Point de presse de M. Etienne Grandmont, porte-parole du deuxième groupe d’opposition en matière de solidarité sociale et d’action communautaire
Version préliminaire
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Le mardi 2 décembre 2025, 10 h 30
Hall principal de l'hôtel du Parlement,
hôtel du Parlement
10 h 28 (version non révisée)
(Dix heures trente et une minutes)
Le Modérateur
: Donc, bonjour,
tout le monde! Bienvenue à ce point de presse de Québec Solidaire. Prendrons la
parole dans l'ordre Étienne Grandmont, député de Taschereau, Caroline Toupin,
coordonnatrice du RQAK, ainsi que Sylvain Lafrenière, coordonnateur du RODCD. Merci.
M. Grandmont : Oui. Merci,
Nicolas. Bonjour, tout le monde! Étienne Grandmont, donc. Et aujourd'hui on
veut vous parler d'un enjeu qui a trait au projet de loi n° 7, qui s'appelle la Loi visant à réduire la bureaucratie et à
accroître l'efficacité de l'État et à renforcer l'imputabilité des hauts
fonctionnaires. Il y a clairement un enjeu. Il y a plusieurs choses, en fait,
dans ce projet de loi là. C'est une espèce de projet de loi fourre-tout évidemment.
Il y en a un qui touche particulièrement le milieu communautaire. La ministre Duranceau,
dans ce projet de loi là, on cherche à fusionner deux fonds qui financent le
milieu communautaire, donc, le Fonds québécois des initiatives sociales et le
Fonds d'aide à l'action communautaire autonome. On est accompagné aujourd'hui,
là, des représentants de deux regroupements, réseaux regroupement de groupes
communautaires qui voient dans cette fusion-là des risques très, très grands.
Donc, je vais les laisser expliquer les risques qu'ils entrevoient à travers
cette fusion-là, à travers le projet de loi n° 7.
Mme Toupin (Caroline) : Merci.
Merci, Étienne. Bonjour. Je m'appelle Caroline Toupin, coordonnatrice du Réseau
québécois de l'action communautaire autonome, le RQACA. Le RQACA. On est l'interlocuteur
privilégié du gouvernement pour tout ce qui concerne l'action communautaire
autonome. On représente 80 regroupements et organismes nationaux. On
rejoint 4 500 organismes à travers le Québec qui, eux, sont soutenus
par 400 000 bénévoles, militantes et militants, 54 000 travailleuses
et travailleurs. Donc, on représente ici beaucoup de monde dans le
communautaire. Le Fonds d'aide à l'action communautaire autonome, je vais le
dire juste une fois, le FAACA, a été créé en 1995 pour garantir l'indépendance
des organismes communautaires, en particulier ceux qui défendent les droits.
Ça, c'est le premier engagement gouvernemental qu'on a réussi à obtenir au
niveau de la reconnaissance de...
10 h 33 (version non révisée)
Mme Toupin (Coraline) : ...autonomie
politique de l'action communautaire autonome. Et là, cette fusion-là vient
maintenant rattacher la défense collective des droits à une loi, la loi qui
vise à lutter contre la pauvreté. Ça, ça pose problème parce que ça réduit
considérablement la portée même de la défense collective des droits, parce que
la défense collective des droits, ça, ça ne concerne pas juste la lutte à la
pauvreté, c'est beaucoup plus large que ça. On parle vraiment de l'ensemble des
droits humains, sociaux, économiques, culturels, etc. Donc, réduire la défense
des droits à la seule question de la pauvreté, c'est nier toute la complexité
des oppressions systémiques, puis de la diversité des luttes qu'on mène dans
notre mouvement. C'est... le fond en question et ce n'est pas juste une
structure administrative pour nous, c'est un instrument de protection, un
levier de reconnaissance arraché par une décennie de mobilisation. Donc,
sacrifier cet outil, c'est faire fi de l'histoire de notre mouvement, c'est
faire fi de 30 ans de relations entre l'État et les organismes
communautaires.
Ce qu'on déplore aussi, c'est qu'il n'y a aucun
des deux interlocuteurs qui ont été consultés en amont. Donc cette exclusion
témoigne d'un manque de connaissance du milieu et... d'un manque de respect
flagrant envers nos structures démocratiques et nos représentants du
communautaire.
Cette fusion-là soulève plusieurs
questions qu'on aimerait poser, donc, à la ministre responsable de la
Solidarité sociale et de l'action communautaire. Est-ce qu'elle est en train de
rejeter le modèle québécois de l'action communautaire autonome au Québec? Pour
nous, en faisant ça, la ministre tourne le dos à 30 ans de reconnaissance
et de relations entre l'État et le mouvement communautaire et elle ouvre la
voie à un désengagement de l'État envers la défense collective des droits et
envers l'action transformatrice de l'ensemble des organismes d'action
communautaire autonome. Une autre question qu'on se pose, c'est : c'est
quoi les réelles économies que va générer cette fusion-là? À notre avis, étant
donné que les deux missions des deux fonds vont être récupérées dans un seul
fonds, à notre avis, ça va se faire à coût nul. Il n'y en aura pas d'économie
parce que les équipes vont rester les mêmes, etc. Donc, est-ce qu'on va
réellement sacrifier 30 ans de reconnaissance pour un prétexte
administratif? Le coût, à notre avis, n'en vaut vraiment pas la chandelle. Une
autre question qu'on se pose... bien, c'est ça, nous on ne laissera pas le
gouvernement détruire les acquis de notre mouvement.
Le mouvement est mobilisé, il est
solidaire et on va défendre notre autonomie avec la même force qui nous a
permis de la faire reconnaître, donc nos recommandations sont claires : on
souhaite maintenir le Fonds d'aide à l'action communautaire autonome comme
structure indépendante, conformément aux engagements qui ont été pris par l'État,
et ce, afin de protéger les organismes dont la mission principale est la
défense collective des droits. Et ultimement, c'est aussi toute la capacité de
l'ensemble des organismes de l'action communautaire autonome du Québec à opérer
des transformations profondes et systémiques qui visent à s'attaquer aux causes
des problèmes sociaux. Donc voilà, merci beaucoup.
M. Grandmont : Sylvain.
M. Lafrenière (Sylvain) : Oui,
bonjour, mon nom est Sylvain Lafrenière, je suis coordonnateur du Regroupement
des organismes en défense collective des droits, donc je représente 350 des
quelques 4500 organismes qui sont directement financés, directement
menacés par cette... par cette décision-là du gouvernement, qu'ils veulent
faire. Bon ça y ait, je perds mon texte en plus. Ça fait que, donc, voilà... donc,
on est directement touchés. Comme le dit Caroline, on est financé par le FAACA,
et c'est important cette décision-là et pourquoi on est inquiets? C'est que
tous les textes qui défendent et qui expliquent pourquoi le Fonds d'aide à l'action
communautaire autonome est le véhicule privilégié pour le financement sont
inscrits dans la politique de reconnaissance de l'action communautaire. Et dans
ce sens-là, bien, le gouvernement reconnaissait, par exemple, que c'est
important d'avoir un fonds indépendant des ministères avec lesquels les groupes
font affaire, justement pour respecter l'autonomie et s'assurer qu'il n'y ait
pas de conflit avec les ministères avec lesquels on doit intervenir et souvent
critiquer les projets de loi que les gouvernements ont mis en place à travers
les années. Donc, c'était important et cette reconnaissance-là va être perdue
parce qu'actuellement dans aucun des textes qu'on retrouve dans les textes de
loi, cette reconnaissance-là n'a été inscrite. Donc, en changeant le fond,
comme l'a expliqué Caroline, dans un fond plus large, qui a une autre vision,
pour nous, c'est vraiment une menace, une attaque directe à l'autonomie. Le
fonds d'aide a été créé il y a 25 ans et a été concrétisé par la politique
à ce moment-là, il y a 30 ans, en 95 et en 2001, il a été concrétisé au
niveau de son rôle de la défense collective des droits. Et c'est un rôle
important parce que les...
10 h 38 (version non révisée)
M. Lafrenière (Sylvain) : ...ces
organismes-là ont aussi le mandat, et c'est inscrit dans nos redditions de
comptes, dans ce qu'on doit rendre au gouvernement, de... d'être... non
seulement d'informer la population des menaces, des projets de loi qui sont
faits, mais aussi d'informer et de faire des représentations auprès du
gouvernement pour faire entendre la voix de ces personnes-là et aussi de
mobiliser les gens pour qu'ils puissent faire entendre leur voix et peut être
avoir un impact sur les... sur les lois qui les concernent directement. Donc, c'est
un rôle majeur qui a été reconnu dans la politique et tout ça, il n'y aurait plus
de lien, et ça, c'est majeur pour nous.
Le fonds d'aide, avec le temps, a été, au
niveau du financement, décevant. La... la politique était très intéressante puis
c'était un atout majeur à l'époque qui a été... Ça fait quand même... Il y a
peu de sociétés dans lesquelles on reconnaît qu'un gouvernement finance des
organismes qui souvent, j'entends dire, critiquent le gouvernement, mais ça, c'était
un point de... et nous, on pense que c'est un atout majeur et une attitude
saine pour une démocratie saine dans une société de faire entendre et de
financer les organismes pour faire entendre cette voix-là, et ça, c'est ça qui
est en danger actuellement avec le projet du gouvernement. C'est ce que je
viens dire aujourd'hui, et c'est pourquoi nous, on maintient... on demande que
ce chapitre-là du projet de loi soit complètement retiré. On demande le
maintien du Fonds d'aide à l'action communautaire autonome. Merci.
M. Grandmont : Donc, vous le
voyez bien, en fait, autant du côté de l'action communautaire autonome que de
la défense collective des droits, c'est un risque majeur qui est devant nous.
Les deux représentants... en fait, là, les deux regroupements réseau vont être
en commission aujourd'hui à 16 h 05, si ma mémoire est bonne donc
dans le cadre du projet de loi n° 7. Ça a été souligné, mais j'ai... quand
même, je veux réinsister là-dessus, à quoi ça ... à quoi ça aide à réduire la
bureaucratie, en quoi ça aide à augmenter l'efficacité de l'État que de
fusionner ces deux... ces deux fonds-là? On ne la voit pas, on ne la voit pas,
on ne voit pas la raison derrière, et c'est pour ça qu'on trouve ça très
important de souligner que ces deux entités-là, ces deux fonds-là doivent
rester, demeurer séparés.
On a un modèle particulier au Québec, un
modèle qui fait l'envie de probablement beaucoup de monde à travers la planète.
On a un fonds qui finance l'action communautaire autonome en lui faisant
confiance, en faisant confiance aux travailleuses puis aux travailleurs qui
sont sur le terrain, qui comprennent ce qui se passe sur le terrain, qui
comprennent les gens qui sont, qui sont aidés par les organismes qui sont sur
le terrain avec les autres. Mais l'autre côté, on a un fonds aussi qui finance
la défense collective des droits, qui est là pour rappeler au gouvernement ses
obligations au regard des personnes qui sont vulnérables, qui sont
marginalisées. Alors, pour vrai, là, on voit là une grande, grande menace. Un
des aspects très particuliers de l'État québécois dans son fonctionnement d'avoir
un communautaire fort puis un communautaire qui critique l'action
gouvernementale, c'est unique au Québec. Ce qu'on comprend, mon interprétation,
c'est qu'on a un gouvernement qui n'aime pas les contre-pouvoirs, qui ne fait
pas confiance au communautaire, qui veut décider en haut ce qui se passe en bas,
donc un gouvernement qui est très autoritaire et qui refuse les contre-pouvoirs,
et c'est un grave danger pour notre démocratie puis un grave danger pour l'action
communautaire au Québec.
Donc, merci à vous d'être présents aujourd'hui
puis de défendre ces principes-là qui sont fondamentaux pour le Québec. On va
suivre ça avec attention évidemment, dans les jours, dans les semaines, dans
les mois qui viennent, parce qu'on sait que le communautaire est mobilisé en ce
moment, et on va continuer à travailler avec vous autres. Merci beaucoup, tout
le monde.
Le Modérateur
: C'est
ce qui met fin au point de presse.
(Fin à 10 h 42)