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Version finale

32nd Legislature, 4th Session
(March 23, 1983 au June 20, 1984)

Thursday, June 2, 1983 - Vol. 27 N° 29

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Journal des débats

 

(Dix heures treize minutes)

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons nous recueillir quelques instants.

Veuillez prendre vos places.

Aux affaires courantes, il n'y a pas de déclarations ministérielles. Au dépôt de documents, Mme la ministre déléguée à la Condition féminine.

Rapport annuel du Conseil du statut de la femme

Mme Marois: Merci. J'ai le plaisir de déposer le rapport annuel 1981-1982 du Conseil du statut de la femme.

Le Président: Rapport déposé. M. le ministre du Travail.

Décret annulant l'application de la loi 111

M. Fréchette: M. le Président, je dépose un deuxième décret adopté en vertu de l'article 23 de la loi 111.

Le Président: Document déposé. M. le député de Hull.

Mémoire portant sur un statut particulier pour l'Outaouais québécois

M. Rocheleau: M. le Président, je demande le consentement de la Chambre afin de déposer un mémoire qui traite d'un statut particulier pour Hull et l'Outaouais québécois, mémoire dont j'ai énoncé certains extraits lors du discours sur le budget mardi soir dernier et que je souhaiterais que cette Chambre accepte.

Le Président: Il y a consentement au dépôt. M. le député de Hull a déposé un document par consentement. Voudriez-vous répéter s'il vous plaît, M. le député, pour le bienfait des banquettes gouvernementales?

M. Rocheleau: Je répète, pour le bénéfice du leader du gouvernement. Je souhaiterais le consentement de cette Chambre d'accepter le dépôt de ce mémoire sur un statut particulier pour Hull et l'Outaouais québécois, mémoire dont j'ai énoncé certains extraits lors du discours sur le budget mardi soir dernier, et pour le bénéfice de cette Chambre, j'en souhaiterais le dépôt.

Le Président: M. le leader parlementaire du gouvernement.

M. Bertrand: Dans la mesure où le député de Hull a le consentement de sa formation politique, nous ne voyons pas d'objection.

Le Président: Il y a donc consentement au dépôt du document.

Il n'y a pas de dépôt de rapports de commissions élues ni du greffier en loi sur les projets de loi privés.

Il n'y a pas de présentation de projets de loi au nom du gouvernement ou au nom des députés, ce qui nous amène à la période de questions. M. le député d'Outremont.

M. Fortier: M. le Président, j'ai une question à poser au ministre de l'Énergie et des Ressources. Pourrait-on m'indiquer s'il est ici ce matin?

Le Président: M. le leader parlementaire du gouvernement.

M. Bertrand: M. le Président, je n'ai pas reçu d'information dans le sens que le ministre de l'Énergie et des Ressources ne serait pas ici ce matin. Donc, il devrait être ici dans quelques minutes.

Le Président: Mme la députée de Chomedey.

Sites d'enfouissement jugés dangeureux

Mme Bacon: M. le Président, ma question s'adresse au ministre de l'Environnement. Il nous mentionnait, lors de l'étude des crédits de son ministère, en réponse à une question que je lui posais concernant les sites d'enfouissement dangereux, qu'il avait effectivement le type de relevé dont je lui parlais, mais qu'il ne voulait pas alerter ou ameuter la population en révélant ces sites. Le ministère de l'Environnement rendait public, il y a près de deux semaines, le nombre de ces sites contaminés au Québec et le relevé, jusqu'à maintenant, était de 35, mais le ministère refusait de divulguer les noms de ces sites, sauf pour quelques exceptions dont ceux qui sont déjà connus comme Landreville, ville de Mercier et le reste. Donc, pour ne pas apeurer la population, le ministère refuse de les rendre publics et selon nous, le ministère de l'Environnement a d'autres raisons de ne pas les rendre publics. Le ministre de

l'Environnement ne trouve-t-il pas qu'en refusant de nommer ces sites d'enfouissement son gouvernement évite ainsi la pression des mouvements d'une population donnée et par le fait même mène le gouvernement à l'inertie. Je pourrais peut-être lui citer comme exemple, lorsqu'il a fallu qu'il agisse sous la pression de la population, les cas de ville de Mercier et de Tricil.

Le Président: M. le ministre de l'Environnement.

M. Ouellette: M. le Président, de la façon dont le problème est présenté, les Québécois pourraient croire que le ministère de l'Environnement cache délibérément une trentaine de sites que le ministère sait être dangereux. Ce n'est pas du tout cette situation que l'on retrouve dans la liste en question. Effectivement, nous avons une liste de 30 sites - et non pas de 35 - dont huit sont déjà connus du public. Ils ont même été publiés dans le journal La Presse la semaine dernière. Quant aux autres, nous soupçonnons dans ces sites la présence de certains éléments toxiques et avant de les rendre publics, nous voulons nous assurer qu'effectivement, ces sites peuvent être dangereux. En d'autres termes, avant d'apprendre à mon voisin que sa femme vient d'être victime d'un accident, par exemple, je veux m'assurer de l'état de gravité de l'accident. Si elle s'est coïncé un pouce dans une porte d'automobile, ce n'est pas la même chose que si elle a été heurtée par un train. Avant d'aller voir mon voisin pour lui apprendre que sa femme a été victime d'un accident, je veux connaître la gravité de la situation. C'est exactement ce qui prévaut pour les 22 sites en question. Nous soupçonnons la présence de choses dangereuses, mais nous devons procéder à des études afin de nous assurer de la gravité de la situation. Et, au fur et à mesure que nous connaissons la gravité, nous rendons publics ces sites. Ce qui a été fait dans les huit cas qui ont été publiés dans le journal la semaine dernière.

Le Président: En complémentaire, Mme la députée de Chomedey.

Mme Bacon: N'est-il pas vrai que le sous-ministre adjoint, M. Bernard Harvey, avouait que les sites demeureraient confidentiels tant et aussi longtemps qu'il n'aurait pas les crédits pour intervenir? Ne serait-ce pas là une autre raison du refus du gouvernement de divulguer ces sites? C'est parce qu'il n'a pas les crédits. (10 h 20)

Le Président: M. le ministre de l'Environnement.

M. Ouellette: Non, M. le Président. Les crédits auxquels faisaient allusion le sous-ministre Harvey ne sont pas des crédits affectables à la réparation des dégâts dans ces sites. M. Harvey faisait allusion aux études qui sont nécessaires pour connaître l'état de gravité de la situation dans chacun des sites. Cela se situe entre 50 000 $ et 150 000 $, alors qu'il existe d'autres moyens pour connaître la situation. Notamment si on sait qu'un site est utilisé par tel type d'entreprise, il nous suffit d'aller voir l'entreprise, vérifier son type de production, vérifier le type de déchet toxique ou non qu'elle peut déverser dans le site et nous avons déjà là un premier point qui nous permet d'établir des priorités avant d'aller plus loin dans" nos études.

Pour être sûr de soi dans ce domaine, il faut absolument procéder, par exemple, à des études hydrogéologiques. Il faut faire aussi des études au niveau biologique comme tel et au niveau physico-chimique. Parmi ces sites, il y en a qui remontent au régime libéral puisque certains d'entre eux ne sont plus utilisés depuis au moins dix ans. Alors, si vous nous accusez de ne pas nous occuper de nos affaires, je vous dirai que cela remonte à votre régime. Nous héritons un beau matin de 22 sites et nous procédons. On passera donc l'été, figurez-vous, à procéder à ce premier type d'examen qui nous permettra de définir la qualité ou la non-qualité des produits qui y ont été déversés. Par la suite, nous demanderons, nous exigerons même des usagers de ces sites de procéder à leur frais à ces études et aux travaux de réparation comme ce fut le cas de la ville de Mercier.

Le Président: En complémentaire, Mme la députée de Chomedey.

Mme Bacon: Est-ce que le ministre est en train de nous dire que son gouvernement n'a rien fait depuis 1976? Est-ce qu'il y a une réelle volonté politique de la part de ce gouvernement dans ce domaine puisque le projet de règlement sur les déchets industriels promis par ce même gouvernement depuis 1978 n'a jamais été rendu public?

Le Président: M. le ministre de l'Environnement.

M. Ouellette: M. le Président, Mme la députée de Chomedey nous demande si l'actuel gouvernement a pris ses responsabilités. Bien sûr que nous avons pris nos responsabilités puisque 8 de ces 30 cas sont déjà réparés ou en voie de l'être. Je donne comme exemple une décision qui a été prise récemment par notre gouvernement pour injecter une somme de 5 700 000 $ pour pomper la nappe d'eau phréatique contaminée de la ville de Mercier, la traiter avant de la jeter aux cours d'eau. Pour un

seul de ces cas, on injectera 5 700 000 $. Je voudrais rassurer tout de suite Mme la députée en lui disant que cette facture sera transmise aux responsables de ce terrain. Nous sommes en train de régler huit sites et il nous reste à évaluer de façon précise la situation des 22 autres. Ce sera fait cet été; ce qui signifie que, dès l'automne prochain, nous pourrons rendre publics les sites parmi les 22 qui peuvent constituer des risques pour la population.

Le Président: Dernière question complémentaire, Mme la députée de Chomedey.

Mme Bacon: Est-ce que le ministre ne me donne pas raison en disant qu'il a agi seulement à la suite des pressions exercées par la population? Il devrait sûrement faire connaître les sites à l'ensemble de la population afin que d'autres fassent aussi pression pour qu'il agisse. Le ministre n'a pas répondu à ma dernière question: Quand le projet de règlement sur les déchets industriels promis depuis 1978 sera-t-il connu?

Le Président: M. le ministre de l'Environnement.

M. Ouellette: Quant à savoir si nous agissons selon les pressions de la population, il est bien évident que, dans certains cas, les pressions ont pu précéder les gestes gouvernementaux, en tout cas les gestes apparents, mais cela n'a sûrement pas précédé nos préoccupations. Comme je l'indiquais tout à l'heure, avant de rendre public le nom d'un site, nous devons savoir si ce site comporte réellement des risques pour la population avoisinante, dans un premier temps.

Dans un deuxième temps, lorsque les soupçons sont suffisamment importants, nous procédons aux études hydrogéologiques, physico-chimiques et biologiques et, ensuite, nous les rendons publiques avec l'obligation au propriétaire de faire les réparations pour protéger la population.

Le Président: Question principale, M. le député de Jean-Talon.

M. Rivest: M. le Président, ma question s'adresse...

Le Président: En complémentaire? M. Rivest: Ah, pardon.

Le Président: Question complémentaire, Mme la députée?

Mme Dougherty: Oui.

Le Président: Question complémentaire, Mme la députée de Jacques-Cartier.

Mme Dougherty: Ma question s'adresse au ministre de...

Le Président: Est-ce que c'est une question principale ou une question complémentaire?

Mme Dougherty: Une question complémentaire adressée au ministre délégué à la Science et à la Technologie. En tant que coordonnateur dans le domaine scientifique de la part du gouvernement, est-ce que le ministre a fait des démarches auprès du ministre de l'Environnement pour que les études qui s'imposent soient faites le plus tôt possible?

Le Président: M. le ministre délégué à la Science et à la Technologie.

M. Paquette: M. le Président, je crois que la coordination du virage technologique ne va pas au point d'intervenir dans chacune des activités scientifiques des ministères, aussi importantes soient-elles pour la population. C'est là une responsabilité très claire du ministre de l'Environnement qui vous a expliqué comment il l'a assumée.

Le Président: Sur une question principale, M. le député de Jean-Talon.

M. Rivest: Oui, M. le Président, ma question s'adresse au premier ministre. Elle porte sur la participation du Québec au sommet de la francophonie. Est-ce que le premier ministre est ici?

Le Président: M. le leader parlementaire du gouvernement.

M. Bertrand: Je suis convaincu que le premier ministre aurait bien aimé répondre à une telle question venant du député de Jean-Talon. Le premier ministre ne pourra être présent à la période de questions ce matin.

Le Président: Sur une question principale, M. le député d'Outremont.

Les Produits forestiers Saguenay ont-ils payé REXFOR?

M. Fortier: M. le Président, ma question s'adresse au ministre de l'Énergie et des Ressources. J'espère avoir au moins une réponse aujourd'hui. C'est en relation avec l'usine Samoco qui s'appelle maintenant les Produits forestiers Saguenay.

On se souviendra que le gouvernement du Québec avait investi plus de 23 000 000 $ dans cette usine avant 1979 et que, par la suite, le gouvernement, à grand

renfort de publicité, surtout l'ex-ministre de l'Énergie et des Ressources, avait dit que c'en était fini et que l'entreprise, après 1979, serait remise sur pied, qu'à l'avenir il n'y aurait plus d'interruption et que ce serait une usine qui fonctionnerait avec un bon rendement. On se souviendra également que l'usine avait été vendue par REXFOR à un consortium ontarien pour une somme d'environ 4 000 000 $, qui devait être payée par paiements mensuels d'environ 53 000 $, sur une période de douze ans. On pourra aborder d'autres aspects de ce problème un peu plus tard.

La question que j'aimerais poser au ministre de l'Énergie et des Ressources aujourd'hui est celle-ci: Est-ce que le consortium ontarien a respecté tous ses engagements financiers vis-à-vis de REXFOR jusqu'à ce jour? Est-ce que, en particulier, le capital et les intérêts qui devaient être payés à REXFOR ont été payés? Si les Produits forestiers Saguenay sont en défaut de paiement, est-ce que le ministre de l'Énergie et des Ressources a payé à REXFOR les sommes perdues, comme la convention entre le ministère et REXFOR lui donnait droit?

Le Président: M. le ministre de l'Énergie et des Ressources.

M. Duhaime: M. le Président, je vais prendre avis de cette question. Le député d'Outremont comprendra, lorsque j'aurai soulevé la question de privilège pour laquelle je vous ai transmis un avis, pourquoi je prends avis de ses questions pour l'instant.

Le Président: Une question principale, M. le député de Chapleau.

La Loi de police et les municipalités

M. Kehoe: M. le Président, ma question s'adresse au ministre de la Justice. Je ne sais pas s'il est présent.

M. le ministre, en 1979, la Loi de police fut amendée créant l'obligation, pour les municipalités de 5000 habitants et plus, de constituer et de maintenir un corps de police. À cause des coûts croissants de la protection policière sur leur territoire, plusieurs municipalités, l'Union des municipalités du Québec et d'autres intervenants ont exigé certains correctifs ou assouplissements à cette loi. Au mois de mai de cette année, le ministre lui-même, au cours d'une conférence de presse, s'est engagé à étudier la possibilité d'apporter certains amendements à cette loi. La question que je pose au ministre est celle-ci: Quand entend-il apporter les modifications demandées par les différents intervenants dans ce dossier?

Le Président: M. le ministre de la Justice.

M. Bédard: Je voudrais rappeler au député que les amendements qui ont déjà été apportés à la Loi de police en 1979 ont quand même voulu assurer l'équilibre entre les municipalités dans les charges et obligations qui leur incombent d'assurer la sécurité des citoyens. Cette loi 48 avait, dans le temps, été adoptée à l'unanimité de l'Assemblée nationale. Comme il le sait, il est de mon devoir de m'assurer que cette loi soit respectée. Je puis dire au député que j'ai eu, personnellement, de nombreuses rencontres avec des représentants de plusieurs municipalités. Au moment où on se parle, plusieurs de ces municipalités ont accepté non seulement de respecter la loi, parce que c'est une obligation, mais ont posé des gestes très précis pour mettre en place un service de police qui soit de nature à assurer la sécurité des citoyens de leur municipalité respective. (10 h 30)

J'ai rencontré, il n'y a pas très longtemps, il y a environ une quinzaine de jours, un ensemble de représentants de municipalités de même que les représentants de l'Union des municipalités et le président des MRC du Québec qui ont fait une proposition. Ce fut une rencontre très positive, où on m'a assuré du désir des municipalités de respecter la loi. D'autre part - et c'est compréhensible - ils m'ont fait part des difficultés financières que peut représenter l'établissement d'un corps de police.

Nous sommes en train d'étudier la portée de ce que pourraient représenter financièrement de telles propositions. Nous sommes déjà en mesure de dire que s'il fallait appliquer les propositions qu'on nous a faites à l'ensemble des municipalités, non seulement celles qui ont à se constituer un corps de police, mais celles qui en ont déjà un, parce que tout le monde doit être sur un pied d'égalité, les propositions faites représenteraient plusieurs dizaines de millions de dollars. Donc, il faut essayer de continuer les discussions avec ces municipalités. Je n'ai absolument aucune objection à essayer de trouver d'autres aménagements pour rendre la situation moins difficile, mais il reste quand même que la sécurité des citoyens, c'est une responsabilité partagée entre le gouvernement du Québec et les autorités municipales. Nous allons continuer nos efforts pour voir s'il y aurait lieu d'apporter des amendements ou encore d'améliorer la situation relativement aux coûts.

Le Président: Question complémentaire, M. le député de Chapleau.

M. Kehoe: Si je comprends bien, il y a

beaucoup de discussions et de propositions, mais aucun amendement, aucune proposition concrète de changement du règlement. Plus spécifiquement, le règlement qui impose un versement de 72,47 $ per capita pour les municipalités qui ne se conforment pas à la loi est-il appliqué actuellement? Si oui, est-ce que le ministre a l'intention de suspendre l'application jusqu'à ce qu'il trouve une autre solution? Effectivement, les municipalités qui ont des budgets de 1 000 000 000 $ à 2 000 000 000 $ par année n'ont pas les fonds nécessaires pour payer...

Le Président: M. le député, votre question était posée. Il ne s'agit pas d'ajouter une argumentation. M. le ministre de la Justice.

M. Bédard: Effectivement, M. le Président, il n'y a pas, à la loi no 48, très précisément, d'amendements qui sont en vue d'ici la fin de la session. C'est très clair. Nous continuons de discuter avec les municipalités sur la possibilité d'amendements qui soient de nature à assurer la meilleure des sécurités possibles aux citoyens et aussi, pour autant que c'est possible, à diminuer les coûts. Mais je vous avoue que, jusqu'à maintenant, les propositions qui nous ont été faites sont peut-être de nature à diminuer les coûts, mais il faut être conscient que si cela diminue les coûts pour les municipalités, à ce moment-là, cela les augmente pour l'ensemble du gouvernement du Québec.

Je pense que, sans vouloir faire de la politique fédérale-provinciale, le député sait très bien que nous avons déjà acheminé des demandes au fédéral pour qu'il contribue aux coûts relativement au maintien des corps de police au Québec de la même façon qu'il participe aux paiements des coûts des services de police dans d'autres provinces. Si le fédéral donnait suite à nos revendications, cela représenterait plusieurs dizaines de millions de dollars. La facture, au moment où on se parle, dépasserait 1 000 000 000 $ si le fédéral nous remboursait ce qu'il nous doit en faisant les évaluations à partir des avantages qu'il a consentis à d'autres provinces. Au-delà de cette facture jusqu'à maintenant, il reste qu'à chaque année, d'une façon générale, si nous étions traités par le fédéral de la même façon que la majorité des provinces, quant à l'aide pour les coûts policiers, cela représenterait pas loin de 200 000 000 $ par année. Si le fédéral satisfaisait à ces obligations dans ce sens-là ou nous traitait sur un pied d'égalité, nous aurions tout l'argent nécessaire pour régler tous les problèmes policiers en termes de coûts au Québec.

Le Président: Question complémentaire, M. le député de Chapleau.

M. Kehoe: Encore une fois, c'est la faute du fédéral, M. le ministre.

Le Président: M. le député, votre question.

M. Kehoe: Je vous pose cette question. Est-ce que vous appliquez présentement le règlement prévoyant le paiement de 72,47 $ par habitant pour le service de police? Est-ce que le règlement est en vigueur?

Le Président: M. le ministre de la Justice.

M. Bédard: M. le Président, il y a trois ou quatre volets dans la question du député. Je vais essayer de répondre à l'un d'eux. Il me fait plaisir de lui dire que, effectivement le règlement est en vigueur au moment où on se parle. Il n'y a pas encore de municipalités qui ont fait l'objet des pénalités qui sont prévues par ce règlement et, pour une raison bien simple, c'est que nous travaillons d'arrache-pied au ministère de la Justice avec chacune des municipalités. Nous les rencontrons, comme je l'ai dit tout à l'heure. J'ai eu l'occasion de rencontrer des maires de plusieurs municipalités. Nous essayons de travailler avec eux de manière à les amener à constituer le corps de police qui leur est nécessaire pour assurer la sécurité des citoyens. Nous avons une très bonne collaboration de la part de l'ensemble des municipalités parce que nous appliquons la loi avec une certaine flexibilité, tout en étant très conscients des difficultés financières que cela représente pour les populations, pour les autorités municipales concernées.

Maintenant, vous me demandez s'il y a des amendements qui sont prévus. Je vous dis: Non, d'ici la fin de la présente partie de la session. Encore une fois, je voudrais rappeler au député que la règle des 5000 habitants est une règle qui se retrouvait dans un projet de loi déposé par le Parti libéral avant l'ajournement de la session en 1976 et que cette loi a été adoptée à l'unanimité, ici, à l'Assemblée nationale. Cela représente des coûts pour les municipalités, mais cela en représente aussi pour le gouvernement du Québec. Comme il y a une responsabilité conjointe, je pense que chacun doit assumer ses responsabilités. Dans ce sens, je trouve que les autorités municipales sont un peu plus responsables en ce qui concerne leur désir d'assurer le respect de la loi que semble vouloir l'être le député en me demandant des amendements comme ceux-là, sans me préciser leur nature.

Le Président: Conclusion. Question complémentaire, M. le député de Laprairie.

M. Saintonge: Merci, M. le Président.

M. le ministre, vous avez mentionné avoir discuté avec plusieurs municipalités. Voici ma question. Est-ce que vous pouvez prendre l'engagement de rencontrer le comité conjoint de l'Union des municipalités du Québec et de l'Union des municipalités régionales de comté qui a été mis sur pied et qui a fait une proposition concernant les différents problèmes qui concernent ces municipalités en difficulté avec les corps de police? Ce comité conjoint a reçu, par la proposition présentée, l'accord d'une soixantaine de municipalités qui sont justement aux prises avec le même problème. Est-ce que le ministre, est prêt à rencontrer à brève échéance, et dans quel délai, ce comité conjoint, qui pourra faire part des commentaires de l'ensemble des municipalités pour tenter de régler ce problème une fois pour toutes?

Le Président: M. le ministre de la Justice.

M. Bédard: M. le Président, je ne ferai pas reproche au député, mais il n'a manifestement pas écouté ma réponse de tout à l'heure lorsque j'ai dit que j'avais rencontré les représentants de l'Union des municipalités, entre autres, le président de l'Union des municipalités, M. Moreau, le président des MRC, les représentants des 30 ou 40 municipalités qui doivent se constituer des corps de police. J'ai fait cette rencontre. C'est à l'occasion de cette rencontre qu'on nous a fait les propositions qu'évoque le député sur lesquelles j'ai dit qu'il y avait une analyse qui se faisait concernant les coûts que cela pouvait représenter. Il est évident, et je l'ai dit dès le moment de la rencontre, qu'on ne peut, comme gouvernement, adopter une attitude qui représenterait des avantages pour les 30 ou 40 municipalités qui doivent se constituer un corps de police, sans penser au même moment à permettre ces avantages aux municipalités qui respectent la loi et qui ont, à l'heure actuelle, un corps de police avec les coûts que cela représente.

S'il y a une disposition d'amendement qui doit être faite, elle devra s'appliquer à toutes les municipalités, et c'est là qu'on réalise que ce qui pourrait coûter plus ou moins cher pour une dizaine ou à une vingtaine de petites municipalités, si on applique cette disposition à l'ensemble du Québec pourrait coûter des dizaines de millions de dollars.

Le Président: Question principale... Une toute dernière courte complémentaire, avec une réponse courte.

M. Saintonge: M. le ministre, une réponse très courte. Vous analysez le mémoire qui vous a été présenté. Mais après avoir reçu cela, est-ce qu'il y a une possibilité que les deux parties puissent en discuter, que les municipalités aient votre point de vue, avec les chiffres qu'elles vous ont présentés et que vous leur donniez réellement votre position? Vous les avez rencontrées auparavant, vous en avez discuté brièvement, mais sur le mémoire précis présenté, est-ce que vous allez les rencontrer, et dans quels délais? (10 h 40)

Le Président: M. le ministre de la Justice, brièvement.

M. Bédard: J'ai eu l'occasion de rencontrer les représentants de l'Union des municipalités et des MRC, et ceux des municipalités qui sont visées présentement. Sans qu'il y ait besoin de pressions de la part du député qui me pose la question, car c'est tout à fait normal, il est évident qu'une fois terminée l'analyse de la position qu'ils ont évoquée, c'est avec grand plaisir que je rencontrerai à nouveau mes interlocuteurs, comme cela m'a toujours fait plaisir dans le passé. Nos relations sont très bonnes.

Le Président: Question principale, M. le député de Viau.

Nombre de cas déférés par écrit aux orthopédistes par la CSST

M. Cusano: Merci, M. le Président. À la fin d'avril, M. Robert Sauvé, président-directeur général de la Commission de la santé et de la sécurité du travail, accusait les orthopédistes du Québec de recevoir des ristournes de la part des physiothérapeutes vers qui ils avaient dirigé des patients. M. Sauvé alléguait également que des interventions inutiles étaient pratiquées sur la colonne par des orthopédistes. Au mois de mai, les orthopédistes, pour leur part, ont déclaré que, tant que M. Sauvé sera président de la Commission de la santé et de la sécurité du travail, ils doivent modifier leur régime de pratique, c'est-à-dire qu'ils s'abstiendront de procéder à des interventions non urgentes ou de prescrire des traitements de physiothérapie tant qu'ils n'auront pas reçu, dans chaque cas, l'autorisation écrite de la Commission de la santé et de la sécurité du travail. Est-ce que le ministre peut nous dire combien de demandes par écrit ont été faites par la CSST auprès des orthopédistes, jusqu'à maintenant?

Le Président: M. le ministre du Travail.

M. Fréchette: M. le Président, les renseignements que je possède jusqu'à maintenant m'indiquent qu'il y aurait six ou sept demandes qui ont été faites en ce sens. Quant à l'autre aspect de la question du

député de Viau, je n'irai pas plus loin dans le sens qu'il a indiqué, parce qu'il sait tout aussi bien que moi qu'il y a actuellement un sub judice. Il y a une poursuite qui est devant les tribunaux.

Le Président: M. le député de Viau, question complémentaire.

M. Cusano: M. le Président, je n'ai pas parlé dans ma question de l'action intentée en cour. Je parle du nombre de cas qui ont été déférés. Je voudrais demander ceci au ministre: Si cette action de la part des orthopédistes se concrétise, portant ainsi préjudice aux accidentés du travail, a-t-il l'intention de porter une action contre les orthopédistes ou bien a-t-il l'intention de demander la démission de l'honorable juge Sauvé?

Le Président: M. le ministre du Travail.

M. Fréchette: M. le Président, il faudra voir comment le cheminement va se faire et, en temps et lieu, je répondrai à la question du député de Viau.

Le Président: Question principale, M. le député de Saint-Louis.

M. Blank: M. le Président, j'ai une question à poser au ministre du Revenu.

Une voix: Est-ce une question plantée?

Mise en vigueur de la politique sur les pourboires

M. Blank: J'ai donné avis de la question. Non, ce n'est pas cela. On n'a pas discuté de la question. Il n'est pas au courant de la question. Il est au courant du problème, mais pas de la question. M. le ministre, l'automne dernier, on a passé trois ou quatre jours en commission parlementaire pour étudier le problème des pourboires. On a eu toutes sortes de représentations. Des groupements de toutes sortes sont venus et votre humble serviteur a même proposé une sorte de compromis, le système américain, comme on l'appelle, pour régler le problème des pourboires, parce qu'il semble qu'il n'y a pas eu tellement de consensus lors de cette commission parlementaire. Le gouvernement doit trancher la question. Je l'ai aidé à trouver une solution en lui proposant le système américain. Il y a des rumeurs indiquant que le gouvernement a accepté ma proposition et qu'il est en train de préparer un ou deux projets de loi. Le ministre a même suggéré, lors de l'étude des crédits de son ministère, qu'on va peut-être voir quelque chose d'instauré pour le 1er janvier 1984, dans environ six mois. Je constate qu'il n'y a aucun projet de loi à ce sujet au feuilleton du 31 mai afin qu'il puisse être adopté avant la fin de cette période sessionnelle. Je ne sais même pas si le ministre a l'intention de le déposer aujourd'hui ou avant le 18 juin pour qu'on puisse l'étudier durant l'été et avoir peut-être des représentations des gens pour éviter une autre commission parlementaire, parce que c'est un sujet très discuté partout dans la province, les garçons et les filles de table. J'aimerais savoir du ministre quelle est son intention dans cette affaire. A-t-il l'intention de présenter un projet de loi d'ici la fin de cette période sessionnelle ou est-ce seulement au mois d'octobre ou novembre? Comment peut-il voir cette loi en vigueur pour le 1er janvier, comme il l'a promis?

Le Président: M. le ministre du Revenu.

M. Marcoux: Je peux assurer le député de Saint-Louis, M. le Président, que j'ai toujours l'intention de faire en sorte que la solution qui sera choisie par le gouvernement soit implantée pour le 1er janvier 1984, puisque je m'étais engagé auprès des groupes qui sont venus nous faire des représentations à faire en sorte que, quelle que soit la solution, elle soit implantée le plus rapidement possible. Je puis vous assurer que j'ai transmis comme ministre du Revenu un mémoire à mes collègues du Conseil des ministres. Ce mémoire a déjà été analysé par le Comité de développement social. Il sera analysé et discuté au Comité de développement économique dans une quinzaine de jours. Il est également en train d'être analysé au Conseil du trésor. Normalement, je pense que le discussions pourront se situer au Conseil de ministres au cours de l'été ou d'ici la fin juin, pour qu'on soit prêt à déposer un projet de loi au tout début de la session d'automne pour faire en sorte qu'il soit adopté cet automne et mis en vigueur le 1er janvier 1984.

Quant aux hypothèses de solution dont vous avez parlé, je dois préciser que l'hypothèse d'une adaptation de la formule américaine a été proposée dans certains mémoires, en particulier par certains employés syndiqués. Elle était reprise sous la formule 3 dans le livre vert concernant la consultation pour les travailleurs à pourboire et était nommément mentionnée comme étant une des hypothèses soulevées. C'est l'une des quatre hypothèses qui sont discutées et que j'aborde dans mon mémoire, évidemment. Maintenant, c'est au Conseil des ministres, à la suite des recommandations du Conseil du trésor, du CMPDE et du CMPDS, de faire son choix.

Le Président: Question complémentaire, M. le député de Saint-Louis.

M. Blank: Est-ce que le ministre essaiera vraiment de l'adopter à la reprise

de la session à l'automne de cette année?

M. Marcoux: S'il n'en tient qu'à ma volonté, je vous l'assure.

Le Président: Question principale, M. le député de Verchères.

Problèmes à Sucre Saint-Laurent

M. Charbonneau: Je m'adresse au ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation. Hier soir, à Radio-Canada, il y avait un reportage assez alarmiste sur la fermeture éventuelle de la raffinerie Sucre Saint-Laurent à Montréal et sur la responsabilité qu'aurait dans cette éventuelle fermeture la présence et l'action de la Raffinerie de sucre du Québec de Mont-Saint-Hilaire. Est-ce exact que la raffinerie vend du sucre de canne sous sa marque de commerce et pas uniquement du sucre de betterave, comme on l'a cru jusqu'à maintenant et comme on l'a dit à plusieurs reprises?

Le Président: M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.

M. Garon: M. le Président, c'est essentiellement une donnée qui était fausse dans le reportage puisque la production de 1982, qui s'est faite au cours de l'hiver, représente 17 500 tonnes et celle de 1983, qui commencera en octobre, sera autour de 35 000 tonnes. Si vous additionnez les deux ensemble, cela fait autour de 50 000 tonnes dans une période d'un an. Il s'agit essentiellement du sucre qui est raffiné à partir du sucre brut puisque les quantités sont là. Je peux vous dire, pour ceux que cela intéresse, que le mauvais temps peut affecter certaines productions, mais concernant la betterave, jusqu'à maintenant, les ensemencements sont à 94% et, actuellement, on est en train de vendre encore des graines pour 400 hectares additionnels, ce qui est difficile dans une autre production. Les ensemencements de la betterave sont ceux qui sont le plus avancés actuellement dans différentes productions. De sorte qu'au sujet du sucre il s'agit encore d'une fausse information. On essaie de faire croire qu'on vend du sucre acheté ailleurs, alors qu'essentiellement il s'agit de sucre raffiné à forfait à partir du sucre de betterave qui est produit à la Raffinerie de sucre du Québec.

Le Président: En complémentaire, M. le député de Verchères.

M. Charbonneau: Est-ce qu'il y a encore des négociations entre la Raffinerie de sucre du Québec de Mont-Saint-Hilaire et la raffinerie Sucre Saint-Laurent? Est-ce qu'il est exact que Sucre Saint-Laurent pourrait offrir un meilleur prix que la raffinerie Redpath, de Toronto?

Le Président: M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.

M. Garon: Essentiellement, la première chose qu'il faudrait se demander: Qui étaient le premier, le deuxième et le troisième soumissionnaires face aux chaînes alimentaires? Si ce n'était pas la Raffinerie de sucre du Québec qui avait pris le contrat, cela aurait été Redapth; ce n'aurait pas été Sucre Saint-Laurent. Il serait peut-être bon, d'abord, de savoir que le deuxième soumissionnaire n'était pas Sucre Saint-Laurent. (10 h 50)

Je dois dire aussi que, contrairement à ce que les gens ont pensé, les ventes à Provigo viennent seulement de commencer au mois de juin, et à Métro, au mois de janvier. Sucre Saint-Laurent est en grève depuis le début de mars et c'est en partie la raison pour laquelle il y a du sucre qui arrive d'ailleurs. Je pense que, si M. d'Ailly avait moins alarmé tout le monde avec ses déclarations, peut-être que ses employés seraient moins craintifs quand ils négocient leur convention. Actuellement, ils ne veulent pas abandonner les clauses concernant la sécurité contenues dans le contrat, parce qu'il les a énervés depuis deux mois. Je comprends que les employés ne veulent pas abandonner les clauses concernant la sécurité contenues dans leur contrat parce qu'il leur fait peur sans arrêt.

Le Président: En complémentaire, M. le député de Huntingdon, suivi de Mme la députée de Maisonneuve.

M. Dubois: M. le Président, n'est-il pas vrai qu'actuellement la Raffinerie de sucre du Québec commercialise, ici au Québec, par l'entremise d'un courtier du Québec, du sucre produit dans les Maritimes par Atlantic Sugar?

Le Président: M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.

M. Garon: Pas que je sache, à l'exception de la cassonade. Nous voulons faire raffiner de la cassonade par Sucre Saint-Laurent, sauf que nos négociations n'ont pas abouti jusqu'à maintenant. Pour l'ensemble des productions, ii s'agit essentiellement de sucre fabriqué à partir de notre sucre et, pour la cassonade, on serait intéressé à signer un contrat avec Sucre Saint-Laurent, mais cela n'aboutit pas.

Le Président: En complémentaire, Mme

la députée de Maisonneuve.

Mme Harel: Merci, M. le Président. J'ai eu l'occasion, il y a à peine quelques jours, de rencontrer à nouveau des travailleurs en grève de Sucre Saint-Laurent, qui est installée dans Maisonneuve. Je voudrais obtenir du ministre l'assurance que la raffinerie de Saint-Hilaire est toujours prête à donner à Sucre Saint-Laurent l'équivalent du contrat réalisé par Redpath et à donner l'équivalent de ce contrat aux coûts de Redpath plus les coûts de transport.

Le Président: M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.

M. Garon: C'est la base de la discussion et de l'offre faite par la Raffinerie de sucre du Québec: le coût du raffinage à forfait qui est proposé par Redpath, plus le coût de transport entre Toronto et Saint-Hilaire, qu'il faudrait payer de toute façon. Normalement, à ce prix, Sucre Saint-Laurent devrait être intéressée puisqu'il s'agit d'un montant plus élevé, le reste étant pour le transport; ça lui donnerait plus d'argent pour faire du raffinage à forfait. Quant à moi, je peux vous dire une chose: Sucre Saint-Laurent n'est pas une entreprise qui ne fait pas d'argent. Il s'agirait peut-être de regarder le bilan de 1982 pour voir que l'entreprise a fait de l'argent. Je n'ai pas l'habitude de voir des entreprises qui font de l'argent et qui veulent fermer leurs portes. Si Sucre Saint-Laurent veut fermer ses portes, elle sait bien que les entreprises qui se vendent non pas comme un "going concern", mais comme une entreprise fermée, ça ne se vend pas cher et je suis persuadé qu'elle aurait des acheteurs.

Le Président: Dernière question complémentaire, M. le député de Huntingdon.

M. Dubois: M. le Président, je voudrais demander au ministre s'il n'est pas vrai...

Le Président: À l'ordre!

M. Dubois: ...que la dernière offre que Sucre Saint-Laurent a faite à la Raffinerie de sucre du Québec serait plus avantageuse que celle qui a été négociée avec Redpath de Toronto?

Le Président: M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.

M. Garon: On m'a dit qu'il n'y avait pas eu d'offre récemment parce que M. d'Ailly était en vacances, ce qui avait interrompu momentanément les négociations.

Les gens s'imaginent qu'on paie le transport beaucoup plus cher qu'on ne le paie en réalité. Ils pensent qu'ils font une offre correspondante, alors qu'elle ne l'est pas. Je peux vous dire que la base sur laquelle la Raffinerie de sucre du Québec discute, c'est le raffinage à forfait plus les coûts de transport entre Saint-Hilaire et Toronto aller et retour.

Le Président: Question principale, M. le député d'Argenteuil.

M. Ryan: M. le Président, est-ce que le ministre de l'Éducation est présent?

Le Président: Il l'était il y a deux minutes.

Politique en matière d'enseignement privé

M. Ryan: Je vais l'attendre volontiers. Ah, le voici. Je voudrais adresser au ministre de l'Éducation une question à propos de la politique de son ministère concernant l'enseignement privé. Tout d'abord, il y a à peu près six ans que le gouvernement promet de publier une politique en matière d'enseignement privé. Cette politique a été constamment remise. On est aussi perdu à ce sujet après six ans de gouvernement péquiste qu'on l'était au tout début. Je voudrais demander au ministre où il en est dans la mise au point de cette politique qui a été promise à tant de reprises.

Deuxièmement, j'ai eu l'occasion de signaler au ministre, ces derniers temps, que la Commission consultative de l'enseignement privé, qui fonctionne sous l'empire de la Loi sur l'enseignement privé, me semble fonctionner suivant des modalités qui sont contraires non seulement à l'esprit, mais même à la lettre de la loi. En particulier, les nominations que le ministre a faites depuis quelques années ont été faites sans aucune consultation avec les associations représentatives de l'enseignement privé et les quelques suggestions que ces associations ont pu faire n'ont jamais été retenues.

Troisièmement, en ce qui touche les subventions annuelles aux institutions privées, l'an dernier, le gouvernement est arrivé à peu près six ou sept mois en retard. La loi enjoint au gouvernement de fixer le montant des subventions pour le 1er mai en vue de l'année scolaire qui commencera en septembre suivant. Cette année, nous sommes maintenant au 2 juin; le 1er mai est passé depuis un mois. Je voudrais savoir où en est le ministre à ce sujet. Est-ce qu'il a fixé le montant des subventions pour la prochaine année? Est-ce qu'il est en consultation avec les institutions à ce sujet? Quand entend-il le faire?

Le Président: M. le ministre de

l'Éducation.

M. Laurin: M. le Président, le gouvernement a tenté d'élaborer une politique de l'enseignement privé qui se voulait une tentative d'intégration et de rapprochement avec l'enseignement public, puisqu'il y a un seul système d'enseignement au Québec et qu'il fallait voir à ce que ce système d'éducation fonctionne pour le plus grand bénéfice de la population scolaire du Québec. Nous avons, à quelques reprises, tenté d'élaborer un schéma général d'intégration et de rapprochement. Mais devant les critiques que nous nous sommes faites nous-mêmes à l'endroit de ces tentatives, nous avons décidé que ce n'était pas valable et qu'il nous fallait continuer notre réflexion.

Récemment, nous avons pris une autre avenue, une autre piste. Il nous a semblé qu'il était très difficile d'en arriver à l'énoncé d'une pareille politique sans que nous ayons davantage d'informations sur la partie du système qui est encore privée.

Depuis un an, nous procédons à cette approche pragmatique. Nous rencontrons régulièrement les institutions privées. Nous tentons d'obtenir le plus grand nombre de renseignements possible sur ces institutions, puisque, auparavant, cela n'avait jamais été fait. Bientôt, nous serons en mesure d'avoir des connaissances beaucoup plus complètes sur l'enseignement privé: le nombre, la clientèle qu'elles desservent, les conditions, la valeur locative de leurs établissements, le rapprochement sur le plan des régimes pédagogiques. C'est sur cette base beaucoup plus pragmatique et, en même temps, sur une base de consultation beaucoup plus fouillée qu'auparavant que nous tenterons d'en arriver à une politique de l'enseignement privé qui se veut logique et cohérente avec celle de l'enseignement public.

Quant à la commission consultative, il est vrai que nous tentons d'avoir, de la part des institutions privées, le plus grand nombre de suggestions possible avant de procéder à la nomination des membres de cette commission consultative. On peut, certes, critiquer la façon dont le travail a été fait, mais nous pourrons également très bien défendre la façon dont ces nominations sont faites. Je prends en bonne note les remarques du député d'Argenteuil. Nous tenterons d'améliorer dans l'avenir le mode de nomination de ces membres à la commission consultative.

Quant aux subventions annuelles, cette année, nous avons eu affaire à une situation un peu spéciale, comme je l'ai dit en commission parlementaire, étant donné que les subventions annuelles sont maintenant calculées à partir des subventions, pour la même année, que nous dispensons à l'enseignement public. Le député comprendra parfaitement que la longueur des négociations et, surtout, le fait qu'elles se sont conclues encore tout récemment ne nous permettaient pas, avant que ces négociations soient conclues, de déterminer avec exactitude le montant des subventions dont devaient bénéficier les institutions privées. Mais comme j'ai pu le dire au député, lors de la discussion des crédits à la commission parlementaire, maintenant que nous avons en main les chiffres exacts des subventions que nous devons verser à l'enseignement public, il devient possible de déterminer le montant des subventions à l'enseignement privé. Je peux assurer le député que, d'ici une semaine ou deux, non seulement ces montants seront déterminés, mais également ils seront versés aux institutions privées. (11 heures)

M. Ryan: M. le Président...

Le Président: M. le député, la période des questions se termine à l'instant. Je veux bien vous permettre une courte complémentaire, pourvu qu'on m'assure que la réponse sera courte.

M. Ryan: La loi prévoit que les membres de la commission consultative doivent être nommés après consultation des organismes représentatifs des gens qui oeuvrent dans le secteur privé. Le ministre est-il en mesure d'affirmer que ces consultations ont toujours été faites dans le cas des nominations depuis deux ou trois ans et peut-il nier une affirmation qui m'a été faite ces derniers temps voulant qu'aucune suggestion formulée par les associations privées n'a été retenue depuis plusieurs années par le gouvernement dans ces nominations?

Le Président: M. le ministre de l'Éducation.

M. Laurin: Je peux dire que les consultations ont été faites, mais, comme je le disais dans ma réponse, on pourrait toujours discuter le résultat que le ministre peut donner aux consultations qu'il a effectuées. Nous en avons longuement discuté déjà. J'ai pris bonne note des suggestions qui m'ont été faites par le député d'Argenteuil et on essaiera de les mettre à exécution à l'avenir dans toute la mesure du possible.

Le Président: La période des questions est terminée et il n'y a pas de motions non annoncées ou d'enregistrement des noms sur les votes en suspens.

J'ai reçu, de la part du ministre de l'Énergie et des Ressources, la lettre suivante.

Une voix: Article 34?

Question de privilège

Essais industriels de MAGNAQ-2 à Thetford-Mines

Le Président: Non, les questions en vertu de l'article 34 viendront plus tard.

La lettre est datée du 1er juin. "M. le Président, j'aimerais porter à votre attention mon intention d'utiliser l'article 49.1 de notre règlement avant l'appel des affaires du jour de la séance du 2 juin 1983. Dans un article du journal Le Soleil du 27 mai dernier, le député d'Outremont, M. Pierre Fortier, m'accusait d'avoir menti à la Chambre puisque, disait-il, lors d'une de mes interventions à l'Assemblée nationale, je lui aurais donné l'assurance que les essais industriels de MAGNAQ-2 seraient effectués à Thetford Mines. J'aimerais donc rétablir les faits qu'alléguait le député du comté d'Outremont. Veuillez accepter, M. le Président, l'expression de mes sentiments les meilleurs." C'est signé: Yves Duhaime.

M. le ministre, en vous bornant à rétablir les faits.

M. Yves Duhaime

M. Duhaime: Oui, M. le Président. Je ne sais pas si c'est une habitude qu'on est en train de prendre en face ou si c'est le fait que l'équipe libérale ait perdu la partie de balle molle 15 à 5 devant 10 spectateurs à Thetford-Mines qui a affecté l'humeur du député d'Outremont d'une telle façon, mais le Soleil du 27 mai 1983 fait état d'une déclaration du député d'Outremont.

Je vais lire trois extraits qui me paraissent importants. "Le critique officiel de l'Opposition en ressources minières, M. Fortier, député d'Outremont, a confié hier au Soleil qu'il allait demander des comptes dans ce dossier au ministre de l'Énergie et des Ressources, M. Duhaime, puisque, selon lui, lors d'une intervention à l'Assemblée législative, ce dernier lui avait donné l'assurance que les essais industriels seraient effectués à Thetford." On parlait, bien sûr, du projet MAGNAQ-2.

L'article continue: "Pourtant, M. Duhaime n'a pas l'habitude de mentir." Merci beaucoup! Plus loin: "M. Fortier a déclaré qu'il allait intervenir dans ce dossier parce que le ministre Duhaime n'a pas dit la vérité. Que l'usine soit implantée à Thetford, Asbestos ou Sherbrooke, ça importe peu, mais le ministre a dit que les essais seraient effectués à Thetford et je veux savoir pourquoi il m'a menti."

Le reste n'est pas tellement important, il raconte la défaite libérale à la balle molle. Je ne crois pas qu'on fasse allusion ici à une induction en erreur ou à un acte d'omission, je pense que c'est très clair. Je voudrais vous reporter, M. le Président, au journal des Débats lorsqu'il a été question de cette affaire à la page 7842, du 9 mars 1983, alors que j'avais l'occasion d'intervenir dans un débat sur cette question. Je vais tout simplement lire la page 7842 parlant de ce projet. Je m'excuse de me citer, M. le Président. "J'ajoute aussi que nous sommes à mettre sur pied un nouveau projet que j'appellerais une usine pilote dans le magnésium-métal. On est sur le point d'annoncer l'emplacement de cette usine pilote, mais cela va être fait."

La décision de la Société nationale de l'amiante quant à l'implantation de l'usine pilote, c'est-à-dire le Centre de recherche sur le magnésium-métal, a été prise au conseil d'administration de la SNA le 10 février 1983 et a été annoncée par la SNA beaucoup plus tard, pour une raison très simple. C'est qu'il semble que cela ne fait l'unanimité ni au conseil d'administration de la SNA, ni même dans les régions concernées.

Ce que je puis dire aujourd'hui, M. le Président, c'est que cette décision du 10 février 1983 a été confirmée, après une autre discussion au conseil d'administration de la SNA, le 19 mai 1983 et l'annonce en a été faite le 20 mai 1983. L'usine pilote va être à Sherbrooke. Ce qui a été annoncé en même temps, c'était que l'usine de fabrication de magnésium-métal, MAGNAQ-2, serait à Thetford-Mines. Ou bien le député d'Outremont ne comprend strictement rien quand on parle...

Une voix: De mauvaise foi.

M. Duhaime: ...ou bien il est de mauvaise foi. M. le Président, ici, je demanderais que le député d'Outremont nous explique ses propos - je l'invite à le faire -ou encore qu'il nous offre des excuses ou bien je verrai si je lui envoie mes témoins.

M. Lalonde: M. le Président, sur la question de règlement.

Le Président: M. le leader parlementaire de l'Opposition.

M. Lalonde: Je n'ai pas voulu interrompre le ministre, M. le Président. Il avait déjà assez de difficulté à trouver une cohérence dans ses propos sans que je l'interrompe. Mais vous avez été très large, M. le Président, et je pense que l'invitation qu'il fait au député d'Outremont est tout à fait contraire aux règles.

Le Président: À l'ordre!

M. Lalonde: S'il fallait que vous reconnaissiez un ministre chaque fois qu'un journal rapporte des propos désagréables pour le gouvernement, on aurait des questions de

privilège tous les jours.

Le Président: Il est évident... M. Fortier: M. le Président...

Le Président: Non, M. le député d'Outremont. À l'ordre, s'il vous plaît! Il est évident que la toute dernière partie de la question de privilège du député de Saint-Maurice, ce qu'il sollicitait du député d'Outremont, ne devait pas faire partie de la question de privilège. Par ailleurs, il est tout aussi évident que le fait, pour un journal, de porter un jugement de valeur sur le comportement d'un député ne donne pas ouverture à une question de privilège. Le fait pour un journal d'accuser ou le fait que quelqu'un, dans un journal, accuse quelqu'un, notamment, d'avoir menti, puisque les mots étaient expressément mentionnés dans l'article du journal, donne, me semble-t-il, par contre, ouverture, effectivement, à une question de privilège et à un rétablissement des faits.

M. Fortier: Demande de directive, M. le Président.

Le Président: Oui, M. le député d'Outremont.

M. Fortier: Comment un député qui est impliqué dans cette question de privilège pourrait-il faire valoir une autre déclaration du ministre lors de ce débat auquel assistaient de nombreuses personnes du Comité des chômeurs?

Une voix: Question de privilège. M. Pîerre-C. Fortier

M. Fortier: Question de privilège, M. le Président. Si vous le voulez, je vais simplement lire le journal des Débats. C'est simplement le correctif que j'aimerais apporter puisque non seulement moi, mais le ministre, avons reçu deux télégrammes du Comité des chômeurs et du syndicat de la CSN qui semblent avoir compris exactement ce que le journal des Débats dit. Je lis ceci: "Je ne blâme pas les gens de Thetford Mines de s'occuper de leurs affaires, je ne blâme en aucune manière les chômeurs qui se sont organisés dans ce comité et qui voient à leurs intérêts. Je voudrais simplement leur dire quelque mots et leur dire que, pour 1983, nous avons des projets sur la table." Il s'adressait aux gens de Thetford Mines. "J'ai indiqué tout à l'heure le projet de fabrication de laine de roche. Cela créera une trentaine d'emplois. Le projet d'usine pilote dans le secteur du magnésium-métal créera une cinquantaine d'emplois là aussi."

M. le Président, je crois que c'est tout à fait évident que ce deuxième paragraphe est beaucoup plus explicite que le premier et qu'il a tenté de faire croire non seulement au député qui est ici, mais au syndicat de la CSN et au Comité des chômeurs qu'il s'était engagé à ce que l'usine pilote de magnésium-métal aille à Thetford Mines, tel que l'a dit le ministre.

Le Président: On sait très bien qu'une question de privilège ne doit pas donner lieu à un débat. J'ai permis, M. le député, que vous fassiez la lecture d'un extrait que vous avez choisi du journal des Débats. Je me dois, parce que je vois que le ministre se lève de nouveau sur une question de privilège, compte tenu du texte que vous venez de lire, de lui accorder de nouveau une question de privilège, mais, cette fois-ci, ce sera la dernière.

M. le ministre, s'il vous plaît!

M. Duhaime: M. le Président, si le député d'Outremont avait été honnête, il aurait dit ce que je viens de vous lire, à l'Assemblée nationale. C'est la page 7843 et c'est dix lignes plus bas. Alors, quand on les met bout à bout, M. le Président, page 7842, deuxième colonne, on met cela comme cela. Dix lignes plus haut. Ce que j'ai dit tantôt, c'est qu'on est sur le point d'annoncer l'emplacement de cette usine pilote. Tout le monde avait compris que, quant à l'emplacement, que ce soit à Sherbrooke, à Thetford, à Chicoutimi, à Joliette, à Alma, la décision n'était pas annoncée. (11 h 10)

M. Chevrette: Il vient de faire, lui-même, la preuve de sa mauvaise foi.

M. Duhaime: Quand on dit que le projet d'usine pilote dans le secteur du magnésium-métal créera une cinquantaine d'emplois, là aussi, cette phrase s'inscrit dans une liste à la page 7843 où, par projet, je donnais le nombre d'emplois.

M. Chevrette: Malhonnête!

M. Duhaime: Ou bien vous êtes lâche ou bien...

Des voix: Oh! Oh!

M. Lalonde: Question de règlement.

Le Président: À l'ordre! À l'ordre! Question de règlement, M. le leader parlementaire de l'Opposition.

M. Lalonde: M. le Président, on connaît les sautes d'humeur du ministre. On sait qu'il a des impatiences. Mais je vous inviterais à lui demander de conserver son calme et d'utiliser un vocabulaire parlementaire.

Le Président: Encore une fois, les dernières paroles de la question de privilège ne constituaient pas une question de privilège, pas plus que dans le premier cas. Il s'agit de rétablir les faits. Non, je m'excuse, mais, c'est fini les débats là-dessus. Encore sur une question de privilège?

M. Fortier: M. le Président, j'invite le ministre dans le comté de Frontenac et on va régler cette chose avant le Comité des chômeurs et le syndicat de la CSN.

Le Président: À l'ordre! M. le ministre du Loisir, je vous en prie! M. le député d'Outremont aussi. M. le député de Richmond, s'il vous plaît! Est-ce qu'il y en a d'autres? M. le député de Richmond, je vous en prie! M. le député de Hull, nous nous passerons de vos commentaires pour 1 heure. Merci.

Je me permets de vous signaler que le spectacle que vous offrez à la population à l'heure actuelle est particulièrement désolant. Cela étant dit, j'ai permis des questions de privilège - on a évoqué la chose tantôt -parce qu'il y avait eu une accusation de portée par quelqu'un, par le biais d'un journal. J'ai permis au ministre de rétablir les faits. À partir de là, cela a commencé à dégénérer en un débat, ce que, justement, une question de privilège n'est pas censée provoquer. L'incident est clos. Question de règlement, M. le leader parlementaire de l'Opposition.

M. Lalonde: M. le Président, le ministre a utilisé un mot qui me paraît faire partie du caractère désolant du spectacle que vous mentionniez tout à l'heure. Il a traité de "lâche" un député. Je pense que ce n'est pas parlementaire et qu'il doit le retirer.

Le Président: Mais vous avez aussi remarqué, M. le leader parlementaire de l'Opposition, que j'ai permis à M. le député d'Outremont d'intervenir sur cette question. Je lui ai permis d'intervenir sur le mot en question. M. le député d'Outremont a choisi d'inviter M. le ministre dans le comté de Frontenac. Alors, je les invite tous deux à y aller de manière que nous puissions délibérer en paix.

Sur quoi, nous passons aux avis à la Chambre.

M. le leader parlementaire du gouvernement.

Travaux des commissions

M. Bertrand: M. le Président, je voudrais faire motion pour que des commissions parlementaires puissent siéger ce matin de 11 h 15 à 13 heures: à la salle 81-A, la commission de la présidence du conseil et de la constitution pour l'étude des crédits de Mme la ministre déléguée à la Condition féminine; à la salle 91-A, de 11 h 15 à 13 heures toujours, la commission des affaires sociales pour l'étude article par article du projet de loi no 20; au salon rouge, la commission de l'énergie et des ressources pour la poursuite des auditions sur le dossier de LG 2.

Pour cette partie de la journée et comme c'est le seul moment où trois commissions parlementaires siégeraient en même temps, c'est-à-dire de 11 h 15 à 13 heures et que, durant le reste de la journée, il y aura deux commissions parlementaires qui siégeront, comme le prévoit le règlement, je demanderais le consentement pour que les trois puissent siéger en même temps.

Le Président: M. le leader parlementaire de l'Opposition.

M. Lalonde: Excusez-moi. Est-ce que le leader pourrait répéter en ce qui concerne la deuxième commission parlementaire?

M. Bertrand: Oui, c'est celle des affaires sociales. On avait le choix entre affaires sociales ou sécurité du revenu pour l'étude du projet de loi no 20.

Le Président: Il y a donc consentement. La motion de M. le leader parlementaire du gouvernement...

M. Bertrand: Je la complète, M. le Président, après avoir obtenu ce consentement, en indiquant que la commission des affaires sociales poursuivra l'étude du projet de loi no 20, de 15 heures à 18 heures, cet après-midi, toujours à la salle 91-A, et que la commission de l'énergie et des ressources poursuivra ses travaux de 15 heures à 18 heures et de 20 heures à 22 heures, ce soir. Maintenant, ce soir aussi, une deuxième commission parlementaire sera convoquée, c'est celle de la présidence du conseil et de la constitution, à la salle 81-A, pour l'étude des crédits du ministre délégué à l'Aménagement.

Le Président: La motion du leader parlementaire du gouvernement est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Président: Adopté. Questions sur les travaux de la Chambre, en vertu de l'article 34. M. le député de Jean-Talon.

Recours à l'article 34

M. Rivest: Oui, au leader du gouvernement. Est-ce que le gouvernement, d'ici la fin de la session, a l'intention de

déposer un projet de loi modifiant la Communauté urbaine de Québec et est-ce que le ministre pourrait s'informer si un tel projet de loi a fait l'objet, dans toutes et chacune de ses parties, de consultations avec les membres de la Communauté urbaine de Québec?

Le Président: M. le leader parlementaire du gouvernement.

M. Bertrand: À ma connaissance, je n'ai jamais entendu parler, jusqu'à maintenant, qu'il y avait une telle hypothèse de modifications dans l'air à la Loi sur la Communauté urbaine de Québec. Je veux bien prendre information auprès du ministre des Affaires municipales, mais aucune information ne m'est parvenue à ce sujet et je ne vois à l'horizon aucune loi, du moins dans un avenir rapproché.

Je voudrais aussi donner une information, comme me l'avait demandé le leader parlementaire de l'Opposition, relativement aux projets de loi privés, quant aux avis qui doivent paraître. Voici les avis qui restaient à paraître, le 1er juin. Pour le projet de loi no 225 relativement à la charte de la ville de Sainte-Foy, il y avait des avis à paraître dans la Gazette officielle, les 4, 11 et 18 juin, et, dans le journal Le Soleil, les 4 et 11 juin. Pour le projet de loi no 226 relativement à la ville de Saint-Laurent, il y a des avis à paraître dans la Gazette officielle les 4 et 11 juin, dans le Devoir le 4 juin. Et relativement à la Loi concernant la ville de Beaconsfield, il y a des avis à paraître dans la Gazette officielle, les 4, 11 et 18 juin, dans le Devoir, les 3 et 10 juin, et dans le News and Chronicle, les 8 et 15 juin.

Le Président: M. le député d'Outremont, en vertu de l'article 34.

M. Fortier: C'est ça. Est-ce que le leader pourrait nous dire si l'annonce qui a été faite dans le discours inaugural sur l'abolition de la Société de développement de la Baie James et l'annonce qui a été faite par le ministre de l'Énergie et des Ressources à plusieurs reprises seront suivies du dépôt du projet de loi, puisque cela fait plusieurs mois qu'on en parle? Il semblerait que le délai a été dépassé, mais que l'annonce du ministre n'a pas été suivie de faits. Peut-être n'a-t-il pas eu le temps de s'en occuper jusqu'à maintenant?

Le Président: M. le leader parlementaire du gouvernement.

M. Bertrand: Le ministre de l'Énergie et des Ressources m'indique qu'il a bien hâte d'avoir un petit brin de causette avec le député d'Outremont sur un certain nombre de sujets, dont celui-là, entre autres.

Le Président: M. le député de Hull.

M. Rocheleau: Merci. Je demandais hier, à la suite du dépôt du projet de loi no 28, la possibilité d'entendre le président de la Société d'aménagement de l'Outaouais en commission parlementaire. Je crois avoir donné tous les arguments nécessaires au ministre des Affaires municipales, hier, tenant compte du fait que le président de la SAO, Société d'aménagement de l'Outaouais, est aussi membre observateur de la Communauté régionale de l'Outaouais, tenant compte que cela touche à la Communauté régionale de l'Outaouais. Je ne sais pas si le leader peut me dire aujourd'hui qu'il accepte maintenant d'entendre le président de la Société d'aménagement de l'Outaouais.

Le Président: M. le leader parlementaire du gouvernement.

M. Bertrand: M. le Président, il me fait toujours plaisir d'accepter de telles suggestions et de telles recommandations, premièrement, dans la mesure où le ministre responsable du dossier m'indique qu'il est opportun qu'un organisme vienne devant la commission parlementaire et, deuxièmement -je pense que ce sont les meilleures conditions, dans le fond, à remplir - dans la mesure où il y a eu des échanges de part et d'autre et qu'on s'est entendu sur les groupes qu'on voudrait inviter à cette commission parlementaire, puisqu'il s'agit d'invitations et non pas d'une ouverture "at large" des organismes qui voudraient se faire entendre. Je suggérerais au député de Hull, dans la mesure où il trouvera un moment pour le faire, d'en parler au ministre des Affaires municipales. Mais le ministre des Affaires municipales ne m'a pas donné de nouvelles indications quant à ce dossier. Donc, ma réponse, pour l'instant, c'est non, dans le cas de la Société d'aménagement de l'Outaouais. (11 h 20)

Projet de loi no 29 Deuxième lecture

Le Président: Ce qui nous amène aux affaires du jour et à la deuxième lecture du projet de loi no 29, Loi modifiant la Loi sur la Société des alcools du Québec et d'autres dispositions législatives. La parole est au ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme.

M. Rodrigue Biron

M. Biron: M. le Président, je suis heureux aujourd'hui de présenter ce projet de loi modifiant la Loi sur la Société des

alcools du Québec, parce que, depuis déjà au-delà d'un an et demi, nous avons travaillé avec les principaux intervenants dans ce secteur et nous avions pris la décision de principe, que nous réalisons aujourd'hui, de faire en sorte de libéraliser davantage les actions ou les décisions de la Société des alcools du Québec dans le marché des vins et des spiritueux au Québec. Par ce projet de loi, nous ferons donc plus de place à l'entreprise privée qui voudra faire des produits de qualité; nous permettrons surtout à ces entreprises privées de créer davantage d'emplois au Québec en faisant davantage d'embouteillage de vins de qualité au Québec et en permettant aussi à ces entreprises privées de conquérir de nouveaux marchés, particulièrement les marchés de la Nouvelle-Angleterre. Nous donnons une marge de manoeuvre, selon la saine gestion des finances, à chacune des entreprises dans le domaine de la distribution, soit les grossistes en distribution, soit les épiciers-détaillants, ceux et celles qui ont un permis de distribution au gros ou au détail du vin au Québec.

Le 26 février 1982, je convoquais, à titre de ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme, tous les principaux intervenants québécois du secteur des boissons alcooliques à une table de consultation destinée à recevoir les représentations et propositions en vue d'améliorer le système de fabrication et de commercialisation des boissons alcooliques au Québec. Après avoir analysé les problèmes particuliers à ce secteur, ainsi que les propositions des différents intervenants et après avoir mesuré leurs implications financières, économiques et fiscales, le Conseil des ministres dévoilait, le 21 décembre 1982, les grands objectifs qu'il entend poursuivre dans ce secteur et les mesures qui lui semblaient les plus appropriées pour les réaliser. Cette décision de principe du 21 décembre 1982 fut suivie d'une période de consultation intensive avec les partenaires du domaine industriel, en particulier, pour préciser le cadre général et les modalités d'application de ces mesures. J'annonce aujourd'hui le cadre général de cette réforme de façon à préciser la nature des amendements proposés par le projet de loi no 29 à la Loi sur la Société des alcools du Québec.

Les objectifs visés par le gouvernement au moyen de la série de mesures annoncées aujourd'hui sont multiples. Il convient, tout d'abord, de rappeler le rôle exercé dans ce secteur par la Société des alcools du Québec. Il a été généralement reconnu dans le passé que la présence d'un monopole d'État dans ce secteur avait comme principaux avantages de permettre le maintien de prix uniformes dans toutes les régions du Québec et de mieux contrôler la qualité des boissons alcooliques, ainsi que la fiscalité reliée à ce commerce. Le gouvernement tient à conserver les avantages du système actuel qui bénéficient aux consommateurs québécois et qui permettent de favoriser des retombées économiques pour les entreprises du Québec. L'objectif primordial visé par le gouvernement est de permettre, dans le cadre d'une plus grande libéralisation, le maximum de retombées économiques pour le Québec, donc, le maximum d'emplois créés au Québec à cause de l'industrie des vins et spiritueux.

À cet effet, les buts prioritaires de la réforme qui sont à la base du projet de loi no 29 sont les suivants: premièrement, augmenter les retombées économiques des industries impliquées au Québec; deuxièmement, favoriser le développement des ventes des industries québécoises de boissons alcooliques sur le marché nord-américain; troisièmement, permettre le développement de produits typiquement québécois, en particulier les produits du cidre; quatrièmement, favoriser une compréhension mutuelle et de bonnes relations commerciales entre la Société des alcools du Québec et ses fournisseurs et, cinquièmement, permettre une amélioration des services aux consommateurs tout en tenant compte de la nécessité de maintenir le rendement fiscal de la Société des alcools du Québec.

Étant donné l'urgence de mettre en oeuvre certaines des décisions du gouvernement déjà évoquées lors des discussions tenues avec la Société des alcools du Québec et les industriels, les mesures à prendre à court terme seront d'abord présentées. Elles ont trait au développement du secteur industriel des boissons alcooliques et au rôle de la SAQ-production, ainsi qu'au contrôle de qualité et des permis industriels. La réforme du système de commercialisation et d'autres changements de nature fiscale ou administrative seront présentés subséquemment.

Tout d'abord, le développement du secteur des boissons alcooliques et le rôle de la SAQ-production. En vertu de la Loi fédérale sur l'importation des boissons enivrantes, le droit d'importer des boissons alcooliques au Canada est attribué exclusivement au gouvernement des provinces et, plus précisément, aux agences responsables de la vente des boissons alcooliques dans chacune d'elles, donc la Société des alcools au Québec.

Une conséquence de ce pouvoir, qui est fort important puisqu'il consacre la juridiction des provinces en ce domaine, est que l'embouteillage de boissons alcooliques importées relève des provinces. C'est en vertu de ce pouvoir que, depuis 1922, la Société des alcools du Québec embouteille des boissons alcooliques importées. En 1971,

le rapport de la commission Thinel recommandait que la Société des alcools du Québec continue l'embouteillage de produits importés en vrac et, surtout, adopte à leur égard des méthodes modernes et dynamiques d'embouteillage, du publicité et de mise en marché.

On ne saurait reprocher à une société d'État de s'équiper de façon à être efficace dans ses activités. Toutefois, il est apparu essentiel au gouvernement de clarifier la question de la rentabilité de la section embouteillage de la SAQ. À ce sujet, les états financiers de cette section ont été séparés des autres activités de la SAQ, tel que demandé par nos partenaires du secteur privé. Leur exactitude a été vérifiée par des vérificateurs externes. J'aurai l'occasion d'analyser personnellement au cours des prochains jours l'état de la rentabilité des activités de la section de la SAQ.

Cependant, plusieurs intervenants font valoir que le monopole d'achat de la SAQ à l'égard des vins et des spiritueux et sa présence dans l'embouteillage place la SAQ dans une situation particulière d'embouteilleur et d'unique acheteur des produits de ses fournisseurs. Pour répondre aux arguments quant aux conflits appréhendés entre ces différents rôles de la SAQ, une solution consistant à confier les activités de production de la SAQ à une nouvelle société qui pourrait être une filiale d'une société d'État existante a été envisagée. D'une part, cette solution aurait été financièrement risquée parce que la nouvelle société n'aurait plus bénéficié de l'intégration physique des opérations d'embouteillage au centre de distribution de la SAQ à Montréal. D'autre part, le problème de déterminer dès le départ si cette nouvelle société aurait les mêmes possibilités de développement que les sociétés privées se poserait rapidement. Par exemple, cette nouvelle société aurait-elle le droit de concurrencer les distillateurs, les fabricants de cidre et les viniculteurs québécois dans l'embouteillage de produits que la SAQ s'était abstenue d'embouteiller jusqu'ici?

Le gouvernement n'a pas complètement écarté la possibilité de créer une nouvelle société, surtout si le secteur privé voulait en devenir partenaire. Cependant, il apparaît au gouvernement que les solutions à privilégier sont d'abord de favoriser, lorsque c'est requis, un élargissement des pouvoirs du secteur privé dans chacune des industries, d'appliquer des contrôles uniformes à l'égard de tous les produits, y compris ceux de la SAQ-production, et, enfin, de mettre en place des structures qui permettent aux fournisseurs de pouvoir faire appel lorsqu'ils estiment être traités inéquitablement dans l'application de ces contrôles.

La présence de la SAQ dans l'embouteillage du vin, qui remonte à 1922, a été historiquement très importante. Par exemple, en 1969, avant l'implantation d'une industrie vinicole privée au Québec, les vins embouteillés par la SAQ représentaient 35,7% des ventes totales de vin au Québec. En 1982, donc treize ans plus tard, cette part n'avait pratiquement pas changé alors que la part des viniculteurs privés du Québec a progressé régulièrement pour atteindre 30% du marché. C'est donc dire que l'embouteillage de vin au Québec s'est accru de 30% depuis quelques années. C'est autant d'emplois créés dans ce domaine pour les entreprises, les travailleurs et les travailleuses du Québec.

Pourtant, en dépit de cette progression, l'industrie dispose d'une capacité d'embouteillage qui n'est utilisée en moyenne qu'à 25% puisqu'on se sert de ces capacités d'embouteillage essentiellement et exclusivement que pour vendre au Québec. Il est généralement admis que le seul marché québécois ne saurait suffire à rentabiliser les onze fabricants et la chaîne de production de SAQ-production. Pour ce faire, les industriels devront montrer leur aptitude à s'imposer sur le marché québécois, bien sûr, mais aussi et surtout à exporter les produits fabriqués et embouteillés au Québec. (11 h 30)

La libéralisation des règles du jeu pour l'industrie québécoise était demandée par nos principaux partenaires du secteur privé. Il est apparu souhaitable au gouvernement d'amender les règles de la concurrence dans l'industrie du vin pour donner aux viniculteurs des possibilités similaires à celles de la SAQ.

Les mesures suivantes sont donc prévues. Premièrement, à compter du 1er juillet 1983, tout détenteur de permis de fabricant de vin au Québec sera autorisé à embouteiller des vins en provenance de l'extérieur du Québec, mélangés ou non au produit qu'il vinifie, sous les marques dont il est propriétaire exclusif ou sous les marques et pour le compte de ses fournisseurs. Ces marques pourront être mises en vente au Québec à partir du 1er septembre 1983.

Deuxièmement, l'enregistrement et le dédouanement des vins importés continueront à s'effectuer par l'intermédiaire de la SAQ pour un contrôle efficace des quantités de vin entrées au Québec.

Troisièmement, le service des permis industriels sera désigné pour effectuer le contrôle d'authenticité des produits importés et embouteillés au Québec selon une procédure prévue par règlement.

Quatrièmement, le nombre de détenteurs de permis de fabricant de vin sera limité au nombre actuel, soit 11 fabricants privés et la SAQ-production.

Ces mesures donneront aux viniculteurs des possibilités de développement similaires à celles de la SAQ-production. Dans plusieurs

cas, elles devraient leur permettre d'améliorer leurs produits, de réduire leurs coûts et de rentabiliser leur ligne d'embouteillage. Jusqu'à maintenant, les producteurs étaient autorisés à importer jusqu'à 33% de leurs vins, mais étaient obligés de produire, à même du concentré ou du moût, le vin qu'on appelait le vin québécois. Maintenant, on leur permet d'importer jusqu'à 100% de vins de qualité de l'extérieur afin qu'ils soient embouteillés au Québec.

L'industrie des spiritueux. Le cas de l'industrie de la distillation est différent de celui de l'industrie des vins. Il s'agit d'une industrie qui occupe depuis longtemps une place importante au Québec et qui exporte en fait la majeure partie de sa production. De plus, les spiritueux maison embouteillés par la SAQ occupent moins de 12% du marché des spiritueux au Québec, une part bien inférieure à celle que la société occupe dans le marché des vins, bien sûr. Ces chiffres tiennent compte de l'embouteillage de l'alcool à 40% et à 94% en volume que la SAQ est seule à embouteiller. La SAQ joue un rôle utile comme entreprise témoin dans l'embouteillage des spiritueux. Toutefois, puisque les spiritueux ne sont vendus qu'en succursale, la Société des alcools du Québec limitera sa présence sur le marché au nombre de marques maison de spiritueux qu'elle embouteille actuellement. Donc, pas plus d'expansion dans ce secteur pour la SAQ. Nous gardons le statu quo et nous permettons à l'entreprise privée de prendre toute l'expansion du marché québécois, et même à l'extérieur.

Les mesures suivantes sont prévues. Tout détenteur de permis de distillateur sera autorisé à embouteiller des spiritueux en provenance de l'extérieur du Québec sous les marques dont il est le propriétaire exclusif ou sous les marques et pour le compte de ses fournisseurs. Les distillateurs devront toutefois respecter les mêmes mesures de contrôle appliquées aux viniculteurs. Les détenteurs d'un permis de distillateur seront désormais autorisés à vendre à la Société des alcools du Québec, sous leurs marques, de l'alcool à 40% et certaines boissons non normalisées contenant au moins 15% d'alcool en volume.

L'industrie du cidre et des boissons typiquement québécoises. L'industrie du cidre au Québec se compose de trois entreprises industrielles et de trois entreprises artisanales. Ces entreprises sont détentrices d'un permis de fabricant de cidre fort, de cidre léger ou des deux. En principe, l'industrie du cidre est une industrie qui, dans le secteur des boissons alcooliques, devrait avoir une très forte valeur ajoutée par unité de volume, car elle utilise une matière première typiquement québécoise, soit la pomme.

Pourtant, le cidre, en dépit de mesures fiscales avantageuses et malgré une mise en vente dans tous les magasins d'alimentation, n'a pas su se tailler la place espérée au départ en 1971. Récemment, le gouvernement du Québec a autorisé la fabrication de boissons alcooliques de type apéritif à base de pomme pour tenter d'améliorer la situation. Ce nouveau type de produit semble connaître un franc succès, par exemple, le vermouth québécois.

Dans une optique d'autosuffisance alimentaire pour le Québec, le gouvernement maintient son appui aux boissons typiquement québécoises, donc faites à partir de fruits récoltés au Québec.

À cet effet, les mesures suivantes sont prévues: les permis de fabricant de cidre fort et de cidre léger sont abolis et remplacés par un seul permis de fabricant de cidre, donc beaucoup plus simple; l'appellation "cidre" sera désormais réservée et devra être utilisée pour toutes les boissons alcooliques à base de pomme; en plus des catégories de cidre léger et de cidre fort existantes, les fabricants de cidre seront autorisés à fabriquer des cidres légers aromatisés et des cidres apéritifs; toutes les catégories de cidre, sauf le cidre léger, devront être mises en marché par l'intermédiaire de la Société des alcools du Québec pour un meilleur contrôle; toutes les catégories de cidre pourront être mises en vente par un détenteur de permis de vendeur de cidre; tout détenteur de permis de fabricant de vin pourra désormais fabriquer des boissons typiquement québécoises à partir de fruits autres que la pomme: par exemple le bleuet pour le Du Bleuet; pour être définie en tant que boisson typiquement québécoise, au moins 80% du volume du produit fini doit provenir de jus extrait de fruits récoltés au Québec; cette mesure, qui existe déjà dans le cas des cidres, continuera de s'appliquer à ces produits; pour permettre de vérifier le respect de la norme qui vient d'être définie, les détenteurs de permis devront faire rapport périodiquement au ministre sur tous leurs achats de matières premières effectués au Québec.

Un mot sur l'exportation de nos produits. Il est opportun d'insister sur l'importance accordée par le gouvernement du Québec au développement de nos exportations dans le secteur des boissons alcooliques. Les distillateurs et les brasseurs ont pu s'imposer sur plusieurs marchés extérieurs. Le gouvernement espère que cette réussite pourra être imitée par plusieurs de nos viniculteurs et par la Société des alcools du Québec, maintenant que tous disposent, en vertu de la libéralisation de l'embouteillage des vins que je viens d'annoncer, des possibilités nécessaires pour offrir un éventail de boissons alcooliques qui répondent aux préférences des consommateurs.

Pour bien démontrer cet appui, le gouvernement du Québec a rendu disponible cette année à tous les viniculteurs une étude du marché du vin dans le Nord-Est des États-Unis. Le gouvernement du Québec est prêt à appuyer les entreprises intéressées aux marchés d'exportation par les nombreux programmes qui existent soit au ministère de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme, soit au ministère du Commerce extérieur, soit à la SDI. Il met ses ressources à la disposition des intéressés pour leur permettre de conclure des associations avec des entreprises étrangères aux fins d'exportation.

Le gouvernement prévoit également que les fabricants de vin du Québec et les distillateurs auront l'autorisation d'embouteiller des boissons alcooliques importées pour fins d'exportation, que ces boissons soient inscrites ou non au répertoire de la SAQ. C'est tout nouveau, dans ce projet de loi.

Le contrôle de la qualité et le permis industriel. Outre l'élargissement des pouvoirs d'embouteillage du secteur privé, le gouvernement étudie en profondeur les problèmes soulevés par le rôle-conseil joué par la SAQ auprès du ministre dans le cas de permis industriels. Il a également tenu compte de l'impact des décisions du Service de contrôle de qualité de la SAQ sur ses fournisseurs.

Le service des permis industriels de la SAQ n'est pas relié au rôle commercial de la SAQ, mais est essentiellement un organisme de surveillance de l'industrie et de conseil auprès du ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme. De l'avis unanime des fabricants et de la SAQ, ce rôle ne devrait plus être assumé par la SAQ, mais plutôt par le ministère de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme.

En ce qui a trait au contrôle de la qualité, il semble, après analyse, que les plaintes portent moins sur le contrôle de la qualité lui-même que sur la façon dont il aurait pu être utilisé pour des fins de politiques commerciales par la SAQ. C'est pourquoi une première démarche sera de permettre à un comité extérieur à la SAQ d'agir comme arbitre dans les cas de litige.

Ainsi, en matière de contrôle des permis industriels et de contrôle de qualité, les mesures suivantes sont prévues par le gouvernement: dès l'adoption de la Loi modifiant la Loi sur la SAQ, donc, la loi 29, le Service des permis industriels sera transféré au ministère de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme; à l'instar de ce qui existe dans d'autres pays, un comité interprofessionnel sera formé, dès l'automne 1983, qui agira comme arbitre et auquel les fournisseurs de la Société des alcools du Québec pourront en appeler, entre autres, dans le cas des produits refusés ou contestés pour des raisons d'ordre chimique, organoleptique ou d'étiquetage. C'est nouveau. Donc, les représentants de l'entreprise privée pourront siéger à ce comité interprofessionnel comme, d'ailleurs, les représentants de la SAQ. (11 h 40)

Maintenant, la distribution. Depuis octobre 1978, la vente de certains vins et cidres désignés était accordée à tous les détenteurs de permis d'épicerie.

En vertu des règles actuelles, les épiciers sont cependant limités dans le choix des produits qu'ils peuvent mettre en vente et ils sont obligés de les offrir aux consommateurs. Le succès de la vente de plusieurs de ces produits "désignés" a incité les épiciers et les distributeurs autorisés qui les approvisionnent à demander au gouvernement un élargissement de la gamme des vins qu'ils sont autorisés à mettre en vente et, de façon plus générale, une certaine libéralisation du processus de mise en marché des vins.

Bien que les vins constituent, en moyenne, moins de 2% du total des ventes des épiciers, ces vins représentent tout de même près de 35% des ventes totales de vin au Québec. En étendant d'un seul coup la vente de vin à toutes les épiceries, le gouvernement du Québec a permis, en 1977, au Québec de devenir, en comparaison avec d'autres provinces canadiennes et des États américains, un des États où le nombre de points de vente de vin par mille citoyens est le plus élevé en Amérique du Nord.

En évaluant si une telle libéralisation devrait être poursuivie, le gouvernement a dû tenir compte de plusieurs facteurs dont la rentabilité du réseau des succursales de la SAQ et le rôle essentiel de perception fiscale exercé par la Société des alcools du Québec.

À l'égard de la distribution, compte tenu de l'importance du rôle fiscal de la SAQ, le gouvernement a décidé ce qui suit. D'abord, la présence de la Société des alcools du Québec sera maintenue en tant que monopole sur la première distribution des boissons alcooliques au Québec, sauf en ce qui concerne la bière domestique et le cidre léger. Donc, monopole de première distribution quant aux grossistes.

Deuxièmement, la Société des alcools continuera d'utiliser des distributeurs qui achemineront les boissons alcooliques aux épiciers. Donc, des grossistes qui achemineront aux épiciers les boissons alcooliques et le vin. Le gouvernement propose toutefois de modifier la loi pour permettre à ces distributeurs d'acheter et de revendre les boissons alcooliques aux épiciers comme toute entreprise privée le fait normalement, laissant ainsi ces intermédiaires libres de fixer leur propre marge de commercialisation.

Les mesures que le gouvernement

entend proposer concernant la vente au détail sont plus complexes que celles qui ont été présentées jusqu'ici. Il est nécessaire que les consommateurs québécois puissent les situer dans leur juste perspective.

Les études menées depuis la table de consultation de février 1982 ont confirmé les conclusions principales du rapport de la Commission d'enquête sur le commerce des boissons alcooliques, qui date de 1971. D'une part, l'État a intérêt à maintenir un réseau rentable de succursales et d'agences qui bénéficient de l'exclusivité de la vente de certaines catégories de produits, les spiritueux en particulier. D'autre part, il serait possible, à certaines conditions, de permettre une vente plus large de la catégorie des vins de table dans les magasins d'alimentation.

Comme cela a déjà été expliqué, la vente de vin ne représente qu'une faible proportion des ventes dans les épiceries. Pour la Société des alcools du Québec, cependant, tout transfert de vente de boissons alcooliques des succursales vers les épiceries contribue à diminuer la rentabilité de son réseau de succursales. On pourrait donc en arriver à cette situation non souhaitable où l'État aurait à assumer un coût élevé pour fermer des succursales autrefois rentables, ce qui remettrait également en cause l'emploi de centaines de travailleurs qualifiés de la SAQ.

C'est pourquoi, afin d'assurer la rentabilité du réseau des succursales et pour d'autres raisons d'ordre économique et social, le gouvernement a prévu de conserver au réseau de la SAQ l'exclusivité de la vente aux consommateurs des spiritueux et de certaines catégories de vins.

En parallèle, le gouvernement est conscient des pressions qui s'exercent pour améliorer le choix des vins dans les épiceries. Depuis 1978, la vente des vins désignés a été limitée à une sélection de vins des fabricants de vin du Québec et de vins embouteillés par la SAQ sous ses propres marques. En plus d'être limités sur le choix des marques, les épiciers sont obligés de respecter une série de normes de mise en tablettes dont le contrôle se révèle difficilement applicable.

D'un point de vue commercial et sans nuire à la fiscalité gouvernementale et à la survie du réseau des succursales, il nous semble possible d'abolir ces restrictions et d'améliorer le choix dans les épiceries parmi certaines catégories de vins, sans appellation d'origine ou sans indication de cépage, à condition qu'ils soient embouteillés au Québec.

En contrepartie, toutefois, l'État devrait prendre sa marge bénéficiaire au grossiste, laissant les détaillants responsables du choix des vins, du financement des inventaires, du mode d'étalage et de la fixation de leur marge de commercialisation.

En somme, il s'agirait pour le gouvernement de reconnaître, une fois les taxes perçues, que la vente doit se fonder avant tout sur la préférence des consommateurs.

Plusieurs options ont été envisagées en ce qui concerne les marques de vins de table qui seraient mises en vente dans les épiceries. Deux options ont fait l'objet d'une attention plus particulière.

On a mentionné auparavant que les producteurs privés au Québec pourraient embouteiller des vins sous la marque des fournisseurs étrangers, comme le fait actuellement la SAQ. Ces vins seraient vendus dans le réseau des succursales et agences. Une première option aurait été de vendre ces vins dans les épiceries. Cette option a été proposée à la table de consultation par les représentants professionnels des fournisseurs étrangers au Québec.

Pour plusieurs intervenants québécois, une telle mesure se situerait à l'encontre de notre politique qui vise à augmenter l'autosuffisance du Québec et n'encouragerait pas le développement des produits fabriqués à partir de fruits récoltés au Québec.

L'implantation à court terme de cette politique ferait des viniculteurs québécois une industrie d'embouteilleurs moins rentable et sans possibilité d'exportation. En effet, l'absence de marques exclusives propres aux viniculteurs québécois signifierait que l'industrie québécoise ne trouverait plus ici une base stable lui permettant d'exporter. Or, rien n'assure, dans l'hypothèse de la vente de vins de marques étrangères dans les épiceries, que les fournisseurs étrangers accorderaient aux entreprises québécoises le mandat d'exportation de ces marques, aux États-Unis notamment.

Les coûts d'une telle politique seraient donc payés par les Québécois et les profits des marques québécoises, actuellement réinvestis au Québec, seraient transférés hors du Québec au bénéfice des fournisseurs étrangers. Il s'agit donc de mesures difficiles à concevoir dans un secteur où notre balance commerciale avec les pays fournisseurs est déjà négative.

Pour toutes ces raisons, le gouvernement du Québec a fait du réinvestissement au Québec et de l'exportation des vins embouteillés au Québec la clé de sa politique dans le secteur des boissons alcooliques.

C'est dans cette optique qu'il a retenu l'option suivante. Elle consiste d'abord à favoriser, là où c'est possible, le développement des boissons typiquement québécoises. À cette fin, le gouvernement a prévu que, dans le cas des boissons aromatisées et des boissons de type apéritif, le marché des épiceries sera réservé en exclusivité aux boissons typiquement

québécoises.

En ce qui a trait aux vins, on a déjà indiqué que les producteurs privés pourraient embouteiller des vins importés sous leurs propres marques, comme le fait actuellement la SAQ. L'option choisie par le gouvernement est une extension du système actuel qui permettra de vendre en épicerie les vins de table qui ne feront pas référence à une aire géographique à l'intérieur d'un pays ou à un cépage. Les ventes de vins d'appellation et de vins de cépage seront réservées au réseau des succursales de la SAQ. En d'autres termes, on pourra avoir sur une bouteille de vin embouteillée au Québec "vin de France, embouteillé au Québec", avec une marque québécoise, soit Outremont, Montréal, Trois-Rivières et ainsi de suite.

Toutefois, la politique proposée accorde un droit acquis à tous les produits vendus dans les épiceries au moment de la décision du Conseil des ministres du 21 décembre 1982. Le gouvernement du Québec annonce donc aujourd'hui une libéralisation de la vente des vins et des boissons alcooliques typiquement québécoises dans les épiceries et qui comporte les mesures suivantes:

Tout détenteur d'un permis d'épicerie sera désormais autorisé à vendre de la bière, sauf la bière en fût, toutes les catégories de cidre ainsi que les boissons alcooliques embouteillées au Québec sous des marques exclusives aux fabricants de vin du Québec, ou à la Société des alcools du Québec, et définies ainsi: Premièrement, les vins de table sans appellation d'origine et sans indication de cépage. Par appellation d'origine, on entend ici toute inscription sur le contenant d'un vin faisant référence à une aire géographique à l'intérieur d'un pays. Deuxièmement, les marques de boissons alcooliques en vente dans les épiceries le 21 décembre 1982, auxquelles le gouvernement reconnaît un droit acquis. Troisièmement, les boissons alcooliques typiquement québécoises que les fabricants de vin seront autorisés à fabriquer en vertu de la loi et des règlements. Quatrièmement, les vins d'appellation d'origine embouteillés par la Société des alcools du Québec, dans les limites du nombre de marques-formats de tels vins vendus dans les épiceries le 21 décembre 1982.

À l'intérieur des catégories mentionnées précédemment, les épiciers seront désormais libres du choix des vins, du mode d'étalage de leurs produits et de la fixation de leur propre marge de commercialisation.

Cette libéralisation entrera en vigueur de façon progressive entre le 1er septembre 1983 et le 1er septembre 1985, date à laquelle toutes les boissons alcooliques autorisées pourront être mises en marché et vendues par un épicier.

La libéralisation que je viens d'annoncer comporte plusieurs avantages sur le plan de la mise en marché. L'obligation pour les épiciers de maintenir certains produits en vente est abolie. L'épicier pourra donc désormais traiter les catégories de boissons alcooliques qu'il est autorisé à mettre à vente comme n'importe quelle autre catégorie de produits qu'il offre aux consommateurs. Les consommateurs, pour leur part, seront avantagés par un meilleur choix de produits d'excellente qualité à prix raisonnable dans les épiceries. Les viniculteurs pourront profiter de la libéralisation dans l'embouteillage et dans les épiceries pour accroître leur choix de vins et développer le marché des boissons alcooliques typiquement québécoises. (11 h 50)

Je vais parler maintenant de la fiscalité et des prix. Après avoir exposé l'essentiel de la politique proposée par le gouvernement en ce qui concerne la fabrication et le commerce, des précisions importantes doivent être formulées en ce qui concerne la fiscalité et les prix.

L'un des objectifs primordiaux du gouvernement est de permettre à l'État de maintenir le rendement fiscal par le monopole de distribution de la Société des alcools du Québec. À cet effet, le maintien de la SAQ en tant que grossiste de première distribution devrait permettre d'éviter un problème propre au système libre, à savoir les coûts onéreux, voire l'impossibilité de contrôler adéquatement la perception des taxes. Cependant, dans le contexte d'une plus grande libéralisation, les conditions financières faites aux grossistes et aux épiciers ont également une influence sur le niveau de la fiscalité comme l'illustre le système actuel.

En 1978, le gouvernement autorisait la vente dans les épiceries d'une sélection restreinte de vins du Québec et de vins embouteillés par la SAQ. Depuis lors, la sélection de ces vins a été un peu élargie. Il y a cinq ans, le gouvernement avait accepté de garantir, pour une période d'introduction, une rémunération aux épiciers qui leur assurait de couvrir l'ensemble de leurs coûts moyens, fixes ou variables.

Le fait que ce système de rémunération soit basé sur le prix de vente plutôt que sur le coût des ventes de la SAQ, comme le proposait la commission Thinel en 1971, conduit la SAQ à distribuer à ses partenaires commerciaux une partie des hausses de majoration utilisées pour atteindre l'objectif de dividendes prévu par le gouvernement. Comme le système actuel garantit aux intermédiaires qu'ils partageront la hausse de prix avec le gouvernement, la SAQ est obligée de hausser davantage les prix aux consommateurs pour un même niveau de taxes.

Les conditions financières prévues par le gouvernement et annoncées dans le

discours sur le budget sont d'une portée différente. Elles visent à garantir aux épiciers et grossistes qu'ils couvriront au moins les coûts additionnels qu'ils ont à encourir pour la vente du vin. Il appartiendra désormais aux épiciers de déterminer eux-mêmes leur marge de commercialisation et de profits.

Par ailleurs, dans le régime libéralisé, certains intervenants pourraient être tentés de livrer ou de vendre des produits sans que les gouvernements aient pu prélever leurs taxes; Un tel comportement est non seulement illégal, mais il pénalise l'immense majorité des Québécois et des Québécoises qui se voient imposer d'une autre façon pour ces taxes non perçues. Le gouvernement ne permettra pas de tels comportements. Des mesures particulières sont prévues dans le projet de loi pour les contrevenants. Ainsi, une amende importante, voire la révocation du permis, sera encourue par ceux qui seront trouvés coupables.

En conclusion, à l'égard de la fiscalité, le gouvernement prévoit un certain nombre de mesures dont les plus importantes sont les suivantes.

Premièrement, la Société des alcools du Québec établira désormais des prix de gros et laissera les distributeurs et épiciers fixer leur propre marge de commercialisation.

Deuxièmement, les prix de détail minimaux seront établis de telle sorte que les distributeurs et les épiciers couvriront au moins les coûts additionnels qu'ils ont à encourir pour la vente de boissons alcooliques.

Troisièmement, l'écart entre les taux de majoration utilisés par la SAQ pour tous les vins importés en bouteilles et ceux utilisés pour les vins embouteillés au Québec sera établi pour refléter les coûts additionnels assumés par la SAQ pour vendre les vins importés en bouteilles.

Avant de terminer, je voudrais traiter très brièvement de la réforme administrative de la Société des alcools du Québec. La création de la Société des alcools du Québec date de 1971. Dans le domaine commercial, elle remplaçait à cette époque l'ancienne Régie des alcools. Depuis la création de la société, le gouvernement a pu compter sur la présence d'administrateurs qualifiés qui ont pu donner a ce monopole d'Etat le caractère ordonné et efficace nécessaire à toute entreprise moderne. Le gouvernement confirme aujourd'hui les rôles fiscal et commercial joués par la Société des alcools du Québec. Cependant, la tâche des administrateurs de la société est devenue plus ardue et exigeante parce qu'ils doivent désormais tenir compte de la présence des viniculteurs dans le domaine de l'embouteillage et de la libéralisation de la vente du vin dans les épiceries. Dans ce contexte, le projet de loi amendant la Loi

sur la Société des alcools du Québec prévoit désormais la séparation des postes de président du conseil d'administration et de président-directeur général de la société. De plus, le nombre des administrateurs sera porté de sept à neuf.

Le projet de loi confie également au ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme le pouvoir de donner à la Société des alcools du Québec, avec l'approbation du gouvernement, des directives concernant ses objectifs et son orientation. Le projet de loi prévoit aussi que la société pourra, avec l'autorisation du gouvernement, acquérir des actions ou des parts d'une autre entreprise. Cette mesure vise, entre autres, à permettre à la Société des alcools du Québec de s'associer à l'entreprise privée lorsqu'il s'avère que celle-ci est prête à effectuer certaines activités à un coût moindre que la SAQ. Cette volonté du gouvernement d'inviter la Société des alcools du Québec à s'associer à l'entreprise privée lorsqu'il est rentable de le faire pourra s'exprimer de plusieurs façons. À titre d'exemple, en 1982-1983, la SAQ a décidé d'implanter une quarantaine d'agences, dirigées par le secteur privé, dans les régions éloignées des succursales, et jusqu'à maintenant, cela a été un franc succès.

Le transfert du service des permis industriels de la Société des alcools du Québec au ministère de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme et la création d'un comité interprofessionnel se situent également dans l'orientation qui vise à dégager la Société des alcools du Québec des éléments litigieux qui pourraient se développer, maintenant qu'elle partage avec le secteur privé certaines tâches autrefois exclusives.

Le gouvernement est confiant que les administrateurs, la direction et le personnel de la Société des alcools du Québec sauront s'adapter à ces nouvelles conditions et établir avec leurs partenaires du secteur privé un dialogue nécessaire et fructueux afin que, dans son rôle d'intermédiaire, la société puisse continuer à oeuvrer pour le mieux-être de l'ensemble des Québécois et des Québécoises.

Vous me permettrez de terminer en évoquant les défis que comporte cette réforme et le grand potentiel qu'elle représente pour nos entreprises québécoises. En même temps qu'elle apporte des possibilités extraordinaires au niveau de l'amélioration de la qualité de nos produits, la libéralisation de l'embouteillage et de la mise en marché des boissons alcooliques québécoises dans les épiceries va obliger nos industriels à prendre le parti de l'excellence et à répondre de mieux en mieux aux demandes des consommateurs. Ceux qui sauront, avec l'appui indéfectible de notre gouvernement, relever ce défi et démontrer

en plus leurs aptitudes à exporter en seront les grands gagnants.

Quant aux épiciers et aux consommateurs québécois, je suis confiant qu'ils saisiront toute l'importance de favoriser, au moyen de cette libéralisation, les retombées économiques au Québec et la nécessité de prendre des mesures propres à inciter les fournisseurs intéressés à investir et à réinvestir dans l'économie québécoise. Dans ce secteur où le gouvernement du Québec a l'entière juridiction, cette politique devrait être un exemple de plus pour convaincre les citoyens et les citoyennes du Québec d'avoir au Québec les leviers nécessaires au développement de nos entreprises et de notre économie.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député d'Outremont.

M. Pierre-C. Fortier

M. Fortier: M. le Président, au nom de ma formation politique, il me fait plaisir d'adresser la parole à cette Assemblée sur le projet de loi no 29, Loi modifiant la Loi sur la Société des alcools du Québec. Comme vous le savez, jusqu'au mois de septembre dernier, j'ai été le porte-parole de notre formation politique dans le domaine de l'industrie et du commerce. J'ai suivi avec beaucoup d'attention le débat qui s'est engagé dans le public et surtout chez ceux qui se sont intéressés aux modifications qui devaient être apportées à la Société des alcools du Québec à ce sujet. Mon collègue de Mont-Royal étant retenu, comme vous le savez, à la commission parlementaire devant traiter du saccage de la Baie-James, il m'a demandé d'intervenir à sa place. Compte tenu du fait que, depuis l'an dernier, il n'y a eu à peu près aucun progrès dans ce dossier, je me trouve tout à fait à l'aise pour en traiter.

En effet, je crois qu'on doit se réjouir de l'orientation que donne le ministre à la nouvelle politique du gouvernement dans ce domaine. On peut peut-être déplorer que cela ait pris tant de temps, étant donné que la table de concertation a eu lieu au mois de février 1982 et que nous sommes maintenant rendus au mois de juin 1983. Par ailleurs, j'aimerais dire au ministre et au gouvernement que le temps que nous avons eu pour nous préparer à traiter de ce projet de loi extrêmement important a été très limité. En effet, comme vous le savez, le projet de loi no 29 n'a été déposé que mardi dernier, c'est-à-dire il y a deux jours, et je crois que le rapport financier de la Société des alcools du Québec n'a été déposé qu'hier ou aujourd'hui. Nous, de l'Opposition, avons malheureusement dû improviser à la dernière minute pour traiter d'un projet de loi qui a quand même une certaine importance - et je le reconnais - surtout dans le domaine économique.

(12 heures)

D'autant plus qu'en fouillant les nombreux projets de loi qui ont été déposés depuis deux jours, on s'aperçoit que non seulement les lois qui seront modifiées par le projet de loi no 29 que la Loi sur les infractions en matière de boissons alcooliques et la Loi sur les permis d'alcools seront modifiées par le projet de loi no 29, mais en fouillant dans d'autres projets de loi, on s'aperçoit que le projet de loi no 26 modifiera lui aussi les mêmes lois. C'est à se demander si le gouvernement fait tout en son possible pour nous compliquer la vie et fait tout en son possible pour créer de nouvelles coquilles comme celle qui était survenue l'an dernier - vous vous en souviendrez lorsqu'une modification assez importante à la loi permettait à tout contribuable - à tout citoyen du Québec d'entrer dans un restaurant avec sa propre bouteille de vin - et que, par la suite, le gouvernement avait dû modifier cette loi par une réglementation, chose assez inexplicable puisque normalement c'est la loi qui prédomine dans ce genre de choses.

Somme toute et sous réserve d'un examen plus approfondi de tous les projets de loi qui ont été déposés depuis deux jours, mes collègues et moi-même, nous exprimerons ce matin sur ce projet de loi qui modifie assez substantiellement la Loi sur la Société des alcools du Québec pour la libéraliser de la façon dont le ministre vient de l'expliquer.

J'aurais cru et j'espérais que le ministre ne s'en tienne pas uniquement aux aspects fiscaux et aux aspects commerciaux de la Société des alcools du Québec puisque, comme nous le disait dans le rapport financier de l'an dernier le président de la société des alcools, M. Daniel Wermenlinger, la Société des alcools a d'autres missions également. Il nous rappelait dans son message du président, l'an dernier, que la Société des alcools a une mission commerciale - enfin nous nous en doutions, surtout ceux qui vont régulièrement acheter du vin ou des boissons alcooliques dans les magasins de la Société des alcools du Québec, nous savons bien qu'elle a une mission commerciale - qu'elle a également une mission fiscale - personne n'en doute, je crois que nous aurons l'occasion d'y revenir, tous les contribuables du Québec en sont convaincus - qu'elle a une mission économique - le ministre en a dit quelques mots - et je crois que c'est peut-être là la nouvelle orientation qu'on veut donner à la Société des alcools du Québec - que je dois déplorer - mais que finalement elle avait une mission sociale puisque la mission sociale de la Société des alcools du Québec était la mission première de cette société lorsqu'elle

avait été créée dans sa forme originale en 1923.

Enfin il faut se souvenir - peut-être que certains d'entre nous sommes un peu trop jeunes pour nous rappeler de ce sujet puisque certains d'entre nous n'étions même pas nés - d'une revue de presse et une revue de ce qui s'est dit à ce moment nous convainc que l'intervention de l'État était surtout pour contrôler l'alcoolisme, pour s'assurer que les débits de boisson ne seraient pas ouverts à des moments inopportuns et pour s'assurer que la libéralisation de la vente des alcools se ferait sous le contrôle de l'État. Justement, le ministre nous parlait de la libéralisation des points de vente, mais il n'a pas cru bon, en traitant de ce sujet, de traiter également de la mission sociale de la Société des alcools du Québec qui semble être oubliée non seulement par le ministre, mais par l'organisme lui-même; elle semble être oubliée puisque je crois que tout gouvernement, même s'il a à coeur le développement économique du Québec, se doit en même temps, lorsqu'il promulgue des nouveaux principes et des nouvelles politiques touchant le développement économique du Québec, de toucher aux aspects sociaux que cette politique peut amener dans la société québécoise.

On sait fort bien que nous avons des problèmes d'alcoolisme au Québec. On sait fort bien que présentement, à cause du chômage chez les jeunes, il y a des problèmes d'alcoolisme qui vont croissant. D'ailleurs dans les journaux, on y fait écho à différentes reprises. J'ai ici en mains un article qui a paru dans la Presse du 16 décembre 1981 dans lequel une intervenante à Domrémy et une personne qui s'intéresse à ce genre de problème disait: Le gouvernement du Québec peut-il à la fois faire le commerce de l'alcool et combattre l'alcoolisme?

Ma collègue de L'Acadie, Mme Lavoie-Roux, désirait intervenir sur ce projet de loi pour traiter explicitement de ce problème, mais malheureusement, elle est présentement retenue en commission parlementaire et devant aller à Montréal de toute urgence cet après-midi, elle ne pourra pas traiter de ce problème. Je voulais quand même souligner qu'il est inexplicable de la part d'un gouvernement qui se dit, entre guillemets, "social-démocrate", de parler d'un projet aussi important sans s'attaquer au problème de l'alcoolisme et sans traiter de l'objectif, de la mission et des moyens que la Société des alcools du Québec devrait mettre de l'avant pour contrer les problèmes d'alcoolisme qui prévalent présentement dans la société québécoise.

Bien sûr, nous sommes pour le développement économique, mais je crois, M. le Président, qu'un gouvernement libéral et que ma formation politique, tout en s'intéressant d'une façon première au développement économique du Québec, n'a jamais, dans le passé, renié ses responsabilités dans le domaine social. J'ose espérer que, en réplique, le ministre ou ses acolytes pourront nous en dire un peu plus sur ce sujet qui a été trop négligé jusqu'à maintenant.

M. le Président, bien sûr, la Société des alcools a d'autres missions, et le ministre y a fait allusion, elle a une mission commerciale, tout le monde le reconnaît. Malheureusement, dans l'accomplissement de cette mission commerciale, je crois qu'on peut retrouver chez le public de nombreuses critiques. J'aurais espéré encore là que le ministre essaie de nous convaincre que les critiques qui reviennent maintes et maintes fois contre la Société des alcools du Québec ne sont pas fondées. Malheureusement, plusieurs le disent, plusieurs l'écrivent, et même, à un certain moment, le président de la SAQ s'est insurgé contre ces critiques qui tombaient sur la tête de la société. Il reste que le public est convaincu que la Société des alcools du Québec est une société qui cherche à avoir ses clients, et ceci est tout à fait déplorable. Un gouvernement actionnaire de cette société devrait s'assurer que les décisions commerciales, les politiques commerciales mises en oeuvre vont dans le sens de la Loi sur la protection du consommateur et vont dans le sens de protéger les intérêts des individus du Québec, même s'il s'agit d'acheter un produit qui peut être considéré à certains égards comme un produit de luxe.

Lorsqu'on pense à différentes déclarations qui ont été faites, bien sûr, on parle dans les succursales de la Société des alcools du Québec, des profits colossaux dont le Québec n'est pas encore satisfait. On faisait allusion, l'an dernier, aux augmentations répétées qui ont été ajoutées chaque mois aux produits de la Société des alcools du Québec pour s'assurer que les revenus en dividendes du ministre des Finances seraient de plus en plus accrus. Bien sûr, si on fait la revue depuis cinq ou six ans d'un produit en particulier comme la Cuvée des patriotes, on s'aperçoit que ce produit se vendait 2,40 $ en 1978 et est passé à 2,75 $ au cours de la même année et à 3,05 $ en 1979. On s'aperçoit qu'en 1982, il y a eu des augmentations successives: 3,95 $ en avril, 4,10 $ en mai, 4,20 $ en juin pour passer à 4,40 $ en juillet.

Si, encore une fois, ces augmentations pouvaient se justifier! Il n'en reste pas moins que ce que n'acceptent pas les consommateurs, c'est que... Dans une déclaration contenue dans la presse, on disait: "La SAQ empoche des millions en jouant sur les taux de change." Il faudrait

bien que le ministre discute de ces problèmes et tente de convaincre la population que la société agit en toute honnêteté face à ce genre de possibilité. Dans le secteur privé, on pourrait peut-être croire que certains commerçants empochent des millions en jouant sur les taux de change, mais il semble tout à fait ridicule qu'une société appartenant au gouvernement du Québec puisse - je mets un point d'interrogation - profiter d'une façon indue de profits additionnels. J'ose espérer que le ministre nous dira dans sa réplique que les instructions qu'il a données dans le passé et qu'il pourra donner dans l'avenir seront pour s'assurer que la Loi sur la protection du consommateur sera tout à fait respectée. (12 h 10)

M. le Président, quelques mots sur la mission commerciale. En ce qui concerne la mission fiscale, mon collègue de Vaudreuil-Soulanges en dira un mot, j'en suis sûr. Encore là, je crois que personne au Québec n'en doute. Je parlais tout à l'heure du fait qu'à l'origine, en 1923, la mission primordiale de la Société des alcools du Québec était sociale, c'est-à-dire qu'elle avait comme mission de contrôler les abus de boisson qui pouvaient se faire à ce moment-là par un contrôle des points de vente, des heures d'ouverture et en promulguant une réglementation qui forçait les gens, d'une certaine façon, à être un peu plus abstinents. On s'aperçoit, avec le temps, que la mission de la Société des alcools du Québec a évolué d'une façon très rapide. Tout le monde le sait, la principale mission de la Société des alcools du Québec est sûrement une mission fiscale.

À ce sujet, quand on regarde l'évolution des dividendes payés par la Société des alcools du Québec au ministre des Finances, on s'aperçoit que cette progression est très rapide. Pour s'en convaincre, il ne s'agit que de jeter un regard sur les dividendes payés en 1976-1977, qui étaient de 165 000 000 $ et qui sont passés très rapidement à 225 000 000 $, en 1981-1982, pour passer à 275 000 000 $ en 1982-1983. Cette année, ils passeront à 335 000 000 $. C'est donc dire que la mission fiscale prédomine à peu près sur tout, même sur la mission sociale de la SAQ. Dans une certaine mesure, cette mission fiscale a même prévalu sur la mission commerciale de la SAQ; elle a même été, dans une certaine mesure, un empêchement au développement économique de la SAQ elle-même.

Le projet de loi que nous avons devant nous apporte quand même une orientation intéressante. Dans le passé, la SAQ avait un monopole de fait, de droit et voici que dans une certaine mesure on modifie la loi pour permettre au secteur privé de jouer un rôle plus important. Je dois dire que nous nous réjouissons de cette orientation et que nous nous réjouissons que le gouvernement mette un terme à cette expansion monopolistique de la SAQ pour permettre à des gens du secteur privé de tenter d'offrir des produits à meilleur prix, de meilleure qualité peut-être et de tenter de jouer un rôle de concurrents pour que les consommateurs du Québec soient plus satisfaits du choix qu'ils peuvent faire lorsqu'ils vont à la Société des alcools du Québec et de la qualité des produits qui leur sont offerts.

Nous aurons l'occasion d'en parler en commission parlementaire, lorsque nous ferons l'étude article par article, mais les articles les plus importants sont certainement les articles 27.4 et 37.7 qui permettent justement de faire ce que le ministre nous a expliqué tout à l'heure, c'est-à-dire permettre aux fabricants de vin du Québec d'importer des vins, de les écouler sur le marché québécois et possiblement de les exporter à l'étranger dans l'avenir. Cette possibilité est intéressante, elle avait été évoquée lors de la table de concertation, l'an dernier. J'ose espérer qu'elle donne de bons résultats.

Je m'explique avec difficulté quand même le fait que ce privilège soit donné uniquement aux fabricants de vin puisque, tout le monde le sait, ces produits ont quand même eu un certain succès malgré la qualité qu'ils peuvent avoir. La possibilité qu'on leur donne maintenant d'importer du vin de pays étrangers, de les intégrer dans le vin qu'ils fabriquaient dans le passé et jusqu'à maintenant, cela va leur permettre d'écouler des vins étrangers dans une proportion de 99% ou 100%, mais de les écouler sous une étiquette québécoise. Si on ne veut pas être hypocrite, il faut bien dire que dans une très grande mesure les fabricants québécois mettront sur le marché un produit qui ne sera québécois que de nom puisqu'il se pourrait fort bien que ce vin dit québécois soit constitué d'un vin à 90%, à 95%, à 99% et même à 100% fait à partir d'un produit importé. Quand même, je crois qu'il s'agit là d'une ouverture intéressante. La question que j'aimerais poser au ministre est la suivante. Je sais qu'il en a traité légèrement, mais il ne m'a pas convaincu totalement: Si on veut donner ce privilège aux fabricants de vin et surtout écouler ce vin dans les épiceries, pourquoi ne pas l'accorder également aux agents de vin qui existent aussi au Québec et qui ont exercé leur métier depuis de nombreuses années, afin de leur permettre également de l'importer, de le mettre en bouteille et de l'écouler ici, non seulement dans les succursales de la SAQ, mais également dans les épiceries? Il s'agit là d'une mesure qui fait deux poids deux mesures.

Le ministre nous disait: Écoutez! On veut assurer le succès de l'industrie dite québécoise - entre guillemets - puisque,

comme je viens de l'expliquer, il se pourrait fort bien que ce vin dit québécois soit surtout du vin étranger. J'ai de la difficulté à comprendre une concurrence plus ardue, une concurrence plus acharnée entre ceux qui fabriqueraient des vins dits québécois et ceux qui importeraient des vins étrangers et qui les vendraient sous l'étiquette, peut-être originale, de vin français, espagnol ou étranger. Cette concurrence ne pourrait-elle pas jouer pour nous assurer que nos fabricants dits québécois développent un vin de meilleure qualité qui, éventuellement, pourra être vendu dans des pays étrangers, notamment, aux États-Unis?

Il faut bien se rendre compte que, lorsque les vins dits québécois seront exportés dans d'autres pays, à ce moment-là, les exportateurs auront à faire face à la concurrence étrangère. Il serait peut-être désirable de s'assurer que, dans un premier temps, cette concurrence se fasse ici même pour ne pas qu'on s'engage dans des aventures dans des pays étrangers, alors que ces sociétés n'auraient pas eu la chance de voir comment le marché de ce vin se comporte en comparaison avec d'autres vins qui seraient également vendus dans autant de points de vente que ceux qui sont permis par la vente dans les épiceries.

M. le Président, à part ces modifications que, je crois, vont dans le sens de libéraliser la vente des vins dans les épiceries et de mettre un cran d'arrêt à l'expansion que connaissait la Société des alcools du Québec, ce qui permet à des sociétés privées d'importer, de mettre en bouteille et de vendre ces vins non seulement dans les succursales de la Société des alcools du Québec, mais de les vendre également dans les épiceries, dans les nombreux points de vente que représentent les épiceries au Québec... Je crois que ces modifications arrivent à point et que, même s'il y a eu un certain retard, on doit s'en réjouir.

Il y a une partie du projet de loi que j'aimerais traiter. On reconnaît que la mission fiscale joue un rôle prédominant. Ce sont les nombreuses réglementations qui semblent empêcher un individu, un touriste, lorsqu'il va en France ou aux États-Unis, d'importer une caisse de vin ou plusieurs bouteilles de vin. Parce qu'il y a goûté et parce qu'il a trouvé, en France particulièrement, que ce vin était agréable, il voudrait bien en importer.

Dernièrement, j'ai eu une expérience assez intéressante à ce sujet. Un de mes électeurs est allé en France et il a voulu importer deux caisses de vin qu'il avait payées 2,50 $ la bouteille. Je n'aurais pas assez de temps, M. le Président, pour vous expliquer toutes les difficultés que cet électeur a eues. Il est passé à Mirabel sans aucune difficulté. La douane lui a réclamé, de mémoire, 0,35 $ ou 0,40 $ la bouteille, ce qui augmentait, d'une façon peu substantielle, le coût du vin. Mais lorsqu'il a fallu qu'il demande l'autorisation à la Société des alcools du Québec, il s'est aperçu qu'il avait fait un marché de dupe. La Société des alcools du Québec, dans un tel cas, M. le Président - vous devriez le savoir, si jamais vous vous donnez vous-même la peine d'importer du vin de France; je ne parle pas d'importation en grande quantité; je parle de l'importation de douze ou quinze bouteilles simplement pour le plaisir de goûter chez soi un vin qu'on a goûté en France ou dans un autre pays... L'augmentation qui est imposée par la Société des alcools du Québec est tellement élevée que cela ne vaut nullement la peine. Il s'agit réellement d'une pénalité qui est imposée aux touristes québécois qui se permettent une telle aventure.

D'ailleurs, si on regarde la loi qui existe présentement et qui est modifiée quelque peu par le présent projet de loi, on s'aperçoit également - le ministre me corrigera si je fais erreur - que même un touriste, qui irait aux États-Unis pour s'acheter une ou deux caisses de vin, pourrait se faire arrêter par la police qui constaterait qu'il avait ces caisses de vin dans sa voiture, puisque la loi dit clairement que "le transport de vin non acheté à la Société des alcools du Québec est tout à fait une chose illicite". (12 h 20)

J'ose espérer, M. le Président, qu'en commission parlementaire, on puisse modifier cette réglementation tout à fait excessive, qui n'est nullement connue, d'ailleurs, comme vous le savez, dans les pays d'Europe, où on peut assez facilement importer du vin d'un pays à l'autre, surtout s'il s'agit de consommation personnelle en petite quantité. J'ose espérer aussi que l'on arrête d'imposer aux individus, aux citoyens du Québec une réglementation qui, somme toute, est abusive, une réglementation qui avait peut-être sa raison d'être dans le passé, mais, compte tenu de la libéralisation dont parle le ministre, que cette réglementation est sûrement dépassée et devrait être modifiée pour permettre à ceux qui vont en touristes à l'étranger de s'acheter une ou deux caisses de vin sans avoir à subir les foudres de la Société des alcools du Québec.

M. le Président, en terminant, je dirai ceci: Nous aurons certainement des modifications à apporter en commission parlementaire. Nous aurons des amendements à apporter dans le sens que je viens d'expliquer. Nous nous réjouissons quand même des modifications qui ont été faites à la Loi sur la Société des alcools du Québec pour permettre à l'entreprise privée de jouer un rôle accru. Nous nous inquiétons du fait que ni le ministre ni la Société des alcools du Québec ne semblent vouloir jouer un rôle

social plus étendu, compte tenu du problème d'alcoolisme que nous connaissons au Québec. Nous nous inquiétons bien sûr du fait que le ministre des Finances peut décréter, malgré l'opinion du ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme, des augmentations substantielles des prix des vins et des boissons alcooliques d'une façon générale sans que les répercussions de ses décisions puissent être prises par la Société des alcools du Québec ou par le ministre responsable devant cette Assemblée. Il nous semble là que c'est un abus de pouvoir et, si j'avais été dans la peau du ministre de l'Industrie du Commerce et du Tourisme, j'aurais sûrement accepté la recommandation qui avait été faite par l'entreprise privée l'an dernier de diviser, dans les états financiers, la marge fiscale du rendement des ventes qui sont faites par la Société des alcools du Québec, afin de voir très clairement la marge de profits qui a été décrétée par le ministre des Finances du Québec et la marge de profits qui serait le résultat de la bonne gestion du président de la SAQ, appuyé en ce sens par le ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme.

Présentement, M. le Président, les chiffres sont noyés. On ne voit pas quelle est la part de la bonne gestion qui serait de la responsabilité du conseil d'administration de la Société des alcools du Québec ou du président de la SAQ. On ne voit pas quelle peut être la bonne gestion du ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme. On ne peut que déplorer que cette recommandation, qui avait été faite l'an dernier par le secteur privé, n'ait pas été retenue.

Là-dessus, M. le Président, étant donné que nous sommes à l'étape de l'étude du projet de loi dans son principe, nous disons que nous sommes d'accord avec le principe fondamental de donner une chance accrue au secteur privé de pénétrer ce marché et, avec les réserves que j'ai faites, nous appuierons le projet de loi.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Châteauguay et adjoint parlementaire au ministère de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme.

M. Roland Dussault

M. Dussault: Merci, M. le Président. Il me fait grand plaisir d'intervenir aujourd'hui sur le projet de loi no 29, Loi modifiant la Loi sur la Société des alcools du Québec et d'autres dispositions législatives. Je dois vous dire immédiatement, M. le Président, que je me réjouis énormément de l'approche généralement positive du député d'Outremont sur le projet de loi.

Le grand objectif de ce projet de loi est d'améliorer le système de fabrication et de commercialisation des boissons alcooliques au Québec. Ces améliorations ont été demandées et souhaitées par nos partenaires économiques et par les consommateurs. Le projet de loi essaie de tenir compte le mieux possible de ces demandes.

Le gouvernement a d'abord écouté les partenaires économiques sur ces questions. Le ministre nous a dit tout à l'heure qu'il y a eu une table de concertation en février 1982. Par la suite, le Conseil des ministres a fixé les objectifs en décembre 1982. S'il s'est passé un certain temps entre les deux, c'est parce que le ministre et le gouvernement tenaient à ce que cette consultation auprès des partenaires soit la plus sérieuse possible, parce que cette consultation est très importante. Vous savez, si on a attendu 60 ans pour faire des changements à la loi fondamentale, je pense bien qu'on pouvait se permettre un an, un an et demi de consultation sérieuse pour en arriver à un meilleur résultat. Je pense que personne ne nous en tiendra rigueur. Cette consultation s'est faite de façon très intensive auprès des partenaires après que le Conseil des ministres eut fixé les objectifs, en décembre 1982.

Tout ce processus a permis d'amener des amendements à la Loi sur la Société des alcools du Québec. Puisque la consultation a été très sérieuse, ces amendements sont donc le plus près possible des revendications dans le cadre des impératifs qui s'imposent à l'État québécois. Je pense qu'il y a lieu de rappeler les objectifs. D'abord, le projet de loi conserve certains objectifs qui étaient déjà importants, par exemple, les prix uniformes dans tout le Québec, dans les différentes régions du Québec. Le contrôle de la qualité du produit et les avantages de la fiscalité reliés à cette question et issus de l'activité commerciale de la Société des alcools du Québec. Ce sont des objectifs qui existaient et qu'on a conservés. On en a ajouté d'autres comme assurer le maximum de retombées économiques du système de fabrication et de commercialisation par une plus grande libéralisation, comme le ministre l'a dit tout à l'heure, en visant d'abord à augmenter les retombées économiques des industries impliquées au Québec, à favoriser le développement des ventes des industries québécoises de boissons alcooliques sur le marché nord-américain, à permettre le développement de produits typiquement québécois, en particulier du cidre, à favoriser une compréhension mutuelle et de bonnes relations commerciales entre la Société des alcools du Québec et ses fournisseurs et à permettre une amélioration des services aux consommateurs tout en tenant compte de la nécessité de maintenir le rendement fiscal de la Société des alcools du Québec. Ce sont tous des objectifs qu'il nous apparaissait important d'ajouter à la loi.

Les changements importants à la loi ont trait au développement du secteur industriel des boissons alcooliques et au rôle de la Société des alcools du Québec, secteur production, de même qu'au contrôle de la qualité et des permis industriels. Cette réforme dont je viens d'évoquer les objectifs et les buts devrait se solder d'abord par une plus grande protection de l'emploi dans ce secteur, principalement les emplois dans le réseau, par une création d'emplois et plus spécifiquement par des mesures dans le secteur de l'embouteillage; par un débouché pour les produits québécois sur les marchés extérieurs et plus spécifiquement les marchés du Nord-Est américain et, par de plus grands profits du côté de l'entreprise privée, grâce à la libéralisation qui caractérise leurs projets.

Oui, il fallait protéger les emplois qui existent dans le réseau. Il n'aurait pas fallu faire exprès pour faire tomber des emplois et il faudrait en créer d'autres ailleurs. Nous n'aurions pas été cohérents. Aussi, l'ensemble de l'activité de la Société des alcools du Québec sera largement maintenu. Les mesures suivantes devraient cependant créer des emplois additionnels. D'abord, premièrement, l'embouteillage du vin dans le secteur privé. Dans son discours, le ministre lui-même annonçait qu'à compter du 1er juillet 1983 tout détenteur d'un permis de fabricant de vin du Québec sera autorisé à embouteiller des vins en provenance de l'extérieur du Québec, mélangés ou non aux produits qu'il vinifie, sous les marques -donc, les marques seraient québécoises, je pense que c'est très important de le rappeler - dont il est propriétaire exclusif ou sous les marques et pour le compte de ses fournisseurs. Or, ces marques québécoises pourront être mises en vente au Québec à partir du 1er septembre 1983.

En plus de créer de l'emploi additionnel, les mesures annoncées par le ministre devraient permettre aux viniculteurs des possibilités de développement similaires à celles de la SAQ du côté de la production. Dans plusieurs cas, elles devraient leur permettre d'améliorer leur produit, de réduire leur coût et de rentabiliser leur lignes d'embouteillage. Deuxièmement, dans l'industrie des spiritueux, il y a aussi possibilité de créer des emplois additionnels grâce à la mesure annoncée par le ministre qui fera que tout détenteur de permis de distillateur sera autorisé à embouteiller des spiritueux en provenance de l'extérieur du Québec sous les marques dont il est le propriétaire exclusif ou sous les marques et pour le compte de ses fournisseurs. Les distillateurs devront toutefois respecter les mêmes mesures de contrôle appliquées aux viniculteurs. (12 h 30)

Du côté des produits de la pomme, la permission de produire des apéritifs avait déjà contribué à protéger des emplois dans le secteur de la culture de la pomme et même d'en créer. Non seulement des emplois seront protégés, mais d'autres seront créés par une ouverture que permettra la loi sur la fabrication de boissons typiquement québécoises à partir de fruits autres que la pomme dont la culture se fait au Québec et cela, bien sûr, à l'intérieur de normes de qualité. Jusqu'à maintenant, cela a caractérisé la Société des alcools du Québec et la volonté gouvernementale. Il ne faudrait pas que cela change.

Quant à l'accès de nos produits aux marchés extérieurs, il faut rappeler que le gouvernement a rendu disponible cette année à tous les viniculteurs une étude du marché du vin dans le Nord-Est des États-Unis. Le gouvernement soutiendra les entreprises intéressées aux nombreux programmes qui existent au ministère de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme, à la Société de développement industriel et ailleurs. Comme le disait le ministre, il mettra ses ressources, les ressources du gouvernement, les ressources de la SDI, etc., à la disposition des intéressés pour leur permettre de conclure des associations avec des entreprises étrangères aux fins d'exportation. Le ministre ajoutait - et c'est très important - que les fabricants de vin du Québec et les distillateurs auront l'autorisation d'embouteiller des boissons alcooliques importées pour des fins d'exportation, que ces boissons soient inscrites ou non au répertoire de la SAQ. Non seulement cet élargissement du marché québécois sera-t-il avantageux sur le plan de la création d'emplois, mais, en plus de maintenir les emplois existants, il permettra de diminuer l'écart - parce qu'il y a un déficit - entre nos importations et nos exportations. Le Québec exporte hors du Québec au moins 40% de sa production en général et essaiera d'augmenter ce pourcentage. De plus, cela ne créera pas de concurrence supplémentaire à quiconque entre la SAQ et l'entreprise privée en général.

Quant aux bénéfices supplémentaires pour l'entreprise privée que comporte la réforme de la Loi sur la Société des alcools du Québec, que l'objectif de libéralisation rendra possible, je voudrais dire qu'ils seront possibles d'abord du côté de la distribution des vins. À l'occasion de son discours, le ministre annonçait que la Société des alcools du Québec continuera d'utiliser des distributeurs qui achemineront les boissons alcooliques aux épiciers. Il ajoutait que le gouvernement propose toutefois de modifier la loi pour permettre à ces distributeurs d'acheter et de revendre les boissons alcooliques aux épiciers, laissant ainsi ces intermédiaires libres de fixer leur propre marge de commercialisation. On peut même

penser que les améliorations à la distribution, grâce à ces bénéfices supplémentaires, entraîneront une certaine création d'emplois. Des bénéfices supplémentaires seront possibles aussi du côté de la vente au détail. En effet, selon l'éclairage du rapport de la commission d'enquête de 1971, tout en protégeant la rentabilité du réseau de succursales et d'agences de la Société des alcools du Québec et donc, des emplois concernés, le gouvernement entend élargir la vente dans les épiceries de vins de table.

Le gouvernement a prévu de conserver au réseau de la Société des alcools du Québec l'exclusivité de la vente aux consommateurs des spiritueux et de certaines catégories de vin. Avec la loi 29, la politique relative aux vins disponibles chez les épiciers sera moins restrictive. Le gouvernement pense que la vente doit se fonder avant tout sur la préférence des consommateurs. C'est le premier souci que nous devons avoir si nous devons améliorer le service aux consommateurs. Une plus grande liberté de choix pourrait être synonyme de plus grands bénéfices pour l'épicier, bien sûr, et d'un intérêt plus grand des consommateurs, mais c'est particulièrement du côté des boissons aromatisées et des boissons de type apéritif que les espérances de bénéfices supplémentaires pourront grandir. En effet, comme le disait le ministre, dans le cas des boissons aromatisées et des boissons de type apéritif, le marché des épiceries sera réservé en exclusivité aux boissons typiquement québécoises. Pour éviter toute équivoque, il faut rappeler que la politique proposée accorde un droit acquis à tous les produits vendus dans les épiceries au moment de la décision du Conseil des ministres du 21 décembre 1982.

Je ne m'attarderai pas aux bénéfices qu'engendrera l'embouteillage des produits nouveaux de même que ceux qui seront voués à l'exportation. Cela va de soi qu'il y a là un immense potentiel de bénéfices supplémentaires, donc de dollars susceptibles de mieux faire tourner l'économie québécoise, surtout au sortir de la crise que nous avons connue.

En résumé, le projet de loi no 29, qui s'intitule Loi modifiant la Loi sur la Société des alcools du Québec et d'autres dispositions législatives, permettra la réalisation d'objectifs souhaités par tous les intervenants, que ce soient les consommateurs, que ce soit l'entreprise privée en général, y compris les épiciers ou la SAQ elle-même. On comprendra donc que je sois grandement satisfait et que je voterai pour cette loi lors du vote en deuxième lecture. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Vaudreuil-Soulanges.

M. Daniel Johnson

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Merci, M. le Président. Ce projet de loi que le gouvernement nous soumet est encore une illustration à bien des égards du fait que le gouvernement est un gouvernement des occasions manquées de mieux faire. C'est entendu qu'on a libéralisé certaines choses, qu'on a ajouté des éléments qui sont favorables - d'ailleurs, mon collègue d'Outremont en a fait part à cette Chambre - mais il y a des occasions manquées, qui ne sont pas saisies par ce gouvernement lors de l'adoption d'une loi, qui permettraient de réaliser des objectifs que les Québécois souhaitent grandement. Je veux parler ici surtout de la façon dont les Québécois sont en droit de pouvoir constater comment leurs dollars, leurs impôts sont administrés. On pourra toujours alléguer au début que la vente d'une bouteille de vin, ce n'est pas la même chose que la perception d'un impôt. Il n'en reste pas moins que la mission fiscale de la Société des alcools est considérable. Si on regarde les chiffres des commandes du ministre des Finances à la Société des alcools, on voit déjà que le rôle de la Société des alcools, comme percepteur d'impôt, est considérable.

C'est donc évident que la Société des alcools est une vache à lait, même si elle vend de l'alcool, si vous me permettez l'expression, et qu'elle répond donc surtout à un mandat fiscal. Quelle est son influence financière pour le gouvernement? On peut bien parler de développement économique, de rôle social et de toutes ces choses, mais il n'en reste pas moins que, l'an dernier, d'après le rapport annuel qu'on a - c'est de notoriété publique - le ministre avait passé ses commandes lors du discours sur le budget. L'an dernier, la Société des alcools a versé 275 000 000 $ au trésor public. Cela a l'avantage, pour un ministre des Finances, d'être extrêmement attrayant comme façon de lever des impôts, parce que c'est fait un peu en cachette. L'impôt qu'on paie est dans une bouteille. C'est un peu comme la taxe sur l'essence qui est à la pompe, si on veut, et qu'on transfère dans le réservoir à essence d'une automobile. L'avantage de la taxe sur l'essence, quant à savoir ce qu'il en coûte à un contribuable comme impôt, c'est que le prix est affiché.

Il y a certainement des débats publics, étant donné le très haut taux de la taxe sur l'essence au Québec, qui ont sensibilisé les gens à cette source de revenu pour le ministre des Finances et le gouvernement en général. Dans le cas de la Société des alcools, c'est un peu moins clair et très indirect. On a des commandes ici du ministre des Finances à la Société des alcools. Les montants sont considérables, mais, si on met cela en perspective avec les autres genres

d'impôts, il faut réaliser que 275 000 000 $, c'est à peu près la même chose que de faire passer, en chiffres ronds, la taxe sur l'essence de 40% - ce qu'elle est actuellement - à 50%. On voit l'ampleur du rôle fiscal de la Société des alcools. Quand on dit que c'est presque équivalant à 10% de plus - imaginez-vous, ce serait une augmentation de 25% du taux actuel de la taxe sur l'essence - on commence à se rendre compte de l'importance, comme percepteur d'impôt, de la Société des alcools.

Encore faudrait-il qu'on sache, comme Québécois, que c'est véritablement un impôt qui est prélevé. Est-ce que c'est un profit grâce à l'efficacité de la gestion de la Société des alcools qui tombe entre les mains du gouvernement, comme source de revenus, ou est-ce que c'est, de façon tout à fait arbitraire, un impôt très élevé que les Québécois ont à acquitter à chaque fois qu'ils achètent une bouteille de vin? Il me semble que, lorsqu'on se rend compte que la Société des alcools bénéficie d'un monopole, on ne peut pas faire autrement que de conclure qu'il y a un profit de monopole là-dedans, quand il n'y a pas de concurrence pour contraindre les gens à exercer de la rigueur, à essayer de couper leurs coûts afin que les ventes soient faites à des prix qui ont un peu plus de sens, les prix vont monter. C'est la situation de monopole. (12 h 40)

Toutes les législations en Amérique du Nord prévoient que ce n'est pas dans l'intérêt public d'exercer un monopole, sauf quand il est extrêmement bien contrôlé. Cela existe dans certaines régions en matière de services publics, c'est évident; Bell Canada, à titre d'exemple. Aux États-Unis, les gens ont le même problème, il n'y a pas tant de concurrence que cela chez les gens qui fabriquent de l'électricité pour une région, mais, évidemment, ils sont assujettis à un contrôle par des organismes gouvernementaux afin qu'ils n'abusent pas de leur position de monopole à cause de l'absence de concurrence.

Dans le cas de la Société des alcools du Québec, on a encore 275 000 000 $ qui viennent dans les coffres publics qui reposent en grande partie sur le fait que la société exerce un monopole ici, au Québec, dans la distribution et la vente par ses succursales de boissons alcooliques. C'est donc une taxe indirecte, cachée que, d'une façon ou d'une autre - c'est ça qu'on ne sait pas - les Québécois versent par l'entremise d'une activité fort humaine qui est d'acheter des boissons alcooliques. Dans ce sens, on aurait aimé qu'à l'occasion de la présentation de ce projet de loi, le rôle fiscal, la vocation de percepteur d'impôt que reconnaît la loi, que reconnaît le président-directeur général, que reconnaît le ministre, que reconnaît tout le monde, la vocation fiscale qui est celle de la Société des alcools soit plus courageusement décrite, avouée et quantifiée pour qu'on sache vraiment si on a une société d'État qui fonctionne très bien quant à sa mission commerciale, sa mission économique et sa mission sociale.

On n'en sait rien. Il y a tellement d'exemples qui permettent de douter que la mission fiscale est exercée au grand jour. On regarde les politiques soi-disant commerciales de la Société des alcools, par exemple, en matière de majoration de prix pour ce qui est des vins importés de France, récemment. On sait que, depuis quand même plusieurs mois, la Société des alcools du Québec a fixé le taux de change avec le franc français à 0,20 $. C'est-à-dire que, pour les calculs de toutes sortes que les gens font à la Société des alcools du Québec, on dit: Quand on achète du vin français 5 francs, ça coûte 1 $ pour acheter une bouteille qui coûte 5 francs. Or, il n'en est rien, on sait que, depuis des semaines ou des mois, le franc français a pris une débarque, comme on dit, par rapport au dollar canadien. On voit qu'à l'égard de ce simple facteur, dans la composition du prix d'une bouteille qu'on achète, il y a une erreur en faveur de la Société des alcools du Québec de 15% à 18%, parce que le taux de change du franc français a connu une baisse considérable par rapport au dollar canadien, qui est la monnaie d'échange de la Société des alcools du Québec lorsqu'elle fait des achats.

Dans ce sens, on peut être inquiet -c'est juste une illustration, il y en aurait d'autres - du manque de transparence que les états financiers de la Société des alcools du Québec démontrent quant à l'origine, la source de son profit, l'origine de ses bénéfices qui sont répartis à 100% ou à peu près entre les mains du ministre des Finances. On peut comparer - je pense que c'est intéressant - la qualité de la divulgation de la Société des alcools du Québec avec ce que la Caisse de dépôt fait. La Caisse de dépôt peut être l'objet de nombreuses critiques quant à la façon dont elle a agrégé très longtemps, dans ses rapports, ses différents investissements. On ne savait pas vraiment combien, en gros, même pour un portefeuille, elle pouvait avoir payé, les profits qu'elle pouvait avoir faits, son rendement. Même les chiffres de cette année, qui ont été publiés, ne permettent pas d'en calculer véritablement le rendement.

Cela existe, on a demandé, en commission parlementaire, qu'on fournisse aux parlementaires la façon dont les calculs ont été faits. Je dois dire que la Caisse de dépôt et placement du Québec s'est montrée très candide et avenante à cet égard. On aura des détails, le calcul du rendement pour l'année qui vient de s'écouler mais, avec les chiffres qu'on retrouve dans le rapport

annuel de la SAQ, c'est extrêmement difficile de se livrer à l'exercice de partager le profit qui serait commercial et économique des activités de la Société des alcools du Québec, la portion des bénéfices nets de 286 000 000 $ qui est attribuable à une politique de percepteur d'impôt, à la suite des demandes du ministre des Finances, le partage qui doit se faire entre les différents niveaux, les différentes étapes de l'activité commerciale de la SAQ, ce qui donne lieu à des profits ou à des pertes.

Quand on achète des stocks, au niveau de l'approvisionnement, on peut être plus ou moins efficace; au niveau de l'embouteillage de ces stocks, de la production, on peut être plus ou moins efficace; au niveau de l'entreposage, c'est une très importante activité. Il suffit de regarder les volumes, les photos et mêmes les commerciaux de la Société des alcools du Québec à la télévision pour constater que c'est une activité d'une ampleur considérable. Ensuite, il y a la distribution faite par camions, qui est également un aspect de l'activité commerciale de la société et, finalement, l'activité de vente comme telle. Voilà autant de paliers de son activité commerciale dont on est absolument incapable de juger de la performance. C'est absolument impossible avec les chiffres qu'on a, avec les discours qu'on a entendus, avec les questions qu'on peut poser et les réponses qu'on peut obtenir, de partager d'une façon crédible la "profitabilité" ou le manque de "profitabilité" des différentes activités de la Société des alcools.

Je comprends qu'on peut voir, comme téléspectateurs, des messages commerciaux très bien faits à la télévision pour le compte de la Société des alcools. On voit qu'il y a de l'activité économique, il y a des camions qui se promènent et il y a beaucoup de gens qui travaillent. On conclut ces commerciaux en disant que c'est une société dont on peut être fier! Quant à moi, je n'ai aucune hésitation et pas un seul Québécois n'aura la moindre hésitation à être fier d'une société d'État, mais encore faudrait-il savoir pourquoi on en est fier. À ce moment-ci, on est incapable de faire le partage, comme je le disais, entre les ressources financières utilisées à cause de l'activité commerciale elle-même, d'une part, et, d'autre part, les commandes de nature purement fiscale qui sont passées à la société et qui expliquent sa politique de prix.

Dans ce sens, il me semble qu'on a manqué une occasion en or de venir dire publiquement la façon dont fonctionne la Société des alcools du Québec, qui serait tenue de nous divulguer ses résultats financiers. Comme contribuables on est en droit de s'attendre à des détails. C'est une société d'État, je comprends qu'elle fonctionne à même le prix de vente des bouteilles et de tout ce que vous voudrez, mais c'est une source de revenus pour le ministre des Finances qui équivaut à augmenter d'une autre tranche de 10% la taxe sur l'essence. On pourra dire que ce ne sont pas les mêmes gens qui achètent du vin et qui achètent de l'essence. Presque tout le monde achète de l'essence, mais ce n'est pas tout le monde qui achète du vin. Je veux bien. Mais, au point de vue du principe de la gestion d'une société d'État, j'aimerais savoir - et tous les Québécois aimeraient savoir - à quel moment ce monopole, qui n'est pas du tout soumis à la concurrence, est efficace dans la chaîne de ses activités et à quel moment il est en train de bénéficier d'un traitement de faveur, d'un traitement préférentiel, parce qu'il est le seul monopole dans cette activité.

On a raté une bonne occasion de nous amener encore un peu plus loin - on ne le fait pas souvent de l'autre côté, on attend encore bien des choses, y compris au salon rouge - vers la transparence, pour qu'enfin on puisse juger de l'efficacité des gestionnaires extrêmement compétents qu'on a en place un peu partout. Mais on est incapable, à ce moment-ci, de juger véritablement de la performance de la Société des alcools. Il me semble que ce projet de loi est drôlement incomplet quand ce volet considérable de l'appréciation de la qualité d'une société d'État est complètement absent. On semble très peu se soucier de vouloir renseigner les Québécois sur une institution qui est la leur. Merci, M. le Président. (12 h 50)

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Reed Scowen

M. Scowen: Merci, M. le Président. Je veux d'abord aller un peu plus loin que mon collègue, le député d'Outremont, quant au dépôt de ce projet de loi. Comme il l'a dit, il a été déposé il y a à peine 48 heures. C'est un projet de loi qui est fort complexe et, je pense que le ministre sera d'accord, fort important. Alors, c'est quelque chose qui se produit assez souvent ici. Mais, dans ce cas, je veux simplement demander au ministre, dans sa réplique, de nous expliquer ce qui est arrivé. Il me semble qu'il peut accepter facilement que le rôle - qui est important - de l'Opposition est d'examiner les projets de loi qui sont présentés ici. Je peux comprendre qu'il veuille peut-être faire adopter ce projet de loi avant la fin de la session et ce, pour plusieurs raisons. Alors, comment se fait-il que, compte tenu du fait que l'Opposition a besoin d'une période raisonnable d'examen, d'analyse et de consultation pour un tel projet de loi, il nous

a laissé seulement deux jours? J'aurais pensé que, dans un monde civilisé, le ministre aurait dit à ses fonctionnaires, au Conseil des ministres et à tous les autres qui sont obligés de donner leur approbation à un tel projet de loi: Écoutez! Si je veux déposer ce projet de loi et le faire adopter avant la fin de la session du printemps, il faut absolument qu'il soit déposé à la mi-mai afin de donner au moins deux semaines à l'Opposition pour l'examiner.

Je peux imaginer deux raisons seulement. Premièrement, un désir politique de nous empêcher d'examiner le projet de loi, ce qui n'est pas civilisé, ou une espèce d'incompétence administrative au sein de son ministère. J'aimerais le savoir, parce que ce n'est pas l'Opposition qui est hypothéquée par un tel comportement. C'est toute la société québécoise. S'il y a des erreurs dans ce projet de loi, des choses que tout le monde va regretter après, il sera impossible de le reprocher à l'Opposition, bien sûr, mais, plus important que cela, quelqu'un va payer le prix pour ces erreurs. Je demande au ministre, encore une fois, de nous expliquer dans sa réplique comment un tel comportement, non civilisé ou incompétent, peut arriver dans le cas d'un tel dossier.

Comme mon collègue, je dois vous dire que nous allons appuyer le projet de loi parce qu'il va dans le sens de la libéralisation du commerce des vins et des spiritueux au Québec. Tous ces projets de libéralisation ont été adoptés depuis longtemps par le Parti libéral comme un élément essentiel de n'importe quel développement économique et même social ici au Québec. Alors, quand le Parti québécois commence à se diriger vers la libéralisation, il est normal que le Parti libéral l'approuve. Bravo! M. le ministre. C'est timide, mais, quand même, c'est un pas dans la bonne direction.

Je me réjouis, entre autres, que le ministre mette fin à ces règlements stupides qui existent aujourd'hui dans le domaine de la distribution au détail des vins dans les épiceries. J'ai examiné les règlements en vigueur aujourd'hui concernant l'étalage des vins. Vous ne pouvez vous imaginer combien ces règlements, adoptés par le gouvernement péquiste quand il avait permis aux épiciers d'installer les vins dans leur magasin, sont un non-sens.

Je vais en citer un, M. le Président, simplement pour féliciter, si vous voulez, le ministre d'avoir fait quelque chose. "Règlement 12: Lorsqu'un épicier utilise une seule section, la répartition de l'espace doit être effectuée verticalement en proportion égale entre les trois catégories des produits suivants: a) les vins désignés, fabriqués et embouteillés au Québec; b) les vins désignés, embouteillés par la société; c) les vins désignés, fabriqués par une personne qui détient à la fois un permis de fabricant de vin et un permis de fabricant de cidre fort et de cidre désigné." Ce sont 3 règlements qui existent parmi 24 semblables pour obliger le pauvre détaillant à se comporter d'une certaine façon. Encore une fois, nous sommes parfaitement d'accord avec le désir du ministre de libéraliser ces contrôles.

Je veux quand même lui poser une question et j'aimerais beaucoup avoir une réponse approfondie, si possible, dans sa réplique: c'est la question de l'embouteillage. Le ministre a été, dans une autre incarnation, il y a quelques années, le chef de l'Union Nationale; il avait un intérêt profond pour les sociétés d'État. Je pense que tout le monde accepte qu'il y a un rôle à jouer par les sociétés d'État dans plusieurs secteurs de notre économie. Par ailleurs, c'est le Parti libéral qui les a créées en grande partie. Mais cette idée de faire l'embouteillage des vins... Qu'est-ce qu'il y a dans l'embouteillage des vins et des spiritueux qui nécessite une intervention de l'État? Quand on parle de secteur privé et de secteur public, il faut avoir des raisons publiques pour que l'État s'implante dans une telle affaire.

Quelles sont les raisons d'ordre public qui incitent un gouvernement à acheter les lignes d'embouteillage et à embaucher du personnel payé par l'État pour faire l'embouteillage d'un produit commercial comme cela? Ce ne sont certainement pas des considérations d'ordre fiscal. Vous pouvez imposer les taxes que vous voulez sur les vins, qu'ils soient embouteillés par nous autres ou non. Ce n'est certainement pas une question de contrôle de la qualité. Ce n'est certainement pas une question d'ordre social. Ce n'est pas une question de sécurité publique. C'est quoi? Pourquoi avons-nous si peu confiance en nos entrepreneurs québécois dans le domaine du vin que nous insistons encore aujourd'hui pour garder dans le secteur public une usine d'embouteillage des vins et des spiritueux?

Avez-vous une idée de la réponse possible à cette question, M. le Président? Je pense que non. Je m'intéresse beaucoup à ce que le ministre va nous dire en réponse à cette question. Je pense qu'il me reste deux, trois minutes, et je veux simplement soulever un dernier point. L'année passée, j'ai lu avec beaucoup d'intérêt une analyse faite par la compagnie SECOR, une société fort connue ici au Québec pour la compétence de ses analyses, sur la performance fiscale de la Société des alcools du Québec. C'est intéressant parce qu'elle prend la peine de nous comparer avec la Société des alcools de l'Ontario, un organisme comparable à plusieurs égards. Elle prend la peine d'aller au fond de cette question, parce qu'elle trouve que la rentabilité de la société ontarienne est, d'une façon considérable, plus

intéressante que la nôtre. Elle arrive à la conclusion, après une analyse exhaustive, qu'il existe quelque part à la SAQ une inefficacité ou un manque à gagner de près de 100 000 000 $ par année, quand on compare les activités des deux sociétés et qu'on enlève les éléments qui ne sont pas comparables. Il y a un écart qui est beaucoup plus grand que cela, bien sûr, qui relève de la taille comparative des deux entreprises. Chez celle de l'Ontario, le chiffre de vente est à peu près deux fois plus important que le nôtre. Il y a d'autres différences attribuables à la nature des activités, mais, en fin de compte, il y a un écart d'environ 96 000 000 $ qu'on ne peut attribuer qu'à l'inefficacité de l'administration et du fonctionnement de la SAQ.

M. le Président, je vois qu'il est maintenant 13 heures. S'il y a un consentement, je vais prendre approximativement trois minutes de plus et je vais terminer. (13 heures)

Le Vice-Président (M. Rancourt): Consentement?

Des voix: Consentement.

Le Vice-Président (M. Rancourt):

Consentement.

M. Scowen: J'aimerais que le ministre nous dise, quand il fera sa réplique... Je n'ai pas le temps, comme vous le savez, de revoir tous les détails de cette analyse, mais il est intéressant de faire des comparaisons. Si on veut vraiment relever le défi de l'excellence, ici au Québec, il faut qu'on accepte de se comparer avec ce qui est fait à l'extérieur du Québec, de les concurrencer et de gagner. Ici, nous avons un élément très intéressant dans un cas particulier. Les gens de la province voisine font à peu près la même chose que nous et ils le font d'une façon leur permettant de dégager environ 100 000 000 $ de profits par année de plus, sur une base comparative. Cela représente 100 000 000 $ qui sont perdus ou gaspillés ici quelque part.

C'est important, parce que c'est une série de petits points semblables, dans tous les domaines au Québec, qui nous rendent dans l'ensemble plus taxés, plus endettés et avec un secteur public plus lourd qu'ailleurs. S'il existe, au sein du gouvernement, un désir réel d'essayer de régler ce problème - et c'est un problème pour lequel nous payons -je pense qu'il est essentiel que le ministre profite de ces études, qu'il accepte d'aller en profondeur dans les analyses et qu'il nous démontre dans les plus brefs délais où et comment il trouvera ces 100 000 000 $ de gaspillage chaque année pour les éliminer complètement.

Ce sont simplement quelques petits points que je voulais soulever. Mes deux collègues ont déjà amplement parlé du contexte général du projet de loi. En terminant, on dit: Bravo au ministre d'avoir commencé la libéralisation de la Société des alcools du Québec. J'espère que cela entraînera une libéralisation de l'économie du Québec et, dans un proche avenir, la libéralisation du gouvernement du Québec. Merci.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Mille-Îles.

M. Champagne: M. le Président, je demande la suspension du débat.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Est-ce que cette motion de suspension est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boucher: Je demande que l'Assemblée suspende ses travaux jusqu'à 15 heures.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Est-ce que cette motion de suspension est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Rancourt):

Adopté. Nos travaux sont suspendus jusqu'à 15 heures.

(Suspension de la séance à 13 h 02)

(Reprise de la séance à 15 h 05)

Le Vice-Président (M. Rancourt): À l'ordre, s'il vous plaît!

Veuillez vous asseoir.

M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boucher: M. le Président, je vous demanderais de rappeler l'article 19 de notre feuilleton et de reconnaître le brillant député de Mille-Îles.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Champlain.

M. Gagnon: Je ne sais pas en vertu de quel article, mais je vous demanderais trente secondes juste pour saluer des visiteurs de mon comté, de l'école Pierre-Boucher du Cap-de-la-Madeleine. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt):

Comme c'est fait, on n'ajoutera rien. S'il vous plaît!

Reprise du débat sur le projet de loi no 29, Loi modifiant la Loi sur la Société des alcools du Québec et d'autres dispositions législatives. La parole est effectivement au député de Mille-Îles.

M. Jean-Paul Champagne

M. Champagne: Merci, M. le Président. Nous sommes surpris de l'appui unanime de nos adversaires politiques, messieurs les libéraux, et des propos du député de Notre-Dame-de-Grâce qui, à la fin de son discours, a dit spontanément: Bravo, M. le ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme! Je veux aussi remercier le ministre qui me donne l'occasion de faire la réplique gouvernementale concernant le projet de loi no 29. Moi aussi, j'ai fait des consultations, comme le ministre, qui a écouté les principaux intervenants dans ce dossier de la Loi modifiant la Loi sur la Société des alcools du Québec et d'autres dispositions législatives.

À la suite des consultations que j'ai faites auprès des intervenants, je dis aussi, au nom de ces intervenants: Bravo, M. le ministre, pour avoir déposé ce projet de loi no 29 qui fera sûrement des heureux ici au Québec. J'endosserai aussi une remarque du député de Notre-Dame-de-Grâce qui était tellement emballé, ce matin, concernant la loi 29 qu'il s'est écrié: Vive le libéralisme de la SAQ. Il a souhaité aussi que la libéralisation de la SAQ se réalise. Il était content, il disait bravo. Et il est allé même jusqu'à dire: Nous allons souhaiter aussi la libéralisation gouvernementale. Je l'appuierai sûrement dans cette libéralisation politique du gouvernement du Québec, soyez-en assuré.

M. le Président, je suis content et fier d'intervenir au sujet du projet de loi no 29, parce que je suis un consommateur de bon vin, comme mes collègues de l'Assemblée nationale le sont aussi et comme vous, M. le Président. En vous regardant, je pense que vous êtes sûrement un consommateur de bon vin, comme tous les bons Québécois et les bonnes Québécoises qui ont la joie de vivre et le goût de vivre au Québec. Je suis content aussi parce que ce projet de loi aide l'entreprise privée en vue de la création d'emplois. Et c'est une priorité gouvernementale, la création d'emplois et le respect de la libre entreprise. Je suis content d'intervenir dans le débat sur ce projet de loi parce que nous favoriserons l'économie québécoise en accentuant le commerce extérieur des boissons alcooliques. Je suis aussi content parce que la loi fera en sorte que les consommateurs auront un meilleur service au comptoir aux 15 000 points de vente de la Société des alcools du Québec.

Le projet de loi no 29 aide l'entreprise privée surtout dans l'embouteillage. Tous les fabricants qui ont un permis pour la fabrication de vin - ils sont onze associations fabriquant du vin au Québec - auront le droit de faire de l'embouteillage ici au Québec. Autrefois, cet embouteillage était le monopole de la SAQ et aujourd'hui, avec le dépôt du projet de loi no 29, les entreprises privées, les compagnies privées auront le privilège de faire l'achat en vrac de vin, de faire de l'importation et de faire l'embouteillage ici au Québec. Je pense que c'est une libéralisation de la Société des alcools du Québec et nous appuyons cette initiative.

Les onze compagnies vinicoles du Québec pourront faire, partout dans le monde, un choix des vins qu'elles veulent bien nous présenter ici. Cela produira par le fait même beaucoup d'emplois. Cela aidera d'autres industries. Par le fait qu'on embouteillera des vins importés de l'extérieur, cela favorisera la fabrication de l'industrie de la bouteille, cela favorisera la fabrication des bouchons, cela favorisera la fabrication de capsules, la fabrication d'étiquettes. Cela va aider à la création, aux designers qui vont créer les étiquettes, comme cela va aider aussi aux producteurs de carton. L'entreprise privée, par ce projet de loi sur l'embouteillage de produits importés, va pouvoir créer, dès la première année, selon les renseignements que j'ai obtenus hier soir, une centaine d'emplois. La loi 29 va favoriser la libre concurrence et les acheteurs bénéficieront d'un plus grand choix.

Les viniculteurs verront s'accentuer le commerce extérieur. Actuellement, la SAQ a le monopole de l'exportation dans les autres provinces, aux États-Unis et à travers le monde. Ce monopole d'État faisait en sorte que le prix de vente avait des barrières. Si la loi est adoptée - elle le sera sûrement en deuxième lecture - nous aurons devant nous un libre choix de commerce extérieur pour l'exportation des produits de nos viniculteurs, les onze entreprises vinicoles du Québec. Je pense qu'il faut mettre chapeau bas devant le ministre qui a introduit dans la loi 29 cet élément de commerce extérieur. Ces onze entreprises privées pourront faire de la négociation commerciale à travers le monde entier. Par le fait même, nous aurons ici, au Québec, un choix de produits de qualité dans le secteur du vin. Nous aurons un choix de provenance, nous aurons aussi un choix de prix de ces vins qui seront importés et exportés; on ne peut que s'en féliciter.

Les petites entreprises du Québec, les fabricants de vin du Québec, les viniculteurs, comme on les nomme, se réjouiront certainement du dépôt de cette loi. Si vous me le permettez, je vais nommer ces entreprises qui ont applaudi hier au dépôt de la loi 29. Je veux, d'abord, parler des vins Andrès du Québec Ltée, de la région de

Saint-Hyacinthe, qui seront sûrement contents d'apprendre qu'ils pourront faire du commerce extérieur, qu'ils pourront aussi importer des vins, etc. Je veux saluer Les vins Brights, la première entreprise vinicole du Canada et du Québec, qui a été fondée en 1933, et sûrement qu'en cette Assemblée des personnes ont déjà goûté à son bon vin Saint-Georges. Il y a certainement beaucoup de curés de paroisse qui ont goûté au vin de messe des vins Brights de Lachine. Je veux saluer particulièrement Vin Geloso Inc., un produit qui sort du beau comté de Mille-Îles, du quartier Saint-Vincent-de-Paul, dans le comté de Mille-Îles. Les vins Geloso, c'est une entreprise familiale qui, depuis 20 ans, a connu une prospérité et qui, aujourd'hui, emploie plus d'une quarantaine d'employés. C'est une entreprise très dynamique qui compte plusieurs vins différents et qui va de l'avant. Je salue particulièrement cette entreprise et je lui souhaite bon succès. Avec l'adoption du projet de loi no 29, les entreprises Geloso vont pouvoir importer du vin, l'embouteiller dans le comté de Mille-Îles et l'exporter. Je pense que cette entreprise va connaître aussi un essor grandissant.

Je veux saluer aussi Les vins LaSalle Inc., de Saint-Hyacinthe. Le député de Saint-Hyacinthe, à côté de moi, va s'en réjouir. Je veux également saluer Les entreprises Verdi Inc., de Saint-Léonard. Je pense que le député libéral qui représente la circonscription de Saint-Léonard se réjouira de l'adoption du projet de loi no 29 qu'on votera dans quelques instants. Je veux saluer Les vins Corelli Inc., de la ville de Sainte-Catherine. Je veux saluer les gens du Lac-Saint-Jean et l'entreprise Julac Inc., de Dolbeau. Julac Inc., pourra importer des vins à sa guise, pourra les embouteiller à Dolbeau, dans la région du Lac-Saint-Jean, et, ensuite, exporter le produit. Je pense que, pour la région du Lac-Saint-Jean, c'est un projet de loi qui va faire en sorte que l'entreprise Julac Inc., va connaître aussi un essor fulgurant, nous l'espérons.

Je veux saluer Lubec Inc., de Saint-Antoine-Abbé. Je veux saluer Les vignobles Chanteclerc Ltée, de Rougemont. Je veux saluer aussi Les vignobles du Québec Vinification Inc., de Hemmingford, qui seront sûrement très contents. Tout ce groupe fait partie de SOPROVIN, la Société de promotion de l'industrie vinicole du Québec, et il reçoit sûrement, avec très grande joie, le projet de loi no 29. Toutes ces associations, toutes ces compagnies ont été consultées par le ministre et ces intervenants appuient, aujourd'hui même, comme les députés libéraux le font, le projet de loi no 29.

Je veux souhaiter qu'au cours de l'été la réglementation sera préparée. Les agents du ministère du Commerce, de l'Industrie et du Tourisme et les viniculteurs du Québec vont collaborer, je l'espère, d'une façon positive à la réglementation pour assurer le succès de l'embouteillage des nouveaux produits. Le gouvernement du Parti québécois a comme priorité d'aider la petite entreprise québécoise; on le voit par le dépôt de la loi 29. C'est une question économique de service au public. C'est une question de création d'emplois. Nous avons commencé, à l'automne 1978, avec la loi 19 autorisant la vente du vin désigné en épicerie. C'était la libéralisation du vin en épicerie. En 1978, plus de 10 000 permis d'épicerie ont été octroyés - je les appelle ainsi - à de petites et moyennes entreprises du Québec. Nous avons tous ici, dans chacun de nos comtés, de ces petits dépanneurs, de ces petites entreprises, le tabagiste, l'épicier ou le boucher, qui peuvent aujourd'hui vendre nos produits grâce au gouvernement du Parti québécois qui leur a donné l'occasion en 1978 d'avoir un permis pour ce faire.

Quand, en 1978, on a adopté cette loi 19, il n'y avait que 13% du vin fourni par les entreprises privées à la Société des alcools. Considérant la libéralisation qui a été octroyée par cette loi 19 en 1978 par le gouvernement du Parti québécois, aujourd'hui, ces entreprises privées ont augmenté à 30% leur production de vin mise sur le marché québécois. Je pense qu'on peut montrer aujourd'hui que le gouvernement du Parti québécois a la préoccupation d'aider la petite et la moyenne entreprise. On en a une autre preuve aujourd'hui par le dépôt en deuxième lecture de ce projet de loi 29. (15 h 20)

M. le Président, je téléphonais hier à des responsables de l'entreprise SOPROVIN, la Société de promotion vinicole du Québec, qui me disaient jusqu'à quel point ils étaient contents d'appuyer le ministre en regard de la loi no 29, comme, d'ailleurs, les libéraux l'ont proclamé ce matin. Et moi aussi, au nom de ces intervenants du groupe SOPROVIN, je dis au ministre merci beaucoup. Car cette loi no 29 va aider à la libre concurrence, va faire en sorte que nous allons privilégier le commerce extérieur et, par le fait même, que nous allons créer ici au Québec beaucoup d'emplois.

Vous me permettrez de saluer en passant et de remercier grandement tous les cadres et les employés de la Société des alcools du Québec, parce qu'ils font un travail très remarquable.

Lundi dernier, dans mon comté de Mille-Îles, j'avais la chance d'assister à l'ouverture d'une relocalisation de succursale dans le quartier Duvernay, dans le centre commercial Duvernay. À cette manifestation, lundi dernier, j'ai remarqué la courtoisie des cadres, j'ai remarqué la courtoisie et la spontanéité des personnes qui travaillaient à aider le client. Je peux vous assurer qu'on a

respecté le désir de la population en ouvrant un magasin de la Société des alcools du Québec à la page, qui répondait réellement aux besoins du milieu, soit le quartier Duvernay plus spécifiquement. J'étais même surpris de voir étalés dans ce nouveau magasin de la Société des alcools du Québec plus de 1700 titres différents de vins. Au nom des personnes qui vivent dans le quartier Duvernay, je veux remercier les cadres de la Société des alcools du Québec pour cette belle relocalisation.

Dans cette perspective, j'aurai aussi l'insigne bonheur de voir aussi l'ouverture, à la fin du mois de juin, d'une nouvelle succursale dans le quartier de Saint-François. De plus - je ne sais pas si on est gâté à Laval - nous aurons dans quelques mois l'ouverture d'une maison des vins à Laval. Je pense que les Lavallois sont reconnaissants de ce que la Société des alcools du Québec fait pour les Lavallois.

Aussi, tous les Québécois, de toutes les régions, sont sûrement contents de voir que, depuis 1978, nous avons 15 000 points de vente différents pour répondre à la clientèle. On voit que les Québécois, qui ont toujours eu le goût et la joie de vivre, sont contents de voir que le gouvernement va toujours de l'avant dans ce domaine.

Je conclurai - je ne veux pas étirer le bonheur de parler de bon vin - en disant simplement que les objectifs qui sont poursuivis par le projet de loi no 29 réjouissent tous les Québécois et, particulièrement, les viniculteurs du Québec parce que cette loi aide à l'entreprise privée en créant de l'emploi. Elle favorise l'économie québécoise en favorisant le commerce extérieur et elle donne aussi un meilleur service aux consommateurs. Je souhaite que, sans partisanerie, libéraux et péquistes, ici, dans cette Assemblée, voteront unanimement pour la loi 29 parce qu'elle répond à un besoin du public. Le gouvernement du Parti québécois est très près de la population et elle le lui rend bien; il est aussi très près de la petite et moyenne entreprise.

En terminant, au nom de tous les Québécois et Québécoises qui ont réellement le goût du Québec, le goût du bon vin, je dis merci au ministre responsable, M. le ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Est-ce que la deuxième lecture du projet de loi no 29, Loi modifiant la Loi sur la Société des alcools du Québec et d'autres dispositions législatives, est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Adopté.

Le Secrétaire adjoint: Deuxième lecture de ce projet de loi.

Renvoi à la commission de l'industrie, du commerce et du tourisme

M. Boucher: M. le Président, je fais motion pour que ce projet de loi soit déféré à la commission de l'industrie, du commerce et du tourisme.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Est-ce que cette motion de déférence est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boucher: Je vous demanderais d'appeler l'article 3 de notre feuilleton et de reconnaître M. le député de Berthier.

Projet de loi no 12 Reprise du débat sur la deuxième lecture

Le Vice-Président (M. Rancourt):

Reprise du débat sur la motion du ministre des Affaires municipales proposant que le projet de loi no 12, Loi modifiant la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, soit maintenant lu la deuxième fois. M. le député de Berthier.

M. Albert Houde

M. Houde: Merci, M. le Président. Nous avons devant nous le projet de loi no 12, Loi modifiant la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme. Je voudrais d'abord vous rappeler que, en 1979, par cette Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, le gouvernement entreprenait un processus de restructuration du territoire qui, en plus d'affecter l'utilisation du sol, engendra un profond bouleversement de l'ensemble de la société.

En adoptant cette loi, le gouvernement créait les municipalités régionales de comté. Par la création de cette nouvelle structure, il mettait en place les bases de sa nouvelle société soi-disant de décentralisation. C'est un grand mot pour le gouvernement, semble-t-il. Lors de la création des MRC, celles-ci devaient avoir une vocation unifonctionnelle. Lors de l'étude de cette loi, M. Victor Goldbloom, qui était à l'époque le critique officiel de notre parti en cette matière, n'approuvait pas la proposition de créer de toutes pièces une structure d'une telle envergure ayant pour unique fonction l'aménagement du territoire. Il proposait plutôt la formation d'un conseil intermunicipal d'aménagement. Quoique les

intentions gouvernementales ne soient pas encore officiellement dévoilées, il est facile de déceler chez les intervenants péquistes que ces intentions outrepassent la question de l'aménagement, car, au hasard des interventions et des déclarations ministérielles, on s'aperçoit que des responsabilités dans des domaines aussi diversifiés que la voirie, le loisir, l'éducation, la culture, la santé et les services sociaux pourraient être attribuées aux MRC.

L'aménagement du territoire revêt donc une importance très grande, compte tenu des projets de réforme du gouvernement telles la restructuration scolaire ou la réforme électorale qui se révèlent conçues en étroite relation avec les MRC. "De l'avis même du ministre délégué à l'Aménagement et au Développement régional, bien peu de gens, y compris les ministres, ont soupçonné les implications profondes de la loi 125 sur l'aménagement et l'urbanisme. Le gouvernement parle d'une loi qui rapproche les citoyens des instances décisionnelles et implique ceux-ci dans le projet. Peut-être y voit-on une implication de la part de la population, mais cet exercice est factice, le ministre titulaire ayant un droit de décider exceptionnel, et le gouvernement s'attribue ainsi le pouvoir de redessiner la carte municipale du Québec à sa façon." C'était dans le Devoir du samedi 7 août 1982.

Parlons-en de consultation. Drôle de consultation! C'est à la fin de décembre 1982 que les dernières municipalités régionales de comté furent constituées. Le territoire du Québec est maintenant divisé en 94 MRC, entre parenthèses, de petits gouvernements que l'on verra plus tard. Toutefois, il semble que l'harmonie ne règne guère et que des populations sont mécontentes des délimitations qui ont été -comme, par exemple, la Beauce et Gatineau. Le député de Beauce-Sud le mentionnait dans son allocution et le député de Gatineau également - décrétées et qui ne respectent pas les régions d'appartenance. (15 h 30)

Il nous apparaît que les propos tenus par les représentants municipaux et ceux du ministre à l'égard des MRC sont différents. En ce qui concerne la consultation, nous avons de la difficulté à concilier l'insatisfaction et le mécontentement des populations avec les propos du ministre, notamment ceux qu'il tenait lors des derniers crédits, concernant le fait que le gouvernement ait ou non imposé ses volontés aux municipalités. "Absolument pas. Là-dessus cela a été un succès, dit le ministre. Les comités ont très bien fonctionné. La suite de l'émission des lettres patentes a été plutôt un accord généralisé, les gens disaient après coup (...) que les décisions qui ont été prises ont été les meilleures." Journal des Débats, page 3927, toujours selon le ministre des

Affaires municipales.

Aux finances: aide financière aux MRC. On lit dans la Voix de l'Est du 23 avril 1983: "Les municipalités régionales. Québec s'apprête à couper les fonds. Les MRC devront trouver, à très court terme, des sources autonomes de revenus pour assurer leur bon fonctionnement. "Le ministre Léonard est très clair. Si, à l'heure actuelle, c'est Québec qui a pris financièrement en charge les MRC, ce patronage ne durera pas indéfiniment. Il pourrait même cesser d'ici fort peu de temps. Il faudra, concède le ministre, que les MRC fassent preuve d'imagination pour trouver leurs propres sources de revenus."

Les conseils municipaux font leur budget une année à l'avance comme tout bon administrateur doit le faire, le plus précisément possible, pas comme le ministre des Finances du gouvernement actuel.

Il faut que les états financiers soient bien précis, parce que, lorsque la fin de l'année arrive et qu'il manque de l'argent pour équilibrer, il faut imposer des taxes supplémentaires ou augmenter les frais l'année suivante pour que les municipalités puissent équilibrer leur budget. Mais à cause d'imprévoyance ou d'incertitude le ministre des Affaires municipales a décidé à un moment donné de couper dans la dernière tranche qu'il devait verser pour la mise en place des MRC. Mettez-vous à la place d'un conseil municipal, d'un maire et des conseillers d'une municipalité. Je vous assure qu'ils l'aiment le maire, et ce n'est pas sa faute du tout.

Contrôle intérimaire. Le ministre se souviendra sans doute des mises en garde que lui ont formulées à maintes reprises les députés de l'Opposition, notamment lors de l'étude du projet de loi no 92, en décembre dernier, en demandant un moratoire d'un an afin de limiter au maximum les effets économiques négatifs du contrôle intérimaire. Nous lui avons également souligné les conséquences du contrôle intérimaire relatives à l'obtention de la subvention fédérale de 3000 $ pour les mises en chantier faites avant le 30 avril 1983.

Comme vous le savez sans doute, M. le Président, dans un comté rural comme le mien, beaucoup de demandes me sont parvenues et j'ai dû donner beaucoup d'explications à la suite des pressions venant des différentes municipalités de mon comté, parce que les contrôles intérimaires affectaient un tiers des municipalités du Québec, privant d'abord les municipalités de revenus et, ce qui est encore plus grave, privant les travailleurs des heures de travail qu'ils pouvaient accumuler pour conserver leur carte. Après avoir été manipulés par la loi du gouvernement actuel concernant les fameuses cartes qui leur permettaient de travailler, ils en étaient privés encore une

fois à cause de la mauvaise décision que le gouvernement avait prise qui faisait retarder l'autorisation de construire des maisons et profiter des 3000 $ du fédéral. "Par ailleurs, quand on parle des constructeurs, je crois qu'il y a suffisamment de possibilités dans la loi. Les gens qui ont commencé leur schéma étaient avertis à l'avance. Ils pourraient donc normalement obtenir des autorisations avant de commencer le schéma d'aménagement." C'est Jacques Léonard qui parlait ainsi le 14 décembre 1982. "Cela veut dire que vous êtes conscients que vous contribuez à geler certains terrains alors que des terrains équivalents, à côté, bénéficient de droits acquis pour le seul motif qu'il y a des ventes qui ont été enregistrées, tandis que pour un terrain adjacent, la vente n'aurait pas été enregistrée; cela empêche toute transaction, toute construction. Le principe est le suivant, dans un tel cas, on va empêcher les individus de construire, on va empêcher de compléter une transaction de terrain ou de se construire d'ici le 30 avril prochain. On revient aux mêmes choses que le problème du gel dans certains cas où, en vertu des règlements municipaux applicables, on pourrait construire mais, à cause de l'effet de la disposition de la résolution pour le schéma d'aménagement, ces personnes, tant que le gel va durer, ne pourront bénéficier entre autres des subventions fédérales de 3000 $ disponibles." C'est ce que Jean-Pierre Saintonge disait au ministre du temps. Qu'est-ce qui est arrivé? On ne l'a pas fait.

Le ministre Léonard parle: "On n'aurait pas de loi sur l'aménagement si on adoptait cela. Ce serait fini, ce serait aussi bien de "scraper" la loi 125 au complet." Je ne sais pas si c'est vrai, ce que le ministre disait, mais en tout cas...

Conférence des municipalités sur la décentralisation. On peut être sceptique sur la valeur de cette conférence qui se tiendra à l'automne 1983. Cela s'en vient. Depuis deux ans, des municipalités réclament cette conférence car depuis que la loi 125 a été adoptée, bien peu d'entre elles savent où elles vont. Dernièrement, le premier ministre affirmait que les MRC n'auraient pas d'autres responsabilités qui leur seraient déléguées sans des ressources financières adéquates, mais l'incertitude plane encore car malgré cette déclaration du premier ministre, de part et d'autre, on nous fait part d'intentions diverses. C'est ainsi que dans le dernier avis émis par le Conseil de planification et de développement du Québec, les auteurs dressent une liste des intentions possibles de décentralisation: conseils régionaux de santé et de services sociaux, loisirs, transport scolaire, réforme scolaire, réforme électorale, taxi.

Dans le rapport d'étape du comité ministériel sur la décentralisation des activités gouvernementales en juin 1982, il est proposé que les limites territoriales des régions administratives s'ajustent à celles des MRC pour que soit encouragée l'harmonisation des territoires des CLSC avec ceux des MRC. Le rapport identifie cette fonction de décentralisation vers les MRC: voirie municipale, promotion économique et tourisme, équipe de loisirs et de récréation. Dans une déclaration, le ministre Biron a exprimé l'intention de favoriser l'adaptation des périmètres de corporation de développement économique à ceux du territoire des MRC. On est bien loin du débat sur le projet de loi no 125 où le ministre parlait de la MRC comme d'une structure unifonctionnelle. Considérant que la MRC est une création du ministre et qu'elle n'était pas réclamée de la population, nous vous soumettons cette déclaration du CPDQ - laissez faire, M. le député de Terrebonne, je peux m'arranger avec mes papiers. Ne soyez pas inquiet - faite au début, en 1983, et je cite.

M. Blais: Comment, le député de Terrebonne?

M. Houde: Le député de Groulx, excusez-moi, je me suis trompé. "Le conseil ne souscrit pas à cette orientation gouvernementale qui vise à faire un gouvernement régional de la MRC. C'est une orientation qui ne lui apparaît fondée ni sur les besoins, ni sur les aspirations des collectivités locales, mais elle tient plutôt de positions technocratiques relevant davantage de données théoriques."

J'aimerais vous faire part des commentaires importants de l'Union des municipalités du Québec à l'égard du projet de loi no 12. Ils portent essentiellement sur les articles 1 et 2. "Fondamentalement, ces deux articles traduisent une volonté de la part du gouvernement de se soustraire aux contraintes des contrôles intérimaires adoptés par les municipalités. Or, un tel comportement est contraire à l'esprit de la loi 125 qui visait justement à permettre aux élus municipaux de contrôler les interventions sur leur territoire, tant des particuliers que des instances gouvernementales. (15 h 40) "De façon spécifique au projet de loi, l'article 1 apparaît non souhaitable dans la mesure où l'émission d'un permis constitue un moyen de contrôle et d'analyse des projets. En outre, un tel permis n'enlève pas les avantages reliés à la procédure relative aux interventions gouvernementales. Chapitre VI du titre I. "Quant à l'article 2, cette nouvelle modification à l'article 61 de la loi no 125 semble vouloir devenir une habitude malsaine. En effet, en décembre dernier, l'article 76

du projet de loi no 92 a introduit une modification au même article, de façon à alléger les contraintes pour le gouvernement, ses ministères et ses mandataires. "En somme, nos commentaires sur le projet de loi no 12 reposent sur le comportement du gouvernement face aux contraintes imposées par le contrôle intérimaire. Cette simplification à l'avantage du gouvernement, de ses ministères et de ses mandataires, ne remet-elle pas en cause l'équité de tels amendements face aux autres contribuables? Il peut être sain de revoir l'"opérationalisation" de la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, mais cette révision devrait être également élargie aux problèmes rencontrés par les municipalités." Ce sont les commentaires des municipalités.

M. le Président, j'aimerais attirer l'attention du ministre sur ceci. Il disait que les municipalités s'étaient regroupées pour former des MRC et qu'on s'était laissé convaincre par les recommandations de certaines gens du milieu. Il y a bien des sortes de recommandation. Il y a des sortes d'imposition aussi. Lorsqu'on voit un certain Dr Lussier, ex-président provincial du Parti québécois...

Une voix: Un péquiste.

M. Houde: ...qui était engagé par ce dernier à essayer...

Une voix: Un ex-ministre libéral.

M. Houde: Ce n'était pas un ministre libéral. C'était un ministre de l'Union Nationale. À l'époque, il était peut-être bien, je ne le sais pas. Je ne mets pas la faute sur les rouges d'avant ni sur les bleus d'avant. Pas vous autres, parce que vous n'étiez pas là. Vous êtes là depuis sept ans et c'est sept ans de trop. Ce Dr Lussier parcourait certaines municipalités et disait ceci: On vous dit de vous fusionner avec telle et telle municipalité; on vous suggère telle et telle chose; si vous ne vous y conformez pas, si vous ne nous écoutez pas, nous allons vous l'imposer. C'est le Dr Lussier qui disait cela dans des municipalités de mon comté, à part cela. Je ne parle pas à travers mon chapeau. Si on veut parler du Dr Lussier, c'était un cultivateur sur une ferme de la paroisse voisine de chez nous et il est retourné chez lui. Je ne sais pas si c'est parce qu'il était un mauvais administrateur ou si cela n'était pas assez payant. Peut-être.

Lorsqu'on parle de la loi no 125, Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, et de la loi no 90 sur le zonage agricole, qui touchent les municipalités et les cultivateurs dans les comtés ruraux comme celui que je représente, il y avait des droits acquis qui, aujourd'hui, sont brimés, et c'est par le même gouvernement. Je vous assure que les cultivateurs, lorsqu'ils nous parlent du gouvernement péquiste, ne nous en parlent pas sur le même ton qu'ils nous en parlaient il y a trois ou quatre ans. Je vous l'assure. Vous n'avez qu'à vous promener dans les comtés et vous allez vous en apercevoir. Vous devez vous en rendre compte également par les sondages parce que, quand ils montent, on voit que cela additionne mais, quand ils descendent, on voit que cela soustrait. Pour un gars qui ne sait pas tellement compter, vous devez savoir ce que c'est.

Une voix: Vous êtes à moins 14.

M. Houde: Nous autres, on est en bonne posture jusqu'à présent. Attendez les élections; on s'en reparlera. Vous allez voir. Vous n'aurez peut-être pas la chance de revenir en parler ici, en Chambre.

Une voix: L'extermination.

M. Houde: Les pouvoirs. Le ministre, comme d'autres ministres - n'oubliez pas cela; il n'est pas le seul; il peut se consoler - dit aux municipalités: On va vous donner plus de pouvoirs. Écoutez cela! Selon les déclarations faites par des maires et des présidents de MRC, au contraire - je ne l'invente pas, je cite - on dit: "Il nous enlève des pouvoirs; il ne nous en donne pas, il nous en enlève." Mais ils sont tellement bons chanteurs de pomme que lorsqu'ils ont fini de parler on ne sait pas ce qu'on va faire. On ne le sait pas parce que, quand on écoute le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, on se demande ce qu'il nous dit, ce qu'il nous raconte. Souvent, il ne nous raconte pas la vérité. J'ai des preuves à l'appui pour le lui prouver quand ce sera le temps. Quand le moment sera venu, je le lui prouverai.

Le gouvernement dit: On va décentraliser, oui, pour mieux centraliser. Cela ressemble un peu au ministre des Affaires municipales quand il se sent coincé quelque part, qu'il voit qu'il n'est pas capable de passer. Je voyais le député de Beauce-Sud qui parlait hier et qui disait du ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation: Il me fait penser un peu à un "snowmobile" du temps des années trente-cinq, quarante. Où il y avait beaucoup de neige, il avait de la difficulté à passer. La comparaison qu'un des fonctionnaires me faisait, il n'y a pas tellement longtemps, ce n'était pas un "snowmobile", c'était un sous-marin. Quand il n'est pas capable de passer pour aller à l'endroit où il veut aller, vous savez ce qui arrive avec un sous-marin, il s'en va un bout en dessous de l'eau et il ressort plus loin. C'est malheureux, mais c'est ce que les gars me disaient. Ils ont dit:

C'est parce qu'on connaît bien notre ministre. Écoutez, il n'est pas capable de passer à travers, il va passer en dessous et il va ressortir de l'autre bord. Est-ce qu'il va sortir plus fort? On le verra au bout de la ligne.

En mettant des contrôles un peu partout ce gouvernement péquiste brime les droits des individus. On dirait que ce gouvernement pratique cette chose. Il ne se rend pas compte que lorsqu'il adopte des projets de loi aussi insignifiants que celui qu'on avait hier... Avec deux articles, il fait un projet de loi. Il pouvait modifier ce projet de loi à l'intérieur de ce qu'il y avait actuellement. Non, il nous fait un projet de loi qui va prendre du temps à l'Assemblée nationale, il va faire une conférence de presse, beaucoup de tapage pour arriver à accoucher d'une petite souris. Que voulez-vous? On en a des ministres comme ceux-là.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Berthier, si vous voulez conclure.

M. Houde: Ne me dites pas que j'ai fini mes 20 minutes, M. le Président! Est-ce que cela se peut? Consentement pour une minute ou deux?

Cela se passe chez le ministre de l'Éducation aussi. Je vous assure que, lorsqu'on entend parler du ministre de l'Éducation dans le champ, la seule chose qu'ils ont sur les lèvres, c'est la démission du ministre. Vite, cela presse! Dans un sondage fait par une compagnie sérieuse comme SORECOM, à 94% ils ne veulent pas de la restructuration scolaire comme le ministre de l'Éducation la veut; ils ne veulent rien savoir et lui ne veut rien savoir non plus. Il dit: On s'en va tout droit. Je ne dis pas que d'une journée à l'autre on ne le verra plus ici, mais il est encore avec nous autres.

M. le Président, le ministre des Transports disait hier - je termine sur cette note - que, depuis qu'ils sont entrés au gouvernement, cela coûte des millions et des millions pour réparer les gâchis que le gouvernement libéral a faits. Je vais lui dire une chose. Dans mon comté, il y a des arpenteurs qui se sont promenés encore voilà deux ans passés sur des routes que je vois régulièrement et, à un moment donné, ils ont accouché, pas d'une souris, ils ont exproprié des terrains, ils ont payé des milliers et des milliers de piastres, il y en a qui n'ont pas été capables de récupérer, mais il y en a d'autres qui ont récupéré.

Ils ont dit: Écoutez, on vous l'a donné, mais on vous le remet maintenant, donnez-nous-en. Il y a des personnes qui ont été expropriées, elles ont gardé l'argent, elles ne sont plus expropriées, elles n'ont plus de terrain, cela coûte des millions, mais cela dépend du gouvernement actuel, par exemple.

En terminant, nous allons y penser bien sérieusement au projet de loi qui est devant nous, mais je pense que nous voterons contre. Merci.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Trois-Rivières.

Une voix: M. le maire de Trois-Rivières.

M. Denis Vaugeois

M. Vaugeois: Merci, M. le Président. Si je comprends bien, je me situe juste avant l'ex-maire de Hull. C'est un sujet qui, curieusement, a l'air de diviser profondément les formations politiques qui sont face à face dans cette Chambre. C'est assez curieux parce que je vais essayer de rendre mon intervention la moins partisane possible.

Dès le départ, je vais dire que les gens qui sont en face, en général, laissent croire qu'ils savent compter. Les gens qui sont en face sont des gens qui se veulent réalistes. J'en ai un devant moi qui acquiesce et qui convient avec moi qu'il essaie d'être réaliste. C'est un député qui fait peut-être encore des affaires et qui sait l'importance des chiffres. Celui qui vient de me précéder comme orateur a parlé de manipulation des autorités municipales ou locales, a laissé entendre que nous allions brimer les droits des individus et un des gros points, au fond, si je comprends bien, c'est que ce gouvernement aurait décidé de ne plus laisser les gens se construire n'importe où, soit par ses propres choix, soit par une décision des élus locaux ou régionaux. (15 h 50)

La vérité c'est que le problème de l'aménagement et de l'urbanisme est un problème qui n'a jamais pu être résolu par les gens d'en face. Ces gens ont déjà été au gouvernement - ils pensent être sur le point d'y revenir, ce qui n'est pas certain - en 1960, et dès le départ ils ont réalisé que les problèmes d'aménagement étaient des problèmes graves qui avaient des conséquences extrêmement coûteuses pour l'ensemble des citoyens. Il y avait dans leurs rangs, parmi leurs amis, des gens qui s'y connaissaient. Ils ont, dès cette époque, demandé à ces gens de se pencher sur la question et cela nous a donné, au début des années soixante, le rapport d'un urbaniste réputé, Jean-Claude Lahaye, qui a été livré à l'opinion publique et au gouvernement libéral de l'époque qui n'a pas osé y donner suite.

En fait, l'histoire des 15 ou 20 dernières années qui ont précédé l'arrivée au pouvoir du gouvernement actuel, c'est que les gouvernements successifs n'ont pas osé légiférer, n'ont pas osé réglementer et n'ont pas osé intervenir. On a assisté à une

certaine forme de liberté. Effectivement, les gens pouvaient construire à peu près où ils voulaient et réclamer, avant même de construire, des services, réclamer que l'autobus scolaire ramasse leurs enfants, réclamer qu'Hydro-Québec installe l'électricité, réclamer, en fait, tous les services auxquels on s'est habitué au Québec ces dernières années. La vérité, c'est que quand on sort du Québec, parfois, on se prend à observer le long des routes... J'invite les gens à être attentifs. Quand on s'en va aux États-Unis, pays de liberté, pays de l'entreprise privée, le long des routes, voit-on du développement domiciliaire comme on en voit au Québec? Autour des petites municipalités et des petits villages, voit-on des banlieues s'étirer à l'infini? Pourtant, on prétend que le phénomène de la banlieue est lié à l'automobile, et on sait bien que l'automobile est importante dans le développement des États-Unis ces dernières années. Quant aux centres commerciaux, auxquels on s'est habitué au Québec - il y en a d'immenses aux États-Unis, alors qu'il y en a eu, il y a quelques années... - on sait que la mode a un peu changé. On sait que les Américains en sont revenus un peu. Ils ont appris à calculer, à part cela, la facture de l'étalement urbain.

Ma constatation, c'est qu'aux États-Unis, on ne fait plus n'importe quoi. En Ontario, on ne fait plus n'importe quoi. En Europe, alors là, c'est différent. Depuis bien longtemps les habitudes sont prises. Si vous voulez construire au-delà d'une petite municipalité, on peut aussi bien refuser. Si on vous autorise à construire aux limites d'une petite municipalité, aux limites d'un hameau, vous aurez à votre charge les raccordements aux services du hameau. On vous enverra, à vous personnellement, la facture du fournisseur d'électricité pour les quelques mètres qu'il faut faire pour vous raccorder au réseau existant, et cela va être ainsi à peu près pour toutes les factures. Ici, évidemment, on a constaté - parce que c'était tellement gros - qu'il y avait des factures énormes quand on laissait les spéculateurs acheter des terres toujours plus loin des noyaux existants et envoyer la facture à la collectivité. C'était devenu un peu gros. On a développé les taxes d'amélioration locale. C'est une première prise de conscience, mais il reste une vérité. Il reste une réalité. Actuellement, au Québec, les taux d'intérêt ont tendance à se stabiliser. Ils sont revenus à quelque chose d'un peu plus normal; le gouvernement fédéral est un peu revenu sur sa folie des hauts taux d'intérêt. Ce qui guette maintenant les petits propriétaires l'hypothèque est dure à payer, elle sera toujours dure à payer, mais, au moins, il y a moyen de s'arranger un peu, de diminuer le capital emprunté et d'étaler l'emprunt - c'est quelque chose avec lequel on est coincé: les taxes municipales. Cela n'arrête pas de monter même dans les municipalités les plus riches, cela n'arrête pas de monter. Tellement que les gens en sont rendus à fuir les villes les plus importantes. Très souvent, ils disent que c'est pour améliorer leur cadre de vie, mais très souvent, c'est tout simplement pour fuir les taxes municipales. Quand un promoteur décide non pas de construire en ville, non pas de construire là où il y a des terrains vacants où tous les services sont rendus, mais d'aller construire plus loin, ce n'est pas pour offrir le plein air aux futurs acheteurs de ses maisons. C'est très souvent parce qu'il va payer le terrain moins cher et que les factures de raccordement - il en paie quelques-unes - les plus sournoises et les plus coûteuses vont être refilées à la collectivité.

Je vais prendre un exemple concret dans Trois-Rivières. Il y a quinze ans, à Trois-Rivières, il y avait plus de 60 000 habitants. Après quinze ans, la population est tombée à près de 50 000. On est plus ou moins 50 000 habitants. On a perdu environ 10 000 habitants. Est-ce que cela nous est propre? Est-ce qu'il y a seulement Trois-Rivières qui a perdu des habitants au cours des quinze dernières années? Toutes les villes qui ont un certain âge au Québec... J'ai un tableau ici - je ne voudrais pas ennuyer les gens avec cela, mais je les invite à se référer à ce livre dont j'ai déjà parlé: Les défis de l'aménagement, c'est à la page 42 -qui vous donne les noyaux constitués par les anciennes villes: Hull, Saint-Jérôme, Sherbrooke, le cas de Trois-Rivières, de Victoriaville; on pourrait prendre le cas de Montréal et de Québec. Toutes ces vieilles villes ont perdu au cours des quinze dernières années des populations au profit des villes environnantes.

En même temps - je reviens au cas de Trois-Rivières - à l'intérieur même des limites de la ville, la population s'en allait un peu plus loin; tellement qu'à Trois-Rivières, si vous calculez la longueur des rues équipées de services, vous passez de 60 milles il y a environ quinze ans à 150 milles aujourd'hui. Au lieu d'être 60 000 pour payer la facture, on est 50 000; et au lieu de payer pour entretenir 60 milles de longueur de rues, on paie pour entretenir 150 milles. À Trois-Rivières, un pied linéaire, un pied de longueur de rue, équipé de services, coûte 220 $. Un pied, ce n'est pas trop cher. Mais quand vous avez tous ces milliers de pieds qui correspondent aux 90 milles de longueur de rues qu'on a ajoutés, cela commence à faire une sapristi de facture.

Actuellement au Québec, il y a plus de 1 000 000 de lots existants et éligibles en fonction des schémas existants, en fonction des plans d'urbanisme existants, en fonction des normes existantes... il y a plus de

1 000 000 de lots éligibles, par exemple, à Corvée-habitation. Là-dessus, il y a 325 000 lots prêts à construire, viabilisés, où les autobus passent, les égouts et les aqueducs sont rendus, l'asphalte est posée et ainsi de suite. J'ai calculé qu'à 50 pieds de façade et à 220 $ du pied linéaire, il y a d'investis en infrastructures 3 500 000 000 $ d'argent juste pour avoir équipé ces lots et il n'y a rien qui nous dit que ces lots seront construits. Il n'y a rien qui nous dit que des promoteurs, engagés dans un processus de construction domiciliaire, n'iront pas vers des lots non viabilisés parce qu'ils ont des chances d'être moins cher.

Qui paie? C'est nous tous. Je prétends qu'on ne peut plus payer. Je suis propriétaire d'une maison. J'avoue que le compte de taxes commence à me faire peur. Les gens viennent à mon bureau, non pas pour s'inquiéter des taux d'intérêt, mais pour s'inquiéter de la hausse constante des taxes. Les gens sont propriétaires d'un petit immeuble, par exemple, ils ramassent tous les loyers d'un mois dans leur immeuble et ce n'est pas assez pour payer le compte de taxes. Ils ramassent tous les loyers d'un autre mois et ils ont de la difficulté, très souvent, à payer le reste des taxes municipales. Et pourtant, le ministère des Affaires municipales a amélioré les conditions financières des municipalités. Entre autres, il a accepté de payer des taxes sur ses immeubles et a invité le gouvernement fédéral à faire la même chose. Cela finira par arriver.

Malgré le fait qu'on leur a donné une meilleure marge financière, malgré le fait qu'on leur paie nos propres taxes, malgré une réforme de la fiscalité municipale, les comptes de taxes ont continué d'augmenter. Ils se sont stabilisés un peu, à cause des efforts qu'on a faits vis-à-vis des collectivités locales. On sait que c'est un sursis. Pourquoi faut-il profiter du sursis? Il faut en profiter pour inviter les gens à se poser des questions. Est-ce qu'on continue de développer nos villes un peu n'importe comment? Est-ce qu'on continue de mettre en rivalité la ville de Trois-Rivières avec Trois-Rivières-Ouest? Est-ce qu'on continue de mettre en rivalité Trois-Rivières-Ouest avec Saint-Étienne, avec Pointe-du-Lac? Est-ce qu'on continue à mettre la ville de Montréal en compétition avec les villes de la banlieue. La proposition de la loi 125 est finalement de ne pas décider à la place des élus locaux.

Je pense qu'il appartient au ministre, qu'il appartient à son adjoint parlementaire, qu'il appartient aux parlementaires de revenir constamment sur le sujet qui nous oppose aujourd'hui; de revenir constamment là-dessus. Il y a une éducation à faire, il y a une prise de conscience à faire parce qu'il y a des factures énormes en fin de compte.

Notre proposition n'est pas de décider à la place des gens, c'est d'en parler, d'expliquer, de mettre des chiffres sur la table, mais en même temps de leur dire: Une fois que vous savez cela, c'est à vous autres à décider. Il ne s'agit pas de mettre d'un côté les grosses villes et de l'autre, les petites municipalités. Quand on est dans une même sous-région et que - si je fais le tour de ma sous-région - j'ai une ville principale, j'ai d'autres villes secondaires, j'ai des petites municipalités. Il faut que les gens de Saint-Prosper, de Saint-Stanislas, de Sainte-Anne-de-la-Pérade, de Batiscan, de Champlain sachent que leur qualité de vie et leur compte de taxes sont liés à ce qui se passe à Trois-Rivières, au Cap-de-la-Madeleine et à Trois-Rivières-Ouest. La formule des MRC de la loi 125 a permis à ces gens de se regrouper, de s'installer autour d'une table et de discuter de leur aménagement futur. (16 heures)

S'il y a quelque chose à regretter dans tout cela, c'est qu'il y a 20 ans on n'ait pas fait quelque chose de semblable. C'est ça qu'on peut regretter. Au lieu de se lever et de reprocher au ministre d'ajuster avec réalisme la loi 125, grâce à la loi 12 que nous discutons actuellement, il pourrait avoir la franchise de battre un peu sa coulpe et de regretter un peu que ça ne se soit pas fait avant. Ils sont tellement bloqués là-dessus que, quand on a présenté pour la première fois une Loi sur la protection du territoire agricole, ils auraient pu discuter des modalités, ils auraient pu dire: Faites une loi complète sur l'aménagement et incluez-y la protection du territoire agricole; donnez un niveau d'appel, ainsi de suite, et nous serons d'accord pour qu'enfin au Québec on ait une politique claire sur l'aménagement de notre territoire. Le territoire, c'est notre première richesse, avec la population qui l'habite. Mais ce n'est pas ce qu'ils ont fait; Ils ont fait obstruction, ils ont finalement voté contre la protection du territoire agricole. À tous égards, ça les choquait.

Après cela est arrivée la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme. Ils auraient pu dire au ministre: Sapristi, en même temps que vous nous présentez une loi, voulez-vous passer à l'action? Voulez-vous faire comme l'Ontario, par exemple? Voulez-vous permettre aux municipalités, en même temps que la loi se met en place, en même temps que les structures locales et régionales vont se mettre en place, de faire comme en Ontario, avoir accès à un fonds qui leur permette de faire des acquisitions de terrain, de faire des regroupements de terrains dans les centre-ville pour que les promoteurs qui veulent construire ne soient pas incités à toujours aller en banlieue, pour ne pas qu'un Cadillac Fairview qui veut construire un centre commercial choisisse la solution la

plus facile, celle de le situer en banlieue? Il faudra accorder, avec un réseau routier, un transport en commun.

À Trois-Rivières, on en a un exemple et on en a un exemple dans toutes les villes du Québec. On en a un exemple récent, ici à Québec, avec les Galeries de la Capitale. Cela a coûté les yeux de la tête à la collectivité. Est-ce qu'on en avait besoin à cet endroit? À cet endroit, le promoteur peut acheter le terrain. Si on avait offert, à la ville de Québec, de faire du remembrement de terrains dans le centre-ville, comme en Ontario, par exemple, alors qu'une municipalité peut faire un regroupement de terrains avec un financement reçu du gouvernement de la province, louer le terrain aux promoteurs, se rembourser progressivement et, avec le temps, rembourser également le gouvernement de la province.

On n'agit pas dans ce scénario au Québec. On suit avec les égouts, avec les aqueducs, avec les réseaux routiers. On dépense une fortune là-dedans. Au bout de tout cela, on met nos écoles, on met nos équipements collectifs toujours plus loin des gens, toujours dispersés sur le territoire avec des factures absolument astronomiques. Le transport scolaire, autrefois, transportait un enfant sur cinq en autobus scolaire; 20 ans après, c'est quatre sur cinq et la facture du transport de chaque enfant ne cesse d'augmenter. Quand les autobus scolaires ne roulent plus, les gymnases, les auditoriums, les bibliothèques sont inaccessibles.

Cela fait qu'au Québec, actuellement, les écoles sont plus souvent fermées qu'ouvertes et sont inaccessibles en dehors des heures de cours. C'est là qu'on a mis le gros paquet de nos investissements collectifs. On nous propose d'arrêter cela, on nous propose de commencer à calculer, de commencer à faire un peu d'aménagement. Il est bien tard. Il me semble que le reproche qu'on aurait pu nous faire en 1977 et en 1978, c'était de ne pas arriver avec quelque chose comme ça. Le reproche qu'on aurait pu nous faire sur la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, la loi 125, ç'aurait été de ne pas accompagner cette loi d'un geste concret pour l'immédiat. Mais non, le ministre a accepté de s'en remettre au cheminement des élus régionaux et de leur dire, par exemple, que ça presse. Il leur a dit: Cela presse. De l'autre côté, on disait: Non, c'est une mauvaise loi, c'est l'anarchie qu'il faut.

Si ce n'est pas l'anarchie, vous allez me dire ce qu'il fallait faire. Depuis 20 ans, je considère que le drame du Québec, ç'a été le laisser-faire. Il ne faut pas se compter d'histoires. Au nom de ces beaux principes auxquels j'adhère, la liberté des individus, de l'entreprise privée, tout cela, il y a quand même une facture collective. Notre responsabilité d'élus, c'est d'essayer d'équilibrer tout cela. Je constate, comme élu, que j'ai des gens dans mon comté qui voudraient se construire le long d'un rang. Je sais ça, moi aussi. Il y a des promoteurs qui ont trouvé une terre loin et qui seraient prêts à construire des bungalows dessus. Est-ce que je rends service aux promoteurs, est-ce que je rends service aux gens en facilitant cette démarche de construction domiciliaire, alors que mes centre-ville sont vides? Les centre-ville du Québec ont actuellement, en moyenne, 25% de lots vacants. Le centre-ville de Montréal, par exemple, a actuellement à peu près 25% de sa superficie qui n'est pas occupée. C'est du stationnement sauvage ou du stationnement organisé mais il reste que ce n'est pas construit. Dans le centre-ville de Montréal il y a actuellement plus de pieds carrés réservés aux stationnements que de pieds carrés réservés aux logements. C'est à peu près la même chose dans tous nos centre-ville. Les gens les ont fuis. Il y a une facture au bout par exemple. Pour vous donner un ordre de grandeur, à Trois-Rivières le plus gros investissement que le gouvernement ait jamais fait - et cela me fait pleurer, je n'aime pas dire cela; les gens pourraient dire peut-être l'université, cela coûte cher une université - c'est 70 000 000 $ pour huit kilomètres d'autoroute qui coupent la ville en deux.

Une voix: C'est ce gouvernement-là.

M. Vaugeois: Je ne veux même pas distribuer ce genre de responsabilité parce que je pense que depuis 20 ans cela a été successions d'erreurs sur successions d'erreurs. Le ministère des Transports a construit des routes pour couper les villages en deux, des autoroutes pour couper les villes en deux. On en a un exemple ici à côté du parlement. On est au parlement et on veut traverser le boulevard Saint-Cyrille de l'autre côté. Essayez de le traverser à pied, essayez de traverser le boulevard Dufferin à pied. Les villes ont été faites pour la voiture après les avoir défaites. Les villes sont un lieu de regroupement des hommes et des femmes, une ville ça se marche, et on les a brisées les unes après les autres. On voudrait arrêter cela et les gens hésitent à arrêter cela. S'il n'y avait pas de facture au bout, s'il n'y avait pas de qualité de vie qui se trouve compromise, je dirais d'accord, continuez, laissez faire. Mais je pense que ce n'est pas la réalité.

En nous amenant le projet de loi no 12, le ministre se montre raisonnable et réaliste. J'aimerais bien qu'au lieu de s'opposer au nom de principes qui ne correspondent pas à la réalité du projet de loi on prenne ses responsabilités comme parlementaires et qu'on dise au ministre: Le projet de loi no 12 est un geste réaliste par rapport à la loi

125. Le cheminement se fait, les MRC sont créées, les gens de la campagne et de la ville ont appris à se parler, à se mettre autour de la table, à calculer ensemble. Des schémas d'aménagement sont en voie d'élaboration. Pourquoi ne dites-vous pas au ministre ce qui se fait aux États-Unis, ce qui se fait en Ontario, ce qui se fait en Europe? Cela l'aiderait peut-être vis-à-vis d'autres que je n'oserais pas nommer.

Je connais assez le ministre, j'ai assez discuté de ces choses-là avec lui, il partage le genre de préoccupations qui sont peut-être les vôtres aussi, mais, en tout cas, qui sont les nôtres. Pourquoi ne l'obligez-vous pas en quelque sorte à s'engager sur ce terrain de l'action et dire à ses fonctionnaires: D'accord, on a fait un bon travail; on a mis en marche un processus qui permettra aux gens éventuellement d'avoir une politique d'aménagement, de faire des économies d'échelle et d'avoir une bonne qualité de vie, un bon cadre de vie, d'être près des services, etc? On doit avoir quand même toute la discrétion qu'il faut parce qu'on a des exigences de vie, mais en même temps on ne doit pas présenter une facture qu'ils ne sont plus capables de payer.

Il y a des modèles autour de nous. Il y a de petites villes aux États-Unis à partir de Boston et autour, des petites villes que vous connaissez. Vous connaissez cela, vous y êtes allés, vous les connaissez, pourquoi ne parlez-vous pas au ministre de l'expérience de Salem, de l'expérience de Portsmouth, de l'expérience de Newburyport, de l'expérience de Portland? Est-ce que c'est gênant? Est-ce que les États-Unis ont des leçons à recevoir du côté de l'entreprise privée? Est-ce que les villes des États-Unis qui ont eu les moyens de faire du regroupement de terrains, du regroupement d'immeubles, qui sont intervenues en termes de facilité de financement sur des vieux immeubles désaffectés, sur des terrains vacants au centre-ville ont des leçons d'entreprise privée à recevoir de nous? Au contraire, je pense que nous avons à nous inspirer d'eux. Pourquoi n'arrivez-vous pas avec cela?

L'Ontario ne passe pas pour une province rêveuse. L'Ontario a mis au point, il y a déjà des années, un programme de revitalisation des centre-ville. Elle l'a amélioré il y a une couple d'années. Pourquoi n'arrivez-vous pas en Chambre pour dire au ministre: Qu'attendez-vous, M. le ministre, pour convaincre vos collègues, convaincre ce gouvernement d'agir? Le processus est amorcé. Les gestes posés sur le plan législatif rendent possibles ces interventions mais il me semble qu'au lieu d'empêcher une action en avant vous devriez exiger de ce gouvernement qu'il aille plus loin de façon plus concrète. Vous défendez la construction domiciliaire? Pourquoi ne pas la défendre au bon endroit? Pourquoi ne pas la défendre là où les investissements collectifs sont faits, là où les services sont rendus?

Je vous invite à tenir ce discours. Je serai ravi si vous nous pressez d'agir, d'aller plus loin, d'être plus actifs mais il me semble qu'il ne faudrait pas fausser le sens de ce projet de loi, il ne faudrait pas fausser le sens de la loi 125. Ce n'est pas parce qu'à l'époque vous avez eu des scrupules hérités de vos ancêtres parlementaires que vous devez rester branchés sur une espèce de refus de voir un gouvernement intervenir en matière d'aménagement. (16 h 10)

Encore une fois, je vous pose la question: Connaissez-vous des gouvernements élus démocratiquement - je termine, M. le Président - sur cette planète qui se sont désintéressés des questions d'aménagement et qui n'ont pas, à un moment donné, brimé certains droits individuels au nom d'un intérêt collectif? J'avais l'occasion, récemment, d'être en Californie. J'avais l'impression que la Californie, c'était les vedettes de cinéma, les micro-ordinateurs, etc. et c'est tout. J'ai été très étonné de voir le respect du territoire qu'on y avait. On va faire trente milles sur une route sans voir d'habitation; par ailleurs, on voit des terres en culture. On comprend facilement que tout le monde n'a pas le droit de se construire là parce qu'il y a une route et qu'il est propriétaire du terrain. La fonction reconnue de ce territoire est, de toute évidence, une fonction agricole. C'est comme cela en Europe, c'est comme cela aux États-Unis.

Je termine sur un exemple que j'ai vu à Salem, dans une vitrine de magasin du centre-ville de Salem, près de Boston. On explique aux gens que s'ils veulent l'aide de l'État, ils peuvent l'avoir s'ils se construisent à tel endroit. S'ils se construisent à telle distance d'une école, ils ont tant de points; s'ils sont à telle distance d'un égout collecteur important, ils auront tant de points; s'ils sont à telle distance de tel autre type de service collectif, ils ont tant de points. S'ils cumulent tant de points, ils ont tel genre de subvention; s'ils cumulent moins de points, ils auront moins en subvention. S'ils n'ont pas de points du tout ou presque pas, ils pourront même se faire refuser le permis. C'est à Salem, aux États-Unis. Peut-être qu'ils ne pourront pas se construire.

En France, si tu veux te construire à un endroit où les services ne sont pas rendus, c'est non. Si c'est oui, tu paies la facture et la facture complète, pas seulement une partie. Ici, le moment est arrivé de parler de ces choses, de mettre les chiffres sur la table, de tenir un discours réaliste là-dessus et d'oublier un peu nos divisions de parti. L'endettement du Québec est peut-être plus lourd à supporter au

niveau de l'aménagement ou de l'absence d'aménagement que n'importe où ailleurs. J'invite les gens de l'Opposition à beaucoup de réalisme, au-delà de nos divisions de parti. S'ils sont certains de prendre le pouvoir dans deux ou trois ans, qu'ils nous aident donc, pour les années qui restent, à leur laisser un héritage qui ne sera pas des égouts et des aqueducs devant des lots vacants ou un territoire agricole qui aura été gaspillé. Je termine là-dessus.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Hull.

M. Gilles Rocheleau

M. Rocheleau: Merci, M. le Président. Quand j'entends les députés du côté ministériel, et plus particulièrement le dernier intervenant, le député de Trois-Rivières, ex-candidat défait à la mairie de Trois-Rivières, nous parler de liberté, nous dire qu'ils sont pour la liberté, quand j'entends le député de Trois-Rivières se gargariser de ces paroles, je trouve cela honteux. Je trouve que c'est d'autant plus honteux que le parti ministériel, jusqu'à présent, ne s'est pas aperçu de l'arrogance de son ministre des Affaires municipales, un vrai petit Napoléon du XXe siècle, d'une incohérence totale à l'intérieur d'une planification qui se veut une dictature.

J'écoutais le commentaire de mon bon ami et collègue le député de Berthier, il y a quelques instants, et la comparaison qu'il faisait du ministre des Affaires municipales quand il le comparait à un sous-marin qui pique vers le fond quand il voit des obstacles et qui se trouve un trou pour sortir quand il en a la chance. C'est ce que fait le ministre des Affaires municipales au Québec depuis qu'il est là, depuis qu'il a pris la relève de la police montée, le député du comté de Crémazie.

M. Bélanger: C'était pour montrer qu'il était descendu!

M. Rocheleau: On parle de la loi 125, Loi sur l'aménagement et l'urbanisme. Pour la population, des numéros collés ici, des numéros collés là, des lois ici et des lois là, c'est assez complexe.

Premièrement, le citoyen du Québec, quand on ne le fatigue pas dans sa cour, quand on lui laisse la paix, il est assez heureux. Mais le ministre des Affaires municipales est rendu dans votre cour, et pas seulement dans votre cour. Il essaie de décider de l'aménagement de votre salon. Cela va aussi loin.

On a vu, au cours des dernières années, le ministre des Affaires municipales nous passer ses petits "bills" omnibus, comme on les appelait de notre côté, les "bills" autobus, un ramassis de cochonneries qu'il nous a présenté à la fin d'une session pour nous bousculer, pour bousculer l'Union des municipalités et l'Union des conseils de comté - en somme, vos représentants municipaux - et essayer de nous les faire adopter le plus rapidement possible pour que personne ne s'en aperçoive. Voyons donc! C'est comme si le ministre des Affaires municipales nous prenait pour une bande de carottes. Voyons donc! Le ministre des Affaires municipales, je comprends - je l'ai dit hier - est en train de se pendre. Je ne suis pas celui qui va l'arrêter.

Une voix: Il ne faudrait pas qu'il tombe...

M. Rocheleau: Au contraire, je devrais l'encourager.

M. Bélanger: ...fournir la corde.

M. Rocheleau: Si je pouvais même lui fournir la corde, comme le député de Mégantic-Compton vient juste de le mentionner, je le ferais. Mais on n'a pas besoin de faire cela; malheureusement, il est en train de le faire tout seul. Ce dont on a peur, c'est qu'il se cache pour le faire, parce qu'on aimerait le voir au moment où cela va arriver.

De ces projets de loi impossibles, on a parlé de la loi no 33. Tantôt, le député de Trois-Rivières a mentionné qu'il se gargarisait avec la liberté. La liberté, c'est quoi, pour le Parti québécois? Je pense que c'est un beau mot. Tout le monde s'en sert. On est libres, hein? Oui. Québec libre. Mais, M. le Président, on se souvient de la loi no 37 qui a fusionné deux municipalités: Baie-Comeau et Hauterive. Justement, je suis allé à Forestville, hier soir, parler de cela, parce que ces gens-là ont été témoins - c'est dans le comté de Saguenay - de cette loi matraque que ce même ministre des Affaires municipales a fait adopter, en juin dernier. Il a sacrifié, je dirais, le ministre, à l'époque. Lucien Lessard, a plutôt laissé son comté, après avoir été un traître dans ce comté, après l'avoir vendu, après l'avoir laissé tomber. Il s'est retiré en disant que le Parti québécois, que le gouvernement actuel ne pouvait plus rien faire pour son comté, de toute façon.

La loi no 92, M. le ministre des Affaires municipales, l'an dernier... Je sais que, du côté ministériel, depuis le saccage de LG 2, vous perdez la mémoire. On constate cela. Mais vous vous le rappelez qu'on vous avait demandé un moratoire. On vous avait demandé un moratoire, parce que toute l'implication des municipalités régionales de comté, qui venaient à peine d'être créées, vous connaissez le problème que cela avait particulièrement créé dans

plusieurs cas, dans plusieurs coins. On a parlé, hier, à l'étude des crédits, de plusieurs municipalités de comté qui ont été mises dans une jaquette de force. On leur a fait un habit, mais qui n'était sûrement pas sur mesure, et on tente de faire porter cet habit à tout le monde au Québec. Mais c'est vous autres, les citoyens, qui allez devoir subir les fanfaronnades du ministre des Affaires municipales. Il est parti bien raide pour la gloire. Il est parti complètement. J'ai l'impression, parfois, qu'il y en a qu'on place dans des hôpitaux, parce qu'ils ne sont pas corrects. Mais il y en a d'autres qui sont "lousses" sur la rue. C'en est un de ceux-là, l'actuel ministre des Affaires municipales. Il est parti complètement. On tente de lui parler gentiment, doucement. L'Opposition tente d'offrir ses services pour empêcher le gouvernement de faire des erreurs. C'est de l'entêtement, un blocage absolu. C'est du ciment. Il n'y a plus rien en dedans. C'est coulé. Les oeillères. Il ne veut rien savoir. Entêté, bloqué. (16 h 20)

C'est malheureux, vous savez. Vous ne suivez pas tous les débats et je vous comprends, parce que vous pourriez développer une drôle de phobie à les suivre. Regarder ces gars-là aller toute la journée, c'est même dangereux. Nous, de l'Assemblée nationale, on est obligés de prendre une fin de semaine, de temps à autre, pour aller se replonger dans nos comtés, se rafraîchir, se vicier un peu parce que quand on entre dans cette enceinte et qu'on retrouve en face de nous, à cette Assemblée nationale, le côté ministériel, ceux qui dirigent le Québec actuellement, ceux qui sont après nous foutre dans la rue comme il faut... Tantôt, le député de Trois-Rivières nous disait: Si on est à vous préparer le terrain pour notre sortie, au moins tâchez de nous aider avant que cela vienne. Les aider! Ils sont à crucifier ce qui reste à crucifier au Québec et ils nous demandent de les aider. On essaie d'arrêter ces lois folles et ils les adoptent quand même. Le marteau toujours au bout de la ligne. J'en sais quelque chose, cela fait déjà deux ans que je suis ici. Regardez-moi ce que c'est.

On parle de popularité du Parti québécois. Ils piquent pour la baisse, ils sont rendus à peu près à 15%. Ils ne sont pas assez bas encore, ils se donnent des coups de pied, des jambettes, des coups de poing, tout ce que tu veux, les ministres se poignent l'un contre l'autre. Ils ne savent plus où se garrocher dans ce gouvernement. Ils sont pris de panique. La panique les a poignés. C'est cela qui est arrivé. Là on vient nous parler du projet de loi no 12. Savez-vous ce qui arrive? Quand on leur a dit l'année passée: M. le ministre, un moratoire. Arrêtez. "Breakez". Mettez le frein. Laissez les municipalités respirer un peu. Tout le monde devient fou dans ce monde municipal. Vous leur pelletez cela à grands coups et ils ne peuvent plus en prendre. Laissez-les tranquilles. Laissez-les relaxer. Non, bon, boum, boum, boum, on passe les affaires et on y va.

Là, cela ne marche plus. Il s'est tellement bien aperçu que cela ne marchait plus, que le gouvernement était assujetti lui aussi au contrôle intérimaire en attendant que les municipalités régionales de comté aient adopté leur schéma d'aménagement. Le ministre des Affaires municipales l'avait dit lui-même: Le gouvernement est contraint à suivre le contrôle intérimaire. Là, il nous présente le projet de loi no 12. Imaginez-vous, cela va vous concerner tantôt. Je vais vous lire simplement une note explicative. Ce projet de loi, notamment, a pour objet de permettre les opérations cadastrales et les morcellements requis pour la construction de routes par le gouvernement, ses ministères, ses mandataires, pendant la durée du contrôle intérimaire prévu par la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme. De plus, il précise la procédure applicable lorsque le gouvernement, ses ministères ou ses mandataires désirent intervenir dans un territoire où est en vigueur un schéma d'aménagement ou un règlement de contrôle intérimaire. Enfin, ce projet de loi accélère le processus d'entrée en vigueur des modifications au règlement de contrôle intérimaire. La folie furieuse. On lit cela, cela n'a pas l'air trop pire. Tu dis: Voyons donc, il n'y a rien là, une feuille de papier. Tu lâches cela et cela tombe tout seul.

Ils sont rendus qu'ils ne savent plus comment les présenter, ils emploient du papier troué à part de cela. Mais le ministre ne vous dit pas une chose: c'est qu'on parle de routes, mais dans le projet de loi, on parle d'équipements, pas seulement des routes, on parle de structures. Imaginez-vous, ce qui est le pire là-dedans, c'est que le ministre des Affaires municipales s'est aperçu que cela n'avait pas de bon sens, son affaire. Mais il est tellement coq, il est tellement rempli de lui-même qu'il n'oserait pas admettre qu'il a fait une erreur. Pourtant, tout le monde fait des erreurs. Le premier ministre a l'air d'en commettre pas mal souvent. Le groupe de l'autre bord aussi. Ils en font. Normalement, il y a des curés qui sont prêts à donner l'absolution. Tout le monde fait des erreurs. Il n'y a rien là. Mais il n'est pas prêt à l'admettre. Est-ce que cela est assez fort pour vous autres? Cela se peut-il que quelqu'un pris en flagrant délit à faire une erreur, vous lui dites: Non, ce n'est pas vrai. Ce n'est pas blanc. Ce n'est pas noir. Cela se promène dans le gris tout le temps. On ne sait pas où on s'en va.

Il veut se soustraire. Savez-vous ce qui est le plus bête là-dedans? Mettez-vous dans une MRC n'importe où au Québec. On peut

prendre la municipalité régionale de comté de Bellechasse. Exemple: Le député de Bellechasse, un député péquiste du parti ministériel, était l'ancien préfet de Bellechasse, Claude Lachance. Savez-vous ce qu'il disait dans le temps? Il n'était pas encore rendu à l'Assemblée nationale. C'était avant, sur le "step", juste sur le "step" pour passer. Je vais vous en lire seulement un petit bout, pas trop long: "Cette épineuse question doit préoccuper au plus haut point tous les maires de Dorchester, car vous le savez bien, l'existence même de notre comté est très sérieusement menacée. Est-ce utile de rappeler que l'histoire a maintes fois prouvé que si on ne s'occupe pas de ses affaires, d'autres le font à notre place, souvent pas de la façon souhaitée." C'est vrai. Il avait donc raison, le préfet de comté de Dorchester, dans le temps, avant qu'il nous arrive à l'Assemblée nationale du côté ministériel où, quand les décisions sont prises et quand la cloche sonne, les pattes se lèvent. Et silence. On vient voter pour n'importe quoi.

M. le Président, le préfet du comté de Dorchester dans le temps, qui est maintenant député, avait raison dans ce temps-là. Et aujourd'hui, il va voter pour cela. Il va même applaudir, parce que quand la loi est adoptée, ils applaudissent le ministre. Je ne sais pas si c'est par l'épaisseur du projet de loi, par le nombre de pages, mais ils l'applaudissent. Tous, comme de petits fous, ils se lèvent pour l'applaudir, parce qu'on leur a donné la permission d'applaudir. S'ils ne l'ont pas, ce n'est pas un bon projet de loi; ils n'applaudiront pas. Mais si c'est un bon projet de loi, s'ils ont eu de petits "candies" dans leur comté, ils vont applaudir. Cela dépend de la grosseur du "candy".

Oui, le ministre se soustrait du contrôle intérimaire. La municipalité régionale de comté commence son schéma d'aménagement. Elle regroupe ou place ses principaux équipements. On a des municipalités régionales de comté qui recoupent une vingtaine de municipalités. Les arguments poignent, à savoir où doivent aller les principaux équipements, le réseau routier et ainsi de suite, tout ce qui constitue une planification rationnelle et ordonnée dans un secteur donné. Le ministre peut décider tout bonnement qu'un chemin va passer là. Ou bien Hydro-Québec peut décider de poser des bornes, de poser des poteaux, de faire une tour de contrôle ou bâtir un équipement, n'importe quoi. Ils vont décider cela. Le ministre envoie fort. C'est lui qui est le "boss". Le "boss" a parlé. Les maires des municipalités, les préfets de comté et les présidents regardent cela et disent: Le schéma n'est plus bon. Le ministre est venu se fourrer le nez dans nos affaires et il a "déviargé" le schéma. C'est à recommencer. Est-ce possible?

Est-ce possible que nous ayons, à la tête de ce gouvernement, premièrement, le premier ministre actuel... Vous l'avez vécu davantage depuis 1981. Y avez-vous goûté rien qu'un peu? Ce n'est pas fini, il en reste encore. Ils sont collés. Ils sont accrochés à leurs sièges. Ce ne sont pas des avions. Cela ne "fly" pas, ces affaires-là. Est-ce possible qu'on ait encore aujourd'hui ce ministre des Affaires municipales qui, conjointement avec le ministre délégué à l'Aménagement qui ne passe même pas en vapeur ici, parce qu'on ne sait pas ce qu'il fait... On ne sait pas ce qu'il fait, lui. Il est responsable de l'aménagement du territoire et du développement régional, mais on ne sait pas ce qu'il fait. Le coq, c'est le ministre des Affaires municipales. Il est parti - il était ministre de l'Aménagement avant - il a vidé son bureau en emportant les meubles et il l'a laissé au nouveau ministre. Le nouveau ministre n'a à peu près rien à faire. Il s'est soustrait de cela et aujourd'hui vous allez comprendre que cela n'a pas de bon sens. C'est pour se permettre ou permettre au gouvernement, dans son incapacité de...

On nous parle de planification. Y a-t-il quelque chose de moins planifié que ce gouvernement, jusqu'à maintenant? Cela a-t-il du sacré bon sens quand on regarde cela? On parle des ténors du Parti québécois: les ailes leur pètent sur les jambes, on les regarde faire et ils nous parlent de planification. Tantôt, on nous disait: Aux États-Unis, ils ont planifié. Je vais vous donner un exemple: Houston, au Texas. C'est aux États-Unis, cela. C'est le développeur qui amène son plan, qui suggère, dépose, fait approuver et bâtit. Pas de problèmes. Avez-vous vu Houston, Texas. À part de leur club de balle, je vous dis qu'ils y "vont aux toasts". Avez-vous vu le développement qu'il y a là-bas? Bien oui, certainement. C'est que les gens ont une liberté d'investir, de programmer des projets souhaitables et souhaités par la population. (16 h 30)

On n'a pas inventé les boutons à quatre trous au Québec. On n'a pas inventé non plus la planification. En 1983, il ne faut quand même pas se prendre pour d'autres n'est-ce pas? Il y en a dans les années 1600 et 1700, qui ont planifié bien avant aujourd'hui. Ils n'avaient pas des petites bagues dans les doigts et ils n'avaient pas des gros MBA; ce n'étaient pas des ingénieurs et ce n'étaient pas des urbanistes, ce n'étaient pas des gens de toutes sortes qui peinturent les nuages à tous les matins, ce n'était pas cela; c'étaient des gens sensés. Ici, vous avez un gouvernement qui ne vous fait plus confiance, il vous dira bientôt comment vous habiller, à combien d'habits vous aurez droit chaque année. Il est en train de contrôler assez bien vos salaires; il contrôle un peu tout; tantôt, il contrôlera tout. Comment

marcher...

On vient d'apprendre qu'on a un gros budget de quelque 100 000 000 $ pour tout le réseau routier provincial au Québec. Comme un de mes collègues disait: Je ne sais pas s'il y en a assez pour peinturer une ligne traversant le Québec, quand on regarde l'ensemble du fouillis qu'on est à nous présenter.

C'est du tordage de bras. Est-ce que cela se peut, quand on regarde ce ministre qui a l'air - les apparences sont trompeuses - poigné en-dedans de lui-même, il veut se venger. Je ne sais pas ce qui l'a frappé depuis quelque temps, mais il en est poigné, il en souffre, c'est de valeur. C'est triste. On le regarde et on se dit qu'il a une physionomie d'un gars qui est doux, mais ratoureur, faiseur de détours. Quand cela ne passe pas par en avant, il passe par en arrière. Il se promène avec sa petite serviette de boni, les petits certificats-cadeaux, et il essaie de se pacter des clubs ici et là. Ce n'est pas croyable. Au Québec, si on pouvait tirer le rideau. Je ne les blâme quelquefois de nous parler d'indépendance. Maudit, à voir où on s'en va, je me demande si on ne devrait pas avoir un rideau qui nous enveloppe pour se cacher un peu toujours, pour ne pas montrer au reste du monde ce qui se fait en 1983, un peuple civilisé, du continent nord-américain; un pays riche, disons moins riche au Québec parce que depuis sept ans, on est en train d'en manger un peu.

Mais de toute façon, en concluant, j'ai peut-être fait un peu d'humour, mais les citoyens en ont besoin. Je vous dis que cela ne va pas bien comme c'est là. Nous voterons contre ce projet de loi. Ah oui! Incapable, impensable, impossible de jouer le jeu du ministre, on l'a trop averti. C'est fini maintenant; fini! Cela ne marche plus. On l'a averti - et on vous le dit - à plusieurs reprises et on ne le couvre plus. C'est fini. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Papineau.

M. Mark Assad

M. Assad: Il y a quelques minutes seulement, le député de Trois-Rivières avait fait une sorte de bilan de planification au Québec auparavant. Évidemment, il a avoué qu'il y a eu des erreurs qui ont été accumulées pendant les années. Mais il a aussi mentionné, et j'en ai pris note, que, pour nous, de ce côté de la Chambre, cela aurait été mieux si on avait pu dire au ministre ce qui se passe au États-Unis, ce qui se passe en Europe, ce qui se passe dans les autres endroits où il y a eu de la planification, comment ils ont préparé les schémas d'aménagement et comment ils ont protégé les terrains agricoles.

Il n'y a pas de doute, mais quand je regarde la municipalité régionale de comté dans Papineau, c'est certainement les gens qui ont été les plus touchés. Ils ont rencontré le ministre, j'en suis sûr. Ils sont surpris de sa résistance devant les maires de la région qui ont été unanimes à lui dire qu'ils n'étaient pas d'accord avec la façon que certain découpage a été fait. Je voudrais souligner au ministre qu'il y a eu des lettres des MRC de Papineau, le conseil de comté auparavant. Elle a même adressé une lettre au ministre et au premier ministre pour leur dire qu'elle était en désaccord total. Vous savez que c'est très difficile de faire l'unanimité parmi tous les maires d'une région. Concernant la région du lac Gagnon, celui-ci, depuis tous les temps, a toujours fait partie du comté de Papineau. Les chemins d'accès sont du côté de Papineau. J'ai parlé avec le maire de la région et il a l'intention de faire un genre de référendum au cours de l'été auprès des gens qui y ont une résidence d'été. Eux aussi trouvent qu'il est plus logique - et c'est leur désir - de rester à l'intérieur de la MRC de Papineau. On ne comprend pas la résistance du ministre sur cette question.

De plus, concernant la MRC de Papineau, il aurait pu y avoir une coopération presque parfaite. Ils ont demandé très peu, ils ont demandé simplement que le ministre révise cette question du lac Gagnon dans notre région, et on aurait pu avoir la paix. Cela a été refusé. On a fait toutes les démarches possibles auprès du ministre. Logiquement, cette partie du comté, c'est-à-dire le territoire du lac Gagnon, devrait rester où elle était. Le député de Trois-Rivières dit qu'on devrait faire des suggestions. On en a fait à plusieurs reprises. Je demande au ministre, s'il n'est pas trop tard, de reconsidérer le territoire du lac Gagnon et le laisser dans la MRC de Papineau.

Il y a quelques semaines, dans notre région, le CRDO, le Conseil régional de développement de l'Outaouais, s'est réuni dans la ville de Gatineau et j'ai eu la chance d'être invité. À ma grande surprise, ce que j'ai rarement vu dans une salle, tous les gens étaient unanimes à dire qu'il y avait désaccord sur le découpage en général. Pourtant, sur les MRC de la région de l'Outaouais, tous les maires des municipalités et tous les organismes vous ont fait des suggestions. Ils voulaient examiner le découpage. À ce moment-là, il ne faut pas être surpris qu'il y ait un peu de résistance.

Le député de Trois-Rivières nous dit: Il faut parfois que des gouvernements aillent à l'encontre de la décision populaire. Il n'y a pas de doute qu'il y a des moments où les gouvernements sont obligés de prendre des mesures qui sont loin d'être populaires, je

suis d'accord. Mais quand les arguments sont basés sur la logique, à ce moment-là, on doit comprendre qu'il y a de la résistance. De toute façon, on est pris aujourd'hui avec le projet de loi no 12. Voici la réaction de l'Union des municipalités régionales de comté, quand elle a pris connaissance du projet de loi no 12: "L'Union des municipalités régionales de comté est très surprise de constater le dépôt, le jeudi 5 mai dernier, du projet de loi no 12 intitulé Loi modifiant la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme." Elle a été surprise. Pourtant, c'est l'organisme par excellence qui représente la population; ce sont ces gens qui sont les premiers à répondre à nos concitoyens, à nos électeurs, et ils n'ont pas été avisés de ce projet de loi. Il ne faut pas être surpris qu'on vous accuse dans cette Chambre de vouloir cacher des choses alors que vous n'avez pas avisé un organisme avec qui vous travaillez main dans la main.

Dans l'ensemble, quand on voit les problèmes, je pense que le moins qu'on puisse faire, c'est que les organismes impliqués dans ces changements soient consultés. D'ailleurs, vous dites qu'il y a eu de la consultation, mais quelle preuve avons-nous? Les faits nous indiquent le contraire. Pourtant, votre tâche aurait pu être beaucoup plus facile. (16 h 40)

Dans notre région, dans le comté de Papineau particulièrement, les maires s'y sont opposés et ils sont en train, en vertu de la loi 125, de préparer le schéma préliminaire d'aménagement. On est tous d'accord pour dire que la loi 125 a sa raison d'être. Il faudrait dire aussi qu'en principe on est d'accord, on accepte le fait que, malgré les obstacles, les municipalités ont besoin d'un schéma d'aménagement.

Le projet de loi no 12 vient dire aux municipalités: Quand votre schéma d'aménagement sera préparé, nous et nos mandataires n'y seront pas tenus. En d'autres mots, le gouvernement pourrait regarder le schéma d'aménagement de notre région et décider de construire une voie de circulation, même si cela ne correspond pas au schéma d'aménagement. Il peut le faire. Est-ce bien cela, M. le ministre? Je crois que oui.

Donc, vous demandez le respect de la loi 125 et, lorsqu'on demande aux municipalités de dépenser des centaines de milliers de dollars et au Québec des millions de dollars, le gouvernement et ses mandataires disent ne pas être obligés de suivre le schéma. C'est assez difficile de comprendre la logique dans tout cela.

Remarquez que dans le passé il y a eu des erreurs, quel que soit le gouvernement; il y a eu des erreurs. Mais à faire des erreurs on arrive ensuite à trouver la bonne voie. C'est impossible de ne pas faire d'erreurs, nous sommes tous conscients de cela. Quand vous demandez des dépenses aussi considérables pour les schémas d'aménagement et qu'ensuite vous n'êtes pas tenus de les respecter, c'est difficile de comprendre cela pour nous. Même s'il y a eu des erreurs dans le passé, ce n'est pas nécessaire de continuer à faire une série d'erreurs. Pourtant, si vous êtes à l'écoute -et vous clamez être à l'écoute de votre population - vous verrez qu'il y a certainement une révision à faire dans ce domaine.

Il faut dire que, dans la région de l'Outaouais, la MRC de Papineau, que je connais évidemment, est la troisième ou la quatrième plus importante dans la province. Nous sommes bien conscients qu'il est nécessaire de faire un schéma d'aménagement aussi parfait que possible. Si nous payons des centaines de milliers de dollars, on voudrait que notre schéma soit respecté parce que, sur notre territoire, la nature nous a favorisés car nous avons une quantité de lacs. La vocation de l'Outaouais est le tourisme et on voit de plus en plus de gens intéressés à se procurer un lot à côté des lacs de notre région. C'est encore plus important pour nous que notre schéma d'aménagement soit respecté parce que, si le schéma d'aménagement n'est pas près de la réalité, on pourra peut-être avoir de gros problèmes pour les 20 ou 25 ans à venir. Dans le moment, on voudrait que ce soit fait le plus tôt possible et que toutes les municipalités concernées soient d'accord sur la façon dont nous ferons notre développement pour l'avenir.

Nous n'avons pas de temps à perdre pour notre développement, surtout dans notre région. Il y a des années qu'on attend de voir ce qu'il adviendra de notre schéma d'aménagement. On a perdu beaucoup de temps et beaucoup d'énergies et, maintenant, on voudrait avoir les outils pour faire notre développement. Si nous avions les outils appropriés pour notre développement, c'est évident qu'on voudrait travailler de concert avec le gouvernement et cela apporterait un respect mutuel. Notre outil de développement par excellence sera le schéma d'aménagement. Si vous nous dites aujourd'hui que vous n'êtes pas tenu de le respecter, immédiatement, je vois pour les années à venir des accrochages, une perte de temps et une perte d'énergie.

Qu'est-ce que les MRC de la région de l'Outaouais et celles du comté de Papineau demandent? Cela m'a été dit par les maires de la région. Ils veulent l'assurance du respect du schéma d'aménagement. Il faut dire que vous avez vous-mêmes créé cette demande de schéma auprès des municipalités. Si on peut faire preuve de respect mutuel, les maires des municipalités auront hâte de canaliser tous leurs efforts sur le développement de notre région.

Comme on arrive à la fin de ce débat sur un projet de loi de quelques articles, la seule chose qu'il reste à dire après avoir entendu les différentes opinions, c'est qu'il est encore possible, je crois, de faire un dernier effort pour voir s'il n'y a pas possibilité d'en venir à un accord de gré à gré avec toutes nos municipalités régionales de comté.

Il ne faut pas oublier, M. le ministre, que nous avons des années à vivre avec les schémas, nous avons des années à vivre avec le projet de loi 125, sur lequel nous sommes tous d'accord en principe. Il faudrait que notre tâche soit aussi facile que possible. Retournez aux municipalités régionales de comté dans un dernier effort pour essayer de régler le problème, si possible, une fois pour toutes.

M. le Président, je vous remercie. Je demanderais au ministre, dans sa réplique, de répondre à ma question: Y a-t-il une possibilité de tenter un dernier effort? Merci.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le ministre des Affaires municipales, votre droit de réplique.

M. Jacques Léonard (réplique)

M. Léonard: On a entendu beaucoup d'interventions sur un projet de loi qui vise à faciliter la vie des municipalités, la vie du gouvernement et le fonctionnement de la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme. J'ai même été - je dois le dire et tout le monde en conviendra - personnellement pris à partie. On m'a traité de bulldozer, de sous-marin, j'ai même déménagé des lacs en cours de route, enfin, tout y est passé. Je ne ferai pas l'historique de la loi sur l'aménagement parce que ce débat que nous venons d'avoir a finalement donné lieu à toutes sortes de notions d'aménagement. Je suis quand même très heureux qu'on ait pu échanger là-dessus. Finalement, je crois qu'on admet qu'il fallait une loi de l'aménagement.

Quoi qu'il en soit, j'ai bien constaté que certains, en face, avaient la mémoire courte parce que, eux, durant 15 ans, n'ont jamais eu le courage d'adopter une telle loi, même après des études, même après que tout le monde leur eut dit, après qu'ils eurent tous constaté qu'il fallait une loi de l'aménagement. Cela a coûté 500 000 000 $ aux Québécois seulement dans le PAIRA pour corriger les erreurs, pour corriger le manque de courage. Aujourd'hui, il y a une loi de l'aménagement, il y a eu un découpage du territoire après une vaste consultation qui a été une vaste opération. Je rappellerai simplement, par rapport à des déclarations qui ont été faites de l'autre côté de la Chambre, que le comité de consultation étaient composés de trois membres: un membre nommé par le gouvernement, mais sur recommandation de l'Union des conseils de comté du Québec à l'époque, un membre nommé par le gouvernement à la recommandation de l'Union des municipalités du Québec et le président, nommé par le gouvernement. (16 h 50)

Une telle opération ne s'était jamais vue en termes de découpage. Qu'on se rappelle lorsqu'on avait fait, à l'époque, le découpage du territoire des régions administratives et le découpage du territoire des commissions scolaires, il n'y avait pas eu une telle consultation. Cette consultation a duré presque trois ans. Elle a été importante et les décisions que nous avons rendues tiennent compte, dans 99% des cas - l'autre soir, j'ai dit 95%; on me dit que c'est 99% des cas - des résolutions des municipalités. Il me semble que c'est un succès et qu'on doit l'admettre. Au lieu d'insulter les membres des comités de consultation, je pense qu'on doit, au contraire, les féliciter du travail qu'ils ont accompli et j'en profite pour le faire, parce qu'ils ont travaillé de façon acharnée, considérablement. Ils ont...

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît!

Une voix: Que M. le député de Beauce-Sud ait donc le courage de porter des accusations précises.

Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît!

M. Mathieu: Je l'ai fait...

Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît! M. le député de Beauce-Sud, je vous demande de respecter le droit de parole du ministre. M. le ministre.

M. Léonard: Je pense que M. le député de Beauce-Sud a lancé des accusations qui, il me semble, dépassent, j'espère, sa pensée.

Une voix: Non, non.

M. Léonard: Lorsqu'il y a une consultation, on ne peut pas s'attendre qu'il y ait unanimité sur tout, partout, de tous les intervenants. C'est évident, mais, à un moment donné, par rapport à une situation, par rapport à des recommandations, il me semble qu'on doit les accepter. Nous sommes en démocratie. Je pense qu'il se produit des différends, n'importe où. Je voyais encore que, même au sujet de l'Outaouais, il y a un député qui propose un statut particulier alors que son collègue n'est pas d'accord. Il le lui a dit dans une lettre et les journaux en ont

été informés. Donc, cela fait partie de la démocratie. Tout le monde ne s'entend pas nécessairement. Mais, à un moment donné, il faut se rendre à l'évidence, aux exigences du bien commun. C'est comme cela que, finalement, la démocratie fonctionne.

M. le Président, les maires, aujourd'hui, travaillent avec la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme. Il me semble qu'ils travaillent en toute loyauté, de bonne foi. Ils méritent aussi des félicitations, parce que des efforts considérables sont faits sur le territoire du Québec de la part des élus, de la part des maires qui se réunissent souvent, qui se rencontrent, qui discutent de l'aménagement, et de la part de leurs fonctionnaires, un peu partout au Québec.

Nous savons que ce n'est pas nécessairement une tâche facile, mais elle doit se faire. En cours de route, nous savions - nous le savons aussi pour l'avenir - qu'il fallait apporter des ajustements. C'est ainsi qu'il y a eu des amendements à la loi 125, à la loi 92, à la loi 33, maintenant le projet de loi no 12 qui est devant l'Assemblée. La loi 33 apportait, notamment, des amendements sur les modalités de succession. Quand on a transformé les conseils de comté en municipalités régionales de comté, des modalités de succession ont du être précisées, parce qu'on a fait face à des situations qui n'avaient pas été prévues dans la loi originale et il était bien normal qu'on ne pouvait prévoir tous les cas.

De même, dans la loi 92, au mois de décembre dernier, il y a eu aussi des ajustements en ce qui concerne le règlement de contrôle intérimaire et son application. Il y en a d'autres maintenant qui concernent les délais à l'intérieur de l'application du règlement de contrôle intérimaire, comme pour les interventions gouvernementales. Je pense qu'il s'agit d'un processus qu'il faut comprendre, parce qu'il s'accompagne ou il accompagne une évolution dans l'application de la loi 125. À mon avis, c'est une opération tout à fait normale qui se déroule aujourd'hui et j'y viendrai à ce projet de loi no 12, parce qu'on a traité beaucoup de questions générales sans trop toucher directement au projet de loi.

Qu'est-ce que le projet de loi no 12 dit? Il comporte neuf articles. C'est un tout petit projet de loi. J'aimerais quand même vous lire quelques articles, parce qu'on a dit que, là-dedans, le gouvernement n'était plus lié par les schémas. Je vais rappeler simplement trois points majeurs du projet de loi no 12, parce que ce sont ces trois points que couvrent les neuf articles. D'abord, le projet de loi permet des ententes de gré à gré, lorsqu'il s'agit de construire des voies de circulation à la période de contrôle intérimaire. Il élimine aussi une ambiguïté en ce qui concerne possiblement l'application d'un double système pour les opérations gouvernementales. Troisièmement, il raccourcit des délais ou il les enlève lorsqu'il apparaît, à l'usage, qu'ils n'étaient pas nécessaires.

On a dit que le gouvernement n'était plus lié par les schémas d'aménagement. Je dis que c'est faux tout simplement et je vous lis l'article 2 tel que modifié dans le projet de loi no 12, le nouvel article. Il se lit comme suit. C'est plutôt l'article 1 qui corrige l'article 2." L'article 2 de la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme est remplacé par le suivant." Je lis: "Un schéma d'aménagement et un règlement de contrôle intérimaire adoptés par une municipalité régionale de comté et mise en vigueur conformément à la présente loi lient le gouvernement, ses ministères et ses mandataires lorsque ceux-ci désirent intervenir par l'implantation d'un équipement ou d'une infrastructure, par la réalisation de travaux ou par l'utilisation d'un immeuble, dans la seule mesure prévue au chapitre VI du titre 1." J'y reviendrai, M. le Président, parce qu'il s'agit des articles 149 et suivants.

On retiendra les mots: "Lient le gouvernement, ses ministères et ses mandataires." Je continue cette lecture du nouvel article 2 de la loi 125: "Notamment, le gouvernement, ses ministères et ses mandataires ne sont pas tenus d'obtenir un permis ou certificat exigé en vertu d'un règlement de contrôle intérimaire." Pourquoi, M. le Président? Parce qu'il n'y aura pas double système en ce qui concerne les interventions gouvernementales, mais que le gouvernement ou que les interventions gouvernementales vont être régies par le chapitre VI de la loi 125, c'est-à-dire les articles 149 et suivants. Or, qu'est-ce qu'on dit dans l'article 149? C'est ceci. "Lorsque le gouvernement, ses ministères ou mandataires désirent intervenir sur le territoire d'une municipalité régionale de comté où est en vigueur un règlement de contrôle intérimaire ou un schéma d'aménagement, par l'implantation d'un équipement ou d'une infrastructure, par la réalisation de travaux ou l'utilisation d'un immeuble, le ministre doit d'abord adresser un avis de cette intention au conseil de la municipalité régionale de comté. "L'avis du ministre mentionne l'objet et les motifs de l'intervention. Copie de cet avis est enregistrée à la commission."

Les articles qui suivent explicitent la procédure, explicitent la consultation qui doit se tenir. M. le Président, lorsqu'on regarde l'article 2, le nouvel article 2 de la loi 125 et le chapitre VI avec tous ses articles, il faut dire une chose: le gouvernement continue d'être lié par le schéma d'aménagement ou par un règlement de contrôle intérimaire. Je défie les gens d'en face de dire le contraire. Ce que l'on dit

dans la loi, c'est que dorénavant, le processus pour les interventions gouvernementales c'est celui décrit au chapitre VI de la loi 125 et non pas celui des permis, ce qui avait été laissé dans l'ambiguïté. Je pense que pour être honnête, il faut continuer de dire que le gouvernement, ses ministères et ses mandataires sont liés par le règlement de contrôle intérimaire, par le schéma d'aménagement selon le processus du chapitre VI, aux articles 149 et suivants. C'est cela qu'il dit.

Deuxièmement, en ce qui concerne l'article 2 du projet de loi no 12. Cet article va permettre les opérations de gré à gré entre, par exemple, le ministère des Transports et quelqu'un qui devait disposer d'un terrain ou d'une bande de terrain pour permettre la construction de routes ou de voies de circulation. L'article 2 se lit comme suit: "L'article 61 de cette loi, remplacé par l'article 78 du chapitre 63 des lois de 1982, est modifié par le remplacement du paragraphe 2 par le suivant: 2 toute nouvelle opération cadastrale ainsi que le morcellement d'un lot fait par aliénation, sauf le cas d'une opération cadastrale nécessitée par une déclaration de copropriété faite en vertu de l'article 441b du Code civil ou par l'aliénation d'une partie de bâtiment requérant la partition du terrain sur lequel il est situé, et sauf le cas d'une opération cadastrale ou d'un morcellement fait pour permettre au gouvernement ou à l'un de ses ministères ou mandataires de construire une voie de circulation." (17 heures)

M. le Président, ce qui se produisait en vertu de l'article 61, avant l'amendement, faisait en sorte que même si le ministère des Transports et un particulier étaient d'accord pour procéder de gré à gré dans le cas de l'aliénation d'une parcelle de terrain, ils ne pouvaient pas le faire et le ministère des Transports était obligé de procéder par expropriation. Ce que nous disons par cet article, tout simplement, c'est que s'ils veulent procéder de gré à gré, ils pourront le faire, accélérant ainsi la construction des routes. Tout le monde sait que la règle générale et la coutume font en sorte que le ministère des Transports règle de gré à gré avec les particuliers qui lui cèdent des terrains. C'est tout simplement pour simplifier que cet article a été modifié par l'article 2 du projet de loi no 12, parce que lorsqu'ils font l'acquisition de terrains en vue de la construction de routes, les ministères -et surtout celui des Transports - procèdent de gré à gré, beaucoup plus que par expropriation. Ce n'est qu'exceptionnellement que les ministères ont recours aux procédures d'expropriation.

Comme le libellé actuel empêchait de procéder de gré à gré, le nouvel amendement va le permettre, parce que dans le cas de routes, il s'agit finalement de réseaux semblables aux réseaux d'électricité ou d'utilités publiques. Il s'agit, finalement, d'un développement linéaire, mais cela n'évitera pas au ministère des Transports, par exemple, de passer par l'avis au conseil de la municipalité régionale de comté et de devoir procéder selon le processus du chapitre VI, articles 149 et suivants. Tout ce que cela fait, cependant, c'est accélérer le processus. On va pouvoir commencer rapidement les travaux et on ne sera pas empêché de procéder simplement parce qu'il faudrait aller à l'expropriation. On pourra procéder de gré à gré. Donc, il s'agit simplement d'une modalité qui touche à l'acquisition d'un terrain le long de ses axes.

Il faut aussi ajouter une chose par rapport aux interventions gouvernementales. S'il n'y avait pas conformité ou si la conformité était douteuse entre une intervention gouvernementale projetée et le règlement de contrôle intérimaire ou le schéma d'aménagement, le ministre, après avoir reçu l'avis du conseil de la municipalité régionale de comté, pouvait s'adresser à la Commission nationale de l'aménagement et il y avait un délai de 90 jours. Or, il se pouvait que, finalement, le ministre admette que l'intervention projetée par le gouvernement n'était pas conforme au schéma, qu'il l'admette d'emblée, mais selon la rédaction de la loi actuelle, il devait, de toute façon, attendre 90 jours. Or, le projet de loi fait en sorte que si on reconnaît, de part et d'autre, qu'il n'y a pas conformité, on n'est pas obligé d'attendre 90 jours avant de passer à l'étape suivante. Si le conseil de la municipalité régionale de comté est d'accord et si le ministre est d'accord, on peut procéder et donner tous les avis. En fait, dans le cas où la non-conformité, par exemple, est évidente pour tout le monde, on peut passer tout de suite à l'étape suivante et ne pas attendre la fin du délai qui existait quand on s'adressait à la Commission nationale de l'aménagement. Là aussi, on respecte l'esprit de la loi no 125. Je pense que, finalement, tout ce qu'on fait, c'est de conserver l'essentiel et de modifier simplement des modalités. Le gouvernement demeure toujours lié par le règlement de contrôle intérimaire ou le schéma d'aménagement. Il y a toujours la vérification dans tout cela et l'établissement, s'il y a lieu, d'une obligatoire conformité entre l'intervention gouvernementale et les dispositions d'un règlement de contrôle intérimaire ou d'un schéma.

Le troisième point où on modifie la loi de l'aménagement, c'est lorsque la municipalité régionale de comté veut modifier son règlement de contrôle intérimaire. Le règlement de contrôle intérimaire rendra compte d'un processus

évolutif jusqu'au moment où on adoptera le schéma d'aménagement. Cela veut dire qu'on le modifiera assez souvent, tant qu'on n'aura pas adopté le schéma d'aménagement. Or, si tout le monde est d'accord pour modifier le schéma d'aménagement, si le conseil de la municipalité régionale de comté est d'accord, si, par exemple, ici au ministère, lorsqu'on examine ces modifications au règlement de contrôle intérimaire, nous sommes d'accord tout de suite et que les modifications proposées apparaissent nécessaires et évidentes, pourquoi ne pas procéder tout de suite? Si tout le monde s'entend ou si, à tout le moins, il y a un large consensus par rapport à une telle proposition, c'est dans ce cas que nous voulons restreindre ou ne pas tenir compte de cette période obligatoire de 45 jours qu'il y avait, avant d'accepter ou avant de dire que le ministre ne désavouait pas le règlement ou cette modification au règlement de contrôle intérimaire. Là aussi, c'est un assouplissement qui permettra de procéder plus vite. S'il y a contestation à l'intérieur de la municipalité, le ministre, à la suite des avis des fonctionnaires ou des officiers de son ministère, pourra prendre soit la période de 45 jours ou plus longtemps pour procéder à un examen. Tout cela m'apparaît tout à fait normal dans le cours de l'opérationalisation d'une loi.

Donc, je tiens à dire encore une fois que, pour l'essentiel, la loi 125 n'est absolument pas touchée dans son esprit. Elle n'est pas touchée du tout. Il s'agit simplement d'amendements qui permettront de procéder plus rapidement, d'éviter qu'il y ait un double système lorsqu'il s'agit d'interventions gouvernementales. Et, finalement, je suis convaincu que tout le monde s'en trouvera mieux là-dessus.

Je termine par un dernier sujet. On a beaucoup parlé de la consultation dans l'application de la loi 125 ou de la non consultation. S'il y a une loi sur laquelle il y a eu dialogue entre le gouvernement et le monde municipal, c'est bien celle-là. On a pris trois ans avant de l'adopter. Pour faire le découpage des territoires ou la modification des territoires, nous avons pris, là aussi, pratiquement trois ans. Je rappellerai que la loi a été adoptée en décembre 1979. Le découpage s'est terminé en décembre 1982, trois ans après. Maintenant, nous en sommes à une autre étape: les municipalités régionales de comté adoptent des règlements de contrôle intérimaire, on commence la préparation d'un schéma d'aménagement. C'est une autre étape du dialogue; il y en a eu et il y en a encore du dialogue entre le ministre et le monde municipal. J'assiste à tous les congrès des unions. Je rencontre régulièrement des maires, les présidents des unions et encore le 9 avril dernier, je rencontrais les préfets qui sont presque tous venus à la réunion convoquée ici à Québec. Le dernier congrès de l'Union des municipalités du Québec a connu une grande assistance et j'ai aussi l'occasion de rencontrer très souvent des gens de l'Union des municipalités régionales de comté. Ce dialogue se poursuit aussi entre les officiers de mon ministère et les municipalités régionales de comté qui ont adopté un règlement de contrôle intérimaire.

Tout cela se fait dans un esprit de collaboration et pas du tout de confrontation. Lorsqu'il y a des explications qui sont données, parfois c'est le ministère qui modifie sa position, parfois aussi, ce sont les municipalités régionales de comté qui modifient leur position. Cela fait partie du dialogue. Quand on dit qu'on ne dialogue pas au ministère des Affaires municipales - on l'a dit dans certains coins - je voudrais simplement en rappeler - parfois il y a des manchettes qui ne nous aident pas, mais parfois il y en a d'autres qui nous aident aussi - quelques-uns, un de ces jours, maintenant que nous avons déposé le projet de loi sur la réforme de la Communauté régionale de l'Outaouais. Le Droit titrait, le 1er juin: "Bien des besoins régionaux comblés." Plus bas: "Selon l'actuel président de la Communauté régionale de l'Outaouais, il y a pas mal tout ce qu'on voulait." (17 h 10)

Cela, c'est à la suite d'une consultation qui dure depuis trois ans, en ce qui concerne la réforme de la CRO. Elle a été amorcée par mon prédécesseur, je l'ai continuée, on m'a remis un rapport à la fin de l'été dernier, alors que j'avais invité la CRO à revoir ses premières recommandations sur le projet de réforme de la CRO. J'ai rencontré le président à plusieurs reprises, je lui ai parlé à plusieurs reprises, j'ai rencontré les maires de la CRO à deux reprises ce printemps avant d'aboutir au dépôt de ce projet de loi. Cela, c'est une consultation qui a été menée. Il y en a eu aussi lorsqu'on a fait la consultation sur le découpage des territoires des municipalités régionales de comté. On l'a fait dans tous les territoires du Québec avec 19 comités de consultation. Il y a eu dialogue.

Bien sûr, on ne peut pas se rendre aux désirs de tous. La consultation ne signifie pas nécessairement qu'il y a unanimité. On sait qu'il y a parfois des choses sur lesquelles les positions sont irréconciliables. C'est seulement dans ces cas que nous avons dû trancher. Mais nous avons dû le faire parce que, finalement, la consultation avait produit ce qu'elle avait produit, mais pas l'unanimité. Les décisions que nous avons prises, nous les avons prises dans le meilleur intérêt des citoyens, dans le meilleur intérêt du Québec.

M. le Président, nous allons aborder maintenant l'étude article par article de ce

projet de loi en commission parlementaire. Je compte sur la collaboration de tous les membres de l'Opposition. J'espère qu'ils se rendront à l'évidence qu'il faut une loi sur l'aménagement qui soit souple, dans le Québec. Ils ont voté contre la loi 125, une des lois les plus intéressantes et les plus magnifiques qu'on ait eu à voter et que certains, parmi leur formation politique, d'ailleurs, apprécient largement. Sur ce plan, je citerai la déclaration du préfet de la MRC de Matawini qui a dit, et qui n'en démord pas, selon l'article du Joliette Journal, par exemple: "La loi 125, disait-il, est la plus belle mesure dont ait jamais hérité le monde municipal. Il existe enfin une loi permettant aux citoyens d'agir directement sur les élus et de travailler avec eux à l'aménagement du territoire sur lequel ils vivent. C'est sans doute la meilleure loi qui ait jamais été votée en autant que les municipalités sont concernées."

Je ne dis pas que cette loi est parfaite, je dis que les principes en ont été établis en 1979 et que, graduellement, au fur et à mesure que la situation évolue, nous l'ajustons à cette situation. C'est l'objectif du projet de loi no 12. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Est-ce que le projet de loi no 12, Loi modifiant la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, est adopté?

Des voix: Adopté sur division.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Adopté sur division. M. le leader adjoint du gouvernement.

Renvoi à la commission des affaires municipales

M. Boucher: M. le Président, je fais motion pour que ce projet de loi soit déféré à la commission des affaires municipales.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Est-ce que cette motion de déférence est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boucher: Je vous demanderais d'appeler l'article 2 de notre feuilleton. La parole est au député de Bellechasse.

Reprise du débat sur le discours sur le budget et la motion de censure

Le Vice-Président (M. Rancourt): Reprise du débat sur la motion du ministre des Finances proposant que l'Assemblée approuve la politique budgétaire du gouvernement et sur la motion de censure du député de Vaudreuil-Soulanges: "Que cette Assemblée blâme sévèrement le gouvernement d'avoir présenté un budget qui ne contient aucune mesure significative propre à relancer la création d'emplois et les investissements et qui maintient les taxes et les impôts à des niveaux inacceptables sans être en mesure de rétablir la santé des finances publiques."

M. le député de Bellechasse.

M. Claude Lachance

M. Lachance: Merci, M. le Président. D'abord, avant dénoncer mes opinions et ma perception du discours prononcé par le ministre des Finances le 10 mai dernier, je voudrais très brièvement revenir sur certains propos qui ont été prononcés tout à l'heure dans cette Assemblée par le député de Hull, des propos me concernant. Je veux simplement dire là-dessus que si ce que j'ai écrit était à récrire, j'écrirais exactement la même chose. Je pense qu'il est important que les gens se prennent en main, et c'est ce que les gens de ma région ont fait.

Le 10 mai dernier, le ministre des Finances du Québec, le député de L'Assomption nous a présenté un budget extrêmement intéressant dans la conjoncture économique actuelle, qui comportait des prévisions de dépenses de 24 300 000 000 $, avec des prévisions de revenus de 21 100 000 000 $, soit un déficit prévisible de 3 200 000 000 $. Je pense qu'on peut regarder quelle a été la réaction dans la population et, en particulier, quel a été le reflet de ce budget sur certains éditorialistes.

Le 12 mai 1983, Michel Roy, du journal La Presse, titrait: "Budget attentiste, sage et réaliste." Permettez-moi de vous en signaler quelques extraits, M. le Président. Il disait: "C'est en tout cas un budget dont l'objectif est d'accroître l'activité économique, de favoriser les investissements dans le secteur privé. Donc, un budget qui tend à susciter la relance dès que celle-ci se manifestera avec plus de vigueur aux États-Unis et au Canada." Il ajoutait: "Mais on doit quand même souligner que le gouvernement évite soigneusement d'alourdir le déficit et d'augmenter les impôts, ce que M. Lalonde n'a pas réussi." Évidemment, il faisait allusion au budget présenté par le ministre des Finances à Ottawa quelques semaines plus tôt.

Dans le journal Le Nouvelliste du jeudi 12 mai 1983, sous la signature de Sylvio Saint-Amant, on titrait: "Un budget réaliste." Brièvement, il disait ceci: "Le ministre des Finances du Québec, qui ne possédait à peu près aucune marge de manoeuvre, pouvait

difficilement faire mieux."

M. le Président, il y a des gens qui ne manquent pas de culot et le ministre des Finances à Ottawa en est un. Quelques jours avant que le ministre des Finances du Québec présente son budget, M. Lalonde demandait au député de L'Assomption et ministre des Finances à Québec de l'imiter. Sous la signature du journaliste Alain Dubuc, dans la Presse du 5 mai 1983, on lisait le titre: "Si Parizeau imitait Lalonde". On peut lire ceci: "Si le ministre québécois des Finances Jacques Parizeau imitait dans son budget son homologue fédéral, le déficit du Québec bondirait de 3 200 000 000 $ à 11 000 000 000 $." Le journaliste d'ajouter: "Il y a deux bonnes raisons pour lesquelles le gouvernement provincial n'a pas intérêt à imiter son grand frère fédéral. Du côté budgétaire, les finances publiques du Québec sont beaucoup plus saines que celles d'Ottawa et on peut difficilement se payer le luxe d'une débâcle. Du côté de la relance, les programmes du fédéral ressemblent étrangement dans leur philosophie à ceux que le gouvernement québécois avait dévoilés un mois plus tôt. Qui imite qui?"

Je poursuis parce que c'est très intéressant. "À côté de M. Lalonde, quoi qu'en disent ses critiques - et c'est ce qu'on entend de l'autre côté de la Chambre ici -M. Parizeau est un enfant de choeur. Dans son budget de l'an dernier, les dépenses atteignaient 22 500 000 000 $, les revenus 19 300 000 000 $, pour un déficit de 3 200 000 000 $. Cela veut dire que 14,4% du budget québécois est financé par un déficit. En proportion de l'importance des deux secteurs publics, le déficit québécois est donc deux fois et demi moins important et Ottawa dépense quatre fois plus que le Québec, mais s'endette à un rythme dix fois plus élevé." C'est la situation, M. le Président.

Si on peut se permettre brièvement une comparaison avec ce qui se passe au gouvernement canadien, j'ai ici un article publié dans la Presse du 20 avril 1983, intitulé: "En quatre ans, le gouvernement s'endettera autant qu'en 56 ans." Et on parle bien du gouvernement canadien. On dit ceci: "Il en résulte que la dette publique actuellement à 120 000 000 000 $ doublera en quatre ans. Dans cette courte période, le gouvernement canadien s'endettera donc autant qu'il ne l'a fait dans les 56 années précédentes." Rien que cela, M. le Président. Dans le journal La Presse, toujours du 20 avril, le titre de première page est celui-ci: "Les contribuables paieront plus d'impôts, les sociétés moins." On fait toujours allusion au budget présenté par le ministre des Finances, M. Lalonde, à Ottawa. (17 h 20)

Si on jette un coup d'oeil sur une province à laquelle on aime bien comparer le

Québec, par un effet du hasard, il y avait présentation du budget en Ontario, à Queen's Park, la même journée que la présentation de notre budget. On avait le lendemain, dans le journal La Presse du mercredi 11 mai, le titre suivant: 500 000 000 $ de plus en taxes temporaires pour les Ontariens.

Dans la conjoncture actuelle, on peut dire que, quand on se compare, on se console. Personnellement, je retiens de ce budget que M. le ministre des Finances du Québec nous a présenté certaines mesures extrêmement intéressantes pour l'ensemble du Québec et, en particulier, pour le comté que je représente. Dans l'ensemble du Québec, permettez-moi de vous en citer quelques-unes qui vont toucher tous les contribuables québécois. Par exemple, l'indexation des exemptions personnelles. À compter du 1er janvier 1984, les exemptions personnelles seront indexées au taux de 5%. Ainsi, l'exemption des célibataires est passée de 5030 $ à 5280 $; celle des personnes mariées est passée de 8800 $ à 9240 $.

La déduction pour un contribuable travaillant à l'extérieur du Canada est une mesure positive et intéressante pour ces personnes qui ont à nous représenter non seulement à l'extérieur du Québec, mais aussi du Canada. J'en ai quelques-uns dans mon comté qui sont dans cette situation.

Une autre mesure extrêmement intéressante aussi, que j'avais personnellement demandée avec mes collègues du caucus agricole du Parti québécois, c'était la déduction pour les dons de biens agricoles. Il y a actuellement un problème au niveau de la relève agricole; vous êtes bien placé pour le savoir, M. le Président. Présentement, une personne peut déduire, dans le calcul de la valeur imposable de ses dons, dans une année, de son vivant, une seule fois, un montant n'excédant pas 75 000 $. Par le budget annoncé le 10 mai, cette exemption, ce montant a été porté à 100 000 $. C'est donc une mesure extrêmement positive pour un père de famille qui veut passer la relève à l'un de ses fils ou à l'un de ses enfants.

Dans le discours sur le budget, un des aspects qui m'a particulièrement touché, c'est le montant d'argent consacré aux programmes de création d'emplois: 235 000 000 $. Je vais m'arrêter sur un programme qui intéresse beaucoup les citoyens et surtout les élus municipaux de ce temps-ci, le programme PRIME, le Programme d'initiatives municipales pour l'emploi. Sur 34 municipalités que compte le comté de Bellechasse, ce programme est tellement populaire qu'au moins 30 ou 32 d'entre elles ont fait une demande pour obtenir une subvention dans le cadre du programme PRIME qui, comme vous le savez, a été mis sur pied par le ministre de la Main-d'oeuvre et de la Sécurité du revenu

ainsi que le ministre des Affaires municipales pour remplacer le volet municipal du programme RELAIS.

Le programme PRIME, je vous en donne un aperçu. C'est un programme beaucoup plus intéressant que le programme RELAIS. L'un des maires d'une municipalité de mon comté me remettait récemment une lettre qui a été expédiée par mon homologue fédéral dans le comté de Bellechasse, M. Garant, l'un de ces 74 députés silencieux, silencieux en paroles comparativement à d'autres de ses collègues, mais moins silencieux par ses écrits. Ce cher homologue fédéral se permettait de verser des larmes de crocodile, de larmoyer en déplorant que les municipalités ne pourraient pas profiter du programme RELAIS. Il pourra garder ses déceptions pour lui et ses larmes de crocodile car les municipalités se rendent compte, dans le comté que je représente, que le programme PRIME est davantage intéressant que ne l'aurait été le programme RELAIS. Je n'ai pas l'impression que la lettre qu'il a fait parvenir aux 34 maires aura une portée extraordinaire. Je vous lirai simplement sa dernière phrase: "Je suis très déçu de la position du Québec et je serais heureux d'entendre vos commentaires à ce sujet, et veuillez croire à l'expression de mes regrets sincères." Cela ressemble à une carte de sympathie et cela fait un peu bizarre de la part d'un député qu'on a de la difficulté à rejoindre en plein jour. À son bureau, on se fait répondre par un répondeur téléphonique.

Le programme PRIME est un programme qui permet à une municipalité d'obtenir une subvention de 200 $ par personne, par semaine, en moyenne. C'est un aspect intéressant, mais ce n'est pas tout. Là où c'est le plus intéressant, c'est concernant le nombre de semaines. Alors que le programme RELAIS avait un minimum de 12 semaines, le programme PRIME nous donne un minimum de 20 semaines. D'autre part, alors que, pour les autres frais, comme les avantages sociaux, le matériel, la location d'équipement et les frais généraux, le programme RELAIS donnait un maximum de 125 $ par semaine, le programme PRIME, plus généreux, permet d'aller chercher 150 $ par semaine.

De plus, le programme PRIME est plus souple. Il permet d'embaucher une seule personne alors que le programme RELAIS oblige à avoir au moins trois personnes. Évidemment, les municipalités font habituellement des demandes pour 3, 4, 5 et plus, quant au nombre de personnes.

Encore une fois, je suis très heureux de l'arrivée de ce programme totalisant des déboursés prévisibles de 50 000 000 $ qui viennent s'ajouter à une somme de 10 000 000 $ qui avait été annoncée antérieurement dans le cadre du programme de création d'emplois temporaires du ministère des Affaires municipales.

Une autre mesure annoncée dans le discours sur le budget du 10 mai aura une incidence, je pense, assez extraordinaire sur la relance de l'économie. Ce sont les améliorations apportées au programme Corvée-habitation. Dans son discours du 10 mai, le ministre des Finances annonçait que, désormais, le taux d'intérêt garanti pour une période de trois ans serait de 9,5%, et ce n'est pas tout. On ajoutait une somme additionnelle de 2000 $ pour l'acquisition d'une maison à la condition que cela se fasse avant le 1er janvier 1984. Une somme additionnelle de 1000 $ est aussi ajoutée dans Corvée-habitation, nouvelle version, conditionnellement à une contribution équivalente de la part de la municipalité où l'immeuble sera construit.

Je suis persuadé que cette mesure, dans votre comté comme dans ceux des collègues qui siègent à l'Assemblée nationale et celui que je représente, accélérera les mises en chantier et, vous connaissez l'adage très connu: quand la construction va, tout va; l'économie roule. Déjà, au moment où on se parle, il y a des signes visibles sur les terrains et c'est très prometteur en ce qui concerne la relance de l'économie. Je pense que cette mesure s'imposait surtout lorsqu'on a appris l'abandon de la subvention fédérale au montant de 3000 $.

Pour un député d'un comté rural, le dernier budget annonçait une très bonne nouvelle. C'est l'addition de crédits supplémentaires au montant de 50 000 000 $, pour l'ensemble du Québec, pour le réseau routier: 25 000 000 $ en particulier pour des routes rurales et 25 000 000 $ pour la voirie municipale, soit des subventions que le gouvernement peut verser à des municipalités qui possèdent des routes, pour l'entretien, à la charge des municipalités. (17 h 30)

C'est avec un certain sourire que j'ai regardé mes collègues de l'Opposition, au moment où le ministre des Finances nous annonçait cette nouvelle. J'avais hâte de voir s'ils allaient applaudir parce que quelques jours auparavant, le député de Richmond, le député de Beauce-Sud et quelques collègues de l'Opposition avaient fait une question avec débat du vendredi; ils avaient interrogé le ministre des Transports, le député de Drummond, et avaient demandé que le gouvernement fasse des efforts particuliers pour l'amélioration du réseau routier. Je pense qu'ils avaient raison de demander ces sommes pour faire une espèce de rattrapage et j'étais très heureux qu'on puisse sensibiliser les autorités gouvernementales à ce sujet. Mais lorsque la réponse est arrivée je m'attendais à ce que nos amis de l'Opposition applaudissent. Ce n'est pas cela,

M. le Président. On les regardait, ils avaient la tête basse; je ne sais pas quelle a été leur réaction à ce moment, mais ils avaient l'air déçus jusqu'à un certain point. On aurait dit qu'ils s'attendaient que le budget ne soit pas intéressant pour qu'ils puissent facilement le critiquer.

Quand ils ont vu qu'il y avait une chose comme celle-là, aussi intéressante pour eux... Moi, ils m'ont déçu franchement parce que j'aurais aimé que, pour une fois, ils mettent de côté la partisanerie et disent: Enfin, voilà une mesure intéressante; on pourra en faire profiter nos concitoyens et nous sommes heureux. J'attends encore et je n'ai pas entendu ce genre de discours. On aura d'autres députés de l'Opposition qui vont faire des discours là-dessus et j'espère les entendre nous dire qu'ils sont heureux de ce qui va arriver, nous parler des enveloppes additionnelles qu'ils vont pouvoir recommander au ministre pour l'amélioration du réseau routier municipal. Je vois le député de Papineau qui me regarde et je suis certain que tantôt, lorsqu'il va parler, il pourra dire son mot là-dessus, donner son impression sur le budget accru. Dans le comté que je représente, n'eut été de l'annonce de ces sommes additionnelles, c'est un montant très appréciable qui n'aurait pas pu être dépensé, utilisé dès cet été pour améliorer le réseau routier, relier des routes entre elles.

Dans le comté de Bellechasse, présentement, il y a 1665 kilomètres de routes. Sur les 1665 kilomètres de routes, il y en a 849, soit à peu près la moitié, qui ne sont pas encore pavées. C'est vous dire l'ampleur des besoins dans un comté comme le mien. Si maintenant, il est possible, par exemple, d'avoir une amélioration que je vais vous préciser dans le rang Saint-Charles, qui relie les municipalités de Sainte-Sabine et de Saint-Magloire sur une longueur de 4,7 kilomètres, pour un déboursé d'environ 500 000 $, c'est grâce à ce qui a été annoncé dans le discours sur le budget du 10 mai. Et je rends hommage au ministre des Finances d'avoir écouté les parlementaires, les membres du conseil des députés du Parti québécois pour le sensibiliser aux problèmes du réseau routier. Même chose en ce qui concerne les travaux sur la route 216, qui passe dans mon comté, entre les municipalités de Buckland et de Saint-Nazaire.

Il y a des travaux qui pourront se faire cet été sur une distance d'environ deux kilomètres pour une somme de 275 000 $. Si ce discours n'avait pas été prononcé, si ces mesures n'avaient pas été annoncées, il m'aurait été impossible de recommander au ministre des Transports de verser une subvention de 100 000 $ dans la municipalité de Saint-Anselme, de 40 000 $ à ville Lac-Etchemin, et de 30 000 $ dans la municipalité de Saint-Damien. Je rends hommage au ministre des Transports ainsi qu'à son collègue, le ministre des Finances, de cet effort particulier pour le réseau routier d'un comté où on attend beaucoup dans ce dossier. J'espère, en tout cas, et je crois que les parlementaires de l'autre côté de la Chambre vont nous le dire, j'espère que l'effort qui est fait cette année va pouvoir se poursuivre.

M. le Président, dans cette période que nous venons de traverser, il y a eu des moments extrêmement difficiles et cela a suscité des initiatives intéressantes. Par exemple, je voudrais vous parler brièvement d'une initiative pour contrer l'endettement, pour créer de l'emploi et cela s'appelle Les fonds communautaires des Etchemins. Le macaron que je porte aujourd'hui sert justement à financer cet organisme, qui est une corporation à but non lucratif et qui exploite un service de prêts sans intérêt pour les gens de la région du CLSC Lac-Etchemin. Cela a été mis sur pied, M. le Président, grâce à la collaboration de certains bénévoles dont l'instigateur, M. Denis Olivier, responsable de l'équipe socio-économique du CLSC Lac-Etchemin, a su amener autour de lui des personnes pour travailler en vue de venir en aide aux plus démunis. Je sais qu'il existe certaines initiatives comparables. On pourrait citer, par exemple, un organisme semblable à Plessisville. On peut se demander ce que cela peut donner dans la région. Ce service s'adresse d'abord aux individus qui sont mal pris à court terme et dont la situation financière ne correspond pas aux critères d'admissibilité des institutions financières comme les caisses ou les banques. Il peut également venir en aide à des groupes communautaires ou encore à des individus qui sont parrainés par des groupes communautaires qui auraient besoin de fonds pour la mise sur pied de projets de création d'emplois. Je pense que des initiatives semblables doivent être imitées. C'est avec plaisir que de façon peut-être modeste, j'ai été amené à collaborer à la mise sur pied de cet organisme en encourageant les gens du milieu à cette prise en charge.

Je voudrais profiter de l'occasion qui m'est donnée pour vous faire part de la réaction de certaines personnes concernant l'attitude de l'Opposition qui - je ne parviens pas à m'habituer - me déçoit souvent. Cela me fait penser à une tradition ou à une façon de fonctionner qui existe dans certains pays orientaux. Vous savez que dans certains pays orientaux il existe ce qu'on appelle des pleureuses professionnelles, des personnes qu'on paie spécifiquement pour pleurer en certaines occasions. Parfois, lorsque je regarde les gens de l'Opposition, je me demande s'ils ont fait des voyages en Orient ou s'ils ont lu quelque chose là-dessus, parce que leur attitude me fait beaucoup penser

aux pleureuses professionnelles. J'ai ici une lettre d'un de mes commettants et j'ai obtenu de sa part la permission de la lire. Je vais vous en lire quelques extraits. Il donne son opinion sur ce qui se passe, sur la situation actuelle au Québec. Il dit ceci: "Saint-Gervais, le 18 avril 1983 - c'est assez récent - M. le député de Bellechasse, mon épouse se joint à moi pour vous féliciter pour le travail que vous accomplissez à Québec, malgré les embûches de la crise actuelle grossie par vos amis d'en face, mais pas nécessairement mes amis." Après certaines considérations, il dit qu'il suit la politique de très près. C'est là qu'on voit que les citoyens du Québec ne sont pas dupes de ce qui se passe à l'Assemblée, même si on ne s'en rend peut-être pas toujours compte ici. Il dit ceci: "Quant à la commission parlementaire en cours sur le saccage de la Baie-James, quoi qu'il soit arrivé dans ce temps-là, nous, on s'en fout et on s'en contrefout." Je pense qu'un témoignage comme celui-là est assez indicateur de la façon dont les gens perçoivent le travail des parlementaires ici. Et il ajoute dans sa lettre: "Apprenez aux rouges à vivre dans le présent et à préparer l'avenir au lieu de remuer un passé qu'ils ont sali, eux et leur parti. Tous ceux qui vous critiquent sont faciles à boucher n'importe quand. Pour faire des reproches, il faut être sans reproche, et si le passé est garant de l'avenir, leur avenir n'est pas trop prometteur." Ce citoyen s'appelle Henri-Louis Labonté et c'est l'un de mes commettants.

Il y a également d'autres personnes qui se rendent compte de la situation - ce sont peut-être des personnes plus connues - et qui nous disent un peu ce qu'elles en pensent. J'ai ici dans un éditorial du Soleil du mercredi 18 mai 1983, signé par Jacques Dumais, un aperçu de l'opinion qu'on peut avoir de l'équipe de l'Opposition. Permettez-moi de le citer, parce que je pense que cela reflète bien la situation actuelle et la réalité qu'on vit. Il dit ceci: "Dans le moment, les libéraux n'ont la faveur populaire que dans la mesure où l'on est contre le gouvernement Lévesque." Donc, les gens ne sont pas pour eux nécessairement parce qu'ils ne sont pas pour le gouvernement actuel. "Comme programme politique, c'est plutôt dérisoire dans l'optique d'un scrutin général." Et il ajoute: "À observer et à écouter la deputation libérale à Québec, on se demande où se situe le fil conducteur de pareille tour de Babel." (17 h 40)

Je ne pensais pas qu'un journaliste pouvait si bien se rendre compte de ce qu'on perçoit ici à l'Assemblée nationale. Il dit ceci: "Certains s'affichent un peu moins nationalistes et étatistes que le gouvernement qu'ils abhorrent. D'autres se rangent carrément derrière les inconditionnels du fédéralisme unitaire à la Trudeau et de l'entrepreneurship privé à la Reagan." Il y a toutes sortes de gens dans l'Opposition - je n'aime pas utiliser le mot, mais vous comprendrez ce que je veux dire - de ramassis de toutes sortes de tendances. Ce sera drôle de voir cela partir en campagne à la chefferie. Cela ne veut pas dire que les gens d'en face sont des personnes qui ne sont pas, à l'occasion, sympathiques, loin de là. Ce n'est pas ce que je veux dire. Sauf que lorsqu'ils veulent nous faire croire qu'avec eux on aurait la réponse à tous les maux, à tous les problèmes, il ne faut pas prendre non plus la population du Québec pour des imbéciles. Ces gens peuvent voir le jeu qui se trame. Ils savent bien que si on regarde dans le passé, il y a beaucoup de continuité avec l'équipe libérale par rapport à ce qu'on a connu dans le passé.

De ce temps-ci, on voit souvent les gens de l'Opposition se targuer, penser qu'ils seront au pouvoir dans un avenir rapproché. Ils ont la qualité d'être en hausse dans les sondages entre deux élections, pendant la période électorale. Mais dans deux ans, deux an et demi et peut-être trois ans, les prochaines élections, ils devraient faire preuve de prudence et ne pas tenir cela pour acquis trop vite parce qu'ils pourraient avoir de sérieuses déceptions.

Je termine sur une note positive. On sent depuis quelques semaines, quelques mois à peine, que la situation s'améliore. On s'en rendra compte de plus en plus, à mon avis. Déjà, dans la Presse du mardi 17 mai, on pouvait lire: "Le Québec en tête du peloton pour la relance de l'emploi." Un peu partout dans le paysage, on voit - si la température peut s'améliorer, on le constatera davantage - que les gens ont réappris à sourire. On voit que l'optimisme renaît. Après avoir traversé une période où on a été écrasé par des taux d'intérêt absolument épouvantables, l'économie reprendra du poil de la bête et on peut anticiper pour les prochains mois un avenir meilleur.

Je suis heureux du budget qui a été annoncé le 10 mai dernier. Tout ce qu'on peut souhaiter, c'est que les initiatives qui ont été prises à cette occasion par le ministre des Finances aient la portée qu'on prévoit. Tout ce qu'on peut souhaiter également, c'est qu'on soit en mesure, dans le prochain discours sur le budget du ministre des Finances l'an prochain, d'aller plus loin encore et, à titre d'exemple, de réussir l'objectif qu'on s'est fixé de diminuer la taxe sur l'essence. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Papineau.

M. Mark Assad

M. Assad: Je me demande si le député de Bellechasse pourrait déposer son courrier du coeur sur la table.

Le ministre des Finances a présenté un budget qui a pour but de stimuler l'entreprise, mais il était plutôt axé sur l'entreprise privée. Les moyens annoncés sont minimes quand on regarde l'ensemble de notre économie et, évidemment, les résultats ne sont pas plus prometteurs. Les contraintes budgétaires sont énormes, mais, forcément, les marges de manoeuvre sont très minces, même avec les coupures qu'on a connues depuis quelques mois.

Avant la présentation du budget, on espérait que le taux de la taxe sur l'essence serait réduit au moins en partie. Dans la région de l'Outaouais en particulier, le problème de la taxe sur l'essence est doublement néfaste. Notre proximité avec l'Ontario, surtout avec la ville d'Ottawa, nous place dans une situation d'infériorité. La situation est pourtant simple. À cause de notre situation géographique, une simple modification pour créer une zone d'escompte unique pourrait non seulement soulager et aider les garagistes, qui sont une centaine, mais aussi les commerçants qui s'efforcent depuis quelque temps de promouvoir l'achat chez nous avec la Société d'aménagement de l'Outaouais.

Le retour à l'entreprise privée est un véritable virage idéologique. On a le virage technologique, mais, maintenant, c'est un virage idéologique. Malheureusement, les moyens sont faibles. Est-ce qu'on manque d'idées? Pourtant, c'est plutôt un manque de souffle. Dans cette Chambre, cet après-midi - ça ne fait pas tellement longtemps - le député de Trois-Rivières nous a dit que le rôle de l'Opposition - il fera partie de l'Opposition, ce ne sera peut-être pas long -c'est surtout de faire des suggestions au ministre.

Une voix: C'est une question de temps.

M. Assad: Il y a toujours cela, il ne sera pas toujours ici. Pourtant, nous ferons des suggestions, en voici. Dans le monde des affaires, des idées ont déjà été lancées, des idées fort intéressantes. Par exemple, je voudrais parler d'une idée qui a cours aujourd'hui et qui pourrait avoir des ramifications énormes pour notre économie. Cette nouvelle idée a été lancée surtout aux États-Unis. J'ai reçu, par l'entremise du consulat américain, des documents qui proviennent du Comité du Sénat sur les finances. Qu'on pense seulement à tous les programmes qui existent au niveau de la province, aux relances de toutes sortes, OSE, PECEC, il y en a au-delà de 350. Dans le monde des affaires, une nouvelle idée a fait surface. Mais le gouvernement, qui cherche de nouvelles idées, n'y a même pas fait allusion depuis qu'il est au pouvoir. Pourtant, ces idées ont fait surface.

Je vais vous donner un exemple. Je prends le conseil du député de Trois-Rivières, nous allons faire une suggestion qui, vous en jugerez par vous-même, pourrait être extrêmement importante pour l'avenir du Québec. Cela s'appelle l'aide à l'accès à la propriété des employés. Certaines usines ferment leurs portes parce qu'elles sont devenues déficitaires et, malheureusement, elles sont vouées à la faillite. D'autres cessent de fonctionner simplement parce qu'elles ne correspondent pas à la stratégie de profit maximal d'une compagnie à succursales multiples. Les gens sont victimes d'une réorganisation. Ce n'est pas une question de faillite, c'est une question de réorganisation qui arrive souvent avec les grosses compagnies multinationales.

Dans ce dernier cas, il sera possible de garder des emplois en transférant la propriété de l'affaire aux travailleurs. Remarquez...

Une voix: Tricofil.

M. Assad: Non, malheureusement Tricofil n'entre pas dans ce genre d'expérience. Tricofil a manqué la cible complètement, nous le verrons. Aux États-Unis le Congrès a adopté, en 1975, des mesures fiscales qui visent à encourager une telle initiative, c'est-à-dire l'aide à l'accession à la propriété des employés. Au Canada et au Québec les gouvernements respectifs n'ont pas montré beaucoup d'intérêt pour ce type d'approche comme solution pour garder des emplois. Je démontrerai dans ma présentation comment il serait très facile pour nous de lancer cette initiative, de conserver beaucoup d'emplois et d'en créer d'autres.

Concernant le budget présenté ici par le ministre des Finances, c'est évident qu'à cause d'un manque d'originalité la relance économique sera extrêmement difficile, même si elle est possible. Les solutions proposées sont toujours les mêmes. Les mêmes types de subventions, soit l'entreprise aux travailleurs, et ces mesures qui coûtent cher ont souvent des résultats de courte durée. L'entreprise ferme quand même ses portes. On a vu des exemples, on a vu, jour après jour, dans les journaux que malgré des subventions plusieurs entreprises ont malheureusement du fermer leurs portes. (17 h 50)

Le transfert de propriété des entreprises aux employés peut se faire en tout ou en partie, mais depuis que ce phénomène existe on a pu observer qu'il présente de nombreux avantages. Par exemple, lorsqu'il y a eu un transfert

d'actions à des employés, il y a eu des résultats énormes: accroissement de la productivité; moral des employeurs à la hausse; profits accrus, donc plus de rentrées fiscales pour le gouvernement; maintien et souvent augmentation des emplois; humanisation de rapports entre les employés et les chefs d'équipe, car les employés partageant tous les mêmes intérêts, ils ne se voient pas comme des numéros mais comme des maillons importants de la même chaîne.

Une étude américaine démontre que cette formule fonctionne mieux lorsqu'il s'agit de petites et moyennes entreprises. Il y a même des compagnies qui ont entre 100 à 500 employés qui ont des chiffres d'affaires entre 5 000 000 $ et 50 000 000 $. Donc, la main-d'oeuvre est spécialisée et les relations du travail sont bonnes.

Durant les années soixante-dix, environ 100 entreprises furent rachetées par les employés dans certains États aux États-Unis. Cela a permis de garder entre 70 000 et 100 000 emplois, ce qui n'est pas à négliger. Le transfert de l'entreprise aux employés a souvent eu pour résultat d'empêcher le déclin de plusieurs petites villes dont la survie dépend d'une seule industrie. Je pense que plusieurs villes au Québec correspondent à ce critère. En tant que gouvernement responsable, il est de son devoir d'explorer toutes les avenues possibles pour maintenir l'emploi. Pourquoi, alors, le gouvernement ne propose-t-il pas un régime d'imposition facilitant le financement des transferts de propriété aux employés? Ce serait peut-être une manière plus efficace de maintenir l'emploi, d'aider les usines à maintenir leurs activités et, donc, d'empêcher les fermetures par une réorganisation des entreprises.

J'ai ici plusieurs articles fort intéressants qui parlent de centaines d'entreprises des États-Unis qui ont été sauvées par cette aide pour faciliter l'accession à la propriété par les employés. Voici essentiellement la façon dont cela fonctionne. Dans plusieurs villes des États-Unis, à cause de la réorganisation d'une entreprise, des compagnies multinationales ont décidé qu'en fermant une usine et en transférant leurs activités ailleurs, elles maximiseraient leurs profits. Malheureusement, les employés de ces compagnies, à cause de cette réorganisation, perdent leur emploi quand l'usine ferme. Souvent, la majorité des employés ne peut pas trouver d'emploi dans d'autres usines parce que c'est trop éloigné de leur demeure.

Le Sénat américain a trouvé un moyen. Prenons une ville typique du Québec. Prenons une usine qui fermerait à cause d'une réorganisation. Nous pourrions lancer un programme comme il en existe aux États-Unis. C'est très facile d'adapter cette méthode qui a été un grand succès là-bas: d'aider les employés, avec l'aide des institutions financières, à se porter acquéreur des actions de cette compagnie pour lui permettre de continuer ses activités. Non seulement cela va-t-il sauver des emplois dans ce secteur, mais des études faites aux États-Unis ont prouvé sans exception - c'est cela que j'ai trouvé extraordinaire dans tous ces articles et dans les témoignages du comité des finances du Sénat - que cela a été un succès extraordinaire. Toutes les compagnies qui, pour des raisons autres que financières, à cause de réorganisation, à cause d'un manque de productivité, ou que les employeurs avec l'aide du gouvernement -je ne parle pas de l'aide qu'on donne actuellement par tous les programmes - avec une aide assez substantielle... D'ailleurs, pourquoi pas? S'ils sont en chômage ou s'ils sont obligés, après un bout de temps, de recevoir des prestations d'aide sociale, cela nous coûte plus cher. Mais, dans ce système où le gouvernement aide les propriétaires d'usine, il a démontré... Remarquez bien que, sans exception, dans des centaines d'endroits aux États-Unis, où le moral était à la hausse, la productivité a augmenté, en moyenne, de 50%. Il y a eu des profits accrus. C'est un témoignage extraordinaire. On pourrait dire que, d'une façon, c'est de répartir les bénéfices. En d'autres mots, c'est un genre de capitalisme pour toute la population. Il n'y a pas de doute dans mon esprit, M. le Président, que c'est la voie de l'avenir dans le domaine de l'économie.

Depuis l'avènement de la démocratie, cela a toujours été, notre préoccupation primordiale, à savoir de quelle façon nous allons distribuer la richesse. Je vais vous donner un exemple. En 1972, une étude a été faite aux États-Unis - je pense qu'on peut parler pour l'Amérique du Nord - à savoir que 6% de la population possédait 72% de tous les actifs. Pourtant, en Amérique du Nord, nous sommes les êtres les plus privilégiés de la terre. Pourtant, on voit les écarts qui existent. Ici, non seulement nous avons les ressources, le "know-how", comme on dit, la technologie, mais il est possible, avec cette nouvelle méthode qui existe à l'heure actuelle, que tous les gens puissent bénéficier d'une relance économique qui va durer.

Même des compagnies comme General Motors, qui produisait des pièces dans certaines villes des États-Unis, parce qu'elle voulait réorganiser son usine, avec l'aide des employés, des institutions financières, des organismes des milieux, du gouvernement central des États-Unis, ont aidé des travailleurs à devenir propriétaires de l'usine et ils ont continué à fonctionner. Qu'est-ce qu'on a vu? Sans exception, c'est cela que je trouve extraordinaire, des profits accrus, et la productivité a monté de façon parfaite.

Évidemment, jusqu'à maintenant, j'ai lu des cinquantaines de pages sur le comité des finances du Sénat, qui démontrent évidemment que, dans un pays capitaliste, tel qu'on connaît les États-Unis...

Le Vice-Président (M. Rancourt): Il est 18 heures. Est-ce que vous demandez l'ajournement du débat?

M. Assad: Oui. Est-ce que je pourrais continuer à 20 heures, M. le Président? J'aurais d'autres exemples à donner.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Vous demandez la suspension du débat?

M. Assad: La suspension, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Est-ce que cette motion de suspension est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Rancourt):

Adopté.

M. Boucher: M. le Président, je demande la suspension de nos travaux jusqu'à 20 heures.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Est-ce que cette motion est adoptée? Donc, nos travaux sont suspendus jusqu'à 20 heures.

(Suspension de la séance à 17 h 59)

(Reprise de la séance à 20 h 07)

Le Vice-Président (M. Rancourt): À l'ordre, s'il vous plaît! Veuillez prendre place. M. le député de Papineau, vous aviez la parole. Il vous reste environ quatorze minutes sur la reprise du débat sur la motion de M. Parizeau qui propose que l'Assemblée approuve la politique budgétaire du gouvernement et sur la motion de censure du député de Vaudreuil-Soulanges. M. le député de Papineau.

M. Assad: Merci, M. le Président. Pour continuer ce que j'avais commencé vers 17 h 45, dans le domaine de l'aide que je propose au gouvernement de mettre sur pied - l'aide aux employés pour acheter des entreprises - je voulais vous donner des exemples. Avant de donner des exemples de compagnies qui ont eu un grand succès dans ce domaine où les employés sont devenus propriétaires et ont fait un succès de l'entreprise, au Canada, il faut savoir qu'à l'heure actuelle il y a moins d'un travailleur sur cinq qui est dans le domaine de la manufacture. Dans tous les pays industrialisés du monde, le ratio est plus élevé, c'est-à-dire qu'ils ont 1,4 ou 1,3 travailleurs sur cinq dans le domaine manufacturier. Cela démontre pourquoi nous ici, à cause de facteurs de non-productivité et à cause du fait que les compagnies multinationales ont leurs usines dans d'autres pays où elles ont un rendement beaucoup plus efficace, dans d'autres parties du monde, on s'est retrouvé avec un domaine manufacturier de plus en plus faible. Donc, surtout dans ce domaine, nous avons des exemples classiques d'industries qui ferment pour des raisons qu'on ne peut pas énumérer ici ce soir. On pourrait avoir un programme gouvernemental, créer un trust - si je peux employer le terme - où les actions acquises par les travailleurs pourraient être gardées en fiducie. Mais il est essentiel que le gouvernement vienne en aide initialement aux travailleurs pour qu'ils deviennent propriétaires de l'entreprise.

Comme exemple, la compagnie Asbestos dans l'État du Vermont - pourtant, c'est juste à côté de chez nous, le Québec - avait 200 employés et, en 1976, si je me rappelle bien, la compagnie a décidé que ses activités dans l'État du Vermont n'étaient pas aussi profitables qu'elle le désirait. Donc, la compagnie avait annoncé à ses employés qu'elle avait l'intention de cesser toutes les activités de sa mine dans l'État du Vermont en dedans de douze mois. Évidemment, c'est un endroit où c'était le seul employeur et grâce à un individu qui avait beaucoup d'initiative, les gens ont réussi à convaincre leur représentant au Sénat d'obtenir l'aide du gouvernement central. Le programme aux Etats-Unis s'appelle le ESOP, Employer Share Owner's Plan.

Donc, ils ont réussi à avoir de l'aide avec un plan qui existe à l'heure actuelle aux États-Unis et qui pourrait s'adapter ici facilement. Ils ont acheté l'entreprise. Dans l'espace de seulement deux ans, la productivité a doublé. Dans le domaine de l'asbeste, la conjoncture mondiale était très favorable. Pour chaque action achetée par un travailleur, dans l'espace de 36 mois, les actions de 50 $ étaient rendues à 3500 $, une augmentation incroyable. Cela vous donne une idée. Lorsqu'il y a une volonté collective et, surtout, quand vous avez un moral à la hausse, c'est évident qu'il y a des choses qui peuvent être très bénéfiques.

J'ai ici un autre exemple, celui de la General Motors aux États-Unis - je ne me rappelle pas exactement du nom de la ville -dans l'État du New Jersey. Il y avait une usine qui engageait au-delà de 700 employés. La compagnie a décidé de mettre fin à ses activités à cet endroit; elle trouvait que ce n'était pas assez rentable. Dans ce cas-ci, cela a été un phénomène extraordinaire aux États-Unis: les employés, avec l'aide du gouvernement central des États-Unis, ont pu

bénéficier du plan de ISOP et, effectivement, ils sont devenus propriétaires de l'usine. Cela a été un succès extraordinaire.

Je dis au ministre des Finances que c'est possible, ici au Québec, avec l'aide du gouvernement fédéral, de mettre sur pied un plan à chaque endroit où il y a une usine en difficulté, où une entreprise décide pour des raisons dont on pourrait examiner les problèmes... On peut trouver des exemples, je suis certain que c'est la même chose au Québec: il y a des usines qui veulent fermer pour plusieurs raisons. On pourrait arriver avec un plan pour aider ces industries et offrir aux employés la possibilité de devenir détenteurs des actions. Je donne en grand détail les possibilités qu'on a à notre disposition.

Après avoir lu le rapport du Senate Committee on Finance, je me rends compte qu'aux États-Unis - on sait bien que c'est le pays capitaliste par excellence - le gouvernement pense que, pour la paix sociale et pour qu'on distribue les avantages parmi la population... Comme je l'ai mentionné, quand on voit que 6% de la population possède 70% des actifs, on constate que c'est un problème persistant. Et avec la technologie, avec les connaissances qu'on a, c'est une question de modalités que nous pouvons étudier pour donner aux travailleurs la possibilité de devenir propriétaires de n'importe quelle sorte d'industrie. Les preuves sont là, les études ont prouvé que c'est la seule méthode que nous connaissons dans le moment qui pourrait rendre nos industries productives.

Si on regarde la gamme d'industries qui ont fermé depuis trois ans, on remarque évidemment que, dans 75% des cas, c'est soit parce qu'il y a eu une mauvaise gestion de l'entreprise et graduellement baisse de la production. On a constaté que, lorsque les travailleurs sont les propriétaires, on élimine tous ces problèmes.

Je prétends que notre avenir est dans cette voie, que notre relance économique est définitivement dans cette voie; et l'avenir de nos enfants, de nos jeunes, avec cette possibilité de mettre des emplois à la disposition des travailleurs "at large", peut nous garantir la sécurité, la prospérité et surtout la paix sociale. Quand on regarde les coûts sociaux à long terme du chômage, on se rend compte que toute possibilité de maintenir une usine ou une entreprise sur un pied de production est préférable au chômage élevé que nous avons actuellement au Canada.

Quand on regarde tous les programmes qui existent actuellement, la plupart de ces programmes sont démodés. Quand on pense qu'il existe au-delà de 350 programmes, il y aurait certainement moyen de réviser leur efficacité, d'avoir une évaluation complète de tous ces programmes, de voir combien sont inutiles les centaines de millions de dollars que nous avons investis dans différents programmes pour créer des emplois, car, malheureusement, malgré nos efforts, malgré des investissements de millions de dollars, nous n'avons pas réussi à baisser le taux de chômage.

Je suis convaincu qu'un programme pourrait être mis sur pied, avec l'aide du ministère de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme ainsi qu'une équipe de personnes qui irait voir au Sud de quelle façon on est arrivé à mettre en vigueur ce plan qui existe actuellement.

Un sénateur a produit un rapport racontant comment il avait réussi à conserver 700 emplois dans une usine de son État; il faisait remarquer au comité des finances du Sénat qu'à travers les États-Unis et malgré que ce soit peu connu, depuis 1976 jusqu'à présent au-delà de 100 000 emplois ont été sauvés, des emplois qui auraient été définitivement perdus. Parmi ces compagnies, il y en avait même qui avaient l'intention de s'installer ailleurs qu'aux États-Unis. (20 h 20)

C'est évident que dans l'avenir nous allons entendre parler de plus en plus de cette méthode. Je crois que pour nous, avec "the incentives", si je peux employer ce terme, ce serait possible. Je voudrais lancer l'idée. Prenons une ville de 9000 de population, comme j'en ai dans mon comté, ma ville natale de Buckingham où on a justement une compagnie en difficulté. J'ai vu la liste des industries qui ont été sauvées aux États-Unis, j'ai téléphoné pour me renseigner et j'ai vu que c'était possible dans ce cas. Les 60 employés de cette usine pourraient, ensemble, investir chaque mois 50 $ de leur paie dans un fonds. Ils auront besoin de l'aide d'une institution financière, évidemment. Le programme que je propose est que l'investissement fait par les gens, que ce soit 50 $ par mois ou moins, pourrait être déductible de leur impôt. Donc, les gens seraient encore plus encouragés à investir si ces montants étaient déductibles de leur impôt; ce serait avantageux pour eux. Je suis convaincu que cette usine pourrait être sauvée et les 60 emplois aussi.

Je ne peux pas parler des modalités en détail, mais je sais que c'est possible. Quand on regarde les possibilités qui s'offrent à nous et le problème du chômage, on n'a pas le choix. Notre avenir, à mon avis, est dans cette voie. J'espère que le ministre des Finances ou des fonctionnaires de son ministère voudront se pencher là-dessus. Je pourrais leur fournir les renseignements que j'ai recueillis jusqu'à présent; ça vaudrait la peine d'étudier ce programme afin d'essayer de l'adapter à nos besoins. Merci.

Des voix: Bravo! Bravo!

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député d'Arthabaska.

M. Jacques Baril

M. Baril (Arthabaska): M. le Président, nous voilà rendus, encore cette année, à cette fameuse période où tout le monde tente de découvrir les mystères que le discours sur le budget peut livrer. Chaque année, un cortège de spéculateurs font leurs prévisions avant le discours sur le budget. Les taxes vont augmenter. Les impôts vont augmenter. Le déficit va augmenter. Le chômage, c'est évident qu'il va augmenter aussi. Le gouvernement ne fera rien parce qu'il n'est pas capable. Cela a un tel effet que, lorsque le budget est livré, le monde -je dis bien le monde - ne sait plus trop quoi penser, ne sait plus où est la vérité ou ce qui a été annoncé. Cela fait déjà le septième printemps que je suis ici, à cette Assemblée, et, chaque année, c'est la même chose. Le milieu des affaires émet ses opinions. Les syndicats émettent leurs opinions. L'Opposition émet ses opinions et ses commentaires. Évidemment, les ministériels émettent également leurs opinions et leurs commentaires. Souvent, je me mets dans la peau du citoyen, assis devant sa télévision, qui regarde nos fameux débats. Souvent, je me dis: Qu'est-ce qui peut bien mijoter dans la tête de ce citoyen? À cause de la procédure de notre Assemblée, une personne, de ce côté-ci, se lève et, à 99,9%, elle est pour la mesure gouvernementale. De l'autre côté, une personne se lève et elle est, évidemment, contre. Souvent, elle aurait une formule magique, beaucoup meilleure que celle qui est proposée par le gouvernement. Le citoyen qui nous regarde doit certainement se dire: Qui a raison ou qui peut être le meilleur?

Cette année, il y a quand même une chose spéciale. Même le ministre fédéral, M. Lalonde, y est allé de ses prévisions en invitant le ministre des Finances du Québec à l'imiter dans son budget. Voyons très brièvement ce que cela aurait donné si le ministre québécois des Finances avait imité le ministre des Finances du Canada. Cela aurait donné à peu près ceci: le même budget que M. Parizeau a annoncé ou a livré, avec une augmentation de taxes de 6 000 000 000 $ pour les contribuables, les entreprises et une augmentation du déficit de 25%. Au lieu d'avoir un déficit de 3 100 000 000 $, il y aurait eu un déficit d'environ 11 000 000 000 $. C'est ce que cela aurait donné si le ministre des Finances du Québec avait écouté son vis-à-vis, le ministre des Finances du fédéral.

Tout à l'heure, le député qui me précédait donnait une suggestion qui, je pense, est bien, est fondamentale, à savoir que les travailleurs devraient avoir du capital-actions dans leur entreprise. D'ailleurs, je ne sais pas si c'est la même étude que celle qu'il mentionnait dont j'ai pris connaissance dernièrement, mais aux États-Unis, en effet, les entreprises qui se sont le mieux tirées de la crise actuelle, ce sont celles où les travailleurs participaient à l'administration par le biais de capital-actions.

Déjà, au Québec, je pense que nous avons quand même un bon pas de franchi dans ce sens, depuis que le programme expérimental de création d'emplois communautaires existe au Québec. Je pense que plusieurs citoyens - je suis certain que le député de Papineau est au courant de cela également - savent que les entreprises qui veulent faire participer leurs travailleurs, leurs travailleuses à la relance de l'entreprise ou au maintien de leur entreprise, ce programme existe. Souvent, le gouvernement achète pour l'employé, pour les travailleurs et les travailleuses, la part de capital-actions que lui ne peut se payer à cause de sa situation financière. Ce programme, évidemment, existe depuis déjà quelques années, mais il n'y a pas que le gouvernement qui a un effort à fournir. La mentalité des employeurs se doit de changer; également, la mentalité des syndicats se doit de changer. Par rapport à ce programme, nous avons beaucoup de collaboration de la part de la CSD mais, chez les autres centrales, actuellement, on se laisse un peu traîner la patte et on hésite à entrer dans cette solution qui, pour moi, est celle de l'avenir.

Je ne voudrais pas laisser passer inaperçu le fait que la FTQ et la CSN s'impliquent dans le programme Corvée-habitation. C'est une autre chose. Ce n'est pas au niveau de l'administration d'une entreprise comme telle, mais c'est évident que l'avenir est à l'entreprise où le travailleur aura une plus grande participation dans le capital-actions. Il reste un pas à franchir au niveau de notre gouvernement. J'ai déjà demandé au ministre de donner une certaine garantie en regard des investissements de ces employés, ceux qui prennent ou qui obtiennent du capital-actions, pour qu'on leur accorde un certain avantage au niveau des risques ou des pertes qui peuvent être occasionnées par une circonstance future qui peut survenir à ces entreprises et également qu'on leur accorde certains avantages fiscaux en regard de ce capital-actions, mais, n'étant pas un spécialiste de la fiscalité, je m'arrêterai ici. J'avais demandé à quelques reprises au ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme, qui arrive, et également au ministre des Finances d'essayer de voir ce qu'on pourrait faire pour encourager davantage les travailleurs à prendre du capital-actions dans leur entreprise.

De même, si le gouvernement du Québec s'en était tenu aux recommandations du ministre canadien des Finances, cela aurait donné qu'après dix jours de l'annonce du budget, nous aurions mis fin au programme Corvée-habitation. Nous aurions mis fin au programme d'accès à la propriété, au programme Loginove et à tous les programmes qui concernent la construction, parce que, en effet, dans son discours sur le budget, M. Lalonde, le ministre canadien des Finances, avait annoncé un investissement supplémentaire aux 3000 $ qu'on accordait au contribuable qui voulait bien se construire une maison. Comme tout le monde le sait, malheureusement, après dix jours, on a mis fin brusquement à ce programme, à la grande consternation de tous les citoyens canadiens. Malgré tout, ceux-ci me surprennent; il n'y a pas eu tellement de contestation apparente à ce geste que le gouvernement canadien a posé. Cela me surprend et me déçoit un peu. (20 h 30)

Si c'était le gouvernement du Québec qui avait fait un tel geste, il y aurait déjà des défilés ici en avant de ce parlement depuis déjà de nombreux jours pour manifester contre l'action du gouvernement. De toute façon, vous savez que je ne suis pas ici pour commenter le budget du gouvernement canadien, parce que, de toute manière, les élus fédéraux disent tellement de choses et promettent tellement de choses que, pour ce qu'ils réalisent, de moins en moins de personnes portent attention à ce qu'ils annoncent.

Je reviendrai aux opinions qui ont été émises par chacun. D'abord, le milieu des affaires a accueilli généralement bien le discours sur le budget de M. Parizeau. Les syndicats, évidemment, n'ont pas été satisfaits, parce que, lorsqu'on parle de relance de l'économie par l'aide aux entreprises de toutes sortes, certains ne font pas encore le rapprochement avec la relance de l'emploi, mais j'espère que cela viendra. Les mentalités changeront; avec les programmes qui existent actuellement, les syndicats, les travailleurs et les travailleuses comprendront davantage qu'il faut également prendre, en tant que travailleurs et travailleuses, des risques dans notre économie si on veut réussir. Il y a également le sommet populaire et le comité régional de la grande marche, qui y est allé également de ses commentaires en disant ceci, et je cite un article qui a paru dans le Devoir du 12 mai: "M. Parizeau semble plutôt décidé à relancer la spéculation boursière sur les actions des PME au lieu d'offrir aux chômeurs des garanties qu'ils pourront bientôt retourner au travail, et ce ne sont pas les projets de pavage de routes rurales qui arrangeront les choses."

Je reviendrai un peu plus tard dans mon discours pour vous expliquer quand même les implications qui existent quant au pavage et au besoin de rechargement de nos routes dans le secteur rural. Évidemment, pour l'Opposition, il n'y a rien là. Ce n'est pas surprenant; il n'y a rien pour relancer l'économie, dit-elle. C'est un discours vide de sens, c'est un discours qui n'a rien de neuf, c'est du réchauffé! Tous les mots y passent, tous les mots y sont.

Le journal Le Nouveliste de Trois-Rivières du mercredi 11 mai est l'un des rares journaux au Québec qui a bien voulu titrer: "Budget prudent axé sur la relance économique" - c'est le budget du Québec -et, en bas, on voit: "Le budget ontarien. Surcharge fiscale de 500 000 000 $". Encore une fois, c'est l'un des rares journaux du Québec qui a publié en première page une comparaison entre les deux budgets. Budget de l'Ontario d'abord, c'est tout un événement pour l'Ontario: "Suspension pour une période de 90 jours de la taxe de vente de 7% sur les meubles et les appareils ménagers." Quatre-vingt-dix jours, cela fait trois mois. Quant à nous, cela fait au moins quatre ans certainement que la taxe est enlevée sur tous ces appareils et nous ne l'avons pas rétablie. Quant au reste, ce sont des augmentations: "Augmentation du prix du paquet de 20 cigarettes... Application de la taxe de vente au détail à tous les produits issus de la transformation du tabac. Augmentation de 0,30 $ du prix de la caisse de 24 petites bières... Augmentation du prix des spiritueux de 0,20 $ et du prix des bouteilles de vin de 0,10 $. Majoration des primes de l'Assurance-santé de l'Ontario -équivalent de l'assurance-maladie au Québec... Augmentation temporaire de 5% de l'impôt sur le revenu des particuliers, une moyenne, 75 $ par année..." Comme vous pouvez le voir, dans l'ensemble, ce sont toutes des augmentations que le gouvernement de l'Ontario a imposées en plus à ses contribuables. Encore une fois, je ne veux pas discuter des raisons de l'augmentation. C'est évident, c'est certain, je suis sûr que le gouvernement de l'Ontario n'a pas fait exprès pour augmenter les taxes de ses contribuables, c'est parce qu'il était obligé de le faire, comme le Québec a été obligé de le faire dans le passé.

Au Québec, pour cette année, il est évident que la taxe de vente n'a pas été abaissée, mais au moins elle n'a pas été augmentée non plus; elle a été maintenue. Qu'est-ce qui a été annoncé pour stimuler les investissements privés et essayer de relancer l'économie? D'abord, il y a une injection de 40 000 000 $ et plus pour l'accélération de différents projets importants. Il y a l'injection de 50 000 000 $ en agriculture durant les trois prochaines années pour développer davantage la culture des céréales.

Si j'avais plus de temps, je pourrais passer toute la demi-heure qui m'est allouée seulement pour vous dire les implications économiques, les implications sur la création d'emplois contenues dans ce seul programme qui a été annoncé par le gouvernement pour relancer l'économie au Québec. Mais ne disposant pas d'assez de temps pour vous énumérer tous les avantages économiques de ce programme, je vous dirai seulement que les implications financières au niveau du Québec, si on tient compte de l'effort global des agriculteurs du Québec, c'est toutefois à 400 000 000 $, non pas à 50 000 000 $ que s'élèveront, au cours des trois prochaines années, les investissements dans l'amélioration des sols, l'accroissement de la capacité d'entreposage, l'achat d'équipements, la banque de terres, la recherche et la vulgarisation. L'impact pour l'emploi de ce vaste programme est évalué à 12 000 hommes par année, soit 4000 emplois par année qui généreront des salaires de 290 000 000 $.

Globalement, l'économie québécoise profitera d'une valeur supplémentaire de 500 000 000 $. Comme vous pouvez voir, si j'avais le temps d'énumérer toutes les implications de ce programme... Voilà ce que le gouvernement a fait dans un domaine précis pour relancer l'économie et essayer d'être de plus en plus autosuffisant en céréales. Je continuerai à parler de ce qui a été annoncé par le ministre des Finances du Québec pour stimuler les investissements privés. Il y a une injection de 40 000 000 $ et plus, comme je l'ai dit, pour accéler des projets importants. Il y a le programme Corvée-habitation qui a été annoncé dans les jours qui ont suivi; le taux d'intérêt a été diminué à 9,5% pour trois ans. Il y a une subvention directe de 2000 $ et 1000 $ en plus si la municipalité participe. Les REEL sont acceptés jusqu'à 10 000 $ et on a également annoncé que la construction de coopératives de logements, avec le recyclage des bâtisses, serait cette fois-ci incluse; on pourrait bénéficier du programme Corvée-habitation à un taux quand même de 9,5% par année pour trois ans.

Il y a une politique d'électricité pour les grandes entreprises. D'ici 1990, leur tarif sera réduit d'environ 50%. Un soutien au virage technologique: on installera 150 ordinateurs dans les écoles, création de centres de conception et de fabrication informatisés, subvention égale à 10% de la masse salariale consacrée à la recherche et au développement.

Pour la petite et moyenne entreprise, je pense que c'est très important parce que, souvent, plusieurs industriels sont venus me voir et, vous savez, ici au Québec, on est un peu un peuple de patenteux et plusieurs entreprises, que ce soit familiales ou autres, ont créé toutes sortes de machineries ou d'équipements, mais ça leur coûte très cher pour perfectionner ces entreprises. Je suis heureux de voir qu'ils pourront quand même bénéficier de 10% de la masse salariale, somme qui leur sera remise par le gouvernement pour être consacrée à la recherche.

Le gouvernement du Québec met également l'accent sur le financement particulier aux exportations. Au niveau des transports, comme je le disais tout à l'heure, 50 000 000 $ ont été ajoutés et il y a l'achat de quatre avions CL-215 pour répondre à une partie du budget du ministre des Finances pour créer des emplois à Canadair à Montréal. Je dois aller rapidement. Il y a des investissements au niveau de l'épuration des eaux, des programmes d'aide à l'entreprise qui sont quand même avantageux. Encore une fois, je le répète, quand on aide l'entreprise, ce n'est pas uniquement l'entreprise, c'est également le travailleur parce que, souvent, on maintient un emploi ou on en crée un nouveau. (20 h 40)

Pour la création d'emplois, 235 000 000 $ de crédits nouveaux profiteront, selon les chiffres, à au moins 60 000 personnes au Québec et cela, dans le cadre des programmes Chantier-Québec, création d'emplois communautaires et autres.

Encore une fois, le temps me presse parce que je pourrais quand même énumérer plusieurs avantages dont ont bénéficié plusieurs entreprises de mon comté pour différents programmes, que ce soit Chantier-Québec, les bons d'emplois ou autres. J'ai fait le total tout à l'heure, avant de venir ici, et juste pour ces quelques programmes dont je viens de vous parler 250 nouveaux emplois ont été crées dans le comté d'Arthabaska. Je ne parle pas des programmes de maintien d'emplois dans les entreprises de mon comté.

Je passerai tout de suite au programme de 50 000 000 $ d'investissements dans les chemins municipaux. Les chemins municipaux, c'est un dossier dont j'entendais parler quand j'étais tout petit gars - c'est vrai que je ne suis pas vieux encore. J'entendais parler de la voirie rurale, des ponceaux et des bouts de route. Provenant d'une famille de bonne souche d'anciens bleus, on entendait parler couramment de ces sujets. En passant, le Parti québécois a été formé des meilleurs bleus et des meilleurs libéraux qui ont compris. C'est pour cela qu'on se retrouve aujourd'hui au pouvoir. C'est évident qu'il y a des hauts et des bas, mais on se maintient quand même.

Je ne voudrais pas trop lancer la pierre dans le champ du voisin, parce que cela susciterait plusieurs remous. Il y en a encore qui ont une certaine difficulté à accepter le fait d'être libéral mais, d'un autre côté, cela

leur coûte de traverser la Chambre, de venir de notre côté pour nous appuyer. Ils le feront un jour, il faut être patient.

Comme je le disais, dans le temps de Duplessis, on parlait beaucoup de rangs et de bouts de chemin. Les libéraux sont venus au pouvoir, les bleus ont passé, sont revenus, mais il n'y a pas beaucoup de choses qui ont changé. Du temps des libéraux que j'ai connus le plus, après les années soixante et soixante-dix, entre autres, voilà ce qu'on faisait des budgets qui étaient accordés à la voirie rurale. On payait souvent beaucoup plus en frais d'expropriation, d'arpentage, d'ingénierie, en services professionnels qu'il n'en restait à appliquer concrètement dans la réalisation de chemins.

On faisait également beaucoup plus d'autoroutes sophistiquées à mort. On arrive souvent dans des villes et il me semble que je dois être un peu comme la moyenne des gens mais, parfois, on ne sait pas quelle sortie prendre ou quelle entrée prendre parce qu'il y en a trop. On a fait des trèfles et des coeurs tellement grands et tellement sophistiqués... Oui, je dis bien des coeurs parce qu'on dirait que les ingénieurs ne savaient pas comment arrêter ou comment finir. C'est évident qu'ils étaient payés au pourcentage; plus cela coûtait cher, plus ils en recevaient. De toute façon, on s'est aperçu que, dans le passé, les sommes dont le ministère des Transports disposait étaient dépensées beaucoup plus à faire des grands travaux routiers qu'aux besoins réels du milieu rural.

Souvent, pour faire une autoroute, on laissait tomber une règle sur une carte géographique et c'est là qu'on traçait la route. Je peux vous donner des exemples: entre autres, la 51, la 55 que je connais très bien également, l'autoroute 30 qui a été faite...

Une voix: La 116.

M. Baril (Arthabaska): La 116, ce n'est pas une autoroute, en passant. L'autoroute 30 a été faite pour desservir un parc industriel qui ne contient pas grand-chose. Avec les années, nous espérons qu'il y en aura mais des millions ont été investis pour construire ce parc en plein champ, sur nos belles terres, avec sept ou huit milles de routes pour desservir à peu près rien. L'autoroute 40 a été commencée par les autres, mais cela a pris tellement de temps pour réunir Québec et Montréal sur la rive nord que le Parti québécois, dans les prochaines années, pourra enfin finir ce qui avait été entrepris par les libéraux.

Je ne vous parlerai pas de l'autoroute 50 et des nombreuses autoroutes qui existent pour aller à Mirabel parce que, encore une fois, quand on veut aller à Mirabel, il faut surveiller attentivement les indications car on ne sait pas trop où on va se retrouver. Il y en a beaucoup et, malgré cela, on entend encore les députés de l'Opposition demander d'autres autoroutes pour aller dans leur coin.

Je vous rappellerai rapidement l'exemple que le ministre des Transports avait donné au député de Richmond lors d'une question avec débat, ici, en Chambre, sur la construction et l'entretien du réseau routier en milieu rural. Je vais le citer rapidement parce que le temps passe. Je cite le ministre des Transports: "On constate que, pour l'année 1972-1973, avec un budget global de 393 000 000 $, 198 000 000 $ allaient à la construction d'autoroutes, soit plus de 50% du budget global alloué à la construction routière. Pour la voirie locale et pour la voirie rurale dont on parle ce matin, une maigre tranche de 48 000 000 $ était allouée sur ce budget de 393 000 000 $."

Pour aller rapidement, il cite toutes les années antérieures du régime libéral. Le budget alloué pour les autoroutes est toujours d'environ 50% du budget global du ministère des Transports. Ce n'est qu'à compter de 1976-1977 qu'on commence à voir un redressement des crédits alloués à la construction de routes et d'autres réseaux routiers. Tout ceci pour vous dire que l'intérêt que les gens avaient avant nous, qu'ils nous reprochent présentement, c'était d'investir beaucoup plus dans les grands réseaux routiers pour avantager les firmes professionnelles bien davantage qu'on pouvait comprendre le problème que les municipalités vivent, que les propriétaires, que les agriculteurs vivent dans les campagnes.

C'est pour cela qu'encore souvent le printemps, même en 1983, il faut le dire, les agriculteurs sont obligés d'attacher leur tracteur aux camions et aux autobus scolaires pour les sortir du rang quand on n'est pas obligé de fermer le rang complètement. Je dirais que c'est à cause d'un laisser-aller - pour ne pas être trop dur envers mes collègues d'en face - de nos prédécesseurs, qui aimaient mieux satisfaire leurs amis qui participaient davantage à la campagne de financement du Parti libéral, que de faire des travaux concrets dans les rangs.

Chaque fois qu'on investissait dans les rangs - je pourrais vous donner des exemples, cela s'est fait chez nous - en milieu rural, on payait l'expropriation et on payait très cher, selon surtout la couleur politique du propriétaire. J'ai vu qu'ils ont réussi un tour de force à Princeville même. Il ont fait une courbe sur une ligne droite pour pouvoir aller chercher la grange, l'étable et la maison de l'agriculteur de l'autre côté, qui était un bon organisateur libéral; ils l'ont exproprié comme il faut pour qu'il puisse se reconstruire à neuf. On a vu cela à Princeville. L'expropriation de ce rang a coûté 320 000 $ et la construction du rang

a coûté 350 000 $. Voilà où allait l'argent sous le régime antérieur.

Je voudrais résumer en vous parlant de l'injection des 50 000 000 $ supplémentaires que le ministre des Finances a accordés pour améliorer nos chemins par l'entremise du service d'entretien de nos municipalités. Les maires ne portent quasiment plus à terre après avoir pris connaissance du budget que nous avons à distribuer. Là-dessus, les députés libéraux sont très satisfaits et heureux d'appeler les maires pour leur dire: Cette année, mon budget a augmenté de trois à quatre fois comparativement à l'an passé. Si vous êtes réélus dans votre comté, vous pourrez dire que c'est grâce au Parti québécois. (20 h 50)

Également, M. le Président, dans le discours sur le budget, le programme PRIME, programme de création d'emplois par les municipalités a été annoncé. Vu que le gouvernement fédéral n'a pas été capable, ou n'a pas voulu accepter les mesures que le gouvernement du Québec voulait imposer et vu que les municipalités, c'est entièrement de juridiction provinciale, à la suite du congrès de l'Union des municipalités du Québec, les municipalités veulent continuer à faire affaires avec le gouvernement du Québec. Le fédéral a passé outre et, actuellement, il agit d'une façon illégale, parce que c'est anticonstitutionnel de faire ce qu'il fait présentement. Je peux vous dire, M. le Président, qu'actuellement, des municipalités ont eu des offres, et je vais me battre à mort contre le versement direct par le gouvernement fédéral aux municipalités de mon comté. Pas parce que je suis contre, mais parce que c'est illégal.

Ce matin, Marcel Adam, un éditorialiste de la Presse, mentionnait que c'est le gouvernement du Québec qui a toujours montré l'exemple de l'illégalité et que c'est pour cela que les travailleurs et les syndicats sont un peu illégaux. Mais il aurait dû ajouter que le gouvernement canadien lui-même, au regard de sa propre constitution, qu'il a signée - ce n'est pas nous autres qui l'avons signée; c'est lui qui l'a signée - agit actuellement d'une façon complètement illégale. Je vais me battre jusqu'au bout pour que mon gouvernement puisse poursuivre, s'il le faut, devant les tribunaux le gouvernement canadien pour qu'il revienne dans le droit chemin et s'entende avec le gouvernement du Québec avant de donner des sommes d'argent à nos municipalités.

Je terminerai là-dessus, parce que je pense que mon temps achève, malheureusement. Je n'avais pas regardé ma montre comme il faut. Je pensais qu'il me restait dix minutes.

Des voix: Consentement.

M. Baril (Arthabaska): Consentement? Je vous remercie beaucoup.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député d'Arthabaska, il vous reste une minute.

M. Baril (Arthabaska): Mais on m'a donné le consentement, M. le Président. Voyez-vous, M. le Président - pour faire une comparaison entre le budget canadien, le budget de l'Ontario et celui du Québec -c'est toujours plus beau dans le champ du voisin. C'est toujours plus beau quand on voit pousser les choux, les carottes et les patates dans le jardin du voisin, quand on voit pousser le trèfle et la luzerne dans le champ du voisin. On se dit: Batêche! Qu'est-ce qu'il fait pour avoir cela? Je me souviens que quand j'étais sur ma ferme, je travaillais, je vivais avec mes animaux. Je les trouvais petits, je ne les trouvais pas gros. Je me disais: Batêche! Il me semble que ceux du voisin ou des autres sont plus gros. De temps à autre, j'allais faire le tour d'autres fermes et quand je revenais chez moi, mon Dieu que j'étais fier, parce que je trouvais les miens beaux.

Ceci pour vous dire que le budget du gouvernement du Québec, dans l'ensemble, n'est pas si mal. Soyons donc assez positifs pour dire au moins, enfin, que le gouvernement du Québec - comme plusieurs l'ont dit d'ailleurs - avec les ressources dont il dispose, est capable de faire des choses, et ce quand il a simplement la moitié des pouvoirs.

M. Picotte: M. le Président...

Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît! M. le député de Maskinongé, sur une question de...

M. Picotte: Je voulais tout simplement vous dire qu'au nom de l'Opposition, comme notre collègue semble comparer le budget à des patates et des carottes, on est prêt à donner notre consentement jusqu'à 21 heures pour qu'il termine son discours.

Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît! M. le député d'Arthabaska, vous devez conclure, selon notre règlement.

M. Baril (Arthabaska): M. le Président, il me semble que quand il a le consentement de cette Chambre, l'orateur peut continuer. De toute façon, que le député de Maskinongé compare le budget à des choux et des carottes, vous savez, l'agriculture est tellement prospère de nos jours que le budget va exactement dans la foulée de l'agriculture.

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît!

M. Baril (Arthabaska): De toute façon, M. le Président, je vais conclure. Ce ne sera pas long. Je vous l'avais dit, j'avais préparé des notes; je pensais en manquer et je m'aperçois que j'en ai préparé pour trois heures.

Quand on regarde la façon dont le gouvernement du Québec a réussi à s'en sortir avec le budget, quand on regarde brièvement l'administration antérieure, on voit que nous avons dû faire face à un déficit olympique extraordinaire, à des déficits des commissions scolaires, à des déficits de la Caisse de retraite des fonctionnaires du Québec, dans les secteurs public et parapublic, et à combien d'autres dettes à l'expropriation, comme je le disais, qui n'étaient pas payées, à combien de sociétés d'État en déficit, une Baie-James décidée beaucoup trop tôt, parce qu'il n'y avait pas eu d'entente avec les Inuits, les autochtones. Et la position du Parti québécois dans le temps a toujours été contre cette façon d'avoir décidé, d'avoir annoncé trop tôt, sans négociations au préalable, des ententes, des accords avec les Inuits. Des subventions discrétionnaires qui ont été accordées. Si on remonte encore beaucoup plus loin, regardons les investissements que seul le Québec a dû faire pour se découvrir et également découvrir le Canada. Pensons aux mines de fer que Duplessis a dû donner pratiquement aux autres parce que le gouvernement canadien ne voulait pas construire nos chemins de fer pour aller exploiter ces mines. Ce sont les compagnies de chemins de fer qui ont dû le faire. Pensons combien les Québécois ont dû payer dans toutes sortes de systèmes.

En conclusion, M. le Président, si dans l'ensemble les Québécois, nous pouvions être un peu plus positifs et unir nos efforts pour être capables d'obtenir tous les pouvoirs que nous avons, nous pourrions contrôler les importations de nos chaussures, contrôler les importations du textile. On fait des investissements dans ces domaines qui ne nous rapportent pas parce qu'on ne contrôle rien. Il y aurait d'autres gens qui comme Reynold's, Pechiney, Kenworth, Autobus Voyageur et une autre compagnie que je ne peux pas nommer qui viendra probablement investir chez nous qui en surprendra plusieurs, mais je ne veux pas vendre la mèche avant. Vous verrez que des hommes et des femmes au Québec sont capables de faire chez nous ce que d'autres ont fait chez eux, se faire un pays, se faire un chez nous, et que nous sommes capables de vivre ensemble avec nous et avec les autres avec nos propres moyens et ne pas vivre aux dépens des autres, mais aux dépens de nous- mêmes. Soyons fiers, tout en étant fiers des Canadiens, comme je suis fier des Américains, mais ayons donc au moins l'honneur d'être Québécois et arrêtons de nous mépriser.

Si on pouvait faire nos efforts, les libéraux québécois et le Parti québécois du Québec, vous seriez les premiers bénéficiaires vous autres aussi parce que enfin vous ne seriez plus sous la tutelle d'Ottawa et vous pourriez décider vous autres mêmes ce qu'on peut faire chez nous, ce qu'on peut investir au Québec et on pourrait profiter ensemble de tous les avantages de cette richesse qui nous est allouée ici au Québec, qui est disponible. Il ne s'agit que de l'exploiter. J'arrête là-dessus parce que si je m'en vais trop loin dans mon envolée, je m'aperçois que de l'autre côté on va se soulever. Merci beaucoup.

Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît! S'il vous plaît! Je voudrais faire remarquer qu'habituellement, sur le discours sur le budget les interventions sont de 30 minutes et je ne veux pas que cela se répète indûment. Il y a eu consentement, bien sûr. Je l'ai accepté comme tel. J'ai été tolérant. Mais que ce soit d'un côté ou de l'autre, en principe, c'est 30 minutes. Mme la députée de Chomedey.

Mme Lise Bacon

Mme Bacon: M. le Président, je n'ose relever toutes les inexactitudes du discours du député d'Arthabaska. Je rappelle quand même qu'au début de son exposé, il nous disait que les députés du côté ministériel sont évidemment essentiellement pour le budget; les députés de l'Opposition sont essentiellement contre le budget. À la fin, il nous dit: Il ne faut pas se mépriser, il faut s'aimer au Québec, il faut être fiers de nous au Québec.

Je rappellerai peut-être au député d'Arthabaska de commencer par prêcher par l'exemple et d'avoir un peu plus de respect pour ses collègues de l'Opposition qui font le même travail, qui n'ont peut-être pas le même salaire que certains députés du côté ministériel, mais qui ont quand même et essentiellement, encore une fois, le désir, par le travail qu'ils font chaque jour, d'améliorer le sort des Québécois et des Québécoises comme on se plaît à le dire de l'autre côté de cette Chambre. (21 heures)

Essentiellement basé sur des prémisses libérales, le discours sur le budget prononcé le 10 mai dernier nous laisse une ambiguïté que seule une prochaine élection pourra trancher. En fait, la population québécoise s'attendait à deux réponses bien précises dans le budget: Serons-nous épargnés d'une

autre augmentation d'impôt sur le revenu et ce budget saura-t-il, oui ou non, paver la voie à l'indépendance du Québec et ce, conformément au programme du Parti québécois depuis bientôt quinze ans?

Le ministre des Finances leur aura sûrement fourni une première réponse concernant l'impôt sur le revenu des particuliers. En ce qui a trait à la seconde, il semble que l'ambiguïté reliée au projet d'indépendance du Québec à travers la politique budgétaire et économique demeurera jusqu'aux prochaines élections générales.

Au fait, cette ambiguïté consiste à faire un appel aux agents de l'entreprise privée. Ce n'est certes pas le Parti libéral du Québec qui se plaindra d'un tel virage, mais vous admettrez qu'il en a fallu du temps à ce gouvernement pour comprendre qu'une reprise le moindrement durable ne saurait survenir sans une participation accrue du secteur privé. Comme le reste, ce gouvernement devra apprendre que la confiance, qui est une notion abstraite en économie, se reprend difficilement lorsqu'elle est étayée par d'autres discours axés sur l'indépendance, non pas qu'indépendance et économie soient tellement incompatibles, mais nullement souhaitables et bénéfiques dans le contexte canadien aussi bien que québécois à une époque où, au contraire, les actions réussies sur le plan économique proviennent justement d'un raffermissement des marchés et des partenaires.

À bien y penser, M. le Président, le présent gouvernement ne cesse de chevaucher à la fois une culture économique différente de cette politique. Économiquement parlant, le Parti québécois a voulu que l'État s'implique de plus en plus dans des secteurs réservés jusqu'ici au secteur privé. Tout y a passé: le secteur primaire, le transport, l'agroalimentaire et les placements, sans qu'il obtienne toujours les résultats escomptés.

Au niveau régional, on a aussi tenté d'effectuer un virage, un virage à saveur nationaliste, lequel consistait à mousser la participation des Québécois et des Québécoises aux petites et moyennes entreprises. Plusieurs auront sûrement été déçus - et avec raison - de l'expérience de SODEQ. Il fut pourtant une époque où les Québécois ont fait preuve de plus de hardiesse, simplement parce que l'État leur en donnait la chance. Les risques étaient pourtant aussi grands, toutes proportions gardées, mais on a peine aujourd'hui à déceler une génération d'entrepreneurs que nous souhaitons tous, ne serait-ce que pour dégonfler l'appareil de l'État sans provoquer des remous à la suite de pertes d'emplois du secteur public que nous ne pourrions retrouver dans le secteur privé.

De plus, devons-nous ajouter que le Québec possède une main-d'oeuvre plus qualifiée qu'il y a vingt ans ou trente ans même, qui demeure dans une sorte d'attentisme de plus en plus intolérable. Enfin, des dirigeants de petites et moyennes entreprises n'investissent que timidement dans des projets de modernisation et d'expansion, décisions qui sont trop souvent prises proportionnellement à l'aide gouvernementale.

Sur un plan plus politique, la croyance populaire voulait qu'il y ait peu d'entrepreneurs au Québec et encore, que cette place semblait réservée au seul establishment anglophone. Les anglophones du Québec ont effectivement axé le gros de leurs efforts dans des secteurs d'activité prometteurs. Il n'en reste pas moins qu'il a été établi que certaines périodes ont aussi été favorables à une percée des Québécois francophones. C'est ainsi qu'entre 1910 et 1975, par exemple, les Québécois avaient été capables de créer des entreprises dans la plupart des grands secteurs d'activité qu'on retrouve en Amérique du Nord. On estime également que le nombre d'entreprises créées fut en tout point comparable à celui des autres provinces du Canada et, en particulier, de l'Ontario.

En 1982, tout le monde reconnaît que le Québec, à l'instar d'autres provinces ou d'autres pays, a traversé sa pire crise depuis les années trente. Le problème particulier du Québec ne vient pas du fait qu'il soit spécifiquement francophone, mais plutôt que les entreprises fondées chez nous l'ont été dans des secteurs moins productifs. Par exemple, des études soulignent qu'en créant un très grand nombre d'entreprises dans le secteur des services, on pouvait contribuer d'une façon sensible à l'augmentation du produit intérieur brut du Québec. Pourtant, on reconnaît aujourd'hui qu'un tel secteur, celui des services, constitue une clé d'avenir.

La réalité voulait également que les Québécois aient fondé beaucoup d'entreprises dans des secteurs caractérisés par une faible proximité entre l'entreprise et ses usagers, alors que d'autres groupes ethniques choisissaient de tisser un véritable réseau d'affaires de façon beaucoup plus concentrée, comme à Montréal, par exemple. Enfin -d'autres l'ont souligné avant moi - les francophones sont identifiés depuis longtemps à un type d'hommes ou de femmes d'affaires mettant sur pied des entreprises qui nécessitent un capital initial peu élevé.

Ces quelques remarques n'enlèvent rien au dynamisme et à l'effort consacrés par les Québécois au développement économique de leur province. Elles expliquent tout au plus une partie des problèmes qu'ils ont vécus jusqu'à maintenant, problèmes qui se sont aussi réglés, en partie, grâce à une course effrénée depuis plus de 20 ans vers le secteur des affaires dont plusieurs ont raison de s'enorgueillir aujourd'hui.

Le vrai problème de ce gouvernement, c'est qu'au terme de chacun de ses discours sur le budget, on ne voit pas très bien s'il s'inscrit dans une suite logique par rapport aux précédents, non plus s'il se dirigera dans une avenue sécuritaire pour le Québec de demain. Mais, après sept exposés budgétaires et autant de discours inauguraux, la population québécoise est en mesure d'apprécier à sa juste valeur ce que pouvait réaliser le gouvernement.

Ainsi pourrait-elle s'exprimer en 1983. La population pourrait dire aux gens d'en face: Messieurs, dames du gouvernement, vous auriez dû nous dire que l'application intégrale de votre social-démocratie demeurerait à l'état de projet après sept années de pouvoir. Vous auriez dû nous dire qu'au lieu de résorber le déficit des finances publiques que vous aviez tant décrié à l'époque, non seulement vous l'avez haussé de façon spectaculaire, le faisant passer de 884 000 000 $ en 1977-1978 à 3 ZOO 000 000 $ prévus en 1983-1984, mais vous n'aurez réussi qu'à le maintenir au cours de la prochaine année financière. Vous auriez dû nous dire qu'il était illusoire de convaincre les jeunes qu'un jour ils pourraient bénéficier de la gratuité scolaire au niveau postsecondaire. Vous auriez dû nous dire que votre parti vivrait sous des contradictions aussi flagrantes que celles d'affirmer d'une part que, même dans un Québec indépendant, les effets de la crise économique auraient été durement ressentis selon un diagnostic proposé par le vice-président de votre parti lors d'un colloque qui s'est tenu le 20 janvier dernier, alors que certains ministres, dont celui de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme, affirment au contraire qu'il y aurait eu moins de chômeurs si le Québec avait répondu oui au référendum.

Vous auriez dû nous dire que, sous le règne du Parti québécois, le Québec demeurerait la province la plus taxée au Canada. Vous auriez dû nous dire que la crise économique ferait en sorte que la marge de manoeuvre de l'État serait réduite au point de s'en remettre au secteur privé pour redresser la situation après l'avoir presque ignoré depuis sept ans. (21 h 10)

Vous auriez dû nous dire que le réseau de services de la santé, chèrement construit au cours des 20 dernières années, ferait l'objet de coupures de services de façon aussi draconienne au profit de nouvelles orientations souvent discutables sur le plan des intérêts véritables des Québécois.

Vous auriez dû nous dire que le Québec connaîtrait le taux de chômage le plus élevé au Canada à la suite de pertes d'emplois et de fermeture d'usines ou de petites et moyennes entreprises. Vous auriez dû nous dire que votre gouvernement exploiterait le thème du nationalisme québécois de façon aussi abusive, au point où toutes et tous ont fini par se lasser de cette tendance à se sentir à l'étroit, tant sur le plan culturel et social qu'économique. Comme si on pouvait oublier tout ce qui a été produit chez nous bien avant l'arrivée du Parti québécois au pouvoir, tout ce qui a été extrait du sol et du sous-sol québécois pour ensuite être transformé en produits finis ou semi-finis, ou encore notre génie à construire des projets aussi rentables et prometteurs que celui de la Baie-James.

Vous auriez dû nous dire que l'idée de séparer le Québec du reste du Canada demeurerait, même après le verdict rendu par le peuple un certain 20 mai 1980, par une voie que tous ont qualifiée de démocratique. Les choix budgétaires du gouvernement reflètent, à plusieurs égards, cet esprit qui anime les membres de ce parti.

Vous auriez dû nous dire qu'un jour l'État en arriverait à renier sa propre signature dans le cadre des négociations collectives à l'endroit de ses propres employés. Comment peut-il en toute logique chercher à discréditer d'autres organismes? Vous auriez dû nous dire que depuis que le gouvernement a adopté le rapport de la condition féminine, contenant au-delà de 200 recommandations, dont quelques-unes ont été mises de l'avant, la seule amélioration possible à l'endroit des femmes en 1983 dans ce budget se résume à l'abolition de la taxe sur les serviettes hygiéniques.

M. le Président, soyons tout de même francs. Dans le discours sur le budget du 10 mai dernier, le ministre des Finances tente d'insuffler un certain sentiment de passion nationaliste à saveur économique. Il effectue ce virage par le biais de petites et moyennes entreprises en invitant les Québécois à investir davantage. Du même coup, on essaie de renverser un problème du passé qui a fait que les principaux leviers des décisions économiques ont échappé aux Canadiens français en raison d'un manque légitime de volonté à investir du capital de risque. À ce chapitre, il faudra faire en sorte que ne se reproduise une expérience du genre des caisses d'entraide ou des SODEQ, formule d'une forme de nationalisme économique qui en aura déçu plusieurs.

Avec raison, le gouvernement compte sur l'entreprise privée pour occuper un champ qu'il n'a plus les moyens de soutenir. Il semble s'être aperçu comme par miracle que de soutenir telle ou telle entreprise n'équivalait trop peu ou trop souvent qu'à retarder une échéance fatale pour plusieurs d'entre elles. Qu'il suffise de nous rappeler qu'en deux ans 25 000 entreprises auront été saisies, sans compter des milliers d'autres qui ont dû fermer boutique, purement et simplement pour mesurer l'ampleur de cette

crise.

Ainsi en est-il de la création d'emplois. Je pense ici aux fameux bons distribués à des jeunes qui se voyaient astreints à répondre aux nombreuses tracasseries administratives sans que, là non plus, la viabilité de l'entreprise ne soit assurée. Un tel programme a eu aussi pour effet de créer une concurrence déloyale avec des travailleurs plus qualifiés. Peut-être le gouvernement aurait-il compris enfin la nécessité de favoriser un climat propre à l'investissement et de mousser l'initiative d'une nouvelle génération d'hommes et de femmes d'affaires.

Entre autres défis, cette nouvelle génération semble plus prête que jamais à emprunter les nouvelles avenues qu'offrent les secteurs de pointe et de haute technologie. Nous prévenons le gouvernement de deux choses en ce qui a trait au virage technologique. D'une part, il ne suffit pas d'improviser un vaste plan d'investissements en fixant des montants ou des emplacements de façon arbitraire. Cette opération devrait dépasser le stade de la récupération politique en fonction d'une prochaine échéance électorale.

En second lieu, tous les agents économiques, publics ou privés, auront à faire face à un problème de taille, celui d'harmoniser le transfert de la main-d'oeuvre des secteurs dits traditionnels vers des nouvelles activités requérant une toute autre formation.

Les choix seront parfois douloureux, j'en conviens, mais chacun des gestes posés en ce sens confirmera ce que j'ai appelé la coresponsabilité. Au surplus, j'ajouterais que l'intérêt porté envers le virage technologique prouve, à n'en pas douter, l'interdépendance du Québec avec le reste du pays et d'autres coins du monde, M. le Président. De ce fait, le projet d'indépendance de notre province du présent gouvernement va à l'encontre de tous les courants, que cela lui plaise ou non. En effet, dire aux Québécois et Québécoises qu'il faut se prendre en main en se séparant du reste du pays relève d'une forme bien concrète de protectionnisme. Le Québec a douloureusement protégé sa langue. Il aura toujours réussi à affirmer, sans l'imposer, sa culture française. Il aura également réussi à tirer son épingle du jeu de manière fort convenable au sein du fédéralisme canadien.

Un exemple nous a été donné récemment dans le cadre d'un bilan du MEER, qui démontrait que la moitié des ententes avec le Canada avait profité au Québec depuis le début des années soixante.

Enfin, le déséquilibre budgétaire du Québec a pu être altéré grâce au système de péréquation dont nous bénéficions. Des documents du ministre des Finances du Québec indiquent clairement qu'une somme de 3 100 000 000 $ provenait du gouvernement canadien en vertu de cette règle à laquelle nous avons droit. Il n'y a pas de honte à le dire, M. le Président, et bien au contraire puisque tous les citoyens du Québec aussi bien que des autres provinces, contribuent aux rentrées d'argent d'Ottawa. En conséquence, que ce soit dans le cadre du virage technologique ou du maintien de nos secteurs d'activité traditionnels, on n'a pas tort de parler d'un virage préalable, celui-là idéologique.

Avec raison nous nous inquiétons du fait que le Québec ait un certain retard à moderniser sa structure économique mais on nous parle rarement de l'autre côté de l'aspect humain, de l'aspect social d'un tel virage. Cette nouvelle voie ne me semble aucunement au diapason de la passion nationaliste à laquelle se raccroche le Parti québécois.

En quoi avons-nous besoin qu'on nous prouve la nécessité de se prendre en main chez nous? Que le gouvernement commence à se prendre en main lui-même en s'assurant du maintien des services de qualité aux citoyens et aux citoyennes du Québec, avant de se lancer dans des projets soi-disant prometteurs. Qu'il nous prouve, en fait, qu'il est en mesure de bien administrer la province en fonction des ressources disponibles et non de celles que l'on souhaite.

Parce que conservateur, on éprouve beaucoup de peine à déceler son véritable objectif dans la politique économique et budgétaire du ministre des Finances. D'un côté il semble bien qu'on n'ait pas le souci d'alléger le fardeau des taxes que doivent payer les Québécois. De l'autre côté, on ne voit rien dans ce budget qui puisse inciter d'autres investisseurs à venir faire des affaires au Québec. (21 h 20)

Enfin, on invite les Québécois et les Québécoises à investir du capital de risque dans les petites et moyennes entreprises. Mais une fois ces paramètres établis, tout reste à faire. Par exemple, il n'y a rien de stimulant à penser que le déficit sera maintenu pour la prochaine année financière. En d'autres termes, le présent gouvernement ne sait trop quel choix effectuer à ce stade-ci de son histoire politique. Le voilà placé devant un drôle de dilemme.

Une fois également établi que l'on porte un préjugé favorable à l'entreprise privée, c'est oublier toute la place qu'occupe l'État dans à peu près toutes les sphères d'activité. Par exemple, le gouvernement semble oublier que le secteur public prend, au Canada, entre 42% et 43% du produit national brut et qu'au Québec le secteur public occupe 47% du produit intérieur brut. Pour ce qui est du Québec, en particulier, qu'il s'agisse de penser qu'à la fin de 1981 la Société générale de financement possédait

249 000 000 $ dans des compagnies commerciales, alors que la Caisse de dépôt et placement détenait une valeur de 2 300 000 000 $. En fait, souligne un analyste de l'administration publique, Stephen Jarislowski, dans la revue L'Analyste de l'été 1983, et je le cite: "Le gouvernement a mis le pied dans pratiquement toutes les industries provinciales importantes et cotées en bourse."

Cette tendance de l'accroissement du rôle de l'État date de bien avant l'arrivée au pouvoir du Parti québécois, mais est-ce uniquement au nom de la gestion de la décroissance que le présent gouvernement cherche à libérer les charges assumées par l'État au profit du secteur privé? En d'autres termes, on a l'impression que le ministre des Finances effectue un virage non par choix, mais plutôt par obligation.

En effet, ce budget constitue une entorse supplémentaire à son propre programme politique qui, lui, a toujours préféré un rôle accru de l'État de manière à actionner les principaux leviers de la social-démocratie. De plus, le discours sur le budget, s'il veut obliquer vers une participation accrue du secteur privé au produit intérieur brut, n'est guère loquace sur ce qui constitue des freins à cet élan, tels la réglementation, les offices de mise en marché, les divers programmes économiques gouvernementaux qui font concurrence au secteur privé, en somme, tout élément ou politique qui contribue à une influence de plus en plus grande et gênante aux principales décisions économiques prises par le gouvernement en lieu et place des autres agents économiques.

Pourtant, tout gouvernement devrait annoncer clairement ses couleurs quant au rôle de l'État qu'il voudrait voir diminuer ou augmenter selon ses choix politiques. À moins que le ministre des Finances n'ait voulu transformer l'initiative et la libre entreprise du secteur privé en "partenaire complice", si on me permet l'expression, où les principaux intéressés seraient contraints de se soumettre aux paramètres fixés par le gouvernement.

Nous sommes loin de la coresponsabilité à laquelle je me référais et de là, nous sommes loin de ce que le Parti libéral du Québec a toujours prôné en matière économique et spécialement sur le rôle de coordonnateur que l'État devrait assumer, de même que le besoin de susciter un climat susceptible d'encourager la libre entreprise et la saine concurrence au Québec. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Lotbinière, ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme.

M. Rodrigue Biron

M. Biron: M. le Président, j'entendais parler tout à l'heure Mme la députée de Chomedey. Je me suis dit un bout de temps: Ce n'est pas possible, essayer de voir la paille qui est dans l'oeil du voisin et ne pas voir la poutre qui est dans son oeil. Si je voulais être encore plus sévère et vous dire carrément ce que je pense, je vous dirais: Sépulcres blanchis! C'est épouvantable, ce que vous venez de dire, particulièrement au début de votre intervention. Vous vous scandalisiez de ce que fait l'actuel gouvernement du Québec, le gouvernement du Parti québécois, lorsqu'on sait tout ce que les libéraux ont fait, quand ils étaient au pouvoir, relativement à l'étatisation des entreprises en particulier, lorsqu'on sait ce que vos grands frères, à Ottawa, font constamment - il y a au-delà de 350 sociétés d'État, à Ottawa, très mal administrées, d'ailleurs, par le gouvernement canadien -lorsqu'on sait que vos grands frères, à Ottawa, en particulier ont gaspillé et gaspillent encore l'argent des contribuables canadiens et québécois, lorsqu'on sait que ces gens-là ont nationalisé, récemment, quelques compagnies dans le domaine du pétrole, Petrofina, en particulier, qu'ils ont nationalisée dans la logique du Parti libéral. Pour des actions qui valaient 50 $ chacune à la Bourse, les libéraux ont payé 150 $. Pour qui? Pour encourager quelques amis du régime, possiblement. C'est une entreprise qui valait 500 000 000 $; on l'a payée 1 500 000 000 $. Les actions étaient cotées 50 $ à la Bourse; on les a payées 150 $. Ce sont vos grands frères, dans la logique du Parti libéral du Canada. Et on se scandalise de certaines interventions du gouvernement du Québec.

M. le Président, les interventions du gouvernement du Québec, les interventions du Parti québécois, c'est pour administrer le plus sainement possible la chose publique. Lorsque le gouvernement du Québec est intervenu pour acheter Domtar notamment, pourquoi vous êtes-vous prononcés contre cela? Parce que la société Domtar pensait sérieusement à déménager son siège social à l'extérieur du Québec, parce qu'elle ne faisait plus d'investissements au Québec depuis plusieurs années, même à l'époque des libéraux. Vous n'êtes pas intervenus; vous ne savez rien faire. Vous n'avez rien fait. Si on avait laissé faire, une autre société serait partie et, là, vous auriez chialé, vous auriez versé des larmes de crocodile, Mme la députée de Chomedey. Pourtant, des Québécois et des Québécoises auraient perdu leur emploi. Larmes de crocodile, parce que vous vous réjouissez lorsque des entreprises ferment, lorsque des gens perdent leur emploi, alors que nous, nous en préoccupons.

Nous sommes intervenus, bien sûr, pour

garder Domtar au Québec. Depuis, les décisions à l'intérieur de l'entreprise Domtar se prennent...

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le ministre, s'il vous plaît!

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît! M. le député de Mégantic-Compton, si vous voulez parler, soyez au moins à votre siège. Je crois que chacun ici a droit à son intervention et laissez-moi...

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît! Que j'aie au moins le loisir d'entendre chacun d'entre vous. M. le ministre.

M. Biron: M. le Président, je pense que cela fait mal aux libéraux quand on leur dit la vérité de temps en temps, mais je pense que la population du Québec a le droit de savoir la vérité. Quand il y a des gens, en face de nous, qui viennent nous conter des sornettes, ces sépulcres blanchis, il faut, je pense, dire la vérité et la situer exactement où elle est.

Bien sûr, M. le Président, nous passons à l'action. Nous en faisons des choses au Québec. De temps à autre, bien sûr, à force de faire des actions, on peut se tromper. Mais on en fait des actions. Je me rappelle, simplement pour vous citer des chiffres, l'intervention de la Société de développement industriel du Québec pour aider des entreprises au Québec. En six ans de régime libéral, de 1970 à 1976 - Mme la députée de Chomedey a été là pendant quelques années - on a aidé 531 entreprises. En 1982-1983, en un an, nous avons aidé 719 entreprises. (10 h 30)

Nous avons fait plus en un an que ce que vous avez fait en six ans pour aider les entreprises. Que vous chialiez un peu, que vous n'aimiez pas cela en tant que rouges, c'est bien possible. Mais les citoyens du Québec, les chefs d'entreprises aiment cela. Ils apprécient l'aide du gouvernement du Québec. Ils apprécient le fait de pouvoir conserver, protéger des emplois ou en créer. C'est le but de notre action, M. le Président, au gouvernement du Québec. Particulièrement avec le dernier budget du ministre des Finances. Je dirais que c'est un autre instrument de développement économique. Je dirais que c'est un autre instrument de création d'emplois et de protection d'emplois que les Québécois se sont donné, que le gouvernement du Parti québécois a donné aux Québécois, aux

Québécoises pour leur donner un peu plus de chance, un peu plus d'espoir de pouvoir, au Québec, vraiment participer au développement et aménager leur avenir à eux ou à elles.

Grâce à ce budget et parce que la crise économique est en train de s'estomper tranquillement, nous avons bien la ferme impression, la ferme opinion, la ferme décision d'aménager la crise et d'aménager l'après-crise le mieux possible pour répondre aux besoins des hommes et des femmes du Québec, de ceux et celles qui veulent, au Québec, avoir une chance de travailler. Le dernier budget du ministre des Finances donne d'autres instruments au gouvernement pour aider davantage les entreprises québécoises à être meilleures, mieux financées, mieux structurées et faire en sorte, finalement, de donner plus de sécurité aux hommes et aux femmes qui y travaillent.

Bien sûr, ce n'est pas par pièces détachées. Cela fait partie d'une approche globale que nous avons vraiment d'aider toutes les fonctions d'une entreprise. Nous avons commencé, il y a déjà plusieurs années, avec dés programmes d'aide à l'investissement, à encourager des entreprises à investir au Québec, avec un petit coup de pouce pour permettre d'investir des sommes d'argent nécessaires pour assurer leur succès.

Nous avons continué avec une autre fonction de l'entreprise, la gestion de l'entreprise. On a mis en marche depuis plusieurs années des programmes, soit au ministère de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme, soit à d'autres ministères, pour aider nos chefs d'entreprises à avoir une meilleure gestion. On sait bien sûr que la tradition de gestion au Québec est moins longue, surtout dans le Québec francophone, à cause de notre histoire, à cause de notre culture, mais de plus en plus de jeunes, de plus en plus d'hommes et de femmes maintenant arrivent sur le marché des affaires, sur le marché industriel, sur le marché commercial. Ils sont prêts ou elles sont prêtes à assumer de plus lourdes responsabilités, à condition qu'elles ou qu'ils aient le coup de pouce nécessaire du gouvernement du Québec. Au cours des dernières années, nous avons mis en marche plusieurs programmes, en particulier un programme qui est très aimé au niveau des PME québécoises, le programme UNI-PME, qui fait en sorte de prendre de jeunes diplômés des universités, des collèges, des cégeps, de les faire travailler au niveau de PME manufacturières et de payer la moitié de leur salaire pour la première année. Il encourage nos PME manufacturières à engager de jeunes étudiants d'université, à leur donner la chance d'acquérir un peu plus d'expérience au niveau des entreprises et, bien sûr, en même temps, il donne une chance à l'entreprise d'avoir à son service un

diplômé universitaire.

Un autre travail que nous faisons, un autre programme s'adresse d'une façon particulière à la fonction mise en marché, à la fonction marketing. Là-dedans aussi, nos chefs d'entreprises ont été un peu faibles dans le passé, vendant leurs produits un peu autour des entreprises sans atteindre de grands marchés. On a besoin aujourd'hui d'aider de plus en plus nos entreprises manufacturières, non seulement à conquérir le marché québécois, mais à conquérir aussi tout le marché de l'Amérique du Nord, d'abord, et le marché du monde entier ensuite.

Pour cela, de nouveaux programmes ont été mis en marche au cours des dernières années. L'an dernier nous avons mis en marche un programme gestion marketing qui aidait la fonction marketing de l'entreprise, qui faisait en sorte de prendre l'entreprise, de lui montrer la bonne stratégie de mise en marché, une stratégie de marketing, qui lui montrait à faire une étude de marché et qui finalement payait une grande partie, la moitié des coûts des outils nécessaires, les outils de développement d'une stratégie de marketing, c'est-à-dire les catalogues, les pièces d'équipement nécessaires. Voilà un autre programme qui a été mis en marche l'an dernier.

Cette année, en plus des autres programmes, dans le discours sur le budget du ministre des Finances, nous avons voulu aider davantage les entreprises québécoises qui faisaient de la recherche et du développement. On sait comme c'est important aujourd'hui la recherche et le développement. On sait que des entreprises qui ne peuvent pas développer de nouveaux produits, qui ne peuvent pas développer de nouvelles façons de produire sont vouées, un jour ou l'autre, à céder devant d'autres entreprises qui se sont développées techniquement. Et à ce point de vue, en plus, un nouveau ministère qui se spécialise et qui y passe tout son temps et toutes ses énergies, le ministère de la Science et de la Technologie, a pensé de nouvelles approches au point de vue du développement technologique. Et en plus des programmes réguliers ou des programmes que nous avons mis en marche l'an dernier à la Société de développement industriel du Québec et au CRIQ, au Centre de recherche industrielle du Québec, dans le discours sur le budget cette année, nous donnons aux entreprises qui font de la recherche et du développement un crédit d'impôt de 10% de leur masse salariale qui est vouée exclusivement à la recherche et au développement. Cela fait en sorte d'aider beaucoup, énormément, les entreprises québécoises qui font de la recherche et du développement. Si vous voulez faire de la recherche et du développement au Canada, à cause de ces 10% sur la masse salariale, c'est beaucoup mieux de vous installer au Québec avec un centre de recherche et de développement plutôt que de vous installer en Ontario ou ailleurs. Je pense que cela aurait dû être noté d'une façon positive par nos amis de l'Opposition si vraiment ils veulent être au service de la collectivité québécoise.

Ce sont des étapes qu'on a franchies. En plus, bien sûr, je voudrais dire un mot sur la participation des travailleurs aux décisions de l'entreprise avec des programmes qui existent au gouvernement du Québec depuis déjà plusieurs années - le programme PECEC en particulier - où nous encourageons de plus en plus de travailleurs et de travailleuses à participer aux décisions dans leur entreprise. Nous aidons présentement et encourageons les gens de la Fédération des travailleurs du Québec avec leur fonds de solidarité à encourager aussi cette forme de participation des travailleurs aux décisions de l'entreprise. C'est de plus en plus important au Québec, compte tenu que nos jeunes sont de mieux en mieux formés, que nos jeunes sont prêts à dépenser beaucoup plus que les énergies de leurs muscles à l'intérieur des entreprises. Ils veulent dépenser leur cerveau, leur génie et leurs connaissances. Avec une forme de participation des travailleurs, nous aurons véritablement le maximum de ces jeunes, de ces hommes et de ces femmes qui veulent faire leur vie à l'intérieur d'une entreprise.

M. le Président, je voudrais m'arrêter un peu plus longtemps sur une autre fonction de l'entreprise, une fonction qui est souverainement importante: celle du financement des entreprises. L'an dernier, nous avons institué un nouveau programme qu'on a appelé le programme d'aide au financement du fonds de roulement des entreprises, un programme qui n'existait nulle part ailleurs en Amérique du Nord et certainement pas au Canada. Nous avons institué ce programme pour les entreprises manufacturières bien gérées et normalement rentables, mais qui avaient besoin d'un appui moral et financier pour prendre de l'expansion ou pour continuer leurs activités manufacturières ou tout simplement pour assurer la sécurité à leurs travailleurs et à leurs travailleuses. Nous avions ce programme d'urgence ou ce programme d'aide au financement du fonds de roulement des entreprises. Au moment où on se parle, le gouvernement du Québec, dans un peu plus d'un an - un an ou treize mois environ - a répondu d'une façon positive à 600 demandes d'entreprises manufacturières québécoises de taille moyenne ou petite. Nous avons protégé, à l'heure actuelle, 35 000 emplois. Nous avons mis en circulation ou fait mettre en circulation par les banques qui oeuvrent au Québec, par les institutions financières

qui oeuvrent au Québec, 150 000 000 $. Savez-vous ce que cela a coûté au gouvernement du Québec de faire confiance aux chefs d'entreprise du Québec, de faire confiance aux travailleurs et aux travailleuses qui oeuvrent dans ces entreprises? Cela a coûté, au moment où on se parle, possiblement autour de 3 000 000 $ seulement. Car les entreprises ont passé à travers, les entreprises ont conservé les emplois et c'est important. C'est une méthode nouvelle: au lieu de donner de l'argent carrément aux entreprises, nous disons aux institutions financières: Avancez l'argent aux entreprises; on va en garantir une partie, les deux tiers; l'institution financière prend le risque sur le tiers. Le gouvernement, l'institution financière, l'entreprise et le chef d'entreprise ensemble décident de continuer les activités, de continuer de produire et de conserver les emplois. Ce programme d'aide au financement des entreprises a aidé à protéger 35 000 emplois au Québec l'an dernier. (21 h 40)

Je me souviens, lorsqu'on a présenté ce programme au gouvernement fédéral et qu'on a demandé à nos amis d'Ottawa de nous donner un coup de main, la réponse a été: "No, thanks." C'est trop compliqué, aider 500 ou 1000 PME manufacturières québécoises. Pourtant, quelques mois auparavant, on avait répondu oui avec empressement à la demande de Chrysler Corporation, en Ontario, qui voulait une garantie de 200 000 000 $. Le gouvernement fédéral avait endossé la garantie. Mais quand nous avons demandé des garanties pour 500 ou 1000 PME québécoises, parce que c'était au Québec, c'étaient des PME, c'était trop compliqué, cela a été: "No thanks."

Pourtant, quelques mois auparavant, le gouvernement fédéral avait donné des garanties à Massey Ferguson en Ontario, qui n'est pas une petite compagnie non plus, et a donc signé pour 150 000 000 $ de garanties. Mais lorsqu'on demande au gouvernement fédéral de nous aider à protéger des emplois dans nos PME manufacturières québécoises, la réponse est: "No thanks", c'est trop compliqué.

Pourtant, les dirigeants de Maislin, dont certains sont des amis de M. Trudeau, ont dit: On a besoin de 34 000 000 $ d'un coup sec. Les 34 000 000 $ ont été prêtés d'un coup sec. C'était une grande entreprise. Mais quand on demandait, par exemple, d'aider des PME manufacturières québécoises, c'était: "No thanks." C'était trop compliqué et on ne voulait pas donner de garanties.

Pourtant, lorsque Dome Petroleum, un grosse compagnie de l'Ouest canadien, demande l'aide du gouvernement fédéral, celui-ci répond: Oui, messieurs, nous sommes prêts à vous donner des garanties jusqu'à 500 000 000 $. C'était une grande entreprise, mais lorsqu'on demandait, par exemple, pour des entreprises québécoises, des PME manufacturières, c'était toujours: "No thanks."

Qu'est-ce qu'on a fait? Le gouvernement du Québec a agi. Il a protégé nos entreprises. Nous sommes heureux aujourd'hui d'avoir pris ces décisions parce que, finalement, nous avons réussi seuls, au gouvernement du Québec, à protéger ces emplois et ces entreprises manufacturières québécoises qui font la gloire du Québec manufacturier. Mais on veut faire plus.

Bien sûr, c'est un programme conjoncturel, c'est un programme qui s'est adressé ad hoc à une situation particulière qui a duré un an et qui dure encore cette année parce qu'il est prévu dans le budget que nous avons les fonds nécessaires pour une autre année. Mais dans ce budget, ce qu'on a voulu prévoir aussi, c'est de changer la structure financière des entreprises québécoises. On a réalisé, pendant la crise, que celle-ci a frappé plus durement les entreprises du Québec que les entreprises de l'Ontario. Nous avons analysé pourquoi cela avait frappé plus durement les entreprises manufacturières québécoises de taille petite ou moyenne que celles de l'Ontario.

L'une des réponses a été que le financement de nos entreprises manufacturières... La structure de nos entreprises manufacturières, c'est beaucoup plus une structure de type familial où les gens ont très peu de capital-actions, ont très peu de financement à long terme. Ils se dirigent tout simplement vers les institutions financières, vers les banques, en disant: Prêtez-nous sur marge de crédit, donc sur nos inventaires et nos comptes recevables. Lorsqu'on vendra cela, on pourra vous payer. Ce qui est arrivé, c'est ceci. Lorsque les taux d'intérêt ont augmenté considérablement, au lieu de payer 10%, 12% de taux d'intérêt, nos gens, durant la crise et les taux d'intérêt élevés de la Banque du Canada, ont payé 18%, 20%, 22%, 24% de taux d'intérêt.

Pendant ce temps, l'entreprise de l'Ontario qui est, quant à elle, beaucoup mieux financée à cause de sa structure, de son histoire et de sa culture, est financée à long terme ou avec du capital-actions. Elle n'a pas à payer d'intérêt. Tout ce que cette entreprise a fait temporairement, c'est arrêter de payer des dividendes et cela a coûté 0% d'intérêt au cours des deux années de crise. Pendant ce temps, l'entreprise québécoise payait 24% de taux d'intérêt. Cela a fait deux entreprises qui n'étaient pas du tout sur le même pied et nos entreprises ont souffert énormément.

Nous voulons maintenant changer un peu cette structure financière de l'entreprise québécoise et, avec le budget du ministre des Finances, nous pouvons maintenant

encourager ces entreprises de taille moyenne, en particulier, ou de taille plus petite à se regrouper. Nus pouvons encourager nos entreprises québécoises à changer leur structure, c'est-à-dire à s'inscrire sur des marchés publics, comme la Bourse, et faire la même chose que les entreprises de l'Ontario. Lorsqu'on songe que les entreprises d'une certaine taille, en Ontario, sont deux fois mieux capitalisées que celles du Québec, il faut changer la capitalisation de nos entreprises et l'augmenter un peu.

Là-dessus, le budget du ministre des Finances est extraordinaire. Il apporte une réponse précise à ce besoin particulier du Québec, de nos entreprises de chez nous. Même depuis le dépôt du budget par le ministre des Finances, j'ai rencontré à plusieurs reprises, avec les dirigeants de la Société de développement industriel du Québec, les gens de la Bourse de Montréal. Nous travaillons ensemble, avec les gens de la Bourse de Montréal. Nous travaillons ensemble avec les gens de la SDI à préparer et à mettre en application le plus rapidement possible les programmes mis de l'avant par le ministre des Finances en vue d'encourager la participation au financement des entreprises québécoises. Nous croyons qu'au cours des prochains mois, plusieurs entreprises québécoises pourront être inscrites en Bourse et être financées en grande partie par des capitaux de risque, comme les entreprises, d'ailleurs, et donc, beaucoup mieux financées, ces entreprises pourront répondre beaucoup plus facilement à des temps de crise.

Vous allez me dire que ça coûte cher s'inscrire en Bourse, et c'est vrai. Le ministre des Finances a prévu dans son budget que nous pourrions payer une partie des premiers frais d'inscription. C'est ça qui coûte cher. D'abord, on va payer 50% de la première étude de faisabilité jusqu'à concurrence de 10 000 $. Cela va coûter quoi? Cela va coûter à peu près 20 000 $ et on va en payer la moitié pour voir si c'est faisable d'inscrire une entreprise de taille moyenne, une entreprise manufacturière, à la Bourse de Montréal. Si c'est faisable, après cela, ça peut coûter quelque 100 000 $ pour inscrire une entreprise qui vaut 3 000 000 $, 4 000 000 $, 5 000 000 $ ou 10 000 000 $ à la Bourse de Montréal.

Dans ce cas particulier, à cause du dernier budget du ministre des Finances, nous serons capables de donner une participation de 75% de la première tranche de 200 000 $ de coût, 50% entre 200 000 $ et 400 000 $ et, finalement, 25% au-dessus de 400 000 $, sans excéder 1 000 000 $. Cela veut dire qu'on va aider grandement l'inscription en Bourse de beaucoup de nos entreprises manufacturières québécoises. Pas n'importe quelle sorte d'entreprises dans lesquelles les gens vont perdre leur argent, mais des entreprises solides, bien gérées, qui peuvent être inscrites en Bourse, mais qui n'ont pas la capacité financière de le faire. Voilà donc une façon pour nous d'aider les entreprises québécoises à s'inscrire en Bourse.

Il y a autre chose qu'il faut faire aussi pour véritablement avoir un plan complet. Si on les aide en premier à s'inscrire, les entreprises vont dire: Après cela, qu'est-ce qu'on fait? Il faut vendre des actions en Bourse. Là-dessus, le ministre des Finances a voulu prévoir dans son budget aussi qu'on pourrait aider les acheteurs québécois, ceux et celles qui veulent acheter des actions en Bourse à avoir une déduction sur leur impôt, une déduction d'impôt, un abri fiscal qui peut monter selon le taux d'impôt. Vous payez soit 15%, 25% ou 35% selon le salaire que vous gagnez, jusqu'à 150% de l'argent investi. Si vous investissez 1000 $ en Bourse, on pourra déduire de votre revenu imposable jusqu'à 1500 $ multiplié par le taux d'impôt, ça veut dire que ça fait une économie très appréciable pour les gens qui peuvent s'inscrire en Bourse et qui peuvent gagner un salaire raisonnable.

Cela fait une économie, ça encourage les entreprises québécoises à s'inscrire, ça fait vendre leurs actions sur le marché primaire, la première fois en Bourse, mais il faut aussi continuer plus loin et s'assurer que ces actions pourront être rachetées dans trois mois, dans six mois, dans un an, dans deux ans, dans cinq ans par d'autres citoyens qui voudront avoir confiance en cette entreprise donnée. Là-dessus aussi, le ministre des Finances a tout prévu. Il a prévu d'abord un mécanisme qui va faire en sorte d'avoir accès à la Bourse de Montréal, qui a déjà ce qu'on appelle des mainteneurs de marché et qui va aider ces mainteneurs de marché à maintenir les marchés pour qu'ils ne descendent pas trop et que les gens ne perdent pas leur argent.

Deuxièmement, le ministre des Finances a prévu aussi que tous ces types d'entreprises québécoises qui seront reconnus par le gouvernement canadien selon un programme fédéral qu'on appelle le RPTI, tous ces types d'entreprises québécoises seront inscrits en Bourse, déductibles selon le régime d'épargne-actions du gouvernement provincial, si vous faites un profit de capital sur ces types, il n'y aura pas d'impôt sur votre profit de capital, sur ces types de petites et de moyennes entreprises inscrites à la Bourse de Montréal selon le régime d'épargne-actions du gouvernement du Québec.

Cela fait beaucoup de mesures ensemble, mais ça va surtout encourager les gens à voir des courtiers de valeurs mobilières et pour leur demander: Qu'est-ce que vous me recommandez d'investir dans des entreprises québécoises, parce qu'il me

semble qu'avec l'argent que j'ai, je peux faire fructifier mon capital davantage. Je pense que c'est un des plus grands changements, une des plus grandes révolutions économiques et financières qui aient été effectués par un gouvernement depuis fort longtemps pour permettre à des entreprises québécoises d'être inscrites en Bourse, de se financer convenablement et d'aider aussi les citoyens québécois à sauver un peu d'impôt avec cette formule.

Cela m'amène à vous parler un peu et rapidement, quand même, de ce que nos amis d'en face véhiculent trop souvent en disant qu'au Québec on est les plus taxés, qu'au Québec, ce n'est pas restable, ce n'est pas possible de travailler. J'entendais encore tout à l'heure Mme la députée de Chomedey nous dire cela. C'est épouvantable, ce qu'elle dit. On se dévoue, on se dépense sans compter au gouvernement du Québec pour encourager des investisseurs à investir au Québec. Nous invitons des investisseurs étrangers à venir investir au Québec en disant: Écoutez, le Québec, c'est la meilleure place au monde pour investir. Bien sûr, il y a certaines taxes qui sont plus élevées que d'autres; par contre, d'autres taxes sont beaucoup plus basses. La Chambre de commerce du Québec nous disait dernièrement que les taxes municipales sont moitié moins élevées au Québec qu'en Ontario. Je pense qu'il faut être honnête et le dire. (21 h 50)

Les gens qui gagnent un gros salaire au Québec, les hauts salariés, est-ce qu'ils sont plus imposés au Québec qu'ailleurs au Canada? Je vous dis non, M. le Président. Les hauts salariés n'ont qu'à se servir du budget Parizeau, investir dans des PME québécoises selon le budget Parizeau et ils peuvent déduire jusqu'à 30 000 $ de leur salaire, sans impôt. Les gens du Parti libéral du Québec, je vous mets au défi de trouver une province canadienne qui permet à des hauts salariés de déduire jusqu'à 30 000 $, non imposables, sur leur salaire chaque année. Il n'y en a pas une seule. Je pense qu'il faut être honnête et dire aux gens qui veulent travailler au Québec, qui gagnent de hauts salaires, qu'ils peuvent investir et prendre des décisions importantes au Québec: Venez au Québec. Si vous investissez dans l'économie québécoise vous économiserez beaucoup d'argent. Si vous ne voulez pas investir dans l'économie québécoise, c'est bien sûr que vous paierez de l'impôt, mais je pense que ce n'est pas à la collectivité québécoise de payer de l'impôt pour d'autres qui ne veulent pas investir chez nous. Cependant, ceux qui veulent investir chez nous peuvent véritablement sauver beaucoup d'impôt.

Cela m'amène finalement, avant de terminer, à parler de ceux et celles qui détruisent notre économie chaque fois qu'ils parlent. Je comprends que les libéraux peuvent critiquer. On va les laisser critiquer, c'est leur job apparemment, ils sont habitués à cela, ils sont dans l'Opposition et ils y resteront longtemps. Mais il y a des gens qui font de grands discours pseudo-économiques. Je pense en particulier à M. Raymond Garneau, de la Banque d'épargne, je pense à M. Roger Landry, du journal La Presse. Chaque fois que ces gens-là parlent, ils disent aux investisseurs: N'investissez pas au Québec. C'est mauvais au Québec. Les syndicats ne sont pas bons, les travailleurs ont une mauvaise productivité. La loi 101 vous nuit. Les impôts sont trop élevés. Nous autres, pendant ce temps-là, on se dévoue sans compter pour créer des emplois pour des hommes et des femmes du Québec et ces saboteurs de l'économie que sont Landry, Garneau et les autres disent aux investisseurs: Ne venez pas au Québec, ne venez pas investir, ce serait mauvais si vous veniez créer des emplois au Québec.

Je pense qu'il serait grand temps que des saboteurs de l'économie tels que Roger Landry, de la Presse, Raymond Garneau ou d'autres dans ce sens-là...

Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît!

M. Biron: ...se remettent les deux pieds à terre et disent: C'est vrai qu'au Québec il y a des choses qui sont mieux que d'autres, c'est vrai qu'au Québec il y a encore des choses à améliorer. Au moins on reconnaîtrait que ces gens-là sont honnêtes un peu, mais faire de grands discours pour détruire l'économie du Québec, pour empêcher de créer des emplois, je pense que ce n'est pas acceptable en tant que représentants des citoyens québécois, et c'est grand temps de le dire.

Je voudrais aussi que nos amis du Parti libéral du Québec pensent un peu à leur responsabilité en tant que représentants des gens de leur comté. On veut bien créer des emplois chez vous mais dites donc, bon Dieu! qu'il y a quelque chose de meilleur au Québec qu'ailleurs. Dites ce qu'il faut améliorer, on comprendra cela, mais ne manquez donc pas une occasion de dire que la productivité des travailleurs québécois est meilleure qu'ailleurs. Dites donc comme les gens de General Motors - ce n'est pas une petite compagnie - dites donc comme les gens de IBM - ce n'est pas une petite compagnie - qui disent partout dans le monde que leurs usines du Québec sont toujours parmi les deux, trois ou quatre premières au point de vue de la productivité.

Ces gens de GM, ces gens de IBM disent que la productivité des travailleurs québécois, c'est vraiment quelque chose à voir. C'est extraordinaire. Cela prend des étrangers pour venir faire la leçon aux gens

du Parti libéral du Québec qui veulent plus détruire l'économie du Québec qu'autre chose.

Nous, du Parti québécois, nous avons confiance dans la capacité des hommes et des femmes du Québec. Nous avons confiance que nous sommes capables de faire mieux qu'ailleurs, mais pour cela, il faut relever la tête, il faut avoir confiance, bien sûr, il faut avoir la foi, bien sûr, mais il faut surtout ne pas critiquer la collectivité québécoise. Il faut appuyer les actions du gouvernement du Québec lorsque nous créons des emplois ou protégeons des emplois chez nous. Je pense qu'à ce point de vue-là, il n'y a rien de mieux que d'écouter certains chefs d'entreprises qui, pourtant, ont bien critiqué le gouvernement du Québec à leur tour et qui nous disent: Bravo, M. Parizeau, c'est la meilleure chose qu'on ait vue depuis longtemps de la part d'un gouvernement québécois, incluant les gouvernements du passé.

Si des gens sont capables de reconnaître cela, si véritablement les Québécois et les Québécoises se donnent la main, regardent en avant pour voir ce qu'on est capable de faire, je pense qu'on pourra réussir à répondre davantage aux besoins de la collectivité québécoise. Je suis très satisfait du budget déposé par le ministre des Finances parce que ce budget nous aide à faire en sorte que les entreprises québécoises soient beaucoup plus viables, créent des emplois au Québec et protègent les emplois au Québec.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Saint-Henri.

M. Roma Hains

M. Hains: Le 10 mai dernier venait échoir aux Québécois, pour l'année fiscale 1983-1984, un nouveau budget avec un déficit de plus de 3 000 000 000 $, qui viendra s'ajouter pour faire un total de 16 200 000 000 $ de déficit. Le bateau fiscal du gouvernement flotte par conséquent à la dérive, sans force motrice, les voiles flasques et sans aucun souffle de vie. Après le discours inaugural du premier ministre, nous voici vraiment devant un budget terne, sans surprise, avec quelques flammèches de millions sur un ciel fiscal gris et maussade, chargé encore de mauvais présages de chômage et de récession. Que sera l'année 1983-1984 sinon encore et toujours une longue attente de la reprise de l'économie, de l'activité ouvrière et de l'unité collective? Un ciel toujours noir, chargé d'orages, comme les tristes mois que nous venons de passer. Un ciel chargé des obsessions péquistes et souverainistes qui pèsent toujours lourdement sur la province et sur les hommes de chez nous.

Mme Juneau: Et les femmes?

M. Hains: Un ciel, enfin, qui menace d'éclater en rafales de chicanes, de divisions, d'inimitiés et de haine avec la foudre de la souveraineté au-dessus de nos têtes.

Des voix: Oh:

M. Hains: Un ciel lourd, un ciel pesant, qui maintiendra malheureusement l'incertitude et l'anxiété sur toute notre vie québécoise et qui nuira à notre essor économique. Ce discours venait clore en même temps l'année financière 1982-1983 où toutes les avanies et toutes les avaries ont été mises sur le dos du fédéral. Le ministre des Finances n'affirmait-il pas dernièrement qu'un Québec indépendant aurait vraisemblablement été en mesure d'atténuer les effets de la crise, pourtant d'envergure mondiale? C'est toujours la fable de la grenouille qui veut se faire aussi grosse que le boeuf. Cela finit toujours par éclater, par péter.

En fait, en 1982-1983, le ministre augmente les taxes et les impôts de plus de 1 200 000 000 $ par la taxe de vente, la taxe ascenseur. Il fait une ponction de 400 000 000 $ dans les poches de ses commettants. Autrement dit, c'est à la rame, les voiles toutes fendues et sans aucun moteur que M. le ministre a réussi à piloter son budget de l'année dernière. Ses assertions sont donc fallacieuses et prétentieuses et il ne devrait pas s'auréoler d'une couronne de fleurs de lis. Au fait, ses impositions fiscales inopportunes et malencontreuses ont carrément accentué la crise au Québec et ont fait plier l'échine à tous nos contribuables. Cette crise, dont nous sortons tous amochés, a débuté chez nous six mois plus vite qu'ailleurs, a été la plus cruelle et la plus prononcée des dix provinces. La reprise, malheureusement, sera plus tardive et moins sentie que dans le reste du pays. On a descendu la côte les deux pieds calés sur le frein et ça sent le brûlé.

Jusqu'où va-t-on dévaler? C'est une angoissante question. Voilà maintenant le budget 1983-1984. Sera-t-il vraiment le butoir où viendra s'arrêter le train en détresse? Et que laisse-t-il augurer? Le budget du ministre Jacques Parizeau n'est vraiment point un budget de relance. Le pire est passé, semble-t-il nous dire, assoyons-nous, attendons le meilleur. C'est ici que commence sa philosophie de l'immobilisme. (22 heures)

Comme le dit la motion de blâme de notre porte-parole financier, le député de Vaudreuil-Soulanges, on n'y rencontre vraiment aucune mesure significative propre à relancer la création d'emplois et les investissements; par contre, il maintient des taxes et des impôts à des niveaux inacceptables. Il ne fait rien pour rétablir la

santé des finances publiques.

Après les coupures budgétaires très austères, après les hausses de taxes indirectes, après les coupures salariales dans les entreprises, c'est le calme plat. Pendant ce temps, des dépenses continuent d'excéder notre capacité de payer, peu importe. Les surtaxes imposées temporairement pour un an, en 1981, nous écrasent toujours, peu importe aussi. Ce qui importe pour le ministre, c'est de récolter des taxes: 237 000 000 $ de plus pour la taxe de vente à 9%, 10 000 000 $ de plus pour la taxe des télécommunications, 633 000 000 $ de plus pour la taxe ascenseur sur l'essence, soit 880 000 000 $ à ces seuls trois postes.

Aucune bonne nouvelle pour les contribuables, dont le fardeau fiscal est déjà le plus lourd au Canada. "Des grenailles pour les contribuables", titrait la Presse à la une dans son édition du mercredi 11 mai. "De la bouillie pour les chats", dira, en coulisse, le chef de l'Union Nationale. Un humoriste disait: "C'est un budget de tampons hygiéniques et de cassettes vierges."

Notre cher ministre profite de ces temps d'immobilisme pour réfléchir et prêcher. Dans sa méditation, il constate que les querelles Ottawa-Québec nous ont coûté cher, que le fédéral n'est pas le seul à blâmer et il désapprouve la conduite de certains ministres de son parti dans leurs relations avec Ottawa. Il dira ceci: "Nous nous sommes amusés, alors que la chaloupe prenait l'eau, à nous mettre debout tous les deux, Ottawa et Québec, dans cette chaloupe et à nous battre à coups de poing."

Après ces déclarations judicieuses, par une drôle de contradiction et dans un même souffle, il part en croisade pour la souveraineté. Devant l'effondrement actuel de la province, il se demande: "Aurait-on pu faire pire si on avait été indépendant? Il se répond à lui-même: "L'indépendance du Québec, à l'égard de notre prospérité, est essentielle. Mais sa meilleure réflexion, M. le Président, est celle-ci: "La souveraineté ne nous rendra pas automatiquement intelligents." Quel dommage, M. le Président. Le miracle attendu n'arrivera donc jamais.

Lors de sa récente visite dans mon comté, à Saint-Henri, où s'était réunie une maigre assistance de 100 personnes, le ministre des Finances disait ceci: "Il nous faut faire la paix avec le fédéral; on doit se sortir du trou; après, on deviendra indépendant." Et il poursuivit: "Quand le taux de chômage aura baissé et que la crise économique sera apaisée, nous pourrons penser à devenir indépendants." Quelle belle manigance vraiment odieuse, M. le Président. Servons-nous d'Ottawa pour nous sortir du trou et, après, on l'abattra. C'est vraiment la morale de la trahison.

Mais par quelle aberration passent-ils, ces gens d'en face? Même leur chef disait, il y a quelque temps, que "l'indépendance devait passer par de saines finances" et, aujourd'hui, il nous dira, épaulé par son ministre des Finances, que "c'est par l'indépendance que nous arriverons à de saines finances". Vraiment, comme je le disais déjà, c'est virer la peau du chien à l'envers pour y mettre la queue à la place de la tête. C'est illogique. L'hiver est à l'envers, chantait Gilles Vigneault. On peut dire ici, à notre Assemblée, que les capots aussi virent à l'envers.

C'est le début d'un temps nouveau, a dit le premier ministre dans son discours inaugural. Depuis cette déclaration, qui est le thème d'une belle chanson, les ténors sortent des rangs de la chorale péquiste et chantent maintenant leurs petits solos sur la place publique. Permettez-moi, M. le Président, de vous présenter quelques-uns de ces chevaliers chantants de la table ronde péquiste. Voici le député de Lafontaine, Marcel Léger, qui est devenu, par un pur hasard, le nouveau parrain de Saint-Henri et qui s'en va faire carrière au Centre national des arts à Ottawa. Le député de Lotbinière, qui parcourt la province en chantant pour les PME, son bironton, bironton, birontaine. Le député de Drummondville, Michel Clair, qui soulève des transports chez son auditoire, mais qui, à la salle de Saint-Édouard à Lotbinière, s'est figé vraiment dans la musique classique et a dit à ses auditeurs: On ne mènera pas une campagne électorale trop sentimentale, mais plutôt axée sur les questions économiques. Ou encore il nous dira: "Il faut nous mettre en marche dès maintenant pour le grand jour. On s'attendait presque qu'il dise de sa première communion, mais il a dit le jour de l'indépendance.

Il y aura aussi le ministre des Affaires municipales, qui a donné son récital aux MRC. M. le ministre Jacques Léonard a donné un solo qui a vraiment ébranlé l'assistance; lui qui a toujours fait preuve de sobriété dans ses chansons, il s'est vraiment livré à l'ivresse de la souveraineté, voulant troquer les subventions aux municipalités contre leur reconnaissance et leur aide au processus de l'indépendance. C'est du donnant donnant. Souveraineté en retour de nouveaux revenus, dont la taxe de vente, rapporte la Presse du 30 avril dernier. La décentralisation, dira-t-il encore, ne peut se faire sans souveraineté. Comment peut-on, M. le Président, chanter sur des notes aussi croches? Claude Lavergne le disait dans son Dimanche-Matin du 1er mai: Il ne s'agit pas d'une menace de patronage ou d'assistance discriminatoire, mais (vraiment) d'un chantage déclaré et généralisé à l'égard de tous les élus municipaux, qui n'auront droit à une fiscalité municipale que contre la réalisation du projet péquiste. Jamais aura-ton assisté à un abus de pouvoir aussi considérable pour des fins partisanes. La

transparence de jadis est vraiment devenue l'opacité d'aujourd'hui.

Voici maintenant le poète-chanteur de l'Immigration et des Communautés culturelles. Au début, ce fut la bonne entente avec le ministre Godin qui jusqu'ici avait gagné la confiance des minorités, mais, en fin d'avril, tout le monde étonné s'est demandé quelle mouche l'avait piqué. Dans une volte-face surprenante, il a déclaré sans broncher: "Ceux qui ne sont pas capables de nous sentir comme Québécois n'ont qu'à partir. On ne changera pas d'odeur." Pourtant, cette odeur aromatisée au parfum du PQ avait été repoussée et rejetée au référendum. C'est vraiment un triste mot et une triste page qui s'inscrit dans les annales des langues du Québec et des communautés culturelles. En d'autres mots, pour le ministre, nous n'avons pas à regretter ces départs, même si des capitaux s'en vont en même temps.

Quelle bévue et quelle gaffe! Il est tellement normal de penser qu'en ces temps de crise économique tout départ d'investissements devient un drame, surtout pour un ministre québécois. Pourquoi cette interprétation si restrictive du qualificatif québécois? Est-ce que, par hasard, les anglophones ne seraient pas des nôtres? Non, M. le Président, cette déclaration du ministre Godin demeure irrecevable et devrait être retirée. Nous avons besoin de tous nos effectifs. Les départs demeurent toujours des pertes regrettables à tous égards, même si une nombreuse relève attend supposément aux frontières, comme le laisse entendre le ministre Godin. (23 h 10)

M. Dussault: Question de règlement.

Le Président: Une question de règlement du député de Châteauguay.

M. Dussault: M. le Président, j'écoute depuis quelques minutes le discours du député de Saint-Henri. Je remarque qu'il nomme systématiquement les députés par leur nom, alors que le règlement prévoit qu'on devrait les désigner par leur titre. Pourrait-on faire respecter le règlement, s'il vous plaît?

Le Président: Il s'agit davantage d'un usage que du règlement, si je ne m'abuse. Quoi qu'il en soit, c'est effectivement le cas, on doit référer à un autre membre de la Chambre par son titre et sa fonction et non par son nom de famille.

M. Hains: C'est clair que le droit d'émigrer, le droit de partir vers une société que l'on juge meilleure demeure intangible, mais il serait aberrant d'encourager les départs de nos groupes ethniques. Tout le monde se pose de sérieuses questions sur ces exodes et sur la régression des affaires. Les conseillers municipaux de Montréal ont été unanimes à demander à l'exécutif de la CUM une étude sérieuse sur les effets de la loi 101 relativement à l'économie de la métropole. Pourtant, ces conseillers appartiennent à trois formations politiques différentes et ne font pas partie de l'Opposition gouvernementale. Tout ce beau monde ne saurait être une bande d'hallucinés et des ennemis aveugles de la loi 101. L'Opposition est en accord avec le gouvernement pour la protection et la promotion du fait français au Québec, mais on peut, certes, rendre cette loi moins tatillonne et moins parcimonieuse dans ses libéralités. C'est, d'ailleurs, ce qu'avaient promis le premier ministre et le ministre des Communautés culturelles et de l'Immigration. Comme le disait Jean-Claude Leclerc dans le Devoir: "La crise économique et le nationalisme péquiste sont en train de devenir un mélange dangereux. Si M. le ministre de l'Immigration y succombe, qui, à Québec, gardera patience et raison?"

D'ailleurs, cette fameuse élection référendaire que propose le gouvernement pour le prochain appel au peuple est "vraiment indéfendable au point de vue démocratique, irresponsable au point de vue politique et vraiment stérile au point de vue pratique". Cette assertion vient de Jean-Louis Roy, dans le Devoir du 2 mai dernier. À quoi bon souffler de nouvelles "ballounes" bleues dans le ciel québécois, "ballounes" sur lesquelles le peuple a tiré librement lors du référendum et qu'il croyait définitivement crevées? Là encore, le premier ministre se contredit lamentablement...

J'ai droit à une demi-heure, M. le Président. Cela va?

Le Président: Oui, je m'excuse. M. Hains: Merci.

Une voix: Il a commencé à 21 h 55, M. le Président.

M. Hains: Il y a un an et demi environ, M. le premier ministre avait répudié catégoriquement la notion d'élection référendaire et était prêt à se dissocier d'un parti qui ferait sienne cette option. Maintenant, il adore ce qu'il a brûlé et fait l'apologie d'une thèse qui dénie les plus élémentaires valeurs démocratiques. C'est un des vôtres, M. Claude Morin, qui vous donne une terrible gifle à ce sujet. Voici ce qu'il affirme: "Le statut politique d'une nation ne saurait être changé que par une consultation populaire portant sur cette seule question. Si le scrutin général porte sur l'indépendance ou la souveraineté-association, on ne saura jamais quels auront été les facteurs déterminants dans la décision populaire. Il peut y avoir 43 facteurs différents qui jouent

dans ce domaine." Est-ce assez clair? Pourquoi cette obstination?

Car, dira Jean-Louis Roy dans le Devoir: "Les analyses les plus partisanes, même enveloppées dans la rhétorique habile de M. Jacques Parizeau, ne feront croire à personne que le Canada est coupable de tous les maux économiques récents du Québec. La prospérité du Québec est liée à l'état général de l'économie mondiale. Toutes les nations, ajoutait-il, même les plus désireuses d'actions indépendantes, ont reconnu la communauté du destin, l'interdépendance des moyens et l'irréversibilité de l'intégration." D'ailleurs, l'exemple de la France est frappant, cette France dont le gouvernement actuel se privilégie tellement de son amitié. Mitterrand a tracé des limites brutales et précises à la souveraineté française, si farouche soit-elle: "La France dans l'Europe, la France dans le bloc atlantique. Nul, ajoutera le président français ne saurait briser les liens communautaires et leur négation sera certainement suicidaire."

Je m'étonne toujours de cette obstination acharnée et tenace du Parti québécois quant à l'indépendance. Comment des gens intelligents, comme je juge mes collègues d'en face, peuvent-ils persister dans cette option? Est-ce que je suis en retard et régressif? Non. "Les indépendantistes purs et durs", comme les appelle M. Claude Charron dans son livre Désobéir et les partisans irréductibles ne sont que 8%, dit "Craft", CROP dans son dernier sondage. Heureusement qu'ils ne font pas comme le fromage. Je suis donc dans la bonne direction avec les 92% qui pensent que ce n'est pas vraiment la bonne solution. Comme on dit souvent: Vox Dei vox populi. La voix du peuple, c'est la voix de Dieu. Pourquoi le PQ maintient-il toujours cette élection référendaire qui sera suicidaire, comme l'a dit Claude Morin? Est-ce qu'il veut vraiment se faire hara-kiri?

Une voix: Il ne le fera pas.

M. Hains: Est-ce parce qu'il n'aura que 18%, d'après les intentions de vote actuelles? Peut-être pas.

Une voix: Les martyrs.

M. Hains: Voici peut-être le secret de cette machination. Je le trouve dans un article de Vincent Prince dans le Devoir: "Il est évident - je vous prie de bien écouter -que le gouvernement pourrait être mal pris s'il voulait se faire plébisciter sur la sagesse de son administration et sur son orientation social-démocrate." Je répète, "il serait mal pris". Alors, "mieux vaut oublier tout cela et marteler plutôt les objectifs d'indépendance". Calcul savant que le peuple dans sa sagesse traditionnelle saura bien déjouer. Non, M. le Président, il ne faut pas jouer le sort du Québec à l'aveuglette et au risque de l'aventure. Si les mots liberté et indépendance peuvent nous émouvoir, nous griser et nous emballer, il faut vivre les deux pieds dans la réalité et nous dégriser de rêves impossibles. Il faut reprendre les sentiers de la sagesse, de l'équilibre, de la raison, de la bonne administration et de la gestion soignée de nos finances, de notre économie et de l'entreprise privée. Pourquoi tous ces "becs" monopolisés par l'État? Sucrebec, Dépannobec, Pétrobec, Aérobec, SIDBEC, etc. Vive l'entreprise privée! Ce que nous voulons, ce que notre peuple veut, ce n'est pas tellement un Québec libre, mais c'est de vivre libre au Québec.

Des voix: Bravo! Bravo! (22 h 20)

M. Hains: Ce fut le thème d'une conférence de M. Roger Landry devant la Chambre de commerce de Montréal en avril dernier.

L'ambiguïté entretenue par le présent gouvernement quant à son statut constitutionnel ne fait que hisser sur notre province le drapeau noir de la morosité. C'est vraiment triste. Ce n'est pas avec le projet d'une élection référendaire qu'il va ramener le soleil et la prospérité dans le ciel de notre province, ni ramener la paix et la sérénité dans le coeur de nos concitoyens. En 1976, le gouvernement n'a pas été élu pour la souveraineté, ni pour un changement de société, mais pour être un bon gouvernement, comme il le disait lui-même. Notre peuple a toujours été friand de changements. À ce moment, il était ici. Mais quelle déception depuis! Jamais notre province ne s'est enlisée dans autant de dettes, de chômage et de marasme financier. Jamais notre peuple ne s'est trouvé aussi divisé, tiraillé par les luttes intestines à la suite du référendum. Et dire que le premier ministre et ses acolytes nous préparent encore un sinistre scénario pour la prochaine élection.

Comme le dit Marcel Adam, dans la Presse de samedi dernier, c'est le retour à la tour de Babel avec la confusion des langues et des interprétations. "Encore une fois, le gouvernement replonge le Québec dans une guerre fratricide et va dresser, les uns contre les autres, les parents, les amis, les compagnons de travail, les Franco-Québécois contre les autres groupes, il va sacrifier le reste d'énergie vitale des Québécois à la poursuite d'une idée fixe, sinon à la satisfaction d'un orgueil personnel." Alors, le Québec sera le dernier à se remettre encore de la crise économique qui l'a complètement éreinté.

Et M. Marcel Adam termine ainsi: N'y a-t-il pas là quelque chose de stupide, peut-être même de masochiste pour ce

gouvernement péquiste qui a été, depuis l'an 1 du gouvernement péquiste, "la principale cause du tarissement des investissements et du dépérissement économique qui en est résulté"? Pourtant, une aurore encore pâle d'une reprise économique est là.

Une voix: Aurore, l'enfant martyre!

M. Hains: Pourquoi faut-il gâter ce lever d'un vrai jour nouveau en allant se terrer dans la clandestinité pour tramer un putsch séparatiste? Au grand soleil levant, pourquoi ne pas marcher et travailler ensemble épaule contre épaule à rebâtir notre solidarité, notre fraternité, nos chantiers et nos espoirs? C'est ce rêve que veut vivre vraiment notre peuple et non pas des guérillas fratricides. Parler de démocratie en pareille conjoncture est vraiment sacrilège, car c'est mépriser et déchirer l'entente référendaire de mai 1980 voulue et signée par le peuple québécois.

Notre avenir et notre bonheur collectif ne tiennent pas à ces manoeuvres de brousse que le PQ semble vouloir renouveler encore dans peu d'années. Assumons nos propres responsabilités, travaillons ensemble de nos mains, de nos esprits et de nos coeurs; enrôlons nos jeunes dans l'édification de notre chantier communautaire, la chanson au coeur et aux lèvres, pour bâtir dans un grand pays un Québec non asservi aux valeurs éphémères d'un autre âge et encore moins aux risques d'une folle aventure séparatiste dans la brousse de l'indépendance. Merci.

Le Président: Avant de céder la parole au ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, je voudrais corriger ce que j'ai dit tantôt à la suite de la question de règlement de M. le député de Châteauguay. C'est bel et bien en vertu du règlement, et non seulement de l'usage, à l'article 99.6, qu'il est interdit de désigner à un autre membre de l'Assemblée nationale autrement que par son titre ou sa fonction.

M. le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche.

M. Guy Chevrette

M. Chevrette: M. le Président, c'est la première fois que j'entends un poète déblatérer contre d'autres poètes. C'est la première fois que j'entends un poète critiquer les chansonniers, et, pourtant, verser dans le même vice que tous les chansonniers et tous les poètes, en particulier quand on appartient à une succursale. Je vais essayer d'en faire la démonstration.

C'était beau d'entendre le député de Saint-Henri parler de guerre fratricide, de nuages, de griserie, d'emballement, d'enivrement. C'était fantastique. Mais les

Québécois qui nous écoutent doivent se demander, après ce discours: Où est-ce qu'il s'en va au juste? Qu'est-ce qu'il veut dire au juste? Qui est-ce qu'il défend au juste? Que défend-il au juste? Les gens de Saint-Henri, comme les gens de mon comté, doivent se demander: Où est-ce qu'il va atterrir? Où est-ce qu'il va aboutir? A-t-il quelque chose à dire? C'est un peu cela, je pense, que les gens de chez nous et les gens de votre comté, M. le député, se sont posé comme questions. C'était beau. Les phrases coulaient. C'était fantastique, c'était agréable à l'oreille.

Mais cela dit, M. le Président, tout ce que j'ai entendu, depuis la première phrase, par laquelle a commencé son discours, c'est: 16 000 000 000 $ de déficit accumulé sous le gouvernement péquiste. Scandale! Cré poète, réveillez-vous: 16 000 000 000 $ depuis six ou sept ans, ce n'est même pas la moitié du déficit fédéral en un an. Et vous n'êtes pas scandalisé! Mais non! 33% de déficit au fédéral, ce n'est pas grave, ce sont mes grands frères libéraux qui m'ont dit de dire que c'était beau. Donc, tout ce qui est fédéral et libéral, c'est beau, c'est grand. Tout ce qui est québécois, c'est petit, c'est ténébreux, c'est nuageux. C'est poétique de l'entendre, mais c'est farfelu comme jugement. Cela ne devrait pas être digne d'un parlementaire québécois né de la lignée des Lesage qui ne craignait pas de dire qu'il fallait être maîtres chez nous. Je n'en reviens pas d'entendre ça, moi.

De l'à-plat-ventrisme du genre, des mollusques que nous avons devant nous, des invertébrés, des gens sans colonne vertébrale et une succursale de gens qui n'ont même pas de mandat, qui exécutent aveuglément à la lettre et qui se doivent de vanter les mérites des actions des autres même si c'est au détriment du peuple québécois, je n'en reviens tout simplement pas.

Commencer un discours en cette Chambre en se disant scandalisé de l'état du déficit après six ans d'un parti, d'un gouvernement, alors que cela n'atteint pas 50% du déficit annuel de leur grande maison mère, je trouve ça épouvantable de la part d'un député. Il faut bien être poète mais c'est un manque de réalisme et, pourtant, le même député de Saint-Henri disait: Il faut être réaliste, il faut avoir les deux pieds sur terre. J'ai hâte qu'il retombe sur terre, qu'il ouvre son parachute, parce qu'il va tomber dru au train dont il est parti. Il n'y a rien de beau, il n'y a rien de bon au Québec. Tout ce qu'on fait, ce n'est pas beau, ce n'est pas bon. Mais non! Ce n'est pas beau, ce n'est pas bon.

Pour le secteur privé, on dit qu'il nous faut accélérer les projets d'investissement, qu'il nous faut utiliser nos ressources électriques pour stimuler l'industrie. Baie-Comeau, Pechiney, ce n'est pas beau; c'est

fait par le gouvernement du Québec, ce n'est pas bon, ça, voyons! Cela n'a pas d'allure, ces affaires-là. N'essayez pas! La Caisse de dépôt investit quelque part, ce n'est pas beau, ce n'est pas bon, c'est dangereux.

Mais oui, la raffinerie de sucre, attention, ce n'est pas beau, ce n'est pas bon; c'est de l'argent des Québécois qui sert à développer le Québec. Mais si c'était fédéral, oh comme ce serait beau, ce serait grand! Payer n'importe quoi mille fois ce que cela coûte, ce n'est pas grave, c'est fait par nos grands frères libéraux fédéraux. C'est beau, c'est bon, le ciel est bleu. Oui, le ciel est bleu, M. le député de Saint-Henri. N'oubliez pas que Duplessis disait: "L'enfer est rouge et le ciel est bleu." Quand on vous regarde, on se croirait en enfer, je vous le jure.

On a offert aux Québécois le virage technologique pour faire face exactement à la crise qu'on traverse, s'en aller vers l'avenir. Ce n'est pas beau, ça vient du Québec. Ce n'est pas bon, cela a été pensé par des Québécois. Sûrement que ce n'est pas bon. Même si on calquait à la lettre les politiques du gouvernement fédéral, ce ne serait pas beau, ce ne serait pas bon parce que ce serait la décision de Québécois. (22 h 30)

Une succursale d'enfants d'école qui se diminuent qui se rapetissent, qui se ratatinent devant tout ce qui est fait au Québec. Ce n'est jamais beau, ce n'est jamais bon. Je n'en reviens tout simplement pas, en particulier de la part du député de Saint-Henri que je croyais l'un des plus brillants de leur caucus. Je vous avoue que je suis carrément désarmé. Quand on pense à l'amélioration des conditions de financement des exportations, ce n'est pas beau, ce n'est pas bon, ça vient du Québec et cela a été décidé par des Québécois; ce n'est sûrement pas bon. Le plan de logement qui a été présenté par le ministre...

Une voix: Ce n'est pas bon.

M. Chevrette: ...de l'Habitation - vous voyez, M. le Président, j'ai respecté votre directive - ce n'est pas beau, ce n'est pas bon. Même si les entrepreneurs, même si les gens disent qu'il est excellent, même si les financiers, les banquiers et les caissiers nous disent que voilà un programme extrêmement important pour la relance du bâtiment, ainsi va le bâtiment, ainsi va l'économie, pour le Parti libéral, ce n'est pas beau et ce n'est pas bon, ça vient du Québec et cela a été décidé par des Québécois. Voyons! Si ç'avait été la maison mère, ce serait beau, ce serait grand et ce serait merveilleux; mais, décidé par nous autres, non. On est trop petit. Il faut s'arranger pour que ça n'ait l'air de rien, nos affaires. Il ne faut pas se vendre, nous. Il ne faut pas faire voir qu'on a des idées. De l'à-plat-ventrisme, des mollusques, des invertébrés, ces gens-là.

Je les entends répondre: Oui, mais au Québec, vous savez, les impôts sont élevés. Exactement 554 $ de moins qu'en Ontario pour un salarié de 20 000 $ et moins. De cela, on n'en parle pas. Bien non. Imaginez-vous, pour une fois qu'on fait quelque chose de bon, il ne faut surtout pas en parler. Ils vont dire: Non, ce n'est pas cela. Mais eux autres, je les comprends; ils vont parler des hauts salariés. Ils sont habitués de frayer surtout par là. Les très hauts salariés sont surtaxés au Québec. C'est vrai qu'il y a une ascension au-delà de 30 000 $, on est un peu plus haut que les autres provinces, mais je vais rappeler des choses au député de Vaudreuil-Soulanges en même temps, lui qui s'alimente à cette source.

Récemment, la Canadian Business Review publiait une étude du Conference Board. On parlait des salariés de 40 000 $. L'étude du Conference Board présente l'avantage de tenir compte de l'ensemble des coûts et dépenses que doit assumer une famille vivant dans l'une des six grandes villes. Les auteurs ont fait une comparaison avec six grandes villes canadiennes. Ils ont tenu compte des dépenses de logement, de transport, d'habillement, d'ameublement, d'équipements ménagers et d'autres dépenses courantes. Quel est le résultat de cette étude? Il serait peut-être bon de regarder cela. La première au Canada, c'est Winnipeg. À partir d'un salaire de 40 000 $, c'est une personne vivant à Winnipeg qui l'emporte avec une épargne disponible de 4915 $. La deuxième ville au Canada...

Une voix: Montréal.

M. Chevrette: ...c'est Montréal, avec une possibilité d'épargne de 2542 $. La troisième, Saint-Jean, Nouveau-Brunswick, avec 2380 $; la quatrième, Calgary, moins 527 $; la cinquième, Toronto, moins 670 $ et Vancouver, moins 3914 $.

Des voix: Ah!

M. Chevrette: Ah! Comme ça coûte cher d'impôts au Québec! On se compare tout le temps aux autres. Il y a une question de train de vie. Bâtissez une maison au Québec et bâtissez-en une semblable en Ontario, comparez les prix et vous verrez que c'est du simple au double. Mais ce n'est pas grave, non, non. Il faut que le Parti libéral, succursale de la maison mère, dise que ça n'a pas d'allure de vivre au Québec. Après, ils diront: Il y a des émigrants au Québec, des gens qui s'en vont à l'extérieur parce que ça coûte trop cher de vivre au Québec. Mensonge! Menteurs! Vous ne dites pas la vérité.

Pourtant, nous avons pris nos

statistiques là où vous vous gavez vous-mêmes, le Conference Board, Statistique Canada. Vous en parlez, vous en jouissez quand vous en parlez. Vous vous grisez, comme le dirait si bien le député de Saint-Henri. Bien, dégrisez et arrivez sur terre! Fouillez dans les statistiques et vous vous rendrez compte qu'on n'est pas si mal que ça. À se regarder, on se désole, et, dans votre cas, je vous comprends. Mais, à se comparer, on se console. Je peux vous affirmer que je trouve passablement déplorable qu'une formation politique cherche par tous les moyens, à chaque occasion, par des questions, par des discours, au sujet de toutes les lois, que ce soit celle du ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation qui se lève pour annoncer une loi sur la protection des cultivateurs, que ce soit le plan Biron, que ce soit le ministre de l'Habitation et de la Protection du consommateur qui propose quelque chose de fantastique pour l'ensemble des Québécois... Ce n'est pas beau, ce n'est pas bon, ce n'est jamais assez, même si ces gens n'ont jamais rien fait sur de tels sujets tout le temps qu'ils ont été là. Ils chialent contre le drainage agricole. En l'espace de six ans, le gouvernement actuel a fait plus que le double de tout ce qu'ils ont fait sous leur régime, et ce n'est pas assez, malgré tous les faibles moyens qu'on a présentement. Je dis tous les faibles moyens, parce qu'on sait que l'argent n'entre pas comme il entrait. Ils ont administré durant les années de vaches grasses et qui ont-ils enrichis? Leurs petits amis; personne d'autre. Ils enrichissaient leurs petits amis. Vous lirez le rapport Malouf. Si vous voulez en lire d'autres, vous vous abreuverez, surtout les poètes, du rapport Cliche. Vous allez voir que vous ne ferez pas perdre 15 000 $ par jour au Parlement, au salon rouge. Je sais que je n'ai pas le droit d'en parler; donc, je m'arrêterai justement là.

Mon ministère a l'intention de suivre exactement les traces du gouvernement en ce qui regarde la relance économique. Ce n'est pas pour rien que, cette année, nous avons annoncé un investissement de 9 800 000 $ au mont Sainte-Anne Pourquoi? Pour développer le tourisme dans la région de Québec. C'est l'industrie première dans la région. Nous allons installer des canons à neige pour nous permettre de skier au moins six ou sept mois par année. Dès que l'entente fédérale-provinciale sera conclue, on fera de même au Mont-Orford, au mont Sutton, au mont Sainte-Marie.

Des voix: Bravo!

M. Chevrette: Je pense, M. le Président, qu'on voit devant nous. Je comprends que le député d'Orford doit être heureux. Tout le temps qu'il a été au pouvoir, il n'a pas réussi à aller chercher suffisamment pour assurer le développement. Donc, c'est bien évident qu'on va lui donner l'occasion de finir sa carrière politique avec un vrai développement de son mont par un gouvernement adverse. Au Mont-Tremblant, cela a été de même.

Je pourrais vous dire ceci: Nous tentons de développer, à mon ministère, des politiques qui ont des retombées économiques. Je vais vous donner des exemples. Concernant le trappage, nous n'avons présentement que 45% de nos possibilités annuelles. Déjà, nous avons une activité économique d'environ 10 000 000 $ à 12 000 000 $. Si on augmentait le nombre de terrains enregistrés de piégeage, nous pourrions facilement doubler les retombées économiques. On est porté à sous-estimer les effets de la pêche sportive qui rapporte 13 $ pour 1 $ d'investissement au ministère. Les fêtes populaires, tout le monde dit que c'est de l'argent gaspillé. Je m'excuse, mais cela rapporte 9 $ pour 1 $ d'investissement. Mais on ne tient pas compte de cela. On parle de toutes sortes de choses, mais on ne regarde pas les effets des gestes que l'on pose.

Concernant les pourvoiries, j'ai annoncé une politique qui aura accès aux crédits touristiques et aux programmes de création d'emplois. Ces gens-là pourront bénéficier du soutien du ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche précisément pour améliorer leur rendement, pour améliorer les retombées économiques et pour rentabiliser leurs pourvoiries.

Donc, M. le Président, notre ministère s'inscrit carrément dans la foulée gouvernementale, ce désir de poser des gestes qui ont des retombées économiques certaines. C'est bien sûr que cela ne plaira pas à l'Opposition. Ces gens sont là pour diminuer le Québec. Ils ne sont pas là pour consolider les efforts qu'on fait. Il me semble que, dans un Parlement, dans une enceinte dite l'Assemblée nationale du Québec, on devrait avoir le souci premier de se grandir, de se motiver entre nous, et non pas de chercher à diminuer tout geste positif, d'autant plus qu'on pourra nous prêter tous les maux. On pourra nous dire qu'on n'est pas bons. On pourra nous dire qu'on administre mal. On pourra nous dire qu'on n'a pas de politique. Mais je répète que, quand on se compare au gouvernement central qui, pour nous, n'est pas une maison mère, qui n'est pas notre ligne de pensée, qui ne nous dicte pas nos gestes... Il est inconcevable qu'on n'ait pas, en cette enceinte, de formation politique qui reconnaisse les gestes positifs, qui reconnaisse les actes concrets, les efforts malgré les faibles moyens. Je n'en reviens tout simplement pas. Il me semble qu'on pourrait reconnaître que le gouvernement actuel, par ses politiques avant-gardistes, il

faut le dire, a brisé ce cercle de conservatisme économique que nous avions. Nous étions habitués à contenter tranquillement les gens avec de petits suçons, de petites subventions de dernière minute sans penser à cet esprit créateur indispensable, sans susciter cette innovation indispensable si on veut se tenir au diapason des autres pays. (22 h 40)

Il me semble que le gouvernement actuel a prouvé qu'il y avait de l'imagination dans l'ensemble des têtes québécoises et dans l'ensemble de nos dirigeants d'entreprises. Je suis surpris de voir qu'on ne fait pas plus confiance à nos entrepreneurs, quand eux-mêmes viennent nous dire: Ne vous occupez pas de la politique, votre plan est bon. Vous nous avez sauvés d'une faillite. Vous nous avez sauvés d'une fermeture d'usine. Cela va me permettre d'investir. Cela va me permettre de créer de l'emploi dans une conjoncture économique difficile. Il y a des Québécois qui ont investi dans le capital de risque, malgré les hauts taux d'intérêt. Cela prouve une chose, c'est qu'ils ont foi en l'avenir. Ceux qui cherchent à rapetisser, ceux qui ne voient que du noir ici et qui oublient que cette crise est mondiale, je comprends qu'ils cherchent à se rapetisser parce qu'ils marchent à tâtons. Ils ne savent pas où ils s'en vont.

C'est difficile aussi, quand tu es mouton et que tu n'as pas de leader en avant, de savoir où tu vas. Un troupeau de moutons, ça suit le chef. Quand il plonge à l'eau, tous les moutons suivent. Quand tu n'as pas de chef, tu t'en vas un peu partout, tu broutes un peu partout, mais tu n'atterris nulle part. Je vous comprends. J'ai hâte que vous vous en trouviez un, que vous vous trouviez une philosophie qui garde un peu cet esprit nationaliste, qui va vous démontrer cette ferveur de Québécois développée chez vous, par vous et pour vous. C'est notre philosophie. J'ai hâte d'entendre au moins un ténor de l'autre côté avoir le courage de se lever et dire qu'il a foi en l'avenir du Québec, foi dans les entreprises privées québécoises, foi aux modalités qu'on met sur pied pour encourager l'entreprise québécoise, foi en la jeunesse québécoise de demain et en son talent face à la technologie moderne qui vient lui créer les débouchés qui s'imposent. Je vous avoue très honnêtement, Dieu merci, que vous êtes là pour longtemps.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député d'Orford.

M. Georges Vaillancourt

M. Vaillancourt (Orford): M. le Président, je n'ai pas l'intention de relever toutes les conneries que le député de Joliette a dites, mais le député qui m'a précédé ne se souvient probablement pas des premiers temps que j'ai été en politique en 1960. Je pense que le gouvernement provincial de M. Lesage aussi bien que ceux de M. Johnson, de M. Bertrand et de M. Bourassa n'ont pas été des succursales du fédéral parce que nous avons obtenu de nombreuses choses à la suite des négociations fédérale-provinciales qui ont eu cours pendant les 22 ou 23 dernières années que je suis ici en politique et dont j'ai eu connaissance.

M. le Président, je pense que le député de Joliette n'accepte pas tellement l'Opposition. Que ferait un gouvernement sans Opposition dans cette Assemblée nationale? Que feraient les ministres s'ils n'avaient pas d'Opposition et s'ils n'avaient pas de gardiens pour que l'argent de nos taxes soit bien dépensé? Il est vrai que c'est fatigant l'Opposition, mais je pense que, si nous voulons avoir une bonne administration, il en faut une. Je lisais, dans un article récent, un commentaire du discours sur le budget dans lequel on disait et avec raison que le ministre des Finances du Québec nous avait livré un texte "conservateur". Voilà bien une drôle d'étiquette pour un gouvernement qui se voulait avant tout social-démocrate. On aurait pu s'attendre, en effet, qu'après sept années de pouvoir, le gouvernement puisse enfin aboutir à une politique budgétaire qui correspond à sa raison d'être, celle d'un budget visant à promouvoir la social-démocratie.

M. le Président, au lieu de cela, la meilleure performance depuis 1976 pour le gouvernement ou pour le ministre des Finances consiste, en cette période de crise, à nous présenter un discours modéré et il faut se compter chanceux, semble-t-il, si l'impôt sur le revenu des particuliers n'est pas augmenté. Il faut dire en retour que les particuliers se sentent plutôt malheureux au chapitre des taxes indirectes depuis au moins six ans, et plus particulièrement depuis l'instauration du principe dévastateur sur le plan concurrentiel, comme la taxe ascenseur. Soulignons au passage que son rythme a doublé depuis le mini-budget, passant de 20% à 40%. Sur ce point précis, le ministre des Finances aurait pu faire preuve de courage en abolissant ce principe purement et simplement. Ce qui était auparavant une mesure temporaire semble se transformer en une politique permanente au même titre que toutes les autres taxes qu'il a imposées depuis qu'il est en poste. Je vous rappellerai aussi que cette taxe ascenseur est loin d'améliorer la situation d'une région comme celle de l'Estrie. Pour vous prouver que cette taxe ascenseur a deux poids, deux mesures, comme je le disais cette semaine lorsque j'ai posé une question au ministre du Revenu, on voit dans les villes frontalières avec les États-Unis que l'essence se vend

0,393 $ en dollars canadiens du côté américain et, dans ma région, 0,54 $, ce qui fait une différence de 0,13 $; dans la région frontalière du Nouveau-Brunswick, l'essence jaune se vend 0,50 $ à 0,53 $, ce qui fait une différence de 0,12 $ le gallon et, à la frontière de l'Ontario, il y a une différence de 0,08 $; ce qui veut dire que, si la population frontalière du côté canadien va faire le plein d'essence du côté américain, avec 0,13 $ pour le régulier, 0,16 $ pour le sans-plomb régulier et 0,14 $ dans le sans plomb super, je pense qu'à peu près la majorité de la population est intéressée à aller économiser autant d'argent. C'est pour cette raison que je crois qu'avec la politique du ministre des Finances d'accorder une réduction dans les régions frontalières de l'Ontario et du Nouveau-Brunswick, je pense qu'il devrait en donner autant et même davantage à la population des régions frontalières des États-Unis.

En effet, lors d'un récent débat en cette Chambre, il avait été établi que le rendement de cette taxe en 1982-1983 fut de l'ordre de 45 000 000 $ dans une région qui ne représente que 3,75% de l'ensemble de la population québécoise et où cette taxe équivalait à 2,29% du revenu disponible. Cet exemple suffit à démontrer qu'il y a des manques sérieux à ce budget. Si le gouvernement, comme il le prétend, n'est plus en mesure de nous annoncer des mesures encourageantes pour la relance de notre économie, il aurait pu au moins s'employer à minimiser les effets de ses propres mesures antérieures qui ont accéléré la récession au Québec. Du budget modéré, on aurait pu alors passer au budget accélérateur, de manière à redonner confiance à ceux et celles qui croient en une relance possible d'ici peu.

Parlant de la relance, il est normal que ce gouvernement s'accroche aussi fortement à cette perspective d'avenir qui pourrait, selon certains, améliorer sa cote auprès du public. Toutefois, la récession a durement frappé des secteurs vitaux pour l'économie du Québec. Il faudra se résigner à patienter peut-être un peu plus longtemps avant de revoir les beaux jours d'autrefois. C'est ainsi qu'au cours des douze derniers mois, le taux de chômage a atteint 13,8% au Québec, comparativement à 11% dans l'ensemble du Canada et 9,8% en Ontario. Pour le seul mois d'avril 1983, ce taux était de l'ordre de 14,4%, soit une hausse de 1,2% par rapport à la même période l'an dernier. (22 h 50)

Le ministre des Finances ne nous a-t-il pas dit, le soir du 10 mai, et je cite à la page 7 du discours sur le budget: "L'économie internationale a traversé en 1982 la pire crise économique que l'on ait connue depuis celle des années trente." Maintenant, si on revient au taux de chômage du mois d'avril, lequel se situe à 1,2% de plus que l'année dernière, de quelle façon devons-nous l'interpréter? Le choix est mince: Ou bien l'économie du Québec n'a rien à voir avec ce qui se passe sur la scène internationale, puisque les indicateurs démontrent une légère reprise depuis le début de l'année 1983, ou bien le gouvernement du Québec agit délibérément comme s'il était seul dans la course et, incapable qu'il est de rétablir la situation, il attribue au Québec un statut particulier qui fait en sorte que l'indépendance constitue maintenant une condition pour un avenir meilleur.

Pendant ce temps, le Québec occupe toujours une place confortable au chapitre des sans-travail, dont le nombre est passé de 389 000 à 432 000 entre le mois d'avril 1982 et le mois d'avril 1983. En somme, ce gouvernement ne sait plus de quelle manière jouer les cartes en sa faveur. Privé de moyens, il peut tout au plus nous annoncer quelques mesures propres à inciter les investisseurs à avoir confiance dans l'économie du Québec. Mais il aurait dû savoir qu'avant d'acquérir leur confiance, on a d'abord besoin d'avoir confiance en ceux qui les dirigent. Voilà que maintenant cette confiance envers les dirigeants est perdue. Voilà aussi cette carte gagnante qui n'est plus en possession du gouvernement et dont toute la population aurait grandement besoin.

Cette population n'a plus de porte-parole gouvernemental crédible. Les partenaires sur qui le gouvernement comptait pour assurer cette relance sont fatigués d'entendre les discours sur les perspectives meilleures d'un Québec indépendant. Ils sont aussi exténués de devoir subir les effets des politiques fiscales, désastreuses par rapport à d'autres provinces. Ils sont enfin découragés d'assister impuissants aux conséquences combien coûteuses de la réglementation qui ajoutent au fardeau déjà lourd.

En rapport avec la situation des jeunes, il n'y a guère de meilleure nouvelle. En avril 1983, 23,1% d'entre eux étaient toujours sans travail, soit un taux semblable à la moyenne des douze derniers mois de l'année 1982, la pire année, dit-on, depuis les années trente. La moyenne du taux de chômage chez les jeunes, pourtant élevée ailleurs aussi, atteignait 17,1% en Ontario, pour une moyenne canadienne de 18% au cours de l'année 1982. Dans la région de l'Estrie, le taux de chômage était de l'ordre de 15,3% au mois d'avril 1983, soit près de 1% de plus que la moyenne québécoise. Enfin, un apport accru des investisseurs privés serait d'autant plus souhaitable que le nombre d'emplois créés au cours des douze derniers mois au Québec totalise 6000, comparativement à une disparition de l'ordre de 151 000 au cours des 24 derniers mois. C'est donc dire que, pour rétablir la situation, le gouvernement

devrait nous annoncer au cours de la présente année la création d'environ 145 000 emplois.

Quant au secteur stratégique de l'économie du Québec, il faut espérer que les mesures annoncées dans le discours sur le budget soient bénéfiques, de manière à redonner confiance aux Québécois. Jusqu'à maintenant, les indicateurs nous démontrent une dégradation qui s'est poursuivie tout au long de l'année 1982.

Au chapitre des dépenses en immobilisations, nous aurions connu une hausse de 7% entre 1980 et 1981, suivie d'une baisse de 5% entre 1982 et 1983. Les dernières prévisions indiquent une autre baisse. Bien qu'inférieure, elle serait tout de même de 1% entre 1982 et 1983. Nous en serions alors au même point qu'avant 1980. Dans le secteur de la fabrication, secteur qui intéresse particulièrement la région des Cantons de l'Est, le Québec aurait vu ses dépenses augmenter de 4% en 1980 et 1981 pour ensuite chuter de 11% entre 1981 et 1982. Le constat est suffisamment alarmant pour apprécier les mesures annoncées par le ministre des Finances à l'égard des petites et des moyennes entreprises, mais on aurait peut-être souhaité des politiques d'envergure destinées aux grandes entreprises, lesquelles sont toujours une grande part de notre économie.

Enfin, M. le Président, des mesures susceptibles d'encourager la situation des individus auraient aussi été appréciées dans notre région où 15 566 bénéficiaires de l'aide sociale doivent compter sur l'État pour toucher un maigre revenu qui leur permet à peine d'avoir accès aux biens essentiels. Rappelons aussi qu'au 1er mai 1983, le nombre total des bénéficiaires au Québec de l'aide sociale était de 383 773, soit une hausse de 23% par rapport au 1er mai 1977 et de 8% par rapport au 1er mai 1982. Il est triste aussi de constater que le nombre réel de dépendants de l'aide sociale, selon certains estimateurs, serait d'environ 600 000.

En deuxième remarque, on est toujours surpris d'attendre depuis quelques années les efforts de ce gouvernement visant principalement à dégager une marge de manoeuvre financière suffisamment grande de façon à réaliser de grands projets. Dernièrement, les fonctionnaires provinciaux ont dû consentir à des sacrifices salariaux pour apprendre un peu plus tard que les quelques 500 000 000 $ ainsi récupérés ne serviront à créer de l'emploi que dans une proportion d'environ la moitié de cette somme.

Dans d'autres domaines, ce sont les querelles entre Ottawa et Québec qui, selon le ministre des Finances, coûteraient fort cher aux Québécois. Lorsqu'on entend le ministre confesser qu'il est évident que ces tensions et ces luttes ont contribué à la détérioration de l'économie du Québec, on est alors en droit de se demander ce qu'il entend faire pour rétablir des relations, sinon courtoises du moins normales, entre les deux paliers de gouvernement. Dans les secteurs d'activité relevant du ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, par exemple, les querelles coûtent effectivement fort cher. Heureusement que le ministre a annoncé dans son discours tout à l'heure que les négociations entre le Québec et le gouvernement fédéral allaient bon train et que la région des Cantons de l'Est bénéficierait de cet accord. Espérons que je verrai cela avant la fin de ma carrière politique.

Pour ce qui touche le dossier du parc du Saguenay, on sait que l'aménagement de ce parc représentait des retombées économiques fort importantes pour cette région. Dans ce dossier précis, nul n'ignore non plus que le Parti libéral avait, en 1973, adopté une position similaire qui consistait à ne pas céder le territoire dans le cas de cet aménagement. Mais de là à refuser toute collaboration avec le gouvernement canadien quant à un aménagement possible de cette partie de territoire et à favoriser la relance de la région, il y a un grand pas qui me semble infranchissable entre les positions respectives du Parti libéral et du Parti québécois. (23 heures)

Un autre cas type, M. le Président, d'une querelle coûteuse entre les deux gouvernements: celui de l'archipel Mingan, un agrandissement national dont on refuse de définir clairement la vocation et ce, depuis 1978. Dans ce dossier, Parcs Canada se dit prêt à investir 15 000 000 $ répartis sur trois ans, à la satisfaction, semble-t-il, des gens de Mingan et de Havre-Saint-Pierre. M. le Président, dans le dossier du parc du Mont-Orford, j'ai déjà signalé en cette Chambre les retards dans le calendrier des investissements. De plus, il faut bien distinguer entre les dépenses dites de fonctionnement et celles reliées aux immobilisations pour évaluer le véritable impact des millions de dollars que Québec consent à investir. Relativement à d'autres dossiers, le gouvernement canadien se fait attendre. En fait, peu importe aujourd'hui de déterminer qui, du fédéral ou du provincial, est responsable des retards à débloquer un dossier ou l'autre. La population québécoise désire avant tout que soient mis de l'avant les projets annoncés. En ce qui a trait aux dossiers conjoints, et je puis m'exprimer ainsi, le gouvernement du Québec doit faire en sorte de jouer franchement les règles du jeu d'un régime fédéral tant et aussi longtemps qu'il y appartient. Jusqu'à nouvel ordre, le Québec y est toujours.

En dernier lieu, j'inviterais le présent

gouvernement à redoubler d'efforts en vue de regagner cette confiance vis-à-vis des différentes régions du Québec. Au-delà des lignes partisanes, j'estime qu'il revient à tout gouvernement responsable d'assumer l'essentiel de ses tâches de façon efficace. Au cours de l'année 1962, les bureaux régionaux, aussi bien du fédéral que du provincial, dans la région de l'Estrie, ont tenté de décrire un portrait fidèle de la situation. De la visite effectuée auprès des 200 industriels et des tableaux de statistiques compilés, il est clairement ressorti, à la lumière des perspectives d'investissements, une morosité chez les gens d'affaires de la région. Ce diagnostic vaut aussi bien pour le faible niveau des investissements réalisés au cours de l'année 1982 que ceux projetés au cours de la présente année. D'ailleurs, pour apprécier à leur juste valeur les conséquences malheureuses pour notre région, il s'agit de consulter le répertoire des entreprises manufacturières de l'Estrie publié par la Maison régionale de l'industrie pour s'apercevoir que nombre de grandes entreprises d'autrefois sont maintenant répertoriées dans les catégories de moyennes ou de petites entreprises, tandis que d'autres sont purement et simplement disparues.

Il faut enfin tenir compte qu'entre les années financières 1981-1982 et 1982-1983, le nombre d'emplois est passé d'environ 88 500 à 87 500 pour le total de ces activités. Entre les années 1980 et 1982, le secteur primaire a perdu près de 900 emplois, le secteur secondaire, un peu plus de 2500 emplois et le secteur tertiaire dépasse les 6000 en termes de pertes d'emplois. Somme toute, la région de l'Estrie aura à traverser la crise de manière aussi douloureuse que certaines autres régions et j'estime qu'elle a droit à une attention particulière de la part du gouvernement en raison de sa structure industrielle dont les activités sont concentrées dans des secteurs aussi fragiles que le secteur manufacturier.

Enfin, M. le Président, compte tenu de l'importance du virage technologique que le gouvernement veut accorder à la région de l'Estrie, j'aimerais formuler les recommandations suivantes: Premièrement, le gouvernement devrait nous parler un peu plus des modalités du virage devant être effectué dans notre région. Deuxièmement, on devrait aussi savoir que nombre de travailleurs actuellement sans travail proviennent de secteurs traditionnels, comme je le mentionnais plus tôt. Il faut donc savoir que, pour plusieurs d'entre eux, un recyclage dans de nouveaux secteurs, bien que nécessaire, sera douloureux en raison de leur longue expérience acquise dans un milieu autre que hautement sophistiqué sur le plan technologique. Troisièmement, ce virage technologique doit s'effectuer conjointement avec le gouvernement canadien qui, lui aussi, nourrit des ambitions de ce côté. À cet effet, des discussions entre fonctionnaires ou entre ministériels devraient s'engager sur les aspects humains, sociaux et technologiques de ce virage.

En ce qui a trait au recyclage de la main-d'oeuvre, le milieu local constitué des chefs d'entreprise aussi bien que des travailleurs eux-mêmes et le milieu éducationnel devrait ouvrir la voie avec les deux niveaux de gouvernement en vue d'en arriver à une harmonisation des programmes. Je verrais très bien, M. le Président, par exemple, l'étendue d'un programme fédéral bien accepté par les entreprises donnant une aide financière au chapitre de la formation de la main-d'oeuvre. Ce programme offre l'avantage d'une intégration du travailleur à une activité qui, jusqu'alors, lui était inconnue, tout en évitant les inconvénients des subventions accordées pour une période de vingt semaines sans que le bénéficiaire soit assuré de poursuivre son travail. Un emploi serait alors ainsi offert en fonction des besoins et non plus en fonction de la seule occasion pour l'entreprise de toucher un montant d'argent.

M. le Président, je m'en voudrais de ne pas demander au ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche de prêter une oreille très attentive au Club de conservation chasse et pêche Memphrémagog qui demande, pour la troisième phase de l'agrandissement du parc du Mont-Orford, la création d'une réserve faunique avec la partie marécageuse du lac Brompton qui pourrait être acquise pour la somme d'environ 950 000 $ à 1 000 000 $. L'acquisition de ce marais a l'appui de plusieurs municipalités de la région et de plusieurs clubs.

Les municipalités de Magog, de la ville de Magog, du canton de Magog, celle de Rock-Forest, celle de Saint-Élie-d'Orford, celle de Saint-Denis-de-Brompton appuient le projet de la réserve faunique au marais de Brompton ainsi que des groupements affiliés en association. Je ne les nommerai pas tous, mais il y a l'Association des biologistes du Québec de l'Estrie, l'Association forestière des Cantons de l'Est, l'Association chasse et pêche de Sainte-Anne-de-Larochelle, l'Association chasse et pêche de Lac-Mégantic, l'Association chasse et pêche mousquetaire de Victoriaville et les clubs de chasse et de pêche du lac Brompton, ceux de Larochelle, d'Asbestos, de Saint-Ludger, de Cowansville et d'Acton Vale. Il y a aussi la Chambre de commerce de Magog, la Chambre de commerce de Sherbrooke, la Commission d'aménagement touristique de Magog-Orford, l'Association touristique de Magog-Orford, le Service de plein air de l'Estrie, le Conseil régional des loisirs de l'Estrie, la Société de loisirs ornithologiques de l'Estrie et aussi l'Institut botanique de Montréal, le CRD de l'Estrie, le Centre de

recherche en aménagement régional de l'Université de Sherbrooke, le Colloque régional du Parti libéral, l'Association du Parti québécois du comté d'Orford ainsi que les députés de la région. La liste se continue, car il y a aussi une pétition, qui accompagne cette demande, de 1200 personnes de la région. Je crois qu'avec l'appui de toutes ces associations et des municipalités, le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche devrait donner la priorité à l'acquisition de cette parcelle de terrain qu'on appelle le marais de Brompton pour en faire une réserve faunique. M. le Président, je vous remercie. (23 h 10}

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Terrebonne.

M. Yves Blais

M. Blais: Merci beaucoup, M. le Président. Merci, chers confrères, merci beaucoup. M. le Président, ce soir, je voudrais d'abord, pendant une grande partie du petit laïus que je vais tenir ce soir, bien sûr, m'adresser à vous, comme le règlement le demande, mais je vous adresse non seulement ce que je pense, moi, mais des choses que mes électeurs et mes électrices du comté de Terrebonne m'ont mandaté de vous dire depuis à peu près cinq ou six semaines. On vient de sortir d'une campagne de financement et on a vu beaucoup de monde. Cela a très bien été, d'ailleurs.

Lorsque notre budget est sorti, certaines personnes, qui l'ont regardé à prime abord, se sont dit: C'est un excellent budget. Ensuite, lorsqu'ils ont vu le budget de l'Ontario et le budget du Nouveau Brunswick, ils ont dit: Québec a un budget extraordinaire. C'est ce qu'ils ont dit, les gens de chez moi. Lorsqu'ils ont vu le budget fédéral...

Des voix: Oh!

M. Blais: ...ils ont dit: L'effort que nous avons fait au Québec pour avoir un budget aussi solide, espérons que ce sabotage déficitaire du fédéral ne viendra pas trop le déraciner parce que le nôtre était vraiment enraciné dans une rigueur administrative.

Une voix: Cela, c'est vrai.

M. Blais: Les gens nous ont dit, à l'équipe - parce que nous faisons équipe dans le comté de Terrebonne, le député n'en est qu'un simple représentant - lorsqu'ils ont vu qu'en Ontario, on augmentait les taxes sur les particuliers de 5%, l'Ontario la noble, la pure qui augmente les taxes de 5%, ne fût-ce que cette catégorie d'augmentation, on s'est trouvé bien chanceux chez nous que les impôts des particuliers restent à peu près pareils. Pas d'augmentation.

Au Nouveau Brunswick, prenons une seule mesure: 6 $ par jour pour l'hospitalisation. Si on appliquait cela au Québec, nous couperions la taxe sur l'essence et ça nous rapporterait à peu près 600 000 000 $ ou 700 000 000 $. Mais c'est beaucoup plus inhumain parce qu'être malade, on ne le choisit pas; se promener, on le fait par choix.

Des voix: Oui, c'est vrai.

M. Blais: Ce budget était très imaginatif et il l'est encore. C'est un stabilisateur des finances, c'est un tremplin vers l'avenir parce que c'est un budget qui est rempli d'espoir. Ce budget est le fruit du travail du bâtisseur du budget, de son imagination, de sa compétence reconnue à travers tout le pays, bien sûr, le ministre des Finances, mais, en plus de sa compétence, en plus de sa capacité reconnue, notre ministre des Finances est aussi un député qui consulte, qui participe au conseil des députés et qui écoute le conseil des députés. Écouter le conseil des députés, pour être député moi-même, je vous jure que ce n'est pas une mince affaire. Le ministre des Finances fait face à certaines contestations que nous gardons entre nous, le comité des onze, le comité des coupures, et on est tous comme cela, parce que nous sommes constructifs, un peu chialeux, un peu commandeurs, demandeurs et quémandeurs. Cependant, chez nous, nous avons un vrai chef, nous avons un vrai cabinet et nous avons une vraie équipe. Cette équipe fait consensus. J'entendais dire de l'autre côté, par un député que je ne nommerai pas par respect pour le poste qu'il occupe: Vous avez à votre tête un dictateur. On a entendu dire cela aussi par le député de Hull cet après-midi. Vous savez, quand on dit qu'on a un dictateur à la tête d'un gouvernement ou d'un pays et qu'une demi-heure après, on n'est pas mort, on a menti.

Ce travail des députés, ce travail d'équipe a donné le résultat du budget que notre compétent ministre des Finances a ramassé, mais il y a une chose aussi qu'on se doit de dire, c'est que nous avons un président du Conseil du trésor avec une équipe d'une très grande compétence. Depuis trois ans, l'équipe du Conseil du trésor, de concert avec nous, les députés ministériels, a fait des efforts inouïs en Chambre, coordonnés par le président du Conseil du trésor, pour enlever ce qu'on pourrait dire le chromé en temps de crise dans les dépenses budgétaires gouvernementales. Depuis, trois budgets consécutifs, budgets postélectoraux, comprenaient plus de 800 000 000 $ de coupures. En fait, en 1981-1982, nous avons coupé 840 000 000 $. En 1982-1983, nous avons coupé 670 000 000 $ et

511 000 000 $ dans les salaires en plus. En 1983-1984, 410 000 000 $ en salaires et, en 1984-1985, on s'en vient vers 875 000 000 $ de coupures.

Nous avons un déficit de 3 000 000 000 $ encore cette année. Si nous n'avions pas coupé, ces sommes sont récurentes et, cette année, à n'additionner que les coupures que nous avons faites et qui sont rigoureuses et intelligentes, nous aurions un déficit de plus de 6 491 000 000 $. Nous avons pris ici de ce côté, parce que nous avons un vrai chef, un vrai cabinet et une vraie équipe, nos responsabilités. Nous avons augmenté les taxes quand il le fallait, nous avons fait des coupures là où il le fallait et le résultat est que, depuis quatre budgets, nous avons à peu près le même déficit. Si vos grands frères "ottawaïens" avaient fait la même chose, nous n'aurions pas comme Québécois à subir 26% de cet astronomique déficit de 31 200 000 000 $ qui nous fait à peu près pour nous, tout compte fait, 8 000 000 000 $. Nous nous forçons, nous, comme équipe, parce que nous avons du coeur au ventre, parce que nous travaillons ferme, que nous travaillons fort, que nous avons un groupe assez compétent pour nous faire travailler dans la bonne direction, nous avons maintenu un déficit de 3 000 000 000 $ pendant qu'à côté de nous, des gens avec qui nous n'avons presque aucun contact, sur qui nous n'avons tout de même aucune influence, nous endettent de 8 000 000 000 $. C'est ce qu'on appelle la Confédération. Rien à dire, tout à payer. (23 h 30)

Si la rigueur administrative avait existé à Ottawa dans le budget comme la rigueur administrative a régné au Québec pour construire nos budgets, on ne serait pas désespéré du côté - entre guillemets -"habitant un territoire canadien", affublé d'un déficit qui est étouffeur pour tous les autres gouvernements, y compris les gouvernements municipaux. Le Canada emprunte 1 $ à tous les 3 $ qu'il dépense. C'est incroyable! C'est le pire record de tous les pays industrialisés du monde, depuis la création du monde. Nous empruntons 1 $ sur 7 $. Et quand je les vois, de l'autre côté, se lever, comme des serpents qui sortent des cruches et nous dire d'une façon très venimeuse et très vénéneuse, de temps à autre, que nous sommes des irresponsables en empruntant 1 $ sur 7 $, tandis que ceux qui les commandent et qui écrivent leurs textes empruntent 1 $ sur 3 $, ce n'est pas croyable. Mais, en tout cas, M. le Président, les gens de Terrebonne se rendent compte que le budget que nous avons au Québec est bon pour l'ensemble des Québécois, bon spécifiquement dans mon comté. Nous sommes les premiers au Québec pour Corvée-habitation, dans mon comté, les premiers.

Des voix: Bravo!

M. Blais: Nous avons un bon ministre de l'Habitation. Il a su défendre, devant les responsables du budget cette année, une nouvelle formule de Corvée-habitation avec une garantie de 9,5% pendant trois ans. Cela ne s'est jamais vu, surtout en période de crise. Aucun autre gouvernement dans ce vaste Canada, d'une petite côte à l'autre, n'a osé aider les gens, les locataires de sa province comme notre ministre de l'Habitation et notre ministre des Finances l'ont fait. Ensuite, il faut dire merci aussi au ministre des Affaires municipales qui, cette année, nous a apporté des programmes PRIME pour compenser l'esprit éteignoir de la maison mère "ottawaïenne" qui n'a pas voulu nous en fournir dans son programme RELAIS, qui est devenu le programme "Délais". Nous sommes assez "primes", nous nous sommes avancés et nous avons mis 50 000 000 $ à la place du gouvernement fédéral. Ce sont toutes les municipalités du Québec qui en profitent, et Terrebonne aussi.

Une voix: Vous êtes les premiers?

M. Blais: Dans le projet PRIME? Mais non. On n'est pas premiers partout, mais on est premiers dans l'accès à la propriété, à Terrebonne. On est premiers dans Corvée-habitation et j'en suis très fier. Dans une seule ville, la ville de Saint-Louis-de-Terrebonne, on a construit 400 maisons neuves l'an dernier. Qui dit mieux? Je remercie le ministre de l'Habitation de son extraordinaire projet Corvée-habitation.

Cependant, c'est très curieux, la construction allait mieux au Québec que dans le reste du Canada depuis le mois d'octobre l'an dernier. Vu que le plan de Corvée-habitation, jumelé avec les 3000 $ qu'Ottawa donnait dans tout le pays, fonctionnait mieux au Québec qu'ailleurs, on l'a coupé. C'est étudié. C'est rationalisé. C'est voulu. Ce sont des agents déstabilisateurs du gouvernement québécois, mais ils ne nous auront pas. Ils ne nous auront pas!

Des voix: Bravo!

M. Blais: Quand cela va bien au Québec, on nous saute dessus. Ottawa nous saute dessus. Je répète qu'au Québec la construction allait mieux - et beaucoup mieux - que dans tout le reste du Canada depuis le mois d'octobre. Donc, vu que ce projet allait bien au Québec, Ottawa l'a coupé. Et si cela avait été mieux dans une autre province qu'ici, il l'aurait maintenu.

Ce budget, personne, de l'autre côté, ne peut le décrier avec un peu de rationalisa-

tion, sauf que ce que l'on fait normalement quand on est de l'Opposition, c'est décrier tout ce qui se fait de l'autre côté. Mais de façon rationnelle et intelligente - ils le savent d'ailleurs - on ne peut le décrier. Ils crient, il maugréent, mais ils parlent beaucoup à côté du budget plutôt que d'en parler. Ils parlent tous de souveraineté; non, ils disent indépendance. Ils ne parlent que de souveraineté pendant que nous parlons d'argent de ce côté. Nous sommes souverainistes, ' mais là nous parlons du budget.

Une voix: Contre le fédéral.

M. Blais: Comme j'ai un grand poète qui ouvre son capot, je lui répondrai que vous avez tous parlé beaucoup moins comme des redresseurs de budget que comme des dresseurs de mulets.

Cependant, il y a certaines personnes qui, je ne sais pas pourquoi... J'ai reçu une lettre du président de la Chambre de commerce de la province de Québec, M. Langlois; je pense que tous les députés l'ont reçue, j'avais cela dans mon courrier ce matin. Je lis les lettres secondaires en retard; elle est arrivée le 27 mai, je ne l'ai lue que ce matin. Je ne vous dirai que quelques mots sur cette lettre qui regarde le budget. J'ai trouvé cela curieux, malgré qu'elle soit moins négative que ce qui est traditionnel dans ce genre de lettre. Je l'ai trouvée pas mal. "Cher membre - je ne suis pas membre, mais on m'a envoyé une lettre quand même - le ministre Parizeau n'a pas décrété d'augmentation, mais les impôts et taxes ont tout de même augmenté." Cela commence comme cela. C'est du président de la chambre de commerce. Je relis, c'est incroyable: "Le ministre Parizeau n'a pas décrété d'augmentation, mais les impôts et taxes ont tout de même augmenté."

Une voix: C'est facile à comprendre.

M. Blais: C'est bien sûr que cette phrase est incomplète, mais c'est voulu. Le ministre Parizeau n'a pas décrété d'augmentation dans le budget actuel, mais les taxes ont tout de même augmenté depuis la Confédération. C'est cela qui manque. C'est sûr que les taxes ont augmenté, mais il parlait du budget actuel. Il continue, si on ne comprend pas: "En effet, le maintien à 40% du prix de détail de la taxe des carburants et à 9% de la taxe générale de vente, de même que l'abaissement de 5% du taux d'indexation des exemptions personnelles à compter de janvier 1984 constituent à n'en point douter une charge additionnelle." Si maintenir une taxe qui était là depuis quelque temps dans un budget de l'avenir est une augmentation de taxes, M. le Président,

M. Cardinal est encore président. Bien oui!

Il y a une chose que je trouve curieuse, c'est que le président de la chambre de commerce dit: "L'indexation à 5% des exemptions personnelles à compter de janvier 1984 est une augmentation." Sait-il... Excusez, je ne parle pas de la ville; parce qu'il faut bien se faire comprendre, apparemment, il faut bien dire les mots; si je dis Sept-Îles, il pensera que je parle d'un autre comté. Est-ce que ce monsieur sait quelle sera l'inflation à la fin de l'année 1984? On est à 6,6%, 6,7% dans l'inflation actuellement, cela va assez bien; une chose qu'Ottawa essaie de maîtriser et ils en viennent à bout un peu, je les félicite. Ils font tellement peu de bons coups. Sur cela, cela va bien. Ils ont sacrifié toutes les "jobs" de tout le monde et ils ont augmenté l'intérêt à 24%, ils sont en train de nous tuer tous, mais ils ont réussi quand même. À force de frapper, ils couperont l'arbre; ils sont à la veille. 5%. Qui dit à ce monsieur que, dans l'année 1984, l'inflation sera plus haute ou plus basse que 5%? Ce serait merveilleux si elle était à 6%, mais actuellement les exemptions personnelles des déclarations d'impôt sont indexées à 7,5% et l'inflation se situe à 10%, 11%. On a indexé à 7,5%. Cela veut dire qu'il nous manquait trois ou quatre points. C'est une augmentation de trois ou quatre points en fait. Mais quand c'étaient les libéraux, ils n'indexaient pas du tout, pas du tout. On dit qu'on indexera à 5% et la courbe de l'inflation s'en va comme cela. Il est possible qu'à 5% ce soit vraiment une diminution d'impôt. Je ne dis pas que c'en sera une, mais fort probablement que ce sera une diminution d'impôt. (23 h 30)

Mes électeurs et mes électrices du comté de Terrebonne, quand ils parlent du budget, ils en parlent de façon beaucoup plus constructive que ce monsieur. Je vous jure que ces gens devraient au moins être plus honnêtes dans leur critique de nos budgets.

M. le Président, une équipe qui travaille ensemble, de concert avec une structure et une unité forte de direction, donne souvent de bons résultats. Le discours inaugural mettait le cap sur une société nouvelle. Le budget vient confirmer que, dans les années qui viennent, notre gouvernement est prêt à s'orienter vers l'établissement d'une société nouvelle. J'ai pris quelques notes ici et je vais en lire quelques bribes. Je n'aime pas beaucoup lire mes choses mais c'est parce que cela est assez important. La crise a ramené dans l'actualité bien des principes de société que plusieurs avaient tendance à oublier depuis des décennies. Le gouvernement actuel du Québec a fait naître des espoirs nouveaux et c'est à lui, à nous, qu'incombe la tâche de tout mettre en oeuvre pour tracer la route

de leur réalisation. C'est à nous que cela incombe. C'est sûr. On le sait et on ne recule pas devant nos responsabilités.

Avant le prochain scrutin, le gouvernement du Québec doit présenter un projet de société nouvelle qui pourrait, qui pourrait, dis-je, avoir comme base trois choses principales: le droit au travail pour tous ou, au moins, le droit à une activité productive pour tous; un plan qui s'appellerait Vers le plein emploi qui comporterait une refonte totale et en profondeur du Code du travail pour trouver un consensus entre l'État patron, l'État employeur et les employés de l'État et les employés du parapublic, de nouvelles bases de concertation dans le secteur privé pour que finisse le traditionnel statut conflictuel entre patrons et employés, et, enfin, que les patrons et les syndicats, à l'avenir, soient à une table où tout est sur la table, plus de frime entre les patrons et les syndicats. Les deux ont toujours joué un jeu de dupes, depuis des années. C'est terminé.

Deuxième principe, le droit de tous les Québécois d'entrer dans le changement technologique. Les Québécois sont en droit de s'attendre de nous qu'on leur donne vraiment le goût d'entrer dans ce virage technologique: la bureautique, la robotique, l'informatique. Nous devons mettre le cap vers la vulgarisation et la compréhension de tous les nouveaux systèmes des activités productives de demain pour orienter et on réoriente nos façons de nous instruire, réorienter nos façons de consommer et réorienter aussi nos façons de travailler.

Le troisième principe que je mettrais dans une société nouvelle serait celui-ci - il est à deux volets - le droit des Québécois à une meilleure répartition de la richesse collective, mais le devoir de chaque Québécois de participer plus activement au grossissement et à faire un inventaire plus gros de cette richesse collective, de cette richesse commune; le droit à participer aux richesses collectives, mais le devoir de produire pour que cette richesse commune devienne plus volumineuse.

M. le Président, pour ce faire, il y a beaucoup d'axiomes qu'on pourrait rattacher à cela. Il faut redéfinir le rôle dans l'économie et de l'État et du secteur privé. Nous, du gouvernement, nous devons définir vraiment où l'État veut aller dans ses interventions, où il veut arrêter et ce que nous attendons du secteur privé dans l'économie. Il faut qu'on mette des balises. Deuxièmement, il faut dresser la ligne d'arrêt des interventions sociales que nous demandons au secteur privé et que nous exigerons de l'État, dire où est la ligne d'arrêt, parce que nous attendrons peut-être la croissance longtemps. Elle sera infime dans les années qui viennent. Casser les forces de blocus patronales et syndicales, les deux, les casser pour une meilleure compréhension. Une force de blocus ne peut pas exister, ni du côté syndical, ni du côté patronal. Bien sûr, faciliter la syndicalisation rationnelle par un consensus de toutes les parties impliquées, autant le patronat que l'État.

Le résultat de tout cela, si nous nous y mettons - le discours inaugural nous en donnait l'espoir, le budget montre que nous pouvons l'appliquer - c'est de donner aux penseurs du Québec et aux réalisateurs matière à discuter pour améliorer l'avenir; aux travailleurs, un programme tangible pour accrocher un sens à leur travail; à la relève en détresse, une philosophie à fixer, à améliorer, à parfaire durant leur carrière; aux femmes, le défi réel de prendre leur vraie place dans la société; aux défavorisés, c'est donner de vrais pouvoirs; à la population en général, c'est donner les moyens pour développer parmi nous tous un consensus pour un meilleur modus vivendi, pour qu'on vive mieux ensemble, pour avoir plus de tolérance et plus de sens de la justice sociale. C'est ce qu'on appelle le consensus social, M. le Président.

Pendant que nous, nous jetons les bases, autant financières, que du côté des idées et du côté de la pensée, d'une société que nous voulons donner ensemble à tous nos concitoyens, avec une vraie équipe, avec un vrai cabinet et avec une vraie députation forte qui veut faire quelque chose, de l'autre côté, qu'est-ce que l'on voit? Il n'y a pas grand espoir de l'autre côté, M. le Président. Il n'y a pas grand espoir.

Une voix: Non, il ne faut pas s'attendre à cela.

M. Blais: Il ne faut pas aller très loin en arrière, M. le Président. Je me souviens du dernier congrès - on s'apprête à en faire un autre - où on se cherchait un chef après la déconfiture de 1976. On se cherchait un chef.

Une voix: En 1978.

M. Blais: En 1978, au mois d'octobre, je crois. Cela ne fait pas tellement longtemps. Eh bien, il y avait deux personnes qui se présentaient à ce congrès: un type qui, à l'époque, n'était pas député, donc M. Ryan, et un type qui était député, mais qui ne l'est plus, M. Garneau. Ces deux personnes étaient là. Mais qu'est-ce que la maison mère disait à l'époque? Il faut absolument que M. Ryan passe. Et on appuyait M. Ryan, en disant que M. Garneau n'avait aucune valeur. M. Ryan est entré; c'est vrai que c'est un bon homme. C'est un penseur. Donc, il n'a pas pu rester chef d'un parti qui ne fait que dépenser. Ce n'était pas possible. Quand le moteur chauffe, on

ferme le capot, monsieur. Ce n'est pas possible d'avoir un penseur à la tête des libéraux; ils cherchent un dépenseur. Ils cherchent un dépenseur. Alors, aujourd'hui, ils ont rejeté cet homme extraordinaire. Je ne peux pas comprendre quelle force de caractère fait qu'il reste encore là. C'est un homme extraordinaire pour endurer ce monde autour de lui.

Eh bien, le deuxième, qui n'était pas bon pour le fédéral il y a quelques années, est devenu ce messie nouveau, la main gauche de Dieu, je suppose, l'autre main? Ils vont finir par le crucifix, M. le Président. Ce n'est pas croyable. Aujourd'hui, Ottawa nous ramène la main gauche. Ce qui n'était pas bon il y a deux ou trois ans est rendu extraordinaire aujourd'hui. Il faut être à court. Il faut vraiment être à court. À court, oui, à court. Eh bien, pourquoi cette difficulté à trouver quelqu'un comme chef de file de cette formation qui a été au pouvoir pendant si longtemps et qui a eu le meilleur gouvernement que le Québec ait connu, celui de Lesage? Le meilleur gouvernement que le Québec ait connu avant qu'on arrive, bien sûr.

Une voix: Vous autres inclus. (23 h 40)

M. Blais: Pourquoi, M. le Président? C'est parce qu'il y une quarantaine de députés qui marchent sur deux routes complètement parallèles et qui ne se parlent même pas entre eux. Il y a un groupe dont M. Ryan faisait partie qui s'appelle le groupe qui dit ceci...

Une voix: Landry-Morin!

M. Blais: M. le Président, le temps pendant lequel on me dérange, je vais l'ajouter à mon droit de parole. Il y a le groupe qui dit que les francophones forment une majorité au Québec et qu'on doit les respecter comme tels. L'autre groupe à côté dit: Les anglophones forment une majorité au Canada. Il y a deux écoles, deux routes parallèles irréconciliables. C'est pour cela que vous avez des problèmes. Vous êtes, en plus, des valets soumis de gens aveugles et vous n'êtes ici que par siège interposé. Vous n'êtes ici que comme cela.

Je ne peux pas comprendre comment quelqu'un assis à cette noble Assemblée sur un siège que les Québécois ont payé à 100% ait autant de frémissements vers la frontière extérieure et l'autre Parlement. Ils sont 288 députés, ils sont assez pour se défendre. Pourquoi défendez-vous ces gens en plus? Nous ne sommes ici que 75 ou 76 députés. Plutôt que de vous joindre aux 288 députés et de dire que nous sommes des déstabilisateurs d'investisseurs parce que nous sommes souverainistes et indépendantistes, pourquoi ne vous rendrions-nous pas la pareille en disant: Si vous deveniez souverainistes avec nous, nous serions tous des Québécois et on ne ferait plus peur à personne, plutôt que de dire que nous faisons peur au monde? Où est l'épouvantail en cette Chambre? De l'autre côté ou de ce côté-ci? Où est l'épouvantail, M. le Président?

Des voix: Bravo!

M. Blais: On me fait signe que mon temps de parole est terminé.

Malheureusement, en conclusion, M. le Président, avec un parti puissant comme le nôtre, avec des membres qui nous appuient comme ils le font, avec le cabinet le plus compétent - selon une enquête dans tout le Canada - de tout le Canada et de tous les gouvernements canadiens... C'est notre cabinet. Cela a paru en grosses lettres dans les journaux. Vous n'avez pas posé de questions là-dessus.

Le Président: En conclusion.

M. Blais: Une demi-minute, M. le Président et je termine. Avec une équipe comme cela, c'est sûr que l'espoir de la population en des réalisations fortes, en un consensus va nous guider. Un discours sur le budget et un discours inaugural comme ceux qui ont été faits cette année vont donner l'espoir aux Québécois, l'espoir à notre équipe et à mes confrères et l'espoir au député de Terrebonne pour un Québec souverain bientôt.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le député de Beauce-Sud.

M. Hermann Mathieu

M. Mathieu: Merci, M. le Président. Le flot de turpitudes que nous venons d'entendre, que nous venons de subir est bien la démonstration active de l'incompétence de ce groupe à gérer les finances publiques. Le député parlait de chiffres tout à l'heure en ridiculisant le président de la chambre de commerce qui disait à peu près ceci: Le ministre des Finances annonce qu'il n'y a pas de hausses de taxes, mais les impôts augmentent quand même. Il faut être complètement - je vais prendre un mot poli - borné pour ne pas comprendre cela. On n'a qu'à prendre les chiffres du ministre des Finances. Les revenus autonomes, l'année passée, étaient de 13 878 000 000 $ et, cette année, ils sont de 15 135 000 000 $. Qu'est-ce que c'est si ce ne sont pas des augmentations d'impôt? Cela tombe sous le sens. Il faut être complètement incompétent pour ne pas comprendre une vérité aussi

fondamentale. Le discours sur le budget que nous avons entendu était un discours plutôt terne. Les gens étaient contents, oui, il n'y avait pas d'augmentation sensible des taxes mais le gouvernement nous crédite d'une façon normale un déficit de 3 185 000 000 $, un endettement d'environ 3 000 000 000 $, c'est-à-dire que le déficit budgétaire est financé par emprunt dans la proportion de 82,9%, ce qui fait que la dette du Québec passera à 21 345 000 000 $ avec un service de la dette, c'est-à-dire le paiement d'intérêts de plus de 2 000 000 000 $.

Avec vous, messieurs, on en connaît, des records: record de déficits, record de dettes, record de chômage, record de frustrations, record de tout. Quel est le problème? Qu'est-ce qu'ils ne comprennent pas, ces gens-là? Le problème est que ce gouvernement confond la cause du malaise, la cause du mal avec le remède. Quelle est la cause du mal que connaît le Québec? Il y en a deux. La principale, c'est son option indépendantiste et la secondaire, c'est son incompétence à gérer les fonds publics. Un gouvernement de poètes, de rêveurs, de "peintureurs" de nuages! On ne peut pas leur demander d'être compétents; il n'y en a pas un, dans ce groupe, qui a déjà administré une liste de paie, ce qu'on appelle un "payroll". Ils confondent alors la cause et le remède.

M. Vaugeois: M. le Président...

Le Président: M. le député de Trois-Rivières.

M. Vaugeois: ...je voudrais demander au député de répéter ce qu'il vient de dire en y pensant deux fois. Là-dessus, j'aurais quelque chose à relever si...

Le Président: M. le député, vous pouvez, à partir de ce qu'il a dit, soulever une question de règlement ou de privilège, selon le cas, ou lui demander ce que vous souhaitez, si vous pouvez lui posez une question.

M. Vaugeois: Avant de soulever une question de privilège, je voudrais seulement l'inviter à réfléchir à ce qu'il vient de dire. S'il le répète...

Le Président: Le député de Beauce-Sud a prononcé certaines paroles mais, on ne peut pas l'interrompre sous prétexte de l'inviter à réfléchir sur ce qu'il a dit. On peut l'interrompre si on a une raison, sur une question de privilège ou de règlement, ou si on veut lui poser une question.

M. le député de Beauce-Sud.

M. Mathieu: M. le Président, je vois que la série d'interruptions habituelles commence. J'ai écouté les discours, je les ai subis avec courtoisie, je n'ai interrompu personne. Le député de Trois-Rivières commence le manège habituel. Quand on leur fait mal, c'est la riposte, c'est ce qu'ils font.

Je continue mon discours en disant que ce groupe, que ce gouvernement confond la cause du mal avec le remède. C'est comme si un médecin, un anesthésiste disait à un patient moribond: Cher patient, la cause de votre mal, c'est une surdose de chloroforme; le remède qu'on va vous donner, encore du chloroforme. C'est ça, la manière d'administrer de ce gouvernement. On confond la cause et le remède. Pour eux, le remède, c'est l'indépendance, alors que c'est la cause. Quand on confond la cause et le remède, il n'y a pas de surprise à se ramasser avec des problèmes tels que ceux que connaît le Québec présentement.

Une autre cause est la hargne de ce gouvernement contre l'entreprise privée. J'en reparlerai un peu plus loin.

Je qualifierais le gouvernement de triple A, AAA: autoritarisme, arbitraire et arrogance. C'est ce que le gouvernement nous sert depuis qu'il est au pouvoir, M. le Président. Sa marque de commerce, c'est son incompétence. Je dirais que c'est également son abus de la force, sa violence. Je parlerai, de sa violence, tout à l'heure. Bien sûr, ce n'est pas de la violence physique, ils sont trop subtils pour cela. J'en parlais un peu hier. Violence morale, par exemple, qui fait encore plus mal.

De quoi le Québec a-t-il besoin? Il a besoin de bons administrateurs. Il a besoin d'emplois. Pour cela, il faut une relance de l'entreprise privée. Je dirais à ce gouvernement: Contentez-vous donc d'être inutiles sans vous rendre nuisibles. Quand vous ne faites rien, au moins vous ne faites pas mal au monde. Mais quand vous faites quelque chose, vous le contraignez avec votre réglementation qui encarcane de plus en plus et qui devient insupportable.

Parlant du budget, je vais faire plaisir à mes collègues d'en face. Bien sûr, je l'ai déjà noté, il y a des choses qui ont été positives dans ce budget et je suis prêt à le reconnaître. Le fait qu'il n'y ait pas eu de hausses d'impôts, c'est un moindre mal. Bien sûr que je suis satisfait qu'il y ait eu des crédits supplémentaires pour les routes. Je l'avais revendiqué avec force auprès du ministre des Transports. J'avais eu plusieurs contacts avec lui. Je crois que l'initiative que j'avais prise dans ma région de faire une réunion de tous les élus municipaux, des corps intermédiaires et de la population, le 27 avril, a compté pour quelque chose dans cela. Je dis que notre réseau routier est lamentable, délabré et je suis content de voir qu'on y met 50 000 000 $. Ce n'est pas

suffisant, bien sûr, et j'entends poursuivre mon travail pour l'amélioration du réseau routier rural, du réseau routier numéroté également. (23 h 50)

Je voudrais dire quelques mots seulement de la violence de ce gouvernement envers nos jeunes, nos travailleurs de la construction. Qu'est-ce qu'on entend dire? Il y a des processions dans mon bureau de comté. Peut-être que ce n'est pas la même chose pour les autres députés. Peut-être qu'ils font moins de bureau de comté. Exemple: six jours de prison pour un interdit de la construction. Tout ce dont on entend parler, c'est de gens qui viennent nous voir et qui sont qualifiés, qui ont un certificat de qualification, qui sont menuisiers depuis 15, 20, 25 ans.

Ce sont également nos jeunes qui ont pris un cours de menuiserie à l'école, un cours d'électricité ou de plomberie. Au lieu de leur donner un certificat de qualification, on dit: Bien non, vous ne répondez pas aux normes de l'OCQ. C'est quoi ça, l'OCQ? L'office du crime du Québec, M. le Président. Vous le savez comme moi. Qu'est-ce qu'ils ont à répondre à cela? J'entendais l'autre fois le conspirateur de l'an 2000, le député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue qui disait: Oui, il faudrait bien faire quelque chose, en revendiquer l'abolition. M. le Président, le gouvernement se morfond, fait modification après modification à cet hideux règlement, à cet odieux règlement. Quand est-ce qu'il va se décider à reconnaître les faits et à l'annuler?

Je voudrais également parler d'une autre violence morale dans le découpage des MRC. J'en ai déjà traité. Dans ma région, dans mon comté, alors que des paroisses comme Saint-Prosper, Saint-Zacharie, Saint-Ludger, Saint-Robert ont demandé de faire partie de la MRC de Beauce-Sartigan, qu'est-ce que le ministre fait? Il prend Saint-Prosper et il l'intègre à la MRC des Etchemins. M. le Président, si ce n'est pas de la violence, qu'est-ce que c'est, de la violence? Je vous dis une chose: On me reprochera peut-être d'avoir revendiqué avec force pour les gens de ces paroisses afin de conserver la Beauce intacte, mais je n'ai pas été élu pour être le complice de ce gouvernement qui vient poignarder sournoisement la Beauce, qui vient l'estropier et qui vient l'amputer. J'ai été élu pour la protéger, pour la faire grandir et c'est ce que j'entends faire dans la poursuite de mon mandat.

En parlant de violence, sans le consensus de la population, on fusionne des hôpitaux, alors qu'on nous dit que cela va coûter moins cher. Le budget de l'an 1 des hôpitaux fusionnés est de 5 000 000 $ supérieur au budget des deux hôpitaux pour l'année précédant la fusion. C'est une dilapidation des fonds publics. C'est de la violence. Ce que je demande, c'est une solution beauceronne. Les Beaucerons, qui ont bâti leurs institutions avec leurs énergies, sont capables de les administrer. J'aurais une suggestion à faire à ce gouvernement; après l'année de la femme et l'année de l'enfant, il faudrait peut-être que vous fassiez l'année de la violence pour qu'on vous voie sous votre vrai jour.

Je voudrais brièvement vous poser la question suivante: Où menez-vous le Québec? Vous êtes pas mal silencieux. Je vais vous rappeler des souvenirs, votre congrès du 7 décembre 1981. Je lis le Devoir du 7 décembre 1981: "De nombreux étrangers ont suivi de près les délibérations du PQ". Je cite un article sous la plume de M. Clément Trudel: "M. Michel Leduc, député de Fabre, au nom du comité des relations internationales de son parti, a rappelé hier que ses invités - bon nombre d'entre eux proviennent d'Amérique latine - ne se limitent pas au bassin de la francophonie. Puisque le Québec s'achemine vers la souveraineté, il est important que de plus en plus le Québec aille vers les autres dans les rencontres internationales. Ultimement, selon M. Leduc, ces observateurs pourraient compter comme alliés du Québec, advenant une demande d'adhésion à l'Organisation des Nations Unies." Des alliés du Québec, tout ce qu'il y avait de mouvements révolutionnaires du monde entier.

Un autre journal, le Soleil du 7 décembre 1981, cite la Presse canadienne: "Pour la première fois en Amérique du Nord, l'Organisation de libération de la Palestine, l'OLP, a délégué des représentants à un congrès d'un grand parti politique. Cette invitation adressée au représentant montréalais de l'OLP, qui n'est pas officiellement reconnu par le gouvernement fédéral, s'explique par l'ouverture de certains membres du Parti québécois sur le monde, précise M. Omran qui ajoute que, contrairement aux autres partis politiques canadiens, le PQ n'est pas hostile aux Palestiniens." M. le Président, est-ce qu'il y a un mouvement sur le globe qui fait de la violence comme peut en faire l'OLP? Ici, je n'établis pas les causes, les raisons et le bien-fondé... Mais qui fait sauter des autobus d'écoliers? Qui met des grenades dans des autobus de voyageurs de l'âge d'or etc.?

C'est à ces alliés que le PQ tend la main. Sous la plume de Lise Bissonnette, même le journal Le Devoir du 7 décembre 1981: "Le congrès appuie et ovationne Jacques Rose. M. Rose venait présenter une résolution d'urgence demandant au gouvernement du Québec de faire pression sur les autorités fédérales pour la libération des prisonniers politiques québécois, ses anciens collègues derrière les barreaux. Certains délégués sont venus soutenir sa

position en ne craignant pas de faire un lien entre leur projet politique d'indépendance pour le Québec et l'ancien Front de libération du Québec." Rappelons-nous ces paroles: "Nous sommes les pionniers."

J'ai ici un autre article dans le Journal de Québec du 30 mars 1983: "L'internationale socialiste, le PQ veut toujours en faire partie, selon la Presse canadienne. Le Parti québécois n'a pas abandonné son intention de devenir membre de l'Internationale socialiste. C'est ce qu'a rappelé hier un porte-parole du ministre des Affaires intergouvernementales, M. Jacques-Yvan Morin. La demande d'adhésion du PQ doit être discutée le mois prochain à Faro au Portugal à l'occasion du congrès de l'Internationale socialiste." On vient nous parler de la filiale. On dit que nous sommes une filiale du Parti libéral du Canada, filiale d'Ottawa. Je pense que la population préfère des filiales du Canada à des filiales de l'Internationale socialiste et au fait de tendre la main à tout ce qu'il y a de mouvements révolutionnaires. Je peux vous dire que si ces mouvements venaient noyauter un congrès du Parti libéral du Québec, je serais le premier à le quitter. Or, je vous demande: Où menez-vous le Québec? Les gens s'inquiètent de vos flirts avec tous ces mouvements. Où menez-vous le Québec? Est-ce que vous respectez bien le voeu de la population?

En parlant de mon comté, les membres du gouvernement aiment bien parler du miracle beauceron et essayer de faire des gorges chaudes pour récupérer les énergies et les talents des Beaucerons. Dans le Soleil du 31 mai 1983: "Nos Japonais de la Beauce." dixit M. Pierre Marois, ministre de ce gouvernement. Le miracle beauceron, pourquoi parle-t-on du miracle beauceron? Ce phénomène est dû à l'esprit d'initiative des hommes d'affaires, des entrepreneurs de la Beauce, est dû à l'excellence et à l'efficacité de la main-d'oeuvre beauceronne. Puis-je vous rappeler que la Beauce importe toutes ses matières premières et doit exporter ses produits finis. Qu'est-ce qui fait la force du miracle beauceron? C'est la vitalité de ses entreprises privées. L'entreprise privée est le pivot sur lequel repose ce phénomène qu'on appelle le miracle beauceron. C'est la clé et c'est dû aux qualités exceptionnelles des Beaucerons que je suis fier de représenter ici. Que faut-il faire pour devenir contagieux pour transmettre ce miracle beauceron aux autres régions du Québec qui en ont bien besoin? La première chose, il faut créer, prendre des mesures qui soient favorables à l'entreprise privée et il faut changer la mentalité de ce gouvernement. (Minuit)

Qu'il me suffise de rappeler le coût de matraque que ce gouvernement donne à l'entreprise privée. Parlons de la taxe ascenseur de 40% sur le pétrole. Imaginez-vous, dans une région comme la mienne qui importe sa matière première, qui exporte ses produits finis, comme cela coûte cher, cette taxe ascenseur, comme cela met en péril les entreprises chez nous.

Parlons de la hausse du coût d'immatriculation des véhicules commerciaux, de l'augmentation des tarifs d'Hydro-Québec, de l'augmentation de la taxe sur les repas, de l'augmentation de la taxe sur les primes d'assurance. Le gouvernement s'est ingénié, en 1979-1980, à modifier la définition de capital pour y inclure les emprunts de banque et les prêts des actionnaires ainsi que l'achalandage et augmenter la taxe sur le capital. La taxe est passée, en 1979-1980, de 0,2% à 0,3% et, en 1981-1982, de 0,3% à 0,45%. On nous dit: Oui, mais nous avons baissé l'impôt sur le revenu des corporations. Il faut bien distinguer. Si, avec la récession, les entreprises ne font pas de revenus, elles sont quand même astreintes à payer cette taxe sur le capital, taxe qui est complètement hypocrite et qui nous rend non concurrentiels avec les autres provinces et les autres pays.

Que dire des taxes directes à l'emploi? Les taxes sont payées uniquement par l'employeur. Parlons des programmes de santé. En 1981-1982, la contribution de l'employeur sur le salaire est passée de 1,5% à 3%, 100% d'augmentation. Les contributions payées par l'employeur seulement à la Commission de la santé et de la sécurité du travail, à la Régie des rentes du Québec, toutes ces choses viennent handicaper mortellement l'entreprise privée et le miracle beauceron. Qu'il me suffise de comparer une entreprise de 75 employés, chose relativement courante dans ma région, avec toutes ces taxes camouflées, à une entrepise de l'Ontario. Le pourcentage de la taxe salariale, c'est-à-dire la taxe sur la masse salariale, est de 13,7% ici, alors qu'il est de 8,1% en Ontario. Et on s'étonne de voir qu'il y une dégradation de notre économie et de notre entreprise privée.

Je voudrais vous parler d'une autre chose. Suprême folie, la francisation des entreprises. Je suis pour la francisation des grandes entreprises multinationales oeuvrant au Québec avec des milliers d'employés, mais quand on arrive dans la région de la Beauce avec des PME de 10 employés, de 25 employés, de 40 ou 50 employés... J'ai ici le cas d'une entreprise de 51 employés. Je me suis rendu au bureau de la compagnie. Il y avait un dossier d'environ 6 à 7 pouces d'épais. L'employeur, le patron me disait qu'il a dû engager une secrétaire spécialement pour remplir les folies de l'Office de la langue française pour franciser son entreprise, alors qu'il n'y a pas un seul employé qui parle anglais. Tout le monde est unilingue francophone et il a fallu qu'il

recrute une secrétaire bilingue. On vient lui imposer de payer le salaire d'une secrétaire pendant près de deux ans pour remplir la paperasserie de la francisation de l'entreprise. Je n'ai pas le temps de tout vous relater, mais il y a des choses qui sont absolument suaves. Il faut voir le genre d'administration du PQ qui, avec tous ses règlements, vient imposer toutes sortes de tracasseries, de formulaires. Quand les gens reçoivent cela, ils n'en croient pas leurs yeux.

Dans une lettre du 10 avril 1981, qui provenait de l'Office de la langue française, on disait: "L'office vous remercie d'avoir complété le formulaire de renseignements généraux. J'ai maintenant le plaisir de vous envoyer ci-joint votre attestation d'inscription - le type pensait qu'il en avait fini avec eux - première étape du processus menant à l'obtention du certificat de francisation. Vous devez afficher l'original ou une copie de cette attestation. Je dois vous aviser qu'à l'examen de vos réponses à la question 9 nous avons constaté que votre entreprise ne respecte pas les normes." Quelles normes ne respecte-t-elle pas? Les bons de commande doivent être remplis en français. Cette compagnie, qui prend sa matière première, ses matériaux en Allemagne, aux États-Unis et en Amérique du Sud, doit remplir ses bons de commande en français. Est-ce assez ridicule, M. le Président? Les factures aux clients doivent être remplies en français. Cette compagnie qui exporte à la Jamaïque, aux États-Unis, au Honduras, on ne comprendra pas, à l'autre bout, une facture uniquement en français. Vous avez là des abus considérables de ces petits fonctionnaires de l'Office de la langue française avec des documents tels: Quelques moyens de francisation.

M. le Président, si j'avais le temps de tout vous relater cela... On dit: Évitez les situations dans lesquelles le personnel aura à utiliser l'anglais. Il ne faut pas se laisser contaminer, il faut faire attention aux pestiférés qui parlent anglais. On dit un peu plus loin: Apportez les modifications nécessaires aux caisses enregistreuses et aux balances imprimantes. Exigez par écrit des fournisseurs de matériel de programmes d'ordinateur des ordinateurs en français. Informez par écrit les fournisseurs de l'entreprise que celle-ci est engagée dans son processus de francisation et qu'elle devra communiquer en français avec ses fournisseurs. Exigez que les fournisseurs se conforment aux demandes exprimées par la lettre. Contrôlez les réponses reçues des fournisseurs. Retournez au fabricant ou au fournisseur tout catalogue rédigé en anglais. J'ai envie de dire que c'est du racisme.

Imaginez-vous les conseils. Voyez-vous le ridicule de l'affaire? Un patron d'entreprise, alors qu'il a de la misère à vivoter avec la crise, il veut maintenir son entreprise et ses employés et on lui donne des recettes. Je lis la page 12 du document, article 12.2: Au téléphone, identifiez l'entreprise par son nom français, utilisez une entrée en matière française, "bonjour", et continuez la conversation uniquement en français avec les clients. Ne trouvez-vous pas que cela est ridicule?

Alors, je ne vais pas plus loin avec cette démonstration. Quand on vous parle de paperasserie qui écoeure - excusez le mot -littéralement nos entreprises privées, vous en avez un exemple frappant. Quand allez-vous arrêter cette folie furieuse de franciser nos entreprises dans la Beauce, alors qu'il n'y a pas un employé dans la Beauce... Ce sont des entreprises de 51 employés qui ont ces paquets de formules à remplir. Alors, on veut les franciser, mais il n'y a pas un seul parlant anglais dans l'entreprise. Ce sont tous des francophones. Pourquoi les écoeurer avec ce paquet de papiers? Combien coûtent l'Office de la langue française, la Commission de surveillance de la langue française, le Conseil de la langue française, la Commission d'appel de la francisation des entreprises? La Commission de toponymie coûte 19 789 000 $.

Quand on vous dit que vous administrez comme des rêveurs, comme des peintureurs de nuages, c'est une preuve on ne peut plus convaincante. Quand ce gouvernement va-t-il cesser de prendre des profits pour un péché? Comme si c'était péché, une entreprise qui fait des profits. Quand allez-vous cesser de traiter les hommes d'affaires, les investisseurs, les entrepreneurs, nos promoteurs de PME, d'exploiteurs et de profiteurs? Si quelqu'un commence à bien aller et à émerger un peu trop vite, vous dites: Apporte la masse, on va le recaler. On veut tous être égaux dans cette société. Nous sommes tous égaux dans la médiocrité, tous égaux sur l'aide sociale.

M. le Président, je voudrais vous dire quelques mots de la concurrence déloyale des sociétés d'État. Je veux parler de la société Forano qui fait grandement tort à plusieurs entreprises de mon comté. On disait dans le journal Le Soleil du 6 mai 1983: Perte de 10 400 000 $ pour la SGF en 1982 et, là-dedans, Forano arrive avec un déficit de 9 500 000 $. Un déficit de 9 500 000 $ pour Forano, il n'y a pas de problème, le ministre des Finances éponge le déficit. Mais que fait Forano à nos entreprises privées locales? Elle leur fait une concurrence déloyale. Lorsque nos fournisseurs d'équipements ont des commandes téléphoniques, on leur demande: Est-ce que vous avez demandé à Forano? On ne vous fait même pas de soumission, parce que, si on baisse de 5000 $, Forano va baisser de 6000 $ et, si on baisse de nouveau de 5000 $, elle va encore baisser de 6000 $. Il

n'y a pas de limite. (0 h 10)

On me racontait qu'un écorceur qui se vendait 60 000 $ en 1981, Forano le vend 40 000 $ en 1983. Forano, semble-t-il, déprécie la marchandise neuve en inventaire, alors que les compétiteurs, nos entreprises privées locales, n'ont pas, elles, ce privilège. Forano ne paie pas d'impôt; au contraire, elle engendre un déficit à l'État, alors que nos entreprises, elles, paient de l'impôt.

M. le Président, je pense que, quand le gouvernement aura compris cette injustice considérable des entreprises d'État contre nos PME, contre l'entreprise privée, ce sera déjà un grand pas de franchi. Mais encore faut-il que le gouvernement cesse sa hargne contre l'entreprise privée.

M. le Président, ce gouvernement veut tout contrôler, alors que, pour nous, il semble que le rôle de l'État est d'aider. L'État n'a pas à être propriétaire de Forano, des mines d'amiante, etc.

Cela me fait penser, la différence d'optique entre les deux partis, à ce qui suit. Prenons un bateau dans lequel seraient les 6 000 000 de Québécois. Pour nous, du Parti libéral du Québec, on est 6 000 000 à ramer. Il me semble qu'on est forts. Le rôle de l'État est d'être le moteur. C'est de nous orienter pour que les mers soient le moins houleuses possible, alors que, pour ce gouvernement, nous n'avons pas à ramer, c'est l'État qui doit ramer. Qu'est-ce que le bateau fait, M. le Président? Le bateau, c'est bien dommage, s'enfonce, tout simplement.

M. le Président, quelles sont les conditions de la relance économique tellement nécessaire et tellement souhaitée? La première, c'est le respect de l'entreprise privée. Il ne faut pas seulement le dire, il faut que cela passe dans les faits. Il faut que l'État l'épaule, suscite des conditions favorables pour que l'entreprise privée puisse s'épanouir. Il faut modifier la fiscalité. Il faut détaxer les "pay-roll" et non pas pénaliser les employeurs lorsqu'ils créent des emplois. Il faut diminuer le fardeau des taxes à l'emploi qui deviennent des boulets. Pensons à la taxe ascenseur - j'en disais un mot tout à l'heure - qui devient un boulet pour l'entreprise privée. Également, il faut une mentalité d'accueil, un esprit d'ouverture. Il faut déréglementer. Je vous donnais l'exemple tout à l'heure d'un paquet de formules pour franciser une entreprise où il n'y a pas un seul anglophone. J'ai plusieurs cas dans mon comté. Il y en a sûrement ailleurs dans la province. Ces folies furieuses, quand ferez-vous en sorte qu'elles arrêtent?

Je vous dirai: Commencez donc par cesser votre protectionnisme. Avec ce gouvernement, on a besoin de protecteurs. Cela nous prend le protecteur du malade mental, le protecteur de la jeunesse, le protecteur du territoire agricole, le protecteur du consommateur et je ne sais combien d'autres protecteurs. Je dis qu'on aura besoin d'un protecteur pour se protéger contre vos protecteurs. Messieurs, quand comprendrez-vous cela? Avec vos politiques, avec vos règlements sans nombre, on se sent pris dans une armure. Vous connaissez les combattants du Moyen Âge qui combattaient dans une armure métallique? Ils étaient pris de toute part. Avec vos politiques, c'est la même chose. Nous sommes encarcanés dans une armure. Cette armure vient gêner les mouvements de l'entreprise privée. Elle vient blesser l'entreprise privée quand elle ne la fait pas tout simplement mourir.

Le PQ se prend pour une providence. Mais je pense qu'une providence semblable à celle-là, les gens pourraient s'en passer. De quoi les gens ont-ils besoin? Ils ont besoin d'une véritable relance, pas de beaux discours. Nous le savons, M. le Président. Ce gouvernement est un gouvernement de beaux parleurs. Je devrais dire de haut-parleurs qui font des conférences de presse pour annoncer la même chose sept ou huit fois, quand il n'y a pas de différence. Même si, au bout de cinq ans, il n'y a rien là, il y a une banqueroute de plusieurs millions et que tout a été englouti dans le gouffre, il n'y a pas de problème. C'est un gouvernement de beaux parleurs.

Ce dont nous avons besoin comme condition essentielle, c'est un gouvernement qui va respecter les citoyens, qui va d'abord comprendre que c'est l'entreprise privée qui est le moteur de l'économie, qui va donner la liberté nécessaire aux citoyens et à la société, qui va permettre au monde municipal de recommencer à respirer et qui va donner un nouvel espoir aux jeunes.

Ce que je réclame, en terminant, c'est un gouvernement qui saura créer des emplois, pas seulement le dire, mais le faire, et d'autres emplois que des emplois à temps partiel. M. le Président, le Québec a besoin d'un virage, d'un virage politique et je convie tous les gens, dans la tradition purement beauceronne, à faire une grande corvée de tous les citoyens du Québec qui veulent sortir de cette crise. Le but de la corvée, M. le Président, est de s'attaquer à ceux qui nous tiennent dans cet état, c'est-à-dire battre ce gouvernement du Parti québécois.

Le Président: M. le leader parlementaire du gouvernement.

M. Bertrand: M. le Président, je voudrais demander l'ajournement de ce débat au nom d'un de mes collègues, mais sans pour autant céder mon droit de parole, si vous me le permettez.

Je fais en même temps motion, M. le

Président, pour que nous ajournions nos travaux à demain matin, 10 heures.

Le Président: Est-ce que cette motion est adoptée?

M. le député de Viau.

M. Cusano: Est-ce que le leader pourrait nous indiquer l'ordre des travaux de demain...? Je devrais dire de ce matin parce qu'il est minuit et 15.

Le Président: M. le leader parlementaire du gouvernement.

M. Bertrand: Oui, je voudrais indiquer au député qui me pose cette question fort pertinente, puisque nous voulons savoir exactement ce dont nous discuterons demain après la période de questions, que nous aborderons le projet de loi sur l'assurance-dépôts.

Le Président: La motion du leader parlementaire du gouvernement est-elle adoptée? Adopté.

L'Assemblée nationale ajourne donc ses travaux à ce matin, 10 heures.

(Fin de la séance à 0 h 18)

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