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(Dix heures deux minutes)
Le Vice-Président (M. Rancourt): À l'ordre, s'il
vous plaît!
Un moment de recueillement.
Veuillez prendre place.
M. le leader du gouvernement.
M. Bertrand: M. le Président, comme je vous l'avais
demandé hier, je voudrais non pas céder mon droit de parole
puisque je demandais l'ajournement du débat à titre de leader
parlementaire du gouvernement, mais vous indiquer que c'est notre jeune et
brillant collègue, le député de Bourassa qui, ce matin,
ouvrira la reprise du débat sur le message inaugural.
Reprise du débat sur le message inaugural et
les motions de censure
Le Vice-Président (M. Rancourt): Reprise du débat
sur le message inaugural et sur les motions de censure du député
du comté de Bonaventure et du député du comté de
Gatineau.
La parole est au député de Bourassa.
M. Patrice Laplante
M. Laplante: Merci, M. le Président. Depuis le
début de cette session j'ai entendu beaucoup trop d'intervenants nous
dire que tout va mal, que l'économie est au plus bas, que nous
frôlons le gouffre. Loin de moi l'idée de soutenir que tout est
pour le mieux, ce serait de l'inconscience. Il me semble toutefois qu'un
langage aussi alarmiste n'est plus et qu'il n'a jamais été
justifié. Je pense même qu'il cause plus de problèmes qu'il
ne contribue à en régler car maintenant qu'une reprise de
l'économie est enfin prévisible, un tel langage risque encore de
la retarder.
En effet, en faisant preuve d'un pessimisme exagéré
à ce moment-ci, le risque est grand de casser cette confiance toute
neuve et par conséquent fragile, qui inciterait les investisseurs, qu'il
s'agisse d'individus ou d'entreprises, à venir injecter dans
l'économie les fonds nouveaux dont elle a le plus urgent besoin.
Qu'on ne se méprenne pas sur mes propos, M. le Président,
ils ne sont pas le fruit d'un optimisme béat. Je dis simplement que nous
avons enfin des raisons tangibles de reprendre confiance en notre avenir.
D'après le Conference Board, la reprise est enfin là. On
m'objectera peut-être que les prévisions de cet organisme
s'appuient sur l'ensemble de l'économie canadienne et non seulement sur
celle du Québec.
À cela, je réponds que, depuis le temps qu'on nous
répète sur tous les tons que le Québec fait encore partie
du Canada, pour nous empêcher d'adopter des politiques qui nous soient
propres dans certains domaines d'activité, je ne vois pas ce qui
empêcherait le Québec de participer à cette reprise qui
s'amorce au Canada. Bien sûr, ce n'est là qu'une
considération théorique. Mais ma certitude que le plus difficile
de la crise est passé au Québec comme ailleurs se fonde sur
d'autres éléments beaucoup plus concrets.
Permettez-moi, M. le Président, de faire part à cette
Assemblée d'une expérience en cours depuis près d'un an
dans la circonscription que je représente ici. Pour bien situer le
contexte où cette expérience a pris naissance, je
préciserai que, dans la circonscription de Bourassa, l'on retrouve une
très forte concentration de PME. C'est donc dire qu'en mai 1982, la
crise économique se faisait sentir avec une plus grande acuité.
J'ai alors engagé à mon bureau de comté une personne dont
l'unique tâche serait de visiter ces entreprises, de les mettre au
courant des différents programmes existants et de voir avec elles
quelles seraient les meilleures avenues à explorer.
Je partais du principe qu'il était inadmissible que des
entreprises en arrivent à une fermeture alors que le coup de pouce
nécessaire à leur survie était là à
portée de leur main. Je puis dire que lorsque les visites industrielles
ont commencé, en mai dernier, les responsables d'entreprises ne savaient
plus où donner de la tête. C'était pour eux le grand trou
noir, mais ils ignoraient s'ils réussiraient à en sortir. Pris
entre des taux d'intérêt démentiels, des stocks qui
s'accumulaient faute d'acheteurs, ils se retrouvaient avec un problème
de financement sur les bras auquel il semblait difficile d'apporter une
solution. Dans ces conditions, il est bien évident qu'il n'était
pas question d'expansion.
Le 1er novembre dernier, à mon instigation, 300 d'entre eux
participaient à un colloque d'une journée dont le thème
était l'avenir de la PME au Québec. Ce colloque
représentait pour eux l'occasion de rencontrer plusieurs titulaires de
ministères à vocation économique ainsi qu'un expert en
gestion et en économie. Ce colloque a coïncidé avec les
premiers indices véritables d'une reprise de l'économie
américaine de sorte qu'il m'est difficile d'en mesurer l'effet exact sur
le moral des dirigeants et des dirigeantes d'entreprise présents. Il
n'en
demeure pas moins que ce jour-là on pouvait sentir, pour la
première fois depuis longtemps, que le vent était sur le point de
tourner. Les propos étaient moins défaitistes, l'espoir
renaissait.
Depuis, moi-même ou mon secrétaire avons continué
à visiter les industries et je puis vous assurer que la tendance que
j'avais pressentie le 1er novembre se confirme de plus en plus. En effet,
surtout depuis le mois de janvier, les responsables des entreprises que nous
visitons recommencent à nous parler de projets d'expansion. Tous
manifestent une volonté ferme de reprendre le terrain que la
récession leur a fait perdre. Il y a encore mieux. Environ 40% des
entreprises visitées depuis janvier ont ressorti les plans d'expansion
qu'elles avaient il y a deux ans et recommencent enfin à envisager leur
réalisation dans un avenir pas trop lointain.
Par ce colloque, près de 250 nouveaux emplois ont
été créés depuis le 1er novembre dans le
comté de Bourassa. Aujourd'hui même, au moment où je vous
parle, j'ai en main un plan pour une nouvelle industrie, pour l'expansion d'une
industrie qui a déjà près de 120 employés et qui
portera ce nombre à près de 600. C'est un plan que je dois
présenter au ministre de l'Industrie et du Commerce aujourd'hui. C'est
l'effort que nous avons pu faire tous ensemble dans le comté de Bourassa
afin de soutenir notre PME.
De ce contact aussi quotidien avec les entreprises de la circonscription
de Bourassa, j'ai la conviction que nos gens d'affaires ne se sont pas
laissé abattre par les difficultés rencontrées depuis deux
ans. Si c'est vrai chez moi et partout ailleurs au Canada et aux
États-Unis, je ne vois pas pourquoi ce ne serait pas la même chose
au Québec. Voilà pourquoi j'aimerais qu'on cesse les critiques
destructives, à grand renfort de chiffres plus effrayants et
démoralisants les uns que les autres. (10 h 10)
Pour en revenir à la circonscription de Bourassa, il n'y a pas
que l'entreprise privée qui ait repris ses investissements, le
gouvernement du Québec a aussi fait sa part. Des travaux de
réaménagement et de construction de l'ordre de 8 500 000 $ sont
présentement en cours à l'hôpital Fleury et à
Hydro-Québec. Hydro-Québec a récemment entrepris la
construction d'un évacuateur de crue de sa centrale de
Rivière-des-Prairies, un projet qui, à lui seul,
représente près de 78 000 000 $. Ces deux projets seulement,
ensemble, représentent pour le comté de Bourassa, près de
600 emplois nouveaux. Un peu partout dans le Québec, des investissements
semblables sont prévus et contribueront à affermir la reprise et
à réduire le taux de chômage.
Depuis un an, ce gouvernement a réussi à maintenir le taux
de chômage dans des limites, non pas raisonnables, mais à tout le
moins comparables à ce qui existait dans les autres provinces
canadiennes. Il a été le premier, il y a un an, à mettre
sur pied diverses mesures d'urgence pour lutter contre un chômage qui
prenait des proportions épidémiques dans tout le Québec.
Cet effort sans précédent pour créer des emplois,
fussent-ils temporaires, il l'a consenti seul. En effet, ce n'est qu'à
la toute fin de l'année 1982 que le gouvernement fédéral
s'est enfin réveillé à la réalité du
chômage. Si seulement il s'était contenté durant toute
cette période de ne pas participer à cette lutte au
chômage, les efforts du gouvernement du Québec auraient sans doute
réussi à réduire le taux du chômage au lieu de
simplement l'empêcher de grimper vers de nouveaux sommets.
Malheureusement, M. le Président, les exemples ne manquent pas pour
démontrer que les politiques fédérales, loin d'aider
à la création d'emplois, y ont carrément nui à
cette époque.
Permettez-moi de citer quelques-uns de ces exemples où l'incurie
fédérale a empêché la création d'emplois au
Québec quand elle n'a pas cessé de causer directement la perte de
nombreux autres et ce, trop souvent, dans des secteurs où l'avenir se
révélait prometteur. L'exemple qui nous semble le plus
évident est celui du F-18. Tout le monde sait maintenant que le
Québec ne bénéficiera pas ou qu'il ne
bénéficiera que d'une faible partie des retombées promises
lors de l'octroi de ce contrat. On n'insistera jamais assez sur le fait que la
décision fédérale d'acheter des avions chasseurs F-18 met
en péril tout le développement de l'aéronautique au
Québec. Déjà cette industrie, qui est la plus importante
de la région métropolitaine, a perdu en quelques mois
au-delà de 6000 emplois.
L'aéronautique n'est malheureusement pas le seul secteur
d'activité économique où la politique
fédérale est néfaste au Québec.
Un autre secteur de pointe, celui de la recherche pharmaceutique,
connaît de grandes difficultés reliées cette fois aux
politiques fédérales concernant les brevets. Comme ces politiques
désavantagent les entreprises qui investissent dans la recherche et que
80% des laboratoires de recherche canadiens sont situés au
Québec, il est bien évident que nous serons les plus
touchés. La fermeture imminente des laboratoires à Ayerst est une
conséquence directe de ces orientations politiques qui mettent en
péril aujourd'hui, dans la région de Montréal, près
de 7000 emplois reliés à l'industrie de la recherche
pharmaceutique.
Un autre exemple qui me laisse pantois. Il y a quelque temps la ville de
Montréal manifestait le désir de créer le Centre
international biotechnologique de l'ONUDI. Tous les intervenants
montréalais appuyaient
ce projet. Le gouvernement du Québec avait même
annoncé sa participation financière. Peu après, d'autres
villes canadiennes faisaient part de leur intérêt face à ce
projet. Faisant alors preuve d'un rare courage politique, le gouvernement
fédéral se retirait tout simplement du dossier, évitant
ainsi d'avoir à soutenir la candidature de Montréal ou de
d'autres villes canadiennes devant l'organisme international concerné.
De tels exemples ne peuvent que confirmer ce que le Parti
québécois affirme depuis des années. Le Québec n'a
pas sa place dans la fédération canadienne. Ses ressources y sont
gaspillées et il y perd ses meilleures chances d'épanouissement.
Avons-nous les moyens de subventionner les agriculteurs de l'Ouest canadien au
détriment de notre propre industrie agro-alimentaire? Avons-nous les
moyens de contribuer au développement de l'industrie aéronautique
en Ontario, alors que nos propres entreprises dans ce domaine tirent de l'aile?
Pouvons-nous nous permettre l'établissement d'une nouvelle ligne Borden
qui viendrait asphyxier tout un secteur de notre économie et
entraînerait un autre désastre comme celui que nous vivons
actuellement dans l'industrie pétrochimique? Je ne le pense pas, M. le
Président. Nous n'en avons pas les moyens. Nous ne pouvons assumer 8 000
000 000 $ du déficit canadien alors que cette somme a été
bien souvent utilisée à l'encontre de nos intérêts.
Nous n'avons plus de temps à perdre en pourparlers stériles comme
ceux que nous avons connus au printemps dernier, alors que nous tentions
d'intéresser Ottawa au sort de ceux qui, de plus en plus nombreux,
devaient compter sur l'assurance-chômage ou sur l'aide sociale pour
survivre. Nous ne pouvons plus nous permettre qu'une politique
financière aberrante vienne jeter par terre une PME pourtant florissante
de 1976 à 1980.
Je terminerai, M. le Président, en précisant que si le
Québec a réussi à maintenir une certaine activité
économique au cours des deux dernières années,
malgré les bâtons dans les roues que représentent les
politiques fédérales en cette matière, il ne fait pour moi
aucun doute qu'il y serait arrivé beaucoup plus facilement, avec un
meilleur résultat, s'il avait eu les pleins pouvoirs pour décider
des meilleurs moyens à prendre pour faire face aux situations, donc,
s'il avait été indépendant.
Sur ces considérations, je pose la même question que M.
Alfred Rouleau a posée tout dernièrement d'une station de
télévision. Il l'a posée directement à
l'Opposition. Pour lui, le parti au pouvoir, le gouvernement actuel a fait des
efforts louables, honnêtes pour traverser cette crise. Il a posé
aussi une question à l'Opposition à laquelle elle n'a pas
répondu, hier non plus. J'espère qu'elle y répondra au
cours de la semaine.
Vous, de l'Opposition, qui avez toujours une critique destructive, qui
n'avez rien de constructif dans tout ce que vous sortez à partir des
périodes de questions, vous essayez depuis deux ans de gratter sur
n'importe quoi à part l'économie du Québec. Tout s'est
révélé à venir jusqu'à aujourd'hui, des
ballons politiques. Où est l'intérêt de l'Opposition en
matière économique? Qu'est-ce que l'Opposition aurait fait dans
la situation que nous avons vécue depuis deux ans? Quelle solution
aurait-elle apportée au peuple québécois pour
résoudre les problèmes économiques du Québec? C'est
la question que M. Rouleau a posée. C'est la question aujourd'hui, en
terminant, que je pose à l'Opposition, savoir d'y aller d'une
manière constructive pour l'avenir de chacun des Québécois
qui sont ici. C'est à cela que la population s'attend, ce n'est pas au
fait de gratter dans des petits pseudo-scandales, à lancer des
"ballounes" comme on fait depuis deux ans à cette Assemblée
nationale. (10 h 20)
Aucune question constructive n'est sortie, à part les coupures de
journal. Lorsqu'une Opposition se laisse dire par la presse que celle-ci joue
maintenant le rôle de l'Opposition officielle au Québec, j'aurais
honte à leur place, avec 43 députés qui ne peuvent
même pas avoir un service de recherche et poser des questions
intelligentes pendant les périodes de questions; ce ne sont que des
coupures de presse. Le Parti québécois sera là encore pour
20 ans et, à la prochaine élection, l'indépendance sera
garantie avec des gens comme cela. Je vous remercie.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député d'Outremont.
M. Pierre-C. Fortier
M. Fortier: M. le Président, en ce début de
session, dans la tradition britannique, le discours inaugural est toujours
l'occasion de tracer des bilans, de voir où nous en sommes sur le plan
économique, sur le plan social et sur le plan politique et de tenter de
connaître du gouvernement quelles sont ses vraies intentions. Bien
sûr, dans la tradition des gouvernements britanniques, il y a une
formation politique qui a la majorité et c'est elle qui gouverne ou
c'est elle qui devrait gouverner.
Le député de Bourassa nous pose la question:
Qu'aurions-nous fait? C'est là une question hypothétique, mais si
l'on veut connaître notre marque de commerce, si l'on veut
connaître ce que nous avons fait dans le passé - nous l'avons dit
à plusieurs reprises - on n'a qu'à comparer le
développement économique du Québec de 1970 à 1976
et celui qui a prévalu depuis que le Parti québécois est
au pouvoir. On
s'apercevra - je ne veux pas revenir sur les statistiques - que la
proportion des travaux, des investissements, de la création d'emplois
qui s'est faite au Québec par rapport à l'ensemble du Canada a
toujours été une proportion qui se rapprochait du pourcentage de
la population du Québec par rapport à celle du Canada. Mais
malheureusement, depuis que le Parti québécois est au pouvoir,
ces statistiques diminuent, ce pourcentage du travail qui est
créé au Québec par rapport au travail qui est
créé dans les autres provinces canadiennes diminue
considérablement. C'est la raison pour laquelle nous nous trouvons dans
une situation si pénible maintenant.
Que ferons-nous lorsque nous serons au pouvoir, dans un an, dans six
mois, dans deux ans? Nous le dirons au moment de la campagne électorale.
Présentement, nous sommes, à l'intérieur de la commission
politique de notre parti, à compléter nos plans à ce sujet
et nous ferons connaître nos intentions lorsque viendra le temps de la
prochaine campagne électorale.
Comme je le disais il y a un instant, M. le Président, c'est le
gouvernement du Parti québécois qui est au pouvoir et c'est lui
qui, dans son discours inaugural, doit nous faire savoir ce qu'il pense de la
situation présente et qui doit tenter de tracer les orientations qui
permettent et au gouvernement et aux forces vives du Québec de nous
sortir du trou dans lequel nous sommes.
Malheureusement, le discours n'a pas fait sa marque et personne ne l'a
pris au sérieux. Je crois qu'on doit se demander pourquoi. Le premier
ministre, qui est un communicateur tout à fait exemplaire, un
communicateur au verbe magique qui, dans le passé, a soulevé la
population, pouvait cajoler les gens, pouvait les convaincre des meilleurs
lendemains, ce grand communicateur ne réussit plus autant qu'il
réussissait dans le passé et on s'aperçoit par les
sondages que sa popularité est en chute libre présentement.
Je crois qu'on doit se demander comment il se fait qu'un gouvernement
qui avait la cote d'amour de la population, qu'un premier ministre qui
réussissait à convaincre la population d'à peu près
n'importe quoi ne peut le faire maintenant. Si on lit attentivement le discours
inaugural, on s'aperçoit quand même, si on a un peu
d'expérience des discours inauguraux des autres années, qu'il s'y
trouve quelques idées, mais que la foi n'y est plus et que la population
n'est pas du tout pressée de suivre l'orientation que lui a
tracée le premier ministre du Québec.
Bien sûr, on retrouve trois parties dans ce discours inaugural. Le
premier ministre nous a parlé d'un État nouveau, d'un État
qui devrait être plus proche des citoyens. Il y a longtemps qu'on le dit.
On a parlé de la décentralisation de l'État. Il y a au
moins trois ou quatre ans que le gouvernement nous en parle. On nous parle de
concertation, c'est le nouveau mot à la mode pour tenter de trouver des
solutions soi-même lorsque le gouvernement n'en a pas lui-même. On
a parlé d'économie et d'emploi et on a parlé de changement
de société.
Si nous n'avions pas entendu ces mots auparavant, soit depuis quatre ou
cinq ans, dans des discours inauguraux précédents, si nous avions
entendu ce discours pour la première fois, je crois qu'il aurait eu
quelque crédibilité. Malheureusement, il y a beaucoup de
répétitions. Malheureusement, la force de communication du
premier ministre n'y est plus et, maintenant, il semble bien que le
gouvernement n'est plus à même de tracer l'orientation dont le
Québec a besoin pour nous sortir de l'impasse dans laquelle il nous a
mis.
Pourtant, la situation économique du Québec, le manque de
création d'emplois, le manque d'investissements, malgré les
efforts - comme le disait mon ami le député de Bourassa - du
secteur privé qui se débat à l'intérieur d'une
situation pénible... Nous connaissons tous, nous qui venons du secteur
privé, des amis, des parents et des gens qui oeuvrent à
l'intérieur de ce milieu et nous savons que plusieurs d'entre eux se
débattent pour se sortir de la crise malgré tout etmalgré les nombreux handicaps que le gouvernement a bâtis
autour de nous depuis qu'il est au pouvoir.
La situation présente commanderait d'avoir un gouvernement avec
une autorité morale exemplaire et un leadership implacable, capable
d'augmenter le dynamisme des agents économiques et capable d'augmenter
le dynamisme de toutes les forces de la société
québécoise.
Mais le verbe ne prend plus. Le communicateur exemplaire qu'était
le premier ministre ne prend plus. On doit se poser la question: Mais pourquoi?
Je vais tenter de répondre à cette question. Mais pourquoi
avons-nous maintenant un gouvernement qui ne prend plus, qui n'a plus de
crédibilité, qui n'a plus d'autorité morale et qui n'a
plus l'autorité qu'il faut pour mener les affaires du Québec?
Dans un premier temps, c'est un gouvernement qui, malheureusement, a
fait trop de promesses. Il s'agit de faire le tour du Québec, d'aller
dans de nombreuses régions pour s'en convaincre. Le député
de Bourassa a cité des notes de journalistes qui disent: Mais que font
les députés libéraux? Bien sûr, je vais vous le
dire. En fin de semaine, je suis allé en Gaspésie. Auparavant,
j'étais allé dans la région de Thetford-Mines et
auparavant sur la Côte-Nord. Chaque fois que nous allons dans des
régions éloignées, nous ne faisons pas les manchettes des
journaux de Montréal ou de Québec. Nous faisons les
manchettes des journaux régionaux. Je crois que cette
stratégie est beaucoup plus efficace qu'une stratégie qui
viserait a toujours faire les manchettes des journaux de Montréal
uniquement.
J'étais en Gaspésie, en fin de semaine dernière, et
il faut comprendre les plaintes et les sarcasmes de ces gens vis-à-vis
du gouvernement lorsqu'on sait que le chômage, selon les dernières
statistiques, touche 25% ou 26% de la population et surtout lorsque c'est une
des nombreuses régions où le gouvernement a fait d'innombrables
promesses. Le premier ministre lui-même, en 1977 ou en 1978, a promis que
Gaspé allait être le centre des pêcheries du Québec.
Ces gens-là attendent toujours la réalisation de cette promesse.
On a promis également que la route qui fait le tour de la
Gaspésie serait terminée dans les mois qui suivraient
l'élection. Ces gens-là attendent toujours. Il faut rencontrer
les gens de la Gaspésie pour les savoir déçus d'avoir
été trompés.
Que font les députés libéraux? Ils sont
allés également, comme je l'ai fait avec des collègues,
dans la région de Thetford-Mines et nous en avons fait un débat
ici il y a quelque quinze jours ou trois semaines. C'était pour rappeler
au gouvernement toutes les promesses qu'il avait faites, soit par le premier
ministre ou soit par l'adjoint parlementaire au ministre de l'Energie et des
Ressources, en ce qui a trait à la nationalisation de la
société Asbestos et en ce qui a trait à la création
d'emplois dans cette région. (11 h 30)
Qu'est-ce qu'on avait promis? On avait déclaré ceci:
à moins que la société Asbestos ne devienne une
société d'État, à moins que la
société Asbestos Corporation ne soit nationalisée, il y
aurait grand danger que les employés d'Asbestos Corporation perdent leur
emploi. On leur avait promis que si la société Asbestos
était nationalisée, tous les travailleurs, tous les mineurs
d'Asbestos Corporation garderaient leur emploi et ne seraient plus
obligés de suivre les diktats des multinationales, des méchantes
multinationales américaines. Qu'est-ce qui est arrivé, M. le
Président? La condition économique s'est
détériorée, mais le ministre de l'Énergie et des
Ressources lui-même l'a dit à plusieurs reprises, il connaissait
pertinemment la situation de l'industrie de l'amiante dans le monde au moment
où il a fait l'achat de la compagnie et, malgré tout, les
promesses ont été faites et n'ont pas été
respectées.
Dans la région de la Gaspésie, le ministre de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation n'ose plus s'y montrer
et je crois que, dans la région de Thetford-Mines, dans la région
de l'amiante, bien sûr, on ne parlera pas de l'adjoint parlementaire qui
a été sorti à deux reprises et je ne parlerai pas de la
situation qui fait que ce député ne peut plus se présenter
dans son comté. Même le ministre de l'Énergie et des
Ressources ne peut plus y aller. Il refuse même les convocations que lui
fait le Comité des mineurs de Thetford-Mines et d'Asbestos Corporation
alors qu'on le supplie et qu'on lui demande d'aller discuter avec eux de la
situation pénible dans laquelle ces gens se trouvent.
Des promesses ont été faites dans d'autres régions.
Le chef de votre formation en a fait une revue complète, mais je voulais
souligner les régions où je suis allé moi-même. Une
autre de ces régions est la Côte-Nord. Combien de promesses ont
été faites par le gouvernement sur la Côte-Nord? Combien de
fois le ministre responsable du Développement économique, avant
d'être ministre du Commerce extérieur, M. Landry, est-il
allé sur la Côte-Nord pour dire que l'OPDQ mettrait en branle de
nombreux programmes pour enfin suppléer à la perte d'emplois qui
dérivait de la situation du fer sur la Côte-Nord?
Lorsque nous avons siégé en commission parlementaire
à Schefferville, nous avons prouvé - mon collègue de
Mont-Royal en a fait état également en traitant de SIDBEC -que le
gouvernement a trop tardé à faire face à une situation
qui, dans le cas de SIDBEC, était connue depuis avant même les
dernières élections générales. Bien sûr,
lorsqu'on attend pour prendre des décisions qui s'imposent, on fait des
promesses, on retarde les décisions, on hésite et pendant ce
temps, la situation empire.
C'est donc la première raison pour laquelle le discours inaugural
du premier ministre et son verbe ne prennent plus dans la population. Ce
gouvernement a perdu sa crédibilité en faisant trop de promesses
dans toutes les régions du Québec, promesses qui n'ont pas
été tenues.
La deuxième raison est que ce gouvernement offre trop souvent des
solutions peu pratiques et qui ne collent pas à la
réalité. La population ne croit plus à ce gouvernement,
aux solutions apportées par un gouvernement qui tente d'orienter notre
développement économique. Je viens de faire état de la
nationalisation d'Asbestos Corporation. Voilà un investissement qui
n'était nullement nécessaire, nous l'avons dit à plusieurs
reprises. Voilà un investissement de quelque 175 000 000 $. Si on ne les
a pas déjà payés, il faudra bien qu'on les paie
éventuellement, même si l'entente avec General Dynamics nous
permet de reporter le paiement à plus tard. Voilà une dette que
nos enfants devront payer si ce gouvernement ne peut la payer à cause de
sa situation financière. Voilà une solution qui, pour la
région de l'amiante, n'en est pas une. La preuve a été
faite malgré nous et j'en suis bien malheureux.
Alors qu'il y a des problèmes présentement dans la
région de Montréal en particulier, dans un autre domaine, le
Parti québécois présente des solutions qui n'en sont pas,
des solutions économiques qui, éventuellement, commanderont des
investissements de plusieurs millions, si le gouvernement suit les propositions
de certains de ses députés et les résolutions qui ont
été adoptées par le dernier conseil du Parti
québécois. C'est tout le problème des raffineries de
pétrole de Montréal-Est. Voilà une situation qui
était connue depuis 1978 pour quiconque relit le livre blanc de M. Joron
qui, à la suite d'auditions multiples, avait proposé une
politique énergétique qui allait dans le sens de diminuer notre
dépendance du pétrole et de favoriser la
pénétration du gaz et de l'électricité et qu'alors
dans son livre blanc on disait en toutes lettres qu'il fallait diminuer la
proportion d'utilisation du pétrole de 70% à 40% en 1990. Alors,
on savait pertinemment, à ce moment, que ce marché irait en
décroissant et on savait pertinemment que la diminution d'utilisation du
pétrole, éventuellement, était pour condamner une, deux ou
trois raffineries de pétrole à fermer leurs portes. En plus de
cela il y a eu la taxe ascenseur. En plus de cela il y a eu les
économies d'énergie. En plus de cela il y a eu toute la campagne.
Mais il reste que cette situation était connue dès 1978 et je
crois qu'on doit blâmer ce gouvernement de n'avoir pas fait ce qu'il
aurait dû faire à ce moment-là. Cela aurait
été d'avertir les employés des raffineries de
pétrole que tôt ou tard ils devaient perdre leur emploi puisque la
politique du gouvernement était de favoriser d'autres formes
d'énergie.
Pendant ce temps, le ministre se vantait de la création d'emplois
due à la pénétration du gaz. On sait maintenant qu'il
aurait fallu mettre en balance la création d'emplois due à la
pénétration du gaz et soustraire de ce montant les pertes
d'emplois dues aux fermetures de raffineries qui devaient se faire tôt ou
tard. Mais la proposition du gouvernement du Parti québécois,
c'est bien simple, il faudrait nationaliser une raffinerie. En quoi cette
solution va-t-elle changer la conjoncture qui existe et qui va s'aggraver de
plus en plus, non seulement au Québec, mais également dans les
provinces maritimes, en Ontario? C'est une situation où, dans toutes les
provinces de l'Est du Canada, il y a une moins grande dépendance du
pétrole pour favoriser le gaz et l'électricité. C'est une
politique qui a été voulue par le gouvernement du Québec
et c'est une politique qui, je crois, est voulue par le gouvernement du
Canada.
On se propose de nationaliser ou d'acheter. J'espère que le
gouvernement n'ira pas dans cette direction parce que ceci nous mènerait
à investir des sommes dans la nationalisation ou dans l'achat d'une
raffinerie, dans la nationalisation ou dans l'achat d'un réseau de
distribution. La guerre des prix qui prévaut et un marché qui ira
encore en se rétrécissant dans les années à venir,
cela fera en sorte que cet investissement sera encore une fois un très
mauvais investissement de la même façon que le gouvernement a fait
dans le domaine de l'amiante. Cela ne créera aucun emploi
éventuellement et ne réglera aucunement le développement
économique du Québec pour ces régions et pour le
Québec en général.
Une troisième raison pour laquelle le discours inaugural n'a pas
été entendu et n'a plus aucune crédibilité, c'est
que le gouvernement lui-même a perdu sa crédibilité, a
perdu sa transparence. Combien de scandales depuis deux ans? Combien de
scandales qui font que des personnages importants du gouvernement doivent
donner leur démission, doivent subir des procès pour toutes
sortes de raisons? Comment expliquer que ces gens sont maintenus dans leurs
fonctions alors même que dans le passé leurs bévues
auraient commandé, au nom de la transparence du gouvernement, de mettre
ces gens de côté pour s'assurer que la moralité du
gouvernement soit préservée, de même que l'excellence
requise pour diriger la nation de façon à préserver la
crédibilité du gouvernement? Si le gouvernement se trouve dans la
situation où il est présentement, compte tenu de ses scandales,
je crois que dans une certaine mesure il l'a lui-même voulu.
Une quatrième raison pour laquelle le gouvernement n'a plus la
crédibilité nécessaire pour faire passer son discours
inaugural, c'est le fait que le gouvernement a mal géré ses
finances publiques. Bien sûr, il a fallu, à un moment
donné, augmenter les impôts et, comme mon collègue de
Vaudreuil-Soulanges l'a souligné, il a augmenté les impôts
de 1 200 000 000 $ au moment même, à l'automne 1981, où il
y avait une crise internationale. Cette ponction fiscale a donné un coup
très dur à l'économie du Québec et à fait en
sorte que les personnes morales et physiques se sont trouvées dans une
situation désastreuse pour faire face à la situation
économique qui prévalait à ce moment.
C'est donc dire, M. le Président, que le gouvernement, qui avait
mal géré ses finances publiques, a pris une mauvaise
décision alors que la crise commençait. Il devait, j'imagine sous
les pressions des gens de New York qui lui prêtaient de l'argent, prendre
une décision qui, selon toute évidence, n'allait pas dans le sens
du développement économique ou du moins dans le sens d'aider les
agents économiques à préserver les emplois du
Québec. Parmi ces décisions et encore là, en faisant le
tour du
Québec on s'en aperçoit, celle qui a fait le plus de mal
aux régions du Québec, c'est la taxe ascenseur sur l'essence.
M. le Président, nous l'avons dit et peut-être qu'à
ce moment-là, nous n'avions pas prévu tous les maux que cette
taxe causerait. Il faut bien s'en rendre compte et c'est un vrai scandale.
Lorsqu'on fait le tour du Québec, lorsqu'on va en Gaspésie,
lorsqu'on va dans la région de l'amiante, lorsqu'on va sur la
Côte-Nord, on s'aperçoit que cette taxe a un. impact
économique négatif considérable. Pourquoi? On a
parlé assez souvent du fait qu'il s'agit là d'une taxe
régressive, c'est-à-dire d'une taxe qui touchait la poche des
gens ayant des petits salaires, des petits revenus autant que la poche de ceux
qui avaient des revenus plus élevés. Mais si ceci est vrai de
ceux qui ont de petits salaires, il reste qu'encore plus important, cette taxe
a des effets négatifs considérables sur le développement
économique.
Lorsque j'étais dans la région de l'amiante, en
particulier, j'avais consulté et j'avais parlé à des
agents économiques qui me disaient que la plus grande difficulté
pour eux de créer de nouveaux emplois et de partir de nouvelles
entreprises dans la région de Thetford-Mines en particulier et de
Black-Lake, c'était que, lorsqu'ils essayaient de produire de nouveaux
produits et de concurrencer des industries qui étaient d'autres
régions, il fallait ajouter au coût de production même de
certains produits, qu'il fallait qu'ils ajoutent à ces coûts des
coûts de transport pour vendre leurs produits dans les grands centres,
c'est-à-dire dans la région de Québec et de
Montréal. C'est donc dire, M. le Président, que non seulement les
gens qui sont dans les régions doivent payer individuellement des taxes
sur l'essence qui sont plus élevées, mais que ceci devient un
handicap considérable pour ceux qui tentent de partir de nouvelles
entreprises et pour ceux qui tentent de créer de l'emploi dans des
régions éloignées. Il s'agit encore là de voir les
gens de la Gaspésie, les gens de la Côte-Nord et même du
Lac-Saint-Jean, de toutes les régions éloignées, pour
qu'ils nous disent jusqu'à quel point cette taxe ascenseur a
été un handicap considérable pour le développement
économique de leur région.
Mon collègue de Vaudreuil-Soulanges a demandé
récemment au ministre des Finances de couper ces taxes, de faire en
sorte qu'elles ne s'appliquent plus à l'avenir et nous n'avons obtenu
que quelques sarcasmes de la part du ministre des Finances, quelques sarcasmes
qui en disent long sur la compréhension du gouvernement de la situation
économique des régions éloignées.
M. le Président, je crois qu'une autre raison pour laquelle le
discours inaugural ne prend pas, c'est le fait que ce gouvernement a
tripoté les sociétés d'État au lieu de
contrôler, en tant qu'actionnaire, leur rendement et de faire en sorte
que les actions de ces sociétés d'État aillent dans le
sens du développement économique du Québec.
Sans vouloir entrer dans le débat du "sacrage" de la Baie-James,
comme on l'appelle, et mes collègues se chargeront d'étudier les
tenants et les aboutissants de ce problème en commission parlementaire,
il reste tout de même qu'il faudrait souligner que, depuis que le Parti
québécois est au pouvoir, et je ne crois pas que cela ait
été souligné jusqu'à maintenant, les tarifs
d'électricité au Québec deviennent de moins en moins
concurrentiels par rapport à ceux de l'Ontario. J'ai obtenu ici des
chiffres qu'on ne pourra pas nier puisqu'ils viennent d'Hydro-Québec
même. Ils indiquent qu'en janvier 1976, la différence - je parle
bien sûr du tarif électrique pour la grande puissance,
c'est-à-dire pour la grande industrie - entre le tarif ou le prix que
devait payer la grande entreprise pour son énergie en Ontario par
rapport au Québec était de 44%, alors qu'elle était de 72%
en 1977. Cette différence s'est amenuisée maintenant pour se
retrouver à 18% en 1982 et à 19% en 1983. Ce calcul a
été fait uniquement sur la base d'une consommation statutaire,
disons, de 30 000 000 de kilowattheures par année.
C'est donc dire qu'alors qu'il y avait une différence de 50%
à 70% quand nous étions au pouvoir, voilà maintenant que
cette différence est rendue seulement à 18% pour la grande
entreprise entre le Québec et l'Ontario. C'est donc dire que cette force
que nous avions, qui était de favoriser la venue de grandes entreprises,
était beaucoup plus considérable il y a quelque cinq ou six
années.
Un deuxième calcul a été fait non pas sur une
consommation statutaire de 30 000 000 de kilowattheures par année, mais
en un premier temps en passant dans l'ordinateur la consommation
d'énergie faite par la grande entreprise en utilisant les tarifs
d'Hydro-Québec, et en un deuxième temps, en mettant en
mémoire la tarification d'Hydro-Ontario et en essayant de savoir combien
paieraient les entreprises du Québec si elles étaient en Ontario.
On arrive à une différence qui est beaucoup plus basse. On arrive
à un écart de l'ordre 12,5% en moyenne.
Ceci varie pour différents types d'entreprises, mais ceci varie
entre 14% et 6% ou 7%. On comprend mieux, lorsqu'on voit ces chiffres, les
raisons qui poussent maintenant le gouvernement à accorder des tarifs
spéciaux à certaines grandes entreprises pour qu'elles viennent
au Québec, puisque la différence dans la tarification n'est
nullement comparable à ce qu'elle était dans le passé.
Qu'a fait le gouvernement? A-t-il réagi à ces
données? Le gouvernement les connaît-il lui-même? Je ne le
crois pas, puisque dernièrement, lorsque j'étais en commission
parlementaire pour entendre les mémoires des intervenants pour discuter
de la politique énergétique, le ministre de l'Énergie
semblait tout surpris d'entendre ces chiffres. Il était tout à
fait surpris de constater que la différence des coûts
énergétiques entre le Québec et l'Ontario allait en
s'amenuisant, au point même qu'elle se situait maintenant au niveau de
12% ou 13%.
La question qui se pose est la suivante: Comment se fait-il que le
gouvernement ne connaisse pas ces chiffres? Comment se fait-il que le
gouvernement ne suive pas la position énergétique du
Québec par rapport à l'Ontario? Comment se fait-il que le
gouvernement, au lieu de s'ingérer dans les affaires
d'Hydro-Québec, ne suive pas les statistiques et les données
énergétiques du Québec pour s'assurer que
l'électricité soit réellement un levier de
développement économique au Québec?
C'est donc dire qu'au lieu de tripoter les sociétés
d'État, le gouvernement devrait plutôt suivre les données
économiques de ces mêmes sociétés, suivre leur
rendement et suivre surtout leurs décisions et tenter de les influencer
lorsque nous sommes en perte de vitesse par rapport à d'autres
provinces?
Finalement, je crois qu'une sixième raison pour laquelle le
discours inaugural a eu peu de crédibilité dans le public, c'est
qu'alors même que ce gouvernement nous proposait toutes sortes de
solutions depuis six ans pour régler tel et tel problème,
maintenant il constate avec nous que les solutions proposées n'ont
donné aucun résultat valable. Maintenant, on dit: Ces solutions
que nous avions suggérées n'ont pas donné de bons
résultats; la nationalisation de l'amiante n'a pas donné de bons
résultats; Pétrobec ne donnera pas de bons résultats. Mais
maintenant, nous avons la solution totale, la solution finale. Cette solution,
bien sûr, c'est l'indépendance du Québec.
M. le Président, j'aimerais bien que quelques ministres du
gouvernement nous suivent dans les régions. J'entendais hier le ministre
du Commerce extérieur qui parlait de développement
économique. J'aimerais bien que ces gens viennent avec nous dans les
régions. Le député de Bourassa se demandait tout à
l'heure: Que font les députés libéraux? Je lui ai dit:
Nous allons dans les régions pour parler de développement
économique. Nous allons dans les régions pour comprendre leurs
problèmes, pour saisir la réalité économique des
régions et pour tenter de les comprendre davantage pour qu'on puisse ici
soulever les vrais problèmes et pour que nous puissions
éventuellement proposer lors de la prochaine campagne électorale
les solutions qui aideront ces gens à régler les problèmes
des régions, de leur développement économique,
problèmes qui aggravent, bien sûr, les problèmes
sociaux.
M. le Président, ce gouvernement a perdu sa
crédibilité par les fautes qu'il a lui-même commises. Il a
perdu sa crédibilité par les actions qu'il a lui-même
accomplies. Ce gouvernement a perdu sa crédibilité et maintenant
personne ne peut espérer attendre un leadersdhip quelconque de ce
gouvernement. Et tous et chacun, lorsque nous allons dans les régions,
nous disent: Pour l'amour de Dieu, quand allez-vous nous débarrasser de
ce gouvernement?
Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît, M.
le député de Châteauguay, M. le député de
Sainte-Marie s'est levé.
M. le député de Sainte-Marie. (10 h 50)
M. Bisaillon: M. le Président, c'était juste pour
vous informer qu'effectivement, ce serait à mon tour de prendre la
parole, mais comme j'ai discuté avec le député de
Châteauguay et que je sais qu'il doit quitter immédiatement pour
des obligations déjà prises, si vous me le permettez, je lui
céderai mon droit de parole en étant convaincu que cela ne
crée aucun précédent et que je ne perds pas de cette
façon le droit de parole que vous me reconnaîtrez
immédiatement après.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Je vous
reconnaîtrai, M. le député de Saint-Marie. Je donne la
parole, avec le consentement de...
M. Picotte: Un mot seulement, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Oui, M. le
député de Maskinongé.
M. Picotte: Je n'ai pas l'intention de demander que le
député de Châteauguay parte immédiatement, mais je
dois vous dire que nous voulons l'accommoder ce matin tout simplement. On ne
voudrait pas que cela crée de précédent pour l'avenir.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Avec consentement de part
et d'autre, M. le député de Châteauguay.
M. Roland Dussault
M. Dussault: Merci, M. le Président. Le 23 mars dernier,
selon le rituel prévu par notre régime parlementaire de type
britannique, le premier ministre du Québec faisait part à cette
Assemblée nationale de son message inaugural à l'occasion de
l'ouverture de la quatrième session de la 32e Législature. Ce
message inaugural, sobre et
moins substantiel que ceux qui l'ont précédé, se
devait de coller au contexte bien spécifique qui est celui de tous les
Québécois présentement sur le plan
socio-économique, et d'être relié au projet qui
caractérise le Parti québécois qui forme le gouvernement
et qui est le sien depuis le début de son existence, en 1968,
c'est-à-dire rendre le Québec souverain aussitôt que le
peuple québécois lui en aura donné la permission.
Le premier ministre du Québec nous a donc fourni une feuille de
route qui veut répondre le mieux possible aux réalités que
nous a imposées la crise économique, en même temps qu'il
réitérait, en expliquant pourquoi, l'intention gouvernementale
d'aborder la prochaine campagne électorale en proposant aux
Québécois et Québécoises de se prendre en main
définitivement en se donnant le moyen le plus approprié pour ce
faire, soit la souveraineté.
Comme il fallait s'y attendre, tout comme le veut aussi le même
rituel prévu par notre régime parlementaire de type britannique,
le chef de l'Opposition y est allé de sa critique dès le
lendemain et y est allé aussi de sa sempiternelle motion de blâme,
cette fameuse motion qui doit tomber dans cette Assemblée nationale
comme un pavé dans la marre qu'il y ait pertinence ou non.
Comme ce régime parlementaire veut que le gouvernement gouverne
et que l'Opposition s'oppose coûte que coûte, il a donc fallu se
faire une raison une fois de plus. C'est tellement vrai que c'est devenu un
rituel, un numéro à répétition, une cassette du
même genre auquel nous avait habitués le gouvernement
libéral qui nous a précédés, que la plupart d'entre
nous de l'aile ministérielle aurions pu faire une liste au
préalable des clichés qu'il allait nous servir sans grand risque
de nous tromper beaucoup.
M. Jacques Bouchard, chroniqueur de la Presse, décrit mieux que
je ne saurais le faire le type d'interventions auxquelles nous a
habitués le député de Bonaventure et leader de
l'Opposition, non seulement depuis qu'il joue au chef de parti, mais depuis que
j'ai l'honneur de participer aux travaux de cette noble Assemblée. M.
Jacques Bouchard écrivait le mardi 12 avril dernier: D'ailleurs les
interventions de M. Gérard D. Levesque en Chambre et en public se sont
révélées jusqu'à maintenant comme une
diarrhée de mots dans un désert d'idées, démontrant
ainsi que ce politicien n'a aucune vision d'un projet de
société.
Cet homme, plutôt sympathique sur le plan personnel, je dois
l'avouer, ne pourrait de toute façon faire mieux avec la meilleure
volonté du monde. Il se désame à essayer de diriger un
parti qui n'a rien à offrir aux Québécois et aux
Québécoises: pas de pensée articulée, pas de projet
de société, pas d'enthousiasme à servir aux
Québécois, rien que des intérêts à
sauvergarder. Il n'est pas étonnant que ce parti n'ait comme seule ligne
de conduite la recherche de scandales et qu'il se soit transformé depuis
plusieurs mois en soufflerie à ballons qu'il s'efforce d'étirer
le plus longtemps possible pour démontrer qu'il a de l'haleine
politique, même si ces ballons lui crèvent dans la face, chaque
fois qu'ils lui tiennent lieu de politique et d'orientation politique. Ce parti
d'Opposition trouverait sûrement un peu de sympathie auprès de la
population du Québec s'il se montrait capable d'un certain minimum de
reconnaissance des réalités actuelles.
Si l'Opposition était capable de reconnaître au moins que
la crise que nous avons traversée et qui commence à se
résorber, très lentement mais heureusement, n'avait pas ses
racines au Québec, que cette crise n'était pas un mal de nature
essentiellement québécoise, que cette crise a une portée
panaméricaine et occidentale, qu'elle a eu l'ampleur qu'on lui a connue
à cause des orientations profondes du gouvernement Reagan aux
États-Unis et, surtout, que le gouvernement d'Ottawa, sous le leadership
de M. Trudeau, a été on ne peut plus malhabile à trouver
les moyens de nous sortir de ce sacré bourbier qui a fait tellement de
victimes, principalement à cause des taux d'intérêt
élevés et provoqués par une politique monétariste
que tout le monde a dénoncée. Cette Opposition n'apprend pas de
ses erreurs et semble incapable de reconnaître qu'elle a fait fausse
route malgré les indications que lui fournissaient certains
observateurs.
Je me serais attendu, M. le Président, qu'elle en reconnaisse au
moins quelques-unes parmi les plus grossières. Par exemple, l'Opposition
a eu l'occasion, ces derniers jours, d'en corriger une de taille, celle qui
avait consisté, pendant des mois, à faire croire
délibérément aux Québécois que le
gouvernement du Parti québécois était responsable et
même coupable d'un certain exode des anglophones du Québec. C'est
une analyse de M. Charles Castonguay, professeur de mathématiques
à l'Université d'Ottawa, qui a donné à l'Opposition
cette occasion, dans un article paru le 8 avril dernier qu'il a
intitulé: "L'exode des anglophones depuis 1976: Un canular." Dans cet
article, M. Castonguay démontre que la période de 1976-1981 ne
diffère guère - pour employer les mots mêmes de l'auteur -
des périodes précédentes quant au nombre et à
l'importance relative des sortants de langue maternelle anglaise du
Québec.
Selon M. Castonguay, entre 1966 et 1971, 61,8% étaient anglais.
Entre 1971 et 1976, 64,6% étaient anglais et, entre 1976 et 1981, 64,8%
étaient anglais. Donc, 64,6% sous les libéraux et 64,8% sous le
Parti québécois.
M. Castonguay, à la lumière de ces chiffres, dit
textuellement: "L'accession du Parti québécois au pouvoir en 1976
n'a donc rien d'un point tournant à cet égard." On peut le
constater, M. le Président. Il ajoute ce qui suit: "À la
lumière de ces faits, l'ardeur et l'insistance que mettent certains
à emboucher la corne de l'exode, comme si d'importants départs
anglophones n'avaient débuté qu'avec l'élection du Parti
québécois, prennent l'allure d'un grossier canular visant
à culpabiliser le Québec francophone dans le but d'abord de faire
avorter le référendum de 1980 puis d'obtenir l'abandon de
certains éléments sur la loi 101 et plus
généralement d'affaiblir la volonté
d'autodétermination politique et culturelle de la collectivité
franco-québécoise."
Je pense que l'Opposition est incapable de le voir, mais c'est à
elle particulièrement que s'adressent ces propos de M. Castonguay. Dans
cet élan de générosité que je demande à
l'Opposition, qui la rendrait plus sympatique, elle pourrait en même
temps en profiter - d'ailleurs, cette chance inouïe risque de ne pas
revenir de sitôt - pour reconnaître le tort immense fait aux
Québécois par le gouvernement fédéral, sur le plan
économique plus spécifiquement.
Est-ce que l'Opposition ne passerait pas pour plus honnête
intellectuellement si elle reconnaissait que le fédéral a fait
perdre des centaines et des centaines d'emplois dans le secteur de la
chaussure, quand, pendant de longs mois, il a tardé à
rétablir les contingentements, alors que tout le monde le demandait, sur
l'entrée de chaussures de cuir venant de l'étranger?
Est-ce que l'Opposition ne paraîtrait pas plus soucieuse de
l'intérêt de tous les Québécois et de toutes les
Québécoises si elle reconnaissait que le gouvernement
fédéral a fait un tort immense à la Caisse de
dépôt et placement du Québec, qui a le mandat de faire
fructifier le mieux possible les fonds de retraite des Québécois,
en déposant, ce gouvernement fédéral, durant une nuit, un
projet de loi au Sénat, projet devant entrer en vigueur à la date
de son dépôt au Sénat, donc paralysant pendant des mois la
caisse de dépôt et visant insidieusement à réduire
le champ rentable d'investissement de notre caisse de dépôt, plus
spécifiquement dans le domaine des transports? Le gouvernement
fédéral condamnait ainsi les épargnes des
Québécois en ralentissant leur marche de fructification et elles
devaient même servir au développement des étrangers hors du
Québec, du Canada, au développement des autres. (11 heures)
Est-ce que l'Opposition ne paraîtrait pas plus convaincue de la
pertinence de développer l'économie québécoise par
les Québécois et pour les Québécois si elle
était capable d'admettre publiquement, à l'Assemblée
nationale, que le gouvernement fédéral a trompé sciemment
et effrontément les Québécois lors de la campagne
référendaire de mai 1980 quand il a fait croire, entre autres,
qu'au-delà de 50% des retombées du F-18 profiteraient au
Québec, étant donné que l'infrastructure industrielle en
aéronautique est largement concentrée au Québec, alors
qu'on sait tous maintenant que l'Ontario est allé chercher plus de 70%
des retombées globales possibles, le Québec devant se contenter
d'un maigre petit taux de 20%, le reste étant inévitablement
profitable aux Américains?
M. le Président, est-ce que l'Opposition ne gagnerait pas un peu
de crédibilité sur le plan économique, même dans ses
tournées au Québec, si elle était capable de
reconnaître que le gouvernement du Parti québécois
était carrément sur la bonne voie lorsqu'il a rendu publique sa
politique économique axée sur le virage technologique? Cette
Opposition n'a-t-elle pas qualifié cette politique de mirage
technologique, ce jeu de mots trop facile que même les plus responsables
de l'Opposition ont utilisé pour laisser croire que le gouvernement
faisait fausse route? N'est-ce pas cette même Opposition qui tentait
encore, il y a quelques heures, hier particulièrement, de se faire les
défenseurs de ce virage technologique en cherchant des puces au
gouvernement dans sa manière propre d'établir ses
modalités d'application? Est-ce que l'Opposition ne gagnerait pas un peu
plus de crédibilité sur le plan économique en
reconnaissant cela, M. le Président?
Est-ce que l'Opposition ne ferait pas preuve d'une meilleure
connaissance de la réalité structurelle de l'économie
québécoise et du type de problème qu'elle comporte si elle
reconnaissait que le gouvernement du Parti québécois a bien fait
d'axer son aide à l'entreprise en privilégiant principalement la
petite et moyenne entreprise et en changeant la loi constitutive de la
Société de développement industriel, de façon
à rendre cette société plus apte à aider
l'entreprise, plus apte à préparer l'avenir avec l'entreprise, en
l'aidant à se donner une meilleure structure financière, apte
à préparer l'avenir en l'aidant à améliorer sa
gestion, apte à préparer l'avenir en l'aidant à
s'articuler sur le plan de la recherche et du développement, apte
à préparer l'avenir en l'aidant à assurer une meilleure
mise en marché? En ce sens, M. le Président, l'Opposition devrait
saluer - qu'elle ait le courage de certaines opinions - les initiatives
heureuses que le gouvernement du Québec a prises sur le plan de la
sous-traitance, d'abord en subventionnant la mise en place d'un projet pilote
de bourses de sous-traitance, demandé par le sommet économique de
Montréal en février ou mars 1981, qui servira à mettre
rationnellement en
rapport les preneurs d'ordre et les donneurs d'ordre, selon le jargon de
ce domaine, en aidant, par la même occasion, la tenue du salon
général annuel de la sous-traitance organisé avec brio
chaque fois par la société pour le progrès de la rive sud
et qui aura lieu, cette année, à la fin de ce mois-ci; ensuite,
en parrainant le salon de la sous-traitance spécialisée dans le
domaine du transport et qui aura lieu au Palais des congrès en juin
prochain. Ce sont toutes des activités qui amèneront de l'eau au
moulin de la relance économique du Québec.
Est-ce que l'Opposition ne ferait pas, enfin, la preuve de sa
capacité de démarcation avec le grand frère
fédéral en admettant que le gouvernement fédéral a
fait preuve d'une mesquinerie sans précédent à
l'égard de l'économie québécoise, mesquinerie qui
n'a eu d'égal que sa politique de coupure de péréquation
et de transferts fiscaux au Québec, mesquinerie lorsque ce gouvernement
fédéral a refusé de participer au programme d'urgence
qu'avait préparé le ministre de l'Industrie, du Commerce et du
Tourisme avec ses collègues ministres responsables des questions
économiques, dans le but de sauver des dizaines d'entreprises
québécoises menacées par la crise économique et les
hauts taux d'intérêt, de même que les centaines d'emplois
qui allaient être sacrifiés en même temps. À vrai
dire, depuis 1976, l'Opposition ne s'est pas forcée pour être
critique et constructive; elle n'est jamais capable de reconnaître les
bons coups du gouvernement et jamais capable de faire des suggestions de poids
quant au contenu des lois et des politiques du gouvernement. Elle aura
bientôt l'occasion d'être positive.
En effet, en 1984, à l'été
précisément, des événements d'importance lui
donneront, à cette Opposition, l'occasion d'être positive et
constructive. En 1984, il y aura 450 ans qu'un Français de Saint-Malo,
Jacques Cartier, est venu de la Bretagne pour prendre possession d'un
territoire d'Amérique au nom du roi de France, territoire qu'on a
appelé à ce moment-là la Nouvelle-France, nom qui lui est
resté jusqu'à la conquête anglaise de 1760. Ce geste de
prise de possession a été le début de l'implantation ici,
en Amérique, de la francophonie, qui est restée vivante depuis ce
temps malgré les accidents de parcours que l'on connaît. Cette
implantation s'est faite principalement et successivement tout le long du
Saint-Laurent grâce aux valeureux colons français et à leur
famille qui ont remonté ce fleuve unique au monde jusqu'au territoire
qui est maintenant devenu les États-Unis d'Amérique.
À la suite de la conquête anglaise, cette Nouvelle-France
est devenue, à toutes fins utiles, le territoire québécois
actuel. Le Saint-Laurent est resté la principale voie d'accueil et de
développement du Québec à bien des points de vue.
Jusqu'à maintenant, peu d'événements et d'occasions
avaient permis de faire un point de mire de ce ruban de majesté qu'est
le Saint-Laurent, peu d'événements l'avaient mis en relief
à tel point qu'on songe à l'exploiter au maximum à des
fins touristiques. Les grands événements de caractère
international avaient lieu à Montréal - je pense aux Jeux
olympiques et à l'Exposition universelle - ce qui a permis de donner
à cette ville une renommée internationale.
Cette fois, le rassemblement, à Québec, de plusieurs
dizaines de grands voiliers, de même que ce point de départ que
sera Québec pour Transat, cette course, cette compétition pour
Formule 1 de la mer, qui a Saint-Malo pour destination ultime, ces deux
événements principalement donneront enfin à la ville de
Québec, la ville la plus authentique d'Amérique, ses lettres de
noblesse internationales et feront du Saint-Laurent, qui sera mis à
profit comme jamais depuis la venue de de Gaulle, un point de mire qu'on n'aura
pas le droit de ne pas exploiter sur le plan touristique.
Ce rappel de la venue ici de Jacques Cartier, il y a 450 ans, nous
amènera, dit-on, plus de 1 500 000 touristes et générera
des retombées de plus de 1 000 000 $, retombées qui pourraient
être profitables à tout un chapelet de villes
québécoises tout le long du Saint-Laurent si on avait dès
maintenant cette obsession d'exploiter l'existence du fleuve Saint-Laurent
à des fins touristiques. Nos intérêts propres exigent qu'on
se donne cet objectif.
Le fleuve Saint-Laurent est évocateur à plus d'un point de
vue, historique comme économique. Il pourrait être l'occasion
d'une prise de conscience autant de ce qu'il a été, eu
égard à l'implantation française en Amérique, que
de ce qu'il représente relativement à ses ressources, à sa
qualité environnementale et à son potentiel de
développement économique pour le Québec, les rives
immédiates du fleuve, mais aussi tout le Québec, le Québec
tout entier.
Le gouvernement du Québec entend bien ne pas rater cette occasion
en or. Ce ne serait pas la première fois que le gouvernement du
Québec, d'ailleurs, tablerait sur le Saint-Laurent dans le but d'obtenir
un impact économique positif. On se rappellera le leadership dont il a
fait preuve en juin 1982 en organisant à Québec, pendant trois
jours, un colloque sur le Saint-Laurent lequel a réuni plusieurs
personnalités de l'extérieur, de même que du Canada et du
Québec, ce qui a permis de conclure que les ports du Saint-Laurent, au
Québec, pourraient être davantage mis à profit si ceux qui
en ont la juridiction s'en préoccupaient davantage.
Oui, les événements de 1984 pourraient être beaucoup
plus que le rappel d'un événement historique, ils pourraient
être
principalement l'occasion d'une mise en valeur de Québec et du
fleuve Saint-Laurent. J'ose espérer que l'Opposition saura, cette fois,
démontrer un intérêt pour cette approche du gouvernement
québécois. (11 h 10)
On trouvera sûrement légitime que je m'en inquiète
quand on sait le sort que réserve habituellement l'Opposition des
libéraux à tout ce qui est objet de fierté et de recherche
de dignité de la part du présent gouvernement et de son aile
parlementaire. Sur la question nationale pour laquelle nulle autre question ne
peut être autant porteuse de fierté et de recherche de
dignité, l'Opposition est, comme elle est toujours, comme elle l'a
toujours été, désarmante, hargneuse, méprisante,
"rapetisseuse", mesquine, sans âme et sans mémoire. À
l'entendre, force nous est de conclure que, pour elle, la liberté d'un
peuple devrait être le tout dernier de ses soucis, que la liberté
est une denrée qui n'a de signification réelle que pour les
autres peuples et qu'en fin de compte, le Québec ne sera jamais grand
qu'à genoux et rapetissé.
Pour l'Opposition, la dépendance des Québécois
à l'égard de ses voisins du Canada a des vertus si grandes qu'il
vaudrait mieux ne rien changer à cela. Pour l'Opposition, il vaut mieux
être servi par les autres que par soi-même. C'est tellement plus
facile l'irresponsabilité. La crise qui commence à nous
lâcher devrait être l'occasion pour tout le monde de tirer des
conclusions, et l'Opposition ne devrait pas s'en exempter. C'est quand cela va
mal qu'il est possible d'évaluer le mieux les moyens dont on dispose,
car c'est à ce moment qu'il est possible de constater si ces moyens sont
aptes à nous aider quand cela va mieux, mais surtout quand cela va mal.
La crise ne nous a-t-elle pas permis de constater comme il est exact que les
Québécois ne disposent que de la moitié d'un coffre
à outils, la moitié de ses revenus fiscaux potentiels et la
moitié et moins des leviers et technigues économiques dont
dispose un État habituellement pour faire face à ses
responsabilités.
Une bonne part de l'argent que les contribuables québécois
mettent à la disposition des gouvernements pour les servir s'en va
à Ottawa qui les utilise pour desservir les intérêts des
Québécois. Pensons au F-18 dont le contrat s'est
développé au profit de l'Ontario. Pensons aux subventions du
gouvernement fédéral à de grosses entreprises de l'Ontario
alors qu'il refusait d'aider SIDBEC, une grosse entreprise du Québec.
Pensons à l'application du rapport Gilson que fait le gouvernement
fédéral au détriment de l'agro-alimentaire au
Québec. Pensons aux coupures très substantielles de la
péréquation au Québec et des transferts fiscaux pour
lesquels on ne fait jamais assez de lien avec la taxe sur l'essence. C'est une
question de milliards de dollars de coupures que nous a faites le gouvernement
fédéral qui nous a obligés à chercher des moyens
pour arriver à compenser.
Pendant ce temps, le gouvernement fédéral gaspille d'une
façon éhontée les fonds publics qui viennent entre autres
du Québec. J'en passe. Cette "anémisation" du Québec que
pratique le régime fédéral et ses gouvernements qui
soutiennent ce régime ne pourra pas durer encore très longtemps.
Surtout pas au moment où le Québec aura besoin de tous ses moyens
pour relever le défi d'après la crise, le défi de la
relance économique. Aussi ai-je reçu avec la plus grande
satisfaction les propos du premier ministre, M. Lévesque, relatifs
à la prochaine élection, relatifs à la
détermination du gouvernement du Québec, du Parti
québécois de faire de la question de la souveraineté du
Québec la question centrale de la prochaine élection. J'ai senti,
à ce moment, comme j'ai eu l'occasion à plusieurs reprises de le
sentir, avant et après le message inaugural, avec quel enthousiasme
débordant M. Lévesque, notre chef de parti, a le goût de
faire cette élection sur la souveraineté et de la gagner.
J'invite l'Opposition à développer, d'ici cette
élection sur la souveraineté, une nouvelle conscience nationale,
une conscience plus profonde de la camisole de force que constitue pour le
Québec ce régime fédéral étouffant et
surtout à prendre conscience des avantages que comporte le fait de
disposer de moyens de se prendre vraiment en main, ce que permet la
souveraineté et l'indépendance. Au fond, la meilleure preuve de
son intégrité sur le plan intellectuel comme sur le plan
démocratique, l'Opposition pourrait nous la donner avant que desmesures plus pressantes l'y forcent, l'Opposition pourrait nous la donner
en remettant au trésor public les 750 000 $ que le rapport Malouf
identifie comme ayant été reçus par le Parti
libéral à l'occasion des grandes constructions olympiques
à titre de dons à la caisse électorale. Avec les taux
élevés d'intérêt que nous avons connus depuis 1976,
c'est maintenant au moins 1 500 000 $ que ces 750 000 $ sont devenus avec les
intérêts composés, et c'est dans la caisse
électorale du Parti libéral. Cette somme contient le germe, je
dis bien le germe, d'un retour au patronage qu'a pratiqué le
gouvernement libéral qui a précédé le
présent gouvernement. Avec cette incapacité chronique du Parti
libéral de se renouveler, et la lutte au leadership de ce parti nous en
donne un exemple patent présentement, la tentation pourrait être
très grande d'y succomber, de succomber à cette invitation d'une
certaine reconnaissance qu'appelait inévitablement l'ampleur de ces
dons à la caisse électorale libérale au moment des
constructions olympiques.
Le Parti libéral du Québec comme le Parti
québécois sont présentement en campagne de financement.
Cette question de ces fonds olympiques est très d'actualité.
C'est à nouveau pour l'Opposition l'occasion d'y
réfléchir. Ce n'est qu'en remettant au trésor public 1 500
000 $ et en jouant un rôle beaucoup plus positif comme opposition que le
Parti libéral du Québec se qualifiera à nouveau comme un
candidat valable à la gouverne du Québec.
Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Sainte-Marie.
M. Guy Bisaillon
M. Bisaillon: M. le Président, c'est la première
occasion que j'ai, depuis que je siège en cette Chambre comme
député indépendant, d'intervenir sur un message inaugural.
Je voudrais que pour cette première, mon intervention ne soit pas
perçue comme étant une intervention dirigée contre ou pour
le gouvernement, contre ou pour l'Opposition. Je voudrais plutôt faire
cette intervention comme un parlementaire qui prend le message inaugural comme
étant ce qui lui est annoncé comme travail à venir et
porter un jugement sur ce à quoi le gouvernement nous convie dans les
mois qui viennent.
On conviendra avec moi, cela étant dit, qu'il n'y a pas beaucoup
de choses nouvelles dans le message inaugural. Il y a des choses
intéressantes, positives, il y en a un certain nombre que je peux juger
négatives mais pas grand chose de neuf. En effet, la majeure partie de
ce qui est annoncé dans le message inaugural c'est déjà
des projets qui étaient ou bien en cours ou bien qui ont
déjà fait l'objet d'études préliminaires. C'est
cependant habillé différemment.
Ce gouvernement, le premier ministre en tête, a gouverné
par sondages, par slogans. Là le premier ministre s'est
transformé en grand maître couturier et il nous a habillé
les choses de façon différente. Cela part sur un air de chanson,
un air de temps nouveau, un air printanier qui nous convie à un certain
nombre de changements. Il faudrait regarder, M. le Président, si
véritablement il s'agit de changements ou si le mot qu'on utilise ne
présente pas des ajustements plutôt que les véritables
implications d'une notion de changement.
Cela étant dit, un certain nombre d'éléments du
message inaugural qui feront l'objet des discussions dans ce Parlement sont
fort positifs, particulièrement ce que l'on nous annonce comme
législation éventuelle quant aux modifications à apporter
à la fonction publique, à son fonctionnement, à ses modes
de gestion. Le message inaugural à cet égard se lisait comme
suit: Une commission parlementaire spéciale instituée à
l'automne 1981 a clairement fait ressortir la nécessité de ce
type de transformation. (11 h 20)
M. le Président, la commission spéciale à laquelle
le premier ministre se référait, dont j'ai le rapport ici, qui
s'appelle Rapport de la commission Bisaillon... Probablement que le premier
ministre n'a pas identifié cette commission parlementaire, mais, en ne
le faisant pas, je trouve qu'il a raté une belle occasion de souligner
le travail d'un certain nombre de parlementaires, comme le député
de Jean-Talon, la députée de Chomedey, le député de
Papineau, le député de Roberval, le député de
Champlain, la députée de Dorion, qui ont mis beaucoup
d'énergie à présenter un rapport sérieux qui a fait
l'objet d'un débat à l'Assemblée nationale et qui a
même fait l'objet, on s'en souviendra, d'un vote unanime de
l'Assemblée nationale et d'un mandat unanime au gouvernement par
l'Assemblée nationale.
Donc, cette commission parlementaire à laquelle se
référait le premier ministre, c'était la commission que
j'ai présidée sur la fonction publique. Or, les changements qu'on
nous annonce à cet égard sont fort intéressants pour
autant qu'ils correspondront évidemment à l'analyse que la
commission avait pu faire à ce moment: diminution de la
réglementation, un plus grand partage des pouvoirs entre les
sous-ministres, les dirigeants d'organismes, le principe de la
responsabilisation des fonctionnaires, une loi du Vérificateur
général qui l'amènera à faire une
vérification intégrée, c'est-à-dire non seulement
à vérifier la quantité des gestes administratifs qui sont
posés, mais surtout la qualité de ces gestes. Autrement dit,
est-ce que les gestes administratifs qui ont été posés
correspondent aux politiques qui ont été mises de l'avant? Est-ce
que les gestes choisis par l'administration étaient les meilleurs et les
moins coûteux, alors qu'actuellement, on essaie plutôt de faire la
correspondance, le lien entre une politique et un moyen administratif
utilisé pour répondre à cette politique?
Il s'agit, en fait, par l'implantation de l'imputabilité, d'en
arriver à une plus grande efficacité de l'appareil public, mais
surtout à produire plus et mieux à un meilleur coût. Je
pense que c'est dans l'intérêt, non seulement de l'ensemble de
l'appareil public, mais aussi de l'ensemble des citoyens que cela puisse se
réaliser. On nous annonce aussi des efforts accrus au niveau de la
qualité des services devant être dispensés aux
citoyens.
M. le Président, voilà un certain nombre de projets
accompagnés d'une modification ou de modifications à la Loi
sur
la fonction publique qu'il faudra scruter minutieusement. Voilà
un certain nombre de mesures que le message inaugural nous annonce, qui sont
attendues depuis fort longtemps, qui sont essentielles à un meilleur
fonctionnement de notre appareil, à un meilleur rendement de l'appareil
public et à de meilleurs services aux citoyens, et des objectifs que
l'on ne peut qu'endosser au stade où on se trouve sans avoir
évidemment vu et analysé le contenu de ce qui nous sera
proposé.
J'écoutais le chef de l'Opposition proposer sur ce sujet une
large commission d'enquête, du type de la commission Parent ou de la
commission Castonguay. Le chef de l'Opposition proposait une large
enquête sur la fonction publique. Quant à moi, après toutes
les études qui ont été faites, toutes les discussions qui
ont eu cours, il me semble que ce serait non seulement une perte de temps, mais
probablement aussi une perte d'énergie et une perte financière
que de procéder ainsi.
Il serait cependant possible de s'accrocher à un
élément de la suggestion du chef de l'Opposition et d'encourager
le gouvernement à endosser cette suggestion. Ce serait plutôt de
mettre sur pied une espèce de groupe de travail provenant de la fonction
publique, mais accompagné de parlementaires, qui pourrait pointer du
doigt les éléments qui ne fonctionnent pas dans notre fonction
publique, les difficultés de gestion que l'on y voit, les redoublements.
Après avoir tant parlé du redoublement des services entre le
niveau fédéral et le niveau provincial, il me semble qu'il serait
peut-être temps de faire d'abord le ménage chez nous et de
régler une fois pour toutes ces nombreux redoublements que nous
connaissons dans notre propre appareil. Donc, une espèce de groupe de
travail qui, après avoir identifié les mauvais fonctionnements,
pourrait y apporter immédiatement les correctifs nécessaires.
Cela aurait l'avantage d'être souple, d'être efficace, d'être
rapide et surtout de déboucher rapidement sur des résultats
concrets.
Un autre élément positif que l'on retrouve dans le message
inaugural, c'est sûrement cet encouragement que l'on se propose de faire,
un encouragement gouvernemental à la population quant à
l'investissement. Je trouve cela très positif qu'on souligne, par
exemple, dans le message inaugural, les efforts qui ont été faits
par une centrale syndicale, la FTQ, pour ne pas la nommer, qui a mis sur pied
un projet de fonds de solidarité. Le message inaugural semble indiquer
qu'on pourrait aller dans le sens de projets de ce genre. Il m'a fait plaisir
de le retrouver dans le message inaugural, mais cela m'a fait sourire un peu,
surtout lorsque je me référais à une lettre que j'avais
fait parvenir au premier ministre le 6 décembre dernier, laquelle avait
fait l'objet d'articles dans les journaux le 7 décembre et avait fait
l'objet - on s'en souviendra peut-être - de questions que j'avais
moi-même adressées au premier ministre, qui m'avait passablement
ridiculisé. Ces articles se lisent comme suit: "Plutôt que des
coupures de salaires, Bisaillon suggère d'offrir des bons
d'investissement." Autrement dit: Prenons les sommes que nous devons à
nos employés et accordons-leur des bons d'investissement, de sorte que
cela génère une économie nouvelle. Le premier ministre
avait qualifié cela de trouvaille; il avait dit que c'était
louche et que cela arrivait surtout au dernier moment. Voilà que
maintenant dans le message inaugural on semble vouloir s'orienter vers cet
encouragement à la population quant à l'investissement
nécessaire dans nos entreprises québécoises.
Il y a évidemment plusieurs sujets qu'on pourrait relever dans le
message inaugural qui répondront sûrement à des besoins de
la population qu'on représente. Je pense, entre autres, aux
améliorations qu'on nous annonce au programme Logirente. Il est
évident que le programme Logirente est un programme qui répond
à des besoins certains, mais qui s'adresse actuellement uniquement
à une catégorie de la population. Je pense cependant qu'il serait
dangereux de ne régler que le problème Logirente et qu'il
faudrait, dans le même temps, se pencher sur la façon de
subventionner les citoyens et les citoyennes du Québec qui ont des
difficultés quant au paiement de leur logement. Plutôt que de
penser et de mettre sur pied des formules fort douteuses, peut-être que
la formule Logirente qui s'adresse actuellement aux personnes de 65 ans et plus
pourrait s'appliquer à des personnes de 55 ou de 60 ans et plus;
peut-être que cette formule pourrait s'appliquer à l'ensemble de
la population; peut-être que cela serait plus efficace, peut-être
que cela laisserait les gens plus autonomes, plus libres aussi de
décider comment ils se logeront. En fin de compte, cela serait
sûrement moins coûteux que d'autres programmes que l'on
subventionne actuellement.
Je souligne aussi les mesures annoncées quant à une
amélioration des prestations de bien-être social en soulignant,
cependant, que là-dessus, j'ai énormément de crainte
qu'encore une fois, on essaie d'améliorer la situation d'une partie des
assistés sociaux en demandant aux autres assistés sociaux de
partager avec eux. Autrement dit, le système auquel, malheureusement, on
nous a trop souvent habitués en cette Chambre. On prendra à un
groupe pour donner à l'autre, parmi les assistés sociaux; c'est
ma crainte. Je le dis cependant plus fortement peut-être que jamais, en
particulier à cause de la crise économique que nous avons
traversée et que
nous connaissons encore: les prestations de bien-être social sont
insuffisantes actuellement. Alors qu'autrefois elles permettaient aux gens de
subvenir au moins à l'essentiel, elles ne leur permettent plus
actuellement de survivre. Il faudra se pencher rapidement sur ce
problème, en particulier sur celui des jeunes de 18 à 30 ans. On
ne peut penser honnêtement, décemment, franchement, qu'avec 146 $
par mois, quelqu'un peut se loger, peut se nourrir et peut répondre
à l'ensemble de ses besoins essentiels. Je ne parle que des besoins
essentiels. Il est impensable que l'on puisse encore continuer de
prétendre qu'il s'agit là d'une somme suffisante. (11 h 30)
Au-delà de cela, M. le Président - je reviendrai
lè-dessus tantôt - il y aurait plus à faire encore que
l'augmentation des prestations d'assistance sociale, il y aurait surtout de
vrais programmes d'emploi orientés vers du placement permanent. Je
reviendrai sur cette question tantôt.
Il y a aussi, évidemment, les efforts qui semblent vouloir
être déployés du côté des familles
monoparentales. Il y a aussi l'annonce de mesures incitatives afin d'amener la
retraite anticipée, c'est-à-dire de permettre à un certain
nombre de citoyens et de citoyennes du Québec de prendre leur retraite
à 60 ans. L'analyse que l'on retrouve dans le message inaugural nous
démontre que cela pourrait dégager uniquement cette mesure
d'incitation à prendre sa retraite à 60 ans - rapidement et dans
un premier temps près de 50 000 emplois.
Ces mesures incitatives me font peur aussi si elles ne sont pas
accompagnées de correctifs à une loi que nous venons à
peine de voter, en pleine crise économique, et qui visait à
rendre l'âge de la retraite facultative alors que dans plusieurs secteurs
elle était obligatoire à 65 ans.
Questionnons-nous sur le pourquoi de cet amendement à la loi que
nous avons déjà adoptée. Pourquoi avoir rendu la retraite
facultative à 65 ans? Posons-nous des questions pour savoir si, dans la
population, les gens sont d'accord avec cette mesure. Posons-nous la question
pour savoir si nous n'aurions pas pris le problème à l'envers.
Quelqu'un qui est rendu à 65 ans, qui a investi dans la
société par son travail pendant toutes ces années, est-ce
qu'il ne mériterait pas plutôt qu'on se préoccupe de lui
assurer une retraite méritée en dehors de tout souci
matériel plutôt que de l'autoriser à continuer à se
crever au travail jusqu'à ce qu'il soit capable ou encore à
l'âge qu'il décidera? Est-ce que cette mesure que nous avons
adoptée l'an dernier, en pleine crise économique, était la
bonne? À partir du moment où on nous propose des mesures
incitatives pour prendre une retraite anticipée, est-ce qu'on ne
pourrait pas, dans un même temps, corriger cette erreur que, selon moi,
nous avons faite l'an dernier, lorsque nous avons rendu l'âge de la
retraite facultatif?
Voilà donc un ensemble d'éléments positifs du
message inaugural que je jugeais bon de souligner, même si un certain
nombre peuvent s'accompagner de craintes normales et parfois, on le
reconnaîtra, justifiées.
Il y a cependant d'autres mesures qui me laissent songeur. Par exemple,
l'annonce du travail à temps partagé. Je trouve qu'effectivement
le travail à temps partagé peut être une formule
intéressante pour autant qu'on prenne bien nos précautions, que
ce soit bien encadré et que les clientèles visées ne
soient pas toujours les mêmes.
La Commission de la fonction publique avait déjà
analysé cette question du travail partagé. S'il y avait un
endroit où il aurait été facile, compte tenu des garanties
qui entourent les travailleurs de la fonction publique, d'instaurer le travail
partagé, cela aurait bien été dans la fonction publique.
Mais la commission n'avait pas retenu cet élément parce qu'on
craignait trop la mauvaise utilisation de cette notion de travail à
temps partagé. Il faudrait donc, lorsque des mesures nous seront
proposées, qu'on ait toutes les garanties que cela ne visera pas
à développer du "cheap labour" et que cela ne visera pas non plus
à une surexploitation des travailleuses en particulier et des
travailleurs québécois.
Il y a cependant dans le message inaugural, malheureusement, quelques
éléments fort négatifs. Le premier dont je voudrais
parler, c'est celui du mode de scrutin. Avant de parler de ce qui se retrouve
dans le message inaugural actuel, je voudrais rappeler à la population
qui nous écoute ce que, en novembre 1981 - il y a donc maintenant deux
ans - le premier ministre, dans son message inaugural de l'époque,
disait au sujet du mode de scrutin: "Quant au processus électoral dont
nous avons déjà grandement accéléré la
réforme entreprise dès les années soixante, nous avons bon
espoir, avant la fin de la session -là encore, à l'unisson des
partis, si possible -de pouvoir proposer cette étape dont on a tant
parlé, celle d'un nouveau mode de scrutin. Le ministre d'État
à la Réforme électorale a reçu le mandat de
consulter, comme il se doit, les deux côtés de la Chambre, mais
aussi tous les milieux intéressés, afin de mettre au point un
système qui permette de refléter plus fidèlement la
volonté des électeurs."
Deux ans après, dans un autre message inaugural, tout ce qu'on
retrouve, c'est l'annonce d'une commission spéciale qui va
réétudier toute la question du mode de scrutin.
M. le Président, je voudrais référer à
un document de la bibliothèque de l'Assemblée nationale,
qui s'appelle Le mode de scrutin au Québec de 1970 à 1982, qui
relève l'essentiel des prises de position sur la question du mode de
scrutin au Québec. Je voudrais relever une prise de position de M.
Lévesque. On se souviendra qu'en 1970 le gouvernement Bourassa est
arrivé au pouvoir et qu'il a été pris lui-même par
le problème du mode de scrutin. On se souvient qu'en 1966 le Parti
libéral a perdu le pouvoir alors qu'il avait une majorité de
votes sur l'Union Nationale qui, à ce moment-là, avait plus de
députés, mais qui avait été élue. Le Parti
libéral était donc concerné par l'étude du mode de
scrutin et, en 1970, le gouvernement Bourassa a mis de l'avant des
études sur cette question du mode de scrutin.
Or, après huit mois d'étude, M. Bourassa avait opté
pour la même solution que celle à laquelle on assiste,
c'est-à-dire référer le tout à une commission
parlementaire. Au moment où M. Bourassa a pris cette décision, le
11 juin 1970, la Chambre confiait à la commission de l'Assemblée
nationale le mandat d'étudier la réforme électorale. Le
chef du Parti québécois de l'époque, M. Lévesque,
l'actuel premier ministre, disait ceci: "Un gouvernement le moindrement lucide,
conscient des retards accumulés et des périls explosifs qu'il
recèle, n'irait pas risquer de noyer le poisson dans une commission
parlementaire inévitablement tiraillée par les dinosaures de la
vie publique et dominée de surcroît par sa majorité."
C'était la position de M. Lévesque lorsque le gouvernement
Bourassa a référé la question du mode de scrutin à
une commission parlementaire. M. Lévesque trouvait que c'était
manquer de lucidité, que c'était ne pas être conscient des
retards accumulés. Nous sommes maintenant en 1983. Est-ce que, de 1970
à 1983, les retards accumulés ne sont pas plus imposants qu'ils
l'étaient le 11 juin 1970? Qu'est-ce qui justifie le premier ministre
d'avoir acheminé un dossier aussi vital et aussi important que cette
question à une commission spéciale?
Bien sûr, M. le Président, il a dû, comme bien
d'autres, probablement céder à des pressions du milieu, du parti
ou de l'aile parlementaire. Mais, M. le Président, je voudrais
m'adresser au premier ministre du Québec et lui rappeler une chose, lui
rappeler que les premières années de son gouvernement auront
été marquées, quant à moi, justement par un
renouveau de la vie politique au Québec: une Loi régissant le
financement des partis politiques, une Loi sur la consultation populaire, des
mesures pour rendre les débats de l'Assemblée nationale
présents dans chacun des foyers du Québec. C'est ce qui a
caractérisé, dès le départ, le gouvernement du
premier ministre. C'était la volonté ferme du premier ministre,
avant la prise du pouvoir, de compléter toute la réforme
politique au Québec. Le mode de scrutin est un des
éléments essentiels d'une réforme de la vie politique au
Québec. C'est non seulement un élément essentiel de la
réforme de la vie politique, mais c'est aussi un mode essentiel quant
à la réforme parlementaire. Il n'y aura jamais de réforme
parlementaire s'il n'y a pas, d'abord, une réforme du mode de scrutin.
(11 h 40)
II n'y a plus de Parlement, il n'y a qu'un semblant de Parlement. Un
mode de scrutin nouveau, permettant à cette Assemblée
d'accueillir des représentants de toutes les opinions au Québec,
permettant d'avoir une représentation équivalant au vote
exprimé par les électeurs, nous permettrait sûrement des
débats améliorés. Le Parti québécois n'a pas
été le seul à parler d'une modification du mode de
scrutin. On se souviendra que, du côté de l'Opposition officielle,
ce fut aussi un dossier important dans le temps du gouvernement Bourassa, mais
encore plus récemment, le chef de l'Opposition officielle du temps,
parce qu'on change beaucoup de chef d'Opposition de ce côté de la
Chambre, le député d'Argenteuil, de façon
régulière, est intervenu dans cette Assemblée depuis le 9
novembre 1981 pour indiquer au gouvernement l'urgence de modifier le mode de
scrutin actuel. Depuis que, de ce côté de la Chambre, on semble
penser que le pouvoir est proche, on oublie toute cette question du mode de
scrutin.
En effet, lorsqu'on a été élu par un
système, pourquoi on le changerait? C'est un peu le jeu politique, mais
la population commence un peu à être exaspérée.
Quand je suis dans l'Opposition, je me plains de mon sort, je dis que j'ai
été traité injustement, que le pourcentage de vote que
j'ai recueilli ne me donne pas une proportion juste et équitable de
députés à l'Assemblée nationale, mais, dès
que j'ai été élu, je me dis que, dans le fond, le
système n'était pas si mauvais que cela puisqu'il m'a élu.
Dès que je suis réélu, c'est encore pire.
Je sais qu'un certain nombre de députés du
côté ministériel ont longtemps défendu une
réforme du mode de scrutin. Ils la défendent un peu moins
maintenant qu'ils ont été réélus deux fois. Sauf
qu'en dehors de la question de la réélection éventuelle,
il me semble qu'il faudrait regarder aussi la vie au Québec. Le
système actuel ne permet que le bipartisme, c'est-à-dire que la
possibilité pour deux partis de siéger à
l'Assemblée nationale. Lorsqu'il y a des tiers partis, c'est marginal;
c'est non seulement marginal, mais forcément, à un moment
donné ou à un autre, le tiers parti qui arrive au Parlement mange
un des deux autres. C'est ce qui est arrivé régulièrement
dans l'histoire politique du Québec, c'est ce qui est arrivé
lorsque le
Parti québécois, tiers parti, a siégé du
côté de l'Opposition en 1970. Tranquillement, il a mangé
les autres partis existants pour en arriver à un jeu d'un parti
vis-à-vis de l'autre.
Dans la population, on n'assiste plus à des débats qui
sont aussi clairs que celui qu'on voudrait présenter à
l'Assemblée nationale. Ce n'est plus non plus comme il y a 50 ans
où, quand tu n'étais pas bleu, tu étais rouge et alors
qu'on se disait: du bleu au rouge, c'est du pareil au même. Tout le monde
le savait, mais on changeait de l'un à l'autre quand on était
tanné de l'un et on privilégiait l'autre, sachant que
c'était à peu près la même chose. On est encore dans
la même situation qu'il y a 50 ans. Dans la population, les débats
sont beaucoup plus nuancés. Les positions sont beaucoup plus
divergentes. Il n'y a pas du noir et du blanc, il y a un peu de gris et il y a
peut-être des options nouvelles. Où sont-elles, les options
différentes en cette Assemblée? Où sont-ils, les
représentants des 13% de la population qui n'ont voté ni pour le
Parti québécois ni pour le Parti libéral? Où
sont-ils dans cette Chambre? Il me semble que c'est sur cette question
fondamentale qu'on doit se pencher. On doit presser non seulement le
gouvernement, mais le premier ministre qui, lui, avait à coeur, qui,
lui, comprenait, dès le départ, dès la fondation de son
parti, l'essentiel, ce qu'il y avait d'essentiel dans une réforme du
mode de scrutin.
Je terminerai, M. le Président - je me suis attardé un peu
sur cette question et il me reste peu de temps - en soulignant au moins deux
autres éléments qui me semblent négatifs dans le message
inaugural: d'abord, les annonces faites au niveau des amendements au Code du
travail. Pour y avoir participé, je sais qu'il s'annonçait des
choses fort intéressantes et permettant entre autres au mouvement
syndical de favoriser la syndicalisation des travailleurs les plus
démunis et qui reçoivent souvent les traitements les plus bas au
Québec. On avait rencontré des centrales syndicales qui nous ont
démontré, chiffres à l'appui, preuves à l'appui,
dossiers individuels et dossiers de groupes présentés, les
délais incroyables subis par les travailleurs actuellement qui voulaient
s'organiser et se regrouper. Je crains qu'encore une fois le lobby ait
réussi à faire diminuer l'impact de ce qui s'annonçait
comme excellent en termes de réforme en ce qui concerne le Code du
travail. Je ne peux pas non plus parler de réforme du Code du travail
sans mentionner l'importance qu'il faudra accorder et les discussions qu'il
nous faudra faire sur la question du Code du travail dans le secteur
privé et du Code du travail dans le secteur public. Est-ce qu'on doit
avoir des codes du travail identiques? Est-ce que les travailleurs de ces
secteurs différents devraient être soumis à des codes du
travail différents puisque les situations sont différentes?
Voilà autant de questions auxquelles il faudra répondre.
Par ailleurs, je termine en disant que concernant la situation du
chômage qui est de plus en plus dramatique à mesure qu'on en
parle, à mesure que les semaines s'allongent, de plus en plus le nombre
de chômeurs s'accroît et rien n'est fait pour régler le
problème de façon permanente. On assiste de plus en plus à
des débats inutiles entre le fédéral et le provincial,
à des querelles de clochers qu'un chômeur ne comprend pas. Je dis:
J'ai déjà, quant à moi, proposé une formule. Cela
n'est pas une formule universelle. Cela n'est pas une formule qui
réglerait tout, mais c'en est une qui a l'avantage de prendre le
problème de façon globale et d'essayer de le régler de
façon permanente. Ce projet est devant nous. Qu'est-ce que le premier
ministre attend pour demander que l'Assemblée se prononce sur ce projet?
Qu'est-ce que le premier ministre attend pour au moins discuter du contenu de
ce projet de loi qui viserait à créer de l'emploi permanent?
Je termine, M. le Président, il me reste deux secondes, en
soulignant l'étude qui a été faite par le Conseil de
planification et de développement du Québec, un organisme qu'on
s'apprête à saborder justement et qui ne coûtait pas
grand-chose pour bien nous conseiller. Un organisme qui nous a souligné
que jusqu'en 1990 le chômage coûterait aux Québécois
178 000 000 000 $, alors que les programmes d'emploi permanent nous
coûteraient 30 000 000 000 $. Est-ce qu'on est prêt, est-ce que ce
gouvernement est prêt à attaquer le problème de front,
à présenter une politique de plein emploi, à faire en
sorte que l'État, les citoyens, les entreprises et les personnes
concernées sauvent dans les neuf prochaines années 178 000 000
000 $? C'est cela l'enjeu par rapport au chômage et au plein emploi.
Merci.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Prévost et adjoint parlementaire au ministre du Travail.
M. Picotte: M. le Président, question de
règlement.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Je m'excuse, M. le whip
adjoint de l'Opposition, une question de règlement.
M. Picotte: J'ai convenu avec celui qui vous a
précédé au trône tantôt... Une entente a
été conclue d'ailleurs, et je regrette, mais c'est au tour du
député de Chapleau puisque nous avons convenu de faire passer le
député indépendant de Sainte-Marie avant le
député de Chapleau.
Normalement, c'est au député de Chapleau.
M. Brassard: Sur la question de règlement, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le whip du
gouvernement.
M. Brassard: II me semblait... Je n'étais pas partie
à l'entente, mais il me semblait que, le député de
Châteauguay devant nous quitter, le député de Sainte-Marie,
qui voulait prendre la parole, avait consenti à parler plus tard pour
permettre au député de Châteauguay de parler tout de suite.
C'est ce qui s'est produit. Ceci étant dit, à partir de ce
moment, je pense que l'usage, la coutume de l'alternance entre
ministériels et Opposition doit se poursuivre et se continuer. À
ce moment, puisque c'est un député de l'Opposition qui vient de
prendre la parole en la personne du député de Sainte-Marie, non
pas de l'Opposition officielle, mais de l'Opposition, cela doit être
maintenant au tour d'un député ministériel de prendre la
parole en vertu non pas des règles - ce n'est pas dans le
règlement - mais en vertu des coutumes, de l'usage de l'alternance dans
un débat comme celui-là.
M. Bisaillon: M. le Président...
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Sainte-Marie.
M. Bisaillon: ...sur la question de règlement. Je ne
pensais pas que le whip du gouvernement m'obligerait à intervenir de
cette façon. Ce que je peux confirmer quant à l'entente, dans un
premier temps, c'est qu'effectivement je devais prendre la parole et
qu'après moi, puisque j'intervenais après un député
de l'Opposition, cela devait être le député de
Châteauguay. Comme le député de Châteauguay devait
partir, je lui ai cédé mon droit de parole en ayant convenu
à l'avance qu'une fois que le député de Châteauguay
aurait parlé cela reviendrait du côté de l'Opposition.
C'est pour vous expliquer l'entente qui avait été prise. Alors,
il avait été convenu que je parlerais, ensuite le
député de Châteauguay et, enfin, quelqu'un de l'Opposition,
puisque c'était 1-1.
D'autre part, sur la question de règlement et afin, une fois pour
toutes, de régler cette question, je voudrais vous donner mes vues sur
la question de l'alternance, en trois points, si vous me le permettez, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Juste un instant, M. le
député de Sainte-Marie. Je sais que cette question est prise en
délibéré et qu'il n'y a pas encore eu de réponse de
la part du président sur la demande de l'alternance. Je dois vous dire
qu'au départ un principe de base a été adopté,
lorsqu'il y avait des partis reconnus; je parle des partis reconnus dans la
dernière Législature: l'Union Nationale, le Parti libéral,
le Parti créditiste et le gouvernement. Il y avait d'abord ce qu'on
appelle la rotation, un premier tour de table, comme on dit communément.
Mais, après cela, il y a l'alternance, et cela a été
appliqué de façon habituelle.
Je n'ai pas à déterminer, aujourd'hui, si la
décision du président doit être prise ou pas. Selon ce que
j'ai vérifié auprès du président qui m'a
précédé, il semble que c'était le
député de Chapleau. Comme je ne le savais pas, j'ai donné
la parole au député de Prévost. Le président qui
m'a précédé avait dit que c'était ensuite le
député de Chapleau; je lui accorde la parole pour le moment.
M. le député de Chapleau.
M. Bisaillon: Si vous me le permettez, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Juste un instant, M. le
député de Sainte-Marie.
M. Bisaillon: Je voudrais juste terminer en portant à
votre considération un autre élément. Le principe que vous
venez d'expliquer, quant à l'alternance des intervenants, selon qu'ils
soient pour ou contre, selon leur appartenance à des partis, je n'ai
aucune objection et aucun commentaire à faire à son égard.
Je dis, cependant, que cela doit être différent lorsqu'on est face
à des débats restreints. Le débat du message inaugural,
c'est un débat restreint à 25 heures. Or, dans mon cas, par
exemple, si je ne pouvais intervenir juste par le fait de me lever, je
pourrais, par le jeu de l'Opposition et du gouvernement, me retrouver à
la vingt-cinquième heure sans avoir pu avoir l'occasion d'intervenir. Il
s'agit du même phénomène lorsqu'on travaille dans des
commissions parlementaires où des ententes sont faites entre le critique
officiel et le ministre concerné quant au partage du temps. Je ne fais
pas partie des ententes. Tant que je ne ferai pas partie des ententes, il me
semble que je dois avoir ce privilège que me donne le règlement
de parler lorsque le moment me semble convenable.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader du
gouvernement.
M. Brassard: Pour terminer sur la question du règlement,
je sais que vous prenez cela en délibéré. J'espère,
d'abord, qu'une décision sera rendue le plus tôt possible pour
essayer de dissiper la confusion qui peut régner autour de cette
question. Je vous signale simplement que le député de
Sainte-Marie a les mêmes droits comme député que tous les
autres membres de cette
Chambre. Le principe que vous devez prendre en considération
relativement à l'alternance, c'est que le député de
Sainte-Marie n'étant plus - il l'a déjà été
- un député ministériel, il est donc un
député de l'Opposition. Quand il prend la parole,
forcément, il la prend comme député de l'Opposition. Si
après coup un député de l'Opposition pouvait prendre la
parole, cela ferait deux députés de l'Opposition qui parleraient
alternativement, à la suite l'un de l'autre; le principe, l'usage ou la
coutume de l'alternance ne serait pas respecté. Je pense que vous devez
prendre cela en considération. J'espère que vous aurez le plus
tôt possible à rendre une décision sur ce sujet.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Je pense que la
présidence a pris en bonne considération ce qui vient
d'être dit. Je dois rappeler aussi que ce qu'on appelait, d'abord, la
rotation impliquait ensuite, une fois celle-ci terminée au premier tour,
une alternance. À ce moment, pour l'avoir souvent appliquée,
c'était avec une personne de l'Opposition de quelque parti que ce soit
que l'alternance se faisait. En conséquence, c'était avec une
partie qui était à ma gauche et, ensuite, avec une partie qui
était à ma droite. On l'a pris en bonne considération.
Nous avons une rencontre prévue avec les trois personnes qui composent
la présidence. Nous aurons l'occasion de demander au président
qu'une directive finale soit donnée aussi bien pour les travaux à
l'Assemblée nationale qu'en commission parlementaire, puisque le sujet
fait actuellement l'objet de beaucoup de controverses.
Je pense que le leader de l'Opposition aurait quelque chose à
ajouter.
M. Lalonde: Oui, je ne veux pas étendre le débat
indûment. Comme je ne veux pas intervenir à ce stade, avant qu'une
décision finale soit prise, puisque vous venez de nous annoncer qu'une
réunion aurait lieu bientôt, serait-il possible de consulter les
leaders des deux côtés?
Le Vice-Président (M. Jolivet): Oui, M. le leader,
à ce niveau, le présidence aura ce soin à ce moment. On
pourra peut-être inclure la question du député
indépendant pour ne pas le frustrer.
M. Lalonde: Oui, c'est cela.
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député
de Chapleau.
M. John J. Kehoe
M. Kehoe: Merci, M. le Président, pour votre
décision. C'est pour moi un honneur de prendre la parole ce matin en
réponse au discours inaugural de cette 4e session de la 32e
Législature. "Message inaugural", on le sait, est un nouveau terme qu'on
emploie depuis quelques années pour remplacer le terme traditionnel
"discours du trône". Le message inaugural revêt une importance
capitale dans le système démocratique puisqu'il est en quelque
sorte un aperçu des intentions du gouvernement dans les diverses
matières qui tombent sous sa compétence. Il est le menu
législatif pour les mois et même les années à venir.
En plus de brosser un tableau des actions envisagées par le gouvernement
au cours d'une période donnée, le message inaugural constitue la
pierre angulaire qui animera la philosophie et les activités du
gouvernement, de cette Assemblée, au cours des prochains mois.
Je m'adresse donc à l'Assemblée nationale aujourd'hui pour
répondre et analyser les différentes mesures annoncées par
le premier ministre il y a quelques semaines. Ce qui me frappe le plus dans les
40 pages du discours inaugural, c'est le manque de réalisme, le manque
de consistance, l'absence totale de solutions intelligentes et pratiques aux
problèmes que vit le Québec à l'heure actuelle. Loin de
répondre aux préoccupations immédiates qui font que le
Québec vit ces temps-ci une crise double, le discours ou peut-être
le roman que nous a servi le premier ministre est teinté de
démagogie et de partisanerie. On a parlé, encore une fois, de
relance économique. C'est toujours le même thème qui
revient. Depuis 1976, depuis que les péquistes sont au pouvoir, ils
parlent de relance. La prochaine session sera une session sur
l'économie. On va régler les problèmes économiques
de la province de Québec. Mais le passé est garant de l'avenir.
On sait comment les péquistes ont administré la province depuis
1976. On sait les déficits qu'ils ont accumulés depuis ce temps,
d'année en année, des déficits d'au-delà de 3 000
000 000 $. On sait comment ils ont administré les finances publiques.
Ils parlent encore de relance économique, mais ce n'est pas de cela
qu'on a besoin. On a besoin d'actes concrets, de régler les
problèmes qu'on a avec le chômage, les problèmes avec la
jeunesse, les problèmes avec les services sociaux, les problèmes
avec les chômeurs.
Au lieu, comme l'a prétendu le premier ministre, de voir le
gouvernement "centrer ses actions plus que jamais sur l'essentiel, sur les
priorités dans le sens le plus concret du terme," ce discours est venu
une fois de plus illustrer et démontrer de façon concrète
l'hypocrisie du Parti québécois. Le discours de René
Lévesque est une série de clichés, de réchauffage,
de toutes sortes de promesses qu'il avait déjà faites dans
d'autres discours inauguraux. Il revient avec les mêmes choses. Il n'a
pas tenu ses promesses. Comment peut-on avoir confiance
qu'il va tenir les promesses qu'il nous fait dans le présent
discours inaugural? (12 heures)
Comme mes confrères, j'ai écouté la lecture des 40
pages du discours inaugural et ce qui me frappe le plus, ce n'est pas seulement
le contenu de ce document, mais ce que le premier ministre n'a pas dit. Il a
dit bien des affaires, bien des thèmes généraux, bien du
réchauffé, mais enfin, qu'est-ce qu'il propose de nouveau? J'ai
lu, relu et étudié ce discours inaugural et je cherche encore des
solutions innovatrices, réalistes et pratiques pour venir en aide aux
plus défavorisés de notre société. Quelles sont les
mesures proposées pour régler les problèmes des 430 000
chômeurs? Quelles sont les mesures proposées pour aider les 500
000 assistés sociaux? Quelles sont les solutions proposées pour
régler le problème des jeunes qui cherchent de l'emploi et qui,
après avoir complété un cours dans les cégeps, dans
les universités du Québec, sortent de l'école et n'ont
absolument aucune possibilité de trouver un emploi?
Ce discours me semble être un miroir fidèle du gouvernement
péquiste, complètement dépassé, dans les nuages,
coupé de la réalité que vivent nos citoyens dans le
besoin. Bref, un gouvernement qui ne répond pas aux aspirations de la
population, un gouvernement qui n'a aucune solution valable à
présenter pour régler ou, au moins, minimiser les
problèmes qui sont vécus avec une acuité sans pareille au
Québec.
La population du Québec et nous, membres de cette
Assemblée, étions en droit d'attendre beaucoup plus du premier
ministre. Nous voulons que des amorces de solutions soient proposées,
mais que nous propose le premier ministre? Des phrases vides de sens, de
vieilles rengaines récupérées. En fait, ce message
inaugural est une insulte aux Québécois qui y cherchaient des
lueurs d'espoir.
Les observateurs, les chroniqueurs des quotidiens et nous, de ce
côté de l'Assemblée nationale, sommes unanimes à
dénoncer l'audace du gouvernement du Parti québécois de
ressortir son option indépendantiste en cette période de crise
économique. Au lieu de canaliser ses énergies à la
recherche de solutions, il a montré son vrai visage, celui de
l'indépendance coûte que coûte, à n'importe quel prix
social, économique, politique et constitutionnel.
Avant même de parler d'indépendance, je veux aborder, par
contre, quelques secteurs qui font les frais de la politique mesquine et
à courte vue de ce gouvernement péquiste. Le virage
technologique. Depuis quelques mois, depuis quelques années même,
on en parle; cette expression est devenue monnaie courante: le virage
technologique d'un côté, le virage technologique de l'autre. C'est
la panacée pour régler les problèmes des
Québécois, pour régler les problèmes de
chômage dans la province de Québec. Voici que le gouvernement
péquiste nous sert une fois de plus ce plat. Mais pour les
Québécois et pour la population de l'Outaouais
particulièrement, c'est une vraie farce. Même que, dans la
région de l'Outaouais, on a plutôt envie de parler de
dérapage tant le gouvernement du PQ est en train de rater
complètement la courbe dans ce domaine.
Je cite un éditorial de Mme Johannes Martin-Godbout, du quotidien
Le Droit, qui a paru dans ce journal dernièrement: "Après le
ministre Bernard Landry, c'était au tour du ministre
délégué, Gilbert Paquette, de venir nous parler du fameux
virage technologique. Les ministres changent. Les termes varient à
peine. Les dossiers restent aussi peu substantiels. En fait, la
rhétorique continue de primer sur la préoccupation technologique
et, à continuer de l'écouter, l'Outaouais ne prendra certainement
pas le virage." Les ministres changent, les dossiers restent aussi peu
substantiels. Si l'Outaouais veut prendre le virage, il lui faudrait cesser
d'attendre après Québec et lancer ses projets sans plus de
formalités.
Autrement dit, les belles paroles des ministres qui viennent dans notre
coin nous parler du virage technologique sont complètement fausses. Ils
ne font absolument rien pour encourager l'industrie à s'implanter dans
notre région. Au contraire, dans un article paru dans le journal Le
Droit, dernièrement, M. Jean-Marie Comeau, conseiller de gestion et
professeur en informatique à l'Université du Québec, nous
a dit: "Ceux qui croient qu'il y a un virage technologique dans l'Outaouais
québécois rêvent en couleur parce qu'il n'y a rien de ce
qu'il faut en Outaouais, à l'heure actuelle, pour provoquer la formation
d'un deuxième Canada et d'une seconde Silicone Valley."
Comme vous le savez, M. le premier ministre, juste de l'autre bord de
notre région, dans la municipalité de Kanata, qui est
située dans la province d'Ontario, il y a une installation technologique
assez importante. Pourquoi avons-nous cela? Pourquoi ce coin-là s'est-il
développé depuis plusieurs années et pourquoi n'avons-nous
absolument rien actuellement sur le bord du Québec? C'est bien
évident que, depuis des années, les universités,
l'Université Carleton, l'Université d'Ottawa ont mis en place des
programmes qui font que, lorsque les étudiants sortent de ces
établissements, ils peuvent apprendre le fonctionnement des ordinateurs
et apprendre la nouvelle technologie dans bien des domaines. Ils peuvent
pratiquer des programmes et apprendre à faire fonctionner ces
instruments très techniques.
Dans la province de Québec, plus
particulièrement à l'Université du Québec
à Hull, M. Comeau dit: "Mais à Hull, un virage technologique se
produirait tout au plus dans quinze ans." Parce que l'Université du
Québec n'est pas là pour former les gens. Même si les
professeurs qui enseignent là font tout ce qu'ils peuvent, il reste que
cela prend un minimum d'outils pour fonctionner; ce qu'on n'a pas.
L'Université du Québec a Hull fonctionne avec un ordinateur
Cyber, qui date de 1963. Il est tellement désuet que c'est ridicule.
Voilà l'effort fait par la province de Québec. Du
côté de l'Ontario, à Silicone Valley, tout est
établi avec tous les instruments nécessaires pour
développer; il y a des universités qui enseignent l'informatique.
Du côté du Québec, on vient juste de se réveiller,
on a commencé à faire l'installation de l'informatique dans des
écoles, mais cela prendra quinze ans avant qu'on puisse espérer
avoir des compagnies américaines, des compagnies européennes, des
compagnies japonaises qui viennent s'installer dans notre région.
D'un autre côté, nous avons des ministres péquistes,
l'un après l'autre, qui viennent dans notre région faire des
promesses farfelues, des promesses complètement irréalisables.
Ils viennent promettre des installations majeures et dire que des compagnies
importantes viendront s'installer dans notre région. C'est
complètement faux. Tant et aussi longtemps que les universités et
les cégeps ne prépareront pas la main-d'oeuvre requise pour
exploiter ces installations, cela prendra du temps avant qu'on puisse avoir ces
installations dans notre région. (12 h 10)
Une autre raison majeure qui empêche l'installation de ces
compagnies américaines, japonaises et européennes, c'est
justement les effets de la loi 101. On sait que la plupart de ces compagnies
importantes viennent d'endroits comme Los Angeles, Houston. La plupart des
cadres qui dirigent ces compagnies qui vont venir investir de l'argent sont des
anglophones. Mais avec la loi no 101, compte tenu qu'ils n'ont pas fait leur
primaire et leur secondaire dans la province de Québec, ils ne peuvent
pas envoyer leurs enfants à l'école anglaise dans la province de
Québec. C'est une raison majeure qui les empêche de venir
s'installer dans la province de Québec, dans la région de
l'Outaouais. Il y a d'autres raisons reliées au bill 101. Les cadres,
les personnes qui sont responsables de l'installation de ces compagnies, ont de
la difficulté à parler français. Ils ont reçu une
formation en anglais et ils ont beaucoup de difficulté à avoir le
personnel compétent qui viendrait s'installer dans la province de
Québec. Pour cette raison, la société d'aménagement
fait tout ce qu'elle peut pour encourager ces compagnies à venir
s'installer dans notre région. Par contre, la politique du gouvernement
provincial fait en sorte qu'il y a toutes sortes d'obstacles qui les en
empêchent. Un des obstacles, le plus important, c'est la loi no 101.
De plus, il y a la question de l'impôt sur le revenu pour les
résidents de la ville de Gatineau, de la ville de Hull. Dans la province
de Québec, généralement, le taux d'impôt est environ
15% plus élevé que celui de la province de l'Ontario. Pourquoi
les cadres de ces compagnies viendraient-ils s'installer dans le comté
de Chapleau, dans la ville de Hull, quand ils savent que cela va leur
coûter 15% de plus en impôt? On peut ajouter à cela le
coût de l'assurance automobile, le coût de l'immatriculation des
véhicules. Dans la province de Québec, la taxe de vente est de
9%. En Ontario, c'est 7%. Les gens de la province de Québec qui vont
acheter à Ottawa ont même droit à un rabais, à un
remboursement de la taxe de vente de 7% payée en Ontario. Tous ces
facteurs font en sorte que toutes les politiques annoncées par le
gouvernement provincial empêchent les personnes de venir s'installer ici.
Elles empêchent les compagnies de haute technologie de venir s'installer
dans la province de Québec, dans la région de l'Outaouais.
Je demande au gouvernement d'assouplir ses approches quand il s'agit des
villes situées aux frontières de la province de Québec et
de l'Ontario. Le problème y est beaucoup plus sérieux. Chez nous,
dans la région de l'Outaouais, la question est encore plus
sérieuse parce qu'il faut faire concurrence à Silicone Valley qui
est déjà implantée en Ontario et qui est située
à quelque cinq ou six milles à peine de la ville de Gatineau et
de la ville de Hull. Comment peut-on encourager des nouvelles compagnies
à venir s'installer au Québec quand elles ont presque tout ce
qu'il faut en Ontario et quand cela coûte beaucoup plus cher pour
fonctionner dans la province de Québec?
Un autre sujet que je veux aborder, M. le Président, c'est la
question des mines. En ma qualité de porte-parole de l'Opposition dans
ce dossier, il est de mon devoir de dénoncer vigoureusement le discours
inaugural du premier ministre Lévesque pour son incurie dans le domaine
de l'industrie minière. J'ai lu, relu et étudié le
discours inaugural du premier ministre dans ce domaine. Nulle part il n'est
fait mention de la relance de l'industrie des mines. Il n'en parle nulle part.
Pas un mot, pas une ligne. C'est pourtant un secteur essentiel d'une importance
capitale de la relance des activités économiques et industrielles
de la province de Québec. Pourquoi ne pas avoir abordé le
sujet?
Le ministre de l'Énergie et des Ressources a parlé,
à plusieurs reprises, du
commencement d'un programme pour moderniser les mines. Mais,
effectivement, on a un gouvernement qui, pour des raisons politiques, a
décidé de procéder à l'expropriation de la
compagnie Asbestos au coût de quelque 150 000 000 $. Cette année,
on se retrouve avec une perte de 15 000 000 $. On a entendu le
député de Frontenac, on a entendu les ministres avant les
élections qui, à tour de rôle, se sont promenés dans
la région d'Asbestos et ont garanti que par l'expropriation de la
compagnie Asbestos, il y aurait de la création d'emplois. Depuis ce
temps, il y a environ 1500 personnes qui ont perdu leur emploi.
Durant la période qui a précédé
l'expropriation de cette compagnie, tous les intervenants, non seulement les
libéraux, mais tous les experts économiques, toutes les personnes
qui ont fait des études dans ce domaine ont dit que l'industrie de
l'amiante était en déclin. La conjoncture économique
internationale, les questions de danger de l'amiante, etc., plusieurs facteurs
ont contribué à avertir le gouvernement de ne pas procéder
dans ce cas. Mais pour des raisons idéologiques, pour des raisons
politiques, il a décidé de procéder quand même et on
constate maintenant une perte de 15 000 000 $ par année.
Qu'est-ce qu'il fait? La volonté politique n'y est plus pour
tenter de résoudre le problème. Il y a quelques semaines, des
chômeurs sont venus protester contre le gouvernement, contre les
députés et contre les ministres. Qu'est-ce qu'ils ont fait? Rien.
Il n'y a absolument rien qui se fait dans ce domaine. Si les 150 000 000 $
qu'on a payés pour l'expropriation de la compagnie Asbestos avaient
servi à moderniser les mines, lorsque la relance, qui va certainement
venir dans ce secteur, va se faire dans l'économie
québécoise, lorsque le temps viendra, le Québec aurait pu
prendre sa part dans ce secteur d'importance capitale. Mais non, ils ne font
rien.
C'est à peu près la même chose quant à
SIDBEC. On sait très bien que SIDBEC a été mise sur pied
par les libéraux, a été continuée par l'Union
Nationale et maintenant par le Parti québécois. On sait que la
conjoncture économique fait en sorte qu'il n'y a pas de solution
à ce problème pour l'immédiat. Ce qu'on reproche au Parti
québécois, c'est de n'avoir rien fait en 1978, en 1979 et en 1980
lorsqu'il a eu l'occasion de renégocier l'entente avec ses partenaires
dans l'exploitation de cette compagnie. Qu'est-ce qu'il a fait? Il ne s'est
occupé que de l'indépendance; il a mit le paquet sur cela et il a
oublié de tenter de régler le problème de SIDBEC-Normines.
Aujourd'hui, on est rendu avec un problème qui n'a pratiquement pas de
solution, avec un problème d'une perte de 15 000 000 $ par année
à cause du manque de prévoyance de ce gouvernement qui ne sait
pas gouverner.
Le dernier point que je veux aborder aujourd'hui, c'est la question dont
M. Lévesque a parlé dans son message inaugural, la question de
l'indépendance. C'est la première fois en cette Chambre que le
premier ministre a abordé le sujet, qu'il a parlé
spécifiquement de la question de l'indépendance. Auparavant, il
nuançait ses propos en parlant de la souveraineté-association, en
employant des termes qui font moins peur au peuple, mais, là, les jeux
sont faits. C'est rendu qu'il risque le tout pour le tout sur la question de
l'indépendance pour la prochaine élection. (12 h 20)
On se souviendra qu'ils ont gagné les élections en disant:
On va mettre en veilleuse la question de la souveraineté-association.
Ils venaient de perdre le référendum par une majorité de
60-40 sur la question de la souveraineté-association, en utilisant des
termes dont personne ne savait ce qu'ils voulaient dire. C'était une
question de quelque quinze lignes. Personne ne savait au juste ce que voulait
dire un mandat d'aller négocier la souveraineté-association. Il
avait un mandat. La nuance dans cette question était tellement
incertaine. Même à cela, il y a 60% de votants qui ont voté
contre. Depuis ce temps, les affaires ont évolué. Depuis ce
temps, tout de suite après l'élection, il a commencé
à nouveau... Il a gagné l'élection en disant qu'il mettait
en veilleuse son option de séparation. Tout de suite après les
élections il a sorti de nouveau cette option, surtout lors de leur
convention, de leur conseil général au mois de décembre
1981. Je cite M. Pierre Cloutier, le conseiller politique du Parti
libéral qui a écrit dans le Devoir à ce sujet en date du
29 mars: "Décidément, la politique a ses raisons que la raison
ignore. Décembre 1981, 2000 délégués du Parti
québécois sont rabroués sévèrement par le
chef du parti pour avoir osé parler tout haut de l'indépendance
nationale. En quelques mots, ils se font traiter d'agents provocateurs par
l'entourage du premier ministre. "Les mois qui ont suivi ont été
assez pénibles. Règlement de comptes, dissensions, etc. Bref, un
climat malsain et pollué, indigne de ce parti. Pourtant, malgré
la tempête, beaucoup de militants refusent d'abandonner parce que ce
parti leur appartient aussi et surtout que l'idée de
l'indépendance avec ou sans association avec le Canada est tellement
ancrée dans leur coeur qu'il n'y a pas de compromis possible à ce
titre." Voici maintenant qu'aujourd'hui le premier ministre nous parle
d'indépendance. Dans ce temps-là, il ne voulait pas parler
d'indépendance. Il voulait parler de souveraineté-association; le
conseil
général voulait abandonner la question d'association et
venir tout de suite à la question d'indépendance. Mais M.
Lévesque a dit: Cela ne marche pas même si l'instance
suprême du parti dit qu'on va procéder tout de suite à
l'indépendance. Il a dit: Non. Et il y a eu un "renérendum" dans
lequel on posait la question: Est-ce qu'on aime René? Est-ce que vous
m'aimez ou vous ne m'aimez pas? On sait le résultat de ce
référendum. On dit maintenant que la voie de la lucidité
et du réalisme passe par l'indépendance. Vraiment, si on peut
trouver dans les annales de la politique québécoise un politique
plus habile à manier le verbe de l'hypocrisie, je ne le connais pas.
Mr. President, we are at the crossroads of the political history of the
Province of Québec. We have one of two ways to go. The first way is to
take the road of separation, of independence. The game has been played. The
position of the Parti québécois is straightforward. For the first
time, we really understand what the game is. We know that this party has put
aside all questions of delaying the question. They say the next election is
going to be fought on the question of independence. That is one option we have
and it is clear and precise, and we know exactly where we are going. The other
option is: Are we going to stay here in Canada? Are we going to fight for a
better deal for the Province of Québec? The Liberal Party admits that
the Province of Québec, in many instances over the past couple of years,
has not had been given all they required needed in order to develop within
their province. We say that we should go back and negotiate.
The sterile confrontation that we have had since November 1981 has
gotten us absolutely nowhere. We are back to round one again. We have to start
over again. We have to know exactly where we are going. (12 h 20)
On the other hand, we have the Parti québécois. They want
independence and they want independence now. Mr. President, I know my time is
up. The point I want to make in terminating is only this: If the Parti
québécois is so sure that the answer to the to economic problems
in the Province of Québec is independence, if they are so sure that by
lucidity we can have independence in the Province of Québec, let them
have the courage of their convictions. Let them not weaken the province
politically, let them not weaken the province constitutionally and economically
by playing on this question of separation. If they have the courage of their
convictions, let them immediately go to the people and find out if things have
changed since 1980. They were rejected then by 60% of the population who
answered the question which was almost incomprehensible. There were so many
elements in it. There is a lot of people that voted yes because they wanted
Québec to negotiate, they wanted to give Québec a strong hand.
But now it is not that, it is no longer negotiations, it is strictly a
question: Do you wish to separate from the rest of Canada or not? If they have
the courage of their convictions, I say to you, Mr. Lévesque, I say to
you the Parti québécois: Have this courage to immediately call an
election so that once and for all we can solve the problem. Either we separate
and we try to make a better Québec or we join together and try to make a
better Canada. A strong Québec within a unified Canada. This is what it
is all about. Why turn around in circles? Why try to prepare the grounds for a
better tomorrow when you will possibly be able to get your point across?
Mr. President, in terminating I say again: Have the courage of your
convictions; call an election right away and we will let the people of the
province of Québec determine our future.
Thank you.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Prévost et adjoint parlementaire au Travail.
M. Robert Dean
M. Dean: M. le Président, dans son message inaugural, le
premier ministre nous a tracé les grandes lignes de l'action que le
gouvernement se propose d'entreprendre au cours de l'année 1983, cette
année où on espère sortir de la pire crise
économique depuis 50 ans. Dans ce message il nous propose quatre volets.
Un changement d'État qui nous fait espérer un État devenu
moins lourd, plus décentralisé, plus près des citoyens et
qui implique davantage les citoyens dans une atmosphère de
concertation.
Le deuxième volet, celui de l'économie et de l'emploi
propose une série de mesures, les unes plus nécessaires et
urgentes que les autres, en vue de relancer l'économie et de
créer des emplois. On y trouve l'urgence pour aider les PME en
difficulté, le renforcement des structures financières des
entreprises, la participation des travailleurs, les investissements publics et
les incitations à l'investissement privé, le développement
des marchés et la recherche de l'excellence scientifique et
technologique.
Dans le volet changement de société on parle de plan
d'action pour les jeunes et de réformes devenues urgentes et importantes
du Régime de rentes du Québec, du Code du travail, de la Loi sur
les accidents du travail et d'autres. Finalement on parle d'un changement de
régime où on discute de la réforme parlementaire, du mode
de scrutin, du droit des autochtones et de notre place
au sein du régime fédéral.
Je suis d'accord qu'il faut s'attaquer à tous ces multiples
besoins d'une société moderne qui se veut prospère, juste,
libre, humaine et capable d'occuper sa place dans le monde. Nous devons au
cours de l'année, dans cette Chambre, nous attaquer à tous ces
problèmes de front comme le gouvernement du Parti
québécois a su le faire depuis 1976.
Je voudrais surtout insister sur le volet économie et emploi du
message inaugural, ce volet qui nous promet une accentuation de la lutte au
chômage et qui par ce fait rejoint le cri du coeur des hommes et des
femmes dans tout le Québec, qui viennent de toute part, qui nous disent
quoi faire pour sortir de la crise. (12 h 30)
Quoi faire pour assurer un emploi à chaque homme et à
chaque femme, jeunes et moins jeunes qui veulent et qui peuvent travailler.
Quoi faire devant le fait que depuis la fin de la deuxième guerre
mondiale, quel que soit le gouvernement au pouvoir, à Ottawa ou à
Québec, le Québec a toujours eu un taux de chômage plus
élevé que la moyenne canadienne et encore plus
élevé que celui de l'Ontario; quoi faire devant le fait que le
Canada, qui en 1960 occupait le deuxième rang au monde en termes de
revenu national par habitant, en dollars US, c'est-à-dire le
deuxième pour la richesse nationale. Du deuxième rang en 1960, le
Canada est passé au troisième rang en 1970, au dixième
rang en 1979, et au quatorzième rang en 1981, entraînant le
Québec dans sa chute. Soit dit en passant, selon ces mêmes
barèmes, le Québec se trouve au dix-huitième rang.
Pour réfléchir sur ces problèmes, pendant cette
période, il faut constater que le Canada a laissé faire les
entreprises en bonne partie étrangères, au lieu de
préparer une stratégie de développement économique
et industriel. Il a choisi la voie de la compensation minimale des
chômeurs plutôt que de développer une véritable
politique d'emploi. Au début des années soixante-dix, comble de
malheur, il a de nouveau imposé aux Canadiens un deuxième mauvais
choix de politique, soit la création du chômage pour essayer de
lutter en priorité contre l'inflation.
Avant de se poser la question et de proposer des réponses pour
sortir de cette crise, il faut analyser la nature de la crise. Je vous dis que
c'est une double crise que nous vivons au Québec. D'abord, la crise
mondiale qui a affecté tout le monde, qui a frappé tout le monde,
qui a amené un train de misère dans le monde entier. Cette crise
a suivi les deux chocs pétroliers des années soixante-dix, les
fluctuations des prix des denrées alimentaires et les prix des produits
de matière première, et surtout, en face de ces
événements, la politique monétariste adoptée par le
gouvernement des États-Unis, du Canada et de l'Angleterre qui a eu 90%
de ses effets sur la production et l'emploi et seulement 10% sur les prix.
Cette crise mondiale commence à se résorber, nous dit-on.
Le Québec est bien équipé pour prendre sa place dans cette
relance. Il y a une deuxième crise, la crise de l'existence
québécoise au sein du Canada, qui existe depuis que le Canada est
le Canada. C'est cette deuxième crise d'existence qui a fait en sorte
que les industries clés d'une économie saine soient
concentrées en Ontario: l'automobile, l'acier, le caoutchouc, le verre.
C'est cette deuxième crise qui fait que les décisions
fédérales avec la politique de la ligne Borden dans les
années soixante ont abouti en 1982 et 1983 à la fermeture de la
moitié des raffineries de pétrole du Québec. Ce sont ces
politiques fédérales sur les brevets, il y a dix ans, qui ont
fait en sorte que les entreprises pharmaceutiques consacrées à la
recherche sont obligées maintenant de quitter le Québec et le
Canada pour aller s'installer là où elles peuvent faire
protéger leurs brevets.
C'est cette catastrophe de l'acquisition et de la construction d'un
aéroport éléphant blanc à Mirabel. C'est cette
fraude du F-18. C'est le cas de Volkswagen. C'est le S-31. C'est le
Nid-de-Corbeau qui fait risquer la catastrophe à nos agriculteurs. Ce
sont les politiques sur le textile et les chaussures qui font en sorte que
cette crise d'existence québécoise au sein du système
fédéral a toujours travaillé au détriment
économique du Québec et à la création du
chômage. C'est tellement vrai qu'il y a à peine quelques
années, nos adversaires surtout, mais bien des citoyens de bonne
volonté nous disaient: Avec la souveraineté du Québec,
risquerait-il d'y avoir des conséquences économiques
néfastes?
M. le Président, avec les leçons d'histoire depuis la
guerre, rendues encore plus frappantes par la crise mondiale actuelle, nous
pourrions maintenant poser à notre tour la question: Pouvons-nous
risquer d'encourir des conséquences économiques néfastes
avec le régime actuel en ne devenant pas souverains?
M. le Président, les conséquences humaines, sociales,
économiques et politiques résultant de notre incapacité
comme société d'offrir des emplois à tous ceux et toutes
celles qui désirent travailler, et cela, depuis plusieurs
décennies, sont rendues à ce point inacceptables qu'il nous faut,
en tant que société et gouvernement, modifier toute notre
philosophie et nous donner les moyens de changer radicalement la situation.
Dans la foulée du message inaugural, dans ses propositions pour
l'économie et pour l'emploi, nous nous devons d'aller au bout.
Le gouvernement du Québec doit se fixer comme objectif d'assurer
un emploi pour tous et pour toutes. En adoptant une politique de l'emploi, il
se dote d'un instrument indispensable pour assurer une cohérence et
donner leur véritable sens à ses politiques de
développement économique, industriel et régional, à
ses politiques de main-d'oeuvre, de formation professionnelle et de
sécurité du revenu. Il faut constater une fois pour toutes que la
non-stratégie actuelle est un échec; le manque de politiques
d'emploi du fédéral et son laisser-faire en termes de
développement industriel font en sorte que le Québec n'a connu
qu'accidentellement des taux de chômage inférieurs à 6%
depuis 1950. On se retrouve présentement avec près de 500 000
chômeurs. La politique fédérale, axée sur la
sécurité du revenu plutôt que sur l'emploi, n'est pas un
substitut pour une politique d'emploi. Le Québec compte actuellement
plus de 375 000 ménages, bénéficiaires de l'aide sociale,
dont plus de la moitié est constituée de personnes aptes au
travail. Sans changement radical de politique, les deux groupes, chômeurs
et assistés sociaux, risquent de s'enliser et de s'enfermer dans la
pauvreté en permanence.
Quelles sont les conséquences de la politique actuelle? D'abord,
la marginalisation de certains groupes; les jeunes qui n'ont aucun avenir et
qui se trouvent confrontés au désespoir devant
l'impossibilité et leur désir de trouver un emploi; les femmes,
les personnes handicapées, les travailleurs et travailleuses
âgées.
Deuxièmement, les conséquences de la politique actuelle,
les coûts économiques élevés. Savez-vous qu'en 1981
le chômage a coûté au Québec 15 000 000 000 $? 6 000
000 000 $ aux gouvernements; 5 000 000 000 $ aux entreprises et salariés
et 2 000 000 000 $ aux chômeurs. Donc, dans une situation de
chômage chronique, personne ne gagne, tout le monde perd.
Il est estimé que chaque Québécois et
Québécoise au travail paie 2000 $ par année pour soutenir
financièrement ceux et celles qui ne travaillent pas à cause du
chômage.
Troisièmement, les coûts sociaux. Des études
scientifiques répétées au États-Unis
établissent un rapport direct entre une hausse du taux de chômage
et une hausse des coûts sociaux et humains attribuables au suicide,
à l'homicide, aux maladies cardio-vasculaires et rénales et,
d'autre part, à une hausse des taux d'admission dans les hôpitaux
psychiatriques et dans les institutions pénales; sans compter, ce qui
saute plus facilement aux yeux, le désespoir, la misère morale et
physique des individus et des familles: des hommes, des femmes et des
enfants.
Seul, il n'y a pas de solution. Aucun groupe à lui seul ne peut
solutionner ce problème de chômage chronique. Tout le monde perd
en situation de chômage, personne ne gagne. Les travailleurs perdent leur
salaire et leurs acquis; les employeurs perdent des ventes, des profits, leur
efficacité et leur productivité. Les travailleurs et leur
syndicat résistent par insécurité aux innovations
technologiques et aux mesures qui permettent une flexibilité d'action et
s'acharnent sur des clauses strictes de sécurité et
d'ancienneté, ce qui envenime les relations du travail. Le gouvernement
voit baisser ses revenus, voit s'effondrer ses marges de manoeuvre et se voit
incapable de fournir les services dont la population a besoin.
Au contraire, qu'est-ce qu'une politique d'emploi donne comme avantages?
Ce ne sont pas des avantages théoriques que j'élaborerai. La
preuve en est faite. Pendant que le Canada, à l'instar des
États-Unis, s'enlise dans des politiques de laisser-faire
économique et une approche charité de la sécurité
du revenu, une demi-douzaine de petits pays au monde, à une seule
exception, des pays de 5 000 000 à 9 000 000 de population, donc
semblables à la population du Québec, se sont donné, comme
première priorité nationale, un emploi pour tous et pour toutes
et ce, depuis des décennies. Quel en est le résultat? Pendant la
décennie 1970 à 1980, ces pays avaient un taux de chômage
moyen de 2% ou 3% contre 5% à 8% pour le Canada et les
États-Unis. (12 h 40)
Entre 1960 et 1980, les pays qui ont une politique de l'emploi ont
réussi généralement à multiplier par neuf ou dix
leur revenu national par habitant - en dollars américains - alors que le
Canada et les États-Unis n'ont réussi qu'à le multiplier
par quatre. La performance du premier groupe de pays est plus de deux fois
supérieure à celle du Canada et des États-Unis.
Pendant la crise mondiale actuelle, M. le Président, les pays qui
ont une politique de l'emploi ont subi la même crise, la même
pénurie de pétrole, mais ils maintiennent encore des taux de
chômage substantiellement moins élevés que ceux du Canada
et des États-Unis. Ils subissent des taux d'intérêt et des
taux d'inflation souvent inférieurs, mais jamais plus
élevés que ceux du Canada et des États-Unis.
Le Fonds monétaire international et enfin Statistique Canada ont
attribué au Canada la pire performance des 17 pays industrialisés
du monde face à la crise.
C'est d'un autre virage que l'on a besoin, un virage vers une politique
de l'emploi. Pour ceux qui aiment rigoler des virages, laissez-moi vous dire en
passant que, dans ces petits pays, le virage de la politique de l'emploi n'est
aucunement entré en contradiction avec un virage technologique, mais, au
contraire, une politique de l'emploi est la meilleure façon
d'effectuer le virage technologique, de faire rentabiliser et moderniser
les usines de production parce que, dans ces pays, tout le monde travaille. Et,
à cause des éléments d'une politique de l'emploi, on
réajuste l'économie et les emplois. En rentabilisant les
entreprises, on augmente les ventes et les profits.
Qu'est-ce qu'une politique de l'emploi? C'est une politique qui vise
à assurer un emploi pour toute personne qui désire travailler, un
emploi véritablement productif et librement choisi qui répond
à toutes ses aspirations et qui fait appel à ses
compétences déjà acquises ou qu'elle peut améliorer
grâce à une formation appropriée.
Le gouvernement devient le maître d'oeuvre de cette politique d'un
effort national massif où la création et le soutien de l'emploi
deviennent la priorité absolue par rapport à toutes les
politiques de l'État. L'emploi devient une obsession nationale.
Il faut noter que le gouvernement ne devient pas l'employeur, mais
plutôt le chef d'orchestre d'un effort collectif qui englobe et implique
les partenaires socio-économiques, les employeurs et les
travailleurs.
En Suède, 94% des possibilités de production sont entre
les mains de l'entreprise privée. En Autriche, 80%. La politique
d'emploi consiste en des interventions souples, rapides et cohérentes
visant à prévenir le chômage, à créer des
emplois, à adapter la main-d'oeuvre et à modifier les structures
industrielles en conformité avec les objectifs de cette politique. Cette
politique est la façon la plus efficace, la moins coûteuse et la
moins inflationniste de résister au chômage. La preuve en est
faite. Les petits pays, en plus de l'Allemagne qui est un pays un peu plus
grand, en ont fait la preuve et la font encore.
Évidemment, dans le régime fédéral actuel,
il y a des difficultés dans la réalisation d'une politique
d'emploi parce qu'une partie de cette politique est constituée d'une
politique monétaire, commerciale, de sécurité du revenu,
de main-d'oeuvre, budgétaire. Donc, le Québec ne contrôle
pas sa politique monétaire. La politique monétariste
adoptée par le fédéral a fait plus mal au Québec
qu'à toute autre province. Le Québec ne contrôle pas, non
plus, sa politique commerciale. À la suite d'efforts acharnés du
gouvernement du Québec pour aider, par exemple, l'industrie de la
chaussure, du textile et du vêtement à se moderniser, les acquis
et les efforts dépensés pourraient être anéantis par
un coup de plume à la suite d'une décision du gouvernement
fédéral d'ouvrir les vannes sur les importations.
Évidemment, dans le domaine d'une politique de
sécurité du revenu, d'une politique de main-d'oeuvre, d'une
politique budgétaire, le Québec a des moyens, une partie des
outils. Le fédéral garde les autres. Assez souvent, la mise en
pratique de ces politiques est compliquée inutilement et est rendue plus
coûteuse par ce partage des pouvoirs. Mais ce que représente une
politique d'emploi appartient totalement à la juridiction provinciale et
on peut faire un grand bout sur le chemin d'une politique de plein emploi qui
vise un emploi pour tous et toutes avec les outils que la province a à
sa disposition.
Il est surtout important de considérer que le peuple
québécois, une fois convaincu de la volonté et de
l'acharnement de son gouvernement à réaliser une politique
d'emploi, fera, sur-le-champ, le constat de l'impossibilité, de
l'incohérence et de l'injustice du régime fédéral
et, tout naturellement, entamera le processus de la souveraineté pour
réaliser ce que les autres petits pays ont réalisé, la
sécurité et le dynamisme économique et social par une
politique en vue d'assurer un emploi pour tous.
Pour atteindre une politique d'emploi, M. le Président, il y a
des défis à relever. Il faut créer un climat de
solidarité nationale. C'est là une condition essentielle au
succès d'une telle politique. Une décision du gouvernement de
tout mettre en oeuvre pour assurer un emploi à chacun et à
chacune peut contribuer à mobiliser la population dans un effort de
solidarité nationale.
Également, il ne faut pas se laisser paralyser par une hantise du
déficit. Il y a un coût à une politique d'emploi. Des fonds
de solidarité nationale peuvent être des moyens originaux, comme
les bons de la victoire pendant la Deuxième guerre mondiale, pour
amorcer la pompe d'une politique d'emploi, mais il faut également
prévoir des engagements budgétaires de la part de l'État.
Il faut dire qu'un déficit augmenté par les investissements qui
créent des emplois permanents, c'est autrement plus défendable et
plus acceptable qu'un déficit encouru pour payer les prestations
d'assurance-chômage et d'aide sociale. Il est également
prouvé que les entrées fiscales qui résultent de
l'augmentation du niveau de l'emploi compensent assez rapidement le coût
affecté à l'augmentation du niveau de l'emploi. Donc, les dettes
encourues sont relativement de courte durée.
Quelles sont les principales dimensions d'une politique d'emploi?
D'abord, le développement industriel. Le gouvernement du Québec a
déjà sa stratégie de développement industriel:
Bâtir le Québec et Bâtir le Québec, phase II, le
Virage technologique. De nombreux éléments sont
déjà incorporés dans les politiques en vigueur ou des
politiques préconisées dans le message inaugural. Parmi toutes
les politiques
existantes et à créer, deux conditions sont essentielles
au choix des mesures à utiliser: que les différents volets de la
politique d'emploi soient étroitement coordonnés et que les
agents socio-économiques soient étroitement associés
à titre de partenaires dans toutes les phases de la politique.
Deuxième dimension: la protection de l'emploi. Encore une
série de mesures qui aident à lutter contre les périodes
de récession, les périodes de difficulté temporaire des
entreprises ou pour créer temporairement des emplois en périodes
de difficulté. Encore là, nous avons déjà en marche
de telles politiques; d'autres sont prévues, il ne s'agit que de les
compléter et de les coordonner. (12 h 50)
Troisièmement, il faut équilibrer la demande et l'offre de
la main-d'oeuvre. Par exemple, un des outils nécessaires serait
d'établir un inventaire de la main-d'oeuvre, des besoins en
main-d'oeuvre sur le plan local, régional et national, de voir à
la formation, au perfectionnement et au recyclage des travailleurs et des
travailleuses et à leur relocalisation si nécessaire; des
programmes spéciaux pour les groupes cibles, particulièrement
brimés par les conditions actuelles de chômage: les jeunes, les
femmes, les personnes âgées, les personnes handicapées, les
assistés sociaux et les travailleurs immigrants.
Quatrièmement, la création massive d'emplois par l'action
gouvernementale pour permettre la transition vers une politique globale
d'emploi qui vise à assurer un emploi pour tous. Quelques-unes des
possibilités: les programmes d'assainissement des eaux, l'implantation
de réseaux d'aqueduc, la construction domiciliaire, la rénovation
urbaine, l'entretien du réseau routier, l'animation touristique et
culturelle, les services personnels aux personnes âgées, les
activités des enfants et des adolescents, l'entretien du patrimoine,
etc. Encore là, plusieurs de ces mesures existent déjà; il
s'agit de les regrouper pour créer cette politique d'emploi.
Devant l'ampleur du problème, il ne faut pas se laisser abattre
par l'idée que la mise en marche de tels programmes nécessite de
longs délais. Nous avons des exemples frappants qu'on peut
réaliser rapidement un changement majeur sans atteindre la perfection
à court terme. Au début de la Deuxième guerre mondiale, le
Canada est passé d'un taux de chômage de 15% à un
très faible niveau en l'espace de quelques années. Plus
impressionnant encore, au début de la longue et fructueuse
expérience suédoise, le pays est passé de 200 000
chômeurs à 16 000 en l'espace de deux ans. Là où il
y a une volonté ferme et collective, il y a un moyen; il s'agit de
vouloir.
Il y a quelques conditions nécessaires à la
réalisation et à l'efficacité d'une politique globale
d'emploi qui se veut une politique de plein emploi. Pour réaliser une
politique d'emploi, il faut d'abord reconnaître la valeur primordiale du
travail comme moyen privilégié de réalisation personnelle
et sociale, mais aussi comme la meilleure façon d'obtenir un
développement économique dynamique et harmonieux, ainsi qu'une
croissance constante de notre richesse. Il faut également un engagement
ferme du gouvernement, à savoir que la politique d'emploi pour tous et
pour toutes doit transcender toutes les autres politiques du gouvernement. Cela
prend des pouvoirs attribués à un responsable de ce gouvernement
qui lui permettent de maintenir un degré élevé de
coordination des diverses politiques appliquées dans divers
ministères.
Il faut également, enfin, associer les agents
socio-économiques à cette politique. D'abord, ce sont les
employeurs et les travailleurs qui ont une connaissance directe des
problèmes économiques en ce qui a trait à l'entreprise, en
ce qui a trait à une région. Deuxièmement, une politique
d'emploi implique des investissements privés aussi et surtout. Ces
investissements sont décidés par le secteur privé et
d'autres gouvernements que le gouvernement national. Donc, on ne peut
réaliser une politique d'emploi que si chaque agent
socio-économique se sent partie prenante à cette politique comme
c'est le cas dans tous les pays où il existe une politique d'emploi pour
tous et pour toutes. Une politique d'emploi, M. le Président, c'est bien
clair, est un ensemble de nombreuses mesures et composantes. Elle
nécessite une cohérence à toute épreuve, une
continuité tant en période de développement qu'en
période de crise, de la souplesse devant chaque situation
particulière rencontrée et une rapidité
d'intervention.
Une politique d'emploi se base beaucoup plus sur la prévention
que sur la guérison. L'expérience déjà vécue
au Québec confirme ce qui existe en d'autres pays. S'il y a un
coût à la création de l'emploi, ce coût est
rapidement remboursé par les entrées fiscales
réalisées par les emplois créés. On n'a pas besoin
d'experts pour constater que l'emploi et la production de biens et services
rentabilisent l'équipement, augmentent la productivité,
engendrent des profits, stimulent la consommation, réduisent les
coûts de l'assurance-chômage et de l'aide sociale en faveur de
l'augmentation des impôts pour le gouvernement.
M. le Président, en terminant, je voudrais vous dire qu'un emploi
pour tous et pour toutes, une politique globale d'emploi, un acharnement
national pour créer et soutenir les emplois pour toutes les personnes au
Québec, c'est une priorité qu'on ne peut
pas ne pas se permettre. Une politique d'emploi est une politique
à la fois économique et sociale. Elle est économique, mais
elle engendre le dynamisme social. Elle assure la croissance et le
développement économique. Elle élève le niveau de
vie, elle répond aux besoins de la main-d'oeuvre, elle résout
tout le problème du chômage et du sous-emploi. Elle est plus
efficace, moins coûteuse et moins inflationniste. Une telle politique est
réalisable. Elle est réalisable parce qu'elle est
déjà réalisée dans d'autres petits pays du monde
occidental et industriel. Pourquoi pas nous? En cours de route, nous
réaliserons la souveraineté d'un peuple qui se prend en main et
se bâtit. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Hull.
M. Rocheleau: M. le Président, est-ce qu'on peut demander
la suspension du débat?
Le Vice-Président (M. Rancourt): Cette motion de
suspension est-elle adoptée, M. le whip du gouvernement?
M. Brassard: M. le Président, je fais motion pour que nous
suspendions nos travaux jusqu'à 15 heures.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Est-ce que cette motion
de suspension est adoptée? Adopté.
Nos travaux sont suspendus jusqu'à 15 heures.
(Suspension de la séance à 12 h 57)
(Reprise de la séance à 15 h 17)
Le Président: À l'ordre, mesdames et messieurs!
Moment de recueillement. Veuillez vous asseoir.
Visite de l'ambassadeur du Burundi
J'ai le plaisir de souligner la présence dans nos galeries
aujourd'hui de l'ambassadeur du Burundi, M. Jérôme
Ntungumburanye.
Déclarations ministérielles. Il n'y en a pas.
Propositions de délimitation des
circonscriptions électorales
Au dépôt de documents, j'ai le plaisir de déposer un
document qui va sûrement intéresser tous les députés
de cette Chambre. Il s'agit des propositions de délimitation des
circonscriptions électorales de la Commission de la
représentation électorale du Québec.
Au dépôt de documents, M. le leader parlementaire.
Rapport annuel de Radio-Québec
M. Bertrand: M. le Président, à titre de ministre
des Communications, je voudrais déposer le rapport annuel 1981-1982 de
la Société de radiotélévision du Québec,
plus communément appelée Radio-Québec, l'autre
télévision.
Le Président: Rapport déposé.
M. le ministre des Communications.
Rapport de la firme Tamec sur les
télécommunications
M. Bertrand: Même si la nouvelle Loi sur l'accès
à l'information, par son article 39, me dispenserait de déposer
ces documents, puisque nous recevons les dirigeants de Bell Canada la semaine
prochaine, je voudrais déposer le rapport de la firme Tamec sur le
développement intégré du secteur des
télécommunications au Québec.
Le Président: Rapport déposé. M. le ministre
de l'Énergie et des Ressources.
Décret concernant un paiement
pour des actions de la Société
nationale de l'amiante
M. Duhaime: M. le Président, il me fait plaisir de
déposer le décret du 30 mars 1983 concernant un paiement par le
ministre des Finances pour des actions de la Société nationale de
l'amiante.
Le Président: Rapport déposé. M. le
député de Richmond.
Pétition demandant la reconstruction de la
route 116
M. Vallières: M. le Président, je voudrais
déposer une pétition qui a reçu l'appui de quelque 4650
signataires relativement à la reconstruction de la route 116 dans le
comté de Richmond. Je veux, d'abord, vous présenter le court
texte de la pétition: "Considérant la décision du
gouvernement du Québec en 1977 de canceller le projet de construction de
l'autoroute 55 devant relier Saint-Albert à Richmond; considérant
les engagements du premier ministre Lévesque de rendre prioritaire la
réfection de la route 116 en 1979, des anciens ministres des Transports,
MM. Lessard et de Belleval, du ministre actuel,
M. Michel Clair; considérant l'engagement des candidats du Parti
québécois en Estrie lors de l'élection
générale du 13 avril 1981, à savoir de reconstruire la
route 116, section Richmond-Danville; (15 h 20) considérant que la route
116 a atteint un état de détérioration avancé tant
au plan de son caractère géographique que structural et qu'elle
représente un danger sérieux pour ses usagers, considérant
l'importance vitale de la reconstruction de cette route pour le
développement économique des régions d'Asbestos, Danville,
Richmond et Kingsey-Falls, nous, soussignés, demandons au gouvernement
du Québec de procéder sans délai à la
reconstruction de la route 116 entre Kingsey-Falls et Richmond et de
considérer prioritairement la réfection du tronçon reliant
Danville à Richmond."
En terminant, j'inviterais mes trois collègues péquistes
de la région à signer la pétition.
Des voix: Bravo!
Le Président: Pétition déposée. M. le
ministre de l'Énergie et des Ressources a un autre rapport à
déposer.
Rapport annuel du ministère de l'Energie et des
Ressources
M. Duhaime: M. le Président, je voudrais déposer le
rapport annuel 1981-1982 du ministère de l'Énergie et des
Ressources.
Le Président: Rapport déposé. Mme la
députée de Jacques-Cartier.
Mme Dougherty: M. le Président, j'aimerais déposer
deux pétitions qui viennent de plusieurs centaines de parents
montréalais.
Pétition demandant le retrait de la loi
111
La première se lit comme suit: As a citizen of Québec and
as a parent, I demand that the Government of Québec immediately rescind
Law 111, as it infers guilt without proof, suspends civil liberties to which
every citizen of Québec is entitled to in law, and seeks to suspend
rights we all enjoy under the Canadian Constitution.
Le Président: Pétition déposée.
Pétition demandant le rejet du projet de
restructuration scolaire
Mme Dougherty: The second petition: "We, the undersigned, as
responsible citizens and parents, reject the proposals for the restructuration
of our school system as put forth in the white paper: The Québec School:
a responsible force in the community. "We demand that the present system of
education, under the control of school boards elected by universal suffrage, be
retained. "The massive reorganisation proposed in the white paper will not
improve our educational system. The proposals are untimely, unnecessary and
unwanted. We demand peace in our schools."
Le Président: Pétition déposée.
Il n'y a pas de dépôt de rapports de commissions
élues, ni de rapports du greffier en loi sur les projets de loi
privés, ni de présentation de projets de loi au nom du
gouvernement ou au nom des députés. Nous passons donc à la
période des questions.
M. le député de Mont-Royal.
QUESTIONS ORALES DES DÉPUTÉS
Développement régional et taux de
chômage en Gaspésie
M. Ciaccia: M. le Président, ma question s'adresse au
premier ministre et concerne le développement régional en
Gaspésie où le chômage a atteint un taux alarmant. La
situation économique est devenue telle que de toutes les régions
du Québec, c'est sans contredit celle du Bas-Saint-Laurent qui vit le
plus durement la triste réalité du marché du travail, soit
un taux de chômage de 29,3% au mois de mars comparativement à
24,6% à la même époque l'année dernière. On
peut remettre en question les mesures que le gouvernement prend pour essayer de
remédier à ces situations. Par exemple, quand vous parlez de la
création de bons d'emploi, il y a 19 000 jeunes qui ont des bons
d'emploi et il n'y a pas de job pour utiliser ces bons d'emploi.
Ma question au premier ministre est la suivante: Quelles mesures
concrètes et immédiates le premier ministre entend-il prendre
pour remédier au problème, qui est catastrophique, d'un taux de
chômage aussi élevé dans la région du
Bas-Saint-Laurent?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Lévesque (Taillon): M. le Président, je
présume que, si on choisit une région en particulier, c'est pour
des raisons de dramatisation. Il est évident que tout le monde a vu - ce
n'est pas une histoire gaie, mais quand même il y a des choses qu'il faut
relativiser un peu là-dedans - les chiffres du chômage qui ont
paru ces jours-ci. Ils disent que dans une situation qui est dans bien des
coins catastrophique - c'est vrai - il y a quand même, par rapport aux
derniers mois, proportionnellement moins de chômeurs au Québec,
homologués en tout cas par les mêmes statistiques
fédérales, que
pendant n'importe quelle année qui a pu donner des
statistiques.
Actuellement c'est 28,5% du total canadien. Dieu sait que cela fait mal
partout. C'est le total canadien qui a monté aussi. Cela étant
dit, il n'y a pas de gouvernement autant que celui du Québec, sur le
plan provincial en tout cas, toutes proportions gardées, qui ait, aussi
bien l'an dernier que cette année - on a pu voir les crédits qui
ont été déposés il y a quelques jours - fait autant
d'efforts pour essayer d'alimenter au maximum une création d'emplois
dans certains cas temporaires, dans d'autres cas de faire démarrer des
projets. Cela s'applique aussi bien en Gaspésie ou dans le
Bas-Saint-Laurent qu'ailleurs.
Je pourrais par exemple demander - et c'est un coin très
important parce qu'il s'agit de Murdochville en Gaspésie - à mon
collègue de l'Énergie et des Ressources de nous dire où
cela en est par rapport, en particulier, aux possibles projets - et Dieu sait
que c'est complexe à mettre au point -dans le cas de Murdochville, par
exemple. On sait à quel point des menaces planent sur Murdochville comme
cela est arrivé dans je ne sais combien de villes minières ces
dernières années un peu partout en Amérique du Nord.
Peut-être que mon collègue de l'Énergie et des Ressources
pourrait ajouter quelques renseignements utiles en ce qui concerne
spécifiquement Murdochville, dans la région dont parle le
député de Mont-Royal.
Le Président: Rapidement, M. le ministre de
l'Énergie et des Ressources, s'il vous plaîtl
M. Duhaime: M. le Président, je puis dire que nos
discussions sont très avancées avec le groupe minier Noranda pour
ce qui est d'un investissement majeur par la compagnie Mines Gaspé, une
filiale du groupe Noranda, de façon à faire, pour les prochaines
années, des dépenses de développement qui pourraient
créer quelques centaines d'emplois. J'ajoute aussi que, pour ce secteur
du Québec, cette grande région, nous pourrons faire progresser le
dossier de la papeterie de Matane, un investissement projeté de l'ordre
de 270 000 000 $ qui devrait créer plus de 400 emplois, lorsque nous
aurons reçu réponse à deux questions: Est-ce que le
"ruling" du gouvernement fédéral au 30 mars 1983 sera
prolongé pour nous permettre de mettre en place et de financer une
société en commandite? Deuxièmement, à quel moment
et de quel montant sera la subvention fédérale dans ce
dossier?
Je dois me rendre compte, M. le Président, qu'en 1983 il est
moins facile d'avoir des réponses du gouvernement fédéral
dans ce genre de dossier que lors d'une campagne générale au
Québec ou d'une campagne référendaire.
Le Président: M. le député de Mont-Royal,
question additionnelle.
M. Ciaccia: M. le Président, est-ce que je pourrais
demander au premier ministre et au ministre de l'Énergie et des
Ressources, au lieu de toujours essayer d'introduire des conflits
fédéraux-provinciaux, au lieu d'essayer de...
Le Président: Sans préambule, M. le
député.
M. Ciaccia: ...mettre la faute sur les autres...
Une voix: II est rendu séparatiste.
M. Ciaccia: Pourquoi le gouvernement lui-même ne donne-t-il
pas des précisions, des mesures concrètes? Est-ce que je pourrais
porter à l'attention du premier ministre que - quand il cite des
chiffres, il nous accuse de dramatiser en Gaspésie - il y avait 25 575
bénéficiaires de l'aide sociale au 1er avril 1983, soit une
augmentation de 54% depuis 1977? C'est peut-être dramatique...
Des voix: Question.
M. Ciaccia: ...mais ce sont les bénéficiaires de
l'aide sociale qui souffrent et n'ont pas d'emploi. Est-ce que je pourrais
faire une suggestion au premier ministre?
Des voix: Non.
Le Président: M. le député, j'attire votre
attention sur le fait que j'ai demandé jusqu'à maintenant et
obtenu de la part de l'Opposition une bonne collaboration pour ce qui est des
questions additionnelles sans préambule. Je vous en prie, une question,
mais non pas une série de questions qui aboutissent à une autre
question.
M. Ciaccia: Est-ce que le premier ministre pourrait s'engager,
dans le cas de la route 132, par exemple, à continuer, avec
célérité la construction de cette route, ce qui
permettrait la création d'emplois et ce qui permettrait aussi
l'augmentation du tourisme dans ce secteur.
Comme mesure concrète, pour aujourd'hui, le premier ministre
pourrait-il s'engager à compléter ce projet?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Duhaime: M. le Président...
Le Président: M. le ministre de
l'Énergie et des Ressources.
M. Duhaime: Question de privilège, M. le Président.
Avant que vous ne rappeliez à l'ordre le député de
Mont-Royal, qui disait que je voulais susciter une querelle en donnant la
réponse que j'ai donnée tantôt...
Une voix: Ce n'est pas une question de privilège.
M. Duhaime: Oui, c'est une question de privilège, on
m'accuse de poser des gestes que je n'ai pas posés. Je voudrais
simplement rappeler au député de Mont-Royal que dans le dossier
qui concerne l'Est du Québec, la mine de sel, le gouvernement
fédéral n'a jamais payé un seul cent... (15 h 30)
M. Lalonde: Question de règlement, M. le
Président.
Le Président: Je soupçonne la nature de votre
question de règlement, M. le leader, et je me levais au même
moment que vous. Je ne vois pas, M. le ministre, en quoi vous soulevez une
question de privilège sur l'argumentation qui a pu être faite par
le député de Mont-Royal.
M. Duhaime: Je n'ai pas terminé.
Le Président: Un instant! Je ne vous permettrai pas de
terminer, à moins que vous n'ayez effectivement une question de
privilège. En quoi vos privilèges ont-ils été
violés par les propos du député de Mont-Royal?
M. Duhaime: J'allais ajouter, M. le Président, que le
député de Mont-Royal disait que je voulais susciter une querelle
avec le gouvernement fédéral en répondant à la
question. Je vous dis que c'est inexact, que c'est faux.
M. Lalonde: Question de règlement, M. le
Président.
M. Duhaime: Ce que je veux dire, c'est que dans le dossier de
l'amiante, par exemple...
M. Lalonde: Question de règlement, M. le
Président.
Le Président: II y a une question de règlement.
M. Duhaime: Dans le dossier de l'amiante...
M. Houde: Vous le direz après 18 heuresl
M. Lalonde: Question de règlement, M. le
Président.
Le Président: M. le ministre. Question de
règlement, M. le leader parlementaire de l'Opposition.
M. Lalonde: J'aimerais, M. le Président, que vous
expliquiez au ministre de l'Énergie et des Ressources qu'une
différence d'opinions ou même une accusation qui concerne sa
qualité ou sa fonction de ministre ne donne pas ouverture à une
question de privilège de député.
Le Président: Je vous ai signalé tantôt, M.
le ministre, que je ne voyais pas en quoi vos propos constituaient une question
de privilège. J'avoue que je ne vois toujours pas en quoi vous posez une
question de privilège. La question complémentaire était
posée à M. le premier ministre.
M. Lévesque (Taillon): Cela arrive de cette façon.
Je n'en ferai pas une question de privilège, j'en ferai un
complément de réponse, puisqu'on me pose des questions qui
impliquent que, présumément, on ferait des chicanes exprès
avec le fédéral.
Des voix: Oh!
M. Lévesque (Taillon): C'est exactement le
préambule.
Des voix: Oh!
M. Lévesque (Taillon): Le préambule à une
question, sauf erreur, M. le Président, cela justifie un
préambule à ma réponse. Est-ce qu'on a créé
- je parle de la région des Maritimes et de la région du
Bas-Saint-Laurent-Gaspésie, notre région maritime - un conflit
quand le gouvernement fédéral a refusé de mettre un
traître sou dans la mine de sel des Îles-de-la-Madeleine pour
protéger le sel des Maritimes? C'est nous qui avons inventé cela?
Non. C'est dans le Bas-Saint-Laurent-Gaspésie,
Îles-de-la-Madeleine.
Par ailleurs, quand le fédéral a mis -je ne sais pas
combien - 16 000 000 $ pour l'amiante de Terre-Neuve et que, par ailleurs, avec
les surplus, parce qu'on a la même situation économique, il n'y a
jamais un sou disponible pour le Québec, ce n'est pas nous qui
créons le conflit. C'est un conflit systématiquement entretenu
par les amis de nos amis d'en face.
Je rappellerai qu'avec un déficit dont au moins le quart,
c'est-à-dire 7 000 000 000 $ ou à peu près, va peser sur
le dos des citoyens du Québec, ce déficit qui, paraît-il, a
baissé, on l'avait gonflé pour montrer qu'il va être moins
gros. Ce déficit qui est dans les quelque 20 000 000 000 $, il y a de
l'argent québécois là-dedans...
M. Ciaccia: Question de règlement.
Le Président: Question de règlement, M. le
député de Mont-Royal.
M. Ciaccia: M. le Président, je crois que le
règlement est très clair. J'ai posé une question claire et
précise sur la route 132. Est-ce que le premier ministre est prêt
à s'engager de continuer la construction de cette route avec toute
célérité? C'est cela que j'ai demandé.
Le Président: M. le député de Mont-Royal,
voilà une belle illustration - M. le ministre, je vous en prie. M. le
président du Conseil du trésor, s'il vous plaît - M. le
député, de ce pourquoi il est interdit d'avoir des
préambules à une question complémentaire. À partir
du moment où il y a un préambule à une question
complémentaire et votre question complémentaire a
été malgré tout précédée d'un
préambule qui en ouvrait grand, inévitablement, cela ouvre la
porte, non pas à une question de privilège là où il
n'y en avait pas, mais à une réponse qui englobe tout ce que le
préambule interdit a pu soulever. M. le premier ministre.
M. Lévesque (Taillon): M. le Président, je
terminais ce préambule en réponse à celui du
député de Mont-Royal pour dire simplement que quand on est rendu
dans quelque 20 000 000 000 $ de déficit dont quelques milliards,
à peu près le quart, vont peser sur le dos des contribuables du
Québec, on ne devrait pas être obligé de faire des sparages
à n'en plus finir comme cela pour que le Québec obtienne sa part,
surtout dans des régions comme celles qu'évoque le
député de Mont-Royal.
Pour ce qui est de la route no 132 spécifiquement et pour ce qui
est de la politique du gouvernement vis-à-vis de l'ensemble de cette
région Bas-Saint-Laurent-Gaspésie, je demanderai au ministre des
Transports de vous dire ce qui en est pour cette route. Si c'est vrai
honnêtement que vous voulez des informations sur ce que fait le
gouvernement dans cette région, je demanderai au président du
Conseil du trésor de vous expliquer comment on a choisi les
priorités dans les dépenses du gouvernement pour cette
région en particulier.
Le Président: M. le ministre des Transports,
brièvement.
M. Clair: M. le Président, je suis heureux de
l'intérêt, nouveau à ma connaissance, que porte le
député de Mont-Royal aux travaux routiers en Gaspésie.
Tout ce que je dois lui dire sur cette question: d'abord l'enveloppe
budgétaire de construction routière au Québec
prévoit les plus importants travaux cette année, comme
l'année dernière, justement dans la région de la
Gaspésie et dans la région de l'Outaouais. En ce qui concerne de
façon très spécifique la route no 132, à
l'intérieur de cette enveloppe allouée à la construction
routière dans la région de la Gaspésie, les plus
importants travaux ont lieu précisément sur la route no 132. Le
ministère des Transports fait tout ce qui est possible pour
accélérer ces travaux de reconstruction de la route no 132.
J'apprendrai probablement au député de Mont-Royal que, dans le
but d'accélérer encore ces travaux, il y a des soldes, si l'on
veut, dans l'entente sur les axes routiers prioritaires. Je vois le
député d'Argenteuil, qui sait très bien qu'un montant
avait été alloué pour la construction éventuelle de
l'autoroute no 13 dans la région de Montréal, reliant Mirabel
à Montréal; ces travaux ne sont pas considérés
comme prioritaires maintenant par à peu près personne. Il y a
toujours plusieurs mois que j'ai soumis au ministre du Développement
régional et au ministre des Finances, qui en ont saisi leurs
vis-à-vis fédéraux, une demande visant à
réorienter des crédits prévus pour l'autoroute no
13 vers des travaux sur la route no 132 en Gaspésie et la route no
117 vers l'Abitibi.
M. Gratton: Question de règlement, M. le
Président.
Le Président: Une question de règlement, M. le
député de Gatineau.
M. Gratton: M. le Président, si on veut tenter de noyer le
poisson de l'autre côté, je veux bien, mais quand le ministre des
Transports vient déterrer l'autoroute no 13 je ne vois pas quel rapport
cela a avec la question... Je n'ai pas terminé, M. le
Président.
Le Président: Je ne vois vraiment pas, M. le
député, en quoi vous avez une question de règlement. Vous
faites de l'argumentation sur le fond. Si vous avez une question d'appel au
règlement, je vous en prie, indiquez-moi en quoi elle consiste.
M. Gratton: M. le Président, je vais vous poser la
question. Est-il pertinent pour le ministre de répondre à une
question que je pourrais lui poser sur l'autoroute 5 dans mon comté,
pour répondre à la question du député de Mont-Royal
sur la 132 en Gaspésie? il me semble qu'il y a quelque chose qui cloche
quelque part.
Le Président: Je vous en prie. J'ai écouté
les réponses du ministre des Transports. J'ai cru entendre qu'il faisait
référence à une question de transfert de crédits
selon les priorités, que, de l'autoroute
13 qui était à Montréal, cela pouvait aller
à la route 132 en Gaspésie et que, dans ce sens, c'était
effectivement pertinent au propos.
Question principale.
M. Clair: M. le Président, pour compléter...
M. Lévesque (Taillon): La question du député
de Mont-Royal n'était pas spécifique à la route 132. Il
vient d'avoir une réponse spécifique à propos de la route
132. La question n'était pas principalement à propos des
relations fédérales-provinciales, mais c'est le
député de Mont-Royal qui a introduit le sujet. La question
était sur ce qu'on faisait pour la partie chômage, la partie
terriblement catastrophique - d'ailleurs, on le sait - de ce qui se passe en
Gaspésie et dans le Bas-Saint-Laurent. J'ai évoqué les
dépenses, mais je crois qu'il est normal, si la Chambre veut être
informée, les citoyens aussi, et si ce sont des renseignements qu'on
veut, que le président du Conseil du trésor, qui en même
temps représente un comté gaspésien, puisse vous dire ce
qui en est rapidement des priorités qui ont été choisies
pour les dépenses, justement, en ce qui concerne la Gaspésie et
le Bas-Saint-Laurent. (15 h 40)
Le Président: M. le leader parlementaire de l'Opposition,
sur une question de règlement.
M. Lalonde: Question de règlement. On veut bien avoir des
réponses aux questions très pertinentes du député
de Mont-Royal, mais si on accepte - c'est pour cela que je me lève
à ce moment - que le premier ministre agisse simplement comme
maître de cérémonies pour que tous les ministres se
lèvent à tour de rôle pour dire ce qu'ils pensent du
développement économique d'une région, je ne pense pas que
ce soit le genre de questions ou de réponses qui soit prévu
à notre règlement. Si le premier ministre ne connaît pas
les réponses, qu'il dise qu'il ne les connaît pas tout
simplement.
Le Président: M. le leader parlementaire du
gouvernement.
M. Bertrand: M. le Président, sur cette question de
règlement soulevée par le leader de l'Opposition, il était
évident, lorsque le député de Mont-Royal a posé sa
question, qu'il se référait aux décisions que le
gouvernement avait prises relativement aux sommes dégagées pour
tenter de régler certains problèmes, entre autres, au niveau du
chômage, dans la région du Bas-Saint-Laurent-Gaspésie. Or,
la personne qui a la responsabilité de la défense des
crédits, c'est-à-dire des dépenses du gouvernement pour
l'année 1983-1984, c'est le ministre délégué
à l'administration, président du Conseil du trésor. Il
m'apparaît tout à fait normal que le ministre puisse
répondre à cette question puisqu'il connaît très
bien tous les chiffres relatifs aux priorités qui ont été
retenues dans cette région.
Le Président: Je vous en prie. J'ai écouté
effectivement l'argumentation des deux côtés de la Chambre. Je
dois dire qu'effectivement, le préambule, interdit en principe, du
député de Mont-Royal à la question additionnelle a ouvert
la porte très largement. C'est pourquoi j'ai permis, comme je l'ai
souligné tantôt, non pas une question de privilège - ce
n'en était pas une - mais que le premier ministre réponde tout
aussi largement. Toutefois, il est évident qu'à partir du moment
où une question est posée, on pourrait toujours en
référer à un ministre ou à un autre, ou finalement,
presque toujours à l'ensemble du Conseil des ministres et cela
détournerait la période de questions de son but. Dans les
circonstances, il m'apparaît plus à propos, les réponses
ayant été données, tout en indiquant une fois encore,
comment des préambules à des questions complémentaires
peuvent être nuisibles à la période des questions, il
m'apparaît préférable, plus indiqué, compte tenu de
l'esprit de la période de questions, de passer à une nouvelle
question principale, celle du député d'Argenteuil.
Des voix: Bravo!
Les recommandations du conciliateur dans le conflit
des enseignants
M. Ryan: M. le Président, le premier ministre à qui
j'adresse ma question n'éprouvera pas la tentation de la renvoyer au
ministre de l'Éducation parce que celui-ci est absent, pour cause de
maladie, me dit-on. Je crois que le premier ministre est parfaitement en mesure
de répondre à la question en deux volets que je veux lui adresser
à propos de problèmes dont le Conseil des ministres doit
être saisi, d'après ce que les journaux nous rapportent,
aujourd'hui et qui, par conséquent, revêtent un caractère
d'urgence spéciale.
Premièrement, le gouvernement, à la suite du vote qui a
été pris chez les enseignants ces dernières semaines,
entend-il prendre à son propre compte les recommandations contenues dans
le rapport du conciliateur Raymond Désilets en vue d'apporter un
règlement au conflit des enseignants? Et ceci, conformément
à des suggestions qui lui ont été faites de sources
nombreuses, en particulier le Conseil supérieur de l'éducation,
de nombreux éditorialistes et, si cela peut compter, l'Opposition.
Deuxièmement, si le gouvernement
entend assumer les recommandations du rapport Désilets, entend-il
procéder par voie législative, sinon pourquoi?
Troisièmement, le gouvernement - et là, je m'adresse
beaucoup plus spécialement au premier ministre - entend-il donner suite
à la requête qui lui a été faite par les organismes
scolaires les plus importants du Québec, c'est-à-dire la
Fédération des commissions scolaires catholiques, l'Association
des commissions scolaires protestantes, la Commission des écoles
catholiques de Montréal et le Protestant School Board of Greater
Montréal, de rencontrer ces organismes avant que le cabinet ne se
prononce sur la nouvelle version du projet de restructuration scolaire dont ces
organismes nous assurent qu'elle n'améliore en rien la version
première définie dans le livre blanc de juin dernier?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Lévesque (Taillon): M. le Président, je ferai
seulement remarquer au député d'Argenteuil, qui essaie de
reprendre le refrain de certains de ses collègues à propos de ce
qui semble être une ignorance totale de ce qu'est le travail en
équipe. Je ne sais pas si dans le temps où le
député d'Argenteuil dirigeait cette formation éminente qui
est devant nous, ou alors aujourd'hui que c'est le député de
Bonaventure, s'ils prétendent avoir à la fois toutes les
questions toutes les réponses et toutes les décisions. Je ne
marche pas comme cela. Alors, il arrive que lorsque, par exemple, un
député à qui on a posé une question qui ne regarde
absolument pas son domaine et sur un sujet qu'il ne connaît pas
c'est-à-dire la route 132, en Gaspésie...
M. Ciaccia: Question de privilège.
Le Président: Question de privilège, M. le premier
ministre.
M. Lévesque (Taillon): ...il me semble que c'est normal
de...
Le Président: Question de privilège, M. le premier
ministre. M. le député de Mont-Royal.
M. Ciaccia: M. le Président, le premier ministre vient de
suggérer qu'on m'a passé une question qui ne concerne pas mon
domaine du tout. Je voudrais dire au premier ministre que je suis le
porte-parole du ministère de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme
pour ma formation politique et la question que j'ai posée était
tout à fait dans le domaine que le parti m'a confié. Au lieu
d'envoyer des insultes à ce côté, limitez-vous donc
à répondre aux questions.
Une voix: Très bieni
Le Président: M. le premier ministre.
M. Lévesque (Taillon): Je m'excuse, M. le
Président. Je dois m'excuser, je ne savais pas que le
député de Mont-Royal était en rodage sur un nouveau
dossier.
Le Président: À l'ordre!
M. Lévesque (Taillon): J'aurais pu m'en douter. M. le
Président, c'est vrai que la question de l'ensemble, enfin ce qu'on peut
appeler la fin des négociations, la fin - on l'espère en tout cas
- de ce conflit qui avait trop duré, c'est vrai, dis-je, que le sujet
est venu aujourd'hui au Conseil des ministres. Les deux questions
spécifiques du député d'Argenteuil étaient, je
crois: Qu'est-ce qui arrive par rapport au rapport Désilets? Il y a
l'espèce de pondération de vote qui a été faite du
côté des enseignants. Ensuite: Est-ce qu'il y aura de la
législation? C'est cela? Et, troisièmement, qu'en est-il de la
rencontre qui a été demandée par les organismes
mentionnés?
Premièrement, pour ce qui est du rapport Désilets, pour
pouvoir s'appliquer, conformément à un article qui prévoit
cela déjà dans la loi 105, c'est-à-dire que les deux
parties s'entendent là-dessus, c'est un rapport qui devra demander qu'il
y ait une reconsidération de la part des enseignants. J'en donnerai une
seule raison très simple. Il y a une cinquantaine de millions de dollars
-on ne prendra pas de l'argent neuf dans les fonds publics d'aucune
façon pour combler ce trou - impliqués dans le rapport
Désilets et qui, eux-mêmes, impliquent des concessions de la part
des enseignants. On pourra entrer dans plus de détails au besoin.
Donc, le ministre de l'Éducation a été
mandaté par le Conseil des ministres, il n'y a pas de mystère
là-dedans, pour dire aux porte-parole des enseignants qui sont,
paraît-il, réceptifs à une certaine reconsidération
de cette décision un peu complexe, parce que d'une part sur 30% de
votants chez les enseignants, il y avait une toute petite majorité de
50,8% qui était en faveur du rapport Désilets et, par ailleurs,
il y avait deux ou trois syndicats parmi les unités syndicales qui
étaient contre - deux ou trois de majorité - et, de plus, ils ont
fait une sorte de pondération par rapport au vote auquel ils ont droit
dans leur instance, ce qui fait qu'à un moment donné une chatte a
de la misère à trouver ses petits, mais cela les a menés
à une conclusion qui était qu'ils n'acceptaient pas...
Or, à cause du fait qu'ils sont impliqués pour de l'argent
- des sommes substantielles dans le rapport Désilets - eux-mêmes
comme enseignants pour que cela puisse s'appliquer, il faudrait qu'on se
mette
d'accord. Sinon, on retourne essentiellement à ce qui avait
été proposé conjointement comme cadre de règlement
par le ministre de l'Éducation, des représentants des commissions
scolaires, des représentants des cégeps, etc., on retourne,
dis-je, au cadre de règlement du mois de février. Et cela reste
à voir dans les jours qui viennent.
Pour ce qui est de la législation, bien sûr, il faudra un
texte législatif, un peu une loi omnibus qui devra corriger certaines
choses, qui pourra incorporer aussi certaines de ces nouvelles additions ou ces
nouvelles corrections aux décrets. On croit pouvoir s'engager à
déposer ce texte législatif d'ici la fin de la semaine prochaine
normalement. (15 h 50)
Je dois dire en passant que cela coûte quelques centaines de
milliers de dollars, mais, par ailleurs, la traduction des décrets
demandée par un éminent juge, entre autres, qui faisait partie
des considérants ou des conclusions de son jugement, est à peu
près terminée. Cela devrait l'être avant que la loi soit
déposée.
Troisièmement, en ce qui concerne la demande de rencontre des
commissions scolaires et autres organismes, enfin, de l'ensemble des organismes
qui m'ont envoyé ce télégramme ou ce message, si le
député d'Argenteuil l'a bien lu, il s'agit d'avoir une rencontre,
disent-ils, dans les plus brefs délais, avant que la loi de
réforme de structure scolaire soit déposée. Non, pardon,
qu'elle ait passé... Je m'excuse.
M. Ryan: Question de règlement, M. le
Président.
M. Lévesque (Taillon): De règlement?
M. Ryan: Juste une précision, M. le premier ministre, je
m'excuse. C'est qu'ils demandent une rencontre avant que le Conseil des
ministres ne se soit prononcé sur le projet de loi.
M. Lévesque (Taillon): Ce n'est pas une question de
règlement.
Le Président: Ce n'est pas une question de
règlement, M. le député.
M. Lévesque (Taillon): C'est simplement une correction que
j'étais en train de faire.
Des voix: Oh!
M. Bertrand: On vous précède, vous savez.
M. Lévesque (Taillon): La langue m'avait fourché.
Spécifiquement, ils demandent une rencontre avant que le texte de loi,
le projet législatif, soit passé au Conseil des ministres. Je
peux m'engager à cela. Je ne peux pas dire quel jour, mais, enfin, ce
n'est pas encore venu au Conseil des ministres et on s'arrangera pour tenir une
rencontre avant.
Le Président: Question additionnelle, sans
préambule, M. le député d'Argenteuil.
M. Ryan: Est-ce que je dois bien comprendre que le premier
ministre a dit que le gouvernement était réceptif à causer
avec les syndicats d'enseignants pour voir s'ils pourraient se retrouver
quelque part en tenant compte des implications financières du rapport
Désilets? Deuxièmement, le projet de loi qui sera
déposé au cours des prochains jours comprendra-t-il autre chose
que la version anglaise des décrets et dans quelle mesure
comportera-t-il des éléments empruntés au cadre de
règlement du 9 février et au rapport Désilets?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Lévesque (Taillon): M. le Président, il me
semblait que j'avais été clair, mais, enfin, je vais essayer de
l'être davantage. Cela va m'aider à préciser.
Le projet de loi comprendra les corrections qui apparaissent
nécessaires, y compris même des corrections de coquilles, je
crois, et certaines choses normatives qui, de toute façon,
étaient là, en ce qui concerne les enseignants, depuis le mois de
février. Il comprendra le cadre de règlement de février,
mais avec la possibilité d'y ajouter, sur accord, sur entente, comme
c'était déjà dans la loi no 105, qu'en cours de route on
puisse modifier ces choses-là, mais il faut que ce soit un consensus.
À ce moment-là, le rapport Désilets pourrait
éventuellement s'appliquer. Si cela vient plus vite, tant mieux; on le
fera plus vite. Pour l'instant, ce qu'on peut prévoir, c'est qu'il y
aurait au moins l'essentiel de ce cadre de règlement de février.
J'ajouterai une chose aussi à laquelle le gouvernement s'est
engagé. C'est qu'il y aura également l'autorisation
nécessaire - je pense que cela demande une loi - pour la compensation
aux employés à temps partiel à revenu modeste qui a
été promise et qui sera faite sous forme forfaitaire. Je pense
que cela demande une autorisation législative. En tout cas, c'est
prévu dans la loi.
Une voix: Oui.
Le Président: Question additionnelle, Mme la
députée de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, ma question
additionnelle s'adresse au premier ministre. Lors des négociations dans
le domaine des affaires sociales avec la Fédération des affaires
sociales, des
propositions ont été faites par le gouvernement et ont
été entérinées par les membres de la FAS. Par
contre, il demeure une ambiguïté profonde compte tenu que les
membres ont accepté ces propositions majoritairement et que la
fédération, jusqu'à aujourd'hui, à ma connaissance,
n'a pas signé d'entente quant à l'approbation officielle de ces
propositions. Le premier ministre peut-il nous dire s'il entend garantir, par
voie de législation, ces dernières propositions qui avaient
été faites aux syndiqués de la FAS et que ces derniers ont
quand même approuvées majoritairement? Ils sont retournés
au travail par la suite.
Le Président: M. le premier ministre.
M. Lévesque (Taillon): Non, M. le Président. Il ne
s'agit pas du même cas du tout. Dans le cas du temps partiel, c'est un
engagement du gouvernement. Lors des discussions qu'il y a eu avec les
syndicats, cela ne semblait pas les préoccuper prioritairement; nous, en
équité, il nous paraissait que c'était nécessaire.
Alors, ce sera dans la loi omnibus, si vous voulez, qui viendrait la semaine
prochaine.
Pour ce qui concerne la proposition, enfin, les choses essentiellement
normatives qui touchaient la FAS, il ne faut pas oublier que le
président de la FAS, M. Lessard, se promène sur toutes les
tribunes possibles et imaginables pour dire qu'il ne signera pas. Par ailleurs,
il ne faut pas oublier - ce n'est pas comme le rapport Désilets, les
conciliateurs - que c'était à la suite de rencontres qu'on avait
eues au mois de janvier avec l'ensemble des interlocuteurs syndicaux, pendant
trois ou quatre jours, et cela a débouché sur des rencontres,
entre autres, avec le Syndicat des infirmières, avec le Syndicat des
fonctionnaires, et ces syndicats ont accepté de signer, sur la base des
propositions qui avaient été mises sur la table. À partir
du moment où d'autres ont signé, il est évident qu'en
toute équité, en toute bonne foi, il faudrait que la FAS accepte
elle aussi pour qu'on puisse entrer ce cadre de règlement du mois de
janvier dans les décrets. Le jour où elle le ferait, cela
entrerait, mais on ne peut le faire sans... Si on le fait comme ça, pour
des gens qui ne l'ont pas accepté pendant que d'autres l'ont
accepté, il y a quelque chose qui ne fonctionne plus du tout.
Le Président: Question principale, M. le
député de Laurier.
Programmes de création d'emplois
M. Sirros: En l'absence du ministre de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu, j'adresserai ma question au premier ministre.
Cela concerne les programmes de création d'emplois dont il parlait tout
à l'heure. Effectivement, le Québec investit à peu
près 170 000 000 $ dans ces programmes. C'est un montant impressionnant,
important qui donne l'impression que le gouvernement fait quelque chose;
malheureusement, ce n'est qu'une impression selon les études propres du
ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu,
dans le sens que les programmes de création d'emplois se
révèlent un échec surtout par rapport au taux
d'intégration et de rétention sur le marché du travail.
C'est un jugement qui a été porté à l'attention du
ministère de la Main-d'Oeuvre il y a trois ans et une deuxième
fois il y a à peu près quinze mois. Ni dans l'un ni dans l'autre
cas, le gouvernement n'a fait quelque chose de substantiel et de réel
pour changer le fait que les critères ont été mal choisis
par rapport aux bénéficiaires et mal adaptés aux besoins
du marché.
De plus, dès le moment qu'il a été signalé
au gouvernement que ça ne fonctionnait pas, les sommes d'argent qui ont
été investies n'ont cessé de croître pour en arriver
aujourd'hui avec 170 000 000 $ dans des programmes que les services
d'évaluation du ministère de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu disent être un échec. J'aimerais
avoir au moins quelques explications là-dessus.
Le Président: M. le premier ministre.
M. Lévesque (Taillon): Je serai obligé de prendre
avis de la question pour la bonne et simple raison que le député
est mieux éclairé que moi ou que la plupart de mes
collègues sur ces rapports d'évaluation internes.
Des voix: Bravo!
M. Lévesque (Taillon): Pour la bonne et simple raison - je
ne remonterai pas à il y a trois ans ou à il y a quinze mois -
que, pendant les quelque deux ou trois mois qui ont
précédé ce jour, on a travaillé très fort
sur les crédits prévus pour 1983-1984, y compris les programmes
de création d'emplois. On nous dit, au contraire, qu'expérience
faite, par exemple, le bon d'emploi - et cela nous a été
confirmé par des interlocuteurs qui viennent et du milieu patronal et du
milieu syndical - dans un contexte économique comme celui qu'on
connaît, a servi au-delà de toute espérance les jeunes qui
l'ont pris et qui sont allés à la recherche d'un emploi.
Des voix: Ah! Ah! Ah!
M. Lévesque (Taillon): Deuxièmement, dans le cas de
PECEC, qui est un programme qui existe depuis deux ou trois
ans, un programme de création d'emplois communautaires, il y a un
test très facile à faire dans le contexte économique
actuel; il s'agit essentiellement de créer de nouvelles entreprises, de
petites entreprises pour la plupart. Le test appliqué est celui-ci:
Est-ce que le taux de faillite - renversez cela, ce qui revient à dire
le taux de rétention d'emplois - est comparable à ce qui se passe
sur le marché? On nous dit: C'est un peu en dessous. Le taux de faillite
des petites entreprises, qui ont été lancées avec une
certaine injection de fonds publics et, ordinairement, avec cinq ou dix fois
plus de fonds privés que cela a permis de s'agglutiner pour créer
des entreprises, sur un an et demi maintenant, à peu près, est
inférieur au taux de faillite qu'on retrouve dans l'ensemble des petites
et moyennes entreprises au Québec, hélas.
Donc, je ne vois pas très bien où le député
de Laurier a pris ses renseignements; s'il veut être plus précis,
on verra. J'ajouterai simplement, puisqu'on parle de création d'emplois,
que 79 000 000 $ déjà prévus aux crédits,
c'est-à-dire 17% de la marge de manoeuvre d'environ 400 000 000 $ dont
dispose le gouvernement, sont attribués cette année dès le
départ à la région qui préoccupait le
député de Mont-Royal: le Bas-Saint-Laurent et la Gaspésie.
17% des fonds seront disponibles - cela montre à quel point le
gouvernement tient compte de la situation - pour une population qui, elle,
n'est que de 3,8% de la population de l'ensemble du Québec.
Le Président: Mme la députée de Maisonneuve.
(16 heures)
Le fonds de solidarité de la FTQ
Mme Harel: II y a bientôt un mois et demi, la FTQ, la
Fédération des travailleurs du Québec, annonçait
son intention de mettre sur pied un fonds d'investissement volontaire de 200
000 000 $ pour que les travailleurs et les travailleuses
intéressés à y consacrer leurs économies puissent
participer à la création d'emplois dans l'industrie
manufacturière. Je voudrais savoir de la part du ministre de
l'Industrie, du Commerce et du Tourisme où en est rendu exactement le
projet au moment où on se parle. S'il y a d'autres centrales syndicales
qui ont manifesté leur intérêt pour un tel projet. Si une
politique sérieuse d'investissement a pu être
préparée. Il y a, je crois, des fonctionnaires du
ministère de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme qui ont
travaillé avec la Fédération des travailleurs du
Québec. Si donc une politique sérieuse va garantir les sommes
économisées ainsi investies par les travailleurs? Si une forme de
participation à la gestion de l'entreprise pourra être
assurée à ceux qui y participeront?
Le Président: M. le ministre de l'Industrie, du Commerce
et du Tourisme.
M. Biron: M. le Président, c'est exact qu'il y a environ
un mois et demi, la Fédération des travailleurs du Québec
annonçait la création d'un fonds de solidarité pour
investir des sommes d'argent dans des PME québécoises. Ce fonds
de solidarité était financé, en grande partie, par des
travailleurs membres de la Fédération des travailleurs du
Québec. Or, depuis ce temps, le président de la
Fédération des travailleurs du Québec a écrit au
premier ministre, le secrétaire général, M. Daoust, a
correspondu avec moi à quelques reprises. Nous nous sommes
rencontrés aussi à quelques reprises.
Je peux dire, aujourd'hui, que le ministère de l'Industrie, du
Commerce et du Tourisme, au nom du gouvernement du Québec, a
accepté de déléguer des hauts fonctionnaires auprès
de la Fédération des travailleurs du Québec
premièrement pour les aider à terminer la préparation du
concept final du fonds de solidarité; deuxièmement, pour mettre
en place la mécanique nécessaire pour assurer au moins que les
travailleurs et les travailleuses qui vont investir dans ce fonds aient une
certaine garantie que leur investissement est le meilleur possible. Nous ne
voudrions pas que ce fonds investisse dans toutes les entreprises en faillite.
Il faut, au contraire, que ce fonds investisse dans des entreprises qui ont une
chance de survie, qui ont une chance d'avenir.
Nous sommes aussi à préparer avec la
Fédération des travailleurs du Québec un projet de loi
privé pour permettre au fonds de pouvoir fonctionner. Finalement, j'ai
garanti à M. Daoust de la Fédération des travailleurs du
Québec toute l'aide technique nécessaire à la fois du
ministère de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme, de la
Société de développement industriel du Québec et du
Centre de recherche industrielle du Québec afin d'assurer le maximum de
succès à ce fonds. Finalement, oui, la participation des
travailleurs aux décisions de l'entreprise et à la gestion, c'est
cela qui est essentiel. Bien sûr, la FTQ veut bien investir dans le
capital-actions des entreprises, mais surtout elle veut changer l'habitude de
la société de faire des confrontations, elle veut faire en sorte
que les deux parties, patronale et ouvrière, puissent se parler mieux,
puissent se concerter davantage et puissent prendre part ensemble aux
décisions importantes et au développement de l'entreprise. Dans
ce sens, il y aura des garanties que les travailleurs vont participer à
la gestion de l'entreprise.
La dernière question, Mme la députée
de Maisonneuve, concerne les autres centrales syndicales. La CSD est
déjà intéressée dans plusieurs projets de
participation. Nous sommes à discuter présentement avec M.
Hétu, le président. La CSN est intéressée aussi
dans certains projets de participation. On est en train aussi de discuter avec
certains permanents de la CSN qui sont intéressés à ce
projet.
Finalement, je pense qu'ensemble, les centrales syndicales
réalisent que dans le monde économique il faut maintenant
davantage de participation aux décisions, compte tenu que les
travailleurs et les travailleuses sont prêts à participer avec
leur intelligence au développement des entreprises. Je pense que le
fonds a une chance de succès.
M. Levesque (Bonaventure): M. le Président...
Le Président: M. le chef de l'Opposition, en
complémentaire.
M. Levesque (Bonaventure): Simplement une précision au
ministre. Est-ce que le plan ne suggère pas également une
contribution financière de la part du gouvernement du Québec?
Est-ce que cette contribution financière est acceptée par le
gouvernement? Est-ce que le ministre voudrait nous indiquer à quel
endroit on peut trouver cette contribution dans les crédits
1983-1984?
Le Président: M. le ministre de l'Industrie, du Commerce
et du Tourisme.
M. Biron: Le plan suggère au gouvernement, demande au
gouvernement une contribution financière. C'est exact. Nous n'en sommes
pas rendus à ce point de la discussion. Là où on s'est
entendu déjà avec la FTQ, c'est de faire en sorte que dans chaque
entreprise où le fonds de solidarité va intervenir, nous verrons,
avec les programmes réguliers de la SDI, de PECEC ou d'autres
ministères ce qu'on peut faire pour donner le maximum d'aide possible.
En plus, le fonds de solidarité demandait un dégrèvement
fiscal additionnel aux travailleurs et je pense bien que le ministre des
Finances en a tenu compte lorsque la Fédération des travailleurs
du Québec lui a écrit.
Le Président: M. le député d'Outremont.
Le poste d'adjoint parlementaire du
député de Frontenac
M. Fortier: M. le Président, le premier ministre, hier,
à la suite d'une question que je lui posais, me confirmait que le
député de Frontenac demeurait toujours adjoint parlementaire,
qu'il recevait toujours le salaire additionnel auquel ce titre, cette fonction
lui donne droit, 8400 $ par année, mais qu'il ne remplissait aucune
fonction, donc qu'il ne travaillait pas. Je crois que sur ce dernier point -
d'ailleurs le premier ministre avait totalement raison - puisque les journaux
nous apprennent que M. Grégoire est présentement à Miami,
au motel Suez, sous 24 degrés centigrade, il semblerait qu'il ne remplit
pas là une fonction à titre d'adjoint parlementaire.
Cependant, je crois que le premier ministre faisait allusion à un
principe, et là-dessus tous s'accordent pour dire, nous-mêmes y
souscrivons, qu'une personne accusée d'un crime quel qu'il soit est
présumée innocente jusqu'à ce qu'elle soit entendue ou
jusqu'à ce qu'elle soit condamnée ou jusqu'à ce qu'elle
soit exonérée. Il n'en demeure pas moins que dans la fonction
publique il est normal de suspendre, sans traitement, une personne
incriminée jusqu'à ce qu'elle soit exonérée ou
jusqu'à ce qu'elle soit condamnée.
Ma question est celle-ci: Ne croyez-vous pas, M. le Président, M.
le premier ministre, que dans le cas qui nous préoccupe, le
député de Frontenac devrait être suspendu sans traitement
en tant qu'adjoint parlementaire jusqu'à ce qu'une décision
finale soit prise par la justice dans ce cas, quitte à faire les
arrangements qui s'imposeront par la suite?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Lévesque (Taillon): M. le Président, je serai
très bref et je ferai un aveu au député. Les questions
d'hier m'ont forcé à réfléchir quelque peu, c'est
normal, sur la question. Cela arrive que des questions soient utiles. Je dois
avouer que c'est rare. C'est vrai que forcément le député
de Frontenac ne gagne pas son traitement d'adjoint parlementaire puisqu'il a
décidé lui-même de s'extraire des dossiers jusqu'à
ce que son procès soit tenu. Comme tout le monde - je ne me souvenais
plus du nom du motel - ce n'est pas si drôle que vous pensez, parce que,
comme tout le monde, j'apprenais de plus ce matin qu'il faisait un
séjour en Floride, ce qui est absolument son droit, mais il n'est pas
nécessairement très productif. Alors, j'ai demandé qu'on
le rejoigne. Je suis content qu'on m'ait donné l'adresse. On fera le
point rapidement là-dessus et j'en donnerai d'autres nouvelles.
Le Président: La période de questions est
terminée.
M. Fortier: Une question additionnelle s'il vous plaît.
Le Président: Très courte additionnelle.
M. Fortier: Écoutez, le premier ministre nous dit qu'il va
le rejoindre mais pour faire quoi? Est-ce qu'il va maintenir son salaire de
8400 $ par année? Ou que fera-t-il une fois qu'il lui aura
parlé?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Lévesque (Taillon): M. le Président, je suis
bien prêt à me faire suggérer des réflexions par le
député d'Outremont, mais on prendra la décision
nous-mêmes. D'accord?
Le Président: Fin de la période des questions.
Aux motions non annoncées, M. le ministre
délégué à la Science et à la
Technologie.
M. Paquette: M. le Président, je solliciterais...
Le Président: Un instant, M. le ministre.
M. Clair: Pour une question du député de
Richmond.
Le Président: II est exact. C'est vrai, M. le
député, je m'en excuse. Le ministre des Transports a un
complément de réponse à une question d'il y a deux
semaines.
Les travaux sur les routes nos 265 et 116 dans le
comté de Richmond
M. Clair: M. le Président, rapidement. C'était une
double question concernant les travaux sur la route no 265 et sur la route no
116 dans la région du député de Richmond. En ce qui
concerne la route 265, effectivement, j'ai annoncé l'année
dernière que plutôt que de construire une autoroute qui relierait
Thetford-Mines à l'autoroute 20 nous envisageons le contournement de
Saint-Ferdinand-d'Halifax ou Bernierville et l'amélioration de la route
no 265. Ces travaux sont en planification. Le montant total des investissements
prévus sur la route no 265 est de 7 750 000 $. Actuellement nous n'avons
pas encore l'autorisation de la Commission de protection du territoire
agricole, donc l'expropriation n'est pas faite. Nous prévoyons cependant
que les travaux pourraient débuter pour un montant de 1 750 000 $ sur
l'année budgétaire 1984-1985 et se poursuivre pendant quatre
années d'affilée pour être terminés en
l'année 1987-1988.
Quant aux travaux sur la route no 116, il s'agit de l'octroi de dix
contrats dont six sont prévus dans le comté d'Arthabaska
puisqu'on divise la route en tronçons. Il y a six tronçons dans
le comté d'Arthabaska et il y en a quatre dans le comté de
Richmond.
Sur les dix tronçons, un a déjà été
réalisé dans le comté de Richmond l'année
dernière pour un montant de 1 500 000 $. Le prochain contrat
prévu dans le comté de Richmond, c'est un contrat en 1984-1985
qui devrait débuter pour un montant de 2 100 000 $ dans le village de
Danville à proprement parler. (16 h 10)
En ce qui concerne la section d'Arthabaska, il y a deux contrats qui ont
été octroyés dans le comté d'Arthabaska
l'année dernière. Il y en a un autre qui devrait être
octroyé pour cette année. Donc, les dépenses en 1983-1984
sur l'année budgétaire en cause, prévues sur la route 116,
sont de 1 100 000 $. L'an dernier, elles ont été de 3 500 000 $.
On prévoit pour l'année prochaine être en mesure de
dépenser 2 100 000 $. Nous avons à faire face à des
contraintes normales en matière de construction routière à
notre époque, en matière d'expropriation, en matière de
respect des règles de l'environnement, de la Commission de protection du
territoire agricole. Puisque le député a fait signer une longue
pétition - j'ai eu l'occasion de discuter avec lui à plusieurs
reprises des travaux justifiés qu'il réclame pour son
comté en matière de voirie régionale - je voudrais
simplement, pour remettre les choses dans leur juste perspective, souligner
qu'en 1983-1984, en matière de nouvelles initiatives en voirie
régionale, son comté recevra la sixième plus grosse
enveloppe en termes de voirie régionale. C'est assez conforme à
la grandeur du réseau routier, à l'état du réseau
routier. Je peux même dire au député quels sont les six
premiers comtés. Le premier, c'est le comté d'Abitibi-Ouest.
À cause de son étendue, cela me surprendrait...
Le Président: M. le ministre des Transports, j'attire
votre attention sur le fait que vous êtes en complément de
réponse, que déjà une réponse est censée
être aussi courte que faire se peut et le complément de
réponse, encore plus court. S'il vous plaît!
M. Clair: M. le Président, puisque vous me le demandez, je
termine rapidement, en disant simplement que, l'année dernière,
le comté de Richmond a reçu la septième plus grosse
enveloppe en termes de voirie régionale. Cette année, il
reçoit la sixième. Je pense qu'il est placé pour faire des
jaloux des deux côtés de la Chambre.
Le Président: M. le député de Richmond.
M. Vallières: M. le Président, je suis heureux que
le ministre ait pris connaissance de la pétition. Par ailleurs, je veux
lui
indiquer que la réponse qu'il vient de donner à la
question est nettement insatisfaisante. Je veux que le ministre
précise...
Le Président: Sans préambule.
M. Vallières: ...en particulier, puisqu'il annonce des
investissements de façon prioritaire sur la route 116 dans la
région de Danville. Compte tenu que les quelque 4700 signataires de la
pétition qu'on a présentée tantôt demandent que les
travaux soient effectués prioritairement entre Danville et Richmond,
pourrait-il corriger son tir? En second lieu, dois-je comprendre, par la
réponse du ministre, que les gens de la région de Thetford-Mines,
à qui on a annoncé l'an passé des investissements de
l'ordre de 11 300 000 $ sur la route 265, vont devoir demeurer sur leur
appétit jusqu'à l'automne 1984?
Le Président: M. le ministre des Transports.
M. Clair: Très rapidement. Quant à la
priorité à accorder aux travaux dans le comté du
député, je n'ai pas d'objection à l'examiner. J'imagine
que, puisque j'ai donné instruction d'accélérer tous les
travaux sur l'ensemble de la route 116, c'est simplement à ces endroits
que l'emprise sera libérée le plus rapidement possible. Je n'ai
pas d'objection à l'examiner.
Par ailleurs, en ce qui concerne les travaux de 11 300 000 $ qui sont
prévus pour la route 265, ils incluent une partie du montant de 11 300
000 $ qui porte à proprement parler sur la route 265 et une autre partie
sur la route 116, puisque ce sont des routes qui suivent pendant un certain
temps le même tracé. Je pense que le député comprend
qu'à compter du moment où on prend la décision de
reconstruire une route cela ne veut pas dire que, dans les trois mois qui
suivent, les travaux commencent. Il faut respecter les normes que nous nous
sommes fixées comme société en matière de
protection des terres agricoles, de protection de l'environnement,
d'expropriation, règles que votre gouvernement a adoptées et que
nous respectons, ce qui fait que généralement, entre le moment de
la décision de reconstruire une route et les premiers travaux, il
s'écoule facilement de 20 à 24 mois.
Le Président: Motions non annoncées. M. le ministre
délégué à la Science et à la
Technologie.
La semaine de l'informatique au Québec
M. Gilbert Paquette M. Paquette: M. le Président,
j'aimerais solliciter le consentement de cette Assemblée pour
présenter une motion soulignant la semaine de l'informatique au
Québec.
Le Président: Y a-t-il consentement? M. le ministre.
M. Paquette: Merci, M. le Président, c'est cette semaine
la semaine de l'informatique au Québec. Actuellement, la
Fédération de l'informatique du Québec tient, à
Québec même, son premier congrès de fondation, ce qui
témoigne de l'essor et de l'importance qu'a pris cette question dans
notre société. Certaines découvertes scientifiques ont ce
don d'être à l'origine des plus grandes mutations sociales. Il en
a toujours été ainsi depuis le début de l'histoire de
l'humanité. On est passé de la société agricole
à la société féodale et, ensuite, à la
société industrielle, chaque fois sous l'impulsion d'une
invention particulièrement puissante, ayant particulièrement
d'impact sur nos vies.
Certains veulent réduire le phénomène de
l'informatique à une simple question d'efficacité ou de
productivité. Je pense qu'il est important, en cette semaine de
l'informatique, d'en souligner toutes les dimensions. En fait, si on se
rappelle ce qui s'est passé il y a déjà plusieurs
centaines d'années au moment de l'introduction de l'imprimerie, c'est
une invention qui, à première vue, semblait simplement une
amélioration dans la reproduction d'écrits et de documents, mais
qui, finalement, a suscité un essor économique et culturel et a
permis aussi de démocratiser la culture, de permettre à tous les
gens d'avoir accès à des connaissances qui étaient
reproduites sous forme de livres ou autrement. Également, les journaux
sont nés quelques années plus tard et ont amené de grandes
transformations.
Une transformation de cette importance amène toujours son
cortège de craintes en même temps que ses plus grands
défis. Il va de soi que, pour le gouvernement du Québec,
l'importance économique de l'informatique saute aux yeux; il va de soi
que, sans une implication très vigoureuse de tous les agents
socio-économiques du Québec, le Québec ne pourra affronter
la concurrence mondiale si nos entreprises, dans tous les secteurs, n'utilisent
pas cet outil privilégié qu'est l'informatique. Mais
également, je pense qu'il est bon de se rappeler que ce
développement technologique, comme les autres, doit être fait au
service des Québécois et qu'il doit être fait dans la
perspective non pas de réduire les emplois, mais d'augmenter les
services, d'augmenter l'activité et d'augmenter la qualité de vie
des Québécois et des Québécoises.
C'est dans cet esprit que le
gouvernement du Québec a décidé, il y a quelques
semaines, de créer une table de concertation qui tiendra compte, bien
sûr, d'abord des dimensions économiques, mais également des
dimensions sociales et culturelles de l'informatisation de notre
société. J'aurai le plaisir, d'ici à environ un mois, de
déposer une synthèse des actions que le gouvernement entend mener
au cours de l'année qui vient. Mais, pour le moment, j'aimerais
simplement que cette Assemblée, et c'est le texte de la motion, souligne
cette semaine de l'informatique, qu'elle assure de son appui tous ceux et
celles qui oeuvrent dans ce domaine d'avenir et, plus particulièrement,
la Fédération de l'informatique du Québec qui tient
actuellement son premier congrès.
Je pense que notre société a commencé une prise de
conscience qu'elle doit terminer, qu'elle doit enclencher sur l'action de
façon concertée. Nous avons un projet collectif très
important à entreprendre et j'invite tous les parlementaires de cette
Assemblée à s'intéresser de plus en plus à ces
questions et à appuyer tous les agents socio-économiques des
milieux scientifiques qui s'impliquent de plus en plus dans l'informatisation
de la société au Québec. Je vous remercie.
Le Président: Mme la députée de
Jacques-Cartier.
Mme Joan Dougherty
Mme Dougherty: C'est avec plaisir que je réponds, au nom
de mes collègues, à la motion présentée par le
ministre délégué à la Science et à la
Technologie.
La relance économique que tout le monde cherche dépendra
de notre capacité d'être concurrentiel sur le plan global, sur le
plan international. Il est largement reconnu que le moteur principal de la
croissance économique est l'innovation, à savoir la
création de connaissances nouvelles, de nouveaux produits et de
nouvelles méthodes ou nouveaux processus. Le système
économique international est en proie à une mutation profonde,
provoquée par des augmentations phénoménales de la
productivité issues de la révolution microélectronique.
(16 h 20)
Aujourd'hui, le multiplicateur de productivité par excellence est
la microélectronique. Les technologies fondées sur l'utilisation
des circuits intégrés causent des changements quantitatifs d'une
ampleur telle qu'il faut les qualifier non seulement de nouvelle
révolution technique mais aussi de brusque accroissement des
capacités d'action de l'homme.
Les conséquences économiques, sociales et culturelles de
cette révolution sont d'ores et déjà immenses. Elles le
seront encore davantage dans l'avenir. L'avenir des entreprises et des nations
sera grandement conditionné par la place qu'elles auront su se
ménager sur l'échiquier de l'informatique.
Au cours des derniers mois, le Québec était inondé
d'une foule de déclarations d'experts qui sonnent l'alarme pour le
Québec parce que nous risquons de manquer le bateau. On prédit
que d'ici dix ans, 75% de la main-d'oeuvre québécoise sera en
rapport quotidien avec les ordinateurs.
Les manchettes des journaux parlent des nouveaux analphabets. Le virage
technologique dérape dès le départ. Entrave à
l'Université Laval. On parle de la timidité du Québec. Une
autre manchette: "Le Québec n'est pas propice à l'essor de
l'informatique." Il faut faire face au défi d'abord pour préparer
nos jeunes et aussi les adultes, autrement nous risquons de former de futurs
chômeurs. 50 000 computers promised to the schools may look as though we
intend to meet the challenge. But there is a danger. The computer is not a new
toy like a new telephone. It opens whole new ways of learning and teaching.
Let's not be so much in a rush to be spectacular that we underestimate the
importance of preparing our teachers to use this new instrument to its full
potential and in a constructive manner. Notre porte-parole en éducation
a l'intention de sortir un mémoire sur ce sujet demain.
I urge the Government to exploit the many millions of dollars available
to us through the National Training Act. Already in British Columbia, 14 000
000 $ of projects have been approved under this Act, mostly for the training of
their youth and their women, because women will be most affected by this
computer revolution in the new technology.
What is Québec doing to exploit the National Training Act Funds?
What is the Québec Government doing to create learning centers for drop
outs, for unemployed youth with the funds for the National Training Act? Are we
going to let the drive for sovereignty get in the way of preparing our young
people for future productive lives?
Micro-électronique represents a key instrument to make possible
the technological conversion that the Government talks so much about.
II est urgent que le Québec accélère ses
initiatives sur tous les fronts. Il faudrait faire plus que faire adopter des
motions et créer des tables de concertation, sinon le virage
technologique ne sera qu'un beau catalogue de voeux pieux. Merci, M. le
Président.
Le Président: M. le ministre délégué
à la Science et à la Technologie.
M. Gilbert Paquette (réplique)
M. Paquette: M. le Président, très
brièvement, pour répondre à quelques remarques de la
députée, parce que je n'avais pas voulu placer cette motion dans
un contexte polémique. Je voudrais simplement lui souligner
qu'actuellement, lorsqu'on parle de préparer les jeunes à la
révolution informatique, nous avons, mon collègue le ministre de
l'Éducation et moi, annoncé, il y a quelques semaines,
l'introduction, sur une période de cinq ans, de 43 000 micro-ordinateurs
dans les écoles. Je pense que la députée reconnaîtra
que c'est un projet extrêmement ambitieux en ce sens qu'il existe
actuellement en Ontario, dans les écoles ontariennes, 8000
microordinateurs. Il y en_ a environ 50 000 dans l'ensemble des
États-Unis d'Amérique. Évidemment, dans cinq ans, les
États-Unis seront rendus beaucoup plus loin. Mais pour une population
dont le nombre est 20 fois moindre au Québec, je pense que l'effort qui
est entrepris et qui sera réalisé dès l'automne pour
permettre à nos jeunes de préparer leur avenir est sans
précédent en Amérique du Nord. C'est important de le
souligner. Je pense que les Québécois sont capables de relever ce
défi.
On parle également de l'utilisation de la caisse d'accroissement
des compétences professionnelles. Il y a une quarantaine de
collèges d'enseignement général et professionnel qui ont
soumis des projets que nous avons l'intention d'appuyer, d'ailleurs
au-delà de ce qu'ils pourront obtenir de nos taxes que l'on envoie au
gouvernement fédéral et qui peuvent nous revenir par la caisse
d'accroissement des compétences professionnelles. Nous avons l'intention
d'appuyer encore davantage par l'établissement de centres
spécialisés dans les cégeps.
J'ai annoncé, hier, la création du premier de nos centres
de recherche appliquée dans le domaine de l'informatique, au chapitre de
la conception et de la fabrication assistées par ordinateur. C'est un
projet de 6 000 000 $. Nous avons l'intention de créer plusieurs de ces
centres.
Nous sommes à terminer, mes collègues des Communications,
de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme et moi-même,
l'élaboration d'une politique de la bureautique qui permettra d'utiliser
les investissements gouvernementaux.
Alors, ce serait faire injure aux agents socio-économiques qui
ont lancé énormément de projets depuis un an - il y a
énormément d'entreprises qui ont été mises sur pied
-que de dire que nous nous contentons de nous concerter. Nous sommes
également engagés dans l'action, M. le Président.
Le Président: Cette motion est-elle adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Président: Adopté. M. le ministre du Loisir, de
la Chasse et de la Pêche.
Félicitations à Mlle Sylvie
Daigle,
M. Louis Grenier, Mlle Maryse Perreault
et M. Michel Delisle
M. Guy Chevrette
M. Chevrette: M. le Président, je voudrais
également solliciter le consentement de la Chambre afin de
présenter une motion de félicitations à des jeunes
Québécois qui se sont distingués, cette semaine, à
Tokyo, lors des championnats mondiaux de patinage de vitesse en salle.
Le Président: Est-ce qu'il y a consentement?
Des voix: Consentement.
Le Président: M. le ministre.
M. Chevrette: Merci, M. le Président. Je voudrais inviter
cette Assemblée à se joindre à moi pour féliciter,
tout d'abord, Mlle Sylvie Daigle, de Sherbrooke, et, d'une façon
particulière également, M. Louis Grenier, de Sainte-Foy, pour
leur magnifique performance lors des championnats mondiaux de patinage de
vitesse en salle, cette semaine, à Tokyo. Je dois vous dire que ces deux
jeunes ont presque tout raflé ce qu'il était possible d'obtenir
en termes de médailles.
De plus, d'autres jeunes Québécois se sont signalés
également. Je pense, entre autres, à Maryse Perreault, de
Sherbrooke, et à Michel Delisle également, un autre
Québécois. Tous ces jeunes Québécois sont
maintenant reconnus, sur la scène mondiale, comme les champions dans
leur discipline. Ce qui prouve jusqu'à quel point le degré
d'excellence de notre élite sportive dans ce domaine est maintenant
chose reconnue. J'espère que ces succès pourront hâter nos
travaux dans l'élaboration d'une politique d'élites au chapitre
du sport québécois.
Nos athlètes québécois ont acquis une solide
réputation. Je voudrais, au nom de tous mes collègues ici
présents, présenter à tous ces jeunes mes plus
sincères félicitations et les soutenir, les encourager à
poursuivre leurs efforts individuels pour obtenir des objectifs d'excellence
comme ceux qu'ils ont obtenus. Merci.
Le Président: M. le député de
Louis-Hébert.
M. Réjean Doyon
M. Doyon: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir de me
joindre à la motion de félicitations qui est devant cette
Assemblée. En effet, les deux jeunes Québécois, Mlle
Daigle et M. Grenier, nous font honneur. Le Canada a, comme l'écrit le
journal, effectué une véritable razzia au tableau des
médailles au cours du championnat mondial. Je signale aussi,
particulièrement en ce qui concerne M. Grenier - Mlle Daigle est de
Sherbrooke -qu'il est de la ville de Sainte-Foy, dans le comté que je
représente.
M. le Président, cette Assemblée me permettra de souligner
qu'à la ville de Sainte-Foy, il y a maintenant, depuis 1976, une
tradition en patinage de vitesse. La ville de Sainte-Foy est la première
ville et une des seules au Québec à avoir un anneau de glace de
patinage de vitesse. La ville de Sainte-Foy a pris cette initiative à
ses propres frais. Elle l'entretient à ses propres frais. Selon mes
renseignements, cela coûte entre 7000 $ et 8000 $ chaque année
sans compter le travail des nombreux bénévoles qui se
dévouent à encourager les jeunes. (16 h 30)
Je ne voudrais pas passer sous silence les performances de M. Grenier et
de Mlle Daigle, de même que celles de deux autres citoyens de la ville de
Sainte-Foy en patinage de vitesse, qui sont les fils du juge en chef des
Sessions de la paix à Québec, l'honorable juge François
Tremblay, dont les deux fils, depuis de nombreuses années, s'adonnent au
patinage de vitesse à Sainte-Foy. Depuis 1976, la ville de Sainte-Foy
s'est fait une spécialité du patinage de vitesse; elle y consacre
des montants importants et on m'informe que, sur la dizaine ou la douzaine de
semaines durant lesquelles l'anneau de glace est en fonction, il y a entre 25
000 et 30 000 patineurs qui y ont accès. Je pense qu'il faut le
souligner.
Je veux aussi profiter de l'occasion pour féliciter d'autres
villes qui, à l'instar de Sainte-Foy, ont pris des initiatives
semblables. Je réfère plus particulièrement à Laval
et à Sherbrooke, à Vaudreuil ainsi qu'à Chicoutimi,
où il y a eu dernièrement une expérience qui a
été tentée dans ce domaine à la suite des Jeux du
Canada.
Je n'ai donc aucune réserve, je pense qu'ils ont amplement
mérité les lauriers qui sont les leurs. Je les félicite et
je leur souhaite bonne chance lors de tous les autres championnats où
ils auront l'occasion de nous faire honneur.
Des voix: Bravo!
Le Président: Cette motion est-elle adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Président: Adopté.
M. Doyon: M. le Président, j'aurais une motion non
annoncée.
Le Président: Je m'excuse, M. le député de
Louis-Hébert.
M. Doyon: Ma motion vise à demander l'assentiment de cette
Chambre pour féliciter le Parti québécois, qui a
réalisé dernièrement un de ses grands rêves, celui
d'être admis comme observateur à l'Internationale socialiste.
Le Président: Y a-t-il consentement? Il n'y a pas
consentement.
M. Doyon: Ah! Non! Volte-face!
Le Président: M. le leader parlementaire du
gouvernement.
M. Bertrand: M. le Président, comme ils y ont consenti,
nous n'avons plus besoin d'ajouter de consentement.
Le Président: Avis à la Chambre. M. le leader
parlementaire du gouvernement.
Travaux des commissions
M. Bertrand: M. le Président, je voudrais faire motion
pour que la commission parlementaire de la justice puisse siéger
à compter de 16 h 30 jusqu'à 18 heures et demain, de 10 heures
à 13 heures, pour étudier les projets de loi 106 et 107,
c'est-à-dire poursuivre les auditions relativement à ces deux
projets de loi. Voilà pour les motions.
Le Président: M. le leader parlementaire de
l'Opposition.
M. Lalonde: Vous avez bien dit de 10 heures à 13 heures
demain? Il y a une tradition qui veut qu'on arrête à 12 h 30
étant donné qu'on siège ici à 14 heures.
M. Bertrand: Très bien. Je corrige pour 12 h 30.
Le Président: Cette motion est-elle adoptée?
Adopté.
M. le leader parlementaire du gouvernement.
M. Bertrand: Je voudrais donner certaines réponses
à des questions qui sont au feuilleton. La première...
Recours à l'article 34
Le Président: Je m'excuse, M. le leader parlementaire,
mais il y a des questions en vertu de l'article 34.
M. Ciaccia: J'aurais une question en vertu de l'article 34.
Le Président: M. le député de
Mont-Royal.
M. Ciaccia: Le 29 mars, j'avais demandé au ministre de
l'Industrie, du Commerce et du Tourisme de déposer la liste des
subventions et des compagnies auprès desquelles son propre frère
aurait agi comme agent de négociation et desquelles il aurait
perçu des commissions. Le ministre s'était engagé, dans sa
réponse à ma question, à déposer cette liste. Ma
question au leader parlementaire est celle-ci: Quand pourrons-nous avoir une
copie de cette liste?
Le Président: M. le leader parlementaire du
gouvernement.
M. Bertrand: M. le Président, j'ai décidé de
prendre une bonne habitude maintenant avec les questions posées en vertu
de l'article 34, c'est d'en prendre note chaque fois qu'elles sont
formulées et ensuite m'assurer que j'obtiens des réponses dans
les délais les plus rapides. J'essaie de retrouver celle du 29 mars.
M. Ciaccia: C'était à la période des
questions.
M. Bertrand: Ah! Je m'excuse. Ce n'était pas en vertu de
l'article 34?
M. Ciaccia: Non.
M. Bertrand: D'accord. Je vais donc m'enquérir
auprès du ministre de son intention à ce sujet.
M. Ciaccia: Très bien.
Le Président: M. le leader parlementaire de
l'Opposition.
M. Lalonde: En vertu de l'article 34, M. le Président,
concernant les travaux de la commission parlementaire sur le saccage de la
Baie-James. J'avais déjà demandé au premier ministre de
déposer la liste des rencontres qui ont été tenues
à son bureau concernant le règlement hors cour. Effectivement, on
a reçu une liste, il y a deux semaines, au début de nos
séances.
D'autre part, pendant son témoignage, M. Laliberté, le
président-directeur général de la Société
d'énergie de la Baie-James, a fait référence à un
registre de présence ou à un registre d'accueil au bureau du
premier ministre qui ferait la preuve des allées et venues de certaines
personnes, enfin, des visiteurs au bureau du premier ministre. Est-ce que le
leader pourrait s'engager à déposer, à remettre à
la commission, à ses membres, le plus possible, les registres du bureau
du premier ministre, soit de Montréal, soit de Québec, durant
cette période, c'est-à-dire de décembre 1978, janvier,
février, mars 1979, pour nous permettre d'avancer dans nos travaux?
Le Président: M. le leader parlementaire du
gouvernement.
M. Bertrand: Je ne sais pas s'il s'agit vraiment d'une question
en vertu de l'article 34. Je sais que la commission parlementaire va reprendre
ses travaux. Nous savons que la commission parlementaire va reprendre ses
travaux demain matin, à 10 heures. Je veux bien prendre note de la
question qui m'est formulée par le leader de l'Opposition. Étant
donné qu'une commission parlementaire travaille sur cette question, il
serait peut-être tout à fait normal, peut-être plus correct,
si on suit le déroulement normal des travaux parlementaires, que ce type
de question puisse être posé directement aux personnes qui sont
présentes en commission parlementaire, que ce soient les
députés ministériels, le ministre responsable du dossier
devant la commission parlementaire ou les personnes qui viennent
témoigner, qui sont invitées à venir devant la commission
parlementaire.
Je préférerais, M. le Président, si vous n'y voyez
pas d'objection, que cela puisse se faire dans ce contexte plutôt qu'en
vertu de l'article 34. Je prends tout de même note de la question du
leader de l'Opposition.
Le Président: M. le député d'Outremont.
M. Fortier: M. le Président, on m'informe qu'un projet de
loi sera déposé incessamment sur Hydro-Québec qui
amènerait des changements substantiels au conseil d'administration
d'Hydro-Québec. Est-ce que ce projet de loi va être
déposé incessamment pour qu'on puisse en prendre connaissance
avant la fin de l'audition de la commission parlementaire dont on vient de
faire état?
Le Président: M. le leader parlementaire du
gouvernement.
M. Bertrand: II sera déposé la semaine
prochaine.
Le Président: M. le leader parlementaire, vous aviez
commencé à donner des réponses.
M. Bertrand: Oui, je voudrais d'abord répondre à
des questions qui m'ont été posées en vertu de l'article
34, dont une par Mme Dougherty, la députée de Jacques-Cartier,
relativement au projet de loi sur la réforme scolaire. Effectivement, je
peux lui dire que le projet de loi devrait être déposé
à l'Assemblée nationale avant la fin de la première partie
de la session, c'est-à-dire avant le 23 juin. Avant le 23 juin, le
projet de loi sera déposé à l'Assemblée
nationale.
Deuxièmement, à une question qui m'était
posée par le député d'Argenteuil relativement au
décret, à la loi, comment tout cela va se passer, je pense que
les réponses ont été données durant la
période de questions. On peut considérer ce dossier clos pour
l'instant.
M. Lalonde, député de Marguerite-Bourgeoys, me demandait
s'il était exclu que, cette semaine, les décrets, les
traductions, etc., soient soumis à l'Assemblée. Effectivement,
c'est exclu pour cette semaine. Ce sera plus probablement mercredi ou jeudi de
la semaine prochaine ou, en tout cas, au plus tard au début de la
semaine suivante. Il s'agit de faire un certain nombre de vérifications
pour être bien certain de ne rien oublier. Voilà pour les
questions en vertu de l'article 34, M. le Président. Je pense être
à jour là-dessus.
Réponses aux questions inscrites au
feuilleton
Maintenant, relativement aux questions inscrites au feuilleton, à
l'article 1 du feuilleton d'aujourd'hui, une question de M. Bourbeau.
Réponse du ministre des Affaires intergouvernementales. Je fais motion
pour dépôt de document, M. le Président.
Le Président: Cette motion est-elle adoptée?
M. Bertrand: Article 1 du feuilleton. M. Lalonde:
Adopté.
M. Bertrand: Ensuite, une question à l'article 6 au nom de
M. Bissonnet, député de Jeanne-Mance, je crois. Le ministre de
l'Habitation et de la Protection du consommateur donne sa réponse. Je
fais motion pour qu'il y ait dépôt de document.
Le Président: Cette motion est-elle adoptée?
M. Lalonde: Adopté.
M. Bertrand: À l'article 7 du feuilleton, une question de
M. Dauphin. Réponse du ministre du Loisir, de la Chasse et de la
Pêche. Je fais motion pour dépôt de document.
Le Président: Cette motion est-elle adoptée?
M. Lalonde: C'était déjà une demande de
dépôt.
M. Bertrand: Ce n'est pas au feuilleton comme tel,
c'est-à-dire qu'il n'y a pas d'article précis, mais en appendice,
on a une question posée par le député de Sainte-Marie, M.
Bisaillon. La réponse vient du ministre de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu. Je fais donc motion pour dépôt
de document.
Le Président: Cette motion est-elle adoptée?
Adopté.
Reprise du débat sur le message inaugural et
les motions de censure
Nous passons donc aux affaires du jour avec la reprise du débat
sur le message inaugural. La parole avait été demandée, en
réserve de quelqu'un d'autre, si je ne m'abuse, par le leader
parlementaire du gouvernement.
M. Bertrand: M. le Président, c'est terminé.
C'était hier.
Le Président: Au député de Hull, je
m'excuse. M. le député de Hull. (16 h 40)
M. Gilles Rocheleau
M. Rocheleau: Merci, M. le Président. Je voudrais
m'adresser plus particulièrement aux préfets des
municipalités régionales de comté, aux maires des
municipalités, ainsi qu'aux conseillers et conseillères
municipaux, aux citoyens, propriétaires ou locataires qui ont des taxes
à payer et qui subissent annuellement des augmentations de taxes
importantes. Je voudrais vous entretenir plus particulièrement du projet
de loi 125. À prime abord, cela peut paraître lourd, cela peut
paraître technique.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Je m'excuse M. le
député de Hull.
M. le leader du gouvernement.
M. Bertrand: M. le Président, je n'aurais pas voulu
interrompre le député mais on m'a fait remarquer que si on veut
être conforme à la tradition établie en cette Chambre
puisque j'ai donné avis que la commission de l'énergie et des
ressources siégeait demain matin relativement au dossier LG 2 ou de
faire motion pour que cette commission puisse siéger effectivement
demain matin de 10 heures à 12 h 30 aussi.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Cette motion est-elle
adoptée?
Adopté.
M. le député de Hull.
M. Rocheleau: J'excuse le leader du gouvernement. M. le
Président je disais que c'est un projet de loi très technique,
l'aménagement du territoire et plus particulièrement la
création des municipalités régionales de comté.
Mais il faut examiner des points très importants pour tous les citoyens
du Québec, dans le sens que ce sont les citoyens du Québec qui
ont à absorber, par les taxes municipales, le fardeau fiscal des
municipalités. Cette loi 125, dont le parrain est l'actuel ministre des
Affaires municipales, un projet de loi qui, malheureusement, n'a pas de
secondeur. Si j'ai voulu en parler dans ce débat sur le discours
inaugural, c'est parce que le premier ministre a annoncé
précisément, dans son discours inaugural, que le gouvernement a
décidé de convoquer le monde municipal à des assises sur
la décentralisation.
Nous avons tenté de connaître effectivement qui est le
ministre délégué à l'Aménagement du
territoire au Québec. À une question que j'ai posée en
cette Assemblée nationale le 24 novembre 1982, j'ai demandé qui
était le vrai ministre délégué à
l'Aménagement et au Développement régional: Le ministre
délégué à l'Aménagement et au
Développement régional s'est levé pour me dire que
c'était lui. Très simplement et je cite: "Je tiens à dire
que pour ce qui est du gouvernement du Québec, c'est très clair
que les responsabilités en ce qui concerne l'aménagement du
territoire tel que défini dans une loi qui a été
sanctionnée ici même à l'Assemblée nationale et qui
s'appelle la loi 125, sont miennes. Quant aux autres dossiers dont vous avez
parlé dans votre question concernant la décentralisation et toute
la réflexion que j'ai annoncée à plusieurs reprises quant
au développement régional, je pense qu'effectivement ce sont des
responsabilités qui sont miennes." Il pense! C'est surprenant de voir
qu'un ministre qui se dit délégué à
l'Aménagement et au Développement régional pense qu'il a
une responsabilité. Elle se définit où cette
responsabilité? À l'intérieur de la loi 125 à deux
articles particuliers, l'article 11 et l'article 16.
Il a fallu qu'on fasse de la recherche pour trouver qui était le
vrai ministre délégué à l'Aménagement du
territoire. Parce que le ministre actuel des Affaires municipales se met
continuellement le nez dans le développement régional et dans
l'aménagement du territoire. Si on prend l'article 267 de la Loi sur
l'aménagement et l'urbanisme on peut lire que: "Les orientations,
documents, avis, décrets, interventions du gouvernement visés aux
articles 11, 16, 27 et 29 ainsi qu'aux articles 149 et 165 sont
préparés sous la responsabilité du ministre
désigné par le gouvernement". Là on doit aller dans la
Gazette officielle pour trouver qui est le ministre désigné. Le 9
septembre 1982, décret 2009-82, on peut lire que, conformément
à l'article 267 de la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, les
orientations, documents, avis, décrets, interventions du gouvernement
visées aux articles 11, 16, 27, 29, ainsi qu'aux articles 149 et 165 de
cette loi, sont préparés sous la responsabilité du
ministre délégué à l'Aménagement et au
Développement régional.
Je pense qu'on vient de clarifier un point. C'est effectivement le
ministre délégué à l'Aménagement qui doit
s'occuper de l'aménagement du territoire et plus
particulièrement, des municipalités régionales de
comté.
On nous reproche à nous, de l'Opposition, à l'occasion -
on peut même le lire dans les journaux - de ne pas être
suffisamment agressifs, de ne pas faire notre travail, de n'avoir rien à
offrir en échange. Si la partie ministérielle acceptait, lors de
nos interventions, des recommandations, des suggestions, des points importants
qui empêcheraient de commettre des erreurs graves, des erreurs
coûteuses pour l'ensemble des citoyens du Québec, à ce
moment, on pourrait reconnaître la bonne volonté,
l'efficacité de l'Opposition, qui attend que ce gouvernement ait fini de
gâcher la sauce, ait fini de mal gérer le Québec pour
prendre la relève et relancer finalement le Québec vers une
reprise économique. Quand on parle de reprise économique,
j'aimerais tout simplement que les citoyens comprennent qu'une reprise
économique, cela veut dire du pain et du beurre, cela veut dire des jobs
pour les chômeurs, cela veut dire un recyclage possible pour des gens qui
sont maintenant bénéficiaires de l'assistance sociale, cela veut
dire une relance dans la construction, quand on dit au Québec et partout
au monde: Quand la construction va, tout va dans l'économie.
Que vient donc faire le ministre des Affaires municipales actuellement
dans l'aménagement du territoire? Il vient tout simplement bloquer le
développement dans chacune des municipalités à cause
effectivement des contrôles et des règlements qui tiennent compte
du schéma à produire pour chacune de ces municipalités. On
reproche à l'Opposition de ne pas faire sa "job". J'aimerais profiter de
cette occasion - le ministre des Transports tantôt envoyait une petite
boutade - pour dire que, la semaine dernière, le ministre des Affaires
municipales, et non pas le ministre délégué à
l'Aménagement, convoquait ici à Québec, c'était le
9 avril dernier, tous les préfets des municipalités
régionales de comté. Je vous
fais part de la lettre qu'il leur a fait parvenir; je lis simplement
certains paragraphes: "Cette réunion réservée
exclusivement aux préfets du Québec me permettra de
connaître vos préoccupations plus immédiates en
matière de régionalisation ou de décentralisation."
Je continue pour le bénéfice des citoyens qui vont pouvoir
faire la différence entre les responsabilités dévolues
à un ou à l'autre des ministres, et de savoir qu'il y en a un
actuellement qui ne s'occupe pas de ses affaires: "Je crois qu'il est
nécessaire et important, dit le ministre des Affaires municipales, que
nous soulignions le tout et que nous tracions les grandes lignes des trois
prochaines années des municipalités régionales de
comté au Québec." (16 h 50)
M. le Président, je me suis rendu tout simplement vendredi soir
à Québec. Je suis parti de mon comté de Hull, 278 milles,
pour assister à cette rencontre en tant que responsable de l'Opposition
pour l'aménagement du territoire et le développement
régional. N'ayant pas reçu de lettre, je croyais qu'on avait
oublié de m'inviter. Étant donné qu'on semble vouloir
vivre au Québec une démocratie, je me suis dit tout simplement:
C'est un oubli.
Or, vendredi soir, je me suis rendu à Québec. Samedi
matin, j'étais assez tôt, à 8 h 30, au Loews Concorde. Les
préfets des municipalités régionales de comté
commençaient à arriver pour leur assemblée de 9 h 30. J'ai
eu l'occasion, en passant, de pratiquement tous les voir, et je les salue en
passant. Le ministre des Affaires municipales se présente et je lui
demande: M. le ministre, est-ce qu'il y aurait possibilité que j'assiste
à titre d'observateur? Je ne dirai pas un mot. Or, le ministre de me
dire: Cela dépend des préfets de comté. Bon, alors il
s'est esquivé là-dessus.
Quelques minutes après, un de ses hauts fonctionnaires
m'approche, mal à l'aise, et me dit que ma présence gêne le
ministre. J'ai trouvé cela curieux que ma présence gêne le
ministre. Je pense que ma présence gênait davantage le ministre
dans ce qu'il allait dire aux préfets de comté. On venait de
dépenser, pour faire venir les préfets de comté à
Québec, plus de 50 000 $. C'est ce que cela a coûté pour
faire venir 94 préfets de comté ou préfets des
municipalités régionales de comté. Pour leur dire quoi? Je
vais vous le dire. Vous savez que les préfets de comté ne sont
pas tous des péquistes, ce ne sont pas tous des rouges, ce sont des
préfets de municipalités régionales de comté qui
sont avant tout maires de municipalités.
Le ministre des Affaires municipales oublie cela parce qu'un maire,
c'est maire pour toujours. Il a été élu par la population
pour représenter, premièrement, les intérêts de sa
municipalité. Il y en a qui m'ont appelé et il y en a qui m'ont
effectivement donné un compte rendu, et même très
précis. Je citerai pour l'information des citoyens du Québec...
Vous vous souvenez, en 1980, lorsque le PQ s'est fait "planter" au
référendum, on s'en souvient tous; 60% ont dit non à la
séparation du Québec du Canada. Ce n'est pas compliqué. La
population s'est prononcée. Ce même Parti québécois,
tout piteux, à la veille des élections du 13 avril 1981, dont on
fête l'anniversaire aujourd'hui, en passant... Quel malheur d'avoir
enduré depuis plus plus de sept ans déjà, surtout depuis
les deux dernières années, ce gouvernement!
Une voix: II faut être vraiment patient!
M. Rocheleau: M. le Président, pourquoi le ministre des
Affaires municipales a-t-il fait venir les préfets des
municipalités régionales de comté? Ici, on dit: "...me
permettra de connaître vos préoccupations plus immédiates
en matière de régionalisation ou de décentralisation." Il
voulait connaître l'opinion des préfets des municipalités
régionales de comté. Savez-vous ce qu'il leur a dit? "La
décentralisation des MRC passe par l'indépendance. Le
Québec ne dispose pas de ressources nécessaires pour les
régions."
Une voix: Ah! Il n'avait pas d'argent.
M. Rocheleau: Ah! C'est là le hic, M. le Président,
en fin de compte. Le gouvernement ne dispose pas de ressources
nécessaires pour les régions. Ils nous feront accroire qu'il faut
se séparer du Canada pour avoir les ressources nécessaires pour
administrer les municipalités régionales de comté. Quand
on regarde la grande carte du Québec, ce beau Québec jadis
où les gens travaillaient, les gens étaient de bonne humeur, les
gens avaient le sourire et où les gens, ces mêmes citoyens, sont
devenus de plus en plus moroses depuis 1976 et, plus particulièrement,
depuis 1981, alors qu'on s'est fait "fouter" une fois de plus.
Et le ministre continue: "Je fais partie du Parti
québécois qui forme le gouvernement et qui a comme option la
souveraineté." Faire venir les préfets des municipalités
régionales de comté pour leur dire cela, alors que les
problèmes vécus par les préfets des municipalités
régionales de comté, par les MRC du Québec sont des
problèmes graves de gestion, des problèmes graves
d'aménagement de territoire, des problèmes graves qui tiennent
des contrôles intérimaires et de leurs règlements, des
problèmes graves qui empêchent aujourd'hui l'émission de
permis de construction qui permettent à des Québécois ou
à des Québécoises de construire leur petite maison.
Étant donné que les taux d'intérêt sont descendus,
étant donné qu'il y a une certaine
relance, on pourrait bénéficier d'une subvention du
gouvernement fédéral, du gouvernement canadien, de 3000 $. On a
averti le ministre des Affaires municipales. Mon collègue, le
député de Laprairie, en commission parlementaire, ainsi que mon
collègue de Mégantic-Compton et moi-même avons averti le
ministre des Affaires municipales, au mois de décembre 1982, alors qu'on
était à nous passer la loi 92 en commission parlementaire. Plus
de 268 articles! C'est écoeurant, M. le Président, absolument
écoeurant.
On l'a averti et on lui a dit, à cause du gel qu'il créait
à l'intérieur de cette loi 125 et qui n'était pas
suffisamment corrigée par la loi 92, qu'on allait empêcher les
citoyens et citoyennes du Québec de mettre en chantier leur
construction, leur maison avant le 30 avril pour pouvoir
bénéficier d'une subvention de 3000 $, premièrement.
Deuxièmement, qu'on empêchait par ces gels, des travailleurs de la
construction d'exercer leur métier.
En 1976, quand le PQ a pris le pouvoir, on avait près de 200 000
travailleurs de la construction au Québec. En 1983, il nous en reste
à peine 65 000. Ce doit sûrement être la faute du
gouvernement fédéral. SÛrementl Le député de
Frontenac n'est pas ici pour le répéter mais on peut le dire pour
lui.
Tantôt je m'adressais aux préfets qui sont,
premièrement, des maires de municipalités, et je m'adressais
aussi aux maires qui siègent comme conseillers à la table de la
MRC et aux conseillers municipaux dans toutes les municipalités du
Québec. En passant, je me permets de souligner la présence d'un
des conseillers municipaux de la ville de Hull, M. Pierre Chénier, qui
est accompagné du greffier municipal, M. Robert Lesage, qui sont en
visite à Québec aujourd'hui. J'espère que, s'ils ont des
problèmes, ce gouvernement les réglera, M. le
Président.
M. Bélanger: Jamais! Jamais!
M. Rocheleau: Bien oui! Qui se fera foutre à la porte,
l'automne prochain, aux élections municipales, parce qu'on va
blâmer l'administration locale de ne pas faire son travail, de hausser
indûment les taxes, de ne pas voir au développement
régional, d'empêcher l'émission de permis de construction?
Ce sont les maires et les conseillers qui seront accusés, pas le
gouvernement. Il se cache toujours derrière quelqu'un d'autre, quand ce
n'est pas le fédéral, quand ce ne sont pas les États-Unis
et quand ce n'est pas M. Untel, le Mexique, l'Argentine ou le Brésil
où on a envoyé des avions pour lesquels on n'a jamais
été payé.
M. Bélanger: Les Îles Malouines.
M. Rocheleau: Ce sont les préfets des municipalités
régionales de comté et les maires qui ont actuellement des
problèmes sérieux. C'est important, le développement d'une
municipalité, le développement d'une région. C'est
important, c'est très important, on en convient. Ce ne sont pas les
municipalités régionales de comté qui préparent le
contrôle intérimaire sur leur territoire; ce ne sont pas elles,
absolument pas. Elles font un "draft", l'envoient à Québec et
c'est contrôlé par le ministre des Affaires municipales. Si le
ministre des Affaires municipales a l'intention de le désavouer, ce
n'est pas lui qui appelle. Il fait appeler un haut fonctionnaire, il parle
à un autre haut fonctionnaire et il lui fait part des modifications qui
doivent être apportées. (17 heures)
Je dis aux préfets des municipalités régionales de
comté, je dis aux maires des municipalités concernées, aux
conseillers municipaux ainsi qu'à tous les citoyens et toutes les
citoyennes du Québec: Surveillez cela parce que ce n'est pas le milieu
qui décide de son développement, de son aménagement; c'est
le ministre des Affaires municipales qui, en vertu de la loi no 125, n'a
même pas cette responsabilité. C'est censé être la
responsabilité du ministre délégué à
l'Aménagement et au Développement régional. On se
lève parfois pour lui poser une question; il faut essayer de le tenir
éveillé; je ne sais pas ce qu'il fait ici. Le premier ministre,
dans son discours inaugural, il y a quelques semaines, nous a dit qu'il allait
abolir le ministère des Travaux publics, qu'il allait enlever le poste
de ministre des Travaux publics.
Une voix: Une bonne affaire!
M. Rocheleau: II a dit qu'il allait abolir le ministère de
la Fonction publique. Mais, M. le Président, il aurait dû abolir
le poste de ministre délégué à l'Aménagement
et au Développement régional ou fusionner ce ministère
avec le ministère des Affaires municipales. À force de se courir,
ces deux-là nuisent à tout le monde.
Des voix: Ah!
M. Rocheleau: Je pourrais vous citer des articles de journaux.
C'est absolument...
Une voix: C'est bien monté.
M. Rocheleau: Même mon maire, le maire Michel
Légère, vit actuellement dans la Communauté
régionale de l'Outaouais, ce qui est un monstre un peu plus gros qu'une
MRC. Cela a été créé en 1969 et c'a n'a jamais
appris à marcher comme il faut encore. Le maire Michel
Légère et le conseil municipal, unanimement, veulent se retirer
de
la Communauté régionale de l'Outaouais. L'affaire va bien.
Cela va très bien.
M. le Président, le président de la Communauté
régionale de l'Outaouais, un des vôtres, MM. les péquistes,
nommé par vous autres, a été reconduit pour cinq ans,
à quelque 50 000 $ par année. Cela n'est pas grave; il n'y a rien
là. Ménard "varge" dans le tas, dans votre tas à vous
autres.
Des voix: Ah!
Une voix: Le PQ a fait le tas.
M. Rocheleau: Ménard grimpe dans les rideaux, dans vos
rideaux. Pourquoi? Parce que, même à l'intérieur de lois
semblables, la loi 125... Parlons un peu de votre loi no 90 concernant la
protection du territoire agricole. La salade au petit déjeuner. Le
ministre des Affaires municipales n'a pas le temps. Il est tellement
préoccupé à rencontrer les préfets de comté
pour leur dire que cela prend l'indépendance pour faire la
décentralisation qu'il n'a pas le temps de faire la refonte de la CRO
pour le printemps.
Pour rire de cela, on en rit tous les jours. Les avis locaux ont
guidé Léonard, comme s'il cherchait la belle étoile.
Une voix: L'étoile de Bethléem.
M. Rocheleau: M. le Président, je trouve absolument
inconcevable que ce soit, demain, le citoyen québécois et la
citoyenne, le petit propriétaire, le petit locataire... Chaque fois que,
dans une municipalité, on augmente les taxes, il n'y a pas que le
propriétaire qui se fait frapper les couilles. Il y a le locataire aussi
qui se fait frapper, M. le Président.
Une voix: II se fait frapper où? Une voix:Taisez-vous, vous.
M. Rocheleau: Vous viendrez avec moi tantôt, je vais vous
le montrer.
Des voix: Ah! Ah! Ah!
M. Rocheleau: M. le Président.
Une voix: On va perdre un député si cela continue.
Vous en avez assez d'un de perdu.
M. Rocheleau: Actuellement, M. le Président, il y a des
règlements intérimaires que le ministre des Affaires municipales
retient, qu'il a tout simplement désavoués. Par le temps que ces
règlements sont désavoués, c'est ce que cela crée.
Cela crée un empêchement de la relance économique, au
Québec. Ce n'est pas simplement le député de Hull ou le
responsable de l'aménagement qui vous le dit, M. le Président.
Dans la Presse du 9 mars 1983, on pouvait lire: "Les MRC peuvent priver des
Québécois d'une subvention d'Ottawa." Mais le ministre municipal,
cela lui fait assez mal au coeur quand le gouvernement fédéral
distribue ses largesses à tous les Canadiens, dans toutes les provinces
canadiennes, qu'ici, au Québec, on dirait qu'il faudrait accepter tout
simplement d'être privés, d'être privés de
possibilités de relancer notre économie, chez nous, par la
construction. Je mets, aujourd'hui, en garde les préfets des
municipalités régionales de comté qui se sont rendus
à Québec, samedi dernier, dans le but d'avoir des réponses
à leurs nombreux problèmes. Il y a eu près de 30
interventions de différents préfets qui ont posé des
questions au ministre et auxquelles ils n'ont eu aucune réponse valable
autre que: des correctifs seront peut-être apportés, que des
soulagements seront peut-être apportés, qu'on allait
peut-être communiquer avec le gouvernement fédéral dans le
but de faire étendre son programme afin de permettre de corriger une
erreur que le gouvernement péquiste a faite. C'est une multitude
d'erreurs qui font que nous sommes actuellement plus dépourvus que
partout ailleurs au Canada, partout ailleurs sur le continent
nord-américain et on se demande ce que l'Opposition pourrait faire.
De 1970 à 1976, le gouvernement libéral du temps a
démontré ce qu'il pouvait faire au Québec.
Malheureusement, il a été défait et on en connaît
les causes: plus particulièrement, les résultats du "sacrage" de
la Baie-James sur lequel on entend en commission parlementaire les
témoignages de plusieurs hauts fonctionnaires. Il va y avoir un
résultat très concluant et la population pourra voir clair dans
le problème qui existe actuellement au Québec.
En terminant, je veux simplement réitérer à
l'ensemble des Québécois et des Québécoises,
à l'ensemble des "payeurs de taxes"... Vous payez des taxes au
gouvernement du Québec. On sait que le ministère du Revenu court
après vous autres actuellement et remonte jusqu'en 1969. C'est parce
qu'ils ont gaspillé, par leur mauvaise gestion, l'argent des
contribuables du Québec. C'est ce que ces gens ont fait; il ne faut pas
chercher midi à quatorze heures. Quand on est de mauvais gestionnaires,
on gaspille l'argent. On l'a prouvé, on a fait venir les 94
préfets ici, un samedi, durant un beau week-end. C'est 50 000 $ au moins
que cela a coûté pour leur dire qu'il fallait de la
décentralisation, que pour leur confier davantage de
responsabilités, il fallait faire l'indépendance.
Je ne sais pas si on ne nous dira pas bientôt au Québec que
ça va tellement mal que si on faisait l'indépendance, ça
ne
pourrait pas aller plus mal!
Une voix: C'est ce qu'ils visent.
M. Rocheleau: C'est cela. Est-ce assez épouvantable? C'est
diabolique, c'est effrayant de penser que ce gouvernement, pour arriver
à son but ultime de séparation du Québec du Canada, a des
idées semblables. J'aurais pensé qu'il lui restait un coeur, mais
il ne peut pas l'avoir en dedans. Ce n'est peut-être pas de
l'insanité, ce n'est peut-être pas de la folie, mais je me pose
des questions. Est-ce qu'on ne pourrait pas demander un examen psychiatrique
des députés du côté ministériel pour savoir
si on est réellement géré par des gens qui sont sains
d'esprit?
Une voix: M. Fréchette est pas pire.
M. Rocheleau: On se souviendra des années passées,
de l'année 1978, je pense, à "Jonestown", alors que le bonhomme
Jones avait fait boire un petit cocktail à un maudit paquet de monde.
Ils se retrouvaient en dessous de la couverte, ce n'était pas long. Il y
en a un paquet qui sont morts; ils ne sont jamais revenus. Je me demande,
à force de suivre le Parti québécois comme ça, s'il
n'y en a pas qui s'en vont effectivement à leur faillite.
Allez demander aux chômeurs, allez demander aux assistés
sociaux, allez demander aux veuves, allez demander aux jeunes qui sortent de
l'université, du cégep, de la polyvalente et qui n'ont rien dans
leurs poches, 144 $ par mois pour un jeune qui retire de l'aide sociale. C'est
impensable. Et après, on veut diminuer la délinquance
juvénile. On tente de pondre des programmes de création
d'emplois, alors que le ministre des Affaires municipales empêche la
création de jobs, empêche la construction de maisons au
Québec. C'est le monde à l'envers.
J'ose souhaiter, en terminant, que les Québécois et
Québécoises en ont eu suffisamment de ce gouvernement qui a un
taux de popularité, d'après les derniers sondages, de 19%. Vous
en avez perdu "une maudite gang" en cours de route, 19%, et vous venez nous
raconter encore des histoires comme celles-là. Arrêtez-moi cela.
Faites un examen de conscience et ayez le courage d'aller au peuple. Allez
consulter. Faites un grand référendum national. Consultez la
population. Vous allez vous faire jeter dehors avec trois petits points. Merci.
(17 h 10)
Avis de mini-débat
Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre des
Transports, avant de vous accorder la parole, je vais lire une lettre, qui va
certainement vous intéresser, adressée le 13 avril 1983 au
président, M. Richard Guay. "M. le Président, à la
séance d'aujourd'hui, j'ai posé au ministre des Transports une
question portant sur les engagements du gouvernement du Québec pour la
reconstruction des routes 265 dans le comté de Frontenac et 116 dans le
comté de Richmond. Puisque je ne suis pas satisfait de la réponse
donnée, je désire me prévaloir des dispositions de
l'article 174 du règlement. Veuillez agréer, M. le
Président, l'expression de mes sentiments les meilleurs." M. Yvon
Vallières, député de Richmond.
Compte tenu que le règlement à l'article 174 indique que,
comme nous sommes mercredi, il n'est pas possible d'avoir le débat qui
est prévu, il aura donc lieu demain soir à 22 heures, jeudi. M.
le ministre, vous avez la parole.
M. Clair: M. le Président, je signale immédiatement
- je pense que le whip adjoint de l'Opposition est là - qu'à la
demande des gens de la municipalité de Saint-Augustin, sur la
Basse-Côte-Nord, j'avais accepté une invitation à aller les
rencontrer demain. Peut-être qu'il y aura lieu de remettre ce
mini-débat. Maintenant, j'en saisirai mon collègue, le
député de Richmond, plus tard. Je voudrais immédiatement
me prévaloir de mon droit de parole.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Si le whip l'accorde
dès maintenant.
M. Picotte: M. le Président, je vais consulter mon
collègue. S'il y a moyen d'accommoder le ministre, on pourra lui dire
demain matin, je pense.
M. Clair: Je pars à 7 heures, demain matin, pour revenir
tard dans la soirée.
M. Picotte: D'ici 18 heures, je pourrai peut-être
être en mesure de lui faire part des démarches.
M. Clair: Parfait.
Le Vice-Président (M. Jolivet): Merci. Votre intervention,
M. le ministre.
Reprise du débat sur le message
inaugural
M. Michel Clair
M. Clair: M. le Président, la tradition veut qu'au moment
du débat sur le discours inaugural chaque député puisse
intervenir et prononcer le discours qu'il a envie de prononcer et des
méchantes langues ont déjà dit qu'on pouvait dire
n'importe quoi. C'est, je pense, un peu la preuve qu'on vient d'avoir en
entendant le député de Hull, à savoir qu'au moment du
débat sur le discours inaugural on peut dire à peu près
n'importe
quoi.
La deuxième tradition relative au débat sur le discours
inaugural veut qu'un orateur qui prend la parole commence son allocution en
relevant brièvement les principaux points qui ont été
soulevés par l'orateur précédent. Force m'est de constater
que, voulant respecter cette tradition, cela m'est particulièrement
difficile de le faire puisqu'on pourrait résumer dans à peu
près trois points l'allocution du député de Hull.
Premièrement, je suis heureux de constater qu'après deux
ans qu'il est critique en matière d'affaires municipales et
d'aménagement du territoire pour l'Opposition il vient de
découvrir la différence entre les responsabilités du
ministre délégué à l'Aménagement et au
Développement régional et celles du ministre des Affaires
municipales. Je ne peux pas trouver grand-chose à redire contre cela
qu'un critique de l'Opposition, après deux ans de travail à
l'Assemblée nationale, s'aperçoive enfin de la différence
entre les responsabilités de deux collègues ministériels.
Je pense qu'on ne peut qu'applaudir à cela, qu'enfin il s'en
aperçoive après deux ans. Cela nous apparaît assez
normal.
Deuxièmement, le député de Hull a insisté
beaucoup sur le fait qu'il était très déçu de
n'avoir pu assister à une rencontre ministérielle, une rencontre
tenue samedi dernier, entre le ministre des Affaires municipales du
Québec et les préfets des municipalités régionales
de comté. C'est un peu décevant pour le député de
Hull, j'en suis convaincu. Il nous l'a manifesté lui-même
tantôt en disant qu'il trouvait cela difficile actuellement d'appartenir
à l'Opposition. C'est ce que j'en comprenais, en tout cas. Il n'est ni
ministre, ni maire actuellement. Dans la mesure où le ministre des
Affaires municipales rencontre comme ministre responsable d'une partie de la
loi 125 les préfets, cela va surprendre qui que le critique de
l'Opposition ne soit pas présent à cette rencontre? C'est
à peu près comme l'histoire de la belle-mère qui demande
à être présente aux discussions matrimoniales entre deux
époux. C'est un peu cela. C'est quoi cette habitude que les
députés de l'Opposition commencent à prendre à
vouloir venir s'immiscer dans les rencontres ministérielles qu'on a le
droit d'avoir, la responsabilité d'avoir, comme membres du gouvernement,
avec des organismes. Je suis convaincu, connaissant l'affabilité du
ministre des Affaires municipales, qui est reconnue dans tout le Québec,
que le ministre des Affaires municipales aurait pu le dire d'un ton beaucoup
plus sec. Les préfets des MRC quand ils viennent rencontrer les membres
du gouvernement ils ne veulent pas voir la belle-mère de l'Opposition
présente à ces rencontres. Si le député de Hull
voulait se le faire dire de cette façon, moi qui n'ai pas autant
d'affabilité peut-être que mon collègue le ministre des
Affaires municipales, cela ne me fait rien de lui dire. Il n'a pas d'affaire
là, c'est simple.
En ce qui concerne son dernier point, il a parlé avec beaucoup
d'éloquence de la nécessité de subir des tests
psychiatriques. Je voudrais simplement lui offrir que si on veut commencer deux
par deux, un de l'Opposition et un du côté ministériel pour
vérifier la santé de l'esprit de part et d'autre, je suis
prêt à y aller le premier avec lui s'il le désire, au
moment où cela lui conviendra. Deux par deux, je n'ai pas
d'objection.
J'en viens à mon intervention sur le débat sur le discours
inaugural. Les deux dernières années ont été
marquées non seulement au Québec, non seulement au Canada, non
seulement en Amérique mais partout dans le monde par une crise profonde,
une crise qui n'a cessé d'avoir des effets de plus en plus durs,
sévères, en termes de chômage, en termes d'inflation, en
termes de taux d'intérêt, de faillites d'entreprises. On a donc
connu un état de découragement avancé dans plusieurs
parties du monde occidental. À ce compte, d'ailleurs, je crois que la
principale constatation de la dernière année par la
société québécoise a été probablement
de se rendre compte que si la crise avait des effets sévères ici
même au Québec, elle n'était pas unique au Québec
mais que c'était à proprement parler une crise économique
internationale et qu'elle connaissait des ramifications profondes dans notre
manière même de vivre comme société.
Au moment où le premier ministre a prononcé le discours
inaugural, je pense que ce qu'il a surtout voulu indiquer c'est que c'est bien
beau la crise, c'est bien beau les difficultés que nous connaissons
présentement mais le moment n'est plus à analyser seulement les
effets de la crise mais je dirais à préparer, à voir
comment on s'en sortira de cette crise et essayer d'ouvrir les voies de
l'avenir, essayer de préparer l'après-crise. Je suis de ceux qui
pensent que le niveau de vie que nous avons connu, les habitudes de
consommation que nous avons acquises au cours des deux dernières
décennies, cette habitude de recourir, même comme citoyen,
largement à l'emprunt pour consommer, je pense que l'avant-crise ne
reviendra pas demain matin, en raison d'une surconsommation, d'un
surendettement des personnes comme des gouvernements. Il va falloir apprendre
à mieux apprivoiser les réalités économiques,
sociales et culturelles afin de ne pas penser seulement que c'est un mauvais
moment à passer la crise économique et que dans trois, quatre ou
six mois la situation se corrigera complètement.
Je pense qu'on doit avoir comme objectif, en ce moment, comme
gouvernement et comme société, de sortir de la crise
économique, de préparer une société qui soit sur le
plan social et culturel plus juste, plus épanouie et que sur le plan
économique, sur le plan socio-économique, elle soit plus forte
que lorsque nous y sommes entrés. Pour ce faire, il me semble que nous
avons entre les mains, nous le peuple québécois, un certain
nombre d'atouts qui sont disponibles dans le fond à tous les peuples de
la terre mais qu'on peut ici même mieux apprivoiser et dont on peut mieux
se servir afin d'avancer sur le plan socio-culturel notamment.
Je pense qu'on doit faire plus largement appel que jamais à la
solidarité, à la concertation, à l'excellence du travail,
à une volonté d'améliorer notre productivité, notre
performance sur le plan de la production industrielle, sur le plan même
de la production de services au gouvernement.
Je pense en effet, que ce n'est qu'en consentant de nouveaux efforts en
termes de compromis, de concertation, en termes de solidarité les uns
avec les autres, d'efforts au travail, en étant toujours conscients que
c'est de l'effort de toute la société que pourra résulter
une sortie positive de la crise. Ce sont des éléments que nous
avons à notre portée et que nous devons utiliser pour sortir de
cette crise sur le plan social et culturel. De façon encore plus
importante, je crois que c'est au domaine économique que nous devons
accorder le plus d'attention dans le moment. (17 h 20)
En effet, avec un haut taux de chômage, avec plusieurs personnes,
malheureusement beaucoup trop, qui, entre 18 et 30 ans, sont acculées
à des prestations d'aide sociale, je pense que le gouvernement doit
accorder une priorité au développement de l'emploi et au soutien,
dans la crise, des plus démunis.
À ce compte, le discours inaugural proposait plusieurs mesures,
des mesures à court terme, des mesures à moyen terme, des mesures
à long terme pour tenter d'améliorer le niveau de l'emploi au
Québec. J'en donne pour exemples simplement les mesures que nous avons
mises de l'avant en matière de programmes de création d'emplois
temporaires. Ce sont des mesures qui visent à donner de l'emploi
rapidement. Il y a plus de 150 000 000 $ qui sont consacrés à ces
programmes de création d'emplois temporaires. Il y a aussi des mesures
qui sont prises visant à favoriser la préretraite d'un certain
nombre de personnes, de mieux soutenir les jeunes dans le domaine des affaires
sociales, toute une série de mesures visant essentiellement le court
terme, il faut le reconnaître. Quand on connaît les niveaux de
chômage, le nombre d'assistés sociaux présentement, je
crois que c'est tout naturel, c'est normal que l'on prenne des mesures à
court terme pour tenter de favoriser l'emploi du plus grand nombre de personnes
possible.
Il y a également des mesures à moyen et à long
terme sur lesquelles ont doit mettre l'accent. Ces mesures, à mon avis,
me paraissent reliées à deux grands axes d'action que l'on doit
privilégier à ce moment de notre développement. C'est
toute la question du virage technologique et la question du
développement de nos exportations vers l'extérieur.
En matière de virage technologique, le gouvernement a
décidé de consacrer des sommes importantes pour favoriser, non
pas ce que certains sont appelés à voir comme étant pour
essayer de réinventer la roue, mais simplement pour essayer, dans un
certain nombre de secteurs, de moderniser le plus rapidement possible les
sphères d'activité industrielle du Québec afin de
s'assurer qu'on ne rate pas le développement technologique qui continue
de surgir dans plusieurs domaines de l'activité économique.
En matière d'exportation aussi; quand on sait que près de
40% de tout ce que nous fabriquons au Québec est exporté, je
pense qu'il faut consentir des efforts en vue de favoriser au maximum le
développement de nos exportations.
Donc, en bref, des mesures à court terme dans le discours
inaugural visant à favoriser la création d'emplois rapidement,
immédiatement, dans des activités qui sont utiles à la
société, mais qui n'entraînent pas nécessairement un
changement, une restructuration de l'économie québécoise,
et, d'autre part, des mesures à plus long terme visant à assurer
le Québec d'une bonne place dans l'après-crise sur le plan
économique.
Comment le ministère des Transports peut-il contribuer à
cet effort du virage technologique, à cet effort d'adaptation de la
réalité de ces politiques aux besoins de l'année 1983
maintenant? Essentiellement de trois façons: d'abord, par un programme
d'accélération d'investissements dans plusieurs domaines et aussi
un programme de réorientation des dépenses que nous avions
l'habitude de faire et que nous essayons maintenant de rendre plus productives.
Je m'explique là-dessus? Sur un programme de relance des investissements
dans le domaine des immobilisations, au ministère des Transports, ce que
nous proposons essentiellement, c'est de tenter de dépenser dans la
construction routière, de métro souterrain, de métro de
surface, dans la construction navale, dans la construction de garages, de
centres d'opérations pour les commissions de transport du Québec.
Nous tentons de créer de l'emploi en faisant plus rapidement des
dépenses qui sont utiles, qui seront nécessaires rapidement, de
façon à susciter plus d'activité dans le domaine des
transports dès les prochains mois.
L'objectif que nous nous sommes fixé, c'est
d'accélérer 100 000 000 $ d'investissements au cours des douze
prochains mois.
La deuxième façon d'intervenir dans le domaine des
transports, c'est d'essayer de mieux utiliser les sommes qui sont disponibles
dans le domaine de la construction routière au Québec. On sait
tous qu'il y a, bon an mal an, un montant d'environ 400 000 000 $ qui, depuis
maintenant trois ans, est consacré à la construction
routière. Plutôt que de continuer dans la voie qui a
été retenue par le gouvernement précédent, d'aller
vers le développement d'axes autoroutiers, dans le domaine des
autoroutes, nous essayons présentement de recycler et de
réorienter les budgets davantage vers de la construction de voirie
régionale qui, dans bien des cas, est beaucoup plus créatrice
d'emplois, qui permet de répartir dans l'ensemble des régions du
Québec des travaux routiers importants.
On parlait cet après-midi de la Gaspésie; effectivement,
je pense que le ministère des Transports peut être en
Gaspésie l'un des moteurs de l'emploi à la condition, cependant,
comme je le disais, qu'on ne consacre pas les montants disponibles
exclusivement à trois ou quatre chantiers d'autoroute dans la grande
région de Montréal ou de Québec, mais qu'on essaie de
répartir dans toutes les régions du Québec le budget de
construction du ministère des Transports.
Une troisième manière pour le ministère des
Transports de s'insérer, si l'on veut, dans la volonté du
gouvernement en même temps que de créer de l'emploi à court
terme, de prendre le virage technologique et de développer notre
activité, notre structure industrielle dans des domaines de pointe,
c'est tout l'effort que le ministère des Transports fait
présentement dans le domaine d'ajustement de ses politiques de transport
pour essayer que celles-ci aient le maximum de retombées
économiques ici même au Québec.
C'est ainsi qu'actuellement nous sommes à revoir notre politique
de construction de transport en commun interurbain afin d'essayer de voir
comment on pourrait, par une mise à jour de notre politique dans ce
domaine, favoriser le renouvellement de la flotte d'autobus des nombreux
transporteurs par autobus au Québec et d'essayer de faire en sorte qu'au
maximum, le renouvellement de la flotte ait des impacts positifs sur les
fabricants de matériel roulant au Québec
spécialisés dans ce secteur. C'est, dans ce cas, Prévost
Car, dans le comté de Bellechasse.
Il y a une autre avenue, M. le Président. On sait qu'on a
procédé en 1979 à un regroupement de commandes d'autobus
urbains, cette fois, pour les commissions de transport du Québec et que
le regroupement de commandes d'autobus urbains a permis l'installation au
Québec de GM, qui fabrique maintenant des autobus urbains qui sont
exportés partout aux États-Unis et au Canada.
Encore là, c'est un effort que nous sommes en train de
répéter en tentant de voir comment, à nouveau, pour la
deuxième commande d'autobus, on peut, par les politiques
d'investissement du ministère des Transports, favoriser les
retombées économiques ici même au Québec.
Il y a également le domaine de la construction du métro de
surface et du métro souterrain. On sait qu'il y a des centaines de
millions de dollars qui ont été investis dans le métro
souterrain à Montréal et que cela a permis tant au BTM (Bureau de
transport métropolitain) qu'à Bombardier de développer une
technologie de pointe dans le domaine - on a même raffiné une
technologie française - du métro sur pneu.
Maintenant, on sait que le marché, dans les prochaines
années, sera surtout à raison d'environ 1 000 000 000 $ en
Amérique seulement, orienté vers le métro-fer, le
métro sur rail. Dans ce cas, nous pensons, au ministère des
Transports, essayer de planifier nos investissements de manière à
répondre aux besoins du transport en commun de l'île de
Montréal, mais également de voir comment on peut marier - si je
peux employer cette expression - en même temps les besoins de
développement du transport en commun sur l'île de Montréal
et les marchés et les possibilités d'exportation de
matériel qui pourrait nous être utile chez nous et aussi
être exportable partout dans le monde. C'est un effort auquel nous nous
sommes livrés depuis maintenant un bon bout de temps, que nous allons
continuer à faire et à accélérer en vue de
permettre d'avoir encore des bonnes nouvelles comme celle qu'on avait ce matin.
J'avais tantôt la coupure de journal; nous avions ce matin la
confirmation que la firme Bombardier avait connu une bonne année dans le
domaine de ses performances financières à cause de la fabrication
de son matériel roulant, notamment. (17 h 30)
Que ce soit dans mes représentations auprès du ministre
fédéral des Transports dans le domaine du renouvellement de la
flotte de Via Rail qui utilise du LRC, que ce soit dans la réponse aux
besoins de transport en commun sur l'île de Montréal, nous devons
prendre ce virage technologique au maximum. Le Québec, au cours des 30
ou 40 dernières années, a manqué, à proprement
parler, les principales retombées de l'ère de l'automobile. Nous
n'avons pas été le récipiendaire, si on veut, d'une grande
concentration d'usines de fabrication
d'automobiles au Québec. Cette industrie s'est surtout
concentrée en Ontario, au Canada. Au moment où s'ouvrent des
perspectives très intéressantes dans le domaine du
matériel roulant pour du transport en commun, que ce soit pour les
autobus urbains, les autobus interurbains, que ce soit en termes de LRC, de
métro de surface, de matériel roulant de composantes de toutes
sortes, je pense qu'on peut et qu'on doit, au ministère des Transports,
essayer au maximum d'ajuster nos politiques aux possibilités
d'exportation de nos entreprises.
Il me reste quelques minutes à peine. Je sais que les membres de
l'Opposition sont intervenus au cours de ce débat à plusieurs
reprises pour faire référence aux difficultés de la
compagnie Quebecair qui a encouru des pertes, pour l'année
dernière, d'environ 17 000 000 $ comme on le sait tous. Comme je n'ai
pas beaucoup de temps, je vais terminer rapidement, simplement pour mettre en
parallèle, mettre en perspective les difficultés que
connaît Quebecair actuellement.
On pourrait dresser une longue liste de comparaisons par rapport aux
pertes d'autres entreprises de transport aérien. On pourrait dire, par
exemple, que Pan American Airways a perdu 450 000 000 $ l'année
dernière, que Air Canada en a perdu 32 000 000 $, que CP Air en a perdu
environ 40 000 000 $ et qu'à peu près toutes les entreprises de
transport aérien au monde sont déficitaires actuellement. Je
pense que c'est déjà un élément important que de
mettre ainsi en comparaison Quebecair avec d'autres entreprises de transport
aérien. On constaterait rapidement que finalement, par rapport à
d'autres compagnies, la seule raison pour laquelle on a tant insisté, du
côté de l'Opposition, sur les déficits de Quebecair, c'est
que c'est une compagnie québécoise et que c'est la seule
compagnie de cette dimension, de deuxième niveau, c'est le seul
transporteur aérien québécois de ce niveau. À part
cela, comme caractéristique, en termes de déficit, à peu
près toutes les compagnies aériennes au monde ont connu des
déficits au cours des deux dernières années, l'ensemble
des compagnies ayant perdu, en 1982, environ 2 000 000 000 $ au niveau de
l'IATA.
Mais comparons plus simplement la situation du déficit de
Quebecair à d'autres domaines du transport au Canada. Comment peut-on
établir une proportion entre le déficit de Quebecair de 17 000
000 $ et le déficit de Via Rail de 755 000 000 $ pour l'année
1982? M. le Président, le député de
Mégantic-Compton dit que ce n'est pas pareil. Je comprends. Notre part
dans le déficit de Via Rail est à peu près de 225 000 000
$. Qu'est-ce que Via Rail offre comme services au Québec, M. le
Président?
On va trois fois par semaine en Abitibi, trois fois par semaine au
Lac-Saint-Jean et on va encore à tous les jours vers le
Bas-Saint-Laurent et Montréal-Québec. 225 000 000 $, c'est notre
part du déficit. À chaque semaine, Via Rail fait le
déficit d'un an de Quebecair. L'Opposition ne dit pas un mot
là-dessus, pas un mot.
Prenons un autre dossier: l'aéroport de Mirabel. On reproche
à Quebecair d'avoir et de continuer à avoir des pertes d'environ
1 000 000 $ par mois. Mirabel, qui devait être le centre de transport
aérien international, qui devait faire de Montréal la plaque
tournante en termes de transport aérien international: déficit
hebdomadaire, 1 000 000 $. Pas un mot du côté de l'Opposition.
Pendant ce temps, la place de Montréal dans le transport aérien
continue de s'affaisser et l'Opposition n'en parle pas. Pendant ce temps, ce
sont les députés libéraux fédéraux
eux-mêmes qui s'inquiètent du déménagement
progressif des activités d'Air Canada vers Toronto, de l'affaiblissement
relatif de Dorval-Mirabel au profit de Toronto.
Avec une loupe, tout ce que l'Opposition est capable de voir, c'est les
déficits de Quebecair. Ses députés sont incapables de voir
que nous avons des intérêts dans le domaine du transport. Ils sont
incapables de voir cela. Ils voient 15 000 000 $ de déficit en un an
chez Quebecair. Ils oublient de voir 750 000 000 $ de déficit chez Via
Rail. Ils oublient de voir 230 000 000 $ de déficit, l'année
dernière, au CN; c'est aussi une belle performance. Ils oublient de voir
une quarantaine de millions de dollars de déficit chez Air Canada. Si
j'additionne les trois suivantes: Air Canada, CN et Via Rail, on arrive
à un déficit, en 1982, de l'ordre de 1 000 000 000 $. Cela veut
dire qu'en cinq jours - même pas, en trois jours - ces trois compagnies
du fédéral font le déficit d'un an complet de Quebecair
et, de l'autre côté, on n'en parle pas du tout. Le pire, c'est que
non seulement ils n'en parlent pas, mais ils ne voient pas les
intérêts du Québec. Ils ne les voient pas. En
matière de transport aérien et dans l'industrie
aéronautique, je ne sais plus ce qu'il va falloir qu'il se produise pour
qu'ils se réveillent.
On nous avait promis 50% des retombées des F-18. On sait
maintenant que cela n'atteindra pas 20%. On nous avait dit qu'avec Mirabel, on
allait redorer le blason de Montréal comme centre international de
transport. Le ministre des Transports du Canada a déposé,
l'année dernière, un programme qui visait à relancer
Mirabel. Résultat: La situation de Mirabel et de Dorval continue
à se détériorer. Qui s'inquiète du
déménagement progressif des activités d'Air Canada vers
l'Ouest? Encore une fois, ce n'est même pas l'Opposition, à
Québec; ce sont les ministériels, à Ottawa. Dans ce
cas-là, j'en sais gré au député
fédéral de Laprairie; c'est le seul à s'intéresser
à ce dossier.
Tout cela pour dire que c'est souvent décevant de voir l'attitude
de l'Opposition dans les dossiers en matière de transport. Je pourrais
parler également du rail et on va publier, dans les prochains jours, une
étude qui a été faite à mon ministère sur
les conséquences, dans le domaine des transports, de la politique
d'immobilisation d'environ 12 000 000 000 $, pour les dix prochaines
années, dans l'Ouest du pays, pour à peine l'équivalent de
500 000 000 $ au cours des dix prochaines années dans l'Est, notamment
au Québec. Ces gens-là ne voient pas la réalité.
Ils ne s'intéressent pas au domaine des transports et, pourtant, que ce
soit en termes de soutien de l'emploi à court terme pour les gens qui
ont besoin de travail, que ce soit pour de la construction routière, des
infrastructures maritimes et aériennes, on peut faire des choses et on
est en train de les faire. Mais cela n'intéresse pas l'Opposition. Tout
ce qui l'intéresse depuis deux ans... Ma foi, si j'ai eu une question du
député de Richmond, aujourd'hui, sur un dossier autre que celui
de Quebecair, je pense que c'est la première fois depuis deux ans. Cela
ne les intéresse pas. On peut, à court terme, faire des choses.
On est en train de les faire et, à moyen et long terme, je pense que le
ministère des Transports s'associe pleinement à cette
volonté du gouvernement du Québec de prendre le virage
technologique, de prendre le taureau par les cornes pour essayer de favoriser
le développement de nos exportations sur les marchés
étrangers. Il y a des entreprises qui sont installées dans ce
secteur et qui n'attendent souvent qu'une volonté politique du
gouvernement pour au moins ajuster nos politiques à leur potentiel.
C'est ce que nous sommes en train de faire.
Malgré que l'Opposition ne s'intéresse qu'au dossier de
Quebecair en matière de transport, quant à moi, je vais continuer
à faire le travail que j'ai entrepris depuis deux ans,
c'est-à-dire essayer d'associer pleinement le ministère des
Transports du Québec au développement économique du
Québec.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le whip de
l'Opposition.
M. Picotte: Merci, M. le Président, compte tenu que je
devais donner une réponse à la fin, je dois dire que mon
collègue de Richmond regrette énormément que le ministre
ne soit pas ici demain pour discuter de l'urgence de la construction des routes
116 et 265. Si la présidence m'assure que mardi soir, sans donner
d'avis, on pourra reprendre ce mini-débat à la fin de la
journée, vers 22 heures, nous sommes disposés, à la
demande du ministre, à reporter ce mini-débat.
M. Clair: Parfait.
Le Vice-Président (M. Rancourt): II y a donc consentement
pour que le mini-débat soit reporté à mardi soir.
M. le député de Jean-Talon.
M. Jean-Claude Rivest
M. Rivest: Comme mes autres collègues en cette Chambre,
j'ai eu le plaisir d'écouter les remarques du ministre des Transports
qui, dans un certain sens, s'est montré bien traditionaliste: la vertu
d'un côté et le vice de l'autre. Le petit "chamaillage" partisan
du Parti québécois, seul et unique détenteur de la
vérité, se préoccupant des intérêts du
Québec et l'Opposition qui ne fait strictement rien.
Je pense que la réalité de la situation politique,
économique et sociale du Québec appelle, de la part des
intervenants de tous les côtés de la Chambre, beaucoup plus de
sérieux que ce "chamaillage" partisan, finalement assez stérile,
qui a été abondamment illustré par les propos du ministre
des Transports. Le ministre des Transports a évoqué la crise
internationale qui frappe l'ensemble des sociétés occidentales.
C'est sûr qu'il y a aux États-Unis, en Europe, au Canada et au
Québec en particulier des facteurs objectifs, des facteurs de
conjoncture économique qui rendent à tous les gouvernements,
à toutes les sociétés et singulièrement à
tous les individus la situation extrêmement difficile.
La question que nous adressons au gouvernement dans cette
Assemblée, avec les responsabilités politiques qu'a ce
gouvernement - je pense que c'est la question que l'ensemble de la population
adresse à ce gouvernement, au gouvernement du Parti
québécois - est celle-ci: Va-t-il reconnaître, une fois
pour toutes - et en situation de crise, Dieu sait que c'est important - qu'il
peut avoir, lui, ce gouvernement, dans la gravité de la situation
politique, économique et sociale du Québec, une part de
responsabilités?
Je pense que les gens sont de plus en plus excédés par
cette attitude du gouvernement du Parti québécois qui ne cesse de
reporter sur d'autres les responsabilités qu'il devrait lui-même
assumer. Or, quand on regarde l'état actuel de la société
québécoise, sur le plan politique, on parle d'un affaiblissement
politique du Québec au niveau du Canada. Sur le plan économique,
l'affaiblissement économique du Québec a, encore une fois cet
après-midi, à l'Assemblée nationale, été
illustré par les questions de mon collègue le
député de Mont-Royal concernant la situation en
Gaspésie. On parle également de l'affaiblissement social du
Québec illustré par la situation de ce gouvernement qui se dit
social-démocrate alors qu'il vient d'accéder à
l'Internationale socialiste. Ce gouvernement maintient, condamne des dizaines
de milliers de jeunes, à vivre avec 144 $ par mois. Il me semble que, si
le langage, le discours, l'image correspondaient à une certaine
réalité, on sentirait, dans le choix les priorités, dans
les attitudes de ce gouvernement, une certaine préoccupation de la
situation sociale, M. le Président. Mais non. Tout ce qui marque, au
fond, la démarche de ce gouvernement depuis maintenant plus de sept ans,
c'est son option de la souveraineté politique du Québec, c'est
cette espèce d'obsession ou cette naïveté qu'il a de croire
que le développement d'une société ne peut se faire qu'en
fonction de l'appartenance à une langue donnée ou à une
culture donnée. Je pense que la réalité première,
c'est cette tendance fondamentale du Parti québécois à
croire qu'une société moderne, cela se ramène à
savoir à quelle communauté nationale un groupe humain appartient.
C'est cela qui l'empêche de réaliser et de constater la
complexité d'une société moderne, la complexité du
développement humain et individuel qui exige bien davantage une attitude
d'ouverture, une attitude de collaboration, une attitude de partnership avec
les autres.
Cela, il me semble que c'est une critique que l'on peut très
justement adresser au gouvernement du Parti québécois. Cela
commence à l'intérieur même de la population
québécoise. On l'a dit à maintes reprises, les attitudes,
les discours, les gestes mêmes, législatifs ou administratifs du
gouvernement, quelles que soient les bonnes intentions du ministre des
Communautés culturelles et de l'Immigration, révèlent une
baisse profonde de la solidarité entre les Québécois
à cause de l'arrivée du Parti québécois. Ce n'est
pas uniquement pour des raisons accidentelles que le Québec a perdu 150
000 personnes. Cela est une première réalité. On l'a
souvent dit, on l'a souvent répété, cette
détérioration de la solidarité des Québécois
est une des causes réelles et objectives qui font que le Québec,
face à la crise internationale, réussit moins bien que d'autres
sociétés à l'intérieur du Canada ou sur le
continent nord-américain. Il me semble qu'on a le droit de souligner,
cette attitude du Parti québécois, de par la nature même de
son programme, de son idéologie, de sa démarche, de constamment
diviser les Québécois les uns contre les autres, de qualifier les
gens qui ne partagent pas les objectifs du Parti québécois de
mauvais et ceux-là qui les partagent de bons Québécois. Je
pense qu'une société adulte comme celle du Québec accepte
qu'il y ait des divergences de vues, mais elle n'acceptera jamais que, parce
que des divergences de vues s'expriment au sein de la société sur
l'avenir de la société québécoise en tant que
telle, les gens soient qualifiés de ceci ou de cela en fonction des
opinions qu'ils ont. C'est le premier élément.
Deuxième élément, M. le Président.
Évoquant le développement lui-même de la
société, le ministre des Transports énumérait les
projets qu'il a dans le domaine du transport aérien, ferroviaire,
routier, etc. Fort bien, son ministère peut se préoccuper d'un
certain nombre de programmes pour développer les transports, mais si,
à la base des choses, il n'y a pas chez le gouvernement une
volonté de créer une activité économique qui
soutienne les activités de transport, comment voulez-vous que tous les
beaux programmes gouvernementaux qu'il puisse imaginer, lui-même et ses
collègues, puissent avoir une quelconque signification? Je ne pense pas
que ce soit injuste de dire que dans l'attitude générale au
niveau du programme du Parti québécois, au niveau de ses
politiques comme telles, il n'y a pas une confiance suffisante dans le talent,
dans la capacité des hommes et des femmes d'ici de se lancer en
affaires, d'avoir une activité commerciale, d'avoir une activité
industrielle. Tout le monde nous le dit, tout le monde sait que cette attitude
n'est pas à la base, dans l'esprit du gouvernement, qu'elle n'est pas
visible comme étant effectivement la priorité de ce gouvernement.
Depuis maintenant six ou sept ans, chaque année, dans les messages
inauguraux, le premier ministre vient nous dire: Cette année-ci sera
l'année du développement économique prioritaire.
Prioritaire un an, absolument prioritaire. Là, le nouveau mot,
c'est "obsessionnellement prioritaire", alors que ce discours ne correspond en
aucune manière à une compréhension de la
réalité économique du Québec qui s'inscrit - cela
est drôlement important en termes économiques - dans l'espace
politique et économique du Canada en tant que tel. (17 h 50)
Sur le plan du manque de confiance, je pense, du Parti
québécois face à l'entreprise privée, cela est
clair, c'est manifeste. Il suffit de voir les attitudes du ministre des
Finances au niveau de la fiscalité des entreprises, les multiples
représentations des hommes et des femmes d'affaires
québécois au sujet de la bureaucratie, de la lourdeur de
l'intervention, de leur manque de liberté, des entraves que la machine
gouvernementale leur pose. Ce manque de confiance est illustré d'une
façon encore beaucoup plus concrète par cette attitude de
chamaillage constant et systématique auquel, pour des raisons
politiques, se livre le gouvernement du Parti québécois
dès lors qu'il s'agit de
dossiers économiques et dès lors que le gouvernement
fédéral est en cause dans des dossiers économiques. Le
ministre des Transports a signalé un certain nombre de dossiers du
domaine économique. Il a parlé des F-18, il a parlé de
tout cela. Mais pourquoi, pour ces dossiers, le Québec n'a-t-il pas pu
obtenir ce qu'il aurait dû obtenir? C'est qu'au départ il y a eu
une dimension dans la conduite de ces dossiers, d'abord ici à
Québec, et en réplique sans doute au gouvernement
fédéral.
Tous ces dossiers, malheureusement pour l'économie du
Québec, malheureusement pour les hommes et les femmes d'affaires du
Québec, et surtout malheureusement pour les travailleurs, sont
politisés. Je n'en citerai qu'un exemple. Nous sommes allés chez
Marine Industrie à Sorel, à plusieurs reprises. Ce ne sont pas
des libéraux qui nous l'ont dit, mais les gens du conseil central de la
CSN à Sorel, qui prennent l'initiative eux-mêmes d'aller à
Ottawa pour que Marine Industrie obtienne des contrats, pour voir les
possibilités qu'offre le gouvernement fédéral au niveau
des frégates, etc. Ils voient les dossiers, ils voient les
possibilités, mais chaque fois qu'arrive le niveau politique, et les
autorités de Marine Industrie font exactement la même chose,
aussitôt qu'intervient un ministre fédéral ou un ministre
péquiste, voilà que l'enjeu de tout le dossier devient le
suivant: savoir lequel des deux ministres va réussir le premier à
aller planter son drapeau sur le contrat.
En fin de compte, Marine Industrie -c'est ce que vous devez
réaliser par cette politisation excessive de vos rapports avec Ottawa -
lorsqu'elle fait une soumission à Sorel, doit concurrencer sept ou huit
chantiers canadiens qui arrivent avec des données techniques, qui
arrivent avec des données financières qui sont comparables, aussi
valables que celles de Marine. Celles de Marine sont souvent plus valables que
d'autres. Marine Industrie, je n'ai aucune hésitation à le dire
à cette Chambre, d'après les renseignements que l'on a obtenus
autant du côté des travailleurs que de la direction, a perdu des
dossiers à cause de la politisation des rapports économiques
entre le gouvernement fédéral et le gouvernement de
Québec. Cela a donné que des gens bien concrets, bien visibles,
bien identifiables à Sorel, des hommes et des femmes ont perdu leurs
jobs.
Vous venez faire de très grands discours et on se tue, du
côté de l'Opposition, à vous dire: Vos histoires
d'indépendance, de souveraineté et tout cela, voulez-vous,
surtout en période de crise, de grâce, alors qu'il y a le nombre
de chômeurs que l'on connaît, mettre cela entre parenthèses
et pour le plus longtemps possible. Quand vous enlèverez les
parenthèses, on espère qu'il n'y aura plus rien entre les
parenthèses, ce sera encore beaucoup mieux de ne pas utiliser cette
question pour essayer de nous faire croire que vous êtes
intéressés aux questions économiques, alors que, par vos
attitudes et vos comportements avec les autorités
fédérales, même avec les autres provinces...
Je le dis, en entendant le ministre des Transports: Quand le
Québec, sur un dossier qui concerne le gouvernement
fédéral, n'obtient pas ce qu'il aurait dû normalement
obtenir comme partenaire entier de l'ensemble fédéral canadien,
dans le discours péquiste - bien des gens l'ont remarqué - on
dirait qu'ils sont quasiment contents, parce que les stratèges
péquistes prennent ce dossier... Prenons les F-18; moi, je suis
convaincu que le Québec s'est fait avoir dans ce dossier, je ne crains
pas de l'affirmer. Cependant, je ne commencerai pas à me réjouir
de cela, pour le citer, pour imprimer cela, pour faire des beaux tableaux et
oublier le reste. En même temps, que les F-18, le ministre des Transports
a mentionné Bombardier. Je me dis: On n'a pas eu notre part au sujet des
F-18, c'est bien dommage qu'on ne l'ait pas eue. L'espèce de
politisation et de chamaillage entre les ministres, le jeu de cachette y a
probablement été pour quelque chose. Par exemple, quand on parle
de Bombardier, je n'ai pas d'hésitation à dire que, si Bombardier
a eu le contrat à New York, c'est grâce à un organisme
fédéral. On a eu notre part.
J'insiste: Les Québécois ne veulent pas de discours
péquistes. Vous êtes au gouvernement du Québec. Quand vous
parlez comme ministre, vous ne vous adressez pas à des militants du
Parti québécois. On exige la vérité; on exige
l'ensemble du bilan pour que les Québécois puissent se faire une
idée de l'endroit où va réellement le Québec.
Depuis sept ans, on n'a jamais eu cela.
Ceci est grave, quand c'est dans le message inaugural du premier
ministre, avec son engagement sur l'indépendance pour la prochaine
élection. Maintenant, les Québécois doivent se rendre
compte que le Québec affronte, comme d'autres sociétés et
encore plus difficilement, à certains égards, une crise
économique, une crise financière et une crise sociale très
grave et qu'on doit tout mobiliser de notre côté pour essayer de
se sortir de cela. Pendant ce temps, je ne sais pas par quelle
irresponsabilité, par quelle inconscience, le premier ministre du
Québec vient de nous placer exactement dans la même situation
où on s'est trouvé de 1976 à 1978 ou 1980, jusqu'au moment
où le référendum a eu lieu. Il vient de placer l'ensemble
des décideurs économiques dans une position d'attente face
à l'avenir constitutionnel du Québec dans la mesure où, en
1984, 1985 ou 1986 - espérons que ce sera le plus tôt possible -
il y aura une
élection qui portera, dit-il, sur l'indépendance.
Comme par hasard, je ne sais pas ce qui s'est passé dans l'esprit
du premier ministre, il est revenu au congrès péquiste qui avait
dit que la thèse du Parti québécois, c'était
l'indépendance; il est revenu à ce congrès péquiste
qui l'avait désavoué parce qu'il n'avait pas parlé de
l'association. Je ne sais pas si les gens l'ont remarqué dans le
discours du premier ministre, je ne sais pas où l'histoire de
l'association est rendue, mais, en tout cas, c'est indépendance.
Ce qui compte pour les Québécois, pour ceux-là, me
semble-t-il, qui ont notre avenir à coeur, c'est de permettre et
d'assurer qu'au cours des prochains mois et des prochaines années, le
Québec se sorte lui aussi, de la crise. Il va pouvoir s'en sortir. Mais,
bon sang! quelle irresponsabilité de la part du premier ministre d'aller
encore créer lui-même, artificiellement, un facteur
d'instabilité, un facteur d'insécurité et un facteur
d'incertitude quant à l'avenir du Québec!
Je vois le député de Bellechasse manifester son
scepticisme. Le dossier de Bell, qui est à Bromont et ailleurs, le
Québec essaie de l'obtenir, mais essayez de voir si ce facteur ne jouera
pas sur le plan de l'implantation industrielle. Essayez de voir si cette
dimension ne jouera pas. Il me semble qu'il y a tellement eu de cas.
Quand vous parlez aux hommes d'affaires, à ceux qui prennent les
décisions dans le domaine économique, tout le monde le dit: Dans
le domaine économique, dans le domaine de l'implantation, nous ne sommes
pas fermés au Québec; nous sommes un territoire en position de
concurrence avec d'autres territoires, que ce soit à l'échelle
canadienne ou à l'échelle nord-américaine. On a des
avantages stratégiques au niveau de la main-d'oeuvre, au niveau des
ressources, au niveau des moyens de communication, mais d'autres régions
en offrent et c'est un des facteurs qui peuvent décider des choses.
Face à cela, M. le Président, je pense que ce que mes
collègues de l'Opposition essaient de dire dans le cadre de ce
débat, c'est ceci. Face à la gravité des crises
économiques, politiques, sociales qui frappent les
Québécois, avec un gouvernement qui a déjà 7 ans
d'âge et probablement 77 ans de durée et de vieillissement, un
gouvernement usé qui commence à donner des signes de fatigue
évidents - la population l'a constaté puisqu'il n'y a que 18% ou
19% qui font confiance à ces gens-là - un gouvernement
dévalué par tout ce qui est en train de se passer à
l'intérieur et tout ce qu'on constate et qu'on apprend de son attitude,
un gouvernement qui se comporte en propriétaire - on dirait que le
gouvernement est propriétaire du Québec, qu'il est
propriétaire du gouvernement; il en abuse, on voit tous les abus qui
sont dénoncés actuellement - un gouvernement non crédible,
qui a perdu sa crédibilité à l'échelle du Canada,
à l'échelle des milieux économiques, comment voulez-vous
que le Québec puisse traverser cette crise, essayer de retrouver des
défis nouveaux? Je pense que la conclusion est bien claire: je pense que
ce gouvernement a fait son temps, a fait plus que son temps, et qu'il est grand
temps qu'il tire lui-même les conséquences, s'il a
véritablement à coeur les intérêts du
Québec.
Des voix: Bravo!
Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous
plaît!
M. le leader du gouvernement.
M. Bertrand: M. le Président, avant de faire motion pour
ajourner le débat, encore une fois, je voudrais faire remarquer que les
députés ne sont pas toujours assis à leur siège.
Vous remarquerez que Mme la députée de Chomedey, probablement en
préparation de sa campagne électorale à la chefferie du
Parti libéral, s'est installée derrière le
député de Jean-Talon. Je ne crois pas que le discours du
député de Jean-Talon ait suscité beaucoup d'enthousiasme
autour de sa candidature, si c'est cela qu'elle voulait encourager.
Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous
plaît!
M. Bertrand: Ceci étant dit, M. le Président, je
demande l'ajournement du débat.
Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous
plaît!
Mme Bacon: M. le Président, je voudrais simplement...
Le Vice-Président (M. Rancourt): Mme la
députée de Chomedey.
Mme Bacon: ...faire remarquer au député de Vanier
que j'ai suivi son exemple.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Est-ce que cette motion
d'ajournement des débats est adoptée?
M. le leader.
M. Bertrand: Motion d'ajournement à demain
après-midi, 14 heures.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Nos travaux sont
ajournés à demain, 14 heures.
(Fin de la séance à 18 h 01)