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Version finale

32nd Legislature, 3rd Session
(November 9, 1981 au March 10, 1983)

Tuesday, June 22, 1982 - Vol. 26 N° 79

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Journal des débats

 

(Dix heures dix-sept minutes)

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! Un instant de recueillement. Veuillez vous asseoir. Affaires courantes. Déclarations ministérielles. M. le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche.

Consultation des citoyens sur des modifications à la Loi sur la conservation de la faune

M. Lucien Lessard

M. Lessard: M. le Président, je désire informer cette Assemblée de l'intention du gouvernement de tenir, à la fin de l'été, une commission parlementaire dont le but sera de consulter les citoyens sur certaines modifications ou ajouts que j'entends apporter à la Loi sur la conservation de la faune et de soumettre à la discussion publique certains moyens et orientations destinés à protéger les habitats de la faune.

Les plus récents amendements à la Loi 3ur la conservation de la faune ont été apportés en 1978. Cette loi nécessite maintenant des modifications importantes pour tenir compte des nouvelles orientations dans lesquelles s'est engagé le gouvernement au cours des dernières années. En premier lieu, nous visons à simplifier cette loi pour en faciliter la compréhension par les quelque 300 000 Québécoises et Québécois qui pratiquent des activités reliées à la faune, ce qui, ultimement, contribuera à une meilleure protection de la faune. En deuxième lieu, nous voulons faire disparaître de la loi toute forme de présomption à l'égard de ceux qui pratiquent la chasse et le piégeage car, pour l'immense majorité, ce ne sont pas des braconniers. Nous voulons, par ailleurs, augmenter substantiellement les amendes aux contrevenants de façon à décourager toute forme de braconnage.

M. le Président, je voudrais dire quelques mots sur les nouvelles orientations que nous entendons mettre de l'avant pour la protection de notre patrimoine faunique. Parmi ces nouvelles orientations, l'une des plus importantes concerne la protection des habitats. L'État québécois a le devoir l'assurer le plein développement de ses ressources et de veiller à leur conservation pour la jouissance des générations actuelles et futures. À l'instar de l'Union internationale pour la conservation de la nature et de ses ressources, le gouvernement est conscient que la conservation n'est pas un secteur limité, mais un processus qui recoupe tous les secteurs et qui devrait être pris en compte par tous les secteurs.

Déjà, nous pouvons être fiers de nos réalisations dans le domaine de la conservation du territoire agricole, des ressources forestières et de notre environnement. Dans cette même foulée et conscient des lacunes de la situation actuelle face aux pertes d'habitats qui menacent les ressources fauniques et mettent en péril les retombées économiques qui y sont rattachées, je me suis engagé, il y a un peu plus d'un an, à trouver les remèdes qui s'imposent. J'ai d'ailleurs reçu, en cela, l'appui de mes collègues, le ministre de l'Énergie et des Ressources et le ministre de l'Environnement, pour créer un groupe de travail pour la protection des habitats fauniques. Je suis heureux de déposer aujourd'hui le rapport synthèse de ce groupe de travail. (10 h 20)

Les premières constatations de ce groupe font état d'un peu plus de 650 espèces de vertébrés au Québec dont les seules utilisations par la chasse, la pêche, le piégage et l'observation engendrent des dépenses annuelles de l'ordre de 750 000 000 $. Une telle richesse ne peut exister et se perpétuer sans un habitat de première qualité puisque ce dernier élément constitue une condition sine qua non à la santé des populations fauniques. Lorsque nous parlons de protection d'habitats, il ne faut surtout pas y voir un gel de l'ensemble du territoire québécois et la subordination de toutes nos activités de développement à la seule présence fortuite de quelques éléments fauniques. Bien au contraire, le gouvernement est soucieux d'assurer le plein développement des ressources du Québec, mais un développement qui soit harmonieux et qui tienne compte des exigences de la faune. Dans mon esprit, il faut assurer avant tout la protection des habitats essentiels, c'est-à-dire ceux dont la présence est indispensable à la faune. Il s'agit des habitats d'espèces animales rares menacées ou en danger d'extinction ainsi que des habitats qui jouent de façon permanente ou temporaire un rôle déterminant dans le maintien et le développement d'une population faunique. Nous pensons, dans ce dernier cas, aux lieux de concentration faunique pour des fonctions vitales, telles que les ravages de cerfs de Virginie et le milieu riverain où se rassemblent les poissons pour frayer, les amphibiens pour se reproduire et les oiseaux pour nicher.

Étant donné que, jusqu'à présent, le ministère dont j'ai la responsabilité s'est attaqué surtout aux problèmes reliés à la conservation des animaux eux-mêmes, on remarque aujourd'hui de sérieuses difficultés dans nos tentatives pour contrer les pertes d'habitats. Il nous faudra envisager, dans les meilleurs délais, de nouvelles mesures qui verraient à assurer la perpétuation de l'ensemble des habitats essentiels, tant sur terres privées que publiques. De plus, pour souligner certains sites particuliers qui sont soit singulièrement riches, rares à l'échelle nationale ou régionale, représentatifs d'un type d'habitat ou soit nécessaires à une population exigeant des conditions de forêt à pleine maturité, il nous faut prévoir des modalités particulières qui mettent davantage l'accent sur la protection des habitats. Dans quelques cas situés sur des terres privées, il pourrait être utile que mon ministère ait le pouvoir de procéder à des ententes avec les propriétaires. Il nous faudra trouver les ressources nécessaires pour procéder à ces ententes, qu'elles aient trait à des accords bipartites, à des achats, à des locations ou à des compensations fiscales.

Il va sans dire que, dans la situation économique difficile que nous traversons actuellement, nous verrons à développer des mécanismes qui n'ajouteront pas au fardeau financier de la population, mais qui solliciteront plutôt la contribution des utilisateurs de la faune et la participation volontaire des intéressés. À titre d'exemple, certaines provinces canadiennes gèrent un fonds spécial destiné à acquérir, protéger ou aménager des habitats importants.

Il s'agit là de modifications majeures que le gouvernement désire apporter à la situation actuelle, modifications qui ne sauraient avoir cours sans la compréhension et l'adhésion populaires. Afin de maximiser l'efficacité de ses intentions, le ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche tentera, chaque fois que cela sera possible, de s'associer aux divers organismes privés et publics intéressés à la protection des habitats de la faune, et même de conclure des ententes bi-partites ou multipartites.

Cet appel aux forces vives n'est pas un vain mot pour nous, mais une approche qui se veut respectueuse des aspirations et des droits de chaque citoyen. C'est d'ailleurs dans cette ligne de pensée que nous convoquerons, à l'été, une commission parlementaire qui verra à recueillir les avis de la population et à nous aider à déterminer, avec le plus de justesse possible, quelles sont les avenues les plus prometteuses parmi toutes celles qui s'offrent à nous.

Au-delà de cette préoccupation pour les habitats, la commission parlementaire examinera également toute une série de propositions visant à améliorer l'efficacité de nos actions comme gestionnaires de la faune.

Ainsi, nous souhaiterions que les agents de conservation de la faune puissent faire respecter d'autres lois, telles la Loi sur la qualité de l'environnement, la Loi sur les réserves écologiques et la Loi sur les terres et forêts.

Nous voulons également en profiter pour examiner à nouveau certains types d'affectations territoriales, telles les réserves fauniques, dans un esprit de simplification tout en les adaptant aux nouvelles orientations.

Au chapitre des pourvoiries, qui deviendront un véritable réseau d'hôtels en forêt, nous songeons à introduire la notion du droit territorial d'hébergement, qui accorde à un pourvoyeur l'exclusivité d'offrir de l'hébergement sur un territoire donné à ceux et celles qui désirent pratiquer la chasse, la pêche ou le piégeage. Ce droit n'empêcherait pas, par ailleurs, toute autre forme d'occupation des terres sur un tel territoire reliée, par exemple, à la villégiature ou au plein air.

Tout en poursuivant nos objectifs de participation des citoyens à la gestion et à l'accessibilité à la ressource, nous souhaitons élargir la délégation de gestion qui est conférée au ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche pour qu'il puisse s'associer partout sur le territoire à des citoyens et groupes désireux de s'impliquer dans l'exploitation, l'aménagement et la conservation de la faune. D'autres modifications pourraient permettre dorénavant que du gibier sauvage ou du poisson soit servi dans un établissement public ou commercial lors d'une fête familiale, par exemple, ou encore d'en vendre à certaines conditions, comme c'est le cas pour le lièvre.

Enfin, au chapitre de la stricte conservation de la faune, nous proposons d'accorder une importance toute particulière aux espèces rares et à celles qui sont menacées d'extinction en les protégeant contre toute forme d'utilisation, s'il y a lieu, et en protégeant également leur habitat. Les importantes modifications que nous faisons subir à notre milieu ou à la forte pression d'utilisation que nous exerçons à l'égard de certaines espèces mettent leur survie en péril. Nous nous devons conséquemment d'assurer la perpétuation de toutes les espèces de notre patrimoine faunique.

En conclusion, je souhaite donc, au nom du gouvernement, que tous les Québécois et toutes les Québécoises qui s'intéressent de près ou de loin à la perpétuation de cette richesse naturelle collective qu'est notre faune viennent nous faire part de leur point de vue lors de la commission parlementaire qui aura lieu, comme je l'ai dit, à la fin de l'été. Ce sera la meilleure façon de prendre collectivement les moyens de protéger une

richesse qui appartient à tous.

Il me fait donc plaisir de déposer le document de consultation qui s'intitule Vers une protection des habitats fauniques au Québec.

Le Président: M. le député de Richmond.

M. Yvon Vallières

M. Vallières: M. le Président, c'est avec un vif intérêt que nous avons pris connaissance de la déclaration du ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche relativement à la Loi sur la conservation de la faune et son intention de mettre l'accent sur la protection des habitats. Je vous souligne au passage que le ministre, sans doute occupé à des dossiers plus chauds comme celui des Indiens de Restigouche ou celui de la fusion des villes de Baie-Comeau et de Hauterive, qui l'animent d'ailleurs toujours, aura fait qu'aucune nouvelle législation ou modification ne nous a été soumise depuis au moins deux ans. Aujourd'hui, le ministre nous aligne côte à côte des modifications à la Loi sur la conservation de la faune et, éventuellement, une législation nouvelle en ce qui a trait à l'habitat faunique.

Cela dit, nous partageons, de ce côté-ci de la Chambre, l'idée voulant qu'il y ait urgence quant à assurer la protection du milieu faunique. En fait, c'est ce que nous répétons depuis la réforme des territoires de chasse et de pêche au Québec de laquelle ont découlé les problèmes vécus aujourd'hui quant à l'équilibre écologique en milieu faunique.

En ce qui concerne les modifications proposées aujourd'hui, qui sont d'ailleurs revendiquées par tous les milieux intéressés depuis plusieurs mois, nous en appuierons les principes. En fait, nous y verrons plus clair lors de la publication des réglementations. C'est ainsi que la distinction entre piégeur et braconnier devra être suffisamment nette de façon qu'un jour la tradition se rompe quant à la vie relativement facile menée par les braconniers, somme toute, depuis les débuts de la colonie. (10 h 30)

Relativement à la conservation, le gouvernement est bien malvenu, à notre avis, de suggérer à titre d'exemples ses réalisations en matière de territoire agricole. Je lui souligne que la question de compensation fut l'un des sujets les plus discutés, pour ne pas dire contestés, et tout porte à croire qu'une telle polémique surgira de nouveau si l'on se fie aux déclarations d'aujourd'hui.

À cette bureaucratie supplémentaire que nécessitera la mise en place de cette politique en matière d'habitat faunique s'ajoutera la complexité géographique du territoire. En effet, le Québec est protégé en matière agricole, protégé par rapport à ses ressources forestières, protégé en vertu des zones d'exploitation contrôlée et les citoyens, eux, se sentent surprotégés au point que l'on a assisté, ces dernières années, à la multiplication des réglementations, lesquelles découragent tout investisseur désireux de venir s'installer chez nous.

Nous ne demandons pas à ce gouvernement de laisser cours au développement anarchique. Nous lui suggérons plutôt de bien mesurer les gestes qu'il pose de manière à éviter les multiples conflits juridiques à la suite de la mise en place improvisée de telles réformes.

En dernier lieu, M. le Président, une remarque que j'estime essentielle en une matière aussi lourde de conséquences et qui constitue la cheville ouvrière de notre système démocratique: la consultation. Précisons d'abord que, depuis la venue au pouvoir de ce parti politique, le véritable sens de la consultation s'est peu à peu transformé en tyrannie. Croyez-moi, M. le Président, le mot n'est pas trop fort et j'en veux pour seule preuve la consultation menée dans le cadre du projet de loi no 37 et du projet de loi no 70 où le mythe de la consultation a suffisamment convaincu la population québécoise de la façon dont on entend disposer de ses suggestions.

Plus près de nous, les administrateurs des ZEC, réunis en congrès au début de 1982 à Québec, vous parleront de la manière cavalière dont le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche a accueilli leurs suggestions alors que celui-ci n'avait même pas assisté à leurs délibérations. Plus récemment encore, les dix zones d'exploitation contrôlée refusaient de signer le protocole annuel avec le gouvernement du Québec parce que, disent les administrateurs, l'encadrement proposé n'a aucune commune mesure avec un minimum d'autonomie, politique pourtant moussée par le ministre lors du dernier congrès des ZEC. Si l'on en croit le sens du respect à l'égard des représentants du milieu, M. le Président, voyez plutôt ce que disait le ministre à la Fédération québécoise de la faune en décembre 1981. Je cite le Journal de Montréal: "Depuis le temps qu'elle existe, la Fédération québécoise de la faune n'a jamais été aussi peu représentative. Elle n'a pas de crédibilité. Les associations, les membres ne s'identifient pas clairement à elle."

Pourtant, les préoccupations de la Fédération québécoise de la faune portent depuis longtemps sur des sujets aussi précis que ceux suggérés par le ministre aujourd'hui. Que s'est-il passé depuis? A-telle acquis cette crédibilité souhaitée par le ministre? Ses membres sont-ils assez représentatifs pour que l'on daigne les

consulter cette fois-ci?

Enfin, un mot concernant la tâche supplémentaire qu'auront à remplir les agents de la faune. Actuellement les coupures budgétaires empêchent d'ajouter les ressources humaines nécessaires à cette opération. On m'indique même que les agents de protection de la faune sont limités dans leurs déplacements.

Voilà que le gouvernement souhaite que ces agents de la faune puissent faire respecter d'autres lois concernant la qualité de l'environnement, la Loi sur les réserves écologiques, etc.

Actuellement débordés dans le présent cadre législatif et administratif, comment les agents de conservation réussiront-ils à assurer d'autres tâches?

Une commission parlementaire permettra très probablement aux intervenants de venir condamner le fouillis indescriptible qu'a créé ce gouvernement et la dilapidation complète qu'il a engendrée des ressources sur le territoire québécois.

Pour tenter de réparer les pots cassés, on va maintenant entendre les intervenants. Soit, mais que le ministre retienne de mes propos le conseil que lui donnait mon collègue du comté de Maskinongé en matière de projets grandioses dans le cadre de l'étude des crédits de son ministère: "La modération a bien meilleur goût."

Je veux vous indiquer en terminant, M. le Président, que c'est beau la démocratie quand on la pratique vraiment. Merci.

Le Président: M. le ministre, brièvement.

M. Lucien Lessard

M. Lessard: Oui, M. le Président, très brièvement, en particulier lorsque le député parle de consultations. Il est exact que j'avais déclaré que la fédération de la faune devait se transformer et, justement, le nouveau président, M. Noël Laurin, reprenant exactement les déclarations que j'avais faites à ce sujet, est en train, justement, de transformer la Fédération québécoise de la faune pour qu'elle représente de plus en plus l'ensemble des pêcheurs et des chasseurs au Québec.

Il ne faudrait quand même pas lire seulement un journaliste lorsqu'on s'intéresse à la faune, il faudrait voir un peu ce qui se passe dans . le milieu. Il ne faudrait pas s'attarder exclusivement à quelques groupes de contestation qui, de toute façon, se sont toujours opposés à l'ouverture du territoire québécois à l'ensemble du public.

Le gouvernement du Québec, ce gouvernement, a été le premier, depuis 1976, non seulement à consulter la population, non seulement à écouter les quelques patroneux de l'ensemble du Québec, mais aussi à écouter les citoyens du Québec et à ouvrir le territoire du Québec à l'ensemble des citoyens. Ceci était réclamé depuis vingt ans et jamais un parti, avant 1976, n'avait eu le courage de redonner ces territoires aux citoyens.

C'est une autre étape, il y a des choses à corriger et cette commission parlementaire nous permettra non seulement d'en arriver à une meilleure conservation, mais surtout d'en arriver - je l'espère, en tout cas - à la protection des habitats fauniques parce que c'est l'un des problèmes fondamentaux de la conservation de nos espèces. Merci, M. le Président.

Le Président: M. le ministre des Finances.

Le taux de la taxe sur le

capital versé des banques à charte

porté à 1,2%

M. Jacques Parizeau

M. Parizeau: M. le Président, à la suite du consensus établi au sommet économique de Québec sur l'urgence de relancer la construction domiciliaire, le gouvernement a négocié, au cours des dernières semaines, avec tous les intervenants dans ce secteur d'activités, en vue de mettre en place un programme de relance de la construction domiciliaire et d'établir la contribution respective de chacun.

Je rappelle que les syndiqués et les employeurs de l'industrie de la construction ont accepté d'y aller d'une contribution paritaire substantielle estimée à 12 500 000 $ chacun par année pour une période de quatre ans, soit une contribution totale de 100 000 000 $. Les ingénieurs, les arpenteurs-géomètres et les notaires ont aussi accepté de collaborer en convenant d'honoraires professionnels réduits. Il en est de même du monde municipal qui a accepté de mettre tout en oeuvre pour assurer l'efficacité du programme, notamment l'établissement de fonds de subvention, la constitution de réserves foncières ou la réduction des droits sur les mutations immobilières.

Quant aux institutions financières, on leur a demandé de consentir, dans le cadre du programme, un taux d'intérêt hypothécaire inférieur de 0,5% par rapport à la moyenne des taux d'hypothèque conventionnels d'un terme d'une année des banques, sociétés de fiducie, compagnies d'assurances et caisses populaires. Le Mouvement Desjardins, la Banque Nationale du Canada et la Banque d'épargne de la cité et du district de Montréal ont accepté cette proposition et convenu de leur entière collaboration à l'administration du programme.

Cependant, malgré nos efforts de

persuasion, d'autres banques à charte, tout en acceptant de poursuivre les discussions concernant l'administration du programme refusent de consentir à quelque rabais que ce soit. Compte tenu de la contribution de l'ensemble des autres intervenants, de la contribution du gouvernement du Québec à même les impôts des contribuables québécois et des retombées favorables du programme sur l'activité économique, le gouvernement du Québec ne peut accepter ce refus.

En conséquence, j'annonce que le taux de la taxe sur le capital versé des banques à charte est porté de 0,9% à 1,2% pour la période allant du 1er juillet 1982 au 30 juin 1985. Toutefois, une banque à charte prescrite par règlement à la suite d'une entente avec le gouvernement concernant sa participation au programme sera exemptée de cette augmentation temporaire du taux de la taxe sur le capital. Les revenus additionnels permettront d'augmenter la subvention gouvernementale de façon à permettre l'atteinte de l'objectif initial d'un taux d'intérêt hypothécaire de 13 1/2% pour l'emprunteur. Ainsi, toutes les banques à charte seront amenées à contribuer au programme de relance de la construction domiciliaire. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Vaudreuil-Soulanges.

M. Daniel Johnson

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Merci, M. le Président. Tout d'abord, j'aurais des questions de nature factuelle a l'endroit du ministre. Quelle est la contribution en centaines de milliers ou en millions de dollars qui sera ainsi assurée au gouvernement à même cette augmentation de la taxe sur le capital? En même temps, le ministre pourrait peut-être commenter la proportion du programme volontaire auquel on s'attendait de voir participer les banques à charte qui sont visées par cette mesure. Dans la mesure où tant de millions de dollars seront perçus, on présumait que ce serait là la contribution de ces institutions financières au programme de relance domiciliaire. (10 h 40)

Ma deuxième question tient plutôt aux mécanismes que semble employer le gouvernement à ce moment-ci. Il m'apparaît inusité qu'on annonce une hausse de la taxe sur le capital par voie de déclaration ministérielle, qu'il n'y ait pas d'annonce de projet de loi qui fixerait en matière d'imposition les nouveaux barèmes d'imposition de la taxe sur le capital versé de ces banques et, notamment, ce qui retient également l'attention, c'est la façon dont par règlement, suivant une entente à venir, certaines institutions seraient exemptées d'une taxe qui à sa face même devrait frapper toutes les institutions de la même façon. On peut, quant à la déclaration du ministre, également, regretter que certaines institutions ne se soient pas jointes à l'effort de relance domiciliaire. Mais il n'en reste pas moins qu'il s'agit là d'un programme qu'on a présenté comme volontaire. C'est une corvée-habitation et, dans ce sens, je ne vois pas en quoi on peut de quelque façon que ce soit culpabiliser les institutions en question ou sévir par voie d'imposition spéciale contre ces institutions.

Il me semble que l'objectif de toute politique fiscale est l'uniformisation du traitement réservé aux individus ou aux sociétés qui en sont l'objet. Dans ce sens, la mesure demeure discriminatoire, c'est-à-dire qu'elle multiplie dans nos lois une autre occasion, elle s'ajoute aux autres occasions où on peut prétendre que des lois sont discriminatoires et, au premier chef, il me semble que les mesures fiscales ne doivent pas faire preuve d'une telle discrimination. Il m'apparaît, finalement, que c'est un autre pas dans la direction que le gouvernement semble emprunter, c'est-à-dire qu'à chaque fois que ces suggestions de nature politique ne font pas l'affaire de certains intervenants, ne soulèvent pas l'enthousiasme délirant de tous les intervenants, le gouvernement procède par voie législative. On l'a vu à l'égard du secteur public. Sous prétexte qu'il y a crise budgétaire et que les employés du secteur public ont négocié de bonne foi des augmentations de salaires pour la convention en cours, on a vu le gouvernement présenter des projets de loi qui retirent unilatéralement à ces employés du secteur public les augmentations de salaires auxquelles ils avaient droit. Dans le schème du gouvernement, il y a dans notre société, à un extrême, si je comprends bien, les grandes banques, les méchants capitalistes et, de l'autre côté, les syndiqués du secteur public. Le gouvernement nous démontre ce matin qu'il est incapable de négocier avec succès avec tous les intervenants dans la société.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre des Finances.

M. Jacques Parizeau

M. Parizeau: M. le Président, je vais commencer par la dernière allusion faite par le député de Vaudreuil-Soulanges où il évoquait, je pense, l'image du méchant capitaliste. Que je sache, la Banque Nationale du Canada ou la Banque d'Épargne ne sont ni plus ni moins capitalistes, j'imagine, que les autres banques. Or, elles ont convenu d'entrer dans le programme. Il ne s'agit donc pas du tout - comment dire? - d'une guerre de symboles.

Revenons à chacune des questions posées par le député de Vaudreuil-Soulanges. Combien cette taxe va-t-elle rapporter, étant bien entendu que les chiffres que je vais donner ne s'appliquent pas à la Banque Nationale du Canada et la Banque d'Épargne puisqu'elles sont réputées avoir accepté la proposition gouvernementale? Cela rapportera, en 1982, 2 000 000 $; en 1983, 4 400 000 $; en 1984, 4 800 000 $ et en 1985, 2 700 000 $.

On dit: C'est inusité. Bien sûr, c'est inusité, ce que je viens d'indiquer, M. le Président. Toute l'opération Corvée-Habitation est tout à fait inusitée. C'est la première fois dans notre société qu'employeurs, syndiqués, institutions financières pour plusieurs d'entre elles -parce que, encore une fois, c'est l'ensemble des caisses populaires, ce sont les deux grandes institutions de Montréal que sont la Banque d'Épargne et la Banque Nationale -entrent avec le gouvernement dans une concertation de cet ordre. On n'a jamais vu passer cela avant. Évidemment, c'est inusité et le gouvernement est très fier, d'ailleurs, de pouvoir pratiquer une opération de caractère inusité, je pense, qui aura démontré à quel point un très grand nombre d'intervenants, justement, dans notre société sont prêts à discuter entre eux et avec le gouvernement pour mettre au point un programme - Dieu sait, d'ailleurs - utile à l'économie et à son relèvement. Que l'on n'ait pas réussi à négocier avec tout le monde, qu'un certain nombre de banques aient refusé de marcher, bien oui, ce sont des choses qui arrivent. Cela ne veut pas dire que le gouvernement est mauvais négociateur. Au contraire, dans la mesure où l'entente est aussi large que celle que je viens d'indiquer, le gouvernement a justement montré à quel point il pouvait pousser très loin cette espèce de dialogue entre les intervenants de notre société.

Ceci étant dit, cependant, il serait un peu trop facile qu'un certain nombre de ces institutions financières disent: Ne comptez pas sur nous. Des intervenants acceptent des sacrifices financiers pour lancer une opération de cet ordre, nous allons en profiter, mais nous ne contribuerons rien. Des gens viendront nous voir pour obtenir du crédit hypothécaire à 13,5%, mais nous ne contribuerons rien. On dit: Dans la mesure où on n'a pas réussi à s'entendre avec vous, on le regrette, mais on va aller chercher l'argent par le truchement de cette taxe sur le capital. Cela conclut une opération. Je regrette encore une fois que toutes les banques n'aient pas embarqué. Suffisamment d'institutions financières, caisses populaires ou banques ont embarqué, cependant, pour nous permettre de savoir que, sur le plan du financement, l'opération peut fonctionner très correctement.

Les institutions financières qui ont accepté de fonctionner avec nous - et je pense que c'était la dernière question soulevée par le député de Vaudreuil-Soulanges - représentent à peu près 40% ou un peu plus de l'ensemble du crédit hypothécaire qui se fait chez nous, y compris d'ailleurs la Société canadienne d'hypothèques. Dans ce sens l'assise de financement est largement suffisante pour que l'on puisse fonctionner.

Voilà, M. le Président, je pense, le dernier chapitre de ces tractations que nous avons eues déjà depuis quelques semaines et qui normalement devraient permettre à mon collègue, le ministre de l'Habitation et de la Protection du consommateur, d'indiquer de façon très précise, dans les jours qui viendront, le mode de fonctionnement du programme et sa date de démarrage. Merci, M. le Président.

Le Président: Dépôt de documents. M. le ministre de l'Éducation, par M. le leader du gouvernement.

Rapport annuel du Barreau du Québec

M. Bertrand: M. le Président, au nom du ministre de l'Éducation, je voudrais d'abord déposer le rapport annuel 1981-1982 du Barreau du Québec.

Rapports de la Corporation

professionnelle des psychologues

et de l'Ordre des comptables agréés

Deuxièmement, déposer le rapport annuel 1980-1981 de la Corporation professionnelle des psychologues du Québec et enfin déposer le rapport annuel 1981-1982 de l'Ordre des comptables agréés du Québec.

Le Président: Rapports déposés. M. le ministre des Transports.

Proposition gouvernementale sur l'organisation et le financement

du transport en commun dans la région de Montréal

M. Clair: M. le Président, d'abord, je voudrais m'excuser auprès de mes collègues, puisqu'à la suite d'une erreur de logistique le dépôt que je vais faire aujourd'hui n'a pas pu être fait vendredi, alors qu'il aurait dû l'être.

Il me fait plaisir, M. le Président, de déposer en deux exemplaires la proposition gouvernementale concernant l'organisation et le financement du transport en commun dans la région de Montréal, intitulée Le transport en commun, un choix régional.

Le Président: Rapport déposé. M. le leader du gouvernement, pour le ministre des Affaires intergouvernementales.

Rapport de l'Office franco-québécois pour la jeunesse, Québec

M. Bertrand: M. le Président, je voudrais déposer le rapport annuel de l'année 1981 de l'Office franco-québécois pour la jeunesse, section du Québec.

Le Président: Rapport déposé. Pétitions. M. le député de Nicolet.

Pétitions pour le report des projets de loi nos 68 et 70

M. Beaumier: Merci, M. le Président. Par considération pour tous ces concitoyens et ces concitoyennes de mon comté, je dépose en cette Chambre la pétition du Syndicat des fonctionnaires provinciaux du Québec, signée par environ 240 de mes commettants et le président du Syndicat des fonctionnaires provinciaux du Québec. Merci.

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Levesque (Bonaventure): ... question de règlement.

Le Président: M. le leader de l'Opposition, sur une question de règlement.

M. Levesque (Bonaventure): II serait normal, M. le Président, qu'en vertu des dispositions de notre règlement l'honorable député nous dise le sujet de cette pétition, afin que les pétionnaires aient pleinement justice.

Le Président: M. le député de Nicolet, un exposé succinct et précis.

M. Beaumier: Comme le sait le leader de l'Opposition officielle, cela concerne l'opposition aux projets de loi nos 68 et 70.

Le Président: Merci. M. le député de Huntingdon.

M. Dubois: M. le Président, en vertu des dispositions de l'article 180 de nos règlements, je voudrais faire le dépôt d'une pétition signée par 112 membres du Syndicat des fonctionnaires provinciaux du Québec, section Valleyfield.

Je fais la lecture du texte, M. le Président: "Attendu que le régime de retraite fait partie intégrante de nos conditions de travail; attendu que les autres régimes de retraite auxquels le gouvernement est partie ne sont pas modifiés en concordance..."

M. Dussault: Question de règlement.

Le Président: M. le député de Châteauguay, sur une question de règlement.

M. Dussault: M. le Président, étant donné qu'hier j'ai déposé une pétition pour les fonctionnaires de la section de Valleyfield, est-ce qu'on doit penser qu'aujourd'hui le député de Huntingdon dépose une pétition identique à celle que j'ai déposée hier?

Le Président: La présidence n'a pas à présumer qu'il s'agit de la même pétition. M. le député de Huntingdon. (10 h 50)

M. Dubois: M. le Président, "attendu que le gouvernement envisage de modifier unilatéralement, sans accord de notre syndicat, ces mêmes régimes de retraite, aux fins d'augmenter nos contributions; attendu que le gouvernement envisage par voie de législation de réduire nos salaires pour récupérer les augmentations prévues à nos conventions collectives venant à échéance le 31 décembre 1982; attendu que la politique salariale actuelle nous a déjà été imposée par le gouvernement par sa loi d'exception de 1979, loi 62; attendu qu'une telle attitude équivaut pour le gouvernement au non-respect de sa signature; attendu que, selon l'esprit et la lettre du Code du travail, les parties à une négociation doivent négocier de bonne foi; "Nous demandons, par votre entremise, à titre de membre de l'Assemblée nationale, que l'adoption de ces projets de loi soit reportée sine die afin de permettre que les négociations pour le renouvellement de la convention collective se fassent de bonne foi et traitent de ces sujets. "Même si nous ne sommes pas considérés comme des citoyens à part entière, nous nous souviendrons, en temps opportun, que nous devrions avoir droit de parole sur ce que doivent être nos conditions de travail."

Cette pétition est respectueusement présentée, M. le Président.

Le Président: Pétition déposée. Mme la députée de La Peltrie et ministre d'État à la Condition féminine.

Mme Marois: M. le Président, c'est à titre de députée de La Peltrie et par respect pour les gens travaillant, dans mon comté, au ministère du Revenu, que je déposerai, selon le même texte lu par mon collègue de Huntingdon, une pétition signée par 1200 travailleurs et travailleuses du Syndicat des fonctionnaires provinciaux du Québec. Merci, M. le Président.

Le Président: Pétition déposée. M. le député de Richelieu.

M. Martel: M. le Président, en vertu de l'article 180, je dépose une pétition signée par 77 fonctionnaires du Syndicat des fonctionnaires provinciaux du Québec de la même nature que celles déposées précédemment.

Le Président: Pétition déposée.

M. le député de Rimouski et ministre des Travaux publics et de l'Approvisionnement.

M. Marcoux: M. le Président, j'aimerais déposer une pétition signée par 497 fonctionnaires de mon comté qui se prononcent contre la loi 68 et la loi 70.

Le Président: Pétition déposée. M. le député de Saint-Hyacinthe.

M. Dupré: M. le Président, à la demande du Syndicat des fonctionnaires provinciaux du Québec des comtés de Johnson, Verchères et Saint-Hyacinthe, je dépose une pétition contenant 322 signatures.

M. Levesque (Bonaventure): Question de règlement.

Le Président: M. le leader de l'Opposition, sur une question de règlement.

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, en vertu des dispositions de notre règlement, est-ce que nous pourrions connaître, comme l'ont fait d'ailleurs les autres collègues, le sujet de la pétition, un exposé clair, succinct, complet?

Le Président: M. le député de Saint-Hyacinthe.

M. Dupré: C'est une pétition similaire à celle déposée par le député de Huntingdon.

Le Président: Pétition déposée. M. le député de Groulx.

M. Fallu: M. le Président, de la part de 32 fonctionnaires travaillant dans le comté de Groulx, au bureau de l'aide sociale, au centre de main-d'oeuvre et au bureau régional du ministère de l'Éducation, j'aimerais déposer une pétition relative à leurs conditions de travail.

Le Président: Pétition déposée. M. le député de Sainte-Marie.

Pétition pour la mise sur pied d'un service national volontaire

M. Bisaillon: M. le Président, en vertu des dispositions de l'article 180 de notre règlement, qu'il me soit permis de déposer une pétition provenant de quelque 850 citoyennes et citoyens du comté de Sainte-Marie, qui se lit comme suit: "Considérant les difficultés particulières rencontrées chez nous; considérant le taux de chômage de plus en plus élevé non seulement dans notre quartier, mais partout au Québec; considérant le portrait socio-économique du comté de Sainte-Marie; considérant qu'il faut envisager au plus tôt des mesures comportant des solutions permanentes; considérant les recommandations de la commission Jean allant dans le même sens, nous appuyons la mise sur pied d'un service national volontaire à l'intention principalement des jeunes de 18 à 25 ans." À suivre, M. le Président.

Le Président: Pétition déposée.

M. Chevrette: Question de règlement.

Le Président: M. le député de Joliette, sur une question de règlement.

M. Chevrette: M. le Président, n'ayant pu aller dans mon comté, il me sera impossible, avant la fin de la session, de déposer ma pétition.

M. Levesque (Bonaventure): Question de règlement.

Le Président: M. le leader de l'Opposition.

M. Levesque (Bonaventure): Nous sommes au moment du dépôt de documents et nous venons d'entendre, de la part du whip en chef du gouvernement, qu'il aurait désiré déposer une pétition. Mutatis mutandis, je pense bien qu'il sera obligé de nous dire quel est le genre de pétition qu'il aurait aimé déposer.

Des voix: Ah!

M. Chevrette: M. le Président, le leader de l'Opposition sait très bien que c'est dans le même sens que celles de tous mes collègues qui se sont levés avant.

Le Président: Dépôt de...

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, afin que cela soit bien clair, si vous me le permettez.

Des voix: Ah!

M. Levesque (Bonaventure): Si le whip en chef a des objections à cela, est-ce qu'il s'agit bien d'une opposition des fonctionnaires, des gens dans les secteurs public et parapublic...

Une voix: Du comté de Joliette.

M. Levesque (Bonaventure): ... du comté de Joliette, sur la rémunération, les conditions de travail, etc.?

M. Chevrette: M. le Président. Une voix: Fonds de retraite.

M. Chevrette: Qui, en cette Chambre, pourrait cacher quelque chose au leader de l'Opposition?

Des voix: Ah!

Le Président: Dépôt de rapports de commissions élues.

M. le député de Chambly.

Étude du projet de loi no 56

M. Tremblay: M. le Président, qu'il me soit permis, conformément aux dispositions de notre règlement, de déposer le rapport de la commission élue permanente des institutions financières et coopératives qui a siégé le 21 juin 1982 aux fins d'étudier article par article le projet de loi no 56, Loi sur les coopératives. Le projet de loi a été adopté avec des amendements.

Le Président: Rapport déposé. M. le député d'Arthabaska.

Étude du projet de loi no 65

M. Baril (Arthabaska): M. le Président, qu'il me soit permis, conformément aux dispositions de notre règlement, de déposer le rapport de la commission élue permanente des communications qui a siégé les 4, 7, 8, 9, 11, 14 et 21 juin 1982 aux fins d'étudier article par article le projet de loi no 65, Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels. Le projet de loi a été adopté avec des amendements.

Le Président: Rapport déposé. M. le député de Nicolet.

Étude du projet de loi no 66

M. Beaumier: Également, M. le Président, conformément aux dispositions de notre règlement, je dépose le rapport de la commission élue permanente de la présidence du conseil et de la constitution qui a siégé le 21 juin 1982 aux fins d'étudier article par article le projet de loi no 66, Loi modifiant certaines dispositions législatives en matière de financement des partis politiques et en matière d'élections municipales. Le projet de loi a été adopté avec des amendements.

Le Président: Rapport déposé.

Dépôt de rapports du greffier en loi sur les projets de loi privés.

Présentation de projets de loi au nom du gouvernement.

M. Bertrand: M. le Président, je vous demanderais d'appeler l'article b) du feuilleton, s'il vous plaît!

Projet de loi no 86 Première lecture

Le Président: M. le ministre de la Justice propose la première lecture du projet de loi no 86, Loi modifiant la Charte des droits et libertés de la personne.

M. le ministre de la Justice. M. Marc-André Bédard

M. Bédard: M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le projet de loi no 86, Loi modifiant la Charte des droits et libertés de la personne.

Ce projet de loi a pour objet de modifier, sous divers aspects, la Charte des droits et libertés de la personne afin de l'adapter davantage aux besoins de la société québécoise et d'accroître la protection qu'elle confère à ses membres.

Les modifications qu'il propose peuvent se regrouper sous cinq thèmes, savoir: la prépondérance de la charte, les droits nouveaux, les avantages sociaux, les programmes d'accès à l'égalité et les pouvoirs de la Commission des droits de la personne.

À l'égard du premier de ces thèmes, le projet de loi vise à étendre la prépondérance de la charte aux libertés et droits fondamentaux contenus dans les articles 1 à 8; cette prépondérance vaudra à l'égard de toutes les dispositions des lois du Québec, qu'elles soient antérieures ou postérieures à la charte, à moins qu'elles n'énoncent expressément s'appliquer malgré celle-ci.

Parmi les droits nouveaux introduits dans le présent projet de loi, on compte, notamment: l'inclusion de l'âge et de la grossesse parmi les motifs illicites de discrimination; l'interdiction du harcèlement en raison d'un motif illicite de discrimination; l'interdiction de requérir d'une personne qui postule un emploi des renseignements reliés à ces motifs de discrimination; l'inclusion ou l'extension de certains droits judiciaires tel le droit de ne pas être jugé de nouveau pour une infraction dont on a déjà été acquitté ou déclaré coupable, ou encore le droit pour l'accusé d'être informé promptement de l'infraction particulière qu'on lui reproche et d'être jugé dans un délai raisonnable. (11 heures)

Le projet de loi vise également à interdire la discrimination dans les avantages sociaux, c'est-à-dire dans les régimes

d'avantages sociaux, de retraite, de rente ou d'assurance, les régimes universels et les contrats d'assurance. Ne seront permises que les distinctions, exclusions ou préférences fondées sur des facteurs de détermination de risque ou des données actuarielles que le gouvernement établira par règlement. Dans l'élaboration de ce règlement, le gouvernement consultera la Commission des droits de la personne. Ce projet de règlement, comme d'ailleurs tout autre projet de règlement découlant de la charte, sera publié et déposé devant la commission parlementaire élue de la justice avant d'être adopté.

Le projet de loi modifie, de plus, la charte pour permettre l'instauration de programmes d'accès à l'égalité. Ces programmes auront pour objet de corriger la situation des personnes faisant partie de groupes victimes de discrimination dans l'emploi, ainsi que dans les secteurs de l'éducation ou de la santé et dans tout autre service ordinairement offert au public. Ces programmes pourront être implantés sur une base volontaire après approbation de la Commission des droits de la personne; ils pourront aussi être recommandés par la commission après enquête ou encore imposés par un tribunal sur présentation d'une preuve de discrimination envers un groupe, lorsque la recommandation de la commission n'aura pas été suivie.

Par ailleurs, le gouvernement s'oblige à implanter des programmes d'accès dans ses ministères et se donne le pouvoir d'en imposer à ses organismes.

Le projet de loi vise enfin à élargir certains pouvoirs de la Commission des droits de la personne. Outre les pouvoirs relatifs aux programmes d'accès à l'égalité, la commission pourra s'adresser au tribunal en vue d'obtenir une injonction contre la personne qui tente d'exercer ou exerce des représailles contre une personne ou un organisme qui a fait une demande d'enquête ou pris part à une enquête de la commission, ou contre une personne pour qui une enquête a été demandée. La commission pourra également intenter des poursuites pour une infraction à certaines dispositions de la charte.

Enfin, le projet de loi prévoit qu'une demande d'enquête à la Commission des droits de la personne suspendra la prescription de tout recours civil visant le même objet. Merci, M. le Président.

Des voix: Bravo! Bravo!

Le Président: Merci. Est-ce que cette motion de première lecture sera adoptée?

Des voix: Adopté. Le Président: Adopté.

Le Secrétaire adjoint: Première lecture de ce projet de loi.

Le Président: Deuxième lecture, prochaine séance ou séance subséquente. M. le leader du gouvernement.

M. Bertrand: M. le Président, je vous demanderais d'appeler l'article c du feuilleton.

Projet de loi no 90 Première lecture

Le Président: M. le leader parlementaire du gouvernement propose la première lecture du projet de loi no 90, Loi sur l'Assemblée nationale du Québec.

M. Jean-François Bertrand

M. Bertrand: Ce projet de loi a pour objet d'ordonner, de préciser et de mettre à jour les dispositions ayant trait à l'organisation et au fonctionnement du pouvoir législatif. Il consacre la suprématie du Parlement du Québec constitué de l'Assemblée nationale et du lieutenant-gouverneur et affirme solennellement le caractère particulier et les prérogatives de l'Assemblée nationale.

Après avoir établi la composition de l'Assemblée, sa durée et ses pouvoirs, le chapitre I traite des commissions de l'Assemblée, de certaines mesures concernant les députés, des fonctions du président, des adjoints parlementaires et du secrétaire général.

Le chapitre II ordonne et rassemble des dispositions actuellement éparses concernant les textes législatifs.

Le chapitre III du projet reprend, en les clarifiant et en les précisant, les grands principes qui gouvernent l'indépendance de l'Assemblée nationale. Après la section sur les droits, privilèges et immunités de l'Assemblée et de ses membres, ce chapitre traite des conflits d'intérêts et des fonctions incompatibles avec le mandat de député.

Ce projet de loi institue la fonction de jurisconsulte dont le rôle sera de donner un avis au député qui en fera la demande sur la conformité d'une situation éventuelle et propre à ce député avec les dispositions du projet concernant les conflits d'intérêts et les incompatibilités de fonctions.

Le chapitre IV du projet édicte les règles relatives à l'administration de l'Assemblée nationale. Il propose la création du Bureau de l'Assemblée nationale composé du président et de députés représentant les principaux partis qui siègent à l'Assemblée. Le bureau exercera des fonctions de contrôle, de réglementation et de gestion, ainsi que toute autre fonction que

l'Assemblée lui confiera. Ce bureau remplace, avec des pouvoirs élargis, les commissaires chargés de la régie interne de l'Assemblée.

Le projet consacre la possibilité pour l'Assemblée de déroger, par l'intermédiaire du bureau, à l'application de toute loi ou règlement de nature administrative, lorsque la poursuite des objectifs et l'exercice des pouvoirs de l'Assemblée peuvent être plus efficacement atteints par l'utilisation de règles particulières.

Le chapitre V du projet édicté des sanctions pour les différentes infractions prévues et reconnaît à l'Assemblée pleine compétence pour juger de ces infractions de même que pour l'exécution des sanctions qui en découlent.

Enfin, le chapitre VI du projet de loi prévoit des dispositions transitoires et finales. Sous ce chapitre, le projet de loi apporte une modification à la Loi sur le ministère des Communications en y intégrant un nouveau chapitre prescrivant que le sous-ministre des Communications est d'office l'Éditeur officiel du Québec. D'autres dispositions énumèrent les fonctions de l'Éditeur officiel du Québec.

Les lois modifiées par ce projet sont: la Loi sur la Législature, la Loi sur le ministère des Communications, la Loi électorale, la Loi sur la Fonction publique, la Loi d'interprétation, la Loi sur le Service des achats du gouvernement et la Loi sur la Société québécoise d'information juridique.

Le Président: Est-ce que cette motion de première lecture sera adoptée?

Des voix: Adopté. Le Président: Adopté.

Le Secrétaire adjoint: Première lecture de ce projet de loi.

Le Président: Deuxième lecture, prochaine séance...

Renvoi à la commission de l'Assemblée nationale

M. Bertrand: Non, M. le Président, je voudrais faire motion pour que ce projet de loi soit déféré à la commission de l'Assemblée nationale.

Le Président: Est-ce que cette motion de déférence sera adoptée?

Une voix: Adopté.

Le Président: Adopté. Présentation de projets de loi au nom des députés.

Période de questions orales des députés.

M. le député de Neiligan.

QUESTIONS ORALES DES DÉPUTÉS

Projet d'épuration des eaux à Granby

M. Lincoln: M. le Président, j'aurais une question à poser à "Sir Marcel Laurier", le ministre de l'Environnement, futur premier ministre du Canada. Le ministre de l'Environnement a été interrogé, le 6 mai 1982, sur un projet dont il ne parle pas trop ces jours-ci, le projet d'épuration des eaux à Granby. C'est un projet qui a commencé en 1980 pour une somme de 19 000 000 $. Dans l'espace de deux ans seulement, cela a augmenté de 300%. C'est maintenant évalué, par les ingénieurs-conseils et la Société québécoise d'assainissement des eaux, à 55 000 000 $. J'ai demandé au ministre comment il se faisait que dans deux ans ce projet ait augmenté de 300%. Voici les réponses qu'il m'a données et je cite exactement ses mots:

Le 6 mai 1982: "J'ai fait venir le prix exact pour Granby; cela a été signé à 32 000 000 $ en 1979." Moi, j'ai parlé de 19 000 000 $ en janvier 1980. Un peu plus tard, il a fait une correction lors d'un complément de réponse: "Ce qui est un peu mêlé, peut-être, dans les dossiers du député de Neiligan, c'est qu'avant le protocole d'entente de 1979 il y a eu un premier protocole de 19 000 000 $, ce qui fait qu'il y a eu un correctif entre le premier protocole et celui de 1979 de 32 000 000 $." C'est-à-dire qu'il y avait un protocole, avant 1979, pour 19 000 000 $ et, après 1979, un autre de 32 000 000 $.

Le Président: Question.

M. Lincoln: Excusez-moi. N'est-il pas vrai que le 18 mai 1982 il m'a dit ceci: "Le montant est passé de 19 000 000 $ à 32 000 000 $ et ce sont les chiffres de décembre 1980"? Là, ce n'est plus avant 1979, c'est ceux de décembre 1980. C'est seulement douze jours après.

N'est-il pas vrai que le 2 avril, un mois avant, il m'avait dit: "À Granby, je peux vous dire que les chiffres, au début, s'élevaient autour de 32 000 000 $"? J'ai revu les crédits du 3 juin 1981 - j'arrive à ma question - et n'est-il pas vrai qu'il a dit: "La ville de Granby a aussi signé un projet de 19 000 000 $ dans la dernière quinzaine"? C'est-à-dire à la mi-mai 1981.

Mes questions au ministre sont celles-ci: Est-ce que c'est 19 000 000 $ avant 1979 ou 19 000 000 $ en mai 1981? Est-ce 32 000 000 $ au début? Est-ce 32 000 000 $ en 1979 ou si c'est passé à 32 000 000 $ en décembre 1980? Cinq réponses différentes en l'espace de quelque temps, la plupart dans l'espace d'un mois.

Peut-il me dire ce qui se passe dans ce contrat? Quelle est la réponse exacte?

Le Président: M. le ministre de l'Environnement. (11 h 10)

M. Léger: M. le Président, il y a un vieux proverbe qui dit: Pourquoi simplifier quand c'est si facile à compliquer? Le député de Nelligan essaie de compliquer les choses alors qu'il y a toujours deux chiffres qu'on doit continuellement distinguer, c'est le coût en argent constant et le coût, à cause de l'inflation, en argent courant. Autrement dit, quand on signe un projet à une date précise, disons, 1980, s'il était terminé en 1980, c'est le prix X défini que ça coûte. Si ce projet se termine dans deux ans, il faut toujours ajouter l'inflation de 10%, 11%, 12% par année, ce qui fait qu'un projet de 1980 n'est pas du même prix en 1982 tout en comportant les mêmes ouvrages. Donc, c'est la différence entre le prix courant et le prix constant. Pour simplifier, M. le Président, ce que le député de Nelligan veut mêler, je vais lui dire que j'ai un document qui essaie de réunir les chiffres de la Société québécoise d'assainissement des eaux qui est le promoteur et le ministère de l'Environnement qui doit s'assurer que le projet se réalise à l'intérieur des balises prévues.

Le projet de Granby a été signé à la fin de 1979 et il y avait eu auparavant, comme je le lui ai dit, un premier protocole de signé, mais il a été corrigé par la suite. Le chiffre en argent de 1980 est 32 938 000 $ et, quand il sera terminé, s'il se fait en deux ans ou en trois ans, il faut toujours ajouter les 11% environ par année d'inflation et, nécessairement, il y a une petite marge de manoeuvre autour de 20% pour les imprévus parce que, quand on fait des études sur papier... Quand on va sur le territoire, il peut y avoir des difficultés et des contraintes qui ne sont pas visibles autrement que sur le territoire. En argent 1980, il est prévu que le coût sera de 32 938 000 $, mais, quand les travaux seront terminés, il faut toujours y ajouter les 11% d'inflation par année.

Le Président: Question additionnelle, sans préambule, M. le député de Nelligan.

M. Lincoln: Sans préambule. J'ai simplement demandé au ministre comment il se fait que, dans l'espace de six semaines, il m'a donné trois dates différentes et trois chiffres différents. N'est-ce pas typique de toute votre affaire dans l'assainissement des eaux où toute votre évaluation est fausse? Cela monte de presque 300% à Granby, de 200% à Cowansville et cela a monté la même chose à Saint-Hyacinthe. Toutes vos évaluations sont tout à fait fausses, vous ne savez même pas les dates auxquelles vous signez ces protocoles.

Le Président: M. le ministre de l'Environnement.

M. Léger: M. le Président, j'essaie de donner les ingrédients dans le chaudron de la question du député, mais c'est lui qui mêle la bouillabaisse.

Le Président: Question additionnelle, M. le député d'Iberville.

M. Beauséjour: M. le Président, je voudrais savoir du ministre s'il est exact que la réalisation de ce projet pourrait être en retard d'un an et, en même temps, si c'était exact, si cela pourrait avoir une influence sur le projet de Farnham.

Le Président: M. le ministre de l'Environnement.

M. Léger: M. le Président, nous avons décidé, pour nous assurer de la réalisation la plus adéquate possible de l'échéancier, de réunir à toutes les semaines les représentants de la Société québécoise de l'assainissement des eaux avec les autorités de mon ministère de l'Environnement pour évaluer la façon dont l'échéancier est respecté ou la façon dont les chiffres vont être respectés. Donc, en ce qui concerne Granby, il n'est pas question qu'il y ait de retard comme tel, mais justement, aujourd'hui, je rencontre des représentants des deux groupes pour déterminer les dates pour chacun de ces projets. Cela me fera plaisir de donner plus tard au député les renseignements sur des dates plus précises.

Le Président: Question principale, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

Le dossier SIDBEC

M. Scowen: J'ai une question à poser au ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme concernant la compagnie SIDBEC et les engagements, semble-t-il, qui ne sont pas respectés. En 1979, M. le Président, le gouvernement péquiste, le gouvernement Lévesque nous a obligés à investir 150 000 000 $ dans la compagnie SIDBEC. Je le répète, c'était le gouvernement péquiste. À ce moment, il s'est engagé à présenter un plan de redressement dans les prochains six mois pour expliquer comment, à long terme, cette compagnie pouvait devenir rentable. Le plan n'était pas rendu public, tel que promis, six mois plus tard. Cela fait maintenant deux ans et il n'est pas encore public.

Lors de l'étude des crédits, il y a quelques semaines, le ministre qui a déjà promis à deux reprises que cette étude serait

rendue publique, m'a assuré que, premièrement, elle serait rendue publique au plus tard cet automne et, deuxièmement, qu'aucune somme additionnelle ne serait versée dans cette société sous forme de prêt, sous forme d'avance, avant que la population et l'Assemblée nationale n'aient eu l'occasion d'examiner ce plan de redressement.

Ce matin, M. le Président, il y a un rapport indiquant que le gouvernement va peut-être faire une avance additionnelle de 40 000 000 $ à SIDBEC avant que ce plan de redressement, promis solennellement par le gouvernement depuis maintenant deux ans, ne soit rendu public et débattu par l'Assemblée nationale.

Je veux simplement, comme première question, que le ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme s'engage, ce matin, à me dire qu'il n'a pas menti quand il m'a dit en commission parlementaire, il y a deux ou trois semaines, qu'aucune somme ne sera versée avant que ce plan de redressement ne soit dévoilé et discuté, et je parle non seulement des dépenses en capital, mais aussi des avances.

Le Président: M. le ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme.

M. Biron: M. le Président, je pense que le dossier SIDBEC est très important à l'heure actuelle, vu la conjoncture et les problèmes qu'a connus cette société au cours des dernières années, en particulier. Je dois dire pour l'information de cette Chambre que les opérations manufacturières dans les quatorze dernières années ont perdu 146 000 000 $. C'est dire que même à travers la mauvaise conjoncture et les difficultés d'adaptation, on a perdu en moyenne 10 000 000 $ par année, mais le problème s'est véritablement compliqué depuis quelques années, depuis trois ans, dans les opérations minières, à cause de contrats qui ont été signés en 1974-1975 sous le gouvernement de M. Bourassa. On a signé des contrats que pas un homme d'affaires, pas une femme d'affaires n'aurait signé dans sa vie. On a signé, en particulier, des contrats de financement pour produire des boulettes de fer. Des boulettes de fer, je ne sais pas si vous savez ce que c'est, mais cela ne se vend pas facilement dans les magasins de détail ces temps-ci. Que SIDBEC...

Des voix: ...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Biron: ... ait besoin ou non de boulettes, le contrat est signé de façon telle qu'on produit des boulettes que SIDBEC vend sur les marchés internationaux en perdant de l'argent, à tel point que l'an dernier, tout près de 50 000 000 $ ont été perdus aux opérations minières à cause de contrats signés en 1974-1975, auxquels nous sommes liés. Il est important de noter que le malaise de SIDBEC provient surtout de décisions qui ont été prises par le gouvernement de Robert Bourassa en 1974-1975 et qui font en sorte qu'aujourd'hui les Québécois doivent payer. Saviez-vous, M. le Président, que chez SIDBEC-Normines seulement, en 1980, sur un total de 220 000 000 $ qui ont été dépensés, il y a, en plus, 50 000 000 $ qui sont des intérêts? On est pris avec eux et on est pris avec le taux d'intérêt qui augmente. Il y a un autre montant de 50 000 000 $ qui a été versé à US Steel ou à Québec Cartier Mining et, là-dessus, on nous dit qu'il y a 12 500 000 $ qui ont été versés pour considérations additionnelles. Une considération additionnelle, on appelle cela une "royauté" qui est payée, bon an, mal an, à US Steel pour avoir le droit d'oeuvrer et de creuser un trou au Québec. Le gouvernement du Québec est pris avec cela à l'heure actuelle. On est en train de revoir ces contrats qui ont été mal négociés et mal signés par les libéraux de l'époque de 1974-1975. On est en train d'essayer de renégocier ces contrats, à la fois avec US Steel, avec Québec Cartier Mining et avec les autres financiers de cette entreprise pour nous permettre au moins une marge de manoeuvre qui permettra à SIDBEC de pouvoir vivre un peu plus convenablement cette mauvaise conjoncture que nous traversons actuellement.

Le Président: Question additionnelle, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Scowen: J'ai deux questions additionnelles, M. le Président, parce qu'il n'a pas répondu à la première question. La première question additionnelle, M. le ministre, est la suivante: N'est-il pas vrai que votre gouvernement - l'héritier d'Hydro-Québec, SGF, SIDBEC, SOQUEM, SOQUIA, SOQUIP et j'en passe - a été élu pour gouverner et que cela fait maintenant six ans que vous donnez des excuses au sujet de votre faible administration de la compagnie SIDBEC? (11 h 20)

La deuxième question que je vous pose, M. le ministre, est très claire. N'est-il pas vrai que c'est votre gouvernement qui a adopté la loi en 1979 pour dépenser 150 000 000 $ de plus dans SIDBEC? N'est-ce pas votre gouvernement qui s'est engagé à faire un plan de redressement dans les six mois qui suivraient l'adoption de cette loi? N'est-ce pas votre gouvernement qui n'a pas respecté cet engagement? N'est-ce pas votre gouvernement qui, aujourd'hui, deux ans après, n'a rien fait pour régler le problème? N'est-ce pas vous-même qui avez pris

l'engagement dans une commission parlementaire, il y a trois semaines, de ne plus verser un sou additionnel des fonds publics dans cette société avant que ce plan de redressement soit rendu public? Je veux dire rendu public ici en Chambre. Est-ce que ce n'est pas un mensonge lorsque vous essayez aujourd'hui de blâmer le Parti libéral qui est disparu du gouvernement depuis maintenant six ans?

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le ministre.

M. Biron: M. le Président, en commission parlementaire, il y a trois semaines, lorsqu'on a discuté du cas de SIDBEC, j'ai dit au député de Notre-Dame-de-Grâce qu'il y avait déjà des sommes d'argent votées dans le budget actuel. Le député de Notre-Dame-de-Grâce ne m'empêchera certainement pas de verser ces sommes d'argent qui sont votées, au su de tout le monde, à SIDBEC en compensation pour des investissements qu'elle a faits l'an dernier.

Deuxièmement, j'ai dit au député de Notre-Dame-de-Grâce que, s'il fallait intervenir au point de vue financier pour donner des garanties bancaires à SIDBEC, on ne laisserait pas l'entreprise se faire saisir par des banques ou tomber en faillite parce que nous autres, nous devons absolument attendre et ne pas procéder rapidement. Je n'ai pas affirmé au député que je ne donnais pas de garanties bancaires ou autres à SIDBEC pour passer à travers une situation difficile, temporaire, à court terme. Mais je dis au député de Notre-Dame-de-Grâce que, si ce n'avait été de la conjoncture mauvaise qu'on passe depuis un an et demi à peu près, les opérations manufacturières de SIDBEC seraient rentables aujourd'hui. Mais on est pris avec une conjoncture où les aciéries canadiennes fonctionnent à 65% de leur capacité, les aciéries américaines, à 48% et, à travers cela, nous autres, nous sommes obligés de payer de taux d'intérêt très élevés à cause de décisions qui ont été prises avant 1976 et, en particulier, à cause de décisions qui proviennent de SIDBEC-Normines.

Lorsqu'on est obligé d'assumer un déficit annuel de 40 000 000 $ à 50 000 000 $ à cause de mauvaises décisions et de mauvais contrats que vous avez pris à l'époque, on est obligé d'assumer nos obligations dans ce sens. Si les contrats de SIDBEC-Normines avaient été faits comme du monde, pour produire la quantité requise pour les partenaires, SIDBEC, British Steel et US Steel, on ne serait pas pris aujourd'hui avec un déficit annuel de 40 000 000 $ ou de 50 000 000 $ à cause de SIDBEC-Normines. Le gros du malaise et le cancer de SIDBEC, dans le fond, provient de

SIDBEC-Normines, de contrats qui ont été signés sur le coin de la table par Robert Bourassa qui est censé être le grand spécialiste de l'économie au Québec. C'est lui qui a fait en sorte qu'aujourd'hui nous perdons de l'argent avec SIDBEC-Normines.

Le Président: Deux dernières questions additionnelles, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, sans préambule, s'il vous plaît, et M. le député de Verchères. À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Scowen: Le ministre n'a-t-il pas donné son engagement en commission parlementaire qu'il ne prévoyait pas une dépense additionnelle de fonds dans SIDBEC avant l'automne et qu'il s'engageait à ce moment, avant que cette garantie ou avance soit faite, à déposer en même temps le plan de redressement? Deuxièmement, combien d'années vont-ils nous donner, une fois rendus au pouvoir, pour blâmer le Parti québécois pour l'achat d'Asbestos et de Québecair?

Le Président: M. le ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme.

M. Biron: M. le Président, je n'ai fait que citer des faits. Lorsqu'on analyse un bilan de société, on analyse un bilan de société et, si on et pris avec des mauvais contrats, on dit au moins de quoi cela dépend ou de qui cela dépend. Je n'ai que dit au député de Notre-Dame-de-Grâce que nous sommes pris aujourd'hui, six ans après, avec des contrats qui ont été mal signés à l'époque et que nous sommes pris avec et qu'il faut vivre avec. On essaie de les regarder dans tous les sens pour ressortir SIDBEC le mieux possible et faire en sorte qu'elle passe à travers cette mauvaise conjoncture. Je rappelle au député que, si ce n'avait été de la mauvaise conjoncture économique, les opérations manufacturières de SIDBEC, aujourd'hui, ne seraient pas déficitaires; au contraire, elles seraient même rentables. On a au moins fait un bout de chemin de ce côté. On est pris avec des vieux contrats qui ont été signés à l'époque.

Le Président: Dernière question additionnelle, M. le député de Verchères.

M. Charbonneau: M. le Président, j'aimerais dire, au profit des travailleurs de SIDBEC et de leur famille qui sont inquiets aujourd'hui, que le titre du journal qui n'a pas été mentionné par le député de Notre-Dame-de-Grâce, c'est: "SIDBEC en faillite d'ici juillet." C'est le titre qu'on voit dans le journal de ce matin, et on parle du 15 juillet.

Est-ce que le ministre pourrait nous indiquer si la situation est à ce point dramatique que le 15 juillet il y a risque de

faillite? Est-ce qu'il pourrait nous indiquer, au sujet des contrats de SIDBEC-Normines, quelle est la durée de vie de ces contrats? Est-ce que c'est exact que les contrats qui ont été signés en 1976 impliquent SIDBEC pour les 30 prochaines années, c'est-à-dire jusqu'à ce que la mine soit épuisée?

Le Président: M. le ministre.

M. Biron: La situation n'est pas dramatique au point où l'article de journal soit véridique; ce n'est pas vrai du tout. SIDBEC est encore capable de payer ses comptes, a sa marge de crédit bancaire et fonctionnera très bien au cours des prochains mois. Il y a des problèmes importants, c'est vrai. On a demandé à la direction de SIDBEC de revoir tous ces problèmes de fond en comble. Aujourd'hui même, on a une réunion du comité ministériel de développement économique pour analyser le rapport du conseil d'administration de SIDBEC.

C'est possible qu'on cherche aussi, dans certains secteurs manufacturiers et même dans les secteurs miniers, des partenaires avec qui on pourra au moins essayer de rentabiliser le plus rapidement certains secteurs d'activité. Le titre est inexact, et je crois que les activités de SIDBEC vont continuer, d'autant plus que, déjà, le conseil d'administration s'est mis à la recherche de partenaires possibles. Il y a des négociations en cours.

Quant aux contrats de SIDBEC-Normines, c'est exact que des contrats ont été signés en 1975 ou 1976 engageant le Québec pour 30 années. Cela veut dire que, quand on aura fini de creuser un trou au Québec, on aura payé au moins 500 000 000 $ de redevances à une multinationale américaine pour avoir, le droit d'employer du minerai de fer du Québec. Cela, c'est le scandale de l'époque qui a été signé par Robert Bourassa et les libéraux.

Le Président: Question principale, M. le député de Saint-Henri.

L'assurance collective des cadres et des directeurs d'école

M. Hains: M. le Président, ma question s'adresse au ministre délégué à l'Administration et président du Conseil du trésor. M. le ministre, vous savez certainement que le plan d'assurance collective des cadres et des directeurs d'école a démontré un surplus depuis 1974. Depuis cette année, le CARR mandaté à cet effet employait des surplus au profit des assurés en bonifications supplémentaires. Au 30 décembre 1980, les surplus s'évaluaient à quelque 15 600 000 $. Voici que le gouvernement vient de décréter trois choses: 1) que les surplus accumulés lui appartiendraient au prorata de sa participation, soit 9 600 000 $; 2) que les futurs surplus lui appartiendront en totalité; et 3) qu'aucune bonification supplémentaire ne sera maintenant consentie sans son accord.

Voici ma question. Le respect des engagements du gouvernement vis-à-vis de ses 4000 directeurs d'école et ses 26 000 cadres est-il vraiment chose du passé? Est-ce que le ministre a oublié de comptabiliser dans le gel des salaires les quelque 9 600 000 $ qu'il a pris au plan des assurances collectives des cadres?

Le Président: M. le président du Conseil du trésor.

M. Bérubé: Non, M. le Président. D'abord, je n'accepte pas du tout l'interprétation du dossier que donne le député. De fait, ce qu'il faut réaliser, c'est que les régimes d'assurance collective des cadres dans les secteurs public et parapublic faisaient en sorte qu'en pratique les régimes coûtaient beaucoup moins que ce que l'employé et le gouvernement versaient en contribution. Ce sont les études actuarielles qui nous ont amenés à constater que des surplus s'accumulaient très rapidement au sein de ces régimes, provenant des surplus de cotisation qui y étaient versés, compte tenu des dépenses que les fonds assumaient.

Or, comme on vient de le souligner, le surplus accumulé atteignait tout près de 15 000 000 $, et s'est posée très sérieusement la question, à ce moment-là, à savoir ce qu'on devait faire d'un tel surplus. Il nous est apparu qu'une bonification d'un régime déjà fort généreux apparaissait inappropriée et, par conséquent, qu'il était plus approprié de retourner les cotisations soit aux employés qui les avaient versées en trop par une réduction des cotisations pour l'avenir, soit au gouvernement qui les avait payées en trop. (11 h 30)

Un avis juridique nous a montré qu'en pratique, les surplus de cotisation appartenaient aux deux parties au prorata de leurs contributions et cela explique pourquoi la contribution versée en trop par les employés leur est retournée et celle versée en trop par le gouvernement est retournée au gouvernement. Maintenant, ceci représente, évidemment, plusieurs millions de dollars qui vont permettre de donner d'autres services à la population et, dans la mesure où le Parti libéral est perpétuellement contre toute forme de compressions budgétaires, il sera absolument d'accord que, dans le cas présent, il s'agit d'une excellente mesure administrative, M. le Président.

Le Président: Question additionnelle, M. le député de Saint-Henri.

M. Hains: Quant aux régimes de retraite, M. le ministre, le gouvernement recevait les associations des cadres, le 11 mars 1982. Elles ont fait parvenir de nombreuses réclamations et aucune réponse, paraît-il, ne serait parvenue. Pourquoi le gouvernement n'a-t-il pas accepté le partage égal des coûts des régimes de retraite au lieu de réduire des bénéfices, comme le demandait l'association des directeurs d'école?

Le Président: M. le président du Conseil du trésor.

M. Bérubé: M. le Président, le régime de retraite dans le secteur public est régi essentiellement de trois façons différentes, soit par deux vieux régimes, qui sont le Régime de retraite des enseignants et le Régime de retraite des fonctionnaires, et un régime plus récent qui date de 1973, qui est maintenant commun à l'ensemble des nouveaux employés du secteur public - donc depuis 1973 - et regroupe près de 200 000 des quelque 300 000 employés du secteur public. Dans la mesure où ces régimes, comme nous l'avons expliqué - ce sont les deux régimes particuliers des fonctionnaires et des enseignants - avaient dégagé des déficits actuariels considérables, compte tenu que les sommes que nous devons injecter dans ces régimes, annuellement, simplement pour empêcher le déficit de croître, sont tellement considérables et impliquent, pour l'avenir, des engagements face aux générations à venir qui sont également très importants, il nous est apparu approprié de réduire la générosité des régimes de manière a en faire des régimes encore parmi les plus généreux au Canada, mais, néanmoins, d'apprendre à vivre à la mesure de nos moyens.

Si le député de Saint-Henri ne comprend pas ce qu'est une crise économique et l'obligation de vivre à la mesure de nos moyens, M. le Président, je n'y peux absolument rien, mais il s'agissait de réforme fondamentale.

M. Hains: Une dernière brève question.

Le Président: Dernière question additionnelle, M. le député de Saint-Henri.

M. Hains: Je vais y aller très rapidement. Depuis le 21 avril dernier, vous avez rencontré encore des cadres et, depuis ce temps-là, ils ont fait beaucoup de suggestions à propos du gel des salaires qui diminue d'environ 7%, paraît-il, le salaire des directeurs d'école actuellement. On vous demande ceci. Le ministre a-t-il réalisé que cette politique de deux poids deux mesures envers les directeurs d'école qui ne sont pas syndiqués est en train de miner vraiment leur carrière parce que, depuis ce temps-là, les professeurs ne sont vraiment plus intéressés à postuler pour ce poste supérieur?

Le Président: M. le président du Conseil du trésor.

M. Bérubé: Non, M. le Président, je ne partage pas l'analyse qui est faite. Dans le cas des directeurs d'école, le gel des salaires pour les directeurs qui sont rémunérés à 37 000 $ et plus est identique au gel en vigueur dans l'ensemble des secteurs public et parapublic et, d'ailleurs, identique à ce que les médecins ont accepté comme gel, un gel de leur rémunération d'une année complète. Ils n'ont eu une augmentation que pour une année et non pas l'autre année. Par conséquent, dans l'ensemble du secteur public, les employés bénéficiant d'un salaire de 37 000 $ à 40 000 $ et plus ont vu leur salaire gelé pour cette année qui commence, soit à partir de juillet 1982.

Dans le cas des directeurs d'école, la règle s'applique également et ils ont connu un gel. La situation que dénonce le député de Saint-Henri est liée à un autre problème qui est l'écart existant entre, par exemple, les directeurs d'école, certains professionnels et certains enseignants qui sont rémunérés sauvent à des salaires supérieurs, ou du moins très voisins, aux salaires de directeurs d'école.

Or, c'est un problème qui est passablement universel, M. le Président, dans la mesure où la rémunération pour les professionnels au gouvernement et également pour les enseignants est telle que les cadres inférieurs se retrouvent souvent avec des salaires qui sont moindres ou à peine supérieurs aux salaires des employés qu'ils dirigent. C'est donc un problème que nous avons de distorsion des échelles salariales liée au fait que les salaires de nos professionnels sont probablement complètement hors marché et non seulement probablement, mais évidemment hors marché. Par conséquent, il y avait un redressement à effectuer et ce redressement, M. le Président, est en cours.

Le Président: Question principale, Mme la députée de Dorion.

Les augmentations salariales dans les cabinets ministériels

Mme Lachapelle: M. le Président, ma question s'adresse aussi au ministre délégué à l'Administration et président du Conseil du trésor.

Le premier ministre a annoncé, il y a quelque temps, une décision de principe

quant au gel modulé des salaires du personnel de cabinet selon les paramètres de la proportion gouvernementale faite aux centrales syndicales en avril dernier.

Ma question est la suivante: Qu'en est-il exactement des augmentations salariales dans les cabinets pour 1982-1983 et qu'arrive-t-il aux masses salariales des cabinets?

Le Président: M. le président du Conseil du trésor.

M. Bérubé: M. le Président, c'est une problème analogue à celui que le député de Saint-Henri vient de souligner. Je pense d'abord qu'il faut bien comprendre que dans le cas du personnel de cabinet, il n'y a pas que les attachés politiques souvent rémunérés au même titre que des professionnels du gouvernement, mais il y a également tout le personnel de soutien, le personnel de secrétariat et les téléphonistes qui relèvent des cabinets.

Donc, il y a un éventail très grand de salaires dans les cabinets ministériels. Il en va de même également pour le personnel politique engagé par le parti de l'Opposition. Il s'agissait de définir quelles seraient les augmentations de salaires acceptables pour les employés des cabinets politiques. Je dois dire, M. le Président, qu'on aurait peut-être dû vous poser la question puisque vous présidez le comité de régie interne. Il reste que le gouvernement a demandé au comité de régie interne, et cela a été accepté, que s'applique comme politique de rémunération, la proposition que nous avions faite aux employés de l'État au 15 avril dernier, c'est-à-dire que dans le cas des employés de cabinet, les employés politiques en bas d'échelle, c'est-à-dire rémunérés au salaire d'à peu près 13 000 $ par année, soit 7,20 $ l'heure, le salaire sera indexé au 1er juillet pour protéger entièrement les employés contre l'érosion de leur pouvoir d'achat. Il en ira de même au 31 décembre, alors qu'une nouvelle augmentation prévaudra, ce qui veut dire qu'en juillet, les employés des cabinets rémunérés au salaire le plus bas, c'est-à-dire 13 000 $, recevront 8,65% d'augmentation. Au 31 décembre, ils recevront 2,8% d'augmentation. Cependant, au fur et à mesure que le salaire croît, l'augmentation de salaire diminue, c'est-à-dire que quelqu'un qui est situé à mi-chemin dans l'échelle salariale, soit un salarié moyen qui gagnerait environ 22 000 $, soit 12 $ l'heure, n'aurait que 4,5% à peu près d'augmentation le 1er juillet et environ 1,5% le 31 décembre.

Quant à un employé qui gagnerait 37 000 $ et plus, il aurait environ 1% d'augmentation au 1er juillet et 0,4% le 31 décembre. Quant au salarié supérieur, il n'aurait absolument aucune autre augmentation de salaire. Donc, tous les employés recevant plus de 37 000 $ de salaire verraient leur salaire complètement gelé comme le cas des cadres qu'on vient de soulever.

Il faut souligner que cette proposition m'apparaît éminemment juste et équitable dans la mesure où les employés qui travaillent dans nos cabinets à bas salaire verront leur pouvoir d'achat complètement protégé contre l'érosion causée par l'accroissement du coût de la vie.

Soulignons également que cette proposition que nous avons faite à l'ensemble des employés du secteur public nous apparaît véritablement la plus équitable.

Le Président: Merci. Question principale, M. le député de Pontiac.

M. Middlemiss: Merci, M. le Président. Ma question s'adresse au ministre de l'Éducation. Je vois qu'il n'est pas ici, est-ce qu'on pourrait...

M. Bertrand: II est ici, M. le Président, il ne devrait pas tarder.

Une voix: II se cache.

Le Président: M. le député de Mont-Royal.

M. le député de Pontiac.

M. Ciaccia: Je ne pourrai pas poser ma question...

M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: Ma question s'adresse au ministre de l'Habitation...

Le Président: Excusez-moi. Pontiac et Mont-Royal, Mont-Royal à Pontiac. M. le député de Pontiac.

Le campus Héritage

M. Middlemiss: Merci de nouveau, M. le Président. On sait déjà que ma question s'adresse au ministre de l'Education. Est-ce qu'il pourrait nous énumérer les motifs réels qui l'ont amené à faire volte-face dans le dossier du campus Héritage, le 11 juin dernier, compte tenu que le ministre avait indiqué le 23 mars 1981, en pleine campagne électorale, qu'il acquiesçait à la demande du conseil d'administration du cégep de l'Outaouais de transférer l'administration du campus Héritage au collège Champlain? Cette décision de maintenir le lien de dépendance au cégep de l'Outaouais, plutôt qu'à une affiliation au collège Champlain, est une atteinte à l'autonomie du campus Héritage ainsi qu'à la communauté anglophone de l'Outaouais et est d'autant plus douteuse, surtout lorsqu'on regarde les

résultats du référendum du Parti québécois en janvier et février derniers. Permettez-moi de vous rappeler que 95% des répondants, lors de ce référendum, s'étaient prononcés pour la question suivante: "Que le parti réaffirme son respect et son ouverture à l'endroit de tous les Québécois et de toutes les Québécoises, quelle que soit leur origine ethnique ou culturelle et, notamment, par la reconnaissance du droit de la minorité anglophone à ses établissements essentiels, scolaires et autres." (11 h 40)

Le Président: M. le ministre de l'Éducation.

M. Laurin: J'espère que le député ne me conseille pas de rattacher un campus collégial, qui compte seulement 500 étudiants, donc, qui n'a pas la taille pour devenir un cégep, à un siège social situé à près de 250 kilomètres de ce campus régional. Ce siège social, qui administre déjà trois campus de niveau collégial éjarrés aux quatre coins du Québec, dont un à Québec, un à Saint-Lambert et un autre dans la région de l'Estrie a beaucoup à faire, certains diraient trop à faire, d'administrer des campus régionaux déjà très dispersés qui ont chacun leurs problèmes et dont le mode d'administration suscite de plus en plus de critiques au sein même des campus régionaux qui relèvent de lui.

Il me semble que ce serait une décision administrative aberrante que d'ajouter aux problèmes que connaît déjà le siège social du collège de Champlain pour administrer ces campus. Si on devait y ajouter un quatrième campus, avec tous les problèmes additionnels que cela causerait, je pense qu'on ne ferait qu'ajouter aux problèmes, ce qui se solderait inévitablement par une moins bonne administration.

Une autre raison qui justifie la décision que nous venons de prendre est la suivante: elle s'appuie sur le rapport d'étude que j'ai demandé à M. Caldwell et à deux assistants. Ce rapport Caldwell retient deux principes fondamentaux. Le premier principe fondamental, c'est qu'il faut accorder au campus de l'Outaouais une plus grande autonomie car, même s'il n'y a que 500 étudiants, le campus a quand même atteint une certaine taille. En vue du maintien et du développement des caractéristiques culturelles et linguistiques de cet enseignement, il importe de lui accorder une plus grande autonomie.

Or, la décision que je viens de prendre comporte une autonomie marquée pour le campus Héritage. Par exemple, nous allons aménager très bientôt une nouvelle annexe à ce campus, au coût de 1 600 000 $, qui procurera des espaces, des locaux, des équipements additionnels. Nous accordons au campus Héritage une représentation directe au sein du cégep de l'Outaouais dont il relève. Nous lui accordons une très grande autonomie sur le plan des relations de travail, sur le plan de la pédagogie. Donc, on peut dire qu'avec le nouveau régime le campus régional jouira d'une autonomie de près de 80%, ce qui est parfaitement compatible avec la résolution du Parti québécois qui veut que la minorité anglophone contrôle ses établissements.

Le Président: M. le ministre, en concluant, s'il vous plaît.

M. Laurin: Le deuxième principe... M. Garon: C'est important.

M. Bérubé: Le deuxième est plus important que le premier.

M. Laurin: ... du rapport Caldwell...

Le Président: M. le ministre, je comprends, mais c'est l'une des dernières périodes des questions. Plusieurs députés sont prêts à poser des questions et il ne reste que cinq minutes à la période des questions. Alors, s'il vous plaît.

M. Laurin: Le deuxième principe que retenait le rapport Caldwell était qu'il fallait insérer de plus en plus les communautés linguistiques anglophones dans le tissu social et culturel de la société québécoise. Il faut donc que le campus soit administré dans l'Outaouais, par l'Outaouais pour le développement de la société outaouaise. En ce sens, je pense que la décision que nous venons de prendre permettra au campus Héritage de l'Outaouais de s'insérer d'une façon plus marquée et significative dans le tissu social et culturel de l'Outaouais pour le plus grand bénéfice...

Le Président: M. le député de Pontiac.

M. Middlemiss: N'est-il pas...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Middlemiss: ... vrai, M. le ministre, que le rapport Caldwell avait recommandé l'affiliation au collège Champlain? N'est-il pas vrai, M. le ministre, que la décision vous a été édictée plutôt par des pressions d'organismes socio-culturels de la région qui craignent que le passage du campus Héritage sous l'administration anglophone n'entraîne des francophones à s'y inscrire puisque la loi 101 n'impose aucune restriction au niveau collégial et universitaire?

Le Président: M. le ministre, brièvement, s'il vous plaît.

M. Laurin: M. le Président, le rapport Caldwell n'a pas exclu une affiliation au cégep de l'Outaouais. Il pouvait, bien sûr, recommander...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Laurin: ... une affiliation au cégep Champlain, mais ceci constituait une modalité. Il y a longtemps que j'ai appris qu'il vaut mieux respecter les principes que les modalités, qui peuvent changer. En ce sens, la modalité du maintien du lien entre le cégep de l'Outaouais et le campus Héritage m'apparaît bien plus respectueuse de l'esprit du rapport Caldwell, beaucoup plus susceptible d'amener l'insertion de cette communauté linguistique dans le tissu de la société québécoise et en particulier de l'Outaouais.

Le Président: Merci. Question principale, M. le député de Mont-Royal.

Le logement des personnes âgées

M. Ciaccia: M. le Président, ma question s'adresse au ministre de l'Habitation au sujet du programme Logirente, programme d'aide financière aux personnes de 65 ans et plus. À une réponse de ma collègue la députée de L'Acadie, vous aviez indiqué l'augmentation du plafond de loyer admissible dans certains cas. Par exemple, un logement d'une personne seule a augmenté de 180 $ à 195 $. Le logement pour un couple, de 200 $ à 210 $. Vous avez laissé les chambreurs à 120 $. L'augmentation moyenne était approximativement de 8%. Est-ce que le ministre est prêt à accepter les recommandations du front commun Logirente pour augmenter le plafond pour les chambreurs à 145 $ et augmenter le logement pour un couple de 200 $ à 255 $? Ne serait-il pas plus équitable d'accepter ces recommandations du front commun Logirente spécialement en vue du fait que même la Régie du logement a annoncé cette année qu'elle accorderait des hausses de loyer de 10% à 20%, ce qui serait en accord avec les recommandations qui ont été faites par le front commun Logirente?

Le Président: M. le ministre de l'Habitation et de la Protection du consommateur.

M. Tardif: M. le Président, comme je l'ai déjà dit au député de L'Acadie, nous allons procéder à une révision des loyers plafonds au cours de l'été pour que ceux-ci soient révisés avant pour la date anniversaire du programme, soit le 1er octobre prochain. Est-ce que ce sera de l'ordre mentionné par le député de Mont-Royal? Je pense qu'en toute équité il faut reconnaître que, dans le cas des personnes vivant en chambre, il n'y a pas eu ajustement la dernière fois, de sorte que dans leur cas il se pourrait que le relèvement soit plus significatif que dans les deux autres. Tout ce que je puis dire, M. le Président, c'est que nous étudions présentement les recommandations du front commun Logirente; que ce programme qui a été mis sur pied en 1980 et qui est dans sa deuxième année d'existence a été bonifié une première fois; il le sera régulièrement. Nous allons essayer de nous ajuster justement sur la progression des loyers.

Nous savons, M. le Président, que le loyer moyen payé en 1981 - pour ceux qui à tout le moins ont fait des réclamations à Logirente - était de l'ordre de 150 $ pour les chambreurs, de 213 $ pour les personnes seules et de 231 $ pour les couples. Donc, M. le Président, si nous nous basons là-dessus, compte tenu du fait que c'est le revenu de l'année précédente qui est pris en compte, ce qui veut donc dire que la situation financière de la personne généralement retraitée dont la pension de vieillesse est indexée trimestriellement est meilleure que celle sur laquelle on s'appuie pour les fins de calcul. M. le Président, il m'apparaît que les chiffres cités par le député ne sont pas irréalistes et que c'est dans une fourchette autour de cela que nous allons nous retrouver au mois d'octobre. (11 h 50)

M. Ciaccia: Question additionnelle, M. le Président.

Le Président: Sans préambule, s'il vous plaît.

M. Ciaccia: Le front commun Logirente vous a fait des représentations à savoir que, si ce programme était bonifié, cela réduirait les pressions pour des demandes de HLM qui sont beaucoup plus dispendieuses. Il y a une autre recommandation et je demanderais au ministre s'il serait prêt à l'accepter: Vu qu'il y a trop de personnes âgées qui sont obligées de consacrer de 30% à 40% de leurs revenus à leur loyer et que leurs revenus sont trop limités pour consacrer un si haut pourcentage au loyer et vivre décemment, le ministre est-il prêt à accepter une autre recommandation, à savoir que l'allocation du logement soit calculée en considérant que les personnes âgées ne devraient pas consacrer plus de 25% de leurs revenus au logement, autrement dit, d'essayer de prendre les mêmes critères, grosso modo, pour les HLM, en termes de pourcentage de revenu, que ceux que vous prenez pour le programme Logirentes?

Le Président: M. le ministre.

M. Tardif: Non, M. le Président. Dans l'immédiat, ceci n'est pas envisagé. Il faut

rappeler une différence fondamentale entre le programme de HLM et celui du supplément au loyer. C'est que c'est ou bien l'État, ou bien une municipalité, ou bien un organisme sans but lucratif, ou une coop qui est propriétaire du logement, mais, dans tous les cas, il s'agit d'organismes sans but lucratif. Dans le cas du programme Logirente, les personnes peuvent louer un logement n'importe où et évidemment subir des hausses de loyer qui n'ont rien à faire avec les coûts de fonctionnement, mais qui peuvent être liées également à la recherche d'un profit. C'est peut-être normal, mais il y a un plafond. Dans toutes les provinces qui ont un programme d'allocation-logement - je pense à la Colombie britannique avec son programme SAFER, qui est l'équivalent de cela, c'est pour Shelter Aid for Elderly Residents qui est l'équivalent du programme Logirente - on retrouve les mêmes paramètres. Étant donné que la personne est libre d'aller d'un logement à l'autre et de se voir demander des augmentations, ce que nous ne voulons certainement pas, c'est que l'aide de l'État passe dans les poches du propriétaire et ne vienne pas aider véritablement le locataire. Il y a aura donc toujours un apport additionnel, un intérêt pour le locataire de s'assurer qu'il n'y a pas de demande abusive de loyer et qu'on ne retrouve pas ce phénomène. Donc, M. le Président, un réajustement du programme, mais certainement pas dans ce sens pour l'immédiat.

Le Président: Fin de la période des questions. Excusez-moi, M. le député de

Shefford, c'est la fin de la période des questions.

Une voix: Pourrais-je avoir le consentement, M. le Président...

Le Président: S'il vous plaît! On m'informe que le ministre des Affaires sociales aurait un complément de réponse à fournir à une question du député de Laurier. M. le ministre.

Places pour délinguants anglophones à Montréal

M. Johnson (Anjou): M. le Président, hier, le député de Laurier a posé une question touchant des recommandations qui viendraient du Conseil régional de la santé et des services sociaux du Montréal métropolitain en regard des places non sécuritaires pour jeunes délinquants anglophones dans cette région. En réponse précise à sa question, je dirai que je n'ai pas reçu de telles recommandations, ni quant aux places sécuritaires ni quant aux places non sécuritaires du conseil régional. Au ministère, on m'avise qu'il n'y a pas eu non plus de tel rapport ou de telles recommandations qui lui ont été transmises. Cependant, nous croyons savoir qu'effectivement le conseil régional s'apprêterait à nous faire des recommandations dans ces domaines. Donc, à ce stade-ci, il est parfaitement prématuré de se prononcer, étant donné que nous n'en sommes pas saisis.

Le Président: Mme la députée de L'Acadie, une courte question additionnelle.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, comme mon collègue de Laurier n'est pas ici, la seule réponse que je voudrais avoir du ministre est celle-ci: Confirme-t-il le fait qu'il y a un manque de places sécuritaires pour les jeunes anglophones du Québec et de la région de Montréal, en particulier? Confirme-t-il ce fait-là?

Le Président: M. le ministre.

M. Johnson (Anjou): Je peux confirmer le fait dans la région de Montréal proprement dite, le fait qu'il y a effectivement des difficultés en termes de ressources. Cependant, je peux également confirmer, dans le cas des ressources sécuritaires, que déjà, au ministère, avec notamment Cité des Prairies, nous avons fait en sorte d'aménager deux unités qui pourraient servir à la communauté anglophone et qu'un des établissements anglophones, tout en reconnaissant la valeur de ce qui a été fait dans la première unité, ne voudrait pas se servir de la deuxième unité de douze places et préférerait que nous fassions un aménagement nouveau ou un réaménagement des ressources existantes dans la communauté anglophone. En ce sens, si on regarde le nombre de places disponibles, de façon générale, on peut dire que, malgré la pression, sur l'île de Montréal, c'est adéquat. Il y a tout le problème à propos de la rive sud et du débordement sur Montréal, mais il y a effectivement un problème d'aménagement de ressources dans la mesure où on considère qu'il y a deux communautés, donc deux types d'établissements, alors qu'une des approches que nous aurions favorisée aurait été de reconnaître des unités anglophones et de faire les aménagements budgétaires nécessaires à l'intérieur des ressources existantes, notamment à la Cité des Prairies qui, on le sait, est un endroit de la communauté francophone.

Le Président: M. le ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme, en complément de réponse à une question du député de Brome-Missisquoi.

L'entreprise Vélan de Granby

M. Biron: M. le Président. La semaine dernière, le député de Brome-Missisquoi m'a posé une question concernant une entreprise qui, apparemment, ne ferait pas d'autres investissements au Québec à cause de la conjoncture économique du gouvernement du Québec. Il s'agit de l'entreprise Vélan, de Saint-Laurent et de Granby. Ce matin, le député de Shefford et moi avons pris le petit déjeuner avec M. Vélan et son fils. Nous avons fait le tour de ses appréhensions et de son entreprise. M. Vélan est d'abord très déçu de voir qu'une seule des lettres personnelles qu'il a adressées, soit celle à M. Boivin, le commissaire industriel libéral de Granby, a été publiée, alors qu'une autre copie de lettre qu'il avait adressée à M. Trudeau et qui est plus dure que la première n'a pas été publiée, blâmant le gouvernement fédéral de la conjoncture économique et du peu d'actions économiques que le gouvernement fédéral poserait. À tout événement, M. le Président, l'entreprise Vélan, il y a trois ans, avait 90 employés à Granby et en a maintenant 160. L'entreprise Vélan faisait 9 000 000 $ de chiffre d'affaires et en fait maintenant 28 000 000 $, à Granby. Cela veut dire que l'entreprise est très satisfaite de sa productivité et surtout de l'excellente collaboration que l'entreprise reçoit de ses travailleurs de la ville de Granby, du maire, en particulier, et du gouvernement du Québec.

M. Vélan m'a dit, ce matin, que, peu importe la situation politique du Québec, même dans un Québec souverain, il demeurerait au Québec et continuerait d'investir au Québec, parce qu'il a confiance dans les travailleurs et les travailleuses du Québec.

Des voix: Bravo!

M. Biron: Bien sûr, M. Vélan, comme d'ailleurs beaucoup de gens au Québec, s'inquiète de la bureaucratie, à la fois québécoise et fédérale et, là-dessus, il appuie le gouvernement dans les décisions que nous prenons pour essayer de dégraisser un peu notre machine. Mais je veux aussi dire au député de Brome-Missisquoi, que, ce matin, il y avait une lettre ouverte, dans la Voix de l'Est, de Granby, signée par le maire de Granby, qui déplore que son commissaire industriel ait fait publier une lettre personnelle qui lui était adressée pour des fins probablement politiques. M. Trépanier prend la défense du gouvernement du Québec en disant que ce n'est véritablement pas la faute du gouvernement du Québec s'il n'y a pas d'autres investissements.

À l'intention du député de Brome-Missisquoi et de cette Chambre, je dis que l'entreprise Vélan vend 90% de ses produits hors du Québec. Ce n'est certainement pas la conjoncture économique du Québec qui fait qu'elle ne fait pas de ventes ou qu'elle peut diminuer ses ventes, mais c'est à cause de la conjoncture mondiale et de la conjoncture canadienne.

Dans ce sens, M. Vélan m'a dit qu'aussitôt que la conjoncture se replacerait sur le plan mondial, particulièrement dans la robinetterie et dans la pétrochimie, il continuerait d'investir au Québec et particulièrement à Granby.

Le Président: Courte question additionnelle, M. le député de Brome-Missisquoi.

M. Paradis: La question que j'ai à poser au ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme est très précise. M. Vélan, dans une lettre du 12 mai 1982, qui a été reproduite dans le journal La Voix de l'Est, du samedi 12 juin 1982, disait: "Regardant un investissement très précis de..."

Le Président: M. le député de Brome-Missisquoi, il est de tradition, en période de complément de réponse, qu'on accorde qu'une courte question additionnelle sans préambule au député à qui est adressé le complément de réponse. S'il vous plaît!

M. Paradis: N'est-il pas vrai, le ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme, qu'on parlait, lors de ma question, d'un investissement de 5 000 000 $, de la création de cinquante emplois, que M. Vélan dit retarder à cause du climat socio-politique du Québec et du fait que le présent gouvernement n'est pas vraiment intéressé dans le développement industriel et donne préférence à ses batailles avec Ottawa? Vous a-t-il dit, ce matin, qu'il ferait l'investissement de 5 000 000 $ et qu'il créerait les cinquante emplois? (12 heures)

Le Président: M. le ministre.

M. Biron: Je crois que le député de Brome-Missisquoi se mêle un peu entre 50 000 000 $ et 5 000 000 $, il y a une différence importante. M. Vélan m'a dit que son investissement de 5 000 000 $, il le ferait à Granby aussitôt que la conjoncture mondiale - non pas la situation politique du Québec et du Canada - pourrait se replacer et qu'il pourrait réaliser des ventes à l'extérieur du Québec. Je vous rappelle qu'il vend déjà 90% de ses produits à l'extérieur du Québec. Cela veut dire que ses produits sont vraiment écoulés en fonction de la conjoncture mondiale. M. Vélan nous a assurés que si la conjoncture mondiale se replace, les investissements seront faits au Québec. Je répète que M. Vélan a confiance

au gouvernement du Québec et aux travailleurs et travailleuses d'ici.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le député de Shefford, à moins d'un consentement...

Des voix: Non.

Le Président: Défaut de consentement. Motions non annoncées, M. le député de Vachon.

M. Payne: M. le Président, selon la tradition, je demande le consentement unanime de la Chambre pour présenter la motion suivante: Que l'Assemblée nationale du Québec enregistre son plaisir d'apprendre la grande nouvelle venant de l'Angleterre, hier, au sujet de la naissance d'un fils à Diana, princesse du pays de Galles et à Charles, prince du pays de Galles.

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement? Est-ce qu'il y a consentement unanime?

Des voix: Non!

Le Président: Absence de consentement constatée.

M. le député de Pontiac.

M. Middlemiss. Merci, M. le Président.

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de Pontiac.

Référendum mondial sur le désarmement

M. Middlemiss: Merci, M. le Président. Je demande la permission à l'Assemblée que l'Assemblée nationale du Québec appuie l'idée de la tenue d'un référendum mondial administré par l'ONU sur la question du désarmement nucléaire et général.

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement? Y a-t-il consentement unanime?

Des voix: Oui, consentement.

Le Président: II y a consentement. M. le député de Pontiac.

M. Middlemiss: Merci, M. le Président. Réalisant que l'humanité est de plus en plus menacée d'une guerre mondiale nucléaire; considérant que, malgré trente ans de négociation, la course aux armements continue au rythme de 550 000 000 000 $ par année; constatant que l'Organisation des Nations Unies a déclaré que l'humanité fait face à deux choix, soit arrêter la course aux armements et procéder au désarmement ou faire face à l'annihilation; réalisant que la question du désarmement touche chaque individu qui ainsi dispose du droit fondamental de se prononcer sur le sujet; étant donné que les membres de l'ONU se sont mis d'accord sur le texte d'une résolution McCloy-Zorin donnant les principes du désarmement général et complet; attendu que 84 municipalités canadiennes ont appuyé l'idée de la tenue d'un référendum mondial administré par l'ONU sur une période de quelques années, permettant aux peuples du monde de voter pour le désarmement général et complet.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre des Communautés culturelles et de l'Immigration.

M. Godin: Au nom du parti ministériel, il me fait plaisir de m'associer à cette motion. J'aimerais citer la phrase du poète Léo Ferré: À force de tant jouer avec la bombe, un jour il faudrait bien qu'elle tombe. Pour éviter que ça tombe, justement, je pense qu'un référendum pourrait nous donner une très bonne indication de la volonté des peuples que la prolifération nucléaire cesse.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Cette motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté. M. le leder de l'Opposition.

Félicitations à trois vétérans de l'Assemblée nationale

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, qu'il me soit permis de demander le consentement unanime de cette Chambre pour présenter une motion de félicitations et de meilleurs voeux à l'endroit de deux de nos collègues, le député de Saint-Louis et le député d'Orford, qui célèbrent aujourd'hui, le 22 juin, le 22e anniversaire de leur présence en cette Assemblée.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader adjoint du gouvernement.

Une voix: C'est quasiment tous des vieux partis...

M. Levesque (Bonaventure): ...

Le Vice-Président (M. Jolivet): Excusez-moi. M. le leader de l'Opposition.

M. Levesque (Bonaventure): M. le

Président, je voudrais, au nom de notre formation politique...

Le Vice-Président (M. Jolivet): Un instant, s'il vous plaît! Comme il y a consentement, M. le leader de l'Opposition.

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, je voudrais, au nom de notre formation politique, me faire l'interprète de tous nos collègues et je suis convaincu, par les applaudissements qui sont venus de toutes parts, que je me fais également l'interprète de tous les députés de l'Assemblée nationale pour formuler nos meilleurs voeux à nos deux collègues qui ont eu cette persévérance de rester aussi longtemps en cette Assemblée. Je voudrais, en particulier, féliciter leurs électeurs et leurs électrices de leur avoir permis de dépasser le cap des 20 ans et, maintenant, d'être rendus à 22 ans.

Le 22 juin, il est arrivé que nous ayons terminé nos travaux ou encore il est arrivé également, pas tellement souvent, que cette date ou ce jour soit un samedi ou un dimanche, alors nous n'avons pas eu l'occasion de le souligner. Je suis heureux qu'en ce 22 juin nous soyons tous ensemble ici pour rendre un hommage et un témoignage bien mérités à l'endroit de ces deux excellents députés.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Fréchette: M. le Président, vous allez comprendre que c'est sans aucune espèce de réserve que je m'associe et que j'associe ma formation politique aux félicitations qui viennent d'être adressées au député de Saint-Louis et au député d'Orford.

Je le fais avec d'autant plus de plaisir, M. le Président, que, de 1966 à 1970, nous avons eu l'occasion de siéger ensemble ici dans le même Parlement, sauf qu'ils ont été plus persévérants que celui qui vous parle et qu'ils n'ont pas interrompu cette brillante carrière politique.

M. le Président, je résumerai le fond de ma pensée en disant tout simplement ceci. Voici deux hommes politiques qui, bien sûr, ont des adversaires dans cette vie tourmentée, mais, quant à moi - je pense que c'est la même chose pour tous les membres de cette Chambre - je ne leur connais pas d'ennemi.

M. le Président, je ne sais pas si cela devrait prendre la forme d'un amendement à la motion du leader de l'Opposition ou si cela peut se limiter à un simple commentaire, mais il est un autre homme politique au Québec qui, le 22 juin 1960, a également été élu député, sauf que, quant à lui, sa carrière a été momentanément interrompue pendant quelques années, mais il est revenu en 1976. Ayant été élu député du comté de Laurier en 1960, si mon souvenir est fidèle, il a fait cette période de 1960 à 1970 et, en 1976, il est revenu à titre de député de Taillon et premier ministre du Québec.

M. le Président, je pense que, sous forme d'amendement, on devrait aussi faire en sorte que ces félicitations soient également transmises au premier ministre du Québec.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Saint-Louis.

M. Blank: Étant donné que notre règlement nous donne le droit de faire un sous-amendement, puisque le 20 juin 1982 était un dimanche, je ne veux pas qu'on oublie que, dimanche dernier, le 20 juin, c'était le 26e anniversaire de l'élection du député de Bonaventure.

Le Vice-Président (M. Jolivet): La motion amendée... Oh! M. le député d'Orford.

M. Vaillancourt (Orford): M. le Président, je ne veux pas faire un débat, mais je voudrais tout simplement profiter de l'occasion pour remercier mes collègues de leur motion nous félicitant pour nos 22 ans de vie politique. Si, après 22 ans, je suis ici aujourd'hui, c'est grâce à la population de mon comté qui m'a élu à sept élections consécutives. Je tiens aussi à remercier mon épouse qui a été très patiente et qui m'a permis de servir la population, comme je l'ai fait au cours des 22 dernières années. J'ai toujours eu le grand plaisir de desservir une population comme celle du comté d'Orford qui m'a toujours été très agréable. Je pense que si j'ai eu la patience de continuer pendant 22 ans, c'est parce que j'ai été bien servi par la population de mon comté. (12 h 10)

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Saint-Louis.

M. Blank: Avec la permission de la Chambre je voudrais dire quelques mots. I too would like to thank my electors for sending me here seven times. I also would like to thank my family and my wife for taking the strain and giving the support necessary for me to be here. In passing, I suppose there are many people responsible for me entering politics, but purhaps one person may be responsible for my election in 1960, which, out of 40 000 votes cast I won by less than 100 votes; I must say that the first person who got up and spoke for me in public was the honourable René Lévesque.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Est-ce que cette motion amendée et sous-amendée est adoptée? Adopté.

M. le député de Saint-Hyacinthe.

M. Dupré: Merci, M. le Président. Je demande le consentement de cette Chambre afin que cette Assemblée félicite M. Michel Tremblay et M. Mario Thivierge, deux fonctionnaires au ministère des

Communications du Québec, pour avoir obtenu le grand prix au gala de l'affiche d'art 1982 pour la créativité du concept Minute Ottawa! dénonçant le coup de force du gouvernement libéral de Pierre Elliott Trudeau, coup de force qui réduit sensiblement les pouvoirs de l'Assemblée nationale du Québec.

Des voix: Bravo! Bravo! Bravo!

Le Vice-Président (M. Jolivet): II n'y a malheureusement pas de consentement.

M. Picotte: M. le Président, je serais prêt à donner mon consentement dans un combat verbal...

Le Vice-Président (M. Jolivet):Enregistrement des noms sur les votes en suspens.

Qu'on appelle les députés.

Mise aux voix du rapport de la commission qui a étudié

le projet de loi no 37, des articles, du titre, etc.

(12 h 16)

Le Vice-Président (M. Jolivet): À l'ordre!

Les votes que nous avons à prendre portent sur la loi 37, Loi regroupant les villes de Baie-Comeau et de Hauterive, et pour l'acceptation du rapport. Je dois vous faire remarquer qu'à la suite d'une décision de cette Assemblée, le vote est pris rétroactivement à la séance précédente, tel qu'entendu, selon l'ordre de la Chambre qui avait été donné.

Il y a trois votes. Je vais les donner l'un après l'autre. C'est un vote en bloc sur tous les amendements qui ont été proposés. Vous avez ensuite, comme deuxième vote, les articles du projet de loi qui ont été amendés, ceux qui ne sont pas amendés, le titre, le préambule, les annexes. Le troisième vote va porter sur l'acceptation du rapport tel qu'amendé. Ces trois votes sont rétroactifs, tel que l'ordre de la Chambre l'a désigné.

Je porte donc à votre attention le premier vote qui est le vote en bloc sur les amendements.

Que ceux et celles qui sont pour veuillent bien se lever, s'il vous plaît!

Le Secrétaire ajoint: Mme Marois, MM. Bédard, Parizeau, Laurin, Johnson (Anjou), Bérubé, Landry, Gendron, Lessard, Marcoux, Biron, Godin, Rancourt, Richard, Clair, Chevrette, Fréchette, Marois, Garon, Tardif, Léonard, Martel, Baril (Arthabaska), de Belleval, Ouellette, Mme Lachapelle, MM. Brassard, Dean, Paquette, Gagnon, Guay, Dussault, Desbiens, Fallu, Bordeleau, Marquis, Charbonneau, Boucher, Mme Harel, MM. Beauséjour, Champagne, Perron, Blouin, Gauthier, Gravel, Laplante, Brouillet, Rochefort, Baril (Rouyn-Noranda-Témiscaminque), LeMay, Payne, Beaumier, Tremblay, Lafrenière, Paré, Lachance, Dupré, Bisaillon.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Que ceux et celles qui sont contre veuillent bien se lever, s'il vous plaît!

Le Secrétaire adjoint: MM. Ryan, Levesque (Bonaventure), O'Gallagher, Ciaccia, Mme Lavoie-Roux, MM. Mailloux, Vaillancourt (Orford), Mme Bacon, MM. Marx, Bélanger, Blank, Mathieu, Assad, Vallières, Mme Dougherty, MM. Lincoln, Paradis, Johnson (Vaudreuil-Soulanges), Picotte, Rocheleau, Bissonnet, Polak, Cusano, Dubois, Sirros, Dauphin, French, Doyon, Kehoe, Middlemiss, Hains, Leduc (Saint-Laurent), Scowen.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Y a-t-il consentement? Consentement.

Le Secrétaire: Pour: 58

Contre: 33

(12 h 20)

Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté.

Le deuxième vote, c'est sur les articles du projet de loi d'abord amendés, ensuite non amendés, le titre, le préambule et les annexes. Même vote?

Des voix: Même vote.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Même vote. Adopté.

Le troisième vote, sur le rapport tel qu'amendé.

Des voix: Même vote.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Même vote. Adopté.

Les avis à la Chambre. M. le leader adjoint, il n'y en a pas.

M. Fréchette: M. le Président, vous aurez noté qu'au chapitre des motions ou des avis à la Chambre tout est immaculé. Il n'y a donc aucune commission qui siège aujourd'hui. Il n'y a pas d'avis, non plus, en conséquence de ce que je viens de dire. Par ailleurs, je crois l'occasion utile, M. le Président, d'informer les membres de cette

Chambre qu'au cours de l'été certaines commissions seront appelées à siéger à des dates qui seront déterminées. Les membres de ces différentes commissions seront informés de ces dates dans les délais prévus par nos règlements.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Les affaires du jour. M. le leader adjoint.

M. Fréchette: M. le Président, je vous prierais d'appeler l'article 20 du feuilleton, s'il vous plaît!

Prise en considération

du rapport de la commission

qui a étudié le projet de loi no 67

Le Vice-Président (M. Jolivet): Prise en considération du rapport de la commission permanente de la justice qui a étudié le projet de loi no 67, Loi modifiant la Loi sur les poursuites sommaires, le Code de procédure civile et d'autres dispositions législatives. Est-ce que le rapport est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté. M. le leader adjoint.

M. Fréchette: Je crois comprendre, M. le Président, qu'il pourrait peut-être y avoir consentement pour que nous puissions dès maintenant procéder à l'adoption de la motion de troisième lecture de ce même projet de loi.

Troisième lecture

Le Vice-Président (M. Jolivet): II y a consentement. Donc, la troisième lecture du projet de loi no 67 est adoptée. M. le leader adjoint.

M. Fréchette: Article 21 du feuilleton, M. le Président.

Prise en considération

du rapport de la commission

qui a étudié le projet de loi no 70

Le Vice-Président (M. Jolivet): Prise en considération du rapport de la commission des finances et des comptes publics qui a étudié le projet de loi no 70, Loi concernant la rémunération dans le secteur public. Le rapport est-il adopté?

Des voix: Adopté. Une voix: Sur division.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté sur division.

M. Fréchette: M. le Président, je vous prierais maintenant de référer à la page 9 du feuilleton.

Le Vice-Président (M. Jolivet): La troisième lecture du projet de loi, est-ce à une séance subséquente?

M. Fréchette: À une séance subséquente.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Même séance ou séance subséquente.

M. Levesque (Bonaventure): Ah, oui.

M. Fréchette: M. le Président, à la page 9 du feuilleton, au chapitre des projets de loi inscrits au nom du gouvernement et déférés pour étude à des commissions après la deuxième lecture, si je pouvais obtenir le consentement pour que nous puissions dès maintenant procéder à la prise en considération du rapport de la commission de la présidence du conseil et de la constitution quant au projet de loi no 66 sur le financement des partis politiques, nous serions prêts à en disposer.

Prise en considération

du rapport de la commission

qui a étudié le projet de loi no 66

Le Vice-Président (M. Jolivet): II y a consentement. Prise en considération du rapport du projet de loi no 66, Loi modifiant certaines dispositions législatives en matière de financement des partis politiques et en matière d'élections municipales. Adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté.

M. Fréchette: Troisième lecture, M. le Président?

M. Levesque (Bonaventure): Non.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Même séance ou séance subséquente.

M. Fréchette: Ce serait la même procédure, si on y consentait, M. le Président, quant au projet de loi no 65. Consentement pour la prise en considération du rapport dès maintenant?

Le Vice-Président (M. Jolivet): Y a-t-il consentement?

Des voix: Consentement.

Prise en considération

du rapport de la commission

qui a étudié le projet de loi no 65

Le Vice-Président (M. Jolivet): Consentement. Prise en considération du rapport sur le projet de loi no 65, Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels. Adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté. Troisième lecture, même séance ou séance subséquente.

M. Fréchette: C'est le même processus, M. le Président, quant au projet de loi no 56, même consentement.

Prise en considération

du rapport de la commission

qui a étudié le projet de loi no 56

Le Vice-Président (M. Jolivet): Même consentement. Prise en considération du rapport du projet de loi no 56, Loi sur les coopératives. Adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté.

M. Fréchette: M. le Président, je pense qu'on pourrait maintenant également s'entendre pour la troisième lecture, sauf qu'il y a cependant un amendement. Je pense que Mme la députée de Chomedey a été saisie de la nature de l'amendement. Je ne sais pas si elle a des commentaires à formuler ou si elle est d'accord avec la nature de l'amendement.

Une voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Jolivet): II y a consentement.

Troisième lecture

M. Fréchette: II faudrait faire motion, M. le Président, pour que les écritures soient faites en conséquence et qu'ensuite on procède à l'adoption de la troisième lecture.

M. le Président, essentiellement, l'amendement, c'est pour permettre que le recours collectif qui est prévu au Code de procédure civile s'applique dans cette loi également. C'est un ajout qui a été fait pour permettre cette possibilité.

Le Vice-Président (M. Jolivet): II y a donc consentement pour que les écritures soient faites, que l'amendement soit adopté et que la troisième lecture soit adoptée avec l'amendement?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté. M. le leader adjoint.

M. Fréchette: M. le Président, je vous prierais de revenir, s'il vous plaît, à l'article 4 du feuilleton d'aujourd'hui.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Est-ce que la troisième lecture du projet de loi no 68, Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant les régimes de retraite, est adoptée?

M. le leader de l'Opposition.

M. Levesque (Bonaventure): Je crois, M. le Président, que ce projet de loi pourrait être discuté en même temps que le projet de loi no 70 en troisième lecture. Comme nous allons sans doute demander un vote enregistré, même si nous n'intervenons pas, nous sommes prêts à dire que nous nous opposons à la troisième lecture comme à toutes les autres lectures du projet de loi no 68. Cependant, il faudrait s'entendre pour que nous disposions des projets de loi nos 68 et 70 par un vote enregistré.

Le Vice-Président (M- Jolivet): M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Fréchette: Je voudrais être sûr d'avoir bien compris le leader de l'Opposition. Est-ce que je suis justifié de croire qu'il serait disposé qu'on adopte la troisième lecture du projet de loi no 68 sur division, quitte à faire le débat, qui était ici prévu, sur le projet de loi no 70?

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader de l'Opposition.

M. Levesque (Bonaventure): Je pense que c'est plus que sur division. Nous voulons enregistrer notre vote sur le projet de loi no 68 en même temps que sur le projet de loi no 70. On pourrait avoir le même vote, si vous voulez, mais je pense que, dans les deux cas, nous aimerions avoir un vote enregistré.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Nous sommes donc mieux de reporter la décision concernant le projet de loi no 68 en même temps que le projet de loi no 70?

M. Fréchette: Voilà, oui.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Fréchette: L'article 6, M. le Président.

Projet de loi no 72 Troisième lecture

Le Vice-Président (M. Jolivet): J'appelle la troisième lecture du projet de loi no 72, Loi modifiant le Code du travail, le Code de procédure civile et d'autres dispositions législatives. Cette troisième lecture est-elle adoptée?

M. Marois: M. le Président...

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. Pierre Marois

M. Marois: Nous en sommes rendus au terme de l'étude. C'est un projet de loi qui - je pense que tous et toutes l'admettront -touche un problème qui est à la fois complexe, mais, en même temps, il touche certainement une des choses les plus fondamentales dans une société, c'est-à-dire la primauté du droit des citoyens de bénéficier de tous les services jugés essentiels lorsque les travailleurs, lorsque les travailleuses exercent leur droit de grève, non seulement et, bien sûr, au premier chef, dans les services de santé et les services sociaux, mais également - ce qui est complètement nouveau par le présent projet de loi - dans les services publics, à partir du moment où certains services publics seraient nommément désignés par décret du gouvernement.

Nous avons passé près de 16 heures d'étude, de travail en commission parlementaire, aussi bien les parlementaires de l'Opposition que ceux de ce côté-ci de la Chambre, à étudier, à scruter à la loupe chacun des articles du projet de loi. Je voudrais, en passant, remercier très sincèrement mes collègues des deux côtés de la Chambre de leur coopération lors de l'étude article par article de ce projet de loi.

Un certain nombre d'amendements ont été adoptés, les uns suggérés par les membres de l'Opposition, les autres par les membres de ce côté-ci de la Chambre, tout ça dans le but de bonifier le projet de loi. Je ne vais pas reprendre tous ces amendements ici, mais je voudrais rappeler cependant un certain nombre d'amendements importants, notamment certains amendements qui concernent le fonctionnement du conseil des services essentiels, pour éviter que puissent se produire des problèmes de conflits d'intérêts. Plus fondamentalement, il y a un amendement qui concerne l'exercice même du droit de grève pour en resserrer, en civiliser encore davantage l'exercice dans le sens suivant.

Si tant est que le droit de grève sent le besoin de s'exercer, non seulement il ne pourra l'être sans que, au préalable, une entente ou une liste entre les parties ait été déposée en bonne et due forme, mais il faut que cela ait été fait dans un délai précis de 90 jours, dans le cas des services de santé et des services sociaux, et de sept jours, dans le cas des services publics, et dans un délai tel que le conseil des services essentiels ait le temps de procéder à l'évaluation de ces ententes ou de ces listes avant que soit acquis, toujours avant que soit acquis, le droit de grève, pour faire en sorte que la suffisance ou l'insuffisance, le cas échéant, puisse être évaluée de façon extrêmement serrée et que, en cas d'insuffisance, il soit possible au gouvernement d'assumer pleinement ses responsabilités, ce qui signifie clairement, dans le projet de loi, la suspension de l'exercice du droit de grève.

Si tant est que ces documents ne devaient pas être remis dans les délais prévus, par voie de conséquence, le droit de grève s'en trouverait retardé d'autant. (12 h 30)

Ces travaux, en commission parlementaire, nous ont permis aussi de peut-être encore faire davantage ressortir ce qui apparaissait déjà pourtant suffisamment clair. Si, des deux côtés de la Chambre, nous nous entendons sur les objectifs fondamentaux, c'est-à-dire d'assurer cette primauté, dans les faits, du droit des citoyens d'obtenir les services essentiels, nous divergeons sur les moyens à prendre pour y arriver.

L'Opposition est revenue et nous a proposé des amendements, dans le sens de ce qu'elle avait évoqué déjà, visant à introduire cette notion, dans notre droit et dans les faits, de l'abolition sélective du droit de grève dans certains établissements de santé à vocation unique, de même que dans des établissements, comme on dit dans le jargon, à vocation multiple, c'est-à-dire, par exemple, des hôpitaux où on retrouve à la fois des malades chroniques, des gens qui ont subi des interventions chirurgicales récentes, des patients psychiatriques, des services de gynécologie, des services d'urgence, etc.

Même si cette idée paraît extrêmement généreuse à première vue, nous avons eu à nouveau l'occasion d'expliquer pourquoi, à notre point de vue, elle paraît terriblement risquée et périlleuse. L'abolition du droit de grève n'a pas encore réussi à abolir la réalité même de la grève lorsque des salariés ont décidé de l'exercer. Certaines provinces en ont fait encore récemment la douloureuse expérience. Dans ces cas, aucun mécanisme de services essentiels n'étant prévu, on imagine facilement les jours d'angoisse qui sont vécus par les citoyens bénéficiaires pendant que dure la réalité d'une grève illégale.

De ce côté-ci de la Chambre, quant à

nous, nous n'avons pas choisi la voie spectaculaire, il faut le dire, de l'abolition, un peu, beaucoup, passionnément, sélective ou pas, du droit de grève. Nous avons préféré une approche qui nous paraît certes, à première vue, plus complexe. Les uns ont dit plus bureaucratique, plus lourde. Je ne crois pas. Elle demeure profondément, extrêmement souple, pouvant nous permettre d'agir avec efficacité, rapidement; c'est une approche qui demeure plus réaliste et que nous croyons aussi plus efficace.

Vous savez, M. le Président, l'espérance qu'il ne pleuvra pas en voyage ne vaudra jamais l'efficacité d'un imperméable qu'on apporte avec soi. Nous avons voulu faire en sorte que les bénéficiaires des soins de santé aient l'assurance de recevoir les soins auxquels ils ont droit. Tout en reconnaissant le droit des salariés de faire valoir leur point de vue en matière de relations du travail, nous balisons et nous limitons ce droit et surtout nous le subordonnons au droit des citoyens de recevoir les services essentiels.

On me permettra à nouveau de préciser la portée de certaines dispositions extrêmement importantes du présent projet de loi, plus spécialement en réponse à certaines allégations qui sont revenues à nouveau dans certains textes, notamment, qui ont été publiés.

Les uns ont affirmé que la formule des services essentiels avait été, jusqu'à présent, un échec. Je pense que cette affirmation doit être très nuancée. Les faits sont là pour en témoigner. Est-ce qu'il est encore nécessaire de rappeler que, dans un grand nombre de cas, des ententes sont intervenues et ont été respectées dans les établissements lors des dernières négociations? Nous voulons capitaliser sur l'acquis tout en raffinant cet acquis, en raffermissant la portée aussi des mécanismes déjà expérimentés.

En ce qui a trait aux services publics, est-ce qu'il est nécessaire de souligner à nouveau la tradition qui existe maintenant au Québec? De plus en plus, on la voit à l'occasion de certains conflits que la société vit présentement, la tradition en matière des services essentiels, que ce soit particulièrement dans le cas d'Hydro-Québec, plus près de nous, plus présent parmi nous, ou dans le cas du conflit qui perdure depuis déjà un bon moment chez Gaz Métropolitain. On a bon espoir - j'ouvre une parenthèse -que ce conflit puisse se régler dans les jours ou les semaines à venir. Cela dit, à Gaz Métropolitain, une entente est intervenue sur les services essentiels, qui est toujours respectée par les deux parties. Je n'ai pas encore reçu quelque plainte que ce soit de citoyens ou de citoyennes bénéficiant des services de Gaz Métropolitain. La liste des services essentiels sera maintenant soumise en plus aux exigences de ce qu'on appelle un protocole-cadre et cela va faciliter d'autant la conclusion d'entente entre les parties.

Dans le cas où on ne parviendrait pas à une entente, la liste présentée par la partie syndicale sera soumise - ce n'est plus la responsabilité ultime, comme c'était le cas par le passé - à l'examen, à l'étude, à l'évaluation du conseil qui pourra même la refuser s'il la juge insuffisante. Si une partie syndicale devait persister dans le maintien d'une liste qui soit jugée insuffisante, le rapport du conseil au ministre, dont le contenu sera rendu public pour que les citoyens soient pleinement informés, sans compter le pouvoir général d'information qui sera donné au conseil, ne pourrait qu'amener une suspension du droit de grève à cet endroit précis.

Dans certains cas, la liste des services essentiels, et on a eu l'occasion d'en discuter plus amplement, plus concrètement en commission parlementaire, pourra comprendre et devra même comprendre, tant c'est l'évidence même, et comme cela a été fait dans certains établissements durant les dernières rondes de négociation, la presque totalité des services, et de ce fait, la grève, si tant est qu'elle sente le besoin de s'exercer, ne pourra avoir autre chose qu'un caractère purement symbolique.

C'est particulièrement vrai pour les établissements où les malades chroniques sont entièrement dépendants. Le protocole-cadre devra prévoir le contenu de ce minimum exigible, minimum qui pourrait voisiner le maximum dans certains cas. La loi précise également, et il est important de le rappeler, que le gouvernement pourra ultimement modifier le contenu du protocole-cadre élaboré par le conseil.

Il est certain que notre pari repose sur l'idée que nous pouvons faire confiance au sens des responsabilités des personnes, salariés ou administreurs, mais un sens des responsabilités qui sera désormais surveillé de façon extrêmement serrée et étroite. Je demeure profondément convaincu qu'il est moins risqué pour tous de choisir cette voie. Présumer que les gens ne sont pas responsables et procéder par voie d'interdiction ne peut guère encourager une attitude de concertation entre les parties appelées à négocier.

La méfiance engendre la défiance et c'est par la porte de la défiance que passent toujours invariablement les abus. Il va sans dire que je souhaiterais, comme tous les Québécois et toutes les Québécoises, j'en suis convaincu, qu'une attitude de concertation remplace graduellement de plus en plus l'esprit d'affrontement systématique dont nous sommes témoins trop souvent dans le monde des relations du travail. Mais cet esprit ne peut malheureusement pas disparaître par l'effet magique d'une loi que pourrait adopter le législateur.

D'autres l'ont essayé avant nous sans succès. On ne peut pas forcer ou imposer la conscience sociale, on ne peut que l'inciter à devenir de plus en plus adulte et responsable. Nous allons faire tout ce qui est humainement possible poursuivant dans cette voie pour en favoriser l'éclosion en lui permettant de croître dans un cadre propice à son épanouissement. Et ce cadre, c'est ma conviction profonde, ne peut être que celui de la responsabilité sociale des individus et, encore une fois, une responsabilité sociale surveillée.

Le projet de loi qui est devant nous sur le maintien des services essentiels fait appel à ce sens des responsabilités, mais n'exclut pas la responsabilité ultime du gouvernement dans ce domaine, bien au contraire.

Nous osons croire qu'il peut y avoir progrès dans ce sens, mais, cependant, la confiance que nous avons dans le sens de l'humanité, des hommes et des femmes qui travaillent particulièrement dans les hôpitaux, dans certains établissements de santé, à titre de salarié, de médecin ou d'administrateur, ne doit jamais nous faire oublier que le bien-Être des malades doit être assuré en toute circonstance. (12 h 40)

C'est pourquoi j'ai tenu à ce que ce projet de loi contienne des dispositions incitant au respect des principes qu'il défend, tout en espérant que les sanctions prévues ne demeureront qu'incitatives et n'auront jamais à être utilisées. Je peux vous assurer que le gouvernement ne reculera pas devant ces responsabilités, s'il doit le faire. Je demeure profondément convaincu, et je sais que c'est une conviction partagée, en tout cas par les membres de l'Opposition qui ont travaillé avec nous en commission parlementaire, qu'aucune voie, de toute manière, n'offre de garantie absolue d'atteindre les buts que nous nous fixons tous. Nous avons choisi ce qui nous semble être la voie la plus réaliste, la plus susceptible d'offrir toutes les protections nécessaires aux malades, quelles que soient es éventualités. Encore une fois, ce n'était ,-ertes pas la voie la plus spectaculaire, mais je demeure convaincu qu'il est préférable de baliser, d'encadrer, de limiter l'exercice d'un droit plutôt que de l'abolir.

Le projet de loi qui est présentement devant nous traduit justement notre volonté de réaffirmer à sa juste valeur le droit prioritaire des bénéficiaires des services de santé à recevoir ces services et de faire en sorte que cela se traduise dans les faits. Voilà, M. le Président, l'essentiel des objectifs des voies et moyens qui sont contenus dans le présent projet de loi. C'est notre intention, dès que ce projet de loi sera adopté, de faire tout ce qui est humainement possible pour que les divers mécanismes qui y sont prévus et contenus soient mis en place dans les plus brefs délais. Merci.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Mme la députée de L'Acadie.

Mme Thérèse Lavoie-Roux

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, nous abordons maintenant le débat en troisième lecture du projet de loi no 72, qui modifie certaines dispositions du Code du travail et prévoit en particulier des mécanismes pour assurer le maintien des services essentiels en cas de grève. C'est probablement, au point de vue de la population, à moyen et à long terme, le projet de loi le plus important dont l'Assemblée nationale ait été saisie durant cette dernière session. Il y a peut-être d'autres projets de loi qui ont occupé un grand nombre d'heures de nos débats, mais celui-ci en a déjà occupé, comme le signalait le ministre, un nombre relativement important, mais ceci ne soustrait rien à l'importance fondamentale qu'il occupe, quant à la qualité de vie et à la protection des citoyens, c'est-à-dire la protection que l'on veut accorder aux citoyens.

M. le Président, le gouvernement a choisi de s'en rapporter à une structure essentiellement bureaucratique et technocratique pour tenter d'amoindrir les inconvénients des grèves, particulièrement dans le domaine de la santé. Pour notre part, nous avions déjà fait connaître notre position en ce qui a trait au maintien des services essentiels et nous proposions une restriction de l'exercice du droit de grève dans certains domaines, en particulier en ce qui touche les hôpitaux de soins prolongés où se trouvent les chroniques, comme on les appelle, les hôpitaux de soins prolongés où se trouvent les malades psychiatriques, les centres d'accueil qui hébergent, soit des personnes âgées, des personnes handicapées ou des enfants handicapés en besoin de protection, en fait, une catégorie d'établissements qui, du point de vue des services qu'ils rendent, sont des établissements extrêmement fragiles, compte tenu du type de services et de la population qu'ils desservent. Cela a été de bonne guerre pour le gouvernement. J'entendais le ministre dire à la fin, et c'est le droit du gouvernement de choisir cette voie, je ne le conteste pas: Écoutez, nous privilégions une voie moins spectaculaire, mais que nous jugeons efficace, sans aucun doute, puisque c'est la voie que le gouvernement a choisie. Dans notre esprit à nous, il ne s'agissait pas d'une voie spectaculaire, mais d'une voie réaliste et d'une voie responsable. La population de tous les milieux et même ceux qui oeuvrent comme travailleurs ou professionnels à l'intérieur de ces établissements, dans des sondages répétés, ont indiqué qu'ils trouvaient que l'exercice du droit de grève dans ces secteurs

particulièrement névralgiques devrait être aboli. Dans le moment, je ne parle pas de ce qu'on appelle communément les hôpitaux de soins aigus ou les hôpitaux généraux, comme on en parlait il y a quelques années; je parle strictement d'une catégorie d'établissements où la population est captive, dans ce sens que ces personnes doivent y vivre 24 heures par jour, sept jours par semaine, douze mois par année, et qu'elles n'ont pas d'alternative quand surgissent les conflits dans ces milieux.

Le gouvernement nous apporte ceci comme argument à la proposition que nous lui faisions - et qui d'ailleurs, je dois le dire a mon grand regret, n'a même pas été jugée un amendement recevable - de soustraire au mécanisme qu'il prévoyait pour le maintien des services essentiels ce type d'établissement: Nous préférons faire appel à la responsabilité des travailleurs et des travailleuses, alors que vous allez probablement laisser à découvert ces patients ou cette clientèle qui se trouvent à l'intérieur de ces institutions.

Je voudrais bien vous faire remarquer que nous aussi faisons appel au même sens des responsabilités des travailleurs et des travailleuses. Ils peuvent obéir à des lois, respecter la loi, ils sont des citoyens à part entière, comme tous les autres. Ils peuvent exercer un jugement responsable comme tous les autres. De la même façon que le ministre présume qu'ils vont exercer ces responsabilités dans le sens d'une restriction de leur droit de grève, c'est-à-dire une restriction dans le sens qu'ils devront assurer des services essentiels, il fait appel à la responsabilité des travailleurs et des travailleuses, de la même façon nous croyons que ces mêmes travailleurs et travailleuses, si une loi légitimement votée par l'Assemblée nationale vient leur faire la proposition que nous mettions de l'avant, peuvent exercer ce même sens de responsabilités à l'égard de cette loi.

Je pense que le fond du problème, dans l'approche différente que le gouvernement a décidé d'adopter et la nôtre, c'est que le gouvernement n'est pas encore convaincu. Pourtant, les exemples sont nombreux. Il ne s'agit pas de dire que partout, dans toutes les institutions, c'est le chaos, ce sont des abus; ce n'est pas le cas. Mais les moindres abus qui s'exercent à l'égard de personnes âgées qui, au plan physique, sont totalement dépendantes, souvent au plan psychologique sont totalement dépendantes, les moindres abus, ne serait-ce que dans un seul établissement, les répercussions ne s'en mesurent pas. Nous ne pouvons pas les mesurer, ni le ministre ni moi, mais on sait qu'elles sont considérables et qu'elles mettent ces citoyens dans un état d'insécurité très pénible pour eux.

D'ailleurs, il faudrait peut-être se rappeler le témoignage de la coalition des malades devant la commission parlementaire qui étudiait tous ces problèmes du maintien des services essentiels. Il reste que ceux qui sont touchés sont les membres des différents organismes représentés soit par le Comité provincial des malades ou d'autres comités de malades ou comités de bénéficiaires à l'intérieur des institutions. Ces gens ont quand même, avec beaucoup de sobriété - il faut le dire - mais aussi avec beaucoup de conviction, rappelé à tous les membres de l'Assemblée nationale qui siégeaient à cette commission que nous sommes incapables, à moins que nous soyons des patients à l'intérieur de ces institutions-là, de vraiment mesurer toute l'insécurité que des situations de grève même appréhendée créent pour eux. (12 h 50)

Je dois dire que, sur un point particulier, le ministre a apporté un amendement qui avait d'ailleurs été suggéré par l'Association des hôpitaux du Québec, à l'effet de resserrer ou un peu mieux baliser l'exercice du droit de grève. Je pense que c'est une amélioration, dans le sens qu'on ne pourra pas aller en grève à moins que l'entente ait été ratifiée par le conseil des services essentiels ou, dans le cas où le conseil jugerait que ces services ne sont pas suffisants, que le gouvernement soit intervenu pour dire que le droit de grève ne peut pas s'exercer. Mais, vous vous trouverez alors dans la même situation où vous prétendez que nous pourrions nous trouver et où nous disons que le droit de grève ne pourrait pas être exercé. Dans ce cas en effet, est-ce que les travailleurs ne décideront pas, malgré le décret ou l'arrêté ministériel du gouvernement, d'exercer leur droit de grève?

On sait fort bien qu'il y a deux autres points extrêmement difficiles ou qui peuvent surgir dans le temps où les travailleurs pourront exercer des pressions sur l'établissement. Il y a d'abord le fait - et cela a été reconnu par tout le monde - que, quand on sait que le droit de grève doit s'exercer, ce n'est pas la journée où le droit de grève commence à s'exercer que les problèmes se créent. Peut-être que, cette journée-là, les services essentiels seront fort bien maintenus, mais c'est toute la période préparatoire qui dure deux, trois à quatre mois, et même davantage, selon la longueur des négociations - on acquiert le droit de grève, on décide de l'exercer, on en remet l'exercice, on redécide de l'exercer - qui est difficile. C'est que, durant toute cette période d'attente, on sait fort bien que le climat est très difficile et la tension très grande à l'intérieur des établissements. Le sens de notre proposition, c'était d'éviter à ces institutions, à leur personnel et particulièrement aux bénéficiaires ce climat d'incertitude, d'insécurité, de tension qui n'en

finit plus. C'est là un premier argument. Même si on délimite tout dans un cadre très précis, vous n'échapperez pas à cette période de préparation à la grève qui est exercée, remise, répétée, vous le savez bien, M. le ministre.

Il y a un deuxième point où il peut se présenter des problèmes graves, c'est que, tout au cours de l'exercice d'un droit de grève, on doit réévaluer d'un jour à l'autre la liste des services essentiels, parce que les besoins diffèrent d'une journée à l'autre, selon le type de patient, par exemple, qu'on accueille, etc. Même à ce moment-là, dans cette remise à jour de la liste des services essentiels, il se fait un marchandage. À ce moment-là, les choses se précipitent. Ce qui était bon une journée ne l'est plus le lendemain. Cela vous crée un carcan bureaucratique, si je peux dire, un organisme technocratique qui intervient pour juger, refaire appel au gouvernement, et tout intervient pour que le gouvernement porte à son tour un nouveau jugement, décide de retirer ou de ne pas retirer le droit de grève. Tout cela est dans une séquence extrêmement rapide où les gens qui sont touchés ne peuvent pas attendre 48 heures, 72 heures, etc.

Ce point du maintien des services essentiels, je pense qu'hier nous en avons eu une très bonne démonstration dans le cas de la loi spéciale que nous avons votée pour demander aux médecins de reprendre le travail. Le ministre des Affaires sociales disait: Je refuse la notion de services essentiels dans le cas des médecins. Très bien. À partir de cette notion-là, cela le justifiait de faire voter cette loi spéciale à laquelle nous avons adhéré. Le ministre faisait valoir que, pour lui, le médecin est le chaînon principal dans la chaîne des services de santé, les autres travailleurs ou travailleuses n'accomplissant que • des emplois complémentaires ou supplémentaires.

M. le Président, il est vrai que dans une chaîne de services de santé rendus à la population, à un point X, c'est le médecin qui a le rôle principal à jouer. Mais on sait fort bien qu'au point Y, au moment où une infirmière ou un infirmier doit dispenser des soins à un patient, celui ou celle qui est devenu le chaînon principal dans cette série de services de santé, c'est l'infirmière ou l'infirmier. C'est pour cela que cette inquiétude que le ministre des Affaires sociales nous a communiquée en disant: Je n'accepte pas la notion de services essentiels en ce qui a trait aux médecins, remet en cause toute là notion de services essentiels dans l'ensemble des services de santé à l'intérieur de nos institutions.

M. le Président, nous croyons vraiment que le gouvernement fait fausse route. Ceci n'est pas uniquement l'avis des membres de l'Opposition parce qu'on peut toujours les accuser de vouloir faire de la partisanerie. Je peux vous assurer, de mon siège, que si le gouvernement avait tout de même suivi certaines pistes que nous lui indiquions, que l'histoire passée et l'histoire récente nous ont indiqué qu'il fallait suivre, nous aurions avec lui, voté à l'unanimité l'adoption d'une telle loi qui aurait vraiment corrigé, au moins en partie, des problèmes extrêmement durs que nos institutions de santé ou nos centres d'accueil ont dû vivre. Mais le ministre ou le gouvernement refuse cette voie. C'est pourquoi nous nous trouvons dans l'impossibilité de voter pour ce projet de loi parce que nous croyons que peut-être, d'une certaine façon, il satisfait une vision technocratique ou théorique, je dirais, du gouvernement. Mais dans la réalité des choses il ne pourra pas satisfaire aux besoins de la population.

M. le Président, il y a un point particulier sur lequel notre formation politique a proposé des amendements, il s'agit de la nomination des membres qui siégeront au conseil sur le maintien des services essentiels. Nous croyons qu'une des conditions essentielles qui puissent garantir le bon fonctionnement de tout organisme réside dans sa crédibilité auprès des parties. Alors que la loi no 59, qui est la loi qui a précédé cette loi no 72, prévoyait la nomination par le juge en chef du Tribunal du travail des membres de cette commission, cette loi prévoit que les membres soient nommés par le gouvernement après consultation. Je ne voudrais pas discréditer la valeur morale ou la valeur professionnelle des gens que le gouvernement pourrait nommer à ce fameux conseil, mais le seul fait que ces membres soient nommés par le gouvernement uniquement et que dans le langage courant on puisse s'y référer comme étant un organisme qui est une créature gouvernementale, va affecter, au moment des conflits, la crédibilité des avis que ce conseil devra donner au gouvernement et des mises à jour qu'il communiquera à la population.

C'est dans ce sens que nous avions demandé même que le président, vu l'importance de cet organisme qui, maintenant, devient un organisme permanent, que le président de ce conseil soit nommé par un vote des deux tiers de l'Assemblée nationale. D'une part, ceci ajoute à l'autorité morale d'une personne quand elle est nommée par l'Assemblée nationale, et nous croyons également qu'il est beaucoup plus difficile, dans un cas de conflit, pour quelque parti que ce soit ou quelque organisme que ce soit, d'attaquer sa crédibilité. (13 heures)

La personne nommée par l'Assemblée nationale se sent aussi représentative de tous les membres de l'Assemblée qui sont élus par l'ensemble de la population. À ce moment, cela lui permet de prendre ses distances et

d'être beaucoup plus critique, quand c'est nécessaire, à l'endroit du gouvernement qu'on ne l'est quand on est simplement un membre nommé par le gouvernement avec le risque que cette nomination soit une nomination de politique partisane. Nous regrettons que le gouvernement n'ait pas accédé à cette demande et nous demeurons convaincus... Je pense que le temps est terminé. Alors, si vous me le permettez, je vais conclure en disant qu'encore une fois en dépit des affirmations du ministre qui dit qu'il croit avoir mis en place un mécanisme ou présenté une loi qui va garantir - non, je devrais corriger; il a dit: II n'y a rien qui est garanti d'une façon parfaite et, là-dessus, je le rejoins - le mieux possible la répétition des problèmes que nous avons rencontrés lors des négociations précédentes, je ne peux mettre en doute sa bonne foi, mais je lui dis au nom de ma formation politique - et je crois aussi me faire le porte-parole de la population en général et de tous les observateurs qui ont examiné le projet de loi du ministre - qu'il fait fausse route. Je ne lui souhaite pas, parce que je crois qu'ici personne ne se souhaite ce type de - il faut presque les appeler ainsi - catastrophes quand les services essentiels ne sont pas maintenus, mais malheureusement, il ne met pas de son côté les chances que les prochains conflits de travail qui devraient survenir à l'occasion des négociations dans les secteurs public et parapublic épargnent les plus faibles et ceux qui ont le plus besoin, que ce soit pour une période temporaire ou que ce soit pour une période permanente, que leurs droits fondamentaux soient respectés et protégés. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Est-ce que la troisième lecture de ce projet de loi est adoptée?

Une voix: Non.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Non. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Fréchette: Avant que le député de Prévost vous soumette une motion de suspension des débats, M. le Président, je voudrais vous faire part d'une entente dont il a été convenu avec le leader de l'Opposition pour que vous puissiez l'officialiser. Nous suspendrions tout de suite nos travaux pour les reprendre à 14 h 30 plutôt qu'à 15 heures cet après-midi.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Est-ce que cette motion est adoptée? Adopté. M. le député de Prévost.

M. Dean: M. le Président, je demande la suspension du débat.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Est-ce que cette motion est adoptée? Adopté.

M. le leader adjoint du gouvernement, suspension jusqu'à 14 h 30?

M. Fréchette: 14 h 30, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté. Suspension jusqu'à 14 h 30.

(Suspension de la séance à 13 h 03)

(Reprise de la séance à 14 h 34)

Complément d'enquête

sur un incident en commission parlementaire

Le Président: M. le leader, avant que vous appeliez un article du feuilleton, j'aimerais déposer, conformément aux engagements que j'ai pris hier, un complément d'enquête relativement aux événements du 11 juin 1982 à la salle 81-A. M. le leader du gouvernement.

M. Bertrand: C'est la poursuite du débat, M. le Président, sur le projet de loi no 72 en troisième lecture.

Le Président: M. le leader de l'Opposition.

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, quant au complément d'enquête, ou je ne sais pas, qui a fait l'objet du dépôt il y a un instant, est-ce que vous tenez compte de la motion qui a été présentée à l'Assemblée nationale pour cette partie du rapport?

Le Président: Oui. Cette partie du rapport et l'autre seront envoyées au Procureur général du Québec conformément à l'ordre de l'Assemblée. C'est-à-dire que copie conforme de tous ces documents sera envoyée parce que les originaux doivent demeurer ici à l'Assemblée nationale du Québec. M. le leader du gouvernement.

M. Bertrand: Alors, poursuite de l'article 6 du feuilleton, M. le Président.

Projet de loi no 72

Reprise du débat sur la troisième lecture

Le Président: J'appelle la reprise du débat sur la troisième lecture du projet de loi no 72, Loi modifiant le Code du travail, le Code de procédure civile et d'autres dispositions législatives. M. l'adjoint parlementaire au ministre du Travail, de la

Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu. M. Robert Dean

M. Dean: M. le Président, après un long cheminement de procédures, de consultations, d'évaluations, d'expériences antérieures, une commission parlementaire où 55 groupes ont été consultés, le projet de loi no 72, suite à des amendements, va bientôt prendre sa place dans nos lois du travail.

Je vais me contenter surtout, M. le Président, brièvement, de relever quelques remarques de la députée de L'Acadie durant ce débat de troisième lecture. Premièrement, elle a dit que le processus qui demeure dans cette loi occasionnerait une instabilité dans les établissements, surtout ceux de santé, pendant une longue période de préparation a la grève. Elle a souligné qu'elle pensait que la loi était adéquate en ce qui concerne le moment de l'exercice du droit de grève mais que cette période de préparation pouvait être nuisible.

Je répondrais, M. le Président, que le projet de loi apporte justement plusieurs correctifs à cette situation d'instabilité appréhendée. D'abord, le délai; le dépôt des listes ou des ententes est prévu au moins 80 jours avant l'acquisition d'un droit de grève. L'ancienne loi prévoyait un avis de deux jours avant le déclenchement de la grève et le projet de loi prévoit un avis de sept jours avant l'exercice du droit de grève et, si le droit de grève n'est pas exercé, cela prendra un autre avis de sept jours. Donc, c'est un autre élément d'instabilité qui va également éliminer, dans les centres hospitaliers et dans les centres d'accueil, ce processus de baisser les taux d'occupation un an ou plusieurs mois à l'avance en prévision d'une grève appréhendée.

Deuxièmement, Mme la députée de L'Acadie a suggéré qu'avec le projet de loi no 72, si on suspend l'exercice du droit de grève dans un établissement, cela peut ressembler beaucoup à la position de l'Opposition quant à l'abolition partielle ou sélective du droit de grève. Donc, si cela ressemble beaucoup à cela, l'Opposition devrait être pour ce projet de loi et non contre. Je souligne que ce n'est peut-être pas aussi similaire que le croit la députée de L'Acadie, dans le sens que, dans le projet de loi no 72, dans un établissement où les services de santé ne sont pas maintenus, on propose de suspendre le droit de grève jusqu'à ce que les services soient assurés. Ce qui est une différence de taille avec une abolition sélective prônée par l'Opposition qui affecterait quelque chose comme 60% de tous les établissements du réseau des affaires sociales.

Mme la députée de L'Acadie s'est aussi référée à la possibilité que la liste soit l'objet de marchandage. Je soutiens que le projet de loi no 72 met aussi fin à cette possibilité par le fait que, maintenant, les listes sont sujettes à l'évaluation d'un conseil des services essentiels rendu permanent et auquel on a donné plus de pouvoir d'évaluation pour juger de l'état d'acceptabilité de toute entente ou de toute liste soumise par un syndicat à défaut d'entente.

Finalement, Mme la députée de L'Acadie a évoqué la possibilité qu'on aurait dû prévoir la nomination du conseil des services essentiels par l'Assemblée nationale. Elle a suggéré que la nomination de ces personnes pourrait être l'objet de favoritisme politique, etc.

Nous disons non à cette possibilité pour une raison simple. C'est que l'économie de ce projet de loi prévoit d'abord la responsabilisation des parties; deuxièmement, un conseil indépendant qui exerce un rôle d'évaluation et de dénonciation, s'il le faut, d'ententes ou de listes qui sont inacceptables et, finalement, comme troisième volet, il prévoit que le gouvernement doit exercer ses responsabilités en dernier lieu et suspendre le droit de grève si les services essentiels ne sont pas maintenus. On ne pourrait que déplorer, M. le Président, que l'Opposition tente de discréditer à l'avance l'intégrité et la compétence du conseil des services essentiels qui serait fondé à la suite de l'adoption de ce projet de loi. (14 h 40)

Maintenant, Mme la députée de L'Acadie, dont on ne peut pas mettre en doute l'humanité et la sincérité des préoccupations pour les démunis de notre société, nous a dit: Est-ce qu'on peut prouver, hors de tout doute, que le projet de loi no 72 assurerait toujours, en tout temps et en tout lieu, le maintien des services essentiels? Non, M. le Président, il n'y a aucun système, quel qu'il soit, qui peut assurer, hors de tout doute, que des services seront maintenus. On ne peut qu'évoquer l'expérience de l'Australie où le droit de grève n'existe pas, non seulement dans le secteur des services publics, mais dans tous les secteurs et où le taux de grève est parmi le plus élevé au monde, toutes illégales qu'elles soient. On a des expériences vécues en Ontario et dans d'autres provinces où, malgré que la grève soit interdite dans le secteur de la santé, cela n'a pas empêché qu'elles aient lieu. On a vécu, à Montréal, il y a quelques années, la triste fin de semaine rouge où des pompiers qui n'avaient pas le droit de grève ont tout simplement débrayé et laissé le monde s'arranger avec ses problèmes.

Donc, il faut dire que s'il y a irresponsabilité et mépris dans des établissements, ils vont exister, il me semble, en tout temps et non seulement en situation de conflit. Ce n'est pas une

situation de conflit de travail appréhendée qui transforme des hommes et des femmes qui ont une conscience professionnelle. Ce n'est pas une situation de conflit qui les transforme, tout d'un coup, en monstres, parce qu'il y a une situation de conflit de travail, ce sont les mêmes hommes et les mêmes femmes. Dans un nombre énorme de cas, les travailleurs et travailleuses, surtout du secteur de la santé, ont déjà fait preuve, en situation de négociation et de conflit de travail, d'un grand sens des responsabilités, de conscience professionnelle, de considération humaine pour le patient. Il y a un nombre énorme de cas où les unités de soins ou dans les établissements où des services ont été maintenus à 100% ou à 100% moins une personne, si cette personne, par entente, était cadre.

Il y a trop de cas où les travailleurs et travailleuses du secteur de la santé ont déjà manifesté et fait preuve de leur conscience et de leur responsabilité, pour qu'on démolisse tout d'un coup cet acquis par une législation. Il faut, au contraire, bâtir cet acquis et c'est sur cette base que la loi 72 est bâtie. C'est-à-dire qu'avec les améliorations substantielles apportées à notre législation par la loi 72, les hommes et les femmes qui ont fait preuve de responsabilité et de conscience professionnelle ne seront pas privés de l'exercice d'un droit fondamental, le droit de grève, qu'ils ont déjà su exercer de façon humaine, civilisée et respectueuse du droit prioritaire des malades, des handicapés et des personnes âgées à leurs soins essentiels.

Pour ceux et celles qui n'ont pas fait preuve de ces responsabilités, M. le Président, l'objet de la loi 72 est, premièrement de les amener, de force s'il le faut, à exercer ce sens des responsabilités, par la création d'un conseil permanent avec des pouvoirs accrus. Deuxièmement, le gouvernement, en cas ultime, prend ses responsabilités et suspend le droit de grève dans un établissement où les services ne sont pas maintenus.

En terminant, cette loi constitue un virage, non pas un virage technologique, mais un virage de valeurs humaines, de valeurs morales; c'est un virage de la conscience sociale de toute une société. Notre société, une fois pour toutes, proclame la primauté des soins et des services essentiels des citoyens sur l'exercice, même légitime, du droit de grève. Nous sommes convaincus que la loi no 72 contribuera à compléter ce virage dans le sens de rendre notre société plus humaine, plus juste, et ce, même lors de l'exercice de droits de grève de la part des travailleurs et travailleuses des services publics. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Laurier.

M. Christos Sirros

M. Sirros: Merci, M. le Président. Le débat que nous avons ici en troisième lecture sur le projet de loi no 72, comme l'a souligné tout à l'heure ma collègue de L'Acadie, c'est probablement pour plusieurs personnes le projet de loi le plus important qu'on ait étudié cette session... Nous parlons de quelque chose qui, dans le quotidien et dans la réalité, a touché et touchera des personnes par milliers. Effectivement, dans notre société, qui connaît des situations de conflits de travail, la grève est utilisée comme l'un des outils disponibles aux syndicats et aux travailleurs pour faire avancer leurs points de vue. C'est un droit bien connu et bien accepté dans notre société et dans notre régime de relations de travail. Il arrive pourtant des moments où l'exercice de ce droit touche, dans leur vie, des personnes qui, finalement, sont spectatrices de ce qui se déroule ailleurs. Plus particulièrement, on pense aux grèves qui ont déjà eu lieu dans les services de santé et les services sociaux et, effectivement, le gros du débat sur ce projet de loi tourne autour de cette question des services de santé et des services sociaux. On parle de gens qui sont en quelque sorte dans l'incapacité d'agir, de gens qui sont en quelque sorte les otages d'une situation, pas nécessairement les otages de telle ou telle personne, des syndicats ou du patronat, mais d'une situation. Le système qu'on a engendre un rapport de forces entre deux groupes qui s'affrontent afin d'en arriver à un genre de compromis acceptable aux deux parties qui défendent chacune leur position.

Dans le cas des services de santé, on a un groupe de personnes qui sont de véritables spectateurs dans le sens qu'elles n'ont même pas le pouvoir de faire entendre leur voix. Elles sont prisonnières de la situation. Je pense plus particulièrement à toutes les personnes qui sont en centre d'accueil, à toutes les personnes qui sont en centre hospitalier pour soins prolongés, en centre psychiatrique, etc. C'est clair, par définition, que ce sont des gens complètement dépendants de la présence tant de l'employeur que de l'employé pour que leur vie quotidienne soit assurée. Quand on arrive à parler de vie quotidienne dans la réalité, on ne peut parler en même temps de services qui sont essentiels aux besoins d'une personne. Déjà, pour que quelqu'un soit amené à dépendre si complètement de l'État ou de l'institution dans laquelle il vit, cela veut dire que c'est déjà le strict minimum dont il a besoin afin de s'assurer une vie décente. Par-dessus le marché, qu'on vienne parler de services essentiels à quelque chose qui est déjà un minimum pour ces gens, il y a quelque chose qui me crée, quant à moi, certains problèmes.

II est vrai que le gouvernement a la responsabilité d'essayer, selon moi, en tout cas, de concilier les divergences qui existent dans notre société et d'agir en quelque sorte comme harmonisateur. C'est l'un des deux points de vue possibles sur ce qu'est un gouvernement autre, c'est que le gouvernement décide là où il veut mener la société et agit de telle sorte qu'il puisse entraîner derrière lui la population et changer ainsi la notion qu'a un peuple ou une société d'elle-même. (14 h 50)

Le danger pourtant avec cela, c'est qu'il arrive des moments où il faut faire des choix et c'est sur ces choix qu'on sera jugé finalement. Quand on vient à parler de grève et de services essentiels, il arrive des moments où effectivement l'exercice du droit de grève est incompatible avec un autre droit, le droit à une vie décente, à une vie aussi complète que possible pour des personnes qui sont déjà dans une situation de dépendance par rapport à cette société qui exerce à différents niveaux différents droits. Alors, c'est là qu'on est en droit de s'attendre qu'un gouvernement aura une position claire, précise et explicite sur le droit qui aura préséance en quelque sorte, parce qu'il y a des situations où les deux ne peuvent pas avoir lieu: la porte est trop petite pour que les deux passent à travers, il y en a juste un finalement qui peut sortir pour s'exprimer. C'est là qu'on aurait droit de s'attendre que le gouvernement décide clairement lequel des deux il choisit.

Le projet de loi que nous avons devant nous est un effort, selon moi, de concilier les deux en mettant sur pied un système qui prévoit certaines modalités techniques, d'autres ont dit technocratiques, afin d'assurer ou d'essayer de prévoir que dans le cas d'une grève, certains services seraient considérés comme essentiels par rapport à certaines clientèles ou certaines populations et que ces services ne seraient pas touchés. On a déjà vécu le même principe et la seule différence entre ce projet de loi et celui qui existait avant, le projet de loi no 59, je pense, se trouve en gros dans les modalités parce que le principe demeure le même. Le principe est, encore une fois, qu'il y a certains services qui sont essentiels dans tous les domaines, dans certains domaines plutôt et qu'il y en a d'autres, dans d'autres domaines, qui ne le sont pas.

Alors, je pense que l'expérience qu'on a connue depuis maintenant quatre ans a démontré clairement... C'est le point de vue quasi unanime de toutes les personnes qui ont subi, pas les personnes qui ont vu cela de l'extérieur, pas les personnes qui regardaient de leur fauteuil ou de leur salon à la télévision ce qui se passait, mais les gens qui ont vécu ces choses de l'intérieur de ces institutions... C'est l'opinion unanime de ces personnes ainsi que celle de la plupart des observateurs non partisans, si vous le voulez, que ce principe n'a pas marché et qu'il y a un pas de plus qu'il faudrait faire comme société et clairement indiquer qu'il y a certains domaines dans lesquels nous, comme société, comme gouvernement, comme Assemblée nationale et les travailleurs et travailleuses comme syndiqués, n'avons pas le droit d'exercer ce droit, si vous voulez, de grève. Je pense qu'on a souvent fait appel - et ç'a été fait tout à l'heure par l'adjoint parlementaire du ministre du Travail - en espérant que le sens des responsabilités des syndiqués fera en sorte que leur droit de grève sera exercé de manière humaine, en assurant effectivement ce que le projet de loi ou le conseil va définir comme des services essentiels.

Je pense que le pas réel qu'il aurait fallu faire, cela aurait été de faire appel au même sens des responsabilités de ces mêmes travailleurs et travailleuses pour qu'ils acceptent volontairement... Et je pense que ce n'est pas quelque chose qui est impensable parce qu'effectivement ce sont des gens qui ont un sens des responsabilités et s'il existe, le sens des responsabilités, son expression réelle aurait été dans l'acceptation d'un appel par le gouvernement à l'abolition claire et nette du droit de grève dans les services de santé en particulier.

Je pense que si on peut faire appel pour que les gens exercent leur droit avec responsabilité, je pense qu'on peut faire d'abord appel à la responsabilité des gens pour qu'ils acceptent d'eux-mêmes de reconnaître qu'une grève dans les hôpitaux, les centres d'accueil n'est pas acceptable, surtout au moment où ces mêmes services de santé sont déjà réduits au minimum. Nous avons connu depuis quatre ans 500 000 000 $ de compressions ou de coupures, appelez-les comme vous le voulez, uniquement dans le domaine des hôpitaux, par exemple. Au même moment où nous réduisons, comme société, au minimum les services que nous offrons, déjà il importe encore plus que jamais que comme société nous fassions appel aux gens pour qu'ils acceptent le fait que les personnes qui sont complètement dépendantes de l'État aient droit à des services de qualité et des services surtout continus, qui ne seraient pas interrompus par une grève et qui n'auraient pas à subir le processus de définition de ce qui est essentiel et de ce qui n'est pas dans des situations où finalement tout est essentiel, comme le disait hier même le ministre des Affaires sociales dans un autre domaine.

Il faudrait tout de même être consistant et faire le dernier pas.

Merci.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre du Travail, de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu dans votre droit de réplique.

M. Pierre Marois (réplique)

M. Marais: M. le Président, c'est précisément parce que nous partageons cette conviction que vient d'évoquer le député de Laurier que, comme société de Québec, on doit faire un pas de plus, mais non pas un pas vers ce qui risque, de notre point de vue, d'être un précipice dans le sens d'une idée généreuse mais qui peut être terriblement risquée. C'est précisément parce que nous avons cette conviction profonde que, comme société, il nous faut faire un pas dans le sens d'une responsabilisation, un pas dans le sens d'une responsabilité mais surveillée. C'est précisément aussi parce que le gouvernement est profondément préoccupé par ce droit profond des citoyens, plus particulièrement les plus démunis, que nous voulons le consacrer par ce projet de loi. En cela, je crois qu'on admettra qu'il y a là une nuance de taille en comparaison avec tout ce qui a été fait dans le domaine des lois en matière de relations de travail au Québec par le passé. Ce projet de loi a pour objet -je pense qu'il est bon en terminant de le rappeler - de consacrer la primauté du droit des citoyens et des citoyennes de continuer à bénéficier des services fondamentaux auxquels ont droit ces gens qui sont dans des centres de services sociaux, dans des centres de services de santé et même plus, puisque cela couvre aussi le secteur des services publics.

C'est pourquoi, M. le Président, en terminant, tout ayant été ou à peu près écrit et dit sur ce projet de loi et sur cette question, je propose l'adoption en troisième lecture du présent projet de loi.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Est-ce que la troisième lecture du projet de loi no 72, Loi modifiant le Code du travail, le Code de procédure civile et d'autres dispositions législatives, est adopté?

M. le leader adjoint de l'Opposition?

M. Lalonde: M. le Président, il est possible que nous ayons quelques votes à prendre sur certains projets de loi. Serait-il possible de reporter à plus tard, peut-être au cours de cette séance, ce vote et d'autres aussi? Nous aimerions avoir un vote enregistré sur ce projet de loi et sur d'autres.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader du gouvernement.

M. Bertrand: Tout à fait d'accord, M. le Président.

Il y aura un certain nombre de projets de loi qui, vers la fin de la journée, pourront faire l'objet d'un certain nombre de votes. Nous attendrons ce moment. C'est l'Opposition qui nous dira à quel moment effectivement nous pourrons procéder à tous ces votes.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Comme il avait été entendu un peu ce matin, c'était avec les projets de loi nos 70, 68 et le 72.

M. le leader du gouvernement.

M. Bertrand: M. le Président, je vous demanderais d'appeler l'article 3 du feuilleton, s'il vous plaît.

Projet de loi no 48 Troisième lecture

Le Vice-Président (M. Jolivet): Troisième lecture du projet de loi no 48, Loi favorisant la poursuite des objets de la Ligue de taxis de Montréal Inc. avec amendements. M. le ministre des Transports.

M. Michel Clair

M. Clair: M. le Président, vous avez justement annoncé des amendements que je voulais proposer au moment de la troisième lecture. Effectivement, ces amendements font, pour deux d'entre eux, suite à des discussions que nous avons eues en commission parlementaire et à l'engagement que j'avais pris auprès de mes collègues les députés de Saint-Louis et de Jeanne-Mance de réviser nos positions sur deux questions. La première est l'éventualité de contestations juridiques des élections à l'article 34, où nous proposons un amendement qui nous avait été formulé par le député de Saint-Louis, à savoir que ces matières soient jugées et instruites d'urgence. M. le Président, l'autre amendement comporte le pouvoir pour le ministre de reporter l'ensemble des délais qui sont contenus au projet de loi.

Enfin, vous vous souviendrez sans doute que ce projet de loi avait été prévu pour adoption rapide à la fin du mois de mai dernier et qu'à cause d'un certain nombre d'événements parlementaires et d'événements non parlementaires qui concernent celui qui vous parle, ce projet de loi n'a pu être adopté à la fin du mois de mai. Ce n'est qu'aujourd'hui 22 juin, que nous sommes en mesure d'en proposer l'adoption en troisième lecture. Comme ce projet de loi comportait toute une série de délais de dates précises à respecter, après en avoir discuté avec le critique de l'Opposition en cette matière, le député de Jeanne-Mance, nous avons convenu de reporter à peu près d'un mois l'ensemble

des échéances qui étaient fixées, qui étaient contenues au projet de loi no 48. J'ai eu l'occasion de communiquer avec mon collègue, le député de Jeanne-Mance, et à déposer sur la table de l'Assemblée nationale les amendements qui sont proposés en troisième lecture et qui sont essentiellement, comme je vous le dis, des modifications de dates. Cela reporte à peu près la totalité des délais d'un mois, en tenant compte des dimanches et des samedis; il y a quelques petits ajustements qui sont faits à ce moment. (15 heures)

Maintenant, sur le fond de la question, ce projet de loi vise effectivement, comme son titre l'indique, à favoriser la poursuite des objets de la Ligue de taxis de Montréal Inc. Depuis sa présentation en deuxième lecture, des membres de la ligue, notamment des membres du conseil d'administration ont manifesté à certains moments un peu de déception non pas tellement quant au contenu du projet de loi qu'ils m'ont aidé à préparer, dont ils m'ont facilité l'application jusqu'à maintenant - à tout le moins, l'application future au cours des prochaines semaines - mais davantage quant à certaines expressions que celui qui vous parle a pu emprunter et qui ont pu blesser, à un moment ou à un autre, les administrateurs de la ligue.

J'ai eu l'occasion d'expliquer à ces gens qu'en aucune façon ce projet de loi ne se veut un jugement à l'égard du comportement de qui que ce soit, en rapport avec les difficultés qu'a pu vivre au cours des récentes années la Ligue de taxis de Montréal Inc. Au contraire, ce projet de loi est essentiellement basé sur la confiance, sur la confiance mutuelle que les membres de la Ligue de taxis de Montréal Inc. peuvent mettre dans le ministre des Transports, mais également la confiance que le ministre des Transports peut lui-même mettre dans les administrateurs de la Ligue de taxis de Montréal Inc.

Ce projet de loi pourrait effectivement, cette loi pourrait être utile sans la collaboration des administrateurs actuels de la ligue A-11, mais l'objectif n'était nullement de les écarter. Bien au contraire, puisque la plupart des dispositions font justement appel à leur collaboration pour faciliter la remise sur pied de la Ligue de taxis de Montréal Inc. et l'assainissement de sa situation financière.

À l'occasion de l'adoption en troisième lecture de ce projet de loi no 48, j'invite donc publiquement les administrateurs actuels de la Ligue de taxis de Montréal Inc. à collaborer avec celui qui vous parle, avec le comité de trois personnes qui sera mis sur pied afin de faciliter l'application de cette loi, afin de trouver une solution aux problèmes de confusion qui ont entouré la question des élections, la question de la cotisation. Je pense que c'est en travaillant conjointement, sur une base de confiance réciproque entre le ministère des Transports, le ministre des Transports du Québec et les administrateurs de la ligue A-11 que nous serons à même de parler de l'avenir de l'industrie du taxi plus que de son passé. D'ailleurs, je vous rappelle que j'ai toujours la volonté ferme de déposer, de rendre public très prochainement un programme de rajeunissement de la réglementation de l'industrie du taxi afin de permettre non seulement aux propriétaires de taxis, aux chauffeurs de taxi de la région de Montréal de connaître une meilleure rentabilité financière, mais également à l'ensemble de l'industrie du taxi dans tout le Québec.

Dans ce sens, si, par le projet de loi dont je propose aujourd'hui l'adoption en troisième lecture, nous pouvons favoriser la poursuite des objets de la ligue A-11, de La ligue de taxis de Montréal Inc., je suis certain que nous aurons posé là un geste positif, significatif pour la relance de l'industrie du taxi, en particulier, à Montréal.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Jeanne-Mance.

M. Michel Bissonnet

M. Bissonnet: M. le Président, au tout début, nous acquiescions de bon droit aux amendements proposés par le ministre des Transports au projet de loi tel qu'il a été adopté en commission parlementaire. Il s'agit effectivement de modifications quant aux délais. Nous comprenons également qu'il puisse surgir certaines difficultés et nous permettrons qu'il y ait une prolongation des délais à l'intérieur du projet de loi. Il a été entendu, selon le projet de loi qui serait adopté, que le 31 octobre 1982, tous les propriétaires artisans de taxis de l'agglomération A-11 de Montréal auront une assemblée pour faire des élections.

Ce projet de loi, M. le Président, est venu à cette Assemblée parce qu'à la Ligue de taxis A-11, depuis deux ans, il n'y a pas eu d'assemblée générale, il n'y a pas eu de rapport des états financiers. Tout ceci a commencé, - ce n'est pas là un blâme au ministre des Transports actuel - par une difficulté d'interprétation de l'ex-ministre des Transports, le député de Charlesbourg, qui a porté à confusion. Dans la Ligue de taxis A-11, tous les propriétaires d'autos-taxis qui détiennent des permis ne savaient pas s'ils devaient payer un montant de 60 $ ou de 35 $, et c'est en cour présentement, c'est sub judice. Il y a eu tellement de débats à l'intérieur de la Ligue de taxis A-11 - j'en parlais au député de Sainte-Anne, qui est un de mes adjoints dans ce dossier - tellement de dossiers à la cour, soit à la Commission

des Transports qui les a référés à la Cour supérieure, à la Cour d'appel... et c'est toujours les petits propriétaires, les chauffeurs de taxi qui seront obligés de payer la note un jour pour ces difficultés internes, M. le Président.

Ce projet de loi vient d'une façon définitive établir la cotisation pour les années 1979, 1980 et 1981. S'il y a lieu d'une cotisation spéciale, le ministre des Transports fixera cette cotisation suite à un rapport que les vérificateurs, qu'il nommera en vertu de ce projet de loi, devront lui soumettre avant le 1er août 1982.

Nous acquiesçons à ce que la Ligue de taxis A-11 soit démocratique pour permettre à tous les propriétaires de la région métropolitaine A-11 - Montréal, Verdun et quelques villes de banlieue - de s'exprimer de façon démocratique le 31 octobre, M. le Président, pour élire un conseil d'administration pour bien veiller aux intérêts des propriétaires de la Ligue de taxis A-11 de la région de Montréal.

Ce projet de loi vient confirmer la démocratie à l'intérieur de cette ligue de taxis. J'espère que tous les propriétaires, tous les chauffeurs de taxi, tous les propriétaires de permis de taxi seront présents pour prendre en main, selon une expression que le gouvernement du Parti québécois connaît bien - II faut se prendre en main! - pour faire valoir leur point de vue sur les élections qui se tiendront et sur la refonte des règlements de la ligue A-11.

Donc, ce projet de loi, contrairement à la loi no 37 qui refuse la démocratie, présenté par le ministre des Transports, ramènera d'une façon certaine, à l'intérieur de la Ligue de taxis A-11, une démocratie donnant à tous les propriétaires l'occasion de s'exprimer, M. le Président.

Je serai très bref. Nous avons accepté d'emblée ce projet de loi. Je voudrais quand même informer le ministre des Transports qu'il y a beaucoup de difficultés dans l'industrie du taxi au Québec. Il y a beaucoup de difficultés, M. le Président, et je le dis en corollaire de cette loi. Je prends très régulièrement des taxis et, suite à l'augmentation des tarifs, la clientèle a diminué. Suite à l'augmentation de l'essence, en particulier dans la région de Québec, les chauffeurs de taxi ont fait une grève de trois jours. Le problème a été soumis au ministre des Institutions financières, mais il n'est pas réglé.

M. le Président, je demande au ministre des Transports pour la prochaine session, à l'automne prochain... Je sais qu'il a l'intention de déposer un livre blanc sur le taxi; je suis convaincu qu'il rendra à terme ce projet pour que cette industrie devienne une industrie où tous les artisans qui y travaillent puissent y gagner leur vie honorablement. Il y a aussi la question du trop grand nombre de permis, en particulier dans les régions métropolitaines de Montréal et de Québec. L'Opposition entend, M. le ministre, qu'au mois de septembre, ou au cours de l'été, vous déposiez ce livre blanc sur le taxi afin de permettre à tous les intervenants, à toutes les ligues de faire connaître leur point de vue pour rentabiliser cette industrie qui aide beaucoup notre tourisme et qui est un acquis pour notre communauté. Je suis convaincu, M. le Président, que nous ferons avancer ce dossier et l'Opposition vous offre d'avance sa collaboration à cet effet. Merci M. le Président. (15 h 10)

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Saint-Louis.

M. Harry Blank

M. Blank: Je veux seulement ajouter quelques mots, voyant que j'ai été visé par le ministre, et lui demander d'acceptez une suggestion que je vais faire concernant un amendement. Il me fait plaisir d'accepter cet amendement, mais en adoptant ce projet de loi qui règle le problème, j'espère que cela réglera le problème de la Ligue de taxis A-11. J'espère que le ministre, en préparant son livre blanc, réglera tout le problème du taxi, à Montréal particulièrement. Qu'il ne se cache pas la tête dans le sable car il y a d'autres facettes à la ligue de taxi. Je parle des associations qui ne sont pas dans la ligue mais qui existent, et aussi des propriétaires de flotte. Quand je parle de flotte, je ne parle pas tellement de flotte de trente, quarante ou deux cents taxis, je parle de flotte de trois, quatre ou cinq, des petits entrepreneurs qui n'achètent que trois, quatre ou cinq permis et qui ne sont pas vraiment représentés dans la ligue. Je sais qu'il y a un nouveau groupe qui commence à s'organiser et qui comprend la ligue, les artisans, les associations et les propriétaires de flotte. Je sais que le ministre a déjà reçu une communication de ce groupe et j'espère qu'il prendra contact avec eux afin que leur point de vue soit aussi établi dans ce livre blanc.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre des Transports.

M. Michel Clair (réplique)

M. Clair: M. le Président, très brièvement, j'exercerai mon droit de réplique de façon générale pour remercier mon collègue, le député de Jeanne-Mance, de la collaboration qu'il m'a offerte tout au long de ce processus. Je veux seulement relever bien rapidement deux remarques désagréables et injustifiées, à mon avis, qu'il a faites, premièrement, à l'égard de mes

prédécesseurs, le député de Saguenay et le député de Charlesbourg, qui, comme j'ai eu l'occasion de le dire, ont toujours été animés par exactement la même volonté que celui qui vous parle, à savoir de favoriser la poursuite des objets de la ligue de taxis pour le meilleur intérêt de tous les détenteurs de permis de taxi. La deuxième remarque, c'est le rapprochement qu'il fait avec le projet de loi 37. Il a dit: Voilà un cas où le ministre des Transports incite à la démocratie, et dans le cas de la loi 37, c'est un peu l'inverse.

M. le Président, je lui dirai simplement que ce sont des analyses un peu raccourcies puisqu'il s'agit de répondre à deux situations fort différentes. Dans les deux cas, ma conviction est profonde que le gouvernement a pris les meilleurs moyens à sa disposition pour résoudre des problèmes réels.

Enfin, M. le Président, le député de Saint-Louis me demande de tenir compte, dans la rédaction du livre blanc que nous sommes à préparer - et qui est retardé un peu parce que nous visons justement à tenir compte de l'ensemble de l'ampleur du problème - des intervenants dans le domaine du taxi, à savoir les associations de service, à savoir les flottes, les chauffeurs, les propriétaires, les questions de marché, les questions de rentabilité, les questions de types de véhicules autorisés, l'ensemble de la question du domaine du taxi. J'ai cru, M. le Président, plutôt que d'arriver avec un livre blanc qui ne couvre que la stricte dimension des détenteurs de permis de taxi, il valait mieux prendre un peu plus de temps et arriver avec une proposition un peu plus complète.

M. le Président, je terminerai, avant de proposer l'adoption en troisième lecture de ce projet de loi, sur une double invitation. Je fais l'invitation, premièrement, aux administrateurs actuels de la ligue A-11 d'offrir toute leur collaboration à celui qui vous parle, aux vérificateurs, au comité de trois personnes qui sera formé, pour s'assurer que, le plus rapidement possible, on pourra respecter les délais et que la Ligue de taxis de Montréal Inc. pourra reprendre, dans le meilleur intérêt de ses membres, sa vie la plus normale, la plus agréable, la plus positive possible.

La deuxième invitation que je formulerai c'est d'inviter tous les propriétaires de taxi, tous les détenteurs de permis de taxi de l'agglomération A-11 à se présenter, le 31 octobre prochain, à l'assemblée générale annuelle, à suivre attentivement les activités qui se dérouleront consécutivement à la loi, les avis de convocation, l'inscription sur les listes, le paiement des cotisations. Je fais une invitation générale à l'ensemble des détenteurs de permis de taxi, de se présenter, lorsqu'ils seront requis de le faire, dans le meilleur intérêt de leur ligue.

M. le Président, cette loi, lorsqu'elle sera sanctionnée, sera un instrument entre les mains de la Ligue de taxis de Montréal Inc., pour favoriser la poursuite de ses objectifs et se remettre sur pied financièrement parlant. J'espère que c'est comme cela qu'elle sera accueillie en définitive. Je termine donc, M. le Président, en proposant que la loi 48 soit adoptée en troisième lecture.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Avant de faire cette adoption, il faut, comme j'ai cru comprendre qu'il y a un consentement de part et d'autre, faire d'abord la révocation de la troisième lecture, faire comme si on était allé en commission plénière et accepter les amendements, accepter le rapport amendé et faire en sorte que le projet de loi no 48, Loi favorisant la poursuite des objets de la Ligue de taxis de Montréal Inc., soit adopté tel qu'amendé. D'accord? Adopté?

M. le leader du gouvernement.

Projet de loi no 90

Convocation de la commission de l'Assemblée nationale

M. Bertrand: M. le Président, tant qu'à faire des choses, je voudrais vous dire que ce matin, quand j'ai déféré le projet de loi no 90 à la commission de l'Assemblée nationale, ce n'était pas en vertu de l'article 118a. C'est-à-dire qu'il n'y a pas nécessité de donner avis dans la Gazette officielle; c'est une convocation de commission pour que les parlementaires puissent étudier le projet de loi no 90 et non pas pour entendre des personnes que nous inviterions à se présenter devant cette commission. Alors, la motion a été faite nonobstant 118a.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Donc, cette correction est adoptée?

Une voix: Oui.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader adjoint de l'Opposition.

M. Lalonde: M. le Président, si je comprends bien, le leader du gouvernement veut une dispense d'envoyer les avis. Qu'il en fasse motion, et on l'adoptera immédiatement.

M. Bertrand: Alors, motion pour dispense d'envoyer des avis, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader du gouvernement.

M. Bertrand: M. le Président, je vous demanderais d'appeler l'article 9 du feuilleton d'aujourd'hui.

Projet de loi no 63 Troisième lecture

Le Vice-Président (M. Jolivet): Troisième lecture du projet de loi no 63, Loi sur la Raffinerie de sucre du Québec. Est-ce qu'il y a un intervenant?

M. Lalonde: M. le Président...

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader adjoint de l'Opposition.

M. Lalonde: ... est-ce qu'on peut suspendre pour deux minutes? Voilà, notre intervenant est arrivé.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Brome-Missisquoi, vous avez la parole sur la troisième lecture du projet de loi no 63.

M. Pierre-J. Paradis

M. Paradis: Merci, M. le Président. Il s'agit d'un projet de loi qui est rendu à l'étape de la troisième lecture, qui porte le numéro 63 et qui traite de la Loi sur la Raffinerie de sucre du Québec. L'objet principal de la loi est le suivant, selon les notes explicatives qui nous ont été fournies par le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation. Ce projet de loi a principalement pour objet de doter la Raffinerie de sucre du Québec d'un fonds social de 50 000 000 $.

Mentionnons immédiatement que les paragraphes qui suivent nous indiquent qu'une partie de cette somme a déjà été attribuée à la Raffinerie de sucre du Québec par le ministère de l'Agriculture. Il s'agit, suivant le ministre de l'Agriculture du Québec, du projet agro-alimentaire le plus important au Québec. Lorsque le ministre de l'Agriculture est arrivé à son poste en 1976, il a trouvé sur son bureau des études économiques qui mettaient en doute la rentabilité de ladite raffinerie. Parce que ces études avaient été effectuées sous un régime libéral, le ministre de l'Agriculture, a décidé d'en faire un cheval de bataille privilégié. Dans la phase I de son projet de raffinerie de sucre, le ministre nous annonce que, pour 19 000 000 $, nous allons moderniser la Raffinerie de sucre du Québec qui est localisée à Saint-Hilaire. Pour 19 000 000 $, nous allons conserver les équipements en place et nous allons aller acquérir, dans le

Maine, d'une compagnie qui s'appelle "Triple A Sugar", de l'équipement moderne.

M. le Président, le premier mandat au pouvoir du Parti québécois passe et rien ne se fait. En pleine campagne électorale, le député de Lévis, ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation nous annonce que son modeste projet de 19 000 000 $ qui doublait la production deviendra un gigantesque projet de 39 000 000 $ où on conserve l'aile en place et où on ajoute les équipements qui viennent du Maine. (15 h 20)

Ce qui inquiète le Parti libéral, ce qui inquiète les producteurs de betterave à sucre, ce qui inquiète l'entreprise privée dans ce dossier, c'est le fait que le ministre s'y aventure dans aucune étude de rentabilité. Ce qui inquiète tous les intervenants au dossier, c'est que le ministre a refusé d'entendre en commission parlementaire les principaux intéressés dans ce domaine. Il a refusé d'entendre le secteur privé qui s'occupe de raffinage de sucre au Québec. Il a refusé d'entendre les producteurs qui sont actuellement aux prises dans les champs avec des problèmes sérieux parce qu'il y a eu sécheresse dans la région de Saint-Hyacinthe avec les pluies de la fin de semaine passée. Il a refusé d'entendre tout ce monde et il se lance dans le projet du siècle en agro-alimentaire.

Ce que le Parti libéral veut éviter, c'est qu'on investisse ce genre de deniers publics, il s'agit de 50 000 000 $ dans une période où le gouvernement est en état de faillite. Il s'agit d'un projet qui ne repose sur aucune étude de rentabilité. On a demandé au ministre, en deuxième lecture, d'arriver en commission parlementaire avec des études de rentabilité parce qu'on savait, au Parti libéral, que les économistes du gouvernement du Québec, du ministère de l'Agriculture du Québec, parce qu'on savait que les économistes du niveau fédéral qui avaient été consultés dans le cadre d'une intervention du ministère de l'Expansion économique régionale, disaient: On ne peut s'embarquer à cause de la rentabilité. C'est le premier objet de notre inquiétude, 50 000 000 $ que l'on garroche dans l'économie comme cela, dans le secteur public sans aucune étude économique.

La deuxième inquiétude du Parti libéral, ce sont les emplois qui sont détenus par des Québécois à Montréal dans des compagnies de sucre à caractère privé et que l'on met ces emplois en péril en se dotant d'une capacité additionnelle de raffinage au Québec qui va être détenue par le secteur public et qu'on va subventionner à chaque année.

Le troisième élément - je demanderais au ministre de nous répondre là-dessus également - c'est le fait que dans Le virage technologique, OSE phase II, du Parti

québécois, on devait tenir compte de la technologie de haute pointe, on devait aller dans des secteurs qu'on appelle des secteurs durs de l'économie par opposition aux secteurs traditionnels qui sont plus fragiles. Ce que l'Ontario et ce que les États-Unis font présentement, c'est qu'ils s'en vont dans des raffineries de sucre d'un tout autre genre, c'est qu'ils s'en vont a partir du maïs plutôt que de la betterave à sucre. Est-ce que le ministre a étudié ce marché? Est-ce qu'il sait pourquoi les Américains s'en vont dans une autre technologie? Est-ce qu'il sait pourquoi les Ontariens s'en vont dans une autre technologie? Est-ce qu'il peut nous dire pourquoi il choisit de s'en aller dans le secteur traditionnel en mettant en péril des centaines et des centaines de producteurs qu'on embarque dans ce projet?

En conclusion, nous pouvons vous dire que s'il s'agit là du projet agro-alimentaire du siècle, il sera consigné au journal des Débats que le Parti libéral a voté contre un projet qui ne reposait sur aucune étude de rentabilité. Il sera consigné au journal des Débats que, comme projet agro-alimentaire du siècle, on ne pouvait pas faire pire dans un domaine où la technologie nous dit qu'on devrait se lancer dans du raffinage d'un autre genre et qu'on ne pourra pas aller faire face au secteur privé et mettre en péril des emplois dans le secteur privé pour en créer dans le secteur public, à partir des deniers publics. Notre devoir de parlementaire, c'est de défendre les taxes qui sont perçues de la poche de nos citoyens et c'est ce que le Parti libéral va faire. Le Parti libéral ne votera jamais pour injecter 50 000 000 $ dans un projet où il n'y a aucune étude de rentabilité.

Des voix: Bravoi Bravo!

Le Vice-Président (M. Rancourt): Est-ce que la troisième lecture du projet de loi no 63, Loi sur la Raffinerie de surcre du Québec, est adoptée?

Des voix: Adopté. Une voix: Sur division.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Sur division. M. le leader du gouvernement.

M. Bertrand: Article 10 du feuilleton, M. le Président.

Projet de loi no 76 Troisième lecture

Le Vice-Président (M. Rancourt): Adopté sur division.

Donc, troisième lecture du projet de loi no 76, Loi modifiant la Loi sur la protection du territoire agricole.

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Adopté sur division. M. le leader du gouvernement.

M. Bertrand: M. le Président, je voudrais vous demander d'appeler l'article 7 du feuilleton s'il vous plaît.

Projet de loi no 75 Troisième lecture

Le Vice-Président (M. Rancourt): Troisième lecture du projet de loi no 75, Loi modifiant la Loi sur l'aide au développement industriel. Est-ce qu'il y a des intervenants?

M. Bertrand: II y a deux amendements, M. le Président, un amendement à l'article 2 qui a été transmis au secrétaire général et un amendement à l'article 15 qui a aussi été transmis au secrétaire général. Je ne lirai pas les deux amendements, M. le Président, ils ont été transmis à l'Opposition.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader adjoint de l'Opposition.

M. Lalonde: Je vois que c'est le projet de loi no 75 qui est appelé. Serait-il possible d'appeler avant le projet de loi no 71 sur l'aide juridique? Nos intervenants sont sur place, deux ou trois intervenants, de sorte que l'intervenant sur le projet de loi no 75 pourra se joindre à nous.

M. Bertrand: M. le Président, nous pourrions peut-être effectivement appeler le projet de loi no 71, considérant cependant que, si le ministre de la Justice n'avait pas le temps de venir pour exercer son droit de réplique, il puisse le faire un petit peu plus tard. Merci.

Projet de loi no 71 Troisième lecture

Le Vice-Président (M. Rancourt): D'accord. Donc, troisième lecture du projet de loi 71, Loi modifiant la Loi sur l'aide juridique. M. le député de Sainte-Anne.

M. Maximilien Polak

M. Polak: Merci, M. le Président. Rapidement, une réponse à une déclaration faite hier soir ou pendant la nuit par le ministre. Il a donné l'exemple d'une pauvre femme qui a un problème sur le plan marital et veut voir un avocat. Il dit: Elle a le droit d'avoir l'aide juridique, cela ne lui coûte pas

une cenne. Mais il faut être bien prudent, il faut rectifier cela parce qu'il nous a accusés. Il a dit: L'Opposition est à niaiser, ces gens sont des démagogues sur ce projet de loi; mais nous ne le sommes pas, on va le démontrer. Parce qu'on admet que seulement ceux qui bénéficient de l'aide sociale aient droit à un service gratuit. C'est admis, d'accord, pas de problème. Mais ceux qui n'ont pas l'aide sociale sont obligés... Et je parle encore de la pauvre dame, par exemple, qui ne reçoit pas l'aide sociale, qui a tout de même quelques revenus, un peu plus, disons, que le niveau de l'aide sociale. Pour être admissible à la Loi sur l'aide juridique, il faut qu'elle fasse la preuve numéro un: avoir vraisemblablement le droit ou le besoin d'un service juridique.

En d'autres termes, la dame va voir un avocat de l'aide juridique. Elle dit: Voici, j'ai un problème avec mon mari, il est parti, il m'a laissé ainsi que les enfants. Je pense que j'ai besoin d'une séparation pour réclamer une pension alimentaire. Le projet de loi dit très clairement: Après que cette vraisemblance est admise. Cela est bien le fait. Elle va voir un avocat et va dire: Voici, mon mari m'a quittée ainsi que les enfants. Le projet de loi dit que cette personne est tenue d'acquitter les frais pour l'étude de sa demande au montant fixé par le règlement. On retombe sur le fameux principe du ticket modérateur; il n'y a pas de doute, le projet de loi dit très clairement que cette femme-là qui n'est pas admissible à l'aide sociale est obligée de payer un certain montant que le ministre a mentionné être entre 25 $ et 30 $, justement pour avoir cette aide juridique. Donc, qu'il ne vienne pas nous dire qu'hier soir, on niaisait, que nous sommes des démagogues, parce que cette pauvre femme a droit à l'aide juridique; c'est vrai qu'elle a droit à l'aide juridique, mais il faut qu'elle paie, pour son dossier, 25 $ ou 30 $. Je voulais juste faire la rectification de ce point de vue là.

M. le Président, comme je l'ai dit hier soir... Je suis content. Le ministre vient d'entrer. Il peut nous répondre. La différence entre quelqu'un qui reçoit l'aide sociale et quelqu'un qui reçoit peut-être 10 $ de plus par mois, c'est très peu, parce que ces deux personnes vivent en dessous du seuil de la pauvreté, parce que la différence entre l'aide sociale et ceux qui gagnent un peu plus, c'est presque rien. Donc, je voudrais rectifier cela en rappelant au ministre l'article 5 de la loi. C'est très clair. Une telle personne qui ne reçoit pas d'aide sociale, du moment qu'elle a la vraisemblance du droit, comme l'exemple de la séparation de corps ou encore quelqu'un qui a fait une chute sur le trottoir et veut poursuivre une ville, elle va voir un avocat et va dire: Voici ma cause...

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Sainte-Anne, s'il vous plaît! Vous avez terminé? C'est que j'ai beaucoup de difficulté à vous suivre. J'aimerais que cette Assemblée baisse le nombre de décibels pour pouvoir justement me permettre de vous suivre. (15 h 30)

M. le député de Sainte-Anne.

M. Polak: Merci M. le Président. Je ne vais pas répéter tout ce que j'ai dit parce que c'est plus important pour moi, maintenant, que le ministre de la Justice me suive. Je voulais juste rectifier ce que le ministre de la Justice a dit la nuit dernière à 2 heures exactement, quand il a dit: Ces personnes sont qualifiées pour l'aide juridique et ne paient pas. Cela n'est pas vrai. Ce sont seulement celles qui reçoivent de l'aide sociale qui ne paient pas, cela c'est vrai. Cette catégorie de personnes qui reçoivent de l'aide sociale ne paient même pas de ticket modérateur. Toutes les autres doivent payer ce qu'on appelle le ticket modérateur "user fee" ou frais d'ouverture de dossier, comme le ministre l'a appelé. Ces personnes sont obligées de payer entre 25 $ et 30 $. Il s'agit de milliers de personnes pour qui, très souvent, il n'y a pas de différence entre le revenu de l'aide sociale et leur propre revenu.

Merci beaucoup.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Jeanne-Mance.

M. Michel Bissonnet

M. Bissonnet: M. le Président, le projet de loi qui nous est présenté, cet après-midi, en troisième lecture est véritablement un recul réel face aux conceptions sociales-démocrates que ce gouvernement a.

M. le Président, les revenus pour permettre aux citoyens du Québec d'être admissibles à l'aide juridique n'ont pas été indexés en 1981. Ce qui veut dire qu'une personne seule avec un dépendant qui reçoit plus de 185 $ de revenu n'est pas admissible, aujourd'hui, à l'aide juridique puisqu'on a, dès ce moment, en vertu du gel de l'indexation des revenus à l'aide juridique au 1er janvier 1981, réduit l'accessibilité à l'aide juridique. Je pense qu'une personne qui gagne 185 $ et qui a un dépendant, c'est-à-dire une femme seule avec un enfant - on n'a qu'à considérer le coût de la vie d'aujourd'hui et le coût du logement qui augmentent sans cesse - je pense véritablement que cette personne n'a pas les moyens de contribuer si elle a besoin des services d'un avocat.

En commission parlementaire et à cette Assemblée, en deuxième lecture, j'ai informé le ministre - si je l'ai informé, c'est que j'ai vérifié auprès de certains dirigeants de l'aide juridique qu'on a fait cette même expérience

au Manitoba où on a permis un "user fee" tel que le mentionnait mon collègue et ami, le député de Sainte-Anne. Ce "user fee", après trois ans, a été supprimé par le gouvernement du Manitoba, car on a découvert que beaucoup de personnes qui devaient payer un ticket modérateur n'ont pas recouru aux services d'un avocat vu le montant, même minime à payer.

Je pense que c'est un net recul sur la loi qu'avait proposée à cette Assemblée le ministre de la Justice du temps, l'honorable Jérôme Choquette, qui avait présenté à la population du Québec un projet de loi permettant aux moins nantis d'avoir les services d'un avocat pour faire valoir leurs droits vis-à-vis la justice, M. le Président. Je pense qu'aujourd'hui, je voterai contre ce projet de loi parce que c'est contre les moins nantis de notre société. Quand une personne vivant avec un enfant gagne 185 $ par semaine et qu'elle n'est plus admissible à l'aide juridique entièrement comme elle l'était auparavant, je crois que c'est un recul et au point de vue des frais d'administration que cela va rapporter au gouvernement, calculant les dépenses, on m'informe, M. le Président et M. le ministre, qu'à la fin de l'année, il ne restera pas grand-chose en surplus. Cela va être un inconvénient beaucoup moins utile à nos concitoyens les moins nantis que cela va rapporter au gouvernement. De là encore, je crois que le ministre aurait eu intérêt à consulter ses collègues de la province du Manitoba qui ont essayé ce système qui n'a pas fonctionné.

J'espère que les membres de l'Opposition penseront, en votant sur ce projet de loi, aux moins nantis qu'ils représentent et qui ont besoin de l'aide juridique pour bien les représenter et sans ticket modérateur.

Le Président suppléant (M. Gagnon): M. le ministre de la Justice.

M. Marx: Si le ministre veut parler avant moi.

Le Président suppléant (M. Gagnon): M. le député de D'Arcy McGee.

M. Herbert Marx

M. Marx: Merci, M. le Président. Je ne vais pas reprendre tout ce que mes collègues et amis les députés de Jeanne-Mance et de Sainte-Anne ont dit, mais je pense qu'il faut faire le point, même une troisième fois, parce que le message doit passer à la population et nous sommes contre cette loi 71 qui modifie la loi sur l'aide juridique pour deux raisons principales: premièrement, parce que le gouvernement veut réduire la couverture de l'aide juridique et deuxièmement, parce que le gouvernement est en train de prélever un ticket modérateur sur les gagne-petit, les gens qui sont économiquement défavorisés.

Il faut se souvenir que le président du Conseil du trésor a demandé au ministre de la Justice de faire des coupures dans son ministère et c'est le ministre de la Justice lui-même qui a choisi de faire des coupures sur le dos des gagne-petit, sur le dos des gens qui ne peuvent pas payer des tickets modérateurs. Et j'aimerais répondre, pour quelques minutes, au discours que le ministre a fait hier ou avant-hier en ce qui concerne ce ticket modérateur et parler en général de ce projet de loi no 71.

Le ministre a dit que le ticket modérateur n'aura pas un grand effet sur trop de personnes, parce que finalement cela sera demandé seulement aux personnes qui ont une cause, c'est-à-dire que quelqu'un va aller voir un avocat au bureau des services juridiques et faire état de son problème. Si cette personne n'a pas de cause, elle ne sera pas appelée à payer un ticket modérateur, mais dès que l'avocat va décider que monsieur ou madame a une cause, cette personne sera appelée à payer le ticket modérateur d'environ 30 $. Et il ne faut pas oublier qu'on va demander aux personnes démunies, à des gens qui n'ont pas d'argent, de payer ces 30 $. C'est-à-dire que ceux qui reçoivent de l'aide sociale n'auront pas à payer un ticket modérateur, mais il y a beaucoup de Québécois qui vivent au-dessous du seuil de la pauvreté, qui seront appelés à payer un ticket modérateur de 30 $.

Il me semble que ce n'est pas nécessaire pour moi de répéter, une troisième ou une quatrième fois, l'attitude de ce gouvernement en ce qui concerne les tickets modérateurs. C'est le ministre des Affaires sociales qui a dit qu'un ticket modérateur, c'était un Big Mac et un Coke. Et hier, le ministre de la Justice a fait une farce, il a dit que c'était une grande farce de parler comme je l'ai fait.

Mais, le ticket modérateur, 30 $, c'est beaucoup d'argent pour quelqu'un qui a 300 $ ou 400 $ par mois pour faire vivre sa famille ou pour faire vivre deux personnes. Et de dire qu'un ticket modérateur ce n'est rien, c'est vraiment dénaturer toute cette Loi sur l'aide juridique qui a été adoptée par le gouvernement libéral en 1972. Et, pour ce qui concerne l'expression du ministre des Affaires sociales, il a parlé d'un ticket modérateur pour les frais médicaux, les visites chez le médecin, un Big Mac et un Coke. Il y a des dizaines de milliers de Québécois qui ne peuvent pas se payer le luxe d'un Big Mac et d'un Coke et qui ne peuvent pas payer ces tickets modérateurs. Il y a des gens qui n'ont pas l'argent pour se payer un ticket de métro pour aller au bureau d'aide juridique et maintenant, un ticket modérateur pour le ministre de la

Justice, ce n'est pas important. (15 h 40)

Comme deuxième point, il dit qu'il faut penser aux contribuables québécois qui paient l'aide juridique. On a pensé aux Québécois quand on a fait adopter la Loi sur l'aide juridique en 1972. À cette époque, on n'avait pas prévu de ticket modérateur parce qu'on a voulu donner ce service à la population qui en avait besoin. Maintenant, qu'on fasse des économies sur le dos des pauvres, je ne pense pas que c'est cela que les Québécois veulent. Franchement, même si c'est un gouvernement populiste qui se permet de faire et de dire n'importe quoi, je ne pense pas que les Québécois en général veulent que leur gouvernement impose un ticket modérateur aux gagne-petit et fassent cette économie sur le dos des pauvres.

C'est le député de Sainte-Marie, qui a démissionné du caucus du PQ, qui a dit que ce gouvernement a été un gouvernement social-démocrate pendant trois ans mais ne l'est plus. En fait, ce gouvernement est en train de déformer les programmes sociaux qui ont été adoptés par les gouvernements libéraux précédents. Comme mon collègue et ami le député de Jeanne-Mance l'a dit, c'est bien clair qu'un ticket modérateur va rapporter très peu au gouvernement. En effet, on a essayé cela au Manitoba. Pourquoi est-ce que le gouvernement ne nous parle pas de cette expérience faite au Manitoba? C'est un gouvernement conservateur qui a adopté un règlement ou une loi pour appliquer un ticket modérateur à l'aide juridique et c'est un gouvernement NPD qui a abrogé cette loi. Pour les services de l'aide juridique, ce sera seulement au Québec, de toutes les provinces canadiennes, où les gagne-petit seront appelés à payer un ticket modérateur.

Le ministre va répondre: Notre système d'aide juridique est le plus généreux au Canada. Ce n'est pas sûr, ce sont juste des paroles. En Ontario et ailleurs au Canada, les gens ont droit aux services de l'aide juridique aussi comme au Québec et il n'y a pas de ticket modérateur. Troisièmement, le ministre a dit: Je vais chercher des fonds au gouvernement fédéral et si j'ai 1 000 000 $ ou 1 500 000 $ de plus, je vais abroger ce règlement qui va prévoir le ticket modérateur.

M. le Président, premièrement, le gouvernement du Québec reçoit déjà des fonds du fédéral pour les services de l'aide juridique et il ne faut pas oublier que les autres provinces n'ont pas plus que le Québec et n'ont pas de ticket modérateur. Je pense que c'est un faux argument du ministre, c'est même la chanson: blâmer le fédéral. Quand les péquistes n'ont rien à dire, ils sortent toujours leur disque, ils font jouer le même disque: C'est la faute du fédéral, si on veut avoir plus d'argent du fédéral, on va administrer davantage notre système au Québec. C'est un faux argument et pour moi cela ne veut pas dire grand-chose.

Le dernier point sur lequel j'aimerais insister, c'est que ce gouvernement, le gouvernement péquiste, a refusé de recevoir et d'entendre des personnes et des associations qui ont demandé une commission parlementaire sur la Loi sur l'aide juridique. Ce matin, à 4 heures, j'ai lu la liste de tous les organismes et toutes les associations qui m'ont envoyé des télégrammes et des lettres à moi et au ministre de la Justice. Je ne veux pas relire tous les noms de ces associations mais, si les députés péquistes insistent pour que je les lise, je n'ai rien contre les répétitions. Pour ceux qui sont intéressés, il s'agit seulement de revoir les débats de ce matin.

J'aimerais seulement lire un télégramme que j'ai reçu cet après-midi du Front d'action populaire en réaménagement urbain. Cela m'était adressé et il était écrit: "Nous avons pris connaissance du projet de loi no 71 et désirons vous faire connaître notre position sur le projet dans son entier. Nous revendiquons le maintien de la gratuité des services d'aide juridique. Nous exigeons d'être entendus en commission parlementaire ou nous exigeons la tenue d'une commission parlementaire sur le projet de loi 71." Fin du télégramme. Signé: Front d'action populaire en réaménagement urbain.

C'est seulement un des télégrammes, c'est le dernier que j'ai reçu. J'ai, ici, des dizaines et des dizaines de télégrammes et de lettres de partout au Québec et le ministre a reçu les mêmes télégrammes et les mêmes lettres. Il a refusé d'entendre, de parler a ces personnes. Pour moi, c'est un comportement éhonté et j'ai demandé au ministre, à maintes reprises, pourquoi il refusait d'entendre, d'écouter ces personnes qui représentent des dizaines de milliers de Québécois. Il ne m'a jamais donné de réponse claire à l'Assemblée nationale et peut-être va-t-il le faire cet après-midi.

J'ai parlé à un certain nombre de personnes et j'ai parlé à un certain nombre de péquistes. J'ai même parlé aux députés péquistes de cette Assemblée nationale, dans les corridors et ailleurs et je peux vous dire, M. le Président, qu'ils ne sont pas heureux de ce projet de loi où le gouvernement va essayer de faire des économies de quelque cent mille dollars par année sur le dos des gagne-petit. Il y a même des ministres, ici, qui, j'en suis sûr, ont voté contre ce projet de loi au Conseil des ministres, mais c'étaient les ministres les plus durs, qui ne sont pas inconscients socialement qui ont gagné cette lutte au Conseil des ministres.

Comme je l'ai dit au début au sujet de notre position à propos du projet de loi 71, c'est surtout une déformation d'un

programme social initié et adopté par le gouvernement libéral précédent et c'est tout à fait inacceptable pour l'Opposition. C'est pourquoi, nous allons voter contre ce recul et j'invite les députés ayant une conscience sociale dans l'Opposition de voter avec nous comme ils le font de temps à autre lorsqu'ils voient que le gouvernement vraiment agit à l'encontre du bon sens. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Laurier.

M. Christos Sirros

M. Sirros: Merci, M. le Président. Je voudrais profiter de cette occasion qui m'est offerte par la troisième lecture du projet de loi en question pour rectifier d'abord quelque chose qui a été laissé comme impression, hier, lors de la prise en considération du rapport de la commission permanente de la justice quant à ce projet de loi.

M. le Président, hier, le ministre a réagi avec une certaine excitation à la suite des interventions qu'a faites l'Opposition officielle sur le projet de loi en question. J'ai dit, hier, et je le répète aujourd'hui, que le projet de loi en question a pour but, finalement, M. le Président, d'imposer un ticket modérateur à une couche particulière de la population, plus précisément les gens qui ne sont pas bénéficiaires de l'aide sociale et qui ne sont pas admissibles à l'aide sociale, mais qui sont admissibles à l'aide juridique. Cela veut dire, M. le Président...

Le Vice-Président (M. Rancourt): Monsieur le député de Laurier, excusez-moi. S'il vous plaît, s'il vous plaît! Je vais être obligé de vous demander, de nouveau, de prendre vos fauteuils et de garder le silence ou d'aller discuter à l'extérieur de cette Assemblée. M. le député de Laurier.

M. Sirros: Merci, M. le Président, pour l'effort de mettre un certain ordre dans nos travaux. Je disais, hier, pour revenir au sujet, qu'il y a finalement une partie de la population qui est spécifiquement touchée par ce projet de loi et ce sont des gens qui ne sont pas bénéficiaires de l'aide sociale, qui ne sont pas admissibles à l'aide sociale, mais qui sont admissibles à l'aide juridique. Cela veut dire, M. le Président, si mes données sont correctes, que sont admissibles à l'aide juridique les gens qui ont un revenu, les familles, par exemple, qui ont un revenu de moins de 12 000 $. Quand on sait que, de l'autre côté, l'aide sociale quant à elle pour le même type de personnes peut-être, offre un certain plancher de 6000 $, cela veut dire qu'il y a un niveau de gens qui gagnent entre 6000 $ et 12 000 $ qui seront appelés dorénavant, parce que ce gouvernement a décidé qu'il lui fallait trouver de l'argent de toute manière, n'importe comment et peu importe de qui, à payer un ticket modérateur quand ils auront besoin d'un avocat qui leur est disponible par l'entremise de l'aide juridique.

Cela brime d'abord le principe original de l'aide juridique qui était de rendre ce service accessible gratuitement.

Gratuitement, cela veut sans déboursé. Hier, le ministre nous disait que l'aide juridique serait encore gratuite, mais dès qu'on débourse 20 $, 30 $, 40 $, peu importe le montant - le ministre en décidera par règlement - ce n'est plus gratuit, M. le Président. Cela n'est plus gratuit pour des gens qui sont quand même parmi les plus démunis de la société, peut-être pas l'extrême, étant donné qu'on a éliminé l'aide sociale, mais on parle quand même d'une population qui est visiblement dans le besoin, surtout par les temps qui courent, quand on sait le taux d'inflation, etc. Le projet de loi en question vient chercher, strictement aux fins budgétaires de ce gouvernement, un montant, par ce ticket modérateur, pour aider le gouvernement - par le ministère de la Justice aussi - à sortir ou à essayer de ne pas se noyer dans l'impasse financière dans laquelle il nous a amenés depuis six ans, M. le Président.

Je répète que c'est le but du projet de loi, c'est l'effet du projet de loi. Il n'y a pas de quoi en être fier. Comme je le disais hier, je le répète aujourd'hui - si le ministre veut se lever et dire qu'on fait de la démagogie avec cela, libre à lui de le faire je crois sincèrement, M. le Président, quand on regarde les autres actions de ce gouvernement par rapport même aux populations les plus démunies, surtout au niveau de la santé, par exemple, dans les services sociaux qui ont été coupés aussi de façon draconienne, que cela s'inscrit dans ce même courant de pensée qui caractérise ce gouvernement depuis un an.

Le deuxième point que je j'ai soulevé hier, c'est que je me demandais si les prisonniers seraient admissibles à l'aide juridique. Je suis content que le ministre ait répondu que oui, hier, sauf qu'en lisant le projet de loi, ce n'est pas si clair. Le projet de loi dit que sont exemptés les gens bénéficiaires du bien-être social et ceux qui sont admissibles à l'aide sociale, mais, par définition, un prisonnier n'est pas admissible à l'aide sociale, techniquement. J'ai soulevé un point technique et j'ai dit hier au ministre qu'il faudrait peut-être qu'il le regarde, qu'il le clarifie. S'il veut bien dire devant tout le monde et devant les caméras que ce n'est pas son intention d'exclure les prisonniers, j'en serai heureux et je le remercierai d'avoir eu la franchise de nous le dire.

M. le Président, ce sont les deux petits

points que je voulais rectifier en cette troisième lecture. Je vous remercie de l'occasion que vous m'avez donnée de le faire et j'espère que ces commentaires seront pris en considération tels qu'ils ont été donnés. Merci.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Reed Scowen

M. Scowen: M. le Président, c'est la première fois que j'interviens dans ce débat sur l'aide juridique, mais j'ai été frappé, hier soir, par le discours du ministre. Je voulais simplement lui dire, ainsi qu'à la population, que je n'ai jamais de ma vie entendu un discours aussi idiot. Le ministre a dit, si je comprends bien, que nous avons aujourd'hui l'aide juridique gratuite pour à peu près tout le monde. Il présente un projet de loi pour obliger certaines personnes à payer les frais de l'aide juridique. Dans le cours de ce débat, il a proposé, il a suggéré que c'était afin de protéger les plus démunis et en assurer l'universalité. Je le cite, j'en ai pris note, M. le Président. C'est gratuit, en général. Aujourd'hui, il veut imposer ces frais aux personnes qui ne sont pas bénéficiaires de l'aide sociale, à un ensemble de personnes qui vivent en-dessous du seuil de la pauvreté. À peu près 100 000 personnes, selon ses propres chiffres, seront obligées de payer les frais de l'aide juridique, alors qu'elles ne sont pas obligées de payer ces frais à l'heure actuelle. Est-ce clair?

Une voix: C'est cela.

M. Scowen: Des gens qui ne paient pas les frais de l'aide juridique aujourd'hui vont les payer après l'adoption de la loi. C'est clair.

Pour le justifier, le ministre essaie de passer le message à la population en disant que c'est pour protéger les plus démunis et pour garantir l'universalité du service. M. le Président, si la population est capable d'avaler cette espèce de confusion dans le mensonge - mensonge est peut-être un mot trop fort - mais dans la distorsion, qu'en ajoutant, avec le projet de loi des frais aux gens qui n'en payaient pas, pour un service qui, jusqu'ici, était plus ou moins gratuit on assure davantage de protection pour les plus démunis et une universalité accrue, M. le Président, j'ai mon voyage! J'espère que la population du Québec va l'avoir aussi. Merci.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le ministre de la Justice, votre droit de réplique.

M. Marc-André Bédard (réplique)

M. Bédard: M. le Président, je n'emploierai sûrement pas les expressions utilisées par le député de Notre-Dame-de-Grâce.

Une voix: Très haut niveau de discours.

M. Bédard: Je pense que c'est un niveau de discours qui est à sa mesure. S'il avait pris la peine d'étudier ce projet de loi, ce qu'il n'a manifestement pas fait, il se rendrait compte que les étiquettes qu'il a employées tout à l'heure s'adressent surtout à lui. S'il avait pris la peine de regarder le projet de loi et d'écouter véritablement plutôt que d'affirmer n'importe quoi cet après-midi, il saurait très bien que je n'ai jamais dit que le système d'aide juridique était gratuit pour tout le monde. Vous le savez à part cela, vous pouvez bien sourire. Vous pensez qu'à force de dire des mensonges à la télévision il va toujours en rester. Mais la vérité ne semble pas vous préoccuper outre mesure. C'est à la mesure, je pense, de votre intégrité intellectuelle, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

Il y a des limites à prendre la population en otage avec des affirmations qui sont complètement en dehors de la réalité, tel que tente de le faire le député de Notre-Dame-de-Grâce. Je n'avais pas l'intention d'intervenir, mais je vais le faire parce que je crois qu'il y a une limite à la démagogie trop facile qui est faite cet après-midi sur le dos des plus démunis par le député de Notre-Dame-de-Grâce, par le député de D'Arcy McGee et par d'autres qui se sont fait entendre cet après-midi en laissant entendre n'importe quoi.

M. le Président, je n'ai jamais dit que l'aide juridique était gratuite pour tout le monde pour la bonne et simple raison que tout le monde en cette Chambre et, je dirais, toute la population sait très bien que ce n'est pas le cas. Il n'y a que le député de Notre-Dame-de-Grâce qui essaie de prêter ces propos à un de ses collègues, et ce d'une façon tout à fait pernicieuse. Je le dis encore une fois: Je pense que le député de Notre-Dame-de-Grâce a donné vraiment la mesure de sa capacité. Il a montré jusqu'à quel point il était capable d'aller en termes, je ne dirai pas de mensonges, mais de fausses représentations pour essayer de berner la population sur la portée d'un projet de loi, se disant que, au bout de la ligne, il va toujours rester quelque chose de toutes ces fausses représentations.

La démagogie des députés de l'Opposition sur le projet de loi concernant l'aide juridique est proprement inqualifiable. On a laissé entendre, à un moment donné, que toutes les personnes qui pouvaient être admissibles à l'aide juridique pouvaient être

éventuellement touchées par ce projet de loi. Le député de D'Arcy McGee le sait. Il a mentionné, au début du projet de loi...

M. Marx: Question de règlement, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Question de règlement, M. le député de D'Arcy McGee.

M. Marx: Je ne dois pas souffrir les mensonges du ministre. Je n'ai jamais dit ce qu'il a dit. On peut lire les débats...

Le Vice-Président (M. Rancourt): À l'ordre, s'il vous plaît! Ceci n'étant pas une question de règlement, M. le ministre. (16 heures)

M. Bédard: M. le Président, le député de D'Arcy McGee est drôlement nerveux parce que je n'ai pas encore dit ce qu'il avait dit et déjà il est debout pour essayer de soulever une question de règlement. Le député de D'Arcy McGee essaie, comme il le fait depuis qu'il est en cette Chambre, de faire de la démagogie pure et simple sur le dos des plus démunis. Il sait très bien, M. le Président, que ce projet de loi ne touche d'abord, en aucune façon, les gens qui bénéficient de l'aide sociale. Je le dis pour la population parce qu'il est important qu'elle le sache et qu'elle ne soit pas induite en erreur par quelque propos que ce soit. Nous avons à coeur de défendre les plus démunis.

Il n'y a pas très longtemps, justement en termes d'administration de la justice, j'ai fait en sorte, et ce, en l'espace de deux ans, de donner deux augmentations concernant la Loi sur les petites créances justement pour permettre aux plus démunis de mieux se prévaloir de ce recours. Il n'y a pas longtemps - nous l'avons adopté cet après-midi; le député de D'Arcy McGee le sait -nous avons adopté un projet de loi pour essayer d'éviter la prison à ceux qui ne sont pas capables de payer leurs amendes. C'est cela s'occuper de l'administration de la justice envers les plus démunis. Le député le sait très bien. Je pourrais y aller de beaucoup d'autres mesures que, comme ministre de la Justice et comme membre de ce gouvernement, nous avons mises au point, justement en ayant toujours à l'esprit l'idée d'aider ceux qui sont les plus mal pris.

Or, M. le Président, avant même que le député de D'Arcy McGee ait pu en faire la suggestion, nous y avons pensé, aux plus démunis.

Des voix: Ah!

M. Bédard: C'est pour cela que nous n'avons pas accepté...

Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît!

M. Bédard: L'Opposition peut rire, M. le Président, parce qu'elle peut se laisser aller à toutes sortes de fausses représentations au niveau de la population. Quand on est en train de rétablir les faits, par exemple, on voit quelle est son attitude. Il y a des dispositions extrêmement importantes dans ce projet de loi que n'ont pas évoquées le député de D'Arcy McGee et les autres députés. Je pense, par exemple, M. le Président...

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît! M. le ministre.

M. Scowen: Question de privilège. Des voix: Oh!

Le Vice-Président (M. Rancourt): Question de privilège, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Scowen: Cela fait à peu près quatre fois que le ministre fait allusion au député de Notre-Dame-de-Grâce. Je veux simplement savoir si c'est un projet de loi qui réduit ou qui augmente les frais de l'aide juridique.

Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît! Il n'y a pas de question de privilège.

M. Scowen: Augmenter ou réduire?

Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît! J'en profite, pendant que je suis debout, pour vous demander, encore une fois, s'il vous plaît, de maintenir un ordre qui sied tout à fait à ce lieu. M. le ministre de la Justice.

M. Bédard: M. le Président, s'il y a quelqu'un qui aurait pu soulever une question de privilège, c'est bien moi, à la suite des propos tenus par le député de Notre-Dame-de-Grâce, mais comme je savais par qui c'était dit, avec son degré d'intégrité intellectuelle, je n'ai pas cru bon de soulever de question de privilège parce que sa réputation est faite, ici en cette Chambre et devant la population.

M. le Président, on a, tout à l'heure, essayé de tourner en ridicule le fait qu'il y avait des dispositions dans ce projet de loi qui nous permettaient de récupérer des sommes du fédéral. Le député de D'Arcy McGee sait bien que je n'ai jamais évoqué de chicane fédérale-provinciale en ce qui a trait à ce projet de loi. Au contraire, j'ai

simplement dit que je faisais une chose qui aurait dû être faite depuis bien longtemps, à savoir un amendement qui va nous permettre - après tout, ce sont nos impôts - d'aller récupérer des autorités fédérales une somme approximative de 6 000 000 $. J'ai dit également en commission parlementaire et, cette nuit, en Chambre, que si nous pouvions, par nos démarches, obtenir encore plus du gouvernement fédéral, je m'engageais à faire en sorte que ces sommes soient affectées à l'ensemble du système de l'aide juridique de manière à aider les plus démunis.

Également, dans ce projet de loi - le député de D'Arcy McGee n'en a pas parlé -il y a une disposition très importante. Si l'Opposition ne veut rien comprendre, les contribuables québécois vont comprendre que c'est normal d'aider les plus démunis. Je pense que c'est ce que nous faisons. Il y a des dispositions, dans ce projet de loi, qui font que, lorsqu'on a donné l'aide juridique gratuite à une personne aux fins de faire valoir un droit, lorsque cette personne a fait valoir son droit et qu'elle a obtenu un montant d'argent important, disons 50 000 $, 100 000 $ et même moins, je crois - et les contribuables québécois, les "payeurs de taxes" le comprennent - qu'il est tout à fait normal - ce qui n'était pas le cas auparavant, par exemple - qu'à ce moment-là, nous récupérions, de la part de la personne qui a obtenu un montant d'argent important, une partie de ces sommes pour payer les frais de l'aide juridique qu'elle a obtenue d'une façon gratuite. Je pense que c'est une attitude responsable.

En fonction de protéger également les plus démunis, nous avons trouvé le moyen de resserrer le texte de loi de façon qu'il ne soit plus possible à des avocats de réclamer des gens qui reçoivent de l'aide juridique des sommes additionnelles à celles payées par l'aide juridique sous forme de déboursés ou encore en demandant des sommes à des tierces personnes. Je pense que c'est important, justement en fonction des plus démunis.

Le député de D'Arcy McGee peut bien essayer de faire de la démagogie facile, mais il y a des situations dont il faut tenir compte en administrateurs responsables des deniers publics. Effectivement, le système d'aide juridique que nous avons à l'heure actuelle est le système le plus généreux au Canada, la preuve en est faite. En commission parlementaire, j'ai fourni des chiffres qui permettent de faire des comparaisons avec l'Ontario, avec d'autres provinces. Il a été clairement établi que c'était le système le plus généreux. Avec ce projet de loi, l'aide juridique continue de demeurer l'un des systèmes d'aide juridique les plus généreux au Canada.

Il y a une réalité qu'il ne faut pas oublier: l'aide juridique, qui coûtait peut-être 8 000 000 $ en 1974, est passée à 46 000 000 $ en 1980-1981 et les prévisions sont que ce sera peut-être au-delà de 60 000 000 $ que pourrait coûter l'aide juridique d'ici un an ou deux. Il y a, d'une part, les personnes démunies, qui ont besoin de l'aide juridique; il y a, d'autre part, des contribuables, des "payeurs de taxes" québécois qui ont le droit d'exiger de leur gouvernement un juste équilibre entre, d'une part, leur capacité de payer et, d'autre part, leur désir d'aider les plus démunis de la société.

Je voudrais que ce soit bien clair pour ceux qui nous écoutent parce que les propos des membres de l'Opposition ont pu les induire en erreur. Toutes les personnes qui bénéficient de l'aide sociale au moment où je vous parle, ou qui sont admissibles à l'aide sociale, c'est-à-dire ayant un revenu équivalant à l'aide sociale, ne sont en aucune façon touchées par ce projet de loi. Elles avaient droit à l'aide juridique, à des services gratuits; elles continuent d'avoir droit à des services gratuits.

Pour répondre au député de Laurier, qui a soulevé une question dans ce sens, qui se demandait si les détenus, en prison, n'ayant pas de revenu, avaient droit aux services de l'aide juridique d'une façon gratuite, c'est évident qu'ils y ont droit. Je pense que la première responsabilité d'un député en cette Chambre est quand même de lire le projet de loi, de ne pas faire comme le député de Notre-Dame-de-Grâce et de parler à la dernière minute sur un projet de loi...

M. Sirros: Question de privilège, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît! M. le député de Laurier sur une question...

M. Sirros: ... de privilège.

Le Vice-Président (M. Rancourt): ... de privilège.

M. Sirros: D'abord, j'aimerais dire que j'ai bien lu le projet de loi. J'inviterais le ministre à faire la lecture de l'article 5 du projet de loi; s'il lit les mots qui sont là et non pas les intentions, il va voir que j'avais raison.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le ministre.

M. Bédard: M. le Président, je vais lire l'article. Vous allez voir jusqu'à quel point, tant sur ce point que sur d'autres qui ont été soulevés par le député de D'Arcy McGee, on essaie de charrier le monde. Cela se lit comme suit: "Après que la vraisemblance du

droit - j'y reviendrai tout à l'heure, c'est un autre élément important - ou, selon le cas, le besoin d'un service juridique a été établi, cette personne est tenue d'acquitter, pour l'étude de sa demande, les frais au montant fixé par règlement, à moins qu'elle ne soit bénéficiaire d'aide sociale ou admissible à l'aide sociale, c'est-à-dire ayant un revenu équivalant à l'aide sociale." Il me semble que c'est très clair qu'une personne qui n'a pas de revenus équivalents ou au-dessus de ce que peut représenter l'aide sociale a le droit à des services d'aide juridique gratuits autant avant ce projet de loi qu'après l'adoption de ce projet de loi. Je voudrais également mentionner un point important. (16 h 10)

M. Sirros: En vertu de l'article 96, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît!

M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Scowen: Le ministre a insinué que je n'avais pas lu le projet de loi.

Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît!

M. Scowen: J'ai la forte impression...

Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît, M. le ministre, j'aimerais entendre le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Scowen: La lecture de ce projet de loi m'avait laissé l'impression que l'objectif était de hausser les frais de l'aide juridique, non pas de les abaisser. J'ai cette impression, et je veux que le ministre la confirme ou la nie. Est-ce que le but est d'ajouter des frais pour l'aide juridique aux gens qui ne paient pas aujourd'hui, ou d'en enlever aux gens qui paient aujourd'hui? C'est la question qu'on se pose.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le ministre de la Justice.

M. Bédard: M. le Président, si le député de Notre-Dame-de-Grâce a lu le projet, il l'a mal lu. Je viens de faire état de plusieurs dispositions de ce projet de loi qui vont faire en sorte que les enveloppes globales soient plus importantes en fonction d'aider l'ensemble des plus démunis qui sont touchés, quand on parle de l'aide juridique, ceux qui sont bénéficiaires de l'aide sociale. Je ne sais pas combien il va falloir le dire de fois aux membres de l'Opposition pour qu'ils le comprennent, ces gens ne sont pas touchés, non plus que les personnes qui pourraient être admissibles à l'aide sociale, qui n'ont pas les revenus plus que ce que représente l'aide sociale. On a essayé de faire croire en cette Chambre que cela toucherait d'une façon tout à fait particulière les femmes seules qui n'ont pas de revenus. Je leur dis à la télévision qu'elles peuvent, comme dans le passé, se rendre à l'aide juridique, et si elles n'ont pas de revenus qui peuvent équivaloir à l'aide sociale, elles auront tous les services gratuits de la part de l'aide juridique. Essayer de faire croire le contraire, c'est vraiment induire la population en erreur. C'est ce que j'appelle essayer de faire de la démagogie facile sur le dos du pauvre monde.

M. le Président, ce n'est pas nous qui dénaturons les principes qui étaient à la base du système d'aide juridique, ce sont plutôt les députés de l'Opposition qui essaient de dénaturer ce projet de loi.

Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît!

M. Bédard: Deux grands principes étaient à la base du système d'aide juridique, entre autres, premièrement, la liberté de choix de la part de ceux qui demandent des services à l'aide juridique.

M. le Président, nous avons conservé ce principe de base. Également, en ce qui a trait à l'universalité des services, le député de Notre-Dame-de-Grâce a, tout à l'heure, encore une fois, induit la population en erreur parce qu'il a mis en doute le fait que nous gardions l'universalité des services. Justement, c'est ce que nous avons fait parce qu'il y avait des choix qui se posaient. Nous aurions pu décider, à ce moment, pour les personnes qui avaient besoin de notaires, qui n'avaient pas les moyens, autrement dit, qui étaient bénéficiaires de l'aide sociale, de couper les frais de notaires ou la possibilité de se rendre à l'aide juridique pour des demandes notariales. Nous n'avons pas voulu le faire. Nous aurions pu décider que le droit civil était exclu de l'aide juridique. Nous n'avons pas voulu le faire. Nous aurions pu décider que les personnes qui ont des difficultés du côté du droit criminel ne seraient pas couvertes par l'aide juridique. Nous n'avons pas voulu le faire. Que ce soit dans le domaine du notariat, que ce soit dans le domaine du droit civil ou du droit criminel, nous avons voulu conserver l'universalité de ces services. Je pense que c'était un des principes fondamentaux qui étaient à la base du service d'aide juridique.

M. le Président, et je terminerai là-dessus, une autre chose qui est très importante, je ne le dis pas pour l'Opposition, mais pour ceux et celles qui nous entendent, c'est que ce dont nous parlons, ce sont des frais de traitement de dossier qui ne s'appliquent que lorsque la vraisemblance du droit a été établie par un avocat de l'aide juridique. Ceci veut dire que toutes les personnes qui, jusqu'à maintenant,

allaient à l'aide juridique, aux fins de demander des conseils sur une cause, peuvent continuer de le faire sans exception et absolument gratuitement, parce qu'elles doivent être informées. Ce frais de traitement de dossier ne sera réclamable, ne sera exigible que lorsque le dossier ou leur demande aura été évalué et qu'il aura été décidé qu'il y avait une vraisemblance de droit leur permettant de faire un choix.

M. le Président, je termine là-dessus. Je sais que ce n'est jamais facile dans une période de compressions budgétaires d'arriver avec des projets de loi qui doivent tenir compte d'une part des besoins des plus démunis et tenir compte aussi de la capacité de payer des contribuables québécois, surtout dans la situation économique dans laquelle nous vivons. Je pense que c'est une responsabilité fondamentale que nous devons assumer, nous l'avons fait. Je suis convaincu qu'avec ce projet et même malgré, comme dirait l'Opposition, ce projet de loi, l'aide juridique demeure et continuera de demeurer au service des plus démunis et continuera de demeurer un des services les plus généreux dans l'ensemble du Canada, ce dont nous sommes fiers. Merci, M. le Président.

M. Marx: M. le Président, question de privilège.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de D'Arcy McGee, en vertu de l'article 96.

M. Marx: C'est une question de privilège, parce que le ministre m'a mal cité, soit inconsciemment, soit consciemment. J'aimerais rectifier les faits. J'ai dit que, l'an dernier, nous avons eu 240 000 personnes qui ont fait une demande d'aide juridique, 100 000 étaient des assistés sociaux qui ne seront pas appelés, maintenant, en vertu de la nouvelle loi, à payer un ticket modérateur. J'ai dit que les 140 000 qui n'ont pas payé des frais de ticket modérateur cette année seront appelés à payer un tel ticket et ce seront des gens qui vivent en-dessous du seuil de pauvreté. De plus, le ministre n'a pas répondu pourquoi il n'a pas entendu...

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député, la deuxième partie n'était vraiment pas en vertu de l'article 96, c'était de l'argumentation et le ministre, à ce niveau, n'avait pas l'obligation de répondre à votre question.

M. le ministre.

M. Bédard: M. le Président, je pourrais bien en fait soulever une question de privilège, parce que le député m'a fait dire, à un moment donné, que je m'étais exprimé dans le sens que ce n'était pas important d'avoir à adopter des mesures qui pouvaient toucher les personnes qui sont plus démunies. Je n'ai jamais dit cela et je n'ai jamais dit que ce n'était pas important les gens les plus démunis. C'est ce qu'a essayé de me faire dire le député de D'Arcy McGee, mais c'est une fausseté, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît, M. le député; En vertu de l'article 96, j'ai cru comprendre le député de Laurier de la même façon qu'on a eu une question la nuit passée.

M. le député de Laurier.

M. Sirros: C'est très bref, en vertu de l'article 96. Sur le cas des prisonniers qui sont admissibles ou non à l'aide sociale, j'aimerais simplement demander si un prisonnier, selon la Loi sur l'aide sociale, est admissible à l'aide sociale, M. le ministre.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député, c'était en vertu de l'article 100, si M. le ministre veut répondre.

M. Bédard: M. le Président, il y a deux questions. Est-ce qu'il est admissible à l'aide sociale? Vous en connaissez les critères. Votre préoccupation est de savoir s'il est admissible à l'aide juridique, parce que c'est de cela qu'on parle. Je vous ai donné la réponse tout à l'heure. Cette personne est admissible à l'aide juridique pour la bonne et simple raison qu'elle n'a pas un salaire équivalant à plus que ce que recevrait quelqu'un qui reçoit l'aide sociale. C'est clair, cela?

Le Vice-Président (M. Jolivet): Est-ce que la troisième lecture du projet de loi no 71, Loi modifiant la Loi sur l'aide juridique, est adoptée? (16 h 20)

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Sur division. M. le leader du gouvernement.

Rapport de la Régie de l'assurance-maladie et

Rapport du Conseil interprofessionnel

M. Bertrand: M. le Président, avec le consentement de l'Opposition, il y aurait à ce moment-ci trois rapports annuels à déposer: d'abord, le rapport annuel 1981-1982 de la Régie de l'assurance-maladie du Québec; ensuite, le rapport annuel 1981-1982 du Conseil interprofessionnel du Québec, le premier au nom du ministre des Affaires sociales, le deuxième au nom du ministre de l'Éducation. Le ministre de la Justice aurait un rapport annuel à déposer aussi.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre de la Justice.

Rapport du Fonds d'aide aux recours collectifs

M. Bédard: M. le Président, il me fait plaisir de déposer le rapport annuel 1981-1982 du Fonds d'aide aux recours collectifs, une autre mesure qui est de nature à aider les défavorisés.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Vous trichez un peu sur les règlements. C'est donc avec le consentement de l'Opposition et du côté ministériel. M. le leader adjoint de l'Opposition.

M. Lalonde: M. le Président, naturellement, le ministre s'étant permis quelques remarques, notre consentement était aussi assujetti à la condition que le ministre n'impose pas un autre ticket modérateur pour le recours collectif.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader du gouvernement.

M. Bertrand: Alors, M. le Président, après ce discours collectif, je vous demanderais d'appeler l'article 7 du feuilleton.

Projet de loi no 75 Troisième lecture

Le Vice-Président (M. Jolivet): Troisième lecture du projet de loi no 75, Loi modifiant la Loi sur l'aide au développement industriel. M. le député de Châteauguay et adjoint parlementaire au ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme. Est-ce qu'il y a des amendements, M. le député?

M. Roland Dussault

M. Dussault: Merci, M. le Président. Justement, j'allais dire que mon intervention ne sera pas très longue. Je pense que l'après-midi est aux courtes interventions. J'ai effectivement deux amendements à déposer, M. le Président. Le premier amendement se rapporte à l'article 2, paragraphe 2, intitulé Objectifs, qui dirait ceci au lieu du texte du projet de loi: "La société a pour objet d'administrer des programmes d'aide financière dans le but d'accélérer le développement économique du Québec, notamment en favorisant le développement des entreprises à technologie moderne et dynamique, la croissance des exportations et les activités de recherche et d'innovation. La société doit s'assurer que l'aide accordée engendre des retombées significatives au Québec, notamment en matière de création d'emplois.

Le deuxième amendement, M. le Président, se rapporte à l'article 15. Il est tout à fait technique, d'ailleurs. Il dit ceci: "La présente loi entre en vigueur le jour de sa sanction" plutôt qu'à la date fixée par proclamation du gouvernement.

Sur le premier amendement, brièvement, M. le Président, je dois dire que, lors des débats que nous avons connus ici à l'Assemblée nationale en deuxième lecture et, ensuite, à la commission parlementaire article par article, il n'y a pas eu vraiment d'opposition très fondamentale des partis sur le projet de loi. Il y a eu, évidemment, quelque réticence de la part de l'Opposition, c'est bien normal. Particulièrement sur l'article 2, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce avait demandé au ministre d'apporter des modifications, ce que le ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme avait promis de faire au député lorsqu'arriverait la troisième lecture. Alors, le ministre m'a chargé de déposer cet amendement qui tend, comme cela a été souhaité par l'Opposition, à faire en sorte que la définition de la fonction ou de l'objet de la société quant à ses objectifs soit plus précise, ce qui est maintenant le cas. C'est ce que j'avais à dire sur ces amendements.

Il serait peut-être utile de rappeler que le projet de loi no 75 fait en sorte que nous ayons maintenant une nouvelle Société de développement industriel du Québec, un instrument qui a rendu d'énormes services à la population québécoise sur le plan du développement économique jusqu'à maintenant. Le projet de loi no 75 voudrait maintenant lui donner un rôle accru, en faire un moteur encore plus imposant, plus considérable de développement économique. Je pense que tout le monde conviendra que le projet de loi no 75 donnera tout à fait ces résultats.

Pour terminer, à moins que je n'aie une réplique à faire, ce qui serait étonnant, je voudrais tout simplement souhaiter longue vie à la nouvelle Société de développement industriel du Québec.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Reed Scowen

M. Scowen: Je veux remercier le ministre d'avoir écouté nos commentaires sur l'article 2 du projet de loi. L'article 2 pour que vous puissiez comprendre de quoi il s'agit, est un article très important; c'est l'article qui définit les objectifs de la société. On trouvait, de la façon dont ces objectifs étaient rédigés dans le texte du projet de loi, qu'il y avait toute une série d'objectifs qui étaient même contradictoires. On a souligné ces points au ministre et le texte amendé qu'il a proposé, même si ce

n'est pas mot à mot ce que nous avions suggéré, je peux dire que je trouve - je pense que je parle au nom de mon collègue d'Outremont - que c'est une grande amélioration et c'est acceptable.

Juste avant de terminer je vais ajouter, pour les gens qui vont avoir la responsabilité de diriger cette société, que le ministre a ajouté à la fin de ce nouvel article l'objectif de la création d'emplois. Je veux simplement faire en sorte que tout le monde comprenne que nous avons ici une organisation dont les objectifs sont de financer les compagnies qui seront les plus avancées dans la technologie moderne, dans la technologie dynamique, dans les activités de recherche et d'innovation, et que très souvent à court terme ces activités vont entraîner des baisses dans la création d'emplois. Si nous voulons ici garantir que nous aurons beaucoup d'emploi on peut essayer de continuer avec nos secteurs traditionnels, comme le textile, qui a été traditionnellement un grand employeur mais qui n'était pas très rentable sur le plan d'une entreprise dynamique. Si vous allez à l'autre bout, si vous entrez dans le domaine des robots, par exemple, qui est une technologie des plus avancées et qui a pour effet essentiellement de remplacer les travaux des gens par les travaux des machines, c'est une technologie avancée qui ne crée pas d'emploi.

Nous sommes persuadés - et je pense que le président de la Société de développement industriel et le ministre en sont également persuadés - qu'à long terme la création d'une économie forte basée sur une population forte et bien instruite est basée sur l'idée d'une société qui est très avancée dans le domaine technologique, dans le domaine de la recherche, même si à court terme ses activités vont impliquer une création de l'emploi qui est plus faible. C'est une contradiction qui, peut-on dire, est dans l'objectif rédigé par le ministre, mais j'ai confiance que le ministre et le président de la société seront très conscients du fait que finalement l'élément essentiel c'est la modernisation, la technologie, la recherche, l'innovation. C'est cela qu'il nous faut.

En terminant, je veux simplement dire que quant à nous, ce n'est pas une nouvelle société de développement industriel. La Société de développement industriel a été créée en 1971 par un gouvernement libéral. Elle s'est renouvelée tous les ans par les nouveaux programmes, par les nouvelles idées, et j'espère, je suis certain qu'elle va continuer de se renouveler toutes les années, mais c'est quand même une institution qui est ici depuis une dizaine d'années, qui a toujours joué un grand rôle dans le développement économique du Québec et qui va continuer d'agir ainsi. Merci beaucoup.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Terrebonne.

M. Yves Blais

M. Blais: Merci, M. le Président. Cette loi no 75 vient donner à la SDI des suppléments de fonds pour faire le point, le troisième point du triangle de la prospérité économique du Québec. À la base de la maturité sociale qui est à se cimenter dans notre société, nous avions deux points très forts. Nous avions, d'un côté, les prêts agricoles et les subventions agricoles formant un point du triangle; nous avions de l'autre côté la SODICC, qui s'occupait du monde économique, culturel et du monde économique des communications. Manquait un point saillant du triangle qui était un peu plus faible, celui d'une aide directe aux entreprises manufacturières et aux industries. Ce projet de loi donne les fonds nécessaires pour assurer à la SDI le pilier nécessaire, c'est-à-dire les fonds requis pour que le triangle lui-même de la prospérité économique du Québec soit bien assis et que notre mandat de promouvoir la souveraineté autant économique que culturelle trouve dans cette loi la finalité et nous donne à nous les pouvoirs d'y aller à plein fouet dans l'avenir. (16 h 30)

Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): En vertu de l'article 96, allez-y.

M. Scowen: À moins que je comprenne mal le projet de loi, il n'y a aucune mise de fonds impliquée dans le projet de loi no 75.

Le Vice-Président (M. Jolivet): D'une façon ou d'une autre, ce n'était vraiment pas en vertu de l'article 96 mais cela a été dit. Simplement...

S'il vous plaît!

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Jolivet): ... pour les besoins du journal des Débats, il y aura donc entente et consentement pour révocation de la troisième lecture.

Adoption des amendements en commission plénière. Adoption de rapports amendés et adoption de la troisième lecture amendée du projet de loi no 75, Loi modifiant la Loi sur l'aide au développement industriel.

M. le leader adjoint de l'Opposition.

M. Lalonde: Ce sont bien les amendements présentés par le député de Châteauguay, pour qu'on se comprenne bien, au projet de loi no 75.

Adopté.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Au nom

du ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme.

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader du gouvernement.

M. Bertrand: M. le Président, je vous demanderais d'appeler l'article 8 du feuilleton, s'il vous plaît!

Projet de loi no 82 Troisième lecture

Le Vice-Président (M. Jolivet): L'article 8. La troisième lecture du projet de loi no 82, Loi visant à promouvoir la construction domiciliaire. Il faut donc d'abord au départ un consentement pour qu'on puisse procéder. Il y a consentement?

Il y a des amendements?

M. le ministre de l'Habitation et de la Protection du consommateur.

M. Guy Tardif

M. Tardif: M. le Président, en effet avec la permission unanime des membres de cette Assemblée que je remercie d'ailleurs de permettre de procéder à la troisième lecture aujourd'hui, j'ai distribué déjà un amendement au 1er alinéa de l'article 15 de façon à remplacer le mot "juillet" par le mot "septembre". Il s'agit d'un amendement pour permettre à l'Office de la construction, qui sera responsable de la perception des cotisations des employeurs et des employés de la construction d'avoir la latitude voulue dans le temps pour commencer a percevoir d'une part et évidemment à l'autre bout du processus également de terminer le travail.

M. le Président, le projet de loi no 82 vise à promouvoir la construction domicilaire... M. le Président, avant peut-être d'aller plus loin, je veux demander qu'on puisse procéder aux écritures dans ce cas, puisqu'il s'agit, à toutes fins utiles, de liquider cet amendement s'il n'y a pas d'objection avant de passer aux remarques générales.

Le Vice-Président (M. Jolivet): II y a consentement à ce qu'on puisse procéder et, à la fin, j'irai vers l'ensemble des demandes nécessaires.

M. Tardif: D'accord, M. le Président.

Le projet de loi no 82, comme je l'ai dit, vise à promouvoir la construction domiciliaire. C'est important de le noter, c'est un projet de loi qui se veut le reflet formel d'un consensus dégagé au dernier sommet économique de Québec, tenu au début du mois d'avril, et qui portait, on le sait, sur la construction de 50 000 logements.

Il est assez extraordinaire de constater qu'à partir d'un consensus au niveau des principes l'unanimité se soit concrétisée dans les faits en l'espace de seulement quelques semaines ainsi qu'en témoignèrent les divers intervenants lors de la conférence de presse présidée par le premier ministre le 8 juin dernier. C'est le fruit de cette concertation et de cette collaboration entre tous les partenaires qui a permis que ce projet de loi soit aujourd'hui devant l'Assemblée nationale. Lors de la conférence de presse, j'avais suggéré que cette concertation en vue d'oeuvrer à une relance vigoureuse de l'économie et de l'emploi, comme l'indiquent les premières lettres des mots clés, puisse peut-être s'appeler "Corvée-Habitation". Il semble que l'image ait été retenue puisqu'on se réfère maintenant couramment au programme sous ce nom. Or, Corvée-Habitation, ce sera pour désigner le nom du programme visant la contruction des 50 000 unités de logement entre juin 1982 et mars 1984. Ce sera également le nom de l'organisme sans but lucratif chargé d'administrer le fonds de relance de la construction, où on retrouvera incidemment des représentants de chaque groupe de partenaires. Ce sera également la façon de désigner la somme des contributions additionnelles qui pourront provenir des municipalités et des différents corps professionnels; je pense aux architectes, ingénieurs, arpenteurs-géomètres et notaires. Et, évidemment, ce sera également le nom pour désigner l'apport de tous ceux qui voudront y participer en s'assurant d'abord qu'ils font fonctionner le programme en se faisant construire, mais aussi que les matériaux et accessoires utilisés pour la construction de leur maison soient fabriqués au Québec, permettant ainsi de procurer du travail à des travailleurs québécois dans des industries de chez nous.

Pour que ce programme de relance démarre, il fallait que les différents partenaires ratifient l'accord de principe intervenu lors de la conférence de presse. Or, ceci a été fait la semaine dernière et il me plaît d'en informer cette Chambre. Cinq associations patronales sur six jusqu'à maintenant ainsi que quatre centrales syndicales, les quatre centrales syndicales de la construction, ont confirmé leur volonté de contribuer financièrement au programme. Un décret précisant les modalités de leur contribution sera proposé pour adoption au Conseil des ministres dès cette semaine, M. le Président. Pour leur part, plusieurs institutions financières ont déjà donné leur accord. C'est le cas notamment des caisses populaires, de la Banque Nationale et de la Banque d'Épargne. Il reste à préciser avec elles certaines modalités d'administration du

programme. Dans ces conditions donc, M. le Président, il faut considérer que le programme de relance de la construction est à peu près prêt pour le démarrage. Les ménages doivent dès maintenant envisager l'achat de logements au taux hypothécaire avantageux de 13 1/2% pendant trois ans et les promoteurs doivent dès maintenant se mettre à offrir des logements modèles qui suscitent l'intérêt des acheteurs.

Au retour des vacances de la construction, les formulaires d'admission au programme devraient être disponibles dans les caisses populaires, dans les banques et dans les autres institutions. Permettez-moi de résumer succintement les paramètres du programme afin que l'on puisse savoir exactement ce à quoi il donne droit.

Comme cela a déjà été annoncé, tout logement mis en chantier après le 25 mai 1982 et avant le 31 décembre de la présente année peut bénéficier d'une hypothèque maximale de 54 000 $ au taux de 13 1/2 % garanti pour trois ans. Pour les unités mises en chantier après cette date mais complétées avant le 31 mars 1984, celles-ci bénéficieront d'un taux d'intérêt favorable qui sera déterminé en décembre 1982 et qui sera fixé lui aussi pour une période de trois ans. Quant aux conditions pour bénéficier de ce taux, elles sont réduites au minimum. En ce qui concerne les personnes, tout citoyen ou citoyenne, déjà propriétaire ou non, qui se fait construire une maison ou un logement reconnu pour les fins du programme a droit au taux de 13 1/2% garanti pour trois ans.

Deuxièmement, en ce qui concerne le type de bâtiment, de construction, est admissible au rabais d'intérêt tout type de maison ou de logement moyennant que le prix n'excède pas 60 000 $ par logement, que celui-ci soit situé dans un immeuble d'au plus quatre étages et soit construit par des employés et des employeurs de la contruction participant au fonds de relance. Le logement peut prendre l'une ou l'autre des formes suivantes: de type unifamilial, duplex, triplex, quadruplex, quintuplex, condominium, c'est-à-dire copropriété divise, et coopérative d'habitation.

Une autre particularité importante pour ceux et celles qui feront construire avant le 31 décembre 1982, c'est, je le rappelle, la réduction additionnelle du revenu imposable d'une somme de 2000 $ dans le cas du régime enregistré d'épargne logement, tel qu'annoncé dans le discours sur le budget. Dans le cas où le logement est acquis par les deux membres d'un ménage, la déduction du revenu imposable peut atteindre le cas échéant jusqu'à 6000 $ si les deux membres ont chacun un REEL. De plus, j'invite tout en leur demandant de faire preuve de compréhension, les citoyens et citoyennes du Québec à s'informer auprès de leur municipalité et chez les différents corps professionnels des différents avantages offerts par ceux-ci dans le cadre du programme de Corvée-Habitation. (16 h 40)

II va sans dire, M. le Président, et je le répète, que ces mêmes citoyens et citoyennes non seulement peuvent mais doivent faire partie de cet effort de concertation en se faisant construire, certes, mais en s'assurant aussi du contenu québécois dans la construction de leur maison. C'est la meilleure façon, M. le Président, de maximiser les effets de cette injection massive dans l'économie québécoise.

M. le Président, 50 000 logements, au prix moyen de 50 000 $ par logement, signifient des investissements de 2 500 000 000 $, soit plus que ce qu'ont produit beaucoup de mégaprojets et avec infiniment plus de retombées en termes d'emplois directs et indirects, étant donné le ratio logement-personne-année qui est voisin de l'unité, ce qui veut donc dire que 50 000 logements produisent au moins 50 000 emplois mesurés en termes d'année-homme.

En terminant, M. le Président, il nous reste à souhaiter que cette solidarité manifestée par les Québécois se propage à d'autres secteurs et que, d'autre part, le gouvernement d'Ottawa ne vienne pas, encore une fois, neutraliser les efforts des Québécois par de nouvelles hausses d'impôt et qu'il prendra, je le souhaite, les mesures nécessaires pour que les rentrées fiscales dont il profitera grâce à l'effort de tous soient retournées sous une forme ou sous une autre dans l'amélioration de l'habitation au Québec.

Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Mont-Royal.

M. John Ciaccia

M. Ciaccia: II y a une année, à peu près à ce temps-ci, M. le Président, que le gouvernement faisait adopter un projet de loi pour favoriser l'accès à la propriété. C'était au mois de juin 1981. Les critiques que nous avons apportées à ce moment-là, M. le Président, allaient dans le sens que ce projet de loi était trop restrictif, trop restreignant, même on était allé jusqu'à dire qu'il était discriminatoire. On avait suggéré au gouvernement de permettre l'accès à la propriété non seulement aux familles qui avaient un enfant de moins de 12 ans mais à toute la population. Autrement dit, M. le Président, l'année dernière à ce temps-ci, nous avons demandé au gouvernement d'introduire un programme de subventions pour les taux hypothécaires dans tout le Québec pour toute la population pour promouvoir la construction domiciliaire. Les indices étaient là, il y avait une chute

désastreuse dans la construction et la mise en chantier de maisons unifamiliales et on avait demandé au gouvernement d'agir.

Le gouvernement, M. le Président, a refusé, il s'est entêté à garder son projet de loi restrictif. Une année plus tard, en juin 1982, le gouvernement vient nous demander d'adopter un projet de loi qui aurait du être adopté l'année dernière s'il avait écouté les recommandations et suggestions de l'Opposition officielle. Nous savons ce qui est arrivé durant la dernière année dans le secteur de la construction, spécialement dans le secteur domiciliaire.

Le ministre, dans sa conférence de presse, a dit que son programme avait connu une réussite, il y avait eu 7685 demandes mais il a oublié de dire qu'il n'y en avait eu seulement 2685 acceptées et 1013 de plus acceptées conditionnellement. Mais, même s'il y avait eu environ 3000 demandes acceptées, le fait demeure que, durant les douze derniers mois et spécialement durant les cinq ou six derniers mois, la construction domiciliaire a été absolument désastreuse. Il y avait nécessité que le gouvernement agisse pour introduire un programme de subventions pour les taux d'intérêt.

Or, M. le Président, le gouvernement s'est donné un pouvoir de réglementation dans le projet de loi no 82. On ne nous a pas donné les détails du projet de loi, le ministre en a parlé en troisième lecture, mais ici on aurait besoin aussi de faire une mise en garde, M. le Président, parce que la même chose est arrivée l'année dernière. Le gouvernement avait annoncé son programme au mois de juin, avait donné les détails et cela lui avait pris six mois avant que les règlements soient publiés, deviennent officiels. Non seulement cela, mais quand les règlements ont été publiés dans la Gazette officielle, quand ils ont été rendus publics, juste avant Noël, ils avaient été changés. Le programme qui avait été annoncé au mois de juin n'était pas le même qui a été mis en application au mois de décembre.

Le ministre sait bien quels sont les changements qu'il a faits. Au lieu que le taux d'intérêt soit de 0% pour les premiers 10 000 $, 5% la deuxième année et 10% maximum pour la troisième à la cinquième année, puisque les taux d'intérêt avaient augmenté, le gouvernement a changé son programme. En effet, le taux d'intérêt sera de 0% pour les premiers 10 000 $, pour la première année, un tiers des taux en vigueur la deuxième année et deux tiers pour la troisième à la cinquième année. C'était une modification et il ne faudrait pas que la même chose se produise ici. Il ne faudrait pas que les règlements, que le ministre va nous annoncer, soient différents de ceux qu'il nous a annoncés aujourd'hui. Le troisième point est qu'il y a urgence. Une fois qu'on annonce un programme de ce genre, on bloque les mises en chantier. On reçoit des télégrammes et des téléphones de différents groupes demandant: Quand le programme va-t-il être mis en application? J'ai remarqué que le ministre ne nous a pas dit qu'il était maintenant en application, il nous a dit - si j'ai bien compris ses paroles - qu'il est à peu près prêt pour le démarrage. Il faudrait s'assurer que la réglementation soit mise en application le plus tôt possible.

Lorsque le ministre, au premier alinéa de l'article 15, remplace le mot "juillet" par le mot "septembre", j'espère que ce n'est pas une indication que les règlements ne seront pas publiés avant le mois de septembre. Si c'est le cas, non seulement avez-vous perdu la construction du printemps et de ces mois-ci, mais vous allez perdre tout le mois d'août et cela va retarder indûment les mises en chantier.

Il y a un autre problème. Nous avons reçu - je suis bien certain que le ministre a dû en recevoir aussi - des télégrammes de différents organismes, de différents entrepreneurs au sujet du budget d'aide a l'habitation. Je cite un télégramme: "Résultat: vente bloquée des maisons en stock. Acheteurs prêts à perdre leur dépôt, entraîne poursuites judiciaires, etc. Suggestion: inclure ces maisons dans le programme. Nous serions prêts à payer 2% du prix de vente pour les inclure dans le programme. Raison: relance retardée, il faut d'abord vendre les maisons neuves, déjà construites, sinon, pas de nouvelles constructions."

Je continue à citer le télégramme: "Les constructeurs actifs sont pénalisés pour avoir tenté de relancer l'économie avant la présentation du budget. Ceux-ci relanceront la construction si l'aide est appliquée sur les maisons en stock." C'est signé par différentes corporations ou sociétés qui sont dans le domaine de la construction.

C'est un problème. Des maisons ont été construites, des maisons neuves. Je voudrais que le ministre nous dise ce qu'il va advenir de ces maisons qui sont déjà en stock. Est-ce possible de les inclure dans le programme ou de faire certaines modifications pour ne pas les exclure totalement? Une suggestion a été faite ici, de payer une prime de 2%; ce serait quelque chose d'acceptable, semble-t-il, aux personnes impliquées.

Comme le disent ces gens, il ne faudrait pas, parce que le gouvernement a tardé à annoncer son programme, pénaliser les gens qui ont voulu faire la relance de la construction. Ce problème ne se serait pas posé si, l'année dernière, dans votre programme d'accès à la propriété, vous aviez ouvert le programme à tout le monde qui se qualifiait pour les maisons de 60 000 $ et moins sans les restreindre aux familles qui avaient un enfant. (16 h 50)

M. le Président, un autre problème qui existe est celui du coût de la construction. Le ministre pourrait-il nous dire comment il va s'assurer que les contributions qu'il exige des employeurs n'augmenteront pas le coût de construction des maisons? Dans sa conférence de presse, il a parlé d'une mesure modifiant la Loi sur la protection du consommateur. On remarque que dans le projet de loi 82 il n'y a pas une telle mesure. J'aimerais que le ministre nous explique comment il va s'assurer que les sommes qui sont payées par les employeurs n'augmenteront pas d'une façon artificielle le coût du produit, le coût des maisons.

M. le Président, il y a aussi les participants dont le ministre avait parlé. On remarque que les architectes ne sont pas inclus dans le projet de loi. Il est vrai que les architectes ne sont pas impliqués dans des maisons de 60 000 $ et moins, et en plus, leurs règlements leur permettent déjà de réduire leurs tarifs, même s'ils sont impliqués, mais je crois que le ministre savait cela avant sa conférence de presse. Pourrait-il nous expliquer pourquoi les fournisseurs de matériaux ne sont pas compris? Le ministre des Finances a augmenté sa taxe de vente de 1% sur les matériaux de construction, ce qui va augmenter, encore une fois, le coût de construction des maisons. Le ministre pourrait peut-être nous expliquer pourquoi les fournisseurs de matériaux ne sont pas inclus dans le projet de loi. Il va peut-être y avoir une autre déclaration ministérielle du ministre des Finances qui va imposer une taxe spéciale aux fournisseurs de matériaux qui ont refusé ou qui ont négligé de faire partie du programme.

On remarque aussi que les institutions financières n'ont pas toutes donné leur accord jusqu'à maintenant. Nous devons déplorer la façon d'agir du ministre des Finances qui, par une loi punitive ou un règlement punitif, veut pénaliser les institutions financières et les organismes qui ne sont pas d'accord avec lui. Je crois, M. le Président, qu'il aurait dû y avoir un autre moyen de procéder plutôt que de faire une réglementation, une taxe spéciale sur certains secteurs de notre société, certains organismes qui ne sont pas d'accord avec le programme du ministre. Je déplore qu'ils ne se joignent pas au programme pour réduire les taux d'intérêt de 19% à 18,5%. De ce côté-ci de la Chambre, nous aurions voulu que toutes les institutions financières participent au programme de relance de la construction domiciliaire. Ceci étant dit, le fait que quelques-unes d'entre elles ne participent pas n'est pas une raison pour imposer le genre de taxe dont le ministre des Finances a parlé dans sa déclaration ministérielle aujourd'hui. C'est un précédent très dangereux, M. le Président, et je crois que dans un pays démocratique, ce n'est pas une façon d'agir. Ce n'est pas la bonne manière, d'amener les gens qui ne sont pas d'accord avec nous, par des lois matraques, des taxes spéciales et des taxes discriminatoires, à partager le point de vue du gouvernement.

M. le Président, j'avais donné certains chiffres, en deuxième lecture, mais malheureusement, durant le discours du ministre en deuxième lecture, j'avais d'autres travaux et je n'ai pu être en Chambre et me lever sur une question de privilège que j'aurais pu faire sur les propos du ministre. Je peux dire seulement ceci: Les chiffres que j'ai donnés quant aux mises en chantier dans le domaine de la construction, soit domiciliaire, soit commerciale, le pourcentage du Québec vis-à-vis du reste du Canada, ce sont des chiffres officiels, des chiffres de la Société canadienne d'hypothèques et de logement et je défie le ministre de les contredire. Je peux comprendre les propos du ministre, en deuxième lecture, qui demandait au chef de l'Opposition de changer le porte-parole du dossier de l'habitation. M. le Président, si j'étais passé par les mêmes expériences que le ministre de l'Habitation, avec le dossier de la Société d'habitation du Québec, je comprendrais son désir que je m'occupe d'autres dossiers. Je vous comprends bien.

M. le Président, si vous me permettez, ce programme affecte plusieurs personnes de langue anglaise. Je voudrais prendre juste quelques minutes pour faire un résumé du programme, afin de leur donner un peu d'information et de clarifier le programme que vient d'annoncer le ministre.

The Government proposes to grant subsidies to lower the interest rates for single-family dwellings, to reduce the interest rate to 13,5% on dwellings having a maximum cost of 60 000 $, whether it be a single-family unit, a condominium or an undivided ownership with a maximum of four storeys. However, as usual, with this Government there are a lot of misrepresentations in the way it goes about to announce its programs. The Government held a press conference, but it did not have the details of the program; the purpose of the press conference was to tell us that they would subsequently announce the details and get the consent of all the parties.

Unfortunately, not all of the parties who were solicited by the Government have accepted to be a part of the program. One association of employers has refused. However, they will be forced to participate because a majority of employers have accepted. As for the financial institutions, some of them have accepted, others have not. Unfortunately, this morning, the Minister of Finance imposed a special tax on the financial institutions that do not want to

participate in this program. The applauses that you hear are those of the Parti québécois members, applauding a punitive measure by the Minister of Finance. Certain people do not agree with his point of view and it is a very dangerous precedent, Mr. Speaker, that the Minister has set today in a democratic Government. It is unfortunate.

We hope that the Minister will revise his decision because that kind of action is not conducive to creating a climate attracting investment in Québec and we all know that unless we create jobs, unless we have a social atmosphere where people will come and invest money, a program to encourage the building of homes will not be successful.

M. le Président, je voudrais aussi demander au ministre si le chiffre de 50 000 logements inclut les mises en chantier qui auraient eu lieu sans le programme ou si c'est en plus des mises en chantier qui auraient eu lieu sans le programme qui vient d'être annoncé par le ministre.

En conclusion, nous sommes favorables à un programme de relance de la construction domiciliaire. Nous remettons quelque peu en question certaines des modalités que le gouvernement nous a annoncées. Nous voudrions demander aux différents participants, les notaires, les autres professionnels, quel est le montant que cela peut représenter en épargne pour l'acheteur éventuel. Le ministre a certainement dû consulter ces différents corps professionnels. Il a dû se faire donner des chiffres. Ce serait bon qu'il nous le dise pour que la population soit informée, sache ce que cela peut représenter. (17 heures)

Nous ne voyons pas d'invitation à une participation de la Société canadienne d'hypothèques et de logement. Nous savons que c'est une société qui oeuvre depuis 1954, qui a beaucoup d'expérience. Un des problèmes qui existent maintenant, M. le Président, c'est les différents programmes à différents paliers de gouvernement. Il y a des programmes municipaux, des programmes du Québec, des programmes fédéraux. Je pense qu'il faudrait avoir un organisme qui puisse coordonner ces différents programmes. Par exemple, 44 000 000 $ venant de la Société canadienne d'hypothèques et de logement n'ont pas été utilisés au Québec, parce qu'il n'y a pas eu de demande dans le domaine des coopératives et des sociétés à but non lucratif.

M. le Président, c'est bien beau de faire des querelles constitutionnelles, mais quand cela vient dans des programmes d'aide à la construction, on a un exemple parfait ici que le manque de coordination peut seulement faire peur à une catégorie de personnes, c'est la population. Si vous étiez un peu plus de bonne foi et si vraiment, au lieu de faire de la politique avec vos spectacles de conférences de presse prématurées, vous aviez obtenu ou si vous demandiez la coopération en essayant de faire la coordination de tous ces programmes, je pense que les bénéficiaires seraient les consommateurs.

Or, M. le Président, en conclusion, tous les éléments sont là pour relancer la construction, les mises en chantier sont presque nulles, la demande est là. Si la construction domiciliaire n'est pas relancée, je pense que le gouvernement aura seulement lui-même à blâmer. Merci.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre de l'Habitation et de la Protection du consommateur, dans votre droit de réplique.

M. Guy Tardif (réplique)

M. Tardif: M. le Président, je ne peux pas laisser passer toutes ces affirmations grosses, pour ne pas dire grossières, du député de Mont-Royal. J'espère que, cette fois-ci, il va rester là, parce que, quand j'ai donné la réplique en deuxième lecture, il est parti, de sorte que j'ai donné la plupart des réponses aux questions qu'il soulève maintenant. Je suis heureux de voir que le chef de l'Opposition est également là. C'est vrai qu'en commission parlementaire j'ai suggéré que ce soit le député de Mégantic-Compton qui soit le critique officiel de l'Opposition, parce qu'il posait des questions très pertinentes en tant qu'ancien entrepreneur en construction, alors que le député de Mont-Royal - je m'excuse de le dire comme cela - a évoqué un dossier auquel je suis évidemment très sensible, M. le Président. Je lui dirai qu'il aurait peut-être plus d'expérience à bâtir des centres commerciaux que des immeubles à logement. M. le Président, je n'entrerai pas là-dedans aujourd'hui. Cela prend quand même un certain culot de la part d'un député comme celui de Mont-Royal, qui était membre d'un gouvernement...

M. Ciaccia: M. le Président...

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Mont-Royal, sur...

M. Ciaccia: Une question de privilège.

Le Vice-Président (M. Jolivet): ... une question de privilège.

M. Ciaccia: Je voudrais demander au ministre d'expliciter sa remarque. Que voulait-il dire par son affirmation sur les centres commerciaux et le secteur domiciliaire? Si on veut faire un débat là-dessus, je suis prêt à le faire.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. Tardif: M. le Président, j'ai tout simplement dit...

M. Ciaccia: II ne faudrait pas, M. le Président, faire des insinuations parce qu'on est fâché des propos que j'ai tenus sur le projet de loi no 82.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. Tardif: M. le Président, je n'insinue rien, je fais tout simplement état de l'expérience passée du député de Mont-Royal dans la construction de centres commerciaux, aussi bien sur la Côte-Nord que partout au Québec, pour Ivanhoe Corporation.

Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! M. le député de Mont-Royal, sur une question de...

M. Ciaccia: De privilège, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): privilège.

M. Ciaccia: Je peux affirmer de mon siège, M. le Président, que je n'ai jamais, à aucun moment, construit de centre commercial, que ce soit à Montréal ou sur la Câte-Nord. Cette insinuation du ministre de l'Habitation et de la Protection du consommateur est peu digne d'un ministre.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. Tardif: M. le Président, encore une fois, je ne relèverai pas, moi non plus, les insinuations du député de Mont-Royal sur les travaux de la Société d'habitation dans le dossier de réparations majeures où elle n'a fait que réparer le gâchis que le député connaît aussi bien que moi, puisqu'il était là à l'époque. M. le Président, on va fermer ce dossier et on le reprendra à un autre moment, si cela intéresse le député. Ce que je veux tout simplement dire, c'est que je trouve qu'il faut quand même être drôlement...

M. Ciaccia: M. le Président, question de privilège.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Mont-Royal, sur une question de privilège.

M. Ciaccia: Je n'accepterai pas les insinuations du ministre quand il dit qu'on va fermer ce dossier. Il n'y a pas de dossier. S'il a des affirmations à faire, qu'il les fasse maintenant.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. Tardif: M. le Président, je fais état, entre autres, d'un article du Devoir paru au mois de décembre dernier. Le député l'a lu aussi bien que moi. Cet article fait état justement de cette expérience fort pertinente qu'il avait dans un secteur, qui était celui de l'implantation des centres commerciaux, mais je suis prêt à fermer ce dossier et à revenir au sujet qui nous intéresse.

Je dis qu'il faut être drôlement culotté pour avoir fait partie d'un gouvernement qui a aboli le seul programme d'aide à l'habitation familiale qui existait au Québec, qui avait été instauré par le régime Duplessis en 1948 et que votre gouvernement, à l'époque, a aboli, c'est-à-dire en 1974. Le député de Mont-Royal dit: Vous avez mis au point un programme d'aide à l'accession à la propriété à la même époque l'année dernière et il n'a pas atteint les objectifs qui étaient fixés. Encore là, c'est faire preuve véritablement de courte vue de la part du député de Mont-Royal puisqu'il sait pertinemment que ce qui s'est produit entre le printemps dernier et maintenant, c'est la montée en flèche des taux d'intérêt.

Lorsque le programme d'aide à l'accession à la propriété résidentielle a été lancé, au mois de mars ou au mois d'avril dernier, les taux d'intérêt étaient autour de 15%. Ils ont atteint 21% au cours de l'hiver. À moins d'être complètement aveugle, c'est ça la véritable cause de la baisse dramatique de la construction. C'est une baisse dramatique non seulement au Québec...

M. Ciaccia: M. le Président, question de privilège.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre, je vais essayer de bien protéger votre droit de parole en vertu de l'article 100 et je vais demander au député de Mont-Royal s'il accepte, dans ce cas-ci - sinon je vais lui donner la parole - d'utiliser l'article 96. Ce n'est pas cela? L'article 49?

M. Ciaccia: L'article 49, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Mont-Royal, en vertu de l'article 49.

M. Ciaccia: Le ministre vient d'induire

la Chambre en erreur. Les taux d'intérêt n'étaient pas de 15% à l'annonce du programme, ils étaient à plus de 18%.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. Tardif: M. le Président, les taux d'intérêt au printemps étaient de 15% et une fraction. C'est au mois de juillet qu'ils étaient de 18%. Ils ont monté à peu près de 1% par mois jusqu'à atteindre 20% et 21% aux mois de décembre et janvier. Je mets le député de Mont-Royal au défi.

Ce sont ces taux d'intérêt, qui s'appliquent non seulement au Québec, mais partout, qui expliquent la baisse dramatique de la construction non seulement au Québec, mais partout au Canada. Les statistiques de la SCHL, que j'ai citées lors de ma réplique aux discours de deuxième lecture, indiquent des baisses de 50% à 60% de la construction cette année par rapport à l'année dernière. Ce n'est pas propre au Québec. Évidemment, le député de Mont-Royal persiste à dire que c'est une situation particulière au Québec.

L'autre point qu'il est important de souligner, c'est que les chiffres de mises en chantier au Québec seraient encore de beaucoup inférieurs si ce n'était du programme d'aide à l'accession à la propriété qui, à l'heure actuelle, suscite des demandes de l'ordre de 1200 à 1500 par mois, dont à peu près moitié-moitié pour le logement neuf et le logement ancien. Deuxièmement, le député de Mont-Royal dit que ç'a pris un certain temps à faire commencer le programme. C'est vrai, c'était un nouveau ministère que j'avais l'honneur d'instituer, sauf que ce programme était rétroactif au 1er mai, de sorte que personne n'a rien perdu. Cela, le député de Mont-Royal ne le dit pas.

Deuxième élément. Le député veut nous faire ce que j'appelle le coup qu'ils ont fait à mon collègue, le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, cette semaine, en disant: Écoutez, le programme d'établissement de 50 000 $ pour les jeunes agriculteurs, c'est notre idée, vous n'avez fait que le mettre en forme. Voyons donc, M. le Président! Ils sont en train de nous dire que le programme de relance de la construction, c'est aussi leur idée et qu'on ne fait que le mettre en forme. La seule chose que vous avez faite dans le domaine de la construction à l'époque, ç'a été d'abolir le seul programme qui existait au Québec. C'est ça que vous avez fait.

Je suis d'accord, d'autre part, qu'il y a urgence à faire commencer ce programme parce que l'industrie est vraiment stagnante présentement. Je suis également d'accord avec le fait que nous devons établir avec les institutions financières les modalités administratives. Elles nous l'ont demandé, ça m'apparaît raisonnable. Ce qui est important, c'est que les gens sachent qu'ils peuvent se prévaloir de tel taux d'intérêt pour une période fixe. Le député de Mont-Royal dit: Comment nous assurer que les coûts de la contribution accrue des entrepreneurs ne seront pas reflétés dans le coût des maisons? (17 h 10)

M. le Président, cette contribution des entrepreneurs est de l'ordre de 0,75% du taux d'intérêt sur une réduction de 5,5% puisque, quand on parle d'un taux d'intérêt de 13,5% alors qu'il est actuellement de l'ordre de 19% ou 19,25%, cela veut dire une subvention de 5,5% à 5,75% du taux d'intérêt.

Le député a parlé de la Loi sur la protection du consommateur. Ce que j'ai dit je l'en ai informé en commission parlementaire - c'est que dans les délais qui nous étaient impartis, il nous était impossible de réviser la Loi sur la protection du consommateur présentement, mais que nous allions tenter de remédier à cette situation dès l'automne. Ce qui nous apparaissait important, c'était, pour l'instant, de faire démarrer la construction.

Il a posé la question sur les architectes et il a donné la réponse lui-même, d'autant plus que je la lui avais donnée aussi, en commission parlementaire. Cet ordre professionnel, contrairement aux notaires, aux ingénieurs et aux arpenteurs-géomètres, n'a pas de tarif minimal. Donc, on n'a pas à les autoriser à consentir un tarif plus bas que celui prescrit par règlement puisqu'il n'y a pas de tarif minimal prescrit présentement.

Le député nous a parlé des 50 000 logements en nous disant: Est-ce que ce sera 50 000 logements en tout et partout ou en plus? Je dis, M. le Président, que ce sera 50 000 logements en plus. Maintenant, il est bien évident qu'il y a des gens qui, présentement, parmi les 20 000 logements qui auraient été mis en chantier, vont faire une demande d'admission au programme et qui vont donc s'en prévaloir, si bien qu'il se pourrait que le nombre total de logements subventionnés à l'intérieur du programme dépasse le nombre de 50 000 et atteigne 60 000 ou 65 000 en raison de ces plages de recoupement.

Le député de Mont-Royal fait une affirmation grossière également lorsqu'il dit que le Québec n'utilise pas toutes les sommes. C'est une vieille rengaine, un disque usé. Je ne sais pas où il a pêché cela. Je le mets au défi, M. le Président, publiquement, de fournir des preuves à l'appui de ce qu'il dit puisque, présentement, toutes les coopératives d'habitation au Québec se plaignent qu'on manque de financement en vertu de l'article 56.1. Partout, dans toutes les régions du Québec, elles viennent nous voir pour avoir accès au programme

LOGIPOP et nous disent: On a fait une demande à la SCHL et on manque de fonds présentement. C'est entièrement faux. Toutes les sommes qui étaient disponibles ont été utilisées et même plus, c'est la SCHL qui, présentement, nous dit: On n'est pas capable de suffire à la demande.

Également, le député de Mont-Royal, dans son intervention qu'il a terminée aussi bien... Il pose la question à propos des matériaux de construction. Or, il devrait savoir, puisqu'il était en commission parlementaire, qu'un amendement a été apporté à l'article 2, soit les articles 2.1 et 2.2, pour dire ceci: "À la demande des parties contractantes à un décret adopté en vertu de la Loi sur les décrets de convention collective qui régit les activités reliées à la fabrication, à l'installation de matériaux ou d'assemblage de matériaux de construction, le gouvernement peut, par règlement..." Nous avons donc donné ouverture, en partie, à ce que le député de Mont-Royal a demandé. Il était en commission, néanmoins, M. le Président, et je m'interroge sur la raison pour laquelle il a posé cette question.

Évidemment, le député de Mont-Royal nous dit: Écoutez! Il y a une association patronale qui a refusé. Évidemment, c'est son droit de dire qu'il y en a une sur six qui a refusé, mais cela aurait été plus conforme, je pense, à l'honnêteté et à l'intégrité s'il avait dit: II y en a cinq sur six qui ont accepté. Cela aurait été, je pense, un peu plus conforme à ce qui est l'espèce de consensus qui s'est dégagé. De la même manière, il n'a pas fait état que les quatre centrales syndicales se sont engagées par écrit.

Il a parlé des banques et il a dit que c'est une mesure punitive. Or, les caisses populaires ont spontanément accepté. La Banque Nationale a officiellement accepté et la Banque d'épargne également a officiellement accepté. Les autres banques, effectivement, ont demandé que les pourparlers se prolongent. On a dit: Maintenant, c'est le temps d'accoucher. Vous pouvez choisir votre image. Est-ce que vous voulez choisir une image comme une institution financière au service des Québécois, prête à faire son effort, surtout au moment où une commission parlementaire à Ottawa étudie les profits des banques, ou si vous voulez avoir justement l'image d'une institution qui soit complètement déconnectée de la réalité québécoise? Je pense qu'elles ont le choix, d'autant plus que la déclaration ministérielle de mon collègue, ce matin, les exemptera de la taxe pour peu qu'elles veuillent bien contribuer au fonds de relance comme tout le monde. Donc, elles peuvent choisir leur image.

M. le Président, en terminant, je n'ai pas d'autres commentaires à faire à la suite de cette intervention du député de Mont-

Royal. Tout ce que je souhaite, c'est que le maximum de Québécois se prévalent de ce programme qui va être relativement coûteux pour l'ensemble de la société québécoise. On en a parlé. C'est un effort global d'environ 500 000 000 $ en termes d'aide, de bonification de taux d'intérêt dont les contributions viennent de diverses sources, c'est une injection de 2 500 000 000 $ dans l'économie québécoise. C'est énorme, c'est appréciable, et j'espère qu'il pourra s'en réaliser dans tous les comtés des gens qui sont encore ici et qui suivent la fin de ces débats. Je comprends que, dans certains comtés, l'espace est peut-être plus restreint qu'ailleurs, c'est la raison pour laquelle nous invitons...

Le député de Mont-Royal disait: Pourquoi parler des architectes, quand on sait que, dans le cas des petites propriétés, on n'a pas recours à un architecte? M. le Président, je vous dis qu'il serait peut-être temps d'avoir recours à des architectes pour essayer de concevoir un type d'habitat pour contrer la formule du développement unifamilial en banlieue, qui soit autre chose que des tours en hauteur. Là-dessus, l'Ordre des architectes nous a assurés de sa collaboration pour essayer de trouver justement de ces types d'habitat de moyenne densité qui permettent de réaliser des immeubles à des coûts abordables et qui se prêtent justement, en cette période de crise énergétique, à cette espèce de mouvement de retour à la ville.

Donc, voilà ce que je voulais dire en terminant et, malgré les remarques du député de Mont-Royal, je veux remercier l'Opposition d'avoir assuré que ce projet-là franchisse toutes ses étapes en une si courte période. Merci, M. le Président.

Une voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Rancourt): Avec consentement, nous avons révoqué la troisième lecture. Nous y ajoutons un amendement que nous avons ajouté en comité plénier. Cet amendement est adopté. Le projet de loi est donc adopté tel qu'amendé en troisième lecture.

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Adopté.

M. le leader du gouvernement.

M. Bertrand: M. le Président, pour faire suite à une entente intervenue hier, nous allons aborder à ce moment-ci l'étude du projet de loi no 62 dans sa phase finale, le chef de l'Opposition ayant un droit de parole d'environ 20 minutes et le ministre de la

Justice à peu près l'équivalent. C'est l'article 2 du feuilleton.

Projet de loi no 62

Reprise du débat sur la troisième lecture

Le Vice-Président (M. Rancourt): Reprise du débat sur la motion du ministre de la Justice proposant que le projet de loi no 62, Loi concernant la Loi constitutionnelle de 1982, soit lu pour la troisième fois.

M. le chef de l'Opposition, député d'Argenteuil.

M. Claude Ryan

M. Ryan: M. le Président, le projet de loi no 62, que le gouvernement est sur le point de faire adopter est l'un des plus importants qui aient été soumis à l'attention de l'Assemblée nationale au cours de la présente session. C'est un projet de loi auquel, du côté de l'Opposition, nous nous opposons fermement et pour des raisons fondamentales. Je regrette profondément qu'à compter de maintenant l'on doive, à cause de ce projet de loi, envisager la perspective que, dans tous les textes de lois adoptées au Québec, autant dans le passé que dans l'avenir, il faudra se résigner à voir figurer à la fin du texte un petit paragraphe dans lequel on a commencé d'ailleurs à dire: "... Mais ce texte de loi sera soustrait à l'application des articles 2 et 7 à 15 de la Charte des droits et libertés du Canada."

À ce sujet, deux principales questions nous séparent profondément du gouvernement. Tout d'abord, la question de l'enchâssement même des droits, et, deuxièmement, la question de l'enchâssement des droits dans une constitution canadienne. Sur l'enchâssement des droits, le gouvernement soutient qu'il ne s'agit pas là d'un objectif impérieux. Le gouvernement préfère, en matière de protection de droits, les protéger par voie de législation ordinaire qui fait appel à la Charte des droits et libertés de la personne du Québec dont il nous dit qu'elle peut assurer une protection aussi bonne que celle qui est garantie par la Charte des droits et libertés du Canada. (17 h 20)

Je pense qu'il y a une différence fondamentale de perception, pour nous, de l'Opposition, des libertés fondamentales des citoyens, de la liberté de parole, de la liberté d'association, de la liberté de réunion, de la liberté de pensée, du droit à des protections fondamentales devant les tribunaux en matière légale, du droit à la protection contre diverses formes de discrimination malheureusement encore beaucoup trop largement répandue dans notre société. Ce sont des biens tellement fondamentaux pour les citoyens qui doivent être l'objet de la mesure de protection la plus forte qu'on puisse imaginer. Si on compare la protection accordée par une loi ordinaire à celle qui est accordée par une loi constitutionnelle, il saute aux yeux que la protection accordée par une loi constitutionnelle est beaucoup plus forte, beaucoup plus solide que la protection accordée par une loi ordinaire.

D'ailleurs, il suffit de se demander comment ces lois peuvent être modifiées pour comprendre tout de suite la différence. Quand une protection est inscrite dans la loi constitutionnelle, elle ne peut plus être altérée ou effacée sauf par le recours à une procédure d'amendement qui est très compliquée et qui exige beaucoup plus que la majorité des voix dans un seul Parlement ou dans une seule Législature. Quand les droits sont garantis uniquement par une loi ordinaire, il suffit d'une majorité, dans une Législature, pour qu'un droit soit modifié, altéré ou éliminé purement et simplement, n'importe quand.

Nous avons vu, au cours de la dernière session, certains projets de loi. Il y a celui, par exemple, qui touche la fusion de deux villes de la Côte-Nord, Baie-Comeau et Hauterive. Il saute aux yeux que le projet gouvernemental obéit à une logique capricieuse et arbitraire qui contredit d'ailleurs tout ce qu'avait dit le gouvernement avant cela. Le gouvernement va quand même faire adopter sa loi, selon toutes les apparences; à moins d'un miracle de dernière heure, le rouleau compresseur va passer tantôt. Mais nous ne voulons pas que la même chose puisse se produire à propos des droits fondamentaux des citoyens et c'est pour cela que nous trouvons infiniment préférable que ces droits soient garantis dans la constitution et non pas uniquement dans une loi ordinaire.

Le ministre soutient que c'est bien commode de définir ces droits seulement dans une loi ordinaire, que cela permet de faire des ajustements, c'est sûr. Mais nous, nous pensons que les libertés individuelles des citoyens sont beaucoup plus importantes que les besoins d'ajustement de n'importe quel Parlement ou de n'importe quel gouvernement, elles sont le fondement même, la pierre d'assise sur laquelle doit reposer tout l'édifice démocratique.

Deuxièmement, nous disons au gouvernement que nous n'avons pas d'objection, de ce côté-ci de la Chambre, que des droits aussi fondamentaux soient garantis dans la constitution canadienne. Là, je pense que nous frappons un sujet qui nous oppose radicalement et invinciblement au gouvernement actuel. Nous disons que le Canada est le pays dont nous faisons partie et nous tenons énormément au Québec, c'est notre société immédiate, c'est là qu'évolue

la communauté dont nous sommes tous fiers de faire partie. Le Québec et les citoyens qui en font partie sont également membres de la fédération canadienne. Dans la pensée du gouvernement, l'adhésion à l'ensemble canadien est une affaire de pure collectivité. Le Québec fait partie de la fédération canadienne.

Si on suivait la philosophie profonde du gouvernement, les rapports avec les autres n'auraient lieu qu'au niveau des collectivités et des gouvernements, tellement ce gouvernement a peur du danger de contamination qui, selon lui, nous menacerait dans la fédération canadienne. Nous disons que ce n'est pas seulement le gouvernement et l'Assemblée nationale du Québec qui font partie de l'ensemble canadien, ce sont aussi les citoyens, individuellement, les personnes humaines qui habitent le Québec. Si nous acceptons ce pays, il est infiniment souhaitable, hautement désirable que tous les citoyens de ce pays, de l'Atlantique au Pacifique, puissent évoluer n'importe où au pays en sachant que leurs libertés fondamentales d'expression, de parole, de choisir les lectures, les journaux, les sorties, les distractions, le métier, la compagnie, les relations, les associations soient reconnues de la même manière et protégées de la même manière partout à travers ce pays qui leur est commun.

Si la liberté de parole est bonne, si la liberté d'association est une bonne chose, il est infiniment préférable d'en jouir à l'échelle d'un pays qui s'étend de l'Atlantique au Pacifique, plutôt que d'en jouir uniquement à l'intérieur des frontières du Québec. Nous ne voyons pas, si l'objectif est le même... Je pense que, de ce côté, le gouvernement serait prêt à accepter de garantir aussi ces libertés fondamentales. Nous disons: Ayons-les au Québec, mais ayons-les également à l'échelle de tout le Canada.

Pour ceux qui croient à l'idéal canadien, la reconnaissance de ces droits fondamentaux peut être une source d'unité plus grande pour ce pays. Je sais que je scandaliserai peut-être nos amis d'en face en leur parlant de l'unité plus grande du pays comme d'un bien désirable. Nous qui adhérons à l'objectif du fédéralisme canadien, nous ne le faisons pas uniquement pour des raisons de forme. Nous le faisons parce que nous voulons que cela marche. Nous voulons que ce pays soit plus fort, plus efficace, plus à l'avant-garde de la civilisation, surtout dans le domaine de la protection des droits. Toutes les indications que nous avons - et je défie le ministre de la Justice de me contredire à ce sujet - nous autorisent à affirmer que la tendance générale dans le monde actuellement va vers la protection constitutionnelle des droits fondamentaux et non pas seulement vers la protection statutaire ou la protection par des lois ordinaires. Encore une fois, quant à faire partie d'un pays qui s'appelle le Canada, nous trouvons qu'il est infiniment souhaitable que ces droits fondamentaux soient garantis avec la même intensité, de la même manière partout.

Si la Charte des droits et libertés du Canada était un mauvais document, si c'était une charte mal faite, une charte conçue d'une façon arbitraire ou improvisée, je comprendrais les réserves du gouvernement. Ce n'est pas le cas. Il est arrivé des accidents de parcours malheureux dans le processus qui a conduit à l'adoption de cette charte. Il est arrivé même qu'à certains moments nous nous soyons entendus, de ce côté-ci de la Chambre et de l'autre, pour déplorer certaines manières de faire qui n'étaient pas conformes à la tradition et à l'esprit de la constitution du Canada. Ces faits sont maintenant du passé. On ne peut pas bouder le passé pendant des générations. Je pense qu'on stériliserait tout le processus politique en agissant ainsi.

Si nous regardons froidement les documents, nous sommes obligés d'admettre que la Charte canadienne des droits et libertés est un bon document pour les citoyens individuels. Je pense que le ministre de la Justice lui-même reconnaîtra que l'article 2 de la Charte canadienne des droits et libertés qui garantit la liberté de pensée, la liberté d'expression, la liberté de religion et la liberté d'association, c'est bon pour les citoyens individuels. Le document définit nos droits d'une manière sobre, d'une manière classique, d'une manière généralement reçue à travers le monde et, même si le ministre voulait s'efforcer de trouver une meilleure formulation, je pense qu'il serait réduit, en regardant la charte québécoise des droits, à conclure qu'il n'y a pas tellement de différence dans la formulation, sauf que la charte québécoise des droits, même avec les améliorations que le ministre vient d'annoncer et que nous examinerons avec beaucoup d'intérêt de ce côté-ci de la Chambre, restera une protection statutaire et non pas une protection constitutionnelle. Par conséquent, ce sera une protection beaucoup plus faible.

Deuxièmement, la charte limite les pouvoirs de l'Assemblée nationale. Elle limite également les pouvoirs des autres Législatures provinciales du Canada. Elle limite - il faut le noter avec force - les pouvoirs du Parlement canadien. Ce sont tous les Parlements qui se voient invités à accepter une certaine limitation de leurs pouvoirs au profit non pas du gouvernement fédéral, mais d'une plus grande protection des libertés fondamentales des citoyens.

Le gouvernement a soutenu, en deuxième lecture, qu'il n'avait pas trop confiance aux pouvoirs judiciaires pour

arbitrer ces grandes causes historiques qui découleront peut-être, éventuellement, de l'application de la Charte des droits et libertés du Canada. Nous lui répondons, de notre côté, que nous avons davantage confiance aux pouvoirs judiciaires pour certaines formes d'arbitrage. Dieu sait - et nous l'avons vécu encore pendant cette session - que les partis politiques sont malheureusement continuellement tentés d'exploiter les préjugés populaires, de flotter sur les passions, de cultiver les préjugés, d'entretenir souvent l'ignorance dans l'esprit des citoyens. S'il fallait attendre que les partis politiques sortent de leur gélatine intellectuelle, souvent, on attendrait très longtemps avant d'avoir des améliorations en matière de liberté. Aux États-Unis, les partis politiques se renvoyaient la balle de l'un à l'autre continuellement en matière de protection des droits des Noirs. S'il avait fallu attendre que l'un ou l'autre avance... Les Démocrates ne voulaient pas. Ils avaient peur des Démocrates de la Louisiane et du Sud des États-Unis. Les Républicains ne voulaient pas. Ils avaient peur d'autre chose et, finalement, on se succédait, de parti en parti, au gouvernement et les Noirs continuaient d'être les victimes d'une exploitation honteuse qu'on avait trouvé le moyen de rationaliser avec les plus beaux refrains et les arguments les plus séduisants. (17 h 30)

II a fallu qu'un pouvoir judiciaire indépendant, se situant au-dessus de la mêlée, intervienne il y a déjà une vingtaine d'années, si mes souvenirs sont bons, même une trentaine d'années, qui a été le tribunal que présidait M. Warren à l'époque, pour dire: Ces folies ont assez duré. À partir de maintenant, il faut reconnaître véritablement l'égalité des gens. On va se rendre compte une fois pour toutes que des Blancs et des Noirs séparés, cela ne fait pas des Blancs et des Noirs égaux. Cela fait des Blancs et des Noirs inégaux. C'est depuis ce moment qu'a commencé le vaste mouvement d'émancipation moderne des Noirs aux États-Jnis. Il a fallu l'intervention du pouvoir judiciaire.

Je pense qu'au Canada, avec l'instrument qu'on s'est donné maintenant, il y a de très bonnes chances de progresser de ce côté beaucoup plus vite et surtout beaucoup plus décisivement que ne le feraient des partis qui passent leur temps à calculer s'ils vont faire un peu de millage aux dépens de l'autre, en faisant un petit peu plus de surenchère démagogique que l'autre. On l'a vu en discutant ce projet de loi no 62.

J'ajoute un point: dans les articles que vise le projet de loi no 62, il y a un aspect qui est particulièrement déplorable pour nous. Ces articles n'imposaient rien au Québec. De fait, dans ces articles, il est dit que, nonobstant ce que prescrivent ces articles, une Assemblée législative ou un Parlement peut toujours décider que telle ou telle loi ne sera pas affectée par l'article en question. Donc, nous avions toute possibilité raisonnable de soustraire pour des raisons valables une loi précise, une loi particulière à l'application de cette charte, si nous avions dû constater qu'il existait un conflit invincible entre la Charte canadienne des droits et libertés et telle ou telle loi précise du Québec. Le gouvernement n'a jamais fait d'étude des lois qui pourraient être affectées par cette Charte canadienne des droits. Il ne nous a jamais soumis de rapports précis, fonctionnels disant que telle loi va être affectée, et que telle autre loi devrait être affectée. Il a fait un geste globaliste. Il a pris toutes les lois que nous avons adoptées au Québec depuis avant même la Confédération, toutes celles que nous adopterons à l'avenir. Il dit, d'un seul petit trait de plume, d'un seul petit texte de loi d'à peu près deux pages: Bonsoir la visite, c'est fini. Nous autres, nous disons que tout cela, cela ne nous regarde pas. Nous pensions être citoyens de ce pays. Nous pensions avoir participé à la définition progressive de ces droits, à force de débats, d'expériences de toutes sortes. Le gouvernement vient nous dire: On se soustrait à cela.

M. le Président, je soumets que c'est une manière cavalière et irresponsable de procéder, en matière de droits fondamentaux. J'ai déjà souligné dans cette Chambre que, dans l'avenir prévisible, il résultera de l'adoption du projet de loi no 62 une diminution effective et grave de la protection accordée par nos lois aux citoyens du Québec en matière de libertés fondamentales. Déjà, les articles 2 et 7 à 14 de la Charte canadienne des droits s'appliquent au Québec. Ils sont en vigueur au Québec à l'heure où je vous parle, mais ils ne seront plus en vigueur dans quelques heures après que le projet de loi no 62 aura été adopté. Tant que le ministre n'aura pas fait adopter les amendements qu'il a annoncés ce matin à la charte québécoise des droits, c'est-à-dire dans un nombre indéfini de mois, les Québécois n'auront pas la même qualité de protection en matière de libertés fondamentales qu'ils ont à l'heure où nous nous parlons. Même quand le ministre aura réussi à faire adopter ses amendements, la qualité de protection sera loin d'être aussi forte parce que cela restera, comme je l'ai dit tantôt, une protection statutaire et non pas une protection constitutionnelle.

Je regrette infiniment que nous en soyons rendus là. Nous avons déjà adopté quelques textes de loi depuis quelques jours. Vous trouvez en bas ce petit paragraphe qui n'a rien à voir avec le texte de la loi. C'est une espèce de baroud d'honneur que le gouvernement veut se donner. On dirait que

le gouvernement veut faire oublier la piètre performance qu'il a donnée en matière de négociations constitutionnelles depuis surtout un an. Cela a été une série de gaffes, une série d'erreurs, une série de reculs, une série de déceptions. On dirait que le gouvernement, au lieu d'essayer constructivement de réparer les dégâts qu'il a faits, veut essayer de se frapper le bedaine en disant: Malgré toutes les erreurs qu'on a faites, on va s'enfoncer encore un petit peu plus loin. C'est l'impression qu'on a en regardant ce projet de loi. Je suis obligé de dire que, lorsqu'un gouvernement libéral sera au pouvoir, ce sera l'une des premières lois qu'il se fera un devoir de modifier pour qu'enfin les Québécois puissent participer de plain-pied à la protection plénière, à la protection fondamentale, à la protection stable et solide que leur garantit la Charte canadienne des droits et libertés.

Seulement un dernier point, M. le Président, en ce qui regarde les droits linguistiques, parce qu'il en est question brièvement à la fin du projet de loi no 62. J'ai déjà dit dans cette Chambre que nous sommes parfaitement d'accord pour que l'application de l'article de la Charte canadienne des droits et libertés qui regarde l'adoption du critère de la langue maternelle, comme critère d'admission des enfants à l'école anglaise, soit laissée au jugement de l'Assemblée nationale et non pas simplement du gouvernement. Si ce n'était que de cet article du projet de loi no 62, le débat aurait duré cinq minutes entre nous, nous aurions été facilement d'accord. Mais ce que nous ne pouvons pas accepter et ce contre quoi je veux protester vigoureusement, c'est le refus systématique que le gouvernement continue d'opposer à la mise en oeuvre au Québec de la clause Canada, entendue d'une manière raisonnable et pratique.

La clause Canada, dans le sens où je l'entends, veut dire que tout enfant de parents ayant reçu leur instruction, au niveau élémentaire, en langue anglaise, n'importe où au Canada, devrait être admis à l'école anglaise au Québec. En vertu de la loi 101, ce n'est pas le cas, seuls sont admis à l'école anglaise les enfants de parents qui ont fait leurs études, au niveau élémentaire, au Québec, en anglais. Disons qu'une famille déménage de Hawkesbury à Granville; elle traverse seulement l'Outaouais pour venir s'installer dans le comté d'Argenteuil, comme cela arrive à peu près tous les mois. Il y a des familles qui viennent trouver du travail du côté québécois et vice versa. Cette famille n'aura pas la même protection suivant qu'elle traverse d'un côté ou de l'autre. C'est parfaitement ridicule et irréaliste dans un pays qui veut être un pays fédéral, c'est-à-dire un pays basé, comme le dit l'étymologie du terme, sur la confiance et l'amitié réciproque.

Je dis au gouvernement qu'il est profondément déplorable qu'il continue de s'opposer à la mise en oeuvre d'une clause dont les effets au point de vue quantitatif n'auraient rien du caractère catastrophique que se plaît à annoncer mensongèrement le ministre actuel de l'Éducation. Franchement, je le déplore profondément et je déplore encore plus profondément que le gouvernement ait engagé des procédures judiciaires pour empêcher que cette clause s'applique normalement au Québec, qu'il ait engagé des procédures administratives. Le ministre a envoyé des directives dans les commissions scolaires. Il a envoyé des directives aux institutions privées d'enseignement, les menaçant de toutes sortes de sanctions si elles commettent l'erreur impardonnable d'accepter de se soumettre à la Charte canadienne des droits et libertés qui, jusqu'à nouvel ordre, est une loi parfaitement constitutionnelle et légitime. Je demande au gouvernement de cesser de gaspiller les fonds publics dans cette cause qui, de toute évidence, est perdue d'avance. On essaie de gagner du temps, de retarder des enfants d'un an. Je trouve que c'est absolument inhumain pour les enfants, pour les parents et pour les administrateurs scolaires. Si, au moins, le gouvernement avait consenti sur ce point précis... Quand le ministre veut nous faire croire qu'il va y avoir des conséquences numériques catastrophiques, c'est absolument faux. L'article 23 de la charte canadienne, celui qui repose sur le critère de la langue maternelle, comporte des dangers et nous sommes prêts à tenir compte de ces dangers. J'ai dit moi-même dans cette Chambre que nous ne proposerions pas cet article. Nous proposerions qu'il reste comme il est là, c'est-à-dire qu'il ne soit pas applicable au Québec, mais l'article qui définit la clause Canada, je pense que c'est l'article 23.(l)a, je demande au gouvernement d'examiner dans les plus brefs délais la possibilité de l'appliquer loyalement au Québec et je lui demande d'enjoindre au ministre de l'Éducation de cesser ses procédure! tracassières par lesquelles il cherche à faire de la misère actuellement aux parents, aux enfants et aux commissions scolaires.

Il me semble que faire partie d'un pays commun, cela postule un minimum d'esprit de collaboration. Il y a des problèmes sur lesquels le gouvernement doit maintenir une ligne ferme. Quand elle sera raisonnable, nous l'appuierons volontiers, mais il y a d'autres problèmes au sujet desquels il doit penser au bien des citoyens individuels. Dans ce cas-ci, il me semble que, s'il l'avait fait, nous n'aurions pas ce projet de loi contre lequel nous serons obligés de voter tantôt.

Des voix: Bravo!

(17 h 40)

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le ministre de la Justice.

M. Marc-André Bédard (réplique)

M. Bédard: M. le Président, j'ai écouté avec beaucoup d'attention les propos du chef de l'Opposition. Je pense qu'il a raison de dire que nous avons des différences fondamentales de perspective, qu'il y a, lorsqu'on parle de droits et libertés, surtout de l'enchâssement des droits et libertés dans une charte constitutionnelle, deux courants de pensée qui se heurtent, sans pour cela aller jusqu'à dire qu'ils ne se respectent pas. Je respecte les opinions du chef de l'Opposition, mais je ne les partage pas, très sincèrement.

Le chef de l'Opposition a passé une grande partie de son discours à nous vanter les mérites absolus de l'enchâssement des droits dans une constitution par rapport à une situation telle que celle que nous avons ici au Québec. Je respecte cette opinion, mais je ne suis pas d'accord avec cette confiance presque aveugle qu'évoque le chef de l'Opposition dans la nécessité qu'il y a ou qu'il semble y avoir pour lui que pour être respectés, ces droits et libertés doivent être nécessairement enchâssés dans une constitution.

Si une charte constitutionnelle était miraculeuse au point que veut nous le faire croire le chef de l'Opposition en termes de protection des droits et libertés, comment explique-t-on que le Québec, comme société, se situe à l'avant-garde de la protection des droits et libertés non seulement au Canada, mais dans le monde entier, par rapport à des pays qui ont des chartes constitutionnelles, qui ont enchâssé leurs droits et libertés dans leur constitution?

Pourtant ici, au Québec, jusqu'à maintenant, un tel enchâssement n'existe pas et n'existera pas, en fonction de la loi 62, par rapport à certains secteurs de la loi constitutionnelle, et ceci n'empêche pas, sans se prendre pour d'autres, d'être en mesure d'affirmer que la société québécoise, même si elle n'a pas eu jusqu'à maintenant de charte constitutionnelle, se place - le chef de l'Opposition le sait - à l'avant-garde du monde entier quant à la protection des droits et libertés. Cela veut dire que, même si je respecte l'opinion du chef de l'Opposition, ce n'est pas vrai - je parlerai un peu plus longuement tout à l'heure là-dessus - que l'enchâssement constitutionnel a des propriétés aussi miraculeuses qu'essaie de le faire croire le chef de l'Opposition pour la protection des droits et libertés.

Cette protection - j'y reviendrai tout à l'heure - prend beaucoup plus sa force, sa racine non pas dans un enchâssement ou dans une loi, qui sont des moyens, au bout de la ligne, mais ce respect des droits et libertés prend beaucoup plus sa base, sa racine dans la détermination et la volonté d'une population de vouloir respecter les droits et libertés. C'est ce qui se passe ici dans la société québécoise.

Le chef de l'Opposition - cela me surprend de sa part - en fait presque une question d'idéal canadien - je l'entendais parler tout à l'heure - une question de fédéralisme. Ce n'est pas le cas. Je m'excuse, mais ce n'est pas le cas, c'est déplacer le problème. Ce n'est pas une question d'idéal canadien, ce n'est pas une question de fédéralisme ou pas. Ce n'est pas une question, comme on l'a entendu dire à plusieures reprises, de refus du Canada. C'est une question, par exemple, de refus d'un Canada qui ne veut pas respecter la société québécoise, qui ne veut pas respecter l'Assemblée nationale qui représente l'ensemble de la société québécoise, et qui ne veut pas respecter les pouvoirs et les devoirs de cette Assemblée nationale. C'est cela, la loi no 62.

Des voix: Bravo!

M. Bédard: Je suis bien d'accord avec le chef de l'Opposition lorsqu'il dit qu'il faut sortir de la gélatine intellectuelle - j'emploie son expression - pour tomber dans les choses pratiques, mais ce n'est pas une raison pour tomber aussi rapidement qu'il semble le faire dans le ciment de la démission face aux pouvoirs et aux devoirs de l'Assemblée nationale, parce que c'est de cela qu'il s'agit, M. le Président. C'est une question de principe fondamentale. Le Québec comme société - on le sait, on en a fait la preuve -est capable, enchâssement ou pas, de respecter et de protéger les droits et libertés aussi bien, sinon mieux que n'importe quelle société.

Des voix: Bravo!

M. Bédard: Le principe fondamental de ce projet de loi, c'est de savoir si le Québec comme société, si l'Assemblée nationale comme représentante de cette société québécoise a décidé ou non de se respecter. C'est une question de principe. Donc, il s'agit de dire non, non pas à la protection des droits et libertés - nous les protégeons déjà ici et même mieux que dans tout le reste du Canada - mais à un Canada qui, malgré tous les efforts qui ont été faits, n'a pas été capable de respecter la volonté de cette Assemblée nationale.

Le chef de l'Opposition devrait se rappeler qu'il y a quand même une logique dans le projet de loi no 62. Il devrait y en avoir une au niveau des membres de l'Opposition. Nous avons voté d'une façon unanime, au niveau des partis avec quelques dissidents libéraux, ici, à cette Assemblée

nationale, il y a quelques mois - le chef de l'Opposition en a le souvenir - une résolution qui était très claire, très explicite, à savoir que cette Assemblée nationale, dont nous faisons partie et dont fait partie le chef de l'Opposition, n'accepterait jamais de voir ses pouvoirs diminués sans son consentement.

Or, nous savons la suite des événements. Le fédéral, dans sa manière d'agir, a passé outre aux représentations faites par cette Assemblée nationale et les membres qui la constituent. Il a décidé de passer outre à cette volonté quand même clairement exprimée par les membres de l'Assemblée nationale et nous avons eu droit à ce coup de force, tel qu'on l'a qualifié. Ce n'est pas une question, encore une fois, de faire une bataille de fédéralisme ou pas, d'idéal canadien ou pas. C'est une question de nous respecter nous-mêmes comme Assemblée nationale, comme instrument qui représente la société québécoise, cette société québécoise qui a le droit d'être respectée lorsque le gouvernement fédéral se permet d'y aller d'une législation constitutionnelle aussi considérable que celle que nous connaissons, la Loi constitutionnelle de 1982.

M. le Président, je pense que ça vaut quand même la peine d'être rappelé. Ce n'est jamais arrivé et ce n'est pas une question de ressasser des souvenirs pour le plaisir de la chose. C'est une question de logique, ce à quoi j'invite, mais maintenant en désespoir de cause, parce que je pense que le chef de l'Opposition a annoncé ses couleurs assez clairement tout à l'heure... C'est une question de logique qui fait qu'une société, qu'elle soit québécoise ou autrement, ne peut pas accepter qu'un autre gouvernement puisse se permettre de légiférer dans des secteurs aussi fondamentaux que la protection des droits et libertés sans l'accord de cette société qui est concernée au premier chef. (17 h 50)

Je l'ai rappelé tout à l'heure, le 2 octobre dernier, l'Assemblée nationale, dans un vote qui a fait l'unanimité des partis, s'opposait formellement à tout geste qui pourrait porter atteinte à ses droits et affecter ses pouvoirs sans son consentement. Puisqu'il n'y a jamais eu de consentement du Québec à la Loi constitutionnelle, il n'est que normal que l'Assemblée nationale donne suite à sa décision du 2 octobre dernier et utilise maintenant non pas l'illégalité, mais toutes les possibilités légales - et c'est ce que nous faisons - offertes par la Loi constitutionnelle elle-même pour protéger le mieux possible nos pouvoirs et nos droits. Face à ce coup de force du gouvernement de M. Trudeau, nous avons décidé d'utiliser toutes les soupapes contenues dans la Loi constitutionnelle fédérale afin de limiter son impact et aussi de donner priorité aux lois québécoises. Il me semble qu'il n'y a rien de plus normal que ça. Ce n'est pas une question, encore une fois, d'idéal canadien, de fédéralisme ou de refus du Canada. Il y a des choix à faire en politique. Si c'est le Québec d'abord - l'Opposition est peut-être en mesure de nous le dire, on ne le sait pas encore - il y a quand même une logique qui s'impose au niveau des gestes à poser, c'est d'abord de ne jamais accepter qu'on passe sur le dos du Québec et qu'on lui impose des choses comme société, sans son consentement.

Quand vous votez contre le projet de loi no 62, c'est que vous acceptez que le gouvernement fédéral passe sur le dos des Québécois alors que cette société québécoise ne s'est pas prononcée sur les amendements qui ont été apportés à la constitution. La meilleure preuve est est, M. le chef de l'Opposition, votre refus d'assister aux fêtes qui ont eu lieu à Ottawa. Vous vous le rappelez? Il y a quelques-uns de vos députés qui se sont faits un honneur, qui n'ont pas eu peur de se traîner sur le ventre pour se faire inviter à ces magnifiques fêtes en l'honneur de celle qui nous visitait.

M. Rocheleau: Vous nous insultez! C'est insultant!

M. Bédard: C'est insultant, oui. Le député de Hull dit que c'est insultant. Sûrement, c'est insultant de voir autant de députés de l'Opposition faire toutes les manigances possibles pour avoir l'honneur de se faire inviter à Ottawa par un gouvernement qui, à ce moment-là, était délibérément passé au-dessus de la volonté exprimée par cette Assemblée nationale représentant la société québécoise.

Des voix: Bravo!

M. Bédard: D'ailleurs, c'est tellement vrai - cela, je suis obligé de le souligner et j'en suis fier - que même s'il y a beaucoup de députés de l'Opposition qui se sont prêtés à ce manège, à cette démission, heureusement, le chef de l'Opposition s'est tenu debout. J'en étais fier parce que, au moins, il a exprimé la connaissance et le respect qu'il avait de l'opinion de cette société québécoise qui s'était exprimée. Je pense que c'est la meilleure leçon qu'il pouvait donner à tous ceux - je dis "tous ceux" parce que je pense que Mme la députée de L'Acadie n'était pas là - qui se sont empressés d'accepter des invitations plutôt que de continuer à défendre les droits du Québec.

Que fait cette loi 62? D'abord, la loi 62 refuse l'entrée en vigueur au Québec du critère de la langue maternelle pour l'admission à l'école anglaise. Ce critère, il faut s'en souvenir - le député de Marguerite-

Bourgeoys en sait quelque chose - est le même que celui de la loi 22 qui a causé de grandes difficultés d'application au gouvernement précédent. De plus, cette loi oblige le gouvernement à soumettre toute décision à ce sujet à un débat public à l'Assemblée nationale avant qu'elle ne devienne irrémédiable. Cette disposition n'est pas l'objet d'une controverse puisque le chef de l'Opposition a lui-même dit tout a l'heure, qu'il était d'accord. Quand il fait la promesse que c'est la première loi qu'il ferait sauter - pour employer l'expression -si jamais il assumait la responsabilité du pouvoir, il doit convenir qu'il vient de nous dire qu'il y en a déjà une bonne partie avec laquelle il est d'accord.

Deuxièmement, que fait cette loi? Elle donne - ce n'est pas un malheur, comme on essaie de nous le faire croire - priorité aux lois québécoises et, notamment, à la Charte des droits et libertés de la personne du Québec adoptée en 1975 par un gouvernement libéral. Elle donne priorité à cette charte sur les dispositions de la Loi constitutionnelle canadienne qui sont sujettes à une telle priorité.

M. le Président, on l'a reconnu tout à l'heure, ce n'est pas une question de bataille de chartes plus qu'il ne le faut. Tous reconnaissent que les droits et libertés énumérés à la Loi constitutionnelle, dont il s'agit, se retrouvent également dans la charte québécoise. Tous reconnaissent, de plus, que la charte québécoise couvre un grand nombre de droits et libertés que l'on ne retrouve pas dans la Loi constitutionnelle fédérale. Parmi ceux-ci se retrouvent des droits aussi fondamentaux que le droit au respect de la vie privée et de la demeure, le droit à la non-discrimination sur la langue, la condition sociale, les convictions politiques, un handicap, l'orientation sexuelle et l'état civil, le droit de l'enfant à la protection, à la sécurité et à l'attention, le droit à l'instruction publique gratuite, le droit de toute personne âgée d'être protégée contre toute forme d'exploitation. Ce sont tous des droits et libertés qui sont dans notre charte et qu'on ne retrouve pas dans la Loi constitutionnelle. Il y a également le droit des minorités ethniques de maintenir et de faire progresser leur vie culturelle.

De plus, comme l'a fait remarquer le chef de l'Opposition, je viens de déposer un projet de loi, que nous étudierons cet automne, qui améliore substantiellement la Charte québécoise des droits et libertés, notamment, au chapitre du harcèlement sexuel. C'était demandé par tous les groupes de femmes qui se sont fait entendre devant la commission parlementaire sur notre Charte des droits et libertés. Cela améliore également la Charte québécoise des droits et libertés au chapitre des avantages sociaux et, également, de l'état de grossesse. Ce sont des préoccupations qui ont été évoquées lors de nos travaux en commission parlementaire. Cela ne se retrouve pas dans la charte' fédérale. Combien de temps cela prendrait-il, avec le lourd processus d'amendement à la constitution, pour que ces libertés et ces droits se retrouvent dans la Loi constitutionnelle? Quand on sait à quel rythme vont les amendements constitutionnels, on sait que la population risquerait d'attendre longtemps.

En plus d'une protection plus étendue, notre charte offre aussi l'immense avantage de pouvoir être modifiée par l'Assemblée nationale pour s'ajuster à l'évolution de la société québécoise sans passer par le lourd processus de l'amendement constitutionnel du système fédéral canadien qui nécessite l'accord de sept provinces, nécessite l'accord du Sénat et du Parlement d'Ottawa. Le meilleur exemple en est tout simplement le dépôt de ce projet de loi no 86 que nous avons fait ce matin Loi modifiant la Charte des droits et libertés de la personne qui, justement, présente plusieurs modifications importantes qui vont être soumises aux membres de cette Assemblée, que nous allons probablement voter unanimement ensemble, qui va représenter une amélioration. Cela peut se faire très rapidement dans l'espace de quatre ou cinq mois, alors que s'il fallait attendre, quand on parle de protection des droits et libertés, les amendements constitutionnels, avec le processus que cela représente, nous attendrions longtemps.

Je terminerai sur ceci. Le second objet de la critique du chef de l'Opposition porte, je l'ai mentionné au début de mon propos, sur la valeur intrinsèque qu'il reconnaît à l'enchâssement des droits et libertés comme étant un moyen nécessaire à la sauvegarde des libertés individuelles et des droits démocratiques. (18 heures)

M. le Président, vous le savez, nous en avons des exemples constamment, cette sécurité juridique que représente l'enchâssement, qui est invoquée par le chef de l'Opposition, peut vite devenir une sécurité théorique. Qu'on me permette juste un exemple. Ce n'est pas parce qu'une charte des droits et libertés est enchâssée qu'elle est nécessairement respectée. La meilleure preuve en est ce qui se passe en URSS. Qu'il me soit simplement permis de rappeler que la constitution de l'URSS prévoit une charte des droits complète, peut-être dans ce qu'il y a de plus complet en termes de charte des droits et libertés. Cependant, vous serez d'accord avec moi que ce n'est sûrement pas un exemple que l'on peut imiter en matière de droits et libertés. Pourtant, elle est enchâssée. Enchâssement ou non, c'est un moyen, M. le Président. Je le dis, parce que je le crois sincèrement, parce que je crois que la véritable protection

des droits et libertés pour une collectivité, cela prend sa racine dans le coeur des citoyens, dans la volonté des citoyens de voir à ce que ces droits et libertés soient respectés. Je pense que, dans ce domaine -je terminerai là-dessus - vous le savez, le Québec a une tradition exceptionnelle de tolérance et de respect de la démocratie. Ce n'est pas à cause du régime constitutionnel ou du fédéralisme, c'est plutôt une tradition qui prend ses racines dans le coeur et l'esprit des Québécois, une tradition qui se révèle avec force dans la façon généreuse et respectueuse avec laquelle on a traité la minorité anglophone ici au Québec.

Dans une société, autrement dit, M. le Président, les libertés fondamentales ne sont efficacement protégées que si la volonté propre des citoyens et des citoyennes s'exprime clairement à ce sujet. À ce titre, l'enchâssement constitutionnel, surtout lorsqu'il est fait à la manière fédérale, ne paraît certes pas le meilleur moyen de refléter les valeurs propres de la société québécoise. C'est avec cette confiance que j'ai que nous sommes capables ensemble à l'Assemblée nationale d'améliorer notre Charte des droits et libertés pour offrir encore mieux à l'ensemble de la population québécoise, c'est avec cette confiance aussi que j'ai de la continuité - si vous en doutez, je n'en doute pas - de cet esprit de tolérance et de cette générosité dont a toujours fait preuve la société québécoise et qui va continuer que je dis tout simplement que, maintenant, il s'agit d'être logiques, il s'agit de nous respecter nous-mêmes, d'avoir confiance en notre Assemblée nationale, comme dans tous les autres domaines, et surtout dans le domaine de la protection des droits et libertés et c'est à ce titre que la société québécoise sera le mieux protégée. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): La troisième lecture du projet de loi no 62, Loi concernant la Loi constitutionnelle de 1982, est-elle adoptée? M. le leader adjoint de l'Opposition.

M. Lalonde: M. le Président, j'aimerais qu'on reporte le vote avec les autres votes qui seront pris à la fin de la séance.

Une voix: Consentement.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Consentement. M. le leader du gouvernement.

M. Bertrand: M. le Président, comme c'est un projet de loi sur lequel, semble-t-il, il n'y a pas d'intervention, ni du côté de l'Opposition, ni du côté ministériel, nous pourrions, à ce moment-ci, avec le consentement des députés, appeler la troisième lecture du projet de loi no 66.

Projet de loi no 66 Troisième lecture

Le Vice-Président (M. Jolivet): La troisième lecture du projet de loi no 66, Loi modifiant certaines dispositions législatives en matière de financement des partis politiques et en matière d'élections municipales, est-elle adoptée? M. le leader de l'Opposition.

M. Lalonde: M. le Président, si, en effet, le ministre de la Justice n'a pas un discours aussi tortueux que celui qu'il vient de prononcer, nous n'aurons pas non plus d'intervention sur ce projet de loi.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté? Adopté. M. le leader.

M. Bertrand: M. le Président, le grand sourire du ministre de la Justice m'indique qu'il n'a pas prêté oreille et attention aux propos du député de Marguerite-Bourgeoys. À ce moment-ci, M. le Président, encore une fois avec le consentement de l'ensemble des députés, je vous demanderais d'appeler la troisième lecture du projet de loi no 65.

Projet de loi no 65 Troisième lecture

Le Vice-Président (M. Jolivet): Est-ce que la troisième lecture du projet de loi no 65, Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels, est adoptée?

M. Lalonde: Un instant, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader adjoint de l'Opposition.

M. Lalonde: D'abord, nous allons donner notre consentement pour que la troisième lecture soit faite maintenant.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Consentement.

M. le député de Westmount.

M. Richard French

M. French: M. le Président, quelques mots pour souligner l'occasion importante qu'est la troisième lecture du projet de loi no 65, Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des

renseignements personnels. L'Opposition a entrepris l'étude du projet de loi avec beaucoup d'intérêt, croyant qu'un accès amélioré aux documents publics ainsi qu'une meilleure protection de la vie privée des citoyens québécois étaient des objectifs louables. Nous croyons avoir trouvé une certaine attention de la part de nos homologues du côté gouvernemental; nous avons trouvé une atmosphère qui a transcendé la partisanerie politique au sein de la commission permanente des communications.

Nous avons essayé d'améliorer le projet de loi dans le sens suivant. Tout d'abord, l'idée maîtresse était que l'accès aux documents publics devait être aussi grand que possible, le moins restrictif possible, non seulement quant au contenu des documents, mais aussi par rapport aux procédures utilisées pour y avoir accès. D'autre part, nous avons essayé de garantir autant la protection des renseignements personnels que de plus en plus de Québécois se trouvent à confier aux organismes publics, non seulement aux organismes ministériels du gouvernement du Québec, mais aussi aux hôpitaux, commissions scolaires, écoles, universités, cégeps, centres de services sociaux, CLSC, etc.

Dans cette optique, l'Opposition veut souligner que le ministre des Communications s'est montré très réceptif, de même que son adjoint parlementaire, le député de Taschereau. Le ministre des Communications a ultimement accepté de modifier quelque 64 articles sur un total de 184. Dans la plupart des cas, il s'agissait ou bien d'amendements que l'Opposition avait présentés ou bien d'amendements qu'avait apportés le gouvernement à la suite des suggestions de l'Opposition.

Je voudrais souligner brièvement certains amendements importants. Nous avons réussi, par exemple, à faire sauter une certaine partie de l'article 32 qui représentait une restriction importante qui donnait aux organismes publics la possibilité de ne pas divulguer des documents. Je cite cette partie de la version originale du projet de loi: "de compromettre sérieusement la réalisation d'un projet en cours". Il nous semblait - et, heureusement, il le semblait au ministre des Communications, au gouvernement - qu'il y avait là une restriction beaucoup trop grande et dangereuse pour l'accès aux documents publics. On n'avait qu'à penser à certains ministres, notamment le ministre de l'Éducation, qui a toujours quelques projets en cours et qui est toujours menacé sérieusement par la divulgation de documents que le ministre ne voudrait pas voir rendus publics.

Nous avons dans plusieurs cas réussi à réduire les délais de divulgation que certaines classes de documents allaient exiger des organismes publics qui les détenaient. Encore une fois, nous avons trouvé un allié important en la personne du ministre dans ces cas. Nous avons réussi, à la suite de l'intervention de la présidence de l'Assemblée nationale, à obtenir une meilleure protection pour l'Assemblée nationale et pour ses agents, y compris plus particulièrement les services de recherche des partis politiques. (18 h 10)

Dans le cas de l'article 66, un article important, nous avons réussi à limiter le pouvoir du gouvernement du Québec de décréter des ententes entre organismes publics là où les organismes publics eux-mêmes ne pouvaient pas se mettre d'accord, des ententes qui traiteraient de l'échange de renseignements personnels. Donc, nous avons réussi quelque peu à resserrer l'exercice de ce pouvoir que l'Assemblée nationale donne, dans le projet de loi no 65, au gouvernement.

Concernant les renseignements personnels, nous avons réussi, à la suite d'interventions, notamment, celle du député de Marguerite-Bourgeoys, à restreindre une certaine ouverture qui semblait plus nécessaire quant à l'accès aux renseignements personnels de certains, comme les corps policiers, etc. Nous avions toujours à l'esprit, au cours de l'étude de ce chapitre du projet de loi, d'abord et avant tout la protection de la vie privée, ce qui nous semble l'objectif primordial durant lequel doivent se plier les exigences de l'administration, les exigences des corps policiers dans les enquêtes judiciaires.

Nous avons également, dans ce chapitre II du projet de loi, réussi à restreindre un certain "tatillonnage", une certaine paperasse qui menaçait de surgir autour des activités réglementaires que le projet de loi, dans sa version originale, donnait à la commission. Ainsi, nous avons changé, de façon significative, les pouvoirs de réglementation de la commission au fichier des renseignements personnels. Nous avons également réussi à mieux adapter le projet de loi au vécu quotidien de plusieurs organismes publics et de plusieurs individus avec des responsabilités importantes par rapport aux renseignements personnels.

Finalement, nous avons suggéré - le gouvernement l'a accepté - de clarifier et de simplifier les fonctions essentielles de la commission d'accès en tant qu'organisme quasi judiciaire. Nous avons enlevé plusieurs fonctions qui nous paraissaient une invitation à la bureaucratisation de cette commission, une invitation à la dépense, une invitation à un certain gonflement, si vous voulez, de cette institution importante dont les fonctions devraient demeurer quasi judiciaires.

M. le Président, il faudrait quand même mentionner que, dans plusieurs cas, nos suggestions n'ont pas été acceptées par le gouvernement. Nous regrettons, par exemple, la protection qui est, à notre avis, indue concernant les documents du Conseil des ministres et de certaines autres instances décisionnelles dans les organismes publics.

Nous regrettons également - je pense qu'il faut vraiment discuter cela de façon plus détaillée - que le gouvernement n'ait pas trouvé suffisamment de courage pour retirer l'article 146 du projet de loi. Même si la commission ordonne à un organisme public de divulguer un document, l'article 146 donne au gouvernement du Québec, au Conseil des ministres du gouvernement du Québec, le pouvoir de décréter que le document en question ne doit pas être divulgué par l'organisme public en question.

Il faudrait bien souligner, M. le Président, qu'on ne parle pas, à l'article 146, uniquement des organismes ministériels. On ne parle pas uniquement des organismes du gouvernement du Québec. On parle de n'importe lequel des 5000 organismes publics ultimement visés par le projet de loi: les cégeps, les universités, les hôpitaux, les municipalités, etc. Il faudrait aussi souligner qu'on ne parle pas uniquement de certaines restrictions, peut-être plus importantes que d'autres, comme la restriction concernant les relations intergouvernementales, mais on parle bel et bien de toutes les restrictions contenues dans le projet de loi. On ne parle pas non plus d'un délai limité dans le temps. On parle bel et bien, M. le Président, d'un pouvoir donné au Conseil des ministres du gouvernement du Québec de décréter un délai illimité quant à l'application de l'ordonnance de la commission. On prétend que c'est dans l'intérêt public que ce soit ainsi. D'ailleurs, on prétend que c'est le Conseil des ministres du gouvernement du Québec qui est la seule institution politique de la province habilitée à définir ultimement l'intérêt public en ce qui a trait à l'accès aux documents publics et à la protection des renseignements personnels.

Je pense bien qu'il y a là des différences fondamentales non seulement entre tous les gouvernements et toutes les Oppositions, mais entre le gouvernement actuel et l'Opposition actuelle, parce que nous n'avons jamais, de ce côté-ci de la Chambre, imaginé que le Conseil des ministres, qu'il soit péquiste, unioniste ou libéral, soit la seule institution politique habilitée ultimement à définir l'intérêt public pour tous les Québécois. S'il est possible, à la limite, d'imaginer que l'Assemblée nationale doit définir l'intérêt public d'ailleurs, c'est exactement ce que fait le projet de loi no 65, parce qu'il définit l'intérêt public dans la confidentialité dans plusieurs cas, dans plusieurs restrictions - nous avons reconnu cette nécessité, nous avons essayé de bonifier ces restrictions, mais nous avons accepté le principe que les restrictions doivent exister.

Quand on demande à l'Assemblée nationale de déléguer ses pouvoirs, de définir l'intérêt public en ce qui a trait à l'accès de la population aux documents des organismes publics, ça, c'est aller trop loin, c'est d'éviter la politicaillerie, c'est d'éviter les espèces d'échanges de services politiques entre certaines administrations de certains organismes publics et le gouvernement du Québec. C'est donc une tentation indue qui ne devrait pas exister.

On prétend, parce que le pouvoir de décret envisagé à l'article 146 implique, exige le dépôt du décret à l'Assemblée nationale subséquemment, qu'il va y avoir un débat à l'Assemblée nationale et qu'ainsi le gouvernement va payer le prix politique de ses gestes. Je veux bien, mais il est difficile d'imaginer comment on peut avoir un débat informé avec le genre de décret qui découlerait de l'article 146. En vertu de l'article 146, le lieutenant-gouverneur en conseil demande au cégep de Longueuil -entre parenthèses, dans le comté du premier ministre du Québec - de ne pas divulguer tel document - document décrit, évidemment, dans des termes très généraux, parce qu'il est évidemment impossible de révéler ce qui est dans un document qui doit rester confidentiel - pour un délai de 36 mois.

Comment voulez-vous qu'on soit en mesure de façon informée et réelle, de soutenir ce débat dans de telles circonstances? C'est évident qu'il y aura une question, deux questions, peut-être une motion de blâme, au maximum, on est là et la machine du gouvernement va continuer de rouler pour n'importe quel gouvernement au pouvoir dans ce cas-là, c'est la tendance naturelle des gouvernements. Ce que fait le gouvernement dans le projet de loi no 65 -je veux donner le crédit à qui il est dû -c'est d'adopter une espèce d'autodiscipline. Il dit: On ne peut pas se fier ultimement, avec toute la bureaucratie, dans tous les ministères, dans tous les organismes publics, qu'on va respecter systématiquement ce pouvoir d'accès public jour après jour. Alors, nous allons légiférer là-dessus. C'est tout à fait louable et très acceptable. Je vais même dire que c'est exemplaire du point de vue de ce genre de loi pour le Canada et pour les systèmes de type parlementaire britannique.

Mais, avec l'article 146, on en arrive à entacher cet effort louable. J'informe donc le ministre que l'Opposition serait tout à fait prête - je vois que le ministre de la Justice est aux alentours - à aider le gouvernement pour améliorer son projet de loi dans son étape finale. Qu'il retire l'article 146, qui est le seul article qui crée vraiment des

problèmes dans le projet de loi. (18 h 20)

M. le Président, encore une fois, je voudrais dire qu'on est, de ce côté de la Chambre, tout à fait conscient de l'attitude positive avec laquelle le ministre et son adjoint parlementaire ont entrepris le défi de la commission parlementaire. Je trouve que leurs efforts et les nôtres, avec cette troisième lecture du projet de loi no 65, sont couronnés de succès. Une des raisons pour lesquelles j'ai choisi d'entrer dans l'arène politique au niveau provincial, c'est parce que je croyais que ce serait possible d'accomplir plus, plus vite. La première fois que j'ai eu le sentiment d'avoir vraiment contribué à un projet de loi, cela a été le projet de loi no 65. J'en suis très reconnaissant. Je reste convaincu que le projet de loi 65 est un modèle, abstraction faite de l'article 146, pour d'autres Parlements de type britannique, qu'ils soient au Canada, qu'ils soient en Australie, en Nouvelle-Zélande, même en Inde, en Angleterre, Dieu sait où.

C'est ainsi que nous, de l'Opposition, remercions le ministre de son attitude positive et de sa flexibilité. Nous espérons que le projet de loi saura servir la démocratie québécoise, tel que c'est prévu qu'il le fasse. Merci.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Jeanne-Mance.

M. Michel Bissonnet

M. Bissonnet: M. le Président, je serai très bref. Je voudrais tout d'abord souligner, comme l'a dit le député de Westmount, l'attitude positive du ministre des Communications, qui était bien différente de l'attitude qu'il avait, l'autre soir, lorsqu'il a présenté ce projet guillotine qu'était la loi 37.

La commission parlementaire des communications a siégé de façon très assidue pour étudier ce projet de loi. Elle a passé 33 heures à l'étudier article par article. Je me dois ici de souligner le leadership qu'a assuré notre député de Westmount dans l'étude de ce dossier. Par sa compétence et ses qualifications, il a, aidé de l'un de nos recherchistes, M. Jean Larivière, apporté à cette commission de nombreux amendements qui ont bonifié ce projet de loi. Il est évident que les recommandations soumises par la commission Paré ont été d'une aide bien précieuse aux membres de la commission pour préparer ce travail. Je dois souligner que c'est une loi très importante pour l'Opposition que cette Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels.

Mon propos sera très bref, c'est de féliciter notre leader dans ce dossier, le député de Westmount. Grâce à lui et grâce au travail aussi des autres membres de la commisison, nous arrivons aujourd'hui à un résultat positif. Quant à l'article 146, je pense, M. le ministre, que si vous biffiez cela et proposiez un amendement pour le retirer du projet de loi, ce projet de loi serait encore plus valable qu'il ne l'est présentement. Merci beaucoup.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Taschereau et adjoint parlementaire au ministre des

Communications.

M. Richard Guay

M. Guay: Merci, M. le Président. Très brièvement, parce que je ne veux pas abuser du temps de cette Chambre. J'ai été un petit peu déçu d'une partie de l'intervention du député de Westmount qui ne reflétait pas, en s'attardant à un seul article, tout l'effort exceptionnel, l'apport qu'il a fourni à la commission. Il ne reflétait pas non plus complètement l'esprit dans lequel les travaux de la commission se sont déroulés, qui a été un esprit dénué de toute partisanerie politique, un esprit où on cherchait de part et d'autre à donner aux Québécois et aux Québécoises la meilleure loi possible, une loi fondée sur deux principes; le maximum de protection des renseignements privés, et l'accès le plus large aux documents des organismes publics qui, faut-il le rappeler, sont au nombre de 5000, tels que définis dans la loi. Ce ne sont pas seulement le gouvernement et les régies, ce sont aussi les municipalités, les commissions scolaires, les hôpitaux, enfin tout ce qui relève de près ou de loin de l'Assemblée nationale du Québec,

Je ne prévoyais pas mentionner l'article 146, mais puisque le député de Westmount a fait porter une si grande partie de son intervention là-dessus, je pense, et je le dis brièvement, que l'on exagère la portée de l'article 146.

Le régime normal quotidien de cette loi, dès lors qu'elle sera en vigueur complètement, dès lors que les 5000 organismes publics seront visés par le projet de loi et que la loi fonctionnera, fera qu'une personne s'adressera à un organisme public, comme la ville de Québec, la Commission des écoles catholiques de Montréal, l'Hôpital de Valleyfield, enfin bref, peu importe, pour demander un document et que l'organisme dira oui, le voici, ou non, on ne le vous donne pas. Ce n'est que dans le cas où l'organisme ne le donne pas que la personne pourra en appeler à la commission pour lui demander de réviser la décision. La commission, à son tour, dira: Non, vous ne l'avez pas et l'organisme avait raison de ne pas vous le donner. Cela finit là. Ou, alors la commission dira: Oui, l'organisme aurait

dû vous le donner. La décision quotidienne dans ce domaine sera prise par les 5000 organismes sur le terrain. Or, ce n'est pas la décision des organismes qui peut faire l'objet de la révision gouvernementale; c'est la décision de la commission en appel d'une décision négative d'un organisme et seulement dans les cas où la commission dit: Oui, le document devrait être dévoilé. Dans ces cas-là seulement et encore là très exceptionnellement au nom de l'intérêt public, le gouvernement peut dire: Attention, suspendez cela pour l'instant, et déposer un décret en ce sens à l'Assemblée nationale.

Alors, on exagère grandement la portée de l'article 146 parce qu'on semble donner l'impression que le gouvernement pourrait suspendre la décision d'un organisme public dans l'application de la loi, ce qui n'est absolument pas le cas. Cela étant, M. le Président, je ne veux pas m'attarder sur l'article 146, mais beaucoup plus sur les travaux de la commission.

Le député de Westmount l'a fait, le député de Jeanne-Mance l'a fait. Je veux à mon tour souligner l'esprit qui a régné à cette commission. Je pense, M. le Président, que ces trente heures de débat, si elles avaient pu être enregistrées sur film ou sur ruban magnétoscopique, auraient probablement révélé à la population qui est habituée à nos débats très contradictoires en cette Chambre, de manière assez surprenante d'ailleurs, ce que peut être le travail d'une commission au-delà des lignes de parti et jusqu'à quel point le travail d'une commission parlementaire peut fouiller, scruter, gratter, tester les articles d'un projet de loi et chercher constamment à les bonifier, à les améliorer dans le meilleur intérêt de la population.

En ce sens, je vous le dis, M. le Président, en six ans maintenant que je siège dans cette Chambre, c'est la commission la plus intéressante à laquelle j'ai participé, celle que j'ai trouvé la plus constructive et qui, à mon avis, sert ou devrait servir de modèle pour ce que devrait être maintenant et pour l'avenir une commission parlementaire de cette Assemblée nationale.

La commission héritait d'un projet de loi qui venait déjà de loin, de travaux antérieurs à la commission Paré, du rapport Paré, du projet de loi du ministre des Communications qui avait été vérifié au Comité ministériel de développement culturel, au Conseil des ministres, au comité de législation. La commission a aussi bénéficié de l'aide des membres de l'Opposition, je veux le signaler. Le député de Jeanne-Mance a noté l'apport du député de Westmount. C'est exact, le député de Westmount avait et a dans ce domaine des compétences reconnues qui nous ont été particulièrement précieuses. Le député de Marguerite-Bourgeoys aussi dont la qualité d'avocat a été également précieuse lorsqu'il s'est agi de vérifier la portée de certains articles de loi et de la restreindre à certains moments.

Tout ce projet de loi, donc, qui provenait de cette source a été, comme je le disais, gratté, vérifié. On a évoqué publiquement, sans ligne de parti, des hypothèses qu'on a retenues, qu'on a abolies, qu'on a modifiées, qu'on a améliorées. Finalement, le travail de ces trente heures de tous les membres de cette commission fait que ce projet de loi aujourd'hui devient le projet de loi non plus du gouvernement, non plus le projet de loi issu de la commission Paré, mais véritablement le projet de loi de toute l'Assemblée nationale du Québec.

En ce sens, M. le Président, tous les parlementaires qui aujourd'hui, en votant la troisième lecture de ce projet de loi no 65, donneront aux Québécoises et aux Québécois cette Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels, c'est-à-dire nous-mêmes, M. le Président en cette Chambre, peuvent le faire la tête haute et avec fierté parce que c'est véritablement, je pense, dans les circonstances, le meilleur projet. Le député de Westmount l'a souligné, c'est un projet qui est probablement le meilleur qui puisse exister à l'heure actuelle dans nos démocraties occidentales. (18 h 30)

Je veux, M. le Président, ajouter deux choses. D'abord que le défi que pose ce projet de loi est loin d'être terminé du fait de son adoption. Beaucoup dépendra - et les membres de la commission qui ont travaillé si fort à ce texte le savent - des personnes qui seront nommées à cette commission, parce que, même avec le meilleur projet de loi, selon les individus, on peut faire un projet de loi qui, finalement, ne prend pas son envol et n'aura pas toute sa portée. Donc, la nomination des membres de la commission sera extrêmement importante à cet égard. Je veux souligner aussi une chose importante, le député de Trois-Rivières l'a signalée dans son discours de deuxième lecture et je veux revenir là-dessus, parce qu'il est très important pour le gouvernement de déposer dès l'automne le projet de loi sur les archives nationales, qui vient compléter la loi 65. Cela étant, M. le Président, j'ai mentionné l'apport du député de Westmount, l'apport du député de Marguerite-Bourgeoys.

Je voudrais, en terminant, rendre hommage à la personne qui, tout au long de ce cheminement, depuis le tout début, avec ténacité, persévérance - et j'ai mentionné les étapes qu'il a fallu franchir; dans certains cas, c'étaient des étapes longues, parfois difficiles - a su conserver l'espoir, la volonté de mener à terme ce projet et de faire en sorte que les Québécoises et les Québécois

soient dotés de ce projet de loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels.

Je veux parler, bien sûr, du ministre des Communications. Cela est d'autant plus remarquable, à mon avis, qu'en cours d'année, le ministre des Communications a hérité d'une lourde responsabilité additionnelle comme leader du gouvernement, responsabilité d'autant plus lourde en cette fin de session. Malgré tout cela, il a réussi à mener à terme ce projet de loi no 65. Je me souviens, M. le Président, quand le rapport Paré a été publié, que les médias d'information se sont posé la question: Le ministre des Communications aura-t-il le courage de donner suite au rapport Paré? S'il fallait qu'il n'ait pas eu ce courage, les médias d'information seraient tous aujourd'hui en train de parler de l'absence de courage du ministre des Communications. Il a eu ce courage et, assez paradoxalement, les médias d'information ne parlent pas du projet de loi no 65 qui est pourtant, à mon avis, un des projets de loi les plus importants que cette Assemblée nationale s'apprête à donner aux Québécois et aux Québécoises en cette session.

Malgré le double fardeau qu'il a dû assumer, le ministre des Communications a mené ce projet à terme. C'est une coïncidence - et je pense qu'on peut le dire à la Chambre - d'autant plus heureuse. Je pense que tout le monde a le même sentiment. Lorsque l'on donne des cadeaux, on a l'impression souvent que c'est beaucoup plus agréable que d'en recevoir. Normalement, le jour de son anniversaire, on reçoit des cadeaux, mais je pense qu'il est beaucoup plus agréable d'en donner un. Il est significatif que cette troisième lecture de ce projet de loi et la sanction, je présume, de ce projet de loi no 65 se fait le jour de l'anniversaire du leader parlementaire du gouvernement et ministre des

Communications. En ce sens, c'est probablement le meilleur cadeau qu'il pouvait faire à la population du Québec. Merci.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Marguerite-Bourgeoys et leader adjoint de l'Opposition.

M. Fernand Lalonde

M. Lalonde: M. le Président, même si nous sommes dans les dernières heures de cette session et que le temps est précieux pour aborder d'autres projets de loi, je pense qu'il importe de nous attarder quelques minutes sur ce projet de loi. D'abord, est-ce que le leader du gouvernement veut, à la suite de l'annonce que son adjoint vient de nous faire, accepter les bons voeux de l'Opposition? Je le souhaite.

Deuxièmement, on passe tellement de temps ici à se chicaner de toutes les manières que, lorsqu'on s'entend, je pense que cela vaut la peine d'insister et de le dire. Lorsque ce gouvernement... Comme dirait le leader de l'Opposition, ces gens font tellement d'erreurs que, quand ils font une bonne chose, il faut le souligner aussi.

C'est donc avec beaucoup d'espoir que j'avais vu, d'abord, les travaux de la commission Paré et, ensuite, son rapport. Nous l'avons accueilli, mais avec un certain scepticisme, comme l'a dit le député de Taschereau. On a dit: Est-ce que le ministre aura le courage? Nous avons participé, tout le monde le sait, à cette commission parlementaire qui a entendu des gens sur le rapport Paré. Nous avons aussi accueilli avec beaucoup de joie le projet de loi. C'est, en effet, comme le disait le député de Taschereau, un travail d'équipe. Je me souviens de quelques occasions où c'était le député de Taschereau et votre humble serviteur qui, ensemble, tentaient de convaincre le ministre et le député de Westmount d'un de leurs amendements. Alors, c'était au-delà de la partisanerie.

On a tenté - et cela, je le répète même s'il faut prendre quelques minutes de plus - de trouver la plus grande ouverture à l'accès aux documents publics - je pense que je répète les mots du député de Taschereau - et de réduire au minimum les occasions où les renseignements personnels pourraient être transmis d'une personne à l'autre, etc. Donc, la plus grande protection pour les renseignements personnels. Est-ce que nous avons réussi? Je rencontrais un brillant légiste qui a travaillé avec la commission Paré et peut-être - je le soupçonne aussi -qui a travaillé à la rédaction de la loi et je lui disais: J'espère qu'on n'a pas trop "magané" ta loi. Je ne sais pas, j'espère qu'on l'a améliorée. En fait, c'est l'esprit dans lequel on l'a fait. D'ailleurs, les conseillers du ministre l'accompagnaient pas à pas pour nous empêcher d'aller trop loin. Cette loi a une portée incroyable. Moi aussi, je regrette le peu de publicité que cette loi a eue jusqu'à maintenant. À partir de maintenant, il faudrait la faire connaître. Elle a une portée incroyable, il y a 5000 organismes qui, à partir du moment où cette loi entrera en vigueur, devront changer des habitudes, devront avoir une attitude complètement différente vis-à-vis du citoyen, implanter des structures et aussi une nouvelle gestion des documents. C'est une loi qui a une grande portée et on s'en apercevra lorsqu'elle sera mise en vigueur. Je suis sûr que ce cadeau -il nous fait plaisir de nous joindre au ministre pour le donner à la population aujourd'hui - recevra à ce moment-là les éloges qu'il mérite.

Une autre chose - cela vaut la peine de le mentionner, car le ministre a innové à plusieurs égards dans cette loi - c'est, par

exemple, la clause qu'il appelle crépusculaire. C'est une loi qu'on devra revoir parce que, si on ne la revoit pas, elle va disparaître. Donc, c'est une clause qui existe dans d'autres lieux, dans d'autres lois, mais qui force le gouvernement qui sera là à ce moment-là à la revoir, à se repencher dessus, à réexaminer sa portée, à en corriger les excès. Pour cela, je pense qu'on doit remercier le gouvernement et, en particulier, le ministre que je félicite et le député de Westmount, naturellement. Sans lui...

J'étais pris entre deux commissions parlementaires, j'avais celle sur le projet de loi no 37 et celle-là; imaginez-vous l'atmosphère de l'une à l'autre! Cela changeait. Pardon?

Une voix: II y avait une plus grande hospitalité.

M. Lalonde: II y avait deux personnalités aussi: le leader du gouvernement qui nous imposait la guillotine et le ministre des Communications qui nous accueillait à bras ouverts, prêt à nous écouter avec la plus grande bienveillance.

C'est donc à l'épreuve qu'on verra la portée de cette loi. Je souhaite qu'elle soit mise en action dans les plus brefs délais. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre des Communications et leader du gouvernement.

M. Jean-François Bertrand

M. Bertrand: M. le Président, les différents témoignages qui ont été apportés par le député de Westmount, le député de Jeanne-Mance, le député de Taschereau et le député de Marguerite-Bourgeoys auraient de quoi m'émouvoir; je n'ai pas l'émotion facile, mais je dois dire que j'accepte l'ensemble des félicitations qu'ils m'ont adressées, et je l'accepte d'autant plus facilement que je suis capable de les retourner. Effectivement, je reprendrai là-dessus l'image du député de Marguerite-Bourgeoys, vers la fin de ses propos, quand il disait qu'il changeait de chapeau en passant de la commission parlementaire des affaires municipales qui étudiait le projet de loi no 37 à celle des communications qui étudiait le projet de loi no 65. J'ai aussi coiffé deux chapeaux au cours des derniers mois, celui de leader parlementaire du gouvernement et celui de ministre des Communications, et je dois vous avouer que je ressentais beaucoup plus de satisfaction personnelle dans le type de climat qui prévalait à la commission parlementaire des communications que dans le discours que j'ai tenu sur la guillotine que le gouvernement avait décidé d'imposer pour mettre fin aux travaux de la commission parlementaire sur le projet de loi no 37.

En d'autres mots, à la commission parlementaire permanente des communications personne n'a cherché à passer sur le corps de l'autre; je dirais au contraire que l'ensemble des parlementaires qui ont oeuvré sur ce projet de loi pour le bonifier, pour l'améliorer ont vraiment joint leurs efforts, se sont serré les coudes et ont permis, je pense, au parlementarisme de connaître un de ses beaux et de ses grands moments. Effectivement, nous sommes en politique très souvent, la plupart du temps pourrais-je dire, pour vous affronter, exprimer nos divergences d'opinions et montrer à la population qu'il existe un fossé important entre ce qu'on peut penser dans un parti politique et ce qu'on peut penser dans un autre.

À cette commission parlementaire, nous avons vraiment travaillé en équipe. Il était agréable de voir - quoique ça ne devait pas arriver trop souvent, sinon on se serait posé des questions sur les principes de solidarité ministérielle et de responsabilité ministérielle - à l'occasion le député de Taschereau poser des questions et même argumenter avec le ministre et voir aussi le député de Marguerite-Bourgeoys confronter ses points de vue à ceux du député de Westmount de telle sorte qu'on n'avait pas vraiment l'impression qu'autour de cette table il y avait d'un côté l'Opposition, de l'autre le gouvernement, d'un côté le Parti libéral, de l'autre le Parti québécois. Je le dis avec vraiment toute la sincérité qui peut caractériser mes propos en ce moment, c'était vraiment un moment de parlementarisme qui nous a permis de situer le débat à un niveau très élevé et de faire en sorte que nous nous sentions tous ensemble coresponsables de la loi que nous allions faire adopter par l'Assemblée nationale. C'était un de ces moments où le député de Trois-Rivières, qui a présidé à ce document fort important sur la réforme parlementaire, aurait pu réaliser que peu importent les réformes parlementaires, peu importent les projets de loi, peu importent les idées, si on ne peut pas modifier les comportements, les habitudes et les mentalités, finalement il n'y a pas de véritable réforme parlementaire. Je crois que cette commission parlementaire était en elle-même un bel exemple de ce que le parlementarisme peut atteindre comme idéal de perfection.

M. le Président, ce projet de loi que nous allons adopter en troisième lecture, il a d'abord été dans l'histoire une idée. Dans d'autres pays, c'était depuis longtemps une tradition, ça fait partie de l'histoire. Chez nous, c'est devenu une idée à un certain moment. Je veux rendre hommage, à ce point de vue, au député de Trois-Rivières qui, en 1980, lorsqu'il assumait les

reponsabilités de ministre des

Communications, avait présenté un mémoire au Conseil des ministres sollicitant son appui pour créer la commission Paré et permettre ainsi que cette commission puisse effectuer le bon travail que nous avons recueilli et surtout cette proposition de loi qui nous a été tellement utile pour faire avancer plus rapidement nos travaux.

De projet de loi en projet de loi, de commission parlementaire en comité ministériel permanent jusqu'au comité de législation, le Conseil des ministres et tous ces organismes qu'on doit traverser avant de parvenir à l'Assemblée nationale, il y a eu beaucoup de travail et je dois en rendre hommage à ces fonctionnaires qui, au sein du ministère des Communications, au comité de législation, au ministère de la Justice, parmi ce groupe de légistes fort compétents, nous ont aidés à préparer le projet de loi.

Je veux dire que cette idée qui a été présentée par le député de Trois-Rivières est aujourd'hui appliquée dans un projet qui va devenir, tout le monde l'aura reconnu, une des pièces majeures de notre législation. Je pense que, dans les objectifs de transparence que nous cherchons à atteindre, dans les objectifs d'amélioration de notre régime démocratique et dans ces objectifs fondamentaux qui sont inscrits dans la Charte des droits et libertés, comme, par exemple, le droit à l'information et le droit à la protection de la vie privée, je crois que ce projet de loi fournit finalement ce que le député de Westmount appelait tout à l'heure une des pièces législatives exemplaires dans le domaine de l'accès à l'information et de la protection des renseignements personnels.

Je suis content du travail qui a été fait en commission parlementaire parce que, effectivement, comme le disait le député de Westmount, nous avons réussi à bonifier le projet de loi. Nous avons calculé, quant à nous, plus de 70 articles qui ont été modifiés sur les 184 que contient le projet de loi. C'est beaucoup, mais c'est correct et c'est normal. Nous étions dans un champ nouveau, nous faisions du droit nouveau et il était normal que, dans ce contexte, nous apportions, à l'occasion de l'étude article par article pendant ces 33 heures de débat en commission parlementaire, un bon nombre d'améliorations.

La loi, maintenant, va être adoptée. Cette loi, je le dis, en y incluant l'article 146, va vivre un certain nombre d'années jusqu'à ce que notre gouvernement ou un autre ait la responsabilité de la réviser. C'est à l'usage et à l'usure, comme dirait l'autre, qu'on verra ce qu'elle donne, qu'on pourra évaluer les résultats qu'elle permet et dans la mesure, évidemment, où, depuis la proposition de loi contenue dans le rapport Paré jusqu'à tous ces brouillons, esquisses, projets qui ont préparé le projet de loi no 65, nous en arrivions à l'adoption de cette loi, il y a eu beaucoup de travail qui a permis d'en arriver à perfectionner cet instrument, mais il y aura beaucoup à faire encore. Je suis convaincu que, dans cinq ans, lorsque des parlementaires se pencheront de nouveau sur cette loi, ils y auront trouvé un certain nombre de trous, ils y auront trouvé un certain nombre de failles, ils auront réalisé que certains de ses articles doivent ou disparaître, ou être améliorés ou que d'autres articles doivent être introduits. C'est le lot des lois. Elles ne sont pas coulées dans le ciment pour empêcher qu'il y ait une dynamique. (18 h 50)

L'évolution va nous permettre d'évaluer justement quels sont ces changements qui devront être apportés en cours de route. Mais je pense que nous avons là un bon point de départ. Nous avons un outil, un instrument qui va être extrêmement utile pour l'ensemble de la collectivité québécoise parce que c'est pour elle que nous avons préparé ce projet de loi et que nous allons adopter ce projet de loi. C'est pour l'ensemble de nos concitoyens et concitoyennes, à qui nous disons que le droit à l'information, ce doit être plus qu'un beau mot; que la protection de la vie privée, ce doit être plus qu'un voeu pieux. Cela doit se concrétiser dans des actes, dans des gestes, dans des attitudes, dans des comportements, dans des mentalités. C'est tellement vrai que cette loi, aussi valable soit-elle, ne sera jamais efficace ou efficiente si les hommes et les femmes qui ont à l'appliquer, qui ont à vivre avec ne sont pas des personnes qui acceptent de modifier leur comportement, leurs habitudes et leur mentalité.

Donc, dans ce contexte, M. le Président, je voudrais dire en terminant que, quant à moi, j'ai trouvé extraordinaire l'expérience vécue à l'occasion de l'étude de ce projet de loi et, en particulier, en commission parlementaire lors de l'étude article par article. J'y ai découvert, j'ai appris à y connaître davantage des collègues de l'Assemblée nationale qui jamais n'ont laissé pointer quelque allusion partisane dans l'ensemble des discussions. Je le dis pour le député de Taschereau, dont les connaissances dans le secteur juridique ont été extrêmement profitables au ministre des Communications qui n'a pas eu le privilège de poursuivre des études dans cette discipline. Je le dis pour le député de Westmount, dont la connaissance des lois vécues dans plusieurs pays a été extrêmement profitable pour l'amélioration de ce projet de loi. Je le dis à l'ex-Solliciteur général qui nous a apporté bon nombre de remarques pertinentes qui ont permis certaines modifications qui, je le crois, ont bonifié ce projet de loi à la fin.

Je dis à toutes ces personnes que c'est

leur oeuvre, c'est leur accomplissement et qu'aujourd'hui le ministre des

Communications, effectivement, en ce 22 juin, est très fier de pouvoir présenter à la collectivité québécoise le projet de loi no 65, en espérant qu'il sera utilisé au maximum et qu'il permettra concrètement d'en arriver à réaliser ce double objectif de droit à l'information pour l'ensemble de la collectivité et de protection de la vie privée pour les hommes et les femmes du Québec.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Est-ce que la troisième lecture du projet de loi no 65, Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels, est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Bertrand: Oh: M. le Président, emporté par l'enthousiasme d'adopter un projet de loi et ne résistant aucunement à la bonification jusqu'à la dernière minute, j'allais oublier que deux amendements s'y ajoutent, mais ils sont purement de forme. Il y a un amendement à l'article 1 et un amendement à l'article 163; ils ont été transmis à mes collègues de l'Opposition ainsi qu'au secrétaire général. Je ferais motion pour que nous puissions les adopter.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader adjoint de l'Opposition.

M. Lalonde: Je veux être bien sûr pour ne pas qu'on fasse erreur. Ce que le leader nous a communiqué contenait aussi un amendement à l'article 22.

M. Bertrand: Oui, il est enlevé. C'est une erreur. On voulait souligner le 22 juin etc., mais c'est une erreur, on voulait dire autre chose.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Donc, nous allons procéder selon les formes, c'est-à-dire qu'il y a consentement pour la révocation de la troisième lecture, qu'il y a adoption des modifications à l'article 1 et à l'article 163, les amendements, que le rapport en commission plénière est adopté tel qu'amendé et que la troisième lecture est adoptée tel qu'amendée.

M. le leader du gouvernement.

M. Bertrand: M. le Président, à ce moment-ci, puisque nous avons le plaisir d'avoir avec nous le ministre délégué à l'Administration et président du Conseil du trésor, sans oublier sa lourde responsabilité mais combien intéressante de député du comté de Matane, aborder en même temps l'étude en troisième lecture des projets de loi nos 68 et 70. C'est l'article 4 du feuilleton, M. le Président, ainsi, avec le consentement de l'Opposition, que le projet de loi no 70 qui n'est pas inscrit au feuilleton parce nous avons effectué la prise en considération plus tôt aujourd'hui.

Projets de loi nos 68 et 70 Troisième lecture

Le Vice-Président (M. Jolivet): C'est cela. Il y a consentement pour qu'on puisse procéder à l'étude du projet de loi no 70. Donc, il y aura la troisième lecture du projet de loi no 68, Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant les régimes de retraite et, selon l'entente prévue, la troisième lecture du projet de loi no 70, Loi concernant la rémunération dans le secteur public. M. le ministre délégué à l'Administration et président du Conseil du trésor.

M. Bérubé: M. le Président, nous avons longuement débattu du projet de loi no 68 et du projet de loi no 70. Même qu'hier, tard dans la nuit, pour la prise en considération du rapport sur la loi 68, j'ai eu l'occasion de faire une intervention d'une dizaine de minutes. Je pensais me réserver simplement le droit de réplique de telle sorte qu'on puisse, en fait, aller un peu plus rapidement.

Le Vice-Président (M. Jolivet): D'accord. Le chef de l'Opposition.

M. Claude Ryan

M. Ryan: M. le Président, nous aimerions pouvoir passer aussi rapidement sur ce projet de loi que semble vouloir le faire le président du Conseil du trésor, mais c'est impossible de le faire pour des raisons qui sautent aux yeux. Autant nous étions d'accord pour accepter le projet de loi no 65 et nous en réjouir, autant nous devons maintenir jusqu'à la fin l'opposition très ferme que nous avons exprimée à l'encontre des projets de loi nos 68 et 70. Le projet de loi no 68 est celui qui modifie unilatéralement et arbitrairement les conditions de participation aux régimes de retraite des employés des secteurs public et parapublic et le projet de loi no 70 est celui qui modifie les conditions salariales des employés des secteurs public et parapublic pendant les trois premiers mois de l'année 1983.

Mon collègue, le député de Vaudreuil-Soulanges, a résumé ce matin au stade de la prise en considération du rapport de la commission les objections que nous avons formulées à l'encontre du projet no 68 relatif aux régimes de retraite.

Je voudrais parler plus particulièrement, à ce stade-ci, du projet no 70, dans une dernière tentative, que je sais malheureusement devoir être vaine, en vue de convaincre le gouvernement de la gravité du geste qu'il s'apprête à faire en utilisant sa majorité en cette Chambre.

Il est arrivé à plusieurs reprises, M. le Président, que nous ayons été appelés dans cette Chambre au cours des dernières années à adopter des lois spéciales dans des domaines directement reliés aux conditions de travail. Encore hier, nous avons adopté la loi 91 en vertu de laquelle l'Assemblée nationale, usant de son pouvoir souverain, enjoignait aux médecins omnipraticiens de reprendre le travail dès aujourd'hui. Au début de la présente année, nous avons adopté une loi ordonnant aux travailleurs de la Commission de transport de la Communauté urbaine de Montréal de reprendre le travail. Mais chaque fois depuis, je dirais, une quinzaine d'années que ce recours à des lois d'exception existe dans l'Assemblée nationale, chaque fois que l'Assemblée nationale a adopté une loi spéciale affectant les conditions de travail dans un secteur, cela a été au terme d'un processus pendant lequel toutes les règles de la négociation libre des conditions de travail avaient été observées par les deux parties. C'est parce que, étant parvenu au terme du processus et ayant abouti à un constat d'impuissance insurmontable, les parties n'avaient plus de solution; le bien public était directement affecté, que l'Assemblée nationale était invitée par le gouvernement à intervenir. Toujours, l'intervention s'est faite, par conséquent, au terme d'un processus de négociation libre qui est un des fondements même de tout notre régime de relations du travail et je dirais, je l'expliquerai tout à l'heure d'ailleurs, de tout notre régime politico-social. (19 heures)

Dans ce cas-ci, le gouvernement intervient alors que ce processus n'a pas du tout connu son développement normal. D'abord, il n'y a pas eu de négociation en bonne et due forme. Il y a eu des embryons de conversation, il y a eu des échanges de vues exploratoires, des échanges de propos par la voie des journaux et de la télévision, il n'y a pas eu de négociation au sens réel du terme.

Deuxièmement, la période pendant laquelle auraient dû avoir lieu ces négociations expirait, selon la loi modifiée par le gouvernement actuel, le 31 décembre prochain. Il restait par conséquent sept mois pour procéder à des négociations en bonne et due forme avec les syndicats accrédités qui représentent légalement les quelque 350 000 employés des secteurs public et parapublic. Le gouvernement n'a pas tenu compte de ce facteur.

En troisième lieu, le gouvernement avait fait une demande aux syndicats concernés, il les avait invités à renoncer à des engagements qu'il avait pris sous sa signature. Les syndicats lui ont donné une réponse contenant des éléments d'ouverture importants. Malgré tous ces facteurs, le gouvernement a décidé de procéder de manière unilatérale, de manière urgente, de manière autoritaire et de manière que je qualifierais d'arbitraire. C'est une attaque sans précédent contre le principe du droit d'association et son corollaire logique, le principe même du droit à la libre négociation des conditions de travail par les salariés dans quelque secteur que ce soit.

Si l'on craint que mes paroles soient trop sévères, qu'on me permette de rappeler ce qu'ont dit en commission parlementaire les porte-parole les plus autorisés des travailleurs syndiqués du Québec. En particulier, M. Louis Laberge, le président de la Fédération des travailleurs du Québec, a déclaré publiquement et avec beaucoup de force que ce projet de loi était la mesure la plus odieuse, la plus abjecte, la plus dangereuse et la plus rétrograde qu'il lui ait été donné de voir en 30 années de vie syndicale.

Le nouveau président de la CSN, M. Donatien Corriveau - à qui je rends hommage, parce qu'il est venu témoigner devant la commission comme un homme sensé et responsable; il n'y avait aucune démagogie dans les propos que cet homme est venu nous tenir - a porté lui aussi un jugement très sévère sur le projet gouvernemental. Nous avons entendu un jugement également sévère et dur de la part du président de la Centrale de l'enseignement du Québec, M. Gaulin, et de la part du président du Syndicat des fonctionnaires du gouvernement du Québec, M. Harguindeguy.

C'est une attaque, encore une fois, sans précédent. C'est la négation du droit à la libre négociation des conditions de travail par un groupe extrêmement important, le salarié de notre société. En commission parlementaire, le ministre, avec qui nous avons eu des échanges très substantiels, très ordonnés, très cordiaux même à certains moments, quoique les divergences soient demeurées profondes et inconciliables du début à la fin, en commission parlementaire, le ministre a laissé tomber des propos que je ne puis m'empêcher de relever. Il a dit: Au fond, l'Opposition et le gouvernement sont d'accord sur la substance; ce sont des questions de forme qui nous séparent. Je tiens à me dissocier totalement et très catégoriquement de cette distinction que je qualifierais d'inacceptable. C'est un principe de fond qui est impliqué ici. Ce n'est pas uniquement une question de forme. Je me rappelle quand nous discutions les

amendements constitutionnels, en février dernier. Moi-même, comme chef de l'Opposition, je me suis opposé à la manière unilatérale de procéder du gouvernement fédéral et j'ai entendu plusieurs porte-parole fédéraux dire à l'époque: II n'y a pas de problème, le chef de l'Opposition à Québec est d'accord sur le fond. C'est simplement un désaccord de forme. J'ai insisté pour dire à ce moment-là que le processus lui-même impliquait des principes fondamentaux auxquels nous ne pouvions pas demeurer indifférents et auxquels nous ne pouvions, par conséquent, renoncer.

Dans ce cas-ci, je dis au ministre que c'est un principe fondamental qui est violé directement, ouvertement, je dirais même inconsciemment par le gouvernement. J'ajoute à l'intention du ministre que s'il avait été là quand nous avons fait des luttes qui ont abouti à la libéralisation de nos lois du travail, au début des années 60, - il était encore très jeune à ce moment-là - s'il avait été présent quand nous avons tenu ces débats sur la place publique, d'autres dans ce Parlement, d'autres dans les journaux, d'autres dans les organisations volontaires de toutes sortes, il ne parlerait pas comme cela, parce qu'à ce moment-là, quand nous réclamions la libéralisation des droits du travail, nous étions convaincus que nous traitions d'un problème de substance, que nous traitions du contenu même du genre de société démocratique dans laquelle nous voulions vivre. Si ces questions devaient devenir, pour le gouvernement actuel, des pures questions de forme, je serais très inquiet. J'ose espérer qu'en s'exprimant de cette manière le ministre, président du Conseil du trésor, a laissé tomber des propos qui dépassaient largement sa pensée, ainsi que celle de ses collègues du gouvernement.

Deuxième point. Il est souvent arrivé, au cours des derniers mois, à l'occasion de cette crise économique que nous connaissons et dont je dirai un petit mot tantôt, que des employeurs, mal pris par les effets de cette situation économique extrêmement corsée, se soient sentis obligés de remettre en question les engagements auxquels ils avaient consenti sous la signature de leurs représentants attitrés. L'adjoint parlementaire du ministre du Travail, de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu, le député de Prévost, évoquait dans cette Chambre, il y a déjà quelque temps, le cas de la compagnie Ford, aux États-Unis, qui avait demandé à ses syndicats d'être déliée de ses engagements contractuels. On pourrait citer le cas de General Motors, le cas de Chrysler également et d'un bon nombre d'autres compagnies.

Mais ce que l'adjoint parlementaire n'a pas ajouté, ce qu'il a oublié de mentionner et qui est capital, c'est qu'aucune de ces entreprises qu'il a mentionnées n'aurait procédé à des changements dans ses engagements contractuels si elle n'avait pas obtenu l'acquiescement de la partie syndicale. C'est tellement vrai qu'au Canada c'est curieux, parce que l'adjoint parlementaire a parlé des États-Unis, mais il oublié de parler du Canada qui est bien plus important pour nous autres - la compagnie Ford et la compagnie General Motors ont demandé à leurs syndicats de rouvrir des conventions collectives qu'elles avaient signées en bonne et due forme et, les syndicats ayant refusé, ces compagnies ont reconnu qu'il ne leur était pas loisible de rouvrir unilatéralement les conventions collectives.

C'est la première fois, à ma connaissance, qu'un employeur de l'importance du gouvernement du Québec décide, de son propre chef, seul, de procéder de cette manière. J'assure le ministre que le mécontentement profond créé par cette mesure ne fait que commencer à se manifester. Je pense que le gouvernement vit encore sous l'effet d'un certain engourdissement créé dans l'opinion publique par le fait que la mesure ne prendra effet qu'à compter du 1er janvier 1983. Je veux vous assurer, M. le Président, que ce que le gouvernement fait en reniant sa signature, en refusant d'honorer ses engagements, en procédant de manière jésuitique, de manière sibylline, de manière subreptice pour faire, à compter du 1er janvier 1983, ce qu'il n'était absolument pas autorisé à faire avant le 31 décembre 1982, c'est une procédure qui est absolument déplorable. C'est une procédure qui contribue à mettre en doute la crédibilité du gouvernement, la crédibilité de nos institutions politiques et la crédibilité de n'importe quelle signature qui pourra émaner à l'avenir de ces gens du gouvernement. Comment pourra-t-on prendre au sérieux à l'avenir leur signature quand on se souviendra que, dans une affaire aussi importante, ils ont décidé de l'envoyer promener en se servant, encore une fois, de la majorité dont ils jouissent dans cette Chambre pour faire des choses qu'ils auraient été les premiers à condamner vivement, à reprocher sévèrement à d'autres, si elles avaient été faites du temps où ils étaient dans l'Opposition? Ils ont fait énormément d'agitation sociale quand ils étaient dans l'Opposition, pour des motifs infiniment inférieurs à ceux qui justifient les opposants à cette mesure législative de la combattre avec vigueur.

Avec le projet de loi no 70 et le projet de loi no 68, le gouvernement va chercher dans la poche des employés des secteurs public et parapublic 800 000 000 $, au bas mot, M. le Président: à peu près 521 000 000 $ avec le projet de loi no 70 qui affecte immédiatement les salariés syndiqués des secteurs public et parapublic, 150 000 000 $ avec le projet de loi no 68

qui touche les régimes de retraite et au moins 50 000 000 $ du côté des cadres non syndiqués qui seront frappés par un gel complet à partir du mois prochain.

C'est une mesure qui entraîne des réductions salariales pendant les trois premiers mois de 1983 pour les employés syndiqués des secteurs public et parapublic, non pas de 18,8%, comme l'a dit vertueusement le président du Conseil du trésor dans son discours de présentation, mais d'environ 22%. Nous avons fait les calculs ensemble et je pense que le ministre en a convenu avec nous lors des travaux en commission parlementaire. En tout, c'est 22% de réduction que les employés syndiqués des secteurs public et parapublic se verront imposer pendant les trois premiers mois de 1983 sans savoir ce qui les attend par la suite.

Disons que c'est une mesure injuste et illégale. On prend en otage une catégorie particulière de travailleurs, on leur impose des sacrifices qui sont sans aucune commune mesure avec ceux exigés non seulement des autres citoyens en général, mais même d'autres catégories très importantes de travailleurs qui évoluent eux aussi dans les secteurs public et parapublic, mais qui échappent aux effets de cette mesure. Nous disons que c'est une mesure odieuse parce que, une fois de plus, suivant une habitude qui le caractérise et dont nous avons eu d'autres exemples dans cette Chambre pas plus tard qu'aujourd'hui, le gouvernement exploite un préjugé populaire et tente de l'utiliser pour ses avantages politiques et électoraux.

Tout le monde sait qu'il y a un préjugé très répandu voulant que les employés des secteurs public et parapublic soient mieux traités que les autres, soient dans une espèce de loge dorée où ils n'ont pas de problème, pas d'inquiétude pour l'avenir, où ils seraient beaucoup mieux payés que les autres en retour d'un travail souvent moins considérable, moins abondant que celui qu'on observe dans d'autres secteurs. Il y a des questions qui se posent à ce sujet. Il ne faut pas être aveugle, il ne faut pas se laisser aller à des jugements faciles ni dans un sens, ni dans l'autre. Nous trouvons qu'utiliser ce genre d'argument à ce moment-ci pour justifier des mesures qui visent une catégorie particulière de citoyens, c'est procéder d'une manière proprement odieuse et inadmissible.

Si le gouvernement a fait des erreurs dans le passé - nous en parlerons tantôt - il y a des moyens de les corriger dans l'avenir, mais on ne cherche pas à corriger ses erreurs en exploitant des préjugés qui circulent un peu partout au sujet des soi-disant écarts qui existeraient dans le traitement accordé aux employés du secteur public et ceux dont jouissent les salariés d'autres secteurs. N'oublions pas que les employés des secteurs public et parapublic sont déjà surtaxés par le gouvernement actuel. Comme tous leurs autres concitoyens, ils paient 18% de taxe de plus que les salariés de l'Ontario.

Je vois le président du Conseil du trésor qui me regarde avec étonnement. L'écart fiscal véritable entre les citoyens du Québec et ceux de l'Ontario est de 18%, de l'aveu même du ministre des Finances. C'est 14% selon vos formules de rapports d'impôt et 4% de plus en redevances que vous allez chercher dans la caisse des sociétés de la couronne, des organismes d'État, lesquels vont chercher leurs revenus dans les goussets des contribuables sous forme de tarifs plus élevés. Si le ministre ne veut pas me croire, il pourra réfuter mes propos tantôt. Ce sont des chiffres qu'on trouve dans le document annexé au discours sur le budget du ministre des Finances présenté le 26 mai dernier. 14% si vous regardez le fardeau direct qui échoit aux contribuables individuels et 18% si on ajoute à ce fardeau les sommes que le gouvernement va chercher en plus dans la caisse des sociétés de la couronne.

Ces employés des secteurs public et parapublic paient par conséquent des taxes à un niveau beaucoup plus élevé que les citoyens des autres provinces. Ils sont frappés durement par les conséquences de l'impéritie du gouvernement. Le gouvernement les frappe d'une manière toute spéciale avec le projet de loi no 70 et le projet de loi no 68 et nous ne pouvons en aucune façon être solidaires d'une mesure aussi arbitraire, aussi contraire à nos traditions et aussi influencée par la situation désespérée dans laquelle, au point de vue financier, le gouvernement s'est lui-même placé, sans que ses fonctionnaires et ses employés aient rien à y faire. Pourquoi le gouvernement agit-il de la sorte? Voilà la vraie question que nous devons nous poser, M. le Président.

La cause de cette situation dans laquelle est plongé le gouvernement, le ministre nous a dit, avec une répétition presque inlassable, que c'est la crise économique actuelle. C'est l'argument qu'a trouvé le gouvernement, un argument à deux volets. Nous sommes dans une situation de crise épouvantable et, deuxièmement, nous faisons appel à la solidarité nationale. Venez vous joindre à nous. Nous avons absolument besoin de vous et, comme vous ne le voulez pas, on va vous conscrire de force. Le gouvernement invoque la crise économique. Il n'est pas le seul à être frappé par la crise économique. Il y en a beaucoup d'autres qui sont frappés. Les municipalités du Québec sont frappées par la crise économique. Avez-vous entendu parler d'une seule municipalité du Québec qui se serait présentée à l'Assemblée nationale en demandant d'être soulagée de ses engagements contractuels

envers ses employés? Avez-vous entendu parler du gouvernement d'une autre province du Canada? Ils en ont des conventions collectives, en quantité, dans les autres provinces. Ils ne fonctionnent pas de la même manière centralisée que nous avons au Québec par la faute surtout du ministre actuel des Finances, mais ils ont des conventions collectives en quantité. Avez-vous entendu parler d'un seul gouvernement d'une autre province qui aurait été obligé de se présenter devant sa Législature en disant: Notre ministre des Finances a négocié des conventions que nous ne sommes plus capables d'honorer. Voulez-vous nous soulager de notre signature? Nos employés ne veulent pas comprendre. Il n'y a aucune autre province où le problème se soit présenté de cette manière-là.

Le gouvernement fédéral a des problèmes considérables dont il est largement responsable, mais est-ce que vous l'avez vu se présenter devant le Parlement en disant: Nous avons pris des engagements avec nos employés des Postes, avec nos employés de Radio-Canada, avec nos postiers, avec nos employés de l'impôt sur le revenu, et nous ne sommes plus capables de leur payer des salaires que nous nous étions engagés à leur payer. Voulez-vous nous dégager, par une loi spéciale, de la signature que nous avions donnée? Nulle part, M. le Président, un employeur public n'invoque un tel argument et, de manière très générale, les employeurs privés que nous avons au Canada respectent, eux aussi, intégralement, les engagements qu'ils ont pris par voie de négociation et de convention collective.

Pourquoi le gouvernement en est-il réduit à présenter une mesure comme celle-ci? C'est bien simple. Il a fait deux graves erreurs ces dernières années. D'abord, il a mal géré les finances publiques du Québec. Il les a gérées d'une manière imprudente et imprévoyante. Je le disais, l'autre jour, au ministre des Finances. Dans les autres provinces du Canada, on a commencé, il y a cinq ou six ans, à réduire les déficits, à exercer un contrôle vigilant sur les dépenses publiques. On voyait venir la crise. Tout le monde sentait la venue de cette crise qui s'est manifestée d'une manière beaucoup plus virulente au cours de la dernière année. Mais les autres gouvernements ont été prévoyants. Ce gouvernement-ci, au lieu de faire montre de prévoyance, a laissé les déficits s'accroître sans cesse, au point qu'il nous a endettés collectivement de 14 000 000 000 $ de plus en l'espace de six ans. Notre dette était à 5 000 000 000 $. Elle sera, à la fin de la présente année budgétaire, de 18 000 000 000 $. Cela veut dire des déficits incroyables. Nous en sommes au troisième déficit annuel de 3 000 000 000 $. Il faut bien, quand on entre dans une période de contraction économique encore plus marquée, que la piqûre, l'effet de cette piqûre se manifeste quelque part. Cela s'est manifesté dans la caisse du gouvernement qui était devenue vide. Il était en désespoir de cause - je vais en parler tantôt - et il s'est dit: II me reste seulement une sortie: il faut que j'aille chercher cela dans la poche des employés des secteurs public et parapublic qui seront sans défense à ce moment-là.

La deuxième erreur qu'a faite le gouvernement a été de négocier, en 1979-1980, des conventions collectives extrêmement imprudentes. D'abord, au plan des clauses normatives qui sont tellement importantes dans leurs implications financières, vous avez, messieurs du gouvernement, laissé aller tout le paquet en 1979. Vous avez laissé tomber à peu près tout cela. Il y a un journaliste qui était témoin de toutes ces négociations, M. Demers. Il a écrit un volume récemment et il raconte qu'eux autres mêmes, du côté syndical, étaient renversés de la légèreté avec laquelle le négociateur en chef du gouvernement laissait tomber toutes les clauses normatives. Il disait: On va maintenir le statu quo sur toute la ligne. Déjà, il y avait de ces clauses-là qui demandaient à être révisées en profondeur. Vous les avez laissées toutes aller. Vous avez même ajouté des élargissementes considérables en matière de sécurité d'emploi. Vous avez ajouté des clauses qui sont absolument indéfendables et dont nous espérons que vous voudrez les réviser à l'occasion des prochaines négociations. (19 h 20)

En matière salariale, c'est vous autres, du gouvernement, qui avez concédé les clauses que le ministre et président du Conseil du trésor veut rappeler ou racheter par le truchement de la loi 70. Ce n'est pas venu du ciel, ce n'est pas tombé des nues, ces obligations qui incombent au gouvernement aujourd'hui, c'est lui-même qui les a contractées. Aujourd'hui, il voudrait créer une atmosphère, par sa propagande et ses propos, qui en ferait reposer tout le blâme sur les employés des secteurs public et parapublic, nous refusons fermement ce genre d'exercice. À cause de son imprévoyance, le gouvernement s'est placé dans une situation telle que tous les robinets sont bouchés. Il voudrait recourir à l'emprunt, et ici, je vais corriger une fausse impression qui a été créée par plusieurs porte-parole gouvernementaux.

On nous dit: Vous affirmez que nous ne pouvons plus emprunter. Ce n'est pas nous qui l'affirmons, c'est le ministre des Finances, c'est le premier ministre, c'est le président du Conseil du trésor, c'est vous autres qui avez dit que vous n'êtes plus capables d'emprunter au-delà de 3 000 000 000 $. Nous n'y pouvons rien,

nous ne sommes pas des magiciens des finances publiques, c'est vous autres qui l'avez admis en toutes lettres. Vous avez mené toute votre campagne pour le projet de loi no 70 sur ce thème. Vous nous avez dit: On ne peut pas taxer davantage. Ce n'est pas a nous de vous le dire, c'est vous autres qui l'avez dit.

Vous nous dites: Troisièmement, nous avons fait des compressions budgétaires, mais nous ne pouvons pas aller plus loin. Vous nous posez souvent cette question: Qu'est-ce que vous auriez fait, à notre place? Comment agiriez-vous, si vous étiez à notre place? Si nous avions été à la place du gouvernement, nous aurions d'abord fait marcher l'économie d'une manière tout à fait différente de celle qu'a employée ce gouvernement. Au lieu de décourager les entrepreneurs, au lieu de nous réjouir quand des entreprises quittaient le Québec, au lieu de créer des conditions vraiment de nature à "désinciter" ceux qui veulent investir, nous aurions essayé, par tous les moyens, d'encourager ceux qui sont capables de procurer des emplois et de faire marcher l'économie.

Nous aurions fait l'économie de querelles stériles, inutiles et coûteuses avec le gouvernement fédéral, qui ont privé le Québec d'une participation légitime à bien des programmes qui auraient permis de renforcer l'activité dans plusieurs secteurs de notre économie. Nous aurions gardé les déficits à un niveau beaucoup plus raisonnable, nous aurions évité de porter l'endettement public à ce niveau qui est devenu incontrôlable. Je le disais l'autre jour au ministre des Finances, si seulement le rapport entre la dette publique et les dépenses du gouvernement était demeuré du même ordre - si le pourcentage était demeuré le même - que ce qu'il était en 1976... Personne ne vous dira sérieusement que la dette du Québec aurait dû rester à 5 000 000 000 $. Non, il était normal qu'elle augmente, mais elle aurait dû, selon nous, augmenter dans les mêmes proportions que les dépenses ont augmenté de façon que le rapport entre ce que vous dépensez et ce que vous allez chercher sous forme de revenus et l'endettement que vous encourez soit demeuré sous contrôle raisonnable.

Si la dette était demeurée dans le même rapport, comparativement aux dépenses où elle était en 1976, savez-vous de quelle marge de liquidité additionnelle le gouvernement aurait disposé en 1982-1983? 1 000 000 000 $ au bas mot. Cela vous aurait évité l'obligation d'aller voler aux employés des secteurs public et parapublic les sommes que vous allez extraire par le truchement des projets de loi nos 68 et 70. Nous aurions été en mesure, avec ce genre de gestion, de présenter au public québécois, pour l'année 1982-1983, une équation budgétaire entièrement différente, des revenus d'une nature différente, des dépenses d'un volume différent, un déficit d'un volume beaucoup moins élevé. Cela nous aurait permis d'envisager le renouvellement des conventions collectives, à compter de 1983, dans des conditions infiniment meilleures à la fois pour le gouvernement employeur et pour les travailleurs syndiqués que celles qui se dessinent dans le sillage des lois 68 et 70 dont vous devrez porter longtemps la responsabilité aux yeux des travailleurs.

Vous nous avez dit souvent en cours de route - je tiens à y revenir, parce que cela a été un de vos leitmotivs en cours de discussion - qu'est-ce que vous auriez fait à notre place? Avez-vous des suggestions positives a présenter? Nous en avons présenté à plusieurs reprises, je vais les rappeler brièvement. Pour faire mentir ceux qui disent que nous n'en avons jamais présenté, je vais m'inspirer du discours que j'ai fait en deuxième lecture pour rappeler ces choses.

Premièrement, comme gouvernement, nous aurions respecté notre signature intégralement. Avant de donner notre signature, nous en aurions mesuré davantage les implications, mais, une fois donnée, nous l'aurions respectée intégralement.

Deuxièmement, nous n'aurions jamais envisagé de faire indirectement ce que nous ne pouvons faire directement, ce que nous nous serions engagés à ne pas faire directement sous la signature de tout un gouvernement. Troisièmement, nous aurions affirmé beaucoup plus tôt et beaucoup plus clairement que le gouvernement actuel ne l'a fait le principe d'une parité raisonnable, en matière de rémunération, entre le secteur public et le secteur privé.

De l'aveu même du gouvernement, la source du problème auquel on prétend trouver une solution par la loi 70, ce sont les salaires trop élevés qu'aurait donnés ce gouvernement dans ses conventions de 1979-1980; autrement, il ne viendrait pas rechercher cet argent, il l'admet lui-même. Nous autres, nous affirmons depuis déjà au moins deux ou trois ans qu'il faut aller vers la parité raisonnable entre le secteur public et le secteur privé. Vous vous êtes toujours vanté, parce que vous aviez bien des appuis électoraux dans ce milieu, que vous étiez capables de faire mieux, que le secteur public devait être la locomotive qui véhiculait tout le reste, qui donnait son "impetus", son élan à tout le reste. On paie pour aujourd'hui, tous ensemble. Nous le disons clairement.

Quatrièmement, nous proposons que soient établis dans les plus brefs délais des mécanismes institutionnels impartiaux pour la cueillette et l'interprétation des données. Tout ceci se fait sur la base de données qui ont été recueillies et interprétées

unilatéralement par le gouvernement. On vous dit: C'est effrayant, vous êtes payés beaucoup plus que dans le secteur privé. II faut aller chercher cela dans vos poches. Savez-vous que, sur les 350 000 employés des secteurs public et parapublic, il y en a à peine 90 000 ou 100 000 au maximum qui occupent des emplois comparables à ceux qu'on trouve dans le secteur privé. Les autres ne sont même pas comparables.

Comment pouvez-vous fonder tout un projet de loi sur une affirmation comme celle-là? Nous vous disons que c'est un domaine où il faudrait absolument - vous avez eu six ans pour le faire et vous ne l'avez point fait encore - que nous ayons un mécanisme impartial de cueillette et d'interprétation des données. Il faudrait au moins que les données, les chiffres soient les mêmes pour tout le monde, qu'ils soient communément acceptés, qu'ils soient établis par une autorité impartiale sur laquelle les deux parties pourraient exercer un droit de regard, un droit de surveillance quelconque, mais qui, en fin de compte, pourrait dire: La vérité, c'est ceci. Ce ne serait pas uniquement la vérité du gouvernement, ni celle des syndicats, mais une vérité impartiale. En matière de chiffres et de rémunération, ce sont des choses qu'il est possible d'établir.

Nous vous avons dit, en cinquième lieu, que vous devriez vous préparer dès maintenant à présenter, en vue de l'année 1983 et des années subséquentes, des propositions salariales en bonne et due forme sur la table. Nous ne les avons pas encore, ces propositions. Nous n'avons même pas l'ABC d'une politique salariale du gouvernement. C'était le temps. Jusqu'au mois de décembre, c'est en plein la période où le gouvernement aurait dû déposer sur la table ses propositions salariales en vue de l'année 1983.

Le député de Joliette me regarde, il connaît cela, la négociation collective, il sait que c'est comme cela que cela se fait. Il sait qu'actuellement le gouvernement est dans une voie dont il n'a jamais vu l'équivalent quand il négociait du côté syndical. C'était cela, la procédure à suivre. Si vous n'êtes pas capables de donner d'augmentation en 1983, si vous n'êtes plus capables de donner l'indexation, de donner la prime d'enrichissement et de tenir compte de tous les autres facteurs, si vous n'êtes plus capables de tenir compte des avancements d'échelon, nous vous le disons: Déposez franchement vos propositions sur la table, vous avez jusqu'au mois de janvier pour le faire. Par conséquent, vous n'aviez aucune raison valable de procéder de manière unilatérale et aussi arbitraire à un stade aussi prématuré dans le déroulement du processus dont nous avons parlé tantôt. (19 h 30)

Enfin, nous vous disions: Définissez donc les éléments d'une véritable politique salariale. Ce n'est pas tout de dire: II faut se baser sur le secteur privé, ce n'est pas suffisant pour définir une politique salariale humaine, sérieuse, responsable et complète. Jamais nous n'avons entendu de la part du gouvernement - cela fait six ans qu'il gère les affaires du Québec - jamais nous n'avons entendu un exposé de politique salariale sérieux. II y a d'autres suggestions que nous avons faites également. Je pense que j'en ai présenté assez pour montrer que l'attitude de l'Opposition est une attitude foncièrement positive dans ce débat.

Je recevais cet après-midi même, du président d'une des centrales syndicales les plus importantes, un appel téléphonique dans lequel il me demandait où nous en étions rendus dans l'étude du projet de loi. Il n'avait pas suivi l'affaire de près; il a été pris par d'autres obligations, je le comprends. Il me demandait où cela en était rendu et s'il y avait encore quelque espoir d'éviter qu'un projet aussi odieux pour la tradition des relations du travail au Québec soit adopté par la majorité de l'Assemblée nationale. Je lui ai dit qu'il pouvait compter jusqu'au bout sur l'attitude franche, sur la fidélité à ses principes de l'Opposition libérale. Je lui ai dit que jusqu'à la dernière minute, nous essaierions de convaincre le ministre et ses collègues que ce serait infiniment préférable de mettre ce projet de loi de côté et d'aller négocier au cours des prochains mois, quitte à nous revenir à la fin de l'année avec des propositions en bonne et due forme du gouvernement, à défaut d'entente avec l'autre. Je lui ai dit qu'il y avait très peu de motifs d'espoir, parce que le gouvernement m'est apparu, tout au long du processus, intransigeant et intraitable.

Je vous dis, M. le Président, que c'est une très mauvaise attitude de la part d'un employeur qui se prépare, nous dit-il, à passer à la table de négociation. Vous vous apprêtez à passer à la table de négociation, mais vous avez déjà réglé, unilatéralement, les trois quarts du problème que vous êtes censé y négocier. Je le regrette infiniment et l'Opposition ne saurait être solidaire de vous dans un geste aussi déplorable.

Le Vice-Président (M. Rancourt): J'attends celui qui va demander la parole. Mme la députée de Maisonneuve.

Mme Louise Harel

Mme Harel: M. le Président, il y a à peine un an, soit précisément le 6 avril 1981, donc l'an dernier, à une semaine des élections générales au Québec, on pouvait lire en page éditoriale du "Financial Time" de Toronto le bilan suivant du premier mandat du Parti québécois. Donc, c'était en

avril de l'an passé et on lisait en page éditoriale: "En 1976, les croque-morts économiques disaient qu'un gouvernement Lévesque ruinerait l'économie du Québec. En fait, l'économie du Québec a connu une croissance réelle de 14,5% depuis 1976, abstraction faite de l'inflation. Cela représente presque le double du taux de croissance de 7,7% en Ontario, la province la plus semblable sur le plan économique."

L'éditorialiste de ce journal, peu susceptible, tous en conviendront, d'appuyer le Parti québécois, continuait en citant une série de données montrant que les finances publiques québécoises avaient été gérées de façon efficace et prudente, que le fardeau fiscal des Québécois s'était relativement allégé par rapport à celui des Ontariens depuis 1976.

Mais que s'est-il donc passé pour que tout à coup le ciel tombe sur la tête de centaines, de milliers de Québécoises et de Québécois victimes de chômage ou vainement à la recherche d'un emploi, disparus dans la tourmente des fermetures d'usines, des faillites ou de la récession économique? Que s'est-il donc passé, depuis un an, pour que les finances publiques, pour que l'État québécois lui-même soit profondément secoué dans cette tourmente? Est-ce qu'il s'agit d'un cataclysme naturel de l'ordre de la fatalité devant lequel tout le monde doit s'incliner? Non, M. le Président, bien au contraire. On parle d'abondance dans cette Assemblée et on parle avec raison de tous ceux et celles, patrons comme employés, qui sont victimes de cette crise. La réalité est certainement qu'au Québec, nous en sommes collectivement affectés. Nous parlons peu de ceux qui en profitent, sans doute parce qu'il y en a peu des nôtres. Cependant, il faut se rappeler que ceux-là existent grassement aussi.

Le ministre des Finances disait, il y a quelque temps, que ce qui se passait à l'échelle de l'économie était une gigantesque redistribution des revenus des salariés au profit des gens propriétaires de capitaux. On assiste, en définitive, dans l'économie québécoise comme dans l'ensemble des économies des pays industrialisés, à un vaste redéploiement de l'économie privée qui consiste à fermer des usines pour en rentabiliser d'autres, à introduire des changements technologiques considérables pour augmenter la productivité, augmenter le niveau de profit, sans garantie du maintien et encore bien moins sans aucune garantie de l'augmentation du niveau de l'emploi.

Je crois sincèrement que nous n'avons pas les moyens, comme Québécois, de laisser aux forces aveugles du marché privé le soin de déterminer seul le niveau des emplois ni le niveau des salaires qui y seront payés. Je sais bien que nous ne sommes pas les seuls, même comme gouvernement, je sais très bien que nous ne pouvons pas décider cela seuls; imbriqués comme nous le sommes, à notre corps défendant, dans des politiques" monétaires et industrielles qui sont très largement décidées ailleurs.

Nous avons ici la chance de former une collectivité nationale à l'échelle humaine. Le fait est que, très fréquemment, dans nos rencontres sociales, il nous est possible de nous rendre compte que le Québec est un grand village où souvent un peu tout le monde se connaît. Nous pouvons, comme bien peu de sociétés industrielles, faire de la concertation la pierre d'assise de notre développement économique. Nous avons les moyens de convaincre plutôt que de contraindre, de persuader plutôt que d'imposer. Quant à moi, je pense que pour ce faire, nous devons très clairement envisager le syndicalisme comme un agent dynamique de transformation sociale. Nous devons accréditer le processus de la libre négociation dans le secteur public et élargir la syndicalisation dans le secteur privé comme des éléments fondamentaux du progrès social et du progrès économique dans une société industrielle.

En fait, il suffit de regarder actuellement les salaires payés dans le secteur privé et ceux du secteur public pour, entre autres choses, constater qu'un pas a déjà été franchi dans le secteur public, notamment dans la réduction des écarts entre les salaires versés aux femmes et les salaires versés aux hommes, par exemple pour des travaux équivalents, et également pour se rendre compte que les réductions d'écarts ont franchi un certain pas dans les salaires versés entre les hauts et les bas salariés. On se rend compte que c'est dans une direction tout à fait opposée aux salaires payés dans le secteur privé où les écarts, depuis dix ans, ont eu tendance à s'élargir plutôt qu'à se réduire.

J'ai la conviction profonde qu'en cette période économique très inquiétante les Québécoises et les Québécois qui ressentent un besoin profond de solidarité n'aspirent pas à l'égalité dans la malchance pour les travailleuses et les travailleurs du secteur public, mais aspirent plutôt à une politique de solidarité nationale ayant pour objectif premier la création d'emplois et la lutte aux inégalités. Évidemment, on s'attend que cette politique de solidarité nationale soit largement soutenue, avec un échéancier de réalisation et avec un mode de financement équitable, par l'ensemble des travailleuses et des travailleurs du secteur public et parapublic.

Le projet de loi no 70 qu'on discute présentement à l'Assemblée n'empêche pas -et je le sais bien - la poursuite des négociations avec les employés de l'État, mais il faut quand même convenir que la porte des négociations qui est entrouverte et

qui demeure entrouverte l'est dans un climat d'échec appréhendé puisque le projet de loi se veut une mesure préventive en cas d'échec. J'ai eu l'occasion de faire part des réserves que j'avais à l'égard de ce projet de loi au conseil national du Parti québécois. Mon point de vue n'a pas été retenu. Je peux dire d'ailleurs qu'il n'a pas été largement partagé, loin de là, et j'en conviens. J'entends ne pas me dissocier de la décision du conseil national, ni, cependant, voter en désaccord avec moi-même. Aussi, vais-je m'abstenir lors du vote sur le projet de loi no 70. (19 h 40)

M. Polak: Cela commence à craquer là-bas.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Papineau. S'il vous plaît! M. le député de Sainte-Anne.

M. Maximilien Polak

M. Polak: Merci, M. le Président. Avec le projet de loi no 70, nous sommes encore une fois en face d'une loi spéciale. Les péquistes sont devenus des spécialistes des lois spéciales. Déjà, durant les quatre mois où j'ai été ici, j'ai vu deux lois de retour au travail; on a ici la loi no 70 que j'appelle une loi de coupure de salaires et on trouve une nouvelle terminologie péquiste: le document sessionnel. Ils ont produit un projet de loi avec le document sessionnel qui contient toutes les conditions concernant les salaires. Quand le ministre des Finances veut imposer une taxe aux banques, on procède par décret. Quand le ministre de la Justice veut imposer un ticket modérateur sur le dos des pauvres, on procède par règlement. Quand on veut une fusion forcée de deux municipalités Baie-Comeau et Hauterive, on se sert de la majorité pour écraser ceux qui voient dans cette loi, à juste titre, une mesure antidémocratique. Donc, une loi spéciale ce n'est presque plus spécial parce que l'exception est presque devenue la règle.

Savez-vous que j'étais à la commission quand on a étudié en détail ce projet de loi no 70? Je me rappelle très bien que je demandais au ministre, président du Conseil du trésor, de prendre l'exemple d'un fonctionnaire qui gagne un salaire, disons, moyen d'à peu près 20 000 $, 21 000 $. Qu'est-ce qui arrive à ce fonctionnaire-là? Parce que, savez-vous, ces fonctionnaires encore aujourd'hui ont l'impression que, dans la période du 1er janvier 1983 jusqu'au 31 mars 1983, ils vont subir une baisse de salaire de 18,8%. Mais ce n'est pas vrai parce que la vraie réduction est de 21,2%. On a fait la démonstration et je vais vous donner rapidement les chiffres tirés de l'exemple. Un fonctionnaire qui gagne aujourd'hui, à la fin du mois de juin, 840 $ va recevoir le 1er juillet une augmentation à 926 $; ensuite, à la fin de décembre, il va monter à 953 $ pour ce que le ministre appelle une seconde entre le 31 décembre et le 1er janvier, pour ensuite retomber le 1er janvier à 751 $. J'ai demandé au ministre, parce qu'il se promène toujours avec sa petite calculatrice en main. Voulez-vous faire le calcul? Il a dit: Oui, si vous le calculez comme ça, c'est vrai, ce n'est pas 18,8%, c'est 21,2% de moins pendant trois mois. C'est mieux que les fonctionnaires le sachent et, quand le ministre enverra la prochaine fois un petit dépliant aux fonctionnaires pour expliquer la politique du gouvernement, qu'il soit donc honnête avec ses chiffres!

Deuxième point, on a parlé de la productivité dans les secteurs public et parapublic. On a eu le rapport Bisaillon; ça, c'était avant que Bisaillon devienne un candidat indépendant ou un député indépendant. Tout de même, il y avait de très bons points dans ce rapport. On a parlé du facteur de la productivité. Comment croyez-vous qu'on aura de la productivité de ces fonctionnaires qui, le 1er janvier, vont recevoir une coupure de salaire de 21,2%? Ça, on n'en parle pas. On a demandé à la commission parlementaire: Qu'est-ce qui arrive au point de vue des institutions d'enseignement privées? Savez-vous ce que le ministre a répondu? Bien, dans ce domaine, on coupe simplement des subventions. Qu'ils s'arrangent avec leurs problèmes! J'ai dit: Mais, il y a les enseignants qui ont des contrats sous signature privée avec une école privée. Ils ont un contrat, ils vont dire à leur employeur: Tu ne peux pas couper mon salaire, j'ai un contrat, je vais te poursuivre. J'ai demandé au ministre: Voulez-vous amender ce projet de loi pour au moins donner la possibilité à l'employeur...

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Sainte-Anne, s'il vous plaît, je vais demander à nouveau la collaboration de cette Assemblée pour me permettre justement, comme je l'ai dit à plusieurs occasions, au moins d'entendre le député de Sainte-Anne.

M. Polak: M. le Président, je suis content de savoir que vous voulez m'entendre parce que je pense qu'avec les autres, surtout le président du Conseil du trésor, je ne réussis pas. À un moment donné, en commission parlementaire, quand il ne veut plus rien écouter, il se penche comme cela en arrière et il n'écoute plus. Je continue à parler parce qu'on a toujours espoir, jusqu'à la dernière minute. On a demandé, pour les institutions d'enseignement privées, de donner le pouvoir à l'employeur d'intervenir dans les contrats. Il dit: Cela ce n'est pas mon problème, qu'ils s'arrangent avec leur problème, ils auraient dû être syndiqués.

Évidemment, comme le chef de notre parti a expliqué, je n'ai pas besoin d'aller dans les détails, on a des raisons très sérieuses d'être contre ce projet de loi parce qu'il s'agit d'une manière unilatérale d'agir, d'une manière de jouer avec les dates. Tout va bien jusqu'au 31 décembre 1982 et là le fonctionnaire reçoit ce qu'on appelle le cadeau Bérubé pour l'année 1983. Il se réveillera le 1er janvier et il aura un mal de tête, non pas parce qu'il aura trop bu le 31 décembre mais parce que son chèque de paie va être coupé.

Je sais qu'il y en a d'autres qui veulent parler. Je suis curieux d'entendre le député de Sainte-Marie qui va parler apparemment ce soir. Comme j'écoute le ministre, j'écoute les représentants de notre formation politique, je vais écouter le représentant d'une nouvelle formation politique, quoique cela ne m'impressionne pas parce que vraiment il est resté péquiste; il sera toujours péquiste, il est séparatiste et peut-être que le gouvernement est bien content qu'il va jouer un peu le rôle de l'Opposition et critiquer le gaspillage de fonds.

Merci beaucoup.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Joliette et whip du gouvernement.

M. Guy Chevrette

M. Chevrette: M. le Président, nous venons à peine d'entendre, avant les quelques mots du député de Sainte-Anne et de la députée de Maisonneuve, le chef de l'Opposition et c'est à partir de ses paroles que je voudrais commencer mon bref exposé.

J'écoutais le chef de l'Opposition, dans ses envolées habituelles, dire avec beaucoup d'énergie: Si nous étions au pouvoir nous aurions, nous, sans doute gardé des services identiques. Nous n'aurions sans doute nullement augmenté les déficits. Nous n'aurions sûrement pas augmenté les impôts mais nous aurions relancé l'économie. Je me suis dit, il va ajouter autre chose. De fait il a ajouté: Nous n'aurions pas augmenté plus ailleurs à l'étranger. Là je me suis dit: II a un don ce gars, il va chercher l'argent je ne sais où, ou bien il y a quelque chose qui se passe, il a des sources sûrement miraculeuses d'impression monétaire.

M. Brassard: ...

M. Chevrette: Cela me fait déjà penser à de vieux politiciens - vous avez raison mon collègue de Lac-Saint-Jean - qui parlaient pratiquement d'impression de dollars. Mais plus je l'écoutais, plus je me disais: Combien d'incohérences, combien de fausses alliances à très court terme. Le Parti libéral du

Québec se faisant le défenseur des travailleurs du secteur public, si cela ne me fait pas rire personnellement! Le défenseur des fonctionnaires du Québec! Les enseignants du Québec, les professionnels du Québec, le Parti libéral! Je me suis dit que peut-être il ne fait pas de farce et qu'il est sérieux mais après avoir réfléchi il a complètement raison de s'en faire le défenseur. Mais, de là, par exemple, à nous faire porter l'odieux de la situation, on va s'en parler pendant quelques minutes.

Qui, pendant six ans, a augmenté le nombre de fonctionnaires d'une façon tout à fait désordonnée, prohibitive et exagérée? 104 000 nouveaux fonctionnaires en six ans, 104 000, alors que, sous le gouvernement péquiste, 980 nouveaux fonctionnaires en six ans. Avec une sécurité d'emploi à toute épreuve, voilà sans doute une des raisons qui font en sorte qu'on a un problème budgétaire. C'est vrai, mais où est la cause? Ne le dites pas, de grâce ne le dites pas! Ce n'est pas vous autres, voyons! Voyons! Le président de l'Office des autoroutes, un député battu, vos organisateurs, tout le monde pullulait, on devenait fonctionnaire comme on devient un simple "moppologiste". Il s'agissait d'être libéral, cela était clair. M. le Président, je n'en reviens pas. Je n'en reviens pas qu'on soit tout à fait inconscient dans une telle crise économique dans une formation dite libérale qui se soucie du bien des gagne-petit. (19 h 50)

Imaginez-vous que des travailleurs au Québec, il n'y en a pas uniquement dans la fonction publique! Il y a 67, 68, 69, peut-être 70% de la main-d'oeuvre au Québec qui n'est pas dans le secteur public, qui n'a même pas de syndicat, qui n'a même pas de sécurité d'emploi, qui n'a même pas une clause d'indexation face à l'augmentation du coût de la vie. Et vous allez nous reprocher, du jour au lendemain, d'avoir une pensée plus collective, plus globale, de nous préoccuper aussi des 66% qui sont à peine au salaire minimum? Je m'excuse, vous pourrez nous reprocher de ne pas avoir de préjugés favorables envers les travailleurs, malgré qu'on l'ait dit en 1976, mais je peux vous prouver facilement le contraire.

Depuis 1976, nous avons adopté des lois dans cette Chambre qui ont permis à des groupes de salariés complètement démunis en termes d'organisation, tout d'abord, de se structurer; au lieu de demander une accréditation à 50%, on peut le faire maintenant avec 35% des employés dans une usine. Nous avons adopté une loi antiscabs. C'est une chose que vous n'avez jamais osé faire même si un député de l'Opposition, à l'époque, Robert Burns, avait présenté cela comme membre de l'Opposition. Nous avons voté des lois, les normes du travail pour nous préoccuper du gagne-petit. Qui a adopté

cette loi pour protéger nos gens gui n'ont aucune protection d'aucune nature? Qui s'est occupé de la sécurité du revenu, du supplément de revenu, de l'allocation de maternité, de la baisse des impôts consécutive qu'on a fait et de la responsabilisation des travailleurs dans le domaine de l'établissement des services essentiels? Qui a augmenté à trois reprises le salaire minimum? Quelle formation politique? Le Parti libéral? Mon oeil; Le temps que vous avez été là, vous avez monté et bâti des éléphants blancs qui ont coûté trois fois le prix que cela valait. Exemple, le chantier olympique.

On pourrait continuer et parler du bon d'emploi pour nos jeunes, parler de l'assurance automobile où nos petits salariés se faisaient littéralement exploiter et parler expressément de ce qu'on a fait en fonction du gagne-petit. Moi, quand on vient me dire aujourd'hui: Tu es un traître parce que tu trahis ceux avec lesquels tu as travaillé dans la fonction publique... En état de crise, quand on vit en famille, quand on vit dans une collectivité, quand on vit en communauté, je m'excuse, mais on donne un peu de notre lait quand on en a un plein verre et qu'un autre n'en a pas à côté. C'est cela la loi.

Le chef du Parti libéral du Québec, avec des élans de sainteté, s'en vient nous dire qu'on a signé des conventions désordonnées. Mon oeil encore, M. le Président! Sous le régime libéral, 4% de croissance, 4% d'enrichissement chaque année de convention collective. Sous le régime péquiste, 0,4%. Ce n'est pas cela qu'on a fait. Ce n'est pas cela qu'on a fait lorsqu'on a signé nos conventions. On a été très raisonnable, mais on n'est pas le bon Dieu en taxi, comme on dit par chez nous. On ne peut pas prévoir des crises économiques. Quand on vit une crise et qu'on a une conscience sociale vraiment ouverte et collective, on demande à tout le monde de mettre la main à la pâte et on dit à ceux qui sont les mieux nantis: Aidez-nous donc, venez donc vous écraser à une table. Négocions donc ensemble un peu, un tant soi peu, pour permettre à ceux qui dans notre collectivité, ont de la difficulté, de mieux respirer. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Louis-Hébert.

M. Réjean Doyon

M. Doyon: Merci, M. le Président. Les éclats de voix du député de Joliette ne masqueront pas la réalité qui nous oblige à rester ici ce soir, M. le Président, et à passer l'heure du souper à écouter et à essayer de faire comprendre au gouvernement une chose qui est claire à tout le monde.

C'est que, quand ce gouvernement prétend avoir un préjugé favorable pour quelque chose ou quelqu'un, méfiez-vous, faites bien attention, parce qu'il va se passer quelque chose que vous n'aimerez pas. Faites attention s'il a le malheur de prononcer les mots "préjugé favorable" pour vous, il s'en vient quelque chose que vous n'aimerez pas. Garez-vous quand le gouvernement nous dit qu'il a un préjugé favorable pour l'autonomie municipale, méfiez-vous, parce qu'il y a un projet de loi no 37 qui s'en vient. C'est cela, le préjugé favorable, méfiez-vous, cela s'appelle le projet de loi no 37 en faveur des municipalités.

Quand le gouvernement nous dit qu'il a un préjugé favorable en faveur des économiquement faibles, méfiez-vous, vous qui l'êtes ou qui le serez, parce qu'il s'en vient un projet de loi où on aura ce qu'on appelle, avec beaucoup de modestie, avec beaucoup de pudeur, un ticket modérateur, ce qui est une taxe sur l'accès à la justice, méfiez-vous, vous qui allez bénéficier du préjugé favorable en faveur des économiquement défavorisés, parce que c'est cela le préjugé favorable.

L'entreprise privée, qu'elle se méfie maintenant avec Le virage technologique où on veut avantager l'entreprise privée. Avec ce virage technologique, on vire tellement qu'on est en train de tourner en rond et je vous annonce qu'il est à prévoir que, très bientôt, on aura exactement ce qui s'est passé dans d'autres domaines, c'est que le préjugé favorable annoncé dans Le virage technologique prendra d'autres formes qui seront beaucoup plus semblables à la nationalisation d'Asbestos, a la formation d'un Pétro-Québec, ce sera quelque chose comme cela, le préjugé favorable en faveur de l'entreprise privée. C'est cela que le gouvernement nous présente. Quand le gouvernement nous a annoncé qu'il avait un préjugé favorable pour les syndicats et des syndiqués, qu'avons-nous aujourd'hui devant nous, M. le Président? On a le projet de loi no 70, on a le projet de loi no 68 qui injustement, illégalement et d'une façon totalement unilatérale, enlèvent aux personnes qui ont négocié de bonne foi, qui de bonne foi ont mis leur signature, leur enlèvent des avantages qu'elles étaient allées chercher par la voie normale de la négociation.

M. le Président, si ce n'était de parodier et de paraphraser un geste que vous connaissez par la publicité péquiste, je prendrais la convention des employés, je ferais cela et je dirais: Minute, PQ, minute, PQ! Vous ne ferez pas cela à notre convention, parce que c'est comme cela que vous agissez. Minute PQ! Cela va faire, les gens commencent à vous voir sous vos vraies couleurs! Ce que le président du Conseil du trésor nous annonce d'une façon désinvolte en se disant:

Moi, j'ai tout compris et je vais vous expliquer comment cela marche. Mais ce qu'il oublie de nous dire est plus important que ce qu'il nous dit. Ce qu'il oublie de nous dire, c'est que, quand il prétend épargner 500 000 000 $ des fonds publics qu'il enlève injustement aux employés, il se garde bien cependant de dire combien, sur ces 500 000 000 $ qu'il dit épargner, il en serait entré de toute façon dans les poches et dans les coffres du gouvernement, combien il en aurait été dépensé dans des commerces, dans des industries qui auraient payé des impôts, qui auraient engagé du personnel, qui auraient retardé des fermetures, qui auraient gardé en poste des gens qui ont besoin de gagner leur vie et qui, à cause de ces gestes unilatéraux injustifiés, se voient dans l'obligation de quémander ce qui finalement leur est dû.

M. le Président, on n'a tout simplement, pour juger les gens d'en face qu'à regarder leur attitude gênée, leur attitude de personnes prises en défaut quand ils sont obligés de se lever, conformément aux souhaits de leurs électeurs, et de dire: Voici, j'aurais moi aussi une petite pétition à vous présenter. On a de la misère à entendre leurs voix, M. le Président. On dirait qu'ils ne savent même plus lire, ils ne sont pas capables de les lire, ils ont perdu la capacité même de lire ce qu'il y a sur leurs feuilles. Ils sont tout gênés, M. le Président, on est obligé d'avoir notre leader parlementaire de l'Opposition pour inviter le président à inviter ces gens-là à se conformer au règlement et à lire ce qui finalement provient des gens qui nous ont amenés ici aussi bien moi que vous. Ces gens-là ont le droit de se faire entendre à l'Assemblée nationale et de voir leurs pétitions présentées d'une façon équitable, qu'ils aient le bonheur ou non d'être servis par des gens de l'Opposition ou par des gens du côté ministériel. Tous les citoyens du Québec doivent avoir les mêmes droits. Ce n'est parce qu'on s'adonne à être dans un comté péquiste, c'est entendu qu'on n'est pas chanceux, mais on ne doit pas insister, on ne doit pas rendre leur situation pire en empêchant ces gens de se faire entendre alors que, du côté de l'Opposition, nous nous rendons au désir de nos commettants en lisant leurs pétitions en bonne et due forme et en faisant connaître à l'Assemblée nationale ce qui est le but de ces pétitions, M. le Président. (20 heures)

M. le Président, le président du Conseil du trésor nous a expliqué, en grand administrateur qu'il est, ce qui faisait que, dans certaines circonstances, c'était plus ou moins facile d'aller chercher des fonds, comment on devait s'y prendre pour avoir des emprunts à des taux plus ou moins favorables, il nous a expliqué la disponibilité des fonds, etc., mais il y a une chose sur laquelle il ne nous a pas donné son éclairage. Lorsque des prêteurs, M. le Président, sont sollicités par un emprunteur pour avoir des fonds, il y a un élément extrêmement important dont ils doivent tenir compte: la qualité des administrateurs à la tête de la corporation ou de la compagnie ou de l'organisme public qui doit utiliser ces fonds.

Si le gouvernement est obligé de confesser aujourd'hui - le chef de l'Opposition le mentionnait - qu'il est dans l'impossibilité d'aller chercher des fonds supplémentaires dépassant 3 000 000 000 $, ce qui est le déficit réel depuis trois ans de la province de Québec, c'est en grande partie à cause d'un facteur difficilement évaluable mais qui a une importance capitale, primordiale chez tous les prêteurs qui doivent évaluer les risques auxquels ils ont à faire face quand ils prêtent leurs fonds, leur argent, c'est la qualité des administrateurs à qui ils vont confier leur capital contre paiement d'intérêts.

M. le Président, ce que je dis à cette Assemblée, c'est que la qualité des administrateurs est tellement piètre que le plafond de 3 000 000 000 $, que le ministre des Finances reconnaît comme étant le maximum qui peut être emprunté par la province de Québec, est en grande partie attribuable à la mauvaise réputation d'administrateur qu'a réussi à acquérir en l'espace de quelques années le gouvernement péquiste qui est au pouvoir depuis 1976.

Je pense, M. le Président, qu'un gouvernement a la responsabilité bien nette d'administrer en donnant l'exemple. Ce qui est particulièrement inquiétant dans la situation à laquelle nous avons à faire face, c'est le mauvais exemple que donne le gouvernement concernant le respect de sa signature au bas des conventions collectives. Il faut s'interroger sur les conséquences considérables, qu'il est difficile d'évaluer, qu'aura cette négation de sa signature par le gouvernement péquiste. Comment réagiront les autres compagnies, les autres employeurs, les autres syndicats quand, à tout moment, ce gouvernement les appellera au respect de leur signature, au respect des clauses des conventions collectives qu'ils ont signées? Comment le gouvernement pourra-t-il répondre à ces personnes, à ces gens qui se serviront de l'argument suivant, M. le Président: On n'est pas pire que vous-autres. Qu'allez-vous répondre à cela? On n'est pas pire que vous autres. On est aussi mal pris que vous prétendiez l'être et on emploie des solutions que vous nous avez vous-mêmes enseignées.

J'invite le gouvernement à réfléchir là-dessus et je pense qu'en réfléchissant il se rendra compte que les avantages à court terme qu'il prétend retirer de la négation de sa signature sont totalement, sans proportion

et sans comparaison, contrebalancés par le coût social que vont entraîner cette attitude et cette décision. C'est beau de jouer aux pompiers, de jouer aux apprentis sorciers, de penser qu'on a des solutions à tout, mais le contrôle des instruments qu'on a ensorcelés peut nous échapper. On a des exemples nombreux dans le passé d'attitudes comme cela et le gouvernement est en train de se mettre dans cette situation.

Je pense que la population est en train de juger le gouvernement sur ses actes et non pas sur ses paroles, de le juger sur ses promesses, sur ses réalisations. Ma conviction profonde, c'est que le verdict est absolument désastreux pour le gouvernement. Il est sans appel et, dès que la population le pourra, elle fera savoir à ce gouvernement que gouverner, c'est aussi respecter les autres, savoir que lorsqu'on s'est assis à une table et qu'on a négocié de bonne foi, comme l'autre partie l'a fait, il faut respecter cela. Je pense que c'est une leçon fondamentale qui doit être tirée et j'invite le gouvernement à la tirer.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Laurier.

M. Christos Sirros

M. Sirros: M. le Président, d'abord, au député de Joliette qui s'est permis tout à l'heure cette grande envolée démagogique, probablement au profit des agents qui cherchent de nouveaux comédiens, je lirais simplement une petite citation du ministre actuel des Finances, M. Parizeau, qui disait, il n'y a pas si longtemps, le 19 décembre 1975. Que le Québec soit financièrement aux abois et ait besoin d'en enlever aux uns pour en donner à d'autres, cela est bien possible, mais alors c'est sa gestion des affaires publiques qu'il doit défendre. S'il a tellement mal administré qu'il doit maintenant tripoter les salaires et voler une partie de sa main-d'oeuvre pour équilibrer ses comptes, il n'a pas de raison d'être fier de sa performance. Je comprends bien, M. le Président, le désir de fouetter les troupes, en quelque sorte, de faire un petit spectacle pour permettre aux gens de dire: Voilà, on est encore bon à quelque chose. Au moins, on peut faire de la bonne démagogie, M. le Président, mais c'est à peu près tout, parce que le contenu du message que nous a livré le député de Joliette était d'un vide incroyable.

Par exemple, il a parlé de 104 000 nouveaux emplois de fonctionnaires qui ont été créés par l'ancien gouvernement libéral, entre 1970 et 1976. Il a oublié de mentionner, M. le Président, quelques faits très saillants dans ce contexte. Il a oublié de mentionner, par exemple, la mise sur pied des cégeps durant la même époque. Il a oublié de mentionner l'augmentation de la clientèle scolaire. Il a oublié de mentionner la mise en oeuvre et sur place de la Régie de l'assurance-maladie. Ce sont toutes des actions qui ont nécessité effectivement une intervention de l'État à travers des fonctionnaires, des employés du secteur parapublic pour des choses qui avaient une valeur qu'on reconnaît aujourd'hui, même si, aujourd'hui, ce même gouvernement est en train de détruire tranquillement, petit à petit, tout ce qui a été construit au Québec depuis les derniers douze à quinze ans.

M. le Président, sur un gouvernement qui arrive à gouverner finalement par des lois d'exception et des lois spéciales, je pense qu'il y a une autre citation d'un autre ministre qui fait partie de ce gouvernement aujourd'hui, le ministre de l'Éducation, qui disait finalement que quand on arrive à gouverner par des lois spéciales, ce n'est qu'une preuve de l'incapacité de prévoir, de l'incapacité de gérer, de l'incapacité d'apporter des solutions pour guérir des choses, sans parler de prévenir des choses.

Si le Québec se trouve aujourd'hui au point où il ne lui reste plus de marge de manoeuvre, ni quant aux emprunts, ni quant aux taxes, et que le gouvernement se voit obligé aujourd'hui de nous dire d'adopter ces projets de loi no 70 et no 68, pour finalement voler - parce qu'il s'agit d'un vol après avoir donné sa parole - ses propres employés, ce n'est pas seulement la question des finances publiques qui est en jeu, M. le Président, parce que, même avec ce projet de loi no 70, le problème des finances publiques du Québec ne sera pas résolu. On va peut-être sauver la situation pour cette année, mais cela ne règle en rien le problème chronique que nous avons et cela ne règle en rien le fait qu'il y a un déficit de 3 000 000 000 $, non pas de 500 000 000 $ et que, l'année prochaine, on sera encore au même point. À ce moment-là, ayant vu déjà le genre d'exemple que donne le gouvernement quand il s'agit de respecter sa signature et sa parole, qu'il met de côté avec une légèreté incroyable, les travailleurs et d'autres personnes de la société, d'autres groupes sociaux pourraient bien se demander ce qui arrivera. Comme le disait mon collègue de Louis-Hébert: Méfiez-vous. Effectivement, dès qu'on nous dit que ce gouvernement veut protéger une certaine partie de la population, c'est peut-être elle qui va payer prochainement.

Le fait que le gouvernement décide de venir devant l'Assemblée pour adopter le projet de loi no 70 et le projet de loi 68, qui font en sorte que le gouvernement lui-même renie sa signature, à la suite de négociations libres, la signature qu'il a lui-même librement consentie il y a à peine deux ans et demi quand le gouvernement et, encore une fois, le ministre des Finances nous disaient que le gouvernement s'était

trouvé, à la fin de ces négociations, un valable gardien des fonds publics, le fait, dis-je, que le gouvernement arrive aujourd'hui et nous dise: Notre signature ne vaut pas grand-chose, parce qu'on est pris, veuillez nous comprendre, que voulez-vous, cela ne veut pas dire grand-chose. (20 h 10)

M. le Président, je pense qu'on commence a avoir là une attitude arrogante. C'est à peu près la seule manière dont je peux la qualifier. À peu près la seule personne que j'ai trouvée consistante et logique avec elle-même effectivement dans ce débat, c'est le député de Sainte-Marie. Je ne le dis pas pour faire du capital politique, parce que je me réjouis que... Croyez-le ou non, mais je crois que le député lui-même, avant de poser ce geste, a dû s'interroger sur ce qu'il faisait. Effectivement, je crois qu'il a décidé qu'il était plus important de rester consistant et logique avec lui-même que de faire partie de cette farce que nous avons devant nous, ce projet de loi qui met de côté une parole d'un gouvernement face à des employés, face à une signature donnée à la suite d'une négociation libre.

Le député de Joliette disait: C'est drôle de voir le Parti libéral venir à la rescousse et à la défense des syndiqués et prétendre qu'ils sont maintenant devenus les défenseurs des syndiqués. Je crois que ce qu'il est important de comprendre dans ce débat, c'est que, finalement, il s'agit de devenir et de rester un défenseur de certains principes, à un certain moment. Si, aujourd'hui, on peut dire que le Parti libéral défend les syndiqués dans ce dossier, c'est surtout parce que le Parti libéral défend le principe qui part du respect d'une signature du gouvernement, le principe de la libre négociation qui fait que, au moins, les syndicats, avec nous, savent où ils vont. They know where they stand, as it is said in English.

Par contre, de l'autre côté, vous avez charrié pendant des années en nous disant que vous aviez un préjugé favorable envers les travailleurs, en nous disant que le secteur public devrait être la locomotive qui allait entraîner le secteur privé dans les augmentations des conditions de travail, du salaire, etc. Tout cela pendant que le Parti québécois cherchait le pouvoir et qu'il cherchait à garder le pouvoir.

Une fois que le Parti québécois a eu le pouvoir pour la deuxième fois, il ne pouvait plus cacher à la population la situation dans laquelle il nous avait amenés. Après six ans de gérance économique ou de désastre économique, les masques sont effectivement tombés. Peut-être le font-ils à contrecoeur, mais, jusqu'à maintenant, je n'ai vu personne dire que c'était à contrecoeur; on fait appel à un sentiment de solidarité. Le premier ministre nous dit: Voyons donc, tout le monde va comprendre, il faut que chacun fasse sa part. Vous êtes les défenseurs de quoi, alors? Finalement, vous êtes les défenseurs du pouvoir que vous détenez parce que vous voulez bien le garder et vous direz à peu près n'importe quoi pour le maintenir. La preuve, nous l'avons devant nous: la loi 70 et la loi 68. Merci beaucoup, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Rosemont.

M. Gilbert Paquette

M. Paquette: M. le Président, je vais répondre immédiatement au député de Laurier. Qui défendons-nous? Nous défendons les plus vulnérables de la société. Dans une période économique difficile comme celle que nous traversons, le Québec paie chèrement le prix de sa dépendance politique et économique. Il est certainement plus difficile d'être social-démocrate, de protéger les plus faibles de la société, mais c'est justement la période où on doit être véritablement social-démocrate et où les choix sont difficiles. Québec n'est pas la seule société à être placée dans cette situation. C'est l'ensemble du monde occidental qui est touché par la récession économique et par ce que ma collègue de Maisonneuve décrivait comme une redistribution de la richesse vers les détenteurs de capitaux.

Nous ne sommes pas la seule société et je vais vous donner l'exemple de la société française qui, depuis un an, s'est donné un gouvernement socialiste dont les liens sont extrêmement étroits avec les centrales syndicales, encore plus que le préjugé favorable que peut avoir le Parti québécois face aux travailleurs. Pourtant, même ce pays souverain qui dispose de tous les outils économiques, ce que le Québec n'a pas, est obligé de prendre des mesures extraordinaires pour faire face à la crise économique et budgétaire. Je vous donne un exemple. Le gouvernement français se propose de couper 8 000 000 000 de francs d'économie dans les dépenses de sécurité sociale, dans les dépenses de maladie, l'étalement des augmentations prévues de certaines prestations, allocations familiales, allocations au logement.

Concernant l'inflation, le gouvernement français a le pouvoir de bloquer les prix. Nous n'avons pas ce pouvoir, M. le Président. Le gouvernement français peut donc bloquer les prix et les salaires. Sur le plan des salaires, les mesures qui sont actuellement devant la société française, proposées par un gouvernement socialiste, consistent en un blocage général des salaires également, sauf le salaire minimum, avec particulièrement la suspension des clauses dans les conventions des employés du secteur public en termes

d'augmentation de salaires et des accords d'indexation des revenus non salariés aussi dans le secteur privé. M. le Président, je pense que ceci démontre que toutes les sociétés doivent prendre des mesures extraordinaires pour faire face à la crise.

Ici, au Québec, je ne voudrais pas analyser longuement les causes de notre dépendance politique. Un dollar qui est rendu à 0,77 $, la production nationale qui baisse, le chômage (400 000 chômeurs au Canada dont 150 000 au Québec) créé par les politiques monétaires du gouvernement fédéral, tout cela démontre le coût de notre dépendance politique. Mais, indépendamment qu'on s'entende ou non avec les gens du Parti libéral sur les causes, on doit convenir d'une chose: comme la société française, comme les autres sociétés, il faut faire appel à la solidarité nationale. Autrement, c'est la loi de la jungle à laquelle nos amis du Parti libéral nous ont habitués pendant qu'ils étaient au pouvoir.

Ce gouvernement-ci demande à tous les Québécois un effort. Encore aujourd'hui, on vient de voter une loi pour geler le salaire des médecins pour un an. Les hauts salariés vont être gelés: les médecins et les cadres. Les cadres de la fonction publique sont gelés pour un an. Les députés ont des augmentations de salaires de 6% depuis trois ans et leurs salaires seront gelés dès la prochaine occasion, de même que les régimes de retraite.

On dit: Vous n'avez pas augmenté suffisamment les impôts des entreprises. En cinq ans, les impôts des entreprises ont augmenté de 179%, alors que la moyenne des revenus du gouvernement a augmenté de 60%. Aujourd'hui, le ministre des Finances a annoncé un impôt sur les institutions financières de façon à financer le programme de relance de l'emploi dans l'industrie de la construction. Ce qui est demandé aux employés du secteur public, c'est de faire leur part comme les autres. Je pense que là-dessus on va s'entendre facilement.

Dans le domaine de la construction, les syndiqués ont accepté de contribuer, à même une réduction de leurs salaires, à la création d'emplois de façon à assurer leur propre sécurité d'emploi et à aider d'autres salariés dans le domaine de la construction à se trouver un emploi.

Est-ce que la solution aurait été de se mettre à réduire des postes dans le secteur public? II y a beaucoup de gens dans les syndicats qui ont pris cela comme du chantage. Ce n'est pas du chantage, M. le Président. C'est la situation économique et budgétaire qui est comme cela.

Il reste la question de l'opportunité du projet de loi no 70. C'est cela, je pense, la véritable question qu'il faut discuter. Il n'y a personne qui va chicaner sur le fait qu'il faut geler les hauts salariés, qu'il faut indexer partiellement les salariés moyens et qu'il faut indexer pleinement les bas salariés dans le secteur public. Qu'est-ce que fait le projet de loi no 70? Il dit essentiellement: Si on ne peut pas négocier une meilleure entente, une meilleure répartition d'une masse salariale globale qui doit être de 500 000 000 $ de moins qu'elle était prévue pour l'année budgétaire en cours, si on n'est pas capable de négocier quelque chose de mieux, il y aura, en dernière alternative, une réduction de salaires au mois de janvier.

Je vous signale, M. le Président, que l'effet de ce projet de loi no 70 fera quand même que sur neuf mois, quand on regarde le salaire au mois de juin de cette année par rapport au salaire en avril 1983, avec des hauts et des bas, bien sûr, les bas salariés auront augmenté, en moyenne, de 11,7%, les moyens salariés de 5,8% et les hauts salariés auront vu leurs salaires gelés comme les cadres, comme les médecins et comme les députés. (20 h 20)

M. le Président, je pense que ce projet de loi est important pour montrer la détermination de ce gouvernement de faire en sorte que tous les employés dans la société québécoise et tous les Québécois fassent leur part de façon à protéger les plus vulnérables, de façon qu'on puisse indexer pleinement l'aide sociale et payer pour ceux qui arrivent sur l'aide sociale justement à cause de la récession économique, à cause du chômage.

On nous dit: Ce projet de loi no 70 n'aurait peut-être jamais dû être présenté, cela va nuire aux négociations. J'espère, je souhaite que cela ne soit pas le cas. Mais on peut aussi prétendre que, si le projet de loi no 70 n'avait pas été présenté, tout le monde s'imaginerait qu'il n'est pas nécessaire de réduire la masse salariale de 500 000 000 $. M. le Président, au point où on en est, il n'y a pas d'autres solutions. C'était 700 000 000 $ dont le gouvernement avait besoin en mars, 900 000 000 $ en mai, à cause de la récession économique qui s'accentue et qui fait boule de neige. Il suffit de lire les journaux. Dans deux ou trois mois, cela peut être 1 200 000 000 $ avant qu'on commence à en sortir, avant qu'on crée suffisamment d'emplois pour en sortir. S'imaginer qu'on peut aller chercher un peu d'argent en laissant augmenter le déficit, en créant quelques taxes, peut-être est-ce possible, mais je pense qu'un gouvernement responsable doit se garder un certain nombre de mesures au cas où la situation économique continuerait de se détériorer.

M. le Président, je pense qu'on peut comprendre les centrales syndicales qui disent: Vous venez bouleverser le processus de négociation, vous nous faites une pression indue. On a le fusil sur la tempe, comme le

disaient les chefs syndicaux. Je pense que c'est le devoir de ce gouvernement de leur dire que c'est l'ensemble de la société qui a le fusil sur la tempe, actuellement, et que l'ensemble des Québécois doit faire sa part.

J'espère que personne ne va penser, dans la société, que ce parti, que ce gouvernement en a contre les syndicats, voudrait toucher les syndiqués plus que les non-syndiqués. Le propos de tous les gens de ce côté-ci de la Chambre vise à protéger les plus vulnérables de la société. L'attitude honnête, c'est de mettre la situation sur la table telle qu'elle est, d'inviter les gens à laisser de côté les questions de forme qui peuvent être importantes et qui ne doivent pas céder le pas au fond du problème. Le fond du problème, c'est qu'on a une crise économique qui découle de notre dépendance politique et économique; pour en sortir, il faut que chacun fasse sa part. Je vous remercie, M. le Président.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Sainte-Marie.

M. Guy Bisaillon

M. Bisaillon: On peut se demander, après six ans, comment il se fait que nous qui, avant 1976, parlions de la négociation des priorités gouvernementales, nous qui, avant 1976, parlions de la concertation, nous qui, avant 1976, parlions de préjugé favorable, nous nous retrouvions aujourd'hui avec un projet de loi comme celui qui est devant nous. J'admets, au départ, que la conjoncture économique actuelle, que les difficultés budgétaires gouvernementales doivent amener le gouvernement à se préoccuper de trouver les moyens d'en sortir. J'admets aussi que les moyens qu'on va trouver doivent tenir compte du fait qu'on doit, d'abord et avant tout, se préoccuper des plus démunis de la société. Par ailleurs, je trouve que la façon dont on procède actuellement vise davantage à opposer des groupes précis de la société plutôt que de les amener justement a se préoccuper encore plus et encore davantage des plus démunis de notre société. La façon dont on procède peut nous amener, à court terme et sûrement à moyen terme, à faire en sorte que des gens qui auraient été prêts et qui fondamentalement sont encore prêts à se préoccuper des plus démunis, parce qu'on aura utilisé les mauvais moyens, se détourneront peut-être des objectifs que, nous aussi, on poursuit.

On pourrait être contre le projet de loi no 70 par principe, en disant que cela balance toute négociation actuelle et future, que cela rejette le principe même d'une négociation librement consentie. Une négociation, cela suppose que chaque partie fait ses demandes, qu'on fait du donnant donnant et qu'on en arrive, en fin de compte, à un résultat qui convienne aux deux parties. C'est la formule traditionnelle des négociations. On peut prétendre que la loi 70 vient bouleverser tout le champ futur des négociations. Certains pourraient prétendre que, quand on parlait de renouveler le mode des relations du travail au Québec, de renouveler la façon de négocier des gouvernements, c'était peut-être cela qu'on voulait dire. Je prétends qu'à l'époque ce n'était pas cela du tout qu'on voulait dire. On pourrait donc s'opposer au projet de loi no 70 par principe, en disant que c'est un principe tellement fondamental que cela va compromettre toute action future du gouvernement, peu importe que ce soit au niveau des relations du travail ou à d'autres niveaux.

M. le Président, je vais me permettre de vous citer un exemple qui nous a été servi cet après-midi, en cette Chambre, par le biais d'une déclaration ministérielle. Vous vous souviendrez que le ministre des Finances nous a annoncé qu'on avait procédé à de larges négociations avec les intervenants du milieu pour les amener à participer aux efforts gouvernementaux, que, de façon générale, les gens avaient admis qu'il fallait faire un effort, mais qu'un certain nombre de banques n'avaient pas consenti à faire ces efforts que les autres, eux, avaient consentis. En conséquence, on imposait une taxe particulière sur les profits de ces banques à charte.

M. le Président, je voudrais bien qu'on me comprenne. Je ne veux surtout pas dire ici qu'il ne fallait pas en arriver à cette solution. Je voudrais, cependant, qu'on soit bien conscient qu'on fait le même genre de négociations gouvernementales, cette fois, que le genre de négociations que, dans le passé, on a reproché aux centrales syndicales, une négociation d'escalade, une négociation qui part d'un certain nombre d'acquis et qui dit: À partir du moment où j'ai mes acquis, tant pis, tu vas embarquer dans le train. C'est exactement ce qu'on fait. Qu'est-ce qu'elles vont dire, les mêmes entreprises, la prochaine fois qu'on va aller négocier? Vont-elles dire: Est-ce une négociation? Je suis aussi bien d'accepter ce qu'ils me proposent; sans cela, ils vont m'arriver après avec une mesure qui va me coûter plus cher, comme l'employeur gouvernemental autrefois se disait: Je suis aussi bien de prendre les demandes qu'ils me font, parce que, si je ne les prends pas, ils vont me faire la grève et, après la grève, cela va me coûter plus cher. On procède exactement de la même façon.

Ce sur quoi j'aurais été d'accord, c'est qu'on dise à l'ensemble du mouvement financier: Vous profitez actuellement, vous

autres, par rapport aux plus démunis, des taux d'intérêt élevés; vous avez donc un surplus à donner. Ce surplus, on l'impose au départ à tout le monde, mais on ne fait pas semblant d'aller le négocier avec d'autres et, par la suite, de se venger auprès de ceux qui n'ont pas négocié. Il me semble qu'il y a une procédure, une façon de faire qui est exactement celle qu'on a reprochée aux autres dans le passé. (20 h 30)

On pourrait donc être contre ce projet de loi à cause aussi de la procédure utilisée. Par exemple, le gouvernement annonce, à un moment donné, son intention de mettre fin de façon unilatérale aux conventions collectives. Par la suite, il se ravise et il dit: Non, effectivement, ce ne serait pas respecter ma parole. Donc, je ne mettrai pas fin unilatéralement aux conventions collectives. Je vais accorder les privilèges salariaux qui étaient prévus dans les conventions collectives, mais je vous préviens que, le lendemain matin, je vais aller vous chercher ces sommes.

M. le Président, aux yeux du public, on a respecté notre parole jusqu'à la dernière journée et quand, dans les trois mois qui suivent, on va rechercher l'argent, c'est dans le cadre d'une nouvelle négociation. En principe, M. le Président, on pourrait peut-être rappeler que, quand une convention collective se termine, elle se poursuit normalement, et les mêmes clauses, les mêmes conditions s'appliquent normalement jusqu'à la conclusion d'une nouvelle convention. Si c'est exact, on fait donc, le lendemain de la fin de la convention collective, la même chose qu'on s'apprêtait à faire avant la fin de la convention collective et que, pourtant, officiellement, on avait annoncé qu'on ne ferait plus jamais.

Il y a donc une espèce de "finassement" de "fafinage", de jeu de stratégie qui va exactement à rencontre aussi des orientations, il me semble, qu'on s'était données, entre nous, à un moment donné. On pourrait être contre, parce qu'on pourrait dire que la procédure à utiliser - compte tenu de l'analyse qu'on peut faire, qu'effectivement un bon nombre de travailleurs des secteurs parapublic et public sont conscients qu'eux aussi, ils ont quelque chose à faire, qu'eux aussi doivent apporter quelque chose - aurait pu être de profiter de cette occasion pour les réunir, pour se concerter, pour leur laisser l'occasion, en même temps qu'ils consentaient à des gels de salaires, de nous donner au moins l'orientation ou de nous indiquer des voies ou des moyens qu'ils auraient voulu qu'on prenne quant à l'utilisation de ces sommes.

On pourrait être contre le projet de loi, M. le Président, parce qu'on pense que ce ne sont pas les bons moyens. On pourrait être contre le projet de loi, parce qu'on dirait: II y a d'autres moyens qui auraient pu être utilisés que celui-là.

Mais, au-delà de tout cela, au-delà de la question de principe, au-delà de la question de procédure, au-delà de la question du jugement qu'on peut porter sur les bons moyens ou pas les bons moyens - je termine de cette façon, M. le Président - au-delà de tous ces moyens, est-ce qu'on ne pourrait pas se poser une autre question, qui serait: Est-ce que la fin justifie toujours les moyens utilisés?

Je voudrais vous donner un exemple vécu dans un milieu, justement, de démunis, l'exemple d'un père de famille dont les enfants n'ont pas mangé pendant deux jours et qui se rend chez le dépanneur du coin pour emprunter le tiroir-caisse. Le motif est très louable, est très valable en soi, mais est-ce qu'il a utilisé le bon moyen? On pourrait appliquer exactement la même question à ce qu'on s'apprête à faire actuellement. Au-delà de cela, on pourrait aller plus loin et se poser la question sur les effets à moyen terme. En tout cas, quant à moi, je ne suis pas encore convaincu que des positions présentées par les centrales syndicales - l'Alliance des professeurs de Montréal, par exemple, effectivement, proposait un gel des salaires, proposait de surcroît un investissement de la part des travailleurs, pour autant qu'on l'investisse dans des programmes d'emplois - n'auraient pas été plus valables à court terme.

Si on regarde les sommes que le gouvernement va aller chercher et qu'on déduit de ces sommes les pertes en impôts que le gouvernement ne recevra pas, que l'on déduit de surplus les pertes en taxes et en impôts que les commerçants ne paieront pas parce que les travailleurs des secteurs public et parapublic vont moins acheter, qu'on déduit - je termine, je n'ai pas abusé -finalement les effets secondaires de cette situation, le montant d'argent qu'on retiendra en fin de compte, ces 100 000 000 $ ou ces 150 000 000 $, est-ce qu'on n'aurait pas eu avantage à aller les chercher de plein consentement, sans couteau sous la gorge, en faisant l'analyse suivante? Ces travailleurs qu'on vise depuis un an, ceux qu'aujourd'hui on se sent obligé de déculpabiliser, ceux à qui on doit dire aujourd'hui: Vous savez, ce n'est pas vous autres les responsables, ce n'est pas tout à fait cela qu'on a voulu dire, est-ce que, depuis un an, on n'aurait pas pu prendre les moyens pour aller chercher ces 100 000 000 $, avec leur consentement, avec leur participation, en leur donnant la fierté qu'au moins eux aussi avaient participé volontairement parce qu'ils y croyaient, et qu'ils voulaient faire quelque chose pour les plus démunis de la société?

Ils sont actuellement - et ce sera ma conclusion - même pas certains, même pas

sûrs, même pas assurés que les sommes qu'on va leur prendre serviront justement aux plus démunis de la société. Dans ce sens, on a choisi une stratégie d'affrontement plutôt qu'une stratégie d'approche de concertation. C'est pour ces raisons que je serai contre le projet de loi.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre délégué à l'Administration et président du Conseil du trésor, votre droit de réplique.

M. Yves Bérubé (réplique)

M. Bérubé: M. le Président, j'ai écouté les interventions qui, à nouveau, ont été riches de part et d'autre parce que c'est un débat qui va, finalement, au fond d'un certain nombre de valeurs dans notre société. On ne peut pas qualifier le dialogue auquel on a eu droit de dialogue de sourds, mais on peut certainement parler, de part et d'autre, de la défense d'un ensemble de valeurs et d'un choix politique sur des moyens à prendre pour sortir collectivement non seulement d'une impasse budgétaire, mais d'une impasse économique tout court.

J'ai entendu plusieurs intervenants présenter le projet de loi no 70 comme étant la négation du droit à libre négociation, comme s'il n'y avait qu'un seul droit, comme si le droit des plus démunis de la société n'exitait pas non plus, comme si le droit à l'indexation de l'aide sociale pour les 600 000 assistés sociaux du Québec n'était pas également un droit qui représente dans la conjoncture actuelle des sommes considérables, comme si les 150 000 travailleurs devenus chômeurs et qui ont fini par aboutir même à l'aide sociale - cette année, il y en aura près de 60 000 de plus -n'avaient pas également le droit de faire manger leur famille, et cela aussi coûte de l'argent à la société. C'est aussi un droit qu'il faut mettre dans la balance.

On n'a pas parlé d'un certain nombre de droits de la société québécoise, lorsque, par exemple, il a fallu réduire nos dépenses dans la crise que nous traversons et qu'on n'a pu épargner aucun secteur. On a dû toucher les affaires sociales comme l'éducation. Souvent, à l'éducation, cela a touché l'accueil à l'enfance inadaptée, l'éducation des adultes qui ont écopé. On a entendu énormément de critiques nous dire: Ah! Le gouvernement s'en prend à ceux qui ne sont pas organisés, à ceux qui n'ont pas une force de frappe pour défendre leurs droits et leurs privilèges, il s'en prend aux plus démunis. On n'a pas parlé des droits de ces gens maintenant dans le débat. Parce que, subitement, on a demandé aussi aux travailleurs mieux organisés de faire leur part, là on a dit: Vous violez le droit à la libre négociation. On n'a pas parlé du droit des Québécois à un réseau de soins de santé. C'est tellement important à nos yeux qu'on ne tolère pas la moindre grève de nos omnipraticiens, à titre d'exemple, et que notre Assemblée, unanimement, décide d'intervenir pour protéger ce droit à des soins lorsque nos citoyens sont malades. De la même façon, il faut protéger l'ensemble de ce réseau, l'ensemble de ces institutions. Il faut éviter que, faute des fonds nécessaires, on menace l'ensemble de nos institutions que nous nous sommes données dans le domaine culturel, dans le domaine de l'éducation, dans le domaine de la santé, que l'on menace ces institutions de l'asphyxie à laquelle elles pourraient être entraînées si nous ne dégageons pas les marges de manoeuvre dont nous avons besoin. (20 h 40)

Voilà des droits de la société québécoise dont l'Opposition n'a pas parlé, pas une fois, comme si ces droits n'existaient pas, mais que subitement il ne restait plus que le droit à la libre négociation au sein de notre société. Eh bien non! Il y en a un paquet de droits dans notre société. Il faut essayer de faire un équilibre entre ces droits et le projet de loi no 70 vise à établir un certain équilibre.

J'ai écouté l'Opposition qui nous a dit que nous avons mal géré, nous du Parti québécois. Je pense que c'est la députée de Maisonneuve qui, par une brève citation, à mon avis, a répondu à toutes les interventions de l'Opposition. Elle a cité un article qui datait du mois d'avril 1981. En pleine campagne électorale un journal comme le Financial Times, qu'on ne peut certainement pas taxer d'appartenance péquiste, souligne que la croissance économique durant le mandat du Parti québécois a été le double de celle de l'Ontario. Je ne reprendrai pas cette citation.

M. Ryan: Question de règlement.

M. Bérubé: M. le Président, je m'excuse, sur la question de règlement du chef de l'Opposition...

Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît! S'il vous plaît, M. le ministre. Pour pouvoir juger une question de règlement, il faudrait au moins que je l'entende. M. le chef de l'Opposition.

M. Ryan: M. le Président, je soutiens que le ministre induit cette Chambre en erreur en citant ces chiffres qui sont faux, nous l'avons prouvé l'autre jour.

Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît! M. le ministre.

M. Bérubé: Non, M. le Président, ces

chiffres-là ne sont...

Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! M. le ministre, vous avez la parole.

M. Bérubé: M. le Président, ces chiffres-là ne sont pas faux, loin de là; ils sont tirés directement des chiffres publiés par le gouvernement fédéral dans Statistique Canada et ils sont repris par l'ensemble des analystes économiques. Ce sont les façons de les citer du chef de l'Opposition qui sont erronées, comme l'était, d'ailleurs, sa question de privilège qui n'en était pas une.

Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît!

M. Bérubé: M. le Président...

Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît!

M. Bérubé: M. le Président, je ne prétends pas que l'actuel gouvernement n'a fait aucune erreur au cours des années où il a été en charge des finances publiques; je ne prétends pas cela. Nous avons géré au meilleur de notre connaissance et si, au sommet économique, on a pu sougliner que la croissance du produit intérieur brut per capita a été quasiment le double de celle de l'Ontario au cours des dernières années, si on compare les investissements du secteur privé au Québec avec ceux de l'Ontario, parce qu'on a toujours fait des comparaisons avec notre voisin, on doit constater que la performance n'a pas été mauvaise, loin de là.

M. le Président, non, je ne chercherai pas des boucs émissaires, je ne chercherai pas à attaquer le gouvernement fédéral pour sa mauvaise gestion, pas plus que je ne chercherai à attaquer le gouvernement américain pour sa politique monétaire. Je laisserai à d'autres le soin de le faire; la littérature, les journaux en sont pleins. Lors d'une réunion récente de banquiers canadiens ici au Québec - je ne citerai pas le nom de ces banquiers, mais je citerai le Devoir du jeudi 10 juin, simplement pour ne pas gêner certains de ces intervenants qui ne voudraient peut-être pas passer pour avoir appuyé la politique gouvernementale comme telle - on souligne de la bouche d'un vice-président d'une importante banque de Montréal, qui ne met pas de gants blancs pour l'affirmer, qu'il n'existe aucun indice venant d'Ottawa qui permette de croire que des solutions pourraient venir de la capitale fédérale pour régler nos maux économiques. Un de ses collègues souligne qu'on a les politiciens que l'on mérite et, à vous entendre, je comprends de quelle classe vous êtes.

On voudrait - c'est un autre président de banque qui le souligne - que la situation se redresse, mais personne ne veut faire les premiers pas dans ce sens. Dernière citation, un des présidents de banque souligne que le dernier budget de M. Parizeau n'est pas mal dans les circonstances puisqu'il réduit la croissance des dépenses publiques, y compris les salaires de ses employés qui gagnent encore 15% de plus que ceux du domaine privé.

M. le Président, si la performance économique du Québec n'a pas été mauvaise au cours des cinq dernières années, cela ne peut pas être parce qu'on s'est donné un mauvais gouvernement en 1981 que, subitement, elle changerait. C'est qu'il y a une crise, et nous l'avons abondamment décrite. Tantôt, le député de Sainte-Marie nous disait: Dans ce processus de négociations auxquelles nous sommes habitués, il y a du donnant, donnant. Oui, c'est vrai. C'est vrai que, lorsqu'il y a une croissance de la richesse, il s'agit de la partager, que les négociations des conventions collectives dans le secteur public ont permis, par du donnant, donnant, de choisir entre accroître les services à la population et donner une meilleure rémunération aux employés du secteur public. Ceci a permis effectivement de faire en sorte que les employés du secteur public, qui étaient fort mal rémunérés autrefois, aujourd'hui soient rémunérés à un niveau décent. C'est vrai, il s'agissait de partager une nouvelle richesse, et dans ce donnant, donnant, on effectuait les arbitrages.

Lorsqu'on est en période de récession, lorsque l'économie ralentit, lorsqu'il n'y a plus de richesses à partager, cela ne peut plus être du donnant, donnant. On va donner quoi en échange? La chemise des Québécois? La problématique est différente à ce moment. Il faut faire un certain nombre de choix. Un bel exemple de ce type de négociation, c'est l'accord conclu avec les spécialistes. Ils n'ont pas obtenu toutes leurs demandes. De fait, ils demandaient des augmentations beaucoup plus substantielles, se comparant avec les médecins de l'Ontario, les médecins d'autres provinces du Canada. Ils ont fait la preuve - et je pense que c'était assez clair - qu'ils étaient sans doute les médecins les plus mal payés au Canada. Néanmoins, les spécialistes ont accepté de régler non pas sur la base de leurs demandes, mais sur la base d'un gel, acceptant une réduction de leur pouvoir d'achat pour l'année qui vient. Ce n'est pas du donnant, donnant cela; c'est du donnant tout court.

C'est bien certain que, dans la conjoncture que nous traversons, il va falloir éviter les affrontements stériles, les déchirements inutiles. C'est la raison pour laquelle nous avons choisi d'ouvrir les livres,

de mettre toutes les données sur la table, qui ne sont contestées par personne qui fait l'analyse des finances publiques et qui tire les mêmes conclusions que nous tirons. Mais l'inconvénient d'ouvrir les livres, c'est qu'on n'a plus un baril avec deux et trois fonds, M. le Président. Dans une négociation, quand vous avez ouvert les livres, que vous avez dit: Voici ce qu'il y a dans le baril; il n'y en a pas plus, à partir de ce moment, on change complètement la dynamique de la négociation. C'est une négociation fondée davantage sur la franchise, sur l'ouverture et sur une prise de conscience de la réalité que nous traversons. C'est vrai que les négociations que nous allons connaître vont être différentes de ce que nous avons connu dans le passé et c'est normal. On ne négocie pas en période de croissance économique comme on négocie en période de récession. Indéniablement il faut changer un certain nombre d'attitudes.

Nous avons encore beaucoup de choses à négocier avec les employés du secteur public. Indéniablement, nous injectons dans le secteur de l'éducation, pour essentiellement les mêmes résultats, près de 800 000 000 $ de plus que l'Ontario. Si nous voulons développer nos universités, si nous voulons mettre en valeur l'éducation des adultes, il va falloir trouver un moyen de réorienter les ressources que nous y mettons, qui sont généreuses, trouver moyen de les réorienter, non pas réduire l'argent que nous investissons dans l'éducation, mais s'assurer que, face aux besoins nouveaux, nous avons la flexibilité, comme société, avec les moyens dont nous disposons et qui sont généreux, de faire en sorte que l'on puisse relever ce genre de défi. Il faudra s'occuper de l'accueil de l'enfance inadaptée. Il y a des réformes dans le secteur de l'éducation qui doivent être faites au Québec, pour lesquelles nous avons besoin de ressources et cela ne veut pas nécessairement dire aller puiser de nouveau dans les poches des contribuables, mais peut vouloir dire plonger dans ce qui est déjà abondant et l'utiliser différemment. Il faudra donc être assez flexible, être assez mobile pour relever les défis que nous allons connaître dans les années 80 avec les moyens dont nous disposons. (20 h 50)

Dans le domaine hospitalier, par exemple, lorsqu'il faut fermer des services, réorienter des services, ce n'est pas normal et les employés eux-mêmes le vivent et le ressentent. Ce n'est pas normal que pour fermer un poste, on doive pratiquement déplacer quinze autres employés dans le réseau hospitalier, ce n'est pas normal, il faut trouver une solution à cela. On parle de sécurité d'emploi, oui, et ce n'est pas malsain la sécurité d'emploi, mais il va falloir rechercher la mobilité. Il y a des employés qui se morfondent depuis des années dans des emplois qu'ils n'aiment plus. Il faut trouver un moyen de leur permettre de se déplacer à l'intérieur de la fonction publique. Il faut même avoir des politiques pour nos cadres pour faire en sorte qu'il y ait une mobilité continue avec de nouveaux défis continuels. Voilà le genre de négociation pour bâtir un système de qualité avec les moyens dont nous disposons, qui sont abondants. Il reste encore beaucoup de choses à discuter avec les employés du secteur public. Le défi que nous aurons à relever au cours des prochaines négociations en sera un de réalisme et de solidarité. Oui, depuis deux exercices financiers, nous nous attachons à corriger les finances publiques, à faire en sorte que nous ayons un budget équilibré et je peux vous assurer que ce sera fait très bientôt, de façon complète et de façon éclatante.

Mais nous ne le faisons pas simplement pour équilibrer une comptabilité. Nous sommes en pleine crise avec un effondrement de l'industrie de la construction. Nous pourrions attendre encore une année qu'il y ait relance économique et qu'éventuellement l'industrie de la construction redémarre. Il y a cette proposition qui nous est venue de la Fédération des travailleurs du Québec appuyée par la CSN de, tous ensemble, donner un coup de main pour relancer plus vite l'industrie de la construction, de mettre 50 000 maisons en construction. Dans quelle société a-t-on vu des travailleurs offrir de réduire leur salaire, des banques offrir de réduire leur taux d'intérêt pour aider d'autres Québécois à devenir propriétaires de leur domicile? Il n'y a pas beaucoup de pays où cela s'est fait, mais cela se fait au Québec. Et c'est cela une société qui est capable de relever le défi de la solidarité.

On a une quantité de jeunes qui cherchent du travail. Souvent, on parle de l'augmentation du chômage. C'est vrai que cette croissance du chômage au Québec affecte profondément notre société. Ce qu'on ne dit pas, cependant, c'est que la création d'emplois n'a pas été mauvaise au cours des dernières années. Près de 2% d'augmentation des emplois par année alors que la population n'augmente que de 0,5% sauf que ce que l'on ne mentionne pas, c'est cette quantité incroyable de jeunes qui arrivent sur le marché du travail et qui arrivent à un rythme plus rapide que nous arrivons à créer des emplois. Il va falloir s'attaquer à ce problème des jeunes. La mise sur pied du bon d'emploi va permettre à un certain nombre de jeunes qui, après six mois, n'ont pas réussi à prendre de l'expérience nulle part, qui sont dans ce cercle vicieux: sans expérience, sans emploi, sans emploi, sans expérience. Voilà une mesure gouvernementale qu'on met sur pied pour justement donner une chance à nos jeunes, mais pour cela, il faut une marge de

manoeuvre. Nous avons des assistés sociaux au Québec aptes au travail, qui viennent d'arriver à l'aide sociale. Pourquoi? Parce qu'il n'y a pas d'emplois. Quand il y a 40 demandes pour un emploi disponible dans un centre de main-d'oeuvre, on se rend bien compte qu'il y a un grand nombre de gens qui vivent de l'aide sociale présentement et qui n'ont jamais vécu de l'aide sociale dans le passé et qui veulent travailler, qui veulent faire quelque chose d'utile pour la collectivité. Ce programme qu'on a mis sur pied pour permettre à un plus grand nombre de ces bénéficiaires de l'aide sociale, c'est-à-dire 25 000, d'embarquer, eux aussi, dans la ronde de la solidarité et de travailler, eux aussi, à des projets communautaires, voilà une action gouvernementale, mais pour cela, il faut une marge de manoeuvre.

Quand on veut une marge de manoeuvre, ce n'est pas simplement pour "balancer" des équilibres financiers, c'est pour être capable de faire des choses, c'est pour être capable de répondre aux attentes de nos concitoyens et à un certain nombre de problèmes auxquels nous faisons face. Le défi technologique que nous avons à relever, indéniablement, il faut penser pour aujourd'hui mais il faut penser pour demain. Lorsqu'un jeune vient dans mon comté, qu'il a fait un cours en instrumentation et qu'il cherche un endroit où il pourrait travailler dans un domaine qui le passionne qui est l'électronique et le contrôle automatique des procédés, qu'il sort directement du cégep et qu'il ne se trouve pas d'emploi après un an, on se rend bien compte qu'il faut penser à l'avenir.

Il va falloir investir là-dedans parce que nous avons investi pour éduquer nos enfants. Mais, aujourd'hui qu'ils ont des connaissances qui vont leur permettre d'innover, de développer un certain nombre de nouveaux secteurs, il faut que la société leur offre la chance d'exercer ces connaissances. C'est pour cela que ça prend une marge de manoeuvre; c'est cela, une marge de manoeuvre. Lorsqu'on dit qu'il faut réduire nos dépenses de 500 000 000 $, ce que l'on dit en même temps, M. le Président, c'est essentiellement une chose. Nous avons des défis à relever comme collectivité. Nous avons une mentalité à modifier face à une crise qui affecte le monde entier, autant les pays derrière le rideau de fer que les pays occidentaux, une crise qui touche tous les pays.

Mais, M. le Président, il y a une façon de se sortir de la crise, c'est de regarder la réalité en face, honnêtement, franchement. Un peu comme un papillon qui vient se brûler les ailes à une lumière, il ne faut pas inutilement, M. le Président, se meurtrir à vouloir des choses que nous ne pouvons pas réaliser.

La loi 70 vient baliser les ressources que la collectivité québécoise peut mettre à la disposition des employés du secteur public. Ils continueront d'être bien rémunérés, M. le Président, ils continueront d'être mieux rémunérés que dans le secteur privé, même après cette loi-là, et nous continuerons dans le secteur public à avoir de bonnes conditions de travail. En même temps, le gouvernement aura une marge de manoeuvre pour s'engager dans la relance de l'économie qu'attend l'ensemble de nos concitoyens. En même temps, le gouvernement pourra faire en sorte qu'on ne mettra pas en danger, en cause les acquis de notre société et le grand nombre de ces institutions que nous nous sommes données au cours des 20 dernières années et auxquelles nos concitoyens tiennent.

M. le Président, la loi 70, c'est une loi franche, une loi honnête qui dit: Nous devons vivre avec la réalité, mais, parce que nous savons vivre avec la réalité, nous serons capables de relever les défis de demain, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Est-ce que cette motion de troisième lecture est adoptée? M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Fréchette: II y a une situation qu'il faudrait rendre claire, M. le Président. Je comprends que la réplique du ministre dispose à la fois des projets de loi nos 68 et 70 mais, par ailleurs, il a été convenu que le vote sur ces deux motions se prendrait en même temps que sur certaines autres qui ont déjà été laissées en suspens. C'est le sens de l'entente. Oui, votes enregistrés, bien sûr.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader de l'Opposition.

M. Levesque (Bonaventure): Si on veut attendre l'issue du projet de loi no 37. À moins que le gouvernement ne veuille retirer le projet de loi no 37. Est-ce que j'ai compris que le gouvernement voulait retirer le projet de loi 37?

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader du gouvernement.

M. Bertrand: Est-ce que nous devons comprendre que l'Opposition serait prête à voter immédiatement sur le projet de loi no 37?

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader de l'Opposition.

M. Levesque (Bonaventure): Tenant compte du fait que nous voulons être aussi efficaces et logiques que possible malgré cette fin de session un peu turbulente, je me

demandais s'il fallait réunir les députés deux fois. Alors, c'est pour cela que je me demandais si on ne devait pas attendre l'issue du projet de loi no 37. Pardon? (21 heures)

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Fréchette: Vote sur les projets de loi nos 68 et 70 jusqu'à ce que nous soyons prêts à disposer également, par vote enregistré, du projet de loi no 37 et du projet de loi no 72.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader adjoint du gouvernement, est-ce que vous ne considérerez pas aussi le vote sur les projets de loi nos 68 et 62?

M. Bertrand: Tous les votes, M. le Président...

M. Levesque (Bonaventure): Si je pouvais faire une suggestion au leader parlementaire du gouvernement, est-ce qu'on ne pourrait pas, à ce moment-ci, étudier les projets de loi en deuxième et troisième lecture, les projets de loi privés?

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader du gouvernement.

M. Bertrand: C'est exactement ce que j'allais proposer à l'Assemblée nationale, c'est qu'avant d'entreprendre l'étude du projet de loi no 37 qui pourrait clore nos travaux, nous puissions disposer de tous les projets de loi privés ainsi que de deux projets de loi publics inscrits au nom de députés. Quand nous aurons disposé de ces projets de loi privés ainsi que du projet de loi no 37, nous ne prendrons les votes qu'à ce moment-là, c'est-à-dire une fois le débat terminé. Je vous demanderais donc, M. le Président, d'appeler l'article 22 du feuilleton.

Prise en considération du rapport de

la commission qui a étudié le projet

de loi no 190

Le Vice-Président (M. Rancourt): Prise en considération du rapport de la commission permanente de la justice qui a étudié le projet de loi no 190, Loi sur la commune de la seigneurie d'Yamaska. Est-ce que cette prise en considération du rapport est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Adopté.

Troisième lecture M. Bertrand: M. le Président, motion pour adopter en troisième lecture le projet de loi.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Est-ce que cette motion de troisième lecture est adoptée? Adopté.

Des voix: Adopté.

M. Bertrand: M. le Président, je vous demanderais d'appeler l'article 17 du feuilleton.

Projet de loi no 191 Troisième lecture

Le Vice-Président (M. Rancourt): Troisième lecture du projet de loi no 191, Loi modifiant la Loi concernant la ville d'Acton Vale. Est-ce que cette motion de troisième lecture est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Bertrand: M. le Président, je vous demanderais d'appeler l'article 23 du feuilleton.

Projet de loi no 207 Deuxième lecture

Le Vice-Président (M. Rancourt): Deuxième lecture du projet de loi no 207, Loi concernant la succession de Jean-Louis Brissette. Est-ce que cette deuxième lecture de ce projet de loi est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Secrétaire adjoint: Deuxième lecture de ce projet de loi.

Troisième lecture

Le Vice-Président (M. Rancourt): Adopté. Est-ce que la troisième lecture de ce même projet de loi est adoptée? Adopté.

M. Bertrand: Article 24 du feuilleton, M. le Président.

Projet de loi no 208 Deuxième lecture

Le Vice-Président (M. Rancourt): Deuxième lecture du projet de loi no 208, Loi concernant la succession de Robert Meighen. Est-ce que cette deuxième lecture est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Secrétaire adjoint: Deuxième lecture de ce projet de loi.

Troisième lecture

Le Vice-Président (M. Rancourt): Adopté. Est-ce que la troisième lecture de ce projet de loi est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Adopté. M. le leader de l'Opposition.

M. Levesque (Bonaventure): Je compte que le leader parlementaire du gouvernement nous fera part s'il y avait des objections dont il aurait été mis au courant ou dont le gouvernement aurait été informé quant à tous ces projets de loi de nature privée.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader du gouvernement.

M. Bertrand: Oui, M. le Président. Chaque fois qu'il y aura une objection, j'en ferai part à l'Assemblée nationale. Article 25 du feuilleton, M. le Président.

Projet de loi no 226 Deuxième lecture

Le Vice-Président (M. Rancourt): Deuxième lecture du projet de loi no 226, Loi concernant la succession d'Edmond Laliberté senior. Est-ce que cette deuxième lecture est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Secrétaire adjoint: Deuxième lecture de ce projet de loi.

Troisième lecture

Le Vice-Président (M. Rancourt): Adopté. La troisième lecture de ce même projet de loi est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Bertrand: Article 26, M. le Président.

Projet de loi no 242 Deuxième lecture

Le Vice-Président (M. Rancourt): Deuxième lecture du projet de loi no 242,

Loi modifiant la Loi constituant en corporation l'Hôpital d'Argenteuil. Est-ce que cette deuxième lecture de ce projet de loi est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Secrétaire adjoint: Deuxième lecture de ce projet de loi.

Troisième lecture

Le Vice-Président (M. Rancourt): Adopté. Est-ce que la troisième lecture de ce même projet de loi est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Bertrand: Article 27, M. le Président.

Projet de loi no 210 Deuxième lecture

Le Vice-Président (M. Rancourt): Deuxième lecture du projet de loi no 210, Loi concernant la succession de Louis Fortier. Est-ce que cette deuxième lecture est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Secrétaire adjoint: Deuxième lecture de ce projet de loi.

Troisième lecture

Le Vice-Président (M. Rancourt): Adopté. Est-ce que la troisième lecture de ce même projet de loi est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Bertrand: Article 28.

Projet de loi no 213 Deuxième lecture

Le Vice-Président (M. Rancourt): Deuxième lecture du projet de loi no 213, Loi concernant la fabrique de la paroisse du Sacré-Coeur de Jésus. Est-ce que cette deuxième lecture est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Secrétaire adjoint: Deuxième lecture de ce projet de loi.

Troisième lecture

Le Vice-Président (M. Rancourt): Adopté. Est-ce que la troisième lecture de ce même projet de loi est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Adopté. M. leader du gouvernement.

M. Bertrand: II y a un petit problème à l'article 29. Effectivement, je voudrais souligner que nous avons un certain nombre de réserves et nous voudrions reporter l'adoption de ce projet de loi à l'automne prochain.

M. Levesque (Bonaventure): D'accord, M. le Président. Cela fait partie des appréhensions que j'avais.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Reporté.

M. le leader du gouvernement.

M. Bertrand: Vous avez vu avec quel grand sourire, M. le Président, il l'appréhendait? L'article 30 du feuilleton, M. le Président.

Projet de loi no 233 Deuxième lecture

Le Vice-Président (M. Rancourt): Deuxième lecture du projet de loi no 233, Loi concernant certains terrains donnés à Horace Bérubé. Est-ce que cette deuxième lecture est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Adopté.

Le Secrétaire adjoint: Deuxième lecture de ce projet de loi.

Troisième lecture

Le Vice-Président (M. Rancourt): Est-ce que la troisième lecture de ce même projet de loi est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Adopté.

M. le leader du gouvernement.

M. Bertrand: L'article 31, M. le Président.

Projet de loi no 243 Deuxième lecture

Le Vice-Président (M. Rancourt): Deuxième lecture du projet de loi no 243, Loi concernant la succession de Edward Scallon. Est-ce que la deuxième lecture de ce projet de loi est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Secrétaire adjoint: Deuxième lecture de ce projet de loi.

Troisième lecture

Le Vice-Président (M. Rancourt): Est-ce que la troisième lecture de ce même projet de loi est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Adopté.

M. le leader du gouvernement.

M. Bertrand: Article 32, M. le Président.

Projet de loi no 257 Deuxième lecture

Le Vice-Président (M. Rancourt): Deuxième lecture du projet de loi no 257, Loi concernant certains lots du cadastre de la paroisse de Saint-Augustin, division d'enregistrement de Portneuf. Est-ce que la deuxième lecture de ce projet de loi est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Adopté.

Le Secrétaire adjoint: Deuxième lecture de ce projet de loi.

Troisième lecture

Le Vice-Président (M. Rancourt): Est-ce que la troisième lecture de ce même projet de loi est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader du gouvernement.

M. Bertrand: Article 33, M. le Président.

Projet de loi no 202 Deuxième lecture

Le Vice-Président (M. Rancourt): Deuxième lecture du projet de loi no 202, Loi concernant la ville de Montréal-Est. Est-ce que la deuxième lecture de ce projet de loi est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Secrétaire adjoint: Deuxième lecture de ce projet de loi.

Troisième lecture

Le Vice-Président (M. Rancourt): Est-ce que la troisième lecture de ce même projet de loi est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader du gouvernement.

M. Bertrand: Article 34, M. le Président.

Projet de loi no 203 Deuxième lecture

Le Vice-Président (M. Rancourt):Deuxième lecture du projet de loi no 203, Loi concernant la ville d'Anjou. Est-ce que la deuxième lecture de ce projet de loi est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Secrétaire adjoint: Deuxième lecture de ce projet de loi.

Troisième lecture

Le Vice-Président (M. Rancourt): Est-ce que la troisième lecture de ce même projet de loi est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader du gouvernement.

M. Levesque (Bonaventure): Je me permets de demander au leader parlementaire du gouvernement s'il a l'intention de demander l'adoption des projets de loi de l'article 32 à l'article 57.

M. Bertrand: M. le Président, de l'article 35 à l'article 56 inclusivement.

M. Levesque (Bonaventure): Vous n'avez pas à le demander, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader du gouvernement.

M. Bertrand: M. le Président, pour les articles 35 à 56 inclusivement qui sont inscrits au feuilleton, je ferai motion pour que nous adoptions en bloc les deuxième et troisième lectures de ces différents projets de loi.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Est-ce que cette motion de deuxième et de troisième lecture est adoptée?

M. Levesque (Bonaventure): À la condition que vous en fassiez la lecture, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Que j'en fasse la lecture individuellement?

M. Levesque (Bonaventure): Oui.

Projet de loi no 204 Deuxième et troisième lecture

Le Vice-Président (M. Rancourt): Cela va. Deuxième lecture du projet de loi no 204, Loi concernant la ville de Kirkland.

Projet de loi no 212 Deuxième et troisième lecture

Deuxième lecture du projet de loi no 212, Loi modifiant la charte de la ville de Vanier.

Projet de loi no 216 Deuxième et troisième lecture

Deuxième lecture du projet de loi no no 216, Loi concernant l'Union-Vie.

Projet de loi no 220 Deuxième et troisième lecture

Deuxième lecture du projet de loi no 220, Loi modifiant la charte de la ville de Longueuil.

Projet de loi no 223 Deuxième et troisième lecture

Deuxième lecture du projet de loi no 223, Loi concernant la Compagnie de fiducie Citicorp.

Projet de loi no 224 Deuxième et troisième lecture

Deuxième lecture du projet de loi no 224, Loi modifiant la charte de la ville de Shawinigan.

Projet de loi no 232 Deuxième et troisième lecture

Deuxième lecture du projet de loi no 232, Loi concernant les Soeurs de la Charité de l'Hâtel-Dieu de Saint-Hyacinthe devenant Soeurs de la Charité de Saint-Hyacinthe.

Considérez que, depuis le début, il s'agissait des deuxième et troisième lectures.

Projet de loi no 234 Deuxième et troisième lecture

Deuxième et troisième lecture du projet de loi no 234, Loi concernant la Corporation des Soeurs de Sainte-Croix et des Sept-Douleurs devenant Les Soeurs de Sainte-Croix.

Projet de loi no 235 Deuxième et troisième lecture

Deuxième et troisième lecture du projet de loi no 235, Loi concernant la ville de Val-d'Or.

Projet de loi no 238 Deuxième et troisième lecture

Deuxième et troisième lecture du projet de loi no 238, Loi modifiant la charte de la ville de Québec.

Projet de loi no 240 Deuxième et troisième lecture

Deuxième et troisième lecture du projet de loi no 240, Loi concernant Ressources Consolidées Impérial Limitée.

Projet de loi no 241 Deuxième et troisième lecture

Deuxième et troisième lecture du projet de loi no 241, Loi concernant Citicorp Ltée.

Projet de loi no 246 Deuxième et troisième lecture

Deuxième et troisième lecture du projet de loi no 246, Loi concernant la ville de Saint-Basile-le-Grand. (21 h 10)

Projet de loi no 247

Deuxième et troisième lecture

Deuxième et troisième lecture du projet de loi no 247, Loi concernant la cité de Verdun.

Projet de loi no 250 Deuxième et troisième lecture

Deuxième et troisième lecture du projet de loi no 250, Loi concernant la ville de Victoriaville.

Projet de loi no 255 Deuxième et troisième lecture

Deuxième et troisième lecture du projet de loi no 255, Loi concernant la ville de Vaudreuil.

Projet de loi no 256 Deuxième et troisième lecture

Deuxième et troisième lecture du projet de loi no 256, Loi modifiant les pouvoirs de la ville de La Prairie.

Projet de loi no 258 Deuxième et troisième lecture

Deuxième et troisième lecture du projet de loi no 258, Loi concernant la ville de Grand'Mère.

Projet de loi no 261 Deuxième et troisième lecture

Deuxième et troisième lecture du projet de loi no 261, Loi concernant la ville de Ville-Marie.

Projet de loi no 264 Deuxième et troisième lecture

Deuxième et troisième lecture du projet de loi no 264, Loi modifiant la charte de la ville de Trois-Rivières.

Projet de loi no 268 Deuxième et troisième lecture

Deuxième et troisième lecture du projet de loi no 268, Loi concernant la ville de Fermont.

Projet de loi no 279 Deuxième et troisième lecture

Deuxième et troisième lecture du projet de loi no 279, Loi concernant les Soeurs Franciscaines missionnaires de l'Immaculée-Conception.

Est-ce que ces motions de deuxième et troisième lecture, en bloc, sont adoptées?

Des voix: Adopté.

Le Secrétaire adjoint: Deuxième et troisième lecture de ces projets de loi.

M. Levesque (Bonaventure): Avec les réserves que nous avions faites, M. le Président, à savoir que le gouvernement nous aurait indiqué s'il y avait eu des objections.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader du gouvernement.

M. Bertrand: M. le Président, je veux bien faire part immédiatement au leader de l'Opposition des objections que nous avons. Il s'agit, évidemment, de projets de loi qui sont inscrits à la page 10 du feuilleton d'aujourd'hui et qui ont été déférés pour étude à des commissions après la première lecture. Ce sont tous des projets de loi qui seront étudiés l'automne prochain et un seul pose des problèmes - je l'indique immédiatement au leader de l'Opposition -c'est le projet de loi no 206 inscrit au nom de M. Sirros, Loi concernant Canadian Slovak Building Ltd. Tous les autres, c'est-à-dire les trois premiers ainsi que les trois derniers, six au total, seront étudiés l'automne prochain.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader de l'Opposition.

M. Levesque (Bonaventure): Des projets de loi privés déférés pour étude à des commissions après la première lecture, on m'a indiqué le projet de loi no 206. Ensuite, qu'est-ce qui arrive avec les autres?

M. Bertrand: Le projet de loi no 206 fait problème et les six autres projets de loi privés pourront être étudiés l'automne prochain.

M. Levesque (Bonaventure): Ils sont tous pareils. C'est pour l'automne prochain.

M. Bertrand: De toute façon, c'est remis à l'automne prochain.

M. Levesque (Bonaventure): D'accord.

M. Bertrand: Mais je voulais vous faire savoir qu'il y avait un problème particulier pour ce projet de loi.

M. Levesque (Bonaventure): D'accord.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader du gouvernement.

Projet de loi no 200 Commission plénière

Corrections au rapport de la commission

M. Bertrand: M. le Président, il nous resterait, à l'article 57 du feuilleton, la deuxième lecture du projet de loi no 200, Loi modifiant la charte de la ville de Montréal. Je voudrais vous indiquer que, premièrement, il y a des corrections à apporter au rapport de la commission des affaires municipales et, deuxièmement, il y a deux amendements à apporter au projet de loi no 200.

Je fais motion, M. le Président, pour que les corrections soient apportées. Elles ont été transmises au Secrétaire général pour que les amendements soient adoptés.

M. Levesque (Bonaventure): Est-ce qu'on peut les voir?

M. Bertrand: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader du gouvernement.

M. Bertrand: Le ministre pourrait les lire de son siège.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le ministre des Affaires municipales, la lecture des amendements.

M. Léonard: M. le Président, il s'agit d'un premier amendement qui concerne une disposition permettant un colistier à Montréal sur lequel nous avions interrogé, d'ailleurs, les représentants de la ville de Montréal lorsqu'ils sont venus à la commission parlementaire.

Alors, je lis l'amendement: "Malgré leur abrogation, les dispositions de la Loi concernant les élections de 1978 dans certaines municipalités et modifiant la Loi des cités et villes, 1978, chapitre 63, relatives au colistier s'appliquent à une élection générale en les adaptant." Cela a pour effet de permettre le système de colistier à Montréal.

Une deuxième amendement...

Une voix: ...

M. Léonard: II faut l'inscrire après l'article 450.

En ce qui concerne un autre amendement de fond, nous voulons rendre

rétroactif l'article 51 qui concerne une inscription au rôle de certains immeubles. Il s'agit de pouvoir inscrire au râle des immeubles de 50 000 000 $ et plus, en termes d'évaluation, qui sont construits sur une période de trois ans et de permettre la construction sur une période de trois ans avant l'inscription au rôle, ce qui a été discuté en commission parlementaire, je pense; mais il y en a un ou deux ensemble, l'édifice de Bell Canada et de la Banque Nationale du Canada à Montréal. Cela touche cet édifice-là en particulier. Pour les autres, ça va être normal.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Bourassa.

M. Laplante: M. le Président, le parrain accepte les amendements.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader de l'Opposition.

M. Levesque (Bonaventure): Ce qui est beaucoup plus important en procédure parlementaire que le parrain, c'est l'Opposition, M. le Président, surtout à ce moment-ci de nos travaux. Je tiens à dire que l'Opposition est heureuse de concourir à cela.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Les amendements sont adoptés.

M. Bertrand: M. le Président...

M. Léonard: Excusez-moi...

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. Léonard: Est-ce que les corrections au rapport doivent être lues intégralement aussi pour plus de sécurité?

Le Vice-Président (M. Jolivet): Ce serait préférable.

M. Léonard: Je les lis.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Un instant! M. le leader de l'Opposition.

M. Levesque (Bonaventure): Si le ministre a l'air inquiet, je pense qu'on va accepter parce qu'il a peut-être des remords ou il veut se justifier.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. Léonard: Une première correction de forme à l'article 48. Il s'agit d'une correction du rapport de la comission parlementaire visant à retrancher le deuxième alinéa de l'article 755 proposé par la ville et qui n'a pas été adopté lors de la commission parlementaire du 15 juin dernier, qui avait été indiqué comme étant adopté.

Une deuxième correction à l'article 50b qui vise à ajouter les mots "ou d'un local" à la fin du sous-paragraphe c) du paragraphe 2 de l'article 808 de la charte et qui vise aussi à retrancher un paragraphe 3 apparaissant dans le rapport et qui n'a pas été adopté en commission parlementaire. Le deuxième alinéa du paragraphe 2 du rapport devenant le paragraphe 3. Cela va?

Le Vice-Président (M. Jolivet): Cela va? M. Léonard: Mais, il y en a d'autres...

Le Vice-Président (M. Jolivet): Est-ce qu'il y en a d'autres, M. le ministre?

M. Léonard: Oui. Ensuite, une correction de concordance à l'article 76 en remplaçant les mots "par les rubriques et les articles suivants" par les mots "par la rubrique et l'article suivant". C'est vraiment une correction de forme.

Ensuite, inscrire à l'article 80a cet article qui a été adopté en commission parlementaire mais qui ne figure pas comme adopté au rapport de la commission. Il y a donc lieu de l'adopter.

À l'article 80 du projet de loi, il s'agit de remplacer le paragraphe 2 de l'article 80 par le suivant: "La ville de Montréal s'engage à prolonger la rue Jean-Talon dans son territoire jusqu'au chemin Kildare prolongé par la cité de Côte-Saint-Luc à ses limites et à construire les tunnels ou viaducs requis pour traverser les voies du Canadien Pacifique dans ce territoire", parce que le paragraphe 2 apparaissant au rapport n'a pas été celui qui fut adopté.

Enfin, à l'article 787b de la charte qui était édicté par l'article 50 du projet de loi, il faut enlever les soulignés qui apparaissent au rapport de la commission. J'ai terminé, M. le Président.

Deuxième et troisième lecture

Le Vice-Président (M. Jolivet): Pour les besoins du journal des Débats, nous allons procéder de la façon suivante. Il y aurait acceptation de la deuxième lecture. Nous avons consentement pour avoir été en commission plénière où les corrections et les amendements ont été faits au rapport présenté. Les amendements sont adoptés.

En commission plénière la correction au rapport a été faite de consentement. Le rapport a été adopté tel qu'amendé et le projet de loi est adopté en deuxième lecture et en troisième lecture avec les amendements à la fois au rapport et au projet de loi même.

Une voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Bertrand: Je voudrais immédiatement indiquer que l'avis qui est inscrit en appendice ne tient plus. C'est l'avis qui consistait à convoquer la commission des engagements financiers pour le 8 juillet prochain.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Merci. Nous passons au projet de loi no 37.

M. Bertrand: Oui, la troisième lecture du projet de loi no 37. (21 h 20)

Projet de loi no 37

Troisième lecture

Le Vice-Président (M. Jolivet): Troisième lecture du projet de loi no 37, Loi regroupant les villes de Baie-Comeau et de Hauterive. M. le ministre des Affaires municipales.

M. Jacques Léonard

M. Léonard: Nous entreprenons maintenant, en troisième lecture, l'étude d'un projet de loi qui a suscité, dans un premier temps, un débat plus régional et national par la suite, où se sont fait entendre divers groupes de citoyens, de contribuables, plusieurs organismes, qui avaient pour objectif le développement de la Côte-Nord, et les élus des deux villes, Baie-Comeau et Hauterive.

Depuis quelque temps, le débat a peut-être dégénéré quelque peu, prenant, un jour, des allures de guérilla, prenant, un autre jour, des accents à ce point excessifs que la réalité quotidienne de la vie des Québécois, qui vivent dans les villes de Baie-Comeau et de Hauterive, a été oblitérée, à ce point qu'aujourd'hui beaucoup de Québécois d'ailleurs, de Jonquière, de Hull, de Matane, de partout, désirent en savoir plus long.

Baie-Comeau est née en 1937, à l'embouchure de deux grandes rivières: la Manicouagan et la rivière aux Outardes. Baie-Comeau s'est développée au rythme d'une très grande entreprise d'exploitation forestière, la Quebec North Shore Paper, qui avait élu domicile à cet endroit avant même que Baie-Comeau n'apparaisse sur la carte. Plus tard, en 1959, à cause de l'énergie renouvelable qu'offraient les rivières et à cause de la baie de l'embouchure qui permettait l'installation d'un port sécuritaire sur le Saint-Laurent, d'autres entreprises, comme l'aluminerie de la Reynolds, se sont ajoutées.

Baie-Comeau compte donc aujourd'hui un peu plus de 12 000 habitants, ce qui est relativement peu pour une ville qui accueille de si grandes entreprises. Ce phénomène s'explique par ce que je suis prêt à nommer, comme les citoyens de la région, un accident historique. Cet accident, c'est Hauterive.

En fait, Hauterive est née, en 1950, sur un plateau sablonneux, de l'autre côté des rivières, lorsque les grands propriétaires de terrains, les grandes entreprises de Baie-Comeau, prioritairement, n'ont pas voulu céder de territoire à l'installation d'équipements communautaires de caractère religieux ou éducationnel. Les travailleurs des usines ont suivi pour les mêmes raisons: les services qu'on offrait à leur famille. Aujourd'hui, même si Hauterive est née 13 ans après Baie-Comeau, la population de l'agglomération parallèle de Hauterive est supérieure de quelque 2000 citoyens. Ces deux villes vivent seules, côte à côte, accrochées aux rives du golfe Saint-Laurent, au bord d'un immense territoire. Mais Hauterive ne serait pas venue au monde si on ne l'y avait pas forcée.

Aujourd'hui, il y a donc en apparence, strictement géographique, deux agglomérations, un coeur industriel, une succursale domiciliaire, Baie-Comeau et Hauterive, une ville de compagnies et une ville de travailleurs. Mais il ne s'agit que d'une seule communauté dont les territoires spécialisés sont strictement complémentaires. Plus des deux tiers des travailleurs des usines à l'est des rivières ont élu résidence à l'ouest des rivières et la tendance se maintient.

Lorsque, d'autre part, la compagnie Reynolds investira sous peu quelque 750 000 000 $ sous la forme d'installations nouvelles et plus compétitives, elle devra camper ses équipements adjacents à ceux qui sont déjà là, dans le secteur de Baie-Comeau actuel, ce qui est encore normal et ce qui maintient la tendance à la spécialisation naturelle des secteurs d'aménagement. Là où la situation n'est plus compatible avec la réalité sociale du milieu, c'est en termes de redistribution des dépenses que cotise l'ensemble de la communauté économique chaque année pour se donner les services nécessaires.

Il faut savoir que depuis de très nombreuses années, pour ne pas dire depuis la naissance de Hauterive, qui est née d'une division forcée, les contribuables des deux villes juridiques d'aujourd'hui se servent indifféremment des équipements de l'une ou de l'autre municipalité dans leur travail, dans leur commerce ou dans leur choix de loisirs.

Or, il faut aussi savoir que l'agglomération actuelle de Baie-Comeau tire des revenus très élevés de 286 000 000 $ d'évaluation qui vont gonfler encore, avec d'autres établissements industriels annoncés dont plus de 63% proviennent du domaine

industriel. Ces revenus sont redistribués aux seuls 12 000 habitants du secteur Baie-Comeau, et la ville dépense 888 $ par habitant, un sommet très élevé, sinon inégalé au Québec, pour une municipalité de cette taille. D'autres villes comme Matane, par exemple, de l'autre côté du fleuve, qu'habitent le même nombre de citoyens, dépensent moins de la moitié pour offrir des services décents à leurs contribuables. Aima dont les 26 000 habitants font plus que le double de la population de Baie-Comeau actuelle dépense la moitié, 449 $, exactement la moitié de l'argent qu'investit par habitant la ville de la Côte-Nord. Donc, double d'habitants, mais moitié moins de dépenses par habitant et pourtant, Alma est une ville heureuse. Rien à redire sur une telle situation, M. le Président, si ce n'est pour expliquer que toute l'acrimonie qui a été jusqu'ici distillée peut venir d'administrateurs, peut-être, de revenus qui vont de toute façon augmenter de façon assurée, progressive, demain.

Rien à redire non plus sur une telle situation, si ce n'est pour constater que de l'autre côté de la rivière, c'est-à-dire Hauterive, où demeurent la majorité des travailleurs qui oeuvrent dans les usines, qui fournissent en bons citoyens corporatifs la base des revenus municipaux, on doit se couper de l'éventualité d'une redistribution normale et naturelle de ces revenus communautaires. Pour sa part, le secteur de Hauterive ne dispose que de 142 000 000 $ d'évaluation contre 286 000 000 $ à Baie-Comeau, la moitié moins, ne dispose que de la moitié de la richesse d'évaluation, donc, de sa soeur qui est d'ailleurs constituée en toute logique à plus de 80% de résidences familiales. La situation est claire. Le secteur de Baie-Comeau ne supporte qu'une partie non équitable des services nécessités par le développement résidentiel nécessaire aux ouvriers et qu'on doit réaliser dans le secteur de Hauterive. Les autorités municipales de Hauterive ont quand même dû dépenser plus de 580 $ par habitant l'an dernier, ce qui est aussi au-dessus de la moyenne québécoise.

L'écart qui est aujourd'hui inscrit dans la réalité juridique fictive des deux villes ira toujours en s'écartant et tous les corps intermédiaires, des chambres de commerce des deux agglomérations jusqu'au Conseil régional de développement, sont venus le rappeler aux députés de l'Assemblée nationale il y a plus de six mois déjà, au mois de décembre dernier. Ce paysage, M. le Président, ne peut être considéré isolément. Ces deux villes sont complémentaires comme jamais depuis leurs 29 années de vie commune. Les mêmes citoyens vont magasiner, travailler ou voir des parents de part et d'autre des mêmes rivières. Ils sont 26 000 Québécois à habiter l'ensemble du territoire. L'ensemble des groupes intermédiaires issus de cette population, les jeunes chambres, les chambres de commerce, la Confédération des syndicats nationaux, la Fédération des travailleurs du Québec, le Conseil régional de développement, tous ces organismes depuis 1960 revendiquent une entente entre les deux administrations municipales qui puisse briser une séparation juridique paralysante. Un mémoire de 1967 préparé par la Jeune chambre de Baie-Comeau-Hauterive était clair dans ses conclusions lorsqu'il étudiait les raisons de manque de planification en termes d'aménagement lié aux défis économiques.

Le mémoire signale que la fusion éliminerait sans aucun doute les retards, les tiraillements et les indécisions qui ont été notre lot au cours des récentes années. La planification du développement des quartiers résidentiels, des centres industriels et commerciaux, les parcs publics, les maisons d'enseignement, toute la panoplie d'une cité moderne et dynamique ne peut être réalisée rationnellement qu'en assurant l'unité de décision au préalable. Nous croyons, M. le Président, que ces citoyens ont raison. Trop de dossiers se sont plus ou moins réglés sans que jamais le monde des affaires n'ait pu s'habituer à une telle situation de stérilité ambiante. D'autres solutions à d'autres problèmes ne sont pas encore survenues alors que les ensembles industriels et urbains comparables de Sept-Îles et Port-Cartier, les concurrents naturels, les ont déjà ou inventées ou installées.

(21 h 30)

L'agglomération de Baie-Comeau attend encore son parc industriel régional, un retard de plusieurs années qui ne s'explique par aucune raison logique, sinon l'absence d'une décision concertée du milieu. Port-Cartier et Sept-îles disposent déjà de cet outil. Pourtant, les subventions accordées à l'agglomération de Baie-Comeau sont gelées aux ententes Canada-Québec depuis 1977, parce que le milieu ne réussit pas à faire le choix du site du parc industriel régional. L'agglomération de Baie-Comeau, par ailleurs, pourrait obtenir un financement beaucoup plus intensif advenant que la municipalité participante détienne un bloc de population, un bloc d'emplois et un nombre d'industries supérieures. La Société de développement industriel Manicouagan-Outardes est venue en commission parlementaire nous citer cet aspect de la paralysie régionale. C'est une situation à laquelle ne se sont jamais non plus habitués les organismes de planification et de développement régionaux. L'Association touristique régionale de Manicouagan a cité les nombreux problèmes d'une concurrence indue au coeur de la même communauté

économique. Même le Conseil régional de développement, le CRD, qui juge préférable l'annexion au statu quo, a dit devant les députés de l'Assemblée nationale que le regroupement municipal constitue l'objectif qu'il faut atteindre le plus rapidement possible. C'est une situation aussi qu'ont condamnée depuis 1960 tous les rapports d'études dont cinq sur six ont été commandés par le milieu de Baie-Comeau-Hauterive et qui ont conclu unanimement en fin d'analyse à une communauté, une ville. Et je tiens à rappeler que ce sont les citoyens contribuables du grand Baie-Comeau qui ont payé ces études qu'ils ont envoyées à Québec coup sur coup depuis 20 ans pour dire que la seule solution pour eux est de doter leur communauté d'une seule autorité locale et communautaire. Une seule de ces études, la sixième, celle de Major et Martin, a coûté plus de 200 000 $ à l'ensemble des citoyens du Québec. Elle concluait, elle aussi, au regroupement des services des deux agglomérations. C'est une situation, M. le Président, à laquelle les gouvernements eux-mêmes ne se sont pas non plus habitués, que ce soit celui de Québec ou celui d'Ottawa, lorsqu'on a discuté des écoles, des organismes socio-économiques, du parc industriel, lorsqu'on a discuté aussi du bureau de poste.

M. le Président, à quel genre de gouvernement avons-nous affaire dans le cas de Baie-Comeau? Nous avons affaire à un gouvernement qui est aujourd'hui conscient que les premières tentatives de réunion ont été entreprises par les deux villes de Baie-Comeau et Hauterive il y a plus de 20 ans déjà, à un gouvernement qui a le courage de se rendre à la volonté diffuse de la majorité régionale qui, de 1963 à 1976, envoyait à Québec les résultats d'études favorables au regroupement des forces que nous préconisons, à un gouvernement qui n'a jamais, depuis 1976, en six ans, jusqu'à ce jour, imposé de regroupement de municipalités au Québec. Nous avons affaire, M. le Président, au gouvernement qui a été le plus soucieux et le plus dynamique face à l'autonomie et à la vitalité municipale depuis les années 1920. Avant la Loi sur la fiscalité, des municipalités reposaient, pour plus de 30% de leur budget, sur les subventions de Québec. Elles s'autosuffisent aujourd'hui à plus de 90%. Avant la loi permettant les ententes intermunicipales, les collectivités ne pouvaient, avec souplesse, combiner leurs forces et leurs services pour atteindre d'appréciables économies d'échelle. Avant la Loi sur l'aménagement qui réunit à cette fin plusieurs municipalités et qui leur donne leur premier pouvoir d'intervention, il fallait procéder de la manière forte comme le faisaient les gouvernements antérieurs et la loi 98 du gouvernement Bourassa a réuni par la force 44 municipalités en dix jours, entre le 17 décembre et le 27 décembre 1974. Il s'agit ici d'un gouvernement qui croit à l'émergence des mentalités régionales et à la prolifération des ententes intermunicipales qui, selon nous, sont des solutions économiques et administratives qui ressemblent beaucoup plus aux façons de s'identifier des Québécois et des Québécoises. Mais, pour ce qui est de l'avenir du grand Baie-Comeau, ni les ententes intermunicipales, ni la municipalité régionale de comté ne pouvaient suffire à atteindre ces objectifs de correction de la situation que nous venons de décrire, ni en termes fiscaux, ni en termes de cohérence d'avenir économique.

Il y a eu, au Québec, depuis six ans, des fusions entre plusieurs villes. Notre attitude a été alors d'accorder aux élus responsables toute l'aide technique que le gouvernement pouvait offrir dans cette démarche, y compris une subvention statutaire.

Dans le cas de Baie-Comeau et de Hauterive, une subvention de 734 000 $ a été annoncée dès le dépôt du projet de loi, en décembre, et était destinée au fonds général de la nouvelle municipalité. Le gouvernement - et nous devons insister sur cet aspect de la solution que nous proposons - a aussi estimé que le rétablissement de la situation, aujourd'hui inéquitable, devait se faire sans que les citoyens de Baie-Comeau ne soient indûment pénalisés par la venue de l'agglomération de Baie-Comeau.

L'ensemble des contribuables du Québec vont donc verser une seconde subvention au secteur de l'ancien Baie-Comeau de 1 300 000 $ pour diminuer l'impact sur le compte de taxes de ses contribuables du nouvel équilibre. Ce gouvernement versera donc, M. le Président, la somme totale de 2 034 000 $ à la nouvelle ville moderne et désormais concurrentielle de Baie-Comeau.

Cet effort de tous les Québécois, de Hull à Gaspé, de 5chefferville à Sherbrooke, pour aider les citoyens de Baie-Comeau et de Hauterive à réorganiser leur vie en fonction de l'an 2000 ne mérite pas les attitudes excessives qui, au fond, défendent une espèce de paradis fiscal quel qu'en soit le prix social et économique. On avait mis fin, déjà, aux espoirs du milieu, en 1977, de voir se réaliser un regroupement volontaire entre les deux secteurs de l'agglomération de Baie-Comeau. Pour une évaluation de 25 000 $, la charge fiscale du contribuable du secteur de Baie-Comeau aurait augmenté alors de 21 $.

On avait dit non, comme aujourd'hui, au bien commun et à un avenir économique et social mieux équilibré, libéré de la paralysie de la fausse concurrence. On est même allé et je le regrette comme tous les Québécois, comme tous les députés de l'Assemblée nationale à affirmer qu'on

préconiserait le non-respect de la loi votée par cette Assemblée à l'instar des entreprises établies au coeur de l'agglomération de Baie-Comeau. Je souhaite que l'intérêt commun aura plus d'importance que toute autre considération, M. le Président.

Nous considérons que le tremplin de ce projet de loi accorde aux 26 000 citoyens de l'agglomération de Baie-Comeau un nouveau départ exaltant que peuvent envier la plupart des autres villes du Québec. L'agglomération de Baie-Comeau tirera sa richesse d'une évaluation très équilibrée, 51% industrielle et 49% résidentielle, équilibre que ne détient pas Sept-Îles. L'agglomération de Baie-Comeau aura une dette à long terme de 1496 $ par habitant qui se compare très avantageusement à la moyenne de la dette des villes de la Côte-Nord qui est de 1787 $.

Un autre indice avantageux de ce projet de loi pour la nouvelle communauté: l'agglomération de Baie-Comeau détiendra un indice de richesse de trente-deux points supérieur à la moyenne des municipalités du Québec, supérieur de quinze points à celui d'une ville comme Lévis et se rapprochant à près de dix points de Sept-îles, sa concurrente naturelle. La richesse collective de l'agglomération de Baie-Comeau, puisque c'est ainsi qu'on peut considérer la valeur de l'évaluation municipale, sera comparable à celle de Sept-îles lorsque l'investissement de 750 000 000 $ de la compagnie Reynolds sera devenu réalité.

Si l'on veut évaluer le niveau de services auquel auraient droit les citoyens de l'agglomération de Baie-Comeau à partir des budgets 1981 des deux secteurs actuels, nous obtenons de très heureuses comparaisons. L'agglomération de Baie-Comeau accorde par tête 89 $ pour les loisirs alors que Valleyfield n'en accorde que 38 $ à chacun de ses 32 000 contribuables, et que Rimouski n'en comptabilise que 50 $ pour ses 29 000 citoyens. Au budget de la police, l'écart est encore plus marqué. Nous avons aligné ces chiffres pour affirmer que l'agglomération de Baie-Comeau n'est pas une fantaisie, n'est pas un rêve. C'est le souhait de la majorité du territoire parce qu'il assure un meilleur équilibre présent, parce qu'il permet le déblocage de très nombreuses hésitations dans le milieu et parce qu'il renforce l'ensemble des contribuables réunis.

Baie-Comeau, c'est une ville qui est là pour rester, qui est assise sur des richesses renouvelables. Québec est conscient qu'il y a dans l'agglomération de Baie-Comeau une large partie du dynamisme de la Côte-Nord. Son but n'est que de consolider et de donner de l'élan à cette communauté et le gouvernement utilise d'ailleurs 2 000 000 $ des taxes des Québécois dans la situation présente, pour aider à la rapidité de cette relance. Le gouvernement ne peut être accusé d'acharnement et encore moins de dictature, il agit à la suite de six rapports d'étude envoyés à Québec depuis 1960, il obéit à la volonté majoritaire des témoins qui sont venus déposer auprès de la commission parlementaire en décembre 1981. Nous croyons que c'est au tour du gouvernement d'agir, après que des corps constitués et des citoyens aient dépensé autant d'argent et d'efforts. Nous proposons une formule de gestion municipale réaliste, équitable, intégrée et plus moderne que le statu quo.

Nous proposons la seule façon possible de redistribuer l'ensemble de la richesse communautaire là-bas. Nous proposons d'ouvrir les portes à l'avenir en accordant aux élus de l'agglomération de Baie-Comeau un plus large accès aux mesures d'assistance au développement et à la promotion industrielle et économique. Un gouvernement qui, pour la première fois de son existence, prend cette responsabilité de faire primer la solution du bien commun, doit bien définir ses positions et son objectif. Il veut créer des conditions favorables pour que se forment, à Baie-Comeau, un pôle économique et social dont l'équipement sera concurrentiel et puissant, une ville équilibrée sans les anachronismes des années cinquante, une communauté d'avenir avec un port, un aéroport, un parc industriel et une participation équitable et dynamique de tous les partenaires.

Nous croyons, comme des citoyens du milieu sont venus nous le dire, que nous devons aider à réunir ce qui n'aurait jamais dû être désuni et que ce regroupement sera plutôt une question d'avenir. Au-delà de la fierté, au-delà des héritages, au-delà de la courte vue, au-delà de l'intérêt immédiat, les élus démocrates et responsables de l'agglomération de Baie-Comeau vont se mettre à la tâche, j'en suis sûr, comme l'ont fait ceux de Jonquière, Kénogami et Arvida pour bâtir le Grand Jonquière, comme l'ont fait ceux de Port-Alfred, Grande-Baie et Bagotville pour créer Labaie. Québec croit au Grand Baie-Comeau, à ses 26 000 citoyens. Je dis, en terminant, M. le Président, que demain matin, c'est déjà l'avenir.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le chef de l'Opposition.

M. Claude Ryan

M. Ryan: M. le Président, je n'ai pas eu l'occasion de participer avant ce soir au débat sur le projet de loi no 37. Ce n'est pas parce que je ne suivais pas le déroulement des procédures, c'est parce que j'étais pris par mes devoirs à d'autres commissions ou à d'autres tâches. Je m'étonne de la placidité avec laquelle le

ministre a présenté son plaidoyer ultime à l'appui de son projet de loi. Il nous a parlé comme si tout s'était fait, s'était déroulé dans un climat de paix et d'harmonie. C'est absolument faux. Rarement un projet gouvernemental aura-t-il donné lieu à une telle agitation, à des réactions aussi vives. Je crois qu'il faut se demander sur quoi repose toute cette agitation, tout ce malaise qui entoure l'adoption très prochaine maintenant du projet de loi.

D'abord, il y a eu une précipitation, dans cette Chambre, qui nous étonne tous. Nous entendions les rapports des travaux qui ont été faits autour de différents projets de loi au cours de la journée. Autour des projets de loi nos 68 et 70, on a travaillé pendant à peu près 28 ou 29 heures en commission. Autour du projet de loi no 65, je crois qu'on a travaillé pendant 33 ou 35 heures, on a progressé graduellement, on est arrivé à des conclusions qui sont, dans l'ensemble, très positives. Moi-même, j'ai travaillé à la commission des finances et des comptes publics autour des projets de loi nos 68 et 70 et jamais, en cours de route, on ne nous a parlé d'imposer le bâillon. Jusqu'à la toute dernière minute, nous avons eu des raisons de travailler à ces deux projets de loi jusqu'à minuit vendredi dernier et jamais on n'a agité le spectre d'une intervention du type du bâillon qu'on a imposé autour du projet de loi no 37. Pourtant, autour du projet de loi no 37, la commission n'avait travaillé que pendant 15 à 18 heures au plus pendant la présente session, même avant cela, déjà on nous avait informés la veille ou l'avant-veille qu'on s'en venait avec le bâillon. C'était déjà décidé dans l'esprit du gouvernement et il n'y avait plus grand-chose à faire.

J'entendais le ministre évoquer l'opinion majoritaire des citoyens de la région, je ne sais pas sur quoi il se repose; apparemment sur des sondages. Le ministre sait comme moi que des sondages, ce n'est pas la mesure la plus sûre de l'opinion publique. Il y en a beaucoup qui le voudraient. Je pense que j'ai des titres à exprimer certains doutes là-dessus parce que je n'ai jamais été identifié comme un partisan aveugle des sondages. Souvent, j'ai réussi à prouver, d'ailleurs, qu'ils avaient tort. Je dis au ministre que, s'il veut être sérieux dans une manoeuvre aussi importante, on ne prend pas une décision à l'aide d'un sondage. On va consulter la population par les moyens valides qui lui sont disponibles.

De très nombreux citoyens et des organismes responsables ont proposé au gouvernement - et nous-même l'avons fait -aux stades antérieurs de l'étude du projet, un sondage par la voie d'un référendum pour s'assurer du sentiment réel des citoyens. Nous n'avons même pas insisté, dans les propositions qui ont été faites, sur la nécessité, par exemple, d'avoir un sondage requérant la majorité absolue des citoyens des deux villes concernées. Nous vous disions: Allez donc procéder par les voies régulières. On exige des référendums dans les Affaires municipales pour des questions infiniment moins importantes que celle-là. Comment se fait-il que le gouvernement ait résisté avec autant, je dirais, de férocité, de détermination ou d'obtination à une idée qui est pourtant simple? Le ministre n'en a pas parlé, et comme il n'en a pas parlé, je lui pose le problème tout simplement. Ce qui inquiète beaucoup, c'est le fond.

Je tiens à répéter une chose qu'il m'avait été donné de dire au tout début de l'étude du projet, quand on avait réuni la commission des affaires municipales en décembre dernier. Il y a des raisons objectives qui justifient le projet du gouvernement. C'est évident que le déséquilibre dans la fiscalité et dans le développement économique entre les deux villes justifie l'idée d'une mise en commun des ressources tôt ou tard. Là-dessus, nous avons dit à plusieurs reprises, de ce côté-ci de la Chambre, que nous étions prêts à coopérer avec le gouvernement à la réalisation de cette intention qui est noble en soi et qui, à long terme, est très probablement justifiée. Les citoyens de l'une des deux villes, en particulier... En disant ceci, je tiens à me dissocier de certaines choses qui ont pu être dites par le maire de Baie-Comeau. Je l'ai entendu l'autre soir à la télévision et je crois humblement que ce n'est pas une façon convenable de procéder. Je l'ai même entendu témoigner, à certains moments. Je pense que, s'il avait mis un peu moins de passion obstinée dans son affaire, il aurait mieux réussi à faire passer son argument, à certains points de vue. Par conséquent, je tiens à exprimer clairement certaines réserves que m'ont inspirées des choses que je l'ai entendu dire.

Nonobstant ces écarts regrettables, je pense qu'il y a des citoyens de Baie-Comeau qui sont de bonne foi, des citoyens au jugement calme et responsable qui s'inquiètent des implications financières de tout ceci. Ils se disent: Nous avons bâti une ville à force de travail, à coups de sacrifices également, à coups d'énergie; les autres en ont bâti une de leur côté avec leurs critères, avec leurs préférences, avec leur manière d'agir. Ils se disent: On ne voudrait pas que tout cela soit mis ensemble, qu'on recommence toute l'équation à partir de zéro demain matin sans qu'il n'ait été établi, de manière judicieuse, impartiale, objective et surtout équitable, le partage des actifs et des responsabilités en vue de l'avenir.

Un comité conjoint a été formé dont les auteurs ont eu la chance de comparaître devant la commission parlementaire. Malheureusement - et là-desssus, je suis sujet

à correction parce que je n'ai pas suivi toutes les étapes du travail - entre les recommandations formulées par le comité conjoint et les conclusions que le gouvernement a retenues, il y a un écart considérable qui demeure une source d'inquiétude très répandue là-bas. Il est probablement trop tard pour que le gouvernement change son intention et cette détermination qu'il a manifestée de passer le rouleau compresseur sur toute forme d'opposition. Je dis au gouvernement qu'il n'est peut-être pas trop tard, au stade de la mise en oeuvre de cette décision, pour examiner une dernière fois toutes les implications dans un esprit de justice et d'équité, surtout étant donné que vous allez obliger, par le projet de loi no 37, les citoyens des deux villes à partager des services et une administration municipale commune pour un avenir indéfini.

Quand on se rappelle le climat très rude et violent dans lequel on s'est acheminé vers cette décision au cours des derniers mois, surtout des dernières semaines, je pense qu'il s'impose que le gouvernement fasse montre d'un esprit de compréhension, de respect de la réalité qui semble, malheureusement, avoir fait défaut jusqu'à maintenant.

Je termine là dessus, en disant qu'à cause de ces facteurs, du fait que le gouvernement a refusé de laisser le processus de travail parlementaire se poursuivre normalement, il a recouru d'une manière prématurée et mal justifiée à la clôture; deuxièmement, à cause du fait que le gouvernement a refusé de procéder à une consultation populaire en bonne et due forme et, troisièmement, à cause de fait que les répercussions financières de tout ceci demeurent définies d'une manière insatisfaisante pour un grand nombre de citoyens qui seront concernés, il sera très difficile pour un député de l'Opposition de voter pour ce projet de loi et nous voterons même contre sans aucune hésitation. (21 h 50)

Le Vice-Président (M. Rancourt): Mme la députée de Chomedey.

Mme Lise Bacon

Mme Bacon: Merci, M. le Président. Dans une dernière tentative pour convaincre le ministre des Affaires municipales et même le député de Saguenay qu'il faudrait retirer ce projet de loi no 37, je m'adresse de nouveau à cette Assemblée pour essayer d'éviter le pis.

J'aimerais tout d'abord citer, certaines paroles qu'a déjà prononcées un membre de cette Chambre et qui se lisent comme suit: "II n'est pas question de "bulldozer" un projet de loi comme cela et de l'adopter avant qu'un certain consensus ne soit établi." Ce sont les paroles du premier ministre à l'Assemblée nationale, le 17 décembre 1981. Lors d'une conférence de presse improvisée le jeudi 17 juin 1982, le premier ministre déclarait, suite à l'adoption du projet de restructuration scolaire par le Conseil des ministres et je le cite: "II n'est pas question de "bulldozer" un projet de loi comme cela et de l'adopter avant qu'un certain consensus ne soit établi."

La population du Québec, les administrateurs municipaux et scolaires devront se rappeler que, lorsque que le premier ministre parle de ne pas "bulldozer" et de consensus, il ne fait qu'utiliser des termes de son répertoire auxquels il ne croit pas lui-même. Jamais dans les délibérations de l'Assemblée nationale un gouvernement n'aura imposé la guillotine à l'Opposition après moins de vingt heures de discussion en commission parlementaire et surtout pendant que c'était le gouvernement lui-même qui faisait obstruction à toute motion d'amendement soumise par l'Opposition. Une telle méthode, c'est plus que du "bulldozage". D'ailleurs, le leader du gouvernement a très bien défini l'objectif poursuivi par le gouvernement pour soutenir sa motion de censure quand il nous a dit: On va vous passer sur le corps, c'est pire que le bulldozer, c'est le rouleau compresseur qui veut écraser ceux qui ne sont pas d'accord ou ceux qui ont le devoir de défendre ceux qui ne sont pas d'accord avec le gouvernement. Ce gouvernement a oublié que plus de 46% des électeurs du Québec comptent sur l'Opposition pour défendre leurs points de vue parce que plus de 46% des électeurs ont voté contre ce gouvernement et le pourcentage est encore plus élevé lorsqu'il s'agit de l'obsession indépendantiste qui hante ce même gouvernement et qui lui a fait oublier ses véritables responsabilités envers l'ensemble des Québécois.

Revenons maintenant à la définition du mot "consensus". C'est peut-être bon, ce soir, qu'on le rappelle au ministre des Affaires municipales. Selon le petit Robert, il y aurait consensus lorsqu'il y aurait accord et consentement entre personnes. En décembre 1981, toute une population, celle de Baie-Comeau a dit non à une fusion sans consultation préalable. Plus de 5000 lettres ont été transmises à cet effet au premier ministre qui n'a même pas eu la décence d'y répondre. Toujours en décembre 1981, un sondage réalisé par le cégep de Hauterive démontrait que 60% de la population des deux villes étaient en désaccord avec le projet de fusion forcée. En février 1982, à l'occasion d'un autre sondage réalisé par la maison CROP, cette fois, 80% des citoyens des deux villes ont émis l'opinion que le gouvernement devrait toujours consulter les populations concernées avant de procéder à la fusion. En juin 1982, c'est plus de 98%

des 3500 citoyens qui assistaient à une réunion d'information à Baie-Comeau qui rejettent le projet de loi no 37 parce qu'il ne contient aucun mécanisme de consultation.

De quel consensus le premier ministre parlait-il donc le 17 décembre 1981 et le 17 juin 1982? Ce n'était certainement pas d'un consensus au sein de chacune des deux populations concernées. Le consensus auquel faisait allusion le premier ministre, c'est celui qui est intervenu entre le premier ministre qui s'était engagé envers Hauterive à faire la fusion, et cela sans aucune consultation avec la ville de Baie-Comeau; le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, qui avait promis que chaque ville assumerait sa dette, qu'il n'y aurait aucune augmentation de taxes à Baie-Comeau s'il y avait fusion et qu'il n'imposerait jamais la fusion; le ministre des Finances qui n'avait plus d'argent pour sortir Hauterive de sa situation financière précaire; les membres du cabinet qui, au moment où ils étaient dans l'Opposition, s'opposaient à toute fusion qui ne se ferait pas selon les dispositions de la Loi favorisant le regroupement des municipalités; les députés du Parti québécois qui constataient que le geste qu'on leur imposait était contraire aux principes démocratiques auquels ils croyaient peut-être encore et au programme de leur parti, qui est défendu par l'Opposition et renié par le gouvernement.

Pour l'Opposition, le consensus à respecter et à défendre était celui qui démontrait que la majorité des citoyens des deux villes s'opposaient à une fusion forcée et sans consultation préalable. Pour respecter ce consensus, l'Opposition a voulu proposer l'introduction dans le projet de loi no 37 d'un mécanisme de consultation des deux populations concernées. L'amendement proposé par l'Opposition a été jugé irrecevable. Le gouvernement, dès la première journée de discussion sur le premier article du projet de loi, a fait obstruction à toute tentative d'amendement qui pouvait être faite par l'Opposition, parce que ces amendements auraient pu alléger quelque peu le poids du rouleau compresseur. Le projet de loi dont ce gouvernement se prépare à imposer l'adoption, contrairement à ce que pourrait dire le gouvernement, n'aura jamais été discuté de façon normale à l'Assemblée nationale pour la bonne raison que le ministre des Affaires municipales l'a complètement chambardé. Il lui a davantage donné l'allure du règlement de compte ou du "crois ou meurs" par les amendements à la toute dernière minute qu'il a produits pour les articles 2 et 3 et qu'il n'a même pas eu le courage de déposer devant les membres de la commission parlementaire.

Si ce projet de loi est adopté, si les députés du Parti québécois l'approuvent, alors qu'ils savent tous qu'il va à l'encontre du programme de leur parti, des principes défendus par leurs collègues lorsqu'ils étaient dans l'Opposition et des actions antérieures de leur gouvernement en matière de regroupement, soit par exemple, le dégroupement de Buckingham et l'abrogation des dispositions d'une loi qui aurait forcé la fusion Jonquière-Chicoutimi; si ce projet de loi est adopté, en dépit de la volonté contraire exprimée par la majorité des citoyens des villes concernées, ce sera une honte pour le Parti québécois. Le Québec vit encore la démocratie parce qu'il fait toujours partie du Canada. Autrement ce serait la dictature qu'il aurait à subir, le rouleau compresseur, le bulldozer; le "crois ou meurs" et "on va vous passer sur le corps", dont la démonstration a été clairement faite dans le cadre du projet de loi no 37.

Cette loi, le gouvernement a l'indécence d'en imposer l'adoption. Cette loi le suivra partout, comme un boulet. Nous nous assurerons que les citoyens du Québec ne l'oublieront jamais. Le ministre nous disait: Demain matin, c'est déjà l'avenir. Je pense que ce soir, c'est presque une veillée d'armes de la part de l'Opposition pour tenter, encore une fois, de convaincre le ministre des Affaires municipales du bien-fondé des arguments de l'Opposition. (22 heures)

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Mégantic-Compton.

M. Fabien Bélanger

M. Bélanger: Merci, M. le Président. Encore une fois, nous sommes réunis pour parler du projet de loi 37. Cette attitude du gouvernement est vraiment inquiétante. Le projet de loi no 37 vise à fusionner, comme on le sait, les villes de Baie-Comeau et de Hauterive aux conditions imposées uniquement par le gouvernement et sans consultation préalable des citoyens.

Considérant les manoeuvres utilisées pour adopter ce projet de loi en dépit de toute logique, c'est un abus de pouvoir.

Ce qui est pire, M. le Président, c'est que les députés péquistes qui représentaient l'Opposition en 1974 ont combattu des projets de loi de fusion forcée, dont les conséquences étaient beaucoup moins graves, parce que le gouvernement n'avait pas respecté, selon eux, le processus prévu par la Loi favorisant regroupement des municipalités. Ces mêmes députés siègent maintenant au Conseil des ministres et ont donné leur appui à ce projet de loi inique. C'est un abus de confiance.

Lorsque le premier ministre, sans aucune consultation avec les autorités de la ville de Baie-Comeau et sans jamais les en informer par la suite, a pris l'engagement solennel de fusionner les villes de Baie-Comeau et de Hauterive, en invoquant le

fait que la ville industrielle se devait de payer pour la ville résidentielle, il s'est comporté en dictateur et, par surcroît, sans aucun respect pour les élus municipaux. Ce n'est pas surprenant que le premier ministre ait agi de la sorte. Vous avez vu de quelle façon il résout les problèmes à l'intérieur même de son parti. Si un conseil national ne fait pas son bonheur, si des résolutions ne sont pas selon sa vision, sa pensée, on impose immédiatement un référendum, trois questions, une réponse.

M. le Président, lorsque le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche s'est engagé à ne pas faire de fusion forcée, à faire assumer par chaque municipalité la dette dans le cadre de la fusion, à faire une fusion sans aucune augmentation de taxes pour les citoyens de Baie-Comeau, alors qu'il savait déjà qu'il manquait 2 000 000 $ au budget de Hauterive, qu'à ces 2 000 000 $ il faudrait probablement ajouter 1 000 000 $ annuellement pour l'accroissement du service de la dette de Hauterive et que la dette, dans cette fusion, serait assumée par tous les citoyens de la nouvelle ville, il trompait les gens mêmes qui l'avaient élu et qui étaient en droit de s'attendre qu'il les défende loyalement.

Quand le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, le député de Saguenay, a voulu faire croire aux citoyens de Baie-Comeau et de Hauterive que la taxe d'affaires moyenne, dans les villes industrielles du Québec, était de 15% de la valeur locative, lors d'une conférence de presse devant la Chambre de commerce de Hauterive, le 25 janvier 1982, il trompait la population des deux villes.

Une voix: C'est vrai!

M. Bélanger: Quand le premier ministre déclarait à l'Assemblée nationale, comme en a fait état ma collègue de Chomedey, le 17 décembre 1981, qu'il n'était pas question de "bulldozer" un projet de loi comme cela, qu'il fallait attendre un consensus, alors qu'on voit les moyens qu'il prend actuellement pour faire adopter son projet de loi, en sachant très bien qu'on fait maintenant face à une situation de confrontation grave entre les citoyens des deux villes, il se moquait non seulement de l'Assemblée nationale, mais des deux populations concernées.

Quand le gouvernement, le 25 janvier 1982, a annoncé une subvention additionnelle, comme en a fait état le ministre, de 1 300 000 $ - cette subvention, M. le Président, on la récupérait presque en totalité par la diminution des paiements d'"en lieu" de taxes sur les édifices des réseaux de l'éducation et des affaires sociales - il savait qu'il retirait d'une main ce qu'il donnait de l'autre.

Quand le gouvernement a rejeté du revers de la main le rapport du comité conjoint, qui confirmait les mémoires antérieurs de la ville de Hauterive en ce sens qu'il lui manquait plusieurs millions de dollars pour s'administrer de façon normale, mémoires qui avaient été portés à la connaissance du premier ministre et de plusieurs de ses ministres au Conseil des ministres, il se dégageait de tout cela, en remettant la responsabilité, encore une fois, sur les deux populations concernées.

L'appui inconditionnel, M. le Président, que les députés du Parti québécois s'apprêtent à donner au premier ministre, qui en est tout de même le véritable parrain, c'est lui le chef du parti, alors qu'ils savent tous, sans exception, que ce projet de loi va à l'encontre de leur programme électoral, va à l'encontre des principes défendus par ce parti, c'est là la parfaite démonstration que ces gens n'ont pas été élus pour gouverner. Ils ont été élus pour obéir. Obéir à qui? Obéir à René 1er.

Ce projet de loi, dans les circonstances qui l'ont vu naître, avec les méthodes utilisées pour le faire adopter, est une véritable honte pour le Parti québécois. Ce projet de loi mérite le mépris, tout comme ceux qui l'ont parrainé et qui l'ont proposé. Nous voulons avertir les maires des municipalités du Québec que c'est là la démonstration de la façon dont ce gouvernement entend les respecter.

Enfin, M. le Président, lorsque nous avons été informés que le maire de Hauterive et son greffier, en commission parlementaire - on a appris cela en décembre 1981 - avaient eux-mêmes participé à l'élaboration du projet de loi no 37, à l'insu évidemment des autorités municipales de la ville de Baie-Comeau, nous ne pouvons en tirer qu'une seule conclusion. Ce gouvernement entretient à l'égard des autorités de Baie-Comeau une attitude de mépris. Je l'ai déjà mentionné, il faut le rappeler à cette Assemblée. Le geste le plus disgracieux auquel nous avons dû assister est sans doute lorsque le leader du gouvernement a imposé sa motion de clôture, sa guillotine, avec un certain plaisir.

J'écoutais mon collègue de Bonaventure, le leader de l'Opposition, dire que, lorsqu'il a dû poser le même geste à quelques occasions durant sa longue carrière politique, cela a été un geste de sacrifice, cela a été un geste posé à la dernière minute, mais ce que nous avons vu en cette Chambre était totalement différent. C'était un geste de dictature, un geste totalitaire. Le gouvernement allait nous passer sur le corps. Il allait nous couper la tête, mais non pas seulement à nous de l'Opposition, il allait couper la tête à 46% de la population qui nous a envoyés dans cette Chambre et, s'il y avait des élections demain matin,

probablement à 60% ou 70% de la population du Québec. C'est à ces gens que le leader du gouvernement - que nous avons baptisé d'ailleurs, depuis ce temps-là, le petit bélier mécanique - voulait couper la tête et leur passer sur le corps.

Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Louis-Hébert.

M. Réjean Doyon

M. Doyon: Merci, M. le Président.

L'Opposition se voit dans l'obligation de faire valoir des voix qui doivent être écoutées par le gouvernement, que le gouvernement connaît, mais qu'il n'entend pas parce que le gouvernement a choisi d'être sourd. Il est sûr qu'il n'y a pas de pire sourd que celui qui a choisi de ne pas entendre et c'est ce que le gouvernement fait. Peut-être que, si l'on donne lecture au gouvernement d'un article qui a paru dans le Soleil d'aujourd'hui par l'éditorialiste et rédacteur en chef, M. Claude Masson, qui ne dit rien d'autre que ce qui suit: "Le gouvernement actuel a menti aux populations visées, tant par son programme que par les déclarations multiples et sans équivoque de ses ministres. Le PQ s'est engagé à n'effectuer aucune fusion forcée et à consulter les citoyens avant de réaliser un regroupement municipal. Ces promesses formelles n'ont pas été respectées, dit M. Masson. Au chapitre économique, les chiffres gouvernementaux sont erronés. Alors que la fusion devait coûter approximativement 2 000 000 $, c'est plus que le double qui a été prévu par un comité conjoint Baie-Comeau-Hauterive avec l'apport de la Commission municipale du Québec. Le député-ministre de Saguenay, M. Lucien Lessard, instigateur du projet de regroupement, s'est dédit continuellement dans les discussions utilisant constamment un langage provocateur et irritant, jouant au petit dictateur régional." L'article continue, et ce ne sont pas des termes que j'emploie moi-même, ce sont les termes de M. Masson dans le journal d'aujourd'hui. (22 h 10)

Le problème auquel est confronté le gouvernement actuellement, c'est la difficulté dans laquelle il se trouve de faire une adéquation acceptable. On ne demande pas une adéquation parfaite, on demande une adéquation acceptable entre ses gestes et ses paroles. Il n'y a aucune rencontre entre les deux et c'est ce qui cause l'espèce de cul-de-sac dans lequel s'est enfermé le gouvernement lui-même. M. le Président, il est certain qu'on ne peut indéfiniment tenir un langage qui est contredit dans les faits. À un moment donné, il faut en payer le prix et on n'y échappe pas. Et c'est ce prix que devra payer le gouvernement.

Les Indiens disaient des gens qui n'ajustaient pas leurs paroles avec leurs gestes qu'ils avaient une langue fourchue. M. le Président, c'est un terme qu'on pourrait encore employer en ce qui concerne le gouvernement actuel. Il a la langue fourchue parce qu'il dit blanc et qu'il fait noir. À partir de là, comment peut-on savoir quels sont les gestes qui vont être entraînés par les paroles du gouvernement? Cette incertitude dans laquelle on est constamment avec ce gouvernement qui nous parle de préjugés favorables envers celui-ci ou celui-là, alors qu'il fait le contraire, cette incertitude est plus grave que les pires manquements à la bonne administration, et Dieu sait que ce gouvernement ne s'en est pas privé. L'incertitude dans laquelle la population est de ne pas savoir à quoi s'attendre, c'est ce qui est le pire pour une population, c'est ce qui est le pire pour les travailleurs, c'est ce qui est le pire pour les investisseurs. Un climat d'incertitude, une atmosphère qui est loin d'être transparente, une atmosphère qui est nébuleuse dans laquelle on ne sait pas où on s'en va, c'est le pire handicap empêchant d'en arriver à des solutions qui soient acceptables pour la population.

Il est paradoxal, et j'ai eu l'occasion de le dire, de voir un parti qui a été et qui reste un parti dont l'article premier est l'indépendance du Québec, la séparation du Québec, prôner aujourd'hui les avantages de la fusion, les avantages de l'union, alors que ce parti est caractérisé par une marque de commerce qui est la sienne, celle de la séparation, de la désunion. C'est paradoxal parce que du côté ministériel on nous fait valoir les avantages des grands ensembles pour justifier ses prises de position en ce qui concerne Baie-Comeau et Hauterive. On nous dit qu'il va y avoir des économies d'échelle, on fait de beaux discours sur les avantages indéniables, prétend-on, qu'il y a à étendre le territoire, à avoir un seul gouvernement municipal, etc. Comment dans le même souffle peut-on prétendre être logique et conséquent avec soi-même quand on voit qu'ici même au Canada on a un pays qui s'étend sur un territoire immense, du Pacifique à l'Atlantique? Je pense qu'on a ce qu'on peut qualifier un grand ensemble. Avec une population de 25 000 000 ou 26 000 000, nous faisons sûrement des économies d'échelle et, si le raisonnement que nous tient le PQ est valable pour convaincre Hauterive et Baie-Comeau de s'unir, de fusionner, comment le gouvernement peut-il ne pas réaliser que ces mêmes arguments qu'il tente de vendre à la population actuellement sont des arguments qui à un plus fort degré se retournent contre lui quand il tente de détruire le pays qui est le Canada?

Comment peut-on concilier ces deux attitudes sinon en y mettant un dénominateur commun qui s'applique aux deux cas et qui s'appelle l'opportunisme électoral, l'opportunisme politique tout simplement? Là-dessus, il y a toujours un coût, coût que malheureusement la population devra payer en l'occurrence. Je me réjouis quand même jusqu'à un certain point parce que les bêtises que sont en train de faire les ministériels, espérons que la population va les voir sous leur vrai jour et qu'elles amèneront les commettants à poser un jugement qui se basera sur des faits qui, malheureusement, auront des effets néfastes pour les habitants de Hauterive et de Baie-Comeau, mais qui n'auront pas, au point de vue néfaste, la même amplitude que si elles étaient posées envers toute la population du Québec et toute la population du Canada.

Je pense, M. le Président, qu'il faut mettre cet exemple sous un verre grossissant, sous la loupe de l'observation populaire, de façon qu'on puisse voir très bien ce qui est à la base même du raisonnement biaisé, du faux raisonnement des ministériels. Je pense que cette loupe grossissante doit nous éclairer plus que n'importe quel discours sur la façon dont gouverne le gouvernement actuel. Le gouvernement actuel se comporte exactement comme un éléphant dans un magasin de porcelaine, M. le Président. Le monde municipal est un monde fragile; je le connais assez, M. le Président, je l'ai vu de l'intérieur, ayant été, pendant de nombreuses années, secrétaire de la Commission de refonte des lois et secrétaire de la Communauté urbaine de Québec. Je sais que c'est un monde fragile qu'on ne peut bousculer par des supposées décisions qui sont pour le meilleur intérêt de la population. Le monde municipal est un monde adulte, c'est un monde qui est capable de décider ce qui est bien pour lui. Il n'a pas besoin des directives de qui que ce soit, il n'a pas besoin de se faire dire par le gouvernement quelle pilule doit le guérir des supposées maladies qui ont été diagnostiquées par les médecins ministériels qui nous gouvernent actuellement et qui sont bien plus des apprentis sorciers qu'autre chose.

M. le Président, je pense que ce gouvernement va traîner une tache indélébile et que cette tache indélébile s'appelle le projet de loi no 37 et que, dorénavant, M. le Président, on ne pourra prononcer le chiffre 37 sans penser à Baie-Comeau et Hauterive et sans penser à la bêtise qu'a faite le gouvernement, sans penser à la clôture qu'il nous impose, sans penser à la guillotine, sans penser au bâillon. Le chiffre 37 va être identifié d'une façon permanente au gouvernement actuel. Cette tache-là va vous suivre où que vous alliez, parce que c'est une décision que vous avez prise en y pensant comme il faut, en vous entêtant avec opiniâtreté, avec obstination et vous n'avez aucune excuse de vous entêter. Vous n'avez pas l'excuse de poser un geste pressé par les circonstances. C'est un geste qui est tempéré, c'est un geste réfléchi, mais qui est d'autant plus grave que vous n'avez aucune excuse pour le poser.

M. le Président, je pense que les bouleversements de la vie municipale qui sont provoqués par le projet de loi no 37 sont graves et on n'a qu'à regarder les précautions qui ont été prises dans le passé pour éviter de forcer des populations à partager un même toit, à partager les mêmes institutions, à partager le même maire, les mêmes conseillers. M. le Président, je connais...

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Louis-Hébert.

M. Doyon: Oui. Merci, M. le Président, je termine là-dessus. Je connais la région de Baie-Comeau et de Hauterive et mes dernières paroles sont pour dire que cette région méritait décidément mieux que ce que le gouvernement est en train de lui servir, le projet de loi no 37.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Portneuf.

M. Michel Pagé

M. Pagé: Merci, M. le Président. M. le Président, nous intervenons, à ce moment-ci, dans la troisième lecture du projet de loi no 37. Nous en sommes évidemment à la fin de l'étude de ce projet de loi comme à la fin de cette session et je voudrais, dans un premier temps, M. le Président, remercier tous les collègues de l'Opposition qui ont participé aux différents débats auxquels on a été conviés dans le cadre de l'étude du projet de loi no 37, que ce soit le débat en deuxième lecture, que ce soit la motion de report que nous avons déposée et qui a malheureusement été refusée par la majorité ministérielle, que ce soit en commission parlementaire où un travail peut-être limité à quelques heures s'est fait. Mais ce travail était nécessaire et il aurait été tout à fait opportun, je crois, que la commission parlementaire chargée d'étudier le projet de loi article par article puisse siéger plus longtemps, de façon à prendre connaissance des amendements qui ont été déposés et qui étaient d'ailleurs préparés par l'Opposition.

Je me dois, M. le Président, à ce moment-ci, de remercier bien sincèrement, au nom de notre formation politique, notre collègue de Hull qui, pendant tous ces instants, pendant l'étude et toute l'évolution de ce projet, a suivi le dossier de très près, s'est rendu à Baie-Comeau et à Hauterive

et, comme porte-parole du ministère des Affaires municipales du côté de l'Opposition, a pris ce dossier à coeur. On doit lui témoigner notre appréciation à l'égard du travail qu'il a fait. (22 h 20)

À propos de ce projet de loi, peut-être plusieurs personnes se demandent-elles pourquoi nous avons mené une bataille aussi farouche? C'est que nous sommes en profond désaccord avec cette mesure telle que présentée. À plusieurs reprises en cette Chambre, le député de Saguenay et le ministre des Affaires municipales ont évoqué cette volonté qui s'est manifestée, à certains moments depuis quelques années, des populations de Baie-Comeau et de Hauterive de se fusionner pour devenir une nouvelle entité municipale.

M. le Président, vous aurez certainement compris par les commentaires qu'on a formulés, que nous n'étions pas contre la fusion comme telle. Nous sommes contre la façon dont cette fusion sera décrétée; nous sommes contre la façon dont les études préparatoires se sont faites et, finalement, nous sommes contre le fait que le gouvernement ait refusé péremptoirement de donner suite à plusieurs requêtes qui ont été présentées par les gens de Baie-Comeau et formulées ici par l'Opposition. Je me rappelle qu'un des moments importants des échanges et des débats autour de ce projet de loi aura été finalement la formation d'un comité mixte comprenant des représentants de la ville de Baie-Comeau, de la ville de Hauterive et des membres de la Commission municipale du Québec.

On sait, M. le Président, que depuis décembre dernier, ce projet de loi a été étudié ici et c'était l'élément qui devait être le plus déterminant dans la position gouvernementale. Je me rappelle avoir déjà entendu, en cette Chambre, que ce comité allait siéger afin d'étudier les impacts de tous les tenants et aboutissants à une fusion éventuelle. Ce comité a siégé, s'est réuni, il en est arrivé à des conclusions bien particulières. Il a pu quantifier et chiffrer l'effet pour les contribuables des deux municipalités d'une telle fusion. À plusieurs égards, les conclusions de ce comité qui ont été rendues publiques, allaient dans le sens des représentations et des inquiétudes exprimées par les citoyens de la ville de Hauterive. Curieusement, le gouvernement a fait fi des engagements qu'il avait pris, a mis de côté ses conclusions, lui qui, par la voix des membres du cabinet, avait déclaré que c'était tout à fait illusoire, tout à fait non fondé de penser ou de croire que le coût de la fusion serait très exorbitant. Malgré qu'on le lui ait démontré noir sur blanc, le gouvernement s'est quand même obstiné et il a continué l'étude du projet de loi.

M. le Président, quand on voit une opposition aussi farouchement exprimée, je ne voudrais pas, ici, être considéré comme étant celui qui veut jeter de l'huile sur le feu, au contraire, M. le Président. On sait que l'opposition a été farouche envers ce projet de loi, tant de la part des autorités municipales de la ville de Baie-Comeau que de la part des citoyens. Malgré cette opposition clairement exprimée, le gouvernement s'est toujours obstiné à continuer et nous avions, la semaine dernière, par la voix du leader du gouvernement, un énoncé assez clair, assez évident et assez net sur le sens donné à la démocratie par le gouvernement du Parti québécois. On se rappellera longtemps la déclaration du leader du gouvernement, savoir que ce projet de loi allait être adopté envers et contre tous et que s'il le fallait, le gouvernement passerait sur le corps de l'Opposition à l'Assemblée nationale.

On doit en conclure, M. le Président, aujourd'hui, que le gouvernement nous est effectivement passé sur le corps. On se rappelle que la commission parlementaire a délibéré pendant une douzaine d'heures seulement ou à peu près. On se rappelle que le projet de loi a été étudié en pleine nuit. On se rappelle que vendredi soir dernier, lors de la prise en considération du rapport, nous avons siégé jusqu'à minuit. On se rappelle que cette nuit, le projet de loi a été amené vers 1 h 30 et qu'on a siégé jusqu'à 4 heures du matin. Le gouvernement s'est caché pour passer son bill. Le gouvernement a pris tous les moyens dont celui de passer sur le corps de l'Opposition, qui représente 46% des électeurs du Québec et qui voulait exprimer, je pense que c'est tout à fait justifié, par la voix qu'elle a fait entendre, ici, à l'Assemblée nationale, les réserves qu'elle avait à l'endroit du projet de loi, de plusieurs questions de fond, de l'approche du ministre des Affaires municipales et du député de Saguenay.

M. le Président, je termine mon propos en exprimant, à titre de whip de mon parti, tout le regret que nous, les parlementaires, avons de voir que ce projet de loi sera adopté finalement envers et contre tous, après avoir été "bulldozé", après nous avoir passé sur le corps. Étant donné que la loi sera probablement sanctionnée ce soir et que l'on peut présumer qu'on sera battu parce qu'ils sont 79 députés et que nous sommes seulement 43, j'ose espérer que cette fusion se fera dans le plus grand calme, sous l'indice de la paix et que, malgré tout, les citoyens respecteront cette loi parce que c'est une loi qui est adoptée à l'Assemblée nationale du Québec, par la majorité des parlementaires ici.

Je crois que la seule leçon que les citoyens doivent tirer de cela, c'est que le gouvernement a accepté de présenter cette loi, malgré qu'elle contrevienne, malgré

qu'elle aille dans un sens tout à fait contraire au programme politique du Parti québécois. Le gouvernement a accepté de présenter cette loi, malgré que la très grande majorité des porte-parole du Parti québécois se soient déjà prononcés contre des lois analogues. Le gouvernement du Parti québécois et le premier ministre en tête ont accepté que cette loi soit présentée, malgré que plusieurs députés du caucus se considèrent comme tout à fait inconfortables avec ce projet de loi no 37. Le gouvernement a accepté de faire parrainer cette loi par le ministre des Affaires municipales, malgré que - et cela, on peut le constater de l'intérieur - le ministre des Affaires municipales soit mal à l'aise et inconfortable avec ce projet de loi.

Le gouvernement a accepté de présenter ce projet de loi, finalement, pour faire plaisir au ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche et député de Saguenay qui, aujourd'hui, à la fin de nos travaux, veut évidemment en arriver à poser un testament politique ou quelque chose de cette nature à l'égard des villes de Baie-Comeau et de Hauterive et régler de vieux comptes.

La loi sera adoptée. Cette loi devra être respectée. Je suis persuadé que les citoyens et de Baie-Comeau et de Hauterive tireront leur conclusion sur la façon cavalière dont le gouvernement les a traités. Lorsqu'on reçoit une leçon comme celle-là, on se la rappelle au moment d'un scrutin général. Il faut respecter la loi, mais qu'on se rappelle cela au moment des prochaines élections.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Hull.

Des voix: Bravo! Bravoi

M. Gilles Rocheleau

M. Rocheleau: Merci, M. le Président. Avant de faire une rétrospective de ce projet de loi matraque, je voudrais, pour le bénéfice du ministre des Affaires municipales, sûrement, et pour le bénéfice de la population du Québec, apporter une correction à un éditorial que nous lisait, lors de la prise en considération, le ministre des Affaires municipales, un éditorial de M. Gérard Lefrançois, père du journalisme sur la Côte-Nord. Le ministre des Affaires municipales, au cours de cette période de prise en considération, nous mentionnait tous les mérites qu'avait soulignés M. Gérard Lefrançois dans un éditorial de 1965...

Une voix: II était en retard.

M. Rocheleau: ... les études qui avaient été faites et le souhait qu'émettait M.

Gérard Lefrançois de voir ces deux municipalités de la Côte-Nord fusionner. Mais, en 1982, ce même Gérard Lefrançois que j'ai eu l'occasion de visiter chez lui, à Sainte-Foy, étant maintenant résident de Sainte-Foy... J'ai passé avec lui quelques heures à discuter des problèmes de fond de Baie-Comeau et de Hauterive. M. Gérard Lefrançois, dans le Plein Jour sur Manicouagan, en avril 1982 disait ceci et je vous le lis pour le bénéfice de tous les citoyens du Québec qui sont à l'écoute de ce débat depuis déjà plusieurs mois. J'espère que le ministre des Affaires municipales va aussi faire comme tous les citoyens et citoyennes du Québec; écouter.

Une voix: II rit, il rit. (22 h 30)

M. Rocheleau: "J'ai été et je suis toujours pour la fusion nous a-t-il confié à la condition que Baie-Comeau n'ai pas à payer pour les dettes de la ville de Hauterive. Il est peut-être trop tard, ajoute M. Lefrançois. Pourquoi? L'ex-échevin de la ville de Baie-Comeau soutient que Hauterive est fortement endettée et qu'on devra compter entre huit et dix ans pour rétablir sa situation. Il est peut-être trop tard pour la fusion en ce sens que la duplication des services qu'on aurait pu éviter existe présentement. À titre d'exemples, M. Lefrançois cite les polyvalentes, les arénas et même les hôtels de ville. Quant il a lancé l'expression "mieux vaut tard que jamais", M. Lefrançois maintient que c'était avec scepticisme, non pour signifier que la fusion devait nécessairement se faire. Selon le père du journalisme dans la région, si la fusion doit se réaliser, il faudra que la population soit consultée." Je pense que c'est important de souligner les propos de cet homme qui a connu la Côte-Nord, qui a écrit sur la Côte-Nord, qui a vécu sur la Côte-Nord et qui est très conscient des problèmes que vivent encore aujourd'hui ces deux municipalités.

M. le Président, la loi no 37, c'est beaucoup plus qu'une fusion entre deux municipalités, c'est-à-dire Baie-Comeau et Hauterive. C'est un changement d'orientation politique de ce parti, de ce gouvernement qui, en 1977, inscrivait dans son programme, dans ses engagements du Parti québécois que jamais au Québec on ne ferait la fusion de deux municipalités d'une façon forcée. C'est un engagement qui fait partie d'une orientation politique d'un parti; d'une orientation sur laquelle ce parti s'est fait élire, d'une part, en 1976 et sûrement réélire en 1981. Même en 1981, le 6 février, à peine quelques mois avant l'élection générale du 13 avril, le député et ministre du Loisir, de la Chasse, et de la Pêche faisait cette déclaration que jamais le gouvernement n'imposerait une fusion forcée entre Baie-Comeau et Hauterive.

Aujourd'hui, ce n'est pas une question de prendre pour les rouges ou de prendre pour les péquistes ou de nous lire des déclarations de militants libéraux qui sont pour une fusion ou de militants péquistes qui sont contre une fusion; c'est une question, tout simplement, de démocratie. Lorsqu'on examine ce projet de loi no 37, on dit que ce n'est pas simplement deux villes, Baie-Comeau et Hauterive, qui sont concernées mais tout le Québec, toutes les municipalités, les villes, les villages, les paroisses, et cela, même si le Parti libéral supporte entièrement le fait qu'il y a trop de municipalités au Québec, que nous devrions, à toutes fins utiles, tenter d'en fusionner plusieurs. Nous l'avons mentionné à plusieurs reprises. On n'a qu'à examiner la province voisine, l'Ontario, qui compte 2 000 000 de population de plus que le Québec et qui a la moitié moins de municipalités que le Québec. Il est bien évident que ce serait un avantage, mais il existe des moyens, parce qu'il existe une loi qui s'appelle la loi no 276 qui préconise des fusions volontaires, qui permet à cette démocratie de s'exercer, qui accorde cette liberté à l'individu de décider lui-même de ce que doit devenir sa collectivité, alors qu'aujourd'hui le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche se fait le bourreau de ces deux municipalités, impose sa volonté. À l'exemple du leader du gouvernement, l'autre soir, quand il disait à l'Opposition: Le gouvernement va vous passer sur le corps, j'ai eu un certain frisson, voyant le leader du gouvernement qui aurait à peine la force de tuer une mouche et qui se permettait subitement de passer sur le corps de l'Opposition et en même temps, et sûrement, sur le corps du député de Hull. Cela aurait été quelque chose à voir!

M. le Président, le ministre des Affaires municipales nous a dit l'autre soir, entre autres: Le gouvernement qui nous a précédés, c'est-à-dire avant 1976... Il a invoqué à toutes fins utiles la loi 98 pour dire que le Parti libéral ou le gouvernement libéral du temps avait imposé des fusions à au-delà de 40 municipalités dans l'Outaouais et dans le Saguenay-Lac-Saint-Jean.

Je me permets, pour le bénéfice de tous nos citoyens du Québec, de mentionner simplement que, lors de l'adoption de cette loi 98 qui touchait l'Outaouais, j'étais maire de la ville de Hull. Oui, j'étais maire de la ville de Hull et dans l'Outaouais on a regroupé 32 municipalités en huit, pour après en dégrouper une qui est celle de Buckingham, parce que le gouvernement libéral du temps n'avait pas supposément consulté suffisamment la population. On a consulté par référendum pour après soustraire certaines muncipalités de Buckingham dans cet esprit de la grande démocratie et de cette consultation que ce gouvernement voulait à tout prix dans le temps.

Aujourd'hui, on se rend compte d'une chose: À regarder du côté ministériel, on s'aperçoit que ce sont des gens fatigués, des gens que le pouvoir a usés en cinq ans à peine. Il est malheureux que cette même démocratie ne permette pas aujourd'hui à la population tout entière du Québec de se débarrasser de ce gouvernement, parce que, vous le savez, c'est ce gouvernement qui va décider quand aller au peuple. C'est le peuple qui, effectivement, a à choisir ses représentants, comme ce même peuple, en 1981, a eu à choisir son député du comté de Saguenay. Je vous avoue que, parmi la clientèle péquiste d'aujourd'hui à Baie-Comeau et à Hauterive, on retrouve des mécontents en grand nombre. Si vous saviez tout ce que j'ai entendu lors de mes voyages sur la Côte-Nord: Plus particulièrement, j'ai voulu me rendre sur la Côte-Nord, j'ai voulu aller visiter les citoyens de Baie-Comeau et de Hauterive. Je n'ai pas eu besoin de passeport pour aller et à Baie-Comeau et à Hauterive, car j'étais le bienvenu. Je n'avais pas de "body-guard". J'ai été reçu par le conseil municipal de Baie-Comeau. J'ai rencontré le comité de citoyens. J'ai rencontré aussi des citoyens bien ordinaires. J'ai rencontré des travailleurs. Je suis allé sur les lieux. Quand le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche se promène en région pour s'occuper de ses loisirs, cela lui prend peut-être beaucoup plus que quelques jours pour s'apercevoir des problèmes qu'on peut avoir en région. Mais cela ne prend pas de temps au député de Hull pour voir quel genre de problèmes peuvent exister dans une ville. (22 h 40)

Je me suis rendu sur les lieux. Je suis allé visiter, entre autres, les travailleurs de la compagnie Reynolds. Ces travailleurs n'étaient pas tous des gens de Baie-Comeau. II y en avait de Hauterive et il y en avait d'un peu partout. Je pense que ces gens sont impliqués dans le milieu. Tous ces gens se posaient la question, à ce moment-là, le 2 avril dernier: Pourquoi ne veut-on pas nous informer de ce qui va nous arriver s'il y a une fusion? Pourquoi veut-on forcer cette fusion sans nous consulter? C'étaient ces questions qu'on entendait. Qu'est-ce que le gouvernement nous cache? Y a-t-il quelque chose de si épouvantable qui va survenir après cette loi matraque, pour qu'on ne le sache pas? Après tout, M. le Président, qui, dans une municipalité, paie les taxes, si ce ne sont pas les citoyens? Qui, dans une municipalité, a à décider de son avenir, de la collectivité et de ses besoins? Ce sont les citoyens.

Ce même ministre des Affaires municipales est le grand défenseur de la Loi sur l'aménagement du territoire, la loi 125. On se rappelle le mécanisme que peut

engendrer un changement de zonage dans une municipalité, quand on parle d'un petit quadrilatère tout petit et que les citoyens veulent changer le zonage, soit pour passer d'un logement à un duplex, permettre un troisième logement ou de la haute densité. Les citoyens sont alors contraints à la formule du référendum, à la consultation populaire, pour décider s'il doit y avoir un changement dans ce coin; les citoyens sont appelés, dans une consultation populaire, à décider s'il doit y avoir un changement au point de vue de la densité dans un secteur donné d'une municipalité.

Ce soir, M. le Président, on nous arrive avec ce projet de loi no 37, pour lequel on va devoir voter dans quelques instants et on oblige deux collectivités, deux entités locales autonomes à se fusionner d'une façon forcée, alors qu'il est si facile de suivre des mécanismes afin que, d'une part, la démocratie soit respectée et que, d'autre part, la liberté d'expression de chacun puisse aussi être exercée.

Dans ma tournée sur la Côte-Nord, j'ai pu me rendre compte de plusieurs problèmes. Je vais vous en citer quelques-uns. Entre autres, en 1979, le premier ministre du Québec, dont on connaît bien les envolées oratoires et les promesses souvent faites sans tenir compte des implications, a dit aux gens de Hauterive que cela n'avait pas de bon sens d'avoir deux municipalités et qu'il fallait, à tout prix, avoir une agglomération de Baie-Comeau, une grande ville et que cela allait se faire. C'était un engagement, M. le Président, en 1979, du premier ministre du Québec. Pourtant, à compter de cette date, la ville de Hauterive a préparé un mémoire, mémoire d'intentions présenté au premier ministre du Québec, en 1980, qui souhaitait à tout prix un consensus s'il devait y avoir fusion, qui souhaitait à tout prix, que le gouvernement reconnaisse les problèmes qui avaient été causés à Hauterive par le gouvernement libéral du temps. Nous, cela ne nous fait rien d'accepter qu'on puisse avoir commis des erreurs dans le passé, mais une erreur qui a été commise dans le passé mérite un correctif, cela ne mérite pas d'être doublé par une autre erreur. Quand en 1971, on a par la loi no 50 éliminé les subventions tenant lieu de taxes sur les barrages hydroélectriques, on a, du même coup, soustrait en subventions à Hauterive environ 2 000 000 $ par année. C'est bien évident qu'à Hauterive, à ce moment, avec les barrages qu'Hydro-Québec avait construits, il fallait tout de même apporter les services, des infrastructures. Il y avait de plus en plus de citoyens qui s'installaient dans cette municipalité qui prenait un essor assez important et qui voyait sa population augmenter de semaine en semaine, sinon de mois en mois. Et subitement, en 1971, on retire cette subvention importante pour

Hauterive. Cela a été le début des problèmes pour cette ville. Cela a été suivi d'une mauvaise planification. Combien de fois et combien de fois allons-nous devoir répéter aux citoyens et citoyennes du Québec, dans chacune des municipalités qui élisent un maire et des conseillers de faire en sorte de choisir les personnes les plus aptes à les représenter, les personnes les plus responsables, les personnes qui doivent tenir compte des capacités de payer des citoyens, des personnes qui ne doivent pas de par les responsabilités qui leur sont confiées de faire des dépenses peut-être même inutiles. Mais on doit excuser cette même population parce qu'elle a commis la même erreur, le 13 avril 1981, en élisant, pour une deuxième fois, ce gouvernement, alors que ce même gouvernement se lançait dans une multitude de promesses de toutes sortes. On a même raconté, quelques jours avant le 13 avril 1981, que le premier ministre se promenait avec une sacoche à promesses. Il avait fait des promesses à la grandeur du Québec pour plus de 6 000 000 000 $, alors qu'aujourd'hui on se rend compte d'une façon dramatique dans quelle situation on est pognés.

Voici un exemple typique d'une administration mal planifiée, à Hauterive: avec la complicité de ce gouvernement on a déménagé un parc de maisons mobiles de cette municipalité pour l'amener à quelque 1000 pieds plus loin. Le parc de maisons mobiles - ici pour ceux qui écoutent la télévision, c'est facile de faire des chiffres -a coûté 6 000 000 $ en aménagement, 6 000 000 $ pour favoriser la venue de 300 roulottes. Cela fait 20 000 $ le terrain uniquement pour les services d'aqueduc et d'égout, de pavage, de trottoirs, et luminaires. 20 000 $ le terrain. Il n'y a pas une municipalité à travers tout le Québec qui peut se permettre de construire des services d'aqueduc et d'égout, de pavage, de trottoirs et de luminaires à 20 000 $ le terrain, pas une. En 1982, aujourd'hui, cela coûte entre 9000 $ et 11 000 $ pour ces services. Et le gouvernement a été complice par sa participation. Combien d'autres erreurs pourrait-on soulever! Quand on pense à fusionner avec sa voisine, on n'emménage pas dans un nouvel hôtel de ville; on demeure dans les locaux qu'on occupe et on tente de traiter avec sa voisine pour faire un mariage des plus heureux. (22 h 50)

Mais non! on se paie des équipements ici, des équipements là. La preuve, on l'a sortie il y a quelques jours: dans une dette globale de 21 000 000 $ à Hauterive, il y a plus de 8 000 000 $ d'engagés depuis 1979, alors qu'on s'était fait dire qu'il y avait une possibilité de voir ces municipalités fusionner. On s'est payé la traite avant d'aller faire payer ses dettes par la ville

voisine. Je pense que c'est important de le souligner. C'est d'autant plus important de le souligner que cela peut arriver n'importe où au Québec, dans n'importe quelle municipalité, qu'il y en ait une qui se paie la traite, etc., et qui va voir ce gouvernement de gaspilleux, et parce qu'il voit une municipalité qui est plus ou moins en santé à côté d'elle, on va les fusionner, on va pénaliser ceux qui ont bien administré pour ceux qui ont été trop gourmands.

Cela nous fait penser en passant à un des slogans du Parti québécois. En ont-ils pondu des bons au cours des dernières années? Des vraies poules à pondre des slogans un après l'autre. Celui-là s'applique sûrement aux gens de Baie-Comeau. S'ils sont à l'écoute ce soir, qu'ils le prennent et qu'ils l'analysent, parce que le gouvernement a déjà dit: II ne faut pas se faire avoir. Bien, les gens de Baie-Comeau sont en train de se faire avoir par leur député et par son complice, le ministre des Affaires municipales, qui joue au bon p'tit gars. Je l'ai déjà dit, un petit gant de velours sur une main de fer. Le ministre des Affaires municipales ne fait pas de bruit, il fait sa petite valse à tous les jours, passe ses projets de loi matraques. Il faudrait aussi prendre un autre slogan du Parti québécois: II faut se prendre en main. Avez-vous déjà vu quelque chose de plus beau? Il faut se prendre en main, se pogner; et de temps en temps il faut s'attacher, s'attacher au Québec.

Mais les gens de Baie-Comeau ne demandent pas mieux que de se prendre en main! Ils n'ont jamais demandé à leur ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche qui, en passant, prend peut-être la fusion de Baie-Comeau et de Hauterive pour un loisir. Mais non, s'il faut se prendre en main, qu'on laisse donc les gens de Baie-Comeau se prendre en main. En passant, je veux souhaiter la bienvenue à notre premier ministre. Il est aussi le troisième responsable de cette fusion forcée entre Baie-Comeau et Hauterive. Le premier ministre du Québec avec son équipe de batteurs de tambour.

Une voix: Sa chorale.

M. Rocheleau: M. le Président, on a un premier ministre qui fait des promesses et qui fout cela dans les bras de ses ministres. Actuellement, son ministre des Affaires municipales, si le petit oiseau pouvait nous dire ce qu'il entend parfois, il doit sûrement être en maudit contre son ami et ministre du Saguenay.

Mais apparemment que du côté ministériel, on appelle cela de la solidarité. Oui, en parlant de solidarité, il y en a un qui a décroché, le député de Sainte-Marie, l'autre jour. Je me servais de lui comme exemple depuis quelque temps parce qu'il avait dit que le ministre des Affaires municipales, au sujet du projet de loi no 46 sur la Communauté urbaine de Montréal, qu'il était entêté et j'avais donné raison à mon collègue, le député de Sainte-Marie, parce que j'étais tout à fait d'accord avec lui. Étant responsable des affaires municipales, M. le Président, et travaillant effectivement en collaboration quand on peut avec le ministre des Affaires municipales et son équipe, je me suis aperçu que le ministre des Affaires municipales était entêté. Et son entêtement servait l'orgueil du député et ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche du comté de Saguenay. Ministre, petit soldat orgueilleux qui a même déjà dit au maire Henry Leonard qu'il allait le mettre à ses pieds; possiblement que c'est une façon de procéder du député pour trainer à ses pieds ceux qui n'ont pas voulu l'écouter ou ceux qui n'ont pas voulu, dans le passé, partager ses opinions. Projet de loi matraque obligeant maintenant ces deux municipalités à vivre ensemble, projet de loi matraque pénalisant deux populations.

Alors, M. le Président, jamais je n'aurais pensé, alors que j'étais maire de Hull et que mes citoyens me demandaient de me présenter à cette Assemblée nationale afin de débarrasser un des plus beaux comtés du Québec d'un député péquiste, jamais je n'aurais pensé, dis-je, venir en cette Chambre et rencontrer un gouvernement qui avait une orientation "pognée" dans le ciment à l'intérieur de ses politiques. Et, pourtant on n'a pas assisté à un "renérendum" pour changer cela, non, parce que dans le référendum que le premier ministre a tenu, il y a à peine quelques mois, dans la commande de "grocerie" il aurait pu ajouter, je veux dire la fusion forcée des municipalités et passer cela en même temps parce qu'il attendait après un oui. Il n'avait pas eu son oui au référendum du 20 mai 1980 et puis il en voulait un à tout prix. Il a pris son gang et s'est fait voter un oui sur son bord et depuis ce temps-là qu'il est heureux.

Mais, M. le Président, quand on pense au ministre de la Justice qui nous parlait encore ce soir de la Charte des droits et libertés de la personne, quand on pense à cela on se pose de sérieuses questions, quand on pense qu'en cette Chambre ce matin, le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, le petit bourreau du Saguenay, nous disait qu'il allait faire une consultation au cours de l'été en ce qui a trait aux loisirs, consulter les gens. M. le Président, il aurait peut-être dû pratiquer sur les gens de Baie-Comeau et de Hauterive et les consulter, il me semble que cela aurait été une bonne pratique et après cela il aurait pu se promener à la grandeur du Québec et aller consulter les autres. Je ne sais pas de quelle façon il sera reçu partout et si les gens

voudront y aller, quand on va voir arriver un petit matraqueur, M. le Président, consulte aujourd'hui, impose demain. Est-ce une façon de procéder d'un gouvernement? Je vous l'ai dit tout à l'heure, M. le Président, c'est un gouvernement fatigué. On s'en rend compte, tous les citoyens du Québec s'en rendent compte aussi et on s'en rend drôlement compte quand on voit les projets de loi matraques qu'on impose ici en cette Chambre et encore si on donnait la chance à l'Opposition de faire son travail jusqu'au bout mais non, M. le Président, quand cela ne fait pas l'affaire, on passe le bâillon. Oui, M. le Président. (23 heures)

J'aimerais vous entretenir quelques instants sur le processus qu'a suivi ce gouvernement, M. le Président, pour en arriver, ce soir, à passer son projet de loi no 37. Le 30 novembre dernier, c'est-à-dire 1981, dépôt en cette Chambre du projet de loi no 37. Le 15 décembre dans une certaine forme de consultation, on permet aux intervenants, c'est-à-dire les villes de Baie-Comeau et de Hauterive, le Conseil régional de développement, la chambre de commerce et autres, de se faire entendre. Par la suite, on procède à la deuxième lecture en cette Chambre.

L'Opposition avait demandé trois choses élémentaires dans un regroupement. Premièrement, une étude. Le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche nous sortait des rapports Demain, des rapports ici et des rapports de là qui dataient de 1965, 1967, 1970. Allons donc! Quand on parle d'une fusion en 1982, on tient compte d'un rapport récent de 1982. Tout ce que l'Opposition a demandé, c'était d'avoir une étude récente. Sachant qu'il y avait une certaine rivalité entre les deux municipalités, on s'est dit: Impliquons la commission municipale, formée de gens quand même neutres dans le portrait, de gens spécialisés, afin qu'elle participe à cette étude.

Le député de Saguenay ne voulait pas d'étude, cela retarderait encore son projet de fusion forcée. Il y a eu une étude et le ministre des Affaires municipales a compris qu'il fallait impliquer la Commission municipale du Québec et l'Opposition était relativement heureuse parce qu'on s'est dit: Au moins, on va connaître le coût réel de cette fusion pour les deux municipalités. Le 18 mai, le rapport du comité conjoint est déposé aux conseils municipaux de Baie-Comeau et de Hauterive. Là, c'est comme la tombe, personne n'en parle.

Le ministre des Affaires municipales, à cette date, n'a même pas exprimé son opinion sur l'ensemble du rapport. II n'a même pas tenu compte des demandes et des coûts dans le rapport du comité conjoint. On a retenu un élément. Est-ce un manque de confiance envers la commission municipale, est-ce un manque de confiance envers deux municipalités qui ne semblaient pas pouvoir se parler et qui se sont parlé? On peut se poser de sérieuses questions sur l'intransigeance de ce gouvernement aujourd'hui. On peut se demander si ce gouvernement ne cache pas quelque chose d'autre. Dans le contexte actuel, après avoir pris connaissance de ce rapport, ce n'était pas une question de crier victoire, c'était simplement un fait que les chiffres qu'avait produits Baie-Comeau le 15 décembre 1981 semblaient très conservateurs, si on tient compte du rapport du comité conjoint. À toutes fins utiles, ce n'était pas un péché, ce n'était pas mal de dire: Baie-Comeau avait raison.

Si le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche n'avait pas passé son temps à faire des déclarations au micro partout et dire aux gens: Cela ne coûtera pas plus cher à Baie-Comeau et ça va coûter moins cher à Hauterive; si c'était pour coûter plus cher à Baie-Comeau, je serais un de ceux qui seraient "antifusionnistes". Le député de Saguenay passait son temps à lancer des choses comme ça partout. On n'avait même pas commencé l'étude en commission parlementaire, M. le Président - vous le savez, vous étiez ici avec nous - que déjà le député de Saguenay annonçait à Baie-Comeau qu'il mettrait le bâillon. Il nous passait la corde au cou avant même d'avoir commencé à étudier le projet de loi en commission parlementaire. Cela va bien pour travailler quand vous avez la masse sur la tête.

Après cela, on se pose des questions quand des gens de Baie-Comeau viennent à Québec en autobus pour manifester et qu'il y en a qui ont des sautes d'humeur. Quand il y a provocation, ces gens-là, j'essaie au moins de les comprendre. Je ne partage pas trop leur opinion et je ne suis pas d'accord que l'Assemblée nationale soit perturbée par une certaine forme de violence, mais il faudrait que le boss, le premier ministre du Québec avertisse ses ministres de faire attention à ce qu'ils disent dans leur comté parce que c'est de cette façon que ça part, la violence, M. le Président. Cela peut devenir grave, cette affaire-là. Je pense qu'il faudrait quand même en tenir compte.

M. le Président, dans le fond, c'était tellement simple un projet de fusion volontaire. C'était tellement simple, qu'on a tenté, en commission parlementaire, d'adopter un amendement qu'on a présenté à l'article 1. On s'est fait dire qu'on avait refoulé cela pour ne pas que cela passe. On avait retardé. On appelait cela un filibuster. Voyons donc, M. le Président! On a un projet de loi, fusion volontaire, M. le ministre des Affaires municipales. Est-ce que c'est possible? On a dit: Le calme à Baie-Comeau et à Hauterive. Non, cela n'a pas été retenu, M. le Président.

On a même invoqué l'article 68 du règlement. On va peut-être déterrer cela un jour et on va vous en parler. Je vais vous lire l'amendement qu'on avait présenté. Ce n'était pas si bête après tout. M. le premier ministre, écoutez celai Cela a du bon sens notre affaire. On disait: À la suite d'une consultation des propriétaires et des locataires, tenue conformément à l'article 13 de la Loi favorisant le regroupement des municipalités, est constituée la ville de Baie-Comeau dont la charte se lit comme suit. C'était l'amendement à l'article 1. On n'était pas contre une fusion. On en donnait une fusion, une fusion volontaire, M. le Président. Ce n'était pas compliqué. On venait de recevoir une pétition de 6059 personnes de Baie-Comeau qui demandaient, d'une part, d'être informées sur le rapport du comité conjoint. La pétition demandait au ministre des Affaires municipales et à son complice, le député de Saguenay, d'aller rencontrer les gens de Baie-Comeau et de leur expliquer le rapport du comité conjoint, les chiffres, et leur parler de consultation. Il leur avait même garanti qu'il n'y aurait aucun problème. Est-ce assez fort? Mais non, on a vu à la télévision, le soir de cette assemblée qui regroupait plusieurs milliers de personnes, plus de 3500 personnes, deux chaises en avant avec les noms du ministre des Affaires municipales, M. Léonard, et du ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche et député de Saguenay, M. Lessard. Deux chaises vides. Est-ce possible? Ils veulent regrouper deux villes, M. le Président. Tous les deux se promènent à Hauterive et, quand vient le temps d'aller voir l'autre gang à Baie-Comeau, ils n'y vont pas. Après, ils parlent de climat social, de paix, etc.

M. le Président, on avait un projet de loi qu'on a offert au gouvernement. Pour prouver - écoutez bien cela, les citoyens du Québec, je vais vous parler de cela - qu'on avait raison avec ce projet de loi... Tantôt, en cette Assemblée, on a adopté à peu près 25 projets de loi privés pour lesquels l'Opposition a donné toute sa collaboration au gouvernement. Ce soir, on a même adopté la deuxième et la troisième lecture, d'un seul coup. Regardons les ministériels: ils ont l'air tellement fatigués qu'il semble qu'ils voudraient partir ce soir. On s'est dit: Voyons! On ne va pas s'accrocher au projet de loi no 37; on pourrait les faire mourir cette nuit; cela ne donnerait rien de plus parce que, demain matin, il va être adopté.

Mais, M. le Président, on avait offert toute notre collaboration au ministre des Affaires municipales. Tous ces projets de loi ont été adoptés ce soir, dont le projet de loi no 200, Loi modifiant la charte de la ville de Montréal, qui contenait 87 articles, pour lequel on a entendu des intervenants, et combien d'autres projets de loi importants pour les municipalités. L'Opposition a offert toute sa collaboration au ministre des Affaires municipales et, ce soir, nous avons même accepté des amendements une autre fois, en troisième lecture. On n'a pas bloqué, on n'a pas demandé de se retirer en commission spéciale pour étudier ça article par article et de revenir ensuite. Toute notre collaboration a toujours été offerte et, parfois, je me pose la question à savoir si on doit, justement, être de si bons garçons que ça. (23 h 10)

Tout ce qu'on demandait, c'est que ce gouvernement accepte de regarder le projet de loi qu'on offrait aux gens de Baie-Comeau et de Hauterive. Le président de cette commission, le député de Bourassa, ne jugeait pas opportun d'accepter les amendements de l'Opposition parce que cela semblait perturber les travaux de la commission. Les amendements du ministre des Affaires municipales, eux, étaient corrects. On a même déposé des amendements pareils à ceux du ministre des Affaires municipales, pareils, pareils, pareils, la virgule avec. Notre amendement n'était pas bon et l'amendement du ministre était bon. Le député a été obligé d'aller consulter plus haut et il est revenu pour nous dire qu'on avait raison.

Quand on a vu ça, M. le Président, on s'est dit: De quelle façon l'Opposition peut-elle faire son travail en cette Chambre quand, en commission parlementaire, on avait trois articles qui se répartissaient dans 27 sous-articles en tout? On avait, quand même, passé quatre articles et les autres s'en venaient. Il aurait fallu ne pas utiliser le projet de loi no 37 simplement pour boucher les trous au cours de toute cette session. Alors que le gouvernement n'avait pas de lois à nous offrir, il nous planquait le projet de loi no 37 un soir en deuxième lecture et tantôt c'était en motion de report, etc. On se promenait ici et envoie donc! Le projet de loi no 37 servait de bouche-trou. Oui, gens de Baie-Comeau et de Hauterive, vous avez servi de bouche-trou au gouvernement pendant au moins quelques mois. Cela fait six mois qu'on est là-dessus, six mois pour passer un petit projet de loi comme ça - six mois, est-ce que cela se peut? - alors qu'on aurait pu consulter la population, qu'on aurait pu accepter une motion de report. Au mois de février, on demandait six mois.

Si le gouvernement avait accepté de reconnaître l'erreur qu'il commettait, on ne l'aurait dit à personne. On se serait tu pour ne pas éveiller de soupçons dans la population. On se serait tu. On leur avait même dit: Si vous acceptez de corriger votre erreur, on ne le dira pas et on va même collaborer avec vous autres. Non! L'orgueil a pris le dessus. C'est dommage. L'orgueil et un petit peu de vengeance, ça fait une drôle

de soupe, ça!

Je ne peux pas m'empêcher... Cela, je l'ai vérifié deux fois. Je vais revenir avec des questions, mais ce ne sera pas avant l'automne peut-être. En passant, il y a une chose qui m'inquiète énormément. Je ne sais pas si je devrais le dire, mais je pense que je suis quand même obligé de vous en parler, parce que ça concerne une question que j'avais posée au ministre de l'Énergie et des Ressources il y a quelque temps, à savoir s'il avait répondu au télégramme de la firme Reynolds. On se souvient de ça, j'avais posé une question en Chambre. Il avait reçu un télégramme en décembre 1981 et un autre au mois de mars. Le ministre de l'Énergie et des Ressources, M. Duhaime, m'avait dit qu'il allait les rencontrer.

Il y a deux semaines, je suis allé à la commission de l'industrie, du commerce et du tourisme et j'ai demandé au ministre s'il avait rencontré le président-directeur général de Reynolds qui voulait savoir ce que la fusion allait coûter, et c'est tout à fait normal. Le ministre de l'Industrie m'a dit: Oui, je l'ai rencontré avec mes fonctionnaires, la semaine passée. J'ai dit: Eh bien! c'est pas pire! Le lendemain matin, il me prend une idée. Je me suis dis: Ces gars-là, je ne les "trust" pas. Je me suis dit: Je vais appeler le président-directeur général de la Reynolds. Je lui ai demandé: Le ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme - il est caché derrière la colonne, mais je le vois quand même - vous a-t-il téléphoné, vous a-t-il rencontré? Il m'a dit: Non, il ne m'a pas rencontré. Je lui ai demandé: Le ministre de l'Énergie et des Ressources est-il allé souper avec vous? Il m'a dit: Non, il n'est pas venu souper avec moi.

M. le Président, c'est un investissement de 500 000 000 $ à Baie-Comeau. Je dirais au ministre des Affaires municipales qu'il ne faut pas vendre la peau de l'ours avant de l'avoir tué. Si on ne compte que sur l'addition au projet de 500 000 000 $, vous devriez, M. le ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme, soigner nos industries au Québec pour les empêcher de partir et essayer de garder celles qu'on a, au moins.

M. Biron: Question de privilège, s'il vous plaît!

Le Vice-Président (M. Rancourt): Question de privilège, M. le ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme.

M. Biron: J'entends le député de... Des voix: Hull!

M. Biron: J'avais oublié le nom de son comté.

Une voix: C'est écoeurant!

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Jeanne-Mance, si vous voulez prendre la parole, vous devez au moins être à votre siège. M. le ministre.

M. Biron: J'entends le député de Hull dire des fausssetés et je voudrais qu'il vérifie sérieusement avant d'affirmer des choses en cette Chambre. J'ai parlé personnellement à M. David P. Reynolds Junior aux États-Unis et c'est lui qui m'a confirmé que les 500 000 000 $ d'investissement, au minimum, se faisaient, que tout était attaché, que les décisions étaient prises et que ça se ferait à Baie-Comeau.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît! M. le député de Hull, vous avez la parole.

M. Rocheleau: M. le Président, de mon siège, je peux affirmer que le ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme m'a dit qu'il les avait rencontrés avec ses fonctionnaires à Baie-Comeau. Là, il vient de me dire qu'il a appelé Junior Reynolds aux États-Unis; ce n'est pas pareil, ça. Je vais vérifier avec Junior Reynolds demain et je vous en reparlerai après-demain.

Des voix: Ah! Ah!

Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît!

M. Rocheleau: En terminant, je trouve...

Une voix: Cela vous fait mal.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Hull, un instant, s'il vous plaît! Même si nous en sommes peut-être à la dernière journée, je demanderais la collaboration de cette Assemblée pour pouvoir, dans les formes et dans les règles, entendre les intervenants. M. le député de Hull.

M. Pagé: M. le Président, brièvement, j'ai une demande de directive.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Oui.

M. Pagé: Est-ce un concours de circonstances qui fait que, lorsque vous rappelez à l'ordre un député de l'Opposition, il est nommé par son comté alors que, de l'autre côté, il n'est jamais nommé par son comté?

Des voix: Oh!

Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît, M. le député de Portneuf...

Des voix: Ah! Ah! Ah!

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Hull.

M. Rocheleau: Merci beaucoup, M. le Président. Je constate que, du côté ministériel, ça commence à les fatiguer, quand on leur lance des vérités et qu'on va même vérifier. Je me souviens que mon collègue de Richmond a remis à sa place le ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme, l'autre jour.

Des voix: Oh! Oh! Oh!

(23 h 20)

M. Rocheleau: Ce n'est pas croyable de voir les amendements, à la pochetée, qu'a déposés le ministre des Affaires municipales, en rapport avec le projet de loi no 37, au cours des derniers jours. Ce n'est pas croyable, M. le Président! Sérieusement, je ne pensais pas du ministre des Affaires municipales qu'il pouvait nous déposer un brouillon. Alors qu'il disait que c'était l'Opposition qui avait retardé, le ministre des Affaires municipales était tellement en retard avec son travail qu'il nous a déposé un brouillon. Je ne peux pas comprendre non plus de quelle façon Baie-Comeau et même Hauterive vont pouvoir accepter un projet de loi qui contient autant de failles. J'ose espérer encore que dans les quelques minutes qu'il nous reste il va y avoir une lumière quelque part qui va s'allumer dans le cerveau de ces gens...

Une voix: Ce ne sont pas des 5000 watts.

M. Rocheleau: Si ça prenait la main de Dieu, M. le Président, je n'ai rien contre cela. Remarquez que s'il y avait une petite lueur d'espoir pour que ce gouvernement n'adopte pas ce projet de loi, qui va perturber davantage le climat social entre Baie-Comeau et Hauterive plutôt que de le corriger, et prenne les moyens ordinaires, les moyens que les gens comprennent, c'est-à-dire la consultation... On l'a dit souvent à Baie-Comeau: Pas de fusion sans référendum. Ce n'est pas compliqué, M. le Président. Cela ne veut pas dire qu'il n'y aurait pas de fusion s'il y avait un référendum. Au contraire. Si on donne aux gens l'occasion de s'exprimer, de disposer d'eux-mêmes, d'exprimer librement ce qu'ils veulent, il n'y a rien de bête là-dedans... Si c'est là qu'on s'en va, c'est dangereux. On tente de dégrouper le Canada et on veut en grouper d'autres au Québec. C'est une façon de se venger contre les autres, M. le Président. C'est à n'y rien comprendre.

En terminant, je vous remercie et je remercie mes collègues de ce côté-ci qui m'ont prêté un concours extraordinaire au cours de ces six derniers mois. Tous ont participé à ce débat. Nous aurions souhaité que ce gouvernement comprenne.

Malheureusement, on doit s'en remettre aux citoyens de Baie-Comeau et de Hauterive. Merci.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader du gouvernement.

M. Bertrand: M. le Président, le député de Saguenay utilisera la demi-heure qui est normalement dévolue au leader parlementaire du gouvernement.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, député de Saguenay.

M. Lessard: M. le Président, je voudrais d'abord, en commençant cette intervention, remercier mes collègues qui depuis le début de l'étude de ce projet de loi n'ont cessé de m'appuyer. Je sais très bien que ce projet de loi n'était pas facile. Je sais très bien que ce projet de loi allait à l'encontre même du programme du Parti québécois. Je sais très bien...

Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît! Question de règlement, M. le leader de l'Opposition.

M. Levesque (Bonaventure): Simplement, M. le Président, je voudrais bien comprendre la procédure à ce moment-ci. Le ministre qui a proposé la troisième lecture du projet de loi a un droit de réplique. Si je comprends bien, le ministre a décidé de ne pas l'utiliser. Cependant, j'ai des doutes quant à la possibilité que le député de Saguenay puisse sans un consentement que je serais sans doute prêt à lui donner... Ah non! c'est parce que je ne voudrais pas créer de précédent à la toute dernière minute de cette session. Je voudrais, M. le Président, savoir si vous êtes d'accord que l'on puisse ainsi créer un précédent à quelque chose que je n'ai pas encore vu, que le leader parlementaire du gouvernement puisse lui-même utiliser son droit de parole, mais les changements de cette sorte me semblent une nouveauté.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader du gouvernement.

M. Bertrand: M. le Président, il n'y a pas lieu d'intervenir très longuement, d'autant plus que le leader de l'Opposition dit que, dans les circonstances, il lui

apparaît un peu normal que le député de Saguenay puisse...

Une voix: Consentement.

M. Bertrand: D'accord? Avec consentement? Je ferai simplement valoir que l'article 94, paragraphe 1, prévoit que le leader parlementaire du gouvernement peut utiliser la moitié de la période normalement prévue, soit une demi-heure par rapport à une heure et que, dans les circonstances, il peut très bien céder son droit de parole à un autre parlementaire. Je lis l'article, M. le Président: "Sauf dispositions contraires du règlement, un député peut parler sur une motion de fond pendant vingt minutes; mais peuvent parler pendant une heure le premier ministre, le leader parlementaire du gouvernement, le chef d'un parti reconnu ou leur représentant et lors des deuxième et troisième lectures, le proposeur du projet de loi." Deuxième paragraphe: "Sur toute autre motion, la durée des discours prévue au paragraphe 1 est réduite de moitié. Pour les fins du présent article, les motions de deuxième et troisième lectures sont assimilées à des motions de fond."

M. le Président, à ce moment-ci, plutôt que de faire ce qu'on pourrait appeler une querelle de procédure, je pense que nous pourrions peut-être, d'un commun accord, sans même vouloir donner une interprétation au règlement, sans même vouloir présumer de ce qu'est le règlement 94.1 et 94.2, permettre au député de Saguenay d'exercer un droit de parole qui pourrait être d'environ 20 minutes.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader de l'Opposition.

M. Levesque (Bonaventure): Dans les circonstances, nous sommes prêts à donner notre consentement.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Donc, consentement. M. le ministre.

M. Lucien Lessard

M. Lessard: M. le Président, je sais très bien que ce projet de loi n'était pas facile, que ce projet de loi allait à l'encontre d'un certain nombre de principes que nous avions défendus, que ce projet de loi allait même à l'encontre du programme du parti; il n'était pas facile pour les membres du parti, pour les membres du gouvernement, d'accepter ce projet de loi. Mais lorsque j'ai eu l'occasion de leur expliquer, de leur présenter le problème comme j'essaierai de l'expliquer, de le présenter ce soir, mes collègues ont compris, justement, que l'exception confirmait la règle. Ils ont compris qu'il s'agissait d'une loi exceptionnelle. Ils ont compris qu'il s'agissait d'une loi spéciale et qu'il était nécessaire d'adopter ce projet de loi au nom des intérêts de l'ensemble de la région, au nom des intérêts de la Côte-Nord et surtout, au nom des intérêts des gens de Baie-Comeau et de Hauterive.

Je tiens à remercier spécialement le ministre des Affaires municipales qui s'est engagé dans ce projet de loi - j'en parlerai de M. Leonard tout à l'heure - qui s'y est engagé une fois qu'il eut compris le dossier, une fois qu'il eut pris conscience qu'il s'agissait d'un dossier qui traînait depuis 20 ans, qu'il s'agissait d'un dossier qu'il fallait absolument régler, qu'il s'agissait d'un dossier où il fallait, comme gouvernement, comme dans de nombreux autres cas, prendre nos responsabilités. Je pense que le ministre des Affaires municipales a accepté de s'engager dans une bataille difficile, dans une bataille qui était dure pour lui, dans une bataille qui ne touchait pas son comté, qui ne touchait pas sa région, mais qui touchait une région du Québec, comme il s'est engagé dans une bataille qui touchait la population de Montréal. Je pense qu'il est aussi important d'essayer de régler des problèmes qui touchent des régions que de régler les problèmes de Montréal. Il y a Montréal, il y a le développement économique de l'ensemble du Québec et il y a aussi le développement économique des régions comme celle de la Côte-Nord.

Cette bataille, c'est vrai, elle a été difficile avec l'Opposition, c'est normal et je n'ai pas l'intention, ce soir, de répondre à toute l'argumentation qui a été développée par l'Opposition. J'ai eu l'occasion hier soir -comme j'en ai eu l'occasion il y a quelques jours, comme j'en ai eu l'occasion en deuxième lecture - de répondre à toute cette argumentation. Il est normal pour l'Opposition de reprendre un certain nombre de faits, d'insister sur des faits, de ne pas insister sur d'autres, de dire, par exemple, que 90% de la population de Baie-Comeau était contre la fusion forcée, de dire que 65% de la population de Hauterive était contre la fusion forcée et d'éviter de dire que, dans ce même sondage qui a été commandé par la ville de Baie-Comeau, payé par la ville de Baie-Comeau, 59% de la population de Baie-Comeau et de Hauterive était favorable à la fusion. C'est la confirmation d'un sondage qui avait d'ailleurs déjà été fait en 1970.

M. le Président, l'Opposition a fait sa bataille. Le maire Henry Leonard a fait aussi sa bataille. Je connais très bien, depuis très longtemps, le maire Henry Leonard. Je sais très bien avec quel acharnement, lorsqu'il s'engage dans un dossier, il est capable d'y mettre toute sa passion. Le maire Leonard, M. le Président, ce soir ou cet après-midi, selon des informations que je possède,

annonçait qu'il serait candidat à la mairie du Grand Baie-Comeau. C'est donc dire que le maire Leonard accepte la démocratie, c'est donc dire que le maire Leonard accepte de travailler dans le sens de la loi. Je dis ce soir au maire Henry Leonard, sans préjuger des décisions qui seront prises par la population en octobre prochain, quelle que soit sa décision, quel que soit le résultat, que je lui assurerai encore, comme dans le passé, toute ma collaboration.

Je voudrais reprendre certains arguments du chef de l'Opposition. J'ai été surpris, ce soir, de l'intervention du chef de l'Opposition parce que, lorsqu'il était éditorialiste au Devoir, il a toujours demandé aux hommes politiques de s'élever au-dessus des intérêts partisans, des intérêts particuliers et le chef de l'Opposition nous disait qu'il s'agissait là d'un abus de pouvoir.

Je voudrais expliquer ceci au chef de l'Opposition, lui qui connaît d'ailleurs très bien le dossier, lui qui connaissait très bien d'ailleurs Mgr Labrie qui a été obligé de fonder la ville de Hauterive à la suite d'un refus de la ville fermée qui était la propriété, à ce moment-là, de la QNS. Je suis resté surpris de l'intervention du chef de l'Opposition parce que je comprends une chose. Le chef de l'Opposition a décidé ce soir, plutôt que de s'élever au-dessus de la partisanerie politique, de parler au nom des intérêts partisans, ce qu'il dénonçait lorsqu'il était éditorialiste du Devoir.

Si j'avais écouté simplement mes intérêts partisans, si j'avais écouté simplement mes intérêts comme député du comté de Saguenay, jamais je ne me serais embarqué dans un tel projet. J'ai obtenu à la dernière élection 53% du vote à Baie-Comeau, 74% du vote à Hauterive et 68,9% du vote dans l'ensemble du comté. Avais-je besoin de m'embarquer dans un tel projet? Avais-je besoin de m'embarquer dans de telles complications? J'aurais pu dire: Au nom de mes intérêts partisans et politiques, je ne m'embarque pas dans un tel projet.

D'ailleurs, contrairement à ce qu'on a dit depuis le début, depuis sept ou huit mois qu'on discute de ce projet, je m'étais engagé au moment de la campagne électorale - ce qui a été confirmé en commission parlementaire par un journaliste qui s'appelle Charles Hamelin - à l'occasion d'une interview que j'avais à la radio avec un certain nombre de journalistes, à considérer le projet de fusion de Baie-Comeau et de Hauterive à partir de zéro. Un des journalistes me posait la question suivante: Est-ce que cela veut dire que vous pouvez envisager une fusion forcée? J'ai indiqué, au moment de la campagne électorale, que je ne refusais aucune hypothèse. Cela, M. le Président, c'était en pleine campagne électorale.

Il faudrait dire pourquoi je me suis engagé dans cette bataille. Je ne me suis pas engagé dans cette bataille tout seul. Jusqu'en 1976, je n'avais discuté ni avec le maire de Baie-Comeau, ni avec le maire de Hauterive, de fusion, mais est arrivé le rapport Major-Martin qui a été déposé dans la région par Bernard Lachapelle, ministre de l'OPDQ dans le temps. Le rapport Major-Martin avait été payé par le gouvernement du Québec à la demande des deux villes de Baie-Comeau et de Hauterive et concernait le développement de l'ensemble de la région, particulièrement de la région de Baie-Comeau-Hauterive.

Le rapport Major-Martin recommandait, comme une des premières conclusions pour le développement de la région de Baie-Comeau-Hauterive, ceci en 1976: "Le regroupement des deux villes éviterait la concurrence inutile sur le plan industriel. Le regroupement permettrait de donner de meilleurs services à la population." M. le Président, ce n'est pas Lucien Lessard qui l'affirme, ce n'est pas une firme qui a été payée par le gouvernement du Parti québécois; c'est une firme qui avait été engagée par les libéraux en 1976. On lisait ceci dans le rapport Major-Martin: "II s'agit, en fait - on parlait de la fusion - d'une condition de développement essentielle pour l'avenir de la région", d'une condition essentielle pour l'avenir de la région. Lorsque Bernard Lachapelle est venu dans la région, à Baie-Comeau en particulier, le maire Henry Leonard s'engagait, au moment du dépôt du rapport, à respecter chacune de ces recommandations qui étaient faites dans le rapport Major-Martin, en particulier de s'engager dans le projet de fusion.

C'est dans ce sens que, le 3 mars 1977, je recevais la lettre suivante qui m'était adressée: "Bonjour Lucien. Tel que convenu lors de notre rencontre du lundi 28 février 1977, je te fais parvenir les documents concernant le dossier fusion. Si tu juges à propos de faire des corrections concernant ces documents, n'hésite pas à communiquer avec nous. J'ose croire que nous respecterons fidèlement la "cédule" afin que nous puissions disposer de ce fameux dossier. Au besoin, nous sommes à ta disposition pour une saine et bonne promotion de la Côte-Nord. Bien à toi, Henry Leonard. Maurice Boutin." (23 h 40)

Des voix: Bravo! Bravo!

M. Lessard: Donc, M. le Président, je dois dire ce soir, non seulement à la population de Baie-Comeau et de Hauterive, mais à toute la population du Québec que le projet de fusion n'a pas été commencé d'abord par Lucien Lessard, mais il a été commencé d'abord par les deux maires, le maire, M. Henry Leonard, et le maire, M. Maurice Boutin.

Dans ce dossier, on me demandait de régler un certain nombre de choses. Je vais vous citer un certain nombre de ces choses. À la suite d'une assemblée qui réunissait les membres suivants des deux conseils municipaux, M. Henry Leonard, maire; M. Sylva Lord, conseiller de Baie-Comeau; M. Jean-Paul Montigny, conseiller; M. Jean-Claude Ouellet, conseiller; M. Aurèle Paradis, conseiller de Baie-Comeau; M. Maurice Boutin, maire de Hauterive, les conseillers: MM. Marius Gauvin, Hamel Savard, Jacques Asselin et André Lavoie. Ouverture de l'assemblée à 9 heures 30; la date: 26 février 1977, il est convenu de regarder et discuter de certaines mesures incitatives relatives au dossier fusion. Les mesures incitatives peuvent se grouper en trois catégories. Les titres de chapitres seront les suivants: Au premier chapitre, Hauterive, boulevard Laflèche. Le coût de construction de ce boulevard qui est utilisé comme route nationale 138 devrait être payé entièrement par le gouvernement du Québec.

Oui, M. le Président, nous l'avons payé entièrement parce que les libéraux ne l'avaient pas payé dans le temps. Vous l'aviez laissé... C'était essentiellement la route 138. Les libéraux ne l'avaient pas payé et nous avons versé 500 000 $ pour compenser justement le fait que les libéraux n'avaient rien fait de 1970 à 1976.

Dans ce dossier, il y avait aussi la question du plateau. Nous avions inscrit "programme" à l'intérieur du programme régulier du gouvernement. Il y avait approvisionnement en eau potable. Deux rapports existent, donc deux solutions; "un choix économique et logique devra être fait." Cela a été réglé, 2 000 000 $ versés par le gouvernement du Québec. Parc de maisons mobiles dont a parlé le député de Hull tout à l'heure, parc absolument ridicule et qui ne correspond pas à la réalité; réglé, versement par le gouvernement du Québec: 4 850 000 $.

Les dossiers de Baie-Comeau, parlons-en. Résidence pour personnes âgées. Que le projet de 100 logements tel que conçu par l'Office municipal d'habitation de Baie-Comeau et la Société d'habitation du Québec soit activé. Depuis 1973 que cela traînait parce que les libéraux ne bougeaient pas. Que ce programme soit activé et que le projet débute au printemps; réglé, versement de 4 231 758 $ à Baie-Comeau. La nouvelle ville; le débarcadère, et je continue, versement par le gouvernement du Québec de 3 100 000 $. Parc industriel, parce qu'on n'a pas réussi à s'entendre encore, parce qu'on fonctionnait dans le sens de la fusion; pour le parc industriel, il reste encore 2 500 000 $ qu'une ville fusionnée pourra venir chercher.

Route de liaison à la ville de Gagnon, 19 000 000 $ que le gouvernement du

Québec a versés depuis 1976, ce que les libéraux n'ont jamais été capables de verser, de 1970 à 1976. Je pourrais... Subvention de fusion: 2 034 000 $. 90% des dossiers qui étaient inscrits dans ce document ont été réglés. Qu'est-ce qui est arrivé? Le maire Leonard a décidé de sortir du comité conjoint de la fusion. On ne peut pas profiter à la fois des avantages et des interventions du gouvernement du Québec et, après cela!' décider de se retirer en disant: Maintenant que nos dossiers sont réglés...

Des voix: Bravo! Bravo!

M. Lessard: Oui, M. le Président, vous comme moi avons lu M. Claude Masson du Soleil ce matin, comme je lisais les éditoriaux du chef actuel du Parti libéral. Je comprends que, quand on écrit des éditoriaux il faut écrire au jour le jour; je comprends que bien souvent on n'a pas le temps de regarder un dossier qui remonte à 20 ans. Mais quand on est dans le milieu, comme je l'ai indiqué l'autre jour, quand on vit depuis des années et des années dans la région on est capable de comprendre les problèmes. Quant à moi, comparativement au député de Hull, je devrai vivre dans ma région, je devrai y rester, dans ma région.

C'est facile de venir deux jours dans une région, c'est facile d'essayer de venir monter des citoyens dans une région. D'ailleurs les libéraux eux-mêmes... Hier soir, j'ai nommé les différentes associations régionales qui sont d'accord avec la fusion, les différentes - parce que le député de Saguenay n'est pas seul dans cette bataille -municipalités de l'ensemble du comté qui sont d'accord avec cette fusion. Je lisais hier des télégrammes. Il est facile pour le député de Hull de venir monter des citoyens, venir essayer de créer des problèmes dans une région, mais la différence, c'est qu'après la loi le député de Hull va retourner à Hull, mais moi je devrai retourner dans ma région.

Je voudrais, puisqu'il me reste quelques minutes, m'adresser non pas à l'Opposition...

Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!

M. Lessard: ... mais aux citoyens du comté. Je voudrais m'adresser aux gens de Baie-Comeau comme aux gens de Hauterive. Un certain nombre de ces citoyens - et je les comprends - se sont opposés à la fusion; un certain nombre d'autres personnes n'ont pu nous dire qu'elles étaient pour la fusion sinon lorsqu'elles nous rencontraient, parce qu'un certain climat existe à Baie-Comeau. Je suis convaincu que ce climat peut devenir positif parce que dans le fond - je les comprends - une grande partie de ces citoyens qui se sont opposés à la fusion de Baie-Comeau et de Hauterive sont les

premiers citoyens de la Côte-Nord, des citoyens qui ont tout risqué au moment où la QNS est venue dans la région, qui ont tout risqué pour venir s'installer sur la Côte-Nord. Ils ont construit Baie-Comeau, mais ces mêmes citoyens, à la suite d'un défi fondamental, à la suite d'un défi important et au nom des intérêts de la Côte-Nord, ces mêmes citoyens peuvent se donner la main. Au lieu de se battre entre Baie-Comeau et Hauterive on peut fonctionner ensemble comme deux chevaux de trait et travailler ensemble.

M. le Président, je pourrais parler du rapport du comité conjoint, je n'en ai pas le temps, mais je leur lance le message suivant. Il s'agit ce soir, une fois que nous aurons terminé avec ce projet de loi, de créer une grande ville sur la Côte-Nord. Vous allez me dire que non par rapport à Montréal, mais par rapport à la Côte-Nord, c'est une grande ville. Il s'agit de créer un grand pôle d'attraction sur la Côte-Nord, qui est d'ailleurs lancé. Il s'agit de faire une meilleure planification des ressources entre Baie-Comeau et Hauterive. Surtout, finies les chicanes de clochers; Finies les chicanes d'hôpitaux! Finies les chicanes de polyvalentesl Finies les chicanes de palais de justice! Construisons ensemble la grande ville, M. le Président. (23 h 50)

Le Vice-Président (M. Jolivet): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. le leader de l'Opposition.

M. Gérard D. Levesque

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, nous avons donné notre consentement au député de Saguenay...

Des voix: Bravo!

M. Levesque (Bonaventure): ... pour qu'il exerce son droit de parole, apparemment, pour représenter le leader parlementaire du gouvernement et en même temps nous avons su du ministre des Affaires municipales qu'il n'avait pas l'intention d'exercer son droit de réplique, droit auquel il aurait pu avoir recours s'il l'avait jugé à propos.

Le député de Saguenay, ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, a fait une excellente intervention dans les termes parlementaires et je le comprends très bien. J'ai moi-même été assez longtemps député d'un comté. Je comprends qu'au moment où nous arrivons à la fin d'un long débat il sente le besoin de faire entendre ce qu'il croit être l'opinion majoritaire de son comté. Je n'en suis pas tellement sûr mais, enfin, c'est ce qu'il pense. On a vu la nervosité des ministériels qui se sont empressés d'aller le féliciter, après avoir souffert un martyre de plusieurs semaines et de plusieurs mois. Nous comprenons tout cela. À la fin d'une session comme celle-ci, nous sommes prêts à reconnaître qu'il y a des éléments humains qu'il faut reconnaître. Je sais que le député de Saguenay, le ministre, a sûrement passé des moments difficiles. Je lui souhaite de ne pas continuer à passer des moments difficiles. Les moments qu'il va connaître ne sont pas nécessairement ceux qu'il vient de connaître pour un instant ici. Ce moment de gloire va passer et il aura à rendre compte à la population de Baie-Comeau et de Hauterive dans les heures et les jours qui viennent. C'est son problème, et je n'ai pas l'intention de jeter de l'huile sur le feu.

Je veux simplement rappeler à cette Chambre que, quant au projet de fusion, c'est un objectif valable, c'est un objectif auquel nous avons même souscrit quant au principe de cette cause qui peut être défendue. Même si nous pensons qu'il y a là un élément de justice économique et fiscale, même s'il y a des arguments qui peuvent normalement encore militer en faveur d'une fusion de ces deux villes, il y a autour du processus employé des choses extrêmement troublantes. C'est justement cela qui a fait que nous avons poursuivi une lutte pendant plusieurs semaines, et particulièrement au cours des derniers jours, ce qu'on a appelé un "filibuster", qui a amené de la part du gouvernement une motion de clôture afin de mettre fin à la voix de l'Opposition, voix qui ne se voulait pas contraire au principe ou à l'objectif d'une fusion, mais qui voulait qu'une telle fusion se fasse selon des voies et des principes démocratiques. C'est cela que nous avons défendu.

Est-ce qu'il a été possible de convaincre ce gouvernement qu'il aurait été infiniment plus acceptable de procéder par une consultation populaire des gens intéressés? Est-ce que nous aurions pu réussir cela? Pas avec ce gouvernement. Malgré ce que nous trouvons dans le programme sacré ou sacro-saint du Parti québécois qui, dans ce programme même, se refuse à des fusions qui ne sont pas entourées de toutes les précautions démocratiques, M. le Président.

Ce gouvernement a dit que jamais il ne procéderait à des fusions forcées. Nous avons là un exemple, présentement, d'une fusion forcée. M. le Président, est-ce que cela veut dire que, si on poursuivait ainsi cette politique, il faudrait en arriver à la conclusion que ce gouvernement est prêt à faire des fusions non seulement pour le petit chou du Saguenay, mais pour tous les autres députés qui ont des problèmes comme ceux-là et où on pense que, rationnellement, on aurait besoin d'un fusion? J'ai dans mon propre comté des exemples où, je pense personnellement, que ce serait mieux qu'il y ait une fusion. Il en a d'autres, même chez nos amis d'en face, j'en suis convaincu. Je

vois déjà qu'il y a des acquiescements, il y a dans chacun de ces comtés ou dans la plupart de ces comtés, d'un côté comme de l'autre de la Chambre, des exemples où des fusions seraient désirables justement pour des fins d'équité fiscale et économique. Est-ce qu'on va dire, désormais, que nous allons procéder à des fusions forcées dans chacun de ces cas?

Des voix: Non.

M. Levesque (Bonaventure): Oui ou non, M. le Président? C'est la question que je pose au gouvernement, ce soir. Ce gouvernement a-t-il décidé, après l'exemple de Baie-Comeau et de Hauterive, qu'ailleurs au Québec, dans les autres comtés du Québec où il y a des raisons qui justifient de procéder à des fusions, il devrait y avoir des lois spéciales et des motions de clôture pour imposer des fusions? Est-ce la politique du gouvernement? J'attends la réponse de ce gouvernement. Ou a-t-on fait un cas spécial de Baie-Comeau et de Hauterive? On peut se poser des questions, en dehors de l'euphorie de quelques instants du moment de gloire du député de Saguenay, du ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, qui a été entouré de tous ceux qui ont été complètement bouleversés par une nervosité qui a rejoint chacun des membres de cette Assemblée. Derrière les rideaux, dans les coulisses, le long des corridors de l'Assemblée nationale, depuis quelques jours et quelques semaines, on dit: Mais, mon Dieu! on est pris avec l'affaire de Baie-Comeau-Hauterive! Les ministériels ne savaient plus où donner de la tête...

Des voix: Oh!

Une voix: C'est faux!

M. Levesque (Bonaventure): ... et ils se disaient: Est-ce qu'on est pris avec le projet de loi no 37? On ne pourra même pas ajourner la session à cause du projet de no 37. Qui a voulu cela, M. le Président? On a même pris certaines précautions à la dernière minute. On a dit: On va avoir un rapport. On va demander à un comité formé de gens de Hauterive, de Baie-Comeau et de la Commission municipale du Québec de se pencher sur la question et de nous apporter un rapport qui nous dira la vérité.

La vérité, M. le Président, elle a été déposée en cette Chambre. Cela n'a rien changé aux intentions du gouvernement, cela n'a rien changé, à la réalité des gens de Baie-Comeau et de Hauterive. A-t-on ajouté quelques sommes pour aider justement à réparer certaines injustices qui peuvent être créées par cette fusion? Rien, M. le Président. On a même ajouté des amendements qui sont de nature dictatoriale, pour assurer cette fusion, une fusion forcée comme jamais on a forcé une fusion, M. le Président.

Pourquoi deux minutes? Est-ce que je dois comprendre qu'il me reste deux minutes, M. le Président?

Le Vice-Président (M. Jolivet): C'est cela, M. le député et leader de l'Opposition. Vous avez un droit de parole de dix minutes.

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, avec le consentement, je vais continuer. Je suis convaincu qu'on va me donner deux ou trois minutes, nous avons été très généreux dans nos consentements toute la journée.

Une voix: Oui.

M. Levesque (Bonaventure): Ceci étant dit, je ne suis pas inquiet, M. le Président. La session n'est pas terminée et j'espère que je vais avoir le consentement. Voici, M. le Président. Nous avons entendu le ministre tout à l'heure parler de la danse des millions, les millions qui auraient été donnés à Baie-Comeau, à divers titres. Mais, M. le Président, le "bonjour Lucien" de 1971, comment se fait-il qu'en 1982 ce ne soit plus "bonjour, Lucien"? Il y a là une sorte de refus global de la population de Baie-Comeau à cette fusion. (Minuit)

M. le Président, si cela fait 20 ans, 30 ans ou 40 ans que cela dure, je ne sais pas combien d'années, est-ce qu'on n'aurait pas pu attendre quelques mois simplement pour nous assurer que le tout se fasse selon certains principes acceptables dans une démocratie? Est-ce qu'on n'aurait pas pu procéder simplement à une consultation populaire? Si on avait peur d'une consultation populaire dans chacune des municipalités, est-ce qu'on n'aurait pas pu, au moins, avoir une consultation populaire globale des deux municipalités? Rien, rien. On a toujours refusé toutes les suggestions qui sont venues de la part de l'Opposition et de la part des citoyens. Je me demande, M. le Président, pourquoi on a ainsi procédé. On a créé là un précédent. Et je reviens à mes paroles du début: Est-ce une nouvelle politique du gouvernement? Est-ce qu'on va déchirer la page du programme du Parti québécois qui dit que jamais on ne veut avoir de fusions forcées? Vous ne le savez pas? Retournez à votre programme et vous verrez.

Des voix: On l'a.

M. Levesque (Bonaventure): Est-ce qu'on a le programme du Parti québécois quelque part ici? Oui. Je vois le premier ministre me dire: Ce n'est pas nécessaire. Lui, il le sait! Je dis: Si on veut déchirer cette page, qu'on

la déchire publiquement, mais jusqu'à nouvel ordre je crois que nous sommes dans une situation où n'importe où au Québec on pourra maintenant recourir à une fusion forcée. Là, j'invite le ministre, même s'il a refusé son droit de réplique, à le reprendre - deux minutes, d'accord - pour nous dire si c'est la politique du gouvernement de procéder à des fusions forcées lorsque des fusions volontaires semblent difficiles.

Les citoyens des villes concernées, du moins ceux de la ville de Baie-Comeau désirent que les gens soient consultés avant de se voir imposer cette fusion. N'est-ce pas là ce que proposait le programme même du Parti québécois, lequel précise en page 4: "Puisque les citoyens du Québec vivent en démocratie, c'est au peuple de décider lui-même de son avenir"? Ailleurs, on peut lire: "Un gouvernement du Parti québécois s'engage à revaloriser le pouvoir local, notamment en démocratisant la Loi du référendum au même titre que les autres lois électorales et en étendant cette Loi du référendum à toutes les cités et villes du Québec, y compris Montréal et Québec, pour que leurs projets importants soient agrées ou refusés par les électeurs". Alors, est-ce assez clair, M. le Président?

Des voix: Bravo!

M. Levesque (Bonaventure): Ceci étant dit, lorsque le ministre, mon bon ami le député de Saguenay...

Une voix: C'est un bon gars.

M. Levesque (Bonaventure): Je comprends les difficultés qu'il a passées récemment. J'espère qu'il n'en aura pas trop dans l'avenir. Mais le discours qu'il a fait ce soir, pourquoi ne le fait-il pas à Baie-Comeau?

Des voix: Bien oui.

M. Levesque (Bonaventure): Est-ce qu'il ne pourrait pas convaincre les gens de Baie-Comeau?

Une voix: À l'aréna.

M. Levesque (Bonaventure): II y avait 3500 de ses concitoyens qui étaient réunis à Baie-Comeau récemment et qui invitaient le ministre à venir les rencontrer. Il n'a pas voulu, à ce moment, aller faire le discours qu'il a fait en Chambre ce soir. S'il avait été aussi éloquent et si ce qu'il a dit correspondait autant à la vérité qu'ont semblé le reconnaître ses collègues ministériels, il me semble qu'il aurait pu convaincre la population. Pourquoi ne convainc-t-il pas la population? Qu'est-ce qu'il y a qui ne va pas?

Une voix: Ouais!

M. Levesque (Bonaventure): Je ne le sais pas, je ne suis pas de Hauterive, je ne suis pas de Baie-Comeau. J'aime les gens de Hauterive comme j'aime les gens de Baie-Comeau. Plusieurs d'entre eux sont des gens qui viennent de chez nous, qui viennent de la patrie du premier ministre, de la patrie de celui qui vous parle. Les gens qui ont bâti Baie-Comeau et Hauterive sont des gens que nous aimons bien. Nous aimerions que ces gens puissent s'exprimer, dire avec qui ils veulent vivre ou ne pas vivre. Pourquoi le ministre n'irait-il pas, avant l'adoption de cette loi, convaincre les gens, demander un référendum?

Pardon? Je vous l'accorde, M. le ministre, si vous voulez avoir un droit de réplique et me dire que vous irez à Baie-Comeau et que vous voulez convaincre... Vous avez le droit de réplique. Quant à moi, j'invite le ministre à venir nous dire qu'il est prêt à aller à Baie-Comeau et à retarder l'adoption du projet de loi pour que cette fusion se fasse dans l'harmonie. C'est cela que nous souhaitons. Ceci étant dit, je souhaite que, si ce projet de loi doit être adopté, cependant, j'invite les gens de Baie-Comeau et de Hauterive à essayer de vivre le plus heureux, malgré le Parti québécois. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre des Affaires municipales.

M. Jacques Léonard (réplique)

M. Léonard: M. le Président, je vous remercie, je remercie l'Opposition de m'accorder une ou deux minutes pour clore un débat qui tire à sa fin, évidemment, puisque nous allons voter tout à l'heure et, sans préjuger du résultat. Quand même, on peut escompter que beaucoup de gens ici à cette Assemblée ont été convaincus du fond du dossier. D'autant plus que, comme le rappelait le leader de l'Opposition, il y a eu un comité conjoint qui a fonctionné. Alors qu'il s'était disloqué à la fin de janvier, il s'est remis sur pied et il a pondu un rapport fort intéressant, qui va servir sûrement aux prochains élus de l'agglomération de Baie-Comeau pour prendre des décisions très éclairées.

Quoi qu'il en soit, je ne voudrais pas en parler davantage. Je veux simplement dire que, s'il y a une expérience qui a été vécue ici qui a été difficile pour beaucoup de gens, elle nous a donné quelques enseignements, bien sûr, à savoir que je pense que j'aurai le consentement de mes collègues lorsque je secouerai la poussière qu'il y a sur la loi des fusions volontaires pour l'aménager et la rendre plus facile d'accès pour tout le monde, et c'est vraiment la voie dans

laquelle il faut se diriger. Je pense que les fusions forcées comme celles-là sont des exceptions.

Alors, en terminant, je pense que, maintenant que le débat est fait, lorsque le vote sera terminé, il s'agit de vivre avec une loi. Il faut le faire dans la solidarité des gens de Baie-Comeau. Je pense que nous leur donnons l'occasion de créer sur la Côte-Nord une très grande métropole qui va être dynamique, qui va être bien intégrée. Je pense aussi que ce sont des gens eux-mêmes dynamiques qui ont foi dans l'avenir et qu'ils vont réaliser ce qu'ils espèrent. Alors, l'avenir, c'est demain matin.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Comme il a été convenu, il y a cinq projets de loi, le projet de loi no 72, le projet de loi no 62, le projet de loi no 68, le projet de loi no 70 et le projet de loi no 37, qu'il faut maintenant mettre aux voix. Est-ce qu'on doit appeler les députés?

M. Levesque (Bonaventure): Oui.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Qu'on appelle les députés. (0 h 08)

Mise aux voix

(0 h 12)

Le Vice-Président (M. Jolivet): Prenez vos sièges. S'il vous plaît. S'il vous plaît.

Le premier vote va donc porter sur la troisième lecture du projet de loi no 37, Loi regroupant les villes de Baie-Comeau et de Hauterive. Que ceux et celles qui sont pour veuillent bien se lever, s'il vous plaît!

Le Secrétaire adjoint: MM. Lévesque (Taillon), Bertrand, Mme Marois, MM. Bédard, Johnson (Anjou), Bérubé, Landry, Gendron, Mme LeBlanc-Bantey, MM. Lessard, Marcoux, Biron, Godin, Rancourt, de Bellefeuille, Richard, Clair, Chevrette, Fréchette, Marois, Duhaime, Garon, Tardif, Léonard, Martel, Baril (Arthabaska), Proulx, de Belleval, Mme Lachapelle, MM. Brassard, Dean, Paquette, Gagnon, Guay, Dussault, Vaugeois, Fallu, Marquis, Charbonneau, Boucher, Mme Harel, MM. Beauséjour, Champagne, Blais, Blouin, Gauthier, Gravel, Laplante, Lavigne, Brouillet, Rochefort, Baril (Rouyn-Noranda-Témiscamingue), LeMay, Rodrigue, Payne, Beaumier, Tremblay, Lafrenière, Paré, Lachance, Dupré, Bisaillon.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Que ceux qui sont contre veuillent bien se lever, s'il vous plaît!

Le Secrétaire adjoint: MM. Ryan, Levesque (Bonaventure), O'Gallagher, Ciaccia, Lalonde, Vaillancourt (Orford), Mme Bacon, MM. Bélanger, Mathieu, Assad, Vallières, Mme Dougherty, MM. Lincoln, Paradis, Pagé, Rocheleau, Bissonnet, Polak, Cusano, Dubois, Sirros, Dauphin, Doyon, Kehoe, Houde, Middlemiss, Hains.

Le Secrétaire: Pour: 62 Contre: 27

Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté.

Mise aux voix de la troisième lecture du projet de loi no 70

Le deuxième vote porte sur la troisième lecture du projet de loi no 70, Loi concernant la rémunération dans le secteur public. M. le leader du gouvernement.

M. Bertrand: M. le Président, je proposerais avec le consentement de l'Opposition que, pour les quatre autres projets de loi, soit les projets de loi nos 70, 68, 62 et 72, nous ayons le même vote.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader de l'Opposition.

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, il semble que le gouvernement est tellement sûr que ses lois ne sont pas bonnes qu'il prévoit qu'on va voter contre. Je pense que le gouvernement a raison pour une fois. Nous allons voter contre tous ces projets de loi.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Cependant, je pense que le député de Sainte-Marie...

M. Bisaillon: M. le Président, il serait peut-être possible de procéder au vote sur 70 et 68. Quant à moi, je vote contre 70 et 68; pour les autres, je suis pour.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Mme la députée de Maisonneuve.

Mme Harel: Quant à moi, c'est l'abstention sur le projet de loi 70.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Donc, je vais lire le projet de loi.

M. le leader de l'Opposition.

M. Levesque (Bonaventure): Le secrétaire général semble avoir des difficultés et, s'il en a, je crois qu'on va voter pour vrai.

Des voix: On vote.

M. Levesque (Bonaventure): On vote.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Que ceux et celles qui sont pour le projet de loi 70 veuillent bien se lever, s'il vous plaît!

Le Secrétaire adjoint: MM. Lévesque (Taillon), Bertrand, Mme Marois, MM. Bédard, Johnson (Anjou), Bérubé, Landry, Gendron, Mme LeBlanc-Bantey, MM. Lessard, Marcoux, Biron, Godin, Rancourt, de Bellefeuille, Richard, Clair, Chevrette, Fréchette, Marois, Duhaime, Garon, Tardif, Léonard, Martel, Baril (Arthabaska), Proulx, de Belleval, Mme Lachapelle, MM. Brassard, Dean, Paquette, Gagnon, Guay, Dussault, Vaugeois, Fallu, Marquis, Charbonneau, Boucher, Beauséjour, Champagne, Blais, Blouin, Gauthier, Gravel, Laplante, Lavigne, Brouillet, Rochefort, Baril (Rouyn-Noranda-Témiscamingue), LeMay, Rodrigue, Payne, Beaumier, Tremblay, Lafrenière, Paré, Lachance, Dupré.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Que ceux et celles qui sont contre veuillent bien se lever s'il vous plaît!

Le Secrétaire adjoint: MM. Ryan, Levesque (Bonaventure), O'Gallagher, Ciaccia, Lalonde, Vaillancourt (Orford), Mme Bacon, MM. Bélanger, Mathieu, Assad, Vallières, Mme Dougherty, MM. Lincoln, Paradis, Pagé, Rocheleau, Bissonnet, Polak, Cusano, Dubois, Sirros, Dauphin, Doyon, Kehoe, Houde, Middlemiss, Hains, Bisaillon.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Abstentions.

Le Secrétaire adjoint: Abstentions, Mme Harel.

(0 h 20)

Le Secrétaire: Pour: 60

Contre: 28

Abstentions: 1

Enregistrement des noms sur la

troisième lecture des projets

de loi nos 68, 62 et 72

Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté.

Troisième lecture du projet de loi no 68, Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant les régimes de retraite. J'ai cru comprendre que c'est le même vote que celui sur la loi no 37, sauf que le député de Sainte-Marie vote contre au lieu de voter pour.

M. Bisaillon: C'est cela, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Troisième lecture du projet de loi no 62, Loi concernant la Loi constitutionnelle de 1982. C'est le même vote que celui sur la loi no 37.

Une voix: C'est cela.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Troisième lecture du projet de loi no 72, Loi modifiant le Code du travail, le Code de procédure civile et d'autres dispositions législatives. C'est le même vote que celui sur la loi no 37.

Une voix: C'est cela.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader de l'Opposition.

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, est-ce qu'on pourrait ajouter le nom du député de Notre-Dame-de-Grâce?

Des voix: Oui.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Consentement.

M. Levesque (Bonaventure): Merci.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le premier ministre.

Bilan et voeux M. René Lévesque

M. Lévesque (Taillon): M. le Président, après les flots d'éloquence qu'on a entendus ce soir, je vais essayer d'être le plus bref possible parce qu'il est déjà passé minuit largement. D'autant plus qu'il ne s'agit pas d'une prorogation, mais d'un ajournement. On ne quitte pas cette session définitivement, on ajourne nos travaux à plus tard pro forma, comme on dit en général, c'est-à-dire que c'est une formalité. La date qui vous sera donnée ne sera, le moins que je puisse dire, fort probablement pas la bonne. Il est possible que nous avancions cette date, il y a même de fortes possibilités, mais je crois que c'est normal, dans la tradition, de prendre la date la plus lointaine possible quand on ajourne pro forma, de façon à pouvoir garder une certaine souplesse.

Évidemment, la session n'est pas terminée. On a encore beaucoup de pain sur la planche pour l'automne. Il suffit d'ailleurs de référer au discours inaugural de novembre 1981 pour s'apercevoir qu'il manque encore des pièces. Certaines pièces majeures qui, à la dernière minute, ont été déposées, demanderont du travail pendant cet été et à la reprise aussi, que ce soit la Loi de l'Assemblée nationale - je dois souligner ici pour la énième fois, parce qu'il y a des gens qui, dans les médias d'information surtout, ne semblaient pas avoir compris - qui n'est pas complète, tout le monde le sait. Il manque des pans entiers du côté des questions délicates pour tous les parlementaires, que sont le traitement et aussi le régime de retraite sur lesquels nous nous sommes engagés, sous forme de complément, à terminer le travail cet été. En particulier ce

qui est évidemment difficile parce que c'est la nécessité, comme on vient de le faire d'ailleurs en ce qui concerne les secteurs public et parapublic, mutatis mutandis, la nécessité d'ajuster, d'une façon plus acceptable, je crois, pour la suite, ce régime de retraite des parlementaires.

On a eu d'ailleurs la chance d'avoir un petit groupe de citoyens éminents qui nous ont donné un coup de main - parce que c'est toujours difficile, c'est un peu délicat quand on est pris soi-même par le sujet, on risque toujours d'être à la fois juge et partie - qui nous ont fait d'excellentes recommandations dans l'ensemble. On va les étudier le plus rapidement possible de façon à faire le meilleur travail possible aussi et autant que faire se pourra, de concert avec l'Opposition, pour arriver avec un projet de loi complet, dont la partie retraite sera nécessairement rétroactive au 1er juillet. Il y a donc cette Loi de l'Assemblée nationale. Il y a la révision et, je crois, des progrès substantiels aussi dans la Charte québécoise des droits et libertés de la personne qu'il faudra travailler avant la fin de la session.

Je dois dire que vous retrouverez dans le discours inaugural l'évocation, la perspective de changements qui sont devenus nécessaires, tout le monde l'admet, et c'est un très gros morceau au point de vue social comme au point de vue économique, en ce qui concerne le Régime des rentes du Québec, et, par voie de conséquence, la Caisse de dépôt. Du travail se fera, je l'espère, de façon qu'on puisse arriver avec tout ça dans le meilleur état possible au moment de la rentrée. Sans compter, au-delà de la législation, tout ce qui, dans le domaine budgétaire et administratif, pourrait nous solliciter pendant les derniers mois de l'année.

Ce n'est pas le temps, ce soir, de prétendre faire un bilan qui ne serait pas complet. Je rappellerai simplement qu'on a eu à remplir, et je pense que c'est normal pour un gouvernement qui a un renouvellement de mandat, certains engagements qui sont devenus d'autant plus prioritaires que la situation économique nous semblait commander qu'on fasse le maximum de ce qu'on pouvait parce que c'était directement relié à certains aspects, hélas trop modestes, on le sait bien, mais des difficultés économiques auxquelles il faut faire face: que ce soient les bons d'emploi pour les jeunes ou le programme d'accès à la propriété qui, heureusement, donne de bons résultats, ou que ce soit l'établissement des jeunes agriculteurs, de la relève agricole. En fait, on peut dire que la situation économique, la crise économique à laquelle tout le monde doit faire face, on l'a retrouvée, depuis la fin de l'an dernier, à tous les détours depuis le début de la session. On l'a retrouvée, hélas, dans le budget supplémentaire très dur, cruel même, qu'il a fallu adopter à la fin de 1981... On retrouve également entre les lignes du budget régulier de 1982-1983 qui est venu 'à la fin de mai cette préoccupation constante, obsédante, de la situation économique. Cela se répercute dans les projets de loi nos 68 et 70 qu'on vient de voter et, bien sûr, c'était également à l'arrière-plan de la loi d'exception qu'on a cru devoir présenter, hier soir, pour assurer le retour au travail d'une partie importante du corps médical, des effectifs médicaux du Québec.

C'est aussi la situation économique qui nous a dicté le programme de maintien d'emplois ou de stimulation économique qu'avec les moyens du bord dont on dispose, on a complété ces dernières semaines, y compris cette pièce maîtresse qui a été complétée par une loi qui, je crois, était un projet d'urgence et qui, grâce à la coopération de l'Opposition, a pu être complétée, votée ces jours derniers, cette pièce maîtresse étant, bien sûr, le programme de relance de la construction domiciliaire.

J'écoutais, tout à l'heure, le président du Conseil du trésor; je ne répéterai pas ce qu'il a dit, sauf pour simplement le réaffirmer. C'est quelque chose dont, en touchant du bois, en espérant que cela va donner tous les résultats escomptés - parce que je pense que personne ne peut être contre la perspective de succès pour un programme comme celui-là - on peut être fier, simplement qu'on se soit rendu, déjà, à cette solidarité concrète de gens qui disent: Oui, on va faire notre part, on va casquer les uns et les autres pour essayer de relancer ce qui reste toujours un secteur stratégique dans n'importe quelle économie. Je pense que je n'ai jamais vu cela ailleurs, on ne l'a jamais vu avant au Québec. Il n'y a pas de mérite particulier du gouvernement, c'est le mérite de notre société où de plus en plus de gens se rendent compte qu'il va falloir le plus possible, au coude à coude, en tout cas, comme jamais auparavant, faire face à ce qui se passe comme situation économique et à tout ce que cela peut impliquer d'épreuves pour l'ensemble de nos concitoyens.

On retrouve cela tout au long de la session. On a retrouvé cela dans les préoccupations tout au long de l'année. En même temps que c'était sous le signe de la crise, tout ce qui est arrivé ou tout ce qu'on a essayé de faire de notre mieux, on peut dire aussi que c'était sous le signe de l'espoir ou, en tout cas, d'une confiance en l'avenir qui semble de plus en plus justifiée. Évidemment, on ne voit pas cela à court terme. Quand on ne voit pas plus loin que le bout de son nez, c'est sûr qu'on ne le voit pas. Ayant déjà vécu ce qu'est l'Opposition, je me dis que c'est normal aussi que ce soit

le court terme qui préoccupe surtout nos amis d'en face. Nous sommes tous exposés à cela. C'est normal, dans le quotidien, mais il reste quand même que, quand on regarde ce qui se passe dans notre population - peut-être qu'on devrait sortir plus souvent, on va en avoir l'occasion pendant un certain nombre de semaines - on a l'impression que la perspective est beaucoup moins noire que ce que parfois on distille ici sans trop s'en rendre compte les uns et les autres. (0 h 30)

II y a tellement de force, il y a tellement d'espoir concrètement réalisable grâce à nos ressources humaines, à leur qualité maintenant et grâce à la dotation matérielle que renferme le Québec, peut-être qu'on devrait profiter - le premier qui pourrait le dire, c'est votre serviteur - mais les uns et les autres de la pause estivale pour essayer le plus possible d'aller voir ce qui se passe un peu partout dans tous les milieux chez nous et corriger un peu une certaine vision qu'on risque d'avoir parfois à force de s'enfermer dans des débats qui sont toujours à court terme. En tout cas, sur le plan législatif en particulier, on verra la suite à l'automne.

Entre-temps, je dois juste souligner qu'avec quelques-uns de mes collègues du Conseil des ministres, j'arrivais ce soir des États-Unis, juste à côté, pas loin, où là aussi, en compagnie de représentants de six États américains de la Nouvelle-Angleterre et de cinq provinces y compris le Québec, on a pu partager encore ce sentiment, cette conscience de vivre de très grandes difficultés, d'être quelque part dans un tunnel économique dont on ne voit pas très précisément le bout, mais, et c'est ce qui arrive dans notre société - on a l'impression que ça peut arriver entre gens qui se connaissent bien, qui ont des liens d'amitié et des liens de coopération de plus en plus solides - cette crise est aussi l'occasion de travailler ensemble comme jamais auparavant et d'essayer en tout cas de voir toutes les possibilités de maximiser nos efforts pour autant qu'on peut les mettre en commun.

Beaucoup de gens parlent à travers le monde du dialogue Nord-Sud à l'échelle planétaire. Cela n'a pas l'air exactement pour demain, que ça puisse se réaliser concrètement, bien que la perspective soit généreuse et probablement nécessaire pour l'avenir du monde. Quant à nous, on a un petit dialogue à notre échelle Nord-Sud avec nos voisins, en particulier de New York et des États de la Nouvelle-Angleterre, qui devient, à mon humble avis, de plus en plus une tradition fructueuse et un resserrement non seulement de relations de bon voisinage, mais de relations d'amitié de plus en plus productives et de plus en plus bénéfiques pour les deux parties. De cela comme de bien autre chose, on aura sûrement des nouvelles et des développements à communiquer d'ici à la fin de l'été.

D'ici là, très brièvement, selon l'usage, il me reste et très chaleureusement à rendre un hommage mérité à tous ceux et celles qui ont contribué directement ou indirectement au progrès et au succès de nos travaux depuis un bon nombre de mois, à commencer, bien sûr, par toute l'équipe ministérielle avec au premier rang les whips, pour qui le travail de fin de session est toujours particulièrement cauchemardesque, et les leaders. Je soulignerais en particulier le travail du leader officiel du gouvernement, mon voisin ici, le député de Vanier, qui a pris la relève au pied levé, littéralement, en plein coeur de la session, et qui, grâce à un travail acharné - on peut tous en témoigner de ce côté-ci - grâce aussi à la collaboration loyale qu'il a réussi à maintenir, et cela se joue des deux côtés, avec le leader de l'Opposition, est parvenu à conduire à bon port, à une heure encore convenable et avant les derniers délais, cette partie importante de la session.

Évidemment, je voudrais remercier le secrétaire général, tous les officiers et tout le personnel de la Chambre qui, sous la direction ferme et souple de la présidence, nous ont facilité la tâche tout le long du chemin, de même que les équipes du journal des Débats, les équipes de la télévision des débats et tout le personnel du Parlementaire qui est toujours aussi accueillant, aussi dévoué. Je n'ai pas à remercier les gens de la tribune de la presse dont le rôle n'est pas de nous faire plaisir. Ils ont réussi à écorcher tout le monde à peu près également, donc, ils ont dû remplir leur rôle convenablement. À eux et à elles, à toutes et tous, comme aussi à nos concitoyens qui ont parfois la patience de suivre nos travaux, il reste à souhaiter d'abord une bonne fête nationale au-dessus des partis, des divisions. Peut-être qu'on rediscutera encore des budgets un peu plus tard, mais espérons que non. Ils sont marqués au signe de l'austérité cette année de toute façon. Quoi qu'il en soit, ce n'est pas une question d'argent, c'est une question de fierté et d'identité en tout cas et je crois qu'on doit se souhaiter à tous une bonne fête nationale et aussi de pouvoir prendre des vacances et d'en profiter pour qu'on se retrouve dans la meilleure forme possible un jour qu'il reste à fixer définitivement pendant l'automne qui vient. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le chef de l'Opposition.

M. Claude Ryan

M. Ryan: M. le Président, quand j'écoutais le premier ministre dire tantôt que la presse avait réservé un traitement à peu

près égal aux députés des deux côtés de la Chambre, j'ai vu son collègue, le ministre de la Justice, sourire en me regardant. Il semblait trouver que j'avais été l'objet d'un traitement un peu plus égal que les autres à certains moments.

Des voix: Ah! Ah!

M. Ryan: Quand j'écoutais ce soir le député de Saguenay, suivi par mon collègue, le député de Bonaventure, je m'amusais intérieurement, parce que je me disais qu'il y a seulement dans la politique qu'on peut défendre avec autant de chaleur des points de vue opposés en étant convaincus qu'on a parfaitement raison de chaque côté. Nous savons tous que dans la réalité, les choses sont plus partagées, même l'intérieur de chacun. Je tiens à rassurer le député de Saguenay de ce côté-là que, sur le projet de loi qu'il défendait, sur le fond, j'avais une sympathie profonde pour la cause qu'il représentait. J'aurais voulu qu'il la défende d'une autre manière, mais cela fait partie de nos moeurs parlementaires. Je pense que le système veut que nous soyons dans une relation d'adversaires à peu près tout le temps et il faut que nous l'acceptions.

Je constate, malgré ce que je viens de dire, qu'encore au cours de la dernière session, si nous traçons un bilan objectif de ce que nous avons fait, les projets de loi qui nous ont permis d'être d'accord ont été au moins aussi nombreux que ceux sur lesquels nous nous sommes sentis obligés d'être en désaccord. Je ne veux pas faire frémir les membres de mon parti en disant que sur au moins dix textes de loi différents, nous avons voté avec le gouvernement, mais c'est une vérité historique. J'observais cet après-midi des échanges de bons procédés auxquels -encore une fois, je veux rassurer tout le monde - je n'avais rien à faire, M. le Président, entre les députés de ce côté-ci de la Chambre qui ont participé avec le ministre des Communications et quelques-uns de ses collègues à l'étude du projet de loi qui est devenu loi maintenant, sur l'accès à l'information. On nous racontait de part et d'autre que le travail s'était fait dans un esprit de recherche objective et désintéressée qui était vraiment une source d'édification pour nous tous. Je pense qu'il y a de ces moments constructifs dans la vie de l'institution parlementaire qu'il convient de signaler. Je constate qu'au cours de cette partie de session que nous terminons, en plus du projet de loi 65, il y a eu le projet de loi 75 sur le développement de la SDI qui a donné lieu à un accord des deux côtés de la chambre.

Le projet de loi que nous avons adopté hier sur le retour au travail des médecins omnipraticiens a également donné lieu, je pense, à un débat hautement civilisé, de même que la loi sur la réforme, la législation coopérative, la loi sur le programme d'urgence en matière d'habitation, les deux projets de loi du ministre de l'Agriculture qu'on fait semblant de traiter durement de ce côté-ci de la Chambre et qui sait qu'on l'affectionne beaucoup. Il nous le rend, d'ailleurs, au centuple.

Il y a également deux projets de loi que nous avons été très heureux de voir adopter par cette Chambre, celui sur le financement des jeunes agriculteurs qui veulent se lancer dans la profession agricole et celui sur l'ajustement de la loi de mise en marché des produits agricoles pour les producteurs de pommes. Nous sommes très heureux de ces changements qui ont été apportés à nos lois. Je pense que ce sont autant d'exemples qui montrent que sur bien des sujets, il existe encore, malgré nos divergences, un consensus profond, c'est-à-dire un certain nombre de valeurs et de principes communs qui nous permettent de chercher ensemble, dans un esprit constructif, des solutions valables pour tous nos concitoyens.

Évidemment, il y a également des projets de loi auxquels nous nous sommes opposés durement au cours de la dernière session. Je mentionne, en particulier, les projets de loi qui regardent les relations du travail, le projet de loi sur les régimes de retraite gouvernementaux, le projet de loi sur les coupures salariales que devront encaisser les travailleurs des secteurs public et parapublic au début de la prochaine année, le projet de loi 72 sur lequel nous trouvions que le gouvernement a apporté une solution très déficiente, le projet de loi 37 sur la fusion de Baie-Comeau et de Hauterive et le projet de loi sur le zonage agricole où nous trouvons qu'il répond très incomplètement aux besoins qui existent de ce côté. Finalement, il y a eu le projet de loi sur la Communauté urbaine de Montréal au sujet duquel, après avoir approuvé l'intention du gouvernement en deuxième lecture, nous nous sommes vus obligés de voter contre le texte, parce qu'il y avait des points essentiels sur lesquels nous n'avions pas eu satisfaction, mais je pense qu'on peut dire d'une manière... (0 h 40)

M. Levesque (Bonaventure): Le projet de loi no 62.

M. Ryan: II y a le projet de loi 62 que j'allais oublier, dont nous avons évidemment discuté, encore aujourd'hui, sur lequel j'ai réussi à réveiller le ministre de la Justice qui aurait voulu qu'on ait un débat très bref et qui, finalement, a parlé presque aussi longtemps que moi, ce qui n'est pas peu dire.

Pour conclure, je pense que nous avons fait un bout de session très productif, le

dernier. Malheureusement, pendant toute la première partie de la session, le gouvernement s'est essayé à maintes reprises au jeu des motions à caractère unanimiste. J'étais très heureux de voir le premier ministre, à la fin du débat, conclure que, selon lui, selon l'expérience que nous avons vécue ensemble, ce n'est peut-être pas le meilleur usage que nous puissions faire de l'institution parlementaire que de multiplier le recours à ces motions. De toute manière, c'est le gouvernement qui a l'initiative dans cette Chambre et nous sommes toujours prêts à lui répondre au meilleur de nos aptitudes.

Je pense que le climat des relations entre les parlementaires de deux côtés, si vous voulez ma modeste impression, s'est plutôt amélioré au cours de la dernière année. Je suis entré en Chambre dans une période où il y avait une polarisation très intense et où on ne se parlait pratiquement pas des deux côtés de la Chambre. Je ne pensais pas que c'était aussi dur. Peut-être que ça s'adressait plus à moi parce que j'étais nouveau, dans une fonction nouvelle, je ne sais trop, mais je trouvais ça un peu dur. Je crois constater que depuis quelques mois, les rapports sont meilleurs de ce côté-là. Les divergences restent nombreuses et profondes, mais il me semble qu'on a appris davantage à se parler avec respect et à se considérer même quand on est à des pôles entièrement opposés dans le spectre des opinions.

Je voudrais dire seulement un mot en terminant sur la leçon que je dégage personnellement de cette session. Je pense que c'est une session qui a été dominée par la hantise de la crise économique qui frappe très durement nos concitoyens du Québec et par cette impression d'échec que nous avons constatée de ce côté-ci de la Chambre en matière de gestion des finances publiques. Je pense que nous étions dans une situation économique qui aurait exigé de la part du gouvernement des ressources, un potentiel d'intervention qui, malheureusement, a été épuisé presque complètement par les déficits énormes des dernières années. C'est malheureux que nous ne puissions pas faire davantage ensemble pour contribuer à soulager cette situation qui multiplie les chômeurs, qui multiplie les fermetures d'entreprises, les coupures de personnel, les réductions dans le volume de la production, les tensions auxquelles sont en proie des milliers et des milliers de foyers de chez nous. Je veux vous assurer que, de ce côté-ci de la Chambre, nous allons employer toute notre énergie au cours de la période à venir pour collaborer à la recherche de solutions aux problèmes qui se posent à nos concitoyens dans le domaine de l'économie.

Au cours des débats, il nous arrive souvent de mettre le blâme du côté du gouvernement. Je pense que c'est notre responsabilité de le faire et, très souvent, nous avons de bons arguments pour appuyer nos reproches. Nous savons très bien qu'il y a une conjoncture générale qui est défavorable actuellement, qui fouette très durement non seulement le Québec, mais tout le Canada, toute l'Amérique du Nord et même tout le monde industrialisé. Je pense qu'il y a une leçon très sérieuse qui se dégage de tout ça pour nous. Après les années d'optimisme que nous avons vécues ensemble depuis 1960, nous sommes entrés dans une période de contraction, de rétrécissement des chances qui nous obligent à faire preuve d'infiniment plus de mesure et de circonspection dans le déploiement des moyens que nous allons puiser finalement dans les goussets des contribuables. Je pense que nous sommes entrés dans une période où les mots discipline, sobriété, pondération, retenue, qui faisaient sourire il n'y a pas tellement longtemps beaucoup de monde dans ce milieu, commencent à prendre toute leur signification. On s'aperçoit que ce sont des mots qui vont peut-être nous conduire au redressement dont nous avons besoin pour retrouver le sens de notre avenir.

Je pense qu'en cette veille de fête nationale il n'y a pas de sentiment plus pertinent à exprimer que celui que je résumerais par les mots suivants: D'un côté, malgré toutes ces difficultés que nous connaissons ensemble, nos concitoyens et nous-mêmes, nous devons garder une foi profonde dans le destin de notre peuple. Notre peuple a connu bien des difficultés dans le passé, toute son histoire a été consacrée à vaincre des obstacles qui apparaissaient insurmontables aux yeux des observateurs de l'extérieur, aux yeux de bien des pessimistes de l'intérieur également. Chaque fois, par une espèce de ressort intérieur très profond et toujours vivant, notre peuple a réussi à passer à travers, à forger son destin, parfois d'une manière obscure, incompréhensible à l'oeil nu, mais pour atteindre de nouveaux sommets, de nouveaux dépassements qui lui ont permis de se doter d'une société, d'un réseau d'institutions, d'un mode de vie qui fait de lui une nation, une communauté nationale, originale, dans la famille des peuples. J'espère que ce sentiment, nous allons tous ensemble l'approfondir au cours des prochains jours. Je parle autant pour nos concitoyens en général que pour nous-mêmes parce que nous sommes tous égaux en ce jour de fête nationale. Il n'y a plus de chefs. Il n'y a plus de sujets. Tout le monde, nous sommes les membres égaux d'une grande famille, y compris ceux qui sont d'une origine différente de celle de la majorité.

Je pense que la deuxième note qui se dégage de notre expérience des derniers mois, c'est la note du réalisme. La foi est

très importante; le réalisme aussi. Je pense que nous devons nous méfier plus que jamais des rêveurs qui nous amènent vers des aventures sans issue et aussi des opportunistes qui voudraient nous diminuer et nous rabaisser à un niveau dont nous ne voulons pas non plus. C'est dans ce mélange harmonieux de réalisme et de foi dans les plus hautes destinées que nous allons trouver le chemin de l'avenir au cours des mois qui s'annoncent dans des conditions difficiles, mais que nous sommes capables de vaincre.

Je souhaite à tous nos concitoyens une très heureuse et, malgré les circonstances difficiles d'aujourd'hui, une joyeuse fête nationale. J'espère que, des deux côtés de la Chambre et tous les Québécois sans aucune distinction de classe, de race, de langue, de religion ou d'origine, tous ensemble nous fêterons le Québec. Merci.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader du gouvernement.

M. Jean-François Bertrand

M. Bertrand: M. le Président, j'ai eu plus que ma large part de fleurs, cet après-midi, lorsque nous avons étudié en troisième lecture le projet de loi no 65, Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels. À ce moment-ci, prenant le chapeau du leader parlementaire du gouvernement, je sens que les circonstances m'amènent à peut-être inviter le pot davantage que les fleurs.

Effectivement, ce métier difficile de parlementaire, particulièrement dans une position où il s'agit, jusqu'à un certain point, de piloter une équipe à l'Assemblée nationale, nous amène, à l'occasion, à des excès de voix et, quelquefois, des écarts de langage. À ceux que j'aurais blessés, d'une façon ou d'une autre, quels que soient les termes qui auraient pu être utilisés dans le cadre de quelque débat que ce soit, je voudrais dire à l'ensemble de mes collègues de l'Assemblée nationale que tout cela n'est jamais fait de mauvaise foi. Nous sommes, de part et d'autre, des gens qui pensent différemment. Nous tentons d'exprimer nos sentiments, nos émotions, nos opinions, sous une forme qui nous apparaît convenable. L'Assemblée nationale étant ce qu'elle est, le Parlement étant l'institution qu'on connaît, il arrive qu'il existe un fossé plus large entre les quelques pieds qui nous séparent les uns des autres qu'entre les sentiments profonds qui nous animent lorsque nous débattons différents projets de loi. Tout le monde aura bien compris qu'en aucun moment, ni par goût, ni par motivation, je n'ai voulu passer sur le corps de qui que ce soit. Mais les mots sont là et ils demeurent. (0 h 50)

Au-delà de ces mots et de ces réalités, il y a tout de même des choses positives qui demeurent. Parmi ces choses les plus positives, je voudrais dire que ce que je retiens de véritablement intéressant dans cette fonction de leader parlementaire du gouvernement, c'est cette très étroite collaboration que le leader parlementaire de l'Opposition qui, pour l'instant, est distrait par son adjoint, a toujours voulu m'accorder.

Effectivement, M. le Président, il s'agit là d'un homme qui a consacré à la vie politique plus d'années que quiconque en cette Chambre, beaucoup d'expérience, beaucoup de sagesse, un certain caractère de renard, une certaine capacité de tourner le fer dans la plaie. Je ne sais, pour n'être pas né dans cette région, s'il s'agit de caractéristiques qui sont propres aux gens de la Gaspésie...

M. Lévesque (Taillon): C'est sui generis.

M. Bertrand: ... il n'en demeure pas moins que j'ai su apprécier et comprendre comment nous devons, ici à l'Assemblée nationale, remplir de part et d'autre nos responsabilités avec tout ce que cela implique de difficultés, de remous et, en même temps, savoir, parce qu'il le faut bien, se rencontrer, se concerter, dialoguer, collaborer et coopérer. À ce point de vue, M. le Président, vous me permettrez ici de rendre un hommage particulier, après quatre mois dans cette fonction de leader parlementaire du gouvernement, à la finesse, à la gentillesse, à la cordialité, à l'amabilité du leader de l'Opposition.

Des voix: Bravo!

M. Lévesque (Bonaventure): ...

M. Bertrand: M. le Président, je sais qu'il ne me le rendra pas nécessairement, mais je sais par contre que, si cette relation doit se maintenir au cours des prochains mois, je peux compter sur une personnalité de cette Assemblée nationale qui apporte une contribution exemplaire à ce qu'on pourrait appeler la valorisation de l'institution même dans laquelle nous sommes appelés à travailler.

Je voudrais aussi, parce que nous oublions trop souvent ces personnes qui travaillent autour de nous, et le leader de l'Opposition sait de qui je veux parler, souligner de façon particulière cette fois-ci à quel point autour de nous, des femmes et des hommes nous aident à faire ici à l'Assemblée nationale, notre strict devoir d'état. Je veux remercier très particulièrement trois personnes qui, depuis fort longtemps, sont associées non seulement

au travail du leader parlementaire du gouvernement qui assume cette responsabilité depuis le 23 février, mais qui, aussi, étaient là au moment où mon prédécesseur, le député de Saint-Jacques, occupait les mêmes fonctions. Je veux mentionner tout particulièrement les noms de Denise Malouin, de Pauline Poisson et de Mathieu Proulx. Ce sont des personnes qui, dans l'ombre, chaque jour, efficacement, font un travail qui, par la suite, est pris en charge par le leader de chacune des formations politiques. Je pense qu'il est tout à fait normal, dans les circonstances, que nous rendions à ces personnes l'hommage qu'elles méritent.

Nous avons vécu une session d'environ 80 jours, 80 jours qui nous auront permis de voter, d'adopter environ 45 projets de loi publics et 35 projets de loi privés; cela constitue, comme le disait le chef de l'Opposition, un travail considérable. Cela constitue aussi un travail qui, particulièrement dans le contexte de la crise économique que nous connaissons, de la crise budgétaire que nous tentons, tous ensemble, de traverser, je dois le dire, est attribuable à cette équipe qui, d'heure en heure, de commission en commission, de séance en séance, ici, jour et nuit, très souvent, sous la gouverne du whip en chef du gouvernement et de ses collaborateurs, a permis que nous en arrivions à faire en sorte que le bilan, somme toute, soit positif en fin de compte. Je voudrais donc remercier ici tous les membres de l'équipe ministérielle, les députés d'abord - je le dis - et les ministres.

Finalement, pour conclure ces quelques propos, je voudrais qu'au moment de terminer ces quelques commentaires, nous puissions rendre hommage ici, à l'Assemblée nationale, à toutes ces personnes qui nous aident de près ou de loin, chez vous, M. le Président, dans votre entourage, les gens de la télédiffusion des Débats, les gens qui travaillent autour de nous comme pages, à une personne qui, demain, prend sa retraite, qui nous quitte après avoir consacré plusieurs années à nous rendre service; simplement par une motion non annoncée, mais qui, je le crois, sera agréée par tout le monde, je veux rendre hommage à quelqu'un que vous avez visité, M. le premier ministre, sur la rue Sainte-Thérèse, dans le comté de Taschereau, à l'occasion du Carnaval de Québec, notre bon ami Paul Frenette qui prend sa retraite demain et que nous remercions beaucoup.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader de l'Opposition.

M. Gérard D. Levesque M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, il est 1 heure du matin et vous devez avoir hâte de m'entendre.

Des voix: Ah! Ah! Ah!

M. Levesque (Bonaventure): Ah! Ah! Ah!

Je suis convaincu que tous ceux qui demeurent ici voudraient bénéficier du message fort important que j'ai à livrer ce soir ou ce matin.

Ceci étant dit, M. le Président, très brièvement, je voudrais vous remercier, vous, l'équipe de la présidence, si je peux l'appeler ainsi, l'équipe de soutien, en commençant par le secrétaire général lui-même, ses collaborateurs, les gens du journal des Débats, du Parlementaire, les journalistes, qui sont tous là et nous écoutent présentement...

Des voix: Ah! Ah! Ah!

M. Levesque (Bonaventure): Je voudrais féliciter et remercier tous ceux, autrement dit, qui ont collaboré avec nous pour faciliter toute cette vie parlementaire qui a divers aspects: des aspects heureux, des aspects malheureux, des aspects de cordialité, des aspects d'affrontement, de confrontation, des compliments de fin de session, que nous aimons bien recevoir, mais qui nous mettent mal à l'aise vis-à-vis de nos troupes qui disent: II a dû nous trahir, ce leader parlementaire de l'Opposition! Pourquoi n'a-t-il pas été plus dur, pourquoi ne leur a-t-il pas mis des bâtons dans les roues, pourquoi n'a-t-il pas fait en sorte que cette session ne se termine jamais? (1 heure)

Tout ceci étant dit, c'est avec beaucoup de cordialité que je salue mon bon ami le leader parlementaire du gouvernement, qui mérite sûrement des félicitations pour la façon dont il a assumé ses responsabilités, avec sincérité, avec fiabilité également, parce que je n'ai eu aucune occasion de le voir manquer à sa parole. Je pense que c'est une des choses qui compte le plus dans les relations, les rapports qui doivent exister entre les leaders et leaders adjoints, de part et d'autre. Les whips, je salue mon "boss", le whip en chef parce que c'est lui qui a la discipline ici. Je le remercie du travail qu'il fait tous les matins à 9 heures, lorsqu'il nous convoque en caucus et qu'il dirige très bien toute cette réunion qui doit se faire rapidement et avec efficacité. Je le félicite et je félicite également, en plus du député de Portneuf, le député de Marguerite-Bourgeoys qui lui aussi a assumé de nouvelles responsabilités comme leader adjoint. Je félicite évidemment, cela va de soi, M. le Président, je prends 30 secondes pour féliciter tous mes collègues, surtout ceux qui sont encore ici. Ils sont tous ici, d'après ce que je peux voir. Je les

félicite parce que ce que nous voyons ici et ce que nos concitoyens voient à la télévision, c'est juste la pointe de l'iceberg.

Tout le travail qui se fait en commission parlementaire, en comité, les missions économiques, sociales, culturelles, agricoles, tous ces travaux qui se font à la journée ici, tout le travail des députés dans les comtés, cela ne paraît pas ici à l'écran mais cela fait partie du travail des députés, d'un côté comme de l'autre de l'Assemblée nationale. Je veux féliciter tous nos collègues pour le magnifique travail qu'ils font. Eux, évidemment, ils sont du mauvais bord, M. le Président. Ils essaient, mais cela n'a pas l'air de réussir. Tout de même, ce soir, je ne dirai pas un mot. À 1 heure du matin, M. le Président, je n'ai pas envie de susciter quelque controverse que ce soit. Simplement, je continuerai à faire mon devoir comme mes collègues pour attaquer ce gouvernement.

Ceci dit, M. le Président, je veux souhaiter bonne fête, encore une fois, avant qu'il ne soit trop tard, c'est l'heure du Nouveau-Brunswick, mais, tout de même, je peux souhaiter bonne fête à mon vis-à-vis, le leader parlementaire du gouvernement, même s'il est 1 heure du matin. Je voudrais, avant de terminer, simplement rappeler l'importance qu'il y a pour nous tous de conserver ce dialogue même lorsqu'on se chicane. J'ai dit au leader parlementaire du gouvernement, quand il a été nommé par le premier ministre: Fais attention, on va se chicaner. Mais il y a une chose importante, c'est que, quand on sort d'ici, on ne se chicane plus parce qu'écoutez, si on ne se parle plus entre leaders, vous allez avoir bien des problèmes. Vous ne finirez jamais une session. Je vous le dis, jamais vous ne finirez une session, ce sera une session continuelle.

Ceci dit, M. le Président, nous nous sommes parlé quelquefois plus durement, toujours fermement, toujours sincèrement. Soyez sûr d'une chose, dans l'intérêt du public, c'est important, s'il y a des législations, qu'on les laisse adopter pour deux raisons: La bonne pour aider le public; la mauvaise, pour que le gouvernement soit jugé le plus rapidement possible et qu'il soit battu. Il faut faire notre possible, M. le Président, pour bonifier les projets de loi. Mais, lorsque le gouvernement s'entête, on les laisse adopter et, à un moment donné, cela s'accumule. Je connais ça. J'ai été d'un bord, j'ai été de l'autre. À un moment donné, on a perdu nos élections. D'autres fois, on les a gagnées. La prochaine fois, on les gagnera parce que, quand on est dans l'Opposition, on s'en va vers le pouvoir. Quand on est au pouvoir, on s'en va vers l'Opposition. Cela a toujours été comme ça.

M. le Président, la population du Québec se réjouit ce soir de voir qu'encore une fois l'histoire s'écrit. Ces messieurs des bills 68, 70, 72, tous ces bills, le bill 37, évidemment, ça fait partie du bagage qui s'en va, qui amène tous ces gens vers la porte, vers la sortie, M. le Président. Quant à nous, nous sommes disponibles et surtout avec un chef comme le député d'Argenteuil qui a fait un travail magnifique, qui fait l'édification de ceux avec qui il travaille. Oui, oui, il a été pour nous tous une source d'inspiration et il l'est tous les jours, M. le Président. Il y a du placotage à gauche et à droite, mais il y a une chose: Je suis fier de travailler avec cet homme. C'est un homme - et je tiens à le dire en terminant - qui nous a appris à travailler d'une façon efficace et en profondeur. C'est un homme de principe, un homme d'intégrité, un homme qui nous amène, avec son esprit d'analyse et de synthèse, à garder une cohérence dans nos politiques. Je suis heureux de travailler avec lui et tous nos collègues ici ce soir sont heureux de témoigner que nous avons travaillé, que nous avons fait une excellente session sous le leadership d'un homme comme le député d'Argenteuil que je salue en terminant. Au premier ministre, au chef de l'Opposition, à tout le monde, mes meilleurs voeux. Bonnes vacances, bon été et à la prochaine chicane!

Le Vice-Président (M. Jolivet): Avant de passer à la...

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! II y a une dernière motion importante du leader du gouvernement.

Ajournement au 9 novembre

M. Bertrand: M. le Président, je voudrais faire motion pour que nous ajournions nos travaux jusqu'au 9 novembre prochain, à 14 heures.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Avant d'accepter cette motion, j'aimerais vous rappeler qu'il y a sanction, à la salle 103-A, de plusieurs projets de loi. M. le leader du gouvernement.

M. Bertrand: Et contrairement à une information donnée ce soir, M. le Président, la commission des engagements financiers se réunira effectivement le 8 juillet prochain.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Cette motion d'ajournement est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté.

(Fin de la séance à 1 h 07)

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