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Version finale

32nd Legislature, 4th Session
(March 23, 1983 au June 20, 1984)

Wednesday, April 13, 1983 - Vol. 27 N° 7

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Journal des débats

 

(Dix heures deux minutes)

Le Vice-Président (M. Rancourt): À l'ordre, s'il vous plaît!

Un moment de recueillement.

Veuillez prendre place.

M. le leader du gouvernement.

M. Bertrand: M. le Président, comme je vous l'avais demandé hier, je voudrais non pas céder mon droit de parole puisque je demandais l'ajournement du débat à titre de leader parlementaire du gouvernement, mais vous indiquer que c'est notre jeune et brillant collègue, le député de Bourassa qui, ce matin, ouvrira la reprise du débat sur le message inaugural.

Reprise du débat sur le message inaugural et les motions de censure

Le Vice-Président (M. Rancourt): Reprise du débat sur le message inaugural et sur les motions de censure du député du comté de Bonaventure et du député du comté de Gatineau.

La parole est au député de Bourassa.

M. Patrice Laplante

M. Laplante: Merci, M. le Président. Depuis le début de cette session j'ai entendu beaucoup trop d'intervenants nous dire que tout va mal, que l'économie est au plus bas, que nous frôlons le gouffre. Loin de moi l'idée de soutenir que tout est pour le mieux, ce serait de l'inconscience. Il me semble toutefois qu'un langage aussi alarmiste n'est plus et qu'il n'a jamais été justifié. Je pense même qu'il cause plus de problèmes qu'il ne contribue à en régler car maintenant qu'une reprise de l'économie est enfin prévisible, un tel langage risque encore de la retarder.

En effet, en faisant preuve d'un pessimisme exagéré à ce moment-ci, le risque est grand de casser cette confiance toute neuve et par conséquent fragile, qui inciterait les investisseurs, qu'il s'agisse d'individus ou d'entreprises, à venir injecter dans l'économie les fonds nouveaux dont elle a le plus urgent besoin.

Qu'on ne se méprenne pas sur mes propos, M. le Président, ils ne sont pas le fruit d'un optimisme béat. Je dis simplement que nous avons enfin des raisons tangibles de reprendre confiance en notre avenir. D'après le Conference Board, la reprise est enfin là. On m'objectera peut-être que les prévisions de cet organisme s'appuient sur l'ensemble de l'économie canadienne et non seulement sur celle du Québec.

À cela, je réponds que, depuis le temps qu'on nous répète sur tous les tons que le Québec fait encore partie du Canada, pour nous empêcher d'adopter des politiques qui nous soient propres dans certains domaines d'activité, je ne vois pas ce qui empêcherait le Québec de participer à cette reprise qui s'amorce au Canada. Bien sûr, ce n'est là qu'une considération théorique. Mais ma certitude que le plus difficile de la crise est passé au Québec comme ailleurs se fonde sur d'autres éléments beaucoup plus concrets.

Permettez-moi, M. le Président, de faire part à cette Assemblée d'une expérience en cours depuis près d'un an dans la circonscription que je représente ici. Pour bien situer le contexte où cette expérience a pris naissance, je préciserai que, dans la circonscription de Bourassa, l'on retrouve une très forte concentration de PME. C'est donc dire qu'en mai 1982, la crise économique se faisait sentir avec une plus grande acuité. J'ai alors engagé à mon bureau de comté une personne dont l'unique tâche serait de visiter ces entreprises, de les mettre au courant des différents programmes existants et de voir avec elles quelles seraient les meilleures avenues à explorer.

Je partais du principe qu'il était inadmissible que des entreprises en arrivent à une fermeture alors que le coup de pouce nécessaire à leur survie était là à portée de leur main. Je puis dire que lorsque les visites industrielles ont commencé, en mai dernier, les responsables d'entreprises ne savaient plus où donner de la tête. C'était pour eux le grand trou noir, mais ils ignoraient s'ils réussiraient à en sortir. Pris entre des taux d'intérêt démentiels, des stocks qui s'accumulaient faute d'acheteurs, ils se retrouvaient avec un problème de financement sur les bras auquel il semblait difficile d'apporter une solution. Dans ces conditions, il est bien évident qu'il n'était pas question d'expansion.

Le 1er novembre dernier, à mon instigation, 300 d'entre eux participaient à un colloque d'une journée dont le thème était l'avenir de la PME au Québec. Ce colloque représentait pour eux l'occasion de rencontrer plusieurs titulaires de ministères à vocation économique ainsi qu'un expert en gestion et en économie. Ce colloque a coïncidé avec les premiers indices véritables d'une reprise de l'économie américaine de sorte qu'il m'est difficile d'en mesurer l'effet exact sur le moral des dirigeants et des dirigeantes d'entreprise présents. Il n'en

demeure pas moins que ce jour-là on pouvait sentir, pour la première fois depuis longtemps, que le vent était sur le point de tourner. Les propos étaient moins défaitistes, l'espoir renaissait.

Depuis, moi-même ou mon secrétaire avons continué à visiter les industries et je puis vous assurer que la tendance que j'avais pressentie le 1er novembre se confirme de plus en plus. En effet, surtout depuis le mois de janvier, les responsables des entreprises que nous visitons recommencent à nous parler de projets d'expansion. Tous manifestent une volonté ferme de reprendre le terrain que la récession leur a fait perdre. Il y a encore mieux. Environ 40% des entreprises visitées depuis janvier ont ressorti les plans d'expansion qu'elles avaient il y a deux ans et recommencent enfin à envisager leur réalisation dans un avenir pas trop lointain.

Par ce colloque, près de 250 nouveaux emplois ont été créés depuis le 1er novembre dans le comté de Bourassa. Aujourd'hui même, au moment où je vous parle, j'ai en main un plan pour une nouvelle industrie, pour l'expansion d'une industrie qui a déjà près de 120 employés et qui portera ce nombre à près de 600. C'est un plan que je dois présenter au ministre de l'Industrie et du Commerce aujourd'hui. C'est l'effort que nous avons pu faire tous ensemble dans le comté de Bourassa afin de soutenir notre PME.

De ce contact aussi quotidien avec les entreprises de la circonscription de Bourassa, j'ai la conviction que nos gens d'affaires ne se sont pas laissé abattre par les difficultés rencontrées depuis deux ans. Si c'est vrai chez moi et partout ailleurs au Canada et aux États-Unis, je ne vois pas pourquoi ce ne serait pas la même chose au Québec. Voilà pourquoi j'aimerais qu'on cesse les critiques destructives, à grand renfort de chiffres plus effrayants et démoralisants les uns que les autres. (10 h 10)

Pour en revenir à la circonscription de Bourassa, il n'y a pas que l'entreprise privée qui ait repris ses investissements, le gouvernement du Québec a aussi fait sa part. Des travaux de réaménagement et de construction de l'ordre de 8 500 000 $ sont présentement en cours à l'hôpital Fleury et à Hydro-Québec. Hydro-Québec a récemment entrepris la construction d'un évacuateur de crue de sa centrale de Rivière-des-Prairies, un projet qui, à lui seul, représente près de 78 000 000 $. Ces deux projets seulement, ensemble, représentent pour le comté de Bourassa, près de 600 emplois nouveaux. Un peu partout dans le Québec, des investissements semblables sont prévus et contribueront à affermir la reprise et à réduire le taux de chômage.

Depuis un an, ce gouvernement a réussi à maintenir le taux de chômage dans des limites, non pas raisonnables, mais à tout le moins comparables à ce qui existait dans les autres provinces canadiennes. Il a été le premier, il y a un an, à mettre sur pied diverses mesures d'urgence pour lutter contre un chômage qui prenait des proportions épidémiques dans tout le Québec. Cet effort sans précédent pour créer des emplois, fussent-ils temporaires, il l'a consenti seul. En effet, ce n'est qu'à la toute fin de l'année 1982 que le gouvernement fédéral s'est enfin réveillé à la réalité du chômage. Si seulement il s'était contenté durant toute cette période de ne pas participer à cette lutte au chômage, les efforts du gouvernement du Québec auraient sans doute réussi à réduire le taux du chômage au lieu de simplement l'empêcher de grimper vers de nouveaux sommets. Malheureusement, M. le Président, les exemples ne manquent pas pour démontrer que les politiques fédérales, loin d'aider à la création d'emplois, y ont carrément nui à cette époque.

Permettez-moi de citer quelques-uns de ces exemples où l'incurie fédérale a empêché la création d'emplois au Québec quand elle n'a pas cessé de causer directement la perte de nombreux autres et ce, trop souvent, dans des secteurs où l'avenir se révélait prometteur. L'exemple qui nous semble le plus évident est celui du F-18. Tout le monde sait maintenant que le Québec ne bénéficiera pas ou qu'il ne bénéficiera que d'une faible partie des retombées promises lors de l'octroi de ce contrat. On n'insistera jamais assez sur le fait que la décision fédérale d'acheter des avions chasseurs F-18 met en péril tout le développement de l'aéronautique au Québec. Déjà cette industrie, qui est la plus importante de la région métropolitaine, a perdu en quelques mois au-delà de 6000 emplois.

L'aéronautique n'est malheureusement pas le seul secteur d'activité économique où la politique fédérale est néfaste au Québec.

Un autre secteur de pointe, celui de la recherche pharmaceutique, connaît de grandes difficultés reliées cette fois aux politiques fédérales concernant les brevets. Comme ces politiques désavantagent les entreprises qui investissent dans la recherche et que 80% des laboratoires de recherche canadiens sont situés au Québec, il est bien évident que nous serons les plus touchés. La fermeture imminente des laboratoires à Ayerst est une conséquence directe de ces orientations politiques qui mettent en péril aujourd'hui, dans la région de Montréal, près de 7000 emplois reliés à l'industrie de la recherche pharmaceutique.

Un autre exemple qui me laisse pantois. Il y a quelque temps la ville de Montréal manifestait le désir de créer le Centre international biotechnologique de l'ONUDI. Tous les intervenants montréalais appuyaient

ce projet. Le gouvernement du Québec avait même annoncé sa participation financière. Peu après, d'autres villes canadiennes faisaient part de leur intérêt face à ce projet. Faisant alors preuve d'un rare courage politique, le gouvernement fédéral se retirait tout simplement du dossier, évitant ainsi d'avoir à soutenir la candidature de Montréal ou de d'autres villes canadiennes devant l'organisme international concerné. De tels exemples ne peuvent que confirmer ce que le Parti québécois affirme depuis des années. Le Québec n'a pas sa place dans la fédération canadienne. Ses ressources y sont gaspillées et il y perd ses meilleures chances d'épanouissement. Avons-nous les moyens de subventionner les agriculteurs de l'Ouest canadien au détriment de notre propre industrie agro-alimentaire? Avons-nous les moyens de contribuer au développement de l'industrie aéronautique en Ontario, alors que nos propres entreprises dans ce domaine tirent de l'aile? Pouvons-nous nous permettre l'établissement d'une nouvelle ligne Borden qui viendrait asphyxier tout un secteur de notre économie et entraînerait un autre désastre comme celui que nous vivons actuellement dans l'industrie pétrochimique? Je ne le pense pas, M. le Président. Nous n'en avons pas les moyens. Nous ne pouvons assumer 8 000 000 000 $ du déficit canadien alors que cette somme a été bien souvent utilisée à l'encontre de nos intérêts. Nous n'avons plus de temps à perdre en pourparlers stériles comme ceux que nous avons connus au printemps dernier, alors que nous tentions d'intéresser Ottawa au sort de ceux qui, de plus en plus nombreux, devaient compter sur l'assurance-chômage ou sur l'aide sociale pour survivre. Nous ne pouvons plus nous permettre qu'une politique financière aberrante vienne jeter par terre une PME pourtant florissante de 1976 à 1980.

Je terminerai, M. le Président, en précisant que si le Québec a réussi à maintenir une certaine activité économique au cours des deux dernières années, malgré les bâtons dans les roues que représentent les politiques fédérales en cette matière, il ne fait pour moi aucun doute qu'il y serait arrivé beaucoup plus facilement, avec un meilleur résultat, s'il avait eu les pleins pouvoirs pour décider des meilleurs moyens à prendre pour faire face aux situations, donc, s'il avait été indépendant.

Sur ces considérations, je pose la même question que M. Alfred Rouleau a posée tout dernièrement d'une station de télévision. Il l'a posée directement à l'Opposition. Pour lui, le parti au pouvoir, le gouvernement actuel a fait des efforts louables, honnêtes pour traverser cette crise. Il a posé aussi une question à l'Opposition à laquelle elle n'a pas répondu, hier non plus. J'espère qu'elle y répondra au cours de la semaine.

Vous, de l'Opposition, qui avez toujours une critique destructive, qui n'avez rien de constructif dans tout ce que vous sortez à partir des périodes de questions, vous essayez depuis deux ans de gratter sur n'importe quoi à part l'économie du Québec. Tout s'est révélé à venir jusqu'à aujourd'hui, des ballons politiques. Où est l'intérêt de l'Opposition en matière économique? Qu'est-ce que l'Opposition aurait fait dans la situation que nous avons vécue depuis deux ans? Quelle solution aurait-elle apportée au peuple québécois pour résoudre les problèmes économiques du Québec? C'est la question que M. Rouleau a posée. C'est la question aujourd'hui, en terminant, que je pose à l'Opposition, savoir d'y aller d'une manière constructive pour l'avenir de chacun des Québécois qui sont ici. C'est à cela que la population s'attend, ce n'est pas au fait de gratter dans des petits pseudo-scandales, à lancer des "ballounes" comme on fait depuis deux ans à cette Assemblée nationale. (10 h 20)

Aucune question constructive n'est sortie, à part les coupures de journal. Lorsqu'une Opposition se laisse dire par la presse que celle-ci joue maintenant le rôle de l'Opposition officielle au Québec, j'aurais honte à leur place, avec 43 députés qui ne peuvent même pas avoir un service de recherche et poser des questions intelligentes pendant les périodes de questions; ce ne sont que des coupures de presse. Le Parti québécois sera là encore pour 20 ans et, à la prochaine élection, l'indépendance sera garantie avec des gens comme cela. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député d'Outremont.

M. Pierre-C. Fortier

M. Fortier: M. le Président, en ce début de session, dans la tradition britannique, le discours inaugural est toujours l'occasion de tracer des bilans, de voir où nous en sommes sur le plan économique, sur le plan social et sur le plan politique et de tenter de connaître du gouvernement quelles sont ses vraies intentions. Bien sûr, dans la tradition des gouvernements britanniques, il y a une formation politique qui a la majorité et c'est elle qui gouverne ou c'est elle qui devrait gouverner.

Le député de Bourassa nous pose la question: Qu'aurions-nous fait? C'est là une question hypothétique, mais si l'on veut connaître notre marque de commerce, si l'on veut connaître ce que nous avons fait dans le passé - nous l'avons dit à plusieurs reprises - on n'a qu'à comparer le développement économique du Québec de 1970 à 1976 et celui qui a prévalu depuis que le Parti québécois est au pouvoir. On

s'apercevra - je ne veux pas revenir sur les statistiques - que la proportion des travaux, des investissements, de la création d'emplois qui s'est faite au Québec par rapport à l'ensemble du Canada a toujours été une proportion qui se rapprochait du pourcentage de la population du Québec par rapport à celle du Canada. Mais malheureusement, depuis que le Parti québécois est au pouvoir, ces statistiques diminuent, ce pourcentage du travail qui est créé au Québec par rapport au travail qui est créé dans les autres provinces canadiennes diminue considérablement. C'est la raison pour laquelle nous nous trouvons dans une situation si pénible maintenant.

Que ferons-nous lorsque nous serons au pouvoir, dans un an, dans six mois, dans deux ans? Nous le dirons au moment de la campagne électorale. Présentement, nous sommes, à l'intérieur de la commission politique de notre parti, à compléter nos plans à ce sujet et nous ferons connaître nos intentions lorsque viendra le temps de la prochaine campagne électorale.

Comme je le disais il y a un instant, M. le Président, c'est le gouvernement du Parti québécois qui est au pouvoir et c'est lui qui, dans son discours inaugural, doit nous faire savoir ce qu'il pense de la situation présente et qui doit tenter de tracer les orientations qui permettent et au gouvernement et aux forces vives du Québec de nous sortir du trou dans lequel nous sommes.

Malheureusement, le discours n'a pas fait sa marque et personne ne l'a pris au sérieux. Je crois qu'on doit se demander pourquoi. Le premier ministre, qui est un communicateur tout à fait exemplaire, un communicateur au verbe magique qui, dans le passé, a soulevé la population, pouvait cajoler les gens, pouvait les convaincre des meilleurs lendemains, ce grand communicateur ne réussit plus autant qu'il réussissait dans le passé et on s'aperçoit par les sondages que sa popularité est en chute libre présentement.

Je crois qu'on doit se demander comment il se fait qu'un gouvernement qui avait la cote d'amour de la population, qu'un premier ministre qui réussissait à convaincre la population d'à peu près n'importe quoi ne peut le faire maintenant. Si on lit attentivement le discours inaugural, on s'aperçoit quand même, si on a un peu d'expérience des discours inauguraux des autres années, qu'il s'y trouve quelques idées, mais que la foi n'y est plus et que la population n'est pas du tout pressée de suivre l'orientation que lui a tracée le premier ministre du Québec.

Bien sûr, on retrouve trois parties dans ce discours inaugural. Le premier ministre nous a parlé d'un État nouveau, d'un État qui devrait être plus proche des citoyens. Il y a longtemps qu'on le dit. On a parlé de la décentralisation de l'État. Il y a au moins trois ou quatre ans que le gouvernement nous en parle. On nous parle de concertation, c'est le nouveau mot à la mode pour tenter de trouver des solutions soi-même lorsque le gouvernement n'en a pas lui-même. On a parlé d'économie et d'emploi et on a parlé de changement de société.

Si nous n'avions pas entendu ces mots auparavant, soit depuis quatre ou cinq ans, dans des discours inauguraux précédents, si nous avions entendu ce discours pour la première fois, je crois qu'il aurait eu quelque crédibilité. Malheureusement, il y a beaucoup de répétitions. Malheureusement, la force de communication du premier ministre n'y est plus et, maintenant, il semble bien que le gouvernement n'est plus à même de tracer l'orientation dont le Québec a besoin pour nous sortir de l'impasse dans laquelle il nous a mis.

Pourtant, la situation économique du Québec, le manque de création d'emplois, le manque d'investissements, malgré les efforts - comme le disait mon ami le député de Bourassa - du secteur privé qui se débat à l'intérieur d'une situation pénible... Nous connaissons tous, nous qui venons du secteur privé, des amis, des parents et des gens qui oeuvrent à l'intérieur de ce milieu et nous savons que plusieurs d'entre eux se débattent pour se sortir de la crise malgré tout etmalgré les nombreux handicaps que le gouvernement a bâtis autour de nous depuis qu'il est au pouvoir.

La situation présente commanderait d'avoir un gouvernement avec une autorité morale exemplaire et un leadership implacable, capable d'augmenter le dynamisme des agents économiques et capable d'augmenter le dynamisme de toutes les forces de la société québécoise.

Mais le verbe ne prend plus. Le communicateur exemplaire qu'était le premier ministre ne prend plus. On doit se poser la question: Mais pourquoi? Je vais tenter de répondre à cette question. Mais pourquoi avons-nous maintenant un gouvernement qui ne prend plus, qui n'a plus de crédibilité, qui n'a plus d'autorité morale et qui n'a plus l'autorité qu'il faut pour mener les affaires du Québec?

Dans un premier temps, c'est un gouvernement qui, malheureusement, a fait trop de promesses. Il s'agit de faire le tour du Québec, d'aller dans de nombreuses régions pour s'en convaincre. Le député de Bourassa a cité des notes de journalistes qui disent: Mais que font les députés libéraux? Bien sûr, je vais vous le dire. En fin de semaine, je suis allé en Gaspésie. Auparavant, j'étais allé dans la région de Thetford-Mines et auparavant sur la Côte-Nord. Chaque fois que nous allons dans des régions éloignées, nous ne faisons pas les manchettes des journaux de Montréal ou de Québec. Nous faisons les

manchettes des journaux régionaux. Je crois que cette stratégie est beaucoup plus efficace qu'une stratégie qui viserait a toujours faire les manchettes des journaux de Montréal uniquement.

J'étais en Gaspésie, en fin de semaine dernière, et il faut comprendre les plaintes et les sarcasmes de ces gens vis-à-vis du gouvernement lorsqu'on sait que le chômage, selon les dernières statistiques, touche 25% ou 26% de la population et surtout lorsque c'est une des nombreuses régions où le gouvernement a fait d'innombrables promesses. Le premier ministre lui-même, en 1977 ou en 1978, a promis que Gaspé allait être le centre des pêcheries du Québec. Ces gens-là attendent toujours la réalisation de cette promesse. On a promis également que la route qui fait le tour de la Gaspésie serait terminée dans les mois qui suivraient l'élection. Ces gens-là attendent toujours. Il faut rencontrer les gens de la Gaspésie pour les savoir déçus d'avoir été trompés.

Que font les députés libéraux? Ils sont allés également, comme je l'ai fait avec des collègues, dans la région de Thetford-Mines et nous en avons fait un débat ici il y a quelque quinze jours ou trois semaines. C'était pour rappeler au gouvernement toutes les promesses qu'il avait faites, soit par le premier ministre ou soit par l'adjoint parlementaire au ministre de l'Energie et des Ressources, en ce qui a trait à la nationalisation de la société Asbestos et en ce qui a trait à la création d'emplois dans cette région. (11 h 30)

Qu'est-ce qu'on avait promis? On avait déclaré ceci: à moins que la société Asbestos ne devienne une société d'État, à moins que la société Asbestos Corporation ne soit nationalisée, il y aurait grand danger que les employés d'Asbestos Corporation perdent leur emploi. On leur avait promis que si la société Asbestos était nationalisée, tous les travailleurs, tous les mineurs d'Asbestos Corporation garderaient leur emploi et ne seraient plus obligés de suivre les diktats des multinationales, des méchantes multinationales américaines. Qu'est-ce qui est arrivé, M. le Président? La condition économique s'est détériorée, mais le ministre de l'Énergie et des Ressources lui-même l'a dit à plusieurs reprises, il connaissait pertinemment la situation de l'industrie de l'amiante dans le monde au moment où il a fait l'achat de la compagnie et, malgré tout, les promesses ont été faites et n'ont pas été respectées.

Dans la région de la Gaspésie, le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation n'ose plus s'y montrer et je crois que, dans la région de Thetford-Mines, dans la région de l'amiante, bien sûr, on ne parlera pas de l'adjoint parlementaire qui a été sorti à deux reprises et je ne parlerai pas de la situation qui fait que ce député ne peut plus se présenter dans son comté. Même le ministre de l'Énergie et des Ressources ne peut plus y aller. Il refuse même les convocations que lui fait le Comité des mineurs de Thetford-Mines et d'Asbestos Corporation alors qu'on le supplie et qu'on lui demande d'aller discuter avec eux de la situation pénible dans laquelle ces gens se trouvent.

Des promesses ont été faites dans d'autres régions. Le chef de votre formation en a fait une revue complète, mais je voulais souligner les régions où je suis allé moi-même. Une autre de ces régions est la Côte-Nord. Combien de promesses ont été faites par le gouvernement sur la Côte-Nord? Combien de fois le ministre responsable du Développement économique, avant d'être ministre du Commerce extérieur, M. Landry, est-il allé sur la Côte-Nord pour dire que l'OPDQ mettrait en branle de nombreux programmes pour enfin suppléer à la perte d'emplois qui dérivait de la situation du fer sur la Côte-Nord?

Lorsque nous avons siégé en commission parlementaire à Schefferville, nous avons prouvé - mon collègue de Mont-Royal en a fait état également en traitant de SIDBEC -que le gouvernement a trop tardé à faire face à une situation qui, dans le cas de SIDBEC, était connue depuis avant même les dernières élections générales. Bien sûr, lorsqu'on attend pour prendre des décisions qui s'imposent, on fait des promesses, on retarde les décisions, on hésite et pendant ce temps, la situation empire.

C'est donc la première raison pour laquelle le discours inaugural du premier ministre et son verbe ne prennent plus dans la population. Ce gouvernement a perdu sa crédibilité en faisant trop de promesses dans toutes les régions du Québec, promesses qui n'ont pas été tenues.

La deuxième raison est que ce gouvernement offre trop souvent des solutions peu pratiques et qui ne collent pas à la réalité. La population ne croit plus à ce gouvernement, aux solutions apportées par un gouvernement qui tente d'orienter notre développement économique. Je viens de faire état de la nationalisation d'Asbestos Corporation. Voilà un investissement qui n'était nullement nécessaire, nous l'avons dit à plusieurs reprises. Voilà un investissement de quelque 175 000 000 $. Si on ne les a pas déjà payés, il faudra bien qu'on les paie éventuellement, même si l'entente avec General Dynamics nous permet de reporter le paiement à plus tard. Voilà une dette que nos enfants devront payer si ce gouvernement ne peut la payer à cause de sa situation financière. Voilà une solution qui, pour la région de l'amiante, n'en est pas une. La preuve a été faite malgré nous et j'en suis bien malheureux.

Alors qu'il y a des problèmes présentement dans la région de Montréal en particulier, dans un autre domaine, le Parti québécois présente des solutions qui n'en sont pas, des solutions économiques qui, éventuellement, commanderont des investissements de plusieurs millions, si le gouvernement suit les propositions de certains de ses députés et les résolutions qui ont été adoptées par le dernier conseil du Parti québécois. C'est tout le problème des raffineries de pétrole de Montréal-Est. Voilà une situation qui était connue depuis 1978 pour quiconque relit le livre blanc de M. Joron qui, à la suite d'auditions multiples, avait proposé une politique énergétique qui allait dans le sens de diminuer notre dépendance du pétrole et de favoriser la pénétration du gaz et de l'électricité et qu'alors dans son livre blanc on disait en toutes lettres qu'il fallait diminuer la proportion d'utilisation du pétrole de 70% à 40% en 1990. Alors, on savait pertinemment, à ce moment, que ce marché irait en décroissant et on savait pertinemment que la diminution d'utilisation du pétrole, éventuellement, était pour condamner une, deux ou trois raffineries de pétrole à fermer leurs portes. En plus de cela il y a eu la taxe ascenseur. En plus de cela il y a eu les économies d'énergie. En plus de cela il y a eu toute la campagne. Mais il reste que cette situation était connue dès 1978 et je crois qu'on doit blâmer ce gouvernement de n'avoir pas fait ce qu'il aurait dû faire à ce moment-là. Cela aurait été d'avertir les employés des raffineries de pétrole que tôt ou tard ils devaient perdre leur emploi puisque la politique du gouvernement était de favoriser d'autres formes d'énergie.

Pendant ce temps, le ministre se vantait de la création d'emplois due à la pénétration du gaz. On sait maintenant qu'il aurait fallu mettre en balance la création d'emplois due à la pénétration du gaz et soustraire de ce montant les pertes d'emplois dues aux fermetures de raffineries qui devaient se faire tôt ou tard. Mais la proposition du gouvernement du Parti québécois, c'est bien simple, il faudrait nationaliser une raffinerie. En quoi cette solution va-t-elle changer la conjoncture qui existe et qui va s'aggraver de plus en plus, non seulement au Québec, mais également dans les provinces maritimes, en Ontario? C'est une situation où, dans toutes les provinces de l'Est du Canada, il y a une moins grande dépendance du pétrole pour favoriser le gaz et l'électricité. C'est une politique qui a été voulue par le gouvernement du Québec et c'est une politique qui, je crois, est voulue par le gouvernement du Canada.

On se propose de nationaliser ou d'acheter. J'espère que le gouvernement n'ira pas dans cette direction parce que ceci nous mènerait à investir des sommes dans la nationalisation ou dans l'achat d'une raffinerie, dans la nationalisation ou dans l'achat d'un réseau de distribution. La guerre des prix qui prévaut et un marché qui ira encore en se rétrécissant dans les années à venir, cela fera en sorte que cet investissement sera encore une fois un très mauvais investissement de la même façon que le gouvernement a fait dans le domaine de l'amiante. Cela ne créera aucun emploi éventuellement et ne réglera aucunement le développement économique du Québec pour ces régions et pour le Québec en général.

Une troisième raison pour laquelle le discours inaugural n'a pas été entendu et n'a plus aucune crédibilité, c'est que le gouvernement lui-même a perdu sa crédibilité, a perdu sa transparence. Combien de scandales depuis deux ans? Combien de scandales qui font que des personnages importants du gouvernement doivent donner leur démission, doivent subir des procès pour toutes sortes de raisons? Comment expliquer que ces gens sont maintenus dans leurs fonctions alors même que dans le passé leurs bévues auraient commandé, au nom de la transparence du gouvernement, de mettre ces gens de côté pour s'assurer que la moralité du gouvernement soit préservée, de même que l'excellence requise pour diriger la nation de façon à préserver la crédibilité du gouvernement? Si le gouvernement se trouve dans la situation où il est présentement, compte tenu de ses scandales, je crois que dans une certaine mesure il l'a lui-même voulu.

Une quatrième raison pour laquelle le gouvernement n'a plus la crédibilité nécessaire pour faire passer son discours inaugural, c'est le fait que le gouvernement a mal géré ses finances publiques. Bien sûr, il a fallu, à un moment donné, augmenter les impôts et, comme mon collègue de Vaudreuil-Soulanges l'a souligné, il a augmenté les impôts de 1 200 000 000 $ au moment même, à l'automne 1981, où il y avait une crise internationale. Cette ponction fiscale a donné un coup très dur à l'économie du Québec et à fait en sorte que les personnes morales et physiques se sont trouvées dans une situation désastreuse pour faire face à la situation économique qui prévalait à ce moment.

C'est donc dire, M. le Président, que le gouvernement, qui avait mal géré ses finances publiques, a pris une mauvaise décision alors que la crise commençait. Il devait, j'imagine sous les pressions des gens de New York qui lui prêtaient de l'argent, prendre une décision qui, selon toute évidence, n'allait pas dans le sens du développement économique ou du moins dans le sens d'aider les agents économiques à préserver les emplois du Québec. Parmi ces décisions et encore là, en faisant le tour du

Québec on s'en aperçoit, celle qui a fait le plus de mal aux régions du Québec, c'est la taxe ascenseur sur l'essence.

M. le Président, nous l'avons dit et peut-être qu'à ce moment-là, nous n'avions pas prévu tous les maux que cette taxe causerait. Il faut bien s'en rendre compte et c'est un vrai scandale. Lorsqu'on fait le tour du Québec, lorsqu'on va en Gaspésie, lorsqu'on va dans la région de l'amiante, lorsqu'on va sur la Côte-Nord, on s'aperçoit que cette taxe a un. impact économique négatif considérable. Pourquoi? On a parlé assez souvent du fait qu'il s'agit là d'une taxe régressive, c'est-à-dire d'une taxe qui touchait la poche des gens ayant des petits salaires, des petits revenus autant que la poche de ceux qui avaient des revenus plus élevés. Mais si ceci est vrai de ceux qui ont de petits salaires, il reste qu'encore plus important, cette taxe a des effets négatifs considérables sur le développement économique.

Lorsque j'étais dans la région de l'amiante, en particulier, j'avais consulté et j'avais parlé à des agents économiques qui me disaient que la plus grande difficulté pour eux de créer de nouveaux emplois et de partir de nouvelles entreprises dans la région de Thetford-Mines en particulier et de Black-Lake, c'était que, lorsqu'ils essayaient de produire de nouveaux produits et de concurrencer des industries qui étaient d'autres régions, il fallait ajouter au coût de production même de certains produits, qu'il fallait qu'ils ajoutent à ces coûts des coûts de transport pour vendre leurs produits dans les grands centres, c'est-à-dire dans la région de Québec et de Montréal. C'est donc dire, M. le Président, que non seulement les gens qui sont dans les régions doivent payer individuellement des taxes sur l'essence qui sont plus élevées, mais que ceci devient un handicap considérable pour ceux qui tentent de partir de nouvelles entreprises et pour ceux qui tentent de créer de l'emploi dans des régions éloignées. Il s'agit encore là de voir les gens de la Gaspésie, les gens de la Côte-Nord et même du Lac-Saint-Jean, de toutes les régions éloignées, pour qu'ils nous disent jusqu'à quel point cette taxe ascenseur a été un handicap considérable pour le développement économique de leur région.

Mon collègue de Vaudreuil-Soulanges a demandé récemment au ministre des Finances de couper ces taxes, de faire en sorte qu'elles ne s'appliquent plus à l'avenir et nous n'avons obtenu que quelques sarcasmes de la part du ministre des Finances, quelques sarcasmes qui en disent long sur la compréhension du gouvernement de la situation économique des régions éloignées.

M. le Président, je crois qu'une autre raison pour laquelle le discours inaugural ne prend pas, c'est le fait que ce gouvernement a tripoté les sociétés d'État au lieu de contrôler, en tant qu'actionnaire, leur rendement et de faire en sorte que les actions de ces sociétés d'État aillent dans le sens du développement économique du Québec.

Sans vouloir entrer dans le débat du "sacrage" de la Baie-James, comme on l'appelle, et mes collègues se chargeront d'étudier les tenants et les aboutissants de ce problème en commission parlementaire, il reste tout de même qu'il faudrait souligner que, depuis que le Parti québécois est au pouvoir, et je ne crois pas que cela ait été souligné jusqu'à maintenant, les tarifs d'électricité au Québec deviennent de moins en moins concurrentiels par rapport à ceux de l'Ontario. J'ai obtenu ici des chiffres qu'on ne pourra pas nier puisqu'ils viennent d'Hydro-Québec même. Ils indiquent qu'en janvier 1976, la différence - je parle bien sûr du tarif électrique pour la grande puissance, c'est-à-dire pour la grande industrie - entre le tarif ou le prix que devait payer la grande entreprise pour son énergie en Ontario par rapport au Québec était de 44%, alors qu'elle était de 72% en 1977. Cette différence s'est amenuisée maintenant pour se retrouver à 18% en 1982 et à 19% en 1983. Ce calcul a été fait uniquement sur la base d'une consommation statutaire, disons, de 30 000 000 de kilowattheures par année.

C'est donc dire qu'alors qu'il y avait une différence de 50% à 70% quand nous étions au pouvoir, voilà maintenant que cette différence est rendue seulement à 18% pour la grande entreprise entre le Québec et l'Ontario. C'est donc dire que cette force que nous avions, qui était de favoriser la venue de grandes entreprises, était beaucoup plus considérable il y a quelque cinq ou six années.

Un deuxième calcul a été fait non pas sur une consommation statutaire de 30 000 000 de kilowattheures par année, mais en un premier temps en passant dans l'ordinateur la consommation d'énergie faite par la grande entreprise en utilisant les tarifs d'Hydro-Québec, et en un deuxième temps, en mettant en mémoire la tarification d'Hydro-Ontario et en essayant de savoir combien paieraient les entreprises du Québec si elles étaient en Ontario. On arrive à une différence qui est beaucoup plus basse. On arrive à un écart de l'ordre 12,5% en moyenne.

Ceci varie pour différents types d'entreprises, mais ceci varie entre 14% et 6% ou 7%. On comprend mieux, lorsqu'on voit ces chiffres, les raisons qui poussent maintenant le gouvernement à accorder des tarifs spéciaux à certaines grandes entreprises pour qu'elles viennent au Québec, puisque la différence dans la tarification n'est nullement comparable à ce qu'elle était dans le passé.

Qu'a fait le gouvernement? A-t-il réagi à ces données? Le gouvernement les connaît-il lui-même? Je ne le crois pas, puisque dernièrement, lorsque j'étais en commission parlementaire pour entendre les mémoires des intervenants pour discuter de la politique énergétique, le ministre de l'Énergie semblait tout surpris d'entendre ces chiffres. Il était tout à fait surpris de constater que la différence des coûts énergétiques entre le Québec et l'Ontario allait en s'amenuisant, au point même qu'elle se situait maintenant au niveau de 12% ou 13%.

La question qui se pose est la suivante: Comment se fait-il que le gouvernement ne connaisse pas ces chiffres? Comment se fait-il que le gouvernement ne suive pas la position énergétique du Québec par rapport à l'Ontario? Comment se fait-il que le gouvernement, au lieu de s'ingérer dans les affaires d'Hydro-Québec, ne suive pas les statistiques et les données énergétiques du Québec pour s'assurer que l'électricité soit réellement un levier de développement économique au Québec?

C'est donc dire qu'au lieu de tripoter les sociétés d'État, le gouvernement devrait plutôt suivre les données économiques de ces mêmes sociétés, suivre leur rendement et suivre surtout leurs décisions et tenter de les influencer lorsque nous sommes en perte de vitesse par rapport à d'autres provinces?

Finalement, je crois qu'une sixième raison pour laquelle le discours inaugural a eu peu de crédibilité dans le public, c'est qu'alors même que ce gouvernement nous proposait toutes sortes de solutions depuis six ans pour régler tel et tel problème, maintenant il constate avec nous que les solutions proposées n'ont donné aucun résultat valable. Maintenant, on dit: Ces solutions que nous avions suggérées n'ont pas donné de bons résultats; la nationalisation de l'amiante n'a pas donné de bons résultats; Pétrobec ne donnera pas de bons résultats. Mais maintenant, nous avons la solution totale, la solution finale. Cette solution, bien sûr, c'est l'indépendance du Québec.

M. le Président, j'aimerais bien que quelques ministres du gouvernement nous suivent dans les régions. J'entendais hier le ministre du Commerce extérieur qui parlait de développement économique. J'aimerais bien que ces gens viennent avec nous dans les régions. Le député de Bourassa se demandait tout à l'heure: Que font les députés libéraux? Je lui ai dit: Nous allons dans les régions pour parler de développement économique. Nous allons dans les régions pour comprendre leurs problèmes, pour saisir la réalité économique des régions et pour tenter de les comprendre davantage pour qu'on puisse ici soulever les vrais problèmes et pour que nous puissions éventuellement proposer lors de la prochaine campagne électorale les solutions qui aideront ces gens à régler les problèmes des régions, de leur développement économique, problèmes qui aggravent, bien sûr, les problèmes sociaux.

M. le Président, ce gouvernement a perdu sa crédibilité par les fautes qu'il a lui-même commises. Il a perdu sa crédibilité par les actions qu'il a lui-même accomplies. Ce gouvernement a perdu sa crédibilité et maintenant personne ne peut espérer attendre un leadersdhip quelconque de ce gouvernement. Et tous et chacun, lorsque nous allons dans les régions, nous disent: Pour l'amour de Dieu, quand allez-vous nous débarrasser de ce gouvernement?

Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît, M. le député de Châteauguay, M. le député de Sainte-Marie s'est levé.

M. le député de Sainte-Marie. (10 h 50)

M. Bisaillon: M. le Président, c'était juste pour vous informer qu'effectivement, ce serait à mon tour de prendre la parole, mais comme j'ai discuté avec le député de Châteauguay et que je sais qu'il doit quitter immédiatement pour des obligations déjà prises, si vous me le permettez, je lui céderai mon droit de parole en étant convaincu que cela ne crée aucun précédent et que je ne perds pas de cette façon le droit de parole que vous me reconnaîtrez immédiatement après.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Je vous reconnaîtrai, M. le député de Saint-Marie. Je donne la parole, avec le consentement de...

M. Picotte: Un mot seulement, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Oui, M. le député de Maskinongé.

M. Picotte: Je n'ai pas l'intention de demander que le député de Châteauguay parte immédiatement, mais je dois vous dire que nous voulons l'accommoder ce matin tout simplement. On ne voudrait pas que cela crée de précédent pour l'avenir.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Avec consentement de part et d'autre, M. le député de Châteauguay.

M. Roland Dussault

M. Dussault: Merci, M. le Président. Le 23 mars dernier, selon le rituel prévu par notre régime parlementaire de type britannique, le premier ministre du Québec faisait part à cette Assemblée nationale de son message inaugural à l'occasion de l'ouverture de la quatrième session de la 32e Législature. Ce message inaugural, sobre et

moins substantiel que ceux qui l'ont précédé, se devait de coller au contexte bien spécifique qui est celui de tous les Québécois présentement sur le plan socio-économique, et d'être relié au projet qui caractérise le Parti québécois qui forme le gouvernement et qui est le sien depuis le début de son existence, en 1968, c'est-à-dire rendre le Québec souverain aussitôt que le peuple québécois lui en aura donné la permission.

Le premier ministre du Québec nous a donc fourni une feuille de route qui veut répondre le mieux possible aux réalités que nous a imposées la crise économique, en même temps qu'il réitérait, en expliquant pourquoi, l'intention gouvernementale d'aborder la prochaine campagne électorale en proposant aux Québécois et Québécoises de se prendre en main définitivement en se donnant le moyen le plus approprié pour ce faire, soit la souveraineté.

Comme il fallait s'y attendre, tout comme le veut aussi le même rituel prévu par notre régime parlementaire de type britannique, le chef de l'Opposition y est allé de sa critique dès le lendemain et y est allé aussi de sa sempiternelle motion de blâme, cette fameuse motion qui doit tomber dans cette Assemblée nationale comme un pavé dans la marre qu'il y ait pertinence ou non.

Comme ce régime parlementaire veut que le gouvernement gouverne et que l'Opposition s'oppose coûte que coûte, il a donc fallu se faire une raison une fois de plus. C'est tellement vrai que c'est devenu un rituel, un numéro à répétition, une cassette du même genre auquel nous avait habitués le gouvernement libéral qui nous a précédés, que la plupart d'entre nous de l'aile ministérielle aurions pu faire une liste au préalable des clichés qu'il allait nous servir sans grand risque de nous tromper beaucoup.

M. Jacques Bouchard, chroniqueur de la Presse, décrit mieux que je ne saurais le faire le type d'interventions auxquelles nous a habitués le député de Bonaventure et leader de l'Opposition, non seulement depuis qu'il joue au chef de parti, mais depuis que j'ai l'honneur de participer aux travaux de cette noble Assemblée. M. Jacques Bouchard écrivait le mardi 12 avril dernier: D'ailleurs les interventions de M. Gérard D. Levesque en Chambre et en public se sont révélées jusqu'à maintenant comme une diarrhée de mots dans un désert d'idées, démontrant ainsi que ce politicien n'a aucune vision d'un projet de société.

Cet homme, plutôt sympathique sur le plan personnel, je dois l'avouer, ne pourrait de toute façon faire mieux avec la meilleure volonté du monde. Il se désame à essayer de diriger un parti qui n'a rien à offrir aux Québécois et aux Québécoises: pas de pensée articulée, pas de projet de société, pas d'enthousiasme à servir aux Québécois, rien que des intérêts à sauvergarder. Il n'est pas étonnant que ce parti n'ait comme seule ligne de conduite la recherche de scandales et qu'il se soit transformé depuis plusieurs mois en soufflerie à ballons qu'il s'efforce d'étirer le plus longtemps possible pour démontrer qu'il a de l'haleine politique, même si ces ballons lui crèvent dans la face, chaque fois qu'ils lui tiennent lieu de politique et d'orientation politique. Ce parti d'Opposition trouverait sûrement un peu de sympathie auprès de la population du Québec s'il se montrait capable d'un certain minimum de reconnaissance des réalités actuelles.

Si l'Opposition était capable de reconnaître au moins que la crise que nous avons traversée et qui commence à se résorber, très lentement mais heureusement, n'avait pas ses racines au Québec, que cette crise n'était pas un mal de nature essentiellement québécoise, que cette crise a une portée panaméricaine et occidentale, qu'elle a eu l'ampleur qu'on lui a connue à cause des orientations profondes du gouvernement Reagan aux États-Unis et, surtout, que le gouvernement d'Ottawa, sous le leadership de M. Trudeau, a été on ne peut plus malhabile à trouver les moyens de nous sortir de ce sacré bourbier qui a fait tellement de victimes, principalement à cause des taux d'intérêt élevés et provoqués par une politique monétariste que tout le monde a dénoncée. Cette Opposition n'apprend pas de ses erreurs et semble incapable de reconnaître qu'elle a fait fausse route malgré les indications que lui fournissaient certains observateurs.

Je me serais attendu, M. le Président, qu'elle en reconnaisse au moins quelques-unes parmi les plus grossières. Par exemple, l'Opposition a eu l'occasion, ces derniers jours, d'en corriger une de taille, celle qui avait consisté, pendant des mois, à faire croire délibérément aux Québécois que le gouvernement du Parti québécois était responsable et même coupable d'un certain exode des anglophones du Québec. C'est une analyse de M. Charles Castonguay, professeur de mathématiques à l'Université d'Ottawa, qui a donné à l'Opposition cette occasion, dans un article paru le 8 avril dernier qu'il a intitulé: "L'exode des anglophones depuis 1976: Un canular." Dans cet article, M. Castonguay démontre que la période de 1976-1981 ne diffère guère - pour employer les mots mêmes de l'auteur - des périodes précédentes quant au nombre et à l'importance relative des sortants de langue maternelle anglaise du Québec.

Selon M. Castonguay, entre 1966 et 1971, 61,8% étaient anglais. Entre 1971 et 1976, 64,6% étaient anglais et, entre 1976 et 1981, 64,8% étaient anglais. Donc, 64,6% sous les libéraux et 64,8% sous le Parti québécois.

M. Castonguay, à la lumière de ces chiffres, dit textuellement: "L'accession du Parti québécois au pouvoir en 1976 n'a donc rien d'un point tournant à cet égard." On peut le constater, M. le Président. Il ajoute ce qui suit: "À la lumière de ces faits, l'ardeur et l'insistance que mettent certains à emboucher la corne de l'exode, comme si d'importants départs anglophones n'avaient débuté qu'avec l'élection du Parti québécois, prennent l'allure d'un grossier canular visant à culpabiliser le Québec francophone dans le but d'abord de faire avorter le référendum de 1980 puis d'obtenir l'abandon de certains éléments sur la loi 101 et plus généralement d'affaiblir la volonté d'autodétermination politique et culturelle de la collectivité franco-québécoise."

Je pense que l'Opposition est incapable de le voir, mais c'est à elle particulièrement que s'adressent ces propos de M. Castonguay. Dans cet élan de générosité que je demande à l'Opposition, qui la rendrait plus sympatique, elle pourrait en même temps en profiter - d'ailleurs, cette chance inouïe risque de ne pas revenir de sitôt - pour reconnaître le tort immense fait aux Québécois par le gouvernement fédéral, sur le plan économique plus spécifiquement.

Est-ce que l'Opposition ne passerait pas pour plus honnête intellectuellement si elle reconnaissait que le fédéral a fait perdre des centaines et des centaines d'emplois dans le secteur de la chaussure, quand, pendant de longs mois, il a tardé à rétablir les contingentements, alors que tout le monde le demandait, sur l'entrée de chaussures de cuir venant de l'étranger?

Est-ce que l'Opposition ne paraîtrait pas plus soucieuse de l'intérêt de tous les Québécois et de toutes les Québécoises si elle reconnaissait que le gouvernement fédéral a fait un tort immense à la Caisse de dépôt et placement du Québec, qui a le mandat de faire fructifier le mieux possible les fonds de retraite des Québécois, en déposant, ce gouvernement fédéral, durant une nuit, un projet de loi au Sénat, projet devant entrer en vigueur à la date de son dépôt au Sénat, donc paralysant pendant des mois la caisse de dépôt et visant insidieusement à réduire le champ rentable d'investissement de notre caisse de dépôt, plus spécifiquement dans le domaine des transports? Le gouvernement fédéral condamnait ainsi les épargnes des Québécois en ralentissant leur marche de fructification et elles devaient même servir au développement des étrangers hors du Québec, du Canada, au développement des autres. (11 heures)

Est-ce que l'Opposition ne paraîtrait pas plus convaincue de la pertinence de développer l'économie québécoise par les Québécois et pour les Québécois si elle était capable d'admettre publiquement, à l'Assemblée nationale, que le gouvernement fédéral a trompé sciemment et effrontément les Québécois lors de la campagne référendaire de mai 1980 quand il a fait croire, entre autres, qu'au-delà de 50% des retombées du F-18 profiteraient au Québec, étant donné que l'infrastructure industrielle en aéronautique est largement concentrée au Québec, alors qu'on sait tous maintenant que l'Ontario est allé chercher plus de 70% des retombées globales possibles, le Québec devant se contenter d'un maigre petit taux de 20%, le reste étant inévitablement profitable aux Américains?

M. le Président, est-ce que l'Opposition ne gagnerait pas un peu de crédibilité sur le plan économique, même dans ses tournées au Québec, si elle était capable de reconnaître que le gouvernement du Parti québécois était carrément sur la bonne voie lorsqu'il a rendu publique sa politique économique axée sur le virage technologique? Cette Opposition n'a-t-elle pas qualifié cette politique de mirage technologique, ce jeu de mots trop facile que même les plus responsables de l'Opposition ont utilisé pour laisser croire que le gouvernement faisait fausse route? N'est-ce pas cette même Opposition qui tentait encore, il y a quelques heures, hier particulièrement, de se faire les défenseurs de ce virage technologique en cherchant des puces au gouvernement dans sa manière propre d'établir ses modalités d'application? Est-ce que l'Opposition ne gagnerait pas un peu plus de crédibilité sur le plan économique en reconnaissant cela, M. le Président?

Est-ce que l'Opposition ne ferait pas preuve d'une meilleure connaissance de la réalité structurelle de l'économie québécoise et du type de problème qu'elle comporte si elle reconnaissait que le gouvernement du Parti québécois a bien fait d'axer son aide à l'entreprise en privilégiant principalement la petite et moyenne entreprise et en changeant la loi constitutive de la Société de développement industriel, de façon à rendre cette société plus apte à aider l'entreprise, plus apte à préparer l'avenir avec l'entreprise, en l'aidant à se donner une meilleure structure financière, apte à préparer l'avenir en l'aidant à améliorer sa gestion, apte à préparer l'avenir en l'aidant à s'articuler sur le plan de la recherche et du développement, apte à préparer l'avenir en l'aidant à assurer une meilleure mise en marché? En ce sens, M. le Président, l'Opposition devrait saluer - qu'elle ait le courage de certaines opinions - les initiatives heureuses que le gouvernement du Québec a prises sur le plan de la sous-traitance, d'abord en subventionnant la mise en place d'un projet pilote de bourses de sous-traitance, demandé par le sommet économique de Montréal en février ou mars 1981, qui servira à mettre rationnellement en

rapport les preneurs d'ordre et les donneurs d'ordre, selon le jargon de ce domaine, en aidant, par la même occasion, la tenue du salon général annuel de la sous-traitance organisé avec brio chaque fois par la société pour le progrès de la rive sud et qui aura lieu, cette année, à la fin de ce mois-ci; ensuite, en parrainant le salon de la sous-traitance spécialisée dans le domaine du transport et qui aura lieu au Palais des congrès en juin prochain. Ce sont toutes des activités qui amèneront de l'eau au moulin de la relance économique du Québec.

Est-ce que l'Opposition ne ferait pas, enfin, la preuve de sa capacité de démarcation avec le grand frère fédéral en admettant que le gouvernement fédéral a fait preuve d'une mesquinerie sans précédent à l'égard de l'économie québécoise, mesquinerie qui n'a eu d'égal que sa politique de coupure de péréquation et de transferts fiscaux au Québec, mesquinerie lorsque ce gouvernement fédéral a refusé de participer au programme d'urgence qu'avait préparé le ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme avec ses collègues ministres responsables des questions économiques, dans le but de sauver des dizaines d'entreprises québécoises menacées par la crise économique et les hauts taux d'intérêt, de même que les centaines d'emplois qui allaient être sacrifiés en même temps. À vrai dire, depuis 1976, l'Opposition ne s'est pas forcée pour être critique et constructive; elle n'est jamais capable de reconnaître les bons coups du gouvernement et jamais capable de faire des suggestions de poids quant au contenu des lois et des politiques du gouvernement. Elle aura bientôt l'occasion d'être positive.

En effet, en 1984, à l'été précisément, des événements d'importance lui donneront, à cette Opposition, l'occasion d'être positive et constructive. En 1984, il y aura 450 ans qu'un Français de Saint-Malo, Jacques Cartier, est venu de la Bretagne pour prendre possession d'un territoire d'Amérique au nom du roi de France, territoire qu'on a appelé à ce moment-là la Nouvelle-France, nom qui lui est resté jusqu'à la conquête anglaise de 1760. Ce geste de prise de possession a été le début de l'implantation ici, en Amérique, de la francophonie, qui est restée vivante depuis ce temps malgré les accidents de parcours que l'on connaît. Cette implantation s'est faite principalement et successivement tout le long du Saint-Laurent grâce aux valeureux colons français et à leur famille qui ont remonté ce fleuve unique au monde jusqu'au territoire qui est maintenant devenu les États-Unis d'Amérique.

À la suite de la conquête anglaise, cette Nouvelle-France est devenue, à toutes fins utiles, le territoire québécois actuel. Le Saint-Laurent est resté la principale voie d'accueil et de développement du Québec à bien des points de vue. Jusqu'à maintenant, peu d'événements et d'occasions avaient permis de faire un point de mire de ce ruban de majesté qu'est le Saint-Laurent, peu d'événements l'avaient mis en relief à tel point qu'on songe à l'exploiter au maximum à des fins touristiques. Les grands événements de caractère international avaient lieu à Montréal - je pense aux Jeux olympiques et à l'Exposition universelle - ce qui a permis de donner à cette ville une renommée internationale.

Cette fois, le rassemblement, à Québec, de plusieurs dizaines de grands voiliers, de même que ce point de départ que sera Québec pour Transat, cette course, cette compétition pour Formule 1 de la mer, qui a Saint-Malo pour destination ultime, ces deux événements principalement donneront enfin à la ville de Québec, la ville la plus authentique d'Amérique, ses lettres de noblesse internationales et feront du Saint-Laurent, qui sera mis à profit comme jamais depuis la venue de de Gaulle, un point de mire qu'on n'aura pas le droit de ne pas exploiter sur le plan touristique.

Ce rappel de la venue ici de Jacques Cartier, il y a 450 ans, nous amènera, dit-on, plus de 1 500 000 touristes et générera des retombées de plus de 1 000 000 $, retombées qui pourraient être profitables à tout un chapelet de villes québécoises tout le long du Saint-Laurent si on avait dès maintenant cette obsession d'exploiter l'existence du fleuve Saint-Laurent à des fins touristiques. Nos intérêts propres exigent qu'on se donne cet objectif.

Le fleuve Saint-Laurent est évocateur à plus d'un point de vue, historique comme économique. Il pourrait être l'occasion d'une prise de conscience autant de ce qu'il a été, eu égard à l'implantation française en Amérique, que de ce qu'il représente relativement à ses ressources, à sa qualité environnementale et à son potentiel de développement économique pour le Québec, les rives immédiates du fleuve, mais aussi tout le Québec, le Québec tout entier.

Le gouvernement du Québec entend bien ne pas rater cette occasion en or. Ce ne serait pas la première fois que le gouvernement du Québec, d'ailleurs, tablerait sur le Saint-Laurent dans le but d'obtenir un impact économique positif. On se rappellera le leadership dont il a fait preuve en juin 1982 en organisant à Québec, pendant trois jours, un colloque sur le Saint-Laurent lequel a réuni plusieurs personnalités de l'extérieur, de même que du Canada et du Québec, ce qui a permis de conclure que les ports du Saint-Laurent, au Québec, pourraient être davantage mis à profit si ceux qui en ont la juridiction s'en préoccupaient davantage.

Oui, les événements de 1984 pourraient être beaucoup plus que le rappel d'un événement historique, ils pourraient être

principalement l'occasion d'une mise en valeur de Québec et du fleuve Saint-Laurent. J'ose espérer que l'Opposition saura, cette fois, démontrer un intérêt pour cette approche du gouvernement québécois. (11 h 10)

On trouvera sûrement légitime que je m'en inquiète quand on sait le sort que réserve habituellement l'Opposition des libéraux à tout ce qui est objet de fierté et de recherche de dignité de la part du présent gouvernement et de son aile parlementaire. Sur la question nationale pour laquelle nulle autre question ne peut être autant porteuse de fierté et de recherche de dignité, l'Opposition est, comme elle est toujours, comme elle l'a toujours été, désarmante, hargneuse, méprisante, "rapetisseuse", mesquine, sans âme et sans mémoire. À l'entendre, force nous est de conclure que, pour elle, la liberté d'un peuple devrait être le tout dernier de ses soucis, que la liberté est une denrée qui n'a de signification réelle que pour les autres peuples et qu'en fin de compte, le Québec ne sera jamais grand qu'à genoux et rapetissé.

Pour l'Opposition, la dépendance des Québécois à l'égard de ses voisins du Canada a des vertus si grandes qu'il vaudrait mieux ne rien changer à cela. Pour l'Opposition, il vaut mieux être servi par les autres que par soi-même. C'est tellement plus facile l'irresponsabilité. La crise qui commence à nous lâcher devrait être l'occasion pour tout le monde de tirer des conclusions, et l'Opposition ne devrait pas s'en exempter. C'est quand cela va mal qu'il est possible d'évaluer le mieux les moyens dont on dispose, car c'est à ce moment qu'il est possible de constater si ces moyens sont aptes à nous aider quand cela va mieux, mais surtout quand cela va mal. La crise ne nous a-t-elle pas permis de constater comme il est exact que les Québécois ne disposent que de la moitié d'un coffre à outils, la moitié de ses revenus fiscaux potentiels et la moitié et moins des leviers et technigues économiques dont dispose un État habituellement pour faire face à ses responsabilités.

Une bonne part de l'argent que les contribuables québécois mettent à la disposition des gouvernements pour les servir s'en va à Ottawa qui les utilise pour desservir les intérêts des Québécois. Pensons au F-18 dont le contrat s'est développé au profit de l'Ontario. Pensons aux subventions du gouvernement fédéral à de grosses entreprises de l'Ontario alors qu'il refusait d'aider SIDBEC, une grosse entreprise du Québec. Pensons à l'application du rapport Gilson que fait le gouvernement fédéral au détriment de l'agro-alimentaire au Québec. Pensons aux coupures très substantielles de la péréquation au Québec et des transferts fiscaux pour lesquels on ne fait jamais assez de lien avec la taxe sur l'essence. C'est une question de milliards de dollars de coupures que nous a faites le gouvernement fédéral qui nous a obligés à chercher des moyens pour arriver à compenser.

Pendant ce temps, le gouvernement fédéral gaspille d'une façon éhontée les fonds publics qui viennent entre autres du Québec. J'en passe. Cette "anémisation" du Québec que pratique le régime fédéral et ses gouvernements qui soutiennent ce régime ne pourra pas durer encore très longtemps. Surtout pas au moment où le Québec aura besoin de tous ses moyens pour relever le défi d'après la crise, le défi de la relance économique. Aussi ai-je reçu avec la plus grande satisfaction les propos du premier ministre, M. Lévesque, relatifs à la prochaine élection, relatifs à la détermination du gouvernement du Québec, du Parti québécois de faire de la question de la souveraineté du Québec la question centrale de la prochaine élection. J'ai senti, à ce moment, comme j'ai eu l'occasion à plusieurs reprises de le sentir, avant et après le message inaugural, avec quel enthousiasme débordant M. Lévesque, notre chef de parti, a le goût de faire cette élection sur la souveraineté et de la gagner.

J'invite l'Opposition à développer, d'ici cette élection sur la souveraineté, une nouvelle conscience nationale, une conscience plus profonde de la camisole de force que constitue pour le Québec ce régime fédéral étouffant et surtout à prendre conscience des avantages que comporte le fait de disposer de moyens de se prendre vraiment en main, ce que permet la souveraineté et l'indépendance. Au fond, la meilleure preuve de son intégrité sur le plan intellectuel comme sur le plan démocratique, l'Opposition pourrait nous la donner avant que desmesures plus pressantes l'y forcent, l'Opposition pourrait nous la donner en remettant au trésor public les 750 000 $ que le rapport Malouf identifie comme ayant été reçus par le Parti libéral à l'occasion des grandes constructions olympiques à titre de dons à la caisse électorale. Avec les taux élevés d'intérêt que nous avons connus depuis 1976, c'est maintenant au moins 1 500 000 $ que ces 750 000 $ sont devenus avec les intérêts composés, et c'est dans la caisse électorale du Parti libéral. Cette somme contient le germe, je dis bien le germe, d'un retour au patronage qu'a pratiqué le gouvernement libéral qui a précédé le présent gouvernement. Avec cette incapacité chronique du Parti libéral de se renouveler, et la lutte au leadership de ce parti nous en donne un exemple patent présentement, la tentation pourrait être très grande d'y succomber, de succomber à cette invitation d'une certaine reconnaissance qu'appelait inévitablement l'ampleur de ces

dons à la caisse électorale libérale au moment des constructions olympiques.

Le Parti libéral du Québec comme le Parti québécois sont présentement en campagne de financement. Cette question de ces fonds olympiques est très d'actualité. C'est à nouveau pour l'Opposition l'occasion d'y réfléchir. Ce n'est qu'en remettant au trésor public 1 500 000 $ et en jouant un rôle beaucoup plus positif comme opposition que le Parti libéral du Québec se qualifiera à nouveau comme un candidat valable à la gouverne du Québec.

Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Sainte-Marie.

M. Guy Bisaillon

M. Bisaillon: M. le Président, c'est la première occasion que j'ai, depuis que je siège en cette Chambre comme député indépendant, d'intervenir sur un message inaugural. Je voudrais que pour cette première, mon intervention ne soit pas perçue comme étant une intervention dirigée contre ou pour le gouvernement, contre ou pour l'Opposition. Je voudrais plutôt faire cette intervention comme un parlementaire qui prend le message inaugural comme étant ce qui lui est annoncé comme travail à venir et porter un jugement sur ce à quoi le gouvernement nous convie dans les mois qui viennent.

On conviendra avec moi, cela étant dit, qu'il n'y a pas beaucoup de choses nouvelles dans le message inaugural. Il y a des choses intéressantes, positives, il y en a un certain nombre que je peux juger négatives mais pas grand chose de neuf. En effet, la majeure partie de ce qui est annoncé dans le message inaugural c'est déjà des projets qui étaient ou bien en cours ou bien qui ont déjà fait l'objet d'études préliminaires. C'est cependant habillé différemment.

Ce gouvernement, le premier ministre en tête, a gouverné par sondages, par slogans. Là le premier ministre s'est transformé en grand maître couturier et il nous a habillé les choses de façon différente. Cela part sur un air de chanson, un air de temps nouveau, un air printanier qui nous convie à un certain nombre de changements. Il faudrait regarder, M. le Président, si véritablement il s'agit de changements ou si le mot qu'on utilise ne présente pas des ajustements plutôt que les véritables implications d'une notion de changement.

Cela étant dit, un certain nombre d'éléments du message inaugural qui feront l'objet des discussions dans ce Parlement sont fort positifs, particulièrement ce que l'on nous annonce comme législation éventuelle quant aux modifications à apporter à la fonction publique, à son fonctionnement, à ses modes de gestion. Le message inaugural à cet égard se lisait comme suit: Une commission parlementaire spéciale instituée à l'automne 1981 a clairement fait ressortir la nécessité de ce type de transformation. (11 h 20)

M. le Président, la commission spéciale à laquelle le premier ministre se référait, dont j'ai le rapport ici, qui s'appelle Rapport de la commission Bisaillon... Probablement que le premier ministre n'a pas identifié cette commission parlementaire, mais, en ne le faisant pas, je trouve qu'il a raté une belle occasion de souligner le travail d'un certain nombre de parlementaires, comme le député de Jean-Talon, la députée de Chomedey, le député de Papineau, le député de Roberval, le député de Champlain, la députée de Dorion, qui ont mis beaucoup d'énergie à présenter un rapport sérieux qui a fait l'objet d'un débat à l'Assemblée nationale et qui a même fait l'objet, on s'en souviendra, d'un vote unanime de l'Assemblée nationale et d'un mandat unanime au gouvernement par l'Assemblée nationale.

Donc, cette commission parlementaire à laquelle se référait le premier ministre, c'était la commission que j'ai présidée sur la fonction publique. Or, les changements qu'on nous annonce à cet égard sont fort intéressants pour autant qu'ils correspondront évidemment à l'analyse que la commission avait pu faire à ce moment: diminution de la réglementation, un plus grand partage des pouvoirs entre les sous-ministres, les dirigeants d'organismes, le principe de la responsabilisation des fonctionnaires, une loi du Vérificateur général qui l'amènera à faire une vérification intégrée, c'est-à-dire non seulement à vérifier la quantité des gestes administratifs qui sont posés, mais surtout la qualité de ces gestes. Autrement dit, est-ce que les gestes administratifs qui ont été posés correspondent aux politiques qui ont été mises de l'avant? Est-ce que les gestes choisis par l'administration étaient les meilleurs et les moins coûteux, alors qu'actuellement, on essaie plutôt de faire la correspondance, le lien entre une politique et un moyen administratif utilisé pour répondre à cette politique?

Il s'agit, en fait, par l'implantation de l'imputabilité, d'en arriver à une plus grande efficacité de l'appareil public, mais surtout à produire plus et mieux à un meilleur coût. Je pense que c'est dans l'intérêt, non seulement de l'ensemble de l'appareil public, mais aussi de l'ensemble des citoyens que cela puisse se réaliser. On nous annonce aussi des efforts accrus au niveau de la qualité des services devant être dispensés aux citoyens.

M. le Président, voilà un certain nombre de projets accompagnés d'une modification ou de modifications à la Loi sur

la fonction publique qu'il faudra scruter minutieusement. Voilà un certain nombre de mesures que le message inaugural nous annonce, qui sont attendues depuis fort longtemps, qui sont essentielles à un meilleur fonctionnement de notre appareil, à un meilleur rendement de l'appareil public et à de meilleurs services aux citoyens, et des objectifs que l'on ne peut qu'endosser au stade où on se trouve sans avoir évidemment vu et analysé le contenu de ce qui nous sera proposé.

J'écoutais le chef de l'Opposition proposer sur ce sujet une large commission d'enquête, du type de la commission Parent ou de la commission Castonguay. Le chef de l'Opposition proposait une large enquête sur la fonction publique. Quant à moi, après toutes les études qui ont été faites, toutes les discussions qui ont eu cours, il me semble que ce serait non seulement une perte de temps, mais probablement aussi une perte d'énergie et une perte financière que de procéder ainsi.

Il serait cependant possible de s'accrocher à un élément de la suggestion du chef de l'Opposition et d'encourager le gouvernement à endosser cette suggestion. Ce serait plutôt de mettre sur pied une espèce de groupe de travail provenant de la fonction publique, mais accompagné de parlementaires, qui pourrait pointer du doigt les éléments qui ne fonctionnent pas dans notre fonction publique, les difficultés de gestion que l'on y voit, les redoublements. Après avoir tant parlé du redoublement des services entre le niveau fédéral et le niveau provincial, il me semble qu'il serait peut-être temps de faire d'abord le ménage chez nous et de régler une fois pour toutes ces nombreux redoublements que nous connaissons dans notre propre appareil. Donc, une espèce de groupe de travail qui, après avoir identifié les mauvais fonctionnements, pourrait y apporter immédiatement les correctifs nécessaires. Cela aurait l'avantage d'être souple, d'être efficace, d'être rapide et surtout de déboucher rapidement sur des résultats concrets.

Un autre élément positif que l'on retrouve dans le message inaugural, c'est sûrement cet encouragement que l'on se propose de faire, un encouragement gouvernemental à la population quant à l'investissement. Je trouve cela très positif qu'on souligne, par exemple, dans le message inaugural, les efforts qui ont été faits par une centrale syndicale, la FTQ, pour ne pas la nommer, qui a mis sur pied un projet de fonds de solidarité. Le message inaugural semble indiquer qu'on pourrait aller dans le sens de projets de ce genre. Il m'a fait plaisir de le retrouver dans le message inaugural, mais cela m'a fait sourire un peu, surtout lorsque je me référais à une lettre que j'avais fait parvenir au premier ministre le 6 décembre dernier, laquelle avait fait l'objet d'articles dans les journaux le 7 décembre et avait fait l'objet - on s'en souviendra peut-être - de questions que j'avais moi-même adressées au premier ministre, qui m'avait passablement ridiculisé. Ces articles se lisent comme suit: "Plutôt que des coupures de salaires, Bisaillon suggère d'offrir des bons d'investissement." Autrement dit: Prenons les sommes que nous devons à nos employés et accordons-leur des bons d'investissement, de sorte que cela génère une économie nouvelle. Le premier ministre avait qualifié cela de trouvaille; il avait dit que c'était louche et que cela arrivait surtout au dernier moment. Voilà que maintenant dans le message inaugural on semble vouloir s'orienter vers cet encouragement à la population quant à l'investissement nécessaire dans nos entreprises québécoises.

Il y a évidemment plusieurs sujets qu'on pourrait relever dans le message inaugural qui répondront sûrement à des besoins de la population qu'on représente. Je pense, entre autres, aux améliorations qu'on nous annonce au programme Logirente. Il est évident que le programme Logirente est un programme qui répond à des besoins certains, mais qui s'adresse actuellement uniquement à une catégorie de la population. Je pense cependant qu'il serait dangereux de ne régler que le problème Logirente et qu'il faudrait, dans le même temps, se pencher sur la façon de subventionner les citoyens et les citoyennes du Québec qui ont des difficultés quant au paiement de leur logement. Plutôt que de penser et de mettre sur pied des formules fort douteuses, peut-être que la formule Logirente qui s'adresse actuellement aux personnes de 65 ans et plus pourrait s'appliquer à des personnes de 55 ou de 60 ans et plus; peut-être que cette formule pourrait s'appliquer à l'ensemble de la population; peut-être que cela serait plus efficace, peut-être que cela laisserait les gens plus autonomes, plus libres aussi de décider comment ils se logeront. En fin de compte, cela serait sûrement moins coûteux que d'autres programmes que l'on subventionne actuellement.

Je souligne aussi les mesures annoncées quant à une amélioration des prestations de bien-être social en soulignant, cependant, que là-dessus, j'ai énormément de crainte qu'encore une fois, on essaie d'améliorer la situation d'une partie des assistés sociaux en demandant aux autres assistés sociaux de partager avec eux. Autrement dit, le système auquel, malheureusement, on nous a trop souvent habitués en cette Chambre. On prendra à un groupe pour donner à l'autre, parmi les assistés sociaux; c'est ma crainte. Je le dis cependant plus fortement peut-être que jamais, en particulier à cause de la crise économique que nous avons traversée et que

nous connaissons encore: les prestations de bien-être social sont insuffisantes actuellement. Alors qu'autrefois elles permettaient aux gens de subvenir au moins à l'essentiel, elles ne leur permettent plus actuellement de survivre. Il faudra se pencher rapidement sur ce problème, en particulier sur celui des jeunes de 18 à 30 ans. On ne peut penser honnêtement, décemment, franchement, qu'avec 146 $ par mois, quelqu'un peut se loger, peut se nourrir et peut répondre à l'ensemble de ses besoins essentiels. Je ne parle que des besoins essentiels. Il est impensable que l'on puisse encore continuer de prétendre qu'il s'agit là d'une somme suffisante. (11 h 30)

Au-delà de cela, M. le Président - je reviendrai lè-dessus tantôt - il y aurait plus à faire encore que l'augmentation des prestations d'assistance sociale, il y aurait surtout de vrais programmes d'emploi orientés vers du placement permanent. Je reviendrai sur cette question tantôt.

Il y a aussi, évidemment, les efforts qui semblent vouloir être déployés du côté des familles monoparentales. Il y a aussi l'annonce de mesures incitatives afin d'amener la retraite anticipée, c'est-à-dire de permettre à un certain nombre de citoyens et de citoyennes du Québec de prendre leur retraite à 60 ans. L'analyse que l'on retrouve dans le message inaugural nous démontre que cela pourrait dégager uniquement cette mesure d'incitation à prendre sa retraite à 60 ans - rapidement et dans un premier temps près de 50 000 emplois.

Ces mesures incitatives me font peur aussi si elles ne sont pas accompagnées de correctifs à une loi que nous venons à peine de voter, en pleine crise économique, et qui visait à rendre l'âge de la retraite facultative alors que dans plusieurs secteurs elle était obligatoire à 65 ans.

Questionnons-nous sur le pourquoi de cet amendement à la loi que nous avons déjà adoptée. Pourquoi avoir rendu la retraite facultative à 65 ans? Posons-nous des questions pour savoir si, dans la population, les gens sont d'accord avec cette mesure. Posons-nous la question pour savoir si nous n'aurions pas pris le problème à l'envers. Quelqu'un qui est rendu à 65 ans, qui a investi dans la société par son travail pendant toutes ces années, est-ce qu'il ne mériterait pas plutôt qu'on se préoccupe de lui assurer une retraite méritée en dehors de tout souci matériel plutôt que de l'autoriser à continuer à se crever au travail jusqu'à ce qu'il soit capable ou encore à l'âge qu'il décidera? Est-ce que cette mesure que nous avons adoptée l'an dernier, en pleine crise économique, était la bonne? À partir du moment où on nous propose des mesures incitatives pour prendre une retraite anticipée, est-ce qu'on ne pourrait pas, dans un même temps, corriger cette erreur que, selon moi, nous avons faite l'an dernier, lorsque nous avons rendu l'âge de la retraite facultatif?

Voilà donc un ensemble d'éléments positifs du message inaugural que je jugeais bon de souligner, même si un certain nombre peuvent s'accompagner de craintes normales et parfois, on le reconnaîtra, justifiées.

Il y a cependant d'autres mesures qui me laissent songeur. Par exemple, l'annonce du travail à temps partagé. Je trouve qu'effectivement le travail à temps partagé peut être une formule intéressante pour autant qu'on prenne bien nos précautions, que ce soit bien encadré et que les clientèles visées ne soient pas toujours les mêmes.

La Commission de la fonction publique avait déjà analysé cette question du travail partagé. S'il y avait un endroit où il aurait été facile, compte tenu des garanties qui entourent les travailleurs de la fonction publique, d'instaurer le travail partagé, cela aurait bien été dans la fonction publique. Mais la commission n'avait pas retenu cet élément parce qu'on craignait trop la mauvaise utilisation de cette notion de travail à temps partagé. Il faudrait donc, lorsque des mesures nous seront proposées, qu'on ait toutes les garanties que cela ne visera pas à développer du "cheap labour" et que cela ne visera pas non plus à une surexploitation des travailleuses en particulier et des travailleurs québécois.

Il y a cependant dans le message inaugural, malheureusement, quelques éléments fort négatifs. Le premier dont je voudrais parler, c'est celui du mode de scrutin. Avant de parler de ce qui se retrouve dans le message inaugural actuel, je voudrais rappeler à la population qui nous écoute ce que, en novembre 1981 - il y a donc maintenant deux ans - le premier ministre, dans son message inaugural de l'époque, disait au sujet du mode de scrutin: "Quant au processus électoral dont nous avons déjà grandement accéléré la réforme entreprise dès les années soixante, nous avons bon espoir, avant la fin de la session -là encore, à l'unisson des partis, si possible -de pouvoir proposer cette étape dont on a tant parlé, celle d'un nouveau mode de scrutin. Le ministre d'État à la Réforme électorale a reçu le mandat de consulter, comme il se doit, les deux côtés de la Chambre, mais aussi tous les milieux intéressés, afin de mettre au point un système qui permette de refléter plus fidèlement la volonté des électeurs."

Deux ans après, dans un autre message inaugural, tout ce qu'on retrouve, c'est l'annonce d'une commission spéciale qui va réétudier toute la question du mode de scrutin.

M. le Président, je voudrais référer à

un document de la bibliothèque de l'Assemblée nationale, qui s'appelle Le mode de scrutin au Québec de 1970 à 1982, qui relève l'essentiel des prises de position sur la question du mode de scrutin au Québec. Je voudrais relever une prise de position de M. Lévesque. On se souviendra qu'en 1970 le gouvernement Bourassa est arrivé au pouvoir et qu'il a été pris lui-même par le problème du mode de scrutin. On se souvient qu'en 1966 le Parti libéral a perdu le pouvoir alors qu'il avait une majorité de votes sur l'Union Nationale qui, à ce moment-là, avait plus de députés, mais qui avait été élue. Le Parti libéral était donc concerné par l'étude du mode de scrutin et, en 1970, le gouvernement Bourassa a mis de l'avant des études sur cette question du mode de scrutin.

Or, après huit mois d'étude, M. Bourassa avait opté pour la même solution que celle à laquelle on assiste, c'est-à-dire référer le tout à une commission parlementaire. Au moment où M. Bourassa a pris cette décision, le 11 juin 1970, la Chambre confiait à la commission de l'Assemblée nationale le mandat d'étudier la réforme électorale. Le chef du Parti québécois de l'époque, M. Lévesque, l'actuel premier ministre, disait ceci: "Un gouvernement le moindrement lucide, conscient des retards accumulés et des périls explosifs qu'il recèle, n'irait pas risquer de noyer le poisson dans une commission parlementaire inévitablement tiraillée par les dinosaures de la vie publique et dominée de surcroît par sa majorité." C'était la position de M. Lévesque lorsque le gouvernement Bourassa a référé la question du mode de scrutin à une commission parlementaire. M. Lévesque trouvait que c'était manquer de lucidité, que c'était ne pas être conscient des retards accumulés. Nous sommes maintenant en 1983. Est-ce que, de 1970 à 1983, les retards accumulés ne sont pas plus imposants qu'ils l'étaient le 11 juin 1970? Qu'est-ce qui justifie le premier ministre d'avoir acheminé un dossier aussi vital et aussi important que cette question à une commission spéciale?

Bien sûr, M. le Président, il a dû, comme bien d'autres, probablement céder à des pressions du milieu, du parti ou de l'aile parlementaire. Mais, M. le Président, je voudrais m'adresser au premier ministre du Québec et lui rappeler une chose, lui rappeler que les premières années de son gouvernement auront été marquées, quant à moi, justement par un renouveau de la vie politique au Québec: une Loi régissant le financement des partis politiques, une Loi sur la consultation populaire, des mesures pour rendre les débats de l'Assemblée nationale présents dans chacun des foyers du Québec. C'est ce qui a caractérisé, dès le départ, le gouvernement du premier ministre. C'était la volonté ferme du premier ministre, avant la prise du pouvoir, de compléter toute la réforme politique au Québec. Le mode de scrutin est un des éléments essentiels d'une réforme de la vie politique au Québec. C'est non seulement un élément essentiel de la réforme de la vie politique, mais c'est aussi un mode essentiel quant à la réforme parlementaire. Il n'y aura jamais de réforme parlementaire s'il n'y a pas, d'abord, une réforme du mode de scrutin. (11 h 40)

II n'y a plus de Parlement, il n'y a qu'un semblant de Parlement. Un mode de scrutin nouveau, permettant à cette Assemblée d'accueillir des représentants de toutes les opinions au Québec, permettant d'avoir une représentation équivalant au vote exprimé par les électeurs, nous permettrait sûrement des débats améliorés. Le Parti québécois n'a pas été le seul à parler d'une modification du mode de scrutin. On se souviendra que, du côté de l'Opposition officielle, ce fut aussi un dossier important dans le temps du gouvernement Bourassa, mais encore plus récemment, le chef de l'Opposition officielle du temps, parce qu'on change beaucoup de chef d'Opposition de ce côté de la Chambre, le député d'Argenteuil, de façon régulière, est intervenu dans cette Assemblée depuis le 9 novembre 1981 pour indiquer au gouvernement l'urgence de modifier le mode de scrutin actuel. Depuis que, de ce côté de la Chambre, on semble penser que le pouvoir est proche, on oublie toute cette question du mode de scrutin.

En effet, lorsqu'on a été élu par un système, pourquoi on le changerait? C'est un peu le jeu politique, mais la population commence un peu à être exaspérée. Quand je suis dans l'Opposition, je me plains de mon sort, je dis que j'ai été traité injustement, que le pourcentage de vote que j'ai recueilli ne me donne pas une proportion juste et équitable de députés à l'Assemblée nationale, mais, dès que j'ai été élu, je me dis que, dans le fond, le système n'était pas si mauvais que cela puisqu'il m'a élu. Dès que je suis réélu, c'est encore pire.

Je sais qu'un certain nombre de députés du côté ministériel ont longtemps défendu une réforme du mode de scrutin. Ils la défendent un peu moins maintenant qu'ils ont été réélus deux fois. Sauf qu'en dehors de la question de la réélection éventuelle, il me semble qu'il faudrait regarder aussi la vie au Québec. Le système actuel ne permet que le bipartisme, c'est-à-dire que la possibilité pour deux partis de siéger à l'Assemblée nationale. Lorsqu'il y a des tiers partis, c'est marginal; c'est non seulement marginal, mais forcément, à un moment donné ou à un autre, le tiers parti qui arrive au Parlement mange un des deux autres. C'est ce qui est arrivé régulièrement dans l'histoire politique du Québec, c'est ce qui est arrivé lorsque le

Parti québécois, tiers parti, a siégé du côté de l'Opposition en 1970. Tranquillement, il a mangé les autres partis existants pour en arriver à un jeu d'un parti vis-à-vis de l'autre.

Dans la population, on n'assiste plus à des débats qui sont aussi clairs que celui qu'on voudrait présenter à l'Assemblée nationale. Ce n'est plus non plus comme il y a 50 ans où, quand tu n'étais pas bleu, tu étais rouge et alors qu'on se disait: du bleu au rouge, c'est du pareil au même. Tout le monde le savait, mais on changeait de l'un à l'autre quand on était tanné de l'un et on privilégiait l'autre, sachant que c'était à peu près la même chose. On est encore dans la même situation qu'il y a 50 ans. Dans la population, les débats sont beaucoup plus nuancés. Les positions sont beaucoup plus divergentes. Il n'y a pas du noir et du blanc, il y a un peu de gris et il y a peut-être des options nouvelles. Où sont-elles, les options différentes en cette Assemblée? Où sont-ils, les représentants des 13% de la population qui n'ont voté ni pour le Parti québécois ni pour le Parti libéral? Où sont-ils dans cette Chambre? Il me semble que c'est sur cette question fondamentale qu'on doit se pencher. On doit presser non seulement le gouvernement, mais le premier ministre qui, lui, avait à coeur, qui, lui, comprenait, dès le départ, dès la fondation de son parti, l'essentiel, ce qu'il y avait d'essentiel dans une réforme du mode de scrutin.

Je terminerai, M. le Président - je me suis attardé un peu sur cette question et il me reste peu de temps - en soulignant au moins deux autres éléments qui me semblent négatifs dans le message inaugural: d'abord, les annonces faites au niveau des amendements au Code du travail. Pour y avoir participé, je sais qu'il s'annonçait des choses fort intéressantes et permettant entre autres au mouvement syndical de favoriser la syndicalisation des travailleurs les plus démunis et qui reçoivent souvent les traitements les plus bas au Québec. On avait rencontré des centrales syndicales qui nous ont démontré, chiffres à l'appui, preuves à l'appui, dossiers individuels et dossiers de groupes présentés, les délais incroyables subis par les travailleurs actuellement qui voulaient s'organiser et se regrouper. Je crains qu'encore une fois le lobby ait réussi à faire diminuer l'impact de ce qui s'annonçait comme excellent en termes de réforme en ce qui concerne le Code du travail. Je ne peux pas non plus parler de réforme du Code du travail sans mentionner l'importance qu'il faudra accorder et les discussions qu'il nous faudra faire sur la question du Code du travail dans le secteur privé et du Code du travail dans le secteur public. Est-ce qu'on doit avoir des codes du travail identiques? Est-ce que les travailleurs de ces secteurs différents devraient être soumis à des codes du travail différents puisque les situations sont différentes? Voilà autant de questions auxquelles il faudra répondre.

Par ailleurs, je termine en disant que concernant la situation du chômage qui est de plus en plus dramatique à mesure qu'on en parle, à mesure que les semaines s'allongent, de plus en plus le nombre de chômeurs s'accroît et rien n'est fait pour régler le problème de façon permanente. On assiste de plus en plus à des débats inutiles entre le fédéral et le provincial, à des querelles de clochers qu'un chômeur ne comprend pas. Je dis: J'ai déjà, quant à moi, proposé une formule. Cela n'est pas une formule universelle. Cela n'est pas une formule qui réglerait tout, mais c'en est une qui a l'avantage de prendre le problème de façon globale et d'essayer de le régler de façon permanente. Ce projet est devant nous. Qu'est-ce que le premier ministre attend pour demander que l'Assemblée se prononce sur ce projet? Qu'est-ce que le premier ministre attend pour au moins discuter du contenu de ce projet de loi qui viserait à créer de l'emploi permanent?

Je termine, M. le Président, il me reste deux secondes, en soulignant l'étude qui a été faite par le Conseil de planification et de développement du Québec, un organisme qu'on s'apprête à saborder justement et qui ne coûtait pas grand-chose pour bien nous conseiller. Un organisme qui nous a souligné que jusqu'en 1990 le chômage coûterait aux Québécois 178 000 000 000 $, alors que les programmes d'emploi permanent nous coûteraient 30 000 000 000 $. Est-ce qu'on est prêt, est-ce que ce gouvernement est prêt à attaquer le problème de front, à présenter une politique de plein emploi, à faire en sorte que l'État, les citoyens, les entreprises et les personnes concernées sauvent dans les neuf prochaines années 178 000 000 000 $? C'est cela l'enjeu par rapport au chômage et au plein emploi. Merci.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Prévost et adjoint parlementaire au ministre du Travail.

M. Picotte: M. le Président, question de règlement.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Je m'excuse, M. le whip adjoint de l'Opposition, une question de règlement.

M. Picotte: J'ai convenu avec celui qui vous a précédé au trône tantôt... Une entente a été conclue d'ailleurs, et je regrette, mais c'est au tour du député de Chapleau puisque nous avons convenu de faire passer le député indépendant de Sainte-Marie avant le député de Chapleau.

Normalement, c'est au député de Chapleau.

M. Brassard: Sur la question de règlement, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le whip du gouvernement.

M. Brassard: II me semblait... Je n'étais pas partie à l'entente, mais il me semblait que, le député de Châteauguay devant nous quitter, le député de Sainte-Marie, qui voulait prendre la parole, avait consenti à parler plus tard pour permettre au député de Châteauguay de parler tout de suite. C'est ce qui s'est produit. Ceci étant dit, à partir de ce moment, je pense que l'usage, la coutume de l'alternance entre ministériels et Opposition doit se poursuivre et se continuer. À ce moment, puisque c'est un député de l'Opposition qui vient de prendre la parole en la personne du député de Sainte-Marie, non pas de l'Opposition officielle, mais de l'Opposition, cela doit être maintenant au tour d'un député ministériel de prendre la parole en vertu non pas des règles - ce n'est pas dans le règlement - mais en vertu des coutumes, de l'usage de l'alternance dans un débat comme celui-là.

M. Bisaillon: M. le Président...

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Sainte-Marie.

M. Bisaillon: ...sur la question de règlement. Je ne pensais pas que le whip du gouvernement m'obligerait à intervenir de cette façon. Ce que je peux confirmer quant à l'entente, dans un premier temps, c'est qu'effectivement je devais prendre la parole et qu'après moi, puisque j'intervenais après un député de l'Opposition, cela devait être le député de Châteauguay. Comme le député de Châteauguay devait partir, je lui ai cédé mon droit de parole en ayant convenu à l'avance qu'une fois que le député de Châteauguay aurait parlé cela reviendrait du côté de l'Opposition. C'est pour vous expliquer l'entente qui avait été prise. Alors, il avait été convenu que je parlerais, ensuite le député de Châteauguay et, enfin, quelqu'un de l'Opposition, puisque c'était 1-1.

D'autre part, sur la question de règlement et afin, une fois pour toutes, de régler cette question, je voudrais vous donner mes vues sur la question de l'alternance, en trois points, si vous me le permettez, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Juste un instant, M. le député de Sainte-Marie. Je sais que cette question est prise en délibéré et qu'il n'y a pas encore eu de réponse de la part du président sur la demande de l'alternance. Je dois vous dire qu'au départ un principe de base a été adopté, lorsqu'il y avait des partis reconnus; je parle des partis reconnus dans la dernière Législature: l'Union Nationale, le Parti libéral, le Parti créditiste et le gouvernement. Il y avait d'abord ce qu'on appelle la rotation, un premier tour de table, comme on dit communément. Mais, après cela, il y a l'alternance, et cela a été appliqué de façon habituelle.

Je n'ai pas à déterminer, aujourd'hui, si la décision du président doit être prise ou pas. Selon ce que j'ai vérifié auprès du président qui m'a précédé, il semble que c'était le député de Chapleau. Comme je ne le savais pas, j'ai donné la parole au député de Prévost. Le président qui m'a précédé avait dit que c'était ensuite le député de Chapleau; je lui accorde la parole pour le moment.

M. le député de Chapleau.

M. Bisaillon: Si vous me le permettez, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Juste un instant, M. le député de Sainte-Marie.

M. Bisaillon: Je voudrais juste terminer en portant à votre considération un autre élément. Le principe que vous venez d'expliquer, quant à l'alternance des intervenants, selon qu'ils soient pour ou contre, selon leur appartenance à des partis, je n'ai aucune objection et aucun commentaire à faire à son égard. Je dis, cependant, que cela doit être différent lorsqu'on est face à des débats restreints. Le débat du message inaugural, c'est un débat restreint à 25 heures. Or, dans mon cas, par exemple, si je ne pouvais intervenir juste par le fait de me lever, je pourrais, par le jeu de l'Opposition et du gouvernement, me retrouver à la vingt-cinquième heure sans avoir pu avoir l'occasion d'intervenir. Il s'agit du même phénomène lorsqu'on travaille dans des commissions parlementaires où des ententes sont faites entre le critique officiel et le ministre concerné quant au partage du temps. Je ne fais pas partie des ententes. Tant que je ne ferai pas partie des ententes, il me semble que je dois avoir ce privilège que me donne le règlement de parler lorsque le moment me semble convenable.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: Pour terminer sur la question du règlement, je sais que vous prenez cela en délibéré. J'espère, d'abord, qu'une décision sera rendue le plus tôt possible pour essayer de dissiper la confusion qui peut régner autour de cette question. Je vous signale simplement que le député de Sainte-Marie a les mêmes droits comme député que tous les autres membres de cette

Chambre. Le principe que vous devez prendre en considération relativement à l'alternance, c'est que le député de Sainte-Marie n'étant plus - il l'a déjà été - un député ministériel, il est donc un député de l'Opposition. Quand il prend la parole, forcément, il la prend comme député de l'Opposition. Si après coup un député de l'Opposition pouvait prendre la parole, cela ferait deux députés de l'Opposition qui parleraient alternativement, à la suite l'un de l'autre; le principe, l'usage ou la coutume de l'alternance ne serait pas respecté. Je pense que vous devez prendre cela en considération. J'espère que vous aurez le plus tôt possible à rendre une décision sur ce sujet.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Je pense que la présidence a pris en bonne considération ce qui vient d'être dit. Je dois rappeler aussi que ce qu'on appelait, d'abord, la rotation impliquait ensuite, une fois celle-ci terminée au premier tour, une alternance. À ce moment, pour l'avoir souvent appliquée, c'était avec une personne de l'Opposition de quelque parti que ce soit que l'alternance se faisait. En conséquence, c'était avec une partie qui était à ma gauche et, ensuite, avec une partie qui était à ma droite. On l'a pris en bonne considération. Nous avons une rencontre prévue avec les trois personnes qui composent la présidence. Nous aurons l'occasion de demander au président qu'une directive finale soit donnée aussi bien pour les travaux à l'Assemblée nationale qu'en commission parlementaire, puisque le sujet fait actuellement l'objet de beaucoup de controverses.

Je pense que le leader de l'Opposition aurait quelque chose à ajouter.

M. Lalonde: Oui, je ne veux pas étendre le débat indûment. Comme je ne veux pas intervenir à ce stade, avant qu'une décision finale soit prise, puisque vous venez de nous annoncer qu'une réunion aurait lieu bientôt, serait-il possible de consulter les leaders des deux côtés?

Le Vice-Président (M. Jolivet): Oui, M. le leader, à ce niveau, le présidence aura ce soin à ce moment. On pourra peut-être inclure la question du député indépendant pour ne pas le frustrer.

M. Lalonde: Oui, c'est cela.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Chapleau.

M. John J. Kehoe

M. Kehoe: Merci, M. le Président, pour votre décision. C'est pour moi un honneur de prendre la parole ce matin en réponse au discours inaugural de cette 4e session de la 32e Législature. "Message inaugural", on le sait, est un nouveau terme qu'on emploie depuis quelques années pour remplacer le terme traditionnel "discours du trône". Le message inaugural revêt une importance capitale dans le système démocratique puisqu'il est en quelque sorte un aperçu des intentions du gouvernement dans les diverses matières qui tombent sous sa compétence. Il est le menu législatif pour les mois et même les années à venir. En plus de brosser un tableau des actions envisagées par le gouvernement au cours d'une période donnée, le message inaugural constitue la pierre angulaire qui animera la philosophie et les activités du gouvernement, de cette Assemblée, au cours des prochains mois.

Je m'adresse donc à l'Assemblée nationale aujourd'hui pour répondre et analyser les différentes mesures annoncées par le premier ministre il y a quelques semaines. Ce qui me frappe le plus dans les 40 pages du discours inaugural, c'est le manque de réalisme, le manque de consistance, l'absence totale de solutions intelligentes et pratiques aux problèmes que vit le Québec à l'heure actuelle. Loin de répondre aux préoccupations immédiates qui font que le Québec vit ces temps-ci une crise double, le discours ou peut-être le roman que nous a servi le premier ministre est teinté de démagogie et de partisanerie. On a parlé, encore une fois, de relance économique. C'est toujours le même thème qui revient. Depuis 1976, depuis que les péquistes sont au pouvoir, ils parlent de relance. La prochaine session sera une session sur l'économie. On va régler les problèmes économiques de la province de Québec. Mais le passé est garant de l'avenir. On sait comment les péquistes ont administré la province depuis 1976. On sait les déficits qu'ils ont accumulés depuis ce temps, d'année en année, des déficits d'au-delà de 3 000 000 000 $. On sait comment ils ont administré les finances publiques. Ils parlent encore de relance économique, mais ce n'est pas de cela qu'on a besoin. On a besoin d'actes concrets, de régler les problèmes qu'on a avec le chômage, les problèmes avec la jeunesse, les problèmes avec les services sociaux, les problèmes avec les chômeurs.

Au lieu, comme l'a prétendu le premier ministre, de voir le gouvernement "centrer ses actions plus que jamais sur l'essentiel, sur les priorités dans le sens le plus concret du terme," ce discours est venu une fois de plus illustrer et démontrer de façon concrète l'hypocrisie du Parti québécois. Le discours de René Lévesque est une série de clichés, de réchauffage, de toutes sortes de promesses qu'il avait déjà faites dans d'autres discours inauguraux. Il revient avec les mêmes choses. Il n'a pas tenu ses promesses. Comment peut-on avoir confiance

qu'il va tenir les promesses qu'il nous fait dans le présent discours inaugural? (12 heures)

Comme mes confrères, j'ai écouté la lecture des 40 pages du discours inaugural et ce qui me frappe le plus, ce n'est pas seulement le contenu de ce document, mais ce que le premier ministre n'a pas dit. Il a dit bien des affaires, bien des thèmes généraux, bien du réchauffé, mais enfin, qu'est-ce qu'il propose de nouveau? J'ai lu, relu et étudié ce discours inaugural et je cherche encore des solutions innovatrices, réalistes et pratiques pour venir en aide aux plus défavorisés de notre société. Quelles sont les mesures proposées pour régler les problèmes des 430 000 chômeurs? Quelles sont les mesures proposées pour aider les 500 000 assistés sociaux? Quelles sont les solutions proposées pour régler le problème des jeunes qui cherchent de l'emploi et qui, après avoir complété un cours dans les cégeps, dans les universités du Québec, sortent de l'école et n'ont absolument aucune possibilité de trouver un emploi?

Ce discours me semble être un miroir fidèle du gouvernement péquiste, complètement dépassé, dans les nuages, coupé de la réalité que vivent nos citoyens dans le besoin. Bref, un gouvernement qui ne répond pas aux aspirations de la population, un gouvernement qui n'a aucune solution valable à présenter pour régler ou, au moins, minimiser les problèmes qui sont vécus avec une acuité sans pareille au Québec.

La population du Québec et nous, membres de cette Assemblée, étions en droit d'attendre beaucoup plus du premier ministre. Nous voulons que des amorces de solutions soient proposées, mais que nous propose le premier ministre? Des phrases vides de sens, de vieilles rengaines récupérées. En fait, ce message inaugural est une insulte aux Québécois qui y cherchaient des lueurs d'espoir.

Les observateurs, les chroniqueurs des quotidiens et nous, de ce côté de l'Assemblée nationale, sommes unanimes à dénoncer l'audace du gouvernement du Parti québécois de ressortir son option indépendantiste en cette période de crise économique. Au lieu de canaliser ses énergies à la recherche de solutions, il a montré son vrai visage, celui de l'indépendance coûte que coûte, à n'importe quel prix social, économique, politique et constitutionnel.

Avant même de parler d'indépendance, je veux aborder, par contre, quelques secteurs qui font les frais de la politique mesquine et à courte vue de ce gouvernement péquiste. Le virage technologique. Depuis quelques mois, depuis quelques années même, on en parle; cette expression est devenue monnaie courante: le virage technologique d'un côté, le virage technologique de l'autre. C'est la panacée pour régler les problèmes des Québécois, pour régler les problèmes de chômage dans la province de Québec. Voici que le gouvernement péquiste nous sert une fois de plus ce plat. Mais pour les Québécois et pour la population de l'Outaouais particulièrement, c'est une vraie farce. Même que, dans la région de l'Outaouais, on a plutôt envie de parler de dérapage tant le gouvernement du PQ est en train de rater complètement la courbe dans ce domaine.

Je cite un éditorial de Mme Johannes Martin-Godbout, du quotidien Le Droit, qui a paru dans ce journal dernièrement: "Après le ministre Bernard Landry, c'était au tour du ministre délégué, Gilbert Paquette, de venir nous parler du fameux virage technologique. Les ministres changent. Les termes varient à peine. Les dossiers restent aussi peu substantiels. En fait, la rhétorique continue de primer sur la préoccupation technologique et, à continuer de l'écouter, l'Outaouais ne prendra certainement pas le virage." Les ministres changent, les dossiers restent aussi peu substantiels. Si l'Outaouais veut prendre le virage, il lui faudrait cesser d'attendre après Québec et lancer ses projets sans plus de formalités.

Autrement dit, les belles paroles des ministres qui viennent dans notre coin nous parler du virage technologique sont complètement fausses. Ils ne font absolument rien pour encourager l'industrie à s'implanter dans notre région. Au contraire, dans un article paru dans le journal Le Droit, dernièrement, M. Jean-Marie Comeau, conseiller de gestion et professeur en informatique à l'Université du Québec, nous a dit: "Ceux qui croient qu'il y a un virage technologique dans l'Outaouais québécois rêvent en couleur parce qu'il n'y a rien de ce qu'il faut en Outaouais, à l'heure actuelle, pour provoquer la formation d'un deuxième Canada et d'une seconde Silicone Valley."

Comme vous le savez, M. le premier ministre, juste de l'autre bord de notre région, dans la municipalité de Kanata, qui est située dans la province d'Ontario, il y a une installation technologique assez importante. Pourquoi avons-nous cela? Pourquoi ce coin-là s'est-il développé depuis plusieurs années et pourquoi n'avons-nous absolument rien actuellement sur le bord du Québec? C'est bien évident que, depuis des années, les universités, l'Université Carleton, l'Université d'Ottawa ont mis en place des programmes qui font que, lorsque les étudiants sortent de ces établissements, ils peuvent apprendre le fonctionnement des ordinateurs et apprendre la nouvelle technologie dans bien des domaines. Ils peuvent pratiquer des programmes et apprendre à faire fonctionner ces instruments très techniques.

Dans la province de Québec, plus

particulièrement à l'Université du Québec à Hull, M. Comeau dit: "Mais à Hull, un virage technologique se produirait tout au plus dans quinze ans." Parce que l'Université du Québec n'est pas là pour former les gens. Même si les professeurs qui enseignent là font tout ce qu'ils peuvent, il reste que cela prend un minimum d'outils pour fonctionner; ce qu'on n'a pas. L'Université du Québec a Hull fonctionne avec un ordinateur Cyber, qui date de 1963. Il est tellement désuet que c'est ridicule.

Voilà l'effort fait par la province de Québec. Du côté de l'Ontario, à Silicone Valley, tout est établi avec tous les instruments nécessaires pour développer; il y a des universités qui enseignent l'informatique. Du côté du Québec, on vient juste de se réveiller, on a commencé à faire l'installation de l'informatique dans des écoles, mais cela prendra quinze ans avant qu'on puisse espérer avoir des compagnies américaines, des compagnies européennes, des compagnies japonaises qui viennent s'installer dans notre région.

D'un autre côté, nous avons des ministres péquistes, l'un après l'autre, qui viennent dans notre région faire des promesses farfelues, des promesses complètement irréalisables. Ils viennent promettre des installations majeures et dire que des compagnies importantes viendront s'installer dans notre région. C'est complètement faux. Tant et aussi longtemps que les universités et les cégeps ne prépareront pas la main-d'oeuvre requise pour exploiter ces installations, cela prendra du temps avant qu'on puisse avoir ces installations dans notre région. (12 h 10)

Une autre raison majeure qui empêche l'installation de ces compagnies américaines, japonaises et européennes, c'est justement les effets de la loi 101. On sait que la plupart de ces compagnies importantes viennent d'endroits comme Los Angeles, Houston. La plupart des cadres qui dirigent ces compagnies qui vont venir investir de l'argent sont des anglophones. Mais avec la loi no 101, compte tenu qu'ils n'ont pas fait leur primaire et leur secondaire dans la province de Québec, ils ne peuvent pas envoyer leurs enfants à l'école anglaise dans la province de Québec. C'est une raison majeure qui les empêche de venir s'installer dans la province de Québec, dans la région de l'Outaouais. Il y a d'autres raisons reliées au bill 101. Les cadres, les personnes qui sont responsables de l'installation de ces compagnies, ont de la difficulté à parler français. Ils ont reçu une formation en anglais et ils ont beaucoup de difficulté à avoir le personnel compétent qui viendrait s'installer dans la province de Québec. Pour cette raison, la société d'aménagement fait tout ce qu'elle peut pour encourager ces compagnies à venir s'installer dans notre région. Par contre, la politique du gouvernement provincial fait en sorte qu'il y a toutes sortes d'obstacles qui les en empêchent. Un des obstacles, le plus important, c'est la loi no 101.

De plus, il y a la question de l'impôt sur le revenu pour les résidents de la ville de Gatineau, de la ville de Hull. Dans la province de Québec, généralement, le taux d'impôt est environ 15% plus élevé que celui de la province de l'Ontario. Pourquoi les cadres de ces compagnies viendraient-ils s'installer dans le comté de Chapleau, dans la ville de Hull, quand ils savent que cela va leur coûter 15% de plus en impôt? On peut ajouter à cela le coût de l'assurance automobile, le coût de l'immatriculation des véhicules. Dans la province de Québec, la taxe de vente est de 9%. En Ontario, c'est 7%. Les gens de la province de Québec qui vont acheter à Ottawa ont même droit à un rabais, à un remboursement de la taxe de vente de 7% payée en Ontario. Tous ces facteurs font en sorte que toutes les politiques annoncées par le gouvernement provincial empêchent les personnes de venir s'installer ici. Elles empêchent les compagnies de haute technologie de venir s'installer dans la province de Québec, dans la région de l'Outaouais.

Je demande au gouvernement d'assouplir ses approches quand il s'agit des villes situées aux frontières de la province de Québec et de l'Ontario. Le problème y est beaucoup plus sérieux. Chez nous, dans la région de l'Outaouais, la question est encore plus sérieuse parce qu'il faut faire concurrence à Silicone Valley qui est déjà implantée en Ontario et qui est située à quelque cinq ou six milles à peine de la ville de Gatineau et de la ville de Hull. Comment peut-on encourager des nouvelles compagnies à venir s'installer au Québec quand elles ont presque tout ce qu'il faut en Ontario et quand cela coûte beaucoup plus cher pour fonctionner dans la province de Québec?

Un autre sujet que je veux aborder, M. le Président, c'est la question des mines. En ma qualité de porte-parole de l'Opposition dans ce dossier, il est de mon devoir de dénoncer vigoureusement le discours inaugural du premier ministre Lévesque pour son incurie dans le domaine de l'industrie minière. J'ai lu, relu et étudié le discours inaugural du premier ministre dans ce domaine. Nulle part il n'est fait mention de la relance de l'industrie des mines. Il n'en parle nulle part. Pas un mot, pas une ligne. C'est pourtant un secteur essentiel d'une importance capitale de la relance des activités économiques et industrielles de la province de Québec. Pourquoi ne pas avoir abordé le sujet?

Le ministre de l'Énergie et des Ressources a parlé, à plusieurs reprises, du

commencement d'un programme pour moderniser les mines. Mais, effectivement, on a un gouvernement qui, pour des raisons politiques, a décidé de procéder à l'expropriation de la compagnie Asbestos au coût de quelque 150 000 000 $. Cette année, on se retrouve avec une perte de 15 000 000 $. On a entendu le député de Frontenac, on a entendu les ministres avant les élections qui, à tour de rôle, se sont promenés dans la région d'Asbestos et ont garanti que par l'expropriation de la compagnie Asbestos, il y aurait de la création d'emplois. Depuis ce temps, il y a environ 1500 personnes qui ont perdu leur emploi.

Durant la période qui a précédé l'expropriation de cette compagnie, tous les intervenants, non seulement les libéraux, mais tous les experts économiques, toutes les personnes qui ont fait des études dans ce domaine ont dit que l'industrie de l'amiante était en déclin. La conjoncture économique internationale, les questions de danger de l'amiante, etc., plusieurs facteurs ont contribué à avertir le gouvernement de ne pas procéder dans ce cas. Mais pour des raisons idéologiques, pour des raisons politiques, il a décidé de procéder quand même et on constate maintenant une perte de 15 000 000 $ par année.

Qu'est-ce qu'il fait? La volonté politique n'y est plus pour tenter de résoudre le problème. Il y a quelques semaines, des chômeurs sont venus protester contre le gouvernement, contre les députés et contre les ministres. Qu'est-ce qu'ils ont fait? Rien. Il n'y a absolument rien qui se fait dans ce domaine. Si les 150 000 000 $ qu'on a payés pour l'expropriation de la compagnie Asbestos avaient servi à moderniser les mines, lorsque la relance, qui va certainement venir dans ce secteur, va se faire dans l'économie québécoise, lorsque le temps viendra, le Québec aurait pu prendre sa part dans ce secteur d'importance capitale. Mais non, ils ne font rien.

C'est à peu près la même chose quant à SIDBEC. On sait très bien que SIDBEC a été mise sur pied par les libéraux, a été continuée par l'Union Nationale et maintenant par le Parti québécois. On sait que la conjoncture économique fait en sorte qu'il n'y a pas de solution à ce problème pour l'immédiat. Ce qu'on reproche au Parti québécois, c'est de n'avoir rien fait en 1978, en 1979 et en 1980 lorsqu'il a eu l'occasion de renégocier l'entente avec ses partenaires dans l'exploitation de cette compagnie. Qu'est-ce qu'il a fait? Il ne s'est occupé que de l'indépendance; il a mit le paquet sur cela et il a oublié de tenter de régler le problème de SIDBEC-Normines. Aujourd'hui, on est rendu avec un problème qui n'a pratiquement pas de solution, avec un problème d'une perte de 15 000 000 $ par année à cause du manque de prévoyance de ce gouvernement qui ne sait pas gouverner.

Le dernier point que je veux aborder aujourd'hui, c'est la question dont M. Lévesque a parlé dans son message inaugural, la question de l'indépendance. C'est la première fois en cette Chambre que le premier ministre a abordé le sujet, qu'il a parlé spécifiquement de la question de l'indépendance. Auparavant, il nuançait ses propos en parlant de la souveraineté-association, en employant des termes qui font moins peur au peuple, mais, là, les jeux sont faits. C'est rendu qu'il risque le tout pour le tout sur la question de l'indépendance pour la prochaine élection. (12 h 20)

On se souviendra qu'ils ont gagné les élections en disant: On va mettre en veilleuse la question de la souveraineté-association. Ils venaient de perdre le référendum par une majorité de 60-40 sur la question de la souveraineté-association, en utilisant des termes dont personne ne savait ce qu'ils voulaient dire. C'était une question de quelque quinze lignes. Personne ne savait au juste ce que voulait dire un mandat d'aller négocier la souveraineté-association. Il avait un mandat. La nuance dans cette question était tellement incertaine. Même à cela, il y a 60% de votants qui ont voté contre. Depuis ce temps, les affaires ont évolué. Depuis ce temps, tout de suite après l'élection, il a commencé à nouveau... Il a gagné l'élection en disant qu'il mettait en veilleuse son option de séparation. Tout de suite après les élections il a sorti de nouveau cette option, surtout lors de leur convention, de leur conseil général au mois de décembre 1981. Je cite M. Pierre Cloutier, le conseiller politique du Parti libéral qui a écrit dans le Devoir à ce sujet en date du 29 mars: "Décidément, la politique a ses raisons que la raison ignore. Décembre 1981, 2000 délégués du Parti québécois sont rabroués sévèrement par le chef du parti pour avoir osé parler tout haut de l'indépendance nationale. En quelques mots, ils se font traiter d'agents provocateurs par l'entourage du premier ministre. "Les mois qui ont suivi ont été assez pénibles. Règlement de comptes, dissensions, etc. Bref, un climat malsain et pollué, indigne de ce parti. Pourtant, malgré la tempête, beaucoup de militants refusent d'abandonner parce que ce parti leur appartient aussi et surtout que l'idée de l'indépendance avec ou sans association avec le Canada est tellement ancrée dans leur coeur qu'il n'y a pas de compromis possible à ce titre." Voici maintenant qu'aujourd'hui le premier ministre nous parle d'indépendance. Dans ce temps-là, il ne voulait pas parler d'indépendance. Il voulait parler de souveraineté-association; le conseil

général voulait abandonner la question d'association et venir tout de suite à la question d'indépendance. Mais M. Lévesque a dit: Cela ne marche pas même si l'instance suprême du parti dit qu'on va procéder tout de suite à l'indépendance. Il a dit: Non. Et il y a eu un "renérendum" dans lequel on posait la question: Est-ce qu'on aime René? Est-ce que vous m'aimez ou vous ne m'aimez pas? On sait le résultat de ce référendum. On dit maintenant que la voie de la lucidité et du réalisme passe par l'indépendance. Vraiment, si on peut trouver dans les annales de la politique québécoise un politique plus habile à manier le verbe de l'hypocrisie, je ne le connais pas.

Mr. President, we are at the crossroads of the political history of the Province of Québec. We have one of two ways to go. The first way is to take the road of separation, of independence. The game has been played. The position of the Parti québécois is straightforward. For the first time, we really understand what the game is. We know that this party has put aside all questions of delaying the question. They say the next election is going to be fought on the question of independence. That is one option we have and it is clear and precise, and we know exactly where we are going. The other option is: Are we going to stay here in Canada? Are we going to fight for a better deal for the Province of Québec? The Liberal Party admits that the Province of Québec, in many instances over the past couple of years, has not had been given all they required needed in order to develop within their province. We say that we should go back and negotiate.

The sterile confrontation that we have had since November 1981 has gotten us absolutely nowhere. We are back to round one again. We have to start over again. We have to know exactly where we are going. (12 h 20)

On the other hand, we have the Parti québécois. They want independence and they want independence now. Mr. President, I know my time is up. The point I want to make in terminating is only this: If the Parti québécois is so sure that the answer to the to economic problems in the Province of Québec is independence, if they are so sure that by lucidity we can have independence in the Province of Québec, let them have the courage of their convictions. Let them not weaken the province politically, let them not weaken the province constitutionally and economically by playing on this question of separation. If they have the courage of their convictions, let them immediately go to the people and find out if things have changed since 1980. They were rejected then by 60% of the population who answered the question which was almost incomprehensible. There were so many elements in it. There is a lot of people that voted yes because they wanted Québec to negotiate, they wanted to give Québec a strong hand. But now it is not that, it is no longer negotiations, it is strictly a question: Do you wish to separate from the rest of Canada or not? If they have the courage of their convictions, I say to you, Mr. Lévesque, I say to you the Parti québécois: Have this courage to immediately call an election so that once and for all we can solve the problem. Either we separate and we try to make a better Québec or we join together and try to make a better Canada. A strong Québec within a unified Canada. This is what it is all about. Why turn around in circles? Why try to prepare the grounds for a better tomorrow when you will possibly be able to get your point across?

Mr. President, in terminating I say again: Have the courage of your convictions; call an election right away and we will let the people of the province of Québec determine our future.

Thank you.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Prévost et adjoint parlementaire au Travail.

M. Robert Dean

M. Dean: M. le Président, dans son message inaugural, le premier ministre nous a tracé les grandes lignes de l'action que le gouvernement se propose d'entreprendre au cours de l'année 1983, cette année où on espère sortir de la pire crise économique depuis 50 ans. Dans ce message il nous propose quatre volets. Un changement d'État qui nous fait espérer un État devenu moins lourd, plus décentralisé, plus près des citoyens et qui implique davantage les citoyens dans une atmosphère de concertation.

Le deuxième volet, celui de l'économie et de l'emploi propose une série de mesures, les unes plus nécessaires et urgentes que les autres, en vue de relancer l'économie et de créer des emplois. On y trouve l'urgence pour aider les PME en difficulté, le renforcement des structures financières des entreprises, la participation des travailleurs, les investissements publics et les incitations à l'investissement privé, le développement des marchés et la recherche de l'excellence scientifique et technologique.

Dans le volet changement de société on parle de plan d'action pour les jeunes et de réformes devenues urgentes et importantes du Régime de rentes du Québec, du Code du travail, de la Loi sur les accidents du travail et d'autres. Finalement on parle d'un changement de régime où on discute de la réforme parlementaire, du mode de scrutin, du droit des autochtones et de notre place

au sein du régime fédéral.

Je suis d'accord qu'il faut s'attaquer à tous ces multiples besoins d'une société moderne qui se veut prospère, juste, libre, humaine et capable d'occuper sa place dans le monde. Nous devons au cours de l'année, dans cette Chambre, nous attaquer à tous ces problèmes de front comme le gouvernement du Parti québécois a su le faire depuis 1976.

Je voudrais surtout insister sur le volet économie et emploi du message inaugural, ce volet qui nous promet une accentuation de la lutte au chômage et qui par ce fait rejoint le cri du coeur des hommes et des femmes dans tout le Québec, qui viennent de toute part, qui nous disent quoi faire pour sortir de la crise. (12 h 30)

Quoi faire pour assurer un emploi à chaque homme et à chaque femme, jeunes et moins jeunes qui veulent et qui peuvent travailler. Quoi faire devant le fait que depuis la fin de la deuxième guerre mondiale, quel que soit le gouvernement au pouvoir, à Ottawa ou à Québec, le Québec a toujours eu un taux de chômage plus élevé que la moyenne canadienne et encore plus élevé que celui de l'Ontario; quoi faire devant le fait que le Canada, qui en 1960 occupait le deuxième rang au monde en termes de revenu national par habitant, en dollars US, c'est-à-dire le deuxième pour la richesse nationale. Du deuxième rang en 1960, le Canada est passé au troisième rang en 1970, au dixième rang en 1979, et au quatorzième rang en 1981, entraînant le Québec dans sa chute. Soit dit en passant, selon ces mêmes barèmes, le Québec se trouve au dix-huitième rang.

Pour réfléchir sur ces problèmes, pendant cette période, il faut constater que le Canada a laissé faire les entreprises en bonne partie étrangères, au lieu de préparer une stratégie de développement économique et industriel. Il a choisi la voie de la compensation minimale des chômeurs plutôt que de développer une véritable politique d'emploi. Au début des années soixante-dix, comble de malheur, il a de nouveau imposé aux Canadiens un deuxième mauvais choix de politique, soit la création du chômage pour essayer de lutter en priorité contre l'inflation.

Avant de se poser la question et de proposer des réponses pour sortir de cette crise, il faut analyser la nature de la crise. Je vous dis que c'est une double crise que nous vivons au Québec. D'abord, la crise mondiale qui a affecté tout le monde, qui a frappé tout le monde, qui a amené un train de misère dans le monde entier. Cette crise a suivi les deux chocs pétroliers des années soixante-dix, les fluctuations des prix des denrées alimentaires et les prix des produits de matière première, et surtout, en face de ces événements, la politique monétariste adoptée par le gouvernement des États-Unis, du Canada et de l'Angleterre qui a eu 90% de ses effets sur la production et l'emploi et seulement 10% sur les prix.

Cette crise mondiale commence à se résorber, nous dit-on. Le Québec est bien équipé pour prendre sa place dans cette relance. Il y a une deuxième crise, la crise de l'existence québécoise au sein du Canada, qui existe depuis que le Canada est le Canada. C'est cette deuxième crise d'existence qui a fait en sorte que les industries clés d'une économie saine soient concentrées en Ontario: l'automobile, l'acier, le caoutchouc, le verre. C'est cette deuxième crise qui fait que les décisions fédérales avec la politique de la ligne Borden dans les années soixante ont abouti en 1982 et 1983 à la fermeture de la moitié des raffineries de pétrole du Québec. Ce sont ces politiques fédérales sur les brevets, il y a dix ans, qui ont fait en sorte que les entreprises pharmaceutiques consacrées à la recherche sont obligées maintenant de quitter le Québec et le Canada pour aller s'installer là où elles peuvent faire protéger leurs brevets.

C'est cette catastrophe de l'acquisition et de la construction d'un aéroport éléphant blanc à Mirabel. C'est cette fraude du F-18. C'est le cas de Volkswagen. C'est le S-31. C'est le Nid-de-Corbeau qui fait risquer la catastrophe à nos agriculteurs. Ce sont les politiques sur le textile et les chaussures qui font en sorte que cette crise d'existence québécoise au sein du système fédéral a toujours travaillé au détriment économique du Québec et à la création du chômage. C'est tellement vrai qu'il y a à peine quelques années, nos adversaires surtout, mais bien des citoyens de bonne volonté nous disaient: Avec la souveraineté du Québec, risquerait-il d'y avoir des conséquences économiques néfastes?

M. le Président, avec les leçons d'histoire depuis la guerre, rendues encore plus frappantes par la crise mondiale actuelle, nous pourrions maintenant poser à notre tour la question: Pouvons-nous risquer d'encourir des conséquences économiques néfastes avec le régime actuel en ne devenant pas souverains?

M. le Président, les conséquences humaines, sociales, économiques et politiques résultant de notre incapacité comme société d'offrir des emplois à tous ceux et toutes celles qui désirent travailler, et cela, depuis plusieurs décennies, sont rendues à ce point inacceptables qu'il nous faut, en tant que société et gouvernement, modifier toute notre philosophie et nous donner les moyens de changer radicalement la situation.

Dans la foulée du message inaugural, dans ses propositions pour l'économie et pour l'emploi, nous nous devons d'aller au bout.

Le gouvernement du Québec doit se fixer comme objectif d'assurer un emploi pour tous et pour toutes. En adoptant une politique de l'emploi, il se dote d'un instrument indispensable pour assurer une cohérence et donner leur véritable sens à ses politiques de développement économique, industriel et régional, à ses politiques de main-d'oeuvre, de formation professionnelle et de sécurité du revenu. Il faut constater une fois pour toutes que la non-stratégie actuelle est un échec; le manque de politiques d'emploi du fédéral et son laisser-faire en termes de développement industriel font en sorte que le Québec n'a connu qu'accidentellement des taux de chômage inférieurs à 6% depuis 1950. On se retrouve présentement avec près de 500 000 chômeurs. La politique fédérale, axée sur la sécurité du revenu plutôt que sur l'emploi, n'est pas un substitut pour une politique d'emploi. Le Québec compte actuellement plus de 375 000 ménages, bénéficiaires de l'aide sociale, dont plus de la moitié est constituée de personnes aptes au travail. Sans changement radical de politique, les deux groupes, chômeurs et assistés sociaux, risquent de s'enliser et de s'enfermer dans la pauvreté en permanence.

Quelles sont les conséquences de la politique actuelle? D'abord, la marginalisation de certains groupes; les jeunes qui n'ont aucun avenir et qui se trouvent confrontés au désespoir devant l'impossibilité et leur désir de trouver un emploi; les femmes, les personnes handicapées, les travailleurs et travailleuses âgées.

Deuxièmement, les conséquences de la politique actuelle, les coûts économiques élevés. Savez-vous qu'en 1981 le chômage a coûté au Québec 15 000 000 000 $? 6 000 000 000 $ aux gouvernements; 5 000 000 000 $ aux entreprises et salariés et 2 000 000 000 $ aux chômeurs. Donc, dans une situation de chômage chronique, personne ne gagne, tout le monde perd.

Il est estimé que chaque Québécois et Québécoise au travail paie 2000 $ par année pour soutenir financièrement ceux et celles qui ne travaillent pas à cause du chômage.

Troisièmement, les coûts sociaux. Des études scientifiques répétées au États-Unis établissent un rapport direct entre une hausse du taux de chômage et une hausse des coûts sociaux et humains attribuables au suicide, à l'homicide, aux maladies cardio-vasculaires et rénales et, d'autre part, à une hausse des taux d'admission dans les hôpitaux psychiatriques et dans les institutions pénales; sans compter, ce qui saute plus facilement aux yeux, le désespoir, la misère morale et physique des individus et des familles: des hommes, des femmes et des enfants.

Seul, il n'y a pas de solution. Aucun groupe à lui seul ne peut solutionner ce problème de chômage chronique. Tout le monde perd en situation de chômage, personne ne gagne. Les travailleurs perdent leur salaire et leurs acquis; les employeurs perdent des ventes, des profits, leur efficacité et leur productivité. Les travailleurs et leur syndicat résistent par insécurité aux innovations technologiques et aux mesures qui permettent une flexibilité d'action et s'acharnent sur des clauses strictes de sécurité et d'ancienneté, ce qui envenime les relations du travail. Le gouvernement voit baisser ses revenus, voit s'effondrer ses marges de manoeuvre et se voit incapable de fournir les services dont la population a besoin.

Au contraire, qu'est-ce qu'une politique d'emploi donne comme avantages? Ce ne sont pas des avantages théoriques que j'élaborerai. La preuve en est faite. Pendant que le Canada, à l'instar des États-Unis, s'enlise dans des politiques de laisser-faire économique et une approche charité de la sécurité du revenu, une demi-douzaine de petits pays au monde, à une seule exception, des pays de 5 000 000 à 9 000 000 de population, donc semblables à la population du Québec, se sont donné, comme première priorité nationale, un emploi pour tous et pour toutes et ce, depuis des décennies. Quel en est le résultat? Pendant la décennie 1970 à 1980, ces pays avaient un taux de chômage moyen de 2% ou 3% contre 5% à 8% pour le Canada et les États-Unis. (12 h 40)

Entre 1960 et 1980, les pays qui ont une politique de l'emploi ont réussi généralement à multiplier par neuf ou dix leur revenu national par habitant - en dollars américains - alors que le Canada et les États-Unis n'ont réussi qu'à le multiplier par quatre. La performance du premier groupe de pays est plus de deux fois supérieure à celle du Canada et des États-Unis.

Pendant la crise mondiale actuelle, M. le Président, les pays qui ont une politique de l'emploi ont subi la même crise, la même pénurie de pétrole, mais ils maintiennent encore des taux de chômage substantiellement moins élevés que ceux du Canada et des États-Unis. Ils subissent des taux d'intérêt et des taux d'inflation souvent inférieurs, mais jamais plus élevés que ceux du Canada et des États-Unis.

Le Fonds monétaire international et enfin Statistique Canada ont attribué au Canada la pire performance des 17 pays industrialisés du monde face à la crise.

C'est d'un autre virage que l'on a besoin, un virage vers une politique de l'emploi. Pour ceux qui aiment rigoler des virages, laissez-moi vous dire en passant que, dans ces petits pays, le virage de la politique de l'emploi n'est aucunement entré en contradiction avec un virage technologique, mais, au contraire, une politique de l'emploi est la meilleure façon

d'effectuer le virage technologique, de faire rentabiliser et moderniser les usines de production parce que, dans ces pays, tout le monde travaille. Et, à cause des éléments d'une politique de l'emploi, on réajuste l'économie et les emplois. En rentabilisant les entreprises, on augmente les ventes et les profits.

Qu'est-ce qu'une politique de l'emploi? C'est une politique qui vise à assurer un emploi pour toute personne qui désire travailler, un emploi véritablement productif et librement choisi qui répond à toutes ses aspirations et qui fait appel à ses compétences déjà acquises ou qu'elle peut améliorer grâce à une formation appropriée.

Le gouvernement devient le maître d'oeuvre de cette politique d'un effort national massif où la création et le soutien de l'emploi deviennent la priorité absolue par rapport à toutes les politiques de l'État. L'emploi devient une obsession nationale.

Il faut noter que le gouvernement ne devient pas l'employeur, mais plutôt le chef d'orchestre d'un effort collectif qui englobe et implique les partenaires socio-économiques, les employeurs et les travailleurs.

En Suède, 94% des possibilités de production sont entre les mains de l'entreprise privée. En Autriche, 80%. La politique d'emploi consiste en des interventions souples, rapides et cohérentes visant à prévenir le chômage, à créer des emplois, à adapter la main-d'oeuvre et à modifier les structures industrielles en conformité avec les objectifs de cette politique. Cette politique est la façon la plus efficace, la moins coûteuse et la moins inflationniste de résister au chômage. La preuve en est faite. Les petits pays, en plus de l'Allemagne qui est un pays un peu plus grand, en ont fait la preuve et la font encore.

Évidemment, dans le régime fédéral actuel, il y a des difficultés dans la réalisation d'une politique d'emploi parce qu'une partie de cette politique est constituée d'une politique monétaire, commerciale, de sécurité du revenu, de main-d'oeuvre, budgétaire. Donc, le Québec ne contrôle pas sa politique monétaire. La politique monétariste adoptée par le fédéral a fait plus mal au Québec qu'à toute autre province. Le Québec ne contrôle pas, non plus, sa politique commerciale. À la suite d'efforts acharnés du gouvernement du Québec pour aider, par exemple, l'industrie de la chaussure, du textile et du vêtement à se moderniser, les acquis et les efforts dépensés pourraient être anéantis par un coup de plume à la suite d'une décision du gouvernement fédéral d'ouvrir les vannes sur les importations.

Évidemment, dans le domaine d'une politique de sécurité du revenu, d'une politique de main-d'oeuvre, d'une politique budgétaire, le Québec a des moyens, une partie des outils. Le fédéral garde les autres. Assez souvent, la mise en pratique de ces politiques est compliquée inutilement et est rendue plus coûteuse par ce partage des pouvoirs. Mais ce que représente une politique d'emploi appartient totalement à la juridiction provinciale et on peut faire un grand bout sur le chemin d'une politique de plein emploi qui vise un emploi pour tous et toutes avec les outils que la province a à sa disposition.

Il est surtout important de considérer que le peuple québécois, une fois convaincu de la volonté et de l'acharnement de son gouvernement à réaliser une politique d'emploi, fera, sur-le-champ, le constat de l'impossibilité, de l'incohérence et de l'injustice du régime fédéral et, tout naturellement, entamera le processus de la souveraineté pour réaliser ce que les autres petits pays ont réalisé, la sécurité et le dynamisme économique et social par une politique en vue d'assurer un emploi pour tous.

Pour atteindre une politique d'emploi, M. le Président, il y a des défis à relever. Il faut créer un climat de solidarité nationale. C'est là une condition essentielle au succès d'une telle politique. Une décision du gouvernement de tout mettre en oeuvre pour assurer un emploi à chacun et à chacune peut contribuer à mobiliser la population dans un effort de solidarité nationale.

Également, il ne faut pas se laisser paralyser par une hantise du déficit. Il y a un coût à une politique d'emploi. Des fonds de solidarité nationale peuvent être des moyens originaux, comme les bons de la victoire pendant la Deuxième guerre mondiale, pour amorcer la pompe d'une politique d'emploi, mais il faut également prévoir des engagements budgétaires de la part de l'État. Il faut dire qu'un déficit augmenté par les investissements qui créent des emplois permanents, c'est autrement plus défendable et plus acceptable qu'un déficit encouru pour payer les prestations d'assurance-chômage et d'aide sociale. Il est également prouvé que les entrées fiscales qui résultent de l'augmentation du niveau de l'emploi compensent assez rapidement le coût affecté à l'augmentation du niveau de l'emploi. Donc, les dettes encourues sont relativement de courte durée.

Quelles sont les principales dimensions d'une politique d'emploi? D'abord, le développement industriel. Le gouvernement du Québec a déjà sa stratégie de développement industriel: Bâtir le Québec et Bâtir le Québec, phase II, le Virage technologique. De nombreux éléments sont déjà incorporés dans les politiques en vigueur ou des politiques préconisées dans le message inaugural. Parmi toutes les politiques

existantes et à créer, deux conditions sont essentielles au choix des mesures à utiliser: que les différents volets de la politique d'emploi soient étroitement coordonnés et que les agents socio-économiques soient étroitement associés à titre de partenaires dans toutes les phases de la politique.

Deuxième dimension: la protection de l'emploi. Encore une série de mesures qui aident à lutter contre les périodes de récession, les périodes de difficulté temporaire des entreprises ou pour créer temporairement des emplois en périodes de difficulté. Encore là, nous avons déjà en marche de telles politiques; d'autres sont prévues, il ne s'agit que de les compléter et de les coordonner. (12 h 50)

Troisièmement, il faut équilibrer la demande et l'offre de la main-d'oeuvre. Par exemple, un des outils nécessaires serait d'établir un inventaire de la main-d'oeuvre, des besoins en main-d'oeuvre sur le plan local, régional et national, de voir à la formation, au perfectionnement et au recyclage des travailleurs et des travailleuses et à leur relocalisation si nécessaire; des programmes spéciaux pour les groupes cibles, particulièrement brimés par les conditions actuelles de chômage: les jeunes, les femmes, les personnes âgées, les personnes handicapées, les assistés sociaux et les travailleurs immigrants.

Quatrièmement, la création massive d'emplois par l'action gouvernementale pour permettre la transition vers une politique globale d'emploi qui vise à assurer un emploi pour tous. Quelques-unes des possibilités: les programmes d'assainissement des eaux, l'implantation de réseaux d'aqueduc, la construction domiciliaire, la rénovation urbaine, l'entretien du réseau routier, l'animation touristique et culturelle, les services personnels aux personnes âgées, les activités des enfants et des adolescents, l'entretien du patrimoine, etc. Encore là, plusieurs de ces mesures existent déjà; il s'agit de les regrouper pour créer cette politique d'emploi.

Devant l'ampleur du problème, il ne faut pas se laisser abattre par l'idée que la mise en marche de tels programmes nécessite de longs délais. Nous avons des exemples frappants qu'on peut réaliser rapidement un changement majeur sans atteindre la perfection à court terme. Au début de la Deuxième guerre mondiale, le Canada est passé d'un taux de chômage de 15% à un très faible niveau en l'espace de quelques années. Plus impressionnant encore, au début de la longue et fructueuse expérience suédoise, le pays est passé de 200 000 chômeurs à 16 000 en l'espace de deux ans. Là où il y a une volonté ferme et collective, il y a un moyen; il s'agit de vouloir.

Il y a quelques conditions nécessaires à la réalisation et à l'efficacité d'une politique globale d'emploi qui se veut une politique de plein emploi. Pour réaliser une politique d'emploi, il faut d'abord reconnaître la valeur primordiale du travail comme moyen privilégié de réalisation personnelle et sociale, mais aussi comme la meilleure façon d'obtenir un développement économique dynamique et harmonieux, ainsi qu'une croissance constante de notre richesse. Il faut également un engagement ferme du gouvernement, à savoir que la politique d'emploi pour tous et pour toutes doit transcender toutes les autres politiques du gouvernement. Cela prend des pouvoirs attribués à un responsable de ce gouvernement qui lui permettent de maintenir un degré élevé de coordination des diverses politiques appliquées dans divers ministères.

Il faut également, enfin, associer les agents socio-économiques à cette politique. D'abord, ce sont les employeurs et les travailleurs qui ont une connaissance directe des problèmes économiques en ce qui a trait à l'entreprise, en ce qui a trait à une région. Deuxièmement, une politique d'emploi implique des investissements privés aussi et surtout. Ces investissements sont décidés par le secteur privé et d'autres gouvernements que le gouvernement national. Donc, on ne peut réaliser une politique d'emploi que si chaque agent socio-économique se sent partie prenante à cette politique comme c'est le cas dans tous les pays où il existe une politique d'emploi pour tous et pour toutes. Une politique d'emploi, M. le Président, c'est bien clair, est un ensemble de nombreuses mesures et composantes. Elle nécessite une cohérence à toute épreuve, une continuité tant en période de développement qu'en période de crise, de la souplesse devant chaque situation particulière rencontrée et une rapidité d'intervention.

Une politique d'emploi se base beaucoup plus sur la prévention que sur la guérison. L'expérience déjà vécue au Québec confirme ce qui existe en d'autres pays. S'il y a un coût à la création de l'emploi, ce coût est rapidement remboursé par les entrées fiscales réalisées par les emplois créés. On n'a pas besoin d'experts pour constater que l'emploi et la production de biens et services rentabilisent l'équipement, augmentent la productivité, engendrent des profits, stimulent la consommation, réduisent les coûts de l'assurance-chômage et de l'aide sociale en faveur de l'augmentation des impôts pour le gouvernement.

M. le Président, en terminant, je voudrais vous dire qu'un emploi pour tous et pour toutes, une politique globale d'emploi, un acharnement national pour créer et soutenir les emplois pour toutes les personnes au Québec, c'est une priorité qu'on ne peut

pas ne pas se permettre. Une politique d'emploi est une politique à la fois économique et sociale. Elle est économique, mais elle engendre le dynamisme social. Elle assure la croissance et le développement économique. Elle élève le niveau de vie, elle répond aux besoins de la main-d'oeuvre, elle résout tout le problème du chômage et du sous-emploi. Elle est plus efficace, moins coûteuse et moins inflationniste. Une telle politique est réalisable. Elle est réalisable parce qu'elle est déjà réalisée dans d'autres petits pays du monde occidental et industriel. Pourquoi pas nous? En cours de route, nous réaliserons la souveraineté d'un peuple qui se prend en main et se bâtit. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Hull.

M. Rocheleau: M. le Président, est-ce qu'on peut demander la suspension du débat?

Le Vice-Président (M. Rancourt): Cette motion de suspension est-elle adoptée, M. le whip du gouvernement?

M. Brassard: M. le Président, je fais motion pour que nous suspendions nos travaux jusqu'à 15 heures.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Est-ce que cette motion de suspension est adoptée? Adopté.

Nos travaux sont suspendus jusqu'à 15 heures.

(Suspension de la séance à 12 h 57)

(Reprise de la séance à 15 h 17)

Le Président: À l'ordre, mesdames et messieurs!

Moment de recueillement. Veuillez vous asseoir.

Visite de l'ambassadeur du Burundi

J'ai le plaisir de souligner la présence dans nos galeries aujourd'hui de l'ambassadeur du Burundi, M. Jérôme Ntungumburanye.

Déclarations ministérielles. Il n'y en a pas.

Propositions de délimitation des circonscriptions électorales

Au dépôt de documents, j'ai le plaisir de déposer un document qui va sûrement intéresser tous les députés de cette Chambre. Il s'agit des propositions de délimitation des circonscriptions électorales de la Commission de la représentation électorale du Québec.

Au dépôt de documents, M. le leader parlementaire.

Rapport annuel de Radio-Québec

M. Bertrand: M. le Président, à titre de ministre des Communications, je voudrais déposer le rapport annuel 1981-1982 de la Société de radiotélévision du Québec, plus communément appelée Radio-Québec, l'autre télévision.

Le Président: Rapport déposé.

M. le ministre des Communications.

Rapport de la firme Tamec sur les télécommunications

M. Bertrand: Même si la nouvelle Loi sur l'accès à l'information, par son article 39, me dispenserait de déposer ces documents, puisque nous recevons les dirigeants de Bell Canada la semaine prochaine, je voudrais déposer le rapport de la firme Tamec sur le développement intégré du secteur des télécommunications au Québec.

Le Président: Rapport déposé. M. le ministre de l'Énergie et des Ressources.

Décret concernant un paiement

pour des actions de la Société

nationale de l'amiante

M. Duhaime: M. le Président, il me fait plaisir de déposer le décret du 30 mars 1983 concernant un paiement par le ministre des Finances pour des actions de la Société nationale de l'amiante.

Le Président: Rapport déposé. M. le député de Richmond.

Pétition demandant la reconstruction de la route 116

M. Vallières: M. le Président, je voudrais déposer une pétition qui a reçu l'appui de quelque 4650 signataires relativement à la reconstruction de la route 116 dans le comté de Richmond. Je veux, d'abord, vous présenter le court texte de la pétition: "Considérant la décision du gouvernement du Québec en 1977 de canceller le projet de construction de l'autoroute 55 devant relier Saint-Albert à Richmond; considérant les engagements du premier ministre Lévesque de rendre prioritaire la réfection de la route 116 en 1979, des anciens ministres des Transports, MM. Lessard et de Belleval, du ministre actuel,

M. Michel Clair; considérant l'engagement des candidats du Parti québécois en Estrie lors de l'élection générale du 13 avril 1981, à savoir de reconstruire la route 116, section Richmond-Danville; (15 h 20) considérant que la route 116 a atteint un état de détérioration avancé tant au plan de son caractère géographique que structural et qu'elle représente un danger sérieux pour ses usagers, considérant l'importance vitale de la reconstruction de cette route pour le développement économique des régions d'Asbestos, Danville, Richmond et Kingsey-Falls, nous, soussignés, demandons au gouvernement du Québec de procéder sans délai à la reconstruction de la route 116 entre Kingsey-Falls et Richmond et de considérer prioritairement la réfection du tronçon reliant Danville à Richmond."

En terminant, j'inviterais mes trois collègues péquistes de la région à signer la pétition.

Des voix: Bravo!

Le Président: Pétition déposée. M. le ministre de l'Énergie et des Ressources a un autre rapport à déposer.

Rapport annuel du ministère de l'Energie et des Ressources

M. Duhaime: M. le Président, je voudrais déposer le rapport annuel 1981-1982 du ministère de l'Énergie et des Ressources.

Le Président: Rapport déposé. Mme la députée de Jacques-Cartier.

Mme Dougherty: M. le Président, j'aimerais déposer deux pétitions qui viennent de plusieurs centaines de parents montréalais.

Pétition demandant le retrait de la loi 111

La première se lit comme suit: As a citizen of Québec and as a parent, I demand that the Government of Québec immediately rescind Law 111, as it infers guilt without proof, suspends civil liberties to which every citizen of Québec is entitled to in law, and seeks to suspend rights we all enjoy under the Canadian Constitution.

Le Président: Pétition déposée.

Pétition demandant le rejet du projet de restructuration scolaire

Mme Dougherty: The second petition: "We, the undersigned, as responsible citizens and parents, reject the proposals for the restructuration of our school system as put forth in the white paper: The Québec School: a responsible force in the community. "We demand that the present system of education, under the control of school boards elected by universal suffrage, be retained. "The massive reorganisation proposed in the white paper will not improve our educational system. The proposals are untimely, unnecessary and unwanted. We demand peace in our schools."

Le Président: Pétition déposée.

Il n'y a pas de dépôt de rapports de commissions élues, ni de rapports du greffier en loi sur les projets de loi privés, ni de présentation de projets de loi au nom du gouvernement ou au nom des députés. Nous passons donc à la période des questions.

M. le député de Mont-Royal.

QUESTIONS ORALES DES DÉPUTÉS

Développement régional et taux de chômage en Gaspésie

M. Ciaccia: M. le Président, ma question s'adresse au premier ministre et concerne le développement régional en Gaspésie où le chômage a atteint un taux alarmant. La situation économique est devenue telle que de toutes les régions du Québec, c'est sans contredit celle du Bas-Saint-Laurent qui vit le plus durement la triste réalité du marché du travail, soit un taux de chômage de 29,3% au mois de mars comparativement à 24,6% à la même époque l'année dernière. On peut remettre en question les mesures que le gouvernement prend pour essayer de remédier à ces situations. Par exemple, quand vous parlez de la création de bons d'emploi, il y a 19 000 jeunes qui ont des bons d'emploi et il n'y a pas de job pour utiliser ces bons d'emploi.

Ma question au premier ministre est la suivante: Quelles mesures concrètes et immédiates le premier ministre entend-il prendre pour remédier au problème, qui est catastrophique, d'un taux de chômage aussi élevé dans la région du Bas-Saint-Laurent?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Lévesque (Taillon): M. le Président, je présume que, si on choisit une région en particulier, c'est pour des raisons de dramatisation. Il est évident que tout le monde a vu - ce n'est pas une histoire gaie, mais quand même il y a des choses qu'il faut relativiser un peu là-dedans - les chiffres du chômage qui ont paru ces jours-ci. Ils disent que dans une situation qui est dans bien des coins catastrophique - c'est vrai - il y a quand même, par rapport aux derniers mois, proportionnellement moins de chômeurs au Québec, homologués en tout cas par les mêmes statistiques fédérales, que

pendant n'importe quelle année qui a pu donner des statistiques.

Actuellement c'est 28,5% du total canadien. Dieu sait que cela fait mal partout. C'est le total canadien qui a monté aussi. Cela étant dit, il n'y a pas de gouvernement autant que celui du Québec, sur le plan provincial en tout cas, toutes proportions gardées, qui ait, aussi bien l'an dernier que cette année - on a pu voir les crédits qui ont été déposés il y a quelques jours - fait autant d'efforts pour essayer d'alimenter au maximum une création d'emplois dans certains cas temporaires, dans d'autres cas de faire démarrer des projets. Cela s'applique aussi bien en Gaspésie ou dans le Bas-Saint-Laurent qu'ailleurs.

Je pourrais par exemple demander - et c'est un coin très important parce qu'il s'agit de Murdochville en Gaspésie - à mon collègue de l'Énergie et des Ressources de nous dire où cela en est par rapport, en particulier, aux possibles projets - et Dieu sait que c'est complexe à mettre au point -dans le cas de Murdochville, par exemple. On sait à quel point des menaces planent sur Murdochville comme cela est arrivé dans je ne sais combien de villes minières ces dernières années un peu partout en Amérique du Nord. Peut-être que mon collègue de l'Énergie et des Ressources pourrait ajouter quelques renseignements utiles en ce qui concerne spécifiquement Murdochville, dans la région dont parle le député de Mont-Royal.

Le Président: Rapidement, M. le ministre de l'Énergie et des Ressources, s'il vous plaîtl

M. Duhaime: M. le Président, je puis dire que nos discussions sont très avancées avec le groupe minier Noranda pour ce qui est d'un investissement majeur par la compagnie Mines Gaspé, une filiale du groupe Noranda, de façon à faire, pour les prochaines années, des dépenses de développement qui pourraient créer quelques centaines d'emplois. J'ajoute aussi que, pour ce secteur du Québec, cette grande région, nous pourrons faire progresser le dossier de la papeterie de Matane, un investissement projeté de l'ordre de 270 000 000 $ qui devrait créer plus de 400 emplois, lorsque nous aurons reçu réponse à deux questions: Est-ce que le "ruling" du gouvernement fédéral au 30 mars 1983 sera prolongé pour nous permettre de mettre en place et de financer une société en commandite? Deuxièmement, à quel moment et de quel montant sera la subvention fédérale dans ce dossier?

Je dois me rendre compte, M. le Président, qu'en 1983 il est moins facile d'avoir des réponses du gouvernement fédéral dans ce genre de dossier que lors d'une campagne générale au Québec ou d'une campagne référendaire.

Le Président: M. le député de Mont-Royal, question additionnelle.

M. Ciaccia: M. le Président, est-ce que je pourrais demander au premier ministre et au ministre de l'Énergie et des Ressources, au lieu de toujours essayer d'introduire des conflits fédéraux-provinciaux, au lieu d'essayer de...

Le Président: Sans préambule, M. le député.

M. Ciaccia: ...mettre la faute sur les autres...

Une voix: II est rendu séparatiste.

M. Ciaccia: Pourquoi le gouvernement lui-même ne donne-t-il pas des précisions, des mesures concrètes? Est-ce que je pourrais porter à l'attention du premier ministre que - quand il cite des chiffres, il nous accuse de dramatiser en Gaspésie - il y avait 25 575 bénéficiaires de l'aide sociale au 1er avril 1983, soit une augmentation de 54% depuis 1977? C'est peut-être dramatique...

Des voix: Question.

M. Ciaccia: ...mais ce sont les bénéficiaires de l'aide sociale qui souffrent et n'ont pas d'emploi. Est-ce que je pourrais faire une suggestion au premier ministre?

Des voix: Non.

Le Président: M. le député, j'attire votre attention sur le fait que j'ai demandé jusqu'à maintenant et obtenu de la part de l'Opposition une bonne collaboration pour ce qui est des questions additionnelles sans préambule. Je vous en prie, une question, mais non pas une série de questions qui aboutissent à une autre question.

M. Ciaccia: Est-ce que le premier ministre pourrait s'engager, dans le cas de la route 132, par exemple, à continuer, avec célérité la construction de cette route, ce qui permettrait la création d'emplois et ce qui permettrait aussi l'augmentation du tourisme dans ce secteur.

Comme mesure concrète, pour aujourd'hui, le premier ministre pourrait-il s'engager à compléter ce projet?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Duhaime: M. le Président...

Le Président: M. le ministre de

l'Énergie et des Ressources.

M. Duhaime: Question de privilège, M. le Président. Avant que vous ne rappeliez à l'ordre le député de Mont-Royal, qui disait que je voulais susciter une querelle en donnant la réponse que j'ai donnée tantôt...

Une voix: Ce n'est pas une question de privilège.

M. Duhaime: Oui, c'est une question de privilège, on m'accuse de poser des gestes que je n'ai pas posés. Je voudrais simplement rappeler au député de Mont-Royal que dans le dossier qui concerne l'Est du Québec, la mine de sel, le gouvernement fédéral n'a jamais payé un seul cent... (15 h 30)

M. Lalonde: Question de règlement, M. le Président.

Le Président: Je soupçonne la nature de votre question de règlement, M. le leader, et je me levais au même moment que vous. Je ne vois pas, M. le ministre, en quoi vous soulevez une question de privilège sur l'argumentation qui a pu être faite par le député de Mont-Royal.

M. Duhaime: Je n'ai pas terminé.

Le Président: Un instant! Je ne vous permettrai pas de terminer, à moins que vous n'ayez effectivement une question de privilège. En quoi vos privilèges ont-ils été violés par les propos du député de Mont-Royal?

M. Duhaime: J'allais ajouter, M. le Président, que le député de Mont-Royal disait que je voulais susciter une querelle avec le gouvernement fédéral en répondant à la question. Je vous dis que c'est inexact, que c'est faux.

M. Lalonde: Question de règlement, M. le Président.

M. Duhaime: Ce que je veux dire, c'est que dans le dossier de l'amiante, par exemple...

M. Lalonde: Question de règlement, M. le Président.

Le Président: II y a une question de règlement.

M. Duhaime: Dans le dossier de l'amiante...

M. Houde: Vous le direz après 18 heuresl

M. Lalonde: Question de règlement, M. le Président.

Le Président: M. le ministre. Question de règlement, M. le leader parlementaire de l'Opposition.

M. Lalonde: J'aimerais, M. le Président, que vous expliquiez au ministre de l'Énergie et des Ressources qu'une différence d'opinions ou même une accusation qui concerne sa qualité ou sa fonction de ministre ne donne pas ouverture à une question de privilège de député.

Le Président: Je vous ai signalé tantôt, M. le ministre, que je ne voyais pas en quoi vos propos constituaient une question de privilège. J'avoue que je ne vois toujours pas en quoi vous posez une question de privilège. La question complémentaire était posée à M. le premier ministre.

M. Lévesque (Taillon): Cela arrive de cette façon. Je n'en ferai pas une question de privilège, j'en ferai un complément de réponse, puisqu'on me pose des questions qui impliquent que, présumément, on ferait des chicanes exprès avec le fédéral.

Des voix: Oh!

M. Lévesque (Taillon): C'est exactement le préambule.

Des voix: Oh!

M. Lévesque (Taillon): Le préambule à une question, sauf erreur, M. le Président, cela justifie un préambule à ma réponse. Est-ce qu'on a créé - je parle de la région des Maritimes et de la région du Bas-Saint-Laurent-Gaspésie, notre région maritime - un conflit quand le gouvernement fédéral a refusé de mettre un traître sou dans la mine de sel des Îles-de-la-Madeleine pour protéger le sel des Maritimes? C'est nous qui avons inventé cela? Non. C'est dans le Bas-Saint-Laurent-Gaspésie, Îles-de-la-Madeleine.

Par ailleurs, quand le fédéral a mis -je ne sais pas combien - 16 000 000 $ pour l'amiante de Terre-Neuve et que, par ailleurs, avec les surplus, parce qu'on a la même situation économique, il n'y a jamais un sou disponible pour le Québec, ce n'est pas nous qui créons le conflit. C'est un conflit systématiquement entretenu par les amis de nos amis d'en face.

Je rappellerai qu'avec un déficit dont au moins le quart, c'est-à-dire 7 000 000 000 $ ou à peu près, va peser sur le dos des citoyens du Québec, ce déficit qui, paraît-il, a baissé, on l'avait gonflé pour montrer qu'il va être moins gros. Ce déficit qui est dans les quelque 20 000 000 000 $, il y a de l'argent québécois là-dedans...

M. Ciaccia: Question de règlement.

Le Président: Question de règlement, M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: M. le Président, je crois que le règlement est très clair. J'ai posé une question claire et précise sur la route 132. Est-ce que le premier ministre est prêt à s'engager de continuer la construction de cette route avec toute célérité? C'est cela que j'ai demandé.

Le Président: M. le député de Mont-Royal, voilà une belle illustration - M. le ministre, je vous en prie. M. le président du Conseil du trésor, s'il vous plaît - M. le député, de ce pourquoi il est interdit d'avoir des préambules à une question complémentaire. À partir du moment où il y a un préambule à une question complémentaire et votre question complémentaire a été malgré tout précédée d'un préambule qui en ouvrait grand, inévitablement, cela ouvre la porte, non pas à une question de privilège là où il n'y en avait pas, mais à une réponse qui englobe tout ce que le préambule interdit a pu soulever. M. le premier ministre.

M. Lévesque (Taillon): M. le Président, je terminais ce préambule en réponse à celui du député de Mont-Royal pour dire simplement que quand on est rendu dans quelque 20 000 000 000 $ de déficit dont quelques milliards, à peu près le quart, vont peser sur le dos des contribuables du Québec, on ne devrait pas être obligé de faire des sparages à n'en plus finir comme cela pour que le Québec obtienne sa part, surtout dans des régions comme celles qu'évoque le député de Mont-Royal.

Pour ce qui est de la route no 132 spécifiquement et pour ce qui est de la politique du gouvernement vis-à-vis de l'ensemble de cette région Bas-Saint-Laurent-Gaspésie, je demanderai au ministre des Transports de vous dire ce qui en est pour cette route. Si c'est vrai honnêtement que vous voulez des informations sur ce que fait le gouvernement dans cette région, je demanderai au président du Conseil du trésor de vous expliquer comment on a choisi les priorités dans les dépenses du gouvernement pour cette région en particulier.

Le Président: M. le ministre des Transports, brièvement.

M. Clair: M. le Président, je suis heureux de l'intérêt, nouveau à ma connaissance, que porte le député de Mont-Royal aux travaux routiers en Gaspésie. Tout ce que je dois lui dire sur cette question: d'abord l'enveloppe budgétaire de construction routière au Québec prévoit les plus importants travaux cette année, comme l'année dernière, justement dans la région de la Gaspésie et dans la région de l'Outaouais. En ce qui concerne de façon très spécifique la route no 132, à l'intérieur de cette enveloppe allouée à la construction routière dans la région de la Gaspésie, les plus importants travaux ont lieu précisément sur la route no 132. Le ministère des Transports fait tout ce qui est possible pour accélérer ces travaux de reconstruction de la route no 132. J'apprendrai probablement au député de Mont-Royal que, dans le but d'accélérer encore ces travaux, il y a des soldes, si l'on veut, dans l'entente sur les axes routiers prioritaires. Je vois le député d'Argenteuil, qui sait très bien qu'un montant avait été alloué pour la construction éventuelle de l'autoroute no 13 dans la région de Montréal, reliant Mirabel à Montréal; ces travaux ne sont pas considérés comme prioritaires maintenant par à peu près personne. Il y a toujours plusieurs mois que j'ai soumis au ministre du Développement régional et au ministre des Finances, qui en ont saisi leurs vis-à-vis fédéraux, une demande visant à réorienter des crédits prévus pour l'autoroute no 13 vers des travaux sur la route no 132 en Gaspésie et la route no 117 vers l'Abitibi.

M. Gratton: Question de règlement, M. le Président.

Le Président: Une question de règlement, M. le député de Gatineau.

M. Gratton: M. le Président, si on veut tenter de noyer le poisson de l'autre côté, je veux bien, mais quand le ministre des Transports vient déterrer l'autoroute no 13 je ne vois pas quel rapport cela a avec la question... Je n'ai pas terminé, M. le Président.

Le Président: Je ne vois vraiment pas, M. le député, en quoi vous avez une question de règlement. Vous faites de l'argumentation sur le fond. Si vous avez une question d'appel au règlement, je vous en prie, indiquez-moi en quoi elle consiste.

M. Gratton: M. le Président, je vais vous poser la question. Est-il pertinent pour le ministre de répondre à une question que je pourrais lui poser sur l'autoroute 5 dans mon comté, pour répondre à la question du député de Mont-Royal sur la 132 en Gaspésie? il me semble qu'il y a quelque chose qui cloche quelque part.

Le Président: Je vous en prie. J'ai écouté les réponses du ministre des Transports. J'ai cru entendre qu'il faisait référence à une question de transfert de crédits selon les priorités, que, de l'autoroute

13 qui était à Montréal, cela pouvait aller à la route 132 en Gaspésie et que, dans ce sens, c'était effectivement pertinent au propos.

Question principale.

M. Clair: M. le Président, pour compléter...

M. Lévesque (Taillon): La question du député de Mont-Royal n'était pas spécifique à la route 132. Il vient d'avoir une réponse spécifique à propos de la route 132. La question n'était pas principalement à propos des relations fédérales-provinciales, mais c'est le député de Mont-Royal qui a introduit le sujet. La question était sur ce qu'on faisait pour la partie chômage, la partie terriblement catastrophique - d'ailleurs, on le sait - de ce qui se passe en Gaspésie et dans le Bas-Saint-Laurent. J'ai évoqué les dépenses, mais je crois qu'il est normal, si la Chambre veut être informée, les citoyens aussi, et si ce sont des renseignements qu'on veut, que le président du Conseil du trésor, qui en même temps représente un comté gaspésien, puisse vous dire ce qui en est rapidement des priorités qui ont été choisies pour les dépenses, justement, en ce qui concerne la Gaspésie et le Bas-Saint-Laurent. (15 h 40)

Le Président: M. le leader parlementaire de l'Opposition, sur une question de règlement.

M. Lalonde: Question de règlement. On veut bien avoir des réponses aux questions très pertinentes du député de Mont-Royal, mais si on accepte - c'est pour cela que je me lève à ce moment - que le premier ministre agisse simplement comme maître de cérémonies pour que tous les ministres se lèvent à tour de rôle pour dire ce qu'ils pensent du développement économique d'une région, je ne pense pas que ce soit le genre de questions ou de réponses qui soit prévu à notre règlement. Si le premier ministre ne connaît pas les réponses, qu'il dise qu'il ne les connaît pas tout simplement.

Le Président: M. le leader parlementaire du gouvernement.

M. Bertrand: M. le Président, sur cette question de règlement soulevée par le leader de l'Opposition, il était évident, lorsque le député de Mont-Royal a posé sa question, qu'il se référait aux décisions que le gouvernement avait prises relativement aux sommes dégagées pour tenter de régler certains problèmes, entre autres, au niveau du chômage, dans la région du Bas-Saint-Laurent-Gaspésie. Or, la personne qui a la responsabilité de la défense des crédits, c'est-à-dire des dépenses du gouvernement pour l'année 1983-1984, c'est le ministre délégué à l'administration, président du Conseil du trésor. Il m'apparaît tout à fait normal que le ministre puisse répondre à cette question puisqu'il connaît très bien tous les chiffres relatifs aux priorités qui ont été retenues dans cette région.

Le Président: Je vous en prie. J'ai écouté effectivement l'argumentation des deux côtés de la Chambre. Je dois dire qu'effectivement, le préambule, interdit en principe, du député de Mont-Royal à la question additionnelle a ouvert la porte très largement. C'est pourquoi j'ai permis, comme je l'ai souligné tantôt, non pas une question de privilège - ce n'en était pas une - mais que le premier ministre réponde tout aussi largement. Toutefois, il est évident qu'à partir du moment où une question est posée, on pourrait toujours en référer à un ministre ou à un autre, ou finalement, presque toujours à l'ensemble du Conseil des ministres et cela détournerait la période de questions de son but. Dans les circonstances, il m'apparaît plus à propos, les réponses ayant été données, tout en indiquant une fois encore, comment des préambules à des questions complémentaires peuvent être nuisibles à la période des questions, il m'apparaît préférable, plus indiqué, compte tenu de l'esprit de la période de questions, de passer à une nouvelle question principale, celle du député d'Argenteuil.

Des voix: Bravo!

Les recommandations du conciliateur dans le conflit des enseignants

M. Ryan: M. le Président, le premier ministre à qui j'adresse ma question n'éprouvera pas la tentation de la renvoyer au ministre de l'Éducation parce que celui-ci est absent, pour cause de maladie, me dit-on. Je crois que le premier ministre est parfaitement en mesure de répondre à la question en deux volets que je veux lui adresser à propos de problèmes dont le Conseil des ministres doit être saisi, d'après ce que les journaux nous rapportent, aujourd'hui et qui, par conséquent, revêtent un caractère d'urgence spéciale.

Premièrement, le gouvernement, à la suite du vote qui a été pris chez les enseignants ces dernières semaines, entend-il prendre à son propre compte les recommandations contenues dans le rapport du conciliateur Raymond Désilets en vue d'apporter un règlement au conflit des enseignants? Et ceci, conformément à des suggestions qui lui ont été faites de sources nombreuses, en particulier le Conseil supérieur de l'éducation, de nombreux éditorialistes et, si cela peut compter, l'Opposition.

Deuxièmement, si le gouvernement

entend assumer les recommandations du rapport Désilets, entend-il procéder par voie législative, sinon pourquoi?

Troisièmement, le gouvernement - et là, je m'adresse beaucoup plus spécialement au premier ministre - entend-il donner suite à la requête qui lui a été faite par les organismes scolaires les plus importants du Québec, c'est-à-dire la Fédération des commissions scolaires catholiques, l'Association des commissions scolaires protestantes, la Commission des écoles catholiques de Montréal et le Protestant School Board of Greater Montréal, de rencontrer ces organismes avant que le cabinet ne se prononce sur la nouvelle version du projet de restructuration scolaire dont ces organismes nous assurent qu'elle n'améliore en rien la version première définie dans le livre blanc de juin dernier?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Lévesque (Taillon): M. le Président, je ferai seulement remarquer au député d'Argenteuil, qui essaie de reprendre le refrain de certains de ses collègues à propos de ce qui semble être une ignorance totale de ce qu'est le travail en équipe. Je ne sais pas si dans le temps où le député d'Argenteuil dirigeait cette formation éminente qui est devant nous, ou alors aujourd'hui que c'est le député de Bonaventure, s'ils prétendent avoir à la fois toutes les questions toutes les réponses et toutes les décisions. Je ne marche pas comme cela. Alors, il arrive que lorsque, par exemple, un député à qui on a posé une question qui ne regarde absolument pas son domaine et sur un sujet qu'il ne connaît pas c'est-à-dire la route 132, en Gaspésie...

M. Ciaccia: Question de privilège.

Le Président: Question de privilège, M. le premier ministre.

M. Lévesque (Taillon): ...il me semble que c'est normal de...

Le Président: Question de privilège, M. le premier ministre. M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: M. le Président, le premier ministre vient de suggérer qu'on m'a passé une question qui ne concerne pas mon domaine du tout. Je voudrais dire au premier ministre que je suis le porte-parole du ministère de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme pour ma formation politique et la question que j'ai posée était tout à fait dans le domaine que le parti m'a confié. Au lieu d'envoyer des insultes à ce côté, limitez-vous donc à répondre aux questions.

Une voix: Très bieni

Le Président: M. le premier ministre.

M. Lévesque (Taillon): Je m'excuse, M. le Président. Je dois m'excuser, je ne savais pas que le député de Mont-Royal était en rodage sur un nouveau dossier.

Le Président: À l'ordre!

M. Lévesque (Taillon): J'aurais pu m'en douter. M. le Président, c'est vrai que la question de l'ensemble, enfin ce qu'on peut appeler la fin des négociations, la fin - on l'espère en tout cas - de ce conflit qui avait trop duré, c'est vrai, dis-je, que le sujet est venu aujourd'hui au Conseil des ministres. Les deux questions spécifiques du député d'Argenteuil étaient, je crois: Qu'est-ce qui arrive par rapport au rapport Désilets? Il y a l'espèce de pondération de vote qui a été faite du côté des enseignants. Ensuite: Est-ce qu'il y aura de la législation? C'est cela? Et, troisièmement, qu'en est-il de la rencontre qui a été demandée par les organismes mentionnés?

Premièrement, pour ce qui est du rapport Désilets, pour pouvoir s'appliquer, conformément à un article qui prévoit cela déjà dans la loi 105, c'est-à-dire que les deux parties s'entendent là-dessus, c'est un rapport qui devra demander qu'il y ait une reconsidération de la part des enseignants. J'en donnerai une seule raison très simple. Il y a une cinquantaine de millions de dollars -on ne prendra pas de l'argent neuf dans les fonds publics d'aucune façon pour combler ce trou - impliqués dans le rapport Désilets et qui, eux-mêmes, impliquent des concessions de la part des enseignants. On pourra entrer dans plus de détails au besoin.

Donc, le ministre de l'Éducation a été mandaté par le Conseil des ministres, il n'y a pas de mystère là-dedans, pour dire aux porte-parole des enseignants qui sont, paraît-il, réceptifs à une certaine reconsidération de cette décision un peu complexe, parce que d'une part sur 30% de votants chez les enseignants, il y avait une toute petite majorité de 50,8% qui était en faveur du rapport Désilets et, par ailleurs, il y avait deux ou trois syndicats parmi les unités syndicales qui étaient contre - deux ou trois de majorité - et, de plus, ils ont fait une sorte de pondération par rapport au vote auquel ils ont droit dans leur instance, ce qui fait qu'à un moment donné une chatte a de la misère à trouver ses petits, mais cela les a menés à une conclusion qui était qu'ils n'acceptaient pas...

Or, à cause du fait qu'ils sont impliqués pour de l'argent - des sommes substantielles dans le rapport Désilets - eux-mêmes comme enseignants pour que cela puisse s'appliquer, il faudrait qu'on se mette

d'accord. Sinon, on retourne essentiellement à ce qui avait été proposé conjointement comme cadre de règlement par le ministre de l'Éducation, des représentants des commissions scolaires, des représentants des cégeps, etc., on retourne, dis-je, au cadre de règlement du mois de février. Et cela reste à voir dans les jours qui viennent.

Pour ce qui est de la législation, bien sûr, il faudra un texte législatif, un peu une loi omnibus qui devra corriger certaines choses, qui pourra incorporer aussi certaines de ces nouvelles additions ou ces nouvelles corrections aux décrets. On croit pouvoir s'engager à déposer ce texte législatif d'ici la fin de la semaine prochaine normalement. (15 h 50)

Je dois dire en passant que cela coûte quelques centaines de milliers de dollars, mais, par ailleurs, la traduction des décrets demandée par un éminent juge, entre autres, qui faisait partie des considérants ou des conclusions de son jugement, est à peu près terminée. Cela devrait l'être avant que la loi soit déposée.

Troisièmement, en ce qui concerne la demande de rencontre des commissions scolaires et autres organismes, enfin, de l'ensemble des organismes qui m'ont envoyé ce télégramme ou ce message, si le député d'Argenteuil l'a bien lu, il s'agit d'avoir une rencontre, disent-ils, dans les plus brefs délais, avant que la loi de réforme de structure scolaire soit déposée. Non, pardon, qu'elle ait passé... Je m'excuse.

M. Ryan: Question de règlement, M. le Président.

M. Lévesque (Taillon): De règlement?

M. Ryan: Juste une précision, M. le premier ministre, je m'excuse. C'est qu'ils demandent une rencontre avant que le Conseil des ministres ne se soit prononcé sur le projet de loi.

M. Lévesque (Taillon): Ce n'est pas une question de règlement.

Le Président: Ce n'est pas une question de règlement, M. le député.

M. Lévesque (Taillon): C'est simplement une correction que j'étais en train de faire.

Des voix: Oh!

M. Bertrand: On vous précède, vous savez.

M. Lévesque (Taillon): La langue m'avait fourché. Spécifiquement, ils demandent une rencontre avant que le texte de loi, le projet législatif, soit passé au Conseil des ministres. Je peux m'engager à cela. Je ne peux pas dire quel jour, mais, enfin, ce n'est pas encore venu au Conseil des ministres et on s'arrangera pour tenir une rencontre avant.

Le Président: Question additionnelle, sans préambule, M. le député d'Argenteuil.

M. Ryan: Est-ce que je dois bien comprendre que le premier ministre a dit que le gouvernement était réceptif à causer avec les syndicats d'enseignants pour voir s'ils pourraient se retrouver quelque part en tenant compte des implications financières du rapport Désilets? Deuxièmement, le projet de loi qui sera déposé au cours des prochains jours comprendra-t-il autre chose que la version anglaise des décrets et dans quelle mesure comportera-t-il des éléments empruntés au cadre de règlement du 9 février et au rapport Désilets?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Lévesque (Taillon): M. le Président, il me semblait que j'avais été clair, mais, enfin, je vais essayer de l'être davantage. Cela va m'aider à préciser.

Le projet de loi comprendra les corrections qui apparaissent nécessaires, y compris même des corrections de coquilles, je crois, et certaines choses normatives qui, de toute façon, étaient là, en ce qui concerne les enseignants, depuis le mois de février. Il comprendra le cadre de règlement de février, mais avec la possibilité d'y ajouter, sur accord, sur entente, comme c'était déjà dans la loi no 105, qu'en cours de route on puisse modifier ces choses-là, mais il faut que ce soit un consensus. À ce moment-là, le rapport Désilets pourrait éventuellement s'appliquer. Si cela vient plus vite, tant mieux; on le fera plus vite. Pour l'instant, ce qu'on peut prévoir, c'est qu'il y aurait au moins l'essentiel de ce cadre de règlement de février. J'ajouterai une chose aussi à laquelle le gouvernement s'est engagé. C'est qu'il y aura également l'autorisation nécessaire - je pense que cela demande une loi - pour la compensation aux employés à temps partiel à revenu modeste qui a été promise et qui sera faite sous forme forfaitaire. Je pense que cela demande une autorisation législative. En tout cas, c'est prévu dans la loi.

Une voix: Oui.

Le Président: Question additionnelle, Mme la députée de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, ma question additionnelle s'adresse au premier ministre. Lors des négociations dans le domaine des affaires sociales avec la Fédération des affaires sociales, des

propositions ont été faites par le gouvernement et ont été entérinées par les membres de la FAS. Par contre, il demeure une ambiguïté profonde compte tenu que les membres ont accepté ces propositions majoritairement et que la fédération, jusqu'à aujourd'hui, à ma connaissance, n'a pas signé d'entente quant à l'approbation officielle de ces propositions. Le premier ministre peut-il nous dire s'il entend garantir, par voie de législation, ces dernières propositions qui avaient été faites aux syndiqués de la FAS et que ces derniers ont quand même approuvées majoritairement? Ils sont retournés au travail par la suite.

Le Président: M. le premier ministre.

M. Lévesque (Taillon): Non, M. le Président. Il ne s'agit pas du même cas du tout. Dans le cas du temps partiel, c'est un engagement du gouvernement. Lors des discussions qu'il y a eu avec les syndicats, cela ne semblait pas les préoccuper prioritairement; nous, en équité, il nous paraissait que c'était nécessaire. Alors, ce sera dans la loi omnibus, si vous voulez, qui viendrait la semaine prochaine.

Pour ce qui concerne la proposition, enfin, les choses essentiellement normatives qui touchaient la FAS, il ne faut pas oublier que le président de la FAS, M. Lessard, se promène sur toutes les tribunes possibles et imaginables pour dire qu'il ne signera pas. Par ailleurs, il ne faut pas oublier - ce n'est pas comme le rapport Désilets, les conciliateurs - que c'était à la suite de rencontres qu'on avait eues au mois de janvier avec l'ensemble des interlocuteurs syndicaux, pendant trois ou quatre jours, et cela a débouché sur des rencontres, entre autres, avec le Syndicat des infirmières, avec le Syndicat des fonctionnaires, et ces syndicats ont accepté de signer, sur la base des propositions qui avaient été mises sur la table. À partir du moment où d'autres ont signé, il est évident qu'en toute équité, en toute bonne foi, il faudrait que la FAS accepte elle aussi pour qu'on puisse entrer ce cadre de règlement du mois de janvier dans les décrets. Le jour où elle le ferait, cela entrerait, mais on ne peut le faire sans... Si on le fait comme ça, pour des gens qui ne l'ont pas accepté pendant que d'autres l'ont accepté, il y a quelque chose qui ne fonctionne plus du tout.

Le Président: Question principale, M. le député de Laurier.

Programmes de création d'emplois

M. Sirros: En l'absence du ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu, j'adresserai ma question au premier ministre. Cela concerne les programmes de création d'emplois dont il parlait tout à l'heure. Effectivement, le Québec investit à peu près 170 000 000 $ dans ces programmes. C'est un montant impressionnant, important qui donne l'impression que le gouvernement fait quelque chose; malheureusement, ce n'est qu'une impression selon les études propres du ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu, dans le sens que les programmes de création d'emplois se révèlent un échec surtout par rapport au taux d'intégration et de rétention sur le marché du travail. C'est un jugement qui a été porté à l'attention du ministère de la Main-d'Oeuvre il y a trois ans et une deuxième fois il y a à peu près quinze mois. Ni dans l'un ni dans l'autre cas, le gouvernement n'a fait quelque chose de substantiel et de réel pour changer le fait que les critères ont été mal choisis par rapport aux bénéficiaires et mal adaptés aux besoins du marché.

De plus, dès le moment qu'il a été signalé au gouvernement que ça ne fonctionnait pas, les sommes d'argent qui ont été investies n'ont cessé de croître pour en arriver aujourd'hui avec 170 000 000 $ dans des programmes que les services d'évaluation du ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu disent être un échec. J'aimerais avoir au moins quelques explications là-dessus.

Le Président: M. le premier ministre.

M. Lévesque (Taillon): Je serai obligé de prendre avis de la question pour la bonne et simple raison que le député est mieux éclairé que moi ou que la plupart de mes collègues sur ces rapports d'évaluation internes.

Des voix: Bravo!

M. Lévesque (Taillon): Pour la bonne et simple raison - je ne remonterai pas à il y a trois ans ou à il y a quinze mois - que, pendant les quelque deux ou trois mois qui ont précédé ce jour, on a travaillé très fort sur les crédits prévus pour 1983-1984, y compris les programmes de création d'emplois. On nous dit, au contraire, qu'expérience faite, par exemple, le bon d'emploi - et cela nous a été confirmé par des interlocuteurs qui viennent et du milieu patronal et du milieu syndical - dans un contexte économique comme celui qu'on connaît, a servi au-delà de toute espérance les jeunes qui l'ont pris et qui sont allés à la recherche d'un emploi.

Des voix: Ah! Ah! Ah!

M. Lévesque (Taillon): Deuxièmement, dans le cas de PECEC, qui est un programme qui existe depuis deux ou trois

ans, un programme de création d'emplois communautaires, il y a un test très facile à faire dans le contexte économique actuel; il s'agit essentiellement de créer de nouvelles entreprises, de petites entreprises pour la plupart. Le test appliqué est celui-ci: Est-ce que le taux de faillite - renversez cela, ce qui revient à dire le taux de rétention d'emplois - est comparable à ce qui se passe sur le marché? On nous dit: C'est un peu en dessous. Le taux de faillite des petites entreprises, qui ont été lancées avec une certaine injection de fonds publics et, ordinairement, avec cinq ou dix fois plus de fonds privés que cela a permis de s'agglutiner pour créer des entreprises, sur un an et demi maintenant, à peu près, est inférieur au taux de faillite qu'on retrouve dans l'ensemble des petites et moyennes entreprises au Québec, hélas.

Donc, je ne vois pas très bien où le député de Laurier a pris ses renseignements; s'il veut être plus précis, on verra. J'ajouterai simplement, puisqu'on parle de création d'emplois, que 79 000 000 $ déjà prévus aux crédits, c'est-à-dire 17% de la marge de manoeuvre d'environ 400 000 000 $ dont dispose le gouvernement, sont attribués cette année dès le départ à la région qui préoccupait le député de Mont-Royal: le Bas-Saint-Laurent et la Gaspésie. 17% des fonds seront disponibles - cela montre à quel point le gouvernement tient compte de la situation - pour une population qui, elle, n'est que de 3,8% de la population de l'ensemble du Québec.

Le Président: Mme la députée de Maisonneuve. (16 heures)

Le fonds de solidarité de la FTQ

Mme Harel: II y a bientôt un mois et demi, la FTQ, la Fédération des travailleurs du Québec, annonçait son intention de mettre sur pied un fonds d'investissement volontaire de 200 000 000 $ pour que les travailleurs et les travailleuses intéressés à y consacrer leurs économies puissent participer à la création d'emplois dans l'industrie manufacturière. Je voudrais savoir de la part du ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme où en est rendu exactement le projet au moment où on se parle. S'il y a d'autres centrales syndicales qui ont manifesté leur intérêt pour un tel projet. Si une politique sérieuse d'investissement a pu être préparée. Il y a, je crois, des fonctionnaires du ministère de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme qui ont travaillé avec la Fédération des travailleurs du Québec. Si donc une politique sérieuse va garantir les sommes économisées ainsi investies par les travailleurs? Si une forme de participation à la gestion de l'entreprise pourra être assurée à ceux qui y participeront?

Le Président: M. le ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme.

M. Biron: M. le Président, c'est exact qu'il y a environ un mois et demi, la Fédération des travailleurs du Québec annonçait la création d'un fonds de solidarité pour investir des sommes d'argent dans des PME québécoises. Ce fonds de solidarité était financé, en grande partie, par des travailleurs membres de la Fédération des travailleurs du Québec. Or, depuis ce temps, le président de la Fédération des travailleurs du Québec a écrit au premier ministre, le secrétaire général, M. Daoust, a correspondu avec moi à quelques reprises. Nous nous sommes rencontrés aussi à quelques reprises.

Je peux dire, aujourd'hui, que le ministère de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme, au nom du gouvernement du Québec, a accepté de déléguer des hauts fonctionnaires auprès de la Fédération des travailleurs du Québec premièrement pour les aider à terminer la préparation du concept final du fonds de solidarité; deuxièmement, pour mettre en place la mécanique nécessaire pour assurer au moins que les travailleurs et les travailleuses qui vont investir dans ce fonds aient une certaine garantie que leur investissement est le meilleur possible. Nous ne voudrions pas que ce fonds investisse dans toutes les entreprises en faillite. Il faut, au contraire, que ce fonds investisse dans des entreprises qui ont une chance de survie, qui ont une chance d'avenir.

Nous sommes aussi à préparer avec la Fédération des travailleurs du Québec un projet de loi privé pour permettre au fonds de pouvoir fonctionner. Finalement, j'ai garanti à M. Daoust de la Fédération des travailleurs du Québec toute l'aide technique nécessaire à la fois du ministère de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme, de la Société de développement industriel du Québec et du Centre de recherche industrielle du Québec afin d'assurer le maximum de succès à ce fonds. Finalement, oui, la participation des travailleurs aux décisions de l'entreprise et à la gestion, c'est cela qui est essentiel. Bien sûr, la FTQ veut bien investir dans le capital-actions des entreprises, mais surtout elle veut changer l'habitude de la société de faire des confrontations, elle veut faire en sorte que les deux parties, patronale et ouvrière, puissent se parler mieux, puissent se concerter davantage et puissent prendre part ensemble aux décisions importantes et au développement de l'entreprise. Dans ce sens, il y aura des garanties que les travailleurs vont participer à la gestion de l'entreprise.

La dernière question, Mme la députée

de Maisonneuve, concerne les autres centrales syndicales. La CSD est déjà intéressée dans plusieurs projets de participation. Nous sommes à discuter présentement avec M. Hétu, le président. La CSN est intéressée aussi dans certains projets de participation. On est en train aussi de discuter avec certains permanents de la CSN qui sont intéressés à ce projet.

Finalement, je pense qu'ensemble, les centrales syndicales réalisent que dans le monde économique il faut maintenant davantage de participation aux décisions, compte tenu que les travailleurs et les travailleuses sont prêts à participer avec leur intelligence au développement des entreprises. Je pense que le fonds a une chance de succès.

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président...

Le Président: M. le chef de l'Opposition, en complémentaire.

M. Levesque (Bonaventure): Simplement une précision au ministre. Est-ce que le plan ne suggère pas également une contribution financière de la part du gouvernement du Québec? Est-ce que cette contribution financière est acceptée par le gouvernement? Est-ce que le ministre voudrait nous indiquer à quel endroit on peut trouver cette contribution dans les crédits 1983-1984?

Le Président: M. le ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme.

M. Biron: Le plan suggère au gouvernement, demande au gouvernement une contribution financière. C'est exact. Nous n'en sommes pas rendus à ce point de la discussion. Là où on s'est entendu déjà avec la FTQ, c'est de faire en sorte que dans chaque entreprise où le fonds de solidarité va intervenir, nous verrons, avec les programmes réguliers de la SDI, de PECEC ou d'autres ministères ce qu'on peut faire pour donner le maximum d'aide possible. En plus, le fonds de solidarité demandait un dégrèvement fiscal additionnel aux travailleurs et je pense bien que le ministre des Finances en a tenu compte lorsque la Fédération des travailleurs du Québec lui a écrit.

Le Président: M. le député d'Outremont.

Le poste d'adjoint parlementaire du député de Frontenac

M. Fortier: M. le Président, le premier ministre, hier, à la suite d'une question que je lui posais, me confirmait que le député de Frontenac demeurait toujours adjoint parlementaire, qu'il recevait toujours le salaire additionnel auquel ce titre, cette fonction lui donne droit, 8400 $ par année, mais qu'il ne remplissait aucune fonction, donc qu'il ne travaillait pas. Je crois que sur ce dernier point - d'ailleurs le premier ministre avait totalement raison - puisque les journaux nous apprennent que M. Grégoire est présentement à Miami, au motel Suez, sous 24 degrés centigrade, il semblerait qu'il ne remplit pas là une fonction à titre d'adjoint parlementaire.

Cependant, je crois que le premier ministre faisait allusion à un principe, et là-dessus tous s'accordent pour dire, nous-mêmes y souscrivons, qu'une personne accusée d'un crime quel qu'il soit est présumée innocente jusqu'à ce qu'elle soit entendue ou jusqu'à ce qu'elle soit condamnée ou jusqu'à ce qu'elle soit exonérée. Il n'en demeure pas moins que dans la fonction publique il est normal de suspendre, sans traitement, une personne incriminée jusqu'à ce qu'elle soit exonérée ou jusqu'à ce qu'elle soit condamnée.

Ma question est celle-ci: Ne croyez-vous pas, M. le Président, M. le premier ministre, que dans le cas qui nous préoccupe, le député de Frontenac devrait être suspendu sans traitement en tant qu'adjoint parlementaire jusqu'à ce qu'une décision finale soit prise par la justice dans ce cas, quitte à faire les arrangements qui s'imposeront par la suite?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Lévesque (Taillon): M. le Président, je serai très bref et je ferai un aveu au député. Les questions d'hier m'ont forcé à réfléchir quelque peu, c'est normal, sur la question. Cela arrive que des questions soient utiles. Je dois avouer que c'est rare. C'est vrai que forcément le député de Frontenac ne gagne pas son traitement d'adjoint parlementaire puisqu'il a décidé lui-même de s'extraire des dossiers jusqu'à ce que son procès soit tenu. Comme tout le monde - je ne me souvenais plus du nom du motel - ce n'est pas si drôle que vous pensez, parce que, comme tout le monde, j'apprenais de plus ce matin qu'il faisait un séjour en Floride, ce qui est absolument son droit, mais il n'est pas nécessairement très productif. Alors, j'ai demandé qu'on le rejoigne. Je suis content qu'on m'ait donné l'adresse. On fera le point rapidement là-dessus et j'en donnerai d'autres nouvelles.

Le Président: La période de questions est terminée.

M. Fortier: Une question additionnelle s'il vous plaît.

Le Président: Très courte additionnelle.

M. Fortier: Écoutez, le premier ministre nous dit qu'il va le rejoindre mais pour faire quoi? Est-ce qu'il va maintenir son salaire de 8400 $ par année? Ou que fera-t-il une fois qu'il lui aura parlé?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Lévesque (Taillon): M. le Président, je suis bien prêt à me faire suggérer des réflexions par le député d'Outremont, mais on prendra la décision nous-mêmes. D'accord?

Le Président: Fin de la période des questions.

Aux motions non annoncées, M. le ministre délégué à la Science et à la Technologie.

M. Paquette: M. le Président, je solliciterais...

Le Président: Un instant, M. le ministre.

M. Clair: Pour une question du député de Richmond.

Le Président: II est exact. C'est vrai, M. le député, je m'en excuse. Le ministre des Transports a un complément de réponse à une question d'il y a deux semaines.

Les travaux sur les routes nos 265 et 116 dans le comté de Richmond

M. Clair: M. le Président, rapidement. C'était une double question concernant les travaux sur la route no 265 et sur la route no 116 dans la région du député de Richmond. En ce qui concerne la route 265, effectivement, j'ai annoncé l'année dernière que plutôt que de construire une autoroute qui relierait Thetford-Mines à l'autoroute 20 nous envisageons le contournement de Saint-Ferdinand-d'Halifax ou Bernierville et l'amélioration de la route no 265. Ces travaux sont en planification. Le montant total des investissements prévus sur la route no 265 est de 7 750 000 $. Actuellement nous n'avons pas encore l'autorisation de la Commission de protection du territoire agricole, donc l'expropriation n'est pas faite. Nous prévoyons cependant que les travaux pourraient débuter pour un montant de 1 750 000 $ sur l'année budgétaire 1984-1985 et se poursuivre pendant quatre années d'affilée pour être terminés en l'année 1987-1988.

Quant aux travaux sur la route no 116, il s'agit de l'octroi de dix contrats dont six sont prévus dans le comté d'Arthabaska puisqu'on divise la route en tronçons. Il y a six tronçons dans le comté d'Arthabaska et il y en a quatre dans le comté de Richmond.

Sur les dix tronçons, un a déjà été réalisé dans le comté de Richmond l'année dernière pour un montant de 1 500 000 $. Le prochain contrat prévu dans le comté de Richmond, c'est un contrat en 1984-1985 qui devrait débuter pour un montant de 2 100 000 $ dans le village de Danville à proprement parler. (16 h 10)

En ce qui concerne la section d'Arthabaska, il y a deux contrats qui ont été octroyés dans le comté d'Arthabaska l'année dernière. Il y en a un autre qui devrait être octroyé pour cette année. Donc, les dépenses en 1983-1984 sur l'année budgétaire en cause, prévues sur la route 116, sont de 1 100 000 $. L'an dernier, elles ont été de 3 500 000 $. On prévoit pour l'année prochaine être en mesure de dépenser 2 100 000 $. Nous avons à faire face à des contraintes normales en matière de construction routière à notre époque, en matière d'expropriation, en matière de respect des règles de l'environnement, de la Commission de protection du territoire agricole. Puisque le député a fait signer une longue pétition - j'ai eu l'occasion de discuter avec lui à plusieurs reprises des travaux justifiés qu'il réclame pour son comté en matière de voirie régionale - je voudrais simplement, pour remettre les choses dans leur juste perspective, souligner qu'en 1983-1984, en matière de nouvelles initiatives en voirie régionale, son comté recevra la sixième plus grosse enveloppe en termes de voirie régionale. C'est assez conforme à la grandeur du réseau routier, à l'état du réseau routier. Je peux même dire au député quels sont les six premiers comtés. Le premier, c'est le comté d'Abitibi-Ouest. À cause de son étendue, cela me surprendrait...

Le Président: M. le ministre des Transports, j'attire votre attention sur le fait que vous êtes en complément de réponse, que déjà une réponse est censée être aussi courte que faire se peut et le complément de réponse, encore plus court. S'il vous plaît!

M. Clair: M. le Président, puisque vous me le demandez, je termine rapidement, en disant simplement que, l'année dernière, le comté de Richmond a reçu la septième plus grosse enveloppe en termes de voirie régionale. Cette année, il reçoit la sixième. Je pense qu'il est placé pour faire des jaloux des deux côtés de la Chambre.

Le Président: M. le député de Richmond.

M. Vallières: M. le Président, je suis heureux que le ministre ait pris connaissance de la pétition. Par ailleurs, je veux lui

indiquer que la réponse qu'il vient de donner à la question est nettement insatisfaisante. Je veux que le ministre précise...

Le Président: Sans préambule.

M. Vallières: ...en particulier, puisqu'il annonce des investissements de façon prioritaire sur la route 116 dans la région de Danville. Compte tenu que les quelque 4700 signataires de la pétition qu'on a présentée tantôt demandent que les travaux soient effectués prioritairement entre Danville et Richmond, pourrait-il corriger son tir? En second lieu, dois-je comprendre, par la réponse du ministre, que les gens de la région de Thetford-Mines, à qui on a annoncé l'an passé des investissements de l'ordre de 11 300 000 $ sur la route 265, vont devoir demeurer sur leur appétit jusqu'à l'automne 1984?

Le Président: M. le ministre des Transports.

M. Clair: Très rapidement. Quant à la priorité à accorder aux travaux dans le comté du député, je n'ai pas d'objection à l'examiner. J'imagine que, puisque j'ai donné instruction d'accélérer tous les travaux sur l'ensemble de la route 116, c'est simplement à ces endroits que l'emprise sera libérée le plus rapidement possible. Je n'ai pas d'objection à l'examiner.

Par ailleurs, en ce qui concerne les travaux de 11 300 000 $ qui sont prévus pour la route 265, ils incluent une partie du montant de 11 300 000 $ qui porte à proprement parler sur la route 265 et une autre partie sur la route 116, puisque ce sont des routes qui suivent pendant un certain temps le même tracé. Je pense que le député comprend qu'à compter du moment où on prend la décision de reconstruire une route cela ne veut pas dire que, dans les trois mois qui suivent, les travaux commencent. Il faut respecter les normes que nous nous sommes fixées comme société en matière de protection des terres agricoles, de protection de l'environnement, d'expropriation, règles que votre gouvernement a adoptées et que nous respectons, ce qui fait que généralement, entre le moment de la décision de reconstruire une route et les premiers travaux, il s'écoule facilement de 20 à 24 mois.

Le Président: Motions non annoncées. M. le ministre délégué à la Science et à la Technologie.

La semaine de l'informatique au Québec

M. Gilbert Paquette M. Paquette: M. le Président, j'aimerais solliciter le consentement de cette Assemblée pour présenter une motion soulignant la semaine de l'informatique au Québec.

Le Président: Y a-t-il consentement? M. le ministre.

M. Paquette: Merci, M. le Président, c'est cette semaine la semaine de l'informatique au Québec. Actuellement, la Fédération de l'informatique du Québec tient, à Québec même, son premier congrès de fondation, ce qui témoigne de l'essor et de l'importance qu'a pris cette question dans notre société. Certaines découvertes scientifiques ont ce don d'être à l'origine des plus grandes mutations sociales. Il en a toujours été ainsi depuis le début de l'histoire de l'humanité. On est passé de la société agricole à la société féodale et, ensuite, à la société industrielle, chaque fois sous l'impulsion d'une invention particulièrement puissante, ayant particulièrement d'impact sur nos vies.

Certains veulent réduire le phénomène de l'informatique à une simple question d'efficacité ou de productivité. Je pense qu'il est important, en cette semaine de l'informatique, d'en souligner toutes les dimensions. En fait, si on se rappelle ce qui s'est passé il y a déjà plusieurs centaines d'années au moment de l'introduction de l'imprimerie, c'est une invention qui, à première vue, semblait simplement une amélioration dans la reproduction d'écrits et de documents, mais qui, finalement, a suscité un essor économique et culturel et a permis aussi de démocratiser la culture, de permettre à tous les gens d'avoir accès à des connaissances qui étaient reproduites sous forme de livres ou autrement. Également, les journaux sont nés quelques années plus tard et ont amené de grandes transformations.

Une transformation de cette importance amène toujours son cortège de craintes en même temps que ses plus grands défis. Il va de soi que, pour le gouvernement du Québec, l'importance économique de l'informatique saute aux yeux; il va de soi que, sans une implication très vigoureuse de tous les agents socio-économiques du Québec, le Québec ne pourra affronter la concurrence mondiale si nos entreprises, dans tous les secteurs, n'utilisent pas cet outil privilégié qu'est l'informatique. Mais également, je pense qu'il est bon de se rappeler que ce développement technologique, comme les autres, doit être fait au service des Québécois et qu'il doit être fait dans la perspective non pas de réduire les emplois, mais d'augmenter les services, d'augmenter l'activité et d'augmenter la qualité de vie des Québécois et des Québécoises.

C'est dans cet esprit que le

gouvernement du Québec a décidé, il y a quelques semaines, de créer une table de concertation qui tiendra compte, bien sûr, d'abord des dimensions économiques, mais également des dimensions sociales et culturelles de l'informatisation de notre société. J'aurai le plaisir, d'ici à environ un mois, de déposer une synthèse des actions que le gouvernement entend mener au cours de l'année qui vient. Mais, pour le moment, j'aimerais simplement que cette Assemblée, et c'est le texte de la motion, souligne cette semaine de l'informatique, qu'elle assure de son appui tous ceux et celles qui oeuvrent dans ce domaine d'avenir et, plus particulièrement, la Fédération de l'informatique du Québec qui tient actuellement son premier congrès.

Je pense que notre société a commencé une prise de conscience qu'elle doit terminer, qu'elle doit enclencher sur l'action de façon concertée. Nous avons un projet collectif très important à entreprendre et j'invite tous les parlementaires de cette Assemblée à s'intéresser de plus en plus à ces questions et à appuyer tous les agents socio-économiques des milieux scientifiques qui s'impliquent de plus en plus dans l'informatisation de la société au Québec. Je vous remercie.

Le Président: Mme la députée de Jacques-Cartier.

Mme Joan Dougherty

Mme Dougherty: C'est avec plaisir que je réponds, au nom de mes collègues, à la motion présentée par le ministre délégué à la Science et à la Technologie.

La relance économique que tout le monde cherche dépendra de notre capacité d'être concurrentiel sur le plan global, sur le plan international. Il est largement reconnu que le moteur principal de la croissance économique est l'innovation, à savoir la création de connaissances nouvelles, de nouveaux produits et de nouvelles méthodes ou nouveaux processus. Le système économique international est en proie à une mutation profonde, provoquée par des augmentations phénoménales de la productivité issues de la révolution microélectronique. (16 h 20)

Aujourd'hui, le multiplicateur de productivité par excellence est la microélectronique. Les technologies fondées sur l'utilisation des circuits intégrés causent des changements quantitatifs d'une ampleur telle qu'il faut les qualifier non seulement de nouvelle révolution technique mais aussi de brusque accroissement des capacités d'action de l'homme.

Les conséquences économiques, sociales et culturelles de cette révolution sont d'ores et déjà immenses. Elles le seront encore davantage dans l'avenir. L'avenir des entreprises et des nations sera grandement conditionné par la place qu'elles auront su se ménager sur l'échiquier de l'informatique.

Au cours des derniers mois, le Québec était inondé d'une foule de déclarations d'experts qui sonnent l'alarme pour le Québec parce que nous risquons de manquer le bateau. On prédit que d'ici dix ans, 75% de la main-d'oeuvre québécoise sera en rapport quotidien avec les ordinateurs.

Les manchettes des journaux parlent des nouveaux analphabets. Le virage technologique dérape dès le départ. Entrave à l'Université Laval. On parle de la timidité du Québec. Une autre manchette: "Le Québec n'est pas propice à l'essor de l'informatique." Il faut faire face au défi d'abord pour préparer nos jeunes et aussi les adultes, autrement nous risquons de former de futurs chômeurs. 50 000 computers promised to the schools may look as though we intend to meet the challenge. But there is a danger. The computer is not a new toy like a new telephone. It opens whole new ways of learning and teaching. Let's not be so much in a rush to be spectacular that we underestimate the importance of preparing our teachers to use this new instrument to its full potential and in a constructive manner. Notre porte-parole en éducation a l'intention de sortir un mémoire sur ce sujet demain.

I urge the Government to exploit the many millions of dollars available to us through the National Training Act. Already in British Columbia, 14 000 000 $ of projects have been approved under this Act, mostly for the training of their youth and their women, because women will be most affected by this computer revolution in the new technology.

What is Québec doing to exploit the National Training Act Funds? What is the Québec Government doing to create learning centers for drop outs, for unemployed youth with the funds for the National Training Act? Are we going to let the drive for sovereignty get in the way of preparing our young people for future productive lives?

Micro-électronique represents a key instrument to make possible the technological conversion that the Government talks so much about.

II est urgent que le Québec accélère ses initiatives sur tous les fronts. Il faudrait faire plus que faire adopter des motions et créer des tables de concertation, sinon le virage technologique ne sera qu'un beau catalogue de voeux pieux. Merci, M. le Président.

Le Président: M. le ministre délégué à la Science et à la Technologie.

M. Gilbert Paquette (réplique)

M. Paquette: M. le Président, très brièvement, pour répondre à quelques remarques de la députée, parce que je n'avais pas voulu placer cette motion dans un contexte polémique. Je voudrais simplement lui souligner qu'actuellement, lorsqu'on parle de préparer les jeunes à la révolution informatique, nous avons, mon collègue le ministre de l'Éducation et moi, annoncé, il y a quelques semaines, l'introduction, sur une période de cinq ans, de 43 000 micro-ordinateurs dans les écoles. Je pense que la députée reconnaîtra que c'est un projet extrêmement ambitieux en ce sens qu'il existe actuellement en Ontario, dans les écoles ontariennes, 8000 microordinateurs. Il y en_ a environ 50 000 dans l'ensemble des États-Unis d'Amérique. Évidemment, dans cinq ans, les États-Unis seront rendus beaucoup plus loin. Mais pour une population dont le nombre est 20 fois moindre au Québec, je pense que l'effort qui est entrepris et qui sera réalisé dès l'automne pour permettre à nos jeunes de préparer leur avenir est sans précédent en Amérique du Nord. C'est important de le souligner. Je pense que les Québécois sont capables de relever ce défi.

On parle également de l'utilisation de la caisse d'accroissement des compétences professionnelles. Il y a une quarantaine de collèges d'enseignement général et professionnel qui ont soumis des projets que nous avons l'intention d'appuyer, d'ailleurs au-delà de ce qu'ils pourront obtenir de nos taxes que l'on envoie au gouvernement fédéral et qui peuvent nous revenir par la caisse d'accroissement des compétences professionnelles. Nous avons l'intention d'appuyer encore davantage par l'établissement de centres spécialisés dans les cégeps.

J'ai annoncé, hier, la création du premier de nos centres de recherche appliquée dans le domaine de l'informatique, au chapitre de la conception et de la fabrication assistées par ordinateur. C'est un projet de 6 000 000 $. Nous avons l'intention de créer plusieurs de ces centres.

Nous sommes à terminer, mes collègues des Communications, de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme et moi-même, l'élaboration d'une politique de la bureautique qui permettra d'utiliser les investissements gouvernementaux.

Alors, ce serait faire injure aux agents socio-économiques qui ont lancé énormément de projets depuis un an - il y a énormément d'entreprises qui ont été mises sur pied -que de dire que nous nous contentons de nous concerter. Nous sommes également engagés dans l'action, M. le Président.

Le Président: Cette motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Président: Adopté. M. le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche.

Félicitations à Mlle Sylvie Daigle,

M. Louis Grenier, Mlle Maryse Perreault

et M. Michel Delisle

M. Guy Chevrette

M. Chevrette: M. le Président, je voudrais également solliciter le consentement de la Chambre afin de présenter une motion de félicitations à des jeunes Québécois qui se sont distingués, cette semaine, à Tokyo, lors des championnats mondiaux de patinage de vitesse en salle.

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement?

Des voix: Consentement.

Le Président: M. le ministre.

M. Chevrette: Merci, M. le Président. Je voudrais inviter cette Assemblée à se joindre à moi pour féliciter, tout d'abord, Mlle Sylvie Daigle, de Sherbrooke, et, d'une façon particulière également, M. Louis Grenier, de Sainte-Foy, pour leur magnifique performance lors des championnats mondiaux de patinage de vitesse en salle, cette semaine, à Tokyo. Je dois vous dire que ces deux jeunes ont presque tout raflé ce qu'il était possible d'obtenir en termes de médailles.

De plus, d'autres jeunes Québécois se sont signalés également. Je pense, entre autres, à Maryse Perreault, de Sherbrooke, et à Michel Delisle également, un autre Québécois. Tous ces jeunes Québécois sont maintenant reconnus, sur la scène mondiale, comme les champions dans leur discipline. Ce qui prouve jusqu'à quel point le degré d'excellence de notre élite sportive dans ce domaine est maintenant chose reconnue. J'espère que ces succès pourront hâter nos travaux dans l'élaboration d'une politique d'élites au chapitre du sport québécois.

Nos athlètes québécois ont acquis une solide réputation. Je voudrais, au nom de tous mes collègues ici présents, présenter à tous ces jeunes mes plus sincères félicitations et les soutenir, les encourager à poursuivre leurs efforts individuels pour obtenir des objectifs d'excellence comme ceux qu'ils ont obtenus. Merci.

Le Président: M. le député de Louis-Hébert.

M. Réjean Doyon

M. Doyon: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir de me joindre à la motion de félicitations qui est devant cette Assemblée. En effet, les deux jeunes Québécois, Mlle Daigle et M. Grenier, nous font honneur. Le Canada a, comme l'écrit le journal, effectué une véritable razzia au tableau des médailles au cours du championnat mondial. Je signale aussi, particulièrement en ce qui concerne M. Grenier - Mlle Daigle est de Sherbrooke -qu'il est de la ville de Sainte-Foy, dans le comté que je représente.

M. le Président, cette Assemblée me permettra de souligner qu'à la ville de Sainte-Foy, il y a maintenant, depuis 1976, une tradition en patinage de vitesse. La ville de Sainte-Foy est la première ville et une des seules au Québec à avoir un anneau de glace de patinage de vitesse. La ville de Sainte-Foy a pris cette initiative à ses propres frais. Elle l'entretient à ses propres frais. Selon mes renseignements, cela coûte entre 7000 $ et 8000 $ chaque année sans compter le travail des nombreux bénévoles qui se dévouent à encourager les jeunes. (16 h 30)

Je ne voudrais pas passer sous silence les performances de M. Grenier et de Mlle Daigle, de même que celles de deux autres citoyens de la ville de Sainte-Foy en patinage de vitesse, qui sont les fils du juge en chef des Sessions de la paix à Québec, l'honorable juge François Tremblay, dont les deux fils, depuis de nombreuses années, s'adonnent au patinage de vitesse à Sainte-Foy. Depuis 1976, la ville de Sainte-Foy s'est fait une spécialité du patinage de vitesse; elle y consacre des montants importants et on m'informe que, sur la dizaine ou la douzaine de semaines durant lesquelles l'anneau de glace est en fonction, il y a entre 25 000 et 30 000 patineurs qui y ont accès. Je pense qu'il faut le souligner.

Je veux aussi profiter de l'occasion pour féliciter d'autres villes qui, à l'instar de Sainte-Foy, ont pris des initiatives semblables. Je réfère plus particulièrement à Laval et à Sherbrooke, à Vaudreuil ainsi qu'à Chicoutimi, où il y a eu dernièrement une expérience qui a été tentée dans ce domaine à la suite des Jeux du Canada.

Je n'ai donc aucune réserve, je pense qu'ils ont amplement mérité les lauriers qui sont les leurs. Je les félicite et je leur souhaite bonne chance lors de tous les autres championnats où ils auront l'occasion de nous faire honneur.

Des voix: Bravo!

Le Président: Cette motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Président: Adopté.

M. Doyon: M. le Président, j'aurais une motion non annoncée.

Le Président: Je m'excuse, M. le député de Louis-Hébert.

M. Doyon: Ma motion vise à demander l'assentiment de cette Chambre pour féliciter le Parti québécois, qui a réalisé dernièrement un de ses grands rêves, celui d'être admis comme observateur à l'Internationale socialiste.

Le Président: Y a-t-il consentement? Il n'y a pas consentement.

M. Doyon: Ah! Non! Volte-face!

Le Président: M. le leader parlementaire du gouvernement.

M. Bertrand: M. le Président, comme ils y ont consenti, nous n'avons plus besoin d'ajouter de consentement.

Le Président: Avis à la Chambre. M. le leader parlementaire du gouvernement.

Travaux des commissions

M. Bertrand: M. le Président, je voudrais faire motion pour que la commission parlementaire de la justice puisse siéger à compter de 16 h 30 jusqu'à 18 heures et demain, de 10 heures à 13 heures, pour étudier les projets de loi 106 et 107, c'est-à-dire poursuivre les auditions relativement à ces deux projets de loi. Voilà pour les motions.

Le Président: M. le leader parlementaire de l'Opposition.

M. Lalonde: Vous avez bien dit de 10 heures à 13 heures demain? Il y a une tradition qui veut qu'on arrête à 12 h 30 étant donné qu'on siège ici à 14 heures.

M. Bertrand: Très bien. Je corrige pour 12 h 30.

Le Président: Cette motion est-elle adoptée? Adopté.

M. le leader parlementaire du gouvernement.

M. Bertrand: Je voudrais donner certaines réponses à des questions qui sont au feuilleton. La première...

Recours à l'article 34

Le Président: Je m'excuse, M. le leader parlementaire, mais il y a des questions en vertu de l'article 34.

M. Ciaccia: J'aurais une question en vertu de l'article 34.

Le Président: M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: Le 29 mars, j'avais demandé au ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme de déposer la liste des subventions et des compagnies auprès desquelles son propre frère aurait agi comme agent de négociation et desquelles il aurait perçu des commissions. Le ministre s'était engagé, dans sa réponse à ma question, à déposer cette liste. Ma question au leader parlementaire est celle-ci: Quand pourrons-nous avoir une copie de cette liste?

Le Président: M. le leader parlementaire du gouvernement.

M. Bertrand: M. le Président, j'ai décidé de prendre une bonne habitude maintenant avec les questions posées en vertu de l'article 34, c'est d'en prendre note chaque fois qu'elles sont formulées et ensuite m'assurer que j'obtiens des réponses dans les délais les plus rapides. J'essaie de retrouver celle du 29 mars.

M. Ciaccia: C'était à la période des questions.

M. Bertrand: Ah! Je m'excuse. Ce n'était pas en vertu de l'article 34?

M. Ciaccia: Non.

M. Bertrand: D'accord. Je vais donc m'enquérir auprès du ministre de son intention à ce sujet.

M. Ciaccia: Très bien.

Le Président: M. le leader parlementaire de l'Opposition.

M. Lalonde: En vertu de l'article 34, M. le Président, concernant les travaux de la commission parlementaire sur le saccage de la Baie-James. J'avais déjà demandé au premier ministre de déposer la liste des rencontres qui ont été tenues à son bureau concernant le règlement hors cour. Effectivement, on a reçu une liste, il y a deux semaines, au début de nos séances.

D'autre part, pendant son témoignage, M. Laliberté, le président-directeur général de la Société d'énergie de la Baie-James, a fait référence à un registre de présence ou à un registre d'accueil au bureau du premier ministre qui ferait la preuve des allées et venues de certaines personnes, enfin, des visiteurs au bureau du premier ministre. Est-ce que le leader pourrait s'engager à déposer, à remettre à la commission, à ses membres, le plus possible, les registres du bureau du premier ministre, soit de Montréal, soit de Québec, durant cette période, c'est-à-dire de décembre 1978, janvier, février, mars 1979, pour nous permettre d'avancer dans nos travaux?

Le Président: M. le leader parlementaire du gouvernement.

M. Bertrand: Je ne sais pas s'il s'agit vraiment d'une question en vertu de l'article 34. Je sais que la commission parlementaire va reprendre ses travaux. Nous savons que la commission parlementaire va reprendre ses travaux demain matin, à 10 heures. Je veux bien prendre note de la question qui m'est formulée par le leader de l'Opposition. Étant donné qu'une commission parlementaire travaille sur cette question, il serait peut-être tout à fait normal, peut-être plus correct, si on suit le déroulement normal des travaux parlementaires, que ce type de question puisse être posé directement aux personnes qui sont présentes en commission parlementaire, que ce soient les députés ministériels, le ministre responsable du dossier devant la commission parlementaire ou les personnes qui viennent témoigner, qui sont invitées à venir devant la commission parlementaire.

Je préférerais, M. le Président, si vous n'y voyez pas d'objection, que cela puisse se faire dans ce contexte plutôt qu'en vertu de l'article 34. Je prends tout de même note de la question du leader de l'Opposition.

Le Président: M. le député d'Outremont.

M. Fortier: M. le Président, on m'informe qu'un projet de loi sera déposé incessamment sur Hydro-Québec qui amènerait des changements substantiels au conseil d'administration d'Hydro-Québec. Est-ce que ce projet de loi va être déposé incessamment pour qu'on puisse en prendre connaissance avant la fin de l'audition de la commission parlementaire dont on vient de faire état?

Le Président: M. le leader parlementaire du gouvernement.

M. Bertrand: II sera déposé la semaine prochaine.

Le Président: M. le leader parlementaire, vous aviez commencé à donner des réponses.

M. Bertrand: Oui, je voudrais d'abord répondre à des questions qui m'ont été posées en vertu de l'article 34, dont une par Mme Dougherty, la députée de Jacques-Cartier, relativement au projet de loi sur la réforme scolaire. Effectivement, je peux lui dire que le projet de loi devrait être déposé à l'Assemblée nationale avant la fin de la première partie de la session, c'est-à-dire avant le 23 juin. Avant le 23 juin, le projet de loi sera déposé à l'Assemblée nationale.

Deuxièmement, à une question qui m'était posée par le député d'Argenteuil relativement au décret, à la loi, comment tout cela va se passer, je pense que les réponses ont été données durant la période de questions. On peut considérer ce dossier clos pour l'instant.

M. Lalonde, député de Marguerite-Bourgeoys, me demandait s'il était exclu que, cette semaine, les décrets, les traductions, etc., soient soumis à l'Assemblée. Effectivement, c'est exclu pour cette semaine. Ce sera plus probablement mercredi ou jeudi de la semaine prochaine ou, en tout cas, au plus tard au début de la semaine suivante. Il s'agit de faire un certain nombre de vérifications pour être bien certain de ne rien oublier. Voilà pour les questions en vertu de l'article 34, M. le Président. Je pense être à jour là-dessus.

Réponses aux questions inscrites au feuilleton

Maintenant, relativement aux questions inscrites au feuilleton, à l'article 1 du feuilleton d'aujourd'hui, une question de M. Bourbeau. Réponse du ministre des Affaires intergouvernementales. Je fais motion pour dépôt de document, M. le Président.

Le Président: Cette motion est-elle adoptée?

M. Bertrand: Article 1 du feuilleton. M. Lalonde: Adopté.

M. Bertrand: Ensuite, une question à l'article 6 au nom de M. Bissonnet, député de Jeanne-Mance, je crois. Le ministre de l'Habitation et de la Protection du consommateur donne sa réponse. Je fais motion pour qu'il y ait dépôt de document.

Le Président: Cette motion est-elle adoptée?

M. Lalonde: Adopté.

M. Bertrand: À l'article 7 du feuilleton, une question de M. Dauphin. Réponse du ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche. Je fais motion pour dépôt de document.

Le Président: Cette motion est-elle adoptée?

M. Lalonde: C'était déjà une demande de dépôt.

M. Bertrand: Ce n'est pas au feuilleton comme tel, c'est-à-dire qu'il n'y a pas d'article précis, mais en appendice, on a une question posée par le député de Sainte-Marie, M. Bisaillon. La réponse vient du ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu. Je fais donc motion pour dépôt de document.

Le Président: Cette motion est-elle adoptée? Adopté.

Reprise du débat sur le message inaugural et les motions de censure

Nous passons donc aux affaires du jour avec la reprise du débat sur le message inaugural. La parole avait été demandée, en réserve de quelqu'un d'autre, si je ne m'abuse, par le leader parlementaire du gouvernement.

M. Bertrand: M. le Président, c'est terminé. C'était hier.

Le Président: Au député de Hull, je m'excuse. M. le député de Hull. (16 h 40)

M. Gilles Rocheleau

M. Rocheleau: Merci, M. le Président. Je voudrais m'adresser plus particulièrement aux préfets des municipalités régionales de comté, aux maires des municipalités, ainsi qu'aux conseillers et conseillères municipaux, aux citoyens, propriétaires ou locataires qui ont des taxes à payer et qui subissent annuellement des augmentations de taxes importantes. Je voudrais vous entretenir plus particulièrement du projet de loi 125. À prime abord, cela peut paraître lourd, cela peut paraître technique.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Je m'excuse M. le député de Hull.

M. le leader du gouvernement.

M. Bertrand: M. le Président, je n'aurais pas voulu interrompre le député mais on m'a fait remarquer que si on veut être conforme à la tradition établie en cette Chambre puisque j'ai donné avis que la commission de l'énergie et des ressources siégeait demain matin relativement au dossier LG 2 ou de faire motion pour que cette commission puisse siéger effectivement demain matin de 10 heures à 12 h 30 aussi.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Cette motion est-elle adoptée?

Adopté.

M. le député de Hull.

M. Rocheleau: J'excuse le leader du gouvernement. M. le Président je disais que c'est un projet de loi très technique, l'aménagement du territoire et plus particulièrement la création des municipalités régionales de comté. Mais il faut examiner des points très importants pour tous les citoyens du Québec, dans le sens que ce sont les citoyens du Québec qui ont à absorber, par les taxes municipales, le fardeau fiscal des municipalités. Cette loi 125, dont le parrain est l'actuel ministre des Affaires municipales, un projet de loi qui, malheureusement, n'a pas de secondeur. Si j'ai voulu en parler dans ce débat sur le discours inaugural, c'est parce que le premier ministre a annoncé précisément, dans son discours inaugural, que le gouvernement a décidé de convoquer le monde municipal à des assises sur la décentralisation.

Nous avons tenté de connaître effectivement qui est le ministre délégué à l'Aménagement du territoire au Québec. À une question que j'ai posée en cette Assemblée nationale le 24 novembre 1982, j'ai demandé qui était le vrai ministre délégué à l'Aménagement et au Développement régional: Le ministre délégué à l'Aménagement et au Développement régional s'est levé pour me dire que c'était lui. Très simplement et je cite: "Je tiens à dire que pour ce qui est du gouvernement du Québec, c'est très clair que les responsabilités en ce qui concerne l'aménagement du territoire tel que défini dans une loi qui a été sanctionnée ici même à l'Assemblée nationale et qui s'appelle la loi 125, sont miennes. Quant aux autres dossiers dont vous avez parlé dans votre question concernant la décentralisation et toute la réflexion que j'ai annoncée à plusieurs reprises quant au développement régional, je pense qu'effectivement ce sont des responsabilités qui sont miennes." Il pense! C'est surprenant de voir qu'un ministre qui se dit délégué à l'Aménagement et au Développement régional pense qu'il a une responsabilité. Elle se définit où cette responsabilité? À l'intérieur de la loi 125 à deux articles particuliers, l'article 11 et l'article 16.

Il a fallu qu'on fasse de la recherche pour trouver qui était le vrai ministre délégué à l'Aménagement du territoire. Parce que le ministre actuel des Affaires municipales se met continuellement le nez dans le développement régional et dans l'aménagement du territoire. Si on prend l'article 267 de la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme on peut lire que: "Les orientations, documents, avis, décrets, interventions du gouvernement visés aux articles 11, 16, 27 et 29 ainsi qu'aux articles 149 et 165 sont préparés sous la responsabilité du ministre désigné par le gouvernement". Là on doit aller dans la Gazette officielle pour trouver qui est le ministre désigné. Le 9 septembre 1982, décret 2009-82, on peut lire que, conformément à l'article 267 de la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, les orientations, documents, avis, décrets, interventions du gouvernement visées aux articles 11, 16, 27, 29, ainsi qu'aux articles 149 et 165 de cette loi, sont préparés sous la responsabilité du ministre délégué à l'Aménagement et au Développement régional.

Je pense qu'on vient de clarifier un point. C'est effectivement le ministre délégué à l'Aménagement qui doit s'occuper de l'aménagement du territoire et plus particulièrement, des municipalités régionales de comté.

On nous reproche à nous, de l'Opposition, à l'occasion - on peut même le lire dans les journaux - de ne pas être suffisamment agressifs, de ne pas faire notre travail, de n'avoir rien à offrir en échange. Si la partie ministérielle acceptait, lors de nos interventions, des recommandations, des suggestions, des points importants qui empêcheraient de commettre des erreurs graves, des erreurs coûteuses pour l'ensemble des citoyens du Québec, à ce moment, on pourrait reconnaître la bonne volonté, l'efficacité de l'Opposition, qui attend que ce gouvernement ait fini de gâcher la sauce, ait fini de mal gérer le Québec pour prendre la relève et relancer finalement le Québec vers une reprise économique. Quand on parle de reprise économique, j'aimerais tout simplement que les citoyens comprennent qu'une reprise économique, cela veut dire du pain et du beurre, cela veut dire des jobs pour les chômeurs, cela veut dire un recyclage possible pour des gens qui sont maintenant bénéficiaires de l'assistance sociale, cela veut dire une relance dans la construction, quand on dit au Québec et partout au monde: Quand la construction va, tout va dans l'économie.

Que vient donc faire le ministre des Affaires municipales actuellement dans l'aménagement du territoire? Il vient tout simplement bloquer le développement dans chacune des municipalités à cause effectivement des contrôles et des règlements qui tiennent compte du schéma à produire pour chacune de ces municipalités. On reproche à l'Opposition de ne pas faire sa "job". J'aimerais profiter de cette occasion - le ministre des Transports tantôt envoyait une petite boutade - pour dire que, la semaine dernière, le ministre des Affaires municipales, et non pas le ministre délégué à l'Aménagement, convoquait ici à Québec, c'était le 9 avril dernier, tous les préfets des municipalités régionales de comté. Je vous

fais part de la lettre qu'il leur a fait parvenir; je lis simplement certains paragraphes: "Cette réunion réservée exclusivement aux préfets du Québec me permettra de connaître vos préoccupations plus immédiates en matière de régionalisation ou de décentralisation."

Je continue pour le bénéfice des citoyens qui vont pouvoir faire la différence entre les responsabilités dévolues à un ou à l'autre des ministres, et de savoir qu'il y en a un actuellement qui ne s'occupe pas de ses affaires: "Je crois qu'il est nécessaire et important, dit le ministre des Affaires municipales, que nous soulignions le tout et que nous tracions les grandes lignes des trois prochaines années des municipalités régionales de comté au Québec." (16 h 50)

M. le Président, je me suis rendu tout simplement vendredi soir à Québec. Je suis parti de mon comté de Hull, 278 milles, pour assister à cette rencontre en tant que responsable de l'Opposition pour l'aménagement du territoire et le développement régional. N'ayant pas reçu de lettre, je croyais qu'on avait oublié de m'inviter. Étant donné qu'on semble vouloir vivre au Québec une démocratie, je me suis dit tout simplement: C'est un oubli.

Or, vendredi soir, je me suis rendu à Québec. Samedi matin, j'étais assez tôt, à 8 h 30, au Loews Concorde. Les préfets des municipalités régionales de comté commençaient à arriver pour leur assemblée de 9 h 30. J'ai eu l'occasion, en passant, de pratiquement tous les voir, et je les salue en passant. Le ministre des Affaires municipales se présente et je lui demande: M. le ministre, est-ce qu'il y aurait possibilité que j'assiste à titre d'observateur? Je ne dirai pas un mot. Or, le ministre de me dire: Cela dépend des préfets de comté. Bon, alors il s'est esquivé là-dessus.

Quelques minutes après, un de ses hauts fonctionnaires m'approche, mal à l'aise, et me dit que ma présence gêne le ministre. J'ai trouvé cela curieux que ma présence gêne le ministre. Je pense que ma présence gênait davantage le ministre dans ce qu'il allait dire aux préfets de comté. On venait de dépenser, pour faire venir les préfets de comté à Québec, plus de 50 000 $. C'est ce que cela a coûté pour faire venir 94 préfets de comté ou préfets des municipalités régionales de comté. Pour leur dire quoi? Je vais vous le dire. Vous savez que les préfets de comté ne sont pas tous des péquistes, ce ne sont pas tous des rouges, ce sont des préfets de municipalités régionales de comté qui sont avant tout maires de municipalités.

Le ministre des Affaires municipales oublie cela parce qu'un maire, c'est maire pour toujours. Il a été élu par la population pour représenter, premièrement, les intérêts de sa municipalité. Il y en a qui m'ont appelé et il y en a qui m'ont effectivement donné un compte rendu, et même très précis. Je citerai pour l'information des citoyens du Québec... Vous vous souvenez, en 1980, lorsque le PQ s'est fait "planter" au référendum, on s'en souvient tous; 60% ont dit non à la séparation du Québec du Canada. Ce n'est pas compliqué. La population s'est prononcée. Ce même Parti québécois, tout piteux, à la veille des élections du 13 avril 1981, dont on fête l'anniversaire aujourd'hui, en passant... Quel malheur d'avoir enduré depuis plus plus de sept ans déjà, surtout depuis les deux dernières années, ce gouvernement!

Une voix: II faut être vraiment patient!

M. Rocheleau: M. le Président, pourquoi le ministre des Affaires municipales a-t-il fait venir les préfets des municipalités régionales de comté? Ici, on dit: "...me permettra de connaître vos préoccupations plus immédiates en matière de régionalisation ou de décentralisation." Il voulait connaître l'opinion des préfets des municipalités régionales de comté. Savez-vous ce qu'il leur a dit? "La décentralisation des MRC passe par l'indépendance. Le Québec ne dispose pas de ressources nécessaires pour les régions."

Une voix: Ah! Il n'avait pas d'argent.

M. Rocheleau: Ah! C'est là le hic, M. le Président, en fin de compte. Le gouvernement ne dispose pas de ressources nécessaires pour les régions. Ils nous feront accroire qu'il faut se séparer du Canada pour avoir les ressources nécessaires pour administrer les municipalités régionales de comté. Quand on regarde la grande carte du Québec, ce beau Québec jadis où les gens travaillaient, les gens étaient de bonne humeur, les gens avaient le sourire et où les gens, ces mêmes citoyens, sont devenus de plus en plus moroses depuis 1976 et, plus particulièrement, depuis 1981, alors qu'on s'est fait "fouter" une fois de plus.

Et le ministre continue: "Je fais partie du Parti québécois qui forme le gouvernement et qui a comme option la souveraineté." Faire venir les préfets des municipalités régionales de comté pour leur dire cela, alors que les problèmes vécus par les préfets des municipalités régionales de comté, par les MRC du Québec sont des problèmes graves de gestion, des problèmes graves d'aménagement de territoire, des problèmes graves qui tiennent des contrôles intérimaires et de leurs règlements, des problèmes graves qui empêchent aujourd'hui l'émission de permis de construction qui permettent à des Québécois ou à des Québécoises de construire leur petite maison. Étant donné que les taux d'intérêt sont descendus, étant donné qu'il y a une certaine

relance, on pourrait bénéficier d'une subvention du gouvernement fédéral, du gouvernement canadien, de 3000 $. On a averti le ministre des Affaires municipales. Mon collègue, le député de Laprairie, en commission parlementaire, ainsi que mon collègue de Mégantic-Compton et moi-même avons averti le ministre des Affaires municipales, au mois de décembre 1982, alors qu'on était à nous passer la loi 92 en commission parlementaire. Plus de 268 articles! C'est écoeurant, M. le Président, absolument écoeurant.

On l'a averti et on lui a dit, à cause du gel qu'il créait à l'intérieur de cette loi 125 et qui n'était pas suffisamment corrigée par la loi 92, qu'on allait empêcher les citoyens et citoyennes du Québec de mettre en chantier leur construction, leur maison avant le 30 avril pour pouvoir bénéficier d'une subvention de 3000 $, premièrement. Deuxièmement, qu'on empêchait par ces gels, des travailleurs de la construction d'exercer leur métier.

En 1976, quand le PQ a pris le pouvoir, on avait près de 200 000 travailleurs de la construction au Québec. En 1983, il nous en reste à peine 65 000. Ce doit sûrement être la faute du gouvernement fédéral. SÛrementl Le député de Frontenac n'est pas ici pour le répéter mais on peut le dire pour lui.

Tantôt je m'adressais aux préfets qui sont, premièrement, des maires de municipalités, et je m'adressais aussi aux maires qui siègent comme conseillers à la table de la MRC et aux conseillers municipaux dans toutes les municipalités du Québec. En passant, je me permets de souligner la présence d'un des conseillers municipaux de la ville de Hull, M. Pierre Chénier, qui est accompagné du greffier municipal, M. Robert Lesage, qui sont en visite à Québec aujourd'hui. J'espère que, s'ils ont des problèmes, ce gouvernement les réglera, M. le Président.

M. Bélanger: Jamais! Jamais!

M. Rocheleau: Bien oui! Qui se fera foutre à la porte, l'automne prochain, aux élections municipales, parce qu'on va blâmer l'administration locale de ne pas faire son travail, de hausser indûment les taxes, de ne pas voir au développement régional, d'empêcher l'émission de permis de construction? Ce sont les maires et les conseillers qui seront accusés, pas le gouvernement. Il se cache toujours derrière quelqu'un d'autre, quand ce n'est pas le fédéral, quand ce ne sont pas les États-Unis et quand ce n'est pas M. Untel, le Mexique, l'Argentine ou le Brésil où on a envoyé des avions pour lesquels on n'a jamais été payé.

M. Bélanger: Les Îles Malouines.

M. Rocheleau: Ce sont les préfets des municipalités régionales de comté et les maires qui ont actuellement des problèmes sérieux. C'est important, le développement d'une municipalité, le développement d'une région. C'est important, c'est très important, on en convient. Ce ne sont pas les municipalités régionales de comté qui préparent le contrôle intérimaire sur leur territoire; ce ne sont pas elles, absolument pas. Elles font un "draft", l'envoient à Québec et c'est contrôlé par le ministre des Affaires municipales. Si le ministre des Affaires municipales a l'intention de le désavouer, ce n'est pas lui qui appelle. Il fait appeler un haut fonctionnaire, il parle à un autre haut fonctionnaire et il lui fait part des modifications qui doivent être apportées. (17 heures)

Je dis aux préfets des municipalités régionales de comté, je dis aux maires des municipalités concernées, aux conseillers municipaux ainsi qu'à tous les citoyens et toutes les citoyennes du Québec: Surveillez cela parce que ce n'est pas le milieu qui décide de son développement, de son aménagement; c'est le ministre des Affaires municipales qui, en vertu de la loi no 125, n'a même pas cette responsabilité. C'est censé être la responsabilité du ministre délégué à l'Aménagement et au Développement régional. On se lève parfois pour lui poser une question; il faut essayer de le tenir éveillé; je ne sais pas ce qu'il fait ici. Le premier ministre, dans son discours inaugural, il y a quelques semaines, nous a dit qu'il allait abolir le ministère des Travaux publics, qu'il allait enlever le poste de ministre des Travaux publics.

Une voix: Une bonne affaire!

M. Rocheleau: II a dit qu'il allait abolir le ministère de la Fonction publique. Mais, M. le Président, il aurait dû abolir le poste de ministre délégué à l'Aménagement et au Développement régional ou fusionner ce ministère avec le ministère des Affaires municipales. À force de se courir, ces deux-là nuisent à tout le monde.

Des voix: Ah!

M. Rocheleau: Je pourrais vous citer des articles de journaux. C'est absolument...

Une voix: C'est bien monté.

M. Rocheleau: Même mon maire, le maire Michel Légère, vit actuellement dans la Communauté régionale de l'Outaouais, ce qui est un monstre un peu plus gros qu'une MRC. Cela a été créé en 1969 et c'a n'a jamais appris à marcher comme il faut encore. Le maire Michel Légère et le conseil municipal, unanimement, veulent se retirer de

la Communauté régionale de l'Outaouais. L'affaire va bien. Cela va très bien.

M. le Président, le président de la Communauté régionale de l'Outaouais, un des vôtres, MM. les péquistes, nommé par vous autres, a été reconduit pour cinq ans, à quelque 50 000 $ par année. Cela n'est pas grave; il n'y a rien là. Ménard "varge" dans le tas, dans votre tas à vous autres.

Des voix: Ah!

Une voix: Le PQ a fait le tas.

M. Rocheleau: Ménard grimpe dans les rideaux, dans vos rideaux. Pourquoi? Parce que, même à l'intérieur de lois semblables, la loi 125... Parlons un peu de votre loi no 90 concernant la protection du territoire agricole. La salade au petit déjeuner. Le ministre des Affaires municipales n'a pas le temps. Il est tellement préoccupé à rencontrer les préfets de comté pour leur dire que cela prend l'indépendance pour faire la décentralisation qu'il n'a pas le temps de faire la refonte de la CRO pour le printemps.

Pour rire de cela, on en rit tous les jours. Les avis locaux ont guidé Léonard, comme s'il cherchait la belle étoile.

Une voix: L'étoile de Bethléem.

M. Rocheleau: M. le Président, je trouve absolument inconcevable que ce soit, demain, le citoyen québécois et la citoyenne, le petit propriétaire, le petit locataire... Chaque fois que, dans une municipalité, on augmente les taxes, il n'y a pas que le propriétaire qui se fait frapper les couilles. Il y a le locataire aussi qui se fait frapper, M. le Président.

Une voix: II se fait frapper où? Une voix:Taisez-vous, vous.

M. Rocheleau: Vous viendrez avec moi tantôt, je vais vous le montrer.

Des voix: Ah! Ah! Ah!

M. Rocheleau: M. le Président.

Une voix: On va perdre un député si cela continue. Vous en avez assez d'un de perdu.

M. Rocheleau: Actuellement, M. le Président, il y a des règlements intérimaires que le ministre des Affaires municipales retient, qu'il a tout simplement désavoués. Par le temps que ces règlements sont désavoués, c'est ce que cela crée. Cela crée un empêchement de la relance économique, au Québec. Ce n'est pas simplement le député de Hull ou le responsable de l'aménagement qui vous le dit, M. le Président. Dans la Presse du 9 mars 1983, on pouvait lire: "Les MRC peuvent priver des Québécois d'une subvention d'Ottawa." Mais le ministre municipal, cela lui fait assez mal au coeur quand le gouvernement fédéral distribue ses largesses à tous les Canadiens, dans toutes les provinces canadiennes, qu'ici, au Québec, on dirait qu'il faudrait accepter tout simplement d'être privés, d'être privés de possibilités de relancer notre économie, chez nous, par la construction. Je mets, aujourd'hui, en garde les préfets des municipalités régionales de comté qui se sont rendus à Québec, samedi dernier, dans le but d'avoir des réponses à leurs nombreux problèmes. Il y a eu près de 30 interventions de différents préfets qui ont posé des questions au ministre et auxquelles ils n'ont eu aucune réponse valable autre que: des correctifs seront peut-être apportés, que des soulagements seront peut-être apportés, qu'on allait peut-être communiquer avec le gouvernement fédéral dans le but de faire étendre son programme afin de permettre de corriger une erreur que le gouvernement péquiste a faite. C'est une multitude d'erreurs qui font que nous sommes actuellement plus dépourvus que partout ailleurs au Canada, partout ailleurs sur le continent nord-américain et on se demande ce que l'Opposition pourrait faire.

De 1970 à 1976, le gouvernement libéral du temps a démontré ce qu'il pouvait faire au Québec. Malheureusement, il a été défait et on en connaît les causes: plus particulièrement, les résultats du "sacrage" de la Baie-James sur lequel on entend en commission parlementaire les témoignages de plusieurs hauts fonctionnaires. Il va y avoir un résultat très concluant et la population pourra voir clair dans le problème qui existe actuellement au Québec.

En terminant, je veux simplement réitérer à l'ensemble des Québécois et des Québécoises, à l'ensemble des "payeurs de taxes"... Vous payez des taxes au gouvernement du Québec. On sait que le ministère du Revenu court après vous autres actuellement et remonte jusqu'en 1969. C'est parce qu'ils ont gaspillé, par leur mauvaise gestion, l'argent des contribuables du Québec. C'est ce que ces gens ont fait; il ne faut pas chercher midi à quatorze heures. Quand on est de mauvais gestionnaires, on gaspille l'argent. On l'a prouvé, on a fait venir les 94 préfets ici, un samedi, durant un beau week-end. C'est 50 000 $ au moins que cela a coûté pour leur dire qu'il fallait de la décentralisation, que pour leur confier davantage de responsabilités, il fallait faire l'indépendance.

Je ne sais pas si on ne nous dira pas bientôt au Québec que ça va tellement mal que si on faisait l'indépendance, ça ne

pourrait pas aller plus mal!

Une voix: C'est ce qu'ils visent.

M. Rocheleau: C'est cela. Est-ce assez épouvantable? C'est diabolique, c'est effrayant de penser que ce gouvernement, pour arriver à son but ultime de séparation du Québec du Canada, a des idées semblables. J'aurais pensé qu'il lui restait un coeur, mais il ne peut pas l'avoir en dedans. Ce n'est peut-être pas de l'insanité, ce n'est peut-être pas de la folie, mais je me pose des questions. Est-ce qu'on ne pourrait pas demander un examen psychiatrique des députés du côté ministériel pour savoir si on est réellement géré par des gens qui sont sains d'esprit?

Une voix: M. Fréchette est pas pire.

M. Rocheleau: On se souviendra des années passées, de l'année 1978, je pense, à "Jonestown", alors que le bonhomme Jones avait fait boire un petit cocktail à un maudit paquet de monde. Ils se retrouvaient en dessous de la couverte, ce n'était pas long. Il y en a un paquet qui sont morts; ils ne sont jamais revenus. Je me demande, à force de suivre le Parti québécois comme ça, s'il n'y en a pas qui s'en vont effectivement à leur faillite.

Allez demander aux chômeurs, allez demander aux assistés sociaux, allez demander aux veuves, allez demander aux jeunes qui sortent de l'université, du cégep, de la polyvalente et qui n'ont rien dans leurs poches, 144 $ par mois pour un jeune qui retire de l'aide sociale. C'est impensable. Et après, on veut diminuer la délinquance juvénile. On tente de pondre des programmes de création d'emplois, alors que le ministre des Affaires municipales empêche la création de jobs, empêche la construction de maisons au Québec. C'est le monde à l'envers.

J'ose souhaiter, en terminant, que les Québécois et Québécoises en ont eu suffisamment de ce gouvernement qui a un taux de popularité, d'après les derniers sondages, de 19%. Vous en avez perdu "une maudite gang" en cours de route, 19%, et vous venez nous raconter encore des histoires comme celles-là. Arrêtez-moi cela. Faites un examen de conscience et ayez le courage d'aller au peuple. Allez consulter. Faites un grand référendum national. Consultez la population. Vous allez vous faire jeter dehors avec trois petits points. Merci. (17 h 10)

Avis de mini-débat

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre des Transports, avant de vous accorder la parole, je vais lire une lettre, qui va certainement vous intéresser, adressée le 13 avril 1983 au président, M. Richard Guay. "M. le Président, à la séance d'aujourd'hui, j'ai posé au ministre des Transports une question portant sur les engagements du gouvernement du Québec pour la reconstruction des routes 265 dans le comté de Frontenac et 116 dans le comté de Richmond. Puisque je ne suis pas satisfait de la réponse donnée, je désire me prévaloir des dispositions de l'article 174 du règlement. Veuillez agréer, M. le Président, l'expression de mes sentiments les meilleurs." M. Yvon Vallières, député de Richmond.

Compte tenu que le règlement à l'article 174 indique que, comme nous sommes mercredi, il n'est pas possible d'avoir le débat qui est prévu, il aura donc lieu demain soir à 22 heures, jeudi. M. le ministre, vous avez la parole.

M. Clair: M. le Président, je signale immédiatement - je pense que le whip adjoint de l'Opposition est là - qu'à la demande des gens de la municipalité de Saint-Augustin, sur la Basse-Côte-Nord, j'avais accepté une invitation à aller les rencontrer demain. Peut-être qu'il y aura lieu de remettre ce mini-débat. Maintenant, j'en saisirai mon collègue, le député de Richmond, plus tard. Je voudrais immédiatement me prévaloir de mon droit de parole.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Si le whip l'accorde dès maintenant.

M. Picotte: M. le Président, je vais consulter mon collègue. S'il y a moyen d'accommoder le ministre, on pourra lui dire demain matin, je pense.

M. Clair: Je pars à 7 heures, demain matin, pour revenir tard dans la soirée.

M. Picotte: D'ici 18 heures, je pourrai peut-être être en mesure de lui faire part des démarches.

M. Clair: Parfait.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Merci. Votre intervention, M. le ministre.

Reprise du débat sur le message inaugural

M. Michel Clair

M. Clair: M. le Président, la tradition veut qu'au moment du débat sur le discours inaugural chaque député puisse intervenir et prononcer le discours qu'il a envie de prononcer et des méchantes langues ont déjà dit qu'on pouvait dire n'importe quoi. C'est, je pense, un peu la preuve qu'on vient d'avoir en entendant le député de Hull, à savoir qu'au moment du débat sur le discours inaugural on peut dire à peu près n'importe

quoi.

La deuxième tradition relative au débat sur le discours inaugural veut qu'un orateur qui prend la parole commence son allocution en relevant brièvement les principaux points qui ont été soulevés par l'orateur précédent. Force m'est de constater que, voulant respecter cette tradition, cela m'est particulièrement difficile de le faire puisqu'on pourrait résumer dans à peu près trois points l'allocution du député de Hull.

Premièrement, je suis heureux de constater qu'après deux ans qu'il est critique en matière d'affaires municipales et d'aménagement du territoire pour l'Opposition il vient de découvrir la différence entre les responsabilités du ministre délégué à l'Aménagement et au Développement régional et celles du ministre des Affaires municipales. Je ne peux pas trouver grand-chose à redire contre cela qu'un critique de l'Opposition, après deux ans de travail à l'Assemblée nationale, s'aperçoive enfin de la différence entre les responsabilités de deux collègues ministériels. Je pense qu'on ne peut qu'applaudir à cela, qu'enfin il s'en aperçoive après deux ans. Cela nous apparaît assez normal.

Deuxièmement, le député de Hull a insisté beaucoup sur le fait qu'il était très déçu de n'avoir pu assister à une rencontre ministérielle, une rencontre tenue samedi dernier, entre le ministre des Affaires municipales du Québec et les préfets des municipalités régionales de comté. C'est un peu décevant pour le député de Hull, j'en suis convaincu. Il nous l'a manifesté lui-même tantôt en disant qu'il trouvait cela difficile actuellement d'appartenir à l'Opposition. C'est ce que j'en comprenais, en tout cas. Il n'est ni ministre, ni maire actuellement. Dans la mesure où le ministre des Affaires municipales rencontre comme ministre responsable d'une partie de la loi 125 les préfets, cela va surprendre qui que le critique de l'Opposition ne soit pas présent à cette rencontre? C'est à peu près comme l'histoire de la belle-mère qui demande à être présente aux discussions matrimoniales entre deux époux. C'est un peu cela. C'est quoi cette habitude que les députés de l'Opposition commencent à prendre à vouloir venir s'immiscer dans les rencontres ministérielles qu'on a le droit d'avoir, la responsabilité d'avoir, comme membres du gouvernement, avec des organismes. Je suis convaincu, connaissant l'affabilité du ministre des Affaires municipales, qui est reconnue dans tout le Québec, que le ministre des Affaires municipales aurait pu le dire d'un ton beaucoup plus sec. Les préfets des MRC quand ils viennent rencontrer les membres du gouvernement ils ne veulent pas voir la belle-mère de l'Opposition présente à ces rencontres. Si le député de Hull voulait se le faire dire de cette façon, moi qui n'ai pas autant d'affabilité peut-être que mon collègue le ministre des Affaires municipales, cela ne me fait rien de lui dire. Il n'a pas d'affaire là, c'est simple.

En ce qui concerne son dernier point, il a parlé avec beaucoup d'éloquence de la nécessité de subir des tests psychiatriques. Je voudrais simplement lui offrir que si on veut commencer deux par deux, un de l'Opposition et un du côté ministériel pour vérifier la santé de l'esprit de part et d'autre, je suis prêt à y aller le premier avec lui s'il le désire, au moment où cela lui conviendra. Deux par deux, je n'ai pas d'objection.

J'en viens à mon intervention sur le débat sur le discours inaugural. Les deux dernières années ont été marquées non seulement au Québec, non seulement au Canada, non seulement en Amérique mais partout dans le monde par une crise profonde, une crise qui n'a cessé d'avoir des effets de plus en plus durs, sévères, en termes de chômage, en termes d'inflation, en termes de taux d'intérêt, de faillites d'entreprises. On a donc connu un état de découragement avancé dans plusieurs parties du monde occidental. À ce compte, d'ailleurs, je crois que la principale constatation de la dernière année par la société québécoise a été probablement de se rendre compte que si la crise avait des effets sévères ici même au Québec, elle n'était pas unique au Québec mais que c'était à proprement parler une crise économique internationale et qu'elle connaissait des ramifications profondes dans notre manière même de vivre comme société.

Au moment où le premier ministre a prononcé le discours inaugural, je pense que ce qu'il a surtout voulu indiquer c'est que c'est bien beau la crise, c'est bien beau les difficultés que nous connaissons présentement mais le moment n'est plus à analyser seulement les effets de la crise mais je dirais à préparer, à voir comment on s'en sortira de cette crise et essayer d'ouvrir les voies de l'avenir, essayer de préparer l'après-crise. Je suis de ceux qui pensent que le niveau de vie que nous avons connu, les habitudes de consommation que nous avons acquises au cours des deux dernières décennies, cette habitude de recourir, même comme citoyen, largement à l'emprunt pour consommer, je pense que l'avant-crise ne reviendra pas demain matin, en raison d'une surconsommation, d'un surendettement des personnes comme des gouvernements. Il va falloir apprendre à mieux apprivoiser les réalités économiques, sociales et culturelles afin de ne pas penser seulement que c'est un mauvais moment à passer la crise économique et que dans trois, quatre ou six mois la situation se corrigera complètement.

Je pense qu'on doit avoir comme objectif, en ce moment, comme gouvernement et comme société, de sortir de la crise économique, de préparer une société qui soit sur le plan social et culturel plus juste, plus épanouie et que sur le plan économique, sur le plan socio-économique, elle soit plus forte que lorsque nous y sommes entrés. Pour ce faire, il me semble que nous avons entre les mains, nous le peuple québécois, un certain nombre d'atouts qui sont disponibles dans le fond à tous les peuples de la terre mais qu'on peut ici même mieux apprivoiser et dont on peut mieux se servir afin d'avancer sur le plan socio-culturel notamment.

Je pense qu'on doit faire plus largement appel que jamais à la solidarité, à la concertation, à l'excellence du travail, à une volonté d'améliorer notre productivité, notre performance sur le plan de la production industrielle, sur le plan même de la production de services au gouvernement.

Je pense en effet, que ce n'est qu'en consentant de nouveaux efforts en termes de compromis, de concertation, en termes de solidarité les uns avec les autres, d'efforts au travail, en étant toujours conscients que c'est de l'effort de toute la société que pourra résulter une sortie positive de la crise. Ce sont des éléments que nous avons à notre portée et que nous devons utiliser pour sortir de cette crise sur le plan social et culturel. De façon encore plus importante, je crois que c'est au domaine économique que nous devons accorder le plus d'attention dans le moment. (17 h 20)

En effet, avec un haut taux de chômage, avec plusieurs personnes, malheureusement beaucoup trop, qui, entre 18 et 30 ans, sont acculées à des prestations d'aide sociale, je pense que le gouvernement doit accorder une priorité au développement de l'emploi et au soutien, dans la crise, des plus démunis.

À ce compte, le discours inaugural proposait plusieurs mesures, des mesures à court terme, des mesures à moyen terme, des mesures à long terme pour tenter d'améliorer le niveau de l'emploi au Québec. J'en donne pour exemples simplement les mesures que nous avons mises de l'avant en matière de programmes de création d'emplois temporaires. Ce sont des mesures qui visent à donner de l'emploi rapidement. Il y a plus de 150 000 000 $ qui sont consacrés à ces programmes de création d'emplois temporaires. Il y a aussi des mesures qui sont prises visant à favoriser la préretraite d'un certain nombre de personnes, de mieux soutenir les jeunes dans le domaine des affaires sociales, toute une série de mesures visant essentiellement le court terme, il faut le reconnaître. Quand on connaît les niveaux de chômage, le nombre d'assistés sociaux présentement, je crois que c'est tout naturel, c'est normal que l'on prenne des mesures à court terme pour tenter de favoriser l'emploi du plus grand nombre de personnes possible.

Il y a également des mesures à moyen et à long terme sur lesquelles ont doit mettre l'accent. Ces mesures, à mon avis, me paraissent reliées à deux grands axes d'action que l'on doit privilégier à ce moment de notre développement. C'est toute la question du virage technologique et la question du développement de nos exportations vers l'extérieur.

En matière de virage technologique, le gouvernement a décidé de consacrer des sommes importantes pour favoriser, non pas ce que certains sont appelés à voir comme étant pour essayer de réinventer la roue, mais simplement pour essayer, dans un certain nombre de secteurs, de moderniser le plus rapidement possible les sphères d'activité industrielle du Québec afin de s'assurer qu'on ne rate pas le développement technologique qui continue de surgir dans plusieurs domaines de l'activité économique.

En matière d'exportation aussi; quand on sait que près de 40% de tout ce que nous fabriquons au Québec est exporté, je pense qu'il faut consentir des efforts en vue de favoriser au maximum le développement de nos exportations.

Donc, en bref, des mesures à court terme dans le discours inaugural visant à favoriser la création d'emplois rapidement, immédiatement, dans des activités qui sont utiles à la société, mais qui n'entraînent pas nécessairement un changement, une restructuration de l'économie québécoise, et, d'autre part, des mesures à plus long terme visant à assurer le Québec d'une bonne place dans l'après-crise sur le plan économique.

Comment le ministère des Transports peut-il contribuer à cet effort du virage technologique, à cet effort d'adaptation de la réalité de ces politiques aux besoins de l'année 1983 maintenant? Essentiellement de trois façons: d'abord, par un programme d'accélération d'investissements dans plusieurs domaines et aussi un programme de réorientation des dépenses que nous avions l'habitude de faire et que nous essayons maintenant de rendre plus productives. Je m'explique là-dessus? Sur un programme de relance des investissements dans le domaine des immobilisations, au ministère des Transports, ce que nous proposons essentiellement, c'est de tenter de dépenser dans la construction routière, de métro souterrain, de métro de surface, dans la construction navale, dans la construction de garages, de centres d'opérations pour les commissions de transport du Québec. Nous tentons de créer de l'emploi en faisant plus rapidement des dépenses qui sont utiles, qui seront nécessaires rapidement, de façon à susciter plus d'activité dans le domaine des

transports dès les prochains mois.

L'objectif que nous nous sommes fixé, c'est d'accélérer 100 000 000 $ d'investissements au cours des douze prochains mois.

La deuxième façon d'intervenir dans le domaine des transports, c'est d'essayer de mieux utiliser les sommes qui sont disponibles dans le domaine de la construction routière au Québec. On sait tous qu'il y a, bon an mal an, un montant d'environ 400 000 000 $ qui, depuis maintenant trois ans, est consacré à la construction routière. Plutôt que de continuer dans la voie qui a été retenue par le gouvernement précédent, d'aller vers le développement d'axes autoroutiers, dans le domaine des autoroutes, nous essayons présentement de recycler et de réorienter les budgets davantage vers de la construction de voirie régionale qui, dans bien des cas, est beaucoup plus créatrice d'emplois, qui permet de répartir dans l'ensemble des régions du Québec des travaux routiers importants.

On parlait cet après-midi de la Gaspésie; effectivement, je pense que le ministère des Transports peut être en Gaspésie l'un des moteurs de l'emploi à la condition, cependant, comme je le disais, qu'on ne consacre pas les montants disponibles exclusivement à trois ou quatre chantiers d'autoroute dans la grande région de Montréal ou de Québec, mais qu'on essaie de répartir dans toutes les régions du Québec le budget de construction du ministère des Transports.

Une troisième manière pour le ministère des Transports de s'insérer, si l'on veut, dans la volonté du gouvernement en même temps que de créer de l'emploi à court terme, de prendre le virage technologique et de développer notre activité, notre structure industrielle dans des domaines de pointe, c'est tout l'effort que le ministère des Transports fait présentement dans le domaine d'ajustement de ses politiques de transport pour essayer que celles-ci aient le maximum de retombées économiques ici même au Québec.

C'est ainsi qu'actuellement nous sommes à revoir notre politique de construction de transport en commun interurbain afin d'essayer de voir comment on pourrait, par une mise à jour de notre politique dans ce domaine, favoriser le renouvellement de la flotte d'autobus des nombreux transporteurs par autobus au Québec et d'essayer de faire en sorte qu'au maximum, le renouvellement de la flotte ait des impacts positifs sur les fabricants de matériel roulant au Québec spécialisés dans ce secteur. C'est, dans ce cas, Prévost Car, dans le comté de Bellechasse.

Il y a une autre avenue, M. le Président. On sait qu'on a procédé en 1979 à un regroupement de commandes d'autobus urbains, cette fois, pour les commissions de transport du Québec et que le regroupement de commandes d'autobus urbains a permis l'installation au Québec de GM, qui fabrique maintenant des autobus urbains qui sont exportés partout aux États-Unis et au Canada.

Encore là, c'est un effort que nous sommes en train de répéter en tentant de voir comment, à nouveau, pour la deuxième commande d'autobus, on peut, par les politiques d'investissement du ministère des Transports, favoriser les retombées économiques ici même au Québec.

Il y a également le domaine de la construction du métro de surface et du métro souterrain. On sait qu'il y a des centaines de millions de dollars qui ont été investis dans le métro souterrain à Montréal et que cela a permis tant au BTM (Bureau de transport métropolitain) qu'à Bombardier de développer une technologie de pointe dans le domaine - on a même raffiné une technologie française - du métro sur pneu.

Maintenant, on sait que le marché, dans les prochaines années, sera surtout à raison d'environ 1 000 000 000 $ en Amérique seulement, orienté vers le métro-fer, le métro sur rail. Dans ce cas, nous pensons, au ministère des Transports, essayer de planifier nos investissements de manière à répondre aux besoins du transport en commun de l'île de Montréal, mais également de voir comment on peut marier - si je peux employer cette expression - en même temps les besoins de développement du transport en commun sur l'île de Montréal et les marchés et les possibilités d'exportation de matériel qui pourrait nous être utile chez nous et aussi être exportable partout dans le monde. C'est un effort auquel nous nous sommes livrés depuis maintenant un bon bout de temps, que nous allons continuer à faire et à accélérer en vue de permettre d'avoir encore des bonnes nouvelles comme celle qu'on avait ce matin. J'avais tantôt la coupure de journal; nous avions ce matin la confirmation que la firme Bombardier avait connu une bonne année dans le domaine de ses performances financières à cause de la fabrication de son matériel roulant, notamment. (17 h 30)

Que ce soit dans mes représentations auprès du ministre fédéral des Transports dans le domaine du renouvellement de la flotte de Via Rail qui utilise du LRC, que ce soit dans la réponse aux besoins de transport en commun sur l'île de Montréal, nous devons prendre ce virage technologique au maximum. Le Québec, au cours des 30 ou 40 dernières années, a manqué, à proprement parler, les principales retombées de l'ère de l'automobile. Nous n'avons pas été le récipiendaire, si on veut, d'une grande concentration d'usines de fabrication

d'automobiles au Québec. Cette industrie s'est surtout concentrée en Ontario, au Canada. Au moment où s'ouvrent des perspectives très intéressantes dans le domaine du matériel roulant pour du transport en commun, que ce soit pour les autobus urbains, les autobus interurbains, que ce soit en termes de LRC, de métro de surface, de matériel roulant de composantes de toutes sortes, je pense qu'on peut et qu'on doit, au ministère des Transports, essayer au maximum d'ajuster nos politiques aux possibilités d'exportation de nos entreprises.

Il me reste quelques minutes à peine. Je sais que les membres de l'Opposition sont intervenus au cours de ce débat à plusieurs reprises pour faire référence aux difficultés de la compagnie Quebecair qui a encouru des pertes, pour l'année dernière, d'environ 17 000 000 $ comme on le sait tous. Comme je n'ai pas beaucoup de temps, je vais terminer rapidement, simplement pour mettre en parallèle, mettre en perspective les difficultés que connaît Quebecair actuellement.

On pourrait dresser une longue liste de comparaisons par rapport aux pertes d'autres entreprises de transport aérien. On pourrait dire, par exemple, que Pan American Airways a perdu 450 000 000 $ l'année dernière, que Air Canada en a perdu 32 000 000 $, que CP Air en a perdu environ 40 000 000 $ et qu'à peu près toutes les entreprises de transport aérien au monde sont déficitaires actuellement. Je pense que c'est déjà un élément important que de mettre ainsi en comparaison Quebecair avec d'autres entreprises de transport aérien. On constaterait rapidement que finalement, par rapport à d'autres compagnies, la seule raison pour laquelle on a tant insisté, du côté de l'Opposition, sur les déficits de Quebecair, c'est que c'est une compagnie québécoise et que c'est la seule compagnie de cette dimension, de deuxième niveau, c'est le seul transporteur aérien québécois de ce niveau. À part cela, comme caractéristique, en termes de déficit, à peu près toutes les compagnies aériennes au monde ont connu des déficits au cours des deux dernières années, l'ensemble des compagnies ayant perdu, en 1982, environ 2 000 000 000 $ au niveau de l'IATA.

Mais comparons plus simplement la situation du déficit de Quebecair à d'autres domaines du transport au Canada. Comment peut-on établir une proportion entre le déficit de Quebecair de 17 000 000 $ et le déficit de Via Rail de 755 000 000 $ pour l'année 1982? M. le Président, le député de Mégantic-Compton dit que ce n'est pas pareil. Je comprends. Notre part dans le déficit de Via Rail est à peu près de 225 000 000 $. Qu'est-ce que Via Rail offre comme services au Québec, M. le Président?

On va trois fois par semaine en Abitibi, trois fois par semaine au Lac-Saint-Jean et on va encore à tous les jours vers le Bas-Saint-Laurent et Montréal-Québec. 225 000 000 $, c'est notre part du déficit. À chaque semaine, Via Rail fait le déficit d'un an de Quebecair. L'Opposition ne dit pas un mot là-dessus, pas un mot.

Prenons un autre dossier: l'aéroport de Mirabel. On reproche à Quebecair d'avoir et de continuer à avoir des pertes d'environ 1 000 000 $ par mois. Mirabel, qui devait être le centre de transport aérien international, qui devait faire de Montréal la plaque tournante en termes de transport aérien international: déficit hebdomadaire, 1 000 000 $. Pas un mot du côté de l'Opposition. Pendant ce temps, la place de Montréal dans le transport aérien continue de s'affaisser et l'Opposition n'en parle pas. Pendant ce temps, ce sont les députés libéraux fédéraux eux-mêmes qui s'inquiètent du déménagement progressif des activités d'Air Canada vers Toronto, de l'affaiblissement relatif de Dorval-Mirabel au profit de Toronto.

Avec une loupe, tout ce que l'Opposition est capable de voir, c'est les déficits de Quebecair. Ses députés sont incapables de voir que nous avons des intérêts dans le domaine du transport. Ils sont incapables de voir cela. Ils voient 15 000 000 $ de déficit en un an chez Quebecair. Ils oublient de voir 750 000 000 $ de déficit chez Via Rail. Ils oublient de voir 230 000 000 $ de déficit, l'année dernière, au CN; c'est aussi une belle performance. Ils oublient de voir une quarantaine de millions de dollars de déficit chez Air Canada. Si j'additionne les trois suivantes: Air Canada, CN et Via Rail, on arrive à un déficit, en 1982, de l'ordre de 1 000 000 000 $. Cela veut dire qu'en cinq jours - même pas, en trois jours - ces trois compagnies du fédéral font le déficit d'un an complet de Quebecair et, de l'autre côté, on n'en parle pas du tout. Le pire, c'est que non seulement ils n'en parlent pas, mais ils ne voient pas les intérêts du Québec. Ils ne les voient pas. En matière de transport aérien et dans l'industrie aéronautique, je ne sais plus ce qu'il va falloir qu'il se produise pour qu'ils se réveillent.

On nous avait promis 50% des retombées des F-18. On sait maintenant que cela n'atteindra pas 20%. On nous avait dit qu'avec Mirabel, on allait redorer le blason de Montréal comme centre international de transport. Le ministre des Transports du Canada a déposé, l'année dernière, un programme qui visait à relancer Mirabel. Résultat: La situation de Mirabel et de Dorval continue à se détériorer. Qui s'inquiète du déménagement progressif des activités d'Air Canada vers l'Ouest? Encore une fois, ce n'est même pas l'Opposition, à

Québec; ce sont les ministériels, à Ottawa. Dans ce cas-là, j'en sais gré au député fédéral de Laprairie; c'est le seul à s'intéresser à ce dossier.

Tout cela pour dire que c'est souvent décevant de voir l'attitude de l'Opposition dans les dossiers en matière de transport. Je pourrais parler également du rail et on va publier, dans les prochains jours, une étude qui a été faite à mon ministère sur les conséquences, dans le domaine des transports, de la politique d'immobilisation d'environ 12 000 000 000 $, pour les dix prochaines années, dans l'Ouest du pays, pour à peine l'équivalent de 500 000 000 $ au cours des dix prochaines années dans l'Est, notamment au Québec. Ces gens-là ne voient pas la réalité. Ils ne s'intéressent pas au domaine des transports et, pourtant, que ce soit en termes de soutien de l'emploi à court terme pour les gens qui ont besoin de travail, que ce soit pour de la construction routière, des infrastructures maritimes et aériennes, on peut faire des choses et on est en train de les faire. Mais cela n'intéresse pas l'Opposition. Tout ce qui l'intéresse depuis deux ans... Ma foi, si j'ai eu une question du député de Richmond, aujourd'hui, sur un dossier autre que celui de Quebecair, je pense que c'est la première fois depuis deux ans. Cela ne les intéresse pas. On peut, à court terme, faire des choses. On est en train de les faire et, à moyen et long terme, je pense que le ministère des Transports s'associe pleinement à cette volonté du gouvernement du Québec de prendre le virage technologique, de prendre le taureau par les cornes pour essayer de favoriser le développement de nos exportations sur les marchés étrangers. Il y a des entreprises qui sont installées dans ce secteur et qui n'attendent souvent qu'une volonté politique du gouvernement pour au moins ajuster nos politiques à leur potentiel. C'est ce que nous sommes en train de faire.

Malgré que l'Opposition ne s'intéresse qu'au dossier de Quebecair en matière de transport, quant à moi, je vais continuer à faire le travail que j'ai entrepris depuis deux ans, c'est-à-dire essayer d'associer pleinement le ministère des Transports du Québec au développement économique du Québec.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le whip de l'Opposition.

M. Picotte: Merci, M. le Président, compte tenu que je devais donner une réponse à la fin, je dois dire que mon collègue de Richmond regrette énormément que le ministre ne soit pas ici demain pour discuter de l'urgence de la construction des routes 116 et 265. Si la présidence m'assure que mardi soir, sans donner d'avis, on pourra reprendre ce mini-débat à la fin de la journée, vers 22 heures, nous sommes disposés, à la demande du ministre, à reporter ce mini-débat.

M. Clair: Parfait.

Le Vice-Président (M. Rancourt): II y a donc consentement pour que le mini-débat soit reporté à mardi soir.

M. le député de Jean-Talon.

M. Jean-Claude Rivest

M. Rivest: Comme mes autres collègues en cette Chambre, j'ai eu le plaisir d'écouter les remarques du ministre des Transports qui, dans un certain sens, s'est montré bien traditionaliste: la vertu d'un côté et le vice de l'autre. Le petit "chamaillage" partisan du Parti québécois, seul et unique détenteur de la vérité, se préoccupant des intérêts du Québec et l'Opposition qui ne fait strictement rien.

Je pense que la réalité de la situation politique, économique et sociale du Québec appelle, de la part des intervenants de tous les côtés de la Chambre, beaucoup plus de sérieux que ce "chamaillage" partisan, finalement assez stérile, qui a été abondamment illustré par les propos du ministre des Transports. Le ministre des Transports a évoqué la crise internationale qui frappe l'ensemble des sociétés occidentales. C'est sûr qu'il y a aux États-Unis, en Europe, au Canada et au Québec en particulier des facteurs objectifs, des facteurs de conjoncture économique qui rendent à tous les gouvernements, à toutes les sociétés et singulièrement à tous les individus la situation extrêmement difficile.

La question que nous adressons au gouvernement dans cette Assemblée, avec les responsabilités politiques qu'a ce gouvernement - je pense que c'est la question que l'ensemble de la population adresse à ce gouvernement, au gouvernement du Parti québécois - est celle-ci: Va-t-il reconnaître, une fois pour toutes - et en situation de crise, Dieu sait que c'est important - qu'il peut avoir, lui, ce gouvernement, dans la gravité de la situation politique, économique et sociale du Québec, une part de responsabilités?

Je pense que les gens sont de plus en plus excédés par cette attitude du gouvernement du Parti québécois qui ne cesse de reporter sur d'autres les responsabilités qu'il devrait lui-même assumer. Or, quand on regarde l'état actuel de la société québécoise, sur le plan politique, on parle d'un affaiblissement politique du Québec au niveau du Canada. Sur le plan économique, l'affaiblissement économique du Québec a, encore une fois cet après-midi, à l'Assemblée nationale, été illustré par les questions de mon collègue le

député de Mont-Royal concernant la situation en Gaspésie. On parle également de l'affaiblissement social du Québec illustré par la situation de ce gouvernement qui se dit social-démocrate alors qu'il vient d'accéder à l'Internationale socialiste. Ce gouvernement maintient, condamne des dizaines de milliers de jeunes, à vivre avec 144 $ par mois. Il me semble que, si le langage, le discours, l'image correspondaient à une certaine réalité, on sentirait, dans le choix les priorités, dans les attitudes de ce gouvernement, une certaine préoccupation de la situation sociale, M. le Président. Mais non. Tout ce qui marque, au fond, la démarche de ce gouvernement depuis maintenant plus de sept ans, c'est son option de la souveraineté politique du Québec, c'est cette espèce d'obsession ou cette naïveté qu'il a de croire que le développement d'une société ne peut se faire qu'en fonction de l'appartenance à une langue donnée ou à une culture donnée. Je pense que la réalité première, c'est cette tendance fondamentale du Parti québécois à croire qu'une société moderne, cela se ramène à savoir à quelle communauté nationale un groupe humain appartient. C'est cela qui l'empêche de réaliser et de constater la complexité d'une société moderne, la complexité du développement humain et individuel qui exige bien davantage une attitude d'ouverture, une attitude de collaboration, une attitude de partnership avec les autres.

Cela, il me semble que c'est une critique que l'on peut très justement adresser au gouvernement du Parti québécois. Cela commence à l'intérieur même de la population québécoise. On l'a dit à maintes reprises, les attitudes, les discours, les gestes mêmes, législatifs ou administratifs du gouvernement, quelles que soient les bonnes intentions du ministre des Communautés culturelles et de l'Immigration, révèlent une baisse profonde de la solidarité entre les Québécois à cause de l'arrivée du Parti québécois. Ce n'est pas uniquement pour des raisons accidentelles que le Québec a perdu 150 000 personnes. Cela est une première réalité. On l'a souvent dit, on l'a souvent répété, cette détérioration de la solidarité des Québécois est une des causes réelles et objectives qui font que le Québec, face à la crise internationale, réussit moins bien que d'autres sociétés à l'intérieur du Canada ou sur le continent nord-américain. Il me semble qu'on a le droit de souligner, cette attitude du Parti québécois, de par la nature même de son programme, de son idéologie, de sa démarche, de constamment diviser les Québécois les uns contre les autres, de qualifier les gens qui ne partagent pas les objectifs du Parti québécois de mauvais et ceux-là qui les partagent de bons Québécois. Je pense qu'une société adulte comme celle du Québec accepte qu'il y ait des divergences de vues, mais elle n'acceptera jamais que, parce que des divergences de vues s'expriment au sein de la société sur l'avenir de la société québécoise en tant que telle, les gens soient qualifiés de ceci ou de cela en fonction des opinions qu'ils ont. C'est le premier élément.

Deuxième élément, M. le Président. Évoquant le développement lui-même de la société, le ministre des Transports énumérait les projets qu'il a dans le domaine du transport aérien, ferroviaire, routier, etc. Fort bien, son ministère peut se préoccuper d'un certain nombre de programmes pour développer les transports, mais si, à la base des choses, il n'y a pas chez le gouvernement une volonté de créer une activité économique qui soutienne les activités de transport, comment voulez-vous que tous les beaux programmes gouvernementaux qu'il puisse imaginer, lui-même et ses collègues, puissent avoir une quelconque signification? Je ne pense pas que ce soit injuste de dire que dans l'attitude générale au niveau du programme du Parti québécois, au niveau de ses politiques comme telles, il n'y a pas une confiance suffisante dans le talent, dans la capacité des hommes et des femmes d'ici de se lancer en affaires, d'avoir une activité commerciale, d'avoir une activité industrielle. Tout le monde nous le dit, tout le monde sait que cette attitude n'est pas à la base, dans l'esprit du gouvernement, qu'elle n'est pas visible comme étant effectivement la priorité de ce gouvernement. Depuis maintenant six ou sept ans, chaque année, dans les messages inauguraux, le premier ministre vient nous dire: Cette année-ci sera l'année du développement économique prioritaire.

Prioritaire un an, absolument prioritaire. Là, le nouveau mot, c'est "obsessionnellement prioritaire", alors que ce discours ne correspond en aucune manière à une compréhension de la réalité économique du Québec qui s'inscrit - cela est drôlement important en termes économiques - dans l'espace politique et économique du Canada en tant que tel. (17 h 50)

Sur le plan du manque de confiance, je pense, du Parti québécois face à l'entreprise privée, cela est clair, c'est manifeste. Il suffit de voir les attitudes du ministre des Finances au niveau de la fiscalité des entreprises, les multiples représentations des hommes et des femmes d'affaires québécois au sujet de la bureaucratie, de la lourdeur de l'intervention, de leur manque de liberté, des entraves que la machine gouvernementale leur pose. Ce manque de confiance est illustré d'une façon encore beaucoup plus concrète par cette attitude de chamaillage constant et systématique auquel, pour des raisons politiques, se livre le gouvernement du Parti québécois dès lors qu'il s'agit de

dossiers économiques et dès lors que le gouvernement fédéral est en cause dans des dossiers économiques. Le ministre des Transports a signalé un certain nombre de dossiers du domaine économique. Il a parlé des F-18, il a parlé de tout cela. Mais pourquoi, pour ces dossiers, le Québec n'a-t-il pas pu obtenir ce qu'il aurait dû obtenir? C'est qu'au départ il y a eu une dimension dans la conduite de ces dossiers, d'abord ici à Québec, et en réplique sans doute au gouvernement fédéral.

Tous ces dossiers, malheureusement pour l'économie du Québec, malheureusement pour les hommes et les femmes d'affaires du Québec, et surtout malheureusement pour les travailleurs, sont politisés. Je n'en citerai qu'un exemple. Nous sommes allés chez Marine Industrie à Sorel, à plusieurs reprises. Ce ne sont pas des libéraux qui nous l'ont dit, mais les gens du conseil central de la CSN à Sorel, qui prennent l'initiative eux-mêmes d'aller à Ottawa pour que Marine Industrie obtienne des contrats, pour voir les possibilités qu'offre le gouvernement fédéral au niveau des frégates, etc. Ils voient les dossiers, ils voient les possibilités, mais chaque fois qu'arrive le niveau politique, et les autorités de Marine Industrie font exactement la même chose, aussitôt qu'intervient un ministre fédéral ou un ministre péquiste, voilà que l'enjeu de tout le dossier devient le suivant: savoir lequel des deux ministres va réussir le premier à aller planter son drapeau sur le contrat.

En fin de compte, Marine Industrie -c'est ce que vous devez réaliser par cette politisation excessive de vos rapports avec Ottawa - lorsqu'elle fait une soumission à Sorel, doit concurrencer sept ou huit chantiers canadiens qui arrivent avec des données techniques, qui arrivent avec des données financières qui sont comparables, aussi valables que celles de Marine. Celles de Marine sont souvent plus valables que d'autres. Marine Industrie, je n'ai aucune hésitation à le dire à cette Chambre, d'après les renseignements que l'on a obtenus autant du côté des travailleurs que de la direction, a perdu des dossiers à cause de la politisation des rapports économiques entre le gouvernement fédéral et le gouvernement de Québec. Cela a donné que des gens bien concrets, bien visibles, bien identifiables à Sorel, des hommes et des femmes ont perdu leurs jobs.

Vous venez faire de très grands discours et on se tue, du côté de l'Opposition, à vous dire: Vos histoires d'indépendance, de souveraineté et tout cela, voulez-vous, surtout en période de crise, de grâce, alors qu'il y a le nombre de chômeurs que l'on connaît, mettre cela entre parenthèses et pour le plus longtemps possible. Quand vous enlèverez les parenthèses, on espère qu'il n'y aura plus rien entre les parenthèses, ce sera encore beaucoup mieux de ne pas utiliser cette question pour essayer de nous faire croire que vous êtes intéressés aux questions économiques, alors que, par vos attitudes et vos comportements avec les autorités fédérales, même avec les autres provinces...

Je le dis, en entendant le ministre des Transports: Quand le Québec, sur un dossier qui concerne le gouvernement fédéral, n'obtient pas ce qu'il aurait dû normalement obtenir comme partenaire entier de l'ensemble fédéral canadien, dans le discours péquiste - bien des gens l'ont remarqué - on dirait qu'ils sont quasiment contents, parce que les stratèges péquistes prennent ce dossier... Prenons les F-18; moi, je suis convaincu que le Québec s'est fait avoir dans ce dossier, je ne crains pas de l'affirmer. Cependant, je ne commencerai pas à me réjouir de cela, pour le citer, pour imprimer cela, pour faire des beaux tableaux et oublier le reste. En même temps, que les F-18, le ministre des Transports a mentionné Bombardier. Je me dis: On n'a pas eu notre part au sujet des F-18, c'est bien dommage qu'on ne l'ait pas eue. L'espèce de politisation et de chamaillage entre les ministres, le jeu de cachette y a probablement été pour quelque chose. Par exemple, quand on parle de Bombardier, je n'ai pas d'hésitation à dire que, si Bombardier a eu le contrat à New York, c'est grâce à un organisme fédéral. On a eu notre part.

J'insiste: Les Québécois ne veulent pas de discours péquistes. Vous êtes au gouvernement du Québec. Quand vous parlez comme ministre, vous ne vous adressez pas à des militants du Parti québécois. On exige la vérité; on exige l'ensemble du bilan pour que les Québécois puissent se faire une idée de l'endroit où va réellement le Québec. Depuis sept ans, on n'a jamais eu cela.

Ceci est grave, quand c'est dans le message inaugural du premier ministre, avec son engagement sur l'indépendance pour la prochaine élection. Maintenant, les Québécois doivent se rendre compte que le Québec affronte, comme d'autres sociétés et encore plus difficilement, à certains égards, une crise économique, une crise financière et une crise sociale très grave et qu'on doit tout mobiliser de notre côté pour essayer de se sortir de cela. Pendant ce temps, je ne sais pas par quelle irresponsabilité, par quelle inconscience, le premier ministre du Québec vient de nous placer exactement dans la même situation où on s'est trouvé de 1976 à 1978 ou 1980, jusqu'au moment où le référendum a eu lieu. Il vient de placer l'ensemble des décideurs économiques dans une position d'attente face à l'avenir constitutionnel du Québec dans la mesure où, en 1984, 1985 ou 1986 - espérons que ce sera le plus tôt possible - il y aura une

élection qui portera, dit-il, sur l'indépendance.

Comme par hasard, je ne sais pas ce qui s'est passé dans l'esprit du premier ministre, il est revenu au congrès péquiste qui avait dit que la thèse du Parti québécois, c'était l'indépendance; il est revenu à ce congrès péquiste qui l'avait désavoué parce qu'il n'avait pas parlé de l'association. Je ne sais pas si les gens l'ont remarqué dans le discours du premier ministre, je ne sais pas où l'histoire de l'association est rendue, mais, en tout cas, c'est indépendance.

Ce qui compte pour les Québécois, pour ceux-là, me semble-t-il, qui ont notre avenir à coeur, c'est de permettre et d'assurer qu'au cours des prochains mois et des prochaines années, le Québec se sorte lui aussi, de la crise. Il va pouvoir s'en sortir. Mais, bon sang! quelle irresponsabilité de la part du premier ministre d'aller encore créer lui-même, artificiellement, un facteur d'instabilité, un facteur d'insécurité et un facteur d'incertitude quant à l'avenir du Québec!

Je vois le député de Bellechasse manifester son scepticisme. Le dossier de Bell, qui est à Bromont et ailleurs, le Québec essaie de l'obtenir, mais essayez de voir si ce facteur ne jouera pas sur le plan de l'implantation industrielle. Essayez de voir si cette dimension ne jouera pas. Il me semble qu'il y a tellement eu de cas.

Quand vous parlez aux hommes d'affaires, à ceux qui prennent les décisions dans le domaine économique, tout le monde le dit: Dans le domaine économique, dans le domaine de l'implantation, nous ne sommes pas fermés au Québec; nous sommes un territoire en position de concurrence avec d'autres territoires, que ce soit à l'échelle canadienne ou à l'échelle nord-américaine. On a des avantages stratégiques au niveau de la main-d'oeuvre, au niveau des ressources, au niveau des moyens de communication, mais d'autres régions en offrent et c'est un des facteurs qui peuvent décider des choses.

Face à cela, M. le Président, je pense que ce que mes collègues de l'Opposition essaient de dire dans le cadre de ce débat, c'est ceci. Face à la gravité des crises économiques, politiques, sociales qui frappent les Québécois, avec un gouvernement qui a déjà 7 ans d'âge et probablement 77 ans de durée et de vieillissement, un gouvernement usé qui commence à donner des signes de fatigue évidents - la population l'a constaté puisqu'il n'y a que 18% ou 19% qui font confiance à ces gens-là - un gouvernement dévalué par tout ce qui est en train de se passer à l'intérieur et tout ce qu'on constate et qu'on apprend de son attitude, un gouvernement qui se comporte en propriétaire - on dirait que le gouvernement est propriétaire du Québec, qu'il est propriétaire du gouvernement; il en abuse, on voit tous les abus qui sont dénoncés actuellement - un gouvernement non crédible, qui a perdu sa crédibilité à l'échelle du Canada, à l'échelle des milieux économiques, comment voulez-vous que le Québec puisse traverser cette crise, essayer de retrouver des défis nouveaux? Je pense que la conclusion est bien claire: je pense que ce gouvernement a fait son temps, a fait plus que son temps, et qu'il est grand temps qu'il tire lui-même les conséquences, s'il a véritablement à coeur les intérêts du Québec.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît!

M. le leader du gouvernement.

M. Bertrand: M. le Président, avant de faire motion pour ajourner le débat, encore une fois, je voudrais faire remarquer que les députés ne sont pas toujours assis à leur siège. Vous remarquerez que Mme la députée de Chomedey, probablement en préparation de sa campagne électorale à la chefferie du Parti libéral, s'est installée derrière le député de Jean-Talon. Je ne crois pas que le discours du député de Jean-Talon ait suscité beaucoup d'enthousiasme autour de sa candidature, si c'est cela qu'elle voulait encourager.

Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît!

M. Bertrand: Ceci étant dit, M. le Président, je demande l'ajournement du débat.

Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît!

Mme Bacon: M. le Président, je voudrais simplement...

Le Vice-Président (M. Rancourt): Mme la députée de Chomedey.

Mme Bacon: ...faire remarquer au député de Vanier que j'ai suivi son exemple.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Est-ce que cette motion d'ajournement des débats est adoptée?

M. le leader.

M. Bertrand: Motion d'ajournement à demain après-midi, 14 heures.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Nos travaux sont ajournés à demain, 14 heures.

(Fin de la séance à 18 h 01)

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