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(Dix heures huit minutes)
Le Vice-Président: À l'ordre, s'il vous
plaît! Veuillez prendre place.
Un moment de recueillement, s'il vous plaît.
Veuillez vous asseoir. L'Assemblée nationale entreprend ses
travaux en ce mercredi 29 octobre 1986. Nous en sommes aux affaires du jour. M.
le leader du gouvernement.
M. Gratton: M. le Président, je vous prierais d'appeler
l'article 25 du feuilleton, s'il vous plaît.
Projet de loi 78
Prise en considération du rapport de la
commission
Le Vice-Président: Donc, à l'article 25, nous
allons procéder à la prise en considération du rapport de
la commission du budget et de l'administration déposé le 21
octobre 1986, commission qui a procédé à l'étude
détaillée du projet de loi 78, Loi modifiant diverses lois
fiscales afin de donner suite à l'énoncé de politiques
budgétaires du gouvernement du 18 décembre 1985. La parole est
à M. le leader du gouvernement.
M. Michel Gratton
M. Gratton: Merci, M. le Président. Très
brièvement, il n'est peut-être pas inutile de rappeler que, comme
l'indique le titre du projet de loi, il s'agit de donner suite aux dispositions
du discours sur le budget que prononçait le ministre des Finances le 18
décembre 1985, c'est-à-dire au lendemain de l'élection du
2 décembre qui devait donner un gouvernement libéral au
Québec.
On se rappellera qu'en cours de la campagne électorale le Parti
libéral avait pris un certain nombre d'engagements dont certains
portaient sur les taxes et impôts. Dès après
l'élection, le premier ministre avait décrété la
tenue d'une mini-session convoquée d'urgence qui avait permis au
ministre des Finances de déposer un budget, lequel prévoyait dans
les grandes lignes trois dispositions qui donnaient suite à des
engagements électoraux.
Notamment, le discours sur le budget du 18 décembre
prévoyait l'exemption des primes d'assurance individuelle de personnes.
C'est ainsi que dans le projet de loi 78 on retrouve les dispositions qui
traduisent de façon légale cette intention, cette décision
du ministre des Finances. De même le projet de loi modifie la Loi sur les
impôts afin d'abaisser les taux marginaux d'imposition d'une certaine
catégorie de travailleurs, réduction qui était d'ailleurs
prévue dans la réforme fiscale de l'ex-gouvernement mais qui
devait s'appliquer à compter du 1er janvier 1987. Or, en campagne
électorale, le Parti libéral avait indiqué qu'on
devancerait d'un an ces réductions des taux marginaux pour qu'ils
s'appliquent à compter du 1er janvier 1986, ce que vient consacrer le
projet de loi 78.
Finalement, le troisième point parmi les plus importants que
contient le projet de loi 78, ce sont les modifications à la Loi
concernant la taxe sur les carburants afin de prévoir la
réduction du taux de la taxe sur les carburants dans certaines
régions périphériques, de même que la date de prise
d'effet des règlements adoptés à cet égard. On se
rappellera que, dans un premier temps, le gouvernement antérieur avait
commencé à détaxer certaines régions, notamment les
régions frontalières à la suite de représentations
de l'Opposition au lendemain de l'imposition de la surtaxe de 20 % sur
l'essence. Nous avions fait valoir dans l'Opposition qu'on incitait à
l'évasion fiscale surtout dans les régions frontalières
puisque les gens retrouvant un certain avantage à aller s'approvisionner
en carburant du côté soit de l'Ontario, soit des
États-Unis, cela avait pour effet d'inciter les gens également
à acheter d'autres produits, d'autres services, ce qui constituait une
occasion d'évasion fiscale.
Le gouvernement précédent avait, en quelque sorte,
établi ces régions d'exception à la taxe sur les
carburants, et le ministre des Finances, dans son discours sur le budget du 18
décembre, a fait en sorte que certaines régions dites
périphériques, notamment l'Abitibi, le
SaguenayLac-Saint-Jean, la Gaspésie et une partie de l'Outaouais
puissent jouir d'une détaxation, selon les régions, soit de la
moitié de la surtaxe, de façon à permettre aux
utilisateurs, aux automobilistes de ces régions éloignées
qui ont un besoin accru d'utiliser leur automobile de façon beaucoup
plus régulière, de bénéficier d'exemption de cette
surtaxe sur l'essence.
Voilà en bref, les principaux éléments du projet de
loi 78. Évidemment, il y a d'autres articles de concordance. Le tout a
fait l'objet d'une étude détaillée en commission
parlementaire et, puisque nous en sommes à l'étape de la prise
en
considération du rapport, j'indique tout de suite que, dès
l'adoption du rapport et le plus tôt possible, nous procéderons
à la prochaine étape qui est l'adoption du projet de loi de
façon que ces dispositions, qui sont déjà en vigueur
depuis le 18 décembre, faut-il le rappeler, retrouvent leur fondement
légal le plus tôt possible.
Le Vice-Président: Je cède maintenant la parole
à M. le député d'Abitibi-Ouest et leader adjoint de
l'Opposition.
M. François Gendron
M. Gendron: M. le Président, je voudrais juste prendre
quelques minutes pour exprimer mon point de vue concernant la prise en
considération du rapport sur le projet de loi 78 qui a fait l'objet
d'une étude en commission parlementaire, même si c'est mon
collègue, le député de Lévis, critique en ces
matières, qui a participé très activement à cette
commission - s'il arrive -qui devrait être notre porte-parole dans ce
débat.
Je voudrais quand même profiter de l'occasion pour faire quelques
remarques. Le ministre du Revenu a correctement identifié que ce projet
de loi, c'est un projet de loi qui donne suite à l'énoncé
de politiques budgétaires du gouvernement du 18 décembre 1985.
C'est exact. Nous avions en commission parlementaire le mandat d'étudier
article par article les suites à être données à cet
énoncé de politiques.
Dans les notes explicatives, on explique à la population que
c'est à la suite de l'énoncé complémentaire du
budget présenté par le ministre des Finances qu'il y avait lieu
de présenter ce projet de loi. Cependant, on aurait pu très bien
le titrer "Suite partielle à être donnée aux engagements
électoraux du Parti libéral" puisque, contrairement aux attentes
que l'Opposition et la population pouvaient avoir, ce n'est que très
partiellement dans certains cas que ce projet de loi donne suite aux
engagements que ces gens-là avaient pris, en particulier pour tout le
volet de l'assurance.
Rappelez-vous que la nuance qu'on a établie dans le projet de loi
n'a jamais existé en termes d'engagement électoral lors de la
campagne. On avait dénoncé, décrié comme ce n'est
pas possible l'imposition de cette taxe inique, disait-on de l'autre
côté, cette taxe qui va à l'encontre de toutes les
traditions québécoises qui veulent que l'assurance soit une
protection, une espèce de notion d'épargne qu'on transfère
pour une protection pour l'avenir. Dans ce sens, je pense que, entre le
discours que ces gens-là ont tenu sur cette disposition et la
réalité qu'ils ont appliquée dans le budget du mois de
décembre, il y avait tout un écart, en particulier, en
restreignant uniquement la non-taxation aux assurances de caractère
personnel, les assurances qu'on prend individuellement, les primes d'assurance
individuelle, lorsqu'on sait que, majoritairement, la plupart des
Québécois et des Québécoises ne s'assurent pas de
cette façon, mais bénéficient plutôt d'une
assurance-groupe, d'une assurance collective. Bien sûr, si ces formes
d'assurance avaient été détaxées, cela aurait
été beaucoup plus avantageux pour les citoyens et les citoyennes
du Québec, comme il avait pris l'engagement en campagne
électorale d'éliminer complètement toute notion de taxe
concernant les assurances.
M. le Président, rapidement, qu'est-ce qui s'est passé en
commission parlementaire? On l'a étudié article par article, mais
je pense qu'on ne peut pas convenablement prétendre faire rapport en
Chambre de l'étude détaillée de ce projet de loi sans
revenir sur ce que nous avons appris d'une façon formelle. Le ministre
du Revenu nous a appris à cette commission parlementaire que, contre
toute attente, le gouvernement a confirmé que les personnes qui avaient
annulé leur police d'assurance individuelle ne reverraient jamais la
couleur de la taxe de vente de 9 % qu'elles avaient payée.
Est-ce qu'il avait lu de longues explications? Est-ce qu'il avait lu
dans la presse parlementaire le fait qu'on a repris les propos du critique en
ces matières, le député de Lévis, en disant qu'on
trouvait cela, de notre part, passablement odieux, passablement difficile
à justifier? Concrètement - le député de
Lévis pourrait faire image mieux que moi, mais je voulais juste en
rappeler une - c'est comme si on disait à quelqu'un qui a acheté
une automobile: Cela va, tu peux annuler ta prime, mais pas la taxe que tu as
payée de 9 % sur ta prime d'assurance. Alors qu'il ne dispose plus du
bien, on lui fait quand même payer une contribution pour un bien qu'il
n'utilise plus. Le député de Lévis a même
utilisé l'expression "c'est comme payer la taxe sur un repas que je n'ai
pas pris". Je trouverais cela curieux de payer une taxe sur un repas que je
n'ai jamais pris, mais on me dit: Cela ne fait rien, il faut que tu paies la
taxe pareil.
C'est ce que le député de Lévis avait
mentionné en commission parlementaire, en disant que, pour nous, s'il y
a une taxe à payer sur une prime, il y a une assurance, mais s'il y a
remboursement de la prime, il devrait y avoir remboursement de la taxe. Il me
semble que c'est simple; c'est compréhensible; c'est logique. Par
définition, s'il y a annulation de la prime, il devrait également
y avoir annulation de la taxe sur la prime. (10 h 20)
On a beaucoup insisté là-dessus. On dit: "Aucun
remboursement de la taxe ne doit
être effectué à l'égard d'une prime
remboursée après le 18 décembre 1985, si cette prime est
attribuable à un contrat d'assurance individuelle de personnes auquel on
met fin après cette date." C'est une disposition qui nous paraît
odieuse, inacceptable et on l'a dénoncée. On n'a pas eu vraiment
d'explications satisfaisantes à ce sujet, pas plus du
député de Montmorency, qui est adjoint parlementaire au ministre
du Revenu, que du ministre du Revenu lui-même, qui nous a dit que
c'était tout simplement pour éviter que des gens, au lendemain de
l'annonce de la détaxation de ces primes d'assurance, utilisent le
stratagème d'annuler leur contrat pour en négocier un nouveau
bref pour éviter de payer la taxe.
Nous, on pense que c'est un droit individuel. Moi, si j'ai une police
individuelle et que je décide de l'annuler, c'est de mes affaires. Ce
sont des affaires personnelles. Cela regarde l'individu dans son libre choix
et, en conséquence, si je décidais d'annuler une police
d'assurance, il est normal qu'on me rembourse la taxe que j'ai payée. Le
gouvernement, dans ce projet de loi, nous dit non. Dorénavant, il n'est
pas question de rembourser la taxe de 9 % payée sur la prime. On pense
que c'est une disposition inacceptable.
Et je pense que ce qui était aussi inacceptable c'est que le
ministre du Revenu, quoique je ne suis pas sûr... Il pourra profiter de
sa réplique pour nous indiquer des choses que j'aurais omises... Il me
semble qu'en commission parlementaire on avait été très
ferme là-dessus: on voulait absolument avoir l'information sur le
montant d'argent que cela pouvait représenter pour le ministère
du Revenu. En commission parlementaire on n'a pas pu avoir réponse
à cette question. D'ailleurs, ici je cite le Soleil: "Garon parle de
millions, Gratton ne peut répondre." Je citais un article de journal, M.
le Président, et j'aimerais qu'au cours de la réplique, le
ministre du Revenu, puisqu'il a sûrement eu le temps de regarder ses
papiers, a sûrement eu le temps de retourner au ministère pour
être en mesure d'évaluer quelle somme représente pour
l'État québécois cette partie des taxes sur les assurances
individuelles qu'on ne retournera pas aux citoyens et aux citoyennes du
Québec... je pense que le moment serait venu...
Bien sûr - cela va être ma conclusion -on a eu
également l'occasion d'apprécier, lors de l'étude article
par article, certains autres éléments qui étaient compris
dans ce projet de loi, en particulier ce qui a été, selon
l'Opposition, le fleuron de la minisession de décembre, à savoir
une réduction de la surtaxe sur l'essence dans les régions dites
éloignées et périphériques. Nous, on a
constaté que c'était intéressant pour les régions
concernées, mais il n'en demeure pas moins qu'on a changé une
disposition pour maintenir dorénavant la taxe à son niveau le
plus élevé alors que, partout au Québec, on assistait
à une réduction sans précédent du prix de
l'essence, du baril de pétrole. En conséquence, on trouve que
c'est une disposition avantageuse pour le gouvernement mais peu avantageuse
pour les citoyens et les citoyennes du Québec, de se gonfler
l'intérieur en disant que c'est fini, la taxe ascenseur. Je comprends,
ils l'ont collée au plafond, à son plus haut niveau, et elle est
fixe à 30 % alors qu'on assiste graduellement à une
réduction des prix du baril de pétrole qui, en
conséquence, devrait se traduire, pour l'usager, l'utilisateur, par une
réduction plus significative, plus marquée. Je ne pense pas que
nous ayons assisté à une réduction très importante
du litre payé à la pompe parce que le niveau de taxe est
demeuré très élevé. La différence, c'est
qu'il est à son plus haut niveau et qu'il est collé là.
Même si le prix de l'essence continuait à baisser, le niveau de
taxation imposé par ce gouvernement ne baisse pas. C'est ce qui fait que
c'est très dispendieux pour les contribuables. On a profité
effectivement de cette commission parlementaire, lors de l'étude article
par article, pour revenir sur ces dispositions et prétendre qu'entre
l'engagement que ces gens avaient pris et la réalité, il y avait
tout un monde d'écart.
Ce sont les principales dispositions. Peut-être une
dernière remarque sur ce que nous avons décrié,
c'est-à-dire la réduction ou l'abolition des 500 $ pour les taxis
en disant que ce n'était pas une mesure qui devait être maintenue.
Le projet de loi indique un montant de 500 $ pour chaque permis de taxi autre
qu'un permis de taxi délivré, alors que cette disposition
permettait de donner une autre possibilité dans les régions
éloignées. En conséquence, M. le Président, on a eu
à déplorer cette disposition dans ce projet de loi.
Voilà les commentaires que je voulais formuler sur le projet de
loi que nous étudions en Chambre aujourd'hui, qui se veut une suite aux
travaux de la commission parlementaire. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président: Suivant notre règlement, je
cède maintenant la parole à M. le ministre du Revenu pour une
intervention de cinq minutes.
M. Michel Gratton
M. Gratton: Merci, M. le Président. Je voudrais
répliquer à seulement un argument invoqué par le
député d'Abitibi-Ouest, soit toute la question du remboursement
de la taxe de vente sur les primes d'assurance individuelle en se servant d'un
article du Soleil où on citait le député de Lévis
selon
lequel il s'agirait de sommes de 10 000 000 $. Je voudrais
rétablir les faits. D'abord, je pense que personne au Québec,
sauf peut-être l'Opposition, ne comprendra pourquoi on avait prévu
dans le discours sur le budget du 18 décembre, cette disposition pour
empêcher de rembourser la taxe de vente.
D'abord, situons les choses dans leur contexte. C'est le gouvernement du
Parti québécois qui a imposé une taxe de 9 % sur
l'ensemble des assurances. Le Parti libéral, durant la campagne
électorale, s'est engagé à détaxer les primes
d'assurance pour l'ensemble des primes d'assurance au cours de la
période d'un mandat, c'est-à-dire quatre ans. Dans un premier
temps, il a commencé par les primes d'assurance individuelle dès
le discours du 18 décembre dernier. On a donc détaxé les
primes d'assurance individuelle à compter du 18 décembre,
c'est-à-dire seize jours après notre élection.
Mais, M. le Président, il y a une disposition qui a
été évoquée par le ministre des Finances à
ce moment-là, à savoir qu'on ne rembourserait pas la taxe de
vente de 9 % sur des assurances individuelles qui seraient annulées.
J'ai dit clairement en commission parlementaire que la raison de cette
disposition, c'était d'éviter qu'à partir du 18
décembre, leurs primes d'assurance n'étant plus taxables, des
gens annulent leurs polices d'assurance pour pouvoir se faire rembourser la
taxe, contractent ensuite à nouveau avec l'assureur et obtiennent ainsi
des avantages qui n'étaient pas prévus dans la mesure du ministre
des Finances. Il n'avait pas été question, dans le discours sur
le budget du ministre des Finances, de détaxer "en arrière". On
ne pouvait quand même pas donner des avantages sur les primes
déjà payées. C'était à compter du 18
décembre. D'ailleurs, la formule consacrée c'est: "À
compter de ce soir, minuit". C'est donc à compter du 18 décembre
que ces primes d'assurance n'étaient plus taxées et il fallait
prévoir que les gens ne puissent pas, simplement en annulant leur police
d'assurance, récupérer la taxe pour, ensuite, se réassurer
sans payer cette taxe.
Ce que je n'ai pu donner comme information en commission parlementaire
lors de l'étude détaillée, c'était les montants
impliqués, mais je les ai fournis depuis aux membres de la commission
dans une lettre que j'ai adressée au président de la commission,
le député de Vanier, dont j'ai fait parvenir copie à
chacun des membres de la commission la semaine dernière. Je vais lire le
passage de la lettre, M. le Président, puisque je pense que cela
résume l'ensemble de l'information requise. "Tout d'abord, il
m'apparaît important de souligner que la mesure proposée à
l'article 7 est purement une mesure préventive visant à
éviter, au lendemain du 18 décembre 1985, une annulation massive
possible des contrats d'assurance pour la seule raison du remboursement de la
taxe". C'est ce que j'expliquais tantôt. "Cet objectif a d'ailleurs
été atteint puisque aucune action importante visant à
mettre fin à des contrats d'assurance n'a été
constatée à la suite de l'annonce de l'exemption sur les primes
d'assurance individuelle de personnes". Donc, la mesure a donné les
résultats escomptés. "En ce qui concerne l'incidence
financière, il n'a pas été possible à mes
fonctionnaires d'établir le montant des primes remboursées
annuellement aux personnes qui, dans le cours normal des choses, mettent fin
à un contrat d'assurance individuelle de personnes avant terme, ni
d'établir le montant de telles primes remboursées après le
18 décembre 1985. "Cependant, d'après nos informations, un tel
montant serait habituellement marginal compte tenu, d'une part, qu'en
assurance-vie individuelle la prime est acquise à l'assureur dès
qu'elle est payée par l'assuré et qu'elle n'est remboursable que
dans les circonstances suivantes: le contrat est annulé dans les dix
jours de l'émission de la police - c'est la clause de rescision - ou le
contrat est annulé avant que la police ne soit émise". Ce sont
les deux seuls cas où on peut annuler une assurance-vie. "D'autre part,
en assurance individuelle contre la maladie ou les accidents, même si les
compagnies d'assurances acceptent généralement de rembourser
à la suite de l'annulation d'un contrat la partie de la prime relative
aux jours à courir, le total annuel de ces remboursements serait minime,
toujours selon nos informations." (10 h 30)
C'est donc dire que le montant de 10 000 000 $ dont parlait le
député de Lévis n'existe pas, n'a jamais existé,
mais aurait peut-être pu exister si, pour éviter à toutes
fins utiles de payer la taxe qui était due jusqu'au 18 décembre,
on avait permis à des gens d'annuler leur police d'assurance. Mais
encore aurait-il fallu que les assureurs eux-mêmes des contrats
d'assurance de ces gens prévoient cette possibilité d'annulation
et, comme on l'indique ici, il y a seulement deux cas où cela s'applique
dans le cas de l'assurance-vie, c'est lorsque le contrat est annulé dans
les dix jours de l'émission ou lorsque le contrat est annulé
avant que la police soit émise. Tout le monde sait qu'une police
d'assurance-vie ne s'annule qu'au moment de son échéance et
jamais en cours d'année.
Donc, M. le Président, ce qu'évoquait le
député d'Abitibi-Ouest en se faisant l'écho du
député de Lévis est un argument qui ne vaut pas, qui n'a
aucune valeur puisque, effectivement, la mesure était prévue pour
empêcher une certaine évasion fiscale, qu'on
constate effectivement que la mesure a eu le résultat
désiré et qu'il n'y a aucune incidence financière en temps
normal. Il n'y en aurait eu que si la mesure n'avait pas été
prévue, ce qui aurait été complètement
irresponsable de la part du ministre des Finances et ce que le ministre des
Finances actuel est loin d'être, tout le monde en conviendra.
Le Vice-Président: Je cède maintenant la parole
à M. le député de Lévis.
M. Jean Garon
M. Garon: M. le Président, le ministre du Revenu vient
précisément de donner les raisons pour lesquelles - c'est ce qui
avait été indiqué par les représentants des
assureurs - la disposition qui était incluse dans le budget du 18
décembre 1985 aurait cet effet d'empêcher l'annulation
d'assurances qui aurait pu être faite si les gens avaient pu
récupérer la taxe. Auparavant, on devait distinguer dans les
contrats les taxes pour les différents types de contrats, pour rendre le
remboursement possible, et le remboursement de la taxe sur des primes
annulées était prévu dans la loi. C'est cette disposition
que le discours sur le budget du 18 décembre dernier vient changer. Le
ministre du Revenu, s'il lit l'article avec moi, verra que l'amendement
proposé a pour effet de modifier par l'addition après le
deuxième alinéa du suivant qui dit: Malgré le premier
alinéa aucun remboursement de la taxe ne doit être effectué
à l'égard d'une prime remboursée après le 18
décembre 1985 si cette prime est attribuable à un contrat
d'assurance individuel de personne auquel on met fin après cette
date.
Alors que le régime prévu par le premier alinéa
c'est justement le remboursement, l'article qui est ajouté par cet
amendement a pour but d'empêcher le remboursement même si la prime
est remboursée. On se trouve dans la situation ridicule, avec cet
amendement proposé par le gouvernement Bourassa, de maintenir une taxe
alors qu'il n'y a plus de prime. Si on paie une prime de 100 $ sur des
assurances et qu'on a payé 9 % de taxe, c'est-à-dire qu'on a
payé 109 $ à la compagnie d'assurances, 100 $ de prime et 9 $ de
taxe, c'est-à-dire un compte de 109 $ et que l'assurance est
annulée, la compagnie va rembourser les 100 $ de prime, mais le
gouvernement va garder les 9 $ de taxe sur une prime qui n'existe plus. C'est
un vol pur et simple. Appelons les choses par leur nom, c'est un vol pur et
simple, parce qu'une taxe sur rien ne peut plus être une taxe. Là
on a réussi ce qu'aucun gouvernement antérieur n'avait
réussi: taxer le néant, taxer l'inexistence, taxer l'absence de
prime.
On comprendra que s'il y a une taxe sur une prime, une taxe de vente de
9 %, que la taxe s'applique sur un montant, sur quelque chose. Si le quelque
chose sur lequel s'applique la taxe n'existe plus, il n'y a plus de base pour
la taxe et la taxe devrait être remboursée. La situation est un
peu ridicule. J'expliquais en commission parlementaire, le parallèle est
exactement le même: Si j'achète une automobile de 10 000 $, j'ai
une taxe de 9 %, de 900 $. Si, pour une raison ou pour une autre la transaction
est annulée, le garage me remet mon chèque de 10 000 $, mais le
gouvernement gardera la taxe de 900 $ sur une automobile qui n'a pas
été achetée. On voit à quel point c'est ridicule.
Pourtant, c'est ce que le gouvernement introduit par une mesure dans
l'assurance, par la prime, par la disposition sur les contrats individuels de
personnes.
Même si le contrat d'assurance est annulé, même si la
compagnie doit rembourser la prime, le gouvernement garde la taxe. Pourtant
dans toutes les autres lois fiscales, le gouvernement doit rembourser les taxes
quand l'objet de la taxe n'existe plus ou n'existe pas. C'est facile à
comprendre. Le ministre du Revenu devrait comprendre que sa disposition... Il
n'a peut-être pas compris ce que les fonctionnaires ou les conseillers
ont mis dans le projet de loi, aujourd'hui, après l'étude qui a
été faite, il devrait comprendre que cela n'a pas de bon sens de
laisser une disposition comme celle-là dans la loi. D'autant plus
qu'elle n'aurait plus d'effet de toute façon parce qu'il dit
lui-même que le fait qu'elle ait existé a empêché des
gens qui auraient voulu annuler leur contrat de l'annuler parce qu'ils
n'auraient pas obtenu le remboursement de la taxe auquel ils auraient eu
droit.
Là, on ne me dira pas que le ministre, en faisant une disposition
comme celle-là, travaille pour les assurés. Il travaille pour les
assureurs. Il travaille pour les compagnies. C'est cela la marque de commerce
du Parti libéral. Au diable les consommateurs! Au diable les individus!
Au diable les citoyens! Au diable les contribuables, d'abord que les
intérêts des puissants sont servis, d'abord que les
intérêts du gouvernement sont servis indépendamment des
gens.
On taxe l'inexistence actuellement. On taxe le remboursement des primes
d'assurance. Avez-vous déjà vu quelque chose comme cela? C'est la
première fois dans toute l'histoire du Parlement - pourtant, j'ai
enseigné l'impôt - qu'on taxe rien, qu'on met une taxe sur rien.
Je voudrais le répéter encore une fois parce qu'il y a des gens
qui peuvent nous écouter ce matin. Ils peuvent dire: Cela n'a quasiment
pas de bon sens. Mais, c'est cela, c'est justement cela. Cela n'a pas de bon
sens.
Si j'ai un contrat d'assurance-vie de
personne avec une compagnie et que, pour une raison ou pour une autre,
le contrat est annulé, j'ai droit à un remboursement de prime.
J'ai payé la prime et j'ai payé la taxe sur la prime. La
compagnie va me rembourser la prime, mais le gouvernement va garder la taxe sur
la prime qui n'existe plus. Il n'y a plus de prime, elle a été
remboursée. Le gouvernement, lui, va garder la taxe. Cela n'a pas de bon
sens. Cela n'a pas de bon sens. Le ministre va passer à l'histoire comme
un ministre qui a réussi à taxer le néant, qui a
réussi à garder des taxes sur des primes quand les primes
n'existaient plus, quand les primes étaient remboursées par les
compagnies. C'est cela qui pollue notre environnement fiscal au Québec.
C'est sans doute le seul endroit en Amérique du Nord où on aura
réussi à mettre des taxes sur des remboursements de prime alors
que la prime n'existera plus, alors que le contrat aura été
annulé. Alors que l'individu, le citoyen, l'assuré aura droit au
remboursement de sa prime, le gouvernement va garder la taxe. (10 h 40)
M. le Président, on se retrouve devant ces beaux
défenseurs de la veuve et de l'orphelin. On voit aujourd'hui ce qu'ils
ont réussi à faire. Et tout ce budget du 18 décembre a
été fait dans la même veine de protéger les
puissants contre les petits, de protéger ceux qui ont le moins besoin de
protection, mais de ne pas protéger ceux qui ont besoin de protection.
On a réussi par cette mesure à faire en sorte de pénaliser
les gens qui auraient dû avoir droit à des remboursements de taxe
parce que leur contrat d'assurance a été annulé, parce
qu'ils ont droit à un remboursement de la prime d'assurance. Le
gouvernement, lui, avec une disposition nouvelle, alors que la loi
antérieurement prévoyait justement que, lors du remboursement de
la prime, il y aurait remboursement de la taxe, le Parti libéral veut
voter une disposition pour empêcher que des gens qui avaient droit au
remboursement de la taxe y ait droit.
Vous savez, c'est une situation nouvelle qu'il crée alors que la
loi prévoyait justement, faisait l'obligation aux compagnies
d'assurances de distinguer, dans les comptes, les primes et les taxes,
justement pour qu'on puisse rembourser les uns et les autres. La loi
prévoyait qu'il devait y avoir un remboursement de la prime et,
consécutivement au remboursement de la prime, il devait y avoir un
remboursement de la taxe, ce qui est normal dans toute société
civilisée.
Le ministre vient mettre une disposition complètement incroyable,
complètement nouvelle dans tout système fiscal d'imposition dans
le monde entier. Je suis persuadé qu'il n'existe nulle part, dans aucun
pays au monde, une telle mesure qui n'a aucun sens.
Alors que la loi prévoit que la compagnie doit distinguer les
primes et les taxes dans les différents types de contrat, justement,
pour qu'on puisse faire les remboursements, le ministre vient adopter une
disposition pour dire: Même si la prime est remboursée, on garde
la taxe. C'est quelque chose, M. le Président: Vous regardez votre
règlement, vous ne pouvez pas en croire vos yeux vous non plus.
Pourquoi? Parce que cela n'a pas de bon sens. Je vais vous dire qu'on pourra
conter aux délégations qui viendront de pays étrangers
qu'on a une disposition nouvelle dans notre régime fiscal qui fait en
sorte que lorsque la prime est remboursable, le gouvernement garde la taxe.
Que ce soit à 9 % de 100 $, 9 % de 1000 $ ou 9 % de 10 000 $, la
taxe a été payée et la prime doit être
remboursée à l'assuré, mais le gouvernement dit:
Même si la taxe s'appliquait sur la prime et que la prime doit être
remboursée, je garde la taxe. Il fait une disposition spéciale
dans ce sens.
M. le Président, le ministre du Revenu dira ce qu'il voudra. Il
donnera les explications qu'il voudra, la réalité est ainsi faite
que c'est très clairement indiqué dans l'article qu'il propose:
"Malgré le premier alinéa, aucun remboursement de la taxe ne doit
être effectué à l'égard d'une prime
remboursée..."
Il interdit aux compagnies d'assurances qui remboursent la prime de
rembourser la taxe sur la prime que l'assureur a payée. C'est cela que
l'article vient faire. Si la prime est attribuable à un contrat
d'assurance individuelle de personnes auquel on met fin après une
certaine date, il interdit à la compagnie qui a fait payer à
l'assuré la prime et la taxe de rembourser la taxe lorsqu'elle rembourse
la prime.
Cela vient dire exactement le contraire de ce que disait l'article de
loi antérieurement, M. le Président. C'est une situation
aberrante. C'est un exemple unique au monde d'iniquité fiscale. C'est
complètement inique. On va garder une taxe sur une prime, même si
la prime est remboursée. Cela veut dire 9 % d'une prime de 100 $ ou de
1000 $ qui n'existe plus, puisque la prime a été
remboursée. Alors, pourquoi mettre 9 % d'une prime qui n'existe plus,
puisqu'elle a été remboursée?
Même type de mesquinerie à l'égard des chauffeurs de
taxi qui avaient droit à un remboursement de 500 $ dans les
régions éloignées. Dans les régions
éloignées, les chauffeurs de taxi avaient droit a un
remboursement de 500 $ pour tenir compte du fait qu'un chauffeur de taxi dans
une région éloignée doit payer plus de taxe parce qu'il
consomme plus d'essence.
Évidemment, il n'y a pas beaucoup de gens de régions
éloignées dans le Parti libéral qui parlent. On ne les
entend jamais
parler. Ils sont là comme des machines à voter, sans
jamais dire un mot.
Une voix: Des moules.
M. Garon: Même les moules font souvent sortir des bulles
d'air. Le Parti libéral, même pas de bulles d'air, rien, alors que
quand il s'agit de Montréal, il y a de la
générosité pour le transport en commun. C'est par
centaines de millions que l'argent est versé, chaque année, pour
subventionner le transport en commun. Il n'y a pas de transport en commun dans
les régions périphériques.
Mais là, on dit que le chauffeur de taxi qui joue le rôle
de transporteur... Pour beaucoup de personnes, le seul transport qui existe
dans les régions périphériques, c'est le taxi. Il existait
un remboursement de 500 $ pour les permis des chauffeurs de taxi dans les
régions périphériques qui avait été
institué par le gouvernement du Parti québécois. Le Parti
libéral dit: Non, plus de 500 $ pour les chauffeurs de taxi en
région périphérique. C'est cela que le Parti
libéral veut adopter par sa loi.
Le montant de 500 $ qui était remboursable par le fait qu'un
chauffeur de taxi conduisait un taxi en région éloignée,
qu'il avait... Vous savez, dans les régions éloignées,
à quel point cela peut être onéreux, parce que les routes
ne sont pas toujours aussi bonnes, parce qu'il y a souvent beaucoup de routes
de terre, parce que cela coûte plus cher à exploiter. Comme il
doit faire de plus longs trajets, qu'il doit consommer plus d'essence, pas par
plaisir mais par obligation, un montant de 500 $ était remboursé,
ce qui, au fond, pouvait aider les chauffeurs de taxi à demander de
meilleurs tarifs dans ces régions éloignées. On trouve que
le petit des régions éloignées en a trop, encore une fois,
et on dit: On va les lui ôter. Il faut les lui enlever, il n'a pas besoin
de ces 500 $. Mais, quand il s'agit de verser 500 000 000 $, ou plutôt
395 000 000 $, pour subventionner le transport en commun à
Montréal, il n'y a pas de problème. Pourquoi ne pas garder
l'équilibre? Il n'y a pas, sur la Côte-Nord, aux
Îles-de-la-Madeleine, dans le Bas-Saint-LaurentGaspésie, en
Abitibi-Témiscamingue, dans l'Outaouais, dans les régions
nordiques, à Laviolette, etc., de transport en commun organisé
comme il y en a à Montréal et à Québec.
Des voix: Voyons doncl
M. Garon: Non, dans les régions nordiques. On a voulu
enlever ces montants. Dans l'Ungava, vous savez que le transport en commun, ce
n'est pas pour demain. Le député d'Ungava est ici. Mais donner
500 $ à un chauffeur de taxi, parce que le taxi est le seul moyen de
transport des régions périphériques, le ministre du Revenu
dit non. Pourquoi? Parce que les députés d'arrière-ban du
Parti libéral ne parlent pas à leur caucus. Ils ne sont pas
capables de défendre les régions qu'ils représentent. La
preuve, c'est qu'aujourd'hui on enlève la maigre pitance de 500 $ par
permis de chauffeur de taxi. Mais quand il s'agit de donner 400 000 000 $ pour
subventionner le transport en commun de Montréal, ils regardent passer
la parade, ils sont dans l'estrade. Qu'est-ce qui caractérise les
députés du Parti libéral? Ils ne sont pas dans la parade,
ils sont dans l'estrade, des spectateurs qui regardent passer les trains sans
jamais dire un mot. Encore une mesure qui pénalise le contribuable.
Troisièmement, quand vous regardez l'article de loi, c'est
évident qu'il faut faire des calculs, puisqu'on vient changer les taux
d'impôt laissant entendre qu'on fait des cadeaux aux contribuables. C'est
pour cela qu'on a appelé cela le budget à 10 $ de M. le ministre
des Finances, député de Bonaventure. Il aura comme effet en 1986
de donner peu aux gens à faible revenu et de donner beaucoup aux gens
à haut revenu de la même façon que son budget va aller
encore dans la même direction le 1er mai 1987. Qu'est-ce qu'il aura comme
effet? Ce projet de loi proposé par le Parti libéral pour mettre
en oeuvre le budget du 18 décembre 1986 aura pour effet de diminuer
l'impôt sur le revenu de 10 $ pour celui qui gagne 20 000 $, de 68 $ pour
celui qui gagne 30 000 $, de 195 $ pour celui qui gagne 40 000 $, de 324 $ pour
celui qui gagne 50 000 $, de 816 $ pour celui qui gagne 75 000 $ et de diminuer
de 1301 $ pour celui qui gagne 100 000 $. Si vous gagnez 20 000 $, vous avez
une diminution de 10 $; si vous gagnez 100 000 $, vous avez une diminution de
1300 $. Cela veut dire que l'écart entre 20 000 $ et 100 000 $, c'est de
1 à 5. Quand vous gagnez 100 000 $, vous gagnez cinq fois plus que celui
qui gagne 20 000 $.
Le calcul est facile. Si vous gagnez 20 000 $, vous gagnez cinq fois
moins que celui qui gagne 100 000 $. Mais le résultat de la loi que veut
adopter le Parti libéral sera de faire en sorte que celui qui gagne 100
000 $, cinq fois plus que celui qui gagne 20 000 $, paiera 130 fois moins
d'impôt. Celui qui gagne 20 000 $ verra son impôt diminuer de 10 $,
celui qui gagne 100 000 $ verra son impôt diminuer de 1301 $ - 130 fois
moins - alors que le rapport entre les revenus est de 1 à 5, le rapport
entre les diminutions d'impôt des petits et de ceux qui gagnent le plus
sera de 1 à 130. (10 h 50)
Essentiellement, cette mesure a pour effet de faire payer moins
d'impôt aux riches et de garder à peu près le
même
niveau pour ceux qui n'ont pas de bons revenus. Encore là, c'est
la marque de commerce du Parti libéral d'établir que ceux qui
gagnent plus paient moins et que ceux qui gagnent moins paient plus.
On verra, dans le discours du 1er mai, ce sera encore pire. Alors qu'on
dit qu'on est serré, qu'il y a des trous financiers
épouvantables, on trouve le moyen de détaxer de 500 000 $ de gain
de capital sûrement pas les gens les plus démunis de notre
société. On trouvera le moyen d'exempter pour 500 000 $ de gain
de capital, mais, par la même mesure, on trouvera le moyen de
réduire les déductions des gens qui ont 1000 $
d'intérêt sur épargne, c'est-à-dire
l'intérêt à peu près sur 10 000 $ d'épargne,
à 500 $. Pour vous autres, 1000 $ déductibles, c'est trop, on va
en enlever et baisser cela - le Parti libéral va baisser cela - à
500 $.
Regardez toutes ces mesures. Vous n'en trouverez aucune qui avantage les
moins fortunés, les plus démunis, ceux qui gagnent le moins
d'argent. Toutes les mesures vont en faveur de ceux qui gagnent le plus.
Voilà la marque de commerce du Parti libéral qui est le parti des
gens fortunés. Si vous êtes à Westmount et que vous votez
libéral, je comprends, mais quand vous vivez dans le
Bas-Saint-LaurentGaspésie, dans l'ensemble des territoires
où les gens n'ont pas de hauts revenus, je comprends moins bien. Ce
parti est voué à défendre les intérêts des
puissants, des riches et à se foutre des intérêts de ceux
qui ont de plus faibles revenus.
M. le Président, la différence avec le Parti
québécois qui est un parti de type social-démocrate, c'est
qu'il veut une équité fiscale. C'est pourquoi il y avait
antérieurement dans les lois des mesures qui avaient pour effet
d'équilibrer les revenus, de faire en sorte que ceux qui avaient plus
d'argent payaient plus d'impôt et de ne pas détaxer plus ceux qui
gagnent plus. Encore une mesure dans ce budget inique qui a fait une plus
grande iniquité fiscale en réduisant les taux de
progressivité fiscale.
Et la cerise sur le sundae, d'autres diront le couvert sur la chiotte,
restons en termes plus parlementaires, c'est d'avoir gelé à 30 %
la taxe sur le carburant. Alors qu'on avait fait les gorges chaudes pendant des
années en cette Chambre sur une taxe temporaire sur le pétrole,
qui avait été réduite par l'ancien gouvernement, on veut
la geler à 30 % alors qu'on s'est engagé pendant des
années à la faire disparaître.
Drôle de gouvernement, qui a besoin d'études pour
réaliser ses engagements mais qui n'a pas besoin d'études pour
réaliser des choses pour lesquelles il ne s'était pas
engagé, pour favoriser ses amis. On voit que pour les privatisations on
n'a pas besoin d'études. On privatise et on vend aux "chums", mais quand
il s'agit d'adopter des mesures auxquelles ce gouvernement s'était
engagé, au contraire il ne les accomplit pas.
La taxe sur le carburant demeure. Pire même, elle est gelée
au plafond. On avait dit que c'était une taxe ascenseur. Ce
n'était pas une taxe ascenseur sur le pilote automatique, il fallait une
décision gouvernementale. Ce nouveau gouvernement s'est
dépêché de faire monter l'ascenseur au plafond pour ensuite
couper le courant à jamais. On aura un nouvel ascenseur fiscal
libéral qui monte mais qui ne descend plus jamais, alors que la
caractéristique d'un ascenseur c'est de monter et de descendre.
Je vois la députée de Kamouraska qui rit. Je suis certain
que, comme les autres, dans son comté elle a dit: c'est
épouvantable d'avoir une taxe sur le carburant! Mais eux, ils l'ont
remontée pour la geler ensuite. C'est épouvantable! C'est
épouvantable!
C'est pour cela que les citoyens deviennent un peu cyniques devant la
politique, parce qu'ils se rendent compte que les libéraux disent
n'importe quoi et ne remplissent ensuite aucun engagement. C'est pareil comme
les lignes qui passaient sur le fleuve Saint-Laurent entre Lotbinière et
Portneuf. On entendait de belles promesses pendant le temps des
élections. On va vous arranger ça! Et qu'est-ce qui arrive? En
septembre on dit: cela aurait pris neuf mois. Exactement, s'ils avaient pris la
décision en temps cela aurait été fait. S'ils avaient fait
uniquement ce qu'ils ont dit lors de la campagne électorale, s'ils
avaient pris la décision en décembre de réviser le
corridor, comme ils l'avaient dit et ils avaient le droit de le faire,
c'était le gouvernement, le corridor aurait été
révisé en septembre et aurait été terminé.
Mais non! promesse, mensonge, qu'on ne respecte pas, et c'est pourquoi, au
Québec, il y a tant de cynisme vis-à-vis des politiciens parce
qu'il y a trop de promesses qui n'ont pas été
réalisées.
On se retrouve donc, M. le Président, avec une taxe sur les
carburants gelée à 30 %, ce qui fait qu'actuellement, au
Québec, alors qu'on paie l'essence ordinaire 0,46 $ et 0,47 $... Cet
été - je prends à témoin le député de
Vanier qui était présent - je le lui ai montré et je lui
ai dit: Regardez la station; vous pourrez vous en rappeler quand on reviendra
au Québec. À Regina, c'était 0,345 $ le litre alors qu'ici
il coûte 0,47 $, 0,467 $, 0,468 $, entre 0,46 $ et 0,47 $. Donc, 0,12 $
de plus. Quelle différence y a-t-il entre la Saskatchewan et le
Québec? Le gouvernement libéral. C'est la seule
différence. C'est le gouvernement libéral qui taxe, un
gouvernement "taxeux", un gouvernement qui avait pris des engagements qu'il ne
respecte pas, qui parlait contre la taxe sur les assurances, mais qui la
maintient, qui parle contre la taxe sur les carburants, mais qui l'augmente
davantage
et, après, la gèle pour que l'ascenseur ne puisse plus
jamais descendre, alors qu'un ascenseur, M. le Président, cela
descend.
Il savait que le niveau des prix internationaux était en train de
diminuer, devait diminuer à la suite du désaccord des membres de
l'OPEP, et qu'il serait obligé de baisser sa taxe parce que le niveau
des prix moyens serait plus bas. Mais, pour ne pas avoir à le faire, il
s'est dépêché d'augmenter la taxe avant la baisse des prix,
d'augmenter la taxe au maximum et, après, d'enlever le niveau, d'enlever
l'ascenseur pour que l'ascenseur ne puisse plus jamais descendre.
C'est la situation dans laquelle on se trouve présentement, une
taxe au sujet de laquelle le ministre lui-même - le ministre devrait
reconnaître son erreur - disait qu'il ne savait pas, quand il avait
signé un arrêté ministériel, que c'était
automatique qu'elle augmentait. S'il ne le savait pas et qu'il a commis une
erreur, il y a une efface au bout des crayons. C'est justement parce que,
parfois, les gens peuvent se tromper, qu'ils peuvent effacer. Mais quand les
gens sont orgueilleux, on dirait que, quand c'est le Parti libéral, ils
n'ont plus besoin d'efface. Quand ils se trompent, cela devient quand
même la réalité, plus besoin d'effacé dans le Parti
libéral. On ne se trompe pas, même quand il y a eu une erreur. Le
ministre lui-même a admis qu'il y avait une erreur. Il a admis qu'il
s'était trompé. Il a admis qu'il ne réalisait pas qu'il
signait automatiquement un décret ministériel, qu'il n'avait pas
besoin d'aller au Conseil des ministres, sauf que cela va rapporter 250 000 000
$ de plus au gouvernement. Cela a été adopté en
février 1986.
M. le Président, on s'est dépêché de le
faire. Le Parti libéral s'est dépêché de le faire
justement pour profiter au maximum, avant la baisse des taux du pétrole.
Alors que partout ailleurs...
M. Gratton: Question de règlement, M. le
Président.
M. Garon: ...partout ailleurs le niveau des prix a
baissé...
Le Vice-Président: M. le député de
Lévis, un instant.
M. Garon: ...principalement aux États-Unis...
Le Vice-Président: Un instant, M. le député
de Lévis. Question de règlement, M. le leader du
gouvernement.
M. Gratton: Oui, M. le Président. Je m'excuse
d'interrompre la divagation du député de Lévis, mais
pourrais-je lui rappeler qu'il s'agit ici du projet de loi 78 qui donne suite
au discours sur le budget du 18 décembre, lequel budget réduisait
la taxe sur les carburants dans les régions périphériques?
Il est en train de nous faire un discours sur le discours sur le budget du 1er
mai, M. le Président. Le discours sur le budget du 1er mai fera l'objet
d'un autre projet de loi qu'on débattra à un autre moment, mais
la pertinence du débat exige qu'il nous parle maintenant de la
détaxation des carburants dans les régions
périphériques, parce que c'est de cela que le projet de loi 78
traite.
Le Vice-Président: Sur la question de règlement, je
vous dirai que nous sommes à l'étude du rapport de la commission,
de la prise en considération du rapport. Évidemment, je n'ai pas
été témoin de toutes les discussions qu'il y a eu en
commission sur ce sujet, et votre intervention, c'est assez
général quand même. Je vais céder la parole au
député de Lévis en lui rappelant qu'il lui reste
exactement quatre minutes. Et, dans la mesure du possible, je lui demanderais
de se limiter aux questions qui ont trait au projet de loi que nous discutons,
soit le projet de loi 78.
M. le député de Lévis.
M. Garon: M. le Président, le ministre du Revenu devrait
lire l'article 15 qui remplace l'article 2 de la Loi concernant la taxe sur les
carburants. Il se rendra compte que cette taxe devient une taxe permanente et
que la taxe sera permanente à l'avenir sur les carburants.
Une voix: C'est faux.
M. Garon: M. le Président, je reçois du courrier
des gens qui me montrent leurs comptes de taxes. Ils me montrent les montants
qu'ils paient en taxes au gouvernement du Québec: la taxe sur l'essence
sans plomb, la taxe sur l'essence avec plomb, la taxe sur le diesel. Cela
indique à quel point c'est facile à voir... Quand même le
député... Disons que les gens ne veulent pas retourner au texte
de loi. Ils vont en Ontario, ils vont aux États-Unis, et ils voient le
prix qu'ils paient. C'est moins de 1 $ pour un gallon d'essence aux
États-Unis alors qu'ici, cela revient à peu près à
2,50 $ ou 3 $ le gallon selon les types d'essence. (11 heures)
Cela ne prend pas une 500 watts pour voir la différence qu'il y a
dans les prix. Je mets le député de Vanier au défi de
venir contredire ce que je dis. On était ensemble à la commission
sur la vérification des comptes publics. Je lui ai montré que
l'essence se vendait en Saskatchewan entre 0,345 $ et 0,349 $ le litre. On dit
qu'aux États-Unis c'est environ 0,23 $ le litre. Ici, c'est 0,467 $ ou
0,46 $ ou 0,47 $ le litre.
À tel point que l'autre jour je faisais un plein d'essence
à l'angle des rues Cartier
et Saint-Cyrille. Des Américains sont venus me voir, ils ont
regardé la pompe et m'ont dit: Est-ce vraiment le prix que vous payez?
Pour quelle quantité payez-vous cela? J'ai dit: Pour un litre. Ils ont
dit: Combien cela prend-il de litres pour faire un gallon? Je leur ai
expliqué. Ils ont éclaté de rire. Ils n'en croyaient pas
leurs yeux. Ils se pensaient au pôle nord. Cela n'a pas de bon sens
à quel point l'essence coûte plus cher au Québec. Il y a
des milliers de personnes du Québec qui vont en Floride, qui font la
comparaison des prix.
Le ministre dira n'importe quelle élucubration sauf que nos
citoyens sont capables de voir le prix qu'ils paient quand ils vont en Ontario,
dans l'Ouest ou aux États-Unis. Ils n'ont qu'à traverser la
frontière. S'il y en a qui veulent voir qui a raison, le ministre du
Revenu ou le député de Lévis, je les incite en fin de
semaine, les gens de la région de Montréal, d'aller faire juste
un tour de l'autre côté de la frontière et regarder le prix
qu'ils vont payer pour leur essence. Ils vont voir qu'ils vont payer entre 0,10
$, 0,15 $ ou 0,20 $ meilleur marché le litre aux États-Unis. Ils
vont payer à peu près deux fois moins le litre aux
États-Unis qu'au Québec. Pourquoi? Parce que c'est un
gouvernement qui avait promis d'enlever les taxes. Nous avions baissé
les taxes temporaires mais eux non seulement ne les baissent pas, mais ils les
rendent permanentes alors qu'ils avaient promis le contraire à la
population.
M. le Président, je sais que mon temps de parole achève.
Nous aurons l'occasion, au cours de ces prochaines années, d'en parler
régulièrement parce que c'est là dans les faits. Les gens
paient plus cher. On verra au prochain budget à quel point ils
trouvaient que ce n'était pas assez. Alors qu'ils ont réduit le
prix de vente de l'électricité aux États-Unis, ici
qu'est-ce qu'ils font? Ils l'augmentent puis ils imposent une taxe sur le
mazout, l'huile à chauffage de maison.
Quand on fera l'étude du budget du 1er mai, je mettrai au
défi le gouvernement de nous dire combien il vendait
l'électricité aux Américains il y a un an, combien il la
vend maintenant, à quel prix, à quel point le prix de vente aux
Américains a baissé pendant qu'en même temps augmentait le
prix aux Québécois de 5,4 %, et qu'on leur imposait une taxe de 9
% sur l'huile à chauffage. Pourquoi? Pour justifier un projet de Baie
James qui n'est plus rentable au niveau actuel du prix international du
pétrole.
Il y a Hydro-Québec qui rapportait, en 1981, des profits de 800
000 000 $. Cette année, elle va rapporter 133 000 000 $ après
avoir augmenté les tarifs considérablement. Pourquoi? Nous aurons
l'occasion, M. le Président, d'en parler à satiété,
d'en parler constamment au cours des prochaines années parce que les
gens du Parti libéral ne nous feront pas avaler ces couleuvres. Merci,
M. le Président.
Le Vice-Président: M. le ministre du Revenu, vous avez
droit à une intervention de cinq minutes.
M. Michel Gratton
M. Gratton: M. le Président, je n'essaierai pas de
reprendre chacun des arguments, des points soulevés par le
député de Lévis. Je ne suis pas un surhomme mais... Je
vais laisser tomber.
À l'intention de ceux qui nous écoutent, je voudrais
expliquer ce que le député de Lévis a compris, parce qu'il
ne manque pas d'intelligence, et ce qu'il fait semblant de ne pas comprendre,
surtout quand il veut donner un bon spectacle.
Le 18 décembre, dans son discours sur le budget, le ministre des
Finances libéral a décrété qu'à compter de
cette date on ne paierait plus la taxe de 9 % sur les primes d'assurance
individuelle, taxe qui avait été imposée l'année
précédente, le 23 avril 1985, par le ministre des Finances
péquiste, Yves Duhaime. C'est clair? Le ministre des Finances
péquiste impose une taxe de 9 % sur l'ensemble des assurances le 23
avril 1985. Le ministre des Finances libéral enlève la taxe de 9
% sur une partie des assurances, c'est-à-dire les assurances
individuelles, à compter du 18 décembre. Donc, toutes les
personnes qui ont acheté ou qui vont acheter une assurance après
le 18 décembre ne paient plus la taxe de 9 % en ce qui a trait aux
primes d'assurance individuelle.
Le député de Lévis nous dit: Scandale! parce que
dans le projet de loi on prévoit qu'on ne remboursera pas la taxe de
vente sur des polices annulées. C'est évident que, dans le cas de
tout ce qui a été acheté après le 18
décembre, cet article du projet de loi ne change rien. On n'en paie pas
de taxe depuis le 18 décembre. Donc, si on annule la prime, on n'a pas
à rembourser une taxe. Alors, le député d'Abitibi-Ouest,
lui, me fait signe que c'est compréhensible, c'est clair. En fait, il
n'y a que le député de Lévis qui fait semblant de ne pas
comprendre.
De quoi s!agit-il quand on parle de la disposition qui dit qu'on ne
remboursera pas la taxe sur des primes annulées, sur des assurances
annulées? Il s'agit des assurances achetées avant le 18
décembre, c'est-à-dire, en fait, entre le 23 avril 1985 et le 18
décembre 1985. Comment l'explique-t-on? C'est qu'on a dit, je le
répète, que si nous n'avions pas inclus cette disposition dans le
projet de loi on se serait placés dans une situation où, à
compter du 18 décembre, les gens savaient qu'ils n'avaient plus à
payer la taxe de 9 % sur leurs primes d'assurance
personnelle. Ils auraient donc pu annuler leur assurance, se faire
rembourser la taxe de 9 % et contracter à nouveau une assurance. C'est
ce qu'on a voulu éviter, et pas seulement pour éviter que cela ne
coûte deux fois plus cher au gouvernement. Évidemment, le
député de Lévis, lui, se dit: II n'y a pas de
problème là; que cela coûte 100 000 000 $, 200 000 000 $,
le gouvernement libéral devrait faire cela du revers de la main. Comme
s'il n'avait pas été au gouvernement pendant neuf ans et qu'il
n'avait pas été solidaire de la décision de les augmenter,
les taxes, sur l'essence et sur les assurancesl II n'y a pas une taxe qu'ils
n'ont pas inventée, ces gens du Parti québécois. Le
député de Lévis était là. Il votait
là-dessus à tour de bras. Il pesait de tout son poids sur les
décisions du gouvernement péquiste d'augmenter les taxes.
Aujourd'hui, il vient nous dire qu'on aurait dû faire fi de tout
cela d'un coup. Il ne peut quand même pas nous demander de réparer
en quelque neuf mois toutes les erreurs que son gouvernement a faites, a mis
neuf ans à faire. On est bon, mais on n'est pas à ce point bon.
On a commencé, par contre, dans le budget du 18 décembre,
à réparer les erreurs du gouvernement antérieur. Mais,
là, il semble qu'il aurait fallu non seulement annuler la taxe de 9 %
sur les primes achetées après le 18 décembre, mais il
aurait voulu qu'on les annule pour avant le 18 décembre
également; en d'autres termes, qu'on rembourse aux gens la taxe que
l'ancien gouvernement leur avait imposée le 23 avril 1985.
On aurait pu le faire si on en avait eu les moyens, de la même
façon qu'on aurait pu mettre fin à toutes les taxes
imposées par le gouvernement péquiste. Mais on doit quand
même composer avec la réalité et la réalité,
c'est qu'on a hérité d'une situation financière tout
à fait inédite dans l'histoire du Québec, des
déficits accumulés de 3 000 000 000 $ par année, et qu'on
se doit de maintenir un équilibre financier. Donc, quand le
député de Lévis parlait et donnait l'exemple du
remboursement de la taxe sur une automobile, ce n'est pas du tout la même
chose. Il compare des pommes et des oranges. Des polices d'assurance-vie, on
n'annule pas cela. On n'échange pas sa police d'assurance contre une
autre, comme on le fait avec son automobile au garage. Il n'y a aucune
espèce de comparaison possible. Cela ne tient pas debout. Je regrette de
le dire au député de Lévis.
Ce n'est pas surprenant que certains courriéristes parlementaires
ou autres jugent la performance du député de Lévis de
façon très sévère. Il faudrait qu'il soit un peu
plus cohérent quand il parle. Par exemple, il nous accuse d'avoir mis
fin au crédit d'impôt de 500 $ - je dois conclure, M. le
Président, je reviendrai en réplique - aux chauffeurs de taxi,
mais ce qu'il omet de dire, c'est qu'on le fait seulement dans les
régions où on a aboli la surtaxe. Évidemment, on ne
remboursera pas une taxe que les gens ne paient plus. C'est évident.
D'aller comparer cela au financement du transport en commun, qui a
été décidé par l'ancien gouvernement de toute
façon, de prétendre qu'il n'y a pas de transport en commun dans
l'Outaouais, c'est méconnaître, c'est ne pas savoir de quoi on
parle. Malheureusement, on en a entendu pendant une demi-heure, tantôt,
pendant le discours du député de Lévis. On y reviendra.
(11 h 10)
Le Vice-Président: Je cède la parole à M. le
député de Nelligan et ministre de l'Environnement.
M. Clifford Lincoln
M. Lincoln: M. le Président, j'ai été
vraiment estomaqué, étonné aujourd'hui d'entendre que le
député de Lévis avait soudainement découvert la
veuve et l'orphelin, après neuf ans dans le gouvernement du
Québec, le gouvernement le plus dépensier que l'histoire du
Québec ait connu. Soudainement, le député a
découvert que l'essence au Québec coûte beaucoup plus cher
qu'aux États-Unis et qu'ailleurs.
Avant, lorsqu'il allait dans sa voiture ministérielle comme
certains de mes collègues et moi-même le faisons aujourd'hui, il
ne se préoccupait pas du coût de l'essence. Il ne descendait pas
de sa voiture pour aller voir le prix de l'essence. Lorsque j'étais
député, que je n'avais pas de voiture ministérielle, je me
souviens du prix de l'essence au Québec, qui était dans les 0,60
$ le litre. Il n'aime pas écouter la vérité, le
député de Lévis. Je me souviens du prix de l'essence
d'alors, causé par la taxe ascenseur du Parti québécois
qui montait tout le temps parce que le prix du pétrole...
M. Garon: Question de règlement. M. Gendron:
Question de règlement.
Le Vice-Président: Un instant, M. le ministre! Question de
règlement, M. le leader adjoint de l'Opposition.
M. Gendron: II est très clair. Il y a un règlement
qui dit qu'aucun député en cette Chambre peut imputer des motifs
à un parlementaire. Mon collègue, le député de
Lévis, depuis au moins plusieurs minutes est réclamé
à une commission parlementaire qui siège. Je pense que le
député de Nelligan -ce n'est pas son habitude - n'a pas le droit,
sûrement pas à ce moment-ci, lorsqu'un collègue doit
s'acquitter de ses responsabilités ministérielles comme
critique,
de lui prêter les motifs que, parce qu'il n'aime pas
écouter il quitte. C'est complètement antiparlementaire par
rapport au règlement, qui défend de prêter des motifs
à un parlementaire qui veut s'acquitter de sa tâche.
Le Vice-Président: M. le leader du gouvernement.
M. Gratton: Sur la question de règlement, je ferais
remarquer que signaler le départ d'un député n'est pas lui
imputer des motifs, mais simplement se rendre compte que le
député quitte. Ce qui est beaucoup moins grave, M. le
Président, que de faire ce que le député de Lévis
tantôt a fait, c'est-à-dire de parler de la députée
de Kamouraska-Témiscouata qui glosait, disait-il, alors que la
députée de Kamouraska-Témiscouata n'était pas ici,
et de parler du député de Vanier et de le prendre à
témoin de certaines choses qu'il affirmait alors que le
député de Vanier, lui aussi, est en commission parlementaire.
M. le Président, je vous suggère qu'on devrait
peut-être faire la part des choses quand on parle d'imputer des
motifs.
M. Gendron: Un instant, M. le Président! Sur la question
de règlement...
Le Vice-Président: Oui, un instant. Je vous cède la
parole à ce moment-ci. Je ne voudrais pas qu'on fasse un débat
entre les deux leaders. Je vous cède la parole, M. le leader adjoint du
gouvernement.
M. Gendron: Très court, M. le Président. Le motif
ce n'est pas de dire qu'un député quitte - pensez-vous que cela
n'est pas encore tendancieux, comme ils ont l'habitude de l'être? - c'est
de dire qu'il quitte parce qu'il ne veut pas entendre les propos du
député de Nelligan. C'est cela imputer un motif, c'est ce qu'il
faut dénoncer et qui n'est pas permis par le règlement.
Le Vice-Président: Très bien, M. le leader adjoint
de l'Opposition. En fait, je suis d'accord avec vous que si un
député quitte, il peut quitter pour autre chose à ce
moment-ci; on n'a pas à juger de la pertinence que le
député quitte ou pas. Je pense ici que nous avons éclairci
la situation. Si le député de Lévis quitte pour la
commission parlementaire, c'est son droit, et son devoir de parlementaire
probablement.
C'est la même chose aussi pour faire les mises au point qu'on a
faites tantôt. La députée de Kamouraska-Témiscouata,
je dois le noter, c'est vrai, n'était pas ici. Le député
de Lévis a sûrement confondu avec un autre député,
comme cela peut arriver effectivement à tous les
députés.
Dans ce cas-ci, je cède la parole au ministre de
l'Environnement.
M. Lincoln: En tout cas, je vais faire amende honorable. Je ne
veux pas imputer des motifs au député de Lévis. Seulement,
tout ce que je veux dire, après l'avoir entendu... J'expliquais que
soudainement il a découvert le prix de l'essence parce que maintenant il
doit aller remplir son réservoir d'essence lui-même ou le faire
remplir par quelqu'un de la station-service. Pendant neuf ans, il n'a jamais su
cela; il était dans sa limousine et cela ne le frappait pas
beaucoup.
Je me souviens des nombreux débats que nous avons eus en Chambre
sur la montée du prix de l'essence au Québec, sur le scandale des
prix de l'essence. Je n'ai jamais entendu le député de
Lévis défendre la veuve et l'orphelin et dire: Mais oui, un jour
quand nous le pourrons, en tant que gouvernement, on va réduire la taxe.
Il parle aujourd'hui de taxe temporaire. Elle n'est pas restée
temporaire puisqu'on en a hérité, nous. C'était une taxe
temporaire qui était quasi permanente. Et tout le temps qu'il a
été la comme ministre, je ne l'ai pas entendu défendre la
veuve et l'orphelin et dire: Ah, ces pauvres gens! Comment peuvent-ils payer
0,60 $ le litre d'essence? Ce n'était pas du tout cela.
Aujourd'hui, soudainement, parce qu'il a à l'acheter
lui-même avec ses deniers, cela devient cher, cela devient payant.
À ce moment-là, cela coûte cher. Cela coûte
très cher. Alors on fait des comparaisons avec les États-Unis et
les autres provinces. Mais cela a toujours été le cas,
c'était encore pire.
Au moins, nous avons fait un geste important de dire que, dans certaines
régions qui en souffrent encore plus, nous allons commencer à
réduire le prix de l'essence. Au moins nous avons mis un tarif de
pourcentage sur cette taxe pour que les gens sachent où ils s'en vont.
Si, demain matin, le prix du pétrole international montait en
flèche, au moins les gens sauront que c'est une taxe qui n'est pas une
taxe déguisée, mais une taxe que les gens peuvent lire et
connaître, parce qu'elle est vraie, elle est officielle.
On aurait préféré ne pas avoir de taxe. Dieu seul
sait qu'on s'est battu contre cette taxe pendant des années de notre
côté, lorsque nous étions de l'Opposition. Mais c'est
certain aussi qu'on a hérité d'une situation catastrophique.
Quand j'entends le député de Lévis nous parler de
pollution fiscale, lui-même, qui, en commission parlementaire - j'en ai
passé des belles - a introduit des mesures comme le palais de
l'exposition agricole de Montréal pour un petit 40 000 000 $, sans un
bout de papier, sans un bilan prospectif, sans une prévision
budgétaire!
Je me souviens de lui avoir demandé: Où sont les
prévisions budgétaires? Le président de la
société, le directeur général et secrétaire
de la société ont imposé toutes ces mesures prises au pied
levé, dépensé des millions de dollars, 40 000 000 $, sans
même un bilan provisoire, sans même une prévision
budgétaire de même un an, sans parler de trois et cinq ans, et qui
me disait: Assez avec nos niaiseries. C'est là dans les archives
parlementaires.
Les mêmes gens et le ministre, lui, qui ont dépensé
- des millions et des millions dans l'usine de sucre, des déficits de 30
000 000 $ et 40 000 000 $, 50 000 000 $ pour la seule étude d'Archipel,
le fameux projet hydroélectrique dont, nous, on a dit pendant longtemps
que c'était une perte d'argent. On en était arrivé
à 50 000 000 $. 375 000 000 $ dans la grande aventure de la
Société nationale de l'amiante, 100 000 000 $ pour la gloire
nationale de Quebecair, et ainsi de suite. Aujourd'hui, on a eu le culot de
venir nous parler de pollution fiscale?
En ce qui concerne le domaine de l'assurance, j'en sais quelque chose.
J'ai transigé dans ce secteur pendant des années. Le
député n'en comprend pas grand-chose, vous m'excuserez de le
dire. Il faudrait au moins lui poser la question. Il s'est mis là,
encore une fois, comme grand défenseur des pauvres et des petits. C'est
inique, dit-il, qu'on demande de rembourser, qu'on ne laisse pas rembourser ces
9 % pour la période du 23 avril jusqu'au 19 décembre. C'est
inique, ce n'est pas connu. C'est la seule fois dans le monde que cela se
passe. Mais il me semble que la question bien simple qu'on devrait lui
demander, c'est: Qui a imposé la taxe? Admettons, aux fins du
débat, que c'est inique. Est-ce que ce n'est pas beaucoup plus inique
d'avoir imposé la taxe, en premier lieu? Qui a imposé cette
taxe?
On vient nous dire que nous sommes les pollueurs fiscaux comme s'il
disait que nous avons inventé cette fameuse taxe que le ministre Duhaime
a adoptée à la dernière minute, parce qu'il était
tellement pris. Il fallait trouver une façon quelconque de trouver 450
000 000 $. Pour ne pas être "décoter" sur le marché de New
York et descendre notre déficit à plus ou moins 3 000 000 000 $,
il fallait trouver 450 000 000 $.
On a fait cette espèce de taxe à l'improviste sur les
assurances. Je me souviens d'avoir participé à ce débat
sur la taxe sur les assurances où, par exemple, ils avaient taxé
l'assurance maritime ne sachant pas du tout comment cela s'appliquerait. Cela a
été un cafouillis de première classe. On a
été obligé de la retirer après qu'on eût fait
des représentations.
C'est nous qui avons fait les premières représentations,
mon collègue de l'Industrie et du Commerce et moi-même. Je me
souviens des quantités de questions en Chambre pour montrer le
cafouillis qu'était cette taxe sur les assurances, et il a le culot de
venir nous dire aujourd'hui, nous, qui au contraire, disons: On va retirer
cette taxe d'assurances. Il faut avoir un peu de temps pour faire quelque
chose. On ne peut pas le faire maintenant devant une situation
budgétaire extrêmement pénible qu'ils nous ont
laissée, un déficit additionnel et caché de 1 500 000 000
$. On ne peut pas le faire tout de suite, mais, au moins, on a mis 54 000 000 $
pour réduire une partie de ces taxes sur les assurances individuelles.
On va, le plus tôt possible, aussitôt qu'on le pourra, que les
finances du Québec le permettront, continuer à réduire
cette taxe. (11 h 20)
Et voilà le député qui a le culot de nous dire que
nous pénalisons les veuves et les orphelins. Je dis au
député de Lévis que n'eût été le
gaspillage effréné du Parti québécois pendant neuf
ans, il n'y aurait pas eu de taxes sur l'essence, sur les assurances, les
quantités de taxes qu'ils nous ont imposées pendant neuf ans.
C'est pourquoi, en parlant du cynisme qu'il a évoqué, les gens
sont devenus tellement cyniques, aujourd'hui, qu'ils ont débarqué
le Parti québécois avec une décision aussi
catégorique. Les gens continuent à se prononcer de plus en plus.
Les sondages démontrent que tout ce que nous faisons de ce
côté est approuvé par les contribuables du Québec,
pas seulement les gros mais beaucoup de petits, la plus grande majorité
des petits. Ils disent à 60 %: Le Parti libéral, vous faites bien
les choses, continuez dans ce sens. On va continuer dans ce sens. Nous
espérons pouvoir dans les prochaines années remettre de l'ordre
dans le grand désordre que vous avez créé dans les budgets
et la fiscalité du Québec.
Le Vice-Président: Je cède maintenant la parole
à M. le ministre du Revenu pour son droit de réplique.
M. Michel Gratton
M. Gratton: Très brièvement, M. le
Président, j'aimerais rappeler - ce n'est pas inutile de le faire compte
tenu de l'intervention intempestive du député de Lévis -
en quoi consiste le projet de loi 78. Il s'agit de donner une suite
législative au discours sur le budget du 18 décembre qui
prévoyait donner suite lui-même à des engagements
électoraux en ce qui a trait, premièrement, à la
détaxation de certaines primes d'assurance individuelle. Dans un premier
temps, le 18 décembre, le ministre des Finances libéral a dit: La
taxe imposée, le 23 avril, par M. Duhaime sur l'ensemble des primes
d'assurance, nous l'abolissons,
nous l'abrogeons dans le cas des primes d'assurance personnelle:
assurance-vie, assurance-accident et assurance-maladie individuelles. C'est ce
que le projet de loi 78 vient faire.
Deuxièmement, dans le domaine de la taxe sur les carburants -
surtaxe imposée par le gouvernement du Parti québécois -
le 18 décembre, le ministre des Finances libéral a
décrété que certaines régions
périphériques, notamment l'Abitibi, le
SaguenayLac-Saint-Jean, la Gaspésie, une partie de l'Outaouais -
j'en suis fort heureux - jouiraient d'une détaxation partielle de la
surtaxe sur l'essence. Un autre engagement électoral était
entériné, était respecté du moins partiellement en
attendant, comme l'a indiqué mon collègue de l'Environnement, que
l'équilibre financier du gouvernement permette de détaxer
l'ensemble du Québec.
Troisième mesure, contrairement à ce que prétend le
député de Lévis qui fait valoir qu'il s'agit là
d'une mesure libérale dans la mesure où elle privilégie
les riches plutôt que les pauvres, en abaissant les taux marginaux
d'imposition à compter du 1er janvier 1986, nous n'avons fait que
devancer d'un an une décision qui avait déjà
été prise par le gouvernement péquiste qui, lui, avait
l'intention d'abaisser ces taux marginaux d'imposition du même
pourcentage à compter du 1er janvier 1987. Tout ce que le gouvernement
libéral a fait, c'est de devancer d'un an pour donner, justement, un
dégrèvement d'impôt à un certain nombre de
contribuables. Bref, ce sont là les trois éléments majeurs
du projet de loi 78 qui viennent entériner les décisions
annoncées dans le discours sur le budget du 18 décembre dernier.
Il est sûr qu'il y a des articles dans le projet de loi 78 qui sont
afférents à ces trois grands principes, notamment la disposition
prévoyant le non-remboursement de la taxe de 9 % sur des primes
d'assurance qui auraient pu être annulées, primes d'assurance
achetées avant le 18 décembre qui auraient pu être
annulées. J'ai déjà longuement expliqué la raison
d'être de ces dispositions.
J'ai déjà démontré que le but visé,
soit celui d'éviter une campagne d'évasion fiscale de la part de
ceux qui auraient pu annuler leur police pour se faire rembourser la taxe, a
été atteint et qu'effectivement il n'y a pas eu de campagne
d'annulation des primes d'assurance qui aurait non seulement eu un effet
négatif sur les équilibres financiers du gouvernement, mais qui
aurait créé également un fouillis indescriptible chez les
assureurs autant que chez les assurés. Donc, le but est atteint. Les
appréhensions du député de Lévis à savoir
qu'on ne remboursera plus la taxe sur des primes d'assurance à l'avenir
ne tiennent pas puisqu'on ne paie plus de taxe sur cette catégorie de
primes d'assurance. Donc, c'est sûr que si on ne paie plus de taxe sur
des primes d'assurance, si on les annule éventuellement, on ne sera pas
remboursé de la taxe.
Le même raisonnement s'applique en ce qui a trait au crédit
d'impôt de 500 $ pour les chauffeurs de taxi dans les régions
périphériques. Le projet de loi 78 dit effectivement qu'on ne
remboursera plus, jusqu'à un maximum de 500 $, les détenteurs de
permis de taxi dans les régions périphériques à
titre de remboursement d'une taxe payée sur les carburants. On ne
remboursera plus parce qu'ils ne la paient plus. En décidant de ne plus
taxer dans ces régions, en décidant d'abolir la surtaxe sur
l'essence, il fallait évidemment en même temps abolir le
remboursement de la taxe, sinon cela aurait été une subvention
déguisée. Le ministère du Revenu n'est pas là pour
subventionner les contribuables, mais pour être équitable envers
tous. Alors, pourquoi les chauffeurs de taxi des régions
périphériques qui ne paient plus la taxe obtiendraient-ils une
subvention de 500 $ du gouvernement alors que ceux d'ailleurs qui paient la
taxe ne l'obtiendraient pas? Ce serait complètement inéquitable
et injuste à l'égard d'une majorité de détenteurs
de permis de taxi. Le ministère du Revenu n'est pas là pour faire
des programmes artificiels de subventions qui engendrent
l'inéquité. Bien au contraire, la Loi sur le ministère du
Revenu impose au titulaire du ministère d'appliquer les lois de
façon équitable à l'endroit de tous et c'est ce que le
projet de loi 78 traduit par ses articles.
Bref, M. le Président, je regrette de le dire, mais le
député de Lévis a été égal à
lui-même encore une fois en traitant de façon démagogique
et irresponsable d'un projet de loi. Je ne lui demanderai pas d'applaudir aux
gestes du gouvernement. On n'en demandera pas trop, mais j'aurais
souhaité, ce à quoi sont en droit de s'attendre les citoyens et
contribuables du Québec, avoir une Opposition responsable, qui ne se
limiterait pas à faire de la démagogie. Les propos tenus par le
député de Lévis ont été exactement les
mêmes, mot pour mot dans certains cas, que ceux qu'il tenait dans sa
réplique au discours sur le budget du 1er mai, qui avaient
inspiré Alain Dubuc, chroniqueur du journal La Presse à
écrire dans le journal du 8 mai, c'est-à-dire la semaine
après le discours sur le budget, dans un article intitulé: "Jean
Garon, le retour du créditisme" - je vous cite un court passage, M. le
Président - "Mardi soir le critique financier de l'Opposition, Jean
Garon, répliquait au budget du ministre Gérard D. Levesque. Le
tout a été diffusé à l'Autre
Télévision. Quel dommage! La population québécoise
et le Parti québécois lui-même se seraient mieux
portés s'il n'y avait pas eu de réplique du tout. Comme le veut
le
personnage, c'était coloré mais le discours était
un exercice disgracieux de démagogie, truffé de faussetés
et de demi-vérités. Même si le terme est fort, la seule
façon de résumer ces deux heures de monologue, c'est de constater
que M. Garon a dit un nombre incroyable de conneries. C'est aussi une injure au
PQ et à ce qu'il a incarné pendant des années: la rigueur
et l'honnêteté intellectuelle. Quand on songe à Jacques
Parizeau, on assiste à un inquiétant processus de
dégénérescence dans lequel on sent une pointe du
pénible créditisme des années soixante." Cela continuait
ainsi sur plusieurs lignes, avec des sous-titres: "Le PQ renie-t-il le PQ?";
"Les erreurs du professeur", c'est-à-dire du député de
Lévis; et "Un discours irresponsable". (11 h 30)
M. le Président, ce que je souhaite très
sincèrement, c'est qu'on ait des débats vigoureux ici, à
l'Assemblée nationale, et il y a des membres de l'Opposition qui en sont
capables, mais que ces débats, M. le Président, portent sur des
faits, portent sur des appréciations et ne portent pas uniquement sur
des intentions d'attiser les passions à partir de
demi-vérités, de démagogie et de conneries - et le terme
n'est pas de moi, mais d'Alain Dubuc.
M. le Président, je le souhaite non seulement pour le respect de
l'institution qu'est l'Assemblée nationale, mais surtout pour la bonne
information de la population qui a un droit sacré à ce que
l'Opposition fasse un travail responsable ici, à l'Assemblée
nationale, ce que, malheureusement, le député de Lévis
semble, jusqu'à maintenant, être incapable de faire.
Le Vice-Président: Le débat est clos et nous allons
procéder à la mise aux voix du rapport. Est-ce que le rapport de
la commission du budget et de l'administration, déposé le 21
octobre 1986, sur l'étude détaillée du projet de loi 78,
Loi modifiant diverses lois fiscales afin de donner suite à
l'énoncé politique budgétaire du gouvernement du 18
décembre 1985, est adopté?
Une voix: Sur division.
Une voix: Adopté.
Le Vice-Président: Adopté sur division. M. le
leader du gouvernement.
M. Gratton: M. le Président, je vous prierais maintenant
d'appeler l'article 3 du feuilleton.
Projet de loi 96
Reprise du débat sur l'adoption du
principe
Le Vice-Président: À l'article 3 du feuilleton,
nous allons reprendre le débat sur l'adoption du principe du projet de
loi 96, Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant les
boissons alcooliques.
Je cède la parole à M. le député de
Laval-des-Rapides.
M. Guy Bélanger
M. Bélanger: Merci, M. le Président. Mon
collègue, le Solliciteur général et député
de Chambly, en soumettant à la Chambre le projet de loi 96, veut ainsi
rendre la circulation et la vente des boissons alcooliques plus efficaces. Il
veut aussi mettre fin à la situation ambiguë qui prévaut
dans l'industrie de la restauration avec ce qu'il est convenu d'appeler la
circulation ou le vin libre. Ce dernier sujet a d'ailleurs beaucoup
mobilisé l'opinion publique dans les trois dernières
années. C'est un phénomène qui est typiquement de chez
nous, qui est entré dans nos moeurs, et il est temps de le
réglementer si on veut éviter des problèmes plus grands.
Décrié par les uns, souhaité par les autres, le
contentieux à ce sujet a vraiment déjà trop duré.
Il est temps qu'on y mette fin.
L'usage, dans les dernières années, nous a appris qu'il y
a des trous et des zones grises très importantes dans la loi actuelle.
Des abus sont régulièrement faits par des gens qui cherchent, par
divers moyens, à éviter de payer la taxe de 4,4 % que,
généralement ou, devrais-je dire, obligatoirement, les
détenteurs de permis paient lors de leurs achats de boissons alcooliques
ou de vins et spiritueux. Je me permettrai quelques exemples pour illustrer ces
propos.
On sait que certains détenteurs de permis vont s'approvisionner
à des endroits autres que ceux prévus par la loi pour
éviter, comme je le disais tout à l'heure, de payer la taxe de
4,4 %. Les pertes ainsi encourues par la province sont importantes, mais
beaucoup plus importantes encore si on regarde les conséquences de ce
geste. Car afin d'éviter d'être pris ou d'être
démasqué par un autre moyen, qui serait celui de la taxe de 10 %
à la consommation - on sait que, s'ils se prévalent ou s'ils font
la perception de cette taxe de 10 %, on pourra, de cette façon,
déterminer les quantités d'alcool qui ont été
vendues dans leurs établissements - donc, pour éviter que soit
déterminée cette quantité, pour ne pas se faire prendre au
jeu qu'ils ont joué relativement à la première taxe de 4,4
%, ils ne perçoivent pas cette taxe de 10 %. Donc, c'est une perte de 14
% pour la province. Si on voulait la quantifier, on sait que c'est une perte
qui va chercher entre 10 000 000 $ et 15 000 000 $ par année.
Il y a aussi d'autres pratiques illicites qui sont tout aussi
coûteuses pour la
province et que nous voulons corriger par ce projet de loi. Par exemple,
ce commerçant qui se rend à la Société des alcools,
se procure des bouteilles d'alcool non timbrées, c'est-à-dire les
bouteilles que tout citoyen achète sans payer la taxe spéciale de
4,4 % et, par la suite, en transvide le contenu dans des bouteilles vides qui
ont déjà des timbres. Alors, la même bouteille pourra
servir plusieurs fois et ainsi éviter à plusieurs reprises de
payer cette taxe. Et toujours le petit truc des 10 % qui s'ajoutent.
D'ailleurs, il y a eu, dans le passé, plusieurs saisies et
procédures touchant les commerçants qui faisaient ces pratiques,
mais les peines prévues dans la loi actuelle sont insuffisantes, de
telle sorte que, même en payant l'amende, c'est encore plus payant de la
transgresser que... Alors, il faut vraiment légiférer à ce
sujet et augmenter les amendes pour décourager les
délinquants.
Comme je le disais tout à l'heure, ces pertes qui sont de l'ordre
de 10 000 000 $ à 15 000 000 $ par année pour la province sont
très substantielles et constituent, je pense, une des raisons
très importantes pour réviser certaines dispositions
pénales et donner plus de pouvoir à la Régie des permis
d'alcool du Québec. Dans le cas de la vente illégale de boissons
alcooliques ou de disposition illégale des timbres ou
d'étiquettes de la SAQ, le projet de loi 96 prévoit une hausse
des amendes déjà prévues. On sait que les articles 9 et 13
prévoyaient déjà des amendes, mais on prévoit les
mettre encore plus substantielles, comme je le disais tout à l'heure,
pour décourager les délinquants. On se rappelle que ces timbres
et étiquettes sont le moyen privilégié de contrôle
que la Régie des permis d'alcool a pour vérifier si toutes les
taxes ont été payées.
Dans cette même loi, la notion d'établissement a
été aussi élargie à l'article 1. Cela permet
d'éviter les situations souvent dénoncées à cause
des ambiguïtés du texte actuel. Prenons l'exemple du restaurateur
qui décide d'ajouter une terrasse à son restaurant. La terrasse
ne fait pas partie de la notion actuelle d'établissement. Il faut faire
toutes les démarches, recommencer. Alors, en élargissant, comme
on veut le faire avec l'article 1, cette notion d'établissement, on rend
les choses beaucoup plus faciles pour tout le monde.
Autre exemple aussi de l'élargissement des pouvoirs de la
Régie des permis d'alcool du Québec. Je reprends ici quelques
exemples que nous en donnait le Solliciteur général hier afin de
nous rafraîchir un peu la mémoire sur le sujet. Advenant le refus
par un détenteur de permis de produire un rapport - on sait que les
détenteurs de permis doivent produire régulièrement des
rapports sur les achats, les quantités, les prix et leurs fournisseurs,
ceci afin d'avoir un certain contrôle sur les volumes et sur les ventes
et toujours sur les perceptions de taxes - or, lorsqu'un détenteur
refuse de faire son rapport et lorsque la régie redemande ces rapports
et qu'il n'y a pas plus de production de ce rapport, cette dernière, la
régie, pourra en vertu de l'article 12, convoquer et, s'il y a lieu,
révoquer ou suspendre le permis, du contrevenant.
Si on corrige ainsi l'ancien article qui permettait des délais
très importants qui faisaient en sorte que, lorsqu'on arrivait aux
procédures ou aux limites des procédures prévues par
l'actuelle loi, les délais étaient trop longs et, plus souvent
qu'autrement, le but, l'objectif visé par la loi n'était pas
atteint.
Le projet de loi 96 veut aussi éviter qu'un tenancier qui perd
son permis d'exploiter se retourne de bord, aille chercher un autre
associé, reformule sa raison sociale, change deux ou trois
éléments puis redemande un permis et recommence, et une semaine
après, recommence le même manège, de telle sorte que,
malgré les interventions répétées de la
régie, on n'arrive pas à corriger certains problèmes. Et
il y a eu des causes célèbres dans la province à ce sujet.
Pour éviter que cela se reproduise, la régie verra ses pouvoirs
augmentés pour pouvoir intervenir et éviter que de tels petits
manèges ne soient faits et ainsi qu'on contourne la loi.
Il est bien évident que par souci d'éviter que ces mesures
créent des préjudices à certains tenanciers qui sont de
bonne foi ou à un nouvel acquéreur qui pourait être de
bonne foi, il y aura des processus de recours ou des mesures
procéduriales, des garanties procéduriales qui seront contenues
dans la loi qui permettront de réévaluer ou qui serviront de
mécanisme de recours là où le besoin s'en fera sentir.
La régie pourra aussi révoquer ou suspendre un permis
délivré en vertu de la Loi sur les permis d'alcool du
Québec, l'article 36. Il s'agit ici de permis de fabricants industriels.
On sait qu'un fabricant industriel n'a pas le droit de fournir directement un
tenancier à moins, je présume, qu'il y ait des ententes avec la
Société des alcools pour établir des contrôles. Or,
advenant le cas où un industriel fournirait directement un tenancier, il
est bien évident que ce dernier évite ainsi les contrôles
et peut éviter de payer la taxe de 4,4 %. Dorénavant, la loi nous
permettra d'intervenir sévèrement. (11 h 40)
Actuellement, on peut faire presque impunément ce genre de
pratique. Cela devenait très compliqué d'intervenir. On veut
corriger cette lacune afin de s'assurer qu'il n'y aura plus d'injustice, que
les mêmes mesures s'appliqueront à tout le monde avec la
même rigueur et la même fermeté. La
Régie des permis d'alcool du Québec pourra aussi demander
à un membre de la Sûreté du Québec d'aller inspecter
chez un détenteur de permis industriel lorsqu'elle aura des raisons
suffisantes ou des doutes raisonnables pour justifier son intervention.
C'est un projet qui corrige des lacunes très importantes dans une
loi qui a de l'âge et, comme je le disais tout à l'heure, qui a
beaucoup de trous, beaucoup de zones grises. Avec les dispositions sur le vin
libre que présentera mon collègue député de
Sainte-Anne dans la suite des interventions - donc je ne m'attarderai pas sur
ce sujet - je pense que par ces deux corrections importantes, ces deux volets
importants qu'on a donnés à la loi 96 nous pourrons ainsi
corriger un certain laxisme et un certain nombre de situations qui sont
dénoncées depuis plusieurs années au sujet de cette loi.
Nous pourrons, à ce moment, agir plus efficacement et ce dans le
meilleur intérêt de la province et de tous les citoyens. Je vous
remercie.
La Vice-Présidente: Merci, M. le député de
Laval-des-Rapides. M. le député de Shefford.
M Roger Paré
M. Paré: Merci beaucoup. Moi aussi je tiens à
intervenir quelques minutes, pas très longtemps, sur le projet de loi 96
qui a pour objet de modifier diverses dispositions législatives
concernant les boissons alcoolisées. C'est un projet de loi qui est
important parce que cela nous permet d'apporter une solution au problème
du vin libre dans les restaurants et un meilleur contrôle aussi sur la
vente des boissons alcooliques. Je pense que c'est important. C'est un secteur
qui concerne tout le monde. Cela serait peut-être le temps aussi de
parler de la restauration. Le problème des vins libres, on l'a
découvert dans les restaurants, c'est évident, un secteur qu'il
ne faut spécialement pas négliger au Québec.
On a une renommée pour la qualité de nos restaurants au
Québec. Il faut faire en sorte que ce secteur économique soit
bien traité, avec des normes et des règlements qui soient connus
de tout le monde et respectés aussi de tout le monde. La restauration,
c'est important au Québec. Il ne faudrait pas l'oublier. C'est un
secteur du développement économique, dans le grand secteur
touristique, très important, primordial. Dans ce secteur, d'ailleurs, le
Québec s'est fait une renommée, à mon avis,
nord-américaine, mais aussi internationale. On le reconnaît de
différentes façons. Entre autres, il y a le Mois de la
restauration au Québec. Il y a chez nous, et je suis fier de le
rappeler, le Festival gastronomique de Granby chaque année, qui permet
aux
Québécois de savourer de bons mets toujours
agrémentés de vin, bien entendu, dans un festival gastronomique.
Il y a aussi de la part du MAPAQ, ministère de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation du Québec, des reconnaissances
annuelles qui sont décernées à nos meilleurs restaurateurs
sur l'ensemble du territoire québécois.
C'est donc un secteur important, d'où la nécessité
d'intervenir pour clarifier les choses et permettre justement à ces
entreprises que sont les restaurants de savoir exactement selon quelles
règles ils doivent fonctionner. Comme je le disais tantôt, cette
loi va régler, entre autres - c'est une solution, en tout cas, qui est
proposée - le problème du vin libre. Je dois dire, au nom de la
formation politique que je représente, que nous sommes d'accord,
favorables au principe de cette loi qui vient justement régler ce
problème du vin libre dans les restaurants. C'est sûr que nous
allons avoir quelques questions à poser. J'y reviendrai un peu plus tard
et on va surtout y revenir à la commission parlementaire où on va
étudier le projet de loi 96 article par article.
Le projet de loi, en soi, vient modifier trois lois: la Loi sur les
infractions en matière de boissons alcooliques, la Loi sur les permis
d'alcool et la Loi sur la Société des alcools du Québec.
C'est un projet de Loi qui va faire en sorte, en les modifiant et en donnant
plus de contrôle à la Régie des permis des alcools du
Québec, que ce secteur va être mieux réglementé et
que la population va savoir exactement quels sont ses pouvoirs, mais aussi ses
limites au niveau du vin libre dans les restaurants. Je dois dire aussi qu'une
des raisons qui font que nous sommes favorables en principe à ce projet
de loi, c'est que cela fait partie aussi d'une demande que nous avions faite
déjà en 1985 au président de la Régie des alcools,
M. Laflamme, afin qu'on aille consulter les gens. Cela, c'est important.
Aller consulter les gens pour savoir exactement quelle est la
volonté, quels sont les besoins du milieu, c'est important. Je trouve
que cela devrait être, pour le gouvernement actuel, une bonne
leçon ou une bonne direction à suivre parce que cela ne s'est pas
fait souvent, à mon avis, depuis le 2 décembre. On aurait
peut-être moins de problèmes, en tout cas, moins de
problèmes graves comme ceux qu'on connaît présentement ou
on ferait moins d'erreurs. On a souvent promis qu'on était pour
consulter, comme sur la Raffinerie de sucre du Québec ou dans d'autres
dossiers, et on voit les résultats aujourd'hui. Malheureusement, on n'a
pas consulté. Mais, dans ce cas-ci - c'est ce qui fait en sorte que,
nous, on trouve que c'est une bonne direction à suivre - on a
consulté. On a consulté des gens qui connaissent le secteur, qui
connaissaient les problèmes aussi et qui avaient des solutions
à proposer.
Parmi ces gens qu'on a consultés, il y avait l'Association des
restaurateurs du Québec, l'Association des hôteliers de la
province de Québec, l'Association des marchands détaillants du
Québec, l'Association des détaillants en alimentation du
Québec, le Regroupement des restaurants non licenciés,
l'Association des résidents du mail piétonnier Prince-Arthur, le
Regroupement des restaurateurs du boulevard Saint-Martin et, surtout,
l'Association des consommateurs du Québec. C'est important, je pense,
qu'on ait fait le tour. On a permis aux gens qui ont un intérêt
soit dans leur entreprise ou les gens qu'ils représentent, dont le
dernier que je vous ai mentionné, les consommateurs... Ils ont eu
l'occasion de faire valoir leur point de vue, justement, à la
Régie des permis d'alcool du Québec afin que la solution qu'on
propose reflète sinon un consensus ou l'unanimité, du moins une
orientation, une certaine volonté exprimée par beaucoup de ces
gens.
Je pense que la consultation, c'est une très bonne chose. C'est
même indispensable si on veut avoir une collaboration, une concertation,
une coopération de tous les gens. Il faut tout d'abord, à mon
avis, avoir une bonne consultation. C'est un point que nous considérons
comme important et c'est une des raisons qui fait en sorte que cette
recommandation, nous, on l'appuie parce qu'on sait qu'elle vient du milieu,
qu'elle vient des gens qui ont été consultés.
En plus, ce projet de loi, le projet de loi 96, qui modifie des
dispositions législatives, entre autres, de la Société des
alcools du Québec, cela vient donner plus de pouvoirs, plus de
responsabilités à la Régie des permis d'alcool du
Québec. Cela aussi, nous, du côté du Parti
québécois, cela nous satisfait énormément parce
qu'il ne faut pas oublier que la Société des alcools du
Québec a été mise sur pied par le gouvernement du Parti
québécois le 1er juin 1980 parce qu'on voulait justement
séparer la Société des alcools du Québec de
l'émission des permis et cela, probablement pour apporter plus de
tranquillité et dans l'intérêt public, plus
d'impartialité, finalement. C'est exactement le rôle que joue la
Régie des permis d'alcool du Québec.
Nous, nous sommes satisfaits qu'on vienne faire confiance davantage
à cette régie, qu'on lui donne plus de pouvoirs, plus de
responsabilités, en fait. Cela permet aussi un meilleur service à
la population, soit en raccourcissant les délais ou en donnant une
meilleure information. Mais comme c'est leur tâche principale, cela leur
permet aussi d'être impartial, plus détaché de la
Société des alcools du Québec. Nous sommes aussi d'accord
là-dessus et avec le fait que, dans ce projet de loi, on vienne
reconnaître davantage la Régie des permis d'alcool du
Québec comme un intervenant important pour régler des
problèmes au Québec ou s'assurer, en tout cas, de donner un
meilleur service au secteur concerné. Cela vient aussi contredire ce
que, nous, on dénonce avec vigueur et qu'on va continuer à
dénoncer parce qu'on trouve cela inacceptable. Il s'agit des fameux
rapports du comité des sages où à l'intérieur d'un
rapport, le rapport Scowen, on demande l'abolition de la régie comme si
cela n'était pas utile.
Je suis fier de voir que le ministre vient contredire cette affirmation
gratuite qui ne repose sur rien quand on lit le rapport parce que, vraiment,
cela n'est pas tellement épluché, cela n'est pas tellement en
détail. Cela ne donne pas de solution. Cela parle tout simplement
d'abolir pour abolir, comme si l'État n'avait pas un rôle
important à jouer.
Cette reconnaissance par le projet de loi 96 de l'importance de la
Régie des permis d'alcool nous satisfait en grande partie et vient
rappeler aux gens qui ont fait le rapport du comité des sages qu'il
faudrait peut-être consulter un peu plus les gens qui sont élus,
qui ont des responsabilités, qui sont ministres, ici, responsables d'un
secteur. Avant de demander à un ministre d'abolir quelque chose, je
pense qu'il vaudrait la peine de faire des études un peu plus
poussées. Je me rends compte que les sages n'ont pas agi de façon
sage du tout. Je pense que cela a été fait comme un travail dont
on se débarrasse en pensant que l'État n'a plus aucun rôle,
alors que l'État a une responsabilité majeure dans le
bien-être de la population du Québec. (11 h 50)
Encore une fois, le rapport des sages vient d'être rejeté
du revers de la main, et je dois vous dire que cela nous réjouit, M. le
ministre, que vous ayez pris cette décision. Vous pourrez compter sur
nous de ce côté.
Il y a eu consultation, il y a reconnaissance de plus de
responsabilité de la Régie des permis des alcools du
Québec, contrairement à la recommandation du rapport des sages.
Ce sont des facteurs qui font en sorte que nous favorisons ce genre de
décision. Dans le projet de loi 96, ce sont des facteurs qui font en
sorte qu'on va appuyer le principe, même si, comme je vous le disais au
début, nous allons avoir certaines questions qui vont se rapporter
principalement à l'exclusion de la bière des permis de
servir.
Si la Régie des permis d'alcool doit aussi émettre des
permis et que le permis concerne globalement, généralement, de
façon régulière les boissons alcoolisées, y compris
la bière, dans le projet de loi, je pense qu'il y a clarification
à apporter et c'est certainement en commission parlementaire qu'on va
pouvoir le faire. C'est une des questions que nous aurons et sur laquelle
nous espérons pouvoir apporter de l'éclairage.
En ce qui concerne les montants des amendes, c'est sûr qu'il faut
qu'une loi ait des dents, comme on dit souvent, si on veut avoir des
contrôles pour être capable de faire respecter les lois. Mais en ce
qui concerne les amendes, nous aurons quelques questions là-dessus.
Il y a aura également des questions que nous aurons à
poser sur certains articles concernant la responsabilité d'un
propriétaire pour la révocation ou l'octroi de permis de
réunion. En commission parlementaire, je pense que nous pourrons faire
un très bon boulot là-dessus, de façon à tout
décortiquer et à nous assurer que le projet de loi va
répondre le mieux possible à l'esprit de la loi comme tel et aux
demandes qui ont été exprimées par les intervenants qui
ont été consultés le printemps dernier, et à nous
assurer aussi que nous allons trouver une solution acceptable pour tout le
monde, donc les gens du secteur concerné qui sont aussi les petites et
moyennes entreprises, nos restaurateurs, mais aussi tout en s'assurant que le
consommateur ne sera pas lésé là-dedans mais, au
contraire, pourra trouver davantage ses droits respectés comme
consommateur.
Même s'il y a certaines limites, comme je l'ai dit, Mme la
Présidente, malgré ses limites sur le fond, c'est un projet de
loi qui répond à un besoin, qui suggère une solution qui
nous semble acceptable, qui augmente l'efficacité, ce qui nous a souvent
été apporté par des gens, dont ceux de l'Association des
restaurateurs qui devaient payer des taxes, avoir un permis, avoir un
contrôle sur la qualité du service, mais aussi sur le débit
de boisson, alors que d'autres restaurateurs n'avaient pas à payer de
permis et pouvaient donner un service - pas semblable ni équivalent - et
pouvaient permettre quand même aux gens de consommer sur place, alors
qu'il n'y avait aucune contrainte, aucune obligation, aucun permis à
avoir.
Je pense que cela rétablit une certaine équité. Sur
le fond, je pense qu'on ne peut pas faire autrement qu'être d'accord et
vous dire que vous pourrez compter sur l'appui de l'Opposition sur le fond du
projet. Nous avons toujours dit que nous ferions une Opposition positive et que
nous serions en faveur des projets de loi qui vont dans le sens des besoins des
consommateurs et de la population du Québec en
général.
On vous le prouve encore une fois aujourd'hui en vous mettant en garde
sur certaines limites que nous espérons régler en commission
parlementaire et en espérant que nous aurons des informations qui vont
corriger les inquiétudes que nous avons. Vous pourrez compter sur nous
pour une commission parlementaire positive et notre appui sur le projet de loi
comme tel, sur le fond du projet de loi. Merci, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente: Merci, M. le député de
Shefford. M. le député de Sainte-Anne.
M. Maximilien Polak
M. Polak: Merci, Mme la Présidente. J'apprécie bien
avoir l'occasion de parler après le député de Shefford.
Voici la différence dans le ton ce matin. On a entendu le
député de Lévis, le grand "show", et, maintenant, on vient
d'écouter le ton raisonnable du député de Shefford qui
nous félicite pour ce beau projet de loi. Je le remercie pour cela.
Je voudrais tout de même faire une rectification. Le
député de Shefford a cité erronément le
député de Notre-Dame-de-Grâce en disant que M. Scowen, dans
son rapport, avait recommandé l'abolition de la Régie des permis
d'alcool. Ce n'est absolument pas vrai. Je voulais juste faire la
rectification. Il ne faut pas faire au député de
Notre-Dame-de-Grâce un reproche qu'il ne mérite pas.
On parle ce matin des dispositions législatives concernant les
boissons alcooliques. C'est le premier projet de loi présenté par
le Solliciteur général. Il est assis à ma gauche, il nous
écoute et je le félicite parce qu'il s'agit d'un projet de loi
bien préparé, un bon projet de loi qui règle en même
temps des situations qui étaient douteuses, qui créaient des
problèmes. On a maintenant une solution claire et nette à
beaucoup de problèmes. Je le félicite. D'ailleurs, on a vu
l'attitude de l'Opposition qui appuie le projet de loi, on a vu les
commentaires dans les journaux au mois de juin lorsque le projet de loi a
été déposé en première lecture et
c'était généralement très bien reçu.
Je voudrais parler ce matin du consommateur. Souvent, les citoyens nous
disent: Pourriez-vous, à l'Assemblée nationale, nous expliquer en
termes profanes de quoi il s'agit? Souvent, ces projets de loi sont très
techniques. Parlez-nous un peu pour que la masse des gens comprennent. C'est
cela que je vais tenter de faire, me placer du point de vue du consommateur, du
citoyen ordinaire. Il y a une disposition qui, je pense, constitue une
amélioration claire et nette dans ce projet de loi: À partir du
moment où il sera adopté, si on vend de l'alcool à un
mineur, une personne de moins de 18 ans, les amendes seront augmentées
considérablement. Jusqu'à maintenant, il y avait une amende
minimale de 200 $ et une amende maximale de 1000 $. Ces montants seront
augmentés respectivement à 1000 $ et 5000 $. Je pense que c'est
une disposition très importante. Lorsqu'on voit le projet de loi que
vient de faire adopter le ministre des Transports sur
le contrôle de la vitesse, il faut voir cela comme un tout.
Évidemment, le ministre, en protégeant les mineurs, pose un geste
très important pour éviter, justement, des problèmes tels
que les accidents graves de la route qui résultent très souvent
chez les jeunes de la consommation illégale d'alcool. Pour une
deuxième infraction et les infractions subséquentes, l'amende
minimum sera de 5000 $ et l'amende maximum de 20 000 $. On parle vraiment de
très grosses amendes et je pense que les restaurateurs qui servent de
l'alcool à une personne mineure ne le feront plus, une fois cette loi en
vigueur.
Le grand problème qui a été réglé par
ce projet de loi est celui qu'on appelle le problème du vin libre. Je
parle à titre de député montréalais et aussi comme
quelqu'un qui aime bien les restaurants de toutes sortes. À
Montréal, nous avons des restaurants qui ont cette pratique du vin
libre. J'ai été étonné d'apprendre qu'il n'y en a
presque pas à Québec. Dans les régions, cela n'existe pas
non plus. Il faut donc l'expliquer. Il s'agit de restaurants où le
consommateur peut se rendre en apportant sa propre bouteille de vin à
4,50 $ ou 5 $, qu'il achète à l'épicerie, et consommer
cette bouteille avec le repas. Il y a un autre type de restaurants qu'on
connaît, c'est-à-dire où on achète le vin au
restaurant où on prend un repas. C'est évidemment beaucoup plus
cher, parce que le restaurant nous vend le vin avec profit. Le problème
qui est survenu, c'est qu'il n'y avait aucune réglementation, aucun
contrôle, aucune règle pour les restaurants avec vin libre. Je
suis allé dans ces restaurants. Très souvent, le dimanche soir,
j'invite ma femme et mes enfants a aller dans un tel restaurant parce que c'est
papa qui paie la facture. Donc, on achète une bouteille de vin dans une
épicerie et on va le boire dans ce restaurant où on prend un
repas. À Montréal, il y a des restaurants grecs, des restaurants
chinois, aussi, où on peut apporter son vin. Cela fait épargner
beaucoup d'argent. Dans de tels restaurants, on commence à vendre aussi
des boissons alcooliques parce qu'ils obtiennent un permis sous la loi
actuelle. (12 heures)
À un moment donné on trouve dans le même restaurant
deux opérations une à côté de l'autre. On peut voir
une bouteille de 5 $ à une table et à côté quelqu'un
achète la même bouteille au restaurant pour 15 $. Qui recevra le
meilleur service? Évidemment, celui qui paie la bouteille 15 $. Cela a
du sens parce que le serveur recevra 10 % ou 15 % de pourboire sur le montant
total de la facture. Cela causerait des problèmes et des conflits. Cela
a été réglé par le ministre dans ce projet de
loi.
Comme le député de Shefford l'a dit, après une
consultation et un consensus très larges on aura désormais deux
sortes de permis: ce qu'on appelle un permis de restaurant pour vendre - le
permis qui existe actuellement pour les restaurants qui vendent des boissons
alcooliques - et un autre qu'on appelle le permis de restaurant pour servir,
c'est-à-dire le permis qui permettra au restaurant de servir des repas
et de la boisson à celui qui l'apporte au restaurant.
Le projet de loi dit: Ceux qui l'apportent dans l'établissement
pour consommer sur place à l'occasion d'un repas. Évidemment, il
faut toujours comprendre qu'on n'apporte pas une bouteille de vin dans un
restaurant pour le consommer sans prendre de repas en même temps. C'est
essentiel que le vin soit consommé à l'occasion d'un repas.
Plusieurs raisons ont eu une grande influence sur le changement dans le
projet de loi. Il y avait ce qu'on appelle une concurrence déloyale. Ces
restaurants de type vin libre ne payaient pas de permis au gouvernement. Il n'y
avait aucun contrôle. D'autres restaurants qui avaient le permis
ordinaire payaient et étaient sujets à toutes sortes de
contrôles de la part du gouvernement. Évidemment, cela
créait une concurrence déloyale. Cela est maintenant
réglé parce que le coût du permis - j'ai cru comprendre
cela du ministre lorsque je le lui ai demandé hier - est autour de 228 $
par année. Ce n'est pas un montant énorme pour toute une
année d'activités. Ce n'est pas un tel montant qui empêche
les activités d'un restaurant.
En vertu du nouveau permis pour servir, ce type de restaurants sera
soumis exactement à la même réglementation que ceux qui
détiennent le permis pour vendre, c'est-à-dire que la protection
pour les mineurs s'appliquera dans les deux cas. Quant au respect des heures de
fermeture, de la santé, de l'ordre et de la tranquillité
publique, cela s'appliquera dans les deux cas.
Il y a plusieurs arguments parce que ce problème a
été largement discuté. Des audiences publiques ont
été tenues devant la régie. Des restaurateurs ont
émis différents points de vue. Il est bon pour le public de
savoir pourquoi le gouvernement a opté pour ce nouveau type de permis.
Il faut comprendre en même temps que le nouveau type de permis permettra
seulement au consommateur d'apporter du vin, c'est-à-dire pas de
bière, d'alcool, de boissons alcooliques. Il faut dire pourquoi on ne
donne pas le droit à quelqu'un d'apporter de la bière, par
exemple, pour consommation dans des restaurants de ce type.
Premièrement, c'est à cause de la sécurité
publique. Il est bien connu que la bière se vend
généralement dans des contenants de 6, 12 ou 24 bouteilles. II
est fort probable qu'une surconsommation de bière se produirait plus
facilement qu'avec une bouteille de vin.
Deuxièmement, si la personne prend le volant après le
repas - ordinairement, ceux qui viennent dans ces restaurants prennent leur
propre voiture - elle ne rapporte pas le petit restant de la bouteille de vin,
mais on rapporterait ce qui resterait de bière dans l'automobile et cela
pourrait causer des problèmes.
Il y a aussi un argument de protection de l'environnement. Les
contenants vides, les bouteilles ou les canettes de bière, cela
créera plus de problèmes soit pour le restaurateur qui devra les
rapporter chez l'épicier le lendemain ou pour les personnes qui ont
à retourner avec ces contenants et qui les laisseront peut-être
sur la place publique. Avec tout le respect que je dois à ceux qui
consomment de la bière - je consomme moi-même de la bière -
on avait décidé de donner cette permission pour le vin, parce que
le vin était servi avec les repas dans ces restaurants, plutôt que
de permettre de venir avec notre propre contenant de bière.
Il y a aussi l'argument de l'Association des hôteliers de la
province de Québec dont les membres ont été
consultés et qui sont pour ce projet de loi. Ils se sont
prononcés pour un permis pour le vin libre, mais ils ont demandé
que ce soit limité au vin seulement, pour les raisons déjà
évoquées. C'est important d'avoir l'opinion de ceux qui
travaillent dans ce commerce et dans cette industrie, les gens de l'Association
des hôteliers qui nous ont dit: Nous sommes d'accord pour
régulariser la situation de ce qu'on appelle le vin libre. Vous aurez
notre appui, M. le ministre, ont-ils dit, mais on voudrait que ce soit
limité au vin seulement et pas à d'autres sortes de boissons
alcooliques.
Il y a aussi la considération touristique parce que c'est bien
connu, la gastronomie québécoise est associée à de
bons mets et à la consommation de bons vins. On n'a qu'à regarder
les touristes américains qui viennent ici l'été, à
Québec et à Montréal. Je pense qu'on peut être
très fiers de la restauration québécoise et du type de
restaurants où les gens entrent et voient les clients consommer du vin.
Au point de vue touristique, c'est un autre argument en faveur de le limiter
à cette classe-là.
Comme le ministre l'a déjà mentionné hier soir et
d'autres députés, généralement il y avait de
très bons commentaires sur ce projet de loi. Je voudrais simplement lire
un commentaire dans la Gazette. Vous savez, il y a beaucoup de restaurateurs
qui sont de langue anglaise qui sont très intéressés
à ce débat et aussi très heureux que le problème
ait été réglé. Je veux citer la Gazette du 8 avril
1986: "Restaurants that let patrons bring their own wine provide a popular
service and should be allowed to flourish, the Quebec agency that issues liquor
license said yesterday." C'est très important de savoir que c'est le
public qui l'a voulu. C'est le consommateur, c'est nous autres qui avons voulu
qu'on leur donne l'occasion de continuer ce qu'on appelle le vin libre.
"Ghislain Laflamme, President of the Régie des permis d'alcool du
Québec, rejected a call by licensed restaurants for a total ban on
"brown bagging, but did agree the practice should be regulated." On a ici
"regulated". On trouve cela maintenant dans le projet de loi. La
réglementation est là, la protection est là, exactement
tel que réclamé. It is "the public who is responsible for
launching this phenomenon", Laflamme said. "Among consumers, we were not able
to find any real opposition to it." Donc, parmi les consommateurs, il n'y a
vraiment aucune opposition à cette façon de procéder. Tout
le monde est d'accord, certainement du point de vue du consommateur. "While
concluding that bring-your-own-wine restaurants are in the public interest, the
Régie proposed some controls. It called for the creation of a new form
of liquor permit, for serving but not selling alcohol, to cover
bring-your-own-wine restaurants. Most now operate without any permit." C'est
exactement ce qu'ils ont demandé qu'ils ont eu. Ils ont demandé
de régulariser la situation, d'émettre un permis sujet à
un contrôle comme le permis régulier. On trouve cette disposition
dans le projet de loi.
Mme la Présidente, il y a, évidemment, beaucoup d'autres
dispositions dans ce projet de loi dont le député de
Laval-des-Rapides a déjà traité ce matin. Tel que le
député de Shefford l'avait dit en commission parlementaire, je
suis certain qu'il y a peut-être des petits changements dans les articles
sur des points très mineurs, mais, en principe, tout le monde est
d'accord, ceux qui vivent de cette industrie, ceux qui gagnent leur vie dans
cette industrie, les consommateurs, le gouvernement, l'Opposition. Donc, je
pense que nous sommes sur une très bonne route et je félicite
encore une fois le Solliciteur général. Ce n'est pas comme dans
le temps de la législation péquiste. Je me rappelle que
très souvent on donnait naissance à ce que j'appelais, du
côté de l'Opposition, une souris morte, mais vous avez
donné naissance à un très beau bébé. Je vous
remercie. (12 h 10)
La Vice-Présidente: Merci, M. le député de
Sainte-Anne. M. le député de Mercier.
M. Gérald Godin
M. Godin: Mme la Présidente, je me propose d'appuyer le
principe de cette loi parce que je pense qu'elle illustre fort bien le
mûrissement et la maturation d'une idée lancée il y a
quelques années par notre gouvernement et qui, aujourd'hui, a
trouvé dans le député de Chambly l'occasion de devenir
une solution, à mon avis, louable, acceptable et intelligente
à ce problème.
Je me suis battu à quelques reprises en tant que membre du
Conseil des ministres de l'ancien gouvernement pour les restaurants de la
clientèle de ma collègue, la députée de Bourassa et
ministre de l'Immigration, pour qu'on protège les minorités
culturelles qui ont mis au monde les chaînes de restaurants au
Québec qui illustrent fort bien ce que le député de
Sainte-Anne citait, que le Québec est doté d'un ensemble de
restaurants peu commun en Amérique du Nord, qui attire ici des touristes
et qui a pu se développer grâce à l'existence au
Québec d'un régime de vin libre.
Mais tout le monde se posait la question de la "tax evasion", comme le
diraient mes collègues anglophones, à laquelle il faudrait mettre
un terme. Je pense que la solution trouvée par le gouvernement actuel
est une bonne solution et nous voterons pour cela avec empressement. On se
réjouit qu'entre-temps les restaurants multiethniques au Québec
se soient multipliés, aient pu croître et se développer
comme les enfants dont parle la Bible. Ils ont maintenant atteint un
degré de stabilité financière tel qu'ils envisagent sans
trop se plaindre de verser à l'État une partie de leurs profits
alors qu'à l'époque où ils ont commencé cela aurait
été un scandale pour eux, ils se seraient battus à mort
contre toute mesure visant à leur imposer un permis à eux aussi.
Maintenant, les choses ont changé, il y a eu une évolution des
mentalités, ils ont fait des profits, ils disposent de fonds leur
permettant de verser à l'État une contribution fiscale sur les
vins qui sont consommés chez eux.
Donc, dans ce domaine comme dans d'autres, on constate que d'un
gouvernement à l'autre il y a une continuité et que les erreurs
de l'un peuvent profiter à l'autre et surtout faire mûrir les
mentalités, faire mûrir les commerçants, faire mûrir
les idées. Je constate donc que, le fruit étant mûr, le
gouvernement actuel le cueille de la meilleure manière qui soit
puisqu'il y a unanimité sur ce projet de loi au Québec. On
constate qu'il y a une idée qui a frappé ce gouvernement - au
moins une, en tout cas -qui est bonne et à laquelle nous nous
associerons totalement, Mme la Présidente. Merci beaucoup.
La Vice-Présidente: Merci, M. le député de
Mercier. M. le député de Sainte-Marie.
M. Michel Laporte
M. Laporte: Mme la Présidente, je remercie effectivement
et je prends bonne note des propos tenus par le député de Mercier
en cette Chambre sur son appui au projet de loi 96 et de ses
félicitations à l'endroit du gouvernement actuel. Je comprends
bien, étant le représentant d'un des comtés voisins du
comté de Mercier, qu'effectivement il y a un très grand nombre de
restaurateurs dans la population qu'il dessert qui sont situés dans son
comté et qui font ce type de service au niveau du vin libre. Comme je
prends très bien aussi ses arguments au sujet des divers essais qu'il a
faits au niveau du Conseil des ministres afin d'adopter cette loi-ci que notre
gouvernement a mise sur pied.
Mme la Présidente, nous abordons actuellement l'étude du
projet de loi 96 visant à apporter des modifications aux lois actuelles:
la Loi sur les infractions en matière de boissons alcooliques, la Loi
sur les permis d'alcool et la Loi sur la Société des alcools du
Québec. Concrètement, la partie de ce projet de loi qui retient
le plus l'attention du public, des consommateurs particulièrement et
sûrement des restaurateurs, est celle de la vente qu'on appelle
communément de vin libre dans les établissements.
J'aurai l'occasion de revenir sur ce sujet précis du vin libre un
peu plus tard au cours de mon discours, mais je ne voudrais pas, pour autant,
passer sous silence toutes les dispositions traitant du contrôle de la
circulation et de la vente des boissons alcooliques au Québec. Il existe
de nouvelles habitudes qui, chemin faisant, se popularisent et deviennent une
pratique courante. On pourrait citer les exemples suivants. Nous savons tous
qu'un commerçant qui vend des boissons doit obtenir des bouteilles qu'on
appelle timbrées, avec des timbres dessus, qui indiquent le droit pour
l'établissement de vendre aux consommateurs ce type de boissons en
particulier. Il arrive et ce, malheureusement, qu'un certain nombre de
restaurateurs transvident d'une bouteille timbrée à une autre non
timbrée certains des produits qu'ils ont. Ceci leur permet
d'éviter le paiement de certains droits appropriés, au
détriment de tous ceux qui, eux, respectent la loi.
Il y a aussi ceux qui, par la bande, achètent différents
produits alcoolisés soit des États-Unis ou des particuliers.
Aussi, il y en a beaucoup qui, peut-être pas par mauvaise volonté,
mais on pourrait dire un peu par malhonnêteté, échangent
les étiquettes d'une bouteille à l'autre. Ces faits existant, il
est important que le gouvernement, pour tous ceux - c'est la grande
majorité, on doit quand même le dire - qui respectent les lois et
paient les droits, apporte les corrections qui s'imposent, en permettant, entre
autres, à la Régie des permis d'alcool d'avoir les outils, par le
biais de pénalités, et les mécanismes pour agir afin
d'être plus efficace en regard du mandat qu'elle possède. Ce ne
sont nullement des modifications qu'on appellerait
tatillonnes. Elles visent, justement, à combler les lacunes qui
ont pu être constatées par le Solliciteur général
dans la loi actuelle et permettent - il ne faut pas s'en cacher - de
récupérer des montants d'argent importants qui nous permettront,
à titre de gouvernement, de continuer les actions que nous avons
entreprises dans plusieurs domaines.
Ainsi, la Régie des permis d'alcool du Québec pourra, par
l'extension de certains de ses pouvoirs, révoquer ou suspendre un permis
qui a été délivré à un établissement
si celui-ci ne respecte pas les dispositions de la loi. Nous pourrions citer
quelques exemples précis d'endroits peu recommandables. D'ailleurs, en
manchette, des journaux nous en ont fait part à plusieurs reprises, mais
je ne voudrais pas leur faire de publicité ici. Je ne les mentionnerai
pas, mais ils se sont vu retirer pour un certain temps leur permis. En
pratique, ceci survenait toujours par un effet détourné. Ces
mêmes propriétaires pouvaient former une autre compagnie, se
revendaient ce commerce l'un l'autre et pouvaient obtenir à nouveau une
certaine forme de permis sans qu'on puisse nécessairement apporter -
parce que la preuve est difficile -des éléments de preuve
justement qui correspondent à la révocation de leur permis et ce
permis révoqué pouvait être continué après.
Les nouvelles modifications permettront un meilleur respect de la loi car la
suspension ou révocation ne sera pas attachée à
l'individu, mais à l'établissement en tant que tel. Les personnes
qui habitent non loin de ces propriétés et commerces et qui ont
eu à vivre ces situations seront, j'en suis persuadé, heureuses
de cette approche.
Je vous ferai grâce aussi de tous les détails techniques se
rapportant à un meilleur contrôle à exercer sur plusieurs
points par la régie. De toute manière, le discours d'introduction
que le Solliciteur général nous a livré, fort
brièvement, d'ailleurs, vous explique les grandes lignes avec force
détails.
Le point sur lequel j'aimerais vous entretenir présentement porte
sur un des aspects du projet de loi 96 et traite plus spécifiquement de
ce qu'on appelle le vin libre dans les restaurants. Nous avons pu constater
depuis environ quatre ans - et je dois dire que, comme député de
la région de Montréal, j'ai pu le vérifier à
maintes reprises - qu'il s'est développé de nouvelles habitudes
de consommation. D'ailleurs, dans le comté que je représente, le
comté de Sainte-Marie, j'ai pu remarquer qu'il n'existait pas moins
d'une vingtaine d'établissements qui offraient à la fois une
nourriture de qualité à leur clientèle et la
possibilité d'apporter leur vin. (12 h 20)
Cette pratique, fort répandue dans certains secteurs tant de
Montréal, de
Québec et d'autres régions, va en s'accroissant. Il est
important de régulariser cette situation du permis en apportant une
définition plus précise à la notion
d'établissement; précise, parce que la nouvelle définition
permettra d'inclure tous les lieux de cet établissement, que ce soit le
sous-sol, une terrasse ou tout autre lieu que l'établissement dessert,
en introduisant aussi la notion de permis de servir et de permis de vendre.
Ces nouvelles définitions de permis enlèveront ce que
j'appellerais toute discrimination existant à l'heure actuelle envers
ceux qui détenaient un permis de restaurant sous sa forme actuelle.
Elles répondent à la volonté du gouvernement d'exercer un
équilibre sur la vente des boissons alcoolisées. Il existait
jusqu'à présent une espèce de vide juridique sur cette
question et le projet de loi 96 vient combler cette lacune.
Certains arguments ont été apportés. On a pu les
entendre par le biais des journaux et surtout aux audiences qu'a tenues la
régie. Les premiers arguments que faisaient valoir les opposants au
projet de loi, à bon droit je crois bien, c'est que cette pratique
était néfaste pour le commerce. Deux principaux arguments
ressortaient, à savoir qu'ils possédaient un permis et qu'ils
défrayaient un coût pour ce permis. Comme je l'ai dit
tantôt, la nouvelle définition de permis de vendre et de permis de
servir vient régler cette situation.
Il y avait aussi l'autre situation, où on disait que la taxation
sur la vente des produits alcoolisés, surtout en ce qui concerne le vin,
faisait en sorte qu'ils avaient une obligation supplémentaire. Il ne
faudrait pas cependant, pour ce motif, oublier - on le voit à l'analyse
- qu'ils ont aussi certains avantages lorsqu'ils font l'achat ou l'acquisition
de caisses de bouteilles de vin à la Société des alcools
du Québec, ce qui vient compenser et équilibrer un peu toute
cette dimension et toute cette argumentation qui était apportée
par ces opposants. De plus, c'est ce qui est, à mon avis, le plus
important: les habitudes de consommation ont changé et la
clientèle demeure toujours variée.
Tout d'abord, il est bon de souligner que chacun des
établissements et restaurants a pour une grande part un type de
clientèle qui lui est propre. Il existe toujours, on me dira, un certain
pourcentage qui va soit à l'un, soit à l'autre; mais je crois
bien, par expérience, ayant eu la possibilité d'aller à
tous ces types de restaurants, que chacun a une espèce de
clientèle captive. Justement, en raison de cela, rien n'est apparu moins
évident que la compétition dite déloyale exercée
par les restaurants qui acceptaient que leurs clients apportent leur vin,
surtout
lorsque nous constatons que l'achalandage dans les restaurants que
j'appellerais traditionnels est demeuré stationnaire, pour ne pas dire
en constante évolution. L'un et l'autre peuvent cohabiter sans
nécessairement se nuire. Le consommateur, dans cette perspective, n'en
sera que mieux servi. On lui offrira une gamme de services, une gamme de choix,
il n'en sera que mieux éclairé.
Accepter le vin libre, c'est accepter la possibilité que ceux qui
n'en ont pas toujours les moyens puissent quand même aller au restaurant.
On pensera, entre autres, aux étudiants et aux étudiantes qui
fréquentent passablement ce type de restaurants. On pensera aussi
à plusieurs travailleurs et travailleuses. Accepter le vin libre est le
reflet aussi d'une écoute de la volonté exprimée par le
consommateur québécois. Une société est en
constante évolution et nous ne faisons que concrétiser en une loi
cette évolution. Cela est très important. Nous n'aurions
effectivement aucun avantage à laisser aller, sans la
concrétisation de cette loi, les choses comme elles se
présentent. Je crois bien que, si on avait laissé perdurer cette
situation, l'inéquité aurait été très mal
servie, car la situation du vin libre, qui prend de l'ampleur et qui se
démarque depuis quatre ans, ne nous permet pas de laisser continuer des
choses comme cela.
Le meilleur des exemples que je cite en ce qui concerne ces nouveaux
types de restauration et les consommateurs qui fréquentent ces
différents établissements, c'est un peu comme les
différents concessionnaires d'autos. Ce n'est pas toujours
agréable de voir un concessionnaire d'une autre marque se retrouver
à côté. Je crois bien que cela stimule le commerçant
qui était habitué, peut-être, à une pratique un peu
plus stationnaire. On diversifie, par ce fait, les différents produits,
surtout les différentes qualités et les différentes
approches qu'on offre au consommateur.
Donc, en ce sens, je crois bien que le projet de loi 96
présenté par le Solliciteur général est une
très bonne loi et qu'on se doit sans délai de l'adopter. Je vous
remercie bien de votre attention, Mme la Présidente, et je souhaite
ardemment qu'on puisse procéder le plus rapidement possible.
La Vice-Présidente: Merci, M. le député de
Sainte-Marie. Il n'y a pas d'autres intervenants?
M. le Solliciteur général, en réplique.
M. Gérard Latulippe (réplique)
M. Latulippe: Permettez-moi, tout d'abord, Mme la
Présidente, de témoigner ma satisfaction de l'attitude de
l'Opposition en rapport avec ce projet de loi, une attitude positive, une
attitude rationnelle. Je pense que je dois témoigner publiquement ma
satisfaction à l'appui que l'Opposition apporte au principe du projet de
loi 96.
Peut-être assistons-nous aujourd'hui à la naissance d'une
nouvelle Opposition, plus positive, plus rationnelle, plus libérale que
celle dont nous avons été témoins depuis décembre
1985. C'est une habitude à prendre et j'invite mon
collègue...
M. Filion: Question de règlement, Mme la
Présidente.
La Vice-Présidente: Question de règlement, M. le
député de Taillon.
M. Filion: Est-ce que vous pourriez rappeler au Solliciteur
général qu'il en est à sa réplique sur le projet de
loi 96 et que la règle de la pertinence s'applique toujours à
cette étape de nos travaux?
M. Latulippe: Mme la Présidente, je pourrais
peut-être répondre.
La Vice-Présidente: M. le Solliciteur
général, sur une question de règlement?
M. Latulippe: Sur une question de règlement, je pourrais
peut-être simplement dire comment c'est pertinent, parce que, pendant les
moments où l'Opposition est intervenue sur ce projet de loi, chacun des
députés est intervenu positivement dans le but de
démontrer l'appui qu'il apportait à mon projet de loi. Je veux
tout simplement féliciter l'Opposition de cet appui et je pense que
c'est dans ce sens qu'on doit interpréter mes propos.
La Vice-Présidente: Si vous me le permettez, M. le
Solliciteur général, en vertu de nos règlements, il y un
article qui spécifie la pertinence. C'est sûr qu'on ne donne pas
une interprétation trop restrictive de la pertinence du débat,
mais, tout de même, il faudrait à un moment donné tomber
dans le vif du sujet. Je vous demanderais, M. le Solliciteur
général, de bien parler de la Loi modifiant diverses dispositions
législatives concernant les boissons alcooliques.
M. Latulippe: Très bien, Mme la Présidente. Je
croyais qu'il était pertinent pour nous de souligner le moment où
l'Opposition pose des gestes positifs. Je croyais que c'était pertinent
pour un ministre de le souligner à cette Assemblée.
Par ailleurs, une des remarques de mon collègue, le
député de Taillon, au moment où il a fait ses commentaires
sur le projet de loi, c'était de dire que c'est en juin 1985 que le
gouvernement précédent avait demandé de tenir des
audiences publiques sur
le phénomène dit du vin libre.
Mon collègue est tellement satisfait du projet de loi qu'il nous
dit que la source du projet de loi fut l'ancien gouvernement. Je voudrais
donner des précisions sur ce point et parler un peu de l'intervention et
de la source de ce projet de loi, dire un peu comment on en est finalement
arrivé à proposer ce projet de loi.
C'est en 1982 qu'un amendement est proposé à l'article 91,
à l'époque par l'ancien gouvernement, de la Loi sur les
infractions en matière de boissons alcooliques. Il faut bien se rappeler
quel était le problème qu'on voulait cerner à
l'époque. Là-dessus, je voudrais citer le rapport de la
Régie des permis d'alcool sur le phénomène dit du vin
libre: "Au début des années quatre-vingt, une pratique s'est
répandue dans certaines régions du Québec et a
entraîné des problèmes relatifs à la
tranquillité publique. En effet, des organisateurs de soirées se
sont mis à louer des salles publiques où aucun permis d'alcool
n'était exploité. Ces organisateurs engageaient soit un
orchestre, soit un artiste, et vendaient des billets d'entrée pour leurs
soirées. Ils incitaient les gens à apporter leurs boissons
alcooliques dans ces salles publiques". (12 h 30)
C'est en voulant réglementer à l'époque sur les
problèmes de tranquillité publique en rapport avec les salles de
réunion que l'on a du même coup créé un vide
juridique et une coquille juridique qui a permis l'émergence du vin
libre. À ce moment-là, en 1982, on réglementait sur les
problèmes relatifs aux salles de réunion. C'est ce qui a
amené le gouvernement de l'époque à proposer une
modification en 1982, soit l'article 91.1 de la loi qui se lisait comme suit:
Le propriétaire, le locataire ou l'occupant d'un local dans lequel le
public est admis ne peut permettre que des boissons alcooliques y soient
consommées à moins qu'il ne soit détenteur d'un permis
pour ce local et qu'il ne s'agisse de boissons qu'il s'est procurées en
vertu du permis qu'il détient. C'est cela qu'on réglementait
à l'époque.
On avait sur ce point précis fait une exclusion en rapport avec
les restaurants. C'est à partir de cette exclusion que, finalement, les
consommateurs québécois ont commencé ce qu'on appelle
maintenant la pratique du vin libre. À partir de cette coquille
juridique qui n'avait pas été voulue par le gouvernement de
l'époque, les gens ont commencé à apporter leur vin dans
des restaurants, mais autant dans les restaurants qui avaient un permis que
dans ceux qui n'en avaient pas. Voyant ce phénomène prendre de
l'ampleur, le ministre du Revenu de l'époque décréta un
règlement. Là encore, je cite le rapport sur le
phénomène dit du vin libre qui nous parle de cette
deuxième intervention du gouvernement en rapport avec ce
phénomène: "Devant les clameurs publiques et l'intervention de
certains restaurateurs, le ministère du Revenu a fait adopter le
décret 1740-82 pour obliger les restaurants, détenteurs d'un
permis d'alcool, à n'avoir dans leur établissement que des
boissons portant le timbre d'une taxe reliée aux débits de
boissons."
On venait, finalement, réglementer les cas où des
personnes, des citoyens apportaient leur vin dans des restaurants qui
détenaient des permis de boisson. On bouchait une partie du vide
juridique, les cas du vin libre dans les restaurants qui, effectivement,
détenaient des permis d'alcool. Le phénomène,
évidemment, puisqu'il s'agissait d'une pression qui provenait des
consommateurs, se répandit dans ce qui demeurait un vide juridique,
c'est-à-dire le cas des restaurants qui ne détenaient aucun
permis. Dans ces cas-là, le vin libre devint une pratique de plus en
plus répandue. Par cette réglementation, par cette loi de 1982,
on a abouti à un véritable imbroglio administratif et juridique
qui a perduré quelques années, au point où, en 1985, le
ministre du Tourisme se débarrassa de cette patate chaude qui lui
brûlait les mains depuis quelques années pour l'envoyer à
la Régie des permis d'alcool qui, effectivement, j'en témoigne, a
fait un travail très important dans ce dossier pour démêler
cet imbroglio administratif. Il faut bien comprendre qu'à
l'époque l'objectif du gouvernement n'était pas de
légaliser le vin libre, mais de permettre à la régie de
tenir des audiences. D'ailleurs, le mandat même que le ministre du
Tourisme donna à la régie était varié. Ce mandat
visait tout autant la légalisation du vin libre que son abrogation
totale. C'est dans le but de régler cet imbroglio administratif et de
s'occuper de cette patate chaude que la régie l'a reçue et elle a
fait un travail très important.
Deuxième commentaire que mon collègue, le
député de Taillon, a fait dans sa présentation principale:
il nous a dit que la loi de 1979 était une réforme importante en
matière d'alcool. Â l'époque, il faut bien comprendre que
la Commission de contrôle des permis d'alcool devenait la Régie
des permis d'alcool. Ce n'était assurément pas une réforme
en profondeur de la loi, mais on y apportait des modifications administratives.
Il y a donc un bémol à mettre sur ses commentaires, à
savoir que la loi de 1979 était fort importante et fondamentale dans le
domaine du commerce des boissons alcooliques.
Mon collègue, le député de Taillon, nous a aussi
dit qu'il aurait certains commentaires précis à faire en
commission parlementaire. Un de ses sujets sera, finalement, la question de la
bière. Est-ce que nous devrions permettre ou non aux citoyens d'apporter
leur bière dans les restaurants? Il
nous a dit qu'il aurait des commentaires là-dessus. Finalement,
j'attendrai le détail des propositions de mon collègue en
commission parlementaire pour commenter.
Cependant, à ce stade-ci je voudrais donner un peu notre
philosophie. Pour nous, le phénomène que nous voulions
légaliser était le phénomène du vin libre. Ces
habitudes de consommation qui se sont développées chez les
Québécois et les Québécoises, en particulier dans
la région de Montréal - on pense à la rue Duluth, entre
autres, à la rue Prince-Arthur et ailleurs -étaient axées
sur le vin libre, sur le fait que des citoyens apportaient leur vin au
restaurant. C'était une nouvelle habitude gastronomique que l'on
consacrait. Nous n'avons pas assité jusqu'à maintenant à
un phénomène de bière libre. Pendant toutes ces
années où, finalement, il n'y avait pas de réglementation,
où on vivait cet imbroglio administratif, le phénomène de
la bière libre ne s'est pas développé. C'était
effectivement essentiellement, d'abord et avant tout, un
phénomène axé sur le vin libre, un nouveau type de
restauration. C'est pour valider cette pratique qu'effectivement nous adoptons
ce projet de loi 96.
Il y a d'autres arguments. D'ailleurs, mon collègue, le
député de Sainte-Anne, a fait état des raisons qui nous
ont amenés à ne pas inclure la bière dans le permis pour
servir. Il en a fait longuement état. Je pense qu'on pourra en parler en
commission parlementaire, mais on pourrait, finalement, classifier ses raisons
sous trois ordres: la protection de l'environnement, la sécurité
publique et la tranquilité publique. Je pense qu'on peut dire aussi,
finalement, une certaine volonté du milieu en ce sens.
Je voudrais conclure mes commentaires sur la dernière remarque de
mon collègue, le député de Taillon. Il nous a dit que ce
projet de loi 96 et la création de deux classes de permis, celui pour
vendre et celui pour servir, entrent en contradiction avec le rapport Scowen
sur la déréglementation. Il nous a cité ce rapport et
particulièrement l'article 2.4. Mon collègue, le
député . de Taillon, a l'habitude de faire très bien ses
devoirs. Je lui recommanderais de bien lire le rapport Scowen et son article
2.4 et de recommencer ses devoirs dans ce cas-ci. Ledit article 2.4 et le
rapport Scowen visent la distribution de boissons alcooliques et portent sur la
Loi sur la Société des alcools du Québec. Permettez-moi de
vous en lire quelques phrases: "La Loi sur la Société des alcools
confère au gouvernement de larges pouvoirs réglementaires en
matière de commerce de boissons alcooliques." Les remarques du rapport
Scowen visent donc la Loi sur la Société des alcools du
Québec. C'est d'ailleurs dans ce rapport que M. Scowen nous dit: "Cette
législation a peut-être un riche passé historique, mais le
groupe de travail ne croit pas qu'elle ait quelque pertinence en 1986, sauf
dans le cas du contrôle de la qualité ou comme véhicule
fiscal. Il croit, au contraire, qu'une libéralisation ne ferait
qu'assainir ce marché en favorisant une organisation plus rationnelle de
la distribution, tout en permettant des rentrées fiscales
équivalentes."
Or, les permis que nous créons aujourd'hui, ces classifications
de permis, c'est-à-dire le permis pour vendre et le permis pour servir,
sont donnés en vertu de la Loi sur les permis d'alcool qui a comme
objectif non pas la réglementation en tant que telle, comme la Loi sur
la Société des alcools, du commerce de boissons alcooliques, mais
le contrôle des débits de boisson. C'est en vertu de cette loi, la
Loi sur les permis d'alcool, que les permis sont émis. Cette loi
établit un cadre réglementaire en matière d'ordre public,
en matière de tranquillité publique. Jamais le rapport Scowen ne
dit que nous ne devons pas réglementer en matière d'ordre public
ou en matière de tranquillité publique. Je pense qu'il est
très important que nous puissions faire cette distinction parce que
cette loi ne vient pas en contradiction avec le rapport Scowen, mais en
complémentarité. D'ailleurs, le rapport Scowen, lorsqu'il parle
de la Loi sur la Société des alcools et lorsqu'il parle du
commerce en matière de boissons alcooliques, nous dit que la loi et la
réglementation sont pertinentes dans le cas de contrôle de la
qualité ou comme véhicule fiscal.
Or, avec ce projet de loi, celui que nous demandons à
l'Assemblée d'adopter, précisément nous faisons notre bout
de chemin. Nous contribuons, finalement, à améliorer le
véhicule fiscal. Nous sommes plus sévères en
matière de commerce illégal de boissons alcooliques. Nous avons
des dispositions qui visent à empêcher le commerce de timbres ou
le "transvidage". Comme gouvernement étant conséquents avec
nous-mêmes, conséquents avec ce rapport, nous avons donné
des instruments pour concrétiser ce rapport, en particulier cet aspect
de véhicule fiscal puisque nous aurons maintenant une loi avec des
dents.
Mme la Présidente, je dois à nouveau dire - je pense que
c'est à l'unanimité de cette Assemblée - que le
gouvernement, encore aujourd'hui, pose un geste positif pour les consommateurs
québécois. Je pense que, dorénavant, le commerce des
boissons alcooliques au Québec sera mieux réglementé et
sera aussi plus en faveur des consommateurs québécois.
La Vice-Présidente: Merci, M. le Solliciteur
général.
Le débat étant clos, est-ce que le principe du projet de
loi 96, Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant
les boissons alcooliques, est adopté? Des voix:
Adopté.
La Vice-Présidente: Adopté. M. le ministre de
l'Énergie et des Ressources.
Renvoi à la commission des institutions
M. Ciaccia: Mme la Présidente, je fais motion afin que le
présent projet de loi soit déféré à la
commission des institutions et que cette commission soit présidée
par un président de séance.
La Vice-Présidente: Est-ce que cette motion est
adoptée?
Une voix: Adopté.
La Vice-Présidente: M. le ministre de l'Énergie et
des Ressources.
M. Ciaccia: Je demanderais le consentement de l'Assemblée
afin de suspendre nos travaux jusqu'à 15 heures.
La Vice-Présidente: Est-ce qu'il y a consentement?
Une voix: Consentement.
La Vice-Présidente: Consentement. Nous allons suspendre
nos travaux jusqu'à 15 heures, cet après-midi.
(Suspension de la séance à 12 h 44)
(Reprise à 15 h 6)
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît:
Veuillez vous asseoir.
Présence de parlementaires et
du consul de la République
fédérale d'Allemagne
Si vous me permettez, avant de procéder aux affaires courantes,
il me fait plaisir de vous présenter deux parlementaires de la
République fédérale d'Allemagne, M. Norbert Lammert et son
épouse ainsi que M. Manfred Schulte.
Nos invités sont accompagnés cet après-midi du
consul Karl Erich Rombach. Messieurs et Madame.
Déclarations ministérielles.
Présentation de projets de loi, M. le leader du gouvernement.
M. Gratton: Article b, M. le Président.
Projet de loi 115
Le Président: À l'article b du feuilleton, Mme la
ministre des Affaires culturelles présente le projet de loi 115, Loi
abrogeant la Loi sur le Conseil d'artisanat. Mme la ministre, vous avez la
parole.
Mme Lise Bacon
Mme Bacon: M. le Président, ce projet de loi a pour objet
d'abroger la Loi sur le Conseil d'artisanat.
Le Président: M. le leader du gouvernement.
L'Assemblée accepte-t-elle de se saisir de ce projet de loi? M. le
leader de l'Opposition.
M. Chevrette: Oui, M. le Président, en présumant
que c'est l'application du rapport Gobeil.
Le Président: Si j'ai bien compris votre intervention,
c'est adopté.
M. Gratton: M. le Président, non, c'est en fonction du
fait que le conseil n'a pas siégé depuis 25 ans.
Le Président: C'est quand même adopté. M. le
leader du gouvernement.
M. Gratton: Article c, M. le Président.
Projet de loi 116
Le Président: À l'article c du feuilleton, Mme la
ministre. S'il vous plaît! S'il vous plaît! À l'article c,
Mme la ministre des Affaires culturelles présente le projet de loi 116,
Loi abolissant le Conseil des arts du Québec. Mme la ministre.
Mme Lise Bacon
Mme Bacon: M. le Président, ce projet de loi a pour objet
de modifier la Loi sur le ministère des Affaires culturelles afin
d'abolir le Conseil des arts du Québec qui ne siège pas depuis de
nombreuses années aussi.
Le Président: L'Assemblée accepte-t-elle de se
saisir de ce projet de loi? Adopté? Adopté. M. le leader du
gouvernement.
M. Gratton: Article d, M. le Président.
Projet de loi 113
Le Président: À l'article d du feuilleton, M. le
ministre de l'Énergie et des Ressources présente le projet de loi
113, Loi abrogeant la Loi sur la Société de carto-
graphie du Québec. M. le ministre. M. John Ciaccia
M. Ciaccia: Ce projet de loi abroge la Loi sur la
Société de cartographie du Québec qui a été
vendue par le gouvernement précédent, M. le Président.
Le Président: M. le leader de l'Opposition.
M. Chevrette: Je voudrais faire remarquer au ministre de
l'Énergie et des
Ressources que voilà, là, une privatisation
réussie.
Le Président: Entre-temps, est-ce que ce projet de loi
à l'étape de la présentation est adopté?
Des voix: Adopté.
Le Président: Adopté.
Dépôt de documents. M. le ministre des Transports et
responsable du Développement régional.
Copie du contrat de vente des Boeing 737 de
Quebecair
M. Côté (Charlesbourg): M. le Président,
merci de votre amabilité de me permettre de faire aujourd'hui ce que
l'Opposition m'a empêché de faire hier et ce qui était
d'ailleurs souhaité par elle. Je voudrais déposer photocopie du
contrat intervenu quant à la vente...
Une voix: Enfin.
Le Président: À l'ordre! À l'ordre! À
l'ordre, s'il vous plaît!
M. Côté (Charlesborug): Le "enfin" vient exactement
du même côté de ceux qui ont dit non hier. Une copie du
contrat de la vente des Boeing 737, qui permettra à la
députée de Maisonneuve de confirmer que c'est en dollars
américains.
Le Président: M. le ministre, M. le ministre.
M. Côté (Charlesbourg): Laissez-moi terminer, M. le
Président. Au cas...
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
M. Côté (Charlesbourg): Au cas où le contrat
ne suffirait pas parce que peut-être qu'un contrat n'est pas
respecté...
Le Président: Faites la lecture de la liste des documents
que vous voulez déposer. Sans commentaire, s'il vous plaît, M. le
ministre.
M. Côté (Charlesbourg): Sans commentaire. Au cas
où le contrat n'aurait pas été respecté, une
photocopie du chèque en dollars américains.
Le Président: À l'ordre! Documents en liasse
déposés par le ministre des Transports. M. le ministre de
l'Éducation, de l'Enseignement supérieur et de la Science.
Rapports annuels de diverses corporations
professionnelles
M. Ryan: J'ai l'honneur de déposer les rapports annuels
pour l'exercice 1985-1986 des corporations professionnelles suivantes: l'Ordre
des arpenteurs géomètres du Québec, le Barreau du
Québec, la Corporation des chiropraticiens professionnels du
Québec, l'Ordre des comptables agréés, la Corporation des
comptables généraux licenciés, la Corporation des
conseillers en relations industrielles, l'Ordre des dentistes, la Corporation
des denturologistes, la Corporation des diététistes, la
Corporation des ergothéra-peutes, la Corporation - celle-là c'est
pour le ministre des Transports et la députée de Maisonneuve -
des évaluateurs agréés, l'Ordre des ingénieurs
forestiers, la Chambre des notaires, l'Ordre des optométristes, l'Ordre
des orthophonistes et audiologistes, l'Ordre des pharmaciens, la Corporation
professionnelle des psychologues, la Corporation professionnelle des
techniciens dentaires, la Corporation professionnelle des techniciens en
radiologie et l'Ordre des technologues des sciences appliquées.
Le Président: Tous ces documents sont
déposés. Dépôt de rapports de commissions. M. le
Président de la commission de l'aménagement et des
équipements.
Consultation générale sur le projet de
loi 100
M. Rochefort: M. le Président, j'ai l'honneur de
déposer le rapport de la commission de l'aménagement et des
équipements qui a siégé les 4 et 5 septembre ainsi que le
23 octobre dernier afin de procéder à une consultation
générale portant sur le projet de loi 100, Loi sur les
élections et les référendums dans les
municipalités.
Le Président: Rapport de commission
déposé.
Pétitions. Cet après-midi il n'y aura aucune intervention
portant sur une violation de droit ou de privilège ou sur un fait
personnel.
Avant de procéder immédiatement à la période
de questions orales, j'aimerais aviser tous les membres de cette
Assemblée que nous procéderons à un vote qui a
été reporté hier sur une motion présentée
par M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de
l'Alimentation. J'aimerais que tous et chacun restent à leur
place immédiatement après la période de questions.
Nous allons maintenant procéder à la période de
questions orales. M. le député de Lévis en principal.
QUESTIONS ET RÉPONSES ORALES
La vente de Madelipêche et le maintien d'emplois
productifs
M. Garon: M. le Président...
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
M. Garon: ...dans la Presse de samedi dernier, on voit un appel
d'offres pour la vente de Madelipêche, un peu comme un liquidateur qui
est en train de faire la liquidation d'actifs d'une entreprise qui ferme. On y
dit que le gouvernement a comme principal objectif la relance de l'entreprise
et la cessation de subventions hors programme - donc il ne veut plus mettre
d'argent dans les pêches aux îles -et il veut aussi consolider
l'industrie de la pêche aux îles - on ne sait pas comment -en vue
de permettre le maintien d'emplois productifs et la poursuite de la pêche
hauturière. Dans le cadre de l'appel d'offres on a l'impression d'une
vente comme quand un syndic vend une faillite ou un liquidateur fait une
liquidation. Aucune perspective sur le maintien d'emplois à aucun
endroit, sauf qu'on dit qu'on veut permettre le maintien d'emplois
productifs.
La question s'adresse à celui qui est responsable de la question,
je ne sais plus qui. Est-ce que c'est le ministre de l'Agriculture, des
Pêches et de l'Alimentation, le ministre de la Privatisation ou le
ministre délégué aux Pêches sous la tutelle du
ministre de l'Agriculture? À celui que le premier ministre
désignera, j'aimerais demander de quelle façon on distingue des
emplois productifs, on maintient les emplois productifs par rapport à
d'autres emplois qui ne seraient pas productifs et de quelle façon on
veut assurer le maintien des emplois ou le développement des emplois
dans les pêches aux Îles-de-la-Madeleine?
Le Président: M. le ministre délégué
à la Privatisation.
M. Fortier: M. le Président, le député de
Lévis a indiqué à plusieurs reprises, m'a-t-on dit, que
tôt ou tard on devrait privatiser Madelipêche. J'espère
qu'il n'est pas surpris si aujourd'hui le gouvernement prend certaines
décisions à ce sujet. Mon collègue, le ministre de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation et moi-même
sommes allés aux Iles-de-la-Madeleine justement pour indiquer qu'il y
avait des problèmes inhérents à Madelipêche
présentement et le député de Lévis les
connaît très certainement. Nous avons indiqué
également que nous avions fait faire une analyse portant sur les
différents problèmes inhérents à la structure
présente, aux problèmes d'alimentation, aux problèmes de
la gestion des bateaux reliés à la production de l'usine et, en
particulier, à l'usine principale de Madelipêche. En
conséquence, on s'attendait que ceux qui nous font des offres nous
disent très clairement de quelle façon ils entendraient
régler ces problèmes structurels que vit Madelipêche depuis
trois ou quatre années déjà.
C'est la raison pour laquelle nous avons indiqué - vous le savez,
M. le député de Lévis - que la production de
Madelipêche est vendue sur les marchés internationaux, qu'il est
important de produire à un coût concurrentiel par rapport à
la concurrence mondiale puisque la production de Madelipêche se vend aux
États-Unis, au Japon et ailleurs. En conséquence, il est
important que les acheteurs éventuels nous indiquent très
clairement de quelle façon ils entendent régler certains
problèmes structurels que vit présentement Madelipêche et
de quelle façon les emplois productifs pourraient être maintenus
aux Iles-de-la-Madeleine.
Le Président: M. le député de Lévis,
sur une question additionnelle.
M. Garon: Remarquez, M. le Président, qu'on ne peut pas
cacher au ministre que Madelipêche vendait son poisson à quelque
part.
Le Président: En additionnelle, M. le
député.
M. Garon: Comment les membres du gouvernement peuvent-ils penser
que c'est dans une privatisation qu'on publie le 25 octobre et qu'on demande
d'avoir des réponses pour le 28 novembre alors que, dans le
passé, c'est justement l'entreprise privée qui a fermé
boutique? Gorton Pew, en 1976, a été remplacée par le
gouvernement.
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
M. Garon: C'est la question justement que je pose. Comment les
membres du gouvernement peuvent-ils penser que c'est l'entreprise privée
qui va prendre la place et qui va maintenir les emplois alors que le
gouvernement a dû prendre la place de l'entreprise privée qui
fermait les usines?
Le Président: Avant de reconnaître M. le ministre
délégué à la Privatisation, M. le leader de
l'Opposition.
M. Chevrette: Je vous demanderais d'appliquer l'article 36, M. le
Président, dans le cas du député de Chauveau.
Le Président: M. le leader du gouvernement.
M. Gratton: Je veux bien, mais, M. le Président, il ne
faudrait quand même pas que le député de Lévis,
quand il pose sa question, donne la réponse en plus.
Le Président: J'ai toléré amplement et j'ai
été très large quant à la définition d'une
question additionnelle. Il y avait peut-être plus qu'une question
additionnelle. M. le député de Lévis a peut-être des
arguments également. Cela a peut-être été beaucoup
plus long que cela ne l'est normalement. Je vais reconnaître
immédiatement M. le ministre délégué à la
Privatisation.
J'attire l'attention de tous. Peu importe qui a la parole,
j'interviendrai, j'ai à faire respecter le règlement. Je
demanderais aussi votre collaboration de toute façon pour respecter nos
règles lorsqu'il s'agit d'une question additionnelle. M. le
ministre.
M. Fortier: M. le Président, je ne voudrais pas que le
député de Lévis meure d'apoplexie cet après-midi,
on veut le garder avec nous.
Le Président: M. le ministre!
M. Fortier: Mais sérieusement... Je désire indiquer
à cette Chambre... Avec les contraintes, M. le Président, comme
vous nous l'avez indiqué, il est impossible en quelques minutes
d'exposer tous les problèmes structurels que vit présentement
Madelipêche. Mais j'indique d'ores et déjà que mon
collègue, le ministre délégué aux Pêcheries,
déposera en cette Chambre mardi prochain une analyse que nous avons fait
faire et qui explicite dans tous les détails les problèmes que
vit présentement Madelipêche.
Nous avons dit très clairement, mon collègue et
moi-même, que nous espérions que des offres sérieuses nous
soient faites dans un esprit de restructuration pour trouver des solutions aux
problèmes que nous avons évoqués lors de la
conférence de presse.
Nous avons clairement indiqué également que le
gouvernement se réservait le droit de n'accepter aucune proposition ou
d'en réserver une ou deux si c'était le cas, et que celles qui
seront retenues le seront seulement si nous croyons que les objectifs
visés par l'opération de privatisation se
concrétisent.
Donc, il est très clair, M. le Président, que finalement,
le gouvernement sera le seul juge pour déterminer si nos objectifs sont
atteints. Si nous croyons que les offres qui nous seront faites
éventuellement ne nous permettent pas de rencontrer nos objectifs, nous
ne retiendrons pas les offres qui nous seront faites. Il faudra attendre que
ces offres-là nous soient faites pour qu'on puisse... (15 h 20)
Le Président: Conclusion.
M. Fortier: ...répondre d'une façon plus
précise à la question du député de
Lévis.
Une voix: C'est celai
Le Président: M. le député de Lévis,
en additionnelle.
M. Garon: M. le Président, je pose la même question
que j'ai posée au ministre délégué à la
Privatisation: De quelle façon le gouvernement entend-il s'assurer qu'il
y aura maintien des emplois? Quelle distinction fait-il entre des emplois
productifs et des emplois non productifs? Et de quelle façon va-t-il
s'assurer que les emplois seront aux îles, puisque le principal employeur
des îles, c'est Madelipêche et Crustacés des îles, sa
filiale?
Le Président: M. le ministre délégué
à la Privatisation.
M. Fortier: M. le Président, c'est la même question
et c'est donc la même réponse. Je vous dis très clairement
qu'il y a des problèmes présentement et vous les connaissez. Si
vous voulez poser une question traitant spécifiquement du secteur des
pêches, je vais demander au ministre délégué aux
Pêcheries de vous exposer en une demi-heure quels sont ces
problèmes et d'évoquer des éléments de solution.
Mais peut-être que le ministre délégué aux
Pêcheries voudrait traiter de ce sujet plus particulièrement. Je
vous répète ce que je vous ai dit tout à l'heure. Il y a
des problèmes structurels qui sont connus des gens des îles. Quand
nous sommes allés aux îles, les gens eux-mêmes ont reconnu
qu'il y avait des problèmes auxquels ils devaient trouver
réponses. Ils n'ont pas été surpris. Bien sûr, il y
a une certaine crainte, il y a toujours une crainte quand on remet en question
quelque chose qui existe, mais les gens des îles réalisent qu'il y
a des problèmes chez Madelipêche et qu'il faut trouver des
réponses. Si mon collègue désire donner plus de
précisions sur les problèmes touchant les pêcheries plus
particulièrement, je crois qu'il est qualifié pour
répondre à cette question.
M. Garon: M. le Président.
Le Président: M. le député de Lévis,
en additionnelle.
M. Garon: Est-ce que le ministre pourrait nous indiquer que ce
qu'il a rencontré aux îles, ce sont surtout 300 personnes qui sont
venues manifester, craignant justement que les emplois ne soient pas maintenus
par cette privatisation, parce qu'elles savent ce qui s'est passé
lorsque Gorton Pew est parti en 1976 et que National Sea n'a pas voulu
moderniser et a voulu vendre ses actifs? Est-ce que le ministre pourrait nous
dire...
Le Président: M. le député de Lévis,
à deux reprises, je vous ai demandé d'être
extrêmement bref et de poser votre question sans aucun
préambule.
Une voix: II est en maudit...
Le Président: M. le député de Lévis,
à qui posez-vous votre question? Est-ce que vous la posez au ministre
délégué aux Pêcheries?
M. Garon: Je la pose au même ministre, qui semble
être le ministre responsable, le ministre délégué
à la Privatisation, parce qu'on me dit que c'est lui qui doit veiller
à ce que les objectifs de privatisation soient atteints.
Le Président: Parfait! M. le ministre, en réponse
à la question posée par le député de
Lévis.
Une voix: Qu'il répète la question.
Le Président: Voulez-vous répéter la
question, s'il vous plaît?
M. Garon: Le ministre, contrairement à ce qu'il a dit,
n'a-t-il pas plutôt rencontré, aux îles, 300
manifestants...
Une voix: Mécontents.
M. Garon: ...qui sont venus lui faire part de leur
inquiétude devant l'annonce qu'il venait faire, parce qu'ils savent que,
dans le passé, la privatisation a signifié des pertes d'emplois
et des fermetures d'usines avec Gorton Pew et National Sea?
Le Président: M. le ministre délégué
à la Privatisation.
M. Fortier: M. le Président, on pourrait rappeler aux gens
d'en face qu'eux, pas par une privatisation mais par une nationalisation dans
le domaine de l'amiante, nous obligeront à payer au mois de
février 1987 une somme de 173 000 000 $, qu'il y a eu perte de 2500
emplois et que l'achat qu'ils ont fait en 1981 n'est pas encore payé.
Alors, on n'a pas de leçon à recevoir de vous. M. le
Président, nous sommes allés aux îles, nous avons
rencontré les employés de Madelipêche, nous avons
rencontré les cadres, nous avons rencontré la direction, nous
avons rencontré les maires et le préfet des îles. On a
voulu informer tous et chacun qui pouvaient avoir une certaine
préoccupation à ce sujet. Nous avons été
reçus très aimablement. Nous avons engagé le dialogue.
Nous nous sommes engagés à déposer le document qui sera
déposé ici en Chambre mardi prochain. Les Madelinots seront les
premiers informés de toute action que nous prendrons dans ce
dossier.
Des voix: Bravo! Une voix: Très bien!
Le Président: Mme la députée de Maisonneuve
en principale.
Le produit de la vente des Boeing 737 de
Quebecair
Mme Harel: Merci, M. le Président. Ma question s'adresse
au ministre des Transports. Il a finalement mis fin au suspense et à la
confusion qu'il a lui-même provoquée la semaine dernière en
évitant de répondre ou en ne pouvant pas répondre à
la question qui lui était posée sur la devise utilisée
pour la transaction des deux Boeing 737. Le ministre peut-il d'abord nous
confirmer si le prix de vente est bien de 23 000 000 $ américains et si
ce prix de vente converti en dollars canadiens est de 32 000 000 $ qui seront
versés par CP Air aux actionnaires de Nordair Metro permettant, avec le
consentement du gouvernement, de rembourser la moitié de la dette
à long terme et de réaliser, par la seule vente des deux
appareils 737, un profit de 5 500 000 $ canadiens? Le ministre ne trouve-t-il
pas excessif que les actionnaires de Nordair Metro puissent financer la
moitié du prix d'achat de 10 000 000 $ par la seule vente des deux
avions 737?
Le Président: M. le ministre des Transports.
M. Côté (Charlesbourg): M. le Président, vous
conviendrez avec moi que je ne peux pas être plus transparent qu'en
déposant le contrat qui lie les deux parties et une copie du
chèque.
Quant à la confusion, c'est vous-même qui l'avez
créée par vos déclarations et par vos sources
d'information qui ne vous ont donné que leur demi-vérité.
Vous tombez dans le piège de ceux qui vous informent très mal.
Aujourd'hui, vous devez revenir sur des propos que vous avez tenus et vous
tentez d'imputer cela au ministre des Transports. Non, contrairement à
vous, ce que le ministre des Transports a voulu faire
la semaine dernière, c'est de vérifier et d'avoir entre
les mains photocopie du contrat. J'ai même exigé une photocopie du
chèque. Est-ce assez clair? Ainsi, je pouvais me lever à un
certain moment donné et vous dire: Mme la députée de
Maisonneuve, la vérité est là avec le contrat et elle
parle d'elle-même. Vos sources vous ont menti et vous avez erré
dans les propos que vous avez tenus. Aujourd'hui vous êtes obligée
de corriger ce que vous aviez dit à l'époque.
Des voix: Bravo!
Le Président: Mme la députée de Maisonneuve,
en additionnelle.
Mme Harel: Merci, M. le Président. N'est-ce pas le
ministre lui-même, responsable de la vente, qui s'est
révélé incapable de préciser la devise
utilisée dans la transaction, lui le ministre responsable de la vente?
Est-ce que le ministre peut répondre à la question, à
savoir: Ne trouve-t-il pas excessif que les actionnaires Nordair métro
puissent réaliser un profit de 5 500 000 $ en dollars canadiens avec la
transaction qu'il vient de déposer en cette Chambre leur permettant de
financer la moitié du prix d'acquisition de Quebecair?
Le Président: M. le ministre des Transports.
M. Côté (Charlesbourg): Deux éléments
de réponse, M. le Président: ce qui était les
méchants anglophones de CP Air de l'Ouest qui devaient
bénéficier d'un cadeau, c'est maintenant devenu des francophones
du Québec. Le cadeau se déplace. Il est rendu entre les mains...
Un instant! Ne vous énervez pas! Prenez votre temps!
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
À l'ordre, s'il vous plaît! J'ai reconnu M. le ministre des
Transports et j'aimerais entendre sa réponse. M. le ministre.
M. Côté (Charlesbourg): Ce qui était la
vérité du cadeau aux anglophones de l'Ouest, CP Air, est
maintenant rendu un cadeau à des francophones du Québec.
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
Une voix: C'est toujours nous, les perdants.
M. Côté (Charlesbourg): Si Mme la
députée de Johnson veut attendre un petit peu, elle va finir par
comprendre.
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
M. Côté (Charlesbourg): Avec un petit peu de temps,
vous allez finir par comprendre.
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
M. Côté (Charlesbourg): L'autre
élément, M. le Président, qu'il est très important
de se rappeler... Heureusement, il y a des journaux pour nous le rappeler. En
1982, le directeur de cabinet du chef de l'Opposition actuel, ex-ministre des
Transports, a, à l'époque, bien mené le dossier. Vous vous
en souviendrez. Ce qui permettait à la Presse à l'époque
de titrer: Même si Quebecair fait faillite - cela, c'est un article du 4
décembre 1982 - Hamel aura empoché près de 2 000 000 $.
Qu'est-ce que c'est? C'est avoir la vue très courte, la mémoire
très courte. Étudiez le dossier et vous reviendrez. C'est avoir
l'esprit très court et des visions très courtes de ce qui s'est
passé. Si, aujourd'hui, on a été obligé de
privatiser Quebecair, c'est votre responsabilité lorsque vous avez
manqué la fusion Nordair-Quebecair pour des raisons que vous
connaissez.
Le Président: Mme la députée de Maisonneuve,
en additionnelle.
Mme Harel: Merci, M. le Président. Est-ce que le ministre
peut confirmer à cette Chambre avoir également avantagé CP
Air en faisant renoncer le gouvernement et la Société
québécoise des transports, par la clause 6.17 du contrat au bon
de souscription attaché à la propriété de 34 % des
actions de Nordair vendues à CP Air?
Le Président: M. le ministre des Transports. (15 h 30)
M. Côté (Charlesbourg): M. le Président, il
faudra certainement en discuter encore bien longtemps avant que l'Opposition
finisse par comprendre. Vous arrivez encore avec une question que ceux qui vous
informent véhiculent depuis déjà un certain temps.
Êtes-vous capable de déposer ici, en cette Chambre, un document
qui va prouver la valeur de ce que vous avancez? Venez déposer cela et
on va probablement avoir beaucoup de plaisir. C'est probablement la même
personne qui vous a fait des évaluations dans un document que vous avez
rendu public lors d'une conférence de presse la semaine dernière
en ce qui concerne les engagements qui n'auraient pas été pris
par les employés de Quebecair...
M. le Président, un instant! En voulez-vous de l'information ou
si vous n'en voulez pas?
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! Si
vous me le permettez, la période de questions n'est pas un dialogue d'un
côté et de l'autre de la Chambre. On ne peut pas
interpeller au milieu d'une réponse ou au milieu d'une question
le député que j'ai reconnu. Depuis quelques minutes, on
s'interpelle et je ne peux obtenir les réponses ou les questions d'une
façon complète. Si vous me le permettez, je demande la
collaboration de tous et chacun. Je comprends que c'est un sujet
extrêmement urgent et important, mais j'aimerais quand même pouvoir
entendre autant les questions que les réponses. M. le ministre des
Transports, vous avez la parole en conclusion.
M. Chevrette: Question de règlement, M. le
Président.
Le Président: Sur une question de règlement, M. le
leader de l'Opposition.
M. Chevrette: L'article 79 dit que la réponse doit se
rapporter à un élément de question. On ne veut pas que le
ministre se pose des questions et qu'il y réponde. On veut qu'il
réponde aux questions qu'on pose.
Le Président: M. le leader du gouvernement.
M. Gratton: M. le Président, hier le ministre a voulu
donner des informations et on lui a refusé le consentement. Aujourd'hui,
on semble encore avoir peur d'écouter ses réponses. Qu'on
écoute ses réponses et on comprendra ce qui se passe.
Le Président: Oui. J'ai accepté souvent des
préambules extrêmement longs. Il reste que dans une période
de questions, advenant le cas où une réponse ne satisfasse pas
l'interpellateur, vous avez d'autres moyens. Il peut y avoir en fin
d'après-midi un débat de fin de séance, il peut y avoir
une interpellation. Il y a tout autre moyen. Il y a également l'article
81 - j'aimerais bien qu'on se le rappelle, je sais que parfois c'est difficile
de ne pas avoir la réponse qu'on aimerait bien avoir - qui est
très clair et on doit prendre la parole du ministre. M. le ministre, en
conclusion, s'il vous plaît.
M. Côté (Charlesbourg): M. le Président, en
conclusion. Si jamais les réponses ne suffisent pas, je dois avoir au
moins le privilège de répondre aux questions de la manière
dont je veux le faire. Vous poserez les questions que vous voulez, c'est votre
affaire. On le voit très bien. Et je répondrai aux questions de
la manière que je veux. Et si jamais vous n'avez pas suffisamment
d'information, je vous invite à rester cet après-midi. On a un
petit débat, on va avoir du "fun". Vous allez avoir encore beaucoup plus
d'informations que vous n'en voulez.
M. le Président, ce que je disais, c'est probablement, en termes
d'évaluation, exactement le même genre d'évaluation que Mme
la députée de Maisonneuve a fait dans le cas du supposé
cadeau de 3 000 000 $ pour la construction d'un hangar pour l'entretien des
CL-215 à Québec alors qu'elle disait que le coût actuel de
location à Montréal - écoutez, je ne lirai pas vos
documents, c'est ici - c'était aucun prix, alors que sur dix ans c'est
un montant de 4 300 000 $. Donc, notre administration nous fait épargner
1 300 000 $ sur ce que vous prônez.
Le Président: Mme la députée de Maisonneuve,
question additionnelle. Question additionnelle, Madame.
Mme Harel: M. le Président, je rappelle au ministre que ma
question porte sur les bons de souscription. Je veux savoir du ministre
pourquoi avoir renoncé de façon définitive à ces
bons de souscription alors que la Caisse de dépôt et placement du
Québec, Air Canada, le fonds de retraite des policiers et des pompiers
ont, eux, réclamé et obtenu la remise de ces bons de souscription
au moment de la transaction? Pourquoi avoir renoncé à ces titres
qui peuvent se transiger et avoir une valeur sur le marché
éventuellement?
Le Président: M. le ministre des Transports.
M. Côté (Charlesbourg): M. le Président,
lorsqu'on a demandé aux spécialistes qu'on a consultés
quelle était la valeur de ces bons, la réponse a
été très claire: Cela ne valait pas grand-chose. C'est
aussi clair que cela. Et Mme la députée de Maisonneuve le
confirme par sa question "qui peuvent un jour hypothétiquement valoir
quelque chose." C'est comme l'Opposition.
Le Président: Mme la députée de Maisonneuve,
question additionnelle. À l'ordre! À l'ordre, s'il vous
plaît! Mme la députée de Maisonneuve, question
additionnelle.
Mme Harel: Oui, M. le Président. Est-ce que le ministre
des Transports n'aurait pas dû, dans ce domaine, se calquer sur
l'entreprise privée qui, elle, a retenu ces bons de souscription? Est-ce
qu'un administrateur d'entreprise privée qui aurait agi comme le
gouvernement l'a fait à l'égard de ces bons de souscription
n'aurait pas des comptes à rendre à son conseil? Et, M. le
ministre, avez-vous peur de convoquer une commission parlementaire pour faire
toute la lumière sur cette transaction?
Le Président: M. le ministre des Transports.
M. Côté (Charlesbourg): Nous avons beaucoup moins
peur de faire la lumière sur le dossier de Quebecair. Même un
éditorialiste du Soleil nous disait récemment qu'on avait
donné trop d'information. Quant aux leçons du passé, de
ceux qui veulent aujourd'hui nous donner des leçons, puis-je vous
référer à un article du 6 décembre de la Presse
où c'était un sous-titre: "Les louches silences de M. Clair."
Vous allez voir là des choses fort intéressantes sur la
transparence de la transaction de l'époque de Quebecair où vous
étiez au gouvernement, où M. Landry, M. Parizeau et M. Clair
étaient les gens intimement liés dans ce processus qui a
empêché la fusion Nordair-Quebecair, ce qui était le
rêve de l'aviation et des francophones du Québec. Allez relire
cela avant de poser une pareille question et on s'en reparlera.
Le Président: M. le député de...
M. Johnson (Anjou): Question additionnelle au premier ministre M.
le Président.
Le Président: M. le chef de l'Opposition, question
additionnelle.
M. Johnson (Anjou): Est-ce que le premier ministre écarte
totalement la tenue d'une commission parlementaire pour faire la lumière
sur cette transaction qui est déjà assez louche?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Bourassa: II n'en est pas question pour l'instant d'autant
plus que dans... Est-ce que le chef de l'Opposition pourrait me donner le temps
de répondre? D'autant plus qu'au cours de cet après-midi
même, il y aura un débat sur la privatisation. Je pense qu'il est
normal qu'on attende la conclusion du débat. J'inviterais le chef de
l'Opposition, s'il a un point de vue à faire valoir, à intervenir
à l'occasion de ce débat.
Une voix: II en a le droit.
M. Bourassa: II y en a eu un la semaine dernière. Cela se
poursuit cet après-midi. Je ne vois pas pourquoi on aurait trois ou
quatre forums en même temps.
M. Johnson (Anjou): Question additionnelle.
Le Président: Question additionnelle, M. le chef de
l'Opposition.
M. Johnson (Anjou): Le premier ministre a bien dit: II n'en est
pas question pour l'instant. Je dois comprendre qu'il n'écarte pas la
possibilité de la tenue d'une commission parlementaire sur le dossier
Quebecair?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Bourassa: On est toujours ouvert au dialogue. On n'en voit pas
la nécessité pour l'instant.
Le Président: M. le député de Terrebonne...
M. le député de Lévis. M. le député de
Lévis, s'il vous plaît.
M. Blais: Oui, M. le Président.
Le Président: M. le député de Terrebonne,
question principale.
Le rythme des investissements dans l'assainissement
des eaux
M. Blais: Ma question s'adresse au ministre de l'Environnement.
Avant-hier, le ministre déposait le rapport du groupe de travail sur le
programme d'assainissement des eaux du Québec, rapport qui reconnaissait
la pertinence de ce vaste chantier amorcé par le gouvernement du Parti
québécois et recommandait au ministre actuel de l'Environnement
de porter à 550 000 000 $ jusqu'en 1991 le rythme annuel des
investissements que son gouvernement devrait investir. La question est la
suivante. Est-ce que le ministre entend, contrairement à son plan
triennal qui fait descendre à 400 000 000 $ en 1988-1989 les
investissements consentis par son gouvernement, est-ce qu'il entend hausser ces
investissements au rythme de 550 000 000 $ par année jusqu'en 1991?
Le Président: M. le ministre de l'Environnement.
M. Lincoln: Le rythme des investissements, pour
s'établir... Si le député de Lévis veut donner la
réponse, je vais m'asseoir. J'espère qu'il va nous donner une
meilleure réponse que celles qu'il nous donnait quand il était de
ce côté-ci de la Chambre.
Le Président: M. le ministre de l'Environnement, en
réponse à la question, s'il vous plaît.
M. Lincoln: Le programme d'assainissement des eaux est
établi sur un budget de trois ans qui s'est terminé le 31 mars
1986 pour les trois dernières années. Le niveau des
investissements pour les trois dernières années était de
450 000 000 $ par an, et le Conseil du trésor du gouvernement sortant
avait recommandé que le niveau de 450 000 000 $ par an soit maintenu. Le
nouveau budget de trois ans qui a commencé le 1er avril 1986
établissait trois montants,
500 000 000 $ pour l'année en cours, 450 000 000 $ pour
l'année prochaine et 400 000 000 $ pour la troisième
année, ce qui fait une moyenne de 450 000 000 $, exactement le
même montant d'investissements, 1 350 000 000 $, qui avait
été budgétisé pour les trois années
antérieures.
La différence entre les trois années qui sont en cours et
les années antérieures, c'est que, des 1 350 000 000 $ qui
avaient été autorisés par le gouvernement
antérieur, seulement 1 100 000 000 $ ont été
dépensés. Nous on comptait dépenser. On est en train
d'examiner le rapport qui vient d'être déposé, hier. Il est
possible qu'il y ait des changements, il est possible aussi que le budget qui a
été fixé par le Conseil du trésor, l'année
dernière, reste exactement le même. (15 h 40)
Le Président: M. le député de
Terrebonne.
M. Blais: M. le Président, je ne sais pas comment le
ministre fait pour ne pas répondre aux questions. Je lui ai tout
simplement demandé - je le sais que c'est 450 000 000 $ et 400 000 000 $
- s'il entend respecter la recommandation Dagenais qui lui demande de porter
les investissements annuels à 550 000 000 $. Oui ou non?
M. Lincoln: M. le Président, nous avons établi un
comité de travail qui a rendu un rapport officiel il y a deux jours.
C'est une des 40 recommandations du comité de travail. Nous n'avons pas
l'habitude de prendre des décisions au pied levé. On aime les
étudier, on aime approfondir ce que nous allons faire. Je ne sais si
c'était le cas pour le gouvernement du Parti québécois,
mais le ministre de l'Environnement de ce gouvernement ne prend pas de
décisions en vase clos par lui-même. Ce n'est pas moi qui prends
ces décisions seul. C'est une décision gouvernementale. Je vais
en discuter avec mes collègues. Il est possible qu'on le fasse, il est
possible qu'on ne le fasse pas, mais je vais souligner au député
que s'il n'y avait pas eu de Société nationale de l'amiante, 50
000 000 $ de dépensés dans le projet Archipel pour rien, des
sucreries inutiles et toutes les dépenses folles du gouvernement du
Parti québécois, peut-être qu'on aurait pu avoir 550 000
000 $ et plus ces trois dernières années.
Le Président: S'il vous plaît! M. le
député de Terrebonne... J'ai demandé à quelques
reprises cet après-midi la collaboration de tous, je dis bien de
tous.
Une voix:...
Le Président: Non, le député de Terrebonne,
M. le leader de l'Oppostion, était déjà levé et je
ne l'ai pas reconnu parce que certaines personnes de l'Opposition parlaient
encore et la réponse était terminée. Je demande la
collaboration de tous et je l'ai demandée à quelques reprises. M.
le député de Terrebonne.
M. Blais: Merci, M. le Président. Je demande au ministre
de l'Environnement, contrairement à ses dires sur les compagnies
d'amiante, qui n'étaient pas pertinentes... Lorsque nous étions
au pouvoir vous nous accusiez injustement de ne pas aller chercher notre part
pour l'assainissement des eaux à Ottawa. Cela fait dix mois que vous
êtes là. Quelles démarches avez-vous faites pour aller
chercher notre part qui est de 350 000 000 $ minimum, seulement dans ce
dossier?
Le Président: M. le ministre dé
l'Environnement.
M. Lincoln: Je vais dire au député, M. le
Président, que j'ai fait plus de démarches en neuf mois qu'ils
n'en ont fait en neuf ans eux-mêmes. Il y a des démarches qui se
poursuivent. On va arriver à des résultats avec le gouvernement
fédéral. En attendant, ce que je vais souligner au
député, c'est que lorsque le Conseil du trésor du
gouvernement antérieur avait produit des budgets de 450 000 000 $, il
s'est dépensé, la première année, 111 000 000 $ ou
à peu près; la deuxième année, 320 000 000 $; la
troisième année, année électorale par
coïncidence, 715 000 000 $. Tous les budgets ont été
défoncés. Tout allait de l'avant. Je vais dire au
député que, quoi qu'il arrive, que ce soit 450 000 000 $, 500 000
000 $ ou quoi que ce soit, nous allons respecter nos budgets, nous allons agir
en gestionnaires intelligents et éclairés. Cela ne va pas
être la bebelle que vous aviez pendant que vous étiez
là.
Le Président: M. le député de
Jonquière, en additionnelle.
M. Dufour: Ma question additionnelle s'adressera au ministre des
Affaires municipales. Est-ce que le ministre des Affaires municipales pourrait
informer son collègue, comme s'informer lui-même, à savoir
que ce serait le temps que les ministères se branchent, parce que les
municipalités, quand vient le temps de dépenser, sont
obligées d'avoir des réponses des ministères
d'abord...
Des voix: Question!
Le Président: M. le député de
Jonquière, vous êtes en additionnelle. La question, s'il vous
plaît.
M. Dufour: En additionnelle, je vais
dire que...
Le Président: Sans préambule.
M. Dufour: Est-ce que le ministre des Affaires municipales
pourrait demander à son collègue de se brancher le plus
rapidement possible, puisque c'est la période des budgets municipaux et
que les municipalités ont besoin d'avoir des réponses en temps et
lieu et surtout avant l'année financière suivante?
Le Président: M. le ministre des Affaires municipales.
M. Bourbeau: M. le Président, tout ce que je peux
constater, c'est que sous l'ancien gouvernement, on votait des budgets qu'on ne
dépensait pas et on dépensait des budgets qui n'étaient
pas votés. Alors c'était la confusion la plus totale pour les
municipalités. Aujourd'hui, le ministre actuel nous dit: II y aura un
budget de tant de millions de dollars, les municipalités savent à
quoi s'en tenir et c'est cela, bien administrer!
Le Président: M. le député de Taillon, en
principale.
M. Chevrette: M. le Président.
Le Président: Oh! excusez moi! M. le leader de
l'Opposition.
L'intervention du ministre du Travail à
Pointe-au-Pic
M. Chevrette: M. le Président, est-ce que le ministre du
Travail peut nous dire quelles démarches il a spécifiquement
entreprises afin de désamorcer la situation explosive à
Pointe-au-Pic?
Le Président: M. le ministre du Travail.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, M. le Président.
Dès le mois de février, comme ministre du Travail, j'ai
rencontré et contacté toutes les parties impliquées
incluant, par voie de contact, la partie patronale et, par rencontre, la partie
syndicale, qui, comme le sait sans doute le leader de l'Opposition, s'est
rendue à mes bureaux le 19 février. Au printemps, à la
suite d'une demande de médiation de la CSN, j'ai dû
répondre à la centrale syndicale qu'étant donné
l'aspect très particulier de ce dossier, la médiation, au sens
où l'on entend communément dans le domaine des relations du
travail, était impossible.
Devant cette impossibilité, j'ai quand même fouillé
les autres voies d'exploration possibles et, grâce à la
collaboration des parties impliquées, nous nous sommes entendus sur la
possibilité d'assigner et de nommer au dossier une personne-ressource.
Il n'était pas facile, à cette époque, de trouver
quelqu'un qui accepterait cette lourde responsabilité et qui serait
accepté également des parties impliquées. À la
suite de nombreuses démarches et de plusieurs pourparlers, l'ancien
député du comté de Charlevoix, M. Raymond Mailloux,
après avoir été accepté par les deux parties, a
accepté la mission de tenter un rapprochement.
M. le Président, si l'Opposition s'enquiert des démarches
qui ont été effectuées dans cet important dossier...
Le Président: Allez-y, mais plus brièvement.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...je ne voudrais pas lui donner
une partie des démarches et qu'elle revienne en additionnelle, etc. Si
je peux faire un bilan complet, cela évitera les questions
additionnelles. Maintenant, s'ils veulent poser une question additionnelle tout
de suite, ils peuvent la poser.
Le Président: Allez-y, M. le ministre. M. le leader de
l'Opposition.
M. Chevrette: M. le Président, le bilan, jusqu'à ce
jour, on le connaît et on connaît les résultats. Ce qu'on
veut savoir, c'est quelles sont les démarches qu'il veut entreprendre
pour désamorcer la situation actuelle? Quelles sont les démarches
qu'il entend prendre?
Une voix: Futures.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, moi, cela
ne me fait rien si le leader de l'Opposition veut s'amuser avec ce dossier.
J'ai compris de sa première question - vous m'indiquerez si j'ai bien
compris, M. le Président - qu'il voulait savoir quelles étaient
les démarches que nous avions entreprises dans le passé. C'est ce
que je lui expliquais. Maintenant, s'il veut savoir - s'il n'est pas
intéressé à savoir ce qui a été fait, c'est
son problème - ce qu'on entend faire, il s'agit d'une autre question et
je suis prêt également à répondre à cette
autre question.
Vous comprendrez, M. le Président, qu'on ne prend pas le dossier
dans un vase clos, à un moment complètement arrêté.
Il faut tenir compte de ce qui a été fait dans le passé.
Dans le passé, il y a une personne-ressource compétente et
respectée par les parties, par la population de Charlevoix et par
l'ensemble de la population du Québec qui a agi dans le dossier et qui
m'a fait rapport. Cette personne a jugé bon également d'informer
la population par la voix des médias d'une partie du rapport qu'elle m'a
fait. C'est à partir de ce point qu'on reprend
le dossier.
Je pense que cette personne-ressource, qui est M. Mailloux, a fait part
à la population que malgré que les observateurs aient dit que les
deux parties étaient enracinées au début et que personne
ne bougerait dans le dossier une des parties, au moins, a accepté de
bouger dans ledit dossier. Au moment où l'on se parle, il nous faut
trouver une autre perle rare qui fera en sorte que les deux parties bougeront
dans le sens d'un rapprochement avec le bureau du premier ministre, avec le
bureau du ministre du Loisir, de la Chasse, de la Pêche et du Tourisme et
avec mon bureau. On s'acharne présentement à trouver cette perle
rare.
Le Président: M. le leader de l'Opposition.
M. Chevrette: Une dernière question additionnelle, M. le
Président. Est-ce que le ministre du Travail entend donner certains
pouvoirs à cette éventuelle perle pour qu'il puisse vraiment
jouer avec l'opinion publique en ce sens qu'on sait très bien que, quand
un médiateur n'a pas nécessairement un pouvoir de recommandation
publique, les parties s'en foutent un peu. Va-t-il donner des pouvoirs
précis à ce médiateur spécial qu'il entend trouver?
(15 h 50)
Le Président: M. le ministre du Travail.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, vous
comprendrez aisément de même que le leader de l'Opposition que si
nous définissons le mandat et les pouvoirs, avant de trouver la personne
et avant que les partis aient entériné le choix de la personne,
nous, nous, si je peux utiliser l'expression, "peinturons dans le coin" et nous
éliminons un tas de possibilités qui pourraient se
révéler fructueuses.
Avant de répondre à une telle question, j'aimerais que les
parties aient accepté une personne et que la personne ait accepté
un mandat et que, à ce moment-là, nous le rendions public. Nous
essayons de ce côté-ci de la Chambre de faire les choses dans
l'ordre.
Le Président: M. le député de Beauce-Nord,
en principale.
Entente avec les "majors" américains du
cinéma
M. Audet: Merci, M. le Président. Ma question s'adresse
à la ministre des Affaires culturelles et concerne le dossier du
cinéma. On se rappellera, M. le Président, que ce dossier et la
loi 109 ont fait la manchette plus d'une fois dans le passé. L'ancien
gouvernement ne cessait d'invoquer la difficulté de négocier avec
les "majors" américains pour expliquer que la loi 109 était
toujours inopérante dans ses parties les plus essentielles. Or, voici
que le 22 octobre dernier, la ministre des Affaires culturelles
débloquait le dossier par la signature d'une entente valide pour cinq
ans avec les "majors" américains. La ministre pourrait-elle nous
expliquer les raisons de ce débloquage subit dans ce dossier et nous
mentionner les avantages d'une telle entente pour les distributeurs
québécois?
Le Président: Mme la ministre des Affaires
culturelles.
Mme Bacon: Je suis surprise que l'Opposition n'ait pas
posé de question sur ce sujet, M. le Président. Il est vrai que
l'Opposition avait négligé de régler le dossier depuis
1983. Je trouve la question du député fort pertinente. Sous
l'ancien gouvernement, le dossier du cinéma a accusé un retard
intolérable pour les distributeurs québécois. Cette
lenteur leur a fait payer le prix. Nous avons adopté l'approche de ne
pas négocier un tel dossier sur la place publique comme le reste de mes
collègues le font dans leurs dossiers. Les résultats ont
été atteints... Voulez-vous la réponse?
Une voix: Oui.
Mme Bacon: Les résultats ont été atteints de
façon encore plus rapide et surtout avec beaucoup plus
d'efficacité de cette façon-là, M. le Président. Et
nous avons fait reconnaître à nos interlocuteurs la
spécificité du Québec à l'intérieur du
Canada.
J'estime donc que les résultats constituent un déblocage
majeur aux termes de délicates négociations qu'on n'a pas
traînées sur la place publique. En vertu de cette entente, nous
pouvons maintenant dire que nous pourrons éviter des situations comme
celle qu'on a vécue en 1979. On se souviendra à cette
époque que les distributeurs américains avaient perturbé
l'industrie cinématographique au Québec par la décision
qu'ils ont prise de créer une nouvelle division qu'on a appelée
les "Classics"; cette division s'octroyait arbitrairement le pouvoir de
distribuer au Québec les films qui étaient dévolus aux
distributeurs québécois. Je rappelle qu'en vertu de l'entente que
nous avons signée, seuls les distributeurs qui ont leur principal
établissement au Québec pourront distribuer des films qui sont
tournés dans une langue autre que l'anglais.
Les "majors" renoncent donc, M. le Président, à la
distribution de tels films à moins d'y avoir investi 100 % des
coûts de production. L'entente que nous avons signée assure aux
distributeurs québécois l'accès à environ 150 films
de langue anglaise par
année puisque les "majors" ne pourront distribuer au
Québec que les films pour lesquels ils détiennent des droits de
distribution aux États-Unis.
Le Président: M. le député de Saint-Jacques,
en additionnelle.
M. Boulerice: En additionnelle à Mme la ministre des
Affaires culturelles. Avant de faire ce texte, est-ce qu'elle a eu le temps de
lire l'article qu'écrivait dans le Devoir cette critique reconnue qu'est
Mme Petrowski et qui s'appelait justement à propos de cette
négociation "The color of money".
Le Président: Mme la ministre des Affaires
culturelles.
Mme Bacon: M. le Président, je suis étonnée
de voir que le député de Saint-Jacques s'adresse à une
femme de ménage. Quel mépris il a eu pour ces femmes; M. le
Président! Et je veux le lui dire publiquement.
J'aimerais dire, M. le Président, que les humeurs de Mme
Petrowski...
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
À l'ordre, s'il vous plaît!
Mme la ministre, vous avez la parole.
Mme Bacon: Je prends un peu les humeurs de Mme Petrowski dans cet
article comme je prends les humeurs de M. Foglia de la Presse. C'est amusant de
voir les humeurs de Mme Petrowski. J'ai préféré lire...
Voulez-vous écouter ma réponse?
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
Mme Bacon: J'ai préféré lire les articles
qui ont été écrits par des éditorialistes
renommés sérieux et qui ont salué ce déblocage
majeur pour les Québécois qui nous permettra d'avoir des
investissements accrus dans la production cinématographique au
Québec. Si nos gens d'en face qui n'ont pas été capables
de résoudre ce problème depuis 1983... Vous pouvez vous amuser,
M. le chef de l'Opposition. Vous n'avez pas été capable comme
gouvernement de régler ce problème.
Le Président: S'il vous plaît!
Mme Bacon: Nous l'avons fait comme nous réglons les autres
dossiers. Amusez-vous!
Des voix: Bravo!
Le Président: M. le député de Taillon, en
principale.
Les revendications des procureurs de la
couronne
M. Filion: Merci, M. le Président. Ma question s'adresse
au Procureur général et concerne la situation dans les palais de
justice. Après avoir réussi, on le sait, le tour de force de
provoquer un conflit judiciaire sans précédent entre
lui-même et les juges, conflit qui n'est toujours pas
réglé, soit dit en passant, voilà maintenant que le
Procureur général est au centre d'un conflit ouvert avec les
procureurs de la couronne qui sont, on le sait, ses propres substituts. Ce
conflit entraîne des conséquences désastreuses sur
l'administration quotidienne de la justice, créant une situation
inadmissible: les causes ne se plaident plus, il y a dix causes de meurtres qui
ne trouvent pas preneur chez les procureurs de la couronne, un outrage au
tribunal qui circule déjà, bref, la situation est pourrie dans
nos palais de justice. Je voudrais savoir du Procureur général,
au-delà de ses déclarations pompeuses mais inefficaces d'appui
aux procureurs de la couronne, quels gestes concrets il entend poser dans les
jours qui viennent pour que ses propres substituts obtiennent justice dans leur
dossier de revendications des conditions de travail?
Le Président: M. le Procureur général,
ministre de la Justice.
M. Marx: M. le Président, premièrement, il n'y a
pas de conflit entre le Procureur général et les juges et il n'y
a pas de conflit entre le Procureur général et ses substituts. Je
ne pense pas que le député de Taillon soit sérieux quand
il me demande de transporter la table des négociations au salon
bleu.
Le Président: Une dernière additionnelle, M. le
député de Taillon.
M. Filion: M. le Président, le ministre de la Justice a
pris position dans ce dossier de façon claire et explicite...
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
Vous êtes en additionnelle. Sans préambule!
M. Filion: Est-ce que le ministre de la Justice renie,
aujourd'hui, l'appui clair et explicite qu'il a donné aux procureurs de
la couronne? Si oui, est-ce qu'il pourrait aviser concrètement les
procureurs de la couronne qu'il leur retire son appui?
Le Président: M. le Procureur général et
ministre de la Justice.
M. Marx: M. le Président, nous prenons toutes les mesures
possibles pour nous entendre avec les substituts, à la satisfaction
des susbstituts, au gouvernement.
Le Président: Fin de la période de questions
orales.
Tel qu'annoncé tout à l'heure, messieurs les whips, nous
allons procéder au vote qui a été reporté.
Mise au voix de la motion
proposant l'adoption du principe du projet de loi
86
(16 heures)
À l'ordre, s'il vous plaît! Je vais mettre
immédiatement aux voix la motion présentée par M. le
ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation proposant
que le principe du projet de loi 86, Loi abrogeant la Loi sur la
Société du parc des expositions agro-alimentaires, soit
maintenant adopté.
Que ceux et celles qui sont pour ladite motion veuillent bien se
leverl
Le Secrétaire adjoint: MM. Bourassa (Saint-Laurent),
Gratton (Gatineau), Marx (D'Arcy McGee), Pagé (Portneuf), Levesque
(Bonaventure), Mme Bacon (Chomedey), M. Ryan (Argenteuil), Mme Lavoie-Roux
(L'Acadie), MM. Bourbeau (Laporte), Paradis (Brome-Missisquoi), Latulippe
(Chambly), Dutil (Beauce-Sud), Mmes Gagnon-Tremblay (Saint-François),
Robic (Bourassa), MM. MacDonald (Robert Baldwin), Rémillard
(Jean-Talon), Savoie (Abitibi-Est), Vallerand (Crémazie), Lincoln
(Nelligan), French (Westmount), Côté (Charlesbourg), Ciaccia
(Mont-Royal), Vallières (Richmond), Gobeil (Verdun), Picotte
(Maskinongé), Fortier (Outremont), Rocheleau (Hull), Mme Bégin
(Bellechasse), MM. Cusano (Viau), Vaillancourt (Orford), Dauphin (Marquette),
Maltais (Saguenay), Philibert (Trois-Rivières), Mme Dougherty
(Jacques-Cartier), MM. Lefebvre (Frontenac), Sirros (Laurier), Doyon
(Louis-Hébert), Beaudin (Gaspé), Cannon (La Peltrie), Chagnon
(Saint-Louis), Lemire (Saint-Maurice), Paradis (Matapédia), Mme Pelchat
(Vachon), MM. Rivard (Rosemont), Polak (Sainte-Anne), Assad (Papineau), Audet
(Beauce-Nord), Baril (Rouyn-Noranda-Témiscamingue), Bélanger
(Laval-des-Rapides), Bélisle (Mille-Îles), Mme Hovington (Matane),
M. Séguin (Montmorency), Mmes Trépanier (Dorion), Bélanger
(Mégantic-Compton), MM. Gervais (L'Assomption), Trudel (Bourget), Mme
Bleau (Groulx), MM. Bradet (Charlevoix), Brouillette (Champlain), Camden
(Lotbinière), Mme Cardinal (Châteauguay), MM. Després
(Limoilou), Forget (Prévost), Gardner (Arthabaska), Gauvin
(Montmagny-L'Islet), Hamel (Sherbrooke), Laporte (Sainte-Marie), Dubois
(Huntingdon), Bissonnet (Jeanne-Mance), Kehoe (Chapleau), Mme Legault
(Deux-Montagnes), MM. Leclerc (Taschereau), Hétu (Labelle), Joly
(Fabre), Lemieux (Vanier), Marcil (Beauharnois), Messier (Saint-Hyacinthe),
Poulin (Chauveau), Richard (Nicolet),
Tremblay (Rimouski), Thérien (Rousseau), Théorêt
(Vimont), Saint-Roch (Drummond).
Le Président: Que ceux et celles qui sont contre veuillent
bien se leverl
Le Secrétaire adjoint: MM. Johnson (Anjou), Chevrette
(Joliette), Mme Blackburn (Chicoutimi), MM. Jolivet (Laviolette), Garon
(Lévis), Rochefort (Gouin), Charbonneau (Verchères), Mme Juneau
(Johnson), MM. Gendron (Abitibi-Ouest), Brassard (Lac-Saint-Jean), Filion
(Taillon), Gauthier (Roberval), Godin (Mercier), Mme Vermette (Marie-Victorin),
MM. Claveau (Ungava), Boulerice (Saint-Jacques), Blais (Terrebonne), Dufour
(Jonquière), Parent (Bertrand), Mme Harel (Maisonneuve), M. Desbiens
(Dubuc).
Le Secrétaire: Pour: 83
Contre: 21
Abstentions: 0
Le Président: La motion est adoptée.
Nous allons maintenant continuer les affaires courantes.
M. le leader du gouvernement. À l'ordre, s'il vous plaît!
La motion est adoptée. Est-ce qu'il y a une motion de
déférence, M. le leader du gouvernement?
M. Gratton: Oui, M. le Président.
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! Nos
travaux ne sont pas terminés. À l'ordre, s'il vous plaît!
À l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons maintenant continuer les
affaires courantes. Je vais céder la parole à M. le leader du
gouvernement.
Renvoi à la commission de
l'agriculture, des pêcheries
et de l'alimentation
M. Gratton: Oui, M. le Président. Par rapport à ce
projet de loi 86 dont on vient d'adopter le principe, je voudrais faire motion
pour qu'il soit déféré à la commission de
l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation pour son étude
détaillée et que la commission soit présidée par un
président de séance.
Le Président: Est-ce que cette motion est adoptée,
M. le leader de l'Opposition?
M. Chevrette: Adopté.
Le Président: Adopté. Motions sans préavis.
Avis touchant les travaux des commissions, M. le leader du gouvernement.
Avis touchant les travaux des commissions
M. Gratton: Oui, M. le Président. Je
voudrais donner avis que le jeudi 30 octobre, de 10 heures à 12
heures, à la salle du Conseil législatif, la commission de
l'éducation procédera à l'étude
détaillée des projets de loi suivants et ce, dans l'ordre
ci-après indiqué: le projet de loi 29, Loi modifiant la Loi sur
le Conseil supérieur de l'éducation; le projet de loi 25, Loi
modifiant la Loi sur les investissements universitaires; le projet de loi 26,
Loi modifiant la Loi sur le Conseil des universités, et, finalement, le
projet de loi 28, Loi modifiant la Loi sur les collèges d'enseignement
général et professionnel.
Je désire aviser également cette Assemblée que le
jeudi 6 novembre 1986, de 10 heures à 12 h 30, après la
période des affaires courantes jusqu'à 18 heures et, si
nécessaire, de 20 heures à 22 heures, à la salle
Louis-Joseph-Papineau, la commission du budget et de l'administration entendra
les intéressés et procédera à l'étude
détaillée des projets de loi d'intérêt privé
suivants et ce, dans l'ordre ci-après indiqué: d'abord le projet
de loi 209, Loi sur l'Hôtel de Lido Inc; ensuite le projet de loi 243,
Loi concernant Ressources Chesbar Inc. et, finalement, le projet de loi 244,
Loi concernant Les Explorations Muscocho Ltée.
Le Président: J'aimerais communiquer l'avis suivant
à cette Assemblée: Jeudi, de 10 heures à 12 heures, la
commission des affaires sociales se réunira à la salle
Louis-Joseph-Papineau pour vérifier les engagements financiers du
ministère de la Santé et des Services sociaux pour les mois de
janvier à juin 1986. Est-ce qu'il y a d'autres avis à communiquer
à cette Assemblée?
Renseignements sur les travaux de l'Assemblée.
M. Chevrette: M. le Président.
Le Président: M. le leader de l'Opposition. M. le
député de Roberval.
Renseignements sur les travaux de
l'Assemblée
M. Gauthier: M. le Président, voilà cinq mois,
c'est-à-dire le 15 mai 1986, j'ai inscrit une question au feuilleton
dans laquelle je demandais au ministre de l'Énergie et des Ressources de
me transmettre le contenu intégral de l'entente concernant la cession
des installations de production de phénol de l'ancienne usine Gulf de
Montréal. Je demandais au ministre du Revenu de nous dévoiler le
contenu de l'entente, les avantages fiscaux consentis à la compagnie
Ultramar lors de cette entente. Cela fait cinq mois. Je n'ai toujours pas eu de
réponse. Est-ce que je pourrais demander au leader du gouvernement s'il
entend me donner des réponses à ces questions avant la fin de
leur mandat?
Le Président: M. le leader du gouvernement.
M. Gratton: Je pense que je peux prendre un engagement formel que
oui. On me demande avant la fin du mandat, je dis oui. Sûrement qu'on
pourra faire un peu plus rapidement que ce qui est escompté,
semble-t-il, par le député. Je vais vérifier auprès
de mon collègue de l'Énergie et des Ressources et on le fera le
plus tôt possible.
Le Président: Cela va. Je pense que la réponse
répondait à tous les articles du règlement. Mme la
députée de Chicoutimi.
Mme Blackburn: Sur l'avis de consultation générale
sur la loi 104, Loi sur le Conseil permanent de la jeunesse, les associations
de jeunes ont demandé deux choses, qu'il y ait d'abord prolongation des
délais et que la commission soit itinérante, j'aimerais savoir du
leader si son gouvernement a l'intention de donner suite à la demande
des associations de jeunes de prolonger la durée, le délai pour
le dépôt des mémoires?
Le Président: M. le leader du gouvernement.
M. Gratton: On sait que le délai pour le
dépôt des mémoires se termine demain, soit le 30 octobre.
Nous aviserons donc dès demain et je pourrai donner les informations que
me demande la députée dès le début de la semaine
prochaine.
M. Chevrette: M. le Président, je vous demande d'appeler
la motion du mercredi et je demande également au leader du gouvernement
si la réunion se tient pour le partage du temps.
Reprise du débat sur la motion
proposant d'arrêter les
procédures
de privatisation
La Vice-Présidente: Nous allons donc reprendre la reprise
du débat qui avait été ajourné le 22 octobre
dernier par le leader de l'Opposition sur la motion qui avait été
présentée par le député de Bertrand et qui se
lisait comme suit: Que cette Assemblée exige l'arrêt des
procédures de privatisation et que se tienne une commission
parlementaire permettant un large débat afin de faire toute la
lumière sur les conséquences contraires à
l'intérêt public du démantèlement des
sociétés d'État, notamment dans le dossier de Quebecair."
M. le député d'Ungava. (16 h 10)
M. Christian Claveau
M. Claveau: Merci. Comme vous venez de le dire, la motion qu'on a
à débattre aujourd'hui vise à arrêter un mandat que
s'est donné lui-même l'actuel gouvernement, sans prendre en
considération les intérêts de ta population du
Québec. Nous demandons en plus d'arrêter ce mandat de
dernière minute, ce mandat de dilapider les biens du Québec. Nous
demandons une commission parlementaire pour en discuter avec la population.
Quand nous disons que l'on doit arrêter les procédures de
privatisation - pardon, Mme la Présidente - nous avons de bonnes raisons
de le faire. On n'est pas sans savoir ce qui se passe actuellement dans le cas
du Manoir Richelieu, une des privatisations de l'actuel gouvernement. La
Raffinerie de sucre du Québec, on en parle de moins en moins, mais ce
qui s'est passé dans la raffinerie de sucre de Saint-Hilaire, je pense
que cela serait intéressant de pouvoir en rediscuter un peu en
commission parlementaire, de voir comment les gens ont vécu
là-bas, de quelle façon ils ont apprécié la
dilapidation d'un de leurs biens, d'une de leurs sources de travail, d'emplois,
une source de revenus.
Quebecair, il en est question depuis quelques jours. On voit comment
cela se passe. Je ne sais pas si vous le savez, mais il n'y a personne en
régions qui aime se faire traiter comme des pizzas. Le terme ne vient
pas de moi, il y en a qui savent ici d'où vient le terme. On nous traite
de pizzas et on nous fait voyager sur des coucous actuellement. On a droit
à mieux que cela. Je pense que les gens des régions devraient
venir, ont le droit, en tant que citoyens du Québec, de venir s'exprimer
devant cette Assemblée pour démontrer de quel genre de bois on se
chauffe, nous, les pizzas du Nord.
Madelipêche, il en a été question tout à
l'heure. Je crois qu'il y a encore beaucoup à dire sur le
problème de Madelipêche, ce n'est pas nouveau. Si le gouvernement
du Québec a dû intervenir dans Madelipêche aux
Îles-de-la-Madeleine, je pense qu'il avait raison de le faire, et il
serait probablement intéressant, non pas de laisser colporter des
supposées interprétations de ce que la population pense, par des
gens nommés à des comités ou par un ministre qui va passer
quelques heures par-ci, par-là sur les bancs de sable des
Îles-de-la-Madeleine. Non, il serait intéressant que les gens
viennent nous confirmer ici sur place pour voir si c'est vrai ce qu'il nous
dit. Je pense que c'est tout à fait légitime, c'est la moindre
des choses.
Quand on s'apprête à dilapider l'ensemble de
l'économie d'une région, qu'on prenne le temps de venir en
discuter ici à Québec, en commission parlementaire devant
l'ensemble des élus, pour qu'on puisse se faire une idée juste.
Ce serait probablement plaisant de savoir ce qu'ils ont à dire, de
quelle façon vraiment on devrait réagir en tant que
société responsable ou qu'élus responsables devant un
problème aussi grave que celui, entre autres, de Madelipêche qui
risque d'affecter l'ensemble de l'économie d'une région, Mme la
Présidente.
Dofor, on s'apprête à vendre Dofor en douce comme si de
rien n'était, 650 000 000 $ au minimum. Une valeur d'au moins 650 000
000 $. On va essayer de nous glisser cela en douce comme si c'était
à peu près rien, comme si c'était moins que rien,
j'oserais dire. On dilapide la Société générale de
financement en essayant de nous faire croire qu'après tout c'est quelque
chose de tout simplement normal et que cela va passer un peu comme du beurre
dans la poêle. On joue avec les intérêts du Québec,
les intérêts de la population. Au-delà de 1000 emplois
directs dans mon comté dépendent de Domtar qui est à 28 %
propriété de la Société générale de
financement par le biais de Dofor. Je pense que ces gens auraient quelque chose
à dire. Il serait intéressant qu'ils puissent venir discuter,
nous présenter leur point de vue, plutôt que de se fier à
des supposées hypothèses, des qu'en-dira-t-on, des
je-pense-que-j'ai-entendu-dire-que. On aimerait savoir ce qu'ils ont vraiment
à nous dire. Si ce gouvernement n'a rien à cacher, il devrait
d'emblée, immédiatement, sans rancune, sans remords, tout de
suite décréter une commission parlementaire sur la privatisation.
À ce moment-là, on serait capable de vérifier si le mandat
qu'il s'est donné, le mandat qu'il croit avoir reçu, c'est
vraiment le mandat que la population a voulu lui donner au soir du 2
décembre dernier.
J'ai passé une privatisation, mais ce n'était que pour
mieux y revenir, il s'agit de SOQUEM, un des fleurons de l'industrie
québécoise dans le domaine de l'or, entre autres. Qu'est-ce que
SOQUEM? C'est la Société d'exploration minière qui agit,
déjà, depuis plus de vingt ans, dans le domaine de l'exploration.
En effet, à première vue, SOQUEM semble être une
privatisation parfaite, le bel exemple de ce que peut être la
privatisation. Soit! Mais allons un peu plus loin dans les données.
D'abord, je me demande où se cache le ministre
délégué aux Mines, s'il regarde les statistiques...
Une voix: II est en vacances.
M. Claveau: ...il est en vacances - qui émanent du
ministère de l'Énergie et des Ressources, direction de la
politique et de l'évaluation. Ce n'est pas moi qui l'invente, il y a
régression dans la production de la plupart des métaux que l'on a
produits au Québec en 1985 et 1986. Il y a régression dans la
production du cuivre. On a produit
dans les huit premiers mois de 1986, près de 4 % de moins de
cuivre que dans les huit premiers mois de 1985. C'est la même chose dans
le domaine du fer où on a diminué notre production de 13,5 % dans
les huit premiers mois de 1986. C'est 1 % dans l'or.
Vous me direz que 1 % c'est presque rien, mais 1 % de moins cela
représente exactement 179 946 grammes d'or de moins de produits au
Québec dans les huit premiers mois de 1986 comparativement aux huit
premiers mois de 1985. Quand on sait, Mme la Présidente, que le sommet
du prix de l'or en 1985, établi le 19 août 1985, était de
340,90 $ US, alors qu'en 1986 le sommet qu'on vient tout juste d'atteindre
dernièrement, le 22 septembre 1986, était de 442,75 $ US, c'est
102 $ US de plus, le sommet qu'on a atteint dans le courant des mois
d'août et de septembre entre 1985 et 1986.
Parallèlement à cela qu'est-ce qu'on fait? On diminue la
production de l'or. Cela est une vraie politique de développement et
cela est une politique d'entrée de fonds dans l'économie
québécoise! Le prix monte, on en produit moins! Est-ce comme cela
qu'on va vraiment assurer notre développement économique? Est-ce
qu'on parle sérieusement quand on dit qu'on est en train
d'établir des politiques minières au Québec? En ce qui
concerne le zinc, on a diminué notre production de 30,81 %; c'est
presque 31 % de moins de zinc qu'on a produit dans les huit premiers mois de
1986 comparativement aux huit premiers mois de 1985. C'est 13,57 %, la
diminution de notre production d'amiante pour la même période.
Je me demande ce que le ministre délégué aux Mines
fait. Est-ce que le ministre est au courant de ces statistiques? Où
est-ce que le ministre s'en va? On ne le sait pas. S'il le sait, lui, je pense
qu'il est le seul à le savoir parce que nous n'avons pas entendu parler
beaucoup de prises de position pour relancer l'industrie minière.
Alors qu'il essaie de nous faire croire que tout va relativement bien et
qu'on distribue ici et là quelques petites subventions, on se rend
compte que les chiffres nous disent que la production diminue dans à peu
près tous les grands secteurs de l'industrie minière au
Québec. Si je m'attarde à l'or, c'est parce que justement il y a
un autre phénomène qui se passe. C'est SOQUEM qui arrive. SOQUEM,
un des grands producteurs d'or du Québec, propriétaire, avant la
privatisation et avant la création de Cambior, de 50 % de la mine Doyon,
une des plus belles mines d'or en Amérique, de 37 % de Louvem, de 24 %
des Ressources Aiguebelle, de 32 % du groupe Sullivan - quatre
sociétés qui oeuvrent dans le domaine des aurifères,
c'est-à-dire qui produisent de l'or - et de 100 % de Niobec qui, elle,
n'est pas dans le domaine de l'or mais qui, dans le columbium ou niobium, est
l'un des premiers producteurs mondiaux. Qu'est-ce qu'on fait? On vend cela.
Comment? À quel prix? Voyons voir. (16 h 20)
Quand on évalue actuellement les actifs de Cambior, après
la vente, c'est 220 000 000 $ dont SOQUEM, l'ancien SOQUEM se garde 70 000 000
$. Sur 22 000 000 d'actions SOQUEM s'en garde 7 000 000. On évalue les
actions à 10 $ l'action au moment de la mise en vente. On met donc en
vente 15 000 000 d'actions à 10 $ l'action, c'est cela que l'on vend.
Jusque là, tout va bien; tout semble conforme aux règles de
l'art.
Mais voilà, Mme la Présidente, que le chat sort du sac.
À peine dix semaines plus tard, la valeur de l'action de Cambior
à la Bourse est rendue à 15 $, une augmentation de 50 % en dix
semaines. Bravo aux économistes qui ont évalué la valeur
des actions de Cambior au moment de la vente!
Une voix: Un gouvernement compétent!
M. Claveau: Bravo! On s'est trompé à peine de 50 %
sur une période de dix semaines-Une voix: Un détail!
M. Claveau: ...dans un domaine où les actions n'ont pas
tendance à jouer si rapidement. De 10 $ l'action, on passe à 15 $
dix semaines plus tard. Qu'est-ce que cela veut dire? Cela veut que, sur 150
000 000 $ investis pour acheter 15 000 000 d'actions, les acheteurs ont
encaissé en moins de dix semaines sur la valeur de leurs actions 75 000
000 $, Mme la Présidente. C'est cela que ça veut dire!
Une voix: C'est cela la privatisation.
M. Claveau: Cela veut dire que le gouvernement du Québec,
le Parti libéral qui représente malheureusement ce gouvernement
actuellement, en sous-évaluant la valeur de l'action des biens qui
appartenaient à l'État et qui produisaient, qui étaient
rentables et qui permettaient d'entrer de l'argent dans les coffres, tout cela
pour pouvoir capitaliser quelques millions pour ajuster son budget de
fonctionnement au plus vite, a permis ou a donné l'équivalent de
75 000 000 $ à des acheteurs qui ne sont probablement pas les plus
pauvres de la société québécoise, Mme la
Présidente. Vous savez comme moi que, lorsqu'il nous reste assez
d'argent une fois l'épicerie payée, pour acheter de l'or, c'est
probablement parce qu'on s'est déjà payé un peu de loisir.
J'ai bien l'impression que c'est probablement encore quelques petits amis qui
ont dû en profiter ici et là. 75 000 000 $ que l'on a
donnés pour avoir sous-évalué...
Une voix: Un cadeau!
M. Claveau: Au moment où on savait, Mme la
Présidente, au moment où toutes les tendances des
économistes démontraient que le prix de l'or était
à la hausse, au moment où on avait une situation conflictuelle,
entre autres en Afrique du Sud, qui est l'un des grands producteurs d'or, l'un
de nos principaux concurrents, au moment où on pouvait imaginer que,
potentiellement, nos actions, les avoirs des Québécois dans le
domaine de l'or, allaient prendre de la valeur, on se dépêche de
les vendre à un prix juste assez bas pour être intéressant
et pour permettre de trouver rapidement du capital pour injecter dans le fonds
consolidé et, de cette façon, réussir à
équilibrer les budgets. Après, on dit: Bien, que voulez-vous? On
l'a vendu! Tant mieux pour les acheteurs s'ils ont mis 75 000 000 $ dans leur
poche! Oui, tant mieux pour les acheteurs peut-être, mais tant pis, par
exemple, pour l'ensemble des Québécois qui, depuis des
années, investissaient pour créer, par le biais de SOQUEM et de
son secteur aurifère, l'un des plus beaux fleurons de l'économie
québécoise.
Une voix: Très bien!
M. Claveau: Seulement quelques minutes pour parler de ce qui
reste de SOQUEM. Dans le décret 1008-86 du 9 juillet dernier, le
gouvernement donnait à SOQUEM jusqu'au 1er septembre pour
présenter son plan quinquennal d'action. On est le 29 octobre, Mme la
Présidente, probablement que ce décret n'a pas plus de valeur que
bien d'autres choses qui ont été faites par l'actuel
gouvernement. Toujours est-il que selon nos informations, il n'y a pas encore
de plan déposé, il n'y a pas de décision de prise, on ne
sait pas où on s'en va. Que va devenir SOQUEM, le petit peu qui reste de
SOQUEM? Qu'est-ce qui va en résulter? On n'en a aucune idée. Par
contre, en sauveur, en prophète, le ministre
délégué aux Mines se promène en régions, il
vient faire un tour ici et là et annonce, entre autres, que SOQUEM va
aider à relancer l'économie de Chapais-Chibougamau. J'en suis
fier, c'est mon patelin. J'étais content, je pensais qu'on allait
annoncer quelque chose. J'étais content, j'étais derrière
le ministre pour dire: Oui, il faut faire quelque chose.
Mises à part quelques subventions aux compagnies, le ministre
annonce en grande pompe que, pour l'exercice financier 1986-1987, SOQUEM va
disposer de 1 510 000 $ pour injecter dans l'économie de
Chapais-Chibougamau, à condition que ce soit accepté par le
Conseil des ministres, parce qu'on n'est pas encore sûr que SOQUEM
continue à fonctionner. Son plan n'est pas encore déposé,
on ne sait pas où on s'en va, le Conseil des ministres est
hésitant, le président du Conseil du trésor a peur que
cela lui coûte un peu trop cher. De toute façon, on annonce pour
1986-1987, 1 510 000 $. Cela, c'est de l'aide! Cela, c'est de l'argent! Ce qu'a
oublié de dire le ministre délégué aux Mines, c'est
qu'en 1985-1986, la même SOQUEM, dans onze projets différents, a
injecté dans le même secteur, celui de Chapais-Chibougamau dont il
est question, une somme de 1 605 177 $. Le ministre, en sauveur, vient nous
annoncer que SOQUEM va investir 100 000 $ de moins que l'an passé. Cela,
c'est du développement! Cela, c'est de l'intérêt des
régions!
C'est nouveau, parfait. On met de l'argent, oui. Il a oublié de
dire qu'on en mettait moins que ce qui avait déjà
été investi. Évidemment, il dit qu'on va augmenter
à 2 200 000 $ dans les années à venir. Demain matin, on
baisse. À partir de l'année prochaine, on en aura moins - cela,
il ne l'a pas dit - dans onze projets dans lesquels SOQUEM est
déjà impliquée. Voilà quelques-unes des raisons.
Entre autres, cet exemple nous a permis de démontrer jusqu'à quel
point si on ne fait pas attention, on risque de dilapider l'essence même
de l'économie québécoise. Voilà pourquoi, nous,
à titre d'Opposition responsable, nous exigeons que ce gouvernement
arrête immédiatement ses procédures de privatisation et
appelle les gens des régions, ceux qui sont directement conernés,
qui perdent leur emploi par la privatisation, à venir s'expliquer en
commission parlementaire et montrer jusqu'à quel point c'est odieux de
privatiser à outrance et de vendre à rabais l'ensemble des biens
collectifs que nous avons mis tant de peine et d'ardeur à nous
payer.
Des voix: Bravo!
La Vice-Présidente: Merci, M. le député
d'Ungava.
Avant de reconnaître un autre député, j'aimerais
aviser cette Chambre de l'entente qu'il y a eu entre les leaders concernant la
répartition du temps de parole. Le temps de parole se partagera
également entre les deux formations politiques jusqu'à 17 h 45.
À 17 h 45, on reconnaîtra un droit de réplique de quinze
minutes à l'auteur de la motion.
M. le député de Vimont.
M. Jean-Paul Théoret
M. Théorêt: Merci, Mme la Présidente. Je
croyais que l'Opposition demandait ce débat sur la privatisation de
certaines sociétés d'État afin de faire part de
propositions ou de solutions qui auraient pu aider notre gouvernement à
prendre les décisions dans ces dossiers. Mais non, de tous les membres
du parti de l'Opposition qui sont
intervenus dans ce débat la semaine dernière et même
du député d'Ungava, qui vient de parler pendant près de 20
minutes aujourd'hui, jamais aucun d'entre eux n'a proposé des solutions
concrètes pour aider ce débat. Tout ce qu'ils ont fait, c'est
strictement critiquer, critiquer et critiquer. Ils ont demandé ce
débat tout simplement pour nous dire de reporter nos décisions
à plus tard. Ils agissent comme membres de l'Opposition exactement de la
même façon qu'ils agissaient lorsqu'ils formaient le gouvernement.
Ils fuient leurs responsabilités et, comme gouvernement
précédent, ils fuyaient leurs responsabilités. Ils
n'avaient pas le courage politique de prendre des décisions et
remettaient toujours à plus tard les solutions à apporter aux
problèmes. Et on remarque encore aujourd'hui qu'ils ont la même
attitude. (16 h 30)
Hier, Mme la Présidente, ils demandaient au ministre de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation de reporter de six mois
le projet de loi concernant le parc des expositions agro-alimentaires.
Aujourd'hui, ils nous demandent de reporter à plus tard la privatisation
de certaines sociétés d'État. Toujours ce même
manque de courage face aux problèmes, et ce, simplement parce qu'ils
n'ont aucune solution à apporter. Ce qui veut dire qu'au lieu
d'étudier ces dossiers fort importants des sociétés
d'État appelées à être privatisées, ils les
ont tout simplement ignorés, et ce, pendant plusieurs mois. Ils
découvrent, à l'ouverture d'une nouvelle session, que des gestes
concrets et responsables ont été posés par notre
gouvernement et que d'autres seront bientôt posés.
Ils nous disent aujourd'hui: Reportez votre décision à
plus tard. Il nous faut du temps pour étudier cela de près. On ne
savait pas, disent-ils, qu'on avait à faire face à ces
problèmes maintenant. Alors que les membres de l'Opposition semblent
ignorer qu'il y a des discussions et que des décisions se prennent sur
la privatisation, alors qu'ils nous disent que nous n'avons pas de mandat de la
population pour agir dans ces dossiers, un sondage effectué au mois
d'août et rendu public démontre que plus de 60 % de la population
sait que le gouvernement veut privatiser certaines sociétés
d'État et que cette population est d'accord avec cette
décision.
Mme la Présidente, les députés de l'Opposition
viennent de découvrir qu'il y a un gouvernement sérieux et
cohérent avec ce qu'il avait annoncé en période
électorale, et un gouvernement d'action. La privatisation de Quebecair
n'était une surprise pour personne sauf, bien sûr, pour les
députés du Parti québécois qui, d'un seul coup, se
réveillent le 21 octobre dernier et nous demandent pourquoi privatiser
Quebecair. Ils nous demandent de surseoir à la vente de Quebecair, nous
disant d'attendre la décision du fédéral dans ce dossier.
Ce réveil soudain des membres de l'Opposition est tout à fait
aberrant, mais pas surprenant, et démontre sans équivoque qu'ils
ne se souviennent pas de ce qui s'est passé durant la campagne
électorale et de ce qui est arrivé le 2 décembre dernier.
Autrement dit, ils sont encore dans un profond sommeil, et il nous faut donc
les réveiller et leur rappeler les faits. Les faits, c'est que, dans le
programme du Parti libéral publié en 1985, il était
clairement établi que le nouveau gouvernement favoriserait la
privatisation de certaines sociétés d'État et, en
particulier, celles où les contribuables québécois
devaient constamment payer, à même leurs taxes, les
déficits énormes de ces sociétés boiteuses.
En pleine campagne électorale, le ministre actuel, le ministre
délégué aux Finances et à la Privatisation,
annonçait que Quebecair serait une des premières
sociétés à être privatisée afin de mettre fin
à un gouffre financier important pour le gouvernement du
Québec.
En résumé, Mme la Présidente, tout le monde savait
que Quebecair allait être privatisée et pourquoi nous devions,
comme gouvernement responsable, agir d'une façon concrète et sans
délai dans ce dossier. Sans délai parce que l'imminence de la
déréglementation de l'espace aérien canadien venait
ajouter une certaine urgence à la restructuration des activités
de Quebecair. Déjà, au printemps 1986, plusieurs compagnies dont
Nordair Metro, City-Express et Nationair avaient annoncé leur intention
de desservir certaines villes du Québec. Donc, avec cette nouvelle
concurrence, les problèmes structurels de Quebecair ne pouvaient que
s'aggraver et ce, à très court terme si des décisions
gouvernementales n'étaient prises.
Regardons ensemble, Mme la Présidente, le contexte dans lequel
nous nous trouvions pour effectuer cette transaction et les résultats
qui en ont découlé. Un montant de 80 000 000 $ englouti au cours
des dernières années, donc déficit par-dessus
déficit et aucune solution réaliste en vue pour corriger le
déficit chronique de Quebecair. C'est dans ce contexte que notre
gouvernement a invité les groupes intéressés à
soumettre des propositions pour l'achat de Quebecair, mais ces propositions
devaient répondre à quatre objectifs fondamentaux pour que le
gouvernement approuve la transaction finale.
Ces objectifs étaient les suivants: 1. maintien de services
adéquats en régions; 2. maintien d'une base opérationnelle
et d'un centre de décision au Québec; 3. maintien du plus grand
nombre possible d'emplois; 4. obtention d'un prix raisonnable. Enfin, Mme la
Présidente, les offres devaient être
globales et porter sur l'ensemble des actifs de Quebecair.
Or, il faut bien admettre qu'à cause de la situation
financière de Quebecair et également des exigences du
gouvernement pour maintenir les services en régions et maintenir le plus
d'emplois possible, il est bien évident, dis-je, que le nombre
d'acheteurs éventuels n'était pas très
élevé. En fait, il y en avait deux, soit le groupe Parent dont
l'offre était plus faible et conditionnelle à l'approbation et
à la participation de plusieurs intervenants, ce qui n'était
d'ailleurs pas assuré; d'autre part, il y avait l'offre du groupe
Leblanc qui était de loin la plus intéressante, compte tenu de
l'ensemble des objectifs établis par le gouvernement.
Il nous fallait donc agir et prendre notre décision assez
rapidement, pour deux raisons: 1. chaque mois de délai pour la prise de
décision coûtait aux contribuables québécois 1 000
000 $; 2. une guerre de prix en vue à laquelle Quebecair n'avait pas les
moyens financiers de faire face puisque Quebecair, transporteur à
coût élevé, était très vulnérable face
à une guerre des prix.
En conclusion, Mme la Présidente, oui, nous voulons arrêter
l'hémorragie des fonds publics dans les canards boiteux comme Quebecair.
Oui, Mme la Présidente, nous voulons renforcer les structures
industrielles du Québec en misant sur l'entrepreneurship et le dynamisme
du secteur privé québécois. C'est pourquoi nous
procédons à la privatisation de certaines sociétés
d'État et ce, comme gouvernement responsable de la bonne gestion des
finances publiques du Québec. Contrairement aux membres de l'Opposition
qui formaient le précédent gouvernement, nous prenons nos
responsabilités et passons à l'action. Merci, Mme la
Présidente.
La Vice-Présidente: Merci, M. le député de
Vimont. M. le député d'Abitibi-Ouest.
M. François Gendron
M. Gendron: Merci, Mme la Présidente. Je m'en voudrais,
comme membre de l'Opposition, de ne pas participer à cette motion dite
du mercredi sur une question majeure, sur une question importante quant
à l'avenir du développement économique global du
Québec.
La motion nous dit clairement que cette Assemblée exige
l'arrêt des procédures de privatisation et demande qu'il se tienne
une commission parlementaire permettant un large débat afin de faire
toute la lumière sur les conséquences contraires à
l'intérêt public du démantèlement des
sociétés d'État, notamment Quebecair. (16 h 40)
Je viens d'entendre le député de Vimont. J'ai eu
l'occasion la semaine dernière d'entendre celui de Matapédia.
Cela n'a pas de bon sens comme ces gens n'ont pas l'air d'être
intéressés à parler de ce qui se passe. On ne veut pas
avoir un discours sur des généralités. Nous aussi, on est
en mesure de prendre nos responsabilités. Justement on veut les prendre.
Je répète, Mme la Présidente - cela va être mon
thème jusqu'aux fêtes, je n'ai pas le choix - que ce gouvernement
a l'intention de gouverner avec un double langage en utilisant constamment des
situations erronées par rapport aux faits, des objectifs
complètement diversifiés par rapport aux objectifs de la
vice-première ministre qui avait le culot, lors de l'ouverture de la
session, de dire: Nous, nous allons gouverner avec transparence; nous, on va
gouverner ouvertement. On va mettre les citoyens et les citoyennes du
Québec dans le coup. Comme si le dossier de la privatisation
n'était pas assez majeur, pas assez important pour qu'une fois pour
toutes on sorte du Parti libéral, du gros club privé du Parti
libéral au Québec et qu'on fasse de cette question un
débat de société.
Je veux revenir à ce que le député de
Matapédia disait: Nous, on est d'accord pour s'interroger sur le
rôle des sociétés d'État. Cela ne prend pas un gros
quotient pour convenir de cette nécessité. On l'a fait, nous, en
privatisant trois sociétés d'État. Par contre, on ne veut
pas que les sociétés d'État soient liquidées, comme
c'est en train de se faire, sans aucun objectif précis. Je reviens au
député de Vimont qui dit: Nous, on veut privatiser parce qu'on
veut arrêter l'hémorragie des fonds publics. Soit, je voudrais
regarder cela. Mais tout de suite après - encore là, il faut
avoir du culot - il dit: On fait cela pour renforcer le développement de
l'industrialisation au Québec. J'aimerais qu'il m'explique comment il va
renforcer l'industrialisation du Québec en se départissant de
Dofor, alors que c'est le bras le plus puissant, le plus capable - là,
ce n'est pas juste Gendron qui parle. Tous ceux qui ont regardé cela
avec intelligence, en dehors de la partisanerie du Parti libéral, ont
dit: Un instant! Quebecair, vous avez remarqué qu'ils n'ont pas
parlé trop fort. Cela ne veut pas dire que je suis d'accord avec cela.
Je parle des chroniqueurs qui ont regardé cela. Mais quand on est rendu
à tout mêler dans le panier de la privatisation,
Madelipêche, Dofor... De temps en temps, l'objectif, c'est
d'arrêter l'hémorragie des fonds publics; un autre tantôt,
c'est d'être capable de faire de la relance industrielle dans des
secteurs qui ne sont pas assumés par l'entreprise privée.
Qu'est-ce que c'est, Mme la Présidente, que ce
discours-là? Madelipêche, pourquoi pensez-vous que c'est devenu
gouvernemental? Pourquoi l'État est-il dans Madelipêche? Encore
là, cela ne prend pas une longue analyse. C'est parce que, dans le
secteur des îles, pour des facteurs insulaires,
pour des facteurs d'éloignement, c'est la seule industrie
importante. Comment cela se fait-il que le privé, pendant sept ou huit
ans, neuf ans, dix ans, ne l'a pas développée? Tout le secteur
privé dans le secteur des îles, faillite après
faillite.
Il y a une responsabilité sociale pour un État, de temps
en temps, d'assumer dans des coins de pays quelque chose qui coûte
quelque chose. J'aime mieux cela que le chômage et l'aide sociale. Ces
gens, cela n'a pas l'air de les déranger. Nous, on va privatiser et,
dans quelques années, il n'y aura pas preneur, à moins de faire
encore là des prix de régime, des prix d'amis du régime.
On va privatiser à rabais. Nous, c'est cela qu'on voudrait faire.
Discuter ouvertement dans un débat public parce que c'est un
débat important. On n'est pas contre la privatisation, mais on voudrait
que ce gouvernement ait la responsabilité non pas du double langage et
de parler des deux côtés de la bouche.
La population se rend compte de cela à un moment donné.
Quand je les voyais encore à la période de questions se vanter
aujourd'hui: 60 % des gens sont d'accord avec nous. C'est faux! Il y a
déjà cinq régions qui ne veulent plus rien savoir de vous
autres. Regardez le sondage. Il y a cinq régions qui ne veulent rien
savoir de vous autres déjà, après neuf mois, en disant:
Cela va faire vos... Je ne peux pas le dire en Chambre. Mais la population a
compris ce qui a été dit. Sur la privatisation, on me montre que
la population est d'accord. C'est encore faux. La population est d'accord sur
la thématique de la privatisation. Mais pas sur une privatisation
à l'emporte-pièce avec n'importe quel élément
d'objectif. De temps en temps, cela va être d'arrêter
l'hémorragie. De temps en temps, cela va être de renforcer le
développement de l'industrialisation. Comment voulez-vous qu'ils soient
crédibles?
Par exemple, quand ils se débarrassent de Dofor dans la SGF, il y
a quand même des chroniqueurs qui ont dit: Cela va faire! Attendez un
peu, là! Un délai de réflexion. Ce n'est pas Gendron qui
demande cela. C'est Paul-André Comeau dans un éditorial
très bien tapé. Pensez-vous que Gilles Lesage aujourd'hui
félicite ces gens? Privé du coffre à outils. On pourrait
prendre une bonne demi-heure si je l'avais. Il dit des choses de fond. Pas des
choses aveuglées par la partisanerie. Il dit: Plus les mois passent,
plus la démarche pragmatique dont se targue ce gouvernement-là
ressemble bien plus à du dogmatisme absolu. Ce n'est pas le
député d'Abitibi-Ouest qui vous parle. C'est Gilles Lesage qui en
a vu bien d'autres. Mais là, à un moment donné, il dit:
"Enough is enough". Là, il trouve que c'est assez, Gilles Lesage, avec
les folies des libéraux sur la privatisation. Il dit: Cela n'a pas de
bon sens qu'on soit rendu à vendre tout le coffre à outils. Et
ces gens vont avoir le culot de nous faire le discours: Nous, on est les
promoteurs de la défense des intérêts privés, d'un
Québec solide, plus fort, d'un Québec agressif en termes de
développement industriel.
Qu'est-ce que c'est cela? La SGF, qu'est-ce qu'elle va pouvoir faire
quand elle va être privée de tous ses revenus valables? Comment se
fait-il que la SGF soit une société d'État importante qui
a pu souscrire, en Abitibi-Témiscamingue, et participer à du
développement important dans Normick-Donohue? Pensez-vous que j'aurais,
dans mon comté, une usine de papier journal s'il n'y avait pas eu la
SGF? Je l'ai encore vérifié hier soir avec les
propriétaires qui, justement, veulent mettre la main sur Dofor, et je ne
les blâme pas.
Je tiens à le dire publiquement. Si jamais la vente se fait, je
vais les appuyer. Je vais appuyer Norwick-Perron. Je vais être d'accord
pour Normick-Perron plutôt que vendre cela encore aux amis
libéraux, Power Corporation ou ailleurs. Je veux au moins que cela reste
dans une multinationale québécoise, Lasarroise, si vous me passez
l'expression. Avant de donner mon appui, je leur ai dit notre position, elle
n'est pas hypocrite, elle est claire.
On pense que cela n'a pas de bon sens de vendre le Québec en
petits morceaux comme ces gens sont en train de le faire. Cela n'a pas de bon
sens et on va s'opposer à cela le plus qu'on peut le faire. Plus cela
va, plus il y a des appuis, plus il y a des gens qui s'ouvrent les yeux et qui
disent: Écoutez, ils sont dangereux ces gens-là. Ils sont
dangereux, parce que leurs objectifs sont complètement disparates.
Quebecair, c'est arrêter le gouffre financier. Supposons qu'ils aient
raison, ils ont vraiment erré, ils ont vraiment trompé la
population, Mme la Présidente. Les emplois, c'est terrible, les
services... À entendre le ministre des Transports, j'ai l'impression
qu'il n'a pas pris souvent Quebecair ou Nordair Metro.
Je tiens à vous dire que je suis un utilisateur régulier:
deux fois par semaine. Sur mes quatorze derniers voyages avec Nordair Metro,
j'en ai fait deux sans problèmes. Vous m'avez compris. Ce n'est pas un
discours d'un ministre qui vit à Charlesbourg, c'est un discours d'un
utilisateur concret, pratique, deux fois par semaine. Il y a toujours un
pépin avec ce genre d'appareil. Ce n'est pas parce que je ne veux pas
voyager en Convair. J'en ai vu d'autres, quand on vit en Abitibi... Mme la
Présidente, j'ai voyagé en DC-3, en brouette, mais je veux au
moins avoir un peu de respect comme usager. C'est dangereux,
sérieusement. À un moment donné, c'est un rotor qui ne
marche pas, c'est le moteur qui ne part pas, c'est un autre problème et
je
vous donne juste un petit exemple. Ce n'est pas bien compliqué.
Je l'utilise pour travailler dans l'avion, pour lire des documents. Comme ce
sont des avions qui faisaient du cargo auparavant, le plafonnier de lecture est
à deux pieds de mon siège. Quand on respecte des clients, au
moins on pourrait corriger cela.
Ces gens ont le culot de faire accroire qu'il y a eu des exigences sur
la qualité du service. S'ils avaient un peu de jugement et
d'honnêteté, ils ne pourraient pas dire des choses comme celles
que j'ai entendues dans cette Chambre du ministre des Transports: "Non, la
qualité du service est aussi bonne qu'avant. Il n'y a pas de
problèmes, on a maintenu les liaisons." Il le prendra. Je vois le
député de Beauce-Nord - qu'est-ce qu'il peut connaître
là-dedans - il le prendra Nordair Metro. Il va voir que ce n'est pas
drôle, on arrive souvent en retard. Mardi dernier, je suis entré
à 14 h 5. Est-ce que je devais entrer à 14 h 5? Non. Pourquoi
suis-je entré à 14 h 5? Nordair Metro, petit problème. Il
y a de la brume ou je ne sais pas quoi, cela ne part pas comme prévu. Ce
n'est pas vrai, Mme la Présidente, qu'on a une qualité de service
accrue. Ce n'est pas vrai qu'on a maintenu les liaisons. Ce n'est pas vrai que
c'est une privatisation qui s'est faite dans le contexte des exigences qui
avaient été posées. C'est juste un exemple.
Si on revient sur le fond du dossier, ce qu'on veut dire aujourd'hui aux
gens du gouvernement, c'est qu'on ne veut pas qu'ils ne prennent pas leurs
responsabilités, on ne veut pas qu'ils ne prennent pas les
décisions, c'est leur affaire. Mais on dit: ayez au moins un peu de ce
que j'appellerais d'objectivité pour permettre que des choses aussi
majeures pour l'avenir du Québec, des choses aussi importantes se
fassent au vu et au su de tout le monde. Cela ne coûterait pas cher de
faire un débat de fond là-dessus et de regarder cela. Combien de
fois on vous entend dire: Nous, de ce côté, on comprend rien, on
ne connaît rien, et cela ne donne rien. Il y a quelque chose qui ne
marche pas, parce qu'il y a de plus en plus de gens, pas seulement dans la
population, qui disent: Non, être privé du coffre à outils,
cela n'a pas de bon sens. Un délai dé réflexion s'impose.
M. Bourassa doit cesser de vendre pour vendre. Ce n'est pas Gendron qui parle,
ce n'est pas le député d'Abitibi-Ouest qui dit cela, c'est
d'autres personnes qui sont un peu moins aveuglées par la partisanerie
et qui trouvent que le vase commence à déborder.
Ce n'est pas une question de dire: On avait cela dans le programme.
Est-ce que ces gens vont gouverner pendant trois ou quatre ans pour le Parti
libéral du Québec? Je veux bien que ce soit un gros club
privé fermé. Mais c'est assez. Ils ont été
élus par une bonne majorité de la population, je veux respecter
cela. Mais c'est faux qu'ils aient été élus pour faire des
folies comme ils sont en train d'en faire. (16 h 50)
Dans le domaine de la privatisation, on voudrait qu'effectivement, il y
ait des analyses plus sérieuses, plus poussées, et des objectifs.
Qu'est ce qu'ils vont faire, Mme la Présidente, avec les revenus de
Dofor? Est-ce que vous avez eu une réponse à cette question? Je
pourrais demander à chacun des membres, ici, qui sont bien plus
portés à répéter des choses qu'ils entendent
qu'à se faire une tête et un jugement, est-ce qu'il y en a un
parmi les membres, les députés ministériels, qui pourrait
me répondre? Qu'est-ce que vous allez faire le gouvernement du
Québec avec les 35 000 000 $, 40 000 000 $, 200 000 000 $ ou 300 000 000
$ de la vente de Dofor? Il n'y a pas un sacré monde qui va être
capable de me répondre. Il n'y en a pas un qui va être capable
de...
Justement, j'en entends dire: Pour payer vos dettes. Pourtant si l'on
regarde les dossiers, ce n'est pas cela qui est écrit. Si l'on regarde
les dossiers sur lesquels doivent se faire... C'est cela je l'attendais leur
réplique rapide insignifiante. Dans le dossier, ce n'est pas cela qui
est dit. Nous voulons faire de la privatisation pour renforcer le
développement industriel, non pas pour payer des dettes. Vous nous avez
dit qu'on ne pouvait pas avoir ce comportement de vendre le coffre à
outils pour payer l'épicerie. Qu'est-ce que les perroquets ont
répondu rapidement? C'est bien facile de dire: Pour payer vos dettes!
Cela va renforcer le Québec celai Mme la Présidente, les dettes
ne sont pas si dramatiques que cela. Comment se fait-il que, quelques mois
à peine avec le gouvernement, il y a eu effectivement un jugement
concernant l'amélioration de la cote financière du Québec?
Donc, ils ne me feront pas brailler et ils ne me feront pas peur avec la
situation budgétaire. Elle n'est pas dramatique et elle n'est pas si
grave que cela.
La balloune est gonflée pour atteindre leurs objectifs partisans
de effectivement financer une Baie James 2 indépendamment qu'on en ait
besoin, indépendamment des coûts et indépendamment qu'on se
vende aux Américains. Cela, c'est important! Cela, c'est important de
dégager une marge de manoeuvre pour faire nos folies partisanes. C'est
cela qu'on doit dénoncer. Si l'Opposition acceptait - ils sont
convaincus de leur thèse - alors, c'est quoi l'inconvénient
d'accepter de prendre cela un peu plus mollo, de prendre cela un peu plus
tranquille, de regarder cela avec d'autres intervenants, de nous convaincre et
de convaincre tous les autres intervenants? Tous les éditorialistes que
je pourrais vous citer: les Paul-André Comeau, Gilles Lesage, M.
Parizeau. Quand
cela fait votre affaire de le citer M. Parizeau quand il nous rentre
dedans, vous aimez celai Qu'est-ce qu'il vient de vous dire là, M.
Parizeau? Lui aussi, il réclame un moratoire et il dit: Aie, cela va
fairel Cela constitue une dilapidation, cela n'a pas de bon sens. Il dit:
Dofor, ce n'est pas un canard boiteux. Révisez votre langage!
Révisez votre vocabulaire! À un moment donné, ils vendent
parce que ce sont des canards boiteux. Si Dofor est un canard boiteux, ils ne
comprennent rien, Mme la Présidente!
Alors, je conclus parce que je veux laisser la chance à d'autres,
mais je pense que c'était important de demander à ces gens de
prendre le temps d'associer d'une façon un peu plus large, dans un
débat aussi fondamental, d'autres points de vue. C'est cela une
société progressiste, c'est cela une société qui
veut qu'effectivement des débats importants se fassent au grand jour et
non pas en s'en allant comme une couleuvre dans tous les sens. De temps en
temps, c'est telle affaire qui fait leur affaire et, une autre privatisation...
C'est telle autre affaire... Il me semble que ce serait simple de dire: Oui,
nous allons accepter d'arrêter cela un peu et nous allons regarder cela
d'une façon plus large. Et si vous avez raison, vous continuerez vos
folies. Merci.
La Vice-Présidente: Merci, M. le député
d'Abitibi-Ouest. Mme la députée de Matane.
Mme Claire-Hélène Hovington
Mme Hovington: Merci, Mme la Présidente. À la suite
de la motion présentée par le député de Bertrand,
j'aimerais apporter les précisions suivantes et appuyer les
démarches entreprises à ce jour par mon gouvernement quant
à la privatisation des sociétés d'État.
Si vous voulez bien, il serait bon de présenter un bref
historique des réflexions et des prises de décision de notre
formation politique. Si l'on reconnaît que l'art de gouverner des 25 ou
30 dernières années est périmé, un changement
s'impose. Plusieurs pays occidentaux s'interrogent à l'heure actuelle
sur la pertinence de conserver les sociétés d'État, et un
certain nombre de ces pays ont déjà amorcé ou
réalisé la privatisation de quelques-unes de leurs
sociétés, et ceci, pour le mieux-être de leur
économie respective. Dans le programme du Parti libéral
"Maîtrisons l'avenir" que les gens d'en face ont sûrement eu
l'occasion de consulter, ou du moins, dont ils ont dû entendre parler
lors de la dernière campagne électorale, dans le cinquième
chapitre qui s'intitule "La carte d'un nouveau style de gouvernement", on
retrouve les principes suivants, et je cite: "II serait vain que le
Québec devienne le terrain d'expérimentation d'un
libéralisme idéologique débridé. On ne saurait, par
exemple, abandonner les grands programmes universels de santé,
d'éducation et de soutien du revenu sans créer un grave
traumatisme social. Nous devrons plutôt nous appliquer à humaniser
ces programmes, en contrôler plus étroitement les coûts, en
décentraliser la gestion dans la mesure du possible. Il faut les
maintenir, mais en tentant d'atténuer certains effets
indésirables du contrôle étatique.
L'État devra aussi continuer à agir sur l'économie,
c'est sûr, mais dans un esprit nouveau. Il cherchera à faire
diminuer les coûts de production, à laisser les forces du
marché agir et à stimuler la concurrence. Bref, il deviendra le
gardien de la compétitivité de nos entreprises.
À notre avis, Mme la Présidente, la question de la
privatisation des sociétés d'État est un sujet complexe et
il doit être abordé d'une manière réaliste et
pratique. D'abord, il ne saurait être question de démanteler des
sociétés d'État simplement parce qu'elles sont du domaine
public, c'est sûr. Ensuite, il faut tenir compte de l'équilibre
économique des régions, particulièrement dans celles
où les sociétés d'État sont les principaux ou les
seuls employeurs. L'intérêt général est aussi en
cause lorsqu'il s'agit de liquider à perte des actifs accumulés
avec l'argent des contribuables. Mais l'État ne devrait toutefois pas
faire concurrence au secteur privé sans raison valable.
Dans un monde où les PME sont les principales sources de nouveaux
emplois, ces grands ensembles que constituent souvent les
sociétés d'État ne sont plus, dans la majorité des
cas, des leviers appropriés de croissance économique.
Dans le cas où la vente totale ou partielle des
sociétés d'État ne serait pas une source importante de
revenus pour le gouvernement, le seul fait d'éliminer des canards
boiteux contribuerait à réduire substantiellement les
dépenses et les besoins futurs en emprunts de l'État.
Le gouvernement s'est engagé à mettre sur pied une
unité de travail, présidée par un ministre responsable
d'un secteur économique, qui procédera systématiquement et
cas par cas à une analyse approfondie de la structure financière,
du rendement, du mandat et des orientations futures des sociétés
d'État.
C'est à partir de cet examen rigoureux que le gouvernement
déterminera si la participation directe des pouvoirs publics demeure
utile ou nécessaire ou si les conditions sont propices à une
démarche partielle ou totale de privatisation.
Voilà, Mme la Présidente, certains éléments
importants du programme du Parti libéral en matière de
privatisation. Lorsque le peuple du Québec s'est prononcé lors
des élections du 2 décembre dernier, les
électeurs et électrices étaient fort bien
renseignés sur les intentions et sur les politiques mises de l'avant par
notre formation politique pendant la campagne électorale.
C'est pourquoi, Mme la Présidente, je ne comprends pas l'objet de
la motion présentée par le député de Bertrand.
À mon avis, notre plate-forme électorale sur le sujet mis en
cause était claire. De plus, le choix des électeurs a
été tout aussi clair.
Pour poursuivre mon bref historique, Mme la Présidente, au
lendemain des élections, le premier ministre nommait un
député ministre délégué à la
Privatisation. En février 1986, le ministre délégué
à la Privatisation rendait public un exposé traçant les
orientations et la base des actions que devait prendre notre gouvernement dans
sa politique de réorientation et de privatisation de
sociétés d'État.
Dans cet exposé, ce dernier soulignait les principes directeurs
qui devraient encadrer la démarche et le processus de privatisation et
qui peuvent se résumer ainsi:
Le premier principe, Mme la Présidente, c'est une plus grande
place au secteur privé, car le gouvernement juge que la production
commerciale des biens et services dans l'économie
québécoise est du ressort du secteur privé, sauf en des
circonstances exceptionnelles.
Le deuxième principe, Mme la Présidente, c'est que
l'objectif structurel devrait avoir priorité sur l'objectif financier,
c'est-à-dire que la privatisation n'est pas une fin en soi, mais
lorsqu'elle s'impose, elle doit viser avant tout à renforcer la
structure économique du Québec tout en assurant la
présence québécoise dans les secteurs clés de
l'économie.
Le troisième principe, Mme la Présidente, est une approche
pragmatique. La privatisation doit se faire cas par cas. Elle peut emprunter
des voies multiples selon les conditions spécifiques d'une
société et de son industrie.
Le quatrième principe de la privatisation; ce sont des
règles reconnues. La privatisation, Mme la Présidente, est un
processus public qui doit répondre aux normes d'équité et
de divulgation qui s'appliquent aux compagnies publiques.
Le cinquième principe de la privatisation est un traitement
équitable. Le gouvernement doit s'assurer, en effet, que dans le cadre
des rationalisations qui pourraient s'imposer, les employés, les
communautés et, le cas échéant, les fournisseurs soient
traités équitablement. (17 heures)
Certaines entreprises pourraient être vendues en bloc à des
firmes privées déjà existantes, mais la cession
d'entreprises pourrait aussi prendre la forme de vente d'actifs et le
démembrement d'entreprises et leur partage entre plusieurs acheteurs
pourront parfois s'imposer aussi comme la meilleure solution. Aussi, nous
entendons effectuer chacune des privatisations en respectant les règles
qui s'appliquent à toutes les compagnies ouvertes de
propriété privée. Cela implique que nous respections
toutes les règles d'éthique, d'équité et de
divulgation qui ont cours dans ce type de transactions. Chacune des
privatisations sera faite, par conséquent, dans l'observance de la Loi
sur les compagnies, de la Loi sur les valeurs mobilières et en tenant
compte de la jurisprudence que nous ont donnée les tribunaux.
Cet ensemble de règles a été rodé au fil des
ans et donne généralement satisfaction à toutes les
parties en cause. Il est toutefois Un domaine où le comportement de
l'État devra tenir compte de dimensions qui lui sont
particulières. Il s'agit de l'attention à accorder aux groupes
qui subiraient des effets négatifs de la privatisation, le cas
échéant. À la suite d'une privatisation, des
rationalisations jugées nécessaires par les nouveaux
propriétaires peuvent se traduire par des mises à pied, voire des
fermetures d'établissements. Ainsi, des employés, des
fournisseurs ou même des communautés entières seraient
peut-être exposés à subir les contrecoups des
décisions. Mais le gouvernement entend bien assumer complètement
sa responsabilité à l'égard de ces divers groupes. Or, la
propriété d'État n'est pas la seule voie qui permette
d'assumer cette responsabilité mais, en cette matière aussi, le
pragmatisme doit être de rigueur. Il n'existe pas une, mais plusieurs
façons d'aborder le problème et, dans chacun des cas où le
problème se présentera, chaque possibilité de solution
devra être évaluée.
Dans le cas qui nous préoccupe, aujourd'hui, soit la
privatisation de Quebecair, toutes les avenues avaient été et ont
été envisagées. Afin d'éviter des erreurs comme la
privatisation manquée de succursales de la Société des
alcools, on s'est quand même assuré qu'il y avait des acheteurs
potentiels avant de mettre en branle toute une mécanique lourde et
rigide. Les ministres des Transports et de la Privatisation affirmaient en
conférence' de presse, le 21 octobre dernier, qu'en effet, après
avoir englouti près de 80 000 000 $, l'expérience des cinq
dernières années est implacable. Ni un changement de direction de
Quebecair, ni des améliorations à la marge des pratiques
commerciales ne pouvaient se révéler des solutions
réalistes au déficit chronique de Quebecair. Les
acquéreurs éventuels devaient procéder plutôt
à une restructuration fondamentale des activités afin de
rééquilibrer les coûts et les équipements avec le
potentiel du réseau.
C'est dans un tel contexte que le gouvernement invita le monde
québécois de
l'aviation à soumettre des propositions pour l'achat de
Quebecair. Il était évident dans cette démarche que les
acheteurs intéressés devaient proposer une solution aux
problèmes structurels de Quebecair, un point essentiel à
l'obtention du financement de la transaction qu'il proposait. C'est pour ces
mêmes raisons que le gouvernement balisa son appel d'offres. Comme le
mentionnait tout à l'heure un député, il fallait quatre
objectifs. D'abord, le maintien d'un service adéquat aux régions,
le maintien aussi d'une base opérationnelle au Québec, le
maintien d'un plus grand nombre d'emplois possible et un prix raisonnable.
Sous-jacente à cette dernière considération subsistait une
volonté nette et explicite du gouvernement de maintenir Quebecair en
exploitation tout en cessant de subventionner le transport aérien du
Québec. Les pertes atteignaient 1 000 000 $ par mois cette année
et cette aventure aura coûté, comme je le disais, plus de 80 000
000 $ au Trésor québécois.
Croyez-moi, hors de tout doute, l'entente conclue entre le gouvernement
et le groupe Leblanc se révèle une bonne transaction pour le
Québec. Je suis aussi une utilisatrice de Nordair Metro deux fois par
semaine. Contrairement à ce que mentionnait le député
d'Abitibi-Ouest tout à l'heure, jusqu'à maintenant, je n'ai pas
eu à souffrir de retard ou de traumatisme plus qu'il ne faut avec ce
service. S'il y a eu quelques retards, c'était dû à la
brume et la brume, que je sache, est un caprice de la nature et non pas un
caprice de Nordair Metro.
En conclusion, j'aimerais rappeler ce que nous considérons comme
étant les deux mots clés de notre gouvernement dans l'approche
que nous entendons adopter face à nos sociétés
d'État, rigueur et pragmatisme pour chacune d'entre elles. Qu'il
s'agisse de privatiser, de réorienter ou même de donner une
bénédiction, cela sera fait après une étude
sérieuse des objectifs poursuivis à l'origine, des succès,
des échecs dans la poursuite de ceux-ci et surtout de la pertinence
actuelle de ces mêmes objectifs. Après 20 ans de croissance de
l'État dans l'appareil commercial et industriel du Québec, nous
croyons qu'une telle remise en question s'impose et nous ne croyons pas
nécessaire de mettre un terme à nos procédures de
privatisation et nous ne croyons pas nécessaire non plus de tenir une
commission parlementaire sur le sujet.
À mon avis, nous avons été clairs et précis
dans notre programme Maîtrisons l'avenir tout au long de notre campagne
électorale de l'automne dernier ainsi que depuis le 2 décembre
dernier, date à laquelle nous avons reçu un mandat tout aussi
clair et tout aussi précis de la population. Merci, Mme la
Présidente.
La Vice-Présidente: Merci, Mme la députée de
Matane.
Mme la députée de Maisonneuve.
Mme Louise Harel
Mme Harel: Merci, Mme la Présidente. On m'a
informée que je disposais de quatorze minutes sur la présente
motion. J'aimerais que vous m'informiez, à la clôture de mon
intervention, du temps qui m'est imparti.
En écoutant la députée de Matane je me disais: mon
doux que c'est donc beau. Le problème est que la privatisation dont elle
a parlé, c'est la privatisation sur papier, la privatisation
rêvée et que si elle prend ses désirs pour des
réalités, malheureusement la privatisation que des centaines et
des centaines de personnes vivent au Québec présentement, c'est
une bien plus triste réalité. Pas seulement pour les
employés qui n'ont plus d'emploi mais aussi pour les régions.
Nous aurons l'occasion de l'illustrer rapidement, compte tenu du peu de temps
à notre disposition, avec le dossier de Quebecair.
C'est, nous dit-on, pendant la campagne électorale qu'auraient
été transmis à l'opinion publique québécoise
ces objectifs de privatisation. Je dois vous dire que cela doit en
étonner beaucoup qui nous écoutent présentement. Cela doit
étonner particulièrement les gens de l'est de Montréal. Je
ne sache pas que durant toute cette campagne, à aucun moment, il y ait
un candidat libéral qui ait parlé d'un dossier de privatisation.
Si c'était dans vos papiers de famille, il faut dire que vous ne les
avez pas sortis beaucoup pendant la campagne électorale. Dans l'est, on
s'est fait promettre la création d'une zone d'entreprises.
Immédiatement après le 2 décembre, on a vu
apparaître une immense pancarte indiquant "zone d'entreprises", mais
c'est tout ce dont on a entendu parler depuis le 2 décembre. À
part la pancarte, rien d'autre ne s'est passé.
Pendant cette campagne, on a beaucoup joué au Père
Noël du côté du gouvernement au point de faire des promesses
en se faisant aviser, par des gens qui étaient bien informés, des
gens qui ont ce mandat d'étudier les dossiers, je pense entre autres au
chroniqueur de la Presse, M. Dubuc, et par bien d'autres économistes,
qu'en 1985 la marge de manoeuvre n'existe pas et que pour tout gouvernement
quel qu'il soit une marge de manoeuvre, ça n'existe plus.
Les Québécois ont dû être assez surpris parce
que bon nombre d'entre eux avaient certainement eu l'idée d'élire
des gens pragmatiques le 2 décembre dernier. Ils s'étaient fait
dire qu'ils allaient ainsi pouvoir se reposer des idéologues du PQ, de
leur idéologie de concertation - vous vous rappelez le ministère
de l'Emploi et de la Concertation - de leur idéologie de
régionalisation. Vous vous rappelez l'ensemble des
régionalisations. Pensons simplement à la mise en place des
municipalités régionales de comté et des autres conseils
régionaux. Les Québécois s'étaient fait dire...
Quelle est la principale préoccupation? Quand ils sont
interrogés, quelle que soit la question, un député qui
dit: le déficit... Je suis convaincue que la principale
préoccupation des gens qui nous écoutent ce soir, c'est l'emploi.
Dans tous les sondages, quelle que soit leur allégeance politique, la
principale préoccupation des Québécoises et des
Québécois, c'est l'emploi.
Ils s'étaient dit: La concertation et la régionalisation,
ce n'est peut-être pas ce qui permettra efficacement de créer des
emplois. Ils ont pensé qu'ils allaient élire un gouvernement
pragmatique, un gouvernement qui, comme il le prétendait à
l'époque, allait régler les problèmes au fur et à
mesure qu'ils allaient survenir. Devant quel gouvernement se sont-ils
réveillés? Devant un gouvernement d'idéologues mais d'une
autre sorte d'idéologie: l'abolition de l'Emploi et de la Concertation,
mais un nouveau ministère dont personne n'avait entendu parler
auparavant, avec un ministre à la Privatisation. (17 h 10)
Plus de régionalisation mais maintenant un adjoint parlementaire
directement attaché au premier ministre, à la
déréglementation. C'est l'été dernier, en plein
mois de juillet, qu'ils se sont réveillés devant des rapports
où apparaissait comme une peinture à numéros... Vous savez
comment c'est une peinture quand on commence à dessiner un numéro
et qu'on ne sait pas vraiment ce qui va apparaître en fin de compte. Les
Québécois, on fait ce dessin petit à petit pour se rendre
compte avec effroi, indignation et désarroi que le portrait qui en
résultait n'était pas exactement ce qu'ils en avaient
pensé et que ce n'était pas pour cela qu'ils avaient
voté.
Mme la Présidente, on dit de ce gouvernement qu'il est un
gouvernement qui, en plein été, rappelons-nous, en juillet, n'a
pas simplement sorti les trois rapports de son projet idéologique. Il a
sorti aussi en plein juillet... Et les Québécois savent
très bien que les deux dernières semaines de juillet sont comme
réservées aux vacances. Avec les vacances de la construction,
c'est à peu près l'ensemble des entreprises qui ferment, et c'est
connu, c'est reconnu, c'est un fait comme acquis dans la société
québécoise. Il en est ainsi. Eh bien! Coup de tonnerre. À
la fin de juillet, le 30 ou le 31 juillet, le ministre des Transports annonce
la vente de Quebecair.
Il faut se rappeler comment cela a été annoncé. Il
faut se rappeler que les médias annonçaient que le gouvernement
avait eu à choisir entre deux offres: une offre de 21 000 000 $ et une
offre beaucoup plus basse d'environ 9 000 000 $ et moins, jusqu'à ce que
les médias eux-mêmes et les Québécois apprennent que
c'était là un prix de vente maquillé parce que cette offre
de 21 000 000 $ dégonflée de tous les ajustements auxquels
consentait le gouvernement dans la transaction résultaient en fin de
compte en une offre de 10 000 000 $. Mais, évidemment, il a fallu aller
fouiller pour connaître les modalités de cette transaction.
Si c'est là la façon publique et transparente de rendre
des comptes à la population, Mme la députée de Matane, je
demande d'autres démonstrations. Cette offre d'achat qui a
été à ce moment retenue par le gouvernement, cette offre
d'achat, nous dit le gouvernement qui continue encore maintenant à
confondre ces deux offres, qui continue à comparer des offres qui ne
sont pas comparables, non pas seulement parce que le montant de l'offre d'achat
n'était pas le même... Pourquoi ne sont-ils pas comparables? Cela
se comprend très rapidement. Parce que, voyez-vous, quand vous achetez,
comme le proposaient les employés de Quebecair, Air Canada et le Fonds
de solidarité de la FTQ dans une offre conjointe, quand vous vous
proposez d'acheter pour exploiter, dans le jargon de ce métier, cela
s'appelle en "going concern", quand vous vous proposez d'exploiter toute la
flotte d'avions et que vous achetez pour exploiter les avions, ce n'est pas
comme une offre qui est celle qui a été choisie par le ministre
des Transports et son collègue à la Privatisation. Ce n'est pas
comme l'offre des actionnaires de Nordair Metro qui démantèle
Quebecair, qui vend les avions, les deux DC-B, les deux 737 - tout le monde le
sait, c'est dans les journaux maintenant - et qui, du même coup, abolit
les emplois qui étaient rattachés à l'exploitation de
cette flotte. Et on va nous dire que c'est la même transaction.
Mme la Présidente, il y a là une confusion qui est
savamment entretenue entre deux offres fondamentalement différentes.
L'une qui exploitait la flotte et qui non seulement l'exploitait mais qui avait
obtenu une étude fouillée d'un ancien vice-président d'Air
Canada qui était en annexe à l'offre d'achat et qui
démontrait que, pour être rentabilisée, une entreprise
comme Quebecair devait garder toutes ses activités de nolisement. Le
nolisement, ce sont les voyages comme certains de nos compatriotes
québécois ont pu en faire, en Europe ou ailleurs. Ce sont des
activités lucratives, ce sont des activités payantes. Il fallait,
disait cette étude qui était faite par un spécialiste
reconnu par toutes les parties dans le domaine de l'aviation, conserver toutes
les activités de nolisement et conserver intégralement la flotte.
C'était là le prix d'une rentabilité de Quebecair.
Qu'est-ce qu'on en a fait? Le gouvernement a choisi une offre qui
contient dans ses clauses mêmes, donc avec le consentement du
gouvernement, un démantèlement de la flotte, une cessation des
activités lucratives, des activités de nolisement. Je pense,
entre autres, comme tout le monde peut-être, parce que cela devient de
plus en plus connu, à l'entretien des avions-citernes, des CL-215.
C'était là une activité qui rapportait à Quebecair.
Par qui cette activité va-t-elle maintenant être faite? Par les
acheteurs de Quebecair parce que -comment dire? c'est l'autre paradoxe de cette
transaction - les acheteurs de Quebecair, ceux qui ont fait l'offre qui est
retenue par le gouvernement sont les actionnaires de Nordair Metro et les
actionnaires de Nordair Metro sont actionnaires d'une entreprise concurrente de
Quebecair. C'est assez facile à comprendre. Quand vous avez une
entreprise et que vous la vendez aux actionnaires de votre concurrent, ce
serait assez étrange que l'actionnaire de votre concurrent la vende pour
la rendre rentable en même temps, comme l'ont dit bien des personnes en
cette Chambre, avec la déréglementation pour se faire à
eux-mêmes concurrence.
Le moins qu'on puisse dire, c'est qu'il y a là une contradiction
assez importante et fondamentale. C'est de façon systématique que
l'entreprise Quebecair a été dénigrée. Toujours on
a parlé des 100 000 000 $ de dettes. Les états financiers de
Quebecair en date du 31 décembre 1985 - évidemment, dans des
états financiers, vous avez des dettes, mais vous n'avez pas que des
dettes dans des états financiers, vous avez aussi des actifs - montrent
110 000 000 $ de dettes, oui, et 124 000 000 $ d'actifs. C'est facile à
comprendre. C'est comme une maison que vous achetez. Vous avez une
hypothèque de 110 000 000 $, sauf que votre évaluation municipale
serait de 124 000 000 $. L'évaluation de la valeur réelle de
Quebecair est bien supérieure au montant des actifs. Dans le domaine de
l'aviation, c'est bien différent des autres secteurs d'activité.
Quand on pense à un avion, il ne faut pas y penser comme à une
auto. Quand on achète une auto, on sait qu'au bout de cinq ou six ans,
elle va être dépréciée. Quand on achète un
avion, on dit qu'un avion cela ne se déprécie pas. Cela
s'apprécie. C'est-à-dire que cela augmente de valeur constamment.
Plus encore au moment, comme c'est le cas présentement, où on vit
une diminution des coûts du pétrole, des coûts du carburant,
quand on diminue ces coûts, il y a des types d'avions qui augmentent de
prix.
On dit que le marché, dans le jargon, est "boomé".
C'était cela la réalité de la flotte d'avions dont se
départit actuellement l'acquéreur de Quebecair. Plus encore.
Qu'est-ce que le gouvernement a fait? Il n'a pas attendu l'approbation de la
Commission canadienne des transports, parce que je vous rappelle qu'il y a 58
municipalités régionales de comté, chambres de commerce,
municipalités, conseils régionaux de développement, des
régions de l'Abitibi, de la Gaspésie, de la Côte-Nord, des
Îles-de-la-Madeleine qui ont fait opposition devant la Commission
canadienne des transports à Ottawa et qui réclament un examen
public de la transaction. C'est qu'il doit y avoir un problème.
Peut-être que les députés de ces régions, comme la
députée de Matane, n'ont pas pu prendre connaissance encore de
l'ensemble des oppositions qui viennent des régions, mais elles sont
très nombreuses et publiques. Je dois vous dire que d'avoir remis, sans
l'approbation de la Commission canadienne des transports, sans qu'il y ait
encore eu clôture de la vente - parce que c'est juste une offre d'achat
qui est acceptée, il n'y a pas encore clôture de la vente, ce
n'est pas encore signé - aux mains de l'acheteur les clés de
l'entreprise Quebecair, d'avoir obligé les administrateurs à
démissionner immédiatement et de les avoir remplacés par
des administrateurs nommés par l'acheteur qui n'a pas encore conclu la
vente, des administrateurs... Le ministre le sait très bien parce que le
ministre des Transports a lui-même nommé l'avocat Raynold
Langlois, qui était procureur des acheteurs et qui se retrouve comme
administrateur à Quebecair, dont le bureau, Langlois, Trudeau, a
intenté des poursuites contre la Société
québécoise de transport et le gouvernement pour obtenir plus que
ce qui avait été consenti comme ajustement par le gouvernement
lui-même.
On peut dire que c'est un circuit assez fermé et je dois vous
dire - familial, sans doute - que dans le domaine de l'emploi, le gouvernement
ne peut pas plaider innocence. Déjà un rapport qu'il avait
lui-même commandé en date de juin dernier mentionnait que la
problématique du choix de CP Air allait amener la possibilité de
300 mises à pied et la mise à pied également de 30
à 60 pilotes sur les 110 qu'embauchait Quebecair. Le gouvernement ne
peut donc pas plaider innocence dans le domaine de l'emploi. Il a beau
maintenir que les emplois sont assurés, il y a 274 employés qui,
au moment où on se parle, sont à la recherche d'un emploi. (17 h
20)
Le ministre aurait intérêt, non pas à écouter
simplement la haute direction, mais il aurait aussi intérêt
à rencontrer ou, tout au moins, à répondre aux lettres des
employés. Des employés ont été informés
après vingt ans... Parce que Quebecair, ce n'est pas une créature
du Parti québécois et du gouvernement du Parti
québécois; Quebecair, cela existe depuis 40 ans, Mme la
Présidente, cela fait partie du patrimoine
québécois. Il y a des employés qui, après 20
ans de services, après 27 ans de services, ont été
avisés qu'ils étaient mis à pied le jour même, on a
requis leur départ. Si c'est cela, simplement gérer des fonds
publics, c'est scandaleux. Je vous remercie.
La Vice-Présidente: Merci, Mme la députée de
Maisonneuve. M. le ministre des Transports.
M. Marc-Yvan Côté
M. Côté (Charlesbourg): Mme la Présidente, je
suis extrêmement heureux d'avoir l'occasion de disposer de 25 minutes
pour être capable de répondre au genre d'affirmations qu'on vient
d'entendre de Mme la députée de Maisonneuve qui se fait le
porte-voix d'individus qui aujourd'hui, bien sûr, dans certains cas ont
perdu leur emploi et qui, dans certains cas, manipulent littéralement
Mme la députée de Maisonneuve qui elle, à son tour, tente
de manipuler aussi l'ensemble des citoyens du Québec en donnant des
demi-vérités et toute une série de faussetés que je
vais tenter, pendant les courtes 25 minutes que j'ai, de corriger.
La Vice-Présidente: M. le ministre, il y a un terme
antiparlementaire que vous avez prononcé vis-à-vis de la
députée de Maisonneuve et j'aimerais bien que vous le retiriez.
Vous avez dit "faussetés", que la députée de Maisonneuve
disait des faussetés. Vous savez, M. le ministre des Transports, que
c'est un terme antiparlementaire et je vous demanderais de le retirer.
M. Côté (Charlesbourg): On va changer cela pour
demi-vérité. Mme la Présidente, comme, effectivement, le
temps est limité, je pense que nous devrons être très
clairs et ne pas courir beaucoup de choses en même temps. Mme la
députée de Maisonneuve dit que le Parti libéral n'a jamais
parlé de privatisation durant la campagne électorale. Madame,
vous n'êtes pas sortie de l'est de Montréal, vous auriez dû
sortir, parce qu'il s'en est parlé partout. Moi, personnellement, j'ai
toujours parlé de privatisation et, au premier chapitre, de celle de
Quebecair. C'est clair et j'ai fait quelques comtés dans le
Québec et on en a parlé. C'était très clair dans le
programme du Parti libéral. Ce que je constate, c'est que vous ne savez
pas davantage lire aujourd'hui, dans l'Opposition, que vous ne saviez lire
durant la campagne électorale et c'est ce qui fait que vous ne savez pas
aujourd'hui ce qu'est la vérité.
Pour ceux qui veulent comprendre le dossier et qui ont comme objectif de
comprendre ce qui s'est passé, le dossier est effectivement très
clair, très limpide et très transparent, beaucoup plus que la
transaction ou tout ce qui a entouré la décision du gouvernement
précédent d'investir les deniers publics dans le dossier de
Quebecair en 1981. Mme la Présidente, oui, nous avons privatisé
Quebecair et je veux le dire et le redire très fort. Elle a
été vendue à l'entreprise privée, à
l'entreprise privée à laquelle elle aurait dû toujours
appartenir, n'eût été la volonté de certains
individus qui, il faut l'admettre, sur le plan idéologique partagent
très bien la volonté de Mme la députée de
Maisonneuve. C'est le rêve d'un Québec indépendant et d'une
fleur de lys sur une queue d'avion qui arrive à Paris et qui est
reçu avec tapis rouge et tambour battant. Cela a été le
rêve des Landry, cela a été le rêve de ceux qui
pensent encore que le Québec pourra devenir indépendant.
On nous a dit tout à l'heure: Cela a été fait en
plein milieu de l'été, un 31 juillet. Vous ne vous rappelez pas
la déclaration et la question que vous avez posée en Chambre le
22 mai ou le 21 mai dernier, alors que vous disiez que le gouvernement avait
annoncé par la voix de mon collègue, le député
d'Outremont, de Paris, la privatisation de Quebecair? Le 22 mai, est-ce que
c'est le 31 juillet? L'annonce des intentions du gouvernement avait
été faite dès le mois de janvier. On avait très
clairement indiqué que, fin juin, le dossier serait clos. Venir nous
dire aujourd'hui qu'on a donné des délais additionnels pour
permettre à Air Creebec de déposer une proposition était
malhonnête de la part des... Et de vouloir privatiser en plein milieu de
l'été... Voyons-donc! Trouvez d'autres raisons pour
défendre votre dossier, vous en avez véritablement besoin.
Ce qui est fondamental en ce qui concerne le dossier, Mme la
Présidente, c'est que les citoyens du Québec, eux, ont compris
depuis déjà fort longtemps. Le vote du 2 décembre 1985
était très clair et, contrairement à ce que vous dites
dans votre exposé, si on avait si mal fait, est-ce que les sondages
auraient donné au Parti libéral 2 % de plus qu'en décembre
1985 et la transaction de Quebecair était effectuée à ce
moment? Est-ce que vous dites la vérité aujourd'hui? La
population a compris et elle vous juge. Vous avez choisi d'être le
porte-parole et le porte-voix de personnes qui, aujourd'hui, dans certains cas,
subissent des diminutions de salaire et le porte-parole de certains individus
qui vous manipulent. Quant à moi, j'ai choisi d'être le
porte-parole des 6 000 000 de Québécois qui en avaient assez de
payer quotidiennement de leurs impôts et d'investir dans Quebecair 1 000
000 $ par mois en plus des dettes qu'il aurait fallu payer et dont on se
parlera tout à l'heure.
Mme la Présidente, oui, effectivement, nous avons vendu Quebecair
et elle est
vendue. C'est une question de temps quant à la finalisation du
dossier. C'est une question de temps quant à la décision de la
Commission canadienne des transports. Lorsque Mme la députée de
Maisonneuve fait allusion à quelque 50 organismes et individus qui ont
déposé un mémoire devant la Commission canadienne des
transports, ce n'est pas le fait que le député de Duplessis
envoie un mémoire à la Commission canadienne des transports qui
éclaire davantage le dossier. Cela en fait un. C'est clair. Ce n'est pas
le fait que les syndicats qu'on connaît déjà de par leur
opposition devant la Commission canadienne des transports déposent un
document, qui ajoute des éléments neufs au dossier. La Commission
canadienne des transports - il faut le dire à la population - dans les
dix dernières années n'a refusé qu'un seul cas de
transaction et c'était le cas d'une compagnie d'Angleterre qui voulait
acquérir des équipements chez nous. Cela a été
refusé et c'est la seule fois où cela a été
refusé. Dans tous les autres cas cela a été
accepté.
Pour vous dire jusqu'à quel point vous êtes
manipulés, vous vous êtes promenés et d'autres individus se
sont promenés au Québec et ont fait en sorte de mal informer les
citoyens qui, eux, sous la foi de ces informations, ont transmis des demandes
à la Commission canadienne des transports pour être entendus. Je
veux vous donner des exemples de votre mauvaise information et cela est
très clair. Prenons-en un premier et je vais vous en donner six pour
vous demander d'être prudente à l'avenir.
Vous m'avez dit en Chambre qu'il y avait un document qui était
celui de M. Dufour. Deux signatures doivent certainement suffire à vous
prouver que c'est M. Parent qui a signé. M. Parent a signé dans
les deux cas, et la lettre de transmission et le mémoire transmis au
ministre des Transports qui, à l'époque, faisait une analyse
très sérieuse de la situation le 9 avril. Bien sûr, il
voulait en tant qu'employé devenir propriétaire de Quebecair,
c'était légitime et c'était normal. Leur analyse disait
fort bien que les régions du Québec devraient être
éventuellement desservies non pas par des avions à
turbopropulseur parce que les gens là-bas ne le comprendront pas, mais
par des avions à hélices. Ce que d'ailleurs Air Canada a
annoncé hier, les partenaires d'hier des gens et des employés.
C'est là que cela a accroché, parce que les pilotes voulaient
maintenir la flotte de Boeing 737.
Lorsque vous parlez de M. Glenn, le spécialiste, s'il
était si influent, M. Glenn, et si connaissant dans le monde de
l'aviation, comment cela se fait-il que la compagnie qui a commandité
l'étude n'a pas retenu ses brillantes recommandations et qu'elle a
annoncé hier, même dans le cas de Nordair, qu'ils allaient
maintenant desservir les régions avec des avions à
hélices, ce que fait actuellement Nordair Metro? Expliquez-moi cela?
Le deuxième dossier. Lors des engagements financiers,
informé par ceux qui étaient dans mon dos, vous vous en
souviendrez, vous m'avez interrogé sur le fait que Lavalin n'avait pas
engagé une seule personne alors qu'il devait y en avoir dix. Je vous ai
dit: Méfiez-vous des informations que vous avez. Mes informations sont
en ce sens qu'il y en a et j'ai vérifié. Il y en a quatorze, non
pas dix, mais quatorze, une deuxième mauvaise information.
Troisièmement, la semaine dernière, vous êtes
intervenue en parlant de M. Desmond Ryan, probablement une carte d'affaire
refilée par quelques employés frustrés qui cherchent les
bibites un peu partout pour tenter de mettre du sable dans l'engrenage au lieu
de collaborer à faire de Quebecair actuelle une compagnie rentable dans
laquelle ils peuvent obtenir des actions, s'ils le veulent, comme
employés et éventuellement encaisser des profits. Vous avez dit:
M. Desmond Ryan, c'est la preuve très claire, deux cartes d'affaire.
Est-ce qu'on vous avait dit en même temps que M. Desmond Ryan
n'était payé que par une seule compagnie maintenant, depuis le
1er août, depuis le moment où les nouveaux acquéreurs ont
pris la responsabilité de l'administration de Quebecair? Est-ce qu'on
vous a dit qu'il occupait le poste par intérim en prenant le temps de
trouver un successeur? On a oublié de vous dire cela. Tout ce qu'on vous
a donné ce sont deux cartes, et vous êtes partie avec deux cartes
en disant: Voilà la preuve irréfutable que les gens de Nordair
Metro prennent le contrôle total de Quebecair et que c'est Nordair Metro
qui en tirera profit. (17 h 30)
Quatrièmement, les transactions financières. Document que
vous avez déposé vendredi dernier lors d'une conférence de
presse; c'est très clair et ce n'est pas mon document, c'est le
vôtre. Engagement qui n'aurait pas été pris par les
employés de Quebecair. Location du hangar à conifères: 3
000 000 $ par le gouvernement; par les employés, aucun. Ce qui est
totalement faux! Totalement faux! Vérifiez entre 423 000 $ et 450 000 $
par année sur dix ans, cela fait de 4 230 000 $ à 4 500 000 $ par
rapport à 3 000 000 $, c'est donc 1 000 000 $ de plus que coûtait
l'offre des employés par rapport à celle de Nordair Metro. La
vérité a tout de même ses droits, la vérité a
ses droits, et c'est, elle, la vérité toute crue.
Autre dossier. Lorsque vous vous êtes levée sur un
pseudo-scandale avec les cadeaux des Boeing 737 à CP Air, c'était
épouvantable, on avait fait un cadeau de millions de dollars, sauf qu'on
avait oublié de
vous informer que cela avait été effectivement payé
en dollars américains. Moi, au moins, j'ai eu la précaution,
parce que le doute s'est installé dans mon esprit lorsque vous avez
posé la question, croyant que vous étiez bien informée, le
doute s'est installé dans mon esprit et je suis allé
vérifier, contrat en main. J'ai même pu croire un certain moment
que le nouveau patron de la députée de Maisonneuve était
saint Thomas, et j'ai dit: II me faudrait une photocopie du chèque. J'ai
déposé aujourd'hui photocopie du contrat et photocopie du
chèque.
Le quatrième dossier sur lequel vous avez erré au sujet
des Boeing 737. Encore sur les mises à pied. Et vous venez de le
répéter aujourd'hui. Vendredi dernier, vous disiez à la
presse: 274 mises à pied... Je vais vous informer pour vous donner le
score très juste, permettez-moi l'expression "l'heure juste" au sujet
des emplois à Quebecair, ce qui est très clair. Vendredi dernier,
vous avez dit: II y a 274 personnes de mises à pied. C'était
faux! Et j'espère que ce n'est pas antiparlementaire, Mme la
Présidente. C'était faux parce que, vendredi dernier, le 24
octobre, il y avait 106 personnes mises à pied et 58 personnes qui
avaient démissionné pour un total de 164. C'était cela la
vérité le 24, au moment où vous avez fait votre
conférence de presse.
M. Filion: Question de règlement, Mme la
Présidente.
La Vice-Présidente: Question de règlement, M. le
député de Taillon.
M. Filion: Pourriez-vous rappeler au ministre des Transports que,
en vertu de nos règles, il doit s'adresser à la présidence
et non pas à un député en particulier?
La Vice-Présidente: S'il vous plaît: Effectivement,
en vertu des règles de cette Chambre, tout orateur qui a la parole doit
s'adresser à la présidence et j'aimerais que ce règlement
soit respecté.
M. Côté (Charlesbourg): Mme la
Présidente, je vais respecter... Et le député de
Taillon, dans ce cas-là, avait fort raison. Je ne peux m'adresser
à la députée de Maisonneuve, je vais m'adresser à
vous en étant fort conscient que vous allez transmettre
intégralement à la députée ce que j'ai à
vous dire.
Oui, effectivement, Mme la Présidente, lorsque la
députée de Maisonneuvre - ça va aller comme cela? Cela va
pour le député de Taillon? - a, vendredi dernier, informé
la population qu'il y avait 274 emplois de perdus, c'était faux! Il y en
avait 106, et 58 personnes avaient décidé d'aller ailleurs. Pour
vous tenir au fait, Mme la Présidente, de ce qui se passe chaque jour et
pour vous prouver que nous suivons, aujourd'hui même, la situation est
différente puisqu'il y a effectivement d'autres personnes qui ont
été mises à pied, pour votre information. Le nombre n'est
plus de 164 puisqu'il s'est ajouté d'autres personnes qui ont
été mises à pied. Nous suivons quotidiennement la
situation, et notre but est d'informer la population. Dans ce cas-là
comme dans les autres cas, vous avez erré et vous avez très bien
erré, Mme la Présidente, par l'entremise de la
députée de Maisonneuve, sur le dossier. Je ne veux pas
prêter de mauvaises intentions à la députée de
Maisonneuve puisque je pense qu'elle est sincère dans ce dossier et
qu'elle veut transmettre de l'information à la population, mais ce sont
ses sources d'information qui, elles, visent autre chose. C'est là que
j'ai dit, Mme la Présidente, que la députée de Maisonneuve
était manipulée.
Quel aurait été l'idéal dans le dossier de
Quebecair? On peut leur en parler puisqu'ils étaient au pouvoir à
ce moment-là. Le rêve de l'aviation de tous les francophones a
toujours été de faire une fusion entre Nordair et Quebecair pour
avoir un transporteur de deuxième niveau dans tout le Québec. Qui
a fait "foirer" la transaction en 1981? C'est exactement celui qui,
aujourd'hui, est un conseiller extérieur, qui s'appelle Bernard Landry,
parce que lui, je peux le nommer, il n'est plus député et, Dieu
merci, il ne le sera plus jamais. Bernard Landry, oui. Parce qu'il a
étudié à Paris, il a, comme plusieurs des citoyens d'en
face, fait le rêve de débarquer à Paris, de faire
dérouler le tapis rouge avec une fleur de lys sur la queue de l'avion.
C'était cela, le rêve de ces gens-là. Avec la
complicité de celui qui, aujourd'hui, est directeur du cabinet du chef
de l'Opposition, qui était ministre des Transports et qui est intervenu
dans le dossier, qui a réglé le dossier alors que le ministre des
Finances de l'époque, M. Parizeau, était à
l'extérieur du Québec, à Paris - la vérité a
ses droits - et on lui a trafiqué cela dans le dos au Conseil des
ministres pendant qu'il était à Paris. Ce n'est pas
étonnant qu'hier il ait répété que Quebecair devait
être privatisé. Dieu sait que, sur le plan idéologique, il
y a certains liens entre la pensée de M. Parizeau et celle de Mme la
députée de Maisonneuve.
Oui, effectivement, pourquoi a-t-on privatisé Quebecair? Pour
quatre raisons fondamentales. La première, parce que Quebecair
était devenue ingouvernable. Les dirigeants de Quebecair, ceux qui
avaient des postes très élevés, n'allaient plus au bureau
du ministre des Transports de qui ils relevaient mais avaient porte ouverte au
bunker, où résidait soi-disant la crème du PQ à
l'époque, et au cabinet du premier ministre. Année après
année, on a fait miroiter les possibilités d'un Quebecair
rentable. Je vais vous donner deux exemples. Si chacun lisait les
documents que nous avons déposés... personne ne peut contester
ces documents. Nous avons travaillé, mon collègue d'Outremont et
moi-même, avec nos équipes pour tenter de mettre la
vérité sur la place publique. Ce sont des documents qui peuvent
être discutés n'importe quand. Amenez des preuves contraires aux
chiffres qu'il y a là-dedans. En 1985, les dirigeants de Quebecair
disaient: Déficit prévisible de 3 700 000 $ Résultat
mirobolant: 11 900 000 $, comme dans certains cas, cautionné par
l'administration précédente. Le 31 décembre, on vendait un
Boeing 737 pour diminuer le déficit et on arrivait avec un
déficit de 8 400 000 $. On avait dit qu'il y aurait redressement en
1986...
Une voix: Par le nolisement.
M. Côté (Charlesbourg): Oui, par le nolisement...
redressement du déficit prévu de 3 500 000 $ alors que, dans les
six premiers mois de l'année, il y avait un déficit
d'exploitation de 1 000 000 $ par mois. C'est cela. Si Quebecair était
devenue ingouvernable, c'était votre faute et votre
responsabilité comme gouvernement. Ce que vous avez fait, c'est que vous
avez toujours cautionné et mis de l'argent non pas pour des principes de
saine administration, pas pour que l'entreprise privée puisse, elle,
demeurer responsable de ce qu'elle doit être, soit l'aviation à
travers le Québec, mais vous avez cautionné l'administration en
place pendant bien longtemps et il y a des documents pour le prouver.
Très rapidement, je parlerai d'un document que j'ai eu la chance
de trouver. C'est celui qui est signé par le président du
comité de vérification. Très intéressant! Il est
signé par tous les membres du comité de vérification dont
les noms vous sont très bien connus: Mme Denise Martin qui, je pense, a
été une très bonne collaboratrice du député
actuel de Taillon et du leader de l'Opposition, à l'époque du
ministère du Travail, une personne très reconnue; M.
Réjean Blain, de même que M. Vézina, président de la
Régie de l'assurance automobile. C'est clair. Voici ce qu'ils disaient
en février 1986 de l'administration que vous nous avez laissée:
"II s'agit bien plus de comportements et d'attitudes qui font que les membres
du conseil d'administration ont beaucoup de difficulté,
premièrement, à suivre le cheminement du raisonnement et de la
logique qui déterminent les décisions de la direction;
deuxièmement, à bien saisir les motifs de changement de cap;
troisièmement, à porter sur des projets précis un jugement
éclairé, faute d'information et d'outils d'appréciation;
quatrièmement, à saisir l'évolution de la situation de
l'entreprise, faute de rapports réguliers, simples, concis et
présentés sous une même forme; cinquièmement,
à poser des questions qui semblent trop souvent apparaître comme
étant non pertinentes et déplacées par rapport à
une bonne connaissance du secteur de l'aviation civile." (17 h 40)
Je ne veux pas tout vous lire, mais il y a encore des petits bouts. Vous
verrez que vous aviez un bon contrôle sur l'administration de Quebecair.
Vous ne saviez pas ce qui se passait là-dedans parce qu'il n'y avait pas
de volonté de savoir. Je n'ai parlé à personne des lois
ailleurs.
Mme la Présidente, plus loin, on dit: "Nous doutons que les
calculs concernant les coûts de revient et les projections des ventes de
nouveaux projets présentés au conseil d'administration ont
toujours originé ou ont toujours été validés par le
service des finances. Nous nous interrogeons également sur la
qualité des calculs des prix de revient puisqu'ils semblent être
volatiles et s'adapter aux circonstances. "En effet, il faudrait plutôt
tenter de répondre aux questions suivantes - écoutez bien et
prenez des notes parce que cela s'est passé sous votre
responsabilité, sous votre administration - premièrement, qui a
décidé de l'opération cargo? À partir de quelles
études et analyses? Qui a décidé de l'achat de
l'équipement? Combien cela a-t-il coûté et combien en
coûte-t-il pour les conserver dans nos hangars? Deuxièmement, qui
est ou où sont les responsables de la perte encourue dans la faillite
Jet Lines. Le vérificateur externe est d'avis que le
vice-président aux finances ne peut être mis en cause.
Troisièmement, qui a entraîné l'entreprise sur de nouvelles
routes en faisant miroiter des marchés qui se sont avérés
ou bien inexistants - voir le poisson de Sept-Îles -ou bien beaucoup plus
compétitifs que prévu sur Boston, Toronto, New York en termes de
nolisement?"
Ce n'est pas Marc-Yvan Côté, ministre des Transports, qui
pose ce jugement-là, ce sont des gens que vous avez nommés au
conseil d'administration de Quebecair qui ont porté un jugement sur
l'administration. Et c'était votre responsabilité de la
surveiller. Vous nous avez donc laissé un bébé mal
administré à cause de votre volonté de voir flotter dans
les airs une compagnie qui véhiculait à l'extérieur la
fleur de lys et c'était là l'essentiel de vos
préoccupations.
Quebecair, il faut le dire, était techniquement en faillite. Il
faut se le dire parce que la vérité est là. Au cours des
deux dernières années, 12 000 000 $ de déficit ou à
peu près, c'est très important. Des dettes accumulées
d'au-delà 60 000 000 $, dont 11 000 000 $ exigibles en 1986 et 31 000
000 $ exigibles au cours des quatre prochaines années, c'est clair, vous
nous avez laissé le bébé et vous avez
dit: Débrouillez-vous avec.
Plus que cela, Mme la Présidente, au mois de juillet dernier le
président du conseil d'administration, M. Lizotte, m'avait
demandé 8 000 000 $ additionnels pour être capable de finir
l'année.
C'est clair que la qualité du service aux régions a
été notre préoccupation et les emplois aussi. Si nous
avions fait ce que le PQ voulait que l'on fasse, soit obtenir le plus grand
prix en faisant abstraction des emplois, nous aurions effectivement reçu
beaucoup plus au plan monétaire et cela aurait aidé à
éponger davantage le déficit, l'impasse de 1 700 000 000 $ que
vous nous avez laissé. Mais non, nous avons décidé de
jouer franc jeu, livres ouverts. Lorsque j'entends l'Opposition venir nous
critiquer sur la transparence et exiger une commission parlementaire pour faire
toute la lumière, c'est avoir une mémoire sélective des
événements du passé. Je ne voudrais que vous citer les
louches silences de M. Clair. Puisque vous avez tantôt cité M.
Alain Dubuc, permettez-moi de le faire aussi et de vous renvoyer la pareille.
Et c'était très clair.
Il disait: "En principe, les chiffres cités plus haut auraient pu
être connus de tous. Pourtant, il a fallu fouiller, gratter pour les
obtenir parce que le ministre des Transports, Michel Clair, a placé son
intervention sous le sceau du plus grand secret. Ce n'est que harcelé
à l'Assemblée nationale qu'il a consenti à
révéler quelques éléments du casse-tête au
compte-gouttes, à coups de demi-vérités, ce qui est le lot
de ce qui nous est véhiculé aujourd'hui."
Puisqu'il ne me reste qu'une minute, Mme la Présidente, je peux
vous dire que la transaction qui a été faite l'a
été dans les plus grands intérêts de l'ensemble des
citoyens du Québec qui aujourd'hui n'ont plus, et depuis le 1er
août, à payer le déficit d'opération de Quebecair,
puisque ce sont les nouveaux actionnaires et acquéreurs qui paient de
leur propre poche les déficits d'opération.
Les gens des régions, puisque vous en parlez souvent, n'ont plus
à payer, comme le disait le député de Matapédia,
deux tickets que vous leur avez imposés, le premier pour prendre l'avion
et le deuxième à même leurs propres taxes, pour payer les
déficits d'exploitation de Quebecair. C'était cela la
vérité, c'était cela l'héritage que vous aviez
laissé aux régions et c'est pour cela que vous avez mangé
une bonne volée sur le plan électoral le 2 décembre et
que, dans la veine où vous allez, vous êtes en train de vous en
préparer une superbe pour les prochaines. Laissez-moi vous dire qu'on va
continuer de vous surveiller. Faites votre travail d'Opposition comme vous
devez le faire, à l'Assemblée nationale et arrêtez d'aller
dans les régions colporter toutes sortes de
demi-vérités...
La Vice-Présidente: M. le ministre, pourriez-vous
conclure?
M. Côté (Charlesbourg): Merci, Mme la
Présidente.
La Vice-Présidente: Merci, M. le ministre des Transports.
En réplique, M. le député de Bertrand.
M. Jean-Guy Parent (réplique)
M. Parent (Bertrand): Merci, Mme la Présidente. Conclure
après quatre heures de mini-débat sur la question de la
privatisation et la demande qui a été faite d'un moratoire, d'une
commission parlementaire, ce n'est pas facile d'arriver à une
conclusion. Cependant, dans un premier temps, je prendrai les derniers propos
du ministre des Transports et lui rappelerai que s'il trouvait honteux que les
Québécois aient à payer une facture d'environ 1 000 000 $
par mois pour assurer le transport aérien avec Quebecair, il faudrait
peut-être se rappeler qu'actuellement les mêmes
Québécois paient environ 20 000 000 $ pour le transport en commun
dans la seule ville de Montréal.
Vous avez eu votre tour, M. le ministre. Si vous le permettez, Mme la
Présidente, j'aimerais être respecté aussi. Quand cela fait
mal, on crie fort de l'autre côté.
La Vice-Présidente: S'il vous plaît: S'il vous
plaît! Continuez, M. le député de Bertrand.
M. Parent (Bertrand): Le ministre délégué
à la Privatisation mentionnait la semaine dernière que le
député de Bertrand n'était pas tellement au courant de ce
qui se passait ou de ce qui s'était passé ces dernières
années dans le milieu des affaires. Je me permets de rappeler, avec
toute la dignité et le respect du ministre, que je pense avoir fait ma
marque dans ce domaine et je n'aimerais pas que l'arrogance du ministre
à ces propos fasse en sorte qu'on puisse engendrer un débat sur
ce point. Cependant, je rappellerais au ministre délégué
à la Privatisation qu'il s'est passé des choses dans le milieu
des affaires entre 1960 et 1986. Et lorsque le ministre mentionne que, durant
toute cette période, il s'est passé des choses, mais que la vraie
question sur le dossier de la privatisation actuellement qu'il faut se poser,
c'est s'il y a des gens ici capables d'assumer les responsabilités... Si
le député de Bertrand veut se poser ces questions, moi je connais
les réponses. Et là il a enchaîné avec plusieurs
exemples que le milieu des affaires
avait évolué.
J'aimerais, dans un premier temps, dire que, moi aussi, j'ai
évolué dans ce milieu des affaires que je respecte
énormément. Je pense que le milieu des affaires, que l'ensemble
des Québécois et des Québécoises qui ont
évolué ces dix ou quinze dernières années ont
marqué beaucoup de points en ce qui a trait à leur
capacité de prendre leurs responsabilités. Lorsque le ministre
qui est responsable de la privatisation, de même que tous ses
collègues du Parti libéral qui forme le gouvernement, s'appuient
sur cette donnée, je pense qu'on a manqué un peu le débat.
Je pense que c'est un peu pour cette raison qu'il faudrait assurément
avoir un débat beaucoup plus prolongé parce qu'on ne s'entend pas
où on est rendu dans le développement au Québec. (17 h
50)
Moi aussi, je connais les Serge Saucier, les Bernard Lamarre de Lavalin,
les Pierre Péladeau, les Perron de Normick-Perron, les Beaudoin, les
Royer de Bombardier. Ce sont des gens pour qui j'ai beaucoup d'estime. Ce sont
des gens de qui, je pense, on peut dire qu'ils sont rendus à avoir des
entreprises qui ont fait beaucoup de chemin. Cependant, entre cela et remettre
aujourd'hui l'ensemble des sociétés d'État au secteur
privé, je pense qu'il y a une marge. Je m'explique. Une marge dans le
sens que les sociétés et particulièrement là
où s'engage un débat de fond concernant l'avenir de ce qui va se
passer avec la Société générale de financement et
particulièrement de Dofor, j'aimerais qu'on puisse nous nommer ici
à l'Assemblée nationale une entreprise québécoise
qui aura les reins, les moyens financiers d'acheter le bloc de 28 % des actions
de la compagnie Domtar.
Oui, parce qu'on parle de 400 000 000 $, 450 000 000 $, strictement sur
ce bloc d'actions. J'aimerais savoir quelle est la compagnie
québécoise qui aura les reins assez solides pour le faire. Je ne
dis pas qu'on n'a pas des fleurons, des entreprises et des hommes d'affaires
qui n'ont pas évolué. Prenons le cas de Québécor,
par exemple. Ses actifs se situent autour de 200 000 000 $, 250 000 000 $.
Chapeau, M. Péladeau. Attention! On n'est pas capable de prendre seuls
la relève. On ne s'entend pas nécessairement sur la
maturité. Là où on ne s'entend pas non plus, c'est sur le
rôle que doit jouer le gouvernement du Québec rendu en 1986. D'une
part, on nous dit: On doit se retirer. Je viens du secteur privé. Il y
en a d'autres dans cette salle qui viennent du secteur privé. Je pense
qu'on est d'accord pour que l'État soit le moins interventionniste
possible.
Là-dessus, je suis d'accord et ma position est très
claire, sauf à des conditions. Ces conditions doivent être
respectées que ce soit pour les emplois, pour protéger, au
Québec, les intérêts entre les mains des
Québécois, que ce soit pour la continuité. Je pense que ce
sont des points drôlement importants. Je ne pense pas qu'on ait la
réponse lorsqu'on la cherche particulièrement dans le cas du
dossier de Dofor.
Ce qu'on ne réalise pas c'est qu'au cours des dernières
années il y a eu un chemin de fait. Le ministre
délégué à la Privatisation a rendu un hommage, si
on peut dire, en disant: Oui, c'est merveilleux ce qui s'est passé ces
dernières années, chapeau à la communauté. Mais
oui, mais cela s'est passé et cela s'est passé sous
différents gouvernements. Je ne pense pas que ce soit seulement à
cause des gouvernements, mais si aujourd'hui on a des entreprises qui sont
rendues à une plus grande maturité, si on a des gens qui
commencent à entrevoir des marchés internationaux, à
s'implanter un peu partout à travers le monde, c'est parce qu'on leur a
fourni ces dernières années des outils de développement.
C'est parce qu'on leur a fourni des supports, c'est parce qu'on a
été des tuteurs.
Là où on ne s'entend pas, c'est qu'on ne peut pas remettre
à l'entreprise privée tout le paquet demain matin sur un plateau
d'argent. On ne peut pas faire cela, Mme la Présidente. On n'a pas la
capacité de le faire et on le verra de par les offres qui seront
apportées de ce côté. C'est là qu'on ne s'entend
pas. Ce n'est pas un petit débat politique pour faire de la
politicaillerie. Je pense que le débat s'élève au-dessus
de cela.
Est-ce qu'on a réalisé que dans le domaine des pâtes
et papiers au Québec, on a investi, entre 1977 et 1985, au-delà
de 4 000 000 000 $ seulement dans la modernisation des équipements?
Est-ce qu'on réalise que tout cela s'est produit au Québec parce
que le gouvernement du Québec agissait comme bras financier dans Domtar
et dans Donohue? 1 200 000 000 $ dans cette période à Domtar
à Windsor; 79 000 000 $ à Dolbeau, toujours à Domtar.
À Saint-Félicien, Donohue: 300 000 000 $ investis. À
Clermont, Donohue: 150 000 000 $. À Amos, Donohue: 200 000 000 $. 2 000
000 000 $ d'investis dans ces deux entreprises, Domtar et Donohue, dont, comme
Québécois, nous sommes propriétaires.
Ce qu'il faut comprendre c'est que la concurrence sur le marché
international fait en sorte qu'on a à peine rejoint les grands dans ce
domaine. Que ce soit les États-Unis, que ce soit la Scandinavie, le
Québec n'arrive pas à la cheville de ces gens par rapport
à la récupération qu'il a faite et je m'explique. On devra
au cours des années 1986 à 1996, au cours des dix prochaines
années, au Québec, investir dans le domaine des pâtes et
papiers au-delà de 4 000 000 000 $, c'est-à-dire, au cours des
dix prochaines années, une moyenne de
400 000 000 $ strictement pour continuer à être capables de
garder une concurrence au niveau international. Quelle entreprise au
Québec aura les reins assez forts pour être capable non seulement
de financer l'acquisition des blocs d'actions de Donohue et de Domtar, mais de
mettre les sommes nécessaires à la recherche et au
développement, de mettre les montants nécessaires pour moderniser
les équipements, parce que la concurrence internationale est
féroce dans ce domaine? C'est là qu'il faut voir. C'est pour cela
que, si le gouvernement veut se retirer graduellement, on en discutera en
commission parlementaire.
Au cours de l'année 1985, il y a eu des émissions
d'actions pour au-delà de 80 000 000 $. Un député a
mentionné précédemment: L'Opposition chiâle,
critique et ne fait aucune proposition. Bien oui, et à l'émission
qui passera ce soir, Tribune, dans une face à face que j'ai
enregistré hier soir avec le ministre de l'Industrie et du Commerce, il
y a eu des suggestions de faites, vous verrez ce soir. J'ai
apprécié - vous le verrez - que votre collègue, le
ministre de l'Industrie et du Commerce, ait eu une ouverture par rapport
à la commission parlementaire, puisqu'il parle d'une possibilité
au mois de janvier. Il y aurait peut-être lieu que vous vous consultiez.
Ce même ministre de l'Industrie et du Commerce vient de la grande
entreprise. Il vient de Power Corporation, et il sait ce que c'est, il sait ce
dont on parle. Mais le 30 ou le 31 mai, le journal Les Affaires citait que le
ministre de l'Industrie et du Commerce était inquiet: Doit-on conserver
les sociétés d'État? Qu'est-ce qu'on doit faire avec la
SGF? Je pense que ce sont des préoccupations.
Mme la Présidente, étant donné que le temps nous
presse, je vous dirai qu'il y a des questions à se poser. J'ai
préparé une douzaine de questions. Si, à toutes ces
questions, les députés dans cette Chambre, d'un côté
ou de l'autre, sont capables de répondre, c'est parce qu'on est capable
de procéder à ce que le gouvernement dit avoir comme mandat. Mais
je ne pense pas qu'on ait ces réponses. Je les cite en terminant, les
questions et les vraies questions qu'il faut se poser en cette Chambre en tant
que responsables de l'avenir économique du Québec.
Qui, au Québec, peut acheter le bloc d'actions de 28 % de la
Domtar, c'est-à-dire faire un déboursé de l'ordre de 400
000 000 $ à 450 000 000 $? Qu'arri-vera-t-il si la Consolidated
Bathurst, propriété de Power Corporation, achète Domtar?
Que se passera-t-il si l'acheteur, que ce soit l'acheteur de Donohue ou de
Domtar, se départit de ses intérêts dans un an ou deux en
faveur d'entreprises étrangères? Qu'arrivera-t-il? Qu'est-ce
qu'on fera à partir de cela?
Quatrièmement, est-ce qu'on est conscients que, pour
l'acquéreur, il faudra investir chaque année, dans le domaine de
la recherche, du développement et de la modernisation, plus de 400 000
000 $? Est-ce que la Société générale de
financement sans Dofor peut jouer le rôle de premier plan qu'elle joue
actuellement dans le développement économique?
Pourquoi et en vertu de quoi, Mme la Présidente, peut-on vendre
des actifs de Dofor, des actifs, soit dit en passant, rentables, parce qu'on
fait au-delà de 4 000 000 $ de profits par mois au moment où on
se parle. En vertu de quelle stratégie se débarrasse-t-on
actuellement des intérêts qu'on a dans les produits forestiers?
Qu'arrivera-t-il à notre nouvelle politique forestière dans le
cas où le bloc d'actions de Domtar serait acheté par Consol?
Avez-vous réalisé que 40 % des concessions forestières au
Québec viendraient dans les mains d'un seul propriétaire?
Posez-vous ces questions-là.
Quel est le plan de stratégie du développement
économique au Québec de ce gouvernement? Qu'est-ce qui presse et
qu'est-ce qui est si urgent actuellement pour passer le rouleau compresseur sur
des sociétés d'État, puisqu'on n'a pas affaire à un
canard boiteux, on ne perd pas d'argent à tous les mois? Le journal
Finances du 13 octobre - et je termine là-dessus - Mme la
Présidente, mentionnait que dans la seule semaine du 6 octobre, la
compagnie Dofor qu'on veut vendre a pris une plus-value de 28 000 000 $. En une
seule semaine, Mme la Présidente.
Est-on conscient que dans le dossier de la vente de Dofor, seulement
dans cette période, on a fait un gain en termes de
Québécois, et cela nous appartient?
Dernière question. Lorsqu'on aura vendu notre plus important
coffre d'outils et payé les dépenses courantes, qu'est-ce qui va
arriver l'année prochaine et dans les années futures pour
renflouer les coffres de l'État?
Je n'ai pas la prétention ni ma formation politique, Mme la
Présidente, d'avoir le monopole de la vérité, mais je ne
pense pas non plus que de l'autre côté on ait le monopole de la
vérité et, pour cette raison, nous demandons un débat
public. Je vous remercie beaucoup.
Des voix: Bravo!
La Vice-Présidente: Merci, M. le député de
Bertrand. Le débat étant clos, nous allons mettre aux voix la
motion du député de Bertrand.
M. Chevrette: Mme la Présidente, il y a eu une entente
pour reporter le vote à demain.
La Vice-Présidente: Y a-t-il consentement pour le report
du vote?
M. Gratton: Mme la Présidente, je suggère, comme le
prévoit l'article 223, qu'on prenne le vote aux affaires courantes
demain.
La Vice-Présidente: Le vote sera donc reporté aux
affaires courantes de demain et nous allons ajourner nos travaux jusqu'à
14 heures demain.
(Fin de la séance à 18 h 1)