Cette transcription a été réalisée à l’aide d’un logiciel de reconnaissance vocale. Elle pourrait donc contenir des erreurs.
(Treize heures quinze minutes)
La Modératrice : Alors,
conférence de presse, aujourd'hui, du Commissaire à la langue française, M.
Benoît Dubreuil. Je vous invite à présenter les gens avec qui vous êtes assis présentement.
M. Dubreuil (Benoît) : Bonjour
à tous. Merci d'être ici avec nous aujourd'hui. Je suis accompagné aujourd'hui
par Stéphanie Cashman-Pelletier, qui est commissaire adjointe, également par
Louis-François Chabot et Marilou Jetté, qui sont deux professionnels de
recherche dans mon équipe, qui ont travaillé avec moi sur le sujet dont on va
vous parler aujourd'hui.
Alors, merci beaucoup d'être là. Aujourd'hui,
la présidente de l'Assemblée a déposé notre rapport annuel 2024-2025, qui
inclut notre rapport annuel de gestion, y compris un premier suivi de notre
plan stratégique, un suivi de nos activités et suivi de la mise en œuvre de la
Charte de la langue française par les institutions parlementaires. Alors, par
ailleurs, vous vous en rappelez, l'année dernière, notre rapport comprenait une
section plus substantielle qui était consacrée à l'évaluation de la première
année du déploiement de Francisation Québec. Cette année, nous y avons inclus
une nouvelle évaluation consacrée, cette fois, à la francisation en milieu de
travail. C'est donc de cette évaluation que je souhaite vous parler aujourd'hui.
Cette évaluation, elle est motivée par la
demande de nombreuses parties prenantes de mieux soutenir la francisation en
milieu de travail, notamment, pour répondre aux besoins du nombre élevé de
travailleurs étrangers temporaires ne maîtrisant pas le français. Elle s'appuie
sur la documentation de Francisation Québec et sur les témoignages recueillis
auprès d'intervenants du domaine. Notre objectif était de juger de l'efficacité,
de l'efficience et de l'équité des modèles de formation mis en œuvre ainsi que
des processus administratifs en vigueur. En 2023, francisation Québec a repris
du ministère de l'Emploi et de la Solidarité sociale la responsabilité de la
francisation en milieu de travail. Son offre de service est aujourd'hui divisée
en trois paliers : les activités d'initiation au français pour les petites
entreprises, les formations courtes et les formations qualifiantes.
La francisation en milieu de travail ne
représente en ce moment qu'une part limitée du budget dédié à la francisation,
soit environ 4 %. Ainsi, la très grande majorité des travailleurs en
francisation suivent des cours en dehors du travail sur leur temps personnel.
Pour que la francisation en milieu de travail soit efficace, les participants
doivent réaliser des progrès significatifs en français. Ils doivent pouvoir
réinvestir leurs apprentissages dans la vie quotidienne et ils doivent pouvoir
s'insérer durablement dans des réseaux francophones. Malheureusement, comme
nous l'expliquons dans le rapport, ces conditions sont rarement réunies. Parmi
les facteurs qui limitent l'efficacité de la francisation en milieu de travail,
nous relevons l'absence de connaissance préalable du français chez la plupart
des participants, l'indisponibilité des travailleurs qui conduit à des
formations de faible intensité et un environnement linguistique parfois
défavorable, notamment en raison de la concurrence de l'anglais comme langue de
communication interculturelle. Dans ce rapport, nous examinons comment ces
contraintes se manifestent dans les différents modèles de formation puis nous
suggérons des manières d'en renforcer l'efficacité.
D'abord, les activités d'initiation au
français pour les petites entreprises visent à encourager l'utilisation du
français et à renforcer la confiance linguistique des participants. Nous
expliquons que les projets financés ont une certaine pertinence, mais que la
liste des activités admissibles devrait être révisée. Ainsi, Francisation
Québec devrait soutenir les activités structurantes et exclure celles offrant
un faible rendement, comme les séances de mentorat avec de très petits groupes,
voire avec une seule personne.
Les formations courtes sont conçues dans
le but de répondre aux besoins spécifiques d'une entreprise. Leur utilité est
cependant limitée par l'absence d'arrimage avec les autres formations et par
leur faible intensité qui empêche les participants de faire des progrès
significatifs. Francisation Québec devrait abandonner ce type de formation et
se concentrer sur la conception de cours standardisés par domaines d'emploi
complémentaires aux cours généraux.
Finalement, les formations qualifiantes
comprennent des cours généraux de français et des cours spécialisés par
domaines d'emploi. Ces formations standardisées devraient représenter le cœur
de l'offre de francisation en milieu de travail. Néanmoins, leur efficacité est
limitée par la faible intensité des formations, par le désengagement des
participants et par des environnements linguistiques parfois défavorables.
Alors Francisation Québec devrait exiger un engagement plus fort des
entreprises quant à la disponibilité des travailleurs et à la création d'un
environnement favorable à l'apprentissage informel.
Les contraintes pratiques font en sorte
que le nombre de participants par entreprise est souvent très petit. Dans ces
circonstances, la francisation en milieu de travail coûte beaucoup plus cher
que la francisation offerte en dehors du travail, notamment lorsque
l'entreprise reçoit une subvention salariale. Depuis 2023, Francisation Au
Québec a introduit des changements dans le but de contenir les coûts de la
formation. Il faudrait cependant réduire encore plus l'écart avec les
formations en dehors du milieu de travail en réévaluant la subvention salariale
pour les entreprises de moins de 100 employés et le nombre de participants
par groupes. Alors, plutôt que de chercher à déployer des formations en
personne dans les petites et moyennes entreprises qui ne comptent que quelques
employés à former, Francisation Québec doit, en collaboration avec ses
partenaires, favoriser l'organisation de formations multientreprises en
personne ou en ligne, de formations intensives avant l'entrée en fonction et de
formations pendant les périodes de plus grande disponibilité des travailleurs.
Alors, pour ce qui est de l'efficacité des
processus administratifs de la francisation en milieu de travail, elle est
limitée par des contraintes liées à la gestion contractuelle et par les besoins
d'accompagnement des employeurs. La gestion administrative devrait être allégée
en simplifiant l'offre et en informant clairement les entreprises de la nature
des services avant le dépôt d'une demande. De même, Francisation Québec devrait
poursuivre les changements qui faciliteront la concertation entre les acteurs
aux niveaux régional et sectoriel. Sa priorité devrait être de définir une offre
simple, de rendre les formations disponibles rapidement puis d'en assurer le
suivi et la qualité.
Pour assurer sa pertinence, la
francisation en milieu de travail devrait être recentrée sur les activités à
forte valeur ajoutée en lien avec les visées de la Charte de la langue
française. Par ailleurs, pour l'instant, elle n'offre malheureusement pas une
voie réaliste d'intégration en français pour les personnes sans connaissance
préalable de cette langue. Le gouvernement devrait donc viser à ce que les personnes
qui s'installent au Québec aient à une connaissance au moins intermédiaire du
français avant leur entrée sur le marché du travail.
Alors, je vous remercie de votre attention
et je suis disponible pour répondre à vos questions.
La Modératrice : Donc, pour
la période de questions, on va commencer par Isabelle Porter, Le Devoir.
Journaliste : Oui, bonjour.
Vous parlez du fait que, bon, c'est très cher par rapport à l'autre offre de
cours, mais, en même temps, on pourrait se dire : 12 millions, ce
n'est pas tant d'argent que ça, c'est une priorité du gouvernement, la
francisation. Qu'est-ce que vous pourriez répondre à ça, là?
M. Dubreuil (Benoît) : En
fait, c'est intéressant, votre question, parce qu'en ce moment il y a... la
demande n'est pas si forte que ça. Donc, la raison c'est que les paramètres
actuels font qu'il n'y a pas... même, il n'y a même pas tant d'entreprises, en
fait, qui se présentent pour recevoir la formation dans les paramètres actuels,
donc les sommes globales qui sont dépensées restent assez faibles. Et malgré
tout, la quantité d'argent qu'on dépense par rapport au nombre réel d'heures de
formation qu'on obtient est assez importante, c'est-à-dire que l'heure moyenne
en ce moment nous coûte très cher, même si la formation en milieu de travail
reste assez petite.
Donc, le message principal, c'est qu'on a
là un modèle qui n'est pas universalisable, qui n'est pas généralisable. On ne
peut pas prendre ce modèle-là dans sa forme actuelle puis dire : Bien, on
va le... on va en décupler la taille parce que les coûts seraient absolument
prohibitifs par rapport aux progrès réels que ça nous permettrait de faire. En
ce moment, je vous dirais, l'argent qui va à la formation aux individus permet
de faire davantage de gains, O.K., que celle qui va à la formation en milieu de
travail. Donc vous, comme contribuables, ce que vous voulez, c'est en avoir
pour votre argent, vous assurer que les gens font le plus de gains possible
avec le meilleur usage des ressources publiques. Donc, en ce moment, les
modèles qui existent, malheureusement, ne vous en donnent pas beaucoup pour
votre argent.
Journaliste
: Mais je
me mets à la place des entreprises qui participent à ce genre de programme là.
D'un côté, vous leur dites : Faites-en plus. Libérez davantage de temps.
Puis en plus vous leur coupez une partie de la subvention. Ce n'est pas une...
Ça ne risque pas de démobiliser les entreprises qui font de la francisation?
M. Dubreuil (Benoît) : Bien,
je vous dirais, il y a plusieurs variables à prendre en ligne de compte. O.K.
Donc, en ce moment, c'est sûr que les entreprises sont beaucoup motivées par la
volonté de conserver leurs travailleurs étrangers temporaires. Et, je vous
dirais, c'est beaucoup ça, en ce moment, là, qui motive les entreprises à
participer à la francisation en milieu de travail. Et ça, cette motivation-là,
elle va demeurer, même si on enlève la subvention. C'est pour ça qu'on a vu
qu'en enlevant la subvention aux plus grandes entreprises, il y en a quand même
plusieurs, là, qui se sont manifestées pour suivre des cours sans subvention.
Puis généralement, je pense que c'est ça, le motif. C'est qu'avec les plafonds
fédéraux qui ont été imposés sur les travailleurs étrangers temporaires, les
gens, ils emploient des gens qui sont avec eux depuis deux, trois, quatre ou
cinq ans. Ils ont peur de les perdre. Donc là, ils sont prêts peut-être à dégager
plus de... plus de temps. Mais c'est ça, il n'y a pas... il n'y a pas de
formule magique, là, c'est sûr.
Mais je reviens au point principal. Si on
paye des formations avec une subvention salariale de très, très, très petits
groupes, ça nous coûte tellement cher pour aller chercher des heures
d'apprentissage qu'il n'y a pas de scénario où on peut généraliser la
connaissance du français parmi ces travailleurs-là. On parle de milliards de
dollars, vraiment, là.
La Modératrice
:
Pardon. Louis Lacroix, Cogeco.
Journaliste
: Bonjour.
Vous avez donné un exemple tout à l'heure. Qu'est-ce qu'il fait... Quel est le
frein notamment? Parce qu'évidemment ce qu'on veut dans une formation comme
celle-là, ma compréhension, c'est de dire : On va vous donner une base et
ensuite vous allez appliquer cette base-là en discussion avec des collègues de
travail, par exemple, etc. Vous avez mentionné tout à l'heure en briefing
technique qu'il y a des freins à ça. Est-ce que vous pouvez nous rappeler quels
sont ces freins?
M. Dubreuil (Benoît) : Alors,
moi, je vais vous décrire un scénario idéal où la francisation en milieu de
travail fonctionnerait parfaitement. Imaginez, vous avez quelqu'un qui arrive
dans une entreprise. La personne a déjà peut-être un niveau intermédiaire qui
lui permet d'avoir des conversations courtes comme ça, de discuter avec ses
collègues d'une manière difficile, mais quand même un minimal, minimalement
fluide. Cette personne-là, vous la mettez dans un milieu francophone entouré de
collègues francophones, puis vous lui donnez un quatre heures semaine de...
quatre heures par semaine de renforcement, O.K., où elle va ensuite, tout de
suite, pouvoir appliquer ses connaissances pour socialiser avec ses collègues.
Ça, c'est le milieu par excellence de la francisation en milieu de travail. Si
vous investissez là-dedans, vous allez avoir une grande valeur ajoutée.
À l'inverse, là, vous n'avez pas de valeur
ajoutée, c'est vous prenez quelqu'un qui part de zéro, donc qui n'est pas du
tout capable de communiquer avec ses collègues. Et là, la personne, elle va
avoir besoin de 400 ou 500 heures avant d'atteindre le stade où elle va
même pouvoir avoir des petites conversations de base. Donc, cette personne-là, premièrement,
elle n'atteindra probablement jamais le stade. Et si en plus... Je vais vous
donner des exemples. Si la personne travaille la nuit à faire des ménages dans
des édifices du centre-ville, si la personne travaille sur des chiffres de nuit
en Beauce, dans une usine où tous les travailleurs hispanophones sont ensemble
le soir dans l'usine. Si la personne travaille à Montréal dans un environnement
où, de toute manière, tout le monde parle très bien l'anglais, donc, les gens
convergent naturellement vers l'anglais, bien, dans tous ces scénarios-là, vous
avez ce que j'appelle un environnement linguistique défavorable, c'est-à-dire
que vous ne pouvez pas miser sur la volonté naturelle de la personne de se
socialiser puis de s'intégrer pour l'amener à apprendre.
Donc, ce qui va se passer dans ce cas-là, c'est
que vous allez dépenser de l'argent pour augmenter son niveau de compétence.
Puis là, quand vous allez arrêter d'investir, bien là, les compétences vont
diminuer comme ça. Donc, essentiellement, vous allez avoir gaspillé votre
argent. Bien évidemment, ce n'est pas ça qu'on veut. Donc, il faut qu'on
jumelle, qu'on associe la francisation en milieu de travail avec des contextes
propices à l'apprentissage informel pour que ça se renforce mutuellement.
Journaliste : Bon, vous avez
déjà expliqué les différents niveaux, là, de francisation, là, de 0 jusqu'à 11
ou 12, je pense. Sur les 4 776 personnes qui ont eu droit à une
formation en milieu de travail, est-ce que vous êtes capable d'établir un
pourcentage qui a atteint un niveau où il peut, à la rigueur, atteindre le
niveau 4, là, qui est un niveau très de base, là? Est-ce que vous êtes
capable d'établir des statistiques en ce sens-là?
M. Dubreuil (Benoît) : On
pourrait. On ne les a pas pour l'instant. Ça fait partie des choses qui nous
intéressent pour l'avenir. Cela dit, je peux vous dire tout de suite que
l'écrasante majorité, on parle de gens qui sont dans des niveaux débutant, donc
dans des niveaux 1, 2, 3, 4, donc... Mais par contre, ça, des statistiques
plus détaillées, ça nous intéresse, je pense que ça va faire partie des sujets
qu'on aimerait creuser. Mais, pour simplifier, là, en ce moment, en
francisation, autant en milieu de travail qu'à l'extérieur du milieu de
travail, le gros des investissements qui sont faits sert à franciser les gens qui
sont au niveau débutant et qui vont rester au niveau débutant. Les gens vont
monter d'un niveau, peut-être deux.
La Modératrice : Alain
Laforest, TVA.
Journaliste : Bonjour. De
façon simple et courte, la formation courte, on la remplace par quoi?
M. Dubreuil (Benoît) : Alors,
de la formation qualifiante, donc la formation qui est vraiment associée au
cadre de référence, les niveaux 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8. Donc, comme ça, au
moins, je pourrais venir vous voir puis vous dire : Bien, je sais que sur
100 personnes qui se sont inscrites, bien, il y en a 70 qui ont atteint
les objectifs, puis là je saurais de quoi je parle parce que c'est un cadre de
référence qui est reconnu. Mais en ce moment, quelqu'un me dit : Bien,
j'ai x pourcentage de personnes qui ont réussi ces cours-là, je ne suis pas
capable de vous dire si c'est bon ou pas bon parce que chaque cours est
autonome, chaque cours est distinct et propre à l'entreprise. Donc, formation
qualifiante puis formation aussi qu'on appelle propre au domaine d'emploi.
Donc, ça, Francisation Québec en développe.
Donc, par exemple, il y a un cours de
français de la restauration. Donc, ça, ça peut être intéressant. La personne,
par exemple, est au niveau 5, elle a fait des cours de formation générale,
mais elle travaille en restauration. Donc là, vous dites : Bien, on va
vous donner un cours qui est spécifique à votre domaine, qui est arrimé au
niveau 5, et là vous allez vraiment consolider vos apprentissages en
allant chercher du lexique, des expressions qui sont vraiment propres à votre
domaine. Alors là, on est dans quelque chose qui est beaucoup plus intéressant,
là.
Journaliste : Bon, on parle
de faibles sommes d'argent, mais le fait d'éliminer la formation courte, on
parle de quoi comme économie pour le gouvernement?
M. Dubreuil (Benoît) : Ah! il
n'y a pas vraiment d'économie dans la mesure où si ces formations-là sont
simplement remplacées par des formations qualifiantes, c'est juste deux types
de cours différents, là. Donc, en fait, en termes d'économie, ça dépend
toujours de combien de gens prennent... s'inscrivent au cours puis combien de
cours on...
Journaliste : Mais, pour
vous, ce serait plus efficace d'avoir des formations qualifiantes parce que
vous croyez que ce sera... les gens vont plus se franciser. Mais vous l'avez
quand même dit à mon collègue Louis tout à l'heure, l'anglais est encore
prédominant, principalement à Montréal dans les usines. Ce n'est pas le trois
heures de français qui va changer quelque chose. Est-ce que c'est ça que je
comprends?
M. Dubreuil (Benoît) : Vous
comprenez très bien. Je pense que dans tous les scénarios, si l'environnement
linguistique est défavorable, on ne peut pas faire de miracles avec une formation
à temps partiel. Ça, c'est très clair. Je pense qu'un des points sur lequel on
insiste aussi, puis ça, il y a un consensus là-dessus chez les intervenants,
c'est, il faut qu'on trouve des manières d'insérer les gens dans des réseaux
francophones.
Donc, dans l'entreprise, par exemple, je
l'ai mentionné tout à l'heure, mais si on sépare les équipes puis on dit :
Bon, on va faire une équipe pour les hispanophones puis on va faire une autre
équipe pour les francophones, ou une équipe pour ceux qui parlent anglais puis
une équipe pour ceux qui parlent français, puis là les gens ne se croisent pas,
il n'y a pas de réinvestissement de l'apprentissage. Par contre, si on
dit : Bien, nous, comme entreprise, on s'engage à prendre un... à assigner
un mentor linguistique à chacun de nos employés immigrants puis on lui dit...
bien, on les met ensemble, on fait des binômes pour que les gens... puis on dit
clairement à l'employé québécois : Bien, toi, tu es bon en français, lui,
il l'apprend, donc, je compte sur toi pour l'aider à s'améliorer. Puis ça va
être bon pour lui, puis ça va être bon pour l'entreprise, puis ça va être bon
pour le climat de travail. Donc, je pense qu'il faut avoir ce type de démarche
là dans les entreprises pour favoriser l'intégration.
La Modératrice : Thomas
Laberge, La Presse canadienne.
Journaliste : Oui. Bonjour à
tous. Écoutez, c'est peut-être juste une impression, mais le constat que vous
dressez de la francisation dans le milieu de travail, c'est assez peu
reluisant. Je veux dire, est-ce que ça a encore sa pertinence au final?
M. Dubreuil (Benoît) : Écoutez,
deux choses. Je pense que, pour certains types de profils, ça demeure
probablement la seule approche disponible. Des gens qui sont... par exemple,
des gens qui viennent du reste du Canada, qui viennent s'établir au Québec, à
un moment donné, on ne peut pas fermer les frontières, on ne peut pas... Donc,
je pense qu'il faut accepter que ça va être ça, la solution, quitte à ce que ça
prenne du temps, quitte à ce que ça prenne cinq ans, quitte à ce que ça prenne
10 ans.
Ce que je dirais simplement, c'est que si
on veut... si on veut que ce soit durable, il faut qu'à un moment donné on
fasse le pont avec l'apprentissage informel pour pas qu'on se retrouve... Vous
savez, des fois à l'école secondaire, ailleurs au pays, puis à l'école
primaire, les gens peuvent apprendre le français pendant 10 ans à faire
trois heures par semaine, puis ensuite, quand ils quittent le secondaire, ils
ne sont pas capables d'avoir une conversation en français, puis cinq ans,
10 ans plus tard, bien, ils ne se rappellent absolument rien de ce qu'ils
ont appris au secondaire. O.K., donc, ce n'est pas ça qu'on veut. Donc, pour ne
pas que ça, ça arrive, il faut que la personne s'insère dans des réseaux francophones
puis il faut qu'elle prenne des habitudes de consommation culturelle aussi en
français. O.K. Donc ça, il faut qu'on construise un environnement de soutien
autour du travail. Alors, il faut que ce soit intégré dans notre manière de
penser la francisation. O.K. Cela dit, il y a l'autre volet qui est
celui des travailleurs étrangers temporaires qui en ce moment représentent le
gros de la clientèle en francisation en milieu de travail, et là, je pense que
ça pose la question de notre approche de plus plus générale de planification de
la main-d'oeuvre. Donc, il y a un débat en ce moment, notamment entre les
organisations syndicales et les organisations patronales : Qu'est ce qu'on
fait avec les permis de travail fermés? Je pense que c'est un débat qui va
occuper une place importante cet automne lors de la consultation sur
l'immigration. Bien, moi, j'aimerais que les considérations de francisation
soient à l'esprit des gens. Donc, moi, je vous dis le modèle qu'on a développé
au cours des quatre, cinq, six dernières années où les employeurs vont chercher
aux Philippines, vont chercher en Amérique latine, des travailleurs qui sont au
niveau zéro de français et les amènent dans des milieux de travail en donnant
de la formation... de la francisation à des doses très, très faibles, ça, ce
n'est pas une solution qui est... qui est gagnante. Donc, des solutions
gagnantes, je reviens un peu sur ce que j'ai dit l'année dernière dans le
rapport sur l'immigration temporaire, soit on fait du recrutement dans les pays
francophones, soit on trouve des manières d'intensifier la formation avant que
la personne arrive en poste pour qu'au moment où elle arrive en poste, elle a
déjà un certain niveau, et là, ça pose des questions sur les programmes
d'immigration puis de l'équilibre patronal-syndical, là.
Journaliste : O.K. Mais
est-ce que je comprends au fond qu'un peu le but de votre argumentaire avec la
francisation dans le milieu de travail, c'est un peu pour démonter les
arguments des patrons, pour dire : Finalement francisation dans les
milieux de travail, ce n'est pas une panacée, ça ne peut pas se substituer
aux... à une francisation...
M. Dubreuil (Benoît) : En
amont.
Journaliste : ...préalable,
ou à une intervention plus, plus... en tout cas, dans un milieu francophone.
M. Dubreuil (Benoît) : Mais,
écoutez, c'est... Bon, je ne veux pas pointer du doigt personne. C'est sûr que
du côté à la fois patronal et syndical, il y a des demandes pour que le
gouvernement soutienne mieux la francisation en milieu de travail. Donc, moi,
ce que je veux montrer aujourd'hui, c'est que... c'est que selon les modalités
qu'on choisit, faites attention parce que ça peut vraiment coûter très, très
cher, vraiment très, très cher.
Écoutez, il y a
400 000 personnes qui occupent un emploi au Québec, environ là, qui
ne parlent pas français. Donc, si chacun a besoin de faire 1 000 à
1 500 heures pour devenir à l'aise en français, ça fait que
globalement, là, nous, les contribuables, on doit payer entre 400 et
600 millions d'heures de formation. Donc, si l'heure de formation coûte cher,
bien, on parle de milliards de dollars, là. On n'en est pas... Ce n'est pas
avec des dizaines de millions qu'on va réussir à généraliser la connaissance du
français sur le marché du travail. Donc, il y a comme des choix stratégiques à
faire, puis c'est sûr évidemment, du côté patronal-syndical, bien, là, il y a
quand même une tension autour de ça évidemment. Puis l'approche des dernières
années où... qui a amené beaucoup de travailleurs non francophones est venu
comme attiser aussi, là, cette tension-là. Donc, j'essaie d'éclairer le débat
et peut-être aussi proposer des voies, là, qui nous permettraient d'aller vers
l'avant.
Le Modérateur
: Hugo
Lavallée, Radio-Canada.
Journaliste : Oui. Bonjour.
J'aimerais vous entendre sur la notion de la formation à distance, là, parce
que c'est une des choses qui m'a quand même surpris. Là, on a cette image
peut-être que, quand on fait de la francisation en entreprise, c'est en
entreprise, puis qu'il y a, je ne sais pas, un prof qui se déplace. Est-ce que
c'est vraiment efficace la formation à distance pour des gens qui ne parlent
pas français du tout?
M. Dubreuil (Benoît) : Bien,
nous, ça nous a surpris aussi parce qu'en fait, pour votre information, il y a
un peu plus de la moitié des cours en formation en francisation en milieu de
travail qui sont offerts à distance en ce moment. Donc, moi, la francisation à
distance, je pense que ça peut... ça peut bien fonctionner. Je vous dirais,
pour l'instant, nous, il n'y a pas de données qui nous permettent d'en évaluer
l'efficacité. O.K. Donc, cependant, on a posé la question à beaucoup de gens,
beaucoup d'experts, beaucoup de praticiens. Il y a plusieurs contextes où ça
peut très bien fonctionner. L'enjeu qu'on a en ce moment, c'est que la
clientèle, si vous voulez, est beaucoup composée de travailleurs étrangers
temporaires niveau zéro en français, généralement avec un faible niveau de
qualification et un faible niveau de compétences numériques. Donc, c'est sûr
que si vous avez... vous cherchez à faire de la francisation en milieu de
travail, puis vous travaillez avec des gens qui font de la conception
informatique, puis qui sont habitués de travailler dans un environnement
numérique, il n'y a pas de raison que ça ne fonctionne pas bien. Par contre,
quand vous arrivez avec des gens qui ne savent pas se servir d'un ordinateur,
qui n'ont, des fois, même pas d'espace pour s'installer dans la shop, puis là
vous dites : Bien, on va vous amener... Les gens n'ont pas nécessairement
d'habitude d'apprendre, ils n'ont pas nécessairement... Donc, ce qu'on
comprend, c'est que, pour ce profil-là qui est assez nombreux, la francisation
à distance, malheureusement, n'est pas une solution qui semble viable.
Journaliste : Concernant,
donc, l'obligation de démontrer la maîtrise du français à un niveau 4,
pour pouvoir renouveler un permis de travail, donc, ça, je comprends que ce
n'est pas encore entré en vigueur.
M. Dubreuil (Benoît) : Non,
c'est un engagement que le gouvernement a pris, je crois, là, on met la date,
mais il y a comme un an et demi, là, d'exigé.
Journaliste : C'est ça, 1er novembre
2023, mais on n'a pas d'indication sur le moment où ça entre en vigueur. O.K.
M. Dubreuil (Benoît) : Non,
mais il y a eu un échange de lettres, là, entre les ministres québécois et
fédéral de l'Immigration, pour confirmer la volonté d'aller de l'avant avec ça.
Journaliste : ...dans l'état
actuel des choses, ça ne marchait pas là.
M. Dubreuil (Benoît) : C'est-à-dire,
l'enjeu, c'est que ça va inciter Les entreprises à investir davantage, à
libérer davantage leurs travailleurs. Parce que les entreprises semblent très
motivées à l'idée de garder, en fait, leurs travailleurs étrangers temporaires.
Donc, ça permettrait de dégager peut-être plus de temps.
Cela dit, c'est sûr que, tu sais, si la
personne, ça lui prend trois ans ou quatre ans avant de commencer à pouvoir
avoir des conversations avec ses collègues, on n'est pas dans une dynamique
d'intégration qui est superforte, là.
Journaliste : La question que
je vais vous poser, en ce qui concerne les travailleurs, justement, dans les
entreprises, est-ce que je comprends que le niveau de suivi est moindre qu'il
ne le serait si c'était un parcours individuel? Parce que je lisais dans le
rapport qu'il n'y a pas de dossier. On n'évalue pas nécessairement la
connaissance avant ni après la formation...
M. Dubreuil (Benoît) : C'est
ça.
Journaliste : ...beaucoup de
gens qui interrompent la formation en cours de route aussi.
M. Dubreuil (Benoît) : Bien,
écoutez, moi, je ne veux pas trop critiquer Francisation Québec là-dessus,
parce qu'on constate quand même des améliorations depuis qu'ils ont repris le
dossier. Mais, effectivement, il y a toute une gestion à faire pour arrimer les
systèmes informatiques, et tout ça, puis ils n'ont pas fini de la faire.
Mais je vous donne une idée, là, si vous
me demandez, il y avait combien de gens en francisation en milieu de travail il
y a trois ans ou quatre ans? On n'est même pas capable d'avoir la donnée, la
donnée n'existait même pas. Donc, aujourd'hui, au moins, on a des formations
qualifiantes pour une partie des gens. Donc, on sait, on sait ce que les gens
apprennent. On a un nombre de participants, on a une répartition aussi selon
les domaines. Donc, en termes de données, je pense que les choses se sont
améliorées, mais il y a encore du travail à faire.
La Modératrice : Sébastien
Desrosiers, Radio Canada.
Journaliste : Bonjour, M.
Dubreuil. Pour revenir à cette idée d'éliminer la subvention salariale aux
entreprises, vous écrivez dans le rapport qu'au fond, les entreprises qui font
le choix de recruter des travailleurs non francophones doivent assumer une part
de responsabilité. Est-ce que vous pouvez élaborer un peu plus, c'est quoi, la
responsabilité des entreprises? C'est de ne pas recruter ces travailleurs-là
d'abord ou ensuite de les libérer pour que la formation meilleure.
M. Dubreuil (Benoît) : Oui,
c'est ça. Bien, il y a différentes manières de le voir en termes de politique
publique. Mais juste le point de base pour moi, c'est qu'à partir du moment où
l'entreprise fait ce choix-là, il y a des coûts sociaux, il y a une
externalité, comme on dit, qui est transférée sur moi, sur vous, sur les autres
travailleurs autour, sur les clients. Donc, quand on a des externalités, en
général, en économie, la solution, c'est d'internaliser les externalités. On a
la chance de parler une grande langue internationale qui est le français, qui
est parlé dans plus de 300 millions de personnes à travers le monde. Il y
a beaucoup d'entreprises qui font des efforts de recrutement, qui vont à
Madagascar, qui vont en Tunisie, qui vont au Cameroun précisément parce qu'ils
trouvent que c'est important de recruter des gens qui parlent français. On a
des entreprises aussi qui investissent pour franciser les gens avant qu'ils
arrivent au Québec.
Donc, pour moi, il y a quand même,
effectivement, un enjeu d'équité autour de ça, dans la mesure où l'entreprise,
qui, elle, ne fait rien ou dit : Pour moi, ce n'est pas important, à
quelque part, il devrait y avoir un signal de coût qui lui est transféré et
éviter justement que le... voyons, que le gouvernement dise : Bien, nous,
on assume tout, on paie tout, inquiétez-vous pas, donc. Parce qu'à un moment
donné, vous voyez à quel point ça coûte cher aussi, là, si von veut se rendre
au bon niveau, si on veut généraliser la connaissance du français, la question
de l'argent arrive, arrive assez rapidement, là.
Journaliste : Puis quelle
part du budget de la formation en entreprise est attribuée à la subvention
salariale, est-ce que c'est 72 millions?
M. Dubreuil (Benoît) : C'est
ça. Donc, pour l'année qui vient de passer, il y avait... à la fin janvier, on
était à 10 millions de dollars d'engagés.
Journaliste : Mais tout ça,
ça va être des subventions à des entreprises.
M. Dubreuil (Benoît) : Ça,
c'est pour les entreprises, donc, il y en a une partie qui sert à payer les
fournisseurs, donc, les profs, essentiellement, qui viennent offrir le service.
Puis il y a environ deux tiers qui va la subvention salariale. Par contre, ça,
ça va changer, parce qu'en septembre on a décidé que les entreprises de plus de
100 employés ne seraient pas éligibles à la subvention salariale. Donc,
l'an prochain, ça va être un peu différent.
Journaliste : O.K. Puis
peut-être juste... Vous parlez des demandeurs d'asile un peu plus tôt dans le
rapport. Ce sont quoi au juste vos inquiétudes concernant, bon, l'afflux, là,
qui a été constaté ces dernières semaines? Qu'est-ce que ça pourrait entraîner
comme conséquences sur la situation linguistique au Québec?
M. Dubreuil (Benoît) : Bien,
écoutez, là, vous me posez une question qui est superimportante. Moi, j'avoue
que j'ai de grandes inquiétudes. On avait abordé la question l'année dernière
dans notre rapport sur l'immigration temporaire. On a regardé les chiffres pour
cette année aussi. Il y a une petite baisse en 2024 du nombre de demandeurs
d'asile. Par contre, il y a des changements dans la composition qui ne sont pas
nécessairement favorables au français, hein? Donc, ce qu'on a vu cette année en
2024, c'est une baisse beaucoup des gens originaires du Mexique et une hausse
importante des gens qui sont originaires d'Asie du Sud ou d'Afrique anglophone,
donc des gens qui, a priori, ont plutôt tendance à s'intégrer en anglais. Par
ailleurs, on voit que les gens sont encore très peu nombreux à s'inscrire aux
cours de Francisation Québec du côté des demandeurs d'asile.
Donc, concrètement, là, ça veut dire qu'il
y a vraiment plusieurs dizaines de milliers de personnes qui ne parlent pas
français, plusieurs qui parlent ni français ni anglais, à qui on donne des
permis de travail, qui sont ici, au Québec, et qui là entrent sur toutes sortes
de milieux de travail. Donc, s'ils parlent anglais, c'est mieux pour eux, ils
sont moins vulnérables, mais ce n'est pas mieux pour leurs clients puis ce
n'est pas mieux pour leurs travailleurs qui ont le droit de travailler en
français. Puis là vous avez beaucoup de gens qui parlent ni l'un ni l'autre et
qui se retrouvent dans une situation, je suis certain, de très grande
vulnérabilité, parce que quand vous arrivez à Montréal puis vous parlez ni
l'une ni l'autre langue, honnêtement ce n'est pas vrai, là, que vous êtes...
vous êtes bien, là. Même si vous recevez l'aide sociale, qui vous donne
800 $ par mois... 800 $ par mois, c'est le coût d'une chambre à
Montréal.
Donc, c'est sûr que, pour le français, on
ne peut pas prétendre en ce moment qu'on a un système qui permet d'assurer ni
la francisation ni l'intégration en français de ces dizaines de milliers de
personnes qui arrivent, en fait, puis qui continuent d'arriver. Donc, moi, j'ai
des inquiétudes.
Journaliste : Merci.
Journaliste : Je vais me
permettre une petite précision. Je voudrais vous entendre clairement sur le
12,6 millions. Est-ce que vous estimez que c'est de l'argent bien investi
à la lumière du rapport que vous nous fournissez aujourd'hui?
M. Dubreuil (Benoît) : Globalement,
je vous dirais qu'il y a vraiment des progrès importants qu'il reste... qu'il
reste à faire. En ce moment, je vous dirais, j'ai plus confiance dans l'argent
qui est investi dans les services aux individus. Je pense qu'avec des
modifications ciblées, celles dont on a parlé aujourd'hui, on peut réorienter
les choses. Par exemple, en ce moment, on sait que Francisation Québec réussit,
dans certaines entreprises ou dans certains contextes, à créer des groupes qui
sont relativement grands, où les gens vont faire une formation qui est
qualifiante. Donc, je vous dirais, dans ce cas-là, c'est bon, je pense que je
suis rassuré. Mais, de manière générale, il y a quand même pas mal de
resserrement qu'il reste à opérer, là.
Journaliste : Donc,
c'est : Pas vraiment, non?
M. Dubreuil (Benoît) : Une
grande piste... Il y a eu beaucoup... Il y a de la place à l'amélioration, oui.
Journaliste : Et puis je
voudrais juste vous entendre clairement aussi... À l'heure actuelle, là, pour
quelqu'un qui prend un cours de français à temps partiel, comme ça, sur son...
dans son milieu de travail, ça prend combien d'années avant d'être à un niveau
quatre et éventuellement à un niveau huit, là?
M. Dubreuil (Benoît) : Oui.
C'est ça. Donc, là-dessus, il faut toujours être un peu prudent, évidemment,
parce que ça dépend beaucoup des gens, ça dépend de la langue de départ, ça
dépend beaucoup de la motivation, des compétences aussi cognitives et tout. La
seule donnée objective sur laquelle on peut s'appuyer, c'est le programme du
ministère de l'Éducation, qui prévoit 500 heures d'apprentissage pour se
rendre au niveau quatre et qui prévoit 1 400 heures pour se rendre au
niveau huit. Évidemment, si vous avez quelqu'un qui parle déjà une langue
latine, qui est très scolarisé, qui est habitué d'apprendre, qui est
hypermotivé, ça peut être beaucoup plus rapide que ça. Mais, en même temps, si
vous avez quelqu'un qui est très...
Journaliste : Donc, en nombre
d'années, c'est?
M. Dubreuil (Benoît) : Ah! en
nombre d'années. Donc, écoutez, à trois heures par semaine, ce qu'on a calculé,
je pense, c'était quatre ans pour atteindre le niveau quatre et 11 ans
pour atteindre le niveau huit. Donc, c'est des chiffres, évidemment, qui sont
théoriques dans la mesure où on ne voit pas les gens rester aussi longtemps,
là, dans la formation, malheureusement.
La Modératrice : On va passer
en anglais. Je vois que Franca n'est plus là. Donc, Phil
Authier, The Gazette.
Journaliste :
Good afternoon, M. Dubreuil. Is it
morning? You… We know that, in recent years, many Québec companies have talked
about the advantages of teaching French in the workplace, and the Conseil du
patronat, and they're all big, big fans of this, that… the principle that a new
arrival will learn French well or faster if they're exposed to it at work all
day while they're on the salary. What would you say... What's not working with
the system?
M. Dubreuil
(Benoît) :
I
think it it can work in theory, it really depends on the context of the
business. So, if you have a person that arrives in the workplace, already has
some basic knowledge of French and then the person interacts on a daily basis
with Francophones and wants to socialize, is motivated to socialize with
Francophones and then receives a few hours per week of French... intensive
French training, then it makes sense that the person will increase its level or
her level of proficiency over time. So that's the context that we would like to
have. Unfortunately, we have a lot of context where we see the workers who
arrive in the workplace, start from... they are at a beginners level, they have
no prior knowledge of French, then they receive a training that is not very
intensive, so we're talking about approximately three hours per week of French
training, and then they are in an environment in which they don't necessarily
have the opportunity to practice, it can be because they work alone, they have
no colleagues, it can be because they work with other colleagues who speak
Spanish, or it can be because they work with Quebecker and they happen to have a common knowledge of English, so English
will become the lingua franca by default.
Journaliste :
You also mentioned that the... I know
the dropout rate in these courses is 23%, as mentioned on page 59, but you also
explained that, for some workers, their main priority is money, it's to make a
living. So, you know, you mentioned they have fatigue, many of them have
different kinds of schedules, some people have more than one job, so that
affects their ability to learn. What could the Government do about... What
could Francisation Québec do about that to make... Even as you said, you can't
blow up the whole system, the system's there, but to make it work better, what
could you do to make... to entice people to learn and make their environment
better?
M. Dubreuil
(Benoît) :
I
think the big challenge is always time, and time is money, as you know. And a
lot of people who arrive in Québec, they have a migratory project that is based
on a pretty tight assumption about money. So, they need to work, and they need
to work a lot just to make a living. So, it's very hard to address this
problem, unless someone, somewhere is ready to pay way more to make people
available. So, it could be the businesses. Should be strengthen requirements on
businesses to make their workers more available, for instance? Or should we
invest more public money? And that's another challenge because we know that it
can become very expensive very rapidly if we pay people to learn French. Or
should we change our immigration policy to make sure that people who arrive in
Quebec already have some basic knowledge of French at the entry point?
So, I think we can we can
take all these options, but I think, like, in terms of the... for what is of
the temporary foreign workers, we definitely have to rethink our approach to
recruitment, especially in light of what happened in the past four, five, six
years where a lot of employers have hired people on closed permits and we did
not manage to have people fully integrated in French.
Journaliste :
So, companies have a responsibility as
well because they're desperate for labor. You're saying they're...
M. Dubreuil
(Benoît) :
Yes.
Basically, companies are optimizing in function of the rules that exist, so I
think we need to provide the right incentives. I think a lot of companies do
not have problems or issues with French training because they make a specific
effort to recruit in French speaking countries. We've seen other companies who
say : I don't find the type of workforce that I want in French speaking
countries, but I'm going to invest in people learning French prior to their
arrival in Québec. That's another option. But I think companies in general
should have incentives to bring in people who are not at level zero, because
once people have started to work at level zero, it's very hard to make up the
time to make real progress.
Journaliste :
And I have a question here from my
colleagues. A few... A little while ago, Mr. Lacombe was sitting there tabling
his bill on cultural... They wanted to know : Could Mr. Lacombe's new bill
realistically help make French content more readily available on various
platforms?
M. Dubreuil
(Benoît) :
Yes,
I'm just eager to read the bill. That's a discussion that has been in the air
since a long time. We've been waiting for this bill to be tabled for a while.
In the last... In our report from last fall, we even made a recommendation to Government to table a bill as fast as
possible to increase the visibility of French content on platforms. So, we'll
see. We'll take a very close look at the bill. I don't think it is the entire
solution, but I think there is a broad consensus now in Québec that we need to move in this
direction, yes.
Journaliste
:
Est-ce que ce serait possible de l'avoir en français, s'il vous plaît, cette
réponse?
M. Dubreuil (Benoît) :
O.K. Je vais reprendre mes idées. Alors, on est vraiment... On a vraiment très
hâte de lire le projet de loi qui a été déposé ce matin par le ministre
Lacombe. On pense qu'il y a un consensus quand même assez large dans la société
québécoise quant à la nécessité d'imposer aux compagnies, aux différentes
plateformes numériques des exigences de mise en valeur du contenu francophone.
C'est un débat qui se poursuit déjà depuis quelques années. Dans notre rapport
de cet automne sur le français comme langue commune, on avait d'ailleurs
recommandé au gouvernement de déposer rapidement un projet de loi, son projet
de loi à cet effet. Donc, on a vraiment hâte d'en prendre connaissance et on
espère que ça va amener à des résultats. Oui.
Journaliste
: Peut-être
une petite dernière. Est-ce que vous êtes satisfaits des ajustements qui ont
été apportés par le ministre à l'offre de cours de francisation, là, dans les
centres de services scolaires et tout ça?
M. Dubreuil (Benoît) :
Oui. Alors, l'année dernière, je vous ramène à pareille date l'année dernière,
on avait publié un rapport sur l'offre de service aux individus. On avait
expliqué qu'il y avait un gros problème, là, dans la manière dont le système
avait été conçu, qui rendait très difficile la planification de l'offre en
francisation. Et là, on a vu pendant l'année dernière qu'il y a eu justement
les événements que vous connaissez, là, dans les centres de services scolaires
où, finalement, plusieurs centres de services scolaires qui ont été obligés de
mettre fin à leurs cours de français parce qu'ils étaient à bout, en fait, de
leur budget. Nous, de notre point de vue, c'était quand même un problème qui
était assez prévisible à la lumière des problèmes qu'on avait documentés
l'année précédente. Ce qu'on comprend, c'est que pour cette année, il y a eu
une collaboration beaucoup plus étroite entre le ministère de l'Éducation et le
MIFI pour planifier l'offre de service pour l'année qui vient.
Nous, on espère que ça va fonctionner puis
que le système va bien se dérouler. On n'a pas de raison de ne pas avoir
confiance. Mais c'est sûr qu'il y a un enjeu de fond aussi avec Francisation
Québec qu'on a traité l'année dernière dans notre rapport, qui est tout le
processus d'inscription, tout le système informatique, la plateforme, la
mécanique de création des groupes qui a été mise en place. C'est extrêmement
complexe, ça rend en soi la planification difficile. Donc, nous, on réitère que
ça, ce système-là, il doit être amélioré du côté de Francisation Québec. On
comprend que ça fait partie de leur plan. Là, évidemment, les développements
informatiques au gouvernement, vous le savez, parfois, ça peut être un petit
peu laborieux. Donc, on va leur laisser le temps de voir aux différentes
améliorations, puis on va surveiller ça, évidemment, avec attention.
La Modératrice
: C'est
ce qui met fin à la conférence de presse. Merci.
M. Dubreuil (Benoît) :
Merci.
(Fin à 13 h 55)