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(Trois heures de l'après-midi)
M. HYDE (président): Qu'on ouvre les portes. Let the doors be
opened.
A l'ordre, messieurs. Affaires courantes.
Présentation de pétitions. Lecture et réception de
pétitions. Présentation de rapports de comités
élus. Présentation de motions non annoncées.
Présentation de bills privés. Présentation de bills
publics.
Exposition universelle
M. LESAGE: M. le Président, nous avons l'honneur d'avoir, cet
après-midi, dans les galeries de la Chambre, la visite de très
nombreux membres du Bureau international des expositions. En l'absence de M.
Barrety, le président du Bureau, c'est M. D. A. Logan,
vice-président, qui dirige la délégation.
We are deeply honored indeed to have this afternoon, here, in this
House, the visit of the distinguished members of the « Bureau
international des expositions ». These gentlemen have come to our country
to visit the site of the International Exhibition of 1967, in Montreal. Being
in Montreal they visited various cities of Canada, including the capital,
Ottawa, Toronto, Winnipeg, Vancouver, Halifax and our capital city of
Quebec.
Je veux signaler également la présence de plusieurs
membres de la Corporation canadienne de l'exposition 1967, sous la
présidence distinguée de Son Excellence monsieur l'ambassadeur
Dupuy qui accompagne la délégation.
Nous sommes heureux de recevoir tous ces messieurs. Le gouvernement avec
l'appui de la législature, j'en suis certain, va faire l'impossible pour
coopérer avec la Corporation de l'exposition universelle et avec le
Bureau international, si nécessaire, pour assurer le succès le
plus entier, le plus complet à cet événement de 1967. Je
veux dire combien nous sommes heureux que cette exposition de 1967 soit tenue
au Canada, mais surtout dans le Québec, à Montréal
métropole du Canada.
I am sure that all those who are visiting us will enjoy their stay and
will appreciate the hospitality, not only of the province of Quebec, but also
of the city of Quebec which, I should say without boasting, has acquired quite
a reputation as far as hospitality is concerned.
Alors, bienvenue à tous ces messieurs. Je leur souhaite un
excellent séjour. Nous aurons sans doute, plusieurs d'entre nous,
l'occasion de les rencontrer demain soir à Montréal, lorsque la
cité de Montréal, au cours d'un événement
historique, remettra à la Corporation canadienne de l'Exposition
universelle le site de ladite exposition.
J'en profite pour aviser les députés qui veulent
participer à cette fête de demain soir, à Montréal,
à laquelle ils sont invités que je proposerai l'ajournement
à cinq heures vingt, afin qu'ils puissent prendre le train de six heures
et ils pourront descendre à la gare Jean-Talon où des autocars
seront à leur disposition pour les conduire directement à
l'hôtel de ville de Montréal d'où se fera le départ
pour l'île Ste-Hélène.
M. JOHNSON: M. le Président vous comprendrez que l'Opposition
veuille joindre sa voix à celle du premier ministre pour souhaiter la
bienvenue à tous ces délégués ou à ses
directeurs du Bureau international des expositions ainsi qu'aux membres de la
Corporation canadienne de l'Exposition 1967. Nous voulons par là
marquer, disons, l'absence de politique avec un petit « p » dans un
projet qui tient tant à coeur aux Québécois en
général et aux Canadiens de quelque province qu'ils soient.
Nous sommes très heureux, nous de l'Opposition, de pouvoir
proclamer aujourd'hui que cette question a été tenue par les deux
partis en dehors de tout climat politique au sens où l'on entend
souvent. En effet, c'est en 1959 que la première loi concernant
l'Exposition universelle a été votée à
l'unanimité de la Chambre, sur la proposition du premier ministre, le
regretté Paul Sauvé.
Au mois de février 1960, lors d'une conférence
fédérale-provinciale, la première en vue de la
célébration du centenaire de la Confédération,
j'avais l'honneur de représenter le gouvernement et c'est là que
j'ai eu l'occasion de proposer une motion qui, après quelques
hésitations, fut agréée à l'unanimité,
motion qui tendait à obtenir du premier ministre et du gouvernement du
Canada que l'Exposition universelle soit considérée comme un des
événements du centenaire de la Confédération et
qu'elle soit tenue à Montréal, dans la province de
Québec.
Je dois dire, comme je l'ai souligné tantôt, que c'est
seulement après quelques hésitations que les premiers ministres
ou les délégués officiels de toutes les provinces ont
souscrit à cette motion. On sait le travail que depuis quelques
années s'impose la cité de Montréal par son maire et son
exécutif particulièrement, pour faire de cet
événement un succès retentissant à la gloire, non
seulement des Québécois, mais du Canada tout entier. Nous sommes
donc
très heureux de souhaiter ici la bienvenue à ces
distingués visiteurs.
And I would like to follow the example of the Prime Minister in this so
old and unique bilingual provincial parliament of Canada to express in English
my heartiest welcome to the members of this international bureau, or the Bureau
of International Exhibitions. Hearing the Prime Minister and reading about
their journey across Canada, I must add my admiration for their great
resistance to a back-breaking schedule that seems to have been imposed on them
during this rapid trip all over the country.
Evidemment, il n'est pas étonnant qu'on voyage vite et
efficacement, quand le voyage est organisé par Son Excellence
l'ambassadeur Dupuy qui semble avoir le don de ces voyages rapides et en
même temps efficaces.
Donc, bienvenue, et je dis tout de suite au premier ministre que nous
sommes reconnaissants des détails qu'il nous a fournis. Plusieurs
députés de l'Opposition se feront sans doute un devoir d'assister
à cette cérémonie grandiose préparée avec
tant de soins par le maire Drapeau et le président de l'exécutif,
M. Lucien Saulnier. Et d'une façon bien égoïste, je nous
souhaite à tous demain soir une température un peu plus favorable
que celle qu'on a connue la semaine dernière à pareil
endroit.
Décès d'un ancien
député
M. le Président, comme ça arrive souvent en cette Chambre,
nous passons rapidement des choses agréables à des choses moins
agréables pour souligner des événements plutôt
attristants. Il s'agit cette fois de la mort d'un ancien député
de cette Chambre, M. Alfred Dubé, qui pendant onze ans fut
député de Rimouski, soit de 1936 à 1939 et ensuite de 1944
à 1952. M. Dubé fut, je vous demande pardon, député
pendant quinze ans.
M. LESAGE: 1956.
M. JOHNSON: Pendant quinze ans, il avait été
réélu en 1952, mais avait décidé de ne pas briguer
de nouveau les suffrages en 1956. Ceux qui ont connu M. Dubé savent de
quels précieux conseils il était pour un gouvernement à
cause de ses grandes connaissances comme cultivateur professionnel et comme
homme occupé et dévoué à tous les
intérêts des cultivateurs dans leurs associations de tout genre.
M. Dubé a eu la grande consolation de vivre jusqu'à un âge
très avancé, il avait en effet 80 ans au moment de son
décès et il laisse une famille de douze enfants encore
vivants, dont trois fils et neuf filles. Un de ses fils est curé de
Baie-Comeau et deux de ses filles sont religieuses. Les deux autres fils sont
mariés et les sept filles également et tous ont de nombreux
enfants. M. Dubé était aux yeux de ceux qui l'ont connu pendant
les dernières années de son mandat en cette Chambre, le type
parfait du patriarche canadien français, cultivateur actif, père
d'une famille nombreuse, intéressé à tout ce qui
concernait ses frères les cultivateurs et particulièrement
attaché à cette belle région de Rimouski et du bas du
fleuve. Donc, à toute la famille éplorée, j'offre en mon
nom personnel et au nom de tous les députés de l'Opposition, nos
condoléances les plus sincères.
M. LESAGE: M. le Président, avec le chef de l'Opposition et les
membres du gouvernement et du parti ministériel je déplore la
perte d'un ancien député de cette Chambre, M. Dubé, que je
n'ai pas eu le plaisir de connaître. Plusieurs de mes collègues
l'ont connu et ils m'ont tous dit qu'ils n'avaient qu'à s'en
féliciter.
C'était un homme d'un commerce extrêmement agréable,
bien dévoué aux intérêts de son comté et qui
était un père de famille exemplaire, c'est clair, c'est
évident; d'ailleurs la vocation de son fils et de ses deux filles le
prouve, sans compter qu'il laisse, je pense, 32 petits-enfants, en plus des
enfants qui lui survivent. J'ai connu cependant son fils, M. le curé de
Baie-Comeau qui, auparavant était curé de Shelter Bay. J'ai eu
l'occasion de causer avec lui à quelques reprises des
intérêts de la côte nord.
A monsieur le curé de Baie-Comeau et à tous les membres de
la famille je désire exprimer en mon nom, au nom du gouvernement et des
membres du parti ministériel, nos profondes condoléances.
M. DIONNE: M. le Président, je me dois de me joindre à
l'honorable premier ministre et à l'honorable chef de l'Opposition pour
offrir au nom de toute la population du comté de Rimouski mes
sincères condoléances. M. Dubé, par les fonctions qu'il a
accomplies, a rendu d'inappréciables services à la classe
agricole. Il était le député de tout le monde, rendant
service à tous, sans égard à la race, au point qu'une fois
il m'a confié: « Lorsqu'il m'arrive de rendre service à un
libéral, c'est là vraiment que je reçois de la gratitude;
lorsque je rends service à un des miens, souvent il me laisse entendre
que ça aurait pu être mieux. » Je crois que cette chose est
vécue, a été vécue, et est encore vécue par
la plupart des députés de cette Chambre.
Mais lorsque venait le temps des élections,
il triomphait des adversaires les plus qualifiés. En 1956, je
n'ai pas eu à lutter contre lui parce qu'il avait décidé
de se retirer. C'est un homme qui se faisait élire par ses
qualités personnelles. C'est pourquoi, en mon nom et au nom de tous les
citoyens du comté de Rimouski, j'offre à madame Dubé,
à sa nombreuse et grand, famille, mes sympathies les plus
sincères et à tous ses enfants, à son fils, M. le
curé de Baie-Comeau,-ses deux filles, révérendes soeurs du
St-Rosaire, j'offre mes condoléances et celles de tous les gens du
comté de Rimouski.
Anniversaire
M. BERTRAND (Missisquoi): Avec votre permission, je voudrais,
étant donné que j'étais absent le 19 juin, au moment de
l'ajournement, absence motivée, j'assistais alors aux funérailles
d'un ex-député du comté de Frontenac, j'ai appris que
l'honorable premier ministre et l'honorable chef de l'Opposition, et je l'ai lu
en arrivant ici tantôt, dans « Le Journal des débats
», que l'on avait bien voulu me présenter ainsi qu'à ma
famille des bons voeux à l'occasion de mon anniversaire de naissance. Je
tiens à les en remercier. Comme je ne veux pas prolonger cette courte
intervention, je le fais sans commentaire, je veux mettre ces voeux au compte
de leur bonne volonté et de l'amitié que nous vivons en cette
Chambre entre tousles collègues, d'un côté comme de
l'autre. Ainsi, que j'ai promis à ma famille de le faire, je leur offre
ma pleine et loyale coopération pour que les travaux de la Chambre
s'accélèrent afin que nous puissions retourner dans nos familles,
car il ne faudrait pas qu'ayant quitté la Chambre à l'âge
de 47 ans, y revenant à l'âge de 48 ans, j'y sois, pour mon 49e
anniversaire, durant la même session!
M. LESAGE: J'espère, M. le Président, qu'il sera possible
d'exaucer les voeux du député de Missisquoi qui sont
partagés par l'immense majorité sinon la totalité des
membres de cette Chambre.
Municipalités et Commissions scolaires
Je voudrais, M. le Président, soulever une question de
privilège.
Dans « l'Action » de jeudi, le 25 juin, un article est
intitulé « Monsieur Lesage ne reçoit pas ». Je cite
l'article de « L'Action » « Les représentants des
commissions scolaires et des municipalités de la province ne
rencontreront pas le premier ministre pour lui faire part des voeux émis
par leur assemblée con- jointe tenue il y a quelque temps au
Château Frontenac. Dans un télégramme que le premier
ministre a fait parvenir à la Fédération des commissions
scolaires et à l'Union des municipalités M. Lesage a
invité les deux organismes à lui faire parvenir que par
correspondance les résolutions au mémoire qu'ils souhaitaient lui
présenter. M. Lesage a précisé que ce n'est pas là
une attitude spéciale à l'endroit des municipalités et des
commissions scolaires, mais qu'il ne recevait aucun groupe devant lui soumettre
des voeux sur ce point préférant les recevoir par vole de
courrier. »
Et ensuite un sous-titre « Déception » ! « Il
va sans dire que les représentant des commissions scolaires et des
municipalités sont fort déçus de cette attitude. »
L'article continue, mais j'en ai cité suffisamment pour en faire la part
de mon point de privilège.
Je crois qu'il est juste que je lise le télégramme qui est
identique et que j'ai adressé à M. Robert Cauchon, le
président de l'Union des municipalités ainsi qu'à M. Jean
Leduc, le président de la Fédération des commissions
scolaires catholiques du Québec. « J'accuse réception du
télégramme que vous-même et M. Leduc m'avez adressé
le 15 courant en vos qualités respectives de président de l'Union
des municipalités du Québec et de président de la
Fédération des commissions scolaires catholiques du
Québec, dans lequel vous me faites part du désir exprimé
à l'effet que les représentants de vos associations respectives
puissent avoir une entrevue avec moi pour me remettre les résolutions
qui ont été adoptées au cours de l'assemblée
extraordinaire qui a eu lieu à Québec le 13 courant. Comme j'ai
adopté comme ligne de conduite, afin de garantir toute
impartialité c'est ça que l'article ne dit pas, je
répète comme j'ai adopté comme ligne de conduite,
afin de garantir toute impartialité aux groupes concernés de ne
jamais recevoir de délégations de personnes
intéressées à des bills soumis à la
législature, je vous prierais, dans les circonstances, de bien vouloir
m'adresser par courrier les résolutions que votre
délégation aurait voulu me remettre au cours de l'entrevue
demandée. Par ailleurs vos organismes ont déjà eu
l'occasion de se faire entendre au comité des bills privés
je pense que c'était publics lors de la première
étude du bill 54 en 1963 et cette année encore lors des
séances du comité spécial de la législature sur la
fonction publique alors que vous étiez représentés par Me
Arthur Nadeau. »
M. le Président, je voudrais ajouter simplement ceci: c'est que
lorsque des délégations
comme, par exemple, l'exécutif de l'Union catholique des
cultivateurs m'a demandé une entrevue au sujet du problème urgent
de la taxe foncière, en particulier dans le domaine scolaire, je les ai
reçus vendredi matin. Nous avons discuté publiquement devant les
représentants de tous les média d'information et j'ai pu me
former une opinion en consultation avec le président de la commission
sur la fiscalité qui m'accompagnait, ainsi que quelques-uns de mes
collègues qui étaient à mes côtés, et j'ai pu
leur dire, à la suite de la discussion que nous avons eue, ce que
j'avais l'intention de soumettre au Conseil des ministres lorsqu'il
siègera la prochaine fois, c'est-à-dire jeudi.
Il s'agissait dans le cas de l'Union catholique des cultivateurs non pas
d'un conflit d'intérêts, mais d'une demande faite au gouvernement.
Lorsqu'il s'agit de conflits d'intérêts entre des groupes ou entre
des individus, en ce qui concerne des projets de loi qui sont devant la Chambre
ou que l'on se propose de présenter à la Chambre, je crois qu'en
toute impartialité je ne me dois pas d'entendre les parties « ex
parte ». C'est une ligne de conduite que j'ai suivie sans exception
depuis 1960.
J'ai des amis fort intimes qui sont avocats souvent sur des bills
privés. J'ai systématiquement refusé de les entendre en
quelque circonstance que ce soit, devant le comité des bills
privés, parce que je n'entends pas les gens qui ont des conflits
d'intérêts qui sont devant la Chambre ou devant un de ses
comités. Je ne les entends pas « ex parte » et cela par
souci d'impartialité et pour que la population de la province de
Québec sache que je veux agir avec impartialité et que les
décisions prises à la suite des représentations qui sont
faites contradictoirement, publiquement devant les comités, que les
décisions prises par le gouvernement le sont à la lumière
des renseignements qui nous sont donnés publiquement par tous les
intéressés et non pas dans mon bureau en discussion
privée.
M. JOHNSON: M. le Président, je comprends qu'il n'y ait pas de
débat sur une question de privilège, mais je voudrais poser une
question. Est-ce qu'il n'est pas vrai que le premier ministre qui ne
reçoit pas les délégations, lorsqu'il s'agit d'un bill
devant la Chambre ou devant un comité, ne réfère pas ces
avocats et ces délégations à son conseiller juridique, M.
Pigeon?
M. LESAGE: Pas les délégations! Les procureurs lorsqu'il
s'agit de bills privés ou publics.
M. JOHNSON: M. le Président, le premier ministre a-t-il...?
M. LESAGE: Lorsqu'il s'agit de discuter de points de rédaction,
de points de droit, les conflits d'intérêts se discutent
publiquement devant le comité.
Chutes Hamilton
M. JOHNSON: Le premier ministre aurait-il des nouvelles à nous
communiquer concernant les chutes Hamilton qui auraient été le
sujet de son entretien à Montréal à l'occasion de son
départ du Québec vendredi après-midi?
M. LESAGE: J'ai discuté de cette question vendredi
après-midi et de nouveau longuement ce matin et il n'est pas dans
l'intérêt public, qu'à ce moment précis, je dise
quoi que ce soit.
M. JOHNSON: M. le Président, en l'absence du ministre du Commerce
et de l'Industrie...
UNE VOIX: Il est là!
Investissements britanniques
M. JOHNSON: Je vous demande pardon, du ministre du Revenu, est-ce que le
premier ministre voudrait donner à la Chambre quelques indications sur
un projet exposé par le ministre du Revenu à l'occasion d'un
discours retentissant devant la Canadian British Trade Association? Il
s'agirait d'une industrie ou d'un complexe industriel de $70,000,000 qui est
à la veille ou sur le point de s'installer dans la province de
Québec.
M. LEVESQUE (Bonaventure): Je voudrais, tout simplement, faire une
remarque si on me le permet. C'est que le ministre en question n'a pas fait de
déclaration à l'effet qu'il s'agissait d'un complexe industriel,
mais qu'il s'agissait d'un investissement.
M. LESAGE: Des investissements par des intérêts
britanniques.
M. LEVESQUE (Bonaventure): Britanniques!
M. LESAGE: Une somme d'à peu près $70,000,000.
M. JOHNSON: Il va acheter des épargnes, des bons d'obligations,
des obligations d'épargnes?
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs.
M. LESAGE: M. le Président, je regrette, la vente des obligations
d'épargne est terminée et d'ailleurs le chef de l'Opposition sait
fort
bien que seuls les résidents de la province de Québec
peuvent en acheter et que la limite pour chacun est de $15,000.
M. JOHNSON: Pour ne pas être une corporation.
M. LESAGE: Les corporations ne peuvent pas en acheter.
Fiscalité rurale
M. JOHNSON: Le premier ministre est-il encore d'avis, comme il semblait
l'être vendredi dernier, que la généralisation de la taxe
de vente et sa distribution partielle à des municipalités qui ne
l'imposaient pas est un remède suffisant au problème
exposé par l'U.C.C. concernant le manque de justice distributive
dans...
M. LESAGE: Est-ce que le chef de l'Opposition pourrait recommencer sa
question?
M. JOHNSON: Le premier ministre est-il encore d'avis comme il semblait
l'être...
M. LESAGE: Encore?
M. JOHNSON: ... la semaine dernière ou avant l'ajournement que sa
généralisation de la taxe de vente et une distribution d'une
partie d'icelle aux municipalités qui ne l'imposaient pas est une
solution satisfaisante aux yeux de l'U.C.C. qui avait demandé une
meilleure distribution du fardeau de l'impôt foncier?
M. LESAGE: M. le Président, je ne comprends pas que le chef de
l'Opposition puisse dire que j'ai semblé avoir dit ça parce que
j'ai dit tout le contraire. J'ai dit exactement le contraire. J'ai dit que
c'était un palliatif temporaire et que les corporations municipales,
particulièrement en milieu rural, pouvaient faire profiter les
cultivateurs par une diminution de l'impôt foncier municipal de la
généralisation de la taxe de vente.
Pour ce qui est de ma satisfaction j'ai dit exactement le contraire
devant tous les média d'information lorsque j'ai reçu
l'exécutif de l'U.C.C. J'ai dit que je réalisais que la situation
du cultivateur devait être corrigée. Je l'avais dit, d'ailleurs,
depuis plusieurs mois au président de la Commission sur la
fiscalité, M. Marcel Bélanger. Je l'ai dit publiquement, vendredi
matin. Je l'avais dit en Chambre aussi. Et ce que je cherchais vendredi matin
avec les membres de l'exécutif de l'U.C.C. c'était un moyen de
faire le pont, de les aider d'une manière efficace d'i- ci à ce
que nous ayons le rapport de la Commission Bélanger qui doit traiter
justement de toute la fiscalité dans la province de Québec, ce
qui comprend évidemment le problème de l'impôt foncier en
milieu rural.
Et comme M. Bélanger lui-même l'a expliqué
publiquement vendredi matin aux cultivateurs, il s'agit d'une affaire
extrêmement complexe qui demande une étude approfondie. Et ce
n'est qu'après avoir consulté M. Bélanger et le ministre
de l'Education et les autres ministres qui m'entouraient, mais principalement
M. Bélanger, en ce qui concerne ce nouveau palliatif que je dois
proposer au Conseil des ministres jeudi, que j'ai eu l'assurance de M.
Bélanger qu'une telle proposition, si elle était adoptée
d'abord par le Conseil des ministres et ensuite par la Chambre, ne serait pas
de nature à briser, si vous voulez, ou à créer une
situation de fait qui rendrait plus difficile et l'étude et la
préparation du rapport qu'il doit nous faire.
Donc, je n'ai jamais déclaré, et je ne comprends pas que
le chef de l'Opposition puisse prétendre que j'ai semblé
être satisfait de la généralisation de la taxe de vente
comme remède pour le problème que crée l'impôt
foncier dans le domaine municipal et scolaire pour les cultivateurs.
M. JOHNSON: Le premier ministre se demande pourquoi je pose la question,
M. le Président. Je lui rendrai service en lui disant que je trouve
regrettable que ça prenne autant de temps au premier ministre pour
comprendre le problème et y apporter un commencement de solution...
UNE VOIX: A l'ordre.
M. LESAGE: M. le Président, je ne puis laisser passer ces paroles
sans me lever sur une question de privilège. Ce n'est pas moi qui prends
le temps; c'est la Commission Bélanger...
M. BELLEMARE: Cela fait quatre ans que vous devez régler ce
problème là.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre messieurs.
M. LESAGE: Oui, mais l'Union nationale a été au pouvoir
pendant seize ans et puis elle n'y a jamais touché...
M. BELLEMARE: On a fait quelque chose pour les cultivateurs. Voyons
donc!
M. LE PRESIDENT: A l'ordre messieurs.
M. BELLEMARE: Jamais les cultivateurs n'ont fait la grève.
M. LACROIX: Ils n'étaient pas libres de la faire.
M. BELLEMARE Il y en avait 10,000 cultivateurs devant le Parlement.
C'est du monde ça.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre messieurs...
M. BELLEMARE: En 1960, vos grandes annonces.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre messieurs.
UNE VOIX: On n'a pas de matraques nous autres!
M. BELLEMARE: Non, mais il vous manque d'autres choses.
M. JOHNSON: Vous avez des taxes.
M. BELLEMARE: Et vous avez des grèves.
M. LESAGE: Est-ce d'Asbestos que vous voulez parler?
M. LE PRESIDENT: A l'ordre messieurs.
M. BELLEMARE: Non, mais de celle des camionneurs à
Jacques-Cartier. Le monde qui saignait. Et ils se sont « tapochés
» à coups de matraques. Vous n'en n'avez pas parlé de
celle-là.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre messieurs. Je considère que
premièrement on est engagé dans un sujet qui est certainement de
nature à soulever un débat, que c'est un débat qui a
déjà été discuté et décidé en
Chambre deux fois. On est toujours à la même session, où on
a discuté des motions concernant les dépenses publiques, la
menace au crédit de la province, l'imposition sur les contribuables,
à revenus modestes, d'un fardeau disproportionné à leurs
revenus; c'était au mois de février. En avril, on avait
discuté d'une motion concernant la pensée agricole, les promesses
du gouvernement...
UNE VOIX: Vous vous y attendiez!
M. LE PRESIDENT: On en a discuté, durant le discours du budget,
du 6%. On a passé la loi. Ce sont toutes des mesures qui ont
été discutées et décidées par la
Chambre.
M. JOHNSON: M. le Président, je vous remercie d'avoir
récapitulé pour nous les titres de débats en tout cas,
mais je crois qu'il y en aura un autre puisque le gouvernement devra apporter
certaines législations pour donner effet aux solutions proposées.
Je voudrais, avec votre permission, poser quelques questions au premier
ministre.
En quoi consisteront, par exemple, les démarches qui doivent
être faites et dont a parlé le ministre de l'Agriculture et de la
Colonisation pour que les cultivateurs, autres que ceux qui vendent leur lait
en nature, bénéficient eux aussi, d'une augmentation du prix de
leur produit?
M. LESAGE: Nous avons discuté de cette question et il a
été entendu que l'U.C.C. ferait des pressions sur Ottawa en ce
qui concerne le prix de ce qu'on appelle le lait utilisé pour fins
industrielles, ce qui comprend, évidemment, le lait utilisé pour
la fabrication du beurre et du fromage.
M. JOHNSON: Quant à l'autre mesure proposée, celle d'une
augmentation de $0.20 le cent livres de lait que le ministre proposerait ou
suggérerait à la Régie des produits et des marchés
agricoles, est-ce qu'on procédera par législation, par directives
ou encore en vertu de quelle autorité?
M. LESAGE: En vertu de l'autorité de la Régie, M. le
Président.
UNE VOIX.: De quoi?
M. LESAGE: L'autorité de la Régie.
M. GOSSELIN: Elle n'a pas été bien efficace jusqu'à
date!
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs! Affaires du jour.
M. JOHNSON: M. le Président, est-ce que, dans le cadre du
fédéralisme-coopératif, M. Pearson ou un
représentant aurait consulté le ministre des Affaires
fédérales-provinciales ou le premier ministre de la province
avant de faire entreprendre une étude par les experts
fédéraux sur les conséquences d'un séparatisme
éventuel?
M. LESAGE: M. le Président, pas plus que nous l'avons fait,
nous.
Préférences tarifaires
M. BELLEMARE: M. le Président, est-ce que l'honorable ministre de
l'Industrie et du Commerce pourrait nous donner certaines informations
concernant les entretiens qu'il a eus ou la correspondance qu'il a
échangée au sujet des préférences douanières
pour l'établissement, dans la province de Québec, des industries
Renault et Peugeot?
M. BERTRAND (Terrebonne): Adressez-vous au gouvernement
fédéral.
M. LEVESQUE (Bonaventure): Je l'ai déjà dit, j'ai
reçu une lettre de M. Drury à ce sujet, mais, je le
répète encore une fois, si M. Drury veut faire connaître le
contenu de cette lettre, on n'a qu'à le lui demander. Mais je sais que
c'est déjà fait et qu'il a répondu qu'il n'était
pas d'intérêt public de faire connaître son contenu pour le
moment et, quant à nous, nous sommes dans les mêmes
dispositions.
M. JOHNSON: M. le Président, si le député de
Champlain me permet, M. Drury aurait également déclaré
ceci, en substance: « Je demande aux députés de
l'Opposition de ne pas me poser de questions puisque c'est un travail ou une
responsabilité actuellement assumée par les autorités
provinciales du Québec. »
Manoir de Verchères
M. BELLEMARE: M. le Président, est-ce que l'honorable premier
ministre pourrait me donner une indication concernant la Commission des
monuments historiques du Québec? Relève-t-elle de
l'exécutif, du ministre du Tourisme et de la Chasse ou du
Secrétariat provincial?
M. BERTRAND (Terrebonne): Ah non, ah non!
M. BELLEMARE: J'ai regardé dans les Affaires culturelles et je ne
le trouve pas.
M. LESAGE: Bien voyons! Donnez-moi un budget.
M. BERTRAND (Terrebonne): Les Affaires culturelles.
M. LESAGE: C'est aux Affaires culturelles. Je vais vous donner la page.
C'est à la page 16 item 16. C'est pour, je crois, les...
M. BELLEMARE: Oui, mais c'est le Service des monuments historiques.
M. LESAGE: ... investissements.
M. BELLEMARE: Ce n'est pas la Commission.
M. LESAGE: Un instant! Pardon?
M. BELLEMARE: C'est le Service des monuments historiques mais ce n'est
pas la Commissions.
M. LESAGE: Bien oui!
M. BELLEMARE: En tout cas, ma question est celle-ci. La province a
dépensé $24,750 pour acheter le manoir de
Madeleine-de-Verchères à Ste-Anne-de-la-Pérade...?
UNE VOIX; Jamais.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, je crois que je devrais suggérer ceci
au député de Champlain. Il me semble à moi qu'il y aurait
des raisons particulières pour que la question concernant une certaine
dépense soit déposée au feuilleton. Je ne dis pas que ce
n'est pas une question d'urgence pour certaines gens, mais ce n'est pas une
question d'intérêt général, publique et urgente en
ce qui concerne le gouvernement de la province. Je crois que c'est une question
qui devrait être déposée au feuilleton.
M. LESAGE: M. le Président, si vous vouliez me le permettre, ce
serait très facile de répondre, de référer le
député de Champlain à la page 14 du livre des estimations
budgétaires, item 9,...
UNE VOIX: 4.
M. LESAGE: ... 4 et alors, ces estimations budgétaires sont
passées.
M. BELLEMARE: Elles sont passées, oui. M. le Président, je
me soumettrai à votre décision. Mais ma question est celle-ci. Le
ministre nous avait dit que, dans ces deux endroits, au manoir de
Madeleine-de-Verchères et à l'ancien presbytère de
Batiscan, il y aurait pour les touristes dès cette année des
travaux d'aménagement qui leur permettraient de bénéficier
de ces endroits. La question est de savoir si véritablement il va se
faire des travaux cette
année? Les touristes vont-ils pouvoir en
bénéficier?
M. LESAGE: Je ne le sais pas. Le ministre est en Europe.
M. BERTRAND (Terrebonne): M. le Président, je veux simplement
répondre ceci: lorsque, il y a deux ans, j'ai dit que le Conseil du
tourisme avait acheté des emplacements a
Ste-Anne-de-la-Pérade,...
M. BELLEMARE: $24,700, oui.
M. BERTRAND (Terrebonne): ... dans les deux endroits, le vieux
presbytère et le vieil emplacement du...
M. BELLEMARE: $40,000.
M. BERTRAND (Missisquoi): ... manoir Madeleine-de-Verchères, le
député de Champlain a semblé protester. Dans le temps,
c'était l'Office du tourisme qui a négocié l'achat de ces
deux emplacements.
M. BELLEMARE: Protesté contre le prix de $40,000, pour un vieux
presbytère.
M. BERTRAND (Missisquoi): Bien, j'ai protesté parce que ça
valait ça dans le temps,...
M. BELLEMARE: Cela valait ça?
M. BERTRAND (Terrebonne): ... l'Office du Tourisme l'a acheté.
Deuxièmement, il avait été question dans le temps, lorsque
le ministère des Affaires culturelles serait formé, que ces
emplacements soient transférés a la Commission des sites et des
monuments historiques et qu'en même temps le nouveau ministère du
Tourisme de la Chasse et de la Pêche s'occuperait, de concert avec le
ministère des Affaires culturelles, d'en faire des lieux qui pourraient
être visités par les touristes, mais qui en même temps
serviraient de sites historiques selon les brochures et les pamphlets que, dans
le temps, nous étions en droit de vouloir publier. Ces deux projets sont
sur le tapis à l'heure actuelle et, au vieux presbytère de
Ba-tiscan, il a été fait l'an passé des études
archéologiques qui ont donné de merveilleux résultats. Que
le député de Champlain ne soit pas impatient.
M. BELLEMARE: OÙ?
M. BERTRAND (Terrebonne): Nous allons continuer nos démarches,
nous avons un plan directeur destiné a donner à ces endroits, du
point de vue touristique, le plus d'ampleur possible et l'année 1964
marquera certainement un tournant heureux dans l'industrie touristique de la
province de Québec.
M. BELLEMARE: C'est épouvantable! M. LE PRESIDENT: Affaires du
jour.
Sidérurgie
M. GABIAS: M. le Président, il s'agit d'une question urgente,
d'intérêt public, qui devrait certainement intéresser toute
la province. Est-ce que l'honorable premier ministre a eu le temps de consulter
le rapport de rentabilité concernant la sidérurgie,...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs. Je demande au
député de Trois-Rivières de déposer sa question...
A l'ordre, messieurs.
M. GABIAS: ... rapport qui a été déposé le
30 octobre 1963?
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs. Je demande au
député de Trois-Rivières de déposer sa question au
feuilleton. Affaires du jour.
M. LESAGE: Numéro 1.
M. JOHNSON: M. le Président, il est évident que le
député de Trois-Rivières et tous les députés
aimeraient savoir s'il y a du nouveau quant au site du complexe
sidérurgique. Si le premier ministre n'a pas de nouveau à nous
annoncer, il n'a qu'à dire qu'il n'en a pas; c'est aussi simple que
ça, mais nous aimerions être renseignés le plus tôt
possible.
M. LE PRESIDENT: Affaires du jour.
M. LESAGE: Numéro 1.
M. GABIAS: Est-il exact que...
M. LE PRESIDENT: Numéro 1, question de M. Allard.
M. GABIAS: J'ai une autre question à poser, M. le
Président.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs.
M. GABIAS: Est-il exact qu'il y a 98% des chances que le complexe
sidérurgique...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs. Affaires du jour. A l'ordre,
numéro 1, question numéro 1, question de M. Allard.
Travail sessionnel
M. JOHNSON: M. le Président, je sais bien que vous ne voulez pas
bousculer tous les députés, mais j'avais aussi à poser au
premier ministre quelques questions qui regardent, je pense, la marche
générale de la Chambre; ça pourrait peut-être
être remis au moment de l'ajournement, mais je pense qu'il est
d'intérêt public que nous le sachions tout de suite. Le premier
ministre aurait déclaré, selon certains journaux, qu'il
espérait finir la session à la fin du mois de juillet. J'aimerais
savoir si c'est exact, et deuxièmement, l'assurer que nous
coopérerons, évidemment dans toute la limite du possible, et tout
en faisant notre devoir de députés de l'Opposition. C'est
exact?
M. LESAGE: C'est vrai que j'ai déclaré ça. J'ai
peut-être été un peu optimiste, mais enfin, je l'ai
déclaré quand même.
M. JOHNSON: Est-ce que les projets de loi sont prêts? Est-ce que,
par exemple, les...
M. LESAGE: M. le Président, les projets de loi seront inscrits
à l'ordre du jour au fur et à mesure que le gouvernement en
décidera.
M. JOHNSON: C'est une réponse claire, précise, concise et
très explicative. M. le Président, est-ce que le bill 54 sera
étudié cette semaine? Est-ce qu'on est prêt du
côté du gouvernement?
M. LESAGE: Pas cette semaine, nous n'avons pas reçu le dernier
rapport du comité présidé par le député de
Jacques-Cartier en ce qui concerne les relations dans les services
scolaires.
M. JOHNSON: Est-ce que le député de Jacques-Cartier,
président du comité, est en fonction officielle,
représentant la province?
M. LESAGE: Oui.
M. JOHNSON: A quelle sorte de fonction, M. le Président?
M. BERTRAND (Missisquoi): C'est pour ça qu'elle prolonge son
voyage...
M. LESAGE: Je m'excuse, j'ai un manque de mémoire.
M. BERTRAND (Missisquoi): ... à la fête du Canada, en
Angleterre?
M. LESAGE: Non, je ne pense pas.
M. BERTRAND (Missisquoi): C'est ce qu'on m'a dit.
M. LESAGE: Bien, je sais que c'est une fonction officielle.
UNE VOIX: C'est ce qu'elle nous avait dit.
M. LESAGE: Oui, c'est une fonction officielle.
M. JOHNSON: M. le Président, ça n'a rien à faire
avec le bill 16 le voyage?
M. LESAGE: Il est sanctionné.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs.
M. JOHNSON: Alors, M. le Président, quant au bill 54, ça
peut aller à la semaine prochaine ou à...?
M. LESAGE: Bien, le plus tôt possible. Je pense que le
député de Jacques-Cartier n'est pas revenue de Londres
encore.
Elections partielles
M. JOHNSON: M. le Président, est-ce que le premier ministre
pourrait satisfaire notre curiosité, la curiosité légitime
de toute la population? Le 30 juillet, il y aura un an exactement que le
comté de Matane est sans député. C'est, je crois, une
situation sans précédent depuis 1944. Je me demende quand
viendront les élections partielles dans le comté de Matane; dans
le comté de Dorchester? et dans le comté de Saguenay?
M. LESAGE: Le plus tôt possible.
M. JOHNSON: M. le Président, le premier ministre se rend compte
que ces gens, ces électeurs, ces contribuables ont le droit, comme les
contribuables de nos comtés respectifs, à un
député.
DES VOIX: A l'ordre, à l'prdre.
M. JOHNSON: Et quand ça fait un an...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs.
Comptes publics
M. GABIAS: Juste avant l'ajournement, l'honorable premier ministre avait
déclaré à cette Chambre qu'il pourrait y avoir un
comité des comptes publics le 14 juillet...
M. LESAGE: Il pourrait.
M. GABIAS: Oui, il pourrait. Or, je vois, à l'appendice du
feuilleton, qu'il n'y a pas encore d'avis de donné. Est-ce que
l'honorable premier ministre a l'intention de donner l'avis au feuilleton?
M. LESAGE: M. le Président, non. J'avais dit, lorsque, l'an
dernier, nous avons commencé à siéger au comité des
comptes publics, que si l'Opposition décidait de se servir de ce
comité (le parti de l'Union nationale) pour faire le travail réel
que doit faire ce comité, qu'il siègerait
régulièrement. Or, la semaine dernière, à la suite
d'une des réunions du comité des comptes publics, le journal
officiel de l'Union nationale, le journal « Le Temps », a
publié en première page une photographie et un texte
abominables.
M. GABIAS: Ceci n'a rien à voir avec le comité des comptes
publics.
M. LESAGE: Cela y a affaire.
M. GABIAS: M. le Président, ceci n'a rien à voir avec le
comité des comptes publics.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs. M. LESAGE: J'ai répondu,
M. le Président.
M. GABIAS: M. le Président, je pose une question au premier
ministre, à savoir s'il a l'intention de donner un avis en
appendice?
M. LESAGE: J'ai dit non.
M. GABIAS: Très bien.
M. LE PRESIDENT: Affaires du jour.
M. GABIAS: Nous nous servirons des règlements pour le
convoquer.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs.
M. LOUBIER: M. le Président, je remarque l'absence du ministre de
la Santé, mais est-ce qu'on ne pourrait considérer cette question
com- me avis ou préavis? Il y a quelque temps, au cours de la discussion
sur le ministère de la Santé, l'honorable ministre de la
Santé annonçait, dans Bellechasse, la construction d'un
hôpital à Armagh, tel qu'il avait été promis au
cours du mois de novembre 1960, et qu'il était en train de faire
préparer les plans pour cet hôpital. Je voudrais demander au
ministre de la Santé si ces plans sont prêts actuellement, et si
l'hôpital, comme il l'a promis, va se construire au cours de
l'année 1964?
M. LE PRESIDENT: Je crois que c'est une autre question que le
député devrait déposer au feuilleton. L'item, la question
No 1, question de M. Allard.
M. LESAGE: M. le Président, voici, cependant, il y a l'item
« a », voici la raison, c'est que, par une erreur cléricale
à nos bureaux de législation, l'ordre d'imprimer n'a pas
été donné.
M. BELLEMARE: Il y a plusieurs amendements?
M. LESAGE: Oui, il y a plusieurs amendements, puis, je pense, il n'est
pas contentieux, c'est pour...
M. BELLEMARE: Est-ce qu'il touche au contentieux?
M. LESAGE: Je ne pense pas. Je pourrais l'expliquer, c'est pour
améliorer les pensions des gens qui, par exemple, reçoivent des
pensions depuis plusieurs années. Il y a eu augmentation du coût
du maximum; de toute façon, je pense que demain ou après-demain
au plus tard ce sera prêt, nous pourrons donner des explications sur la
première lecture, mais c'est pour aider ceux qui reçoivent des
pensions partielles ou totales, pour augmenter lesdites pensions, c'est le but
principal.
Le numéro 1, il s'agit d'une question de M. Allard, c'est une
question qui exige une réponse de je ne sais trop combien de pages, avec
un tas de tableaux et de détails, alors je propose que la question soit
transformée en motion pour production de document, je dépose ce
document, étant donné qu'il s'agit de plusieurs ministères
concernés.
M. LE PRESIDENT: Adopté? Adopté.
M. LESAGE: No 36, il s'agit d'une motion... c'est une motion de M. le
Dr. Lizotte, document déposé pour M. Cliche.
No 14.
M. LE PRESIDENT: M. Lesage propose que je quitte maintenant le fauteuil
pour que la Chambre se forme de nouveau en comité des subsides. Cette
motion sera-t-elle adoptée? Adoptée.
M. BEDARD (président du comité des subsides): Alors,
Procureur général, page 93, article 5, « Poursuites au
criminel ».
Subsides: Procureur général
UNE VOIX: Adopté.
UNE VOIX: Non.
M. GABIAS: Le ministre de la Famille voulait parler.
M. LAFRANCE: M. le Président...
M. GABIAS: Le ministre avait indiqué son intention de
parler»
M. LAFRANCE: M. le Président, je me vois obligé
d'intervenir dans ce débat. Bien à regret, car je trouve
premièrement que le débat est très restreint puisque nous
devons nous en tenir à l'article 5 qui a trait aux poursuites
judiciaires. Et l'on sait sans doute que le problème de l'alcoolisme est
un problème très vaste et très complexe et j'eusse
préféré, évidemment, l'envisager dans son ensemble,
c'est-à-dire en considérant les mesures préventives,
répressives et curatives. Deuxièmement, j'interviens à
contrecoeur, parce que c'est un débat qui a été, disons,
mal engagé, engagé sous l'angle partisan...
M. JOHNSON: Non.
M. LAFRANCE: ... où il semble, M. le Président, que les
considérations partisannes et les considérations
personnelles...
M. GABIAS: C'est la meilleure!
M. LAFRANCE: ... semblent l'emporter sur la cause de la
sobriété.
M. JOHNSON: M. le Président, j'invoque le règlement.
M. LAFRANCE: M. le Président, je voudrais que le chef de
l'Opposition...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs.
M. LAFRANCE: ... me laisse faire mes déclarations; il aura le
loisir d'y répondre.
M. JOHNSON: J'invoque le règlement. Oui, bien sûr que nous
voulons laisser le ministre de la Famille et de 1' « alcoolisme »
faire ses déclarations, mais il n'a pas le droit, en vertu du
règlement, M. le Président, de nous imputer de pareils motifs,
qu'un débat est engagé sous l'angle partisan et pour des motifs
personnels. Je vous demande, M. le Président, de le rappeler à
l'ordre.
M. LAFRANCE: M. le Président, j'ai droit à mon opinion. Je
dis que le débat est engagé sous l'angle partisan et que le chef
de l'Opposition, selon son habitude, s'est livré à des attaques
personnelles, a fait des personnalités contre le député de
Richmond.
M. LOUBIER: M. le Président, il n'a pas le droit de dire
ça.
M. LAFRANCE: C'est mon opinion, M. le Président, j'ai droit
à mon opinion.
M. JOHNSON: M. le Président, je vous demande de rendre une
décision.
M. LE PRESIDENT: Voici! Evidemment il faut remonter assez loin. Le
débat s'est engagé sur cet article-là le 28 mai.
UNE VOIX: Il n'a pas le droit de dire ça.
M. LE PRESIDENT: Alors je ne me rappelle pas là textuellement
tout ce qui s'est dit. Je me rappelle qu'à un certain moment, je ne suis
pas sûr, mais je crois que c'est le chef de l'Opposition, alors qu'il
exerçait son droit de parole, qui s'en est pris directement au
député de Richmon, exactement dans quels termes, je ne me
souviens pas, mais c'est à ce moment-là que le
député de Richmond a semblé réagir et a
exprimé, à la dernière séance du comité, le
18 juin, je pense...
M. LOUBIER: Vous l'avez rappelé à l'ordre.
M. LE PRESIDENT: ...le 18 juin qu'il aurait quelque chose à dire.
Alors je demande évidemment au député de Richmond,
ministre de la Famille et du Bien-Etre, d'exercer son droit de parole, mais
dans les cadres, évidemment, du règlement...
M. LOUBIER: C'est ça.
M. LE PRESIDENT: ... qui, comme il l'a reconnu au début, est
assez restreint en comité. Si lui ou un autre veut faire des
déclarations
plutôt d'ordre général sur l'alcoolisme, sur tout le
problème, ça peut se faire par motion ou toute autre
procédure permise par le règlement. Mais si, en comité
plénier, je laisse un député, quel qu'il soit, s'engager
dans cette voie, à ce moment-là évidemment il n'y aura
plus de limite. Alors je demanderais au député de Richmond s'il a
des rectifications à faire sur des propos tenus en comité par le
chef de l'Opposition ou par un autre député de le faire, mais
toujours en restant dans les cadres de la discussion restreinte à
l'article 5 du budget.
M. LAFRANCE: M. le Président, c'est bien mon intention de relever
quelques-unes des déclarations du député de Bagot.
D'ailleurs, la Chambre a été témoin depuis autre ans des
provocations sans cesse de la part du député de Bagot...
M. JOHNSON: M. le Président...
M. LOUBIER: Il n'a pas le droit de dire ça.
M. LAFRANCE: M. le Président, je vais relever ces provocations du
chef de l'Opposition...
M. LOUBIER: Il n'a pas le droit de dire ça, depuis quatre ans.
Voyons donc.
M.JOHNSON: Quatre ans.
M. LAFRANCE: Le député de Bagot est bien nerveux, M. le
Président.
M.JOHNSON: Non...
M. LAFRANCE: Il me semble qu'on l'a laissé faire...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs. M. LAFRANCE: ... toutes ses
insinuations.
M. JOHNSON: J'invoque le règlement. Je connais le manque de
sobriété du ministre dans ses paroles et dans ses propos et je
sais que la façon avec laquelle il engage cet après-midi sa
réplique va nécessiter une réponse.
Je ne laisserai pas passer de tels propos. Depuis quatre ans, dit-il, je
fais des attaques personnelles contre le député de Richmond.
D'abord ce n'est pas l'occasion de relever, même si c'était vrai,
ces attaques dites personnelles, mais je considère qu'il n'a pas le
droit de m'accuser ainsi lorsque je fais mon devoir. C'est lui-même, M.
le Président, je vous fournis ici un argument bien « ad hominem
», c'est lui-même qui disait il n'y a pas tellement
longtemps...
M. LAFRANCE: M. le Président, est-ce que le député
de Bagot a le droit de faire un discours à ce moment-ci?
M. LOUBIER: Laissez parler le grand monde!
M. LAFRANCE: M. le Président, je soulève un point
d'ordre.
M. GOSSELIN: C'est le député de Richmond qui est plus
nerveux.
M. LAFRANCE: Le père Gédéon peut attendre!
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs. M. LOUBIER: Vieille fille
violée!
M. LE PRESIDENT: Alors, encore une fois, c'est le député
de Richmond qui a la parole. Je lui demanderais s'il veut relever les
affirmations qui ont été lancées en comité, ici, et
ne pas remonter antérieurement.
M. LAFRANCE: M. le Président, je m'en tiens donc aux
débats de cette année. On n'a qu'à relire les comptes
rendus du débat qui a été tenu la semaine dernière.
D'ailleurs, les journaux; le journal « Le Soleil » en particulier,
a rappelé que « le chef de l'Opposition s'était
livré à des attaques personnelles contre le député
de Richmond ». C'est donc une preuve que c'est un dialogue de sourds que
nous entreprenons chaque année sur le problème de l'alcoolisme,
où on essaie de démontrer, de faire le procès politique
d'un parti ou de l'autre. Je me demande si ce sont les intérêts du
parti qui prédominent, ou si c'est vraiment la cause de la
sobriété.
Mais je crois que mon silence, en ce moment, serait peut-être
considéré comme un aveu. J'ai relevé certaines
déclarations sur lesquelles je voudrais immédiatement faire des
mises au point. D'abord le député de Beauce a dit; « Le
ministre de la Famille se promène dans la province pour dire que tout va
bien »!
C'est exactement, je n'étais pas à la Chambre,
j'étais à Ottawa à ce moment-là ce sont les
paroles que j'ai lues dans « Le Journal des débats » et qui
ont été prononcées par le député de Beauce.
Eh bien! voici une autre
inexactitude. D'ailleurs le procureur général a
relevé plusieurs inexactitudes dans le dossier du député
de Beauce; il est certainement de mauvaise foi, ou il est certainement mal
informé le député de Beauce. D'ailleurs il n'a qu'à
s'en rapporter à trois déclarations, c'est-à-dire à
trois émissions que j'ai faites à la télévision,
à des dizaines de causeries que j'ai prononcées dans la province,
et les textes qui ont été abondamment reproduits dans certains
journaux.
Ce que j'ai dit dans les journaux, à la télévision
et ailleurs, je n'ai pas l'intention à ce moment d'ailleurs je
n'aurais pas le temps de le faire, j'ai des textes que je pourrais communiquer
à la Chambre j'ai dit que je n'étais pas satisfait de la
façon dont on réglait le problème de l'alcoolisme. J'ai
dit que le gouvernement... et c'était peut-être là l'une de
mes désillusions du pouvoir, je n'ai pas l'expérience du pouvoir
comme le chef de l'Opposition, il sait combien il est difficile de faire
observer la loi, je peux au moins alléguer que moi je n'avais pas cette
expérience...
M. BERTRAND (Missisquoi): On vous l'a dit dans le temps!
M. LAFRANCE: Vous nous l'avez dit, mais vous n'avez pas assez
manifesté par des actes votre bonne volonté.
M. LOUBIER: C'est parce que vous étiez dans l'Opposition.
M. LAFRANCE: D'ailleurs on pourra y revenir là-dessus. M. le
Président, je voudrais qu'on me laisse parler. J'y reviendrai.
M. LOUBIER: Dans l'Opposition, vous ne disiez pas ça!
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs.
M. JOHNSON: Quels sont les actes du député de Richmond,
là il a la parole?
M. LAFRANCE: Si le député de Bagot veut bien me laisser
parler comme je l'ai laissé parler!
M. JOHNSON: C'est d'accord!
M. LAFRANCE: M. le Président, j'ai dit également, j'ai
fait appel à la population, j'ai demandé que des changements
soient apportés à la loi, qu'ils soient apportés
également aux règlements, et, enfin, j'ai dit que, de plus en
plus, après 20, 25 ans d'expérience en ce domaine, j'avais
l'intention de plus en plus de concentrer mes efforts sur la prévention.
Alors le seul reproche que je pourrais peut-être adresser en ce moment au
député de Beauce, c'est d'avoir préparé, un peu
à la façon du F.L.Q., sa petite bombe...
UNE VOIX: Non, non!
M. JOHNSON: La fédération libérale du
Québec.
M. LAFRANCE: ... d'avoir préparé sa petite bombe à
scandale.
M. LOUBIER: Dans votre vertu vous essayez de couvrir les turpitudes du
gouvernement.
M. LAFRANCE: Si vraiment le député de Beauce avait eu
comme préoccupation principale la cause de la sobriété,
s'il avait voulu que la loi soit mieux observée il n'aurait pas attendu,
combien, six mois, un an. Il a édifié son petit dossier, il a
attendu à la dernière minute pour essayer de créer un
scandale...
M. ALLARD: Je soulève un point d'ordre, M. le
Président.
M. JOHNSON: J'invoque le règlement, M. le Président.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre messieurs.
M. JOHNSON: Le ministre est en Chambre depuis 1952. Il sait qu'il n'a
pas le droit de tenir les propos qu'il vient de tenir à l'encon-tre du
député de Beauce.
M. LAFRANCE: Bien, voyons donc!
M. JOHNSON: Premièrement, il n'a pas le droit d'imputer un motif
au député de Beauce...
M. LOUBIER: C'est le seul honnête de la Chambre!
M. JOHNSON: Deuxièmement, il se base, et il devrait le savoir
comme député depuis douze ans dans cette Chambre, sur une
interprétation erronnée. Le député de Beauce a
choisi la première occasion qui lui était offerte, soit
l'étude des crédits, l'Item: « Poursuites judiciaires
», pour soulever cette question et c'est la première occasion
qu'il avait de le faire à moins de procéder par une motion et on
lui aurait dit à ce moment-là: « Attendez les
crédits. Vous aurez
l'occasion de le faire. » Il n'a donc pas le droit d'imputer un
motif et dire que c'est une bombe à scandale. Deuxièmement, il
n'a pas le droit de dire que le député de Beauce a malicieusement
attendu pour préparer cette sortie. Il l'a faite comme
député d'opposition au moment prévu par le
règlement.
M. LAFRANCE: M. le Président, il y a d'autres moyens qui sont
prévus. Si le député avait eu comme préoccupation
l'observance de la loi, il est représentant du comté de Beauce
comme tout représentant en cette Chambre, il aurait pu s'adresser au
procureur général...
M. JOHNSON: M. le Président, je vous ai demandé une
décision. Et il vient en parlant, je présume...
M. LAFRANCE: Qu'on me laisse parler!
M. JOHNSON: ... qu'il parlait sur le point de règlement que je
venais de soulever, le député récidive en prêtant au
député de Beauce des intentions.
M. LAFRANCE: M. le Président, je ne prête pas des
intentions, je juge des faits.
M. LOUBIER: M. le Président, faites-le asseoir.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre. C'est justement ça que je voudrais
rappeler au député, ministre de la Famille et du Bien-Etre, comme
il a droit de le faire s'il constate certains faits, le règlement le
permet mais il y a moyen de constater des faits sans nécessairement
imputer de motif. Et c'est là toute la distinction prévue par le
règlement de la Chambre qui doit s'appliquer aux deux côtés
en comité comme en Chambre. Alors la façon de procéder
c'est de constater des faits ou de relever des affirmations mais non pas
d'imputer des motifs à qui que ce soit. Alors je demanderais au ministre
de prendre la parole et d'essayer de faire son intervention dans les cadres du
règlement tel que...
M. LAFRANCE: Je n'impute pas de motif.
M. ALLARD: M. le Président, je voudrais faire une mise au point.
Le ministre de la Famille me prête des intentions en disant que j'ai
voulu faire une bombe. Le ministre devrait savoir que même si
j'étais au courant de certains faits, je n'étais pas capable d'en
parler avant d'être sûr de ce que je pouvais avancer.
Et c'est pourquoi j'ai dû fouiller 300 dossiers, les uns
après les autres. Ce qui m'a pris des mois afin d'arriver avec un
dossier qui était autre chose que du oui-dire. Et je ne voudrais pas que
le ministre...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre. M. LAFRANCE: M. le Président,...
M. LOUBIER: Le ministre a fait du placotage pendant quatre ans. Le
député de Beauce a apporté des faits.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre messieurs.
M. LAFRANCE: M. le Président, je n'impute pas de motif. Je juge
des actes qui ont été posés par le député de
Beauce. Le député de Beauce était certainement au courant
que la loi n'était pas appliquée intégralement. Pourquoi,
comme représentant du peuple, ne s'est-il pas adressé à
l'honorable procureur général de la province au lieu de charger
sa petite bombe à scandale comme il l'a fait?
M. LOUBIER: Arrêtez-vous donc! Il n'y a pas de patronage, non.
C'est presque auprès du procureur général.
M. LAFRANCE: M. le Président, j'espère qu'on me laissera
parler...
M. LOUBIER: Ce sont des bêtises que vous dites.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre.
M. LAFRRANCE: Le député de Bellechasse, je comprends
pourquoi il est mal à l'aise. Si j'étais à sa place, je me
tairais, M. le Président. Après que la Chambre a
démontré sa façon d'agir.
M. LOUBIER: Ce sont des bêtises que vous dites. Vous avez
apporté du placotage durant quatre ans. Le député de
Beauce a apporté des faits lui.
M. LE PRESIDENT: Article 5.
M. LAFRANCE: M. le Président, est-ce que l'Opposition veut
m'entendre, oui ou non?
M. LOUBIER: Non.
M. LAFRANCE: S'ils ne veulent pas m'entendre, je peux bien m'asseoir.
Mais on va me reprocher ensuite de garder le silence.
M. LOUBIER: Non, assoyez-vous, pour ne pas dire des bêtises.
M. LAFRANCE: Le député de Trois-Rivières veut
m'entendre?
M. GABIAS: Non, je dis que si vous gardez le silence, on va vous accuser
avec raison.
M. LAFRANCE: M. le Président, disons d'abord que je ne parle pas
pour certains députés de l'Opposition. J'ai bien l'impression que
je perdrais mon temps. Mais je parle pour établir certains faits. Le
député de Bagot a fait allusion à ce qu'il a appelé
le « show » de l'arrêté en conseil, c'est à la
page 4140. Je ne citerai pas en entier, je vais citer la partie la plus
importante: « Intégralement appliquée. De deux choses
l'une: ou le ministre doit démissionner ou je suis justifié de
dire qu'il ne fait que de la comédie pour servir de paratonnerre au
reste du Cabinet. ... Pendant que le député de Richmond se
promène, fait le vertueux, dit qu'il n'est pas satisfait du
gouvernement. On voit ce qui se passe en dessous. Alors que dans les journaux
du 5 mai, on rapportait une causerie du ministre menaçant de
démissionner si on ne faisait pas quelque chose relativement à la
publicité alors que tout le monde a dit; « Est-ce assez beau un
tel homme; voilà un homme sincère. » « D'après
« La Presse » du 5 mai, le ministre avait pris la parole devant les
membres du Cercle Lacordaire de la Jeunesse étudiante du
séminaire de Sherbrooke. C'est une nouvelle de la Presse canadienne nous
apprenant que M. Emilien Lafrance a déclaré qu'il était
prêt à démissionner si on n'effectuait pas certains
changements dans le domaine dé la publicité mensongère et
pernicieuse pratiquée par les brasseries, en particulier à la
télévision et à la radio.
Le 5 mai, cela paraît bien, tout ça. Je démissionne,
à moins qu'on ne fasse quelque chose au sujet de la publicité.
Or, ajoute le député de Bagot, l'ordre en Conseil pour
régler ce problème était passé depuis le 29 avril.
Le ministre s'en va dire: « Je démissionne si cela ne se fait pas.
» Il le savait, depuis le 29 avril que c'était fait, mais cela
paraît bien. »
M. le Président, évidemment que je savais que les
règlements allaient être changés.
M. JOHNSON: Ils l'étaient.
M. LAFRANCE: Je n'étais certainement pas autorisé à
l'annoncer à la province. D'ailleurs, si je l'avais fait, l'Opposition
nous aurait accu- sé de ne pas en avoir informé la Chambre avant.
J'étais invité depuis longtemps à parler
précisément du problème de la publicité devant les
étudiants de l'université de Sherbrooke.
A ce moment-là, je n'ai pas dit: « Je vais
démissionner si rien ne se fait. » J'avais un texte. Et le seul
représentant était un journaliste de « La Tribune »
qui a rapporté textuellement mes paroles. J'ai dit textuellement ceci:
« Si je n'avais pas confiance que des changements seraient
apportés très prochainement je dis bien: seraient apportés
très prochainement) aux règlements relativement à la
publicité des brasseries, je n'occuperais plus le poste que m'a
confié le gouvernement actuel car le jour où j'aurai à
choisir entre la solidarité ministérielle et la voix de ma
conscience, je n'aurai aucune hésitation à le faire. »
Alors, M. le Président, le petit « show » que me
prêle le député de Bagot, je crois que j'y ai
répondu de façon satisfaisante pour toute personne de bonne
foi.
Le député de Bagot, ensuite, a dit que le curé
d'Asbestos avait affirmé et là encore je devrai citer ses
paroles textuellement, (p. 4137 du « Journal des débats »):
« Même si le curé d'Asbestos, cela a été
publié dans tousles journaux, a dit que les mineurs étaient
servis le dimanche, en plein sous le nez du ministre. »
Mais, le député de Bagot sait très bien que c'est
un texte qu'il a falsifié. Il le sait très bien. D'ailleurs, j'ai
ici la déclaration du Journal « Le Citoyen ». Le chanoine
Demers ne fait pas allusion à Asbestos. Il faisait allusion à ce
qu'il entendait dire un peu partout dans la province et pour appuyer
précisément la campagne que j'ai entreprise pour sortir les
jeunes des débits de boisson. Alors, vous avez encore là une
autre déclaration qui a été tronquée par le
député de Bagot.
M. GABIAS: Il n'a pas le droit de dire ça.
M. LAFRANCE: Cela a été tronqué. Il a
prêté au chanoine Demers la déclaration suivante que
« des boissons alcooliques étaient vendues sous le nez du
député de Richmond à des mineurs. » Ce sont les
paroles textuelles du chef de l'Opposition.
UNE VOIX: C'est ça! m. JOHNSON: M. le Président,...
M. GOSSELIN: C'est vrai aussi!
M. JOHNSON: ... j'invoque le règlement. Je n'ai pas
tronqué un texte. J'ai cité de mémoire un texte.
M. LAFRANCE: Ah oui! Il l'avait, le texte!
M. JOHNSON: Je ne sais pas si le ministre l'a, si c'est exactement le
même texte et vous non plus, vous ne le savez pas. Est-ce qu'il s'agit de
la même déclaration? Vous ne le savez pas, M. le Président.
Il faudrait que le ministre, avant de m'accuser de tronquer un texte, puisse
identifier, évidemment, le texte auquel je référais.
UNE VOIX: C'est connu de tout le monde!
M. GOSSELIN: Oui, mais les jeunes n'ont plus de place où aller;
il y a des permis à toutes les portes.
M. LAFRANCE: J'ai dit, M. le Président, que je ne parlais pas
pour le député de Bagot, encore moins pour le
député de Compton.
M. le Président, il a dit également que les permis avaient
été multipliés dans le comté de Richmond. Là
encore, je ne sais pas à quel endroit à la page 4141 du
« Journal des débats » le député de
Bagot dit: « Le ministre de la Famille était silencieux pendant
deux ou trois ans pour permettre à ses collègues... » (lui
Il ne prête pas d'intention, M. le Président, jamais de la vie! il
est trop honnête pour ça) « il était silencieux
pendant deux ou trois ans pour permettre à ses collègues et aux
députés libéraux de faire émettre des permis de
vente par centaines et par milliers. Même dans le comté de
Richmond les permis ont été multipliés. »
Dans le comté de Richmond, il y avait au moins une cinquantaine
de tolérances. Il y avait parmi ces tolérances tous les clubs,
Club de la Légion, Club de Golf et autres. Les seuls nouveaux permis
dans le comté de Richmond qui ont été accordés;
permis d'hôtel à quelqu'un qui avait commencé ses travaux
un peu avant le changement de gouvernement et à cause des pressions des
concitoyens, eh bien, la Régie lui a accordé un permis
d'hôtel; deux permis de restaurateurs ont été
accordés dans le comté de Richmond et cela, en dépit des
protestations publiques du député de Richmond, à deux ou
trois reprises différentes. Il y a eu trois ou quatre permis
d'épicerie: deux dans mon village natal, à Danville, un à
Windsor et peut-être un à Brompton.
Je ne me souviens pas si c'est avant où après le
changement de gouvernement; il y a eu ensuite cinq ou six permis de club de
golf, et de club de vétérans. On voit donc que, si l'on
considère tous ces permis qui opéraient ouvertement avant, eh
bien il y a certainement une diminution dans le comté de Richmond.
D'ailleurs, mes positions n'ont pas changées. Personnellement, je
trouve qu'il y a trop de permis, je le déplore, et quoique les
statistiques nous démontrent qu'environ 83% de la consommation et des
abus ne se font plus dans les débits de boisson, mais plutôt
à domicile...
M.GABIAS: C'est la meilleure.
M. LAFRANCE: M. le Président, je ne parle pas pour les gens qui
ne sont pas de bonne foi, le député de Compton rit de tout, de
plus s'il fallait le prendre au mot...
M. GOSSELIN: M. le Président, il rit surtout de l'attitude
ridicule du ministre.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre.
M. GOSSELIN: Je lui répondrai d'ailleurs.
M. LAFRANCE: M. le Président,...
M. JOHNSON: M. le Président, le ministre me permet-il une
question?
M. LAFRANCE: Oui.
M. JOHNSON: Est-ce que ces chiffres de 83% qui ont déjà
été donnés dans cette Chambre, 83% de la consommation des
alcools, le ministre y croit-il à ces chiffres-là, connait-il
leur base? Parce que c'est un élément sérieux de
discussion. Est-ce que ce sont des chiffres qui concernent seulement l'alcool
où si ça concerne également alcool et bière. C'est
ce que nous aimerions savoir, je crois que tout le monde a intérêt
à savoir s'ils sont réellement sérieux et fondés
ces chiffres?
M. LAFRANCE: M. le Président, j'ai accepté comme tout le
monde ces chiffres qui ont été publiés en Chambre par
l'ancien procureur général, le député d'Outremont.
J'ai été fort impressionné par ces chiffres que
j'ignorais. Il n'y a personne qui a pu les contredire. J'ai demandé aux
membres du comité d'étude et d'information, parmi lesquels il y a
des universitaires, de bien vouloir examiner le problème...
M. JOHNSON: Bon!
M. LAFRANCE: ... examiner ces statistiques...
M. JOHNSON: Bon!
M. LAFRANCE: ... les vérifier. Je n'ai pas pu avoir de
réponse définitive.
M. JOHNSON: Ah bon!
M. BERTRAND (Missisquoi): Est-ce que le ministre me permet? Les
statistiques qu'il vient de donner et qu'aurait déjà cité
en Chambre l'ancien procureur général, le ministre
reconnaît-il que si ces statistiques-là sont vraies, que cette
vérité-là existe depuis de nombreuses années, que
la consommation ne se faisait pas seulement dans les hôtels où
dans les débits de boisson, mais également dans les foyers...
M. LAFRANCE: M. le Président, c'est évident, je ne sais
pas si ça existait depuis de nombreuses années, je viens de le
dire, ce fut une révélation pour moi quand je les ai apprises.
Alors, je ne peux pas en dire davantage.
M. BERTRAND (Missisquoi): Maintenant, si le ministre me le permet, une
autre question. Il a dit tantôt, dans sa déclaration, que la
Régie avait accordé, des permis malgré ses protestations
publiques; le ministre veut-il dire qu'il s'agissait de permis accordés
dans le comté de Richmond, malgré la protestation ou les
protestations publiques du ministre!
M. LAFRANCE: Oui, M. le Président. Je dois dire que j'ai fait
d'abord, par écrit, des représentations à cause des
pressions qui ont été exercées sur moi par
différents corps publics, différentes associations, j'ai fait des
représentations comme tout citoyen auprès de la Régie,
disant que je m'opposais à ce qu'il y ait des permis. D'ailleurs, ce
n'est pas la seule fois. Je l'ai fait en d'autres occasions, et deux permis ont
été accordés quand même et j'ai protesté, je
crois avec une certaine violence, ce n'est pas mon habitude, je l'ai fait en
public à plusieurs reprises.
M. BERTRAND (Missisquoi): Tous les permis ont été
accordés après une séance publique? Ils l'ont
été après une séance publique. Est-ce que le
ministre était d'opinion, à ce moment-là, connaissant
très bien son comté, qu'il n'était pas dans
l'intérêt public d'accorder de tels permis. Ce n'était pas
dans l'intérêt public.
M. LAFRANCE: C'est là mon humble avis. Je n'ai pas les
informations de la Régie, je ne crois pas que c'était dans
l'intérêt public.
M. le Président, une autre déclaration que je voudrais
relever du député de Bagot c'est quand il a dit que j'avais
traité l'Opposition de bandits, à plusieurs reprises. Je n'ai
jamais utilisé cette expression même si je l'ai pensé
à l'endroit de certains supporteurs de l'Union nationale que je ne
nommerai pas en ce moment, je n'ai jamais utilisé cette expression
je songe à Jean-Marie Bériau et d'autres mais je me
suis attaqué toujours à un système et à ceux qui
étaient responsables de ce système, et d'ailleurs quand j'ai fait
des représentations...
M. JOHNSON: Le ministre me permet une question?
M. LAFRANCE: Oui.
M. JOHNSON: Est-ce que le ministre a déjà établi en
Chambre ici qu'un député de l'Union nationale avait pris de
l'argent, sollicité et pris de l'argent pour ce qu'il appelle des
« tolérances. » Est-ce qu'il a déjà
établi ça en Chambre?
M. LAFRANCE: Non.
M.JOHNSON: Bon.
M. LAFRANCE: Bien voici, oui, j'ai déjà dit en Chambre
qu'un candidat de l'Union nationale, dans mon comté, avait touché
de l'argent d'endroits qui n'étaient pas licensiés. Ce fût
démontré d'ailleurs au cours de procès qui ont
été tenus à Sherbrooke dans le cas de l'hôtel
St-Régis de Danville, et un hôtel près de Windsor, Val...
je ne sais pas le nom au juste, dans deux occasions différentes. Je
voudrais, je regrette d'être obligé de revenir là-dessus,
je veux démontrer que, quand nous dénoncions le régime
scandaleux qui existait dans l'observance de la Loi des liqueurs dans la
province de Québec, je veux démontrer par une seule citation que
nous nous faisions à ce moment-là l'écho de ce que tout le
monde pensait dans la province de Québec.
Dans tous les milieux, tous les groupements, toutes les autorités
s'accordaient à dire que la loi était violée de
façon systématique et impunément, qu'il y avait un
régime de « tolérance » dans la province de
Québec. J'ai été expulsé à une occasion
parce que je persistais à dire qu'il y avait un régime de «
tolérance » dans la province de Québec, et j'ai dit
qu'aussi longtemps que le régime existerait, personne ne
m'empêcherait de le dénoncer.
Je dis donc que nous nous faisons l'écho de ce que tout le monde
pensait dans la province.
Et je veux ici citer un document très important qui provient du
« Messager St-Michel » de Sherbrooke et qui a été
publié par les autorités religieuses de l'archidiocèse de
Sherbrooke, soit le diocèse de Nicolet, le diocèse de Sherbrooke
et le diocèse de St-Hyacinthe. Vous verrez, M. le Président, que
ce texte-là est autrement plus violent que les expressions que
j'employais...
M. JOHNSON: Quelle date?
M. LA FRANCE: Un instant, ça va venir. Ici, j'ai le «
Messager St-Michel » de Sherbrooke, le 25 janvier 1958; j'en lirai une
partie, j'espère qu'on ne m'accusera pas de le tronquer, mais pour bien
établir et démontrer que le député de Richmond,
quant il manifestait ou il faisait preuve d'une certaine violence, bien il se
faisait un peu l'écho de ce que l'on disait, de ce que l'on pensait dans
la province de Québec à ce moment-là.
M. BERTRAND (Missisquoi): Le ministre me permet-il? Nous lira-t-il
tantôt les derniers communiqués du comité de
moralité de St-Jean?
M. LAFRANCE: Si je l'avais, M. le Président, je le citerais, puis
ça ne serait peut-être pas à l'avantage du
député de Bagot si je citais d'autres communiqués...
M. JOHNSON: Non, non, M. le Président, j'invoque le
règlement. Le ministre contourne la question. Il a accepté la
question...
M. LAFRANCE: M. le Président, j'ai répondu au
député de Bagot, je ne permets pas une autre question au
député de Bagot.
M. JOHNSON: Je ne veux pas poser une question, M. le Président,
j'invoque le règlement.
M. LAFRANCE: Si le député de Missisquoi n'est pas
satisfait, qu'il le dise.
M. JOHNSON: J'invoque le règlement, M. le Président.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs.
M. JOHNSON: Le député de Richmond, répondant
à une question très simple et très claire: « Est-ce
que le ministre voudrait nous lire tantôt des extraits du comité
de moralité de St-Jean? » a répondu: « Oui, si je
l'avais, et le député de Bagot ne serait pas à l'aise si
je lisais certains extraits de communiqués », qu'il n'a pas
identifiés, M. le Président.
M. BERTRAND (Missisquoi): Qui n'ont rien à faire avec
ça.
M. JOHNSON: Cela n'a rien à faire avec celui de St-Jean. Il n'y a
aucun communiqué, de quelque source que ce soit, qui puisse, M. le
Président, embarraser le député de Bagot. Que le
député de Richmond ne se gêne pas, nous viderons l'affaire
et nous verrons...
M. CREPEAU: A l'ordre, à l'ordre.
M. JOHNSON: ... lequel se couvre du manteau de la vertu.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs.
M. LAFRANCE: Je pense que le député de Bagot est pas mal
vidé comme il est là. M. le Président, voici donc la
déclaration... D'ailleurs si je voulais citer ce texte, si je l'avais,
je l'ai à mon bureau, je l'apporterai si le député de
Bagot y tient; c'est une déclaration qui se rapporte à la
moralité publique, où le député de Bagot
blâmait les autorités religieuses de ne pas parler aujourd'hui
alors qu'elles parlaient autrefois. Je vous avoue que le comité de
moralité a eu des jugements assez sévères à
l'endroit du député de Bagot.
M. le Président, voici ce communiqué, je le cite non pas
pour me couvrir derrière le clergé, je n'ai pas besoin de me
cacher derrière personne, j'ai toujours fait mes déclarations
face à face, devant un gouvernement qui était archifort
autrefois, j'ai toujours essayé de servir une cause avant de servir un
parti ou des intérêts politiques. Je me suis malheureusement
laissé entraîner trop souvent dans des personnalités
à cause de provocations comme celles que fait le député de
Bagot. Et, M. le Président, c'est pour démontrer le climat qui
existait dans la province de Québec à ce moment-là:
« Si notre peuple, (dit ce communiqué des évêques de
Sherbrooke, de St-Hyacinthe, de Nicolet) boit à l'excès et
s'alcoolise, il faut reconnaître que c'est dû en grande partie
à la violation de la Loi des liqueurs. En effet, si la Loi des liqueurs
était observée, la consommation des boissons alcooliques serait
considérablement réduite et quantité de maux cesseraient
par le fait même d'exister. Lorsqu'en 1922, le chef du gouvernement
québécois faisait voter la Loi des liqueurs, il déclarait:
« Quel que soit le système auquel nous nous arrêtions et que
doive voter la Législature, nous verrons à ce que cette loi soit
respectée parce qu'il n'y a pas, à mon sens, de plus funestes
éléments pour détruire l'ordre et la société
que la désobéissance aux lois qu'un peuple s'est données.
»
Et là le communiqué continue: « Cette loi refondue
en 1941 a connu depuis 25 ans de regrettables violations. « Violations
quant àl'observance du dimanche. Les dimanches et les jours de
fête, les personnes qui ont des permis ne peuvent vendre entre minuit et
huit heures le lendemain matin à ce moment-là, excepté
à des voyageurs à qui on peut vendre bière et vin pendant
le repas et cela entre une heure de l'après-midi et neuf heures. Ces
jours-là, continue le communiqué des évêques,
hôtels, clubs, grills débordent de gens qui ne sont pas des
voyageurs, à qui on vend des liqueurs fortes sans qu'il soit même
question de repas et cela à peu près à n'importe quelle
heure du jour et de la nuit. « Conséquence dans nos
localités, grandes et petites: le dimanche est probablement le jour
où hommes, femmes, jeunes gens, jeunes filles boivent le plus. Le
dimanche n'est plus pour plusieurs le jour du Seigneur, c'est le jour de la
« soûlade » et du péché. Cet état de
choses est connu de tout le monde. La Loi est souvent enfreinte et les bons
citoyens manquent à leur devoir en n'aidant pas à son observance.
« Violation quant à la vente aux jeunes. Les textes
législatifs sont formels: il est défendu de vendre des liqueurs
alcooliques à toutes personne n'ayant pas atteint l'âge de 20 ans.
Or, il est de notoriété publique que les grills et les
hôtels sont fréquentés en grande partie par des jeunes qui
n'ont pas 20 ans. En plus débits garçons et filles,
accompagnés ou non, se font servir des boissons alcooliques sans
difficulté aucune.
Violation quant aux heures de fermeture. En dehors de Québec et
de Montréal, dans nos localités par conséquent, les clubs
et grills vendent des boissons alcooliques très tard dans la nuit,
même jusqu'au petit jour. Violation de la loi par la concession de permis
de touristes à des hôtels qui n'en reçoivent partiquement
pas, violation...
M. GABIAS: Est-ce que ç'a été écrit la
semaine dernière ça?
M. LAFRANCE: Pardon?
M. GABIAS: Est-ce que ç'a été écrit la
semaine dernière ça?
M. LAFRANCE: En 1958. Je ne sais pas si le député de
Trois-Rivières a suivi mon raisonnement, d'ailleurs je ne parlais pas
spécifiquement pour lui.
M. GABIAS: Mais ça ressemble tellement à la situation
d'aujourd'hui que je me demande si ça été écrit la
semaine dernière.
M. LAFRANCE: Je pense que le député de
Trois-Rivières sera libre de faire ses remarques après, s'il le
désire.
M. GABIAS: Merci.
M. LAFRANCE: Violation quant aux heures de fermeture en dehors de
Québec, dans nos localités, par conséquent, de vendre des
boissons alcooliques trop tard. Violation de la loi par la concession de permis
de touristes et des hôtels qui n'en reçoivent pas ou pratiquement
pas. Violation de la loi qui exige que les lieux soient ainsi arrangés
que toute personne présente puisse voir toute la salle. Violation de la
loi par la livraison des liqueurs à des gens en état
d'ébriété. Violation de la loi par la vente de spiritueux
par des gens qui n'ont pas de permis. Débits clandestins qui
fonctionnent et prospèrent, or continuent les
évêques de Nicolet, Sherbrooke et St-Hyacinthe que la loi
soit constamment violée et sans représailles, c'est
déjà une grande faiblesse, mais que la loi soit violée au
vu et au su de tous, que la police des liqueurs connaisse mieux que personne ce
qui se passe, que les autorités civiles soient même de connivence
avec les tenanciers et leur accordent la protection, voilà qui est un
véritable scandale, une atteinte à la morale, une
complicité inqualifiable. Pouvons-nous tolérer que des hommes
publics, responsables du bien commun, collaborent à la
déchéance de notre peuple et à la corruption de notre
jeunesse, hommes et femmes de chez-nous, n'est-ce pas là un
problème qui vous touche et auquel vous devez porter remède?
M. le Président, on voit donc que les déclarations que
faisait le député de Richmond où il n'a jamais
utilisé l'expression de bandit comme lui prêtait le
député de Bagot, eh bien ces déclarations étaient
certainement pas plus violentes que celles qui ont été faites par
l'autorité je crois, bien autorisée en ce demaine puisqu'il
s'agit de moralité publique, par des autorités religieuses.
M. le Président, ce que j'ai reproché au gouvernement qui
était en face de moi, ce que je reprocherais aujourd'hui et demain
à n'importe quel gouvernement qu'il soit bleu ou rouge, je me suis
engagé, M. le Président, il y a nombre d'années, dans une
voie où je ne peux pas reculer sans trahir tout un passé, ce que
j'ai reproché surtout, c'est la grande tolérance du gouvernement,
c'est que la loi soit violée ouverte-
ment au vu et au su, et impunément.
J'ai reproché la politique d'autruche de l'Union Nationale qui ne
voulait pas en parler, qui disait qu'ils ne pouvaient pas faire davantage, et
quand nous entendions le chef du gouvernement dire a ce moment-là:
« Si on est trop sévère ce sera pire ». Combien de
fois, M. le Président, j'ai entendu le chef du gouvernement faire cette
déclaration, et à de moment-là on était bien plus
indulgent qu'aujourd'hui, on rappelait que c'était un peu la faute de
Notre Seigneur à Cana qui avait changé l'eau en vin, on rappelait
qu'il y avait un sacrement de pénitence qui n'était pas pour
rien, le député de Bagot y allait en tenant Adam et Eve
responsables du péché originel et de la tendance que nous avions
à boire.
M. JOHNSON: Voyons donc.
M. LAFRANCE: Je l'ai entendu en cette Chambre et combien d'autres
sornettes semblables. M. le Président, mes positions sont bien connues
et je tiens à les réaffirmer, elles sont connues depuis 25, 30
ans, bien avant d'entrer dans la politique je me suis occupé de ce
problème-là. Je m'en occupais déjà depuis une
quinzaine d'années, elles sont les mêmes que mes positions
passées, mes positions présentes, et futures, que je sois au
pouvoir ou dans l'Opposition, je le répète, M. le
Président, que ce soit un gouvernement rouge, bleu ou caille, je veux
d'abord et avant tout essayer de promouvoir un régime non pas de
prohibition, un régime de sobriété dans la province de
Québec.
M. le Président, je voudrais dire un mot puisqu'il s'agit surtout
de ce problème que la Chambre étudie en ce moment, de
l'observance de la loi. M. le Président, les lois sont sacrées,
c'est le fondement de l'ordre social, et si on ne les fait pas observer, eh
bien nous nous acheminons petit à petit vers l'anarchie, et quand les
lois sont violées impunément, eh bien ça contribue
à fausser la conscience populaire et je crois que ça constitue
une atteinte au bien commun.
M. le Président, il y a un gouvernement qui se ferait complice de
la violation sans sanction de la loi, eh bien deviendrait complice des
violateurs, je veux donc, que la loi soit appliquée
intégralement, sinon c'est la porte ouverte aux pires abus, si nous nous
laissons aller aux caprices de celui-ci ou de celui-là, eh bien je me
demande où est-ce qu'on s'arrêtera dans ces tolérances. Il
y a des conditions pour que la loi soit observée. Il faut d'abord que ce
soient des lois qui soient applicables et M. le Président, je m'entends
sur ce point avec le député de Bagot, si la loi n'est pas
applicable, qu'on la change mais qu'on l'applique intégralement.
Il faut deuxièmement qu'il y ait une atmosphère favorable,
propice à l'application de la loi. Je n'ai pas l'intention de revenir
sur ce qu'a dit l'honorable procureur général. Je veux cependant
citer ce que disait l'épiscopat de la province sur
précisément le problème de l'observance de la loi. Voici
ce que disait ce document publié en 1938 et qui reste, pour tout le
monde d'une très grande actualité.
Il disait ceci: « Mais vous savez, nos très chers
frères, les lois ne peuvent rien si elles n'ont pas le respect et
l'appui de l'opinion publique. Que peuvent les lois sans les moeurs, dit
l'axiome antique: « Quid leges sine moribus ? ». « Et ces
moeurs ne seront réformées que par une forte éducation
religieuse et sociale. On ne rend pas les peuples vertueux et tempérants
par des décrets. « Les remèdes légaux comme les
remèdes fiscaux, a dit un penseur, seront impuissants à enrayer
le mal de l'intempérance et la plaie de l'alcoolisme, s'ils ne sont pas
aidés par les remèdes moraux et religieux ». Il ne suffit
pas que l'intempérant trouve plus de difficultés à
satisfaire sa passion. Il contournera ces obstacles, il se privera de tout
plutôt que de cesser de boire. Il faut l'amener à vouloir se
corriger ».
Monsieur le Président, on voit donc la nécessité
qu'il y a d'éduquer la population et de lui enseigner le respect des
lois. Et la loi n'est pas seulement l'affaire du gouvernement, c'est l'affaire
de tout le monde. Il est évident que le gouvernement a la plus grande
responsabilité dans ce domaine. C'est aussi l'affaire des agents. Il
faut avoir des agents bien consciencieux, bien compétents. C'est aussi
l'affaire des juges qui sont chargés d'appliquer les sanctions et,
enfin, c'est l'affaire de tous les citoyens.
L'observance de la loi est un point très important dans le
domaine de l'alcoolisme. Surtout quand il y a une espèce
d'épidémie, comme on en a cité une dans le comté de
Beauce, par exemple, où on a dit qu'il y avait peut-être huit
cents violations depuis quelques années. Eh bien, je crois que, devant
une épidémie semblable, nous devons recourir à des mesures
rigoureuses. L'alcool n'est pas un besoin essentiel à la vie, ce n'est
pas une nécessité, c'est plus qu'un luxe, et l'alcool constitue
pour tous un danger. On sait les ravages qu'il cause dans la
société. Eh bien, Monsieur le Président, je crois que les
gouvernants se doivent d'avoir des lois sévères, mais applicables
intégralement.
Non, pas des lois prohibitionnistes, et je profite de l'occasion, M. le
Président, on m'a prêté l'intention de vouloir imposer la
prohibition dans la province, même si j'avais cette intention-là,
je ne pourrais certainement pas la réaliser! Jamais je n'ai
préconisé la prohi-
bition qui s'est révélée d'ailleurs un fiasco
monumental chez nos voisins les américains. En ce qui me concerne,
évidemment je suis prohibitionniste, je le suis depuis plus de 25 ans,
mais jamais je n'ai voulu d'aucune façon l'imposer aux autres. Mais les
lois seules, je le dis, je le répète à la suite de cette
déclaration que je viens de citer de l'épiscopat, les lois seules
sont impuissantes à réprimer les abus. Il faut aussi recourir
à d'autres moyens. Il faut des lois judiciaires sévères
pour réprimer les abus premièrement, et deuxièmement pour
protéger les faibles et les malades.
Mais l'on sait que la meilleure loi, c'est encore la loi qu'on
s'applique à soi-même. D'où l'urgente
nécessité de l'éducation et de plus en plus je fais porter
tous mes efforts sur les mesures préventives: l'éducation.
Eduquer les gens à respecter les lois, éduquer les gens sur les
bienfaits de la sobriété, éduquer les gens aussi sur les
dangers de l'alcoolisme. Il faut éduquer les adultes en se servant de
tous les médiums de publicité, nous avons commencé
à le faire de façon très modeste avec le comité
d'étude et d'information sur l'alcoolisme; éduquer les jeunes
à l'école, je ne comprends pas qu'on n'ait pas commencé
déjà, dans notre catholique province de Québec, à
enseigner la sobriété dans nos écoles. Nous voulons que la
sobriété soit enseignée de l'école du rang à
l'université.
M. le Président, on constate que le mal est d'abord et avant tout
dans les esprits. Notre population a certainement plus d'alcool dans sa
mentalité qu'elle n'en a dans ses veines parce qu'on a laissé,...
et j'insiste sur ce point du respect de la loi et du respect des
règlements en ce qui concerne la publicité, il faut que la loi
soit respectée par les gros comme par les petits et quand je parle des
gros, je parle des brasseries. Si le petit hôtelier qui viole la loi se
voit imposer des mesures sévères, il faudra aussi que ceux qui
violent les nouveaux règlements reçoivent le même
traitement.
On me demande, est-ce que vous êtes satisfait de la situation
actuelle? M. le Président, j'ai bien peur de n'être jamais
satisfait, car j'ai bien l'impression, aujourd'hui plus que jamais, que jamais
la loi ne sera observée à 100%. Mais je serai satisfait quand on
aura fait autant pour corriger cette maladie sociale qu'est l'alcoolisme qu'on
a fait par exemple pour la tuberculose. On a dépensé dans la
province de Québec sur une période de 20 ans, plus de$160,000,000
pour combattre la tuberculose, pour faire de la prévention, pour traiter
les tuberculeux, et l'on sait qu'il n'y a rien qui a été
dépensé pour combattre l'alcoolisme, sinon depuis quelques
années avec le comité d'étude et d'information sur
l'alcoolis- me. Je serai satisfait le jour où l'on se préoccupera
autant du problème de l'alcoolisme qu'on se préoccupe du
problème du tabac. On a découvert tout à coup que le tabac
pouvait être une des causes du cancer et l'on sait toutes les campagnes,
le tollé général que ça a soulevé aux
Etats-Unis. Eh bien, l'alcool, c'est prouvé par des savants, des
spécialistes, ne s'attaque pas seulement aux voies respiratoires,
s'attaque à tous les organes du corps, s'attaque non seulement au corps,
mais à l'âme, à la société et à la
famille. L'on se demande parfois comment il se fait que, dans la province de
Québec, les accidents de la route, les accidents mortels, sont deux fois
plus élevés que dans les autres provinces et les Etats
américains...
M. BERTRAND (Missisquoi): Le ministre veut dire l'abus des boissons
alcooliques?
M. LAFRANCE: Evidemment, je parle toujours d'abus, c'est évident,
je le dis, il ne s'agit pas de prohibition, il s'agit d'instaurer dans la
province de Québec un climat où l'on puisse pratiquer la
sobriété. C'est le but vers lequel je m'achemine.
M. le Président, le député de Bagot m'a posé
une question tout à l'heure, il m'a demandé qu'est-ce que le
gouvernement actuel a fait? Je n'ai pas l'intention d'énumérer
toutes les mesures qui ont été adoptées par le
gouvernement actuel. Nous avons cessé de pratiquer d'abord une politique
d'autruche. On n'aimait pas parler de ce problème-là, je crois
que le gouvernement actuel n'aime pas ça non plus. On a dit que je
servais de paratonnerre au gouvernement, j'ai l'impression que plusieurs de mes
amis aimeraient mieux que je ne traite pas de ce problème là en
public. Je me suis tu durant deux ou trois ans, j'ai voulu attendre les effets
du bill 34. On nous avait promis que ça corrigerait certains abus,
d'ailleurs ça en a corrigé des abus, mais je me suis rendu compte
que ça ne suffisait pas pour réprimer un grand nombre d'abus.
Nous avons d'abord, eu le courage de nous attaquer à la Loi des
liqueurs, une chose qui n'était pas arrivée de façon
sérieuse depuis plus de quarante ans, nous avons voulu mettre fin
à ce régime de tolérance, d'hypocrisie qui existait.
Est-ce que nous avons réussi à 100% ? Hélas non.
D'ailleurs le parrain, à ce moment-là, du bill 34, a dit que ce
n'était qu'un commencement, et nous nous rendons compte qu'il y a une
foule de faiblesses dans la loi que nous corrigerons, je ne sais pas quand,
mais sur lesquelles nous faisons des études, et un jour ou l'autre,
j'espère que nous pourrons apporter des amendements afin d'enlever tous
ces trous qui se trouvent encore dans la loi.
Nous avons aussi appliqué la loi de façon plus rigoureuse,
c'est un précédent dans la province de Québec que 897
permis aient été annulés ou suspendus. C'est quelque chose
de nouveau dans la province de Québec. Est-ce qu'on doit recourir
à la prison?
M. LOUBIER: Oui.
M. LAFRANCE: Ma sympathie, M. le Président, avant d'aller au
vendeur va d'abord à ceux qui sont victimes de l'alcool et je crois
qu'on ne doit pas reculer d'aller à la prison, mais j'approuve
l'attitude du procureur général qui a évidemment recouru
à d'autres mesures qui se sont avérées d'ailleurs
efficaces dans certains, comtés mais il le dit devant toute la Chambre,
il ne se contentera pas de ça. Il est prêt, s'il le faut, à
mettre des vendeurs dans le chemin, mais il veut le respect de la loi.
M. le Président, nous avons également modifié des
règlements pour la publicité à la télévision
et à la radio, nous avons créé un comité
d'étude et d'information sur l'alcoolisme qui évidemment fait un
travail très modeste à l'heure actuelle, mais je crois qu'il est
engagé dans une vole où il pourra certainement rendre de plus
grands services à la province.
Alors, M. le Président, mon attitude je le répète
est toujours la même, je suis pour l'observance intégrale de la
loi, qu'on fasse preuve de sympathie et d'humanité comme le dit le chef
de l'Opposition, je suis bien d'avis, jusqu'à un certain point
cependant, parce que je dis que ma sympathie va d'abord et avant tout à
ceux qui sont victimes du système qui existe dans la province. Et je
dois dire que je suis satisfait de la position du procureur
général et je dois dire que j'ai toujours été
reçu avec la plus grande sympathie, avec la plus grande
compréhension de la part du procureur général. Je lui ai
soumis des projets qui sont à l'étude à l'heure actuelle
et je sais que nous allons réussir nous, du gouvernement actuel,
à faire observer la loi. Alors, M. le Président, c'est tout ce
que j'ai à dire pour le moment.
M. GOSSELIN: M. le Président, je n'ai pas l'intention de relever
certaines affirmations de l'honorable ministre seulement je me dois de dire que
si à certains moments l'attitude du ministre m a portée à
rire, c'est que réellement je ne pouvais faire autrement.
Lorsqu'on voit que le ministre de la Famille et du Bien-Etre social
s'élève contre toute la publicité qui est faire autour des
boissons alcooliques je dis que peut-être il a raison, mais je me
demande, en somme, jusqu'à quel point, lorsqu'on empêche la
publicité, on peut arriver à diminuer la consommation de la
boisson lorsque nous savons que nous, dans notre région en particulier,
nous sommes le long de la frontière américaine et que tous les
postes américains entrent chez nous dans tous les foyers et que
là on y fait une publicité à profusion. Je ne crois pas
que même l'attitude du ministre puisse arrêter telstar dans les
astres et empêcher la diffusion ou la publicité de se faire
outre-frontière. Mais, M. le Président, je dis que l'attitude du
ministre au lieu de s'élever contre la publicité qu'on fait
partout dans les postes de télévision, à la radio ou dans
les journaux, il aurait dû plutôt protester contre le grand nombre
de permis qui ont été émis. Encore en fin de semaine, mes
garçons à moi me disaient: « Mais papa, où
voulez-vous qu'on aille aujourd'hui? Il y a des débits de boisson
partout ».
Vous n'avez qu'à prendre la rue St-Jean ici, un mercredi soir
lorsque vous n'avez rien à faire, et entrez dans les restaurants et vous
allez voir qu'à peu près dans tous il y a des licences de
bière, il y a des licences et l'on vend de la boisson.
M. LAFRANCE: Est-ce que le député de Compton parle de sa
ville d'East-Angus?
M. GOSSELIN: Oui, je parle...
M. LAFRANCE: Tous les restaurants ont des licences à
East-Angus?
M. GOSSELIN: Je parle de la rue St-Jean à Québec. Est-ce
que le ministre est sourd ou s'il ne veut pas me comprendre?
M. LAFRANCE: M. le Président, jecrois que le député
de Compton n'avait pas spécifié que c'était dans la ville
de Québec, il a dit la rue St-Jean.
M. GOSSELIN: J'ai dit le mercredi soir, ici, nous sommes en session, le
mercredi soir nous ne retournons pas chez nous. Alors, M. le Président,
je dis...
M. LOUBIER: Vieille fille offensée!
M. GOSSELIN: ... que la multiplication des débits de boisson a
fait en sorte qu'aujourd'hui nos jeunes n'ont plus aucun endroit pour aller se
récréer et si le ministre veut que je parle du comté de
Compton, je vais lui en parler. Dans le comté de Compton il y en avait
des permis, il n'y a jamais eu aucune tolérance. Il y en a eu une qu'on
a portée à ma...
M. LAFRANCE: Ah! Seigneur!
M. GOSSELIN: M. le Président, je dis que dans le comté de
Compton il n'y avait pas de tolérance.
M. LAFRANCE: Le député de Compton ne sait pas ce qui se
passe dans son comté, M. le Président.
M. GOSSELIN: Le député de Compton, M. le
Président...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs. M. LOUBIER: Vieille fille
violée!
M. GOSSELIN: ... sait beaucoup mieux ce qui se passe dans son
comté que celui de Richmond qui est aveugle devant certains
problèmes de son comté...
M. LOUBIER: C'est ça!
M. GOSSELIN: ... et qui prend aussi certaines attitudes qui portent au
ridicule, c'est ce qui me faisait rire d'ailleurs tout à l'heure.
Lorsque je dis qu'il y en a maintenant des tolérances dans le
comté de Compton, il y en a en particulier dans la ville d'East-Angus et
si on se rapporte au bill 34 tel qu'il a été fait nous sommes une
population de moins de 5,000 âmes et dans East-Angus il n'y avait aucun
permis.
Il y a eu deux référendums où l'on prohibait et on
ne voulait pas qu'il y ait de permis pour les épiceries. Pourtant il y
en a dans tous les magasins à East-Angus, excepté le nôtre,
et nous n'en voulons pas. Et c'est ça qui se passe.
On n'avait pas le droit d'en donner et ces permis-là se sont
donnés en dehors des séances de la régie. Et si on veut
parler des séances de la régie: un jour, je me suis trouvé
à Sherbrooke au palais de justice. J'ai assisté à une de
ces séances de la régie et je puis vous dire...
M. HAMEL (St-Maurice): M. le Président, je soulève un
point d'ordre. Voici, nous avons discuté de façon assez large ce
problème-là. Mais je crois que sur l'item: « Poursuites au
criminel » on ne peut pas aller jusqu'à discuter tous les
problèmes de la régie. Cela n'a pas de sens! On a
été large sur les « poursuites au criminel » mais je
ne crois pas que l'on puisse discuter à cet endroit-ci toute
l'administration de la régie, toutes les décisions de la
régie. Je crois que ça n'a pas de bon sens. Si on veut discuter
de la régie, qu'on fasse une motion, qu'on prenne les procédures
ordinaires et puis là on en discutera de la régie.
M. GOSSELIN: M. le Président, puisque le règlement m'en
empêche, je me conformerai à la demande du procureur
général pour dire tout simplement que les séances de la
régie sont une farce monumentale.
Or, le ministre nous a dit qu'il n'était pas au courant de
certains statistiques. Pourtant, dans le rapport de la Régie des alcools
du Québec on nous a fait part des statistiques qui partent de 1921-1922
pour venir jusqu'en 1962-1963. Et qu'est-ce qu'on y trouve dans les
dernières années? On ne pourra certainement pas attribuer
à la mauvaise Union nationale le fait que cela ait augmenté si
grandement au cours des dernières années. Entre 1949 et 1960, on
y voit une augmentation graduelle d'environ $4,000,000 à $6,000,000 par
année dans la consomation des boissons alcooliques. Or, en 1960-1961,
immédiatement vous avez une augmentation de plus de $10,000,000. En
1962...
M. HAMEL (St-Maurice): Il n'y a pas eu une taxe spéciale à
ce moment-là sur l'alcool?
M. GOSSELIN: Peu importe, même si...
M. HAMEL (St-Maurice): Bien ça augmente le chiffre.
M. GOSSELIN: Je parle, M. le Président, des ventes. Si les ventes
ont augmenté à ce point, c'est qu'on a vu aussi l'augmentation
des permis. Si l'on peut se procurer de la boisson à peu près
partout, dans tous les endroits, automatiquement on ne peut pas faire autrement
que d'en consommer plus ou d'en vendre plus. Ce sont les remarques que je
voulais faire.
Sur cette question de l'alcoolisme, je reconnais que nous avons tous une
part de responsabilité. Je reconnais aussi que nous devons faire tous
les efforts possibles pour tâcher d'enrayer ce grand fléau. Mais
je dis que le bill 34 et je dis que l'attitude du gouvernement dans le moment
n'a certainement pas amélioré la situation et n'a certainement
pas été non plus ce que le ministre veut nous laisser entendre
qu'elle a été depuis quatre ans.
M. HAMEL (St-Maurice)s Adopté.
M. BEAUPRE (président du comité des subsides): Article 5
adopté?
M. LOUBIER: Non, non.
M. JOHNSON: Non. M. le Président, juste pour l'édification
du ministre de la Santé qui parle toujours des tolérances du
passé et des
débits clandestins, je veux lui rappeler qu'il n'y a pas
tellement longtemps, en mars 1964, devant un Club Richelieu quelqu'un
d'autorisé a déclaré qu'il y avait dans la région
de Drummondville 48 débits clandestins.
M. LAFRANCE: Est-ce que le député de Bagot a la correction
qui a été faite par l'abbé Boisvert?
M. JOHNSON: Si.
M. LAFRANCE: Très bien.
M. JOHNSON: Alors il s'agit de l'abbé Boisvert, puisque le
ministre l'a nommé qui parlait au Club Richelieu. « On sait
dit l'article que j'ai ici, du « Nouvelliste », le 20 mars 1964
que la déclaration de l'abbé Boisvert avait soulevé
un certain émoi, que quelques jours plus tard l'aumônier des
Lacordaires déclarait qu'il n'avait pas voulu jeter de blâme aux
policiers mais plutôt démontrer qu'il existe toujours des endroits
où on peut se procurer de la boisson clandestinement. « Les
policiers entendent bien fermer tous ces débits clandestins du moins
tous ceux qu'ils pourront retracer ».
M. le Président, je ne sais pas comment qualifier en termes
parlementaires l'attitude de certains députés qui se scandalisent
dans l'Opposition et trouvent ça normal au pouvoir.
M. LAFRANCE: M. le Président, ici je vois que le
député de Bagot évidemment...
M. LOUBIER: Les vieilles filles violées!
M. LAFRANCE: Je m'adresse au député de Bagot. Est-ce qu'il
me permet une question?
M. LOUBIER: Que la vieille fille violée s'assoie!
M. LAFRANCE: Quelle distinction fait-il entre un débit clandestin
et une tolérance?
M. JOHNSON: M. le Président, une tolérance existe quand le
gouvernement actuel comme les gouvernements passés perçoivent de
$4,000,000 à $5,000,000 sur des choses qui sont défendues.
M. LAFRANCE: Le député répond encore à
côté de la question.
M. JOHNSON: Il y a actuellement une situation que le procureur
général connaît ou devrait connaître. Oui, $4,000,000
ou $5,000,000, alors que ça viole d'une façon flagrante la
loi...
M. HAMEL (St-Maurice): De quelle façon? Où?
M. JOHNSON: La taxe sur les paris.
DES VOIX: Ah!
M. JOHNSON: Oui, oui. Oui, oui.
M. HAMEL (St-Maurice): Qu'est-ce que cela a affaire avec le...
M. JOHNSON: 60% de l'argent que le gouvernement perçoit
actuellement vient de courses qui sont illégales, tant
fédérales que provinciales.
M. HAMEL (St-Maurice): Oui. Qu'on se limite à l'alcool pour le
moment-là.
M. JOHNSON: Cela, on appelle ça une tolérance. Le
député de Richmond en voulait un exemple. En voici un.
M. LACROIX: Vous vous êtes trompé de cheval!
M. JOHNSON: Non. Quand on parie on se trompe souvent mais... Autrefois,
M. le Président, je l'ai dit maintes fois dans cette Chambre, les lois
n'étaient pas réalistes. La tolérance
précède généralement la loi. Il s'établit
des habitudes et la loi vient ensuite sanctionner ces habitudes dans une
législation qui est réaliste. C'est le processus sociologique,
normal même en législation ecclésiastique. Est-il
nécessaire que je répète ce que je disais ici en
deuxième lecture sur le bill 34 établissant la Régie des
alcools. Je suis heureux, je le déclarais dans le temps, que l'on
légalise certaines habitudes, que l'on fasse en sorte que certains
permis puissent être accordés dans certaines municipalités
et certains comtés, pour mettre fin aux tolérances. Très
bien, M. le Président. Nous en sommes, mais, à ce
moment-là, la Loi devait être réaliste et je pense que le
député de Beauce a clairement démontré qu'elle ne
l'est pas ou qu'elle n'est pas appliquée. Il a certainement
démontré qu'elle n'est pas appliquée. Est-ce par manque de
réalisme? Est-ce par manque de jugement de la Police? Est-ce par
conspiration entre les mandatés du procureur général?
C'est au procureur général à répondre.
J'ai déclaré, à ce moment-là, parlant
pour
moi-même que je serais heureux si on considère que la Loi
n'est pas réaliste de concourir à des amendements qui la rendent
réaliste, mais qu'on la fasse observer pour précisément,
accorder nos actes avec les principes exposés par le
député de Richmond à plusieurs reprises. Mais, je ne
comprends pas que le député de Richmond se déclare
satisfait des efforts du gouvernement par exemple. Trop de jeunes dans les bars
dit le caporal Mathieu d'Amos, 11 décembre 1963, « Le Soleil
». « Une résolution adoptée en décembre et
amendée de façon à ce qu'elle ne s'adresse qu'à M.
Lafrance. » « Tribune » 12 mars 1964. On sait ce qui est
arrivé à St-Gédéon dans le comté de
Frontenac, M. Gérard Gendreau a fait amender une résolution qui
se lisait d'abord à M. Lafrance et à son équipe des
félicitations pour avoir fait la promotion de la carte
d'identité. Et d'après cette nouvelle de « La Tribune
» du 12 mars, où on dit ceci: M. Gendreau a réclamé
que l'on enlève les derniers mots disant qu'il n'avait pas de
félicitations à adresser à l'équipe libérale
qui depuis son accession au pouvoir « a triplé le nombre des
permis de vente des liqueurs alcooliques dans le comté et permis
également que l'on serve de la boisson dans tous les endroits
licenciés de minuit à deux heures du matin. » Cela va bien,
M. le Président.
Dans une taverne, une autre nouvelle, « Le Droit » 8 avril
1964, dans une taverne, le vendredi saint, à Hull. Une bagarre avait eu
lieu dans une taverne de Hull et quelques deux cents personnes y avaient pris
part un vendredi saint.
UNE VOIX: Ah, ah!
M. JOHNSON: Dans ce même comté dont le député
déclarait dans cette Chambre, je crois l'avoir cité l'autre jour
que tant qu'il serait député, il s'opposerait à ce qu'il
n'y ait jamais aucun nouveau permis d'accordé. J'aimerais qu'il soit ici
pour nous dire combien il y en a et je sais qu'il y en a plusieurs.
UNE VOIX: Oui, mais c'est après 1960 ça!
M. JOHNSON: M. le Président, le 12 avril 1964, « Dimanche
Matin » Gérard Delage, «Le mauvais patronage avec les
licences nuit beaucoup à l'industrie touristique. » « La
presse », le 8 avril, M. Delage condamne l'apatie du gouvernement et je
cite en partie. Il a déclaré particulièrement « le
manque de planification dans l'attribution de permis de la Régie des
alcools que des établissements inqualifiables finissent toujours par
décrocher. Vous n'avez qu'à vous promener par les rues de
Montréal pour constater vous-même qu'on a accordé des
permis à des vendeurs de «hot-dogs », de « hamburgers
» et de « quick lunches » comme si on voulait prouver que
Montréal n'avait rien d'une ville française et que la gastronomie
n'était qu'une farce au pays du Québec. »
M. le Président, je l'avais déclaré dans le temps
et je reviens à la charge...
M. HAMEL (St-Maurice): Est-ce dans la même conférence?
M. JOHNSON: Oui.
M. HAMEL (St-Maurice): C'est dans la même conférence. C'est
pour voir s'il y a deux accusations ou bien une.
M. JOHNSON: Oui, c'est la même.
M. HAMEL (St-Maurice): C'est la même conférence.
M. JOHNSON: Oui, M. le Président. Mais, je l'avais dit dans le
temps et c'est là l'erreur fondamentale du bill 34. On a tort de vouloir
mettre de l'ordre dans la question des liqueurs c'est-à-dire dans les
permis de restaurants, d'hôtels et autres avant d'avoir fait une
classification adéquate de ces établissements, puisque la
philosophie de la Loi c'est d'accorder le droit à ceux qui servent des
repas et de servir également de la boisson eh bien, qu'on s'organise
pour classifier ces endroits qui servent des repas. Et on n'a pas après
quatre ans de classification des hôtels.
On n'a rien d'autre chose que des panacées, et ce qui est
mauvais, c'est cette propagande à faire boire les gens. Ce qu'il faut
empêcher, c'est cette incitation à boire...
M. LAFRANCE: C'est ça.
M. JOHNSON: Or, un des moyens d'inciter les gens à boire, c'est
de donner trop de permis, de sorte que les permissionnaires ayant des paiements
à rencontrer, une concurrence effrénée à subir,
doivent faire de la « promotion ». Plus pn multiplie les permis, et
plus on rend cette situation néfaste et on conduit tous ces
gens-là à faire de la « promotion »,à attirer
le monde avec des « show », à arrêter entre les actes,
en allumant les lumières, pour permettre de servir un coup, le
maître de cérémonie ne se gêne pas pour le dire, il
faut payer le « show » et il faut payer nos
hypothèques. C'en est rendu là. M. Delâge le dit,
les hôtelliers « bona fide », les hôtels bien tenus,
les hôtels qui s'adressent surtout à la clientèle
touristique, ces endroits dont nous aimerions être fiers, ne peuvent plus
subir la concurrence effrénée qu'on a créée en
multipliant le nombre de permis. Un petit hôtel de la Gaspésie,
où il n'y avait qu'une licence, il y a maintenant trois licences autour
de l'hôtel. L'hôtelier doit baisser la qualité de ses repas
ou il va finir par fermer, et ensuite on dira qu'on n'a pas les
facilités nécessaires pour le tourisme. Manque de planification
dans l'octroi des permis. On aurait dû y voir, on aurait dû le
mettre dans la loi dans le chapitre 34. « La Presse » du 22 avril,
toujours à l'adresse du député de Richmond qui se
déclare satisfait, ou qui...
M. LAFRANCE: Non, non, pardon, je n'ai pas dit que j'étais
satisfait.
M. JOHNSON: ... déclare qu'il y a des progrès puis...
M. GABIAS: Il a dit qu'il était satisfait. Il est satisfait.
M. LOUBIER: On a tous compris ça.
M. LAFRANCE: Bien M. le Président, je crois, à cause de
l'insistance des députés de l'Opposition, que j'ai droit de me
lever sur une question de privilège...
M. GOSSELIN: Il a de la difficulté à le dire le ministre
de la Famille et duBien-Etre.
M. LOUBIER: Démissionnez.
M. LAFRANCE: ... J'ai dit que je n'étais pas satisfait, c'est ce
que je répétais partout dans la province, j'ai dit...
M. LOUBIER: Démissionnez.
M. LAFRANCE: ... que je craignais ce moment-là. Bien si le
député de Bellechasse veut bien me laisser parler, je vais
continuer.
M. LOUBIER: Vous aviez promis de démissionner si vous
n'étiez pas satisfait.
M. LAFRANCE: J'ai dit que je craignais...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre.
M. LAFRANCE: ... de n'être jamais à 100% satisfait mais
que, dans les conditions actuelles, j'étais satisfait des efforts du
procureur général.
M. GABIAS: Mon Dieu Seigneur!
M. JOHNSON: « La Presse » 22 avril: « enfants de six
à quinze ans dans un hôtel ». Devant l'alcool dit le Dr R.
de Grandmaison, les députés font la politique de l'autruche. Si
c'est vrai que les députés font la politique de l'autruche, que
fait le gouvernement? Amos demande une enquête de la Régie des
alcools. « Le Droit » du 15 mai 1964: « Lors de la
dernière séance du conseil municipal de la ville d'Amos,
l'échevin et maire suppléant, Jacques Bourgeois, a proposé
que la ville s'adresse au procureur général du Québec, M.
René Hamel, pour que les officiers puissent enquêter sur
l'application de la loi de la Régie des alcools à deux endroits.
Cette proposition de l'échevin Bourgeois a d'abord été
secondée par l'échevin Henri Gosselin, pour ensuite recevoir
l'approbation de tout le conseil municipal. Récemment, la
Sûreté provinciale de la division d'Amos, à la suite de
plusieurs plaintes, visait l'un de ces endroits, et la majorité des
clients qui s'y trouvaient ont dû évacuer les lieux parce qu'ils
n'avaient pas l'âge requis. » « La Loi des liqueurs de la
province de Québec est incomplète et mal appliquée
», autre titre, « Le Soleil, 8 juillet, expression attribuée
au Dr R. de Grandmaison, le président des Lacordaire. « En
plusieurs endroits, disait le Dr de Grandmaison, on a accordé des permis
à des gens qui vendaient des liqueurs alcooliques depuis longtemps hors
la loi et qui, par le fait même, sont des gens qui sont incapables de se
soumettre à des règlements. Les débits clandestins sont
encore nombreux à la campagne, et plusieurs ne sont nullement
importunés ». Une loi pas finie et mal appliquée, la
tolérance continue, une faillite lamentable, autres titres. Je
crois...
M. HAMEL (St-Maurice): Est-ce que c'est la même
conférence?
M. JOHNSON: ... ce sont des titres qui coiffent la même
conférence oui, cette fois-ci c'était dans le journal «
L'Action », même date, 8 juillet.
M. HAMEL (St-Maurice): Ah bon!
M. JOHNSON: M. le Président, vous voyez la situation. Nous ne
disons pas que le procureur général doit aller aux enfers parce
qu'il se commet encore des abus. Nous ne sommes
pas comme ces vieilles filles qui vont communier le matin et mangent du
prochain toute la journée, mais ça a été de
ça dont nous avons souffert dans nos réputations, quand nous
étions de l'autre côté, et c'est de ça qu'on essaie
encore de nous faire porter les conséquences dans des causeries
télévisées. M. le Président, quand le
député de Richmond s'en va, comme il l'a fait récemment,
dans des causeries à la télévision, et qu'il ne manque pas
de nous attraper en passant, affectant des
généralités...
M. LAFRANCE: M. le Président, je soulève un point d'ordre.
C'est absolument faux, je n'ai pas droit de défier...
M. LOUBIER: La vieille fille offensée.
M. LAFRANCE: ... le chef de l'Opposition. Je l'invite à citer une
seule parole. J'ai dit: « je ne suis pas ici pour défendre ou
accuser qui que ce soit »; je n'ai jamais fait aucune allusion M. le
Président...
M. LOUBIER: La vieille fille qui arrive avec un sourire.
M. LAFRANCE: ... au comportement de l'Union nationale, c'est absolument
faux la déclaration que vient de faire le député de
Bagot.
M. LOUBIER: Qu'il s'asseoit donc, M. le Président. «
vieille fille offensée avec un sourire »!
M. JOHNSON: M. le Président...
M. LAFRANCE: Le député de Bellechasse serait mieux d'aller
au restaurant.
M. JOHNSON: ... je prends la parole du député de
Richmond...
M. LOUBIER: Oui, le député de Richmond est allé
souvent avant moi.
M. JOHNSON: ... parce que je suis obligé de la prendre,...
M. LAFRANCE: Cela paraît qu'il est passé.
M. LOUBIER: Oui, ça fait longtemps; il y est allé.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs. UNE VOIX: Ils vendent de bons
sandwiches.
M. JOHNSON: Mais vous l'avez entendu dans cette Chambre, et je n'y
reviens pas, lancer de ces accusations qui sont basées sur quoi, M. le
Président? Y a-t-il eu jamais dans cette Chambre, par aucun
député libéral, pendant seize ans dans l'Opposition, un
réquisitoire réellement basé sur des documents officiels
et des faits comme le réquisitoire du député de Beauce?
Jamais. Ce fut une série de déclarations, à grand coup
d'encycliques qui sont écrites pour, évidemment, couvrir
l'univers. Ce fut à grand coup de déclarations
d'archevêques et d'évê-ques. Je suis d'accord avec plusieurs
de ces déclarations. Je ne suis pas d'accord avec d'autres sortes de
déclarations qui ont été faites par des
autorités.
Quand, en 1958, on a dit, à Montréal, que la loi actuelle,
dans son texte intégral, était le maximum de tolérances,
le maximum de permis qu'on devait accorder, et de latitude qu'on devait
accorder, je n'étais pas de cet avis, et je l'ai prouvé en votant
pour une loi qui élargissait plusieurs des provisions.
Il est vrai, comme le dit le député de Richmond, que je me
suis plaint du silence de certains comités de moralité. Quand il
s'est agi de donner un permis de taverne dans Montréal, (il s'en est
donné deux en seize ans) quand on est arrivé pour donner le
permis de taverne dans une paroisse, ça été un
tollé en chaire à Notre-Dame-de-Grâce. On a mobilisé
toute l'opinion publique, et là vous avez vu le député de
Richmond et ses semblables ou ses semblables faire campagne publiquement, faire
des déclarations.
C'est par vingtaines, cinquantaines et centaines que les permis
s'accordent, et jamais je n'ai entendu de protestations de ces mêmes
autorités, et c'est contre cette situation injuste, situation qui est au
détriment de ma réputation et de la réputation de mes
collègues, que je m'élève aujourd'hui. M. le
Président, a-t-on changé d'avis? Peut-être, mais qu'on le
dise.
M. LAFRANCE: Le député de Bagot est injuste. S'il avait
entendu des déclarations qui ont été faites par Son
Eminence le cardinal Léger et l'archevêque de Sherbrooke, il ne
pourrait certainement pas faire une affirmation gratuite comme
celle-là.
M. JOHNSON: M. le Président, je parle d'une situation à
Montréal...
M. LAFRANCE: Oui, oui, à Montréal; le cardinal
Léger, c'est de Montréal.
M. JOHNSON: ... où certains curés, en chaire, ont fait la
lutte personnellement contre certains députés de l'Union
nationale qui ont été battus et dans... On parle de
Notre-Dame-de-Grâce, ça c'est un cas que je n'ai pas fini.
J'allais dire; a-t-on changé d'opinion? Peut-être, mais c'est
injuste cette situation; et justement dans les comtés que le
député de Mercier connaîl, du haut de la chaire, par les
Ligues du Sacré-Coeur, des requêtes; et dans ces mêmes
paroisses, c'est des tavernes en face pratiquement de l'église, et des
clubs; et nous ne lisons pas les mêmes protestations. M. le
Président, tous les jours dans les journaux, on relève une
annonce payée par la Régie des alcools donnant le nom de ceux qui
présentent des demandes de permis. On n'entend pas de protestations.
M. CREPEAU: 98% sont refusés.
M. JOHNSON: Soyons de bon compte, M. le Président, soyons de bon
compte. Je ne veux pas blâmer les autorités, mais c'est mon devoir
de dire publiquement, et c'est là que j'ai posé la question en
campagne électorale; mais où sont-ils les moralisateurs du
comté de St-Jean? Eh bien, ils se sont réveillés depuis ce
temps-là, et ils ont dénoncé une situation qui est,
à leur sens même, aussi grave sinon pire qu'autrefois dans ce
diocèse de St-Jean. Cela, c'est rétablir les faits.
M. le Président, nous allons prendre, quant à moi, nos
responsabilités en tout cas. Si on veut élargir la loi, qu'on
l'élargisse, qu'on nous apporte des amendements qui soient
réalistes, mais ensuite qu'on l'applique. Car il n'y a pas de pire
corruption que la corruption à la tête, et si on se rit de la loi
devant les tribunaux, c'est beaucoup plus grave que de se rire de la loi aux
échelons des policiers provinciaux, de la police des liqueurs.
Le député de Beauce a posé un
précédent dans cette Chambre, pour lequel il ne faudrait pas le
blâmer mais au contraire, le féliciter. Il a fait ressortir une
situation de faits qui pourraient être multipliés dans plusieurs
coins de la province si on avait le temps et les moyens de faire une
enquête aussi sérieuse et aussi systématique que l'a faite
le député de Beauce, à ses frais. Mais je crois qu'il en a
déclaré ou dévoilé assez pour jeter un cri
d'alarme, pour que le gouvernement se décide à prendre une
attitude réaliste, pour que le procureur général donne des
instructions à ses policiers.
Nous sommes les premiers à comprendre que ça n'a pas de
bon sens d'imposer la prison parce qu'il y a eu une offense technique, d'un
verre de scotch qui est bu à droite plutôt qu'à gauche de
l'écran qui sépare le bar-salon du bar tout court, de boire un
verre de scotch avec un pied dans la taverne et l'autre pied dans le
bar-salon.
M. BERTRAND (Missisquoi): Et la bouche entre les deux.
M. JOHNSON: M. le Président, c'est, d'après le procureur
général, la nature de certaines infractions. Personne de nous ne
voudrait qu'un homme aille en prison pour une telle offense, mais c'est le
gouvernement actuel par exemple, qui a édicté cette
multiplicité de permis, cette variété de permis pour lui
permettre évidemment, de récolter plus d'argent. Il a fait des
distinctions qui sont difficiles d'application. Je sais que certains
hôteliers, bona fide, qui tiennent leur établissement aussi bien
qu'une maison privée, qui suivent la loi scrupuleusement, se sont
trouvés, à un moment donné, à être pris parce
que précisément un officier de police, manquant de jugement ou
ayant reçu des instructions de faire plusieurs causes, je ne le
sais pas, a fait un rapport de cette nature.
Comment se fait-il qu'il a été poursuivi lui, quand on
apprend de toute sorte de source qu'il y a des fois des rapports qui sont
envoyés au procureur général et qu'il n'y a pas de
pour-suita? Est-ce que le procureur général, oui ou non, exerce
une certaine discrétion pour ordonner les poursuites? Est-ce
qu'automatiquement il donne l'ordre que des poursuites soient intentées
chaque fois que rentre un rapport? Nous avons lieu de croire, M. le
Président, qu'il y a des endroits où le procureur
général doit exercer son jugement, mais quand la cause est rendue
devant le tribunal, quand le procurueur général a fait demander
par son mandaté qu'il y ait de la prison, que c'est
spécifiquement mentionné dans la plainte, et que l'on constate,
comme l'a fait le député de Beauce qu'à l'endos de la
plainte le bonhomme accusé de l'infraction a signé comme coupable
à une première infraction et a comme témoin le
mandaté du procureur général, nous avons le droit de
demander qu'est-ce qui s'est passé? Pourquoi a-t-on fait ça?
M. le Président, ce sont là des question raisonnables.
C'est là une attitude raisonnable et je pense qu'au lieu de me limiter
à deux demandes de démission, je vais demander celle de l'ancien
procureur général. On lui fera la commission,...
M. BINETTE: Cela ne l'énerve pas.
M. JOHNSON: Où est-ce qu'il est rendu celui-là?
M. BINETTE: A Paris.
M. JOHNSON: A Paris, celui-là?
M. BINETTE: Cela ne l'énervera pas.
M. JOHNSON: On va avoir « quorum » en Europe pour
siéger.
M. BINETTE: ... dans la province.
M. JOHNSON: M. le Président, c'est le procureur
général, prédécesseur du procureur
général actuel qui disait: « Je m'engage à
démissionner si on établit que j'ai permis que la loi soit
violée ». Or, M. le Président, il est clair d'après
le dossier du député de Beauce, que quelqu'un dans le
ministère du procureur général, donc le procureur
général en est responsable, a permis que la loi soit
violée et qu'elle le soit au stade le plus important, au stade où
c'est le plus grave, précisément dans l'appareil judiciaire.
M. HAMEL (St-Maurice): M. le Président, j'ai justement un mot
à dire pour répondre au chef de l'Opposition. Le chef de
l'Opposition a cité des chiffres tantôt disant que
l'émission des permis constituait à son sens une invitation
à l'alcoolisme. J'ai ici des statistiques établissant que dans
l'Ontario, avec un nombre de permis de beaucoup inférieur au
nôtre, il s'est consommé le double de liqueurs alcooliques.
Les statistiques viennent de l'association des distillateurs du Canada
et elles m'ont été remises par la Régie des alcools. Au 31
mars de l'année 1963-1964, dans la province de Québec, il se
serait consommé 3,695,000. gallons; dans l'Ontario, 7,365,000.
M. LOUBIER: Les statistiques ne sont pas prouvées.
M. JOHNSON: L'alcool seulement. Cela ne comprend pas la
bière.
M. GABIAS: C'est la fabrication, ce n'est pas la vente.
M. HAMEL: Ce sont les distillateurs qui donnent ces
chiffres-là.
M. CREPEAU: Envoyez ça dans le lac
M. HAMEL: Pour avoir une idée assez réa- liste de
ça, il faut tenir compte que le commerce de l'alcool est un commerce qui
suit l'évolution économique.
M. JOHNSON: Si le ministre me permet une remarque. Des statistiques
comme celles-là peuvent induire beaucoup de monde en erreur, à
moins qu'elles ne soient évidemment fouillées par des experts et
expliquées.
Puis-je suggérer que le comité de l'alcoolisme s'occupe de
tout ça ? Ce sont des gens responsables. Le ministre n'a pas le temps de
vérifier tout ça. Je n'ai pas le temps, moi personnellement de
vérifier tout ça. Nous n'avons pas un entraînement de
statisticien. Alors j'aimerais que ce soit le comité de l'alcoolisme qui
fasse une étude et qui nous sorte un rapport public, pour qu'on soit
réaliste, qu'on parte d'une base qu'on admet, tout le monde, au lieu de
s'accuser de part et d'autre et prendre une attitude d'autruche.
M. HAMEL: La Régie des alcools aussi bien que le ministère
du procureur général sont prêts à donner toutes les
informations qu'ils ont et nous aimerions avoir ce service dans notre propre
département. Mais en entendant que ce soit établi, si le
comité anti alcoolique veut avoir les informations que nous
possédons, nous sommes bien prêts à les donner. Nous
n'avons rien à cacher.
M. LAFRANCE: Je dois corriger, monsieur le Président, c'est pas
le comité anti alcoolique, c'est un comité de la
sobriété. Ce n'est pas négatif.
M. HAMEL; Maintenant, en ce qui concerne l'augmentation du nombre des
permis et l'augmentation de la consommation des alcools, c'est un fait qu'en
1962-1963, la consommation d'alcool faite chez des licenciés (à
l'exception de la bière, la bière n'entre pas là-dedans)
était de 17.65% et les calculs ont été faits en tenant
compte de la taxe additionnelle de 5% que doivent payer les détenteurs
de permis.
M. BERTRAND: D'alcool?
M. HAMEL: C'est d'alcool seulement.
M. JOHNSON: Je remercie le ministre; ça éclaire le
débat considérablement. Il s'agit de scotch, de gin, de rye et
non pas de bière ni de vin. Le vin est peut-être classé
là-dedans.
M. HAMEL: Le vin est compris là-dedans.
M. BERTRAND: J'en doute.
M. JOHNSON: A tout événement, on volt là que... Le
député de Richmond va être heureux comme moi d'apprendre
que ces statistiques sont un peu plus claires. Vous savez, le scotch, le gin ou
le rye, au prix que le gouvernement l'a placé récemment, ce n'est
pas le peuple en général qui peut le boire. Monsieur le
Président, ça prend des gens à hauts revenus et les gens
à hauts revenus ne sont pas nombreux...
M. HAMEL: Si je voulais répondre malicieusement au
député de Bagot, je dirais qu'il prétend qu'on prive le
peuple.
Il nous a parlé de l'émission des permis et il se
scandalisait du fait que dans Montréal, par exemple, là où
un comptoir-lunch, là où un ouvrier va manger un sandwich le
midi, on lui permette d'avoir un verre de bière. Il aurait aimé
probablement qu'on donne ça seulement au Windsor puis au Queen
Elizabeth...
M. JOHNSON: Non, non.
M. HAMEL (St-Maurice): ... puis au Ritz Carlton.
M. JOHNSON: Non, je n'ai pas dit ça. Ce sont les propos de M.
Delage.
M. HAMEL (St-Maurice): Bien oui, mais si le chef de l'Opposition ne les
prend pas à son compte, ces propos-la, qu'il ne les dise pas; autrement
je me demande...
Maintenant en 1962-1963, la consommation de l'alcool dans les
débits licenciés était de 17.65%; en 1963-1964, elle a
été de 17.71%. Alors l'augmentation en fait dans les
débits licenciés n'a été que de 00.06%. Enfin on ne
peut pas dire que les statistiques établissent que l'émission de
permis a constitué une augmentation sérieuse dans la consommation
de l'alcool. Je ne le crois pas.
M. GABIAS: Voyons donc.
M. HAMEL (St-Maurice): Evidemment, je n'ai pas encore eu le temps de
scruter...
M. GABIAS: Non, certain.
M. BERTRAND (Missisquoi): Il faudrait que ce soit étudié;
c'est sérieux. Ne vous prononcez pas trop vite; faites-les
étudier.
M. HAMEL (St-Maurice): Très bien, mais à première
vue ça me semble ça. Maintenant il faut tenir compte aussi que
l'alcool c'est un produit généralement de luxe. Et ça suit
l'augmentation du revenu de la population et on ne peut pas l'empêcher.
D'abord disons que l'augmentation de la production nationale brute a
été de 4.6%. L'augmentation de la population a été
de 125,000 à 126,000 âmes dans l'espace d'une année. Les
dépenses du consommateur en biens et services ont augmenté de
10%...
M. GABIAS: Ce ne sont pas les naissants qui boivent toujours?
M. HAMEL (St-Maurice): Pardon?
M. GABIAS: Vous parlez de l'augmentation de la population; 125,000
âmes. Ce ne sont pas eux autres qui boivent, certain.
M. HAMEL (St-Maurice): Non, seulement il y en a qui en 1962-1963 avaient
19 ans, puis en 1963-1964 ils ont 20 ans.
M. GABIAS: Oui. Cela, on sait ça.
M. HAMEL (St-Maurice): Puis il y en a qui sont morts.
M. GABIAS: Cela, on sait ça.
M. HAMEL (St-Maurice): C'est l'augmentation globale, chiffres sur
lesquels on se base pour examiner les problèmes sociologiques. Il est
évident qu'il y a des enfants naissants, ceux-là ne semblent pas
encore pris par cet...
M. GABIAS: Heureusement!
M. HAMEL (St-Maurice): ...inconvénient-là. Mais tous les
gens augmentent d'une année par année ordinairement. Je ne sais
pas si c'est comme ça pour le député de
Trois-Rivières?
M. GABIAS: Ah oui.
M. HAMEL (St-Maurice): Mais il recule en sagesse. Il augmente en
âge, mais il recule en sagesse.
M. GABIAS: Il y en a d'autres qui vieillissent deux années dans
une.
M. HAMEL (St-Maurice): Dépenses des consommateurs en biens et
services. Alors les dépenses des consommateurs en biens et services de
façon générale ont accusé une augmentation
d'à peu près 10%, de 1962 à 1963. L'augmentation de
l'alcool a été 5.4%. L'augmenta-
tion de la consommation de l'alcool a été à peu
près 50% moins élevée que l'augmentation des
dépenses des consommateurs de façon générale. Il ne
faut tout de même pas dramatiser les choses. On ne peut pas dire que
c'est un désastre. Maintenant...
M. GABIAS: Demandez ça au député de Richmond.
M. HAMEL (St-Maurice): ... de 1962 à 1963, les salaires ont
augmenté de $435,000,000. L'augmentation des salaires, des revenus des
salariés a été de 8% et sur le 8% il y en a une partie qui
est allée pour la consommation de l'alcool, c'est vrai.
M. DOZOIS: Quelles sont les statistiques pour la bière vendue
dans les débits licenciés?
M. HAMEL (St-Maurice): Dans les débits licenciés?
M. DOZOIS: Oui.
M. BERTRAND (Missisquoi): Dans les hôtels.
M. DOZOIS: Dans les hôtels, dans les restaurants...
M. BERTRAND (Missisquoi): Dans les tavernes.
M. DOZOIS: ... dans les tavernes. Vous n'avez pas de statistiques?
M. HAMEL (St-Maurice): Je ne les ai pas.
M. BERTRAND (Missisquoi): Mais est-ce qu'on en a ou si on n'en a
pas?
M. HAMEL (St-Maurice): De quoi?
M. BERTRAND (Missisquoi): De statistiques pour la vente de la
bière dans les tavernes, dans les hôtels?
M. HAMEL (St-Maurice): Voici ce qu'on me dit ici; Ceux qui vendent de la
bière sont tous des gens détenant un permis.
M. DOZOIS: Bien, il y a des permis d'épiceries et puis il y a les
permis pour consommation sur place.
M. HAMEL (St-Maurice): On ne m'a jamais donné les chiffres
là-dessus. On peut les de- mander, on peut essayer de savoir s'il y a
moyen de faire une étude...
M. BERTRAND (Missisquoi): C'est important pour une étude
complète.
M. HAMEL (St-Maurice): ... sur ce point particulier.
M. DOZOIS: Ce serait intéressant de les avoir pour un certain
nombre d'années.
M. HAMEL (St-Maurice): On me dit que le volume, incluant la
bière, en 1962-1963, est de 5,944,000 gallons; en 1963-1964,
6,437,000.
M. GABIAS: C'est facile à tirer, ça! M. DOZOIS: 10%
d'augmentation.
M. GABIAS: Prenez votre rapport, vous allez voir!
M. HAMEL (St-Maurice): A peu près 8%. Alors, sur ce
point-là je crois que l'on ne doit pas dramatiser, sans être
assurés de la signification des statistiques que je donne et que nous
allons faire étudier. Il y a un autre point que je voudrais souligner,
c'est celui des débits clandestins.
M. le Président, depuis le mois d'août 1963, j'ai
demandé à la Sûreté provinciale de nous
débarrasser, de nous libérer et donner, dans son travail, la
priorité à la lutte contre les débits clandestins. Je veux
que la Sûreté provinciale nous libère d'abord et avant tout
des débits clandestins qui ne sont soumis à aucune loi ou aucun
règlement, qui constituent une concurrence déloyale pour les
établissements licenciés et j'ai répété
à plusieurs reprises, je me suis permis, quand on me les a
dénoncés, de transmettre immédiatement le rapport qui
m'était fait à la Sûreté provinciale pour nous
libérer des débits clandestins. J'espère que nous allons
réussir.
D'après ce qu'on me dit, je me suis informé
particulièrement pour la Beauce parce que c'est la Beauce qui
était en vedette à ce moment-là, et des gens de la Beauce
qui sont censés connaître la situation me disent; « Avant
1960 ou avant 1961, ayant l'établissement de la nouvelle Loi des
alcools, il y avait au moins, dans une paroisse de la Beauce, paroisse
importante, au moins 45 débits clandestins qui fonctionnaient par
l'intermédiaire de chauffeurs de taxis, par des restaurateurs de «
peanut ».
M. ALLARD: A quel endroit?
DES VOIX; A quel endroit?
M. HAMEL (St-Maurice): A St-Georges de Beauce, a ce qu'on m'a dit.
M. ALLARD: C'est faux! Vous avez de mauvais renseignements.
M. LOUBIER: Mauvais renseignements!
M. HAMEL (St-Maurice): Et on me dit qu'aujourd'hui il n'en existe plus.
Seulement il faut s'entendre là-dessus.
M. ALLARD: Bien oui, c'est mieux.
M. HAMEL (St-Maurice):" Voici, c'est qu'à un moment
donné...
M. LOUBIER: C'est faux!
M. HAMEL (St-Maurice): ... j'ai eu l'occasion de discuter de ça
avec le ministre de la Voirie qui a vu le curé qui avait fait une
déclaration, ou je ne sais pas qui. Evidemment ça demande,
à mon sens, un certain jugement. Je suppose qu'à un moment
donné quelqu'un reçoit inopinément de la visite. Il
téléphone à son voisin, son ami et dit: « Peux-tu me
passer une boutelle? Je te la remettrai ». D'après ce qu'on m'a
dit, c'est que des cas comme ceux-là, je ne dis pas seulement ces
cas-là, mais des cas comme ceux-là avaient servi de base à
la déclaration.
Bien, M. le Président, je ne sais pas si je me trompe mais ce
n'est pas ce que j'entends par une vente de boisson par un débit
clandestin. Je me trompe peut-être, c'est possible ça. «
Errare humanum est. »
M. JOHNSON: Si c'est de même qu'il fait ça pour tous les
voisins, toute la paroisse.
M. HAMEL (St-Maurice): Oui, bien là c'est différent. En
tout cas il y a une chose certaine. J'ai demandé, j'ai
répété ma demande, je le fais encore, mais c'est plus
difficile généralement de faire des causes dans les débits
clandestins que chez les licenciés. Seulement je crois que la
Sûreté doit prendre les moyens nécessaires pour
libérer la province de ces débits clandestins, et je crois
qu'après ça, nous serons en bien meilleure posture, ayant
éliminé la concurrence déloyale que constituent ces
débits-là pour les hôteliers sérieux, pour faire
appliquer la loi avec encore plus de sévérité.
Le député de Trois-Rivières m'a posé une
question avant l'ajournement. J'ai envoyé sa question à la
Régie des alcools immédiatement. On m'a donné par
téléphone les renseignements qu'il me demandait. On me demandait,
sur les permis annulés combien avaient été
réinstallés. Je reçois un téléphone de la
section de Québec ici qui me dit: « Réinstallations, 2 -
nous avons vu, je pense, qu'il y avait 236 permis qui avaient été
annulés d'abord cause d'annulation: non paiement, 2 permis qui
avaient été annulés parce qu'ils n'avaient pas payé
leurs dus ont été réinstallés après le
paiement; 1 permis où il y avait un nombre de chambres insuffisant a
été réinstallé à la suite de
l'établissement d'un nombre de chambres suffisant. Des permis qui
avaient été octroyés dans un endroit de prohibition, qui
avaient été annulés, 3 permis, ont été
réinstallés après l'abolition du règlement de
prohibition. Cela c'est pour le district de Québec. Quant à
Montréal, on me les a donnés par téléphone. On me
dit que 11 permis ont été réinstallés. On ne me
donne pas les raisons. On m'a donné ça par
téléphone.
Alors si le député de Trois-Rivières veut des
détails supplémentaires, bien je lui demanderais de poser sa
question en Chambre au feuilleton, et puis on leur enverra le feuilleton et on
demandera qu'ils nous fournissent tous les détails qu'il veut et on les
lui donnera. On n'a rien à cacher.
M. GABIAS: Est-ce que le ministre maintient sa déclaration qu'il
faisait en Chambre à l'effet qu'au-delà de 400 permis avaient
été annulés dans le district de Montréal?
M. HAMEL (St-Maurice): J'ai transmis à la Chambre les rapports
qui m'ont été transmis par la Régie des alcools. Si le
député de Trois-Rivières prétend qu'il y a des
erreurs, je n'ai aucune objection à attirer l'attention de la
Régie des alcools. Mais j'ai ici encore: permis, section de
Montréal. Permis annulés en 1961-1962, 66; en 1962-1963, 231; en
1963-1964, 319. Permis suspendus, en 1961-1962, 5; en 1962-1963, 12; en
1963-1964, 24.
Dans la section de Québec, 4 en 1961-1962; 48 en 1962-1963; 166
en 1963-1964 et puis là...
M. GABIAS: Annulés ça?
M. HAMEL (St-Maurice): Annulés. Et suspendus en 1962-1963, 2; en
1963-1964, 20; et j'ai un autre chiffre parce que les dates ne correspondent
pas, 54. Alors en tout, 76.
M. GABIAS: Et suivant ce chiffre de 319 permis annulés dans la
région de Montréal en 1962-1963, là-dessus il y en a
eu...
M. HAMEL (St-Maurice): 319, c'est 1963-1964.
M. GABIAS: Alors, en 1963-1964, 319 permis ont été
annulés à Montréal et de ce nombre-là il y en a
huit qui auraient été réinstallés?
M. HAMEL (St-Maurice): Huit qui auraient été
annulés?
M. GABIAS: Non, non, qui auraient été
réinstallés.
M. HAMEL (St-Maurice): J'ai ici, moi, permis suspendus, vingt. Mais
là, évidemment, si cela vient d'un fonctionnaire, on n'a
peut-être pas les mêmes dates qu'on a sur le tableau de la
régie elle-même.
M. GABIAS: Oui.
M. HAMEL (St-Maurice): C'est pour ça que là je donne les
chiffres tels qu'ils me sont donnés et si on veut avoir plus de
précision, qu'on écrive, qu'on nous dise les dates et on aura
exactement ce que veut le député de Trois-Rivières.
M. DOZOIS: M. le Président, dans les chiffres que donne le
procureur général, lorsqu'il nous dit qu'il y a eu, disons, 400
permis d'annulés au cours d'une année et qu'il n'y en a eu deux
ou trois ou dix de réinstallés, est-ce qu'il n'est pas possible
que des 400 permis annulés que l'on ait fait la demande pour un nouveau
permis, au même endroit, sous le nom d'une autre personne...
M. HAMEL (St-Maurice): Oui...
M. DOZOIS: ... et que ce soit considéré, pas comme une
réinstallation, mais tout simplement comme un nouveau permis?
M. HAMEL (St-Maurice): Sous le nom d'une autre personne?
M. DOZOIS: D'une autre personne.
M. HAMEL (St-Maurice): Bien évidemment, ça, c'est...
M. DOZOIS: Bien je veux attirer l'attention du ministre là-dessus
parce que je pense que c'est une méthode qui est possible...
M. HAMEL (St-Maurice): Cela, c'est possible.
M. DOZOIS: ... et qui peut fausser les données que vient de
soumettre le ministre. Parce que, évidemment, si un permis a
été annulé: disons qu'ils sont deux associés et le
permis au nom d'un associé est annulé. L'autre associé le
demande. Evidemment, ce n'est pas une réinstallation, c'est un nouveau
permis selon des fins de statistiques. Je pense que c'est une chose possible.
Il faut en tenir compte.
M. HAMEL (St-Maurice): Cela c'est possible! Adopté.
UNE VOIX: Non, non.
M. BERTRAND (Missisquoi): M. le Président, juste un mot au sujet
des remarques qui viennent d'être faites quant à la Régie
des alcools. On en a parlé tantôt, ce n'est pas l'endroit de
discuter de la Régie des alcools. Très bien. Est-ce qu'il n'y
aurait pas lieu que l'administrateur ou les membres de la régie
même viennent devant un comité parlementaire pour expliquer le
rapport annuel, qui n'est pas volumineux dans un domaine que nous reconnaissons
tous, mettant de côté les accusations que l'on peut se lancer de
part et d'autre, des personnalités qui peuvent être
soulevées; dans un domaine dis-je d'une extrême importance. Ce
rapport annuel qui comporte à peine quelques feuilles, le
député de Trois-Rivières me le remet à l'instant,
il en parlera plus longuement, ce rapport ne renferme pas beaucoup de
détails.
Deuxièmement, au sujet de cette régie, est-ce que le
comité d'étude et d'information sur l'alcoolisme a un
représentant auprès de la régie? Le ministre de la Famille
me répond que non?
M. LAFRANCE: Si le député de Missisquoi permet une
remarque; j'ai justement suggéré à l'administrateur, je
crois, de la régie, M. Power, je lui ai suggéré justement
pour l'application des nouveaux règlements de la publicité, qu'un
représentant du comité d'étude et d'information soit
ajouté...
M. BERTRAND (Missisquoi): Ce représentant qui à l'heure
actuelle n'y est pas au sein de la régie pourrait également
représenter le ministère de la Famille et du Bien-Etre. M. le
Président, voilà quelques remarques que je voulais faire en marge
de la régie.
Quant à l'item en discussion, qui s'intitule « Poursuites
au criminel », je crois de mon devoir de féliciter le
député de la Beauce du travail qu'il a accompli. On a voulu lui
prêter des intentions? Substantiellement, son rapport re-
présente le travail que l'on peut qualifier de vrai travail de
bénédictin. J'ai l'expérience des tribunaux. Je plaide
moins activement depuis quelques années mais j'ai exercé beaucoup
tant au civil qu'au criminel et je constate, comme tous ceux qui sont avocats,
la besogne, la somme de travail que le député de Beauce a
dû s'imposer pour présenter à la Chambre un dossier que,
moi, je qualifie d'inquiétant, que le député de Bagot
qualifie d'inquiétant. Oui, mais pas seulement nous, M. le
Président. Paul Sauriol éditorialiste du « Devoir »
(jeudi 4 juin)...
M. HAMEL (St-Maurice): Ce n'est pas Claude Ryan?
M. BERTRAND (Missisquoi): Paul Sauriol, des commentaires ont
été faits également par M. Ryan si mon souvenir est bon,
l'éditorial du « Devoir » du jeudi 4 juin 1964 s'Intitule:
Le commerce des alcools. Devant un dossier inquiétant.
Paul Sauriol termine son article ainsi: « Devant le dossier
préparé par M. Allard, le procureur général doit
donner premièrement des explications s'il ne peut pas réfuter ce
document et, deuxièmement (c'est moi qui ajoute les subdivisions), il
doit prendre des mesures énergiques pour que cesse un tel scandale,
dégagé je dirais de toute la fumée du combat politique.
»
Dieu sait combien nos réflexes à nous qui avons entendu de
l'autre côté, alors que nous étions au pouvoir, les propos,
je ne dirai pas de tel ou tel député de l'Opposition, je dirai
globalement de l'Opposition, à l'endroit de l'observance ou de la
non-observance de la Loi des liqueurs; on voudra bien comprendre qu'à
certains moments nous puissions bondir devant l'état de choses qui
existe à l'heure actuelle.
Je n'en dirai pas plus long mais durant la semaine de l'ajournement j'ai
été examinateur aux examens du Barreau, durant quatre jours. Je
suis heureux de noter, je pense que ça fera plaisir au premier ministre,
que son fils Jules a été reçu avocat à cette
occasion. Je dirai ceci: lorsque les examinateurs présentent les
questions aux candidats qui passent l'examen, et si on avait eu une question
à poser au candidat au sujet de l'article 141 de la Loi de la
Régie des alcools, et qu'on avait demandé aux candidats, par
exemple, quels sont les devoirs du tribunal saisi d'une poursuite.
En matière d'offense à la Loi de la Régie des
alcools et si, au lieu de nous répondre que le tribunal devant lequel
une poursuite est intentée en raison d'une infraction à la
présente loi, si l'élève avait répondu: « Le
tribunal peut s'assurer si cette infraction est une première, une
deuxième ou une infraction subséquente», le candidat au
Barreau n'aurait pas eu ces notes ou ne les aurait pas toutes eues.
M. HAMEL (St-Maurice): S'il avait lu la Loi, il n'aurait pas
répondu.
M. BERTRAND (Missisquoi): Le procureur général rira
tantôt. Je parle d'un sujet sérieux, de l'observance de la Loi
dont le député de Richmond a dit tantôt qu'il s'agissait
d'une chose sacrée et j'en parle comme ceci. La Loi a été
adoptée par les législateurs, en vertu de notre système,
il y a les divisions du judiciaire, du législatif et de
l'exécutif. Nous avons voté cette Loi, non pas une autre, on
dira; « Vous êtes intransigeant. » Ce n'est pas moi qui suis
intransigeant, c'est le texte de loi que nous avons voté. C'est la Loi
qui doit être observée, c'est la Loi que les législateurs
ont voté pour qu'elle soit appliquée; celui qui est chargé
de son application, c'est l'exécutif, c'est le procureur
général. Celui qui est chargé de juger des cas, c'est le
juge.
Il ne m'appartient pas de donner des ordres aux magistrats, mais ils
connaissent leur devoir devant les textes de loi qui ont été
votés par le Parlement et on a donné tantôt l'exemple de la
tolérance. Le chef de l'Opposition, avec raison, a dit que les lois
souvent viennent confirmer les habitudes, les actes de tolérances. On en
a un exemple ici, il y a acte de tolérance de la part du magistrat
devant qui les inculpés comparaissent et là où il y a
preuve établie suivant les conditions de l'article 141, qu'il s'agit
d'une deuxième ou d'une troisième infraction, il y a une
tolérance qui amènera sans aucun doute des amendements au projet
de loi. Lorsque nous étudierons ces amendements, on dira: « La Loi
est inapplicable. » Il faut la changer. Les juges refusent de l'appliquer
au nom de la miséricorde, au nom de la sympathie, au nom des grands
principes d'humanité en disant qu'on obtient mieux l'application de la
loi par une loi moins sévère.
Le procureur général l'a déclaré l'autre
jour; on a obtenu de meilleurs résultats. Ces gens-là n'ont pas
été poursuivis depuis tant de temps!
Je n'accepte pas cette explication qui n'en est pas une, M. le
Président, c'est une explication boiteuse et je dis que le procureur
général n'a certainement pas expliqué, comme
l'éditorialiste du « Devoir », le lui demandait, le dossier
inquiétant soumis et présenté par le député
de Beauce.
Prendre des mesures énergiques? Il y a, je le dis, le juge, et
comment le juge doit-il s'assurer, s'il s'agit d'une première ou d'une
deuxième infraction? Il y a des avocats qui plaident devant lui, qui
représentent le département du procureur général.
Il y a, dans nos districts un procureur de la Couronne qui agit dans l'ensemble
des causes concernant les actes criminels, et il y a un autre avocat qui est
chargé, lui, de représenter le département du procureur
général pour l'application de la Loi des liqueurs.
Le député de Beauce a donné des cas. Je dis et je
demande au procureur général, sous ma responsabilité de
député et comme avocat connaissant la pratique, de surveiller les
actes de ceux qui le représentent dans nos districts et qui tantôt
agissent comme procureur de la Couronne et tantôt comme procureur de
l'accusé lorsqu'il s'agit de cas, par exemple, de violation de la Loi
des liqueurs. J'en ai parlé d'ailleurs au procureur
général.
M. LESAGE: M. le Président, je pense bien que...
M. BERTRAND (Missisquoi): Je n'ai pas d'objection.
M. LESAGE: ... le député de Missisquoi en a encore pour
quelque temps.
M. BERTRAND (Missisquoi): Quelques minutes.
M. HAMEL (St-Maurice): Adopté? DES VOIX: Ah non!
M. LESAGE: Est-ce que je pourrais demander que la séance du
comité soit suspendue, parce qu'à la suite de la question qui a
été posée par le député de Champlain quant
à la loi modifiant la Loi des accidents du travail, j'ai répondu
qu'à cause d'une erreur de copiste l'ordre d'impression n'avait pas
été donné. Je m'en suis aperçu ce matin à
neuf heures. J'ai donné Instruction immédiate de faire imprimer
le bill et je suggérerais que nous retournions en Chambre pour trois
minutes afin que les députés...
M. JOHNSON: Première lecture?
M. LESAGE: Une minute! Pour la première lecture du bill 44:
« Loi modifiant la loi des accidents du travail » afin que le bill
puisse être distribué aux députés ce soir.
M. BEDARD (président du comité des subsides): M. le
Président, j'ai l'honneur de faire rapport que la séance du
comité est suspendue.
Loi des accidents du travail
M. HYDE (président): Alors je comprends que M. Fortin propose la
première lecture d'une loi modifiant la Loi des accidents du
travail.
M. FORTIN: M. le Président, juste quelques mots. Je donnerai les
détails lors de la deuxième lecture en comité, seulement
je voudrais dire ce soir que le principal but de l'amendement est celui-ci:
c'est que des études actuarielles ont été faites à
la Commission des accidents du travail, et nous avons réalisé que
depuis 1961 jusqu'ici, grâce à des investissements la Commission a
un surplus au fonds de capitalisation des rentes de près de $18,000,000.
Or, c'est de l'argent qui a été payé par les employeurs
depuis 1931 jusqu'à maintenant, et nous avons crû qu'il
était préférable de faire bénéficier les
rentiers, les accidentés, de 1931 jusqu'à 1960, de ce
montant.
Alors le but de la loi est de permettre à la Commission des
accidents du travail de distribuer aux rentiers actuels, aux accidentés
depuis 1931 jusqu'à 1960, suivant une proportion qui est établie
dans le texte de loi, ce surplus que la Commission possède dans son
actif. Il y a un montant de $16,197,282 que nous allons consacrer à la
revalorisation des prestations, et ceci va affecter 11,147 rentiers. Et le
coût de la hausse des rentes s'élèvera à $97,527
à chaque mois. Les rentiers commenceront à recevoir leurs rentes
à compter du mois d'octobre.
En second lieu, le but de la loi est d'assujettir tous les
employés des services publics, du gouvernement, des commissions
scolaires, des municipalités, etc, aux dispositions de la Loi des
accidents du travail, et enfin nous allons, je signale les trois
principaux amendements, nous allons permettre à un ouvrier
travaillant dans la province de Québec, pour un employeur de la province
de Québec, mais qui va exécuter des travaux en dehors de la
province de Québec, de bénéficier des compensations de la
Commission des accidents du travail lorsque dans la province de Québec
les bénéfices de la Commission sont plus élevés que
ceux des pays étrangers.
M. LE PRESIDENT: La motion de première lecture sera-t-elle
adoptée?
UNE VOIX: Adoptée.
M. LE PRESIDENT: Adoptée.
M. LE GREFFIER: Première lecture de ce bill. First reading of
this bill.
M. LE PRESIDENT: Deuxième lecture à la prochaine
séance. La Chambre est de nouveau en comité des subsides.
M. LESAGE: Il est six heures. La séance est suspendue
jusqu'à huit heures...
M. BEDARD (président du comité des subsides): La
séance est suspendue jusqu'à huit heures.
M. LESAGE: C'est ça, oui.
Reprise de la séance à 8 h p. m.
M. BEDARD (président du comité des subsides): A l'ordre
messieurs.
M. BERTRAND (Missisquoi): M. le Président, je n'entends pas
prolonger trop mes remarques...
UNE VOIX: J'espère.
M. BERTRAND (Missisquoi): ... mais je voudrais compléter ce que
j'avais commencé avant le souper en demandant au procureur
général de surveiller bien attentivement l'exercice du mandat que
le ministère confie à ses représentants devant les
tribunaux. Pour le moment je n'en dirai pas plus. Je l'ai
déclaré. J'en ai parlé privément au procureur
général et je lui demande d'exercer une surveillance plus
attentive. C'est le ministère qui, par ses officiers supérieurs,
envoie les plaintes dans chacun de nos districts. Je ne saurais blâmer
cet officier supérieur qui envoie les plaintes là-bas et qui
donne les instructions...
M. HAMEL (a-Maurice): Est-ce que le député de Missisquoi
me permettrait une question?
M. BERTRAND (Missisquoi): Oui.
M. HAMEL (St-Maurice): Le problème a été
soulevé par le député de Beauce aussi. Est-ce que le
député de Missisquoi pratique dans les districts ruraux?
M. BERTRAND (Missisquoi): Oui.
M. HAMEL (St-Maurice): Moi aussi. Est-ce que le député de
Missisquoi croit que nous devrions interdire à nos avocats de la
Couronne p?r exemple qui n'ont pas les causes de la Régie des alcools,
est-ce qu'on devrait les obliger à s'abstenir de comparaître dans
les cas de la Régie des alcools et vice versa? C'est le principe.
M. BERTRAND (Missisquoi): Voici, je conviens avec le procureur
général qu'il est plus facile de poser le problème que de
le régler en pratique. Il est clair qu'il n'y a pas de problème
si cela se produit, je dirais à l'occasion. Mais si l'on voit d'une
manière courante par exemple dans une cause le procureur de la Couronne
qui s'occupe disons des dossiers de tous les actes criminels à
l'exception de ceux de la Régie des alcools, si on le voit d'une
manière courante représenter leg accusés ou les
inculpés alors que le représentant du procureur
général, lui, représente bien entendu la Couronne dans les
causes de la Régie des alcools, il ne peut pas faire autrement que de se
poser à notre esprit que c'est une pratique qui devient, non plus
l'exception mais la règle. On ne peut pas faire autrement que de se
poser une foule de questions.
Et c'est pourquoi j'ai posé le problème comme le
député de Beauce l'a fait; je le pose au procureur
général et je lui demande d'exercer une surveillance. Pour le
moment je ne peux pas aller plus loin.
Donc, M. le Président, dans ce domaine le procureur
général avait des explications à donner. Il a tenté
d'en donner. Il a tenté de se tirer d'une mauvaise situation. Il est
clair que et d'ailleurs je pense que, en toute bonne foi, il le
reconnaîtra, le député de Beauce n'a pas accusé le
procureur général d'avoir porté des plaintes. Ce n'est pas
là qu'est le problème. Le procureur général a
porté des plaintes. C'est dans l'application de la loi, tant par le juge
que par les procureurs du ministère, qu'était le problème.
Et je pense que les explications que nous a données le procureur
général, même pour lui ne sont pas satisfaisantes et
davantage, il voudra bien convenir, que nous continuons à trouver avec
M. Sauriol que le dossier est inquiétant. Les explications du procureur
général ne nous ont pas enlevé nos inquiétudes. Et
j'espère que, si le problème consiste dans le fait que les juges
trouvent que la loi est trop sévère, je demande aux juges
à l'occasion de leur conférence annuelle car ils ont une
réunion annuelle, conférence que l'on appelle « des juges
». Ils se réunissent. Qu'ils fassent parvenir au ministère
du procureur général leurs représentations à ce
sujet-là: qu'ils ne peuvent pas appliquer la loi, que la loi est trop
sévère.
Mais tant et aussi longtemps que la loi existe, ce n'est pas moi qui
l'ai inventé cet adage « Dura lex, sed lex » «
La loi est dure, mais c'est la loi ».
M. HAMEL (St-Maurice): « Summum jus, summa injuria ».
UNE VOIX: Oui.
M. HAMEL (St-Maurice): C'est ce qu'on nous enseignait à
l'université.
M. BERTRAND (Missisquoi): C'est ce que l'on nous enseignait...
UNE VOIX: « Dura lex... »
M. BERTRAND (Missisquoi): Alors c'est ça qu'il faut mettre en
pratique par tout le monde. Le procureur général, son
argumentation? Il pense bonifier sa situation en plaidant la faiblesse de
l'accusateur.
M. HAMEL (St-Maurice): La faiblesse de l'accusateur?
M. BERTRAND (Missisquoi): Oui. Prétendant que le
député de Beauce fait partie d'un mouvement politique qui se
serait rendu coupable dans le passé, d'après lui, d'actes
condamnables, ce que je n'admets pas.
M. HAMEL (St-Maurice): Je n'ai pas parlé de ça!
M. BERTRAND (Missisquoi): Mais même si c'était vrai...
M. HAMEL (St-Maurice): Je n'ai pas dit cela du député de
Beauce!
M. BERTRAND (Missisquoi): Même si c'était vrai, est-ce que
le procureur général bonifie sa cause en plaidant la faiblesse
des autres?
M. HAMEL (St-Maurice): Ce n'est pas ça que j'ai dit.
M. BERTRAND (Missisquoi): Est-ce que le procureur général
améliore l'application de la loi en défendant une loi qui n'est
pas appliquée? Le procureur général le reconnaît, le
rappel du passé, j'en ai pris mon parti à plusieurs reprises et
à l'intérieur de mon parti, et j'ai été
critiqué pour l'avoir fait. Le passé c'est une chose. Tous les
mouvements politiques, quels qu'ils soient, ont eu à leur crédit
et un actif et un passif.
M. HAMEL (St-Maurice): Nos actes nous suivent!
M. BERTRAND (Missisquoi): Oui. Ils nous suivent. Et le fardeau n'est pas
lourd. Je ne le crains pas. Mes actes, c'est moi qui parle en ce moment et les
députés peuvent faire la même chose, nos actes nous
suivent, il est vrai. Mais, même si personnellement j'avais commis des
actes fautifs, en quoi, s'appuyant sur mes actes fautifs, le procureur
général pourrait-il améliorer la situation et diminuer la
responsabilité qui est la sienne à l'heure actuelle? En quoi?
M. HAMEL (St-Maurice): Bien, je ne vois pas comment je devrais
recommencer le discours que j'ai fait.
M. BERTRAND (Missisquoi): Non!
M. HAMEL (St-Maurice): J'ai dit ceci: « Vous avez
créé un climat qui rend extrêmement difficile ». Et
j'ai démontré de quelle façon le climat avait
été créé. J'ai démontré ça.
J'ai dit: « C'est de votre faute! »
M. BERTRAND (Missisquoi): M. le Président, si j'admettais
l'argumentation du procureur général, d'après lui et,
à l'époque, d'après le procureur général qui
a présenté la Loi, c'était justement d'après eux
pour tâcher de corriger les mauvais effets d'un climat, que je n'admets
pas, mais d'un climat qui aurait été créé à
notre époque, que l'on a donné des dents à la loi. Et le
procureur général, à l'époque, je me rappelle de
ses propos, disait: « Nous aurons maintenant une loi réaliste, une
loi collée à la réalité. »
C'est pourquoi toute l'argumentation du procureur général
basée sur le passé tombe à faux. C'est aujourd'hui, et je
n'en fais pas un cas de critique d'actes politiques ou d'actes partisans, que
je demande au procureur général d'exercer la surveillance dont
j'ai parlé tantôt et, si la loi n'est pas applicable, si la loi
est trop sévère, qu'on suggère des amendements. Nous les
examinerons loyalement, objectivement, en prenant nos responsabilités,
non seulement comme députés, mais comme pères de famille.
Mais, j'espère que ce problème, tant de la Régie des
alcools que de l'application de la Loi des liqueurs, recevra du procureur
général actuel et du gouvernement l'attention qu'il
mérite.
Le député de Richmond, cet après-midi, a
cité les communiqués publiés à l'époque dans
le diocèse de Sherbrooke. J'en ai ici, des communiqués, qui ont
été publiés il y a un an, communiqués qui se
répètent presque chaque mois, publiés par le Comité
de moralité publique du diocèse de St-Jean. Un en particulier que
je trouve ici, dans « Le Richelieu » en date du jeudi 1er
août 1963 et qui s'intitule: « La conspiration du silence autour
d'une loi violée ». Et l'on réfère à la Loi
de la Régie des alcools.
Dans ce domaine, pas de pharisaïsme, soyons réalistes,
soyons objectifs. Qu'on applique la loi, et si elle est inapplicable, qu'on
l'amende. Voilà, je pense, la manière d'envisager le
problème, et ce n'est pas en se lançant des accusations, d'un
côté comme de l'autre, que nous allons le régler. Le
procureur général conviendra
qu'il est parfois difficile de se retenir dans ce domaine, quand on a
été l'objet de critiques acerbes, des critique, à certains
moments qui étaient malhonnêtes, à l'endroit des hommes qui
siégeaient de l'autre côté de la Chambre, et c'est
là que je m'arrête pour demander au procureur
général de faire son devoir dans l'exécution de la
loi.
M.GABIAS: M. le Président, là où le
député de Missisquoi s'arrête, moi, je commence. Pendant de
nombreuses années, et toute la population s'en souvient, le parti
libéral, qui alors était dans l'Opposition, s'acharnait à
chaque session, et même à plusieurs reprises au cours de chacune
des sessions, s'acharnait à s'attaquer au gouvernement d'alors, sur la
Loi des liqueurs alcooliques. La population en était venue à
croire que vraiment l'Union nationale était la seule responsable de ce
qui existait alors dans le domaine des liqueurs alcooliques.
La population a cru, grâce à la propagande bien
orchestrée du parti libéral, de ses députés
oppositionnistes, a cru que l'Union nationale était la grande
protectrice des débits clandestins, était la grande protectrice
de la violation systématique de la Loi des liqueurs alcooliques. Et la
population a également cru que le parti libéral était
sincère lorsqu'il disait qu'il mettrait fin à ces abus, que
pendant seize ans, les oppositionnistes libéraux avaient trouvé
les moyens de corriger les imperfections de la loi, avaient trouvé les
moyens d'amener des amendements à la Loi des liqueurs alcooliques pour
empêcher tous ces abus qu'il dénonçaient à
satiété dans l'Assemblée législative, et hors
l'Assemblée législative.
Il n'y avait aucune sobriété, aucune
sobriété de la part des libéraux dans leur langage et dans
la longueur de leurs discours. Je voudrais brièvement rapporter les
discours qui ont été tenus depuis 1953, en cette Chambre, et en
dehors de la Chambre, jusqu'en 1960 par les députés
libéraux, par les candidats libéraux, par les organismes
libéraux. De 1953 à 1960, rien qui pouvait être dit n'a pas
été dit, et tout ce qui pouvait être dit, et tout ce qui ne
pouvait être dit l'a été également.
On ne posait pas le problème au point de vue sociologique, on ne
posait pas, et très rarement le problème au point de vue de la
famille. On posait le problème uniquement sous un angle politique, et
onaccusaitnonseulementunparti, mais on accusait les membres de ce parti, et on
n'y allait pas avec le dos de la cuillère. Pendant seize ans, le parti
libéral s'est promené à travers la province, et dans cette
Chambre, avec les déclarations qui voulaient que ce soit l'Union natio-
nale, la seule responsable de ce qui existait dans la province. Et aujourd'hui,
parce que l'on veut, en cette Chambre, dire, « messieurs les
libéraux non seulement vous n'avez pas corrigé l'état
existant, mais vous avec légalisé l'état existant vous
vous retranchez en arrière du paravent; ne faites pas de
personnalités! placez le problème au-dessus de la politique!
Bien, je dis qu'il est trop facile, après qu'on a semé la
tempête, de ne pas récolter l'orage. Il est trop facile de se
placer en arrière de ce paravent et de dire: « Aujourd'hui,
faisons trêve de tout ce qui touche la politique, faisons trêve de
ce qui touche les partis politiques et plaçons le problème bien
au-dessus de cela. »
Mais où les libéraux l'ont-ils placé, ce
problème? Sur qui l'ont-ils fait reposer ce problème? Et qui
accusaient-ils pendant seize ans? Est-ce qu'ils accusaient les tribunaux?
Est-ce qu'ils accusaient les procureurs de la Couronne? Est-ce qu'ils
accusaient la population? Ils accusaient uniquement l'Union nationale et,
aujourd'hui, ces mêmes gens disent: « Maintenant que nous avons
goûté au pouvoir, nous pouvons placer le problème au-dessus
des attaques politiques. Nous pouvons placer le problème à
côté du département du procureur général.
Nous voulons faire de la sociologie. Nous voulons que la population prenne
conscience de ses responsabilités. »
On fait appel à l'humanisme; on fait appel à la
sociologie; on fait appel aux commissions antialcooliques; on fait appel
à toutes sortes d'organismes pour déplacer la
responsabilité. Mais si, pendant seize ans, la responsabilité
était sur l'Union nationale, je dis que depuis quatre ans elle est
actuellement sur les libéraux; et nous ne pouvons placer la discussion
ailleurs que là.
Le procureur général nous dit: « Vous avez
créé un climat et c'est ce que nous récoltons; le climat
que vous avez créé pendant seizeans. » Où donc est
l'honnêteté d'une telle déclaration? Comment pouvons-nous y
attribuer le moindrement de sérieux alors que nous savons que, depuis
toujours, la Loi de la Régie des alcools a été
violée dans la province de Québec, que nous savons depuis
toujours que ç'a été la pierre d'achoppement de tous les
gouvernements, quels qu'ils soient, avant l'Union nationale comme après
l'Union nationale.
Et on veut faire croire à la population qu'aujourd'hui le parti
libéral récolte la semence de l'Union nationale, que le parti
libéral fait face à une mentalité qui a été
créée de 1944 à 1960. M. le Président, c'est encore
une autre de ces inventions libérales que nous ne pouvons pas laisser
passer en cette Chambre et la population doit savoir la vérité.
La population doit
savoir que le procureur général actuel, comme le procureur
général qui l'a précédé, ont essayé
bien mollement, bien mollement de faire respecter la Loi de la Régie des
alcools.
Jusqu'au 13 avril 1961, le procureur général s'est
défendu en disant: « Nous sommes en présence d'une loi
inapplicable, nous sommes en présence d'une loi qui n'est pas
réaliste. » Et on s'est dérobé pendant quelques mois
derrière les chapitres 255, 256 et 257 des Statuts refondus de la
province. On ne peut pas appliquer la loi parce que la loi n'est pas
réaliste. Mais au cours de la même période, on s'est
empressé de multiplier les permis de liqueurs dans la province. On s'est
empressé dans la même période, du mois de juin 1960
à avril 1961, grâce aux lois qui existaient dans le temps,
défavoriser les amis à travers toute la province pour leur donner
des permis de vente de liqueurs alcooliques. Cela, c'est un fait.
Et si la loi n'était pas réaliste, et si le gouvernement
avait été de bonne foi, comment aurait-on, dans cette courte
période de quelques mois, comment aurait-on pu changer des centaines et
des centaines de permis, comment aurait-on pu multiplier des centaines et des
centaines de nouveaux permis? C'était là, M. le Président,
toute la sincérité du parti libéral.
Une loi qui n'était pas réaliste, une loi qu'on ne pouvait
pas appliquer, et en vertu de la même loi, ces mêmes gens qui
avaient critiqué l'Union Nationale, ces mêmes gens
émettaient des centaines et des centaines de permis grâce à
ces lois qui existaient dans le temps. Où donc était la
sincérité de ces gens, M. le Président? C'est une question
à laquelle nous attendons une réponse. Et depuis avril 1961 nous
sommes en présence d'une nouvelle loi. On a refondu les lois des
liqueurs alcooliques, chapitres 255, 256 et 257 grâce à cette
nouvelle loi, 9 et 10, Elizabeth II, chapitre 86 qui a été
sanctionnée le 13 avril 1961.
Il faudrait, M. le Président, se rappeler quel langage a
été tenu par tous les gens de la droite, en particulier par le
procureur général du temps, en particulier par le ministre de la
Famille et du Bien-Etre et également par le premier ministre actuel. La
nouvelle loi, c'était la panacée à tous les maux. La
nouvelle loi était réaliste. La nouvelle loi mettait fin à
un régime, mettait fin à un système. Avec la nouvelle loi,
et c'était la voix de l'expérience qui parlait, c'était la
voix de seize ans d'études qui parlait, les libéraux avaient
étudié pendant seize ans les méthodes et les moyens pour
corriger un état de faits qu'ils disaient déplorable, de 1944
à 1960 et ils avaient étudié et scruté toute la
loi, et la nouvelle loi de 1961 corrigeait tous les maux. Il n'y aurait plus de
violateurs de la loi des liqueurs alcooliques, les détenteurs de permis
seraient mis au pas; il n'y aurait plus de violation des règlements et
des lois, des prescriptions de la loi des liqueurs alcooliques.
La nouvelle loi forcerait toute la population à respecter cette
loi des liqueurs alcooliques. La nouvelle loi mettait fin aux abus de
publicité. La nouvelle loi mettait fin aux abus de la vente des liqueurs
alcooliques. La nouvelle loi satisfaisait tout le monde parce que dans la
province de Québec il n'y aurait plus de violation de la loi des
liqueurs alcooliques, il n'y aurait plus de violateurs et si par hasard, il y
en avait, le gouvernement verrait à appliquer rigoureusement et
scrupuleusement cette nouvelle loi qu'il adoptait le 13 avril 1961.
Mais qu'est-ce qui s'est passé, M. le Président,
après l'adoption de cette nouvelle loi, qui devait corriger tous les
abus, qui devait mettre fin à ce système que tout le monde
déplorait mais qui était en particulier critiqué par les
libéraux du temps? Et je ne veux que rappeler, parce que l'on savait, on
savait les défauts et les manques et les carences de cette loi. On les
connaissait, on les avait analysés pendant de nombreuses
années.
Par exemple, en 1953, le député de Richmond
déclarait que c'était grâce et je vous réfère
à un compte-rendu de l'Action Catholique du 26 février 1953:
« C'était dû, la violation dans le temps, des lois des
liqueurs alcooliques, uniquement à la mollesse, au laisser-faire du
procureur général, c'était dû à la connivence
du procureur général du temps. »
On ne s'arrêtait pas là, le 9 mars 1953, le ministre de la
Famille et je regrette qu'il ne soit pas ici ce soir, car si je cite des textes
qu'il dira tronqués demain ou qui ne sont pas exacts, j'aimerais mieux
le savoir ce soir.
Le 9 mars 1953, le ministre de la Famille disait que l'ennemi
numéro un dans la province, c'était l'alcool, et que pour
empêcher les effets néfastes de l'alcool, premièrement,
c'était de diminuer le nombre des permis. Ça, c'est le ministre
de la Famille qui le déclarait le 9 mars 1953, alors qu'il était
député de Richmond, et qu'il était le critique officiel de
l'Opposition sur la loi des liqueurs alcooliques. Il n'est pas le seul à
avoir attiré l'attention du gouvernement du temps sur la question des
nombreux permis et des nombreuses violations.
Le 25 novembre 1953, le chef de l'Opposition du temps, l'honorable
Georges Lapalme, déplorait les abus dans la vente de l'alcool dans la
province de Québec. En 1953, le chef de l'Opposition, monsieur Lapalme,
qui a été en-
suite procureur général jusqu'à il y a quelques
mois, déplorait, déplorait les abus dans la vente des alcools
dans la province de Québec, et à ce moment-là, il s'en
vendait à peu près les deux tiers de ce qu'il s'en vend
aujourd'hui.
UNE VOIX: Dans les débits clandestins...
M. GABIAS: Le 24 novembre,... nous y reviendrons à cette question
de débits clandestins. Le 24 novembre 1953, il y avait des discours
à l'emporte pièce qui étaient prononcés par
messieurs Lafrance, ministre actuel de la Famille, par l'honorable Cournoyer,
aujourd'hui ministre des Transports et Communications; et ces discours
reprochaient au gouvernement d'être le complice de la violation des lois
des liqueurs alcooliques.
Il n'y avait pas de termes assez durs, il n'y avait pas de phrases assez
mordantes pour accuser l'Union nationale. On la rendait complice de la loi des
liqueurs alcooliques. Ces mêmes gens aujourd'hui, sont dans le
gouvernement. Est-ce que nous entendons les dénonciations? Le Soleil du
3 mars 1954 nous rapporte que la Sûreté provinciale, on
allait jusqu'à accuser la Sûreté provinciale
d'être complice de la violation de la loi des liqueurs alcooliques. On
accusait le gouvernement de mollesse, on accusait le procureur
général de complicité, on accusait, en termes
généraux, mais jamais, jamais on a vu des accusations
spécifiques être portées contre quiconque en cette Chambre.
Le 18 février 1955, on s'attaque encore à l'application de la loi
des liqueurs alcooliques, cette fois, c'était l'honorable Pinard,
député de Drummond, qui était dans l'Opposition,
aujourd'hui ministre de la Voirie, qui reprochait au gouvernement d'être
le complice de la violation de la loi des liqueurs alcooliques. Le 24 novembre
1955, le ministre actuel de la Famille, ici je cite quelques paroles, parce
qu'elles sont très importantes, déclarait dans la province:
«Nous avons d'autres ennemis, dit-il, je me propose de vous les faire
connaître. D'abord il y a l'alcool. Le grand ennemi des
Canadiens-français, ce ne sont pas les communistes, ni les
canadiens-anglais, mais l'alcool. Celui qui se dit catholique et
français, et qui tolère cela, est un menteur ». Ce
n'étaient pas, j'imagine, des paroles prononcées à la
légère. Il était député depuis plusieurs
années et il disait: « Le premier fléau, le premier ennemi,
dans la province de Québec, des Canadiens-français, c'est
l'alcool ». Le 29 mai 1956, le docteur Rodolphe Leduc était
cité par le chef de l'Opposition du temps. Je vous réfère
à la Presse du 29 mal 1956, et le chef de l'Opposition fait siennes les
paroles suivantes: au docteur Rodolphe Leduc, député de Gatineau
qui avait déclaré que l'Union nationale laisse se perdre un grand
nombre d'adolescents, en permettant que la loi des liqueurs soit violée
partout.
M. Lapalme a dit que la politique de l'Union nationale repose, en grande
partie, sur l'alcool. Pour acheter des votes, l'argent de la caisse
électorale des bleus a été récolté dans les
débits clandestins ou licenciés qui violent les heures de
fermeture et permettent que l'on serve de la boisson à des adolescents.
M. Lapalme, cité par « La Presse » le 21 mai 1956,
était encore plus violent, et il disait; « Et la loi, parlons-en!
M. Duplessis, pensez à ce que vous avez laissé se commettre comme
immoralité dans la province avec votre régime corrompu contre
lequel tout le peuple s'unit, se révolte aujourd'hui. Pensez aux huit
cent mille signatures que vous avez ignorées au bas d'une requête
protestant contre les abus de l'alcool dans la province. »
On était catégorique, M. le Président. On n'y
allait pas avec le dos de la cuillère. On faisait allusion à une
requête de huit cent mille signatures. On accusait le procureur
général du temps d'être responsable de la vente des
liqueurs alcooliques à des adolescents. On n'accusait pas Pierre, Jean,
Jacques, Arthur. On ne disait pas c'est le climat qui existe dans la province.
On ne disait pas c'est la faiblesse de la loi. On disait, « M. le
procuruer général, c'est vous qui êtes responsable que l'on
vende de la boisson aux adolescents. C'est vous qui êtes responsable que
l'on vende de l'alcool le dimanche. C'est vous qui êtes responsable qu'il
y ait des débits clandestins dans la province. »
Et aujourd'hui, on change complètement son fusil d'épaule
et on dit: « Ne venez pas nous accuser, vous de l'Opposition,
d'être responsables de ce qui existe dans la province. Ne venez pas nous
accuser, nous, le gouvernement libéral de la province de Québec,
de faire en sorte que la loi soit violée, ce n'est pas nous, c'est la
population. » Mais en 1955, en 1954, en 1953 et les années qui
suivent, qui les libéraux accusaient-ils d'être responsables? En
1958, on va jusqu'à présenter une motion accusant le gouvernement
de ne pas faire respecter la loi des liqueurs dans la province, et on accuse le
procureur général du temps d'être le responsable de cette
situation. On accuse les membres de l'Union nationale d'être responsables
de cette situation, et le procureur général du temps, l'honorable
Duplessis, disait à l'Opposition du temps: « nous faisons tout ce
qui est humainement possible pour faire respecter la loi. Nous essayons de
l'appliquer humainement. »
Les mêmes paroles qui étaient prononcées en 1958 par
l'honorable premier ministre du temps, l'honorable Duplessis, ont
été reprises par le procureur général actuel. Et
l'on riait du procureur général du temps parce qu'il disait:
« il est difficile d'appliquer la Loi des liqueurs alcooliques. Il faut
être humain dans son application »; et les libéraux, avec le
doigt pointé vers le procureur général, l'honorable
Duplessis, disaient: « C'est vous le responsable C'est vous qui les
protégez. C'est vous qui êtes le complice des gens qui violent la
loi! »
Et aujourd'hui, il faudrait dire: M. le procureur général,
c'est le milieu qui veut ça. Nous autres on fait tout notre possible, on
essaie d'être humain, mais on ne peut tout de même pas envoyer tout
le monde en prison.
Et la différence qui existe avec ce qui existait autrefois, c'est
qu'au moins, de l'aveu même des libéraux, c'était une loi
qui était irréaliste. C'était une loi qui était
impossible d'application, mais la même situation actuelle avec une loi
dite réaliste, avec une loi qui corrigeait tous les abus ou les
empêcherait, où en sommes-nous rendus, M. le Président?
Est-ce que la loi est plus respectée aujourd'hui qu'autrefois?
M. LACROIX: Certainement!
M. GABIAS: Est-ce que la loi est plus respectée par les vendeurs
qu'autrefois?
M. LACROIX: Certainement!
M. GABIAS: Est-ce que la loi est plus respectée par ceux qui
fréquentent les débits d'alcool qu'autrefois? Est-ce que les
représentants ou les mandatés du procureur général
font plus leur devoir qu'autrefois? Est-ce que les juges sont plus
sévères aujourd'hui qu'autrefois?
M. le Président, à chacune de ces questions je vais vous
prouver que ce n'est pas non, que c'est oui. A chacune de ces questions c'est
oui que les mandatés du procureur général ne font pas leur
devoir; c'est oui que le procureur général ne fait pas son
devoir; c'est oui qu'il n'y a pas plus de sévérité
aujourd'hui qu'autrefois et c'est oui que le parti libéral, par exemple,
a changé complètement son attitude depuis trois ans.
C'est là qu'est la vérité et cette même
Opposition du temps qui aujourd'hui est au pouvoir présentait le 13
février 1959, soutenait que l'Opposition voulait faire
l'éducation de la sobriété; et c'est le
député de Richmond qui toujours était le porte-parole
officiel de l'Opposition libérale du temps, a proposé hier,
soit le 12 février 1959, à l'Assemblée
législative que le gouvernement de la province de Québec fasse
l'éducation de la sobriété dans l'usage des boissons
alcooliques dans les universités de même que dans les centres de
recherches et d'études dans ce domaine.
Vous avez bien compris, M. le Président: une motion
présentée par l'Opposition libérale en 1959 pour faire
l'éducation de la sobriété, partout à travers la
province, mais également dans les universités, également
dans les centres de recherches et d'études dans ce domaine. Et le
ministre de la Famille s'appuyait sur des déclarations
d'évêques, de curés, etc et d'associations.
Ce ministre-là, pendant plusieurs années, a donné
l'élan au parti libéral pour faire la guerre à l'Union
nationale sur l'application de la loi des liqueurs alcooliques. Accusations
par-dessus accusations et après quelques années, il
présente une motion pour éduquer la population à la
sobriété. Je vous prie de noter que cette motion a
été présentée le 12 février 1959. Le 25
février 1960, encore le ministre de la Famille parlant de l'alcoolisme
dit: « La famille a droit à la protection de l'Etat contre le
danger de l'alcoolisme qui est considéré à l'instar de
tous les autres agents de perversion, revues immorales, spectacles malsains,
comme un ennemi mortel de la paix et du bonheur familial. »
Le 25 février 1960, après sa motion du mois de
février 1959 le député de Richmond actuellement ministre
de la Famille, critique officiel du parti libéral en matière de
lois des liqueurs alcooliques, met le gouvernement en charge: l'Etat doit
prendre les moyens pour assurer le bonheur et la survie de la famille; et
l'alcool étant un ennemi, l'ennemi No 1 comme il le disait en 1953, il
faut que ce soit l'Etat qui prenne charge de l'éducation de la
sobriété. Il faut que l'Etat prenne les moyens pour endiguer ce
fléau, pour mettre fin, pour abattre l'ennemi mortel No 1 dans la
province de Québec.
Le 4 avril 1960, le même porte-parole officiel du parti
libéral, oppositioniste dans le temps, reprochait à l'Union
nationale d'avoir prêché, et remarquez bien cela, d'avoir
prêché le mépris des lois civiles et morales.
Ce n'était pas longtemps avant l'accession du parti
libéral au pouvoir. Le 4 avril 1960, dans un autre journal on rapporte
également que le ministre a invité les hommes publics au respect
des lois. Ceci termine le premier tableau.
La population était en droit d'attendre du parti libéral
la métamorphose des lois sur les liqueurs alcooliques. La population
était en droit de s'attendre qu'il y aurait au moins
un ministre dans le Cabinet libéral qui disait ce qu'il croyait
et qu'il croyait ce qui était vrai; au moins un ministre, au moins un
député dans l'Opposition libéral du temps qui croyait
à ce qu'il disait, qui croyait qu'il était possible
d'éduquer la population, qui croyait qu'il était possible que ce
soit l'Etat qui se charge d'éduquer la population qui croyait
également que le fléau numéro 1 dans la province
c'était l'alcool, qui croyait également qu'il ne fallait pas
augmenter le nombre de permis de liqueurs alcooliques parce que ça
augmentait le fléau numéro 1, qui croyait également que
l'Etat avait le devoir, non seulement d'enseigner la sobriété,
mais de prendre les dispositions pour que la loi soit respectée, que la
loi soit réaliste, qu'il n'y ait plus de violateurs de la Loi des
liqueurs alcooliques. Il y avait au moins un membre du parti libéral qui
croyait que les hommes publics devaient cesser, comme le député
de Richmond disait, d'inviter la population au mépris de la loi, des
lois civiles et morales.
Que s'est-il passé, M. le Président, après que le
parti libéral a été élu au mois de juin 1960?
Premièrement, il n'y a pas eu de changement dans la loi avant le 13
avril 1961. La population a cru que les libéraux se comporteraient
différemment de l'Union nationale en ce qui concernait l'application des
lois alcooliques du temps. Aucun changement du 22 juin 1960 au 13 avril 1961,
aucun changement dans le texte des lois mais des changements extraordinaires
dans l'application de ces lois. Des centaines de permis pour ne pas dire des
milliers de permis qui ont changé de main en un tour de main. Des
centaines de permis sinon des milliers de permis qui ont été
donnés à des amis politiques. Des libéraux ont reçu
comme récompense...
UNE VOIX: C'est faux.
M. GABIAS: ... de leur participation des permis de liqueurs alcooliques
au lendemain de l'élection du 22 juin 1960, des centaines. Et si je ne
dis pas vrai qu'on se rende à la suggestion du député de
Missisquoi et qu'on forme un comité parlementaire pour étudier ce
qui s'est passé sous le parti libéral depuis le 22 juin 1960
à aujourd'hui au sujet de la vente des permis de liqueurs alcooliques,
au sujet de transferts de permis de liqueurs alcooliques, au sujet de
récompenses données aux libéraux par des permis de
liqueurs alcooliques.
Qu'on n'essaie pas, M. le Président, de leurrer une fois de plus
la population de cette pro- vince. Les libéraux ont réussi
à leurrer la province avant le 22 juin 1960, mais depuis, la population
sait que les vrais amis dans cette province sont dans l'Union nationale et non
chez les libéraux qu'il y a en face de nous. La population sait que les
vrais abus ont été commis par les libéraux et non par
l'Union nationale au domaine de l'alcool. Un parti libéral...
M. LACROIX: Etes-vous sérieux quand vous dites ça? Vous
êtes sérieux là?
M. GABIAS: ... qui devait faire respecter la loi? Il n'est pas besoin
pour moi de faire le tour de la province, il n'est pas besoin pour moi d'aller
dans chacun des districts judiciaires de cette province.
UNE VOIX: Vous avez essayé, par exemple!
M. GABIAS: Il n'y a qu'à prendre le dossier écrasant, le
dossier pulvérisant du député de Beauce qui a
été déposé devant cette Assemblée pour
accuser le gouvernement actuel de grossière complicité dans la
violation des lois des liqueurs.
M. HAMEL (St-Maurice): M. le Président, je soulève un
point d'ordre. J'écoute avec beaucoup de patience les
élucubrations du député de St-Maurice...
M. GABIAS: Ah, de St-Maurice, c'est ça! UNE VOIX: C'est bien
ça! Très bien!
M. HAMEL (St-Maurice): ... du député de
Trois-Rivières.
M. GABIAS: Je n'aurais pas pu mieux dire!
M. HAMEL (St-Maurice): Je crois qu'il est antiparlementaire de dire que
le gouvernement est complice des violateurs de la loi. Je demande que le
député de Trois-Rivières retire ses paroles.
M. GABIAS: J'ai dit, M. le Président, que c'étaient les
libéraux. Je n'ai pas parlé du gouvernement...
M. HAMEL (St-Maurice): Voyons donc! M. GABIAS: J'ai dit: « les
libéraux».
M. LE PRESIDENT: Un instant. A l'ordre! Ce que le député
de Trois-Rivières a dit, juste avant l'intervention, c'était la
« complicité du
gouvernement ». Les termes textuels: « complicité du
gouvernement dans la violation de la loi des liqueurs ». Alors, c'est
pour ça que le procureur général a soulevé le point
d'ordre que l'on sait.
M. GABIAS: Je retire le mot gouvernement, M. le Président.
M. HAMEL (St-Maurice): Qu'est-ce qu'il retire?
M. GABIAS: Le mot « gouvernement » et je le remplace par
« les libéraux ».
M. CADIEUX: Ah!
M. GABIAS: « Les libéraux ».
M. BERTRAND (Missisquoi): Là, il a raison!
M. HAMEL (St-Maurice): Il n'a pas plus raison, mais c'est
peut-être moins antiparlementaire.
UNE VOIX: Il s'attire des bosses.
M. GABIAS: Les libéraux, avec ce dossier qu'a produit le
député de Beauce, démontrent à toute
évidence la complicité des libéraux dans la violation
grossière de la Loi de la Régie des alcools.
Mais il y a un point qui a peut-être passé inaperçu.
Je ne reviendrai pas sur les dossiers. Je voudrais attirer l'attention de cette
Chambre sur un point que je trouve extraordinairement important, sur un point
que nous allons découvrir dans ce dossier qui dénote bien
l'hypocrisie des libéraux, qui dénote bien qu'ils n'ont pas le
souci de l'observance de la Loi de la Régie des alcools.
Tout le monde se souvient qu'il y a eu des élections
générales déclenchées au mois de septembre 1962.
Ces élections générales ont eu lieu le 14 novembre 1962.
L'annonce en a été faite au mois de septembre 1962. Dans ce
dossier écrasant, trouvez une seule infraction qui ait été
reprochée à qui que ce soit dans les trois comtés du
district de Beauce entre l'annonce de la date des élections
générales et le 14 novembre 1962?
UNE VOIX: Ah!
M. GABIAS: Trouvez une seule infraction qui ait été
reprochée à quiconque dans les trois comtés qui font
partie du district de Beauce.
UNE VOIX: Il n'y en a pas!
M. GABIAS: Il y a deux façons pour les libéraux
d'administrer la Loi de la Régie des alcools. Il y a une façon en
dehors des élections et il y a une façon pendant les
élections générales. Cela, c'est ce que j'appelle de la
complicité.
M. HAMEL (St-Maurice): Je soulève un point d'ordre. Le
député de Trois-Rivières n'a tout de même pas le
droit d'induire la Chambre en erreur, sciemment ou inconsciemment.
M. GABIAS: Oui.
M. HAMEL (St-Maurice): Il dit qu'il n'y a pas eu d'infractions de
commises ou de déterminées si vous voulez, de
dénoncées à partir du temps des élections du mois
de septembre.
M. GABIAS: 1962!
M. HAMEL (St-Maurice): Sur le premier, j'ai ici...
M. GABIAS: Jusqu'au 14 novembre!
M. HAMEL (St-Maurice): Oui, oui. J'ai ici, D-l.
M. GABIAS: Oui.
M. HAMEL (St-Maurice): Infraction le 7 novembre 1962.
M. GABIAS: Oui.
M. HAMEL (St-Maurice): J'ai ici, D-2, le 23 septembre 1962,
première infraction.
UNE VOIX: Oui, oui.
M. HAMEL (St-Maurice): Le l3octobre 1962 une autre infraction...
DES VOIX: Ah!
M. HAMEL (St-Maurice): ... j'ai ici, 31 décembre 1961, 28
janvier 1962, mars 1962, avril, mai 1962, février, juin 1962, les
deux premiers qui me sont tombés sous la main, c'étaient des
infractions précisément durant la période
électorale.
M. GABIAS: Oui, mais! vous voyez comme le procureur
général n'écoute pas quand il se trouve accusé:
J'ai dit: trouvez une plainte qui
a été portée entre l'annonce des élections
générales et le 14 novembre 1962. Trouvez-en une? Trouvez-en une
M. le Président?
M. JOHNSON: Il n'y en a pas.
M. GABIAS: J'ai dit qu'il y a deux façons pour les
libéraux d'administrer la Loi de la Régie des alcools, celle en
dehors des élections, et celle après l'annonce des
élections générales. C'est de cela que j'accuse les
libéraux. Serait-ce un hasard? Ce hasard, nous le retrouverions dans
d'autres comtés judiciaires, dans d'autres districts judiciaires. Et que
l'on donne le comité réclamé par le député
de Missisquoi; il nous sera possible de démontrer que des agents de la
Police des liqueurs ou de la Sûreté, provinciale ont reçu
instruction de cesser de faire leur devoir, concernant l'application de la Loi
de la Régie des alcools, entre l'annonce des élections
générales et le 14 novembre 1962.
M. LE PRESIDENT: Un instant.
M. HAMEL (St-Maurice): Non seulement c'est antiparlementaire.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs. Je ne sais pas si le
député de Trois-Rivières réalise que ce n'est pas
en employant le mot « les libéraux » ou « le parti
libéral » qu'il peut rendre parlementaire ce qu'il déclare
actuellement; quand il parle de l'administration de la loi, du fait que des
plaintes ne sont ou ne sont pas portées, ou même que les
poursuites ne sont pas faites, ou que la police ne fait pas son devoir pendant
la période électorale, il faut nécessairement, à ce
moment-là, qu'il se réfère à quelqu'un qui a charge
de l'administration, et d'une façon plus spécifique, du procureur
général. S'il veut porter des accusations contre le procureur
général, je n'ai pas d'objections, mais qu'il le fasse suivant
les termes prévus par notre règlement, particulièrement
les articles 193 et suivants; et je tiens à souligner au
député de Trois-Rivières comme à tous les
députés que ce n'est pas en se servant d'un terme
générique lorsqu'on parle de questions d'administration, de
plaintes et de poursuites, qu'on fait d'une façon parlementaire ce que
le règlement défend directement.
M. GABIAS: M. le Président, je voudrais vous
référer à des décisions qui ont été
rendues par le Président de cette Chambre, alors que l'honorable Cliche
en était le président, à l'effet que l'on pouvait accuser
un parti de ce que l'on voulait, et que c'était parlementaire. Je vous
réfère à deux décisions qui ont été
rendues en 1961 par le Président du temps, concernant
précisément les accusations qui étaient portées par
le ministre actuel des Richesses naturelles, il accusait l'Union nationale de
toutes sortes de choses, et ce fut jugé parlementaire par le
Président du temps.
M. LE PRESIDENT: Voici, si le député de
Trois-Rivières voulait écouter...
M. GABIAS: Je pourrais citer au Président les
décisions.
M. LE PRESIDENT: ... exactement ce que je dis, ce que je voulais
expliciter, c'est qu'il ne s'agit pas en l'occurence d'accusations
générales qui peuvent s'appliquer à un parti, encore une
fois, quel qu'il soit. L'accusation que porte le député de
Trois-Rivières est une question strictement d'administration d'une loi
par un responsable qui nécessairement est le procureur
général; et ce n'est pas que je sache un parti politique, quel
qu'il soit, qui va porter des plaintes devant les tribunaux où verra
à ce que la loi soit suivie par la Sûreté provinciale ou
par les tribunaux. C'est ça que je tenais à faire remarquer au
député de Trois-Rivières, et je suis persuadé que
ce ne sont pas les décisions antérieures qu'il invoque qui
peuvent justifier sa façon actuelle de procéder, en portant des
accusations directement,... indirectement, excusez-moi, contre le procureur
général.
M. GABIAS: M. le Président, je continue en disant comment se
fait-Il que dès l'annonce d'élections générales, au
mois de septembre 1962, jusqu'au 14 novembre de la même année,
comment se fait-il que dans le dossier écrasant produit par le
député de Beauce en cette Chambre, aucune plainte n'ait
été portée? Est-ce le fruit du hasard? A quoi attribuer
cette trêve? Est-ce parce qu'à ce moment-là le procureur
général était plus libéral que procureur
général?
M. JOHNSON: Une bonne question.
M. GABIAS: A quoi attribuer cette trêve? Est-ce parce que tous les
mandatés du procureur général participaient à
l'organisation de la campagne électorale? Est-ce parce que les gens
n'étaient plus disponibles pour, être traduits devant les
tribunaux?
Nous sommes en droit de nous poser une série de questions sur
cette trêve quant à l'application de la Loi de la Régie des
alcools, celle qui avait été adoptée le 13 avril 1961.
Je ne sache pas que la Loi prévoie des trêves quant
à l'application de la Loi de la Régie des alcools. Je ne sache
pas que, dans la Loi telle qu'on l'a adoptée, à l'occasion
d'élections générales il n'y ait pas de plainte de
portée. Et pourtant le dossier que nous a produit le
député de Beauce nous indique que, durant toute cette
période, pas une seule plainte n'a été portée. La
population a le droit de savoir d'où provient cette trêve à
l'occasion précisément d'élections
générales.
Mais ça dénote bien le visage du parti libéral:
alors qu'il est dans l'Opposition, il s'attaque et s'acharne non seulement
à un parti, mais aux membres de ce parti; il s'attaque et s'acharne
à vouloir faire des complices de la violation de la loi tous ceux qui
appartenaient à l'Union nationale, tous ceux qui étaient dans le
gouvernement du temps, non seulement les membres de l'Assemblée
législative, mais tous les fonctionnaires, tous les membres de la
Sûreté provinciale, tous les avocats mandatés pour
représenter le gouvernement dans les causes des liqueurs, tous les
enquêteurs, tous les magistrats, tout le monde était complice,
tout le monde érigeait un système pour aller à l'encontre
des lois des liqueurs du temps. Cela, c'était les accusations du parti
libéral.
Aujourd'hui, alors que nous avons la preuve, dans un district
judiciaire, que la loi qui avait été en gestation pendant seize
ans dans le cerveau des libéraux, la loi qui devait corriger tous les
abus alors qu'elle est adoptée et qu'elle est en vigueur, nous avons la
preuve formelle qu'elle est plus violée plus que jamais et qu'elle est
violée avec le concours des libéraux, M. le Président.
M. CADIEUX: Formidable!
M. GABIAS: Le ministre de la Famille, après avoir attaqué,
comme on l'a vu tantôt, à chacune des sessions et même en
dehors de la session, l'Union nationale, le procureur général du
temps, aujourd'hui il chante un autre refrain. C'est à se demander ce
qui s'est passé chez cet homme. Cet homme, le porte-parole officiel du
parti libéral, chante un autre refrain depuis 1961 et son refrain, au
lieu d'accuser le gouvernement et le procureur général, accuse la
publicité.
Aujourd'hui c'est la publicité qui est responsable de
l'était actuel dans la province de Québec concernant
l'application des lois des liqueurs. L'ennemi numéro 1, ce n'est plus
l'alcool, c'est la publicité à l'entour de l'alcool L'ennemi
numéro 1, le fléau national, ce n'est plus l'alcool, c'est la
télévision, c'est la radio. Ce n'est plus l'alcool! Il a compris
que l'alcool n'était plus un fléau.
C'est la publicité qui est responsable, ce n'est plus l'affaire
du gouvernement, le gouvernement fait son possible, le gouvernement fait des
efforts inouïs, le procureur général est encensé par
le ministre de la Famille parce que le seul responsable de la violation des
lois des liqueurs alcooliques, c'est la publicité, et afin de se bien
poster, il réfère à des règlements qui ont
été adoptés le 29 avril 1964, concernant les
règlements sur la publicité relative aux boissons alcooliques,
règlements qui entrent en vigueur 45 jours après publication. Et
le ministre de la Famille dit à cette assemblée, gare, gare si je
ne donnerai pas ma démission si on ne corrige pas la publicité
à l'entour des liqueurs alcooliques. M. le Président, j'ai lu
avec beaucoup d'attention ces règlements. Je me demande encore quelle
situation va être changée quant à la publicité des
liqueurs alcooliques dans la province. Je me demande encore de quelle
façon l'alcool va cesser d'être l'ennemi numéro un dans
cette province. Je me demande encore, en relisant tous ces règlements,
comment par la simple réglementation de la publicité, les gens
vont respecter la loi, comment...
M. GOSSELIN; Le père Gédéon va-t-il être
encore là?
M. GABIAS: Comment le procureur général va appliquer la
loi, va être forcé d'appliquer la loi par ces
règlements-là? Comment la population va-t-elle cesser de violer
la loi des liqueurs alcooliques à cause de ces
règlements-là? Après avoir entendu le ministre de la
Famille, je me suis demandé, M. le Président, si on ne devait pas
lui attribuer le slogan d'une marque de bière connue dans la province,
les trois « D ». Vous connaissez très bien les trois «
D ». Je me demande pourquoi le ministre de la Famille ne se l'applique
pas à lui: donne donc démission. Qu'il applique à
lui-même ces trois « D » là: donne donc
démission. Et s'il est sincère, M. le Président,
M. LACROIX: Vous resteriez pas chef longtemps avec ce
slogan-là.
M. GABIAS: S'il est sincère, M. le Président, avec
lui-même, comment se fait-il...
M. LACROIX: Sous-chef.
M. GABIAS: ... qu'il ait tellement changé son refrain, depuis
1960? Et nous voyons, M. le Président...
M. HARVEY: Les trois « D » Daniel...
M. GABIAS: ... sa reculade fantastique, nous voyons sa volte-face
révoltante. Elle commence le 9 octobre 1961. L'Honorable Lafrance nous
dit ceci, à l'occasion d'un grand congrès, le ministre a fait
quelques remarques et a déploré ce qui se passe à Magog,
et dans les environs, c'est triste quand on voit les terrains de stationnement
de différents hôtels, se congestionner, etc...
Il réalise que la situation n'a pas changé, il est le
premier à convenir que les lois, et cela c'est le 9 octobre 1961,
après la passation de la nouvelle loi, de la régie des alcools il
constate que la loi n'est pas appliquée, que la loi est violée.
Il le déplore, mais il n'accuse personne. A ce moment-là il fait
un choix. Qui va-t-il accuser? Il n'est pas prêt à jeter
l'anathème à personne. Il constate que la loi est violée,
le 9 octobre 1961, n'accuse pas le gouvernement, n'accuse pas la loi des
liqueurs alcooliques. Il constate que la loi est violée. Le 16octobre
1961, le ministre va un peu plus loin, il déclare: la loi des liqueurs
est encore trop souvent violée.
C'est le ministre de la Famille qui déclare cela à
Sherbrooke; « La Loi de la Régie des alcools est encore trop
souvent violée dans la province de Québec. » Il n'accuse
encore personne, le 5 mai 1962.
Monsieur le ministre Lafrance, le 21 juin 1962, revise ses positions. Et
voici ce que nous lisons dans « Le Soleil » du 21 juin 1962:
« Monsieur Emilien Lafrance a déclaré hier soir à
l'Assemblée législative qu'il a revisé ses positions sur
la question de l'alcoolisme, mais que lorsqu'il dénonçait des
abus dans le passé, il agissait sur la foi de requêtes
reçues des autorités religieuses de la province. « Ce que
j'ai surtout dénoncé, a dit le ministre de la Famille et du
Bien-Être social, c'est la violation scandaleuse de la loi de l'alcool
sous l'ancien gouvernement. »
Le député de Beauce a amplement démontré la
violation ouverte de la Loi de la Régie des alcools. Le ministre n'a pas
dénoncé le gouvernement, le ministre a constaté,
après la passation de la nouvelle loi le 10 octobre 1961, que la loi
était trop souvent violée: il n'a pas accusé le
gouvernement. Le 9 octobre 1961, le ministre constatait que la loi était
violée: il n'a pas accusé le gouvernement. Le 19 décembre
1963, le ministre de la Famille est insatisfait du gouvernement dont il fait
partie, mais ne l'accuse pas, monsieur le Président. C'est une opinion
qu'il donne.
Il est insatisfait et il va plus loin. « Si le gouvernement ne
fait pas respecter la lettre de la loi, je m'engage à
démissionner. » Il disait cela le 19 décembre 1963.
Nous l'avons entendu aujourd'hui. Il n'a pas encore
dénoncé le gouvernement. Il n'a pas encore déclaré
que l'augmentation scandaleuse du nombre de permis depuis 1960 alourdissait le
fléau mortel de l'alcool dans la province. Le ministre n'a pas
déclaré que la loi était violée à la
grandeur de la province. Le ministre n'a pas déclaré qu'il
démissionnerait.
Il a trouvé une autre soupape; ça lui a permis de faire
une autre cabriole. C'est la publicité qui est responsable de
l'état actuel, et si les producteurs de boissons alcooliques, les
vendeurs de boissons alcooliques ne sont pas mis à la raison par
l'application du règlement qui a été adopté
concernant la publicité des liqueurs alcooliques eh bien, là, le
ministre va démissionner.
M. le président, la farce a assez duré: ça fait
quatre ans que le ministre déclare qu'il va démissionner si la
loi n'est pas respectée, ça fait quatre ans que la loi est
violée, ça fait quatre ans que le gouvernement est impuissant
à faire respecter la loi, et le ministre est encore dans le
gouvernement. Je dis que la farce a assez duré. Qu'il
démissionne, il n'a pas autre chose à faire. Et vous me
permettrez en terminant, monsieur le Président, on ne m'accusera pas
d'être violent pour le gouvernement, je cite...
M. CADIEUX: Quelle farce! Vous n'êtes pas parti avec le Rideau
vert pour Paris!
UNE VOIX: Le pire c'est qu'il se prend au sérieux!
M. GABIAS: Je cite un extrait d'une conférence prononcée
à Ste-Anne-de-la-Pocatière par une personne qu'on ne peut pas
accuser de « partisanerie » politique et cette personne accuse nos
législateurs de se faire les complices de l'alcoolisme au Québec.
« Monsieur Grand-maison accuse le gouvernement actuel de se faire le
complice de l'alcoolisme au Québec. »
M. HAMEL (St-Maurice): ... M. le Président, je soulève un
point d'ordre. On n'a pas le droit comme le député de
Trois-Rivières, de faire porter par d'autres des accusations qu'on n'a
pas le droit de porter soi-même, 285.
M. GABIAS: Je cite, M. le Président...
M. HAMEL (St-Maurice): On n'a pas le droit de discuter de cela.
M. GABIAS: ... un autre extrait de jeudi le 11 juin 1964, où la
fédération des cercles de fermières de
Lévis-Lotbinière, demande une
enquête sérieuse de la régie des alcools avant
l'émission d'un permis de vente. Ce n'est pas l'Opposition, M. le
Président, qui se plaint de la conduite ou de l'administration du parti
libéral, du gouvernement actuel, ce sont les associations qui, devant le
bluff monumental qui a été passé à la population en
1960, commence à réagir contre l'hypocrisie de ceux qui
administrent la loi actuelle des liqueurs alcooliques dans la province de
Québec. Les gens qui ont été trompés accusent et
accusent fortement de les avoir trompés, le parti libéral et
disent à ces gens non seulement vous n'êtes pas sérieux,
mais vous êtes les complices de la violation de la Loi des liqueurs
alcooliques.
M. HAMEL (St-Maurice): M. le Président, je n'ai pas l'intention
de prolonger longtemps. Il y a trois choses dans le cas du député
de Trois-Rivières dans le cours de son discours. Premièrement il
a prétendu qu'il n'y avait pas eu de plaintes durant la campagne
électorale, j'ai ici des jugements qui ont été rendus, par
exemple j'en vois un ici, le 26 octobre 1962...
DES VOIX: Ce n'est pas une plainte. M. JOHNSON: C'est un jugement.
M. HAMEL (St-Maurice): Bien, écoutez, je n'ai pas la date
où les plaintes ont été portées. J'ai la date des
infractions, la date des... Mais il y a eu un jugement le 26 octobre 1962.
Maintenant il y a une chose là-dessus. Il faut dire que dans le
comté de Beauce, qu'on n'essaie pas de noicir plus qu'il le faut
le comté de Beauce, à partir de septembre 1962, il y a
au-delà de 50% des gens qui avaient violé la loi et qui ont
arrêté de la violer non seulement durant la campagne
électorale, mais depuis ce temps-là. Il y a eu au-delà de
50%.
M. GOSSELIN: Ils se sont sanctifiés.
M. HAMEL (St-Maurice): Deuxièmement, le député de
Trois-Rivières a prétendu que l'honorable ministre de la Famille
et du Bien-Etre social avait amené une résolution pour demander
d'étudier le problème de l'alcoolisme et de la
sobriété. Mais, M. le Président, ce que le déput
é de Trois-Rivières a omis de dire, c'est qu'en 1961, le 24 mars
1961, quelques mois après l'arrivée au pouvoir du gouvernement
actuel, le ministre du Bien-Etre et de la Famille amenait, et cette Chambre a
voté, la Loi pour favoriser la lutte contre l'alcoolisme et
l'institution d'un comité en 1961. Comment le député de
Trois-Rivières peut-il reprocher au ministre du Bien-Etre social et de
la Famille de ne pas avoir été conséquent avec la
résolution qu'il a amenée en 1958, quand à peine quelques
mois après avoir été élu, il amène la loi
précisément pour faire suite à la résolution qu'il
avait amenée dans l'Opposition?
M. GABIAS: C'est ça la farce!
M. HAMEL (St-Maurice): Maintenant, M. le Président, le
député de Trois-Rivières s'est acharné à
dire qu'il y a un système d'établi. Non, il n'y en a pas de
système. Je ne dis pas qu'il n'y a pas de violateur de la Loi, je dis
qu'il n'y en a pas de système, il n'y a pas de système comme
celui qui existait sous l'Union nationale et qui était admis
officiellement par des députés de l'Union nationale, par des
ministres de l'Union nationale et qui disaient ceci: il s'agit, cher monsieur,
il s'agit en l'occurence d'un monsieur qui en est à sa première
offense et qui est tout nouveau dans l'hôtellerie, de mon consentement il
tombe sous le régime dit de tolérance. C'est écrit en
toutes lettres. Comment peut-on, M. le Président...
M. GABIAS: Trois personnes, un système.
M. HAMEL (St-Maurice): ... dire: on a un système ici. Il n'y
avait pas de système. Trois des députés écrivaient
aux fonctionnaires des lettres comme celle-là.
M. GABIAS: Trois personnes, un système. Soyez donc
sérieux!
M. HAMEL (St-Maurice): Etant donné que votre agent n'était
pas au courant de la chose et que M. Chouinard, lui-même, n'avait pas
été avisé des règlements...
M. GABIAS: Vous avez tout lu ça l'autre jour.
M. HAMEL (St-Maurice): ... de tolérance. Oui, je l'ai lu.
M. GABIAS: Vous n'avez pas le droit de le répéter, vous
n'avez pas le droit.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs.
M. GABIAS: C'est contraire au règlement, M. le Président.
C'est hors d'ordre. Il y a trois lettres qu'il nous a lues, le ministre. S'il
en a d'autres à lire, très bien..
M. HAMEL (St-Maurice): M. le Président...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre.
M. BINETTE: Vous avez répété et puis ils ont
laissé faire!
M. GABIAS: C'est hors d'ordre.
M. HAMEL (St-Maurice): Je la lirai aussi souvent, M. le
Président, qu'on prétendra de l'autre côté qu'il n'y
avait pas de système organisé sous leur régime. A chaque
fois qu'il y en aura un qui se lèvera pour dire: « Cela n'existe
pas la tolérance chez nous », je dirai « Ce n'est pas vrai
parce que j'ai la lettre ici qui est signée par un député,
le député de Frontenac.
M. LOUBIER: Une lettre?
M. HAMEL (St-Maurice): J'en ai assezd'une.
M. LOUBIER: Lisez en des lettres!
M. GABIAS: Bien voyons donc!
M. LOUBIER: Voyons donc! Une lettre établit un
système!
M. HAMEL (St-Maurice): En voulez vous d'autres?
M. LOUBIER: Oui, lisez en!
M. HAMEL (St-Maurice): Je vais en lire du député de
Témiscouata, je vais en lire du député de Yamaska, je vais
en lire du député de LIslet.
M. LOUBIER: Lisez les! Vous n'avez pas le droit de dire ça.
M. HAMEL (St-Maurice): Je ne sais pas s'il y en a encore là.
M. LOUBIER: Lisez les ces lettres!
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs.
M. LIZOTTE: M. le Président, est-ce que le procureur
général prétend que j'ai écrit des lettres qui vont
prouver qu'il y avait un système d'établi? J'ai écrit des
lettres comme lui-même le procureur général en
écrivait dans ce temps-là.
M. LOUBIER: Ce n'est pas un système établi. Une lettre
établit un système, c'est faux!
M. LE PRESIDENT: A l'ordre.
M. GABIAS: Est-ce que le procureur général me permet une
question?
M. HAMEL (St-Maurice): Pas à ce moment-ci. Je vais
compléter...
M. LOUBIER: Le procureur général se conduit comme un
farceur. Une lettre construit un système? c'est faux.
M. GABIAS: M. le Président, le ministre...
M. HAMEL (St-Maurice): J'en ai une ici, c'est la vieille. «
j'aurais voulu à venir vous rencontrer afin de vous exposer un petit
problème mais j'ai pensé vous écrire. Au cours de la
dernière élection M. Léon Morrissette de
St-François-du-Lac appartenant à l'organisation libérale
du comté de Yamaska a manifesté l'intention de se
présenter comme candidat libéral. « N'ayant pas
été choisi lors de la convention, on a essayé de
l'amadouer en lui donnant la position de secrétaire trésorier du
parti dans le comté. M. Morrissette n'étant pas de bonne humeur
leur a causé beaucoup d'intrigue en faisant livrer les secrets du parti
adversaire... »
M. GABIAS: C'est le député d'Arthabaska ça?
M. HAMEL (St-Maurice): Et là il continue. « Un beau jour il
est venu me dire que l'organisation libérale recevrait dans le cours de
la journée une cargaison de boisson en mentionnant l'endroit et la
disposition de la maison où serait placé ce whisky. « J'ai
envoyé mes officiers de la Commission des liqueurs. Ils ont saisi 60
gallons de whisky de contrebande chez un M. Nadeau mais pour ne pas faire
douter écoutez bien l'astuce de la sincérité
de M. Morrissette j'ai dit aux officiers d'aller faire une perquisition chez M.
Morrissette aussi. Vous voyez le système. J'ai dit aux officiers d'aller
faire une perquisition chez lui aussi, M. Morrissette. On a saisi chez lui un
40 onces. La cause est inscrite en cour et c'est Paul-Emile Guertin qui est
l'avocat de la Commission des liqueurs. »
M. GABIAS: Qu'est-ce qu'il y a de mal là-dedans?
M. HAMEL (St-Maurice): Ecoutez! M. GABIAS: Bien oui,
j'écoute.
M. CADIEUX: Attend un peu!
M. HAMEL (St-Maurice): C'est bon! « Vu que nous allons être
appelés à souscrire dans la cause de Morrissette...
M. GABIAS: Oui, continuez!
M. HAMEL (St-Maurice): ... j'apprécierais beaucoup, si la chose
est possible que la plainte contre Morrissette soit changée.
M. LOUBIER: Si possible.
M. HAMEL (St-Maurice): Si possible etafin d'adoucir la peine et que
écoutez bien elle contre M. Nadeau soit laissée
à plein rendement.
M. GOSSELIN: Pendant ce temps-là les rouges avaien 40 gallons de
whisky.
M. LOUBIER: Il y avait combien de gallons de whisky « 40?
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs. M. HAMEL (St-Maurice): J'en ai
d'autres. M. LOUBIER: Combien de gallons?
M. HAMEL (St-Maurice): Ce n'est pas fini, c'est le commencement.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs. UNE VOIX: 40 ballons.
M. HAMEL (St-Maurice): Le chef de l'Opposition...
M. GOSSELIN: 40 gallons!
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs.
M. HAMEL (St-Maurice): Si le chef de l'Opposition soulève une
question de règlement...
M. JOHNSON: Je voudrais demander une question, M. le
Président...
M. GOSSELIN: C'est le whisky qui était chez les rouges, 40
gallons.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs.
M. JOHNSON: M. le Président, je voudrais vous demander si le
procureur général a le droit de démontrer ainsi
publiquement que les libé- raux faisaient leurs élections avec la
boisson.
M. HAMEL (St-Maurice): Non. J'en ai une autre. Ecoutez bien!
M. HARVEY: Qui a signé la première?
M. HAMEL (St-Maurice): « La présente est pour vous
recommander la suspension de l'amende imposée à M. Joseph
Bégin, hôtelier à Ste-Germaine du Lac-Etchemin.
Signé: J.-D. Bégin. »
M. LOUBIER: Puis, ça prouve quoi, ça? C'est quoi
ça? Qu'est-ce que ça veut dire?
M. JOHNSON: Vous savez ce qui est arrivé?
M. HAMEL (St-Maurice): En voulez-vous d'autres?
M. LOUBIER: Voyons donc! Le procureur général est plus
intelligent que ça.
M. JOHNSON: Non, mais qu'est-ce qui est arrivé
là-dedans?
M. HAMEL (St-Maurice): Aimez-vous ça? UNE VOIX: Oui,
amenez-nous-en! M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs. M. LOUBIER: Prouvez-nous
le système.
M. GABIAS: Il n'y a absolument rien d'un système là-dedans
et il n'y a rien de repréhensible là-dedans et le ministre le
sait.
M. CADIEUX: Ah! Rien de repréhensible! Honte!
DES VOIX: Ah!
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs.
M. LOUBIER: Il en a deux, le ministre. Une autre?
M. GABIAS: Et le ministre le sait.
M. HAMEL (St-Maurice): Ecoutezbien.
M. LOUBIER: Bien oui.
M. CADIEUX: Le député de Trois-Rivières dit qu'il
n'y a rien de repréhensible.
M. HAMEL (St-Maurice): Je ne sais pas si je dois dire le nom.
UNE VOIX: Oui, envoyez.
M. HAMEL (St-Maurice): « M. Napoléon Mercier, que vous
connaissez bien, vous rencontre cet après-midi en compagnie de M.
Cloutier dans mon comté. Il est sans doute inutile de vous dire que M.
Cloutier est un de mes amis les plus dévoués ainsi que tous les
membres de sa famille. Je vous saurais gré d'écouter avec
beaucoup de bienveillance les représentations que vous feront nos deux
amis et de vous rendre à leur demande dans toute la mesure du possible.
»
M. LOUBIER: C'est ça.
M. GABIAS: Qu'est-ce qu'il y a de mal là-dans?
M. HAMEL (St-Maurice): ... et c'est signé en bas: un
député de l'Union nationale. J'admets...
M. GABIAS: Où est le système?
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs.
M. HAMEL (St-Maurice): ...que ces lettres-là sont moins
significatives que la première que j'ai lue.
M. LOUBIER: Bien oui, puis? Ce n'est pas un système, une lettre.
Voyons donc!
M. HAMEL (St-Maurice): Bien oui, mais j'en ai lu une. J'en ai lu une
autre à un moment donné où on disait: « Ne
transportez pas la boisson chez les libéraux. Transportez la boisson
chez les gars de l'Union nationale. » J'ai lu ça il y a quelque
temps.
M. LOUBIER: Non, non. M. GABIAS: Bien sortez-la.
M. HAMEL (St-Maurice): Bien je vais la relire d'abord, M. le
Président, si on ne s'en souvient pas.
M. HARVEY: Relisez-la tranquillement, pas vite.
M. GOSSELIN: Sortez-la. C'est les libéraux qui avaient ça
le whisky.
M. JOHNSON: Enfin on l'a, la preuve que les libéraux font les
élections avec de la boisson.
M. GOSSELIN: Cela et les faux certificats, ça va bien
ensemble.
M. LOUBIER: Est-ce que le ministre me permettrait une question?
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs.
M. HAMEL (St-Maurice): « Dans le courant de janvier dernier, vers
le 10, c'est adressé à l'honorable Antoine Rivard
la Police des liqueurs, à la suite d'une saisie effectuée
à St-François-d'Assise, a remis la bière saisie à
l'hôtel Restigouche de M. Dubé, Matapédia...
M. GABIAS: Vous l'avez lue, l'autre jour.
M. HAMEL (St-Maurice): Bien oui, mais le chef de l'Opposition ne s'en
souvient pas. Il m'a demandé de la relire.
M. BERTRAND (Missisquoi): Cela ne règle rien.
M. HAMEL (St-Maurice): Cela ne règle rien. Qu'est-ce que
règle le discours du député de Trois-Rivières?
M. BERTRAND (Missisquoi): Cela ne règle rien.
M. JOHNSON: M. le Président, j'invoque le règlement...
M. GABIAS: Qu'est-ce que ça prouve? Cela prouve que vous
êtes des hypocrites.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs.
M. JOHNSON: ... qui prévoit, évidemment, et il est clair
qu'on n'a pas le droit de se répéter. C'est un document qui a
déjà été lu en cette Chambre...
M. HAMEL (St-Maurice): Cela fait dix fois que vous dites les mêmes
choses, vous autres.
M. JOHNSON: Non, non, des nouvelles. Et puis on en apprend des nouvelles
surtout.
M. HAMEL (St-Maurice): C'est bon, ça.
M. JOHNSON: On apprend que les libéraux faisaient leurs
élections avec de la boisson. On
a eu un aveu enfin, M. le Président. Ce n'est pas
là...
M. GOSSELIN: L'aveu du procureur général.
M. JOHNSON: ... le point. Cela ne règle rien d'abord. Le ministre
a déjà lu ce document...
M. GOSSELIN: Il est pire que Jacob Nicol.
M. JOHNSON: S'il en a de nouveaux, il a le droit de les lire. Nous
savions qu'il prendrait cette tactique, mais ça ne règle rien.
Qu'est-ce qui se passe en 1964 et qu'est-ce qu'on va faire?
M. BERTRAND (Missisquoi): C'est ça.
M. HAMEL (St-Maurice): M. le Président tant et aussi longtemps
que les gens de l'autre côté de la Chambre prétendront
qu'ils n'avaient pas établi un système et créé un
climat, je démontrerai par tout ça qu'ils avaient
créé un climat et un système qui nous causent aujourd'hui
des difficultés. Mais je m'arrête, M. le Président.
M. JOHNSON: Est-ce que le ministre me permet une question? Cela va
simplifier les affaires. Est-ce que le ministre a apporté aussi des
lettres des députés libéraux, de son équipe
aujourd'hui?
UNE VOIX: Il n'y en a pas!
M. HAMEL (St-Maurice): Je vais dire franchement au député
de Bagot que je ne me souviens pas d'avoir jamais vu une seule lettre d'un
député...
M. LACROIX: On n'intervient pas, nous autres!
M. HAMEL (St-Maurice): ... libéral intervenant dans un cas comme
celui-là.
M. GOSSELIN: Le procureur général demandait de
téléphoner.
M. JOHNSON: M. le Président, est-ce que le...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs!
M. JOHNSON: ... procureur général se souvient de coups de
téléphone ou d'entrevues?
M. HAMEL (St-Maurice): Pas de téléphone! M. JOHNSON:
Non?
M. HAMEL (St-Maurice): Je ne me souviens pas des
téléphones. C'est possible.
DES VOIX: Ah, ah!
M. HAMEL (St-Maurice): Mais, je dois dire ceci, comme je l'ai dit
à un moment donné qu'un député de l'Union nationale
aussi bien qu'un député libéral vienne me voir pour
discuter de problèmes de quelqu'un, par exemple, qui est
incarcéré, et je discute de problèmes avec n'importe
lequel des députés. Mais ce n'est pas parce que c'est un
député libéral qu'il serait exclu de la discussion.
M. BERTRAND (Missisquoi): Pas du tout!
M. HAMEL (St-Maurice): Alors, il y a le troisième point que le
député de Trois-Rivières a souligné, M. le
Président. Je ne veux pas m'y arrêter plus longtemps. Il a
prétendu que le ministre du Bien-Etre social et de la Famille
prêchait contre l'alcoolisme et qu'il trouvait que cela ne se corrigeait
pas assez vite. Il a raison. Seulement, il ne mérite pas d'être
blâmé pour ça. Cela fait deux mille ans que nos
curés, nos missionnaires prêchent contre le péché.
Et quand on se regarde chacun d'entre nous...
M. BERTRAND (Missisquoi): On pêche encore!
M. HAMEL (St-Maurice): On peut se dire, comme disait St-Paul «
Dimeo meliora proboque détériora »... qu'est-ce que vous
voulez?
M. BERTRAND (Missisquoi): Au nom du Père et du Fils et du
St-Esprit, Ainsi-soit-il. Avec la grâce que je vous souhaite!
M. HAMEL (St-Maurice): Mais bien loin de blâmer le ministre de la
Famille...
M. GABIAS: Il se cache en arrière des soutanes!
M. HAMEL (St-Maurice): ... je le félicite de son courage.
UNE VOIX: En arrière d'un bouton de Lacordaire!
M. JOHNSON: Celui de rester dans le Cabinet!
M. HAMEL (St-Maurice): Non! Celui de prêcher suivant ses
convictions.
M. LE PRESIDENT: Article 5.
M. GABIAS: Est-ce que le ministre me permet une question?
M. LALONDE: Il a parlé pendant une heure!
M. HARVEY: Vous n'avez pas le droit de parler.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, à l'ordre!
M. GABIAS: M. le Président, j'avais une question à poser
au procureur général. Il semble dire à cette Chambre que
lorsqu'un fait s'est produit une fois, qui est contraire à la loi,
contraire aux habitudes normales, cela devient un système. Alors, je
pourrais dire, M. le Président, qu'il y a un système
d'établi chez les Libéraux obligeant...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, à l'ordre! Le député de
Trois-Rivières sait fort bien qu'il n'est pas en voie de poser une
question mais plutôt de faire une affirmation de fait. Il s'est
levé en demandant la permission de poser une question au procureur
général. Son temps était épuisé mais je
crois que je pouvais lui permettre de poser une question mais non pas de faire
une affirmation de fait.
M. GABIAS: Cela va être très court, M. le
Président.
M. LALONDE: Vous n'avez pas le droit!
M. LE PRESIDENT: Est-ce une question que vous...
M. GABIAS: Bien si je démontrais c'est une question.
Est-ce que le procureur général...
UNE VOIX: Ah non!
M. GABIAS: ... dirait qu'il s'agit d'un système si je lui disais
qu'on a payé pour un permis la somme de $25,000 sous les
Libéraux?
M. LE PRESIDENT: A l'ordre.
M. HAMEL (St-Maurice): Là-dessus, je dirai ceci. Il est
arrivé qu'il a été porté...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, à l'ordre!
Il est évident que le député de
Trois-Rivières qui connaît certainement le règlement et la
façon de procéder est en train d'ouvrir tout un autre
débat, toujours évidemment, sur la question non pas des
poursuites au criminel mais de la Loi en général, de la
Régie des alcools. Il me semble que je me suis assez efforcé
depuis tout le début, d'être impartial, de permettre à tous
et chacun de parler aussi longtemps que le règlement le permet. Le
député de Trois-Rivières sait parfaitement qu'il a
épuisé son droit de parole au complet alors je ne puis pas
permettre qu'il ouvre un autre débat.
M. GABIAS: Il me restait cinq minutes, M. le Président,
d'après mes calculs. J'avais prévu ça. Voici, cela va
intéresser sûrement le procureur général. Le 2 mai
1962, chèque numéro C-44440, fait payable à Montreal Trust
Company au montant de $25,000, signé Richelieu Raceway, remis à
Roger Létourneau, et endossé par Roger Létourneau.
Ça va intéresser le ministre tout cela.
M. HAMEL (St-Maurice): M. le Président, je dois dire ceci: il y a
des cas qui nous ont été soumis de gens qui avaient
exploité ou qu'on prétend qui ont exploité des
détenteurs de permis, ou des applicants, et tous les cas qui nous ont
été démontrés ont été
poursuivis...
M. ALLARD: Le grand argentier du parti libéral.
M. HAMEL (St-Maurice): ... devant les tribunaux.
M. ALLARD: Roger Létourneau aussi?
M. HAMEL (St-Maurice): ... et il yen a encore actuellement. Je ne sais
pas de quoi il s'agit...
M. ALLARD: Roger Létourneau, avocat de Québec,
trésorier du parti libéral.
M. HAMEL (St-Maurice): Je ne sais pas de quoi il s'agit M. le
Président. Et chose certaine c'est que tous ceux qui se sont plaints
d'avoir été exploités, je dois dire ceci d'abord, qu'il
n'y a personne qui a affaire à la Régie, qui doit payer quoi que
ce soit à qui que ce soit, pour l'obtention de son permis.
M. ALLARD: C'est faux.
M. HAMEL (St-Maurice): Je le sais, et il y en a qui ont
été exploités, nous les avons poursuivis.
M. ALLARD: Pas remboursés, par exemple.
M. HAMEL (St-Maurice): Et actuellement il y en a un à
Montréal qui est poursuivi je pense pour un $20,000...
M. LOUBIER: Qui?
M.. HAMEL (St-Maurice): ... pour extorsion.
M. GABIAS: Bourbonniêre?
M. HAMEL (St-Maurice): Oui, Bourbonnière.
M. GABIAS: Je vais vous en donner un autre, il a remis $500 à M.
Harvey.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre.
M. HAMEL (St-Maurice): Que le député de
Trois-Rivières me donne des preuves et demain on les envoie devant les
tribunaux.
M. GABIAS: Oui, ce n'est pas mon ouvrage, c'est celui du procureur
général.
M. HAMEL (St-Maurice): Je ne poursuivrai pas d'après les
commérages du député de Trois-Rivières.
M. JOHNSON: M. le Président, si on établissait,.. le
procureur général offre au député de
Trois-Rivières de poursuivre quand on lui ferait part de certaines
irrégularités; si on lui fait part que M. Roger Létourneau
a exigé $25,000...
M. HAMEL (St-Maurice): Cela, ça n'est pas prouvé.
M. JOHNSON: Non, non, mais si on lui fait part... si on lui fait part
que le trésorier du parti libéral a exigé certains
paiements avant que le permis ne parte de la Commission des liqueurs, que va
faire le procureur général?
M. HAMEL (St-Maurice): M. le Président, chaque cause est
étudiée. Celle-là le sera quand même, comme les
autres.
M. GABIAS: Je donne des indices assez précises M. le
Président: chèque 2 mal 1962, numéro C4440, payable
à Montreal Trust Company, montant $25,000 signé par Richelieu
Raceway, remis à Roger Létourneau, et endossé par Roger
Létourneau. Est-ce que c'est suffisant ça?
M. CREPEAU: 6 mois après l'obtention du permis.
M. GABIAS: J'en ai un autre M. le Président. J'ai dit que
c'était pour un permis des liqueurs alcooliques, je le redis,
M. LE PRESIDENT: A l'ordre.
M. HAMEL (St-Maurice): Cela, c'est ce que dit le député de
Trois-Rivières.
M. GABIAS: Ce n'est pas à moi à faire l'enquête,
j'en donne un autre au procureur général...
M. CREPEAU: Jean-Louis Lévesque.
M. GABIAS: ... le 2 octobre 1962, tiré sur la Banque Canadienne
nationale, payé à l'ordre de Jean Bourbonniêre, $500,
payé par C.-E. Harvey Limitée, re: permis, est-ce assez
ça?
DES VOIX: Ah!
M. GABIAS: Est-ce un système M. le Président? On va
pouvoir accuser les libéraux d'avoir un système de vendre les
permis.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre.
M. HAMEL (St-Maurice): Il est devant...
M. GABIAS: C'est ça qui est un système.
M. CREPEAU: Vous avez le mauvais système.
M. LE PRESIDENT: Il me semble que le député de
Trois-Rivières, pendant son heure, a eu tout le temps voulu pour dire du
moins ce qu'il considérait être le plus important, qu'il croyait
être le plus important dans son discours. Je l'ai laissé se lever
tout à l'heure pour poser une question. Je savais pertinemment que,
disons que j'avais l'intuition que ce n'était pas une question. On en a
la preuve.
M. GABIAS: C'est l'enthousiasme M. le Président.
M. LE PRESIDENT: Je demande au député de
Trois-Rivières, attendu qu'il a plus qu'épuisé son droit
de parole, d'attendre l'occasion qu'il choisira pour faire ces
affirmations.
M. GABIAS: Je vais me reprendre demain.
M. LOUBIER: M. le Président, le député de Beauce,
au cours de son exposé, a présenté devant la Chambre des
faits, comme les quali-
fiait un journal, des plus inquiétants. Il y a un aspect que le
procureur général n'a pas voulu toucher, et c'est l'aspect du
tripotage de la justice qu'on retrouve dans plusieurs dossiers qui ont
été soumis par le député de Beauce, qui a
été prouvé par le député de Beauce. Ce
tripotage de la justice s'est fait contrairement à toutes les normes
d'une bonne administration de la justice.
Nous avons dans la Beauce, ce qui est extraordinaire, dans les dossiers
qui ont été cités par le député de Beauce,
nous avons le procureur de la Couronne, Me Vézina, qui à un
moment donné, étant procureur de la Couronne, se fait le
défenseur de l'accusé par la Commission des liqueurs.
M. LE PRESIDENT: Un instant, s'il vous plaît. Si le
député de Bellechasse me le permet, non pas pour l'interrompre,
mais pour essayer de mettre un peu d'ordre dans le débat. Tout à
l'heure, je crois que le député de Bellechasse n'était pas
ici, mais tout ce point-là a été discuté...
M. LOUBIER: J'étais ici, M. le Président
M. LE PRESIDENT: ... le procureur général lui-même
en a parlé, le député de Missisquoi en a parlé
assez longuement. Il me semble encore une fois, ce n'est pas pour interrompre
le député de Bellechasse, mais je ne vois pas l'utilité de
revenir indéfiniment sur des points bien précis qui ont
été discutés, et où les explications ont
été fournies de part et d'autre.
M. LOUBIER: Bien, j'ai bien l'impression, M. le Président, que
vous ne m'empêcherez pas d'exprimer des opinions sur des faits qui ont
été présentés à cette Chambre. D'ailleurs
c'est sous un aspect tout à fait différent, ce que j'ai
exposé jusqu'ici, ce sont des préliminaires, et j'arriverai
à des suggestions tout à l'heure. Je voulais tout simplement
signaler à l'attention du procureur général que dans des
dossiers produits par le député de Beauce, le procureur de la
Couronne agit à un certain moment. Celui qui représente la Reine,
agit comme le défenseur de l'accusé contre la Reine, ce qui est
absolument indécent et contraire à toutes les règles de
l'éthique professionnelle. Deuxièmement...
M. HAMEL (St-Maurice): Le député de Bellechasse me
permet-il une question?
M. LOUBIER: Pas tout de suite, M. le Président. Tout à
l'heure M. le Procureur général ça me fera plaisir.
Deuxièmement, nous avons le cas d'un autre avocat qui règle un
dossier signalé par le député de Beauce, avocat qui a
l'avantage et le privilège d'être président de la
Fédération libérale du comté de Beauce et qui,
malgré une troisième ou quatrième infraction, obtient la
plainte comme étant une deuxième infraction, et qui en plus, en
surplus d'être un avocat président de la Fédération
libérale, est un juge municipal de la Beauce nommé par le
gouvernement actuel et, à ce moment-là on viole toutes les
règles qui ont été établies par le gouvernement
actuel et je me demande pourquoi, M. le Président, sinon parce que
l'avocat qui a représenté l'accusé était
président de la Fédération libérale du comté
de Beauce.
Troisième cas, M. le Président. Est-ce qu'il est normal,
à votre sens, qu'un juge dans le district de Beauce qui a à juger
une violation, une infraction contre la Loi des alcools, agisse comme
témoin à un moment donné, et signe comme témoin
pour affirmer que l'infraction qui est imputée à un accusé
est la première infraction, alors qu'il s'agit de la troisième
infraction. Encore là, M. le Président, c'est un personnage qui a
été posté là par le gouvernement actuel, le
procureur de la Couronne qui agit comme assistant est un procureur de la
Couronne qui a été installé là depuis quelques
années, depuis le gouvernement actuel, et je veux tout simplement
démontrer à cette Chambre que, dans le district de la Beauce, il
y a eu une enquête sérieuse. Sil y avait eu dans d'autres
districts judiciaires, comme dans le district judiciaire de Bellechasse et
Montmagny, district judiciaire de Rimouski, district judiciaire de Sherbrooke,
tous les autres districts judiciaires, s'il y avait eu des enquêtes
approfondies comme l'a fait le député de Beauce, nous aurions
probablement découvert les mêmes anomalies, et les mêmes
violations de la Loi qui ont eu lieu dans la Beauce. Et nous nous servons de ce
cas précis où une étude sérieuse, et je
félicite le député de Beauce de l'avoir fait avec beaucoup
de courage, avec beaucoup de persuasion, d'avoir fait cette étude dans
la Beauce, pour démontrer à la face de la province que la Loi des
alcools est violée de façon flagrante dans la province de
Québec.
M. le Président, je suggérerais au procureur
général, premièrement, qu'à l'avenir des
instructions sévères soient données afin que les
procureurs de la Couronne, à quelque palier qu'ils agissent, qu'ils
agissent commepro-cureurs de la Couronne pour les causes criminelles ou pour
les causes des liqueurs, procureurs de la Couronne qui représentent la
Reine, qui représentent le droit suprême et
souverain dans la province de Québec, n'aient pas le droit
d'agir, à un moment donné, et pour la Reine et pour
l'accusé et qu'un tripotage de la justice se fasse à ce
moment-là.
Deuxièmement, je suggérerais au procureur
général qu'il n'y ait pas de juges de district, dans la province
de Québec, qui agissent actuellement de concert avec les procureurs de
la Couronne pour que les causes soient réglées dans les bureaux
des juges, parce que, à ce moment-là, nous assistons, une autre
fois, à un triste exemple du tripotage de justice qui,
évidemment, chez le peuple, ternit la réputation de la
magistrature et des avocats.
M. le Président, ce sont deux suggestions que je soumets
humblement au procureur général afin que les fins de justice
soient mieux servies et qu'on reprenne, de plus en plus, dans le peuple
confiance en la magistrature, confiance en ceux qui représentent les
droits de la communauté et qu'on n'assiste pas au spectacle
indécent qu'on a eu dans la Beauce: que le procureur de la Couronne, le
procureur de la Reine, celui qui représente les intérêts de
la communauté soit en même temps celui qui représente les
droits de la communauté et que le juge de district ne soit pas en
même temps de connivence, de façon officielle, tel qu'il a
été démontré dans les dossiers
représentés par le député de Beauce...
M. HAMEL (St-Maurice): Le député de Bellechasse ne peut
pas dire ça.
M. LOUBIER: ... ne soit pas de connivence avec les procureurs de la
Couronne.
M. HAMEL (St-Maurice): Je soulève une question de
règlement. J'ai des responsabilités vis-à-vis la
magistrature. Le député de Bellechasse n'a pas le droit de dire
que les magistrats de district sont de connivence avec les avocats de la
Couronne; il n'a pas le droit de dire ça. Cela est
antiparlementaire.
M. LOUBIER: L'ancien procureur général l'a dit avant moi,
M. le Président.
M. HAMEL (St-Maurice): Un instant.
M. LOUBIER: L'ancien procureur l'a dit avant moi, M. le
Président, le député de Westmount l'a dit avant moi...
M. HAMEL (St-Maurice): Si cela était dit en dehors de cette
Chambre, cela constituerait un mépris de Cour.
M. LOUBIER: D'Outremont. Le député d'Outremont l'a dit
avant moi dans cette Chambre, dans les mêmes termes, alors qu'il
était procureur général et le présent procureur
général devrait s'en souvenir, il a absolument
répété et pris les mêmes termes que j'ai pris ce
soir, l'an passé, et le procureur général dans le temps ne
s'est pas levé en Chambre, n'a pas fait d'intervention, n'a pas
soulevé une question de règlement.
M. le Président, le député de Beauce a
démontré de façon claire et précise que les
procureurs de la Couronne, dans certains cas, avaient agi avec toute
l'indécence voulue pour ternir la réputation de la magistrature
et des avocats dans la province de Québec, et qu'il avait voulu
représenter, par mesquinerie, les intérêts et de la Reine
et de l'accusé.
C'est ça que nous condamnons, M. le Président, et je
demanderais, sur un ton plus serein, au procureur général
qu'à l'avenir il donne des instructions pour que les procureurs de la
Couronne, procureurs de la Couronne tant au point de vue criminel qu'au point
de vue de Régie des alcools, ne soient pas admis, ne soient pas
habilités pour, en même temps, représenter les
intérêts de la Reine et les intérêts des
accusés.
Il me semble que c'est une suggestion bien constructive que je fais
là et que c'est dans l'intérêt de la justice, pour une
bonne administration, et pour la bonne renommée de la magistrature et
des avocats dans la province de Québec.
M. HAMEL (St-Maurice): M. le Président, je dois dire que c'est en
partie l'établissement d'avocats de la Couronne qui règle en fait
ce problème-là, là où il existe...
M. LOUBIER: Non, non, à Québec et à
Montréal, pas dans les autres districts.
M. HAMEL (St-Maurice): Je dis les avocats permanents de la Couronne
là où ils existent.
M. LOUBIER: Bien oui.
M. HAMEL (St-Maurice): Le problème ne se pose pas. Maintenant
voici la situation telle quelle. Dans les districts, nous faisons un peu de
partage dans la mesure du possible: les causes de la Régie des alcools,
les causes de la route, les causes de la Couronne.
M. JOHNSON: Partage entre qui? Entre avocats libéraux?
M. HAMEL (St-Maurice): Je l'espère.
M. BERTRAND (Missisquoi): C'est réglé, vous n'avez plus
besoin d'espérer, ç'a été réglé.
M. HAMEL (St-Maurice): Je l'espère. Alors, mon opinion n'est pas
définitive.
UNE VOIX: Sont-Ils d'accord entre eux?
M. HAMEL (St-Maurice): Est-ce qu'on doit interdire aux avocats qui sont
chargés de l'application de la Loi de la Régie des alcools de
comparaître dans d'autres causes? C'est un problème qui est
posé et sur lequel nous allons travailler et essayer de trouver une
solution qui sera la meilleure dans l'intérêt public.
M. LOUBIER: Monsieur le Président, est-ce que le procureur
général me permettrait certaines remarques? Est-ce que,
d'après lui, dans son opinion, il a pratiqué le droit
durant de nombreuses années...?
M. GABIAS: Pas tellement.
M. LOUBIER: Est-ce que, dans son opinion il est normal qu'un avocat
investi de tous les privilèges d'un avocat de la Couronne,
défenseur des droits de la communauté, à un moment
donné, intervienne, surtout quand l'on songe que cet avocat a
été nommé dans tous les districts judiciaires, sauf
Québec et Montréal, par un gouvernement au pouvoir, est-ce qu'il
est normal que cet avocat qui a à faire respecter de façon
intégrale les droits, de façon absolue, de la Reine ou de la
communauté dans la province de Québec, est-ce qu'il est normal
que cet avocat à un moment donné, se fasse en même temps le
défenseur et le procureur d'un accusé contre la Reine, même
si ce n'est pas exactement son département, quand on songe aux relations
très intimes et très directes qui existent entre
l'assistant-procureur dans nos districts ruraux, assistant-procureur pour les
causes criminelles et assistant-procureur pour les causes des boissons
alcooliques, est-ce que le procureur général va pouvoir nous
dire, ce soir, dans cette Chambre, qu'il est normal qu'un procureur de la
Couronne, à quelque titre qu'il agisse, puisse défendre en
même temps les intérêts de la Reine et les
intérêts de l'accusé? Voilà la question que je lui
pose.
M. LE PRESIDENT: Article 5 adopté? Adopté.
M. LOUBIER: C'est absolument indécent. M. JOHNSON: Monsieur le
Président, est-ce que le jugement a été rendu dans la
cause où un personnage de Montréal a été
accusé d'avoir extorqué de l'argent pour obtenir ou faire obtenir
des permis de liqueurs?
M. HAMEL (St-Maurice): La réponse est non.
M. JOHNSON: Est-ce que le jugement a été rendu en
dernière instance dans la cause d'un autre personnage de
Montréal, secrétaire d'un député libéral,
qui a été accusé d'avoir pris ou exigé $1,000 pour
l'obtention d'un permis d'épicerie? Le secrétaire du
député de Bourget.
M. HAMEL (St-Maurice) Je ne suis pas au courant.
M. JOHNSON: On me dit que c'est allé en Cour Suprême.
M. HAMEL (St-Maurice): Pardon?
M. JOHNSON: C'est allé jusqu'en Cour Suprême.
M. HAMEL (St-Maurice): Je ne suis pas au courant.
M. JOHNSON: L'année dernière à pareille date la
cause était en instance devant la Cour Suprême.
M. CREPEAU: Ce n'est pas le secrétaire du député de
Bourget.
M. HAMEL (St-Maurice): Mon sous-ministre ne s'en souvient pas.
M.JOHNSON: Le ministre pourra me donner une réponse à la
prochaine séance?
M. HAMEL (St-Maurice): Oui.
M. JOHNSON: M. le Président, je voulais demander au ministre, il
est bien tard évidemment pour entrer dans ce sujet, je voulais parler
des faux certificats, nous pourrons remettre ça à demain, je vais
me contenter de questions plus courtes sur Jean Bienvenue, dont le ministre m'a
dit qu'il était responsable de tous les procureurs de la Couronne dans
le district de Québec. A-t-il démissionné?
M. HAMEL (St-Maurice): Il a démissionné de cette
fonction-là à compter du 1er juillet.
M. JOHNSON: Depuis quand occupait-il cette fonction?
M. HAMEL (St-Maurice): Depuis quelques mois, Je n'ai pas la date
exacte.
M. LESAGE: Décembre je pense.
M. HAMEL (St-Maurice): Décembre ou janvier 1964. En tous cas
après le mois d'août.
M. GABIAS: Pour être candidat dans Dorchester?
M. JOHNSON: M. le Président, depuis que M. Bienvenue est
responsable des procureurs de la couronne, et des procureurs de la loi des
liqueurs et de tous ceux qui font des poursuites au nom de la Reine, est-ce
que, depuis ce temps-là, M. Bienvenue a recommandé qu'on aille en
appel dans l'une ou l'autre des causes de la Beauce, du district judiciaire de
Beauce, exposées par le député de Beauce?
M. HAMEL (St-Maurice): Voici, depuis que M. Bienvenue a
été nommé au poste d'assistant procureur
général adjoint et en charge des avocats de la couronne pour le
district d'appel de Québec, il ne s'est occupé que de plaider
personnellement certaines causes particulièrement importantes et il n'a
pas eu le temps encore, il n'a pas eu le temps, jusqu'au 1er juillet, de
s'occuper des autres avocats de la couronne.
M. JOHNSON: A quoi s'occupe M. Guy Desjardins, avocat de la couronne
à Montréal?
M. HAMEL (St-Maurice): M. Desjardins est avocat en chef de la couronne.
C'est lui qui fait la distribution des causes entre les avocats de la
couronne.
M. JOHNSON: Est-il nécessaire d'avoir un avocat comme M.
Desjardins, au salaire de $11,000, lorsqu'on a, à la fois, des
procureurs permanents et aussi un M. Robichaud qui est responsable de toutes
les poursuites dans le district de Montréal? Est-ce qu'on a besoin de
payer $11,000 un avocat qui ne va jamais en Cour...
M. LESAGE: Ce n'est pas Robichaud, c'est Tourangeau je crois.
M. JOHNSON: Tourangeau, je vous demande pardon. Est-ce qu'on a besoin de
M. Desjardins? Je comprends qu'autrefois il y avait un avocat en chef, parce
qu'il n'y avait pas d'avocat permanent. Et lorsqu'il n'y avait pas d'avocat
superviseur pour le district de Montréal, on avait besoin d'un avocat en
chef, et il arrivait qu'il n'allait pas très souvent à la Cour,
mais il distribuait l'ouvrage, le faisait faire par tous ses acolytes et ses
substituts. Mais là, on a M. Tourangeau, qui est permanent, payé
$14,000 ou $15,000, on a 4 ou 5 ou 6 ou 8 ou 10 avocats permanents, et je ne
vois pas, pour ma part, pourquoi on doit payer $11,000 un avocat de la couronne
qui n'est jamais en Cour, qui n'occupe jamais, sauf dans deux causes
fameuses...?
M. HAMEL (St-Maurice): J'ai fait la même rélexion à
l'assistant procureur général et le cas est actuellement sous
étude.
M. JOHNSON: M. Desjardins a-t-il reçu d'autres honorables que son
$11,000 au cours de l'année écoulée?
M. HAMEL (St-Maurice): La réponse est non.
M. GABIAS: Une poursuite a été intentée par le
procureur général...
M. HAMEL (St-Maurice): Le député de Trois-Rivières
a épuisé son droit de parole.
M. GABIAS: Vous avez donc bien peur des questions.
M. HAMEL (St-Maurice): Non, seulement quand ça fait assez
longtemps qu'on est sur cet article-là.
M. LALONDE: Le 28 mai.
M. GABIAS: Une poursuite a été intentée contre Jean
Beauregard. Est-ce que le procureur général pourrait me
répondre demain où en est rendue cette poursuite?
M. HAMEL (St-Maurice): On consultera le dossier.
M. JOHNSON: Je voudrais aussi que le ministre songe, demain, à
apporter les dossiers concernant l'enquête demandée dans l'affaire
des sceaux qui auraient été fabriqués à l'occasion
d'un référendum municipal à Ville Renaud, qui fait partie
de...
M. HAMEL (St-Maurice): M. le Président, on est venu me voir, j'ai
demandé: « Qu'est-ce que vous voulez? » On m'a dit que le
député, je ne sais pas trop quel député,
démissionne et puis on va fermer ça là. J'ai dit: «
Monsieur,
ce n'est pas comme ça que ça marche. Si vous avez des
choses sérieuses, allez voir notre assistant-procureur
général à Montréal qui a tout l'organisme qu'il
faut pour examiner le problème et me faire rapport. »
D'après les nouvelles que j'ai eues, ils ne sont jamais allés
voir M. Tourangeau comme je leur avais demandé.
M. JOHNSON: Dans l'affaire de Rec Stone à Ville d'Anjou,
comté de Bourget, au sujet de laquelle le député de
Bourget a fait publiquement des interventions, y a-t-il eu enquête et
où en est rendue l'enquête? Est-elle au stade de la poursuite?
M. HAMEL (St-Maurice): Il y a actuellement une enquête qui est en
cours.
M. GABIAS: Est-ce que l'enquête sur Sulphur Converting
Corporation...
M. HAMEL (St-Maurice): Sur quoi?
M. GABIAS: Sulphur Converting Corporation. Où en est rendue cette
enquête? Est-ce que le ministre pourrait me répondre demain?
M. HAMEL (St-Maurice): M. le Président, il y a 100,000 dossiers.
Chaque année, la Sûreté provinciale ouvre 100,000 dossiers.
Je ne les ai pas. Mais des questions comme celles-là sont
précisément des questions qui doivent être
déposées au feuilleton. Là on sait exactement qu'est-ce
qui en est.
Je ne parle pas des causes qui sont en cours, par exemple, demander
où en sont rendues les procédures quand les procédures
sont en marche. Mais quand il s'agit des cas qui sont sous enquête, je
crois que ce sont des questions qu'on doit mettre au geuilleton et là on
verra si c'est dans l'intérêt public de donner les renseignements
demandés ou de ne pas les donner.
M. GABIAS: C'est une affaire de $300,000,000 ça, « Sulfur
Converting Corporation ». Il me semble que le ministre aurait
intérêt à renseigner la population à savoir
où en est rendue l'enquête sur « Sulfur Converting
Corporation ». C'est un complexe sidérurgique qui devait
s'établir à Lévis. Il n'y a pas eu beaucoup de causes
comme ça. Alors, je demanderais au ministre de bien vouloir nous
répondre demain après-midi sur « Sulfur Converting
Corporation.
M. LOUBIER: M. le Président, dans le même genre de
question...
M. HAMEL (St-Maurice)": Adopté?
M. LOUBIER: Non. J'aimerais à demander à l'honorable
procureur général, dans l'enquête Coffin, il y avait eu, je
pense,...
UNE VOIX: Elle est en cours.
M. LOUBIER: ... une somme de $100,000 de votée. Combien y a-t-il
eu de dépensé à date et combien le procureur
général prévoit-il dépenser?
M. HAMEL (St-Maurice): Il y a eu une somme de $30,000 de votée et
nous redemandons, je pense que c'est $80,000 ou $90,000,...
M. LESAGE: Cela viendra dans un budget supplémentaire...
M. HAMEL (St-Maurice): ... dans un budget supplémentaire qui
viendra...
M. LOUBIER: Qui viendra ultérieurement...? M. LESAGE: En
même temps. M. LOUBIER: Pardon?
M. LESAGE: Le budget supplémentaire du ministère du
procureur général sera étudié immédiatement
après l'étude du budget ordinaire.
M. JOHNSON: Il y a un montant dans ce budget supplémentaire.
M. LESAGE: Oui, oui.
M. LOUBIER: A date, est-ce que le procureur général...
M. LESAGE: Je l'ai d'ailleurs expliqué en présentant le
budget supplémentaire.
M. LE PRESIDENT: Dix heures!
M. HAMEL (St-Maurice): Je sais que le montant de $30,000 à date
est insuffisant et je crois qu'on a des engagements...
M. LESAGE: Nous avons un budget supplémentaire pour un montant de
je ne sais combien.
M. HAMEL (St-Maurice): Au budget supplémentaire on vous dira
ça. Mais ça coûte plus cher qu'on l'avait prévu.
Est-ce que j'ai compris que l'article 5 est adopté?
DES VOIX: Non.
M. LE PRESIDENT: M. le Président, j'ai l'honneur de faire rapport
que le comité n'a pas fini de délibérer sur l'article 5 et
qu'il demande la permission de siéger de nouveau.
M. HYDE (président): Quand siégera-t-il?
A la prochaine séance? A la prochaine séance.
M. LESAGE: Demain, M. le Président, à deux heures et
trente, même programme.
M. LE PRESIDENT: La Chambre est ajournée à demain
après-midi à deux heures et demie.