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(Trois heures de l'après-midi)
M. Hyde (président): Qu'on ouvre les portes. Let the doors be
opened.
A l'ordre, messieurs. Affaires courantes.
Présentation de pétitions. Lecture et réception de
pétitions. Présentation de rapports de comités
élus. Présentation de motions non annoncées.
Présentation de bills privés. Présentation de bills
publics. Affaires du jour.
Plan de rentes
M. JOHNSON: M. le Président, le premier ministre a-t-il
répondu au télégramme de 7 1/2 pages de M. Pearson,
télégramme qui contenait la proposition d'Ottawa pour
règler l'imbroglio entre le fédéral et les provinces?
M. LESAGE: M. le Président, je crois que mon discours du budget
constituait une réponse. Une réponse directe est en
préparation mais elle n'ajoutera rien à ce que j'ai dit dans mon
discours du budget.
M. JOHNSON: M. le Président, je ne fais pas de commentaire, sauf
que je note qu'il y a une réponse en préparation. Et le premier
ministre comprendra pourquoi la question. Il y a un doute chez les journalistes
et chez celui qui vous parle quant à la portée de certaines
expressions du message de M. Pearson concernant le plan de pension.
Y aura-t-il un seul plan de pension avec option pour les provinces
d'administrer ou d'organiser un mécanisme, même par loi, ou s'il y
aura un plan de Québec et un plan d'Ottawa qui seront, à la suite
de l'entente, rendus conformes au moins dans leurs parties essentielles?
M. LESAGE: M. le President, j'ai redéclaré,
répété, re-répété et je
répète de nouveau qu'il y aura un plan provincial de rentes dans
le Québec, plan qui sera strictement provincial. Les cotisations seront
perçues par la province. Elles seront administrées pas la
province. Les prestations seront payées par la province ou une
commission provinciale. Les investissements seront à 100% faits par la
province suivant les décisions de la province et une loi provinciale
sera présentée sur le sujet.
UNE VOIX: Avez-vous encore des doutes?
M. JOHNSON: Le premier ministre a répondu à tous les
aspects de la question sauf à l'aspect formel et qui intéresse le
plus, actuellement, l'Opposition et le public. Est-ce que la province pourra
apporter à ce plan que vient de mentionner le premier ministre, un plan
provincial en vertu duquel la province percevra ses cotisations, les imposera,
les percevra et les administrera librement? Est-ce qu'une modification pourrait
être apportée à ce plan, sans le consentement
préalable d'Ottawa?
M. LESAGE: La Législature de Québec, M. le
Président, est maîtresse de ses lois; et totalement.
M. JOHNSON: Bravo!
UNE VOIX: Il a de la misère à comprendre ça.
M. JOHNSON: M. le Président, je voudrais proposer à cette
Législature c'est une motion sans avis qu'on envoie une
copie de cette déclaration du premier ministre de la province au premier
ministre du Canada, afin qu'il soit un peu plus clair dans ses
déclarations.
M. LESAGE: M. le Président, j'ai relevé aussi, qu'en
réponse il arrive souvent qu'un premier ministre, ou un ministre,
en réponse à une question, utilise des mots dans un but de
brièveté qui peuvent donner lieu à des doutes sur
l'interprétation à donner à la réponse. Mais, il me
semble que j'ai été absolument clair, cette fois-ci, et que ma
réponse ne peut donner lieu à aucune interprétation, sauf
celle qui vient des mots « exact » et« précis»
que j'ai employés.
M. JOHNSON: M. le Président, est-ce que le premier-ministre
explique sa déclaration, ou s'il justifie l'ambiguïté de la
déclaration de M. Pearson?
M. LESAGE: Je ne me souviens pas, mais à un moment donné,
j'ai lu, dans le Hansard, que M. Pearson avait je regrette, ma
mémoire me fait défaut mais il avait parlé d'option
des provinces, et c'est peut-être là-dessus qu'il y a eu
ambiguïté...
M. BERTRAND (Missisquoi): C'est ça, c'est ça!
M. LESAGE: ... mais c'était en réponse à une
question posée avant les ordres du jour. Je l'ai remarqué
moi-même. Je me demande même si je ne l'ai pas ici? J'ai tellement
de paperas-
se que... De toute façon, je l'avais remarqué.
Il est clair qu'il s'agit d'une expression qui a été
employée pour répondre brièvement à une question
sur les ordres du jour.
M. JOHNSON: M. le Président, c'est touchant de voir, maintenant
qu'ils sont à la veille de se séparer, la tendresse qui...
M. LESAGE: Pardon?
M. JOHNSON: ... marque les rapports entre les deux chefs, d'Ottawa et de
Québec.
M. LESAGE: M. le Président, excusez-moi, s'il vous plaît,
on parlait en arrière de moi, je n'ai pas compris le début de la
question.
M. JOHNSON: Je dis: c'est touchant de voir de constater la tendresse
avec laquelle le premier ministre de l'aile provinciale traite maintenant le
premier ministre de l'aile fédérale, alors qu'ils sont à
la veille de se séparer et de faire chambre à part.
M. LESAGE: M. le Président, je n'ai jamais caché mon
amitié et mon admiration pour le premier ministre du Canada.
Il est entendu que nous n'avons pas toujours été d'accord.
Evidemment, je ne sais pas ce qui se passait au Conseil des ministres sous
l'Union nationale, lorsque le chef actuel de l'Opposition en faisait partie,
mais il arrive, dans tous les Conseils de ministres, qu'il y a des
échanges de vues et que des ministres ne partagent pas les mêmes
opinions, qu'il y a conciliation parce qu'il faut qu'il y ait unanimité
au Cabinet.
Il m'est arrivé, même lorsque j'étais un
collègue de M. Pearson à Ottawa, d'avoir des différences
d'opinions avec lui, différences d'opinions qui se sont
conciliées. Il a été mon maître en diplomatie, et
j'ai dû être un assez bon élève.
M. JOHNSON: Il serait temps que le premier ministre en fournisse des
preuves.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs. Affaires du jour.
M. HAMEL (St-Maurice): A l'item 32, M. Gagnon propose qu'il soit
déposé copie de tout rapport d'enquête ou de toute
correspondance, 32.
M. BELLEMARE: 32. UNE VOIX: Avant 31.
M. BELLEMARE: Oui, mais 32?
UNE VOIX: 32, au feuilleton.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs.
M. DOZOIS: M. le Président, j'ai trois questions inscrites au
feuilleton de même que deux motions pour production de documents. Sur les
cinq, il y en a deux qui sont urgentes; les questions 9 et 10 et, si le premier
ministre pouvait soumettre à la Chambre ses réponses le plus
tôt possible, je l'apprécierais.
M. LESAGE: 9 et 10?
M. DOZOIS: 9 et 10. Maintenant, M. le Président...
M. LESAGE: Bien, il s'agit de l'Hydro-Québec. Evidemment, 9 c'est
l'Hydro. Je vais demander à un de mes collègues de communiquer
avec M. Lessard pour avoir ce montant le plus tôt possible.
M. GERIN-LAJOIE: Le 10 est en préparation.
M. LESAGE: Le 10, c'est le ministère de la Jeunesse.
Uniformisation de la taxe
M. DOZOIS: Maintenant, M. le Président, ce matin,
malheureusement, je suis arrivé un peu tard. J'avais soumis au greffier,
je crois, une motion pour production de documents; le mémoire de la
Commission Bélanger recommandant l'uniformisation de la taxe.
C'était trop tard pour que ça paraisse au feuilleton, mais je me
demande si le premier ministre aurait condescendance de nous le
déposer.
M. LESAGE: Ah! Par une heureuse coïncidence, ou parce que j'avais
peut-être pensé que la question viendrait, j'ai fait faire des
photocopies des deux rapports et je puis déposer deux photocopies de
chacun des rapports.
M. DOZOIS: Très bien, merci. Je vais retirer ma motion.
M. BELLEMARE: M. le Président, je n'ai pas d'objection à
ce que le gouvernement puisse retirer ma question numéro 7. Maintenant
que nous avons une très bonne nouvelle pour l'autoroute du Nord. Je n'ai
pas d'objection. J'ai été pleinement satisfait en entendant le
premier ministre faire sa déclaration...
M. LESAGE: Je remercie le député de Champlain et, quant
à moi, il y a consentement unanime.
M. BELLEMARE: Merci.
M. LE PRESIDENT: Question et réplique retirées.
Numéro 7.
M. LESAGE: Numéro 5.
M. COUTURIER: Question de M. Cloutier, lue et répondue.
M. LESAGE: Numéro 8, question de M. Dozois, lue et
répondue.
UNE VOIX: Non.
St-Joachim de Tourelle
M. HAMEL (St-Maurice): Numéro 30. Voici: le député
de Gaspé demande copie des rapports concernant St-Joachim-de-Tourelle.
En fait, c'est un dossier assez volumineux. J'ai lu le rapport et dans ce qu'on
a au ministère du procureur général, je ne crois pas qu'il
y ait rien de particulièrement intéressant. Je comprends..,Qu'on
me laisse finir! Si le député voulait en prendre connaissance au
ministère et s'il y a des extraits qu'il trouve intéressants,
nous en ferons faire des copies. Cela nous éviterait de publier tout le
dossier, dont 90%, je pense bien, n'est pas d'un intérêt
particulier.
M. GAGNON: M. le Président, je remercie le procureur
général. Vu qu'il a eu l'amabilité de m'inviter à
prendre connaissance du dossier, en temps opportun, j'irai le consulter pour
des choses qui pourraient être utiles lorsque viendront les
crédits pour faire des suggestions au gouvernement, ou pour nommer des
comités ou un comité qui, en temps et lieu, pourrait s'occuper de
cas comme celui-là.
M. HAMEL (St-Maurice): Il y a des répétitions dans ce
mémoire-là. C'est presqu'uniquement des répétitions
de témoignages. Témoignage de M. Untel, de M. Untel, de M. Untel.
Il y en a peut-être 25 et ils disent presque tous la même chose;
alors, si le député de Gaspé-nord veut en avoir de ces
témoignages-là, on lui dira: dites-nous celui que vous voulez,
puis on vous le fera copier.
M. GAGNON: C'est ça, j'irai consulter le dossier. Je remercie le
ministre.
M. LESAGE: Alors, numéro 24.
Bill 33
M. LE PRESIDENT: M. Laporte propose la deuxième lecture du bill
numéro 33, Loi concernant la cité de St-Jean et la ville de
St-Luc. La motion sera-t-elle adoptée?
M. LAPORTE: M. le Président, le bill 33 est assez simple, il
s'agit d'annexer par uns loi une légère partie du territoire de
la municipalité de St-Luc, dans le comté de St-Jean, à la
municipalité de St-Jean. C'est un territoire de 361.17 arpents.
Pourquoi cette annexion par une loi spéciale? C'est parce qu'il y
a nécessité d'annexer et parce qu'il y a urgence d'annexer. Nous
avons appris, il y a environ une semaine, officiellement, qu'une subsidiaire,
qu'une filiale de la Dominion Textiles qui va porter le nom da Textiles
Richelieu, et je souligne que c'est la première fois dans
l'histoire de cette société qu'une de ses filiales porte un nom
français, que les Textiles du Richelieu veulent s'installer dans
la cité de St-Jean. C'est une décision qui, maintenant, est
prise. Dominion Textiles va investir approximativement $12,500,000 pour
construire une usine de textile ultra-moderne. En fait ce sera l'usine la plus
moderne en Amérique du Nord, usine qui donnera du travail à
environ 300 à 350 personnes.
Textiles Richelieu s'installe à cet endroit à la suite de
négociations qui ont duré plusieurs semaines et auxquelles ont
participé, outre le chef du gouvernement, de façon très
active, le ministre de l'Industrie et du Commerce st le ministre du Travail,
parce qu'il y avait évidemment d'abord un problème de parc
industriel et il y avait également das problèmes de relations de
travail, d'heures de travail, de continuité d'opération; et
finalement la société Dominion Textiles a pris la semaine
dernière la décision de s'installer à St-Jean.
L'une des conditions, c'était que la partie de St-Luc où
s'installe la compagnie soit annexée à St-Jean. Elle voulait
d'abord s'installer là parce que ce terrain est situé à
proximité d'une grande route, route qui va relier l'usine à tout
le réseau de voirie de la province de Québec, On me permettra
bien, en passant, M. le Président, d'Insister une fois de plus sur
l'importance primordiale de cette voirie dans la province de Québec. Si
Textiles Richelieu s'en va là, et c'est la déclaration du
président mema de la compagnie, c'est à cause de la
proximité de cette route.
M. JOHNSON: C'est à côté de la question
ça.
M. LAPORTE: Ce n'est pas à côté de la question,
c'est à côté de la route. L'usine est à
côté de la route. M. le Président...
M. JOHNSON: Cela, c'est à côté du sujet, M. le
Président, c'est tout à fait à côté du
sujet.
M. LAPORTE: Alors, je répète, M. le Président, que
ce n'est pas à côté de la question parce qu'il y a eu des
négociations de la Dominion Textiles avec des gens d'autres provinces.
Voici le sommaire de la déclaration que faisait ce matin, au
téléphone, M. Kaine. Cette compagnie détenait des options
sur des terrains dans la province d'Ontario; la première décision
prise...
M. JOHNSON: Nous sommes à étudier en deuxième
lecture le bill 33. Il s'agit du principe du bill. Le principe du bill, c'est
de faire une annexion sans passer par les formalités déjà
prévues par la loi qui s'applique déjà à ces
municipalités, et je pense que le ministre devrait nous donner les
raisons pour lesquelles on ne suit pas la loi générale, et pour
lesquelles on apporte un bill...
M. LAPORTE: M. le Président, étant donné que
ça déplait au chef de l'Opposition je n'y reviendrai pas, mais je
vais simplement lui donner les raisons pour lesquelles l'annexion est
nécessaire. L'annexion est nécessaire parce que Dominion Textiles
veut s'instaler là, Dominion Textiles veut s'installer à cause
des routes. Je ne le répèterai pas, parce que ça lui
déplait, mais c'est ça. C'est une des raisons qui ont
amené ici...
M. JOHNSON: Pourquoi ne passerait-on pas par les procédures
ordinaires?
M. LAPORTE: J'allais justement y venir. M. JOHNSON: Cela, c'est le seul
point.
M. LAPORTE: J'allais justement y venir. Il faut d'abord, avant qu'on
passe par les procédures, savoir s'il y a une compagnie qui s'installe
maintenant on le sait. La Chambre est officiellement saisie d'un fait: c'est
que Textiles Richelieu veut s'installer sur une pointe de terre dans St-Luc. La
procédure d'annexion ordinaire pourrait être suivie effectivement.
Disons que les gestes ordinaires de cette expropriation, de cette annexion, ont
été suivis; mais la raison fondamentale, c'est que l'annexion
n'entrerait en vigueur que le 1er janvier prochain alors que la construction
doit commencer aussitôt que le bill aura été
sanctionné.
M. JOHNSON: Ils pourraient construire quand même.
M. LAPORTE: Eh bien! C'est assez compliqué, pour une compagnie
qui veut s'installer dans St-Jean, d'aller bâtir dans St-Luc, parce qu'il
y a tout le problème du parc industriel qui passe dans St-Jean, d'abord.
Ils bâtissent dans le parc industriel de St-Jean. Eh bien, si le parc
industriel de St-Jean n'est pas étendu à cette portion-là,
ils ne bâtiront plus dans le parc industriel de St-Jean, mais bien dans
St-Luc.
Ils ne s'en vont pas dans St-Luc non pas parce qu'ils ne sont pas en
parfaite amitié avec les administrateurs ou avec les citoyens, mais
parce que cette partie de St-Luc est située absolument à
l'extrémité de la municipalité, et que la
municipalité n'est pas en mesure de leur fournir les services dont ils
ontbesoin. St-Luc n'est pas en mesure de fournir les services dont ils ont
besoin; alors, tout le monde est d'accord. Evidemment, la municipalité
de St-Jean est d'accord. Nous avons à cet effet une résolution et
c'est à leur demande, après des négociations avec St-Jean,
que Dominion Textiles ou Textiles Richelieu s'installe là;
deuxièmement la majorité des propriétaires
intéressés ont signé une requête dont j'ai
ici...
M. DOZOIS: Combien y a-t-il de propriétaires?
M. LAPORTE: Pardon? Comment est-ce qu'il y a de propriétaires? Je
vais vous le dire exactement, un, deux, trois, quatre, cinq, six, sept, huit,
neuf. Sur les neuf, il y en a cinq qui ont signé la requête que
j'ai ici, cinq sur neuf. Deux des neuf sont des sociétés, «
Shell Oil Company » et « Canadian National Railways » qui
n'ont pas d'objection, mais qui ne se sont pas exprimées par la
pétition. Vous avez M. Wilfrid Dubois qui n'a pas signé la
pétition, mais dont la terre de 44 arpents, sauf un arpent, me dit-on, a
été vendue à la ville deSt-Jean. Il lui reste un arpent.
On n'a pas requis sa signature pour l'arpent qui lui restait. Alors, il s'agit
de 361 arpents, d'une évaluation de $12,735.
Nous avons donc l'approbation de la cité de St-Jean; nous avons
donc l'approbation de la majorité des personnes
intéressées, des propriétaires, et nous avons
également l'approbation du conseil municipal de St-Jean: «
attendu, attendu,.. attendu,.. il est résolu à
l'unanimité, sur proposition de M. le conseiller Lucien Des-
pelteau, appuyée par M. le conseiller Joseph Mailloux, que le
conseil municipal de St-Luc accepte de céder à la ville de
St-Jean le territoire comprenant les terres achetées par cette
dernière, à savoir, (ici, description) que ladite ville de
St-Jean rembourse pendant cinq ans », et le reste.
Alors, l'approbation, la volonté d'annexion est unanime. La seule
raison qui nous fait passer un projet de loi, c'est pour qu'il entre en vigueur
immédiatement. Je ne vois pas d'autres explications pour le moment. M.
le Président, je propose donc la deuxième lecture de ce bill.
M. JOHNSON: M. le Président, lorsque nous serons en
comité, nous poserons des questions au ministre,
M. LE PRESIDENT: La motion de deuxième lecture sera-t-elle
adoptée?
M. LAPORTE: Un instant, pas tout de suite. Le député de
St-Jean veut dire un mot.
M. OUIMET: M. le Président, comme député du
comté de St-Jean, je représente à la fois la ville de
St-Luc et la ville de St-Jean. Les deux municipalités sont
intéressées par le projet de loi actuellement à
l'étude en deuxième lecture. Il m'est donc agréable de
participer brièvement à ce débat pour déclarer que
je suis d'accord en tous points aves les objectifs du bill 33.
Essentiellement, ces objectifs sont de rendre possible
l'établissement dans la province, et plus particulièrement dans
mon comté, d'une industrie nouvelle qui apportera dans notre province
des capitaux de l'ordre de $12,000,000 et qui procurera du travail à
environ 300 à 350 personnes.
La ville de St-Jean profitera évidemment en tout premier lieu de
la venue de cette nouvelle industrie. Vous savez, M. le Président, que
le départ de l'industrie de la Brown Boveri avait causé à
notre population du comté de St-Jean des problèmes
économiques et sociaux, problèmes que l'arrivée des
Textiles Richelieu résoudra presque complètement.
J'ai eu l'occasion, comme député de cette région,
de rencontrer les administrateurs des deux villes intéressées. Je
voudrais dire ici que de part et d'autre l'on a fait preuve d'une bonne
volonté et d'une compréhension qui sont dignes d'être
signalées.
Le ministre des Affaires municipales a fréquemment insisté
sur l'importance et la rentabilité de la coopération municipale,
St-Luc et St-Jean viennent de nous fournir un exemple qui mérite
d'être signalé à toute la province. Au nom d'une autonomie
mal comprise, le Conseil municipal de St-Luc aurait pu s'opposer, probablement
sans succès, à l'annexion du territoire compris dans le bill 33,
au risque, peut-être, de faire perdre, au profit d'une autre province,
l'usine des Textiles Richelieu. Au contraire, le maire et les échevins
ont compris qu'une nouvelle usine sera un actif pour toute la région et
ils ont consenti de bonne grâce, au nom du bien commun, à
l'annexion.
Je sais que Dominion Textiles, dont les Textiles Richelieu sont une
filiale, va commencer la construction de l'usine nouvelle d'ici quelques jours.
L'Assemblée législative, en facilitant l'adoption du bill 33,
aura rendu la chose possible. Au nom de la population de St-Jean, je tiens
à remercier publiquement l'honorable premier ministre, M. Jean Lesage;
le ministre de l'industrie et du Commerce, l'honorable Gérard-D.
Levesque; le ministre des Affaires municipales, l'honorable Pierre Laporte; et
également le ministre du Travail, l'honorable Carrier Fortin, pour leur
instante collaboration qui a permis au comté de St-Jean d'obtenir cette
nouvelle usine.
Il me fait plaisir d'apprendre à cette Chambre que c'est avec
joie que la population de St-Jean accueillait cette nouvelle la semaine
dernière. Nous sommes extrêmement optimistes quant aux
résultats favorables qu'aura la venue de cette nouvelle usine chez nous.
En effet, une usine de ce calibre ne manquera pas d'attirer autour d'elle
d'autres industries connues et complémentaires.
Je puis assurer mes collègues de la Chambre que je continuerai
à travailler sans relâche, en collaboration avec les
ministères et les autorités concernés, en vue
d'espérer voir disparaître dans le plus bref délai le
spectre du chômage, non seulement dans le comté de St-Jean, mais
dans toute la province de Québec.
M. JOHNSON: M. le Président, le problème est plus simple
que les discours du ministre et du député de St-Jean ne le
laissent voir. Il s'agit de faire une exception à la Loi
générale, exception à laquelle ont concouru toutes les
parties intéressées, à la fois des propriétaires ou
la très grande majorité d'entre eux, la municipalité de
St-Luc et la municipalité de St-Jean. M. le Président, nous
n'avons pas d'objection évidemment en principe; cependant, je voudrais
faire remarquer d'abord au député de St-Jean, qu'il nous faisait
plaisir d'entendre sa voix.
Enfin, je ferais remarquer au député de St-Jean que, dans
ses remerciements, il a dû
oublier de Nous avons de bonnes raisons de croire, dans cette
région de Beauharnois, que le député de Beauharnois aussi
a concouru et qu'il a recommandé à Dominion Textile de
s'installer à St-Jean plutôt que d'agrandir à Valleyfield
où on a actuellement aussi des problèmes très
sérieux.
Je suis certain, M. le Président, que le député de
Beauharnois en votant à l'unanimité pour le principe de ce bill
pose là un geste tout à tait héroïque parce qu'on
sait par ses déclarations antérieures que c'est lui qui
réglemente la venue des industries dans la ville ou dans son
comté de Beauharnois et il a dû en conséquence recommander
à Dominion Textile d'aller s'installer dans le comté de St-Jean
pour faire plaisir à son collègue.
Nous aurions aimé, cependant, M. le Président, que le
ministre mentionne dans son bill que les municipalités avaient consenti
et je pense qu'en comité le ministre voudra bien, à notre
suggestion, inclure cette mention dans le préambule afin qu'on ne donne
pas l'impression d'avoir créé un précédent qui
serait grave en théorie à la lecture seulement du
préambule et un précédent qui n'en est pas un.
M. le Président, quant à la voirie, bien je suis tout
à fait à côté de la question, mais c'est bien dans
la mentalité des ministres actuels. Je ne pouvais m'empêcher de
sourire quand je passais dans le comté de Vaudreuil-Soulanges et que je
voyais une énorme pancarte d'une dimension de 15 à 20 pieds de
large par peut-être une dizaine de pieds de haut mentionnant: une autre
réalisation Bernard Pinard, ministre de la Voirie et Roger Labrecque,
sous-ministre de la Voirie, M. le Président, c'est une utilisation
très intelligente mais pas tellement rationnelle des fonds des
contribuables.
M. LAPORTE: M. le Président...
M. CADIEUX: M. le Président, il me fera plaisir de voter en
deuxième lecture en faveur du bill 33. Je ne suis jamais jaloux de ce
qui peut arriver de bien à une autre région. J'espère tout
de même que la Domition Textiles ne fermera pas ses portes à
Valleyfield. J'en suis assuré car elle est déjà
instalée à Valleyfield et elle emploie 2,000 employés.
Tout ce que je souhaite c'est que le nombre ne diminue pas et je souhaite
beaucoup de succès au député de St-Jean et à la
région de St-Jean.
C'est vrai que j'ai déjà annoncé la venue à
Valleyfield d'une insdustrie, la rafinerie de Zinc. Cela a peut-être
aidé à la dernière élection. Peut-être que le
chef de l'Opposition est jaloux de ne pouvoir en faire autant dans son
comté ou à travers la province. Je félicite tous les
promoteurs de la venue à St-Jean de la Dominion Textiles et je voterai
en deuxième lecture pour le bill 33.
M. JOHNSON: M. le Président, est-ce que je dois faire la mise au
point?
M. LE PRESIDENT: Non. En comité.
M. JOHNSON: En comité? C'est très bien.
M. LE PRESIDENT: Est-ce qu'il y a d'autres députés qui
voudraient prendre la parole sur la motion de deuxième lecture?
Cette motion sera-t-elle adoptée? Adoptée.
M. LE GREFFIER: Deuxième lecture de ce bill. Second reading of
this bill.
M. LE PRESIDENT: M. Laporte propose que je quitte maintenant le fauteuil
pour que la Chambre se forme en comité plénier pour
étudier le bill 33. Cette motion sera-t-elle adoptée?
Adoptée.
Comité plénier: bill 33
M. LAPORTE: M. le Président, s'il n'y a pas eu la mention dont a
parlé tout à l'heure le chef de l'Opposition, c'est que jusqu'au
24 avril les négociations qui avaient eu lieu avec la
municipalité de St-Luc avaient eu un caractère officieux.
J'ai rencontré personnellement le conseil municipal de St-Luc et
il a verbalement déclaré qu'il était d'accord pour
l'annexion, mais comme nous n'avions pas de documents à l'effet qu'il
était d'accord, ça n'a pas été mis dans le
préambule; mais en date du 24 avril a eu lieu une séance du
conseil municpal et j'ai reçu le document à mon entrée
à la Chambre cet après-midi. Evidemment, je n'ai absolument
aucune objection à ce qu'on ajoute au préambule un attendu
disant: « Attendu que toutes les parties intéressées sont
d'accord », ou quelque chose du genre.
M. JOHNSON: Est-ce qu'on en est rendu là, au
préambule?
M. LAPORTE: Ah bien, c'est à la fin le préambule.
M. JOHNSON: L'article 1, M. le Président. Sur quelques remarques
faites par le député de Beauharnois, je voudrais faire une mise
au point.
Le député de Beauharnois a fait allusion à la venue
à Valleyfield d'une raffinerie de zinc, et il s'en est attribué,
évidemment, de très grands mérites dans les journaux lors
de la campagne électorale...
M. CADEUX: Non, non! C'est faux... M. JOHNSON: ... de 1960 et de
1962.
M. CADEUX: ... M. le Président, je ne me suis jamais
attribué le mérite de la venue à Valleyfield de la
raffinerie de zinc. Je me suis contenté d'en annoncer la venue. J'ai
même dit que je n'étais pas responsable de cette venue, mais bien
le gouvernement provincial.
M. JOHNSON: M. le Président, le député aurait
dû ajouter que, le -17 mars 1960, dans le « McLean's Builders Guide
», qui est une publication à laquelle les constructeurs sont
abonnés, on déclarait que l'entente était conclue pour
l'établissement à Valleyfield ou Beauharnois, de cette raffinerie
de zinc. Le 17 mars 1960, avant les élections de 1960.
M. CADIEUX: A cette date-là, M. le Président, on discutait
de la possibilité, mais il n'y avait pas d'entente.
M. JOHNSON: Non, non! A ce moment-là, M. le Président,
cette revue, qui est sérieuse et que j'ai de très bonnes raisons
de croire, l'annonçait définitivement. A tout
événement, c'est un à-côté. C'est le ministre
qui peut nous donner l'assurance que l'article « 1 » décrit
réellement le territoire qu'on veut annexer. Et on comprendra que ce
n'est pas à nous de vérifier ces descriptions. C'est au ministre
de se porter garant de l'exactitude de cette description. Ce n'est pas à
nous.
M. LAPORTE: Voici! Précisément parce que le ministre doit
se porter garant de l'exactitude, j'ai vérifié ce matin dans le
dossier et la loi déclare, comme dans tous les cas d'annexion de
territoire, que c'est le ministère des Terres et Forêts qui nous
envoie la description. Alors la description de la cité de St-Jean, ou
préparée par la cité de St-Jean, a été
envoyée au ministère des Terres et Forêts qui nous l'a
retournée en disant: « Nous avons pris connaissance. » Et
c'est cette description vérifiée qui apparaît maintenant
dans le bill à l'article « 1 ».
M. BEDARD (président du comité plénier): Article 1,
adopté. Article 2: « Description »?
UNE VOIX: Adopté.
M. LE PRESIDENT: Adopté. Article 3?
M. DOZOIS: M. le Président, la ville de St-Luc a-t-elle
accepté cet arrangement d'être remboursée des taxes de 1964
pendant six ans? Est-ce que ça fait partie de sa résolution
acceptant que ses terres soient annexées à St- Jean ?
M. LAPORTE: Voici, je lis le premier paragraphe: « Que ladite
ville de St-Jean rembourse pendant les cinq prochaines années à
la ville de St-Luc, à la commission scolaire de St-Luc et aux syndics
d'église, les taxes que ces derniers auraient perçues sur ledit
territoire, sans cette annexion, à l'évaluation et au taux en
vigueur à la date de l'annexion. »
M. DOZOIS: Mais, M. le Président, le document que vient de lire
le ministre, est-ce la résolution du conseil de ville St-Luc?
M. LAPORTE: Oui! Session spéciale du conseil municipal de la
ville de St-Luc, vendredi le 24e jour du mois d'avril. L'évaluation est
de $12,735. L'imposition est de $1,15, je pense, ce qui représente
évidemment une somme très minime.
M. JOHNSON: Le ministre déposera-t-il une copie de cette
résolution du conseil de St-Luc?
M. LAPORTE: Avec plaisir, dès demain. M. LE PRESIDENT: Article
3?
M. JOHNSON: M. le Président, le ministre pourrait-il nous dire
quand il en a parlé pour la première fois au conseil de
St-Luc?
M. LAPORTE: Disons, approximativement, une semaine à dix jours,
ici dans le parlement.
M. JOHNSON: M. le Président, est-ce que, antérieurement
à cette entrevue du ministre avec des membres du conseil municipal de
St-Luc, il y eut des représentations par le conseil de St-Luc?
M. LAPORTE: Directement auprès des fonctionnaires du
ministère? Oui!
M. JOHNSON: Oui.
M. LAPORTE: La municipalité de St-Luc posait certaines
conditions, et c'est ça que nous avons discuté.
M. JOHNSON: Est-ce que la municipalité de Saint-Luc ne s'opposait
pas, au début, à cette annexion?
M. LAPORTE: Voici; j'ai une résolution que je n'ai pas
apportée parce quelle est antérieure à celle dont il est
question actuellement et qui déclarait que, moyennant certaines
conditions... Il y avait trois conditions de base: que le ministère
donne la garantie qu'une usine s'installerait à cet endroit-là
c'est un fait acquis maintenant; deuxièmement, que les taxes
perçues dans le territoire, avant l'annexion, continueraient
d'être payées pendant cinq années; troisièmement,
que, s'il arrivait qu'une industrie veuille s'installer dans le territoire
voisin de St-Luc, disons à la limite du nouveau territoire de St-Jean et
de St-Luc, que St-Jean soit obligé d'installer les services mais aux
frais de St-Luc, évidemment. A St-Luc on se rend compte que si l'usine
ne s'est pas installée dans son territoire, c'est en bonne partie parce
que la ville n'était pas en mesure de fournir des services parce que le
terrain était trop loin du centre. Alors, St-Luc dit: « Si nous
sommes encore dans la même situation, il faudrait à ce
moment-là que St-Jean installe les services chez nous et nous les fasse
payer. »
Nous avons répondu qu'en vertu de la Loi des cités et
villes on prévoit ces travaux faits en commun. L'explication a
été acceptée par St-Luc et cala apparaît ici dans sa
résolution du 24. Alors, ils sont d'accord sur toute la ligne.
M. JOHNSON: Est-ce que ça prévoit une obligation? Est-ce
que le ministre laisse entendre qu'en vertu des lois actuelles la
municipalité de St-Luc pourrait forcer la municipalité de St-Jean
à fournir les services aux frais de St-Luc?
M. LAPORTE: Non. C'est-à-dire que la Régie des services
publics, d'une part, le ministère de la Santé d'autre part, et la
Régie d'épuration des eaux en troisième lieu ont toute
l'autorité pour faire faire des travaux en commun par deux villes dans
le territoire qui leur est limitrophe. Cela existe actuellement dans trois
endroits différents: le ministère de la Santé pour l'eau,
la Régie des services publics pour les égouts et la Régie
d'épuration des eaux pour les usines d'épuration.
M. JOHNSON: Oui, c'est bien ça, M. le Pré- sident, mais
cela ne règle pas la troisième condition que posait d'abord la
municipalité de St-Luc pour consentir à cette annexion. La
municipalité de St-Luc songe ....
M. LAPORTE: Espère...
M. JOHNSON: ... ou espère développer, au point de vue
industriel, une partie de son territoire, notamment cette partie qui est
contiguë à St-Jean. Et, si j'ai bien compris le rapport que le
ministre vient de nous faire, la municipalité de St-Luc posait comme
troisième condition que St-Jean s'oblige, lorsque telle
éventualité arriverait, à fournir à cette partie du
territoire de St-Luc des services aux frais, évidemment, de St-Luc.
Le ministre aurait répondu à ça: « Eh bien,
les lois actuelles permettent ou prévoient un mécanisme qui, en
somme, apporterait cette solution au problème. »
M. le Président, je ne crois pas que la municipalité de
St-Luc, ayant une occasion, par exemple, d'établir une industrie dans le
territoire contigu à celui dont il est question dans le bill 33,
pourrait forcer à ce moment-là la ville de St-Jean à
fournir des services. Je pense qu'on doit être plus réaliste que
ça et avertir les gens de St-Luc qu'on a commencé à
annexer ces territoires propices à l'industrialisation à la
municipalité de la ville de St-Jean et s'il y avait une autre industrie
qui voulait s'installer là, évidemment qu'on se
prévaudrait de ce même précédent et qu'on
demanderait l'annexion à St-Jean. Les gens de St-Luc sont aussi bien
d'en faire leur deuil, M. le Président.
M. LAPORTE: C'est un vrai beau deuil. Pour 350 emplois et $12,000,000
d'investissement juste à côté de chez eux! Des deuils comme
ça, tous les jours, dans la province de Québec, ça en
prendrait.
M. JOHNSON: C'est drôle, M. le Président, que la
municipalité de St-Jean insiste pour que ce soit dans sa
municipalité.
M. LAPORTE: Pourquoi pas St-Jean? Ils ne sont pas mécontents. Il
faut bien s'entendre.
M. JOHNSON: Non, non, ils ne sont pas choqués du tout!
M. LAPORTE: Ils ne sont pas choqués du tout.
M. JOHNSON: M. le Président, le ministre ne me fera pas croire
qu'une municipalité est
heureuse et que l'autre ne le serait pas d'avoir la même
industrie. On aurait bien pu l'installer à Valleyfield ou à
Scotstown ou le premier ministre a fait une promesse bien formelle.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs.
M. JOHNSON: C'eut été un endroit peut-être
très bien placé. Je regrette M. le Président. C'est le
ministre qui a parlé de cet aspect du problème. C'est lui qui a
vanté le système de Voirie et c'est le député de
St- Jean qui a remercié profusément le premier ministre, le
ministre des Affaires municipales, le ministre de l'Industrie et du
Commerce...
M. LAPORTE: C'est le chef de l'Opposition qui a répondu
déjà une fois. Cela a été compris. Vous avez
répondu déjà une fois. On pourrait peut-être s'en
tenir au bill. Jusqu'ici, sauf mon excursion sur la Voirie qui était
impérieuse, parce que la compagnie insistait, je ne suis pas sorti une
seconde en dehors de mon bill.
M. JOHNSON: M. le Président, je pense que le ministre a raison.
C'est à l'occasion des crédits de l'Industrie et du Commerce que
nous pourrons obtenir des autorités les raisons qui ont motivé le
choix de St-Jean plutôt que le choix de... disons Scotstown...
UNE VOIX: Est-ce vrai?
M. JOHNSON: ... ce qui aurait dégagé le premier ministre,
d'une promesse très formelle qu'il a faite publiquement...
M. LAPORTE: St-Jean est le site idéal pour la compagnie puisqu'il
est situé à mi-chemin entre ses usines de Magog et de
Valleyfield. Cela, c'est une phrase du président... et qu'elle
possède un beau réseau routier,... ça, c'était dans
la phrase aussi.
M. LE PRESIDENT: Article 3 adopté, Article 4 adopté.
Préambule est-ce qu'on le dépose?
M. LAPORTE: Tel que modifié? Modifié tel que
suggéré tout à l'heure.
M. LE PRESIDENT: Alors, on pourrait ajouter un: attendu que toutes les
parties intéressées...
M. JOHNSON: Bien pourquoi ne pas mentionner attendu que le conseil de la
municipalité de St-Luc a consenti.
M. LAPORTE: D'accord.
M. JOHNSON: A exprimé son consentement, à ce
démembrement.
M. LAPORTE: A ce progrès. Voyez-vous M. le Président,
cette municipalité a exprimé son consentement.
M. LE PRESIDENT: Attendu que le Conseil de la municipalité de
St-Luc a apporté son consentement,... D'accord? Alors, ce sera le 3e
attendu.
UNE VOIX: 2 ou 3?
M. LE PRESIDENT: Alors ce sera le 2e, d'accord.
M. DOZOIS: Cela suit immédiatement les mots dans le débat
de la ville de St-Luc. Il. me semble que c'est plus logique.
M. BEDARD (président du comité plénier):
Adopté. M. le Président, le comité a adopté le bill
numéro 33 avec un amendement.
M. HYDE (président): M. Laporte propose que l'amendement soit
maintenant lu et agréé. Cette motion sera-t-elle
adoptée?
UNE VOIX: Adoptée.
M. LE PRESIDENT: Troisième lecture? Prochaine séance. Pour
M. Lesage, M. Hamel propose que Je quitte maintenant le fauteuil et que la
Chambre se forme de nouveau en comité des subsides, cette motion
sera-t-elle adoptée? Adoptée.
Comité des subsides: Travail
M. BEDARD (président du comité des subsides): Alors, nous
en étions au ministère du Travail, article 1, sous-article 5:
« Bureaux des mécaniciens de machines fixes ».
M. BELLEMARE: Il avait été entendu, je crois, avec le
ministre du Travail que nous pourrions jeter juste un coup d'oeil très
rapide sur les bureaux de placement. Le chef de l'Opposition aurait quelques
questions à poser concernant ces bureaux. Je pense que le ministre nous
avait laissé un espoir qu'il serait possible, dans un climat très
serein, de poser ces quelques questions et je pense que le chef de
l'Opposition...
M. LE PRESIDENT: Si c'est dans un climat très serein, je n'ai pas
d'objection.
M. BELLEMARE: En autant que le procureur général ne s'en
mêlera pas!
M. FORTIN: Si j'ai compris: le chef de l'Opposition avait
été distrait, par la partie de hockey probablement; il est
arrivé en retard. Alors, je n'ai pas d'objection à ce qu'il pose
des questions sur l'item 4.
M. JOHNSON: M. le Président, je remercie le ministre et ça
va simplifier beaucoup le problème. Je voudrais savoir si, en pratique,
ce sont les bureaux de placement et leurs officiers qui s'occupent de diriger
la main-d'oeuvre nécessaire sur les chantiers de l'Hydro-Québec,
particulièrement à Manicouagan?
Le ministre des Richesses naturelles a déjà
déclaré, dans cette Chambre, que les demandes devaient passer par
le bureau de placement. Or, il est de connaissance publique, dans tous les
comtés, que les députés libéraux écrivent
des lettres de recommandation pour soutenir la demande d'emploi de X, Y, Z, qui
veut offrir ses services pour les travaux considérables sur la
Côte-Nord.
Et nous avons des plaintes. J'en ai eu personnellement de gens qui
prétendent qu'il n'y a pas moyen d'aller travailler sur les chantiers de
l'Hydro, même si on a son nom au bureau de placement provincial, sans
avoir une lettre de recommandation du député ou du
député battu, du « patroneux ». Je voudrais savoir du
ministre si ces bureaux de placement conduisent réellement la barque ou
si c'est encore le système de députés et de «
patroneux »?
M. FORTIN: M. le Président, depuis 1960, ce
système-là a été aboli...
UNE VOIX: Ah! Ah!
M. FORTIN: Bien! Vous me demandez de répondre à la
question.
M. BERTRAND (Missisquoi): Vous êtes grandement naïf,
grandement naïf!
M. FORTIN: Voici: les bureaux de placement des comtés ont
reçu instruction de diriger au bureau de placement provincial de
Montréal toutes les demandes qu'ils reçoivent afin d'avoir de
l'uniformité. Et c'est le bureau de placement de Montréal qui
recueille toutes les demandes à travers la province et qui dirige vers
les chantiers de manicouagan les gens qui font des demandes. Maintenant, je
peux vous dire que jamais des instructions ont été données
aux bureaux de placement provinciaux, soit les bureaux locaux soit le bureau
provincial de Montréal, de n'accepter que des gens qui ont des lettres
de recommandation de députés de quelque couleur politique qu'ils
soient. A mesure que les demandes arrivent, nous nous efforçons de les
distribuer le plus équitablement possible. Il y a eu certain pourcentage
d'établi: nous donnons une préférence, suivant un certain
pourcentage que je ne pourrais pas donner exactement de mémoire, pour la
Côte-Nord et la Gaspésie et nous nous efforçons
d'encourager les régions les plus affectées par le
chômage.
M. JOHNSON: M. le Président, le ministre ne s'attend pas,
j'espère que nous ajoutions foi à cet énoncé un peu
général: depuis 1960, le système de recommandations par
les députés a été aboli. Et je pense bien qu'il ne
mettra pas son siège en jeu pour une pareille affirmation, M. le
Président...
M. BERTRAND (Missisquoi): Il perdrait vite.
M. JOHNSON: Le ministre nous dit aussi et c'est assez habile de sapart:
«Jamais d'instructions n'ont été données aux bureaux
de placement de donner préférence à ceux qui ont une carte
du député ou une lettre de recommandation du député
ou du « patroneux ». » J'espère, M. le
Président, que le ministre n'ira pas jusqu'à donner des
instructions pareilles. Il faut tout de même qu'il puisse se garder un
manteau extérieur de vertu, le mot est un peu fort! Vu
qu'il y a des libéraux, M. le Président, le mot « vertu
», ça jure.
Le ministre ne donnera pas de pareilles instructions, je crois, et ce
n'est pas nécessaire, parce que, dès leur arrivée au
pouvoir, ils se sont assurés que les employés-clés dans
les bureaux de placement soient des gens de la Fédération
libérale. Et comme ce ne sont pas de parfaits imbéciles, eh bien!
ces gens-là, tout naturellement, appliquent systématiquement le
principe déjà annoncé par l'ancien ministre du Travail,
alors qu'il dirigeait ce ministère: à compétence
suffisante, préférence aux amis, aux libéraux; à
compétence suffisante,...
M. BELLEMARE: Aux rouges, aux rouges.
M. JOHNSON: Alors, les employés qui sont actuellement sous la
juridiction du député de Sherbrooke ont été mal
formés. J'avertis le ministre. Ils ont été formés
du temps du député de
St-Maurice qui prêchait dans cette Chambre ce principe, le grand
principe social, de justice sociale du ministre du Travail du temps...
M. BELLEMARE: Il a appris ça...
M. JOHNSON: Il a appris ça sans doute dans ses études
post-universitaires à Louvain.
M. BELLEMARE: Louvain!
M. JOHNSON: M. le Président...
M. FORTIN: La question que le chef de l'Opposition me pose...
M. JOHNSON: Disons que je fais quelques affirmations.
M. FORTIN: C'est le préambule, je comprends.
M. JOHNSON: Et les affirmations que je viens de faire, moi, je suis
prêt à les appuyer même par l'enjeu de mon siège, M.
le Président. Deuxièmement, la question je la pose...
M. FORTIN: J'aimerais mieux que vous me donniez des faits plus
précis, parce que votre siège, ça va prendre plus de
temps.
M. JOHNSON: Ah, mais voici, M. le Président, De tous les
députés qui étaient en Chambre dans le temps,
c'était M. Brousseau qui était le député de
Sherbrooke...
M. FORTIN: Non, non, mais vous parlez...
M. JOHNSON: On a longtemps entendu le ministre du Travail dans cette
Chambre, et je pense que le ministre a récidivé même, en
d'autres circonstances. J'ai deux question à poser au ministre. La
première: Est-ce qu'il l'applique lui, ou est-ce qu'il partage l'opinion
exprimée par le ministre, son prédécesseur, le
député de St-Maurice, quand il disait: « à
compétence suffisante, non pas égale, mais suffisante,
préférence aux libéraux, à ceux qui nous ont
aidés à gagner les élections »
M. HAMEL (St-Maurice): Aux vétérans.
M. JOHNSON: Aux vétérans à part de ça, M. le
Président, il y avait un ordre de priorité. Plus c'était
un vieux rouge, plus le rouge était racé, avait de bonnes racines
libérales, et plus il avait évidemment de chance d'entrer. Cela
s'appelle un ordre de priorité.
Là, si le ministre me répond oui qu'il applique ce
principe, je vais lui poser en sous-question, la suivante: comment va-t-il
maintenant établir ces priorités entre les rouges
fédéraux et les rouges provinciaux? Ça va être
joliment embêtant. Il va falloir faire étudier ça par une
commission, des sociologues de Laval, pour savoir comment on pourrait
établir les priorités entre ceux qui font partie de l'Association
libérale provinciale et ceux qui font partie de l'Association
libérale fédérale, et, dans un deuxième ordre,
partie de l'Association qui serait, comme dirait le premier ministre,
affiliée aux deux fédérations, à la
fédérale et à la provinciale. Cela, c'est bien
mêlé.
Je sais que ça prendrait une commission pour règler
ça. Je ne m'attends pas à une réponse définitive
cet après-midi, mais je voudrais savoir du ministre, quelles sont les
priorités, si priorités il y a, pour l'emploi. Le ministre a dit:
on tâche de répartir l'emploi dans une certaine proportion sur la
Côte-Nord. M. le Président, je veux demander au ministre si les
responsables des bureaux de placement ont des instructions établissant
des priorités pour ceux dont les prestations d'assurance-chômage
sont expirées, pour ceux qui sont en chômage depuis plus longtemps
que les autres, indistinctement de leur couleur, de leur appartenance, et de
leurs innées de service?
M. FORTIN: Comme la dernière question du chef de l'Opposition
semble un peu sérieuse, je vais lui répondre
immédiatement. Les seules instructions, ou les seules directives que
nous avons données à nos bureaux de placement sont les suivantes:
c'est qu'ils doivent donner la préférence aux chômeurs qui
reçoivent de l'assistance-chômage. Alors à ceux qui ont
déjà de l'assurance-chômage, qui reçoivent
déjà un montant de subsistance, demandons de leur donner la
préférence. A ce sujet, je dois dire que nous avons établi
une collaboration entre le ministère de la Famille et du Bien-Etre
social, c'est-à-dire les bureaux de ce ministère qui existent
dans les différents comtés, avec les bureaux de placements
provinciaux pour donner la préférence à ces
personnes-là, et ce sont les seules directives qui ont été
données.
Maintenant, le chef de l'Opposition dit que nous avons ni plus ni moins
donné le contrôle des bureaux de placement à des membres de
la Fédération libérale. Je lui dirai qu'un employé
qui a été à l'emploi du chef de l'Opposition d'une
façon assez particulière pendant que son parti était au
pouvoir travaille dans un bureau de placement du gouvernement, qu'il a eu
dernièrement une promotion et même une
augmentation de salaire suivant mes recommandations, à la suite
des rapports qui m'avaient été faits, parce que c'est un bon
employé.
M. JOHNSON: Est-ce que c'était M. Morin?
M. FORTIN: Ah, je préfère ne pas donner de nom, mais je
crois que le chef de l'Opposition le connaît très bien et c'est
pour dire que les hommes qui sont compétents et qui sont loyaux envers
la province, nous savons le reconnaître.
M. Bergeron qui est en charge des placements à Montréal,
ça fait des années qu'il est là et il est encore
là; c'est le même.
M. JOHNSON: M. le Président, le ministre répond par un
argument « ad hominem », celui d'un ancien employé du chef
de l'Opposition, alors qu'il était ministre. C'est exact. Mais le
ministre n'a pas les renseignements complets.
M. Morin dont il s'agit était à mon emploi et je
considérais qu'il était couvert par cette tradition de position
protégée; les employés personnels d'un ministre, on le
sait, lorsqu'il y a un changement de gouvernement, ont le choix de rester
à l'emploi du gouvernement au même salaire et de ne pas
être, évidemment, mis à pied parce qu'ils ont fait de la
politique; ils étaient nécessairement attachés au service
personnel, au bureau personnel du ministre.
Ce fut le cas de M. Morin et on l'a placé à ce
moment-là, grâce à M. Larue, au bureau d'emploi à
St-Hyacinthe. Mais tout de suite, quelques mois après, on a
transféré M. Morin à Montréal, ce qui rendait
évidemment son salaire beaucoup moins intéressant parce qu'il
devait voyager de Montréal à St-Pie ou encore demeurer à
Montréal et y pensionner. J'ai vainement tenté, auprès du
prédécesseur du ministre du Travail actuel, d'obtenir un
redressement de la situation. J'ai vainement tenté d'obtenir soit une
augmentation de salaire, soit une nouvelle assignation à
St-Hyacinthe.
Je suis très heureux d'apprendre qu'on lui a accordé une
augmentation de salaire récemment et ce n'est que justice et
j'espère qu'elle est suffisante pour couvrir les trois années et
demie pendant lesquelles M. Morin n'a pas été traité
équitablement, selon la tradition qui veut que les employés
personnels d'un ministre restent à l'emploi aux mêmes conditions
et au même salaire.
M. le Président, le ministre me dira peut-être... Quel est
le montant de cette augmentation?
M. FORTIN: Je tiens à dire que je ne sais pas si la tradition
autorisait ou couvrait la reclassification mais, à tout
événement, il a été reclassifié et parce que
les rapports que nous avons eus voulaient qu'il accomplit très bien son
travail, il est passé de $2,700 à $3,800.
M. JOHNSON: Bravo! Je suis très heureux, M. le Président.
Cela prouve que j'avais des bons hommes à mon emploi, qui sont capables
de servir loyalement un autre gouvernement. C'est de même que je
conçois, moi, le fonctionnatisme. Le ministre...
M. FORTIN: Je vois que le chef de l'Opposition partage les remarques que
j'ai faites aux employés au mois de janvier?
M. JOHNSON: La loyauté, il n'y a pas d'erreur. Pourvu que
ça soit loyauté non pas à un parti, mais loyauté
à l'administration, qu'elle soit dirigée par un parti ou par
l'autre.
M. le Président, le ministre, et je l'en remercie, nous a fait
part de certaines instructions quant aux priorités en faveur de ceux qui
ont le plus besoin de travailler. Le ministre a-t-il un rapport de
l'efficacité de cette mesure? Est-ce qu'il a des chiffres pour indiquer
quelle proportion des gens placés par les bureaux de placement
provinciaux sont des gens qui bénéficiaient d'une priorité
due à leur condition?
M. FORTIN: Je n'ai pas de statistiques au point pour vous dire
exactement combien de gens ont été placés. Je pourrais
bien les fournir au chef de l'Opposition. Ce sont des rapports qui nous
parviennent mensuellement; mais, je crois que la compilation n'a pas
été faite.
M. JOHNSON: Le ministre devrait, à mon sens, c'est une
suggestion que je lui fais respectueusement, prévoir dans son
rapport annuel un chapitre, ou quelques paragraphes, ou quelques tableaux qui
rendraient compte de l'efficacité de ces instructions.
M. FORTIN: Je m'excuse. Dans le rapport du ministère du Travail
en 1963, à la page 133, vous verrez que nous avons eu 128,465 demandes,
et que nous en avons référées 63,352 et nous avons fait
59,413 placements. Il y a eu 80,465 renouvellements. Le chef de l'Opposition
aura toutes les réponses dans le rapport du ministère pour 1963,
à la page 133.
M. JOHNSON: Mais, est-ce qu'on donne le nombre de gens qui ont
été l'objet d'une préférence à cause de leur
situation, à cause de leur
situation sociale, à cause du manque de prestation à
l'assurance chômage, ou à cause de leur condition
d'assistés?
M. FORTIN: Pas dans ce rapport, pas dans le rapport de 1963.
M. JOHNSON: Ma suggestion c'est qu'on le fasse pour les années
à venir.
M. FORTIN: Bien, on peut faire faire des relevés les publier dans
le bulletin mensuel du ministère du Travail. Les membres de la Chambre
ont remarqué que, cette année, le rapport du ministère du
Travail est moins volumineux que par les années passées. C'est
parce que nous avons amélioré le bulletin mensuel imprimé
par le ministère du Travail, et nous avons ajouté dans ce
bulletin mensuel plusieurs renseignements qui, auparavant, étaient
compilés et résumés dans le rapport annuel.
Or, nous donnons à chaque mois, dans ce bulletin, des
informations précises et détaillées qui sont actuellement
au service de tous ceux qui s'intéressent aux relations industrielles.
Maintenant, nous pourrons peut-être dans ce bulletin mensuel, je
verrai le directeur du service, publier les renseignements que le chef
de l'Opposition désire, ou encore, peut-être l'an prochain, les
inclure dans le rapport annuel.
M. JOHNSON: Le ministre voudrait-il nous dire l'état des
relations entre les bureaux de placement provinciaux et les bureaux de
placement du fédéral?
M. FORTIN: Je n'ai pas de rapport précis à ce
sujet-là. Je crois que dans certains endroits lorsque, par exemple, des
demandes d'emploi sont faites et que nous n'avons pas de candidats, nous
communiquons avec le bureau fédéral pour savoir s'ils ont des
candidats, ou vice et versa; mais tout ce que je peux dire, c'est
qu'actuellement je n'ai pas de rapport, ou je n'ai pas entendu parler de
mésentente entre les deux services.
M. JOHNSON: Y a-t-il des comités qui s'occupent de coordonner le
travail du bureau fédéral et le travail du bureau provincial de
placement dans une région déterminée, ou à
l'échelle provinciale, afin de planifier an peu mieux ce problème
de l'emploi?
M. FORTIN: Non! Pas à ma connaissance, pas actuellement. Il n'y a
pas de pareils comités.
M. JOHNSON: M. le Président, le ministre me permettra d'attirer
son attention sur cet aspect du problème. Actuellement le
fédéral qui a juridiction sur l'assurance-chômage et qui
s'occupe du placement par son bureau national de placement, le
fédéral doit avoir et a certainement certaines priorités,
certaines réglementations. Par ailleurs, le provincial a aussi un
début de priorité, et c'est bien maigre.
J'espère que ça va s'étoffer très
rapidement; et on se ramasse devant deux organismes qui ne semblent pas
coopérer ensemble. Je sais que ce n'est pas facile, mais je crois que le
temps est venu pour la province de prendre toutes ses responsabilités,
ou au moins l'initiative de toutes les solutions dans le domaine de
l'emploi.
Le plein emploi, M. le Président, c'est l'ambition, ou ça
doit être le but de toute administration provinciale, de toute
administration fédérale. Mais dans, le cas qui nous
préoccupe, celui de la province de Québec, j'ai
suggéré déjà, je n'y reviens pas longuement,
que c'est la province qui devrait dresser des plans complets, qui
devrait assumer complètement la planification en vue du plein emploi,
quitte à faire prester par Ottawa et ses organismes ce qu'Ottawa est
autorisé à faire en vertu de la constitution, ou en vertu des
plans conjoints ou des plans à frais partagés.
En somme il faut une autorité qui prend sur elle de s'attaquer
d'une façon efficace à ce problème du plein emploi. On
s'entend, le plein emploi n'est pas nécessairement l'emploi à
100%, 12 mois par année. Le plein emploi a déjà
reçu, dans le milieu des sociologues et des économistes, un sens
bien déterminé, c'est l'emploi, disons pour les fins de la
discussion ici, l'emploi à 98% ou 98.2%. On considérerait que le
chômage à 1.8% ça ne serait pas une plaie, ça ne
serait même pas une maladie, puisqu'il y a tellement de ces gens qui,
entre deux emplois, ou à l'occasion du mariage, ou à l'occasion
d'un événement familial, vont naturellement et volontairement en
chômage.
Mais parlant du plein emploi, il faut absolument, à mon sens que,
soit le fédéral soit le provincial se mette dans la tête
qu'il doit prendre l'initiative. Or, est-il nécessaire que je vous le
dise? Je considère que c'est le provincial qui, dans l'Etat du
Québec, devrait prendre cette initiative, quitte à faire marcher,
à faire coopérer le fédéral. Je ne veux pas entrer
sur le terrain du fédéralisme coopératif, mais s'il doit y
avoir coopération entre le fédéral et le provincial, comme
je crois qu'il doit y en avoir dans plusieurs domaines, l'initiative cependant
des plans, des normes et des plans d'exécution, doit être prise
par Québec, quitte
à faire entrer les organismes d'Ottawa dans le jeu, quitte
à utiliser au maximum la juridiction fédérale lorsque le
fédéral, évidemment, reste dans les limites de sa
juridiction.
De toute façon, nous allons très rapidement vers une
centralisation qui m'inquiète dans de domaine-là. La carte,
et j'en parle, M. le Président, parce qu'elle est actuellement
recommandée sous l'aspect de l'assurance-chômage et d'emploi.
La carte d'assurance sociale qu'Ottawa essaie de faire signer par tous
les employés de cette province et même des personnes qui sont
à leur propre compte est une initiative d'Ottawa, qui sera
dirigée par Ottawa, qui a été pensée par Ottawa et
qui, petit à petit, va amener vers Ottawa tout le secteur du plein
emploi, tout ce secteur de la juridiction provinciale. Nous serons encore une
fois à la merci et à la remorque d'Ottawa.
Je ne sais pas si le ministre a consenti à ce que la province
entre dans ce jeu. Le premier ministre a déclaré dans cette
Chambre: « Nous sommes actuellement à étudier le
problème' » Le premier ministre a déclaré: «
Evidemment, plusieurs verraient de grands avantages à ce que nous ayons
le même numéro pour le même citoyen, qu'Ottawa et
Québec aient le même numéro et même les
municipalités. »
M. le Président, le premier ministre n'a pas voulu dire si oui ou
non on avait consenti à coopérer avec Ottawa dans ce domaine.
J'ai de bonnes raisons de croire que le gouvernement actuel a consenti, soit
formellement soit par certains gestes de certains ministres. Il semble
qu'à Ottawa on se réjouisse que Québec collabore à
l'instauration de cette carte d'assurance sociale qui consiste, comme on le
sait, à donner un numéro à chacun des citoyens, à
chacun des employés ou chacune des personnes à son propre
emploi.
On a inauguré ce système à Ottawa et on en fait la
publicité sous l'angle de l'assurance-chômage. Les gens
comprennent naturellement qu'il s'agit, en l'occurrence, de leur être
plus efficacement utile quand il s'agit de trouver un nouvel emploi. Mais je
crois que ça va plus loin que ça. D'abord on n'aurait pas du
laisser Ottawa prendre le monopole de cette expression « carte
d'assurance sociale » alors que l'assurence sociale est d'abord une
compétence provinciale. Deuxièmement, selon le secrétaire
de l'Association des compagnies de crédit du Canada, un M. Bowlid,
je crois, le nom exact m'échappe il serait dans les plans
d'Ottawa de faire de cette carte le premier point d'un programme qui conduirait
à l'enregistrement même des naissances.
Petit à petit, si nous n'endiguons pas tout de suite ce petit
ruisseau qui commence, petit à petit, Ottawa, par le truchement de cette
carte d'assurance sociale, va prendre le contrôle complet de tout le
domaine de l'assurance sociale, de sa naissance d'un enfant jusqu'à la
mort ou à son enterrement ou à sa crémation selon le
cas.
M. le Président, c'est le temps d'attirer l'attention du ministre
sur cet aspect du problème et j'espère qu'il nous donnera
l'état de la question tel qu'il le connaît actuellement.
M. FORTIN: M. le Président, en ce qui concerne les bureaux de
placement, on comprendra qu'actuellement les bureaux de placement
fédéraux travaillent étroitement avec les bureaux
d'assurance-chômage. Ce sont les mêmes bureaux, les mêmes
officiers.
Evidemment, dès qu'une personne est en chômage, elle se
rend immédiatement au bureau d'assurance-chômage
fédéral pour s'enregistrer, retirer ses prestations et
sur-le-champ ce bureau s'efforce de lui trouver un emploi afin de diminuer les
retraits sur la caisse d'assurance-chômage fédérale. Alors,
sur ce point-là on comprendra que les bureaux provinciaux de placement
sont, je pourrais dire, un peu dans un état d'infériorité.
Le travailleur qui est en chômage, sa première réaction,
je parle de celui qui reçoit de l'assurance-chômage,
c'est de se rendre immédiatement au bureau fédéral de
placement.
Mais, en ce qui concerne les personnes qui n'ont pas
d'assurance-chômage, bien, je dois dire que plusieurs viennent à
nos bureaux provinciaux et je soulignerai que la province de Québec est
la seule province de tout le Canada qui a conservé des bureaux
provinciaux de placement. Nous sommes les seuls. Nous avons en plus des
officiers de liaison, des solliciteurs si vous voulez, qui sont en contact
assez régulier avec les employeurs pour rechercher de l'emploi pour les
chômeurs. Nous avons des officiers de placement qui font le tour des
usines et qui s'efforcent de placer les personnes qui viennent dans nos bureaux
demander de l'emploi.
En ce qui concerne la carte d'assurance sociale, bien, le chef de
l'Opposition, je crois, lui a donné des conséquences pas mal
étendues. Je ne crois pas que le fait, pour le gouvernement
fédéral, d'instaurer une carte d'assurance sociale et commencer
à enregistrer des chômeurs signifie que tout l'Acte de
l'Amérique du Nord britannique va être annulé et que, par
le fait même, Ottawa aura le droit de venir dans tous les champs de
juridiction provinciale.
Une chose certaine c'est qu'à l'heure actuelle, nous sommes
à étudier de quelle manière les
services du gouvernement provincial peuvent être affectés
par cette carte. Ceci est à l'étude. Mais, pour l'instant, je ne
crois pas que ceci puisse affecter d'une façon quelconque la juridiction
provinciale dans les domaines que nous occupons à l'heure actuelle.
M. JOHNSON: M. le Président, ce n'est pas bien rassurant
d'entendre le ministre dire qu'il. ne voit pas comment l'instauration par
Ottawa de cette carte d'assurance sociale pourrait affecter les
compétences provinciales. C'est toujours la même chose avec
Ottawa. D'abord, Ottawa n'a même pas besoin du prétexte d'une
carte pour s'immiscer dans nos affaires. On l'a vu récemment. Je ne veux
pas ouvrir un débat sur ces questions, nous aurons l'occasion d'en
reparler. Quant àl'assurance-chômage, on avait voté une
loi, ici, en 1937 ou 1938, une loi qui n'a pas été
proclamée durant le premier régime de l'Union nationale. Ensuite,
en 1940 ou 1941, M. Godbout, sur simple lettre a consenti à un
amendement à l'Acte de l'Amérique du Nord britannique
transférant la juridiction à Ottawa en matière
d'assurance-chômage. Il n'y a pas eu d'arrêté
ministériel ni consentement de la Législature, évidemment.
Cela avait été dénoncé, dans le temps.
Maintenant, Ottawa est entré dans ce domaine. Québec est
la seule province, comme le dit le ministre, qui a maintenu ses bureaux de
placement. Avec raison. Tout le monde va comprendre que la province de
Terre-Neuve, par exemple, ou l'Ile-du-Prince-Edouard, la Nouvelle-Ecosse, le
Nouveau-Brunswick, l'Ontario et toutes les autres provinces du Canada, sauf
Québec n'ont pas un intérêt tellement aigu à
maintenir un bureau de placement.
D'abord, quand on est une petite province comme l'Ile-du-Prince-Edouard,
qu'est-ce que ça donne d'établir un système provincial
à côté! Du moment qu'on a des bureaux régionaux,
même s'ils sont financés par Ottawa, même si la
règlementation vient complètement d'Ottawa, ces
provinces-là n'ont pas d'intérêt à maintenir un
système séparé. Deuxièmement, au contraire, dans
notre monde moderne, les Canadiens des autres provinces que Québec ont
intérêt à ce qu'il y ait une politique nationale. Et on
comprend pourquoi: pour permettre précisément un plus grand
marché de travail. C'est l'intérêt de l'ouvrier
spécialisé ou non, ou du professionnel ou du technicien, de
Sydney au Cap-Breton, de pouvoir aller travailler, si le coeur lui en dit,
à Victoria ou à Vancouver. Il a intérêt à ce
que les standards soient les mêmes. Il a intérêt à ce
que les bureaux soient les mêmes. Mais quand il s'agit de la province de
Québec, ça ne marche plus.
L'ouvrier de Ste-Christine ou de Bagot ne se sentirait pas à
l'aise d'aller travailler à Victoria, ni à Sydney. Il est
forcément, à cause de notre langue et de notre culture,
limité dans la liberté, dans ce grand marché du travail,
à moins d'être parfaitement bilingue, et encore!
Alors, à cause précisément de notre
mentalité, de notre culture et de notre langue, il nous faut absolument
donner à l'Etat du Québec, maintenir à la province de
Québec cette juridiction. Mais il faut qu'elle soit efficace. Et, pour
être efficace, il faut que nous en ayons l'initiative. Il faut que nous
ne soyons pas toujours à la remorque d'Ottawa quand il s'agit même
de l'établissement des zones de détresse et de tout ce que l'on
veut.
On comprendra le sens d'un article que je considérais, moi, le
plus important de tous dans un programme politique que j'ai eu l'honneur de
présenter à la population, en novembre 1962: « Dans tous
les domaines, faire les plans pour le développement de la province de
Québec, quitte à obtenir du pouvoir fédéral qu'il
s'acquitte des obligations auxquelles il est obligé en vertu de la
constitution. »
Je ne sais pas si je fais saisir au ministre l'importance qu'il y a pour
lui, non seulement de garder ces bureaux de placement, mais l'importance qu'il
y a de les rendre efficaces, de les rendre le plus efficaces possible. J'aurais
aimé entendre le ministre nous dire: « Nous avons un plan
préparé en vue d'instaurer le plus rapidement possible le plein
emploi. Nous avons un plan d'ensemble qui nous permet d'espérer que,
d'ici peu de temps, nous atteindrons le plein emploi ou presque, un plan qui
comprendrait, par exemple, la prestation par le fédéral de
certaines des obligations qu'il doit remplir en vertu de sa juridiction ou de
sa compétence, comme on le voudra. »
J'aurais aimé entendre le ministre nous donner espoir qu'il y a
de la vigueur dans son département et qu'on est très conscient du
danger que représente cette nouvelle intrusion d'Ottawa via cette carte
d'assurance sociale dont l'importance ne peut être minimisée. Ce
n'est pas moi qui soulève des mythes, c'est le secrétaire de
l'Association des compagnies de crédits du Canada qui a fait une
déclaration à cet effet-là, la semaine dernière ou
il y a deux semaines.
Avec regret, je constate que le ministre, lui, n'est pas du tout
alarmé. La première condition pour le règlement d'un
problème, c'est d'être conscient de sa gravité. Le ministre
n'a pas l'air conscient de cette gravité.
M. FORTIN: M. le Président, le chef de
l'Opposition semble sous l'impression que le seul fait d'avoir des
bureaux de placement bien organisés, avec du bon personnel,
qu'automatiquement ça va règler le problème du
chômage. Ce n'est pas du tout d'avoir des bons bureaux de placement, mais
encore faut-il qu'il y ait de l'ouvrage et pour qu'il y ait de l'emploi, eh
bien, il faut que l'industrie soit prospère et ne relève pas
exclusivement du ministère du Travail.
Le plein emploi dans la province de Québec, comme je le disais
l'autre jour, c'est une responsabilité des municipalités, c'est
une responsabilité du gouvernement provincial, c'est également
une responsabilité du gouvernement fédéral et on ne peut
pas, dans ce domaine, établir de cloisons étanches. Le
ministère du Travail, c'est un ministère de service et nos
bureaux de placement sont là pour déceler les emplois qui peuvent
exister et pour placer les chômeurs. Mais encore une fois, notre service
sera efficace en autant qu'il y a de l'emploi. Evidemment la promotion
industrielle relève du ministère de l'Industrie et du Commerce
et, à ce sujet-là, lorsqu'on étudiera les crédits
du ministère de l'Industrie et du Commerce, on pourra poser les
questions que l'on voudra à mon collègue; mais en ce qui nous
concerne, je crois que les bureaux de placement provinciaux sont
organisés à l'heure actuelle de façon telle qu'ils rendent
un bon service et qu'ils aident énormément à placer les
chômeurs.
Maintenant, le chef de l'Opposition dit que nous ne sommes pas
alarmés par le gouvernement fédéral qui établit une
carte d'assurance sociale. Eh bien, il y a une chose qu'il ne faut pas oublier,
c'est qu'en matière du travail il y a juridiction concurrente du
fédéral et du provincial. Nous ne pouvons certainement pas,
malgré toutes les protestations que nous pourrions faire, empêcher
le gouvernement fédéral d'établir une carte d'assurance de
sécurité sociale, en ce qui concerne le chômage.
Le chef de l'Opposition dit: « Oui, mais ils commencent par
là, puis ils vont aller plus loin. » Bien, vous faites
évidemment un procès d'intention. S'ils mettent le pied dans nos
plates-bandes, nous saurons en temps et lieu, nous opposer comme il se doit.
Mais pour l'instant, est-ce que, au point de vue constitutionnel, est-ce qu'au
point de vue administratif, la province de Québec pourrait dire au
gouvernement fédéral: « Vous n'avez pas le droit
d'établir cette carte dans la province de Québec. »
M. JOHNSON: Elle n'est pas obligatoire. M. FORTIN: Bon, alors,
même si elle n'est pas obligatoire, est-ce qu'on peut les empêcher,
est-ce qu'on peut protester, est-ce qu'on peut dire: « Vous n'avez pas le
droit de faire ça, » et dire aux citoyens de la province de
Québec: « Ne signez pas cette carte-là! »
M. JOHNSON: Est-ce que les employés civils vont être
obligés de remplir des demandes nécessaires?
M. FORTIN: Ah, je ne pourrais pas vous répondre là-dessus.
Je n'ai pas....
M. BELLEMARE: Est-ce qu'on vous avait pressenti lors de la
conférence des ministres du Travail?
M. FORTIN: Il n'en a pas été question du tout lors de la
conférence fédérale-provinciale des ministres du Travail.
Nous n'avons pas été concultés sur ça et, en ce qui
concerne le ministère du Travail, nous n'avons jamais été
consultés; on ne nous a jamais demandé si on était
prêts ou non. J'ai appris l'existence de cette carte comme tout le monde
lorsque le fédéral l'a annoncée, ce qui démontre,
à mon avis, que le fédéral n'avait pas à nous
consulter parce que ceci relève de sa juridiction. Il a bien le droit,
le fédéral, d'imposer cette carte pour contrôler ses
bureaux d'assurance-chômage. C'est une question d'administration.
Maintenant...
M. JOHNSON: Oui, le ministre là,... Je ne sais pas si le ministre
a une faille de mémoire, mais Ottawa n'a jamais dit, dans sa
publicité, que c'était uniquement pour
l'assurance-chômage...
M. FORTIN: Non, non, pas pour l'Instant.
M. JOHNSON: Le ministre sait- il, par exemple, qu'on a l'intention,
à Ottawa, de s'en servir pour le contrôle de
l'assurance-hospitalisation, pour l'identification des gens à travers
tout le Canada? Le ministre de la Santé a dû avertir le ministre
du Travail. Je suis certain que le ministre de la Santé sera très
heureux de nous expliquer que, lui, il a refusé au gouvernement
fédéral de s'immiscer dans ce domaine-là. Non, je pense
que le ministre ne saisit pas toute la portée, ou en tout cas, il est
bien assez habile pour tâcher d'enterrer un problème, ne pas
contribuer à le faire naître. Ottawa établit cette
carte-là et publie des annonces en mentionnant
l'assurance-chômage, c'est vrai; mais Ottawa, même dans sa
publicité, ne restreint pas l'usage de cette carte à
l'assurance-chômage. D'ail-
leurs, Ottawa n'a pas besoin de cette carte pour
l'assurance-chômage. Ottawa a déjà ces
renseignements-là pour l'assurance-chômage.
C'est donc pour d'autres fins, et les autres fins? C'est une
coordination quant au problème de l'identification dans
l'assurance-santé; un peu plus tard, on s'en servira pour les pensions,
oui, le plan de retraite: « Uniform Canada Pension Plan », comme
dirait M. Pearson, malgré les protestations du premier ministre de
Québec. Et Ottawa, avec cette carte, doit finir par exiger, quand la
plupart des gens l'auront signée, exiger que tout le monde la signe;
elle deviendra obligatoire, et à ce moment-là, Ottawa sera mieux
outillé que nous pour règler efficacement certains
problèmes, fournir certaines statistiques; et comme on vit dans une
période où la sacro-sainte efficacité semble être la
seule règle qui guide certains hommes politiques, même certains
ministres, eh bien nous finirons par être encore faibles devant Ottawa,
et je crois que c'est mauvais.
En tout cas, je n'insiste pas davantage, je ne veux pas que le ministre
se choque malgré lui. Je ne veux pas que le ministre nous fasse des
déclarations qu'il ne trouve pas à-propos de faire aujourd'hui,
mais je me déclare très insatisfait du vague de ses
réponses.
M. FORTIN: M. le Président, tout ce que je peux dire au chef de
l'Opposition, c'est qu'Ottawa n'a pas consulté le ministère du
Travail avant d'établir cette carte, après l'avoir
établie, et que nous n'avons jamais reçu aucune communication
à ce sujet.
M. JOHNSON: Merci.
M. BELLEMARE: M. le Président, allez-vous faire rapport à
l'Orateur? Nous n'avons pas quorum d'après le règlement.
M. LE PRESIDENT: Comme il s'agissait d'un article qui était
déjà adopté, j'ai pensé que c'était un
à-côté de l'étude.
M. BELLEMARE: Alors, M. le Président, nous continuons
d'être à côté, et du règlement et de la
question, et je saisis l'occasion de parler des bureaux de placement, puisque
c'est là que s'adressent la plupart des jeunes qui veulent entrer sur le
marché du travail pour obtenir un emploi. Je saisis l'occasion pour dire
à l'honorable ministre que c'est malheureux ce nombre des jeunes qui,
malgré certains avertissements, certaines requêtes qui ont
été faites en haut lieu, entrent très jeunes, à 14,
15, 16 ans sur le marché du travail.
Je n'ai pas besoin de vous dire que je reviens encore cette année
à la charge pour dire au ministre du Travail combien il est douloureux
de voir entrer sur le marché du travail un nombre aussi
considérable de jeunes, à tous les ans, avant l'âge de 16
ans. Le rapport de la Commission du salaire minimum nous dit que, l'an
passé, il y a eu 4,290 requêtes de cas spéciaux de 14
à 16 ans qui ont demandé du travail. Il y a eu sur ça
3,600 qui relevaient directement de la Commission du salaire minimum; il y en
avait 531 qui s'appuyaient sur l'application de certains décrets, il y
en avait 99 autres dans le domaine agricole ou sous d'autres juridictions.
Mais, M. le Président, voici un fait: 4,290 jeunes, filles ou
garçons, ont demandé un permis pour entrer à cet âge
sur le marché du travail. L'an passé, la J.O.C., à
l'occasion de la Fête du travail, disait ceci: « La voix de la
jeunesse ouvrière et travailleuse veut se faire entendre, et les 500,000
jeunes travailleurs et travailleuses du Québec, et
particulièrement du Canada français, méritent qu'on tende
l'oreille, et les 50,000 qui viennent d'entrer sur le marché du travail
au cours de l'été et les 75,000 autres jeunes chômeurs de
ces milliers de jeunes travailleurs qui tentent de se frayer une route de
sécurité dans le monde du travail. »
Ces membres de la J.O.C. faisaient une déclaration
opportunée pour signaler au gouvernement le danger qu'il y a
d'émettre des permis à ces jeunes travailleurs de l'âge de
14, 15 et 16 ans, et la J.O.C, disait: « on dépense des millions
pour résoudre le problème de la délinquence
juvénile, 50 pour cent des délinquants condamnés par les
tribunaux sont des jeunes de 15 à 20 ans. Des sommes beaucoup plus
modestes, ( et j'attire l'attention du ministre sur cette phrase) des sommes
beaucoup plus modestes seraient très utiles pour prévenir cette
délinquance juvénile et épargneraient beaucoup de soucis
à l'Etat. »
M. le Président, ce cri de détresse, lancé par la
J.O.C. à l'occasion de la fête du travail, au 31 août 1963,
prouve qu'il y a là un problème des plus pressants. Si l'on
regarde dans le rapport du ministère du Travail, à la page 135,
vous verrez que ce sont les jeunes de 14, 15, 16, 17 et 18 ans qui font le plus
de demandes de travail, puisque, d'après le code qui nous est
donné à la page 135, on retrouve 22,444 appliquants, soit 78.7
pour cent de tous ceux qui ont demandé de l'ouvrage aux bureaux de
placement provincial, et ces 22,444 qui ont demandé de l'ouvrage
prouvent qu'il est d'un devoir impérieux pour le ministère du
Travail d'étudier très sérieusement toutes les deman-
des qui sont faites par ces jeunes.
M. le Président, d'après une enquête qui a
été faite à Lachute, par le même mouvement, la
J.O.C. on apprend que, sur 8,370 jeunes de 16 à 20 ans qui ont
répondu à l'enquête, 90 pour cent de ces jeunes
fréquentent aujourd'hui les places publiques et les bars. Les jeunes
sont abandonnés à eux-mêmes, après leur sortie de
l'école, et c'est pour ça que je rappelle aujourd'hui, dans cette
Chambre, que le Procureur général d'aujourd'hui, l'ancien
ministre du Travail, avait dit en 1961 qu'il établirait au
ministère du Travail un comité inter-ministériel qui
s'occuperait de l'intégration de la jeunesse au marché du
travail. Ce comité, je le demande au ministre du Travail
d'aujourd'hui, a-t-il fonctionné?
L'an passé, je revenais avec les mêmes
représentations et je disais au ministre du Travail du temps qu'il
était impérieux pour le ministère du Travail de s'occuper
de cette classe particulière que sont les jeunes, parce que les jeunes
gens sont trop laissés à eux-mêmes dans la vie, ces adultes
de demain, dans leur intégration au monde du travail, dans leur
préparation à la vie de famille, dans leur apprentissage
définitif, ne connaissent presque jamais toute l'étendue de leurs
responsabilités. C'est pourquoi je dis aujourd'hui au ministre que, sur
le marché du travail, on devrait être extrêment prudent
avant de donner un permis qui autorise ces jeunes de 14, 15 et 16 ans à
aller travailler. Autrefois, l'âge scolaire obligatoire était de
14 ans, il est présentement de 15 ans. Je pense M. le Président,
que plus on développera dans la province l'amour et l'assiduité
aux études, plus on influencera les jeunes à continuer leurs
études, mêmes s'ils ont fait leur neuvième année, de
continuer avec les facilités que leur donnt l'Etat aujourd'hui, de
continuer leurs études pour que, sur le marché du travail, ils ne
viennent pas, d'abord par leur nombre, encombrer ce marché, qui souffre
déjà de chômage. Au point de vue moral, et au point de vue
de préparation pour la vie, ces jeunes-là n'ont ni
l'expérience, ni le sens de la responsabilité pour étayer
leur vie future sur des principes de base salutaires.
M. le Président, la situation économique des jeunes
travailleurs mérite qu'on s'occupe d'eux d'une manière
particulière. J'ai ici un tableau excellent qui a été
préparé sur un groupe de jeunes garçons et filles de 14,
15 et 16 ans, et qui prouve que la grande majorité ont laissé
l'école avant ou après la septième année. Le
Congrès général de la J.O.C. tenu à Montréal
l'an passé émettait une opinion assez concrète et
demandait au ministère du Travail de faire l'impossible pour essayer
d'empêcher des jeunes, avec un permis, de se rendre sur le marché
du travail, soit dans le textile, soit dans les garages, soit comme messagers,
soit dans le domaine des grands magasins, comme livreurs et commencent à
envahir le marché du travail.
Je n'ai pas besoin de vous dire qu'ici j'ai un titre de « La
Presse » disant: « Plus de 60% des jeunes travailleurs de 14
à 17 ans, n'ont qu'une neuvième année. Le résultat
du chômage et des petits emplois. » Eh bien, ça, c'est pour
étayer le sort pénible d'un trop grand nombre d'adolescents
travailleurs.
D'après une statistique qui m'est fournie et que je cite au
ministre: « Sur 225 garçons de 14 à 17 ans qui sont
déjà au travail, 87.4% avouent n'avoir jamais
dépassé leur neuvième année. Et de ce nombre, 42.7%
ont quitté l'école à la fin de la septième
année. De même, sur 147 filles de 14 à 17 ans, 89.2% n'ont
pas poussé leurs études plus loin que la neuvième
année. Et 50.1% ont quitté l'école à la fin de la
septième année. Ont laissé l'école avant 16 ans,
61.3% des garçons, et 77% des filles. »
M. FORTIN: En quelle année?
M. BELLEMARE: C'est une enquête qui a été faite, et
qui est reproduite dans « l'Action Catholique », par la J.O.C.
M. FORTIN: Mais, en quelle année ça été
fait?
M. BELLEMARE: En 1962. Je cite ces chiffres, non pas pour dire au
ministre qu'il ne sait rien faire. Au contraire, je suis d'avis qu'il y a
peut-être eu une légère amélioration, mais je dis et
je demande aujourd'hui qu'en ce qui regarde le travail des adolescents, on
devrait être extrêmement sévère et, qu'avant
d'accorder un permis de travail à ceux qui ont 14, 15 et 16 ans, on
consulte les parents, et aussi que l'on confie au service social la demande de
cet adolescent pour savoir si véritablement il a l'obligation, au point
de vue financier, d'aider sa famille ou autre, d'aller sur le marché du
travail.
Et je pense que la Commission du salaire minimum rendrait
énormément service. Le ministre nous demande souvent des
suggestions, je lui en fais une. Si chaque demande d'un permis pour adolescent,
après avoir été transmise au bureau de la Commission du
salaire minimum pour l'octroi d'un permis, avant d'être accordé,
recevait l'autorisation des parents, ce serait très bien, mais ce serait
encore mieux avec en plus un rapport écrit du service social de
l'en-
droit attestant si véritablement on est d'accord pour accorder ce
permis sollicité.
M. le Président, il y a eu 6,403 jeunes de 14 à 16 ans en
1962 qui ont demandé des permis. Cette année, le ministre va me
répondre: il n'y en a plus que 4,290. Très bien, et je voudrais
que ce chiffre tombe encore en bas de 1,000 si possible. S'il y a eu 6,403
jeunes en 1962 qui ont demandé des permis et qu'il y en a seulement
4,290 en 1963, je dis « tant mieux », et plus on baissera ces
demandes de permis, plus on rendra service à nos jeunes, on rendra
service à la collectivité aussi, et on rendra service à
tous ces mouvements de jeunesse qui demandent qu'on s'occupe d'une
manière particulière de ce travail prématuré, de ce
travail de nos adolescents.
M. FORTIN: M. le Président, je crois que le député
de Champlain fait erreur lorsqu'il dit que nous accordons des permis de
travail. En vertu de la Loi des établissements industriels et
commerciaux, les enfants à partir de 14 ans ont le droit de travailler,
nous ne pouvons pas les empêcher de travailler.
M. BELLEMARE: Pourquoi?
M. FORTIN: La seule exception qui existe, ou la seule restriction qui
existe pour les enfants de 14 à 16 ans, c'est lorsqu'ils se
présentent à un endroit. L'employeur ne peut pas leur donner
d'ouvrage à moins de faire venir l'inspecteur et là l'inspecteur
va voir si l'enfant sait lire et écrire, s'il travaille dans un endroit
qui n'est pas dangereux pour lui. Mais du moment que l'usine n'est pas
dangereuse, du moment que les conditions de travail sont normales, l'inspecteur
est obligé de lui donner son certificat parce que l'enfant a le droit de
travailler, et c'est une loi qui existe depuis longtemps. Un instant... vous me
répondrez...
M. BELLEMARE: M. le Président, je soulève un point d'ordre
parce que le ministre pourra lire ce qui est écrit à la page 65
de son rapport, et il verra que ce n'est pas tout à fait conforme
à ce qu'il vient de dire.
M. FORTIN: Bien, je vous donne la loi.
M. BELLEMARE: Le rapport dit: « De concert avec les services
d'inspection du travail, les bureaux de placement de la province de
Québec, la Commission du salaire minimum s'occupe à rendre plus
efficace le contrôle du travail des jeunes de 14 à 16 ans. Elle
veille pour sa part à ce que chaque adolescent sous certificat
ça demande donc un certificat reçoive le salaire minimum
légal. »
Mais, M. le Président, il reçoit un certificat à ce
moment-là, il en reçoit un, puisque c'est
décrété dans la Loi générale des relations
patronales et ouvrières.
M. FORTIN: M. le Président, le député de Champlain
donne à la loi une mauvaise interprétation. C'est un certificat
de contrôle, ce n'est pas un permis de travail, c'est un certificat de
contrôle...
M. BELLEMARE: Cela revient au même parce qu'il ne peut pas...
UNE VOIX: Non, non.
M. FORTIN: Bien non! C'est qu'en vertu de la loi on ne peut pas refuser
à un enfant... à compter de 14 ans, on ne peut pas lui refuser de
travailler. En bas de 14 ans, ils n'ont pas le droit de travailler, il n'y a
aucun permis possible. Mais à partir de 14 ans, l'enfant a le droit de
travailler et, lorsqu'il se présente à l'ouvrage, comme je le
disais tout à l'heure, c'est un certificat de contrôle qu'on
donne. C'est-à-dire qu'on s'assure qu'il sait lire et écrire et
qu'il n'y a pas de condition matérielle dangereuse pour lui. Et du
moment que ceci rencontre les normes et les règlements, nous sommes
obligés, l'inspecteur est obligé de lui donner son
certificat.
M. le Président, le député de Champlain a
parlé de statistique. Eh bient il remarquera par exemple, que pour les
enfants de 16 à 20 ans, c'est surtout durant les vacances que le nombre
des emplois augmente. Il s'est contenté de citer un chiffre: 28,502
emplois durant l'année. Il remarquera, par exemple, que durant les mois
de juin, de juillet et d'août, il y a une courbe, une progression
fantastique. C'est pratiquement le double.
M. BELLEMARE: Combien en juillet et août?
M. FORTIN: Dans le mois de juin, par exemple, il y a 3,700 jeunes
employés...
M. BELLEMARE: Combien dans le mois de mai? 2,900?
M. FORTIN: 2,900, bien oui!
M. BELLEMARE: Combien dans le mois de mars? 2,169?
M. COUTURIER: Et combien depuis Adam? Ah! ça commence!
M. BELLEMARE: Vous êtes réveillé, vous dormiez tout
à l'heure.
M. COUTURIER: Je ne dors pas, je me repose.
M. FORTIN: Dans bien des universités, les cours finissent vers la
fin d'avril: la faculté de droit de Sherbrooke, par exemple, vers le 29
ou 30 avril. Alors les étudiants commencent à travailler dans le
mois d'avril, dans le mois de mai, Juin et vous avez seulement à
prendre, par exemple, le mois de novembre: 1,900; le mois de décembre,
1,300, et c'est vers la fin de mars, mai et juin que ça augmente.
Ce sont des jeunes de 16 à 20 ans, ça. Maintenant, en ce
qui concerne les jeunes gens, eh bien! à l'heure actuelle, la
fréquentation scolaire est à 15 ans. Dans la plupart des
décrets de la construction, nous exigeons par exemple, la 9e
année. Actuellement, le gouvernement s'efforce de faire connaître
les centres d'apprentissage pour les métiers, dans le métier de
la construction, dans l'automobile, dans la robe, dans les vêtements,
pour enseigner des métiers aux jeunes apprentis qui n'ont pas beaucoup
d'instruction mais qui ont au moins leur 7e ou leur 9e année, et c'est
le ministère du Travail qui s'efforce de donner à ces jeunes gens
l'instruction nécessaire pour avoir de meilleurs métiers.
Mais quand un enfant est rendu à l'âge de 15 ans, qu'il
n'est plus obligé de fréquenter la classe, eh bien! qu'est-ce que
vous voulez? Il est bien mieux qu'il se trouve un petit emploi quelque part que
de traîner la rue et nous ne pouvons pas le forcer à rester chez
lui, nous ne pouvons pas l'empêcher de travailler. Il faudrait changer la
loi et dire: « Les jeunes gens n'auront pas le droit de travailler en bas
de 16 ans. » Eh bien! je ne crois pas que la réaction serait
très favorable et vous pourriez voir le nombre de lettres que nous
recevons, même depuis quelques temps, où les parents nous disent:
« Bien, j'ai un grand garçon de 15 ans. Qu'est-ce qu'il va faire
durant les vacances? Le garder à la maison? On ne peut rien faire avec
lui. Vous ne pourriez pas le placer quelque part et lui trouver un petit
ouvrage? »
Des lettres pour des enfants de 15 ans, 16 ans, nous en recevons tous
les jours. Au ministère des Terres et Forêts, où on a
créé un comité spécial pour l'emploi des
étudiants durant les vacances parce qu'on a centralisé ça
dans un seul département, eh bien! nous exigeons que les enfants aient
18 ans pour pouvoir travailler ou encore qu'ils aient fait leur 12e
année, afin de tâcher encore d'inciter les jeunes à
étudier même durant les vacances.
Encore là, nous mettons un minimum de 18 ans pour donner une
chance aux étudiants les plus âgés, qui ont besoin de plus
d'argent pour payer leur cours, mais encore là nous nous
efforçons de remonter l'âge pour inciter les jeunes à ne
pas se lancer à l'ouvrage à un âge trop bas.
M. BEAUPRE (président): Adopté.
M. BELLEMARE: M. le Président, je suis surpris de l'attitude du
ministre. Franchement, je croyais que le ministre du Travail se serait
levé dans cette Chambre et aurait parlé dans le même sens
que je viens de le faire. Attirant son attention sur des problèmes
d'adolescents, des problèmes de travail, des problèmes d'ordre
moral et surtout au point de vue de cette réhabilitation de la jeunesse
dont il est tellement question dans la province, je croyais que le ministre du
Travail se serait levé et qu'il aurait d'emblée abondé
dans le même sens en disant: « C'est vrai, nous avons là un
problème difficile, nous allons nous employer à y apporter une
solution encore meilleure, à faire une meilleure sélection.
»
Lâ,j'aurais été fier du ministre du Travail, mais
pas de l'entendre défendre ce que tout le monde condamne. Il essaie,
avec des textes de loi ou avec des parties de rapport, de prouver, ce que tout
le monde dans la province, toutes les organisations, surtout ceux qui
s'occupent spécialement de ce problème du travail des
adolescents, condamnent à partir de l'archevêque de
Montréal, de la J.O.C. et de tous les groupements sociaux, familiaux,
tous condamnent le travail des adolescents.
Le ministre du Bien-Etre et de la Famille est le premier, je l'en
félicite, à défendre, à essayer par tous les moyens
d'empêcher ce travail-là.
Mais ce n'est pas ça que j'ai entendu. J'ai entendu un ministre
qui essaie de dire: « Je ne suis pas coupable. La loi me le permet. Il
faudrait changer la loi à 16 ans. » Non, M. le Président,
si la loi de l'éducation, si la loi de la fréquentation scolaire
dit 15 ans, comment se fait-il qu'on donne des permis à 14 ans?
Et si la loi imposant la limite de 16 ans a besoin d'être
changée, qu'on la change. Mais il y a une grosse différence entre
le travail d'un adolescent durant la période de vacances et le travail
coutumier, régulier dans une usine. On entend le ministre de la
Santé venir dire: « Vous
n'avez pas lu votre rapport. » Pauvre ministre de la
Santé!
M. COUTURIER: Il est bien à plaindre, hein!...
M. BELLEMARE: Oui, M. le Président, quand il est
réveillé...
M. COUTURIER: ... autant que le député de Champlain.
Pleurez sur vous et sur vos enfants...
M. BELLEMARE: Pas quand il dort en Chambre, non! Mais s'il avait
regardé son rapport comme je l'ai étudié, il s'apercevrait
que, dans la section de 21 ans à 30 ans, les chiffres augmentent du mois
de mai, juin, juillet, août...
M. COUTURIER: M. le Président, je soulève un point
d'ordre...
M. BELLEMARE: C'est une grosse différence.
M. COUTURIER: La première chose c'est que le ministre de la
Santé n'a pas dit un mot sur le rapport et n'a pas dit qu'il n'avait pas
lu le rapport. Ce n'est pas le ministre de la Santé qui a dit
ça.
M. BELLEMARE: M. le Président, vous relirez demain les
débats de l'Assemblée législative et vous verrez son
intervention. Je le laisse, lui, parce que ce n'est pas lui qui
m'intéresse, c'est le ministre du Travail.
M. COUTURIER: Continuez à donner des conseils au ministre.
M. BELLEMARE: Je suis à expliquer des choses sérieuses et
je voudrais continuer. Je dis et je répète que l'attitude du
ministre du Travail aujourd'hui me déçoit. Il aurait dû,
cet après-midi, de concert avec le ministre du Bien-Etre, admettre que
c'est vrai et déplorer le fait et dire: « Monsieur, nous allons
rendre plus difficile, si possible, par des enquêtes encore plus
approfondies, ce travail des adolescents dans nos usines. » Et là,
avec l'autorité que lui confère sa tâche, il aurait, dans
la province, reçu la publicité et, surtout, il aurait
été probablement écouté. Dans les circonstances,
puisque le ministre semble dire que c'est seulement des...
C'est vrai que durant les vacances, j'en suis pour que les jeunes
travaillent: j'en suis! Mais durant l'année, quand les jeunes sont
supposés aller aux écoles, si on leur rend plus difficile
l'émission d'un certificat pour travail, on leur aura rendu service.
C'est vrai qu'il existe aujourd'hui des centres d'apprentissage. Et les centres
d'apprentissage, nous en reparlerons tout à l'heure, parce que c'est un
des articles du budget. Nous allons prouver que les centres d'apprentissage ont
rendu d'immenses services aux jeunes de 14, 15, 16 ans. Une initiative
très heureuse qui a été instaurée dans la province
de Québec sous l'ancien régime.
Mais avec toutes ces autorités, avec tous ces gens qui veulent
aider notre jeunesse et surtout qui veulent un peu clarifier cette situation,
je dis que le ministre aurait dû, plutôt que d'essayer de
s'attacher à des bribes de règlemen- tation de loi, à ses
statistiques, me dire: « Dans les circonstances, nous allons demander
dans chaque municipalité à ceux qui sont en charge du service
social, à tous ceux qui voudront entrer sur le marché du travail
avant la 16e année, de nous fournir un rapport complet. »
M. FORTIN: M. le Président, lorsque le député de
Champlain dit que je favorise le travail des enfants de 14 à 16 ans, il
est absolument dans l'erreur. Il a mal compris les explications que j'ai
fournies tout à l'heure.
D'abord je vais lui dire que les enfants de 14 à 15 ans, bien
que, à l'heure actuelle, d'après la Loi des établissements
industriels et commerciaux ils ont le droit de travailler, vu que la
fréquentation scolaire est rendue à 15 ans,ehbien, les enfants de
14 à 15 ans ne reçoivent aucun certificat leur permettant de
travailler.
S'ils se présentent à l'ouvrage, ces enfants de 14
à 15 ans, l'employeur sait qu'il doit obtenir de l'inspecteur un
certificat l'autorisant £ employer de tels enfants. L'employeur refuse
d'employer des enfants de 14 à 15 ans, et nos inspecteurs refusent de
donner le certificat prévu par la loi, de sorte que les enfants de 14
à 15 ans, durant l'année scolaire, ne travaillent pas. Mais
durant les vacances, par exemple, comme la fréquentation scolaire n'est
pas obligatoire pendant les vacances, eh bien, s'il se présente des
enfants de 14 à 15 ans, ils peuvent travailler s'ils ont le certificat
exigé.
Maintenant, au sujet des enfants de 14 à 16 ans, eh bien, tout
à l'heure le député de Champlain citait des statistiques.
Mais il a cité des statistiques pour les enfants de 16 à 20 ans
et ceci ne vise pas les enfants de 14 à 16 ans. La Loi des
établissements industriels et commercaux prévoit des dispositions
pour les enfants de 14 à 15 ans: ils ont le droit de travailler mais
avec un certificat de placement ou de contrôle. Mais de 16 ans en
montant, c'est la loi ordinaire qui s'applique.
M. BELLEMARE: Si le ministre me permet...
M. FORTIN: Un instant! Maintenant, je lui dirai que, par exemple, en
1961, il yavait 5,465 jeunes gens qui travaillaient...
M. BELLEMARE: Combien en 1962?
M. FORTIN: En 1962, le nombre a baissé à 3,905 et en 1963
à 3,305. Alors diminution de pratiquement 2,000 dans deux ans. Pourquoi?
A cause de la fréquentation scolaire que nous avons montée
à 15 ans et parce que, dans les écoles techniques et les
écoles d'arts et métiers et les centres d'apprentissage, nous
avons développé ces secteurs et nous invitons la jeunesse
à venir s'instuire davantage et à apprendre des
métiers.
Mais pour tout ça, il y a une évolution qui doit se faire.
Cela ne se fera pas du jour au lendemain. Et je ne pourrais pas proposer en
Chambre par exemple un texte de loi disant: « Jusqu'à 16 ans il
est défendu de travailler. » Il faut que nous donnions à la
jeunesse une chance d'apprendre des métiers. Il y a une évolution
qui doit se faire graduellement.
A ce sujet-là, je dirai qu'avec nos écoles d'arts et
métiers, avec nos centres d'apprentissage et avec l'éducation et
la propagande que nous faisons, nous invitons de plus en plus la jeunesse
à apprendre des métiers pour se trouver de l'ouvrage. Et je
déplore comme tout le monde de voir des jeunes gens de 14, 15 et 16 ans
travailler dans des usines. C'est bien déplorable. C'était une
situation qui existait bien avant qua nous soyons au pouvoir, mais nous allons
essayer graduellement de modifier la situation.
C'était une question, d'ailleurs, d'éducation dans la
province de Québec. On se souvient que dans le passé, quand un
enfant allait étudier, les pères de famille disaient: «
Qu'est-ce qu'il fait votre plus vieux? « Bien, lui, il ne fait rien, il
ne travaille pas, il va étudier. » Dans le passé
aussitôt qu'en enfant sortait de la petite école à 9, 10,
11 ans, le souci des parents c'était de les faire travailler.
Il y a une éducation à faire dans la province de
Québec à ce sujet-là. Quand on pense au temps ou on a
établi la fréquentation scolaire à 14 ans, on se couvient
de toutes les tempêtes qui ont eu lieu à ce moment-là
contre cette disposition du gouvernement d'obliger les enfants à aller
à l'école jusqu'à l'âge de l4ans. Et lorsque nous
avons mis la fréquentation scolaire à 15 ans il y a eu bien des
protestations. Des parents disaient: « On va forcer nos enfants à
étu- dier jusqu'à l'âge de 15 ans alors qu'ils sont
à la maison et qu'ils peuvent travailler et nous aider.
C'est une question d'éducation et le gouvernement s'efforce, en
collaboration avec tous les mouvements comme la J.O.C., la L.O.C. et tous les
mouvements d'apostolat et d'action catholique, de convaincre la population, de
convaincre les parents qu'il est nécessaire d'encourager leurs enfants
aux études et surtout pour les jeunes travailleurs d'apprendre des
métiers. Le gouvernement s'efforce par ses écoles de former la
jeunesse et de lui donner la facilité d'apprendre des métiers.
Mais encore là, tout ne se fera pas du jour au lendemain. Loin de moi la
pensée de vouloir maintenir le statu quo et de dire: « Les enfants
vont commencer à travailler à 14 ans. Nous sommes satisfaits de
ça. »
Si le chef...
UNE VOIX: Le deuxième chef!
M. FORTIN: ... le député de Champlain a pris mes remarques
dans ce sens là, eh bien il s'est trompé. Il m'a mal
interprété. Ce n'est nullement le sens de mes remarques.
M. BELLEMARE: M. le Président, la ministre a reculé d'un
pied. Il s'est aperçu que dans l'opinion publique surtout ceux qui
l'avaient entendu cet après-midi, en Chambre, que ce n'était pas
la réponse adéquate. Il vient de donner une autre version....
M. FORTIN: M. le Président, j'invoque le règlement. Le
député de Champlain a fait des remarques. Je lui ai
répondu. Je ne crois pas qu'on va éterniser le débat. Je
n'ai pas reculé je n'ai fait que m'exprimer plus clairement parce que le
député de Champlain ne m'avait pas compris.
M. COUTURIER: Il ne comprend rien. Il ne veut rien comprendre.
M. CREPEAU: Il n'est pas capable de comprendre.
M. BELLEMARE: Est-ce que vous avez seulement une oreille?
M. COUTURIER: Il ne veut rien comprendre.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
UNE VOIX: Qui a les statistiques de ça?
M. COUTURIER: La matière grise...
M. LE PRESIDENT: Je demanderais au député de Champlain de
suivre les règlements.
M. BELLEMARE: M. le Président, c'est réellement bien
parlementaire de voir siéger un ministre de la Santé mais pas
avec des expressions aussi antiparlementaires dans la bouche.
M. COUTURIER: Ce n'est pas antiparlementaire.
M. BELLEMARE: Je vous laisse le soin de le juger. Si vous ne le rappelez
pas à l'ordre M. le Président, je penserai que vous ne remplissez
pas votre devoir.
M. COUTURIER: Vous avez le droit de penser ce que vous voulez.
Continuez!
M. CREPEAU: Quel est le point d'ordre, M. le Président?
M. BELLEMARE: M. le Président, le ministre du travail dit que
c'est un problème qui se règle avec les années. Oui, M. le
Président, j'en suis. Mais, nous devrions, tous ensemble, pas seulement
celui qui parle, pas seulement le ministre du Travail mais tous ensemble nous
devrions nous aider pour règler ce problème. La meilleure
manière c'est encore la suggestion que j'ai faite au ministre, à
savoir qu'aucun permis d'adolescent de 14, 15 et 16 ans ne devrait être
octroyé sans avoir au préalable et la signature des parents et
l'enquête du service social, s'il est nécessaire qu'il soit
accordé. Si le ministre ne veut pas prendre ma suggestion, qu'il agisse
comme bon lui semblera, j'ai fait mon devoir.
M. le Président, au sujet de l'article des bureaux de placement,
je n'ai pas d'autre chose à ajouter. Si d'autres de mes collègues
en ont?
M. LE PRESIDENT: Article 4, adopté. Article 5.
M. BELLEMARE: Article 5 adopté. 6, mécaniciens en
tuyauterie, M. le Président, est-ce qu'à la tuyauterie c'est le
même examinateur en chef M. Hétu?
M. FORTIN: Oui. C'est le même.
M. BELLEMARE: Est-ce qu'il y a eu des changements dans ce service, M. le
Président parmi les examinateurs? Dans les principaux membres de ce
bureau des examinateurs?
M. FORTIN: Il y a M. Durant qui a pris sa retraite.
M. BELLEMARE: Il était là M. Durant.
M. FORTIN: Il y a M. Durant qui a pris sa retraite. Il y a M.
Séguin qui l'a remplacé.
M. BELLEMARE: Il est inspecteur en chef à Montréal.
M. FORTIN: A Trois-Rivières c'est M. Morency. Et il est
resté, là.
M. BELLEMARE: M. Morency qui avait remplacé M. Gendron? Oui, je
le connais. Adopté, M. le Président, si...
M. LE PRESIDENT: Article 7. Service de l'aide à
l'apprentissage.
M. BELLEMARE: Le service de l'aide à l'apprentissage, M. le
Président, c'est un service qui a une formule unique au monde, ça
tout le monde le sait. On n'en parlera jamais trop, 17 ans d'existence ont
prouvé de toute évidence, le bien fondé de ces
écoles.
Et je suis sûr que ces programmes que suivent les apprentis des
métiers de la construction ont rendu d'immenses services à notre
jeunesse en particulier et ont été cités par bien des.
autorités comme les meilleurs et les mieux adaptés à notre
système. La programmation des centres d'apprentissage, nous apprend-on
relèvera du ministère de l'Education.
M. FORTIN: Bien, en vertu du bill 60, l'administration des centres
d'apprentissage va relever du Travail,...
M. BELLEMARE: La programmation.
M. FORTIN: ... mais les programmes vont relever du ministère de
l'Education et ça va être fait en collaboration avec les centres
d'apprentissage et le ministère de l'Education. Parce que d'ailleurs,
avant, c'était l'Instruction publique; il n'y a pas de changements.
C'est la même chose.
M. BELLEMARE: Bien, c'est-à-dire que voici: avant, je pense que
la programmation relevait de l'organisme des centres d'apprentissage et
directement du ministère du Travail, c'est sûr. Mais
là,..
M. FORTIN: Cela va continuer,
M. BELLEMARE: ... c'est la programma-
tion de nos centres d'apprentissage qui va relever du ministère
de l'Education. C'est dans le but d'uniformiser dans toute la province les
certificats de compétence, dit le ministre du Travail dans une
déclaration qu'il a faite le 24 septembre 1963, à Ste-Marguerite:
« Le ministre du Travail a dissipé hier soir tout malentendu au
sujet des centres d'apprentissage et il a clairement indiqué son
intention d'uniformiser dans toute la province ces certificats de
compétence qui donnent droit à l'exercice d'un métier et
le gouvernement, a-t-il expliqué, s'est appuyé sur les
recommandations du rapport Tremblay pour en arriver à cette conclusion.
»
M. FORTIN: Si le député de Champlain me permet, il se
rappellera que je parlais aux représentants des centres d'apprentissage
des métiers de la construction.
M. BELLEMARE: 27e... M. FORTIN: Oui, oui.
M. BELLEMARE: ... commission professionnelle provinciale d'apprentissage
à l'auberge Alpine.
M. FORTIN: Oui, mais c'était dans les métiers de la
construction. Seulement, il faut bien remettre le texte dans...
M. BELLEMARE: Oui, oui! Seulement, quand un journal intitule son
article: « La programmation pédagogique des centres
d'apprentissage relèvera du ministère de l'Education, »
j'ai le droit, moi, de me demander, après les déclarations qui
ont été faites en Chambre ici par le premier ministre et surtout
par le ministre du Travail que les centres d'apprentissage ne relèveront
jamais du ministère de la Jeunesse, ni de l'Education. J'ai le droit de
me demander, comme tout le monde et particulièrement les
autorités des centres d'apprentissage, si véritablement la
programmation pédagogique va être faite par le ministère de
l'Education. Cela, je me demande ça.
Le ministre après sa déclaration me dit non; mais quand il
ajoute, par exemple, que dans les métiers exigeant l'apprentissage, il
serait normal que la compétence des travailleurs soit
déterminée selon des normes communes à un même
métier et sanctionnée par un certificat de compétence
identique dans toutes les régions de la province, j'ai le droit de me
demander si la programmation va être faite par le ministère de
l'Education, surtout quant il y a différents systèmes
régionaux de reconnaissance et de compétence des travailleurs;
surtout quand le ministre dit s'élever contre certaines commissions
d'apprentissage, qui entreprennent des constructions un peu trop somptueuses,
sans toutefois les nommer. Là il parlait des centres
d'apprentissage.
Alors, je pense que le ministre aujourd'hui peut rassurer les centres
d'apprentissage dans la province en nous disant clairement si oui ou non toute
la programmation pédagogique des centres d'apprentissage va relever du
nouveau ministère de l'Education.
M. FORTIN: M. le Président, les centres d'apprentissage sont
déjà rassurés à ce sujet-là. Les centres
d'apprentissage ont créé une fédération des centres
d'apprentissage. Ils ont également un comité de formation
pédagogique qui comprend les directeurs des centres d'apprentissage et
différents membres des centres d'apprentissage et c'est ce comité
qui, avec l'aide de notre directeur du service de l'aide à
l'apprentissage, prépare les programmes d'études et
d'enseignement des métiers. Cependant, afin qu'il y ait uniformisation
avec les écoles d'arts et métiers et avec les instituts de
technologie qui relèvent directement du ministère de l'Education,
il est entendu, et ceci est conforme aux dispositions du bill 60, que ce sont
nos programmes pédagogiques dans les centres d'apprentissage qui doivent
être soumis au ministère de l'Education, pour étude et
approbation. Mais encore là, ceci ne veut pas dire que c'est le
ministère de l'Education qui va faire les programmes et qui va les
imposer.
M. BELLEMARE: Quel est le rôle que le ministre du Travail jouera
maintenant dans cette programmation?
M. FORTIN: Le ministère du Travail, par son Service de l'aide
à l'apprentissage, va aider les centres d'apprentissage à
préparer leur programme, mais ces programmes-là, une fois qu'ils
seront préparés par les centres d'apprentissage, seront soumis au
ministère de l'Education pour approbation finale afin qu'il y ait
coordination avec les écoles d'arts et métiers et les instituts
de technologie. Et nous voulons qu'un élève, par exemple, qui
s'en va dans un centre d'apprentissage des métiers de la construction,
et qui apprend le métier de charpentier-menuisier, et qui après
ces quatre ans d'apprentissage, s'aperçoit qu'il veut se perfectionner
davantage, il pourra s'en aller dans une école d'arts et métiers
ou dans une école de technologie et
continuer mais les études qu'il aura faites au centre
d'apprentissage, et surtout les études théoriques qu'il aura
faites, il ne sera pas obligé de les recommencer quand il changera
d'école.
Nous voulons une expèce de coordination entre ces trois
secteurs-là, et c'est pourquoi nous voulons que les programmes de
formation pédagogique soient soumis au ministère de l'Education
pour qu'il n'y ait pas contradiction ou duplication, mais uniformisation. Et
c'est dans ce sens-là que la loi des centres d'apprentissage et le bill
60 seront appliqués, coordonnés entre les deux
ministères.
M. BELLEMARE: M. le Président, je relève une phrase du
ministre où il dit que ceux du centre d'apprentissage pourront
retourner...
M. FORTIN: Pas retourner, continuer.
M. BELLEMARE: ... continuer; le ministre est trop au courant des cours
que l'on donne aux centres d'apprentissage pour savoir que ce qui s'apprend
là est souvent en avance de beaucoup sur les écoles d'arts et
métiers, de beaucoup. Alors, je ne vois pas un élève qui
va sortir des centres d'apprentissage pour retourner à l'école
des arts et métiers ou de la technologie. Les centres de métiers,
les centres d'apprentissage de métiers qui existent actuellement dans la
province sont les meilleurs au monde, ce sont les institutions les plus
techniquement complètes au point de vue des ouvriers. Le travailleur, le
jeune qui s'en va là s'initie directement à son travail bien plus
que dans n'importe quelle autre école de technologie ou de
métiers. Ce sontles meilleures écoles au monde, et c'est
grâce un gouvernement de l'Union nationale si ça s'est
réalisé, ça. On a fait du bien dans la province et cela en
est encore un autre exemple, nos centres d'apprentissage. Et je dis que ces
centres d'apprentissage devraient conserver leur entière autonomie dans
la programmation, et ne pas laisser le ministre de l'Education se fourrer le
nez dans ce domaine, et le ministre le sait, à un moment donné il
y a eu de la part des centres d'apprentissage des menaces, même de
recourir aux tribunaux, et c'est le premier ministre lui-même qui a
réglé le conflit.
Tout le monde le sait on a vu un M. Tremblay essayer de venir, (pas
celui-là mais un autre Tremblay), essayer de prendre les écoles
d'apprentissage pour les adjoindre aux écoles de -technologie et surtout
aux écoles d'arts et métiers. C'est le premier ministre qui est
intervenu et qui a dit: « Cela va rester du domaine du travail, ça
n'ira pas sous la juridic- tion du ministère de la Jeunesse. »
Nous avons été heureux de cette décision, et tout le monde
des travailleurs aussi. Nous nous sommes réjouis qu'une telle
décision ait été prise. Cela a été
bâti, entretenu et payé par les travailleurs et, aujourd'hui, ces
cours d'apprentissage doivent demeurer entièrement autonomes et je dis
que le ministre du Travail devrait plus que jamais,... le ministre dit: «
Nous devrons concéder, » non, le ministre ne devrait pas
concéder, le ministre devrait plutôt se fier à son bon
jugement et administrer, lui, comme ministre, la programmation des centres
d'apprentissage qui lui est concédée par son Service de l'aide
à l'apprentissage. Et ce Service de l'aide à l'apprentissage est
justement bien placé pour constater l'opportunité de
développer un métier, ou d'apporter de la technologie nouvelle
dans ces différents secteurs.
Non, je refuse, M. le Président, de dire que le ministre de
l'Education doive surveiller la programmation, ce n'est pas l'affaire du
ministre de la Jeunesse, ni du ministère de l'Éducation, de venir
faire de la programmation aux centres d'apprentissage dans la province de
Québec. Le ministre sait que j'ai raison. C'est un domaine particulier.
C'est un domaine de technologie, oui, mais c'est un domaine privé,
où le Conseil de l'aide à l'apprentissage peut faire beaucoup
mieux que tous les pédagogues, puis tout ce que vous voudrez. Là,
avec les conseils que reçoit le ministre dans l'organisation de ces
cours, il pourra facilement maintenir cette autonomie absolue.
M. le Président, il était question de l'agrandissement du
Centre d'apprentissage à Hull. Est-ce qu'il est terminé
l'agrandissement du Centre de Hull?
M. FORTIN: Il n'est pas commencé.
M. BELLEMARE: Il n'est pas commencé. Il était dit qu'un
agrandissement au Centre d'apprentissage, « la construction d'une aile de
deux étages au Centre d'apprentissage de Hull permettra de doubler le
nombre des élèves et d'ajouter la cours
d'électricité aux cours des métiers qui se donnent
présentement. C'est ce qu'a fait savoir mardi au « Droit »
le directeur du Centre d'apprentissage de la rue Carillon, M. Louis Froment
». M. le Président...
M. FORTIN: Oui, une demande est faite à ce sujet-là. Le
centre d'apprentissage de Hull, veut agrandir son école. Il y a d'autres
centres d'apprentissage également; mais nous sommes à
étudier tous ces programmes, toutes ces de-
mandes et nous verrons d'ici quelque temps, quelle réponse nous
pourrons donner à ces différents centres d'apprentissage. Nous
avons beaucoup de demandes.
M. BELLEMARE: M. le Président, cette nouvelle était
communiquée aux journaux le 14 mars 1962, « Les travaux doivent
débuter très bientôt et être terminés pour
septembre prochain. L'agrandissement proposé permettra,
premièrement, deuxièmement, troisièmement,
quatrièmement, cinquièmement, sixièmement,
septièmement, » et les sept considérations pour
l'agrandissement étaient données là. Et M. le
Président, on disait: « l'aile projetée sera située
à l'arrière de l'édifice actuel, s'allongera vers le sud,
le rez-de-chaussée aura 8,230 pieds, et l'étage 4,874. De plus,
on prévoit un montant de $3,000 pour meubler la cantine et un montant de
$4,000 pour l'ameublement des classes, tableaux, pupitres, chaises, armoires,
etc. »
M. FORTIN: Oui, mais, ça, ce n'est pas une nouvelle du
ministère du Travail?
M. BELLEMARE: Comment? Non. Non.
M. FORTIN: Oui, mais ça c'est le projet des...
M. BELLEMARE: Oui, cela avait été annoncé comme
possible...
M. FORTIN: Oui, c'est le projet... M. BELLEMARE: ... en 1962.
M.. FORTIN: ... oui, ce sont les gens de Hull qui avaient demandé
ça. C'est un projet qui va coûter de $600,000 à $800,000.
Alors à l'heure actuelle, la demande a été faite et puis
nous sommes à l'étudier. C'était un agrandissement d'un
centre d'apprentissage. Mais il y avait dans la province de Québec des
demandes beaucoup plus urgentes que ça. Alors nous avons d'autres
centres d'apprentissage, des écoles nouvelles que nous avons
bâties. Maintenant après le projet de Hull, il y a le projet de
Maniwaki, il y a celui à Hauterive. Je pense que j'ai six demandes
à l'heure actuelle, qui représentent près de $4 millions.
Alors nous sommes à étudier tout ça.
M. BELLEMARE: M. le Président, ce qui me surprend c'est que M. le
directeur Froment qui était le directeur de l'école
annonçait ça comme chose décidée en 1962.
M. FORTIN: Eh bien, c'est un homme qui avait beaucoup
d'espérance!
M. BELLEMARE: Ah bien ça c'est une grosse raison. Mais M. le
Président, c'est un froment qui n'a pas levé; c'est un froment
qui n'a pas levé sûrement!
M. FORTIN: Pardon?
M. BELLEMARE: C'est un froment qui n'a pas levé!
M. FORTIN: Il a manqué de levain!
M. BELLEMARE: Mais j'ai reçu de la part de plusieurs personnes de
Hull des représentations réclamant du ministre la
réalisation sur place plutôt que dans cette partie du nord ouest
québecois. Il était urgent d'agrandir pour répondre
à tous ces besoins, tels que décrits ici dans les demandes.
M. FORTIN: Mais ce que le député de Champlain lit,
c'était un projet de 1962, d'à peu près $100,000.
Après 1962, quand les gens de Hull ont vu que ça pourrait se
réaliser, leurs espérances ont grandi. Ils ont modifié
leur pian. Ils ont présenté à l'inspecteur un projet de
$800,000. Alors ce n'était pas tout à fait la même chose.
Entre dire oui pour $100,000 et dire oui pour $800,000 il y a une marge.
M. BELLEMARE: M. le Président, je constate seulement une chose,
c'est que le ministre me dit que pour 1964 il n'est pas question de donner
suite à cet agrandissement de Hull.
M. FORTIN: Je n'ai pas dit ça.
M. BELLEMARE: Est-ce que le ministre peut me dire s'il y a quelque chose
de décidé en faveur des gens de Hull?
M. FORTIN: Il n'y a absolument rien de décidé, mais il y a
une étude sérieuse et immédiate qui se fait.
M. BELLEMARE: Est-ce que le député de Champlain peut avoir
avec les gens de Hull un espoir qui ne sera pas vain, pour la
réalisation de ce projet cette année?
M. FORTIN: Je peux dire au député de Champlain qu'il peut
entretenir toutes les espérances qu'il veut, mais je ne peux pas lui
garantir de réaliser toutes ses espérances.
M. BELLEMARE: Est-ce que sur le budget qu'il a devant lui, M. le
Président, il y a quelque chose de spécifié? Dans le
montant qui nous est demandé, est-ce qu'il y a quelque chose, M. le
Président de spécifié dans les projets...
M. FORTIN: Excusez une minute.
Je dirai au député de Champlain que dans le budget de
1964-1965, j'anticipe parce que nous sommes à l'item 5, dans les
subventions, eh bien pour le centre d'apprentissage des métiers
de la construction de Hull et Maniwaki, nous avons prévu $180,100, mais
depuis ce temps-là, depuis que nous avons fait notre budget, ils sont
revenus nous voir. Ils ont changé leur projet. Ils ont un projet de
$800,000 à un endroit, et de $600,000 à Maniwaki, ça fait
$1,400,000. Alors qu'est-ce que vous, voulez qu'on fasse avec $180,000? . C'est
pour ça que je vous dis que c'est à l'étude. Nous sommes
obligés de reviser nos chiffres et nous allons voir ce que nous pourrons
faire, mais lorsque nous avons préparé notre budget, nous
n'avions pas des demandes aussi considérables.
M. BELLEMARE: Mais le ministre leur a fait une remarque au centre
d'apprentissage de ne pas construire trop somptueusement. Le ministre leur a
déjà dit ça de ne pas bâtir des édifices trop
somptueux et d'être prudents quand ils construisent. Il leur a dit
ça. Finalement le ministre s'est élevé contre certaines
commissions d'apprentissage qui entreprennent des constructions un peu trop
somptueuses, sans toutefois les nommer. Mais le ministre sait que presque la
totalité de ces constructions sont assumées et par l'industrie et
par le patronat. Dans la réalisation de ces édifices...
M. FORTIN: Mais depuis un an ou deux ans, c'est par les plans conjoints
avec presque les trois quarts payés par le gouvernement.
M. BELLEMARE: Non, non, pas les trois quarts, M. le Président,
non. Mais qu'importe la proportion! Il reste toujours le principe que les
centres d'apprentissage ont presque toujours dans la province été
bâtis par suite d'une coopération entre l'industrie, le patronat
et les unions ouvrière, qui ont assuré une grande partie de ces
centres d'apprentissage.
M. FORTIN: Pour jusqu'en 1962, le député de Champlain a
raison; mais pas depuis 1962.
M. BELLEMARE: Depuis 1962, il y a eu l'entente
fédérale-provinciale qui a pourvu pour une partie...
M. FORTIN: 50%.
M. BELLEMARE: Dans l'Ontario, cela a fonctionné sur une grande
échelle puisque nous avons eu dans l'Ontario une proportion
considérable des centres d'apprentissage qui ont été
réalisés...
M. FORTIN: En Ontario, ils n'ont pas de centres d'apprentissage. Ils ont
le système qu'ils ont.
M. BELLEMARE: Non, non, ce ne sont pas des centres d'apprentissage, ce
sont des écoles. Mais le ministre me dit que, pour Hull, il n'y a rien
de prévu définitivement.
M. FORTIN: C'est-à-dire que, suivant les demandes qui avaient
été faites, en novembre j'avais prévu $180,000 parce que
le budget, de la province, on ne le fait pas une semaine avant, ça fait
depuis le mois de novembre que nous travaillons sur ça. Mais depuis ce
temps-là, ils ont changé leur plan, c'est-à-dire Maniwaki
dépend de Hull. Ils sont venus avec deux nouveaux projets qui vont
coûter peut-être $1,600,000.
M. BELLEMARE: Est-ce que le ministre peut me dire, cette année,
ce qu'il entend réaliser dans les centres d'apprentissage?
M. FORTIN: Ah! cela, je vous le dirai à l'item 5.
M. BELLEMARE: A l'item 5. Très bien, M. le Président.
M. LE PRESIDENT: A l'item 5.
M. BELLEMARE: Il y a, M. le Président, au centre d'apprentissage
une nomination qui a été faite: monsieur Métréas,
nommé directeur intérimaire à Sherbrooke.
M. FORTIN: Ça relève de la juridiction des centres
d'apprentissage. Le ministère du Travail n'a pas à s'immiscer
dans ça.
M. BELLEMARE: Le ministère du Travail n'a pas juridiction quant
aux nominations? Pourquoi M. Béliveau est-il parti, puis tout
ça?
M. FORTIN: Ah ça!
M. BELLEMARE: Cela, le ministre ne le sait pas.
M. FORTIN: Je peux le savoir, mais même si je le savais, je ne
répondrais pas parce que ça ne relève pas de ma
compétence. Les centres d'apprentissage sont autonomes. Ce sont eux qui
engagent leur personnel, qui le remercient; ça les regarde. Le ministre
n'a aucunement le droit d'intervenir dans ça.
M. BELLEMARE: Le ministre ne sait pas pourquoi M. Métréas
est entré? Il l'ignore?
M. FORTIN: Personnellement, je le sais; mais officielle ment je n'ai pas
à répondre à cette question-là, qui ne
relève pas de ma compétence.
M. BELLEMARE: Bon, M. le Président, l'école des
métiers de la construction de Sherbrooke a fait l'acquisition de
l'édifice Orient Hosiery à Sherbrooke?
M. FORTIN: Oui.
M. BELLEMARE: Avec l'aide d'un octroi provincial?
M. FORTIN: Le centre d'apprentissage de Sherbrooke était
déjà propriétaire d'édifices dans le quartier est.
Il a vendu ces édifices à la Commission scolaire de Sherbrooke et
acheté cette manufacture d'Hosiery Mills qui était
désaffectée et, avec le produit de la vente plus un octroi de
$100,000 du gouvernement, il a acheté cette manufacture qu'il a
convertie en centre d'apprentissage des métiers de la construction.
M. LE PRESIDENT: Adopté?
M. FORTIN: Maintenant, le député de Champlain tout
à l'heure a parlé du contrôle de la programmation. Eh bien,
la Loi de l'aide à l'apprentissage qui a été
adoptée en 1945 prévoyait, à l'article 15: « Les
programmes d'études théorique et pratique visés par
l'alinéa précédent doivent être approuvés par
le Conseil de l'Instruction publique. » Or, ce que nous avons
changé c'est que nous disons que ce sont les mêmes dispositions,
mais au lieu d'être adoptés par le Conseil de l'Instruction
publique, ces programmes doivent être faits en collaboration avec le
ministère de l'Education. Alors ce principe que le député
de Champlain semblait condamner avec véhémence tout à
l'heure, eh bien, il est dans la loi qu'il a défendue avec autant de
véhémence il y a quelques instants.
M. BELLEMARE: M. le Président, je voudrais que le ministre
m'interprète tel que je l'ai voulu et pas simplement comme il le dit
là, parce que je fais suite à une déclaration de M. Lionel
Thibault, le président de la Corporation des techniciens professionnels,
qui disait que la Corporation des techniciens professionnels veut la fin des
hostilités entre les ministères, mais elle veut que le
ministère du Travail conserve sa juridiction sur la programmation. Et
c'est ça que j'ai dit, et c'est ça que je veux avec tous ceux qui
s'intéressent véritablement aux méthodes en vigueur dans
ces centres d'apprentissage.
M. FORTIN: Le problème a été réglé
par le bill 60. C'est mot à mot dans le bill 60.
M. BELLEMARE: Je dis que le ministre devrait garder sa juridiction
totale et absolue sur la programmation et que ça lui revient de droit,
cette juridiction-là.
M. FORTIN: Mais nous avons été liés par le
précédent que vous avez créé.
M. BELLEMARE: Pardon?
M. FORTIN: Nous étions liés par le précédent
que vous avez créé.
M. BELLEMARE: M. le Président, le ministre n'est lié par
rien. Le ministre administre en 1964 et s'il a besoin d'amender une loi pour
lui donner juridiction, qu'il l'amende. C'est en 1964 qu'on travaille! ce n'est
pas en 1962, ni en 1957, ni en 1946, ni en 1939 lors de l'entente
Bilodeau-Rogers. C'est à la suite de l'entente Bilodeau-Rogers qu'est
arrivée cette loi. Le ministre le sait!
M. LE PRESIDENT: Article 8: « Service de conciliation et
d'arbitrage ».
M. BELLEMARE: M. le Président, dans ce service il y a eu d'abord
des déclarations du ministre qui ont été assez
sensationnelles qui disent par exemple, que « c'est une urgence pour tous
les employeurs de s'unir ». Même on en fait un éditorial
dans un journal et on dit: « Dans la province de Québec on assiste
tout juste à des essais d'organisation du patronat, comme l'a
déclaré M. Carrier Fortin, ministre provincial du Travail devant
l'Association des marchands en alimentation du Québec.
L'A.P.I. travaille à la formation d'un conseil du patronat, mais
on n'a pas encore réussi à
former une fédération, une association du patronat pouvant
parler au nom des employeurs. Le patronat tarde à s'organiser. Dans
certains pays européens, il y a une confédération qui se
fait le porte-parole de toutes les associations patronales pour toutes les
questions d'intérêt commun. La réponse à cet appel
doit venir des employeurs. »
M. le Président, le ministre répétait encore dans
« la Tribune » de Sherbrooke le 16 septembre 1963: « Il
n'existe pas d'association proprement patronale qui couvre tout le monde. A
l'ère où se développent des pratiques qui permettent aux
associations intermédiaires de se faire entendre, le patronat tarde
à s'organiser de sorte que personne n'est encore autorisé
à parler au nom du patronat québecois. » Ce sont des
déclarations du ministre. Quant à la demande qu'il faisait au
patronat de s'unir, je ne suis pas contre ça. Au contraire, j'y
adhère d'une manière toute particulière et je dis que plus
le patronat s'unira, plus aussi on aura dans les relations
patronales-ouvrières une meilleure entente.
Le ministre a entendu les réclamations qui ont été
faites contre un bill qui est à l'étude actuellement, le bill 54,
et je sais qu'il entendra aussi d'une aussi bonne oreille les protestations qui
vont être faites ou qui sont à la veille d'être faites
à la suite des amendements qui seront apportés par le
patronat.
Je n'ai pas besoin de vous dire que le ministre, à ce
moment-là, se montrera aussi bienveillant à l'endroit de la
classe des patrons qu'à l'endroit de la classe des travailleurs pour
donner justice et équité à tous.
M. le Président, il y a eu des critiques assez acerbes qui ont
été formulées par les organisations syndicales au sujet
d'une nomination, la nomination de M. J.-L.-C. Pilon.
M. FORTIN: Si le député de Champlain me permet, je vais
lui répondre immédiatement.
M. BELLEMARE: Bien je vais finir mon intervention.
M. FORTIN: Vous allez voir que ça va bien aller. C'est que,
depuis ce temps-là, j'ai rencontré les chefs des deux grandes
centrales syndicales et les deux m'ont dit que, à la suite de
négociations qu'avait présidées M. Pilon, nous sommes
très satisfaits de lui.
Dans le journal « Le Travail » il y a un paragraphe qui
disait: « M. Pilon a conduit les négociations avec une main de
maître », enfin une phrase de ce sens-là, dans
les négociations du textile. Et j'ai rencontré M. Roger Provost
il y a 15 jours ou trois semaines et il m'a dit: « M. Pilon, c'est lui
qui préside les négociations dans les textiles et nous sommes
très heureux et très satisfaits de lui. »
M. BELLEMARE: M. le Président, je prends la parole du ministre
parce que je ne les ai pas vues ces déclarations-là ni de la part
des métallos, ni de la part de la Fédération des
travailleurs du Québec ni de la part de la C.S.N. mais je sais que, le
24 février 1964, il y a eu des déclarations assez tapageuses
faites par les unions ouvrières dans la province et qui ont pris la
manchette à ce moment-là, comdamnant le ministre d'avoir
nommé M. Pilon à cette haute fonction de président
permanent des arbitrages.
Si le ministre me dit qu'il a rencontré depuis ce temps les
organismes syndicaux et qu'ils sont satisfaits, je ne peux pas être plus
catholique qu'eux. Mais je dis que j'avais ici une protestation assez
véhémente de la part des métallos qui reprochaient au
ministre d'avoir engagé un antisyndicaliste aussi
invétéré que le prétendaient les unions
ouvrières, surtout les métallos, parce qu'il avait pris part
à un conflit ouvrier que connaît le ministre, à Sherbrooke,
et qu'il avait fait des déclarations assez retentissantes. Mais si le
ministre me donne sa parole que les métallos sont satisfaits du choix
que le ministre a fait, depuis, je me conforme à ça.
M. FORTIN: M. le Président, je veux bien faire une distinction.
Je n'ai pas dit que les métallos, j'ai dit le textile et M. Provost, le
président de la F.T.Q. Maintenant, voici. LorsqueM. Pilon a
été nommé, il était un agent de relations
extérieures et agent de personnel pour une compagnie qui, à ce
moment-là, était en lutte assez vive avec une organisation
ouvrière.
A l'heure actuelle, lorsque nous avons besoin de négociateurs au
ministère du Travail et d'employés spécialisés,
évidemment il faut que nous allions les chercher dans les rangs de gens
qui ont de l'expérience. Et ces gens-là qui connaissent leur loi
ouvrière et qui ont de l'expérience, eh bien,
nécessairement ils ont évolué, ils ont travaillé
soit dans des associations patronales ou pour des employeurs, soit dans des
associations ouvrières. Si nous avons besoin d'un négociateur et
allons le chercher dans les rangs d'une union ouvrière, l'employeur
pourrait bien nous dire: « Bien écoutez, cet homme-là va
être partial. Il a travaillé pour une union ouvrière.
»
Je dis que dès qu'un homme entre au service du ministère
du Travail comme conciliateur, à ce moment-là on lui confie un
nouveau mandat.
Il doit travailler dans une nouvelle optique. Lors-
qu'il travaillait comme agent d'affaires pour un syndicat, il avait un
mandat de travailler pour défendre les Intérêts de son
syndicat. Et c'est le même principe qui s'applique lorsque je vais
chercher quelqu'un qui a travaillé par exemple dans une association
patronale ou pour un employaur. Il s'est formé là. A ce
moment-là il avait comme mandat de défendre les
intérêts de son employeur,et maintenant il est négociateur.
Eh bien, son mandat au service du gouvernement, c'est de s'efforcer de
concilier les deux parties.
Et je crois qu'on ne doit pas faire de procès d'intention aux
gens que l'on emploie de cette façon-là, parce que, sans
ça, il serait impossible de recruter des gens pour le ministère
du Travail. Je crois qu'il faut prêter à ces personnes qui se
spécialisent dans le domaine du travail, qu'elles soient du
côté employeur ou du côté employé, je crois
qu'il faut leur prêter de l'Intégrité intellectuelle at ne
pas les soupçonner d'être partiales lorsqu'elles viennent à
l'emploi du gouvernement parce qu'elles sortent des rangs soit du
côté patronal, soit du côté ouvrier.
Maintenant, au sujet de M. Pilon lorsque nous l'avons engagé,
nous avions fait faire une enquête assez sérieuse sur son cas et
dira qu'il était antisyndical, c'est-à-dire que c'était un
homme d'une philosophie antisyndicale, c'est faux et c'était mal le
juger. Mais qu'il aît par exemple, travaillé pour son employeur,
pour défendre les intérêts de son employeur, suivant le
mandat qui lui avait été confié avec assez de vigueur,
très bien, c'est tout à son honneur, Cela vaut dire que
c'était un homme consciencieux qui travaillait avec loyauté pour
ceux qui l'employaient.
Aujourd'hui il travaille au ministère du Travail at je puis dira
qu'à la première conciliation dont il a eu à s'occuper,
ç'a été dans le domaine du décret de la sacoche, et
c'était un problème excessivement...
M. BELLEMARE: De la quoi?
M. FORTIN: Dans l'industrie de la sacoche, la fabrication des
sacoches.
M. BELLEMARE: Une drôle de grève! M. FORTIN: Non, il n'y
avait pas de grève.
M. BELLEMARE: Une drôle d'appellation pour le ministre du Travail:
« la sacoche ».
M. CREPEAU: En avez-vous une meilleure?
M. FORTIN: En tout cas ce n'était pas en grève encore dans
ce domaine-là.
M. BELLEMARE: Est-ce que ce sont des hommes qui font ça?
M. FORTIN: Pardon? M. CREPEAU: A l'ordre.
M. FORTIN: Alors, M. le Président, le problème
était assez aigu, et M. Pilon a négocié. Après les
négociations, nous avons reçu, et de la part des employeurs, et
de la part des employés, une lettre qui a été
adressée au ministre du Travail disant: « Monsieur, nous vous
remercions de nous avoir envoyé un excellent conciliateur qui a
réussi à rétablir la paix et à éviter la
grève. »
A l'heure actuelle, il y a des négociations dans le domaine du
textile, et tout le monde sait que c'est une des industries principales de la
province de Québec, Je ne sais pas où en sont rendues les
négociations, mais je peux dire que j'ai rencontré le
représentant de la C.S.N., M. Ouellet, qui actuellement négocie
pour la C.S.N.
Il m'a déclaré, à mol, catégoriquement
l'autre jour lors de la réunion des conseillers en relations
industrielles: « M. le ministre, M. Pilon conduit les négociations
à notre entière satisfaction et nous avons exprimé notre
satisfaction dans notre journal « Le Travail »et il m'a
montré une coupure du journal à ce sujet-là. Et, l'autre
Jour, comme je le disais, lors le l'inauguration d'un édifice qui
appartient aux unions du vêtement pour dame lors de l'inauguration
officielle à Montréal, j'ai rencontré à cette
occasion, M. Roger Provost et c'est lui même qui a mis le sujet sur le
tapis et il m'a dit: M. Fortin, dans le textile nous sommes très
satisfaits des services que M. Pilon nous rend à l'heure actuelle dans
le domaine de la négociation.
M. BELLEMARE: M. le Président, est-ce encore M. Miron qui est en
charge du...?
M. FORTIN: Oui.
M. BELLEMARE: Son salaire a-t-il été changé?
M. FORTIN: Il est rendu, je pense, au maximum de sa classe. $10,200.
M. BELLEMARE: M. Moreau est encore assistant du service du district de
Montréal?
M. FORTIN: Est-il assistant? Il n'est pas assistant mais il a la
même position.
M. BELLEMARE: Dans le rapport on lui donne le titre d'assistant.
M. FORTIN: C'est M. Pilon qui est assistant.
M. BELLEMARE: M. Pilon. Alors, M. le Président, combien de
grèves non réglées au premier mars 1964?
M. FORTIN: Je pense qu'il y en a trois ou quatre.
M. BELLEMARE: Sur les 47?
M. FORTIN: D'après le rapport du 19 avril 1964, il y a la
grève de Janin construction à St-Hyacinthe qui n'est pas
réglée. Après ça c'est, je crois, National Heel
à St-Jérôme et Hebdo Printing à Montréal et
puis Fashion Craît à Victoriaville. Quatre.
M. BELLEMARE: Et Manicouagan. Manic 2, Manic 5...
M. FORTIN: C'est réglé ça. Manic 2, Manitou
Bar...
M. BELLEMARE: La grève des comptoirs forestiers, c'est
réglé?
M. FORTIN: Les comptoirs forestiers? Oui. M. BELLEMARE: La semaine
dernière?
M. FORTIN: Bien, je suppose. Il y a trois semaines, je pense. Une
quinzaine de jours. A tout événement, c'est
réglé.
M. BELLEMARE: Combien de grèves? Le ministre dit: « 47
»
M. FORTIN: En tout et partout? En quelle année ça?
M. BELLEMARE: Dans l'année du premier... M. FORTIN: De mars 1963
à mars 1964, 50. M. BELLEMARE: Combien? M. FORTIN: 50.
M. BELLEMARE: 50 grèves. 4 qui ne sont pas
réglées.
M. FORTIN: A l'heure actuelle, oui.
M. LE PRESIDENT: Adopté.
M. BELLEMARE: Non. Juste un instant. M. le Président, dans les
grèves qui ne sont pas réglées, est-ce que la grève
de St-Jérôme n'est pas la plus contentieuse, la plus difficile?
Celle où les parties semblent le plus en désaccord?
M. FORTIN: Eh bien, c'est bien difficile pour le ministre du Travail de
donner une opinion à savoir...
M. BELLEMARE: C'est pour demander au ministre du Travail si son aide a
été requise?
M. FORTIN: Ah oui. A National Heel nous avons envoyé le
négociateur à plusieurs reprises. A St-Hyacinthe la même
chose et même encore dernièrement il y a eu de la conciliation
à ce sujet-là. Mais évidemment, comme le ministère
du Travail, d'après la Loi n'a aucun pouvoir de coercition, nous ne
pouvons pas imposer, ni à l'employeur ni à l'employé, des
conditions de travail. Tout ce que le négociateur peut faire c'est
d'essayer de rapprocher les parties, essayer de les raccorder le plus possible.
Mais les parties restent maîtresses de décider si elles vont
terminer la grève, si elles vont s'entendre. Actuellement, à
National Heel ce n'est pas encore en voie de règlement et puis à
St-Hyacinthe, encore avant hier...
M. BELLEMARE: A St-Hyacinthe cela se trouve dans le domaine de la
construction.
M. FORTIN: Grève entre la compagnie Janin construction et le
Syndicat des métiers de la construction de St-Hyacinthe.
M. BELLEMARE: Est-ce que celle de Victoriaville dont j'ai reparlé
au ministre, l'autre jour, est comprise dans ça?
M. FORTIN: Dans ça? Oui. M. BELLEMARE: Non.
M. FORTIN: Janin construction, National Heel, Hebdo Printing puis
Fashion Craft.
M. BELLEMARE: Non, Fashion Craft...
M. FORTIN: Les quatre grèves sont actuellement en marche.
M. BELLEMARE: Est-ce que véritablement, à Victoriaville,
c'est une grève ou si c'est une suspension de travail pour
étude?
M. FORTIN: Bien écoutez! Bien ah ça...
M. BELLEMARE : Bien non, non; mais ce qui nous est dit, là...
M. FORTIN: C'est-à-dire dans le document que j'ai, c'est
classé comme un endroit où il y a un conflit où ça
ne travaille pas.
Je ne donnerai pas d'opinion légale en Chambre ici, pour
déterminer si l'arrêt de travail à Fashion Craît
à Victoriaville; si c'est une grève légale ou
illégale. Il ne m'appartient pas pour l'instant de donner une opinion
à ce sujet-là en Chambre.
M. BELLEMARE: Est-ce qu'il n'y a pas eu l'autre jour, entre le ministre
des Richesses naturelles et puis le ministre du Travail et le
député de comté, une réunion pour essayer de
trouver une solution à ce problème de Victoriaville...
M. FORTIN: Oui.
M. BELLEMARE: ... pour qu'on puisse empêcher cette industrie qui
avait mis à pied les commis de bureaux dans le dessin probablement de
déménager à Montréal? Est-ce qu'il s'est produit
quelque chose depuis la semaine dernière à la suite de mon
intervention?
M. FORTIN: Je crois qu'il ne serait pas pour l'instant dans
l'intérêt public que je révèle les moyens qui seront
pris probablement pour règler ce différend.
M. BELLEMARE: Est-ce que le ministre prétend que ça finira
par se règler assez prochainement?
M. FORTIN: Je le crois.
M. BELLEMARE: Vous le croyez. M. le Président, dans son service,
a combien le ministre compte-t-il de conciliateurs permanents?
M. FORTIN: C'est divisé en deux bureaux Il y en a un à
Montréal et un à Québec.
M. BELLEMARE: Oui, un à Montréal sur la rue McGill et un
à Québec.
M. FORTIN: Alors, d'après nos chiffres du mois de janvier 1964,
nous en avons 24 à l'heure actuelle.
M. BELLEMARE: 24 conciliateurs à Montréal?
M. FORTIN: Non, non, dans les deux. A Québec et à
Montréal.
M. BELLEMARE: Combien à Montréal et combien à
Québec?
M. FORTIN: Nous en avons 14 à Montréal et 10 à
Québec.
M. BELLEMARE: Dix à Québec. Est-ce que le ministre
pourrait me donner la liste des employés de Montréal?
M. FORTIN: Voulez-vous que je vous les nomme?
M. BELLEMARE: Juste les nommer.
M. FORTIN: Messieurs Cyprien Miron, Pilon, Asselin, Francoeur, Maurice
Cantin, A. Coutellier, Guy Deschênes, Gilles Desmarais, Claude Dumais,
Maurice Durand, L. Maloin, C.-E. Montbleau, E. Moreau, John Valentine, Cela,
c'est à Montréal. A Québec, messieurs
Bérubé, J.-B. Bellemare, Claude Bender, G. Charbonneau,
Léonce Cliche, François Guérin, J.-B. Lafleur, Jean
Lapointe, Roger Leclerc, A. Parent, André Racine, Léopold Jasmin
et Lauréat Cantin.
M. BELLEMARE: M. Guindon travaille-t-il pour le ministère?
M. FORTIN: Il travaille comme médiateur à la Commission
des relations ouvrières.
M. BELLEMARE: Très bien. Est-ce qu'il y a un autre plan...
M. LE PRESIDENT: 4.
M. BOUDREAU: Je voudrais demander au ministre comment se fait le choix
d'un président de tribunal d'arbitrage?
M. FORTIN: Bien ça dépend dans quel domaine. Règle
générale, au début les parties s'entendent entre elles
pour se choisir un président. La partie ouvrière choisit
l'arbitrage syndical, la partie patronale choisit son arbitre et les deux
arbitres essaient de s'entendre pour en choisir un troisième et
lorsqu'il ne s'entendent pas, eh bien, c'est le ministre d'office qui nomme un
président du tribunal d'arbitrage.
Dans le choix de cet arbitre, de ce président nommé
d'office par le ministre du Travail, nous avons une liste qui a
été préparée au mi-
nistère du Travail après consultations avec les parties
ouvrières et les parties patronales. Chacune des parties nous a fait des
suggestions, nous a suggéré des noms, et c'est à
même cette liste-là que nous puisons. C'est une liste qui comprend
des juges de la Cour supérieure, de la Cour de magistrat, certains
économistes spécialistes en matière du travail et quelques
avocats.
M. BOUDREAU: Ah, c'est ça que je voulais savoir. Le ministre a
une liste. Je comprends qu'il en a une. Maintenant, est-ce que les arbitres
patronaux reçoivent un salaire uniforme pour chaque tribunal
d'arbitrage?
M. FORTIN: Les arbitres patronaux et les arbitres syndicaux sont
payés par le ministère, mais suivant un prix qui est fixé
par un arrêté en conseil. C'est $10 par séance pour les
arbitres et $25 par séance pour le président du tribunal
d'arbitrage. Et en plus, le président du tribunal d'arbitrage, lorsqu'il
a rédigé la sentence reçoit un honoraire de $100 pour la
rédaction et toutes les copies.
M. BOUDREAU: Merci.
M. LE PRESIDENT: Adopté. 9- « Service de recherche et de
l'information ».
M. BELLEMARE: M. le président, là c'est un nouveau service
qu'on forme au ministère du Travail qui groupera 11 nouveaux
employés et qui demande des crédits de $77,000 au lieu de
$40,000. Des recherches sur tous les sujets qui touchent le monde du travail et
qui seront transmis es au public, les réalisations des différents
services et des commissions du ministère.
Ce service, M. le Président, sera présidé par un
directeur relevant des sous-ministres. Qui, M. le Président, est le
directeur?
M. FORTIN: C'est M. Gilles Néron qui est le directeur
intérimaire.
M. BELLEMARE: Intérimaire. M. Néron sera-t-il
confirmé dans ses fonctions ou si le ministère prévoit
d'autres nominations?
M. FORTIN: Bien, on verra ça à l'expiration du
délai que j'ai fixé à ce sujet.
M. BELLEMARE: Maintenant, M. le Président, ce Service de
l'information va faire quoi en somme?
M. FORTIN: D'abord, je voudrais attirer l'attention du
député de Champlain sur ceci: c'est que nous avons pris des
crédits qui auparavant, étaient à l'item «
administration » et nous les avons versés à l'item 9. Le
Service de recherche et de l'information, comprend toute la publicité,
l'impression des décrets, des textes de loi. Ce Service d'information et
de recherche va aussi s'occuper de compiler, en coopération avec le
ministère de l'Industrie et du Commerce, des statistiques concernant le
chômage, concernant l'emploi, enfin toutes les statistiques qui peuvent
aider le monde du travail.
En plus, nous faisons une analyse des conventions collectives; je crois
qu'il y a actuellement, par exemple, les décrets, je pense qu'il y a 110
décrets dans la province de Québec à l'heure actuelle, en
vigueur. Après ça, il y a 2,500 conventions collectives. Alors,
ce Service d'information et de recherche va faire une analyse de toutes ces
conventions pour essayer de trouver les standards de salaires, les standards
d'emploi dans la province afin d'aider ceux qui négocient des
conventions collectives. Alors, c'est de préparer la documentation, de
fournir aux négociateurs, aux patrons comme aux ouvriers, et aux
négociateurs du ministère du Travail des renseignements afin de
rendre le plus efficace les négociations et puis faciliter les relations
industrielles entre les employeurs et les employés.
Ce service des recherches et d'informations va publier, comme je l'ai
déjà annoncé, un recueil contenant toutes les
décisions sur les conflits de droits émanant de la Commission des
relations ouvrières, des tribunaux, les principales sentences sur les
griefs, afin de découvrir un peu quelle est, dans ce domaine, la
jurisprudence; encore pour aider tous les gens qui s'intéressent aux
relations de travail. Vous avez pu voir que, depuis quelques mois, notre
bulletin s'est amélioré considérablement et nous voulons
également améliorer les publications du ministère du
Travail. C'est à cette tâche que va se consacrer le service
d'information et de recherche.
M. BELLEMARE: Je crois que c'est « La Revue du travail »
dont veut parler le ministre? C'est « La Revue du travail ? »
Est-ce que le ministère va en faire tenir des exemplaires aux
députés de l'Assemblée législative? nous n'en
recevons pas encore. Est-ce que le ministre pourrait nous en faire distribuer
à tous les députés. C'est une revue qui va prendre de
l'expansion...
M. FORTIN: C'est très bien.
M. BELLEMARE: Je comprends que ça va entrer dans quatre secteurs
différents, d'après la déclaration du ministre: la section
économique, la section juridique, la section sociale et la section
technologique. C'est dans le bulletin « La Revue du travail » que
seront condensés tous les jugements, c'est le ministre qui dit
ça. « La Revue du travail » constituera un recueil où
l'on trouvera toutes les sentences arbitrales et toutes les décisions de
la Commission des relations ouvrières résumées et
classées.
M. FORTIN: Si le député de Champlain veut me le permettre.
Il ne faudrait pas confondre ce bulletin mensuel avec...
M. BELLEMARE: Avec « La Revue du travail. »
M. FORTIN: Non, c'est une autre chose encore. C'est un recueil
spécial de jurisprudence que nous allons publier.
M. BELLEMARE: Et qui va s'appeler « La Revue du travail?
»
M. FORTIN: Cela va s'appeler « Recueil des décisions sur
des conflits de droits ».
M. BELLEMARE: Ah bon! Adopté.
M. LE PRESIDENT: Adopté. La séance du comité est
suspendue jusqu'à huit heures.
Reprise de la séance à 8 h p.m.
M. BEDARD (président du comité des subsides): A l'ordre,
messieurs. Ministère du Travail, article 2.
M. BELLEMARE: M. le Président, le Conseil supérieur du
travail, $20,000 cette année comparativement à $30,000 l'an
passé, $10,000 de moins. Je ne sais pas pourquoi. Le ministre nous le
dira probablement dans ses explications. Mais je voudrais lui demander,... je
sais que le mandat du Conseil supérieur du travail prenait fin le 2 mars
1963; il a dû y avoir un arrêté ministériel à
ce moment-là, pour nommer des nouveaux membres. Je sais qu'on a
publié dans les journaux qu'on a nommé huit nouveaux membres au
Conseil. Dans les nouveaux membres: M. Ernest Beringham de la Fraternité
ferroviaire internationale. Qui a-t-il remplacé à ce moment
là, M. le Président?
M. FORTIN: M. le Président, c'est assez difficile de
répondre à ces questions-là parce que le mandat du Conseil
du travail a été renouvelé à son expiration. J'ai
les noms de tous les membres du Conseil supérieur du travail, mais vous
dire que M. Beringham remplaçait monsieur Untel, là je ne puis
vous le dire.
M. HAMEL (St-Maurice): Il remplaçait le gros, assez
âgé qui travaillait à notre ministère avant.
M. BELLEMARE: M. Mortimer Baker?
M. HAMEL (St-Maurice): M. Baker, lui, je pense que c'est la C.N.E. Il
était nommé, suggéré par la C.N.E.
M. FORTIN: Je vais vous donner la liste...
M. BELLEMARE: Ah, je l'ai! Les huit nouveaux membres.
M. FORTIN: ... non, mais je peux vous donner la liste et qui ils
représentent.
M. BELLEMARE: Ah, oui, oui. Cela, ça m'intéresserait.
M. FORTIN: Alors, au Conseil supérieur du travail le groupe A, le
côté travail: représentant de la
Confédération des syndicats nationaux, M. Jean Marchand, M.
Marcel Pépin et M. Jean-Paul Geoffroy...
M. BELLEMARE: Une minute. Jean Marchand, Gérin-Lajoie. Marcel
Pépin...
M. FORTIN: Non, non. Pour la Confédération des syndicats
nationaux, M. Jean Marchand, M. Marcel Pépin, M. Jean-Paul Geoffroy.
M. BELLEMARE: M. Jean-Paul? M. FORTIN: Geoffroy.
M. BELLEMARE: Il remplaçait Jean Gérin-Lajoie?
M. FORTIN: Non, non, M. Jean Gérin-Lajoie est de la F.T.Q.
M. BELLEMARE: Membre de la commission permanente, première...
M. FORTIN: Maintenant, la Fédération des travailleurs du
Québec est actuellement représentée par M. Roger Provost,
M. Jean Gérin-Lajoie et M. John Purdy.
M. BELLEMARE: Ah oui!
M. FORTIN: La Corporation des instituteurs et institutrices catholiques
du Québec est représentée par M. Leopold Garant.
M. BELLEMARE: Le même.
M. FORTIN: La Fraternité ferroviaire internationale par M. Ernest
Beringham.
M. HAMEL (St-Maurice): Il a remplacé M. Messier.
M. BELLEMARE: Ah oui, oui.
M. FORTIN: Il a remplacé M. Messier.
M. BELLEMARE: Oui, oui.
M. FORTIN: Bon! Le groupe B qui représente les employeurs...
M. BELLEMARE: Ernest Messier?
M. FORTIN: Oui. ... représentant les employeurs: l'Association
des manufacturiers canadiens représentée par M. J.-J. Gagnon, W.
M. Baker; l'Association professionnelle des industriels est
représentée par M. Charles-E. Lebrun et M. Jean Girouard;
l'Association des marchands détaillants du district de Québec
incorporée représentée par M. Alfred Levesque.
M. BELLEMARE: Par qui?
M. FORTIN: Alfred Levesque. La Quebec Metal Mining Association est
représentée par M. Jean-Pierre Després.
M. BELLEMARE: Le même.
M. FORTIN: La Fédération de l'industrie de la construction
de la province de Québec est représentée par Me Jean
Cournoyer; l'Association des Industries forestières du Québec est
représentée par M. C. -A. Després.
Le groupe C qui comprend des économistes et sociologues est
constitué de Me Maxwell Cohen, professeur à la Faculté de
droit de l'Université McGill.
M. JOHNSON: Il est doyen maintenant.
M. FORTIN: Il est doyen depuis ce temps-là?
M. JOHNSON: De la semaine dernière.
M. FORTIN: De la semaine dernière. C'est parce que mon volume n'a
pas été corrigé à date.
M. Jacques Parizeau, professeur agrégé à l'Ecole
des hautes études commerciales de l'Université de
Montréal, M. Jacques St-Laurent secrétaire du département
des relations industrielles de la Faculté des sciences sociales de
l'Université Laval, M. Jean-Réal Cardin qui est professeur
titulaire au département des relations industrielles de la
Faculté des sciences sociales de l'Université Laval, M.
André Bisson, professeur agrégé à la faculté
de commerce de l'Université de Montréal; Armand Leroux,
professeur agrégé à la faculté de commerce de
l'Université de Sherbrooke; H.-D. Woods, directeur du centre des
relations industrielles de l'Université McGill; Roland Parenteau,
professeur titulaire à l'école des Hautes études
commerciales de l'Université de Montréal.
Maintenant le groupe D, composé des membres adjoints: M.
Gérard Tremblay, le sous-ministre du Travail; M. Donat Quimper,
sous-ministre adjoint du Travail, et M. Gilles Néron, conseiller
technique et directeur intérimaire du service d'information et de
recherche du ministère du Travail.
M. BELLEMARE: M. Néron a remplacé M. Lambert?
M. FORTIN: Oui.
M. BELLEMARE: M. Lambert était un conseiller juridique au
ministère du Travail?
M. FORTIN: Oui.
M. BELLEMARE: Est-ce qu'il est encore là:
M. FORTIN: Oui.
M. BELLEMARE: Est-ce que le ministre pourrait nous faire parvenir une
liste complète du Conseil supérieur du travail ainsi que des
membres de l'exécutif, les membres du conseil?
M. FORTIN: De la Commission permanente?
M. BELLEMARE: De la Commission permanente, les membres de la Commission,
les représentants patronaux.
M. FORTIN: Les membres de la Commission permanente: Mr Marcel
Pépin, le président; M. Després,
vice-président.
M. BELLEMARE: Non, non, mais que le ministre m'en fasse parvenir une
copie s'il veut.
M. FORTIN: Très bien.
M. BELLEMARE: Du Conseil supérieur et les membres de la
Commission permanente, Maintenant, M. le Président...
M. FORTIN: Une question à laquelle je veux répondre...
M. BELLEMARE: Oui, oui.
M. FORTIN: ... vous demandez pourquoi nous réduisons de $20,000
à $10,000.
M. BELLEMARE: Pardon?
M. FORTIN: Vous demandez pourquoi nous avons réduit.
M. BELLEMARE: De $30,000 à $20,000.
M. FORTIN: C'est parce que, d'après l'expérience du
passé, ils n'épuisent jamais le plein montant. L'an dernier, par
exemple, prenez en 1962-1963, nous avions voté $30,000 et au 3 mars 1963
ils avaient dépensé $4,659.86 laissant un crédit de
$25,000. En 1963-1964 nous avions voté encore $30,000, le Conseil
supérieur a dépensé $6,861.10, laissant des crédits
de $23,000. Alors cette année on l'a réduit à $20,000 et
puis nous espérons bien qu'avec ça, nous allons pas mal
balancer.
M. BELLEMARE: Le ministre, dans son rapport, nous fournissait
habituellement les noms de tous ces membres. Je retrouve une partie de ces
membres-là, je pense que ça va faire; je pense que je viens de
les retrouver parmi les membres de la Commission permanente. Le ministre n'aura
pas besoin de me les faire parvenir.
Maintenant, M. le Président, le Conseil supérieur du
travail a siégé trois fois dans l'année. Il a
siégé le 25 mai 1962,1e 13 juin et le 26 mars 1963.
M. FORTIN: Le 28 mai 1963.
M. BELLEMARE: Le 28 mai 1963. Quatre fois. Au Conseil, d'abord on a
été très heureux de recevoir la visite d'un homme qui, au
point de vue des relations patronales et ouvrières, connaît bien
le sujet, en la personne du sous-ministre M. Tremblay. On l'a
écouté présenter des projets d'amendement aux lois des
établissements industriels et commerciaux, de relations, de relations
ouvrières, de la convention collective. Ce devait être très
intéressant mais nous aurions aimé, si c'était possible,
connaître les points de vue du sous-ministre. Ils ont aussi, le Conseil
supérieur du travail, fait des suggestions très opportunes pour
améliorer la loi de l'organisation en forêt. Le ministre
pourrait-il nous dire s'il y aura une législation qui sera
adaptée aux recommandations du Conseil supérieur du travail
d'abord dans cette première phase d'étude de l'organisation en
forêt? Deuxièmement, la définition du terme «
employeur » dans les organisations forestières. Est-ce que le
ministre veut prendre quelques notes sur ces sujets-là?
M. FORTIN: Bien, une partie de ces recommandations-là,... nous
nous en sommes servis dans le bill 54, pour la question des employeurs.
M. BELLEMARE: Non.
M. FORTIN: Une partie.
M. BELLEMARE: Ah! bien non.
M. FORTIN: Alors quelles sont ces recommandations-là?
M. BELLEMARE: Voici. Le Conseil supérieur du travail a fait des
recommandations particulières en ce qui regarde l'organisation
ouvrière en forêt. La définition du mot « employeur
» dans les industries forestières, dans la contribution syndicale
chez les bûcherons, le
Conseil supérieur du travail a étudié ces
modalités-là, et l'avantage qu'il y aurait que les plaintes de
congédiement soient entendues par un juge seul. C'est dans le bill 54,
comme la nomination d'un 3e vice-président à la Commission des
relations ouvrières.
M. BELLEMARE: Maintenant le ministre a demandé aussi... je vais
le laisser répondre sur ces choses-là parce que j'ai d'autres
questions qui regardent le Conseil supérieur du travail. Le ministre me
dit qu'ils sont compris dans le Code du travail mais je pense que le ministre,
s'il se souvient des allégués qu'ont faits en bas certains
représentants de l'U.C.C. concernant les exploitations
forestières, en particulier un M. Lévesque, il se souviendra des
revendications qu'il a faites spécialement en ce qui concerne le mot
« employeur », dans les relations ouvrières dans les
forêts.
M. FORTIN: Les recommandations du Conseil supérieur en ce
domaine-là ont été étudiées par le
ministère du Travail et, lorsque nous avons préparé le
bill 54, nous avons tenu compte de certaines des représentations. Nous
ne disons pas que nous avons tenu compte de toutes les recommandations du
Conseil supérieur mais, en ce domaine, leur représentations ont
servi à préparer certains articles du bill 54 actuel.
Maintenant, je me souviens très bien que M. Lévesque a
discuté de la définition du mot employeur en forêt mais, si
vous regardez les dispositions du bill 54, nous nous sommes servis
énormément de ses recommandations. Il y a toute une série
de définitions spéciales dans le bill 54; ce que sont le
détenteur du droit de coupe, le détenteur du permis de coupe,
etc. Alors nous nous sommes inspirés des recommandations du Conseil
supérieur.
M. BELLEMARE: M. le Président, je me réserve le
privilège de reparler, à l'occasion du bill 54, des
définitions parce que ça reviendra en Chambre pour
l'étude. Me serait-il permis de demander au ministre du Travail si les
amendements qui ont été préparés par le Conseil
exécutif de la province ont été soumis de nouveau au
Conseil supérieur du travail après les changements qui devaient
être apportés au bill 54?
M. FORTIN: Vous pourrez poser cette question-là lorsqu'on
discutera du bill 54.
M. BELLEMARE: Bon, alors c'est bon. Je suis sûr que le ministre ne
les a pas soumis parce que le Conseil n'a pas siégé.
M. FORTIN: Si vous êtes sur, pourquoi me poser la question?
M. BELLEMARE: Bien, c'est pour vous dire que le Conseil aurait dû
siéger, que le Conseil supérieur du travail qui est un
organisme...
M. FORTIN: M. le Président, je soulève une question de
règlement. Je crois que c'est absolument hors d'ordre. Nous discuterons
de ça lorsque nous étudierons le bill 54.
M. BELLEMARE: Oui, nous avons hâte de connaître d'abord les
amendements et de discuter de ce bill contentieux.
UNE VOIX: A l'ordre.
M. BELLEMARE: M. le Président, le Conseil supérieur du
travail est un organisme qui, pendant quelques années, au dire de
l'ancien ministre, a été mis dans un réfrigérateur.
Il n'a pas siégé. Et il fallait entendre le député
de St-Maurice d'aujourd'hui, le Procureur général, lorsqu'il
parlait de l'inactivité du Conseil. Je demande aujourd'hui si les 35
mémoires de la convention collective qu ont été soumis au
Conseil supérieur du travail ont été, depuis le 28 mai
1963, étudiés de nouveau par la commission permanente.
M. FORTIN: M. le Président, des avis ont été mis
dans les journaux à partir du mois de septembre, je crois, ou octobre
par le Conseil supérieur du travail invitant tous les organismes
intéressés à faire parvenir au Conseil supérieur
des mémoires sur la Loi de la convention collective. Il y a environ, je
crois, 35 mémoires qui ont été envoyés au Conseil
supérieur du travail et, depuis ce temps-là, la commission
permanente du Conseil supérieur s'est réunie,...
M. BELLEMARE: Le 14 février.
M. FORTIN: ... ah! 5 ou 6 fois depuis ce temps-là. Ils ont
étudié les mémoires et ils ont demandé que des
spécialistes soient adjoints à cette commission pour leur aider
à travailler. Nous avons retenu les services d'un M. Raymond
Gérin et nous venons également de retenir, il y a quelques jours,
les services d'un diplômé en relations industrielles.
Ces deux personnes, avec deux ou trois autres officiers du
ministère, vont faire une enquête assez approfondie de
l'administration des comités paritaires, sur la manière suivant
la- quelle la Loi de la convention collective est administrée. Ils vont
faire un rapport de statistiques et de faits à ce sujet et vont remettre
ça à la commission permanente qui, conjointement avec ces
spécialistes, vont ensuite analyser les mémoires, les
étudier et finalement faire un rapport d'abord au Conseil
supérieur du travail et par la suite, évidemment, au ministre du
Travail et au gouvernement.
M. BELLEMARE: M. le Président, la législation concernant
les conventions collectives ne sera sûrement pas prête pour cette
session.
M. FORTIN: Définitivement non.
M. BELLEMARE: Non. Est-ce que le ministre a l'intention de
présenter la deuxième tranche du Code du travail à la
session 1965, à l'ouverture de la session 1965?
M. FORTIN: Bien, M. le Président, tout dépendra où
le Conseil supérieur du travail sera rendu dans tout son travail
à ce moment-là.
M. BELLEMARE: Je suis très heureux d'entendre monsieur le
ministre qui nous dit que le Conseil supérieur du travail est en
fonction, surtout la Commission permanente qui siège assez
régulièrement pour prendre connaissance des 35 mémoires
qui ont été soumis concernant les conventions collectives et je
dirais je ne veux pas répéter ce que j'ai dit l'autre soir
sur l'automaiion, mais je serais très heureux vu que le ministre
a lancé à travers la province le cri, surtout l'avertissement
« priorité à l'automation ». Je pense que le Conseil
supérieur du travail et la Commission permanente devraient dès
aujourd'hui en prendre connaissance et probablement soumettre au ministre des
recommandations adéquates.
D'ailleurs, la Confédération des travailleurs du Canada,
à son congrès qui s'est terminé dimanche, en a fait une
particularité dans ses recommandations et elle a donné une foule
de statistiques, surtout des recommandations qu'il serait très utile
d'entendre et d'obtenir.
Le Congrès du travail du Canada, par son président, M.
Jodoin a établi une commission spéciale pour étudier ce
problème qui dit-il est un problème d'urgence économique.
Et, ce Conseil mériterait qu'on prenne ses suggestions, mais le Conseil
supérieur du travail devrait être pressenti autant, comme le
ministre l'a fait pour les conventions collectives du travail.
M. le Président, je n'ai pas d'autre question. Si mes
collègues en ont concernant le Conseil supérieur du
travail...
M. LE PRESIDENT: Article 2, adopté. Article 3, relations
patronales ouvrières.
M. BELLEMARE: M. le Président, mon collègue de Ste-Marie
voudrait vous exposer un problème.
UNE VOIX: Présentez-nous le.
M. CHARBONNEAU: M. le Président, à cet article des
relations patronales-ouvrières j'aimerais porter à l'attention du
ministre certains malaises qui existent dans la convention collective des
bijoutiers, présentement en force dans notre province.
J'aurais préféré discuter amicalement avec le
ministre. C'est pour ça que le 17 mars je lui avais fait parvenir une
lettre lui demandant une entrevue à son bureau. Malheureusement, les
circonstances ne l'ont pas permis, Par ce que je vais annoncer, je ne voudrais
pas attaquer le ministre du tout, comme je le lui disais dans ma lettre du 17
mars, dans le deuxième paragraphe et je cite: « Je sais que vous
n'êtes pas à blâmer dans les circonstances parce que cet
état de chose existait honteusement bien avant votre arrivée au
poste que vous occupez présentement. »
Il existe une convention collective dans toute la province sauf dans la
ville de Montréal et dans le district de Hull. Cette convention
collective, comme tout le monde le sait, est une excellente chose en autant
qu'elle est administrée convenablement. Mais voici qu'elle a
été présentée par un groupe de bijoutiers de la
section de Drummondville incorporés sous le nom de Corporation des
horlogers-bijoutiers de la province de Québec.
Cette corporation n'en est pas une comme les autres. Quoique son nom
porte le nom de corporation, ce n'est pas une corporation fermée. Dans
son statut il y a trois mots qui précisent que: « appartient qui
veut ». Autrement dit, c'est une corporation sans l'être. C'est
plutôt un genre d'association sauf qu'elle a le privilège de
donner un titre à ses membres qui s'appellent des M.Il.B. «
Maîtres-horlogers-bijoutiers ».
On a parcouru au tout début, la province, après que la Loi
de la convention collective eut été établie et on a
tablé sur la convention collective. On a fait du recrutement pour la
corporation et pour votre information, on réclame $40 pour faire partie
de la corporation, plus 1% que les bijoutiers ont à payer,
c'est-à-dire 1/2% par l'employeur et 1/2% par l'employé.
Ce qui est malheureux, c'est que, avec les années, les bijoutiers
se sont demandé, à un moment donné, pour quelle raison ils
auraient à payer $40.00, s'ils ne sont pas obligés d'appartenir
à aucune association que ce soit. Alors, voici ce qui arrive. C'est que,
quand un bijoutier discontinue de payer son $40, un bijoutier qu'on a
toléré jusqu'à ce temps-là, je peux vous citer des
cas. C'est ce que j'aurais voulu vous démontrer monsieur le ministre,
à votre bureau, des bijoutiers qui ont 35, 40, 50 ans d'existence, qu'on
a toujours tolérés, qui ont même des droits acquis, et
dès la journée où ils discontinuent de verser le $40
à la Corporation, immédiatement on leur exige des examens, on
leur fait des causes en Cour, on les poursuit, et pour votre information,
l'Association des bijoutiers a fait les relevés, sur 40 poursuites,
ça a coûté $2,484.45 aux bijoutiers qui ont
été poursuivis, soit une moyenne de $62.10 chacun, et je puis
vous dire que ça comprend, un minimum de $25 par poursuite, allant
jusqu'à $371 pour un seul cas.
C'est vous dire que, quand un bijoutier, comme je peux vous citer
un cas, ici, de mémoire, dont je vous ai envoyé le dossier, qui
vient de Ste-Anne-de-la-Pérade et me demande dans sa lettre: « Je
désirerais avoir quelques renseignements concernant la Corporation. Je
ne désire plus faire partie de cette corporation. (Cela, c'est sa
décision à lui, mais c'est là que commencent son malheur
et ses troubles). Et je demande s'il peut y avoir des sanctions
désagréables pour l'avenir disons dans le cas de
décès, si mon épouse pourrait continuer la vente des
montres. » Je ne continue pas la lettre, mais vous voyez la
préoccupation, et cette préoccupation-là, elle est
logique, parce qu'elle s'est produite avant
Il y a eu des cas où le mari est mort, et l'on a
immédiatement commencé à harceler la veuve. J'ai un cas
ici d'un magasin dans Trois-Rivières, qui avait au-dessus de 50 ans
d'existence. Le père de famille meurt, on fait dépenser une
petite fortune, pour ces gens-là, c'est une petite
fortune, à les talonner par des actions; finalement, la veuve qui
n'est pas jeune, nécessairement après 50 ans d'affaires, elle
n'est certainement pas jeune, eh bien, elle ferme son commerce. Cela, ce sont
les choses que je signale, que je considère extrêmement
regrettables et disgracieuses, et qui se pratiquent à travers la
province. Ce n'est pas un cas isolé que je vous donne là, c'est
un cas, un exemple seulement.
Ce qui est malheureux également, c'est que, dans le cas que je
vous cite celui de Ste-Anne-de-la-Pérade, la corporation lui envoie sa
première lettre quand il ne paye pas sa contribution. Elle vient de la
Corporation,
et voici de quelle façon elle se lit: « Nous avons le
regret de vous dire qu'à défaut d'acquitter votre contribution,
cela entraînera une annulation du certificat qui vous a été
émis. Conséquemment, nous nous voyons dans l'obligation de vous
avertir de nouvelles procédures ». On emploie le mot
«procédures » là. Il y a un semblant de menace.
Si vous remarquez, pour le commun des mortels qui reçoit une
lettre et se fait menacer de procédures, il pense seulement à une
chose, il pense à la Cour immédiatement, il pense aux
procédures, au droit, et ce que ça va lui coûter quand cela
a coûté tant d'argent aux autres. Maintenant, la carte dont on
parle dont je vous ai envoyé un exemplaire monsieur le ministre, c'est
une carte sur laquelle il est mentionné, « Corporation des
horlogers-bijoutiers de la Province de Québec, section sociale des
employeurs. » On marque son nom, « M. Yvon, » et puis on met
en petite lettre en bas, « membre en règle de la corporation des
horlogers-bijoutiers de la Province de Québec, à titre de
compagnons horlogers-bijoutiers. »
Dans l'ancienne loi, le compagnon horloger était comme
aujourd'hui. Aujourd'hui, ils ont. le maître, ils ont le « senior
» et le « junior ». Dans ce temps-là, il y avait le
maître et le compagnon, alors, on lui dit ici qu'il est
considéré comme compagnon. Alors, le type prend pour acquis lui,
que c'est une carte de compétence ça. La preuve, c'est qu'il
m'écrit dans une autre lettre, qu'il a sa carte de compétence,
puis tout ça. Alors, je lui demande une copie de sa carte, et je lui
demande s'il a passé des examens. Il n'en a jamais passés. Mais
voici un type qui est en affaires depuis à peu près 25 ans, qui
est sûr d'être dans son droit, qui est accepté et
toléré depuis toujours, et puis à la minute où il
manque de payer cette contribution-là, on lui saute dessus, on le
poursuit.
Remarquez bien que la lettre par laquelle on l'avise vient de
Montréal, puis lui il est ici à Ste-Anne-de-la-Pérade, et
puis en plus elle est signée par un M. Camille Vertefeuille qui, lui,
demeure à Sorel. Alors, réalisez-vous, là, dans quelle
situation le petit bijoutier d'une place comme celle-là se trouve. Il
n'a qu'un choix, celui d'ailleurs que je lui ai conseillé: paie ta
contribution, puis qu'est-ce que vous voulez, paie ton $40!
Alors, les gens deviennent victimes de, je ne vous dirai pas le mot,
mais vous pouvez le penser, je ne dirai pas ça ici en Chambre, c'est
antiparlementaire. Cela, ça se pratique, et à part ça, ce
n'est qu'un cas.
J'en ai un autre que je vous ai envoyé aussi, un cas de
Rivière-du-Loup, un M. Savard. M.
Savard est bijoutier qui est en affaires depuis 35 ans. Lui aussi a sa
carte. Puis, un bon jour, il décide de ne pas payer sa contribution
parce qu'il trouve que ça ne lui donne rien sauf qu'il paie la
contribution. Alors, on l'avise lui aussi qu'on va le poursuivre. Son
garçon a sa 12e année ( j'ai tous ces renseignements ici ) qui
pratique le métier depuis huit ans et qui a certainement des droits
acquis..
Cela, ça ne compte pas, ce qui compte pour eux c'est la
contribution. Point. La contribution à la corporation. Alors, Je vous
donne ces détails-là pour bien vous faire comprendre qu'on se
sert de la convention collective pour talonner les gens, collecter des
contributions pour la corporation.
Et tout ça est fait par un seul homme, c'est l'homme qui a
bâti la corporation, c'est l'homme qui a fait la demande de la convention
collective, c'est l'homme qui, à un moment donné, a
été le secrétaire de la corporation, du côté
patronal, en même temps qu'il était secrétaire du
côté employé. La convention collective a été
signée de cette façon-là. C'est lui qui mène le
bal, lui est dans une tour d'ivoire. Personne ne peut le décoller de
là. Si quelqu'un prend un peu de prestige, il s'arrange pour le mettre
de côté et ça marche comme ça depuis nombre
d'années. C'est rendu à un point et cela a pris une tournure
telle qu'il y a des comtés qui ont fait signer, je me rappelle
ici, j'ai justement une liste qui m'a été envoyée d'un
comté, de Beauharnois, oui de Beauharnois, qui me dit ici que la
totalité des bijoutiers ont demandé par une requête
d'être exclus de la convention collective. Ils ont la totalité des
bijoutiers.
Savez-vous ce qui arrive dans ce temps-là? Cela, ça arrive
à votre bureau, M. le Ministre, c'est mis dans une filière. On
prétend qu'il y a des enquêtes qui se font, mais elles se font
très mal parce que j'ai été témoin de ça.
Elles sont faites par des inspecteurs. Je ne sais pas où ils prennent
les noms, mais on a eu des contre-requêtes avec des noms fictifs que j'ai
vus, que j'ai vus, c'est moi qui les ai vus là. Je ne vous rapporte pas
une chose que je ne connais pas.
Alors, le tout s'en va aux oubliettes, à un tel point, cela a
pris une tournure tellement grave, qu'en 1962 cinq comtés ont
demandé d'être exclus de la convention collective. Vous avez le
comté de St-Jean qui a signé la requête pour être
exclu de la convention collective dans une proportion de 80%. Vous avez le
comté de Chicoutimi. Vous avez le comté de
Rivière-du-Loup. Vous avez le comté de Montmagny. Vous avez le
comté de L'Assomption et le huitième, je crois, si ma
mémoire est bonne, c'est Rimouski mais je ne suis pas tellement certain
de ce dernier.
Voici, la même chose est arrivée dans ce cas-là;
toutes ces requêtes-là ont été
reléguées aux oubliettes. Alors, il y en a un qui
m'intéressait parce que, moi, j'ai un commerce dans le comté de
L'Assomption et je connais le comté de L'Assomption, pour y demeurer.
J'ai fait le tour du comté de l'Assomption et dans tout le comté
de L'Assomption il y a exactement six bijoutiers, six seulement. Quatre ont
signé la requête pour être exclus de la convention. Un
était trop loin, je ne suis pas allé le voir pour le faire
signer. Un s'est objecté. Alors, quand j'ai vu que ça ne marchait
pas dans le comté de L'Assomption, je suis allé voir dans votre
bureau. On m'a refusé de voir les autres protestations. C'était
logique. Mais j'ai demandé au moins à voir celles de l'Assomption
qui m'intéressaient, le comté dans lequel j'avais
travaillé. Et puis on m'a montré une contre-requête, M. le
Ministre, qui comprenait des noms tous fictifs, qui n'existaient même
pas.
C'est un comté que je connais comme le fond de mes poches. Alors,
c'est de cette façon-là qu'on... je comprends qu'il y a un
certain monsieur dans votre ministère qui est le créateur de la
convention collective, il a du mérite, il mérite des
félicitations. La convention collective a certainement sa valeur, elle
mérite d'être supportée, d'être encouragée.
Mais entre ça puis s'en faire un piédestal pour exercer une
façon déloyale de percevoir de l'argent, il y a une marge.
Vous savez il y a toujours moyen de gagner. J'ai un cas ici, de St-Jean,
de M. Sonbeck, un Belge, on doit respecter tout le monde, ce monsieur-là
qui est arrivé au pays, n'était pas aimé de ses voisins,
alors on a fait des démarches pour l'empêcher de pratiquer. On a
fait passer des examens à ce monsieur-là, M. le ministre, on l'a
bloqué continuellement.
Je ne vous cache pas que les examinateurs, moi je les connais, je suis
dans la ligne depuis l'âge de seize ans, je vais en avoir 63 cette
année. J'ai connu les inspecteurs, je connais les bijoutiers comme je
connais mon propre magasin. Je connais aussi les examinateurs. Je connais
l'horlogerie que j'ai pratiquée depuis l'âge de seize ans. C'est
mon métier. J'ai enseigné l'horlogerie, j'ai été
celui qui a obtenu l'école provinciale qui est sur la rue St-Denis;
c'est moi qui l'ai obtenue. Je suis celui qui ai choisi le professeur M.
Théberge qui, aujourd'hui, est à sa pension. Je connais M.
Théberge, je connais ses successeurs, je connais les examinateurs de
part et d'autre et quand on veut bloquer un homme comme M. Sonbeck qui a
dû dépenser peut-être $1,000 pour gagner sa cause, ce
n'est pas drôle ça, c'est facile, c'est très
facile.
Je suis certain, et j'ai causé même le sous-ministre
a un rapport de ça avec l'homme qui l'examinait, on l'a
bloqué avec trois points seulement et j'ai fait admettre dans un
entretien avec l'examinateur en question, qu'il avait posé des questions
inutiles, auxquelles lui-même n'aurait pas pu répondre. Il me l'a
avoué.
Alors je suis certain que si on prenait l'examen de ces gens-là
qu'on bloque à volonté, que si on les tournait puis qu'on les
présentait aux examinateurs, ils passeraient même pas leur examen
eux non plus. Ce sont des choses inutiles qui ne s'étudient pas et
même des choses qui ne se pratiquent pas dans l'horlogerie. Et c'est de
cette façon-là qu'on bloque ceux qu'on veut bloquer. C'est la
chose la plus simple, la plus facile au monde, mais qui est
dégoûtante, absolument dégoûtante, c'est une pratique
malheureuse.
Franchement, ça me fait de la peine de dire toutes ces
choses-là ici ce soir, j'aurais aimé mieux vous en parler. Je
vous aurais apporté les preuves de ce que j'avance. J'ai un dossier,
j'ai une multitude de cas, je les compile depuis bien longtemps et puis, c'est
malheureux à dire, mais ça a tout l'air que ces gens-là
opèrent avec la bénédiction de votre ministère et
c'est ça que je suis obligé de dévoiler, de crier à
la face du public. Je le regrette mais il faut que ça casse un jour.
La convention collective s'appuie sur un article, l'article 10 de leur
convention. Elle est ingrate, elle est même ultra vires d'après
les conseils que j'ai de multiples avocats. Elle oblige toute personne qui
prend de la réparation et quand je dis réparation, je ne parle
pas seulement de réparation de montres. Ils sont rendus qu'ils font
ça pour la réparation de bijoux, il y a des bijoutiers qui ont
été poursuivis pour avoir pris une bague à souder. C'est
rendu à un point, que c'est grave, ils semblent avoir une confiance
absolue de faire tout ce qu'ils veulent et d'abuser des gens d'une façon
renversante.
Voici, l'article 10 dit ceci: C'est que dans chaque établissement
il faut un horloger, là, en permanence, à un tel point que s'il
n'y a pas un horloger là en permanence, on défend au bijoutier
d'accepter des réparations. Mais croyez-moi ou non, ça c'est plus
sévère que chez un pharmacien où vous, M. le ministre,
vous allez porter une ordonnance. C'est une demoiselle qui va la prendre, c'est
n'importe quel commis qui va prendre l'ordonnance mais le pharmacien ne sera
pas à l'amende pour ça parce que c'est le pharmacien qui va
compléter la commande, ça tout 1e monde le sait, eh bien pour eux
autres, la corporation ne permet pas ça. Il faut avoir un horloger dans
le magasin, en permanence, et
vous savez comme moi que c'est une chose impossible, dans notre
province, dans nos petites paroisses. Je me vois moi payer un horloger aux
salaires comme on en exige aujourd'hui, pour peut-être $25 ou $30 de
réparations par semaine? C'est physiquement impossible. C'est une chose
qui ne peut pas se pratiquer, qui ne peut pas être loi, qui ne peut pas
être applicable et cependant on perçoit le $40 par année de
ces gens-là, sous la menace.
Et quand je dis sous la menace, j'ai envoyé un questionnaire l'an
dernier pour connaître la disposition des bijoutiers à travers la
province et 23% m'ont répondu. On demandait si les gens payaient leur
contribution librement, s'ils étaient satisfait de la payer ou si
c'était par crainte des représailles. 23% et une fraction m'ont
répondu qu'ils payaient par crainte de représailles. Cela, c'est
la situation dans la province (je ne parle pas de Montréal là),
dans la province seulement chez leurs propres membres, chez les gens qui
paient.
Alors il nous reste deux alternatives pour sauver ces gens-là,
monsieur le ministre. Il reste d'abord la question de Cour. La Cour
supérieure, pour faire déclarer l'article 10 « ultra vires
», ça va coûter beaucoup d'argent, ça va prendre bien
du temps, ça. Mais j'avais une autre suggestion, si vous voulez me le
permettre. C'est que la C.S.N. nous a suggéré un moyen de le
contourner tout en protégeant le marchand, en protégeant le
métier, en un mot en protégeant tout le monde et, si vous voulez
me permettre, je vais vous le lire: ç'a été accepté
par la C.S.N., ce sont eux qui me l'ont suggéré, c'est fait avec
des avocats et ç'a été accepté par l'Association
des bijoutiers de la province de Québec qui est la plus importante
association patronale dans notre province: « En principe, il est
défendu à un employeur ou à un établissement de
faire exécuter du travail d'horloger à l'extérieur, sauf
si cet employeur ou si cet établissement est détenteur d'un
permis émis par le Comité paritaire, » Alors il faudra
prendre un permis, alors il y aura un contrôle immédiatement
là. « Le Comité paritaire n'émettra de permis que si
l'employeur ou l'établissement lui fournissent toutes les garanties que
le travail est exécuté par un horloger qualifié à
cette fin. »
Alors de cette façon-là, un petit bijoutier dans une
campagne qui ne peut pas se payer le luxe d'un horloger à un prix d'une
centaine de piastres par semaine, parce qu'il ne pourra jamais le faire, ou une
veuve dont le mari est décédé dernièrement ne sera
pas dans l'obligation de vendre son commerce parce qu'elle ne peut pas prendre
de réparations (c'est sa seu- le chance de survie) et, avec une clause
comme celle-là, elle pourra demander son permis, prouver qu'elle envoie
sa réparation chez quelqu'un qui est compétent, qui est reconnu,
qui est qualifié et tout le monde sera satisfait, tout le monde sera
heureux et ça empêchera le mot que je taisais tout à
l'heure de se propager dans la province, qui est extrêmement malheureux,
et qui n'est pas une note très, très gaie pour le
ministère du Travail, j'en suis certain. Et je soumets ça
très humblement, monsieur le ministre, et je serais très heureux
s'il y avait un moyen d'arriver à une entente.
Maintenant, dans les questions que je vous ai dévoilées
là, je pourrai vous donner les preuves, les noms et je pourrai vous en
fournir une quantité extraordinaire d'autres que j'ai déjà
en main. Celles que je vous ai soumises dans le moment, sont des plaintes que
j'ai reçues tout dernièrement. Elles sont toutes fraîches,
toutes nouvelles. Ce sont des gens qui sont présentement en
difficultés. Par contre, j'en ai d'autres qui ont été
réglées depuis ce temps-là, qui sont de plus vieille date.
Je pourrais même vous mettre en communication avec certains avocats qui
ont eu à défendre ces causes-là. Il y a eu des cas
pénibles, je vous assure, qui ont duré bien longtemps et qui ont
coûté extrêmement cher.
Si vous voulez, je vais vous citer mon cas. J'ai été
poursuivi comme ça dans le magasin de Repentigny. Mais remarquez bien
une chose: je gère une compagnie qui porte mon nom. J'ai un magasin dans
Repentigny, là où le magasin est assujetti à la loi. Je
suis un horloger qui a déjà été qualifié par
le Comité paritaire dans le district de Montréal. J'ai une
expérience de 40 ans en affaires cette année. Alors je
considère que je suis à peu près qualifié. Je suis
connu de ces gens-là, à part ça. On me connaît! Et
voici qu'on fait une cause un bon jour parce que j'ai pris une
réparation, selon eux, de $5. Sur la facture, ce n'est pas marqué
ce qu'on a réparé, c'est marqué juste une
réparation. L'homme qui fait la cause est seul. Alors, de ce
fait-là, j'aurais pu facilement gagner ma cause parce qu'il n'y avait
pas de preuves suffisantes: rien ne désignait ce que j'avais
réparé. Mais je voulais voir jusqu'à quel point on pouvait
être malpropre. Je voulais savoir jusqu'à quel point ça
pouvait être coûteux. Alors j'ai plaidé non coupable et j'ai
laissé la cause continuer jusqu'à sa fin.
Quand je vous ai dit tout à l'heure que, pour un bijou, ça
m'a coûté $371, c'est ce que ça m'a coûté: $5
d'amende et $371 de frais. Alors il n'est pas surprenant que lorsque des
bijoutiers écrivent à l'Association, puis qu'ils di-
sent: on est poursuivi par la Corporation, qu'est-ce qu'on devrait
faire?
Voici ce que je leur réponds. Ne prenez pas d'avocat d'abord,
plaidez coupable, et payez $25 ou à peu près. Alors ça se
résume à ça et les gens ne peuvent certainement pas
engager un horloger. Alors je vous soumets ce problème-là, je
suis certain qu'il y a quelque chose à corriger. Si je n'ai pas
réussi à vous convaincre, M. le ministre, je serais prêt
à rencontrer qui vous voudrez, quand vous voudrez, n'importe où
et j'irai seul, même s'ils étaient une armée, parce que
j'ai de quoi prouver ce que je vous dis.
M. FORTIN: M. le Président, d'après les remarques et
l'historique que nous a faits le député de Ste-Marie, j'ai
l'impression qu'il n'aime pas beaucoup le décret No 163 qui a
été adopté pour la première fois en 1948.
Il existe dans la province de Québec actuellement deux
corporations groupant les horlogers-bijoutiers, je pourrais dire le
côté employeur, la Corporation des horlogers-bijoutiers de la
province de Québec, et puis il y a l'Association des
horlogers-bijoutiers. Maintenant, je comprends que le député de
Ste-Marie appartient à la deuxième corporation, à la
deuxième association de patrons, et que les relations ne sont pas des
plus amicales entre les deux organismes.
Il faut distinguer, dans toutes les remarques qu'a faites le
député de Ste-Marie, deux choses au moins. C'est qu'il y a
d'abord la Corporation des horlogers-bijoutiers de la province de Québec
qui a une charte, qui n'est pas une corporation fermée, et il a en
outre, le décret relatif au métier d'horloger-bijoutier qui a
été adopté à la suite d'une convention collective,
signée d'une part par la Corporation des horlogers-bijoutiers, d'autre
part par la Fédération des employés de bijouteries et
d'horlogeries du Québec. Et à la suite de ce décret, un
comité paritaire a été constitué composé de
délégués des employeurs et des employés.
Maintenant, qu'il y ait actuellement abus de pouvoir de la part de la
Corporation des horlogers-bijoutiers, eh bien! cette corporation-là ne
relève pas du ministère du Travail. C'est la même situation
avec le Barreau de la province, la Chambre des notaires, le Collège des
médecins, etc, tous ces gens-là ont une charte; ont un statut
corporatif, et s'ils commettent des abus de pouvoir, il appartient aux membres
de s'adresser aux tribunaux compétents et de se défendre. Si la
corporation, par exemple, des horlogers-bijoutiers qui demande une contribution
de $40 par année à ses membres, se sert de menaces, ou veut se
servir du décret pour forcer les membres de la corporation à
payer leur contribution de $40, évidemment il ne m'appartient pas
de donner des opinions légales en cette Chambre, mais tout de
même je puis dire qu'ils commettent une illégalité.
Lorsqu'un bijoutier ou un employeur ou un employé a un certificat
de compétence, ce certificat, il l'a non pas parce qu'il est membre de
la Corporation des horlogers-bijoutiers, mais il l'a à la suite d'un
examen qui a été passé devant les examinateurs du
comité conjoint. Et une fois qu'il a passé ses examens et qu'il a
son certificat de compétence, ce certificat est permanent, c'est pour la
vie, et si la Corporation des horlogers-bijoutiers lui dit: « Monsieur,
vous n'avez pas payé votre contribution de $40 à notre
corporation, en conséquence nous allons vous enlever votre certificat de
compétence que vous avez obtenu du comité conjoint », c'est
absolument illégal, ils n'ont pas le droit de faire ça, ils
mêlent deux juridictions.
Maintenant, je ne comprends pas de quelle façon ces
personnes-là peuvent agir! S'il y a des gens qui ont eu des plaintes du
comité-conjoint pour avoir pratiqué le métier sans
certificat de compétence, alors qu'ils l'avaient déjà
obtenu, parce qu'ils n'avaient pas payé leur contribution de $40, je
serais bien heureux que le député de Ste-Marie m'apporte un
jugement de la Cour me montrant que ç'a été
sanctionné. Mais je n'arriva pas du tout à comprendre la
situation qu'il expose. C'est absolument inconciliable.
Si le comité conjoint ou le comité paritaire commet des
abus dans l'administration du décret, qu'on nous le souligne, et nous
verrons ce que nous pouvons faire. Mais, je crois rappeler devant la Chambre
que les comités paritaires sont des corporations indépendantes,
qui s'administrent d'une façon qui ne relève pas directement et
immédiatement du ministère du Travail. Ces comités
paritaires sont composés de représentants d'employeurs et
d'employés; ils passent des règlements pour leur constitution qui
sont approuvés par le lieutenant-gouverneur en conseil. Lorsqu'ils
décident d'établir un certificat de qualification, ou qu'ils
exigent des examens de compétence, ils soumettent leur règlement
qui est encore approuvé par le lieutenant-gouverneur en conseil. Leur
budget doit être approuvé par nous, ainsi que leur
prélèvement; mais du moment qu'ils ont accompli ces
formalités, en ce qui concerne le ministère, nous n'intervenons
pas dans leur administra-
tion, ils sont maîtres de leurs décisions. Cependant, je
dois dire que si, par hasard, il y a des abus de pouvoir, nous intervenons pour
les rappeler à l'ordre, pour leur signaler quelle est la loi. Mais,
strictement parlant, nous n'avons pas à intervenir, à donner
d'ordres précis.
Encore une fois, s'il semble y avoir eu des abus de ce
côté-là, qu'on nous les indique. Mais une chose que je
trouve surprenante, c'est que le député de Ste-Marie dit avoir
payé $5 d'amende et $327 de frais. Eh bien, j'en ai plaidé assez
souvent de ces causes-là dans ma pratique, depuis une vingtaine
d'années, et je dois dire que s'il a payé $327 de frais, c'est
parce que son avocat, l'avocat du comité paritaire, n'était pas
prêt et qu'il y a eu des remises considérables, parce que c'est au
moins $5 ou $7.50 chaque remise, et ensuite, il a dû y avoir une preuve
considérable avec beaucoup de témoins. Mais s'il avait
plaidé sa cause, s'il avait pu plaider non coupable, et si le juge
l'avait entendue après une ou deux remises, ç'a lui aurait
peut-être coûté à peu près $35 ou $40 de
frais.
Maintenant, peut-être que le député de Ste-Marie a
voulu faire patienter le comité paritaire et a voulu jouer un peu avec
eux, alors ç'a lui a coûté $327 de frais.
Si la plainte du comité paritaire était mal fondée,
je ne comprends pas comment il se fait qu'après une enquête le
juge a condamné le député de Ste-Marie. Ou bien le
décret est valide ou il ne l'est pas ou bien la plainte était
bien fondée, ou elle ne l'était pas.
Le député de Ste-Marie nous dit: « L'article 10 est
ultra vires ». C'est fort discutable. Mais cet article 10, dans le
décret 163, il existe depuis au moins le 26 avril 1950, je dirais
même avant, mais le dernier amendement à l'article 10, dans ce
décret, est daté du 26 avril 1950. Alors ça fait
déjà au minimum 14 ans que cet article 10 est dans le
décret. Et il a été inscrit dans le décret à
la demande des employeurs et des employés, et pour les raisons
suivantes. On conçoit, par exemple, que dans une petite place, ily a
supposons, un épicier qui reçoit une montre pour
réparation. Alors il prend la montre et l'envoie à un
horloger-bijoutier qui est habile dans le métier mais n'a pas de
certificat de compétence. Et lui, qui est dans une autre paroisse, ou
dans une ville, va faire la réparation. Eh bien, comment voulez-vous que
le comité paritaire puisse contrôler que le bijoutier qui n'a pas
de certificat de compétence, qui est un type qui agit en marge de la
loi, comment pouvons-nous contrôler que cet homme-là a son
certificat de compétence. Et l'épicier, ou n'importe qui, qui
n'est pas un horloger-bijoutier, fait réparer la montre; quand la montre
revient, il fait payer la réparation et charge une petite commission.
Qu'est-ce qui arrive avec des méthodes semblables? C'est que ce sont les
ouvriers compétents, qui ont suivi des cours, qui ont appris leur
métier, ont suivi pendant 4 ou 5 ans l'apprentissage, eh bien, ces
gens-là sont privés de leur travail.
Et deuxièmement, les horlogers-bijoutiers qui vivent de leur
métier, qui paient des loyers et qui ont organisé tout leur
atelier, cas gens-là encore une fois se voient priver de leur gagne-pain
par des gens qui ne sont pas spécialistes dans la matière, et qui
se servent de moyens détournés pour, en d'autres termes, faire un
commerce qui ne relève pas de leur compétence. Et c'est la raison
pour laquelle l'article 10 a été mis dans le décret. Il a
été approuvé depuis 1950 par un arrêté en
conseil. Est-il « ultra vires » ou « intra vires », je
ne m'aventurerai pas à donner une opinion en cette Chambre. Et si par
hasard, il y a des employeurs ou des employés dans ce métier qui
prétendent que cet article est « ultra vires », qu'ils le
fassent décider par la Cour supérieure.
Le député de Ste-Marie dit: « Mais la C.S.N. nous a
préparé un projet. » Je comprends qu'à l'heure
actuelle il y a une requête de l'Association des bijoutiers de laquelle,
je crois, le député de St-Marie fait partie, et du Syndicat des
horlogers de Montréal de la C.S.N. pour avoir un décret pour le
Montréal métropolitain. Cette région n'est pas couverte
par le décret 163 qui, lui, couvre le reste de la province de
Québec, Un avis a été publié dans la «
Gazette officielle » à ce sujet-là et la requête est
à l'étude.
Je remarque à l'article 8, au sous-paragraphe E, une disposition
qui est pratiquement la même que l'article 10 qu'a dénoncé
le député de Ste-Marie et qui dit que: « Tout individu,
société, firme ou corporation qui, dans notre contexte
québecois, n'est pas reconnu comme commerçant bijoutier,
c'est-à-dire que son établissement ne contient pas à 80%
des marchandises vendues régulièrement par des bijoutiers et qui
tient ou gère un ou plusieurs établissements où il exerce,
exécute etc., doit avoir à son emploi, en permanence, un horloger
licencié. » C'est exactement le même principe avec la
différence de 80%. Le député doit connaître cette
article-là. Alors, je comprends difficilement les remarques du
député à ce sujet.
Le député dit aussi: «On envoie des requêtes,
ça demeure aux oubliettes. » Je crois que cette affirmation est
purement gratuite. Tous ceux qui ont passé au ministère du
Travail, que ce soit sous l'ancien gouvernement ou sous le nôtre, sont
unanimes à dire que le sous-ministre
actuel du Travail, M. Gérard Tremblay qui, je dois le dire dans
cette Chambre a été le père de la loi de la convention
collective et l'a administrée avec efficacité et une très
grande intégrité depuis qu'il est sous-ministre du Travail, bien
je puis dire qu'avec lui il n'y a pas grand chose qui va aux oubliettes.
M. JOHNSON: Non! UNE VOIX: Très bien.
M. FORTIN: Ah, le chef de l'Opposition peut envoyer des petits coups
d'encensoir. Ils sont mérités.
M. JOHNSON: Vous allez voir que je suis plus habile que le ministre pour
en envoyer au sous-ministre. Moi aussi, j'en ai à lui envoyer.
M. FORTIN: C'est peut-être discutable. M. JOHNSON: Mais, pas
là-dessus.
M. FORTIN: Voici la procédure qui est suivie lorsqu'une
requête parvient au ministère du Travail pour demander l'extension
juridique. Dès que nous recevons une requête, nous faisons publier
un avis dans la « Gazette officielle » et dans les principaux
journaux où le décret sera en application. Nous attendons que des
objections nous parviennent. Lorsque nous en recevons, nous en faisons faire
des copies et nous les envoyons aux requérants et à toutes les
parties intéressées. Evidemment, il y a des réponses. Je
puis dire que nous envoyons, par la suite, des enquêteurs qui se rendent
sur les lieux afin de vérifier si les requêtes sont bien
fondées, vérifier les signatures et, surtout, vérifier si
les requérants ont la prépondérance c'est-à-dire
s'ils représentent réellement une majorité raisonnable des
employeurs et des employés.
Qu'il soit arrivé, par exemple, que des faux aient
été envoyés au ministère du Travail, que l'on ait
fait signer des faux noms sur des requêtes, c'est fort possible! Cela
arrive dans n'importe quelle institution. Mais, de là à dire que
les documents envoyés au ministère du Travail et les
requêtes prennent le chemin des oubliettes et qu'on ne s'en occupe pas,
je crois que c'est une affirmation absolument gratuite.
Dire que la Corporation des horlogers-bijoutiers ainsi que le
Comité paritaire exercent des opérations illégales et,
pour reprendre l'expression du député de Ste-Marie, « font
du chantage avec la bénédiction du ministère du Travail
», encore là, je dis que c'est une affirmation graguite. Parce que
si nous étions mis au courant de ces faits avec preuves à
l'appui, bien, nous interviendrions.
Maintenant, le député me dit qu'il a fait parvenir des
documents. Evidemment, des plaintes et de la correspondance, il y a comprendre
qu'au ministère du Travail, nous en recevons quantité et
quantité à tous les jours. Je regrette, de mémoire, je ne
me souviens pas des cas qu'il m'a référés. Je me souviens
qu'il m'a écrit et je me demande si je ne vous ai pas invité
à passer à mon bureau. De mémoire, je regrette infiniment,
je ne me souviens pas d'avoir vu ce dossier. Mais, à tout
événement, je n'ai pas l'habitude de laisser des lettres sans
réponse.
Si le député veut passer à mon bureau avec tous ses
dossiers, ses cas particuliers qu'évidemment je ne peux pas
règler en Chambre aujourd'hui, nous verrons s'il y a possibilité
d'intervenir, parce que, encore une fois ça ne relève pas de
notre administration.
Le député a parlé enfin du cas d'un belge. Encore
une fois, si cet homme-là a été victime d'abus, je ne
comprends pas comment il se fait qu'il ait pu payer $1,000 pour passer des
examens et je dirai à ce sujet-là au député de
Ste-Marie ceci: lorsqu'un type passe un examen devant un bureau d'examinateurs
d'un comité paritaire, et s'il n'est pas satisfait, s'il prétend
qu'il a été traité injustement, il a le droit, en vertu de
la loi, de faire appel au comité conjoint directement en se plaignant de
l'examen qui a été mal fait, où qui a été
mal corrigé par le bureau des examinateurs. Et s'il n'est pas satisfait
de la décision du comité conjoint, en vertu de la Loi de la
convention collective, il peut en appeler au ministre, et à ce
moment-là, le ministre peut faire venir tous les examens, et même
faire passer lui-même, par des experts, un examen au candidat, et lui
donner, malgré l'objection et l'opposition du comité paritaire un
certificat de compétence.
Eh bien, tous ces gens-là, s'il y a quelque chose qui ne marche
pas, n'ont qu'à suivre la loi. Le sous-ministre me dit que dans le cas
du Belge, c'est la procédure qui a été suivie, et à
la demande du ministre, il a passé un examen devant un comité
spécial de l'école d'horlogerie et. de bijouterie de la province
de Québec, et son certificat lui a été refusé. Il a
été refusé deux fois par une école qui ne relevait
ni de l'association, ni du comité paritaire, mais par une école
qui relève du ministère de la Jeunesse, parce qu'à deux
reprises, il a échoué dans ses examens.
M. CHARBONNEAU: M. le Président, d'abord, je remercie le
ministre. Ça m'a donné
une occasion d'avoir une invitation à son bureau, ça me
fera plaisir d'y aller à part ça. M. le ministre prétend
que je ne suis pas en amour avec le code 163. Bien justement, vous faites
lecture d'une convention collective que j'ai signée moi-même,
parce que je suis président de l'Association des bijoutiers et je suis
signataire de cette demande-là, et l'article que vous avez lu tout
à l'heure avait été refusé.
Justement, monsieur le ministre, si vous le lisez attentivement, vous
allez vous apercevoir que ce n'est pas du tout l'article 10 de l'autre
convention collective. C'est comme l'homme qui avait deux chevaux, qui disait
qu'ils étaient absolument pareils. Seulement, il y en avait un qui
était noir, puis l'autre était blanc, à part ça,
ils étaient corrects. Mais seulement, ce n'est pas du tout la même
chose. L'article que vous avez lu tout à l'heure dans la convention
collective suggérée à Montréal, s'applique
seulement à ceux qui ne sont pas bijoutiers. C'est toute la
différence au monde parce que dans celle-ci, au lieu de protéger
le commerce de bijouterie, c'est le bijoutier qu'on tape, ça fait toute
la différence.
Maintenant, pour la liste des comtés, il est extraordinaire, vous
me dites, que les requêtes n'aient pas été envoyées
aux oubliettes, il est extraordinaire que ça donne exactement 6
comtés à qui on n'a jamais donné suite à leurs
requêtes. Vous me dites que ce sont des noms fictifs. Je suis certain que
les noms ne sont pas encore à votre comité. Si vous voulez j'irai
vous voir, puis on ira ensemble; je les ai vus ces noms-là moi, et le
comté de l'Assomption, je le connais, j'espère que vous le
connaissez aussi bien que moi, vous allez vous apercevoir que ce que je vous
dis, c'est vrai. Quand je lance des accusations, je ne les lance pas à
tort et à travers, je sais ce que je dis. Maintenant, l'article 10, pour
ce qui est du contrôle,...
M. BELLEMARE: Très bien.
M. CHARBONNEAU: ... je ne comprends pas que vous ne saisissiez pas que
le contrôle sera facile avec l'article que je vous propose. Justement
c'est celui que vous avez lu, mais pas celui que l'on a ici, ça c'est le
nouveau qui doit entrer dans la convention collective que vous avez entre les
mains, sauf que les articles 8 que vous avez et 13 vont être
combinés avec celui-là qui est beaucoup plus court, ici, et puis
qui à notre point de vue, permet un contrôle parfait. C'est pour
ça. Si vous voulez, je peux vous donner la copie que j'ai ici;
franchement je comprends que les...
M. FORTIN: Est-ce que le député de Ste-Marie me
permettrait une question? Il y a une confusion un peu. Le texte que vous avez
lu tout à l'heure, qui aurait été préparé
par les aviseurs de la C.S.N., est-ce que ce serait pour être
incorporé dans le décret 163...
M. CHARBONNEAU: Oui.
M. FORTIN: ... ou bien dans le décret de Montréal?
M. CHARBONNEAU: Dans le décret de Montréal.
M. FORTIN: Dans le décret de Montréal.
M. CHARBONNEAU: Oui, mais celui-là; pas celui que vous avez.
M. FORTIN: Oui, mais est-ce que ce texte officiel a été
envoyé au ministère pour être publié dans la Gazette
officielle?
M. CHARBONNEAU: Il va être rendu ces jours-ci, s'il n'est pas
rendu.
M. FORTIN: Ah, je n'ai jamais entendu parler de ça.
M. CHARBONNEAU: Non, mais ce que je veux dire par là, c'est que
je suis loin d'être contre le décret 163, mais seulement je suis
contre tout ce qui peut être malhonnête, ça je peux vous le
dire. Et je considère qu'actuellement c'est administré
extrêmement malhonnêtement. C'est un groupe qui est absolument
indésirable, je vous l'assure, de la façon dont ils agissent
Maintenant, vous me parliez des inspecteurs tout à l'heure. Pour
votre information, si vous n'êtes pas au courant, ces
inspecteurs-là sont sous le contrôle d'un M. Réal Savard;
comme je l'ai dit tout à l'heure, lui. il est dans sa tour d'ivoire et
puis il contrôle toute l'industrie de la bijouterie dans son domaine.
Notre association a fait une offre à votre ministère
dernièrement que partout où vous enverriez votre inspecteur,
qu'on enverrait le nôtre nous aussi et on va payer les dépenses.
C'était une offre raisonnable, alléchante. On était
prêt à payer les dépenses, si vous voulez que les deux
soient accompagnés, et on n'a pas eu de réponse à cette
offre-là, et l'offre est encore ouverte, si vous voulez recommencer, on
va couvrir la province, si vous voulez, on va payer les dépenses tout le
long. Alors, là vous aurez une image parfaite du malaise et de ce que
veulent les bijoutiers.
Vous n'aurez pas de faux rapports, puis vous n'aurez pas de noms
fictifs, je vous le promets. Vous aurez une chose bâtie droite. Je vais
vous dire une autre chose qui est différente de la corporation dans
notre association, c'est que dans notre association personne n'est payé,
personne ne gagne un sou, on n'a pas de salaire de $10,000 ou $15,000 par
année, personne n'a intérêt à sauvegarder cette
question-là, sauf que chacun travaille pour le bien
général du commerce. Point. Personne n'est payée, on ne
fait pas d'argent, on ne cherche aucune récompense monétaire
tandis que dans l'autre, c'est tout le contraire; c'est un veau d'or qu'on
cultive et qu'on cultive d'une façon extrêmement
malhonnête.
C'est la différence entre les deux groupes, ça; puis quand
je vous dis qu'on est prêt à fournir un inspecteur qui va faire le
tour avec le vôtre, ça nous ferait plaisir n'importe quel temps et
soyez assuré qu'on va les payer les dépenses. Et si ça
vous convient, là vous aurez des contre-requêtes à votre
goût. Je suis certain que vous pourrez voir la vérité parce
que les inspecteurs, tel qu'ils travaillent dans le moment, ne travaillent pas
correctement, ne travaillent dans l'intérêt ni du
ministère, ni des bijoutiers, ni de personne. Ils travaillent dans un
seul intérêt et c'est l'intérêt de la
corporation.
M. FORTIN: L'offre de l'inspecteur, est-ce qu'il y a longtemps que
ç'a été fait au ministère du Travail par votre
association?
M. CHARBONNEAU: Non! voici, M. le Ministre! Réellement on a fait
une requête, on nous a demandé, c'est de valeur que je n'ai
pas emporté ça, on nous a demandé un tas de
questions ce qui nous a coûté près de $500 pour donner les
renseignements au ministère. Je suis certain que jamais ça n'a
été demandé à personne ça. C'est ce qui me
fait croire que dans le ministère, il y a quelque chose contre les gens
honnêtes, il y a quelque chose qui ne marche pas.
On a dépensé $500 pour vous donner les renseignements qui
étaient exigés; et puis si vous regardez les renseignements qu'on
nous demande, vous allez dire: « C'est épouvantable ». On
n'a pas rouspété, M. le Ministre, on s'est rendu à la
demande, on a fait l'enquête, on a dépensé l'argent, on a
fait le tour de l'Ile de Montréal de porte en porte, puis on a
donné un rapport qui est exact, sur lequel je peux faire serment et les
enquêteurs aussi. C'est fait à la lettre, vous avez le nom de
l'homme, s'il a des employés ou s'il n'en a pas, vous avez tous les
détails très précis. On n'a pas économisé
comme je vous l'ai dit. On a une association, ce n'est pas pour faire de
l'argent, nous-autres, c'est pour le bien du commerce. Et quand il y a quelque
chose qui se présente, on dépense l'argent pour le bien du
commerce. Onn'apas d'affaire à s'enrichir là-dedans, on ne fait
pas cinq cents, on en dépense plus qu'on pourrait en faire.
Alors, si par hasard, vous avez quelques localités où vous
voulez faire des sondages, je vous le répète, je vous l'offre, si
vous voulez avoir un compagnon qui va accompagner votre ou vos
enquêteurs, ne vous gênez pas, on fournira l'automobile et notre
homme défraiera les dépenses.
M. FORTIN: Cela a pris bien du temps au député de
Ste-Marie pour répondre à ma question, mais je ne suis pas encore
satisfait. Est-ce que c'est la première fois que vous faites cette
offre-là ou est-ce que vous l'avez déjà faite au
ministère du Travail, l'offre d'un inspecteur?
M. CHARBONNEAU: J'ai fait des plaintes souvent, M. le Ministre, et je
n'ai jamais été bien reçu. J'ai porté plainte...
Voulez-vous que je vous lise une lettre que j'ai envoyée au sou-ministre
déjà?
M. FORTIN: Un instant! Est-ce que vous avez déjà, par
écrit, offert au ministère du Travail votre inspecteur. Est-ce
que ça a déjà été offert, cet
inspecteur-là? Est-ce que vous avez déjà offert par
écrit au ministère du Travail...
M. CHARBONNEAU: Oh oui, oui, vous avez ça chez vous, oui
certainement qu'on a offert cela.
M. FORTIN: Vouz avez offert par écrit...
M. CHARBONNEAU: Certainement, cette offre n'a pas été
à moitié faite, mais par écrit.
M. FORTIN: Bon, très bien.
M. CHARBONNEAU: Voulez-vous que je vous lise une lettre que j'ai
envoyée au sous-ministre? Voulez-vous me permettre de vous la lire? Je
l'ai envoyée le 18 février 1963.
UNE VOIX: Cela fait déjà un an et demi.
M. CHARBONNEAU: Franchement, j'étais scandalisé.
C'était une réponse que M. le sous-
ministre avait envoyée à l'Association dont je suis
président. Qu'est-ce que vous-voulez? c'est mon seizième terme
alternatif là. « Cher monsieur. « Je viens de prendre
connaissance de votre réponse, en date du 13 février, à la
demande que vous faisait l'Association des bijoutiers de la province de
Québec Incorporée, dans la lettre du 8 février courant.
« Je ne vous cache pas que l'attitude du gouvernement, par l'entremise de
son sous-ministre du Travail, me renverse. En effet, je trouve inconcevable que
le gouvernement se fasse le coresponsable des multiples injustices qui se
pratiquent par les moyens qui frôlent le chantage, de façon
à malmener les gens, en leur extorquant des sommes d'argent
considérables, et même souvent en leur faisant perdre leur
commerce. » Ce n'est pas exagéré ce que je vous dis
là, je pourrai vous le prouver, je pourrai tout vous prouver
ça.
M. FORTIN: Arrivez à l'inspecteur.
M. CHARBONNEAU: Un instant, s'il vous plaît. « Et
vous-même, M. le sous-ministre, ne pouvez certainement pas plaider
ignorance dans les circonstances. Vous m'avez dit avoir reçu
quantité de plaintes de la part des bijoutiers, sans compter toutes
celles que j'ai portées à votre attention, en mon nom personnel
comme au nom de l'Association des bijoutiers de la province de Québec
Incorporée. On se couvre du manteau de la loi pour laisser un petit
groupe d'hommes exploiter les honnêtes marchands et les assujettir
à des règlements absolument inapplicables, dans une foule de cas,
s'ils ne consentent pas à verser ce que l'on exige d'eux comme
contribution et cela au vu et au su du sous-ministre du Travail. « Je
vous ai dit et aujourd'hui je vous écris sans crainte que les
passe-droit sont multiples au sein de l'organisation de la Corporation des
bijoutiers, que l'Association des bijoutiers accuse, et malgré les
requêtes signées par la majorité d'entre eux, dans certains
comtés... »
M. FORTIN: Je regrette d'interrompre le député de
Ste-Marie, mais, encore une fois, j'ai posé une simple question. J'ai
demandé quand il avait offert un inspecteur? Il est après nous
lire toute une correspondance.
M. CHARBONNEAU: Vous m'avez demandé,...
M. JOHNSON: Il arrive à ce paragraphe-là.
M. CHARBONNEAU: ... M. le Ministre, si j'avais porté plainte
déjà au ministère? Je vous donne un exemple, là,
d'une plainte que j'ai faite, qui est fantastique: elle ne peut pas être
plus réelle. Elle est tellement réelle: je l'ai montrée
à un juge et à un avocat avant de l'envoyer.
M. FORTIN: Quand bien même vous prendriez toute la veillée
à nous lire des lettres où à soumettre des plaintes...
M. CHARBONNEAU: Non, mais elle est bonne celle-là, je l'aime
celle-là.
M. FORTIN: Tout ce que je veux savoir: quand avez-vous fait une offre
d'inspecteur? Je ne voudrais pas que vous fassiez le tour des comtés de
toute la province pour venir me dire quand vous avez fait une offre par
écrit d'un inspecteur au ministère.
M. CHARBONNEAU: Mais vous lirez votre correspondace, vous l'avez. Je
vous jure que vous l'avez, à part ça, c'est moi qui l'ai
signée.
M. FORTIN: Bon, c'est très bien. M. LE PRESIDENT:
Adopté?
M. JOHNSON: Non, M. le Président, qu'est-ce que le gouvernement
attend pour mettre à exécution une promesse faite par le parti de
l'Union nationale et qui se lisait comme suit: « Mettre fin à la
discrimination contre les employés féminins en appliquant
intégralement le principe: A travail égal, salaire égal.
»
Voici un gouvernement qui est là depuis quatre ans, un groupe qui
gouverne depuis quatre ans, qui se vante avec raison d'avoir eu la
première femme député et d'avoir été 1e
premier gouvernement à nommer une femme au sein de son Cabinet et qui
n'a rien à montrer...
M. COURCY: Ce n'est pas vrai.
M. JOHNSON: M. le Président, le sujet de cette phrase
c'était: « un groupe et un gouvernement qui, depuis quatre ans,
n'a rien à montrer ». M. le Président, si des esprits
pervers veulent entendre autre chose, je n'en suis pas responsable. Comme
dirait le député de St-Maurice: « Ad modum recipientis
accipitur ».
M. HAMEL (St-Maurice): « Omnia impura impuris ».
M. JOHNSON: M. le Président, « on reçoit selon sa
possibilité, » Mais ce gouvernement, qui a donc dans son sein une
femme depuis... M. le Président, le député de Champlain
est prêt à traverser du côté des libéraux, il
a le même esprit.
Ce gouvernement, donc, qui comprend parmi les membres de son Cabinet,
une femme, n'a encore posé aucun geste pour appliquer ce principe
élémentaire: « à travail égal, salaire
égal », en 1964, c'est intolérable qu'on n'ait rien fait
dans ce domaine. Sauf erreur, je pense que le gouvernement actuel n'a
posé aucun geste, aucune législation qui nous justifierait de le
taxer d'être à l'heure de 1964. Je demande donc au ministre: quand
allons-nous avoir la proclamation de ce principe, ou qu'est-ce qu'on attend
pour le faire?
M. FORTIN: A l'heure actuelle, M. le Président, je dirai que dans
les ordonnances de la Commission du salaire minimum, il n'y a aucune
différence, aucune discrimination quelconque entre le salaire
féminin et le salaire masculin.
Je concède qu'il n'y a pas de texte de loi, à l'heure
actuelle, disant dans la province de Québec « à travail
égal, salaire égal ». Il y a quelques provinces qui ont
adopté ce principe, mais d'après une enquête que nous avons
faite à ce sujet, je sais que dans une province, on a adopté une
loi obligeant qu'il y ait « salaire égal à travail
égal ». C'est beau d'émettre un principe dans une loi, mais
il s'agit de faire appliquer ce principe. Et à l'heure actuelle, dans
cette province, je sais que l'on prend des moyens bien détournés
pour que la loi ne soit pas appliquée, et qu'elle est très
difficile d'application.
A tout événement, nous avons étudié, l'an
dernier et encore cette année, nous sommes à étudier de
quelle manière nous pourrions inclure un tel principe dans notre
législation. Mais encore une fois, pourquoi se couvrir d'hypocrisie,
passer des lois, et inclure dans des lois des principes quand on sait que ce
n'est pas applicable.
M. JOHNSON: Pourquoi ce n'est pas applicable?
M. FORTIN: Vous pouvez mettre dans un décret, vous pouvez mettre
dans une ordonnance de la Commission du salaire minimum, « à
travail égal, salaire égal. » Mais il y a une
infinité de moyens pour des employeurs de détourner ce texte de
loi, de modifier les tâches, de changer les tâches. Mais je sais
par exem- ple que dans bien des décrets ou dans des conventions
collectives, à l'heure actuelle, dans la province de Québec,
lorsqu'il s'agit de conventions collectives entre un syndicat ou une union et
des employeurs, il ne se fait pas de discrimination, parce qu'il y a des
tâches qui sont établies pour les femmes, et des tâches pour
les hommes, mais en ce qui concerne une même tâche, lorsqu'elle est
accomplie par une femme ou un homme c'est le même salaire dans les
conventions collectives qui sont déposées au ministère du
Travail. Dans les décrets, c'est la même chose, et vous pouvez
regarder tous les décrets et toutes les ordonnances du salaire minimum,
vous ne verrez pas, pour une même tâche, un salaire
différent pour une femme et pour un homme. J'ai discuté avec le
président de la Commission du salaire minimum à ce sujet, et il
m'assure qu'il n'y a pas de discrimination qui se fait.
Maintenant, le principe! Je suis d'accord que le principe n'est pas mis
textuellement dans la loi, mais en pratique, nous l'appliquons.
M. BELLEMARE: Dans le vêtement, il y a une grosse
différence.
M. FORTIN: Maintenant, ici au gouvernement, regardez toutes les
classifications du service civil, il n'y a aucune discrimination, aucune
distinction entre un travail fait, pour le même travail fait par une
femme ou par un homme, c'est la même chose.
M. JOHNSON: Le ministre dit ça sérieusement?
M. FORTIN: Certainement.
M. JOHNSON: Il a raison à l'intérieur de la classification
du Service civil: il n'y a pas de discrimination entre le salaire payé
à une femme et un homme. Mais quand c'est un homme qui fait la
même fonction qu'une fille, je parle de secrétaire
particulière, du secrétaire particulier, là on donne une
autre classification à cet homme-là et, même s'il fait le
même ouvrage que cette dame ou cette fille, il est payé quand
même plus cher ou la femme est payée moins cher.
M. FORTIN: Est-ce que vous avez des cas?
M. JOHNSON: Je n'ai pas à répondre au ministre. Ce qui se
fait actuellement se fait dans les conventions collectives. En somme, c'est ce
que le ministre vient d'admettre et c'est exact. Mais je crois que la
proclamation du principe
dans le bill 54, par exemple, donnerait aux unions ouvrières
lorsqu'elles négocient le contrat ou lorsqu'elles l'interprètent
ou tentent de l'interpréter en faveur de l'un de leurs syndiqués,
ça donnerait, dis-je, la proclamation de ce principe, une base d'action,
même de recours, soit en grief, soit même devant les tribunaux si
on voulait bien, comme je l'ai dit, adopter ce principe, l'incorporer dans la
législation, dans un code du travail et ça donnerait enfin un
petit air de code de travail au bill 54. M. le Président, pas beaucoup
de progrès dans ce domaine-là, comme dans bien d'autres
d'ailleurs.
Je vais demander une autre question au ministre au sujet des relations
patronales-ouvrières. Il est un autre article du programme de l'Union
nationale qui n'a pas été encore appliqué par la
gouvernement actuel. C'est le salaire minimum de $1 l'heure pour les
travailleurs qui sont actuellement protégés ou qui le seront
à l'avenir par les ordonnances de la Commission du salaire minimum.
On sait qu'en Saskatchewan cette législation existe.
M. HAMEL (St-Maurice): Le gouvernement a été battu
récemment!
M. JOHNSON: On sait qu'en Ontario le chef du parti libéral avait
prôné $1.25 et son parti avait adopté cette
législation et là aussi les libéraux ont été
battus en Ontario. Ils prônaient $1.25 l'heure à ce
moment-là.
M. HAMEL (St-Maurice): Pas en Saskatchewan.
M. JOHNSON: M. le Président, l'Union nationale a
préconisé $1 l'heure et je suis prêt à admettre,
ça va faire plaisir au ministre, que dans certains milieux ça n'a
pas aidé les candidats de l'Union nationale, au contraire, parce que les
employeurs avec les arguments fournis par le premier ministre, s'il vous
plaît, dans une déclaration fameuse, les employeurs ont fait
pression sur leurs employés et leur ont fait croire que si l'Union
nationale arrivait au pouvoir et mettait en vigueur cette promesse de $1
l'heure, eh bien! on serait obligé de réduire le personnel. De
cette façon plusieurs employés qui travaillent pour un salaire
moindre que $1 l'heure ont voté contre l'Union nationale sur la pression
de leurs employeurs.
Je ne regrette rien. Je crois que $1 l'heure était une mesure
sociale qui s'imposait et qui s'impose davantage aujourd'hui; autrement nous
allons très rapidement créer dans la province de Québec
des zones de paupérisme et c'est même commencé. Est-ce
qu'il y a un ministre dans cette Chambre, un député dans cette
Chambre, qui veut se lever et nous dire publiquement qu'il croit que $1 l'heure
est plus que suffisant pour un ouvrier, quel qu'il soit, un employé,
quel qu'il soit? M. le Président, y a-t-il un ministre, un
député dans cette Chambre qui peut se lever et dire que $48 par
semaine ou $44 par semaine est suffisant? Cela ne l'est pas. Il n'y en a pas un
qui voudrait, de son siège de député, proclamer cette
énormité! Pourtant, on a fait campagne, le premier ministre en
tête, contre cette promesse de l'Union nationale.
D'abord, M. le Président, j'y ai vu un hommage de la part de la
population. Les gens ont dit: « Bien si l'Union nationale promet
ça, elle va la tenir cette promesse-là. »
Et comme certains employeurs ne voulaient pas payer $1 de l'heure, on a
inventé toutes sortes de croque-mitaines pour effrayer ces employeurs.
Quand tous les restaurants, quand tous les hôtels paieront le même
prix à tout le monde, M. le Président, c'est le consommateur qui
en recevra le contrecoup. Et dans le cas des hôtels, en particulier, il y
a là une situation intolérable. Des femmes de chambre ont
envoyé récemment une requête me demandant d'intervenir et
de mentionner le cas. Il s'agit d'un groupe de femmes de chambre dans des
hôtels de Montréal qui ne gagnent que 64 cents de l'heure et qui
prétendent ne pas recevoir une rémunération en
conformité avec le total d'heures qu'elles ont fournies. En tout cas je
transmets l'information que j'ai reçue par écrit.
Le fédéral, M. le Président, songerait à
proclamer un Code du travail. Les journaux ont été remplis de ces
nouvelles. Vous en avez certainement pris connaissance. Le gouvernement
fédéral songerait à incorporer dans son Code du travail
qu'il doit présenter cette année, disait-on, dès la
présente session, une provision concernant le salaire minimum pour ses
employés ou les employés de sa juridiction, qui serait
fixé à $1.25 l'heure. Et les journaux nous ont rapporté
que Terre-Neuve et Québec avaient fait la moue à cette
proposition du gouvernement fédéral.
Le ministre pourra répondre tantôt quant à cette
partie et je l'invite aussi à nous expliquer comment, lui,
considère que $1 l'heure c'est un minimum qu'on ne peut pas ou qu'on ne
doit pas appliquer dans toutes les ordonnances de la Commission du salaire
minimum.
M. FORTIN: M. le Président, il y a des ordonnances qui ont
été corrigées depuis 1960-1961 par la Commission du
salaire minimum. D'abord parlons de l'ordonnance No 3 au sujet
du congé annuel payé qui était de 2%. Eh bien, en
1961 nous avons étendu les dispositions de cette ordonnance à
tous les vendeurs et agents à commission. Et par la suite, en 1962
constatant que dans bien des conventions collectives il y avait des
dispositions qui n'étalent pas aussi généreuses pour les
salariés, nous avons encore une fois amendé l'ordonnance No 3 et
nous avons dit que dans les conventions collectives où il ne serait pas
prévu que le salarié aurait 2% de vacances à partir de la
première journée de son salaire, l'ordonnance s'appliquerait. C'a
été un premier pas qui a été fait pour
améliorer le sort des travailleurs.
En ce qui concerne l'ordonnance No 30 dans les scieries et les
entreprises connexes, avant 1962 ces employés étaient couverts
par l'ordonnance No 4 et recevaient 64 cents de l'heure. La Commission du
salaire minimum a présenté une ordonnance qui a été
ratifiée par le lieutenant-gouverneur en conseil et nous avons
fixé pour les salariés qualifiés dans Montréal
métropolitain $1.30 l'heure et dans le reste de la province $1.20
l'heure, Alors, avant 1962 c'était 64 cents et ils ont eu $1.30 et $1.20
l'heure. Les autres salariés, $1.15 l'heure et $1.05 l'heure. C'a
été un premier pas vers une correction dans ce sens.
Dans l'ordonnance No 30, en 1963, de nouveau nous l'avons modifié
pour couvrir les scieries et les ateliers de bois ouvré. Et alors que
ces gens étaient payés à 64 cents de l'heure en 1960 et
avant 1960, en 1963 nous avons adopté une ordonnance pour ces ouvriers.
Les salariés qualifiés dans Montréal métropolitain,
$1.30 l'heure et dans le reste de la province, $1.20 l'heure, et les autres
salariés $1.15 l'heure et $1.05.
M. JOHNSON: Combien de salariés environ?
M. FORTIN: 15,000 salariés. Maintenant l'ordonnance No 39 dans
les exploitations forestières qui est une ordonnance nouvelle,
l'augmentation accordée par cette ordonnance a été
d'environ 10% et le taux honoraire est passé de 90 cents à $1
l'heure. Et celui de la journée de $8 à $8,60 et celui du
salarié à forfait de $9 à $10 par jour.
M. JOHNSON: Combien de salariés environ?
M. FORTIN: Je ne sais pas les chiffres. $35,000 à peu
près.
M. BELLEMARE: Ce n'est que temporaire. C'est passager.
M. FORTIN: Qu'est-ce qui est passager? L'ordonnance?
M. BELLEMARE: Non, pas l'ordonnance, le nombre. Voyons! Le travail.
DES VOIX: Le travail.
M. FORTIN: Cependant dans cette ordonnance on a réintroduit des
taux à forfait comme suit. Pour le bols de pulpe $6 la corde et pour le
bois de sciage $6 du mille pieds.
Maintenant l'ordonnance numéro 39. L'augmentation apportée
à cette ordonnance a été encore supérieure à
10%. Nous avions apporté une première augmentation de 10% en
1961. En 1962, une autre augmentation de 10% et les salariés à
l'heure ou à la journée ont été
rémunérés à $1.10 l'heure ou $9.60 par jour. Les
salariés à forfait, $11 par jour. A la semaine de $51.60 à
$59.40.. Pour le bois de pulpe $6.50 la corde et pour le bois de sciage $11 par
jour.
Maintenant, dans cette ordonnance, on accorde aux bûcherons,
à titre d'allocation de vacances 2% du salaire quel que soit le nombre
de jours travaillés. Avant 1961 ces ouvriers n'avaient aucune vacance.
En 1961, ils avaient 2% après 50 jours de travail et en 1962 on vient de
leur donner 2% sans aucune restriction.
L'ordonnance numéro 41, dans les corporations municipales et
scolaires, en 1960, tout le monde, sauf les messagers, surveillants et
secrétaires recevaient dans la zone 1, $0.70 et dans la zone 2 $0.64
l'heure. Les secrétaires de municipalités $40 à $175 par
mois, les secrétaires des commissions scolaires de $30 à $110 par
mois. En 1963, nous avons changé l'ordonnance et le taux minimum
général a été augmenté à $0.90
l'heure dans toute la province. Les secrétaires de $60 à $225 par
mois et les secrétaires de commissions scolaires de $60 à $225
par mois selon le nombre de propriétaires enregistrés au
rôle d'évaluation. Il faut comprendre que dans les petites
municipalités il y a des secrétaires-trésoriers qui par
exemple, vont travailler une journée ou deux jours par semaine.
M. JOHNSON: Combien de salariés maintenant?
M. FORTIN: Pardon?
M. JOHNSON: Combien de salariés dans cette catégorie?
M. FORTIN: Bien 1,500 - il y a à peu près 1,500
municipalités, 1500 commissions scolai-
res cela représenterait à peu près 10,000
employés en tout et partout.
Maintenant, le chef de l'Opposition, dit, il faudrait mettre $1 l'heure
partout dans la province de Québec. Est-ce que je dois comprendre qu'il
veut donner ce salaire même aux jeunes apprentis qui commencent à
apprendre le métier?
M. BELLEMARE: On vous a parlé de l'ordonnance numéro 40,
dans les hôtels.
M. FORTIN: Oui, attendez une minute. L'ordonnance numéro 40, j'y
reviendrai tout à l'heure.
Simplement pour vous donner un exemple, comme quoi lorsqu'on augmente
subitement les salaires, on ne peut passer de $0.64 ou $0.70 à $1
l'heure rapidement. Bien, nous avons changé les salaires, dans les
commissions scolaires. Qu'est-ce qui est arrivé? Après la
fixation du taux minimum de $0.90 l'heure, on a vu des commissions scolaires
congédier leurs employés et ils ont donné à
forfait, à des entreprises le nettoyage dès écoles.
M. GAGNON: S'ils ont fait ça, cela leur coûte plus
cher.
M. FORTIN: Bien cela dépend.
UNE VOIX: Ils ne sont pas nombreux.
M. FORTIN: Maintenant, je dirai ceci, c'est que j'ai rencontré le
sous-ministre de l'Ontario et on prépare une ordonnance, dans l'Ontario,
pour cette section de Toronto qu'ils appellent le « Golden Horse Shoe
» juste aux alentours de Toronto. Ils préparent une ordonnance de
la Commission du salaire minimum pour hausser les salaires. Cela fait depuis,
je pense, un an, un an et demi, que des économistes travaillent sur
ça et ils ont beaucoup de difficultés à cause des
répercussions économiques. Prenez dans les restaurants. On
parlait des restaurants, nous allons en parler.
M. BELLEMARE: L'ordonnance 40.
M. FORTIN: L'ordonnance 40. Combien de jeunes gens et de jeunes filles
qui travaillent dans les restaurants, doublent et triplent leur salaire par les
pourboires.
M. BELLEMARE: Mais ils les imposent pareil!
M. FORTIN: La Commission du salaire minimum, bien qu'il y ait 125
employés de moins qu'en 1960, d'après les statistiques que je
peux vous donner a fait plusieurs réclamations et 1e président me
dit qu'en de multiples occasions, dans bien des cas ils ne sont pas capables de
percevoir les salaires parce que les gens font faillite. Regardez des
restaurants, des hôtels, de petits hôtels et plusieurs restaurants:
ils font faillite justement parce qu'il y a une concurrence effrenée.
Ils ont de la difficulté à réussir. Maintenant, vous me
direz probablement que ce n'est pas aux employés à supporter les
frais, mais nous savons que, règle générale, dans les
restaurants, les employés se font de bons revenus avec les pourboires.
Maintenant, je dois dire...
M. BELLEMARE: Le gouvernement avait réclamé $48,000 l'an
passé, combien cette année?
M. FORTIN: Je vais vous donner ça, mon cher monsieur.
M. BELLEMARE: En vertu de l'ordonnance numéro 40.
M. FORTIN: En vertu de l'ordonnance numéro 3 dans la
région, de...
M. BELLEMARE: Nonr non, pas 3, l'ordonnance numéro 40.
M. FORTIN: Non, non, quant à vous en donner, on va vous en
donner. La compilation des réclamations du 1er janvier au 31
décembre 1963, pour la région de Montréal, d'après
l'ordonnance numéro 40, la commission du salaire minimum a perçu
$ 129,569.54 et, pour les autres régions de la province, $77,056.63.
Cette année, pour toutes les ordonnances, la commission du salaire
minimum a, en 1963, perçu des employeurs $675,513.73 conparativement
à $154,000 en 1960 pour des salaires insuffisants.
M. BELLEMARE: Vous avez changé les ordonnances, vous avez
monté les choses, vous en avez couvert plus grand. C'est sûr, il y
en a plus qui contribuent aussi.
M. FORTIN: Oui, puis à part ça, je puis vous dire que nous
avons fait dans la région de Montréal la visite de 3,083
employeurs et ça couvrait 20,306 employés et nous avons produit
des réclamations pour 1,786 employés dans la région de
Montréal.
Dans le reste de la province on a visité
3,572 employeurs et nous avons fait des réclamations pour 1329
employés.
A l'heure actuelle, la Commission du salaire minimum analyse les 110
décrets qui existent dans la province de Québec pour
établir quels sont les salaires moyens, et je puis dire qu'à
l'heure actuelle, dans la province de Québec, des décrets
signés par des unions ouvrières et par des employeurs comportent
des salaires qui sont à peu près les mêmes que ceux de
l'ordonnance No 4. Il y a un certain nombre de décrets qui, à
l'heure actuelle, prévoient des salaires inférieurs à 60
et à 64 cents l'heure et ça, ce sont des décrets, des
conventions collectives entre des employeurs et des employés dans la
province de Québec, pour des apprentis si vous voulez. Mais
évidemment est-ce qu'on va commencer par exemple à donner
à un jeune apprenti de 18 ans ou 19 ans, travaillant quoi, 54 heures par
semaine, est-ce qu'on va lui donner $1 l'heure, $54 par semaine, pour commencer
à apprendre son métier, alors qu'il ne connaît absolument
rien? Eh bien, je crois qu'il faut être absolument logique.
A tout événement, je dois dire que la Commission du
salaire minimum fait depuis un an et demi, une étude assez
poussée sur le sujet, pour voir quelles sont les améliorations
à apporter spécialement à l'ordonnance numéro
4.
Pour terminer, je dirai au chef de l'Opposition que le ministre du
Travail du Québec, en allant à Ottawa n'a ni approuvé ni
désapprouvé ni fait la moue lorsque le ministre du Travail
fédéral a dit qu'il voulait passer une loi du salaire minimum et
que nous lui avons dit: « Pourvu, monsieur, que vous restiez dans votre
juridiction, que voulez-vous que nous ayons à dire, nous n'avons rien
à dire. »
M. JOHNSON: Encore dans ce domaine, celui du salaire minimum, l'effort
du gouvernement n'est pas spectaculaire. Je demande pardon au ministre. S'il a
l'intention de parler, s'il veut absolument retarder l'adoption des
crédits de son collègue.
M. ARSENAULT: Certainement, j'ai l'intention de parler. Il y a pas
quelques instants en cette Chambre, le chef de l'Opposition a dit: «
Y-a-t-il un ministre qui osera se lever et je Pal entendu et j'ose M. le
Président, me lever pour dire au chef de l'Opposition et aux membres de
l'Opposition que la politique de $1 l'heure qu'ils ont
préconisée, cette invention qu'ils ont faite tout à coup
sur leur chemin de Damas en 1962, avec laquelle ils devaient battre le parti
libéral, eh bien ça n'a pas fonctionné. J'espère,
M. le Président, que c'est la dernière fois que nous en entendons
parler. Je veux rendre service à l'Opposition. J'ai été du
même parti, et ça me fait de la peine de voir des gens se couler
constamment, se couler davantage. C'est épouvantable, M. le
Président, de constater jusqu'à quel point les conseillers du
chef de l'Opposition ne sont pas réalistes. Je me souviens, au cours de
la campagne de 1962, d'ailleurs du côté de l'Opposition elle a
été déclenchée à Amqui, dans le comté
de Matapédia, c'était bien sûr selon leurs discours que
Bona Arsenault était battu, qu'un Gérard-D Levesque était
battu...
M. JOHNSON: Cela a passé proche.
M. ARSENAULT: ... qu'ils balayaient la Gaspésie, parce qu'on
garantissait à tout le monde $1 l'heure. C'était leur grande
découverte; la plus grande découverte depuis la découverte
de l'Amérique par Christophe Colomb. Eh bien, aussitôt que j'ai
entendu ça, je suis allé à une réunion dans mon
comté, je crois que c'était au Lac-aux-Saumons. Il y avait des
gens qui avaient un peu la figure longue. Ils m'ont dit: « As-tu entendu
parler de ça, toi, de l'affaire d'une piastre l'heure, c'est effrayant,
tout le monde en parle. » Quoi la piastre l'heure? Alors, je suis
arrivé à l'assemblée et j'ai dit: « Voici,
l'Opposition, par la bouche de M. Johnson, promet un salaire minimum d'une
piastre l'heure. » Et là, au Lac-aux-Saumons, il y a une industrie
et la moyenne des salaires c'est environ $1.20 de l'heure, alors j'ai dit aux
pères de famille qui étaient là: « Vous avez sans
doute une bonne, une servante; alors à partir du moment où M.
Johnson sera premier ministre de la province, vous gagnez $1.20 et puis il
faudra que vous payiez une piastre de l'heure à votre bonne. Puis, si
elle travaille dix heures par jour, mais c'est $10 par jour. » Alors,
tout le monde évidemment a ri; quelques jours plus tard...
M. ALLARD: Ceux qui gagnaient $l.50, vous allez gagner rien qu'une
piastre!
M. ARSENAULT: ... nous apprenons par les journaux que le chef de
l'Opposition se ravisait, et disait: « Bien oui, mais il faudra, $1 pour
tout le monde, oui, mais il faudra exempter les bonnes, ça, ça
n'a pas de bon sens. Les pères de famille qui ont des grandes familles
sont obligés de payer une piastre l'heure pour la bonne quand eux ne
gagnent pas une piastre l'heure. » Alors, ils ont dit: « Cela,
c'est correct, exception. »
Le surlendemain, un autre orateur libéral
dit: « Mais oui, les apprentis, où vont-ils pouvoir
apprendre leur métier? Quel est le patron, quel est le chef d'entreprise
qui va vouloir offrir des salaires, qui va pouvoir offrir des salaires de $1
l'heure à des jeunes garçons de 15, 16 ou 17 ans, qui veulent
apprendre un métier et qui seraient prêts à payer pour
apprendre un métier, pour réussir dans la vie, et qui ne valent
pas plus que $0.35 ou $0.50 l'heure? » Ah, le chef de l'Opposition a
entendu cette objection, et il a annoncé « une autre exception!
» Tout le monde dit-il, doit gagner $1 l'heure dans la province, mais non
les bonnes, par exemple, et non les apprentis.
Bon! Arrive le cas des serveuses de restaurant, des employés
d'hôtel, puis s'il y en a dans la province. C'est ce qui a
contribué à battre dans une grande mesure l'Opposition qui
voulait être le gouvernement. Toutes les serveuses de restaurant, les.
employés d'hôtel, dans tous les hôtels de Montréal,
de Québec, de tous les centres de la province ont dit: « $1
l'heure? Ça veut dire que notre chef, notre patron, demain, pourra nous
dire: Combien as-tu reçu en pourboires, toi, hier? Mets ça sur la
table qu'on compte ça. Ah, ça te fait $1.50 l'heure, on va
baisser ça à $1 parce que M. Johnson a dit: c'est $1 et pas plus,
$1 puis pas plus! »
M. ALLARD: La malhonnêteté des libéraux,
malhonnêteté.
M. ARSENAULT: Il y a autre chose. Au moment même où
l'Opposition préconisait $1 l'heure, le ministre du Travail vient de le
rappeler tantôt, la CDmmission avait déjà
décrété et en ma qualité de ministre des Terres et
Forêts, dans le temps, j'avais été mêlé de
très près à ces négociations-là, pour les
employés de scieries qui, sous l'Union nationale, loin de gagner $1
l'heure, gagnaient $0.64 l'heure.
Nous les avons pris et nous leur avons donné $1.30, pas $1, mais
$1.30 dans la région de Montréal et $1.20 ailleurs dans la
province.
Et enfin il restait les professionnels, les médecins, les
avocats, les architectes. Eh bien, eux, $1 l'heure, ça ne les
intéressait pas tellement! Il restait ce groupe-là. Mais il
restait un autre groupe: un groupe qui a toujours été
délaissé sous l'Union nationale. Il est vrai que ça
remplaçait dans une grande mesure, les services sociaux d'aujourd'hui;
on engagait pour la Voirie des gens qui ne pouvaient pas donner une bonne
journée de travail ailleurs. On les payait pour ce qu'ils valaient,
croyait-on.. Sous l'Union nationale, de toute façon, les employés
de la Voirie, et ils sont nombreux dans la province, les employés de la
Voirie. C'est à peu près la seule classe que je peux voir qui
restait; une fois toutes les exceptions ajoutées aux exceptions de
l'Opposition au cours de la lutte électorale de 1962. Il restait la
classe des employés de la voirie.
Eh bien, à partir du 1er avril cette année, les
employés de la Voirie qui, sous l'Union nationale gagnaient 60 ou 65
cents l'heure, 75 cents peut-être et 85 cents en 1960, gagnent $1.05
l'heure. Est-ce que l'Opposition veut qu'on les baisse à $1?
Et les camionneurs, leur augmentation a été de 20 cents
l'heure pour les porter à $1.30, ou $1.35 l'heure. M. le
Président, ce n'est pas pour défendre la politique du ministre du
Travail, c'est l'un des meilleurs ministres du Travail que nous ayons jamais
eus depuis la Confédération. Il a du talent, il a pratiqué
pendant une vingtaine d'années.
M. BELLEMARE: C'est pas moi qui le dis là, c'est lui.
M. ARSENAULT: Il a été, et c'est un spécialiste des
questions ouvrières, c'est un spécialiste des contrats
collectifs, c'est un homme pondéré, c'est un savant dans son
domaine, puis l'Opposition le respecte beaucoup plus qu'aucun ministre du
Travail a pu être respecté sous l'Union nationale. Puis je connais
M. Antonio Barrette, qui est aujourd'hui ambassadeur du Canada en Grèce,
qui a été un excellent ministre du Travail parce qu'il avait un
excellent sous-ministre du Travail dans la personne de M. Gérard
Tremblay.
M. BELLEMARE: M. le Président, il y a toujours une limite.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre.
M. ARSENAULT: Et ce n'est pas la politique du parti libéral que
je défends, parce que cette piastre l'heure-là a
été pesée et jugée par la population: jugée
en 1960, jugée en 1962. Mais c'est pour m'efforcer de rendre service
à l'Opposition, afin qu'aux élections prochaines qui viendront
l'Opposition ne continue pas de perdre des comtés davantage avec une
politique qui n'est pas réaliste, qui n'a pas de sens et qui est
déjà depuis lontemps dépassée dans la province.
M. JOHNSON: M. le Président, quand j'entendais le ministre faire
l'éloge de son collègue, du ministère du Travail, et
énumérer ses qualités, je ne pouvais m'empêcher de
faire la comparaison et avec l'ancien ministre du Travail, celui qui a
immédiatement précédé le dé-
puté de Sherbrooke et avec celui qui nous parlait tantôt.
J'ai beau avoir un peu d'imagination, Je ne pouvais pas appliquer aucun des
qualificatifs qu'il adressait au ministre, au député de
Sherbrooke, au ministre lui-même, le député de
Matapédia qui, avec un cynisme qui ne surprend personne qui le
connaît bien, est venu admettre en Chambre les méthodes
utilisées par le parti libéral pour tromper
l'électorat.
Il est venu admettre lui-même qu'il est allé à Lac
au Saumon, dire aux gens: eh bien, si l'Union nationale arrive au pouvoir,
vous, qui gagnez $1,20 vous gagnerez $1 l'heure seulement. M. le
Président, c'est le ministre lui-même...
M. COITEUX (Duplessis): Il n'a pas dit ça. M. LE PRESIDENT: A
l'ordre messieurs.
M. JOHNSON: ... qui est venu admettre l'utilisation de pareilles
tactiques pendant la campagne électorale, et ce n'est pas nouveau,
ça été comme ça à la largeur de la province,
M. le Président. Quand ce n'est pas avec des faux certificats, c'est
avec des faussetés pareilles que le gouvernement libéral se fait
élire.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre.
M. JOHNSON: Et c'est de justesse que le ministre, qui avait 1,800 ou
1,900 de majorité, est passé par la peau des dents, j'allais dire
la peau de son portefeuille, avec 170 de majorité.
M. COITEUX (Duplessis): ce n'est pas nous autres qui avons
inventé les faux télégrammes par exemple.
M. JOHNSON: M. le Président, il y a 350,000 employés de
cette province, et ce sont les chiffres donnés par le premier ministre
pendant la campagne électorale, qui ne gagnent pas $1 l'heure. Le
ministre est venu nous faire part, tantôt, d'améliorations dans le
cas de 45,000 ou 50,000 ouvriers qui depuis 1960, ont
bénéficié de modifications aux ordonnances de la
Commission du salaire minimum de façon à gagner un minimum de $1
l'heure.
Je trouve que le gouvernement fait encore là un effort
insuffisant; le gouvernement devrait s'appliquer, dans une politique bien
pensée, dans une politique bien planifiée, devrait s'appliquer
intensément et rapidement à élever le niveau de vie de ces
350,000 employés de la province qui représentent au-delà
de 25% de notre force ouvrière. Evidemment, dans certains secteurs, il
faudra aller un petit peu plus tranquillement, mais il en est toute une foule
de secteurs où on pourrait tout de suite imposer un salaire minimum de
$1 l'heure.
Ah, je sais qu'on va dire, « mais comment allons-nous vendre notre
marchandise? » M. le Président, quand tous les manufacturiers,
quand tous les fournisseurs de services, quand tous les commerçants sont
astreints à payer le même minimum, eh bien, le jeu de la
concurrence n'est pas déplacé. Quand il s'agit du marché
extérieur, il y a une foule de manières d'ajuster le coût.
Il y a une foule de manières qu'on pourrait utiliser, en demandant la
coopération du fédéral qui pourrait baisser ses droits
d'importation dans certains cas, concernant certaines matières
premières, et qui pourrait hausser ses douanes quand il s'agit
d'importation de marchandises manufacturées à
l'extérieur.
En somme, ce que je demandais, et ce que nous recherchions, et ce que
nous recherchons actuellement, et ce que le gouvernement devrait rechercher
immédiatement, c'est le moyen de relever le niveau de vie d'un
cinquième de la classe ouvrière dans cette province. Et c'est le
temps plus que jamais, si on ne veut pas implanter et faire fleurir le
paupérisme dans cette province, et tirer de la queue dans cette parade
des provinces du Canada.
M. le Président, le ministre ne m'a pas du tout
impressionné par ses quelques améliorations. Tant mieux si une
cinquante de mille ouvriers ont pu bénéficier de certaines
améliorations par ces amendements aux ordonnances. Mais le ministre,
secrétaire de la province, député de Matapédia, m'a
encore impressionné moins que le ministre du Travail!
C'est le représentant de cette mentalité rétrograde
qui voudrait garder les ouvriers à petit salaire et comblés par
des pensions sociales! Si le ministre avait une pensée sociale
dynamique, il s'appliquerait à étudier ce qui s'est fait ailleurs
où en 15 ans on a pris la plus basse, la classe sociale qui
reçoit le moins, soit entre 2,000 et 4,000 couronnes par année et
on l'a pratiquement, cette classe, fait disparaître dans un pays. Le
ministre peut vérifier ces chiffres-là dans les publications
officielles.
Dans un pays que j'ai eu l'occasion de visiter récemment, on a
pris la classe de 2,000 à 4,000 couronnes de revenu annuel et qui
représentait 33 1/3% de toute la main-d'oeuvre et on l'a rendue au
deuxième degré, c'est-à-dire dans la catégorie de
15,000 à 20,000 couronnes. Aujourd'hui, on a dans cette catégorie
tout près
de 30% de la main-d'oeuvre et on n'a plus que 5% ou 6% qui gagnent le
salaire de la plus basse catégorie.
En somme, en 15 ans on a réussi à rehausser le niveau de
vie, les revenus d'abord et le niveau de vie, de la classe la moins
favorisée. Or, le gouvernement actuel fait exactement le contraire. Il
taxe cette classe, il taxe les gens qui ne gagnent pas $30 par semaine dans
cette province et sont célibataires. Il taxe ceux qui gagnent à
peine $50 par semaine, étant mariés. Le gouvernement actuel a
fait porter sur 250,000 petits salariés, gens à revenus modestes,
un impôt personnel sur le revenu.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre.
M. JOHNSON: M. le Président, ça démontre quel est
l'esprit social qui anime réellement le gouvernement. Oh! à grand
renfort de publicité, avec des belles manchettes dans les journaux, avec
un ton grasseyant et des larmes aux yeux si c'est nécessaire, on entend
le premier ministre et certains des ministres faire des grandes
déclarations d'amour en faveur de la classe la moins priviligée.
On leur paie des pensions, c'est vrai! Mais ce n'est pas ça qui
compte.
Ce qui compte c'est de légiférer de manière
à ce que le plus grand nombre de nos concitoyens, à ce que le
plus grand nombre des travailleurs de cette province puissent par leur travail
gagner leur subsistance et dépendre de moins en moins d'allocations
sociales ou d'assistance sociale. C'est ça une pensée sociale
dynamique. Je vous donne un conseil, M. le Président: ne vous fiez pas
au député de Matapédia pour vous la fournir.
DES VOIX: A l'ordre,
M. ARSENAULTr M. le Président, j'ai juste une question à
poser au chef de l'Opposition. Est-ce qu'il me le permet de la lui poser?
M. BELLEMARE: Le député de Matapédia,...
M. ARSENAULT: J'étais debout avant le député de
Champlain.
M. BELLEMARE: ... M. le Président,... DES VOIX: A l'ordre.
M. ARSENAULT: M. le Président, j'étais debout avant le
député de Champlain.
UNE VOIX: Dix heures.
M. LE PRESIDENT: Un instant. A l'ordre, messieurs. Je crois comprendre
que le député de Matapédia avait une réplique
à faire au chef de l'Opposition. Maintenant, si on ne s'entend pas, bien
on est peut-être aussi bien d'ajourner.
M. BELLEMARE: M. le Président, juste avant qu'il soit dix
heures...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs!
M. LESAGE: M. le Président, je comprends que les crédits
du ministère du Travail ne sont pas terminés.
M. BELLEMARE: A cause du député de Matapédia.
M. HYDE: A l'ordre, messieurs! J'attends le rapport.
M. LESAGE: Oh! pardon.
M. BEDARD (président du comité des subsides): M. le
Président, j'ai l'honneur de faire rapport que le comité a
adopté des résolutions et qu'il demande la permission de
siéger de nouveau.
M. HYDE (président): Quand siégera-t-il? A la prochaine
séance? A la prochaine séance. M. Lesage propose que les
résolutions soient maintenant lues et agréées. Cette
motion sera-t-elle adoptée?
M. JOHNSON: Adoptée.
M. LE PRESIDENT: Adoptée.
M. LESAGE: Alors demain, M. le Président, 3e lecture du bill qui
a été adopté en 2e lecture aujourd'hui au sujet de la
ville de St-Jean et de la ville de St-Luc, je crois.
M. BERTRAND (Missisquoi): St-Luc.
M. LESAGE: Et par la suite nous continuerons l'étude des
crédits du ministère du Travail; ensuite, les crédits du
ministère de la Famille et du Bien-Etre social et je pense bien que,
rendus à 6 heures, nous n'aurons pas terminé.
M. LE PRESIDENT: La Chambre est ajournée à demain
après-midi à deux heures et demie.