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« Salon de la race »

Définition

Expression utilisée par Maurice Duplessis en 1936 pour marquer la distinction et la dignité :

  • De la salle de l'Assemblée législative en tant que lieu physique où siègent les élus;
  • Des représentants du peuple qui la composent;
  • De l'Assemblée en tant qu'institution parlementaire démocratique propre au Québec.

L'usage de l'expression est plus rare en Chambre et dans les médias après 1970.

Historique

Pour bien cerner le contexte et l'esprit de l'expression, Duplessis la prononce d'abord durant une assemblée partisane tenue à Saint-Jérôme (9 août 1936) au plus fort d'une campagne électorale chaudement disputée entre son parti, l'Union nationale, et les libéraux d'Adélard Godbout, dont le parti est au pouvoir depuis 1897 à Québec.

Dénonçant ces derniers avec énergie, Duplessis estime que « [...] le temps est arrivé où il faut prendre le fouet et chasser les vendeurs du temple, et empêcher que la Législature, qui est le salon de la race, devienne une caverne de voleurs1 ».

Devenu premier ministre, Duplessis répète l'expression en Chambre le 7 octobre suivant durant son discours d'appui à la candidature de Paul Sauvé au poste d'orateur de la Chambre :

En l'occurrence, je crois que le choix du député de Deux-Montagnes est des plus opportuns, parce qu'il me paraît posséder toutes ces qualités. Il a toute la compétence voulue et il saura faire preuve d'impartialité et de dignité dans cette Chambre qui doit être le salon non seulement de la province, mais je dirais même dans le salon de la race. Voilà pourquoi toutes ces qualités sont nécessaires. En conséquence, je crois refléter l'opinion unanime de la Chambre en proposant que Joseph-Mignault-Paul Sauvé soit élu président de cette Chambre2.

Dans ce contexte, l'expression se veut élogieuse envers une Chambre composée de députés de différentes origines, confessions religieuses et groupes linguistiques qui, selon lui, représentent l'expression de l'électorat, et ce, dans le lieu où ils sont appelés à siéger3 .

De nombreux journalistes utilisent ensuite l'expression dans le même esprit. Calixte Dumas, par exemple, conclut sa description de l'éclat de la cérémonie d'ouverture de la session parlementaire de 1939 en ces mots : « On a souvent donné à la Législature provinciale le titre pompeux de salon de la race. Jamais ce qualificatif n'a été plus justifié qu'au cours de l'après-midi d'hier4. » À l'inverse, certains parlementaires déformeront parfois l'expression par la suite en « salon de la farce », ou encore, « salon de la crasse », durant certains échanges partisans5.

Aujourd'hui, bien que le mot « race » soit porteur d'une connotation négative6, certains journalistes utilisent à l'occasion l'expression « salon de la race » - souvent de manière sarcastique - pour désigner les parlementaires, la salle où ils se réunissent, ou encore en référence à l'histoire passée de l'Assemblée nationale7.

Pour citer cet article

« Salon de la race », Encyclopédie du parlementarisme québécois, Assemblée nationale du Québec, 1er mars 2024.

Faites-nous part de vos commentaires à : encyclopedie@assnat.qc.ca

Notes

1 

« M. Duplessis à Saint-Eustache et à Saint-Jérôme », Le Devoir, 10 août 1936, p. 6.

2 

Débats de l'Assemblée législative, 7 octobre 1936.

3 

À ce moment, Peter Bercovitch est le seul représentant de la communauté juive à siéger à l'Assemblée législative. La Chambre compte alors neuf parlementaires anglophones sur un total de 90 députés.« En marge de la session », L'Action catholique, 19 janvier 1939, p. 3.

4 

« En marge de la session », L'Action catholique, 19 janvier 1939, p. 3.

5 

Débats de l'Assemblée législative, 5 novembre 1936 et 4 mars 1937.

6 

Le Dictionnaire Usito résume la question en ces termes : « Le terme race, en raison de son évolution et de son caractère scientifiquement non applicable chez l'espèce humaine, est perçu par certains comme étant porteur d'une charge péjorative. Son utilisation, en parlant des êtres humains, tend à disparaître des discours officiels. On [préfère] dire, par exemple, un homme noir, une femme blanche [...]. D'un point de vue strictement linguistique, ce terme entre dans la formation de dérivés (racisme, raciste, interracial, etc.) et de divers composés (profilage racial) qui correspondent à des concepts souvent incontournables. »

7 

Voir par exemple « Yves Blais, le prolixe député de l'Assemblée nationale », La Presse, 13 décembre 1986, p. A8; « Ni Charest ni Boisclair ne réfèrent à la fête chrétienne », Journal de Québec, 15 décembre 2006, p. 2; « Brusque fin de session pour Couillard », Journal de Québec, 14 juin 2014, p. 10.