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(Dix heures trente et une minutes)
Le Modérateur
: Donc, bonjour,
tout le monde. Bienvenue à ce point de presse de Québec solidaire. Prendront la
parole, dans l'ordre, Etienne Grandmont, député de Taschereau, Caroline Toupin,
coordonnatrice du RQAK, ainsi que Sylvain Lafrenière, coordonnateur du RODCD. Merci.
M. Grandmont : Oui. Merci,
Nicolas. Bonjour, tout le monde. Etienne Grandmont, donc. Et aujourd'hui on
veut vous parler d'un enjeu qui a trait au projet de loi n° 7, qui s'appelle, en fait, la Loi visant à réduire la
bureaucratie, à accroître l'efficacité de l'État et à renforcer l'imputabilité
des hauts fonctionnaires. Il y a clairement un enjeu. Il y a plusieurs choses,
en fait, dans ce projet de loi là. C'est une espèce de projet de loi fourre-tout
évidemment. Il y en a un qui touche particulièrement le milieu communautaire.
La ministre Duranceau, dans ce projet de loi là, on cherche à fusionner deux
fonds qui financent le milieu communautaire, donc, le Fonds québécois des
initiatives sociales et le Fonds d'aide à l'action communautaire autonome. On
est accompagné aujourd'hui, là, des représentants de deux regroupements,
réseaux regroupement de groupes communautaires qui voient dans cette fusion-là
des risques très, très grands. Donc, je vais les laisser expliquer les risques
qu'ils entrevoient à travers cette fusion-là, à travers le projet de loi n° 7.
Mme Toupin (Caroline) : Merci.
Merci, Étienne. Bonjour. Je m'appelle Caroline Toupin, coordonnatrice du Réseau
québécois de l'action communautaire autonome, le RQACA. Le RQACA. On est l'interlocuteur
privilégié du gouvernement pour tout ce qui concerne l'action communautaire
autonome. On représente 80 regroupements et organismes nationaux. On
rejoint 4 500 organismes à travers le Québec qui, eux, sont soutenus
par 400 000 bénévoles, militantes et militants, 54 000 travailleuses
et travailleurs. Donc, on représente ici beaucoup de monde dans le
communautaire. Le Fonds d'aide à l'action communautaire autonome, je vais le
dire juste une fois, le FAACA, a été créé en 1995 pour garantir l'indépendance
des organismes communautaires, en particulier ceux qui défendent les droits.
Ça, c'est le premier engagement
gouvernemental qu'on a réussi à obtenir au niveau de la reconnaissance de
l'autonomie politique de l'action communautaire autonome. Et là, cette
fusion-là vient maintenant rattacher la défense collective des droits à une
loi, la loi qui vise à lutter contre la pauvreté. Ça, ça pose problème parce
que ça réduit considérablement la portée même de la défense collective des
droits, parce que la défense collective des droits, ça, ça ne concerne pas
juste la lutte à la pauvreté, c'est beaucoup plus large que ça. On parle
vraiment de l'ensemble des droits humains, sociaux, économiques, culturels,
etc. Donc, réduire la défense des droits à la seule question de la pauvreté,
c'est nier toute la complexité des oppressions systémiques, puis de la
diversité des luttes qu'on mène dans notre mouvement. C'est... le fond en
question et ce n'est pas juste une structure administrative pour nous, c'est un
instrument de protection, un levier de reconnaissance arraché par une décennie
de mobilisation. Donc, sacrifier cet outil, c'est faire fi de l'histoire de
notre mouvement, c'est faire fi de 30 ans de relations entre l'État et les
organismes communautaires.
Ce qu'on déplore aussi, c'est qu'il n'y a
aucun des deux interlocuteurs qui ont été consultés en amont. Donc cette
exclusion témoigne d'un manque de connaissance du milieu et... d'un manque de
respect flagrant envers nos structures démocratiques et nos représentants du
communautaire.
Cette fusion-là soulève plusieurs
questions qu'on aimerait poser, donc, à la ministre responsable de la
Solidarité sociale et de l'action communautaire. Est-ce qu'elle est en train de
rejeter le modèle québécois de l'action communautaire autonome au Québec? Pour
nous, en faisant ça, la ministre tourne le dos à 30 ans de reconnaissance
et de relations entre l'État et le mouvement communautaire et elle ouvre la voie
à un désengagement de l'État envers la défense collective des droits et envers
l'action transformatrice de l'ensemble des organismes d'action communautaire
autonome. Une autre question qu'on se pose, c'est : c'est quoi les réelles
économies que va générer cette fusion-là? À notre avis, étant donné que les
deux missions des deux fonds vont être récupérées dans un seul fonds, à notre
avis, ça va se faire à coût nul. Il n'y en aura pas d'économie parce que les
équipes vont rester les mêmes, etc. Donc, est-ce qu'on va réellement sacrifier
30 ans de reconnaissance pour un prétexte administratif? Le coût, à notre
avis, n'en vaut vraiment pas la chandelle. Une autre question qu'on se pose...
bien, c'est ça, nous on ne laissera pas le gouvernement détruire les acquis de
notre mouvement.
Le mouvement est mobilisé, il est
solidaire et on va défendre notre autonomie avec la même force qui nous a
permis de la faire reconnaître, donc nos recommandations sont claires : on
souhaite maintenir le Fonds d'aide à l'action communautaire autonome comme
structure indépendante, conformément aux engagements qui ont été pris par
l'État, et ce, afin de protéger les organismes dont la mission principale est
la défense collective des droits. Et ultimement, c'est aussi toute la capacité
de l'ensemble des organismes de l'action communautaire autonome du Québec à
opérer des transformations profondes et systémiques qui visent à s'attaquer aux
causes des problèmes sociaux. Donc voilà, merci beaucoup.
M. Grandmont : Sylvain.
M. Lafrenière (Sylvain) :
Oui, bonjour. Mon nom est Sylvain Lafrenière, je suis coordonnateur du
Regroupement des organismes en défense collective des droits, donc je
représente 350 des quelques 4500 organismes qui sont directement financés,
directement menacés par cette... par cette décision-là du gouvernement, qu'ils
veulent faire. Bon ça y ait, je perds mon texte en plus. Ça fait que, donc,
voilà... donc, on est directement touchés. Comme le dit Caroline, on est
financé par le FAACA, et c'est important cette décision-là et pourquoi on est
inquiets? C'est que tous les textes qui défendent et qui expliquent pourquoi le
Fonds d'aide à l'action communautaire autonome est le véhicule privilégié pour
le financement sont inscrits dans la politique de reconnaissance de l'action
communautaire. Et dans ce sens-là, bien, le gouvernement reconnaissait, par
exemple, que c'est important d'avoir un fonds indépendant des ministères avec
lesquels les groupes font affaire, justement pour respecter l'autonomie et
s'assurer qu'il n'y ait pas de conflit avec les ministères avec lesquels on
doit intervenir et souvent critiquer les projets de loi que les gouvernements
ont mis en place à travers les années. Donc, c'était important et cette
reconnaissance-là va être perdue parce qu'actuellement dans aucun des textes
qu'on retrouve dans les textes de loi, cette reconnaissance-là n'a été
inscrite. Donc, en changeant le fond, comme l'a expliqué Caroline, dans un fond
plus large, qui a une autre vision, pour nous, c'est vraiment une menace, une
attaque directe à l'autonomie. Le fonds d'aide a été créé il y a 25 ans et
a été concrétisé par la politique à ce moment-là, il y a 30 ans, en 95, et
en 2001, il a été concrétisé au niveau de son rôle de la défense collective des
droits.
Et c'est un rôle important, parce que ces
organismes-là ont aussi le mandat, et c'est inscrit dans nos redditions de
comptes, dans ce qu'on doit rendre au gouvernement, de... d'être... non
seulement d'informer la population des menaces, des projets de loi qui sont
faits, mais aussi d'informer et de faire des représentations auprès du
gouvernement pour faire entendre la voix de ces personnes-là et aussi de
mobiliser les gens pour qu'ils puissent faire entendre leur voix et peut être
avoir un impact sur les... sur les lois qui les concernent directement. Donc,
c'est un rôle majeur qui a été reconnu dans la politique et tout ça, il n'y
aurait plus de lien, et ça, c'est majeur pour nous.
Le fonds d'aide, avec le temps, a été, au
niveau du financement, décevant. La... la politique était très intéressante
puis c'était un atout majeur à l'époque qui a été... Ça fait quand même... Il y
a peu de sociétés dans lesquelles on reconnaît qu'un gouvernement finance des
organismes qui souvent, j'entends dire, critiquent le gouvernement, mais ça,
c'était un point de... et nous, on pense que c'est un atout majeur et une
attitude saine pour une démocratie saine dans une société de faire entendre et
de financer les organismes pour faire entendre cette voix-là, et ça, c'est ça
qui est en danger actuellement avec le projet du gouvernement. C'est ce que je
viens dire aujourd'hui, et c'est pourquoi nous, on maintient... on demande que
ce chapitre-là du projet de loi soit complètement retiré. On demande le
maintien du Fonds d'aide à l'action communautaire autonome. Merci.
M. Grandmont : Donc, vous le
voyez bien, en fait, autant du côté de l'action communautaire autonome que de
la défense collective des droits, c'est un risque majeur qui est devant nous.
Les deux représentants... en fait, là, les deux regroupements réseau vont être
en commission aujourd'hui à 16 h 05, si ma mémoire est bonne donc
dans le cadre du projet de loi n° 7. Ça a été souligné, mais j'ai... quand
même, je veux réinsister là-dessus, à quoi ça... à quoi ça aide à réduire la
bureaucratie, en quoi ça aide à augmenter l'efficacité de l'État que de
fusionner ces deux... ces deux fonds-là? On ne la voit pas, on ne la voit pas,
on ne voit pas la raison derrière, et c'est pour ça qu'on trouve ça très
important de souligner que ces deux entités-là, ces deux fonds-là doivent
rester, demeurer séparés.
On a un modèle particulier au Québec, un
modèle qui fait l'envie de probablement beaucoup de monde à travers la planète.
On a un fonds qui finance l'action communautaire autonome en lui faisant
confiance, en faisant confiance aux travailleuses puis aux travailleurs qui
sont sur le terrain, qui comprennent ce qui se passe sur le terrain, qui
comprennent les gens qui sont, qui sont aidés par les organismes qui sont sur
le terrain avec les autres. Mais l'autre côté, on a un fonds aussi qui finance
la défense collective des droits, qui est là pour rappeler au gouvernement ses
obligations au regard des personnes qui sont vulnérables, qui sont
marginalisées. Alors, pour vrai, là, on voit là une grande, grande menace. Un
des aspects très particuliers de l'État québécois dans son fonctionnement
d'avoir un communautaire fort puis un communautaire qui critique l'action
gouvernementale, c'est unique au Québec. Ce qu'on comprend, mon interprétation,
c'est qu'on a un gouvernement qui n'aime pas les contre-pouvoirs, qui ne fait
pas confiance au communautaire, qui veut décider en haut ce qui se passe en
bas, donc un gouvernement qui est très autoritaire et qui refuse les
contre-pouvoirs, et c'est un grave danger pour notre démocratie puis un grave
danger pour l'action communautaire au Québec.
Donc, merci à vous d'être présents
aujourd'hui puis de défendre ces principes-là qui sont fondamentaux pour le
Québec. On va suivre ça avec attention évidemment, dans les jours, dans les
semaines, dans les mois qui viennent, parce qu'on sait que le communautaire est
mobilisé en ce moment, et on va continuer à travailler avec vous autres. Merci.
Le Modérateur
: Merci
beaucoup, tout le monde. C'est ce qui met fin au point de presse.
(Fin à 10 h 42)