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Introduction historique-en

26th Legislature, 1st Session
(September 20, 1960 au September 22, 1960)

Par Stéphane Savard

Le Québec en ébullition (printemps-été 1960)

Le Québec entre en ébullition. D’un point de vue culturel, l’été 1960 est synonyme de nouveautés et de créations. En août, la fondation du Festival du film de Montréal concrétise « la naissance des cinémas d’art et d’essai au Québec ». Fruit du travail intensif des Pierre Juneau, Guy Côté et Roch Demers, ce Festival deviendra rapidement un tremplin pour les cinéastes québécois1. Le même mois, le jeune poète et chansonnier Gilles Vigneault prend le devant de la scène, pour la première fois, à l’ouverture de la « Boîte à chansons », dans la ville de Québec2. En septembre, Jean-Paul Desbiens publie Les Insolences du frère Untel, un ouvrage corrosif dénonçant les problèmes de la société canadienne-française, notamment le système d’éducation où les enseignants « ne savent rien » ou « le savent mal », la langue française désincarnée par le « joual » et l’omniprésence de la religion catholique3.

Sur le plan économique, une crise frappe de plein fouet le Canada depuis 1957. Au Québec, au mois de mars, le chômage devient un problème majeur alors que 236 000 personnes recherchent activement un emploi. À ce moment, 42 % de l’ensemble des chômeurs canadiens habitent le Québec, statistique plutôt disproportionnée par rapport au poids de la population québécoise dans l’ensemble canadien. En moyenne, 9,2 % de la population active du Québec se retrouve sans emploi pendant l’année 19604.

Dans le domaine social, le gouvernement progressiste-conservateur de John Diefenbaker, au fédéral, autorise la compagnie G. D. Searle à vendre la première pilule contraceptive du nom d’Enovid. Rapidement adopté, ce moyen de contraception représente un outil d’émancipation pour les femmes canadiennes et québécoises ainsi qu’un facteur non négligeable dans la baisse du taux de natalité au Canada et au Québec5.

Dans l’arène politique, la mort du premier ministre Paul Sauvé (2 janvier), successeur de Maurice Duplessis, ébranle l’Union nationale et la province tout entière. Le vent de fraîcheur qui avait soufflé sur le Québec depuis l’arrivée au pouvoir du député de Deux-Montagnes s’estompe avec le choix d’Antonio Barrette, ministre du Travail, pour diriger le gouvernement unioniste. Si la nouvelle administration Barrette entreprend une série de petites réformes, notamment la création d’une commission d’enquête sur les problèmes d’hospitalisation, il s’inscrit davantage en continuité avec le régime de Duplessis. Pour le nouveau premier ministre, les choses se compliquent au sein même de son parti; la grogne s’installe parmi certains membres, dont ceux travaillant à l’organisation de l’Union nationale, ce qui mine d’autant le leadership de Barrette6.

À cette stabilité proposée par le gouvernement Barrette s’opposent de nombreux mouvements de contestation qui, depuis le début des années 1950 mais particulièrement depuis la fin de cette décennie, regroupent des représentants des filières syndicales, des universités, du milieu des affaires et du monde artistique. Préconisant une plus grande intervention de l’État québécois, ces réformistes favorisent « des changements dans tous les secteurs de l’activité sociale : démocratisation politique, modernisation et laïcisation des institutions, justice sociale, liberté d’expression, accès à l’éducation et aux soins hospitaliers, soutien à la culture, fin de la censure, etc.7 ».

Ces tenants d’un nouveau nationalisme centré sur l’État québécois8 perçoivent l’action politique comme le principal vecteur de changements socioéconomiques. Parmi ce nombre, plusieurs joignent les rangs du Parti libéral; d’autres choisissent de créer une nouvelle organisation en fondant, le 10 septembre 1960, le Rassemblement pour l’indépendance nationale (RIN). À l’origine, le RIN est un « mouvement d’opinion » ayant comme principal but la promotion « de l’indépendance du Québec » par le biais de l’« éducation populaire »9. Cette organisation contestataire s’inscrit dans un contexte mondial de décolonisation, alors qu’en août, septembre et octobre 1960, plusieurs territoires coloniaux d’Afrique proclament leur indépendance. Parmi ces derniers, notons le Niger, la Côte-d’Ivoire, le Tchad, le Sénégal, le Mali et le Nigéria10.

 

Les élections provinciales du 22 juin 1960

Le 27 avril 1960, le premier ministre Antonio Barrette annonce la tenue d’élections générales. Il plonge le Québec dans une campagne électorale virulente où deux principales formations politiques – l’Union nationale et le Parti libéral – s’affrontent en vue de former le prochain gouvernement.

Sollicitant auprès de l’électorat québécois un cinquième mandat consécutif, l’Union nationale fait une campagne électorale sans vagues et, surtout, sans programme politique précis11. « Mon programme, c’est celui de 1944 », affirme Antonio Barrette à l’ouverture de sa campagne à Joliette; le chef de l’Union nationale entend poursuivre les réalisations de Maurice Duplessis qui, pour lui, sont sources de bienfaits12. Invitant l’électorat québécois à le laisser « faire notre devoir13 », Barrette considère que le passé grandiose de l’Union nationale est garant d’avenir, comme l’illustre un des slogans du parti : « Vers les sommets avec Barrette et l’Union nationale14 ». S’il reprend le thème de l’autonomie provinciale comme principal cheval de bataille15, le premier ministre y greffe des annonces et des déclarations qui illustrent parfois une certaine volonté de changement : plan d’assurance-hospitalisation, planification en vue d’effectuer un inventaire des ressources naturelles, annonce de la construction du pont de Trois-Rivières sur le Saint-Laurent et confirmation d’un investissement, par Hydro-Québec, de 724 millions de dollars pour la construction, entre autres, des projets Manicouagan et Carillon16.

Dans leurs critiques à l’égard des libéraux, les unionistes utilisent le terme « gauchisme » pour qualifier le programme politique de leurs adversaires17 et pour faire ressortir, dans un contexte de guerre froide avec l’URSS, les vieux démons socialistes qui ont tant fait peur à la population nord-américaine durant les années 1950. Fiers des « trois grands » de l’Union nationale, soit Maurice Duplessis, Joseph-Mignault-Paul Sauvé et Antonio Barrette, qui représentent un exemple de dévouement envers le Québec, ils critiquent ceux qu’ils appellent les « trois étrangers », soit Jean Lesage, Georges-Émile Lapalme et René Hamel, parce qu’ils ont d’abord siégé à la Chambre des communes avant de diriger le Parti libéral du Québec. Les unionistes ne ratent pas une occasion de souligner que pour le chef des libéraux, « la province de Québec est [leur] deuxième choix18 ». Malgré une machine électorale pourtant bien huilée, l’Union nationale perd très tôt le contrôle de la campagne, ne réussissant à imposer ni ses orientations ni ses priorités19.

L’arrivée de Jean Lesage à la tête du Parti libéral, à la fin du mois de mai 1958, a contribué à accélérer les transformations internes du parti. À la veille des élections, la majorité des mouvements réformistes perçoivent désormais le Parti libéral comme le principal parti politique porteur de changements favorables à l’émergence d’un État-providence québécois20. Contrairement à leurs adversaires unionistes, les libéraux se démarquent en élaborant un programme politique clairement défini21. Ce dernier reprend plusieurs points précédemment défendus par Georges-Émile Lapalme, ancien chef du parti, et par Jean Lesage dans son essai Jean Lesage s’engage : libéralisme québécois d’aujourd’hui. Jalon de doctrine par Jean Lesage22. « C’est l’temps qu’ça change! » devient le principal slogan d’une campagne électorale fondée sur l’argumentation que le Québec a accumulé un retard par rapport aux autres sociétés nord-américaines. Reprenant le thème de l’autonomie provinciale à son compte, Lesage veut en faire un levier pour enclencher plusieurs réformes économiques, politiques, sociales et culturelles23.

En éducation, en plus de souhaiter la mise sur pied d’une commission royale d’enquête sur l’enseignement, le Parti libéral préconise la gratuité scolaire à tous les degrés de scolarité ainsi que l’obligation de fréquenter l’école jusqu’à l’âge de 16 ans. Sur le plan économique, afin de contrer les actions du gouvernement unioniste qui a « cédé la province aux étrangers », Lesage promet la création d’un conseil d’orientation économique et d’un ministère des richesses naturelles qui permettraient une industrialisation décentralisée du Québec en plus de promouvoir la libération économique des Canadiens français. Dans le domaine social, les libéraux considèrent comme primordial l’établissement d’un système étatique d’assurance-hospitalisation et s’engagent à augmenter les montants remis dans le cadre des allocations familiales et des pensions aux personnes âgées. Le Parti libéral souhaite aussi que l’État, et non plus le réseau institutionnel canadien-français contrôlé en partie par les membres de l’Église, prenne l’initiative en matière de francophonie. Enfin, sur le plan politique, Lesage souhaite une triple réforme : celle de la Constitution avec son rapatriement, celle de la fonction publique, et celle des mœurs électorales24.

Lesage s’entoure de candidats de prestige, notamment avec René Lévesque, journaliste très apprécié du public depuis l’émission Point de mire, et Paul Gérin-Lajoie, constitutionnaliste et ancien conseiller juridique de la Fédération des collèges classiques et des commissions scolaires du Québec. Ces deux têtes d’affiche se greffent à des politiciens aguerris qui forment, depuis quelques années, le noyau libéral : Georges-Émile Lapalme, René Hamel, Alcide Courcy et Émilien Lafrance25.

« L’équipe du tonnerre » ainsi constituée critique l’Union nationale sur plusieurs fronts. Le scandale du gaz naturel refait surface pendant la campagne électorale alors que les libéraux accusent certains ténors unionistes, dont le premier ministre lui-même, de conflit d’intérêts dans la vente du réseau gazier d’Hydro-Québec. Lesage promet de faire toute la lumière sur ce scandale avec la création d’une enquête publique26. Le patronage et les pouvoirs persuasifs de la caisse électorale unioniste sont vertement dénoncés, en particulier lorsque Lesage dévoile l’affaire Honoré Pelletier, un cultivateur de Saint-Pacôme qui aurait reçu 3 200 $ de l’Union nationale pour l’obtention de son vote27. Enfin, l’équipe libérale emprunte à la stratégie unioniste pour dépeindre le gouvernement Barrette et le cabinet Diefenbaker, à Ottawa, comme de grands amis marchant main dans la main. En retour, le Parti libéral se présente comme distinct du Parti libéral fédéral. Comme en témoignent les termes « Fédération libérale du Québec » accolés au nom du parti depuis l’arrivée de Lesage, de même que la mise sur pied de structures proprement québécoises, les libéraux se montrent sous un jour nouveau, c’est-à-dire comme un parti voué aux seuls intérêts de la province28.

Le 22 juin, jour du scrutin, le Parti libéral remporte les élections avec 51,4 % des voix, contre 46,6 % pour l’Union nationale. La formation politique de Jean Lesage fait élire 51 députés, alors que les unionistes obtiennent 43 sièges. Avec 34 députés élus par une majorité de moins de 5 % des voix, les élections de 1960 sont excessivement serrées. Plusieurs vedettes du Parti libéral remportent leur pari de justesse, comme c’est le cas de René Lévesque, dans Laurier, élu grâce à une majorité officielle de 129 voix, ou encore de Paul Gérin-Lajoie, dans Vaudreuil-Soulanges, qui termine la journée avec 149 voix de plus que son adversaire29. Du côté du gouvernement sortant, la défaite est amère, d’autant plus que quelques châteaux forts unionistes tombent entre les mains des libéraux, tels que le comté de Sherbrooke (du ministre John S. Bourque), celui de Deux-Montagnes (Paul Sauvé, décédé au début de l’année) ou encore celui de Matane (ayant appartenu à Onésime Gagnon, devenu lieutenant-gouverneur le 14 février 1958).

 

L’arrivée au pouvoir de « l’équipe du tonnerre »

Dans nos repères historiographiques, la victoire électorale du Parti libéral est souvent présentée comme la première grande marche de la Révolution tranquille. L’arrivée du gouvernement Lesage entame une période de rattrapage et de « modernisation » grâce aux interventions marquées de l’État québécois et grâce aussi à l’hégémonie d’un nouveau nationalisme territorial favorable à la libération socioéconomique des Canadiens français30. À ces deux caractéristiques s’ajoute l’émergence des technocrates, ces membres scolarisés de la nouvelle classe moyenne québécoise qui exerceront leurs compétences scientifiques et techniques dans la fonction publique afin d’orienter l’État québécois31.

L’assermentation du Cabinet a lieu le 5 juillet 1960. Jean Lesage présente un gouvernement dirigé par 16 ministres. Le premier ministre prend sur lui de diriger également le ministère des Finances. Son bras droit, Georges-Émile Lapalme, devient vice-premier ministre et procureur général. Le chef de la nouvelle administration libérale s’entoure de gens chevronnés, jugés comme la crème de « l’équipe du tonnerre « : René Lévesque est nommé ministre des Ressources hydrauliques et ministre des Travaux publics; René Hamel, ministre des Affaires municipales et ministre du Travail; Alcide Courcy, ministre de l’Agriculture et de la Colonisation; Paul Gérin-Lajoie, ministre de la Jeunesse; Émilien Lafrance, ministre du Bien-être social; Gérard D. Levesque, ministre de la Chasse et des Pêcheries; André Rousseau, ministre de l’Industrie et du Commerce; Paul Earl, ministre des Mines; Alphonse Couturier, ministre de la Santé; Bona Arsenault, ministre des Terres et Forêts; Gérard Cournoyer, ministre des Transports et des Communications; Bernard Pinard, ministre de la Voirie; Lionel Bertrand, secrétaire de la province, et Charles-Aimé Kirkland, ministre d’État.

Le mois de juillet et le début du mois d’août s’avèrent cruciaux dans l’établissement du nouveau régime libéral. Pierre Laporte, dans Le Devoir, parle des « trente jours qui ébranlèrent la province32 ». Cette période est le théâtre d’importantes réorientations qui laissent présager, pour la prochaine session parlementaire régulière, un costaud menu législatif à saveur réformiste33.

Le 6 juillet, Lesage donne les pleins pouvoirs au ministre de la Jeunesse, Paul Gérin-Lajoie, en matière de politiques et de planification budgétaire touchant au vaste domaine de l’éducation. En d’autres termes, ce ne sera plus le secrétaire de la province qui – comme par le passé – veillera aux affaires relatives à l’instruction publique donc. Deux semaines plus tard, le premier ministre annonce la mise sur pied d’une commission des universités chargée d’étudier les problèmes financiers et les projets d’avenir de ces institutions scolaires.

Plus encore. Le 9 juillet, Georges-Émile Lapalme entreprend la réorganisation de la police provinciale largement décriée par les opposants du gouvernement Duplessis. Le 11 juillet, le gouvernement Lesage entame des pourparlers avec l’État fédéral en vue de mettre sur pied une assurance-hospitalisation. Le 22 juillet, dans un but de transparence, il oblige l’ensemble des ministères et commissions étatiques à rédiger un rapport annuel. Enfin, le 4 août, René Lévesque, ministre des Ressources hydrauliques, annonce l’intention du gouvernement de ne plus octroyer de nouvelles concessions hydrauliques aux compagnies privées d’électricité34.

Ces réformes entreprises, le gouvernement Lesage s’attaque à un problème délicat qui le force à appeler une session parlementaire spéciale en septembre 1960.

 

Les parlementaires

La session spéciale, qui commence le 20 septembre 1960 et qui se termine le 22 septembre35, se déroule sous le signe de la sobriété. L’ouverture des Chambres se fait sans invités d’honneur ni déploiement somptueux36 et les députés sont invités à faire leur travail moyennant une faible indemnité de 10 $ par jour37.

Un nouvel Orateur est élu à la Chambre basse. Lucien Cliche prend la place de Maurice Tellier et John Richard Hyde remplace Germain Caron comme Orateur suppléant. Dans le discours justifiant le choix de l’Orateur, le nouveau premier ministre exprime sa profonde volonté de redonner au président de l’Assemblée législative l’impartialité qu’il a perdue sous l’Union nationale38 : « L’autorité de l’Orateur, poursuit Lesage, je la veux impartiale. Si j’ai tort, qu’il en juge ainsi sans crainte, sans contrainte et sans remords. Si les ministres ou les députés ministériels se trompent, qu’il les rappelle à l’ordre! Que l’impartialité soit sa règle absolue! » (20 septembre) En trois jours de séances, il y a d’ailleurs un cas où le président Cliche « refuse le rappel au Règlement demandé par le ministre des Affaires municipales (l’honorable M. Hamel) »39. (22 septembre)

Au Conseil législatif, Joseph-Oscar Gilbert occupe dès le 30 mars 1960 le siège laissé vacant par le décès de Jacob Nicol, en 1958. Le jour même où Antonio Barrette déclenche les élections (27 avril), Victor Marchand est démis de ses fonctions pour cause d’absentéisme. Il est remplacé par Jean Raymond. Lorsque commence la session spéciale de septembre 1960, 17 conseillers législatifs sont d’allégeance unioniste, alors que sept sont considérés comme des libéraux. Parmi ces derniers, le vétéran Hector Laferté succède à Jean-Louis Baribeau comme Orateur de la Chambre rouge.

Au tout premier jour de la session, la composition de la Chambre basse ne reflète déjà plus l’intention populaire du 22 juin précédent. Deux fauteuils unionistes sont vacants, symbole de la désunion dans les rangs oppositionnistes. En premier lieu, le chef Antonio Barrette, critiqué pour la défaite de ses troupes, annonce sa démission le 14 septembre. Deux jours plus tard, Yves Prévost, ancien secrétaire de la province de 1956 à 1960, devient chef intérimaire du parti et chef de l’opposition à l’Assemblée législative. Le 19 septembre, une autre grosse pointure quitte le parti : Laurent Barré, ancien ministre de l’Agriculture, démissionne pour des raisons de santé.

Les rivalités et les dissensions qui minent de l’intérieur la formation politique n’échappent pas aux yeux scrutateurs des ministériels. Par des propos dérisoires, René Hamel, ministre des Affaires municipales et ministre du Travail, illustre bien la situation tendue dans le parti fondé par Maurice Duplessis : « […] la défaite [aux élections du 22 juin 1960] a fait surgir des ambitions chez quelques-uns de ses membres. Il semble y avoir diverses écoles présentement dans l’Union nationale, dit-il. Il y a l’école de Montmorency (M. Prévost), l’école de Bagot (M. Johnson) et l’école de Missisquoi (M. Bertrand). Ça fait une véritable salade. »

En somme, les 93 députés de l’Assemblée législative sont répartis comme suit : 51 sièges pour le Parti libéral du Québec, 41 sièges pour l’Union nationale et un député indépendant, Frank Hanley, de Montréal-Saint-Anne, qui avait jadis pour habitude de voter avec le gouvernement unioniste40.

 

Le Bill 1

Un seul projet de loi est étudié durant cette session spéciale. Le bill 1 sur le projet de référendum à Montréal amorce la résolution d’un problème administratif et démocratique qui avait pris de l’ampleur depuis quelques années.

Dans les années 1950, le conseil municipal de Montréal comprend trois classes de conseillers dont chacune détient le tiers des sièges : les conseillers de la classe « A » élus par les propriétaires seulement, ceux de la classe « B » élus par l’ensemble des électeurs (locataires et propriétaires), et ceux de la classe « C » non élus au suffrage mais nommés par les « principaux corps intermédiaires » de la ville, entre autres les organismes et les associations publiques. Paralysé depuis la fin des années 1950 par des luttes entre la Ligue d’action civique, de Jean Drapeau, et le Ralliement du Grand Montréal, de Sarto Fournier, le conseil municipal « devient un véritable champ de bataille où s’affrontent les clans opposés » et où le parti au pouvoir n’obtient jamais de majorité significative39. Dans leurs luttes pour dominer le conseil municipal, les adversaires feraient appel, dit-on, à des pratiques douteuses – le « marchandage » – pour tenter de corrompre les conseillers de la classe « C ».

Deux facteurs semblent influencer le cabinet Lesage dans sa décision d’appeler une session spéciale, en septembre 1960, au lieu d’attendre la session régulière, prévue pour le mois de novembre. Le gouvernement Barrette avait d’abord « pris l’engagement formel qu’une session spéciale aurait lieu en septembre » pour résoudre le problème montréalais42. Créée par l’administration unioniste lors de la session parlementaire du début de l’année 1960, la commission d’étude du système administratif de Montréal (commission Champagne) dépose un rapport préliminaire le 31 août et propose des esquisses de réformes. L’approche des élections municipales prévues pour le 24 octobre représente aussi un sérieux incitatif pour le gouvernement qui refuse de laisser se dérouler un autre scrutin sans intervenir.

Pendant la session spéciale, les membres du Parti libéral du Québec sont expéditifs. On sent bien la volonté de faire vite et de ne s’en tenir qu’au problème montréalais, possiblement pour ne pas vendre la mèche d’une future session plus pompeuse où le gouvernement aura le loisir de présenter ses grandes réformes législatives43. Exceptionnellement laconique, le discours du trône ne fait que confirmer la nécessité de réformer l’administration municipale de Montréal.

En ce qui a trait à l’adresse en réponse au discours du trône, proposée par Jean-Noël Lavoie, député de Laval, et secondé par Harry Blank, député de Montréal-Saint-Louis, elle se limite à une simple formule de courtoisie, sans véritables discours44. Quant au court débat qui s’ensuit, Yves Prévost se montre insatisfait du travail accompli jusqu’à maintenant par le gouvernement Lesage, à qui il reproche de ne pas avoir « un menu plus substantiel à présenter à la Chambre » (21 septembre). Parmi les questions urgentes qui auraient mérité une attention immédiate, selon lui, l’assurance-hospitalisation, la gratuité scolaire et le problème du chômage se trouvent en tête de liste. Sur ce dernier point, Antonio Talbot, député unioniste de Chicoutimi, et son collègue Gérard Thibeault, député de Montréal-Mercier, en profitent pour écorcher au passage la décision du premier ministre d’avoir bloqué plusieurs travaux publics pendant l’été, nuisant ainsi aux travailleurs québécois45.

Afin d’accélérer le processus d’étude du problème montréalais, le premier ministre propose, le 21 septembre, une motion autorisant la suspension de certains articles du Règlement. Ce faisant, il veut accélérer le déroulement de la « session d’urgence » en suspendant temporairement « la formation des comités permanents et le choix de leurs membres », le droit de présenter des pétitions, l’exigence « que les trois lectures d’un bill se fassent dans des séances différentes », la présentation des bills privés, le droit relatif aux questions ainsi que le dépôt de rapports et documents.

Brisant avec la tradition parlementaire de présenter d’abord la « Loi relative à la prestation des serments d’office »46, le gouvernement Lesage fait la première lecture du bill 1, concernant un référendum à Montréal, avant même la présentation du discours du trône à l’Assemblée législative.

La deuxième lecture s’effectue le lendemain. René Hamel, ministre des Affaires municipales, explique les deux « principes importants » de la loi : organisation d’un « référendum donnant la chance aux Montréalais de décider eux-mêmes du sort de la classe C de ses conseillers municipaux » et « limitation à deux ans de la durée du mandat du prochain terme des administrateurs de Montréal ». (21 septembre) Comme Hamel et Lesage l’expliquent, ces « modifications temporaires » permettront de tenir les élections municipales à la date prévue, le 24 octobre, en attendant que le rapport final de la commission Champagne soit remis au gouvernement – prévu pour le mois de mars 1961 – et que des mesures législatives de plus grande envergure soient prises par la suite.

Le chef de l’opposition critique beaucoup le projet de loi qui ne tient pas compte, selon lui, de la nouvelle structure administrative déjà proposée par le rapport préliminaire de la commission Champagne. Au lieu de maintenir le scrutin en date du 24 octobre, il propose plutôt de retarder les élections de deux mois pour « insérer les recommandations de la commission dans un nouveau projet de loi ». En bref, l’opposition juge insuffisantes les mesures d’urgence proposées afin de mettre un baume sur les problèmes administratifs montréalais. Elle craint même que la ville ne plonge dans « l’incertitude » (21 septembre) et ne subisse des retards « dans sa course avec Toronto pour conserver son titre de métropole ». (22 septembre)

En réplique, le premier ministre estime qu’il serait impossible d’appliquer les changements proposés par la commission en si peu de temps. Il avoue trouver « difficile d’accepter certaines parties du rapport Champagne », notamment celle sur la création d’une « commission consultative chargée d’administrer ». (21 septembre) Le 22 septembre, après deux jours de débats, le bill 1 sur le référendum de Montréal reçoit la sanction royale. Cette dernière étape met fin à la session.

 

Faits divers, faits cocasses…

Lesage n’est pas Duplessis! Jean Lesage fait ses premiers pas à l’Assemblée législative du Québec et, contrairement à Maurice Duplessis qui savait utiliser les règlements de la Chambre pour museler l’opposition, le nouveau premier ministre se montre plus ouvert à la discussion. Lors de la troisième lecture du bill 1, après avoir écouté le ministre René Hamel, le député unioniste Paul Dozois, de Montréal-Saint-Jacques, demande la parole. S’ensuit alors la discussion suivante où Jean Lesage ne semble pas certain des arguments qu’il avance :

L’honorable M. Lesage (Québec-Ouest): M. l’Orateur, je soulève un point d’ordre. Je crois que la réplique du parrain du bill clôt le débat. Le député de Montréal-Saint-Jacques (M. Dozois) n’aurait donc plus le droit de parler sur cette troisième lecture.

(À l’adresse du chef de l’opposition) Mais qu’en pensez-vous?

M. Prévost (Montmorency) laisse le premier ministre hésiter.

L’honorable M. Lesage (Québec-Ouest): Qu’est-ce qui se pratiquait sous les anciens régimes?

M. Prévost (Montmorency): (Souriant) Attention. D’habitude, et il en a toujours été ainsi depuis que je siège en cette Chambre, le proposeur d’une motion doit, avant d’user de son droit de réplique, demander si d’autres députés ne veulent pas parler. Le ministre des Affaires municipales (l’honorable M. Hamel) ne l’a pas fait. En conséquence, le député de Montréal-Saint-Jacques (M. Dozois) a parfaitement le droit de parler.

Un député de l’opposition: (À l’adresse du premier ministre) Bâillon comme à Ottawa.

L’honorable M. Lesage (Québec-Ouest): J'accepte le point de vue du chef de l’opposition et je retire le point d’ordre.

 

La critique des sources

Par Stéphane Savard

Les membres de la Tribune de la presse47

En septembre 1960, au moins 20 courriéristes parlementaires citent, commentent ou résument les interventions des députés en Chambre. Peu avant l’ouverture de la session, ils choisissent comme président Pierre Laporte, du Devoir. Trois vice-présidents entourent ce dernier : Gérard Fecteau, de CFCM-TV, Paul Leduc, du Montreal Daily Star, et Warren Stafford, du Quebec Chronicle-Telegraph. Henri Dutil, journaliste travaillant pour Le Soleil et pour L’Événement-Journal, devient secrétaire de la Tribune.

Les autres membres connus de la Tribune travaillent pour les grands quotidiens québécois, pour les principales agences de presse ou encore pour des postes de radio ou de télévision : Wilbur Arkinson, pour The Gazette; Jean Berger, pour CJLR; Maurice Bernier, du Montréal-Matin; Paul Cliche, de L’Action catholique; Dominique Clift, du Globe and Mail; Richard Daignault et Jacques Monnier, de La Presse canadienne; J.-L. Lacroix, de La Presse; Guy Lafrance, de CKCV; Guy Lemieux, de CHRC; Paul-Émile Plouffe, du Nouvelliste; Fernand Renault, du Montreal Daily Star; Louis Roberge, de Radio-Canada; Marc-Edmond Thivierge, de la United Press International; et Joseph Voisard, de L’Événement-Journal48.

La reconstitution des débats de 1960 a nécessité la consultation de comptes rendus, de chroniques et d’articles de plusieurs hebdomadaires ou quotidiens. Les principaux journaux dépouillés pour cette courte session spéciale sont le Montréal-Matin, La Presse, Le Soleil, The Gazette, L’Action catholique, Le Nouvelliste, Le Devoir, The Montreal Daily Star, La Tribune, Le Temps et The Quebec Chronicle-Telegraph. Il est à noter que Le Devoir a surtout permis de retracer l’atmosphère présente en Chambre, surtout en ce qui concerne les applaudissements.

 

Une source parfois imparfaite

Quelques exemples rappellent aux lecteurs des débats parlementaires que le travail de reconstitution se voit tributaire de la qualité des comptes rendus effectués par les membres de la Tribune. Si la division des tâches entre journalistes sous la forme d’un « pool » permet d’atténuer les sympathies politiques49 et de rapporter le plus fidèlement possible les propos des députés, il arrive parfois que l’intervention d’un responsable politique soit résumé et non intégralement citée. Des phrases comme « Il lance plusieurs flèches aux membres du gouvernement » (21 septembre) ou encore « Il (l’honorable M. Lesage) souligne ce que le Cabinet fait actuellement pour la proche réalisation du projet d’assurance-hospitalisation » (21 septembre) demeurent plutôt vagues. La subjectivité des courriéristes parlementaires vis-à-vis de certaines discussions peut expliquer pourquoi ces derniers jugent inutile de rapporter tels ou tels propos.

 

Notes de l’introduction historique et de la critique des sources

1. Bilan du siècle, Université de Sherbrooke, www.bilan.usherb.ca

2. Ibid.

3. Ibid.

4. Jean Hamelin et Jean-Paul Montminy, « La mutation de la société québécoise, 1939-1976. Temps, rupture, continuités », dans Fernand Dumont, Jean Hamelin et Jean-Paul Montminy, Idéologies au Canada français, 1940-1976. Tome 1er : La Presse – La littérature, Québec, Presses de l’Université Laval, 1981, p. 45-46; Jacques Lacoursière, Histoire populaire du Québec. Tome 5 : 1960 à 1970, Québec, Septentrion, 2008, p. 44; Paul-André Linteau, René Durocher, Jean-Claude Robert et François Ricard, Histoire du Québec contemporain. Tome II : Le Québec depuis 1930, Montréal, Boréal, 1989, p. 423.

5. Bilan du siècle, Université de Sherbrooke, www.bilan.usherb.ca

6. Richard Jones, Duplessis et le gouvernement de l’Union nationale, Ottawa, La société historique du Canada, 1983, p. 20; J. Lacoursière, Histoire populaire du Québec…, p. 45; « Selon une enquête journalistique : L’affaire du tremplin liée à la démission de M. Antonio Barrette », La Presse, 22 septembre 1960, p. 17.

7. Robert Comeau, « La Révolution tranquille : une invention? », dans Yves Bélanger, Robert Comeau et Céline Métivier (dir.), La Révolution tranquille, 40 ans plus tard : un bilan, Montréal, VLB éditeur, 2000, p. 13-14.

8. Appelé aussi le néonationalisme par l’historien Michael D. Behiels, Prelude to Quebec’s Quiet Revolution : Liberalism versus Neo-Nationalism, 1945-1960, Kingston/Montréal, McGill-Queen’s University Press, 1985, 366 p.

9. P.-A. Linteau, R. Durocher, J.-C. Robert et R. Ricard, Histoire du Québec contemporain…, p. 709. Voir aussi : Bilan du siècle, Université de Sherbrooke, www.bilan.usherb.ca

10. François-Pierre Gingras, « Le Rassemblement pour l’Indépendance Nationale ou l’indépendantisme : du mouvement social au parti politique », dans Réjean Pelletier (dir.), Partis politiques au Québec, Montréal, Cahiers du Québec/Hurtubise HMH, 1976, p. 221; Jean Provencher, Chronologie du Québec, 1534-2000, Montréal, Boréal, 2000, p. 272; Perspective monde, « 1960-1964 » Université de Sherbrooke, perspective.usherbrooke.ca

11. J. Lacoursière, Histoire populaire du Québec…, p. 45; Jean-Louis Roy, Les programmes électoraux du Québec : un siècle de programmes politiques québécois. Tome II : 1931-1966, Ottawa, Éditions Leméac, 1971, p. 373-375.

12. Réjean Pelletier, Partis politiques et société québécoise : de Duplessis à Bourassa, 1944-1970, Montréal, Québec/Amérique, 1989, p. 277 et 280.

13. J.-L. Roy, Les programmes électoraux…, p. 373.

14. J. Lacoursière, Histoire populaire du Québec…, p. 42.

15. R. Pelletier, Partis politiques et société québécoise…, p. 277; J. Provencher, Chronologie du Québec…, p. 273.

16. Antonio Barrette, cité dans J.-L. Roy, Les programmes électoraux…, p. 375-376. Voir aussi : Bilan du siècle, Université de Sherbrooke, www.bilan.usherb.ca

17. J. Lacoursière, Histoire populaire du Québec…, p. 46.

18. R. Pelletier, Partis politiques et société québécoise…, p. 280.

19. Ibid., p. 282.

20. Robert Comeau, « La Révolution tranquille… », p. 13-14; P.-A. Linteau, R. Durocher, J.-C. Robert et F. Ricard, Histoire du Québec contemporain…, p. 366 et 706

21. R. Pelletier, Partis politiques et société québécoise…, p. 238.

22. J. Lacoursière, Histoire populaire du Québec…, p. 42. Voir : Jean Lesage, Jean Lesage s’engage : libéralisme québécois d’aujourd’hui, Montréal, Éditions politiques du Québec, 1959, 123 p.

23. Gérard Boismenu, « La pensée constitutionnelle de Jean Lesage », dans Robert Comeau (dir.), Jean Lesage et l’éveil d’une nation : les débuts de la Révolution tranquille, Québec, Presses de l’Université du Québec, 1989, p. 77.

24. Pour en savoir davantage sur le programme électoral du Parti libéral, voir : J. Lacoursière, Histoire populaire du Québec…, p. 43-44; R. Pelletier, Partis politiques et société québécoise…, p. 240; J.-L. Roy, Les programmes électoraux…, p. 380 et 386-387.

25. J. Lacoursière, Histoire populaire du Québec…, p. 45; R. Pelletier, Partis politiques et société québécoise…, p. 239; J. Provencher, Chronologie du Québec…, p. 273.

26. J.-L. Roy, Les programmes électoraux…, p. 380.

27. Bilan du siècle, Université de Sherbrooke, www.bilan.usherb.ca

28. P.-A. Linteau, R. Durocher, J.-C. Robert et R. Ricard, Histoire du Québec contemporain…, p. 706; R. Pelletier, Partis politiques et société québécoise..., p. 237-238.

29. Voir : J. Lacoursière, Histoire populaire du Québec…, p. 47.

30. Voir, entre autres : Robert Boily, « Une interprétation de la Révolution tranquille », dans Robert Comeau (dir.), Jean Lesage et l’éveil d’une nation : les débuts de la Révolution tranquille, Québec, Presses de l’Université du Québec, 1989, p. 302-311; P.-A. Linteau, R. Durocher, J.-C. Robert et R. Ricard, Histoire du Québec contemporain…, p. 421-422, 461-463 et 718; Denis Monière, Le développement des idéologies au Québec des origines à nos jours, Montréal, Québec/Amérique, 1977, p. 319-321.

31. Pour en savoir plus sur les technocrates, voir : Jean-Charles Falardeau, « Des élites traditionnelles aux élites nouvelles », dans Richard Desrosiers (dir.), Le personnel politique québécois, Montréal, Boréal Express, 1972, p. 29-30; P.-A. Linteau, R. Durocher, J.-C. Robert et R. Ricard, Histoire du Québec contemporain…, p. 555-557; Jean-Jacques Simard, La longue marche des technocrates, Montréal, Albert Saint-Martin, 1979, 332 p.

32. Cité par J. Lacoursière, Histoire populaire du Québec…, p. 49-50. Il est probable que cette allusion fasse référence au livre à succès de John Reed sur la Révolution russe de 1917, intitulé Ten Days that Shook the World. Publié pour la première fois en 1919, cet ouvrage connaît de nombreuses traductions et rééditions à la fin des années 1950; l’édition française Dix jours qui ébranlèrent le monde est parue en 1958.

33. R. Pelletier, Partis politiques et société québécoise…, p. 195.

34. Pour plus d’information concernant les interventions du gouvernement Lesage en juillet et août 1960, voir : J. Lacoursière, Histoire populaire du Québec…, p. 49; P.-A. Linteau, R. Durocher, J.-C. Robert et R. Ricard, Histoire du Québec contemporain…, p. 659-660; R. Pelletier, Partis politiques et société québécoise…, p. 194. Voir aussi : Bilan du siècle, Université de Sherbrooke, www.bilan.usherb.ca

35. Cette session de trois jours est beaucoup plus courte que la précédente session spéciale qui a duré 21 jours, entre le 7 octobre et le 12 novembre 1936.

36. « Session spéciale pour la ville de Montréal : L’hon. René Hamel présente le bill », Le Nouvelliste, 21 septembre 1960, p. 1; « Aucun heurt au cours de cette première séance », La Presse, 21 septembre 1960, p. 13; « La XXVIe Législature est ouverte. Première journée : formalités – Le travail commence », La Presse, 21 septembre 1960, p. 49.

37. Comme le rappelle le chef de l’opposition, Yves Prévost, « nous siégeons pratiquement à nos frais ». (22 septembre)

38. Maurice Duplessis est reconnu pour avoir réussi à « inféoder » l’Orateur de la Chambre. Voir : Christian Blais, Gilles Gallichan, Frédéric Lemieux et Jocelyn Saint-Pierre, Québec : quatre siècles d’une capitale, Québec, Publications du Québec, 2008, p. 458. Voir aussi : Louis Massicotte, Le Parlement du Québec de 1867 à aujourd’hui, Québec, Presses de l’Université Laval, 2009, p. 48-50.

39. Cette décision en faveur de l’opposition serait rendue pour « la première fois depuis plusieurs années ». Voir : La Presse canadienne, « L’hon. L. Cliche donne raison à l’opposition », Le Soleil, 23 septembre 1960, p. 3.

340. Durant la séance du 21 septembre, Frank Hanley sent d’ailleurs le besoin de faire une courte allocution afin de rappeler sa position d’indépendant aux députés et aux représentants des journaux : « Il y a une quinzaine de jours, un journal anglais de Montréal faisait savoir, dans un article daté de Québec, que j’étais considéré comme faisant partie de l’opposition. L’article était fondé sur une liste des députés préparée par un employé de l’Assemblée législative et fournie à la Tribune de la presse par une branche de l’administration provinciale. Je proteste contre cette façon de procéder. J’ai reçu plusieurs appels de mes électeurs qui protestent, eux aussi, en disant qu’ils élisent depuis plusieurs années un député indépendant. Je n’appartiens pas à l’opposition et n’ai pas l’intention d’être classé dans la catégorie des membres de l’opposition. Certes, je n’aurais pas honte à le faire, car les membres de l’opposition sont mes amis, et je n’en veux pas à l’opposition actuelle. Il y a évidemment, dans cette opposition, un grand nombre de gentilshommes que je respecte, et, parmi eux, des anciens ministres qui ont toujours été très généreux pour le comté de Sainte-Anne alors qu’ils étaient au pouvoir. Mais je suis un député indépendant et j’entends continuer à siéger comme député indépendant; c’est le mandat que j’ai reçu. » Voir aussi : « Aucun doute sur l’indépendance de Frank Hanley », Le Soleil, 22 septembre 1960, p. 12; « M. Frank Hanley se range du côté du pouvoir », Montréal-Matin, 22 septembre, p. 12.

41. Paul-André Linteau, Brève histoire de Montréal, Montréal, Boréal, 1992, p. 137-138; Paul-André Linteau, Histoire de Montréal depuis la Confédération, Montréal, Boréal, 1992, p. 543-544; P.-A. Linteau, R. Durocher, J.-C. Robert et R. Ricard, Histoire du Québec contemporain…, p. 288.

42. Voir Antonio Barrette, dans J.-L. Roy, Les programmes électoraux…, p. 375.

43. Sur ce point, Jean Lesage ne rate pas l’occasion, à la toute fin de la dernière séance du 22 septembre, d’annoncer la convocation des Chambres pour une session ordinaire le 10 novembre de la même année.

44. Selon La Presse, cette situation est une première dans l’histoire « des annales parlementaires du Québec ». Voir : « Le débat sur le discours du Trône : Un précédent, une passe d’armes et un vote de 51 contre 39 à Québec », La Presse, 22 septembre 1960, p. 51.

45. Deux jours après la passation des pouvoirs, Jean Lesage prend des mesures draconiennes afin d’éviter, selon lui, tout débordement dans les dépenses publiques. Pierre Laporte, journaliste au Devoir, présente les principales interventions : « 1) Des policiers montent la garde à la porte du parlement. Ils ont pour mission spéciale de voir à ce qu’aucun document ni aucun dossier ne puisse sortir des immeubles gouvernementaux; 2) tous les travaux publics ont été arrêtés dans la province; 3) les hauts fonctionnaires ont été prévenus, sous les peines les plus graves, de s’en tenir strictement aux actes essentiels de l’administration. » Pierre Laporte, cité dans J. Lacoursière, Histoire populaire du Québec…, p. 47-48.

46. Ce bill symbolique, aussi appelé bill pro forma, est présenté avant le discours du trône dans la Chambre basse pour montrer l’indépendance du législatif sur l’exécutif. Il sera présenté pour la dernière fois en 1968.

47. Pour plus d’information sur la Tribune de la presse, voir : Jocelyn Saint-Pierre, Histoire de la Tribune de la presse à Québec, 1871-1959, Montréal, VLB éditeur, 2007.

48. Voir : Les membres de la Tribune de la presse : liste chronologique (1871-1989), Québec, Bibliothèque de l’Assemblée nationale, 1990, Bibliographie et documentation, no 34.

49. J. Saint-Pierre, Histoire de la Tribune…, p. 95-101.