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Version finale

32nd Legislature, 3rd Session
(November 9, 1981 au March 10, 1983)

Thursday, December 17, 1981 - Vol. 26 N° 23

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Journal des débats

 

Dix heures vingt-quatre minutes)

Le Vice-Président (M. Jolivet): À 'ordre, s'il vous plaît!

Un moment de recueillement. Veuillez vous asseoir. Affaires courantes. Déclarations ministérielles. Dépôt de documents.

Avis de la Commission de la fonction publique au Conseil du Trésor

Conformément aux dispositions de 'article 30 de la Loi sur la fonction publique, je dépose copie de l'avis que la Commission de la fonction publique a donné au Conseil du trésor sur les cinq règlements suivants.

M. le ministre des Travaux publics et de l'Approvisionnement.

Rapport annuel du ministère des

Travaux publics et de

l'Approvisionnement

M. Marcoux: M. le Président, il me fait plaisir de déposer le rapport annuel 1980-1981 du ministère des Travaux publics et de 'Approvisionnement.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Rapport déposé.

M. le ministre de l'Énergie et des Ressources.

Une voix: II retire le projet de loi no 16.

Rapport annuel du ministère de l'Énergie et des Ressources

M. Duhaime: M. le Président, il me fait plaisir de déposer le rapport annuel du ministère de l'Énergie et des Ressources pour l'année 1980-1981.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Rapport déposé.

M. le ministre de l'Habitation et de la Protection du consommateur.

Rapport annuel de la Régie des entreprises en construction

M. Tardif: M. le Président, j'ai le plaisir de déposer le rapport annuel 1980-1981 de la Régie des entreprises en construction du Québec.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Rapport déposé.

M. le ministre des Affaires sociales.

Statistiques annuelles pour 1980 de la RAMQ

M. Johnson (Anjou): M. le Président, il me fait plaisir de déposer en deux copies le rapport des statistiques annuelles pour 1980 de la Régie de l'assurance-maladie du Québec.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Rapport déposé.

Dépôt de rapports de commissions élues.

Mme la députée de Dorion.

Audition de mémoires sur le projet de loi no 37

Mme Lachapelle: M. le Président, qu'il me soit permis de déposer le rapport de la commission élue permanente qui a entendu les mémoires concernant le projet de loi no 37, Loi regroupant les villes de Baie-Comeau et de Hauterive.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Rapport déposé.

Une voix: J'espère qu'ils les ont invités, M. le Président.

Des voix: Ah!

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Limoilou.

Une voix: Un discours.

Étude des projets de loi nos 230, 237, 248, 263 et 253

M. Gravel: M. le Président, qu'il me soit permis, conformément aux dispositions de notre règlement, de déposer le rapport de la commission élue permanente des institutions financières et coopératives qui a siégé le 16 décembre 1981 aux fins d'étudier article par article les projets de loi privés suivants: no 230, Loi concernant La Solidarité, Compagnie d'assurance sur la vie et L'Unique, Compagnie d'assurance-vie; no 237, Loi concernant la "Congrégation des Petits Frères de Marie" dits "Frères Maristes"; no 248, Loi concernant l'Union Saint-Joseph de Notre-Dame de Beauport; no 263, Loi concernant la Coopérative agricole régionale de Papineau; no 253; Loi concernant le Groupe Prêt et Revenu.

Les projets de loi privés nos 237, 263, 253 et 248 ont été adoptés avec des amendements. Le projet de loi privé no 230 a été adopté sans amendement. Merci bien.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Jolivet): Est-ce que le rapport de cette commission est adopté?

M. le leader, est-ce que le rapport de cette commission peut être adopté immédiatement?

M. Charron: Oui, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté. Deuxième lecture prochaine séance ou séance subséquente?

M. Charron: Probablement prochaine séance, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Prochaine séance.

M. le député de Saint-Hyacinthe.

Étude du projet de loi no 41

M. Dupré: M. le Président, qu'il me soit permis de déposer le rapport de la commission élue permanente de l'habitation et de la protection du consommateur qui a étudié, article par article, le projet de loi no 41, Loi modifiant la Loi instituant la Régie du logement et modifiant le Code civil et d'autres dispositions législatives, le mercredi 16 décembre 1981 et l'a adopté avec des amendements.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Rapport déposé.

Le député de Bellechasse.

Audition d'organismes sur le projet de loi no 33

M. Lachance: M. le Président, qu'il me soit permis de déposer le rapport de la commission élue permanente des affaires municipales qui a entendu certains organismes relativement au projet de loi no 33, Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant les municipalités.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Rapport déposé.

M. le leader.

M. Charron: M. le Président, on a la preuve...

Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! S'il vous plaît!

M. Charron: ... établie que le député de

Bellechasse est un excellent rapporteur. Je ne sais pas pourquoi ils ne l'ont pas pris.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Dépôt de rapports... S'il vous plaît!

M. le député de Saint-Louis.

M. Blank: Ce n'est pas sûr, mais peut être qu'à la prochaine réunion on va encore suggérer son nom.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Dépôt de rapports du greffier en loi sur les projet de loi privés.

M. le leader.

Rapports du greffier en loi sur les projets de loi privés

M. Charron: J'en ai quelques-uns, M. li Président. Le projet de loi qui porterait le no 261, qui concerne la ville de Ville-Marie au Témiscamingue. On dit que le projet de loi est conforme à l'avis, que les avis on été publiés. La loi 264 qui, elle, modifierai la charte de la ville de Trois-Rivières. Ces aussi conforme à l'avis et les avis ont été publiés. La loi 235 qui concerne la ville de Val d'Or. C'est aussi conforme à l'avis et le avis ont été publiés. Finalement, une que j'ai beaucoup hésité à déposer, M. le Président, mais je me suis résigné à le faire, le projet de loi no 247 concernant la cité de Verdun conforme à l'avis et les avis ont été publié également.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Rapports déposés.

Présentation de projets de loi au non du gouvernement.

M. le ministre de la Justice.

M. Bédard: J'ai l'honneur de présenter..

Le Vice-Président (M. Jolivet): Un instant! Un instant: (10 h 30)

M. Charron: Si mon collègue le permet M. le Président...

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader, les privilèges et les droits...

M. Charron: Oui, les privilèges et les droits étant sur le point d'être violés, M. le Président, je dois d'abord solliciter le consentement pour que le ministre de la Justice puisse déposer ce projet de loi même s'il ne paraît qu'en appendice aujourd'hui au feuilleton.

Des voix: Ah!

Le Vice-Président (M. Jolivet): Est-ce que cette motion est adoptée, M. le leader de l'Opposition?

M. Levesque (Bonaventure): Si nous avons une amende honorable du ministre de la Justice, à ce moment-là, nous serons prêts a donner notre consentement.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Consentement obtenu.

M. le ministre de la Justice.

Projet de loi no 45

Première lecture M. Marc-André Bédard

M. Bédard: Je suis prêt à faire toute amende honorable, sachant que je serai payé de retour, en termes d'amende honorable, par les membres de l'Opposition.

J'ai l'honneur de présenter le projet de loi no 45. Ce projet de loi a pour objet d'assurer à toute personne qui a intenté ou intentera d'ici le 1er juillet 1982 un recours en justice fondé sur l'utilisation de la mousse d'urée-formol comme isolant. Ce projet de loi a pour effet d'assurer à ces personnes que ce recours ne pourra être rejeté pour le motif qu'il est prescrit ou qu'il n'a pas été intenté avec la diligence raisonnable.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Est-ce que cette première lecture du projet de loi no 45, Loi favorisant l'exercice des recours découlant de l'utilisation de la mousse d'urée formaldéhyde comme isolant, est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté.

Le Secrétaire adjoint: Première lecture de ce projet de loi.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Deuxième lecture, prochaine séance ou séance subséquente.

Présentation de projets de loi au nom des députés.

M. le leader.

M. Charron: Article 1) du feuilleton, M. le Président.

Projet de loi no 188 Première lecture

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Vachon propose la première lecture du projet de loi no 188, Loi concernant un contrat d'approvisionnement à l'hôpital Charles Le Moyne. Est-ce que cette première lecture est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté.

Le Secrétaire adjoint: Première lecture de ce projet de loi.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Deuxième lecture, prochaine séance ou séance subséquente. M. le leader.

M. Charron: Article o) du feuilleton, M. le Président.

Projet de loi no 246 Première lecture

Le Vice-Président (M. Jolivet): Le député de Chambly propose la première lecture du projet de loi no 246, Loi concernant la ville de Saint-Basile-le-Grand.

Cette première lecture est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté.

Le Secrétaire adjoint: Première lecture de ce projet de loi.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Deuxième lecture ou déférence, M. le leader?

Renvoi à la commission des affaires municipales

M. Charron: Déférence à la commission des affaires municipales, s'il vous plaît.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Cette motion de déférence à la commission des affaires municipales est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté. M. le leader.

M. Charron: M. le Président, je vais vous demander d'appeler d'autres projets de loi, je ferai une motion de déférence commune par la suite puisqu'ils vont tous à la même commission.

Article k) du feuilleton, s'il vous plaît.

Projet de loi no 204 Première lecture

Le Vice-Président (M. Jolivet): Le député de Nelligan propose la première lecture du projet de loi privé no 204, Loi concernant la ville de Kirkland.

Cette motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté.

Le Secrétaire adjoint: Première lecture de ce projet de loi.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader.

M. Charron: Article n) du feuilleton.

Projet de loi no 256 Première lecture

Le Vice-Président (M. Jolivet): Le député de Laprairie propose la première lecture du projet de loi privé no 256, Loi modifiant les pouvoirs de la ville de La Prairie.

Cette motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté.

Le Secrétaire adjoint: Première lecture de ce projet de loi.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader.

M. Charron: L'article m, M. le Président.

Projet de loi no 247 Première lecture

Le Vice-Président (M. Jolivet): Le député de Sainte-Anne propose la première lecture du projet de loi privé no 247, Loi concernant la cité de Verdun. Cette première lecture est-elle adoptée? Adopté. M. le leader.

M. Charron: L'article g du feuilleton, s'il vous plaît.

Projet de loi no 261 Première lecture

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue propose la première lecture du projet de loi privé no 261, Loi concernant la ville de Ville-Marie. Cette motion de première lecture est-elle adoptée? Adopté.

Le Secrétaire adjoint: Première lecture de ce projet de loi.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader.

M. Charron: Article j.

Projet de loi no 264 Première lecture

Le Vice-Président (M. Jolivet): Le député de Champlain propose la première lecture du projet de loi privé no 264, Loi modifiant la Charte de la ville de Trois-Rivières. Cette motion de première lecture est-elle adoptée? Adopté.

Le Secrétaire adjoint: Première lecture de ce projet de loi.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader.

M. Charron: L'article i, M. le Président.

Projet de loi no 235 Première lecture

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député d'Abitibi-Est propose la première lecture du projet de loi privé no 235, Loi concernant la ville de Val-d'Or. Cette première lecture est-elle adoptée? Adopté. M. le leader.

Renvoi à la commission des affaires municipales

M. Charron: Je propose que tous ces projets de loi soient déférés à la même commission, celle des affaires municipales.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Cette motion de renvoi est-elle adoptée? Adopté.

QUESTIONS ORALES DES DEPUTES

Comptes à payer de 1 103 000 000 *

M. le député de Vaudreuil-Soulanges.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Ma question s'adresse au ministre des Finances, M. le Président. Parmi les lectures fort intéressantes qui nous sont permises à titre de membres de l'Assemblée nationale, se trouve le rapport annuel du vérificateur, le comptable, M. le Président, de tous les Québécois, celui à qui notre Législature a confié le mandat d'examiner les états financiers du gouvernement. On peut lire dans le rapport qui a été soumis à cette Assemblée hier par le Vérificateur général que "les conventions comptables doivent être pertinentes, adéquates, suffisamment précises puisqu'elles doivent servir de base pour établir, interpréter et comparer les états financiers du gouvernement. En d'autres

termes, elles doivent permettre une présentation sincère, exacte et intégrale de la situation financière et des résultats?

M. le Président, on pourrait s'étonner de voir une telle affirmation dans ce document, à moins qu'en creusant on découvre précisément pourquoi cet énoncé si clair et si évident se retrouve encore une fois cette année dans ce rapport. M. le Président, on peut découvrir en creusant dans le document que le ministre des Finances continue à creuser des trous dans les finances publiques. On découvre, M. le Président, que de 726 000 000 $ de comptes à payer dans les paiements de transfert aux institutions publiques, de 726 000 000 $ que le trou était dans les comptes publics l'an dernier, il est passé à 1 103 000 000 $ cette année. M. le Président, cette augmentation de 400 000 000 $, beaucoup plus que le simple chiffre de 1 000 000 000 $ est pertinente, il me semble, à ce moment-ci. J'inviterais le ministre des Finances à nous expliquer comment d'un trou de 500 000 000 $ qui était un oubli ou une erreur, un trou de 1 100 000 000 $ est devenu parfaitement conscient, lorsqu'on a été averti à deux reprises par les vérificateurs et les comptables du Québec. M. le Président, le ministre des Finances doit des explications à cette Chambre.

Le Président: M. le ministre des Finances.

M. Parizeau: Très volontiers, M. le Président. On revient à un certain nombre de choses dont nous avons souvent discuté en cette Chambre et que je vais reprendre. On se souviendra que dans ce qu'on a appelé le trou de 500 000 000 $ dans l'éducation il y a deux ans, le gouvernement en avait inscrit, au moment où cela a été découvert, 200 000 000 $ dans les crédits de cette année-là, et, a simplement laissé pour épuration successive, le solde là où les commissions scolaires l'avait laissé, c'est-à-dire dans les banques. On a constaté aussi, qu'en dépit des crédits votés dans cette Chambre et des instructions données, en particulier les plans de redressement dans les hôpitaux, un déficit bancaire s'accumulait graduellement. J'ai eu même l'occasion dans ma réplique au discours sur le budget d'hier de faire allusion, pour la énième fois, à cette absence de contrôle suffisant sur les emprunts bancaires, par les institutions de réseau. Nous avons pris les dispositions depuis quelques mois pour arrêter cette absence de contrôle, qui fait qu'effectivement, dans certains réseaux, par rapport aux crédits que la Chambre vote ici, il y avait systématiquement et depuis toujours une sorte d'échappatoire du côté des banques. Les mesures sont maintenant prises pour contrôler cela et les banques sont d'ailleurs averties, les règles du jeu s'établissent. Il n'en reste pas moins que ce qui a été ainsi emprunté dans les banques s'y retrouve encore et que le gouvernement doit payer les arrérages graduellement.

Cette situation de fait a toujours été inscrite - enfin, depuis quelques années en tout cas - dans les comptes publics du gouvernement à la page 593, si on veut prendre, par exemple, les comptes publics de 1979-1980. Le numéro peut varier d'une année à l'autre mais c'est invariablement à la fin des comptes publics, une des dernières pages.

Cette année, dans les comptes publics de 1980-1981, nous avons passé cette mention - tous les chiffres qu'on passait à la fin des comptes publics - au début, dans les notes complémentaires. Ce sont les mêmes renseignements, mais déplacés de façon qu'ils soient plus visibles et qu'ils soient dans les notes complémentaires au bilan. Donc, il n'y a rien de modifié dans la présentation des choses sauf de les inscrire aux notes complémentaires. (10 h 40)

Voici ce que dit dans son rapport, le Vérificateur général, page 13. "Pour la première fois cette année dans une note complémentaire aux états financiers - note 3 - il est fait mention que, en raison de certaines dispositions des conventions comptables et de la Loi sur l'administration financière, il arrive que, tant au cours des années antérieures qu'au cours de l'année courante, des dépenses encourues n'aient pu être imputées sur un crédit." Un peu plus loin: "Nonobstant l'amélioration de l'information financière découlant de la note 3, etc..."

Je regrette un peu que le Vérificateur général n'ait pas cru bon d'indiquer que tous les renseignements qui apparaissent en 1980-1981 dans la note complémentaire apparaissaient dans les renseignements supplémentaires des mêmes comptes publics dans les années précédentes. Je vais expliquer pourquoi. À certains moments, il faut quand même être clair sur ces choses. La raison pour laquelle nous mettions cela dans les renseignements supplémentaires jusqu'en 1980-1981 venait de ce que le Vérificateur général de l'époque insistait pour que ce soit là. La raison pour laquelle, dans les états financiers de 1980-1981, cela apparaît dans les notes complémentaires, c'est que le nouveau vérificateur a accepté que ce soit là. Alors, dans ce sens, je n'ai aucune espèce d'objection que d'un vérificateur à l'autre, on veuille changer, comme on dit, les conventions. Je dois dire à cet égard que nous suivons les indications du vérificateur au fur et à mesure qu'il nous les donne.

Cela dit, je dois dire que je regrette

infiniment la traduction de tout ça dans la Presse de ce matin. Venir parler d'un oubli "de 659 000 000 V c'est faux, parce que cela a toujours été dans les états financiers et nous en avons discuté souvent en cette Chambre.

Deuxièmement, il y a un M. Couillard, du bureau du Vérificateur général, qui m'a l'air d'avoir donné une conférence de presse. Que le Vérificateur général passe à la télévision, donne des entrevues, etc., c'est parfaitement normal, c'est même son rôle. On aura noté, d'ailleurs, que dans ses interventions, hier soir, à la télévision, il ne parle pas du tout de ce genre de choses. Mais un de ses fonctionnaires donne une conférence de presse ou une entrevue - déjà, en soi, je trouve ça un peu étonnant - et il est cité au texte - tenez-vous bien, tous ceux qui ont déjà travaillé en comptabilité -pour dire ceci: "Nous avons la certitude à peu près absolue - d'ajouter M. Couillard -que la différence de 513 000 000 $ devrait être ajoutée au déficit."

Voilà maintenant des comptables qui nous disent: Nous avons la certitude à peu près absolue. Curieuse convention comptable, c'est le cas de le dire. Ou bien c'est dedans, ou bien de n'est pas dedans. En tout état de cause, d'aucune espèce de façon on ne peut parler d'oubli. Depuis des années, cela a toujours été dans les comptes publics. Cette année, ça a simplement été changé de place, sur l'autorisation du nouveau Vérificateur général, par rapport à une pratique que l'ancien refusait. Merci, M. le Président.

Le Président: M. le député de Vaudreuil-Soulanges.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): M. le Président, le groupe ministériel est en train d'applaudir une réponse qui contient une citation tronquée. J'aimerais simplement relever que le ministre des Finances nous a dit que le Vérificateur prétend cette année que, nonobstant l'amélioration de l'information financière, etc... Etc, M. le Président, la phrase se lit au complet de la façon suivante: "À mon avis - c'est le comptable des Québécois qui parle - tous les frais encourus directement par le gouvernement pour une année financière doivent être inscrits aux livres." C'est ce qu'on dit. Ce n'est pas la première fois.

L'an dernier, pour l'année 1979-1980, le Vérificateur général, qui est la même personne responsable et compétente qui examine actuellement les états financiers des comités de la fête nationale, qui a découvert les irrégularités à la SHQ, a dit: "Pour que les états financiers reflètent exactement les opérations d'une année financière, la convention comptable devrait exiger l'inscription aux livres des dépenses de transfert que le gouvernement doit acquitter pour les frais de fonctionnement dans la période même où ces frais sont encourus."

Finalement, j'aimerais entendre les commentaires du ministre des Finances sur ce qui est absolument central. On prétend, à ce moment-ci, que ce sont les vérificateurs qui changent d'idée d'une année à l'autre. Le Vérificateur général, à la page 15 du rapport qui nous a été remis hier, déclare: "Nous avons transmis - c'est le Vérificateur général, encore une fois - au mois d'avril 1980, nos remarques, commentaires et suggestions sur le projet de convention préparé par le personnel du Conseil du trésor, et constatons avec regret que, plus de 18 mois plus tard, en novembre 1981, il n'y a encore rien de fait en substance."

M. le Président, j'aimerais demander au ministre des Finances à quel moment il fera quelque chose, à quel moment on aura des états financiers comparables, au lieu de changer ces trous d'une page à l'autre, d'une section à l'autre, d'une note à un énoncé complémentaire, à une annexe. Quand cela sera-t-il aux états financiers du gouvernement du Québec?

Une voix: Très bien.

Le Président: M. le ministre des Finances.

M. Parizeau: M. le Président, puisque le député de Vaudreuil-Soulanges m'en donne l'occasion, on va examiner d'un peu plus près les citations qu'il vient de donner.

Le vérificateur dit donc qu'il serait préférable, à son avis, que tous les frais encourus directement par le gouvernement pour une année financière soient inscrits aux livres. Cela se réfère essentiellement à ceci. La Loi sur l'administration financière prévoit que doivent être inscrits aux livres tous les comptes rentrés dans les 30 jours en vertu de l'article 58 de la Loi sur l'administration financière. Tout ce qui est entré dans les 30 jours doit être inscrit. Or, il est évident que, surtout dans les ministères régionalisés ou décentralisés, une partie de ces factures entre passé 30 jours. Le problème consiste à savoir si, à la prochaine révision de la Loi sur l'administration financière - comme on le sait, ces lois sont révisées de période en période, mais c'est un exercice extrêmement long - on passera de 30 jours à 45 jours ou à deux mois pour l'inscription. Mais, dans l'état de la loi, telle qu'elle est actuellement, il est évident que des comptes rentrent passé 30 jours et que, dans ces conditions, à cause de la loi, ils ne peuvent pas être imputés à l'année précédente. Encore une fois, il faut bien comprendre une chose. Moi, je suis responsable d'appliquer les lois. Qu'on les transforme de temps à autre, je veux bien, mais dans l'état actuel des lois, il faut bien suivre ce que la loi dit de

faire.

Deuxièmement, il dit aussi: "II en est de même pour les frais de fonctionnement à la charge du gouvernement, des commissions scolaires, institutions d'enseignement, établissements de santé et de bien-être dans la période même où ces frais sont encourus." Cela revient exactement à ce que je disais tout à l'heure et à ce que nous avons dit souvent en cette Chambre, des deux côtés. Cette règle n'est possible que dans la mesure où les emprunts des réseaux en banque sont contrôlés. Or, regardez la position de votre parti sur la Loi sur les emprunts scolaires que nous avons discutée encore il y a quelques jours. Quels sont ceux qui font le plus d'objections au contrôle des emprunts bancaires par les réseaux? Pas nous, le parti d'en face.

Une voix: C'est cela.

M. Parizeau: II faudrait quand même que vous vous branchiez. Nous ne pouvons pas réaliser cette condition, si nous n'avons pas le contrôle des emprunts bancaires des réseaux. Cela est facile à comprendre. Si ce contrôle-là n'existe pas, nous votons des crédits en cette Chambre, les réseaux se retournent vers les banques, empruntent dans les banques et disent: Les banques demanderont peut-être d'être payées par le ministre des Finances. Si vous voulez que cette condition soit réalisée, il faut que vous nous donniez un coup de main de l'autre côté pour faire en sorte qu'au fur et à mesure qu'on adopte une loi pour contrôler les emprunts de réseaux, on soit appuyé.

Des voix: Très bien.

M. Parizeau: C'est très joli, M. le Président, de parler de décentralisation, de déconcentration, d'autonomie locale et de tout ce qu'on voudra, sauf que l'autonomie locale et la décentralisation, à la limite, c'est cela que cela donne, des emprunts dans les banques et des factures envoyées au ministre des Finances et des factures, soit dit en passant, envoyées au ministre des Finances pas l'année où cela tombe, l'année suivante et parfois l'autre année après.

Une voix: Et parfois deux ans.

M. Parizeau: Dans ce sens, je ne peux pas être plus d'accord avec le Vérificateur général là-dessus, sauf qu'il faut se doter, comme on l'a fait depuis quelques mois, des instruments nécessaires pour être en mesure de contrôler cela.

Le député de Vaudreuil-Soulanges m'a aussi demandé des réactions à la page 15. Je rappelle, M. le Président, que...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Parizeau: ... nous ne déplaçons pas des montants d'un endroit à l'autre des comptes publics. Les notes complémentaires font partie des états financiers. Cela a toujours été reconnu, on en a discuté à l'occasion de la commission des comptes publics et, conformément au voeu qui avait été exprimé à ce moment-là, c'est dans les notes complémentaires, mais cela sera reflété par l'état des crédits quand les conditions dont j'ai parlé tout à l'heure auront été réalisées. Merci, M. le Président.

Le Président: Question additionnelle, M. le chef de l'Opposition.

M. Ryan: M. le Président, le ministre admet d'abord que ce montant de 1 100 000 000 $ ne figure pas dans les états financiers réguliers, contrairement à l'avis qui est émis par le vérificateur des comptes. Si la loi n'a pas été modifiée, c'est la faute du gouvernement et non pas du vérificateur des comptes ou de l'Opposition.

Deuxièmement, je voudrais rappeler au ministre que, si des institutions, en particulier des hôpitaux, ont contracté des emprunts auprès des banques, cela a été souvent parce que le gouvernement leur disait: Nous n'avons pas plus d'argent à vous donner, allez emprunter aux banques et on verra plus tard.

Troisièmement, je voudrais demander au ministre des Finances de clarifier les deux points suivants. D'abord, est-ce qu'il admet, conformément à ce qui est dit dans le rapport du vérificateur, que ce passif, classé comme indirect, mais très direct en termes d'obligations à la fin de l'exercice dernier, était de 400 000 000 $ environ supérieur à ce qu'il était l'année précédente à la même date? Deuxièmement, peut-il donner la garantie, en particulier dans le cas des hôpitaux, qu'il n'y avait pas beaucoup d'autres obligations de même nature dont le gouvernement n'était pas encore au courant à ce moment-là et qui viendront, par conséquent, s'ajouter dans la réalité au montant de 1 100 000 000 $?

Le Président: M. le ministre des Finances.

M. Parizeau: M. le Président, d'abord, je veux bien qu'on dise que le gouvernement est responsable de toutes les lois; c'est tout à fait exact, sauf que je rappellerai que la Loi sur l'administration financière a maintenant à peu près dix ans. Dans ces conditions...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Parizeau: ... ne commençons pas à faire des vertus rétrospectives, n'est-ce pas? La Loi sur l'administration financière...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! M. le ministre des Finances.

M. Parizeau: ... peut présenter des tas d'inconvénients, mais sa stabilité a au moins un avantage, c'est que d'année en année les comptes sont comparables. Je ne souhaiterais pas voir la Loi sur l'administration financière changer tous les deux ans. J'ai l'impression que la plupart des gens qui cherchent à analyser la situation du gouvernement trouveraient ça beaucoup plus compliqué. On sait à quel point une convention comptable est une convention comptable, ni plus ni moins. On sait à quel point l'imputation des dépenses peut se faire de plusieurs façons. L'important, c'est qu'on ne commence pas à changer, d'année en année, la façon dont on présente les comptes parce que là personne ne s'y retrouvera.

Deuxièmement, pour la question des hôpitaux, je ne suis pas d'accord, pas plus que dans le cas des commissions scolaires, avec le chef de l'Opposition. Je lui rappellerai à cet égard que les plans de redressement budgétaire commencés avec certains hôpitaux, pas tous d'ailleurs, mais, en particulier, avec certains des plus gros hôpitaux de Montréal et de Québec il y a déjà au-delà de trois ans, ont bien fonctionné la première année, moins bien la deuxième, pas beaucoup la troisième. C'est pour cela que l'argent s'est retrouvé dans les banques. Ce n'est pas parce qu'on incitait les hôpitaux à emprunter dans les banques; c'est qu'au fur et à mesure que le redressement budgétaire s'effectuait, on trouvait cela plus pénible la deuxième année que la première, forcément, beaucoup plus pénible la troisième que la deuxième et la banque se trouvait à être une sorte de tentation perpétuelle. S'imaginer que le gouvernement téléphonait dans les hôpitaux en disant: "Empruntez, le ministre des Finances sera généreux un jour", c'est de la légende.

Des voix: Quel jour?

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Parizeau: II est tout à fait clair que sur le plan des comptes à payer, les chiffres qui sont donnés ne sont pas faussés alors, forcément, l'augmentation des comptes à payer correspond à la réalité, cela va de soi. Au cas où cela pourrait satisfaire le chef de l'Opposition, je dirais que d'année en année, selon les échéances que nous avons, ce montant des comptes à payer varie à la hausse, mais à la baisse aussi, selon les années, de centaines de millions. Il est tout à fait clair, par exemple, qu'au moment de la réforme fiscale municipale, nous avions, en comptes à payer, 300 000 000 $ qui ont paru à la fin d'une année alors que l'année suivante, ils se sont résorbés. Quiconque sait comment on établit les comptes à payer sur des masses pareilles, sait très bien qu'il y a des fluctuations de plusieurs centaines de millions dans les deux sens, d'ailleurs.

II y avait une dernière question posée par le chef de l'Opposition; je m'excuse, mais c'était quoi? Il avait fait une dernière observation et je l'ai oubliée. J'ai l'impression qu'il l'a oubliée lui aussi. Merci, M. le Président.

Le Président: Question principale, M. le député d'Outremont.

M. Fortier: Bref, j'ai compris qu'on est dans le trou. C'est ce que j'ai compris.

M. Rivest: C'est ça!

Déclaration de M. Robert Boyd pour une politique énergétique

M. Fortier: J'aurais une question à poser au ministre de l'Énergie et des Ressources. Vous vous rappellerez que la semaine dernière, à la suite de la nomination du nouveau PDG d'Hydro-Québec le député de Mont-Royal, à juste titre d'ailleurs, avait fait l'éloge de l'ancien président-directeur général, M. Boyd. D'ailleurs, je vous rappellerai qu'à la commission parlementaire de l'énergie et des ressources, lors de l'étude du projet de tarification soumis par HydroQuébec, le ministre de l'Énergie avait prononcé une allocution très remarquée, notant, à juste titre, la compétence de M. Boyd et ses nombreuses années de service -37 ans, je crois - à la direction d'Hydro-Québec et comme employé, au préalable.

Je m'étais d'ailleurs associé à ces éloges qui avaient été faits par le ministre de l'Énergie et des Ressources. C'est donc dire que des deux côtés de cette Chambre nous reconnaissons la compétence de M. Boyd dans le domaine énergétique.

Je voudrais porter à l'attention du ministre une déclaration que M. Boyd a faite dans le Devoir de ce matin: "On parle beaucoup de politique énergétique au Québec. Cela fait des années qu'on en parle, mais on n'en a toujours pas. On devrait donc dire ce qu'est la politique et ce qu'est le rôle d'Hydro-Québec dans telle ou telle partie de cette politique. Également, le gouvernement devrait définir clairement son rôle face à l'Hydro. Il faudrait préciser le rapport entre les deux: présentement, ce n'est pas clair et cela n'a jamais été clair."

La question que je pose au ministre de l'Énergie est celle-ci: Ne croit-il pas que la déclaration de M. Boyd donne un appui peut-être tardif, mais quand même déterminant, à tous les arguments avancés par l'Opposition pour s'opposer au projet de loi no 16, Loi modifiant la Loi sur l'Hydro-Québec"?

Deuxièmement, ne croit-il pas que les

changements substantiels à la Loi sur l'Hydro-Québec ne devraient pas se faire sans que le gouvernement définisse au préalable le rôle d'Hydro-Québec à l'intérieur d'une politique énergétique globale, pour tout le Québec?

Le Président: M. le ministre de l'Énergie et des Ressources. À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Duhaime: M. le Président, j'ai lu comme tout le monde le compte rendu d'une entrevue rapportée ce matin par Michel Nadeau dans le journal Le Devoir. J'ai certaines hésitations à commenter directement comme avéré ce qui est écrit entre guillemets. Cependant, M. le Président, en tenant pour acquis que ce qui est rapporté dans le journal est précis et exact, je pense que M. Boyd a raison sur un point. Ce n'est pas d'hier, d'ailleurs. Cela remonte à l'existence même d'Hydro-Québec. Il y a nécessairement et il y aura toujours nécessairement, je pense, une zone grise dans les rapports qui existeront entre un gouvernement et Hydro-Québec. Il faut dire aussi que traditionnellement, sur le plan des mandats confiés à Hydro-Québec, elle reçoit des mandats du gouvernement, la politique énergétique est établie par le gouvernement, et il est bien certain que, dans la jonction normale et le fonctionnement quotidien d'une pareille entreprise, il y a évidemment des zones grises.

Je rappelle essentiellement, en toute justice, cependant, je dois le dire, pour M. Boyd, ce que j'ai eu l'occasion de dire en commission parlementaire, je serais prêt à le répéter ce matin, M. le Président, je pense pouvoir réitérer au député d'Outremont que c'est des deux côtés de cette Chambre que nous avons reconnu les longs états de service de M. Boyd. Je dois dire cependant que le Devoir rapporte également ce matin ceci: "Se défendant de claquer la porte, M. Boyd a dit partir parce que la charge de travail était devenue trop lourde. Il est temps de passer le travail à des jeunes. J'en ai pris beaucoup, peut-être trop. Il y a du personnel très compétent à Hydro-Québec."

Si c'est vrai des deux côtés, M. le Président, qu'on est prêt à reconnaître les longs états de service, les loyaux états de service de M. Boyd, je pense aussi, qu'il y a quelques jours, des deux côtés de la Chambre, sur une motion du député d'Outremont, nous étions prêts à reconnaître également que le successeur de M. Boyd, M. Coulombe, était capable de relever le défi à Hydro-Québec pour les années quatre-vingt.

M. Fortier: M. le Président, je vois que le ministre n'a pas répondu à mes deux questions. Il a parlé d'une zone grise. J'ai l'impression qu'on a un ministre gris et qu'il ne sait pas trop où il s'en va, et s'il n'est pas capable de répondre à mes questions, j'aimerais bien que le premier ministre le remplace. (11 heures)

Le Président: M. le ministre.

M. Duhaime: M. le Président, je ne sais pas qui grisonne le plus vite de nous deux, M. le député d'Outremont. Puisqu'on parle de la loi 16, je m'en excuse auprès du député d'Outremont, j'aurais peut-être dû accrocher la deuxième partie de sa question, mais j'essaie d'être bref dans mes réponses et d'être clair aussi, M. le Président, l'Opposition, qui en est à sa troisième semaine du "filibuster" sur la loi 16, nous annonçait, puisqu'on en parle, il faut bien en parler, que, dès le mois de juin, lors du dépôt, il y a eu des commentaires par des gens d'en face, que, lors de la commission parlementaire sur la loi 16 également, ils ont fait des commentaires et on disait même, en citant l'ancien vice-président aux finances d'Hydro-Québec, M. Lemieux, qui vit sans doute des jours glorieux aujourd'hui dans une des province de l'Ouest du Canada - je donne cela comme exemple, M. le Président, pour montrer tout le sérieux de l'Opposition dans le débat - qu'Hydro-Québec serait mise en difficulté pour réaliser son programme d'emprunt.

M. Fortier: Question de règlement.

Le Président: M. le député d'Outremont, sur une question de règlement.

M. Fortier: Le règlement exige que le ministre réponde simplement et immédiatement aux questions qui sont posées. Alors, je vous demanderais de lui demander de répondre.

Le Président: Alors, M. le ministre.

M. Duhaime: M. le Président, je rappelle que... je réponds au député d'Outremont. Ils ont fait un lien entre la capacité d'emprunt d'Hydro-Québec et la loi 16, alors qu'on a toujours dit qu'il n'y en avait pas, que toutes les garanties étaient dans la loi. Dans la Presse du 16 décembre 1981 - c'est donc très proche de nous et cela va intéresser le chef de l'Opposition, j'en suis convaincu - "Hydro: emprunts de 2 027 000 000 $". Le programme en cours pour l'année est normalement complété avec un emprunt additionnel de 50 000 000 $ avec la cote AA. J'ai l'impression que peut-être ce sont les libéraux qui vont commencer à dire AA, face à Hydro-Québec.

Le Président: Question principale, M. le député de Hull, et par la suite, M. le député de Limoilou.

Fusion de Baie-Comeau et Hauterive

M. Rocheleau: M. le Président, ma question s'adresse au premier ministre. Cela concerne la loi 37 qui vise une fusion forcée des municipalités de Baie-Comeau et Hauterive. Nous avons jusqu'à 3 heures du matin, hier, M. le Président, entendu 8 intervenants de Baie-Comeau et Hauterive, dont les municipalités, les comités de citoyens, la Chambre de commerce, le CRD et la grande majorité, M. le Président, a rejeté la fusion forcée. Unanimement, M. le Président, les intervenants ont exigé du gouvernement de prendre ses responsabilités, c'est-à-dire de corriger la situation de Hauterive qui ne reçoit pas de taxe foncière d'Hydro-Québec pour ses barrages de Manic. M. le Président, étant donné que la démocratie a encore sa place, j'espère, au Québec, je demande au premier ministre s'il a l'intention de retirer le projet de loi 37 en attendant que les citoyens de Baie-Comeau et Hauterive aient l'opportunité de voir clair dans leurs affaires.

M. Lévesque (Taillon): La réponse, M. le Président, c'est non. Il n'est pas question de retirer le projet de loi; il n'est pas question, non plus, de prétendre le faire passer à la vapeur. Juste une correction de fait qu'on vient de me rappeler et que je dois rappeler au député de Hull. C'est qu'Hydro-Québec, contrairement à ce qu'il a mentionné je ne sais pas pourquoi, paie quelques centaine de milliers de dollars par année à Hauterive en "en lieu" de taxe et depuis longtemps. Il ne faut pas charrier, non plus.

Pour ce qui est des gens qui rejettent unanimement la fusion, peut-être qu'il y a des gens qui rejettent ce qui pourrait leur sembler sûrement une fusion forcée. Mais c'est complètement faux d'après les rapports que j'ai eus; je n'assistais pas à la commission, mais je ne vois pas pourquoi le député de Hull s'amuse à tronquer les faits. On me dit, au contraire, que beaucoup de gens ont découvert à quel point, à partir des chiffres, y compris ceux qui étaient à la commission... C'est malheureux, d'ailleurs, que les représentants de médias d'informations - et je les comprends - soient allés se coucher, apparemment, avant la fin de la commission, parce qu'il découlait de l'ensemble des discussions et de l'ensemble des faits qui étaient sur la table, d'après les rapports que j'en ai eus, que non seulement cette fusion semble plus qu'indiquée mais qu'elle serait à l'avantage des deux populations concernées. D'ailleurs, cela fait des années et des années, tout le monde le sait - lorsqu'on passe sur la Côte-Nord, tout le monde le dit - qu'il est inévitable qu'un jour une seule ville solide, plus grande, plus intégrée, si vous voulez, serait avantageuse. Maintenant, il est évident que même si c'est avantageux, même si c'est souhaitable - et je pense que la plupart des gens de la Côte-Nord, de la région le sentent - il n'est pas question de "bulldozer" un projet de loi comme ça s'il n'y a pas une sorte de consensus qui s'établit, mais je suis convaincu qu'il va s'établir rapidement.

Le Président: M. le député de Hull.

M. Rocheleau: Question additionnelle, M. le Président. Le comité des citoyens de Baie-Comeau disait au ministre Lessard, l'autre jour, justement, Arrêt, Stop, on se souvient de cela dans l'histoire. M. le Président, j'aimerais que le premier ministre, lui qui aime la consultation, le prouve actuellement. Il n'est pas heureux de son congrès, des résultats, il demande maintenant chez ses militants un référendum.

Le Président: Question additionnelle, s'il vous plaît.

M. Rocheleau: M. le Président, le maire Boutin, de Hauterive, a confirmé sa participation secrète à la rédaction de la loi 37 étudiée en commission parlementaire. Je demande encore une fois si le premier ministre du Québec aime à consulter simplement ceux qui vont dire oui à sa demande, alors que les gens de Baie-Comeau et de Hauterive n'acceptent pas une fusion forcée. On veut revenir à la consultation, M. le premier ministre. On demande le retrait de la loi 37 afin de permettre justement cette démocratisation. Le ministre Lessard n'a pas été élu pour une fusion forcée de Baie -Comeau et Hauterive.

Le Président: Question, s'il vous plaît. Voulez-vous vous asseoir, s'il vous plaît.

Question additionnelle, s'il vous plaît.

M. Rocheleau: M. le Président, avant de poser ma question, j'aimerais que les députés péquistes...

Le Président: À l'ordre! À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît!

Question additionnelle, s'il vous plaît.

M. Rocheleau: M. le Président...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! Question de règlement, M. le ministre.

M. Richard: M. le Président, sur une question de règlement. Je voudrais que vous demandiez au député de Hull de faire attention de ne pas briser les bureaux qui font partie de notre patrimoine.

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

M. le député de Hull, je m'attends à votre collaboration et à ce que vous posiez une question additionnelle sans aucun autre préambule. S'il vous plaît!

M. Rocheleau: M. le Président, je voudrais simplement dire, avant, au ministre...

Le Président: M. le député de Hull, question, s'il vous plaît.

M. Rocheleau: M. le Président, je voudrais que le premier ministre du Québec nous dise s'il va permettre une consultation et un référendum avant de forcer la loi 37.

Le Président: M. le premier ministre.

M. Lévesque (Taillon): J'avouerai qu'il y a quelques instants, le sens démocratique du député de Hull me faisait quasiment peur. Je pense que la plupart de ceux qui suivent assidûment nos travaux ont dû avoir un certain frisson parce que c'était un spectacle...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Lévesque (Taillon): ... qui explique un peu certains des commentaires qu'on se faisait faire à Hull, dans le temps où le député actuel était le potentat de l'hôtel de ville. (11 h 10)

M. Rocheleau: Question de règlement, M. le Président. Question de règlement.

Le Président: Question de règlement.

M. Rocheleau: M. le Président, je parle ce matin de démocratie; je ne parle pas du temps où j'étais maire de Hull parce que je pourrais vous en parler...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de Hull!

M. le premier ministre.

M. Lévesque (Taillon): M. le Président, devant ces explosions de violence, je vais faire appel à quelqu'un qui est responsable fondamentalement de ce projet de loi et qui peut répliquer du tac au tac - on connaît sa vigueur de style - mon collègue des Affaires municipales.

Le Président: M. le ministre.

M. Léonard: Je vois qu'on essaie de faire un spectacle, chez les gens d'en face, mais, justement, dans un article du Soleil, ce matin...

M. Rocheleau: Question de privilège.

Le Président: Question de privilège, M. le député de Hull.

M. Rocheleau: M. le Président, le spectacle n'est pas de ce côté-ci, il est de l'autre côté.

Le Président: M. le ministre des Affaires municipales.

M. Léonard: Le journaliste, justement, mentionne qu'à la lecture des données que j'avais citées à la commission parlementaire, il n'y avait à peu près plus personne qui s'opposait à la fusion des deux villes, sauf...

M. Rocheleau: C'est rendu que tout le monde quitte.

Le Président: M. le député de Hull, s'il vous plaît! M. le député de Hull, assoyez-vous! S'il vous plaît! M. le député de Hull, je vous recommanderais fortement, au cours de la période des fêtes, de lire notre règlement attentivement, de l'article 1 au dernier. Vous verrez que lorsque le président est debout, vous devez vous asseoir, et lorsqu'un député a la parole, vous ne devez point l'interrompre.

M. le ministre.

M. Léonard: Peut-être que le journaliste exagérait un peu, mais disons qu'il y a quand même des chiffres sur lesquels à peu près tout le monde s'entend et sur lesquels il y a eu aussi des consultations, parce que ce dossier dure depuis au moins quinze ans dans la région. Les chiffres sont les suivants: À Hauterive, il y a 14 724 habitants qui dépensent en moyenne, per capita, 505 $, qui ont une évaluation industrielle et commerciale de 27 000 000 $. À Baie-Comeau, il y a 11 911 habitants qui dépensent en moyenne 863 $, comparativement à 505 $ à Hauterive, et qui ont une évaluation industrielle et commerciale de 181 000 000 $, comparé à 27 000 000 $.

Or, il se trouve que les gens de Hauterive travaillent en grande partie à Baie-Comeau. Ce sont deux populations qui vivent côte à côte depuis fort longtemps, et à la suite d'accidents de terrain, il se produit des écarts considérables dans les charges financières des deux villes. Depuis longtemps, à la suite de plusieurs rapports, des recommandations disent: II n'y a pas d'autre solution que la fusion. Maintenant, nous proposons un projet de loi, nous avons ouvert la commission parlementaire des affaires municipales à la population, chacun s'est fait entendre. Mais sur les faits, sur les chiffres, sur le fond, tout le monde s'entend.

Comme a dit le premier ministre, il n'est pas question de bousculer ce projet de loi, mais il est urgent que la fusion se fasse,

et tout le monde en a convenu à la fin de la commission parlementaire.

Le Président: En complément de réponse, M. le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche.

M. Lessard: M. le Président, un complément de réponse, tout en corrigeant un certain nombre de choses. Il est exact que nous, de ce côté-ci de la Chambre comme, peut-être aussi, dans la région, on n'aime pas la fusion obligatoire. J'ai indiqué à plusieurs reprises que j'aurais aimé, à la suite de négociations que j'ai entreprises d'ailleurs à la demande des deux maires depuis 1976, une fusion volontaire. Mais, M. le Président, pour corriger un certain nombre de choses, c'est que, à la suite des différents rapports qui nous ont été présentés, en commission parlementaire, j'ai posé à chaque intervenant la même question: Est-ce que vous croyez qu'une fusion volontaire serait possible? Je pense que le député de Hull pourra le confirmer, dans la majorité des réponses, cela a été: II est impossible d'envisager une fusion volontaire dans les circonstances. C'est pourquoi nous devons présenter le projet de loi no 37 d'autant plus que, pour respecter l'ensemble de la population, nous constatons qu'à la suite de sondages, 57% de la population de Baie-Comeau et de Hauterive veut la fusion des deux villes.

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! Dernière question additionnelle, sans préambule, M. le député de Hull, s'il vous plaît!

M. Rocheleau: M. le Président, j'ai une pétition d'au-delà de 5000 personnes qui demandent une consultation populaire et je demande de nouveau...

Des voix: Question.

M. Rocheleau: ...au ministre Lessard s'il est prêt à permettre à ces gens d'être consultés et d'accepter cette fusion volontaire, à la suite du fait que les deux municipalités se sont concertées avec une équipe de spécialistes, pas des gens qui essaient de mettre la pagaille là-bas. M. le ministre Lessard, vous qui êtes le député de Saguenay, est-ce que vous allez accepter une consultation pour vos citoyens?

Le Président: M. le ministre.

M. Lessard: M. le Président, comme on le soulignait tout à l'heure, il y a à peu près, dans ce dossier, quinze ans de consultations. Il y a six rapports d'experts qui remontent à 1963. Le dernier rapport, M. le Président, a été le rapport Major-Martin, qui a été demandé par les deux villes, Hauterive et Baie-Comeau, et qui a coûté 286 000 $ au gouvernement du Québec. Il y a donc des études qui ont coûté plus de 500 000 $. Nous constatons que, malgré ces études qui recommandent unanimement la fusion et malgré tous les efforts que nous avons pu faire, il est impossible d'en arriver à une fusion volontaire. Dans les circonstances, nous sommes obligés de présenter ce projet de loi.

Ceci ne veut pas dire pour autant -puisque les deux villes devront présenter un budget pour l'année à venir et qu'à la suite de l'opposition que nous avons du côté libéral, nous ne pourrons probablement pas adopter ce projet de loi avant Noël - que, maintenant, il peut y avoir des ententes avant. Il pourra y avoir des ententes pour le prochain budget, mais il est entendu que le gouvernement du Québec n'a pas l'intention de lâcher à ce sujet, que nous devrons régler un problème que les libéraux n'ont pas réglé dans le passé...

Des voix: Ah!

M. Lessard: ...ce qui avait été demandé. Je demande, en terminant, M. le Président, si le député de Hull était prêt, lui, à accepter un référendum lorsqu'il a voulu fusionner Hull-Ouest et Aylmer.

M. Rocheleau: Oui. M. le Président.

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! Question principale.

M. Rocheleau: II m'a posé une question, M. le Président.

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! Question principale, M. le député de Limoilou.

Situation au centre Robert-Giffard

M. Gravel: Merci, M. le Président. Ce n'est pas facile pour un député ministériel de poser une question en cette Chambre. M. le Président, ma question s'adresse au ministre des Affaires sociales. Les conditions de travail sont de plus en plus difficiles actuellement au centre hospitalier Robert-Giffard. J'ai eu l'occasion de vous sensibiliser par le passé, de même que votre prédécesseur, sur un point particulier, soit l'état déplorable de la cuisine centrale du centre hospitalier. J'ai moi-même constaté que ces installations sont dans un état inacceptable et doivent être rénovées. Un rapport du ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation a déjà confirmé cette situation. Les travailleurs en ont assez. J'ai eu l'occasion de vous parler, dans le passé, M. le ministre, d'une certaine

table en chêne, d'un piano, etc. M. le Président, est-ce que le ministre pourrait m'indiquer dans quel délai ces travaux de rénovation pourraient être entrepris?

Le Président: M. le ministre des Affaires sociales.

M. Johnson (Anjou): M. le Président, je remercie le député de Limoilou de sa question, je sais depuis un certain nombre de jours qu'il veut la poser en cette Chambre. On connaît aussi l'attachement du député de Limoilou pour les travailleurs, l'institution et les citoyens desservis par cette importante institution de la région de Québec...

Une voix: II a travaillé là. (11 h 20)

M. Johnson (Anjou): ...puisqu'il y a déjà travaillé. On sait que le centre Giffard héberge 2500 patients psychiatriques, que son budget est d'environ 60 000 000 $, que les cuisines datent de 1939, qu'il y a un projet de rénovation d'environ 2 500 000 $ qui est en cours depuis un certain temps et qui a dû, dans le contexte de certains réaménagements budgétaires, être imputé, pour cette partie des travaux qui étaient commencés et de l'équipement acheté, au budget de fonctionnement qui, de toute évidence, sera insuffisant pour compléter ce qui est une opération essentielle, compte tenu de la vétusté d'une bonne partie de l'équipement et du piètre aménagement de certains endroits au sujet desquels, encore une fois, les travailleurs, je pense, ont raison, comme l'institution elle-même, de se plaindre.

En ce sens, avant d'évoquer cette question de délai, je dirai que ce piano dont il est question à Robert-Giffard a été donné aux soeurs à l'époque où elles étaient propriétaires en 1929. La direction m'a avisé qu'il ne fonctionnait plus et que, si quelqu'un pouvait en prendre livraison, il était le bienvenu. La table de chêne a été faite par les travailleurs eux-mêmes et remise à l'institution il y a 50 ans. Il faut peut-être préciser certaines choses à cet égard-là.

Il y a pour environ 1 300 000 $ d'aménagement et 1 400 000 $ d'équipement qui sont impliqués, ce qui comprend les 600 000 $ qui étaient imputés initialement. Nous pensons que, dans le cadre des réaménagements budgétaires, il sera possible, d'une part, d'amortir ces rénovations qui pourraient continuer très bientôt à l'intérieur même du budget de l'hôpital. D'autre part, le ministère des Affaires sociales, au niveau de son budget d'équipement, quant à sa péréquation, considérera ce dossier comme un dossier prioritaire et en collaboration avec le CRSS, l'institution et le ministère dans la région, nous parviendrons, à très court terme, je pense, à régler cette question.

Merci.

Le Président: Fin de la période des questions.

On m'informe que le ministre de la Justice aurait un complément de réponse à donner à une question de M. le député de Mont-Royal.

M. Gagnon: Question de règlement, M. le Président.

Le Président: Question de règlement, M. le député de Champlain.

M. Gagnon: On attendait depuis tantôt la possibilité de poser des questions. Le député de Hull, entre autres, a retenu l'attention avec un spectacle...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Gagnon: Je voudrais savoir si on pourrait avoir l'assurance d'être reconnu demain pour poser un certain nombre de questions.

Des voix: Non, non, non.

M. Gagnon: On a, nous aussi, des questions à poser, M. le Président.

Le Président: J'essaierai, M. le député de Champlain, de vous reconnaître demain lors de la période des questions.

M. Grégoire: M. le Président, j'ai une question à poser.

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! Des voix: Fédéral, fédéral, fédéral.

Le Président: M. le ministre de la Justice.

Le dossier des irrégularités à la SHQ

M. Bédard: M. le Président, comme je l'avais promis au député de Mont-Royal la semaine dernière, j'aimerais faire le point sur la progression des enquêtes policières qui ont été entreprises à la suite d'allégations formulées ici ou en dehors de cette Chambre que des actes criminels auraient pu être commis dans le cadre de différentes activités reliées à la Société d'habitation du Québec. J'aimerais, tout d'abord, rappeler qu'il y a quatre volets bien distincts les uns des autres, donc quatre enquêtes policières distinctes à l'intérieur de ce dossier général d'enquêtes reliées à la Société d'habitation.

Il y avait, premièrement, celui dit de la fausse facture. Dès le mois de juin dernier, j'avais été à même d'affirmer

qu'après étude du dossier les responsables de la direction générale des affaires criminelles en étaient venus à la conclusion qu'aucun acte criminel n'avait été commis dans cette affaire de fausse facture. Ce volet est donc clos.

D'autre part, les enquêteurs de la Sûreté du Québec ont remis récemment un rapport concernant le deuxième et le troisième volets de cette enquête. Le deuxième volet traite spécifiquement d'une allégation à savoir qu'un pot-de-vin de 50 000 $ aurait été offert ou demandé par une ou des personnes supposément dans le but de favoriser le règlement d'un litige opposant un entrepreneur à la Société d'habitation du Québec et impliquant supposément le chef de cabinet du premier ministre. L'enquête policière est terminée et toutes les personnes qui étaient susceptibles d'apporter un éclairage sur cette affaire ont été interrogées et les faits ont été vérifiés. Le rapport d'enquête a été remis aux responsables de la Direction générale des affaires criminelles qui l'ont examiné. La conclusion de cette étude est qu'il n'y a aucun fait, dans cette affaire, susceptible de démontrer la commission de quelque acte criminel que ce soit.

Pour ce qui est du troisième volet, il s'agissait de vérifier si une tentative de fraude avait été commise par des personnes qui auraient, de diverses façons, mis de l'avant un projet d'augmenter artificiellement de 50 000 $ la somme à être versée par la Société d'habitation du Québec, lors du règlement d'une réclamation, et ce dans le but d'avantager une tierce personne.

Les responsables de la Direction générale des affaires criminelles, qui ont analysé le rapport d'enquête, en sont venus à la conclusion que l'ensemble des faits, qui avaient tous été recueillis et examinés par les policiers, n'était pas de nature à permettre de porter des accusations de tentative de fraude ou même de complot pour en arriver à cette fin. Aucune accusation criminelle ne peut donc être portée dans cette affaire.

Le quatrième et dernier volet regroupe les allégations diverses reliées à des malversations possibles ayant pu avoir eu cours au service des réparations majeures de la Société d'habitation du Québec. L'enquête policière, dans ce dossier, suit son cours normal. À cet égard, dès que le rapport d'enquête aura été remis à un procureur qui l'examinera, les décisions qui s'imposeront seront alors prises en conséquence. Merci, M. le Président.

Le Président: Merci.

M. le député de Mont-Royal, question additionnelle.

M. Ciaccia: M. le Président, inutile de dire que nous allons examiner la réponse que le ministre nous a donnée ce matin. Les quelques commentaires ou les quelques questions qui me viennent à l'esprit sont les suivantes: Comment expliquer, dans ce cas, l'admission de M. Foisy, membre du bureau du ministre de l'Habitation, faite publiquement, comme quoi il aurait fait cette offre de 50 000 $? Comment expliquer le fait que Michel Lemieux, qui était, je crois, le chef de cabinet, a admis, selon les journaux - et cela n'a pas été nié ou démenti - qu'effectivement il y a eu discussion de cette offre de 50 000 $? Il y a eu discussion; ce sont des admissions publiques.

Il me semble que le ministre fait fi des faits qui entourent ces admissions, et ces conclusions nous laissent un peu perplexes. Je voudrais demander au ministre maintenant, vu l'importance du dossier, s'il va déposer l'analyse faite par le procureur de la couronne des éléments de preuve recueillis par l'enquête.

Le Président: M. le ministre de la Justice et Procureur général.

M. Bédard: Je suis surpris des remarques faites par le député de Mont-Royal qui évoque certains noms et certaines déclarations qui ont été faites. Ce que je veux lui dire, c'est que toutes les personnes qui devaient être vues au cours de cette enquête policière l'ont été. L'enquête policière - donc, des personnes que vous pouvez très bien identifier ont été vues -étant terminée, l'ensemble des faits et des témoignages recueillis a été acheminé, selon la procédure normale, au procureur de la couronne chargé du dossier qui en a fait l'analyse, lequel rapport a été transféré à la Direction générale des affaires criminelles qui en a fait l'analyse. Vous savez très bien que, comme Procureur général, je ne peux que vous donner ici les conclusions. (11 h 30}

Si vous me permettez, on va essayer d'en discuter dans un calme qui me semble indiqué. Le député de Mont-Royal sait très bien que je ne peux et qu'aucun Procureur général ne dépose les rapports d'analyse qui sont faits par les procureurs de la couronne, de la même façon qu'il ne dépose de rapports de police qui sont nécessairement là étant donné qu'il y a eu une enquête policière. Le député de Mont-Royal sait très bien aussi que, comme Procureur général, je n'ai pas à commenter les faits contenus dans une enquête policière. Quant à moi, vous me permettrez, M. le Président, pour qu'il n'y ait pas... je ne pense pas que le député de Mont-Royal ait voulu faire quelque insinuation que ce soit, mais sur la manière de traiter le dossier, je voudrais rappeler que je n'ai jamais dérogé d'une ligne de conduite

qu'impose la fonction de Procureur général. Je rappellerai simplement que le traitement de tels dossiers a toujours été identique depuis que j'occupe ces fonctions.

Je me permets de rappeler un cas similaire, à bien des égards, à celui qui se présente à nous aujourd'hui. Il s'agit - le député de Mont-Royal comprendra que je ne peux pas, comme Procureur général, être plus explicite que je l'ai été - de l'affaire dite de la SAQ et qui, à l'époque, semblait mettre en cause, on le sait, un ancien ministre du cabinet libéral, alors député de l'Opposition. Je rappellerai au texte, tirée du journal des Débats, la déclaration que je faisais dans ce dossier, le 21 décembre 1977, à la page 5119: "M. le Président, à la suite d'une question de privilège qui contenait également une question pure et simple soulevée par le député de Jean-Talon relativement à l'enquête policière sur la Société des alcools, je suis présentement en mesure de faire la mise au point suivante. "Je désire d'abord rappeler que mon rôle comme Procureur général consiste à faire respecter les lois et à décider, s'il y a lieu, de porter des plaintes ou des accusations eu égard aux lois qui nous gouvernent, notamment eu égard au Code criminel. "C'est dans ce contexte que j'ai demandé qu'on fasse le point sur tous les éléments connus, à ce stade-ci de l'enquête, susceptibles de constituer des infractions criminelles qui pourraient impliquer quelques membres de cette Assemblée. Les officiers responsables, tant à la Sûreté du Québec qu'à la direction des affaires criminelles, m'ont indiqué que ces éléments ne révèlent pas la commission d'infraction criminelle, de sorte que, comme Procureur général, je puis assurer cette Assemblée qu'il n'existe actuellement aucun motif raisonnable et probable de croire qu'un quelconque de ses membres ait pu être partie à la commission d'une infraction criminelle. Quant à l'ensemble de cette enquête sur la SAQ, comme je l'ai déjà dit, elle devrait se terminer, selon les officiers supérieurs de la Sûreté du Québec, vers la fin de février 1978."

À la suite de ce rapport, aucune objection n'avait été soulevée par l'Opposition, bien au contraire. Quant à moi, je pense que c'est important, je répète que le traitement accordé au présent dossier est identique. Je souhaiterais que les attitudes et les comportements de l'autre côté de la Chambre soient empreints du même sens de responsabilité et de dignité.

M. le Président, le député de Mont-Royal peut, s'il le juge à propos - c'est sa responsabilité - ramener sur le tapis un ensemble d'éléments, de faits, d'allégations qui ont déjà été véhiculés dans cette Chambre. Il expliquera toutefois non seulement à cette Chambre, mais à l'ensemble de la population pourquoi il le fait. À la suite de ces allégations, le gouvernement, le ministre de la Justice a accédé à la demande qu'une enquête policière se tienne. Cette enquête policière s'est tenue. Tous les témoins susceptibles d'être interrogés l'ont été et, comme Procureur général, je donne les conclusions non seulement de l'enquête policière, mais de l'analyse qui a été faite par les procureurs de la couronne de cette enquête policière et l'analyse faite par la Direction générale des affaires criminelles du ministère de la justice.

M. Ryan: M. le Président.

Le Président: M. le chef de l'Opposition.

M. Ryan: Vu que le ministre de la Justice s'est permis dans sa réponse de donner des conseils à l'Opposition, je voudrais lui rappeler quelques éléments très simples. Je voudrais lui dire que le genre d'enquête qu'il a commandée dans ces situations ne peut pas répondre complètement aux interrogations qui ont surgi du côté de l'Opposition et dans l'opinion publique. Je vais lui rappeler un petit fait bien connu de l'histoire politique canadienne. Je me rappelle qu'il y a plusieurs années, il y avait eu un cas, la fameuse enquête Rivard, où un avocat avait dit: On m'a offert un pot-de-vin pour faire ceci. Si on avait réduit cela à une enquête de police secrète, comme celle que vous avez faite, peut-être que jamais rien ne serait sorti de cela. Le gouvernement fédéral, sous la pression de l'opinion, a dû instituer une enquête publique. Là, on a constaté qu'il y avait quelque chose, qu'il y avait anguille sous roche. Finalement, cela a donné lieu à toutes sortes de conséquences. Il me semble qu'il y avait assez de choses dans ce dossier-là, en particulier dans les rapports du vérificateur des comptes, pour que le gouvernement se sente obligé de faire la lumière complète. Là, vous nous dites qu'il n'y a pas d'offense criminelle. Nous l'aurions peut-être appris par une enquête plus large; parfois, on arrive à établir un délit criminel en commençant par établir solidement des irrégularités administratives, des actes de népotisme. Finalement, on arrive sur le vrai noyau de l'affaire, mais la méthode que vous avez choisie ne peut que donner les résultats qui la caractérisent, c'est-à-dire des résultats partiels.

Le Président: M. le ministre de la Justice.

M. Bédard: D'abord, M. le Président, je dirai au chef de l'Opposition qu'il ne s'agit pas d'une enquête secrète. C'est une enquête

normale, régulière, comme toutes les enquêtes qui se font par la Sûreté du Québec et selon les règles normales de ces enquêtes, de la même façon que vous avez pu en faire dans le temps où vous étiez au pouvoir et qui étaient des enquêtes normales. Alors, s'il vous plaît, de ce côté-là, n'essayons pas de commencer à y aller d'insinuations. Je suis très surpris, M. le Président, de l'autre aspect des questions posées par le chef de l'Opposition, qui se réfèrent au rapport du Vérificateur général. Il me semble très manifestement que, de fait, je n'ai pas à me prononcer sur ce qui est contenu dans sa question, et il me semble que, très manifestement, le chef de l'Opposition n'a pas compris ou encore n'a pas retenu une partie de la mise au point que je viens de faire, concernant le quatrième et dernier volet, qui regroupe les allégations diverses reliées à des malversations possibles ayant pu avoir eu cours au service des réparations majeures de la Société d'habitation du Québec. Sur ce point-là, qui est très manifestement soulevé par le chef de l'Opposition, j'ai dit que l'enquête policière suivait son cours normal. Quand elle sera terminée, si des accusations doivent être portées, elles seront portées. Pour ce qui est des questions administratives, je ne pense pas que c'est comme Procureur général que je dois répondre dans ce sens.

M. Ryan: En vertu de l'article 96, M. le Président, je voudrais signaler que le ministre a mal compris ce que j'ai dit. Je lui dis et je lui répète que la méthode qu'il entend continuer à suivre va produire des résultats aussi incomplets et insatisfaisants que ceux de ce matin.

M. Bédard: M. le Président, je suis très surpris des remarques du chef de l'Opposition, parce que la méthode que nous avons suivie est exactement celle que nous avons suivie, lorsqu'il s'agissait d'un cas qui est bien connu par l'Opposition, à savoir celui d'un ancien ministre libéral. L'enquête avait été faite selon les mêmes règles, avait duré au-delà d'un an, un an et demi, en est arrivée aux conclusions qui sont les mêmes que celles auxquelles j'arrive aujourd'hui et, à ce moment-là, je n'avais jamais entendu des remarques dans le sens de celles qui sont formulées ce matin par l'Opposition.

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! Sur une question de privilège, M. le chef de l'Opposition.

M. Ryan: Question de privilège, M. le Président, il n'y a jamais eu 10 pages du rapport du vérificateur des comptes sur les actes sur lesquels...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

M. le ministre de la Justice.

M. Bédard: M. le Président, je m'excuse, j'ai été distrait par quelqu'un et je n'ai pas entendu la dernière remarque du chef de l'Opposition. J'aime bien que rien ne soit laissé en blanc. Je veux répondre à toutes les questions. Alors, est-ce que le chef de l'Opposition pourrait répéter sa dernière remarque? (11 h 40)

M. Ryan: C'est qu'il y a maldonne entre nous. Nous avons demandé une enquête publique sur les nombreuses irrégularités qui ont entouré le fonctionnement... Maintenant, ce que je vous ai répondu, c'est que nous appuyons notre demande, entre autres, sur un rapport du vérificateur des comptes qui consacrait une dizaine de pages à ces questions. Ce que je vous ai dit, c'est que le rapport du vérificateur des comptes, à ma connaissance, n'a jamais consacré un paragraphe aux actes auxquels vous avez fait allusion.

Le Président: M. le ministre de la Justice.

M. Bédard: M. le Président, je n'ai pas à rendre compte aujourd'hui des résultats d'une enquête publique qui n'a pas eu lieu et je n'ai pas à me prononcer sur l'opportunité d'une enquête publique ou pas. Du côté de l'Opposition, on a demandé qu'une enquête policière soit faite, je pense que c'était normal.

Des voix: Question de règlement.

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît!

M. le ministre de la Justice.

M. Bédard: Si cela n'a pas été demandé par l'Opposition, je suis bien prêt à retirer mes paroles là-dessus. C'est suite à des allégations qui ont été faites - je l'ai dit; il s'agit de revenir à la déclaration que j'ai faite - suite à des questions posées en cette Chambre ou en dehors de cette Chambre qu'il était nécessaire de faire, je pense, une enquête policière. Cette enquête policière a été faite; elle doit se continuer sur d'autres volets. En temps et lieu, quand elle sera complètement terminée, c'est avec plaisir que j'en donnerai le résultat.

M. Ciaccia: Question de privilège, M. le Président.

Le Président: M. le député de Mont-Royal, sur une question de privilège.

M. Ciaccia: M. le Président, le ministre a induit cette Chambre en erreur en indiquant que l'Opposition avait demandé une

enquête policière.

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

J'ai compris que le ministre avait retiré cette allégation.

Motions non annoncées.

M. le ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme.

Félicitations à M. Jean-Claude

Lebel et remerciements à M.

Guy Coulombe

M. Biron: M. le Président, je voudrais faire motion que cette Assemblée félicite et offre ses meilleurs voeux de succès à M. Jean-Claude Lebel pour son élection à la présidence de la Société générale de financement et remercie l'ancien président, M. Guy Coulombe, pour les excellents services rendus à cette société d'État québécoise.

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement à la présentation de la motion? Consentement.

M. le ministre.

M. Rodrigue Biron

M. Biron: M. le Président, je voudrais tout simplement prendre quelques minutes de cette Chambre pour rappeler qu'à l'arrivée de M. Coulombe à la Société générale de financement, au début de 1978, la Société générale de financement contrôlait 8200 emplois. Aujourd'hui, à la fin de 1981, on doit dire 27 000. À l'époque, il y avait 316 000 000 $ de chiffre de ventes pour la Société générale de financement; aujourd'hui, la Société générale de financement et ses filiales contrôlent 2 500 000 000 $ de ventes. À l'époque, la Société générale de financement faisait 14 000 000 $ de déficit, en 1977; cette année, à la fin de 1981, incluant toutes les entreprises contrôlées par la SGF, nous aurons un profit de 100 000 000 $. M. le Président, veuillez croire que je suis très heureux de la performance de la société et je suis heureux que M. Lebel ait accepté de succéder à M. Coulombe comme président de la Société générale de financement.

Je dois, tout simplement, vous rappeler qu'en 1978, lorsque M. Coulombe est arrivé, le gouvernement a donné un nouveau mandat à la SGF. Ce mandat comportait, premièrement ceci: en continuant d'assumer la gestion d'un groupe industriel, la SGF devait concentrer ses activités dans des entreprises de taille significative dans certains secteurs jugés prioritaires pour le développement économique du Québec. Les deux secteurs prioritaires définis en 1978 furent ceux de la forêt et de l'électromécanique.

Deuxièmement, dans la planification de ce développement, la SGF devait agir de préférence avec des partenaires.

Troisièmement, le nouveau mandat de la SGF faisait une place prépondérante à l'objectif de rentabilité puisqu'il était spécifié désormais que le développement de la SGF doit se faire conformément à des conditions de rentabilité normale. Or, il y a eu beaucoup de gestes de posés. La SGF a collaboré avec d'autres entreprises privées, en particulier, le groupe Normick-Perron dans Donohue, avec Gulf et Union Carbide dans Pétromont, avec la Banque nationale, la Caisse de dépôt et la Laurentienne dans Novacap Inc. La SGF, depuis ce temps, a vendu ses intérêts dans Tricot Lasalle de Plessisville, de même que 35% de ses intérêts dans Marine Industrie vendus à une société française, Alsthom-Atlantique. M. le Président, avec la venue...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Levesque (Bonaventure): Question de règlement, M. le Président.

Le Président: S'il vous plaît! M. le leader de l'Opposition, sur une question de règlement.

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, nous avons donné notre consentement au ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme afin que nous puissions ensemble féliciter M. Lebel de sa nomination. Il n'a jamais été question de M. Lebel encore. Est-ce qu'on ne pourrait pas entendre parler de M. Lebel?

M. Biron: M. le Président, je comprends que le Parti libéral n'est pas trop intéressé au développement économique, mais, nous autres, cela nous intéresse.

M. Lebel est connu. Il a été un grand serviteur...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Biron: ... de l'État québécois. M. Lebel a été secrétaire général associé du Conseil exécutif pendant plusieurs années et secrétaire du Conseil du trésor pendant cinq ans avant de quitter le gouvernement du Québec, depuis un peu plus d'un an maintenant, pour être vice-président de la Banque nationale du Canada. Je suis très heureux de le voir revenu encore une fois dans le giron des activités économiques du Québec.

Je termine en disant que, de 1978 à 1981...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! M. Biron: De 1978 à 1981, la Société

générale de financement est passée d'une phase de redressement amorcée dans l'incertitude, qui caractérise les entreprises en difficulté, à une étape de développement stratégique. En consolidant le groupe et en déterminant ses grands axes de croissance, l'équipe réunie par M. Coulombe a fait de la SGF un réel outil de restructuration industrielle qui répond aux grands objectifs qu'avait fixés le gouvernement lorsqu'il créa cette société en 1962. Maintenant, en cette période où les politiques industrielles se heurtent à une situation économique difficile, les cadres et les travailleurs de la SGF prouvent qu'il est possible de réussir à bâtir le Québec. Merci, M. le Président.

Le Président: M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Reed Scowen

M. Scowen: M. le Président, je veux tout d'abord offrir, au nom de mes collègues de l'Opposition libérale, mes meilleurs voeux à M. Lebel dans ses nouvelles fonctions. Je veux aussi profiter de cette occasion pour vous parler brièvement de la Société générale de financement et de son histoire, et pour poser quelques questions à M. Lebel, auxquelles, j'espère, il répondra publiquement dans les plus brefs délais, parce qu'il y a des questions importantes, en ce moment, à l'intérieur de la SGF, qui sont préoccupantes pour toute la population.

Je veux rappeler tout d'abord que la SGF est une création du gouvernement libéral. Elle a été conçue et réalisée sous le régime de M. Lesage et elle est devenue, j'en conviens, l'un des éléments les plus importants dans le développement économique du Québec. Quand le Parti québécois est arrivé au pouvoir, il y avait quand même une certaine incohérence dans le rôle de la SGF que l'Opposition libérale, en 1979, a portée à l'attention du gouvernement. L'actuel ministre de l'Industrie et du Commerce, qui était à l'époque dans une autre formation politique, avait apporté les mêmes réserves quant au comportement de la SGF et quant à son incohérence, dans le sens qu'on ne savait pas exactement quel était son mandat.

Par conséquent, face à une crise financière dans la société en 1979, la faillite imminente de Marine Industrie, nous avons obligé le gouvernement - et je dois admettre et rappeler que c'était avec la collaboration de M. Coulombe, qui était, à l'époque, le président - et la Société générale de financement à préciser son rôle, son mandat. Je peux vous dire que je pense sincèrement que tout ce qui a été fait à ce moment, à la fin de novembre 1978 ou 1979, si ma mémoire est bonne, était une étape très importante dans le développement de nos sociétés d'État. Pour la première fois, à ma connaissance - et c'était aussi, malheureusement, la dernière fois - on a réussi à sortir d'une société d'État un bilan concret de son mandat et de ses plans pour l'avenir d'une façon cohérente, et cela a été présenté au cours d'un débat public, en commission parlementaire, et étudié par tout le monde.

Je veux féliciter M. Coulombe - je l'ai déjà fait à plusieurs reprises - pour cette démarche que l'Opposition libérale avait obligé le gouvernement à faire et qui avait reçu une réponse très positive. Si vous vous souvenez, à cette époque, il était convenu que la Société générale de financement se limiterait dorénavant à trois secteurs principaux: premièrement, le secteur des pâtes et papiers, qui était déjà bien installé; deuxièmement, le secteur de l'hydroélectricité, qui était installé par l'entreprise de Marine Industrie et de deux ou trois autres filiales et, troisièmement, la pétrochimie.

Nous avons par la suite - vous vous en souviendrez, M. le Président - approuvé la création de Pétromont. De nouveau, M. Coulombe est venu devant l'Assemblée nationale, devant une commission parlementaire, et il a présenté un programme pour l'achat ou la création, si vous préférez, de cette filiale Pétromont en collaboration avec deux industries du secteur privé, (11 h 50)

Alors, je soumets tout cela, M. le Président, à votre attention, parce que c'est la seule société d'État, jusqu'à présent, qui ait accepté de définir comme il le faut les normes de comportement dans un débat public. Quand on a vu, l'hiver passé, le comportement de SOQUIP et SOQUEM dans ce sens, il a été exceptionnellement malheureux de voir comment ces autres sociétés se comportent aujourd'hui comparativement au fondement de la SGF.

En terminant, M. le Président, je veux poser une question à M. Lebel; je ne sais pas s'il nous écoute aujourd'hui. C'est la question la plus importante à laquelle la SGF soit obligée de faire face. Cet été, au mois d'août, elle a acheté à peu près 22% des actions de Domtar pour une somme, si ma mémoire est bonne, d'environ 140 000 000 $. Depuis ce temps, la valeur de ces actions a baissé d'à peu près 50 000 000 $. Nous avons perdu 50 000 000 $ jusqu'à présent, en cinq mois, dans cet achat. On ne peut pas blâmer le marché parce que le marché n'a pas baissé même du tiers.

Mais il y a une question plus importante, M. le Président. À l'époque, le gouvernement a promis à la SGF de lui donner les fonds nécessaires pour paver ces actions. C'est bien clair que ces fonds auraient dû être fournis à la SGF par l'entremise d'un projet de loi par lequel nous aurions eu le privilège, le droit, de regarder

de près cet achat de Domtar. Si je comprends bien la situation maintenant, le gouvernement refuse de fournir ces 140 000 000 $ à la société. C'est un achat qui a été financé à court terme par les banques, et le gouvernement a dû payer 16% ou 17% d'intérêt sur ce montant, ce qui touche directement et profondément les profits de la SGF.

On aimerait savoir de M. Lebel, immédiatement, comment il propose de financer à long terme cet achat des actions de Domtar. Deuxièmement, on voit qu'il nous assure que cela ne sera pas fait par l'entremise de la Caisse de dépôt et placement du Québec directement ou indirectement. La Caisse de dépôt et placement du Québec a le droit de garder un maximum de 30% des actions dans une société privée. Elle a déjà à peu près 20% de Domtar. Si elle essaie d'arranger le financement de cette société par l'entremise d'un prêt ou de fonds fournis par la société d'État à la Caisse de dépôt, c'est clair que cela sera un détournement de fonds important.

Alors, en terminant, M. le Président, je remercie le ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme d'avoir ouvert cette porte importante, ce matin, dans son discours sur la Société générale de financement. J'espère que M. Lebel, dans les plus brefs délais, va répondre à la question publiquement pour démontrer à la population ce qui est arrivé dans cet achat de Domtar et comment elle va payer. Les Québécois ont le droit, après avoir payé 140 000 000 $ pour cette société, de savoir exactement ce qu'ils ont acheté et comment cela sera financé. Merci.

Une voix: Très bien.

Le Président: M. le ministre des Finances.

M. Jacques Parizeau

M. Parizeau: M. le Président, je voudrais m'associer à ceux qui m'ont précédé pour offrir mes meilleurs voeux à M. Lebel dans la nouvelle tâche qu'il entreprend. J'ai eu l'occasion de travailler avec M. Lebel pendant au-delà de quatre ans et demi. J'ai été amené à constater à quel point, comme meneur d'hommes, comme administrateur, M. Lebel a des qualités de tout premier ordre. Que nous ayons réussi à l'amener à quitter la Banque nationale où il faisait une carrière prometteuse, pour l'amener maintenant à la direction de la SGF, augure fort bien, je pense, pour les chances de développement de la SGF dans les années qui viennent. Donc, je lui offre mes meilleurs voeux et j'ajouterai simplement pour terminer que la plupart des questions posées par le député de

Notre-Dame-de-Grâce quant à la SGF ou à la Domtar, s'il les posait à la période des questions, auraient des réponses. Merci, M. le Président.

Le Président: Merci. M. le député d'Outremont, sur la même motion?

M. Fortier: Oui.

Le Président: M. le député d'Outremont.

M. Pierre-C. Fortier

M. Fortier: M. le Président, il me fait plaisir de m'associer aux félicitations d'usage à M. Lebel. Il est intéressant de noter d'ailleurs qu'il s'agit d'un grand serviteur de l'État, comme M. Coulombe, d'ailleurs, qui a servi au Conseil exécutif et à la Banque nationale. J'aimerais porter à l'attention du ministre que la Banque nationale est une institution financière du Québec, au cas où il ne le saurait pas.

Pour le bénéfice de tous ceux qui ne connaissent pas intimement M. Lebel, j'aurais une question à poser, une demande à formuler au ministre. Est-ce qu'il pourrait nous distribuer les notes biographiques de M. Lebel, pour que nous puissions prendre connaissance de toute l'expérience qu'il a, de son expérience passée et de l'expérience qu'il a acquise soit dans le domaine politique ou dans le domaine privé?

J'aimerais également poser une deuxième question à cet égard, qui a trait aux finances de la SGF et compte tenu du fait que le ministre des Finances nous avait dit que les déclarations de dividendes ne touchaient pas uniquement Hydro-Québec mais qu'elles touchaient toutes les sociétés d'État, y inclus la SGF. J'aimerais savoir si le ministre pourrait nous dire si la SGF sera en mesure de déclarer des dividendes cette année ou si elle sera en mesure d'en déclarer l'année prochaine. Je vous remercie.

Le Président: Est-ce que la motion du ministre sera adoptée?

Des voix: Adopté. Le Président: Adopté.

M. Lalonde: M. le Président, j'aurais une motion non annoncée.

Le Président: M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: Je suis convaincu que le parti ministériel va offrir la même collaboration que celle que nous avons offerte à la motion du ministre. "Que cette Assemblée nationale exprime sa vive

inquiétude devant la méthode profondément dangereuse, même si d'apparence puérile et ridicule, avec laquelle les députés et ministres péquistes ont, par écrit, donné leur soumission au chef et à ses pensées."

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement? Il y a absence de consentement.

Une nouvelle motion non annoncée de la part du chef de l'Opposition.

Demande de retrait d'une

ordonnance de la Commission

canadienne du blé

M. Claude Ryan

M. Ryan: M. le Président, je suis sûr que celle-ci aura un meilleur sort. Le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation a fait état hier de la situation créée par la décision de la Commission canadienne du blé d'exiger des consommateurs québécois, en matière de grain, le prix à l'exportation.

À la lumière de la situation que cette décision crée pour les producteurs et pour l'agriculture du Québec, je voudrais proposer à l'attention de cette Chambre la motion suivante: "La décision de la Commission canadienne du blé de vendre aux agriculteurs québécois le blé, l'avoine et l'orge nécessaires à l'alimentation des troupeaux de ferme au prix de l'exportation, et de mettre ainsi fin au régime d'équité des prix établi en 1974 est hautement discriminatoire pour l'économie agricole québécoise. En décrétant qu'à compter du 21 décembre 1981 les grains de provende destinés au Québec et produits dans l'Ouest seraient soumis à cet embargo, la Commission canadienne du blé obligera des éleveurs et des producteurs agricoles québécois à payer de 20 $ à 30 $ la tonne de plus pour nourrir leurs animaux au Québec que dans les provinces de l'Ouest. Les coûts accrus qui en découleront pour l'agriculture québécoise menacent d'entraver gravement son développement. "Vu l'urgence de la situation et devant les conséquences désastreuses et inacceptables qu'aura cette politique sur l'agriculture du Québec, l'Assemblée nationale du Québec demande au gouvernement fédéral le retrait immédiat de cette ordonnance de la Commission canadienne du blé."

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement à la présentation de la motion?

Des voix: Consentement.

Le Président: Consentement. M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.

M. Ryan: Excusez, M. le Président...

Le Président: M. le chef de l'Opposition.

M. Ryan: S'il y a consentement, M. le ministre va me permettre d'expliquer ma motion.

Le Président: D'accord. M. le chef de l'Opposition.

M. Ryan: Merci. Je serai très bref, M. le Président, parce que j'ai présenté ma motion dans un esprit constructif et en vue de servir les intérêts de l'agriculture du Québec comme notre parti le fait toujours lorsqu'il y a une cause claire et nette à défendre. (12 heures)

En vertu des nouveaux prix décrétés par la Commission canadienne du blé, qui seront les prix de l'exportation, les producteurs québécois devront payer pour l'orge 140 $ la tonne au lieu de 110 $, c'est-à-dire une augmentation de 30 $ du coup; pour l'avoine, 180 $ au lieu de 99 $ la tonne; pour le blé, 145 $ au lieu de 127 $ la tonne. Ceci annule le régime d'équité des prix qui avait été établi en 1974 et qui donnait aux producteurs agricoles du Québec l'accès aux grains de l'Ouest au même prix que les producteurs de l'Ouest. Ce régime nous a permis de développer au Québec certaines productions sans sol dans lesquelles nous étions faibles jusque-là, en particulier, dans le domaine du porc. Nous savons que le Québec a connu une progression spectaculaire depuis une dizaine d'années; dans le domaine du poulet, nous avons aussi connu des développements considérables.

Or, il arrive que, si les prix décrétés par la Commission canadienne du blé allaient s'appliquer à compter du 21 décembre, il en résulterait pour les producteurs du Québec une hausse de coûts qu'un journaliste du Soleil établissait l'autre jour à 3000 $ par année en moyenne. Je ne peux pas l'affirmer parce que nous n'avons pas eu le temps de faire tous les calculs nécessaires à cette fin, mais on allait jusqu'à parler de coûts qui pourraient s'élever à quelque 150 000 000 $ de plus pour l'ensemble de l'agriculture québécoise.

Inutile de dire que notre agriculture québécoise dépend, dans une très grande mesure, des grains en provenance de l'Ouest pour les producteurs de porc, en particulier, et je ne veux pas ouvrir aujourd'hui le débat sur la politique du gouvernement québécois en cette matière parce que je veux que nous adoptions cette motion pour les producteurs de porc qui sont déjà dans une situation désastreuse. Cette nouvelle contrainte, qui découlerait de la mise en oeuvre de la décision de la Commission canadienne du blé,

risquerait d'être catastrophique.

En plus, je voudrais évoquer, pour terminer, l'attitude qui a été prise par l'Association professionnelle des meuniers du Québec, laquelle, dans une déclaration qui remonte au 10 décembre et qui a été adressée aux autorités fédérales, déclarait ceci: "La décision de la Commission canadienne du blé de vendre le blé, l'avoine et l'orge aux agriculteurs du Québec au prix de l'exportation à compter du 21 décembre prochain est la plus discriminatoire jamais prise par un organisme gouvernemental au détriment de l'économie agricole." Si je ne la cite pas au complet, ce n'est pas parce que je veux en cacher des passages, mais seulement parce que je veux épargner le temps de la Chambre. "En éprouvant ce mépris d'équité à l'encontre du programme de commercialisation des céréales à l'intérieur du Canada, qui fut établi à la satisfaction générale en 1974, le gouvernement fédéral détruit ce qu'il avait construit et consacre de nouveau une injustice qui avait duré plus de trente ans et ce, juste au moment où on va procéder à la fermeture du canal Saint-Laurent." Je cite toujours le document de l'Association des meuniers du Québec: "Nous demandons le retrait immédiat et sans aucune autre considération de ce décret de la Commission canadienne du blé et la reconnaissance totale de la politique d'équité établie en 1974."

Tel est aussi l'objet de la motion que je présente ce matin et j'ose souhaiter que toute la Chambre se fera un plaisir d'y souscrire afin que les autorités fédérales soient saisies dans les meilleurs délais de la volonté des législateurs québécois dans cette question qui intéresse au plus haut point l'avenir de secteurs vitaux de notre agriculture.

Le Président: M. le ministre. M. Jean Garon

M. Garon: M. le Président, je n'ai pas eu le texte exact de la motion du député d'Argenteuil et chef de l'Opposition libérale - j'aurais aimé l'avoir - mais j'ai vu qu'il n'était pas d'accord avec la décision de la Commission canadienne du blé. Je pense que c'est ce à quoi il se référait dans sa motion, mais je n'ai pas vu le texte. Je voulais, hier, présenter une motion sur les terres de Mirabel demandant son consentement et je lui avais fait parvenir le texte d'avance par délicatesse; j'aurais aussi aimé avoir son texte à l'avance.

Une voix: On peut peut-être suspendre quelques minutes, M. le Président.

M. Garon: Non, non.

Une voix: II a le droit de réfléchir.

M. Garon: M. le Président, j'aimerais amender la résolution, si on me le permet, pour faire d'une pierre deux coups.

Étant donné que la décision récente de la Commission canadienne du blé vient enlever complètement l'accès au marché libre de l'Ouest à partir de maintenant. En mars 1979, on avait déjà commencé à entamer l'équité qui avait été établie en 1974 et, à ce moment, on avait restreint, par une décision de la Commission canadienne du blé de mars 1979 qui s'était appliquée à partir du 1er août 1979, on a commencé à restreindre déjà l'accès au marché libre de l'Ouest en pénalisant les agriculteurs de l'Ouest qui vendaient sur le marché libre dans l'Ouest, en déduisant leur production sur le marché libre du quota qu'ils avaient auprès de la Commission canadienne du blé, de sorte que je pense, M. le Président, si on veut vraiment rétablir l'équité totale, qu'il faudrait revenir à la politique de 1974 plutôt qu'à celle qui était en vigueur avant la récente décision de la Commission canadienne du blé. À ce moment, dans la motion, on pourrait dire que nous rejetons la décision récente de la Commission canadienne du blé et également celle du mois de mars 1979 qui s'applique depuis le 1er août 1979, pour en venir à la résolution de 1974.

Si le chef du Parti libéral y consent, je pense qu'à ce moment nous rétablirions la situation exactement comme elle devrait l'être, c'est-à-dire un total accès au marché libre de l'Ouest à partir de 1974, un véritable marché commun sans aucune barrière dans le Canada. À ce moment, je pense, M. le Président, qu'on sera d'accord pour dire qu'il y aura véritablement une libre circulation des biens du Canada. Je suis content de voir que le député d'Argenteuil est allé par-dessus les sarcasmes de son caucus d'hier qui me disait que je parlais du fédéral, en voulant dire que c'était toujours la faute du fédéral. Je suis content de voir aujourd'hui qu'il a passé par-dessus l'humeur inutile de ses troupes pour vérifier auprès des véritables agriculteurs - ce qu'auraient dû faire le député de Beauce-Sud - les meuniers, l'Union des producteurs agricoles, la Coopérative fédérée, pour constater que ce que je disais était vrai.

Il faut que ce soit "véritablement vrai" ce que j'ai dit hier, M. le Président, puisque aujourd'hui le député d'Argenteuil, par sa motion, me donne raison en condamnant la politique fédérale. J'aimerais dire aussi que, par ses paroles, il a un peu condamné ce qu'a dit le député de Beauce-Sud, puisqu'il a attribué l'augmentation de la production du porc au Québec à la nouvelle politique de 1974, alors que le député de Beauce-Sud disait hier: Le ministre de l'Agriculture a

commandé du porc, maintenant que la marchandise est livrée, qu'il paie, alors que le député d'Argenteuil vient de dire: Aujourd'hui, parce qu'il y eu a une équité dans la circulation des grains en 1974 au Canada, cela a favorisé l'augmentation de la production du porc. Je suis d'accord pour dire que ce n'est pas la seule mesure. Mais c'est vrai, je pense, que cela a contribué à ce qu'il y ait une augmentation de la production du porc au Québec.

Comme le gouvernement du Parti québécois est plus rusé que ça, nous n'avons pas couru de risques, M. le Président, et c'est pour ça que, dès 1978, le gouvernement du Parti québécois a mis en place une politique d'autosuffisance dans le domaine des céréales. Il est évident qu'on n'arrivera pas à l'autosuffisance d'un coup sec, dans le domaine des céréales, M. le Président, mais nous avons mis en place des équipements considérables, 19 centres régionaux d'entreposage des grains, plus de 8000 silos à la ferme pour l'entreposage des grains pour augmenter notre production de grains au Québec, au cas justement où les politiques fédérales seraient modifiées, surtout la politique du "crow's nest pass", la passe du nid du corbeau, que les gens de l'Ouest demandent de changer depuis des années et on sent le gouvernement fédéral flancher sur la politique du nid du corbeau.

Aujourd'hui, nous essayons de faire de plus en plus de grains au Québec pour justement être beaucoup moins dépendant des grains de l'Ouest, pour pouvoir produire ce qu'on anticipe d'ici 1990, c'est-à-dire environ 75% des grains consommés au Québec.

Je vais terminer là-dessus, M. le Président, et je souhaite que le député d'Argenteuil accepte mon amendement pour qu'on revienne avant 1974, pour qu'on condamne en même temps la politique qui a été établie en mars 1979 pour s'appliquer au 1er août 1979, pour qu'on en vienne véritablement à la politique de l'équité de 1974. (12 h 10)

Par la même occasion, si le député d'Argenteuil voulait que je présente la motion non annoncée dont je vous parle depuis quelques jours pour appuyer les cultivateurs de Mirabel qui ont été expropriés inutilement en 1968. À ce moment-là je pourrais présenter ma proposition. On serait d'accord, voyez-vous, M. le Président, au sujet des terres de Mirabel, avec la ville de Mirabel, la fédération régionale des Laurentides de l'Union des producteurs agricoles, l'Association des jeunes agriculteurs de Deux-Montagnes et Argenteuil...

Le Président: M. le ministre, est-ce que la présidence pourrait avoir une copie de votre amendement, s'il vous plaît?

M. le chef de l'Opposition.

M. Ryan: M. le Président, pour sauver du temps à la Chambre, je voudrais faire une proposition au ministre au sujet de son amendement, qui nous permettrait peut-être de nous trouver d'accord et, à ce moment-là, peut-être qu'on pourrait continuer la discussion de fond. Si on ajoutait tout simplement ceci à la fin du texte que j'ai présenté: L'Assemblée nationale du Québec demande au gouvernement fédéral le retrait immédiat de cette ordonnance de la Commission canadienne du blé et le retour à la politique d'équité des prix institué en 1974.

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement à l'amendement tel que stipulé par le chef de l'Opposition?

Des voix: Adopté.

Le Président: Alors, l'amendement est reçu. Il y a consentement.

M. Mathieu: M. le Président.

Le Président: M. le député de Beauce-Sud.

M. Mathieu: Oui, merci M. le Président.

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

Je comprends qu'il y a consentement que le chef de l'Opposition modifie sa motion principale telle que stipulé il y a une minute. Maintenant, il n'y a pas d'amendement, nous sommes sur une nouvelle motion principale.

M. le député de Beauce-Sud.

M. Hermann Mathieu

M. Mathieu: Merci, M. le Président, je vais intervenir très brièvement, malgré que tout à l'heure le ministre de l'Agriculture ait fait une certaine provocation quand il a traité de mes propos d'hier.

Avant d'entrer sur le fond du débat, vous me permettrez sans doute, M. le Président, de faire une rectification. C'est que l'on sait tous que l'augmentation de la production d'une manière injustifiée dans le domaine du porc existe depuis 1977. Il n'y avait pas de surproduction avant cette année-là. Alors, hier, quand je faisais référence à une surproduction, je voulais dire que c'est à compter de 1977 que la situation est devenue inquiétante.

Ces choses étant dites, M. le Président. Je désire appuyer la motion du chef de l'Opposition et je désire également féliciter le chef de l'Opposition qui est toujours là pour prendre position quand il y a des problèmes dans le domaine agricole.

Je voudrais mentionner qu'en réponse à une des mes questions, le 10 décembre, page 1166 des Débats, le ministre de l'Agriculture disait ceci: "Concernant la politique des grains de provende, le gouvernement fédéral a refusé la position du Québec". Plus loin: "Le gouvernement libéral, à Ottawa, n'a pas voulu accéder aux demandes du monde agricole dans l'ensemble du Québec. Aller répéter la même chose à une conférence fédérale-provinciale..." M. le Président, c'est justement quand je reprochais au ministre de l'Agriculture sa non-participation aux conférences fédérales-provinciales, à la dernière conférence, celle de la semaine dernière, que le ministre a dû jugé non importante. C'était juste pour aller chercher des statistiques, il savait lire et, surtout, chose très importante, il économisait un voyage à Ottawa... Mais à cette conférence, M. le Président, le problème de la politique céréalière du Québec a été inséré à l'ordre du jour à la demande de Terre-Neuve. Si le ministre de l'Agriculture du Québec avait été présent à cette conférence, il aurait pu faire part des revendications et des intérêts des producteurs agricoles. Il aurait du même coup renforcé la position du ministre fédéral de l'Agriculture, et ce dernier aurait eu un pouvoir de négociation beaucoup plus fort auprès du président de la Commission canadienne du blé. M. le Président, avez-vous déjà vu un syndicat qui refuse de négocier pour obtenir quelque chose?

Une voix: Non, jamais.

M. Mathieu: Quand on veut obtenir quelque chose, il faut être présent et négocier; c'est cela qui est le grand défaut du gouvernement actuel.

Ce que veux demander, en conclusion, c'est l'appui de tous à cette motion. Surtout, j'insiste pour demander l'appui de tous les députés fédéraux du Québec à Ottawa sur cette motion, sans exception. C'est une question vitale pour l'agriculture du Québec, on doit tout faire pour protéger nos agriculteurs. Merci beaucoup.

Le Président: Est-ce que la motion du chef de l'Opposition sera adoptée?

M. Houde: M. le Président, je n'ai pas fini.

Le Président: M. le député de Berthier, excusez-moi.

M. Albert Houde

M. Houde: Merci, M. le Président. Je suis complètement en désaccord avec la décision prise par la Commission canadienne du blé au détriment des agriculteurs du Québec.

Des voix: Adopté.

M. Houde: Pourquoi est-ce que vous êtes pressés tant que ça, les amis d'en face, lorsqu'on parle d'agriculture...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît!

M. le député de Berthier, vous avez la parole.

M. Houde: Merci, M. le Président. Plusieurs des députés d'en face ne connaissent rien à l'agriculture. Je demanderais au ministre de l'Agriculture qu'il leur en dise un mot. L'agriculture est importante au Québec. On sait que le ministre actuel de l'Agriculture crie à grand renfort: II faut s'autosuffire, il faut s'autosuffire. Écoutez-le donc de temps en temps. Laissez-le parler.

Cela va coûter quelque 1000 $ par agriculteur. On est conscient du problème. Entre autres, dans le porc, c'est toujours désastreux pour le Québec et, pour cela, ça va être catastrophique. Dans cette Chambre et dans des questions avec débat, on entend notre ministre de l'Agriculture crier que ça va bien. Je demanderais plutôt que le même ministre parle lorsque c'est temps de parler et soit présent aux rencontres fédérales-provinciales, pas comme il nous a dit la semaine dernière: On ira quand on pensera que ce sera utile d'y aller. Je regrette. Je dis que, lorsqu'il y a des consultations, il faut toujours être présent, M. le ministre.

Une voix: C'est vrai.

M. Houde: En tant que député libéral provincial de l'Opposition ici, à Québec, je suis capable de le reconnaître quand le gouvernement fédéral fait une chose qui n'est pas correcte aux dépens de nos agriculteurs du Québec. Je n'accepte pas que le ministre de l'Agriculture du Québec - je l'entendais au congrès de l'UPA, la semaine dernière, au Château Frontenac - pendant presque une heure, ne dise jamais un mot du fédéral, qu'il est bon. À la même occasion, le ministre de l'Agriculture, M. Eugene Whelan, et M. Ouellet ont dit qu'il y avait des choses correctes qui étaient faites par Québec dans l'agriculture. Je lève mon chapeau, M. le ministre Garon, excusez, M. le ministre de Lévis.

Nous demandons immédiatement que cette décision soit retirée dans le plus bref délai afin qu'elle prenne... D'abord, elle est censée entrer en vigueur le 21 décembre, que je sache, c'est aujourd'hui le 17 décembre. Alors, M. le ministre, déplacez-vous les pieds; allez-y en avion s'il le faut... (12 h 20)

Des voix: Bravo!

Une voix: C'est ça, Albert!

M. Houde: Pour le bien des agriculteurs, j'accepterai, M. le ministre, que vous preniez l'avion, je ne dirai pas un mot. Pour nous, les Québécois, je suis prêt à accepter la proposition faite dans ce sens par mon chef, M. Claude Ryan. Merci beaucoup, M. le Président.

Des voix: Bravo!

Le Président: Votre droit de réplique, M. le chef de l'Opposition.

M. Claude Ryan (réplique)

M. Ryan: Je serai très bref, M. le Président. Je veux d'abord rétablir un fait. Le ministre a insinué tantôt que j'aurais agi en passant par-dessus la tête de mes collègues qui forment le sous-comité de la mission agricole dans notre groupe parlementaire. Je veux l'assurer que j'ai agi à la suggestion de plusieurs d'entre eux, en particulier, du porte-parole principal, M. le député de Beauce-Sud, et que nous l'avons rédigée ensemble. M. le député de Beauce-Sud, dont le coeur est large comme le monde, tous le reconnaîtront, dans cette Chambre, est entièrement acquis à la défense des intérêts des producteurs agricoles.

Je voudrais signaler seulement un petit fait. Je crois que I'excursus, les propos du ministre sur Mirabel n'étaient pas pertinents, si j'ai bien compris, et ne se rattachaient pas à la motion. Il y a seulement un petit point qui se rattachait peut-être à la motion. Il a parlé de la construction de silos, ces dernières années, au Québec. II aurait pu ajouter - mais c'est peut-être le temps qui lui a fait défaut, il voulait nous épargner du temps - que ce programme de construction de silos a été possible grâce à des subventions fédérales importantes.

Je voudrais lui rappeler aussi que dans la région de Mirabel, à cause de décisions pas mal autoritaires de sa part, les agriculteurs de cette région n'ont pas eu accès à ces subventions parce que tout est gelé depuis un an et demi ou deux. C'est absolument vrai, ils m'en ont parlé eux-mêmes.

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! Je voudrais inviter le chef de l'Opposition, puisque j'ai fait de même envers le ministre, à ne pas parler de la motion sur Mirabel, parce qu'elle n'a pas été présentée.

M. le chef de l'Opposition.

M. Garon: Question de privilège, M. le Président.

Le Président: M. le ministre, sur une question de privilège.

M. Garon: Ce que le député d'Argenteuil dit est faux puisque les programmes ont été remis en application cet été. Non seulement ça, mais les subventions qui n'avaient pas été payées dans l'intervalle où ils n'étaient pas en application ont été remboursées aux agriculteurs. De sorte qu'aucun agriculteur...

Le Président: M. le chef de l'Opposition.

M. Ryan: Je veux simplement signaler que, pendant un an et demi, ils ont été privés de ces subventions et beaucoup n'ont pas fait les constructions qu'ils auraient faites à cause de cela.

Juste pour terminer, je veux me réjouir parce je pense que, ce matin, nous faisons une constatation formidable en Chambre. Pour la première fois de sa vie, le ministre de l'Agriculture convient qu'il y a au moins une politique fédérale qui était bonne, celle de 1974 sur le prix des grains. J'espère qu'il en découvrira d'autres au cours des prochaines années. Je suis bien content du prix qu'il nous mentionne.

Le Président: Est-ce que la motion du chef de l'Opposition sera adoptée?

Des voix: Adopté. Le Président: Adopté.

M. Charron: Est-ce qu'on demande le vote...

Le Président: Excusez-moi, je l'ai déclarée adoptée avant que la demande du député de Portneuf me soit adressée. Je comprends que le député de Beauce-Sud a une motion non annoncée à présenter. Si on veut un vote enregistré, on pourra l'avoir sur la prochaine motion. À moins qu'il n'y ait un consentement unanime pour que le mot "adopté", que j'ai bel et bien dit...

Des voix: Adopté.

Le Président: Adopté?

M. le député de Beauce-Sud.

M. Mathieu: Merci, M. le Président. Avant de savoir s'il y a consentement ou non, il me semble qu'il faut connaître la teneur de la motion. La motion concerne la politique laitière du gouvernement fédéral et est très importante pour l'agriculture au Québec.

Le Président: M. le député de Beauce-Sud, je vous demanderais de faire état, en premier lieu, de votre motion et par la

suite, s'il y a consentement, en vertu du règlement, vous pourrez parler sur la motion.

M. Mathieu: Pendant l'exercice 1980-1981 - je lis la motion - le gouvernement du Canada, par l'entremise de la Commission canadienne du lait...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! Je prends la parole du député de Beauce-Sud et je tiens pour acquis que ce qu'il va lire constitue le texte de sa motion. M. le député de Beauce-Sud.

M. Mathieu: M. le Président, j'ai quatre attendus et une conclusion. Il me semble que les attendus font partie de la motion. "Attendu qu'en l'exercice financier 1980-1981, le gouvernement du Canada, par l'entremise de la Commission canadienne du lait, a versé 293 100 000 $ pour le soutien des prix des produits laitiers, dont 131 500 000 $ aux producteurs laitiers du Québec; attendu que cette politique est indispensable au maintien et au développement de l'industrie laitière, particulièrement au Québec, selon des informations récentes, le gouvernement du Canada songerait à réduire de 25 000 000 $ ses subsides, dont près de la moitié au Québec... cette perspective sème l'inquiétude et la consternation parmi les producteurs. C'est pourquoi cette Assemblée nationale demande au gouvernement fédéral de maintenir pour 1981-1982 et pour les années à venir les mêmes barèmes de subsides à l'industrie laitière que ceux qui ont été appliqués en 1980-1981. Toute diminution risquerait de mettre en péril le développement de l'industrie laitière au Québec."

Une voix: C'est cela.

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement à la motion?

M. Charron: Non, M. le Président. Des voix: Ah!

M. Charron: Je voudrais soulever une question de règlement.

Le Président: Sur une question de règlement, M. le leader du gouvernement.

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, je vous demanderais, à ce moment-ci... C'est une question de règlement...

Le Président: Je viens de remarquer, tout d'abord, qu'il n'y a pas consentement à la motion...

Des voix: Ah!

Le Président: ... et que le leader du gouvernement me demande la parole sur une question de règlement.

Une voix: II ne peut y en avoir deux en même temps.

M. Levesque (Bonaventure): Demande de directive, M. le Président.

Le Président: Oui.

Une voix: II ne peut y en avoir deux en même temps.

M. Charron: Tout de suite après...

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, je veux simplement vous demander...

M. Charron: M. le Président, j'ai soulevé une question de règlement.

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! M. Grégoire: ... la directive après.

Le Président: M. le député de Frontenac, s'il vous plaît, auriez-vous l'obligeance de reprendre votre fauteuil. À l'ordre, s'il vous plaît! Est-ce que la demande de directive ne pourrait pas avoir lieu après la question de règlement?

Des voix: Non...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Charron: Question de privilège.

Le Président: M. le leader, question de privilège.

M. Charron: Je veux d'abord assurer à l'Assemblée que la question de règlement que je vous ai annoncée, M. le Président, n'est aucunement une façon d'exprimer la raison du refus de consentement au dépôt de la motion du député de Beauce-Sud. Il s'agit d'une tout autre affaire. J'avais senti que c'était cela la demande de directive.

M. le Président, la question de règlement que je soulève est la suivante. Sur les motions non annoncées comme celle-ci, je ne sais pas si vous vous en rendez compte et si toute l'Assemblée s'en rend compte, mais un précédent vient d'être créé ce matin. Habituellement, on n'a jamais laissé une motion être lue intégralement, comme cela a été le cas pour le député de Beauce-Sud, pour, ensuite, demander s'il y a consentement ou s'il n'y a pas consentement. Autrement, M. le Président, si ceci devient

une pratique - c'est la question de règlement que je soulève - là, le député de Lévis et ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, qui a d'ailleurs dit clairement tout à l'heure qu'il en avait une qu'il était sur le point de présenter, sur Mirabel, il faudrait aussi lui laisser livrer toute sa motion.

Or, M. le Président, ce n'est pas la tradition en cette Assemblée. Ce que je souhaiterais, c'est qu'on s'en tienne à la tradition. Nous avons habituellement procédé de la façon suivante: un député se lève et dit, comme je l'ai fait, par exemple, sur la situation polonaise cette semaine: "M. le Président, j'ai l'intention de proposer une motion concernant la situation en Pologne"; à partir de cette base, et de cette base seulement, on doit attendre qu'on me dise s'il y a consentement à ce que le sujet soit évoqué ou non. Par la suite, s'il y a consentement, je présente ma motion. Le député de Beauce-Sud a d'ailleurs été dans la tradition du règlement. Il s'est levé et il a dit: J'ai l'intention de proposer une motion concernant la politique laitière. C'est à ce moment-là qu'on regarde s'il y a consentement ou s'il n'y a pas consentement. S'il y a consentement, il peut lire les attendus et les considérants. Il peut même faire le discours de 20 minutes auquel il a droit. Mais je crois, M. le Président, que nous avons commis un impair dangereux ce matin. Je n'en veux à personne. Le député a reçu un refus de consentement. Nous sommes donc prêts à procéder à autre chose. Mais je voudrais qu'il soit bien établi qu'on n'a pas brisé la tradition. Il s'est agi d'un impair, et la tradition, c'est plutôt de solliciter le consentement sur le sujet avant même que l'on présente la motion.

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, sur la question de règlement.

M. Charron: Autrement, ce serait le capharnaüm. (12 h 30)

Le Président: M. le leader de l'Opposition, sur la question de règlement.

M. Levesque (Bonaventure): Je diffère, et c'est mon droit, M. le Président, de l'opinion de mon collègue d'en face. Quel consentement pourrions-nous donner, M. le Président, sans avoir été pleinement éclairés sur le sens de la motion?

Lorsqu'on parle de la politique laitière, c'est trop vaste pour que nous soyons en mesure de savoir si nous donnons notre consentement ou non. Je pense qu'au moins la substance de la motion doit être connue. Si on n'est pas au courant de l'objectif poursuivi, de la conclusion à laquelle on veut en arriver, comment voulez-vous que nous donnions notre consentement ou non? Voilà!

M. Mathieu: M. le Président, sur une demande de directive.

Le Président: Sur une demande de directive, M. le député de Beauce-Sud.

M. Mathieu: Dois-je comprendre que cette motion, si vitale pour la classe agricole, est refusée?

Une voix: Ce n'est pas une demande de directive.

Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît! La question de règlement soulevée par le leader du gouvernement est fort pertinente, comme son argumentation d'ailleurs, et les arguments du leader de l'Opposition sont pertinents également, comme d'habitude. La présidence va prendre le tout en délibéré, va vérifier auprès des autres Législatures du Canada à savoir comment se présentent les motions non annoncées. Mais je voudrais faire remarquer que l'impair de ce matin n'est pas venu avec la motion du député de Beauce-Sud, mais avec celle du chef de l'Opposition qui comprenait plusieurs lignes. Je me suis moi-même posé la question intérieurement, à savoir si la motion ne commençait pas aux mots "vu l'urgence" ou aux mots "la décision", ceci étant, pour la présidence, un préambule.

Il n'y a pas deux députés qui aient la même façon de présenter une motion non annoncée. La suggestion du leader du gouvernement est très valable, celle du leader de l'Opposition est également valable. En conséquence, je ne porterai pas jugement ce matin, mais je dirai au moins ceci. Ce qui s'est passé ce matin ne doit pas constituer et ne constitue pas un précédent et je me réserve une décision que je rendrai à l'Assemblée en temps et lieu.

M. Lalonde: M. le Président, une question de directive.

Le Président: M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: Pourriez-vous donner la motion que j'ai faite en exemple? Il n'y avait pas de préambule, j'ai parlé de l'à-plat-ventrisme des députés.

Le Président: Enregistrement des noms sur les votes en suspens.

M. Charron: M. le Président... Le Président: Qu'on appelle les députés. (Suspension de la séance à 12 h 33)

(Reprise de la séance à 12 h 40)

Le Vice-Président (M. Jolivet): À l'ordre! Veuillez prendre vos sièges, s'il vous plaît! À l'ordre!

J'aimerais faire connaître le texte de la motion qui doit être mise aux voix. Mise aux voix de la motion suivante de M. Parizeau proposant que l'Assemblée approuve le complément aux politiques budgétaires du gouvernement pour 1981-1982 et de la motion de censure suivante, de M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): "Que cette Assemblée blâme sévèrement le gouvernement du Parti québécois qui, par sa gestion désastreuse des finances publiques, continue d'affaiblir le Québec et rend sa situation financière très vulnérable et qui, de plus, impose en cours d'exercice financier des augmentations de taxes qui alourdissent dangereusement le fardeau des impôts des contribuables québécois, déjà les plus taxés au Canada."

Mise aux voix de la motion de censure à

l'encontre des politiques budgétaires du

gouvernement et de la motion approuvant

le complément à ces politiques

La première motion à être mise aux voix est la motion de blâme. Que ceux et celles qui sont pour cette motion veuillent bien se lever, s'il vous plaît!

Le Secrétaire adjoint: MM. Ryan, Levesque (Bonaventure), O'Gallagher, Ciaccia, Mme Lavoie-Roux, MM. Lalonde, Mailloux, Vaillancourt (Orford), Mme Bacon, MM. Marx, Bélanger, Bourbeau, Blank, Garon, Mathieu, Assad, Vallières, Lincoln, Paradis, Scowen, Pagé, Gratton, Rivest, Fortier, Rocheleau, Polak, Cusano, Dubois, Sirros, Saintonge, Johnson (Vaudreuil-Soulanges), French, Mme Dougherty, MM. Kehoe, Houde, Middlemiss, Hains.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Que ceux et celles qui sont contre veuillent bien se lever, s'il vous plaît!

Le Secrétaire adjoint: MM. Charron, Mme Marois, MM. Bédard, Parizeau, Laurin, Bérubé, Landry, Gendron, Mme LeBlanc-Bantey, MM. Lessard, Biron, Godin, Léger, Clair, Johnson (Anjou), Chevrette, Bertrand, Duhaime, Garon, Tardif, Léonard, Fréchette, Baril (Arthabaska), Ouellette, Proulx, Mme Lachapelle, MM. Vaugeois, Paquette, Gagnon, Guay, Dussault, de Belleval, Martel, Mme Juneau, MM. Fallu, Grégoire, Bordeleau, Leduc, Marquis, Charbonneau, Lavigne, Boucher, Beauséjour, Lévesque (Kamouraska-Témiscouata), Desbiens, Perron, Blais, Blouin, Gauthier, Gravel, Laplante, Brassard, Brouillet, Rochefort, Baril (Rouyn-Noranda-Témiscamingue), LeMay, Champagne, Rodrigue, Payne, Paré, Tremblay, LeBlanc, Lafrenière, Beaumier, Lachance, Dupré.

Le Secrétaire: Pour: 37 Contre: 66

Le Vice-Président (M. Jolivet): Motion rejetée.

Sur la motion principale, M. le leader.

M. Charron: Puis-je proposer le même vote inversé, M. le Président?

Le Vice-Président (M. Jolivet): Est-ce que cette motion est adoptée? Adopté. Nous sommes rendus aux avis à la Chambre.

M. Charron: Non, M. le Président. Je voudrais indiquer à l'Assemblée que lorsque la commission plénière qui a étudié le budget supplémentaire que nous venons d'adopter s'est ajournée, à la fin de sa séance du 10 décembre dernier, elle l'a fait sur un avis -j'ai le papier devant moi ici - qu'elle n'avait pas fini de délibérer et demandait la permission de siéger à nouveau puisqu'il restait peut-être une quarantaine de minutes sur les huit heures possibles utilisables. Je voudrais proposer que cette Assemblée considère le rapport de la commission plénière comme désormais complet et celle-ci comme ayant terminé ses travaux.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Cette motion est-elle adoptée? Adopté.

Projet de loi no 21

M. Charron: Ce qui m'amène à proposer, en vertu de l'article 131, M. le Président, que le ministre des Finances puisse déposer le projet de loi no 21 qui, selon l'article 131, peut être présenté à ce moment-ci et les trois lectures adoptées sans débat ni amendement.

Première, deuxième et troisième lectures

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre des Finances propose l'étude du projet de loi no 21 en première, deuxième et troisième lectures. Est-ce que cette motion est adoptée? Adopté. Aux avis à la Chambre... Sur division.

Recours à l'article 34

En vertu de l'article 34, M. le député de Verdun.

M. Caron: M. le Président, la semaine dernière, je demandais au leader du gouvernement si le gouvernement déposerait le projet de loi dont le but est d'apporter certains amendements au projet de loi de la Communauté urbaine de Montréal. Est-ce que le Conseil des ministres a pris une décision?

M. Charron: M. le Président, il semble tout à fait probable qu'effectivement un projet de loi modifiant la loi de la Communauté urbaine soit déposé au cours d'une des deux séances qu'il reste à cette session avant son ajournement.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: En vertu de l'article 34, est-ce que le ministre des Communications ou le leader, pourrait nous dire s'il a l'intention ou quand il a l'intention de déposer le fameux projet de loi sur l'information gouvernementale et la protection de la vie privée?

M. Charron: Au printemps, M. le Président.

M. Lalonde: Au printemps. M. Charron: Au printemps.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de D'Arcy McGee, en vertu de l'article 34.

M. Marx: Oui, c'est en vertu de l'article 34. Pour ce qui concerne le projet de loi no 200, vous avez dit qu'il serait déposé en deuxième lecture; est-ce qu'il va y avoir une commission parlementaire?

M. Charron: Sur quoi?

M. Marx: Sur la Communauté urbaine de Montréal.

M. Charron: Oui, bien sûr. En le déposant je vais le déférer à la commission parlementaire.

M. Marx: Est-ce qu'il serait possible aussi d'entendre des témoins comme la cité de Côte-Saint-Luc?

M. Charron: Bien sûr. C'est exactement pour ça qu'elle sera déférée à la commission parlementaire.

M. Marx: Est-ce qu'ils ont déjà eu un avis?

M. Charron: Ne mettons pas la charrue devant les boeufs. Commençons par déposer le projet de loi, on verra après.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Les avis à la Chambre, M. le leader.

Avis à la Chambre

M. Charron: Vous avez sans doute remarqué, M. le Président, que la matinée est complètement "flaillée". Cela m'oblige à modifier un peu le menu du jour et de la nuit, forcément. M. le Président, je voudrais indiquer ceci quant aux travaux de l'Assemblée. Lorsque nous reprendrons, à 15 heures, nous reprendrons avec les projets de loi au nom du ministre de la Justice, ce qui veut dire, - il faut dire, M. le Président, pour expliquer la surprise et l'angoisse qui assaille mon collègue actuellement que je lui avais dit 16 heures. À 15 heures, les trois lois au nom du ministre de la Justice; par la suite, la loi au nom du ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation et un certain nombre de prises en considération de rapports qui sont déjà au feuilleton à cette étape. Finalement, la prise en considération du rapport sur la loi 16 complétera le menu de la journée.

Je fais motion, M. le Président, pour que pendant que la Chambre s'adonnera à ses travaux, de 15 heures à 18 heures et de 20 heures à 24 heures, les commissions des affaires sociales, à la salle 81A, sur la loi 27, et... Est-ce que vous acceptez 14 h 30?

Une voix: Oui.

M. Charron: Très bien. Je remercie Mme la députée de L'Acadie. Donc, celle des affaires sociales commencera à 14 h 30 au salon rouge, alors, parce que la salle 81 sera peut-être occupée par une autre réunion. De 14 h 30 à 18 heures et de 20 heures à 24 heures, ce sont les affaires sociales sur la loi 27 et, à la salle 81, de 15 heures à 18 heures et de 20 heures à 24 heures, la commission des institutions financières poursuivra l'étude des trois projets de loi qui lui ont été déjà déférés.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Cette mention est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader. (12 h 50)

M. Charron: Je crois qu'il est de mon devoir, à ce moment-ci des travaux de la session, M. le Président, de rappeler - c'est Mme la députée de L'Acadie qui vient presque de me donner l'occasion de le faire par la collaboration qu'elle vient d'offrir -aux membres de ces commissions parlementaires qu'il leur est toujours permis, à eux, de décider sur place avec le consentement de tous et chacun de poursuivre au-delà de 24 heures, s'ils veulent achever un projet de loi qui est déjà en cours. Si je le dis, M. le Président, je ne le fais pas à travers mon chapeau. Premièrement, c'est parce que cette collaboration s'est déjà produite dans le passé et que, deuxièmement - oui, la

semaine dernière, et cela s'est produit cette semaine à la commission des affaires municipales - je veux simplement le rappeler pour les collègues qui seront là. Je le fais avec une intention bien précise à l'égard des collègues des institutions financières également. Les collègues membres de la commission des institutions financières, la semaine dernière, avaient reçu un mandat de l'Assemblée, d'entendre des représentations entre 15 heures et 18 heures et de débuter l'étude article par article du projet de loi sur les caisses d'entraide économique à 20 heures vendredi dernier. La commission, sur place, a choisi de prendre une plus grande période de temps de consultation - je ne lui en fait pas grief; les membres étaient la pour juger du bien-fondé de cette décision -et par la suite d'ajourner, plutôt qu'à minuit, à 23 heures vendredi soir, sans entreprendre l'étude article par article, c'est-à-dire, dirais-je en non-conformité avec le mandat qui lui avait été confié par l'Assemblée. J'imagine, la transcription est là pour le dire, que cette décision s'est prise sur place avec une promesse de collaboration lors d'une prochaine séance. C'est simplement à cela que je fais allusion aujourd'hui, en disant à nos collègues qui ont bien travaillé hier à cette commission parlementaire - le fait qu'on ait perdu la séance de ce matin, nous n'en sommes pas responsables, les événements sont là, ils en sont victimes comme nous tous - que cette collaboration est désormais, à cette commission en particulier, très sérieusement espérée et attendue.

M. le Président, je propose de suspendre nos travaux jusqu'à 15 heures.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Cette motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté. Suspension de nos travaux jusqu'à 15 heures.

(Suspension de la séance à 12 h 52)

(Reprise de la séance à 15 h 13)

Le Président: Veuillez vous asseoir. M. le député de Portneuf.

Question de privilège

Retransmission des délibérations du caucus du Parti québécois

M. Michel Pagé

M. Pagé: Merci, M. le Président, le leader me le permettra. Je voudrais très brièvement, comme whip en chef de l'Opposition, au nom de mes collègues, soulever une question de privilège qui vous est adressée, M. le Président. J'ai tous les motifs de croire que des faits inquiétants se sont produits ici, à l'Assemblée nationale du Québec, sur l'heure du midi. Selon les informations que je possède, la réunion du caucus du parti ministériel, qui s'est réuni en privé et à huis clos, comme c'est normal et tout indiqué, aurait été l'objet d'une retransmission des propos qui s'y sont tenus.

Notre formation politique, comme celle du parti ministériel, se réunit - notre formation tout au moins, je le peux confirmer - tous les matins, les 41 députés libéraux, dans les salles de l'Assemblée nationale du Québec, plus particulièrement dans les salles 81-A et 91-A. Nous tenons généralement nos caucus hebdomadaires dans une de ces deux salles qui sont mises à notre disposition par le président de l'Assemblée nationale. Je voudrais vous dire que c'est très grave; s'il faut que les réunions des partis politiques puissent être l'objet de retransmission, cela n'a pas de bon sens, c'est tout à fait inacceptable. À ce moment-ci, la question est suffisamment importante pour que je vous demande, comme président de l'Assemblée nationale du Québec, de, premièrement, faire enquête sur le pourquoi de la retransmission du caucus dans mon bureau. Pour le bénéfice de ceux qui nous écoutent, les députés ont dans leur bureau ce qu'on appelle, dans le jargon parlementaire, un perroquet qui leur retransmet les propos de l'Assemblée nationale et des commissions. Alors, on m'a indiqué, dès le moment où je suis arrivé à mon bureau cet après-midi, vers 14 h 55, que le caucus des députés du Parti québécois était retransmis en direct sur le perroquet qui est dans mon bureau. C'est inquiétant, cela n'a pas de bon sens.

M. le Président, je vous demande, premièrement, si vous voulez faire enquête. Le soutient de mon propos, c'est que nous avons des caucus journaliers et on ne peut accepter que de tels événements se produisent. Premièrement, l'enquête et, deuxièmement, j'apprécierais que vous nous informiez des garanties que vous pouvez donner comme président de l'Assemblée nationale pour que de tels faits ne puissent se reproduire. M. le Président, je me permettrai d'ajouter, si vous me le permettez, qu'un député était à mon bureau à ce moment-là, le député de Brome-Missisquoi; il voudrait ajouter un mot.

M. Pierre-J. Paradis

M. Paradis: M. le Président, avec votre permission, sur la même question de privilège, étant donné le sérieux de la question de privilège du député de Portneuf, j'étais au bureau du whip à l'heure du dîner

et j'ai entendu, par le biais du perroquet, les délibérations du caucus du Parti québécois.

Fort conscient de l'importance de conserver une preuve dans ce domaine, j'ai enregistré ledit caucus, et j'ai ici la bobine. Pour vous démontrer qu'il ne s'agit pas d'une cassette de musique, je peux vous la faire jouer seulement trente secondes, et je vous la remettrai sans en avoir fait de copie.

Le Président: J'ai déjà l'enregistrement, M. le député de Brome-Missisquoi.

M. Charron: M. le Président, sur une question de privilège.

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Claude Charron

M. Charron: Étant membre du caucus visé, vous permettrez sûrement que j'aie le droit, au nom de mes collègues, d'ajouter aussi le fait que rien ne nous permet, à la suite de cet incident, de faire état d'un complot ou d'un scandale quelconque. Je signale tout de suite, d'ailleurs, que quand on voudra protéger notre intégrité on trouvera n'importe quel avocat, sauf le député de Portneuf. De notre côté, nous avons plutôt envisagé cette situation comme un incident regrettable, sans aucun doute, parce que ce genre de réunion politique a droit à une confidentialité, somme toute, assurée.

Sur cet incident, j'aimerais obtenir un éclaircissement de votre part, mais soyez sûr que si je fais cette demande, c'est dans le respect qu'on vous doit et dans le respect qu'on veut vous assurer. Nous sommes assurés que vous aurez toute la vigilance voulue pour que ça ne se reproduise plus.

M. Gérard D. Levesque

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, on me permettra, comme leader parlementaire de l'Opposition, de vous dire quel fut mon étonnement lorsque j'ai entendu les deux députés de notre formation politique; même le leader parlementaire du gouvernement semble confirmer tout cela. Un caucus d'une des deux formations politiques pourrait ainsi être retransmis directement. À ce moment-là, il n'y a plus de caucus possible. Un caucus, c'est justement la réunion des députés d'une formation politique, c'est soumis aux règles, d'abord, de la confidentialité. Aucun caucus ne pourrait exister. C'est l'existence même de ces caucus qui est mise en cause par cette révélation. Je comprends que c'est le caucus ministériel qui en est la victime, mais à ce moment-ci, M. le Président, cela veut dire que l'une ou l'autre des formations politiques serait dans une situation impossible si de tels faits se répétaient. Dieu sait maintenant si nous ne pouvons pas avoir un doute, puisque cela s'est déjà produit.

M. le Président, je crois que la situation est suffisamment grave. Je n'ai pas de raison de croire que cela ne s'est pas produit, vu que tout le monde semble s'entendre pour dire que cela s'est produit. Si cela s'est produit, M. le Président, je vous demande, avec toute la solennité que je puis y mettre, de grâce, de trouver un moyen pour protéger ce qui est essentiel dans notre vie parlementaire, c'est-à-dire la réunion des membres d'une formation politique sous le sceau de la confidentialité. Autrement, M. le Président, toutes nos institutions, toutes nos traditions en prendraient pour leur rhume.

Le Président: M. le whip en chef du gouvernement. (15 h 20)

M. Guy Chevrette

M. Chevrette: M. le Président, j'ai effectivement fait deux démarches, y compris auprès des responsables de l'appareillage électronique en bas. Au moment où je suis entré avec les techniciens, on s'est permis de baisser délicatement un bouton. De plus, la console était bel et bien ouverte à la salle 81.

Je vous demande aussi, dans le même sens que le leader de l'Opposition, de voir à respecter... On discute des politiques de l'État et on a le droit, comme formation politique - c'est notre droit le plus sacré - à la confidentialité, que ce soit la formation libérale ou la formation du Parti québécois. Je pense que c'est votre rôle comme Président de l'Assemblée nationale de faire la lumière immédiatement sur ce fait, d'abord, et de voir à nous assurer, pour l'avenir, l'entière confidentialité de nos débats.

Remarques du président

Le Président: Mes chers collègues, j'ai été informé de ce fait à 14 h 57 cet après-midi. Déjà, au moment où on se parle, l'enquête est en cours. J'ai un rendez-vous de prévu dans quelques minutes avec la personne qui aurait commis l'erreur humaine dont il est question. Mais je ne voudrais surtout pas, tout en me disant d'accord avec les propos des députés qui sont intervenus sur la confidentialité absolument essentielle des caucus, que cet incident, dont tous les indices que j'ai en ma possession me permettent de croire qu'il est isolé, que c'est une erreur humaine, on fasse quelque chose qui ressemblerait à un complot. Donc, je m'engage...

Une voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! Je m'engage donc à continuer l'enquête qui est actuellement entreprise depuis 15 heures exactement. Je vais rencontrer la personne concernée et...

M. Chevrette: Question de privilège.

Le Président: S'il vous plaît, quand j'aurai fini.

L'enquête est commencée. Je m'engage, dans les plus brefs délais et si possible aujourd'hui avant 18 heures, à vous donner, de façon détaillée, les raisons qui ont amené cette écoute d'une partie ou de la totalité -je l'ignore - du caucus du Parti québécois. Je puis assurer les membres des deux formations politiques que c'est la première fois à ma connaissance que cette chose arrive, si elle est arrivée, et je pense qu'elle est arrivée effectivement puisque j'ai une bobine en ma possession que je vais écouter tout à l'heure. Je voudrais vous assurer d'une chose, dont vous êtes sûrs d'ailleurs, au moment où je vous parle, toutes les mesures seront prises afin que de pareilles choses, si elles sont arrivées, ne se reproduisent plus. Mais je ne voudrais surtout pas qu'on fasse d'une erreur qui est possiblement une erreur humaine et involontaire... Une commission parlementaire était convoquée au salon rouge pour 14 h 30 et il semblerait de prime abord que la convocation de cette commission pour 14 h 30 ait pu jouer un rôle extrêmement important dans cette histoire.

De toute façon, d'ici à 18 heures vous aurez tous les détails.

M. Chevrette: Une dernière question de privilège, M. le Président. Si j'ai bien compris, on vous a remis une cassette enregistrée par une formation politique. J'aimerais savoir une chose au niveau de votre enquête. Est-ce qu'il y a eu enregistrement ou s'il y a eu uniquement erreur technique de diffusion? Il y a deux dimensions possibles dans cela. S'il y a eu effectivement cassettes et, donc, retranscription, je vous demanderais d'y voir dans les meilleurs délais.

Le Président: Effectivement, M. le député de Joliette-Montcalm, vous venez de soulever une question très pertinente. Le moins que je puisse faire aujourd'hui, c'est de demander à tous les parlementaires, non pas d'oublier ce qu'ils ont entendu, parce que à l'impossible nul n'est tenu, mais ce que je veux demander à l'ensemble des parlementaires et des fonctionnaires qui peuvent m'écouter au moment où l'on se parle, c'est de venir remettre sans retranscription aucune dans les meilleurs délais, c'est-à-dire cet après-midi même, au bureau du président, toutes les cassettes qui ont pu être enregistrées.

M. Charron: M. le Président, j'ai un scandale.

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Charron: Je me suis fait voler mon feuilleton.

Le Président: M. le leader du gouvernement, puisque j'ai le plaisir d'avoir les deux leaders avec moi en cette Chambre cet après-midi, puis-je vous demander vers quelle heure vous seriez disponibles pour assister à une conférence des leaders, comme c'est prévu à l'article 123 de notre règlement, puisque la présidence a remarqué qu'aujourd'hui, au feuilleton, paraît la prise en considération du rapport de la commission parlementaire sur la loi 16; en conséquence, j'aimerais rencontrer les leaders. Puisque j'ai aussi une enquête à faire, il faudrait donc s'entendre ensemble sur une rencontre.

M. Charron: M. le Président, vous me connaissez, il suffit que vous exprimiez le désir de me rencontrer pour que j'annule tout ce que j'avais de réservé auparavant. Je suis disponible à l'instant, si mon collègue l'est également.

Le Président: M. le leader de l'Opposition.

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, je suis libre, de la même façon que vient de l'indiquer mon "ami" d'en face, entre guillemets et avec toutes les réserves que ce terme implique. Cependant, je dois intervenir sur le projet de loi no 36 relativement à la qualité du poisson. En dehors de cet engagement auquel je peux difficilement me soustraire, je suis entièrement à votre disposition.

Le Président: Je comprends donc qu'après l'intervention du leader de l'Opposition...

M. Charron: Ou avant, M. le Président...

Le Président: Ou avant.

M. Charron: ... parce que j'allais vous demander d'appeler d'abord le projet de loi no 34, ce qui nous libérera pendant quelques instants. Je vous prierais d'appeler l'article 6 du feuilleton d'aujourd'hui, s'il vous plaît.

Projet de loi no 34 Deuxième lecture

Le Président: J'appelle donc la deuxième lecture du projet de loi no 34, Loi

modifiant la Loi sur la représentation électorale.

M. le ministre de la Justice.

M Marc-André Bédard

M. Bédard: M. le Président, le projet de loi no 34, modifiant la Loi sur la représentation électorale, constitue une conséquence directe des intentions qui ont été exprimées dans le dernier discours inaugural concernant le mode de scrutin.

Comme l'indiquait le discours inaugural, nous avons bon espoir, avant la fin de la session, de pouvoir proposer cette étape dont on a tant parlé, celle d'un nouveau mode de scrutin. Il est évident que le découpage de la carte électorale découle directement du mode de scrutin qu'on utilise; donc, modifier le système électoral, c'est également ouvrir la porte à un découpage dont on n'a pas encore défini l'encadrement.

Selon la loi 10, la Commission de la représentation électorale a jusqu'au 13 avril 1982 pour produire un projet de nouvelle carte pour consultation publique, comme on le sait. Depuis la fabrication de la carte actuelle, il s'est ajouté 160 000 nouveaux électeurs au Québec. En même temps le recensement pour le scrutin de 1981 a permis de constater que, sur les 122 circonscriptions électorales, 25 dépassaient le plafond normal de 40 000 électeurs dont on parle dans la loi 10, alors que 24 ont de 38 000 à 40 000 électeurs et auront donc probablement franchi avant le prochain scrutin le plafond de 40 000 électeurs. C'est donc, M. le Président, 49 ou près de la moitié des circonscriptions dont il faut envisager le remaniement prochain. Il vaut mieux, dans ce contexte - c'est pourquoi nous présentons le projet de loi no 34 -suspendre les travaux que la loi 10 impose à la Commission de la représentation électorale jusqu'à ce que le gouvernement ait arrêté sa décision concernant le mode de scrutin.

Cette solution évitera à la commission un travail et des coûts qui seraient inutiles. C'est précisément l'objet de ce projet de loi qui suspend les travaux de la Commission de la représentation sur la préparation d'une nouvelle carte électorale, et ce de la date d'entrée en vigueur du projet de loi no 34 jusqu'au 1er janvier 1983. Ce projet de loi reporte au 13 avril 1983 la remise de son rapport sur la nouvelle délimitation des circonscriptions électorales. Le directeur général de la représentation a été consulté à ce sujet et juge qu'un délai d'un an ne pose pas de problème important à la commission. De toute manière, quelles que soient les modifications au mode de scrutin qui seront retenues par le gouvernement et l'Assemblée nationale normalement au cours de 1982, l'éventuel projet de loi sur le mode de scrutin pourra prévoir d'autres délais que le 1er janvier 1983 et le 13 avril 1983 selon la nature des changements que la loi apportera au mode de scrutin actuel. (15 h 301

M. le Président, compte tenu que le présent projet de loi tire ses origines de la volonté du gouvernement de mettre en place un nouveau système électoral qui permette de refléter plus fidèlement la volonté des électeurs, il serait pertinent d'apporter en terminant quelques précisions sur la prochaine étape de ce dossier. Comme l'indique le discours inaugural, j'ai reçu le mandat d'effectuer une consultation avant que le Conseil des ministres ne retienne l'une ou l'autre des hypothèses. Cette phase de consultation va s'amorcer au cours du mois de janvier, alors que je rendrai public un document explicitant les diverses hypothèses de modification du mode de scrutin. La réforme du mode de scrutin, on le sait, doit se réaliser en étroite collaboration avec tous les membres de l'Assemblée nationale, la population et les partis politiques. Il m'apparaît particulièrement important que tous les députés soient impliqués dans le processus conduisant à la réforme. La publication d'un document de base permettra donc d'impliquer tous les intéressés dans cette étape de consultation et de réflexion qui débouchera éventuellement sur une décision gouvernementale.

M. le Président, en terminant, je me propose donc, dans ces étapes de consultation qui sont nécessaires pour en arriver éventuellement à déposer une loi concernant une réforme du mode de scrutin, de rencontrer le chef de l'Opposition afin de discuter du cheminement du dossier et des modalités de collaboration car, sur un sujet aussi intimement lié au processus démocratique, je crois que la recherche d'un consensus constitue un objectif absolu et un objectif plus que souhaitable. M. le Président, ce sont les quelques propos que je crois indiqué de formuler à ce stade-ci du projet de loi. Merci.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Saint-Louis.

M. Harry Blank

M. Blank: M. le Président, je comprends très bien les raisons pour lesquelles le gouvernement a présenté ce projet de loi et je ne peux pas m'opposer du tout à leur façon de procéder. Seulement, j'espère que cette commission et les fonctionnaires qui y travaillent ont comme seul but de préparer une nouvelle carte suivant les anciennes règles. Je me demande ce que ces gens feraient dans une année. Une autre question; j'espère que le gouvernement n'a pris aucune décision et n'a pas demandé à ces gens de

créer une autre carte advenant la possibilité d'un mode de scrutin différent, parce qu'on ne sait jamais ce qui peut arriver. On a déjà eu l'expérience en cette Chambre de la carte d'identité et on a engagé des employés. On a dépensé environ 3 000 000 $ et le projet de loi n'a jamais été adopté; le gouvernement l'a retiré et on a eu une perte de 3 000 000 $. J'espère que la même situation n'arrivera pas ici avec cette commission. Je ne veux pas mettre en chômage ces fonctionnaires mais, s'ils n'ont rien à faire durant une année, qu'au moins on leur trouve quelque chose qui est utile pour ne pas avoir un gaspillage d'argent comme c'est arrivé il y a peut-être deux ou trois ans, je ne me souviens pas exactement. Je suis très heureux que le ministre dise qu'il va y avoir de la collaboration de notre côté. J'espère qu'il demandera aussi la collaboration du public pour avoir des intéressés. Il y a peut-être dix ans ou quinze ans, on a eu des experts qui sont venus devant une commission parlementaire pour nous donner des idées, nous dire comment cela se passe ailleurs, le pour et le contre de certains systèmes de scrutin que nous connaissons seulement par des rapports ou des documents. Ce serait très bon d'avoir des experts ou des gens, peut-être des politiciens, des autres milieux qui ont déjà vécu cette forme de scrutin qu'on suggérera. Ils nous donneraient des avis juridiques et pratiques du mode de scrutin dans leur pays ou État. Peut-être qu'en commission parlementaire j'aurai d'autres questions plus directes. Pour le moment, je veux dire au ministre qu'on votera pour ce bill.

M. Bédard: Je voudrais m'informer s'il y a d'autres intervenants. Il n'y en a pas d'autres.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le ministre de la Justice.

M. Marc-André Bédard (réplique)

M. Bédard: M. le Président, je remercie le député de Saint-Louis d'avoir indiqué que sa formation voterait pour le projet de loi. Je crois, comme il a dit, que c'est la seule solution qui s'impose dans les circonstances. Il a demandé comment serait utilisé entre-temps le personnel de la Commission de la représentation électorale; c'est une question fort judicieuse. Je puis l'assurer que nous y avons pensé. Je crois que nous aurons l'occasion, comme je l'ai dit tout à l'heure, d'avoir des échanges avec les membres de l'Opposition en ce qui a trait à la réforme du scrutin, au processus pour y arriver, au niveau de la réflexion qui doit s'amorcer dans les partis, au niveau de la population, etc. Alors, nous allons faire en sorte d'utiliser l'expertise de la Commission de la représentation électorale dans le processus conduisant à l'adoption d'un nouveau mode de scrutin tout en sauvegardant l'indépendance de cette commission et, par conséquent, sa crédibilité. Je pense qu'à partir du moment où on s'indique mutuellement des balises d'utilisation, si je peux employer l'expression, des membres de la commission il y a possibilité que ces membres, avec l'expertise qu'ils ont, puissent contribuer à nos travaux de réflexion qui vont nous acheminer vers ce qui pourrait être un nouveau mode de scrutin.

Il est évident que, lorsque l'étude commencera concernant ce projet de loi menant à une réforme du scrutin, il y aura lieu d'avoir des séances de commission parlementaire. Assurément, nous devrons - et c'est notre intention - faire appel à toutes les ressources humaines, toutes les compétences qui existent dans ce domaine, de manière à donner le meilleur éclairage possible à tous les membres de cette Assemblée nationale et à la population en fonction des décisions qui pourraient être éventuellement prises.

M. le Président, ce sont les seuls commentaires que je crois appropriés. Je remercie mon collègue de l'Opposition.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le ministre, faites-vous motion pour que cette deuxième lecture soit adoptée?

M. Bédard: Oui, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Adopté.

Le Secrétaire adjoint: Deuxième lecture de ce projet de loi.

Renvoi à la commission de la justice

Le Vice-Président (M. Rancourt): Motion de déférence...

M, Bédard: Motion de déférence, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Est-ce que cette motion de déférence est adoptée?

M. Bédard: À la commission permanente de la justice, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Cette motion de déférence à la commission permanente de la justice est-elle adoptée? Adopté. Est-ce que vous présentez le deuxième projet?

M. Bédard: Oui, M. le Président. Il s'agirait du projet de loi no 18.

Projet de loi no 18

Deuxième lecture

Le Vice-Président (M. Rancourt):

Deuxième lecture du projet de loi no 18, Loi assurant l'application de la réforme du droit de la famille et modifiant le Code de procédure civile.

M. le ministre de la Justice.

M. Marc-André Bédard

M. Bédard: M. le Président, le projet de loi qui est devant vous aujourd'hui, le projet de loi no 18, a pour but de permettre une application harmonieuse de la Loi instituant un nouveau Code civil et portant réforme du droit de la famille qui, comme on le sait, a déjà été adoptée par cette Chambre. Cette loi, qui a été adoptée en décembre 1980, avait comme objectif fondamental de concrétiser l'affirmation et la protection de la dignité, de la liberté et de l'égalité des membres de la famille et de faire converger les règles régissant l'organisation de la famille avec les réalités de la société québécoise contemporaine. D'ailleurs, ce projet de loi - je pense que c'est bon de le rappeler - avait recueilli l'assentiment unanime des membres de cette Chambre. (15 h 40)

Le projet de loi no 18, assurant l'application de la réforme du droit de la famille et modifiant le Code de procédure civile, constitue un complément essentiel à la réforme du droit de la famille et il en respecte naturellement les principes fondamentaux dans les modifications qu'il apporte au Code de procédure civile et à diverses lois.

Si nous dégageons les principes sur lesquels repose le projet de loi no 18, ils visent notamment à rendre plus humain le processus judiciaire de la rupture en permettant aux parties de débattre leurs différends d'une façon plus sereine puisqu'ils confèrent aux audiences un caractère plus intime, davantage privé et confidentiel. Le projet de loi vise également à respecter davantage les parties en cause et leur autonomie, parce qu'il vise une prise en charge du règlement des conflits par les conjoints eux-mêmes en introduisant la règle de la demande conjointe.

Enfin, ce projet de loi vise à garantir la protection des droits de l'enfant par un mécanisme de représentation adéquat. Il vise à compléter l'intégration dans notre droit civil des dispositions législatives relatives à l'adoption.

Ces quatre objectifs principaux entraînent, comme il va de soi, un changement important du rôle du tribunal en matière familiale. Concernant les principaux amendements - c'est quand même un projet de loi qui est très volumineux et, dirais-je aussi, très important, mais je ne veux pas faire un débat plus long que ce n'est nécessaire - je m'en tiendrai à certaines dispositions qui sont dans ce projet de loi et qui répondent aux objectifs que je viens d'évoquer. Entre autres, il y aura des amendements au Code de procédure civile concernant le caractère privé des débats devant les tribunaux lorsqu'on parle de matière familiale.

En ce qui concerne le caractère des débats, nous proposons plus précisément l'introduction de la règle du huis clos en matière familiale. En plus d'être conforme au droit, à la dignité et au respect de la vie privée, de même qu'aux droits fondamentaux de l'enfant, ce projet de loi respecte de plus le voeu des parties concernées et l'opinion de la plupart des catégories de personnes qui sont impliquées dans l'application du droit de la famille. Enfin, ce projet de loi est cohérent avec les autres objectifs poursuivis par le projet, à savoir une plus grande participation des parties, une protection plus adéquate des droits de l'enfant et la règle de l'anonymat en matière d'adoption. La règle du huis clos, M. le Président, n'est toutefois pas absolue et elle peut être écartée si une partie le demande et que le juge décide qu'il y va de l'intérêt de la justice de le faire.

Ce projet de loi instaure donc la règle générale de procédure par voie de demande conjointe en séparation de corps et en divorce sur projet d'accord. Il institutionnalise également l'étape de conciliation dans le processus de déroulement de l'instance.

De la même manière qu'il convient de miser sur le sens des responsabilités des individus dans l'organisation de leur vie familiale, il apparaît logique de respecter cette latitude et cette volonté dans le cas où la séparation de corps et le divorce doivent être envisagés entre eux. Il serait contradictoire de maintenir, dans ce cas, des règles de procédure qui ne permettraient pas aux gens d'assumer pleinement leur décision en invoquant le fondement réel de leur démarche.

Dans ce sens et suivant la ligne de pensée exprimée au Code civil du Québec, je suis favorable à donner ouverture à une procédure dénuée de recherche et d'établissement d'un faux coupable - ce qui était malheureusement trop le cas auparavant - notamment dans les cas où les deux parties auront concouru à cette décision et qu'elles auront convenu d'un règlement de toutes les mesures matérielles de cette séparation. Le motif réel sera donc considéré et il n'y aura pas lieu de faire appel à des subterfuges ou d'invoquer de faux motifs pour voir sanctionner par le tribunal une situation qui est devenue irréversible.

La représentation des enfants. Pour

assurer la protection des droits de l'enfant, consacrés dans la réforme du droit de la famille, et pour respecter l'égalité de tous les membres de la cellule familiale, nous proposons des règles de procédure permettant une représentation adéquate de l'enfant. S'ajoute à cette protection fondamentale la possibilité pour l'enfant d'être assisté de toute personne apte à le rassurer et à l'aider, de même que plusieurs dispositions prévoyant que l'enfant soit, en matière d'adoption et suivant son âge, avisé des demandes qui le concernent. En ce qui a trait à l'adoption, le projet de loi complète l'intégration des dispositions législatives relatives à l'adoption dans notre Code de procédure civile. Les diverses procédures relatives à la déclaration d'adoptabilité, aux ordonnances de placement, à l'adoption et à la restitution d'enfant se retrouveront donc dorénavant dans le Code de procédure civile, ce qui n'était pas le cas auparavant, et ceci donne suite à une demande qui est faite depuis longtemps dans le sens que nous voulons légiférer présentement. Ceci permettra de suppléer au silence de la loi par des règles générales de procédure.

M. le Président, concernant le rôle du Tribunal de la famille, la loi instituant un nouveau Code civil, en révisant entièrement les principes qui fondent la séparation de corps et le divorce, affirme qu'en ces matières, la mission du tribunal est de conseiller les parties et aussi d'essayer de favoriser leur conciliation. Pour permettre une application quotidienne et réaliste de ces principes d'égalité entre époux et entre enfants, nous proposons l'établissement d'une procédure moins formaliste que celle qui existe présentement, d'une procédure également plus accessible et mieux adaptée aux besoins de notre société actuelle.

En terminant, pour compléter l'application de la Loi instituant un nouveau Code civil et portant réforme du droit de la famille, nous avons dû, comme on le sait, modifier un grand nombre de lois qui maintenaient une certaine disparité à l'égard de la femme et de certains enfants. Ces lois contenaient un traitement différent pour les hommes et les femmes et pour les enfants légitimes naturels ou adoptifs. Cette situation, une fois pour toutes, et c'est grand temps que ce soit fait, sera corrigée parce qu'on cessera... Je pense entre autres aux demandes normales qui avaient été faites pour que des mesures soient adoptées au niveau de notre Code civil afin que soit reconnue très clairement dans les textes l'égalité de l'homme et de la femme dans l'organisation de la vie familiale. Cela se retrouve dans ce projet de loi qui confirme le Code civil déjà adopté. Peut-être qu'un des points dont je suis le plus fier et une situation qui est maintenant corrigée, c'est qu'en fonction de l'avenir, on va cesser de parler d'enfants illégitimes. À partir de maintenant, à partir de leur naissance, tous les enfants sont sur un pied d'égalité, ce qui n'était pas le cas, comme on le sait, auparavant.

M. le Président, le bref rappel des objectifs fondamentaux de la Loi instituant un nouveau Code civil et cette rapide analyse des perspectives du projet de loi no 18 illustrent comment se sont concrétisées les préoccupations qui nous ont guidés dans l'élaboration de ce projet.

Nous avons voulu faire oeuvre de cohérence dans l'établissement des règles de procédure qui prévalent en matière familiale. Sur le plan de la forme, cela se traduit par l'intégration dans un même titre du Code de procédure civile de la plupart des règles relatives aux demandes en matière familiale.

Plus essentiel encore, le fond de la réforme s'appuie sur les grands principes qui ont présidé à la réforme du Code civil en matière familiale: l'égalité des personnes qui composent la cellule familiale et la liberté dont elles doivent jouir dans leur participation à la solution des différents problèmes juridiques susceptibles d'affecter la vie de la cellule familiale. (15 h 50)

Cette réforme procédurale vise à favoriser l'épanouissement de la famille en misant sur la responsabilité accrue et partagée de chacun de ses membres, elle repose sur la confiance en l'individu et en la capacité de chacun de contribuer à la solution des différends qui l'affectent. Ce projet est la suite logique de la réforme du droit de la famille et obéit aux mêmes principes. Par le fait même, je suis confiant qu'il saura répondre, comme cette réforme, aux aspirations et aux attentes des Québécois et des Québécoises et qu'il saura aussi avoir l'assentiment des membres de l'Opposition officielle.

Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de D'Arcy McGee.

M. Herbert Marx

M. Marx: Merci, M. le Président. Le projet de loi no 18, à l'étude devant la Chambre, porte sur la modification du Code de procédure civile et d'autres lois afin de permettre l'application de la réforme du droit de la famille que nous avons adoptée en 1980, c'est-à-dire la loi no 89. Il va sans dire que l'Opposition est favorable à toute mesure pour rendre efficace l'application de la loi 89. Nous avons dit, en 1980, que ce n'était pas assez d'adopter la loi 89 et nous avons insisté, à cette époque, pour qu'on adopte les modifications au Code de procédure civile afin qu'on puisse mettre en application la loi 89 d'une façon efficace.

Le ministre a déjà souligné les points saillants, les points importants de ce projet de loi et je ne veux pas répéter tout ce qu'il a déjà dit. Vous savez, c'est toujours plus difficile pour le deuxième qui parle. Le premier commence et le deuxième ne peut que répéter ou trouver d'autres points à souligner; le ministre a déjà souligné tous les points importants, il ne m'en reste pas. Ce que j'aimerais faire, c'est situer le projet de loi no 18 dans l'ensemble de la réforme du Code civil et de notre droit civil en général.

Vous savez bien que le Code civil est la loi fondamentale au Québec, c'est la loi la plus importante. C'est plutôt un corps de droit et non pas seulement un code de droit. Comme je viens de le dire, c'est la loi fondamentale la plus importante qui existe au Québec. Notre Code civil comporte le droit commun des Québécois et ce code englobe le droit qui régit les rapports entre citoyens au Québec. Le Code civil est un des éléments qui ont fait du Québec une société distincte dans le Canada parce que, dans les autres provinces, les rapports entre individus sont réglementés par le "common law" qui est, bien sûr, d'inspiration anglaise. Le "common law" vient de l'Angleterre et, comme vous le savez, le Code civil est d'inspiration française. Notre Code civil est la codification du droit coutumier et plus précisément de la coutume de Paris.

Ce Code civil, que nous avons aujourd'hui, a été adopté en 1866, c'est-à-dire même avant la Confédération. Avec la constitution, avec l'adoption de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique, on voit dans les textes mêmes que le Québec n'est pas une province comme les autres; on a reconnu, dans la constitution, la différence de la société québécoise parce que dans la constitution du Canada, c'est-à-dire dans l'Acte de l'Amérique du Nord britannique, on déclare, à l'article 94, qu'on peut faire l'uniformisation des lois dans toutes les provinces, mais on a exclu le Québec et on l'a exclu, bien sûr, parce que le Québec a un système de droit civil qui est assez différent des systèmes de droit civil dans toutes les autres provinces du Canada.

M. le Président, on parle au Québec de la réforme de notre Code civil depuis fort longtemps, c'est-à-dire qu'on a commencé à parler, je pense, d'une grande réforme du Code civil il y a 25 ans au moins parce qu'il est nécessaire de mettre à jour notre Code civil puisque, comme je l'ai dit, il a été adopté en 1866, depuis déjà plus d'un siècle. On y a déjà fait des modifications, des ajouts et ainsi de suite, mais on n'a jamais fait une réforme complète d'un bout à l'autre du Code civil.

Il y a environ 20 ans, le gouvernement du Québec a établi l'Office de révision du Code civil. On a demandé à cet office d'examiner en profondeur tous les titres du

Code civil, tous les chapitres du Code civil et tous les articles qui s'y trouvent. Cela a pris des années et des années, bien sûr, pour que l'office ait le temps d'étudier tout le Code civil et de préparer un rapport. Le gouvernement du Québec, le gouvernement péquiste que nous avons aujourd'hui, a reçu ce rapport final il y a déjà quelques années, mais le gouvernement a suggéré très peu de réformes, c'est-à-dire que très peu de réformes suggérées dans le rapport de l'Office de révision du Code civil sont traduites en lois. La seule révision importante jusqu'à aujourd'hui, c'est essentiellement la loi 89 que nous avons adoptée en décembre 1980. Mais - et je dois le souligner - le rapport de l'Office de révision du Code civil est un rapport d'ensemble. C'est un travail de 20 ans. Le danger qu'il y a avec le gouvernement actuel, c'est qu'on veut faire la révision du Code civil à la pièce. On veut adopter un morceau chaque couple d'années. Comme on le fait maintenant, comme le gouvernement se propose de le faire, ça va peut-être prendre 25 ans si on fait un chapitre par deux ans, ça va prendre au moins 25 ans. J'ai peur que beaucoup des réformes proposées par l'Office de révision du Code civil ne soient désuètes avant d'être adoptées par l'Assemblée nationale.

De plus, M. le Président, si on fait des modifications à la pièce, on va se retrouver avec beaucoup de contradictions, beaucoup d'erreurs, beaucoup de lacunes et ainsi de suite. Qui va souffrir de tout ça? Bien sûr, M. le Président, c'est vous et moi et tous les citoyens et citoyennes du Québec, donc, les rapports juridiques sont régis par notre Code civil. J'ai déjà fait un long exposé, en mai 1981, devant la commission permanente de la justice pour expliquer que notre droit civil est un mélange aujourd'hui, M. le Président. J'invite le ministre à relire le discours que j'ai fait en commission parlementaire pour voir comment c'est difficile pour les avocats - et si c'est difficile pour les avocats, cela doit être encore plus difficile pour les citoyens - de se retrouver dans notre Code civil. En effet, aujourd'hui, nous avons deux codes civils: il y a le Code civil du Bas-Canada de 1866, qui a été amendé et modifié depuis, et il y a le Code civil du Québec qui est en fait la loi 89. (16 heures)

Comme je viens de le dire, les avocats sont souvent mêlés entre ces deux codes, toutes les modifications, ils ne se retrouvent pas et il faut mettre un peu d'ordre dans ces codes de droit civil. M. le Président, je demande encore une fois au gouvernement d'accélérer le processus d'adoption de lois découlant de la révision du Code civil. Le gouvernement devrait pouvoir nous présenter une cédule pour dire: On va adopter tout le

nouveau Code civil d'ici deux ou trois ans, on va l'adopter, on va faire cette réforme durant ce Parlement. Je pense qu'un gouvernement qui a l'intention de vraiment compléter cette réforme pourrait le faire durant un Parlement et j'aimerais que le ministre prenne l'engagement de terminer cette réforme du droit civil durant le présent Parlement. Il va de soi que la mise a jour, la modification de notre Code civil est au-dessus de la partisanerie politique et que le ministre aura la coopération complète de l'Opposition, comme il l'a eue pour faire adopter la loi 89. Nous avions offert notre coopération pour que ce soit possible d'adopter la loi avant Noël 1980.

Pour revenir spécifiquement au projet de loi no 18 qui est devant la Chambre, il faut, bien sûr, adopter des mesures de procédure afin de permettre la mise en application de la loi 89 qui est, comme le ministre vient de le dire, la réforme du droit de la famille. L'application complète de cette loi a été retardée parce qu'on n'a pas adopté les modifications nécessaires en matière de procédure civile. Il faut, bien sûr, étudier en profondeur les changements proposés dans ce projet de loi parce que souvent la forme rejoint le fond, c'est-à-dire que la procédure peut être aussi importante que le droit substantif. C'est notre devoir d'étudier le projet de loi no 18 en profondeur et j'imagine qu'on va le faire en commission parlementaire après les fêtes.

Il y a certains problèmes que je vois tout de suite dans le projet de loi no 18 et je peux vous en donner deux ou trois exemples, M. le Président. Premièrement, le projet de loi no 18 modifie la procédure concernant la façon d'introduire une demande. J'aimerais en discuter en commission parlementaire et voir comment c'est nécessaire, pourquoi c'est nécessaire et ainsi de suite. Deuxième exemple, il y a la présomption de validité qu'on trouve à l'article 79, une présomption qui doit être minutieusement examinée en commission parlementaire. Enfin, un troisième exemple, au lieu de passer carrément outre à la Charte des droits et libertés de la personne, dans ce projet de loi, on trouve une modification directe à l'article 39 de la charte des droits pour prévoir le huis clos en matière de famille sauf si le tribunal en décide autrement. M. le Président, pour le bien-être de tous les Québécois, je crois qu'il faudrait étudier l'effet de ce changement à la charte des droits. Il me semble que le ministre innove ici, c'est-à-dire qu'au lieu d'adopter une disposition pour dire: Nonobstant la charte des droits du Québec, on adopte telle et telle disposition, le ministre propose de modifier la charte des droits elle-même pour, en fait, contourner une des dispositions qu'on retrouve dans la charte. Il serait peut-être intéressant d'avoir l'opinion de la Commission des droits de la personne en ce qui concerne des modifications de ce genre, quoique je ne veuille pas préjuger de ma réponse en ce qui concerne le bien-fondé ou le "mal-fondé" de cet article, mais je pense que c'est une procédure tout à fait nouvelle.

En terminant, M. le Président, nous sommes plutôt favorables à ce projet de loi. Comme je l'ai dit au début, il faut adopter un projet de loi pour modifier le Code de procédure civile pour qu'on puisse mettre en application la loi 89. On est un peu surpris que cela ait pris presque un an au ministre pour déposer ce projet de loi. Il va sans dire que ce ne sera pas adopté avant Noël, mais plutôt, je ne le sais pas, aux mois de février, mars ou avril. Donc, cela a pris beaucoup plus d'un an pour déposer un projet de loi pour permettre la mise en application efficace de la nouvelle Loi sur la famille. On pense que cela aurait dû venir plus tôt.

En conclusion, il faut procéder prudemment en cette matière, mais aussi d'une façon accélérée afin que ce projet de loi puisse bénéficier à tous les Québécois. En principe, nous sommes favorables à ce projet de loi. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Sainte-Anne.

M. Maximilien Polak

M. Polak: M. le Président, il me fait plaisir d'intervenir sur ce projet de loi no 18. Je pense surtout aux membres du barreau, aux avocats comme moi qui pratiquent depuis 23 ans, surtout dans le domaine du droit de la famille et encore dans la subdivision de séparation et de divorce. Donc, on a eu le bénéfice d'un discours d'un professeur d'université, le député de D'Arcy McGee, et maintenant, je pense, pour compléter notre représentation...

M. Marx: Je suis aussi membre du barreau.

M. Polak: Oui, il est membre du barreau. Même au barreau, on fait la distinction entre ceux qui sont professeurs d'université et ceux qui sont dans le champ, qui font la bataille de jour en jour devant les tribunaux. Donc, je pense que le ministre et peut-être aussi un peu le député de D'Arcy McGee auront besoin d'un point de vue pratique sur ces changements. Il ne s'agit pas seulement de la plomberie, il s'agit aussi de changements de nature substantielle. Je vous fais part d'une certaine anxiété qui règne au Barreau du Québec qui d'ailleurs a présenté un mémoire dont j'ai reçu une copie. Je suis certain que le ministre de la Justice a déjà pris connaissance de ce mémoire, mais je pense

que c'est important que l'opinion publique soit aussi au courant de certaines objections qui existent contre le projet tel qu'il se trouve maintenant.

En premier lieu, on a l'impression, quand on lit ce projet de loi, qu'il a été rédigé par des bons fonctionnaires, mais peut-être qu'il n'y avait pas assez de praticiens qui ont travaillé à la préparation de ce texte. Je pense qu'on pourrait certainement améliorer la rédaction de ce texte pour amener un peu moins de confusion. Il y a un grand changement en ce qui concerne le rôle du juge parce que, jusqu'ici, le juge est celui qui tranche le débat. En d'autres termes, les parties sont représentées par des avocats qui présentent la preuve devant le tribunal, de part et d'autre, et le juge a un rôle plutôt passif. Il est obligé d'écouter la preuve des deux parties pour ensuite trancher le débat. C'est vrai que le juge, pour compléter la preuve, peut demander des renseignements additionnels. II a un certain rôle actif à jouer, même dans le système actuel, mais je crois qu'avec tout le respect que je dois aux juges de toutes les cours de la province de Québec, il est très bon, de temps en temps, de tenir le juge en place. Cela, c'est aux avocats de le faire. (16 h 10)

II y a ici une grande modification; on fait maintenant du juge une sorte d'acteur dans cette preuve parce qu'il peut assigner des témoins, créer les orientations dans la preuve, même sans le consentement des parties et, par la suite, c'est lui qui va juger sur la preuve qu'il s'est lui-même donnée. C'est un changement assez important; le Barreau du Québec l'a indiqué et trouve cela un peu incompatible, parfois, avec la fonction du juge telle qu'on la connaît maintenant.

De plus, ce même juge jouera un rôle important comme conciliateur, évidemment, le barreau indique qu'il y a également un problème; si, à un moment donné, ce même conciliateur ne réussit pas dans sa tentative de conciliation, il devient en charge de trancher le litige. Il peut y avoir un certain problème même dans l'esprit du juge qui a agi comme conciliateur, qui n'a pas réussi et qui doit alors trancher le débat selon les règles qu'on connaît.

Le deuxième point qui a été mentionné, c'est que le ministre a dit qu'on voulait simplifier la procédure. Je suis certain que tous les membres du barreau sont en faveur des deux principes. Mais que dit-on dans la loi? On dit qu'il y a deux façons de procéder. En certaines matières, on procède par requête et, en d'autres matières, par le biais d'une déclaration. Si on voulait simplifier, pourquoi ne pas avoir pris un type de procédure plutôt que deux? Cela peut mener à la confusion, il y a des possibilités d'erreur, d'imprécision et, justement, d'insécurité parmi les juristes et parmi les justiciables. Cela, c'est un autre point qui a été soulevé et qui est important. Je pense que ça pourrait être corrigé dans le texte final de la loi.

Le troisième point, c'est qu'à la fin, à l'article 33, on suspend, dans le texte de la loi qui est devant nous maintenant, la promulgation de certaines dispositions de la loi et, ensuite, on ne leur donne effet que pour permettre de rendre opérationnelles les dispositions d'un autre chapitre. En d'autres termes, ces deux articles ne seront pas en vigueur, mais ils seront présumés être en vigueur pour fins d'application d'autres articles. Vraiment, si on veut dire qu'on est mêlé, on est mêlé. J'ai relu le texte quatre ou cinq fois, et, ayant pratiqué le droit pendant 23 ans comme avocat devant le Tribunal de la famille, j'ai eu énormément de difficulté à comprendre ce qu'on voulait faire. Cela peut mener à une très grande confusion. Il faut que ce soit tranché clairement. Avec tout le respect que je dois aux fonctionnaires qui rédigent les lois, je pense qu'un bon praticien n'a pas participé activement à cette rédaction, il y a des corrections à apporter.

Le quatrième point qui a été soulevé par le barreau, c'est le problème de la constitutionnalité de certaines dispositions de ce projet de loi no 18. Nous savons tous que, du moment qu'il y a des dispositions qui semblent même prima facie être inconstitutionnelles, un avocat va attaquer la constitutionnalité de ces dispositions et ça peut bouleverser tout le système. Imaginez que ça arrive dans une affaire de divorce ou de séparation, le juge peut dire: On va suspendre la cause en attendant le jugement final des tribunaux parce que le point est en litige.

Peut-être aurait-il été préférable, plutôt que d'attendre les décisions, que le problème fût résolu avant de revenir avec les dispositions telles qu'elles sont présentées dans le projet de loi. On éviterait des débats de cette nature qui auraient comme résultat que les délais seraient prolongés, les coûts, augmentés, et le justiciable se trouverait dans une situation inconfortable. Il nous consulterait à savoir s'il peut prendre telle ou telle procédure. Que doit-on dire comme avocat? Savez-vous, monsieur ou madame, cette affaire est maintenant devant la Cour d'appel, après l'audition, sans doute que ce sera décidé par la Cour suprême si c'est un point de constitutionnalité. Qu'est-ce qu'on doit conseiller au client? C'est très difficile. Dans ce texte, on suscite les problèmes qu'on voudrait éviter.

Maintenant, le ministre a fait mention du fait qu'il y aura cet aspect de demande conjointe. Je comprends très bien. Je vois les avantages de cette demande conjointe.

D'autre part, il ne faut pas oublier non plus que l'État a une certaine obligation de protéger l'institution de la famille et du mariage. Il ne faut tout de même pas qu'à un moment donné deux personnes mariées puissent se présenter devant un juge pendant cinq minutes avec un document en disant: Voici, on veut dissoudre notre mariage. Il faut être prudent. Il sera important d'analyser cela plus tard en détail pour que, justement, on ait une solution plus rapide quand le divorce ou la séparation doivent avoir lieu mais, d'un autre côté, il faut éviter que cela soit trop facile. Des jeunes mariés, pendant les premiers six mois, ont leur première grande bataille et ils disent: Bon! On va aller voir le juge tout de suite demander la séparation ou le divorce. Je ne pense pas que ce soit l'intention de la loi.

En conclusion, M. le Président, en vertu des points que j'ai soulevés, le barreau a dit, dans une lettre du 14 décembre adressée au ministre de la Justice, dont j'ai reçu copie, qu'il aimerait bien avoir une commission parlementaire où, justement, tous ces points pourront être débattus et où, évidemment, le barreau aura le droit d'être présent, d'être entendu. Je n'ai pas encore obtenu une réponse du ministre. Je ne sais pas s'il est favorable à une telle démarche, mais j'appuie entièrement la demande du député de D'Arcy McGee, à savoir qu'une telle commission parlementaire devrait avoir lieu le plus tôt possible et, deuxièmement, que pas seulement le barreau, mais, évidemment, d'autres organismes qui sont intéressés dans ce domaine puissent avoir l'occasion de présenter des mémoires et de se faire entendre, de sorte qu'on pourrait apporter, espérons-le, les amendements qui s'imposent pour avoir une loi qui sera souple et plus simple que la procédure actuelle. Mais, sans doute, pour obtenir un tel résultat, faut-il apporter des amendements assez importants. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre, votre droit de réplique.

M. Marc-André Bédard (réplique)

M. Bédard: Quelques commentaires, M. le Président, parce que je ne crois pas qu'il y ait une longue réplique à faire, étant donné que les représentants de l'Opposition, malgré leurs remarques, ont indiqué leur intention de voter pour le projet de loi.

Je remercie le député de Sainte-Anne pour les remarques judicieuses qu'il a faites. Effectivement, j'ai eu l'occasion aussi de prendre connaissance des remarques formulées par le barreau et d'autres associations. On n'a jamais la prétention de présenter un projet de loi parfait. Ce qui est important - je pense que c'est le sentiment de tous les membres de cette Assemblée - c'est d'unir nos efforts en termes de collaboration de manière à en arriver au projet de loi le plus acceptable possible.

Je voudrais quand même faire remarquer que ce projet de loi a fait l'objet de nombreuses consultations avec le barreau, la Chambre des notaires, la magistrature, le comité tripartite de la justice. Il n'est pas arrivé comme cela, il n'a pas été déposé comme étant le fruit simplement d'intellectuels, comme a semblé le laisser entendre le député de Sainte-Anne.

Je voudrais dire au député de Sainte-Anne qu'il n'y a pas seulement des professeurs d'université ou encore des fonctionnaires qui ont travaillé à la rédaction de ce projet de loi. En passant, je pense que le député de Sainte-Anne ne voulait pas être négatif à l'endroit du travail fait par les fonctionnaires du ministère de la Justice concernant ce projet de loi, parce qu'ils ont fait un travail formidable. Ce n'est quand même pas facile de jouer avec des notions aussi compliquées et d'essayer d'en arriver à un texte qui soit compréhensible et acceptable pour tout le monde. Non seulement en mon nom personnel et au nom du gouvernement, mais également au nom des membres de l'Opposition, on doit féliciter tous les membres du contentieux du gouvernement qui ont travaillé d'arrache-pied à ce projet de loi. (16 h 20)

Effectivement, comme l'a mentionné le député de D'Arcy McGee, nous procédons aujourd'hui à la deuxième lecture. Nous allons ensuite avoir l'occasion d'étudier ce projet de loi article par article en commission parlementaire. Nous aurons, à ce moment-là, l'occasion de formuler toutes nos réserves et de faire preuve d'imagination pour mettre sur la table toutes les suggestions qui sont susceptibles d'améliorer le projet de loi.

M. le Président, en terminant, je puis également assurer le député de D'Arcy McGee que c'est avec le plus de célérité possible que nous allons procéder à la réforme d'autres chapitres du Code civil. Le député de D'Arcy McGee a dit qu'il fallait y aller prudemment et rapidement. Il conviendra que ce n'est pas facile de concilier ces deux notions. Effectivement, au moment où on se parle, il y a déjà des équipes qui sont au travail depuis plusieurs mois sur des chapitres que j'ai déjà indiqués en ce qui a trait à la continuation du travail de réforme du Code civil.

Ce sont les seuls commentaires que j'ai à formuler, M. le Président. Je remercie les membres de l'Opposition de continuer leur collaboration dans ce dossier très important pour l'ensemble de la société québécoise, puisqu'il s'agit effectivement, quand on parle du Code civil, de la loi la plus fondamentale de la société québécoise.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Est-ce que cette deuxième lecture du projet de loi no 28, Loi modifiant diverses dispositions législatives, est adoptée?

M. Polak: M. le Président...

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Sainte-Anne.

M. Polak: J'ai une remarque de 30 secondes. Je ne voudrais pas que le ministre pense que je suis contre les intellectuels ou ceux qui ont rédigé ce texte-là, je respecte trop la pratique du droit, l'Université de Montréal et les fonctionnaires du ministère pour cela. Tout ce que j'ai voulu dire -peut-être avait-il mal compris? - c'est qu'à la commission parlementaire les praticiens qui travaillent dans le champ, comme on dit, seront entendus pour améliorer le texte. Merci.

Le Vice-Président (M. Jolivet): C'était, en vertu de l'article 96, M. le député, une très belle intervention.

Est-ce que ce projet de loi est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Secrétaire adjoint: Deuxième lecture de ce projet de loi.

Renvoi à la commission de la justice

Le Vice-Président (M. Jolivet): Déférence de ce projet en commission, M. le ministre?

M. Bédard: Déférence en commission de la justice, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Cette motion de déférence est-elle adoptée?

Une voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté. Le prochain article.

M. Bédard: M. le Président, je vous demanderais d'appeler l'article qui traite du projet de loi no 28. Je comprends que mon leader est absent au moment où l'on se parle...

Projet de loi no 28 Deuxième lecture

Le Vice-Président (M. Jolivet): Excusez, je viens de me rendre compte d'une erreur que j'ai commise. J'ai appelé la deuxième lecture du projet de loi no 28 alors qu'en réalité j'aurais du dire le projet de loi no 18. Nous allons donc à la deuxième lecture du projet de loi no 28, Loi modifiant diverses dispositions législatives, en sous-entendant qu'on aurait dû dire tout à l'heure que c'est le projet de loi no 18, Loi assurant l'application de la réforme du droit de la famille et modifiant le Code de procédure civile, qui a été adopté en deuxième lecture et déféré en commission parlementaire. M. le ministre.

M. Marc-André Bédard

M. Rédard: Je vous remercie, M. le Président. Concernant le projet de loi no 28, il s'agit d'une Loi modifiant diverses dispositions législatives. Comme par les années passées, j'ai déposé devant cette Assemblée un projet de loi visant à modifier certaines dispositions législatives. Vous constaterez, à la lecture du projet de loi no 28 et notamment à la lecture des notes explicatives, que ce projet de loi propose des modifications à une quinzaine de lois. Le regroupement de ces modifications en un seul projet évite à l'Assemblée nationale l'étude d'autant de projets de loi. Je pense que c'est une façon de procéder avec plus de célérité parce que, s'il avait fallu que nous présentions pas moins d'une quinzaine de projets de loi, je crois qu'il aurait été plus difficile d'atteindre l'objectif que nous voulons atteindre par un projet de loi de cette nature qui est, effectivement, de corriger certaines dispositions et ce, à l'avantage des citoyens.

Compte tenu de ce qui précède, je me limiterai à commenter, parmi les principales modifications proposées par ce projet, celles qui sont les plus significatives. Le projet de loi propose des modifications à la Loi sur les agents de voyages et à la Loi sur le ministère de l'Habitation et de la Protection du consommateur afin de transférer la responsabilité de la surveillance de la Loi sur les agents de voyages, du nouveau ministère de l'Habitation et de la Protection du consommateur, de transférer cette responsabilité à l'Office de la protection du consommateur.

Je vois le député de Saint-Louis qui est bien d'accord. Si je me rappelle bien, lorsque nous étions dans l'Opposition, cette demande avait été faite. On s'aperçoit que ça prend du temps parfois, mais remarquez que vous ne l'aviez pas fait lorsque vous étiez dans l'Opposition. Maintenant, il y a un nouvel Office de la protection du consommateur.

Ce transfert semble opportun, compte tenu que l'Office de la protection du consommateur est structuré, est organisé pour surveiller l'application des lois analogues à celle de la Loi sur les agents de voyages. C'est d'autant plus indiqué que cette commission dispose des ressources nécessaires pour surveiller l'application de cette loi.

Autre modification significative: la Loi

électorale fait aussi l'objet d'une proposition de modification. En effet, aucune modification de cette loi ne prévoit la possibilité pour le directeur général des élections de nommer un suppléant à un directeur de scrutin qui doit s'absenter, qui devient incapable ou dont le poste devient vacant. Il y a donc lieu de modifier la Loi électorale pour remédier à cette situation.

En outre de quelques corrections de nature technique ou de concordance aux articles déjà inclus dans le projet de loi, je voudrais proposer, à la suite des représentations qui m'ont été faites, certains amendements au projet de loi no 28. D'autres modifications seront proposées à la Loi assurant l'exercice des droits des personnes handicapées afin de permettre à l'office d'exiger, par étapes et selon la taille des entreprises, les plans d'embauchage de personnes handicapées que les employeurs de 50 salariés ou plus seront tenus de lui soumettre. Un mécanisme sera aussi prévu afin de permettre à l'office d'assurer un suivi sur la mise en oeuvre de ces plans d'embauchage.

J'ai également l'intention de proposer des modifications à la Loi sur la refonte des lois et règlements afin d'établir principalement que la publication de la refonte des règlements se fera sous forme d'édition plutôt que sous la forme des feuilles mobiles que l'on connaît. En plus de représenter, en période d'austérité, une économie substantielle, la formule de l'édition reliée, que nous adopterons en fonction de l'avenir - cela répond aussi à certaines demandes qui avaient été faites -répondrait à un voeu exprimé, entre autres, par le barreau dans le rapport de son comité de législation en date de septembre 1981 et qui m'a été présenté officiellement par le bâtonnier en octobre 1981.

En terminant, je tiens à vous préciser qu'en outre des modifications dont j'ai traité sommairement, le projet de loi comporte aussi des modifications de concordance qui en découlent. Toutes les modifications que je viens de suggérer sont importantes pour assurer la cohérence de notre corpus législatif, bien que plusieurs d'entre elles ne visent que des corrections mineures. Toutefois, leur impact éventuel et l'urgence de leur application n'en sont pas moins grands pour ceux qu'elles concernent. Je pense, entre autres, aux dispositions concernant les handicapés et les autres que j'ai énumérées tout à l'heure. Pour ces raisons, je propose l'adoption de ce projet de loi et je vous informe également que je ne les ai pas en main. Il y aura peut-être d'autres amendements qui seront proposés en commission, mais j'en informerai préalablement mon vis-à-vis de l'Opposition, de manière que nous puissions convenir de l'à-propos de l'adoption de nouvelles dispositions qui seraient incluses dans ce projet de loi. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de D'Arcy McGee. (16 h 30)

M. Herbert Marx

M. Marx: Merci, M. le Président. Il s'agit, bien sûr, d'un projet de loi omnibus qui touche beaucoup de lois, c'est un projet de loi qui est présenté avant la fin de chaque session. C'est évident que le ministre va avoir la coopération de l'Opposition pour faire adopter ce projet de loi, s'il le veut, même avant les fêtes. Il s'agit surtout, comme le ministre vient de le dire, de faire la concordance entre certaines lois, de corriger certaines erreurs qui se sont glissées dans un certain nombre de projets de loi et ainsi de suite. Il s'agit de la modification de dix-sept lois et pour la plupart elles ne méritent pas d'être des lois distinctes. C'est pourquoi on va adopter un projet de loi omnibus pour couvrir toutes ces lois avec les modifications qui sont contenues dans ce projet de loi.

Il y a certaines modifications de fond, M. le Président. Par exemple, il y a la Loi sur les normes du travail qui est modifiée à l'article 43 et il sera nécessaire d'étudier cette modification de fond en commission parlementaire. Nous avons juste reçu d'autres amendements qui ont été proposés par le ministre de la Justice. Bien sûr, il sera nécessaire d'étudier ces amendements parce que je vois qu'on va modifier la loi qui touche les droits des personnes handicapées. Il me semble, M. le Président, qu'il s'agit d'une modification de fond en ce qui concerne la loi qui touche ces personnes handicapées.

On va les étudier en commission parlementaire et, en principe, il va de soi que nous sommes en faveur de ce projet de loi. On va faire les modifications nécessaires en commission parlementaire. C'est tout ce que j'ai à dire pour le moment, M. le Président. Merci.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Saint-Louis.

M. Harry Blank

M. Blank: Seulement une intervention très courte. Le ministre de la Justice a parlé du transfert des agents de voyages à l'Office de la protection du consommateur parce que ce dernier peut surveiller d'une meilleure façon la situation pour qu'il donne une certaine protection aux citoyens du Québec. En voyant qu'on fait des amendements à la Loi sur le ministère de l'Habitation et de la Protection du

consommateur, je veux attirer l'attention du ministre parce que peut-être il devra ajouter un autre amendement quand il fera ses amendements. Dans cette loi de la protection du consommateur, il y a un groupe qui n'est pas touché par la loi, qui est exempté de la loi. Au moment où on a adopté cette loi, cela avait du bon sens. Hydro-Québec est exemptée de la loi de la protection du consommateur. Quand Hydro-Québec était autonome et avait comme mandat de donner le plus bas prix de l'électricité, on avait raison. Pas de problème.

Maintenant avec le bill 16 et les autres choses que le gouvernement fait, cela devient une agence gouvernementale dans le sens que le gouvernement va contrôler, augmenter les prix pour n'importe quelle raison, sans aucune protection pour le consommateur. Je suggère que le ministre se penche sur le problème, c'est-à-dire amende la loi pour ajouter le nom d'Hydro-Québec à la loi de l'Office de la protection du consommateur pour que nous les citoyens du Québec puissions avoir un peu de la protection qu'on n'a pas ici en Chambre.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre, votre droit de réplique.

M. Marc-André Bédard (réplique)

M. Bédard: Ma réplique sera brève, M. le Président, je vois que le député de Saint-Louis profite de l'occasion pour passer son message dans le contexte du "filibuster" que nous venons de vivre en cette Chambre. Je prends note de ce qu'il a dit. J'espère que la discussion que nous aurons sur ce point ne fera pas l'objet d'un "filibuster", quelles que soient les positions que nous adopterons. M. le Président, je demanderais simplement qu'il y ait déférence pour étude en commission de la justice.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Avant la référence, je vais la faire adopter.

M. Bédard: C'est ça.

Renvoi à la commission de la justice

Le Vice-Président (M. Jolivet): Adoption, cette fois-ci réelle, de la deuxième lecture du projet de loi no 28, Loi modifiant diverses dispositions législatives. J'ai cru comprendre qu'en même temps on demandait la déférence à la commission de la justice. Est-ce que cette motion est acceptée?

M. Bédard: M. le Président...

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. Levesque (Bonaventure): Avant que nous disposions du projet de loi là-dessus? Je préfère, dans ce cas, M. le Président, consentir à l'adoption de la motion relativement au projet de loi lui-même et, dans un deuxième temps, accepter qu'on puisse le déférer à la commission parlementaire de la justice.

Le Vice-Président (M. Jolivet): C'est cela. Donc, j'allais demander, premièrement, si la motion d'acceptation de la deuxième lecture était adoptée?

Une voix: Adopté.

Le Secrétaire adjoint: Deuxième lecture de ce projet de loi.

Renvoi du projet de loi no 34

à la commission de la présidence

du conseil et de la constitution

M. Bédard: M. le Président, il s'est peut-être glissé une erreur lorsque nous étions dans l'étude des lois concernant le ministère de la Justice. Je voudrais bien vérifier. Concernant la loi 34, je crois qu'on a fait une déférence à la commission de la justice plutôt qu'à la commission de la présidence du conseil et de la constitution.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Donc, nous corrigeons.

M. Bédard: Je demanderais qu'il y ait une correction et que la déférence se fasse à la commission de la présidence du conseil et de la constitution. C'est cela, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): C'est cela. Donc, la loi 34 sera déférée à la commission de la présidence du conseil et de la constitution et la loi 28 à la commission de la justice. M. le leader.

M. Charron: M. le Président, conformément au menu indiqué, je vous prierais d'appeler maintenant le projet de loi inscrit au nom du ministre de l'Agriculture, l'article 6. Non, pas 6, mais 10. C'est cela, M. le Président, vous êtes tombé droit dessus. Article 10 du feuilleton.

Projet de loi no 36 Deuxième lecture

Le Vice-Président (M. Jolivet): Article 10. Deuxième lecture du projet de loi no 36, Loi modifiant la Loi sur les produits agricoles et les aliments. M. le ministre, la parole est à vous.

M. Jean Garon

M. Garon: M. le Président, cela me fait plaisir aujourd'hui d'avoir à présenter le projet de loi dont nous allons discuter en deuxième lecture, qui modifie la Loi sur les produits agricoles et les aliments, loi qui deviendra la Loi sur les produits agricoles, les produits marins et les aliments. Je déplore le fait toutefois, M. le Président, que le chef de l'Opposition libérale, le député d'Argenteuil, ne soit pas présent. Je m'aperçois qu'il ne s'intéresse pas plus au secteur des pêches qu'il ne s'intéresse au secteur agricole, puisque pendant deux ans...

Le Vice-Président (M. Jolivet): Question de privilège de la part du leader de l'Opposition.

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, je dois donc conclure que ni le premier ministre, ni le ministre de la Justice, ni le ministre d'État au Développement culturel, ni le...

Le Vice-Président (M. Jolivet): Le message étant passé, maintenant, sur le projet de loi, M. le ministre.

M. Garon: M. le Président, évidemment, quand, pendant des mois et des années, le chef d'un parti politique ne s'intéresse pas à un secteur, évidemment, après cela il est obligé de faire toutes sortes de chinoiseries pour essayer de démontrer que cela l'intéresse quelque peu, comme ce matin lorsqu'on a présenté une proposition qui venait confirmer que ce que je disais la veille était vrai. Tantôt, quand je parlerai des pêches, j'aurai un mot à dire du gouvernement...

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre, seulement une instant. Je voudrais que vous arriviez au projet de loi, s'il vous plaît!

M. Garon: M. le Président, quand on parle de l'agriculture et des pêches c'est beaucoup plus interrelié qu'on pense. C'est le ministre fédéral des Pêches et des Océans, M. LeBlanc, qui me disait la semaine dernière que le fait que le secteur des pêches sera regroupé avec l'agriculture, va vous donner sans doute la possibilité, dans le secteur des pêches, d'un peu tracer la voie, parce que le secteur agricole, qui est familier avec les aliments, a tout un dispositif de services qu'il va pouvoir fournir à un certain nombre de services du secteur des pêches, ce qu'il serait trop onéreux pour un gouvernement d'avoir en double. Par exemple, aujourd'hui, M. le Président, pour la préparation de ce projet de loi, nous avons utilisé un grand nombre de services du ministère, du secteur des pêches et du secteur agricole, avec, évidemment, la

Direction des pêches maritimes, mais également la Direction de l'inspection des aliments, le service de la normalisation des aliments, la direction des études économiques, la direction du développement industriel agroalimentaire. C'est pour cela que, dans l'antichambre, on pourrait trouver des fonctionnaires comme Me Ducharme, qui est un avocat spécialisé dans la rédaction de textes de loi dans ce domaine, Me Cantin, Mme Julien, le sous-ministre Moore, M. Duchesne. Ce sont des gens qui ont - j'en oublie, parce que je ne pourrais pas les nommer tous - contribué à ce secteur - il y a les gens du milieu économique également -pour arriver à un projet de loi comme celui-là. (16 h 40)

Un projet de loi comme celui-là, M. le Président, va placer le Québec à l'avant-garde au Canada, alors qu'encore récemment, il y a quelques jours, les gens du fédéral faisaient encore un collogue d'étude à Matane. Je ne leur reproche pas d'en faire mais, nous, nous avons dépassé le stade des études et nous sommes prêts à proposer une loi qui va être un détonateur dans le secteur des pêches maritimes. Les gens ont parlé longtemps de qualité mais il ne faut pas seulement en parler, il faut adopter des mesures. On verra combien cela prendra de temps - je ne le dis pas méchamment, je connais les difficultés qu'il aura - au gouvernement fédéral pour arriver à une législation moderne dans le secteur des pêches pour un excellent contrôle de la qualité.

Vous savez, tout ça n'est pas arrivé au hasard; un grand nombre d'études ont été faites sur le contrôle de la qualité. Vous me permettrez, M. le Président, de vous dire que dès 1970 une étude réalisée sur la commercialisation du poisson au Canada par Stevenson et Kellogg, à la demande des industriels du secteur des pêches, recommandait à ceux-ci de s'attaquer à trois problèmes fondamentaux: la qualité médiocre des produits de la mer, la fraîcheur de ceux-ci et les mauvaises odeurs qui s'en dégagent. Dès 1973 aussi, une autre étude portant sur la commercialisation du poisson au Québec, réalisée par la maison Redma et Associés à la demande du ministère de l'Industrie et du Commerce, faisait état de la constatation qui suit: Tous nos interlocuteurs sont unanimes à observer que la qualité des produits en provenance d'un certain territoire maritime du Québec est inférieure à celle obtenue des autres provinces de l'Atlantique.

Par ailleurs, lors d'une intervention faite en 1978, au cours d'une conférence socio-économique sur les pêches à Gaspé, la vice-présidente de la section québécoise de l'Association des consommateurs du Canada déclarait que la qualité inégale de certains

poissons frais ou congelés diminue l'attrait du consommateur et éloigne ceux qui seraient tout disposés à leur donner une plus grande place dans leur menu quotidien. Même chose au cours du mois de septembre 1979, rapport d'une enquête réalisée par le ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation qui traite du même sujet et qui fixe le pourcentage, tant au niveau du détail qu'au niveau des usines de transformation, ou encore la quantité de produits qui ne répondent pas à toutes les normes auxquelles ils devraient se soumettre au point de vue de la qualité.

Je ne veux pas entrer dans les détails parce que je pense qu'il y a eu beaucoup de discussions là-dessus. Si les gens nous demandaient de rendre ces études publiques, ce ne serait pas un fleuron très glorieux à notre chapeau. C'est pour ça, je pense, qu'il est important d'améliorer la qualité du poisson au Québec en ayant d'abord un ensemble de règles précises concernant l'augmentation du contrôle de la qualité du poisson. Comme mets, le poisson est un des aliments qui subissent le plus de manutention sur le marché des aliments. Il y a peu d'aliments qui doivent subir autant de manutention que le poisson. Quand je dis le poisson, j'inclus les mollusques et les crustacés. Cela dépend, par exemple, des méthodes de pêche, selon qu'on pêche de telle ou telle façon. Tout le monde sait, principalement les gens de la Gaspésie ou les gens du territoire maritime, que lorsqu'on pêche des poissons à la palangre ou au filet maillant, le poisson meurt immédiatement dans l'eau ou reste vivant jusqu'à ce qu'on le retire de l'eau. S'il est mort dans l'eau et qu'il y reste à cause d'une tempête ou des mauvaises conditions atmosphériques, qu'on ne peut pas aller le rechercher immédiatement, il peut se détériorer dans l'eau. Lorsqu'on le remonte à bord du bateau, il peut être déjà de plus ou moins bonne qualité, de sorte que les instruments de pêche ont une importance.

À bord du bateau, de quelle façon est-il entreposé? Selon qu'il y a de la glace ou qu'il n'y en a pas, qu'il y a de la réfrigération ou qu'il n'y en a pas, toutes les méthodes de manipulation à bord du bateau jouent sur la qualité du poisson. Le débarquement au quai, de quelle façon se fait-il? Est-ce qu'on utilise des bacs ou des fourches pour manipuler le poisson au débarquement? Est-ce que le poisson reste sur le quai? Est-ce qu'il est manipulé au soleil ou non? Est-ce que le poisson va rester longtemps au soleil ou non? Est-ce que le poisson est transporté vers l'usine dans des camions sur des routes de terre, avec une forte possibilité de contamination, ou s'il est transporté d'une façon sécuritaire sur le plan hygiénique? À l'usine même, de quelle façon va-t-il être traité? Dans quelles conditions sera-t-il entreposé? Quelle sera la température maintenue dans les entrepôts frigorifiques, à quelle rapidité sera-t-il congelé. Tout cela, ce sont des éléments qui feront, encore là, que le poisson aura une meilleure qualité ou une plus grande constance de qualité. Ensuite, de quelle façon il sera transporté vers le marché de détail et, au marché de détail, de quelle façon il sera traité.

Je peux vous dire qu'au ministère de l'Agriculture, où les aliments sont la spécialité, il y a peu d'aliments qui connaissent autant de manutention que le poisson, dans des conditions aussi difficiles. C'est pourquoi il y a un problème qui n'est pas québécois, mais sur lequel on s'interroge dans l'ensemble du Canada au point de vue de l'amélioration de la qualité. Avec le projet de loi que nous avons déposé, que nous étudions en deuxième lecture aujourd'hui, nous serons la première province du Canada à arriver avec une loi moderne, alors qu'on s'interroge ailleurs.

C'est pour ça que, depuis que les pêches ont été rattachées au ministère de l'Agriculture, je me suis préoccupé d'aller voir de quelle façon on traitait le poisson en Europe, de quelle façon on le traitait dans les usines. Je suis allé également dans différentes usines du Canada, en Colombie britannique où on me disait que c'était là qu'on avait la meilleure façon de traiter le poisson. Je suis allé récemment sur la Côte-Ouest des États-Unis pour visiter des usines. Du matin au soir, j'ai visité des usines, des expositions de poissons. Pourquoi? Pour voir comment on traitait le poisson et pour faire la compilation des formes de réglementation pour en arriver à une meilleure qualité.

Aujourd'hui, dans le projet de loi qu'on présente, et surtout dans la réglementation que j'ai déposée en même temps que le projet de loi - on ne fait pas ça souvent au Parlement - pour que l'Opposition puisse se rendre compte de quoi il s'agit, il n'y a pas un chiffre qui a été tiré au fusil. Ce sont des chiffres qui ont été vérifiés. Il n'y a pas un chiffre dans la réglementation, au point de vue du degré de température pour le poisson, que ce soit à bord du bateau, que ce soit à l'usine, qu'il s'agisse du degré de congélation, qui n'a pas été l'objet d'une étude approfondie et de comparaisons avec ce qui se fait dans les différents pays d'Europe, aux États-Unis et dans tous les pays qui font le commerce du poisson d'une façon libre. Évidemment, on n'a pas regardé ce qui se faisait dans les pays qui fonctionnent différemment, où ce n'est pas le marché libre du poisson.

Cette loi n'est pas non plus sortie d'un chapeau de magicien. Je peux vous dire qu'il y a eu des colloques qui l'ont précédée. Tout à l'heure, on a parlé d'études, il y a aussi eu des colloques. Le colloque de Gaspé, au

mois de mars 1980, où la question de la qualité du poisson a été envisagée dans son ensemble. Lors de ce colloque étaient représentés les pêcheurs par leur association, les industriels de la pêche, les représentants des gouvernements et tous ceux qui, de près ou de loin, sont intéressés au commerce du poisson et à la pêche. Il y a eu, à ce moment-là, une entente sur les grandes lignes dans le secteur des pêches, au point de vue des principes. Immédiatement après, quand je suis revenu au ministère, à Québec, j'ai demandé aux gens de chez nous de commencer à travailler sur le plan des modalités.

Je peux vous dire que, quand on aura adopté le projet de loi, je pourrai tracer un tableau où sont écrites, depuis treize mois maintenant, les différentes phases que devrait comprendre une réglementation sur la qualité du poisson, c'est-à-dire les normes de construction des bateaux pour la conservation du poisson, le maintien de la qualité à bord des bateaux, les tris à quai ou au débarquement, le déchargement, la manutention à quai et le transport vers les usines, les normes de construction des usines, le contrôle de la qualité dans les usines, les procédures de manutention et de traitement du poisson, etc. Pourquoi? Pour que de la pêche du poisson dans l'eau jusqu'au magasin de détail, les comportements qu'on devrait avoir pour assurer au poisson une constance dans la qualité et une qualité maximale soient retrouvés dans la réglementation. (16 h 50)

Ensuite, lors du colloque du mois de mars 1981 à Sept-Îles, j'ai présenté aux différents intervenants du secteur des pêches un projet de réglementation en leur disant que ce serait en gros la réglementation qu'on envisageait dans le secteur des pêches. Je peux vous dire qu'il y a eu un vaste consensus des intervenants, des représentants des pêcheurs de différentes régions maritimes, de la Côte-Nord, des Îles-de-la-Madeleine et de la Gaspésie. Il y avait même des représentants des Esquimaux que j'avais invités à ce colloque qui sont venus parce qu'ils pensent développer la pêche chez eux. Il y avait des représentants des industriels, des ministères, surtout du ministère des Pêcheries du Québec, et aussi tous ceux qui, de près ou de loin, sont concernés. Vaste consensus, à ce moment-là, pour dire que les différents points de notre règlement devraient être modifiés, ajustés en fonction d'une réglementation précise. À ce moment-là, on a parlé de différents sujets, notamment le tri du poisson.

Aujourd'hui, c'est le projet de loi que nous présentons et aussi le règlement qui devrait être adopté par la suite. Mais, une fois que le projet de loi sera adopté, le règlement sera envoyé une dernière fois pour lecture pour ceux qui oeuvrent dans le secteur. Ce sera une dernière consultation afin de voir s'il y a des éléments qui, selon eux, devraient être modifiés. Ensuite, il sera acheminé, au cours du mois de janvier, au Conseil des ministres pour approbation. À ce moment-là, nous disposerons de l'instrument dont nous avons besoin. Les gens sauront à quoi s'en tenir, au Québec, dans le secteur des pêches pour avoir un produit de qualité.

Surtout, je dirai, M. le Président, que ce sera un changement important par rapport à ce qui se passait auparavant dans le secteur des pêches. Dans le secteur des pêches, évidemment, depuis deux ans que j'ai la responsabilité de ce secteur au ministère, nous avons fait un certain nombre de choses. Le premier geste que j'ai eu à poser - parce qu'à la suite de la décentralisation un grand nombre de fonctionnaires ont quitté leurs fonctions - quand le secteur des pêches m'a été confié - je dois dire qu'à ce moment-là il y avait 80 postes vacants - c'est qu'il a fallu d'abord remplir les postes par des gens qui étaient d'accord pour aller en territoire maritime. Aujourd'hui, essentiellement, les différentes fonctions sont occupées. Il y a eu un rodage de fait et nous avons entrepris immédiatement la décentralisation, qui était déjà amorcée d'ailleurs, pour en accélérer le processus. Aujourd'hui, je peux vous dire que, il y a quelques jours, j'acceptais des modifications pour l'émission des permis de pêche relativement à un programme public que nous avions adopté en 1980 pour que l'émission des permis de pêche soit faite selon des normes connues. J'avais eu la surprise de ma vie de constater, lorsque le secteur des pêches a été transféré et qu'il m'a été confié en 1980, que lors de l'émission des permis de pêche, dans certains cas, les permis aux pêcheurs étaient donnés en mettant les noms dans un chapeau; des gens tiraient les noms du chapeau et c'étaient les gens qui avaient les permis. J'ai trouvé cette méthode un peu moyenâgeuse et ce n'était peut-être pas la meilleure façon d'émettre des permis. C'est à ce moment-là cela a fait partie du processus de décentralisation - que nous avons formé des comités locaux pour l'émission des permis qui sont représentés par deux fonctionnaires du ministère, deux pêcheurs choisis parmi cinq représentants des pêcheurs dont les noms nous sont fournis par des associations de pêcheurs et présidés par un membre du service de la protection du territoire maritime dans le secteur des pêches, de sorte qu'aujourd'hui, il y a huit comités. Cette année, il y aura neuf comités parce qu'on considère que le côté nord et le côté sud de la Gaspésie formés en un seul comité, c'est un grand territoire et qu'il serait mieux de subdiviser. Donc, cette année, il y aura neuf comités à la suggestion des pêcheurs eux-mêmes pour que les pêcheurs aient accès à l'émission des permis. Ceux qui sont au

ministère depuis plusieurs années m'ont dit qu'en 1980 c'est sans doute l'année où il y a eu le moins de plaintes concernant l'émission des permis. Pourquoi? Parce que les pêcheurs eux-mêmes ont été associés à l'émission des permis et que les critères d'émission des nouveaux permis de pêche sont indiqués dans une directive qui est suivie par les gens du ministère et les pêcheurs qui participent au comité pour l'émission des permis. C'est une nouvelle politique, et, aujourd'hui, je peux vous dire que le seul endroit dans l'Est du Canada où l'émission des permis est faite en plein jour, avec la participation des pêcheurs, selon des critères établis où on ne pourra en tout temps... Les gens qui savent qui a un permis, c'est au Québec. Au fédéral, ils ne savent même pas le nombre de permis, ils ne savent pas le nombre de permis non utilisés, qui pourraient être réémis et qui ne sont pas réémis, etc. J'ai même annoncé au ministre des Pêches et des Océans, à Ottawa, quand je suis allé à la conférence fédérale, la semaine dernière, que, contrairement à ce qu'il nous avait dit, des permis avaient été émis au Labrador et à Terre-Neuve: 15 permis en 1980-1981. Lui-même a été surpris et il a fait venir à la table les fonctionnaires responsables pour leur demander de répondre à ce que venait de dire le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation du Québec, parce qu'il était étonné de cela. Ils sont venus confesser qu'ils avaient émis des permis et que ce n'était pas ce qui devrait être fait. Pourquoi? Parce que cela ne se fait pas de façon ouverte. Si tout cela se fait de façon ouverte, à ce moment-là, les pêcheurs eux-mêmes peuvent juger de ce qui se fait, tandis que si cela est fait de façon cachée, les pêcheurs ne peuvent pas le savoir. C'est pour cela que nous avons commencé dans cette réforme, d'abord, par une politique de permis de pêche émis ouvertement.

Nous avons eu également une politique de construction de bateaux de pêche, puisque le gouvernement fédéral a réduit les montants qu'il donnait dans le secteur des pêches, commençant d'abord par réduire les budgets, de sorte qu'il y avait peu de construction de bateaux. Nous avons remplacé le gouvernement fédéral pour encourager la construction de bateaux de pêche. Ensuite, il a réduit son pourcentage de subvention de 35% à 25%. Ensuite, il a réduit son maximum par bateau, selon qu'il s'agissait d'un bateau de fer ou d'un bateau de bois, de 100 000 $ à 125 000 $. Le gouvernement du Québec doit de plus en plus subventionner et financer la construction des bateaux au Québec parce que le gouvernement fédéral ne le fait plus.

En 1976, M. le Président, il s'était construit trois bateaux de pêche au Québec. Avec l'arrivée du Parti québécois au pouvoir, en 1977, il s'en est construit 19; en 1978, 24; en 1979, 15; en 1980, 39. Bientôt je signerai les lettres d'offres pour cette année pour la construction de nouveaux bateaux. Là, il s'agit uniquement de bateaux de plus de 35 pieds. Seulement en 1980, pour montrer la progression, le gouvernement du Québec aura donné, pour la construction de bateaux, plus de 2 067 000 $, presque 2 068 000 $, et des prêts pour plus de 5 000 000 $. Cette année, en dehors du budget, il y a 10 000 000 $ pour les prêts pour les bateaux et au-dessus de 3 000 000 $, presque 4 000 000 $, de subsides pour la construction de bateaux, parce que le gouvernement du Parti québécois s'implique de plus en plus dans la construction des bateaux. On pense que pour la pêche, l'élément premier pour qu'il y ait véritablement un développement du secteur des pêches au Québec, ce sont les bateaux. Sans bateau, on peut avoir les meilleurs intentions du monde, mais le poisson reste à l'eau. Il faut d'abord des bateaux et nous avons commencé par ce qui était essentiel au point de départ - pas théorique, essentiel - la construction des bateaux.

Actuellement je suis en train de réviser... Je vois mon collègue du Conseil du trésor qui a peut-être reçu cette semaine un document - je ne dis pas cela pour l'ennuyer - prévoyant des modifications aux subventions pour la construction des bateaux de moins de 35 pieds, parce qu'il y a des pêcheurs qui aiment mieux avoir des équipements moins considérables que des bateaux de 35 pieds. On ne voudrait pas qu'ils soient incités à construire des bateaux plus gros que ceux qu'ils désirent parce qu'il y a une politique nouvelle pour les bateaux de plus de 35 pieds et que la politique pour les bateaux de moins de 35 pieds serait trop vieille.

Nous avons maintenant un projet de révision pour la construction de bateaux de pêche artisanale. Avec le député de Matane, qui est sensibilisé à ces questions-là, parce que c'est un de nos sujets de conversation les plus réguliers, je suis persuadé que nous allons pouvoir annoncer dans quelque temps une nouvelle politique pour la construction des bateaux de pêche artisanale, qu'ils soient construits par les pêcheurs eux-mêmes ou par d'autres. (17 heures)

Évidemment, il y a eu également la politique des bacs que le gouvernement du Québec a subventionnés en 1979-1980. Au lieu de manutentionner le poisson avec des fourches, on le manutentionne avec des bacs, ce qui permet, au lieu d'avoir un amoncellement terrible de poisson, des milliers de livres de poisson en tas, de sorte que le poisson du dessous trouve la charge un peu pesante, on a une politique de bacs. On met de 50 à 100 livres de poisson par bac et cela permet une meilleure

manutention du poisson. En 1979, on avait 6300 bacs subventionnés; en 1980, autour de 17 000 bacs et en 1981, cette année, la compilation n'est pas terminée, mais c'est autour de 30 000 bacs.

Je vous dirai que ma première préoccupation a été de faire faire les bacs au Québec. Cela a l'air de rien mais, auparavant, les bacs étaient importés d'Europe. Nous avons fait normaliser les bacs. J'ai retardé le programme en 1980 -oui, madame - pour que le bureau de normalisation et les fonctionnaires du ministère des pêches normalisent le bac et qu'au lieu d'être importé d'Europe il soit manufacturé au Québec. Une politique comme celle-là a un impact même dans le comté de Bellechasse où la firme de Saint-Damien, Métivier ou Les Industries provinciales Ltée, s'est lancée dans la construction des bacs parce qu'il y a une politique d'achat de bacs au Québec.

À l'exposition de Seattle, où j'étais au mois de septembre, j'ai vu des entreprises du Québec, deux entreprises du Québec y exposer les bacs qu'elles pouvaient vendre aux États-Unis. Grâce à une politique de développement industriel québécoise, la modernisation dans le secteur des pêches a même des effets sur le secteur industriel pour la fourniture de produits manufacturés chez nous.

Les agrès de pêche. Le ministère des pêches subventionnait le filet maillant. Cette année, nous avons arrêté de subventionner les filets maillants. Pourquoi? Parce que les pêcheurs, dans les associations ou lors de rencontres sur la qualité, nous disaient que le filet maillant ne donne pas un poisson de bonne qualité, la palangre est préférable. Je trouvais un peu ridicule que le ministère chargé du développement du secteur des pêches subventionne des agrès que les gens considèrent eux-mêmes comme n'aidant en rien la qualité du poisson; on serait mieux de subventionner des agrès qui donnent une meilleure qualité. C'est pour cela que, cette année, nous avons changé notre politique pour subventionner les agrès de pêche comme la palangre ou encore pour aider ceux qui construisent des casiers pour la pêche au crabe. Il y a un certain nombre de pêcheurs qui sont en train de s'équiper à neuf parce que c'est un secteur en voie de développement au Québec.

On a aussi adopté cette année une politique de subventions aux associations de pêcheurs. Vous voyez dans les journaux de temps en temps des associations de pêcheurs qui veulent s'exprimer, qui demandent à rencontrer le ministre. Avant, ils ne pouvaient pas le faire. Pourquoi? Parce que toutes les associations étaient divisées. Nous n'avons pas une politique de diviser pour régner, mais d'unifier pour développer. Nous avons subventionné cette année des associations de pêcheurs en vue d'un regroupement des associations de pêcheurs. Je suis content de constater que les pêcheurs côtiers sont en train de se regrouper dans une fédération, de même que les pêcheurs hauturiers. C'est évident que ce sera plus difficile pour le gouvernement d'avoir des associations regroupées plutôt que des associations divisées mais, si on veut parler en termes de développement, nous aurons maintenant des interlocuteurs que nous pourrons rencontrer, qui seront organisés pour mettre en oeuvre, avec le gouvernement, des politiques de développement dans le secteur des pêches.

Je sais que c'est plus dangereux pour un ministre de vivre dans le secteur avec des associations organisées, mais c'est nous qui avons, comme gouvernement du Québec, aidé les associations de pêcheurs pour qu'elles se regroupent afin que le développement se fasse par l'intermédiaire de ces associations elles-mêmes.

Une politique a également été adoptée au mois de février 1981; elle ne pouvait pas porter ses fruits immédiatement parce que c'est un programme de modernisation des usines de transformation du poisson au Québec et les usines attendaient notre réglementation sur la qualité du poisson. Mais, à partir de l'adoption de ce projet de loi et de ses règlements, les usines connaîtront exactement les règles du jeu et pourront utiliser le programme, adopté depuis février 1981, qui permet des subventions aux investissements pour la modernisation des usines de transformation du poisson - il y a de prévu, par le gouvernement du Québec, 20% de subvention et le gouvernement fédéral, habituellement, donne aussi 20% - de sorte que, dans le secteur des pêches, les usines de transformation qui se modernisent pourront compter sur une subvention de 40%.

M. le Président, nous avons aussi connu cette année le premier bateau qui appartient majoritairement à des Québécois qui pêche dans la zone de 200 milles. Je me rappelle que Mme LeBlanc-Bantey, qui était adjointe parlementaire aux pêches - elle est maintenant ministre de la Fonction publique - me disait d'une façon régulière: II faut aller dans les 200 milles. Il fallait commencer d'abord par un bateau; avant d'en avoir deux ou trois, il fallait commencer par un. Je comprends qu'elle avait un intérêt particulier et c'est un peu le sort qui l'a voulu ainsi parce que, normalement, les bateaux qui vont dans les 200 milles seraient plus portés à être rattachés aux Îles-de-la-Madeleine qui sont déjà plus avant dans le territoire maritime.

Le sort a voulu que la politique qui a été préconisée par la députée des Îles-de-la-Madeleine profite en premier aux gens de la Gaspésie puisque le premier bateau, qui est le Kristina Logos, qui est la propriété

maintenant de sociétés québécoises comme les Pêcheurs unis, comme les Fruits de mer de l'Est du Québec, la Société québécoise d'initiative agro-alimentaire, de Danois, pour une part, et d'un investisseur montréalais, de sorte que la propriété est majoritairement au Québec... Mais les prises qu'ils vont faire le long de la Côte du Labrador jusqu'aux Terres de Baffin vont permettre de fournir du poisson, c'est-à-dire des crevettes, des petites crevettes - les grosses seront empaquetées de façon finale à bord du bateau et entreposées à bord du bateau, mais les petites crevettes vont être acheminées vers l'usine des Pêcheurs unis de Rivière-au-Renard et l'usine de Matane, des Fruits de mer de l'Est du Québec - et d'ajouter six semaines d'ouvrage, selon les prévisions à Rivière-au-Renard et à Matane.

M. le Président, en plus, nous avons un protocole d'entente avec les Danois pour qu'à bord du bateau, qui est dans la zone de 200 milles, on puisse, dans un délai déterminé dans le contrat, que l'équipage du bateau qui navigue dans la zone de 200 milles puisse, en dedans de deux ans, devenir entièrement québécois. Je peux vous dire que, selon l'échéancier qui a été prévu, sur deux ans, nous sommes déjà en avance, M. le Président, sur notre échéancier pour que l'équipage devienne québécois. Comme il y a deux permis attachés à ce bateau, je souhaite que, dans un avenir pas trop lointain, nous ayons un deuxième bateau dans la zone de 200 milles. Il serait peut-être bon, comme le dit la députée des Îles-de-la-Madeleine qui est ici, que ce deuxième bateau soit rattaché aux Îles-de-la-Madeleine parce qu'à ce moment, il y aura un partage de la zone de 200 milles avec ce genre de bateaux.

Maintenant, il y aura la Côte-Nord... Je vois le député de Saguenay qui est ici, qui parle d'un troisième bateau. Je peux vous dire que, sur la Côte-Nord, il y a presque un miracle dans le secteur des pêches. Ce qui prouve que le Parti québécois n'est pas un parti qui fait de la discrimination c'est qu'essentiellement, les gens qui vivent sur la Côte-Nord sont des gens de langue anglaise. Les gens auraient pu dire: Les gens du Parti québécois vont négliger la Basse-Côte-Nord. Au contraire. Aujourd'hui, depuis 1976, le revenu des gens de la Basse-Côte-Nord a plus que triplé. Les prises de poisson; 3 500 000 livres en 1976, et les gens pêchaient essentiellement dans de grosses chaloupes. Il n'y avait pas de bateaux de plus de 35 pieds. Aujourd'hui, un effort considérable a été fait et les prises, cette année, vont atteindre autour de 20 000 000 livres de poisson, presque six fois plus qu'en 1976, parce que nous considérons les gens de la Basse-Côte-Nord comme des Québécois, qu'il y a un potentiel considérable de développement dans le secteur des pêches de la Basse-Côte-Nord et qu'avec des équipements mieux faits, mieux organisés, ils pourront même franchir le petit détroit pour en arriver dans des zones qui sont à l'est de Terre-Neuve et du Labrador. C'est un point stratégique de développement au cours des deux prochaines années. Le député de Duplessis, M. Perron, suit le dossier régulièrement; quotidiennement; je dirais même que le dossier est toujours avec lui. (17 h 10)

Nous avons l'intention de faire un effort particulier pour occuper ces endroits stratégiques de développement que sont Blanc-Sablon, la Basse-Côte-Nord au point de vue du développement du secteur des pêches. C'est un plan d'action - tout cela n'est pas improvisé, M. le Président - concret, un plan d'action qui consiste à considérer les pêches d'une façon professionnelle, c'est-à-dire reconnaître le statut professionnel des pêcheurs et le caractère industriel des entreprises de transformation. Trop de personnes ont vu les pêches comme un secteur folklorique. Il faut les voir comme un secteur industriel de développement économique.

Évidemment, je ne m'attends pas que tout cela se fasse sans qu'il y ait un peu de brasse-camarades. Il est évident que, pour faire ce saut sur le plan du développement du secteur maritime, cela prend un effort considérable de tous les intervenants pour la mise en place d'une politique qui est axée essentiellement sur les points suivants: la mise en place des équipements de base que sont la flotte de pêche et les usines de transformation; deuxièmement, l'acquisition d'équipement et le recours à des procédés favorisant l'amélioration de la qualité des produits marins; troisièmement, l'organisation professionnelle du milieu par l'aide aux associations de pêcheurs et industriels; quatrièmement, la prise de conscience de l'existence au Québec d'un important marché potentiel, alors que par le passé notre industrie de transformation a surtout été orientée vers les marchés extérieurs - et je vais revenir tout de suite là-dessus, M. le Président - cinquièmement, la mise en valeur de ressources sous-exploitées tant par la capture de nouvelles espèces telles que le crabe et le maquereau que par la récupération en usine de parties comestibles actuellement rejetées; et, sixièmement, la prise en charge par les entreprises de transformation de toutes les étapes de la production y compris la congélation et l'entreposage de produits marins.

Quand je parle du potentiel du marché québécois, je vous dirai, M. le Président, que, quand les usines sont venues près de fermer au mois de juin 1980, tout le monde me disait de ne pas m'en faire, que c'était la coutume, qu'il fallait fermer les usines parce qu'elles fermaient de toute façon

ailleurs dans le territoire maritime. J'ai été surpris de cette façon de voir les choses et j'ai demandé aux gens du ministère de regarder quel était le potentiel du marché québécois et quel était le problème en pensant à essayer de maintenir ouvertes ces usines qui transformaient le crabe au Québec. On s'est rendu compte qu'en 1980 les prises avaient été abondantes, alors que le marché était lent et que les usines au Québec manquaient de fonds de roulement, et qu'avec une aide sur le plan du financement des inventaires les usines pourraient fonctionner plus longtemps. C'est ce que le gouvernement a fait en garantissant des marges de crédit aux banques pour ces usines de transformation du crabe. Résultat: près de 700 personnes et plus de 200 pêcheurs ont pu travailler jusqu'à la fin d'août, début de septembre, au lieu d'être sans emploi au mois de juin. J'avais assorti cette aide financière d'une condition, une condition qui disait que les entreprises devaient s'engager à participer à une promotion sur le marché québécois. Cette promotion a été faite. M. le Président, en 1979, d'après les chiffres du ministère, il se consommait sur le marché québécois dans toute l'année 1979, pas un mois, dans toute l'année, environ de 50 000 à 100 000 livres de crabe, presque pas. Avec la promotion, seulement dans le mois de septembre, il s'en est consommé au Québec 150 000 livres et on me dit que, si on additionne septembre et octobre, cela fait 250 000 livres.

Des voix: Bravo!

M. Garon: II y a un potentiel du marché québécois considérable puisque actuellement nous produisons, en termes d'autosuffisance, seulement 53% des produits marins que nous consommons au Québec, seulement 53%. Je suis persuadé qu'il est possible d'augmenter ce degré d'autosuffisance de façon considérable mais en développant la commercialisation au Québec. Historiquement, la commercialisation du poisson du territoire maritime québécois ne s'est pas faite surtout sur le marché québécois, mais vers l'exportation. Avec l'arrivée de la zone de 200 milles, la commercialisation du poisson va être modifiée considérablement puisque les Russes et les Japonais qui pêchaient dans le territoire atlantique sont partis. Des quantités considérables de poisson seront disponibles pour nous, mais les marchés vont être différents; des quantités supérieures de poisson vont entrer sur des marchés où elles ne pénétraient pas auparavant puisqu'elles étaient expédiées sur des marchés différents. Il faut penser beaucoup plus en termes de commercialisation de notre poisson; si nous ne pensons pas en ces termes, nous allons voir tantôt des marchés se refermer. Nous voyons, par exemple, que les États-Unis qui, il y a quelques années, importaient 75% du poisson qu'ils consommaient, importent maintenant 60% du poisson qu'ils consomment et on prévoit que leur degré d'autosuffisance va augmenter avec les années parce qu'ils ont eux aussi leurs 200 milles. Il faut penser en termes différents dans le secteur des pêches.

Cette loi que nous présentons aujourd'hui dira dans quelles conditions va se faire la modernisation du secteur des pêches. Dès le mois de mars, nous aurons un autre colloque, pas sur la qualité, mais la qualité sera enchâssée dans les règles à suivre dans cette loi et dans cette réglementation, dans la phase suivante qui doit suivre la qualité de la commercialisation du poisson. Cette conférence socio-économique devrait avoir lieu au mois de mars. Elle permettra de voir les stratégies de commercialisation et de discuter avec tous les intervenants du secteur des pêches comment devrait se faire d'une façon efficace la commercialisation du poisson du territoire maritime québécois vers les marchés intérieurs et extérieurs. Il y a un potentiel considérable à condition d'avoir une politique ordonnée, coordonnée de commercialisation du poisson québécois.

Le projet de loi que nous étudions aujourd'hui va modifier le secteur des pêches puisque, depuis le dépôt de la loi, il y a quelques jours, il n'y a plus de permis émis selon l'ancienne loi; tous les permis doivent être émis selon la nouvelle loi. Plus de permis selon l'ancienne loi de la préparation des produits de la mer, qui avait ainsi l'honneur d'être la loi la plus courte de toute la législation québécoise. Elle avait deux articles: un article sur la préparation des produits et un article pour sa mise en vigueur. Vous comprenez, M. le Président, que c'est pour ça qu'il n'y avait pas beaucoup de lignes directrices au point de vue du contrôle de la qualité dans le secteur des pêches maritimes. Avec ce nouveau projet de loi, toute nouvelle usine qui n'a pas un permis au moment du dépôt de la loi devra maintenant, se conformer à la législation que nous présentons aujourd'hui. Les usines existantes, celles qui avaient un permis au moment du dépôt de la loi actuelle, auront jusqu'au 1er janvier 1985, c'est-à-dire trois ans, pour se moderniser et répondre aux normes de construction des usines en fonction des standards nécessaires dans une usine normale du secteur des pêches. Il y en a qui ont besoin de peu de transformations, il y en a qui n'ont besoin d'aucune transformation, mais il y en a qui ont besoin presque d'être refaites de fond en comble. Pourquoi? Les gens sauront, avec l'adoption de cette loi et des règlements qui vont suivre, quelles vont être les règles qui vont s'appliquer dans le secteur des pêches. Il n'y aura pas de cachette puisque les

normes de construction des usines, les équipements nécessaires, le degré de température qu'il faudra suivre sont précisés dans la réglementation qui suit la loi et les règles à suivre vont être différentes selon qu'il s'agit d'usines de préparation du poisson ou de conserveries pour fins de vente en gros de produits marins destinés à la consommation humaine. L'ancienne loi va permettre le fonctionnement des usines jusqu'au 1er janvier 1985. À partir du 1er janvier 1985, il n'y aura plus d'usine selon l'ancienne loi. Toute usine qui voudra rencontrer la nouvelle réglementation d'ici au 1er janvier 1985 - une usine présentement en exploitation - pourra obtenir le permis, en se conformant au fur et à mesure à la nouvelle réglementation.

Si un propriétaire d'usine dit: Demain moi, je veux faire de la modernisation et répondre à la nouvelle réglementation, il pourra demander un permis selon la nouvelle loi, et aussitôt qu'il se conformera à la nouvelle réglementation, il recevra son permis selon cette nouvelle réglementation. Je pense bien que les premiers à se moderniser pourront utiliser ce nouveau permis pour dire: Je réponds maintenant à toutes les normes modernes de transformation du poisson. Je suis persuadé que, dans la promotion de leurs produits, ça va faciliter la tâche à ces usines, de sorte que, graduellement, au fur et à mesure que les mois vont passer, ces usines vont se moderniser.

J'ai rencontré déjà un certain nombre de propriétaires d'usines qui m'ont dit qu'ils attendaient cette réglementation pour faire les corrections nécessaires pour répondre à la nouvelle réglementation. C'est un point majeur.

Un deuxième point majeur, c'est le tri du poisson qui est prévu par la loi. Le pouvoir est donné par la loi au ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, mais les façons de procéder seront précisées dans le règlement. Le tri est aussi, selon tous ceux qui sont dans le secteur des pêches, une des façons d'améliorer la qualité puisque, à ce moment-là, le tri pourra être fait, selon des critères de qualité, en poisson extra, A ou B, et en poisson rejeté. À ce moment, le prix payé pour le poisson selon la qualité variera selon que le poisson sera de première, de deuxième ou de troisième qualité. À ce moment-là, il y aura une incitation pour le pêcheur à fournir un poisson de qualité parce que celui qui fournit un poisson de qualité aura un prix correspondant au poisson qu'il produit.

Ce tri, nous n'avons pas l'intention de l'établir d'une façon universelle au point de départ. Puisqu'il s'agit de méthodes nouvelles, il faut roder graduellement ce système, et nous avons l'intention, dès la prochaine saison de pêche, de mettre en place un système de tri du poisson d'une façon volontaire sur le territoire maritime, à un endroit aux Îles-de-la-Madeleine, à un endroit sur la Basse-Côte-Nord, et à deux ou trois endroits - trois endroits préférablement - en Gaspésie, pour que les gens se familiarisent avec la façon de faire le tri en fonction de la qualité du poisson et pour qu'il y ait quelques années de rodage, en 1982 et en 1983, avant d'étendre d'une façon obligatoire le tri à l'ensemble du territoire québécois. Ainsi, le tri du poisson, qui se fait dans plusieurs pays occidentaux et qui permet d'avoir un poisson de meilleure qualité en payant aux pêcheurs un meilleur prix pour du poisson de meilleure qualité, pourra graduellement atteindre le stade opérationnel. C'est évident qu'au point de départ les gens vont parler de différentes façons de faire ce tri, mais ça pourra s'ajuster au cours de deux saisons de rodage, en 1982 et en 1983.

M. le Président, cette réglementation, qui deviendra la clé de voûte de toute la modernisation du secteur des pêches au Québec, va permettre, par la promotion que nous ferons au développement de la commercialisation des produits marins avec les entreprises du secteur, d'atteindre une meilleure commercialisation du produit, avec des produits dont la régularité de la qualité sera assurée, mais elle va nécessiter aussi un certain nombre d'investissements dans les bateaux, pas dans tous les bateaux, mais dans un certain nombre de bateaux.

Nous avons fait des études sur les investissements nécessaires pour les bateaux qui ont plus de 65 pieds, pour ceux qui ont entre 35 et 65 pieds et ceux qui ont moins de 35 pieds. C'est évident que les équipements nécessaires sont différents et ne comportent pas les mêmes coûts. Je peux dire que tous les bateaux qui ont été construits selon la nouvelle politique d'expansion de la flotte de pêche du Québec depuis 1977, en général, répondent à ces normes de qualité. Les bateaux récents qui ont été construits n'ont pas de modification ou peu de modifications à faire pour répondre à ces critères.

Dans la modernisation des cales des bateaux qui sera nécessaire, là encore, il y a des subventions qui sont possibles, soit du fédéral ou du Québec, ou des prêts à bas taux d'intérêt.

J'ai mentionné tout à l'heure la possibilité au point de vue de la modernisation des usines et la possibilité de subventions. 11 va falloir aussi - c'est un des objectifs prioritaires que nous avons moderniser les parcs d'hivernement. Pourquoi? Parce qu'avec le nombre de nouveaux bateaux qui ont été construits ou de bateaux qui ont été modernisés, les pêcheurs aimaient mieux pouvoir localiser leurs bateaux de pêche au cours de l'hiver plus près de leur résidence, plus près de

l'endroit où ils pêchent, où ils demeurent, pour pouvoir effectuer des travaux au cours de l'hiver. Je pense, par exemple, aux pêcheurs des Îles-de-la-Madeleine qui m'ont parlé d'un parc d'hivernement. Je pense aux pêcheurs de Newport qui m'ont parlé d'un parc d'hivernement sur la pointe où nous sommes allés marcher ensemble, pour voir à quel endroit devrait être situé le parc d'hivernement. Je pense aux pêcheurs de Blanc-Sablon ou de la côte, à Brador ou à Blanc-Sablon, aux deux municipalités; les gens de ce coin-là souhaitent avoir un parc d'hivernement pour que leurs bateaux soient hivernés chez eux. Je pense aux gens de Rivière-au-Tonnerre, par exemple. C'est une politique de parcs d'hivernement dont la construction devrait commencer rapidement. Nous sommes actuellement à discuter avec les gens du fédéral puisque les fonds pourraient provenir d'une entente auxiliaire. J'ai constaté, avec beaucoup de plaisir, que le député fédéral de Gaspé semble être d'accord puisque je lisais, dans le journal de la Gaspésie, Le Havre, qu'il avait l'air de dire qu'il était d'accord pour qu'on fasse la construction d'un parc d'hivernement à Newport.

Je pense qu'il n'y aura pas de problème au point de vue des modifications à l'entente auxiliaire pour que ces constructions de parcs d'hivernement puissent se faire et même commencer l'an prochain. Nous sommes actuellement en discussion avec les gens pour que cela se fasse le plus rapidement possible. Je souhaite que toutes ces constructions commencent en 1982. Donc, c'est un des éléments nécessaires.

Il y a aussi un autre élément qui va être nécessaire. C'est l'entreposage de la bouette et de la glace pour les pêcheurs. Au niveau des usines, je pense qu'il y a 50% des usines qui ont leurs propres équipements de refroidissement, de réfrigération, et d'autres utilisent des équipements assez vieux puisque la plupart datent des années trente, du ministère des Pêches du Québec. Dans la modernisation du secteur des pêches, les équipements frigorifiques d'entreposage nécessaires aux usines doivent appartenir aux usines et c'est pour cela que 40% de la construction, de la modernisation des usines, des équipements frigorifiques, aidera les entreprises à s'équiper à ce point de vue.

Au point de vue des pêcheurs, nous sommes actuellement à compléter des travaux pour l'équipement des centres de pêche avec des machineries pour fournir de la glace et des équipements pour garder de la bouette pour les pêcheurs, pour que ces derniers ne souffrent pas, aient les équipements nécessaires. Ce que nous pensons, en même temps, M. le Président, c'est que, dans une perspective, encore une fois, de décentralisation, ces équipement soient assumés, c'est-à-dire gérés par les associations de pêcheurs elles-mêmes, plutôt que d'avoir toujours des permissions à demander au gouvernement. Les équipements pour la bouette et les équipements pour la glace pourraient être fournis par le gouvernement et, en même temps, les associations pourraient, avec leur structuration, fournir, selon leurs critères, la glace et la bouette dont les pêcheurs ont besoin. (17 h 20)

J'en ai parlé à beaucoup d'associations de pêcheurs que j'ai rencontrées au cours de l'été. Avant de vouloir embarquer dans des modernisations comme celle-là dans le secteur des pêches, le premier souci que j'ai eu fut de visiter le territoire maritime, de faire le tour de la Gaspésie au complet, de visiter les quais, visiter toutes les bâtisses sans exception, visiter des associations de pêcheurs, visiter toutes les bâtisses sans exception. J'ai fait la même chose cet été; sur la Basse-Côte-Nord, on m'a dit dans la plupart des villages que j'ai visités que c'était la première fois qu'un ministre mettait les pieds sur les territoires. Cela ne donne peut-être pas grand-chose...

M. Levesque (Bonaventure): Question de privilège, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Oui.

M. Levesque (Bonaventure): Je pense que ma question de privilège est bien justifiée. On peut laisser le ministre se vanter de bien des choses, mais, lorsqu'il dit qu'il est le premier ministre responsable des pêcheries à aller sur la Basse-Côte-Nord et chacun des villages, je lui demande de faire bien attention, parce que je ne pense pas qu'il y ait un ministre qui ait plus visité que moi tous les endroits de pêche au Québec.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le ministre.

M. Garon: M. le Président, peut-être que le député de Bonaventure est déjà allé, mais je suppose que les gens que j'ai rencontrés étaient trop jeunes pour se le rappeler. À moins qu'il l'ait fait en avion; à ce moment-là, ils ne savaient pas qui était le passager. Je veux vous dire que je l'ai fait en bateau.

M. Levesque (Bonaventure): Question de privilège, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Question de privilège, M. le chef de l'Opposition.

M. Levesque (Bonaventure): Je me demande si le ministre est réellement allé là, parce qu'il doit savoir qu'on ne peut pas y

aller très facilement en avion, mais on peut y aller en hydravion ou encore en hélicoptère ou encore on peut y aller en bateau, comme vient de l'indiquer le ministre. Qu'il fasse attention, parce qu'à force de parler il va peut-être me convaincre qu'il n'y est jamais allé.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le ministre.

M. Garon: J'en ai fait des bouts en camion, des bouts en petit avion de brousse, des bouts en bateau et des bouts en automobile parce que au-dessus de la mer avec un hélicoptère à un moteur je suis un peu nerveux.

La question de la glace et la question de la bouette et au cours... Le député de Bonaventure pourrait m'accompagner, parce que je songe à aller au mois de janvier sur la Basse-Côte-Nord pour expliquer la réglementation aux gens dans les villages. J'y suis allé la plupart du temps au cours de l'hiver, c'était la première fois que j'y allais au cours de l'été. Auparavant j'y étais allé au cours de l'hiver parce qu'ils m'ont dit: Dans le temps des libéraux, ils venaient surtout dans le temps du homard. Je suis allé au cours de l'été et j'ai l'intention d'y aller au mois de janvier ou au début de février.

M. Levesque (Bonaventure): Question de privilège.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Question de privilège.

M. Levesque (Bonaventure): Je ne peux pas laisser passer cela, M. le Président, parce qu'il faudrait bien que le ministre sache que dans ma propre région nous avons le meilleur homard au monde. Ah! je sais.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le ministre.

M. Garon: Je ne pensais pas au député de Bonaventure quand je parlais des gens qui visitaient le territoire maritime dans le temps du homard. C'est évident que je ne pensais pas à lui.

J'ai l'intention d'y aller pour expliquer aux gens la réglementation, quelles sont les différentes étapes de la réglementation, de quelle façon cela va se faire, quelles sont les aides gouvernementales qui vont être disponibles à tous ceux qui vont vouloir appliquer ces normes-là le plus rapidement possible. Il faut prendre le temps et je pense que la meilleure période de l'année où les gens sont disponibles, c'est au cours de l'hiver.

Maintenant, ce que je souhaite, c'est que le gouvernement fédéral fasse sa part là-dedans au point de vue des quais, des havres et des ports parce que... Je suis allé à la conférence...

Le Vice-Président (M. Rancourt): Je m'excuse, M. le ministre, je vais vous demander de conclure assez rapidement, s'il vous plaît!

M. Garon: J'ai vu récemment un rapport de la firme Roche et Associés qui avait été commandé par le gouvernement fédéral lui-même. Des photos de beaucoup de quais, de havres et de ports dans cette étude indiquent que la très grande majorité de nos quais et de nos havres de pêche sont délabrés, sont en mauvais état et devraient être modernisés.

Comme il s'agit d'une responsabilité fédérale, je peux vous dire que les gens ont voulu dire que la question des lots de grève est une question qui empêchait... Cela s'est dit, à un moment donné. J'ai demandé qu'on règle cette question très rapidement et cette question a été réglée pour que la question des lots de grève ne soit pas un empêchement pour la modernisation des ports de mer. Aujourd'hui la question des lots de grève est réglée pour que la modernisation des quais et des havres se fasse le plus rapidement possible parce que la modernisation du secteur des pêches au Québec, comme ailleurs, c'est un ensemble. Il faut que les quais soient modernes, il faut que les bateaux soient bons, il faut que les usines soient modernes, il faut que les camions qui transportent le poisson soient modernes et réfrigérés, il faut que les équipements qui fournissent la glace soient modernes. À des endroits, on m'a montré des équipements en me parlant de l'âge plutôt que de la rapidité, ce sont de vieux équipements.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le ministre, votre temps est écoulé.

Des voix: Consentement! Des voix:Non!

Le Vice-Président (M. Rancourt): Si vous voulez conclure.

M. Garon: Je conclus donc en disant que cette loi va dans le sens de la modernisation du secteur des pêches. C'est avec beaucoup de fierté que je présente aujourd'hui cette loi en deuxième lecture au nom du gouvernement et je peux vous dire qu'au ministère, tous les fonctionnaires qui y ont contribué sont très fiers que ce travail ait pu être fait aussi rapidement afin d'être à l'avant-garde au Canada dans le secteur des pêches.

Une voix: Bravo! Bravo!

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader de l'Opposition et député de Bonaventure.

Des voix: Bravo!

Une voix: Tenez bien votre ligne, ça va partir!

M. Gérard D. Levesque

M. Levesque (Bonaventure): Je suis heureux, à titre de député d'un comté du territoire maritime, le comté de Bonaventure - comme vous venez de l'indiquer, M. le Président - de pouvoir participer au débat sur ce projet de loi no 36, Loi modifiant la Loi sur les produits agricoles et les aliments. Le titre lui-même ne semble pas très éloquent quant à la nature des produits dont nous discutons, mais je suis heureux de constater que le titre de la loi elle-même, la Loi sur les produits agricoles et les aliments, sera modifié du fait que nous étudions maintenant ce projet afin que nous ayons désormais une Loi sur les produits agricoles, les produits marins et les aliments.

Je suis heureux de constater que l'on poursuit une oeuvre ou une orientation que j'avais indiqué vouloir prendre lorsque j'avais suggéré que le ministère lui-même change de nom. On avait songé à l'appeler le ministère de l'Agriculture et de l'Alimentation de façon que ce ministère absorbe les pêcheries. Il a été suggéré que le nom du ministère lui-même soit changé en ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation. Je suis donc très heureux de voir que, même ici, on continue dans le même sens, en attendant d'avoir un ministère autonome des pêcheries.

D'après ce que le ministre nous a dit il y a quelques instants, c'est pour un peu plus tard, car il a mentionné que ce serait peut-être trop onéreux d'avoir les services en double entre le ministère de l'Agriculture et le possible ministère des Pêcheries; de toute façon, je comprends qu'il y ait une complémentarité, particulièrement, dans le secteur de l'alimentation. Il y a là, évidemment, des intérêts qui se rejoignent et je continue de penser que, pour les gens du territoire maritime, il serait fort intéressant d'avoir un ministère des Pêcheries. D'ailleurs, lorsque les pêcheries étaient au ministère de l'Industrie et du Commerce, il y avait là également certains avantages. Il y avait la promotion industrielle. Lorsqu'on parle de flotte de pêche, lorsqu'on parle d'usines de transformation, on participe évidemment à une expertise fort intéressante au ministère de l'Industrie et du Commerce.

On pourrait penser que la meilleure façon d'aider les pêcheries serait de les rattacher au ministère des Finances; à ce moment-là, ce qui leur manque le plus, elles pourraient le retrouver là plus facilement. C'est bien le budget du ministère qui serait de nature, s'il était augmenté, à aider davantage les pêcheurs. (17 h 40)

En effet, lorsqu'on voit la somme consacrée aux pêcheries dans la distribution du budget du Québec, on s'aperçoit que c'est fort peu satisfaisant. Il y aurait lieu d'augmenter le budget. D'autant plus que le gouvernement actuel, il y a quelques années, avait fait des pronostics, pour ne pas employer le mot "promesses", fort intéressants, dans un plan qu'on appelait le grand plan quinquennal des pêches. Là, M. le Président, ce n'étaient pas les millions qui manquaient. Ce n'était pas une question d'avoir 1 000 000 $, 2 000 000 $ 2 500 000 $. C'était 200 000 000 $, M. le Président, le plan quinquennal spectaculaire qu'on a lancé à ce moment. Je comprends que le ministre dit: Moi, je n'étais pas là. D'ailleurs, le ministre lui-même ne pèche pas par excès d'humilité parce qu'il disait justement, le mardi 27 janvier 1981, et je vois le titre dans le Soleil: "Garon regrette de n'avoir pas mis la main sur les pêches maritimes un an plus tôt." Évidemment, je comprends que le ministre voulait dire que lui n'aurait pas fait de semblables promesses. À ce moment, M. le Président, il ne serait pas pris avec ce genre d'engagement du gouvernement, dont il faisait partie, cependant. J'imagine que ça avait été discuté quelque part. Je ne peux pas imaginer que le ministre prédécesseur du ministre actuel avait inventé ça de toutes pièces.

Cela avait été annoncé et tous les gens, évidemment, qui avaient confiance dans ce gouvernement ont cru que c'était sérieux. On s'aperçoit, aujourd'hui, M. le Président, après quelques années, que le budget n'a pas changé. Même l'année suivante, je pense qu'il avait diminué. Le plan quinquennal, il est fort probable qu'on en ait un autre. Évidemment, ce n'est pas tout à fait le propos qui touche particulièrement le projet de loi que nous avons devant nous, malgré qu'on parle de millions. M. le ministre parle des 10 000 000 $ qu'il consacre à la construction des bateaux, mais il ne nous a pas dit cependant quelle partie de ces 10 000 000 $ a été utilisée cette année. Il dit qu'il a 10 000 000 $. On sait qu'il y a un projet de loi, une loi c'est-à-dire, qui existe dont le montant qui est attribué à la construction de bateaux varie. Il a varié... Quand je suis arrivé aux pêches, en 1960, je pense qu'il était de 500 000 $. Ensuite, cela a monté graduellement. Je pense que, quand j'ai quitté, c'était rendu à 3 500 000 $ ou 4 000 000 $. C'est rendu, en 1981, à 10 000 000 $. C'est même plus bas que

l'inflation. D'ailleurs, M. le Président, si on regarde le prix des bateaux, ce qu'on peut faire aujourd'hui avec 1 000 000 $, je vous assure qu'on ne dépasse même pas un bateau de 65 pieds. On ne peut pas en faire deux.

Je vous assure, M. le Président, que ça prend pas mal de millions pour changer une flotte de pêche. Il serait peut-être bon de se rappeler, lorsqu'on parle de flotte de pêche, qu'il y a, d'après les renseignements que j'ai ici, dans la flotte québécoise, 2533 bateaux, dont 21 ont plus de 65 pieds et 405 ont entre 35 et 65 pieds. Si ces chiffres sont exacts, M. le Président, je vous assure que ce n'est pas quelques millions que ça prendrait pour moderniser la flotte de pêche. Mais c'est plusieurs dizaines, vingtaines, cinquantaines, centaines de millions, pour réellement parler de modernisation de la flotte de pêche. Je comprends que c'est un défi extraordinaire pour le ministre, mais je pense qu'avant de parler d'avoir changé beaucoup avec les 10 000 000 $ qu'il a dans sa loi. Ce n'est pas nécessairement 10 000 000 $ qu'il a consacrés à la construction des bateaux de pêche, parce qu'on s'informe dans les chantiers; présentement, il y a des inquiétudes, surtout pour les prochaines commandes, qui ne s'en viennent pas tellement rapidement. M. le Président, il y a beaucoup d'inquiétudes dans les chantiers, mais, là encore, ce n'est pas le propos que je veux entreprendre à ce moment-ci. Cependant, je ne peux pas faire autrement que de relever certaines choses que le ministre dit, parce qu'il est porté à se vanter terriblement, le ministre. C'est un charmant garçon, quand on le rencontre privément, mais, lorsqu'il arrive devant un micro, devant la télévision ou quelque part, la, c'est de se vanter: Le Parti québécois a... Depuis que le Parti québécois est...

On dirait que tout est venu au monde avec le Parti québécois en 1976. Le ministère des Pêcheries, lui, est venu au monde, même pas en 1976, mais après 1976, depuis qu'il est là. Je vous assure que tout est récent, M. le Président. Je l'entendais parler, par exemple, des bacs c'est entendu que c'est une technologie plus récente, qui n'existait pas en 1960. Mais, lorsqu'il parle des politiques d'achat du Québec, lorsque j'étais à ce moment-là dans ses fonctions aux pêcheries, nous avions des politiques d'achat exactement dans le même sens.

Ainsi, lorsqu'on a voulu, par exemple, me demander d'aider ceux qui faisaient du hareng fumé aux Îles-de-la-Madeleine, j'ai dit: D'accord, mais vous allez acheter des boîtes en bois qui viennent du Québec. On les achetait ailleurs. Ce n'est pas nouveau. Je pourrais me vanter de bien des beaux coups comme cela qu'on a faits. Mais ce n'est pas parce que je faisais alors partie du Parti libéral ou que le ministre fait partie actuellement du Parti québécois, je pense simplement que tous les gouvernements doivent être capables de protéger les intérêts des Québécois; c'est la responsabilité des ministres ou des députés appelés à exercer des fonctions à l'intérieur de cette Assemblée.

M. le Président, on pourrait continuer. J'ai pris certaines notes sur ce que le ministre disait, et il y a une chose à retenir. Il s'est vanté d'avoir un projet de réglementation qu'il a déposé avant l'étude du projet de loi. Voilà quelque chose non pas d'inédit, mais quelque chose dont le gouvernement dont il fait partie n'a pas pris l'habitude. Je le félicite pour avoir agi de la sorte, parce que ce n'est pas un règlement d'une page ou deux, c'est un règlement volumineux et je ne l'ai pas apporté avec moi. C'est un règlement où il y a évidemment des répétitions au point de vue technique, mais je crois que c'est un règlement qu'il est important pour nous d'avoir entre les mains pour pouvoir discuter de ce projet de loi, car nous avons là les intentions assez précises du gouvernement, malgré qu'il s'agisse, encore une fois, d'un projet de réglementation et qu'il sera soumis, comme l'indique le ministre, aux intéressés au cours des prochaines semaines. J'espère bien que ce n'est pas simplement de remettre cette réglementation aux intéressés, mais c'est surtout de consulter les intéressés pour bonifier ce règlement et le rendre le plus réaliste possible: réaliste selon les objectifs que nous poursuivons, mais également réaliste quant aux possibilités et aux moyens de voir au respect de cette réglementation. Quand je pense aux possibilités et aux moyens, je pense évidemment au côté financier, en particulier, des exigences de cette réglementation.

M. le Président, la qualité du poisson, c'est cela qui fait l'objet de ce projet de loi. Nous savons que depuis quelques années -le ministre l'a évoqué - il y a certaines lacunes qui se font sentir au titre de la qualité de notre poisson, et cela pas seulement au Québec mais dans tout le pays. Qu'il y ait, de la part du gouvernement, une décision de déposer un tel projet de loi qui serait de nature à donner au ministre des pouvoirs accrus soit, mais il ne faudrait pas penser que ce projet de loi ne fait que du neuf; le ministre avait déjà une loi qui lui permettait de réglementer l'inspection du poisson. Ceci lui permet d'aller un peu plus en aval ou en amont dans ce genre d'inspection. Il y a ce qui nous paraît... Le projet de loi lui-même ne dit pas grand-chose, c'est une loi-cadre qui permet de faire certains ajouts à la loi qui touche les produits agricoles et les aliments. Ceci permet au ministre de présenter ses nouveaux règlements qui touchent en particulier le tri qui se fait lorsque le poisson arrive au quai. Évidemment, j'ai

plusieurs images à l'esprit à savoir comment le poisson est retiré du bateau pour se rendre sur le quai et la façon dont on le manutentionne entre le quai et l'usine. On ne m'apprendra pas grand-chose là-dedans parce que j'ai vécu cela depuis mon enfance.

Mais depuis mon enfance également, il faut bien le dire, j'ai toujours mangé du bon poisson. Cela ne m'est jamais arrivé de manger du mauvais poisson lorsque j'étais en Gaspésie. Cela m'est arrivé ailleurs, par exemple, de manger du poisson qui n'était pas bon mais dans mon comté jamais il ne m'est arrivé de manger du poisson qui n'était pas parfait et d'une saveur extraordinaire; autrement dit, seulement à y penser, l'eau me vient à la bouche et je me demande si on a besoin de ce projet. (17 h 50)

Probablement qu'on a besoin de ce projet de loi parce qu'il y a peut-être des endroits où le poisson, une fois arrivé à destination, n'est pas dans une condition qui lui permet de recevoir la meilleure compensation possible. Autrement dit, sur certains marchés, les produits marins québécois et même canadiens reçoivent une compensation financière à un prix quelquefois inférieur au poisson provenant d'autres pays. C'est pourquoi il est important de nous assurer que ce poisson arrive aux consommateurs, que ce soit aux États-Unis ou ailleurs au Canada ou en Europe, dans la condition la plus parfaite possible.

C'est pourquoi nous appuyons tout effort qui est fait de ce côté pour améliorer la qualité du poisson mais je ne pense pas qu'il faille à ce moment-ci, pour arriver à cet objectif qui est fort louable, utiliser des propos malheureux comme ceux que le ministre a employés. Il parlait de "scrap" en parlant du poisson québécois. J'ai même apporté ici des extraits...

M. Garon: M. le Président, question de privilège.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Question de privilège, M. le ministre.

M. Garon: À aucun moment je n'ai utilisé le mot "scrap" et je n'ai jamais employé un terme dérogatoire à l'endroit du poisson du Québec. S'il y en a qui ont écrit des choses en ce sens-là, jamais, je n'ai tenu de tels propos.

M. Levesque (Bonaventure): Je suis heureux que les journalistes se soient trompés. Je l'ai lu et, si le ministre le veut, je le lui remettrai après. Mais si ce n'est pas vrai, tant mieux. Tant mieux si le ministre n'utilise pas ces mots, mais on a écrit que le ministre avait tenu de tels propos. Peut-être qu'à un moment donné, quand le ministre parle fort, les mots lui échappent, un peu comme lorsqu'il promet des choses dans le comté de Bonaventure avant les élections, ça lui a peut-être échappé. Mais lorsqu'il y a un communiqué de presse qui dit qu'il l'a dit et que ça parvient de son bureau, c'est un peu plus gênant de le nier.

Ceci étant dit, je pense que l'important dans ce projet de loi, c'est de nous assurer non seulement que la réglementation corresponde aux besoins, mais également que cette loi permette une réglementation réaliste. Il faut penser à ceux qui devront appliquer cette réglementation. C'est évident que si on veut arriver, le 1er janvier 1985... Je pense ne pas me tromper en disant que la réglementation obligatoire, définitive et absolue est prévue pour le 1er janvier 1985. D'ici là, on dit aux producteurs, on dit aux transformateurs, on dit à tous les manutentionnaires: Préparez-vous, la réglementation s'en vient. Préparez-vous tout de suite. Vous avez deux ans, trois ans, et ce sera fini. C'est ça que vous dites dans votre réglementation.

Mais dites-vous en même temps ce que ça va coûter? Le ministre n'a pas tellement parlé de prix. Moi, c'est ça qui m'inquiète particulièrement parce que, lorsqu'on consulte l'industrie, lorsqu'on consulte les producteurs, on arrive à des chiffres extrêmement élevés pour le milieu. Il ne faut pas oublier que, dans le domaine des pêches, nous avons une industrie localisée en Gaspésie, sur la Basse-Côte-Nord, aux Îles-de-la-Madeleine. Les chiffres peuvent paraître raisonnables dans un domaine comme l'agriculture, qui couvre presque tout le territoire du Québec. Peut-être que les chiffres n'ont pas impressionné le ministre. Qu'est-ce que 32 000 000 $? Ce n'est pas grave lorsqu'on parle du domaine agricole parce que ça touche beaucoup plus de monde, il y a beaucoup plus de gens dans le domaine de l'agriculture que dans le domaine des pêches. Lorsqu'on pense à des chiffres comme ceux-là, on pense, à ce moment-là, à des chiffres qui vont faire mal quelque part. Le ministre, évidemment, je ne l'ai pas entendu parler de la façon dont ces coûts seront financés. On parle de 36 000 000 $, c'est le chiffre qui est retenu présentement lorsqu'on parle des investissements nécessaires. Ce sera sûrement plus que cela si on veut respecter la réglementation qui est envisagée. On ne met presque rien dans ces 36 000 000 $ pour la flotte de pêche. Or, M. le Président, les bateaux, présentement, ne sont pas capables, ne sont pas prêts à respecter cette réglementation. La flotte est vieillie. Le ministre parlait des bateaux construits récemment disant qu'ils pourraient satisfaire aux normes de la réglementation. Je dis: Attention! On m'informe que même les bateaux construits aujourd'hui sont construits selon des plans conçus il y a une vingtaine

d'années. Alors, si on veut aménager ces nouveaux bacs, ces nouveaux containers, si l'on veut, pour cette flotte-là, on va avoir des difficultés. On risque d'avoir des difficultés sérieuses et sûrement de provoquer des coûts assez forts. On dit même, chez certains experts, que la seule modification de la flotte actuelle voudrait dire, en plus de ces 36 000 000 $ dont on parle pour les usines, etc., au moins une dizaine de millions de dollars.

Je comprends que le ministre a l'air surpris, mais si cela arrive, à ce moment-là, il devra... Il ne sera plus là. Qu'est-ce que vous voulez? Il peut dire n'importe quoi aujourd'hui parce que c'est en 1985. Mais d'ici là, M. le Président, il y a des gens qui sont fort inquiets: les propriétaires de bateaux. Lorsqu'on parle des bateaux de 65 pieds et plus, c'est assez délicat, comme lorsqu'on parle des 45 pieds. Mais lorsqu'on parle des 45 pieds et moins, il y a un producteur à Gaspé qui nous disait récemment: Si on met cette réglementation à exécution, finalement, tout ce qu'on pourra aller chercher avec notre petit bateau, c'est à peu près une commande d'épicerie. Ces gens-là ont peut-être exagéré, caricaturé, mais je pense qu'il faut écouter le producteur. Il y en a trop qui pensent politique et qui ne pensent pas assez consultation. Il ne faut pas penser que, parce qu'on a préparé une réglementation, elle est parfaite. D'ailleurs, le ministre de la Justice a donné un bel exemple, tout à l'heure, en disant du projet de loi qu'il présentait qu'il n'avait aucune prétention que son projet de loi était une réponse définitive, que ce projet de loi était parfait et qu'il invitait les députés à apporter une contribution pour le bonifier.

Je pense que le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation devrait aborder l'étude de ce projet de loi avec le même esprit. Et c'est dans cet esprit également, M. le Président, sachant que je dois coopérer avec le ministre, sachant que son appétit doit être assez important - je me permets d'être un peu personnel puisqu'il a parlé de mon âge -je vous fais remarquer qu'il est 18 heures et je propose la suspension de nos travaux.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Donc, nos travaux sont suspendus jusqu'à 20 heures.

(Suspension de la séance à 17 h 59)

(Reprise de la séance à 20 h 11)

Communication du président sur la retransmission

des délibérations du caucus du Parti québécois

Le Président: Veuillez vous asseoir, s'il vous plaît!

M. le leader de l'Opposition, je pense que c'est vous qui aviez la parole mais vous me pardonnerez si je respecte l'engagement que j'avais pris de rendre compte à cette Assemblée avant 18 heures; cependant, mon enquête a été plus longue que prévu, elle est maintenant terminée et je suis en mesure de vous dire de façon très précise et très claire ce qui est arrivé.

Depuis que j'ai appris au cours de la journée, même avant que la question de privilège soit soulevée à l'Assemblée nationale, qu'il aurait pu se glisser une erreur technique quant à la diffusion et à l'enregistrement sur une période d'environ quinze minutes des délibérations du caucus du Parti québécois tenu aujourd'hui dans la salle 81-A, je me suis employé à colliger tous les faits pertinents et à rencontrer toutes les personnes concernées.

Après avoir rencontré lesdites personnes et obtenu les informations désirées, après avoir même visité les équipements et les studios, appuyé d'affidavits appropriés des personnes rencontrées, signés en bonne et due forme devant le secrétaire général de l'Assemblée nationale, commissaire délégué à l'assermentation, je suis en mesure de vous faire part des conclusions suivantes.

Il y a eu effectivement diffusion sur perroquet, entre, approximativement, 14 h 28 et 14 h 45, à partir d'un seul microphone sur une vingtaine qui sont dans la salle 81-A, d'une partie des délibérations du caucus du Parti québécois.

Selon la technique habituelle, le technicien en service avait mis en ondes toutes les salles de commission et le salon bleu, sachant qu'au salon bleu l'Assemblée se réunirait à 15 heures, qu'une commission siégerait au salon rouge à 14 h 30 et qu'une autre commission parlementaire siégerait à la salle 81-A à compter de 15 heures, ignorant, en outre, qu'un caucus du Parti québécois se tenait à la salle 81-A, à ce moment.

C'est la première fois depuis que le système est en service qu'une pareille chose se produit. Des directives, en conséquence, sont actuellement émises verbalement mais le seront par écrit demain afin que cette situation ne se reproduise plus. Je suis personnellement détenteur de la cassette qui a été enregistrée et je verrai au cours des prochaines heures à procéder à sa destruction. Je continue à avoir une entière confiance aux employés de l'Assemblée nationale et tout particulièrement à ceux de la radiotélévision des débats. Je suis absolument convaincu que les deux partis politiques représentés en cette Chambre partagent avec moi ce sentiment de confiance que j'ai envers les employés de l'Assemblée nationale et ceux de la radiotélévision des débats. Merci.

M. Jean-François Bertrand M. Bertrand: M. le Président...

Le Président: M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Bertrand: Je tiens à vous remercier pour la diligence que vous avez mise à récolter tous les faits pertinents pour que nous soyons, dans les plus brefs délais, rassurés sur les événements qui se sont produits cet après-midi. Nous sommes heureux aussi de savoir que vous avez mené à bonne fin toutes les opérations qui se devaient d'être menées pour que, premièrement, les enregistrements soient détruits et deuxièmement, que cette situation ne se reproduise plus, j'espère que ce qui s'est passé cet après-midi sera de nature à nous faire réfléchir encore davantage sur ce que le leader de l'Opposition appelait, à juste titre, la nécessité absolue de protéger la confidentialité des réunions des formations politiques, surtout dans le contexte où elles se déroulent, M. le Président. C'est un peu à cause des salles qui sont mises à notre disposition; on n'y peut rien, ce sont des salles déjà munies d'équipement qui donne toutes sortes de possibilités. Je pense qu'on en a vécu une cet après-midi.

Il y a une seule question que j'aimerais vous poser, M. le Président. J'aimerais savoir, parce que le député de Brome-Missisquoi vous a remis cet après-midi, devant l'ensemble de nos collègues, une cassette qui contenait une partie ou le tout de l'enregistrement qui était parvenu sur, comme on l'appelle dans le langage, le perroquet du whip en chef de l'Opposition, qu'est-il advenu de cet enregistrement, M. le Président? Est-ce qu'il a été lui aussi détruit au moins dans sa teneur, dans son contenu? J'aimerais bien qu'on puisse, je l'espère, remettre au député de Brome-Missisquoi la cassette elle-même, au prix où elles se vendent, et s'assurer qu'effectivement toutes les informations qui pouvaient y être contenues sont détruites, quoique j'imagine que le député de Brome-Missisquoi peut en garder un certain nombre dans sa mémoire. Mais selon ce que je me rappelle, de toute façon, entre 14 h 28 et 14 h 45, il ne s'est pas déroulé le genre d'événement sur lequel l'Opposition aurait aimé capitaliser. Pour me rappeler nos délibérations de cet après-midi, entre 14 h 28 et 14 h 45, il y a peut-être eu tout au plus certaines primeurs, mais pas plus.

Le Président: Auparavant, M. le whip de l'Opposition, j'aimerais dire au leader du gouvernement qu'effectivement - j'ai oublié de le faire - je suis détenteur également et possesseur de la cassette que m'a remise le député de Brome-Missisquoi. Je l'ai entendue et, pour mettre un peu d'humour dans cette affaire, pour une fois que j'aurais pu participer à un caucus du Parti québécois, ce n'était presque pas compréhensible...

M. Paradis: M. le Président, question de privilège.

Le Président: ... et non pas à cause de votre enregistrement, M. le député de Brome-Missisquoi. M. le whip de l'Opposition.

M. Michel Pagé

M. Pagé: M. le Président, je vous remercie. Je dois vous faire part, au nom des collègues de l'Opposition officielle, que nous apprécions la diligence avec laquelle vous avez mené l'enquête par laquelle est confirmé le fait que nous avons porté à la connaissance de l'Assemblée nationale cet après-midi, soit le fait, combien malheureux et combien regrettable, qu'une assemblée, et plus particulièrement le caucus d'une formation politique ici à l'Assemblée, ait été l'objet d'une retransmission électronique par la voie du journal des Débats, que, somme toute, on a pu entendre cet après-midi. M. le Président, je suis satisfait, évidemment, de la déclaration que vous faites. Je suis heureux de constater que cela a été une erreur, un accident ou, quelque chose d'autre. Là où je m'interroge, M. le Président, c'est sur le fait que nous n'ayons aucun moyen, que ce soit le whip du gouvernement ou moi-même qui présidons ces caucus, qui par surcroît ne sommes ni un ni l'autre des techniciens en électronique ou de quelque qualification que ce soit, de nous assurer - le président non plus - lorsqu'on s'asseoit à une réunion de caucus, qu'il n'y a pas un commutateur quelconque et un microphone d'ouverts?

Cela soulève évidemment toute la question des locaux qui sont mis à notre disposition par le président de l'Assemblée nationale. Il y a quelques semaines nous vous adressions, le whip en chef du gouvernement et moi-même, une lettre sous notre signature conjointe, par laquelle nous vous demandions la possibilité de siéger dans un autre local que les salles 81-A et 91-A.

Je dois vous dire, en conclusion de tout cela, M. le Président, que je suis satisfait de l'enquête que vous avez menée. J'espère que des faits analogues ne se reproduiront pas. J'ose croire qu'on pourra, en toute sécurité et avec toutes les garanties appropriées, continuer à délibérer dans nos caucus, parce que ça, c'est l'essentiel de la démocratie. Ce qui se passe dans le caucus du Parti québécois, ce qui se passe dans le caucus du Parti libéral du Québec, M. le Président, cela ne peut pas, cela ne doit pas être livré publiquement.

En terminant, il y a toujours cette

inquiétude que j'ai, à moins que nos partis respectifs nous votent des budgets pour qu'on aille suivre un cours pour être en mesure de vérifier si les micros fonctionnent ou ne fonctionnent pas, et je vous invite à vous pencher sur toute cette question de l'allocation des salles et des locaux mis à notre disposition.

Le Président: M. le whip du gouvernement. (20 h 20)

M. Guy Chevrette

M. Chevrette: M. le Président, je me joins à mes collègues pour vous remercier aussi de la diligence que vous avez manifestée. Je voudrais également personnellement m'excuser. Je le fais avec beaucoup d'humilité. J'ai sans doute exprimé, sur le moment, certains sentiments agressifs quand j'ai découvert qu'il y avait des boutons levés. Je m'excuse auprès du personnel, mais je dois vous avouer que je me joins à mon collègue de Portneuf pour dire que nous tenons essentiellement à la confidentialité, il y a tellement de fuites autres que par l'électronique. Il me semble qu'on doit au moins, de ce côté-là - parce qu'il y a même des armoires qu'il faut surveiller quelquefois - avoir la certitude qu'on n'a pas à faire les chiens policiers et à se courir dans les passages. Je pense qu'on a le droit au respect de la confidentialité de nos caucus.

Je vous remercie de votre orientation suivant laquelle vous allez prendre les moyens nécessaires pour nous assurer cette confidentialité et, quant à moi, je suis très heureux de constater que c'est une erreur humaine; au lieu d'un bouton, on en tire quatre à la fois. J'espère que la directive indiquera qu'un bouton suffit à la fois; une chose se contrôle toujours mieux que quatre. J'espère une chose, c'est qu'on n'ait plus a déplorer ceci à l'Assemblée nationale, d'autant plus que, je crois que dans les circonstances, avec tout ce qui s'est passé depuis quelque temps au niveau des rumeurs et de tout, j'espère que cela ne viendra pas entacher la réputation de l'Assemblée nationale. C'est une erreur humaine, je le prends comme tel. Je vous remercie infiniment d'être des plus vigilants dans l'application de vos directives.

Le Président: M. le whip du gouvernement et M. le whip de l'Opposition, je vois que vous êtes unanimes au moins sur un point, c'est sur la lettre que vous m'avez écrite.

M. Chevrette: Voulez-vous me permettre une question de privilège?

Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît!

Oui, sur la radiotélévision pour... Mais, effectivement, les directives ont été émises verbalement et seront émises demain par écrit. Mais s'il s'avérait que, malgré cette directive, techniquement, il soit encore possible que ces choses arrivent, soyez assurés que l'argument que vous venez de soulever me touche profondément et que, possiblement, vous allez avoir gain de cause dans la demande commune que vous m'avez faite relativement à la salle 101-B. Ceci n'est pas un engagement, c'est la solution de dernier recours. Mais si, malgré les directives, ces choses se reproduisaient, il est bien évident que la salle 101-B assurerait aux deux partis politiques cette confidentialité à laquelle vous avez droit.

En terminant, M. le whip du gouvernement, sans vous reprendre, je voudrais dire qu'il ne s'agit pas d'une erreur humaine. Un mot très important que j'ai dit dans mon texte: ... "selon la coutume et la technique habituelle." Ce n'est donc pas une erreur humaine, c'est une mauvaise habitude qui s'est propagée au cours des années d'ouvrir et de mettre en ondes, environ 30 minutes avant le début des séances, le salon bleu et les salles des commissions parlementaires. Donc, ce n'est pas une erreur humaine, c'est une mauvaise habitude et un mauvais procédé, procédé qui, à partir de demain, sera changé.

Ce n'est donc pas l'erreur d'une personne, c'est une personne qui a fait mécaniquement un geste qui se fait depuis des années. À partir de demain, cela ne se fera plus. Merci beaucoup.

M. Chevrette: M. le Président, si vous me permettiez un dernier mot. Si c'est vrai que cette mauvaise habitude existe depuis fort longtemps, on me dit qu'il y a beaucoup de comités de travail qui auraient été enregistrés. J'espère que vous détruirez tout cela. Il y a même les femmes de ménage qui sont enregistrées en changeant les verres.

Le Président: M. le député de Brome-Missisquoi, je vais garder votre cassette pour la détruire.

M. Paradis: Justement, une chose m'inquiète, M. le Président; de façon que ça ne paraisse pas dans le rapport du Vérificateur général, quant au matériel dont je suis responsable, j'aimerais que vous informiez le Vérificateur général que le député de Brome-Missisquoi a eu une de ses cassettes détruite par ordre du président de l'Assemblée nationale.

Le Président: M. le député de Brome-Missisquoi, je ne sais pas si vous étiez ici lors de la défense de mes crédits pour la première fois, en mai ou en juin 1981, mais

la question m'avait été posée, je pense, par un membre de l'Opposition. J'avais dit, à ce moment-là, qu'une enquête maison m'avait démontré que ce n'était pas 1200 cassettes, mais 297 cassettes, précisément, qui manquaient à l'Assemblée nationale du Québec. Merci.

Là-dessus, je pense que la parole était au leader de l'Opposition et député de Bonaventure.

Projet de loi no 36

Deuxième lecture

M. Gérard D. Levesque (suite)

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, nous revenons maintenant, si je comprends bien, à l'étude en deuxième lecture du projet de loi no 36, Loi modifiant la Loi sur les produits agricoles et les aliments. L'une des premières dispositions de ce projet de loi fait que cette loi s'appellera désormais, si elle est adoptée par cette Chambre, Loi sur les produits agricoles, les produits marins et les aliments. Or, nous avons dû nous quitter à 18 heures, alors que j'avais eu l'occasion d'entreprendre cette étude et que j'intervenais à la suite du ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation. J'avais rappelé, à ce moment, l'importance des pêcheries dans l'économie régionale de l'Est du Québec. J'avais en même temps souscrit aux objectifs poursuivis par le projet de loi, c'est-à-dire une amélioration toujours possible de la qualité du poisson et j'en étais, à ce moment-ci, à attirer l'attention de cette Chambre sur les conséquences financières que comportent ou que pourraient comporter l'adoption et la mise en oeuvre de ce projet de loi.

En effet, les chiffres qui nous sont donnés sont assez importants. Malgré que le ministre ait dû réserver la révélation de ces chiffres pour son droit de réplique, j'aurais préféré qu'il le fasse dans sa présentation. Mais il avait passé tellement de temps à vanter sa propre performance depuis un an ou deux, son parti, etc., qu'il a oublié de nous donner l'essentiel ou ce qui devrait être très près de l'essentiel: Combien cela va-t-il coûter et qui va payer? Si ceux à qui j'ai pu poser la question ont raison le moindrement, il s'agit de sommes considérables compte tenu, évidemment, comme je le mentionnais avant la suspension, que ces sommes sont dans un domaine limité territorialement, géographiquement. Nous ne parlons pas de chiffres reliés, par exemple, à la grande industrie ou à l'agriculture, qui touche à peu près toutes les régions du Québec, mais nous touchons un secteur très limité - je donnais quelques statistiques - où nous avons affaire à environ 4000 pêcheurs, où nous avons affaire à environ 86 usines de transformation des produits marins et où nous avons affaire à une valeur de débarquement d'une quarantaine de millions de dollars et peut-être d'une mise en marché d'environ 100 000 000 $. Alors, il ne faut pas penser à une industrie qui s'étendrait partout au Québec et qui toucherait des sommes beaucoup plus importantes en chiffres absolus, malgré - comme je l'ai mentionné il y a quelques instants - qu'il ne faut pas sous-estimer l'importance des pêcheries lorsque l'on prend seulement l'économie d'une région comme celle du territoire maritime, c'est-à-dire la Basse-Côte-Nord, la Gaspésie et les Îles-de-la-Madeleine. Pour ces régions les pêcheries sont d'une importance vitale et primordiale, mais, encore là, lorsque l'on pense à la réglementation qui suivra l'adoption de ce projet de loi, on s'aperçoit qu'il y a des sommes relativement considérables qui vont être nécessaires si on veut donner suite au programme d'amélioration de la qualité du poisson. Là, on touche essentiellement la flotte de pêche. Il va falloir faire des modifications dans les navires, dans les bateaux, il va falloir investir de ce côté-là. (20 h 30)

De plus, il va falloir imaginer des frais, le ministre l'a lui-même admis, pour le tri du poisson, où il y aura une facture tripartite, si l'on veut, les usines, les pêcheurs et le gouvernement devant payer un certain écot pour assurer que ce tri soit fait d'une façon aussi impartiale que possible et que l'on garde une certaine neutralité. Il y a les nouveaux inspecteurs qui s'ajoutent aux inspecteurs qui sont déjà tout près dans les usines, les inspecteurs fédéraux qui s'ajoutent aux inspecteurs provinciaux qui sont dans les entreprises de détail. Pour ces inspecteurs du tri, encore là il y a des coûts. Mais là où les coûts sont encore plus considérables, c'est dans la modernisation de ces usines où on a tellement de conditions dans l'avant-projet de règlement qui nous a été soumis. Je crois que les chiffres du ministère établissant à environ 32 000 000 $ les changements qui devront être faits dans les usines.

Donc, il y a des frais qui pourraient être, d'après les chiffres qu'on m'a fournis, de 10 000 000 $ et plus pour la flotte de pêche, il y a des frais pour le débarquement et le tri du poisson, il y a également des frais pour l'acheminement des quais jusqu'à l'usine. Le ministre a même mentionné des chemins de terre qui devraient probablement être pavés parce qu'il a dit que le poisson en arrachait en se promenant entre le quai et l'usine sur certains chemins de terre, avec de la poussière, etc.

M. Ryan: Ce n'est pas dans Bonaventure!

M. Levesque (Bonaventure):

Évidemment, je ne sais pas...

M. Ryan: Cela ne peut pas être dans Bonaventure!

M. Levesque (Bonaventure): ...quelles sont les intentions du ministre, mais, si on ne pave pas, au moins on va être obligé de mettre le poisson dans des contenants qui sont à l'abri de la poussière.

Enfin, ce sont tous des règlements qui, sur papier, paraissent fort défendables, mais cela fait qu'à première vue, nous sommes devant une dépense ou un investissement qui serait de l'ordre, si je prends les chiffres du ministre, de 36 000 000 $ à 40 000 000 $ et, si je prends les chiffres de l'industrie, c'est plus près de 50 000 000 $. Alors, soyons bon prince, disons que c'est entre 35 000 000 $ et 50 000 000 $. Mais qui va payer cela? Quand on songe à la situation des pêches aujourd'hui, lorsqu'on songe à la situation des usines aujourd'hui qui ont infiniment de difficultés, non pas seulement à rencontrer les deux bouts, comme on dit, mais à faire face au déficit d'opération, qui va payer, M. le Président? Les pêcheurs? On parle des agriculteurs qui ont de la difficulté; mon bon ami, le député de Beauce-Sud, attire continuellement l'attention du même ministre sur les difficultés des agriculteurs, mais les difficultés des pêcheurs, c'est au moins aussi pire et le ministre le sait; D'autant plus que le ministre lui-même a dû participer au raid du ministre des Finances. On sait que le ministre des Finances a pris tous les moyens à sa disposition pour aller taxer tout ce qui était taxable au Québec et, si c'avait été possible, il serait allé à l'extérieur du Québec.

Il est même rendu souvent à Ottawa de ce temps-ci, et à Toronto et je m'imagine...

M. Ryan: À Halifax!

M. Levesque (Bonaventure): ... et à

Halifax aussi et j'ai l'impression qu'il va peut-être finir par aller taxer même à l'extérieur du Québec.

De toute façon, le ministre a dû participer, comme ses collègues, volontairement ou non, de bon gré ou non, à l'opération taxe. On sait que le ministre des Finances est allé partout, il est allé dans l'impôt sur le revenu des particuliers, il est allé dans la bière, il est allé dans l'essence; il y est allé, comme on le sait, on en a entendu parler tout récemment, pas seulement 20%, maintenant, il y va de 40%.

M. Ryan: Hydro-Québec!

M. Levesque (Bonaventure): Hydro-Québec! Qui a parlé d'Hydro-Québec? II me semble qu'on a parlé de cela ici récemment, je crois. Je pense que c'était le projet de loi no 16. Le ministre des Finances et le ministre d'État au Développement culturel nous disent: Vous en avez trop parlé. Non! Je veux l'informer que, s'il attend encore ici quelque temps, ce soir, il aura l'occasion d'en entendre encore parler.

Le ministre des Finances, en effet, est allé à Hydro-Québec, non pas seulement pour la hausse des tarifs, et particulièrement à partir du 1er janvier 1982, mais il s'est assuré des revenus de milliards additionnels. D'ici à deux, trois ou quatre ans, on en sera rendu à 1 500 000 000 $ par année qu'il va aller chercher encore quelque part à Hydro-Québec. C'est ainsi qu'on a fonctionné. Les collègues du ministre le savent, ils ont dû plier devant l'appétit du ministre des Finances dans le domaine de l'immatriculation des véhicules automobiles, dans l'assurance automobile, dans l'assurance-maladie, où on a doublé les primes des employeurs, et les effets que tout cela peut avoir sur l'employé et sur les consommateurs, etc. Cela a été fait sur toute la ligne. Je pensais que, dans le cas du ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, le ministre des Finances rencontrerait un mur solide, infranchissable, insaisissable, intouchable, un mur qui aurait signifié que c'est assez. Le ministre, malheureusement, a dû faire comme les autres, a dû baisser pavillon. Nous avons vu au cours de l'année... Cela ne paraît Das, les gens ne parlent pas trop de ça mais, dans le milieu, les pêcheurs, les producteurs le savent. Ils savent ce qui est arrivé à différentes petites choses que mon collègue de temps en temps... Par exemple, les assurances des bateaux. Jusqu'à maintenant, les assurances des bateaux, cela allait très bien. Les pêcheurs voyaient qu'on avait un gouvernement qui payait l'assurance sur les bateaux. Qu'est-ce qui arrive? On demande simplement aux pêcheurs de payer 50% des primes. C'est tout.

Arrivons à la bouette. Quelqu'un me demandait dans cette Chambre: Qu'est-ce que le ministre dit là? La bouette, qu'est-ce que c'est ça? J'ai dû expliquer ce que c'était que la bouette. Le ministre, peut-être, il y a deux ou trois ans, n'avait jamais entendu parler de ça non plus. Ah, le grand-père était pêcheur? Peut-être qu'il avait entendu parler de ça. Il y a une bonne possibilité. Mais ce n'est pas tout le monde qui a la chance d'avoir un grand-père pêcheur. C'est très bien. Je vous félicite d'ailleurs. Ce n'est pas votre faute, mais enfin!

M. le Président, cela a été ainsi un peu partout. On augmente les frais continuellement. On taxe d'une façon directe d'une façon indirecte. C'est toujours la même chose, c'est toujours le même processus. On le retrouve ici. On parle de la

qualité du poisson. Qu'est-ce qui vient à votre esprit, M. le Président, quand on parle de la qualité du poisson? La première chose qui vous vient à l'esprit, sans doute, c'est: Moi, si j'ai du poisson, la première chose que je dois faire, c'est de le garder au frais sur la glace. C'est la première chose. Je vous assure, M. le Président, que ça prend beaucoup de glace dans l'industrie des pêches.

Qu'est-ce qui arrive dans la glace? M. le Président, avant le 15 août 1981 quel était le taux, qu'est-ce qu'on imputait aux pêcheurs, aux producteurs de poisson? La tonne métrique, 9,65 $. À partir du 16 août 1981, il n'y a pas longtemps de ça, il y a quatre mois, jusqu'au 31 décembre, c'est-à-dire jusqu'à la fin de ce mois-ci, au lieu de 9,65 $, on a trouvé une autre forme de compensation pour payer la glace. Je ne veux pas dire, à ce moment-ci, que la glace ne vaut pas ça. Mais qu'est-ce que notre bon gouvernement faisait pour aider les pêcheurs? Parce que c'est une forme d'aide que de vendre à meilleur marché que l'on produit. C'est clair. C'est un peu comme le taux d'intérêt des pêcheurs, cela a toujours été extraordinaire qu'on n'ait jamais chargé d'intérêts aux pêcheurs dans les prêts. C'était zéro. Alors, on ne peut pas dire que ce n'est pas une bonne politique. Mais je fais attention au ministre parce que je sais quelles sont ses intentions, et je fais plus que les deviner. (20 h 40)

Revenons à notre tonne métrique de glace, M. le Président. On sait combien les producteurs ont besoin de glace, combien les bateaux ont besoin de glace, tout le monde a besoin de glace lorsqu'on parle de qualité du poisson. Les règlements envisagés demandent encore, évidemment, plus de glace. Là, il faut que tout soit à tel degré centigrade maximal, etc. Donc, on va le savoir que cela va prendre de la glace et de plus en plus de glace. Or, qu'est-ce qui arrive? Il y a quatre mois, la glace coûtait 9,65 $ la tonne métrique. Maintenant, quelques mois plus tard, c'est 14,50 $ la tonne métrique, cela, c'est pour le pêcheur. Pour l'industriel et le commerçant, au lieu de 9,65 $, c'est 19,30 $ la tonne métrique et, pour les pêcheurs du Nouveau-Brunswick qui viennent s'accrocher de temps en temps chez nous, c'est 34 $ la tonne, le prix coûtant. Je savais que le ministre répondrait cela.

À partir du 1er janvier 1982, c'est-à-dire dans un mois, de 9,65 $ qu'elle était il y a quatre mois, 14,50 $ qu'elle est à l'heure actuelle, elle sera à 21,75 $ la tonne métrique; dans moins de six mois, on passe de 9,65 $ à 21,75 $. On ne peut pas dire que le ministre des Finances n'a pas fait un bon travail, n'est-ce pas? On nous arrive avec des exigences; la qualité du poisson, et on dit que cela va prendre beaucoup de glace et beaucoup d'eau fraîche, cela va exiger une modernisation des bateaux, modernisation des usines, etc. À côté de cela, on apporte ces augmentations considérables. Ce n'est pas habituer les gens tranquillement à une augmentation que de passer de 9,65 $ à 21,75 $ dans un mois pour les petits pêcheurs - vous aimez parler de cela, les petits - et, pour les industriels et les commerçants, à 38,60 $. Eux, ils payaient 9,65 $, six mois après, ils sont rendus à 38,60 $ la tonne métrique et, pour les pêcheurs du Nouveau-Brunswick qui viennent s'accrocher de temps en temps chez nous, cela sera 39,70 $. Si le prix coûtant était, trois mois avant, à 34 $, j'imagine que le prix coûtant n'a pas augmenté en un mois de 5,70 $, il doit y avoir un petit profit ou quelque chose qui ne va pas. Ou bien c'était en bas du prix coûtant tout à l'heure ou, si c'était le prix coûtant, il y a maintenant un petit profit.

De toute façon, ce n'est pas le but de mon propos, c'est plutôt de voir la progression des coûts que l'on impose présentement aux pêcheurs. Cela est seulement une petite partie de l'augmentation des coûts. Donc, les pêcheurs eux-mêmes sont presque découragés de voir ces augmentations de coûts. Le ministre en a entendu parler, cela ne fait pas longtemps que le ministre est allé dans le territoire... Il est correct, par exemple, il voyage. Il l'a dit tout à l'heure: Je suis allé sur la côte Ouest, le Pacifique, je suis allé aux États-Unis, en France. Je pense qu'il a voyagé beaucoup récemment; donc, il prend un bain d'immersion dans les pêches et cela se comprend, il s'y intéresse. Je le félicite de s'y intéresser, mais ses politiques sont mauvaises, il va falloir que non seulement il s'intéresse aux pêches, mais qu'il trouve des solutions qui collent à la réalité. On ne peut pas être surpris que, dans les journaux régionaux, on voie cela, le mercredi, 14 octobre: "Garon est contesté" c'est quand il est venu pour les pêches. On voit ici: "Des hauturiers veulent qu'Ottawa reprenne le contrôle des pêcheries." Cela a été comme cela depuis quelque deux mois, en particulier. Les gens commencent à s'apercevoir que les intentions sont bonnes, peut-être, mais les résultats ne sont pas très intéressants pour les producteurs. Il va falloir que le ministre se rende compte que, s'il veut être un bon ministre des pêches, il va falloir qu'il fasse autre chose que des discours, parce qu'il parle pas mal, le ministre, il faut lui donner cela, il a l'air convaincant. Il parle longtemps, il a pris son heure et je crois qu'il est rempli de bonnes intentions mais, par contre, les résultats ne sont pas à la hauteur des espoirs qu'il a semés.

Alors, je demanderais au ministre de porter une attention particulière aux conséquences que ces règlements vont

entraîner sur le plan financier. Le ministre ne l'a pas dit encore - je ne pense pas l'avoir entendu le dire - dans son discours, mais je crois qu'il aurait dit que ces 36 000 000 $ ou 50 000 000 $ se finançaient de la façon suivante: 20% par son ministère, 20% par le fédéral, le MEER, et les pêcheurs, les producteurs, l'industrie autrement dit, 60%.

Je vous assure que présentement l'industrie ne peut faire face, en l'espace d'une couple d'années, à des frais de cette nature. Elle n'a pas de réserves suffisantes et elle n'a pas de profits pour faire face à cela. Pourtant, d'après le règlement, cela doit commencer à se faire dans les prochains mois. Avec quel argent le fera-t-il? Est-ce que c'est sûr que le ministre va avoir les 20% dont il parle, s'il en a parlé? Est-ce qu'il est sûr des 20% du gouvernement fédéral? Est-ce que le ministre a fait ses devoirs? Est-ce qu'il a rencontré le gouvernement fédéral? On sait qu'il y a une entente auxiliaire sur les infrastructures industrielles et on sait que depuis à peu près quelques semaines, peut-être trois semaines ou un mois, il y a eu une sorte d'amendement à l'entente, un nouveau plan de réaffectation des sommes, mais cela ne touche pas du tout les domaines reliés au projet de loi no 36. Le MEER le ministère de l'Expansion économique régionale, d'Ottawa, n'a pas ces sommes et ce n'est pas automatique. Le ministère fédéral - si mes renseignements sont exacts - agit cas par cas. Je suis convaincu que le ministère fédéral ne donnerait pas une subvention égale à une usine qui s'est toujours modernisée et qui a toujours essayé d'avoir de hautes normes ou de hauts standards quant à la qualité du poisson et à une autre qui s'est négligée et qui n'a rien investi. On ne peut pas les considérer toutes les deux sur le même pied. Cela voudrait dire que plus une usine aurait négligé la qualité, moins elle se serait modernisée, plus elle serait délabrée, plus d'argent elle recevrait en subvention; cela n'a pas de sens.

Le ministre parle de 20% de son ministère, de 20% du MEER, de 60% de l'industrie. Premièrement, il n'a pas encore ses 20%. Deuxièmement, des 20% du MEER, il n'y a rien dans la loi fédérale ni dans les engagements qui nous dit qu'il y aura un sou de versé. J'espère qu'il y en aura, mais il n'y a rien à l'heure actuelle qui m'indique, à moi du moins, qu'il y aura un sou de versé là-dedans. Troisièmement, quant aux 60% - si c'est le cas - payables par l'industrie, je ne vois pas quelle industrie aurait présentement un sou à disposer pour ce genre de programme.

Alors, le financement de l'opération m'inquiète. Si le ministre peut répondre et me rassurer là-dessus et rassurer les entreprises, les producteurs, les coopératives en particulier, il me semble que ce serait une réponse qui aurait son importance dans le débat.

Il y a plusieurs autres sujets qu'on aurait pu aborder. Par exemple, le point de vue constitutionnel. Je pense bien que le ministre est toujours fort dans le domaine constitutionnel; il aime cela, comme ses collègues. Il me semble qu'il aime mieux parler de constitution que de parler d'économie comme les autres. Non, il me fait signe que non, tant mieux.

Une voix: Il est en train de changer.

M. Levesque (Bonaventure): Dans le domaine constitutionnel, évidemment, on sait que les pêcheries sont un domaine de juridiction fédérale, d'après l'article 91 de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique, mais on sait également qu'il y a eu l'entente de 1922 et qu'il y a eu ensuite des amendements, je pense que c'est en 1953, sur l'inspection. De toute façon, il y a là une double juridiction, absolue d'après l'article 91, mais avec délégation depuis qui permet au ministre d'oeuvrer dans un certain nombre de secteurs. Il n'en reste pas moins que, dans ce domaine, on retrouve les deux gouvernements. Lorsque l'on touche en particulier l'inspection, on a deux réseaux d'inspection. Je pense qu'il serait important de bien établir cela. (20 h 50)

Il y a d'abord les produits qui sont destinés à l'exportation et qui exigent une inspection fédérale. Il ne faut pas oublier que 80% de notre production, à peu près, est exportée. Il y a là, évidemment, beaucoup de responsabilités pour les inspecteurs fédéraux. Il y a l'autre genre d'inspection qui existait déjà au niveau provincial, chez les détaillants, mais il y a en plus cette nouvelle inspection qui va s'ajouter, cette inspection qui va se faire au niveau des débarquements, au niveau du quai de débarquement.

À un moment donné, ces inspecteurs vont peut-être se rencontrer, ils vont peut-être se contredire. J'espère que ça n'arrivera pas, j'espère que tout le monde va tirer dans le même sens. Mais il y aura des dangers de chevauchement. J'espère qu'il y aura moyen de bien établir les fonctions de chacun, de bien définir les aires d'activité, si vous voulez, de tous ces inspecteurs. J'espère qu'on pourra faire ces nouvelles inspections au niveau provincial sans augmenter indûment les coûts parce que, finalement, les coûts vont retomber et sur l'industrie et sur le pêcheur. Le petit pêcheur va encore avoir à supporter ces coûts.

Il est bien possible, malgré ce que fait miroiter le gouvernement, que, si on en arrivait à une amélioration de la qualité du poisson, on n'en arrive pas à une

amélioration correspondant au prix que va obtenir ce même poisson sur les marchés une fois transformé. J'ai cru de mon devoir d'attirer l'attention de cette Chambre, et particulièrement l'attention du ministre, sur divers points qui pourraient amener le ministre à regarder son projet de loi de nouveau, mais surtout sa réglementation, et encore surtout, si je puis employer l'expression, le financement. Le projet de loi ne parle pas, évidemment, de financement. Tout ce que le projet de loi dit, il faut bien s'en rendre compte, c'est: M. le ministre, on vous permet de faire des règlements pour assurer une meilleure qualité du poisson. Le règlement, dont nous avons reçu un avant-projet, dit: Faites donc vos bateaux comme ça, vos containers comme ceci, vous allez avoir' des bacs, nous aurons des inspecteurs au débarquement, on va s'assurer que le transport du poisson se fait dans les meilleures conditions possible, que l'usine est la plus propre, la plus moderne, que les murs sont de telle couleur, que le plancher est fini de telle façon et que la machinerie est de telle qualité.

Tout cela, c'est bien beau, mais, à un moment donné, quand on regarde la facture, on dit: Ça va coûter entre 36 000 000 $ et 50 000 000 $, et on ne sait pas qui va payer. C'est ça qui nous inquiète particulièrement. Je suis convaincu que le ministre va revenir et va dire: J'en ai parlé au ministre des Finances et la somme est là, qui attend. Très bien, si c'est le cas. Mais, lorsqu'on veut envoyer la facture pour au moins 60% à 80% aux producteurs de poisson, qui ont présentement de la difficulté à arriver, je crains que ce soit très difficile de mettre ça à exécution.

Cependant, je veux être optimiste, confiant, manifester de l'espoir dans notre industrie du poisson. Je suis convaincu que tout ce qui peut être fait de ce côté-là mérite d'être encouragé. Soyez assuré, M. le Président, que, de ce côté-ci de la Chambre, nous allons appuyer ce projet de loi en espérant recevoir des réponses aux interrogations normales qui nous sont venues à l'esprit lors de l'étude de toute cette question. Je vous remercie, M. le Président.

Une voix: Très bien!

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Bertrand: M. le Président, avant que mon collègue de Gaspé ne prenne la parole pendant quelques minutes, je voudrais simplement, avec la collaboration du leader de l'Opposition, obtenir immédiatement que nous puissions faire en sorte que la commission parlementaire des institutions financières, qui étudie en ce moment deux projets de loi à la salle 81-A, puisse, lorsqu'elle aura terminé l'examen de ces deux projets de loi, se convertir, si je puis employer l'expression, en commission, parlementaire permanente des finances. On lui proposera, à ce moment-là, de suspendre pendant quelques minutes parce qu'il semble qu'il y a des personnes différentes qui sont membres de l'une et membres de l'autre. Ainsi ils pourraient étudier le projet de loi qui est inscrit au nom du ministre des Finances article par article. Cela se ferait à peu près dans une demi-heure, trois quarts d'heure. Alors, si on pouvait avoir le consentement immédiatement, j'en ferais un ordre de la Chambre, M. le Président.

M. Levesque (Bonaventure):

Consentement.

Le Vice-Président (M. Rancourt):

Consentement.

M. Bertrand: C'est le projet de loi no 32, si ma mémoire est bonne.

Une voix: No 38.

M. Bertrand: Non, le projet de loi no 38, c'est celui qui est à l'étude en ce moment à la commission des institutions financières et coopératives. Le projet de loi no 32, c'est celui sur les emprunts scolaires.

M. Levesque (Bonaventure): D'accord. M. Bertrand: D'accord?

Le Vice-Président (M. Rancourt): Donc, votre motion est acceptée.

M. Bertrand: Bien, merci.

M. Levesque (Bonaventure): Oui.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Donc, M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.

Une voix: Non.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Oh! Je m'excuse. M. le député de Gaspé.

M. Henri LeMay

M. LeMay: Vous êtes tout excusé, M. le Président.

Je tenais, en tant que représentant du comté de Gaspé, à parler sur ce projet de loi étant donné que c'est la première fois qu'ici, en Chambre, on dépose un tel projet de loi qui touche directement les pêcheurs de mon comté.

C'est un comté éloigné, bien sûr, un grand comté, mais un comté aussi très riche si on regarde les richesses naturelles.

Malheureusement, malgré ces richesses que sont la forêt, les mines, le tourisme et, évidemment, la pêche, les gens y sont très pauvres. De plus en plus, dans un comté comme celui que je représente, nous avons besoin d'une relance économique. C'est la première fois que, directement pour mon comté, le comté de Gaspé, il y a un projet de loi qui parle de relance économique. Bien sûr, on pourrait parler longtemps des pêches, M. le Président. On m'a demandé, cependant, d'être court étant donné que la nuit s'annonce, encore une fois, très longue pour les parlementaires. Je voudrais quand même signaler quelques points concernant cette industrie majeure de chez nous.

D'abord, la flotte de pêche a été renouvelée. M. le député de Bonaventure nous disait qu'on ne mettait pas suffisamment d'argent dans les pêches et qu'on en mettait peut-être un peu trop dans le renouvellement de la flotte de pêche. Si on regarde les chiffres de 1970 à 1976, on s'aperçoit que seulement 53 bateaux ont été construits dans le comté de Gaspé et même au Québec, alors que, depuis 1976 à 1980, il y en a eu 120, le double. Sous l'administration libérale, si on s'était davantage occupé des pêches et du renouvellement de la flotte, peut-être qu'aujourd'hui l'argent qu'on met dans ce renouvellement, on pourrait le mettre ailleurs.

M. le député de Bonaventure signalait également l'inquiétude des chantiers maritimes actuellement. La semaine dernière, j'étais dans mon comté et je faisais du bureau à Gaspé. Justement, on me disait qu'on venait d'engager six personnes de plus au chantier maritime de Gaspé. Alors, je pense que pour l'avenir, quant à la construction des navires, on n'a pas à s'inquiéter.

Dans mon comté, il se prend 50% du poisson de tout le Québec. Donc, c'est une industrie qui est importante. Si on regarde les chiffres depuis 1976, on a doublé la quantité de poisson qui a été prise dans le comté de Gaspé. En 1976, alors que nous sommes arrivés au pouvoir, il s'est pris 40 700 000 livres de poisson pour une valeur de 6 500 000 $ alors qu'en 1980 - les chiffres de 1981 ne sont pas complétés - on a pris 79 650 000 livres de poisson pour une valeur de 19 100 000 $.

Une voix: C'est mieux que les libéraux.

M. LeMay: Alors, on a doublé ni plus ni moins depuis 1976, depuis qu'on a commencé à s'occuper de la pêche, depuis qu'on a arrêté de considérer l'industrie de la pêche comme une industrie marginale. (21 heures)

De plus en plus, M. le Président, avec ce qui s'en vient, avec la quantité de poisson pêché et la quantité qui continuera d'augmenter toujours, on a besoin dans le comté d'une industrie qui soit solide. On a besoin d'usines de transformation. Depuis plusieurs années, cela s'est presque toujours fait, on prenait le poisson en bloc, on le faisait congeler et on l'envoyait transformer ailleurs, soit aux États-Unis, soit en Nouvelle-Écosse, soit au Nouveau-Brunswick.

Je pense que les Gaspésiens ont le droit - ils doivent le faire, aidés bien sûr par le gouvernement - de garder chez eux ces usines de transformation. C'est bien beau, me direz-vous, de prendre du poisson en quantité, à coups de 79 000 000 de livres, mais que faire avec ce poisson après? C'est là que la loi est très, très importante. Si on veut que les portes soient ouvertes au niveau du marché mondial, si on veut apprendre aux Québécois et aux Québécoises à manger du bon poisson, il faut leur donner un bon produit et je Dense que c'est le but principal de la loi.

M. le député de Bonaventure nous disait qu'il a toujours mangé du bon poisson. Moi aussi, j'ai toujours mangé du bon poisson en Gaspésie, mais la loi n'est faite ni pour le député de Bonaventure ni pour moi, mais bien pour essayer d'aider le plus possible, de convaincre le plus possible les Québécois et les Québécoises que le poisson est un aliment de base et que très bientôt, peut-être dans 20 ou 25 ans, on sera contents de l'avoir pour suppléer à toute la nourriture qu'on n'aura plus à ce moment-là.

M. le Président, je suis très heureux, en tant que représentant du comté de Gaspé, de voir qu'enfin il y a une loi qui va promouvoir la relance économique de mon comté. Je suis très heureux qu'on arrête de parler d'écoute électronique, de perdre du temps en cette Chambre en parlant de voyages en avion. Les gens de la Gaspésie n'ont absolument pas besoin d'entendre parler de cela et ils ne veulent rien savoir non plus. Ce qu'ils veulent, c'est parler d'économie et actuellement on en parle; c'est pour cela que cela me fait plaisir de prendre la parole.

Les gens de Gaspé se foutent que le ministre de l'Environnement ait fait trois, quatre ou cinq voyages de trop en avion ou que M. Bourassa soit allé dans le Sud en 1970 avec les avions du gouvernement. Ce qu'ils veulent, c'est qu'il y ait une relance économique dans le comté et cela, ils y tiennent mordicus.

Je l'ai souvent dit lors de la campagne électorale et chaque fois que j'en ai eu l'occasion: il faut que la pêche dans le comté de Gaspé fasse partie du programme d'autosuffisance en matière d'alimentation, le programme qui a été mis sur pied par le gouvernement actuel.

En terminant, M. le Président, je voudrais rassurer les pêcheurs qu'avec la

présentation de cette loi il ne s'agit d'égorger personne, ni les entrepreneurs, ni les propriétaires d'usines de transformation; ce qu'on veut, c'est offrir au monde entier un produit de première qualité. On prend le meilleur poisson et il n'y a aucune raison pour qu'on ne puisse pas se rendre sur les marchés mondiaux avec des produits de première qualité.

Je suis très content de voir que le député de Bonaventure est prêt à appuyer ce projet de loi et l'Opposition également parce que pour nous, en Gaspésie, c'est un point de départ. Nous verrons en 1985 les résultats de cette loi mais je suis convaincu que ce sera positif pour ceux qui vivront des produits de la pêche à ce moment-là. Là-dessus, je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Beauce-Sud.

M. Hermann Mathieu

M. Mathieu: Merci, M. le Président. Je me fais un devoir d'intervenir sur ce projet de loi qui touche nos amis les pêcheurs parce que le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation ne me pardonnerait sans doute jamais de ne pas intervenir dans ce débat. Il démontrerait avec force éloquence que le député de Beauce-Sud, critique officiel de l'agriculture et des pêcheries, ne se préoccupe pas du tout du sort des pêcheurs. M. le Président, je veux le rassurer immédiatement et lui dire que le Parti libéral du Québec a toujours été et continue d'être très sensible aux problèmes des pêcheurs. Le Parti libéral, pendant qu'il était au pouvoir, a bien compris leurs problèmes et a apporté des solutions qui collaient à la réalité. Je voudrais profiter de l'occasion pour féliciter tous les pêcheurs du territoire...

Des voix: Le ministre. Il a travaillé fort.

M. Mathieu: Je réitère que je voudrais féliciter tous les pêcheurs...

Des voix: Le ministre!

M. Mathieu: ... pour la qualité du poisson qu'ils nous procurent. C'est une fierté pour nous tous, citoyens du Québec, d'avoir cette richesse à notre portée. Nous ne demandons pas mieux qu'elle se développe principalement pour le plus grand bien des premiers artisans en ce domaine que sont les pêcheurs et les transformateurs.

Dans mes brèves remarques, je voudrais mentionner que ce qui m'a frappé, consterné même, lors des crédits du ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, au mois de juin dernier, ce fut de constater que pour ce qui était du budget de 1980-1981, il y avait, si ma mémoire est bonne, pour environ 5 000 000 $ de crédits périmés. Cela veut dire des sommes qui avaient été votées par cette Assemblée nationale pour venir en aide au développement des pêches maritimes, venir en aide aux pêcheurs, à nos artisans en ce domaine, des crédits qui n'ont pas servi aux buts pour lesquels ils avaient été votés. C'est une chose qui doit être corrigée. J'espère que le ministre a pris toutes les dispositions nécessaires pour qu'une telle chose ne se présente pas de nouveau.

Je voudrais dire un mot sur un article du journal Le Soleil de ce matin qui titre ceci: "Garon veut des sous-ministres à la place de ses directeurs." À la place des directeurs généraux de service.

Une voix: La pertinence!

M. Mathieu: Oui, c'est très pertinent, si vous voulez le savoir, parce qu'on supprime le poste de directeur des pêches maritimes. Il y aura probablement des conséquences dont le ministre se dépêchera de nous montrer le côté bénéfique, j'en suis persuadé, mais c'est dommage de ne voir qu'un côté. L'Association des cadres se méfie. Je ne cite que quelques lignes seulement: "Pour l'association, ce procédé aurait pour conséquence d'introduire dans la structure administrative des nominations admises comme "nominations politiques"."

Des voix: Ah!

M. Mathieu: "L'association s'inquiète d'autant qu'elle y voit un véritable virage politique perceptible dans plusieurs ministères québécois. Dans le cas de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, commentent les porte-parole de l'association, la multiplication des nominations discrétionnaires pour chapeauter toutes les directions générales dépasse les bornes et constituerait un abus inacceptable."

Cette déclaration me rend perplexe, surtout de la part d'une journaliste qui est tout à fait impartiale dans le domaine de la politique, qui ne cherche pas à faire de la petite politique. J'espère qu'il n'y aura pas de conséquences néfastes à court, moyen ou long terme pour nos pêcheurs.

En ce qui concerne la réglementation, j'insiste, à la suite du député de Bonaventure, pour qu'elle soit d'abord appliquée avec un sens, un esprit humain, parce qu'il s'agit des bateaux, de l'inspection du poisson, des usines. Nous savons que la flotte n'est pas préparée à recevoir cette réglementation. Tout à l'heure, le ministre, sans doute, répondra, dira combien cela va coûter et qui va payer. Si le fédéral a une participation promise dans cette entente,

j'espère qu'il y aura des négociations. (21 h 10)

À la dernière conférence à laquelle le ministre n'a pas assisté, probablement qu'il aurait pu inscrire ce point à l'ordre du jour, comme le ministre de Terre-Neuve a fait mettre un point à l'ordre du jour concernant les céréales, pour prendre les précautions nécessaires pour la protection des pêcheurs. On se rappelle que, dans le domaine de la pomiculture, à la suite du désastre du gel des pommiers et de la récolte, il y a eu un comité de formé, un comité fédéral-provincial, et ce comité était formé pour étudier l'ensemble du problème, les remèdes qui devaient être appliqués. Le 9 novembre, pour des raisons inconnues, le ministre de l'Agriculture a fouté dehors les représentants du fédéral à ce comité, alors que l'on sait que le fédéral paie la moitié des prestations d'assurance-récolte. Le ministre n'a même pas voulu donner une copie du rapport de l'assurance-récolte au gouvernement fédéral.

Cela m'inquiète quand je vois, dans le cas qui nous préoccupe présentement, M. le Président... Probablement que le ministre va dire: Bien oui, il y a 20% qui vont être payés par le fédéral. Je lui pose la question. Où en sont rendues les négociations? Parce que, vous savez, vous nous dites: On ne va pas négocier à Ottawa. On n'y va plus, il n'y a rien de bon à aller chercher là. M. le Président, dans un conflit syndical, je crois que vous avez été, dans votre carrière très fructueuse, spécialiste de ces négociations, je lève mon chapeau devant votre compétence, vous n'avez sans doute pas vu souvent un syndicat qui se retire des négociations obtenir de grands bénéfices. Quand l'assiette au beurre se partage, si on n'est pas là pour ramasser notre part, d'autres la ramassent. Ensuite, on ne peut pas jeter le blâme sur le dos des autres. C'est trop facile de ne pas prendre ses responsabilités au moment où on doit les prendre.

M. le Président, en concluant, je vous indique que j'ai l'intention de voter pour ce projet de loi au stade de la seconde lecture. Seulement, M. le Président, j'espère, je demande au ministre d'avoir la prudence requise dans les circonstances pour ne pas étouffer les pêcheurs, les associations, les usines, de ne pas les pressurer avec de nouvelles taxes. Il y avait une pensée qui avait cours en France au moment où les grands pressuraient de taxes, opprimaient les faibles, on disait: Les grands nous font déjà beaucoup de bien quand ils ne nous font pas de mal. J'espère que le ministre saura agir en conséquence, être prudent et réaliste.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre, votre droit de réplique.

M. Jean Garon (réplique)

M. Garon: M. le Président, j'ai écouté le député de Beauce-Sud. J'ai remarqué que son chef l'écoutait moins. Pendant son allocution, j'ai remarqué qu'il a été obligé d'aller dans le domaine de l'assurance-récolte, dans la structure administrative du ministère parce qu'il n'avait pas grand-chose à dire dans le domaine des pêches. Il a même parlé de la conférence de la mi-décembre sur l'agriculture. Je le laisse s'enferrer, voyez-vous, comme un bon pêcheur, je laisse le poisson prendre l'hameçon. Je dirai au député de Beauce-Sud que la conférence de la mi-décembre à Ottawa, cela a toujours été une conférence de fonctionnaires. Je n'y suis pas allé en 1978, je n'y suis pas allé en 1979, je n'y suis pas allé en 1980 et je n'y suis pas allé en 1981. Pourquoi? Parce que c'est une rencontre, habituellement, où les fonctionnaires comparent leurs statistiques.

Il m'accuse, depuis un certain temps, de ne pas aller à cette conférence qui est une conférence administrative. Il a parlé aussi de l'article dans le Soleil. Il s'est bien gardé de me poser des questions ce matin, M. le Président, parce que j'aurais pu lui répondre. J'aurais pu lui dire que, dans le temps des libéraux, il n'y avait pas ces réformes administratives, mais ça coûtait, sur le budget total du ministère, seulement 47%, ce qui allait aux agriculteurs. Tandis qu'avec nos réformes administratives, M. le Président, c'est entre 62% et 63% des budgets du ministère qui iront aux agriculteurs et aux pêcheurs. Vous savez, demandez aux pêcheurs de la Gaspésie, demandez aux pêcheurs des Îles-de-la-Madeleine ou de la Côte-Nord, demandez aux agriculteurs de tout le Québec s'ils aiment ça voir un budget qui est dépensé en grande partie uniquement pour fournir des fonctionnaires. Je ne dis pas qu'ils ne veulent pas qu'il y ait des fonctionnaires pour payer l'aide technique, mais ils souhaitent qu'une bonne partie des budgets aille pour aider ceux qui assurent la production, et c'est ce que les réformes administratives permettent, M. le Président. Je suis prêt n'importe quand à faire un débat de trois heures sur les réformes administratives que j'ai faites au ministère depuis 1977 où nous avons fusionné des régies, où nous avons regroupé certaines activités pour qu'on puisse faire plus de travail avec moins de personnes. M. le Président, tout le monde sait que, pour acheter un crayon au gouvernement, cela prend 47 ou 48 signatures. Au ministère de l'Agriculture, cela ne prend plus 47 ou 48 signatures, parce qu'on a rapproché les cadres du peuple et c'est ce que les gens veulent, M. le Président.

Des voix: Bravo!

M. Garon: Personne ne se plaindra dans la population, vous savez, s'il y a un palier de moins au plan administratif pour pouvoir répondre à la population. Personne ne se plaindra qu'il y ait un palier de moins pour que tout le monde dans la hiérarchie soit plus proche de la population. C'est cela, une réforme, M. le Président. N'importe quand, quand le député de Beauce-Sud voudra en parler, je suis prêt à en parler.

Maintenant, je vous dirai...

M. Mathieu: ...

Une voix: II y a un palier de moins. Cela permet d'être...

Une voix: Le député de Bonaventure va pouvoir...

Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!

M. Garon: M. le Président, quand le député de Bonaventure dit qu'on n'a pas les fonds, je vous dirai ceci, très rapidement. Le budget du ministère est passé cette année à 25 900 000 $ alors qu'il était de 20 400 000 $ l'an dernier, une hausse de 27%. Maintenant, comme j'ai constaté que dans le territoire maritime les communications ne sont pas faciles sur la Basse-Côte-Nord, aux Îles-de-la-Madeleine et en Gaspésie, depuis le mois de décembre 1981 il y a une revue adressée à tous les pêcheurs du Québec pour qu'ils aient les informations concernant le secteur des pêches. Dès ce mois-ci, le secteur des pêches a pu recevoir une revue appelée Alimentation Québec Pêcheries et qui explique les différents secteurs, les politiques du gouvernement, où on s'en va, ce qu'on veut faire, comment fonctionnent les programmes. On peut voir aussi ici qu'à l'aide à la construction navale de bateaux... M. le député de Bonaventure en parlait tout à l'heure; je dois vous dire qu'en 1976 le coût de construction des bateaux au Québec, savez-vous de combien il était dans le temps des libéraux? Trois bateaux. Le coût de construction, je vais vous le dire, 73 748 $. Tantôt, le député de Bonaventure me disait qu'avec 1 000 000 $ on ne construisait même pas deux bateaux. 73 748 $, c'étaient plutôt de grosses chaloupes! Il disait qu'il y avait eu des prêts pour 397 000 $, mais on est obligé de mettre un petit (1) en bas, pourquoi? Parce que les prêts ont été consentis pour l'achat de bateaux usagés. Comprenez-vous? Regardons pour cette année; je ne vous dirai pas les chiffres de 1981, mais je sais qu'on a un budget de 10 000 000 $ pour les prêts. Mais je vous dirai comment ont passé les chiffres: 397 000 $ en 1976; 788 000 $ en 1977; 2 539 000 $ en 1978; 3 300 000 $ en 1979; 5 382 000 $ en 1980 et on a 10 000 000 $ pour 1981.

Des voix: Bravo!

M. Garon: La construction des bateaux en 1976...

M. Levesque (Bonaventure): Question de privilège, M. le Président!

Des voix: Ah! Ah!

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader, est-ce en vertu de l'article 96? Oui? Question de privilège, M. le leader de l'Opposition.

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, lorsque l'on cite des chiffres, on devrait les citer tous et ne pas prendre une année en particulier. Ne vous gênez pas. Partez du moment où j'étais ministre responsable des pêches.

M. Garon: M. le Président, évidemment, je ne suis pas remonté aussi loin que cela, mais tantôt le député de Bonaventure parlait du début des années soixante. Là, ce n'est pas l'histoire des pêches que je fais, M. le Président.

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, on n'a pas le droit de fausser ainsi la vérité. Je demande simplement au ministre de regarder le coût de l'Unifox et de l'Unipec, seulement deux bateaux, dans les années soixante-dix et combien cela a coûté? Des millions de dollars, voyons donc! (21 h 20)

M. Garon: M. le Président, j'ai justement...

Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!

M. Garon: Pour éviter que les gens pensent des choses rares, j'ai dû donner des chiffres depuis 1970. Je n'ai aucune objection à ce qu'on commence nos statistiques en 1960 et, dans le prochain numéro de la revue des pêches et des pêcheurs, je donnerai des chiffres à partir de 1960. Je vais demander aux gens de les compiler pour qu'on puisse avoir les chiffres à partir de I960. Je peux vous dire, par exemple, que la construction de bateaux en 1976 coûtait 73 748 $; en 1977, 1 250 000 $; en 1978, 4 065 000 $; en 1979, 5 268 000; en 1980, 9 245 000 $. C'est quand même quelque chose, en 1980, c'est cent fois plus qu'en 1976. Il y a quand même un changement.

Quand on me dit aussi: Qu'est-ce que cela va donner aux pêcheurs? Je vais vous donner les prix de Boston; je ne prendrai pas mes statistiques, le "Boston Blue Sheet". Les

gens savent ce que c'est, le "Boston Blue Sheet", c'est le prix du marché des poissons à Boston, où tous les prix des différents poissons sont catalogués avec un genre de prix d'enchère. Qu'est-ce que dit le "Boston Blue Sheet"? En octobre 1981, on payait pour le poisson du Québec 1,25 $ et, s'il venait des pays Scandinaves, on payait le filet de morue entre 1,60 $ et 1,80 $. Pourquoi payait-on beaucoup plus cher? Qu'est-ce que cela va donner aux pêcheurs, l'amélioration de la qualité? Cela va donner des prix. On va pouvoir se classer mieux sur le marché international où on vend nos poissons. C'est exactement cela, le but de la réforme. S'il y en a qui ont des doutes sur la nécessité de cette réforme, vous n'avez qu'à demander que je publie les enquêtes qui ont été faites là-dessus. Vous n'avez qu'à le demander, je les rendrai publiques. Je ne les rendrai pas publiques si je ne suis pas obligé mais si on m'y oblige, l'Opposition pourra voir si la réforme qu'on fait est nécessaire ou non.

M. le Président, je pense que dans ce cas nous n'avons pas le choix de faire cette réforme. C'est évident qu'elle va demander des transformations; c'est un peu comme quand on dit: Tout le monde veut aller au ciel mais personne ne veut mourir. Pour aller au ciel, il faut mourir; il n'y a pas d'autres moyens. Il y a peu de gens qui y sont allés directement, comme cela. M. le Président, quand on fait une refonte dans le secteur des pêches, c'est évident que cela va prendre des investissements au niveau des bateaux et au niveau des usines. Il y a des programmes au niveau des bateaux et je vous dis même qu'à ce moment-ci, au moment où je vous parle - et je ne vous dirai pas quelle usine, je ne sais pas encore son nom parce qu'on ne me le dit pas dans tous les cas - il y a encore une usine qui vient d'être décertifiée par le gouvernement fédéral. S'il n'y a pas cette modernisation de l'usine, c'est plusieurs dizaines d'emplois, près de 200 emplois, qui pourront disparaître parce qu'une usine n'est pas modernisée. Ce n'est plus une question de dire: On peut, on veut ou on ne peut pas. On n'a pas le choix de faire la modernisation du secteur des pêches pour respecter les standards de qualité.

Je ne dis pas que tout le monde a des investissements à faire, j'ai dit tantôt qu'il y en a qui n'ont pas d'investissements à faire et qu'ils vont respecter les normes parce qu'ils les respectent déjà. Il y en a qui ont peu d'investissements à faire et il y en a qui ont beaucoup d'investissements à faire, il y en a d'autres qui vont avoir presque à jeter l'usine à terre et la rebâtir à neuf. Il y a de tout dans le secteur des pêches mais ce n'est pas... J'ai visité ailleurs - parce que vous savez, quand vous voyez un tas de rapports, et je sais qu'il y a des théoriciens qui font des rapport - pourquoi? Parce qu'on me disait: Cela se passe comme cela ici et cela passe comme cela là. J'ai dit: Moi, avant de me faire une idée, je vais aller voir ailleurs. C'est pour cela que je suis allé voir les usines en Europe. J'ai demandé où était le milieu au Canada? On m'a dit: C'est en Colombie britannique. Parfait, je vais aller voir en Colombie britannique. Je ne suis pas allé me reposer, je suis allé visiter des usines du matin au soir. Je suis allé en visiter aux États-Unis et j'ai constaté qu'il y en avait des meilleurs que les nôtres, il y en avait des pareilles comme les nôtres et il y en avait des pires que les nôtres. Là, j'ai pu me faire une idée à savoir ce qu'on doit faire comme améliorations dans le secteur des pêches. Pas dans une perspective théorique, mais dans une perspective concrète.

Dans le domaine industriel, combien de fois les gens de mon ministère sont allés rencontrer des gens pour discuter des différents changements qu'il y aurait à faire. Il va y avoir des changements à faire mais peu d'investissements par les petits pêcheurs côtiers. Ceux qui sont plus vulnérables, qui ont de moins grandes sources de revenu sont ceux qui ont des bacs isothermiques et qui reviennent tous les jours. Avec des méthodes, certains efforts sur le plan de la qualité, certaines pratiques à modifier, on peut améliorer avec peu d'investissements. Dans les bateaux de 35 pieds à 65 pieds, il y a des investissements un peu plus grands à faire, mais pas encore considérables. Les bateaux de plus de 65 pieds sont des investissements un peu plus importants, mais, encore là, pas des investissements... Il y a deux ans, j'ai rencontré un pêcheur à Matane qui me disait: M. Garon, j'ai demandé à votre ministère si je pouvais avoir un prêt pour une cale réfrigérée dans mon bateau, parce que je veux faire un poisson de meilleure qualité. Voici la lettre que j'ai reçue. Au lieu de dire oui au départ à ce pêcheur, on lui a transmis une lettre qui disait: Nous poursuivons notre réflexion.

Je suis arrivé au ministère et j'ai dit: Qu'est-ce que c'est, ça? Voici un pêcheur qui veut faire des investissements pour moderniser son bateau, il veut se conformer à tous les standards, et on dit qu'on réfléchit. J'ai alors dit: C'est important de faire de l'action. Cela va permettre exactement aux gens qui veulent faire de la modernisation dans leur bateau, dans leur usine de savoir exactement ce qu'ils doivent faire pour répondre aux normes minimales au point de vue de la qualité. Il y en a qui vont dire non. Mais pensez-vous que l'ensemble du secteur des pêches va pouvoir fonctionner s'il n'y a pas des standards de qualité qui doivent être respectés?

Je suis convaincu que l'ensemble du secteur des pêches va vouloir continuer dans ce sens parce que j'ai eu assez de consultation pour dire que - il m'a semblé,

en tout cas - le secteur des pêches, dans son ensemble, souhaite avoir des normes claires au point de vue de la modernisation. Mais il souhaite aussi avoir des quais décents. Cela les gêne de voir l'état de certains quais. Certaines usines doivent être modernisées. Quand on parle d'une contribution de 40%, 20% du fédéral et 20% du Québec, je pense que c'est un bon montant de subvention. C'est évident que, dans certains cas, ce qui va rendre la tâche plus difficile, c'est le niveau des taux d'intérêt qui sont élevés à l'heure actuelle. Mais j'aimerais que les députés libéraux admettent que la politique des taux d'intérêt dépend du gouvernement, de la Banque du Canada et de son gouverneur général, qui vient de recevoir la médaille de l'Ordre du Canada pour avoir maintenu les taux d'intérêt aussi élevés. Cela, ce n'est pas de ma faute.

Au point de vue des aspects constitutionnels, tout ça a été vérifié. Évidemment, sur l'eau, le fédéral a pas mal de pouvoir; mais, à terre, nous en avons pas mal, nous aussi. Le poisson, à un moment donné, pour entrer dans le secteur de la commercialisation, il faut qu'il vienne à terre. À partir de ce moment-là, nos juridictions sont assez importantes. Je peux vous dire tout de suite que le fédéral m'a laissé entendre qu'il ne serait pas fâché de nous passer le secteur de l'inspection. J'ai dit: Si vous voulez faire une entente avec compensation, je suis prêt à recommander ça tout de suite au gouvernement du Québec. Mais là, il hésite sur la compensation.

Je pense que ce serait une bonne chose si l'inspection était unifiée, parce qu'on n'a pas le choix. S'il y a de l'exportation et qu'on surveille la qualité pour l'exportation sans s'occuper du marché intérieur, ça veut dire que le bon poisson ira à l'étranger et que le mauvais restera chez nous. Ce n'est pas possible. Il faut qu'il y ait un contrôle de la qualité aux deux niveaux.

Dans cette perspective, si le gouvernement fédéral veut faire une entente avec nous pour que nous assumions l'inspection avec une compensation financière, je suis convaincu que le président du Conseil du trésor, le député de Matane, va m'appuyer là-dedans. Tantôt, le député de Bonaventure demandait: Est-ce que le gouvernement du Québec va avoir les fonds? Est-ce que votre ministère va avoir les fonds? Encore là, je regardais le député de Matane et je lui disais: Yves, voyons donc, tu me refuserais des fonds?

Une voix: Ben voyons donc!

M. Garon: Je termine en disant qu'il n'y a pas longtemps je rencontrais également l'Association des détaillants en alimentation. Cette association vient de faire une enquête au point de vue des habitudes de consommation des consommateurs, de ce qu'ils souhaitent trouver dans une épicerie. Un des dirigeants du groupe des détaillants en alimentation qui regroupe près de 10 000 membres, des épiciers du Québec, me disait: Le premier comptoir qui est souhaité par les consommateurs, c'est un comptoir de fruits et légumes. Mais le deuxième, on a été surpris de la réaction, c'est un comptoir de fruits de mer. J'ai dit, à ce moment-là, aux dirigeants de l'Association des détaillants en alimentation: Aussitôt que notre projet de loi et notre règlement seront adoptés, parce qu'on couvre les magasins de détail aussi, les gens du ministère, avec notre réglementation, vos gens et les entreprises susceptibles de faire des constructions, des genres de kit pour des comptoirs de poisson dans les épiceries, nous allons travailler ensemble sur un petit kit, un moyen kit et un gros kit.

Des voix: Ah!

M. Garon: Selon qu'un épicier veut avoir un petit comptoir, un moyen comptoir ou un gros comptoir, à ce moment-là, si on a un peu standardisé les modèles avec les entreprises qui produisent dans ce secteur, cela va coûter moins cher aux épiciers pour avoir un approvisionnement régulier; il faut penser aussi à la régularité de l'approvisionnement du territoire maritime, pour fournir aux détaillants en alimentation. Mais le marché québécois va être important dans notre stratégie de commercialisation du poisson. Les Québécois sont de plus en plus des consommateurs de fruits de mer. Ils ne savent pas toujours apprêter le poisson. D'ailleurs, si on le remarque, au niveau des restaurants, beaucoup de restaurants, actuellement, mettent des fruits de mer sur leur menu. Mais, graduellement, les gens apprennent à consommer du poisson et à préparer chez eux des recettes, des menus ou des plats qu'ils ont mangés au restaurant.

Je termine, M. le Président, parce que je vois le leader du gouvernement qui s'impatiente.

Des voix: Ah!

M. Garon: Lui, il n'est pas du territoire maritime, mais ce projet de loi va l'aider à avoir un approvisionnement en poisson québécois à Montréal et j'espère qu'il va consommer nos poissons avec l'assurance que la qualité sera garantie. Merci.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Jolivet): Avant d'adopter la deuxième lecture de ce projet de loi, j'aimerais savoir s'il y a un règlement qui permet d'empêcher les pressions indues contre le député de Matane.

Est-ce que cette motion de deuxième

lecture du projet de loi no 36, Loi modifiant la Loi sur les produits agricoles et les aliments, est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté.

Le Secrétaire adjoint: Deuxième lecture de ce projet de loi.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader adjoint.

Renvoi à la commission de l'agriculture des pêcheries et de l'alimentation

M. Bertrand: M. le Président, je voudrais faire motion pour que ce projet de loi soit déféré à la commission parlementaire permanente des poissons, mollusques et crustacés et que nous puissions en entreprendre l'étude immédiatement à la salle 91-A, à la suite d'une entente intervenue avec le leader de l'Opposition.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Cette motion de déférence à la commission est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Jolivet): C'est la commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation. Adopté.

M. le leader adjoint.

M. Bertrand: M. le Président, en indiquant immédiatement au ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation ainsi qu'à tous nos collègues qui sont membres de cette commission qu'ils doivent se rendre à la salle 91-A pour entreprendre l'étude article par article de ce projet de loi, je voudrais maintenant que vous appeliez l'article qui nous permettra...

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, cela prend le consentement unanime.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader de l'Opposition.

M. Levesque (Bonaventure): Cela prend un consentement unanime, M. le Président. Je voudrais m'assurer que nous l'avons avant de nous diriger vers cette salle.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Est-ce qu'il y a consentement pour qu'on puisse, à ce moment-ci, aller en commission parlementaire?

M. Bertrand: Je le demande, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Est-ce qu'il y a consentement?

M. Levesque (Bonaventure): D'accord.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Consentement, M. le leader.

M. Bertrand: Merci beaucoup pour l'unanimité.

M. le Président, nous pourrions maintenant prendre en considération le rapport de la commission permanente de l'énergie et des ressources qui a étudié le projet de loi no 16. C'est l'article 17 que je vous demanderais donc d'appeler.

Prise en considération du rapport

de la commission qui a étudié

le projet de loi no 16

Le Président: J'appelle donc la prise en considération du rapport de la commission permanente de l'énergie et des ressources qui a étudié le projet de loi no 16, Loi modifiant la Loi sur l'Hydro-Québec. J'aimerais vous dire, au préalable, que nous avons eu, cet après-midi, une conférence des leaders conformément à l'article 123 du règlement de l'Assemblée nationale, à savoir que tous les députés ont un droit de parole, s'ils veulent bien intervenir, de dix minutes, que le proposeur peut intervenir le nombre de fois qu'il le veut, que le représentant officiel de chaque parti a droit à une demi-heure et qu'en ce qui concerne le vote, il sera pris de la façon suivante. Nous mettrons d'abord aux voix tous les amendements qui ont été proposés par le député d'Outremont au nom de l'Opposition, amendements que j'ai d'ailleurs déclarés recevables. Par la suite, je mettrai aux voix tous les articles du projet de loi no 16, de 1 à 11, ainsi que le préambule et le titre tels qu'ils apparaissent au projet de loi et au rapport de la commission. Enfin, je mettrai aux voix le rapport déposé par le député de Vimont, rapporteur désigné de la commission permanente de l'énergie et des ressources qui a étudié, après la deuxième lecture, le projet de loi no 16, Loi modifiant la Loi sur l'Hydro-Québec.

M. le leader de l'Opposition.

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, je veux à ce moment-ci confirmer en effet qu'il y a eu cette réunion des leaders sous votre présidence, que nous nous sommes entendus sur le déroulement de ce débat et aussi - et je suis heureux de voir que le leader parlementaire du gouvernement se retrouve présentement à son siège parce qu'il a lui aussi participé à cette rencontre -sur le fait que, si le débat n'était pas terminé à la fin de la soirée, nous revenions demain pour le vote, n'est-ce pas?

Autrement dit, ce que je veux vérifier, en d'autres termes, c'est que le vote dont vous avez parlé aurait lieu demain après les affaires courantes.

Le Président: ... de cet oubli, M. le leader de l'Opposition.

M. Levesque (Bonaventure): Vous avez oublié, M. le Président?

M. Charron: M. le Président, je peux le confirmer.

Le Président: Merci.

M. le député d'Outremont.

M. Pierre-C. Fortier

M. Fortier: M. le Président, comme vous l'avez mentionné, l'Opposition a proposé plusieurs amendements à la loi no 16 puisque nous n'avons pas eu le temps de le faire en commission parlementaire. Comme vous le savez, ceci est dû à la motion de bâillon qui nous a été imposée et qui nous a empêchés de faire notre travail jusqu'à la fin.

Il est assez surprenant que nous fassions des amendements puisque nous avons demandé le rappel de cette loi que nous trouvons tout à fait inopportune, injuste et qui ajoute au fouillis qui règne dans le domaine de l'énergie. Le gouvernement aurait dû nous proposer une politique énergétique avant même de proposer une loi qui modifie substantiellement la Loi sur l'Hydro-Québec et qui va ajouter davantage au fouillis dans le domaine énergétique tel que nous le vivons.

Ce fouillis dans le domaine de l'énergie, M. le Président, ce n'est pas seulement moi qui l'affirme puisque, dans le Devoir du 1er octobre dernier, M. Michel Nadeau a écrit un article sur ce sujet, le titre étant "Le fouillis de l'énergie". Il dit: "Mais l'incohérence flagrante qui règne présentement au sein du gouvernement québécois dans le secteur de l'énergie risque de nous coûter beaucoup plus cher. Tous les intervenants semblent se diriger dans des directions opposées sans la moindre concertation, et en cette manière il n'y a plus de Minute Ottawa! le désordre est bien de chez nous. Aussi, il est essentiel que le ministre de l'Énergie prenne enfin les commandes et montre un peu aux Québécois le début d'une vraie politique de l'énergie."

M. le Président, au lieu de suivre le conseil que lui donnait ce journaliste, le ministre de l'Énergie a refusé le débat public, a refusé d'entendre les gens qui ont voulu s'exprimer lors de la dernière commission parlementaire et a tout fait pour nous bâillonner et nous imposer un projet de loi qui, à sa face même, devrait être rejeté.

Nous n'avons pas de politique énergétique, nous l'avons dit à plusieurs reprises, et il faudrait se poser la question: Mais qu'est-ce que c'est qu'une politique énergétique, puisque les gens d'en face n'ont pas l'air de comprendre ce que nous voulons dire par un terme comme celui-là?

Une politique quelle qu'elle soit, ce sont des énoncés clairement exprimés qui ont reçu l'approbation du cabinet, puisque ça doit représenter une politique officielle du gouvernement dans un secteur donné. Bien sûr, il y a eu un énoncé de politique en 1978 dans un livre blanc qui s'intitulait: "Assurer l'avenir", qui avait été présenté par le ministre Joron. Mais, à ma connaissance, M. le Président, cet énoncé de politique n'a jamais été approuvé par le cabinet et ne peut être ainsi appelé politique énergétique. Il s'agit d'un énoncé qui a été mis sur la table publique pour discussions, qui a permis aux gens de savoir peut-être dans quelle direction le gouvernement voudrait bien aller, mais, n'ayant pas reçu d'approbation officielle, il ne reste qu'un énoncé qui n'a pas encore été approuvé. (21 h 40)

Cela est tellement vrai que, lors de la commission parlementaire qui a étudié la tarification d'Hydro-Québec, compte tenu de l'obligation qu'a Hydro-Québec de suivre les politiques du gouvernement, nous avons demandé à Hydro-Québec s'ils étaient au courant d'un décret, d'une politique énergétique officielle qui permettrait justement à Hydro-Québec de présenter une politique tarifaire en fonction d'un nouvel énoncé de politique ou d'une nouvelle politique que nous ne connaissons pas.

La réponse d'Hydro-Québec a été très claire, je crois, on nous a dit qu'il n'existait pas de telle politique officiellement, mais qu'il semblait, selon ce que le ministre avait dit en public, qu'il s'agisse peut-être d'une politique énergétique. Je crois qu'à la vérité aucune politique n'a été approuvée par le gouvernement dans le domaine de l'énergie. Il n'y a pas de politique, approuvée par le gouvernement, qui détermine d'une façon claire et précise les orientations du gouvernement tant dans les différentes formes d'énergie qui seront utilisées dans l'avenir qu'en rapport avec la tarification qui, dans l'avenir, aura un effet déterminant sur les différents choix énergétiques.

Pourtant, la Loi sur l'Hydro-Québec est très claire. L'article 22.1 de la loi dit ceci: "Pour la réalisation de ses objets, la Société - on parle d'Hydro-Québec - prévoit les besoins du Québec en énergie et les moyens de les satisfaire dans le cadre des politiques énergétiques que le gouvernement peut, par ailleurs, établir." La raison pour laquelle -c'était, je crois, en 1978 que cet article a été ajouté - il l'a été, c'est que le gouvernement voulait intervenir. Il voulait déterminer des politiques auxquelles serait

soumise Hydro-Québec. Elles n'existent pas présentement et c'est d'autant plus difficile pour Hydro-Québec de préserver son autonomie puisque ceci amène le gouvernement à intervenir au fur et à mesure et ne permet pas au conseil d'administration d'Hydro-Québec et au président d'Hydro-Québec de suivre des politiques qui seraient claires et précises.

Si ces politiques étaient claires et précises, justement, le président du conseil d'Hydro-Québec et le président-directeur général sauraient à quoi s'en tenir et pourraient administrer cette société d'État qui, jusqu'à maintenant, a été un succès retentissant. Ce manque de politique amène donc un impact sur l'administration d'Hydro-Québec et il n'est pas surprenant de voir ries démissions à Hydro-Québec, il y en a eu deux ou trois dernièrement. Il n'est pas surprenant de constater qu'après avoir démissionné de son poste, le président-directeur général sortant d'Hydro-Québec, l'ancien président-directeur général qui a quitté son poste le 15 décembre dernier, se permette, deux jours après avoir quitté son poste officiellement, maintenant qu'il peut parler, de s'exprimer clairement en disant ceci: "On parle beaucoup de politique énergétique au Québec; cela fait des années qu'on en parle, mais on n'en a toujours pas. On devrait dire ce qu'est la politique et ce qu'est le rôle d'Hydro-Québec dans telle ou telle partie de cette politique. Également, le gouvernement devrait définir clairement son rôle face à l'Hydro; il faudrait préciser les rapports entre les deux."

J'ai fait état de cette déclaration de M. Boyd au ministre ce matin; à cette heure tardive de la soirée, je n'ai reçu aucune réponse du ministre à ce sujet. Il est bien évident que M. Boyd s'exprimait ouvertement, maintenant qu'il a quitté le poste qu'il détenait jusqu'à tout récemment.

Cette politique énergétique, si elle existait, quelle serait-elle? Il faut se souvenir que, contrairement à ce que fait le gouvernement qui nous dirige, le gouvernement fédéral à Ottawa, en 1980, alors que M. MacEachen avait présenté son budget, avait présenté un énoncé de programme énergétique national. C'était en 1980. Bien sûr, cet énoncé de politique, cette politique qu'avançait le ministre de l'Énergie et des Ressources à Ottawa a été critiquée, a permis une discussion sur la place publique, a permis qu'elle soit modifiée, mais a permis à tout le monde ayant un impact sur les questions énergétiques au Canada de participer à cette discussion publique et définir une meilleure politique énergétique. C'est celle qui a été récemment négociée avec l'Alberta, la Saskatchewan, qui est présentement négociée avec Terre-Neuve et qui déterminera finalement une politique clairement connue de tous et qui peut influencer chacun de nos gestes dans ce secteur.

Bien sûr, si vous lisez cette politique énergétique, on y parle des prix du pétrole, des prix du gaz naturel, on v parle des différentes taxes, des nouvelles taxes sur le pétrole, sur le gaz, on y parle des systèmes d'encouragement pétrolier et gazier, on y parle justement de son influence sur l'industrie canadienne. Enfin, M. le Président, tous les aspects d'une politique énergétique sont touchés et permettent à ceux qui veulent étudier la politique officielle du gouvernement fédéral de l'étudier, de la critiquer et de participer au débat public. Mais ça permet aussi à tous les intervenants dans le secteur de l'énergie de se guider sur ces politiques officielles et de comprendre pour quelles raisons une telle politique a été recommandée et a été approuvée. Nous n'avons pas de tel document au Québec. Nous n'avons pas de document qui nous permette de comprendre les nouvelles propositions tarifaires que le gouvernement semble vouloir nous imposer.

Nous ne comprenons pas exactement pourquoi le gouvernement met de l'avant une politique à savoir que le prix de l'électricité, pour des raisons tout à fait inconnues, devrait être entre le prix du gaz et celui du pétrole. Le gouvernement ne nous a donné aucune raison valable appuyée par des études économiques ou des études sociologiques, des études d'impact sur l'avenir énergétique du Québec. M. le Président, je crois qu'il est navrant que nous soyons dans une telle position alors que le gouvernement cherche à nous présenter le projet de loi no 16 qui, justement, va avoir un impact direct dans le domaine des politiques énergétiques, alors que le Québec n'en a pas. Pour continuer dans ce sens, on peut poser la question: Qu'aurait pu être un tel document? Qu'aurait pu contenir un document qui aurait défini la politique énergétique du Québec?

Le ministre nous dit que c'est pour favoriser la pénétration du gaz. J'en conviens, M. le Président. Peut-être qu'il faut avoir ries politiques qui favoriseraient la pénétration du gaz. Mais a-t-il fait des études? Est-ce qu'il y a des études qui existent, région par région et non pas pour l'ensemble du Québec, qui nous permettraient de comprendre justement quelles sont les possibilités de pénétration du gaz? Quels en sont les coûts? Est-ce qu'on peut aller dans toutes les régions du Québec? Je crois que le ministre le sait, il y a des régions du Québec où il n'y aura jamais de gaz. Il y a des régions du Québec où il faudra favoriser l'électricité, justement parce qu'il serait trop coûteux de faire en sorte que le gaz aille dans toutes les régions du Québec. Où sont ces études, M. le Président? Je sais que des études partielles ont été soumises à la Régie du gaz et de l'électricité, soit par Gaz

Métropolitain soit par la compagnie Gaz Inter-Cité. Je sais que des études semblables ont été soumises à l'Office national de l'énergie. Mais est-ce que le ministère de l'Énergie et des Ressources du Québec a consolidé ces études et pourrait nous en présenter un condensé, un résumé, pour qu'enfin nous comprenions ce que le ministre entend par une pénétration du gaz au Québec et quels vont en être les coûts pour la population du Québec, quels vont en être les coûts pour les intervenants dans ces secteurs et surtout quels vont en être les coûts pour les consommateurs, ceux qui utiliseront le gaz ou l'électricité, soit pour le chauffage, soit pour l'éclairage ou soit dans le secteur industriel.

Il aurait fallu, bien sûr, M. le Président, étudier ce que j'ai appelé cette pseudo-politique énergétique qui favorise le gaz au détriment de l'électricité, pour connaître l'impact que cette hausse de tarification artificielle aura sur la tarification de l'électricité par rapport à celle de l'Ontario et par rapport à celle des autres provinces. Nous l'avons dit en commission parlementaire, nous l'avons dit en deuxième lecture lorsque nous avons discuté du projet de loi no 16, il semble bien, M. le Président, que l'avantage économique que nous avions d'avoir une politique tarifaire beaucoup plus basse que celle des autres provinces va en se dégradant et, très bientôt, l'électricité du Québec coûtera plus cher que l'électricité de l'Ontario, et ceci est navrant pour plusieurs raisons.

Nous avons cru, tout le monde avait cru que nous avions justement des richesses naturelles, des ressources qui nous appartiennent en propre et des ressources naturelles auxquelles tous les Québécois avaient droit. Nous savions que nous avions des ressources hydroélectriques immenses qui permettaient, justement, aux Québécois et aux Québécoises de bénéficier d'une richesse naturelle qui leur appartient. S'il fallait, M. le Président, que cette pseudo-politique énergétique, qui n'est appuyée sur aucun document que nous connaissions, fasse, en fin de compte, finalement, que l'électricité coûte plus cher au Québec que dans les provinces voisines, je me demande à quel point nous en serions rendus et jusqu'à quel point cette pseudo-politique énergétique aurait un impact, justement, sur le développement économique du Québec et sur le portefeuille des consommateurs. (21 h 50)

II aurait fallu également, M. le Président, étudier quel impact ces hausses tarifaires artificielles auraient eu sur le développement économique du Québec. Tout le monde sait qu'à cause de ces augmentations tarifaires, à cause des taxes qui seront payées au gouvernement, il s'ensuivra qu'Hydro-Québec aura moins d'argent pour elle-même pour autofinancer son programme d'investissement. D'une autre façon, si on favorise le gaz au détriment de l'électricité, il s'ensuivra, bien sûr, que les programmes d'investissement d'Hydro-Québec seront moins importants que ce qu'ils auraient pu être si on avait favorisé l'électricité. Il m'aurait semblé, M. le Président, qu'avant d'adopter une telle politique, le gouvernement ait présenté sur la place publique des études importantes, des études économiques pour nous convaincre que, finalement, ce choix tarifaire, ces choix énergétiques favoriseront le développement économique du Québec, mais nous ne connaissons absolument rien sur ces résultats, sur ces impacts économiques et nous en sommes rendus, M. le Président, à faire des conjectures, sans pour cela connaître la vérité d'une façon bien précise.

Finalement, M. le Président, un sujet qui aurait dû être étudié dans ce document de politique énergétique, ce sont tous les moyens de coordination qui sont nécessaires pour favoriser le gaz dans certaines régions et pour favoriser l'électricité dans d'autres régions. Même, dans une région donnée, il aurait fallu étudier de quelle façon, quels sont les moyens pratiques, quels sont les moyens déterminants que le gouvernement pourrait mettre en oeuvre et que les sociétés, les intervenants dans ce secteur, que ce soit Hydro-Québec, que ce soit Gaz Métropolitain ou que ce soit Gaz Inter-Cité, quels sont les moyens qui seront mis en oeuvre pour justement faire en sorte qu'il y ait un équilibre entre les différentes formes d'énergie, sans pour cela augmenter les coûts d'une façon démesurée pour les consommateurs. Nous n'avons pas de réponse à ces questions. Le ministre nous a dit qu'il avait formé un comité de coordination; nous ne savons pas exactement de quelle façon ce comité travaille mais on peut se poser des questions. Il m'aurait semblé qu'un sujet aussi sérieux aurait pu faire l'objet d'une étude très approfondie sur des questions comme: Devons-nous faire en sorte qu'il y ait plusieurs intervenants? Avons-nous besoin de deux compagnies de gaz au Québec? Avons-nous besoin d'une compagnie qui se spécialise dans l'électricité alors que d'autres compagnies se spécialisent dans le gaz? Je n'ai pas les réponses à ces questions, je pose des questions. D'une façon semblable à la France, n'aurait-il pas fallu se demander si une société comme Hydro-Québec n'aurait pas pu recevoir le mandat d'être responsable à la fois du gaz et de l'électricité, justement pour assurer une meilleure coordination des politiques énergétiques?

Nous n'avons pas les réponses à ces questions mais le ministre, lui, sans avoir les réponses et sans avoir fait les études approfondies dans ces secteurs, se permet de nous proposer le projet de loi no 16 qui va

influencer l'avenir énergétique sans que la population, sans que l'Opposition et sans que les parlementaires soient informés des différents résultats de ces études. On ne sait pas si elles existent, si le ministre les a fait faire et s'il est convaincu lui-même que les choix qu'il nous propose sont les meilleurs. C'est pour toutes ces raisons que nous avons demandé le rappel de la loi 16.

En commission parlementaire, plusieurs intervenants, dès les mois de février et mars, avaient demandé à être entendus parce qu'ils avaient saisi tous les impacts possibles qu'imposeraient les choix de l'avenir énergétique du Québec. Ces mêmes syndicats, ces mêmes associations et ces mêmes sociétés de protection des consommateurs nous ont envoyé des télégrammes, en ont envoyé récemment au premier ministre du Québec pour demander d'être entendus sur ces questions. Le ministre essaie de nous dire: II n'y a aucune relation entre le projet de loi no 16 affectant Hydro-Québec et les politiques énergétiques du Québec. M. le Président, c'est une affirmation que nous ne pouvons pas accepter, qui doit être rejetée à sa face même. Tous les intervenants sérieux qui connaissent le domaine énergétique savent pertinemment qu'il y a une relation directe entre la loi 16 et l'avenir énergétique du Québec.

Il n'y a jamais eu de synthèse dans ces secteurs, c'est ce que je viens de dire, mais ce qui est plus grave, c'est que le gouvernement, à ma connaissance, n'a jamais demandé qu'une telle synthèse soit faite, n'a jamais proposé de politique globale connue du public et qui nous permettrait de connaître l'impact de la loi 16. Je crois qu'on peut qualifier cette façon de faire d'inconsciente, d'irresponsable de la part du gouvernement, une façon de faire qui ne peut être acceptée et qui ne peut se justifier sur le plan strictement énergétique. Bien sûr, nous savons tous que cet empressement à faire en sorte que la loi no 16 soit approuvée dans les meilleurs délais ne peut être justifié pour des questions énergétiques, mais uniquement à cause du fouillis dans lequel se trouve le gouvernement dans le domaine des finances.

Comment peut-on proposer une telle loi modifiant substantiellement la société la plus importante du Québec dans le domaine de l'énergie, et je parle d'Hydro-Québec? C'est incompréhensible et je crois que c'est irresponsable. Comme je viens de le dire, on peut le comprendre et on peut le justifier uniquement pour des raisons purement financières, parce que le gouvernement, bien sûr, transforme Hydro-Québec en percepteur de taxes et se permet, justement, d'aller chercher des taxes qu'il ne peut aller chercher ailleurs.

Mais si ce n'était que des augmentations de taxes, si ces augmentations avaient été clairement indiquées sans modifier la Loi sur l'Hydro-Québec, s'il avait fallu changer la Loi sur l'Hydro-Québec, mais en exprimant clairement la volonté du gouvernement de ne pas affecter l'avenir énergétique, nous aurions pu avoir une discussion peut-être plus logique. Le ministre ne peut s'en prendre qu'à lui-même si, en commission parlementaire, nous avons eu quelquefois certaines difficultés à avoir un dialogue à la hauteur des problèmes qui nous étaient présentés.

C'est la raison pour laquelle je voudrais rappeler quelque peu la démarche que nous avons faite par rapport à ce projet de loi. Nous avons discuté, pour la première fois en deuxième lecture, le projet de loi no 16, le 1er décembre dernier. Nous avons soulevé, à ce moment-là, des questions de principe extrêmement importantes. Nous avons eu, par la suite, la commission parlementaire qui a siégé du 7 au 11 décembre dernier et, ensuite, les 14 et 15 décembre derniers et, aujourd'hui, nous sommes le jeudi 17 décembre, alors que la commission parlementaire n'a pas fini ses travaux, alors que nous avons dû présenter certains amendements pour faire en sorte que le projet de loi no 16 puisse être amendé d'une façon substantielle pour modifier l'impact qu'il aurait sur l'avenir énergétique du Québec. Combien de temps me reste-t-il?

Le Vice-Président (M. Jolivet): II vous reste près de huit minutes.

M. Fortier: M. le Président, c'était un mauvais projet de loi avant d'en commencer l'étude en deuxième lecture, c'était un mauvais projet de loi avant l'étude en commission parlementaire et ça demeure un très mauvais projet de loi. C'est la raison pour laquelle nous avons présenté certains amendements que j'aimerais revoir rapidement avec vous. Il y a un amendement, bien sûr, que nous avons présenté, mais qui avait été demandé par la direction même d'Hydro-Québec. Ce gouvernement qui nous a dit qu'il ne voulait pas intervenir dans la gestion d'Hydro-Québec, j'ose espérer qu'il comprendra qu'il se doit d'approuver cet amendement qui demande tout simplement que la déclaration des dividendes devrait être suggérée par le conseil d'administration d'Hydro-Québec même si, techniquement, c'est décrété par le cabinet lui-même, par l'entremise du ministre des Finances.

Il me semble, M. le Président, que l'argumentation qui avait été présentée par le président du conseil d'administration d'Hydro-Québec est tout à fait claire. Je me permettrai de rappeler ce que disait justement M. Bourbeau, le président du conseil d'administration d'Hydro-Québec à ce sujet. Je cite le journal des Débats du 25 août 1981, où il disait ceci, à la page B-54: "Permettez-moi de rappeler que le conseil

d'administration d'Hydro-Québec attache une grande importance aux deux aspects suivants du projet de loi no 16. "Premièrement et nous venons d'en parler - il nous semble que le projet de loi devrait reconnaître explicitement au conseil d'administration d'Hydro-Québec le pouvoir de soumettre au gouvernement une proposition de dividende annuel en même temps que les données financières qui fixent le surplus susceptible de distribution. "En second lieu, il nous apparaît tout aussi important que les parlementaires étudient avec soin la possibilité d'assortir d'une garantie gouvernementale les prêts qu'Hydro-Québec sera appelée à consentir aux consommateurs dans le cadre des programmes d'économie d'énergie."

M. le Président, nous avons tout simplement retenu ces deux amendements parce qu'il nous semble que si le conseil d'administration d'Hydro-Québec, dont les membres sont nommés par le gouvernement, a voulu, par la voix de son président du conseil, faire une demande aussi anodine, je dirais une demande aussi importante pour préserver l'autonomie financière d'Hydro-Québec, cet amendement aurait dû être approuvé avant même que la commission parlementaire se réunisse. (22 heures)

Mais, comme cela n'a pas été le cas, je crois qu'il revient à l'Opposition de le faire et de faire en sorte que nous ayons une discussion publique sur ce sujet. M. Bourbeau donnait des explications additionnelles justement pour justifier cette demande et, à la même commission parlementaire, à la page B-90, il disait ceci: "Ce qu'on cherche, à ce moment-ci, c'est justement d'être capable de protéger la réalisation du programme d'équipement." Il parlait justement de l'amendement qu'il proposait. Un peu plus loin, il disait: "Ce qu'on trouve à Hydro-Québec, c'est que, pour être capables de remplir nos responsabilités, de faire face à la demande et d'avoir un programme d'équipement qui puisse se réaliser, il nous faut des fonds que l'on puisse générer nous-mêmes à l'intérieur de l'entreprise, il nous faut des fonds qui viendront de l'extérieur de l'entreprise, c'est notre responsabilité.

M. le Président, je crois que le président du conseil d'administration d'Hydro-Québec, et je le redis, parlait au nom même du conseil d'administration. Quand il faisait cette proposition, il faisait une proposition tout à fait normale, tout à fait raisonnable, et je ne peux comprendre que le gouvernement, à venir jusqu'à ce jour, n'ait pas cru bon de retenir la proposition qui lui était faite.

Il y aura d'autres arguments, M. le Président. Nous désirons insister, nous, pour que, dans un autre amendement, l'on tienne à ce que l'article 22 de la Loi sur l'Hydro-Québec fasse en sorte qu'Hydro-Québec soit tenue de produire des coûts d'électricité aux taux les plus bas compatibles avec une saine administration financière, avant de changer un article aussi important. Je viens d'en faire état en faisant un résumé succinct d'un besoin de politique énergétique et de l'impact que cette politique énergétique pourrait avoir et des études qui sont requises avant même qu'on fasse un changement aussi substantiel, à l'endroit d'Hydro-Québec.

Je ne reviendrai pas, M. le Président, sur le fait qu'il existait un contrat social avec la population, mais, si l'on pense à l'avenir, il me semble, qu'avant de changer un article de loi qui fait en sorte qu'il y ait une obligation extrêmement importante pour Hydro-Québec de produire aux meilleurs coûts et de vendre l'électricité aux meilleurs taux possible, il faut permettre à la population de s'exprimer sur ces nouvelles politiques et ce sera au gouvernement de décider quand il voudra le faire. Mais, tant et aussi longtemps que le gouvernement n'apportera pas sur la place publique des politiques très claires dans le domaine de l'énergie, je crois, M. le Président, qu'on doit garder dans la loi d'Hydro-Québec cette imposition qui a été faite par le législateur il y a plusieurs années de maintenir les taux les plus bas possible.

Un autre amendement que nous avons proposé, M. le Président, et qu'il nous semble, encore là, tout à fait raisonnable, tout à fait normal de l'accepter, c'est l'amendement que nous avons fait pour que la tarification dans l'avenir soit soumise à l'approbation de la Régie du gaz et de l'électricité. En effet M. le Président, comment peut-on concevoir qu'un gouvernement qui a décidé d'imposer des taxes exorbitantes à Hydro-Québec puisse être en même temps celui qui va approuver la tarification d'Hydro-Québec? M. le Président, c'est un conflit d'intérêts tout à fait inacceptable. Il serait tout à fait inacceptable dans le secteur privé et il est tout à fait inacceptable dans le secteur public

M. le Président, il faut vous rappeler ici les taxes importantes que le gouvernement imposera à Hydro-Québec. Je ne voudrais pas revenir sur toutes les statistiques que nous avons données, qui ont été colligées par M. Bélanger, mais, pour ceux qui nous écoutent en ce moment, M. le Président, il faut bien souligner ceci: c'est que la taxe sur le capital augmentera très rapidement. Elle était de zéro l'an dernier, elle sera de 43 000 000 $ cette année et elle passera environ à 100 000 000 $ dans les années qui viennent. Les dividendes, qui étaient de zéro dans les années antérieures, passeront très rapidement à 28 000 000 $ l'an prochain et à peu près à 460 000 000 $

En 1984 et pour passer à 900 000 000 $ en 1985. Il faut souligner que le fardeau fiscal total, relié à l'électricité passera de quelque 100 000 000 $ en 1980 à 1 500 000 000 $ en 1985. Il faut également souligner, M. le Président, qu'en 1982, le fardeau fiscal imposé à Hydro-Québec sera quatre fois supérieur à celui imposé à Hydro-Ontario.

Pour toutes ces raisons, M. le Président, comment peut-on accepter qu'un gouvernement puisse être juge et partie en même temps? Comment peut-on accepter que le gouvernement impose de nouvelles taxes? Et il peut revenir l'an prochain, dans deux ans, dans trois ans pour augmenter ces taxes-là et il sera celui qui recevra la proposition tarifaire d'Hydro-Québec, il sera celui qu'il l'approuvera.

M. le Président, il s'agit là d'un conflit d'intérêts très net, et ceci est une raison additionnelle pour accepter cet amendement qui avait été proposé à plusieurs reprises dans le passé, avant même que nous parlions de nouvelles taxes qui seraient imposées à Hydro-Québec. Dans le passé, mon collègue de Mont-Royal, à plusieurs reprises, avait fait une telle demande et cette demande se justifiait à plusieurs égards. D'ailleurs, lorsqu'on fait une revue de toutes les sociétés d'utilités publiques au Canada, il y en a plusieurs qui s'en remettent à une régie autonome, une régie du gaz et de l'électricité. En Ontario, il y a l'Ontario Energy Board, la commission de contrôle de l'énergie en Ontario, qui a le mandat d'étudier d'une façon autonome et juste les propositions tarifaires et finalement de faire des recommandations précises qui, la plupart du temps, sont approuvées par le gouvernement.

Nous suggérons, dans ce cas-ci, que le gouvernement du Québec s'en remette à la Régie de l'électricité et du gaz pour qu'il soit très clair dans le public que les consommateurs sont protégés. Il faut qu'ils sentent qu'il y a des gens qui vont prendre leur défense et que ce ne sera pas le ministre des Finances qui influencera le ministre de l'Énergie pour que telle et telle proposition tarifaire soit acceptée et que leurs intérêts propres soient défendus. M. le Président, il nous semble que cet amendement - à sa face même - devrait être accepté et c'est la raison pour laquelle nous allons le débattre ce soir dans les minutes qui suivent. Je n'aurai pas le temps d'étudier en profondeur chacun des ces amendements, il y en a sept. Je vous dirai simplement que mes collègues se chargeront d'étudier l'un ou l'autre de ces amendements que nous avons faits.

En finissant, je dirai que pour les raisons que j'ai énoncées au début, à cause du fait que nous n'avons pas de politique énergétique... Comme le dit si bien M. Boyd, cela rend quasiment la vie impossible à

Hydro-Québec. L'ensemble de la population, les parlementaires de côté-ci de la Chambre, nous ne pouvons accepter qu'un projet de loi comme celui-là soit étudié davantage et qu'il ne soit pas rappelé. Mais, comme nous ne pouvons rien contre la machine gouvernementale, nous avons proposé ces amendements, justement pour diminuer l'impact de ce projet de loi. J'ose espérer que l'ensemble des parlementaires recevra favorablement les amendements que nous mettons de l'avant et qu'ils accepteront plusieurs des amendements que nous proposons pour la défense des consommateurs du Québec. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Fernand Lalonde

M. Lalonde: Merci, M. le Président. J'ai hésité pendant quelques secondes à me lever, je regardais le ministre parce que, devant le plaidoyer convaincant du député d'Outremont, je croyais qu'il allait rappeler la loi. Or, M. le Président, comme vous voyez, l'entêtement de ce gouvernement est égal à la panique financière dans laquelle il a jeté la province de Québec depuis cinq ans.

M. le Président, on est, actuellement, au stade de la prise en considération du rapport. C'est un peu un jargon pour le monde et je pense qu'on devrait expliquer ce qui arrive. Ce qui arrive, c'est que la commission parlementaire qui avait été appelée à étudier le projet de loi no 16, qui est la mainmise du gouvernement sur Hydro-Québec, a étudié ce projet de loi pendant une quarantaine d'heures. Une quarantaine d'heures, c'est à peu près l'équivalent du travail d'un journalier par semaine. Ce n'est quand même pas très long, une semaine de travail. Cela a pris à peu près 40 ans pour construire ce joyau de notre patrimoine, qu'est Hydro-Québec - comme disait mon collègue de Vaudreuil-Soulanges, il y a quelques jours - et, en 40 heures, on va le démolir. C'est cela que ce gouvernement est en train de faire. Donc, pendant 40 heures, la commission parlementaire a étudié le projet de loi et tout à coup le gouvernement, tellement affamé et désireux d'aller chercher les fonds d'Hydro-Québec le plus tôt possible, a dit à la commission parlementaire: Non, c'est fini. Vous n'allez pas terminer l'étude ce projet de loi-là. (22 h 10)

Je vais vous dire une chose. Savez-vous que le gouvernement lui-même nous a fait perdre une heure de travail le 10 décembre? Pourquoi? Parce que le 10 décembre nous avons dû ajourner à 23 heures au lieu de minuit, parce qu'il n'y avait plus de ministre. On avait accepté que le ministre de l'Énergie soit absent pour des raisons

humanitaires, pourvu qu'il soit remplacé par un ministre qui connaissait le problème; le ministre des Finances est venu, nous avons discuté avec lui. À 23 heures, il nous a offert, vous savez qui? Je vous le donne en mille: le ministre des Communications. Écoutez, M. le Président, on a dit: Mettez un perroquet, mettez au moins quelqu'un qui sait de quoi il parle. Alors, on a dû refuser. Donc, on a perdu une heure.

Le 11 décembre, vendredi, on aurait pu siéger de 20 heures à minuit. Le gouvernement lui-même a décidé de ne pas faire siéger cette commission-là, d'en faire siéger une autre. C'est une décision du gouvernement, pas de nous. Perte: 4 heures. Le 14 décembre, il y a à peu près une demi-heure, n'insistons pas là-dessus.

Le 15 décembre, nous avons perdu une heure et demie à la fin des travaux. Nous avions jusqu'à minuit, la guillotine sur la tête, mais jusqu'à minuit on aurait pu avancer. À 22 h 30, le député de Frontenac décide de présenter une motion d'ajournement, il était découragé. Pour lui, 40 heures, c'était trop pour faire ce travail. Il était fatigué. Le ministre était aussi fatigué, d'ailleurs, parce qu'il a voté pour la motion. Nous, complètement dégoûtés de ce gouvernement, nous avons quitté la commission parlementaire à ce moment-là. Et, nous avons perdu 4 heures et demie en tout, parce que l'avant-midi et l'après-midi, pendant que nous discutions de cette guillotine, le gouvernement a décidé de ne pas faire siéger la commission, quoiqu'il nous ait fait siéger le soir, pendant qu'on en discutait encore, et on en a discuté jusqu'à 8 h 30 le matin ou 7 h 50. Alors, M. le Président, 10 heures de perdues sur le calendrier qui auraient dû être consacrées à l'étude de ce projet de loi; autrement dit, 25% des 40 heures. C'est l'équivalent de 25% gaspillé à cause du gouvernement, de son incompétence, de sa volonté absolument absente de réellement confier à une commission parlementaire l'étude de ce projet de loi.

M. le Président, il s'agit, de toute évidence, seulement de 40 heures. On n'a jamais vu cela, une guillotine après 40 heures, jamais! C'est cette guillotine qui nous oblige actuellement à parler d'un rapport, d'un rapport tronqué, d'un rapport qui ne dit absolument rien, sauf que le député de Châteauguay a voté sur la même motion avec amendement et sous-amendement, pour, contre et abstention. On l'appelait le député culbute, M. le Président, à cette commission-là. Mais c'était un triple saut; il faut le faire! Donc, c'est un abus de pouvoir de la part du gouvernement que de nous obliger actuellement à mettre fin à cette étude. C'est la dictature de la majorité. C'est la première fois, de mémoire de parlementaire, qu'un gouvernement décide de recourir après seulement l'équivalent d'une semaine de travail à la mesure la plus odieuse, la plus répugnante en démocratie, la guillotine, pour forcer l'adoption d'un projet de loi qui crée des taxes, pas qui donne des services à la population, qui crée des taxes sans donner plus de services.

M. le Président, le Parti libéral du Québec a mené une lutte sans merci, vigoureuse, grâce à la participation de tous les collègues à l'Assemblée nationale et je les en remercie. Ils ont fait preuve d'une solidarité absolument exemplaire et qui montre jusqu'à quel point nous sommes convaincus que nous parlons pour toute la population, lorsque nous disons non au gouvernement. Vous n'allez pas faire ce geste de mainmise, ce rapt d'Hydro-Québec qui va simplement vouloir dire des tarifs plus élevés pour la population qui est déjà surtaxée au Québec. Même bâillonnée, l'Opposition libérale ne lâche pas, nous avons, comme le règlement nous le permet -c'est à peu près les seules choses qui nous restent - proposé des amendements pour rendre les effets moins dommageables et je vais vous en lire quelques-uns, M. le Président, rapidement.

Il y en a un pour assujettir les redevances que le gouvernement va exiger d'Hydro-Québec à la recommandation de la société d'Hydro-Québec. Le conseil d'administration sait de quoi il a besoin. Au moins on aura cette espèce de garantie, à savoir qu'Hydro-Québec sera d'accord si le gouvernement dit: Écoutez, donnez-moi donc 500 000 000 $ ou 100 000 000 $, j'en ai besoin.

Autre amendement: Que la société ait pour objet de fournir l'énergie aux entreprises et aux citoyens, à nous tous, aux taux les plus bas, compatibles avec une saine administration financière. C'est dans la loi actuelle, pas dans celle qu'on présente, mais dans celle qu'on veut changer, celle qui existe depuis 1964. C'est ça qui a permis à Hydro-Québec de donner et aux citoyens de recevoir à peu près le meilleur service d'électricité en Amérique du Nord. C'est ça, ça a l'air du jargon, mais c'est ça, au fond, qu'on veut remettre dans la loi.

Il y a aussi un amendement qui est extrêmement important. Le gouvernement pourra, si cette loi inique est adoptée, aller chercher dans les coffres d'Hydro-Québec, même sans son consentement, 75% des revenus nets, tel que défini dans la loi. À ce moment-là, Hydro-Québec devra augmenter les tarifs en conséquence. Nous disons qu'il y a un autre élément qui est important, ces tarifs sont augmentés avec le consentement de qui? Le consentement du gouvernement lui-même qui va se servir dans les poches d'Hydro-Québec. Le gouvernement est en plein conflit d'intérêts, parce que c'est lui qui va en bénéficier. Nous disons, dans cet

amendement, que la tarification sera acceptée, non pas par le gouvernement, mais par la Régie de l'électricité et du gaz; elle pourra prendre les intérêts des Québécois. C'est un amendement extrêmement important, j'espère que les députés péquistes pourront aller au-delà de la philosophie de parti pour pendre les intérêts des Québécois.

Un autre amendement, M. le Président, qui est très important, on sait que le programme du Parti québécois - mais ça, on ne sait plus ce que ça veut dire, ils ont des congrès et des référendums, on ne sait plus au juste - comportait, à la dernière élection, une promesse d'enlever la taxe de vente sur les comptes d'électricité, c'était une promesse formelle. Or, ce n'était pas marqué dans la loi. Nous voulons l'inclure.

Je conclus là-dessus, M. le Président, et j'espère que les députés péquistes sauront, lorsqu'ils vont voter, demain matin, qu'ils doivent voter selon leur programme et c'est conforme à leur programme de voter pour cet amendement. Ainsi de suite, M. le Président. La seule chose que nous pouvons faire actuellement, c'est de permettre aux péquistes ou députés ministériels de se joindre à nous sur ces amendements. La seule demande qu'il me reste à faire, c'est que les députés du Parti québécois votent pour nos amendements. Le résultat sera que la loi, si elle n'est pas encore acceptable, sera moins dommageable au moins pour les Québécois. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Reed Scowen

M. Scowen: Je ne sais pas si le gouvernement est prêt à écouter l'Opposition libérale, mais j'espère qu'il sera prêt à écouter le conseil d'administration d'Hydro-Québec. Le conseil d'administration d'Hydro-Québec est contre ce projet de loi. Il ne l'a pas dit publiquement, il a agi avec prudence, mais un document qui sort du conseil d'administration, en date du 15 avril de cette année, est arrivé chez nous. Je veux que le ministre nous écoute - s'il n'a pas encore lu ce document, j'imagine qu'il lui a été envoyé - pendant qu'on décrit un peu ce que le conseil d'administration d'Hydro-Québec pense de ce projet de loi du gouvernement.

Il dit: Le budget présenté le 10 mars - c'est effectivement la loi 16 - entraîne pour Hydro-Québec les principales conséquences suivantes: 1) une chute de revenu net de l'entreprise de 37% en 1981, par rapport à 1979 et 1980; 2) des besoins d'emprunt augmentés, entre 1982 et 1985, de 2 600 000 000 $ au-delà du maximum raisonnable - c'est le conseil d'administration qui parle - 3) programme d'emprunt d'environ 3 000 000 000 $ en 1982 qui sera difficile à réaliser à des conditions acceptables; 4) remise en question de la faisabilité financière du plan des installations pour la prochaine décennie, le plan d'immobilisations d'Hydro-Québec pour les prochaines dix années est remis en question par cette loi, d'après le conseil d'administration de la compagnie; 5) abandon de politiques financières soutenues publiquement jusqu'ici par le gouvernement, perte de crédibilité pour Hydro-Québec et répercussions négatives possibles sur les emprunts futurs.

On dit aussi qu'il y a des conséquences pour la mission et la gestion d'Hydro-Québec, que ça va avoir des conséquences de confusion et de dilution des responsabilités en matière de tarification et de prévision de la demande et la difficulté d'établir des plans rentables à long terme. (22 h 201

Deuxièmement, atteinte à la responsabilité de l'entreprise en ce qui a trait à la saine administration financière. Je répète que c'est le conseil d'administration d'Hydro-Québec qui parle, ce n'est pas le Parti libéral, ce n'est pas la population, ce sont ceux qui ont la responsabilité de diriger cette entreprise.

Troisièmement, danger de réduire l'autonomie de gestion interne essentielle au bon fonctionnement d'une société d'État.

Ce sont huit raisons très claires établies par la société d'État même dans ce document. Je veux citer simplement trois ou quatre autres réserves critiques que le conseil d'administration d'Hydro-Québec a faites à l'égard de ce projet de loi. Il dit que le montant que devrait payer Hydro-Québec en vertu des nouvelles mesures serait du même ordre que la totalité de l'impôt sur le revenu des entreprises industrielles et commerciales au Québec aujourd'hui. Par la voie de ce projet de loi, Hydro-Québec va payer autant d'impôt que le total de tous les impôts sur le revenu de toutes les autres compagnies industrielles et commerciales au Québec. Il ajoute que l'activité d'Hydro-Québec ne représente que 5% de la valeur ajoutée totale au Québec. C'est bizarre, c'est brutal. Il dit: "Comme sa capacité d'emprunt n'est pas illimitée, Hydro-Québec se voit forcée de revoir ses conclusions antérieures quant à la faisabilité financière de son plan des installations et d'adopter entre-temps une grande prudence face à la mise en oeuvre de nouveaux projets majeurs." C'est le conseil d'administration qui parle.

Je continue, je n'ai pas fini, M. le Président. Je cite la page 11: "Le nouveau budget - effectivement, le nouveau projet de loi, parce que le projet de loi dont on parle ce soir, c'est quelque chose qui touche directement le budget - marque une rupture importante avec le passé, passé qui a longtemps été considéré dans plusieurs

milieux financiers comme une garantie de l'avenir. Les mesures proposées ont pour effet de modifier la nature même du crédit d'Hydro-Québec surtout en éliminant l'assurance financière que représentait la marge de manoeuvre entre ses tarifs relativement bas et la valeur de son électricité sur les marchés énergétiques. Cette rupture avec le passé risque d'entraîner une méfiance quant au maintien des garanties offertes dans le budget." Le conseil d'administration continue: "Le nouveau budget - du projet de loi no 16 -élimine tout espoir qu'aurait pu entretenir la société compte tenu de ses récents résultats financiers, d'obtenir une cote AAA. Il reste à espérer que les explications et les adaptations qui pourraient être apportées à l'application des mesures prévues dans le budget permettront au moins de défendre la cote actuelle. "Dans ces conditions - je cite encore -Hydro-Québec devra recourir davantage à des formes de financement moins économiques et moins souhaitables telles que les emprunts à taux flottant, les courtes échéances et les recours à des devises comportant un risque sérieux de perte au change", autrement dit dans les pays étrangers.

M. le Président, si le gouvernement n'est pas prêt à nous écouter, s'il est déterminé à adopter cette loi en pleine nuit, malgré tous les arguments qu'on a présentés, qu'il écoute au moins ce cri qui nous est venu du conseil d'administration même d'Hydro-Québec.

Je continue: "L'application de la redevance" - du dividende - "selon les modalités prévues au budget - je cite le conseil d'administration - ne pourra être faite sans une réforme des articles les plus fondamentaux de la Loi d'Hydro-Québec car elle modifie plusieurs aspects de la mission confiée à l'entreprise. Les modalités de cette redevance vont même à l'encontre des caractéristiques normalement reconnues à une société d'État. "... Enfin, parce qu'elles équivalent à un impôt de 100% sur tout revenu net dépassant un certain seuil, ces modalités dissocient entièrement les profits de l'entreprise de la qualité de sa gestion. Parce que le gouvernement va amener, arracher tous les profits au-dessus d'un certain seuil minimum, il ne restera aucune incitation pour la société Hydro-Québec de rester rentable et d'améliorer sa productivité." Ce n'est pas moi qui le dis, c'est Hydro-Québec. J'espère que vous m'écoutez, c'est très important.

La gestion interne. Voici les conséquences, d'après Hydro-Québec, sur la gestion interne de la société: "La formule de redevance" - de dividendes - "qui équivaut à un impôt de 100% sur les revenus nets, dépassant un certain seuil, aura pour effet de réduire la responsabilité d'Hydro-Québec à l'égard de ses résultats financiers. Ainsi, l'incitation à une efficacité administrative en sera réduite, sinon compromise. En contrepartie, le gouvernement en viendra inévitablement à imposer des contrôles paralysants sur la gestion interne d'Hydro-Québec. L'expérience vécue par certaines sociétés d'État dans plusieurs pays et même au Québec démontre que de tels contrôles impliquent la mise en place de processus bureaucratiques coûteux et inefficaces tant pour l'entreprise que pour la collectivité."

Si ces gens s'intéressent un peu à la collectivité, c'est peut-être une bonne idée qu'ils écoutent le conseil d'administration d'Hydro-Québec.

Voici la dernière citation, M. le Président: "La formule de redevance proposée pourrait représenter une solution de facilité pour Hydro-Québec. En effet, toute erreur dans la planification et toute faiblesse dans la gestion qui se refléteraient dans les coûts de l'entreprise seraient absorbées par le gouvernement sous la forme d'une redevance réduite. Cette solution de facilité va à l'en- contre du rôle normal d'une société d'État qui, par définition, doit rendre compte de sa gestion en fonction d'objectifs clairs."

Vous vous souvenez, j'en suis certain, M. le Président, que, ce matin, mon collègue, le député d'Outremont, a cité l'ancien PDG de la société Hydro-Québec, M. Robert Boyd, qui disait que la société Hydro-Québec et le gouvernement étaient loin d'avoir des objectifs clairs quant à la politique énergétique du Québec.

Je termine, M. le Président, en demandant, presque avec une prière, que, si le ministre de l'Énergie et des Ressources, le ministre des Finances et le premier ministre ne sont pas prêts à écouter les 37, 38, 39 députés libéraux qui ont parlé jour et nuit au nom de la collectivité québécoise - et maintenant, j'espère que vous allez trouver que c'est aussi au nom du conseil d'administration d'Hydro-Québec - ils seront au moins prêts à comprendre que tout le monde est opposé à ce projet de loi extrêmement néfaste. Merci.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Mont-Royal.

M. John Ciaccia

M. Ciaccia: M. le Président, nous discutons du projet de loi no 16 qui modifie la Loi sur l'Hydro-Québec et impose des changements assez sérieux. Le gouvernement a décidé d'imposer la clôture. Cela veut dire que nous ne pouvons plus discuter des conséquences pour la population de ce projet de loi. Les règlements de cette Assemblée nous obligent à accepter la décision du gouvernement et à ne plus discuter d'un

projet de loi qui va avoir des conséquences sérieuses sur toute notre économie. Nous acceptons forcément cette décision du gouvernement d'imposer le bâillon et d'arrêter toute discussion sur le projet de loi no 16. Cependant, M. le Président, nous demandons au gouvernement, même s'il veut adopter le projet de loi à la vapeur à la fin de la session, d'apporter certains amendements au projet de loi dans l'intérêt des Québécois, dans l'intérêt d'Hydro-Québec, dans l'intérêt de l'avenir du Québec dans le domaine économique, dans le domaine énergétique. (22 h 30)

Un des amendements que nous demandons, c'est de maintenir les objectifs d'Hydro-Québec tels qu'ils étaient avant l'adoption de ce projet de loi no 16. Quels étaient ces objectifs? Quand Hydro-Québec fut créée, quand les compagnies privées vendaient l'électricité au Québec ont été nationalisées, l'objectif d'Hydro-Québec était de fournir aux citoyens du Québec, aux entreprises industrielles ou commerciales l'énergie aux taux les plus bas compatibles avec une saine administration financière. Cela veut dire que l'objectif principal d'Hydro-Québec est de s'assurer que les Québécois reçoivent l'énergie aux plus bas prix possible, tenant compte des exigences d'Hydro-Québec pour le développement des ressources électriques. C'est important de maintenir cet objectif. Le gouvernement, par le projet de loi no 16, enlève cet objet d'Hydro-Québec, change la mission d'Hydro-Québec et peut affecter l'avenir, non seulement d'Hydro-Québec, mais de l'économie québécoise.

Une autre raison du gouvernement, c'est parce qu'il veut exiger d'Hydro-Québec des dividendes. Le gouvernement dit: On a besoin d'argent, nous voulons aller chercher les dividendes d'Hydro-Québec. Si le gouvernement maintient les objets d'Hydro-Québec, c'est-à-dire de fournir l'énergie au plus bas prix possible, si, après que l'énergie est fournie aux plus bas prix possible, il reste des dividendes pour le gouvernement, pour payer ses autres dettes, là, nous disons: Très bien, cela sera un boni pour le gouvernement. Mais, si le paiement des dividendes exige que les consommateurs au Québec doivent payer plus cher pour l'électricité, là, nous disons non. Nous exigeons du gouvernement de maintenir le mandat qui a été donné à Hydro-Québec.

Pourquoi est-il important de maintenir ce mandat d'Hydro-Québec? La hausse des tarifs va non seulement affecter le paiement de l'énergie par le contribuable pour l'éclairage de sa maison, le chauffage, mais va affecter surtout le prix de tous les produits - et cela c'est important, c'est important que la population réalise les objectifs et les conséquences du projet de loi no 16 qui va être imposé par le gouvernement malgré les protestations de l'Opposition.

Le projet de loi no 16 va avoir pour conséquence d'augmenter le prix de tous les produits et je dis "tous les produits" manufacturés ou vendus au Québec. Si l'on achète un produit au Québec, s'il n'est pas manufacturé au Québec, on l'achète, quand même, au Québec; s'il est produit au Québec, nous allons subir une augmentation additionnelle. Pourquoi? Je vais vous expliquer pourquoi. C'est parce que les hausses d'Hydro-Québec sur les entreprises commerciales, les entreprises industrielles vont être passées aux consommateurs.

Le magasin d'alimentation qui voit augmenter le prix de son électricité, le prix de sa réfrigération, le prix de tout ce qu'il doit à Hydro, que pensez-vous que ce magasin va faire? Pensez-vous qu'il va absorber qu'il va absorber la hausse? Mais non. Dans l'économie, il n'y a pas de sociétés à but non lucratif, ils sont là pour faire un profit. Alors, le marché, les lois économiques vont exiger que la hausse d'électricité soit payée par le consommateur. Le consommateur paie déjà pour l'éclairage, pour le chauffage. Quand il va aller faire ses emplettes au magasin, toutes les semaines, acheter sa viande, ses aliments, quand il va aller à un magasin pour acheter l'habillement, tous les produits, il va payer plus cher. C'est le consommateur, non seulement le consommateur riche, mais tous les consommateurs qui vont être obligés de payer cette hausse qui est exigée par le gouvernement.

Alors, M. le Président, nous protestons, nous disons: Non, vous ne devez pas faire cela. Pourquoi affecter l'avenir d'une société comme Hvdro-Québec, qui a été tellement importante dans le développement économique du Québec? Pourquoi affecter cette société parce que le ministre des Finances, le gouvernement a besoin d'argent? Il a besoin d'argent pour payer le gaspillage, sa mauvaise administration depuis les cinq dernières années. Nous disons au gouvernement, M. le Président: Nous réalisons que nous devons payer les déficits. C'est admis, chacun doit payer les dettes, même si l'Opposition n'en est pas la cause, on accepte cela, mais la population doit les payer. On a élu d'une façon démocratique ce gouvernement, alors il faut payer pour. Il faut payer pour le résultat de cette élection et le résultat de l'administration du gouvernement. Mais, s'il vous plaît, ne faites pas cela à Hydro-Québec. Si vous avez besoin d'argent, trouvez d'autres moyens, trouvez d'autres façons de hausser les taxes. Soyez honnêtes avec la population. N'attaquez pas la mission d'Hydro-Québec.

M. le Président, Hydro-Québec n'est pas seulement une société qui fournit l'électricité

aux Québécois, c'est une société qui aide au développement économique du Québec et, si on touche au surplus d'Hydro-Québec, si on touche aux sommes dont Hydro-Québec a besoin pour le développement des ressources hydroélectriques au Québec, on affecte tout le développement économique du Québec. Cela veut dire qu'on affecte votre avenir, mon avenir, l'avenir de tout le monde. On vous dit, M. le Président, on dit au gouvernement: Soyez donc plus intelligents que cela. Si vous voulez payer pour vos bêtises, n'en faites pas une autre, la bêtise de changer le mandat d'Hydro-Québec, de changer les structures, de changer l'avenir d'Hydro-Québec, de changer le développement de la Raie-James.

On est tous fiers de la Baie-James M. le Président, même ce gouvernement. Quand il était dans l'Opposition, il était contre la Baie-James, il critiquait, il voulait le développement nucléaire; il est venu au pouvoir et il voulait s'attribuer tout le mérite de la Baie-James. C'est lui qui a appuyé sur le petit bouton pour l'ouverture officielle de LG2. J'étais là et vous auriez dû voir la foule de personnes et le mérite que voulait s'attribuer ce gouvernement. Savez-vous ce qu'il fait à la Baie-James maintenant. Il arrête le développement de la Baie-James. M. le Président, c'est honteux! C'est scandaleux! Il ne faut pas permettre cela et il faut que la population sache ce que le gouvernement essaie de faire.

M. le Président, un autre aspect. J'ai seulement un peu de temps qui m'est alloué. Nous demandons au gouvernement, et c'est seulement pour être conforme à la Loi sur la protection du consommateur. C'est vrai que par la Loi sur la protection du consommateur le gouvernement s'est protégé. Il a dit: Je vais faire une loi sur la protection du consommateur mais on va attaquer seulement l'entreprise privée, pas les autres sociétés. Quant au gouvernement, non; il a deux poids, deux mesures. Nous vous demandons quand vous allez l'inclure dans la Loi sur la protection du consommateur. Si, par exemple, vous allez à une banque, vous faites un emprunt, il ne faut pas seulement remettre le paiement total. Supposons que vous empruntez 1000 $, ce n'est pas assez de payer 100 $ par mois. Non, la Loi sur la protection du consommateur dit: Dans ces 100 $, il y a 80 $ de remboursement de capital, 20 $ d'intérêt, le taux d'intérêt, c'est tel ou tel montant.

Alors, nous disons au gouvernement de faire la même chose pour les factures d'Hydro-Québec. Sur la facture, vous deviez donner le chiffre qui représente les montants dont Hydro-Québec a besoin pour une saine administration aux taux les plus bas possible Pour les Québécois, les contribuables, les consommateurs et en terminant, M. le Président, l'autre chiffre qui représente les dividendes dont le ministre des Finances a besoin pour payer les dettes du Québec. Si cela est fait, le contribuable, le consommateur saura ce qu'il paie et le gouvernement se conformera au moins à ses propres lois, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le président du Conseil du trésor.

M. Yves Bérubé

M. Bérubé: Merci, M. le Président. J'ai entendu un certain nombre d'interventions de l'Opposition depuis quelques minutes, M. le Président, et je suis allé voir de mes collègues qui ont participé aux travaux de la commission pour m'enquérir de toutes ces critiques que j'entends depuis quelques minutes, en me disant que le débat en commission parlementaire sur le projet de loi, a dû être extraordinairement étoffé, à voir le nombre de critiques que l'on entend de toutes sortes. Je me suis dit qu'il a dû y avoir des propositions d'amendement intéressantes à l'article 7, 12 ou 14, et qu'on pourrait peut-être en voir la philosophie. Là, j'ai essayé de discuter avec mes collègues et je leur ai posé un certain nombre de questions, par exemple: Quels sont les amendements qu'on a eus à l'article 1, il n'y en a pas eu; à l'article 2, il n'y en a pas eu; à l'article 3, il n'y en a pas eu. J'ai dit: On n'a pas proposé qu'un amendement! Non, a-t-on répondu, on n'a pu discuter ni l'article 1, ni l'article 2, ni l'article 3, parce qu'on a tout simplement discuté autour du projet de loi. Depuis, que nous sommes assis en commission parlementaire, l'Opposition, en aucun moment, n'a cherché de quelque façon que ce soit à aller au fond de la question. On s'est contenté de discuter de la forme, de faire des discussions absolument sur n'importe quoi, l'objectif étant évidemment d'empêcher l'adoption du présent projet de loi.

Aujourd'hui, on dit: On n'a pas eu assez de temps dans les discussions préliminaires, de telle sorte qu'après je ne sais combien d'heures, 30 ou 40 heures, 40 heures, on n'a toujours pas commencé à étudier l'article 1 du projet de loi; on n'en a pas encore parlé. Des considérations générales, l'âge, la beauté, on me dit même dans certaines commissions, je pense que c'est celle sur la loi no 39, on a longuement discuté, par exemple, parce c'est à peu près le même contenu, du député de Saint-Louis, à savoir que c'était un buveur de scotch et non un buveur de bière. Enfin, on a discuté de n'importe quoi, sauf du projet de loi.

Et maintenant on va dire: Mais écoutez, ça n'a aucun bon sens...

M. Bélanger: M. le Président, question de privilège.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Question de privilège, M. le député de Mégantic-Compton.

M. Bélanger: M. le Président, le ministre est en train d'induire cette Chambre en erreur, disant que mon collègue Harry Blank a siégé à cette commission alors qu'il n'est jamais venu... Il parle tout simplement d'une autre commission. De plus...

M. Bérubé: Question de règlement.

Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît!

Question de règlement, M. le ministre.

M. Bérubé: De toute évidence il y a un abus de la procédure de la question de privilège et je pense qu'il faut rappeler le député à l'ordre.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le ministre, vous pouvez continuer.

M. Bérubé: Alors, M. le Président, j'écoutais tantôt le député d'Outremont dire qu'il n'y a pas de politique gouvernementale dans le secteur énergétique et, dans la même intervention, nous parler de l'énoncé de politique gouvernementale de 1978 en matière énergétique. Il n'y a pas de politique, mais il y a un énoncé de politique. Il faudrait peut-être le renvoyer au dictionnaire français. Qu'est-ce qu'un énoncé de politique? Il va s'apercevoir que c'est exactement cela, avoir une politique. Il n'y en avait pas avant 1978, je le concède, il n'y en a jamais eu sous le libéraux, mais on pourrait parler de ces politiques énergétiques qui ont commencé à l'époque de M. Joron par une réflexion en profondeur de toute la problématique des approvisionnements en énergie au Québec.

D'abord on s'est préoccupé de la pénétration du gaz naturel, et on ne s'est pas contenté d'en parler. On s'est dit: Il faut que le gaz entre au Québec vite, et avec des entreprises québécoises à nous, contrôlées du Québec pour s'assurer qu'il y ait la maximum de retombées économiques au Québec par l'achat de ces entreprises; c'est ça qui nous a amenés à prendre le contrôle de Gaz Métropolitain, de Gaz Inter-Cité, ce qui fait qu'aujourd'hui nous sommes pleinement engagés dans l'implantation du gaz naturel au Québec.

Concernant Hydro-Québec, oui, on a dit qu'Hydro-Québec devait aménager le plus rapidement nos rivières, mais non pas, comme le dit le Parti libéral, pour exporter d'immenses quantités d'électricité à long terme pendant 25 ans et faire en sorte qu'on mangue d'énergie pour nos propres besoins, pour assurer notre développement industriel à nous. Non, nous avons pris la peine d'élaborer une politique pour attirer des entreprises au Québec en utilisant justement les avantages de l'énergie électrique pour favoriser l'implantation industrielle. On n'est pas prêt à vendre notre électricité à rabais à des industries, mais on dit: Si vous êtes prêts à consentir un certain nombre d'investissements dans telle et telle conditions on pourra discuter de tarif, et c'est cela qui a amené l'implantation de Reynolds au Québec, l'agrandissement de Baie-Comeau, un investissement de près d'un demi-milliard de dollars chez nous. Mais on ne s'est pas contenté de faire comme des gens avant nous, de parler de la croissance pour la croissance, mais on s'est dit également que les Québécois aspiraient à une certaine qualité de vie et qu'ils étaient préoccupés par les énergies douces, les nouvelles sources d'énergie, les économies d'énergie, pour faire en sorte qu'on ait une société beaucoup plus écologique, qu'ils ne fassent pas du développement sauvage pour du développement sauvage, ce qui nous a amenés, à concevoir un programme d'économie d'énergie comme Énerqain, tellement populaire qu'à l'heure actuelle, Hydro-Québec est totalement débordée par les demandes.

On pourrait parler de Nouveler, la création de cette société, cette société d'état qui va construire cette usine de méthanol à Saint-Juste-de-Bretenières, mais qui est également responsable d'un paquet de projets drôlement intéressants dans le domaine de la conservation de l'énergie. Par exemple, un hôpital à Sainte-Anne-des-Monts n'a pas les moyens d'investir dans l'économie d'énergie, cela n'a pas de bon sens, parce qu'il va économiser beaucoup plus que ce que ça lui coûte, mais il faudrait du comptant. Et voilà, cette société Nouveler à nous qui vient, fait tous les travaux pour l'hôpital sans facturer un sou à l'hôpital et se repaie grâce aux économies d'énergie que l'hôpital effectue. Opération qui est en train de s'étendre à tout le Québec.

Il n'y a personne qui parlait d'économie d'énergie avant nous. Il n'y a personne qui parlait d'énergie nouvelle avant nous. On a parlé d'approvisionnement de pétrole en donnant un véritable mandat à SOQUIP pour approvisionner le Québec en pétrole, pour s'engager dans l'exploration. C'est au-delà de 100 000 000 $ en exploration qui va se faire au Québec, grâce à une mesure fiscale que le gouvernement a adoptée et qui amène maintenant toutes les compagnies de pétrole au Québec à s'associer avec SOQUIP pour faire de l'exploration dans le golfe, chez nous. Ce n'est pas avec un gouvernement du Parti libéral qu'on a eu ça, c'est avec un gouvernement du Parti québécois.

Il fallait en venir également à une politique tarifaire, parce que, si on s'engage dans la pénétration du gaz, dans le

développement de notre électricité, il faut avoir des tarifs, l'un par rapport à l'autre, qui fassent en sorte que le gaz ait une chance de pénétrer. Il fallait donc tout rationaliser cette opération, faire en sorte que l'électricité pour la consommation courante reste bon marché, que l'électricité pour le chauffage reste comparable avec les sources alternatives d'énergie, arriver avec une certaine cohérence dans notre politique tarifaire. C'est ça que le gouvernement a introduit cette année. Mais cela a comme conséquence qu'Hydro-Québec, comme toutes les compagnies pétrolières, va faire des profits épouvantables. L'Opposition libérale ne semble pas avoir participé à la commission parlementaire où Hydro-Québec est venue expliquer la problématique et où on s'est rendu compte qu'Hydro-Québec serait en train de payer, en moins de cinq ans, comptant, ses barrages. Certains députés, mais pas de l'Opposition d'ailleurs, ont soulevé cette question, ils ont essayé d'approfondir ce point particulier. Là, on s'est posé la question: Les contribuables du Québec qui ont investi dans Hydro-Québec ont-ils investi pour que certains consommateurs d'une forme particulière d'énergie se fassent subventionner, ou bien ont-ils investi pour faire en sorte que l'ensemble des contribuables québécois profite des retombées? C'est ça, le sens de la loi.

Ce que la loi no 16 va faire, c'est ceci: vous ne vous chauffez pas à l'électricité, madame ou monsieur, vous vous chauffez au pétrole, vous aurez le droit de profiter des avantages d'Hydro-Québec, même si vous ne consommez pas d'électricité. En d'autres termes, il n'y aura pas simplement certaines entreprises, grosses consommatrices d'électricité, qui vont empocher les résultats des investissements que vous avez faits dans Hydro-Québec, mais c'est l'ensemble des contribuables québécois qui va en profiter. Parce que, lorsque Hydro-Québec paie un dividende au gouvernement, c'est de l'impôt que le gouvernement n'est pas obligé d'aller chercher dans vos poches. Par conséquent, c'est vous qui en profitez. Nous avons donc simplement choisi, non pas de faire profiter vos investissements aux grands consommateurs d'énergie électrique, mais nous avons choisi de vous faire profiter de vos investissements. C'est le sens de la loi no 16, il n'y a rien de plus catastrophique que ça.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le ministre, M. le ministre!

M. Bérubé: Et, M. le Président, je termine.

Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît!

M. Bérubé: Avec une loi aussi rationnelle et devant un comportement aussi irrationnel de l'Opposition qui ne s'est même pas donné la peine d'aborder l'étude de l'article premier du projet de loi, ce que ça veut dire M. le Président, c'est qu'il faut se dépêcher de l'adopter. (22 h 50)

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député d'Outremont, sur une question de...

M. Fortier: Article 96.

Le Vice-Président (M. Rancourt): 96.

M. Fortier: J'aimerais corriger certains propos du discours que j'ai tenu et de celui qu'a tenu le député de Matane.

Il est vrai que j'ai parlé d'énoncé de politique et de politique; en deux mots, je voudrais seulement préciser ma pensée. Il faut croire que je ne me suis pas exprimé très clairement ou le député de Matane ne m'a pas compris; j'ai fait la distinction entre l'énoncé de politique qui n'est pas approuvé par le cabinet et qui demeure un énoncé de politique et une politique qui doit être approuvée par le cabinet. Ce que j'ai dit c'est qu'en ce qui concerne la politique tarifaire...

M. Bérubé: Question de privilège.

M. Fortier: ... il y a un énoncé de politique qui, à ma connaissance, n'est pas approuvé par...

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le ministre, question de privilège.

M. Bérubé: M. le Président, le député d'Outremont a malheureusement induit la Chambre en erreur et de toute évidence, d'ailleurs, il a reconnu qu'il n'était peut-être pas au courant. J'ai l'impression que depuis le début de la discussion, effectivement, il ne semble pas être au courant de quoi que ce soit. M. le Président, l'énoncé de politique énergétique a été approuvé par le Conseil des ministres.

Le Vice-Président (M. Rancourt): II n'y a pas de débat, je m'excuse, M. le député d'Outremont.

M. Fortier: ... sur un autre sujet.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Sur un autre sujet.

M. Fortier: II a dit qu'à la commission parlementaire on avait fait état du fait qu'avec ses revenus qu'Hydro-Québec pourrait s'autofinancer à 60%. Ce que je veux lui faire remarquer, parce qu'il n'était pas là à la commission parlementaire, c'est qu'Hydro-

Québec a fait état d'une différence de calcul... Deux secondes...

Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît! J'étais debout donc, il n'y avait aucun enregistrement ni d'un côté ni de l'autre. M. le député de Mégantic-Compton.

M. Fabien Bélanger

M. Bélanger: Merci, M. le Président. Je ne relèverai pas les propos du député de Matane à savoir que les Québécois avaient investi beaucoup dans Hydro-Québec, n'est absolument faux, les Québécois n'ont pas investi un sou dans Hydro-Québec, c'est une société d'État qui s'est toujours financée à même la facturation de ses clients.

D'autre part, comment tenter de faire croire aux Québécois que le projet de loi no 16 s'inscrit dans le cadre du développement économique du Québec? Je qualifierais cela de fraude intellectuelle, et le président du Conseil du trésor est très habile pour induire les gens en erreur d'un telle façon.

M. le Président, ce projet de loi no 16 passera dans les faits historiques de l'Assemblée nationale; comme l'a bien démontré mon collègue de Marguerite-Bourgeoys, après seulement 40 heures de commission parlementaire, on nous impose quoi? On nous impose le bâillon, la clôture; la clôture péquiste dont ils sont les spécialistes, dont le premier ministre lui-même est un spécialiste; il a mis tout un système en branle pour clôturer son congrès qu'il vient de tenir à Montréal alors que c'est lui et ses dirigeants qui avaient invité à peu près tous les organismes terroristes possibles. C'est maintenant lui qui met en branle un plan pour tenter de tout camoufler, de faire voir par son air de petit gars malheureux que ce n'est pas sa faute. M. le Président, il est le principal responsable.

C'est un geste unilatéral et une façon, à la péquiste, de gouverner.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Je m'excuse, question de règlement du ministre.

M. Bérubé: M. le Président, il existe un règlement de notre Assemblée nationale qui exige que le député qui intervient traite du sujet et que cela porte sur la pertinence du débat. Le député ne parle pas présentement...

M. Bélanger: M. le Président, il a parlé seulement de gaz.

Le Vice-Président (M. Rancourt): II n'y a personne ici dans cette Chambre qui va me dire si mon jugement est mauvais. J'essaie d'interpréter, chaque fois que je suis à ce siège, de la façon la plus juste possible.

Le sujet que nous traitons actuellement est la prise en considération du rapport et, M. le député, j'aimerais que vous vous en teniez à cela. Je ne veux, d'aucune façon, discuter de vos propos, je vous demande simplement de vous en tenir à la prise en considération du rapport qui est déposé devant cette Chambre.

M. le député.

M. Bélanger: Merci, M. le Président, je suis fier de votre décision et je la respecte.

Je disais donc qu'après seulement 40 heures de commission parlementaire on nous impose la clôture péquiste. Je tiens à le dire et je le répète, la clôture péquiste, après seulement 40 heures de discussions au cours desquelles on a tenté, par tous les moyens mis à notre disposition, de faire comprendre le bon sens, de faire entendre des groupes, des personnes intéressées à venir discuter sur ce projet de loi no 16. Mais non, on avait hâte, il fallait passer le projet de loi à la hâte, au rouleau à vapeur.

Pourtant, M. le Président, au mois de septembre, on était prêts, nous, de l'Opposition à venir siéger dans cette chambre, à venir jouer, à venir remplir notre rôle de législateurs, notre rôle de députés, quoi. Qu'est-ce qu'on a fait? On a retardé l'ouverture à cause d'un autre fait historique, M. le Président. C'est la première fois dans l'histoire du Québec qu'on retarde l'ouverture de la session à autant de reprises, cinq reprises. Pourquoi? Toujours pour la même chose, discuter de la constitution. Alors, on nous arrive, M. le Président, à la dernière minute, avec 30 projets de loi à adopter dans trois semaines. On travaille jour et nuit.

Ce gouvernement a démontré son insouciance totale envers le respect de l'Opposition. Pas les députés d'arrière-ban, pas les "back-benchers", le leader du gouvernement lui-même, la nuit dernière, a traité dans cette Chambre les 41 députés libéraux d'insignifiants, M. le Président. D'insignifiants! 46% de la population nous ont approuvés, ont voté pour nous, nous ont mandatés pour venir dans cette Chambre. Que trouve à dire le leader du gouvernement? 41 insignifiants. M. le Président, vous le savez comme moi, j'ai 40 honorables collègues ici, dans cette Assemblée, et il y en a même qui sont ici depuis tellement de temps que le leader de l'Opposition est encore en culotte courte.

M. le Président, ce gouvernement péquiste ne semble pas vouloir s'accommoder de l'Opposition. Pourtant, je lui ai fait ici une mise en garde, il y a quelques jours. Nous allons jouer notre rôle d'Opposition, que cela déplaise ou non au gouvernement, nous allons jouer notre rôle d'Opposition. Qu'on se souvienne des députés péquistes qui, du temps qu'ils étaient dans l'Opposition, à six,

ont réussi à semer le désordre total dans l'administration du gouvernement. On joue tout simplement, M. le Président, notre rôle d'Opposition, tout simplement pour tenter d'obtenir que ce gouvernement n'adopte pas un projet de loi aussi néfaste pour l'ensemble des Québécois, et on se fait accuser de quoi? D'insignifiants:

M. le Président, nous ne sommes pas des insignifiants, nous avons même tenté à plusieurs reprises d'apporter des amendements pour améliorer le projet de loi. Je vais vous en citer un, M. le Président, qui est de toute importance: Nous voulons que sur la facturation d'Hydro-Québec on inscrive le montant versé en taxe de capital et dividende. Cela n'est pas une exception, M. le Président. Prenons l'entreprise privée. Je verrais très mal une entreprise dans le domaine de la couture, par exemple, où il y a 25 comités paritaires, vouloir déduire une taxe sans en mentionner la nature. Je verrais très mal aussi un entrepreneur dans le domaine de la construction, où, encore là, il y a des inspecteurs de l'Office de la construction du Québec, I'OCQ, les caporaux de l'OCQ, faire de même. L'employeur serait mis à l'amende et il serait même emprisonné pour ne pas vouloir faire mention, sur le chèque de paie de son employé, du montant qui lui a été déduit pour fins d'impôts. Pourquoi le gouvernement agirait-il autrement? Pourquoi ne pas vouloir mentionner sur la facture, qu'on le sache au moins, pourquoi la facture d'électricité a augmenté de 10 $, de 20 $, de 30 $? Là, le consommateur sera en mesure de dire: Voilà, cela est ma participation à la mauvaise administration du gouvernement PQ. C'est simple cela, M. le Président.

Il y a beaucoup d'autres amendements que nous avons apportés, mes collègues en ont traité, je pourrais traiter d'autres, on veut aussi que ce soit le conseil d'administration d'Hydro-Québec qui décide des dividendes et non le ministre des Finances. Pourquoi? Tout simplement pour s'assurer que cette société, ce joyau, comme on l'a qualifié, Hydro-Québec, puisse continuer à offrir un service essentiel comme l'électricité aux citoyens du Québec aux meilleurs taux possible. (23 heures)

M. le Président, ce n'est pas insignifiant que de travailler jour et nuit pour tenter de démontrer à ce gouvernement qu'il est en train de commettre la pire erreur depuis qu'il a pris le pouvoir, en 1976, en voulant transformer les structures d'une société qui ne lui appartient pas. Ce gouvernement n'est pas éternel. Dieu sait qu'il n'est pas éternel! Si on avait des élections demain matin, on vous prouverait qu'il est pas éternel. Tout ce qu'on veut, c'est simplement une loi qui aurait un certain sens.

À plusieurs reprises on est intervenu, à la période des questions, pour demander au premier ministre de faire entendre les groupes qui se sont manifestés, on a demandé de retirer le projet de loi no 16. Il semblerait que c'est trop urgent, il faut combler le déficit du ministre des Finances. M. le Président, ce n'est pas être insignifiant que faire un travail comme ça, peu importe ce qu'en pense le leader parlementaire. C'est tout simplement un rôle d'Opposition que nous avons à jouer et que nous allons continuer de jouer tant et aussi longtemps que nous serons ici dans cette Chambre. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Vaudreuil-Soulanges.

M. Daniel Johnson

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Merci, M. le Président. C'est la dernière chance, c'est le "last call", comme on dit, à cette heure-ci, que nous adressons aux ministériels pour qu'ils retirent ou reconsidèrent à tout le moins les dispositions de la loi 16 qui modifient la Loi sur l'Hydro-Québec. Lors de la commission parlementaire, pendant à peine l'équivalent d'une semaine de travail, contrairement à ce que les ministériels ont prétendu, nous avons discuté du fond même de la question. On pourrait même nous reprocher d'en avoir parlé de façon répétitive, mais quand les gens ne comprennent pas, il faut continuer à expliquer longtemps.

Ce n'est pas un véritable argument d'aller prétendre, comme le député de Matane, que nous n'avions pas soumis d'amendement aux articles 1, 2, 3, 4 et 5, là n'est pas la question. Ce que nous avons fait c'est que nous avons passé effectivement plusieurs heures à réclamer que des gens qui sont intéressés, parce qu'ils l'ont manifesté, à parler de ce changement profond que le gouvernement entend faire au régime d'Hydro-Québec, puissent être entendus en commission parlementaire. Nous l'avons tellement demandé qu'on a ensuite prétendu, du côté ministériel, que nous avions utilisé, par nos demandes mêmes le temps qu'on aurait pu consacrer à ces gens qui voulaient se faire entendre devant la commission parlementaire. On nous aurait évidemment reproché de ne pas avoir demandé que des gens viennent se faire entendre, et on ne les aurait pas convoqués dans le cas contraire.

Nous ne pouvions évidemment pas gagner dans ces conditions, sauf que nous avons une dernière occasion de faire valoir que, selon nous, le gouvernement a tort de vouloir faire d'Hydro-Québec une compagnie comme les autres. C'est surtout le ministre des Finances et certains autres intervenants du côté ministériel qui prétendent qu'Hydro-

Québec doit absolument devenir une compagnie comme les autres, ici au Québec, sous prétexte, entre autres, que les Québécois ont investi dans Hydro-Québec et qu'il est temps, je cite le ministre des Finances, dans un discours du mois de mars, "que les Québécois en retirent maintenant des dividendes et un rendement".

Or, c'est Hydro-Québec elle-même, comme entreprise, qui avait, en 1963, emprunté les sommes qui lui ont permis de réaliser l'expansion de son réseau par l'acquisition des compagnies privées. Les Québécois n'y ont rien investi. C'est HydroQuébec elle-même, à même ses revenus, ses profits, qui a remboursé cet emprunt, qui est devenue propriétaire à part entière et qui a intégré à son propre réseau les compagnies privées d'électricité depuis 1963. Les vraies raisons pour lesquelles le ministre des Finances entend faire d'Hydro-Québec une compagnie comme les autres, c'est parce que ça rapporte plus d'impôt. C'est très simple, mais ce n'est pas Hydro-Québec qui est taxée, ce sont les consommateurs d'électricité. Ce sont les consommateurs de tous les produits qui sont achetés au Québec et qui sont transportés d'une façon ou d'une autre, qui sont fabriqués et sur lesquels se répercutent les hausses de tarifs qu'Hydro-Québec, nécessairement, étant donné que le gouvernement lui réclamera des dividendes, devra imposer.

M. le Président, c'est pour trois raisons distinctes que nous avons introduit des amendements à ce moment-ci, qui évoquent la portion, selon nous, dans les tarifs d'Hydro-Québec, qui représente une taxe que doivent payer les Québécois. D'abord, de quelle sorte de taxe s'agit-il? Premièrement, le ministre des Finances prétend qu'il faut doter Hydro-Québec de capital-actions, d'actions ordinaires dont le ministre des Finances serait le dépositaire et dont le gouvernement serait le propriétaire. Qu'est-ce que cela change vraiment au fonctionnement d'Hydro-Québec qu'elle ait ou non des actions ordinaires dans sa structure financière? Cela ne change strictement rien, sauf qu'en vertu des dispositions de la Loi sur l'impôt que le ministre des Finances lui-même détermine, Hydro-Québec devra payer une taxe sur son capital-actions, entre autres. C'est justement là la différence. C'est cela la différence dans le fonctionnement d'Hydro-Québec. Si elle a des actions ordinaires, du capital-actions, elle devra payer une taxe sur le capital.

Deuxièmement, le ministre des Finances prétend donc que, si c'est une compagnie comme les autres, Hydro-Québec devra payer des taxes comme les autres. Je viens de démontrer qu'elle paiera la taxe sur le capital. Elle devrait inévitablement faire payer des taxes, comme les autres compagnies commerciales, lorsqu'elles vendent leurs biens ou produits, demandent aux consommateurs de payer une taxe de vente. C'est pour cela que nous avons inscrit comme amendement, à ce moment-ci, en considération du rapport de la commission, que le gouvernement élimine cette portion de la taxe de vente qui est imposée par Hydro-Québec lorsqu'elle nous envoie son compte d'électricité. C'est pour cela que le ministre des Finances et le gouvernement veulent qu'Hydro-Québec soit une compagnie comme les autres, c'est pour pouvoir aller chercher dans la poche des consommateurs des taxes lors de la vente.

Troisièmement, le gouvernement prétend que, comme toutes les autres compagnies, Hydro-Québec devrait payer des dividendes. Si on regarde exactement ce qu'est HydroQuébec, c'est une société d'État, cela fait partie du domains public, du domaine de ce qui appartient au gouvernement et aux Québécois. Dans ce sens, ce n'est pas une compagnie comme les autres, parce que les dividendes qu'elle pourrait payer, il faut qu'ils viennent d'une seule source, il faut qu'ils viennent des consommateurs d'électricité que sont les Québécois. Encore une fois, c'est là une taxe qui n'est pas sans rappeler le prix de vente de ce qu'on achète à la Société des alcools où il n'y a pas de taxe de vente. La Société des alcools, qui fait partie du domaine public, fixe les prix un peu comme elle le veut. Il n'y a personne d'autre qui vend des boissons fortes, à toutes fins utiles. Il n'y a personne d'autre qui vend du scotch, il n'y a personne d'autre qui vend du gin. Il y a des dépanneurs qui vendent du vin...

M. Bérubé: Question de privilège, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Je m'excuse, M. le député. Question de privilège, M. le ministre, en vertu de l'article 49. J'essaie simplement de savoir si c'est un privilège ou si c'est plutôt une divergence d'opinions que vous pourrez corriger par une autre intervention.

M. Bérubé: Ce n'est pas une divergence d'opinions. Dans le cas de la Société des alcools, il y a une très nette distinction à effectuer entre la taxe à la vente, qui est une taxe de vente sur les produits d'alcool, et les profits de l'entreprise...

Le Vice-Président (M. Jolivet): C'est vraiment une de divergence d'opinions.

M. le député de Vaudreuil-Soulanges.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Merci, M. le Président. C'est donc, dans ce cas, encore une fois, assimilable à la façon dont le gouvernement perçoit des impôts par la vente de billets de Loto-Québec. Personne

d'autre ne vend de façon organisée et systématique des billets de loterie au Québec. Dans la mesure où c'est populaire et que les Québécois veulent en acheter, Loto-Québec est parfaitement libre d'en fixer les prix. C'est de la même façon que les tarifs d'Hydro-Québec seront soumis, à cause du fait que des dividendes seront exigés, non pas comme si c'était une compagnie comme les autres, mais par le gouvernement lui-même. Dans une compagnie comme les autres, c'est le conseil d'administration, les gestionnaires de l'entreprise qui décideraient du montant. Dans le cas d'Hydro-Québec, et c'est dans la loi, cette taxe déguisée qui s'appelle un dividende parce que nous la payons, nous les Québécois, sera déterminée par le gouvernement à la lumière de ses propres besoins. Ce n'est donc pas véritablement une compagnie comme les autres, Hydro-Québec, c'est évident.

Ce n'est pas simplement pour en faire une soi-disant compagnie comme les autres que le gouvernement a soumis le projet de loi 16, c'est pour aller chercher dans la poche des Québécois, de tous les Québécois qui consomment de l'électricité des sommes additionnelles pour se financer. Dans ce sens, M. le Président, nous ne croyons pas qu'il est normal à ce moment-ci que le gouvernement ait interrompu le débat de façon aussi brutale; il est normal à ce moment-ci que les Québécois s'attendent que non seulement l'Opposition fasse valoir son opinion sur le projet de loi 16, mais également que les ministériels, prennent au moins autant de temps que nous pour expliquer aux Québécois pourquoi ils veulent absolument transformer Hydro-Québec en une compagnie comme les autres.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Saint-Henri.

M. Roma Hains

M. Hains: Dans ma dernière intervention sur le fameux projet de loi 16, je faisais allusion, M. le Président, à la chaise électrique, vu qu'on nous avait bâillonnés. Nous étions prêts pour le grand départ et la grande noirceur, mais il y a eu probablement un court-circuit, puisque nous sommes encore ici ce soir et que le débat se continue. C'est sans doute Hydro-Québec qui a coupé le courant et qui a permis les difficultés temporaires de deux heures que nous avons connues dans la nuit de mardi jusqu'au petit jour de mercredi.

M. le Président, que reste-t-il à dire sur ce sujet, sinon que nous sommes vraiment profondément déçus que notre lutte ait porté si peu de fruits. Nous aurions tant désiré que le gouvernement revoie son projet, y apporte des amendements et soulage nos concitoyens de cette hausse de 16,3% sur des factures qu'ils recevront en janvier prochain. Ce sera probablement non, car la voix de la majorité, la voix de l'infaillibilité péquiste ne souffre aucune altération et encore moins aucune contradiction. Notre Hydro-Québec va perdre son indépendance. Elle devra dorénavant plier l'échine et verser comme une vassale la part de sa richesse au seigneur Parizeau.

Pour y parvenir, Hydro-Québec devra percevoir des taxes de chaque maison de son fief pour payer des redevances au trésor provincial et les pauvres ouvriers vont trimer encore plus dur pour répondre aux exigences nombreuses d'un maître intraitable. On se prend presque à rêver, d'un Robin des bois, devant ces pressureurs qui se cachent sous les couleurs de la social-démocratie. Et pourtant, dans cette période difficile que nous traversons, le gouvernement pourrait laisser les citoyens respirer un peu et vivre leur vie déjà alourdie par tant de contraintes et tant d'ennuis. Mais non, on les exaspère on les pique on les harcèle par des taxes de tout calibre et de toute espèce.

Déjà pris dans le tourbillon de l'inflation et des taux d'intérêt, les contribuables ne savent plus où donner de la tête et surtout où puiser des nouvelles ressources pour faire face à toutes ces obligations et impositions.

Ce public n'est pas aussi crédule et aussi dupe que le présent gouvernement semble le croire, car la colère gronde chez le peuple. Il n'en a que faire des luttes constitutionnelles et des chicanes sur des traits d'union; ce qu'il veut, c'est du pain. Les jeux du cirque et du cirque séparatiste, il en est saturé. Il n'en peut plus de se faire taxer à outrance et d'être résident de la province la plus lourdement imposée au pays.

Aurait-on vraiment pu s'imaginer que, dans une même année financière, on écoperait d'une taxe doublée sur l'essence, augmentant de 20% à 40%, soit une augmentation de 0,30 $ le gallon, et que, du même souffle, on augmenterait la facture d'électricité de 16,3%, et cela sans mentionner toutes les autres taxes subsidiaires? Malgré tout, M. le Président, ce gouvernement patauge dans des déficits sans précédent de 3 000 000 000 $ par année. Oui, le public réagit sévèrement. 11 suffit vraiment de faire le tour de nos comtés pour recueillir toutes les plaintes et les doléances de nos contribuables. Comme me disait un de mes électeurs de Saint-Henri avec son franc-parler: "II y a tout de même un maudit "boutte," si ça continue, on va me tordre les oreilles pour me faire cracher de l'argent.

De plus, M. le Président, qu'on arrête donc d'imputer tous nos malheurs et tous nos déboires au fédéral. Comme le dit toujours le député de Frontenac avec son petit accent typique et dramatique, Ottawa existait avant l'arrivée du parti péquiste au pouvoir et on

vivait tout de même bien, on n'était peut-être pas riches, mais on vivait bien. Aujourd'hui, au Québec, malgré qu'on ne soit que 25% de la population canadienne, on a un déficit qui correspond à 60% du déficit de tout l'ensemble du Canada. Si on voulait faire un inventaire de tout le butin financier que le gouvernement a rapaillé en taxes cette année, voici ce que ça donnerait. Le 10 mars dernier, M. Parizeau a annoncé une taxe supplémentaire de quelque 630 000 000 $ pour l'assurance-maladie; il a retiré 600 000 000 $ de plus de taxe ascenseur sur le pétrole, il a annoncé une augmentation de 50% du prix des chambres privées et semi-privées, pour 20 000 000 $ de revenus additionnels; il a imposé une taxe de 60% du coût de l'immatriculation des véhicules, pour 238 000 000 $ de revenus additionnels; il a annoncé une hausse de taxe d'Hydro-Québec de 16,3%, pour des revenus additionnels cette année de 415 000 000 $ et, avec les annonces du 17 novembre dernier, sur les hausses du prix de l'essence, c'est plus de 3 227 000 000 $ d'impôts et de taxes diverses que les Québécois paieront, selon les annonces faites depuis le 10 mars dernier. Cela, M. le Président, sans compter que la non-indexation des tables d'impôt, contrairement au fédéral, aura procuré 800 000 000 $ de revenus de plus à même l'inflation. Alors c'est près de 4 000 000 000 $ de plus que les Québécois auront à verser au Trésor public pour une seule année. C'est vraiment époustouflant!

Je termine, M. le Président, en vous disant que nous, les libéraux, nous sommes heureux de la lutte que nous avons menée contre ce projet de loi no .16 pour protéger nos concitoyens. Nous proposons quelques amendements. Surtout, la suppression de la taxe de vente sur les factures et la détermination des ristournes à payer au gouvernement, laissées à la discrétion de la société d'Hydro-Québec. Il y aura peut-être quelques amendements qui seront, acceptés mais ils seront probablement très peu nombreux au point de vue économique. C'est là que c'est décevant. La population paiera, sans doute, mais jugera aussi un gouvernement qui n'a pas voulu entendre raison et qui poursuit toujours sa politique de taxation. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Verdun.

M. Lucien Caron

M. Caron: M. le Président, moi aussi je voudrais dire quelques mots sur la prise en considération du rapport de la commission parlementaire sur le projet de loi no 16. C'est vrai, M. le Président, c'est la dernière chance, comme mon collègue de Vaudreuil-Soulanges le disait il y a quelques minutes, on sera obligés, avec le bâillon qui nous est imposé, d'accepter les recommandations du gouvernement. M. le Président, pourquoi n'avons-nous pas commencé plus de bonne heure, dans le courant de l'année, pour qu'on puisse discuter de projets de loi aussi importants? J'entends certains collègues en arrière. Au moment où on se parle, on a seulement 46 jours de travail dans l'année. Imaginez-vous, M. le Président, ça fait neuf semaines et une journée qu'on travaille tandis que les travailleurs du Québec, eux, travaillent 52 semaines par année, ceux qui ont du travail. Combien sont en chômage et aimeraient travailler? C'est justement pour ça que nous, du Parti libéral, on veut penser à ceux qui ne peuvent pas être représentés ici, et Dieu sait combien j'en ai dans mon comté qui veulent travailler et qui veulent être aidés. Mais avec des augmentations de taxes de tous bords et de tous côtés, comme mon collègue de Saint-Henri vient de le mentionner, les gens sont tannés. On essaie de faire comprendre aux gens d'en face qu'il est encore temps d'arrêter de siphonner par Hydro-Québec. En 19R1, tout le monde a besoin d'électricité. Le gouvernement le sait. Le gouvernement est pris, le gouvernement est sur le bord de la faillite, alors, il va à Hydro-Québec, sachant que les gens ont besoin d'électricité, et il va augmenter les factures.

Imaginez-vous, qu'en cinq ans, de 1977 à 1982, ce gouvernement a augmenté de 97% les taux d'électricité. Cela fait une moyenne de 19,20%. Est-ce que ces gens d'en face ont augmenté les prestations aux bénéficiaires de l'aide sociale de 19,20% par année? Est-ce que les gens qui ont été victimes d'accidents du travail ont reçu une augmentation de 19,20%? Vous me donnerez la réponse tout à l'heure, les gens d'en arrière, les "back-benchers". Vous ne vous levez pas mais vos ministres vous passent toutes sortes de Québec, oui des Québec, et tout à l'heure vous paierez la note. Vous n'êtes pas assez hommes pour vous présenter devant la population parce que vous savez qu'actuellement, au moment où on est, vous êtes sur le bord de la faillite. Vous le savez. Qu'on aille un peu partout, qu'on prenne des taxis, qu'on circule...

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député, je m'excuse. M. le député si vous... Oui, je vais vous donner la parole, Mme la députée. Je vais simplement dire au député de me regarder, de me parler puisque le règlement dit que c'est à moi qu'on doit s'adresser, de telle sorte qu'on évitera le brouhaha.

Mme la députée de Dorion, question de privilège. Mme la députée.

Mme Lachapelle: M. le Président, j'aimerais souligner au député de Verdun que

je n'ai pas l'intention d'être un homme; je suis une femme, et il ne faudrait peut-être pas qu'il les oublie dans cette Chambre.

Une voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Jolivet): Donc, M. le député, regardez-moi.

M. Caron: M. le Président, c'est qu'au moment où je parlais, je regardais à ma gauche et je voyais seulement des hommes. C'est regrettable je parle en tant que membre de l'Assemblée nationale qu'il n'y en ait pas plus d'une qui soit ici ce soir.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Je m'excuse, M. le député. Je ne voudrais pas que rien soit soulevé, mais j'en vois quatre, d'après ma vue à moi.

Une voix: Question de privilège, M. le Président

Le Vice-Président (M. Jolivet): Mme la ministre, si vous voulez intervenir dans le sens de dire qu'il y a d'autres femmes, je l'ai déjà fait.

M. le député.

Une voix: Merci, M. le Président

M. Caron: Au moment où je parlais, Mme la ministre n'était pas en Chambre, pour autant que je suis concerné.

M. le Président, nous, de ce côté-ci de la Chambre, nous avons des amendements. Si le ministre voulait qu'on accepte son projet de loi, il faudrait qu'il comprenne qu'on a de bons amendements, nous autres aussi, parce que si je me rappelle bien, au moment où le vice premier ministre et le ministre de l'Environnement, qui sont ici ce soir - je les salue parce qu'on ne les voit pas souvent, je les salue en passant - nous ont fait des recommandations on les a acceptées à plusieurs reprises dans l'intérêt des contribuables du Québec.

M. le Président, il y a une en particulier que j'aimerais voir accepter. C'est l'amendement qui se lirait comme suit, au paragraphe 22, à l'article 6: "Ces taux et conditions sont fixés par règlement de la Société pour chaque catégorie d'usagers ou sont déterminés par des contrats spéciaux intervenus entre, d'une part, la Société et, d'autre part, les municipalités, les coopératives d'électricité ou les entreprises industrielles ou commerciales, selon le cas. Ces règlements et ces contrats sont soumis à l'approbation de la Régie de l'électricité et du gaz." Dans le projet de loi, on dit bien: "soumis à l'approbation du gouvernement".

Alors, cela veut dire, en mes termes à moi, peut-être pas en mes termes d'avocat, mais en mes termes à moi, que le ministre du Revenu peut, en n'importe quel temps, exiger d'Hydro-Québec que les montants soient augmentés, mais avec la motion que je soumets, ce serait un corps indépendant, un groupe neutre qui jugerait. C'est cela qu'on veut, on n'a plus confiance aux gens d'en face. Alors, c'est ça qu'on voudrait, parce que des augmentations de taxes, les gens en ont soupé. C'est pour toutes ces raisons que nous, du côté de l'Opposition, nous voterons contre. Oui, nous continuerons de voter contre, Mme la ministre, parce que nous, nous pensons à protéger les gens, les ouvriers, les travailleurs. On a oublié cela de l'autre côté.

Je peux vous dire que, dans le comté de Verdun, on a beaucoup de gens, des travailleurs, qui sont égorgés de taxes, de tout d'abord et de tout côté. C'est la raison pour laquelle je m'y oppose catégoriquement, avec le député d'Outremont et les gens de la commission qui ont fait un excellent travail, même si, de l'autre côté, on prend cela à la légère. Mais les gens du Québec ne prendront pas la prochaine élection à la légère et ils rejetteront les gens qui passent leur temps à augmenter les taxes au Québec.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Laurier.

M. Christos Sirros

M. Sirros: Merci, M. le Président.

Vous savez, M. le Président, que ça doit faire la quatrième ou la cinquième fois que j'interviens sur le projet de loi no 16. Si je soulève ce point, c'est pour souligner la détermination avec laquelle nous, de ce côté-ci de la Chambre, nous avons fait face au projet de loi et l'opposition qu'on mène à ce projet de loi. J'aimerais souligner ou expliquer les raisons qui nous ont amenés à prendre cette attitude assez décidée quant à notre position sur le projet de loi no 16, qui vise à transformer Hydro-Québec en une société à fonds social, ce qui permettrait effectivement au ministre des Finances de déclarer des dividendes, à la suite des profits que pourrait faire Hydro-Québec, qui pourraient aller jusqu'à 75% des profits d'Hydro-Québec.

Si le gouvernement a décidé de changer la raison d'être d'Hydro-Québec qui était, il y 20 ans environ, de donner de l'électricité aux citoyens québécois aux plus bas prix possible et compatibles avec une saine gestion, c'est parce qu'après cinq ans de gouvernement du Parti québécois, on en est rendu avec une économie qui ne marche presque plus, on en est rendu avec une économie qui connaît des déficits spectaculaires, avec un gouvernement qui a triplé ses déficits, qui se trouve aujourd'hui coincé, purement et simplement, du point de vue économique, et qui cherche, à gauche et

à droite, à trouver des sources, des fonds qui pourraient renflouer les coffres de l'État. Nous avons vu, depuis le 13 avril, une série de mesures qui ont été prises par rapport à cet objectif de renflouer les coffres de l'État et qui ont, toutes et chacune, finalement, fonctionné par la porte à côté, c'est-à-dire qu'on peut les qualifier de taxes indirectes, de taxes cachées. (23 h 30)

Un exemple concret, c'est le projet de loi no 16, qui résultera dans des augmentations du compte d'électricité de chaque consommateur d'électricité pour venir au secours du ministre des Finances qui connaît des difficultés financières à la suite des cinq dernières années de gestion de ce gouvernement. On ne dit pas qu'on taxe les gens, dans ce projet de loi, mais cela a le même effet dans le sens que chacun qui va payer son compte d'électricité va venir contribuer aux coffres de l'État. Dans le concret cela va coûter, d'ici 1985, 2000 $ de plus par famille québécoise, pour répondre aux exigences de la loi 16. C'est-à-dire, à la suite des dividendes qui seront déclarés selon les prévisions qu'on connaît, d'ici 1985 chaque famille québécoise aura versé 2000 $ de sa poche au gouvernement du Parti québécois, au gouvernement du Québec pour venir en aide au ministre des Finances, sans recevoir plus de la part d'Hydro-Québec. Avec la même consommation, avec le même appareillage électrique dans les maisons, les gens auront quand même à débourser 2000 $ de plus d'ici 1985.

Nous avons connu le bâillon. Pour moi c'était une première, étant donné que je suis nouveau en cette Assemblée. Nous avons connu le bâillon, ce qui fut une façon pour ce gouvernement de mettre fin à l'étude article par article en commission parlementaire du projet de loi 16. On a muselé l'Opposition, dans son opposition à ce projet de loi, et exigé que le rapport de la commission soit déposé ici, à l'Assemblée nationale, pour qu'on puisse voter. On connaît d'avance les résultats de ce vote. On sait que le parti ministériel détient une majorité qu'il utilise de façon, en tout cas disons qu'il utilise, M. le Président, pour faire face... Ils utilisent M. le Président du conseil du trésor pour se sortir du pétrin dans lequel ils se sont placés eux-mêmes, et ils l'utilisent de façon irresponsable quand il s'agit d'un tel projet de loi. Ils ont choisi la voie des taxes indirectes, des taxes régressives, finalement, parce qu'ils font appel aux citoyens sans tenir compte de leur capacité de payer. Il font verser des fonds d'une manière égale à chacun pour venir au secours du ministre des Finances.

Quant aux amendements qu'on aurait aimé proposer, M. le Président, on est allé voir un peu quel genre d'engagement ce gouvernement avait pris. Un des engagements que le gouvernement avait pris, c'était d'abolir la taxe de vente sur les comptes d'électricité. C'est en toutes lettres, dans le programme du Parti québécois, abolir la taxe de vente sur les comptes d'électricité. Si on se réfère aux événements des derniers jours, on sait que peut-être les engagements que prend ce parti ne veulent pas dire grand-chose. On renverse des décisions prises en congrès plénier par 2000 membres élus, prises de façon démocratique. C'est renversé, ou il y a des tentatives de renverser ça en tout cas. Là aussi je pense qu'on connaît les résultats d'avance étant donné le petit truc qu'on est en train de voir. On sait que le langage que peut tenir ce parti ne veut peut-être plus dire grand-chose. Dans ce sens, lorsqu'on a parlé de cet amendement en Chambre, quand on a soulevé le fait que le parti ministériel lui-même avait, dans le programme du parti, écrit qu'il abolirait la taxe de vente, ce ne fut pas à notre grande surprise qu'on a entendu: Vous savez, peut-être plus tard. Cette attitude a été confirmée, en fin de semaine passée. Je crains qu'on verra de plus en plus, de la part du Parti québécois, ce genre de manoeuvre où finalement on peut dire ce qu'on peut dire, mais il faut que les choses qu'on fait fassent l'affaire de certaines personnes.

Alors, M. le Président, cela a été un amendement. Un autre amendement qu'on aurait voulu présenter tentait de redonner à Hvdro-Québec son mandat initial. C'est-à-dire on aurait voulu voir dans le projet de loi que la raison d'être d'Hydro-Québec serait de fournir l'énergie aux municipalités, aux entreprises industrielles ou commerciales et aux citoyens du Québec, aux taux les plus bas compatibles avec une saine administration financière. C'était là, M. le Président, la raison initiale de la création Hydro-Québec, et on voudrait voir dans le projet de loi, parce que cela n'existe plus dans le projet de loi 16, cet objectif-là. Cela a été enlevé, M. le Président, et c'est clair, la raison pour laquelle cela a été enlevé. Étant donné qu'on vient de dire que c'est le ministre des Finances, maintenant, qui va utiliser Hydro-Québec pour ses propres fins, on voudrait voir cet objectif réinscrit dans la loi pour redonner à Hydro-Québec ce mandat de fournir l'électricité aux citoyens du Québec au plus bas prix possible.

Malheureusement, comme je le disais tout à l'heure, le gouvernement semble décidé à imposer ses taxes cachées aux citoyens du Québec. Il utilisera probablement, parce que la conscience sociale s'en est allée par la porte d'à côté, du côté du Gouvernement, il n'en a pas beaucoup, ces jours-ci, et je doute qu'il puisse la retrouver prochainement, étant donné les problèmes qu'il connaît. Il est aussi préoccupé oar beaucoup d'autres choses que les citoyens du Québec, ces jours-ci. On aurait souhaité

présenter ces amendements et les voir adopter parce qu'on trouve que ce sont des amendements raisonnables, des amendements qui vont dans le sens de l'intérêt de tous les citoyens du Québec. Mais quand le moment du vote viendra, on s'attend que chacun des députés ministériels se lève, tranquillement, et suive les ordres du chef, comme ce sera probablement le cas au référendum, si on peut l'appeler ainsi. Il semble qu'il n'y aura pas de comités-parapluies, ni d'un côté ni de l'autre; il semble que ce soit juste un côté qui ait les moyens de financer la publicité pour convaincre tous les militants du parti que le chef, lui, a la bonne voie et que les autres, ce n'était pas sérieux leur affaire. En tout cas, c'est à eux de vivre avec cela, c'est à eux de penser à ce que cela veut dire, ce n'est pas à nous de juger; qu'ils fassent face un peu à ce problème de conscience, s'ils en ont encore une! Merci beaucoup.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Pontiac.

M. Robert Middlemiss

M. Middlemiss: Merci, M. le Président. Comme tous mes collègues dans cette Chambre ont parlé à plusieurs occasions sur le projet de loi no 16, la destinée veut que ce soir, ce soit la dernière fois.

Tout au long de ce débat, nos amis d'en face nous ont accusés d'avoir retardé inutilement l'évolution ou la discussion de ce projet de loi. Je pense qu'on devrait faire un petit historique. On nous a même dit que, du côté ministériel, tout le monde au Québec le savait, parce qu'on avait traité de cela dans le discours sur le budget du 10 mars dernier. Mais, au moment du discours sur le budget, on a annoncé qu'on voulait faire des changements, des amendements à la société Hydro-Québec. On n'est pas allé dans les détails, on n'a pas expliqué quels seraient les résultats, les conséquences des changements qu'on proposait.

Parlons des retards. On a annoncé dans le budget qu'on voulait faire des changements à la société Hydro-Québec. À la suite de l'élection, l'Assemblée nationale a été convoquée pour le 19 mai. Quand avons-nous présenté pour la première lecture le projet de loi no 16? Le 12 juin, une semaine seulement avant la fin de la session. Donc, on ne peut pas être blâmés pour ce retard. Si cela était tellement important pour l'existence et le bon fonctionnement de la société Hydro-Québec, on aurait certainement pu trouver le temps de le présenter avant cette date. À l'intersession, la commission permanente de l'énergie et des ressources était convoquée le 25 août pour entendre les vues, les opinions d'Hydro-Québec à ce sujet. (23 h 40)

M. le Président, j'aimerais citer les premières phrases du président du conseil d'administration d'Hydro-Québec. J'aimerais vous dire comment lui résumait le projet de loi no 16 et je cite: Ce projet de loi, déposé en première lecture à l'Assemblée nationale le 12 juin dernier, traduit par des amendements à la loi d'Hydro-Québec, certaines mesures annoncées dans le discours sur le budget. Il entraîne une modification substantielle, non seulement dans la structure financière de la société d'État, mais aussi de sa mission au sein de la société québécoise."

Donc, comme je l'ai mentionné tout à l'heure, on n'a pas élaboré, on n'a pas défini, on n'a pas dit quelles seraient les conséquences. Tout ce qu'on a simplement annoncé, c'est que l'on fait certains changements dans une certaine mesure. Et nous, depuis le début de ce débat, M. le Président, nous avons été très consistants. Un des premiers arguments qu'on a soumis, c'est que les changements qu'on voulait faire à Hydro-Québec signifiait un changement complet de sa vocation. La vocation qui lui avait été donnée, qui avait été acceptée en 1962 par toute la population du Québec lors d'une élection.

Quels étaient nos arguments, M. le Président? Premièrement, on a dit qu'il faudrait avoir un débat public, pour avoir l'opinion de tout le monde. Deuxièmement qu'il n'y a pas malheureusement, au Québec, de politique énergétique. On a tenté de dire qu'on a eu une politique énergétique et qu'on s'en sert. Mais on s'aperçoit aujourd'hui que l'ancien PDG d'Hydro-Québec semble être d'avis qu'essentiellement il n'y a pas de politique énergétique à Hydro-Québec. Deuxièmement, on a dit qu'on voudrait soit retarder l'entrée en vigueur de cette loi, soit, une fois que la loi serait en vigueur -lorsqu'on a vu qu'on ne pouvait pas en changer la date d'entrée en vigueur - qu'il y ait une période d'essai, une période d'essai qui aurait permis d'établir une politique énergétique, de tenir le débat public sur les changements proposés à Hydro-Québec et aussi de donner une chance au programme d'économie d'énergie qu'Hydro-Québec a mis en marche, avant de savoir si réellement on va obtenir les résultats espérés et de savoir réellement si cela affecterait une politique énergétique.

Aussi M. le Président, on misait énormément sur la pénétration du gaz naturel. Malheureusement, je crois qu'on accuse un retard de l'ordre de deux ans. Et même à cela, M. le Président, ce n'est pas garanti que la pénétration du gaz se ferait dans toutes les municipalités ou les villes du Québec. Par exemple, combien cela va-t-il prendre de temps avant que le gaz naturel soit rendu ici, à Québec?

M. le Président, pour une dernière chose, j'aimerais proposer une motion pour

ajouter un article après l'article 10, soit que la facturation des tarifs d'électricité aux consommateurs citoyens du Québec soit, à compter du premier janvier, exempte de la taxe de vente au détail. M. le Président, cette taxe représentait jusqu'en 1981 peut-être 60% des revenus totaux de la société Hydro-Québec. Mais, avec la loi 16, cela va devenir, disons, pour l'année 1985, 20%. Même si c'est une minime partie, au moins cela va économiser de l'argent à tous le citoyens du Québec. Je vous remercie M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Ce sera le député de Robert-Baldwin.

M. John O'Gallagher

M. O'Gallagher: Merci, M. le Président. Je pense que c'est la troisième ou quatrième fois que les députés de ce côté-ci de la Chambre se lèvent pour parler contre ce projet de loi. On trouve que c'est une exploitation inacceptable des contribuables de la province de Québec. On est maintenant face à ce projet de loi, après une quarantaine d'heures d'étude, où on a essayé, dans l'Opposition, de montrer au public qui nous regarde les conséquences négatives que ce projet de loi va avoir sur la famille québécoise comme sur l'industrie québécoise...

Une voix: ...

M. O'Gallagher: Merci, M. le député. ... et sans que la population ait probablement vu les conséquences, les résultats que va subir chaque famille par ce projet de loi. On a démontré, et cela a été prouvé, que, d'ici à cinq ans, chaque famille québécoise va être obligée de payer 2000 $ de plus pour l'électricité. Mais il n'y a pas seulement le service de l'électricité qui sera affecté. Les taux sur les industries vont être augmentés d'environ 20%. Cela veut dire que tous les biens et services que la population utilise vont aussi augmenter en valeur. La population va avoir, en plus de payer les frais de chauffage, le chauffage de l'eau et l'éclairage... Tous les prix des matériaux que les familles utilisent vont aussi être augmentés.

On a vu aussi, et cela a été démontré par le député de Notre-Dame-de-Grâce - la population a simplement à se référer à un mémoire préparé par l'administration d'Hydro-Québec qu'il y aura des conséquences draconiennes sur le fonctionnement d'Hydro-Québec. Il y aura une chute de revenu net de l'entreprise de 37% en 1981, par rapport à 1979 et 1980. Les besoins d'emprunt vont être augmentés, des programmes d'emprunt d'environ 3 000 000 000 $ seront difficiles à réaliser à des conditions acceptables. Il y aura la remise en question de la faisabilité financière du plan des installations de 1981 et de 1982. Cela est sérieux, Et, pour que la population puisse comprendre cette phrase-là, qui vient directement d'Hydro-Québec, c'est qu'on a estimé qu'il va y avoir 369 000 000 $ qui ne seront pas investis dans les installations de la Raie-James et les autres projets d'Hydro-Québec. Il faudrait que la population le réalise. Les chômeurs -on en a 320 000 au Québec - n'auront pas l'avantage d'aller travailler à la Raie-James. Ils vont être obligés de partir pour Calgary, dans l'Alberta. Cela est une des conséquences majeures de ce projet de loi.

M. Boyd, jusqu'à hier ou avant-hier président d'Hydro-Québec, notre grand ingénieur, qui a été fêté par l'American Society of engineers comme the Engineer of the Year, a lui-même dit que le gouvernement du Québec n'a aucune politique énergétique, même pas pour l'électricité, ni pour le gaz, l'huile ou le nucléaire. D'abord, il est préoccupé par l'indépendance du Québec et, pour avoir une saine politique énergétique sur l'électricité comme sur le gaz, l'huile et le nucléaire, il faut au moins être une province canadienne comme les autres. Fondamentalement, ils ne sont pas capables de faire une politique énergétique.

Pour que la population puisse comprendre l'affaire, le but d'Hydro-Québec était de fournir l'énergie aux municipalités, aux entreprises industrielles et commerciales et aux citoyens du Québec aux taux les plus bas compatibles avec une saine administration financière. Pourquoi? Hydro-Québec a été fondée en 1944, par une loi quasiment antitrust, pour fournir l'électricité au prix coûtant. À cette époque-là, jusqu'à la nationalisation des compagnies privées en 1962 ou 1963, c'étaient des compagnies privées. Elles avaient des installations et les capitaux étaient payés depuis des années. Elles utilisaient nos rivières pour exploiter la population. Elles faisaient des profits que le gouvernement avait de la difficulté à contrôler. Ils ne voulaient pas s'éloigner pour faire l'électrification rurale. (23 h 50)

La loi créant Hydro-Québec était une loi antitrust pour donner un service à la population au prix le plus bas possible. Comme aujourd'hui, dans nos municipalités, l'aqueduc, le téléphone ou le service de police. Aujourd'hui, avec ce projet de loi, on fait exactement l'opposé. C'est le gouvernement qui exploite la population -c'est ça qu'il faudrait que la population comprenne - à cause de sa mauvaise administration, de la situation financière désastreuse qu'il a créée lui-même pendant cinq ans, à cause de notre déficit de 15 000 000 000 $ accumulé, trois fois le déficit de 1976, quand Bourassa a laissé le gouvernement à ces messieurs. Notre déficit

annuel est de 3 300 000 000 $, c'est plus de trois fois le déficit de toutes les provinces ensemble. C'est impensable, l'énormité de ce désastre financier.

Ils sont obligés, par le truchement de cette loi, par le truchement d'Hydro-Québec, d'aller chercher des fonds dans les poches des contribuables, comme ils font pour la régie. Ils ont augmenté la quote-part des entreprises, des employeurs au Régime d'assurance-maladie. Ils ont doublé la cotisation, pas à la demande de la Régie de l'assurance-maladie, mais à la demande du ministre des Finances, qui fixe le prix. Il n'a pas d'argent. Il a fait la même chose pour l'assurance automobile, il a augmenté les frais de l'assurance automobile par le biais de la Régie de l'assurance automobile, mais c'est à la demande du ministre des Finances. On le voit aussi dans le projet de loi no 39, augmentation de 0,30 $ sur chaque gallon. C'est un fardeau inacceptable pour la province.

M. Clair: Question de privilège, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Question de privilège, M. le ministre.

M. Clair: En tant que ministre responsable de la Régie de l'assurance automobile du Québec, je voudrais simplement indiquer que ce que le député vient de mentionner est tout à fait inexact, puisque la présidente de la Régie de l'assurance automobile du Québec a elle-même précisé en conférence de presse que c'est à la demande de la Régie de l'assurance automobile du Québec; pour la première fois en cinq ans, la régie a demandé au gouvernement d'augmenter de 2% le coût des primes d'assurance automobile, 12% en cinq ans, alors que les compagnies privées ont augmenté, pour les dommages matériels, pendant ce temps, leurs primes d'environ 50%.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Robert Baldwin, vous avez la parole.

M. O'Gallagher: Peut-être que le ministre des Transports pourrait nous expliquer pourquoi nous sommes les plus taxés de tous les Canadiens et de tous les citoyens nord-américains. C'est ça la vérité, nous sommes les plus taxés du Canada, c'est ça la vérité. Dans votre projet de loi, vous allez chercher 2000 $...

M. Clair: On a le meilleur système d'assurance automobile...

M. O'Gallagher: ... dans les poches des contribuables.

Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît!

M. O'Gallagher: M. le Président, en terminant, je voudrais simplement dire que le but d'Hydro-Québec était de fournir l'électricité au prix coûtant, c'était une loi antitrust pour empêcher l'exploitation des contribuables de la province de Québec. Ce projet de loi fait l'opposé, c'est maintenant le gouvernement qui exploite des contribuables, ce n'est pas acceptable. Quant à nous, de l'Opposition, avant que vous adoptiez cette maudite loi, vous auriez pu avoir la décence de laisser l'essentiel qui est la phrase suivante: "La société a pour but de fournir l'énergie aux municipalités, aux entreprises industrielles ou commerciales et aux citoyens du Québec aux taux les plus bas compatibles avec une saine administration financière."

Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Beauce-Sud.

M. Hermann Mathieu

M. Mathieu: Merci, M. le Président. Inutile de vous dire que je suis profondément indigné de ce que nous sommes en train de faire présentement, nous avons pris l'habitude de légiférer la nuit, sous le coup du bâillon, sous le coup du rouleau compresseur, il est presque minuit, hier matin, nous avons fini notre séance de la veille à 7 heures 50. Ce n'est pas rassurant pour la population quand on est obligé de légiférer la nuit. On se cache, la nuit. Quand quelqu'un veut faire un mauvais coup, il fait cela la nuit, il fait cela à la noirceur, il fait cela en cachette. C'est à peu près ce que nous sommes en train de faire en fin de session. Je me rappelle que lorsque les députés du Parti québécois siégeaient dans l'Opposition, dans des circonstances semblables, ils déchiraient leurs vêtements! On les entendait proférer leur indignation devant le rouleau compresseur, devant le bulldozer. Cela ne leur a pas pris de temps à adopter la même recette, pour un gouvernement social-démocrate. On s'en vient la nuit modifier la vocation d'Hydro-Québec, ce joyau qui appartenait à tous les Québécois - je dis bien "qui appartenait" - dont on change la vocation en lui permettant maintenant de taxer indirectement, d'une manière cachée, la nuit, ce qu'il y a de plus faible dans notre population. On donne une pitance, une augmentation d'à peu près 8% aux assistés sociaux et on va chercher, par l'augmentation des tarifs d'électricité à compter du 1er janvier, une augmentation de 16,7%.

M. le Président, l'augmentation des tarifs d'électricité fait l'affaire du

gouvernement, c'est bien sûr. On l'entend préparer le terrain depuis un bon bout de temps. L'ancien ministre de l'Énergie disait: II faut que l'on vende le pétrole au prix international. Il faut augmenter le pétrole au prix international pendant que les ententes Québec-Canada prévoient que quand l'entente sera dans son application maximale, en 1985, ce sera 75% du prix international. Cela ne fait pas l'affaire, c'est 100%. Pourquoi, en outre, aller chercher 0,30 $ le gallon? C'est pour avoir l'occasion d'augmenter les tarifs d'électricité, non plus pour que l'électricité serve les Québécois, comme c'était la vocation d'Hydro, mais pour que les tarifs d'électricité et qu'Hydro-Québec servent le gouvernement qui a perdu le contrôle de l'administration publique, qui a perdu le contrôle des finances publiques. Il n'est pas besoin d'être grand clerc pour en faire la preuve. On découvre à tous les jours des choses cachées. Le Vérificateur général nous indiquait hier que le déficit n'est pas de 2 900 000 000 $, mais de 3 400 000 000 $; encore 400 000 000 $ ou 500 000 000 $ de comptes à payer, de cachés, de dissimulés ici et là. Je comprends que le gouvernement ait besoin de cette vache à lait qu'est Hydro-Québec pour combler sa mauvaise administration. Pendant les cinq premières années du régime, il fallait faire plaisir aux gens. On avait un référendum qui s'en venait, alors il fallait être très large. On ne se préoccupait pas des déficits et des dépenses: 10 000 000 000 $ de déficit dans quatre ans d'administration. Qu'on se rappelle de quelle manière l'actuel ministre des Finances traitait des déficits de 200 000 000 $ du temps du régime précédent. Il y a loin de la coupe aux lèvres.

Quelles seront les conséquences? Avant de passer aux conséquences, je trouve décevant, je trouve déplorable de voir, devant des annonces d'augmentation de taxes, de pressurisation de la population, tous les députés du Parti québécois applaudir à des augmentations semblables. Réellement, je n'y comprends plus rien. Je me demande comment les députés qui reçoivent sans doute des gens à leur bureau de comté, comme on le fait, peuvent justifier une chose semblable, comment ils peuvent applaudir aussi frénétiquement, aussi aveuglément à cela. C'est absolument incompréhensible. (24 heures)

Les conséquences de ces hausses: d'abord, la "désincitation" à l'investissement. Quand il n'y a plus d'investissement, l'économie devient moins prospère. On crée du chômage. Quand la période de prestation d'assurance-chômage pour les prestataires est terminée, ils perçoivent de l'aide sociale. Les budgets d'aide sociale doivent automatiquement gonfler énormément, M. le Président. Les jeunes ne sont plus intéressés à créer des emplois. Les propriétaires de petites et de moyennes entreprises, on les traite de "bums", de voleurs, d'exploiteurs On adopte des lois iniques, injustes qui découragent ces gens à créer de nouveaux emplois et on vient augmenter les tarifs d'électricité, l'essence, la prestation de la Commission de la santé et de la sécurité du travail, une autre taxe cachée, M. le Président, assumée seulement par l'employeur. On double la taxe sur les services de santé payée par l'employeur. On se demande pourquoi l'employeur n'est plus intéressé à créer des emplois. C'est tout simplement désastreux.

Les ministres viennent dans la Beauce vanter le miracle beauceron. Ce n'est pas drôle comme les Beaucerons ont été dynamiques, c'est vrai, je le reconnais, mais cela ne s'est pas fait avec le Parti québécois. Le Parti québécois est en train d'éteindre ce miracle beauceron, M. le Président.

Regardons les résultats. Au cours de la dernière année, de novembre à novembre, la création d'environ 170 000 emplois au Canada; performance du Québec: perte de 67 000 emplois. On n'a même pas pu maintenir nos emplois. C'est tout à fait désastreux.

Que dire, M. le Président, du gouvernement qui exploite notre jeunesse? Qu'est-ce que le gouvernement a fait pour les jeunes? On parle du bon d'emploi; on parle du service civil obligatoire, de toutes sortes de bebelles. Ce n'est pas cela que les jeunes veulent. Votre bien-être, ils n'en veulent pas. Vous commencez à mettre des règlements à l'OCQ, des règlements illégitimes, s'il en est, tout à fait condamnables. La fameuse carte de l'OCQ, je n'ai pas besoin de faire de démonstration, si tu n'as pas travaillé 1000 heures, tu n'as pas de carte; si tu n'as pas de carte, tu n'as pas d'heures, et c'est le chien qui court après sa queue, qui tourne en rond.

À quoi sont condamnés nos jeunes? Au bien-être social. Ils n'en veulent pas, de votre bien-être. Ce qu'ils veulent, c'est garder leur dignité; ils veulent vivre de leur travail; ils veulent avoir le droit et ils revendiquent le droit de choisir leur métier et de vivre de leur travail. On sait que le droit au travail est fondamental; c'est un droit sacré inaliénable. Qu'est-ce que vous en faites? C'est un droit qui est protégé par la Charte des droits et libertés de la personne. D'un coup de règlement, vous le rayez et vous condamnez nos jeunes à l'aide sociale ou au travail clandestin. Qu'est-ce qui se passe avec le travail clandestin? Les peines d'emprisonnement. Vous êtes obligés d'agrandir les prisons, non pas pour les criminels. Quelqu'un va tuer, et c'est juste si on ne lui donne pas de médaille. Mais pour les gens qui veulent gagner leur vie

honorablement, l'année passée, M. le Président, 8000 ont été traduits devant les tribunaux pour contravention à l'OCQ. Quand cela ne fait pas, c'est l'exil. On s'en va en Alberta, on s'en va à Calgary, à des endroits où il est encore possible de travailler. Ce n'est pas avec des choses comme cela qu'on va recréer l'économie et rendre le dynamisme à notre peuple. Je déplore que le gouvernement n'ait rien fait de concret pour les jeunes, pour leur créer de l'emploi, sauf les exploiter, M. le Président.

Je conclus, puisque vous me faites signe que mon temps est terminé. Le gouvernement nous dit souvent: On a seulement 50% des impôts; on ne peut pas faire de miracle. Oui, avec 50% des impôts, vous avez un déficit de près de 4 000 000 000 $; avec 100% des impôts, ce serait bien un déficit de 10 000 000 000 $, si je suis votre raisonnement.

M. le Président, je conclus en appuyant tous les amendements que notre confrère, notre collègue, le député d'Outremont, critique officiel en matière d'énergie, a déposés sur la table du greffier, à ma demande. J'ose espérer, dans un dernier élan de courage, qu'ils seront acceptés comme un moindre mal et qu'ils assureront encore qu'Hydro pourra tant bien que mal continuer un peu la vocation pour laquelle elle avait été créée. Cette vocation, ce n'était pas de combler les déficits du gouvernement, de compenser pour une mauvaise administration, mais de fournir de l'électricité au meilleur prix possible aux Québécois.

M. le Président, il faut qu'Hydro-Québec soit pour les Québécois ce que le pétrole est pour les Albertains. Merci.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Sainte-Anne.

M. Maximilien Polak

M. Polak: M. le Président, je crois être le dernier député de côté de l'Opposition qui ait le droit de parole sur les amendements qu'on a soumis. Je suis très content de constater que le premier ministre est venu m'écouter. D'ailleurs, il est accompagné par le vice-premier ministre et d'autres ministres dont j'ai entendu les discours jusqu'ici et je n'ai pas l'impression qu'on ait réussi à convaincre les députés ministériels et les ministres du bien-fondé de nos amendements.

Cependant, étant le dernier qui parle, je vais faire - et le premier ministre aime bien, de temps en temps, se servir d'expressions anglaises - ce qu'on appelle le dernier "pitch".

M. le Président je me souviens très bien du premier ministre dans sa jeunesse. C'était lui, le premier ministre... Je sais qu'il est maintenant très occupé à parler d'autre chose, de son référendum...

Le Vice-Président (M. Rancourt): Je m'excuse, M. le député de Sainte-Anne. Depuis le dernier intervenant, les murmures de cette salle sont devenus de plus en plus envahissants. Je demanderais votre collaboration, s'il vous plaît.

M. le député de Sainte-Anne.

M. Polak: M. le Président, je vous remercie de votre intervention parce que le premier ministre était occupé ailleurs et j'aime bien qu'il m'écoute parce que je pense que je suis capable de le convaincre, étant le dernier qui parle sur les amendements.

M. Lévesque (Taillon): Si le député le permet, je ne demanderais pas mieux, parce que, depuis le temps que ça dure, je ne demanderais pas mieux que d'être convaincu. Donc je vais écouter avec une religieuse attention le député de Sainte-Anne pour voir s'il est capable de me convaincre de ce que personne, jusqu'ici, n'a réussi à démontrer, c'est-à-dire que les citoyens du Québec ne doivent pas avoir finalement un dividende sur l'investissement qu'ils ont fait il y a vingt ans, vingt et un ans.

En ce qui concerne Hydro-Québec, ça n'a, d'aucune façon, entamé l'intégrité financière d'Hydro-Québec, ce qui me paraît être la clé du projet de loi 16, et, si le député de Sainte-Anne peut me démontrer que ce n'est pas correct, je suis presque prêt à changer d'idée.

Une voix: Oh! Quel défi, quel défi!

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Sainte-Anne.

M. Polak: M. le Président, j'apprécie énormément l'intervention directe du premier ministre. J'espère que son intervention ne sera pas comptée dans mon temps, parce que j'ai dix minutes et les gens de mon comté de Sainte-Anne aimeraient bien que je prenne les dix minutes au complet.

Je vais aller vite parce que le premier ministre m'a lancé le défi de le convaincre et je vais essayer de le convaincre.

Les amendements qu'on suggère sont les suivants. Premièrement, le gouvernement va créer un dividende une fois par année; nous, on suggère, dans notre amendement, que ce soit fait sur recommandation du conseil d'administration d'Hydro-Québec. M. le Président, je suis certain que le premier ministre sera capable d'accepter cet amendement-là. C'est très raisonnable; on dit: M. le gouvernement, créez votre dividende, mais après avoir reçu la recommandation du conseil d'administration d'Hydro-Québec. Je me rappelle le temps où le premier ministre était plus jeune. Il nous a donné Hydro-Québec, nous sommes tous fiers de ça. J'espère que, maintenant qu'il a

un peu vieilli, avec l'expérience politique des années, il va se rappeler ces belles journées du passé où il a accompli de belles choses et qu'il dira: Voilà, Hydro-Québec, faites-nous des recommandations, on va créer les dividendes suivant vos recommandations. Amendement raisonnable et je peux voir, sur le visage du premier ministre, qu'il est prêt à accepter ça.

Maintenant, M. le Président, deuxième amendement. On dit que l'article 6 va être amendé pour se lire comme suit: "Que les taux seront fixés aux taux les plus bas compatibles avec une saine administration financière." En d'autres termes, on n'attaque plus le fait qu'il y a un dividende à être payé, qu'il y a une imposition de taxe sur le capital. On a perdu notre bataille en commission parlementaire, on a été battus. Ce n'est pas facile de vivre 41 contre 80. C'est décevant de temps en temps, mais on ne lâche pas. Le premier ministre m'a lancé un défi et je lui demande: Qu'est-ce que vous avez contre cela, M. le premier ministre, d'inscrire dans le texte "aux taux les plus bas compatibles"? Dans le cadre de la loi maintenant, ça veut dire l'imposition d'une taxe sur le capital et les dividendes, et je vois par son visage qu'il va accepter ce deuxième amendement. (0 h 10)

Troisièmement. On dit ce que le tarif applicable à chaque usager sera le tarif suivant le coût réel du service fourni à cette catégorie, pour autant que cela soit pratique. En d'autres termes, on dit: Nous savons maintenant... On est battu là-dessus, M. le Président, on a eu la guillotine, ce n'est pas drôle de perdre la tête sous la guillotine, mais on fait encore la bataille de la dernière minute, on dit: Soyez donc raisonnables, nous venons avec des amendements raisonnables. On demande, pour la population, que soit décrété dans la loi le coût réel du service, pour autant que cela soit pratique. C'est très raisonnable.

Je vois déjà le premier ministre dire: J'ai accepté les deux premiers amendements, mais là il m'entraîne sur un chemin où je ne le suis pas. Si vous ne suivez pas, on va tomber sur le quatrième. C'est un amendement important sans doute. Le premier ministre est un social-démocrate, un homme raisonnable, l'homme qui dit: Moi seul suis capable de renverser une décision prise. J'espère qu'il va le faire pour la population dans le projet de loi no 16. On demande - on ne demande pas plus que cela - que la facturation de tarifs pour le consommateur... Pas la grande industrie, je suis d'accord avec lui, que ceux qui peuvent payer paient, mais les consommateurs, on va, à partir du 1er janvier 1982, les exempter de la taxe de vente au détail. Quel meilleur cadeau de Noël et du Jour de l'An que de dire: Vous autres, citoyens, je suis social-démocrate, vous payez une augmentation de taxes, c'est grave, c'est sérieux, ce n'est pas ma faute, je comprends bien, mais le 8% de taxe, on enlève cela. C'est raisonnable, la manière dont il répond. Je pense qu'il est d'accord peut-être avec cette suggestion-là.

La dernière, et je vais arrêter parce que je ne peux pas parler plus que les dix minutes qui me sont accordées, c'est qu'on demande simplement, pour informer la population, dans l'article 10.1 de la loi, que la facture que le citoyen recevra désormais ait une catégorie taxes et dividendes. En d'autre termes, et ça, c'est l'élément de la transparence, je reçois mon compte d'électricité, 35 $. Il y sera marqué: total à payer, 35 $. J'accepte, mais il est marqué en plus: taxes et dividendes, 3,50 $, par exemple. C'est seulement pour renseigner le public; ça, c'est le montant qui a été pris par le gouvernement pour financer d'autres projets. Il n'y a rien de plus raisonnable que cela. Mon compte de 35 $, je le paie, je suis obligé, j'accepte, mais on va dire: 3,50 $, ce montant-là est appliqué à la catégorie taxes et dividendes.

M. le Président, je termine, je suis très content que le premier ministre soit venu m'écouter, le vice-premier ministre et le leader parlementaire. Je suis très content parce qu'ils se disent: En dernier lieu, c'est peut-être lui qui a les arguments les plus substantiels. Les amendements qu'on a suggérés sont les amendements de quelqu'un qui a été battu en commission parlementaire, qui a subi la guillotine, mais qui est encore vivant, et qui dit: S'il vous plaît, on vous demande des choses raisonnables pour la population, pour la transparence, pour la social-démocratie; s'il vous plaît votez au moins en faveur de cela. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le premier ministre.

M. Lévesque (Taillon): M. le Président, je dirai simplement une chose avec le consentement de la Chambre. Si le député de Sainte-Anne - parce qu'il y a une sorte de résonance, je ne dis pas qu'elle est logique, mais il y a une sorte de résonance à laquelle je suis sensible dans ce qu'il a dit -avait parlé avant le député d'Outremont, mais on voit alors à quel point il y a deux longueurs d'onde, c'est curieux comme le débat aurait été beaucoup plus intéressant, mais c'est un peu tard.

M. Fortier: Question de règlement, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député d'Outremont, sur une question de règlement.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Cette motion est adoptée?

M. Charron: À ce matin, 10 heures, pardon.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté. Ajournement des travaux à 10 heures ce matin.

(Fin de la séance à 0 h 17)

M. Fortier: Dans toutes les réunions qu'on a eues en commission parlementaire et ici même, le premier ministre n'a jamais été présent pour m'écouter; alors, je ne peux pas comprendre comment il peut porter un jugement aussi insignifiant.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le premier ministre.

M. Lévesque (Taillon): M. le Président, ça fait à peu près 19 ans que je suis, pour des raisons qu'on comprendra, personnellement beaucoup ce qui se passe à Hydro-Québec, y compris - j'aimerais mieux que le député d'Outremont n'insiste pas - ce qui se passe à Gentilly II depuis quelques années.

M. Fortier: M. le Président...

Le Vice-Président (M. Jolivet): Juste un instant. Tout ce que je voulais faire, c'était d'éviter... S'il vous plaît! S'il vous plaît! Tout ce que je voulais éviter, c'est qu'il y ait un débat. Il y a eu consentement pour une première intervention. Il y a une question de règlement, si vous me dites que vous avez une question de privilège, je suis prêt à l'entendre.

M. Fortier: M. le Président, je ne peux pas accepter des menaces comme celles que me fait le premier ministre. S'il veut engager un débat sur ce sujet-là, je suis prêt à l'avoir n'importe quand et je ne suis pas certain que le gouvernement qu'il dirige va se trouver en bonne posture.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Nous sommes rendus, selon l'avis qui a été déterminé, d'abord, à la mise aux voix des amendements. M. le leader.

M. Charron: M. le Président, en vertu des articles du règlement qui me le permettent et pour nous permettre surtout de réfléchir aux arguments du député de Sainte-Anne, je propose que le vote soit retardé à demain matin, après la période de questions.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Donc il y aura, selon le règlement, des votes au début des affaires du jour, après les motions non annoncées.

M. Charron: C'est exact, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader.

M. Charron: Je propose l'ajournement de la Chambre à demain, 10 heures.

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