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Dix heures vingt-quatre minutes)
Le Vice-Président (M. Jolivet): À 'ordre, s'il vous
plaît!
Un moment de recueillement. Veuillez vous asseoir. Affaires courantes.
Déclarations ministérielles. Dépôt de documents.
Avis de la Commission de la fonction publique au
Conseil du Trésor
Conformément aux dispositions de 'article 30 de la Loi sur la
fonction publique, je dépose copie de l'avis que la Commission de la
fonction publique a donné au Conseil du trésor sur les cinq
règlements suivants.
M. le ministre des Travaux publics et de l'Approvisionnement.
Rapport annuel du ministère des
Travaux publics et de
l'Approvisionnement
M. Marcoux: M. le Président, il me fait plaisir de
déposer le rapport annuel 1980-1981 du ministère des Travaux
publics et de 'Approvisionnement.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Rapport
déposé.
M. le ministre de l'Énergie et des Ressources.
Une voix: II retire le projet de loi no 16.
Rapport annuel du ministère de l'Énergie
et des Ressources
M. Duhaime: M. le Président, il me fait plaisir de
déposer le rapport annuel du ministère de l'Énergie et des
Ressources pour l'année 1980-1981.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Rapport
déposé.
M. le ministre de l'Habitation et de la Protection du consommateur.
Rapport annuel de la Régie des entreprises en
construction
M. Tardif: M. le Président, j'ai le plaisir de
déposer le rapport annuel 1980-1981 de la Régie des entreprises
en construction du Québec.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Rapport
déposé.
M. le ministre des Affaires sociales.
Statistiques annuelles pour 1980 de la RAMQ
M. Johnson (Anjou): M. le Président, il me fait plaisir de
déposer en deux copies le rapport des statistiques annuelles pour 1980
de la Régie de l'assurance-maladie du Québec.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Rapport
déposé.
Dépôt de rapports de commissions élues.
Mme la députée de Dorion.
Audition de mémoires sur le projet de loi no
37
Mme Lachapelle: M. le Président, qu'il me soit permis de
déposer le rapport de la commission élue permanente qui a entendu
les mémoires concernant le projet de loi no 37, Loi regroupant les
villes de Baie-Comeau et de Hauterive.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Rapport
déposé.
Une voix: J'espère qu'ils les ont invités, M. le
Président.
Des voix: Ah!
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Limoilou.
Une voix: Un discours.
Étude des projets de loi nos 230, 237, 248, 263 et 253
M. Gravel: M. le Président, qu'il me soit permis,
conformément aux dispositions de notre règlement, de
déposer le rapport de la commission élue permanente des
institutions financières et coopératives qui a
siégé le 16 décembre 1981 aux fins d'étudier
article par article les projets de loi privés suivants: no 230, Loi
concernant La Solidarité, Compagnie d'assurance sur la vie et L'Unique,
Compagnie d'assurance-vie; no 237, Loi concernant la "Congrégation des
Petits Frères de Marie" dits "Frères Maristes"; no 248, Loi
concernant l'Union Saint-Joseph de Notre-Dame de Beauport; no 263, Loi
concernant la Coopérative agricole régionale de Papineau; no 253;
Loi concernant le Groupe Prêt et Revenu.
Les projets de loi privés nos 237, 263, 253 et 248 ont
été adoptés avec des amendements. Le projet de loi
privé no 230 a été adopté sans amendement. Merci
bien.
Des voix: Bravo!
Le Vice-Président (M. Jolivet): Est-ce que le rapport de
cette commission est adopté?
M. le leader, est-ce que le rapport de cette commission peut être
adopté immédiatement?
M. Charron: Oui, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté.
Deuxième lecture prochaine séance ou séance
subséquente?
M. Charron: Probablement prochaine séance, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Prochaine
séance.
M. le député de Saint-Hyacinthe.
Étude du projet de loi no 41
M. Dupré: M. le Président, qu'il me soit permis de
déposer le rapport de la commission élue permanente de
l'habitation et de la protection du consommateur qui a étudié,
article par article, le projet de loi no 41, Loi modifiant la Loi instituant la
Régie du logement et modifiant le Code civil et d'autres dispositions
législatives, le mercredi 16 décembre 1981 et l'a adopté
avec des amendements.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Rapport
déposé.
Le député de Bellechasse.
Audition d'organismes sur le projet de loi no
33
M. Lachance: M. le Président, qu'il me soit permis de
déposer le rapport de la commission élue permanente des affaires
municipales qui a entendu certains organismes relativement au projet de loi no
33, Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant les
municipalités.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Rapport
déposé.
M. le leader.
M. Charron: M. le Président, on a la preuve...
Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!
S'il vous plaît!
M. Charron: ... établie que le député de
Bellechasse est un excellent rapporteur. Je ne sais pas pourquoi ils ne
l'ont pas pris.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Dépôt de
rapports... S'il vous plaît!
M. le député de Saint-Louis.
M. Blank: Ce n'est pas sûr, mais peut être
qu'à la prochaine réunion on va encore suggérer son
nom.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Dépôt de
rapports du greffier en loi sur les projet de loi privés.
M. le leader.
Rapports du greffier en loi sur les projets de loi
privés
M. Charron: J'en ai quelques-uns, M. li Président. Le
projet de loi qui porterait le no 261, qui concerne la ville de Ville-Marie au
Témiscamingue. On dit que le projet de loi est conforme à l'avis,
que les avis on été publiés. La loi 264 qui, elle,
modifierai la charte de la ville de Trois-Rivières. Ces aussi conforme
à l'avis et les avis ont été publiés. La loi 235
qui concerne la ville de Val d'Or. C'est aussi conforme à l'avis et le
avis ont été publiés. Finalement, une que j'ai beaucoup
hésité à déposer, M. le Président, mais je
me suis résigné à le faire, le projet de loi no 247
concernant la cité de Verdun conforme à l'avis et les avis ont
été publié également.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Rapports
déposés.
Présentation de projets de loi au non du gouvernement.
M. le ministre de la Justice.
M. Bédard: J'ai l'honneur de présenter..
Le Vice-Président (M. Jolivet): Un instant! Un instant:
(10 h 30)
M. Charron: Si mon collègue le permet M. le
Président...
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader, les
privilèges et les droits...
M. Charron: Oui, les privilèges et les droits étant
sur le point d'être violés, M. le Président, je dois
d'abord solliciter le consentement pour que le ministre de la Justice puisse
déposer ce projet de loi même s'il ne paraît qu'en appendice
aujourd'hui au feuilleton.
Des voix: Ah!
Le Vice-Président (M. Jolivet): Est-ce que cette motion
est adoptée, M. le leader de l'Opposition?
M. Levesque (Bonaventure): Si nous avons une amende honorable du
ministre de la Justice, à ce moment-là, nous serons prêts a
donner notre consentement.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Consentement obtenu.
M. le ministre de la Justice.
Projet de loi no 45
Première lecture M. Marc-André
Bédard
M. Bédard: Je suis prêt à faire toute amende
honorable, sachant que je serai payé de retour, en termes d'amende
honorable, par les membres de l'Opposition.
J'ai l'honneur de présenter le projet de loi no 45. Ce projet de
loi a pour objet d'assurer à toute personne qui a intenté ou
intentera d'ici le 1er juillet 1982 un recours en justice fondé sur
l'utilisation de la mousse d'urée-formol comme isolant. Ce projet de loi
a pour effet d'assurer à ces personnes que ce recours ne pourra
être rejeté pour le motif qu'il est prescrit ou qu'il n'a pas
été intenté avec la diligence raisonnable.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Est-ce que cette
première lecture du projet de loi no 45, Loi favorisant l'exercice des
recours découlant de l'utilisation de la mousse d'urée
formaldéhyde comme isolant, est adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté.
Le Secrétaire adjoint: Première lecture de ce
projet de loi.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Deuxième lecture,
prochaine séance ou séance subséquente.
Présentation de projets de loi au nom des
députés.
M. le leader.
M. Charron: Article 1) du feuilleton, M. le Président.
Projet de loi no 188 Première lecture
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Vachon propose la première lecture du projet de loi no 188, Loi
concernant un contrat d'approvisionnement à l'hôpital Charles Le
Moyne. Est-ce que cette première lecture est adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté.
Le Secrétaire adjoint: Première lecture de ce
projet de loi.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Deuxième lecture,
prochaine séance ou séance subséquente. M. le leader.
M. Charron: Article o) du feuilleton, M. le Président.
Projet de loi no 246 Première lecture
Le Vice-Président (M. Jolivet): Le député de
Chambly propose la première lecture du projet de loi no 246, Loi
concernant la ville de Saint-Basile-le-Grand.
Cette première lecture est-elle adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté.
Le Secrétaire adjoint: Première lecture de ce
projet de loi.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Deuxième lecture ou
déférence, M. le leader?
Renvoi à la commission des affaires
municipales
M. Charron: Déférence à la commission des
affaires municipales, s'il vous plaît.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Cette motion de
déférence à la commission des affaires municipales
est-elle adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté. M. le
leader.
M. Charron: M. le Président, je vais vous demander
d'appeler d'autres projets de loi, je ferai une motion de
déférence commune par la suite puisqu'ils vont tous à la
même commission.
Article k) du feuilleton, s'il vous plaît.
Projet de loi no 204 Première lecture
Le Vice-Président (M. Jolivet): Le député de
Nelligan propose la première lecture du projet de loi privé no
204, Loi concernant la ville de Kirkland.
Cette motion est-elle adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté.
Le Secrétaire adjoint: Première lecture de ce
projet de loi.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader.
M. Charron: Article n) du feuilleton.
Projet de loi no 256 Première lecture
Le Vice-Président (M. Jolivet): Le député de
Laprairie propose la première lecture du projet de loi privé no
256, Loi modifiant les pouvoirs de la ville de La Prairie.
Cette motion est-elle adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté.
Le Secrétaire adjoint: Première lecture de ce
projet de loi.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader.
M. Charron: L'article m, M. le Président.
Projet de loi no 247 Première lecture
Le Vice-Président (M. Jolivet): Le député de
Sainte-Anne propose la première lecture du projet de loi privé no
247, Loi concernant la cité de Verdun. Cette première lecture
est-elle adoptée? Adopté. M. le leader.
M. Charron: L'article g du feuilleton, s'il vous plaît.
Projet de loi no 261 Première lecture
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Rouyn-Noranda-Témiscamingue propose la première lecture du
projet de loi privé no 261, Loi concernant la ville de Ville-Marie.
Cette motion de première lecture est-elle adoptée?
Adopté.
Le Secrétaire adjoint: Première lecture de ce
projet de loi.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader.
M. Charron: Article j.
Projet de loi no 264 Première lecture
Le Vice-Président (M. Jolivet): Le député de
Champlain propose la première lecture du projet de loi privé no
264, Loi modifiant la Charte de la ville de Trois-Rivières. Cette motion
de première lecture est-elle adoptée? Adopté.
Le Secrétaire adjoint: Première lecture de ce
projet de loi.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader.
M. Charron: L'article i, M. le Président.
Projet de loi no 235 Première lecture
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
d'Abitibi-Est propose la première lecture du projet de loi privé
no 235, Loi concernant la ville de Val-d'Or. Cette première lecture
est-elle adoptée? Adopté. M. le leader.
Renvoi à la commission des affaires
municipales
M. Charron: Je propose que tous ces projets de loi soient
déférés à la même commission, celle des
affaires municipales.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Cette motion de renvoi
est-elle adoptée? Adopté.
QUESTIONS ORALES DES DEPUTES
Comptes à payer de 1 103 000 000 *
M. le député de Vaudreuil-Soulanges.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Ma question s'adresse au
ministre des Finances, M. le Président. Parmi les lectures fort
intéressantes qui nous sont permises à titre de membres de
l'Assemblée nationale, se trouve le rapport annuel du
vérificateur, le comptable, M. le Président, de tous les
Québécois, celui à qui notre Législature a
confié le mandat d'examiner les états financiers du gouvernement.
On peut lire dans le rapport qui a été soumis à cette
Assemblée hier par le Vérificateur général que "les
conventions comptables doivent être pertinentes, adéquates,
suffisamment précises puisqu'elles doivent servir de base pour
établir, interpréter et comparer les états financiers du
gouvernement. En d'autres
termes, elles doivent permettre une présentation sincère,
exacte et intégrale de la situation financière et des
résultats?
M. le Président, on pourrait s'étonner de voir une telle
affirmation dans ce document, à moins qu'en creusant on découvre
précisément pourquoi cet énoncé si clair et si
évident se retrouve encore une fois cette année dans ce rapport.
M. le Président, on peut découvrir en creusant dans le document
que le ministre des Finances continue à creuser des trous dans les
finances publiques. On découvre, M. le Président, que de 726 000
000 $ de comptes à payer dans les paiements de transfert aux
institutions publiques, de 726 000 000 $ que le trou était dans les
comptes publics l'an dernier, il est passé à 1 103 000 000 $
cette année. M. le Président, cette augmentation de 400 000 000
$, beaucoup plus que le simple chiffre de 1 000 000 000 $ est pertinente, il me
semble, à ce moment-ci. J'inviterais le ministre des Finances à
nous expliquer comment d'un trou de 500 000 000 $ qui était un oubli ou
une erreur, un trou de 1 100 000 000 $ est devenu parfaitement conscient,
lorsqu'on a été averti à deux reprises par les
vérificateurs et les comptables du Québec. M. le
Président, le ministre des Finances doit des explications à cette
Chambre.
Le Président: M. le ministre des Finances.
M. Parizeau: Très volontiers, M. le Président. On
revient à un certain nombre de choses dont nous avons souvent
discuté en cette Chambre et que je vais reprendre. On se souviendra que
dans ce qu'on a appelé le trou de 500 000 000 $ dans l'éducation
il y a deux ans, le gouvernement en avait inscrit, au moment où cela a
été découvert, 200 000 000 $ dans les crédits de
cette année-là, et, a simplement laissé pour
épuration successive, le solde là où les commissions
scolaires l'avait laissé, c'est-à-dire dans les banques. On a
constaté aussi, qu'en dépit des crédits votés dans
cette Chambre et des instructions données, en particulier les plans de
redressement dans les hôpitaux, un déficit bancaire s'accumulait
graduellement. J'ai eu même l'occasion dans ma réplique au
discours sur le budget d'hier de faire allusion, pour la énième
fois, à cette absence de contrôle suffisant sur les emprunts
bancaires, par les institutions de réseau. Nous avons pris les
dispositions depuis quelques mois pour arrêter cette absence de
contrôle, qui fait qu'effectivement, dans certains réseaux, par
rapport aux crédits que la Chambre vote ici, il y avait
systématiquement et depuis toujours une sorte d'échappatoire du
côté des banques. Les mesures sont maintenant prises pour
contrôler cela et les banques sont d'ailleurs averties, les règles
du jeu s'établissent. Il n'en reste pas moins que ce qui a
été ainsi emprunté dans les banques s'y retrouve encore et
que le gouvernement doit payer les arrérages graduellement.
Cette situation de fait a toujours été inscrite - enfin,
depuis quelques années en tout cas - dans les comptes publics du
gouvernement à la page 593, si on veut prendre, par exemple, les comptes
publics de 1979-1980. Le numéro peut varier d'une année à
l'autre mais c'est invariablement à la fin des comptes publics, une des
dernières pages.
Cette année, dans les comptes publics de 1980-1981, nous avons
passé cette mention - tous les chiffres qu'on passait à la fin
des comptes publics - au début, dans les notes complémentaires.
Ce sont les mêmes renseignements, mais déplacés de
façon qu'ils soient plus visibles et qu'ils soient dans les notes
complémentaires au bilan. Donc, il n'y a rien de modifié dans la
présentation des choses sauf de les inscrire aux notes
complémentaires. (10 h 40)
Voici ce que dit dans son rapport, le Vérificateur
général, page 13. "Pour la première fois cette
année dans une note complémentaire aux états financiers -
note 3 - il est fait mention que, en raison de certaines dispositions des
conventions comptables et de la Loi sur l'administration financière, il
arrive que, tant au cours des années antérieures qu'au cours de
l'année courante, des dépenses encourues n'aient pu être
imputées sur un crédit." Un peu plus loin: "Nonobstant
l'amélioration de l'information financière découlant de la
note 3, etc..."
Je regrette un peu que le Vérificateur général
n'ait pas cru bon d'indiquer que tous les renseignements qui apparaissent en
1980-1981 dans la note complémentaire apparaissaient dans les
renseignements supplémentaires des mêmes comptes publics dans les
années précédentes. Je vais expliquer pourquoi. À
certains moments, il faut quand même être clair sur ces choses. La
raison pour laquelle nous mettions cela dans les renseignements
supplémentaires jusqu'en 1980-1981 venait de ce que le
Vérificateur général de l'époque insistait pour que
ce soit là. La raison pour laquelle, dans les états financiers de
1980-1981, cela apparaît dans les notes complémentaires, c'est que
le nouveau vérificateur a accepté que ce soit là. Alors,
dans ce sens, je n'ai aucune espèce d'objection que d'un
vérificateur à l'autre, on veuille changer, comme on dit, les
conventions. Je dois dire à cet égard que nous suivons les
indications du vérificateur au fur et à mesure qu'il nous les
donne.
Cela dit, je dois dire que je regrette
infiniment la traduction de tout ça dans la Presse de ce matin.
Venir parler d'un oubli "de 659 000 000 V c'est faux, parce que cela a toujours
été dans les états financiers et nous en avons
discuté souvent en cette Chambre.
Deuxièmement, il y a un M. Couillard, du bureau du
Vérificateur général, qui m'a l'air d'avoir donné
une conférence de presse. Que le Vérificateur
général passe à la télévision, donne des
entrevues, etc., c'est parfaitement normal, c'est même son rôle. On
aura noté, d'ailleurs, que dans ses interventions, hier soir, à
la télévision, il ne parle pas du tout de ce genre de choses.
Mais un de ses fonctionnaires donne une conférence de presse ou une
entrevue - déjà, en soi, je trouve ça un peu
étonnant - et il est cité au texte - tenez-vous bien, tous ceux
qui ont déjà travaillé en comptabilité -pour dire
ceci: "Nous avons la certitude à peu près absolue - d'ajouter M.
Couillard -que la différence de 513 000 000 $ devrait être
ajoutée au déficit."
Voilà maintenant des comptables qui nous disent: Nous avons la
certitude à peu près absolue. Curieuse convention comptable,
c'est le cas de le dire. Ou bien c'est dedans, ou bien de n'est pas dedans. En
tout état de cause, d'aucune espèce de façon on ne peut
parler d'oubli. Depuis des années, cela a toujours été
dans les comptes publics. Cette année, ça a simplement
été changé de place, sur l'autorisation du nouveau
Vérificateur général, par rapport à une pratique
que l'ancien refusait. Merci, M. le Président.
Le Président: M. le député de
Vaudreuil-Soulanges.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): M. le Président, le
groupe ministériel est en train d'applaudir une réponse qui
contient une citation tronquée. J'aimerais simplement relever que le
ministre des Finances nous a dit que le Vérificateur prétend
cette année que, nonobstant l'amélioration de l'information
financière, etc... Etc, M. le Président, la phrase se lit au
complet de la façon suivante: "À mon avis - c'est le comptable
des Québécois qui parle - tous les frais encourus directement par
le gouvernement pour une année financière doivent être
inscrits aux livres." C'est ce qu'on dit. Ce n'est pas la première
fois.
L'an dernier, pour l'année 1979-1980, le Vérificateur
général, qui est la même personne responsable et
compétente qui examine actuellement les états financiers des
comités de la fête nationale, qui a découvert les
irrégularités à la SHQ, a dit: "Pour que les états
financiers reflètent exactement les opérations d'une année
financière, la convention comptable devrait exiger l'inscription aux
livres des dépenses de transfert que le gouvernement doit acquitter pour
les frais de fonctionnement dans la période même où ces
frais sont encourus."
Finalement, j'aimerais entendre les commentaires du ministre des
Finances sur ce qui est absolument central. On prétend, à ce
moment-ci, que ce sont les vérificateurs qui changent d'idée
d'une année à l'autre. Le Vérificateur
général, à la page 15 du rapport qui nous a
été remis hier, déclare: "Nous avons transmis - c'est le
Vérificateur général, encore une fois - au mois d'avril
1980, nos remarques, commentaires et suggestions sur le projet de convention
préparé par le personnel du Conseil du trésor, et
constatons avec regret que, plus de 18 mois plus tard, en novembre 1981, il n'y
a encore rien de fait en substance."
M. le Président, j'aimerais demander au ministre des Finances
à quel moment il fera quelque chose, à quel moment on aura des
états financiers comparables, au lieu de changer ces trous d'une page
à l'autre, d'une section à l'autre, d'une note à un
énoncé complémentaire, à une annexe. Quand cela
sera-t-il aux états financiers du gouvernement du Québec?
Une voix: Très bien.
Le Président: M. le ministre des Finances.
M. Parizeau: M. le Président, puisque le
député de Vaudreuil-Soulanges m'en donne l'occasion, on va
examiner d'un peu plus près les citations qu'il vient de donner.
Le vérificateur dit donc qu'il serait préférable,
à son avis, que tous les frais encourus directement par le gouvernement
pour une année financière soient inscrits aux livres. Cela se
réfère essentiellement à ceci. La Loi sur l'administration
financière prévoit que doivent être inscrits aux livres
tous les comptes rentrés dans les 30 jours en vertu de l'article 58 de
la Loi sur l'administration financière. Tout ce qui est entré
dans les 30 jours doit être inscrit. Or, il est évident que,
surtout dans les ministères régionalisés ou
décentralisés, une partie de ces factures entre passé 30
jours. Le problème consiste à savoir si, à la prochaine
révision de la Loi sur l'administration financière - comme on le
sait, ces lois sont révisées de période en période,
mais c'est un exercice extrêmement long - on passera de 30 jours à
45 jours ou à deux mois pour l'inscription. Mais, dans l'état de
la loi, telle qu'elle est actuellement, il est évident que des comptes
rentrent passé 30 jours et que, dans ces conditions, à cause de
la loi, ils ne peuvent pas être imputés à l'année
précédente. Encore une fois, il faut bien comprendre une chose.
Moi, je suis responsable d'appliquer les lois. Qu'on les transforme de temps
à autre, je veux bien, mais dans l'état actuel des lois, il faut
bien suivre ce que la loi dit de
faire.
Deuxièmement, il dit aussi: "II en est de même pour les
frais de fonctionnement à la charge du gouvernement, des commissions
scolaires, institutions d'enseignement, établissements de santé
et de bien-être dans la période même où ces frais
sont encourus." Cela revient exactement à ce que je disais tout à
l'heure et à ce que nous avons dit souvent en cette Chambre, des deux
côtés. Cette règle n'est possible que dans la mesure
où les emprunts des réseaux en banque sont
contrôlés. Or, regardez la position de votre parti sur la Loi sur
les emprunts scolaires que nous avons discutée encore il y a quelques
jours. Quels sont ceux qui font le plus d'objections au contrôle des
emprunts bancaires par les réseaux? Pas nous, le parti d'en face.
Une voix: C'est cela.
M. Parizeau: II faudrait quand même que vous vous
branchiez. Nous ne pouvons pas réaliser cette condition, si nous n'avons
pas le contrôle des emprunts bancaires des réseaux. Cela est
facile à comprendre. Si ce contrôle-là n'existe pas, nous
votons des crédits en cette Chambre, les réseaux se retournent
vers les banques, empruntent dans les banques et disent: Les banques
demanderont peut-être d'être payées par le ministre des
Finances. Si vous voulez que cette condition soit réalisée, il
faut que vous nous donniez un coup de main de l'autre côté pour
faire en sorte qu'au fur et à mesure qu'on adopte une loi pour
contrôler les emprunts de réseaux, on soit appuyé.
Des voix: Très bien.
M. Parizeau: C'est très joli, M. le Président, de
parler de décentralisation, de déconcentration, d'autonomie
locale et de tout ce qu'on voudra, sauf que l'autonomie locale et la
décentralisation, à la limite, c'est cela que cela donne, des
emprunts dans les banques et des factures envoyées au ministre des
Finances et des factures, soit dit en passant, envoyées au ministre des
Finances pas l'année où cela tombe, l'année suivante et
parfois l'autre année après.
Une voix: Et parfois deux ans.
M. Parizeau: Dans ce sens, je ne peux pas être plus
d'accord avec le Vérificateur général là-dessus,
sauf qu'il faut se doter, comme on l'a fait depuis quelques mois, des
instruments nécessaires pour être en mesure de contrôler
cela.
Le député de Vaudreuil-Soulanges m'a aussi demandé
des réactions à la page 15. Je rappelle, M. le Président,
que...
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
M. Parizeau: ... nous ne déplaçons pas des montants
d'un endroit à l'autre des comptes publics. Les notes
complémentaires font partie des états financiers. Cela a toujours
été reconnu, on en a discuté à l'occasion de la
commission des comptes publics et, conformément au voeu qui avait
été exprimé à ce moment-là, c'est dans les
notes complémentaires, mais cela sera reflété par
l'état des crédits quand les conditions dont j'ai parlé
tout à l'heure auront été réalisées. Merci,
M. le Président.
Le Président: Question additionnelle, M. le chef de
l'Opposition.
M. Ryan: M. le Président, le ministre admet d'abord que ce
montant de 1 100 000 000 $ ne figure pas dans les états financiers
réguliers, contrairement à l'avis qui est émis par le
vérificateur des comptes. Si la loi n'a pas été
modifiée, c'est la faute du gouvernement et non pas du
vérificateur des comptes ou de l'Opposition.
Deuxièmement, je voudrais rappeler au ministre que, si des
institutions, en particulier des hôpitaux, ont contracté des
emprunts auprès des banques, cela a été souvent parce que
le gouvernement leur disait: Nous n'avons pas plus d'argent à vous
donner, allez emprunter aux banques et on verra plus tard.
Troisièmement, je voudrais demander au ministre des Finances de
clarifier les deux points suivants. D'abord, est-ce qu'il admet,
conformément à ce qui est dit dans le rapport du
vérificateur, que ce passif, classé comme indirect, mais
très direct en termes d'obligations à la fin de l'exercice
dernier, était de 400 000 000 $ environ supérieur à ce
qu'il était l'année précédente à la
même date? Deuxièmement, peut-il donner la garantie, en
particulier dans le cas des hôpitaux, qu'il n'y avait pas beaucoup
d'autres obligations de même nature dont le gouvernement n'était
pas encore au courant à ce moment-là et qui viendront, par
conséquent, s'ajouter dans la réalité au montant de 1 100
000 000 $?
Le Président: M. le ministre des Finances.
M. Parizeau: M. le Président, d'abord, je veux bien qu'on
dise que le gouvernement est responsable de toutes les lois; c'est tout
à fait exact, sauf que je rappellerai que la Loi sur l'administration
financière a maintenant à peu près dix ans. Dans ces
conditions...
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
M. Parizeau: ... ne commençons pas à faire des
vertus rétrospectives, n'est-ce pas? La Loi sur l'administration
financière...
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! M.
le ministre des Finances.
M. Parizeau: ... peut présenter des tas
d'inconvénients, mais sa stabilité a au moins un avantage, c'est
que d'année en année les comptes sont comparables. Je ne
souhaiterais pas voir la Loi sur l'administration financière changer
tous les deux ans. J'ai l'impression que la plupart des gens qui cherchent
à analyser la situation du gouvernement trouveraient ça beaucoup
plus compliqué. On sait à quel point une convention comptable est
une convention comptable, ni plus ni moins. On sait à quel point
l'imputation des dépenses peut se faire de plusieurs façons.
L'important, c'est qu'on ne commence pas à changer, d'année en
année, la façon dont on présente les comptes parce que
là personne ne s'y retrouvera.
Deuxièmement, pour la question des hôpitaux, je ne suis pas
d'accord, pas plus que dans le cas des commissions scolaires, avec le chef de
l'Opposition. Je lui rappellerai à cet égard que les plans de
redressement budgétaire commencés avec certains hôpitaux,
pas tous d'ailleurs, mais, en particulier, avec certains des plus gros
hôpitaux de Montréal et de Québec il y a déjà
au-delà de trois ans, ont bien fonctionné la première
année, moins bien la deuxième, pas beaucoup la troisième.
C'est pour cela que l'argent s'est retrouvé dans les banques. Ce n'est
pas parce qu'on incitait les hôpitaux à emprunter dans les
banques; c'est qu'au fur et à mesure que le redressement
budgétaire s'effectuait, on trouvait cela plus pénible la
deuxième année que la première, forcément, beaucoup
plus pénible la troisième que la deuxième et la banque se
trouvait à être une sorte de tentation perpétuelle.
S'imaginer que le gouvernement téléphonait dans les
hôpitaux en disant: "Empruntez, le ministre des Finances sera
généreux un jour", c'est de la légende.
Des voix: Quel jour?
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
M. Parizeau: II est tout à fait clair que sur le plan des
comptes à payer, les chiffres qui sont donnés ne sont pas
faussés alors, forcément, l'augmentation des comptes à
payer correspond à la réalité, cela va de soi. Au cas
où cela pourrait satisfaire le chef de l'Opposition, je dirais que
d'année en année, selon les échéances que nous
avons, ce montant des comptes à payer varie à la hausse, mais
à la baisse aussi, selon les années, de centaines de millions. Il
est tout à fait clair, par exemple, qu'au moment de la réforme
fiscale municipale, nous avions, en comptes à payer, 300 000 000 $ qui
ont paru à la fin d'une année alors que l'année suivante,
ils se sont résorbés. Quiconque sait comment on établit
les comptes à payer sur des masses pareilles, sait très bien
qu'il y a des fluctuations de plusieurs centaines de millions dans les deux
sens, d'ailleurs.
II y avait une dernière question posée par le chef de
l'Opposition; je m'excuse, mais c'était quoi? Il avait fait une
dernière observation et je l'ai oubliée. J'ai l'impression qu'il
l'a oubliée lui aussi. Merci, M. le Président.
Le Président: Question principale, M. le
député d'Outremont.
M. Fortier: Bref, j'ai compris qu'on est dans le trou. C'est ce
que j'ai compris.
M. Rivest: C'est ça!
Déclaration de M. Robert Boyd pour une
politique énergétique
M. Fortier: J'aurais une question à poser au ministre de
l'Énergie et des Ressources. Vous vous rappellerez que la semaine
dernière, à la suite de la nomination du nouveau PDG
d'Hydro-Québec le député de Mont-Royal, à juste
titre d'ailleurs, avait fait l'éloge de l'ancien
président-directeur général, M. Boyd. D'ailleurs, je vous
rappellerai qu'à la commission parlementaire de l'énergie et des
ressources, lors de l'étude du projet de tarification soumis par
HydroQuébec, le ministre de l'Énergie avait prononcé une
allocution très remarquée, notant, à juste titre, la
compétence de M. Boyd et ses nombreuses années de service -37
ans, je crois - à la direction d'Hydro-Québec et comme
employé, au préalable.
Je m'étais d'ailleurs associé à ces éloges
qui avaient été faits par le ministre de l'Énergie et des
Ressources. C'est donc dire que des deux côtés de cette Chambre
nous reconnaissons la compétence de M. Boyd dans le domaine
énergétique.
Je voudrais porter à l'attention du ministre une
déclaration que M. Boyd a faite dans le Devoir de ce matin: "On parle
beaucoup de politique énergétique au Québec. Cela fait des
années qu'on en parle, mais on n'en a toujours pas. On devrait donc dire
ce qu'est la politique et ce qu'est le rôle d'Hydro-Québec dans
telle ou telle partie de cette politique. Également, le gouvernement
devrait définir clairement son rôle face à l'Hydro. Il
faudrait préciser le rapport entre les deux: présentement, ce
n'est pas clair et cela n'a jamais été clair."
La question que je pose au ministre de l'Énergie est celle-ci: Ne
croit-il pas que la déclaration de M. Boyd donne un appui
peut-être tardif, mais quand même déterminant, à tous
les arguments avancés par l'Opposition pour s'opposer au projet de loi
no 16, Loi modifiant la Loi sur l'Hydro-Québec"?
Deuxièmement, ne croit-il pas que les
changements substantiels à la Loi sur l'Hydro-Québec ne
devraient pas se faire sans que le gouvernement définisse au
préalable le rôle d'Hydro-Québec à
l'intérieur d'une politique énergétique globale, pour tout
le Québec?
Le Président: M. le ministre de l'Énergie et des
Ressources. À l'ordre, s'il vous plaît!
M. Duhaime: M. le Président, j'ai lu comme tout le monde
le compte rendu d'une entrevue rapportée ce matin par Michel Nadeau dans
le journal Le Devoir. J'ai certaines hésitations à commenter
directement comme avéré ce qui est écrit entre guillemets.
Cependant, M. le Président, en tenant pour acquis que ce qui est
rapporté dans le journal est précis et exact, je pense que M.
Boyd a raison sur un point. Ce n'est pas d'hier, d'ailleurs. Cela remonte
à l'existence même d'Hydro-Québec. Il y a
nécessairement et il y aura toujours nécessairement, je pense,
une zone grise dans les rapports qui existeront entre un gouvernement et
Hydro-Québec. Il faut dire aussi que traditionnellement, sur le plan des
mandats confiés à Hydro-Québec, elle reçoit des
mandats du gouvernement, la politique énergétique est
établie par le gouvernement, et il est bien certain que, dans la
jonction normale et le fonctionnement quotidien d'une pareille entreprise, il y
a évidemment des zones grises.
Je rappelle essentiellement, en toute justice, cependant, je dois le
dire, pour M. Boyd, ce que j'ai eu l'occasion de dire en commission
parlementaire, je serais prêt à le répéter ce matin,
M. le Président, je pense pouvoir réitérer au
député d'Outremont que c'est des deux côtés de cette
Chambre que nous avons reconnu les longs états de service de M. Boyd. Je
dois dire cependant que le Devoir rapporte également ce matin ceci: "Se
défendant de claquer la porte, M. Boyd a dit partir parce que la charge
de travail était devenue trop lourde. Il est temps de passer le travail
à des jeunes. J'en ai pris beaucoup, peut-être trop. Il y a du
personnel très compétent à Hydro-Québec."
Si c'est vrai des deux côtés, M. le Président, qu'on
est prêt à reconnaître les longs états de service,
les loyaux états de service de M. Boyd, je pense aussi, qu'il y a
quelques jours, des deux côtés de la Chambre, sur une motion du
député d'Outremont, nous étions prêts à
reconnaître également que le successeur de M. Boyd, M. Coulombe,
était capable de relever le défi à Hydro-Québec
pour les années quatre-vingt.
M. Fortier: M. le Président, je vois que le ministre n'a
pas répondu à mes deux questions. Il a parlé d'une zone
grise. J'ai l'impression qu'on a un ministre gris et qu'il ne sait pas trop
où il s'en va, et s'il n'est pas capable de répondre à mes
questions, j'aimerais bien que le premier ministre le remplace. (11 heures)
Le Président: M. le ministre.
M. Duhaime: M. le Président, je ne sais pas qui grisonne
le plus vite de nous deux, M. le député d'Outremont. Puisqu'on
parle de la loi 16, je m'en excuse auprès du député
d'Outremont, j'aurais peut-être dû accrocher la deuxième
partie de sa question, mais j'essaie d'être bref dans mes réponses
et d'être clair aussi, M. le Président, l'Opposition, qui en est
à sa troisième semaine du "filibuster" sur la loi 16, nous
annonçait, puisqu'on en parle, il faut bien en parler, que, dès
le mois de juin, lors du dépôt, il y a eu des commentaires par des
gens d'en face, que, lors de la commission parlementaire sur la loi 16
également, ils ont fait des commentaires et on disait même, en
citant l'ancien vice-président aux finances d'Hydro-Québec, M.
Lemieux, qui vit sans doute des jours glorieux aujourd'hui dans une des
province de l'Ouest du Canada - je donne cela comme exemple, M. le
Président, pour montrer tout le sérieux de l'Opposition dans le
débat - qu'Hydro-Québec serait mise en difficulté pour
réaliser son programme d'emprunt.
M. Fortier: Question de règlement.
Le Président: M. le député d'Outremont, sur
une question de règlement.
M. Fortier: Le règlement exige que le ministre
réponde simplement et immédiatement aux questions qui sont
posées. Alors, je vous demanderais de lui demander de
répondre.
Le Président: Alors, M. le ministre.
M. Duhaime: M. le Président, je rappelle que... je
réponds au député d'Outremont. Ils ont fait un lien entre
la capacité d'emprunt d'Hydro-Québec et la loi 16, alors qu'on a
toujours dit qu'il n'y en avait pas, que toutes les garanties étaient
dans la loi. Dans la Presse du 16 décembre 1981 - c'est donc très
proche de nous et cela va intéresser le chef de l'Opposition, j'en suis
convaincu - "Hydro: emprunts de 2 027 000 000 $". Le programme en cours pour
l'année est normalement complété avec un emprunt
additionnel de 50 000 000 $ avec la cote AA. J'ai l'impression que
peut-être ce sont les libéraux qui vont commencer à dire
AA, face à Hydro-Québec.
Le Président: Question principale, M. le
député de Hull, et par la suite, M. le député de
Limoilou.
Fusion de Baie-Comeau et Hauterive
M. Rocheleau: M. le Président, ma question s'adresse au
premier ministre. Cela concerne la loi 37 qui vise une fusion forcée des
municipalités de Baie-Comeau et Hauterive. Nous avons jusqu'à 3
heures du matin, hier, M. le Président, entendu 8 intervenants de
Baie-Comeau et Hauterive, dont les municipalités, les comités de
citoyens, la Chambre de commerce, le CRD et la grande majorité, M. le
Président, a rejeté la fusion forcée. Unanimement, M. le
Président, les intervenants ont exigé du gouvernement de prendre
ses responsabilités, c'est-à-dire de corriger la situation de
Hauterive qui ne reçoit pas de taxe foncière
d'Hydro-Québec pour ses barrages de Manic. M. le Président,
étant donné que la démocratie a encore sa place,
j'espère, au Québec, je demande au premier ministre s'il a
l'intention de retirer le projet de loi 37 en attendant que les citoyens de
Baie-Comeau et Hauterive aient l'opportunité de voir clair dans leurs
affaires.
M. Lévesque (Taillon): La réponse, M. le
Président, c'est non. Il n'est pas question de retirer le projet de loi;
il n'est pas question, non plus, de prétendre le faire passer à
la vapeur. Juste une correction de fait qu'on vient de me rappeler et que je
dois rappeler au député de Hull. C'est qu'Hydro-Québec,
contrairement à ce qu'il a mentionné je ne sais pas pourquoi,
paie quelques centaine de milliers de dollars par année à
Hauterive en "en lieu" de taxe et depuis longtemps. Il ne faut pas charrier,
non plus.
Pour ce qui est des gens qui rejettent unanimement la fusion,
peut-être qu'il y a des gens qui rejettent ce qui pourrait leur sembler
sûrement une fusion forcée. Mais c'est complètement faux
d'après les rapports que j'ai eus; je n'assistais pas à la
commission, mais je ne vois pas pourquoi le député de Hull
s'amuse à tronquer les faits. On me dit, au contraire, que beaucoup de
gens ont découvert à quel point, à partir des chiffres, y
compris ceux qui étaient à la commission... C'est malheureux,
d'ailleurs, que les représentants de médias d'informations - et
je les comprends - soient allés se coucher, apparemment, avant la fin de
la commission, parce qu'il découlait de l'ensemble des discussions et de
l'ensemble des faits qui étaient sur la table, d'après les
rapports que j'en ai eus, que non seulement cette fusion semble plus
qu'indiquée mais qu'elle serait à l'avantage des deux populations
concernées. D'ailleurs, cela fait des années et des
années, tout le monde le sait - lorsqu'on passe sur la Côte-Nord,
tout le monde le dit - qu'il est inévitable qu'un jour une seule ville
solide, plus grande, plus intégrée, si vous voulez, serait
avantageuse. Maintenant, il est évident que même si c'est
avantageux, même si c'est souhaitable - et je pense que la plupart des
gens de la Côte-Nord, de la région le sentent - il n'est pas
question de "bulldozer" un projet de loi comme ça s'il n'y a pas une
sorte de consensus qui s'établit, mais je suis convaincu qu'il va
s'établir rapidement.
Le Président: M. le député de Hull.
M. Rocheleau: Question additionnelle, M. le Président. Le
comité des citoyens de Baie-Comeau disait au ministre Lessard, l'autre
jour, justement, Arrêt, Stop, on se souvient de cela dans l'histoire. M.
le Président, j'aimerais que le premier ministre, lui qui aime la
consultation, le prouve actuellement. Il n'est pas heureux de son
congrès, des résultats, il demande maintenant chez ses militants
un référendum.
Le Président: Question additionnelle, s'il vous
plaît.
M. Rocheleau: M. le Président, le maire Boutin, de
Hauterive, a confirmé sa participation secrète à la
rédaction de la loi 37 étudiée en commission
parlementaire. Je demande encore une fois si le premier ministre du
Québec aime à consulter simplement ceux qui vont dire oui
à sa demande, alors que les gens de Baie-Comeau et de Hauterive
n'acceptent pas une fusion forcée. On veut revenir à la
consultation, M. le premier ministre. On demande le retrait de la loi 37 afin
de permettre justement cette démocratisation. Le ministre Lessard n'a
pas été élu pour une fusion forcée de Baie -Comeau
et Hauterive.
Le Président: Question, s'il vous plaît. Voulez-vous
vous asseoir, s'il vous plaît.
Question additionnelle, s'il vous plaît.
M. Rocheleau: M. le Président, avant de poser ma question,
j'aimerais que les députés péquistes...
Le Président: À l'ordre! À l'ordre, s'il
vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît!
Question additionnelle, s'il vous plaît.
M. Rocheleau: M. le Président...
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
Question de règlement, M. le ministre.
M. Richard: M. le Président, sur une question de
règlement. Je voudrais que vous demandiez au député de
Hull de faire attention de ne pas briser les bureaux qui font partie de notre
patrimoine.
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
M. le député de Hull, je m'attends à votre
collaboration et à ce que vous posiez une question additionnelle sans
aucun autre préambule. S'il vous plaît!
M. Rocheleau: M. le Président, je voudrais simplement
dire, avant, au ministre...
Le Président: M. le député de Hull,
question, s'il vous plaît.
M. Rocheleau: M. le Président, je voudrais que le premier
ministre du Québec nous dise s'il va permettre une consultation et un
référendum avant de forcer la loi 37.
Le Président: M. le premier ministre.
M. Lévesque (Taillon): J'avouerai qu'il y a quelques
instants, le sens démocratique du député de Hull me
faisait quasiment peur. Je pense que la plupart de ceux qui suivent
assidûment nos travaux ont dû avoir un certain frisson parce que
c'était un spectacle...
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
M. Lévesque (Taillon): ... qui explique un peu certains
des commentaires qu'on se faisait faire à Hull, dans le temps où
le député actuel était le potentat de l'hôtel de
ville. (11 h 10)
M. Rocheleau: Question de règlement, M. le
Président. Question de règlement.
Le Président: Question de règlement.
M. Rocheleau: M. le Président, je parle ce matin de
démocratie; je ne parle pas du temps où j'étais maire de
Hull parce que je pourrais vous en parler...
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! M.
le député de Hull!
M. le premier ministre.
M. Lévesque (Taillon): M. le Président, devant ces
explosions de violence, je vais faire appel à quelqu'un qui est
responsable fondamentalement de ce projet de loi et qui peut répliquer
du tac au tac - on connaît sa vigueur de style - mon collègue des
Affaires municipales.
Le Président: M. le ministre.
M. Léonard: Je vois qu'on essaie de faire un spectacle,
chez les gens d'en face, mais, justement, dans un article du Soleil, ce
matin...
M. Rocheleau: Question de privilège.
Le Président: Question de privilège, M. le
député de Hull.
M. Rocheleau: M. le Président, le spectacle n'est pas de
ce côté-ci, il est de l'autre côté.
Le Président: M. le ministre des Affaires municipales.
M. Léonard: Le journaliste, justement, mentionne
qu'à la lecture des données que j'avais citées à la
commission parlementaire, il n'y avait à peu près plus personne
qui s'opposait à la fusion des deux villes, sauf...
M. Rocheleau: C'est rendu que tout le monde quitte.
Le Président: M. le député de Hull, s'il
vous plaît! M. le député de Hull, assoyez-vous! S'il vous
plaît! M. le député de Hull, je vous recommanderais
fortement, au cours de la période des fêtes, de lire notre
règlement attentivement, de l'article 1 au dernier. Vous verrez que
lorsque le président est debout, vous devez vous asseoir, et lorsqu'un
député a la parole, vous ne devez point l'interrompre.
M. le ministre.
M. Léonard: Peut-être que le journaliste
exagérait un peu, mais disons qu'il y a quand même des chiffres
sur lesquels à peu près tout le monde s'entend et sur lesquels il
y a eu aussi des consultations, parce que ce dossier dure depuis au moins
quinze ans dans la région. Les chiffres sont les suivants: À
Hauterive, il y a 14 724 habitants qui dépensent en moyenne, per capita,
505 $, qui ont une évaluation industrielle et commerciale de 27 000 000
$. À Baie-Comeau, il y a 11 911 habitants qui dépensent en
moyenne 863 $, comparativement à 505 $ à Hauterive, et qui ont
une évaluation industrielle et commerciale de 181 000 000 $,
comparé à 27 000 000 $.
Or, il se trouve que les gens de Hauterive travaillent en grande partie
à Baie-Comeau. Ce sont deux populations qui vivent côte à
côte depuis fort longtemps, et à la suite d'accidents de terrain,
il se produit des écarts considérables dans les charges
financières des deux villes. Depuis longtemps, à la suite de
plusieurs rapports, des recommandations disent: II n'y a pas d'autre solution
que la fusion. Maintenant, nous proposons un projet de loi, nous avons ouvert
la commission parlementaire des affaires municipales à la population,
chacun s'est fait entendre. Mais sur les faits, sur les chiffres, sur le fond,
tout le monde s'entend.
Comme a dit le premier ministre, il n'est pas question de bousculer ce
projet de loi, mais il est urgent que la fusion se fasse,
et tout le monde en a convenu à la fin de la commission
parlementaire.
Le Président: En complément de réponse, M.
le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche.
M. Lessard: M. le Président, un complément de
réponse, tout en corrigeant un certain nombre de choses. Il est exact
que nous, de ce côté-ci de la Chambre comme, peut-être
aussi, dans la région, on n'aime pas la fusion obligatoire. J'ai
indiqué à plusieurs reprises que j'aurais aimé, à
la suite de négociations que j'ai entreprises d'ailleurs à la
demande des deux maires depuis 1976, une fusion volontaire. Mais, M. le
Président, pour corriger un certain nombre de choses, c'est que,
à la suite des différents rapports qui nous ont été
présentés, en commission parlementaire, j'ai posé à
chaque intervenant la même question: Est-ce que vous croyez qu'une fusion
volontaire serait possible? Je pense que le député de Hull pourra
le confirmer, dans la majorité des réponses, cela a
été: II est impossible d'envisager une fusion volontaire dans les
circonstances. C'est pourquoi nous devons présenter le projet de loi no
37 d'autant plus que, pour respecter l'ensemble de la population, nous
constatons qu'à la suite de sondages, 57% de la population de
Baie-Comeau et de Hauterive veut la fusion des deux villes.
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
À l'ordre, s'il vous plaît! Dernière question
additionnelle, sans préambule, M. le député de Hull, s'il
vous plaît!
M. Rocheleau: M. le Président, j'ai une pétition
d'au-delà de 5000 personnes qui demandent une consultation populaire et
je demande de nouveau...
Des voix: Question.
M. Rocheleau: ...au ministre Lessard s'il est prêt à
permettre à ces gens d'être consultés et d'accepter cette
fusion volontaire, à la suite du fait que les deux municipalités
se sont concertées avec une équipe de spécialistes, pas
des gens qui essaient de mettre la pagaille là-bas. M. le ministre
Lessard, vous qui êtes le député de Saguenay, est-ce que
vous allez accepter une consultation pour vos citoyens?
Le Président: M. le ministre.
M. Lessard: M. le Président, comme on le soulignait tout
à l'heure, il y a à peu près, dans ce dossier, quinze ans
de consultations. Il y a six rapports d'experts qui remontent à 1963. Le
dernier rapport, M. le Président, a été le rapport
Major-Martin, qui a été demandé par les deux villes,
Hauterive et Baie-Comeau, et qui a coûté 286 000 $ au gouvernement
du Québec. Il y a donc des études qui ont coûté plus
de 500 000 $. Nous constatons que, malgré ces études qui
recommandent unanimement la fusion et malgré tous les efforts que nous
avons pu faire, il est impossible d'en arriver à une fusion volontaire.
Dans les circonstances, nous sommes obligés de présenter ce
projet de loi.
Ceci ne veut pas dire pour autant -puisque les deux villes devront
présenter un budget pour l'année à venir et qu'à la
suite de l'opposition que nous avons du côté libéral, nous
ne pourrons probablement pas adopter ce projet de loi avant Noël - que,
maintenant, il peut y avoir des ententes avant. Il pourra y avoir des ententes
pour le prochain budget, mais il est entendu que le gouvernement du
Québec n'a pas l'intention de lâcher à ce sujet, que nous
devrons régler un problème que les libéraux n'ont pas
réglé dans le passé...
Des voix: Ah!
M. Lessard: ...ce qui avait été demandé. Je
demande, en terminant, M. le Président, si le député de
Hull était prêt, lui, à accepter un
référendum lorsqu'il a voulu fusionner Hull-Ouest et Aylmer.
M. Rocheleau: Oui. M. le Président.
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
Question principale.
M. Rocheleau: II m'a posé une question, M. le
Président.
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
Question principale, M. le député de Limoilou.
Situation au centre Robert-Giffard
M. Gravel: Merci, M. le Président. Ce n'est pas facile
pour un député ministériel de poser une question en cette
Chambre. M. le Président, ma question s'adresse au ministre des Affaires
sociales. Les conditions de travail sont de plus en plus difficiles
actuellement au centre hospitalier Robert-Giffard. J'ai eu l'occasion de vous
sensibiliser par le passé, de même que votre
prédécesseur, sur un point particulier, soit l'état
déplorable de la cuisine centrale du centre hospitalier. J'ai
moi-même constaté que ces installations sont dans un état
inacceptable et doivent être rénovées. Un rapport du
ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation a
déjà confirmé cette situation. Les travailleurs en ont
assez. J'ai eu l'occasion de vous parler, dans le passé, M. le ministre,
d'une certaine
table en chêne, d'un piano, etc. M. le Président, est-ce
que le ministre pourrait m'indiquer dans quel délai ces travaux de
rénovation pourraient être entrepris?
Le Président: M. le ministre des Affaires sociales.
M. Johnson (Anjou): M. le Président, je remercie le
député de Limoilou de sa question, je sais depuis un certain
nombre de jours qu'il veut la poser en cette Chambre. On connaît aussi
l'attachement du député de Limoilou pour les travailleurs,
l'institution et les citoyens desservis par cette importante institution de la
région de Québec...
Une voix: II a travaillé là. (11 h 20)
M. Johnson (Anjou): ...puisqu'il y a déjà
travaillé. On sait que le centre Giffard héberge 2500 patients
psychiatriques, que son budget est d'environ 60 000 000 $, que les cuisines
datent de 1939, qu'il y a un projet de rénovation d'environ 2 500 000 $
qui est en cours depuis un certain temps et qui a dû, dans le contexte de
certains réaménagements budgétaires, être
imputé, pour cette partie des travaux qui étaient
commencés et de l'équipement acheté, au budget de
fonctionnement qui, de toute évidence, sera insuffisant pour
compléter ce qui est une opération essentielle, compte tenu de la
vétusté d'une bonne partie de l'équipement et du
piètre aménagement de certains endroits au sujet desquels, encore
une fois, les travailleurs, je pense, ont raison, comme l'institution
elle-même, de se plaindre.
En ce sens, avant d'évoquer cette question de délai, je
dirai que ce piano dont il est question à Robert-Giffard a
été donné aux soeurs à l'époque où
elles étaient propriétaires en 1929. La direction m'a
avisé qu'il ne fonctionnait plus et que, si quelqu'un pouvait en prendre
livraison, il était le bienvenu. La table de chêne a
été faite par les travailleurs eux-mêmes et remise à
l'institution il y a 50 ans. Il faut peut-être préciser certaines
choses à cet égard-là.
Il y a pour environ 1 300 000 $ d'aménagement et 1 400 000 $
d'équipement qui sont impliqués, ce qui comprend les 600 000 $
qui étaient imputés initialement. Nous pensons que, dans le cadre
des réaménagements budgétaires, il sera possible, d'une
part, d'amortir ces rénovations qui pourraient continuer très
bientôt à l'intérieur même du budget de
l'hôpital. D'autre part, le ministère des Affaires sociales, au
niveau de son budget d'équipement, quant à sa
péréquation, considérera ce dossier comme un dossier
prioritaire et en collaboration avec le CRSS, l'institution et le
ministère dans la région, nous parviendrons, à très
court terme, je pense, à régler cette question.
Merci.
Le Président: Fin de la période des questions.
On m'informe que le ministre de la Justice aurait un complément
de réponse à donner à une question de M. le
député de Mont-Royal.
M. Gagnon: Question de règlement, M. le
Président.
Le Président: Question de règlement, M. le
député de Champlain.
M. Gagnon: On attendait depuis tantôt la possibilité
de poser des questions. Le député de Hull, entre autres, a retenu
l'attention avec un spectacle...
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
À l'ordre, s'il vous plaît!
M. Gagnon: Je voudrais savoir si on pourrait avoir l'assurance
d'être reconnu demain pour poser un certain nombre de questions.
Des voix: Non, non, non.
M. Gagnon: On a, nous aussi, des questions à poser, M. le
Président.
Le Président: J'essaierai, M. le député de
Champlain, de vous reconnaître demain lors de la période des
questions.
M. Grégoire: M. le Président, j'ai une question
à poser.
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
Des voix: Fédéral, fédéral,
fédéral.
Le Président: M. le ministre de la Justice.
Le dossier des irrégularités à la
SHQ
M. Bédard: M. le Président, comme je l'avais promis
au député de Mont-Royal la semaine dernière, j'aimerais
faire le point sur la progression des enquêtes policières qui ont
été entreprises à la suite d'allégations
formulées ici ou en dehors de cette Chambre que des actes criminels
auraient pu être commis dans le cadre de différentes
activités reliées à la Société d'habitation
du Québec. J'aimerais, tout d'abord, rappeler qu'il y a quatre volets
bien distincts les uns des autres, donc quatre enquêtes policières
distinctes à l'intérieur de ce dossier général
d'enquêtes reliées à la Société
d'habitation.
Il y avait, premièrement, celui dit de la fausse facture.
Dès le mois de juin dernier, j'avais été à
même d'affirmer
qu'après étude du dossier les responsables de la direction
générale des affaires criminelles en étaient venus
à la conclusion qu'aucun acte criminel n'avait été commis
dans cette affaire de fausse facture. Ce volet est donc clos.
D'autre part, les enquêteurs de la Sûreté du
Québec ont remis récemment un rapport concernant le
deuxième et le troisième volets de cette enquête. Le
deuxième volet traite spécifiquement d'une allégation
à savoir qu'un pot-de-vin de 50 000 $ aurait été offert ou
demandé par une ou des personnes supposément dans le but de
favoriser le règlement d'un litige opposant un entrepreneur à la
Société d'habitation du Québec et impliquant
supposément le chef de cabinet du premier ministre. L'enquête
policière est terminée et toutes les personnes qui étaient
susceptibles d'apporter un éclairage sur cette affaire ont
été interrogées et les faits ont été
vérifiés. Le rapport d'enquête a été remis
aux responsables de la Direction générale des affaires
criminelles qui l'ont examiné. La conclusion de cette étude est
qu'il n'y a aucun fait, dans cette affaire, susceptible de démontrer la
commission de quelque acte criminel que ce soit.
Pour ce qui est du troisième volet, il s'agissait de
vérifier si une tentative de fraude avait été commise par
des personnes qui auraient, de diverses façons, mis de l'avant un projet
d'augmenter artificiellement de 50 000 $ la somme à être
versée par la Société d'habitation du Québec, lors
du règlement d'une réclamation, et ce dans le but d'avantager une
tierce personne.
Les responsables de la Direction générale des affaires
criminelles, qui ont analysé le rapport d'enquête, en sont venus
à la conclusion que l'ensemble des faits, qui avaient tous
été recueillis et examinés par les policiers,
n'était pas de nature à permettre de porter des accusations de
tentative de fraude ou même de complot pour en arriver à cette
fin. Aucune accusation criminelle ne peut donc être portée dans
cette affaire.
Le quatrième et dernier volet regroupe les allégations
diverses reliées à des malversations possibles ayant pu avoir eu
cours au service des réparations majeures de la Société
d'habitation du Québec. L'enquête policière, dans ce
dossier, suit son cours normal. À cet égard, dès que le
rapport d'enquête aura été remis à un procureur qui
l'examinera, les décisions qui s'imposeront seront alors prises en
conséquence. Merci, M. le Président.
Le Président: Merci.
M. le député de Mont-Royal, question additionnelle.
M. Ciaccia: M. le Président, inutile de dire que nous
allons examiner la réponse que le ministre nous a donnée ce
matin. Les quelques commentaires ou les quelques questions qui me viennent
à l'esprit sont les suivantes: Comment expliquer, dans ce cas,
l'admission de M. Foisy, membre du bureau du ministre de l'Habitation, faite
publiquement, comme quoi il aurait fait cette offre de 50 000 $? Comment
expliquer le fait que Michel Lemieux, qui était, je crois, le chef de
cabinet, a admis, selon les journaux - et cela n'a pas été
nié ou démenti - qu'effectivement il y a eu discussion de cette
offre de 50 000 $? Il y a eu discussion; ce sont des admissions publiques.
Il me semble que le ministre fait fi des faits qui entourent ces
admissions, et ces conclusions nous laissent un peu perplexes. Je voudrais
demander au ministre maintenant, vu l'importance du dossier, s'il va
déposer l'analyse faite par le procureur de la couronne des
éléments de preuve recueillis par l'enquête.
Le Président: M. le ministre de la Justice et Procureur
général.
M. Bédard: Je suis surpris des remarques faites par le
député de Mont-Royal qui évoque certains noms et certaines
déclarations qui ont été faites. Ce que je veux lui dire,
c'est que toutes les personnes qui devaient être vues au cours de cette
enquête policière l'ont été. L'enquête
policière - donc, des personnes que vous pouvez très bien
identifier ont été vues -étant terminée, l'ensemble
des faits et des témoignages recueillis a été
acheminé, selon la procédure normale, au procureur de la couronne
chargé du dossier qui en a fait l'analyse, lequel rapport a
été transféré à la Direction
générale des affaires criminelles qui en a fait l'analyse. Vous
savez très bien que, comme Procureur général, je ne peux
que vous donner ici les conclusions. (11 h 30}
Si vous me permettez, on va essayer d'en discuter dans un calme qui me
semble indiqué. Le député de Mont-Royal sait très
bien que je ne peux et qu'aucun Procureur général ne
dépose les rapports d'analyse qui sont faits par les procureurs de la
couronne, de la même façon qu'il ne dépose de rapports de
police qui sont nécessairement là étant donné qu'il
y a eu une enquête policière. Le député de
Mont-Royal sait très bien aussi que, comme Procureur
général, je n'ai pas à commenter les faits contenus dans
une enquête policière. Quant à moi, vous me permettrez, M.
le Président, pour qu'il n'y ait pas... je ne pense pas que le
député de Mont-Royal ait voulu faire quelque insinuation que ce
soit, mais sur la manière de traiter le dossier, je voudrais rappeler
que je n'ai jamais dérogé d'une ligne de conduite
qu'impose la fonction de Procureur général. Je rappellerai
simplement que le traitement de tels dossiers a toujours été
identique depuis que j'occupe ces fonctions.
Je me permets de rappeler un cas similaire, à bien des
égards, à celui qui se présente à nous aujourd'hui.
Il s'agit - le député de Mont-Royal comprendra que je ne peux
pas, comme Procureur général, être plus explicite que je
l'ai été - de l'affaire dite de la SAQ et qui, à
l'époque, semblait mettre en cause, on le sait, un ancien ministre du
cabinet libéral, alors député de l'Opposition. Je
rappellerai au texte, tirée du journal des Débats, la
déclaration que je faisais dans ce dossier, le 21 décembre 1977,
à la page 5119: "M. le Président, à la suite d'une
question de privilège qui contenait également une question pure
et simple soulevée par le député de Jean-Talon
relativement à l'enquête policière sur la
Société des alcools, je suis présentement en mesure de
faire la mise au point suivante. "Je désire d'abord rappeler que mon
rôle comme Procureur général consiste à faire
respecter les lois et à décider, s'il y a lieu, de porter des
plaintes ou des accusations eu égard aux lois qui nous gouvernent,
notamment eu égard au Code criminel. "C'est dans ce contexte que j'ai
demandé qu'on fasse le point sur tous les éléments connus,
à ce stade-ci de l'enquête, susceptibles de constituer des
infractions criminelles qui pourraient impliquer quelques membres de cette
Assemblée. Les officiers responsables, tant à la
Sûreté du Québec qu'à la direction des affaires
criminelles, m'ont indiqué que ces éléments ne
révèlent pas la commission d'infraction criminelle, de sorte que,
comme Procureur général, je puis assurer cette Assemblée
qu'il n'existe actuellement aucun motif raisonnable et probable de croire qu'un
quelconque de ses membres ait pu être partie à la commission d'une
infraction criminelle. Quant à l'ensemble de cette enquête sur la
SAQ, comme je l'ai déjà dit, elle devrait se terminer, selon les
officiers supérieurs de la Sûreté du Québec, vers la
fin de février 1978."
À la suite de ce rapport, aucune objection n'avait
été soulevée par l'Opposition, bien au contraire. Quant
à moi, je pense que c'est important, je répète que le
traitement accordé au présent dossier est identique. Je
souhaiterais que les attitudes et les comportements de l'autre
côté de la Chambre soient empreints du même sens de
responsabilité et de dignité.
M. le Président, le député de Mont-Royal peut, s'il
le juge à propos - c'est sa responsabilité - ramener sur le tapis
un ensemble d'éléments, de faits, d'allégations qui ont
déjà été véhiculés dans cette
Chambre. Il expliquera toutefois non seulement à cette Chambre, mais
à l'ensemble de la population pourquoi il le fait. À la suite de
ces allégations, le gouvernement, le ministre de la Justice a
accédé à la demande qu'une enquête policière
se tienne. Cette enquête policière s'est tenue. Tous les
témoins susceptibles d'être interrogés l'ont
été et, comme Procureur général, je donne les
conclusions non seulement de l'enquête policière, mais de
l'analyse qui a été faite par les procureurs de la couronne de
cette enquête policière et l'analyse faite par la Direction
générale des affaires criminelles du ministère de la
justice.
M. Ryan: M. le Président.
Le Président: M. le chef de l'Opposition.
M. Ryan: Vu que le ministre de la Justice s'est permis dans sa
réponse de donner des conseils à l'Opposition, je voudrais lui
rappeler quelques éléments très simples. Je voudrais lui
dire que le genre d'enquête qu'il a commandée dans ces situations
ne peut pas répondre complètement aux interrogations qui ont
surgi du côté de l'Opposition et dans l'opinion publique. Je vais
lui rappeler un petit fait bien connu de l'histoire politique canadienne. Je me
rappelle qu'il y a plusieurs années, il y avait eu un cas, la fameuse
enquête Rivard, où un avocat avait dit: On m'a offert un
pot-de-vin pour faire ceci. Si on avait réduit cela à une
enquête de police secrète, comme celle que vous avez faite,
peut-être que jamais rien ne serait sorti de cela. Le gouvernement
fédéral, sous la pression de l'opinion, a dû instituer une
enquête publique. Là, on a constaté qu'il y avait quelque
chose, qu'il y avait anguille sous roche. Finalement, cela a donné lieu
à toutes sortes de conséquences. Il me semble qu'il y avait assez
de choses dans ce dossier-là, en particulier dans les rapports du
vérificateur des comptes, pour que le gouvernement se sente
obligé de faire la lumière complète. Là, vous nous
dites qu'il n'y a pas d'offense criminelle. Nous l'aurions peut-être
appris par une enquête plus large; parfois, on arrive à
établir un délit criminel en commençant par établir
solidement des irrégularités administratives, des actes de
népotisme. Finalement, on arrive sur le vrai noyau de l'affaire, mais la
méthode que vous avez choisie ne peut que donner les résultats
qui la caractérisent, c'est-à-dire des résultats
partiels.
Le Président: M. le ministre de la Justice.
M. Bédard: D'abord, M. le Président, je dirai au
chef de l'Opposition qu'il ne s'agit pas d'une enquête secrète.
C'est une enquête
normale, régulière, comme toutes les enquêtes qui se
font par la Sûreté du Québec et selon les règles
normales de ces enquêtes, de la même façon que vous avez pu
en faire dans le temps où vous étiez au pouvoir et qui
étaient des enquêtes normales. Alors, s'il vous plaît, de ce
côté-là, n'essayons pas de commencer à y aller
d'insinuations. Je suis très surpris, M. le Président, de l'autre
aspect des questions posées par le chef de l'Opposition, qui se
réfèrent au rapport du Vérificateur général.
Il me semble très manifestement que, de fait, je n'ai pas à me
prononcer sur ce qui est contenu dans sa question, et il me semble que,
très manifestement, le chef de l'Opposition n'a pas compris ou encore
n'a pas retenu une partie de la mise au point que je viens de faire, concernant
le quatrième et dernier volet, qui regroupe les allégations
diverses reliées à des malversations possibles ayant pu avoir eu
cours au service des réparations majeures de la Société
d'habitation du Québec. Sur ce point-là, qui est très
manifestement soulevé par le chef de l'Opposition, j'ai dit que
l'enquête policière suivait son cours normal. Quand elle sera
terminée, si des accusations doivent être portées, elles
seront portées. Pour ce qui est des questions administratives, je ne
pense pas que c'est comme Procureur général que je dois
répondre dans ce sens.
M. Ryan: En vertu de l'article 96, M. le Président, je
voudrais signaler que le ministre a mal compris ce que j'ai dit. Je lui dis et
je lui répète que la méthode qu'il entend continuer
à suivre va produire des résultats aussi incomplets et
insatisfaisants que ceux de ce matin.
M. Bédard: M. le Président, je suis très
surpris des remarques du chef de l'Opposition, parce que la méthode que
nous avons suivie est exactement celle que nous avons suivie, lorsqu'il
s'agissait d'un cas qui est bien connu par l'Opposition, à savoir celui
d'un ancien ministre libéral. L'enquête avait été
faite selon les mêmes règles, avait duré au-delà
d'un an, un an et demi, en est arrivée aux conclusions qui sont les
mêmes que celles auxquelles j'arrive aujourd'hui et, à ce
moment-là, je n'avais jamais entendu des remarques dans le sens de
celles qui sont formulées ce matin par l'Opposition.
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! Sur
une question de privilège, M. le chef de l'Opposition.
M. Ryan: Question de privilège, M. le Président, il
n'y a jamais eu 10 pages du rapport du vérificateur des comptes sur les
actes sur lesquels...
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
M. le ministre de la Justice.
M. Bédard: M. le Président, je m'excuse, j'ai
été distrait par quelqu'un et je n'ai pas entendu la
dernière remarque du chef de l'Opposition. J'aime bien que rien ne soit
laissé en blanc. Je veux répondre à toutes les questions.
Alors, est-ce que le chef de l'Opposition pourrait répéter sa
dernière remarque? (11 h 40)
M. Ryan: C'est qu'il y a maldonne entre nous. Nous avons
demandé une enquête publique sur les nombreuses
irrégularités qui ont entouré le fonctionnement...
Maintenant, ce que je vous ai répondu, c'est que nous appuyons notre
demande, entre autres, sur un rapport du vérificateur des comptes qui
consacrait une dizaine de pages à ces questions. Ce que je vous ai dit,
c'est que le rapport du vérificateur des comptes, à ma
connaissance, n'a jamais consacré un paragraphe aux actes auxquels vous
avez fait allusion.
Le Président: M. le ministre de la Justice.
M. Bédard: M. le Président, je n'ai pas à
rendre compte aujourd'hui des résultats d'une enquête publique qui
n'a pas eu lieu et je n'ai pas à me prononcer sur l'opportunité
d'une enquête publique ou pas. Du côté de l'Opposition, on a
demandé qu'une enquête policière soit faite, je pense que
c'était normal.
Des voix: Question de règlement.
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
À l'ordre, s'il vous plaît!
M. le ministre de la Justice.
M. Bédard: Si cela n'a pas été
demandé par l'Opposition, je suis bien prêt à retirer mes
paroles là-dessus. C'est suite à des allégations qui ont
été faites - je l'ai dit; il s'agit de revenir à la
déclaration que j'ai faite - suite à des questions posées
en cette Chambre ou en dehors de cette Chambre qu'il était
nécessaire de faire, je pense, une enquête policière. Cette
enquête policière a été faite; elle doit se
continuer sur d'autres volets. En temps et lieu, quand elle sera
complètement terminée, c'est avec plaisir que j'en donnerai le
résultat.
M. Ciaccia: Question de privilège, M. le
Président.
Le Président: M. le député de Mont-Royal,
sur une question de privilège.
M. Ciaccia: M. le Président, le ministre a induit cette
Chambre en erreur en indiquant que l'Opposition avait demandé une
enquête policière.
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
J'ai compris que le ministre avait retiré cette
allégation.
Motions non annoncées.
M. le ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme.
Félicitations à M. Jean-Claude
Lebel et remerciements à M.
Guy Coulombe
M. Biron: M. le Président, je voudrais faire motion que
cette Assemblée félicite et offre ses meilleurs voeux de
succès à M. Jean-Claude Lebel pour son élection à
la présidence de la Société générale de
financement et remercie l'ancien président, M. Guy Coulombe, pour les
excellents services rendus à cette société d'État
québécoise.
Le Président: Est-ce qu'il y a consentement à la
présentation de la motion? Consentement.
M. le ministre.
M. Rodrigue Biron
M. Biron: M. le Président, je voudrais tout simplement
prendre quelques minutes de cette Chambre pour rappeler qu'à
l'arrivée de M. Coulombe à la Société
générale de financement, au début de 1978, la
Société générale de financement contrôlait
8200 emplois. Aujourd'hui, à la fin de 1981, on doit dire 27 000.
À l'époque, il y avait 316 000 000 $ de chiffre de ventes pour la
Société générale de financement; aujourd'hui, la
Société générale de financement et ses filiales
contrôlent 2 500 000 000 $ de ventes. À l'époque, la
Société générale de financement faisait 14 000 000
$ de déficit, en 1977; cette année, à la fin de 1981,
incluant toutes les entreprises contrôlées par la SGF, nous aurons
un profit de 100 000 000 $. M. le Président, veuillez croire que je suis
très heureux de la performance de la société et je suis
heureux que M. Lebel ait accepté de succéder à M. Coulombe
comme président de la Société générale de
financement.
Je dois, tout simplement, vous rappeler qu'en 1978, lorsque M. Coulombe
est arrivé, le gouvernement a donné un nouveau mandat à la
SGF. Ce mandat comportait, premièrement ceci: en continuant d'assumer la
gestion d'un groupe industriel, la SGF devait concentrer ses activités
dans des entreprises de taille significative dans certains secteurs
jugés prioritaires pour le développement économique du
Québec. Les deux secteurs prioritaires définis en 1978 furent
ceux de la forêt et de l'électromécanique.
Deuxièmement, dans la planification de ce développement,
la SGF devait agir de préférence avec des partenaires.
Troisièmement, le nouveau mandat de la SGF faisait une place
prépondérante à l'objectif de rentabilité puisqu'il
était spécifié désormais que le
développement de la SGF doit se faire conformément à des
conditions de rentabilité normale. Or, il y a eu beaucoup de gestes de
posés. La SGF a collaboré avec d'autres entreprises
privées, en particulier, le groupe Normick-Perron dans Donohue, avec
Gulf et Union Carbide dans Pétromont, avec la Banque nationale, la
Caisse de dépôt et la Laurentienne dans Novacap Inc. La SGF,
depuis ce temps, a vendu ses intérêts dans Tricot Lasalle de
Plessisville, de même que 35% de ses intérêts dans Marine
Industrie vendus à une société française,
Alsthom-Atlantique. M. le Président, avec la venue...
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
M. Levesque (Bonaventure): Question de règlement, M. le
Président.
Le Président: S'il vous plaît! M. le leader de
l'Opposition, sur une question de règlement.
M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, nous avons
donné notre consentement au ministre de l'Industrie, du Commerce et du
Tourisme afin que nous puissions ensemble féliciter M. Lebel de sa
nomination. Il n'a jamais été question de M. Lebel encore. Est-ce
qu'on ne pourrait pas entendre parler de M. Lebel?
M. Biron: M. le Président, je comprends que le Parti
libéral n'est pas trop intéressé au développement
économique, mais, nous autres, cela nous intéresse.
M. Lebel est connu. Il a été un grand serviteur...
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
M. Biron: ... de l'État québécois. M. Lebel
a été secrétaire général associé du
Conseil exécutif pendant plusieurs années et secrétaire du
Conseil du trésor pendant cinq ans avant de quitter le gouvernement du
Québec, depuis un peu plus d'un an maintenant, pour être
vice-président de la Banque nationale du Canada. Je suis très
heureux de le voir revenu encore une fois dans le giron des activités
économiques du Québec.
Je termine en disant que, de 1978 à 1981...
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
M. Biron: De 1978 à 1981, la Société
générale de financement est passée d'une phase de
redressement amorcée dans l'incertitude, qui caractérise les
entreprises en difficulté, à une étape de
développement stratégique. En consolidant le groupe et en
déterminant ses grands axes de croissance, l'équipe réunie
par M. Coulombe a fait de la SGF un réel outil de restructuration
industrielle qui répond aux grands objectifs qu'avait fixés le
gouvernement lorsqu'il créa cette société en 1962.
Maintenant, en cette période où les politiques industrielles se
heurtent à une situation économique difficile, les cadres et les
travailleurs de la SGF prouvent qu'il est possible de réussir à
bâtir le Québec. Merci, M. le Président.
Le Président: M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce.
M. Reed Scowen
M. Scowen: M. le Président, je veux tout d'abord offrir,
au nom de mes collègues de l'Opposition libérale, mes meilleurs
voeux à M. Lebel dans ses nouvelles fonctions. Je veux aussi profiter de
cette occasion pour vous parler brièvement de la Société
générale de financement et de son histoire, et pour poser
quelques questions à M. Lebel, auxquelles, j'espère, il
répondra publiquement dans les plus brefs délais, parce qu'il y a
des questions importantes, en ce moment, à l'intérieur de la SGF,
qui sont préoccupantes pour toute la population.
Je veux rappeler tout d'abord que la SGF est une création du
gouvernement libéral. Elle a été conçue et
réalisée sous le régime de M. Lesage et elle est devenue,
j'en conviens, l'un des éléments les plus importants dans le
développement économique du Québec. Quand le Parti
québécois est arrivé au pouvoir, il y avait quand
même une certaine incohérence dans le rôle de la SGF que
l'Opposition libérale, en 1979, a portée à l'attention du
gouvernement. L'actuel ministre de l'Industrie et du Commerce, qui était
à l'époque dans une autre formation politique, avait
apporté les mêmes réserves quant au comportement de la SGF
et quant à son incohérence, dans le sens qu'on ne savait pas
exactement quel était son mandat.
Par conséquent, face à une crise financière dans la
société en 1979, la faillite imminente de Marine Industrie, nous
avons obligé le gouvernement - et je dois admettre et rappeler que
c'était avec la collaboration de M. Coulombe, qui était, à
l'époque, le président - et la Société
générale de financement à préciser son rôle,
son mandat. Je peux vous dire que je pense sincèrement que tout ce qui a
été fait à ce moment, à la fin de novembre 1978 ou
1979, si ma mémoire est bonne, était une étape très
importante dans le développement de nos sociétés
d'État. Pour la première fois, à ma connaissance - et
c'était aussi, malheureusement, la dernière fois - on a
réussi à sortir d'une société d'État un
bilan concret de son mandat et de ses plans pour l'avenir d'une façon
cohérente, et cela a été présenté au cours
d'un débat public, en commission parlementaire, et étudié
par tout le monde.
Je veux féliciter M. Coulombe - je l'ai déjà fait
à plusieurs reprises - pour cette démarche que l'Opposition
libérale avait obligé le gouvernement à faire et qui avait
reçu une réponse très positive. Si vous vous souvenez,
à cette époque, il était convenu que la
Société générale de financement se limiterait
dorénavant à trois secteurs principaux: premièrement, le
secteur des pâtes et papiers, qui était déjà bien
installé; deuxièmement, le secteur de
l'hydroélectricité, qui était installé par
l'entreprise de Marine Industrie et de deux ou trois autres filiales et,
troisièmement, la pétrochimie.
Nous avons par la suite - vous vous en souviendrez, M. le
Président - approuvé la création de Pétromont. De
nouveau, M. Coulombe est venu devant l'Assemblée nationale, devant une
commission parlementaire, et il a présenté un programme pour
l'achat ou la création, si vous préférez, de cette filiale
Pétromont en collaboration avec deux industries du secteur privé,
(11 h 50)
Alors, je soumets tout cela, M. le Président, à votre
attention, parce que c'est la seule société d'État,
jusqu'à présent, qui ait accepté de définir comme
il le faut les normes de comportement dans un débat public. Quand on a
vu, l'hiver passé, le comportement de SOQUIP et SOQUEM dans ce sens, il
a été exceptionnellement malheureux de voir comment ces autres
sociétés se comportent aujourd'hui comparativement au fondement
de la SGF.
En terminant, M. le Président, je veux poser une question
à M. Lebel; je ne sais pas s'il nous écoute aujourd'hui. C'est la
question la plus importante à laquelle la SGF soit obligée de
faire face. Cet été, au mois d'août, elle a acheté
à peu près 22% des actions de Domtar pour une somme, si ma
mémoire est bonne, d'environ 140 000 000 $. Depuis ce temps, la valeur
de ces actions a baissé d'à peu près 50 000 000 $. Nous
avons perdu 50 000 000 $ jusqu'à présent, en cinq mois, dans cet
achat. On ne peut pas blâmer le marché parce que le marché
n'a pas baissé même du tiers.
Mais il y a une question plus importante, M. le Président.
À l'époque, le gouvernement a promis à la SGF de lui
donner les fonds nécessaires pour paver ces actions. C'est bien clair
que ces fonds auraient dû être fournis à la SGF par
l'entremise d'un projet de loi par lequel nous aurions eu le privilège,
le droit, de regarder
de près cet achat de Domtar. Si je comprends bien la situation
maintenant, le gouvernement refuse de fournir ces 140 000 000 $ à la
société. C'est un achat qui a été financé
à court terme par les banques, et le gouvernement a dû payer 16%
ou 17% d'intérêt sur ce montant, ce qui touche directement et
profondément les profits de la SGF.
On aimerait savoir de M. Lebel, immédiatement, comment il propose
de financer à long terme cet achat des actions de Domtar.
Deuxièmement, on voit qu'il nous assure que cela ne sera pas fait par
l'entremise de la Caisse de dépôt et placement du Québec
directement ou indirectement. La Caisse de dépôt et placement du
Québec a le droit de garder un maximum de 30% des actions dans une
société privée. Elle a déjà à peu
près 20% de Domtar. Si elle essaie d'arranger le financement de cette
société par l'entremise d'un prêt ou de fonds fournis par
la société d'État à la Caisse de
dépôt, c'est clair que cela sera un détournement de fonds
important.
Alors, en terminant, M. le Président, je remercie le ministre de
l'Industrie, du Commerce et du Tourisme d'avoir ouvert cette porte importante,
ce matin, dans son discours sur la Société générale
de financement. J'espère que M. Lebel, dans les plus brefs
délais, va répondre à la question publiquement pour
démontrer à la population ce qui est arrivé dans cet achat
de Domtar et comment elle va payer. Les Québécois ont le droit,
après avoir payé 140 000 000 $ pour cette société,
de savoir exactement ce qu'ils ont acheté et comment cela sera
financé. Merci.
Une voix: Très bien.
Le Président: M. le ministre des Finances.
M. Jacques Parizeau
M. Parizeau: M. le Président, je voudrais m'associer
à ceux qui m'ont précédé pour offrir mes meilleurs
voeux à M. Lebel dans la nouvelle tâche qu'il entreprend. J'ai eu
l'occasion de travailler avec M. Lebel pendant au-delà de quatre ans et
demi. J'ai été amené à constater à quel
point, comme meneur d'hommes, comme administrateur, M. Lebel a des
qualités de tout premier ordre. Que nous ayons réussi à
l'amener à quitter la Banque nationale où il faisait une
carrière prometteuse, pour l'amener maintenant à la direction de
la SGF, augure fort bien, je pense, pour les chances de développement de
la SGF dans les années qui viennent. Donc, je lui offre mes meilleurs
voeux et j'ajouterai simplement pour terminer que la plupart des questions
posées par le député de
Notre-Dame-de-Grâce quant à la SGF ou à la Domtar,
s'il les posait à la période des questions, auraient des
réponses. Merci, M. le Président.
Le Président: Merci. M. le député
d'Outremont, sur la même motion?
M. Fortier: Oui.
Le Président: M. le député d'Outremont.
M. Pierre-C. Fortier
M. Fortier: M. le Président, il me fait plaisir de
m'associer aux félicitations d'usage à M. Lebel. Il est
intéressant de noter d'ailleurs qu'il s'agit d'un grand serviteur de
l'État, comme M. Coulombe, d'ailleurs, qui a servi au Conseil
exécutif et à la Banque nationale. J'aimerais porter à
l'attention du ministre que la Banque nationale est une institution
financière du Québec, au cas où il ne le saurait pas.
Pour le bénéfice de tous ceux qui ne connaissent pas
intimement M. Lebel, j'aurais une question à poser, une demande à
formuler au ministre. Est-ce qu'il pourrait nous distribuer les notes
biographiques de M. Lebel, pour que nous puissions prendre connaissance de
toute l'expérience qu'il a, de son expérience passée et de
l'expérience qu'il a acquise soit dans le domaine politique ou dans le
domaine privé?
J'aimerais également poser une deuxième question à
cet égard, qui a trait aux finances de la SGF et compte tenu du fait que
le ministre des Finances nous avait dit que les déclarations de
dividendes ne touchaient pas uniquement Hydro-Québec mais qu'elles
touchaient toutes les sociétés d'État, y inclus la SGF.
J'aimerais savoir si le ministre pourrait nous dire si la SGF sera en mesure de
déclarer des dividendes cette année ou si elle sera en mesure
d'en déclarer l'année prochaine. Je vous remercie.
Le Président: Est-ce que la motion du ministre sera
adoptée?
Des voix: Adopté. Le Président:
Adopté.
M. Lalonde: M. le Président, j'aurais une motion non
annoncée.
Le Président: M. le député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: Je suis convaincu que le parti ministériel va
offrir la même collaboration que celle que nous avons offerte à la
motion du ministre. "Que cette Assemblée nationale exprime sa vive
inquiétude devant la méthode profondément
dangereuse, même si d'apparence puérile et ridicule, avec laquelle
les députés et ministres péquistes ont, par écrit,
donné leur soumission au chef et à ses pensées."
Le Président: Est-ce qu'il y a consentement? Il y a
absence de consentement.
Une nouvelle motion non annoncée de la part du chef de
l'Opposition.
Demande de retrait d'une
ordonnance de la Commission
canadienne du blé
M. Claude Ryan
M. Ryan: M. le Président, je suis sûr que celle-ci
aura un meilleur sort. Le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de
l'Alimentation a fait état hier de la situation créée par
la décision de la Commission canadienne du blé d'exiger des
consommateurs québécois, en matière de grain, le prix
à l'exportation.
À la lumière de la situation que cette décision
crée pour les producteurs et pour l'agriculture du Québec, je
voudrais proposer à l'attention de cette Chambre la motion suivante: "La
décision de la Commission canadienne du blé de vendre aux
agriculteurs québécois le blé, l'avoine et l'orge
nécessaires à l'alimentation des troupeaux de ferme au prix de
l'exportation, et de mettre ainsi fin au régime d'équité
des prix établi en 1974 est hautement discriminatoire pour
l'économie agricole québécoise. En décrétant
qu'à compter du 21 décembre 1981 les grains de provende
destinés au Québec et produits dans l'Ouest seraient soumis
à cet embargo, la Commission canadienne du blé obligera des
éleveurs et des producteurs agricoles québécois à
payer de 20 $ à 30 $ la tonne de plus pour nourrir leurs animaux au
Québec que dans les provinces de l'Ouest. Les coûts accrus qui en
découleront pour l'agriculture québécoise menacent
d'entraver gravement son développement. "Vu l'urgence de la situation et
devant les conséquences désastreuses et inacceptables qu'aura
cette politique sur l'agriculture du Québec, l'Assemblée
nationale du Québec demande au gouvernement fédéral le
retrait immédiat de cette ordonnance de la Commission canadienne du
blé."
Le Président: Est-ce qu'il y a consentement à la
présentation de la motion?
Des voix: Consentement.
Le Président: Consentement. M. le ministre de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.
M. Ryan: Excusez, M. le Président...
Le Président: M. le chef de l'Opposition.
M. Ryan: S'il y a consentement, M. le ministre va me permettre
d'expliquer ma motion.
Le Président: D'accord. M. le chef de l'Opposition.
M. Ryan: Merci. Je serai très bref, M. le
Président, parce que j'ai présenté ma motion dans un
esprit constructif et en vue de servir les intérêts de
l'agriculture du Québec comme notre parti le fait toujours lorsqu'il y a
une cause claire et nette à défendre. (12 heures)
En vertu des nouveaux prix décrétés par la
Commission canadienne du blé, qui seront les prix de l'exportation, les
producteurs québécois devront payer pour l'orge 140 $ la tonne au
lieu de 110 $, c'est-à-dire une augmentation de 30 $ du coup; pour
l'avoine, 180 $ au lieu de 99 $ la tonne; pour le blé, 145 $ au lieu de
127 $ la tonne. Ceci annule le régime d'équité des prix
qui avait été établi en 1974 et qui donnait aux
producteurs agricoles du Québec l'accès aux grains de l'Ouest au
même prix que les producteurs de l'Ouest. Ce régime nous a permis
de développer au Québec certaines productions sans sol dans
lesquelles nous étions faibles jusque-là, en particulier, dans le
domaine du porc. Nous savons que le Québec a connu une progression
spectaculaire depuis une dizaine d'années; dans le domaine du poulet,
nous avons aussi connu des développements considérables.
Or, il arrive que, si les prix décrétés par la
Commission canadienne du blé allaient s'appliquer à compter du 21
décembre, il en résulterait pour les producteurs du Québec
une hausse de coûts qu'un journaliste du Soleil établissait
l'autre jour à 3000 $ par année en moyenne. Je ne peux pas
l'affirmer parce que nous n'avons pas eu le temps de faire tous les calculs
nécessaires à cette fin, mais on allait jusqu'à parler de
coûts qui pourraient s'élever à quelque 150 000 000 $ de
plus pour l'ensemble de l'agriculture québécoise.
Inutile de dire que notre agriculture québécoise
dépend, dans une très grande mesure, des grains en provenance de
l'Ouest pour les producteurs de porc, en particulier, et je ne veux pas ouvrir
aujourd'hui le débat sur la politique du gouvernement
québécois en cette matière parce que je veux que nous
adoptions cette motion pour les producteurs de porc qui sont déjà
dans une situation désastreuse. Cette nouvelle contrainte, qui
découlerait de la mise en oeuvre de la décision de la Commission
canadienne du blé,
risquerait d'être catastrophique.
En plus, je voudrais évoquer, pour terminer, l'attitude qui a
été prise par l'Association professionnelle des meuniers du
Québec, laquelle, dans une déclaration qui remonte au 10
décembre et qui a été adressée aux autorités
fédérales, déclarait ceci: "La décision de la
Commission canadienne du blé de vendre le blé, l'avoine et l'orge
aux agriculteurs du Québec au prix de l'exportation à compter du
21 décembre prochain est la plus discriminatoire jamais prise par un
organisme gouvernemental au détriment de l'économie agricole." Si
je ne la cite pas au complet, ce n'est pas parce que je veux en cacher des
passages, mais seulement parce que je veux épargner le temps de la
Chambre. "En éprouvant ce mépris d'équité à
l'encontre du programme de commercialisation des céréales
à l'intérieur du Canada, qui fut établi à la
satisfaction générale en 1974, le gouvernement
fédéral détruit ce qu'il avait construit et consacre de
nouveau une injustice qui avait duré plus de trente ans et ce, juste au
moment où on va procéder à la fermeture du canal
Saint-Laurent." Je cite toujours le document de l'Association des meuniers du
Québec: "Nous demandons le retrait immédiat et sans aucune autre
considération de ce décret de la Commission canadienne du
blé et la reconnaissance totale de la politique d'équité
établie en 1974."
Tel est aussi l'objet de la motion que je présente ce matin et
j'ose souhaiter que toute la Chambre se fera un plaisir d'y souscrire afin que
les autorités fédérales soient saisies dans les meilleurs
délais de la volonté des législateurs
québécois dans cette question qui intéresse au plus haut
point l'avenir de secteurs vitaux de notre agriculture.
Le Président: M. le ministre. M. Jean Garon
M. Garon: M. le Président, je n'ai pas eu le texte exact
de la motion du député d'Argenteuil et chef de l'Opposition
libérale - j'aurais aimé l'avoir - mais j'ai vu qu'il
n'était pas d'accord avec la décision de la Commission canadienne
du blé. Je pense que c'est ce à quoi il se référait
dans sa motion, mais je n'ai pas vu le texte. Je voulais, hier,
présenter une motion sur les terres de Mirabel demandant son
consentement et je lui avais fait parvenir le texte d'avance par
délicatesse; j'aurais aussi aimé avoir son texte à
l'avance.
Une voix: On peut peut-être suspendre quelques minutes, M.
le Président.
M. Garon: Non, non.
Une voix: II a le droit de réfléchir.
M. Garon: M. le Président, j'aimerais amender la
résolution, si on me le permet, pour faire d'une pierre deux coups.
Étant donné que la décision récente de la
Commission canadienne du blé vient enlever complètement
l'accès au marché libre de l'Ouest à partir de maintenant.
En mars 1979, on avait déjà commencé à entamer
l'équité qui avait été établie en 1974 et,
à ce moment, on avait restreint, par une décision de la
Commission canadienne du blé de mars 1979 qui s'était
appliquée à partir du 1er août 1979, on a commencé
à restreindre déjà l'accès au marché libre
de l'Ouest en pénalisant les agriculteurs de l'Ouest qui vendaient sur
le marché libre dans l'Ouest, en déduisant leur production sur le
marché libre du quota qu'ils avaient auprès de la Commission
canadienne du blé, de sorte que je pense, M. le Président, si on
veut vraiment rétablir l'équité totale, qu'il faudrait
revenir à la politique de 1974 plutôt qu'à celle qui
était en vigueur avant la récente décision de la
Commission canadienne du blé. À ce moment, dans la motion, on
pourrait dire que nous rejetons la décision récente de la
Commission canadienne du blé et également celle du mois de mars
1979 qui s'applique depuis le 1er août 1979, pour en venir à la
résolution de 1974.
Si le chef du Parti libéral y consent, je pense qu'à ce
moment nous rétablirions la situation exactement comme elle devrait
l'être, c'est-à-dire un total accès au marché libre
de l'Ouest à partir de 1974, un véritable marché commun
sans aucune barrière dans le Canada. À ce moment, je pense, M. le
Président, qu'on sera d'accord pour dire qu'il y aura
véritablement une libre circulation des biens du Canada. Je suis content
de voir que le député d'Argenteuil est allé par-dessus les
sarcasmes de son caucus d'hier qui me disait que je parlais du
fédéral, en voulant dire que c'était toujours la faute du
fédéral. Je suis content de voir aujourd'hui qu'il a passé
par-dessus l'humeur inutile de ses troupes pour vérifier auprès
des véritables agriculteurs - ce qu'auraient dû faire le
député de Beauce-Sud - les meuniers, l'Union des producteurs
agricoles, la Coopérative fédérée, pour constater
que ce que je disais était vrai.
Il faut que ce soit "véritablement vrai" ce que j'ai dit hier, M.
le Président, puisque aujourd'hui le député d'Argenteuil,
par sa motion, me donne raison en condamnant la politique
fédérale. J'aimerais dire aussi que, par ses paroles, il a un peu
condamné ce qu'a dit le député de Beauce-Sud, puisqu'il a
attribué l'augmentation de la production du porc au Québec
à la nouvelle politique de 1974, alors que le député de
Beauce-Sud disait hier: Le ministre de l'Agriculture a
commandé du porc, maintenant que la marchandise est
livrée, qu'il paie, alors que le député d'Argenteuil vient
de dire: Aujourd'hui, parce qu'il y eu a une équité dans la
circulation des grains en 1974 au Canada, cela a favorisé l'augmentation
de la production du porc. Je suis d'accord pour dire que ce n'est pas la seule
mesure. Mais c'est vrai, je pense, que cela a contribué à ce
qu'il y ait une augmentation de la production du porc au Québec.
Comme le gouvernement du Parti québécois est plus
rusé que ça, nous n'avons pas couru de risques, M. le
Président, et c'est pour ça que, dès 1978, le gouvernement
du Parti québécois a mis en place une politique d'autosuffisance
dans le domaine des céréales. Il est évident qu'on
n'arrivera pas à l'autosuffisance d'un coup sec, dans le domaine des
céréales, M. le Président, mais nous avons mis en place
des équipements considérables, 19 centres régionaux
d'entreposage des grains, plus de 8000 silos à la ferme pour
l'entreposage des grains pour augmenter notre production de grains au
Québec, au cas justement où les politiques
fédérales seraient modifiées, surtout la politique du
"crow's nest pass", la passe du nid du corbeau, que les gens de l'Ouest
demandent de changer depuis des années et on sent le gouvernement
fédéral flancher sur la politique du nid du corbeau.
Aujourd'hui, nous essayons de faire de plus en plus de grains au
Québec pour justement être beaucoup moins dépendant des
grains de l'Ouest, pour pouvoir produire ce qu'on anticipe d'ici 1990,
c'est-à-dire environ 75% des grains consommés au
Québec.
Je vais terminer là-dessus, M. le Président, et je
souhaite que le député d'Argenteuil accepte mon amendement pour
qu'on revienne avant 1974, pour qu'on condamne en même temps la politique
qui a été établie en mars 1979 pour s'appliquer au 1er
août 1979, pour qu'on en vienne véritablement à la
politique de l'équité de 1974. (12 h 10)
Par la même occasion, si le député d'Argenteuil
voulait que je présente la motion non annoncée dont je vous parle
depuis quelques jours pour appuyer les cultivateurs de Mirabel qui ont
été expropriés inutilement en 1968. À ce
moment-là je pourrais présenter ma proposition. On serait
d'accord, voyez-vous, M. le Président, au sujet des terres de Mirabel,
avec la ville de Mirabel, la fédération régionale des
Laurentides de l'Union des producteurs agricoles, l'Association des jeunes
agriculteurs de Deux-Montagnes et Argenteuil...
Le Président: M. le ministre, est-ce que la
présidence pourrait avoir une copie de votre amendement, s'il vous
plaît?
M. le chef de l'Opposition.
M. Ryan: M. le Président, pour sauver du temps à la
Chambre, je voudrais faire une proposition au ministre au sujet de son
amendement, qui nous permettrait peut-être de nous trouver d'accord et,
à ce moment-là, peut-être qu'on pourrait continuer la
discussion de fond. Si on ajoutait tout simplement ceci à la fin du
texte que j'ai présenté: L'Assemblée nationale du
Québec demande au gouvernement fédéral le retrait
immédiat de cette ordonnance de la Commission canadienne du blé
et le retour à la politique d'équité des prix
institué en 1974.
Le Président: Est-ce qu'il y a consentement à
l'amendement tel que stipulé par le chef de l'Opposition?
Des voix: Adopté.
Le Président: Alors, l'amendement est reçu. Il y a
consentement.
M. Mathieu: M. le Président.
Le Président: M. le député de
Beauce-Sud.
M. Mathieu: Oui, merci M. le Président.
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
Je comprends qu'il y a consentement que le chef de l'Opposition modifie
sa motion principale telle que stipulé il y a une minute. Maintenant, il
n'y a pas d'amendement, nous sommes sur une nouvelle motion principale.
M. le député de Beauce-Sud.
M. Hermann Mathieu
M. Mathieu: Merci, M. le Président, je vais intervenir
très brièvement, malgré que tout à l'heure le
ministre de l'Agriculture ait fait une certaine provocation quand il a
traité de mes propos d'hier.
Avant d'entrer sur le fond du débat, vous me permettrez sans
doute, M. le Président, de faire une rectification. C'est que l'on sait
tous que l'augmentation de la production d'une manière
injustifiée dans le domaine du porc existe depuis 1977. Il n'y avait pas
de surproduction avant cette année-là. Alors, hier, quand je
faisais référence à une surproduction, je voulais dire que
c'est à compter de 1977 que la situation est devenue
inquiétante.
Ces choses étant dites, M. le Président. Je désire
appuyer la motion du chef de l'Opposition et je désire également
féliciter le chef de l'Opposition qui est toujours là pour
prendre position quand il y a des problèmes dans le domaine
agricole.
Je voudrais mentionner qu'en réponse à une des mes
questions, le 10 décembre, page 1166 des Débats, le ministre de
l'Agriculture disait ceci: "Concernant la politique des grains de provende, le
gouvernement fédéral a refusé la position du
Québec". Plus loin: "Le gouvernement libéral, à Ottawa,
n'a pas voulu accéder aux demandes du monde agricole dans l'ensemble du
Québec. Aller répéter la même chose à une
conférence fédérale-provinciale..." M. le
Président, c'est justement quand je reprochais au ministre de
l'Agriculture sa non-participation aux conférences
fédérales-provinciales, à la dernière
conférence, celle de la semaine dernière, que le ministre a
dû jugé non importante. C'était juste pour aller chercher
des statistiques, il savait lire et, surtout, chose très importante, il
économisait un voyage à Ottawa... Mais à cette
conférence, M. le Président, le problème de la politique
céréalière du Québec a été
inséré à l'ordre du jour à la demande de
Terre-Neuve. Si le ministre de l'Agriculture du Québec avait
été présent à cette conférence, il aurait pu
faire part des revendications et des intérêts des producteurs
agricoles. Il aurait du même coup renforcé la position du ministre
fédéral de l'Agriculture, et ce dernier aurait eu un pouvoir de
négociation beaucoup plus fort auprès du président de la
Commission canadienne du blé. M. le Président, avez-vous
déjà vu un syndicat qui refuse de négocier pour obtenir
quelque chose?
Une voix: Non, jamais.
M. Mathieu: Quand on veut obtenir quelque chose, il faut
être présent et négocier; c'est cela qui est le grand
défaut du gouvernement actuel.
Ce que veux demander, en conclusion, c'est l'appui de tous à
cette motion. Surtout, j'insiste pour demander l'appui de tous les
députés fédéraux du Québec à Ottawa
sur cette motion, sans exception. C'est une question vitale pour l'agriculture
du Québec, on doit tout faire pour protéger nos agriculteurs.
Merci beaucoup.
Le Président: Est-ce que la motion du chef de l'Opposition
sera adoptée?
M. Houde: M. le Président, je n'ai pas fini.
Le Président: M. le député de Berthier,
excusez-moi.
M. Albert Houde
M. Houde: Merci, M. le Président. Je suis
complètement en désaccord avec la décision prise par la
Commission canadienne du blé au détriment des agriculteurs du
Québec.
Des voix: Adopté.
M. Houde: Pourquoi est-ce que vous êtes pressés tant
que ça, les amis d'en face, lorsqu'on parle d'agriculture...
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
À l'ordre, s'il vous plaît!
M. le député de Berthier, vous avez la parole.
M. Houde: Merci, M. le Président. Plusieurs des
députés d'en face ne connaissent rien à l'agriculture. Je
demanderais au ministre de l'Agriculture qu'il leur en dise un mot.
L'agriculture est importante au Québec. On sait que le ministre actuel
de l'Agriculture crie à grand renfort: II faut s'autosuffire, il faut
s'autosuffire. Écoutez-le donc de temps en temps. Laissez-le parler.
Cela va coûter quelque 1000 $ par agriculteur. On est conscient du
problème. Entre autres, dans le porc, c'est toujours désastreux
pour le Québec et, pour cela, ça va être catastrophique.
Dans cette Chambre et dans des questions avec débat, on entend notre
ministre de l'Agriculture crier que ça va bien. Je demanderais
plutôt que le même ministre parle lorsque c'est temps de parler et
soit présent aux rencontres fédérales-provinciales, pas
comme il nous a dit la semaine dernière: On ira quand on pensera que ce
sera utile d'y aller. Je regrette. Je dis que, lorsqu'il y a des consultations,
il faut toujours être présent, M. le ministre.
Une voix: C'est vrai.
M. Houde: En tant que député libéral
provincial de l'Opposition ici, à Québec, je suis capable de le
reconnaître quand le gouvernement fédéral fait une chose
qui n'est pas correcte aux dépens de nos agriculteurs du Québec.
Je n'accepte pas que le ministre de l'Agriculture du Québec - je
l'entendais au congrès de l'UPA, la semaine dernière, au
Château Frontenac - pendant presque une heure, ne dise jamais un mot du
fédéral, qu'il est bon. À la même occasion, le
ministre de l'Agriculture, M. Eugene Whelan, et M. Ouellet ont dit qu'il y
avait des choses correctes qui étaient faites par Québec dans
l'agriculture. Je lève mon chapeau, M. le ministre Garon, excusez, M. le
ministre de Lévis.
Nous demandons immédiatement que cette décision soit
retirée dans le plus bref délai afin qu'elle prenne... D'abord,
elle est censée entrer en vigueur le 21 décembre, que je sache,
c'est aujourd'hui le 17 décembre. Alors, M. le ministre,
déplacez-vous les pieds; allez-y en avion s'il le faut... (12 h 20)
Des voix: Bravo!
Une voix: C'est ça, Albert!
M. Houde: Pour le bien des agriculteurs, j'accepterai, M. le
ministre, que vous preniez l'avion, je ne dirai pas un mot. Pour nous, les
Québécois, je suis prêt à accepter la proposition
faite dans ce sens par mon chef, M. Claude Ryan. Merci beaucoup, M. le
Président.
Des voix: Bravo!
Le Président: Votre droit de réplique, M. le chef
de l'Opposition.
M. Claude Ryan (réplique)
M. Ryan: Je serai très bref, M. le Président. Je
veux d'abord rétablir un fait. Le ministre a insinué tantôt
que j'aurais agi en passant par-dessus la tête de mes collègues
qui forment le sous-comité de la mission agricole dans notre groupe
parlementaire. Je veux l'assurer que j'ai agi à la suggestion de
plusieurs d'entre eux, en particulier, du porte-parole principal, M. le
député de Beauce-Sud, et que nous l'avons rédigée
ensemble. M. le député de Beauce-Sud, dont le coeur est large
comme le monde, tous le reconnaîtront, dans cette Chambre, est
entièrement acquis à la défense des intérêts
des producteurs agricoles.
Je voudrais signaler seulement un petit fait. Je crois que I'excursus,
les propos du ministre sur Mirabel n'étaient pas pertinents, si j'ai
bien compris, et ne se rattachaient pas à la motion. Il y a seulement un
petit point qui se rattachait peut-être à la motion. Il a
parlé de la construction de silos, ces dernières années,
au Québec. II aurait pu ajouter - mais c'est peut-être le temps
qui lui a fait défaut, il voulait nous épargner du temps - que ce
programme de construction de silos a été possible grâce
à des subventions fédérales importantes.
Je voudrais lui rappeler aussi que dans la région de Mirabel,
à cause de décisions pas mal autoritaires de sa part, les
agriculteurs de cette région n'ont pas eu accès à ces
subventions parce que tout est gelé depuis un an et demi ou deux. C'est
absolument vrai, ils m'en ont parlé eux-mêmes.
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! Je
voudrais inviter le chef de l'Opposition, puisque j'ai fait de même
envers le ministre, à ne pas parler de la motion sur Mirabel, parce
qu'elle n'a pas été présentée.
M. le chef de l'Opposition.
M. Garon: Question de privilège, M. le
Président.
Le Président: M. le ministre, sur une question de
privilège.
M. Garon: Ce que le député d'Argenteuil dit est
faux puisque les programmes ont été remis en application cet
été. Non seulement ça, mais les subventions qui n'avaient
pas été payées dans l'intervalle où ils
n'étaient pas en application ont été remboursées
aux agriculteurs. De sorte qu'aucun agriculteur...
Le Président: M. le chef de l'Opposition.
M. Ryan: Je veux simplement signaler que, pendant un an et demi,
ils ont été privés de ces subventions et beaucoup n'ont
pas fait les constructions qu'ils auraient faites à cause de cela.
Juste pour terminer, je veux me réjouir parce je pense que, ce
matin, nous faisons une constatation formidable en Chambre. Pour la
première fois de sa vie, le ministre de l'Agriculture convient qu'il y a
au moins une politique fédérale qui était bonne, celle de
1974 sur le prix des grains. J'espère qu'il en découvrira
d'autres au cours des prochaines années. Je suis bien content du prix
qu'il nous mentionne.
Le Président: Est-ce que la motion du chef de l'Opposition
sera adoptée?
Des voix: Adopté. Le Président:
Adopté.
M. Charron: Est-ce qu'on demande le vote...
Le Président: Excusez-moi, je l'ai déclarée
adoptée avant que la demande du député de Portneuf me soit
adressée. Je comprends que le député de Beauce-Sud a une
motion non annoncée à présenter. Si on veut un vote
enregistré, on pourra l'avoir sur la prochaine motion. À moins
qu'il n'y ait un consentement unanime pour que le mot "adopté", que j'ai
bel et bien dit...
Des voix: Adopté.
Le Président: Adopté?
M. le député de Beauce-Sud.
M. Mathieu: Merci, M. le Président. Avant de savoir s'il y
a consentement ou non, il me semble qu'il faut connaître la teneur de la
motion. La motion concerne la politique laitière du gouvernement
fédéral et est très importante pour l'agriculture au
Québec.
Le Président: M. le député de Beauce-Sud, je
vous demanderais de faire état, en premier lieu, de votre motion et par
la
suite, s'il y a consentement, en vertu du règlement, vous pourrez
parler sur la motion.
M. Mathieu: Pendant l'exercice 1980-1981 - je lis la motion - le
gouvernement du Canada, par l'entremise de la Commission canadienne du
lait...
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! Je
prends la parole du député de Beauce-Sud et je tiens pour acquis
que ce qu'il va lire constitue le texte de sa motion. M. le
député de Beauce-Sud.
M. Mathieu: M. le Président, j'ai quatre attendus et une
conclusion. Il me semble que les attendus font partie de la motion. "Attendu
qu'en l'exercice financier 1980-1981, le gouvernement du Canada, par
l'entremise de la Commission canadienne du lait, a versé 293 100 000 $
pour le soutien des prix des produits laitiers, dont 131 500 000 $ aux
producteurs laitiers du Québec; attendu que cette politique est
indispensable au maintien et au développement de l'industrie
laitière, particulièrement au Québec, selon des
informations récentes, le gouvernement du Canada songerait à
réduire de 25 000 000 $ ses subsides, dont près de la
moitié au Québec... cette perspective sème
l'inquiétude et la consternation parmi les producteurs. C'est pourquoi
cette Assemblée nationale demande au gouvernement fédéral
de maintenir pour 1981-1982 et pour les années à venir les
mêmes barèmes de subsides à l'industrie laitière que
ceux qui ont été appliqués en 1980-1981. Toute diminution
risquerait de mettre en péril le développement de l'industrie
laitière au Québec."
Une voix: C'est cela.
Le Président: Est-ce qu'il y a consentement à la
motion?
M. Charron: Non, M. le Président. Des voix: Ah!
M. Charron: Je voudrais soulever une question de
règlement.
Le Président: Sur une question de règlement, M. le
leader du gouvernement.
M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, je vous
demanderais, à ce moment-ci... C'est une question de
règlement...
Le Président: Je viens de remarquer, tout d'abord, qu'il
n'y a pas consentement à la motion...
Des voix: Ah!
Le Président: ... et que le leader du gouvernement me
demande la parole sur une question de règlement.
Une voix: II ne peut y en avoir deux en même temps.
M. Levesque (Bonaventure): Demande de directive, M. le
Président.
Le Président: Oui.
Une voix: II ne peut y en avoir deux en même temps.
M. Charron: Tout de suite après...
M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, je veux
simplement vous demander...
M. Charron: M. le Président, j'ai soulevé une
question de règlement.
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
M. Grégoire: ... la directive après.
Le Président: M. le député de Frontenac,
s'il vous plaît, auriez-vous l'obligeance de reprendre votre fauteuil.
À l'ordre, s'il vous plaît! Est-ce que la demande de directive ne
pourrait pas avoir lieu après la question de règlement?
Des voix: Non...
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
M. Charron: Question de privilège.
Le Président: M. le leader, question de
privilège.
M. Charron: Je veux d'abord assurer à l'Assemblée
que la question de règlement que je vous ai annoncée, M. le
Président, n'est aucunement une façon d'exprimer la raison du
refus de consentement au dépôt de la motion du
député de Beauce-Sud. Il s'agit d'une tout autre affaire. J'avais
senti que c'était cela la demande de directive.
M. le Président, la question de règlement que je
soulève est la suivante. Sur les motions non annoncées comme
celle-ci, je ne sais pas si vous vous en rendez compte et si toute
l'Assemblée s'en rend compte, mais un précédent vient
d'être créé ce matin. Habituellement, on n'a jamais
laissé une motion être lue intégralement, comme cela a
été le cas pour le député de Beauce-Sud, pour,
ensuite, demander s'il y a consentement ou s'il n'y a pas consentement.
Autrement, M. le Président, si ceci devient
une pratique - c'est la question de règlement que je
soulève - là, le député de Lévis et ministre
de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, qui a d'ailleurs
dit clairement tout à l'heure qu'il en avait une qu'il était sur
le point de présenter, sur Mirabel, il faudrait aussi lui laisser livrer
toute sa motion.
Or, M. le Président, ce n'est pas la tradition en cette
Assemblée. Ce que je souhaiterais, c'est qu'on s'en tienne à la
tradition. Nous avons habituellement procédé de la façon
suivante: un député se lève et dit, comme je l'ai fait,
par exemple, sur la situation polonaise cette semaine: "M. le Président,
j'ai l'intention de proposer une motion concernant la situation en Pologne";
à partir de cette base, et de cette base seulement, on doit attendre
qu'on me dise s'il y a consentement à ce que le sujet soit
évoqué ou non. Par la suite, s'il y a consentement, je
présente ma motion. Le député de Beauce-Sud a d'ailleurs
été dans la tradition du règlement. Il s'est levé
et il a dit: J'ai l'intention de proposer une motion concernant la politique
laitière. C'est à ce moment-là qu'on regarde s'il y a
consentement ou s'il n'y a pas consentement. S'il y a consentement, il peut
lire les attendus et les considérants. Il peut même faire le
discours de 20 minutes auquel il a droit. Mais je crois, M. le
Président, que nous avons commis un impair dangereux ce matin. Je n'en
veux à personne. Le député a reçu un refus de
consentement. Nous sommes donc prêts à procéder à
autre chose. Mais je voudrais qu'il soit bien établi qu'on n'a pas
brisé la tradition. Il s'est agi d'un impair, et la tradition, c'est
plutôt de solliciter le consentement sur le sujet avant même que
l'on présente la motion.
M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, sur la
question de règlement.
M. Charron: Autrement, ce serait le capharnaüm. (12 h
30)
Le Président: M. le leader de l'Opposition, sur la
question de règlement.
M. Levesque (Bonaventure): Je diffère, et c'est mon droit,
M. le Président, de l'opinion de mon collègue d'en face. Quel
consentement pourrions-nous donner, M. le Président, sans avoir
été pleinement éclairés sur le sens de la
motion?
Lorsqu'on parle de la politique laitière, c'est trop vaste pour
que nous soyons en mesure de savoir si nous donnons notre consentement ou non.
Je pense qu'au moins la substance de la motion doit être connue. Si on
n'est pas au courant de l'objectif poursuivi, de la conclusion à
laquelle on veut en arriver, comment voulez-vous que nous donnions notre
consentement ou non? Voilà!
M. Mathieu: M. le Président, sur une demande de
directive.
Le Président: Sur une demande de directive, M. le
député de Beauce-Sud.
M. Mathieu: Dois-je comprendre que cette motion, si vitale pour
la classe agricole, est refusée?
Une voix: Ce n'est pas une demande de directive.
Le Président: S'il vous plaît! S'il vous
plaît! La question de règlement soulevée par le leader du
gouvernement est fort pertinente, comme son argumentation d'ailleurs, et les
arguments du leader de l'Opposition sont pertinents également, comme
d'habitude. La présidence va prendre le tout en
délibéré, va vérifier auprès des autres
Législatures du Canada à savoir comment se présentent les
motions non annoncées. Mais je voudrais faire remarquer que l'impair de
ce matin n'est pas venu avec la motion du député de Beauce-Sud,
mais avec celle du chef de l'Opposition qui comprenait plusieurs lignes. Je me
suis moi-même posé la question intérieurement, à
savoir si la motion ne commençait pas aux mots "vu l'urgence" ou aux
mots "la décision", ceci étant, pour la présidence, un
préambule.
Il n'y a pas deux députés qui aient la même
façon de présenter une motion non annoncée. La suggestion
du leader du gouvernement est très valable, celle du leader de
l'Opposition est également valable. En conséquence, je ne
porterai pas jugement ce matin, mais je dirai au moins ceci. Ce qui s'est
passé ce matin ne doit pas constituer et ne constitue pas un
précédent et je me réserve une décision que je
rendrai à l'Assemblée en temps et lieu.
M. Lalonde: M. le Président, une question de
directive.
Le Président: M. le député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: Pourriez-vous donner la motion que j'ai faite en
exemple? Il n'y avait pas de préambule, j'ai parlé de
l'à-plat-ventrisme des députés.
Le Président: Enregistrement des noms sur les votes en
suspens.
M. Charron: M. le Président... Le Président:
Qu'on appelle les députés. (Suspension de la séance
à 12 h 33)
(Reprise de la séance à 12 h 40)
Le Vice-Président (M. Jolivet): À l'ordre! Veuillez
prendre vos sièges, s'il vous plaît! À l'ordre!
J'aimerais faire connaître le texte de la motion qui doit
être mise aux voix. Mise aux voix de la motion suivante de M. Parizeau
proposant que l'Assemblée approuve le complément aux politiques
budgétaires du gouvernement pour 1981-1982 et de la motion de censure
suivante, de M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): "Que cette Assemblée
blâme sévèrement le gouvernement du Parti
québécois qui, par sa gestion désastreuse des finances
publiques, continue d'affaiblir le Québec et rend sa situation
financière très vulnérable et qui, de plus, impose en
cours d'exercice financier des augmentations de taxes qui alourdissent
dangereusement le fardeau des impôts des contribuables
québécois, déjà les plus taxés au
Canada."
Mise aux voix de la motion de censure à
l'encontre des politiques budgétaires
du
gouvernement et de la motion approuvant
le complément à ces politiques
La première motion à être mise aux voix est la
motion de blâme. Que ceux et celles qui sont pour cette motion veuillent
bien se lever, s'il vous plaît!
Le Secrétaire adjoint: MM. Ryan, Levesque (Bonaventure),
O'Gallagher, Ciaccia, Mme Lavoie-Roux, MM. Lalonde, Mailloux, Vaillancourt
(Orford), Mme Bacon, MM. Marx, Bélanger, Bourbeau, Blank, Garon,
Mathieu, Assad, Vallières, Lincoln, Paradis, Scowen, Pagé,
Gratton, Rivest, Fortier, Rocheleau, Polak, Cusano, Dubois, Sirros, Saintonge,
Johnson (Vaudreuil-Soulanges), French, Mme Dougherty, MM. Kehoe, Houde,
Middlemiss, Hains.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Que ceux et celles qui
sont contre veuillent bien se lever, s'il vous plaît!
Le Secrétaire adjoint: MM. Charron, Mme Marois, MM.
Bédard, Parizeau, Laurin, Bérubé, Landry, Gendron, Mme
LeBlanc-Bantey, MM. Lessard, Biron, Godin, Léger, Clair, Johnson
(Anjou), Chevrette, Bertrand, Duhaime, Garon, Tardif, Léonard,
Fréchette, Baril (Arthabaska), Ouellette, Proulx, Mme Lachapelle, MM.
Vaugeois, Paquette, Gagnon, Guay, Dussault, de Belleval, Martel, Mme Juneau,
MM. Fallu, Grégoire, Bordeleau, Leduc, Marquis, Charbonneau, Lavigne,
Boucher, Beauséjour, Lévesque (Kamouraska-Témiscouata),
Desbiens, Perron, Blais, Blouin, Gauthier, Gravel, Laplante, Brassard,
Brouillet, Rochefort, Baril (Rouyn-Noranda-Témiscamingue), LeMay,
Champagne, Rodrigue, Payne, Paré, Tremblay, LeBlanc, Lafrenière,
Beaumier, Lachance, Dupré.
Le Secrétaire: Pour: 37 Contre: 66
Le Vice-Président (M. Jolivet): Motion rejetée.
Sur la motion principale, M. le leader.
M. Charron: Puis-je proposer le même vote inversé,
M. le Président?
Le Vice-Président (M. Jolivet): Est-ce que cette motion
est adoptée? Adopté. Nous sommes rendus aux avis à la
Chambre.
M. Charron: Non, M. le Président. Je voudrais indiquer
à l'Assemblée que lorsque la commission plénière
qui a étudié le budget supplémentaire que nous venons
d'adopter s'est ajournée, à la fin de sa séance du 10
décembre dernier, elle l'a fait sur un avis -j'ai le papier devant moi
ici - qu'elle n'avait pas fini de délibérer et demandait la
permission de siéger à nouveau puisqu'il restait peut-être
une quarantaine de minutes sur les huit heures possibles utilisables. Je
voudrais proposer que cette Assemblée considère le rapport de la
commission plénière comme désormais complet et celle-ci
comme ayant terminé ses travaux.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Cette motion est-elle
adoptée? Adopté.
Projet de loi no 21
M. Charron: Ce qui m'amène à proposer, en vertu de
l'article 131, M. le Président, que le ministre des Finances puisse
déposer le projet de loi no 21 qui, selon l'article 131, peut être
présenté à ce moment-ci et les trois lectures
adoptées sans débat ni amendement.
Première, deuxième et troisième
lectures
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre des
Finances propose l'étude du projet de loi no 21 en première,
deuxième et troisième lectures. Est-ce que cette motion est
adoptée? Adopté. Aux avis à la Chambre... Sur
division.
Recours à l'article 34
En vertu de l'article 34, M. le député de Verdun.
M. Caron: M. le Président, la semaine dernière, je
demandais au leader du gouvernement si le gouvernement déposerait le
projet de loi dont le but est d'apporter certains amendements au projet de loi
de la Communauté urbaine de Montréal. Est-ce que le Conseil des
ministres a pris une décision?
M. Charron: M. le Président, il semble tout à fait
probable qu'effectivement un projet de loi modifiant la loi de la
Communauté urbaine soit déposé au cours d'une des deux
séances qu'il reste à cette session avant son ajournement.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: En vertu de l'article 34, est-ce que le ministre des
Communications ou le leader, pourrait nous dire s'il a l'intention ou quand il
a l'intention de déposer le fameux projet de loi sur l'information
gouvernementale et la protection de la vie privée?
M. Charron: Au printemps, M. le Président.
M. Lalonde: Au printemps. M. Charron: Au printemps.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de D'Arcy McGee, en vertu de l'article 34.
M. Marx: Oui, c'est en vertu de l'article 34. Pour ce qui
concerne le projet de loi no 200, vous avez dit qu'il serait
déposé en deuxième lecture; est-ce qu'il va y avoir une
commission parlementaire?
M. Charron: Sur quoi?
M. Marx: Sur la Communauté urbaine de Montréal.
M. Charron: Oui, bien sûr. En le déposant je vais le
déférer à la commission parlementaire.
M. Marx: Est-ce qu'il serait possible aussi d'entendre des
témoins comme la cité de Côte-Saint-Luc?
M. Charron: Bien sûr. C'est exactement pour ça
qu'elle sera déférée à la commission
parlementaire.
M. Marx: Est-ce qu'ils ont déjà eu un avis?
M. Charron: Ne mettons pas la charrue devant les boeufs.
Commençons par déposer le projet de loi, on verra
après.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Les avis à la
Chambre, M. le leader.
Avis à la Chambre
M. Charron: Vous avez sans doute remarqué, M. le
Président, que la matinée est complètement
"flaillée". Cela m'oblige à modifier un peu le menu du jour et de
la nuit, forcément. M. le Président, je voudrais indiquer ceci
quant aux travaux de l'Assemblée. Lorsque nous reprendrons, à 15
heures, nous reprendrons avec les projets de loi au nom du ministre de la
Justice, ce qui veut dire, - il faut dire, M. le Président, pour
expliquer la surprise et l'angoisse qui assaille mon collègue
actuellement que je lui avais dit 16 heures. À 15 heures, les trois lois
au nom du ministre de la Justice; par la suite, la loi au nom du ministre de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation et un certain nombre de
prises en considération de rapports qui sont déjà au
feuilleton à cette étape. Finalement, la prise en
considération du rapport sur la loi 16 complétera le menu de la
journée.
Je fais motion, M. le Président, pour que pendant que la Chambre
s'adonnera à ses travaux, de 15 heures à 18 heures et de 20
heures à 24 heures, les commissions des affaires sociales, à la
salle 81A, sur la loi 27, et... Est-ce que vous acceptez 14 h 30?
Une voix: Oui.
M. Charron: Très bien. Je remercie Mme la
députée de L'Acadie. Donc, celle des affaires sociales commencera
à 14 h 30 au salon rouge, alors, parce que la salle 81 sera
peut-être occupée par une autre réunion. De 14 h 30
à 18 heures et de 20 heures à 24 heures, ce sont les affaires
sociales sur la loi 27 et, à la salle 81, de 15 heures à 18
heures et de 20 heures à 24 heures, la commission des institutions
financières poursuivra l'étude des trois projets de loi qui lui
ont été déjà déférés.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Cette mention est
adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader. (12 h
50)
M. Charron: Je crois qu'il est de mon devoir, à ce
moment-ci des travaux de la session, M. le Président, de rappeler -
c'est Mme la députée de L'Acadie qui vient presque de me donner
l'occasion de le faire par la collaboration qu'elle vient d'offrir -aux membres
de ces commissions parlementaires qu'il leur est toujours permis, à eux,
de décider sur place avec le consentement de tous et chacun de
poursuivre au-delà de 24 heures, s'ils veulent achever un projet de loi
qui est déjà en cours. Si je le dis, M. le Président, je
ne le fais pas à travers mon chapeau. Premièrement, c'est parce
que cette collaboration s'est déjà produite dans le passé
et que, deuxièmement - oui, la
semaine dernière, et cela s'est produit cette semaine à la
commission des affaires municipales - je veux simplement le rappeler pour les
collègues qui seront là. Je le fais avec une intention bien
précise à l'égard des collègues des institutions
financières également. Les collègues membres de la
commission des institutions financières, la semaine dernière,
avaient reçu un mandat de l'Assemblée, d'entendre des
représentations entre 15 heures et 18 heures et de débuter
l'étude article par article du projet de loi sur les caisses d'entraide
économique à 20 heures vendredi dernier. La commission, sur
place, a choisi de prendre une plus grande période de temps de
consultation - je ne lui en fait pas grief; les membres étaient la pour
juger du bien-fondé de cette décision -et par la suite
d'ajourner, plutôt qu'à minuit, à 23 heures vendredi soir,
sans entreprendre l'étude article par article, c'est-à-dire,
dirais-je en non-conformité avec le mandat qui lui avait
été confié par l'Assemblée. J'imagine, la
transcription est là pour le dire, que cette décision s'est prise
sur place avec une promesse de collaboration lors d'une prochaine
séance. C'est simplement à cela que je fais allusion aujourd'hui,
en disant à nos collègues qui ont bien travaillé hier
à cette commission parlementaire - le fait qu'on ait perdu la
séance de ce matin, nous n'en sommes pas responsables, les
événements sont là, ils en sont victimes comme nous tous -
que cette collaboration est désormais, à cette commission en
particulier, très sérieusement espérée et
attendue.
M. le Président, je propose de suspendre nos travaux
jusqu'à 15 heures.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Cette motion est-elle
adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté. Suspension
de nos travaux jusqu'à 15 heures.
(Suspension de la séance à 12 h 52)
(Reprise de la séance à 15 h 13)
Le Président: Veuillez vous asseoir. M. le
député de Portneuf.
Question de privilège
Retransmission des délibérations du
caucus du Parti québécois
M. Michel Pagé
M. Pagé: Merci, M. le Président, le leader me le
permettra. Je voudrais très brièvement, comme whip en chef de
l'Opposition, au nom de mes collègues, soulever une question de
privilège qui vous est adressée, M. le Président. J'ai
tous les motifs de croire que des faits inquiétants se sont produits
ici, à l'Assemblée nationale du Québec, sur l'heure du
midi. Selon les informations que je possède, la réunion du caucus
du parti ministériel, qui s'est réuni en privé et à
huis clos, comme c'est normal et tout indiqué, aurait été
l'objet d'une retransmission des propos qui s'y sont tenus.
Notre formation politique, comme celle du parti ministériel, se
réunit - notre formation tout au moins, je le peux confirmer - tous les
matins, les 41 députés libéraux, dans les salles de
l'Assemblée nationale du Québec, plus particulièrement
dans les salles 81-A et 91-A. Nous tenons généralement nos caucus
hebdomadaires dans une de ces deux salles qui sont mises à notre
disposition par le président de l'Assemblée nationale. Je
voudrais vous dire que c'est très grave; s'il faut que les
réunions des partis politiques puissent être l'objet de
retransmission, cela n'a pas de bon sens, c'est tout à fait
inacceptable. À ce moment-ci, la question est suffisamment importante
pour que je vous demande, comme président de l'Assemblée
nationale du Québec, de, premièrement, faire enquête sur le
pourquoi de la retransmission du caucus dans mon bureau. Pour le
bénéfice de ceux qui nous écoutent, les
députés ont dans leur bureau ce qu'on appelle, dans le jargon
parlementaire, un perroquet qui leur retransmet les propos de
l'Assemblée nationale et des commissions. Alors, on m'a indiqué,
dès le moment où je suis arrivé à mon bureau cet
après-midi, vers 14 h 55, que le caucus des députés du
Parti québécois était retransmis en direct sur le
perroquet qui est dans mon bureau. C'est inquiétant, cela n'a pas de bon
sens.
M. le Président, je vous demande, premièrement, si vous
voulez faire enquête. Le soutient de mon propos, c'est que nous avons des
caucus journaliers et on ne peut accepter que de tels événements
se produisent. Premièrement, l'enquête et, deuxièmement,
j'apprécierais que vous nous informiez des garanties que vous pouvez
donner comme président de l'Assemblée nationale pour que de tels
faits ne puissent se reproduire. M. le Président, je me permettrai
d'ajouter, si vous me le permettez, qu'un député était
à mon bureau à ce moment-là, le député de
Brome-Missisquoi; il voudrait ajouter un mot.
M. Pierre-J. Paradis
M. Paradis: M. le Président, avec votre permission, sur la
même question de privilège, étant donné le
sérieux de la question de privilège du député de
Portneuf, j'étais au bureau du whip à l'heure du dîner
et j'ai entendu, par le biais du perroquet, les
délibérations du caucus du Parti québécois.
Fort conscient de l'importance de conserver une preuve dans ce domaine,
j'ai enregistré ledit caucus, et j'ai ici la bobine. Pour vous
démontrer qu'il ne s'agit pas d'une cassette de musique, je peux vous la
faire jouer seulement trente secondes, et je vous la remettrai sans en avoir
fait de copie.
Le Président: J'ai déjà l'enregistrement, M.
le député de Brome-Missisquoi.
M. Charron: M. le Président, sur une question de
privilège.
Le Président: M. le leader du gouvernement.
M. Claude Charron
M. Charron: Étant membre du caucus visé, vous
permettrez sûrement que j'aie le droit, au nom de mes collègues,
d'ajouter aussi le fait que rien ne nous permet, à la suite de cet
incident, de faire état d'un complot ou d'un scandale quelconque. Je
signale tout de suite, d'ailleurs, que quand on voudra protéger notre
intégrité on trouvera n'importe quel avocat, sauf le
député de Portneuf. De notre côté, nous avons
plutôt envisagé cette situation comme un incident regrettable,
sans aucun doute, parce que ce genre de réunion politique a droit
à une confidentialité, somme toute, assurée.
Sur cet incident, j'aimerais obtenir un éclaircissement de votre
part, mais soyez sûr que si je fais cette demande, c'est dans le respect
qu'on vous doit et dans le respect qu'on veut vous assurer. Nous sommes
assurés que vous aurez toute la vigilance voulue pour que ça ne
se reproduise plus.
M. Gérard D. Levesque
M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, on me
permettra, comme leader parlementaire de l'Opposition, de vous dire quel fut
mon étonnement lorsque j'ai entendu les deux députés de
notre formation politique; même le leader parlementaire du gouvernement
semble confirmer tout cela. Un caucus d'une des deux formations politiques
pourrait ainsi être retransmis directement. À ce moment-là,
il n'y a plus de caucus possible. Un caucus, c'est justement la réunion
des députés d'une formation politique, c'est soumis aux
règles, d'abord, de la confidentialité. Aucun caucus ne pourrait
exister. C'est l'existence même de ces caucus qui est mise en cause par
cette révélation. Je comprends que c'est le caucus
ministériel qui en est la victime, mais à ce moment-ci, M. le
Président, cela veut dire que l'une ou l'autre des formations politiques
serait dans une situation impossible si de tels faits se
répétaient. Dieu sait maintenant si nous ne pouvons pas avoir un
doute, puisque cela s'est déjà produit.
M. le Président, je crois que la situation est suffisamment
grave. Je n'ai pas de raison de croire que cela ne s'est pas produit, vu que
tout le monde semble s'entendre pour dire que cela s'est produit. Si cela s'est
produit, M. le Président, je vous demande, avec toute la
solennité que je puis y mettre, de grâce, de trouver un moyen pour
protéger ce qui est essentiel dans notre vie parlementaire,
c'est-à-dire la réunion des membres d'une formation politique
sous le sceau de la confidentialité. Autrement, M. le Président,
toutes nos institutions, toutes nos traditions en prendraient pour leur
rhume.
Le Président: M. le whip en chef du gouvernement. (15 h
20)
M. Guy Chevrette
M. Chevrette: M. le Président, j'ai effectivement fait
deux démarches, y compris auprès des responsables de
l'appareillage électronique en bas. Au moment où je suis
entré avec les techniciens, on s'est permis de baisser
délicatement un bouton. De plus, la console était bel et bien
ouverte à la salle 81.
Je vous demande aussi, dans le même sens que le leader de
l'Opposition, de voir à respecter... On discute des politiques de
l'État et on a le droit, comme formation politique - c'est notre droit
le plus sacré - à la confidentialité, que ce soit la
formation libérale ou la formation du Parti québécois. Je
pense que c'est votre rôle comme Président de l'Assemblée
nationale de faire la lumière immédiatement sur ce fait, d'abord,
et de voir à nous assurer, pour l'avenir, l'entière
confidentialité de nos débats.
Remarques du président
Le Président: Mes chers collègues, j'ai
été informé de ce fait à 14 h 57 cet
après-midi. Déjà, au moment où on se parle,
l'enquête est en cours. J'ai un rendez-vous de prévu dans quelques
minutes avec la personne qui aurait commis l'erreur humaine dont il est
question. Mais je ne voudrais surtout pas, tout en me disant d'accord avec les
propos des députés qui sont intervenus sur la
confidentialité absolument essentielle des caucus, que cet incident,
dont tous les indices que j'ai en ma possession me permettent de croire qu'il
est isolé, que c'est une erreur humaine, on fasse quelque chose qui
ressemblerait à un complot. Donc, je m'engage...
Une voix: ...
Le Président: S'il vous plaît! Je m'engage donc
à continuer l'enquête qui est actuellement entreprise depuis 15
heures exactement. Je vais rencontrer la personne concernée et...
M. Chevrette: Question de privilège.
Le Président: S'il vous plaît, quand j'aurai
fini.
L'enquête est commencée. Je m'engage, dans les plus brefs
délais et si possible aujourd'hui avant 18 heures, à vous donner,
de façon détaillée, les raisons qui ont amené cette
écoute d'une partie ou de la totalité -je l'ignore - du caucus du
Parti québécois. Je puis assurer les membres des deux formations
politiques que c'est la première fois à ma connaissance que cette
chose arrive, si elle est arrivée, et je pense qu'elle est
arrivée effectivement puisque j'ai une bobine en ma possession que je
vais écouter tout à l'heure. Je voudrais vous assurer d'une
chose, dont vous êtes sûrs d'ailleurs, au moment où je vous
parle, toutes les mesures seront prises afin que de pareilles choses, si elles
sont arrivées, ne se reproduisent plus. Mais je ne voudrais surtout pas
qu'on fasse d'une erreur qui est possiblement une erreur humaine et
involontaire... Une commission parlementaire était convoquée au
salon rouge pour 14 h 30 et il semblerait de prime abord que la convocation de
cette commission pour 14 h 30 ait pu jouer un rôle extrêmement
important dans cette histoire.
De toute façon, d'ici à 18 heures vous aurez tous les
détails.
M. Chevrette: Une dernière question de privilège,
M. le Président. Si j'ai bien compris, on vous a remis une cassette
enregistrée par une formation politique. J'aimerais savoir une chose au
niveau de votre enquête. Est-ce qu'il y a eu enregistrement ou s'il y a
eu uniquement erreur technique de diffusion? Il y a deux dimensions possibles
dans cela. S'il y a eu effectivement cassettes et, donc, retranscription, je
vous demanderais d'y voir dans les meilleurs délais.
Le Président: Effectivement, M. le député de
Joliette-Montcalm, vous venez de soulever une question très pertinente.
Le moins que je puisse faire aujourd'hui, c'est de demander à tous les
parlementaires, non pas d'oublier ce qu'ils ont entendu, parce que à
l'impossible nul n'est tenu, mais ce que je veux demander à l'ensemble
des parlementaires et des fonctionnaires qui peuvent m'écouter au moment
où l'on se parle, c'est de venir remettre sans retranscription aucune
dans les meilleurs délais, c'est-à-dire cet après-midi
même, au bureau du président, toutes les cassettes qui ont pu
être enregistrées.
M. Charron: M. le Président, j'ai un scandale.
Le Président: M. le leader du gouvernement.
M. Charron: Je me suis fait voler mon feuilleton.
Le Président: M. le leader du gouvernement, puisque j'ai
le plaisir d'avoir les deux leaders avec moi en cette Chambre cet
après-midi, puis-je vous demander vers quelle heure vous seriez
disponibles pour assister à une conférence des leaders, comme
c'est prévu à l'article 123 de notre règlement, puisque la
présidence a remarqué qu'aujourd'hui, au feuilleton, paraît
la prise en considération du rapport de la commission parlementaire sur
la loi 16; en conséquence, j'aimerais rencontrer les leaders. Puisque
j'ai aussi une enquête à faire, il faudrait donc s'entendre
ensemble sur une rencontre.
M. Charron: M. le Président, vous me connaissez, il suffit
que vous exprimiez le désir de me rencontrer pour que j'annule tout ce
que j'avais de réservé auparavant. Je suis disponible à
l'instant, si mon collègue l'est également.
Le Président: M. le leader de l'Opposition.
M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, je suis libre,
de la même façon que vient de l'indiquer mon "ami" d'en face,
entre guillemets et avec toutes les réserves que ce terme implique.
Cependant, je dois intervenir sur le projet de loi no 36 relativement à
la qualité du poisson. En dehors de cet engagement auquel je peux
difficilement me soustraire, je suis entièrement à votre
disposition.
Le Président: Je comprends donc qu'après
l'intervention du leader de l'Opposition...
M. Charron: Ou avant, M. le Président...
Le Président: Ou avant.
M. Charron: ... parce que j'allais vous demander d'appeler
d'abord le projet de loi no 34, ce qui nous libérera pendant quelques
instants. Je vous prierais d'appeler l'article 6 du feuilleton d'aujourd'hui,
s'il vous plaît.
Projet de loi no 34 Deuxième lecture
Le Président: J'appelle donc la deuxième lecture du
projet de loi no 34, Loi
modifiant la Loi sur la représentation électorale.
M. le ministre de la Justice.
M Marc-André Bédard
M. Bédard: M. le Président, le projet de loi no 34,
modifiant la Loi sur la représentation électorale, constitue une
conséquence directe des intentions qui ont été
exprimées dans le dernier discours inaugural concernant le mode de
scrutin.
Comme l'indiquait le discours inaugural, nous avons bon espoir, avant la
fin de la session, de pouvoir proposer cette étape dont on a tant
parlé, celle d'un nouveau mode de scrutin. Il est évident que le
découpage de la carte électorale découle directement du
mode de scrutin qu'on utilise; donc, modifier le système
électoral, c'est également ouvrir la porte à un
découpage dont on n'a pas encore défini l'encadrement.
Selon la loi 10, la Commission de la représentation
électorale a jusqu'au 13 avril 1982 pour produire un projet de nouvelle
carte pour consultation publique, comme on le sait. Depuis la fabrication de la
carte actuelle, il s'est ajouté 160 000 nouveaux électeurs au
Québec. En même temps le recensement pour le scrutin de 1981 a
permis de constater que, sur les 122 circonscriptions électorales, 25
dépassaient le plafond normal de 40 000 électeurs dont on parle
dans la loi 10, alors que 24 ont de 38 000 à 40 000 électeurs et
auront donc probablement franchi avant le prochain scrutin le plafond de 40 000
électeurs. C'est donc, M. le Président, 49 ou près de la
moitié des circonscriptions dont il faut envisager le remaniement
prochain. Il vaut mieux, dans ce contexte - c'est pourquoi nous
présentons le projet de loi no 34 -suspendre les travaux que la loi 10
impose à la Commission de la représentation électorale
jusqu'à ce que le gouvernement ait arrêté sa
décision concernant le mode de scrutin.
Cette solution évitera à la commission un travail et des
coûts qui seraient inutiles. C'est précisément l'objet de
ce projet de loi qui suspend les travaux de la Commission de la
représentation sur la préparation d'une nouvelle carte
électorale, et ce de la date d'entrée en vigueur du projet de loi
no 34 jusqu'au 1er janvier 1983. Ce projet de loi reporte au 13 avril 1983 la
remise de son rapport sur la nouvelle délimitation des circonscriptions
électorales. Le directeur général de la
représentation a été consulté à ce sujet et
juge qu'un délai d'un an ne pose pas de problème important
à la commission. De toute manière, quelles que soient les
modifications au mode de scrutin qui seront retenues par le gouvernement et
l'Assemblée nationale normalement au cours de 1982, l'éventuel
projet de loi sur le mode de scrutin pourra prévoir d'autres
délais que le 1er janvier 1983 et le 13 avril 1983 selon la nature des
changements que la loi apportera au mode de scrutin actuel. (15 h 301
M. le Président, compte tenu que le présent projet de loi
tire ses origines de la volonté du gouvernement de mettre en place un
nouveau système électoral qui permette de refléter plus
fidèlement la volonté des électeurs, il serait pertinent
d'apporter en terminant quelques précisions sur la prochaine
étape de ce dossier. Comme l'indique le discours inaugural, j'ai
reçu le mandat d'effectuer une consultation avant que le Conseil des
ministres ne retienne l'une ou l'autre des hypothèses. Cette phase de
consultation va s'amorcer au cours du mois de janvier, alors que je rendrai
public un document explicitant les diverses hypothèses de modification
du mode de scrutin. La réforme du mode de scrutin, on le sait, doit se
réaliser en étroite collaboration avec tous les membres de
l'Assemblée nationale, la population et les partis politiques. Il
m'apparaît particulièrement important que tous les
députés soient impliqués dans le processus conduisant
à la réforme. La publication d'un document de base permettra donc
d'impliquer tous les intéressés dans cette étape de
consultation et de réflexion qui débouchera éventuellement
sur une décision gouvernementale.
M. le Président, en terminant, je me propose donc, dans ces
étapes de consultation qui sont nécessaires pour en arriver
éventuellement à déposer une loi concernant une
réforme du mode de scrutin, de rencontrer le chef de l'Opposition afin
de discuter du cheminement du dossier et des modalités de collaboration
car, sur un sujet aussi intimement lié au processus démocratique,
je crois que la recherche d'un consensus constitue un objectif absolu et un
objectif plus que souhaitable. M. le Président, ce sont les quelques
propos que je crois indiqué de formuler à ce stade-ci du projet
de loi. Merci.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Saint-Louis.
M. Harry Blank
M. Blank: M. le Président, je comprends très bien
les raisons pour lesquelles le gouvernement a présenté ce projet
de loi et je ne peux pas m'opposer du tout à leur façon de
procéder. Seulement, j'espère que cette commission et les
fonctionnaires qui y travaillent ont comme seul but de préparer une
nouvelle carte suivant les anciennes règles. Je me demande ce que ces
gens feraient dans une année. Une autre question; j'espère que le
gouvernement n'a pris aucune décision et n'a pas demandé à
ces gens de
créer une autre carte advenant la possibilité d'un mode de
scrutin différent, parce qu'on ne sait jamais ce qui peut arriver. On a
déjà eu l'expérience en cette Chambre de la carte
d'identité et on a engagé des employés. On a
dépensé environ 3 000 000 $ et le projet de loi n'a jamais
été adopté; le gouvernement l'a retiré et on a eu
une perte de 3 000 000 $. J'espère que la même situation
n'arrivera pas ici avec cette commission. Je ne veux pas mettre en
chômage ces fonctionnaires mais, s'ils n'ont rien à faire durant
une année, qu'au moins on leur trouve quelque chose qui est utile pour
ne pas avoir un gaspillage d'argent comme c'est arrivé il y a
peut-être deux ou trois ans, je ne me souviens pas exactement. Je suis
très heureux que le ministre dise qu'il va y avoir de la collaboration
de notre côté. J'espère qu'il demandera aussi la
collaboration du public pour avoir des intéressés. Il y a
peut-être dix ans ou quinze ans, on a eu des experts qui sont venus
devant une commission parlementaire pour nous donner des idées, nous
dire comment cela se passe ailleurs, le pour et le contre de certains
systèmes de scrutin que nous connaissons seulement par des rapports ou
des documents. Ce serait très bon d'avoir des experts ou des gens,
peut-être des politiciens, des autres milieux qui ont déjà
vécu cette forme de scrutin qu'on suggérera. Ils nous donneraient
des avis juridiques et pratiques du mode de scrutin dans leur pays ou
État. Peut-être qu'en commission parlementaire j'aurai d'autres
questions plus directes. Pour le moment, je veux dire au ministre qu'on votera
pour ce bill.
M. Bédard: Je voudrais m'informer s'il y a d'autres
intervenants. Il n'y en a pas d'autres.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le ministre de la
Justice.
M. Marc-André Bédard
(réplique)
M. Bédard: M. le Président, je remercie le
député de Saint-Louis d'avoir indiqué que sa formation
voterait pour le projet de loi. Je crois, comme il a dit, que c'est la seule
solution qui s'impose dans les circonstances. Il a demandé comment
serait utilisé entre-temps le personnel de la Commission de la
représentation électorale; c'est une question fort judicieuse. Je
puis l'assurer que nous y avons pensé. Je crois que nous aurons
l'occasion, comme je l'ai dit tout à l'heure, d'avoir des
échanges avec les membres de l'Opposition en ce qui a trait à la
réforme du scrutin, au processus pour y arriver, au niveau de la
réflexion qui doit s'amorcer dans les partis, au niveau de la
population, etc. Alors, nous allons faire en sorte d'utiliser l'expertise de la
Commission de la représentation électorale dans le processus
conduisant à l'adoption d'un nouveau mode de scrutin tout en
sauvegardant l'indépendance de cette commission et, par
conséquent, sa crédibilité. Je pense qu'à partir du
moment où on s'indique mutuellement des balises d'utilisation, si je
peux employer l'expression, des membres de la commission il y a
possibilité que ces membres, avec l'expertise qu'ils ont, puissent
contribuer à nos travaux de réflexion qui vont nous acheminer
vers ce qui pourrait être un nouveau mode de scrutin.
Il est évident que, lorsque l'étude commencera concernant
ce projet de loi menant à une réforme du scrutin, il y aura lieu
d'avoir des séances de commission parlementaire. Assurément, nous
devrons - et c'est notre intention - faire appel à toutes les ressources
humaines, toutes les compétences qui existent dans ce domaine, de
manière à donner le meilleur éclairage possible à
tous les membres de cette Assemblée nationale et à la population
en fonction des décisions qui pourraient être
éventuellement prises.
M. le Président, ce sont les seuls commentaires que je crois
appropriés. Je remercie mon collègue de l'Opposition.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le ministre,
faites-vous motion pour que cette deuxième lecture soit
adoptée?
M. Bédard: Oui, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Adopté.
Le Secrétaire adjoint: Deuxième lecture de ce
projet de loi.
Renvoi à la commission de la justice
Le Vice-Président (M. Rancourt): Motion de
déférence...
M, Bédard: Motion de déférence, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Est-ce que cette motion
de déférence est adoptée?
M. Bédard: À la commission permanente de la
justice, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Cette motion de
déférence à la commission permanente de la justice
est-elle adoptée? Adopté. Est-ce que vous présentez le
deuxième projet?
M. Bédard: Oui, M. le Président. Il s'agirait du
projet de loi no 18.
Projet de loi no 18
Deuxième lecture
Le Vice-Président (M. Rancourt):
Deuxième lecture du projet de loi no 18, Loi assurant
l'application de la réforme du droit de la famille et modifiant le Code
de procédure civile.
M. le ministre de la Justice.
M. Marc-André Bédard
M. Bédard: M. le Président, le projet de loi qui
est devant vous aujourd'hui, le projet de loi no 18, a pour but de permettre
une application harmonieuse de la Loi instituant un nouveau Code civil et
portant réforme du droit de la famille qui, comme on le sait, a
déjà été adoptée par cette Chambre. Cette
loi, qui a été adoptée en décembre 1980, avait
comme objectif fondamental de concrétiser l'affirmation et la protection
de la dignité, de la liberté et de l'égalité des
membres de la famille et de faire converger les règles régissant
l'organisation de la famille avec les réalités de la
société québécoise contemporaine. D'ailleurs, ce
projet de loi - je pense que c'est bon de le rappeler - avait recueilli
l'assentiment unanime des membres de cette Chambre. (15 h 40)
Le projet de loi no 18, assurant l'application de la réforme du
droit de la famille et modifiant le Code de procédure civile, constitue
un complément essentiel à la réforme du droit de la
famille et il en respecte naturellement les principes fondamentaux dans les
modifications qu'il apporte au Code de procédure civile et à
diverses lois.
Si nous dégageons les principes sur lesquels repose le projet de
loi no 18, ils visent notamment à rendre plus humain le processus
judiciaire de la rupture en permettant aux parties de débattre leurs
différends d'une façon plus sereine puisqu'ils confèrent
aux audiences un caractère plus intime, davantage privé et
confidentiel. Le projet de loi vise également à respecter
davantage les parties en cause et leur autonomie, parce qu'il vise une prise en
charge du règlement des conflits par les conjoints eux-mêmes en
introduisant la règle de la demande conjointe.
Enfin, ce projet de loi vise à garantir la protection des droits
de l'enfant par un mécanisme de représentation adéquat. Il
vise à compléter l'intégration dans notre droit civil des
dispositions législatives relatives à l'adoption.
Ces quatre objectifs principaux entraînent, comme il va de soi, un
changement important du rôle du tribunal en matière familiale.
Concernant les principaux amendements - c'est quand même un projet de loi
qui est très volumineux et, dirais-je aussi, très important, mais
je ne veux pas faire un débat plus long que ce n'est nécessaire -
je m'en tiendrai à certaines dispositions qui sont dans ce projet de loi
et qui répondent aux objectifs que je viens d'évoquer. Entre
autres, il y aura des amendements au Code de procédure civile concernant
le caractère privé des débats devant les tribunaux
lorsqu'on parle de matière familiale.
En ce qui concerne le caractère des débats, nous proposons
plus précisément l'introduction de la règle du huis clos
en matière familiale. En plus d'être conforme au droit, à
la dignité et au respect de la vie privée, de même qu'aux
droits fondamentaux de l'enfant, ce projet de loi respecte de plus le voeu des
parties concernées et l'opinion de la plupart des catégories de
personnes qui sont impliquées dans l'application du droit de la famille.
Enfin, ce projet de loi est cohérent avec les autres objectifs
poursuivis par le projet, à savoir une plus grande participation des
parties, une protection plus adéquate des droits de l'enfant et la
règle de l'anonymat en matière d'adoption. La règle du
huis clos, M. le Président, n'est toutefois pas absolue et elle peut
être écartée si une partie le demande et que le juge
décide qu'il y va de l'intérêt de la justice de le
faire.
Ce projet de loi instaure donc la règle générale de
procédure par voie de demande conjointe en séparation de corps et
en divorce sur projet d'accord. Il institutionnalise également
l'étape de conciliation dans le processus de déroulement de
l'instance.
De la même manière qu'il convient de miser sur le sens des
responsabilités des individus dans l'organisation de leur vie familiale,
il apparaît logique de respecter cette latitude et cette volonté
dans le cas où la séparation de corps et le divorce doivent
être envisagés entre eux. Il serait contradictoire de maintenir,
dans ce cas, des règles de procédure qui ne permettraient pas aux
gens d'assumer pleinement leur décision en invoquant le fondement
réel de leur démarche.
Dans ce sens et suivant la ligne de pensée exprimée au
Code civil du Québec, je suis favorable à donner ouverture
à une procédure dénuée de recherche et
d'établissement d'un faux coupable - ce qui était malheureusement
trop le cas auparavant - notamment dans les cas où les deux parties
auront concouru à cette décision et qu'elles auront convenu d'un
règlement de toutes les mesures matérielles de cette
séparation. Le motif réel sera donc considéré et il
n'y aura pas lieu de faire appel à des subterfuges ou d'invoquer de faux
motifs pour voir sanctionner par le tribunal une situation qui est devenue
irréversible.
La représentation des enfants. Pour
assurer la protection des droits de l'enfant, consacrés dans la
réforme du droit de la famille, et pour respecter
l'égalité de tous les membres de la cellule familiale, nous
proposons des règles de procédure permettant une
représentation adéquate de l'enfant. S'ajoute à cette
protection fondamentale la possibilité pour l'enfant d'être
assisté de toute personne apte à le rassurer et à l'aider,
de même que plusieurs dispositions prévoyant que l'enfant soit, en
matière d'adoption et suivant son âge, avisé des demandes
qui le concernent. En ce qui a trait à l'adoption, le projet de loi
complète l'intégration des dispositions législatives
relatives à l'adoption dans notre Code de procédure civile. Les
diverses procédures relatives à la déclaration
d'adoptabilité, aux ordonnances de placement, à l'adoption et
à la restitution d'enfant se retrouveront donc dorénavant dans le
Code de procédure civile, ce qui n'était pas le cas auparavant,
et ceci donne suite à une demande qui est faite depuis longtemps dans le
sens que nous voulons légiférer présentement. Ceci
permettra de suppléer au silence de la loi par des règles
générales de procédure.
M. le Président, concernant le rôle du Tribunal de la
famille, la loi instituant un nouveau Code civil, en révisant
entièrement les principes qui fondent la séparation de corps et
le divorce, affirme qu'en ces matières, la mission du tribunal est de
conseiller les parties et aussi d'essayer de favoriser leur conciliation. Pour
permettre une application quotidienne et réaliste de ces principes
d'égalité entre époux et entre enfants, nous proposons
l'établissement d'une procédure moins formaliste que celle qui
existe présentement, d'une procédure également plus
accessible et mieux adaptée aux besoins de notre société
actuelle.
En terminant, pour compléter l'application de la Loi instituant
un nouveau Code civil et portant réforme du droit de la famille, nous
avons dû, comme on le sait, modifier un grand nombre de lois qui
maintenaient une certaine disparité à l'égard de la femme
et de certains enfants. Ces lois contenaient un traitement différent
pour les hommes et les femmes et pour les enfants légitimes naturels ou
adoptifs. Cette situation, une fois pour toutes, et c'est grand temps que ce
soit fait, sera corrigée parce qu'on cessera... Je pense entre autres
aux demandes normales qui avaient été faites pour que des mesures
soient adoptées au niveau de notre Code civil afin que soit reconnue
très clairement dans les textes l'égalité de l'homme et de
la femme dans l'organisation de la vie familiale. Cela se retrouve dans ce
projet de loi qui confirme le Code civil déjà adopté.
Peut-être qu'un des points dont je suis le plus fier et une situation qui
est maintenant corrigée, c'est qu'en fonction de l'avenir, on va cesser
de parler d'enfants illégitimes. À partir de maintenant, à
partir de leur naissance, tous les enfants sont sur un pied
d'égalité, ce qui n'était pas le cas, comme on le sait,
auparavant.
M. le Président, le bref rappel des objectifs fondamentaux de la
Loi instituant un nouveau Code civil et cette rapide analyse des perspectives
du projet de loi no 18 illustrent comment se sont concrétisées
les préoccupations qui nous ont guidés dans l'élaboration
de ce projet.
Nous avons voulu faire oeuvre de cohérence dans
l'établissement des règles de procédure qui
prévalent en matière familiale. Sur le plan de la forme, cela se
traduit par l'intégration dans un même titre du Code de
procédure civile de la plupart des règles relatives aux demandes
en matière familiale.
Plus essentiel encore, le fond de la réforme s'appuie sur les
grands principes qui ont présidé à la réforme du
Code civil en matière familiale: l'égalité des personnes
qui composent la cellule familiale et la liberté dont elles doivent
jouir dans leur participation à la solution des différents
problèmes juridiques susceptibles d'affecter la vie de la cellule
familiale. (15 h 50)
Cette réforme procédurale vise à favoriser
l'épanouissement de la famille en misant sur la responsabilité
accrue et partagée de chacun de ses membres, elle repose sur la
confiance en l'individu et en la capacité de chacun de contribuer
à la solution des différends qui l'affectent. Ce projet est la
suite logique de la réforme du droit de la famille et obéit aux
mêmes principes. Par le fait même, je suis confiant qu'il saura
répondre, comme cette réforme, aux aspirations et aux attentes
des Québécois et des Québécoises et qu'il saura
aussi avoir l'assentiment des membres de l'Opposition officielle.
Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de D'Arcy McGee.
M. Herbert Marx
M. Marx: Merci, M. le Président. Le projet de loi no 18,
à l'étude devant la Chambre, porte sur la modification du Code de
procédure civile et d'autres lois afin de permettre l'application de la
réforme du droit de la famille que nous avons adoptée en 1980,
c'est-à-dire la loi no 89. Il va sans dire que l'Opposition est
favorable à toute mesure pour rendre efficace l'application de la loi
89. Nous avons dit, en 1980, que ce n'était pas assez d'adopter la loi
89 et nous avons insisté, à cette époque, pour qu'on
adopte les modifications au Code de procédure civile afin qu'on puisse
mettre en application la loi 89 d'une façon efficace.
Le ministre a déjà souligné les points saillants,
les points importants de ce projet de loi et je ne veux pas
répéter tout ce qu'il a déjà dit. Vous savez, c'est
toujours plus difficile pour le deuxième qui parle. Le premier commence
et le deuxième ne peut que répéter ou trouver d'autres
points à souligner; le ministre a déjà souligné
tous les points importants, il ne m'en reste pas. Ce que j'aimerais faire,
c'est situer le projet de loi no 18 dans l'ensemble de la réforme du
Code civil et de notre droit civil en général.
Vous savez bien que le Code civil est la loi fondamentale au
Québec, c'est la loi la plus importante. C'est plutôt un corps de
droit et non pas seulement un code de droit. Comme je viens de le dire, c'est
la loi fondamentale la plus importante qui existe au Québec. Notre Code
civil comporte le droit commun des Québécois et ce code englobe
le droit qui régit les rapports entre citoyens au Québec. Le Code
civil est un des éléments qui ont fait du Québec une
société distincte dans le Canada parce que, dans les autres
provinces, les rapports entre individus sont réglementés par le
"common law" qui est, bien sûr, d'inspiration anglaise. Le "common law"
vient de l'Angleterre et, comme vous le savez, le Code civil est d'inspiration
française. Notre Code civil est la codification du droit coutumier et
plus précisément de la coutume de Paris.
Ce Code civil, que nous avons aujourd'hui, a été
adopté en 1866, c'est-à-dire même avant la
Confédération. Avec la constitution, avec l'adoption de l'Acte de
l'Amérique du Nord britannique, on voit dans les textes mêmes que
le Québec n'est pas une province comme les autres; on a reconnu, dans la
constitution, la différence de la société
québécoise parce que dans la constitution du Canada,
c'est-à-dire dans l'Acte de l'Amérique du Nord britannique, on
déclare, à l'article 94, qu'on peut faire l'uniformisation des
lois dans toutes les provinces, mais on a exclu le Québec et on l'a
exclu, bien sûr, parce que le Québec a un système de droit
civil qui est assez différent des systèmes de droit civil dans
toutes les autres provinces du Canada.
M. le Président, on parle au Québec de la réforme
de notre Code civil depuis fort longtemps, c'est-à-dire qu'on a
commencé à parler, je pense, d'une grande réforme du Code
civil il y a 25 ans au moins parce qu'il est nécessaire de mettre
à jour notre Code civil puisque, comme je l'ai dit, il a
été adopté en 1866, depuis déjà plus d'un
siècle. On y a déjà fait des modifications, des ajouts et
ainsi de suite, mais on n'a jamais fait une réforme complète d'un
bout à l'autre du Code civil.
Il y a environ 20 ans, le gouvernement du Québec a établi
l'Office de révision du Code civil. On a demandé à cet
office d'examiner en profondeur tous les titres du
Code civil, tous les chapitres du Code civil et tous les articles qui
s'y trouvent. Cela a pris des années et des années, bien
sûr, pour que l'office ait le temps d'étudier tout le Code civil
et de préparer un rapport. Le gouvernement du Québec, le
gouvernement péquiste que nous avons aujourd'hui, a reçu ce
rapport final il y a déjà quelques années, mais le
gouvernement a suggéré très peu de réformes,
c'est-à-dire que très peu de réformes
suggérées dans le rapport de l'Office de révision du Code
civil sont traduites en lois. La seule révision importante
jusqu'à aujourd'hui, c'est essentiellement la loi 89 que nous avons
adoptée en décembre 1980. Mais - et je dois le souligner - le
rapport de l'Office de révision du Code civil est un rapport d'ensemble.
C'est un travail de 20 ans. Le danger qu'il y a avec le gouvernement actuel,
c'est qu'on veut faire la révision du Code civil à la
pièce. On veut adopter un morceau chaque couple d'années. Comme
on le fait maintenant, comme le gouvernement se propose de le faire, ça
va peut-être prendre 25 ans si on fait un chapitre par deux ans,
ça va prendre au moins 25 ans. J'ai peur que beaucoup des
réformes proposées par l'Office de révision du Code civil
ne soient désuètes avant d'être adoptées par
l'Assemblée nationale.
De plus, M. le Président, si on fait des modifications à
la pièce, on va se retrouver avec beaucoup de contradictions, beaucoup
d'erreurs, beaucoup de lacunes et ainsi de suite. Qui va souffrir de tout
ça? Bien sûr, M. le Président, c'est vous et moi et tous
les citoyens et citoyennes du Québec, donc, les rapports juridiques sont
régis par notre Code civil. J'ai déjà fait un long
exposé, en mai 1981, devant la commission permanente de la justice pour
expliquer que notre droit civil est un mélange aujourd'hui, M. le
Président. J'invite le ministre à relire le discours que j'ai
fait en commission parlementaire pour voir comment c'est difficile pour les
avocats - et si c'est difficile pour les avocats, cela doit être encore
plus difficile pour les citoyens - de se retrouver dans notre Code civil. En
effet, aujourd'hui, nous avons deux codes civils: il y a le Code civil du
Bas-Canada de 1866, qui a été amendé et modifié
depuis, et il y a le Code civil du Québec qui est en fait la loi 89. (16
heures)
Comme je viens de le dire, les avocats sont souvent mêlés
entre ces deux codes, toutes les modifications, ils ne se retrouvent pas et il
faut mettre un peu d'ordre dans ces codes de droit civil. M. le
Président, je demande encore une fois au gouvernement
d'accélérer le processus d'adoption de lois découlant de
la révision du Code civil. Le gouvernement devrait pouvoir nous
présenter une cédule pour dire: On va adopter tout le
nouveau Code civil d'ici deux ou trois ans, on va l'adopter, on va faire
cette réforme durant ce Parlement. Je pense qu'un gouvernement qui a
l'intention de vraiment compléter cette réforme pourrait le faire
durant un Parlement et j'aimerais que le ministre prenne l'engagement de
terminer cette réforme du droit civil durant le présent
Parlement. Il va de soi que la mise a jour, la modification de notre Code civil
est au-dessus de la partisanerie politique et que le ministre aura la
coopération complète de l'Opposition, comme il l'a eue pour faire
adopter la loi 89. Nous avions offert notre coopération pour que ce soit
possible d'adopter la loi avant Noël 1980.
Pour revenir spécifiquement au projet de loi no 18 qui est devant
la Chambre, il faut, bien sûr, adopter des mesures de procédure
afin de permettre la mise en application de la loi 89 qui est, comme le
ministre vient de le dire, la réforme du droit de la famille.
L'application complète de cette loi a été retardée
parce qu'on n'a pas adopté les modifications nécessaires en
matière de procédure civile. Il faut, bien sûr,
étudier en profondeur les changements proposés dans ce projet de
loi parce que souvent la forme rejoint le fond, c'est-à-dire que la
procédure peut être aussi importante que le droit substantif.
C'est notre devoir d'étudier le projet de loi no 18 en profondeur et
j'imagine qu'on va le faire en commission parlementaire après les
fêtes.
Il y a certains problèmes que je vois tout de suite dans le
projet de loi no 18 et je peux vous en donner deux ou trois exemples, M. le
Président. Premièrement, le projet de loi no 18 modifie la
procédure concernant la façon d'introduire une demande.
J'aimerais en discuter en commission parlementaire et voir comment c'est
nécessaire, pourquoi c'est nécessaire et ainsi de suite.
Deuxième exemple, il y a la présomption de validité qu'on
trouve à l'article 79, une présomption qui doit être
minutieusement examinée en commission parlementaire. Enfin, un
troisième exemple, au lieu de passer carrément outre à la
Charte des droits et libertés de la personne, dans ce projet de loi, on
trouve une modification directe à l'article 39 de la charte des droits
pour prévoir le huis clos en matière de famille sauf si le
tribunal en décide autrement. M. le Président, pour le
bien-être de tous les Québécois, je crois qu'il faudrait
étudier l'effet de ce changement à la charte des droits. Il me
semble que le ministre innove ici, c'est-à-dire qu'au lieu d'adopter une
disposition pour dire: Nonobstant la charte des droits du Québec, on
adopte telle et telle disposition, le ministre propose de modifier la charte
des droits elle-même pour, en fait, contourner une des dispositions qu'on
retrouve dans la charte. Il serait peut-être intéressant d'avoir
l'opinion de la Commission des droits de la personne en ce qui concerne des
modifications de ce genre, quoique je ne veuille pas préjuger de ma
réponse en ce qui concerne le bien-fondé ou le "mal-fondé"
de cet article, mais je pense que c'est une procédure tout à fait
nouvelle.
En terminant, M. le Président, nous sommes plutôt
favorables à ce projet de loi. Comme je l'ai dit au début, il
faut adopter un projet de loi pour modifier le Code de procédure civile
pour qu'on puisse mettre en application la loi 89. On est un peu surpris que
cela ait pris presque un an au ministre pour déposer ce projet de loi.
Il va sans dire que ce ne sera pas adopté avant Noël, mais
plutôt, je ne le sais pas, aux mois de février, mars ou avril.
Donc, cela a pris beaucoup plus d'un an pour déposer un projet de loi
pour permettre la mise en application efficace de la nouvelle Loi sur la
famille. On pense que cela aurait dû venir plus tôt.
En conclusion, il faut procéder prudemment en cette
matière, mais aussi d'une façon accélérée
afin que ce projet de loi puisse bénéficier à tous les
Québécois. En principe, nous sommes favorables à ce projet
de loi. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Sainte-Anne.
M. Maximilien Polak
M. Polak: M. le Président, il me fait plaisir d'intervenir
sur ce projet de loi no 18. Je pense surtout aux membres du barreau, aux
avocats comme moi qui pratiquent depuis 23 ans, surtout dans le domaine du
droit de la famille et encore dans la subdivision de séparation et de
divorce. Donc, on a eu le bénéfice d'un discours d'un professeur
d'université, le député de D'Arcy McGee, et maintenant, je
pense, pour compléter notre représentation...
M. Marx: Je suis aussi membre du barreau.
M. Polak: Oui, il est membre du barreau. Même au barreau,
on fait la distinction entre ceux qui sont professeurs d'université et
ceux qui sont dans le champ, qui font la bataille de jour en jour devant les
tribunaux. Donc, je pense que le ministre et peut-être aussi un peu le
député de D'Arcy McGee auront besoin d'un point de vue pratique
sur ces changements. Il ne s'agit pas seulement de la plomberie, il s'agit
aussi de changements de nature substantielle. Je vous fais part d'une certaine
anxiété qui règne au Barreau du Québec qui
d'ailleurs a présenté un mémoire dont j'ai reçu une
copie. Je suis certain que le ministre de la Justice a déjà pris
connaissance de ce mémoire, mais je pense
que c'est important que l'opinion publique soit aussi au courant de
certaines objections qui existent contre le projet tel qu'il se trouve
maintenant.
En premier lieu, on a l'impression, quand on lit ce projet de loi, qu'il
a été rédigé par des bons fonctionnaires, mais
peut-être qu'il n'y avait pas assez de praticiens qui ont
travaillé à la préparation de ce texte. Je pense qu'on
pourrait certainement améliorer la rédaction de ce texte pour
amener un peu moins de confusion. Il y a un grand changement en ce qui concerne
le rôle du juge parce que, jusqu'ici, le juge est celui qui tranche le
débat. En d'autres termes, les parties sont représentées
par des avocats qui présentent la preuve devant le tribunal, de part et
d'autre, et le juge a un rôle plutôt passif. Il est obligé
d'écouter la preuve des deux parties pour ensuite trancher le
débat. C'est vrai que le juge, pour compléter la preuve, peut
demander des renseignements additionnels. II a un certain rôle actif
à jouer, même dans le système actuel, mais je crois qu'avec
tout le respect que je dois aux juges de toutes les cours de la province de
Québec, il est très bon, de temps en temps, de tenir le juge en
place. Cela, c'est aux avocats de le faire. (16 h 10)
II y a ici une grande modification; on fait maintenant du juge une sorte
d'acteur dans cette preuve parce qu'il peut assigner des témoins,
créer les orientations dans la preuve, même sans le consentement
des parties et, par la suite, c'est lui qui va juger sur la preuve qu'il s'est
lui-même donnée. C'est un changement assez important; le Barreau
du Québec l'a indiqué et trouve cela un peu incompatible,
parfois, avec la fonction du juge telle qu'on la connaît maintenant.
De plus, ce même juge jouera un rôle important comme
conciliateur, évidemment, le barreau indique qu'il y a également
un problème; si, à un moment donné, ce même
conciliateur ne réussit pas dans sa tentative de conciliation, il
devient en charge de trancher le litige. Il peut y avoir un certain
problème même dans l'esprit du juge qui a agi comme conciliateur,
qui n'a pas réussi et qui doit alors trancher le débat selon les
règles qu'on connaît.
Le deuxième point qui a été mentionné, c'est
que le ministre a dit qu'on voulait simplifier la procédure. Je suis
certain que tous les membres du barreau sont en faveur des deux principes. Mais
que dit-on dans la loi? On dit qu'il y a deux façons de procéder.
En certaines matières, on procède par requête et, en
d'autres matières, par le biais d'une déclaration. Si on voulait
simplifier, pourquoi ne pas avoir pris un type de procédure plutôt
que deux? Cela peut mener à la confusion, il y a des possibilités
d'erreur, d'imprécision et, justement, d'insécurité parmi
les juristes et parmi les justiciables. Cela, c'est un autre point qui a
été soulevé et qui est important. Je pense que ça
pourrait être corrigé dans le texte final de la loi.
Le troisième point, c'est qu'à la fin, à l'article
33, on suspend, dans le texte de la loi qui est devant nous maintenant, la
promulgation de certaines dispositions de la loi et, ensuite, on ne leur donne
effet que pour permettre de rendre opérationnelles les dispositions d'un
autre chapitre. En d'autres termes, ces deux articles ne seront pas en vigueur,
mais ils seront présumés être en vigueur pour fins
d'application d'autres articles. Vraiment, si on veut dire qu'on est
mêlé, on est mêlé. J'ai relu le texte quatre ou cinq
fois, et, ayant pratiqué le droit pendant 23 ans comme avocat devant le
Tribunal de la famille, j'ai eu énormément de difficulté
à comprendre ce qu'on voulait faire. Cela peut mener à une
très grande confusion. Il faut que ce soit tranché clairement.
Avec tout le respect que je dois aux fonctionnaires qui rédigent les
lois, je pense qu'un bon praticien n'a pas participé activement à
cette rédaction, il y a des corrections à apporter.
Le quatrième point qui a été soulevé par le
barreau, c'est le problème de la constitutionnalité de certaines
dispositions de ce projet de loi no 18. Nous savons tous que, du moment qu'il y
a des dispositions qui semblent même prima facie être
inconstitutionnelles, un avocat va attaquer la constitutionnalité de ces
dispositions et ça peut bouleverser tout le système. Imaginez que
ça arrive dans une affaire de divorce ou de séparation, le juge
peut dire: On va suspendre la cause en attendant le jugement final des
tribunaux parce que le point est en litige.
Peut-être aurait-il été préférable,
plutôt que d'attendre les décisions, que le problème
fût résolu avant de revenir avec les dispositions telles qu'elles
sont présentées dans le projet de loi. On éviterait des
débats de cette nature qui auraient comme résultat que les
délais seraient prolongés, les coûts, augmentés, et
le justiciable se trouverait dans une situation inconfortable. Il nous
consulterait à savoir s'il peut prendre telle ou telle procédure.
Que doit-on dire comme avocat? Savez-vous, monsieur ou madame, cette affaire
est maintenant devant la Cour d'appel, après l'audition, sans doute que
ce sera décidé par la Cour suprême si c'est un point de
constitutionnalité. Qu'est-ce qu'on doit conseiller au client? C'est
très difficile. Dans ce texte, on suscite les problèmes qu'on
voudrait éviter.
Maintenant, le ministre a fait mention du fait qu'il y aura cet aspect
de demande conjointe. Je comprends très bien. Je vois les avantages de
cette demande conjointe.
D'autre part, il ne faut pas oublier non plus que l'État a une
certaine obligation de protéger l'institution de la famille et du
mariage. Il ne faut tout de même pas qu'à un moment donné
deux personnes mariées puissent se présenter devant un juge
pendant cinq minutes avec un document en disant: Voici, on veut dissoudre notre
mariage. Il faut être prudent. Il sera important d'analyser cela plus
tard en détail pour que, justement, on ait une solution plus rapide
quand le divorce ou la séparation doivent avoir lieu mais, d'un autre
côté, il faut éviter que cela soit trop facile. Des jeunes
mariés, pendant les premiers six mois, ont leur première grande
bataille et ils disent: Bon! On va aller voir le juge tout de suite demander la
séparation ou le divorce. Je ne pense pas que ce soit l'intention de la
loi.
En conclusion, M. le Président, en vertu des points que j'ai
soulevés, le barreau a dit, dans une lettre du 14 décembre
adressée au ministre de la Justice, dont j'ai reçu copie, qu'il
aimerait bien avoir une commission parlementaire où, justement, tous ces
points pourront être débattus et où, évidemment, le
barreau aura le droit d'être présent, d'être entendu. Je
n'ai pas encore obtenu une réponse du ministre. Je ne sais pas s'il est
favorable à une telle démarche, mais j'appuie entièrement
la demande du député de D'Arcy McGee, à savoir qu'une
telle commission parlementaire devrait avoir lieu le plus tôt possible
et, deuxièmement, que pas seulement le barreau, mais, évidemment,
d'autres organismes qui sont intéressés dans ce domaine puissent
avoir l'occasion de présenter des mémoires et de se faire
entendre, de sorte qu'on pourrait apporter, espérons-le, les amendements
qui s'imposent pour avoir une loi qui sera souple et plus simple que la
procédure actuelle. Mais, sans doute, pour obtenir un tel
résultat, faut-il apporter des amendements assez importants. Je vous
remercie, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre, votre
droit de réplique.
M. Marc-André Bédard (réplique)
M. Bédard: Quelques commentaires, M. le Président,
parce que je ne crois pas qu'il y ait une longue réplique à
faire, étant donné que les représentants de l'Opposition,
malgré leurs remarques, ont indiqué leur intention de voter pour
le projet de loi.
Je remercie le député de Sainte-Anne pour les remarques
judicieuses qu'il a faites. Effectivement, j'ai eu l'occasion aussi de prendre
connaissance des remarques formulées par le barreau et d'autres
associations. On n'a jamais la prétention de présenter un projet
de loi parfait. Ce qui est important - je pense que c'est le sentiment de tous
les membres de cette Assemblée - c'est d'unir nos efforts en termes de
collaboration de manière à en arriver au projet de loi le plus
acceptable possible.
Je voudrais quand même faire remarquer que ce projet de loi a fait
l'objet de nombreuses consultations avec le barreau, la Chambre des notaires,
la magistrature, le comité tripartite de la justice. Il n'est pas
arrivé comme cela, il n'a pas été déposé
comme étant le fruit simplement d'intellectuels, comme a semblé
le laisser entendre le député de Sainte-Anne.
Je voudrais dire au député de Sainte-Anne qu'il n'y a pas
seulement des professeurs d'université ou encore des fonctionnaires qui
ont travaillé à la rédaction de ce projet de loi. En
passant, je pense que le député de Sainte-Anne ne voulait pas
être négatif à l'endroit du travail fait par les
fonctionnaires du ministère de la Justice concernant ce projet de loi,
parce qu'ils ont fait un travail formidable. Ce n'est quand même pas
facile de jouer avec des notions aussi compliquées et d'essayer d'en
arriver à un texte qui soit compréhensible et acceptable pour
tout le monde. Non seulement en mon nom personnel et au nom du gouvernement,
mais également au nom des membres de l'Opposition, on doit
féliciter tous les membres du contentieux du gouvernement qui ont
travaillé d'arrache-pied à ce projet de loi. (16 h 20)
Effectivement, comme l'a mentionné le député de
D'Arcy McGee, nous procédons aujourd'hui à la deuxième
lecture. Nous allons ensuite avoir l'occasion d'étudier ce projet de loi
article par article en commission parlementaire. Nous aurons, à ce
moment-là, l'occasion de formuler toutes nos réserves et de faire
preuve d'imagination pour mettre sur la table toutes les suggestions qui sont
susceptibles d'améliorer le projet de loi.
M. le Président, en terminant, je puis également assurer
le député de D'Arcy McGee que c'est avec le plus de
célérité possible que nous allons procéder à
la réforme d'autres chapitres du Code civil. Le député de
D'Arcy McGee a dit qu'il fallait y aller prudemment et rapidement. Il
conviendra que ce n'est pas facile de concilier ces deux notions.
Effectivement, au moment où on se parle, il y a déjà des
équipes qui sont au travail depuis plusieurs mois sur des chapitres que
j'ai déjà indiqués en ce qui a trait à la
continuation du travail de réforme du Code civil.
Ce sont les seuls commentaires que j'ai à formuler, M. le
Président. Je remercie les membres de l'Opposition de continuer leur
collaboration dans ce dossier très important pour l'ensemble de la
société québécoise, puisqu'il s'agit effectivement,
quand on parle du Code civil, de la loi la plus fondamentale de la
société québécoise.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Est-ce que cette
deuxième lecture du projet de loi no 28, Loi modifiant diverses
dispositions législatives, est adoptée?
M. Polak: M. le Président...
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Sainte-Anne.
M. Polak: J'ai une remarque de 30 secondes. Je ne voudrais pas
que le ministre pense que je suis contre les intellectuels ou ceux qui ont
rédigé ce texte-là, je respecte trop la pratique du droit,
l'Université de Montréal et les fonctionnaires du
ministère pour cela. Tout ce que j'ai voulu dire -peut-être
avait-il mal compris? - c'est qu'à la commission parlementaire les
praticiens qui travaillent dans le champ, comme on dit, seront entendus pour
améliorer le texte. Merci.
Le Vice-Président (M. Jolivet): C'était, en vertu
de l'article 96, M. le député, une très belle
intervention.
Est-ce que ce projet de loi est adopté?
Des voix: Adopté.
Le Secrétaire adjoint: Deuxième lecture de ce
projet de loi.
Renvoi à la commission de la justice
Le Vice-Président (M. Jolivet): Déférence de
ce projet en commission, M. le ministre?
M. Bédard: Déférence en commission de la
justice, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Cette motion de
déférence est-elle adoptée?
Une voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté. Le prochain
article.
M. Bédard: M. le Président, je vous demanderais
d'appeler l'article qui traite du projet de loi no 28. Je comprends que mon
leader est absent au moment où l'on se parle...
Projet de loi no 28 Deuxième lecture
Le Vice-Président (M. Jolivet): Excusez, je viens de me
rendre compte d'une erreur que j'ai commise. J'ai appelé la
deuxième lecture du projet de loi no 28 alors qu'en
réalité j'aurais du dire le projet de loi no 18. Nous allons donc
à la deuxième lecture du projet de loi no 28, Loi modifiant
diverses dispositions législatives, en sous-entendant qu'on aurait
dû dire tout à l'heure que c'est le projet de loi no 18, Loi
assurant l'application de la réforme du droit de la famille et modifiant
le Code de procédure civile, qui a été adopté en
deuxième lecture et déféré en commission
parlementaire. M. le ministre.
M. Marc-André Bédard
M. Rédard: Je vous remercie, M. le Président.
Concernant le projet de loi no 28, il s'agit d'une Loi modifiant diverses
dispositions législatives. Comme par les années passées,
j'ai déposé devant cette Assemblée un projet de loi visant
à modifier certaines dispositions législatives. Vous constaterez,
à la lecture du projet de loi no 28 et notamment à la lecture des
notes explicatives, que ce projet de loi propose des modifications à une
quinzaine de lois. Le regroupement de ces modifications en un seul projet
évite à l'Assemblée nationale l'étude d'autant de
projets de loi. Je pense que c'est une façon de procéder avec
plus de célérité parce que, s'il avait fallu que nous
présentions pas moins d'une quinzaine de projets de loi, je crois qu'il
aurait été plus difficile d'atteindre l'objectif que nous voulons
atteindre par un projet de loi de cette nature qui est, effectivement, de
corriger certaines dispositions et ce, à l'avantage des citoyens.
Compte tenu de ce qui précède, je me limiterai à
commenter, parmi les principales modifications proposées par ce projet,
celles qui sont les plus significatives. Le projet de loi propose des
modifications à la Loi sur les agents de voyages et à la Loi sur
le ministère de l'Habitation et de la Protection du consommateur afin de
transférer la responsabilité de la surveillance de la Loi sur les
agents de voyages, du nouveau ministère de l'Habitation et de la
Protection du consommateur, de transférer cette responsabilité
à l'Office de la protection du consommateur.
Je vois le député de Saint-Louis qui est bien d'accord. Si
je me rappelle bien, lorsque nous étions dans l'Opposition, cette
demande avait été faite. On s'aperçoit que ça prend
du temps parfois, mais remarquez que vous ne l'aviez pas fait lorsque vous
étiez dans l'Opposition. Maintenant, il y a un nouvel Office de la
protection du consommateur.
Ce transfert semble opportun, compte tenu que l'Office de la protection
du consommateur est structuré, est organisé pour surveiller
l'application des lois analogues à celle de la Loi sur les agents de
voyages. C'est d'autant plus indiqué que cette commission dispose des
ressources nécessaires pour surveiller l'application de cette loi.
Autre modification significative: la Loi
électorale fait aussi l'objet d'une proposition de modification.
En effet, aucune modification de cette loi ne prévoit la
possibilité pour le directeur général des élections
de nommer un suppléant à un directeur de scrutin qui doit
s'absenter, qui devient incapable ou dont le poste devient vacant. Il y a donc
lieu de modifier la Loi électorale pour remédier à cette
situation.
En outre de quelques corrections de nature technique ou de concordance
aux articles déjà inclus dans le projet de loi, je voudrais
proposer, à la suite des représentations qui m'ont
été faites, certains amendements au projet de loi no 28. D'autres
modifications seront proposées à la Loi assurant l'exercice des
droits des personnes handicapées afin de permettre à l'office
d'exiger, par étapes et selon la taille des entreprises, les plans
d'embauchage de personnes handicapées que les employeurs de 50
salariés ou plus seront tenus de lui soumettre. Un mécanisme sera
aussi prévu afin de permettre à l'office d'assurer un suivi sur
la mise en oeuvre de ces plans d'embauchage.
J'ai également l'intention de proposer des modifications à
la Loi sur la refonte des lois et règlements afin d'établir
principalement que la publication de la refonte des règlements se fera
sous forme d'édition plutôt que sous la forme des feuilles mobiles
que l'on connaît. En plus de représenter, en période
d'austérité, une économie substantielle, la formule de
l'édition reliée, que nous adopterons en fonction de l'avenir -
cela répond aussi à certaines demandes qui avaient
été faites -répondrait à un voeu exprimé,
entre autres, par le barreau dans le rapport de son comité de
législation en date de septembre 1981 et qui m'a été
présenté officiellement par le bâtonnier en octobre
1981.
En terminant, je tiens à vous préciser qu'en outre des
modifications dont j'ai traité sommairement, le projet de loi comporte
aussi des modifications de concordance qui en découlent. Toutes les
modifications que je viens de suggérer sont importantes pour assurer la
cohérence de notre corpus législatif, bien que plusieurs d'entre
elles ne visent que des corrections mineures. Toutefois, leur impact
éventuel et l'urgence de leur application n'en sont pas moins grands
pour ceux qu'elles concernent. Je pense, entre autres, aux dispositions
concernant les handicapés et les autres que j'ai
énumérées tout à l'heure. Pour ces raisons, je
propose l'adoption de ce projet de loi et je vous informe également que
je ne les ai pas en main. Il y aura peut-être d'autres amendements qui
seront proposés en commission, mais j'en informerai préalablement
mon vis-à-vis de l'Opposition, de manière que nous puissions
convenir de l'à-propos de l'adoption de nouvelles dispositions qui
seraient incluses dans ce projet de loi. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de D'Arcy McGee. (16 h 30)
M. Herbert Marx
M. Marx: Merci, M. le Président. Il s'agit, bien
sûr, d'un projet de loi omnibus qui touche beaucoup de lois, c'est un
projet de loi qui est présenté avant la fin de chaque session.
C'est évident que le ministre va avoir la coopération de
l'Opposition pour faire adopter ce projet de loi, s'il le veut, même
avant les fêtes. Il s'agit surtout, comme le ministre vient de le dire,
de faire la concordance entre certaines lois, de corriger certaines erreurs qui
se sont glissées dans un certain nombre de projets de loi et ainsi de
suite. Il s'agit de la modification de dix-sept lois et pour la plupart elles
ne méritent pas d'être des lois distinctes. C'est pourquoi on va
adopter un projet de loi omnibus pour couvrir toutes ces lois avec les
modifications qui sont contenues dans ce projet de loi.
Il y a certaines modifications de fond, M. le Président. Par
exemple, il y a la Loi sur les normes du travail qui est modifiée
à l'article 43 et il sera nécessaire d'étudier cette
modification de fond en commission parlementaire. Nous avons juste reçu
d'autres amendements qui ont été proposés par le ministre
de la Justice. Bien sûr, il sera nécessaire d'étudier ces
amendements parce que je vois qu'on va modifier la loi qui touche les droits
des personnes handicapées. Il me semble, M. le Président, qu'il
s'agit d'une modification de fond en ce qui concerne la loi qui touche ces
personnes handicapées.
On va les étudier en commission parlementaire et, en principe, il
va de soi que nous sommes en faveur de ce projet de loi. On va faire les
modifications nécessaires en commission parlementaire. C'est tout ce que
j'ai à dire pour le moment, M. le Président. Merci.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Saint-Louis.
M. Harry Blank
M. Blank: Seulement une intervention très courte. Le
ministre de la Justice a parlé du transfert des agents de voyages
à l'Office de la protection du consommateur parce que ce dernier peut
surveiller d'une meilleure façon la situation pour qu'il donne une
certaine protection aux citoyens du Québec. En voyant qu'on fait des
amendements à la Loi sur le ministère de l'Habitation et de la
Protection du
consommateur, je veux attirer l'attention du ministre parce que
peut-être il devra ajouter un autre amendement quand il fera ses
amendements. Dans cette loi de la protection du consommateur, il y a un groupe
qui n'est pas touché par la loi, qui est exempté de la loi. Au
moment où on a adopté cette loi, cela avait du bon sens.
Hydro-Québec est exemptée de la loi de la protection du
consommateur. Quand Hydro-Québec était autonome et avait comme
mandat de donner le plus bas prix de l'électricité, on avait
raison. Pas de problème.
Maintenant avec le bill 16 et les autres choses que le gouvernement
fait, cela devient une agence gouvernementale dans le sens que le gouvernement
va contrôler, augmenter les prix pour n'importe quelle raison, sans
aucune protection pour le consommateur. Je suggère que le ministre se
penche sur le problème, c'est-à-dire amende la loi pour ajouter
le nom d'Hydro-Québec à la loi de l'Office de la protection du
consommateur pour que nous les citoyens du Québec puissions avoir un peu
de la protection qu'on n'a pas ici en Chambre.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre, votre
droit de réplique.
M. Marc-André Bédard
(réplique)
M. Bédard: Ma réplique sera brève, M. le
Président, je vois que le député de Saint-Louis profite de
l'occasion pour passer son message dans le contexte du "filibuster" que nous
venons de vivre en cette Chambre. Je prends note de ce qu'il a dit.
J'espère que la discussion que nous aurons sur ce point ne fera pas
l'objet d'un "filibuster", quelles que soient les positions que nous
adopterons. M. le Président, je demanderais simplement qu'il y ait
déférence pour étude en commission de la justice.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Avant la
référence, je vais la faire adopter.
M. Bédard: C'est ça.
Renvoi à la commission de la justice
Le Vice-Président (M. Jolivet): Adoption, cette fois-ci
réelle, de la deuxième lecture du projet de loi no 28, Loi
modifiant diverses dispositions législatives. J'ai cru comprendre qu'en
même temps on demandait la déférence à la commission
de la justice. Est-ce que cette motion est acceptée?
M. Bédard: M. le Président...
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Levesque (Bonaventure): Avant que nous disposions du projet de
loi là-dessus? Je préfère, dans ce cas, M. le
Président, consentir à l'adoption de la motion relativement au
projet de loi lui-même et, dans un deuxième temps, accepter qu'on
puisse le déférer à la commission parlementaire de la
justice.
Le Vice-Président (M. Jolivet): C'est cela. Donc, j'allais
demander, premièrement, si la motion d'acceptation de la deuxième
lecture était adoptée?
Une voix: Adopté.
Le Secrétaire adjoint: Deuxième lecture de ce
projet de loi.
Renvoi du projet de loi no 34
à la commission de la présidence
du conseil et de la constitution
M. Bédard: M. le Président, il s'est
peut-être glissé une erreur lorsque nous étions dans
l'étude des lois concernant le ministère de la Justice. Je
voudrais bien vérifier. Concernant la loi 34, je crois qu'on a fait une
déférence à la commission de la justice plutôt
qu'à la commission de la présidence du conseil et de la
constitution.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Donc, nous corrigeons.
M. Bédard: Je demanderais qu'il y ait une correction et
que la déférence se fasse à la commission de la
présidence du conseil et de la constitution. C'est cela, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): C'est cela. Donc, la loi
34 sera déférée à la commission de la
présidence du conseil et de la constitution et la loi 28 à la
commission de la justice. M. le leader.
M. Charron: M. le Président, conformément au menu
indiqué, je vous prierais d'appeler maintenant le projet de loi inscrit
au nom du ministre de l'Agriculture, l'article 6. Non, pas 6, mais 10. C'est
cela, M. le Président, vous êtes tombé droit dessus.
Article 10 du feuilleton.
Projet de loi no 36 Deuxième lecture
Le Vice-Président (M. Jolivet): Article 10.
Deuxième lecture du projet de loi no 36, Loi modifiant la Loi sur les
produits agricoles et les aliments. M. le ministre, la parole est à
vous.
M. Jean Garon
M. Garon: M. le Président, cela me fait plaisir
aujourd'hui d'avoir à présenter le projet de loi dont nous allons
discuter en deuxième lecture, qui modifie la Loi sur les produits
agricoles et les aliments, loi qui deviendra la Loi sur les produits agricoles,
les produits marins et les aliments. Je déplore le fait toutefois, M. le
Président, que le chef de l'Opposition libérale, le
député d'Argenteuil, ne soit pas présent. Je
m'aperçois qu'il ne s'intéresse pas plus au secteur des
pêches qu'il ne s'intéresse au secteur agricole, puisque pendant
deux ans...
Le Vice-Président (M. Jolivet): Question de
privilège de la part du leader de l'Opposition.
M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, je dois donc
conclure que ni le premier ministre, ni le ministre de la Justice, ni le
ministre d'État au Développement culturel, ni le...
Le Vice-Président (M. Jolivet): Le message étant
passé, maintenant, sur le projet de loi, M. le ministre.
M. Garon: M. le Président, évidemment, quand,
pendant des mois et des années, le chef d'un parti politique ne
s'intéresse pas à un secteur, évidemment, après
cela il est obligé de faire toutes sortes de chinoiseries pour essayer
de démontrer que cela l'intéresse quelque peu, comme ce matin
lorsqu'on a présenté une proposition qui venait confirmer que ce
que je disais la veille était vrai. Tantôt, quand je parlerai des
pêches, j'aurai un mot à dire du gouvernement...
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre, seulement
une instant. Je voudrais que vous arriviez au projet de loi, s'il vous
plaît!
M. Garon: M. le Président, quand on parle de l'agriculture
et des pêches c'est beaucoup plus interrelié qu'on pense. C'est le
ministre fédéral des Pêches et des Océans, M.
LeBlanc, qui me disait la semaine dernière que le fait que le secteur
des pêches sera regroupé avec l'agriculture, va vous donner sans
doute la possibilité, dans le secteur des pêches, d'un peu tracer
la voie, parce que le secteur agricole, qui est familier avec les aliments, a
tout un dispositif de services qu'il va pouvoir fournir à un certain
nombre de services du secteur des pêches, ce qu'il serait trop
onéreux pour un gouvernement d'avoir en double. Par exemple,
aujourd'hui, M. le Président, pour la préparation de ce projet de
loi, nous avons utilisé un grand nombre de services du ministère,
du secteur des pêches et du secteur agricole, avec, évidemment,
la
Direction des pêches maritimes, mais également la Direction
de l'inspection des aliments, le service de la normalisation des aliments, la
direction des études économiques, la direction du
développement industriel agroalimentaire. C'est pour cela que, dans
l'antichambre, on pourrait trouver des fonctionnaires comme Me Ducharme, qui
est un avocat spécialisé dans la rédaction de textes de
loi dans ce domaine, Me Cantin, Mme Julien, le sous-ministre Moore, M.
Duchesne. Ce sont des gens qui ont - j'en oublie, parce que je ne pourrais pas
les nommer tous - contribué à ce secteur - il y a les gens du
milieu économique également -pour arriver à un projet de
loi comme celui-là. (16 h 40)
Un projet de loi comme celui-là, M. le Président, va
placer le Québec à l'avant-garde au Canada, alors qu'encore
récemment, il y a quelques jours, les gens du fédéral
faisaient encore un collogue d'étude à Matane. Je ne leur
reproche pas d'en faire mais, nous, nous avons dépassé le stade
des études et nous sommes prêts à proposer une loi qui va
être un détonateur dans le secteur des pêches maritimes. Les
gens ont parlé longtemps de qualité mais il ne faut pas seulement
en parler, il faut adopter des mesures. On verra combien cela prendra de temps
- je ne le dis pas méchamment, je connais les difficultés qu'il
aura - au gouvernement fédéral pour arriver à une
législation moderne dans le secteur des pêches pour un excellent
contrôle de la qualité.
Vous savez, tout ça n'est pas arrivé au hasard; un grand
nombre d'études ont été faites sur le contrôle de la
qualité. Vous me permettrez, M. le Président, de vous dire que
dès 1970 une étude réalisée sur la
commercialisation du poisson au Canada par Stevenson et Kellogg, à la
demande des industriels du secteur des pêches, recommandait à
ceux-ci de s'attaquer à trois problèmes fondamentaux: la
qualité médiocre des produits de la mer, la fraîcheur de
ceux-ci et les mauvaises odeurs qui s'en dégagent. Dès 1973
aussi, une autre étude portant sur la commercialisation du poisson au
Québec, réalisée par la maison Redma et Associés
à la demande du ministère de l'Industrie et du Commerce, faisait
état de la constatation qui suit: Tous nos interlocuteurs sont unanimes
à observer que la qualité des produits en provenance d'un certain
territoire maritime du Québec est inférieure à celle
obtenue des autres provinces de l'Atlantique.
Par ailleurs, lors d'une intervention faite en 1978, au cours d'une
conférence socio-économique sur les pêches à
Gaspé, la vice-présidente de la section québécoise
de l'Association des consommateurs du Canada déclarait que la
qualité inégale de certains
poissons frais ou congelés diminue l'attrait du consommateur et
éloigne ceux qui seraient tout disposés à leur donner une
plus grande place dans leur menu quotidien. Même chose au cours du mois
de septembre 1979, rapport d'une enquête réalisée par le
ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation qui
traite du même sujet et qui fixe le pourcentage, tant au niveau du
détail qu'au niveau des usines de transformation, ou encore la
quantité de produits qui ne répondent pas à toutes les
normes auxquelles ils devraient se soumettre au point de vue de la
qualité.
Je ne veux pas entrer dans les détails parce que je pense qu'il y
a eu beaucoup de discussions là-dessus. Si les gens nous demandaient de
rendre ces études publiques, ce ne serait pas un fleuron très
glorieux à notre chapeau. C'est pour ça, je pense, qu'il est
important d'améliorer la qualité du poisson au Québec en
ayant d'abord un ensemble de règles précises concernant
l'augmentation du contrôle de la qualité du poisson. Comme mets,
le poisson est un des aliments qui subissent le plus de manutention sur le
marché des aliments. Il y a peu d'aliments qui doivent subir autant de
manutention que le poisson. Quand je dis le poisson, j'inclus les mollusques et
les crustacés. Cela dépend, par exemple, des méthodes de
pêche, selon qu'on pêche de telle ou telle façon. Tout le
monde sait, principalement les gens de la Gaspésie ou les gens du
territoire maritime, que lorsqu'on pêche des poissons à la
palangre ou au filet maillant, le poisson meurt immédiatement dans l'eau
ou reste vivant jusqu'à ce qu'on le retire de l'eau. S'il est mort dans
l'eau et qu'il y reste à cause d'une tempête ou des mauvaises
conditions atmosphériques, qu'on ne peut pas aller le rechercher
immédiatement, il peut se détériorer dans l'eau. Lorsqu'on
le remonte à bord du bateau, il peut être déjà de
plus ou moins bonne qualité, de sorte que les instruments de pêche
ont une importance.
À bord du bateau, de quelle façon est-il entreposé?
Selon qu'il y a de la glace ou qu'il n'y en a pas, qu'il y a de la
réfrigération ou qu'il n'y en a pas, toutes les méthodes
de manipulation à bord du bateau jouent sur la qualité du
poisson. Le débarquement au quai, de quelle façon se fait-il?
Est-ce qu'on utilise des bacs ou des fourches pour manipuler le poisson au
débarquement? Est-ce que le poisson reste sur le quai? Est-ce qu'il est
manipulé au soleil ou non? Est-ce que le poisson va rester longtemps au
soleil ou non? Est-ce que le poisson est transporté vers l'usine dans
des camions sur des routes de terre, avec une forte possibilité de
contamination, ou s'il est transporté d'une façon
sécuritaire sur le plan hygiénique? À l'usine même,
de quelle façon va-t-il être traité? Dans quelles
conditions sera-t-il entreposé? Quelle sera la température
maintenue dans les entrepôts frigorifiques, à quelle
rapidité sera-t-il congelé. Tout cela, ce sont des
éléments qui feront, encore là, que le poisson aura une
meilleure qualité ou une plus grande constance de qualité.
Ensuite, de quelle façon il sera transporté vers le marché
de détail et, au marché de détail, de quelle façon
il sera traité.
Je peux vous dire qu'au ministère de l'Agriculture, où les
aliments sont la spécialité, il y a peu d'aliments qui
connaissent autant de manutention que le poisson, dans des conditions aussi
difficiles. C'est pourquoi il y a un problème qui n'est pas
québécois, mais sur lequel on s'interroge dans l'ensemble du
Canada au point de vue de l'amélioration de la qualité. Avec le
projet de loi que nous avons déposé, que nous étudions en
deuxième lecture aujourd'hui, nous serons la première province du
Canada à arriver avec une loi moderne, alors qu'on s'interroge
ailleurs.
C'est pour ça que, depuis que les pêches ont
été rattachées au ministère de l'Agriculture, je me
suis préoccupé d'aller voir de quelle façon on traitait le
poisson en Europe, de quelle façon on le traitait dans les usines. Je
suis allé également dans différentes usines du Canada, en
Colombie britannique où on me disait que c'était là qu'on
avait la meilleure façon de traiter le poisson. Je suis allé
récemment sur la Côte-Ouest des États-Unis pour visiter des
usines. Du matin au soir, j'ai visité des usines, des expositions de
poissons. Pourquoi? Pour voir comment on traitait le poisson et pour faire la
compilation des formes de réglementation pour en arriver à une
meilleure qualité.
Aujourd'hui, dans le projet de loi qu'on présente, et surtout
dans la réglementation que j'ai déposée en même
temps que le projet de loi - on ne fait pas ça souvent au Parlement -
pour que l'Opposition puisse se rendre compte de quoi il s'agit, il n'y a pas
un chiffre qui a été tiré au fusil. Ce sont des chiffres
qui ont été vérifiés. Il n'y a pas un chiffre dans
la réglementation, au point de vue du degré de température
pour le poisson, que ce soit à bord du bateau, que ce soit à
l'usine, qu'il s'agisse du degré de congélation, qui n'a pas
été l'objet d'une étude approfondie et de comparaisons
avec ce qui se fait dans les différents pays d'Europe, aux
États-Unis et dans tous les pays qui font le commerce du poisson d'une
façon libre. Évidemment, on n'a pas regardé ce qui se
faisait dans les pays qui fonctionnent différemment, où ce n'est
pas le marché libre du poisson.
Cette loi n'est pas non plus sortie d'un chapeau de magicien. Je peux
vous dire qu'il y a eu des colloques qui l'ont précédée.
Tout à l'heure, on a parlé d'études, il y a aussi eu des
colloques. Le colloque de Gaspé, au
mois de mars 1980, où la question de la qualité du poisson
a été envisagée dans son ensemble. Lors de ce colloque
étaient représentés les pêcheurs par leur
association, les industriels de la pêche, les représentants des
gouvernements et tous ceux qui, de près ou de loin, sont
intéressés au commerce du poisson et à la pêche. Il
y a eu, à ce moment-là, une entente sur les grandes lignes dans
le secteur des pêches, au point de vue des principes.
Immédiatement après, quand je suis revenu au ministère,
à Québec, j'ai demandé aux gens de chez nous de commencer
à travailler sur le plan des modalités.
Je peux vous dire que, quand on aura adopté le projet de loi, je
pourrai tracer un tableau où sont écrites, depuis treize mois
maintenant, les différentes phases que devrait comprendre une
réglementation sur la qualité du poisson, c'est-à-dire les
normes de construction des bateaux pour la conservation du poisson, le maintien
de la qualité à bord des bateaux, les tris à quai ou au
débarquement, le déchargement, la manutention à quai et le
transport vers les usines, les normes de construction des usines, le
contrôle de la qualité dans les usines, les procédures de
manutention et de traitement du poisson, etc. Pourquoi? Pour que de la
pêche du poisson dans l'eau jusqu'au magasin de détail, les
comportements qu'on devrait avoir pour assurer au poisson une constance dans la
qualité et une qualité maximale soient retrouvés dans la
réglementation. (16 h 50)
Ensuite, lors du colloque du mois de mars 1981 à Sept-Îles,
j'ai présenté aux différents intervenants du secteur des
pêches un projet de réglementation en leur disant que ce serait en
gros la réglementation qu'on envisageait dans le secteur des
pêches. Je peux vous dire qu'il y a eu un vaste consensus des
intervenants, des représentants des pêcheurs de différentes
régions maritimes, de la Côte-Nord, des Îles-de-la-Madeleine
et de la Gaspésie. Il y avait même des représentants des
Esquimaux que j'avais invités à ce colloque qui sont venus parce
qu'ils pensent développer la pêche chez eux. Il y avait des
représentants des industriels, des ministères, surtout du
ministère des Pêcheries du Québec, et aussi tous ceux qui,
de près ou de loin, sont concernés. Vaste consensus, à ce
moment-là, pour dire que les différents points de notre
règlement devraient être modifiés, ajustés en
fonction d'une réglementation précise. À ce
moment-là, on a parlé de différents sujets, notamment le
tri du poisson.
Aujourd'hui, c'est le projet de loi que nous présentons et aussi
le règlement qui devrait être adopté par la suite. Mais,
une fois que le projet de loi sera adopté, le règlement sera
envoyé une dernière fois pour lecture pour ceux qui oeuvrent dans
le secteur. Ce sera une dernière consultation afin de voir s'il y a des
éléments qui, selon eux, devraient être modifiés.
Ensuite, il sera acheminé, au cours du mois de janvier, au Conseil des
ministres pour approbation. À ce moment-là, nous disposerons de
l'instrument dont nous avons besoin. Les gens sauront à quoi s'en tenir,
au Québec, dans le secteur des pêches pour avoir un produit de
qualité.
Surtout, je dirai, M. le Président, que ce sera un changement
important par rapport à ce qui se passait auparavant dans le secteur des
pêches. Dans le secteur des pêches, évidemment, depuis deux
ans que j'ai la responsabilité de ce secteur au ministère, nous
avons fait un certain nombre de choses. Le premier geste que j'ai eu à
poser - parce qu'à la suite de la décentralisation un grand
nombre de fonctionnaires ont quitté leurs fonctions - quand le secteur
des pêches m'a été confié - je dois dire qu'à
ce moment-là il y avait 80 postes vacants - c'est qu'il a fallu d'abord
remplir les postes par des gens qui étaient d'accord pour aller en
territoire maritime. Aujourd'hui, essentiellement, les différentes
fonctions sont occupées. Il y a eu un rodage de fait et nous avons
entrepris immédiatement la décentralisation, qui était
déjà amorcée d'ailleurs, pour en accélérer
le processus. Aujourd'hui, je peux vous dire que, il y a quelques jours,
j'acceptais des modifications pour l'émission des permis de pêche
relativement à un programme public que nous avions adopté en 1980
pour que l'émission des permis de pêche soit faite selon des
normes connues. J'avais eu la surprise de ma vie de constater, lorsque le
secteur des pêches a été transféré et qu'il
m'a été confié en 1980, que lors de l'émission des
permis de pêche, dans certains cas, les permis aux pêcheurs
étaient donnés en mettant les noms dans un chapeau; des gens
tiraient les noms du chapeau et c'étaient les gens qui avaient les
permis. J'ai trouvé cette méthode un peu moyenâgeuse et ce
n'était peut-être pas la meilleure façon d'émettre
des permis. C'est à ce moment-là cela a fait partie du processus
de décentralisation - que nous avons formé des comités
locaux pour l'émission des permis qui sont représentés par
deux fonctionnaires du ministère, deux pêcheurs choisis parmi cinq
représentants des pêcheurs dont les noms nous sont fournis par des
associations de pêcheurs et présidés par un membre du
service de la protection du territoire maritime dans le secteur des
pêches, de sorte qu'aujourd'hui, il y a huit comités. Cette
année, il y aura neuf comités parce qu'on considère que le
côté nord et le côté sud de la Gaspésie
formés en un seul comité, c'est un grand territoire et qu'il
serait mieux de subdiviser. Donc, cette année, il y aura neuf
comités à la suggestion des pêcheurs eux-mêmes pour
que les pêcheurs aient accès à l'émission des
permis. Ceux qui sont au
ministère depuis plusieurs années m'ont dit qu'en 1980
c'est sans doute l'année où il y a eu le moins de plaintes
concernant l'émission des permis. Pourquoi? Parce que les pêcheurs
eux-mêmes ont été associés à
l'émission des permis et que les critères d'émission des
nouveaux permis de pêche sont indiqués dans une directive qui est
suivie par les gens du ministère et les pêcheurs qui participent
au comité pour l'émission des permis. C'est une nouvelle
politique, et, aujourd'hui, je peux vous dire que le seul endroit dans l'Est du
Canada où l'émission des permis est faite en plein jour, avec la
participation des pêcheurs, selon des critères établis
où on ne pourra en tout temps... Les gens qui savent qui a un permis,
c'est au Québec. Au fédéral, ils ne savent même pas
le nombre de permis, ils ne savent pas le nombre de permis non utilisés,
qui pourraient être réémis et qui ne sont pas
réémis, etc. J'ai même annoncé au ministre des
Pêches et des Océans, à Ottawa, quand je suis allé
à la conférence fédérale, la semaine
dernière, que, contrairement à ce qu'il nous avait dit, des
permis avaient été émis au Labrador et à
Terre-Neuve: 15 permis en 1980-1981. Lui-même a été surpris
et il a fait venir à la table les fonctionnaires responsables pour leur
demander de répondre à ce que venait de dire le ministre de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation du Québec, parce
qu'il était étonné de cela. Ils sont venus confesser
qu'ils avaient émis des permis et que ce n'était pas ce qui
devrait être fait. Pourquoi? Parce que cela ne se fait pas de
façon ouverte. Si tout cela se fait de façon ouverte, à ce
moment-là, les pêcheurs eux-mêmes peuvent juger de ce qui se
fait, tandis que si cela est fait de façon cachée, les
pêcheurs ne peuvent pas le savoir. C'est pour cela que nous avons
commencé dans cette réforme, d'abord, par une politique de permis
de pêche émis ouvertement.
Nous avons eu également une politique de construction de bateaux
de pêche, puisque le gouvernement fédéral a réduit
les montants qu'il donnait dans le secteur des pêches, commençant
d'abord par réduire les budgets, de sorte qu'il y avait peu de
construction de bateaux. Nous avons remplacé le gouvernement
fédéral pour encourager la construction de bateaux de
pêche. Ensuite, il a réduit son pourcentage de subvention de 35%
à 25%. Ensuite, il a réduit son maximum par bateau, selon qu'il
s'agissait d'un bateau de fer ou d'un bateau de bois, de 100 000 $ à 125
000 $. Le gouvernement du Québec doit de plus en plus subventionner et
financer la construction des bateaux au Québec parce que le gouvernement
fédéral ne le fait plus.
En 1976, M. le Président, il s'était construit trois
bateaux de pêche au Québec. Avec l'arrivée du Parti
québécois au pouvoir, en 1977, il s'en est construit 19; en 1978,
24; en 1979, 15; en 1980, 39. Bientôt je signerai les lettres d'offres
pour cette année pour la construction de nouveaux bateaux. Là, il
s'agit uniquement de bateaux de plus de 35 pieds. Seulement en 1980, pour
montrer la progression, le gouvernement du Québec aura donné,
pour la construction de bateaux, plus de 2 067 000 $, presque 2 068 000 $, et
des prêts pour plus de 5 000 000 $. Cette année, en dehors du
budget, il y a 10 000 000 $ pour les prêts pour les bateaux et au-dessus
de 3 000 000 $, presque 4 000 000 $, de subsides pour la construction de
bateaux, parce que le gouvernement du Parti québécois s'implique
de plus en plus dans la construction des bateaux. On pense que pour la
pêche, l'élément premier pour qu'il y ait
véritablement un développement du secteur des pêches au
Québec, ce sont les bateaux. Sans bateau, on peut avoir les meilleurs
intentions du monde, mais le poisson reste à l'eau. Il faut d'abord des
bateaux et nous avons commencé par ce qui était essentiel au
point de départ - pas théorique, essentiel - la construction des
bateaux.
Actuellement je suis en train de réviser... Je vois mon
collègue du Conseil du trésor qui a peut-être reçu
cette semaine un document - je ne dis pas cela pour l'ennuyer -
prévoyant des modifications aux subventions pour la construction des
bateaux de moins de 35 pieds, parce qu'il y a des pêcheurs qui aiment
mieux avoir des équipements moins considérables que des bateaux
de 35 pieds. On ne voudrait pas qu'ils soient incités à
construire des bateaux plus gros que ceux qu'ils désirent parce qu'il y
a une politique nouvelle pour les bateaux de plus de 35 pieds et que la
politique pour les bateaux de moins de 35 pieds serait trop vieille.
Nous avons maintenant un projet de révision pour la construction
de bateaux de pêche artisanale. Avec le député de Matane,
qui est sensibilisé à ces questions-là, parce que c'est un
de nos sujets de conversation les plus réguliers, je suis
persuadé que nous allons pouvoir annoncer dans quelque temps une
nouvelle politique pour la construction des bateaux de pêche artisanale,
qu'ils soient construits par les pêcheurs eux-mêmes ou par
d'autres. (17 heures)
Évidemment, il y a eu également la politique des bacs que
le gouvernement du Québec a subventionnés en 1979-1980. Au lieu
de manutentionner le poisson avec des fourches, on le manutentionne avec des
bacs, ce qui permet, au lieu d'avoir un amoncellement terrible de poisson, des
milliers de livres de poisson en tas, de sorte que le poisson du dessous trouve
la charge un peu pesante, on a une politique de bacs. On met de 50 à 100
livres de poisson par bac et cela permet une meilleure
manutention du poisson. En 1979, on avait 6300 bacs
subventionnés; en 1980, autour de 17 000 bacs et en 1981, cette
année, la compilation n'est pas terminée, mais c'est autour de 30
000 bacs.
Je vous dirai que ma première préoccupation a
été de faire faire les bacs au Québec. Cela a l'air de
rien mais, auparavant, les bacs étaient importés d'Europe. Nous
avons fait normaliser les bacs. J'ai retardé le programme en 1980 -oui,
madame - pour que le bureau de normalisation et les fonctionnaires du
ministère des pêches normalisent le bac et qu'au lieu d'être
importé d'Europe il soit manufacturé au Québec. Une
politique comme celle-là a un impact même dans le comté de
Bellechasse où la firme de Saint-Damien, Métivier ou Les
Industries provinciales Ltée, s'est lancée dans la construction
des bacs parce qu'il y a une politique d'achat de bacs au Québec.
À l'exposition de Seattle, où j'étais au mois de
septembre, j'ai vu des entreprises du Québec, deux entreprises du
Québec y exposer les bacs qu'elles pouvaient vendre aux
États-Unis. Grâce à une politique de développement
industriel québécoise, la modernisation dans le secteur des
pêches a même des effets sur le secteur industriel pour la
fourniture de produits manufacturés chez nous.
Les agrès de pêche. Le ministère des pêches
subventionnait le filet maillant. Cette année, nous avons
arrêté de subventionner les filets maillants. Pourquoi? Parce que
les pêcheurs, dans les associations ou lors de rencontres sur la
qualité, nous disaient que le filet maillant ne donne pas un poisson de
bonne qualité, la palangre est préférable. Je trouvais un
peu ridicule que le ministère chargé du développement du
secteur des pêches subventionne des agrès que les gens
considèrent eux-mêmes comme n'aidant en rien la qualité du
poisson; on serait mieux de subventionner des agrès qui donnent une
meilleure qualité. C'est pour cela que, cette année, nous avons
changé notre politique pour subventionner les agrès de
pêche comme la palangre ou encore pour aider ceux qui construisent des
casiers pour la pêche au crabe. Il y a un certain nombre de
pêcheurs qui sont en train de s'équiper à neuf parce que
c'est un secteur en voie de développement au Québec.
On a aussi adopté cette année une politique de subventions
aux associations de pêcheurs. Vous voyez dans les journaux de temps en
temps des associations de pêcheurs qui veulent s'exprimer, qui demandent
à rencontrer le ministre. Avant, ils ne pouvaient pas le faire.
Pourquoi? Parce que toutes les associations étaient divisées.
Nous n'avons pas une politique de diviser pour régner, mais d'unifier
pour développer. Nous avons subventionné cette année des
associations de pêcheurs en vue d'un regroupement des associations de
pêcheurs. Je suis content de constater que les pêcheurs
côtiers sont en train de se regrouper dans une fédération,
de même que les pêcheurs hauturiers. C'est évident que ce
sera plus difficile pour le gouvernement d'avoir des associations
regroupées plutôt que des associations divisées mais, si on
veut parler en termes de développement, nous aurons maintenant des
interlocuteurs que nous pourrons rencontrer, qui seront organisés pour
mettre en oeuvre, avec le gouvernement, des politiques de développement
dans le secteur des pêches.
Je sais que c'est plus dangereux pour un ministre de vivre dans le
secteur avec des associations organisées, mais c'est nous qui avons,
comme gouvernement du Québec, aidé les associations de
pêcheurs pour qu'elles se regroupent afin que le développement se
fasse par l'intermédiaire de ces associations elles-mêmes.
Une politique a également été adoptée au
mois de février 1981; elle ne pouvait pas porter ses fruits
immédiatement parce que c'est un programme de modernisation des usines
de transformation du poisson au Québec et les usines attendaient notre
réglementation sur la qualité du poisson. Mais, à partir
de l'adoption de ce projet de loi et de ses règlements, les usines
connaîtront exactement les règles du jeu et pourront utiliser le
programme, adopté depuis février 1981, qui permet des subventions
aux investissements pour la modernisation des usines de transformation du
poisson - il y a de prévu, par le gouvernement du Québec, 20% de
subvention et le gouvernement fédéral, habituellement, donne
aussi 20% - de sorte que, dans le secteur des pêches, les usines de
transformation qui se modernisent pourront compter sur une subvention de
40%.
M. le Président, nous avons aussi connu cette année le
premier bateau qui appartient majoritairement à des
Québécois qui pêche dans la zone de 200 milles. Je me
rappelle que Mme LeBlanc-Bantey, qui était adjointe parlementaire aux
pêches - elle est maintenant ministre de la Fonction publique - me disait
d'une façon régulière: II faut aller dans les 200 milles.
Il fallait commencer d'abord par un bateau; avant d'en avoir deux ou trois, il
fallait commencer par un. Je comprends qu'elle avait un intérêt
particulier et c'est un peu le sort qui l'a voulu ainsi parce que, normalement,
les bateaux qui vont dans les 200 milles seraient plus portés à
être rattachés aux Îles-de-la-Madeleine qui sont
déjà plus avant dans le territoire maritime.
Le sort a voulu que la politique qui a été
préconisée par la députée des
Îles-de-la-Madeleine profite en premier aux gens de la Gaspésie
puisque le premier bateau, qui est le Kristina Logos, qui est la
propriété
maintenant de sociétés québécoises comme les
Pêcheurs unis, comme les Fruits de mer de l'Est du Québec, la
Société québécoise d'initiative agro-alimentaire,
de Danois, pour une part, et d'un investisseur montréalais, de sorte que
la propriété est majoritairement au Québec... Mais les
prises qu'ils vont faire le long de la Côte du Labrador jusqu'aux Terres
de Baffin vont permettre de fournir du poisson, c'est-à-dire des
crevettes, des petites crevettes - les grosses seront empaquetées de
façon finale à bord du bateau et entreposées à bord
du bateau, mais les petites crevettes vont être acheminées vers
l'usine des Pêcheurs unis de Rivière-au-Renard et l'usine de
Matane, des Fruits de mer de l'Est du Québec - et d'ajouter six semaines
d'ouvrage, selon les prévisions à Rivière-au-Renard et
à Matane.
M. le Président, en plus, nous avons un protocole d'entente avec
les Danois pour qu'à bord du bateau, qui est dans la zone de 200 milles,
on puisse, dans un délai déterminé dans le contrat, que
l'équipage du bateau qui navigue dans la zone de 200 milles puisse, en
dedans de deux ans, devenir entièrement québécois. Je peux
vous dire que, selon l'échéancier qui a été
prévu, sur deux ans, nous sommes déjà en avance, M. le
Président, sur notre échéancier pour que l'équipage
devienne québécois. Comme il y a deux permis attachés
à ce bateau, je souhaite que, dans un avenir pas trop lointain, nous
ayons un deuxième bateau dans la zone de 200 milles. Il serait
peut-être bon, comme le dit la députée des
Îles-de-la-Madeleine qui est ici, que ce deuxième bateau soit
rattaché aux Îles-de-la-Madeleine parce qu'à ce moment, il
y aura un partage de la zone de 200 milles avec ce genre de bateaux.
Maintenant, il y aura la Côte-Nord... Je vois le
député de Saguenay qui est ici, qui parle d'un troisième
bateau. Je peux vous dire que, sur la Côte-Nord, il y a presque un
miracle dans le secteur des pêches. Ce qui prouve que le Parti
québécois n'est pas un parti qui fait de la discrimination c'est
qu'essentiellement, les gens qui vivent sur la Côte-Nord sont des gens de
langue anglaise. Les gens auraient pu dire: Les gens du Parti
québécois vont négliger la Basse-Côte-Nord. Au
contraire. Aujourd'hui, depuis 1976, le revenu des gens de la
Basse-Côte-Nord a plus que triplé. Les prises de poisson; 3 500
000 livres en 1976, et les gens pêchaient essentiellement dans de grosses
chaloupes. Il n'y avait pas de bateaux de plus de 35 pieds. Aujourd'hui, un
effort considérable a été fait et les prises, cette
année, vont atteindre autour de 20 000 000 livres de poisson, presque
six fois plus qu'en 1976, parce que nous considérons les gens de la
Basse-Côte-Nord comme des Québécois, qu'il y a un potentiel
considérable de développement dans le secteur des pêches de
la Basse-Côte-Nord et qu'avec des équipements mieux faits, mieux
organisés, ils pourront même franchir le petit détroit pour
en arriver dans des zones qui sont à l'est de Terre-Neuve et du
Labrador. C'est un point stratégique de développement au cours
des deux prochaines années. Le député de Duplessis, M.
Perron, suit le dossier régulièrement; quotidiennement; je dirais
même que le dossier est toujours avec lui. (17 h 10)
Nous avons l'intention de faire un effort particulier pour occuper ces
endroits stratégiques de développement que sont Blanc-Sablon, la
Basse-Côte-Nord au point de vue du développement du secteur des
pêches. C'est un plan d'action - tout cela n'est pas improvisé, M.
le Président - concret, un plan d'action qui consiste à
considérer les pêches d'une façon professionnelle,
c'est-à-dire reconnaître le statut professionnel des
pêcheurs et le caractère industriel des entreprises de
transformation. Trop de personnes ont vu les pêches comme un secteur
folklorique. Il faut les voir comme un secteur industriel de
développement économique.
Évidemment, je ne m'attends pas que tout cela se fasse sans qu'il
y ait un peu de brasse-camarades. Il est évident que, pour faire ce saut
sur le plan du développement du secteur maritime, cela prend un effort
considérable de tous les intervenants pour la mise en place d'une
politique qui est axée essentiellement sur les points suivants: la mise
en place des équipements de base que sont la flotte de pêche et
les usines de transformation; deuxièmement, l'acquisition
d'équipement et le recours à des procédés
favorisant l'amélioration de la qualité des produits marins;
troisièmement, l'organisation professionnelle du milieu par l'aide aux
associations de pêcheurs et industriels; quatrièmement, la prise
de conscience de l'existence au Québec d'un important marché
potentiel, alors que par le passé notre industrie de transformation a
surtout été orientée vers les marchés
extérieurs - et je vais revenir tout de suite là-dessus, M. le
Président - cinquièmement, la mise en valeur de ressources
sous-exploitées tant par la capture de nouvelles espèces telles
que le crabe et le maquereau que par la récupération en usine de
parties comestibles actuellement rejetées; et, sixièmement, la
prise en charge par les entreprises de transformation de toutes les
étapes de la production y compris la congélation et l'entreposage
de produits marins.
Quand je parle du potentiel du marché québécois, je
vous dirai, M. le Président, que, quand les usines sont venues
près de fermer au mois de juin 1980, tout le monde me disait de ne pas
m'en faire, que c'était la coutume, qu'il fallait fermer les usines
parce qu'elles fermaient de toute façon
ailleurs dans le territoire maritime. J'ai été surpris de
cette façon de voir les choses et j'ai demandé aux gens du
ministère de regarder quel était le potentiel du marché
québécois et quel était le problème en pensant
à essayer de maintenir ouvertes ces usines qui transformaient le crabe
au Québec. On s'est rendu compte qu'en 1980 les prises avaient
été abondantes, alors que le marché était lent et
que les usines au Québec manquaient de fonds de roulement, et qu'avec
une aide sur le plan du financement des inventaires les usines pourraient
fonctionner plus longtemps. C'est ce que le gouvernement a fait en garantissant
des marges de crédit aux banques pour ces usines de transformation du
crabe. Résultat: près de 700 personnes et plus de 200
pêcheurs ont pu travailler jusqu'à la fin d'août,
début de septembre, au lieu d'être sans emploi au mois de juin.
J'avais assorti cette aide financière d'une condition, une condition qui
disait que les entreprises devaient s'engager à participer à une
promotion sur le marché québécois. Cette promotion a
été faite. M. le Président, en 1979, d'après les
chiffres du ministère, il se consommait sur le marché
québécois dans toute l'année 1979, pas un mois, dans toute
l'année, environ de 50 000 à 100 000 livres de crabe, presque
pas. Avec la promotion, seulement dans le mois de septembre, il s'en est
consommé au Québec 150 000 livres et on me dit que, si on
additionne septembre et octobre, cela fait 250 000 livres.
Des voix: Bravo!
M. Garon: II y a un potentiel du marché
québécois considérable puisque actuellement nous
produisons, en termes d'autosuffisance, seulement 53% des produits marins que
nous consommons au Québec, seulement 53%. Je suis persuadé qu'il
est possible d'augmenter ce degré d'autosuffisance de façon
considérable mais en développant la commercialisation au
Québec. Historiquement, la commercialisation du poisson du territoire
maritime québécois ne s'est pas faite surtout sur le
marché québécois, mais vers l'exportation. Avec
l'arrivée de la zone de 200 milles, la commercialisation du poisson va
être modifiée considérablement puisque les Russes et les
Japonais qui pêchaient dans le territoire atlantique sont partis. Des
quantités considérables de poisson seront disponibles pour nous,
mais les marchés vont être différents; des quantités
supérieures de poisson vont entrer sur des marchés où
elles ne pénétraient pas auparavant puisqu'elles étaient
expédiées sur des marchés différents. Il faut
penser beaucoup plus en termes de commercialisation de notre poisson; si nous
ne pensons pas en ces termes, nous allons voir tantôt des marchés
se refermer. Nous voyons, par exemple, que les États-Unis qui, il y a
quelques années, importaient 75% du poisson qu'ils consommaient,
importent maintenant 60% du poisson qu'ils consomment et on prévoit que
leur degré d'autosuffisance va augmenter avec les années parce
qu'ils ont eux aussi leurs 200 milles. Il faut penser en termes
différents dans le secteur des pêches.
Cette loi que nous présentons aujourd'hui dira dans quelles
conditions va se faire la modernisation du secteur des pêches. Dès
le mois de mars, nous aurons un autre colloque, pas sur la qualité, mais
la qualité sera enchâssée dans les règles à
suivre dans cette loi et dans cette réglementation, dans la phase
suivante qui doit suivre la qualité de la commercialisation du poisson.
Cette conférence socio-économique devrait avoir lieu au mois de
mars. Elle permettra de voir les stratégies de commercialisation et de
discuter avec tous les intervenants du secteur des pêches comment devrait
se faire d'une façon efficace la commercialisation du poisson du
territoire maritime québécois vers les marchés
intérieurs et extérieurs. Il y a un potentiel considérable
à condition d'avoir une politique ordonnée, coordonnée de
commercialisation du poisson québécois.
Le projet de loi que nous étudions aujourd'hui va modifier le
secteur des pêches puisque, depuis le dépôt de la loi, il y
a quelques jours, il n'y a plus de permis émis selon l'ancienne loi;
tous les permis doivent être émis selon la nouvelle loi. Plus de
permis selon l'ancienne loi de la préparation des produits de la mer,
qui avait ainsi l'honneur d'être la loi la plus courte de toute la
législation québécoise. Elle avait deux articles: un
article sur la préparation des produits et un article pour sa mise en
vigueur. Vous comprenez, M. le Président, que c'est pour ça qu'il
n'y avait pas beaucoup de lignes directrices au point de vue du contrôle
de la qualité dans le secteur des pêches maritimes. Avec ce
nouveau projet de loi, toute nouvelle usine qui n'a pas un permis au moment du
dépôt de la loi devra maintenant, se conformer à la
législation que nous présentons aujourd'hui. Les usines
existantes, celles qui avaient un permis au moment du dépôt de la
loi actuelle, auront jusqu'au 1er janvier 1985, c'est-à-dire trois ans,
pour se moderniser et répondre aux normes de construction des usines en
fonction des standards nécessaires dans une usine normale du secteur des
pêches. Il y en a qui ont besoin de peu de transformations, il y en a qui
n'ont besoin d'aucune transformation, mais il y en a qui ont besoin presque
d'être refaites de fond en comble. Pourquoi? Les gens sauront, avec
l'adoption de cette loi et des règlements qui vont suivre, quelles vont
être les règles qui vont s'appliquer dans le secteur des
pêches. Il n'y aura pas de cachette puisque les
normes de construction des usines, les équipements
nécessaires, le degré de température qu'il faudra suivre
sont précisés dans la réglementation qui suit la loi et
les règles à suivre vont être différentes selon
qu'il s'agit d'usines de préparation du poisson ou de conserveries pour
fins de vente en gros de produits marins destinés à la
consommation humaine. L'ancienne loi va permettre le fonctionnement des usines
jusqu'au 1er janvier 1985. À partir du 1er janvier 1985, il n'y aura
plus d'usine selon l'ancienne loi. Toute usine qui voudra rencontrer la
nouvelle réglementation d'ici au 1er janvier 1985 - une usine
présentement en exploitation - pourra obtenir le permis, en se
conformant au fur et à mesure à la nouvelle
réglementation.
Si un propriétaire d'usine dit: Demain moi, je veux faire de la
modernisation et répondre à la nouvelle réglementation, il
pourra demander un permis selon la nouvelle loi, et aussitôt qu'il se
conformera à la nouvelle réglementation, il recevra son permis
selon cette nouvelle réglementation. Je pense bien que les premiers
à se moderniser pourront utiliser ce nouveau permis pour dire: Je
réponds maintenant à toutes les normes modernes de transformation
du poisson. Je suis persuadé que, dans la promotion de leurs produits,
ça va faciliter la tâche à ces usines, de sorte que,
graduellement, au fur et à mesure que les mois vont passer, ces usines
vont se moderniser.
J'ai rencontré déjà un certain nombre de
propriétaires d'usines qui m'ont dit qu'ils attendaient cette
réglementation pour faire les corrections nécessaires pour
répondre à la nouvelle réglementation. C'est un point
majeur.
Un deuxième point majeur, c'est le tri du poisson qui est
prévu par la loi. Le pouvoir est donné par la loi au ministre de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, mais les façons
de procéder seront précisées dans le règlement. Le
tri est aussi, selon tous ceux qui sont dans le secteur des pêches, une
des façons d'améliorer la qualité puisque, à ce
moment-là, le tri pourra être fait, selon des critères de
qualité, en poisson extra, A ou B, et en poisson rejeté. À
ce moment, le prix payé pour le poisson selon la qualité variera
selon que le poisson sera de première, de deuxième ou de
troisième qualité. À ce moment-là, il y aura une
incitation pour le pêcheur à fournir un poisson de qualité
parce que celui qui fournit un poisson de qualité aura un prix
correspondant au poisson qu'il produit.
Ce tri, nous n'avons pas l'intention de l'établir d'une
façon universelle au point de départ. Puisqu'il s'agit de
méthodes nouvelles, il faut roder graduellement ce système, et
nous avons l'intention, dès la prochaine saison de pêche, de
mettre en place un système de tri du poisson d'une façon
volontaire sur le territoire maritime, à un endroit aux
Îles-de-la-Madeleine, à un endroit sur la Basse-Côte-Nord,
et à deux ou trois endroits - trois endroits
préférablement - en Gaspésie, pour que les gens se
familiarisent avec la façon de faire le tri en fonction de la
qualité du poisson et pour qu'il y ait quelques années de rodage,
en 1982 et en 1983, avant d'étendre d'une façon obligatoire le
tri à l'ensemble du territoire québécois. Ainsi, le tri du
poisson, qui se fait dans plusieurs pays occidentaux et qui permet d'avoir un
poisson de meilleure qualité en payant aux pêcheurs un meilleur
prix pour du poisson de meilleure qualité, pourra graduellement
atteindre le stade opérationnel. C'est évident qu'au point de
départ les gens vont parler de différentes façons de faire
ce tri, mais ça pourra s'ajuster au cours de deux saisons de rodage, en
1982 et en 1983.
M. le Président, cette réglementation, qui deviendra la
clé de voûte de toute la modernisation du secteur des pêches
au Québec, va permettre, par la promotion que nous ferons au
développement de la commercialisation des produits marins avec les
entreprises du secteur, d'atteindre une meilleure commercialisation du produit,
avec des produits dont la régularité de la qualité sera
assurée, mais elle va nécessiter aussi un certain nombre
d'investissements dans les bateaux, pas dans tous les bateaux, mais dans un
certain nombre de bateaux.
Nous avons fait des études sur les investissements
nécessaires pour les bateaux qui ont plus de 65 pieds, pour ceux qui ont
entre 35 et 65 pieds et ceux qui ont moins de 35 pieds. C'est évident
que les équipements nécessaires sont différents et ne
comportent pas les mêmes coûts. Je peux dire que tous les bateaux
qui ont été construits selon la nouvelle politique d'expansion de
la flotte de pêche du Québec depuis 1977, en
général, répondent à ces normes de qualité.
Les bateaux récents qui ont été construits n'ont pas de
modification ou peu de modifications à faire pour répondre
à ces critères.
Dans la modernisation des cales des bateaux qui sera nécessaire,
là encore, il y a des subventions qui sont possibles, soit du
fédéral ou du Québec, ou des prêts à bas taux
d'intérêt.
J'ai mentionné tout à l'heure la possibilité au
point de vue de la modernisation des usines et la possibilité de
subventions. 11 va falloir aussi - c'est un des objectifs prioritaires que nous
avons moderniser les parcs d'hivernement. Pourquoi? Parce qu'avec le nombre de
nouveaux bateaux qui ont été construits ou de bateaux qui ont
été modernisés, les pêcheurs aimaient mieux pouvoir
localiser leurs bateaux de pêche au cours de l'hiver plus près de
leur résidence, plus près de
l'endroit où ils pêchent, où ils demeurent, pour
pouvoir effectuer des travaux au cours de l'hiver. Je pense, par exemple, aux
pêcheurs des Îles-de-la-Madeleine qui m'ont parlé d'un parc
d'hivernement. Je pense aux pêcheurs de Newport qui m'ont parlé
d'un parc d'hivernement sur la pointe où nous sommes allés
marcher ensemble, pour voir à quel endroit devrait être
situé le parc d'hivernement. Je pense aux pêcheurs de Blanc-Sablon
ou de la côte, à Brador ou à Blanc-Sablon, aux deux
municipalités; les gens de ce coin-là souhaitent avoir un parc
d'hivernement pour que leurs bateaux soient hivernés chez eux. Je pense
aux gens de Rivière-au-Tonnerre, par exemple. C'est une politique de
parcs d'hivernement dont la construction devrait commencer rapidement. Nous
sommes actuellement à discuter avec les gens du fédéral
puisque les fonds pourraient provenir d'une entente auxiliaire. J'ai
constaté, avec beaucoup de plaisir, que le député
fédéral de Gaspé semble être d'accord puisque je
lisais, dans le journal de la Gaspésie, Le Havre, qu'il avait l'air de
dire qu'il était d'accord pour qu'on fasse la construction d'un parc
d'hivernement à Newport.
Je pense qu'il n'y aura pas de problème au point de vue des
modifications à l'entente auxiliaire pour que ces constructions de parcs
d'hivernement puissent se faire et même commencer l'an prochain. Nous
sommes actuellement en discussion avec les gens pour que cela se fasse le plus
rapidement possible. Je souhaite que toutes ces constructions commencent en
1982. Donc, c'est un des éléments nécessaires.
Il y a aussi un autre élément qui va être
nécessaire. C'est l'entreposage de la bouette et de la glace pour les
pêcheurs. Au niveau des usines, je pense qu'il y a 50% des usines qui ont
leurs propres équipements de refroidissement, de
réfrigération, et d'autres utilisent des équipements assez
vieux puisque la plupart datent des années trente, du ministère
des Pêches du Québec. Dans la modernisation du secteur des
pêches, les équipements frigorifiques d'entreposage
nécessaires aux usines doivent appartenir aux usines et c'est pour cela
que 40% de la construction, de la modernisation des usines, des
équipements frigorifiques, aidera les entreprises à
s'équiper à ce point de vue.
Au point de vue des pêcheurs, nous sommes actuellement à
compléter des travaux pour l'équipement des centres de
pêche avec des machineries pour fournir de la glace et des
équipements pour garder de la bouette pour les pêcheurs, pour que
ces derniers ne souffrent pas, aient les équipements nécessaires.
Ce que nous pensons, en même temps, M. le Président, c'est que,
dans une perspective, encore une fois, de décentralisation, ces
équipement soient assumés, c'est-à-dire
gérés par les associations de pêcheurs elles-mêmes,
plutôt que d'avoir toujours des permissions à demander au
gouvernement. Les équipements pour la bouette et les équipements
pour la glace pourraient être fournis par le gouvernement et, en
même temps, les associations pourraient, avec leur structuration,
fournir, selon leurs critères, la glace et la bouette dont les
pêcheurs ont besoin. (17 h 20)
J'en ai parlé à beaucoup d'associations de pêcheurs
que j'ai rencontrées au cours de l'été. Avant de vouloir
embarquer dans des modernisations comme celle-là dans le secteur des
pêches, le premier souci que j'ai eu fut de visiter le territoire
maritime, de faire le tour de la Gaspésie au complet, de visiter les
quais, visiter toutes les bâtisses sans exception, visiter des
associations de pêcheurs, visiter toutes les bâtisses sans
exception. J'ai fait la même chose cet été; sur la
Basse-Côte-Nord, on m'a dit dans la plupart des villages que j'ai
visités que c'était la première fois qu'un ministre
mettait les pieds sur les territoires. Cela ne donne peut-être pas
grand-chose...
M. Levesque (Bonaventure): Question de privilège, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Oui.
M. Levesque (Bonaventure): Je pense que ma question de
privilège est bien justifiée. On peut laisser le ministre se
vanter de bien des choses, mais, lorsqu'il dit qu'il est le premier ministre
responsable des pêcheries à aller sur la Basse-Côte-Nord et
chacun des villages, je lui demande de faire bien attention, parce que je ne
pense pas qu'il y ait un ministre qui ait plus visité que moi tous les
endroits de pêche au Québec.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le ministre.
M. Garon: M. le Président, peut-être que le
député de Bonaventure est déjà allé, mais je
suppose que les gens que j'ai rencontrés étaient trop jeunes pour
se le rappeler. À moins qu'il l'ait fait en avion; à ce
moment-là, ils ne savaient pas qui était le passager. Je veux
vous dire que je l'ai fait en bateau.
M. Levesque (Bonaventure): Question de privilège, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Question de
privilège, M. le chef de l'Opposition.
M. Levesque (Bonaventure): Je me demande si le ministre est
réellement allé là, parce qu'il doit savoir qu'on ne peut
pas y
aller très facilement en avion, mais on peut y aller en hydravion
ou encore en hélicoptère ou encore on peut y aller en bateau,
comme vient de l'indiquer le ministre. Qu'il fasse attention, parce qu'à
force de parler il va peut-être me convaincre qu'il n'y est jamais
allé.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le ministre.
M. Garon: J'en ai fait des bouts en camion, des bouts en petit
avion de brousse, des bouts en bateau et des bouts en automobile parce que
au-dessus de la mer avec un hélicoptère à un moteur je
suis un peu nerveux.
La question de la glace et la question de la bouette et au cours... Le
député de Bonaventure pourrait m'accompagner, parce que je songe
à aller au mois de janvier sur la Basse-Côte-Nord pour expliquer
la réglementation aux gens dans les villages. J'y suis allé la
plupart du temps au cours de l'hiver, c'était la première fois
que j'y allais au cours de l'été. Auparavant j'y étais
allé au cours de l'hiver parce qu'ils m'ont dit: Dans le temps des
libéraux, ils venaient surtout dans le temps du homard. Je suis
allé au cours de l'été et j'ai l'intention d'y aller au
mois de janvier ou au début de février.
M. Levesque (Bonaventure): Question de privilège.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Question de
privilège.
M. Levesque (Bonaventure): Je ne peux pas laisser passer cela, M.
le Président, parce qu'il faudrait bien que le ministre sache que dans
ma propre région nous avons le meilleur homard au monde. Ah! je
sais.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le ministre.
M. Garon: Je ne pensais pas au député de
Bonaventure quand je parlais des gens qui visitaient le territoire maritime
dans le temps du homard. C'est évident que je ne pensais pas à
lui.
J'ai l'intention d'y aller pour expliquer aux gens la
réglementation, quelles sont les différentes étapes de la
réglementation, de quelle façon cela va se faire, quelles sont
les aides gouvernementales qui vont être disponibles à tous ceux
qui vont vouloir appliquer ces normes-là le plus rapidement possible. Il
faut prendre le temps et je pense que la meilleure période de
l'année où les gens sont disponibles, c'est au cours de
l'hiver.
Maintenant, ce que je souhaite, c'est que le gouvernement
fédéral fasse sa part là-dedans au point de vue des quais,
des havres et des ports parce que... Je suis allé à la
conférence...
Le Vice-Président (M. Rancourt): Je m'excuse, M. le
ministre, je vais vous demander de conclure assez rapidement, s'il vous
plaît!
M. Garon: J'ai vu récemment un rapport de la firme Roche
et Associés qui avait été commandé par le
gouvernement fédéral lui-même. Des photos de beaucoup de
quais, de havres et de ports dans cette étude indiquent que la
très grande majorité de nos quais et de nos havres de pêche
sont délabrés, sont en mauvais état et devraient
être modernisés.
Comme il s'agit d'une responsabilité fédérale, je
peux vous dire que les gens ont voulu dire que la question des lots de
grève est une question qui empêchait... Cela s'est dit, à
un moment donné. J'ai demandé qu'on règle cette question
très rapidement et cette question a été
réglée pour que la question des lots de grève ne soit pas
un empêchement pour la modernisation des ports de mer. Aujourd'hui la
question des lots de grève est réglée pour que la
modernisation des quais et des havres se fasse le plus rapidement possible
parce que la modernisation du secteur des pêches au Québec, comme
ailleurs, c'est un ensemble. Il faut que les quais soient modernes, il faut que
les bateaux soient bons, il faut que les usines soient modernes, il faut que
les camions qui transportent le poisson soient modernes et
réfrigérés, il faut que les équipements qui
fournissent la glace soient modernes. À des endroits, on m'a
montré des équipements en me parlant de l'âge plutôt
que de la rapidité, ce sont de vieux équipements.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le ministre, votre
temps est écoulé.
Des voix: Consentement! Des voix:Non!
Le Vice-Président (M. Rancourt): Si vous voulez
conclure.
M. Garon: Je conclus donc en disant que cette loi va dans le sens
de la modernisation du secteur des pêches. C'est avec beaucoup de
fierté que je présente aujourd'hui cette loi en deuxième
lecture au nom du gouvernement et je peux vous dire qu'au ministère,
tous les fonctionnaires qui y ont contribué sont très fiers que
ce travail ait pu être fait aussi rapidement afin d'être à
l'avant-garde au Canada dans le secteur des pêches.
Une voix: Bravo! Bravo!
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader de
l'Opposition et député de Bonaventure.
Des voix: Bravo!
Une voix: Tenez bien votre ligne, ça va partir!
M. Gérard D. Levesque
M. Levesque (Bonaventure): Je suis heureux, à titre de
député d'un comté du territoire maritime, le comté
de Bonaventure - comme vous venez de l'indiquer, M. le Président - de
pouvoir participer au débat sur ce projet de loi no 36, Loi modifiant la
Loi sur les produits agricoles et les aliments. Le titre lui-même ne
semble pas très éloquent quant à la nature des produits
dont nous discutons, mais je suis heureux de constater que le titre de la loi
elle-même, la Loi sur les produits agricoles et les aliments, sera
modifié du fait que nous étudions maintenant ce projet afin que
nous ayons désormais une Loi sur les produits agricoles, les produits
marins et les aliments.
Je suis heureux de constater que l'on poursuit une oeuvre ou une
orientation que j'avais indiqué vouloir prendre lorsque j'avais
suggéré que le ministère lui-même change de nom. On
avait songé à l'appeler le ministère de l'Agriculture et
de l'Alimentation de façon que ce ministère absorbe les
pêcheries. Il a été suggéré que le nom du
ministère lui-même soit changé en ministère de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation. Je suis donc
très heureux de voir que, même ici, on continue dans le même
sens, en attendant d'avoir un ministère autonome des
pêcheries.
D'après ce que le ministre nous a dit il y a quelques instants,
c'est pour un peu plus tard, car il a mentionné que ce serait
peut-être trop onéreux d'avoir les services en double entre le
ministère de l'Agriculture et le possible ministère des
Pêcheries; de toute façon, je comprends qu'il y ait une
complémentarité, particulièrement, dans le secteur de
l'alimentation. Il y a là, évidemment, des intérêts
qui se rejoignent et je continue de penser que, pour les gens du territoire
maritime, il serait fort intéressant d'avoir un ministère des
Pêcheries. D'ailleurs, lorsque les pêcheries étaient au
ministère de l'Industrie et du Commerce, il y avait là
également certains avantages. Il y avait la promotion industrielle.
Lorsqu'on parle de flotte de pêche, lorsqu'on parle d'usines de
transformation, on participe évidemment à une expertise fort
intéressante au ministère de l'Industrie et du Commerce.
On pourrait penser que la meilleure façon d'aider les
pêcheries serait de les rattacher au ministère des Finances;
à ce moment-là, ce qui leur manque le plus, elles pourraient le
retrouver là plus facilement. C'est bien le budget du ministère
qui serait de nature, s'il était augmenté, à aider
davantage les pêcheurs. (17 h 40)
En effet, lorsqu'on voit la somme consacrée aux pêcheries
dans la distribution du budget du Québec, on s'aperçoit que c'est
fort peu satisfaisant. Il y aurait lieu d'augmenter le budget. D'autant plus
que le gouvernement actuel, il y a quelques années, avait fait des
pronostics, pour ne pas employer le mot "promesses", fort intéressants,
dans un plan qu'on appelait le grand plan quinquennal des pêches.
Là, M. le Président, ce n'étaient pas les millions qui
manquaient. Ce n'était pas une question d'avoir 1 000 000 $, 2 000 000 $
2 500 000 $. C'était 200 000 000 $, M. le Président, le plan
quinquennal spectaculaire qu'on a lancé à ce moment. Je comprends
que le ministre dit: Moi, je n'étais pas là. D'ailleurs, le
ministre lui-même ne pèche pas par excès d'humilité
parce qu'il disait justement, le mardi 27 janvier 1981, et je vois le titre
dans le Soleil: "Garon regrette de n'avoir pas mis la main sur les pêches
maritimes un an plus tôt." Évidemment, je comprends que le
ministre voulait dire que lui n'aurait pas fait de semblables promesses.
À ce moment, M. le Président, il ne serait pas pris avec ce genre
d'engagement du gouvernement, dont il faisait partie, cependant. J'imagine que
ça avait été discuté quelque part. Je ne peux pas
imaginer que le ministre prédécesseur du ministre actuel avait
inventé ça de toutes pièces.
Cela avait été annoncé et tous les gens,
évidemment, qui avaient confiance dans ce gouvernement ont cru que
c'était sérieux. On s'aperçoit, aujourd'hui, M. le
Président, après quelques années, que le budget n'a pas
changé. Même l'année suivante, je pense qu'il avait
diminué. Le plan quinquennal, il est fort probable qu'on en ait un
autre. Évidemment, ce n'est pas tout à fait le propos qui touche
particulièrement le projet de loi que nous avons devant nous,
malgré qu'on parle de millions. M. le ministre parle des 10 000 000 $
qu'il consacre à la construction des bateaux, mais il ne nous a pas dit
cependant quelle partie de ces 10 000 000 $ a été utilisée
cette année. Il dit qu'il a 10 000 000 $. On sait qu'il y a un projet de
loi, une loi c'est-à-dire, qui existe dont le montant qui est
attribué à la construction de bateaux varie. Il a varié...
Quand je suis arrivé aux pêches, en 1960, je pense qu'il
était de 500 000 $. Ensuite, cela a monté graduellement. Je pense
que, quand j'ai quitté, c'était rendu à 3 500 000 $ ou 4
000 000 $. C'est rendu, en 1981, à 10 000 000 $. C'est même plus
bas que
l'inflation. D'ailleurs, M. le Président, si on regarde le prix
des bateaux, ce qu'on peut faire aujourd'hui avec 1 000 000 $, je vous assure
qu'on ne dépasse même pas un bateau de 65 pieds. On ne peut pas en
faire deux.
Je vous assure, M. le Président, que ça prend pas mal de
millions pour changer une flotte de pêche. Il serait peut-être bon
de se rappeler, lorsqu'on parle de flotte de pêche, qu'il y a,
d'après les renseignements que j'ai ici, dans la flotte
québécoise, 2533 bateaux, dont 21 ont plus de 65 pieds et 405 ont
entre 35 et 65 pieds. Si ces chiffres sont exacts, M. le Président, je
vous assure que ce n'est pas quelques millions que ça prendrait pour
moderniser la flotte de pêche. Mais c'est plusieurs dizaines, vingtaines,
cinquantaines, centaines de millions, pour réellement parler de
modernisation de la flotte de pêche. Je comprends que c'est un
défi extraordinaire pour le ministre, mais je pense qu'avant de parler
d'avoir changé beaucoup avec les 10 000 000 $ qu'il a dans sa loi. Ce
n'est pas nécessairement 10 000 000 $ qu'il a consacrés à
la construction des bateaux de pêche, parce qu'on s'informe dans les
chantiers; présentement, il y a des inquiétudes, surtout pour les
prochaines commandes, qui ne s'en viennent pas tellement rapidement. M. le
Président, il y a beaucoup d'inquiétudes dans les chantiers,
mais, là encore, ce n'est pas le propos que je veux entreprendre
à ce moment-ci. Cependant, je ne peux pas faire autrement que de relever
certaines choses que le ministre dit, parce qu'il est porté à se
vanter terriblement, le ministre. C'est un charmant garçon, quand on le
rencontre privément, mais, lorsqu'il arrive devant un micro, devant la
télévision ou quelque part, la, c'est de se vanter: Le Parti
québécois a... Depuis que le Parti québécois
est...
On dirait que tout est venu au monde avec le Parti
québécois en 1976. Le ministère des Pêcheries, lui,
est venu au monde, même pas en 1976, mais après 1976, depuis qu'il
est là. Je vous assure que tout est récent, M. le
Président. Je l'entendais parler, par exemple, des bacs c'est entendu
que c'est une technologie plus récente, qui n'existait pas en 1960.
Mais, lorsqu'il parle des politiques d'achat du Québec, lorsque
j'étais à ce moment-là dans ses fonctions aux
pêcheries, nous avions des politiques d'achat exactement dans le
même sens.
Ainsi, lorsqu'on a voulu, par exemple, me demander d'aider ceux qui
faisaient du hareng fumé aux Îles-de-la-Madeleine, j'ai dit:
D'accord, mais vous allez acheter des boîtes en bois qui viennent du
Québec. On les achetait ailleurs. Ce n'est pas nouveau. Je pourrais me
vanter de bien des beaux coups comme cela qu'on a faits. Mais ce n'est pas
parce que je faisais alors partie du Parti libéral ou que le ministre
fait partie actuellement du Parti québécois, je pense simplement
que tous les gouvernements doivent être capables de protéger les
intérêts des Québécois; c'est la
responsabilité des ministres ou des députés appelés
à exercer des fonctions à l'intérieur de cette
Assemblée.
M. le Président, on pourrait continuer. J'ai pris certaines notes
sur ce que le ministre disait, et il y a une chose à retenir. Il s'est
vanté d'avoir un projet de réglementation qu'il a
déposé avant l'étude du projet de loi. Voilà
quelque chose non pas d'inédit, mais quelque chose dont le gouvernement
dont il fait partie n'a pas pris l'habitude. Je le félicite pour avoir
agi de la sorte, parce que ce n'est pas un règlement d'une page ou deux,
c'est un règlement volumineux et je ne l'ai pas apporté avec moi.
C'est un règlement où il y a évidemment des
répétitions au point de vue technique, mais je crois que c'est un
règlement qu'il est important pour nous d'avoir entre les mains pour
pouvoir discuter de ce projet de loi, car nous avons là les intentions
assez précises du gouvernement, malgré qu'il s'agisse, encore une
fois, d'un projet de réglementation et qu'il sera soumis, comme
l'indique le ministre, aux intéressés au cours des prochaines
semaines. J'espère bien que ce n'est pas simplement de remettre cette
réglementation aux intéressés, mais c'est surtout de
consulter les intéressés pour bonifier ce règlement et le
rendre le plus réaliste possible: réaliste selon les objectifs
que nous poursuivons, mais également réaliste quant aux
possibilités et aux moyens de voir au respect de cette
réglementation. Quand je pense aux possibilités et aux moyens, je
pense évidemment au côté financier, en particulier, des
exigences de cette réglementation.
M. le Président, la qualité du poisson, c'est cela qui
fait l'objet de ce projet de loi. Nous savons que depuis quelques années
-le ministre l'a évoqué - il y a certaines lacunes qui se font
sentir au titre de la qualité de notre poisson, et cela pas seulement au
Québec mais dans tout le pays. Qu'il y ait, de la part du gouvernement,
une décision de déposer un tel projet de loi qui serait de nature
à donner au ministre des pouvoirs accrus soit, mais il ne faudrait pas
penser que ce projet de loi ne fait que du neuf; le ministre avait
déjà une loi qui lui permettait de réglementer
l'inspection du poisson. Ceci lui permet d'aller un peu plus en aval ou en
amont dans ce genre d'inspection. Il y a ce qui nous paraît... Le projet
de loi lui-même ne dit pas grand-chose, c'est une loi-cadre qui permet de
faire certains ajouts à la loi qui touche les produits agricoles et les
aliments. Ceci permet au ministre de présenter ses nouveaux
règlements qui touchent en particulier le tri qui se fait lorsque le
poisson arrive au quai. Évidemment, j'ai
plusieurs images à l'esprit à savoir comment le poisson
est retiré du bateau pour se rendre sur le quai et la façon dont
on le manutentionne entre le quai et l'usine. On ne m'apprendra pas grand-chose
là-dedans parce que j'ai vécu cela depuis mon enfance.
Mais depuis mon enfance également, il faut bien le dire, j'ai
toujours mangé du bon poisson. Cela ne m'est jamais arrivé de
manger du mauvais poisson lorsque j'étais en Gaspésie. Cela m'est
arrivé ailleurs, par exemple, de manger du poisson qui n'était
pas bon mais dans mon comté jamais il ne m'est arrivé de manger
du poisson qui n'était pas parfait et d'une saveur extraordinaire;
autrement dit, seulement à y penser, l'eau me vient à la bouche
et je me demande si on a besoin de ce projet. (17 h 50)
Probablement qu'on a besoin de ce projet de loi parce qu'il y a
peut-être des endroits où le poisson, une fois arrivé
à destination, n'est pas dans une condition qui lui permet de recevoir
la meilleure compensation possible. Autrement dit, sur certains marchés,
les produits marins québécois et même canadiens
reçoivent une compensation financière à un prix
quelquefois inférieur au poisson provenant d'autres pays. C'est pourquoi
il est important de nous assurer que ce poisson arrive aux consommateurs, que
ce soit aux États-Unis ou ailleurs au Canada ou en Europe, dans la
condition la plus parfaite possible.
C'est pourquoi nous appuyons tout effort qui est fait de ce
côté pour améliorer la qualité du poisson mais je ne
pense pas qu'il faille à ce moment-ci, pour arriver à cet
objectif qui est fort louable, utiliser des propos malheureux comme ceux que le
ministre a employés. Il parlait de "scrap" en parlant du poisson
québécois. J'ai même apporté ici des extraits...
M. Garon: M. le Président, question de
privilège.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Question de
privilège, M. le ministre.
M. Garon: À aucun moment je n'ai utilisé le mot
"scrap" et je n'ai jamais employé un terme dérogatoire à
l'endroit du poisson du Québec. S'il y en a qui ont écrit des
choses en ce sens-là, jamais, je n'ai tenu de tels propos.
M. Levesque (Bonaventure): Je suis heureux que les journalistes
se soient trompés. Je l'ai lu et, si le ministre le veut, je le lui
remettrai après. Mais si ce n'est pas vrai, tant mieux. Tant mieux si le
ministre n'utilise pas ces mots, mais on a écrit que le ministre avait
tenu de tels propos. Peut-être qu'à un moment donné, quand
le ministre parle fort, les mots lui échappent, un peu comme lorsqu'il
promet des choses dans le comté de Bonaventure avant les
élections, ça lui a peut-être échappé. Mais
lorsqu'il y a un communiqué de presse qui dit qu'il l'a dit et que
ça parvient de son bureau, c'est un peu plus gênant de le
nier.
Ceci étant dit, je pense que l'important dans ce projet de loi,
c'est de nous assurer non seulement que la réglementation corresponde
aux besoins, mais également que cette loi permette une
réglementation réaliste. Il faut penser à ceux qui devront
appliquer cette réglementation. C'est évident que si on veut
arriver, le 1er janvier 1985... Je pense ne pas me tromper en disant que la
réglementation obligatoire, définitive et absolue est
prévue pour le 1er janvier 1985. D'ici là, on dit aux
producteurs, on dit aux transformateurs, on dit à tous les
manutentionnaires: Préparez-vous, la réglementation s'en vient.
Préparez-vous tout de suite. Vous avez deux ans, trois ans, et ce sera
fini. C'est ça que vous dites dans votre réglementation.
Mais dites-vous en même temps ce que ça va coûter? Le
ministre n'a pas tellement parlé de prix. Moi, c'est ça qui
m'inquiète particulièrement parce que, lorsqu'on consulte
l'industrie, lorsqu'on consulte les producteurs, on arrive à des
chiffres extrêmement élevés pour le milieu. Il ne faut pas
oublier que, dans le domaine des pêches, nous avons une industrie
localisée en Gaspésie, sur la Basse-Côte-Nord, aux
Îles-de-la-Madeleine. Les chiffres peuvent paraître raisonnables
dans un domaine comme l'agriculture, qui couvre presque tout le territoire du
Québec. Peut-être que les chiffres n'ont pas impressionné
le ministre. Qu'est-ce que 32 000 000 $? Ce n'est pas grave lorsqu'on parle du
domaine agricole parce que ça touche beaucoup plus de monde, il y a
beaucoup plus de gens dans le domaine de l'agriculture que dans le domaine des
pêches. Lorsqu'on pense à des chiffres comme ceux-là, on
pense, à ce moment-là, à des chiffres qui vont faire mal
quelque part. Le ministre, évidemment, je ne l'ai pas entendu parler de
la façon dont ces coûts seront financés. On parle de 36 000
000 $, c'est le chiffre qui est retenu présentement lorsqu'on parle des
investissements nécessaires. Ce sera sûrement plus que cela si on
veut respecter la réglementation qui est envisagée. On ne met
presque rien dans ces 36 000 000 $ pour la flotte de pêche. Or, M. le
Président, les bateaux, présentement, ne sont pas capables, ne
sont pas prêts à respecter cette réglementation. La flotte
est vieillie. Le ministre parlait des bateaux construits récemment
disant qu'ils pourraient satisfaire aux normes de la réglementation. Je
dis: Attention! On m'informe que même les bateaux construits aujourd'hui
sont construits selon des plans conçus il y a une vingtaine
d'années. Alors, si on veut aménager ces nouveaux bacs,
ces nouveaux containers, si l'on veut, pour cette flotte-là, on va avoir
des difficultés. On risque d'avoir des difficultés
sérieuses et sûrement de provoquer des coûts assez forts. On
dit même, chez certains experts, que la seule modification de la flotte
actuelle voudrait dire, en plus de ces 36 000 000 $ dont on parle pour les
usines, etc., au moins une dizaine de millions de dollars.
Je comprends que le ministre a l'air surpris, mais si cela arrive,
à ce moment-là, il devra... Il ne sera plus là. Qu'est-ce
que vous voulez? Il peut dire n'importe quoi aujourd'hui parce que c'est en
1985. Mais d'ici là, M. le Président, il y a des gens qui sont
fort inquiets: les propriétaires de bateaux. Lorsqu'on parle des bateaux
de 65 pieds et plus, c'est assez délicat, comme lorsqu'on parle des 45
pieds. Mais lorsqu'on parle des 45 pieds et moins, il y a un producteur
à Gaspé qui nous disait récemment: Si on met cette
réglementation à exécution, finalement, tout ce qu'on
pourra aller chercher avec notre petit bateau, c'est à peu près
une commande d'épicerie. Ces gens-là ont peut-être
exagéré, caricaturé, mais je pense qu'il faut
écouter le producteur. Il y en a trop qui pensent politique et qui ne
pensent pas assez consultation. Il ne faut pas penser que, parce qu'on a
préparé une réglementation, elle est parfaite. D'ailleurs,
le ministre de la Justice a donné un bel exemple, tout à l'heure,
en disant du projet de loi qu'il présentait qu'il n'avait aucune
prétention que son projet de loi était une réponse
définitive, que ce projet de loi était parfait et qu'il invitait
les députés à apporter une contribution pour le
bonifier.
Je pense que le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de
l'Alimentation devrait aborder l'étude de ce projet de loi avec le
même esprit. Et c'est dans cet esprit également, M. le
Président, sachant que je dois coopérer avec le ministre, sachant
que son appétit doit être assez important - je me permets
d'être un peu personnel puisqu'il a parlé de mon âge -je
vous fais remarquer qu'il est 18 heures et je propose la suspension de nos
travaux.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Donc, nos travaux sont
suspendus jusqu'à 20 heures.
(Suspension de la séance à 17 h 59)
(Reprise de la séance à 20 h 11)
Communication du président sur la
retransmission
des délibérations du caucus du Parti
québécois
Le Président: Veuillez vous asseoir, s'il vous
plaît!
M. le leader de l'Opposition, je pense que c'est vous qui aviez la
parole mais vous me pardonnerez si je respecte l'engagement que j'avais pris de
rendre compte à cette Assemblée avant 18 heures; cependant, mon
enquête a été plus longue que prévu, elle est
maintenant terminée et je suis en mesure de vous dire de façon
très précise et très claire ce qui est arrivé.
Depuis que j'ai appris au cours de la journée, même avant
que la question de privilège soit soulevée à
l'Assemblée nationale, qu'il aurait pu se glisser une erreur technique
quant à la diffusion et à l'enregistrement sur une période
d'environ quinze minutes des délibérations du caucus du Parti
québécois tenu aujourd'hui dans la salle 81-A, je me suis
employé à colliger tous les faits pertinents et à
rencontrer toutes les personnes concernées.
Après avoir rencontré lesdites personnes et obtenu les
informations désirées, après avoir même
visité les équipements et les studios, appuyé d'affidavits
appropriés des personnes rencontrées, signés en bonne et
due forme devant le secrétaire général de
l'Assemblée nationale, commissaire délégué à
l'assermentation, je suis en mesure de vous faire part des conclusions
suivantes.
Il y a eu effectivement diffusion sur perroquet, entre,
approximativement, 14 h 28 et 14 h 45, à partir d'un seul microphone sur
une vingtaine qui sont dans la salle 81-A, d'une partie des
délibérations du caucus du Parti québécois.
Selon la technique habituelle, le technicien en service avait mis en
ondes toutes les salles de commission et le salon bleu, sachant qu'au salon
bleu l'Assemblée se réunirait à 15 heures, qu'une
commission siégerait au salon rouge à 14 h 30 et qu'une autre
commission parlementaire siégerait à la salle 81-A à
compter de 15 heures, ignorant, en outre, qu'un caucus du Parti
québécois se tenait à la salle 81-A, à ce
moment.
C'est la première fois depuis que le système est en
service qu'une pareille chose se produit. Des directives, en
conséquence, sont actuellement émises verbalement mais le seront
par écrit demain afin que cette situation ne se reproduise plus. Je suis
personnellement détenteur de la cassette qui a été
enregistrée et je verrai au cours des prochaines heures à
procéder à sa destruction. Je continue à avoir une
entière confiance aux employés de l'Assemblée nationale et
tout particulièrement à ceux de la radiotélévision
des débats. Je suis absolument convaincu que les deux partis politiques
représentés en cette Chambre partagent avec moi ce sentiment de
confiance que j'ai envers les employés de l'Assemblée nationale
et ceux de la radiotélévision des débats. Merci.
M. Jean-François Bertrand M. Bertrand: M. le
Président...
Le Président: M. le leader adjoint du gouvernement.
M. Bertrand: Je tiens à vous remercier pour la diligence
que vous avez mise à récolter tous les faits pertinents pour que
nous soyons, dans les plus brefs délais, rassurés sur les
événements qui se sont produits cet après-midi. Nous
sommes heureux aussi de savoir que vous avez mené à bonne fin
toutes les opérations qui se devaient d'être menées pour
que, premièrement, les enregistrements soient détruits et
deuxièmement, que cette situation ne se reproduise plus, j'espère
que ce qui s'est passé cet après-midi sera de nature à
nous faire réfléchir encore davantage sur ce que le leader de
l'Opposition appelait, à juste titre, la nécessité absolue
de protéger la confidentialité des réunions des formations
politiques, surtout dans le contexte où elles se déroulent, M. le
Président. C'est un peu à cause des salles qui sont mises
à notre disposition; on n'y peut rien, ce sont des salles
déjà munies d'équipement qui donne toutes sortes de
possibilités. Je pense qu'on en a vécu une cet
après-midi.
Il y a une seule question que j'aimerais vous poser, M. le
Président. J'aimerais savoir, parce que le député de
Brome-Missisquoi vous a remis cet après-midi, devant l'ensemble de nos
collègues, une cassette qui contenait une partie ou le tout de
l'enregistrement qui était parvenu sur, comme on l'appelle dans le
langage, le perroquet du whip en chef de l'Opposition, qu'est-il advenu de cet
enregistrement, M. le Président? Est-ce qu'il a été lui
aussi détruit au moins dans sa teneur, dans son contenu? J'aimerais bien
qu'on puisse, je l'espère, remettre au député de
Brome-Missisquoi la cassette elle-même, au prix où elles se
vendent, et s'assurer qu'effectivement toutes les informations qui pouvaient y
être contenues sont détruites, quoique j'imagine que le
député de Brome-Missisquoi peut en garder un certain nombre dans
sa mémoire. Mais selon ce que je me rappelle, de toute façon,
entre 14 h 28 et 14 h 45, il ne s'est pas déroulé le genre
d'événement sur lequel l'Opposition aurait aimé
capitaliser. Pour me rappeler nos délibérations de cet
après-midi, entre 14 h 28 et 14 h 45, il y a peut-être eu tout au
plus certaines primeurs, mais pas plus.
Le Président: Auparavant, M. le whip de l'Opposition,
j'aimerais dire au leader du gouvernement qu'effectivement - j'ai oublié
de le faire - je suis détenteur également et possesseur de la
cassette que m'a remise le député de Brome-Missisquoi. Je l'ai
entendue et, pour mettre un peu d'humour dans cette affaire, pour une fois que
j'aurais pu participer à un caucus du Parti québécois, ce
n'était presque pas compréhensible...
M. Paradis: M. le Président, question de
privilège.
Le Président: ... et non pas à cause de votre
enregistrement, M. le député de Brome-Missisquoi. M. le whip de
l'Opposition.
M. Michel Pagé
M. Pagé: M. le Président, je vous remercie. Je dois
vous faire part, au nom des collègues de l'Opposition officielle, que
nous apprécions la diligence avec laquelle vous avez mené
l'enquête par laquelle est confirmé le fait que nous avons
porté à la connaissance de l'Assemblée nationale cet
après-midi, soit le fait, combien malheureux et combien regrettable,
qu'une assemblée, et plus particulièrement le caucus d'une
formation politique ici à l'Assemblée, ait été
l'objet d'une retransmission électronique par la voie du journal des
Débats, que, somme toute, on a pu entendre cet après-midi. M. le
Président, je suis satisfait, évidemment, de la
déclaration que vous faites. Je suis heureux de constater que cela a
été une erreur, un accident ou, quelque chose d'autre. Là
où je m'interroge, M. le Président, c'est sur le fait que nous
n'ayons aucun moyen, que ce soit le whip du gouvernement ou moi-même qui
présidons ces caucus, qui par surcroît ne sommes ni un ni l'autre
des techniciens en électronique ou de quelque qualification que ce soit,
de nous assurer - le président non plus - lorsqu'on s'asseoit à
une réunion de caucus, qu'il n'y a pas un commutateur quelconque et un
microphone d'ouverts?
Cela soulève évidemment toute la question des locaux qui
sont mis à notre disposition par le président de
l'Assemblée nationale. Il y a quelques semaines nous vous adressions, le
whip en chef du gouvernement et moi-même, une lettre sous notre signature
conjointe, par laquelle nous vous demandions la possibilité de
siéger dans un autre local que les salles 81-A et 91-A.
Je dois vous dire, en conclusion de tout cela, M. le Président,
que je suis satisfait de l'enquête que vous avez menée.
J'espère que des faits analogues ne se reproduiront pas. J'ose croire
qu'on pourra, en toute sécurité et avec toutes les garanties
appropriées, continuer à délibérer dans nos caucus,
parce que ça, c'est l'essentiel de la démocratie. Ce qui se passe
dans le caucus du Parti québécois, ce qui se passe dans le caucus
du Parti libéral du Québec, M. le Président, cela ne peut
pas, cela ne doit pas être livré publiquement.
En terminant, il y a toujours cette
inquiétude que j'ai, à moins que nos partis respectifs
nous votent des budgets pour qu'on aille suivre un cours pour être en
mesure de vérifier si les micros fonctionnent ou ne fonctionnent pas, et
je vous invite à vous pencher sur toute cette question de l'allocation
des salles et des locaux mis à notre disposition.
Le Président: M. le whip du gouvernement. (20 h 20)
M. Guy Chevrette
M. Chevrette: M. le Président, je me joins à mes
collègues pour vous remercier aussi de la diligence que vous avez
manifestée. Je voudrais également personnellement m'excuser. Je
le fais avec beaucoup d'humilité. J'ai sans doute exprimé, sur le
moment, certains sentiments agressifs quand j'ai découvert qu'il y avait
des boutons levés. Je m'excuse auprès du personnel, mais je dois
vous avouer que je me joins à mon collègue de Portneuf pour dire
que nous tenons essentiellement à la confidentialité, il y a
tellement de fuites autres que par l'électronique. Il me semble qu'on
doit au moins, de ce côté-là - parce qu'il y a même
des armoires qu'il faut surveiller quelquefois - avoir la certitude qu'on n'a
pas à faire les chiens policiers et à se courir dans les
passages. Je pense qu'on a le droit au respect de la confidentialité de
nos caucus.
Je vous remercie de votre orientation suivant laquelle vous allez
prendre les moyens nécessaires pour nous assurer cette
confidentialité et, quant à moi, je suis très heureux de
constater que c'est une erreur humaine; au lieu d'un bouton, on en tire quatre
à la fois. J'espère que la directive indiquera qu'un bouton
suffit à la fois; une chose se contrôle toujours mieux que quatre.
J'espère une chose, c'est qu'on n'ait plus a déplorer ceci
à l'Assemblée nationale, d'autant plus que, je crois que dans les
circonstances, avec tout ce qui s'est passé depuis quelque temps au
niveau des rumeurs et de tout, j'espère que cela ne viendra pas entacher
la réputation de l'Assemblée nationale. C'est une erreur humaine,
je le prends comme tel. Je vous remercie infiniment d'être des plus
vigilants dans l'application de vos directives.
Le Président: M. le whip du gouvernement et M. le whip de
l'Opposition, je vois que vous êtes unanimes au moins sur un point, c'est
sur la lettre que vous m'avez écrite.
M. Chevrette: Voulez-vous me permettre une question de
privilège?
Le Président: S'il vous plaît! S'il vous
plaît!
Oui, sur la radiotélévision pour... Mais, effectivement,
les directives ont été émises verbalement et seront
émises demain par écrit. Mais s'il s'avérait que,
malgré cette directive, techniquement, il soit encore possible que ces
choses arrivent, soyez assurés que l'argument que vous venez de soulever
me touche profondément et que, possiblement, vous allez avoir gain de
cause dans la demande commune que vous m'avez faite relativement à la
salle 101-B. Ceci n'est pas un engagement, c'est la solution de dernier
recours. Mais si, malgré les directives, ces choses se reproduisaient,
il est bien évident que la salle 101-B assurerait aux deux partis
politiques cette confidentialité à laquelle vous avez droit.
En terminant, M. le whip du gouvernement, sans vous reprendre, je
voudrais dire qu'il ne s'agit pas d'une erreur humaine. Un mot très
important que j'ai dit dans mon texte: ... "selon la coutume et la technique
habituelle." Ce n'est donc pas une erreur humaine, c'est une mauvaise habitude
qui s'est propagée au cours des années d'ouvrir et de mettre en
ondes, environ 30 minutes avant le début des séances, le salon
bleu et les salles des commissions parlementaires. Donc, ce n'est pas une
erreur humaine, c'est une mauvaise habitude et un mauvais
procédé, procédé qui, à partir de demain,
sera changé.
Ce n'est donc pas l'erreur d'une personne, c'est une personne qui a fait
mécaniquement un geste qui se fait depuis des années. À
partir de demain, cela ne se fera plus. Merci beaucoup.
M. Chevrette: M. le Président, si vous me permettiez un
dernier mot. Si c'est vrai que cette mauvaise habitude existe depuis fort
longtemps, on me dit qu'il y a beaucoup de comités de travail qui
auraient été enregistrés. J'espère que vous
détruirez tout cela. Il y a même les femmes de ménage qui
sont enregistrées en changeant les verres.
Le Président: M. le député de
Brome-Missisquoi, je vais garder votre cassette pour la détruire.
M. Paradis: Justement, une chose m'inquiète, M. le
Président; de façon que ça ne paraisse pas dans le rapport
du Vérificateur général, quant au matériel dont je
suis responsable, j'aimerais que vous informiez le Vérificateur
général que le député de Brome-Missisquoi a eu une
de ses cassettes détruite par ordre du président de
l'Assemblée nationale.
Le Président: M. le député de
Brome-Missisquoi, je ne sais pas si vous étiez ici lors de la
défense de mes crédits pour la première fois, en mai ou en
juin 1981, mais
la question m'avait été posée, je pense, par un
membre de l'Opposition. J'avais dit, à ce moment-là, qu'une
enquête maison m'avait démontré que ce n'était pas
1200 cassettes, mais 297 cassettes, précisément, qui manquaient
à l'Assemblée nationale du Québec. Merci.
Là-dessus, je pense que la parole était au leader de
l'Opposition et député de Bonaventure.
Projet de loi no 36
Deuxième lecture
M. Gérard D. Levesque (suite)
M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, nous revenons
maintenant, si je comprends bien, à l'étude en deuxième
lecture du projet de loi no 36, Loi modifiant la Loi sur les produits agricoles
et les aliments. L'une des premières dispositions de ce projet de loi
fait que cette loi s'appellera désormais, si elle est adoptée par
cette Chambre, Loi sur les produits agricoles, les produits marins et les
aliments. Or, nous avons dû nous quitter à 18 heures, alors que
j'avais eu l'occasion d'entreprendre cette étude et que j'intervenais
à la suite du ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de
l'Alimentation. J'avais rappelé, à ce moment, l'importance des
pêcheries dans l'économie régionale de l'Est du
Québec. J'avais en même temps souscrit aux objectifs poursuivis
par le projet de loi, c'est-à-dire une amélioration toujours
possible de la qualité du poisson et j'en étais, à ce
moment-ci, à attirer l'attention de cette Chambre sur les
conséquences financières que comportent ou que pourraient
comporter l'adoption et la mise en oeuvre de ce projet de loi.
En effet, les chiffres qui nous sont donnés sont assez
importants. Malgré que le ministre ait dû réserver la
révélation de ces chiffres pour son droit de réplique,
j'aurais préféré qu'il le fasse dans sa
présentation. Mais il avait passé tellement de temps à
vanter sa propre performance depuis un an ou deux, son parti, etc., qu'il a
oublié de nous donner l'essentiel ou ce qui devrait être
très près de l'essentiel: Combien cela va-t-il coûter et
qui va payer? Si ceux à qui j'ai pu poser la question ont raison le
moindrement, il s'agit de sommes considérables compte tenu,
évidemment, comme je le mentionnais avant la suspension, que ces sommes
sont dans un domaine limité territorialement, géographiquement.
Nous ne parlons pas de chiffres reliés, par exemple, à la grande
industrie ou à l'agriculture, qui touche à peu près toutes
les régions du Québec, mais nous touchons un secteur très
limité - je donnais quelques statistiques - où nous avons affaire
à environ 4000 pêcheurs, où nous avons affaire à
environ 86 usines de transformation des produits marins et où nous avons
affaire à une valeur de débarquement d'une quarantaine de
millions de dollars et peut-être d'une mise en marché d'environ
100 000 000 $. Alors, il ne faut pas penser à une industrie qui
s'étendrait partout au Québec et qui toucherait des sommes
beaucoup plus importantes en chiffres absolus, malgré - comme je l'ai
mentionné il y a quelques instants - qu'il ne faut pas sous-estimer
l'importance des pêcheries lorsque l'on prend seulement l'économie
d'une région comme celle du territoire maritime, c'est-à-dire la
Basse-Côte-Nord, la Gaspésie et les Îles-de-la-Madeleine.
Pour ces régions les pêcheries sont d'une importance vitale et
primordiale, mais, encore là, lorsque l'on pense à la
réglementation qui suivra l'adoption de ce projet de loi, on
s'aperçoit qu'il y a des sommes relativement considérables qui
vont être nécessaires si on veut donner suite au programme
d'amélioration de la qualité du poisson. Là, on touche
essentiellement la flotte de pêche. Il va falloir faire des modifications
dans les navires, dans les bateaux, il va falloir investir de ce
côté-là. (20 h 30)
De plus, il va falloir imaginer des frais, le ministre l'a
lui-même admis, pour le tri du poisson, où il y aura une facture
tripartite, si l'on veut, les usines, les pêcheurs et le gouvernement
devant payer un certain écot pour assurer que ce tri soit fait d'une
façon aussi impartiale que possible et que l'on garde une certaine
neutralité. Il y a les nouveaux inspecteurs qui s'ajoutent aux
inspecteurs qui sont déjà tout près dans les usines, les
inspecteurs fédéraux qui s'ajoutent aux inspecteurs provinciaux
qui sont dans les entreprises de détail. Pour ces inspecteurs du tri,
encore là il y a des coûts. Mais là où les
coûts sont encore plus considérables, c'est dans la modernisation
de ces usines où on a tellement de conditions dans l'avant-projet de
règlement qui nous a été soumis. Je crois que les chiffres
du ministère établissant à environ 32 000 000 $ les
changements qui devront être faits dans les usines.
Donc, il y a des frais qui pourraient être, d'après les
chiffres qu'on m'a fournis, de 10 000 000 $ et plus pour la flotte de
pêche, il y a des frais pour le débarquement et le tri du poisson,
il y a également des frais pour l'acheminement des quais jusqu'à
l'usine. Le ministre a même mentionné des chemins de terre qui
devraient probablement être pavés parce qu'il a dit que le poisson
en arrachait en se promenant entre le quai et l'usine sur certains chemins de
terre, avec de la poussière, etc.
M. Ryan: Ce n'est pas dans Bonaventure!
M. Levesque (Bonaventure):
Évidemment, je ne sais pas...
M. Ryan: Cela ne peut pas être dans Bonaventure!
M. Levesque (Bonaventure): ...quelles sont les intentions du
ministre, mais, si on ne pave pas, au moins on va être obligé de
mettre le poisson dans des contenants qui sont à l'abri de la
poussière.
Enfin, ce sont tous des règlements qui, sur papier, paraissent
fort défendables, mais cela fait qu'à première vue, nous
sommes devant une dépense ou un investissement qui serait de l'ordre, si
je prends les chiffres du ministre, de 36 000 000 $ à 40 000 000 $ et,
si je prends les chiffres de l'industrie, c'est plus près de 50 000 000
$. Alors, soyons bon prince, disons que c'est entre 35 000 000 $ et 50 000 000
$. Mais qui va payer cela? Quand on songe à la situation des
pêches aujourd'hui, lorsqu'on songe à la situation des usines
aujourd'hui qui ont infiniment de difficultés, non pas seulement
à rencontrer les deux bouts, comme on dit, mais à faire face au
déficit d'opération, qui va payer, M. le Président? Les
pêcheurs? On parle des agriculteurs qui ont de la difficulté; mon
bon ami, le député de Beauce-Sud, attire continuellement
l'attention du même ministre sur les difficultés des agriculteurs,
mais les difficultés des pêcheurs, c'est au moins aussi pire et le
ministre le sait; D'autant plus que le ministre lui-même a dû
participer au raid du ministre des Finances. On sait que le ministre des
Finances a pris tous les moyens à sa disposition pour aller taxer tout
ce qui était taxable au Québec et, si c'avait été
possible, il serait allé à l'extérieur du
Québec.
Il est même rendu souvent à Ottawa de ce temps-ci, et
à Toronto et je m'imagine...
M. Ryan: À Halifax!
M. Levesque (Bonaventure): ... et à
Halifax aussi et j'ai l'impression qu'il va peut-être finir par
aller taxer même à l'extérieur du Québec.
De toute façon, le ministre a dû participer, comme ses
collègues, volontairement ou non, de bon gré ou non, à
l'opération taxe. On sait que le ministre des Finances est allé
partout, il est allé dans l'impôt sur le revenu des particuliers,
il est allé dans la bière, il est allé dans l'essence; il
y est allé, comme on le sait, on en a entendu parler tout
récemment, pas seulement 20%, maintenant, il y va de 40%.
M. Ryan: Hydro-Québec!
M. Levesque (Bonaventure): Hydro-Québec! Qui a
parlé d'Hydro-Québec? II me semble qu'on a parlé de cela
ici récemment, je crois. Je pense que c'était le projet de loi no
16. Le ministre des Finances et le ministre d'État au
Développement culturel nous disent: Vous en avez trop parlé. Non!
Je veux l'informer que, s'il attend encore ici quelque temps, ce soir, il aura
l'occasion d'en entendre encore parler.
Le ministre des Finances, en effet, est allé à
Hydro-Québec, non pas seulement pour la hausse des tarifs, et
particulièrement à partir du 1er janvier 1982, mais il s'est
assuré des revenus de milliards additionnels. D'ici à deux, trois
ou quatre ans, on en sera rendu à 1 500 000 000 $ par année qu'il
va aller chercher encore quelque part à Hydro-Québec. C'est ainsi
qu'on a fonctionné. Les collègues du ministre le savent, ils ont
dû plier devant l'appétit du ministre des Finances dans le domaine
de l'immatriculation des véhicules automobiles, dans l'assurance
automobile, dans l'assurance-maladie, où on a doublé les primes
des employeurs, et les effets que tout cela peut avoir sur l'employé et
sur les consommateurs, etc. Cela a été fait sur toute la ligne.
Je pensais que, dans le cas du ministre de l'Agriculture, des Pêcheries
et de l'Alimentation, le ministre des Finances rencontrerait un mur solide,
infranchissable, insaisissable, intouchable, un mur qui aurait signifié
que c'est assez. Le ministre, malheureusement, a dû faire comme les
autres, a dû baisser pavillon. Nous avons vu au cours de
l'année... Cela ne paraît Das, les gens ne parlent pas trop de
ça mais, dans le milieu, les pêcheurs, les producteurs le savent.
Ils savent ce qui est arrivé à différentes petites choses
que mon collègue de temps en temps... Par exemple, les assurances des
bateaux. Jusqu'à maintenant, les assurances des bateaux, cela allait
très bien. Les pêcheurs voyaient qu'on avait un gouvernement qui
payait l'assurance sur les bateaux. Qu'est-ce qui arrive? On demande simplement
aux pêcheurs de payer 50% des primes. C'est tout.
Arrivons à la bouette. Quelqu'un me demandait dans cette Chambre:
Qu'est-ce que le ministre dit là? La bouette, qu'est-ce que c'est
ça? J'ai dû expliquer ce que c'était que la bouette. Le
ministre, peut-être, il y a deux ou trois ans, n'avait jamais entendu
parler de ça non plus. Ah, le grand-père était
pêcheur? Peut-être qu'il avait entendu parler de ça. Il y a
une bonne possibilité. Mais ce n'est pas tout le monde qui a la chance
d'avoir un grand-père pêcheur. C'est très bien. Je vous
félicite d'ailleurs. Ce n'est pas votre faute, mais enfin!
M. le Président, cela a été ainsi un peu partout.
On augmente les frais continuellement. On taxe d'une façon directe d'une
façon indirecte. C'est toujours la même chose, c'est toujours le
même processus. On le retrouve ici. On parle de la
qualité du poisson. Qu'est-ce qui vient à votre esprit, M.
le Président, quand on parle de la qualité du poisson? La
première chose qui vous vient à l'esprit, sans doute, c'est: Moi,
si j'ai du poisson, la première chose que je dois faire, c'est de le
garder au frais sur la glace. C'est la première chose. Je vous assure,
M. le Président, que ça prend beaucoup de glace dans l'industrie
des pêches.
Qu'est-ce qui arrive dans la glace? M. le Président, avant le 15
août 1981 quel était le taux, qu'est-ce qu'on imputait aux
pêcheurs, aux producteurs de poisson? La tonne métrique, 9,65 $.
À partir du 16 août 1981, il n'y a pas longtemps de ça, il
y a quatre mois, jusqu'au 31 décembre, c'est-à-dire
jusqu'à la fin de ce mois-ci, au lieu de 9,65 $, on a trouvé une
autre forme de compensation pour payer la glace. Je ne veux pas dire, à
ce moment-ci, que la glace ne vaut pas ça. Mais qu'est-ce que notre bon
gouvernement faisait pour aider les pêcheurs? Parce que c'est une forme
d'aide que de vendre à meilleur marché que l'on produit. C'est
clair. C'est un peu comme le taux d'intérêt des pêcheurs,
cela a toujours été extraordinaire qu'on n'ait jamais
chargé d'intérêts aux pêcheurs dans les prêts.
C'était zéro. Alors, on ne peut pas dire que ce n'est pas une
bonne politique. Mais je fais attention au ministre parce que je sais quelles
sont ses intentions, et je fais plus que les deviner. (20 h 40)
Revenons à notre tonne métrique de glace, M. le
Président. On sait combien les producteurs ont besoin de glace, combien
les bateaux ont besoin de glace, tout le monde a besoin de glace lorsqu'on
parle de qualité du poisson. Les règlements envisagés
demandent encore, évidemment, plus de glace. Là, il faut que tout
soit à tel degré centigrade maximal, etc. Donc, on va le savoir
que cela va prendre de la glace et de plus en plus de glace. Or, qu'est-ce qui
arrive? Il y a quatre mois, la glace coûtait 9,65 $ la tonne
métrique. Maintenant, quelques mois plus tard, c'est 14,50 $ la tonne
métrique, cela, c'est pour le pêcheur. Pour l'industriel et le
commerçant, au lieu de 9,65 $, c'est 19,30 $ la tonne métrique
et, pour les pêcheurs du Nouveau-Brunswick qui viennent s'accrocher de
temps en temps chez nous, c'est 34 $ la tonne, le prix coûtant. Je savais
que le ministre répondrait cela.
À partir du 1er janvier 1982, c'est-à-dire dans un mois,
de 9,65 $ qu'elle était il y a quatre mois, 14,50 $ qu'elle est à
l'heure actuelle, elle sera à 21,75 $ la tonne métrique; dans
moins de six mois, on passe de 9,65 $ à 21,75 $. On ne peut pas dire que
le ministre des Finances n'a pas fait un bon travail, n'est-ce pas? On nous
arrive avec des exigences; la qualité du poisson, et on dit que cela va
prendre beaucoup de glace et beaucoup d'eau fraîche, cela va exiger une
modernisation des bateaux, modernisation des usines, etc. À
côté de cela, on apporte ces augmentations considérables.
Ce n'est pas habituer les gens tranquillement à une augmentation que de
passer de 9,65 $ à 21,75 $ dans un mois pour les petits pêcheurs -
vous aimez parler de cela, les petits - et, pour les industriels et les
commerçants, à 38,60 $. Eux, ils payaient 9,65 $, six mois
après, ils sont rendus à 38,60 $ la tonne métrique et,
pour les pêcheurs du Nouveau-Brunswick qui viennent s'accrocher de temps
en temps chez nous, cela sera 39,70 $. Si le prix coûtant était,
trois mois avant, à 34 $, j'imagine que le prix coûtant n'a pas
augmenté en un mois de 5,70 $, il doit y avoir un petit profit ou
quelque chose qui ne va pas. Ou bien c'était en bas du prix
coûtant tout à l'heure ou, si c'était le prix
coûtant, il y a maintenant un petit profit.
De toute façon, ce n'est pas le but de mon propos, c'est
plutôt de voir la progression des coûts que l'on impose
présentement aux pêcheurs. Cela est seulement une petite partie de
l'augmentation des coûts. Donc, les pêcheurs eux-mêmes sont
presque découragés de voir ces augmentations de coûts. Le
ministre en a entendu parler, cela ne fait pas longtemps que le ministre est
allé dans le territoire... Il est correct, par exemple, il voyage. Il
l'a dit tout à l'heure: Je suis allé sur la côte Ouest, le
Pacifique, je suis allé aux États-Unis, en France. Je pense qu'il
a voyagé beaucoup récemment; donc, il prend un bain d'immersion
dans les pêches et cela se comprend, il s'y intéresse. Je le
félicite de s'y intéresser, mais ses politiques sont mauvaises,
il va falloir que non seulement il s'intéresse aux pêches, mais
qu'il trouve des solutions qui collent à la réalité. On ne
peut pas être surpris que, dans les journaux régionaux, on voie
cela, le mercredi, 14 octobre: "Garon est contesté" c'est quand il est
venu pour les pêches. On voit ici: "Des hauturiers veulent qu'Ottawa
reprenne le contrôle des pêcheries." Cela a été comme
cela depuis quelque deux mois, en particulier. Les gens commencent à
s'apercevoir que les intentions sont bonnes, peut-être, mais les
résultats ne sont pas très intéressants pour les
producteurs. Il va falloir que le ministre se rende compte que, s'il veut
être un bon ministre des pêches, il va falloir qu'il fasse autre
chose que des discours, parce qu'il parle pas mal, le ministre, il faut lui
donner cela, il a l'air convaincant. Il parle longtemps, il a pris son heure et
je crois qu'il est rempli de bonnes intentions mais, par contre, les
résultats ne sont pas à la hauteur des espoirs qu'il a
semés.
Alors, je demanderais au ministre de porter une attention
particulière aux conséquences que ces règlements vont
entraîner sur le plan financier. Le ministre ne l'a pas dit encore
- je ne pense pas l'avoir entendu le dire - dans son discours, mais je crois
qu'il aurait dit que ces 36 000 000 $ ou 50 000 000 $ se finançaient de
la façon suivante: 20% par son ministère, 20% par le
fédéral, le MEER, et les pêcheurs, les producteurs,
l'industrie autrement dit, 60%.
Je vous assure que présentement l'industrie ne peut faire face,
en l'espace d'une couple d'années, à des frais de cette nature.
Elle n'a pas de réserves suffisantes et elle n'a pas de profits pour
faire face à cela. Pourtant, d'après le règlement, cela
doit commencer à se faire dans les prochains mois. Avec quel argent le
fera-t-il? Est-ce que c'est sûr que le ministre va avoir les 20% dont il
parle, s'il en a parlé? Est-ce qu'il est sûr des 20% du
gouvernement fédéral? Est-ce que le ministre a fait ses devoirs?
Est-ce qu'il a rencontré le gouvernement fédéral? On sait
qu'il y a une entente auxiliaire sur les infrastructures industrielles et on
sait que depuis à peu près quelques semaines, peut-être
trois semaines ou un mois, il y a eu une sorte d'amendement à l'entente,
un nouveau plan de réaffectation des sommes, mais cela ne touche pas du
tout les domaines reliés au projet de loi no 36. Le MEER le
ministère de l'Expansion économique régionale, d'Ottawa,
n'a pas ces sommes et ce n'est pas automatique. Le ministère
fédéral - si mes renseignements sont exacts - agit cas par cas.
Je suis convaincu que le ministère fédéral ne donnerait
pas une subvention égale à une usine qui s'est toujours
modernisée et qui a toujours essayé d'avoir de hautes normes ou
de hauts standards quant à la qualité du poisson et à une
autre qui s'est négligée et qui n'a rien investi. On ne peut pas
les considérer toutes les deux sur le même pied. Cela voudrait
dire que plus une usine aurait négligé la qualité, moins
elle se serait modernisée, plus elle serait délabrée, plus
d'argent elle recevrait en subvention; cela n'a pas de sens.
Le ministre parle de 20% de son ministère, de 20% du MEER, de 60%
de l'industrie. Premièrement, il n'a pas encore ses 20%.
Deuxièmement, des 20% du MEER, il n'y a rien dans la loi
fédérale ni dans les engagements qui nous dit qu'il y aura un sou
de versé. J'espère qu'il y en aura, mais il n'y a rien à
l'heure actuelle qui m'indique, à moi du moins, qu'il y aura un sou de
versé là-dedans. Troisièmement, quant aux 60% - si c'est
le cas - payables par l'industrie, je ne vois pas quelle industrie aurait
présentement un sou à disposer pour ce genre de programme.
Alors, le financement de l'opération m'inquiète. Si le
ministre peut répondre et me rassurer là-dessus et rassurer les
entreprises, les producteurs, les coopératives en particulier, il me
semble que ce serait une réponse qui aurait son importance dans le
débat.
Il y a plusieurs autres sujets qu'on aurait pu aborder. Par exemple, le
point de vue constitutionnel. Je pense bien que le ministre est toujours fort
dans le domaine constitutionnel; il aime cela, comme ses collègues. Il
me semble qu'il aime mieux parler de constitution que de parler
d'économie comme les autres. Non, il me fait signe que non, tant
mieux.
Une voix: Il est en train de changer.
M. Levesque (Bonaventure): Dans le domaine constitutionnel,
évidemment, on sait que les pêcheries sont un domaine de
juridiction fédérale, d'après l'article 91 de l'Acte de
l'Amérique du Nord britannique, mais on sait également qu'il y a
eu l'entente de 1922 et qu'il y a eu ensuite des amendements, je pense que
c'est en 1953, sur l'inspection. De toute façon, il y a là une
double juridiction, absolue d'après l'article 91, mais avec
délégation depuis qui permet au ministre d'oeuvrer dans un
certain nombre de secteurs. Il n'en reste pas moins que, dans ce domaine, on
retrouve les deux gouvernements. Lorsque l'on touche en particulier
l'inspection, on a deux réseaux d'inspection. Je pense qu'il serait
important de bien établir cela. (20 h 50)
Il y a d'abord les produits qui sont destinés à
l'exportation et qui exigent une inspection fédérale. Il ne faut
pas oublier que 80% de notre production, à peu près, est
exportée. Il y a là, évidemment, beaucoup de
responsabilités pour les inspecteurs fédéraux. Il y a
l'autre genre d'inspection qui existait déjà au niveau
provincial, chez les détaillants, mais il y a en plus cette nouvelle
inspection qui va s'ajouter, cette inspection qui va se faire au niveau des
débarquements, au niveau du quai de débarquement.
À un moment donné, ces inspecteurs vont peut-être se
rencontrer, ils vont peut-être se contredire. J'espère que
ça n'arrivera pas, j'espère que tout le monde va tirer dans le
même sens. Mais il y aura des dangers de chevauchement. J'espère
qu'il y aura moyen de bien établir les fonctions de chacun, de bien
définir les aires d'activité, si vous voulez, de tous ces
inspecteurs. J'espère qu'on pourra faire ces nouvelles inspections au
niveau provincial sans augmenter indûment les coûts parce que,
finalement, les coûts vont retomber et sur l'industrie et sur le
pêcheur. Le petit pêcheur va encore avoir à supporter ces
coûts.
Il est bien possible, malgré ce que fait miroiter le
gouvernement, que, si on en arrivait à une amélioration de la
qualité du poisson, on n'en arrive pas à une
amélioration correspondant au prix que va obtenir ce même
poisson sur les marchés une fois transformé. J'ai cru de mon
devoir d'attirer l'attention de cette Chambre, et particulièrement
l'attention du ministre, sur divers points qui pourraient amener le ministre
à regarder son projet de loi de nouveau, mais surtout sa
réglementation, et encore surtout, si je puis employer l'expression, le
financement. Le projet de loi ne parle pas, évidemment, de financement.
Tout ce que le projet de loi dit, il faut bien s'en rendre compte, c'est: M. le
ministre, on vous permet de faire des règlements pour assurer une
meilleure qualité du poisson. Le règlement, dont nous avons
reçu un avant-projet, dit: Faites donc vos bateaux comme ça, vos
containers comme ceci, vous allez avoir' des bacs, nous aurons des inspecteurs
au débarquement, on va s'assurer que le transport du poisson se fait
dans les meilleures conditions possible, que l'usine est la plus propre, la
plus moderne, que les murs sont de telle couleur, que le plancher est fini de
telle façon et que la machinerie est de telle qualité.
Tout cela, c'est bien beau, mais, à un moment donné, quand
on regarde la facture, on dit: Ça va coûter entre 36 000 000 $ et
50 000 000 $, et on ne sait pas qui va payer. C'est ça qui nous
inquiète particulièrement. Je suis convaincu que le ministre va
revenir et va dire: J'en ai parlé au ministre des Finances et la somme
est là, qui attend. Très bien, si c'est le cas. Mais, lorsqu'on
veut envoyer la facture pour au moins 60% à 80% aux producteurs de
poisson, qui ont présentement de la difficulté à arriver,
je crains que ce soit très difficile de mettre ça à
exécution.
Cependant, je veux être optimiste, confiant, manifester de
l'espoir dans notre industrie du poisson. Je suis convaincu que tout ce qui
peut être fait de ce côté-là mérite
d'être encouragé. Soyez assuré, M. le Président,
que, de ce côté-ci de la Chambre, nous allons appuyer ce projet de
loi en espérant recevoir des réponses aux interrogations normales
qui nous sont venues à l'esprit lors de l'étude de toute cette
question. Je vous remercie, M. le Président.
Une voix: Très bien!
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader adjoint du
gouvernement.
M. Bertrand: M. le Président, avant que mon
collègue de Gaspé ne prenne la parole pendant quelques minutes,
je voudrais simplement, avec la collaboration du leader de l'Opposition,
obtenir immédiatement que nous puissions faire en sorte que la
commission parlementaire des institutions financières, qui étudie
en ce moment deux projets de loi à la salle 81-A, puisse, lorsqu'elle
aura terminé l'examen de ces deux projets de loi, se convertir, si je
puis employer l'expression, en commission, parlementaire permanente des
finances. On lui proposera, à ce moment-là, de suspendre pendant
quelques minutes parce qu'il semble qu'il y a des personnes différentes
qui sont membres de l'une et membres de l'autre. Ainsi ils pourraient
étudier le projet de loi qui est inscrit au nom du ministre des Finances
article par article. Cela se ferait à peu près dans une
demi-heure, trois quarts d'heure. Alors, si on pouvait avoir le consentement
immédiatement, j'en ferais un ordre de la Chambre, M. le
Président.
M. Levesque (Bonaventure):
Consentement.
Le Vice-Président (M. Rancourt):
Consentement.
M. Bertrand: C'est le projet de loi no 32, si ma mémoire
est bonne.
Une voix: No 38.
M. Bertrand: Non, le projet de loi no 38, c'est celui qui est
à l'étude en ce moment à la commission des institutions
financières et coopératives. Le projet de loi no 32, c'est celui
sur les emprunts scolaires.
M. Levesque (Bonaventure): D'accord. M. Bertrand:
D'accord?
Le Vice-Président (M. Rancourt): Donc, votre motion est
acceptée.
M. Bertrand: Bien, merci.
M. Levesque (Bonaventure): Oui.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Donc, M. le ministre de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.
Une voix: Non.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Oh! Je m'excuse. M. le
député de Gaspé.
M. Henri LeMay
M. LeMay: Vous êtes tout excusé, M. le
Président.
Je tenais, en tant que représentant du comté de
Gaspé, à parler sur ce projet de loi étant donné
que c'est la première fois qu'ici, en Chambre, on dépose un tel
projet de loi qui touche directement les pêcheurs de mon
comté.
C'est un comté éloigné, bien sûr, un grand
comté, mais un comté aussi très riche si on regarde les
richesses naturelles.
Malheureusement, malgré ces richesses que sont la forêt,
les mines, le tourisme et, évidemment, la pêche, les gens y sont
très pauvres. De plus en plus, dans un comté comme celui que je
représente, nous avons besoin d'une relance économique. C'est la
première fois que, directement pour mon comté, le comté de
Gaspé, il y a un projet de loi qui parle de relance économique.
Bien sûr, on pourrait parler longtemps des pêches, M. le
Président. On m'a demandé, cependant, d'être court
étant donné que la nuit s'annonce, encore une fois, très
longue pour les parlementaires. Je voudrais quand même signaler quelques
points concernant cette industrie majeure de chez nous.
D'abord, la flotte de pêche a été renouvelée.
M. le député de Bonaventure nous disait qu'on ne mettait pas
suffisamment d'argent dans les pêches et qu'on en mettait peut-être
un peu trop dans le renouvellement de la flotte de pêche. Si on regarde
les chiffres de 1970 à 1976, on s'aperçoit que seulement 53
bateaux ont été construits dans le comté de Gaspé
et même au Québec, alors que, depuis 1976 à 1980, il y en a
eu 120, le double. Sous l'administration libérale, si on s'était
davantage occupé des pêches et du renouvellement de la flotte,
peut-être qu'aujourd'hui l'argent qu'on met dans ce renouvellement, on
pourrait le mettre ailleurs.
M. le député de Bonaventure signalait également
l'inquiétude des chantiers maritimes actuellement. La semaine
dernière, j'étais dans mon comté et je faisais du bureau
à Gaspé. Justement, on me disait qu'on venait d'engager six
personnes de plus au chantier maritime de Gaspé. Alors, je pense que
pour l'avenir, quant à la construction des navires, on n'a pas à
s'inquiéter.
Dans mon comté, il se prend 50% du poisson de tout le
Québec. Donc, c'est une industrie qui est importante. Si on regarde les
chiffres depuis 1976, on a doublé la quantité de poisson qui a
été prise dans le comté de Gaspé. En 1976, alors
que nous sommes arrivés au pouvoir, il s'est pris 40 700 000 livres de
poisson pour une valeur de 6 500 000 $ alors qu'en 1980 - les chiffres de 1981
ne sont pas complétés - on a pris 79 650 000 livres de poisson
pour une valeur de 19 100 000 $.
Une voix: C'est mieux que les libéraux.
M. LeMay: Alors, on a doublé ni plus ni moins depuis 1976,
depuis qu'on a commencé à s'occuper de la pêche, depuis
qu'on a arrêté de considérer l'industrie de la pêche
comme une industrie marginale. (21 heures)
De plus en plus, M. le Président, avec ce qui s'en vient, avec la
quantité de poisson pêché et la quantité qui
continuera d'augmenter toujours, on a besoin dans le comté d'une
industrie qui soit solide. On a besoin d'usines de transformation. Depuis
plusieurs années, cela s'est presque toujours fait, on prenait le
poisson en bloc, on le faisait congeler et on l'envoyait transformer ailleurs,
soit aux États-Unis, soit en Nouvelle-Écosse, soit au
Nouveau-Brunswick.
Je pense que les Gaspésiens ont le droit - ils doivent le faire,
aidés bien sûr par le gouvernement - de garder chez eux ces usines
de transformation. C'est bien beau, me direz-vous, de prendre du poisson en
quantité, à coups de 79 000 000 de livres, mais que faire avec ce
poisson après? C'est là que la loi est très, très
importante. Si on veut que les portes soient ouvertes au niveau du
marché mondial, si on veut apprendre aux Québécois et aux
Québécoises à manger du bon poisson, il faut leur donner
un bon produit et je Dense que c'est le but principal de la loi.
M. le député de Bonaventure nous disait qu'il a toujours
mangé du bon poisson. Moi aussi, j'ai toujours mangé du bon
poisson en Gaspésie, mais la loi n'est faite ni pour le
député de Bonaventure ni pour moi, mais bien pour essayer d'aider
le plus possible, de convaincre le plus possible les Québécois et
les Québécoises que le poisson est un aliment de base et que
très bientôt, peut-être dans 20 ou 25 ans, on sera contents
de l'avoir pour suppléer à toute la nourriture qu'on n'aura plus
à ce moment-là.
M. le Président, je suis très heureux, en tant que
représentant du comté de Gaspé, de voir qu'enfin il y a
une loi qui va promouvoir la relance économique de mon comté. Je
suis très heureux qu'on arrête de parler d'écoute
électronique, de perdre du temps en cette Chambre en parlant de voyages
en avion. Les gens de la Gaspésie n'ont absolument pas besoin d'entendre
parler de cela et ils ne veulent rien savoir non plus. Ce qu'ils veulent, c'est
parler d'économie et actuellement on en parle; c'est pour cela que cela
me fait plaisir de prendre la parole.
Les gens de Gaspé se foutent que le ministre de l'Environnement
ait fait trois, quatre ou cinq voyages de trop en avion ou que M. Bourassa soit
allé dans le Sud en 1970 avec les avions du gouvernement. Ce qu'ils
veulent, c'est qu'il y ait une relance économique dans le comté
et cela, ils y tiennent mordicus.
Je l'ai souvent dit lors de la campagne électorale et chaque fois
que j'en ai eu l'occasion: il faut que la pêche dans le comté de
Gaspé fasse partie du programme d'autosuffisance en matière
d'alimentation, le programme qui a été mis sur pied par le
gouvernement actuel.
En terminant, M. le Président, je voudrais rassurer les
pêcheurs qu'avec la
présentation de cette loi il ne s'agit d'égorger personne,
ni les entrepreneurs, ni les propriétaires d'usines de transformation;
ce qu'on veut, c'est offrir au monde entier un produit de première
qualité. On prend le meilleur poisson et il n'y a aucune raison pour
qu'on ne puisse pas se rendre sur les marchés mondiaux avec des produits
de première qualité.
Je suis très content de voir que le député de
Bonaventure est prêt à appuyer ce projet de loi et l'Opposition
également parce que pour nous, en Gaspésie, c'est un point de
départ. Nous verrons en 1985 les résultats de cette loi mais je
suis convaincu que ce sera positif pour ceux qui vivront des produits de la
pêche à ce moment-là. Là-dessus, je vous remercie,
M. le Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Beauce-Sud.
M. Hermann Mathieu
M. Mathieu: Merci, M. le Président. Je me fais un devoir
d'intervenir sur ce projet de loi qui touche nos amis les pêcheurs parce
que le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation ne
me pardonnerait sans doute jamais de ne pas intervenir dans ce débat. Il
démontrerait avec force éloquence que le député de
Beauce-Sud, critique officiel de l'agriculture et des pêcheries, ne se
préoccupe pas du tout du sort des pêcheurs. M. le
Président, je veux le rassurer immédiatement et lui dire que le
Parti libéral du Québec a toujours été et continue
d'être très sensible aux problèmes des pêcheurs. Le
Parti libéral, pendant qu'il était au pouvoir, a bien compris
leurs problèmes et a apporté des solutions qui collaient à
la réalité. Je voudrais profiter de l'occasion pour
féliciter tous les pêcheurs du territoire...
Des voix: Le ministre. Il a travaillé fort.
M. Mathieu: Je réitère que je voudrais
féliciter tous les pêcheurs...
Des voix: Le ministre!
M. Mathieu: ... pour la qualité du poisson qu'ils nous
procurent. C'est une fierté pour nous tous, citoyens du Québec,
d'avoir cette richesse à notre portée. Nous ne demandons pas
mieux qu'elle se développe principalement pour le plus grand bien des
premiers artisans en ce domaine que sont les pêcheurs et les
transformateurs.
Dans mes brèves remarques, je voudrais mentionner que ce qui m'a
frappé, consterné même, lors des crédits du
ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, au
mois de juin dernier, ce fut de constater que pour ce qui était du
budget de 1980-1981, il y avait, si ma mémoire est bonne, pour environ 5
000 000 $ de crédits périmés. Cela veut dire des sommes
qui avaient été votées par cette Assemblée
nationale pour venir en aide au développement des pêches
maritimes, venir en aide aux pêcheurs, à nos artisans en ce
domaine, des crédits qui n'ont pas servi aux buts pour lesquels ils
avaient été votés. C'est une chose qui doit être
corrigée. J'espère que le ministre a pris toutes les dispositions
nécessaires pour qu'une telle chose ne se présente pas de
nouveau.
Je voudrais dire un mot sur un article du journal Le Soleil de ce matin
qui titre ceci: "Garon veut des sous-ministres à la place de ses
directeurs." À la place des directeurs généraux de
service.
Une voix: La pertinence!
M. Mathieu: Oui, c'est très pertinent, si vous voulez le
savoir, parce qu'on supprime le poste de directeur des pêches maritimes.
Il y aura probablement des conséquences dont le ministre se
dépêchera de nous montrer le côté
bénéfique, j'en suis persuadé, mais c'est dommage de ne
voir qu'un côté. L'Association des cadres se méfie. Je ne
cite que quelques lignes seulement: "Pour l'association, ce
procédé aurait pour conséquence d'introduire dans la
structure administrative des nominations admises comme "nominations
politiques"."
Des voix: Ah!
M. Mathieu: "L'association s'inquiète d'autant qu'elle y
voit un véritable virage politique perceptible dans plusieurs
ministères québécois. Dans le cas de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation, commentent les porte-parole de
l'association, la multiplication des nominations discrétionnaires pour
chapeauter toutes les directions générales dépasse les
bornes et constituerait un abus inacceptable."
Cette déclaration me rend perplexe, surtout de la part d'une
journaliste qui est tout à fait impartiale dans le domaine de la
politique, qui ne cherche pas à faire de la petite politique.
J'espère qu'il n'y aura pas de conséquences néfastes
à court, moyen ou long terme pour nos pêcheurs.
En ce qui concerne la réglementation, j'insiste, à la
suite du député de Bonaventure, pour qu'elle soit d'abord
appliquée avec un sens, un esprit humain, parce qu'il s'agit des
bateaux, de l'inspection du poisson, des usines. Nous savons que la flotte
n'est pas préparée à recevoir cette réglementation.
Tout à l'heure, le ministre, sans doute, répondra, dira combien
cela va coûter et qui va payer. Si le fédéral a une
participation promise dans cette entente,
j'espère qu'il y aura des négociations. (21 h 10)
À la dernière conférence à laquelle le
ministre n'a pas assisté, probablement qu'il aurait pu inscrire ce point
à l'ordre du jour, comme le ministre de Terre-Neuve a fait mettre un
point à l'ordre du jour concernant les céréales, pour
prendre les précautions nécessaires pour la protection des
pêcheurs. On se rappelle que, dans le domaine de la pomiculture, à
la suite du désastre du gel des pommiers et de la récolte, il y a
eu un comité de formé, un comité
fédéral-provincial, et ce comité était formé
pour étudier l'ensemble du problème, les remèdes qui
devaient être appliqués. Le 9 novembre, pour des raisons
inconnues, le ministre de l'Agriculture a fouté dehors les
représentants du fédéral à ce comité, alors
que l'on sait que le fédéral paie la moitié des
prestations d'assurance-récolte. Le ministre n'a même pas voulu
donner une copie du rapport de l'assurance-récolte au gouvernement
fédéral.
Cela m'inquiète quand je vois, dans le cas qui nous
préoccupe présentement, M. le Président... Probablement
que le ministre va dire: Bien oui, il y a 20% qui vont être payés
par le fédéral. Je lui pose la question. Où en sont
rendues les négociations? Parce que, vous savez, vous nous dites: On ne
va pas négocier à Ottawa. On n'y va plus, il n'y a rien de bon
à aller chercher là. M. le Président, dans un conflit
syndical, je crois que vous avez été, dans votre carrière
très fructueuse, spécialiste de ces négociations, je
lève mon chapeau devant votre compétence, vous n'avez sans doute
pas vu souvent un syndicat qui se retire des négociations obtenir de
grands bénéfices. Quand l'assiette au beurre se partage, si on
n'est pas là pour ramasser notre part, d'autres la ramassent. Ensuite,
on ne peut pas jeter le blâme sur le dos des autres. C'est trop facile de
ne pas prendre ses responsabilités au moment où on doit les
prendre.
M. le Président, en concluant, je vous indique que j'ai
l'intention de voter pour ce projet de loi au stade de la seconde lecture.
Seulement, M. le Président, j'espère, je demande au ministre
d'avoir la prudence requise dans les circonstances pour ne pas étouffer
les pêcheurs, les associations, les usines, de ne pas les pressurer avec
de nouvelles taxes. Il y avait une pensée qui avait cours en France au
moment où les grands pressuraient de taxes, opprimaient les faibles, on
disait: Les grands nous font déjà beaucoup de bien quand ils ne
nous font pas de mal. J'espère que le ministre saura agir en
conséquence, être prudent et réaliste.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre, votre
droit de réplique.
M. Jean Garon (réplique)
M. Garon: M. le Président, j'ai écouté le
député de Beauce-Sud. J'ai remarqué que son chef
l'écoutait moins. Pendant son allocution, j'ai remarqué qu'il a
été obligé d'aller dans le domaine de
l'assurance-récolte, dans la structure administrative du
ministère parce qu'il n'avait pas grand-chose à dire dans le
domaine des pêches. Il a même parlé de la conférence
de la mi-décembre sur l'agriculture. Je le laisse s'enferrer,
voyez-vous, comme un bon pêcheur, je laisse le poisson prendre
l'hameçon. Je dirai au député de Beauce-Sud que la
conférence de la mi-décembre à Ottawa, cela a toujours
été une conférence de fonctionnaires. Je n'y suis pas
allé en 1978, je n'y suis pas allé en 1979, je n'y suis pas
allé en 1980 et je n'y suis pas allé en 1981. Pourquoi? Parce que
c'est une rencontre, habituellement, où les fonctionnaires comparent
leurs statistiques.
Il m'accuse, depuis un certain temps, de ne pas aller à cette
conférence qui est une conférence administrative. Il a
parlé aussi de l'article dans le Soleil. Il s'est bien gardé de
me poser des questions ce matin, M. le Président, parce que j'aurais pu
lui répondre. J'aurais pu lui dire que, dans le temps des
libéraux, il n'y avait pas ces réformes administratives, mais
ça coûtait, sur le budget total du ministère, seulement
47%, ce qui allait aux agriculteurs. Tandis qu'avec nos réformes
administratives, M. le Président, c'est entre 62% et 63% des budgets du
ministère qui iront aux agriculteurs et aux pêcheurs. Vous savez,
demandez aux pêcheurs de la Gaspésie, demandez aux pêcheurs
des Îles-de-la-Madeleine ou de la Côte-Nord, demandez aux
agriculteurs de tout le Québec s'ils aiment ça voir un budget qui
est dépensé en grande partie uniquement pour fournir des
fonctionnaires. Je ne dis pas qu'ils ne veulent pas qu'il y ait des
fonctionnaires pour payer l'aide technique, mais ils souhaitent qu'une bonne
partie des budgets aille pour aider ceux qui assurent la production, et c'est
ce que les réformes administratives permettent, M. le Président.
Je suis prêt n'importe quand à faire un débat de trois
heures sur les réformes administratives que j'ai faites au
ministère depuis 1977 où nous avons fusionné des
régies, où nous avons regroupé certaines activités
pour qu'on puisse faire plus de travail avec moins de personnes. M. le
Président, tout le monde sait que, pour acheter un crayon au
gouvernement, cela prend 47 ou 48 signatures. Au ministère de
l'Agriculture, cela ne prend plus 47 ou 48 signatures, parce qu'on a
rapproché les cadres du peuple et c'est ce que les gens veulent, M. le
Président.
Des voix: Bravo!
M. Garon: Personne ne se plaindra dans la population, vous savez,
s'il y a un palier de moins au plan administratif pour pouvoir répondre
à la population. Personne ne se plaindra qu'il y ait un palier de moins
pour que tout le monde dans la hiérarchie soit plus proche de la
population. C'est cela, une réforme, M. le Président. N'importe
quand, quand le député de Beauce-Sud voudra en parler, je suis
prêt à en parler.
Maintenant, je vous dirai...
M. Mathieu: ...
Une voix: II y a un palier de moins. Cela permet
d'être...
Une voix: Le député de Bonaventure va
pouvoir...
Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!
M. Garon: M. le Président, quand le député
de Bonaventure dit qu'on n'a pas les fonds, je vous dirai ceci, très
rapidement. Le budget du ministère est passé cette année
à 25 900 000 $ alors qu'il était de 20 400 000 $ l'an dernier,
une hausse de 27%. Maintenant, comme j'ai constaté que dans le
territoire maritime les communications ne sont pas faciles sur la
Basse-Côte-Nord, aux Îles-de-la-Madeleine et en Gaspésie,
depuis le mois de décembre 1981 il y a une revue adressée
à tous les pêcheurs du Québec pour qu'ils aient les
informations concernant le secteur des pêches. Dès ce mois-ci, le
secteur des pêches a pu recevoir une revue appelée Alimentation
Québec Pêcheries et qui explique les différents secteurs,
les politiques du gouvernement, où on s'en va, ce qu'on veut faire,
comment fonctionnent les programmes. On peut voir aussi ici qu'à l'aide
à la construction navale de bateaux... M. le député de
Bonaventure en parlait tout à l'heure; je dois vous dire qu'en 1976 le
coût de construction des bateaux au Québec, savez-vous de combien
il était dans le temps des libéraux? Trois bateaux. Le coût
de construction, je vais vous le dire, 73 748 $. Tantôt, le
député de Bonaventure me disait qu'avec 1 000 000 $ on ne
construisait même pas deux bateaux. 73 748 $, c'étaient
plutôt de grosses chaloupes! Il disait qu'il y avait eu des prêts
pour 397 000 $, mais on est obligé de mettre un petit (1) en bas,
pourquoi? Parce que les prêts ont été consentis pour
l'achat de bateaux usagés. Comprenez-vous? Regardons pour cette
année; je ne vous dirai pas les chiffres de 1981, mais je sais qu'on a
un budget de 10 000 000 $ pour les prêts. Mais je vous dirai comment ont
passé les chiffres: 397 000 $ en 1976; 788 000 $ en 1977; 2 539 000 $ en
1978; 3 300 000 $ en 1979; 5 382 000 $ en 1980 et on a 10 000 000 $ pour
1981.
Des voix: Bravo!
M. Garon: La construction des bateaux en 1976...
M. Levesque (Bonaventure): Question de privilège, M. le
Président!
Des voix: Ah! Ah!
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader, est-ce en
vertu de l'article 96? Oui? Question de privilège, M. le leader de
l'Opposition.
M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, lorsque l'on
cite des chiffres, on devrait les citer tous et ne pas prendre une année
en particulier. Ne vous gênez pas. Partez du moment où
j'étais ministre responsable des pêches.
M. Garon: M. le Président, évidemment, je ne suis
pas remonté aussi loin que cela, mais tantôt le
député de Bonaventure parlait du début des années
soixante. Là, ce n'est pas l'histoire des pêches que je fais, M.
le Président.
M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, on n'a pas le
droit de fausser ainsi la vérité. Je demande simplement au
ministre de regarder le coût de l'Unifox et de l'Unipec, seulement deux
bateaux, dans les années soixante-dix et combien cela a
coûté? Des millions de dollars, voyons donc! (21 h 20)
M. Garon: M. le Président, j'ai justement...
Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!
M. Garon: Pour éviter que les gens pensent des choses
rares, j'ai dû donner des chiffres depuis 1970. Je n'ai aucune objection
à ce qu'on commence nos statistiques en 1960 et, dans le prochain
numéro de la revue des pêches et des pêcheurs, je donnerai
des chiffres à partir de 1960. Je vais demander aux gens de les compiler
pour qu'on puisse avoir les chiffres à partir de I960. Je peux vous
dire, par exemple, que la construction de bateaux en 1976 coûtait 73 748
$; en 1977, 1 250 000 $; en 1978, 4 065 000 $; en 1979, 5 268 000; en 1980, 9
245 000 $. C'est quand même quelque chose, en 1980, c'est cent fois plus
qu'en 1976. Il y a quand même un changement.
Quand on me dit aussi: Qu'est-ce que cela va donner aux pêcheurs?
Je vais vous donner les prix de Boston; je ne prendrai pas mes statistiques, le
"Boston Blue Sheet". Les
gens savent ce que c'est, le "Boston Blue Sheet", c'est le prix du
marché des poissons à Boston, où tous les prix des
différents poissons sont catalogués avec un genre de prix
d'enchère. Qu'est-ce que dit le "Boston Blue Sheet"? En octobre 1981, on
payait pour le poisson du Québec 1,25 $ et, s'il venait des pays
Scandinaves, on payait le filet de morue entre 1,60 $ et 1,80 $. Pourquoi
payait-on beaucoup plus cher? Qu'est-ce que cela va donner aux pêcheurs,
l'amélioration de la qualité? Cela va donner des prix. On va
pouvoir se classer mieux sur le marché international où on vend
nos poissons. C'est exactement cela, le but de la réforme. S'il y en a
qui ont des doutes sur la nécessité de cette réforme, vous
n'avez qu'à demander que je publie les enquêtes qui ont
été faites là-dessus. Vous n'avez qu'à le demander,
je les rendrai publiques. Je ne les rendrai pas publiques si je ne suis pas
obligé mais si on m'y oblige, l'Opposition pourra voir si la
réforme qu'on fait est nécessaire ou non.
M. le Président, je pense que dans ce cas nous n'avons pas le
choix de faire cette réforme. C'est évident qu'elle va demander
des transformations; c'est un peu comme quand on dit: Tout le monde veut aller
au ciel mais personne ne veut mourir. Pour aller au ciel, il faut mourir; il
n'y a pas d'autres moyens. Il y a peu de gens qui y sont allés
directement, comme cela. M. le Président, quand on fait une refonte dans
le secteur des pêches, c'est évident que cela va prendre des
investissements au niveau des bateaux et au niveau des usines. Il y a des
programmes au niveau des bateaux et je vous dis même qu'à ce
moment-ci, au moment où je vous parle - et je ne vous dirai pas quelle
usine, je ne sais pas encore son nom parce qu'on ne me le dit pas dans tous les
cas - il y a encore une usine qui vient d'être décertifiée
par le gouvernement fédéral. S'il n'y a pas cette modernisation
de l'usine, c'est plusieurs dizaines d'emplois, près de 200 emplois, qui
pourront disparaître parce qu'une usine n'est pas modernisée. Ce
n'est plus une question de dire: On peut, on veut ou on ne peut pas. On n'a pas
le choix de faire la modernisation du secteur des pêches pour respecter
les standards de qualité.
Je ne dis pas que tout le monde a des investissements à faire,
j'ai dit tantôt qu'il y en a qui n'ont pas d'investissements à
faire et qu'ils vont respecter les normes parce qu'ils les respectent
déjà. Il y en a qui ont peu d'investissements à faire et
il y en a qui ont beaucoup d'investissements à faire, il y en a d'autres
qui vont avoir presque à jeter l'usine à terre et la
rebâtir à neuf. Il y a de tout dans le secteur des pêches
mais ce n'est pas... J'ai visité ailleurs - parce que vous savez, quand
vous voyez un tas de rapports, et je sais qu'il y a des théoriciens qui
font des rapport - pourquoi? Parce qu'on me disait: Cela se passe comme cela
ici et cela passe comme cela là. J'ai dit: Moi, avant de me faire une
idée, je vais aller voir ailleurs. C'est pour cela que je suis
allé voir les usines en Europe. J'ai demandé où
était le milieu au Canada? On m'a dit: C'est en Colombie britannique.
Parfait, je vais aller voir en Colombie britannique. Je ne suis pas allé
me reposer, je suis allé visiter des usines du matin au soir. Je suis
allé en visiter aux États-Unis et j'ai constaté qu'il y en
avait des meilleurs que les nôtres, il y en avait des pareilles comme les
nôtres et il y en avait des pires que les nôtres. Là, j'ai
pu me faire une idée à savoir ce qu'on doit faire comme
améliorations dans le secteur des pêches. Pas dans une perspective
théorique, mais dans une perspective concrète.
Dans le domaine industriel, combien de fois les gens de mon
ministère sont allés rencontrer des gens pour discuter des
différents changements qu'il y aurait à faire. Il va y avoir des
changements à faire mais peu d'investissements par les petits
pêcheurs côtiers. Ceux qui sont plus vulnérables, qui ont de
moins grandes sources de revenu sont ceux qui ont des bacs isothermiques et qui
reviennent tous les jours. Avec des méthodes, certains efforts sur le
plan de la qualité, certaines pratiques à modifier, on peut
améliorer avec peu d'investissements. Dans les bateaux de 35 pieds
à 65 pieds, il y a des investissements un peu plus grands à
faire, mais pas encore considérables. Les bateaux de plus de 65 pieds
sont des investissements un peu plus importants, mais, encore là, pas
des investissements... Il y a deux ans, j'ai rencontré un pêcheur
à Matane qui me disait: M. Garon, j'ai demandé à votre
ministère si je pouvais avoir un prêt pour une cale
réfrigérée dans mon bateau, parce que je veux faire un
poisson de meilleure qualité. Voici la lettre que j'ai reçue. Au
lieu de dire oui au départ à ce pêcheur, on lui a transmis
une lettre qui disait: Nous poursuivons notre réflexion.
Je suis arrivé au ministère et j'ai dit: Qu'est-ce que
c'est, ça? Voici un pêcheur qui veut faire des investissements
pour moderniser son bateau, il veut se conformer à tous les standards,
et on dit qu'on réfléchit. J'ai alors dit: C'est important de
faire de l'action. Cela va permettre exactement aux gens qui veulent faire de
la modernisation dans leur bateau, dans leur usine de savoir exactement ce
qu'ils doivent faire pour répondre aux normes minimales au point de vue
de la qualité. Il y en a qui vont dire non. Mais pensez-vous que
l'ensemble du secteur des pêches va pouvoir fonctionner s'il n'y a pas
des standards de qualité qui doivent être respectés?
Je suis convaincu que l'ensemble du secteur des pêches va vouloir
continuer dans ce sens parce que j'ai eu assez de consultation pour dire que -
il m'a semblé,
en tout cas - le secteur des pêches, dans son ensemble, souhaite
avoir des normes claires au point de vue de la modernisation. Mais il souhaite
aussi avoir des quais décents. Cela les gêne de voir l'état
de certains quais. Certaines usines doivent être modernisées.
Quand on parle d'une contribution de 40%, 20% du fédéral et 20%
du Québec, je pense que c'est un bon montant de subvention. C'est
évident que, dans certains cas, ce qui va rendre la tâche plus
difficile, c'est le niveau des taux d'intérêt qui sont
élevés à l'heure actuelle. Mais j'aimerais que les
députés libéraux admettent que la politique des taux
d'intérêt dépend du gouvernement, de la Banque du Canada et
de son gouverneur général, qui vient de recevoir la
médaille de l'Ordre du Canada pour avoir maintenu les taux
d'intérêt aussi élevés. Cela, ce n'est pas de ma
faute.
Au point de vue des aspects constitutionnels, tout ça a
été vérifié. Évidemment, sur l'eau, le
fédéral a pas mal de pouvoir; mais, à terre, nous en avons
pas mal, nous aussi. Le poisson, à un moment donné, pour entrer
dans le secteur de la commercialisation, il faut qu'il vienne à terre.
À partir de ce moment-là, nos juridictions sont assez
importantes. Je peux vous dire tout de suite que le fédéral m'a
laissé entendre qu'il ne serait pas fâché de nous passer le
secteur de l'inspection. J'ai dit: Si vous voulez faire une entente avec
compensation, je suis prêt à recommander ça tout de suite
au gouvernement du Québec. Mais là, il hésite sur la
compensation.
Je pense que ce serait une bonne chose si l'inspection était
unifiée, parce qu'on n'a pas le choix. S'il y a de l'exportation et
qu'on surveille la qualité pour l'exportation sans s'occuper du
marché intérieur, ça veut dire que le bon poisson ira
à l'étranger et que le mauvais restera chez nous. Ce n'est pas
possible. Il faut qu'il y ait un contrôle de la qualité aux deux
niveaux.
Dans cette perspective, si le gouvernement fédéral veut
faire une entente avec nous pour que nous assumions l'inspection avec une
compensation financière, je suis convaincu que le président du
Conseil du trésor, le député de Matane, va m'appuyer
là-dedans. Tantôt, le député de Bonaventure
demandait: Est-ce que le gouvernement du Québec va avoir les fonds?
Est-ce que votre ministère va avoir les fonds? Encore là, je
regardais le député de Matane et je lui disais: Yves, voyons
donc, tu me refuserais des fonds?
Une voix: Ben voyons donc!
M. Garon: Je termine en disant qu'il n'y a pas longtemps je
rencontrais également l'Association des détaillants en
alimentation. Cette association vient de faire une enquête au point de
vue des habitudes de consommation des consommateurs, de ce qu'ils souhaitent
trouver dans une épicerie. Un des dirigeants du groupe des
détaillants en alimentation qui regroupe près de 10 000 membres,
des épiciers du Québec, me disait: Le premier comptoir qui est
souhaité par les consommateurs, c'est un comptoir de fruits et
légumes. Mais le deuxième, on a été surpris de la
réaction, c'est un comptoir de fruits de mer. J'ai dit, à ce
moment-là, aux dirigeants de l'Association des détaillants en
alimentation: Aussitôt que notre projet de loi et notre règlement
seront adoptés, parce qu'on couvre les magasins de détail aussi,
les gens du ministère, avec notre réglementation, vos gens et les
entreprises susceptibles de faire des constructions, des genres de kit pour des
comptoirs de poisson dans les épiceries, nous allons travailler ensemble
sur un petit kit, un moyen kit et un gros kit.
Des voix: Ah!
M. Garon: Selon qu'un épicier veut avoir un petit
comptoir, un moyen comptoir ou un gros comptoir, à ce moment-là,
si on a un peu standardisé les modèles avec les entreprises qui
produisent dans ce secteur, cela va coûter moins cher aux épiciers
pour avoir un approvisionnement régulier; il faut penser aussi à
la régularité de l'approvisionnement du territoire maritime, pour
fournir aux détaillants en alimentation. Mais le marché
québécois va être important dans notre stratégie de
commercialisation du poisson. Les Québécois sont de plus en plus
des consommateurs de fruits de mer. Ils ne savent pas toujours apprêter
le poisson. D'ailleurs, si on le remarque, au niveau des restaurants, beaucoup
de restaurants, actuellement, mettent des fruits de mer sur leur menu. Mais,
graduellement, les gens apprennent à consommer du poisson et à
préparer chez eux des recettes, des menus ou des plats qu'ils ont
mangés au restaurant.
Je termine, M. le Président, parce que je vois le leader du
gouvernement qui s'impatiente.
Des voix: Ah!
M. Garon: Lui, il n'est pas du territoire maritime, mais ce
projet de loi va l'aider à avoir un approvisionnement en poisson
québécois à Montréal et j'espère qu'il va
consommer nos poissons avec l'assurance que la qualité sera garantie.
Merci.
Des voix: Bravo!
Le Vice-Président (M. Jolivet): Avant d'adopter la
deuxième lecture de ce projet de loi, j'aimerais savoir s'il y a un
règlement qui permet d'empêcher les pressions indues contre le
député de Matane.
Est-ce que cette motion de deuxième
lecture du projet de loi no 36, Loi modifiant la Loi sur les produits
agricoles et les aliments, est adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté.
Le Secrétaire adjoint: Deuxième lecture de ce
projet de loi.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader adjoint.
Renvoi à la commission de l'agriculture des
pêcheries et de l'alimentation
M. Bertrand: M. le Président, je voudrais faire motion
pour que ce projet de loi soit déféré à la
commission parlementaire permanente des poissons, mollusques et
crustacés et que nous puissions en entreprendre l'étude
immédiatement à la salle 91-A, à la suite d'une entente
intervenue avec le leader de l'Opposition.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Cette motion de
déférence à la commission est-elle adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Jolivet): C'est la commission de
l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation. Adopté.
M. le leader adjoint.
M. Bertrand: M. le Président, en indiquant
immédiatement au ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de
l'Alimentation ainsi qu'à tous nos collègues qui sont membres de
cette commission qu'ils doivent se rendre à la salle 91-A pour
entreprendre l'étude article par article de ce projet de loi, je
voudrais maintenant que vous appeliez l'article qui nous permettra...
M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, cela prend le
consentement unanime.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader de
l'Opposition.
M. Levesque (Bonaventure): Cela prend un consentement unanime, M.
le Président. Je voudrais m'assurer que nous l'avons avant de nous
diriger vers cette salle.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Est-ce qu'il y a
consentement pour qu'on puisse, à ce moment-ci, aller en commission
parlementaire?
M. Bertrand: Je le demande, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Est-ce qu'il y a
consentement?
M. Levesque (Bonaventure): D'accord.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Consentement, M. le
leader.
M. Bertrand: Merci beaucoup pour l'unanimité.
M. le Président, nous pourrions maintenant prendre en
considération le rapport de la commission permanente de l'énergie
et des ressources qui a étudié le projet de loi no 16. C'est
l'article 17 que je vous demanderais donc d'appeler.
Prise en considération du rapport
de la commission qui a étudié
le projet de loi no 16
Le Président: J'appelle donc la prise en
considération du rapport de la commission permanente de l'énergie
et des ressources qui a étudié le projet de loi no 16, Loi
modifiant la Loi sur l'Hydro-Québec. J'aimerais vous dire, au
préalable, que nous avons eu, cet après-midi, une
conférence des leaders conformément à l'article 123 du
règlement de l'Assemblée nationale, à savoir que tous les
députés ont un droit de parole, s'ils veulent bien intervenir, de
dix minutes, que le proposeur peut intervenir le nombre de fois qu'il le veut,
que le représentant officiel de chaque parti a droit à une
demi-heure et qu'en ce qui concerne le vote, il sera pris de la façon
suivante. Nous mettrons d'abord aux voix tous les amendements qui ont
été proposés par le député d'Outremont au
nom de l'Opposition, amendements que j'ai d'ailleurs déclarés
recevables. Par la suite, je mettrai aux voix tous les articles du projet de
loi no 16, de 1 à 11, ainsi que le préambule et le titre tels
qu'ils apparaissent au projet de loi et au rapport de la commission. Enfin, je
mettrai aux voix le rapport déposé par le député de
Vimont, rapporteur désigné de la commission permanente de
l'énergie et des ressources qui a étudié, après la
deuxième lecture, le projet de loi no 16, Loi modifiant la Loi sur
l'Hydro-Québec.
M. le leader de l'Opposition.
M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, je veux
à ce moment-ci confirmer en effet qu'il y a eu cette réunion des
leaders sous votre présidence, que nous nous sommes entendus sur le
déroulement de ce débat et aussi - et je suis heureux de voir que
le leader parlementaire du gouvernement se retrouve présentement
à son siège parce qu'il a lui aussi participé à
cette rencontre -sur le fait que, si le débat n'était pas
terminé à la fin de la soirée, nous revenions demain pour
le vote, n'est-ce pas?
Autrement dit, ce que je veux vérifier, en d'autres termes, c'est
que le vote dont vous avez parlé aurait lieu demain après les
affaires courantes.
Le Président: ... de cet oubli, M. le leader de
l'Opposition.
M. Levesque (Bonaventure): Vous avez oublié, M. le
Président?
M. Charron: M. le Président, je peux le confirmer.
Le Président: Merci.
M. le député d'Outremont.
M. Pierre-C. Fortier
M. Fortier: M. le Président, comme vous l'avez
mentionné, l'Opposition a proposé plusieurs amendements à
la loi no 16 puisque nous n'avons pas eu le temps de le faire en commission
parlementaire. Comme vous le savez, ceci est dû à la motion de
bâillon qui nous a été imposée et qui nous a
empêchés de faire notre travail jusqu'à la fin.
Il est assez surprenant que nous fassions des amendements puisque nous
avons demandé le rappel de cette loi que nous trouvons tout à
fait inopportune, injuste et qui ajoute au fouillis qui règne dans le
domaine de l'énergie. Le gouvernement aurait dû nous proposer une
politique énergétique avant même de proposer une loi qui
modifie substantiellement la Loi sur l'Hydro-Québec et qui va ajouter
davantage au fouillis dans le domaine énergétique tel que nous le
vivons.
Ce fouillis dans le domaine de l'énergie, M. le Président,
ce n'est pas seulement moi qui l'affirme puisque, dans le Devoir du 1er octobre
dernier, M. Michel Nadeau a écrit un article sur ce sujet, le titre
étant "Le fouillis de l'énergie". Il dit: "Mais
l'incohérence flagrante qui règne présentement au sein du
gouvernement québécois dans le secteur de l'énergie risque
de nous coûter beaucoup plus cher. Tous les intervenants semblent se
diriger dans des directions opposées sans la moindre concertation, et en
cette manière il n'y a plus de Minute Ottawa! le désordre est
bien de chez nous. Aussi, il est essentiel que le ministre de l'Énergie
prenne enfin les commandes et montre un peu aux Québécois le
début d'une vraie politique de l'énergie."
M. le Président, au lieu de suivre le conseil que lui donnait ce
journaliste, le ministre de l'Énergie a refusé le débat
public, a refusé d'entendre les gens qui ont voulu s'exprimer lors de la
dernière commission parlementaire et a tout fait pour nous
bâillonner et nous imposer un projet de loi qui, à sa face
même, devrait être rejeté.
Nous n'avons pas de politique énergétique, nous l'avons
dit à plusieurs reprises, et il faudrait se poser la question: Mais
qu'est-ce que c'est qu'une politique énergétique, puisque les
gens d'en face n'ont pas l'air de comprendre ce que nous voulons dire par un
terme comme celui-là?
Une politique quelle qu'elle soit, ce sont des énoncés
clairement exprimés qui ont reçu l'approbation du cabinet,
puisque ça doit représenter une politique officielle du
gouvernement dans un secteur donné. Bien sûr, il y a eu un
énoncé de politique en 1978 dans un livre blanc qui s'intitulait:
"Assurer l'avenir", qui avait été présenté par le
ministre Joron. Mais, à ma connaissance, M. le Président, cet
énoncé de politique n'a jamais été approuvé
par le cabinet et ne peut être ainsi appelé politique
énergétique. Il s'agit d'un énoncé qui a
été mis sur la table publique pour discussions, qui a permis aux
gens de savoir peut-être dans quelle direction le gouvernement voudrait
bien aller, mais, n'ayant pas reçu d'approbation officielle, il ne reste
qu'un énoncé qui n'a pas encore été
approuvé. (21 h 40)
Cela est tellement vrai que, lors de la commission parlementaire qui a
étudié la tarification d'Hydro-Québec, compte tenu de
l'obligation qu'a Hydro-Québec de suivre les politiques du gouvernement,
nous avons demandé à Hydro-Québec s'ils étaient au
courant d'un décret, d'une politique énergétique
officielle qui permettrait justement à Hydro-Québec de
présenter une politique tarifaire en fonction d'un nouvel
énoncé de politique ou d'une nouvelle politique que nous ne
connaissons pas.
La réponse d'Hydro-Québec a été très
claire, je crois, on nous a dit qu'il n'existait pas de telle politique
officiellement, mais qu'il semblait, selon ce que le ministre avait dit en
public, qu'il s'agisse peut-être d'une politique
énergétique. Je crois qu'à la vérité aucune
politique n'a été approuvée par le gouvernement dans le
domaine de l'énergie. Il n'y a pas de politique, approuvée par le
gouvernement, qui détermine d'une façon claire et précise
les orientations du gouvernement tant dans les différentes formes
d'énergie qui seront utilisées dans l'avenir qu'en rapport avec
la tarification qui, dans l'avenir, aura un effet déterminant sur les
différents choix énergétiques.
Pourtant, la Loi sur l'Hydro-Québec est très claire.
L'article 22.1 de la loi dit ceci: "Pour la réalisation de ses objets,
la Société - on parle d'Hydro-Québec - prévoit les
besoins du Québec en énergie et les moyens de les satisfaire dans
le cadre des politiques énergétiques que le gouvernement peut,
par ailleurs, établir." La raison pour laquelle -c'était, je
crois, en 1978 que cet article a été ajouté - il l'a
été, c'est que le gouvernement voulait intervenir. Il voulait
déterminer des politiques auxquelles serait
soumise Hydro-Québec. Elles n'existent pas présentement et
c'est d'autant plus difficile pour Hydro-Québec de préserver son
autonomie puisque ceci amène le gouvernement à intervenir au fur
et à mesure et ne permet pas au conseil d'administration
d'Hydro-Québec et au président d'Hydro-Québec de suivre
des politiques qui seraient claires et précises.
Si ces politiques étaient claires et précises, justement,
le président du conseil d'Hydro-Québec et le
président-directeur général sauraient à quoi s'en
tenir et pourraient administrer cette société d'État qui,
jusqu'à maintenant, a été un succès retentissant.
Ce manque de politique amène donc un impact sur l'administration
d'Hydro-Québec et il n'est pas surprenant de voir ries démissions
à Hydro-Québec, il y en a eu deux ou trois dernièrement.
Il n'est pas surprenant de constater qu'après avoir
démissionné de son poste, le président-directeur
général sortant d'Hydro-Québec, l'ancien
président-directeur général qui a quitté son poste
le 15 décembre dernier, se permette, deux jours après avoir
quitté son poste officiellement, maintenant qu'il peut parler, de
s'exprimer clairement en disant ceci: "On parle beaucoup de politique
énergétique au Québec; cela fait des années qu'on
en parle, mais on n'en a toujours pas. On devrait dire ce qu'est la politique
et ce qu'est le rôle d'Hydro-Québec dans telle ou telle partie de
cette politique. Également, le gouvernement devrait définir
clairement son rôle face à l'Hydro; il faudrait préciser
les rapports entre les deux."
J'ai fait état de cette déclaration de M. Boyd au ministre
ce matin; à cette heure tardive de la soirée, je n'ai reçu
aucune réponse du ministre à ce sujet. Il est bien évident
que M. Boyd s'exprimait ouvertement, maintenant qu'il a quitté le poste
qu'il détenait jusqu'à tout récemment.
Cette politique énergétique, si elle existait, quelle
serait-elle? Il faut se souvenir que, contrairement à ce que fait le
gouvernement qui nous dirige, le gouvernement fédéral à
Ottawa, en 1980, alors que M. MacEachen avait présenté son
budget, avait présenté un énoncé de programme
énergétique national. C'était en 1980. Bien sûr, cet
énoncé de politique, cette politique qu'avançait le
ministre de l'Énergie et des Ressources à Ottawa a
été critiquée, a permis une discussion sur la place
publique, a permis qu'elle soit modifiée, mais a permis à tout le
monde ayant un impact sur les questions énergétiques au Canada de
participer à cette discussion publique et définir une meilleure
politique énergétique. C'est celle qui a été
récemment négociée avec l'Alberta, la Saskatchewan, qui
est présentement négociée avec Terre-Neuve et qui
déterminera finalement une politique clairement connue de tous et qui
peut influencer chacun de nos gestes dans ce secteur.
Bien sûr, si vous lisez cette politique énergétique,
on y parle des prix du pétrole, des prix du gaz naturel, on v parle des
différentes taxes, des nouvelles taxes sur le pétrole, sur le
gaz, on y parle des systèmes d'encouragement pétrolier et gazier,
on y parle justement de son influence sur l'industrie canadienne. Enfin, M. le
Président, tous les aspects d'une politique énergétique
sont touchés et permettent à ceux qui veulent étudier la
politique officielle du gouvernement fédéral de l'étudier,
de la critiquer et de participer au débat public. Mais ça permet
aussi à tous les intervenants dans le secteur de l'énergie de se
guider sur ces politiques officielles et de comprendre pour quelles raisons une
telle politique a été recommandée et a été
approuvée. Nous n'avons pas de tel document au Québec. Nous
n'avons pas de document qui nous permette de comprendre les nouvelles
propositions tarifaires que le gouvernement semble vouloir nous imposer.
Nous ne comprenons pas exactement pourquoi le gouvernement met de
l'avant une politique à savoir que le prix de
l'électricité, pour des raisons tout à fait inconnues,
devrait être entre le prix du gaz et celui du pétrole. Le
gouvernement ne nous a donné aucune raison valable appuyée par
des études économiques ou des études sociologiques, des
études d'impact sur l'avenir énergétique du Québec.
M. le Président, je crois qu'il est navrant que nous soyons dans une
telle position alors que le gouvernement cherche à nous présenter
le projet de loi no 16 qui, justement, va avoir un impact direct dans le
domaine des politiques énergétiques, alors que le Québec
n'en a pas. Pour continuer dans ce sens, on peut poser la question: Qu'aurait
pu être un tel document? Qu'aurait pu contenir un document qui aurait
défini la politique énergétique du Québec?
Le ministre nous dit que c'est pour favoriser la
pénétration du gaz. J'en conviens, M. le Président.
Peut-être qu'il faut avoir ries politiques qui favoriseraient la
pénétration du gaz. Mais a-t-il fait des études? Est-ce
qu'il y a des études qui existent, région par région et
non pas pour l'ensemble du Québec, qui nous permettraient de comprendre
justement quelles sont les possibilités de pénétration du
gaz? Quels en sont les coûts? Est-ce qu'on peut aller dans toutes les
régions du Québec? Je crois que le ministre le sait, il y a des
régions du Québec où il n'y aura jamais de gaz. Il y a des
régions du Québec où il faudra favoriser
l'électricité, justement parce qu'il serait trop coûteux de
faire en sorte que le gaz aille dans toutes les régions du
Québec. Où sont ces études, M. le Président? Je
sais que des études partielles ont été soumises à
la Régie du gaz et de l'électricité, soit par Gaz
Métropolitain soit par la compagnie Gaz Inter-Cité. Je
sais que des études semblables ont été soumises à
l'Office national de l'énergie. Mais est-ce que le ministère de
l'Énergie et des Ressources du Québec a consolidé ces
études et pourrait nous en présenter un condensé, un
résumé, pour qu'enfin nous comprenions ce que le ministre entend
par une pénétration du gaz au Québec et quels vont en
être les coûts pour la population du Québec, quels vont en
être les coûts pour les intervenants dans ces secteurs et surtout
quels vont en être les coûts pour les consommateurs, ceux qui
utiliseront le gaz ou l'électricité, soit pour le chauffage, soit
pour l'éclairage ou soit dans le secteur industriel.
Il aurait fallu, bien sûr, M. le Président, étudier
ce que j'ai appelé cette pseudo-politique énergétique qui
favorise le gaz au détriment de l'électricité, pour
connaître l'impact que cette hausse de tarification artificielle aura sur
la tarification de l'électricité par rapport à celle de
l'Ontario et par rapport à celle des autres provinces. Nous l'avons dit
en commission parlementaire, nous l'avons dit en deuxième lecture
lorsque nous avons discuté du projet de loi no 16, il semble bien, M. le
Président, que l'avantage économique que nous avions d'avoir une
politique tarifaire beaucoup plus basse que celle des autres provinces va en se
dégradant et, très bientôt, l'électricité du
Québec coûtera plus cher que l'électricité de
l'Ontario, et ceci est navrant pour plusieurs raisons.
Nous avons cru, tout le monde avait cru que nous avions justement des
richesses naturelles, des ressources qui nous appartiennent en propre et des
ressources naturelles auxquelles tous les Québécois avaient
droit. Nous savions que nous avions des ressources hydroélectriques
immenses qui permettaient, justement, aux Québécois et aux
Québécoises de bénéficier d'une richesse naturelle
qui leur appartient. S'il fallait, M. le Président, que cette
pseudo-politique énergétique, qui n'est appuyée sur aucun
document que nous connaissions, fasse, en fin de compte, finalement, que
l'électricité coûte plus cher au Québec que dans les
provinces voisines, je me demande à quel point nous en serions rendus et
jusqu'à quel point cette pseudo-politique énergétique
aurait un impact, justement, sur le développement économique du
Québec et sur le portefeuille des consommateurs. (21 h 50)
II aurait fallu également, M. le Président, étudier
quel impact ces hausses tarifaires artificielles auraient eu sur le
développement économique du Québec. Tout le monde sait
qu'à cause de ces augmentations tarifaires, à cause des taxes qui
seront payées au gouvernement, il s'ensuivra qu'Hydro-Québec aura
moins d'argent pour elle-même pour autofinancer son programme
d'investissement. D'une autre façon, si on favorise le gaz au
détriment de l'électricité, il s'ensuivra, bien sûr,
que les programmes d'investissement d'Hydro-Québec seront moins
importants que ce qu'ils auraient pu être si on avait favorisé
l'électricité. Il m'aurait semblé, M. le Président,
qu'avant d'adopter une telle politique, le gouvernement ait
présenté sur la place publique des études importantes, des
études économiques pour nous convaincre que, finalement, ce choix
tarifaire, ces choix énergétiques favoriseront le
développement économique du Québec, mais nous ne
connaissons absolument rien sur ces résultats, sur ces impacts
économiques et nous en sommes rendus, M. le Président, à
faire des conjectures, sans pour cela connaître la vérité
d'une façon bien précise.
Finalement, M. le Président, un sujet qui aurait dû
être étudié dans ce document de politique
énergétique, ce sont tous les moyens de coordination qui sont
nécessaires pour favoriser le gaz dans certaines régions et pour
favoriser l'électricité dans d'autres régions. Même,
dans une région donnée, il aurait fallu étudier de quelle
façon, quels sont les moyens pratiques, quels sont les moyens
déterminants que le gouvernement pourrait mettre en oeuvre et que les
sociétés, les intervenants dans ce secteur, que ce soit
Hydro-Québec, que ce soit Gaz Métropolitain ou que ce soit Gaz
Inter-Cité, quels sont les moyens qui seront mis en oeuvre pour
justement faire en sorte qu'il y ait un équilibre entre les
différentes formes d'énergie, sans pour cela augmenter les
coûts d'une façon démesurée pour les consommateurs.
Nous n'avons pas de réponse à ces questions. Le ministre nous a
dit qu'il avait formé un comité de coordination; nous ne savons
pas exactement de quelle façon ce comité travaille mais on peut
se poser des questions. Il m'aurait semblé qu'un sujet aussi
sérieux aurait pu faire l'objet d'une étude très
approfondie sur des questions comme: Devons-nous faire en sorte qu'il y ait
plusieurs intervenants? Avons-nous besoin de deux compagnies de gaz au
Québec? Avons-nous besoin d'une compagnie qui se spécialise dans
l'électricité alors que d'autres compagnies se
spécialisent dans le gaz? Je n'ai pas les réponses à ces
questions, je pose des questions. D'une façon semblable à la
France, n'aurait-il pas fallu se demander si une société comme
Hydro-Québec n'aurait pas pu recevoir le mandat d'être responsable
à la fois du gaz et de l'électricité, justement pour
assurer une meilleure coordination des politiques
énergétiques?
Nous n'avons pas les réponses à ces questions mais le
ministre, lui, sans avoir les réponses et sans avoir fait les
études approfondies dans ces secteurs, se permet de nous proposer le
projet de loi no 16 qui va
influencer l'avenir énergétique sans que la population,
sans que l'Opposition et sans que les parlementaires soient informés des
différents résultats de ces études. On ne sait pas si
elles existent, si le ministre les a fait faire et s'il est convaincu
lui-même que les choix qu'il nous propose sont les meilleurs. C'est pour
toutes ces raisons que nous avons demandé le rappel de la loi 16.
En commission parlementaire, plusieurs intervenants, dès les mois
de février et mars, avaient demandé à être entendus
parce qu'ils avaient saisi tous les impacts possibles qu'imposeraient les choix
de l'avenir énergétique du Québec. Ces mêmes
syndicats, ces mêmes associations et ces mêmes
sociétés de protection des consommateurs nous ont envoyé
des télégrammes, en ont envoyé récemment au premier
ministre du Québec pour demander d'être entendus sur ces
questions. Le ministre essaie de nous dire: II n'y a aucune relation entre le
projet de loi no 16 affectant Hydro-Québec et les politiques
énergétiques du Québec. M. le Président, c'est une
affirmation que nous ne pouvons pas accepter, qui doit être
rejetée à sa face même. Tous les intervenants
sérieux qui connaissent le domaine énergétique savent
pertinemment qu'il y a une relation directe entre la loi 16 et l'avenir
énergétique du Québec.
Il n'y a jamais eu de synthèse dans ces secteurs, c'est ce que je
viens de dire, mais ce qui est plus grave, c'est que le gouvernement, à
ma connaissance, n'a jamais demandé qu'une telle synthèse soit
faite, n'a jamais proposé de politique globale connue du public et qui
nous permettrait de connaître l'impact de la loi 16. Je crois qu'on peut
qualifier cette façon de faire d'inconsciente, d'irresponsable de la
part du gouvernement, une façon de faire qui ne peut être
acceptée et qui ne peut se justifier sur le plan strictement
énergétique. Bien sûr, nous savons tous que cet
empressement à faire en sorte que la loi no 16 soit approuvée
dans les meilleurs délais ne peut être justifié pour des
questions énergétiques, mais uniquement à cause du
fouillis dans lequel se trouve le gouvernement dans le domaine des
finances.
Comment peut-on proposer une telle loi modifiant substantiellement la
société la plus importante du Québec dans le domaine de
l'énergie, et je parle d'Hydro-Québec? C'est
incompréhensible et je crois que c'est irresponsable. Comme je viens de
le dire, on peut le comprendre et on peut le justifier uniquement pour des
raisons purement financières, parce que le gouvernement, bien sûr,
transforme Hydro-Québec en percepteur de taxes et se permet, justement,
d'aller chercher des taxes qu'il ne peut aller chercher ailleurs.
Mais si ce n'était que des augmentations de taxes, si ces
augmentations avaient été clairement indiquées sans
modifier la Loi sur l'Hydro-Québec, s'il avait fallu changer la Loi sur
l'Hydro-Québec, mais en exprimant clairement la volonté du
gouvernement de ne pas affecter l'avenir énergétique, nous
aurions pu avoir une discussion peut-être plus logique. Le ministre ne
peut s'en prendre qu'à lui-même si, en commission parlementaire,
nous avons eu quelquefois certaines difficultés à avoir un
dialogue à la hauteur des problèmes qui nous étaient
présentés.
C'est la raison pour laquelle je voudrais rappeler quelque peu la
démarche que nous avons faite par rapport à ce projet de loi.
Nous avons discuté, pour la première fois en deuxième
lecture, le projet de loi no 16, le 1er décembre dernier. Nous avons
soulevé, à ce moment-là, des questions de principe
extrêmement importantes. Nous avons eu, par la suite, la commission
parlementaire qui a siégé du 7 au 11 décembre dernier et,
ensuite, les 14 et 15 décembre derniers et, aujourd'hui, nous sommes le
jeudi 17 décembre, alors que la commission parlementaire n'a pas fini
ses travaux, alors que nous avons dû présenter certains
amendements pour faire en sorte que le projet de loi no 16 puisse être
amendé d'une façon substantielle pour modifier l'impact qu'il
aurait sur l'avenir énergétique du Québec. Combien de
temps me reste-t-il?
Le Vice-Président (M. Jolivet): II vous reste près
de huit minutes.
M. Fortier: M. le Président, c'était un mauvais
projet de loi avant d'en commencer l'étude en deuxième lecture,
c'était un mauvais projet de loi avant l'étude en commission
parlementaire et ça demeure un très mauvais projet de loi. C'est
la raison pour laquelle nous avons présenté certains amendements
que j'aimerais revoir rapidement avec vous. Il y a un amendement, bien
sûr, que nous avons présenté, mais qui avait
été demandé par la direction même
d'Hydro-Québec. Ce gouvernement qui nous a dit qu'il ne voulait pas
intervenir dans la gestion d'Hydro-Québec, j'ose espérer qu'il
comprendra qu'il se doit d'approuver cet amendement qui demande tout simplement
que la déclaration des dividendes devrait être
suggérée par le conseil d'administration d'Hydro-Québec
même si, techniquement, c'est décrété par le cabinet
lui-même, par l'entremise du ministre des Finances.
Il me semble, M. le Président, que l'argumentation qui avait
été présentée par le président du conseil
d'administration d'Hydro-Québec est tout à fait claire. Je me
permettrai de rappeler ce que disait justement M. Bourbeau, le président
du conseil d'administration d'Hydro-Québec à ce sujet. Je cite le
journal des Débats du 25 août 1981, où il disait ceci,
à la page B-54: "Permettez-moi de rappeler que le conseil
d'administration d'Hydro-Québec attache une grande importance aux
deux aspects suivants du projet de loi no 16. "Premièrement et nous
venons d'en parler - il nous semble que le projet de loi devrait
reconnaître explicitement au conseil d'administration
d'Hydro-Québec le pouvoir de soumettre au gouvernement une proposition
de dividende annuel en même temps que les données
financières qui fixent le surplus susceptible de distribution. "En
second lieu, il nous apparaît tout aussi important que les parlementaires
étudient avec soin la possibilité d'assortir d'une garantie
gouvernementale les prêts qu'Hydro-Québec sera appelée
à consentir aux consommateurs dans le cadre des programmes
d'économie d'énergie."
M. le Président, nous avons tout simplement retenu ces deux
amendements parce qu'il nous semble que si le conseil d'administration
d'Hydro-Québec, dont les membres sont nommés par le gouvernement,
a voulu, par la voix de son président du conseil, faire une demande
aussi anodine, je dirais une demande aussi importante pour préserver
l'autonomie financière d'Hydro-Québec, cet amendement aurait
dû être approuvé avant même que la commission
parlementaire se réunisse. (22 heures)
Mais, comme cela n'a pas été le cas, je crois qu'il
revient à l'Opposition de le faire et de faire en sorte que nous ayons
une discussion publique sur ce sujet. M. Bourbeau donnait des explications
additionnelles justement pour justifier cette demande et, à la
même commission parlementaire, à la page B-90, il disait ceci: "Ce
qu'on cherche, à ce moment-ci, c'est justement d'être capable de
protéger la réalisation du programme d'équipement." Il
parlait justement de l'amendement qu'il proposait. Un peu plus loin, il disait:
"Ce qu'on trouve à Hydro-Québec, c'est que, pour être
capables de remplir nos responsabilités, de faire face à la
demande et d'avoir un programme d'équipement qui puisse se
réaliser, il nous faut des fonds que l'on puisse générer
nous-mêmes à l'intérieur de l'entreprise, il nous faut des
fonds qui viendront de l'extérieur de l'entreprise, c'est notre
responsabilité.
M. le Président, je crois que le président du conseil
d'administration d'Hydro-Québec, et je le redis, parlait au nom
même du conseil d'administration. Quand il faisait cette proposition, il
faisait une proposition tout à fait normale, tout à fait
raisonnable, et je ne peux comprendre que le gouvernement, à venir
jusqu'à ce jour, n'ait pas cru bon de retenir la proposition qui lui
était faite.
Il y aura d'autres arguments, M. le Président. Nous
désirons insister, nous, pour que, dans un autre amendement, l'on tienne
à ce que l'article 22 de la Loi sur l'Hydro-Québec fasse en sorte
qu'Hydro-Québec soit tenue de produire des coûts
d'électricité aux taux les plus bas compatibles avec une saine
administration financière, avant de changer un article aussi important.
Je viens d'en faire état en faisant un résumé succinct
d'un besoin de politique énergétique et de l'impact que cette
politique énergétique pourrait avoir et des études qui
sont requises avant même qu'on fasse un changement aussi substantiel,
à l'endroit d'Hydro-Québec.
Je ne reviendrai pas, M. le Président, sur le fait qu'il existait
un contrat social avec la population, mais, si l'on pense à l'avenir, il
me semble, qu'avant de changer un article de loi qui fait en sorte qu'il y ait
une obligation extrêmement importante pour Hydro-Québec de
produire aux meilleurs coûts et de vendre l'électricité aux
meilleurs taux possible, il faut permettre à la population de s'exprimer
sur ces nouvelles politiques et ce sera au gouvernement de décider quand
il voudra le faire. Mais, tant et aussi longtemps que le gouvernement
n'apportera pas sur la place publique des politiques très claires dans
le domaine de l'énergie, je crois, M. le Président, qu'on doit
garder dans la loi d'Hydro-Québec cette imposition qui a
été faite par le législateur il y a plusieurs
années de maintenir les taux les plus bas possible.
Un autre amendement que nous avons proposé, M. le
Président, et qu'il nous semble, encore là, tout à fait
raisonnable, tout à fait normal de l'accepter, c'est l'amendement que
nous avons fait pour que la tarification dans l'avenir soit soumise à
l'approbation de la Régie du gaz et de l'électricité. En
effet M. le Président, comment peut-on concevoir qu'un gouvernement qui
a décidé d'imposer des taxes exorbitantes à
Hydro-Québec puisse être en même temps celui qui va
approuver la tarification d'Hydro-Québec? M. le Président, c'est
un conflit d'intérêts tout à fait inacceptable. Il serait
tout à fait inacceptable dans le secteur privé et il est tout
à fait inacceptable dans le secteur public
M. le Président, il faut vous rappeler ici les taxes importantes
que le gouvernement imposera à Hydro-Québec. Je ne voudrais pas
revenir sur toutes les statistiques que nous avons données, qui ont
été colligées par M. Bélanger, mais, pour ceux qui
nous écoutent en ce moment, M. le Président, il faut bien
souligner ceci: c'est que la taxe sur le capital augmentera très
rapidement. Elle était de zéro l'an dernier, elle sera de 43 000
000 $ cette année et elle passera environ à 100 000 000 $ dans
les années qui viennent. Les dividendes, qui étaient de
zéro dans les années antérieures, passeront très
rapidement à 28 000 000 $ l'an prochain et à peu près
à 460 000 000 $
En 1984 et pour passer à 900 000 000 $ en 1985. Il faut souligner
que le fardeau fiscal total, relié à l'électricité
passera de quelque 100 000 000 $ en 1980 à 1 500 000 000 $ en 1985. Il
faut également souligner, M. le Président, qu'en 1982, le fardeau
fiscal imposé à Hydro-Québec sera quatre fois
supérieur à celui imposé à Hydro-Ontario.
Pour toutes ces raisons, M. le Président, comment peut-on
accepter qu'un gouvernement puisse être juge et partie en même
temps? Comment peut-on accepter que le gouvernement impose de nouvelles taxes?
Et il peut revenir l'an prochain, dans deux ans, dans trois ans pour augmenter
ces taxes-là et il sera celui qui recevra la proposition tarifaire
d'Hydro-Québec, il sera celui qu'il l'approuvera.
M. le Président, il s'agit là d'un conflit
d'intérêts très net, et ceci est une raison additionnelle
pour accepter cet amendement qui avait été proposé
à plusieurs reprises dans le passé, avant même que nous
parlions de nouvelles taxes qui seraient imposées à
Hydro-Québec. Dans le passé, mon collègue de Mont-Royal,
à plusieurs reprises, avait fait une telle demande et cette demande se
justifiait à plusieurs égards. D'ailleurs, lorsqu'on fait une
revue de toutes les sociétés d'utilités publiques au
Canada, il y en a plusieurs qui s'en remettent à une régie
autonome, une régie du gaz et de l'électricité. En
Ontario, il y a l'Ontario Energy Board, la commission de contrôle de
l'énergie en Ontario, qui a le mandat d'étudier d'une
façon autonome et juste les propositions tarifaires et finalement de
faire des recommandations précises qui, la plupart du temps, sont
approuvées par le gouvernement.
Nous suggérons, dans ce cas-ci, que le gouvernement du
Québec s'en remette à la Régie de
l'électricité et du gaz pour qu'il soit très clair dans le
public que les consommateurs sont protégés. Il faut qu'ils
sentent qu'il y a des gens qui vont prendre leur défense et que ce ne
sera pas le ministre des Finances qui influencera le ministre de
l'Énergie pour que telle et telle proposition tarifaire soit
acceptée et que leurs intérêts propres soient
défendus. M. le Président, il nous semble que cet amendement -
à sa face même - devrait être accepté et c'est la
raison pour laquelle nous allons le débattre ce soir dans les minutes
qui suivent. Je n'aurai pas le temps d'étudier en profondeur chacun des
ces amendements, il y en a sept. Je vous dirai simplement que mes
collègues se chargeront d'étudier l'un ou l'autre de ces
amendements que nous avons faits.
En finissant, je dirai que pour les raisons que j'ai
énoncées au début, à cause du fait que nous n'avons
pas de politique énergétique... Comme le dit si bien M. Boyd,
cela rend quasiment la vie impossible à
Hydro-Québec. L'ensemble de la population, les parlementaires de
côté-ci de la Chambre, nous ne pouvons accepter qu'un projet de
loi comme celui-là soit étudié davantage et qu'il ne soit
pas rappelé. Mais, comme nous ne pouvons rien contre la machine
gouvernementale, nous avons proposé ces amendements, justement pour
diminuer l'impact de ce projet de loi. J'ose espérer que l'ensemble des
parlementaires recevra favorablement les amendements que nous mettons de
l'avant et qu'ils accepteront plusieurs des amendements que nous proposons pour
la défense des consommateurs du Québec. Je vous remercie.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Fernand Lalonde
M. Lalonde: Merci, M. le Président. J'ai
hésité pendant quelques secondes à me lever, je regardais
le ministre parce que, devant le plaidoyer convaincant du député
d'Outremont, je croyais qu'il allait rappeler la loi. Or, M. le
Président, comme vous voyez, l'entêtement de ce gouvernement est
égal à la panique financière dans laquelle il a
jeté la province de Québec depuis cinq ans.
M. le Président, on est, actuellement, au stade de la prise en
considération du rapport. C'est un peu un jargon pour le monde et je
pense qu'on devrait expliquer ce qui arrive. Ce qui arrive, c'est que la
commission parlementaire qui avait été appelée à
étudier le projet de loi no 16, qui est la mainmise du gouvernement sur
Hydro-Québec, a étudié ce projet de loi pendant une
quarantaine d'heures. Une quarantaine d'heures, c'est à peu près
l'équivalent du travail d'un journalier par semaine. Ce n'est quand
même pas très long, une semaine de travail. Cela a pris à
peu près 40 ans pour construire ce joyau de notre patrimoine, qu'est
Hydro-Québec - comme disait mon collègue de Vaudreuil-Soulanges,
il y a quelques jours - et, en 40 heures, on va le démolir. C'est cela
que ce gouvernement est en train de faire. Donc, pendant 40 heures, la
commission parlementaire a étudié le projet de loi et tout
à coup le gouvernement, tellement affamé et désireux
d'aller chercher les fonds d'Hydro-Québec le plus tôt possible, a
dit à la commission parlementaire: Non, c'est fini. Vous n'allez pas
terminer l'étude ce projet de loi-là. (22 h 10)
Je vais vous dire une chose. Savez-vous que le gouvernement
lui-même nous a fait perdre une heure de travail le 10 décembre?
Pourquoi? Parce que le 10 décembre nous avons dû ajourner à
23 heures au lieu de minuit, parce qu'il n'y avait plus de ministre. On avait
accepté que le ministre de l'Énergie soit absent pour des
raisons
humanitaires, pourvu qu'il soit remplacé par un ministre qui
connaissait le problème; le ministre des Finances est venu, nous avons
discuté avec lui. À 23 heures, il nous a offert, vous savez qui?
Je vous le donne en mille: le ministre des Communications. Écoutez, M.
le Président, on a dit: Mettez un perroquet, mettez au moins quelqu'un
qui sait de quoi il parle. Alors, on a dû refuser. Donc, on a perdu une
heure.
Le 11 décembre, vendredi, on aurait pu siéger de 20 heures
à minuit. Le gouvernement lui-même a décidé de ne
pas faire siéger cette commission-là, d'en faire siéger
une autre. C'est une décision du gouvernement, pas de nous. Perte: 4
heures. Le 14 décembre, il y a à peu près une demi-heure,
n'insistons pas là-dessus.
Le 15 décembre, nous avons perdu une heure et demie à la
fin des travaux. Nous avions jusqu'à minuit, la guillotine sur la
tête, mais jusqu'à minuit on aurait pu avancer. À 22 h 30,
le député de Frontenac décide de présenter une
motion d'ajournement, il était découragé. Pour lui, 40
heures, c'était trop pour faire ce travail. Il était
fatigué. Le ministre était aussi fatigué, d'ailleurs,
parce qu'il a voté pour la motion. Nous, complètement
dégoûtés de ce gouvernement, nous avons quitté la
commission parlementaire à ce moment-là. Et, nous avons perdu 4
heures et demie en tout, parce que l'avant-midi et l'après-midi, pendant
que nous discutions de cette guillotine, le gouvernement a décidé
de ne pas faire siéger la commission, quoiqu'il nous ait fait
siéger le soir, pendant qu'on en discutait encore, et on en a
discuté jusqu'à 8 h 30 le matin ou 7 h 50. Alors, M. le
Président, 10 heures de perdues sur le calendrier qui auraient dû
être consacrées à l'étude de ce projet de loi;
autrement dit, 25% des 40 heures. C'est l'équivalent de 25%
gaspillé à cause du gouvernement, de son incompétence, de
sa volonté absolument absente de réellement confier à une
commission parlementaire l'étude de ce projet de loi.
M. le Président, il s'agit, de toute évidence, seulement
de 40 heures. On n'a jamais vu cela, une guillotine après 40 heures,
jamais! C'est cette guillotine qui nous oblige actuellement à parler
d'un rapport, d'un rapport tronqué, d'un rapport qui ne dit absolument
rien, sauf que le député de Châteauguay a voté sur
la même motion avec amendement et sous-amendement, pour, contre et
abstention. On l'appelait le député culbute, M. le
Président, à cette commission-là. Mais c'était un
triple saut; il faut le faire! Donc, c'est un abus de pouvoir de la part du
gouvernement que de nous obliger actuellement à mettre fin à
cette étude. C'est la dictature de la majorité. C'est la
première fois, de mémoire de parlementaire, qu'un gouvernement
décide de recourir après seulement l'équivalent d'une
semaine de travail à la mesure la plus odieuse, la plus
répugnante en démocratie, la guillotine, pour forcer l'adoption
d'un projet de loi qui crée des taxes, pas qui donne des services
à la population, qui crée des taxes sans donner plus de
services.
M. le Président, le Parti libéral du Québec a
mené une lutte sans merci, vigoureuse, grâce à la
participation de tous les collègues à l'Assemblée
nationale et je les en remercie. Ils ont fait preuve d'une solidarité
absolument exemplaire et qui montre jusqu'à quel point nous sommes
convaincus que nous parlons pour toute la population, lorsque nous disons non
au gouvernement. Vous n'allez pas faire ce geste de mainmise, ce rapt
d'Hydro-Québec qui va simplement vouloir dire des tarifs plus
élevés pour la population qui est déjà
surtaxée au Québec. Même bâillonnée,
l'Opposition libérale ne lâche pas, nous avons, comme le
règlement nous le permet -c'est à peu près les seules
choses qui nous restent - proposé des amendements pour rendre les effets
moins dommageables et je vais vous en lire quelques-uns, M. le
Président, rapidement.
Il y en a un pour assujettir les redevances que le gouvernement va
exiger d'Hydro-Québec à la recommandation de la
société d'Hydro-Québec. Le conseil d'administration sait
de quoi il a besoin. Au moins on aura cette espèce de garantie, à
savoir qu'Hydro-Québec sera d'accord si le gouvernement dit:
Écoutez, donnez-moi donc 500 000 000 $ ou 100 000 000 $, j'en ai
besoin.
Autre amendement: Que la société ait pour objet de fournir
l'énergie aux entreprises et aux citoyens, à nous tous, aux taux
les plus bas, compatibles avec une saine administration financière.
C'est dans la loi actuelle, pas dans celle qu'on présente, mais dans
celle qu'on veut changer, celle qui existe depuis 1964. C'est ça qui a
permis à Hydro-Québec de donner et aux citoyens de recevoir
à peu près le meilleur service d'électricité en
Amérique du Nord. C'est ça, ça a l'air du jargon, mais
c'est ça, au fond, qu'on veut remettre dans la loi.
Il y a aussi un amendement qui est extrêmement important. Le
gouvernement pourra, si cette loi inique est adoptée, aller chercher
dans les coffres d'Hydro-Québec, même sans son consentement, 75%
des revenus nets, tel que défini dans la loi. À ce
moment-là, Hydro-Québec devra augmenter les tarifs en
conséquence. Nous disons qu'il y a un autre élément qui
est important, ces tarifs sont augmentés avec le consentement de qui? Le
consentement du gouvernement lui-même qui va se servir dans les poches
d'Hydro-Québec. Le gouvernement est en plein conflit
d'intérêts, parce que c'est lui qui va en
bénéficier. Nous disons, dans cet
amendement, que la tarification sera acceptée, non pas par le
gouvernement, mais par la Régie de l'électricité et du
gaz; elle pourra prendre les intérêts des Québécois.
C'est un amendement extrêmement important, j'espère que les
députés péquistes pourront aller au-delà de la
philosophie de parti pour pendre les intérêts des
Québécois.
Un autre amendement, M. le Président, qui est très
important, on sait que le programme du Parti québécois - mais
ça, on ne sait plus ce que ça veut dire, ils ont des
congrès et des référendums, on ne sait plus au juste -
comportait, à la dernière élection, une promesse d'enlever
la taxe de vente sur les comptes d'électricité, c'était
une promesse formelle. Or, ce n'était pas marqué dans la loi.
Nous voulons l'inclure.
Je conclus là-dessus, M. le Président, et j'espère
que les députés péquistes sauront, lorsqu'ils vont voter,
demain matin, qu'ils doivent voter selon leur programme et c'est conforme
à leur programme de voter pour cet amendement. Ainsi de suite, M. le
Président. La seule chose que nous pouvons faire actuellement, c'est de
permettre aux péquistes ou députés ministériels de
se joindre à nous sur ces amendements. La seule demande qu'il me reste
à faire, c'est que les députés du Parti
québécois votent pour nos amendements. Le résultat sera
que la loi, si elle n'est pas encore acceptable, sera moins dommageable au
moins pour les Québécois. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Notre-Dame-de-Grâce.
M. Reed Scowen
M. Scowen: Je ne sais pas si le gouvernement est prêt
à écouter l'Opposition libérale, mais j'espère
qu'il sera prêt à écouter le conseil d'administration
d'Hydro-Québec. Le conseil d'administration d'Hydro-Québec est
contre ce projet de loi. Il ne l'a pas dit publiquement, il a agi avec
prudence, mais un document qui sort du conseil d'administration, en date du 15
avril de cette année, est arrivé chez nous. Je veux que le
ministre nous écoute - s'il n'a pas encore lu ce document, j'imagine
qu'il lui a été envoyé - pendant qu'on décrit un
peu ce que le conseil d'administration d'Hydro-Québec pense de ce projet
de loi du gouvernement.
Il dit: Le budget présenté le 10 mars - c'est
effectivement la loi 16 - entraîne pour Hydro-Québec les
principales conséquences suivantes: 1) une chute de revenu net de
l'entreprise de 37% en 1981, par rapport à 1979 et 1980; 2) des besoins
d'emprunt augmentés, entre 1982 et 1985, de 2 600 000 000 $
au-delà du maximum raisonnable - c'est le conseil d'administration qui
parle - 3) programme d'emprunt d'environ 3 000 000 000 $ en 1982 qui sera
difficile à réaliser à des conditions acceptables; 4)
remise en question de la faisabilité financière du plan des
installations pour la prochaine décennie, le plan d'immobilisations
d'Hydro-Québec pour les prochaines dix années est remis en
question par cette loi, d'après le conseil d'administration de la
compagnie; 5) abandon de politiques financières soutenues publiquement
jusqu'ici par le gouvernement, perte de crédibilité pour
Hydro-Québec et répercussions négatives possibles sur les
emprunts futurs.
On dit aussi qu'il y a des conséquences pour la mission et la
gestion d'Hydro-Québec, que ça va avoir des conséquences
de confusion et de dilution des responsabilités en matière de
tarification et de prévision de la demande et la difficulté
d'établir des plans rentables à long terme. (22 h 201
Deuxièmement, atteinte à la responsabilité de
l'entreprise en ce qui a trait à la saine administration
financière. Je répète que c'est le conseil
d'administration d'Hydro-Québec qui parle, ce n'est pas le Parti
libéral, ce n'est pas la population, ce sont ceux qui ont la
responsabilité de diriger cette entreprise.
Troisièmement, danger de réduire l'autonomie de gestion
interne essentielle au bon fonctionnement d'une société
d'État.
Ce sont huit raisons très claires établies par la
société d'État même dans ce document. Je veux citer
simplement trois ou quatre autres réserves critiques que le conseil
d'administration d'Hydro-Québec a faites à l'égard de ce
projet de loi. Il dit que le montant que devrait payer Hydro-Québec en
vertu des nouvelles mesures serait du même ordre que la totalité
de l'impôt sur le revenu des entreprises industrielles et commerciales au
Québec aujourd'hui. Par la voie de ce projet de loi, Hydro-Québec
va payer autant d'impôt que le total de tous les impôts sur le
revenu de toutes les autres compagnies industrielles et commerciales au
Québec. Il ajoute que l'activité d'Hydro-Québec ne
représente que 5% de la valeur ajoutée totale au Québec.
C'est bizarre, c'est brutal. Il dit: "Comme sa capacité d'emprunt n'est
pas illimitée, Hydro-Québec se voit forcée de revoir ses
conclusions antérieures quant à la faisabilité
financière de son plan des installations et d'adopter entre-temps une
grande prudence face à la mise en oeuvre de nouveaux projets majeurs."
C'est le conseil d'administration qui parle.
Je continue, je n'ai pas fini, M. le Président. Je cite la page
11: "Le nouveau budget - effectivement, le nouveau projet de loi, parce que le
projet de loi dont on parle ce soir, c'est quelque chose qui touche directement
le budget - marque une rupture importante avec le passé, passé
qui a longtemps été considéré dans plusieurs
milieux financiers comme une garantie de l'avenir. Les mesures
proposées ont pour effet de modifier la nature même du
crédit d'Hydro-Québec surtout en éliminant l'assurance
financière que représentait la marge de manoeuvre entre ses
tarifs relativement bas et la valeur de son électricité sur les
marchés énergétiques. Cette rupture avec le passé
risque d'entraîner une méfiance quant au maintien des garanties
offertes dans le budget." Le conseil d'administration continue: "Le nouveau
budget - du projet de loi no 16 -élimine tout espoir qu'aurait pu
entretenir la société compte tenu de ses récents
résultats financiers, d'obtenir une cote AAA. Il reste à
espérer que les explications et les adaptations qui pourraient
être apportées à l'application des mesures prévues
dans le budget permettront au moins de défendre la cote actuelle. "Dans
ces conditions - je cite encore -Hydro-Québec devra recourir davantage
à des formes de financement moins économiques et moins
souhaitables telles que les emprunts à taux flottant, les courtes
échéances et les recours à des devises comportant un
risque sérieux de perte au change", autrement dit dans les pays
étrangers.
M. le Président, si le gouvernement n'est pas prêt à
nous écouter, s'il est déterminé à adopter cette
loi en pleine nuit, malgré tous les arguments qu'on a
présentés, qu'il écoute au moins ce cri qui nous est venu
du conseil d'administration même d'Hydro-Québec.
Je continue: "L'application de la redevance" - du dividende - "selon les
modalités prévues au budget - je cite le conseil d'administration
- ne pourra être faite sans une réforme des articles les plus
fondamentaux de la Loi d'Hydro-Québec car elle modifie plusieurs aspects
de la mission confiée à l'entreprise. Les modalités de
cette redevance vont même à l'encontre des caractéristiques
normalement reconnues à une société d'État. "...
Enfin, parce qu'elles équivalent à un impôt de 100% sur
tout revenu net dépassant un certain seuil, ces modalités
dissocient entièrement les profits de l'entreprise de la qualité
de sa gestion. Parce que le gouvernement va amener, arracher tous les profits
au-dessus d'un certain seuil minimum, il ne restera aucune incitation pour la
société Hydro-Québec de rester rentable et
d'améliorer sa productivité." Ce n'est pas moi qui le dis, c'est
Hydro-Québec. J'espère que vous m'écoutez, c'est
très important.
La gestion interne. Voici les conséquences, d'après
Hydro-Québec, sur la gestion interne de la société: "La
formule de redevance" - de dividendes - "qui équivaut à un
impôt de 100% sur les revenus nets, dépassant un certain seuil,
aura pour effet de réduire la responsabilité
d'Hydro-Québec à l'égard de ses résultats
financiers. Ainsi, l'incitation à une efficacité administrative
en sera réduite, sinon compromise. En contrepartie, le gouvernement en
viendra inévitablement à imposer des contrôles paralysants
sur la gestion interne d'Hydro-Québec. L'expérience vécue
par certaines sociétés d'État dans plusieurs pays et
même au Québec démontre que de tels contrôles
impliquent la mise en place de processus bureaucratiques coûteux et
inefficaces tant pour l'entreprise que pour la collectivité."
Si ces gens s'intéressent un peu à la collectivité,
c'est peut-être une bonne idée qu'ils écoutent le conseil
d'administration d'Hydro-Québec.
Voici la dernière citation, M. le Président: "La formule
de redevance proposée pourrait représenter une solution de
facilité pour Hydro-Québec. En effet, toute erreur dans la
planification et toute faiblesse dans la gestion qui se refléteraient
dans les coûts de l'entreprise seraient absorbées par le
gouvernement sous la forme d'une redevance réduite. Cette solution de
facilité va à l'en- contre du rôle normal d'une
société d'État qui, par définition, doit rendre
compte de sa gestion en fonction d'objectifs clairs."
Vous vous souvenez, j'en suis certain, M. le Président, que, ce
matin, mon collègue, le député d'Outremont, a cité
l'ancien PDG de la société Hydro-Québec, M. Robert Boyd,
qui disait que la société Hydro-Québec et le gouvernement
étaient loin d'avoir des objectifs clairs quant à la politique
énergétique du Québec.
Je termine, M. le Président, en demandant, presque avec une
prière, que, si le ministre de l'Énergie et des Ressources, le
ministre des Finances et le premier ministre ne sont pas prêts à
écouter les 37, 38, 39 députés libéraux qui ont
parlé jour et nuit au nom de la collectivité
québécoise - et maintenant, j'espère que vous allez
trouver que c'est aussi au nom du conseil d'administration
d'Hydro-Québec - ils seront au moins prêts à comprendre que
tout le monde est opposé à ce projet de loi extrêmement
néfaste. Merci.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Mont-Royal.
M. John Ciaccia
M. Ciaccia: M. le Président, nous discutons du projet de
loi no 16 qui modifie la Loi sur l'Hydro-Québec et impose des
changements assez sérieux. Le gouvernement a décidé
d'imposer la clôture. Cela veut dire que nous ne pouvons plus discuter
des conséquences pour la population de ce projet de loi. Les
règlements de cette Assemblée nous obligent à accepter la
décision du gouvernement et à ne plus discuter d'un
projet de loi qui va avoir des conséquences sérieuses sur
toute notre économie. Nous acceptons forcément cette
décision du gouvernement d'imposer le bâillon et d'arrêter
toute discussion sur le projet de loi no 16. Cependant, M. le Président,
nous demandons au gouvernement, même s'il veut adopter le projet de loi
à la vapeur à la fin de la session, d'apporter certains
amendements au projet de loi dans l'intérêt des
Québécois, dans l'intérêt d'Hydro-Québec,
dans l'intérêt de l'avenir du Québec dans le domaine
économique, dans le domaine énergétique. (22 h 30)
Un des amendements que nous demandons, c'est de maintenir les objectifs
d'Hydro-Québec tels qu'ils étaient avant l'adoption de ce projet
de loi no 16. Quels étaient ces objectifs? Quand Hydro-Québec fut
créée, quand les compagnies privées vendaient
l'électricité au Québec ont été
nationalisées, l'objectif d'Hydro-Québec était de fournir
aux citoyens du Québec, aux entreprises industrielles ou commerciales
l'énergie aux taux les plus bas compatibles avec une saine
administration financière. Cela veut dire que l'objectif principal
d'Hydro-Québec est de s'assurer que les Québécois
reçoivent l'énergie aux plus bas prix possible, tenant compte des
exigences d'Hydro-Québec pour le développement des ressources
électriques. C'est important de maintenir cet objectif. Le gouvernement,
par le projet de loi no 16, enlève cet objet d'Hydro-Québec,
change la mission d'Hydro-Québec et peut affecter l'avenir, non
seulement d'Hydro-Québec, mais de l'économie
québécoise.
Une autre raison du gouvernement, c'est parce qu'il veut exiger
d'Hydro-Québec des dividendes. Le gouvernement dit: On a besoin
d'argent, nous voulons aller chercher les dividendes d'Hydro-Québec. Si
le gouvernement maintient les objets d'Hydro-Québec, c'est-à-dire
de fournir l'énergie au plus bas prix possible, si, après que
l'énergie est fournie aux plus bas prix possible, il reste des
dividendes pour le gouvernement, pour payer ses autres dettes, là, nous
disons: Très bien, cela sera un boni pour le gouvernement. Mais, si le
paiement des dividendes exige que les consommateurs au Québec doivent
payer plus cher pour l'électricité, là, nous disons non.
Nous exigeons du gouvernement de maintenir le mandat qui a été
donné à Hydro-Québec.
Pourquoi est-il important de maintenir ce mandat d'Hydro-Québec?
La hausse des tarifs va non seulement affecter le paiement de l'énergie
par le contribuable pour l'éclairage de sa maison, le chauffage, mais va
affecter surtout le prix de tous les produits - et cela c'est important, c'est
important que la population réalise les objectifs et les
conséquences du projet de loi no 16 qui va être imposé par
le gouvernement malgré les protestations de l'Opposition.
Le projet de loi no 16 va avoir pour conséquence d'augmenter le
prix de tous les produits et je dis "tous les produits" manufacturés ou
vendus au Québec. Si l'on achète un produit au Québec,
s'il n'est pas manufacturé au Québec, on l'achète, quand
même, au Québec; s'il est produit au Québec, nous allons
subir une augmentation additionnelle. Pourquoi? Je vais vous expliquer
pourquoi. C'est parce que les hausses d'Hydro-Québec sur les entreprises
commerciales, les entreprises industrielles vont être passées aux
consommateurs.
Le magasin d'alimentation qui voit augmenter le prix de son
électricité, le prix de sa réfrigération, le prix
de tout ce qu'il doit à Hydro, que pensez-vous que ce magasin va faire?
Pensez-vous qu'il va absorber qu'il va absorber la hausse? Mais non. Dans
l'économie, il n'y a pas de sociétés à but non
lucratif, ils sont là pour faire un profit. Alors, le marché, les
lois économiques vont exiger que la hausse d'électricité
soit payée par le consommateur. Le consommateur paie déjà
pour l'éclairage, pour le chauffage. Quand il va aller faire ses
emplettes au magasin, toutes les semaines, acheter sa viande, ses aliments,
quand il va aller à un magasin pour acheter l'habillement, tous les
produits, il va payer plus cher. C'est le consommateur, non seulement le
consommateur riche, mais tous les consommateurs qui vont être
obligés de payer cette hausse qui est exigée par le
gouvernement.
Alors, M. le Président, nous protestons, nous disons: Non, vous
ne devez pas faire cela. Pourquoi affecter l'avenir d'une société
comme Hvdro-Québec, qui a été tellement importante dans le
développement économique du Québec? Pourquoi affecter
cette société parce que le ministre des Finances, le gouvernement
a besoin d'argent? Il a besoin d'argent pour payer le gaspillage, sa mauvaise
administration depuis les cinq dernières années. Nous disons au
gouvernement, M. le Président: Nous réalisons que nous devons
payer les déficits. C'est admis, chacun doit payer les dettes,
même si l'Opposition n'en est pas la cause, on accepte cela, mais la
population doit les payer. On a élu d'une façon
démocratique ce gouvernement, alors il faut payer pour. Il faut payer
pour le résultat de cette élection et le résultat de
l'administration du gouvernement. Mais, s'il vous plaît, ne faites pas
cela à Hydro-Québec. Si vous avez besoin d'argent, trouvez
d'autres moyens, trouvez d'autres façons de hausser les taxes. Soyez
honnêtes avec la population. N'attaquez pas la mission
d'Hydro-Québec.
M. le Président, Hydro-Québec n'est pas seulement une
société qui fournit l'électricité
aux Québécois, c'est une société qui aide au
développement économique du Québec et, si on touche au
surplus d'Hydro-Québec, si on touche aux sommes dont Hydro-Québec
a besoin pour le développement des ressources hydroélectriques au
Québec, on affecte tout le développement économique du
Québec. Cela veut dire qu'on affecte votre avenir, mon avenir, l'avenir
de tout le monde. On vous dit, M. le Président, on dit au gouvernement:
Soyez donc plus intelligents que cela. Si vous voulez payer pour vos
bêtises, n'en faites pas une autre, la bêtise de changer le mandat
d'Hydro-Québec, de changer les structures, de changer l'avenir
d'Hydro-Québec, de changer le développement de la Raie-James.
On est tous fiers de la Baie-James M. le Président, même ce
gouvernement. Quand il était dans l'Opposition, il était contre
la Baie-James, il critiquait, il voulait le développement
nucléaire; il est venu au pouvoir et il voulait s'attribuer tout le
mérite de la Baie-James. C'est lui qui a appuyé sur le petit
bouton pour l'ouverture officielle de LG2. J'étais là et vous
auriez dû voir la foule de personnes et le mérite que voulait
s'attribuer ce gouvernement. Savez-vous ce qu'il fait à la Baie-James
maintenant. Il arrête le développement de la Baie-James. M. le
Président, c'est honteux! C'est scandaleux! Il ne faut pas permettre
cela et il faut que la population sache ce que le gouvernement essaie de
faire.
M. le Président, un autre aspect. J'ai seulement un peu de temps
qui m'est alloué. Nous demandons au gouvernement, et c'est seulement
pour être conforme à la Loi sur la protection du consommateur.
C'est vrai que par la Loi sur la protection du consommateur le gouvernement
s'est protégé. Il a dit: Je vais faire une loi sur la protection
du consommateur mais on va attaquer seulement l'entreprise privée, pas
les autres sociétés. Quant au gouvernement, non; il a deux poids,
deux mesures. Nous vous demandons quand vous allez l'inclure dans la Loi sur la
protection du consommateur. Si, par exemple, vous allez à une banque,
vous faites un emprunt, il ne faut pas seulement remettre le paiement total.
Supposons que vous empruntez 1000 $, ce n'est pas assez de payer 100 $ par
mois. Non, la Loi sur la protection du consommateur dit: Dans ces 100 $, il y a
80 $ de remboursement de capital, 20 $ d'intérêt, le taux
d'intérêt, c'est tel ou tel montant.
Alors, nous disons au gouvernement de faire la même chose pour les
factures d'Hydro-Québec. Sur la facture, vous deviez donner le chiffre
qui représente les montants dont Hydro-Québec a besoin pour une
saine administration aux taux les plus bas possible Pour les
Québécois, les contribuables, les consommateurs et en terminant,
M. le Président, l'autre chiffre qui représente les dividendes
dont le ministre des Finances a besoin pour payer les dettes du Québec.
Si cela est fait, le contribuable, le consommateur saura ce qu'il paie et le
gouvernement se conformera au moins à ses propres lois, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le président du
Conseil du trésor.
M. Yves Bérubé
M. Bérubé: Merci, M. le Président. J'ai
entendu un certain nombre d'interventions de l'Opposition depuis quelques
minutes, M. le Président, et je suis allé voir de mes
collègues qui ont participé aux travaux de la commission pour
m'enquérir de toutes ces critiques que j'entends depuis quelques
minutes, en me disant que le débat en commission parlementaire sur le
projet de loi, a dû être extraordinairement étoffé,
à voir le nombre de critiques que l'on entend de toutes sortes. Je me
suis dit qu'il a dû y avoir des propositions d'amendement
intéressantes à l'article 7, 12 ou 14, et qu'on pourrait
peut-être en voir la philosophie. Là, j'ai essayé de
discuter avec mes collègues et je leur ai posé un certain nombre
de questions, par exemple: Quels sont les amendements qu'on a eus à
l'article 1, il n'y en a pas eu; à l'article 2, il n'y en a pas eu;
à l'article 3, il n'y en a pas eu. J'ai dit: On n'a pas proposé
qu'un amendement! Non, a-t-on répondu, on n'a pu discuter ni l'article
1, ni l'article 2, ni l'article 3, parce qu'on a tout simplement discuté
autour du projet de loi. Depuis, que nous sommes assis en commission
parlementaire, l'Opposition, en aucun moment, n'a cherché de quelque
façon que ce soit à aller au fond de la question. On s'est
contenté de discuter de la forme, de faire des discussions absolument
sur n'importe quoi, l'objectif étant évidemment d'empêcher
l'adoption du présent projet de loi.
Aujourd'hui, on dit: On n'a pas eu assez de temps dans les discussions
préliminaires, de telle sorte qu'après je ne sais combien
d'heures, 30 ou 40 heures, 40 heures, on n'a toujours pas commencé
à étudier l'article 1 du projet de loi; on n'en a pas encore
parlé. Des considérations générales, l'âge,
la beauté, on me dit même dans certaines commissions, je pense que
c'est celle sur la loi no 39, on a longuement discuté, par exemple,
parce c'est à peu près le même contenu, du
député de Saint-Louis, à savoir que c'était un
buveur de scotch et non un buveur de bière. Enfin, on a discuté
de n'importe quoi, sauf du projet de loi.
Et maintenant on va dire: Mais écoutez, ça n'a aucun bon
sens...
M. Bélanger: M. le Président, question de
privilège.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Question de
privilège, M. le député de Mégantic-Compton.
M. Bélanger: M. le Président, le ministre est en
train d'induire cette Chambre en erreur, disant que mon collègue Harry
Blank a siégé à cette commission alors qu'il n'est jamais
venu... Il parle tout simplement d'une autre commission. De plus...
M. Bérubé: Question de règlement.
Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous
plaît!
Question de règlement, M. le ministre.
M. Bérubé: De toute évidence il y a un abus
de la procédure de la question de privilège et je pense qu'il
faut rappeler le député à l'ordre.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le ministre, vous
pouvez continuer.
M. Bérubé: Alors, M. le Président,
j'écoutais tantôt le député d'Outremont dire qu'il
n'y a pas de politique gouvernementale dans le secteur
énergétique et, dans la même intervention, nous parler de
l'énoncé de politique gouvernementale de 1978 en matière
énergétique. Il n'y a pas de politique, mais il y a un
énoncé de politique. Il faudrait peut-être le renvoyer au
dictionnaire français. Qu'est-ce qu'un énoncé de
politique? Il va s'apercevoir que c'est exactement cela, avoir une politique.
Il n'y en avait pas avant 1978, je le concède, il n'y en a jamais eu
sous le libéraux, mais on pourrait parler de ces politiques
énergétiques qui ont commencé à l'époque de
M. Joron par une réflexion en profondeur de toute la
problématique des approvisionnements en énergie au
Québec.
D'abord on s'est préoccupé de la pénétration
du gaz naturel, et on ne s'est pas contenté d'en parler. On s'est dit:
Il faut que le gaz entre au Québec vite, et avec des entreprises
québécoises à nous, contrôlées du
Québec pour s'assurer qu'il y ait la maximum de retombées
économiques au Québec par l'achat de ces entreprises; c'est
ça qui nous a amenés à prendre le contrôle de Gaz
Métropolitain, de Gaz Inter-Cité, ce qui fait qu'aujourd'hui nous
sommes pleinement engagés dans l'implantation du gaz naturel au
Québec.
Concernant Hydro-Québec, oui, on a dit qu'Hydro-Québec
devait aménager le plus rapidement nos rivières, mais non pas,
comme le dit le Parti libéral, pour exporter d'immenses quantités
d'électricité à long terme pendant 25 ans et faire en
sorte qu'on mangue d'énergie pour nos propres besoins, pour assurer
notre développement industriel à nous. Non, nous avons pris la
peine d'élaborer une politique pour attirer des entreprises au
Québec en utilisant justement les avantages de l'énergie
électrique pour favoriser l'implantation industrielle. On n'est pas
prêt à vendre notre électricité à rabais
à des industries, mais on dit: Si vous êtes prêts à
consentir un certain nombre d'investissements dans telle et telle conditions on
pourra discuter de tarif, et c'est cela qui a amené l'implantation de
Reynolds au Québec, l'agrandissement de Baie-Comeau, un investissement
de près d'un demi-milliard de dollars chez nous. Mais on ne s'est pas
contenté de faire comme des gens avant nous, de parler de la croissance
pour la croissance, mais on s'est dit également que les
Québécois aspiraient à une certaine qualité de vie
et qu'ils étaient préoccupés par les énergies
douces, les nouvelles sources d'énergie, les économies
d'énergie, pour faire en sorte qu'on ait une société
beaucoup plus écologique, qu'ils ne fassent pas du développement
sauvage pour du développement sauvage, ce qui nous a amenés,
à concevoir un programme d'économie d'énergie comme
Énerqain, tellement populaire qu'à l'heure actuelle,
Hydro-Québec est totalement débordée par les demandes.
On pourrait parler de Nouveler, la création de cette
société, cette société d'état qui va
construire cette usine de méthanol à
Saint-Juste-de-Bretenières, mais qui est également responsable
d'un paquet de projets drôlement intéressants dans le domaine de
la conservation de l'énergie. Par exemple, un hôpital à
Sainte-Anne-des-Monts n'a pas les moyens d'investir dans l'économie
d'énergie, cela n'a pas de bon sens, parce qu'il va économiser
beaucoup plus que ce que ça lui coûte, mais il faudrait du
comptant. Et voilà, cette société Nouveler à nous
qui vient, fait tous les travaux pour l'hôpital sans facturer un sou
à l'hôpital et se repaie grâce aux économies
d'énergie que l'hôpital effectue. Opération qui est en
train de s'étendre à tout le Québec.
Il n'y a personne qui parlait d'économie d'énergie avant
nous. Il n'y a personne qui parlait d'énergie nouvelle avant nous. On a
parlé d'approvisionnement de pétrole en donnant un
véritable mandat à SOQUIP pour approvisionner le Québec en
pétrole, pour s'engager dans l'exploration. C'est au-delà de 100
000 000 $ en exploration qui va se faire au Québec, grâce à
une mesure fiscale que le gouvernement a adoptée et qui amène
maintenant toutes les compagnies de pétrole au Québec à
s'associer avec SOQUIP pour faire de l'exploration dans le golfe, chez nous. Ce
n'est pas avec un gouvernement du Parti libéral qu'on a eu ça,
c'est avec un gouvernement du Parti québécois.
Il fallait en venir également à une politique tarifaire,
parce que, si on s'engage dans la pénétration du gaz, dans le
développement de notre électricité, il faut avoir
des tarifs, l'un par rapport à l'autre, qui fassent en sorte que le gaz
ait une chance de pénétrer. Il fallait donc tout rationaliser
cette opération, faire en sorte que l'électricité pour la
consommation courante reste bon marché, que l'électricité
pour le chauffage reste comparable avec les sources alternatives
d'énergie, arriver avec une certaine cohérence dans notre
politique tarifaire. C'est ça que le gouvernement a introduit cette
année. Mais cela a comme conséquence qu'Hydro-Québec,
comme toutes les compagnies pétrolières, va faire des profits
épouvantables. L'Opposition libérale ne semble pas avoir
participé à la commission parlementaire où
Hydro-Québec est venue expliquer la problématique et où on
s'est rendu compte qu'Hydro-Québec serait en train de payer, en moins de
cinq ans, comptant, ses barrages. Certains députés, mais pas de
l'Opposition d'ailleurs, ont soulevé cette question, ils ont
essayé d'approfondir ce point particulier. Là, on s'est
posé la question: Les contribuables du Québec qui ont investi
dans Hydro-Québec ont-ils investi pour que certains consommateurs d'une
forme particulière d'énergie se fassent subventionner, ou bien
ont-ils investi pour faire en sorte que l'ensemble des contribuables
québécois profite des retombées? C'est ça, le sens
de la loi.
Ce que la loi no 16 va faire, c'est ceci: vous ne vous chauffez pas
à l'électricité, madame ou monsieur, vous vous chauffez au
pétrole, vous aurez le droit de profiter des avantages
d'Hydro-Québec, même si vous ne consommez pas
d'électricité. En d'autres termes, il n'y aura pas simplement
certaines entreprises, grosses consommatrices d'électricité, qui
vont empocher les résultats des investissements que vous avez faits dans
Hydro-Québec, mais c'est l'ensemble des contribuables
québécois qui va en profiter. Parce que, lorsque
Hydro-Québec paie un dividende au gouvernement, c'est de l'impôt
que le gouvernement n'est pas obligé d'aller chercher dans vos poches.
Par conséquent, c'est vous qui en profitez. Nous avons donc simplement
choisi, non pas de faire profiter vos investissements aux grands consommateurs
d'énergie électrique, mais nous avons choisi de vous faire
profiter de vos investissements. C'est le sens de la loi no 16, il n'y a rien
de plus catastrophique que ça.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le ministre, M. le
ministre!
M. Bérubé: Et, M. le Président, je
termine.
Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous
plaît!
M. Bérubé: Avec une loi aussi rationnelle et devant
un comportement aussi irrationnel de l'Opposition qui ne s'est même pas
donné la peine d'aborder l'étude de l'article premier du projet
de loi, ce que ça veut dire M. le Président, c'est qu'il faut se
dépêcher de l'adopter. (22 h 50)
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député d'Outremont, sur une question de...
M. Fortier: Article 96.
Le Vice-Président (M. Rancourt): 96.
M. Fortier: J'aimerais corriger certains propos du discours que
j'ai tenu et de celui qu'a tenu le député de Matane.
Il est vrai que j'ai parlé d'énoncé de politique et
de politique; en deux mots, je voudrais seulement préciser ma
pensée. Il faut croire que je ne me suis pas exprimé très
clairement ou le député de Matane ne m'a pas compris; j'ai fait
la distinction entre l'énoncé de politique qui n'est pas
approuvé par le cabinet et qui demeure un énoncé de
politique et une politique qui doit être approuvée par le cabinet.
Ce que j'ai dit c'est qu'en ce qui concerne la politique tarifaire...
M. Bérubé: Question de privilège.
M. Fortier: ... il y a un énoncé de politique qui,
à ma connaissance, n'est pas approuvé par...
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le ministre, question
de privilège.
M. Bérubé: M. le Président, le
député d'Outremont a malheureusement induit la Chambre en erreur
et de toute évidence, d'ailleurs, il a reconnu qu'il n'était
peut-être pas au courant. J'ai l'impression que depuis le début de
la discussion, effectivement, il ne semble pas être au courant de quoi
que ce soit. M. le Président, l'énoncé de politique
énergétique a été approuvé par le Conseil
des ministres.
Le Vice-Président (M. Rancourt): II n'y a pas de
débat, je m'excuse, M. le député d'Outremont.
M. Fortier: ... sur un autre sujet.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Sur un autre sujet.
M. Fortier: II a dit qu'à la commission parlementaire on
avait fait état du fait qu'avec ses revenus qu'Hydro-Québec
pourrait s'autofinancer à 60%. Ce que je veux lui faire remarquer, parce
qu'il n'était pas là à la commission parlementaire, c'est
qu'Hydro-
Québec a fait état d'une différence de calcul...
Deux secondes...
Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît!
J'étais debout donc, il n'y avait aucun enregistrement ni d'un
côté ni de l'autre. M. le député de
Mégantic-Compton.
M. Fabien Bélanger
M. Bélanger: Merci, M. le Président. Je ne
relèverai pas les propos du député de Matane à
savoir que les Québécois avaient investi beaucoup dans
Hydro-Québec, n'est absolument faux, les Québécois n'ont
pas investi un sou dans Hydro-Québec, c'est une société
d'État qui s'est toujours financée à même la
facturation de ses clients.
D'autre part, comment tenter de faire croire aux Québécois
que le projet de loi no 16 s'inscrit dans le cadre du développement
économique du Québec? Je qualifierais cela de fraude
intellectuelle, et le président du Conseil du trésor est
très habile pour induire les gens en erreur d'un telle façon.
M. le Président, ce projet de loi no 16 passera dans les faits
historiques de l'Assemblée nationale; comme l'a bien
démontré mon collègue de Marguerite-Bourgeoys,
après seulement 40 heures de commission parlementaire, on nous impose
quoi? On nous impose le bâillon, la clôture; la clôture
péquiste dont ils sont les spécialistes, dont le premier ministre
lui-même est un spécialiste; il a mis tout un système en
branle pour clôturer son congrès qu'il vient de tenir à
Montréal alors que c'est lui et ses dirigeants qui avaient invité
à peu près tous les organismes terroristes possibles. C'est
maintenant lui qui met en branle un plan pour tenter de tout camoufler, de
faire voir par son air de petit gars malheureux que ce n'est pas sa faute. M.
le Président, il est le principal responsable.
C'est un geste unilatéral et une façon, à la
péquiste, de gouverner.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Je m'excuse, question de
règlement du ministre.
M. Bérubé: M. le Président, il existe un
règlement de notre Assemblée nationale qui exige que le
député qui intervient traite du sujet et que cela porte sur la
pertinence du débat. Le député ne parle pas
présentement...
M. Bélanger: M. le Président, il a parlé
seulement de gaz.
Le Vice-Président (M. Rancourt): II n'y a personne ici
dans cette Chambre qui va me dire si mon jugement est mauvais. J'essaie
d'interpréter, chaque fois que je suis à ce siège, de la
façon la plus juste possible.
Le sujet que nous traitons actuellement est la prise en
considération du rapport et, M. le député, j'aimerais que
vous vous en teniez à cela. Je ne veux, d'aucune façon, discuter
de vos propos, je vous demande simplement de vous en tenir à la prise en
considération du rapport qui est déposé devant cette
Chambre.
M. le député.
M. Bélanger: Merci, M. le Président, je suis fier
de votre décision et je la respecte.
Je disais donc qu'après seulement 40 heures de commission
parlementaire on nous impose la clôture péquiste. Je tiens
à le dire et je le répète, la clôture
péquiste, après seulement 40 heures de discussions au cours
desquelles on a tenté, par tous les moyens mis à notre
disposition, de faire comprendre le bon sens, de faire entendre des groupes,
des personnes intéressées à venir discuter sur ce projet
de loi no 16. Mais non, on avait hâte, il fallait passer le projet de loi
à la hâte, au rouleau à vapeur.
Pourtant, M. le Président, au mois de septembre, on était
prêts, nous, de l'Opposition à venir siéger dans cette
chambre, à venir jouer, à venir remplir notre rôle de
législateurs, notre rôle de députés, quoi. Qu'est-ce
qu'on a fait? On a retardé l'ouverture à cause d'un autre fait
historique, M. le Président. C'est la première fois dans
l'histoire du Québec qu'on retarde l'ouverture de la session à
autant de reprises, cinq reprises. Pourquoi? Toujours pour la même chose,
discuter de la constitution. Alors, on nous arrive, M. le Président,
à la dernière minute, avec 30 projets de loi à adopter
dans trois semaines. On travaille jour et nuit.
Ce gouvernement a démontré son insouciance totale envers
le respect de l'Opposition. Pas les députés d'arrière-ban,
pas les "back-benchers", le leader du gouvernement lui-même, la nuit
dernière, a traité dans cette Chambre les 41
députés libéraux d'insignifiants, M. le Président.
D'insignifiants! 46% de la population nous ont approuvés, ont
voté pour nous, nous ont mandatés pour venir dans cette Chambre.
Que trouve à dire le leader du gouvernement? 41 insignifiants. M. le
Président, vous le savez comme moi, j'ai 40 honorables collègues
ici, dans cette Assemblée, et il y en a même qui sont ici depuis
tellement de temps que le leader de l'Opposition est encore en culotte
courte.
M. le Président, ce gouvernement péquiste ne semble pas
vouloir s'accommoder de l'Opposition. Pourtant, je lui ai fait ici une mise en
garde, il y a quelques jours. Nous allons jouer notre rôle d'Opposition,
que cela déplaise ou non au gouvernement, nous allons jouer notre
rôle d'Opposition. Qu'on se souvienne des députés
péquistes qui, du temps qu'ils étaient dans l'Opposition,
à six,
ont réussi à semer le désordre total dans
l'administration du gouvernement. On joue tout simplement, M. le
Président, notre rôle d'Opposition, tout simplement pour tenter
d'obtenir que ce gouvernement n'adopte pas un projet de loi aussi
néfaste pour l'ensemble des Québécois, et on se fait
accuser de quoi? D'insignifiants:
M. le Président, nous ne sommes pas des insignifiants, nous avons
même tenté à plusieurs reprises d'apporter des amendements
pour améliorer le projet de loi. Je vais vous en citer un, M. le
Président, qui est de toute importance: Nous voulons que sur la
facturation d'Hydro-Québec on inscrive le montant versé en taxe
de capital et dividende. Cela n'est pas une exception, M. le Président.
Prenons l'entreprise privée. Je verrais très mal une entreprise
dans le domaine de la couture, par exemple, où il y a 25 comités
paritaires, vouloir déduire une taxe sans en mentionner la nature. Je
verrais très mal aussi un entrepreneur dans le domaine de la
construction, où, encore là, il y a des inspecteurs de l'Office
de la construction du Québec, I'OCQ, les caporaux de l'OCQ, faire de
même. L'employeur serait mis à l'amende et il serait même
emprisonné pour ne pas vouloir faire mention, sur le chèque de
paie de son employé, du montant qui lui a été
déduit pour fins d'impôts. Pourquoi le gouvernement agirait-il
autrement? Pourquoi ne pas vouloir mentionner sur la facture, qu'on le sache au
moins, pourquoi la facture d'électricité a augmenté de 10
$, de 20 $, de 30 $? Là, le consommateur sera en mesure de dire:
Voilà, cela est ma participation à la mauvaise administration du
gouvernement PQ. C'est simple cela, M. le Président.
Il y a beaucoup d'autres amendements que nous avons apportés, mes
collègues en ont traité, je pourrais traiter d'autres, on veut
aussi que ce soit le conseil d'administration d'Hydro-Québec qui
décide des dividendes et non le ministre des Finances. Pourquoi? Tout
simplement pour s'assurer que cette société, ce joyau, comme on
l'a qualifié, Hydro-Québec, puisse continuer à offrir un
service essentiel comme l'électricité aux citoyens du
Québec aux meilleurs taux possible. (23 heures)
M. le Président, ce n'est pas insignifiant que de travailler jour
et nuit pour tenter de démontrer à ce gouvernement qu'il est en
train de commettre la pire erreur depuis qu'il a pris le pouvoir, en 1976, en
voulant transformer les structures d'une société qui ne lui
appartient pas. Ce gouvernement n'est pas éternel. Dieu sait qu'il n'est
pas éternel! Si on avait des élections demain matin, on vous
prouverait qu'il est pas éternel. Tout ce qu'on veut, c'est simplement
une loi qui aurait un certain sens.
À plusieurs reprises on est intervenu, à la période
des questions, pour demander au premier ministre de faire entendre les groupes
qui se sont manifestés, on a demandé de retirer le projet de loi
no 16. Il semblerait que c'est trop urgent, il faut combler le déficit
du ministre des Finances. M. le Président, ce n'est pas être
insignifiant que faire un travail comme ça, peu importe ce qu'en pense
le leader parlementaire. C'est tout simplement un rôle d'Opposition que
nous avons à jouer et que nous allons continuer de jouer tant et aussi
longtemps que nous serons ici dans cette Chambre. Merci, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Vaudreuil-Soulanges.
M. Daniel Johnson
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Merci, M. le Président.
C'est la dernière chance, c'est le "last call", comme on dit, à
cette heure-ci, que nous adressons aux ministériels pour qu'ils retirent
ou reconsidèrent à tout le moins les dispositions de la loi 16
qui modifient la Loi sur l'Hydro-Québec. Lors de la commission
parlementaire, pendant à peine l'équivalent d'une semaine de
travail, contrairement à ce que les ministériels ont
prétendu, nous avons discuté du fond même de la question.
On pourrait même nous reprocher d'en avoir parlé de façon
répétitive, mais quand les gens ne comprennent pas, il faut
continuer à expliquer longtemps.
Ce n'est pas un véritable argument d'aller prétendre,
comme le député de Matane, que nous n'avions pas soumis
d'amendement aux articles 1, 2, 3, 4 et 5, là n'est pas la question. Ce
que nous avons fait c'est que nous avons passé effectivement plusieurs
heures à réclamer que des gens qui sont intéressés,
parce qu'ils l'ont manifesté, à parler de ce changement profond
que le gouvernement entend faire au régime d'Hydro-Québec,
puissent être entendus en commission parlementaire. Nous l'avons
tellement demandé qu'on a ensuite prétendu, du côté
ministériel, que nous avions utilisé, par nos demandes
mêmes le temps qu'on aurait pu consacrer à ces gens qui voulaient
se faire entendre devant la commission parlementaire. On nous aurait
évidemment reproché de ne pas avoir demandé que des gens
viennent se faire entendre, et on ne les aurait pas convoqués dans le
cas contraire.
Nous ne pouvions évidemment pas gagner dans ces conditions, sauf
que nous avons une dernière occasion de faire valoir que, selon nous, le
gouvernement a tort de vouloir faire d'Hydro-Québec une compagnie comme
les autres. C'est surtout le ministre des Finances et certains autres
intervenants du côté ministériel qui prétendent
qu'Hydro-
Québec doit absolument devenir une compagnie comme les autres,
ici au Québec, sous prétexte, entre autres, que les
Québécois ont investi dans Hydro-Québec et qu'il est
temps, je cite le ministre des Finances, dans un discours du mois de mars, "que
les Québécois en retirent maintenant des dividendes et un
rendement".
Or, c'est Hydro-Québec elle-même, comme entreprise, qui
avait, en 1963, emprunté les sommes qui lui ont permis de
réaliser l'expansion de son réseau par l'acquisition des
compagnies privées. Les Québécois n'y ont rien investi.
C'est HydroQuébec elle-même, à même ses revenus, ses
profits, qui a remboursé cet emprunt, qui est devenue
propriétaire à part entière et qui a intégré
à son propre réseau les compagnies privées
d'électricité depuis 1963. Les vraies raisons pour lesquelles le
ministre des Finances entend faire d'Hydro-Québec une compagnie comme
les autres, c'est parce que ça rapporte plus d'impôt. C'est
très simple, mais ce n'est pas Hydro-Québec qui est taxée,
ce sont les consommateurs d'électricité. Ce sont les
consommateurs de tous les produits qui sont achetés au Québec et
qui sont transportés d'une façon ou d'une autre, qui sont
fabriqués et sur lesquels se répercutent les hausses de tarifs
qu'Hydro-Québec, nécessairement, étant donné que le
gouvernement lui réclamera des dividendes, devra imposer.
M. le Président, c'est pour trois raisons distinctes que nous
avons introduit des amendements à ce moment-ci, qui évoquent la
portion, selon nous, dans les tarifs d'Hydro-Québec, qui
représente une taxe que doivent payer les Québécois.
D'abord, de quelle sorte de taxe s'agit-il? Premièrement, le ministre
des Finances prétend qu'il faut doter Hydro-Québec de
capital-actions, d'actions ordinaires dont le ministre des Finances serait le
dépositaire et dont le gouvernement serait le propriétaire.
Qu'est-ce que cela change vraiment au fonctionnement d'Hydro-Québec
qu'elle ait ou non des actions ordinaires dans sa structure financière?
Cela ne change strictement rien, sauf qu'en vertu des dispositions de la Loi
sur l'impôt que le ministre des Finances lui-même détermine,
Hydro-Québec devra payer une taxe sur son capital-actions, entre autres.
C'est justement là la différence. C'est cela la différence
dans le fonctionnement d'Hydro-Québec. Si elle a des actions ordinaires,
du capital-actions, elle devra payer une taxe sur le capital.
Deuxièmement, le ministre des Finances prétend donc que,
si c'est une compagnie comme les autres, Hydro-Québec devra payer des
taxes comme les autres. Je viens de démontrer qu'elle paiera la taxe sur
le capital. Elle devrait inévitablement faire payer des taxes, comme les
autres compagnies commerciales, lorsqu'elles vendent leurs biens ou produits,
demandent aux consommateurs de payer une taxe de vente. C'est pour cela que
nous avons inscrit comme amendement, à ce moment-ci, en
considération du rapport de la commission, que le gouvernement
élimine cette portion de la taxe de vente qui est imposée par
Hydro-Québec lorsqu'elle nous envoie son compte
d'électricité. C'est pour cela que le ministre des Finances et le
gouvernement veulent qu'Hydro-Québec soit une compagnie comme les
autres, c'est pour pouvoir aller chercher dans la poche des consommateurs des
taxes lors de la vente.
Troisièmement, le gouvernement prétend que, comme toutes
les autres compagnies, Hydro-Québec devrait payer des dividendes. Si on
regarde exactement ce qu'est HydroQuébec, c'est une
société d'État, cela fait partie du domains public, du
domaine de ce qui appartient au gouvernement et aux Québécois.
Dans ce sens, ce n'est pas une compagnie comme les autres, parce que les
dividendes qu'elle pourrait payer, il faut qu'ils viennent d'une seule source,
il faut qu'ils viennent des consommateurs d'électricité que sont
les Québécois. Encore une fois, c'est là une taxe qui
n'est pas sans rappeler le prix de vente de ce qu'on achète à la
Société des alcools où il n'y a pas de taxe de vente. La
Société des alcools, qui fait partie du domaine public, fixe les
prix un peu comme elle le veut. Il n'y a personne d'autre qui vend des boissons
fortes, à toutes fins utiles. Il n'y a personne d'autre qui vend du
scotch, il n'y a personne d'autre qui vend du gin. Il y a des dépanneurs
qui vendent du vin...
M. Bérubé: Question de privilège, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Je m'excuse, M. le
député. Question de privilège, M. le ministre, en vertu de
l'article 49. J'essaie simplement de savoir si c'est un privilège ou si
c'est plutôt une divergence d'opinions que vous pourrez corriger par une
autre intervention.
M. Bérubé: Ce n'est pas une divergence d'opinions.
Dans le cas de la Société des alcools, il y a une très
nette distinction à effectuer entre la taxe à la vente, qui est
une taxe de vente sur les produits d'alcool, et les profits de
l'entreprise...
Le Vice-Président (M. Jolivet): C'est vraiment une de
divergence d'opinions.
M. le député de Vaudreuil-Soulanges.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Merci, M. le Président.
C'est donc, dans ce cas, encore une fois, assimilable à la façon
dont le gouvernement perçoit des impôts par la vente de billets de
Loto-Québec. Personne
d'autre ne vend de façon organisée et systématique
des billets de loterie au Québec. Dans la mesure où c'est
populaire et que les Québécois veulent en acheter,
Loto-Québec est parfaitement libre d'en fixer les prix. C'est de la
même façon que les tarifs d'Hydro-Québec seront soumis,
à cause du fait que des dividendes seront exigés, non pas comme
si c'était une compagnie comme les autres, mais par le gouvernement
lui-même. Dans une compagnie comme les autres, c'est le conseil
d'administration, les gestionnaires de l'entreprise qui décideraient du
montant. Dans le cas d'Hydro-Québec, et c'est dans la loi, cette taxe
déguisée qui s'appelle un dividende parce que nous la payons,
nous les Québécois, sera déterminée par le
gouvernement à la lumière de ses propres besoins. Ce n'est donc
pas véritablement une compagnie comme les autres, Hydro-Québec,
c'est évident.
Ce n'est pas simplement pour en faire une soi-disant compagnie comme les
autres que le gouvernement a soumis le projet de loi 16, c'est pour aller
chercher dans la poche des Québécois, de tous les
Québécois qui consomment de l'électricité des
sommes additionnelles pour se financer. Dans ce sens, M. le Président,
nous ne croyons pas qu'il est normal à ce moment-ci que le gouvernement
ait interrompu le débat de façon aussi brutale; il est normal
à ce moment-ci que les Québécois s'attendent que non
seulement l'Opposition fasse valoir son opinion sur le projet de loi 16, mais
également que les ministériels, prennent au moins autant de temps
que nous pour expliquer aux Québécois pourquoi ils veulent
absolument transformer Hydro-Québec en une compagnie comme les
autres.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Saint-Henri.
M. Roma Hains
M. Hains: Dans ma dernière intervention sur le fameux
projet de loi 16, je faisais allusion, M. le Président, à la
chaise électrique, vu qu'on nous avait bâillonnés. Nous
étions prêts pour le grand départ et la grande noirceur,
mais il y a eu probablement un court-circuit, puisque nous sommes encore ici ce
soir et que le débat se continue. C'est sans doute Hydro-Québec
qui a coupé le courant et qui a permis les difficultés
temporaires de deux heures que nous avons connues dans la nuit de mardi
jusqu'au petit jour de mercredi.
M. le Président, que reste-t-il à dire sur ce sujet, sinon
que nous sommes vraiment profondément déçus que notre
lutte ait porté si peu de fruits. Nous aurions tant désiré
que le gouvernement revoie son projet, y apporte des amendements et soulage nos
concitoyens de cette hausse de 16,3% sur des factures qu'ils recevront en
janvier prochain. Ce sera probablement non, car la voix de la majorité,
la voix de l'infaillibilité péquiste ne souffre aucune
altération et encore moins aucune contradiction. Notre
Hydro-Québec va perdre son indépendance. Elle devra
dorénavant plier l'échine et verser comme une vassale la part de
sa richesse au seigneur Parizeau.
Pour y parvenir, Hydro-Québec devra percevoir des taxes de chaque
maison de son fief pour payer des redevances au trésor provincial et les
pauvres ouvriers vont trimer encore plus dur pour répondre aux exigences
nombreuses d'un maître intraitable. On se prend presque à
rêver, d'un Robin des bois, devant ces pressureurs qui se cachent sous
les couleurs de la social-démocratie. Et pourtant, dans cette
période difficile que nous traversons, le gouvernement pourrait laisser
les citoyens respirer un peu et vivre leur vie déjà alourdie par
tant de contraintes et tant d'ennuis. Mais non, on les exaspère on les
pique on les harcèle par des taxes de tout calibre et de toute
espèce.
Déjà pris dans le tourbillon de l'inflation et des taux
d'intérêt, les contribuables ne savent plus où donner de la
tête et surtout où puiser des nouvelles ressources pour faire face
à toutes ces obligations et impositions.
Ce public n'est pas aussi crédule et aussi dupe que le
présent gouvernement semble le croire, car la colère gronde chez
le peuple. Il n'en a que faire des luttes constitutionnelles et des chicanes
sur des traits d'union; ce qu'il veut, c'est du pain. Les jeux du cirque et du
cirque séparatiste, il en est saturé. Il n'en peut plus de se
faire taxer à outrance et d'être résident de la province la
plus lourdement imposée au pays.
Aurait-on vraiment pu s'imaginer que, dans une même année
financière, on écoperait d'une taxe doublée sur l'essence,
augmentant de 20% à 40%, soit une augmentation de 0,30 $ le gallon, et
que, du même souffle, on augmenterait la facture
d'électricité de 16,3%, et cela sans mentionner toutes les autres
taxes subsidiaires? Malgré tout, M. le Président, ce gouvernement
patauge dans des déficits sans précédent de 3 000 000 000
$ par année. Oui, le public réagit sévèrement. 11
suffit vraiment de faire le tour de nos comtés pour recueillir toutes
les plaintes et les doléances de nos contribuables. Comme me disait un
de mes électeurs de Saint-Henri avec son franc-parler: "II y a tout de
même un maudit "boutte," si ça continue, on va me tordre les
oreilles pour me faire cracher de l'argent.
De plus, M. le Président, qu'on arrête donc d'imputer tous
nos malheurs et tous nos déboires au fédéral. Comme le dit
toujours le député de Frontenac avec son petit accent typique et
dramatique, Ottawa existait avant l'arrivée du parti péquiste au
pouvoir et on
vivait tout de même bien, on n'était peut-être pas
riches, mais on vivait bien. Aujourd'hui, au Québec, malgré qu'on
ne soit que 25% de la population canadienne, on a un déficit qui
correspond à 60% du déficit de tout l'ensemble du Canada. Si on
voulait faire un inventaire de tout le butin financier que le gouvernement a
rapaillé en taxes cette année, voici ce que ça donnerait.
Le 10 mars dernier, M. Parizeau a annoncé une taxe supplémentaire
de quelque 630 000 000 $ pour l'assurance-maladie; il a retiré 600 000
000 $ de plus de taxe ascenseur sur le pétrole, il a annoncé une
augmentation de 50% du prix des chambres privées et semi-privées,
pour 20 000 000 $ de revenus additionnels; il a imposé une taxe de 60%
du coût de l'immatriculation des véhicules, pour 238 000 000 $ de
revenus additionnels; il a annoncé une hausse de taxe
d'Hydro-Québec de 16,3%, pour des revenus additionnels cette
année de 415 000 000 $ et, avec les annonces du 17 novembre dernier, sur
les hausses du prix de l'essence, c'est plus de 3 227 000 000 $ d'impôts
et de taxes diverses que les Québécois paieront, selon les
annonces faites depuis le 10 mars dernier. Cela, M. le Président, sans
compter que la non-indexation des tables d'impôt, contrairement au
fédéral, aura procuré 800 000 000 $ de revenus de plus
à même l'inflation. Alors c'est près de 4 000 000 000 $ de
plus que les Québécois auront à verser au Trésor
public pour une seule année. C'est vraiment époustouflant!
Je termine, M. le Président, en vous disant que nous, les
libéraux, nous sommes heureux de la lutte que nous avons menée
contre ce projet de loi no .16 pour protéger nos concitoyens. Nous
proposons quelques amendements. Surtout, la suppression de la taxe de vente sur
les factures et la détermination des ristournes à payer au
gouvernement, laissées à la discrétion de la
société d'Hydro-Québec. Il y aura peut-être quelques
amendements qui seront, acceptés mais ils seront probablement
très peu nombreux au point de vue économique. C'est là que
c'est décevant. La population paiera, sans doute, mais jugera aussi un
gouvernement qui n'a pas voulu entendre raison et qui poursuit toujours sa
politique de taxation. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Verdun.
M. Lucien Caron
M. Caron: M. le Président, moi aussi je voudrais dire
quelques mots sur la prise en considération du rapport de la commission
parlementaire sur le projet de loi no 16. C'est vrai, M. le Président,
c'est la dernière chance, comme mon collègue de
Vaudreuil-Soulanges le disait il y a quelques minutes, on sera obligés,
avec le bâillon qui nous est imposé, d'accepter les
recommandations du gouvernement. M. le Président, pourquoi n'avons-nous
pas commencé plus de bonne heure, dans le courant de l'année,
pour qu'on puisse discuter de projets de loi aussi importants? J'entends
certains collègues en arrière. Au moment où on se parle,
on a seulement 46 jours de travail dans l'année. Imaginez-vous, M. le
Président, ça fait neuf semaines et une journée qu'on
travaille tandis que les travailleurs du Québec, eux, travaillent 52
semaines par année, ceux qui ont du travail. Combien sont en
chômage et aimeraient travailler? C'est justement pour ça que
nous, du Parti libéral, on veut penser à ceux qui ne peuvent pas
être représentés ici, et Dieu sait combien j'en ai dans mon
comté qui veulent travailler et qui veulent être aidés.
Mais avec des augmentations de taxes de tous bords et de tous
côtés, comme mon collègue de Saint-Henri vient de le
mentionner, les gens sont tannés. On essaie de faire comprendre aux gens
d'en face qu'il est encore temps d'arrêter de siphonner par
Hydro-Québec. En 19R1, tout le monde a besoin
d'électricité. Le gouvernement le sait. Le gouvernement est pris,
le gouvernement est sur le bord de la faillite, alors, il va à
Hydro-Québec, sachant que les gens ont besoin
d'électricité, et il va augmenter les factures.
Imaginez-vous, qu'en cinq ans, de 1977 à 1982, ce gouvernement a
augmenté de 97% les taux d'électricité. Cela fait une
moyenne de 19,20%. Est-ce que ces gens d'en face ont augmenté les
prestations aux bénéficiaires de l'aide sociale de 19,20% par
année? Est-ce que les gens qui ont été victimes
d'accidents du travail ont reçu une augmentation de 19,20%? Vous me
donnerez la réponse tout à l'heure, les gens d'en arrière,
les "back-benchers". Vous ne vous levez pas mais vos ministres vous passent
toutes sortes de Québec, oui des Québec, et tout à l'heure
vous paierez la note. Vous n'êtes pas assez hommes pour vous
présenter devant la population parce que vous savez qu'actuellement, au
moment où on est, vous êtes sur le bord de la faillite. Vous le
savez. Qu'on aille un peu partout, qu'on prenne des taxis, qu'on circule...
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le
député, je m'excuse. M. le député si vous... Oui,
je vais vous donner la parole, Mme la députée. Je vais simplement
dire au député de me regarder, de me parler puisque le
règlement dit que c'est à moi qu'on doit s'adresser, de telle
sorte qu'on évitera le brouhaha.
Mme la députée de Dorion, question de privilège.
Mme la députée.
Mme Lachapelle: M. le Président, j'aimerais souligner au
député de Verdun que
je n'ai pas l'intention d'être un homme; je suis une femme, et il
ne faudrait peut-être pas qu'il les oublie dans cette Chambre.
Une voix: Bravo!
Le Vice-Président (M. Jolivet): Donc, M. le
député, regardez-moi.
M. Caron: M. le Président, c'est qu'au moment où je
parlais, je regardais à ma gauche et je voyais seulement des hommes.
C'est regrettable je parle en tant que membre de l'Assemblée nationale
qu'il n'y en ait pas plus d'une qui soit ici ce soir.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Je m'excuse, M. le
député. Je ne voudrais pas que rien soit soulevé, mais
j'en vois quatre, d'après ma vue à moi.
Une voix: Question de privilège, M. le
Président
Le Vice-Président (M. Jolivet): Mme la ministre, si vous
voulez intervenir dans le sens de dire qu'il y a d'autres femmes, je l'ai
déjà fait.
M. le député.
Une voix: Merci, M. le Président
M. Caron: Au moment où je parlais, Mme la ministre
n'était pas en Chambre, pour autant que je suis concerné.
M. le Président, nous, de ce côté-ci de la Chambre,
nous avons des amendements. Si le ministre voulait qu'on accepte son projet de
loi, il faudrait qu'il comprenne qu'on a de bons amendements, nous autres
aussi, parce que si je me rappelle bien, au moment où le vice premier
ministre et le ministre de l'Environnement, qui sont ici ce soir - je les salue
parce qu'on ne les voit pas souvent, je les salue en passant - nous ont fait
des recommandations on les a acceptées à plusieurs reprises dans
l'intérêt des contribuables du Québec.
M. le Président, il y a une en particulier que j'aimerais voir
accepter. C'est l'amendement qui se lirait comme suit, au paragraphe 22,
à l'article 6: "Ces taux et conditions sont fixés par
règlement de la Société pour chaque catégorie
d'usagers ou sont déterminés par des contrats spéciaux
intervenus entre, d'une part, la Société et, d'autre part, les
municipalités, les coopératives d'électricité ou
les entreprises industrielles ou commerciales, selon le cas. Ces
règlements et ces contrats sont soumis à l'approbation de la
Régie de l'électricité et du gaz." Dans le projet de loi,
on dit bien: "soumis à l'approbation du gouvernement".
Alors, cela veut dire, en mes termes à moi, peut-être pas
en mes termes d'avocat, mais en mes termes à moi, que le ministre du
Revenu peut, en n'importe quel temps, exiger d'Hydro-Québec que les
montants soient augmentés, mais avec la motion que je soumets, ce serait
un corps indépendant, un groupe neutre qui jugerait. C'est cela qu'on
veut, on n'a plus confiance aux gens d'en face. Alors, c'est ça qu'on
voudrait, parce que des augmentations de taxes, les gens en ont soupé.
C'est pour toutes ces raisons que nous, du côté de l'Opposition,
nous voterons contre. Oui, nous continuerons de voter contre, Mme la ministre,
parce que nous, nous pensons à protéger les gens, les ouvriers,
les travailleurs. On a oublié cela de l'autre côté.
Je peux vous dire que, dans le comté de Verdun, on a beaucoup de
gens, des travailleurs, qui sont égorgés de taxes, de tout
d'abord et de tout côté. C'est la raison pour laquelle je m'y
oppose catégoriquement, avec le député d'Outremont et les
gens de la commission qui ont fait un excellent travail, même si, de
l'autre côté, on prend cela à la légère. Mais
les gens du Québec ne prendront pas la prochaine élection
à la légère et ils rejetteront les gens qui passent leur
temps à augmenter les taxes au Québec.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Laurier.
M. Christos Sirros
M. Sirros: Merci, M. le Président.
Vous savez, M. le Président, que ça doit faire la
quatrième ou la cinquième fois que j'interviens sur le projet de
loi no 16. Si je soulève ce point, c'est pour souligner la
détermination avec laquelle nous, de ce côté-ci de la
Chambre, nous avons fait face au projet de loi et l'opposition qu'on
mène à ce projet de loi. J'aimerais souligner ou expliquer les
raisons qui nous ont amenés à prendre cette attitude assez
décidée quant à notre position sur le projet de loi no 16,
qui vise à transformer Hydro-Québec en une société
à fonds social, ce qui permettrait effectivement au ministre des
Finances de déclarer des dividendes, à la suite des profits que
pourrait faire Hydro-Québec, qui pourraient aller jusqu'à 75% des
profits d'Hydro-Québec.
Si le gouvernement a décidé de changer la raison
d'être d'Hydro-Québec qui était, il y 20 ans environ, de
donner de l'électricité aux citoyens québécois aux
plus bas prix possible et compatibles avec une saine gestion, c'est parce
qu'après cinq ans de gouvernement du Parti québécois, on
en est rendu avec une économie qui ne marche presque plus, on en est
rendu avec une économie qui connaît des déficits
spectaculaires, avec un gouvernement qui a triplé ses déficits,
qui se trouve aujourd'hui coincé, purement et simplement, du point de
vue économique, et qui cherche, à gauche et
à droite, à trouver des sources, des fonds qui pourraient
renflouer les coffres de l'État. Nous avons vu, depuis le 13 avril, une
série de mesures qui ont été prises par rapport à
cet objectif de renflouer les coffres de l'État et qui ont, toutes et
chacune, finalement, fonctionné par la porte à côté,
c'est-à-dire qu'on peut les qualifier de taxes indirectes, de taxes
cachées. (23 h 30)
Un exemple concret, c'est le projet de loi no 16, qui résultera
dans des augmentations du compte d'électricité de chaque
consommateur d'électricité pour venir au secours du ministre des
Finances qui connaît des difficultés financières à
la suite des cinq dernières années de gestion de ce gouvernement.
On ne dit pas qu'on taxe les gens, dans ce projet de loi, mais cela a le
même effet dans le sens que chacun qui va payer son compte
d'électricité va venir contribuer aux coffres de l'État.
Dans le concret cela va coûter, d'ici 1985, 2000 $ de plus par famille
québécoise, pour répondre aux exigences de la loi 16.
C'est-à-dire, à la suite des dividendes qui seront
déclarés selon les prévisions qu'on connaît, d'ici
1985 chaque famille québécoise aura versé 2000 $ de sa
poche au gouvernement du Parti québécois, au gouvernement du
Québec pour venir en aide au ministre des Finances, sans recevoir plus
de la part d'Hydro-Québec. Avec la même consommation, avec le
même appareillage électrique dans les maisons, les gens auront
quand même à débourser 2000 $ de plus d'ici 1985.
Nous avons connu le bâillon. Pour moi c'était une
première, étant donné que je suis nouveau en cette
Assemblée. Nous avons connu le bâillon, ce qui fut une
façon pour ce gouvernement de mettre fin à l'étude article
par article en commission parlementaire du projet de loi 16. On a muselé
l'Opposition, dans son opposition à ce projet de loi, et exigé
que le rapport de la commission soit déposé ici, à
l'Assemblée nationale, pour qu'on puisse voter. On connaît
d'avance les résultats de ce vote. On sait que le parti
ministériel détient une majorité qu'il utilise de
façon, en tout cas disons qu'il utilise, M. le Président, pour
faire face... Ils utilisent M. le Président du conseil du trésor
pour se sortir du pétrin dans lequel ils se sont placés
eux-mêmes, et ils l'utilisent de façon irresponsable quand il
s'agit d'un tel projet de loi. Ils ont choisi la voie des taxes indirectes, des
taxes régressives, finalement, parce qu'ils font appel aux citoyens sans
tenir compte de leur capacité de payer. Il font verser des fonds d'une
manière égale à chacun pour venir au secours du ministre
des Finances.
Quant aux amendements qu'on aurait aimé proposer, M. le
Président, on est allé voir un peu quel genre d'engagement ce
gouvernement avait pris. Un des engagements que le gouvernement avait pris,
c'était d'abolir la taxe de vente sur les comptes
d'électricité. C'est en toutes lettres, dans le programme du
Parti québécois, abolir la taxe de vente sur les comptes
d'électricité. Si on se réfère aux
événements des derniers jours, on sait que peut-être les
engagements que prend ce parti ne veulent pas dire grand-chose. On renverse des
décisions prises en congrès plénier par 2000 membres
élus, prises de façon démocratique. C'est renversé,
ou il y a des tentatives de renverser ça en tout cas. Là aussi je
pense qu'on connaît les résultats d'avance étant
donné le petit truc qu'on est en train de voir. On sait que le langage
que peut tenir ce parti ne veut peut-être plus dire grand-chose. Dans ce
sens, lorsqu'on a parlé de cet amendement en Chambre, quand on a
soulevé le fait que le parti ministériel lui-même avait,
dans le programme du parti, écrit qu'il abolirait la taxe de vente, ce
ne fut pas à notre grande surprise qu'on a entendu: Vous savez,
peut-être plus tard. Cette attitude a été confirmée,
en fin de semaine passée. Je crains qu'on verra de plus en plus, de la
part du Parti québécois, ce genre de manoeuvre où
finalement on peut dire ce qu'on peut dire, mais il faut que les choses qu'on
fait fassent l'affaire de certaines personnes.
Alors, M. le Président, cela a été un amendement.
Un autre amendement qu'on aurait voulu présenter tentait de redonner
à Hvdro-Québec son mandat initial. C'est-à-dire on aurait
voulu voir dans le projet de loi que la raison d'être
d'Hydro-Québec serait de fournir l'énergie aux
municipalités, aux entreprises industrielles ou commerciales et aux
citoyens du Québec, aux taux les plus bas compatibles avec une saine
administration financière. C'était là, M. le
Président, la raison initiale de la création Hydro-Québec,
et on voudrait voir dans le projet de loi, parce que cela n'existe plus dans le
projet de loi 16, cet objectif-là. Cela a été
enlevé, M. le Président, et c'est clair, la raison pour laquelle
cela a été enlevé. Étant donné qu'on vient
de dire que c'est le ministre des Finances, maintenant, qui va utiliser
Hydro-Québec pour ses propres fins, on voudrait voir cet objectif
réinscrit dans la loi pour redonner à Hydro-Québec ce
mandat de fournir l'électricité aux citoyens du Québec au
plus bas prix possible.
Malheureusement, comme je le disais tout à l'heure, le
gouvernement semble décidé à imposer ses taxes
cachées aux citoyens du Québec. Il utilisera probablement, parce
que la conscience sociale s'en est allée par la porte d'à
côté, du côté du Gouvernement, il n'en a pas
beaucoup, ces jours-ci, et je doute qu'il puisse la retrouver prochainement,
étant donné les problèmes qu'il connaît. Il est
aussi préoccupé oar beaucoup d'autres choses que les citoyens du
Québec, ces jours-ci. On aurait souhaité
présenter ces amendements et les voir adopter parce qu'on trouve
que ce sont des amendements raisonnables, des amendements qui vont dans le sens
de l'intérêt de tous les citoyens du Québec. Mais quand le
moment du vote viendra, on s'attend que chacun des députés
ministériels se lève, tranquillement, et suive les ordres du
chef, comme ce sera probablement le cas au référendum, si on peut
l'appeler ainsi. Il semble qu'il n'y aura pas de comités-parapluies, ni
d'un côté ni de l'autre; il semble que ce soit juste un
côté qui ait les moyens de financer la publicité pour
convaincre tous les militants du parti que le chef, lui, a la bonne voie et que
les autres, ce n'était pas sérieux leur affaire. En tout cas,
c'est à eux de vivre avec cela, c'est à eux de penser à ce
que cela veut dire, ce n'est pas à nous de juger; qu'ils fassent face un
peu à ce problème de conscience, s'ils en ont encore une! Merci
beaucoup.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Pontiac.
M. Robert Middlemiss
M. Middlemiss: Merci, M. le Président. Comme tous mes
collègues dans cette Chambre ont parlé à plusieurs
occasions sur le projet de loi no 16, la destinée veut que ce soir, ce
soit la dernière fois.
Tout au long de ce débat, nos amis d'en face nous ont
accusés d'avoir retardé inutilement l'évolution ou la
discussion de ce projet de loi. Je pense qu'on devrait faire un petit
historique. On nous a même dit que, du côté
ministériel, tout le monde au Québec le savait, parce qu'on avait
traité de cela dans le discours sur le budget du 10 mars dernier. Mais,
au moment du discours sur le budget, on a annoncé qu'on voulait faire
des changements, des amendements à la société
Hydro-Québec. On n'est pas allé dans les détails, on n'a
pas expliqué quels seraient les résultats, les
conséquences des changements qu'on proposait.
Parlons des retards. On a annoncé dans le budget qu'on voulait
faire des changements à la société Hydro-Québec.
À la suite de l'élection, l'Assemblée nationale a
été convoquée pour le 19 mai. Quand avons-nous
présenté pour la première lecture le projet de loi no 16?
Le 12 juin, une semaine seulement avant la fin de la session. Donc, on ne peut
pas être blâmés pour ce retard. Si cela était
tellement important pour l'existence et le bon fonctionnement de la
société Hydro-Québec, on aurait certainement pu trouver le
temps de le présenter avant cette date. À l'intersession, la
commission permanente de l'énergie et des ressources était
convoquée le 25 août pour entendre les vues, les opinions
d'Hydro-Québec à ce sujet. (23 h 40)
M. le Président, j'aimerais citer les premières phrases du
président du conseil d'administration d'Hydro-Québec. J'aimerais
vous dire comment lui résumait le projet de loi no 16 et je cite: Ce
projet de loi, déposé en première lecture à
l'Assemblée nationale le 12 juin dernier, traduit par des amendements
à la loi d'Hydro-Québec, certaines mesures annoncées dans
le discours sur le budget. Il entraîne une modification substantielle,
non seulement dans la structure financière de la société
d'État, mais aussi de sa mission au sein de la société
québécoise."
Donc, comme je l'ai mentionné tout à l'heure, on n'a pas
élaboré, on n'a pas défini, on n'a pas dit quelles
seraient les conséquences. Tout ce qu'on a simplement annoncé,
c'est que l'on fait certains changements dans une certaine mesure. Et nous,
depuis le début de ce débat, M. le Président, nous avons
été très consistants. Un des premiers arguments qu'on a
soumis, c'est que les changements qu'on voulait faire à
Hydro-Québec signifiait un changement complet de sa vocation. La
vocation qui lui avait été donnée, qui avait
été acceptée en 1962 par toute la population du
Québec lors d'une élection.
Quels étaient nos arguments, M. le Président?
Premièrement, on a dit qu'il faudrait avoir un débat public, pour
avoir l'opinion de tout le monde. Deuxièmement qu'il n'y a pas
malheureusement, au Québec, de politique énergétique. On a
tenté de dire qu'on a eu une politique énergétique et
qu'on s'en sert. Mais on s'aperçoit aujourd'hui que l'ancien PDG
d'Hydro-Québec semble être d'avis qu'essentiellement il n'y a pas
de politique énergétique à Hydro-Québec.
Deuxièmement, on a dit qu'on voudrait soit retarder l'entrée en
vigueur de cette loi, soit, une fois que la loi serait en vigueur -lorsqu'on a
vu qu'on ne pouvait pas en changer la date d'entrée en vigueur - qu'il y
ait une période d'essai, une période d'essai qui aurait permis
d'établir une politique énergétique, de tenir le
débat public sur les changements proposés à
Hydro-Québec et aussi de donner une chance au programme
d'économie d'énergie qu'Hydro-Québec a mis en marche,
avant de savoir si réellement on va obtenir les résultats
espérés et de savoir réellement si cela affecterait une
politique énergétique.
Aussi M. le Président, on misait énormément sur la
pénétration du gaz naturel. Malheureusement, je crois qu'on
accuse un retard de l'ordre de deux ans. Et même à cela, M. le
Président, ce n'est pas garanti que la pénétration du gaz
se ferait dans toutes les municipalités ou les villes du Québec.
Par exemple, combien cela va-t-il prendre de temps avant que le gaz naturel
soit rendu ici, à Québec?
M. le Président, pour une dernière chose, j'aimerais
proposer une motion pour
ajouter un article après l'article 10, soit que la facturation
des tarifs d'électricité aux consommateurs citoyens du
Québec soit, à compter du premier janvier, exempte de la taxe de
vente au détail. M. le Président, cette taxe représentait
jusqu'en 1981 peut-être 60% des revenus totaux de la
société Hydro-Québec. Mais, avec la loi 16, cela va
devenir, disons, pour l'année 1985, 20%. Même si c'est une minime
partie, au moins cela va économiser de l'argent à tous le
citoyens du Québec. Je vous remercie M. le Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Ce sera le
député de Robert-Baldwin.
M. John O'Gallagher
M. O'Gallagher: Merci, M. le Président. Je pense que c'est
la troisième ou quatrième fois que les députés de
ce côté-ci de la Chambre se lèvent pour parler contre ce
projet de loi. On trouve que c'est une exploitation inacceptable des
contribuables de la province de Québec. On est maintenant face à
ce projet de loi, après une quarantaine d'heures d'étude,
où on a essayé, dans l'Opposition, de montrer au public qui nous
regarde les conséquences négatives que ce projet de loi va avoir
sur la famille québécoise comme sur l'industrie
québécoise...
Une voix: ...
M. O'Gallagher: Merci, M. le député. ... et sans
que la population ait probablement vu les conséquences, les
résultats que va subir chaque famille par ce projet de loi. On a
démontré, et cela a été prouvé, que, d'ici
à cinq ans, chaque famille québécoise va être
obligée de payer 2000 $ de plus pour l'électricité. Mais
il n'y a pas seulement le service de l'électricité qui sera
affecté. Les taux sur les industries vont être augmentés
d'environ 20%. Cela veut dire que tous les biens et services que la population
utilise vont aussi augmenter en valeur. La population va avoir, en plus de
payer les frais de chauffage, le chauffage de l'eau et l'éclairage...
Tous les prix des matériaux que les familles utilisent vont aussi
être augmentés.
On a vu aussi, et cela a été démontré par le
député de Notre-Dame-de-Grâce - la population a simplement
à se référer à un mémoire
préparé par l'administration d'Hydro-Québec qu'il y aura
des conséquences draconiennes sur le fonctionnement
d'Hydro-Québec. Il y aura une chute de revenu net de l'entreprise de 37%
en 1981, par rapport à 1979 et 1980. Les besoins d'emprunt vont
être augmentés, des programmes d'emprunt d'environ 3 000 000 000 $
seront difficiles à réaliser à des conditions acceptables.
Il y aura la remise en question de la faisabilité financière du
plan des installations de 1981 et de 1982. Cela est sérieux, Et, pour
que la population puisse comprendre cette phrase-là, qui vient
directement d'Hydro-Québec, c'est qu'on a estimé qu'il va y avoir
369 000 000 $ qui ne seront pas investis dans les installations de la
Raie-James et les autres projets d'Hydro-Québec. Il faudrait que la
population le réalise. Les chômeurs -on en a 320 000 au
Québec - n'auront pas l'avantage d'aller travailler à la
Raie-James. Ils vont être obligés de partir pour Calgary, dans
l'Alberta. Cela est une des conséquences majeures de ce projet de
loi.
M. Boyd, jusqu'à hier ou avant-hier président
d'Hydro-Québec, notre grand ingénieur, qui a été
fêté par l'American Society of engineers comme the Engineer of the
Year, a lui-même dit que le gouvernement du Québec n'a aucune
politique énergétique, même pas pour
l'électricité, ni pour le gaz, l'huile ou le nucléaire.
D'abord, il est préoccupé par l'indépendance du
Québec et, pour avoir une saine politique énergétique sur
l'électricité comme sur le gaz, l'huile et le nucléaire,
il faut au moins être une province canadienne comme les autres.
Fondamentalement, ils ne sont pas capables de faire une politique
énergétique.
Pour que la population puisse comprendre l'affaire, le but
d'Hydro-Québec était de fournir l'énergie aux
municipalités, aux entreprises industrielles et commerciales et aux
citoyens du Québec aux taux les plus bas compatibles avec une saine
administration financière. Pourquoi? Hydro-Québec a
été fondée en 1944, par une loi quasiment antitrust, pour
fournir l'électricité au prix coûtant. À cette
époque-là, jusqu'à la nationalisation des compagnies
privées en 1962 ou 1963, c'étaient des compagnies privées.
Elles avaient des installations et les capitaux étaient payés
depuis des années. Elles utilisaient nos rivières pour exploiter
la population. Elles faisaient des profits que le gouvernement avait de la
difficulté à contrôler. Ils ne voulaient pas
s'éloigner pour faire l'électrification rurale. (23 h 50)
La loi créant Hydro-Québec était une loi antitrust
pour donner un service à la population au prix le plus bas possible.
Comme aujourd'hui, dans nos municipalités, l'aqueduc, le
téléphone ou le service de police. Aujourd'hui, avec ce projet de
loi, on fait exactement l'opposé. C'est le gouvernement qui exploite la
population -c'est ça qu'il faudrait que la population comprenne -
à cause de sa mauvaise administration, de la situation financière
désastreuse qu'il a créée lui-même pendant cinq ans,
à cause de notre déficit de 15 000 000 000 $ accumulé,
trois fois le déficit de 1976, quand Bourassa a laissé le
gouvernement à ces messieurs. Notre déficit
annuel est de 3 300 000 000 $, c'est plus de trois fois le
déficit de toutes les provinces ensemble. C'est impensable,
l'énormité de ce désastre financier.
Ils sont obligés, par le truchement de cette loi, par le
truchement d'Hydro-Québec, d'aller chercher des fonds dans les poches
des contribuables, comme ils font pour la régie. Ils ont augmenté
la quote-part des entreprises, des employeurs au Régime
d'assurance-maladie. Ils ont doublé la cotisation, pas à la
demande de la Régie de l'assurance-maladie, mais à la demande du
ministre des Finances, qui fixe le prix. Il n'a pas d'argent. Il a fait la
même chose pour l'assurance automobile, il a augmenté les frais de
l'assurance automobile par le biais de la Régie de l'assurance
automobile, mais c'est à la demande du ministre des Finances. On le voit
aussi dans le projet de loi no 39, augmentation de 0,30 $ sur chaque gallon.
C'est un fardeau inacceptable pour la province.
M. Clair: Question de privilège, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Question de
privilège, M. le ministre.
M. Clair: En tant que ministre responsable de la Régie de
l'assurance automobile du Québec, je voudrais simplement indiquer que ce
que le député vient de mentionner est tout à fait inexact,
puisque la présidente de la Régie de l'assurance automobile du
Québec a elle-même précisé en conférence de
presse que c'est à la demande de la Régie de l'assurance
automobile du Québec; pour la première fois en cinq ans, la
régie a demandé au gouvernement d'augmenter de 2% le coût
des primes d'assurance automobile, 12% en cinq ans, alors que les compagnies
privées ont augmenté, pour les dommages matériels, pendant
ce temps, leurs primes d'environ 50%.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Robert Baldwin, vous avez la parole.
M. O'Gallagher: Peut-être que le ministre des Transports
pourrait nous expliquer pourquoi nous sommes les plus taxés de tous les
Canadiens et de tous les citoyens nord-américains. C'est ça la
vérité, nous sommes les plus taxés du Canada, c'est
ça la vérité. Dans votre projet de loi, vous allez
chercher 2000 $...
M. Clair: On a le meilleur système d'assurance
automobile...
M. O'Gallagher: ... dans les poches des contribuables.
Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous
plaît!
M. O'Gallagher: M. le Président, en terminant, je voudrais
simplement dire que le but d'Hydro-Québec était de fournir
l'électricité au prix coûtant, c'était une loi
antitrust pour empêcher l'exploitation des contribuables de la province
de Québec. Ce projet de loi fait l'opposé, c'est maintenant le
gouvernement qui exploite des contribuables, ce n'est pas acceptable. Quant
à nous, de l'Opposition, avant que vous adoptiez cette maudite loi, vous
auriez pu avoir la décence de laisser l'essentiel qui est la phrase
suivante: "La société a pour but de fournir l'énergie aux
municipalités, aux entreprises industrielles ou commerciales et aux
citoyens du Québec aux taux les plus bas compatibles avec une saine
administration financière."
Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Beauce-Sud.
M. Hermann Mathieu
M. Mathieu: Merci, M. le Président. Inutile de vous dire
que je suis profondément indigné de ce que nous sommes en train
de faire présentement, nous avons pris l'habitude de
légiférer la nuit, sous le coup du bâillon, sous le coup du
rouleau compresseur, il est presque minuit, hier matin, nous avons fini notre
séance de la veille à 7 heures 50. Ce n'est pas rassurant pour la
population quand on est obligé de légiférer la nuit. On se
cache, la nuit. Quand quelqu'un veut faire un mauvais coup, il fait cela la
nuit, il fait cela à la noirceur, il fait cela en cachette. C'est
à peu près ce que nous sommes en train de faire en fin de
session. Je me rappelle que lorsque les députés du Parti
québécois siégeaient dans l'Opposition, dans des
circonstances semblables, ils déchiraient leurs vêtements! On les
entendait proférer leur indignation devant le rouleau compresseur,
devant le bulldozer. Cela ne leur a pas pris de temps à adopter la
même recette, pour un gouvernement social-démocrate. On s'en vient
la nuit modifier la vocation d'Hydro-Québec, ce joyau qui appartenait
à tous les Québécois - je dis bien "qui appartenait" -
dont on change la vocation en lui permettant maintenant de taxer indirectement,
d'une manière cachée, la nuit, ce qu'il y a de plus faible dans
notre population. On donne une pitance, une augmentation d'à peu
près 8% aux assistés sociaux et on va chercher, par
l'augmentation des tarifs d'électricité à compter du 1er
janvier, une augmentation de 16,7%.
M. le Président, l'augmentation des tarifs
d'électricité fait l'affaire du
gouvernement, c'est bien sûr. On l'entend préparer le
terrain depuis un bon bout de temps. L'ancien ministre de l'Énergie
disait: II faut que l'on vende le pétrole au prix international. Il faut
augmenter le pétrole au prix international pendant que les ententes
Québec-Canada prévoient que quand l'entente sera dans son
application maximale, en 1985, ce sera 75% du prix international. Cela ne fait
pas l'affaire, c'est 100%. Pourquoi, en outre, aller chercher 0,30 $ le gallon?
C'est pour avoir l'occasion d'augmenter les tarifs d'électricité,
non plus pour que l'électricité serve les
Québécois, comme c'était la vocation d'Hydro, mais pour
que les tarifs d'électricité et qu'Hydro-Québec servent le
gouvernement qui a perdu le contrôle de l'administration publique, qui a
perdu le contrôle des finances publiques. Il n'est pas besoin
d'être grand clerc pour en faire la preuve. On découvre à
tous les jours des choses cachées. Le Vérificateur
général nous indiquait hier que le déficit n'est pas de 2
900 000 000 $, mais de 3 400 000 000 $; encore 400 000 000 $ ou 500 000 000 $
de comptes à payer, de cachés, de dissimulés ici et
là. Je comprends que le gouvernement ait besoin de cette vache à
lait qu'est Hydro-Québec pour combler sa mauvaise administration.
Pendant les cinq premières années du régime, il fallait
faire plaisir aux gens. On avait un référendum qui s'en venait,
alors il fallait être très large. On ne se préoccupait pas
des déficits et des dépenses: 10 000 000 000 $ de déficit
dans quatre ans d'administration. Qu'on se rappelle de quelle manière
l'actuel ministre des Finances traitait des déficits de 200 000 000 $ du
temps du régime précédent. Il y a loin de la coupe aux
lèvres.
Quelles seront les conséquences? Avant de passer aux
conséquences, je trouve décevant, je trouve déplorable de
voir, devant des annonces d'augmentation de taxes, de pressurisation de la
population, tous les députés du Parti québécois
applaudir à des augmentations semblables. Réellement, je n'y
comprends plus rien. Je me demande comment les députés qui
reçoivent sans doute des gens à leur bureau de comté,
comme on le fait, peuvent justifier une chose semblable, comment ils peuvent
applaudir aussi frénétiquement, aussi aveuglément à
cela. C'est absolument incompréhensible. (24 heures)
Les conséquences de ces hausses: d'abord, la
"désincitation" à l'investissement. Quand il n'y a plus
d'investissement, l'économie devient moins prospère. On
crée du chômage. Quand la période de prestation
d'assurance-chômage pour les prestataires est terminée, ils
perçoivent de l'aide sociale. Les budgets d'aide sociale doivent
automatiquement gonfler énormément, M. le Président. Les
jeunes ne sont plus intéressés à créer des emplois.
Les propriétaires de petites et de moyennes entreprises, on les traite
de "bums", de voleurs, d'exploiteurs On adopte des lois iniques, injustes qui
découragent ces gens à créer de nouveaux emplois et on
vient augmenter les tarifs d'électricité, l'essence, la
prestation de la Commission de la santé et de la sécurité
du travail, une autre taxe cachée, M. le Président,
assumée seulement par l'employeur. On double la taxe sur les services de
santé payée par l'employeur. On se demande pourquoi l'employeur
n'est plus intéressé à créer des emplois. C'est
tout simplement désastreux.
Les ministres viennent dans la Beauce vanter le miracle beauceron. Ce
n'est pas drôle comme les Beaucerons ont été dynamiques,
c'est vrai, je le reconnais, mais cela ne s'est pas fait avec le Parti
québécois. Le Parti québécois est en train
d'éteindre ce miracle beauceron, M. le Président.
Regardons les résultats. Au cours de la dernière
année, de novembre à novembre, la création d'environ 170
000 emplois au Canada; performance du Québec: perte de 67 000 emplois.
On n'a même pas pu maintenir nos emplois. C'est tout à fait
désastreux.
Que dire, M. le Président, du gouvernement qui exploite notre
jeunesse? Qu'est-ce que le gouvernement a fait pour les jeunes? On parle du bon
d'emploi; on parle du service civil obligatoire, de toutes sortes de bebelles.
Ce n'est pas cela que les jeunes veulent. Votre bien-être, ils n'en
veulent pas. Vous commencez à mettre des règlements à
l'OCQ, des règlements illégitimes, s'il en est, tout à
fait condamnables. La fameuse carte de l'OCQ, je n'ai pas besoin de faire de
démonstration, si tu n'as pas travaillé 1000 heures, tu n'as pas
de carte; si tu n'as pas de carte, tu n'as pas d'heures, et c'est le chien qui
court après sa queue, qui tourne en rond.
À quoi sont condamnés nos jeunes? Au bien-être
social. Ils n'en veulent pas, de votre bien-être. Ce qu'ils veulent,
c'est garder leur dignité; ils veulent vivre de leur travail; ils
veulent avoir le droit et ils revendiquent le droit de choisir leur
métier et de vivre de leur travail. On sait que le droit au travail est
fondamental; c'est un droit sacré inaliénable. Qu'est-ce que vous
en faites? C'est un droit qui est protégé par la Charte des
droits et libertés de la personne. D'un coup de règlement, vous
le rayez et vous condamnez nos jeunes à l'aide sociale ou au travail
clandestin. Qu'est-ce qui se passe avec le travail clandestin? Les peines
d'emprisonnement. Vous êtes obligés d'agrandir les prisons, non
pas pour les criminels. Quelqu'un va tuer, et c'est juste si on ne lui donne
pas de médaille. Mais pour les gens qui veulent gagner leur vie
honorablement, l'année passée, M. le Président,
8000 ont été traduits devant les tribunaux pour contravention
à l'OCQ. Quand cela ne fait pas, c'est l'exil. On s'en va en Alberta, on
s'en va à Calgary, à des endroits où il est encore
possible de travailler. Ce n'est pas avec des choses comme cela qu'on va
recréer l'économie et rendre le dynamisme à notre peuple.
Je déplore que le gouvernement n'ait rien fait de concret pour les
jeunes, pour leur créer de l'emploi, sauf les exploiter, M. le
Président.
Je conclus, puisque vous me faites signe que mon temps est
terminé. Le gouvernement nous dit souvent: On a seulement 50% des
impôts; on ne peut pas faire de miracle. Oui, avec 50% des impôts,
vous avez un déficit de près de 4 000 000 000 $; avec 100% des
impôts, ce serait bien un déficit de 10 000 000 000 $, si je suis
votre raisonnement.
M. le Président, je conclus en appuyant tous les amendements que
notre confrère, notre collègue, le député
d'Outremont, critique officiel en matière d'énergie, a
déposés sur la table du greffier, à ma demande. J'ose
espérer, dans un dernier élan de courage, qu'ils seront
acceptés comme un moindre mal et qu'ils assureront encore qu'Hydro
pourra tant bien que mal continuer un peu la vocation pour laquelle elle avait
été créée. Cette vocation, ce n'était pas de
combler les déficits du gouvernement, de compenser pour une mauvaise
administration, mais de fournir de l'électricité au meilleur prix
possible aux Québécois.
M. le Président, il faut qu'Hydro-Québec soit pour les
Québécois ce que le pétrole est pour les Albertains.
Merci.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Sainte-Anne.
M. Maximilien Polak
M. Polak: M. le Président, je crois être le dernier
député de côté de l'Opposition qui ait le droit de
parole sur les amendements qu'on a soumis. Je suis très content de
constater que le premier ministre est venu m'écouter. D'ailleurs, il est
accompagné par le vice-premier ministre et d'autres ministres dont j'ai
entendu les discours jusqu'ici et je n'ai pas l'impression qu'on ait
réussi à convaincre les députés ministériels
et les ministres du bien-fondé de nos amendements.
Cependant, étant le dernier qui parle, je vais faire - et le
premier ministre aime bien, de temps en temps, se servir d'expressions
anglaises - ce qu'on appelle le dernier "pitch".
M. le Président je me souviens très bien du premier
ministre dans sa jeunesse. C'était lui, le premier ministre... Je sais
qu'il est maintenant très occupé à parler d'autre chose,
de son référendum...
Le Vice-Président (M. Rancourt): Je m'excuse, M. le
député de Sainte-Anne. Depuis le dernier intervenant, les
murmures de cette salle sont devenus de plus en plus envahissants. Je
demanderais votre collaboration, s'il vous plaît.
M. le député de Sainte-Anne.
M. Polak: M. le Président, je vous remercie de votre
intervention parce que le premier ministre était occupé ailleurs
et j'aime bien qu'il m'écoute parce que je pense que je suis capable de
le convaincre, étant le dernier qui parle sur les amendements.
M. Lévesque (Taillon): Si le député le
permet, je ne demanderais pas mieux, parce que, depuis le temps que ça
dure, je ne demanderais pas mieux que d'être convaincu. Donc je vais
écouter avec une religieuse attention le député de
Sainte-Anne pour voir s'il est capable de me convaincre de ce que personne,
jusqu'ici, n'a réussi à démontrer, c'est-à-dire que
les citoyens du Québec ne doivent pas avoir finalement un dividende sur
l'investissement qu'ils ont fait il y a vingt ans, vingt et un ans.
En ce qui concerne Hydro-Québec, ça n'a, d'aucune
façon, entamé l'intégrité financière
d'Hydro-Québec, ce qui me paraît être la clé du
projet de loi 16, et, si le député de Sainte-Anne peut me
démontrer que ce n'est pas correct, je suis presque prêt à
changer d'idée.
Une voix: Oh! Quel défi, quel défi!
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Sainte-Anne.
M. Polak: M. le Président, j'apprécie
énormément l'intervention directe du premier ministre.
J'espère que son intervention ne sera pas comptée dans mon temps,
parce que j'ai dix minutes et les gens de mon comté de Sainte-Anne
aimeraient bien que je prenne les dix minutes au complet.
Je vais aller vite parce que le premier ministre m'a lancé le
défi de le convaincre et je vais essayer de le convaincre.
Les amendements qu'on suggère sont les suivants.
Premièrement, le gouvernement va créer un dividende une fois par
année; nous, on suggère, dans notre amendement, que ce soit fait
sur recommandation du conseil d'administration d'Hydro-Québec. M. le
Président, je suis certain que le premier ministre sera capable
d'accepter cet amendement-là. C'est très raisonnable; on dit: M.
le gouvernement, créez votre dividende, mais après avoir
reçu la recommandation du conseil d'administration
d'Hydro-Québec. Je me rappelle le temps où le premier ministre
était plus jeune. Il nous a donné Hydro-Québec, nous
sommes tous fiers de ça. J'espère que, maintenant qu'il a
un peu vieilli, avec l'expérience politique des années, il
va se rappeler ces belles journées du passé où il a
accompli de belles choses et qu'il dira: Voilà, Hydro-Québec,
faites-nous des recommandations, on va créer les dividendes suivant vos
recommandations. Amendement raisonnable et je peux voir, sur le visage du
premier ministre, qu'il est prêt à accepter ça.
Maintenant, M. le Président, deuxième amendement. On dit
que l'article 6 va être amendé pour se lire comme suit: "Que les
taux seront fixés aux taux les plus bas compatibles avec une saine
administration financière." En d'autres termes, on n'attaque plus le
fait qu'il y a un dividende à être payé, qu'il y a une
imposition de taxe sur le capital. On a perdu notre bataille en commission
parlementaire, on a été battus. Ce n'est pas facile de vivre 41
contre 80. C'est décevant de temps en temps, mais on ne lâche pas.
Le premier ministre m'a lancé un défi et je lui demande:
Qu'est-ce que vous avez contre cela, M. le premier ministre, d'inscrire dans le
texte "aux taux les plus bas compatibles"? Dans le cadre de la loi maintenant,
ça veut dire l'imposition d'une taxe sur le capital et les dividendes,
et je vois par son visage qu'il va accepter ce deuxième amendement. (0 h
10)
Troisièmement. On dit ce que le tarif applicable à chaque
usager sera le tarif suivant le coût réel du service fourni
à cette catégorie, pour autant que cela soit pratique. En
d'autres termes, on dit: Nous savons maintenant... On est battu
là-dessus, M. le Président, on a eu la guillotine, ce n'est pas
drôle de perdre la tête sous la guillotine, mais on fait encore la
bataille de la dernière minute, on dit: Soyez donc raisonnables, nous
venons avec des amendements raisonnables. On demande, pour la population, que
soit décrété dans la loi le coût réel du
service, pour autant que cela soit pratique. C'est très raisonnable.
Je vois déjà le premier ministre dire: J'ai accepté
les deux premiers amendements, mais là il m'entraîne sur un chemin
où je ne le suis pas. Si vous ne suivez pas, on va tomber sur le
quatrième. C'est un amendement important sans doute. Le premier ministre
est un social-démocrate, un homme raisonnable, l'homme qui dit: Moi seul
suis capable de renverser une décision prise. J'espère qu'il va
le faire pour la population dans le projet de loi no 16. On demande - on ne
demande pas plus que cela - que la facturation de tarifs pour le
consommateur... Pas la grande industrie, je suis d'accord avec lui, que ceux
qui peuvent payer paient, mais les consommateurs, on va, à partir du 1er
janvier 1982, les exempter de la taxe de vente au détail. Quel meilleur
cadeau de Noël et du Jour de l'An que de dire: Vous autres, citoyens, je
suis social-démocrate, vous payez une augmentation de taxes, c'est
grave, c'est sérieux, ce n'est pas ma faute, je comprends bien, mais le
8% de taxe, on enlève cela. C'est raisonnable, la manière dont il
répond. Je pense qu'il est d'accord peut-être avec cette
suggestion-là.
La dernière, et je vais arrêter parce que je ne peux pas
parler plus que les dix minutes qui me sont accordées, c'est qu'on
demande simplement, pour informer la population, dans l'article 10.1 de la loi,
que la facture que le citoyen recevra désormais ait une catégorie
taxes et dividendes. En d'autre termes, et ça, c'est
l'élément de la transparence, je reçois mon compte
d'électricité, 35 $. Il y sera marqué: total à
payer, 35 $. J'accepte, mais il est marqué en plus: taxes et dividendes,
3,50 $, par exemple. C'est seulement pour renseigner le public; ça,
c'est le montant qui a été pris par le gouvernement pour financer
d'autres projets. Il n'y a rien de plus raisonnable que cela. Mon compte de 35
$, je le paie, je suis obligé, j'accepte, mais on va dire: 3,50 $, ce
montant-là est appliqué à la catégorie taxes et
dividendes.
M. le Président, je termine, je suis très content que le
premier ministre soit venu m'écouter, le vice-premier ministre et le
leader parlementaire. Je suis très content parce qu'ils se disent: En
dernier lieu, c'est peut-être lui qui a les arguments les plus
substantiels. Les amendements qu'on a suggérés sont les
amendements de quelqu'un qui a été battu en commission
parlementaire, qui a subi la guillotine, mais qui est encore vivant, et qui
dit: S'il vous plaît, on vous demande des choses raisonnables pour la
population, pour la transparence, pour la social-démocratie; s'il vous
plaît votez au moins en faveur de cela. Merci, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le premier
ministre.
M. Lévesque (Taillon): M. le Président, je dirai
simplement une chose avec le consentement de la Chambre. Si le
député de Sainte-Anne - parce qu'il y a une sorte de
résonance, je ne dis pas qu'elle est logique, mais il y a une sorte de
résonance à laquelle je suis sensible dans ce qu'il a dit -avait
parlé avant le député d'Outremont, mais on voit alors
à quel point il y a deux longueurs d'onde, c'est curieux comme le
débat aurait été beaucoup plus intéressant, mais
c'est un peu tard.
M. Fortier: Question de règlement, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
d'Outremont, sur une question de règlement.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Cette motion est
adoptée?
M. Charron: À ce matin, 10 heures, pardon.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté. Ajournement
des travaux à 10 heures ce matin.
(Fin de la séance à 0 h 17)
M. Fortier: Dans toutes les réunions qu'on a eues en
commission parlementaire et ici même, le premier ministre n'a jamais
été présent pour m'écouter; alors, je ne peux pas
comprendre comment il peut porter un jugement aussi insignifiant.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le premier
ministre.
M. Lévesque (Taillon): M. le Président, ça
fait à peu près 19 ans que je suis, pour des raisons qu'on
comprendra, personnellement beaucoup ce qui se passe à
Hydro-Québec, y compris - j'aimerais mieux que le député
d'Outremont n'insiste pas - ce qui se passe à Gentilly II depuis
quelques années.
M. Fortier: M. le Président...
Le Vice-Président (M. Jolivet): Juste un instant. Tout ce
que je voulais faire, c'était d'éviter... S'il vous plaît!
S'il vous plaît! Tout ce que je voulais éviter, c'est qu'il y ait
un débat. Il y a eu consentement pour une première intervention.
Il y a une question de règlement, si vous me dites que vous avez une
question de privilège, je suis prêt à l'entendre.
M. Fortier: M. le Président, je ne peux pas accepter des
menaces comme celles que me fait le premier ministre. S'il veut engager un
débat sur ce sujet-là, je suis prêt à l'avoir
n'importe quand et je ne suis pas certain que le gouvernement qu'il dirige va
se trouver en bonne posture.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Nous sommes rendus, selon
l'avis qui a été déterminé, d'abord, à la
mise aux voix des amendements. M. le leader.
M. Charron: M. le Président, en vertu des articles du
règlement qui me le permettent et pour nous permettre surtout de
réfléchir aux arguments du député de Sainte-Anne,
je propose que le vote soit retardé à demain matin, après
la période de questions.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Donc il y aura, selon le
règlement, des votes au début des affaires du jour, après
les motions non annoncées.
M. Charron: C'est exact, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader.
M. Charron: Je propose l'ajournement de la Chambre à
demain, 10 heures.