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« Froides régions de l'opposition »

Terme(s) anglais :
Cold shades of the opposition

Définition

Expression surtout utilisée au XIXe siècle dans les parlements de type britannique pour désigner le séjour d'un parti dans l'opposition.

Historique

Les origines de cette expression demeurent incertaines. Le premier à l'utiliser serait fort probablement Benjamin Disraeli, premier ministre de la Grande-Bretagne en 1868 et de 1874 à 1880, qui, réputé pour avoir le sens de la formule, parlait de « cold shades of the opposition1 ». Selon l'historien parlementaire Michael Macdonagh, cette expression désigne « those on the Speaker's right are the Government benches, the benches of the "ins" or the party in office; those on the Speaker's left are the benches of the "outs" or the party in the cold shades of Opposition ». Être dans l'opposition, donc exclu du pouvoir convoité, signifie siéger dans un environnement difficile et inhospitalier où personne ne veut demeurer.

Au Québec, une hypothèse veut que l'expression provienne du fait qu'au parlement du Bas-Canada, le poêle à bois chauffant la Chambre était situé du côté de la majorité. La minorité se trouvait donc dans les « froides régions de l'opposition », d'autant plus que les sessions parlementaires se déroulaient en hiver. L'absence de documentation pour étayer cette interprétation la relègue toutefois au statut de croyance, pour le Québec du moins2.

Cette hypothèse trouve son fondement à Terre-Neuve, où la présence d'une source de chaleur en Chambre va jusqu'à renverser la traditionnelle disposition des sièges. Ainsi, les députés ministériels siègent à la gauche du président dans le Colonial Building (1850-1859) en raison de la présence du foyer de ce côté de la Chambre. Par conséquent, le parti le plus éloigné du feu est celui « which experiences the "Cold shade of Opposition"3 ». Cette disposition se perpétue encore aujourd'hui malgré le fait que les parlementaires siègent dans un édifice moderne bien chauffé.

Cette inversion existe aussi à l'Île-du-Prince-Édouard sans toutefois s'expliquer par la présence d'un foyer. Selon le politologue Frank Mackinnon, le parti au pouvoir siège à la gauche du président en raison de la présence du clerk's office et de la bibliothèque législative de ce côté de la Chambre. Ces pièces permettaient aux parlementaires de fumer tout en bavardant. Accessoirement, le côté gauche est la partie ensoleillée de la Chambre. Là non plus, cette disposition n'a pas été changée depuis, et ce, même après le déménagement de la bibliothèque4.

Par ailleurs, quelques variantes de l'expression ont été répertoriées, dont « les régions froides de l'opposition » ou « les déserts de l'opposition »5. En anglais, on retrace également « shades of the opposition ».

Pour citer cet article

« Froides régions de l'opposition », Encyclopédie du parlementarisme québécois, Assemblée nationale du Québec, 30 janvier 2024.

Faites-nous part de vos commentaires à : encyclopedie@assnat.qc.ca

Notes

1 

Michael Macdonagh, « The Commons at work », dans The Book of Parliament, Londres, Isbister and Company Limited, 1897, p. 415.

2 

Ajoutons qu'à Westminster, ce n'est qu'en 1783 qu'apparaît en Chambre la disposition plaçant les ministériels à droite de l'orateur et l'opposition à sa gauche. Denis Baranger, Le parlementarisme des origines, Paris, Presses universitaires de France, 1999, p. 212.

3 

William Fraser Rae, Newfoundland to Manitoba: a guide through Canada's Maritime, Mining and Prairie Provinces, Londres, S. Low, Marston, Searle & Rivington, 1881, p. 35. Cette interprétation est corroborée par Paul O'Neill, The Oldest City: The Story of St. John's, Newfoundland, Portugal Cove, Boulder Publications, 2003, p. 336.

4 

Frank MacKinnon, The government of the Prince Edward Island, Toronto, University of Toronto Press, 1951, p. 229.

5 

Robert Rumilly, Histoire de la province de Québec, Montréal, Éditions Bernard Valiquette, vol. 8, 1942, p. 91.