To use the Calendar, Javascript must be activated in your browser.
For more information

Home > Parliamentary Proceedings > Assembly Proceedings > Journal des débats (Hansard) of the National Assembly

Advanced search in the Parliamentary Proceedings section

Start date must precede end date.

Skip Navigation LinksJournal des débats (Hansard) of the National Assembly

Version finale

32nd Legislature, 3rd Session
(November 9, 1981 au March 10, 1983)

Monday, November 30, 1981 - Vol. 26 N° 11

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Journal des débats

 

(Quinze heures vingt minutes)

Le Vice-Président (M. Jolivet): À l'ordre, s'il vous plaît!

Un moment de recueillement.

Veuillez vous asseoir.

Affaires courantes.

Déclarations ministérielles.

M. le ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme.

Demandes du gouvernement et des

représentants de l'industrie de la

chaussure du Québec

M. Rodrigue Biron

M. Biron: M. le Président, le gouvernement du Québec, représenté par le ministre d'État au Développement économique, et moi-même, réunissait samedi, à Montréal, les représentants de l'industrie québécoise de la chaussure et des industries connexes, ainsi que des porte-parole des syndicats CSN, FTQ et CSD qui représentent les travailleurs de cette industrie.

L'objet de la rencontre était de fournir aux parties impliquées l'occasion de se concerter sur la décision fédérale d'abandonner complètement les contingentements pour les chaussures en cuir. Cette décision arbitraire et inopportune comporte une menace directe pour les 80 entreprises et les 6600 travailleurs oeuvrant au Québec dans ce secteur d'activité. En effet, 80% de la production québécoise se situe dans le créneau de la chaussure en cuir.

L'imminence de l'entrée en vigueur de cette politique, le 30 novembre, soit ce soir à minuit, commandait une réaction vigoureuse de la part de tous. Les efforts consentis tant par les entreprises que par le gouvernement du Québec depuis quatre ans seraient irrémédiablement balayés et détruits. Ces efforts sont, de la part du gouvernement du Québec, l'abolition de la taxe de vente sur les chaussures, les quelque 10 000 000 $ consacrés au programme Innovation-chaussure et aux autres mesures d'assistance financière fournie notamment par la SDI et par l'Office québécois du commerce extérieur.

L'industrie, pour sa part, y a également consacré des ressources considérables. Les résultats sont remarquables compte tenu de la conjoncture: une productivité en hausse moyenne de 4,5% par an, une maîtrise surprenante des coûts de production qui ne connaissent qu'une hausse de 8,7% par an, substantiellement moins que la moyenne des produits industriels. Enfin, des progrès majeurs sont enregistrés au niveau de l'expertise de l'industrie dans la mise en marché et de sa capacité à rencontrer les besoins des consommateurs.

Conscients des progrès réalisés et du préjudice majeur que causerait l'absence d'une protection adéquate du marché canadien de la chaussure, le tribunal antidumping reconnaissait que la capacité de l'industrie canadienne de conserver sa part actuelle du marché serait gravement menacée. Malheureusement, le gouvernement fédéral en a décidé autrement en enlevant complètement les contingentements pour les chaussures en cuir. Aussi, dans le but précis de poursuivre la consolidation de ce secteur et de récolter les fruits bien légitimes des efforts consentis, les participants à cette rencontre ont unanimement convenu: 1. De réaffirmer conjointement le principe d'une politique de protection adéquate par le moyen de contingentements globaux visant au maintien et à l'accroissement de la part de marché de l'industrie québécoise de la chaussure. 2. D'exiger du gouvernement fédéral un moratoire sur sa décision d'abandonner les contingentements sur la chaussure en cuir, de façon à permettre des consultations entre les intervenants concernés et de maintenir, entre-temps, les mesures actuelles en vigueur en matière de contingentement global. 3. De former un groupe de travail composé de représentants de toutes les parties présentes à la rencontre et dont le mandat sera de faire des représentations appropriées auprès du gouvernement fédéral; d'informer la population des conséquences de la récente décision fédérale; de définir, le cas échéant, les moyens de pression à utiliser; de faire la promotion de l'achat chez nous; de maintenir à jour un état de la situation, des données relatives à la production et à l'emploi dans ce secteur d'activité, et de procéder à une évaluation périodique des effets de toute décision fédérale.

Ce groupe bénéficiera du support technique et financier du gouvernement du Québec, notamment du secrétariat permanent des conférences socio-économiques et du ministère de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme. 4. De demander que, sur la base de l'apport québécois dans l'industrie canadienne de la chaussure, 50% des 17 000 000 $ que le gouvernement fédéral entend consacrer à la restructuration de cette industrie soient transférés au programme guébécois Innovation-chaussure déjà existant au lieu de procéder à la mise sur pied d'une mesure

fédérale séparée du programme guébécois. À cet effet le gouvernement du Québec accepterait que deux représentants du gouvernement fédéral participent au comité d'évaluation des projets chargé de l'administration du programme et procéderait aux modifications reguises du programme actuel, ainsi qu'à son élargissement aux industries connexes. 5. De demander au ministère de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme du gouvernement du Québec d'étudier les problèmes d'approvisionnement en cuir et en produits semi-finis et de requérir, au besoin, l'assistance du Centre de recherche industrielle du Québec, notamment pour analyser et solutionner tout problème relatif à la teinture du cuir.

M. le Président, c'est là l'audacieux programme de travail dont ont convenu unanimement toutes les parties présentes à la réunion de samedi. C'est dire que les Québécois de tous les milieux n'entendent pas faire les frais de cette politique irresponsable du gouvernement fédéral et sont bien décidés de prendre en main leur industrie.

Aujourd'hui même, une lettre siqnée conjointement par mon collègue, M. Bernard Landry, et moi-même sera transmise au ministre fédéral de l'Industrie et du Commerce, M. Herb Gray, afin de lui faire part des demandes et des exigences du Québec.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Reed Scowen

M. Scowen: Je veux d'abord remercier le ministre pour l'invitation qu'il a faite aux membres de l'Opposition d'assister à cette réunion de samedi à laquelle j'étais présent. D'abord, nous sommes d'accord avec le gouvernement pour dire que la décision du fédéral était une décision irréfléchie qui aura des conséquences défavorables sur notre industrie de la chaussure et nous demandons au gouvernement fédéral de revoir sa décision dans les plus brefs délais.

J'ai parlé à beaucoup d'intervenants syndicaux et à des hommes d'affaires qui étaient là et je pense que tout le monde était d'accord pour dire que, même si ça ne sera pas catastrophique dans l'immédiat, dans les prochains mois, à long terme et à moyen terme, ça peut avoir des effets très sérieux sur l'industrie au Québec.

Ceci étant dit, je veux souligner que toute l'histoire des douze derniers mois de cette expérience dans les contingentements de la chaussure est un très bel exemple de la stratégie de confrontation, de la stratégie incompétente du ministère de l'Industrie et du Commerce et de ce gouvernement qui a terriblement affaibli le Québec. Des voix: Oh! Oh!

M. Scowen: Écoutez-moi, vous allez apprendre quelque chosel

Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!

M. Scowen: Premièrement, nous avons une histoire d'un an de négociations par courrier, pas de négociations directes, pas de vraie consultation entre l'une et l'autre, des lettres démagoqiques du ministre de l'Industrie et du Commerce du Québec à Ottawa. Je souligne, à titre d'exemple, M. le Président, une lettre écrite par le ministre de l'Industrie et du Commerce fédéral, M. Gray, le 11 juin de cette année, dans laquelle il disait au ministre: "Si vous considérez la chose comme souhaitable, il pourrait y avoir consultation entre agents de nos ministères respectifs afin de discuter de la question." Il a invité le gouvernement péquiste à commencer immédiatement une négociation; c'était au mois de juin, il y a presque six mois. Est-ce qu'il y a eu une réponse à cette lettre? À ma connaissance, non. Est-ce qu'il y a eu une réunion? J'ai demandé à des fonctionnaires de son ministère samedi et ils m'ont dit qu'à leur connaissance il n'y avait eu aucune réunion.

Alors, des négociations par courrier, aucune rencontre sérieuse. Arrive la catastrophe voulue et on passe à l'action. On convoque un sommet ou un mini-sommet très politisé où on blâme le fédéral pour son manque d'attention dans ce dossier, mais tout le monde sait que c'est une série d'efforts très bien orchestrés pour prouver que le système fédéral ne peut pas fonctionner. Où êtes-vous? Ètes-vous vraiment intéressés au bien-être des travailleurs, des syndicats et des compagnies guébécoises ou voulez-vous n'utiliser ces incidents que pour créer un climat de catastrophe? Si vous étiez vraiment intéressés, vous auriez commencé ces néqociations réelles, face à face, depuis longtemps.

Je veux passer, M. le Président, brièvement, aux quatre éléments du proqramme parce qu'il y a deux ou trois éléments que je veux préciser pour que le ministre en parle dans sa réplique. Premièrement, le ministre a dit que le qouvernement a consacré quelque 10 000 000 $ au proqramme Innovation-chaussure. D'après les chiffres qu'il nous a donnés, de 1978 à 1980, le total consacré a été de 2 500 000 $; en 1980-1981, c'est 1 500 000 $; il monte à 4 000 000 $ et pour cette année, c'est un peu difficile de dégager les sommes totales, mais nous avons l'impression que ça doit être autour de

2 000 000 $, peut-être, pas plus que ça. D'après les chiffres que le ministre nous a donnés, les sommes consacrées jusqu'à maintenant, à la fin de l'année 1981, pour Innovation-chaussure, doivent monter peut-être à 6 000 000 $, pas plus que cela, à moins que le ministre ait décidé de consacrer 6 000 000 $ cette année. J'aimerais avoir une précision sur ces chiffres parce qu'il a dit que ces 10 000 000 $ étaient consacrés dans le cadre d'innovation-chaussure. (15 h 30)

En ce qui concerne les quatre décisions qui ont été prises, la première c'est de réaffirmer une politique de protection adéquate par le moyen des contingentements. On est d'accord. Je pense que le ministre aurait dû souligner l'importance en même temps de la restructuration, de la modernisation de cette industrie pour qu'à la fin des cinq ans de délai voulu par le ministre, nous ayons une industrie de la chaussure concurrentielle non seulement pour les acheteurs québécois, les consommateurs québécois, mais espérant que ce serait concurrentiel à travers le Canada et dans le monde entier.

Deuxièmement, on exige du gouvernement fédéral d'accepter un moratoire. On est d'accord. En ce qui concerne le troisième point, il y a un élément sur lequel on a de grandes réserves. Le ministre propose de former un groupe de travail composé de représentants de toutes les parties intéressées. On est d'accord. Mais l'idée de prendre les fonds publics pour informer la population des conséquences de la récente décision fédérale, pas pour les informer sur les avantages d'acheter les chaussures québécoises, ce qui pourrait être quelque chose d'utile, mais d'informer la population des conséquences d'une décision fédérale, quant à nous, c'est l'utilisation des fonds publics pour des fins pas loin de la propagande.

En terminant, M. le Président, je demande que le ministre réponde à deux questions. Premièrement, quel est le montant versé dans Innovation-chaussure, pendant chacune des quatre années, depuis l'inauguration?

Deuxièmement, est-ce qu'il y a eu, cette année, une seule réunion des fonctionnaires fédéraux, avec les fonctionnaires de son ministère à ce sujet? Si oui, à quelle date?

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. Rodrigue Biron

M. Biron: M. le Président, je commencerai à répondre au député de Notre-Dame-de-Grâce en le remerciant d'abord d'avoir participé à cette réunion d'urgence tenue samedi, à Montréal, avec mon adjoint parlementaire, le député de Châteauguay.

Comme première remarque, je dirai au député de Notre-Dame-de-Grâce qu'on n'a pas besoin de faire d'effort pour prouver que le système ne marche pas, les fédéraux s'organisent pour faire assez d'efforts, qu'ils nous prouvent que ce système ne peut pas marcher à l'heure actuelle.

Deuxième chose, vis-à-vis des demandes précises du député, je pourrai faire les recherches nécessaires pour lui donner, pour chaque année - je m'engage à le faire - ce qui a été fait relativement au programme Innovation-chaussure, et à la SDI. J'ai mentionné qu'à travers les programmes qui ont subventionné l'industrie de la chaussure, il y avait Innovation-chaussure et la SDI. Mais je peux dire au député qu'à la fin de l'année budgétaire qui a précédé cette année, c'est-à-dire à la fin de mars 1981, il y avait déjà 9 750 000 $ versés par le gouvernement du Québec, directement, soit à Innovation-chaussure, soit à la SDI, ou à l'Office québécois du commerce extérieur, pour des entreprises qui en ont fait la demande au cours des dernières années dans le domaine de la chaussure. Cela, c'est sans compter les sommes d'arqent qui ont été indirectement versées dans l'économie de la chaussure par le gouvernement du Québec, à cause de la décision du ministre des Finances d'enlever complètement la taxe sur les chaussures.

Quant à l'autre question posée par le député, concernant la négociation, je l'informe qu'on a un groupe de travail, formé de fonctionnaires, qui sont constamment en discussion avec les fonctionnaires du gouvernement fédéral, qui s'appelle le groupe de travail fédéral-provincial sur la politique du commerce extérieur. Chaque fois qu'on est intervenu à ce groupe de travail, la réponse était: La décision s'en vient, ne vous en faites pas, ne vous inquiétez pas.

D'ailleurs le ministre fédéral, M. Gray, dans un télex qu'il me faisait parvenir le 11 juin, me disait: Comme vous le savez, le gouvernement fédéral étudie actuellement les conclusions du tribunal antidumping et les différentes alternatives visant à l'amélioration de la situation de notre industrie dans ce secteur. Si c'est de cette façon que le gouvernement fédéral pense qu'il va améliorer l'industrie dans ce secteur, en faisant en sorte de faire fermer toutes les industries qui produisent des chaussures et faire perdre les emplois aux travailleurs de la chaussure, je pense que ce n'est pas la bonne façon.

M. le Président, je serais prêt aussi à déposer, pour l'information du député, copie des correspondances que nous avons eues avec le gouvernement fédéral constamment depuis le début de cette année, soit copie

des lettres de mon prédécesseur, M. Duhaime, et copie des lettres que j'ai envoyées personnellement, de même que des réponses de M. Gray, depuis le début de l'année 1981.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Merci, M. le ministre.

Dépôt de documents.

Rapport des dépenses électorales

pour les élections générales du

13 avril

J'aimerais déposer le rapport des dépenses électorales pour les élections générales du 13 avril 1981.

Dépôt de rapports de commissions élues.

Rapports du greffier en loi sur les projets de loi privés

Dépôt de rapports du greffier en loi sur les projets de loi privés.

M. le leader du gouvernement.

M. Charron: J'en ai quelques-uns. D'abord, à tout seigneur tout honneur, le projet de loi qui portera le no 200, qui modifie la charte de la ville de Montréal. Le projet de loi est conforme à l'avis et les avis ont été publiés. Le projet de loi qui portera le no 214 concerne la ville de Mont-Joli. Il est aussi conforme à l'avis et les avis ont été publiés. Le projet de loi no 230, Loi concernant La Solidarité, compagnie d'assurance sur la vie, et L'Unique compagnie d'assurance-vie, est conforme à l'avis et les avis ont été publiés. Pour ce qui est du projet de loi concernant l'Union-Vie, plus de six mois se sont écoulés depuis la parution des avis. Il y a donc lieu de faire motion pour suspendre les règles de pratique à cet égard et permettre le dépôt de la loi. J'en fais motion, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Est-ce que cette motion est adoptée?

M. Charron: No 216.

Une voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté.

M. Charron: Le projet de loi qui portera le no 244, Loi modifiant la charte de la ville de Charlesbourg, est conforme à l'avis et les avis ont été publiés. Il s'est toutefois également écoulé plus de six mois depuis la parution des avis. Je fais motion pour qu'on puisse quand même déposer le projet de loi.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Est-ce que cette motion est adoptée? Adopté.

M. Charron: Le projet de loi qui portera le no 248 concerne l'Union Saint-Joseph de Notre-Dame de Beauport. À la suite des notes du greffier en loi, je fais motion pour la même dérogation, c'est-à-dire qu'on puisse le déposer même si plus de six mois se sont écoulés.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Est-ce que cette motion est adoptée? Adopté.

M. Charron: Le projet de loi qui portera le no 263 concerne la Coopérative agricole régionale de Papineau. Il est conforme à l'avis et les avis ont été publiés.

En ce qui a trait au projet de loi no 268 concernant la ville de Fermont, il y a lieu de solliciter la même dérogation puisque plus de six mois se sont également écoulés, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Cette motion est-elle adoptée? Adopté.

M. Charron: Pour le projet de loi no 243 qui concerne la succession de Edward Scallon, plus de six mois se sont également écoulés. Je fais donc motion, M. le Président, pour qu'on puisse déposer le projet de loi quand même.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Cette motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté.

M. Charron: Le projet de loi 211 concerne le territoire de la ville de Mont-Joli. Est-ce que je ne l'ai pas déjà déposé, celui-là?

Le Vice-Président (M. Jolivet): Non, M. le leader.

M. Charron: Non, c'est un autre. C'est assez curieux, mais...

Le projet de loi 211 concerne la ville de Mont-Joli. Le projet est conforme à l'avis et les avis ont été publiés.

Le projet de loi no 249 concerne l'annexion de certains lots du cadastre de la paroisse de Saint-Raymond à la ville de Saint-Raymond. Le projet de loi est conforme à l'avis et les avis ont été publiés.

Le projet de loi no 253 concerne le Groupe prêt et revenu.

Il reste un avis à paraître à la Gazette officielle du Québec. Cet avis paraîtra le 5 décembre 1981, donc avant la convocation de la commission parlementaire. Je propose qu'on puisse permettre cette dérogation et déposer quand même le projet de loi.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Cette motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté.

M. Charron: Le projet de loi qui portera le numéro 229 concerne la Fondation E.P.I.C. 11 est conforme à l'avis et les avis ont été publiés.

Le projet de loi no 242, qui modifie la Loi constituant en corporation l'Hôpital d'Argenteuil. Plus de six mois se sont écoulés depuis la parution des avis. Je fais motion pour qu'on puisse déposer quand même ce projet de loi, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Cette motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté.

M. Charron: Le projet de loi no 257 qui concerne certains lots du cadastre de la paroisse de Saint-Augustin, division d'enregistrement de Portneuf. Le projet de loi est conforme à l'avis et les avis ont été publiés. Il s'est toutefois également écoulé plus de six mois. Je fais donc la même motion, M. le Président. (15 h 40)

Le Vice-Président (M. Jolivet): Cette motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté.

M. Charron: II y a finalement le projet de loi no 227 qui concerne la ville de Pointe-aux-Trembles. C'est la même motion pour la même dérogation, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Cette motion est-elle adoptée.

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté.

M. Charron: M. le Président, je vous remets...

Le Vice-Président (M. Jolivet): Le dépôt de rapports est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté. Rapports déposés.

Présentation de projets de loi au nom du gouvernement.

M. le leader du gouvernement.

M. Charron: II y en a quelques-uns également, M. le Président.

Je vous prierais d'appeler l'article a) du feuilleton, M. le Président.

Projet de loi no 18

Première lecture

Le Vice-Président (M. Jolivet): Le ministre de la Justice propose la première lecture du projet de loi 18, Loi assurant l'application de la réforme du droit de la famille et modifiant le Code de procédure civile. M. le ministre.

M. Marc-André Bédard

M. Bédard: M. le Président, avec le consentement des membres de l'Assemblée nationale, j'abrégerai un peu les notes explicatives.

Ce projet de loi a pour objet de permettre une application harmonieuse de la Loi instituant un nouveau Code civil et portant réforme du droit de la famille en instituant, au Code de procédure civile, un nouvel ensemble de procédures en matière familiale et en complétant les dispositions législatives relatives à l'adoption.

En matière de procédure civile, ce projet de loi institue la règle que, en matière familiale, les audiences des tribunaux de première instance se tiennent à huis clos, sauf décision contraire du tribunal; la Charte des droits et libertés de la personne est modifiée en conséquence. Il prévoit également que les procédures introductives d'instance sont faites par déclaration ou par requête que, dans l'un et l'autre cas, les parties peuvent adresser au tribunal par une demande conjointe. Il prévoit aussi des règles spécifiques pour faciliter le déroulement de l'instance, la conciliation des parties ou l'instruction de la cause et il introduit le principe du droit de l'enfant à être représenté par un avocat lorsque son intérêt est en jeu et que cette représentation est nécessaire pour assurer la sauvegarde de cet intérêt.

En outre, ce projet de loi vient préciser les règles applicables à certaines demandes. Il vient établir le régime procédural applicable aux demandes conjointes en séparation de corps ou en divorce sur projet d'accord ainsi que celui qui est applicable en matière d'adoption, qu'il s'agisse des demandes en restitution de l'enfant, en déclaration d'adoptabilité, en placement ou en adoption. Enfin, il précise que les jugements rendus en matière d'adoption peuvent faire l'objet d'un appel à la Cour d'appel.

Ce projet de loi vient aussi modifier diverses lois pour y faire disparaître les distinctions qui y subsistent et qui sont

fondées sur le sexe, la filiation ou les circonstances de la naissance. Ce projet de loi modifie aussi la Loi sur l'aide juridique pour y prévoir un pouvoir réglementaire lié au paiement des frais de l'avocat représentant l'enfant ainsi que la Loi sur le ministère des Affaires sociales et la Loi sur la protection de la jeunesse pour y prévoir certains processus administratifs liés à l'adoption.

Enfin, ce projet de loi vient modifier certaines des dispositions transitoires prévues par la Loi instituant un nouveau Code civil du Québec et portant réforme du droit de la famille.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Cette motion de première lecture est-elle adoptée? Adopté.

Le Secrétaire adjoint: Première lecture de ce projet de loi.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Deuxième lecture, prochaine séance ou séance subséquente.

M. le leader du gouvernement.

M. Charron: Article b), s'il vous plaît, M. le Président.

Projet de loi no 28

Première lecture

Le Vice-Président (M. Jolivet): Le ministre de la Justice propose la première lecture du projet de loi no 28, Loi modifiant diverses dispositions législatives. M. le ministre.

M. Marc-André Bédard

M. Bédard: M. le Président, ce projet de loi modifie effectivement plusieurs dispositions législatives. Ces modifications sont de nature technique et ont pour but de faciliter l'administration des lois visées qu'on trouve énumérées dans les notes explicatives. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Cette motion de première lecture est-elle adoptée? Adopté.

Le Secrétaire adjoint: Première lecture de ce projet de loi.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Deuxième lecture, prochaine séance ou séance subséquente. M. le leader.

M. Charron: Article c) du feuilleton, M. le Président.

Projet de loi no 31

Première lecture

Le Vice-Président (M. Jolivet): Le ministre des Transports propose la première lecture du projet de loi no 31, Loi modifiant la Loi sur les transports et d'autres dispositions législatives. M. le ministre.

M. Michel Clair

M. Clair: M. le Président, on me permettra sûrement, compte tenu du nombre de projets de loi à déposer, d'abréger les notes explicatives.

Ce projet de loi a pour objet la réforme de l'ensemble des règles régissant le régime administratif et de gestion du transport des écoliers. Il prévoit aussi l'introduction de mesures de polyvalence destinées à permettre une utilisation plus rationnelle des équipements de transport de personnes, plus particulièrement les autobus scolaires. Le nouveau régime administratif confère aux commissions scolaires une responsabilité accrue dans l'organisation du transport de leur clientèle.

Ce projet de loi permet l'adoption, par les institutions d'enseignement, de mesures favorisant l'ouverture de leur circuit de transport à une clientèle autre que scolaire. Il entrouvre aussi, par le biais des pouvoirs de réglementation, la possibilité, pour les transporteurs scolaires, d'offrir des services de charte-partie. Cette ouverture nécessite la modification du régime actuel qui confère aux organismes publics de transport une juridiction exclusive quant aux voyages à charte-partie effectués sur leur territoire.

Le projet de loi permet aussi aux municipalités, sous réserve de certaines approbations, d'organiser des services de transport en commun par la conclusion de contrats à cet effet. Il prévoit l'exercice de ses nouveaux pouvoirs là où de tels services ne sont pas assurés par un organisme public de transport ou par un détenteur de permis de transport en commun.

L'introduction de ces mesures de réforme du système de transport scolaire et de polyvalence, nécessite des modifications importantes à la Loi sur les transports et à la Loi sur l'instruction publigue ainsi qu'à huit autres lois qu'on me dispensera sûrement d'énumérer.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Cette première lecture est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté.

Le Secrétaire adjoint: Première lecture

de ce projet de loi.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Deuxième lecture, prochaine séance ou séance subséquente. M. le leader.

M. Charron: L'article d), M. le Président, s'il vous plaît.

Projet de loi no 29

Première lecture

Le Vice-Président (M. Jolivet): Le ministre du Revenu propose la première lecture du projet de loi 29, Loi modifiant diverses lois fiscales. M. le ministre.

M. Raynald Fréchette

M. Fréchette: M. le Président, avec la permission de la Chambre, j'abrégerai aussi le contenu des notes explicatives. Ce projet de loi vise principalement à assurer une plus grande harmonisation entre diverses lois fiscales et modifie donc celles-ci de façon purement corrective ou technique. Il prévoit également que le ministre du Revenu doit, depuis le 11 mars 1981, verser mensuellement au fonds spécial olympique 30% de la taxe qu'il perçoit en vertu de la Loi concernant l'impôt sur le tabac. Cette mesure donne suite au discours sur le budget du 10 mars 1981.

Ce projet de loi modifie également la Loi sur le régime de rentes du Québec afin de permettre à un employeur de recouvrer, à certaines conditions, l'excédent de contributions qu'il a versées lorsque, au cours d'une année, il est devenu un nouvel employeur par suite de la formation ou de la dissolution d'une société ou par suite de l'acquisition des biens d'une entreprise.

Enfin, ce projet de loi prévoit les modalités d'application de l'allocation de disponibilité prévue dans le budget du 11 mars 1981. Il prévoit, pour les Québécois et les Québécoises, le choix entre l'allocation de disponibilité et les déductions prévues pour frais de garde d'enfant de moins de six ans.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Cette première lecture est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté.

Le Secrétaire adjoint: Première lecture de ce projet de loi.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Deuxième lecture prochaine séance ou séance subséquente.

M. le leader.

M. Charron: L'article e), M. le Président.

Projet de loi no 33

Première lecture

Le Vice-Président (M. Jolivet): Le ministre des Affaires municipales propose la première lecture du projet de loi 33, Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant les municipalités. M. le ministre.

M. Jacques Léonard

M. Léonard: M. le Président, ce projet de loi modifie diverses lois concernant les municipalités de façon à apporter une solution à certains problèmes de fonctionnement qu'elles rencontrent. En particulier, ce projet de loi modifie la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme et le Code municipal de façon à aplanir certaines difficultés qu'auraient pu rencontrer les municipalités régionales de comté lors de leur constitution. Par exemple, le pouvoir des municipalités régionales de comté de déléguer partiellement leur compétence en matière d'évaluation foncière sera précisé pour ne pas briser inutilement la continuité du travail commencé par les évaluateurs des actuelles corporations de comté.

De plus, des amendements sont apportés pour faciliter la participation des cités et villes aux activités des municipalités régionales de comté.

Enfin, ce projet de loi précise le pouvoir des municipalités de se regrouper, notamment au sein d'une régie intermunicipale, pour fournir des services de police à la population.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Cette première lecture est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté.

Le Secrétaire adjoint: Première lecture de ce projet de loi.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Deuxième lecture prochaine séance ou séance subséquente.

M. le leader.

M. Charron: L'article f), M. le Président.

Projet de loi no 30

Première lecture

Le Vice-Président (M. Jolivet): Le leader du gouvernement, au nom du ministre du Travail, de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu propose la première lecture du projet de loi 30, Loi modifiant la Loi sur l'aide sociale et d'autres dispositions législatives.

M. le leader.

M. Claude Charron

M. Charron: M. le Président, ce projet de loi a pour objet de modifier, dans un premier temps, la Loi sur l'aide sociale afin de permettre la récupération, par le ministre du Travail, de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu, des montants d'aide sociale qui ont été versés à un bénéficiaire en vue de combler un besoin résultant de retenues faites dans le cadre d'autres programmes de sécurité sociale. Il permet également au gouvernement de fixer les conditions d'admissibilité à l'aide sociale en raison de besoins spéciaux. Il prévoit en outre la désignation, par le ministre, d'enquêteurs pour l'application de la Loi de l'aide sociale. Il consacre, enfin, la confidentialité des renseignements personnels obtenus dans le cadre de l'application de la loi tout en permettant au ministre, avec l'autorisation du gouvernement, et à certaines conditions précises, de communiquer certains renseignements à d'autres ministères ou organismes. (15 h 50)

Dans un deuxième temps, ce projet a également pour objet de modifier la Loi sur les allocations familiales pour remplacer le mode de détermination des allocations familiales actuellement prévu à la loi par un pouvoir de réglementation à cet effet et pour modifier les règles concernant le paiement d'allocations dans le cas d'un enfant handicapé.

Il ajoute enfin une disposition à la Loi sur l'assurance automobile afin de permettre à la Régie de l'assurance automobile du Québec de transmettre certains renseignements au ministre du Travail, de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu responsable de l'application de la Loi sur l'aide sociale.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Cette première lecture est-elle adoptée?

Une voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté.

Le Secrétaire adjoint: Première lecture de ce projet de loi.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Deuxième lecture, prochaine séance ou séance subséquente. M. le leader.

M. Charron: Article w), M. le Président, s'il vous plaît.

Projet de loi no 39

Première Lecture

Le Vice-Président (M. Jolivet): Le ministre du Revenu propose la première lecture du projet de loi no 39, Loi modifiant le régime des droits relatifs au commerce des boissons alcooliques et certaines dispositions législatives. M. le ministre.

M. Raynald Fréchette

M. Fréchette: M. le Président, avec le consentement de la Chambre, j'abrégerai aussi les notes explicatives. Ce projet de loi donne suite à la présentation, le 17 novembre 1981, de l'énoncé complémentaire aux politiques budgétaires du gouvernement pour 1981-1982 dans lequel le ministre des Finances annonçait certaines modifications au régime des droits et taxes applicables aux boissons alcooliques, à l'impôt sur le revenu des particuliers et à la taxe sur les carburants.

Enfin, ce projet modifie la Loi sur les permis d'alcool afin de transférer certains pouvoirs de perception de droits de la Société des alcools du Québec au ministère du Revenu du Québec et d'effectuer certaines modifications de concordance.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Cette première lecture est-elle adoptée?

Une voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté.

Le Secrétaire adjoint: Première lecture de ce projet de loi.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Deuxième lecture, prochaine séance ou séance subséquente.

M. le leader du gouvernement.

M. Charron: Article x), M. le Président, s'il vous plaît.

Projet de loi no 36

Première lecture

Le Vice-Président (M. Jolivet): Le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation propose la première lecture du projet de loi no 36, Loi modifiant la Loi sur

les produits agricoles et les aliments. M. le ministre.

M. Jean Garon

M. Garon: Ce projet de loi a pour objet d'étendre la portée de la Loi sur les produits agricoles et les aliments à toutes les phases du conditionnement des produits marins et d'imposer un nouveau système de permis d'exploitation des usines de transformation de ces produits en fonction d'une modernisation des normes de construction d'éguipement et d'exploitation de ces usines.

Il permet au gouvernement d'ordonner le triage des produits marins et autorise le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation à prescrire, dans la proportion fixée par le qouvernement, le remboursement des dépenses de triage faites par la personne préposée au triage, désignée par le ministre, ainsi que la répartition de ces dépenses entre les industriels et les pêcheurs.

II prescrit l'imposition d'amendes dans le cas de contraventions aux dispositions réglementaires ordonnant le triage des produits marins. Il prévoit l'abrogation de la loi sur la préparation des produits de la mer et le maintien en vigueur, jusqu'au 1er janvier .1985, des permis actuels d'exploitation des usines de transformation délivrés en vertu du règlement d'application de cette loi tout en prohibant, à compter de la date du dépôt du présent projet de loi, la délivrance de nouveaux permis selon ce règlement.

Le nouveau système de permis s'appliquera dès la sanction du projet de loi, sauf pour les titulaires des permis actuels qui y sont assujettis à compter du 1er janvier 1985, à moins qu'ils ne demandent un nouveau permis avant cette date. Ce projet de loi vise également à assurer l'application de la Loi sur les produits agricoles et les aliments aux produits et aux lieux de conditionnement reliés à des activités commerciales de fourniture de services moyennant rémunération sans qu'il n'y ait de vente.

Ce projet de loi propose enfin que les rapports d'inspection ou d'analyse des produits constituent une preuve prima facie de leur contenu et de la qualité de leurs signataires tout en précisant que les pouvoirs d'inspection portent non seulement sur les produits, mais également sur les locaux et les équipements.

Je pense bien que l'Opposition me permettra de dire que je mets également à sa disposition, dès ce jour, dix copies du projet de règlement qui devrait être proposé au Conseil des ministres à la suite de l'adoption de cette loi parce que, comme on me le dira sans doute, une bonne partie de la réqlementation se trouve dans le rèqlement plutôt que dans le projet de loi.

On pourra donc étudier le projet de loi en connaissance de cause.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Cette première lecture est-elle adoptée?

Des voix: Bravo!

Une voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté.

Le Secrétaire adjoint: Première lecture de ce projet de loi.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Deuxième lecture, prochaine séance ou séance subséquente. M. le leader.

M. Charron: Article y), M. le Président, s'il vous plaît.

Projet de loi no 37

Première lecture

Le Vice-Président (M. Jolivet): Le ministre des Affaires municipales propose la première lecture du projet de loi no 37, Loi sur le regroupement des villes de Baie-Comeau et de Hauterive. M. le ministre.

M. Jacques Léonard

M. Léonard: M. le Président, ce projet prévoit le regroupement en une seule municipalité des villes de Hauterive et de Baie-Comeau sous le nom de ville de Baie-Comeau. Il prévoit également un régime provisoire d'administration de la nouvelle municipalité jusqu'à la première élection générale et les diverses règles qui régissent ce regroupement.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Cette première lecture est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté.

Le Secrétaire adjoint: Première lecture de ce projet de loi.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Deuxième lecture, prochaine séance ou séance subséquente. M. le leader.

Renvoi à la commission des affaires municipales

M. Charron: M. le Président, comme il est dans l'intention du qouvernement de convoquer les autorités municipales de Hauterive et de Baie-Comeau avant même la

discussion du principe de ce regroupement par l'Assemblée, je proposerais de déférer immédiatement ce projet de loi à la commission parlementaire des affaires municipales.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Cette motion est-elle adoptée?

M. Levesque (Bonaventure): Adopté.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté. M. le leader.

M. Charron: Article z, M. le Président.

Projet de loi no 32

Première lecture

Le Vice-Président (M. Jolivet): Le ministre des Finances propose la première lecture du projet de loi no 32, Loi concernant les emprunts scolaires. M. le ministre.

M. Jacques Parizeau

M. Parizeau: M. le Président, ce projet de loi a pour principal objet de simplifier le processus d'autorisation des emprunts des commissions scolaires et du Conseil scolaire de l'île de Montréal, de faciliter la mise en marché de ces emprunts et d'établir un nouveau mode de garantie des emprunts à long terme. Il confie au ministre de l'Éducation les autorisations d'emprunts scolaires qu'il exerçait conjointement avec le ministre des Affaires municipales et la Commission municipale. Il l'autorise notamment à déterminer les conditions et modalités des emprunts et à requérir des organismes scolaires les informations relatives à leur situation financière. Il modifie enfin la Loi sur le ministère de Éducation afin d'y prévoir la délégation d'autorité du ministre à un fonctionnaire par voie de règlement publié à la Gazette officielle du Québec.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Cette première lecture est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté.

Le Secrétaire adjoint: Première lecture de ce projet de loi.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Deuxième lecture, prochaine séance ou séance subséguente. M. le leader.

M. Charron: Article aa), M. le Président.

Projet de loi no 38

Première lecture

Le Vice-Président (M. Jolivet): Le ministre des Institutions financières et Coopératives propose la première lecture du projet de loi no 38, Loi modifiant la Loi sur l'assurance-dépôts. M. le ministre.

M. Jacques Parizeau

M. Parizeau: M. le Président, ce projet de loi a pour objet d'imposer le paiement d'une prime aux institutions dont le remboursement des dépôts est garanti par la Régie de l'assurance-dépôts du Québec. Il a, de plus, pour objet de porter de 250 000 000 $ à 700 000 000 $ le montant que le gouvernement est autorisé à engager auprès de la Régie de l'assurance-dépôts du Québec.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Cette première lecture est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Secrétaire adjoint: Première lecture de ce projet de loi.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Deuxième lecture, prochaine séance ou séance subséquente. M. le leader.

M. Charron: Article bb).

Projet de loi no 40

Première lecture

Le Vice-Président (M. Jolivet): Le ministre des Institutions financières et Coopératives propose la première lecture du projet de loi no 40, Loi sur les sociétés d'entraide économique et modifiant diverses dispositions législatives. M. le ministre.

M. Jacques Parizeau

M. Parizeau: M. le Président, ce projet de loi a pour objet de permettre la transformation des caisses d'entraide économique en sociétés d'entraide économique. Il a également pour objet de réqir le fonctionnement des sociétés d'entraide économique, d'en assurer le contrôle et la surveillance et de permettre la constitution de la Fédération des sociétés d'entraide économique du Québec. Le titre 1 du projet prévoit que la transformation d'une caisse en société ne pourra se faire qu'avec l'approbation d'au moins les trois quarts des voix exprimées par les membres présents à une assemblée générale spéciale qui sera tenue le 30 janvier 1982. Le projet de

transformation soumis à l'Assemblée aura été préalablement approuvé par le ministre des Institutions financières et Coopératives et précisera, notamment, à l'égard de chague titulaire le nombre de parts sociales qui seront converties en actions de la société, le nombre de parts sociales qui seront converties en dépôts, ainsi que les taux d'intérêt et les échéances de ces dépôts. De plus, certains documents d'information, notamment un résumé du projet de transformation, devront accompagner l'avis de convocation de l'assemblée.

Le titre 1 édicté également des règles sur la tenue de l'assemblée du scrutin.

Le titre 2 prévoit qu'un surintendant sera chargé de l'administration de la loi. Ce titre édicté aussi les normes financières qui concernent notamment les dépôts, l'endettement en dépôts, les prêts, les placements, les emprunts et les liquidités de la société. Il détermine également des règles relatives à la détention des actions du capital-actions d'une société d'entraide économique et prévoit des règles concernant les différents organes de fonctionnement de la société.

Le titre 3 concerne la Fédération des sociétés d'entraide économique du Québec. Il précise les objets et pouvoirs de la fédération et prévoit notamment que celle-ci constituera et administrera un fonds de liquidités pour le bénéfice des sociétés. Le projet rend admissibles au régime d'épargne-actions les actions des sociétés d'entraide économique. Il accorde, de plus, aux membres des caisses d'entraide économique dont les parts sociales auront été converties en actions de sociétés d'entraide économique un crédit d'impôt égal à 25% de la valeur nominale de ces actions. Le projet prévoit au surplus que le ministre devra, dans les trois ans de l'entrée en vigueur de la loi, faire un rapport à la commission des institutions financières et coopératives de l'Assemblée nationale sur l'application de la loi, accompagné de ses recommandations sur l'opportunité d'en maintenir ou d'en modifier les dispositions. Le projet modifie enfin la Loi sur les caisses d'épargne et de crédit et la Loi sur les impôts. (16 heures!

Le Vice-Président (M. Jolivet): Est-ce que cette première lecture est adoptée? Adopté.

Le Secrétaire adjoint: Première lecture de ce projet de loi.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Deuxième lecture, prochaine séance ou séance subséquente. M. le leader.

M. Charron: L'article cc), M. le Président, s'il vous plaît.

Projet de loi no 41

Première lecture

Le Vice-Président (M. Jolivet): Le ministre délégué à l'Habitation et à la Protection du consommateur propose la première lecture du projet de loi 41, Loi modifiant la Loi instituant la Régie du logement et modifiant le Code civil et d'autres dispositions législatives. M. le ministre.

M. Guy Tardif

M. Tardif: M. le Président, avec tout le respect que l'on vous doit, depuis que le ministère de l'Habitation a été constitué, au mois de juin dernier, il faut maintenant parler du ministre de l'Habitation et de la Protection du consommateur et non plus du ministre délégué.

Ce projet de loi a principalement pour objet de modifier des dispositions législatives relatives au fonctionnement de la Régie du logement afin de permettre d'accélérer le traitement de certaines demandes. Les nouvelles mesures proposées ont pour effet, premièrement, de permettre la nomination, selon la procédure prévue par la loi, de régisseurs à temps partiel lorsque les circonstances l'exigent; deuxièmement, d'habiliter des greffiers spéciaux à décider de certaines demandes de recouvrement de loyer ou de résiliation de bail, lorsqu'ils procèdent par défaut et à autoriser le dépôt du loyer; troisièmement, d'autoriser les régisseurs à ordonner, dans certains cas, l'exécution provisoire d'une décision, malgré la révision ou l'appel; quatrièmement, de conférer aux régisseurs le pouvoir d'adjuger les frais afférents aux procédures devant la réqie et élargir à cet égard le pouvoir réglementaire du gouvernement.

Le projet de loi modifie également le Code civil de manière à soumettre le dépôt de la totalité ou d'une partie du loyer à une autorisation du tribunal, à assouplir la formulation de certains avis obligatoires et à simplifier les modalités de constatation du prolongement d'un bail écrit.

Enfin, le projet de loi propose un certain nombre de modifications à caractère purement technique.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: M. le Président, je voudrais poser une question au leader parlementaire. Puisqu'il y a eu une foule de plaintes au sujet de l'application et des dispositions de la présente loi, est-ce que le gouvernement va tenir une commission parlementaire - ce que je suggérerais fortement - avant la deuxième lecture, pour entendre les parties

concernées afin qu'on puisse s'assurer que les amendements qui seront apportés à la présente loi reflètent vraiment les besoins des personnes qui seront affectées par toute cette loi sur la Régie du logement?

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader.

M. Charron: M. le Président, j'accepte de prendre en considération le souhait que vient de formuler le député de Mont-Royal. Pour l'instant, je suggérerais de garder ce projet de loi inscrit en deuxième lecture. Si jamais, après consultation, nous décidions de nous rendre à ce souhait, nous ferons les démarches nécessaires à ce moment-là.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Cette première lecture est-elle adoptée? Adopté.

Le Secrétaire adjoint: Première lecture de ce projet de loi.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Deuxième lecture, prochaine séance ou séance subséquente. M. le leader.

M. Charron: Le dernier, M. le Président, l'article v) du feuilleton.

Projet de loi no 35

Première lecture

Le Vice-Président (M. Jolivet): Le ministre de l'Énergie et des Ressources propose la première lecture du projet de loi no 35, Loi sur la révocation des droits de mine et modifiant la Loi sur les mines. M. le ministre.

M. Yves Duhaime

M. Duhaime: M. le Président, ce projet de loi a pour objet la révocation des droits de mine ne faisant pas partie du domaine public et compris dans les concessions de terres faites avant le 24 juillet 1880, tant dans les cantons que dans les seigneuries et dans les concessions minières pour lequelles des lettres patentes ont été délivrées avant le 1er juillet 1911. Il précise dans quel cas les droits de mine ne sont pas révoqués, notamment les droits de certains minéraux, tels les matériaux de construction, le sable, le gravier, la tourbe, de même que des droits sur des gisements en exploitation, et ceux qui constituent une réserve nécessaire pour assurer la continuité d'une exploitation minière, pétrolière ou gazière.

Il prévoit le paiement d'une indemnité à l'ex-détenteur des droits de mine, sous forme d'un pourcentage du profit annuel découlant de l'exploitation de toute substance minérale provenant du terrain dont les droits de mine sont révoqués. Il institue, de plus, un mécanisme d'attribution des permis spéciaux d'exploration pour rechercher et mettre en valeur les substances minérales dans les limites des territoires dont les droits de mine sont révoqués et modifie la Loi sur les mines pour étendre ce mécanisme à toute concession minière susceptible d'être révoquée pour défaut de paiement d'une taxe annuelle prévue à la loi.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Cette première lecture est-elle adoptée? Adopté.

Le Secrétaire adjoint: Première lecture de ce projet de loi.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Deuxième lecture, prochaine séance ou séance subséquente.

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président...

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader de l'Opposition.

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, nous sommes, comme vous le savez, rendus au 30 novembre - cela paraît un peu, oui - et le gouvernement a voulu se prévaloir des dispositions de l'article 31 paragraphe a, qui prévoient que les projets de loi qui ne sont pas déposés avant le 1er décembre risquent de ne pas être adoptés. Lorsque je vois ce que vient de nous présenter le leader parlementaire du gouvernement, je me demande s'il y a eu un oubli, parce qu'il n'y a qu'un seul projet de loi public apparaissant en avis qui n'a pas été appelé par le leader parlementaire du gouvernement. Il s'agit, en l'occurrence, de l'article u), au nom justement du leader parlementaire du gouvernement, Loi assurant la reprise des services de transport par traversier entre Sorel et Saint-Ignace.

Est-ce que le leader parlementaire du gouvernement peut nous dire s'il s'agit d'un oubli volontaire ou involontaire, et, peut-il nous dire s'il aurait besoin du consentement plus tard ou encore s'il a l'intention de présenter une motion d'urgence?

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader du gouvernement.

M. Charron: C'est un oubli volontaire, qui fait que ce projet de loi demeure encore en avis aujourd'hui et qu'il n'a pas été déposé. La réalité est bien simple, nous espérons encore à ce moment-ci ne pas avoir à le déposer du tout. Ce qui veut dire le résultat concret d'une négociation, qui a donné des signes encourageants, semble-t-il, et d'autre part, de ne jamais avoir besoin d'une motion d'urgence et de solliciter le

consentement unanime pour avoir à le faire. Il est évident que si nous avons à le faire, les premiers informés seront les collègues de l'Opposition desquels nous espérons obtenir la collaboration.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Présentation de projets de loi au nom des députés.

M. le leader.

M. Charron: II y en a aussi quelques-uns. L'article g), s'il vous plaît.

Projet de loi no 244

Première lecture

Le Vice-Président (M. Jolivet): Le député de Charlesbourg propose la première lecture du projet de loi privé 244, Loi modifiant la charte de la ville de Charlesbourg. Cette première lecture est-elle adoptée? Adopté.

Le Secrétaire adjoint: Première lecture de ce projet de loi.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader.

Renvoi à la commission des affaires municipales

M. Charron: Je propose de déférer ce projet de loi à la commission des affaires municipales.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Cette motion est-elle adopté? Adopté. M. le leader.

M. Charron: L'article 0, M. le Président, s'il vous plaît.

Projet de loi no 248

Première lecture

Le Vice-Président (M. Jolivet): Le député de Limoilou propose la première lecture du projet de loi privé 248, Loi concernant l'Union Saint-Joseph de Notre-Dame de Beauport. Cette première lecture est-elle adoptée? Adopté.

Le Secrétaire adjoint: Première lecture de ce projet de loi.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader.

Renvoi à la commission

des institutions financières

et coopératives

M. Charron: Cette loi devrait être déférée à la commission des institutions financières et coopératives. J'en fais motion.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Cette motion est-elle adoptée? Adopté. M. le leader.

M. Charron: L'article j).

Projet de loi no 230

Première lecture

Le Vice-Président (M. Jolivet): Le député de Taschereau propose la première lecture du projet de loi privé 230, Loi concernant La Solidarité, compagnie d'assurance sur la vie et l'Unique, compagnie d'assurance-vie. Cette première lecture est-elle adoptée? Adopté.

Le Secrétaire adjoint: Première lecture de ce projet de loi.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader.

Renvoi à la commission

des institutions financières

et coopératives

M. Charron: Je propose que cette loi soit déférée à la commission des institutions financières et coopératives.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Cette motion est-elle adoptée? M. le leader.

M. Charron: L'article k).

Projet de loi no 263

Première lecture

Le Vice-Président (M. Jolivet): Le député de Joliette, au nom du député d'Arthabaska, propose la première lecture du projet de loi privé 263, Loi concernant la Coopérative agricole régionale de Papineau. Cette première lecture est-elle adoptée? Adopté.

Le Secrétaire adjoint: Première lecture de ce projet de loi.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader.

Renvoi à la commission

des institutions financières

et coopératives

M. Charron: Je propose de déférer le projet de loi à la même commission, celle

des institutions financières.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Cette motion est-elle adoptée? Adopté. M. le leader.

M. Charron: L'article I).

Projet de loi no 216

Première lecture

Le Vice-Président (M. Jolivet): Le député de Joliette, au nom du député d'Arthabaska, propose la première lecture du projet de loi privé 216, Loi concernant l'Union-Vie. Cette motion de première lecture est-elle adoptée? Adopté.

Le Secrétaire adjoint: Première lecture de ce projet de loi.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader.

Renvoi à la commission

des institutions financières

et coopératives

M. Charron: Aux institutions financières.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Cette motion est-elle adoptée? Adopté. M. le leader.

M. Charron: L'article m).

Le Vice-Président (M. Jolivet): Le député de Joliette propose, au nom du député d'Arthabaska...

M. Charron: Excusez-moi, M. le Président. On ne dépose pas ce projet de loi aujourd'hui. Je vous prierais plutôt d'appeler l'article o).

Projet de loi no 227

Première lecture

Le Vice-Président (M. Jolivet): L'article o). Le député de Bourassa propose la première lecture du projet de loi privé 227, Loi concernant la ville de Pointe-aux-Trembles. Cette première lecture est-elle adoptée? Adopté.

Le Secrétaire adjoint: Première lecture de ce projet de loi.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader.

Renvoi à la commission des affaires municipales

M. Charron: Aux affaires municipales.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Déférence aux affaires municipales. Cette motion est-elle adoptée? Adopté.

M. Charron: L'article p), s'il vous plaît.

Projet de loi no 200

Première lecture

Le Vice-Président (M. Jolivet): Le député de Bourassa propose la première lecture du projet de loi privé 200, Loi modifiant la charte de la ville de Montréal. Cette motion de première lecture est-elle adoptée? Adopté.

Le Secrétaire adjoint: Première lecture de ce projet de loi.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Vous le déférez?

Renvoi à la commission des affaires municipales

M. Charron: M. le Président, je voudrais signaler - sans doute qu'on l'a remarqué - que c'est la première fois, depuis quatre ans que j'ai cette responsabilité, que le traditionnel projet de loi privé de la ville de Montréal n'a pas à être présenté sous le couvert du consentement unanime et qu'il est parfaitement respectueux des règles de notre Assemblée. Je propose donc qu'il soit déféré à la commission des affaires municipales. (16 h 10)

Le Vice-Président (M. Jolivet): Cette motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté. M. le leader.

M. Charron: L'article q), M. le président.

Projet de loi no 214

Première lecture

Le Vice-Président (M. Jolivet): Le député de Matapédia propose la première lecture du projet de loi privé 214, Loi concernant la ville de Mont-Joli. Cette première lecture est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté.

Le Secrétaire adjoint: Première lecture de ce projet de loi.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader.

Renvoi à la commission des affaires municipales

M. Charron: À la commission des affaires municipales aussi, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Déféré à la commission des affaires municipales. Cette motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté. M. le leader.

M. Charron: L'article r), M. le Président.

Projet de loi no 229

Première lecture

Le Vice-Président (M. Jolivet): Le député de Rosemont propose la première lecture du projet de loi privé 229, Loi concernant la Fondation E.P.I.C. Cette motion de première lecture est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté.

Le Secrétaire adjoint: Première lecture de ce projet de loi.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader.

M. Levesque (Bonaventure): ...

Renvoi à la commission des affaires municipales

M. Charron: Non, c'est ce dont je m'informais à l'instant. Il s'agit d'un problème d'évaluation. Je crois que la fondation conteste quelque chose, enfin la commission l'examinera. À la commission des affaires municipales.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Déféré à la commission des affaires municipales. Adopté?

Une voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader.

M. Charron: L'article t), M. le Président.

Projet de loi no 268

Première lecture

Le Vice-Président (M. Jolivet): Le député de Duplessis propose la première lecture du projet de loi privé 268, Loi concernant la ville de Fermont. Cette motion de première lecture est-elle adoptée?

Une voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté.

Le Secrétaire adjoint: Première lecture de ce projet de loi.

Renvoi à la commission des affaires municipales

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader. Il est déféré à la commission des affaires municipales?

M. Charron: À la commission des affaires municipales, oui.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Déféré à la commission des affaires municipales. Adopté.

Une voix: Dédé Desjardins.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader.

M. Charron: Un projet de loi à l'article dd), M. le Président.

Projet de loi no 243

Première lecture

Le Vice-Président (M. Jolivet): Le député de Joliette propose la première lecture du projet de loi 243, Loi concernant la succession de Edward Scallon. Ce n'est pas ce qu'on pense. Cette motion de première lecture est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté.

Le Secrétaire adjoint: Première lecture de ce projet de loi.

Renvoi à la commission de la justice

M. Charron: M. le Président, je propose de déférer l'article dd) à la commmission de la justice.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Cette motion est-elle adoptée? Adopté. M. le leader.

M. Charron: L'article ee), M. le Président.

Projet de loi no 242

Première lecture

Le Vice-Président (M. Jolivet): Le député de Groulx propose la première lecture du projet de loi privé 242, Loi modifiant la Loi constituant en corporation "L'Hôpital d'Argenteuil". Cette motion de première lecture est-elle adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté.

Le Secrétaire adjoint: Première lecture de ce projet de loi.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader.

Renvoi à la commission des affaires sociales

M. Charron: Je propose de déférer ce projet de loi à la commission des affaires sociales.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Cette motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté. M. le leader.

M. Charron: L'article ff), M. le Président.

Projet de loi no 211

Première lecture

Le Vice-Président (M. Jolivet): Le député de Matapédia propose la première lecture du projet de loi privé 211, Loi modifiant le territoire de la ville de Mont-Joli. Cette motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté.

Le Secrétaire adjoint: Première lecture de ce projet de loi.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader.

Renvoi à la commission des affaires municipales

M. Charron: Je demanderais qu'il soit déféré à la commission des affaires municipales.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Cette motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté. M. Charron: Le dernier, l'article gg).

Projet de loi no 249

Première lecture

Le Vice-Président (M. Jolivet): Le député de Portneuf propose la première lecture du projet de loi privé 249, Loi concernant l'annexion de certains lots du cadastre de la paroisse de Saint-Raymond à la ville de Saint-Raymond. Cette motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté.

Le Secrétaire adjoint: Première lecture de ce projet de loi.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader.

Renvoi à la commission des affaires municipales

M. Charron: Je demanderais qu'il soit déféré à la commission des affaires municipales, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Cette motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté. M. le leader.

M. Charron: II me faut solliciter le consentement pour déposer deux projets de loi dont j'ai lu les notes qui émanaient du bureau du qreffier en loi, mais qui figurent en appendice aujourd'hui. Celui inscrit au nom du député de Chauveau d'abord.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Cette motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Projet de loi no 257

Première lecture Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté.

Le député de Chauveau propose la première lecture du projet de loi privé 257, Loi concernant certains lots du cadastre de la paroisse de Saint-Augustin, division d'enregistrement de Portneuf. Cette motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté.

Le Secrétaire adjoint: Première lecture de ce projet de loi.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader.

M. Charron: II devrait être déféré à la commission des affaires municipales ou à la justice?

Renvoi à la commission de l'énergie et des ressources

Des voix: À la commission de l'énergie et des ressources.

M. Charron: II devrait être déféré à la commission de l'énergie et des ressources, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Déféré à la commission de l'énergie et des ressources. Cette motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté. Le deuxième.

M. Charron: Celui au nom du député de Taschereau, M. le Président.

Projet de loi no 253

Première lecture

Le Vice-Président (M. Jolivet): Le député de Taschereau propose la première lecture du projet de loi privé 253, Loi concernant le Groupe Prêt et Revenu. Cette motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté.

Le Secrétaire adjoint: Première lecture de ce projet de loi.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader.

Le Secrétaire adjoint: Première lecture de ce projet de loi.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader.

Renvoi à la commission

des institutions financières

et coopératives

M. Charron: M. le Président, je propose de déférer ce projet de loi à la commission des institutions financières et coopératives.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Cette motion est-elle adoptée? Adopté.

Est-ce qu'on propose aussi les deuxièmes lectures?

M. Charron: Non, une autre fois, M. le Président, il faut s'en qarder.

Le Vice-Président (M. Jolivet): On en a amplement.

Nous en sommes rendus aux questions orales des députés. M. le député de Vaudreuil-Soulanges.

QUESTIONS ORALES DES DÉPUTÉS

La situation des stations-service des régions frontalières

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): M. le Président, ma question s'adresse au ministre des Finances qui a dû malheureusement s'absenter quelques secondes. Le voici.

Une voix: There he is.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): M. le Président, à l'occasion du discours sur le budget, le ministre des Finances a imposé aux Québécois une augmentation de 0,30 $ le gallon d'essence. Dans la semaine qui a suivi, en réponse aux questions du député de Gatineau, M. Gratton, le ministre des Finances nous a indiqué qu'il surveillait attentivement la situation à l'égard des stations-service qui étaient dans les régions frontalières de l'Ontario, c'est-à-dire dans l'Outaouais québécois, dans le comté de Bonaventure et dans mon propre comté, Vaudreuil-Soulanges, entre autres.

Il y a un fait nouveau depuis la déclaration du ministre, la semaine dernière. Le premier ministre, dans la région de Hull, en fin de semaine, a indiqué que le ministère des Finances s'apprêtait, dans les quinze jours de la déclaration initiale du ministre des Finances, à prendre des mesures d'exception afin d'alléger les difficultés que rencontrent les stations-service et d'autres commerces, notamment, de l'Outaouais.

Est-ce que le ministre des Finances pourrait commenter cette annonce absolument spontanée de la part du premier ministre en fin de semaine? Ou, alors, est-ce que le ministre des Finances peut simplement

confirmer les dispositions qu'il prendra avant le mercredi 9 décembre, si je comprends bien le premier ministre, afin d'alléger les difficultés que rencontrent les stations-service et autres petits commerces de la région de l'Outaouais, de Vaudreuil-Soulanges et de Bonaventure?

Le Président: M. le ministre des Finances.

M. Parizeau: M. le Président, je ne pense pas que j'aie visé ou que qui que ce soit ait visé les autres petits commerces; nous parlons du commerce de l'essence. La perception que j'ai des choses est peut-être un peu moins tranchée que celle que le député de Vaudreuil-Soulanges vient de présenter. J'ai indiqué, effectivement, lors d'une question avec débat à 22 heures, la semaine dernière, que d'ici deux semaines environ - je ne pense pas que j'aie dit quinze jours juste et pas quinze jours après la mesure - on aurait à examiner ce qui doit être fait, si quelque chose doit être fait.

Nous avons 123 garages, stations-service, etc., qui sont sous surveillance. Je comprends que, passant dans la région, le premier ministre se soit fait demander dans quelle mesure il ne pourrait pas pousser sur le ministre des Finances pour que, s'il a des décisions à prendre, il les prenne le plus vite possible, dans les délais les plus courts possible. J'ai pris la commande du premier ministre à cet effet. Il est évident que, si nous avons à prendre des mesures, le plus tôt elles seront prises, le mieux ce sera. Encore une fois, il faut quand même regarder l'effet que cela produit et quel genre de correctifs doivent être apportés.

Dans ce sens, tout ce que je peux dire au point où nous en sommes à l'heure actuelle, c'est que la question est suivie de très près. Rapidement, s'il y a quelque chose à faire, j'aurai l'occasion de l'indiquer.

Le Président: Question additionnelle, M. le député de Vaudreuil-Soulanges.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): M. le Président, j'ai, de mes propres oreilles, entendu le premier ministre à la radio, en fin de semaine, dire que le ministre des Finances, à toutes fins utiles, à l'intérieur d'un délai de quinze jours depuis sa dernière déclaration d'il y a une semaine, prendrait des mesures d'exception à l'avantage des stations-service qui étaient affectées, dont le volume de vente avait baissé considérablement à la suite de l'annonce de la hausse de taxe de 0,30 $ le gallon d'essence. Est-ce que c'est le ministre des Finances qui déclarait ça il y a une semaine ou si c'est le premier ministre qui déclarait ça en fin de semaine? J'aimerais savoir qui des deux dit vrai.

Le Président: M. le premier ministre.

M. Lévesque (Taillon): M. le Président, si le député de Vaudreuil-Soulanges a bien entendu - j'espère qu'on n'aura pas besoin de faire venir la transcription - j'ai eu l'occasion de dire au moins deux ou trois fois dans la journée qu'à partir de la déclaration que le ministre des Finances a faite il y a quelques jours, dans laquelle il disait que, autant que possible, d'ici une quinzaine de jours, on verrait clair - et j'ai poussé, le ministre des Finances en est témoin, et je pousse encore - s'il est possible de raccourcir les délais d'une journée, de deux jours, de trois jours, je ne sais pas, aussitôt qu'on verra clair, tant mieux. C'est tout ce à quoi je pouvais m'engager; ce n'est pas moi qui fais les calculs.

Le Président: Question additionnelle? M. Parizeau: Un complément.

Le Président: M. le ministre des Finances, un complément de réponse?

M. Parizeau: Oui, quelques mots seulement, M. le Président. Je voudrais, encore une fois, qu'on mette autour de cette question les nuances que j'y avais mises moi-même au moment où j'ai fait ma déclaration en cette Chambre. Il est évident que ce ne sera sûrement pas pour l'ensemble des stations-service. J'ai eu l'occasion de dire, par exemple, que dans le cas des stations-service qui appartiennent à de grandes chaînes ou à de très grandes entreprises, le problème ne se présente pas du tout, du tout de la même façon qu'à l'égard des indépendants. Il faut établir des nuances et être capable de faire quelque chose qui est approprié à chaque cas. fié h 20)

Le Président: Question additionnelle, M. le député de Gatineau.

M. Gratton: M. le Président, c'est sûr que nous faisons les nuances. Je regrette, auprès du ministre des Finances, que son premier ministre ne les fasse pas. Nous avons la transcription et effectivement les journaux titraient: "Mesures d'exception pour l'Outaouais d'ici quinze jours."

Ma question ne porte pas là-dessus, elle porte sur un autre élément qui a été touché. Est-ce que je dois comprendre, de la réponse du ministre des Finances qu'on exclut toute possibilité que cette mesure d'exception, que ces "mesures" entre guillemets, puissent s'appliquer à d'autres commerces que les stations-service?

Je prends le premier ministre à témoin, il a reçu de nombreuses représentations, notamment au cours d'une ligne ouverte, du

propriétaire d'un dépanneur qui prétendait avoir perdu 1300 $ de ventes, la semaine précédente, depuis l'imposition de cette taxe, qui n'avait rien à voir avec l'essence, j'en conviens, c'est un dépanneur. Ma question précise est celle-ci: Est-ce qu'on exclut dès maintenant toute possibilité que ces mesures d'exception puissent s'appliquer à d'autres commerces que les stations-service?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Lévesque (Taillon): Je voudrais quand même rectifier. Je ne sais pas si le député de Gatineau écoutait ou s'il a la transcription. J'ai remarqué que le député de Hull se profilait - on me l'a fait remarquer - derrière un groupe qui est venu à la porte... Il était tellement bien dissimulé que je ne l'ai pas vu à ce moment-là.

M. Rocheleau: ... par l'autre porte.

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Lévesque (Taillon): M. le Président, on est entré bien tranquillement, on a rencontré des gens qui étaient très convaincants, surtout les trois ou quatre premiers, et on m'a appris après que le député de Hull était quelque part aux environs, derrière la foule. Je ne sais pas pourquoi il ne s'est pas montré, mais enfin c'est son problème.

Cela étant dit...

M. Rocheleau: Question de privilège, M. le Président.

Le Président: M. le député de Hull, sur une question de privilège.

M. Rocheleau: J'aimerais dire au premier ministre que j'ai l'habitude d'attendre les gens par la porte d'en avant, alors que le premier ministre s'est faufilé par la porte d'en arrière.

Le Président: M. le premier ministre.

M. Lévesque (Taillon): Autant que je sache, je me suis faufilé par la porte où on m'attendait, M. le Président, sauf que le député de Hull, ayant fait ses rassemblements, s'est faufilé derrière la foule.

Cela étant dit, pour préciser quand même cette partie de la ligne ouverte qu'évoquait le député de Gatineau, c'était quand même un élément d'une journée extraordinaire où on a inauguré un Palais des congrès qui, en 17 mois, a été mis sur pied, a été construit, et qui a déjà 30% d'occupation pour sa première année. On m'a donné des rapports d'étapes extraordinairement intéressants sur l'hôpital de Gatineau qui attendait depuis des années, qui était en marche. L'autoroute 50, les gens trouvent que cela avance bien, malgré les problèmes qu'on est obligé de rencontrer. Autrement dit...

M. Levesque (Bonaventure): Est-ce qu'on va avoir un débat sur la situation économique de l'Outaouais?

M. Lévesque (Taillon): ... en même temps que la route Matagami-Témiscamingue, le complexe intégré forestier s'en vient dans le... Oui, oui. Dans l'ensemble, j'ai cru remarquer en tout cas, et très honnêtement, toute la journée, que les gens de la région de l'Outaouais et des régions de l'Ouest du Québec étaient extraordinairement impressionnés par l'effort sans précédent que le gouvernement a fait depuis cinq ans.

Cela étant dit, le monsieur qui a téléphoné à titre de dépanneur a dit, très précisément, et je ne vois pas pourquoi on étire cela, que juste en face de son dépanneur il y a une station d'essence qui a perdu une partie de ses clients depuis quelque deux semaines, cela l'affecte, mais cela l'affecte à cause de l'absentéisme, si vous voulez, de la clientèle du côté de l'essence. J'ai cru comprendre que son problème à lui serait réglé le jour où serait réglé le problème du poste d'essence qu'il y a en face de chez lui.

Le Président: Dernière question additionnelle, M. le député de Hull.

M. Rocheleau: Merci, M. le Président. J'aimerais procéder par une question de privilège parce que je pense que le premier ministre a induit cette Chambre en erreur quand il a parlé des efforts du gouvernement depuis cinq ans. J'aimerais dire...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! Sur une question additionnelle, M. le député de Hull.

Des voix: Sur une question de privilège.

Le Président: Sur une question additionnelle.

M. Rocheleau: J'aimerais noter que lors du passage du premier ministre dans la région, plus particulièrement à Hull...

Une voix: Question:

M. Rocheleau: Je veux situer les faits, M. le Président, il s'agit d'un texte tiré d'un journal.

Une voix: Question.

M. Rocheleau: J'aimerais savoir si le

premier ministre doit tenir compte du fait qu'il y a déjà des enguêtes qui dénotent une perte de 137 000 $ par jour dans les stations-service de l'Outaouais, plus particulièrement à Aylmer, à Gatineau et à Hull, et si le ministre des Finances, d'autre part, tient compte du fait que cela peut provoquer des pertes d'au-delà de 50 000 000 $ par année uniquement pour le carburant.

Le Président: M. le ministre des Finances.

M. Parizeau: II est évident que dans les premiers jours de l'application d'une mesure comme celle-là, il y a toute une série de mouvements qui se font. J'en prendrai à témoin, par exemple, le fait que quand nous avons enlevé la taxe de vente sur les meubles, les chaussures, les vêtements, de ce côté-là, du côté de Hull, alors que la taxe était encore valide en Ontario et qu'elle est encore aujourd'hui à 7%, cela a provoqué, de ce côté, des mouvements pendant un certain nombre de jours dont on se doutait bien qu'ils ne dureraient pas éternellement.

C'est évident et c'est la raison pour laquelle je demande un peu de temps pour voir. On sait que pendant un certain nombre de jours, cela brasse passablement, il s'agit de savoir à quel niveau cela se situe finalement quand ça se stabilise. Lorsque nous avons établi à 20% la taxe sur l'essence plutôt qu'un certain nombre de cents par litre ou par gallon - on s'en souviendra, il y a déjà quelque temps - l'Ontario était resté aux cents et nous étions au pourcentage. Cela a ouvert un écart entre les deux provinces. Cela a pris quinze jours ou trois semaines et, finalement, presque partout, entre l'Ontario et le Québec, les prix se sont ajustés de chaque côté de la frontière.

Là, je reconnais que dans ce cas, c'est un peu plus grand comme effet, mais il faut d'abord savoir à quel niveau cela se stabilise et, d'autre part, établir une distinction très nette entre: Saqit-il d'indépendants ou de grandes compagnies? Il me semble que c'est une position de bon sens que d'être en mesure, justement, d'établir ces distinctions et de prendre un peu de temps pour que, si on doit bouger, on bouge correctement à l'égard de ceux pour qui on doit bouger et pas de n'importe quelle façon.

D'autre part, je voudrais revenir brièvement sur la question supplémentaire du député de Gatineau. Quant, tout à l'heure, à la suite de l'intervention du député de Vaudreuil-Soulanges, il parlait d'autres commerces, j'ai dit: Non, pas d'autres commerces. J'ai entendu des ricanements de l'autre côté. On voit bien qu'il n'y avait pas matière à ricaner puisque, justement, le député de Gatineau posait la question sur ces autres commerces. Il est clair, il est tout à fait évident qu'on ne va pas commencer, à l'occasion d'une question qui porte sur l'essence, à régler les problèmes de toute espèce d'autres commerces. Encore une fois, quand nous avons aboli la taxe de vente sur des choses aussi importantes que les meubles, les réfrigérateurs ou les cuisinières, personne ne nous a demandé de commencer à ajuster les autres commerces, dans l'autre sens, ou de leur imposer un impôt supplémentaire parce qu'ils faisaient plus d'argent.

Quand on commence à parler des autres commerces, c'est qu'ils reflètent la situation générale de l'économie dans le coin. Il est tout à fait clair - je peux répondre au député de Gatineau à l'occasion de la question du député de Hull à l'égard des autres commerces - que c'est non.

Le Président: Question principale, M. le député de Laporte.

Hausse de la taxe sur l'essence et commissions de transport

M. Bourbeau: Ma question s'adresse au ministre des Finances. À la suite de la hausse du coût de l'essence de 0,30 % le gallon dont on vient de parler, plusieurs commissions de transport du Québec ont annoncé des hausses de tarif imminentes; entre autres, à la commission de transport de Montréal, on parle d'un déficit de 4 000 000 $ à 5 000 000 $ pour l'année courante. A la commission de transport de Québec, le président parlait, au cours de la fin de semaine, d'une hausse probable des tarifs de l'ordre de plus de 20%. À la commission de transport de l'Outaouais, on a parlé d'un déficit excédant 300 000 $.

Le premier ministre, en fin de semaine, dans l'Outaouais, a parlé d'accorder des dégrèvements ou des compensations à des pompistes des régions frontalières. On vient justement d'en faire état.

Ma question est la suivante: Compte tenu de la politique du gouvernement visant à favoriser et même à privilégier le transport en commun, le ministre des Finances songe-t-il à accorder une réduction ou un dégrèvement de la taxe sur l'essence à l'égard des autobus afin d'éviter ces hausses imminentes des tarifs des commissions de transport du Québec? (16 h 30)

Le Président: M. le ministre des Finances.

M. Parizeau: M. le Président, je vais dire quelques mots à ce sujet et j'imagine que mon collègue des Transports voudra probablement donner un complément de réponse. Là encore, il faudrait quand même être un peu sérieux quand on discute de ça. Effectivement, quand je vois des commissions de transport venir annoncer 20%

d'augmentation de leurs tarifs à cause de ça, ça a bon dos, l'augmentation de la taxe sur l'essence. Il est évident que des hausses pareilles, ce serait plusieurs fois l'augmentation de coût qui vient de la taxe sur l'essence. Dans ce sens, je comprends qu'il peut y avoir des commissions de transport qui attendent depuis longtemps d'augmenter leurs billets pour toutes espèces de raisons et qui se disent: Voici l'occasion rêvée. C'est parfait, on va se servir de cela et on va, à l'occasion de ce geste, faire passer toute espèce d'autres choses dans le train. On n'est pas forcé d'être nécessairement impressionné par les chiffres qui sortent.

Pour ce qui a trait aux choses plus sérieuses, comme, par exemple, le fait que la CTCUM, à Montréal, l'augmentation de la taxe sur l'essence va lui coûter à peu près 5 000 000 $, oui, c'est à peu près, à quelques centaines de milliers de dollars près, le coût effectif. Que ça puisse entraîner, qu'on puisse avoir à réexaminer légèrement, par exemple, le coût de la carte d'abonnement mensuel pour tenir compte de ça, ce n'est pas impensable. Seulement, dans des proportions réduites qui correspondent essentiellement à l'augmentation du coût qui découle de cette taxe, pas plus. Il n'y a pas de raison, encore une fois, de faire passer toute une série d'autres facteurs à l'intérieur de ça. La CAM, la carte d'abonnement mensuel, représente, par rapport à tout ce qu'il y avait avant comme paiement de billet, comme abonnement, à Montréal, un avantage considérable. Un avantage sur le plan du coût mensuel pour l'abonné régulier qui est tellement grand que nous avons, je pense, à l'heure actuelle, quelque 365 000 Montréalais - là je peux faire erreur de quelques milliers - qui achètent la CAM à tous les mois. C'est donc qu'ils y trouvent un avantage considérable, et il est évident que le gouvernement a intérêt à garder un avantage relatif important pour ces gens. Cela a été un avantage, je pense, tout à fait essentiel, qui a été accordé par le présent gouvernement aux abonnés mensuels. Il faut garder un avantage financier important.

De là à dire, cependant, qu'on va commencer à établir des distinctions entre les divers usagers et faire en sorte que l'essence pour tel groupe coûterait tel prix et, pour tel autre groupe, coûterait tel autre prix, pour tel genre de véhicule coûterait un prix et pour un autre genre de véhicule coûterait un troisième prix, est-ce que vous avez une idée comment cela pourrait se contrôler? Est-ce qu'il faudrait colorer l'essence de véhicule en véhicule? Avoir des inspecteurs qui vont vérifier dans chaque réservoir pour savoir si la bonne couleur se trouve dedans? Il y a des gens qui, à certains moments, protestent contre comment dire - l'expansion de la bureaucratie. Je vous assure que ce n'est pas la façon de la simplifier que d'avoir différents types d'essence colorée différemment, à différents prix, pour différents types de véhicules. On n'a pas fini de contrôler les choses. Dans ce sens, encore une fois, il faut être raisonnable et simplement, effectivement considérer qu'il peut y avoir des ajustements de tarifs en vertu de cette taxation, mais pour ça seulement, par exemple. Pas pour les trois, quatre, cinq autres facteurs qu'on essaierait de faire passer à l'occasion de.

Le Président: Question additionnelle, M. le député de Laporte.

M. Bourbeau: M. le Président...

Le Président: M. le ministre des Transports.

M. Clair: M. le Président, complément de réponse, simplement pour confirmer les chiffres, qui sont donnés par le ministre des Finances. Effectivement, si on prend le cas de la CTCUM, par exemple, l'augmentation de la taxe représente 5 000 000 $ sur un budget d'environ 405 000 000 $. C'est donc dire que cela représente à peine 1% du budget de la Commission de transport de la Communauté urbaine de Montréal. Là d'où vient le problème, à mon avis, actuellement, c'est qu'au cours des dernières années, la contribution du gouvernement du Québec au transport en commun a augmenté de façon phénoménale. Je prends seulement le cas de la CTCUM: elle est passée de 38 000 000 $ en 1977 à 115 000 000 $ en 1981. C'est multiplié par trois. Or, ce qui se passe actuellement, M. le Président, c'est qu'à l'occasion de l'augmentation de la taxe sur l'essence, certaines commissions de transport et certains élus municipaux veulent - c'est peut-être de bonne guerre - profiter d'une augmentation de taxe sur l'essence pour augmenter considérablement le coût du tarif à l'usager, augmentant ainsi encore la contribution du gouvernement du Québec, mais laissant intacte la part des municipalités. Je pense, M. le Président, qu'on ne doit pas être absolument naïf à l'égard de ce phénomène. C'est la raison pour laquelle j'ai demandé, au cours des derniers jours, de rencontrer les trois présidents des commisions de transport de la région de Montréal, la CTCUM, la Commission de transport de Laval et celle de la rive sud de Montréal, afin de jouer cartes sur table et de connaître exactement ce qui en est, ce qui est attribuable à l'augmentation de la taxe sur l'essence et ce qui est attribuable à des décisions des commissions de transport ou des élus municipaux visant à faire porter aux usagers l'augmentation des coûts dans le transport en

commun parce qu'ils ne veulent pas prendre la décision d'auqmenter leur contribution comme municipalités.

Le Président: Question additionnelle, M. le député de Laporte. M. le député de Rosemont, je vous reconnaîtrai par la suite.

M. Bourbeau: M. le Président, à la suite de la réponse du ministre des Finances, dois-je comprendre qu'il va subventionner davantage la CAM ou les passes aux usagers, de façon à annuler les déficits prévus des commissions de transport et à empêcher les hausses de tarifs?

Le Président: M. le ministre des Finances.

M, Parizeau: Non, M. le Président, rien de ce que j'ai dit tout à l'heure ne permet d'affirmer ça.

Le Président: Question additionnelle, M. le député de Rosemont.

M. Paquette: M. le Président, le président de la CTCUM annonçait, la semaine dernière, son intention de hausser les tarifs du transport en commun pour la deuxième fois au cours de l'année. Ma question s'adresse au ministre des Transports. Est-ce qu'il a l'intention dans ses démarches auprès des autorités de la CTCUM de trouver un mécanisme qui va faire en sorte que les personnes les plus démunies, qui sont obligées d'utiliser le transport en commun, soient protéqées contre une deuxième hausse de tarifs au cours de l'année?

Le Président: M. le ministre des Transports.

M. Clair: M. le Président, encore une fois, la question du député de Rosemont fait directement référence à qui paie les augmentations de coûts dans l'exploitation du transport en commun. Il y a effectivement, dans ce secteur comme dans d'autres, des augmentations de coûts. On a vu tantôt que l'augmentation sur l'essence représente 1%. Par ailleurs, il y a d'autres augmentations de coûts. La volonté du gouvernement du Québec a été clairement énoncée de favoriser le transport en commun et on a augmenté notre contribution de façon considérable dans le transport en commun. Quant à examiner des possibilités de limiter, pour les personnes les plus démunies, les augmentations de tarification dans le transport en commun, c'est directement relié à la volonté des élus municipaux de faire leur part pour contenir les tarifs dans des proportions acceptables. On a fait un pas de géant; on est passé en cinq ans de 38 000 000 $ à 115 000 000 $ de contribution. Pendant ce temps-là, pour la CTCUM notamment, la contribution des municipalités est passée de 44 000 000 $ à 70 000 000 $ seulement.

Je pense que la réponse à la question du député de Rosemont, c'est: Oui, je vais tenter de faire en sorte que les tarifs augmentent le moins rapidement possible et l'une des façons privilégiées, c'est que les municipalités augmentent leur contribution au transport en commun.

Le Président: Question additionnelle, M. le député de Jeanne-Mance, sur le même sujet.

M. de Belleval: M. le Président, question additionnelle.

Le Président: Je vous reconnaîtrai par la suite, M. le député de Charlesbourg.

M. de Belleval: Merci, M. le Président.

M. Bissonnet: M. le Président, après avoir entendu les commentaires du ministre des Transports, je tiens à vous dire - s'il vous plaît, elle s'en vient, la question - que les élus municipaux n'ont aucun contrôle sur la Commission de transport de Montréal. Cette commission n'est même pas un service municipal; elle est autonome et le président a informé la population d'une augmentation de tarifs dans les prochaines semaines. Je pose ma question au ministre, considérant que, dans le journal, dimanche, on indiquait que les députés du parti ministériel demandaient au ministre des Finances de faire tout en son possible pour donner une subvention à ces compagnies de transport pour qu'il n'y ait pas une augmentation de coûts.

Le Président: M. le ministre des Transports.

M. Clair: M. le Président, le député de Jeanne-Mance a raison, à savoir que juridiquement la Communauté urbaine de Montréal n'a pas directement autorité sur la CTCUM. Cependant, elle a un pouvoir moral considérable quand on sait que la CUM a demandé à la CTCUM, par rapport à ses prévisions budgétaires, de réduire son budqet, dans un premier temps, de 7 000 000 $, et dans un deuxième temps, de 7 000 000 $ de plus, donc de 14 000 000 $, faisant en sorte que la contribution de la Communauté urbaine de Montréal n'augmenterait pas, à toutes fins utiles, pour le transport en commun, alors qu'on sait tous que les coûts du transport en commun augmentent, dans ce secteur comme dans d'autres.

Je dis que, juridiquement, le député de Jeanne-Mance a raison; la Communauté urbaine de Montréal n'a pas directement

autorité sur la CTCUM; cependant, elle a une autorité morale et financière très puissante. (16 h 40)

Le Président: Dernière question additionnelle. M. le député de Charlesbourg.

M. de Belleval: M. le Président, à la suite de la présentation du dernier budget du ministre des Finances, le journal Le Soleil, dans la région de Québec, titrait, sur huit colonnes à la une, que le coût du billet de transport en commun pourrait passer de 0,60 $ à 0,90 $, c'est-à-dire une augmentation de 50%, à cause de l'augmentation de la taxe sur l'essence. Ma question est la suivante: D'après les explications que vient de nous donner le ministre des Transports, une augmentation de 50% ne peut pas être justifiée par l'augmentation du coût du pétrole. J'aimerais savoir du ministre des Transports, en ce qui concerne la Commission de transport de la Communauté urbaine de Québec, quel sera en pourcentage le fardeau additionnel sur le budget de dépenses de la Commission de transport qu'apportera la hausse de la taxe sur les carburants?

Le Président: M. le ministre des Transports.

M. Clair: M. le Président, je n'ai pas, en pourcentage, le chiffre exact, puisque je n'ai pas entre les mains le budget de la Commission de transport de la Communauté urbaine de Québec. Ce que je peux vous dire, cependant, c'est qu'en coûts additionnels pour la CTCUQ, la Commission de transport de la Communauté urbaine de Québec, c'est une somme de 869 000 $. Compte tenu que le circuit est un peu moins chargé à la CTCUQ qu'il peut l'être à la Commission de transport de la Communauté urbaine de Montréal, c'est probablement l'équivalent de 1,5% ou 2% d'augmentation par rapport à l'ensemble du budget.

Le Président: Question principale. Mme la députée de L'Acadie.

M. de Belleval: Question de règlement, M. le Président. Je n'ai pas bien entendu le pourcentage cité par le ministre des Transports. De combien est l'augmentation?

M. Clair: Avec les renseignements que j'ai entre les mains à ce moment-ci, c'est à peu près 1,5% ou 2%, mais je vais le vérifier officiellement et donner le renseignement précis au député de Charlesbourg.

Le Président: Question principale. Mme la députée de L'Acadie.

Journée d'étude des médecins omnipraticiens

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, ma question s'adresse au ministre des Affaires sociales. Les médecins omnipraticiens tiennent aujourd'hui une journée d'étude pour protester, entre autres choses, contre la lenteur des négociations en vue du renouvellement de leur entente générale avec le gouvernement.

Ma question va être courte, précise, dans l'espoir d'obtenir une réponse courte et précise. Le ministre peut-il nous dire s'il est exact que la dernière séance de négociations qui a été tenue entre le gouvernement et les représentants de la fédération remonte au 18 septembre dernier?

Le Président: M. le ministre des Affaires sociales.

M. Johnson (Anjou): C'est inexact.

Le Président: Question additionnelle. Mme la députée de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: Le ministre peut-il nous indiquer alors à quelle date remonte cette dernière séance?

Le Président: M. le ministre des Affaires sociales.

M. Johnson (Anjou): Étant donné que la députée de L'Acadie veut absolument des précisions "and with all particulars", comme on dit dans la langue de Shakespeare, cela me fera plaisir de lui fournir plus de précisions, avec dates, lieux et noms, s'il le faut, mais je pourrai vous dire que, dans le cas des dernières rencontres avec la Fédération des médecins omnipraticiens, qui ont permis le règlement du dossier des urgences à Montréal que la fédération elle-même jugeait important, ces réunions ont eu lieu au mois d'octobre.

Le Président: Mme la députée de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, si j'ai posé une question précise, c'est que, la semaine dernière, le ministre m'a répondu exactement sur des dossiers particuliers et non pas sur le dossier de l'entente générale. Ma question était au sujet de la dernière rencontre des négociations touchant le renouvellement de l'entente générale.

Le Président: M. le ministre.

M. Johnson (Anjou): II y a peut-être une confusion qui existe dans le vocabulaire utilisé en ce moment par le président de la Fédération des médecins omnipraticiens qui,

on le sait, est en ce moment en campagne électorale, comme c'est son droit de l'être. Je pourrai peut-être rappeler avec précision les événements qui ont entouré les séances de négociations depuis mon arrivée au ministère. Lors de la dernière élection - je parle de celle du mois d'avril - quand je suis arrivé au ministère, j'ai rencontré les deux présidents des fédérations médicales pour leur offrir de négocier avec des comptables sans mandat ou d'accepter d'attendre jusqu'à l'automne pour s'assurer qu'ils avaient devant eux des gens qui avaient des mandats venant du ministre des Affaires sociales et du Conseil des ministres. Les deux fédérations ont accepté cette espèce de période transitoire de quatre ou cinq mois, cinq mois pour être plus précis, depuis l'expiration de la dernière entente, alors que, rappelons-le, l'entente nue le gouvernement, en 1976, avant les dernières élections, avait conclue, avait pris quatre ans. Puisque je m'étais entendu avec les deux présidents des fédérations que nous ne commencerions les négociations qu'à l'automne, je me suis fait dire par les représentants et notamment par ceux de la FMOQ que certains dossiers étaient plus urgents à leurs yeux, notamment les médecins omnipraticiens pratiquant l'anesthésie, la question du transport ambulancier à Montréal et la question des omnipraticiens s'occupant de problèmes psychiatriques dans la région de Drummondville. Or, nous avons réglé deux de ces trois dossiers pendant l'été.

Par ailleurs, quant au reste...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! Mme la députée, sur une question de règlement.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, chaque fois que nous posons une question au ministre des Affaires sociales, il reprend toujours les mêmes dissertations. Il m'a donné toutes ces informations vendredi. Je lui demande, encore une fois, si la dernière rencontre touchant le renouvellement de l'entente générale avec la FMOQ remonte au 18 septembre. Si tel est le cas, qu'entend-il faire pour que les parties se rencontrent dans les plus brefs délais?

Le Président: M. le ministre.

M. Johnson (Anjou): Nous sommes prêts, M. le Président, à rencontrer les représentants des fédérations. Je les ai rencontrés à quelques reprises. Les mandats non seulement sont prêts, ils ont été rendus publics. Je peux même dire que, dans le cas du président de la FMOQ, en ce moment, il a laissé véhiculer des demi-vérités entre ce qui était contenu dans la loi et ce qui était contenu dans les mandats de négociation, notamment en invoquant ce que certaines personnes ont fait dans certains milieux médicaux, que le salariat était prévu dans la loi. Il n'y a rien de tel dans la loi. C'est dans les mandats de négociation qu'on prévoit que certaines catégories de spécialistes peuvent être l'objet d'un mandat de négociation qui vise à leur donner des honoraires fixes, à les placer dans un cadre d'honoraires fixes plutôt que de rémunération à l'acte.

En ce sens, nous sommes prêts à négocier. Non seulement sommes-nous prêts, nous avons étalé les mandats sur la place publique et, que je sache, pour le moment, c'est le président de la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec qui a dit qu'il n'irait pas à la table de négociation tant qu'on ne retirerait pas les projets de loi. Je pense qu'il exagère.

Le Président: Dernière question additionnnelle, Mme la députée de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: C'est toujours de bonne guerre. Je réalise que tout à coup le ministre actuel des Affaires sociales commence à s'apparenter un peu à l'ancien ministre, c'est toujours la faute des autres et de leurs mauvaises intentions.

Peut-il également confirmer ou infirmer le fait que la fédération aurait déposé un nouveau projet et qu'elle n'a eu aucune réponse?

Le Président: M. le ministre des Affaires sociales.

M. Johnson (Anjou): Effectivement, la fédération a déposé une brique dans la plus pure tradition syndicale, dans le cadre du renouvellement d'une entente.

La réponse, à cause du temps, a été donnée par les représentants qui ont dit: II y aura bientôt sur la place publique, pour que vous le sachiez, un projet de loi dont j'avais laissé entendre de grandes orientations aux présidents des fédérations lors des conversations que j'ai eues avec eux durant l'été et dont je ne me suis pas caché dans les tournées dans les régions du Québec. Deuxièmement, formellement, le ministre des Affaires sociales annoncera les grands contenus de ces mandats de négociation à l'occasion du dépôt du projet de loi. En ce sens, je trouverais un peu regrettable que quelqu'un joue à la surprise, étant donné qu'on s'était entendu là-dessus à partir du moment où je suis arrivé au ministère que c'est ainsi que cela se déroulerait.

Si à la FMOQ on a choisi, dans le cadre, entre autres, d'une élection qui doit avoir lieu le 12 décembre, pour un nouvel exécutif, d'agiter ou de faire tourner, ou de faire du tambour pour les troupes autour du projet de loi 27, qu'on n'invoque pas que le ministère ne veut pas négocier. Qu'il n'ait

pas négocié pendant l'été sur l'ensemble du dossier, je suis entièrement d'accord, c'est vrai; mais on s'était entendu avec les fédérations pour ne pas négocier pendant l'été, parce que je venais d'arriver au ministère et je leur demandais quelgues mois. Quant au reste, il y a une commission parlementaire sur le projet de loi 27 où elles pourront s'exprimer et, par ailleurs, des tables de négociation où nous serons prêts à négocier en plus de continuer le travail qu'on a fait dans le cas des dossiers particuliers. Nous sommes toujours prêts à régler le problème des omnipraticiens qui font de l'anesthésie en région, à condition que le syndicat lui-même accepte de regarder ce dossier dans la perspective de l'entente échue et non pas de l'entente à venir.

Le Président: Question principale, M. le député de Beauce-Sud.

Fusion des hôpitaux de Beauceville et de Saint-Georges

M. Mathieu: Merci, M. le Président. Ma question s'adressera au ministre des Affaires sociales. Nous savons que le ministre suscite une crise grave entre l'hôpital de Beauceville, situé dans Beauce-Nord, qui dessert 18 000 personnes et celui de Saint-Georges, situé dans Beauce-Sud, qui dessert plus de 40 000 personnes. (16 h 50)

En 1978, une entente avait été signée entre les deux hôpitaux, ratifiée par le CRSSS, mais refusée par le ministre. Or, le 6 novembre, le ministre a pris une décision unilatérale par laquelle il décrète la fusion des deux, détermine une liste de services à Beauceville et nomme un mandataire. Cette décision, évidemment, est inacceptable pour la population; elle soulève de l'inquiétude et un tollé général. La population prétend à juste titre qu'il s'agit de déménager une partie des services et que le reste suivra. Jeudi dernier, il y a eu une manifestation de 3000 à 4000 personnes à l'aréna de Saint-Georges-de-Beauce pour protester contre cette décision. Beauce-Sud ne veut rien enlever à personne, mais veut garder son butin. Cette fusion semble être de la confusion.

C'est pourquoi je demande au ministre, premièrement: Vu que le ministre a précisé la vocation de l'hôpital de Beauceville, peut-il nous dire quelle sera la vocation qu'il entrevoit pour l'hôpital de Saint-Georges? Deuxièmement, quelle somme sera économisée en appliquant sa décision? Troisièmement, peut-il nous assurer que sa décision n'aura pas pour effet de faire perdre des emplois?

Le Président: M. le ministre des Affaires sociales.

M. Johnson (Anjou): M. le Président, à l'égard du préambule évoqué par le député de Beauce-Sud, je pourrai dire que s'il décrit un hôpital desservant 18 000 de population et un autre desservant 40 000 de population, je lui ferai remarquer que, même pas à 20 kilomètres l'un de l'autre, c'est une population de 58 000 qui est desservie par les deux établissements. Je pense que c'est peut-être comme ça qu'il faut le voir.

Il n'y aura pas de développement additionnel en termes de lits à Saint-Georges. Il y a suffisamment de lits, il y a suffisamment d'appareils, il y a suffisamment de personnel qualifié dans ce rayon de quelques milles pour desservir adéquatement les citoyens de toute la Beauce. En ce sens, Saint-Georges doit renoncer à l'idée de faire du développement.

Deuxièmement, à partir du moment où on sait qu'il n'y aura pas de développement de nouveaux lits à Saint-Georges, il faut utiliser au maximum les espaces disponibles à Beauceville et à Saint-Georges pour desservir les citoyens, et pas des potentats, et pas des égoïsmes; ne pas s'adonner à des considérations égoïstes, que ce soit de la part des professionnels ou du personnel. C'est l'intérêt des citoyens qui est en cause. C'est pour ça que j'ai donné mandat au Dr Roy de régler le problème dans le cadre suivant et d'entreprendre tous les pourparlers nécessaires avec les conseils d'administration et les conseils des médecins et dentistes des deux établissements: 1) Fusion juridique des deux établissements. Donc, un hôpital avec un conseil des médecins et dentistes possédant deux pavillons, l'un à Saint-Georges, l'autre à Beauceville. 2) Qu'à Beauceville qui, soit dit en passant, est un hôpital mieux équipé sur le plan physique, plus récent, plus moderne, avec au-delà de 240 lits, alors que l'autre n'en a que 150, on s'assure de ne pas le convertir en Auberge des Gouverneurs, c'est-à-dire que ça serve, dans la mesure du possible, comme un hôpital. Pour cela, conserver à Beauceville, d'une part, la gynécologie et l'obstétrique, la pédiatrie, certains services en clinique externe, de l'hébergement pour patients chroniques, la psychiatrie, l'alcoologie, la toxicologie et des départements tel le département de santé communautaire. Ce qui implique, par définition, que s'il devait y avoir d'autres services il faudrait que les gens s'entendent.

Les médecins de Saint-Georqes peuvent être assurés, dans les circonstances, qu'en maximisant et en permettant, notamment, aux femmes de cette région d'accoucher dans de meilleures conditions qu'elles ne le font en ce moment à Saint-Georges, il y aura à Saint-Georges la chirurgie de deuxième niveau, et même de premier niveau dans la plupart des cas, la médecine interne, en

d'autres termes, l'ensemble des disciplines chirurgicales et médicales spécialisées.

Le reste, c'est du placotage qui est, entre autres, entretenu par certaines personnes qui sont contre le changement et qui vont contre les intérêts des citoyens en le faisant.

Le Président: Question additionnelle, M. le député de Beauce-Sud.

M. Mathieu: M. le Président, je peux vous garantir qu'il n'est pas question d'égoïsme ou d'esprit de clocher entre les deux institutions. Je remarque que le ministre ne répond pas à mes questions qui sont les suivantes: Est-ce qu'il y aura des sommes d'argent d'économisées? Je lui fais mention qu'il y a trois fois plus d'accouchements qui se font à Saint-Georges qu'à Beauceville, d'après ce qu'on m'a dit. Si la situation était à ce point tragique, comment la chose serait-elle tolérée?

Est-il au courant que les négociations avec son mandataire sont rompues parce que celui-ci a refusé l'accès à deux délégués de comités de citoyens? Dans une politique de transparence, c'est pas mal bizarre. Est-ce qu'il a quelque chose à cacher?

Le Président: M. le ministre des Affaires sociales.

M. Johnson (Anjou): Absolument pas. Je pense que le Dr Roy, qui est mon mandataire et qui est lui-même originaire de la Beauce pour avoir pratiqué à Saint-Georges et être lui-même originaire, je crois, de Beauceville, est un homme qui respecte ce milieu de la Beauce, comme je le respecte également. Je dis cependant que, compte tenu de la décision de faire en sorte que la gynécologie, l'obstétrique et la pédiatrie soient à Beauceville afin d'être utilisées d'une façon adéquate pour les citoyennes et les citoyens de la Beauce, dans les meilleures conditions possible, de faire en sorte, également, qu'à Saint-Georges on puisse libérer un certain nombre de lits pour y pratiquer de la chirurgie de deuxième niveau parce que c'est un hôpital où cela se fait comme cela et que cela doit continuer de se faire comme cela, dans les circonstances, il m'apparaît normal et adéquat que des échanges puissent avoir lieu, comme le Dr Roy en a eu avec les membres.

Il s'est cependant, à l'occasion, heurté à certaines personnes qui ont tenté de politiser ce débat. Je pense que le député me comprend très bien et je trouve cela un peu regrettable parce que le mandat du Dr Roy n'est pas de faire de la politique. Le mandat du Dr Roy, c'est de s'assurer que les meilleurs services soient disponibles justement pour les citoyens de la Beauce dans le cadre de cette opération. C'est ce à quoi on va continuer à travailler.

Est-ce qu'il y aura des économies? Sans doute qu'il y en aura. Je peux vous assurer d'une chose, par exemple, c'est que le jour où on aura réussi cette opération qui consiste à fusionner ces deux établissements, on pourra s'assurer qu'il y a un développement adéquat des services de santé pour les citoyens de la Beauce, parce qu'il n'y a plus de médecins qui veulent y aller tellement il y a de chicanes. Il faut s'assurer qu'on continue d'avoir des services de qualité dans la Beauce en faisant en sorte que les hommes politiques qui veulent faire de la politique au lieu de s'occuper de la santé publique sortent du décor.

Des voix: Très bien! Bravo!

M. Mathieu: Question additionnelle.

Le Président: Dernière question additionnelle, M. le député de Beauce-Sud. Il reste deux minutes à la période des questions. Donc, courte question et courte réponse.

M. Mathieu: M. le Président, j'affirme, de mon fauteuil à l'Assemblée nationale, que je n'ai jamais participé à la politisation de ce débat et, si la décision fut politique, j'en conviens, ce n'est pas moi qui l'ai politisée.

Ma question est la suivante: En termes d'emplois, le ministre ne nous a pas répondu. Est-ce qu'il y aura perte d'emplois?

Le Président: M. le ministre des Affaires sociales.

M. Johnson (Anjou): Le principe qui doit être retenu dans des circonstances de fusion, c'est le respect des dispositions des conventions collectives. La fusion, en vertu du Code du travail lui-même, garantit à ceux qui ont ce type de garantie dans le cadre d'un établissement les mêmes droits qu'ils auraient s'il n'y avait qu'un seul établissement. Dans ce sens-là, les travailleurs peuvent être assurés que les droits qu'ils ont continueront d'exister, même si cela peut impliquer, en cours de route, que des équipes soient refaites et qu'on change les habitudes des citoyens. Si les habitudes de ces concitoyens, qui sont des travailleurs du secteur hospitalier, sont dérangées, c'est pour mieux servir l'ensemble de la population de la Beauce, qu'elle soit de Beauce-Nord ou de Beauce-Sud.

Le Président: Fin de la période des questions.

Motions non annoncées.

Enregistrement des noms sur les votes en suspens.

Avis à la Chambre.

M. Gratton: En vertu de l'article 34.

M. Charron: Je crois qu'il y a des questions.

Recours à l'article 34

Le Président: En vertu de l'article 34, M. le député de Gatineau.

M. Gratton: Oui, M. le Président. J'aimerais demander au leader parlementaire, compte tenu qu'il semble qu'on sera appelés à étudier les crédits supplémentaires jeudi et compte tenu qu'on a fait état dans les journaux en fin de semaine d'un certain rapport émanant du service aérien du ministère des Transports, qu'il demande au ministre des Transports s'il serait possible de déposer cette étude préparée par les services de son ministère sur le coût des avions du gouvernement.

Le Président: M. le leader. (17 heures)

DÉPÔT DE DOCUMENTS

Coûts d'exploitation et d'entretien des avions du gouvernement

M. Charron: Si on a le consentement, M. le Président, le ministre des Transports serait en mesure de déposer un document. Puisque la question m'est adressée en vertu de l'article 34, je dépose, au nom du ministre des Transports, un document dont le titre est: Répartition des coûts d'opération et d'entretien des avions, année 1980-1981, et tableaux comparatifs.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Document déposé.

M. Charron: Le document est déposé, M. le Président.

Recours à l'article 34 (suite)

Le Vice-Président (M. Rancourt): En vertu de l'article 34, M. le député de Beauce-Sud.

M. Mathieu: Oui, M. le Président, j'aurais une question à poser au leader du gouvernement. Le discours inaugural mentionnait, entre autres, qu'il y aurait une loi pour venir en aide à la relève agricole. Dans toute la panoplie de projets qui ont été déposés tout à l'heure, rien ne tient compte de cela. Le ministre de l'Agriculture avait déjà annoncé la venue d'une loi permettant un prêt de 50 000 $ pour cinq ans. Le ministre avait dit que la subvention ne dépasserait pas 20 000 $. Je veux savoir si cette loi sera présentée avant Noël.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader.

M. Charron: Cette loi ne sera pas présentée avant Noël.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader de l'Opposition.

M. Levesque (Bonaventure): En vertu des dispositions de l'article 34 et avant que le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation ne nous quitte, au cas où le leader parlementaire du gouvernement voudrait le consulter sur la réponse à donner, puis-je demander au leader parlementaire du gouvernement si le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation l'a approché pour le dépôt d'un projet de loi relativement à la qualité du poisson? En effet, dans un article de la Presse de samedi dernier, c'est-à-dire il y a deux jours, on lit: "Le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation du Québec, M. Jean Garon, déposera devant l'Assemblée nationale, au cours des jours qui viennent, un projet de loi régissant la qualité du poisson capturé par les pêcheurs québécois et destiné tant au marché local qu'au marché international".

Simplement pour l'édification du ministre, l'article se termine comme ceci: "Interrogé par la presse à ce sujet lors de l'ouverture officielle du Salon international de l'agriculture, à laquelle il participait, le ministre Jean Garon s'est refusé à tout commentaire. Il s'est d'ailleurs montré irrité par le fait que cette nouvelle, dont l'Assemblée nationale n'est pas encore au courant, serait déjà communiquée au public." Voici donc une belle occasion, une merveilleuse occasion, soit pour le leader parlementaire ou pour le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, alors que nous sommes réunis ici et que nous pouvons nous prévaloir des dispositions de l'article 34, de nous faire connaître les intentions du gouvernement.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader du gouvernement.

M. Charron: Mon collègue de l'Agriculture éprouve le plus grand respect pour l'Assemblée nationale et, en particulier, pour l'Opposition; c'est exactement pourquoi il s'est montré irrité, en fin de semaine, du fait que la décision toute chaude du Conseil des ministres de mercredi dernier avait conduit le comité de législation à travailler -je pense dans la journée même de jeudi - à la mise au point, sur le plan juridique, des décisions gouvernementales et c'est exactement ce que nous vous avons communiqué cet après-midi non seulement sous la forme du projet de loi no 36, qui a

été déposé par le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, mais également le projet de réglementation qui découlerait éventuellement de cette loi telle quelle.

Je crois que l'Opposition en a amplement à se mettre sous la dent, actuellement, en ce qui concerne les intentions annoncées en fin de semaine par le ministre de l'Agriculture et confirmées aujourd'hui par le dépôt du projet de loi no 36.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader de l'Opposition.

M. Levesque (Bonaventure): Est-ce l'intention du gouvernement de voir ce projet de loi adopté avant l'ajournement de Noël et, deuxièmement, s'il y a une telle réglementation que nous ne connaissons pas, est-ce que nous pouvons nous attendre que cette réglementation nous soit communiquée en temps utile?

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader du gouvernement.

M. Charron: Oui, c'est l'intention du gouvernement de voir cette loi adoptée avant l'ajournement de Noël. Deuxièmement, le ministre de l'Agriculture avait avec lui en Chambre, cet après-midi, un nombre peut-être insuffisant pour l'ensemble des députés, mais suffisant pour une reproduction quelconque dans la journée d'aujourd'hui, de ce projet de réglementation. Si ce n'est pas déjà fait, ce sera fait avant la fin de la séance aujourd'hui.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le ministre...

M. Charron: Avec mon consentement.

Le Vice-Président (M. Rancourt): ... avec votre consentement.

M. Garon: J'aimerais dire que celui qui prend les documents est venu à mon bureau et il m'a dit qu'il remettait dix documents au whip du Parti libéral; il s'agit de projets de réglementation. De même qu'il y a dix projets au whip du Parti québécois. J'aimerais aussi aviser le président que je vais prendre l'avion tout à l'heure pour aller à Matane et à Gaspé pour remettre les projets de règlement aux pêcheurs et aux industriels et, dans les jours qui vont suivre, j'irai également aux Îles-de-la-Madeleine et à Sept-Îles, encore en avion, parce qu'autrement je ne pourrais pas revenir à la session avant deux ou trois jours.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député d'Orford, en vertu de l'article 34.

M. Vaillancourt (Orford): J'aimerais demander au leader s'il est au courant que le ministre de l'Agriculture va déposer un projet de loi pour changer le nom des chevaux canadiens en chevaux québécois. C'est lui qui a mentionné, lors d'une visite qu'il a faite à Deschambault dans le comté de Portneuf, que désormais les chevaux canadiens devront s'appeler les chevaux québécois.

M. Charron: M. le Président, vous connaissez bien le député d'Orford. Je pense qu'il a essayé de nous passer un sapin.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Affaires du jour. Article 34, M. le leader.

Avis de la Chambre

M. Charron: Aux affaires du jour, je voudrais donner avis de nos intentions, pour la semaine, auxquelles j'espère collaborera l'Opposition. Je souhaiterais que le débat sur la motion inscrite au nom du premier ministre, qui va reprendre dans quelques instants, s'achève ce soir et que nous puissions, vers la fin de la séance de ce soir, procéder au vote.

Demain, après la période des questions, nous devrions entamer l'étude d'un projet de loi sur lequel on m'annonce un certain nombre d'interventions du côté de l'Opposition. Il concerne la société Hydro-Québec. Nous poursuivrons demain soir et, si ce n'est pas terminé, nous poursuivrons mercredi et possiblement jeudi l'étude de ce projet de loi no 16. S'il n'est pas adopté en deuxième lecture, jeudi midi, par exemple, cela aurait pour effet de retarder l'étude du budget supplémentaire, dont parlait le député de Gatineau, à la semaine prochaine.

Reprise du débat sur la motion déterminant

les conditions sans lesquelles le Québec

ne peut accepter le rapatriement de la constitution

Le Vice-Président (M. Rancourt): Reprise du débat sur la motion de M. Lévesque, premier ministre, député de Taillon. M. Chevrette, au nom du ministre de la Justice avait demandé l'ajournement. Donc, M. le ministre de la Justice.

M. Marc-André Bédard

M. Bédard: M. le Président, face aux événements constitutionnels que nous vivons, je ne voudrais pas aujourd'hui écrire ce que sera le jugement définitif de l'histoire, mais je sais que la population du Québec se trouve devant une situation qu'elle n'avait jamais cru possible. Alors que les partis d'Opposition, à Ottawa, sont disposés à donner suite à une revendication

fondamentale du Québec, à savoir le droit de retrait avec compensation financière obligatoire, ceux qui résistent et qui refusent d'accepter cette revendication du Québec, ce sont les députés du Québec à Ottawa, c'est-à-dire ceux et celles qui prétendent représenter les intérêts du Québec. Autrement dit, au Parlement fédéral, les exigences du Québec, les droits du Québec sont mieux défendus par les partis d'Opposition que par les soi-disant représentants du Québec à Ottawa. (17 h 10)

Pendant ce temps, ici, à l'Assemblée nationale, l'Opposition libérale, aveuglée par la partisanerie et la haine de l'adversaire politique, l'Opposition libérale, dis-je, s'apprête à voter contre une résolution du gouvernement qui exprime les exigences minimales, mais fondamentales, dont le peuple du Québec est en droit d'exiger le respect. Plus que cela, l'Opposition officielle du Québec, l'Opposition libérale, fait savoir à Ottawa qu'elle se contenterait de moins que ce qui est exigé par le gouvernement du Québec. Qui aurait cru possible que le Parti libéral en soit rendu là, après l'engagement de son chef d'effectuer un virage nationaliste proquébécois après le résultat du 13 avril dernier? Qui aurait cru possible, M. le Président, puisque c'est le cas, que les vrais droits de veto contre les intérêts du Québec, ce sont des hommes comme Pierre Elliott Trudeau, Jean Chrétien et tous les députés du Québec, libéraux serviles, que la population a élus à Ottawa pour défendre les intérêts du Québec? Aussi incroyable que cela puisse paraître, ce sont des francophones qui sont les adversaires les plus agressifs à l'endroit des demandes minimales, mais fondamentales, du Québec au point de vue constitutionnel.

Je crois, M. le Président, qu'on peut dire que les masques tombent véritablement et qu'enfin la population est à même de voir les vrais visages de tout ce beau monde, les vrais visages et les vraies intentions des dirigeants du Parti libéral, tant fédéral que provincial, lorsqu'il s'agit de la défense des intérêts du Québec. Malgré les efforts de l'Opposition officielle pour faire croire le contraire, la motion que nous étudions aujourd'hui s'inscrit dans la lignée de celle qu'adoptait l'Assemblée nationale il y a quelques semaines à peine. Elle reprend les principes de base que l'on retrouve dans l'entente que le premier ministre du Québec, qui a respecté sa parole, signait avec sept autres premiers ministres provinciaux le 16 avril dernier. C'est cette entente, M. le Président, que les premiers ministres des provinces anglophones ont déchirée dans le dos du Québec.

Au cours de ce débat, l'Opposition libérale s'est bien gardée de rappeler ces signatures qui ont été reniées. Au contraire, les libéraux provinciaux se sont acharnés à minimiser les efforts de bonne foi qui ont été faits par le premier ministre du Québec pour en arriver à une entente; pas n'importe quelle sorte d'entente, une entente dans la dignité et le respect des droits du Québec.

Tout au long de ce débat, l'Opposition officielle a employé toutes ses énergies à décortiquer et à essayer de dévaloriser les moindres gestes posés par le gouvernement du Québec au cours de ces négociations. Mais je crois sincèrement que l'Opposition officielle n'a trompé personne avec cette attitude qui lui était dictée uniquement, encore une fois, par la partisanerie et la haine de l'adversaire politique.

Lors du référendum, M. le Président, plusieurs de ces premiers ministres qui ont signé sont venus visiter le Québec et déjà, à ce moment-là, lors du référendum, un fort pourcentage des Québécois et des Québécoises savaient que leur parole donnée, leurs promesses, ne valaient rien. Ils ont voté en conséquence. Aujourd'hui - c'était le temps qu'on le sache - toute la population du Québec sait que même les signatures de ces premiers ministres ne valent rien.

Au-delà de cette trahison, M. le Président, et avec quelques semaines de recul, il me semble maintenant que ce qui s'est passé illustre bien la réalité canadienne. C'est l'aboutissement de l'histoire du Québec et la répétition, avec de légères variantes, d'épisodes où d'autres gouvernements qui nous ont précédés se sont retrouvés isolés face au Canada anglais, que ce soit les gouvernements de MM. Lesage, Johnson ou Bourassa.

Cette motion sur laquelle nous aurons à voter demande la reconnaissance de l'égalité des deux peuples fondateurs. Cet ajout était nécessaire puisgue auparavant nous prenions cette dualité comme étant une chose acguise alors que le dénouement de la conférence a clairement illustré la négation de cette réalité fondamentale pour le peuple québécois. Ayant été ignorée, il est maintenant nécessaire que cette égalité soit clairement exprimée.

Cette motion réaffirme ensuite notre désir de protéger les pouvoirs de l'Assemblée nationale dans les domaines de sa compétence face à l'intention du fédéral d'inclure dans son projet des éléments qui auront des conséquences certaines et importantes sur la compétence du Québec d'adopter ses propres lois. Je rappellerai simplement que la Cour suprême a confirmé l'opinion qu'émettaient les juristes experts du gouvernement du Québec concernant l'effet du projet fédéral sur la validité de nos lois, de nos règlements et de nos directives. De plus, il ne fait aucun doute que le projet fédéral ampute les droits du Québec non seulement dans l'enseignement, mais aussi dans le secteur économigue. C'est bien beau

de dire qu'on veut une charte constitutionnelle généreuse, comme le dit souvent le chef de l'Opposition, sauf qu'on oublie de dire aux Québécois que nous avons déjà une Charte des droits et libertés qui est une des plus évoluées dans l'ensemble canadien. Cette charte fédérale doit être analysée avec beaucoup de soin de manière qu'elle n'ait pas comme effet de restreindre les pouvoirs de l'Assemblée nationale. C'est ce que fait cette charte avec plusieurs des dispositions qui y sont contenues.

Enfin, la motion reprend la pierre angulaire de l'entente signée par le premier ministre du Québec et sept autres premiers ministres en avril dernier, c'est-à-dire le droit de retrait avec compensation financière obligatoire. Depuis quelque temps, j'ai entendu, comme bien d'autres, le chef du Parti libéral du Québec déclarer que le Québec avait laissé tomber son droit de veto. Sur ce point, l'Opposition répète servilement l'affirmation faite par MM. Trudeau et Chrétien qui sont manifestement heureux d'avoir trouvé un allié et un complice chez les libéraux provinciaux qui savent très bien qu'à partir du moment où un accord n'est pas respecté le droit de veto reste entier. L'Opposition devrait savoir qu'en endossant cette fausseté et bien d'autres faussetés qui sont véhiculées par les libéraux fédéraux elle contribue à diminuer la force de négociation du gouvernement du Québec. D'ailleurs - cela, l'Opposition le sait même si elle affirme le contraire - non seulement le Québec n'a pas laissé tomber son droit de veto; au contraire, il l'a renforcé en exigeant un droit de retrait avec compensation obligatoire. Cela, nos représentants du Québec, les libéraux fédéraux à Ottawa, l'ont vu rapidement. La meilleure preuve en est l'acharnement de Pierre Elliott Trudeau, et de Jean Chrétien à triturer, justement, ce droit de retrait avec compensation financière obligatoire, qui est un des éléments essentiels, de manière à lui enlever tout le sens qu'il avait au moment où nous avons signé cette entente. (17 h 20)

II faut bien comprendre que le droit de veto traditionnel du Québec est essentiellement un droit de s'opposer à ce que nos pouvoirs soient modifiés sans notre consentement. Ce droit de veto a constamment placé les gouvernements du Québec dans la difficile position de s'opposer à des changements dans la répartition des pouvoirs faits aux provinces anglophones qui désiraient légitimement centraliser davantage la constitution canadienne, alors que le Québec a constamment recherché un accroissement de ses pouvoirs.

L'observateur le moindrement attentif des conférences fédérales-provinciales sait que les autres provinces du Canada partagent toutes, à des degrés divers, une conception beaucoup plus centralisatrice du gouvernement fédéral que celle des Québécois. Pour ces provinces anglophones, le véritable gouvernement national est à Ottawa et c'est normal. Quant à nous, Québécois, le seul gouvernement que nous contrôlons est ici à Québec et notre situation en Amérique du Nord nous oblige à poursuivre son renforcement, indépendamment de nos options politiques.

Ce droit de veto pur et simple du Québec a donc empêché non seulement le système fédéral d'évoluer, mais il a aussi empêché le Québec de voir ses propres pouvoirs augmenter. Il fallait donc trouver une solution pour sortir du cercle vicieux qui nous enfermait constamment dans l'éternelle et difficile position d'empêcheurs de tourner en rond.

Nous avons donc exigé un droit de retrait avec compensation financière qui, s'il avait été accepté, aurait renforcé la notion de droit de veto traditionnel du Québec en permettant au reste du Canada de se doter d'un État fédéral selon sa conception, tout en donnant au Québec la possibilité de mettre sur pied ses propres programmes, selon ses intérêts et de conserver l'intégrité des pouvoirs qui lui sont conférés par la constitution.

Après sa visite à Ottawa, le chef de l'Opposition a semblé réaliser mieux l'importance capitale de ce droit de veto ou de ce droit de retrait avec compensation financière obligatoire qui est, en fait, un droit de veto qui s'applique aux seuls pouvoirs du Québec.

Je me permettrai, M. le Président, de donner un exemple. Au Québec, on connaît bien le secteur de la justice et les conséquences de l'application d'une forme de droit de retrait sans clause compensatoire. En effet, le Québec, qui a la responsabilité exclusive de l'administration de la justice, a décidé, comme vous le savez, de mettre sur pied son propre corps de police, la Sûreté du Québec. Par contre, les provinces anglophones, sauf l'Ontario, ont préféré s'en remettre au fédéral et utiliser chez elles les services de la Gendarmerie royale du Canada. C'est ainsi qu'à même les impôts que nous payons à Ottawa, nous les Québécois, les services policiers offerts dans ces huit provinces par la Gendarmerie royale du Canada sont financés en partie par les Québécois. Ce fait, dénoncé d'abord par Jérôme Choquette, l'ancien ministre libéral de la Justice, a privé le Québec de plus de 1 000 000 000 $, depuis 1966. La réclamation que nous adressons chaque année aux autorités fédérales est de plus de 150 000 000 $, par année. M. le Président, en 1966, si nous avions eu le droit de retrait avec compensation financière obligatoire, ce n'est pas moins de 1 000 000 000 $ de plus qu'il y aurait dans les coffres du

gouvernement depuis 1966.

D'ailleurs, cette décision du Québec n'a jamais été mise en question par les gouvernements qui se sont succédé. La constitution, ce n'est pas seulement du papier, c'est aussi de l'économie. Un des meilleurs exemples est celui que je viens de vous donner. Si, en 1966, nous avions eu ce droit de retrait avec compensation financière obligatoire, ce n'est pas moins de 1 000 000 000 $ qu'il y aurait de plus dans les coffres du Québec et nous n'aurions pas été obligés, comme c'est le cas présentement, de continuellement nous mettre à genoux pour réclamer notre dû, une partie des impôts des Québécois, et nous aurions à ce moment-là obtenu ces sommes qui nous auraient peut-être permis, aujourd'hui, de ne pas être obligés de procéder aux restrictions budgétaires que toute la population connaît.

M. le Président, le retrait ou l'"opting-out" avec compensation financière n'est pas nouveau dans le système de relations fédérales-provinciales. En fait, des accords de cette nature ont été conclus à plusieurs reprises entre MM. Lesage et Pearson dans les années soixante, mais c'était avant l'arrivée au pouvoir de Pierre Elliott Trudeau, dont le gouvernement a refusé, par la suite, de continuer dans cette voie qui avait permis au Québec de se doter de plusieurs outils importants pour son développement social et économique.

Il faut toutefois noter que ces ententes n'ont pas permis au Québec d'acquérir des responsabilités nouvelles en termes de pouvoirs, puisqu'elles furent toutes conclues dans des domaines de juridiction provinciale. En fait, elles ont permis d'éviter un plus grand envahissement du fédéral dans des secteurs que la constitution reconnaît aux provinces. C'est en utilisant justement ce droit de retrait que fut créé notre régime de rentes, plus avantageux pour les Québécois que le régime canadien qui s'applique au reste du Canada. Cette formule permet aussi de faire évoluer notre régime de rentes à notre rythme et selon nos intérêts et nos conceptions.

Il y a quelques années, l'Assemblée nationale du Québec adoptait une loi qui permettait de diminuer le nombre d'années de cotisation des femmes qui se retirent du marché du travail pour élever leur famille de façon que leurs rentes ne soient pas diminuées lorsque viendra le temps de la retraite. Tout cela a été possible en fonction d'un droit de retrait, même si l'Ontario n'était pas d'accord. On le sait, notre régime de rentes est plus avantageux au chapitre des rentes versées aux invalides et aux veuves. Ces rentes sont effectivement plus élevées au Québec que dans le reste du Canada.

De plus, l'établissement de notre propre régime de rentes a permis de créer un outil économique important, la Caisse de dépôt et placement, qui contribue au développement économique du Québec. Plusieurs ententes semblables ont été signées à cette époque entre le Québec et le gouvernement du Canada dans le secteur social, mais jamais aucune autre entente n'a été possible depuis que Pierre Elliott Trudeau, un francophone, est premier ministre du Canada.

M. le Président, c'est là qu'on voit qu'une constitution, ce ne sont pas seulement des mots qu'on écrit, ça représente également une réalité économique. Souvent, on entend, soit le chef de l'Opposition, ici à l'Assemblée nationale, ou nos représentants du Québec à Ottawa, dire: Finissons-en avec la constitution, ensuite, on va parler d'économie. Sauf qu'ils oublient de dire à la population qu'une constitution, justement, une fois qu'elle est écrite, représente des dollars au bout du compte. Je viens de vous en donner un exemple concernant simplement un petit secteur de la justice, à savoir la Sûreté du Québec. Cela représente plus d'un milliard de dollars que les Québécois auraient en caisse au moment où je vous parle sans être obligés de se mettre à genoux. Nous avons également un autre exemple avec le régime de rentes.

Maintenant, M. le Président, si on regarde un tout petit peu en avant et sans fabuler sur les conséquences de ce que M. Trudeau veut imposer au Québec, il est fort plausible que les provinces anglophones veuillent se départir de certains pouvoirs ou programmes qu'elles administrent actuellement, particulièrement ceux où il y a un coûteux dédoublement de fonctions avec des organismes provinciaux. On serait alors dans la position où le fédéral se verrait confier une responsabilité par les provinces anglophones, et le Québec, qui voudrait conserver la sienne, serait doublement pénalisé. Comme dans le cas de la police, les Québécois devraient défrayer le coût de leurs propres services et financer ceux des autres provinces à même les impôts qu'ils paient à Ottawa.

Ainsi, par exemple, un transfert de juridiction sur les cours criminelles peut facilement coûter au Québec 50 000 000 $ s'il veut garder sa responsabilité. Un transfert concernant les prisons, si nous voulons garder notre responsabilité dans ce secteur, peut facilement représenter pour le Québec un coût de 70 000 000 $ (17 h 30)

Une constitution ce n'est pas seulement des écrits, ce sont des réalités économiques. En résumé, et je termine là-dessus, M. le Président, les avantages du droit de retrait avec compensations financières sont les suivants. Il permet au fédéralisme canadien d'évoluer en tenant compte des deux peuples fondateurs. Il permet au Québec, en exerçant

ses pouvoirs, de mettre sur pied des programmes mieux adaptés à ses besoins spécifiques. Le droit de retrait avec compensations financières est enfin un droit de veto du Québec pour ses propres pouvoirs puisqu'il nous permet de nous opposer à un transfert vers le fédéral, tout en exigeant une compensation financière. Il est infiniment plus avantageux pour le Québec, puisqu'il nous permet d'évoluer selon nos besoins et non de nous placer dans la position de l'empêcheur de tourner en rond. Ceci est très important, vous le savez, au moment où on en discute, M. le Président.

Je terminerai en redisant qu'il est incroyable de penser, de réaliser qu'alors que le droit de retrait avec compensations financières obligatoires représente une des demandes fondamentales du Québec dans ce débat constitutionnel, ceux qui s'y opposent, ceux qui, effectivement, je le dis encore une fois, sont les vrais droits de veto contre les intérêts du Québec, ce sont nos francophones de service à Ottawa et l'Opposition libérale officielle, ici, dans cette Assemblée nationale.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Mont-Royal.

M. Rocheleau: Question de règlement, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Question de règlement, M. le député de Hull.

M. Rocheleau: Cela semble être une question très importante que nous traitons actuellement et je me rends compte que du côté ministériel on n'a pas quorum dans cette Assemblée. Je demanderais que les gens soient rappelés, s'il vous plaît.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Je vais vérifier, M. le député de Hull.

Mme Lavoie-Roux: Ils entrent. Ils ne sont pas à leur place.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Nous avons quorum.

M. le député de Mont-Royal.

M. John Ciaccia

M. Ciaccia: L'occasion de la discussion de cette motion est très bienvenue, quant à moi, dans la mesure où, une fois de plus, elle met en lumière les vraies intentions et la vraie philosophie du gouvernement en ce qui concerne non seulement ce pays et son avenir, mais aussi le Québec et ceux qui en font partie.

Je dis cela, M. le Président, parce que subitement le gouvernement redécouvre dans le débat constitutionnel, pour les besoins de sa cause séparatiste, le concept des deux peuples fondateurs.

Je dis "redécouvre" parce que alors deux questions me viennent à l'esprit, auxquelles je demanderais une réponse du gouvernement. La première question: Pourquoi le gouvernement, le premier ministre a-t-il oublié ce concept dans l'entente du 16 avril? Est-ce que les deux peuples fondateurs n'existaient pas à cette date? Qu'est-ce qui obligeait le gouvernement à signer une entente avec les sept autres provinces sans l'inclusion de ce concept des deux peuples fondateurs? Le gouvernement n'a pas donné de véritable réponse.

La deuxième question, le deuxième point sur la motion est qu'à mon sens la formulation même de ce concept, telle que contenue dans la motion, est incomplète, insatisfaisante et ne reflète nullement la réalité sociale et ethnique de ce pays.

Où sont donc les autochtones dans cette motion? Est-ce un moyen de nier à l'avance l'existence de leurs droits, comme cela s'est traduit à l'occasion des événements de Restigouche? Est-ce parce que le gouvernement n'a pas l'intention de respecter les droits des autochtones dans l'entente de la Baie-James, tel que les autochtones et leurs représentants s'en sont plaints? Il manque un élément essentiel quant à la composition de ce pays dans la motion telle que formulée par le gouvernement. À part l'absence des autochtones, dont nous parlerons plus longuement bientôt, où sont les Québécois et les Canadiens d'origine autre que française ou anglo-saxonne dans votre motion? Ne sont-ils pas des Canadiens, eux aussi? Ne sont-ils pas des Québécois? Ne travaillent-ils pas au développement et à l'enrichissement du Québec? En un mot, sont-ils de si mauvais citoyens que le gouvernement ne signale même pas leur présence dans la motion?

Enfin, la formulation de cette motion nous en dit très long sur l'estime et la considération dans lesquelles ce gouvernement tient tous nos concitoyens qui n'ont peut-être pas eu la chance d'être d'origine française ou d'origine anglo-saxonne. Dès lors, il est ironique de vouloir demander justice et équité quand il s'agit de deux catégories de citoyens et d'agir, en fait, de sorte que cette égalité ne soit pas accessible à d'autres catégories.

Ce que cette motion sous-entend par ce concept, c'est que nous avons au Québec, d'après le gouvernement, une société de privilèges et non une société de droits. C'est ce même gouvernement, qui veut supposément intégrer les communautés minoritaires au Québec qui, pour montrer sa reconnaissance, continue de les mettre à part de la population en créant spécialement pour elles un ministère des Communautés

culturelles. Les communautés minoritaires au Québec ne veulent pas de ministère spécialisé à leur endroit; elles veulent, comme les autres citoyens du Québec, bénéficier des services de tous les ministères.

C'est à ce niveau qu'on peut voir la philosophie d'approche qui nous différencie, nous, les libéraux, des membres du gouvernement du Parti québécois. Le programme constitutionnel du Parti libéral prévoit que la nouvelle constitution affirmera l'égalité foncière des deux peuples fondateurs, oui, et des deux communautés linguistiques qui ont donné et confèrent encore à ce pays sa place originale dans la famille des peuples. Cela comprend les peuples fondateurs, mais cela comprend aussi les membres des communautés linguistiques d'autre origine que française ou anglaise.

On prévoit aussi que la constitution reconnaîtra les droits fondamentaux des peuples qui ont été les premiers habitants de ce pays et on prévoit que la constitution affirmera la richesse de l'apport culturel, économique et social fourni par les groupes ethniques et affirmera le droit de ceux-ci à la préservation et à l'épanouissement de leur héritage propre, ainsi qu'à une pleine participation à la vie et aux institutions publiques. Plus particulièrement, les institutions publiques et parapubliques des provinces et de l'État fédéral devront favoriser, dans le respect de la dualité linguistique du pays, la pleine participation des communautés ethniques et de leurs membres. Voilà l'approche ouverte du Parti libéral envers la constitution, envers ce pays et envers tous les citoyens qui font partie du pays, du Québec et du Canada.

Je voudrais qu'on me comprenne bien. Je suis absolument d'accord pour la reconnaissance, dans la constitution canadienne, de l'existence et de l'égalité des deux communautés linguistiques au pays et je crois qu'il appartenait au Québec, par l'exercice de son veto, de continuer de manière positive à accréditer cette notion sur tous les forums où était discutée la constitution. La dualité canadienne ne peut être garantie par une déclaration incomplète et inadéquate qui exclut des centaines de milliers de personnes au Québec et des millions de personnes au Canada qui ne font pas partie des soi-disant deux peuples fondateurs, mais elle est garantie par le droit de veto du Québec sur tout changement important à la constitution, même ceux qui n'impliquent pas des questions de compensations financière. (17 h 40)

M. le Président, j'entendais le ministre de la Justice dire que la formule de Vancouver, qui a été signée par le gouvernement du Parti québécois et sept autres provinces, donnait un droit de veto.

Absolument pas, M. le Président. Je vais vous donner un exemple parfait. Si, dans la province d'Alberta, il y a des écoles pour des francophones, M. le ministre de la Justice, et si, dans l'avenir, on veut enlever ce droit par un changement à la constitution, un droit de veto protégerait les francophones d'Alberta, les francophones dans les autres provinces, mais quelle compensation financière le gouvernement du Québec peut-il demander parce qu'on a enlevé des droits aux francophones au Manitoba, par exemple? L'article 133 qui s'applique au Manitoba, sans le droit de veto du Québec, comment allez-vous protéger ces gens dans ces provinces? Allez-vous dire: Les francophones au Manitoba, ça vaut 10 000 000 $, ça vaut 1 000 000 000 $? M. le Président...

M. Bédard: Question de privilège.

M. Ciaccia: II ne veut pas me laisser parler.

Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît; Question de privilège, M. le ministre de la Justice.

M. Bédard: J'ai bien dit, M. le Président, que c'était un droit de veto sur tous les pouvoirs du Québec. Concernant l'exemple que donne le député, la protection des minorités, il sait très bien que le gouvernement fédéral avait toute latitude pour les protéger dans le passé et qu'il n'a jamais voulu exercer sa responsabilité.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Vous avez droit de parole, M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: M. le Président, le ministre répète les bêtises qu'il a dites dans son discours. Il répète ces bêtises en essayant de faire croire à la population qu'une compensation financière va protéger l'article 133 au Manitoba ou va protéger les droits des francophones en d'autres provinces. Dans le nouveau projet fédéral, il y a des protections pour les francophones. À l'avenir, M. le Président, le droit de veto du Québec aurait protégé ces personnes, mais pas une compensation financière. N'essayez donc pas de faire croire à la population... Dites donc la vérité.

M. Bédard: Le gouvernement fédéral aprotégé les francophones!

M. Ciaccia: Au lieu de blâmer le gouvernement fédéral pour ce qui s'est passé dans le passé, on vit aujourd'hui, essayons donc de bâtir une nouvelle constitution pour tout le monde, aujourd'hui, en tenant compte de la réalité d'aujourd'hui. Arrêtez donc d'essayer de faire passer votre séparatisme

sur ce qui s'est produit en 1890 au Manitoba. Vous faites de la démagogie. M. le Président, il y a une ironie assez tragique à constater que c'est l'actuel gouvernement du Québec qui n'a pas insisté sur le concept du dualisme canadien, qui a abandonné le rôle de protecteur de la dualité canadienne, qui l'a même mise en jeu en abandonnant le droit de veto. Et c'est ce même gouvernement qui, aujourd'hui, fait semblant de se réclamer du dualisme qu'il a torpillé par ses politiques, par sa philosophie et par son style de négociation.

Ce n'est pas la dualité canadienne, M. le Président, que ce gouvernement veut. C'est l'indépendance du Québec. Il va prendre tous les moyens pour y arriver. Rappelons-nous leur philosophie: la fin justifie les moyens. S'il faut abandonner le veto du Québec, le 16 avril, et s'il faut abandonner le concept des deux peuples fondateurs, le 16 avril, ça serait mieux pour revenir et essayer de convaincre la population qu'il faut faire la séparation. C'est ça leur jeu, M. le Président, et la population voit ce jeu. La supercherie de ce gouvernement est devenue encore plus grossière lorsqu'il revendique tardivement l'imposition de l'article 133 à la province d'Ontario. Nous savons tous que jamais le gouvernement du Québec n'en a fait un élément de négociation. Il aurait pu l'inclure dans l'entente du 16 avril, il ne l'a pas fait.

Pourtant, plusieurs groupes issus des communautés minoritaires - on oublie de les mentionner dans la résolution actuelle du gouvernement - ont fait campagne pour que l'Ontario soit précisément assujetti à l'article 133. À cet égard, vous me permettrez, M. le Président, de souligner la présentation faite devant le comité mixte de la Chambre des communes et du Sénat, sur la constitution, par le Congrès des Italo-Canadiens du Québec. Ces derniers ont non seulement apporté leur appui au fait français au Québec et au Canada, mais ils ont réclamé que l'article 133 soit étendu à l'Ontario, au Nouveau-Brunswick et, éventuellement, au reste du Canada.

Nous croyons vraiment à la dualité canadienne, parce que nous sommes Québécois et qu'il nous importe que le fait français s'affirme et se développe dans l'ensemble du pays. D'autres groupes ont aussi eu la même attitude. Mais comment voulez-vous que cette action puisse avoir quelque effet, si notre propre gouvernement du Québec n'a jamais levé le petit doigt pour soutenir cette action, trop préoccupé qu'il était à former le front du refus que l'on sait pour aboutir au résultat que chacun connaît.

M. le Président, est-ce là l'attitude sincère et honnête d'un gouvernement qui recherche vraiment la reconnaissance de la dualité canadienne? Ce n'est pas la dualité canadienne que le gouvernement recherche, mais l'indépendance du Québec. La dualité canadienne, il aurait pu la protéger, l'inclure dans son entente du 16 avril.

J'ai toujours affirmé ma méfiance profonde à l'égard de la volonté de négocier le fédéralisme par ce gouvernement. Je ne crois pas et je n'ai jamais cru que ce gouvernement avait l'intention, pas plus hier qu'aujourd'hui, de négocier le renouvellement du fédéralisme canadien. Je demeure convaincu que ni hier, ni aujourd'hui, le gouvernement du PQ ne peut ni ne veut construire un Canada uni et fraternel. Le but caché des négociations du Parti québécois a toujours été de prouver qu'il était impossible d'en venir à un accord avec le reste du Canada, afin de pouvoir revenir devant le peuple du Québec pour l'amener, par réaction, à accepter à contrecoeur la solution de l'indépendance du Québec.

À ce propos, quand on parle d'un Canada uni et fraternel, je voudrais m'adresser au premier ministre, au Québécois qu'il est et à l'homme de coeur qu'il prétend être. Je voudrais lui demander s'il est raisonnable de construire un pays, même si on est indépendantiste, sur la base de la discorde, de la haine entre communautés, de la méfiance qu'on établit entre francophones et anglophones, entre francophones et communautés ethniques. Est-il vraiment nécessaire d'enflammer les passions et de désigner nommément, dans un discours inaugural et dans tout ce débat constitutionnel, une section de la population, de notre société, à la vindicte publique? Personne, M. le Président, n'aime être montré du doigt. Tout citoyen, quelles que soient sa langue, sa religion, ses origines, doit pouvoir compter sur le respect du gouvernement qu'il a élu et de l'État auquel il contribue. Si on s'en prend aux collectivités, aux anglophones, c'est étrange... Je demanderais au premier ministre de donner le bon exemple, d'arrêter de semer la discorde entre communautés et d'arrêter d'enflammer les passions des Québécois pour essayer d'arriver à ses objectifs.

M. le Président, nous devons tous vivre ensemble au Québec, quelle que soit l'option politique définitive que nous aurons choisie, parce que, au-delà des différences d'opinions, il y a un attachement et un enracinement au Québec pour tous ceux qui l'habitent, quelle que soit leur origine ethnique, quelle que soit leur langue.

M. le Président, peut-on arriver à la reconnaissance des droits du Québec? Comment cette reconnaissance peut-elle nuire aux droits de l'Assemblée nationale? Si l'Assemblée nationale est l'expression de la souveraineté de la population du Québec, en quoi le fait pour cette Assemblée de garantir l'expression des droits individuels des citoyens du Québec constitue-t-elle une

insulte à l'Assemblée nationale? On ne pourra jamais me faire croire que donner le droit d'accès aux écoles à moins de 5000 petits enfants, selon la clause Canada, sur une population dans les écoles anglophones de 150 000 personnes qui diminue tous les ans de 9%, on ne pourra jamais me faire croire, dis-je, que c'est là la raison pour laquelle on ne veut pas renouveler la constitution et que cela va faire tellement de nuisances. L'article 23, même au complet, cela ne ferait pas de tort. Ce n'est pas seulement cet aspect de la clause Canada. Quand on essaie d'enflammer les passions des Québécois, parce que quelqu'un propose la clause Canada, je pense que la population va voir clair et jugera ce gouvernement en conséquence. (17 h 50)

M. le Président, il y a un autre aspect de la résolution que j'ai déjà signalé au début de mon intervention: c'est le manque de références aux autochtones et à la reconnaissance de leurs droits. Nous l'avons délogé, ce peuple, et nous lui avons causé des problèmes trop nombreux pour même les énumérer. Reconnaître les droits des autochtones, cela ne veut pas dire qu'il faut leur remettre le pays. Ce n'est pas cela du tout. Cela ne veut pas dire non plus qu'on peut s'en acquitter seulement en payant des sommes d'argent. Ces peuples ont le même droit à la survivance, à la survivance culturelle et à leur survivance comme peuple que tous les autres peuples au Canada. La reconnaissance des droits implique la reconnaissance d'un mode de vie différent du nôtre, la reconnaissance de leur culture, de leurs traditions et les moyens de les sauvegarder; la reconnaissance des besoins qu'ils ont de ressources financières qui doivent leur permettre non seulement de survivre, mais aussi de s'épanouir. Il est clair que dans la mesure où l'on reconnaît les droits des gens, leur condition économique ou culturelle s'améliore très sensiblement. C'est pour cela qu'il est essentiel de reconnaître les droits des autochtones dans la constitution. Je suis heureux que le gouvernement fédéral et les autres provinces l'aient fait, mais je demande encore où se situe le Québec. Est-ce que, encore une fois, au nom des droits de l'Assemblée nationale, on va refuser de reconnaître d'autres droits des citoyens, cette fois-ci, le droit des autochtones? Je pense que c'est une très mauvaise excuse à donner pour refuser de reconnaître les droits des premiers habitants de ce pays.

En conclusion, M. le Président, je ne voterai pas en faveur de cette résolution, car elle ne correspond pas à la réalité, ni ne répond à aucune des préoccupations immédiates de la population du Québec. Cette résolution ne fera pas que le gouvernement du Québec aille négocier raisonnablement avec nos autres partenaires canadiens et, à ce stade-ci, elle n'est qu'un paravent dérisoire derrière lequel se cache le gouvernement pour son manque de cohérence à l'endroit du Québec et pour la promotion insidieuse de sa thèse indépendantiste. C'est une stratégie du Parti québécois qui ne veut pas de nouvelle constitution et qui veut prendre toutes les excuses possibles pour faire de l'obstruction pour promouvoir ses objectifs.

Quant à la réalité de ce pays, cette motion l'ignore totalement, puisqu'à toutes fins utiles, elle relègue au rang de citoyens de deuxième classe plus d'un tiers de la population canadienne, en plus d'iqnorer totalement les autochtones de ce pays.

M. Président, à cause de cet irréalisme, il est clair que cette motion ne peut être considérée comme une contribution positive visant à véritablement contribuer au renouvellement de la constitution canadienne. Comme le ministre des Finances l'a dit une fois au cours de l'une de ses envolées, le gouvernement nous convie à être comme le boeuf qui regarde passer le train de la constitution. C'est malheureux, mais c'est là le seul rôle que s'est donné ce gouvernement. Je sais que la population du Québec s'en souviendra, parce que, dans les mots d'Ernest Renan, "ce qui fait que des hommes forment un peuple, c'est le souvenir des grandes choses qu'ils ont faites ensemble et la volonté d'en accomplir de nouvelles." M. le Président, ce n'est pas ce que le Parti québécois nous offre.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Châteauguay.

M. Dussault: M. le Président, je demande la suspension du débat.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Nos travaux sont suspendus jusqu'à 20 heures.

(Suspension de la séance à 17 h 55) (Reprise de la séance à 20 heures)

Le Vice-Président (M. Jolivet): À l'ordre, s'il vous plaît;

Veuillez vous asseoir.

M. Chevrette: M. le Président...

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le whip.

M. Chevrette: Avec le consentement du whip de l'Opposition, j'aimerais inverser l'ordre des orateurs et demander au député de Frontenac de parler avant le député de Châteauguay. D'accord?

M. Pagé: Aucun problème, M. le

Président, quant à moi.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Cela va. Donc, M. le député de Frontenac, vous avez maintenant la parole.

M. Gilles Grégoire

M. Grégoire: M. le Président, je ne serai pas très long sur cette motion, mais je voudrais au moins appuyer la motion du premier ministre qui est présentement devant cette Assemblée nationale.

Au mois de mai 1980, il y a eu un référendum au Québec. Certains citoyens québécois ont voté oui à la proposition d'alors, à savoir: oui à des négociations pour une nouvelle entente entre le Québec et le Canada sur la base de la souveraineté-association. D'autres ont voté non, mais il était évident, également, que ces gens admettaient qu'il fallait des changements dans la constitution canadienne, qu'il fallait des changements quant au partage des pouvoirs parce qu'il y avait énormément de chevauchements entre les pouvoirs du gouvernement fédéral et ceux du gouvernement québécois. Dans trop de domaines, il y avait ce chevauchement qui nuisait au progrès, qui l'empêchait, qui le retardait. Ce n'est qu'après maintes discussions et après des compromis qu'on en arrivait à des ententes et, souvent, cela ne faisait que retarder le progrès que tout le monde voulait.

Il y en a qui ont voté non au référendum, mais ils voulaient également des changements. Le chef de l'Opposition a dit qu'il espérait aussi voir des changements. Et, surtout, le premier ministre du Canada est venu au Québec et a dit: II y aura des changements dans la constitution canadienne, on met notre tête en jeu. Mais il n'a pas dit quels changements. La majorité des gens qui ont voté non au référendum espérait bien, ou du moins, n'aurait jamais cru que les changements proposés constitueraient un recul pour le Québec, mais, au contraire, que cela constituerait un avancement.

Aujourd'hui, le premier ministre du Canada arrive avec des amendements constitutionnels, avec une charte, avec un rapatriement de la constitution assorti d'amendements. Or, ce n'est pas un proqrès pour les citoyens québécois ou pour le Québec, c'est un recul.

On nous a dit: Les francophones dans tout le Canada seront protégés avec la nouvelle charte qui sera enchâssée dans la constitution canadienne. Dès la semaine dernière, l'argumentation du premier ministre était démolie puisque le premier ministre de l'Ontario, l'allié numéro un du premier ministre du Canada, disait, dans une lettre qu'il signait, que la charte des droits du gouvernement Trudeau ne changera rien à la situation des franco-ontariens, mais qu'elle était devenue nécessaire pour contrer les législations adoptées par les gouvernements Bourassa et Lévesque en matière linguistique au Québec, les législations adoptées par l'ancien gouvernement libéral aussi bien que l'actuel gouvernement du Parti québécois.

Tous les députés en cette Chambre, qu'ils soient d'un côté ou de l'autre, sont donc impliqués, puisque ce sont les législations sur la langue, qu'elles aient été adoptées par l'ancien gouvernement ou par le gouvernement actuel, qui seront contrées par la charte des droits que veut faire adopter le premier ministre du Canada.

M. Davis, le premier ministre de l'Ontario, ajoute: Je tiens à vous assurer que nous sommes opposés à l'imposition du bilinguisme aux institutions provinciales, tels les Législatures, les tribunaux et les autres institutions.

Nous ne nous y sommes pas opposés, M. le Président. Ici, le bilinguisme est reconnu à la Législature de l'Assemblée nationale, c'est reconnu devant nos tribunaux québécois. L'école publique anglophone est subventionnée au même titre que l'école publique francophone, mais en Ontario, par exemple, on ne veut pas accepter cela. Si la charte des droits du premier ministre du Canada est adoptée, ce n'est pas pour donner plus de droits aux francophones de l'Ontario, mais pour essayer d'enlever des droits au Québec.

Le premier ministre de l'Ontario continue sa lettre en disant: "II est très évident que notre forte opposition - c'est le premier ministre de l'Ontario qui l'écrit - à l'intention première d'Ottawa de revoir l'article 133 de la constitution pour imposer le bilinguisme institutionnel a porté le gouvernement canadien à laisser tomber cette idée." Donc, on admet que le premier ministre du Canada a cédé, a plié devant le premier ministre de l'Ontario.

Le premier ministre de l'Ontario ajoute: "En ce qui a trait à la loi 101, si l'article 23 de la charte devient loi, les sections 72 et 73 de la loi 101, une loi québécoise, seront inconstitutionnelles." Cela veut donc dire, en bon français, que les franco-ontariens ou les francophones hors Québec n'auront rien de plus tandis que les Québécois, eux, perdront dans cette nouvelle charte fédérale.

Ce n'est pas pour rien que le Québec cherche à protéger les droits qu'il possède à l'heure actuelle dans le domaine linguistique et en matière d'éducation. Nous avons appris au cours de l'histoire que nos droits avaient souvent été foulés aux pieds un peu partout au Canada. On se rappelle que c'est en Nouvelle-Écosse que cela a commencé, en 1864, même avant la Confédération, alors qu'on y a fait perdre aux francophones leur droit à des écoles françaises. En 1864. À ce moment-là, la population francophone de la

Nouvelle-Écosse était de 33%. On leur a enlevé leurs écoles françaises; il n'en reste à peine que 4% ou 5%.

En 1871, quatre ans après la Confédération, c'était au tour du Nouveau-Brunswick; après l'acte des écoles communes, c'est-à-dire des écoles publiques et non confessionnelles, on n'enseignait plus le français dans les écoles.

Six ans plus tard, c'était l'Île-du-Prince-Édouard. Même scénario qu'en Nouvelle-Écosse et au Nouveau-Brunswick.

Au Manitoba, quelques années plus tard, on a procédé par deux lois: celle de 1890 et celle de 1916. On a, à toutes fins utiles, aboli les écoles francophones, les écoles françaises dans cette province.

Et puis, cela a été l'Ontario; 1912, le fameux règlement 17 pour la restriction de l'enseignement du français, menaçant la survie du français en Ontario. Au Manitoba, en 1916, quand on a adopté cette loi, il y avait près de 40% de francophones. Aujourd'hui, il n'y en a plus que 5%. Partout dans les autres provinces, on a adopté des lois et jamais le gouvernement d'Ottawa n'a réagi. Jamais! Et s'il y a une province pendant ce temps-là qui traitait bien ses minorités anglophones, et elles peuvent le dire, c'est bien le Québec. Malgré tout cela, aujourd'hui on cherche à restreindre les droits, les juridictions, les pouvoirs du Québec dans le domaine de l'enseignement, dans le domaine de la langue. (20 h 10)

M. le Président, quand on songe qu'il a fallu à peu près 30 ans de lutte - quand je regarde le travail de nos députés québécois à Ottawa, à l'heure actuelle, je réalise qu'ils continuent dans la même tradition depuis 75 ans - à nos députés québécois d'Ottawa pour obtenir que les chèques envoyés par le gouvernement d'Ottawa au Québec soient bilingues, que les chèques de pensions de vieillesse ou d'allocations familiales soient non pas seulement en français, mais bilingues. Le chiffre lui-même pouvait se comprendre, mais tout ce qu'il y avait en lettres, c'était en anglais seulement.

Quand on pense qu'il a fallu près de 25 ans de lutte pour que la monnaie canadienne soit bilingue. Quand on pense qu'il a fallu 40 ans de lutte pour avoir un drapeau typiquement canadien. Quand on pense qu'il a fallu près de 35 ans de lutte pour avoir un hymne national typiquement canadien et, encore, seulement la musique a été adoptée officiellement. Les mots de l'hymne national du Canada n'ont pas encore été adoptés officiellement. Cela fait 15 ans que la musique a été adoptée, mais pas les mots. Quand on pense à tout le nombre d'années où il a fallu que les députés québécois à Ottawa se battent régulièrement pour obtenir cela à la graine et à la pièce, M. le Président, à ce moment-là, on se dit ceci:

Le Québec a des droits, des privilèges, des obligations et, si la nouvelle constitution du premier ministre du Canada veut nous enlever cela, c'est toute l'Assemblée nationale ici qui doit s'y opposer.

M. le Président, je pense bien que l'ensemble de la population du Québec aujourd'hui comprend qu'on ne peut pas enlever au Québec ses droits et privilèges, qu'on doit lui laisser toute sa juridiction, qu'on doit lui laisser tout ce qui lui a été accordé il y a 114 ans par l'Acte de l'Amérique du Nord britannique. Nous l'avons accepté à ce moment. Ceux qui siégeaient à Québec l'ont accepté. On a demandé au gouvernement de Londres de garder le document en dépôt, mais s'il nous le retourne, on voudrait bien qu'il le retourne comme on l'a envoyé, pas en le changeant, qu'il nous retourne le même document. M. le Président, je crois qu'au Québec nous devons rester encore avec l'ancien document. Nous continuerons à respecter celui qui est à Londres, mais celui qu'on nous retournera et qui aura été tronqué en cours de route, nous ne l'accepterons pas.

M. le Président, je crois que l'immense majorité de la population du Québec sait fort bien que les grands problèmes de l'heure sont des problèmes économiques, mais le premier ministre du Canada nous est arrivé avec ce problème constitutionnel, il y a un an ou un an et demi, nous devons y faire face, nous devons le combattre et c'est ce que nous allons faire par cette résolution.

Le Président: Mme la députée de Chomedey.

Mme Lise Bacon

Mme Bacon: M. le Président, dans le cas des discussions constitutionnelles, on aurait pu croire qu'une démarche québécoise ne se serait pas limitée à l'adoption d'une stratégie essentiellement négative de désaccord permanent, mais serait plutôt basée sur le souci d'ouvrir des voies de solution en vue d'en arriver à un consensus raisonnable. Cette démarche négative du gouvernement s'est manifestée à deux niveaux. Dans les dossiers sectoriels, les ministres ont fait preuve de gourmandise, à maintes reprises voisines de témérité. C'est ainsi que, progressivement, le Parti québécois a déployé son arsenal en fermant les portes à toute discussion touchant le contentieux fédéral-provincial. À chaque rencontre sectorielle, ou, si on préfère, ministère par ministère, le scénario fut inlassablement basé sur une volonté de gruger une partie de souveraineté additionnelle.

En fait, le seul dossier où le gouvernement s'est montré satisfait depuis cinq ans concerne l'accord Cullen-Couture, où le Québec aura réussi, avec succès,

disons-le, à mener à bien l'objectif visant à s'assurer un contrôle sur la question de la sélection des candidats immigrants désirant s'installer au Québec. Encore que, dernièrement, le Québec voudrait un contrôle accru en ce qui trait à la question des réfugiés. Mais, à ma connaissance, aucun autre dossier n'a satisfait le Québec. Et lorsque, à certaines occasions, la délégation québécoise sentait le tapis glisser sous ses pieds, on préférait claquer la porte plutôt que de chercher un terrain d'entente et de jouer les règles du fédéralisme, comme l'ont fait les gouvernements du Québec antérieurement.

Pas surprenant alors que les discussions menées par le Québec entourant le rapatriement, se soient soldées par un échec complet. Conséquence directe des discussions sectorielles, la démarche québécoise est, depuis le 20 mai 1980, maquillée d'une pseudo-bonne foi à défendre les droits du Québec.

M. le Président, je tiens à souligner avec force que la défense des droits du Québec ne sera jamais assurée si le Québec est absent lors des discussions avec les autres gouvernements. C'est une question de bon sens d'abord et de leadership ensuite.

Concernant ce droit de veto, nous ne disons pas que le Québec n'a pas raison aujourd'hui de demander aux tribunaux de déterminer si le Québec possède effectivement un droit en matière constitutionnelle. Voilà un point qui aurait dû être éclairci plus tôt. Pourquoi ne pas avoir demandé une telle précision à la Cour suprême en même temps que l'avis sur la démarche unilatérale du gouvernement fédéral? Sans doute une autre stratégie se cache-t-elle en dessous de cette attitude, celle de déstabiliser la tenue des discussions constitutionnelles ou à faire croire que le Parti québécois est constamment présent et attentif à la défense des droits du Québec. C'est ainsi qu'une forte majorité de Québécois a clairement exprimé le désir de voir se poursuivre les discussions constitutionnelles fédérales-provinciales.

Aujourd'hui, on nous demande d'appuyer une motion qui, une fois de plus, aurait comme effet d'associer le Parti libéral du Québec à une autre étape de l'inlassable démarche du Parti québécois vers l'indépendance du Québec. Si telle était son intention, il ne me resterait qu'à aller travailler en atelier lors du prochain congrès du Parti québécois, sachant bien que la tenue du congrès du Parti québécois n'est fondée qu'en fonction de stratégies en fonction du pouvoir. Je préfère travailler pour le progrès du Québec.

Aujourd'hui, le Parti québécois est contraint de pénaliser les groupes les plus vulnérables aux crises économiques en taxant des biens essentiels, en augmentant de façon indue les taxes indirectes, contribuant à la dégradation d'un consensus basé sur un contrat social déjà fragile. C'est ainsi que les incohérences de ce gouvernement auront contribué à miner la crédibilité de nos institutions censées faire converger les pressions politiques, économiques et sociales en vue d'un objectif commun.

M. le Président, il est un autre point sur lequel il m'apparaît important de dissiper une fausse impression que tente de répandre le gouvernement au nom sans doute de cette stratégie de fermer une autre voie d'entente constitutionnelle. J'avoue être étonnée d'une déclaration récente du ministre de la Justice, la semaine dernière, à savoir que s'il fallait que la charte fédérale ait prépondérance sur les chartes provinciales, cela voudrait dire qu'on enlèverait des droits aux femmes du Québec. Sur ce point, la position de notre parti maintes fois répétée demeure claire. Notre parti favorise une charte généreuse.

Premièrement, les femmes se sont révoltées, et avec raison, de la clause "nonobstant", laquelle aurait permis à notre Législature d'adopter des mesures à l'encontre des droits accordés en vertu de la future charte incluse dans la constitution, car, faut-il le répéter, la présente charte québécoise est une loi statutaire en vertu de laquelle le gouvernement pourrait y faire adopter des amendements comme bon lui semble. La solution d'enchâsser les droits des femmes dans une constitution me semble une des meilleures garanties qui aient été données aux femmes du Québec, comme à celle des autres provinces, pour faire face aux défis de demain.

Cette charte des droits, M. le Président, permettra au Québec de se doter des instruments, lois et programmes nécessaires à son développement.

Bien sûr que cette charte limitera jusqu'à un certain point les Assemblées législatives au Canada, mais elle empêchera quelque pouvoir fédéral ou provincial de brimer les droits acquis en vertu de cette dernière. En ce sens l'inclusion sans clause "nonobstant" de la charte dans la constitution doit être vue comme un acquis essentiel pour les Québécoises.

De plus, cette charte constitutionnelle ne constitue pas un plafond, mais plutôt un plancher sur lequel les provinces auront tout le loisir d'ajouter des éléments que les gouvernements estiment nécessaires dans l'intérêt de leurs populations respectives.

D'ailleurs, M. le Président, les Québécoises, au cours des années, se sont habituées à composer, telles des négociatrices en quête d'une justice profondément humaine, en croyant légitime d'espérer une place qui leur est due dans tous les secteurs d'activité d'une société normalement respectueuse des droits.

De plus, les bévues administratives du

présent gouvernement contraignent celui-ci à passer sous silence la mise en place d'un réseau de services de garde complet permettant aux femmes d'avoir accès au marché du travail. (20 h 20)

Enfin, parmi les attentes du Conseil du statut de la femme sur cette charte des droits, on précise que les amendements les plus séduisants devront être suivis de mesures administratives concrètes pour la réalisation de politiques adéquates, car il ne faut jamais oublier une dimension importante, lorsqu'on aborde la question des femmes au Québec. Charte ou non, lois et règlements ou non, celles-ci ne verront leur sort amélioré que si l'État favorise la création d'un climat propice aux changements sociaux et économiques aussi bien que politiques.

À cet égard, je vous avoue douter des capacités du gouvernement à respecter des ententes et conventions en vigueur ou en voie de l'être avec des groupes cibles de notre société, mais je me console à l'idée que, quelques semaines avant le référendum, le présent gouvernement ait compris de quelle façon une majorité de Québécoises avaient clairement manifesté leur intention de ne pas se laisser influencer par des préjugés dangereusement faux qu'on a tenté de répandre à la grandeur du Québec en dévalorisant le rôle de la femme au foyer.

J'aimerais faire une mise en garde aux femmes contre une confiance excessive qu'elles seraient tentées d'accorder à tout gouvernement. Je les inviterais, d'abord, à continuer leur lutte en vue de faire connaître et reconnaître leurs droits, mais aussi à tenir compte des réalités de notre société et à relever les défis du marché du travail à partir d'une démarche tant individuelle que collective. Plus exactement, les femmes ont dû, à un moment donné, s'associer aux différents partis politiques et mouvements sociaux les plus aptes à répondre à leurs revendications. Quelquefois, une telle stratégie a pu faire en sorte que des correctifs soient apportés. Mais elle aura aussi forcé certains mouvements féministes à politiser des problèmes qui relèvent d'une situation de femmes d'abord et avant tout.

Inévitablement, les femmes ont dû, elles aussi, négocier, peut-être même échanger des espoirs contre un appui conditionnel à un parti politique ou à un syndicat. Phénomène normal, me direz-vous, où les mutations profondes d'une société découlent avant tout de la nature des rapports de force existants, mais dangereux aussi, car un tel contexte laisse place à des compromis où les questions de fond font l'objet de promesses électorales qui, bien souvent, ne verront jamais le jour à une époque de restrictions auxquelles tous les groupes sont soumis.

Je préconise plutôt une action individuelle qui tienne compte de nos possibilités, de nos goûts et aspirations et de la réalité avec ses contraintes et ses ouvertures. La charte des droits proposée, bien qu'essentielle, n'est qu'un outil de plus pour les femmes du Québec. Elle ne transforme rien du jour au lendemain, mais ne fait que traduire certaines revendications en principes légitimement reconnus.

En ce sens, la venue au pouvoir du Parti québécois aura créé beaucoup d'illusions. La ministre d'État à la Condition féminine devait récemment déplorer les mêmes problèmes vécus par les femmes à accéder aux postes de cadres dans la fonction publique, ainsi que le taux de pauvreté élevé que l'on retrouve chez les femmes. Dans le secteur privé, d'autres situations sont dénoncées, par exemple dans l'industrie du vêtement où les rapports de force entre syndicats ne semblent pas aider les femmes pour que des correctifs soient apportés. Ces défis doivent être relevés en sachant bien que les mutations et les changements en cours au sein de notre société continueront d'évoluer dans le temps.

Des luttes nombreuses menées par les femmes au cours des dernières années s'ensuivit un éveil de l'ensemble de la société sur ce que ses membres omettent de considérer dans la planification de politiques sociales et économiques. Vous avez remarqué, M. le Président, que les femmes ont dû politiser systématiquement les revendications adressées à nos dirigeants. Quand on est rendu à un tel point, c'est que quelque chose ne va plus dans cette société. C'est aussi parce que l'État n'accomplit plus cette tâche de veiller à l'émancipation aussi bien des groupes que des individus qui forment cette société. C'est, enfin, attribuable aux agents même du pouvoir, pour la plupart des hommes, qui ont refusé dans le passé de considérer sérieusement les misères vécues d'une façon inhumaine par certaines femmes victimes de brutalités tant physiques que psychologiques, des milliers de femmes potentiellement aptes à s'acquitter d'emplois élevés dans la hiérarchie du travail, mais incapables de franchir les étapes en raison de discrimination.

Je connais bien des hommes qui se seraient refusés à vivre ces misères ou frustrations aussi longtemps sans faire appel à la révolte. Faut-il croire que les femmes ont une capacité d'endurance plus élevée à supporter les injustices? Au risque de faire de la discrimination, j'affirme que oui, M. le Président.

En second lieu, vous aurez remarqué que les quelques victoires acquises à partir du simple droit de vote, par exemple, furent bien menées en raison de la cohérence des analyses avancées de la détermination avec laquelle les mouvements féministes d'inspiration européenne ont su faire avancer

leur cause.

J'aimerais voir cette même détermination à faire progresser la cause du Québec au sein du Canada de la part du présent gouvernement, mais, hélas, ni la cohérence de son argumentation non plus que sa stratégie d'action ne sont comparables aux nombreuses luttes des femmes pour obtenir justice et égalité. Bien plus, je vous parie que les femmes obtiendront gain de cause bien avant que le Parti québécois fasse avaler aux Québécois l'indépendance du Québec.

En somme, les femmes du Québec doivent obligatoirement se faire à l'idée que les emplois regroupés dans le secteur des services administratifs et de bureau, bien que des possibilités subsistent, appartiennent aux décennies de 1960 et 1962.

Voilà, à mon avis, les véritables données sur lesquelles doivent s'appuyer les Québécoises pour relever les défis de demain. D'ailleurs, nombre d'entre elles ont fignolé un sens de pragmatisme qui leur aura permis d'accéder à des postes clés enviés par bien des hommes. Donc, revanche, j'en conviens, mais ce n'est pas suffisant, puisque les femmes qui vivent les véritables souffrances inhérentes à notre système s'affichent rarement, tandis que, d'autre part, certains groupes féministes ont peut-être oublié, en cours de route, de situer les vrais problèmes, se contentant trop souvent de s'identifier à une démarche essentiellement politisée, éloignée en cela des préoccupations de milliers de Québécoises.

De ces propos rassurants à l'égard des femmes du Québec, j'ai toute raison de croire que l'optimisme est la voie de l'avenir. Les pas franchis depuis une vingtaine d'années, d'abord sur les bancs de l'école, ensuite sur le marché du travail, sont énormes si l'on compare à l'espace restreint qu'occupaient les Québécoises dans une société où, naguère, le rôle familial de dévouement, souvent sans compensation, l'emportait sur les immenses avantages que procurent les possibilités d'avancement d'une société dite postindustrielle.

On ne peut affirmer par ailleurs que nos mères et grand-mères n'ont vécu que frustration et dévalorisation, depuis le début du dernier siècle. La nature des rapports humains était différente, le concept de la famille aussi. En fait, la société industrielle a façonné un modèle de comportement qui ne sied plus aujourd'hui. À cet égard, Roger Lemelin aura, de façon plus qu'honnête, ressuscité des épisodes de la vie des Québécoises qui, comme on l'a vu, engendraient aussi l'émancipation de façon différente, si l'on veut, jugé aujourd'hui, et avec raison, insuffisante.

L'époque où les communautés religieuses assuraient l'éducation de nos ministres actuels, par exemple, n'est plus si loin. L'époque où les hôpitaux, non sujets aux coupures budgétaires, étaient sous juridiction cléricale, n'est pas si loin non plus. Le secteur public a pris la relève avec les avantages et les désavantages que l'on connaît aujourd'hui.

Plus récemment, la production littéraire et artistique aura contribué à découvrir des talents issus du monde féminin. Sur le marché du travail, les Québécoises ont aussi profité de plusieurs options ouvertes dans le secteur professionnel et au même titre que tous les Québécois ont profité des avantages reliés à un taux de scolarisation élevé.

Nous convenons tous que la démarche entreprise par les Québécoises est loin d'être un aboutissement, mais que les étapes doivent s'effectuer dans cette détermination d'une hausse de qualité de vie pour celles qui n'ont pas encore bénéficié de telle mutation, mais en ne perdant pas de vue des années difficiles, tant sur le plan social qu'économique. Mais un fait demeure, M. le Président, ce présent gouvernement, à force de ramer à contre-courant, n'engendre d'aucune façon le progrès des Québécoises et Québécois.

La situation financière est telle qu'une planification visant à venir en aide aux personnes les plus démunies est rendue illusoire.

Sur le plan constitutionnel, au lieu de s'acharner à dénouer l'inclusion d'une charte des droits dans la constitution, j'inviterais ce présent gouvernement à procéder à un sérieux examen de conscience, surtout lorsqu'on en vient à céder un droit de veto en faveur d'une sympathie éphémère des autres gouvernements.

À la lumière d'un tel bilan, force est de constater qu'un appel au peuple devient chaque jour plus pressant. (20 h 30)

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Sainte-Anne.

M. Maximilien Polak

M. Polak: Merci, M. le Président. En fin de semaine, j'étais dans mon comté de Sainte-Anne et quand j'ai dit à mes électeurs que je parlerais, ce soir, sur la motion constitutionnelle, ils m'ont dit: On ne comprend plus rien de ce que fait le Parti québécois, ses zigzags, ses manoeuvres, ses décisions; voulez-vous nous expliquer un peu de quoi il s'agit afin qu'on comprenne, une fois pour toutes. Comme je suis un homme objectif, je vais d'abord faire un petit historique de ce qui s'est passé depuis le mois d'avril 1981. Je suis d'ailleurs très content de voir que le ministre de l'Éducation du gouvernement péguiste est venu pour m'écouter; peut-être va-t-il retenir quelque chose de ce que je vais dire.

La première date importante est le 16

avril 1981. À ce moment-là, M. Lévesque faisait encore parti du front uni des huit. Vous rappelez-vous? Les huit premiers ministres des provinces, y inclus le Québec, ont signé un accord constitutionnel sur le projet canadien de rapatriement de la constitution. C'était le 16 avril 1981, quelque trois jours seulement après la réélection du gouvernement péquiste. La question de souveraineté était à ce moment-là mise en veilleuse, comme toujours, selon sa stratégie, et c'était sans doute la raison pour laquelle M. Lévesque a signé ledit accord. Il y a une chose intéressante dans cet accord. L'accord que M. Lévesque a signé le 16 avril disait: "Attendu que le Canada est un pays développé et indépendant, doté d'un système fédéral de gouvernement - il est important, le mot "fédéral", il croyait en cela, apparemment, à ce moment-là - de plus, attendu que le plein exercice de la souveraineté au Canada exige une procédure canadienne de modification de la constitution qui respecte le caractère fédéral du Canada..." C'était carrément dans l'accord constitutionnel qui a été signé par M. Lévesque. Il est à noter qu'à ce moment-là, on n'avait pas encore eu le jugement de la Cour suprême et les huit provinces, y inclus M. Lévesque du Québec, espéraient évidemment que la Cour suprême donnerait raison aux provinces.

Dans le communiqué de presse de la même date, de ces huit premiers ministres y inclus M. Lévesque, on peut lire: "Les huit premiers ministres - y inclus M. Lévesque, ne l'oublions pas - ont souligné que leur accord sur la constitution canadienne démontre de façon claire et positive - j'aime le mot "positive" parce qu'ils parlent encore de manière positive - qu'il est possible de faire avancer sensiblement la question constitutionnelle si toutes les parties intéressées l'abordent avec sincérité et bonne volonté." Ils sont très importants, les mots "sincérité et bonne volonté". M. Lévesque était alors dans l'équipe des huit.

Il est à noter également que dans cet accord constitutionnel, M. Lévesque a renoncé au droit de veto du Québec, si jamais tel veto a existé.

Des voix: Ah! Ah!

M. Polak: La prochaine date importante est le 28 septembre 1981, à peu près quatre mois plus tard, quand la Cour suprême a rendu son jugement. On oublie cela maintenant, mais le jugement avait dit carrément que sur le plan légal, M. Trudeau pourrait aller à Londres unilatéralement, qu'il pourrait procéder sans l'assentiment des provinces. Mais, en même temps, le jugement avait dit que sur le plan constitutionnel et selon les conventions, il ne devrait pas le faire.

On a eu alors la réaction des huit provinces; le NPD sur le plan fédéral et notre Assemblée nationale ici, au Québec, avons demandé tous ensemble à M. Trudeau de négocier, ce qui a été consigné dans notre fameuse résolution du 2 octobre 1981. Ce n'était pas facile pour notre parti de voter pour une telle résolution, non pas parce que nous ne croyions pas aux négociations, mais parce qu'elle émanait du gouvernement péquiste. Comme je l'ai dit dans le temps devant l'Assemblée nationale, cette résolution n'était qu'un moyen de tordre le bras de M. Trudeau pour qu'il négocie et d'exiger de la flexibilité de la part du gouvernement fédéral. En toute honnêteté, M. le Président, on a eu cette flexibilité parce qu'on a eu la conférence fédérale-provinciale du 3 au 5 novembre suivant à Ottawa. M. Trudeau n'était pas obligé de la faire sur le plan légal. Mais, selon les conventions et selon les demandes des provinces, y compris l'Assemblée nationale, il a négocié. Nous connaissons tous les résultats de cette conférence, c'est-à-dire que le fédéral et toutes les provinces canadiennes étaient d'accord sur un pacte constitutionnel, sauf le Québec. On voit le changement d'attitude, savez-vous? Le 16 avril, trois jours après les élections, M. Lévesque a souscrit à l'accord des huit provinces, mais là, on est rendu dans le mois de novembre et l'histoire change.

Le prochain événement important au point de vue des dates était le discours inaugural de M. Lévesque, le 9 novembre. J'étais ici quand il était là et qu'il a fait son discours où il a dit qu'il avait été trahi, que le Québec était violé, qu'il s'agissait d'un groupe de bandits - il parlait de premiers ministres d'autres provinces - que le premier ministre l'avait trahi pendant cette nuit des longs couteaux, que, de toute façon c'était le sommaire de son discours à ce moment - il n'y avait plus rien à négocier, qu'on ne parlait plus avec eux autres. Il a même dit: On n'assistera plus aux conférences fédérale-provinciales, sauf évidemment là où il y a des sous à aller chercher.

Il est évident, M. le Président, que pendant cette conférence à Ottawa, entre toutes les provinces et le fédéral, M. Lévesque n'a jamais voulu négocier de bonne foi, parce que comment est-ce que M. Lévesque aurait pu retourner dans la province de Québec comme père d'un fédéralisme renouvelé alors qu'il ne croit vraiment que dans une seule chose, soit: la rupture de notre pays, la séparation? Dans les jours qui suivirent le discours inaugural de M. Lévesque, où il a dit: II n'y a plus rien à négocier, c'est fini - il était très militant à ce moment - on a vu la réaction de l'opinion publique qui demandait, qui réclamait la négociation. C'était clair dans

la presse francophone, anglophone, partout. En fait, le chef de l'Opposition de notre équipe, M. Ryan, réclamait aussi des négociations et il suggérait des solutions aux trois problèmes qui existaient, aux trois problèmes majeurs, c'est-à-dire la formule d'amendement, la clause de mobilité et les droits linguistiques des minorités.

N'oublions pas que depuis cette conférence du 3 au 5 novembre, à Ottawa, M. Lévesque n'a jamais parlé ou voulu négocier avec M. Trudeau. Pas du tout. Il ne veut rien savoir. Mais après les pressions de l'opinion publique, il commence à changer graduellement et là il nous présente - on est rendu au 17 novembre - la fameuse motion qu'on a devant nous maintenant. M. le Président, dans cette résolution, cette motion du gouvernement de M. Lévesque, on demande carrément, au paragraphe 2a, de maintenir au Québec son droit de veto. On demande cela, sans même attendre les résultats du débat de cette résolution, cette motion qui est devant nous aujourd'hui. On la discute, on ne sait pas comment on votera, peut-être qu'il y a des péquistes qui voteront contre, je ne le sais pas, mais on n'attend même pas ça parce que le 25 novembre, dans la motion encore devant nous, on demande: S'il vous plaît, redonnez-nous le droit de veto. Mais le 25 novembre, M. Lévesque a exercé son droit de veto! Le 17 novembre il demande, dans la résolution: Voulez-vous me donner mon droit de veto? Je l'avais perdu, je veux l'avoir. Et le 25 novembre il dit: Je l'exerce, ce droit de veto.

Voilà une contradiction qui ne s'explique pas, que la population ne comprend pas, que moi je ne comprends pas non plus et que même les péquistes ici ne comprennent pas s'ils pensent sérieusement à leur affaire. Pas seulement ça! Avant même d'avoir une réponse de M. Trudeau, il annonce déjà: Voici, on va devant la Cour d'appel de la province de Québec pour demander si on a ce droit de veto et, selon le résultat, le jugement de la Cour d'appel, on va même à la Cour suprême. On débat ce soir une résolution, une motion où on demande le droit de veto. Entre-temps, on a déjà exercé le droit de veto et maintenant on demande à la Cour de confirmer si on a droit au droit de veto, oui ou non. Comprenez-vous ça? Il y a une expression, dans le pays natal d'où je viens, M. le Président, la Hollande, qui dit - je vais le dire d'abord en hollandais et, ensuite, traduire pour vous autres - Lévesque heeft gesproken als een kip zonder kop. M. Lévesque a parlé et agi comme un poulet sans tête. Depuis le mois d'avril jusqu'à aujourd'hui, on peut dire qu'il s'agit de zigzaguer en réagissant aux demandes de l'opinion publique; on va à gauche, on va à droite, on va en arrière, on va en avant, on est mêlé, on ne sait plus quoi faire. (20 h 40)

M. le Président, analysons rapidement quelques paragraphes de cette fameuse motion qui est devant nous. La motion commence - c'est supposé être la manière de négocier du gouvernement du Parti québécois. - par dire: "Rappelant le droit du peuple québécois à disposer de lui-même." C'est bien beau de le dire, mais quand vous voulez négocier un fédéralisme renouvelé, pourquoi insérer ce paragraphe là-dedans, qui me fait penser à l'étapisme du Parti québécois? Parce que, quand on dit "le droit du peuple québécois à disposer de lui-même", on ne pense qu'à une chose, la séparation, la souveraineté. Cela ne devrait peut-être pas se trouver dans un texte, si on est sérieux pour négocier un fédéralisme renouvelé. Ensuite, on est prêt à négocier, disent les péquistes.

Dans le paragraphe 3, on déclare qu'on "ne peut accepter le projet de rapatriement de la constitution, sauf si celui-ci rencontre les conditions suivantes." Avez-vous jamais vu ça, M. le Président? Même le député de Prévost, qui connaît bien le droit ouvrier, doit savoir que, quand on parle avec quelqu'un pour négocier, on ne dit pas: Je négocie, mais je veux les choses suivantes; autrement, je ne parle pas. Est-ce que c'est cela se parler?

Une voix: Négocier debout.

M. Polak: Ce n'est pas une façon de négocier. M. le Président, cette résolution a été préparée juste pour un but, pour le congrès qui aura lieu en fin de semaine à Montréal, avec les 2000 militants. Savez-vous ce que la Gazette disait en fin de semaine: "The radicals at Rene's heel". Pour ceux qui ne comprennent pas, je vais traduire: Les radicaux aux talons de René. Les radicaux parlent, MM. les députés de Maisonneuve et de Rosemont. C'est ça, la vraie raison. On veut acheter la paix.

M. le Président, je ne veux pas continuer, parce que je veux donner à mes confrères une chance de continuer. Je voulais parler de la clause de mobilité, mais je laisse cet honneur au député de Hull qui connaît très bien ça. Mais je voudrais dire une chose... J'espère que les applaudissements sont pour le député de Sainte-Anne. Merci.

M. le Président, en terminant, vous vous rappelez le petit livre qu'on a eu, intitulé Minute Ottawa!, que j'ai critiqué dans le temps et avec raison. J'ai un petit slogan pour les péquistes et pour M. Lévesque, parce qu'il n'est pas encore trop tard. Malheureusement, M. Lévesque n'est pas ici, il ne peut pas entendre ce que j'ai à dire, mais il devrait dire: Minute Ottawa, j'arrive, je suis en retard, il faut se parler,

c'est encore le temps.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Laurier.

M. Christos Sirros

M. Sirros: Merci, M. le Président, à mon tour, je me lève pour me prononcer sur la motion que nous avons devant nous, mais, avant d'aborder le contenu de la motion, j'aimerais prendre quelques instants pour partager avec mes concitoyens du Québec mes vues sur la situation actuelle, dresser, en quelque sorte, ce que je vois comme toile de fond sur laquelle arrive cette motion. Il y a près de deux mois, comme on se le rappelle tous, le 2 octobre, la presque totalité des députés de cette Chambre se trouvait unie dans un des rares moments d'absence de partisanerie. Si nous avons voté, M. le Président, le 2 octobre, de la manière dont nous l'avons fait, c'est parce que nous étions dans une tout autre situation que celle que nous connaissons aujourd'hui. D'ailleurs, les événements changent tellement vite dans ce dossier depuis un certain temps l'ensemble du dossier évolue de façon très rapide et il y a un mouvement continuel -qu'il est très compréhensible que la grande majorité de nos concitoyens se sente perdue, sinon fatiguée d'entendre parler de constitution.

Le 2 octobre, nous étions devant un projet fédéral contre lequel s'élevaient les voix des huit provinces canadiennes. Nous étions éqalement devant une intransigeance apparente du premier ministre du Canada, M. Trudeau. Nous avons voté à ce moment une motion qui, d'une part, déclarait que l'Assemblée nationale s'opposait à une action unilatérale qui réduirait ses pouvoirs, et d'autre part, on exigeait la reprise des négociations. Ces négociations ont eu lieu. M. Trudeau a ouvert la porte à ces négociations, et quelques jours plus tard, elles ont eu lieu.

Nous avons donc, en partie, ici à l'Assemblée nationale, réussi à faire bouger le gouvernement fédéral, à le sortir de son intransigeance et à l'asseoir à la table pour reprendre les discussions. Le tout s'est terminé le 5 novembre dernier par une entente signée par neuf provinces canadiennes et le gouvernement fédéral. M. Lévesque, à la suite de cette entente, est revenu à Québec tout bouleversé, agité, en proférant ce qu'on pourrait qualifier des discours vitrioliques, assaisonnés un peu de menaces et d'appels à la résistance.

Quelque part dans cette agitation, il a réussi quand même à trouver quelques moments de lucidité pour nous faire part que son gouvernement s'opposait finalement à trois points précis dans l'accord: premièrement, la clause de la mobilité; deuxièmement, la compensation financière en cas d'amendements constitutionnels et en cas de retrait du Québec de ces amendements; troisièmement, la fameuse clause 23, soit le droit à l'enseignement dans la langue de la minorité. Quelques jours plus tard, M. Trudeau a encore une fois laissé entrevoir la possibilité qu'il pourrait y avoir d'autres pourparlers, d'autres négociations avec le Québec.

M. Lévesque, pour sa part, nous a répété continuellement qu'il ne voulait rien savoir. Nous lui avons rappelé le sens d'un des paragraphes de la motion du 2 octobre qui demandait qu'on trouve une solution négociée à cette question constitutionnelle. Rien à faire, pourtant. La situation avait changé, disait le gouvernement. Il ne se sentait plus lié par cette motion ou, tout au moins, par cette partie de la motion. On avait commencé, à ce moment, à la suite du discours inaugural, de l'autre côté de cette Chambre, à nous parler continuellement de la nuit des longs couteaux, des mauvais Anglais, sinon des maudits Anglais, de la guerre des plaines d'Abraham, même, pour fouetter l'ardeur des militants péquistes qui commençaient à manifester une certaine inquiétude face à la possibilité que leur gouvernement signe un accord pour une nouvelle constitution canadienne. D'ailleurs, convoqués en congrès national spécial pour essayer de voler la vedette à M. Trudeau qui parlait le même jour - petit jeu qui se jouait à côté - les membres du Parti québécois ont durci leur position. Ils ont laissé tomber le trait d'union entre la souveraineté et l'association et ont commencé à parler d'indépendance pure et simple.

Le vendredi 13 avril, dans un exercice que je qualifie de publicité, le gouvernement a dévoilé aux journalistes une motion qu'il entendait soumettre à l'Assemblée nationale quatre jours plus tard. C'est un geste en soi qui indique un peu le style de ce gouvernement. Le respect de l'institution qu'est l'Assemblée nationale aurait exigé que celle-ci soit saisie de la motion avant les journalistes. On respecte peut-être les conventions quand cela nous convient, mais on les bafoue quand on peut en tirer profit. La consistance qui est là, cherchez là!

La semaine passée, la motion a finalement été appelée pour discussion, dix jours après son dépôt devant les journalistes, tandis qu'on disait que la situation pressait, qu'il y avait une crise, que c'était urgent. Devinez pourquoi cela a pris tant de temps? Entre-temps, entre le moment où le premier ministre a dévoilé sa motion et le moment où on a commencé à la discuter, ce gouvernement qui se dit le défenseur des intérêts des Québécois est venu déposer un deuxième budget à l'Assemblée nationale, un budget des plus régressifs qui met l'incompétence économique de ce

gouvernement sur le dos des Québécois, et non seulement il ne défend pas leurs intérêts, mais il les met quasiment à genoux.

Voilà donc qu'après le dépôt de ce budget, on a sorti cette motion du tiroir et on a commencé à la discuter, un geste qu'on qualifie de tactique de diversion. Voilà en gros comment nous en sommes rendus là. (20 h 50)

Regardons un instant la motion elle-même en se rappelant les trois points de désaccord, mentionnés par le premier ministre, M. Lévesque, et les raisons pour lesquelles il n'a pas signé l'accord des neuf. Quand on lit la motion et qu'on pense à ces trois points, on se rend compte très rapidement que cette motion ne vise absolument pas à résoudre le problème. Si on voulait vraiment arriver à une entente, le gouvernement aurait accepté de parler de l'accord avec le gouvernement fédéral au lieu de présenter des motions qui essaient simplement de sauver la face devant les militants péquistes se préparant à un congrès national.

Que dit la motion quant à la clause de mobilité dans le projet constitutionnel? Absolument rien de constructif, étant donné que ce gouvernement ne veut pas entendre parler de mobilité dans la motion et dans la charte des droits où la clause se retrouve. Il exige dans sa motion la disparition de cette clause de la charte des droits.

De quelle menace pourrait-il s'agir quant aux intérêts des Québécois? Que dit cette clause qui pourrait causer d'irréparables torts au Québec, comme on nous en a fait part de l'autre côté de la Chambre de façon continuelle? Elle dit principalement deux choses. J'aimerais profiter de l'occasion pour les citer pour tout le monde. La première dit simplement ceci: Tout citoyen canadien a le droit de demeurer au Canada, d'y entrer ou d'en sortir.

La deuxième: Tout citoyen canadien et toute personne ayant le statut de résident permanent au Canada ont le droit de se déplacer dans tout le pays, d'établir leur résidence dans toute province et de gagner leur vie dans toute province.

Il y a un troisième paragraphe qui dit ceci: Ces droits mentionnés au paragraphe 2 sont subordonnés, a) aux lois et usages d'application générale en vigueur dans une province donnée, s'ils n'établissent entre les personnes aucune distinction fondée principalement sur la province de résidence antérieure ou actuelle; b), ils sont subordonnés également aux lois prévoyant de justes conditions de résidence en vue de l'obtention des services sociaux publics.

Le gouvernement pourtant ne veut pas entendre parler de mobilité, un point, c'est tout. Pourtant, il me semble qu'une des choses les plus logiques, quand on sait qu'on fait encore partie du Canada, une des choses les plus normales, c'est qu'un citoyen d'un pays ait le droit de se déplacer à travers ce pays et de travailler où il peut dans ce pays. Les temps qui courent sont déjà assez difficiles pour gagner sa vie, venir empêcher ce genre de chose rendrait peut-être la vie encore plus difficile aux gens.

Encore plus, si jamais on craignait que ces étrangers de l'Ontario, du Nouveau-Brunswick viennent ici voler nos jobs, le projet constitutionnel donne le droit à une province ayant un taux de chômage plus élevé que la moyenne de prendre des actions pour protéger les personnes les plus défavorisées par cette situation. Il est donc à mon point de vue inacceptable que le gouvernement s'oppose au droit d'un citoyen de vivre là où il veut et de travailler là où il veut dans le pays, d'autant plus que tous les règlements quant à l'exercice de profession resteront intacts ici au Québec.

Le deuxième point de désaccord: la compensation financière. De quoi s'agit-il finalement? Après avoir signé, le 16 avril, une entente avec sept autres provinces où le Québec a laissé aller son droit de veto, le marchandait, le gouvernement le réclame de nouveau aujourd'hui. C'est une position finalement peu sérieuse, compte tenu que c'est ce même gouvernement qui a effectivement marchandé quelque chose qui ne devrait pas être marchandable. La solution se trouve finalement dans la voie des discussions par rapport à une compensation financière en cas de retrait du Québec des programmes découlant d'amendements constitutionnels.

Le chef de mon parti, M. Ryan, a déjà proposé que cette question soit examinée de nouveau. Le premier ministre Trudeau a déjà consenti à reconnaître une compensation financière dans deux domaines, l'éducation et la culture, en laissant entrevoir qu'il est peut-être prêt à aller plus loin, mais personne ne donne quoi que ce soit sans qu'on ne le demande. Ce n'est pas en criant ici sur tous les toits que le Québec ne négociera jamais qu'on en arrivera à un accord acceptable sur ce point. Tout ce que l'on fait dans cette motion à cet égard, c'est de reculer à la position du Québec du 16 avril dernier ou avant sans démontrer la moindre bonne volonté à discuter de façon responsable et sérieuse.

Nous arrivons finalement à la question des droits linguistiques. Le gouvernement voudrait nous faire croire qu'il y a ici matière à lancer une croisade de défense du caractère francophone du Québec, comme si nous étions envahis par des petits anglophones qui viendraient de l'Ontario pour angliciser le Québec. Rien de plus faux, de plus xénophobe et de plus aveugle au commun bon sens.

Le premier ministre Trudeau, à la suite

de suggestions de M. Ryan, a accepté que la portée de la clause linguistique soit limitée à la fameuse clause Canada. Cela veut dire exactement la même clause que celle qui existe actuellement dans la loi 101, sauf que ceux qui auraient fait leurs études en langue anglaise au primaire partout au Canada, au lieu de simplement au Québec comme le dit la loi 101 actuellement, auraient le droit d'envoyer leurs enfants aux écoles anglaises. Il s'agirait, selon les chiffres d'une étude de l'Office de la langue française, en collaboration, je crois, avec le ministère de l'Éducation, d'une augmentation de clientèle dans les écoles anglophones de l'ordre de 1000 à 5000 élèves.

M. Laurin: ...

M. Sirros: Vous avez accepté, M. le ministre, la dernière fois, l'exactitude de ces chiffres, et on parlait de 5000 personnes. C'est une augmentation de 1% de la clientèle, au maximum, dans les commissions scolaires anglaises. C'est ça, M. le Président, l'immense menace! Sommes-nous, finalement, nous, les Québécois qui demeurent ici, d'un esprit si étroit que nous craignions cela? Je crois que non. Il se peut que d'autres, de l'autre côté, souffrent de cette étroitesse d'esprit. Je suis convaincu que la grande majorité des Québécois accepterait ce fait avec dignité et générosité.

C'est le Parti québécois qui veut agir de cette manière, comme si le Québec était déjà indépendant. C'est ça, la pierre d'achoppement. Il n'y a rien de plus normal, dans un pays où, aujourd'hui, on demande de reconnaître la dualité, que les enfants dont les parents ont été instruits dans une langue puissent fréquenter les écoles de la même langue. Que dit la motion sur ce point? Elle dit simplement que le Québec ne devrait pas avoir à accepter cette partie de la nouvelle constitution canadienne. Comme si une constitution d'un pays pouvait s'appliquer en morceaux ici et là.

En terminant, cette motion n'est rien d'autre qu'un geste partisan. Son intention est de recevoir l'appui des militants au congrès qui se tiendra la fin de semaine prochaine, et cela démontre une étroitesse d'esprit qui n'est pas représentative de la population québécoise. La grande majorité de nos concitoyens exige de ce gouvernement de mener à terme cette négociation constitutionnelle et d'agir de bonne foi.

Nous, de ce côté-ci de la Chambre, après la façon catastrophique dont le gouvernement a mené les négociations jusqu'à présent, nous mettons en doute la compétence de ce gouvernement dans ce domaine et, évidemment, dans beaucoup d'autres. Non pas parce que les membres de ce gouvernement ne sont pas intelligents ou très habiles, mais simplement parce qu'ils participent à contrecoeur à un processus en lequel ils ne croient pas. Ils ont cherché la première occasion pour crier au viol et ils se contentent aujourd'hui de jouer les vierges offensées. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Vachon, sur une question de privilège.

M. Payne: M. le Président, je n'aimerais pas croire que le député de Laurier a induit cette Chambre en erreur. Peut-être faisait-il référence à quelques allusions que je faisais la semaine dernière concernant ceux qui viennent de l'extérieur du Québec. Effectivement, nous avons, au Québec, à peu près 24 000 personnes qui viennent d'autres provinces chaque année. Cela représente effectivement plus de gens, plus d'immigrants...

Des voix: Ce n'est pas une question de privilège.

M. Payne: C'est pour rectifier des faits.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Vachon, vous avez utilisé l'article 89 pour signaler ce que vous croyez être une rectification à vos paroles. Vous avez terminé? (21 heures)

M. Payne: Je voulais brièvement terminer, M. le Président, en disant...

Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît!

M. Payne: ... qu'effectivement le député de Laurier induisait cette Chambre en erreur en suggérant qu'il y a très peu d'immigrants qui viennent des provinces, de l'extérieur. Merci.

M. Blank: Question de règlement.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Question de règlement.

M. Blank: Si le député soulève une question de privilège, il doit poser une question de privilège. Qu'il n'ait pas la même opinion que le député de Laurier ne constitue pas une question de privilège. S'il veut rectifier ce qu'il a dit dans son discours, c'est l'article 96. M. le député de Laurier n'a pas discuté le discours du député de Vachon du tout. Ce n'est ni une question selon l'article 96, ni une question de privilège ici.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Richelieu.

M. Maurice Martel

M. Martel: M. le Président, j'écoutais tout à l'heure mon savant collègue, le député de Sainte-Anne, faire allusion à ce que ses commettants lui avaient dit en fin de semaine ne pas comprendre très bien que, devant une situation économique comme celle que nous connaissons en Amérique du Nord, ici, à l'Assemblée nationale, on discute de problèmes de constitution. Malheureusement, je constate que son histoire du Québec est très limitée puisqu'elle se limite à avril 1981.

Nous ne pouvons pas dissocier à ce moment-ci ce qui est économique de ce qui est constitutionnel.

Une voix: Les deux vont de pair.

M. Martel: Le Québec est une des nations fondatrices du Canada. Le Québec a une culture, des traditions qui ont fait que ce peuple fondateur du pays a besoin d'avoir tous les outils nécessaires afin d'assurer son plein épanouissement. Nous avons vu qu'au tout début de notre histoire on a reconnu, lorsque, par exemple, Cartier et Macdonald ont jeté les bases de cette Confédération, qu'il y avait deux cultures, deux peuples à l'intérieur de ce Canada.

Nous avons vu par la suite que nous avions, comme peuple francophone en Amérique du Nord, des droits, des privilèges que nous devons conserver. Et, pour ce faire, l'histoire nous rappelle que, depuis 1960, les premiers ministres qui se sont succédé dans cette Chambre, tels Duplessis, Johnson, Bertrand, Lesage, Bourassa et Lévesque, ont tous essayé de faire respecter ces droits et ces privilèges fondamentaux pour l'avenir de notre peuple. Nous avons vu ce que cela a donné en 1947, 1952, 1957, lorsque Duplessis était ici, lorsqu'il essayait de renégocier cette entente entre les deux peuples fondateurs. Il est arrivé ce qui arrive aujourd'hui, que toutes les provinces avec le fédéral ont décidé d'accords fiscaux à ce moment-là, et qu'elles ont isolé encore une fois le Québec. Cela se passait avant 1960.

Par la suite, en 1960, 1964, lors des conférences fédérale-provinciales, le premier ministre libéral du temps, M. Lesage, est allé à Ottawa défendre ses positions, et a réclamé du gouvernement fédéral cette fameuse formule d"'opting out" permettant de se retirer avec compensation financière de programmes. Vous avez vu ce que cela a donné. Encore là, un front commun des autres provinces du Canada et l'isolement du Québec.

Par la suite, en 1967, j'ai vécu dans le gouvernement de l'Union Nationale avec Daniel Johnson qui défendait la thèse de l'égalité des deux peuples à l'intérieur de ce Canada ou d'en arriver à son indépendance.

Il fondait ses arguments sur la reconnaissance de ces deux nations comme fondatrices du Canada. Qu'est-ce que cela a donné, encore une fois? Le refus également de cette formule d'"opting out" nécessaire à la survie du peuple québécois.

De 1968 à 1970 Jean-Jacques Bertrand a repris exactement les mêmes arguments pour faire reconnaître que cette association de provinces était basée strictement sur l'identité de ces deux grandes cultures que sont la culture française et la culture anglophone. Encore là, front commun des provinces anglaises pour isoler encore le Québec.

Nous avons vu un autre premier ministre, celui-là libéral, qui a vu, à Victoria, sa proposition rejetée carrément alors qu'il demandait des pouvoirs accrus pour le Québec dans le domaine des affaires sociales. Il a refusé avec raison de signer cette entente de Victoria. Encore une fois, le Québec a essuyé un autre échec.

Nous avons vu, par la suite, en 1981, ce qui est arrivé dernièrement lorsque notre premier ministre actuel est allé à Ottawa pour négocier une nouvelle constitution du Canada. Après avoir obtenu le consentement de cette province concernant le privilège de garder ses droits, de garder ses acquis tant pour les provinces anglophones que pour la province francophone, qu'est-ce que cela adonné? Quelques jours après, ce front commun se reformait à nouveau; le même front commun qui s'est formé dans le temps de Duplessis s'est formé encore une fois en 1981, de la même façon, en isolant le Québec.

Cette histoire se continue encore aujourd'hui. Que fait-on de cette dualité canadienne, de ces deux peuples fondateurs? Nier ce qui existe depuis 1867, que ces Québécois forment cette société distincte d'expression française. La formule d'amendement de la constitution: Ou bien on devra maintenir au Québec son droit de veto ou bien ce sera celui qui a été convenu dans l'accord constitutionnel signé le 16 avril dernier et confirmant le droit du Québec à ne pas être assujetti à une modification qui diminuerait ses pouvoirs ou ses droits, ou bien on devra recevoir, le cas échéant, une compensation financière raisonnable et obligatoire. Et cela ne s'applique pas; ça devient du chantage, ça devient un dilemme permanent, que nous connaissons depuis le début de la Confédération.

En effet, si le Québec veut continuer d'appliquer ses droits, privilèges et compétences, il devra continuellement choisir entre le respect de ses privilèges et le portefeuille des contribuables. Sans compensation financière, le peuple du Québec aura constamment à choisir entre garder ses compétences et payer le double prix ou bien, pour éviter de payer le double, abandonner

ses compétences, droits et privilèges.

En 1968-1969, comme membre du gouvernement de l'Union Nationale, j'ai connu ces pénitences imposées par Ottawa lorsque, par exemple, il était question d'avoir, au Québec, cette assurance-maladie. Dans le temps, comme gouvernement, nous n'avions pas les moyens d'appliquer ce régime au Québec et nous avons refusé d'appliquer ce que le fédéral voulait appliquer avec le consentement de six provinces; maintenant, ça prend sept provinces pour appliquer un programme. Qu'est-ce qui est arrivé au Québec? Nous avons perdu 200 000 000 $, de l'argent des Québécois qui va à Ottawa et qui revient ici. Parce que nous ne voulions pas du programme, on nous a refusé cette somme.

C'est devant des dilemmes semblables que le peuple québécois sera systématiquement placé chaque fois que le fédéral décidera dorénavant, avec l'accord des sept, de mettre sur pied un nouveau programme. En tant que Québécois, nous ne pouvons choisir entre nos principes et 200 000 000 $. Donc, l'entente Ottawa-Canada anglais signifie que le Québec devra laisser aller à la pièce ses compétences, ses droits et ses privilèges et toute la définition que le Québec veut obtenir s'en va par le fait même à Ottawa. L'entente constitutionnelle Ottawa-Canada anglais est à la fois inadmissible et inacceptable pour le peuple québécois.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Hull. (21 h 10)

M. Gilles Rocheleau

M. Rocheleau: Le 20 mai 1980, on nous parlait de référendum. Le peuple québécois a répondu qu'il voulait demeurer dans le Canada. Le 13 avril dernier, une élection provinciale: la veilleuse! Le parti séparatiste a plongé dans l'obscurité la séparation du Québec du Canada. Le 2 octobre dernier, M. le Président, on était appelé en cette Chambre en toute vitesse pour discuter d'une motion d'urgence, c'est-à-dire qu'à la suite des amendements que déposait l'Opposition dans la résolution qui devait être présentée, nous demandions la négociation, nous étions contre un rapatriement unilatéral et nous étions pour les droits de l'Assemblée nationale. Le 5 novembre, une fois les discussions terminées, neuf provinces canadiennes et le fédéral s'entendent. Le Québec passe à côté. Le 24 novembre, on nous déposait une nouvelle motion, une motion qui ne traitait plus uniquement des points en litige, comme la compensation pécuniaire en cas d"'opting out", la langue, la mobilité. Le 25 novembre, quelques heures à peine après la motion qui contenait seize nouveaux problèmes que le Québec soulevait, déclaration ministérielle que nous faisait le premier ministre du Québec pour aller rechercher le droit de veto qu'il avait laissé sur la table, le 16 avril dernier.

M. le Président, les Québécois et les Québécoises en ont soupe de parler de constitution. Ils souhaiteraient que nous parlions d'autre chose. J'ose espérer que, demain, nous allons pouvoir commencer à parler d'autre chose. Vous savez, quand on parle de la langue, et qu'on regarde les nouveaux menus, quand on se présente dans un restaurant, il faut maintenant demander un hambourgeois. Si on veut boire quelque chose, on demande une racinette. Ouais, en québécois c'est un "hamburger" et une "rootbeer". Il ne faudrait pas commencer à faire honte à notre mère patrie, la France, qui emploie quand même encore au coin des rues des "stop" et qui mange encore des "hot dogs".

M. le Président, un des points les plus importants que je retiens actuellement, c'est la question de liberté de circulation et d'établissement. Nous en avons appris quelque chose dans l'Outaouais québécois quand le ministre du Travail du temps, M. Pierre-Marc Johnson, nous a passé sa loi sur le placement, une loi qui, à toutes fins utiles, empêche les Québécois, aujourd'hui, de travailler. La Loi sur la mobilité, on en a souligné tantôt quelques points. Mais de l'avis de motion donné par le ministre de la Justice, l'honorable Jean Chrétien, personne intègre, compétente, qui veut faire du Canada l'unité de demain, je tiens à vous souligner l'article 6, qui dit: Que tout citoyen canadien a le droit de demeurer au Canada, d'y entrer ou d'en sortir. Est-ce que cela est assez fort? De se déplacer dans tout le pays et d'établir sa résidence dans toute province. Est-ce que cela est assez fort? De gagner sa vie dans toute province.

M. le Président, je ne peux accepter là où nous sommes rendus actuellement au Québec. Il y a le gouvernement qui s'oppose au fait de permettre à tous les citoyens québécois de gagner leur vie partout au Canada. Il ne faudrait quand même pas s'inquiéter, mesdames et messieurs. Il ne faut pas s'inquiéter parce que tant et aussi longtemps que vous allez être au pouvoir, ne vous en faites pas, les Canadiens des autres provinces ne viendront pas prendre les jobs ici, il n'y en a pas de jobs. Ne vous en faites pas. Je trouve malheureux que nous charriions actuellement sur l'aspect constitutionnel alors qu'Ottawa est en train de régler nos problèmes pour nous. Pourquoi? Parce que le gouvernement actuel du Québec ne veut pas aller négocier. J'ose souhaiter qu'il leur reste un peu d'honnêteté, M. le Président, dans le sens qu'ils nous reviennent avec une vraie question.

Vous voulez, messieurs et mesdames, la

séparation du Québec du Canada? Arrêtez donc de fricoter, comme le dit si bien votre premier ministre, et posez donc la question aux Québécois et aux Québécoises, pour qu'on en finisse, une fois pour toutes, pour qu'on puisse réellement bâtir au Québec ce que les Québécois et les Québécoises s'attendent de vivre, dans le Canada, avec une nouvelle fédération, avec une nouvelle constitution qui soit propre à nous tous. Je pense que c'est important, M. le Président.

Quand on parle de mobilité, j'examine un peu les problèmes que nous crée actuellement le gouvernement du Québec. Dernier budget Parizeau: catastrophe, 0,30 $ d'augmentation par gallon d'essence. On ne peut sûrement pas empêcher la mobilité, parce que les gens de Hull, de l'Outaouais traversent les ponts pour aller faire le plein d'essence du côté de l'Ontario. C'est ça qu'on voudrait empêcher, la mobilité, empêcher nos Québécois de sortir du Québec un jour? C'est ça que vous voulez construire messieurs et mesdames, une muraille? Une muraille pour empêcher nos Québécois de traverser et d'aller gagner leur vie de l'autre côté.

M. le Président, on s'aperçoit de plus en plus de la faiblesse et de l'irresponsabilité du gouvernement. Nous avons eu la visite de l'honorable premier ministre du Québec, M. René Lévesque, dans l'Outaouais, vendredi passé, et quand le premier ministre commence à utiliser les portes arrière, c'est qu'il a peur de faire face à ses responsabilités, c'est qu'il a peur de faire face aux gens qui ont des problèmes chez nous.

Non, M. le Président, je n'accepterai jamais d'appuyer de nouveau le gouvernement qui s'en va vers son but ultime qui est la séparation. Jamais plus! J'ose souhaiter et j'espère que nous sommes en train d'en convaincre le gouvernement; je m'aperçois de l'essoufflement du gouvernement actuel et, du côté ministériel, sur les quatre derniers orateurs, nous en avons gagné trois de notre côté. Vous êtes essoufflés, messieurs, vous n'avez plus d'argument. Je pense qu'il est temps, aujourd'hui, d'aller au peuple. Allez-y, au peuple, je vous l'ai demandé l'autre jour, je vous le demande encore ce soir. Allez au peuple, messieurs!

Le Vice-Président (M. Rancourt): À l'ordre, s'il vous plaît! S'il vous plaît! M. le député de Hull.

M. Rocheleau: M. le Président, je vous remercie de m'avoir donné la parole. Il faudrait peut-être penser à sortir votre règlement un de ces jours et lire l'article 100 pour que nos collègues d'en face puissent être un peu plus dociles dans cette Chambre. Je m'aperçois que dès la minute où on commence à chatouiller nos adversaires, ça s'excite. On parlait la semaine passée du poulailler qui commençait à picosser un peu. Je pense qu'on a raison quand on dit ça. Je pense qu'on ne peut sûrement pas accuser le député de Hull d'un langage antiparlementaire quand on entend la façon dont le premier ministre du Québec, traite les neuf premiers ministres des provinces voisines et le premier ministre du Canada.

Je trouve que c'est multiplier la haine. On n'est pas en train de se faire un Québec fort, on est en train de s'essouffler ensemble. Je trouve malheureux que nous parlions encore et continuellement de cette constitution et qu'on n'offre pas aux Québécois et aux Québécoises un menu plus judicieux. Merci. (21 h 20)

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Châteauguay. S'il y a eu entente, je reconnaîtrai le député d'Outremont.

M. Fortier: Merci beaucoup.

M. Dussault: M. le Président, ce n'est pas tout à fait ce que...

Le Vice-Président (M. Rancourt): Je m'excuse. M. le député d'Outremont.

M. Pierre-C. Fortier

M. Fortier: Merci beaucoup, M. le Président. Nous voici de nouveau dans cette Chambre pour discuter d'une autre motion traitant de la constitution. Notons que c'est la deuxième en deux mois et la troisième depuis l'an dernier. Je crois que la population qui nous écoute a bien du mal à se retrouver dans tout ce dédale des négociations fédérales-provinciales et se demande bien pour quelle raison nous en sommes encore à discuter de la constitution.

Je vais tenter de vous expliquer et d'expliquer à la population pourquoi nous en sommes encore là et pourquoi je crois que la motion présentée par le Parti québécois n'est d'aucune utilité, et pourquoi je voterai contre cette motion. Je vous ferai part de mes commentaires tout simplement, quoique je vous avouerai que je me sentirais bien plus à l'aise si j'avais à vous parler de développement économique, du chômage accru qui sévit dans les régions et de la nécessité pour le gouvernement de changer radicalement ses attitudes et ses politiques face à ces problèmes, s'il veut vraiment les résoudre.

En effet, toute personne qui parcourt le Québec en ce moment se rend bien compte qu'une très grande majorité de la population n'admet pas que ses députés et surtout que son gouvernement prennent tant de temps et d'énergie pour débattre de la question constitutionnelle alors que les besoins des travailleurs, surtout chez les plus jeunes,

sont si aigus. La population du Québec connaît bien la conjoncture actuelle. Elle sait bien que, depuis que le Parti québécois est au pouvoir, le taux de chômage a augmenté de quelque 30% si on compare le taux de chômage moyen du Canada pour la période de quatre ans, allant de 1977 à 1980 avec la période antérieure de quatre ans de 1973 à 1976. Elle sait bien que les immobilisations dans le domaine de la fabrication ont diminué de 20% en comparant ces mêmes périodes. Comme tous le savent, ce sont ces investissements qui normalement créent le plus grand nombre d'emplois permanents. Elle sait bien que les tarifs d'électricité dans cette province ont augmenté de plus de 100% depuis 1977, alors que l'inflation n'aura augmenté, à la fin de 1982, que de 62%. Elle sait bien également que les Québécois sont ceux qui paient leur essence le plus cher au Canada.

M. le Président, la population sait ces choses. Les Québécois et les Québécoises savent que c'est difficile pour plusieurs de trouver un emploi et ils savent également que, lorsqu'ils en ont un, ils doivent payer les impôts et les taxes indirectes les plus élevés au Canada. Ce que la population sait aussi, c'est que cette Chambre a voté une résolution au début d'octobre, demandant au gouvernement du Québec de négocier et de défendre les intérêts du Québec de façon à permettre au Québec de jouer pleinement son rôle au sein de la fédération canadienne. C'est ce que la population a compris du débat sur la motion que nous avons eu au début du mois d'octobre.

M. le Président, certains de nos sympathisants nous ont reproché l'appui que nous avions donné au gouvernement à cette occasion parce qu'ils ne croyaient pas que le gouvernement puisse utiliser cet appui à bonne fin. Malgré tout, il semble bien qu'à cette occasion, soit au début d'octobre, une majorité de citoyens de cette province a compris que le Parti libéral du Québec avait vraiment à coeur les intérêts des Québécois et des Québécoises, ainsi que les intérêts de tous les Canadiens d'un océan à l'autre. Une majorité des citoyens de cette province a approuvé à ce moment le geste posé par l'Assemblée nationale parce qu'elle savait d'instinct qu'il était important pour le Québec de faire valoir son point de vue, qu'il était important pour le Québec de contribuer positivement à la négociation d'une nouvelle entente constitutionnelle et d'être partie prenante à toute modification substantielle de la constitution.

M. le Président, c'est ce que la population a compris des intentions exprimées par cette Assemblée au début d'octobre. Mais où en sommes-nous maintenant? Je suis convaincu qu'une très grande majorité de citoyens de cette province sont déçus. Ils sont déçus non seulement parce qu'ils voudraient nous voir passer à des choses qui, d'après eux, seraient plus importantes comme la lutte au chômage et le développement de notre économie, deux actions très importantes qui pourraient réduire d'ailleurs le fardeau de nos impôts. On ne peut les en blâmer, mais ils sont déçus, parce qu'ils se rendent compte que notre gouvernement a mal négocié, qu'il a mal défendu les intérêts du Québec et que les brillants stratèges de notre gouvernement ont amené le Québec dans un cul-de-sac.

M. le Président, il faut le dire et le redire, le gouvernement avait établi dans ce dossier constitutionnel une très mauvaise stratégie. Le gouvernement s'est fourvoyé dans son approche et il a perdu. Oui, M. le Président, en signant l'entente du 16 avril dernier, notre gouvernement lui-même a signé sa perte, puisqu'il acceptait officiellement de cette entente deux principes extrêmement importants. D'une part, il ne reconnaissait pas le Québec comme une province comme les autres, puisque le texte de l'entente du 16 avril ne fait aucune allusion à la dualité culturelle du Canada et, d'autre part, il acceptait de troquer notre droit de veto séculaire contre un droit de retrait avec compensation financière, comme si on pouvait négocier pécuniairement un droit de veto qui a eu dans le passé et qui aura encore dans l'avenir une importance primordiale. Ce droit de veto avait toujours été défendu avec acharnement par tous les premiers ministres du Québec jusqu'au 16 avril dernier.

Tous les Québécois ont compris récemment que le gouvernement du Québec avait déjà laissé tomber, en avril dernier, ses meilleurs atouts et que l'affaiblissement du Québec à la dernière conférence constitutionnelle n'était que le résultat des positions du gouvernement prises il y a quelque neuf mois. J'aimerais rappeler que cette entente du 16 avril, qui nous place maintenant dans une situation si difficile, ne fut jamais discutée publiquement et ne fut jamais soumise à cette Assemblée qui est censée nous représenter tous, surtout dans les moments difficiles.

M. le Président, le 16 avril dernier, non seulement le gouvernement a-t-il trahi les positions constitutionnelles les plus fondamentales du Québec, mais il l'a fait en cachette, sans chercher à obtenir l'approbation de cette Chambre, probablement parce qu'il savait fort bien qu'il ne l'aurait jamais obtenue.

Je veux souligner, pour que cela soit très bien compris, que le Parti libéral du Québec n'était pas partie prenante à cette entente du 16 avril et qu'il ne l'aurait jamais été, puisque l'entente que le premier ministre du Québec a signée est en contradiction flagrante avec le livre beige de notre parti.

Le peuple du Québec a également compris autre chose, ces jours derniers. C'est que notre gouvernement est continuellement ballotté entre deux options fondamentales. Certains jours, notre premier ministre, tant bien que mal, tente d'honorer les promesses faites au peuple québécois lors des dernières élections, c'est-à-dire de défendre les intérêts du Québec à l'intérieur de la fédération canadienne, mais d'autres jours, plus nombreux malheureusement, il élabore des stratégies étapistes devant mener le Parti québécois, lentement mais sûrement, vers l'indépendance du Québec. C'est cet enchevêtrement d'objectifs contradictoires qui a mené notre gouvernement dans le cul-de-sac où il se trouve présentement.

M. le Président, les Québécois et les Québécoises ne sont pas dupes. Sans s'attarder à lire tous les textes constitutionnels, ils ont compris ce qui se passe présentement. Ils ont compris, premièrement, que le Québec est affaibli par les mauvaises stratégies du gouvernement. Ils ont compris qu'il était important pour le gouvernement, malheureusement, de répondre aux propositions positives qui lui ont été faites, tant par le gouvernement d'Ottawa que par les partis d'Opposition ainsi que celles qui ont été faites par notre chef de façon à rendre l'entente constitutionnelle compatible avec les vrais intérêts du Québec, mais, malheureusement, le gouvernement n'a pas voulu donner suite à toutes ces ouvertures.

Ils ont compris que notre premier ministre n'a pas cherché à tirer avantage de ces ouvertures, parce qu'il est prisonnier des vues indépendantistes de son parti, surtout à la vieille d'un conseil général du week-end prochain. Ils ont compris que la dernière motion présentement débattue en cette Chambre a bien peu d'importance et qu'elle n'a été amenée que pour cacher les bévues commises par le gouvernement dans ce dossier depuis neuf mois.

M. le Président, les citoyens de cette province ne sont pas dupes et ils ont compris quelle est la situation devant eux présentement. Je vous remercie. (21 h 30)

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Châteauguay.

M. Roland Dussault

M. Dussault: Merci, M. le Président. Je dois vous dire en commençant, et bien sincèrement, combien j'admire l'habileté de nos amis d'en face quand le tapis leur glisse sous les pieds dans les débats comme celui qu'on connaît présentement. Surtout, j'admire leur habileté à ne pas dire s'ils auraient, eux, voté pour la motion, signé oui ou non l'entente des dix. C'est ça, je pense, qui est le plus significatif dans ce débat depuis que nous entendons l'Opposition se prononcer sur la question.

Les événements constitutionnels depuis le référendum de mai 1980 ont largement permis aux Québécois de saisir toute la performance dont est capable la manufacture à illusions des fédéraux et de leurs nouveaux alliés provinciaux. Le non voulant dire un oui au référendum, la négociation estivale devant mener à l'échec, selon le document Kirby, la négociation de la dernière chance démasquée en une nuit, voilà autant de scénarios dont l'objectif, maintenant évident, était d'entretenir l'illusion chez les Québécois.

Les Québécois, cependant, ne sont pas les seules victimes de cette illusion manufacturée. C'est aussi le cas de nos frères de sang qui vivent en dehors du Québec. Depuis qu'il est question d'introduire une charte des droits dans la constitution canadienne, pour eux aussi la grande illusion continue. M. Jean Chrétien leur a dit: Ce sont les minorités francophones qui doivent en premier lieu profiter de la révision constitutionnelle. Qu'en est-il de la réalité? C'est de ça que je veux parler maintenant.

Lors des négociations de la dernière chance, de tous les premiers ministres des provinces où il y a des minorités francophones, seul le premier ministre du Nouveau-Brunswick a fait preuve d'une certaine ouverture à l'égard des francophones hors Québec, mais pour sa province seulement. Les autres ont pratiqué la politique de la porte fermée. Que représentent ces francophones hors Québec sur le plan du nombre et où se situent-ils?

Globalement, en 1971, les francophones hors Québec se déclarant de langue maternelle française étaient au nombre de 924 790, alors qu'en 1976, ils ont diminué, on n'en comptait plus que 896 350. Cependant, en 1971, sur les 924 790 qui se déclaraient de langue maternelle française, seulement 675 200 personnes déclaraient avoir toujours le français comme langue d'usage. Ces francophones hors Québec constituent, en Ontario, 5,6% de la population; au Nouveau-Brunswick, 33%; en Nouvelle-Écosse, 4,5%; à l'Île-du-Prince-Édouard, 5,5%; à Terre-Neuve, 0,5%; au Manitoba, 5,4%; en Saskatchewan, 2,9%; en Alberta, 2,4% et en Colombie britannique, 1,6%. Un jour, au Canada, nous formions la majorité.

D'ici 20 ans, selon une étude récente des démographes Réjean Lachapelle et Jacques Henripin, les francophones hors Québec ne représenteront plus que 2,2% à 3,5% de la population canadienne, alors qu'en 1976, ils étaient de 4,4%. De toute évidence, quand il s'agit de la langue maternelle, les francophones hors Québec sont en nette régression et la situation est pire lorsqu'il s'agit de leur langue d'usage.

Ce n'est qu'en 1968 que des lois sur

l'enseignement en français ont été adoptées en Ontario; en 1969 pour le Nouveau-Brunswick, encore que celles-ci furent promulguées dans leur totalité seulement en 1977, et en 1970 pour ce qui est du Manitoba. Selon le document Deux poids deux mesures, produit par la Fédération des francophones hors Québec: "Si ces lois avaient toujours existé, on n'aurait pas, aujourd'hui, un taux aussi effarant d'assimilation. Il ne faut pas oublier que si plusieurs communautés anglophones ont pu étudier en français, elles ont dû le faire dans l'illégalité et la clandestinité. Les lois sur l'enseignement en français dans ces trois provinces n'établissent aucunement un statut d'égalité et ne permettent pas d'instaurer un système d'éducation autonome. Elles permettent tout simplement aux commissions scolaires d'ouvrir des écoles françaises pourvu qu'un nombre minimum d'élèves soient inscrits." Je le répète: "pourvu qu'un nombre minimum d'élèves soient inscrits."

Cela ne ressemble-t-il pas à quelques petits mots de la charte des droits inscrits dans la résolution d'Ottawa présentement à l'étude à la Chambre des communes? En Saskatchewan, selon les francophones hors Québec, l'État peut agir au gré de sa fantaisie en déterminant les règles du jeu. Les écoles désignées, écoles où l'on tolère l'enseignement du français, n'ont aucune garantie de survie et existent selon le bon vouloir du cabinet.

En Nouvelle-Écosse, à l'Île-du-Prince-Édouard, comptez-vous chanceux, dit le document. Il ajoute: "Dans ces deux provinces il existe quelques écoles où on enseigne en français, mais l'existence même de ces écoles relève entièrement du pouvoir discrétionnaire des ministères de l'Éducation. Il n'existe aucune loi provinciale à ce sujet."

À Terre-Neuve, maintenant, on dit dans le document: "Les quelques écoles qui dispensent un enseignement en français sont des projets pilotes, par conséquent elles peuvent tout aussi bien disparaître sans que les communautés n'aient le moindre recours." C'est ça la réalité, M. le Président. Des générations de revendications n'ont rien donné de plus. Sauf au Nouveau-Brunswick, où des changements récents permettent de l'espérer, les francophones hors Québec ne peuvent encore voir comment ils pourront un jour avoir un contrôle réel sur leurs écoles.

Est-ce que la charte incluse dans la résolution fédérale y changera quelque chose? Est-ce que l'article 23 de cette résolution deviendra le rempart souhaité contre l'assimilation galopante des francophones hors Québec? Je dis non. Les francophones hors Québec disent non aussi. Il n'y aura que les marchands d'illusions pour tenter de faire croire qu'il y aura des changements après cela.

Dois-je rappeler que le contenu de la résolution actuelle relatif aux francophones hors Québec n'est pas fondamentalement différent de ce qu'il était lorsque M. Trudeau voulait l'imposer unilatéralement, ce qui permet de penser que toutes les critiques faites avant demeurent vraies aujourd'hui? Pour les francophones hors Québec, le sort est toujours réservé aux quelques petits mots: "là où le nombre le justifie".

Voyons ce qu'en pensent les francophones hors Québec eux-mêmes. Mme Jeannine Séguin, porte-parole officiel des francophones hors Québec, disait, dans une lettre du 28 octobre, adressée au coprésident de la conférence constitutionnelle devant se tenir le 2 novembre suivant: "Dans sa version actuelle, le projet de charte des droits linguistiques est beaucoup trop limitatif pour qu'il serve à améliorer de façon tangible la situation des francophones hors Québec, en particulier dans le domaine de l'éducation. La Fédération des francophones hors Québec ne peut souscrire à une charte qui assujettit le droit à l'enseignement en langue française à des considérations de nombre suffisant qui ne garantit pas aux francophones hors Québec l'accès à des classes et à des écoles homogènes, de même que le droit à la gestion de leurs institutions scolaires." Un peu plus tard Mme Séguin ajoute: " En définitive, la seule chose que nous accorde la charte est le droit de revendiquer devant les tribunaux pour la reconnaissance de nos droits linguistiques dans le domaine de l'enseignement."

De plus, la Fédération des francophones hors Québec a émis l'opinion qu'aucun tribunal ne pourrait forcer un gouvernement provincial à ouvrir une école française en dehors du Québec si le contenu de la résolution reste ce qu'il est présentement. Pour la fédération, la présente reconnaissance des droits linguistiques n'est qu'un voeu pieux si elle ne prévoit pas aussi que les bénéficiaires de ces droits auront le pouvoir d'exiger qu'ils soient respectés par le pouvoir exécutif autant que par le pouvoir législatif, ce qui n'est pas prévu.

On peut penser que la Fédération des francophones hors Québec dit ce qu'elle pense à la limite de ce que la diplomatie exige. Aussi, pour avoir une idée plus juste des sentiments des francophones hors Québec, il y a lieu d'évoquer ici ce qu'en disait un Franco-Manitobain maintenant installé au Québec, anciennement directeur général de la Société franco-manitobaine. Parlant de l'article 23 de la résolution fédérale à la commission parlementaire de la présidence et de la constitution, le 4 février dernier, M. Hubert Gauthier disait: "Pour mes frères, pour mes soeurs, mes amis, mes parents du Manitoba, de la Saskatchewan, de l'Alberta, tout ce que ce même article leur concède et consacre, c'est le droit de se battre. J'aimerais vous signaler que le droit de se

battre, moi je n'en ai pas eu besoin; mon père non plus n'a pas eu besoin du droit de se battre, mon grand-père non plus et Louis Riel non plus. Le droit de se battre on en portait l'enseigne, et, là-bas, cela faisait partie intrinsèque de la vie de tous les jours. Il est donc complètement superflu, pour ne pas dire aberrant, de nous dire qu'il faut enchâsser le droit de se battre dans la constitution canadienne. C'est cela, à mon avis - disait toujours M. Gauthier - la pire des inégalités, les deux poids deux mesures dont on faisait tant état. Il faisait allusion à ce moment-là au droit qu'ont les anglophones québécois. Plus loin, M. Gauthier ajoutait: "L'illusion, c'est que tout est centré sur l'aspect juridique, sur une soi-disant charte des droits qui donne bonne conscience à certains, et je sais très bien que tout ce débat ne représente qu'une petite fraction de la réalité quotidienne chez nous." Il ajoutait: "Pourtant, on nous laisse croire que tous les problèmes des francophones hors Québec seront résolus une fois pour toutes lorsque ces droits seront enchâssés dans la constitution. Voilà l'autre illusion, disait-il. Il est à se demander si le projet de constitution qu'on nous propose n'est pas l'oeuvre de marchands d'illusions." (21 h 40)

II ajoutait, évoquant la situation délicate dans laquelle se situent les francophones hors Québec face à leurs revendications et face au pouvoir: "Ils vont jusqu'à dire aux francophones hors Québec qu'ils doivent accepter cette situation sinon ils se retrouveront les mains vides, ils perdront toutes ces subventions qui ont été arrachées au prix de tant de luttes." Il terminait en disant: "Les nombreux contacts que je maintiens encore aujourd'hui avec mes amis hors Québec me confirment que ce chantage éhonté se poursuit toujours. Les faits sont là," disait-il.

À la question qu'on lui posait après son exposé, à savoir si le résultat du référendum était susceptible d'aider les francophones hors Québec et les Franco-Manitobains particulièrement, il avait répondu: "Non. Les francophones hors Québec commencent déjà à payer le prix du non que les Québécois ont offert à leur gouvernement." Les francophones hors Québec ne peuvent pas se contenter de la reconnaissance d'un droit individuel; ils veulent des droits collectifs. Mme Séguin, la porte-parole officielle, s'est dite d'avis que toute modification constitutionnelle doit se faire dans le respect des conventions et des principes fondamentaux qui ont présidé à la fondation de ce pays, donc des deux peuples fondateurs, et c'est ce que nous revendiquons dans la motion que nous débattons présentement.

De plus, ce serait l'illusion consommée s'ils ne revendiquaient pas les droits essentiels - et ils les revendiquent - suivants: le droit à l'éducation en français de la maternelle à l'université inclusivement dans des classes, des écoles et des conseils scolaires qui sont sous le contrôle des francophones eux-mêmes, le droit à des services sociaux et communautaires en langue française, le droit à un appareil judiciaire offrant plusieurs services en langue française; le droit à un réseau de radio et de télévision en langue française, reflétant la réalité des besoins des communautés francophones hors Québec; le droit à l'usage du français dans les Législatures provinciales et dans les services qui en découlent.

Ce qu'ils veulent, au fond, ce sont les mêmes avantages qu'on offre à la minorité anglophone du Québec, et pourquoi pas? Mais cela, le Canada anglais ne veut pas le leur donner et il ne le leur donnera jamais. À part le Nouveau-Brunswick, les francophones hors Québec n'auront que ce que l'Ontario accepte bien de donner aux Franco-Ontariens et c'est peu de chose. On en a maintenant la certitude grâce à une lettre du premier ministre de l'Ontario adressée à une Ontarienne, Mme Sallmen, le 29 janvier dernier, et dont des extraits ont été publiés dans la Presse.

Selon M. Davis, la charte ne vise qu'à contrer la loi 101 et ne comporte rien de plus pour les Franco-Ontariens. Dans sa lettre, M. Davis disait: "Cela ne créera aucune obligation supplémentaire à l'Ontario qui a déjà, depuis plusieurs années, sa propre législation assurant que des programmes éducatifs dans la langue française sont offerts là où le nombre le justifie." Toujours ces mots: "là où le nombre le justifie". Pour bien faire comprendre sa pensée et bien situer sa conviction, M. Davis ajoutait: "Je tiens à vous assurer que nous sommes opposés à l'imposition du bilinguisme sur les institutions provinciales telles les Législatures, les tribunaux et autres institutions." Comme si ce n'était pas suffisant, il ajoutait: "II est très évident que notre forte opposition à l'intention première d'Ottawa de revoir l'article 133 de la constitution pour imposer le bilinguisme institutionnel a porté le gouvernement canadien à laisser tomber cette idée".

De toute évidence, non seulement le premier ministre de l'Ontario ne veut pas faciliter les choses aux Franco-Ontariens, mais encore il veut détruire ce qui existe dans les lois québécoises qui protègent les droits des francophones du Québec et c'est inacceptable. C'est dans ces cinq petits mots: "où le nombre le justifie", que l'on peut mesurer toute la générosité dont est capable le système fédéral et la population anglo-saxonne qui le contrôle, de même que le premier ministre de l'Ontario et les auteurs de la résolution fédérale débattue en Chambre des communes présentement. A-t-on

compris, M. le Président, les pertes considérables pour les anglophones du Québec que constituerait au Québec l'application d'une mesure constitutionnelle aussi restrictive? Si notre générosité s'était laissée enfermer dans un tel carcan, connaîtrait-on la situation suivante au Québec? En 1980-1981, sur 377 écoles de langue anglaise, 40 avaient moins de 37 élèves. 21 avaient moins de 20 élèves. Sur 86 écoles bilingues où, pour la plupart, il y a cohabitation linguistique, 39 avaient moins de 37 élèves et 16 avaient moins de 20 élèves.

Plus précisément, sur le territoire même du Conseil scolaire de l'île de Montréal, dans l'appendice protestant du comté de Soulanges, en 1980-1981, le Soulanges Protestant School, à Saint-Télesphore, une école primaire avait neuf élèves, pas une classe de neuf élèves, M. le Président, une école de neuf élèves, une école régulière. Notre générosité n'a jamais eu de limites à leur égard, pas seulement dans le domaine scolaire de niveau élémentaire ou secondaire. La minorité anglophone du Québec a droit à trois universités, à plusieurs collèges, à plusieurs institutions de santé à caractère social, à plusieurs postes de radio et de télévision et même à des journaux dans sa langue où il est même possible d'y colporter toute la propagande entretenant chez cette minorité la conviction qu'elle n'a pas et qu'elle n'a jamais eu droit à une telle générosité.

M. le Président, si on enlevait de la résolution fédérale les mots "où le nombre le justifie", l'accord des dix n'existerait plus. Ces cinq petits mots garantissent, à toutes fins utiles, aux provinces de ne pas devoir appliquer les droits reconnus à l'article 23 de la résolution fédérale. C'est ça, la réalité. C'est de la fumisterie en mots clairs. C'est la garantie de l'assimilation. En terminant, M. Chrétien - je le rappelle - a dit aux francophones - et il leur a menti - qu'ils seraient les premiers à profiter de la révision constitutionnelle. C'était un autre des nombreux produits de la manufacture à illusions entretenues par le régime fédéral.

Vous me permettrez, M. le Président, puisqu'il en a été convenu ainsi, de changer de sujet pour aborder un amendement que je voudrais soumettre à la motion. Avant de soumettre cet amendement que j'annonce, M. le Président, je voudrais dire ceci: La semaine dernière, dans cette Assemblée, nous avions l'impression que l'égalité entre les femmes et les hommes du Canada était enfin reconnue. On sait maintenant que cette reconnaissance n'est pas aussi claire qu'on le croyait et que si l'article 28 assure que toutes les dispositions de la charte fédérale doivent respecter ce principe d'égalité, l'article 33, lui, permet des dérogations. Quel article prévaut sur l'autre? Nul ne le sait et les juristes sont divisés là-dessus. C'est donc la Cour suprême qui devra en décider un jour. Ce n'est donc pas la grande victoire que les femmes avaient pressentie et leurs commentaires reflètent la déception générale. Plusieurs Canadiennes croient que l'article 33 constitue une menace dont il est difficile de mesurer la portée. D'autres n'ont pas le sentiment que les femmes ont gagné quoi que ce soit par la seule modification de l'article 28. Et nous, Québécois et Québécoises, comment pouvons-nous nous situer face à cela?

Au Québec, l'égalité entre les femmes et les hommes est inscrite dans la Charte des droits et libertés de la personne depuis 1975. Non seulement la charte reconnaît-elle le principe de l'éqalité, elle reconnaît certains droits qui donnent une consistance à ce principe. Par exemple, le droit à un salaire égal pour un travail équivalent. À plus ou moins long terme, la charte va reconnaître l'action positive, etc.

Motion d'amendement

Ce qui m'amène, M. le Président, à une constatation qui explique l'amendement proposé. Le système de droit civil qui est le nôtre est différent de celui du reste du Canada, il en est un où la loi écrite a une importance fondamentale, où seule l'Assemblée nationale peut adopter et modifier des lois. Ce système donne des ouvertures aux femmes. Ces instruments que nous donne notre système juridique, nous y tenons. Ce serait un recul que de se soumettre à une charte fédérale opaque, pour ne pas dire douteuse, sur la question d'égalité, la légitimité de ce que les femmes ont gagné ici au cours des années.

En conséquence, je propose l'amendement suivant, tel qu'entendu, à la motion déposée. À l'alinéa 3, je propose un nouveau paragraphe, entre b) et c), qui se lirait comme suit: "L'égalité entre les hommes et les femmes, pourvu que l'Assemblée nationale conserve le pouvoir de faire prévaloir ses lois dans les domaines de sa compétence."

Merci, M. le Président.

Le Président: Je déclare l'amendement recevable et je cède la parole au leader de l'Opposition officielle. (21 h 50)

M. le leader.

M. Gérard D. Levesque

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, il est réellement inconcevable qu'à ce moment-ci du débat, les ministériels déposent une motion d'amendement comme celle que nous avons devant nous. Vous me permettrez de rappeler à cette Chambre qu'en ce qui concerne l'égalité des hommes

et des femmes, j'ai cru comprendre que des deux côtés de l'Assemblée, on voulait laisser entendre à la population qu'on appuyait ce concept. Or, à deux reprises, le gouvernement actuel a fait en sorte de vouloir jeter de la confusion, laisser entendre qu'on appuyait ce concept, mais à ces deux reprises, on présente des motions d'amendement qui n'ont pas pour effet de protéger, dans une charte constitutionnelle, cette égalité des sexes.

On se rappelle du raté de Mme la ministre à la Condition féminine, lorsqu'elle a présenté une motion d'amendement, qu'elle a, par la suite, retirée lorsqu'elle s'est sans doute aperçu de sa valeur intrinsèque, ou plutôt de son absence de valeur. Parce que tout ce que cette motion disait, en deux mots, c'est que nous avons ici une loi que nous appelons la Charte des droits et libertés de la personne et dans cette loi, on proclame l'égalité des sexes. Cette loi est une loi que nous connaissons bien, d'autant plus que c'est un gouvernement du Parti libéral, le dernier gouvernement du Parti libéral d'ailleurs... Est-ce qu'on met en doute qu'il s'agit bien de la Charte des droits et libertés de la personne, proclamée, déposée, votée par cette Assemblée sous un gouvernement libéral? Lorsque je parle du dernier, je ne parle pas dans le même sens que mes honorables amis d'en face, parce que ceux-ci savent fort bien que si on ne va pas aux urnes présentement, de l'autre côté, c'est simplement parce qu'on a peur que ce dernier devienne le prochain, et rapidement!

Je ne voudrais pas, à ce moment-ci, devant une question aussi sérieuse, me laisser entraîner par ces gens qui sont des spécialistes dans les procédures de diversion. Vous me permettrez de rappeler à cette Chambre justement que cette première motion d'amendement présentée encore une fois par les ministériels, et plus précisément par Mme la ministre d'État à la Condition féminine, avait simplement pour effet de rappeler qu'il existait ici une loi statutaire que l'on appelle la Charte des droits et libertés de la personne. Il s'agit bien d'une loi statutaire que tout gouvernement peut changer. On peut la changer chaque jour si l'on veut. Elle n'est pas enchâssée dans une constitution. Ce que les femmes du Canada, du Québec, de toutes les provinces canadiennes demandent, c'est que cette égalité des sexes se retrouve dans la constitution. Non pas une constitution fédérale, une constitution provinciale, mais la constitution du pays, c'est-à-dire une charte constitutionnelle qui, elle, ne peut être changée que par le truchement de la formule d'amendement dont on a tellement parlé. Cela veut dire une majorité de sept provinces, cela veut dire une possibilité de retrait, cela veut dire un vote dans les Chambres provinciales et au Parlement fédéral. C'est donc dire l'importance que ce droit, que ce concept de l'égalité des sexes se retrouve dans une constitution, dans une charte constitutionnelle. Le premier amendement n'avait pas pour effet de donner cette protection aux femmes du Québec et du Canada. Présentement, alors qu'on a retiré la première motion d'amendement parce qu'on savait fort bien qu'elle ne ferait pas grand chemin, on apporte un nouvel amendement à la fin de ce débat sur la motion principale du premier ministre. Et qu'est-ce que l'on dit? On dit: Oui, "l'égalité entre les hommes et les femmes," on retrouve cela, mais on ajoute immédiatement: "pourvu que l'Assemblée nationale conserve le pouvoir de faire prévaloir ses lois dans les domaines de sa compétence." Mais c'est justement cela qui affecte toutes les femmes du Québec et du Canada. Toutes les organisations féminines ont protesté justement contre cela. C'est cela que l'on retrouvait dans la résolution fédérale au début. C'est cela qui a fait qu'il y a eu mobilisation des femmes au Québec et au Canada qui ont dit: Non, nous n'en voulons pas, parce que, justement, ce que proposait le gouvernement fédéral, à la suite de la conférence fédérale-provinciale, de la conférence constitutionnelle, parce qu'il ne pouvait pas avoir l'accord des province, c'était d'avoir l'égalité entre les hommes et les femmes, mais assortie d'une formule, d'une clause qu'on appelle la clause "nonobstant". Cela veut dire qu'une province ou le gouvernement fédéral pouvait encore légiférer à l'encontre de la charte constitutionnelle, à l'encontre de l'égalité des sexes, à condition que, dans cette loi, on dise que c'était "nonobstant la charte constitutionnelle". C'est justement cela que les femmes ne veulent pas et - ils n'ont rien compris encore - ils reviennent encore ce soir avec le même amendement autrement présenté, mais qui n'a pas pour effet, justement, de consacrer l'égalité des sexes dans la constitution. On n'en veut pas, M. le Président.

Pourtant, regardons ce que la résolution fédérale dit. Au début, à l'article 28 - je le répète - elle proclamait l'égalité des deux sexes, mais conditionnellement à l'application de l'article 33, lequel article 33 décrivait ce qu'on appelle la clause "nonobstant". Protestations à travers le pays! Finalement, les provinces les unes après les autres ont consenti à ce que demandaient les femmes du pays. Toutes les provinces, finalement, ont accepté, le gouvernement fédéral était bien d'accord et il a accepté. On nous disait encore récemment: Le Québec va accepter, il accepte, il est bien d'accord, mais lorsqu'on voit en blanc sur noir ou en noir sur blanc, comme vous le voulez, cet amendement qu'on nous apporte ce soir, on s'aperçoit que le gouvernement du Québec, le

gouvernement du Parti québécois s'oppose par cet amendement au concept de l'égalité des sexes enchâssé dans la constitution canadienne.

Une voix: Honte! C'est une honte.

M. Levesque (Bonaventure): On aura beau dire, M. le Président: Mais voyez-vous, nous autres, on a une charte ici. On a une loi statutaire, qu'on l'appelle charte ou non. Ce n'est pas une charte constitutionnelle. Évidemment, nous avons une loi ici, au Québec, c'est vrai. D'ailleurs, nous l'avons adoptée ensemble et elle a été parrainée par un gouvernement libéral. Nous avons cela, c'est vrai, mais ce n'est pas une charte constitutionnelle, elle peut être changée n'importe quand.

Je les entends déjà dire: Mais il y a des fois où on voudrait légiférer, ici à l'Assemblée nationale, pour donner plus de pouvoirs aux femmes. Autrement dit, on ferait peut-être une infraction à la charte constitutionnelle parce que ce ne serait pas l'égalité, on voudrait donner plus aux femmes. Je rappelle à cette honorable Assemblée que l'article 15 de la résolution fédérale prévoit la discrimination positive. C'est-à-dire qu'on pourra adopter des lois ici pour rendre justice aux femmes et même aller plus loin que l'égalité. C'est déjà permis dans l'article 15 de la résolution fédérale.

Alors pourquoi ne pas l'accepter ce soir? Pourquoi se cacher derrière un autre amendement? Pourquoi essayer de faire croire à la population qu'on est en faveur de l'égalité des deux sexes alors qu'on apporte un amendement limitant et mettant de côté ce concept qu'on voudrait voir et que les femmes du pays voudraient voir enchâssé dans la charte constitutionnelle canadienne?

Motion de sous-amendement

Je termine ici ces quelques remarques que je voulais faire sur cet amendement, mais non sans vous dire tout de suite que notre formation politique votera contre cet amendement du député de Châteauguay. De plus, qu'il me soit permis de présenter un sous-amendement afin que notre position soit très bien comprise et que celle des ministériels soit également comprise parce que nos amis d'en face auront à se prononcer sur le sous-amendement que je propose immédiatement. (22 heures)

M. le Président, je propose que, dans la motion d'amendement du député de Châteauguay, tous les mots après le mot "femmes" soient retranchés et que cette motion se lise maintenant comme suit: "... l'égalité entre les hommes et les femmes." Point. Merci, M. le Président.

Des voix: Bravo! Très bien!

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! Je déclare recevable le sous-amendement et je donne la parole à Mme la ministre d'État à la Condition féminine.

Mme Pauline Marois

Mme Marois: Merci, M. le Président. Il est bien évident que je voterai pour l'amendement déposé par mon collègue de Châteauguay. J'aimerais dire immédiatement au député de Bonaventure que je suis essentiellement, sinon je ne serais pas là, en faveur de l'égalité entre les sexes, entre les hommes et les femmes, évidemment, cependant, dans le respect des différences.

Le député de Bonaventure semble dire qu'il y a unanimité chez toutes les femmes et tous les groupes de femmes du Canada, disant qu'enfin l'égalité entre les femmes et les hommes sera reconnue par l'enchâssement dans la constitution.

J'aimerais bien lui répondre maintenant, parce que je pense qu'effectivement il n'y a pas unanimité chez l'ensemble des femmes du Canada. D'autre part, j'aimerais bien dès maintenant dire aussi au député de Bonaventure qu'au contraire il m'apparaît extrêmement courageux de la part de notre gouvernement et je dirais aussi de ma part, comme ministre d'État à la Condition féminine, de soutenir ce qui est présenté maintenant ici comme amendement, parce que justement on reconnaît chez nous, au Québec, l'égalité entre les hommes et les femmes, mais dans le respect de notre différence.

J'aimerais parler des réactions des femmes à travers le Canada et des réactions d'un certain nombre de groupes. Mardi dernier, pour satisfaire le lobby des femmes - je pense qu'elles ont raison de le faire - la Chambre des communes a approuvé une nouvelle version de l'article 28 de la charte. Cet amendement vient corriger l'article 33, celui de la clause "nonobstant". On y a retranché les mots qui exprimaient clairement que le législateur pouvait ignorer l'article 28 en passant des lois qui discriminaient sur la base du sexe. Le problème est donc maintenant de savoir quelle section a priorité sur l'autre. La section 28 qui comprend la clause d'égalité ou la section 33 qui permet le passage de lois discriminatoires?

Il y a plusieurs avis conflictuels qui ont été donnés à ce sujet-là. Je me permets de présenter quelques-uns de ces avis qui sont, évidemment, dans une traduction "ad lib". Par exemple: Camara Thompson, qui est conseillère légale pour le Comité canadien des femmes et la constitution, s'inquiète à cause de la formulation qui n'est pas claire et croit que le verdict final repose sur

l'interprétation ultérieure par la Cour suprême du Canada. Elle ajoute gu'étant donné l'histoire des cours canadiennes, de la façon dont elles ont négocié les droits des femmes, je ne suis pas sûre qu'elles jugeraient en notre faveur sur cette question. Graham Eglinton, qui est conseiller du comité conjoint Sénat-Communes sur les mesures législatives, se refusait de donner immédiatement une opinion, mais admettait que la formulation représentait clairement un problème, du moins en apparence.

Du côté des groupes de femmes, effectivement, l'enthousiasme n'est pas particulièrement délirant au sujet de cette entente. Plusieurs ont exprimé la crainte que l'article 33 - ne nous trompons surtout pas -constitue une menace dont on peut difficilement mesurer la portée. Lucie Pépin, présidente du Conseil consultatif canadien sur la situation de la femme, prétend que le nouvel article 28 est bienvenu, mais elle émet effectivement des doutes sur l'interprétation qu'on fera relativement à la clause "nonobstant" qui demeure encore.

Lynne Gordon, qui dirige le Conseil ontarien du statut de la femme, commente: "Je ne pense pas qu'il y ait matière à jubilation. Cela met en évidence le problème que nous sommes tous et toutes conduits en bateau." Une autre femme de Regina nous dit qu'elle n'a pas le sentiment que les femmes ont gagné quoi que ce soit par la seule modification de l'article 28. Tous ces commentaires témoignent, c'est le moins qu'on puisse dire, que sur la question de l'égalité entre les hommes et les femmes, la charte constitutionnelle est complexe, pour ne pas parler de complexité douteuse.

La confusion durera, évidemment, tant que ne sera pas établi clairement lequel des articles - 28 ou 33 - a priorité sur l'autre. Il est exclu que cela soit précisé dans la constitution; il est donc probable que la réponse appartient à la Cour suprême du Canada et que ce n'est pas demain qu'on saura exactement ce qui en est.

Je me permettrai aussi d'intervenir en ce qui a trait au fait que la charte québécoise des droits contient une clause "nonobstant". Il est vrai que la charte québécoise contient une clause "nonobstant". On la doit d'ailleurs à un gouvernement libéral, le député de Bonaventure l'a reconnu tout à l'heure et je l'ai même applaudi. Mais dans la mesure où la charte donne forme au principe d'égalité, dans la mesure où elle précise certains droits, elle interdit certains comportements pour définir de plus près le principe d'égalité. Je pense que c'est un instrument précieux pour les femmes du Québec.

Comme l'a souligné d'ailleurs mon collègue de Châteauguay, vous savez sans doute - et ce n'est pas à vous, M. le Président, que je vais l'apprendre - que notre système de droit civil, où la loi écrite, a une importance fondamentale, où seule l'Assemblée nationale peut faire et modifier des lois, ce système, M. le Président, donne des ouvertures aux femmes. Les femmes prennent la parole dans les commissions parlementaires. Les pressions de la base se répercutent sur l'Assemblée nationale. Cela nous a permis, entre autres, les femmes du Québec, de faire reconnaître l'égalité des conjoints dans le mariage, dans notre Code civil que nous venons à peine d'adopter, le droit à un salaire égal pour un travail équivalent. La charte des droits sera encore amendée prochainement au cours de cette session, sans doute en grande partie en réponse aux pressions des groupes de femmes, à leur participation, finalement, au processus d'élaboration des lois. Je le répète: Dans le domaine des droits des femmes, c'est le gouvernement qui est le plus près des citoyens et citoyennes qui est le plus susceptible de s'ajuster et de développer une politique globale de la condition féminine qui corresponde étroitement à la situation de la collectivité.

Ne nous y trompons pas, M. le Président, à Ottawa, les femmes ont eu beaucoup de difficultés à gagner, si on peut le dire, la reconnaissance du principe. À vrai dire, les femmes ne sont même pas sûres d'avoir gagné quoi que ce soit. Ce qui est beaucoup plus important, c'est comment on va interpréter ce principe d'égalité. Nous, les femmes, savons bien que, pour être égales, il faut arriver à faire reconnaître notre différence. La charte québécoise va dans ce sens et ira encore plus loin, comme l'a déjà annoncé mon collègue le ministre de la Justice. Pourquoi faudrait-il se reposer sur l'interprétation que les tribunaux anglophones donneront à la charte, eux qui ne reconnaissent pas encore le droit... M. le Président, je les ai écoutés tout à l'heure, je pense que j'ai droit au même respect.

Le Vice-Président (M. Rancourt): A l'ordre, s'il vous plaît! Mme la ministre. (22 h 10)

Mme Marois: Merci, M. le Président. On sait qu'effectivement, et j'y reviens, c'est un principe important, on ne reconnaît pas à beaucoup d'endroits - on est sûrement très particulier au Québec - le droit à un salaire égal pour un travail équivalent. Mon temps se termine, M. le Président. Je me permettrai de citer la présidente du Conseil consultatif canadien du statut de la femme: Je pense qu'on ne peut pas la taxer d'être péquiste. Lucie Pépin parlait de la conférence de Vancouver et elle déplorait l'absence du Québec à cette conférence. Elle a dit: "Mais nous continuons nos relations officieuses qui sont d'ailleurs excellentes. Le Québec est toujours très important dans ce type de rencontre car il a depuis longtemps

le leadership sur ces questions. Il ne faut pas oublier que c'est la seule province à avoir un ministère d'État à la Condition féminine." Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Mme la députée de L'Acadie.

Mme Thérèse Lavoie-Roux

Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président. Il semble que de ce côté-ci de la Chambre comme de l'autre, du moins d'après les paroles de la ministre d'État à la Condition féminine, on veuille tous, je pense, avec beaucoup de sincérité assurer l'égalité des sexes. Mais j'ai écouté attentivement la députée de La Peltrie et il me semble y avoir une confusion. Elle a présenté son argumentation en voulant s.'opposer au sous-amendement - même si elle ne l'a pas mentionné, je pense que c'était sous-entendu - fait par le député de Bonaventure, voulant que l'article 28 qui, au départ, reconnaissait l'égalité des sexes, mais exception faite de l'article 33, c'est-à-dire l'article "nonobstant", créait une confusion, compte tenu que maintenant l'article 33 demeure et on pourrait avoir des difficultés à interpréter si, dans cette question d'égalité des sexes, c'était l'article 28 ou l'article 33 qui avait prédominance.

Il m'apparaît hors de tout doute, M. le Président, qu'à l'article 28, il est clair qu'on a barré, depuis une semaine ou lorsque la décision s'est prise au gouvernement fédéral, exception faite de l'article 33, c'est-à-dire indépendamment des autres dispositions de la présente charte... Les droits et libertés qui y sont mentionnés sont également garantis aux personnes des deux sexes. Le fameux article "nonobstant" n'existe plus, eu égard aux femmes; il subsiste eu égard à d'autres dispositions de la charte.

Une voix: C'est ça.

Mme Lavoie-Roux: II n'existe plus, eu égard aux femmes, mais, quand le gouvernement présente sa motion d'amendement, il veut reconnaître l'égalité des sexes, ce avec quoi tout le monde s'entend, mais pourvu que les lois du Québec, en l'occurrence, aient priorité sur l'égalité des sexes qui est prévue dans la charte. Ce que le gouvernement du Québec fait, je pense que mon collègue, leader de l'Opposition et député de Bonaventure, qui est un juriste averti l'a fait avec encore plus d'éloquence que je ne saurais le faire, mais, en termes plus simples, je pense que c'est évident qu'en réintroduisant ces mots: "pourvu que les lois du Québec aient prédominance", on rétablit cette notion de "nonobstant" pour laquelle on s'est battu et qu'on avait obtenu de faire disparaître.

Une voix: Exactement. Cela réintroduit la clause, vous venez de le dire.

Mme Lavoie-Roux: Ceci ne met pas en doute le fait - et c'est fort heureux - que, dans certains cas, la Charte des droits et libertés de la personne soit à l'avant-garde et que, pour certaines lois du Québec, dont ce côté-ci de la Chambre a été l'instigateur, l'Opposition du temps, j'en suis sûre, y a concouru et inversement, depuis que le Parti québécois est au pouvoir, dans les lois touchant les droits des femmes et introduisant des dispositions nouvelles pour les protéger, nous y avons souscrit.

Alors, ce n'est pas une question de ne pas être d'accord avec le fait qu'il y a peut-être des dispositions touchant les femmes qui sont à l'avant-garde au Québec par rapport à d'autres provinces, mais encore faudrait-il examiner toutes les dispositions ou toutes les lois des autres provinces avant d'établir un bilan final pour savoir quelle province ou quelle autre donne le plus d'avantages aux femmes.

Tout ceci pour dire qu'il m'est est difficile, pour ma part - même si je pense que j'ai les mêmes préoccupations touchant les droits des femmes que la députée de La Peltrie - à ce moment de venir restreindre par une clause "nonobstant", contre laquelle les femmes du Canada se sont battues, et la réintroduire sous forme d'amendement en disant: Nous voulons bien l'égalité des femmes, mais pourvu que nos lois qui, elles, sont statutaires - je reviens sur cette notion de loi statutaire - peuvent être changées selon le bon vouloir des gouvernements. Avec les changements de gouvernement, on sait fort bien que les lois sont amendées. On peut, par la volonté des gouvernements, les modifier, alors que quand ces droits sont inscrits dans une charte constitutionnelle -mon collègue de Bonaventure l'a bien indiqué - on peut très difficilement jouer avec une charte qui est inscrite dans la constitution.

Je sais que c'est un argument que le ministre de la Justice avait développé au moment de la fameuse motion du 2 octobre, où il avait dit: La charte fédérale va venir court-circuiter notre Charte des droits et libertés de la personne, qui est une charte d'avant-garde et qui - d'ailleurs, on l'a mentionné tout à l'heure - dont presque tous les éléments, à l'exception d'un seul qui a été ajouté depuis que le Parti québécois est au pouvoir, soit l'orientation sexuelle, avaient été votés par le gouvernement libéral. Le ministre de la Justice disait: On va venir court-circuiter notre Charte des droits et libertés de la personne. Je pense qu'il a admis par la suite que rien n'empêchait qu'on ait dans la constitution une charte des droits fondamentaux et que, si les provinces voulaient venir enrichir ou ajouter à ces droits par des lois ou par leur propre charte,

rien ne s'y opposait. La condition fondamentale, c'était que dans chacune de ces lois ultérieures on respecte l'égalité des sexes.

M. le Président, je suis certainement favorable au sous-amendement, puisqu'il vient corriger l'amendement du gouvernement qui veut réintroduire une charte de "nonobstant" qui, justement, veut faire passer en premier lieu des lois statutaires, alors que nous croyons qu'une charte enchâssée dans la constitution doit demeurer fondamentale et la plus importante pour vraiment assurer le respect des droits et, en l'occurrence, l'égalité des deux sexes. Merci, M. le Président.

Le Président: M. le premier ministre. M. le leader de l'Opposition.

M. Levesque (Bonaventure): Sur le plan de la procédure, je vois même que le secrétaire général a ses doutes, vous devriez en avoir vous-même, M. le Président, sauf le respect que je vous dois.

Le Président: J'avais compris qu'il y avait entente entre les partis politiques, mais si ce n'est pas le cas, vous avez raison, M. le leader de l'Opposition.

M. Levesque (Bonaventure): Disons que cette entente devrait être consacrée à ce moment-ci, je le pense bien, parce que nous ne pouvons pas laisser un amendement du député de Châteauguay et le sous-amendement de notre côté de la Chambre sans s'entendre au moins pour qu'il y ait un vote là-dessus, à moins que le sous-amendement ne soit accepté de part et d'autre. À ce moment, je ne demanderais même pas le vote pour ne gêner personne, si c'est le voeu de la Chambre.

Le Président: Voici, M. le leader de l'Opposition, j'avais compris que par entente entre les leaders le vote sur la motion principale aurait lieu demain. J'ai déduit personnellement, peut-être à tort, que le vote sur l'amendement et le sous-amendement aurait lieu également demain. À moins que je ne me trompe, je suis prêt à procéder au vote.

M. Charron: M. le Président, vous avez été bien conseillé.

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, je ne veux pas prolonger cette période-ci. Je sais que le premier ministre a son droit de réplique que je ne veux pas lui enlever, ni retarder, mais je voudrais simplement me permettre d'insister là-dessus, parce qu'il n'y avait pas eu effectivement d'entente sur le vote relativement à un sous-amendement, je ne savais pas même à ce moment-là qu'il y avait un sous-amendement. Je pense bien qu'il aurait été difficile d'avoir entente là-dessus.

Maintenant - je pense que tout le monde est d'accord - que vous dites que nous procéderions dès demain matin, aux premières heures, au vote sur le sous-amendement, l'amendement et la motion principale, je suis d'accord, M. le Président.

Le Président: Trois votes demain matin. M. Levesque (Bonaventure): D'accord.

Le Président: M. le premier ministre. (22 h 20)

M. René Lévesque (réplique)

M. Lévesque (Taillon): M. le Président, je pense bien qu'à peu près tout a été dit, y compris même sur l'amendement et le sous-amendement dont nous venons de prendre connaissance. Quant à nous, le débat se résume facilement. Autant nous sommes évidemment d'accord pour faire avancer ces droits des femmes du Canada anglais - on n'est pas toujours très pressé de faire avancer ces droits féminins, on l'a vu depuis quelques semaines - autant on est d'accord pour qu'un maximum d'appui soit apporté à ceux qui veulent les appliquer là-bas sans trop de restrictions et autant on croit que notre charte québécoise, qui, à notre avis, reflète une société distincte, une société qui a non seulement son identité, mais qui a une évolution accélérée aussi, qui est de plus en plus progressiste sur ce sujet comme sur d'autres, devrait garder cette prédominance, qu'elle ne puisse pas être exposée à être ralentie. C'est à cela que cela pourrait mener, quand on étudie un peu plus profondément ce qui est impliqué dans cette charte fédérale ou enfin ce qu'on appelle une charte fédérale des droits. On votera là-dessus, comme sur tout le reste demain matin.

Je pense qu'au moment où se termine ce troisième débat sur le même sujet ici dans cette Chambre depuis un an, il faut d'abord souligner que nous attendons toujours une réponse. J'ai vérifié encore à 20 heures; les bureaux ferment à Ottawa aussi, je pense, à des heures qui ne sont pas tellement tardives, et, à 20 heures, il n'y avait toujours pas la réponse plus étoffée que le premier ministre fédéral nous promettait dans son télex, le vendredi dernier 27 novembre, et dont je rappelle la phrase essentielle: "Des fonctionnaires et des ministres du gouvernement fédéral procèdent actuellement à une lecture attentive de votre lettre - celle dans laquelle on annonçait l'opposition formelle du Québec à ce projet de rapatriement tel qu'il est constitué - et je vous adresserai une réponse

détaillée au début de la semaine prochaine." On est au début de la semaine, bien sûr c'est seulement lundi, mais, encore une fois, à 20 heures, il n'était rien arrivé.

Quoi qu'il en soit, la loi qui implique une référence à la Cour suprême le cas échéant doit être inscrite dès ce soir au feuilleton de la Chambre et, compte tenu de l'insistance répétée de l'Opposition et de son chef sur l'emploi de tous les recours judiciaires disponibles, j'ai confiance qu'au moins là-dessus, le cas échéant, on tombera facilement d'accord sans éterniser les débats sur l'urgence de la question. Enfin, on verra ça en temps et lieu et, encore une fois, le cas échéant.

Cela dit, nous voici 25 jours après le 5 novembre, 25 jours après un accord signé, avec la plus grande solennité et aussi avec une espèce de grosse bonne humeur et beaucoup de tapes dans le dos, à Ottawa, par neuf provinces anglophones et par le gouvernement libéral d'Ottawa. 25 jours pendant lesquels cet accord soi-disant définitif a été amendé, sous-amendé, réamendé pour donner suite à une foule de revendications que je n'ai pas, ici, à discuter en détail ni, entre autres choses, à contester. C'est une foule de revendications qui paraissaient, soit régionalement, soit d'intérêt national au sens "canadian", anglais du terme, absolument essentielles. Tout cela a été fait pendant des jours et des jours.

Pendant cette même période qui a permis tous ces ravaudages sont restés absolument en dehors du processus, un peu comme suspendus en dehors de la réalité fédérale et canadienne anglaise, en dehors de toute cette frénésie, depuis 25 jours, deux problèmes d'une certaine importance. Ce sont, en fait, les deux composantes d'un même problème, c'est-à-dire l'isolement et la spoliation très précise du Québec et, en particulier, bien sûr, fondamentalement, du Québec français, et aussi l'insatisfaction de plus en plus évidente et de plus en plus marquée et, Dieu sait, justifiée des minorités francophones hors Québec qui se rendent compte encore une fois, pour la énième fois depuis 100 ans et plus, qu'elles sont les victimes d'une manoeuvre absolument odieuse.

M. Jean Chrétien, le fidèle exécutant des volontés de son maître, sauf quand, parfois, il leur arrive de se contredire, n'a cessé de jouer avec cet accord, avec le texte de cette entente du 5 novembre. Il paraît que c'est une activité folle, il paraît que M. Chrétien a passé des heures - j'ai vu ça en fin de semaine - et des nuits, même, à essayer de rafistoler tout ça au téléphone et autrement. Mais depuis 25 jours, dès qu'il s'agit de quoi que ce soit qui puisse introduire là-dedans l'une ou l'autre des demandes, en fait des exigences fondamentales du Québec, alors là, aussitôt, le même M. Chrétien québécois parle de Timpossibilité de ce qui serait le bris absolu de l'accord que nous avons conclu avec les neufs provinces". Là, c'est sacré. Tout à coup, les signatures deviennent intangibles et le texte aussi, sur le dos du Québec.

Après avoir déchiré d'autres signatures tout aussi solennelles à nos dépens au début de novembre, celles qui ont succédé le 5 novembre, ces signatures-là sont absolument taboues, mais, encore une fois, aux dépens du Québec.

Bien sûr, donner suite aux exigences québécoises, ce serait enlever tout son sens -je cite un homme aussi au fait de ce qui se passe que M. Davis, premier ministre de l'Ontario - à un projet qui a été calculé et fabriqué "in the canadian way" comme on dit en anglais, en cachette, en l'absence des représentants légitimes du Québec et sur le dos de notre peuple. Pourtant, chacun à sa façon, les chefs de deux partis totalement anglo-canadiens, M. Joe Clark, le premier, avec un courage qu'il faut souligner, parce que Dieu sait qu'on ne voit pas très bien ce que cela peut lui rapporter électoralement, à court terme, en tout cas, dans la situation présente de I'électorat, M. Clark, chef de l'Opposition, à deux reprises, et enfin M. Broadbent lui-même, enchaînant avec un amendement qu'il a proposé aujourd'hui dans le style d'un statut particulier pour le Québec, donc, deux partis totalement anglophones, chacun pour ses motifs que je n'ai pas à évaluer, ont tenu compte au moins partiellement des exigences du Québec et ont eu aussi la courtoisie de nous en parler.

De la part de nos élus libéraux québécois à Ottawa, en immense majorité francophones, qui doivent tout l'essentiel de leur arrivée, de leur maintien et de leur retour au pouvoir à I'électorat québécois, MM. Trudeau, Chrétien, Lalonde et, cet après-midi, ceux qui ont vu les nouvelles à la télévision ont vu un député conservateur, M. Epp, parler - Dieu sait qu'il n'est pas particulièrement proche de la longueur d'onde québécoise - M. Broadbent, NPD, faisant un effort même pour essayer de dire l'essentiel de ce qu'il avait à dire en français et ensuite ce M. Joyal que je mentionnais, disant, avec cette espèce de sincérité absolument indiscutable - parce que ça se sent, à la télévision, la sincérité, en général - en arrivant ensuite, comme représentant québécois, pour dire: C'est malheureux, mais on ne peut tenir compte de rien de tout cela. Donc, ces élus francophones, en immense majorité, du Québec, MM. Trudeau, Chrétien, Lalonde, Joyal et au moins 69 autres, sur les 74 que nous faisons trôner là-bas, de ce côté-là, qu'est-ce qu'il est venu pour le Québec? Ponctués souvent par des farces plates, les quelques discours qu'on a entendus seraient une espèce de honte impérissable, s'ils devaient passer à l'histoire.

Ce qu'on a eu, c'est un lourd et assez affreux silence.

Là, on touche du doigt, comme jamais auparavant, cette décomposition terrible du sens des racines et même du minimum vital de loyauté à l'égard des siens qui semble, pour ce vieux Parti libéral, être toujours fatalement la conséquence du pouvoir à la Chambre des communes. C'est toujours au Québec et au peuple québécois que ces gens-là font payer la rançon de leur gloire et de leur carrière éminemment passagère, même si elle dure trop longtemps parfois, pour garder un appui suffisant au Canada anglais. Pour cela, il faut qu'on soit quelque peu "mange-Canayen", pour parler notre vieux langage, mais jamais ils n'en ont mangé autant et jamais ils n'ont osé attaquer la substance même du Québec français comme sous cette présente caricature de "French power" qui s'éternise ou qui se reperpétue à Ottawa.

Le dernier épisode a été l'entrée solennelle de M. Trudeau lui-même, vendredi dernier, à la Chambre des communes, pour annoncer, avec l'air toujours éminemment sincère d'un homme qui vient d'apprendre une nouvelle historique et inattendue, qu'un télégramme d'un de ses complices occasionnels, un premier ministre provincial du Canada anglais, l'enjoignait sans réplique de ne plus accepter aucun amendement, de ne plus faire aucun changement et que, par conséquent, il fallait que ce soit réglé, voté, expédié aux Communes dans deux jours, c'est-à-dire mercredi de cette semaine. (22 h 30)

Si on a bien compris, même si cela impliquait la parfaite indécence, assez incroyable dans une société démocratique qui respecte les pouvoirs établis des institutions qu'elle s'est elle-même données, de ne pas même attendre l'ultime jugement des tribunaux sur un aspect essentiel de toute l'opération.

Quant aux francophones hors Québec, eux aussi, ils y ont goûté, à cette solidité et à cette vigilance exemplaire du caucus libéral québécois d'Ottawa touchant les droits des nôtres. C'était dans la Presse de vendredi aussi, mais il s'agissait d'une rencontre de jeudi. Quand on pense à tout le branle-bas, à toute l'effervescence qu'on pouvait suivre dans les journaux anglais ou à la télévision anglo-canadienne sur tel ou tel amendement, sous-amendement, rafistolage, etc., de ce projet de charte, qui est en train de devenir une caricature historique, quand on voit tout ça et qu'on voit ceci, qui est arrivé jeudi dernier, que c'est en vain que les représentants des francophones hors Québec ont rencontré hier soir l'exécutif du caucus des libéraux fédéraux du Québec à Ottawa pour obtenir une modification à la charte des droits assurant des droits supplémentaires aux minorités de langue française du pays, un de leurs représentants, M. Yves Saint-Denis, a déclaré à l'issue de la rencontre que les libéraux s'étaient déclarés peinés de la situation, mais qu'il leur avait été impossible de s'engager à obtenir des amendements au chapitre au projet fédéral.

Tout au plus - écoutez bien - a-t-on évoqué la possibilité d'un budget supplémentaire du Secrétariat d'État afin d'aider les minorités francophones du Canada à défendre leurs droits devant les tribunaux. Ce n'est même pas sûr qu'il y aurait ce budget supplémentaire. On sait, depuis la lettre de M. Davis, qui est sortie accidentellement, une lettre d'un cynisme absolument parfait, que cela ne changera rien - c'est entendu - en Ontario, ailleurs aussi, sauf peut-être un peu formellement au Nouveau-Brunswick, cela ne changera rien pour la majorité francophone. M. Davis en a assuré une de ses électrices. Ne vous inquiétez pas, dit-il, j'ai marchandé ce qu'il fallait pour que ça ne change rien, c'est le Québec qui est visé par cette opération.

Vendredi, on recevait un télégramme -je pense que si la Chambre n'est pas au courant, c'est intéressant, c'est très court -du Conseil des parents français de Prince-Albert, Saskatchewan, dont je cite tout l'essentiel, en fait, la seule phrase: "La commission scolaire anglophone vient de fermer les portes de la première et de la seule école primaire française de Prince-Albert, Saskatchewan." "Equal treatment".

Maintenant, avant de terminer, revenons exclusivement au Québec, si vous me permettez, M. le Président. Demain matin, nous voterons le sous-amendement, l'amendement et la motion elle-même sur ces textes qui sont devant nous. Ce que contient cette motion, les exigences qu'elle définit, sont celles que, dans les mêmes circonstances, à supposer qu'il ait eu à traverser des circonstances pareilles, n'importe quel gouvernement du Québec, avant nous, aurait considérées lui aussi comme un minimum vital. Le chef de l'Opposition - qui sera ici demain, j'en suis sûr, qui n'est pas devant nous ce soir, mais enfin, je dois évoquer quand même l'attitude de nos amis d'en face - évoque tout ça. Quand on en parle, il a employé l'autre jour l'expression "éloquence creuse." Des droits, certains pouvoirs qui ont été inaliénables depuis 114 ans, ce serait de l'éloquence creuse que d'en parler, de parler du pouvoir exclusif sur l'accès à nos écoles, sur lequel on n'a de leçon à recevoir de personne, surtout dans ce pays, ailleurs au Canada? Par rapport à la comparaison si terriblement facile entre ce qui arrive ici à une minorité anglophone et ce qui achève d'arriver aux minorités francophones, c'est de l'éloquence creuse que de l'évoquer? Il y a le droit à un statut particulier, qui nous a été promis en

plein référendum par certains des hommes qui, aujourd'hui, déchirent leur signature pour signer le contraire, c'est-à-dire ce qui est inclus dans cette formule de compensation, ce qui est inclus aussi en grande partie dans tout ce qui touche, camouflé derrière le mot "mobilité", cette opération de rattrapage plus nécessaire que jamais pour nos entreprises, c'est-à-dire pour le développement économique par les nôtres. On a maintenant près de la moitié de nos gens qui étudient l'administration, la gestion des entreprises, ici au Québec, la moitié de tous ceux et celles qui étudient au Canada et, tout à coup, on mettrait le couvercle là-dessus? On serait obligé, constitutionnellement, de mettre le couvercle là-dessus? Autrement dit, sur la promotion économique d'une société, seule de son espèce en Amérique du Nord et qui finalement, tardivement, s'est mise à évoluer dans le sens de la modernisation et dans le sens, en conséquence, de l'initiative, ça, c'est de l'éloquence creuse?

Demander la reconnaissance d'une société distincte et d'une société nationale qui a une égalité foncière avec l'autre, à l'intérieur de ce pays, ça ne peut sûrement pas être de l'éloquence creuse, pour le député d'Argenteuil, puisque, mot à mot, ou à peu près, ce sont des énoncés de principe qui étaient dans son propre livre beige. Pas toujours dans l'application de ces principes, c'est ce qu'on critiquait, mais les principes étaient là, mot à mot. Est-ce que c'est de l'éloquence creuse?

Ce qui est attristant, c'est que cette façon de réagir rejoint certains propos tout récents du chef de l'Opposition libérale, et ceux du mois dernier et ceux de ces derniers jours. Le mois dernier, je me souviens avec quelle éloquence, que je ne croyais pas creuse, lui et la plupart de ceux qui sont en face de nous dans cette Chambre disaient à peu près ceci, que nos votes à tous sur la motion - fondamentalement la même, les circonstances ont changé, le fond n'a pas changé...

Vous serez jugés comme les autres. On sera tous jugés. Je me souviens que le député d'Argenteuil disait que, sur ces questions fondamentales, nous serons tous jugés, non seulement en fonction du vote qu'on donnait en octobre, mais en fonction de l'espèce de fidélité essentielle qu'on aura à partir de ce vote, parce que cela va nous suivre longtemps, notre conduite, les uns et les autres. M. le chef de l'Opposition disait: "II ne peut pas être question ni de perdre ni de laisser entamer si peu que ce soit aucune prérogative que ce Parlement détient en fiducie au nom de tout un peuple et dont il est censé être le rempart." C'était le mois dernier. Ces "si", c'est plus vrai que là; nous sommes non seulement devant une éloquence creuse, mais quelque chose qui est bien pire.

Or, il semble que, comme tout ce qui est creux, cela se soit effondré depuis quelques semaines. Je croyais, en octobre -je le dis comme je le pense - en voyant le député d'Argenteuil tenir tête jusqu'à admettre neuf dissidences que je n'ai pas à juger - on sait à quel point c'est dur sur les tripes quand on est obligé de diriger ou d'essayer de diriger le mieux possible un parti politique - et que le chef de l'Opposition tenait tête, avec le député de Saint-Laurent qui n'est plus avec nous - c'est peut-être un peu pour cela qu'il n'est plus avec nous - je me disais que le chef de l'Opposition était redevenu le chef réformiste foncièrement québécois, d'une façon instransigeante sur les principes, comme tant de chefs québécois, qui étaient fédéralistes aussi, s'en sont montrés capables depuis Honoré Mercier et tous les autres, j'en passe.

Encore une fois, tout semble s'effilocher, s'en aller tout à coup, ces jours derniers. La stupéfaction, ce n'est pas moi seul qui l'ai sentie, quand j'ai appris ces jours-ci, dans une entrevue de la Presse, que le député d'Argenteuil savait déjà, en plein référendum 1980 - c'est la première fois qu'on entend dire cela - quelles étaient les vraies intentions du premier ministre fédéral.

Il faut citer: "Quand, durant la campagne référendaire - dans la Presse ces jours-ci - Pierre Trudeau promettait solennellement aux Québécois de modifier la constitution, Claude Ryan savait très bien qu'il n'avait aucunement l'intention de revoir le partage des pouvoirs pour satisfaire aux demandes séculaires du Québec, qu'il n'avait en tête que la charte des droits. C'est au cours d'une entrevue accordée à la Presse cette semaine que le chef du Parti libéral du Québec a fait cette étonnante déclaration, c'est le moins qu'on puisse dire. M. Ryan a dit se souvenir qu'au cours de la campagne référendaire, M. Trudeau lui avait déclaré: "Moi, mon objectif, c'est de faire le solage de la maison, poser les bases au point de vue des droits qui seront garantis; ensuite, d'autres s'arrangeront avec le reste." (22 h 40)

Je me rappelle - poursuit M. Ryan -qu'il m'avait dit cela clairement. Moi, je lui ai dit que je n'étais pas d'accord avec son approche et je l'ai dit aux Québécois dès qu'il a lancé sa réforme constitutionnelle -après - et s'il n'a pas jugé bon d'avertir immédiatement, pendant la campagne référendaire, les Québécois du sens véritable des propos du premier ministre canadien, c'est que "ce n'était pas le sujet de la discussion". Je n'ai pas de commentaires à faire, je pense que cela se tient.

Dans cette même interview à la presse - c'est là que je me demande où se trouve l'éloquence creuse - il s'agit pour M. le chef de l'Opposition libérale d'étayer la demande

d'élections hâtives à laquelle il aboutit. Ah! tout de suite, cela presse. Après sept mois, il faut un autre scrutin pour qu'une sorte de légitimité s'établisse, celle qui n'a pas réussi à s'établir à la satisfaction de nos amis, il y a sept mois, au mois d'avril, comme s'il ne savait pas au fond - je pense qu'on fait des sondages maintenant et il y a aussi d'autres perceptions qui complètent les sondages, si on veut - que le Parti libéral serait liquidé au Canada français en tout cas, je veux dire au Québec français, et liquidé d'une façon qu'il mériterait, non pas que nous soyons très fiers de l'état des choses en ce moment, c'est sûr. Cela fait mal et cela ferait mal, de toute façon, à n'importe quel gouvernement et il faut patauger jusqu'à un certain point pour passer à travers, comme c'est vrai...

Mais toutes les perceptions et tous les sondages disent que, malgré tout, ce n'est surtout pas avec cette succursale disloquée et en partie déracinée que cela irait mieux. Quand je les entends parler d'élection en ce moment, ils me font penser à ce qu'on faisait quand on était petit gars. On passait devant le cimetière et on sifflait pour montrer qu'on n'avait pas peur.

Est-ce qu'on me permet deux minutes, M. le Président, ou à peu près? J'ai presque fini. Merci.

Ce qu'il y a de plus frappant, c'est que pour étayer cette demande un peu artificielle d'élections précipitées, le leader libéral provincial parle de choses comme ceci: S'il avait pris le pouvoir le 13 avril dernier - je cite toujours l'article de la Presse - il n'aurait pas dramatisé la crise constitutionnelle - il n'a plus d'éloquence du tout - comme le Parti québécois le fait en ce moment. "Nous aurions mis la pédale douce et nous aurions obtenu de bien meilleurs résultats." Essayez d'expliquer cela.

Une voix: Come back to the bargaining table.

Une voix: Vous avez raison.

M. Lévesque (Taillon): Je n'irai pas plus loin. Ces applaudissements, comme tout le reste, ça révèle des choses. Je vous ferais remarquer que la pédale douce et cette espèce de résignation tranquille forment un curieux contraste avec l'homme qui avait des propos vibrants, il y a dix ans cette année, alors qu'il s'agissait, à Victoria, du non du gouvernement de M. Bourassa, dont certains, en face, devraient se souvenir. En 1981, ce non est encore au moins deux ou trois fois plus fondé qu'en 1971.

En 1971, il y a dix ans, on a dit non, au nom du Québec, pour refuser un projet dans lequel il n'y avait aucune augmentation des pouvoirs du Québec. Donc, c'était inacceptable. Après tout ce temps, il s'agit cette fois d'une tentative de réduction des pouvoirs du Québec, dix ans après. Si le non de 1971 a fait ranger sur les tablettes cet autre projet fédéral, je ne sais pas quelle logique suicidaire peut pousser les Canadiens anglais et, à Ottawa, les mêmes hommes, si fatigués ou obsédés soient-ils, à passer outre aux objections et au veto si terriblement justifiés du Québec et de tous les francophones du Canada, d'ailleurs, dix ans plus tard, avec la charge qui n'est pas seulement émotive, cette fois-ci, mais qui, au point de vue politique, a quelque chose d'un détonateur, si on ne prend pas garde. Dix ans après, il s'agit quand même du non d'un gouvernement qui représente une société en évolution accélérée.

En terminant, je voudrais citer rapidement un passage d'un ouvrage remarquable du successeur du député d'Argenteuil au Devoir, M. Jean-Louis Roy, sur le débat constitutionnel Québec-Canada pendant les seize ans de 1960 à 1976. Je cite ce passage, à la page 323: "Le fait le plus décisif intervenu depuis 1960 dans les relations du Québec et du Canada est constitué par l'acceptation générale par une majorité de Québécois du statut de nation pour leur collectivité. Le refus du Canada anglais, tout au moins de ses porte-parole au niveau fédéral et à celui des provinces anglophones, de reconnaître ce fait a précipité la rupture psychologique du Canada. Ce refus explique sans doute qu'aucun projet de nouvelle constitution susceptible de susciter l'adhésion au Québec n'est venu du Canada anglais." Il explique de plus l'exceptionnelle marge de manoeuvre du gouvernement fédéral qui peut compter sur l'appui indéfectible des provinces anglophones quant aux questions fondamentales. Il explique enfin l'inacceptable situation qui est encore faite en 1978 - on est en 1981, on sait à quel point cela a changé, mais pas en mieux - aux minorités francophones à travers le pays après plus de quinze années de recherches, de pressions et de discussions bilatérales ou multilatérales. Le refus du Canada anglais de reconnaître le statut de nation à la collectivité québécoise après plus de dix années de négociations constitutionnelles demeure le motif essentiel de la fragmentation du Canada.

Ce que le gouvernement Trudeau prépare, ce qu'il essaie, à toute force, de compléter avant un certain abandon de la vie publique du genre "après moi le déluge", ce qu'il prépare activement et aussi avec la complicité, parfois par servilité, parfois sincèrement - ce sont les plus à plaindre -de tant de gens, ce n'est pas l'écrasement, cela n'est pas possible, c'est fini d'être possible, mais l'affaiblissement, l'abaissement maximum d'une des deux nations du Canada par l'autre et, hélas, par des gens de chez nous qui s'aplatissent dans ces cas-là pour se

prolonger eux-mêmes.

Mais comment peut-on s'imaginer qu'une société nationale...

Le Président: À l'ordre! A l'ordre, s'il vous plaît!

Effectivement, M. le député de Marguerite-Bourgeoys, vous avez raison, le premier ministre a dépassé son temps, sauf que deux minutes après ses vingt minutes j'ai entendu le mot "consentement". Il y a également une tradition dans cette Chambre qui est de longue date, lorsque le chef de l'Opposition officielle et le premier ministre ont la parole, il y a une sorte de tolérance d'un côté et de l'autre de la Chambre pour faire en sorte que ces deux chefs puissent parler. En vous demandant de conclure, M. le premier ministre, s'il vous plaît!

M. Lévesque (Taillon): C'était ma dernière phrase, M. le Président, que le député de Marguerite-Bourgeoys ponctuait avec la courtoisie qui le caractérise. Je disais donc simplement que l'écrasement, même si on le voulait de l'autre côté, ce n'est pas possible, mais l'affaiblissement, l'abaissement maximum d'une des deux nations du Canada par l'autre, avec, hélas, ceux de chez nous qui s'aplatissent dans ces cas-là pour se prolonger eux-mêmes, comment peut-on s'imaginer qu'une société nationale qui a un minimum de dignité, qui a tout l'élan d'une évolution tardive, mais aussi de plus en plus rapide et accélérée, va se laisser faire? Non seulement, ce n'est pas possible, non seulement, ça n'arrivera pas, mais je crois - sans préciser davantage, c'est simplement un sentiment qu'on ne peut pas s'empêcher d'avoir - que cette tentative va se payer cher. C'est un très modeste début, très partiel aussi, de la réponse à cette question qui sera marquée au moins, comme on dit en anglais, comme une "note de pied" dans la petite histoire que constituera le vote des uns et des autres, demain matin, sur la motion. (22 h 50)

Des voix: Bravo! Bravo! Bravo!

Le Président: Les travaux de l'Assemblée sont ajournés à demain... M. le leader de l'Opposition.

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, seulement un mot sur une question de règlement, avant que vous ne déclariez la séance levée. Tout à l'heure, vous avez mentionné qu'il y avait une certaine tolérance pour le premier ministre et pour le chef de l'Opposition, et j'en suis; cependant, M. le Président, je ne voudrais pas que vos paroles soient de nature à être interprétées dans l'avenir comme laissant entendre que le règlement n'existe plus. Ceci simplement pour vous dire, M. le Président, que, dans le cas que nous venons de vivre, le dépassement dépassait, si on veut, 50% du temps alloué au premier ministre. Nous n'avons pas eu d'objection à l'écouter, nous ne voulons pas en faire un plat, mais, tout en respectant les propos que vous avez tenus quant à une tolérance vis-à-vis du premier ministre et du chef de l'Opposition, à ce moment-ci, il ne faudrait pas que ce que nous avons vécu ce soir constitue un précédent ou que vos paroles soient de nature à consacrer une tolérance de 50% et plus.

Le Président: M. le leader de l'Opposition, avant d'ajourner les travaux et puisque vous m'ouvrez la porte, j'aimerais quand même dire que la présidence, trois minutes après l'expiration du temps normal accordé au discours du premier ministre en vertu du règlement, a entendu à sa gauche le mot "consentement". Aucune question de règlement n'a été soulevée entre-temps, de telle sorte que j'ai présumé que le consentement continuait toujours.

Là-dessus, les travaux sont ajournés à demain, dix heures.

(Fin de la séance à 22 h 52)

Document(s) related to the sitting