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Version finale

33rd Legislature, 1st Session
(December 16, 1985 au March 8, 1988)

Wednesday, October 29, 1986 - Vol. 29 N° 54

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Journal des débats

 

(Dix heures huit minutes)

Le Vice-Président: À l'ordre, s'il vous plaît! Veuillez prendre place.

Un moment de recueillement, s'il vous plaît.

Veuillez vous asseoir. L'Assemblée nationale entreprend ses travaux en ce mercredi 29 octobre 1986. Nous en sommes aux affaires du jour. M. le leader du gouvernement.

M. Gratton: M. le Président, je vous prierais d'appeler l'article 25 du feuilleton, s'il vous plaît.

Projet de loi 78

Prise en considération du rapport de la commission

Le Vice-Président: Donc, à l'article 25, nous allons procéder à la prise en considération du rapport de la commission du budget et de l'administration déposé le 21 octobre 1986, commission qui a procédé à l'étude détaillée du projet de loi 78, Loi modifiant diverses lois fiscales afin de donner suite à l'énoncé de politiques budgétaires du gouvernement du 18 décembre 1985. La parole est à M. le leader du gouvernement.

M. Michel Gratton

M. Gratton: Merci, M. le Président. Très brièvement, il n'est peut-être pas inutile de rappeler que, comme l'indique le titre du projet de loi, il s'agit de donner suite aux dispositions du discours sur le budget que prononçait le ministre des Finances le 18 décembre 1985, c'est-à-dire au lendemain de l'élection du 2 décembre qui devait donner un gouvernement libéral au Québec.

On se rappellera qu'en cours de la campagne électorale le Parti libéral avait pris un certain nombre d'engagements dont certains portaient sur les taxes et impôts. Dès après l'élection, le premier ministre avait décrété la tenue d'une mini-session convoquée d'urgence qui avait permis au ministre des Finances de déposer un budget, lequel prévoyait dans les grandes lignes trois dispositions qui donnaient suite à des engagements électoraux.

Notamment, le discours sur le budget du 18 décembre prévoyait l'exemption des primes d'assurance individuelle de personnes. C'est ainsi que dans le projet de loi 78 on retrouve les dispositions qui traduisent de façon légale cette intention, cette décision du ministre des Finances. De même le projet de loi modifie la Loi sur les impôts afin d'abaisser les taux marginaux d'imposition d'une certaine catégorie de travailleurs, réduction qui était d'ailleurs prévue dans la réforme fiscale de l'ex-gouvernement mais qui devait s'appliquer à compter du 1er janvier 1987. Or, en campagne électorale, le Parti libéral avait indiqué qu'on devancerait d'un an ces réductions des taux marginaux pour qu'ils s'appliquent à compter du 1er janvier 1986, ce que vient consacrer le projet de loi 78.

Finalement, le troisième point parmi les plus importants que contient le projet de loi 78, ce sont les modifications à la Loi concernant la taxe sur les carburants afin de prévoir la réduction du taux de la taxe sur les carburants dans certaines régions périphériques, de même que la date de prise d'effet des règlements adoptés à cet égard. On se rappellera que, dans un premier temps, le gouvernement antérieur avait commencé à détaxer certaines régions, notamment les régions frontalières à la suite de représentations de l'Opposition au lendemain de l'imposition de la surtaxe de 20 % sur l'essence. Nous avions fait valoir dans l'Opposition qu'on incitait à l'évasion fiscale surtout dans les régions frontalières puisque les gens retrouvant un certain avantage à aller s'approvisionner en carburant du côté soit de l'Ontario, soit des États-Unis, cela avait pour effet d'inciter les gens également à acheter d'autres produits, d'autres services, ce qui constituait une occasion d'évasion fiscale.

Le gouvernement précédent avait, en quelque sorte, établi ces régions d'exception à la taxe sur les carburants, et le ministre des Finances, dans son discours sur le budget du 18 décembre, a fait en sorte que certaines régions dites périphériques, notamment l'Abitibi, le Saguenay—Lac-Saint-Jean, la Gaspésie et une partie de l'Outaouais puissent jouir d'une détaxation, selon les régions, soit de la moitié de la surtaxe, de façon à permettre aux utilisateurs, aux automobilistes de ces régions éloignées qui ont un besoin accru d'utiliser leur automobile de façon beaucoup plus régulière, de bénéficier d'exemption de cette surtaxe sur l'essence.

Voilà en bref, les principaux éléments du projet de loi 78. Évidemment, il y a d'autres articles de concordance. Le tout a fait l'objet d'une étude détaillée en commission parlementaire et, puisque nous en sommes à l'étape de la prise en

considération du rapport, j'indique tout de suite que, dès l'adoption du rapport et le plus tôt possible, nous procéderons à la prochaine étape qui est l'adoption du projet de loi de façon que ces dispositions, qui sont déjà en vigueur depuis le 18 décembre, faut-il le rappeler, retrouvent leur fondement légal le plus tôt possible.

Le Vice-Président: Je cède maintenant la parole à M. le député d'Abitibi-Ouest et leader adjoint de l'Opposition.

M. François Gendron

M. Gendron: M. le Président, je voudrais juste prendre quelques minutes pour exprimer mon point de vue concernant la prise en considération du rapport sur le projet de loi 78 qui a fait l'objet d'une étude en commission parlementaire, même si c'est mon collègue, le député de Lévis, critique en ces matières, qui a participé très activement à cette commission - s'il arrive -qui devrait être notre porte-parole dans ce débat.

Je voudrais quand même profiter de l'occasion pour faire quelques remarques. Le ministre du Revenu a correctement identifié que ce projet de loi, c'est un projet de loi qui donne suite à l'énoncé de politiques budgétaires du gouvernement du 18 décembre 1985. C'est exact. Nous avions en commission parlementaire le mandat d'étudier article par article les suites à être données à cet énoncé de politiques.

Dans les notes explicatives, on explique à la population que c'est à la suite de l'énoncé complémentaire du budget présenté par le ministre des Finances qu'il y avait lieu de présenter ce projet de loi. Cependant, on aurait pu très bien le titrer "Suite partielle à être donnée aux engagements électoraux du Parti libéral" puisque, contrairement aux attentes que l'Opposition et la population pouvaient avoir, ce n'est que très partiellement dans certains cas que ce projet de loi donne suite aux engagements que ces gens-là avaient pris, en particulier pour tout le volet de l'assurance.

Rappelez-vous que la nuance qu'on a établie dans le projet de loi n'a jamais existé en termes d'engagement électoral lors de la campagne. On avait dénoncé, décrié comme ce n'est pas possible l'imposition de cette taxe inique, disait-on de l'autre côté, cette taxe qui va à l'encontre de toutes les traditions québécoises qui veulent que l'assurance soit une protection, une espèce de notion d'épargne qu'on transfère pour une protection pour l'avenir. Dans ce sens, je pense que, entre le discours que ces gens-là ont tenu sur cette disposition et la réalité qu'ils ont appliquée dans le budget du mois de décembre, il y avait tout un écart, en particulier, en restreignant uniquement la non-taxation aux assurances de caractère personnel, les assurances qu'on prend individuellement, les primes d'assurance individuelle, lorsqu'on sait que, majoritairement, la plupart des Québécois et des Québécoises ne s'assurent pas de cette façon, mais bénéficient plutôt d'une assurance-groupe, d'une assurance collective. Bien sûr, si ces formes d'assurance avaient été détaxées, cela aurait été beaucoup plus avantageux pour les citoyens et les citoyennes du Québec, comme il avait pris l'engagement en campagne électorale d'éliminer complètement toute notion de taxe concernant les assurances.

M. le Président, rapidement, qu'est-ce qui s'est passé en commission parlementaire? On l'a étudié article par article, mais je pense qu'on ne peut pas convenablement prétendre faire rapport en Chambre de l'étude détaillée de ce projet de loi sans revenir sur ce que nous avons appris d'une façon formelle. Le ministre du Revenu nous a appris à cette commission parlementaire que, contre toute attente, le gouvernement a confirmé que les personnes qui avaient annulé leur police d'assurance individuelle ne reverraient jamais la couleur de la taxe de vente de 9 % qu'elles avaient payée.

Est-ce qu'il avait lu de longues explications? Est-ce qu'il avait lu dans la presse parlementaire le fait qu'on a repris les propos du critique en ces matières, le député de Lévis, en disant qu'on trouvait cela, de notre part, passablement odieux, passablement difficile à justifier? Concrètement - le député de Lévis pourrait faire image mieux que moi, mais je voulais juste en rappeler une - c'est comme si on disait à quelqu'un qui a acheté une automobile: Cela va, tu peux annuler ta prime, mais pas la taxe que tu as payée de 9 % sur ta prime d'assurance. Alors qu'il ne dispose plus du bien, on lui fait quand même payer une contribution pour un bien qu'il n'utilise plus. Le député de Lévis a même utilisé l'expression "c'est comme payer la taxe sur un repas que je n'ai pas pris". Je trouverais cela curieux de payer une taxe sur un repas que je n'ai jamais pris, mais on me dit: Cela ne fait rien, il faut que tu paies la taxe pareil.

C'est ce que le député de Lévis avait mentionné en commission parlementaire, en disant que, pour nous, s'il y a une taxe à payer sur une prime, il y a une assurance, mais s'il y a remboursement de la prime, il devrait y avoir remboursement de la taxe. Il me semble que c'est simple; c'est compréhensible; c'est logique. Par définition, s'il y a annulation de la prime, il devrait également y avoir annulation de la taxe sur la prime. (10 h 20)

On a beaucoup insisté là-dessus. On dit: "Aucun remboursement de la taxe ne doit

être effectué à l'égard d'une prime remboursée après le 18 décembre 1985, si cette prime est attribuable à un contrat d'assurance individuelle de personnes auquel on met fin après cette date." C'est une disposition qui nous paraît odieuse, inacceptable et on l'a dénoncée. On n'a pas eu vraiment d'explications satisfaisantes à ce sujet, pas plus du député de Montmorency, qui est adjoint parlementaire au ministre du Revenu, que du ministre du Revenu lui-même, qui nous a dit que c'était tout simplement pour éviter que des gens, au lendemain de l'annonce de la détaxation de ces primes d'assurance, utilisent le stratagème d'annuler leur contrat pour en négocier un nouveau bref pour éviter de payer la taxe.

Nous, on pense que c'est un droit individuel. Moi, si j'ai une police individuelle et que je décide de l'annuler, c'est de mes affaires. Ce sont des affaires personnelles. Cela regarde l'individu dans son libre choix et, en conséquence, si je décidais d'annuler une police d'assurance, il est normal qu'on me rembourse la taxe que j'ai payée. Le gouvernement, dans ce projet de loi, nous dit non. Dorénavant, il n'est pas question de rembourser la taxe de 9 % payée sur la prime. On pense que c'est une disposition inacceptable.

Et je pense que ce qui était aussi inacceptable c'est que le ministre du Revenu, quoique je ne suis pas sûr... Il pourra profiter de sa réplique pour nous indiquer des choses que j'aurais omises... Il me semble qu'en commission parlementaire on avait été très ferme là-dessus: on voulait absolument avoir l'information sur le montant d'argent que cela pouvait représenter pour le ministère du Revenu. En commission parlementaire on n'a pas pu avoir réponse à cette question. D'ailleurs, ici je cite le Soleil: "Garon parle de millions, Gratton ne peut répondre." Je citais un article de journal, M. le Président, et j'aimerais qu'au cours de la réplique, le ministre du Revenu, puisqu'il a sûrement eu le temps de regarder ses papiers, a sûrement eu le temps de retourner au ministère pour être en mesure d'évaluer quelle somme représente pour l'État québécois cette partie des taxes sur les assurances individuelles qu'on ne retournera pas aux citoyens et aux citoyennes du Québec... je pense que le moment serait venu...

Bien sûr - cela va être ma conclusion -on a eu également l'occasion d'apprécier, lors de l'étude article par article, certains autres éléments qui étaient compris dans ce projet de loi, en particulier ce qui a été, selon l'Opposition, le fleuron de la minisession de décembre, à savoir une réduction de la surtaxe sur l'essence dans les régions dites éloignées et périphériques. Nous, on a constaté que c'était intéressant pour les régions concernées, mais il n'en demeure pas moins qu'on a changé une disposition pour maintenir dorénavant la taxe à son niveau le plus élevé alors que, partout au Québec, on assistait à une réduction sans précédent du prix de l'essence, du baril de pétrole. En conséquence, on trouve que c'est une disposition avantageuse pour le gouvernement mais peu avantageuse pour les citoyens et les citoyennes du Québec, de se gonfler l'intérieur en disant que c'est fini, la taxe ascenseur. Je comprends, ils l'ont collée au plafond, à son plus haut niveau, et elle est fixe à 30 % alors qu'on assiste graduellement à une réduction des prix du baril de pétrole qui, en conséquence, devrait se traduire, pour l'usager, l'utilisateur, par une réduction plus significative, plus marquée. Je ne pense pas que nous ayons assisté à une réduction très importante du litre payé à la pompe parce que le niveau de taxe est demeuré très élevé. La différence, c'est qu'il est à son plus haut niveau et qu'il est collé là. Même si le prix de l'essence continuait à baisser, le niveau de taxation imposé par ce gouvernement ne baisse pas. C'est ce qui fait que c'est très dispendieux pour les contribuables. On a profité effectivement de cette commission parlementaire, lors de l'étude article par article, pour revenir sur ces dispositions et prétendre qu'entre l'engagement que ces gens avaient pris et la réalité, il y avait tout un monde d'écart.

Ce sont les principales dispositions. Peut-être une dernière remarque sur ce que nous avons décrié, c'est-à-dire la réduction ou l'abolition des 500 $ pour les taxis en disant que ce n'était pas une mesure qui devait être maintenue. Le projet de loi indique un montant de 500 $ pour chaque permis de taxi autre qu'un permis de taxi délivré, alors que cette disposition permettait de donner une autre possibilité dans les régions éloignées. En conséquence, M. le Président, on a eu à déplorer cette disposition dans ce projet de loi.

Voilà les commentaires que je voulais formuler sur le projet de loi que nous étudions en Chambre aujourd'hui, qui se veut une suite aux travaux de la commission parlementaire. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président: Suivant notre règlement, je cède maintenant la parole à M. le ministre du Revenu pour une intervention de cinq minutes.

M. Michel Gratton

M. Gratton: Merci, M. le Président. Je voudrais répliquer à seulement un argument invoqué par le député d'Abitibi-Ouest, soit toute la question du remboursement de la taxe de vente sur les primes d'assurance individuelle en se servant d'un article du Soleil où on citait le député de Lévis selon

lequel il s'agirait de sommes de 10 000 000 $. Je voudrais rétablir les faits. D'abord, je pense que personne au Québec, sauf peut-être l'Opposition, ne comprendra pourquoi on avait prévu dans le discours sur le budget du 18 décembre, cette disposition pour empêcher de rembourser la taxe de vente.

D'abord, situons les choses dans leur contexte. C'est le gouvernement du Parti québécois qui a imposé une taxe de 9 % sur l'ensemble des assurances. Le Parti libéral, durant la campagne électorale, s'est engagé à détaxer les primes d'assurance pour l'ensemble des primes d'assurance au cours de la période d'un mandat, c'est-à-dire quatre ans. Dans un premier temps, il a commencé par les primes d'assurance individuelle dès le discours du 18 décembre dernier. On a donc détaxé les primes d'assurance individuelle à compter du 18 décembre, c'est-à-dire seize jours après notre élection.

Mais, M. le Président, il y a une disposition qui a été évoquée par le ministre des Finances à ce moment-là, à savoir qu'on ne rembourserait pas la taxe de vente de 9 % sur des assurances individuelles qui seraient annulées. J'ai dit clairement en commission parlementaire que la raison de cette disposition, c'était d'éviter qu'à partir du 18 décembre, leurs primes d'assurance n'étant plus taxables, des gens annulent leurs polices d'assurance pour pouvoir se faire rembourser la taxe, contractent ensuite à nouveau avec l'assureur et obtiennent ainsi des avantages qui n'étaient pas prévus dans la mesure du ministre des Finances. Il n'avait pas été question, dans le discours sur le budget du ministre des Finances, de détaxer "en arrière". On ne pouvait quand même pas donner des avantages sur les primes déjà payées. C'était à compter du 18 décembre. D'ailleurs, la formule consacrée c'est: "À compter de ce soir, minuit". C'est donc à compter du 18 décembre que ces primes d'assurance n'étaient plus taxées et il fallait prévoir que les gens ne puissent pas, simplement en annulant leur police d'assurance, récupérer la taxe pour, ensuite, se réassurer sans payer cette taxe.

Ce que je n'ai pu donner comme information en commission parlementaire lors de l'étude détaillée, c'était les montants impliqués, mais je les ai fournis depuis aux membres de la commission dans une lettre que j'ai adressée au président de la commission, le député de Vanier, dont j'ai fait parvenir copie à chacun des membres de la commission la semaine dernière. Je vais lire le passage de la lettre, M. le Président, puisque je pense que cela résume l'ensemble de l'information requise. "Tout d'abord, il m'apparaît important de souligner que la mesure proposée à l'article 7 est purement une mesure préventive visant à éviter, au lendemain du 18 décembre 1985, une annulation massive possible des contrats d'assurance pour la seule raison du remboursement de la taxe". C'est ce que j'expliquais tantôt. "Cet objectif a d'ailleurs été atteint puisque aucune action importante visant à mettre fin à des contrats d'assurance n'a été constatée à la suite de l'annonce de l'exemption sur les primes d'assurance individuelle de personnes". Donc, la mesure a donné les résultats escomptés. "En ce qui concerne l'incidence financière, il n'a pas été possible à mes fonctionnaires d'établir le montant des primes remboursées annuellement aux personnes qui, dans le cours normal des choses, mettent fin à un contrat d'assurance individuelle de personnes avant terme, ni d'établir le montant de telles primes remboursées après le 18 décembre 1985. "Cependant, d'après nos informations, un tel montant serait habituellement marginal compte tenu, d'une part, qu'en assurance-vie individuelle la prime est acquise à l'assureur dès qu'elle est payée par l'assuré et qu'elle n'est remboursable que dans les circonstances suivantes: le contrat est annulé dans les dix jours de l'émission de la police - c'est la clause de rescision - ou le contrat est annulé avant que la police ne soit émise". Ce sont les deux seuls cas où on peut annuler une assurance-vie. "D'autre part, en assurance individuelle contre la maladie ou les accidents, même si les compagnies d'assurances acceptent généralement de rembourser à la suite de l'annulation d'un contrat la partie de la prime relative aux jours à courir, le total annuel de ces remboursements serait minime, toujours selon nos informations." (10 h 30)

C'est donc dire que le montant de 10 000 000 $ dont parlait le député de Lévis n'existe pas, n'a jamais existé, mais aurait peut-être pu exister si, pour éviter à toutes fins utiles de payer la taxe qui était due jusqu'au 18 décembre, on avait permis à des gens d'annuler leur police d'assurance. Mais encore aurait-il fallu que les assureurs eux-mêmes des contrats d'assurance de ces gens prévoient cette possibilité d'annulation et, comme on l'indique ici, il y a seulement deux cas où cela s'applique dans le cas de l'assurance-vie, c'est lorsque le contrat est annulé dans les dix jours de l'émission ou lorsque le contrat est annulé avant que la police soit émise. Tout le monde sait qu'une police d'assurance-vie ne s'annule qu'au moment de son échéance et jamais en cours d'année.

Donc, M. le Président, ce qu'évoquait le député d'Abitibi-Ouest en se faisant l'écho du député de Lévis est un argument qui ne vaut pas, qui n'a aucune valeur puisque, effectivement, la mesure était prévue pour empêcher une certaine évasion fiscale, qu'on

constate effectivement que la mesure a eu le résultat désiré et qu'il n'y a aucune incidence financière en temps normal. Il n'y en aurait eu que si la mesure n'avait pas été prévue, ce qui aurait été complètement irresponsable de la part du ministre des Finances et ce que le ministre des Finances actuel est loin d'être, tout le monde en conviendra.

Le Vice-Président: Je cède maintenant la parole à M. le député de Lévis.

M. Jean Garon

M. Garon: M. le Président, le ministre du Revenu vient précisément de donner les raisons pour lesquelles - c'est ce qui avait été indiqué par les représentants des assureurs - la disposition qui était incluse dans le budget du 18 décembre 1985 aurait cet effet d'empêcher l'annulation d'assurances qui aurait pu être faite si les gens avaient pu récupérer la taxe. Auparavant, on devait distinguer dans les contrats les taxes pour les différents types de contrats, pour rendre le remboursement possible, et le remboursement de la taxe sur des primes annulées était prévu dans la loi. C'est cette disposition que le discours sur le budget du 18 décembre dernier vient changer. Le ministre du Revenu, s'il lit l'article avec moi, verra que l'amendement proposé a pour effet de modifier par l'addition après le deuxième alinéa du suivant qui dit: Malgré le premier alinéa aucun remboursement de la taxe ne doit être effectué à l'égard d'une prime remboursée après le 18 décembre 1985 si cette prime est attribuable à un contrat d'assurance individuel de personne auquel on met fin après cette date.

Alors que le régime prévu par le premier alinéa c'est justement le remboursement, l'article qui est ajouté par cet amendement a pour but d'empêcher le remboursement même si la prime est remboursée. On se trouve dans la situation ridicule, avec cet amendement proposé par le gouvernement Bourassa, de maintenir une taxe alors qu'il n'y a plus de prime. Si on paie une prime de 100 $ sur des assurances et qu'on a payé 9 % de taxe, c'est-à-dire qu'on a payé 109 $ à la compagnie d'assurances, 100 $ de prime et 9 $ de taxe, c'est-à-dire un compte de 109 $ et que l'assurance est annulée, la compagnie va rembourser les 100 $ de prime, mais le gouvernement va garder les 9 $ de taxe sur une prime qui n'existe plus. C'est un vol pur et simple. Appelons les choses par leur nom, c'est un vol pur et simple, parce qu'une taxe sur rien ne peut plus être une taxe. Là on a réussi ce qu'aucun gouvernement antérieur n'avait réussi: taxer le néant, taxer l'inexistence, taxer l'absence de prime.

On comprendra que s'il y a une taxe sur une prime, une taxe de vente de 9 %, que la taxe s'applique sur un montant, sur quelque chose. Si le quelque chose sur lequel s'applique la taxe n'existe plus, il n'y a plus de base pour la taxe et la taxe devrait être remboursée. La situation est un peu ridicule. J'expliquais en commission parlementaire, le parallèle est exactement le même: Si j'achète une automobile de 10 000 $, j'ai une taxe de 9 %, de 900 $. Si, pour une raison ou pour une autre la transaction est annulée, le garage me remet mon chèque de 10 000 $, mais le gouvernement gardera la taxe de 900 $ sur une automobile qui n'a pas été achetée. On voit à quel point c'est ridicule. Pourtant, c'est ce que le gouvernement introduit par une mesure dans l'assurance, par la prime, par la disposition sur les contrats individuels de personnes.

Même si le contrat d'assurance est annulé, même si la compagnie doit rembourser la prime, le gouvernement garde la taxe. Pourtant dans toutes les autres lois fiscales, le gouvernement doit rembourser les taxes quand l'objet de la taxe n'existe plus ou n'existe pas. C'est facile à comprendre. Le ministre du Revenu devrait comprendre que sa disposition... Il n'a peut-être pas compris ce que les fonctionnaires ou les conseillers ont mis dans le projet de loi, aujourd'hui, après l'étude qui a été faite, il devrait comprendre que cela n'a pas de bon sens de laisser une disposition comme celle-là dans la loi. D'autant plus qu'elle n'aurait plus d'effet de toute façon parce qu'il dit lui-même que le fait qu'elle ait existé a empêché des gens qui auraient voulu annuler leur contrat de l'annuler parce qu'ils n'auraient pas obtenu le remboursement de la taxe auquel ils auraient eu droit.

Là, on ne me dira pas que le ministre, en faisant une disposition comme celle-là, travaille pour les assurés. Il travaille pour les assureurs. Il travaille pour les compagnies. C'est cela la marque de commerce du Parti libéral. Au diable les consommateurs! Au diable les individus! Au diable les citoyens! Au diable les contribuables, d'abord que les intérêts des puissants sont servis, d'abord que les intérêts du gouvernement sont servis indépendamment des gens.

On taxe l'inexistence actuellement. On taxe le remboursement des primes d'assurance. Avez-vous déjà vu quelque chose comme cela? C'est la première fois dans toute l'histoire du Parlement - pourtant, j'ai enseigné l'impôt - qu'on taxe rien, qu'on met une taxe sur rien. Je voudrais le répéter encore une fois parce qu'il y a des gens qui peuvent nous écouter ce matin. Ils peuvent dire: Cela n'a quasiment pas de bon sens. Mais, c'est cela, c'est justement cela. Cela n'a pas de bon sens.

Si j'ai un contrat d'assurance-vie de

personne avec une compagnie et que, pour une raison ou pour une autre, le contrat est annulé, j'ai droit à un remboursement de prime. J'ai payé la prime et j'ai payé la taxe sur la prime. La compagnie va me rembourser la prime, mais le gouvernement va garder la taxe sur la prime qui n'existe plus. Il n'y a plus de prime, elle a été remboursée. Le gouvernement, lui, va garder la taxe. Cela n'a pas de bon sens. Cela n'a pas de bon sens. Le ministre va passer à l'histoire comme un ministre qui a réussi à taxer le néant, qui a réussi à garder des taxes sur des primes quand les primes n'existaient plus, quand les primes étaient remboursées par les compagnies. C'est cela qui pollue notre environnement fiscal au Québec. C'est sans doute le seul endroit en Amérique du Nord où on aura réussi à mettre des taxes sur des remboursements de prime alors que la prime n'existera plus, alors que le contrat aura été annulé. Alors que l'individu, le citoyen, l'assuré aura droit au remboursement de sa prime, le gouvernement va garder la taxe. (10 h 40)

M. le Président, on se retrouve devant ces beaux défenseurs de la veuve et de l'orphelin. On voit aujourd'hui ce qu'ils ont réussi à faire. Et tout ce budget du 18 décembre a été fait dans la même veine de protéger les puissants contre les petits, de protéger ceux qui ont le moins besoin de protection, mais de ne pas protéger ceux qui ont besoin de protection. On a réussi par cette mesure à faire en sorte de pénaliser les gens qui auraient dû avoir droit à des remboursements de taxe parce que leur contrat d'assurance a été annulé, parce qu'ils ont droit à un remboursement de la prime d'assurance. Le gouvernement, lui, avec une disposition nouvelle, alors que la loi antérieurement prévoyait justement que, lors du remboursement de la prime, il y aurait remboursement de la taxe, le Parti libéral veut voter une disposition pour empêcher que des gens qui avaient droit au remboursement de la taxe y ait droit.

Vous savez, c'est une situation nouvelle qu'il crée alors que la loi prévoyait justement, faisait l'obligation aux compagnies d'assurances de distinguer, dans les comptes, les primes et les taxes, justement pour qu'on puisse rembourser les uns et les autres. La loi prévoyait qu'il devait y avoir un remboursement de la prime et, consécutivement au remboursement de la prime, il devait y avoir un remboursement de la taxe, ce qui est normal dans toute société civilisée.

Le ministre vient mettre une disposition complètement incroyable, complètement nouvelle dans tout système fiscal d'imposition dans le monde entier. Je suis persuadé qu'il n'existe nulle part, dans aucun pays au monde, une telle mesure qui n'a aucun sens.

Alors que la loi prévoit que la compagnie doit distinguer les primes et les taxes dans les différents types de contrat, justement, pour qu'on puisse faire les remboursements, le ministre vient adopter une disposition pour dire: Même si la prime est remboursée, on garde la taxe. C'est quelque chose, M. le Président: Vous regardez votre règlement, vous ne pouvez pas en croire vos yeux vous non plus. Pourquoi? Parce que cela n'a pas de bon sens. Je vais vous dire qu'on pourra conter aux délégations qui viendront de pays étrangers qu'on a une disposition nouvelle dans notre régime fiscal qui fait en sorte que lorsque la prime est remboursable, le gouvernement garde la taxe.

Que ce soit à 9 % de 100 $, 9 % de 1000 $ ou 9 % de 10 000 $, la taxe a été payée et la prime doit être remboursée à l'assuré, mais le gouvernement dit: Même si la taxe s'appliquait sur la prime et que la prime doit être remboursée, je garde la taxe. Il fait une disposition spéciale dans ce sens.

M. le Président, le ministre du Revenu dira ce qu'il voudra. Il donnera les explications qu'il voudra, la réalité est ainsi faite que c'est très clairement indiqué dans l'article qu'il propose: "Malgré le premier alinéa, aucun remboursement de la taxe ne doit être effectué à l'égard d'une prime remboursée..."

Il interdit aux compagnies d'assurances qui remboursent la prime de rembourser la taxe sur la prime que l'assureur a payée. C'est cela que l'article vient faire. Si la prime est attribuable à un contrat d'assurance individuelle de personnes auquel on met fin après une certaine date, il interdit à la compagnie qui a fait payer à l'assuré la prime et la taxe de rembourser la taxe lorsqu'elle rembourse la prime.

Cela vient dire exactement le contraire de ce que disait l'article de loi antérieurement, M. le Président. C'est une situation aberrante. C'est un exemple unique au monde d'iniquité fiscale. C'est complètement inique. On va garder une taxe sur une prime, même si la prime est remboursée. Cela veut dire 9 % d'une prime de 100 $ ou de 1000 $ qui n'existe plus, puisque la prime a été remboursée. Alors, pourquoi mettre 9 % d'une prime qui n'existe plus, puisqu'elle a été remboursée?

Même type de mesquinerie à l'égard des chauffeurs de taxi qui avaient droit à un remboursement de 500 $ dans les régions éloignées. Dans les régions éloignées, les chauffeurs de taxi avaient droit a un remboursement de 500 $ pour tenir compte du fait qu'un chauffeur de taxi dans une région éloignée doit payer plus de taxe parce qu'il consomme plus d'essence.

Évidemment, il n'y a pas beaucoup de gens de régions éloignées dans le Parti libéral qui parlent. On ne les entend jamais

parler. Ils sont là comme des machines à voter, sans jamais dire un mot.

Une voix: Des moules.

M. Garon: Même les moules font souvent sortir des bulles d'air. Le Parti libéral, même pas de bulles d'air, rien, alors que quand il s'agit de Montréal, il y a de la générosité pour le transport en commun. C'est par centaines de millions que l'argent est versé, chaque année, pour subventionner le transport en commun. Il n'y a pas de transport en commun dans les régions périphériques.

Mais là, on dit que le chauffeur de taxi qui joue le rôle de transporteur... Pour beaucoup de personnes, le seul transport qui existe dans les régions périphériques, c'est le taxi. Il existait un remboursement de 500 $ pour les permis des chauffeurs de taxi dans les régions périphériques qui avait été institué par le gouvernement du Parti québécois. Le Parti libéral dit: Non, plus de 500 $ pour les chauffeurs de taxi en région périphérique. C'est cela que le Parti libéral veut adopter par sa loi.

Le montant de 500 $ qui était remboursable par le fait qu'un chauffeur de taxi conduisait un taxi en région éloignée, qu'il avait... Vous savez, dans les régions éloignées, à quel point cela peut être onéreux, parce que les routes ne sont pas toujours aussi bonnes, parce qu'il y a souvent beaucoup de routes de terre, parce que cela coûte plus cher à exploiter. Comme il doit faire de plus longs trajets, qu'il doit consommer plus d'essence, pas par plaisir mais par obligation, un montant de 500 $ était remboursé, ce qui, au fond, pouvait aider les chauffeurs de taxi à demander de meilleurs tarifs dans ces régions éloignées. On trouve que le petit des régions éloignées en a trop, encore une fois, et on dit: On va les lui ôter. Il faut les lui enlever, il n'a pas besoin de ces 500 $. Mais, quand il s'agit de verser 500 000 000 $, ou plutôt 395 000 000 $, pour subventionner le transport en commun à Montréal, il n'y a pas de problème. Pourquoi ne pas garder l'équilibre? Il n'y a pas, sur la Côte-Nord, aux Îles-de-la-Madeleine, dans le Bas-Saint-Laurent—Gaspésie, en Abitibi-Témiscamingue, dans l'Outaouais, dans les régions nordiques, à Laviolette, etc., de transport en commun organisé comme il y en a à Montréal et à Québec.

Des voix: Voyons doncl

M. Garon: Non, dans les régions nordiques. On a voulu enlever ces montants. Dans l'Ungava, vous savez que le transport en commun, ce n'est pas pour demain. Le député d'Ungava est ici. Mais donner 500 $ à un chauffeur de taxi, parce que le taxi est le seul moyen de transport des régions périphériques, le ministre du Revenu dit non. Pourquoi? Parce que les députés d'arrière-ban du Parti libéral ne parlent pas à leur caucus. Ils ne sont pas capables de défendre les régions qu'ils représentent. La preuve, c'est qu'aujourd'hui on enlève la maigre pitance de 500 $ par permis de chauffeur de taxi. Mais quand il s'agit de donner 400 000 000 $ pour subventionner le transport en commun de Montréal, ils regardent passer la parade, ils sont dans l'estrade. Qu'est-ce qui caractérise les députés du Parti libéral? Ils ne sont pas dans la parade, ils sont dans l'estrade, des spectateurs qui regardent passer les trains sans jamais dire un mot. Encore une mesure qui pénalise le contribuable.

Troisièmement, quand vous regardez l'article de loi, c'est évident qu'il faut faire des calculs, puisqu'on vient changer les taux d'impôt laissant entendre qu'on fait des cadeaux aux contribuables. C'est pour cela qu'on a appelé cela le budget à 10 $ de M. le ministre des Finances, député de Bonaventure. Il aura comme effet en 1986 de donner peu aux gens à faible revenu et de donner beaucoup aux gens à haut revenu de la même façon que son budget va aller encore dans la même direction le 1er mai 1987. Qu'est-ce qu'il aura comme effet? Ce projet de loi proposé par le Parti libéral pour mettre en oeuvre le budget du 18 décembre 1986 aura pour effet de diminuer l'impôt sur le revenu de 10 $ pour celui qui gagne 20 000 $, de 68 $ pour celui qui gagne 30 000 $, de 195 $ pour celui qui gagne 40 000 $, de 324 $ pour celui qui gagne 50 000 $, de 816 $ pour celui qui gagne 75 000 $ et de diminuer de 1301 $ pour celui qui gagne 100 000 $. Si vous gagnez 20 000 $, vous avez une diminution de 10 $; si vous gagnez 100 000 $, vous avez une diminution de 1300 $. Cela veut dire que l'écart entre 20 000 $ et 100 000 $, c'est de 1 à 5. Quand vous gagnez 100 000 $, vous gagnez cinq fois plus que celui qui gagne 20 000 $.

Le calcul est facile. Si vous gagnez 20 000 $, vous gagnez cinq fois moins que celui qui gagne 100 000 $. Mais le résultat de la loi que veut adopter le Parti libéral sera de faire en sorte que celui qui gagne 100 000 $, cinq fois plus que celui qui gagne 20 000 $, paiera 130 fois moins d'impôt. Celui qui gagne 20 000 $ verra son impôt diminuer de 10 $, celui qui gagne 100 000 $ verra son impôt diminuer de 1301 $ - 130 fois moins - alors que le rapport entre les revenus est de 1 à 5, le rapport entre les diminutions d'impôt des petits et de ceux qui gagnent le plus sera de 1 à 130. (10 h 50)

Essentiellement, cette mesure a pour effet de faire payer moins d'impôt aux riches et de garder à peu près le même

niveau pour ceux qui n'ont pas de bons revenus. Encore là, c'est la marque de commerce du Parti libéral d'établir que ceux qui gagnent plus paient moins et que ceux qui gagnent moins paient plus.

On verra, dans le discours du 1er mai, ce sera encore pire. Alors qu'on dit qu'on est serré, qu'il y a des trous financiers épouvantables, on trouve le moyen de détaxer de 500 000 $ de gain de capital sûrement pas les gens les plus démunis de notre société. On trouvera le moyen d'exempter pour 500 000 $ de gain de capital, mais, par la même mesure, on trouvera le moyen de réduire les déductions des gens qui ont 1000 $ d'intérêt sur épargne, c'est-à-dire l'intérêt à peu près sur 10 000 $ d'épargne, à 500 $. Pour vous autres, 1000 $ déductibles, c'est trop, on va en enlever et baisser cela - le Parti libéral va baisser cela - à 500 $.

Regardez toutes ces mesures. Vous n'en trouverez aucune qui avantage les moins fortunés, les plus démunis, ceux qui gagnent le moins d'argent. Toutes les mesures vont en faveur de ceux qui gagnent le plus. Voilà la marque de commerce du Parti libéral qui est le parti des gens fortunés. Si vous êtes à Westmount et que vous votez libéral, je comprends, mais quand vous vivez dans le Bas-Saint-Laurent—Gaspésie, dans l'ensemble des territoires où les gens n'ont pas de hauts revenus, je comprends moins bien. Ce parti est voué à défendre les intérêts des puissants, des riches et à se foutre des intérêts de ceux qui ont de plus faibles revenus.

M. le Président, la différence avec le Parti québécois qui est un parti de type social-démocrate, c'est qu'il veut une équité fiscale. C'est pourquoi il y avait antérieurement dans les lois des mesures qui avaient pour effet d'équilibrer les revenus, de faire en sorte que ceux qui avaient plus d'argent payaient plus d'impôt et de ne pas détaxer plus ceux qui gagnent plus. Encore une mesure dans ce budget inique qui a fait une plus grande iniquité fiscale en réduisant les taux de progressivité fiscale.

Et la cerise sur le sundae, d'autres diront le couvert sur la chiotte, restons en termes plus parlementaires, c'est d'avoir gelé à 30 % la taxe sur le carburant. Alors qu'on avait fait les gorges chaudes pendant des années en cette Chambre sur une taxe temporaire sur le pétrole, qui avait été réduite par l'ancien gouvernement, on veut la geler à 30 % alors qu'on s'est engagé pendant des années à la faire disparaître.

Drôle de gouvernement, qui a besoin d'études pour réaliser ses engagements mais qui n'a pas besoin d'études pour réaliser des choses pour lesquelles il ne s'était pas engagé, pour favoriser ses amis. On voit que pour les privatisations on n'a pas besoin d'études. On privatise et on vend aux "chums", mais quand il s'agit d'adopter des mesures auxquelles ce gouvernement s'était engagé, au contraire il ne les accomplit pas.

La taxe sur le carburant demeure. Pire même, elle est gelée au plafond. On avait dit que c'était une taxe ascenseur. Ce n'était pas une taxe ascenseur sur le pilote automatique, il fallait une décision gouvernementale. Ce nouveau gouvernement s'est dépêché de faire monter l'ascenseur au plafond pour ensuite couper le courant à jamais. On aura un nouvel ascenseur fiscal libéral qui monte mais qui ne descend plus jamais, alors que la caractéristique d'un ascenseur c'est de monter et de descendre.

Je vois la députée de Kamouraska qui rit. Je suis certain que, comme les autres, dans son comté elle a dit: c'est épouvantable d'avoir une taxe sur le carburant! Mais eux, ils l'ont remontée pour la geler ensuite. C'est épouvantable! C'est épouvantable!

C'est pour cela que les citoyens deviennent un peu cyniques devant la politique, parce qu'ils se rendent compte que les libéraux disent n'importe quoi et ne remplissent ensuite aucun engagement. C'est pareil comme les lignes qui passaient sur le fleuve Saint-Laurent entre Lotbinière et Portneuf. On entendait de belles promesses pendant le temps des élections. On va vous arranger ça! Et qu'est-ce qui arrive? En septembre on dit: cela aurait pris neuf mois. Exactement, s'ils avaient pris la décision en temps cela aurait été fait. S'ils avaient fait uniquement ce qu'ils ont dit lors de la campagne électorale, s'ils avaient pris la décision en décembre de réviser le corridor, comme ils l'avaient dit et ils avaient le droit de le faire, c'était le gouvernement, le corridor aurait été révisé en septembre et aurait été terminé. Mais non! promesse, mensonge, qu'on ne respecte pas, et c'est pourquoi, au Québec, il y a tant de cynisme vis-à-vis des politiciens parce qu'il y a trop de promesses qui n'ont pas été réalisées.

On se retrouve donc, M. le Président, avec une taxe sur les carburants gelée à 30 %, ce qui fait qu'actuellement, au Québec, alors qu'on paie l'essence ordinaire 0,46 $ et 0,47 $... Cet été - je prends à témoin le député de Vanier qui était présent - je le lui ai montré et je lui ai dit: Regardez la station; vous pourrez vous en rappeler quand on reviendra au Québec. À Regina, c'était 0,345 $ le litre alors qu'ici il coûte 0,47 $, 0,467 $, 0,468 $, entre 0,46 $ et 0,47 $. Donc, 0,12 $ de plus. Quelle différence y a-t-il entre la Saskatchewan et le Québec? Le gouvernement libéral. C'est la seule différence. C'est le gouvernement libéral qui taxe, un gouvernement "taxeux", un gouvernement qui avait pris des engagements qu'il ne respecte pas, qui parlait contre la taxe sur les assurances, mais qui la maintient, qui parle contre la taxe sur les carburants, mais qui l'augmente davantage

et, après, la gèle pour que l'ascenseur ne puisse plus jamais descendre, alors qu'un ascenseur, M. le Président, cela descend.

Il savait que le niveau des prix internationaux était en train de diminuer, devait diminuer à la suite du désaccord des membres de l'OPEP, et qu'il serait obligé de baisser sa taxe parce que le niveau des prix moyens serait plus bas. Mais, pour ne pas avoir à le faire, il s'est dépêché d'augmenter la taxe avant la baisse des prix, d'augmenter la taxe au maximum et, après, d'enlever le niveau, d'enlever l'ascenseur pour que l'ascenseur ne puisse plus jamais descendre.

C'est la situation dans laquelle on se trouve présentement, une taxe au sujet de laquelle le ministre lui-même - le ministre devrait reconnaître son erreur - disait qu'il ne savait pas, quand il avait signé un arrêté ministériel, que c'était automatique qu'elle augmentait. S'il ne le savait pas et qu'il a commis une erreur, il y a une efface au bout des crayons. C'est justement parce que, parfois, les gens peuvent se tromper, qu'ils peuvent effacer. Mais quand les gens sont orgueilleux, on dirait que, quand c'est le Parti libéral, ils n'ont plus besoin d'efface. Quand ils se trompent, cela devient quand même la réalité, plus besoin d'effacé dans le Parti libéral. On ne se trompe pas, même quand il y a eu une erreur. Le ministre lui-même a admis qu'il y avait une erreur. Il a admis qu'il s'était trompé. Il a admis qu'il ne réalisait pas qu'il signait automatiquement un décret ministériel, qu'il n'avait pas besoin d'aller au Conseil des ministres, sauf que cela va rapporter 250 000 000 $ de plus au gouvernement. Cela a été adopté en février 1986.

M. le Président, on s'est dépêché de le faire. Le Parti libéral s'est dépêché de le faire justement pour profiter au maximum, avant la baisse des taux du pétrole. Alors que partout ailleurs...

M. Gratton: Question de règlement, M. le Président.

M. Garon: ...partout ailleurs le niveau des prix a baissé...

Le Vice-Président: M. le député de Lévis, un instant.

M. Garon: ...principalement aux États-Unis...

Le Vice-Président: Un instant, M. le député de Lévis. Question de règlement, M. le leader du gouvernement.

M. Gratton: Oui, M. le Président. Je m'excuse d'interrompre la divagation du député de Lévis, mais pourrais-je lui rappeler qu'il s'agit ici du projet de loi 78 qui donne suite au discours sur le budget du 18 décembre, lequel budget réduisait la taxe sur les carburants dans les régions périphériques? Il est en train de nous faire un discours sur le discours sur le budget du 1er mai, M. le Président. Le discours sur le budget du 1er mai fera l'objet d'un autre projet de loi qu'on débattra à un autre moment, mais la pertinence du débat exige qu'il nous parle maintenant de la détaxation des carburants dans les régions périphériques, parce que c'est de cela que le projet de loi 78 traite.

Le Vice-Président: Sur la question de règlement, je vous dirai que nous sommes à l'étude du rapport de la commission, de la prise en considération du rapport. Évidemment, je n'ai pas été témoin de toutes les discussions qu'il y a eu en commission sur ce sujet, et votre intervention, c'est assez général quand même. Je vais céder la parole au député de Lévis en lui rappelant qu'il lui reste exactement quatre minutes. Et, dans la mesure du possible, je lui demanderais de se limiter aux questions qui ont trait au projet de loi que nous discutons, soit le projet de loi 78.

M. le député de Lévis.

M. Garon: M. le Président, le ministre du Revenu devrait lire l'article 15 qui remplace l'article 2 de la Loi concernant la taxe sur les carburants. Il se rendra compte que cette taxe devient une taxe permanente et que la taxe sera permanente à l'avenir sur les carburants.

Une voix: C'est faux.

M. Garon: M. le Président, je reçois du courrier des gens qui me montrent leurs comptes de taxes. Ils me montrent les montants qu'ils paient en taxes au gouvernement du Québec: la taxe sur l'essence sans plomb, la taxe sur l'essence avec plomb, la taxe sur le diesel. Cela indique à quel point c'est facile à voir... Quand même le député... Disons que les gens ne veulent pas retourner au texte de loi. Ils vont en Ontario, ils vont aux États-Unis, et ils voient le prix qu'ils paient. C'est moins de 1 $ pour un gallon d'essence aux États-Unis alors qu'ici, cela revient à peu près à 2,50 $ ou 3 $ le gallon selon les types d'essence. (11 heures)

Cela ne prend pas une 500 watts pour voir la différence qu'il y a dans les prix. Je mets le député de Vanier au défi de venir contredire ce que je dis. On était ensemble à la commission sur la vérification des comptes publics. Je lui ai montré que l'essence se vendait en Saskatchewan entre 0,345 $ et 0,349 $ le litre. On dit qu'aux États-Unis c'est environ 0,23 $ le litre. Ici, c'est 0,467 $ ou 0,46 $ ou 0,47 $ le litre.

À tel point que l'autre jour je faisais un plein d'essence à l'angle des rues Cartier

et Saint-Cyrille. Des Américains sont venus me voir, ils ont regardé la pompe et m'ont dit: Est-ce vraiment le prix que vous payez? Pour quelle quantité payez-vous cela? J'ai dit: Pour un litre. Ils ont dit: Combien cela prend-il de litres pour faire un gallon? Je leur ai expliqué. Ils ont éclaté de rire. Ils n'en croyaient pas leurs yeux. Ils se pensaient au pôle nord. Cela n'a pas de bon sens à quel point l'essence coûte plus cher au Québec. Il y a des milliers de personnes du Québec qui vont en Floride, qui font la comparaison des prix.

Le ministre dira n'importe quelle élucubration sauf que nos citoyens sont capables de voir le prix qu'ils paient quand ils vont en Ontario, dans l'Ouest ou aux États-Unis. Ils n'ont qu'à traverser la frontière. S'il y en a qui veulent voir qui a raison, le ministre du Revenu ou le député de Lévis, je les incite en fin de semaine, les gens de la région de Montréal, d'aller faire juste un tour de l'autre côté de la frontière et regarder le prix qu'ils vont payer pour leur essence. Ils vont voir qu'ils vont payer entre 0,10 $, 0,15 $ ou 0,20 $ meilleur marché le litre aux États-Unis. Ils vont payer à peu près deux fois moins le litre aux États-Unis qu'au Québec. Pourquoi? Parce que c'est un gouvernement qui avait promis d'enlever les taxes. Nous avions baissé les taxes temporaires mais eux non seulement ne les baissent pas, mais ils les rendent permanentes alors qu'ils avaient promis le contraire à la population.

M. le Président, je sais que mon temps de parole achève. Nous aurons l'occasion, au cours de ces prochaines années, d'en parler régulièrement parce que c'est là dans les faits. Les gens paient plus cher. On verra au prochain budget à quel point ils trouvaient que ce n'était pas assez. Alors qu'ils ont réduit le prix de vente de l'électricité aux États-Unis, ici qu'est-ce qu'ils font? Ils l'augmentent puis ils imposent une taxe sur le mazout, l'huile à chauffage de maison.

Quand on fera l'étude du budget du 1er mai, je mettrai au défi le gouvernement de nous dire combien il vendait l'électricité aux Américains il y a un an, combien il la vend maintenant, à quel prix, à quel point le prix de vente aux Américains a baissé pendant qu'en même temps augmentait le prix aux Québécois de 5,4 %, et qu'on leur imposait une taxe de 9 % sur l'huile à chauffage. Pourquoi? Pour justifier un projet de Baie James qui n'est plus rentable au niveau actuel du prix international du pétrole.

Il y a Hydro-Québec qui rapportait, en 1981, des profits de 800 000 000 $. Cette année, elle va rapporter 133 000 000 $ après avoir augmenté les tarifs considérablement. Pourquoi? Nous aurons l'occasion, M. le Président, d'en parler à satiété, d'en parler constamment au cours des prochaines années parce que les gens du Parti libéral ne nous feront pas avaler ces couleuvres. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président: M. le ministre du Revenu, vous avez droit à une intervention de cinq minutes.

M. Michel Gratton

M. Gratton: M. le Président, je n'essaierai pas de reprendre chacun des arguments, des points soulevés par le député de Lévis. Je ne suis pas un surhomme mais... Je vais laisser tomber.

À l'intention de ceux qui nous écoutent, je voudrais expliquer ce que le député de Lévis a compris, parce qu'il ne manque pas d'intelligence, et ce qu'il fait semblant de ne pas comprendre, surtout quand il veut donner un bon spectacle.

Le 18 décembre, dans son discours sur le budget, le ministre des Finances libéral a décrété qu'à compter de cette date on ne paierait plus la taxe de 9 % sur les primes d'assurance individuelle, taxe qui avait été imposée l'année précédente, le 23 avril 1985, par le ministre des Finances péquiste, Yves Duhaime. C'est clair? Le ministre des Finances péquiste impose une taxe de 9 % sur l'ensemble des assurances le 23 avril 1985. Le ministre des Finances libéral enlève la taxe de 9 % sur une partie des assurances, c'est-à-dire les assurances individuelles, à compter du 18 décembre. Donc, toutes les personnes qui ont acheté ou qui vont acheter une assurance après le 18 décembre ne paient plus la taxe de 9 % en ce qui a trait aux primes d'assurance individuelle.

Le député de Lévis nous dit: Scandale! parce que dans le projet de loi on prévoit qu'on ne remboursera pas la taxe de vente sur des polices annulées. C'est évident que, dans le cas de tout ce qui a été acheté après le 18 décembre, cet article du projet de loi ne change rien. On n'en paie pas de taxe depuis le 18 décembre. Donc, si on annule la prime, on n'a pas à rembourser une taxe. Alors, le député d'Abitibi-Ouest, lui, me fait signe que c'est compréhensible, c'est clair. En fait, il n'y a que le député de Lévis qui fait semblant de ne pas comprendre.

De quoi s!agit-il quand on parle de la disposition qui dit qu'on ne remboursera pas la taxe sur des primes annulées, sur des assurances annulées? Il s'agit des assurances achetées avant le 18 décembre, c'est-à-dire, en fait, entre le 23 avril 1985 et le 18 décembre 1985. Comment l'explique-t-on? C'est qu'on a dit, je le répète, que si nous n'avions pas inclus cette disposition dans le projet de loi on se serait placés dans une situation où, à compter du 18 décembre, les gens savaient qu'ils n'avaient plus à payer la taxe de 9 % sur leurs primes d'assurance

personnelle. Ils auraient donc pu annuler leur assurance, se faire rembourser la taxe de 9 % et contracter à nouveau une assurance. C'est ce qu'on a voulu éviter, et pas seulement pour éviter que cela ne coûte deux fois plus cher au gouvernement. Évidemment, le député de Lévis, lui, se dit: II n'y a pas de problème là; que cela coûte 100 000 000 $, 200 000 000 $, le gouvernement libéral devrait faire cela du revers de la main. Comme s'il n'avait pas été au gouvernement pendant neuf ans et qu'il n'avait pas été solidaire de la décision de les augmenter, les taxes, sur l'essence et sur les assurancesl II n'y a pas une taxe qu'ils n'ont pas inventée, ces gens du Parti québécois. Le député de Lévis était là. Il votait là-dessus à tour de bras. Il pesait de tout son poids sur les décisions du gouvernement péquiste d'augmenter les taxes.

Aujourd'hui, il vient nous dire qu'on aurait dû faire fi de tout cela d'un coup. Il ne peut quand même pas nous demander de réparer en quelque neuf mois toutes les erreurs que son gouvernement a faites, a mis neuf ans à faire. On est bon, mais on n'est pas à ce point bon. On a commencé, par contre, dans le budget du 18 décembre, à réparer les erreurs du gouvernement antérieur. Mais, là, il semble qu'il aurait fallu non seulement annuler la taxe de 9 % sur les primes achetées après le 18 décembre, mais il aurait voulu qu'on les annule pour avant le 18 décembre également; en d'autres termes, qu'on rembourse aux gens la taxe que l'ancien gouvernement leur avait imposée le 23 avril 1985.

On aurait pu le faire si on en avait eu les moyens, de la même façon qu'on aurait pu mettre fin à toutes les taxes imposées par le gouvernement péquiste. Mais on doit quand même composer avec la réalité et la réalité, c'est qu'on a hérité d'une situation financière tout à fait inédite dans l'histoire du Québec, des déficits accumulés de 3 000 000 000 $ par année, et qu'on se doit de maintenir un équilibre financier. Donc, quand le député de Lévis parlait et donnait l'exemple du remboursement de la taxe sur une automobile, ce n'est pas du tout la même chose. Il compare des pommes et des oranges. Des polices d'assurance-vie, on n'annule pas cela. On n'échange pas sa police d'assurance contre une autre, comme on le fait avec son automobile au garage. Il n'y a aucune espèce de comparaison possible. Cela ne tient pas debout. Je regrette de le dire au député de Lévis.

Ce n'est pas surprenant que certains courriéristes parlementaires ou autres jugent la performance du député de Lévis de façon très sévère. Il faudrait qu'il soit un peu plus cohérent quand il parle. Par exemple, il nous accuse d'avoir mis fin au crédit d'impôt de 500 $ - je dois conclure, M. le Président, je reviendrai en réplique - aux chauffeurs de taxi, mais ce qu'il omet de dire, c'est qu'on le fait seulement dans les régions où on a aboli la surtaxe. Évidemment, on ne remboursera pas une taxe que les gens ne paient plus. C'est évident. D'aller comparer cela au financement du transport en commun, qui a été décidé par l'ancien gouvernement de toute façon, de prétendre qu'il n'y a pas de transport en commun dans l'Outaouais, c'est méconnaître, c'est ne pas savoir de quoi on parle. Malheureusement, on en a entendu pendant une demi-heure, tantôt, pendant le discours du député de Lévis. On y reviendra. (11 h 10)

Le Vice-Président: Je cède la parole à M. le député de Nelligan et ministre de l'Environnement.

M. Clifford Lincoln

M. Lincoln: M. le Président, j'ai été vraiment estomaqué, étonné aujourd'hui d'entendre que le député de Lévis avait soudainement découvert la veuve et l'orphelin, après neuf ans dans le gouvernement du Québec, le gouvernement le plus dépensier que l'histoire du Québec ait connu. Soudainement, le député a découvert que l'essence au Québec coûte beaucoup plus cher qu'aux États-Unis et qu'ailleurs.

Avant, lorsqu'il allait dans sa voiture ministérielle comme certains de mes collègues et moi-même le faisons aujourd'hui, il ne se préoccupait pas du coût de l'essence. Il ne descendait pas de sa voiture pour aller voir le prix de l'essence. Lorsque j'étais député, que je n'avais pas de voiture ministérielle, je me souviens du prix de l'essence au Québec, qui était dans les 0,60 $ le litre. Il n'aime pas écouter la vérité, le député de Lévis. Je me souviens du prix de l'essence d'alors, causé par la taxe ascenseur du Parti québécois qui montait tout le temps parce que le prix du pétrole...

M. Garon: Question de règlement. M. Gendron: Question de règlement.

Le Vice-Président: Un instant, M. le ministre! Question de règlement, M. le leader adjoint de l'Opposition.

M. Gendron: II est très clair. Il y a un règlement qui dit qu'aucun député en cette Chambre peut imputer des motifs à un parlementaire. Mon collègue, le député de Lévis, depuis au moins plusieurs minutes est réclamé à une commission parlementaire qui siège. Je pense que le député de Nelligan -ce n'est pas son habitude - n'a pas le droit, sûrement pas à ce moment-ci, lorsqu'un collègue doit s'acquitter de ses responsabilités ministérielles comme critique,

de lui prêter les motifs que, parce qu'il n'aime pas écouter il quitte. C'est complètement antiparlementaire par rapport au règlement, qui défend de prêter des motifs à un parlementaire qui veut s'acquitter de sa tâche.

Le Vice-Président: M. le leader du gouvernement.

M. Gratton: Sur la question de règlement, je ferais remarquer que signaler le départ d'un député n'est pas lui imputer des motifs, mais simplement se rendre compte que le député quitte. Ce qui est beaucoup moins grave, M. le Président, que de faire ce que le député de Lévis tantôt a fait, c'est-à-dire de parler de la députée de Kamouraska-Témiscouata qui glosait, disait-il, alors que la députée de Kamouraska-Témiscouata n'était pas ici, et de parler du député de Vanier et de le prendre à témoin de certaines choses qu'il affirmait alors que le député de Vanier, lui aussi, est en commission parlementaire.

M. le Président, je vous suggère qu'on devrait peut-être faire la part des choses quand on parle d'imputer des motifs.

M. Gendron: Un instant, M. le Président! Sur la question de règlement...

Le Vice-Président: Oui, un instant. Je vous cède la parole à ce moment-ci. Je ne voudrais pas qu'on fasse un débat entre les deux leaders. Je vous cède la parole, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Gendron: Très court, M. le Président. Le motif ce n'est pas de dire qu'un député quitte - pensez-vous que cela n'est pas encore tendancieux, comme ils ont l'habitude de l'être? - c'est de dire qu'il quitte parce qu'il ne veut pas entendre les propos du député de Nelligan. C'est cela imputer un motif, c'est ce qu'il faut dénoncer et qui n'est pas permis par le règlement.

Le Vice-Président: Très bien, M. le leader adjoint de l'Opposition. En fait, je suis d'accord avec vous que si un député quitte, il peut quitter pour autre chose à ce moment-ci; on n'a pas à juger de la pertinence que le député quitte ou pas. Je pense ici que nous avons éclairci la situation. Si le député de Lévis quitte pour la commission parlementaire, c'est son droit, et son devoir de parlementaire probablement.

C'est la même chose aussi pour faire les mises au point qu'on a faites tantôt. La députée de Kamouraska-Témiscouata, je dois le noter, c'est vrai, n'était pas ici. Le député de Lévis a sûrement confondu avec un autre député, comme cela peut arriver effectivement à tous les députés.

Dans ce cas-ci, je cède la parole au ministre de l'Environnement.

M. Lincoln: En tout cas, je vais faire amende honorable. Je ne veux pas imputer des motifs au député de Lévis. Seulement, tout ce que je veux dire, après l'avoir entendu... J'expliquais que soudainement il a découvert le prix de l'essence parce que maintenant il doit aller remplir son réservoir d'essence lui-même ou le faire remplir par quelqu'un de la station-service. Pendant neuf ans, il n'a jamais su cela; il était dans sa limousine et cela ne le frappait pas beaucoup.

Je me souviens des nombreux débats que nous avons eus en Chambre sur la montée du prix de l'essence au Québec, sur le scandale des prix de l'essence. Je n'ai jamais entendu le député de Lévis défendre la veuve et l'orphelin et dire: Mais oui, un jour quand nous le pourrons, en tant que gouvernement, on va réduire la taxe. Il parle aujourd'hui de taxe temporaire. Elle n'est pas restée temporaire puisqu'on en a hérité, nous. C'était une taxe temporaire qui était quasi permanente. Et tout le temps qu'il a été la comme ministre, je ne l'ai pas entendu défendre la veuve et l'orphelin et dire: Ah, ces pauvres gens! Comment peuvent-ils payer 0,60 $ le litre d'essence? Ce n'était pas du tout cela.

Aujourd'hui, soudainement, parce qu'il a à l'acheter lui-même avec ses deniers, cela devient cher, cela devient payant. À ce moment-là, cela coûte cher. Cela coûte très cher. Alors on fait des comparaisons avec les États-Unis et les autres provinces. Mais cela a toujours été le cas, c'était encore pire.

Au moins, nous avons fait un geste important de dire que, dans certaines régions qui en souffrent encore plus, nous allons commencer à réduire le prix de l'essence. Au moins nous avons mis un tarif de pourcentage sur cette taxe pour que les gens sachent où ils s'en vont. Si, demain matin, le prix du pétrole international montait en flèche, au moins les gens sauront que c'est une taxe qui n'est pas une taxe déguisée, mais une taxe que les gens peuvent lire et connaître, parce qu'elle est vraie, elle est officielle.

On aurait préféré ne pas avoir de taxe. Dieu seul sait qu'on s'est battu contre cette taxe pendant des années de notre côté, lorsque nous étions de l'Opposition. Mais c'est certain aussi qu'on a hérité d'une situation catastrophique. Quand j'entends le député de Lévis nous parler de pollution fiscale, lui-même, qui, en commission parlementaire - j'en ai passé des belles - a introduit des mesures comme le palais de l'exposition agricole de Montréal pour un petit 40 000 000 $, sans un bout de papier, sans un bilan prospectif, sans une prévision budgétaire!

Je me souviens de lui avoir demandé: Où sont les prévisions budgétaires? Le président de la société, le directeur général et secrétaire de la société ont imposé toutes ces mesures prises au pied levé, dépensé des millions de dollars, 40 000 000 $, sans même un bilan provisoire, sans même une prévision budgétaire de même un an, sans parler de trois et cinq ans, et qui me disait: Assez avec nos niaiseries. C'est là dans les archives parlementaires.

Les mêmes gens et le ministre, lui, qui ont dépensé - des millions et des millions dans l'usine de sucre, des déficits de 30 000 000 $ et 40 000 000 $, 50 000 000 $ pour la seule étude d'Archipel, le fameux projet hydroélectrique dont, nous, on a dit pendant longtemps que c'était une perte d'argent. On en était arrivé à 50 000 000 $. 375 000 000 $ dans la grande aventure de la Société nationale de l'amiante, 100 000 000 $ pour la gloire nationale de Quebecair, et ainsi de suite. Aujourd'hui, on a eu le culot de venir nous parler de pollution fiscale?

En ce qui concerne le domaine de l'assurance, j'en sais quelque chose. J'ai transigé dans ce secteur pendant des années. Le député n'en comprend pas grand-chose, vous m'excuserez de le dire. Il faudrait au moins lui poser la question. Il s'est mis là, encore une fois, comme grand défenseur des pauvres et des petits. C'est inique, dit-il, qu'on demande de rembourser, qu'on ne laisse pas rembourser ces 9 % pour la période du 23 avril jusqu'au 19 décembre. C'est inique, ce n'est pas connu. C'est la seule fois dans le monde que cela se passe. Mais il me semble que la question bien simple qu'on devrait lui demander, c'est: Qui a imposé la taxe? Admettons, aux fins du débat, que c'est inique. Est-ce que ce n'est pas beaucoup plus inique d'avoir imposé la taxe, en premier lieu? Qui a imposé cette taxe?

On vient nous dire que nous sommes les pollueurs fiscaux comme s'il disait que nous avons inventé cette fameuse taxe que le ministre Duhaime a adoptée à la dernière minute, parce qu'il était tellement pris. Il fallait trouver une façon quelconque de trouver 450 000 000 $. Pour ne pas être "décoter" sur le marché de New York et descendre notre déficit à plus ou moins 3 000 000 000 $, il fallait trouver 450 000 000 $.

On a fait cette espèce de taxe à l'improviste sur les assurances. Je me souviens d'avoir participé à ce débat sur la taxe sur les assurances où, par exemple, ils avaient taxé l'assurance maritime ne sachant pas du tout comment cela s'appliquerait. Cela a été un cafouillis de première classe. On a été obligé de la retirer après qu'on eût fait des représentations.

C'est nous qui avons fait les premières représentations, mon collègue de l'Industrie et du Commerce et moi-même. Je me souviens des quantités de questions en Chambre pour montrer le cafouillis qu'était cette taxe sur les assurances, et il a le culot de venir nous dire aujourd'hui, nous, qui au contraire, disons: On va retirer cette taxe d'assurances. Il faut avoir un peu de temps pour faire quelque chose. On ne peut pas le faire maintenant devant une situation budgétaire extrêmement pénible qu'ils nous ont laissée, un déficit additionnel et caché de 1 500 000 000 $. On ne peut pas le faire tout de suite, mais, au moins, on a mis 54 000 000 $ pour réduire une partie de ces taxes sur les assurances individuelles. On va, le plus tôt possible, aussitôt qu'on le pourra, que les finances du Québec le permettront, continuer à réduire cette taxe. (11 h 20)

Et voilà le député qui a le culot de nous dire que nous pénalisons les veuves et les orphelins. Je dis au député de Lévis que n'eût été le gaspillage effréné du Parti québécois pendant neuf ans, il n'y aurait pas eu de taxes sur l'essence, sur les assurances, les quantités de taxes qu'ils nous ont imposées pendant neuf ans. C'est pourquoi, en parlant du cynisme qu'il a évoqué, les gens sont devenus tellement cyniques, aujourd'hui, qu'ils ont débarqué le Parti québécois avec une décision aussi catégorique. Les gens continuent à se prononcer de plus en plus. Les sondages démontrent que tout ce que nous faisons de ce côté est approuvé par les contribuables du Québec, pas seulement les gros mais beaucoup de petits, la plus grande majorité des petits. Ils disent à 60 %: Le Parti libéral, vous faites bien les choses, continuez dans ce sens. On va continuer dans ce sens. Nous espérons pouvoir dans les prochaines années remettre de l'ordre dans le grand désordre que vous avez créé dans les budgets et la fiscalité du Québec.

Le Vice-Président: Je cède maintenant la parole à M. le ministre du Revenu pour son droit de réplique.

M. Michel Gratton

M. Gratton: Très brièvement, M. le Président, j'aimerais rappeler - ce n'est pas inutile de le faire compte tenu de l'intervention intempestive du député de Lévis - en quoi consiste le projet de loi 78. Il s'agit de donner une suite législative au discours sur le budget du 18 décembre qui prévoyait donner suite lui-même à des engagements électoraux en ce qui a trait, premièrement, à la détaxation de certaines primes d'assurance individuelle. Dans un premier temps, le 18 décembre, le ministre des Finances libéral a dit: La taxe imposée, le 23 avril, par M. Duhaime sur l'ensemble des primes d'assurance, nous l'abolissons,

nous l'abrogeons dans le cas des primes d'assurance personnelle: assurance-vie, assurance-accident et assurance-maladie individuelles. C'est ce que le projet de loi 78 vient faire.

Deuxièmement, dans le domaine de la taxe sur les carburants - surtaxe imposée par le gouvernement du Parti québécois - le 18 décembre, le ministre des Finances libéral a décrété que certaines régions périphériques, notamment l'Abitibi, le Saguenay—Lac-Saint-Jean, la Gaspésie, une partie de l'Outaouais - j'en suis fort heureux - jouiraient d'une détaxation partielle de la surtaxe sur l'essence. Un autre engagement électoral était entériné, était respecté du moins partiellement en attendant, comme l'a indiqué mon collègue de l'Environnement, que l'équilibre financier du gouvernement permette de détaxer l'ensemble du Québec.

Troisième mesure, contrairement à ce que prétend le député de Lévis qui fait valoir qu'il s'agit là d'une mesure libérale dans la mesure où elle privilégie les riches plutôt que les pauvres, en abaissant les taux marginaux d'imposition à compter du 1er janvier 1986, nous n'avons fait que devancer d'un an une décision qui avait déjà été prise par le gouvernement péquiste qui, lui, avait l'intention d'abaisser ces taux marginaux d'imposition du même pourcentage à compter du 1er janvier 1987. Tout ce que le gouvernement libéral a fait, c'est de devancer d'un an pour donner, justement, un dégrèvement d'impôt à un certain nombre de contribuables. Bref, ce sont là les trois éléments majeurs du projet de loi 78 qui viennent entériner les décisions annoncées dans le discours sur le budget du 18 décembre dernier. Il est sûr qu'il y a des articles dans le projet de loi 78 qui sont afférents à ces trois grands principes, notamment la disposition prévoyant le non-remboursement de la taxe de 9 % sur des primes d'assurance qui auraient pu être annulées, primes d'assurance achetées avant le 18 décembre qui auraient pu être annulées. J'ai déjà longuement expliqué la raison d'être de ces dispositions.

J'ai déjà démontré que le but visé, soit celui d'éviter une campagne d'évasion fiscale de la part de ceux qui auraient pu annuler leur police pour se faire rembourser la taxe, a été atteint et qu'effectivement il n'y a pas eu de campagne d'annulation des primes d'assurance qui aurait non seulement eu un effet négatif sur les équilibres financiers du gouvernement, mais qui aurait créé également un fouillis indescriptible chez les assureurs autant que chez les assurés. Donc, le but est atteint. Les appréhensions du député de Lévis à savoir qu'on ne remboursera plus la taxe sur des primes d'assurance à l'avenir ne tiennent pas puisqu'on ne paie plus de taxe sur cette catégorie de primes d'assurance. Donc, c'est sûr que si on ne paie plus de taxe sur des primes d'assurance, si on les annule éventuellement, on ne sera pas remboursé de la taxe.

Le même raisonnement s'applique en ce qui a trait au crédit d'impôt de 500 $ pour les chauffeurs de taxi dans les régions périphériques. Le projet de loi 78 dit effectivement qu'on ne remboursera plus, jusqu'à un maximum de 500 $, les détenteurs de permis de taxi dans les régions périphériques à titre de remboursement d'une taxe payée sur les carburants. On ne remboursera plus parce qu'ils ne la paient plus. En décidant de ne plus taxer dans ces régions, en décidant d'abolir la surtaxe sur l'essence, il fallait évidemment en même temps abolir le remboursement de la taxe, sinon cela aurait été une subvention déguisée. Le ministère du Revenu n'est pas là pour subventionner les contribuables, mais pour être équitable envers tous. Alors, pourquoi les chauffeurs de taxi des régions périphériques qui ne paient plus la taxe obtiendraient-ils une subvention de 500 $ du gouvernement alors que ceux d'ailleurs qui paient la taxe ne l'obtiendraient pas? Ce serait complètement inéquitable et injuste à l'égard d'une majorité de détenteurs de permis de taxi. Le ministère du Revenu n'est pas là pour faire des programmes artificiels de subventions qui engendrent l'inéquité. Bien au contraire, la Loi sur le ministère du Revenu impose au titulaire du ministère d'appliquer les lois de façon équitable à l'endroit de tous et c'est ce que le projet de loi 78 traduit par ses articles.

Bref, M. le Président, je regrette de le dire, mais le député de Lévis a été égal à lui-même encore une fois en traitant de façon démagogique et irresponsable d'un projet de loi. Je ne lui demanderai pas d'applaudir aux gestes du gouvernement. On n'en demandera pas trop, mais j'aurais souhaité, ce à quoi sont en droit de s'attendre les citoyens et contribuables du Québec, avoir une Opposition responsable, qui ne se limiterait pas à faire de la démagogie. Les propos tenus par le député de Lévis ont été exactement les mêmes, mot pour mot dans certains cas, que ceux qu'il tenait dans sa réplique au discours sur le budget du 1er mai, qui avaient inspiré Alain Dubuc, chroniqueur du journal La Presse à écrire dans le journal du 8 mai, c'est-à-dire la semaine après le discours sur le budget, dans un article intitulé: "Jean Garon, le retour du créditisme" - je vous cite un court passage, M. le Président - "Mardi soir le critique financier de l'Opposition, Jean Garon, répliquait au budget du ministre Gérard D. Levesque. Le tout a été diffusé à l'Autre Télévision. Quel dommage! La population québécoise et le Parti québécois lui-même se seraient mieux portés s'il n'y avait pas eu de réplique du tout. Comme le veut le

personnage, c'était coloré mais le discours était un exercice disgracieux de démagogie, truffé de faussetés et de demi-vérités. Même si le terme est fort, la seule façon de résumer ces deux heures de monologue, c'est de constater que M. Garon a dit un nombre incroyable de conneries. C'est aussi une injure au PQ et à ce qu'il a incarné pendant des années: la rigueur et l'honnêteté intellectuelle. Quand on songe à Jacques Parizeau, on assiste à un inquiétant processus de dégénérescence dans lequel on sent une pointe du pénible créditisme des années soixante." Cela continuait ainsi sur plusieurs lignes, avec des sous-titres: "Le PQ renie-t-il le PQ?"; "Les erreurs du professeur", c'est-à-dire du député de Lévis; et "Un discours irresponsable". (11 h 30)

M. le Président, ce que je souhaite très sincèrement, c'est qu'on ait des débats vigoureux ici, à l'Assemblée nationale, et il y a des membres de l'Opposition qui en sont capables, mais que ces débats, M. le Président, portent sur des faits, portent sur des appréciations et ne portent pas uniquement sur des intentions d'attiser les passions à partir de demi-vérités, de démagogie et de conneries - et le terme n'est pas de moi, mais d'Alain Dubuc.

M. le Président, je le souhaite non seulement pour le respect de l'institution qu'est l'Assemblée nationale, mais surtout pour la bonne information de la population qui a un droit sacré à ce que l'Opposition fasse un travail responsable ici, à l'Assemblée nationale, ce que, malheureusement, le député de Lévis semble, jusqu'à maintenant, être incapable de faire.

Le Vice-Président: Le débat est clos et nous allons procéder à la mise aux voix du rapport. Est-ce que le rapport de la commission du budget et de l'administration, déposé le 21 octobre 1986, sur l'étude détaillée du projet de loi 78, Loi modifiant diverses lois fiscales afin de donner suite à l'énoncé politique budgétaire du gouvernement du 18 décembre 1985, est adopté?

Une voix: Sur division.

Une voix: Adopté.

Le Vice-Président: Adopté sur division. M. le leader du gouvernement.

M. Gratton: M. le Président, je vous prierais maintenant d'appeler l'article 3 du feuilleton.

Projet de loi 96

Reprise du débat sur l'adoption du principe

Le Vice-Président: À l'article 3 du feuilleton, nous allons reprendre le débat sur l'adoption du principe du projet de loi 96, Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant les boissons alcooliques.

Je cède la parole à M. le député de Laval-des-Rapides.

M. Guy Bélanger

M. Bélanger: Merci, M. le Président. Mon collègue, le Solliciteur général et député de Chambly, en soumettant à la Chambre le projet de loi 96, veut ainsi rendre la circulation et la vente des boissons alcooliques plus efficaces. Il veut aussi mettre fin à la situation ambiguë qui prévaut dans l'industrie de la restauration avec ce qu'il est convenu d'appeler la circulation ou le vin libre. Ce dernier sujet a d'ailleurs beaucoup mobilisé l'opinion publique dans les trois dernières années. C'est un phénomène qui est typiquement de chez nous, qui est entré dans nos moeurs, et il est temps de le réglementer si on veut éviter des problèmes plus grands. Décrié par les uns, souhaité par les autres, le contentieux à ce sujet a vraiment déjà trop duré. Il est temps qu'on y mette fin.

L'usage, dans les dernières années, nous a appris qu'il y a des trous et des zones grises très importantes dans la loi actuelle. Des abus sont régulièrement faits par des gens qui cherchent, par divers moyens, à éviter de payer la taxe de 4,4 % que, généralement ou, devrais-je dire, obligatoirement, les détenteurs de permis paient lors de leurs achats de boissons alcooliques ou de vins et spiritueux. Je me permettrai quelques exemples pour illustrer ces propos.

On sait que certains détenteurs de permis vont s'approvisionner à des endroits autres que ceux prévus par la loi pour éviter, comme je le disais tout à l'heure, de payer la taxe de 4,4 %. Les pertes ainsi encourues par la province sont importantes, mais beaucoup plus importantes encore si on regarde les conséquences de ce geste. Car afin d'éviter d'être pris ou d'être démasqué par un autre moyen, qui serait celui de la taxe de 10 % à la consommation - on sait que, s'ils se prévalent ou s'ils font la perception de cette taxe de 10 %, on pourra, de cette façon, déterminer les quantités d'alcool qui ont été vendues dans leurs établissements - donc, pour éviter que soit déterminée cette quantité, pour ne pas se faire prendre au jeu qu'ils ont joué relativement à la première taxe de 4,4 %, ils ne perçoivent pas cette taxe de 10 %. Donc, c'est une perte de 14 % pour la province. Si on voulait la quantifier, on sait que c'est une perte qui va chercher entre 10 000 000 $ et 15 000 000 $ par année.

Il y a aussi d'autres pratiques illicites qui sont tout aussi coûteuses pour la

province et que nous voulons corriger par ce projet de loi. Par exemple, ce commerçant qui se rend à la Société des alcools, se procure des bouteilles d'alcool non timbrées, c'est-à-dire les bouteilles que tout citoyen achète sans payer la taxe spéciale de 4,4 % et, par la suite, en transvide le contenu dans des bouteilles vides qui ont déjà des timbres. Alors, la même bouteille pourra servir plusieurs fois et ainsi éviter à plusieurs reprises de payer cette taxe. Et toujours le petit truc des 10 % qui s'ajoutent.

D'ailleurs, il y a eu, dans le passé, plusieurs saisies et procédures touchant les commerçants qui faisaient ces pratiques, mais les peines prévues dans la loi actuelle sont insuffisantes, de telle sorte que, même en payant l'amende, c'est encore plus payant de la transgresser que... Alors, il faut vraiment légiférer à ce sujet et augmenter les amendes pour décourager les délinquants.

Comme je le disais tout à l'heure, ces pertes qui sont de l'ordre de 10 000 000 $ à 15 000 000 $ par année pour la province sont très substantielles et constituent, je pense, une des raisons très importantes pour réviser certaines dispositions pénales et donner plus de pouvoir à la Régie des permis d'alcool du Québec. Dans le cas de la vente illégale de boissons alcooliques ou de disposition illégale des timbres ou d'étiquettes de la SAQ, le projet de loi 96 prévoit une hausse des amendes déjà prévues. On sait que les articles 9 et 13 prévoyaient déjà des amendes, mais on prévoit les mettre encore plus substantielles, comme je le disais tout à l'heure, pour décourager les délinquants. On se rappelle que ces timbres et étiquettes sont le moyen privilégié de contrôle que la Régie des permis d'alcool a pour vérifier si toutes les taxes ont été payées.

Dans cette même loi, la notion d'établissement a été aussi élargie à l'article 1. Cela permet d'éviter les situations souvent dénoncées à cause des ambiguïtés du texte actuel. Prenons l'exemple du restaurateur qui décide d'ajouter une terrasse à son restaurant. La terrasse ne fait pas partie de la notion actuelle d'établissement. Il faut faire toutes les démarches, recommencer. Alors, en élargissant, comme on veut le faire avec l'article 1, cette notion d'établissement, on rend les choses beaucoup plus faciles pour tout le monde.

Autre exemple aussi de l'élargissement des pouvoirs de la Régie des permis d'alcool du Québec. Je reprends ici quelques exemples que nous en donnait le Solliciteur général hier afin de nous rafraîchir un peu la mémoire sur le sujet. Advenant le refus par un détenteur de permis de produire un rapport - on sait que les détenteurs de permis doivent produire régulièrement des rapports sur les achats, les quantités, les prix et leurs fournisseurs, ceci afin d'avoir un certain contrôle sur les volumes et sur les ventes et toujours sur les perceptions de taxes - or, lorsqu'un détenteur refuse de faire son rapport et lorsque la régie redemande ces rapports et qu'il n'y a pas plus de production de ce rapport, cette dernière, la régie, pourra en vertu de l'article 12, convoquer et, s'il y a lieu, révoquer ou suspendre le permis, du contrevenant.

Si on corrige ainsi l'ancien article qui permettait des délais très importants qui faisaient en sorte que, lorsqu'on arrivait aux procédures ou aux limites des procédures prévues par l'actuelle loi, les délais étaient trop longs et, plus souvent qu'autrement, le but, l'objectif visé par la loi n'était pas atteint.

Le projet de loi 96 veut aussi éviter qu'un tenancier qui perd son permis d'exploiter se retourne de bord, aille chercher un autre associé, reformule sa raison sociale, change deux ou trois éléments puis redemande un permis et recommence, et une semaine après, recommence le même manège, de telle sorte que, malgré les interventions répétées de la régie, on n'arrive pas à corriger certains problèmes. Et il y a eu des causes célèbres dans la province à ce sujet. Pour éviter que cela se reproduise, la régie verra ses pouvoirs augmentés pour pouvoir intervenir et éviter que de tels petits manèges ne soient faits et ainsi qu'on contourne la loi.

Il est bien évident que par souci d'éviter que ces mesures créent des préjudices à certains tenanciers qui sont de bonne foi ou à un nouvel acquéreur qui pourait être de bonne foi, il y aura des processus de recours ou des mesures procéduriales, des garanties procéduriales qui seront contenues dans la loi qui permettront de réévaluer ou qui serviront de mécanisme de recours là où le besoin s'en fera sentir.

La régie pourra aussi révoquer ou suspendre un permis délivré en vertu de la Loi sur les permis d'alcool du Québec, l'article 36. Il s'agit ici de permis de fabricants industriels. On sait qu'un fabricant industriel n'a pas le droit de fournir directement un tenancier à moins, je présume, qu'il y ait des ententes avec la Société des alcools pour établir des contrôles. Or, advenant le cas où un industriel fournirait directement un tenancier, il est bien évident que ce dernier évite ainsi les contrôles et peut éviter de payer la taxe de 4,4 %. Dorénavant, la loi nous permettra d'intervenir sévèrement. (11 h 40)

Actuellement, on peut faire presque impunément ce genre de pratique. Cela devenait très compliqué d'intervenir. On veut corriger cette lacune afin de s'assurer qu'il n'y aura plus d'injustice, que les mêmes mesures s'appliqueront à tout le monde avec la même rigueur et la même fermeté. La

Régie des permis d'alcool du Québec pourra aussi demander à un membre de la Sûreté du Québec d'aller inspecter chez un détenteur de permis industriel lorsqu'elle aura des raisons suffisantes ou des doutes raisonnables pour justifier son intervention.

C'est un projet qui corrige des lacunes très importantes dans une loi qui a de l'âge et, comme je le disais tout à l'heure, qui a beaucoup de trous, beaucoup de zones grises. Avec les dispositions sur le vin libre que présentera mon collègue député de Sainte-Anne dans la suite des interventions - donc je ne m'attarderai pas sur ce sujet - je pense que par ces deux corrections importantes, ces deux volets importants qu'on a donnés à la loi 96 nous pourrons ainsi corriger un certain laxisme et un certain nombre de situations qui sont dénoncées depuis plusieurs années au sujet de cette loi. Nous pourrons, à ce moment, agir plus efficacement et ce dans le meilleur intérêt de la province et de tous les citoyens. Je vous remercie.

La Vice-Présidente: Merci, M. le député de Laval-des-Rapides. M. le député de Shefford.

M Roger Paré

M. Paré: Merci beaucoup. Moi aussi je tiens à intervenir quelques minutes, pas très longtemps, sur le projet de loi 96 qui a pour objet de modifier diverses dispositions législatives concernant les boissons alcoolisées. C'est un projet de loi qui est important parce que cela nous permet d'apporter une solution au problème du vin libre dans les restaurants et un meilleur contrôle aussi sur la vente des boissons alcooliques. Je pense que c'est important. C'est un secteur qui concerne tout le monde. Cela serait peut-être le temps aussi de parler de la restauration. Le problème des vins libres, on l'a découvert dans les restaurants, c'est évident, un secteur qu'il ne faut spécialement pas négliger au Québec.

On a une renommée pour la qualité de nos restaurants au Québec. Il faut faire en sorte que ce secteur économique soit bien traité, avec des normes et des règlements qui soient connus de tout le monde et respectés aussi de tout le monde. La restauration, c'est important au Québec. Il ne faudrait pas l'oublier. C'est un secteur du développement économique, dans le grand secteur touristique, très important, primordial. Dans ce secteur, d'ailleurs, le Québec s'est fait une renommée, à mon avis, nord-américaine, mais aussi internationale. On le reconnaît de différentes façons. Entre autres, il y a le Mois de la restauration au Québec. Il y a chez nous, et je suis fier de le rappeler, le Festival gastronomique de Granby chaque année, qui permet aux

Québécois de savourer de bons mets toujours agrémentés de vin, bien entendu, dans un festival gastronomique. Il y a aussi de la part du MAPAQ, ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation du Québec, des reconnaissances annuelles qui sont décernées à nos meilleurs restaurateurs sur l'ensemble du territoire québécois.

C'est donc un secteur important, d'où la nécessité d'intervenir pour clarifier les choses et permettre justement à ces entreprises que sont les restaurants de savoir exactement selon quelles règles ils doivent fonctionner. Comme je le disais tantôt, cette loi va régler, entre autres - c'est une solution, en tout cas, qui est proposée - le problème du vin libre. Je dois dire, au nom de la formation politique que je représente, que nous sommes d'accord, favorables au principe de cette loi qui vient justement régler ce problème du vin libre dans les restaurants. C'est sûr que nous allons avoir quelques questions à poser. J'y reviendrai un peu plus tard et on va surtout y revenir à la commission parlementaire où on va étudier le projet de loi 96 article par article.

Le projet de loi, en soi, vient modifier trois lois: la Loi sur les infractions en matière de boissons alcooliques, la Loi sur les permis d'alcool et la Loi sur la Société des alcools du Québec. C'est un projet de Loi qui va faire en sorte, en les modifiant et en donnant plus de contrôle à la Régie des permis des alcools du Québec, que ce secteur va être mieux réglementé et que la population va savoir exactement quels sont ses pouvoirs, mais aussi ses limites au niveau du vin libre dans les restaurants. Je dois dire aussi qu'une des raisons qui font que nous sommes favorables en principe à ce projet de loi, c'est que cela fait partie aussi d'une demande que nous avions faite déjà en 1985 au président de la Régie des alcools, M. Laflamme, afin qu'on aille consulter les gens. Cela, c'est important.

Aller consulter les gens pour savoir exactement quelle est la volonté, quels sont les besoins du milieu, c'est important. Je trouve que cela devrait être, pour le gouvernement actuel, une bonne leçon ou une bonne direction à suivre parce que cela ne s'est pas fait souvent, à mon avis, depuis le 2 décembre. On aurait peut-être moins de problèmes, en tout cas, moins de problèmes graves comme ceux qu'on connaît présentement ou on ferait moins d'erreurs. On a souvent promis qu'on était pour consulter, comme sur la Raffinerie de sucre du Québec ou dans d'autres dossiers, et on voit les résultats aujourd'hui. Malheureusement, on n'a pas consulté. Mais, dans ce cas-ci - c'est ce qui fait en sorte que, nous, on trouve que c'est une bonne direction à suivre - on a consulté. On a consulté des gens qui connaissent le secteur, qui connaissaient les problèmes aussi et qui avaient des solutions

à proposer.

Parmi ces gens qu'on a consultés, il y avait l'Association des restaurateurs du Québec, l'Association des hôteliers de la province de Québec, l'Association des marchands détaillants du Québec, l'Association des détaillants en alimentation du Québec, le Regroupement des restaurants non licenciés, l'Association des résidents du mail piétonnier Prince-Arthur, le Regroupement des restaurateurs du boulevard Saint-Martin et, surtout, l'Association des consommateurs du Québec. C'est important, je pense, qu'on ait fait le tour. On a permis aux gens qui ont un intérêt soit dans leur entreprise ou les gens qu'ils représentent, dont le dernier que je vous ai mentionné, les consommateurs... Ils ont eu l'occasion de faire valoir leur point de vue, justement, à la Régie des permis d'alcool du Québec afin que la solution qu'on propose reflète sinon un consensus ou l'unanimité, du moins une orientation, une certaine volonté exprimée par beaucoup de ces gens.

Je pense que la consultation, c'est une très bonne chose. C'est même indispensable si on veut avoir une collaboration, une concertation, une coopération de tous les gens. Il faut tout d'abord, à mon avis, avoir une bonne consultation. C'est un point que nous considérons comme important et c'est une des raisons qui fait en sorte que cette recommandation, nous, on l'appuie parce qu'on sait qu'elle vient du milieu, qu'elle vient des gens qui ont été consultés.

En plus, ce projet de loi, le projet de loi 96, qui modifie des dispositions législatives, entre autres, de la Société des alcools du Québec, cela vient donner plus de pouvoirs, plus de responsabilités à la Régie des permis d'alcool du Québec. Cela aussi, nous, du côté du Parti québécois, cela nous satisfait énormément parce qu'il ne faut pas oublier que la Société des alcools du Québec a été mise sur pied par le gouvernement du Parti québécois le 1er juin 1980 parce qu'on voulait justement séparer la Société des alcools du Québec de l'émission des permis et cela, probablement pour apporter plus de tranquillité et dans l'intérêt public, plus d'impartialité, finalement. C'est exactement le rôle que joue la Régie des permis d'alcool du Québec.

Nous, nous sommes satisfaits qu'on vienne faire confiance davantage à cette régie, qu'on lui donne plus de pouvoirs, plus de responsabilités, en fait. Cela permet aussi un meilleur service à la population, soit en raccourcissant les délais ou en donnant une meilleure information. Mais comme c'est leur tâche principale, cela leur permet aussi d'être impartial, plus détaché de la Société des alcools du Québec. Nous sommes aussi d'accord là-dessus et avec le fait que, dans ce projet de loi, on vienne reconnaître davantage la Régie des permis d'alcool du

Québec comme un intervenant important pour régler des problèmes au Québec ou s'assurer, en tout cas, de donner un meilleur service au secteur concerné. Cela vient aussi contredire ce que, nous, on dénonce avec vigueur et qu'on va continuer à dénoncer parce qu'on trouve cela inacceptable. Il s'agit des fameux rapports du comité des sages où à l'intérieur d'un rapport, le rapport Scowen, on demande l'abolition de la régie comme si cela n'était pas utile.

Je suis fier de voir que le ministre vient contredire cette affirmation gratuite qui ne repose sur rien quand on lit le rapport parce que, vraiment, cela n'est pas tellement épluché, cela n'est pas tellement en détail. Cela ne donne pas de solution. Cela parle tout simplement d'abolir pour abolir, comme si l'État n'avait pas un rôle important à jouer.

Cette reconnaissance par le projet de loi 96 de l'importance de la Régie des permis d'alcool nous satisfait en grande partie et vient rappeler aux gens qui ont fait le rapport du comité des sages qu'il faudrait peut-être consulter un peu plus les gens qui sont élus, qui ont des responsabilités, qui sont ministres, ici, responsables d'un secteur. Avant de demander à un ministre d'abolir quelque chose, je pense qu'il vaudrait la peine de faire des études un peu plus poussées. Je me rends compte que les sages n'ont pas agi de façon sage du tout. Je pense que cela a été fait comme un travail dont on se débarrasse en pensant que l'État n'a plus aucun rôle, alors que l'État a une responsabilité majeure dans le bien-être de la population du Québec. (11 h 50)

Encore une fois, le rapport des sages vient d'être rejeté du revers de la main, et je dois vous dire que cela nous réjouit, M. le ministre, que vous ayez pris cette décision. Vous pourrez compter sur nous de ce côté.

Il y a eu consultation, il y a reconnaissance de plus de responsabilité de la Régie des permis des alcools du Québec, contrairement à la recommandation du rapport des sages. Ce sont des facteurs qui font en sorte que nous favorisons ce genre de décision. Dans le projet de loi 96, ce sont des facteurs qui font en sorte qu'on va appuyer le principe, même si, comme je vous le disais au début, nous allons avoir certaines questions qui vont se rapporter principalement à l'exclusion de la bière des permis de servir.

Si la Régie des permis d'alcool doit aussi émettre des permis et que le permis concerne globalement, généralement, de façon régulière les boissons alcoolisées, y compris la bière, dans le projet de loi, je pense qu'il y a clarification à apporter et c'est certainement en commission parlementaire qu'on va pouvoir le faire. C'est une des questions que nous aurons et sur laquelle

nous espérons pouvoir apporter de l'éclairage.

En ce qui concerne les montants des amendes, c'est sûr qu'il faut qu'une loi ait des dents, comme on dit souvent, si on veut avoir des contrôles pour être capable de faire respecter les lois. Mais en ce qui concerne les amendes, nous aurons quelques questions là-dessus.

Il y a aura également des questions que nous aurons à poser sur certains articles concernant la responsabilité d'un propriétaire pour la révocation ou l'octroi de permis de réunion. En commission parlementaire, je pense que nous pourrons faire un très bon boulot là-dessus, de façon à tout décortiquer et à nous assurer que le projet de loi va répondre le mieux possible à l'esprit de la loi comme tel et aux demandes qui ont été exprimées par les intervenants qui ont été consultés le printemps dernier, et à nous assurer aussi que nous allons trouver une solution acceptable pour tout le monde, donc les gens du secteur concerné qui sont aussi les petites et moyennes entreprises, nos restaurateurs, mais aussi tout en s'assurant que le consommateur ne sera pas lésé là-dedans mais, au contraire, pourra trouver davantage ses droits respectés comme consommateur.

Même s'il y a certaines limites, comme je l'ai dit, Mme la Présidente, malgré ses limites sur le fond, c'est un projet de loi qui répond à un besoin, qui suggère une solution qui nous semble acceptable, qui augmente l'efficacité, ce qui nous a souvent été apporté par des gens, dont ceux de l'Association des restaurateurs qui devaient payer des taxes, avoir un permis, avoir un contrôle sur la qualité du service, mais aussi sur le débit de boisson, alors que d'autres restaurateurs n'avaient pas à payer de permis et pouvaient donner un service - pas semblable ni équivalent - et pouvaient permettre quand même aux gens de consommer sur place, alors qu'il n'y avait aucune contrainte, aucune obligation, aucun permis à avoir.

Je pense que cela rétablit une certaine équité. Sur le fond, je pense qu'on ne peut pas faire autrement qu'être d'accord et vous dire que vous pourrez compter sur l'appui de l'Opposition sur le fond du projet. Nous avons toujours dit que nous ferions une Opposition positive et que nous serions en faveur des projets de loi qui vont dans le sens des besoins des consommateurs et de la population du Québec en général.

On vous le prouve encore une fois aujourd'hui en vous mettant en garde sur certaines limites que nous espérons régler en commission parlementaire et en espérant que nous aurons des informations qui vont corriger les inquiétudes que nous avons. Vous pourrez compter sur nous pour une commission parlementaire positive et notre appui sur le projet de loi comme tel, sur le fond du projet de loi. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Merci, M. le député de Shefford. M. le député de Sainte-Anne.

M. Maximilien Polak

M. Polak: Merci, Mme la Présidente. J'apprécie bien avoir l'occasion de parler après le député de Shefford. Voici la différence dans le ton ce matin. On a entendu le député de Lévis, le grand "show", et, maintenant, on vient d'écouter le ton raisonnable du député de Shefford qui nous félicite pour ce beau projet de loi. Je le remercie pour cela.

Je voudrais tout de même faire une rectification. Le député de Shefford a cité erronément le député de Notre-Dame-de-Grâce en disant que M. Scowen, dans son rapport, avait recommandé l'abolition de la Régie des permis d'alcool. Ce n'est absolument pas vrai. Je voulais juste faire la rectification. Il ne faut pas faire au député de Notre-Dame-de-Grâce un reproche qu'il ne mérite pas.

On parle ce matin des dispositions législatives concernant les boissons alcooliques. C'est le premier projet de loi présenté par le Solliciteur général. Il est assis à ma gauche, il nous écoute et je le félicite parce qu'il s'agit d'un projet de loi bien préparé, un bon projet de loi qui règle en même temps des situations qui étaient douteuses, qui créaient des problèmes. On a maintenant une solution claire et nette à beaucoup de problèmes. Je le félicite. D'ailleurs, on a vu l'attitude de l'Opposition qui appuie le projet de loi, on a vu les commentaires dans les journaux au mois de juin lorsque le projet de loi a été déposé en première lecture et c'était généralement très bien reçu.

Je voudrais parler ce matin du consommateur. Souvent, les citoyens nous disent: Pourriez-vous, à l'Assemblée nationale, nous expliquer en termes profanes de quoi il s'agit? Souvent, ces projets de loi sont très techniques. Parlez-nous un peu pour que la masse des gens comprennent. C'est cela que je vais tenter de faire, me placer du point de vue du consommateur, du citoyen ordinaire. Il y a une disposition qui, je pense, constitue une amélioration claire et nette dans ce projet de loi: À partir du moment où il sera adopté, si on vend de l'alcool à un mineur, une personne de moins de 18 ans, les amendes seront augmentées considérablement. Jusqu'à maintenant, il y avait une amende minimale de 200 $ et une amende maximale de 1000 $. Ces montants seront augmentés respectivement à 1000 $ et 5000 $. Je pense que c'est une disposition très importante. Lorsqu'on voit le projet de loi que vient de faire adopter le ministre des Transports sur

le contrôle de la vitesse, il faut voir cela comme un tout. Évidemment, le ministre, en protégeant les mineurs, pose un geste très important pour éviter, justement, des problèmes tels que les accidents graves de la route qui résultent très souvent chez les jeunes de la consommation illégale d'alcool. Pour une deuxième infraction et les infractions subséquentes, l'amende minimum sera de 5000 $ et l'amende maximum de 20 000 $. On parle vraiment de très grosses amendes et je pense que les restaurateurs qui servent de l'alcool à une personne mineure ne le feront plus, une fois cette loi en vigueur.

Le grand problème qui a été réglé par ce projet de loi est celui qu'on appelle le problème du vin libre. Je parle à titre de député montréalais et aussi comme quelqu'un qui aime bien les restaurants de toutes sortes. À Montréal, nous avons des restaurants qui ont cette pratique du vin libre. J'ai été étonné d'apprendre qu'il n'y en a presque pas à Québec. Dans les régions, cela n'existe pas non plus. Il faut donc l'expliquer. Il s'agit de restaurants où le consommateur peut se rendre en apportant sa propre bouteille de vin à 4,50 $ ou 5 $, qu'il achète à l'épicerie, et consommer cette bouteille avec le repas. Il y a un autre type de restaurants qu'on connaît, c'est-à-dire où on achète le vin au restaurant où on prend un repas. C'est évidemment beaucoup plus cher, parce que le restaurant nous vend le vin avec profit. Le problème qui est survenu, c'est qu'il n'y avait aucune réglementation, aucun contrôle, aucune règle pour les restaurants avec vin libre. Je suis allé dans ces restaurants. Très souvent, le dimanche soir, j'invite ma femme et mes enfants a aller dans un tel restaurant parce que c'est papa qui paie la facture. Donc, on achète une bouteille de vin dans une épicerie et on va le boire dans ce restaurant où on prend un repas. À Montréal, il y a des restaurants grecs, des restaurants chinois, aussi, où on peut apporter son vin. Cela fait épargner beaucoup d'argent. Dans de tels restaurants, on commence à vendre aussi des boissons alcooliques parce qu'ils obtiennent un permis sous la loi actuelle. (12 heures)

À un moment donné on trouve dans le même restaurant deux opérations une à côté de l'autre. On peut voir une bouteille de 5 $ à une table et à côté quelqu'un achète la même bouteille au restaurant pour 15 $. Qui recevra le meilleur service? Évidemment, celui qui paie la bouteille 15 $. Cela a du sens parce que le serveur recevra 10 % ou 15 % de pourboire sur le montant total de la facture. Cela causerait des problèmes et des conflits. Cela a été réglé par le ministre dans ce projet de loi.

Comme le député de Shefford l'a dit, après une consultation et un consensus très larges on aura désormais deux sortes de permis: ce qu'on appelle un permis de restaurant pour vendre - le permis qui existe actuellement pour les restaurants qui vendent des boissons alcooliques - et un autre qu'on appelle le permis de restaurant pour servir, c'est-à-dire le permis qui permettra au restaurant de servir des repas et de la boisson à celui qui l'apporte au restaurant.

Le projet de loi dit: Ceux qui l'apportent dans l'établissement pour consommer sur place à l'occasion d'un repas. Évidemment, il faut toujours comprendre qu'on n'apporte pas une bouteille de vin dans un restaurant pour le consommer sans prendre de repas en même temps. C'est essentiel que le vin soit consommé à l'occasion d'un repas.

Plusieurs raisons ont eu une grande influence sur le changement dans le projet de loi. Il y avait ce qu'on appelle une concurrence déloyale. Ces restaurants de type vin libre ne payaient pas de permis au gouvernement. Il n'y avait aucun contrôle. D'autres restaurants qui avaient le permis ordinaire payaient et étaient sujets à toutes sortes de contrôles de la part du gouvernement. Évidemment, cela créait une concurrence déloyale. Cela est maintenant réglé parce que le coût du permis - j'ai cru comprendre cela du ministre lorsque je le lui ai demandé hier - est autour de 228 $ par année. Ce n'est pas un montant énorme pour toute une année d'activités. Ce n'est pas un tel montant qui empêche les activités d'un restaurant.

En vertu du nouveau permis pour servir, ce type de restaurants sera soumis exactement à la même réglementation que ceux qui détiennent le permis pour vendre, c'est-à-dire que la protection pour les mineurs s'appliquera dans les deux cas. Quant au respect des heures de fermeture, de la santé, de l'ordre et de la tranquillité publique, cela s'appliquera dans les deux cas.

Il y a plusieurs arguments parce que ce problème a été largement discuté. Des audiences publiques ont été tenues devant la régie. Des restaurateurs ont émis différents points de vue. Il est bon pour le public de savoir pourquoi le gouvernement a opté pour ce nouveau type de permis. Il faut comprendre en même temps que le nouveau type de permis permettra seulement au consommateur d'apporter du vin, c'est-à-dire pas de bière, d'alcool, de boissons alcooliques. Il faut dire pourquoi on ne donne pas le droit à quelqu'un d'apporter de la bière, par exemple, pour consommation dans des restaurants de ce type. Premièrement, c'est à cause de la sécurité publique. Il est bien connu que la bière se vend généralement dans des contenants de 6, 12 ou 24 bouteilles. II est fort probable qu'une surconsommation de bière se produirait plus facilement qu'avec une bouteille de vin.

Deuxièmement, si la personne prend le volant après le repas - ordinairement, ceux qui viennent dans ces restaurants prennent leur propre voiture - elle ne rapporte pas le petit restant de la bouteille de vin, mais on rapporterait ce qui resterait de bière dans l'automobile et cela pourrait causer des problèmes.

Il y a aussi un argument de protection de l'environnement. Les contenants vides, les bouteilles ou les canettes de bière, cela créera plus de problèmes soit pour le restaurateur qui devra les rapporter chez l'épicier le lendemain ou pour les personnes qui ont à retourner avec ces contenants et qui les laisseront peut-être sur la place publique. Avec tout le respect que je dois à ceux qui consomment de la bière - je consomme moi-même de la bière - on avait décidé de donner cette permission pour le vin, parce que le vin était servi avec les repas dans ces restaurants, plutôt que de permettre de venir avec notre propre contenant de bière.

Il y a aussi l'argument de l'Association des hôteliers de la province de Québec dont les membres ont été consultés et qui sont pour ce projet de loi. Ils se sont prononcés pour un permis pour le vin libre, mais ils ont demandé que ce soit limité au vin seulement, pour les raisons déjà évoquées. C'est important d'avoir l'opinion de ceux qui travaillent dans ce commerce et dans cette industrie, les gens de l'Association des hôteliers qui nous ont dit: Nous sommes d'accord pour régulariser la situation de ce qu'on appelle le vin libre. Vous aurez notre appui, M. le ministre, ont-ils dit, mais on voudrait que ce soit limité au vin seulement et pas à d'autres sortes de boissons alcooliques.

Il y a aussi la considération touristique parce que c'est bien connu, la gastronomie québécoise est associée à de bons mets et à la consommation de bons vins. On n'a qu'à regarder les touristes américains qui viennent ici l'été, à Québec et à Montréal. Je pense qu'on peut être très fiers de la restauration québécoise et du type de restaurants où les gens entrent et voient les clients consommer du vin. Au point de vue touristique, c'est un autre argument en faveur de le limiter à cette classe-là.

Comme le ministre l'a déjà mentionné hier soir et d'autres députés, généralement il y avait de très bons commentaires sur ce projet de loi. Je voudrais simplement lire un commentaire dans la Gazette. Vous savez, il y a beaucoup de restaurateurs qui sont de langue anglaise qui sont très intéressés à ce débat et aussi très heureux que le problème ait été réglé. Je veux citer la Gazette du 8 avril 1986: "Restaurants that let patrons bring their own wine provide a popular service and should be allowed to flourish, the Quebec agency that issues liquor license said yesterday." C'est très important de savoir que c'est le public qui l'a voulu. C'est le consommateur, c'est nous autres qui avons voulu qu'on leur donne l'occasion de continuer ce qu'on appelle le vin libre. "Ghislain Laflamme, President of the Régie des permis d'alcool du Québec, rejected a call by licensed restaurants for a total ban on "brown bagging, but did agree the practice should be regulated." On a ici "regulated". On trouve cela maintenant dans le projet de loi. La réglementation est là, la protection est là, exactement tel que réclamé. It is "the public who is responsible for launching this phenomenon", Laflamme said. "Among consumers, we were not able to find any real opposition to it." Donc, parmi les consommateurs, il n'y a vraiment aucune opposition à cette façon de procéder. Tout le monde est d'accord, certainement du point de vue du consommateur. "While concluding that bring-your-own-wine restaurants are in the public interest, the Régie proposed some controls. It called for the creation of a new form of liquor permit, for serving but not selling alcohol, to cover bring-your-own-wine restaurants. Most now operate without any permit." C'est exactement ce qu'ils ont demandé qu'ils ont eu. Ils ont demandé de régulariser la situation, d'émettre un permis sujet à un contrôle comme le permis régulier. On trouve cette disposition dans le projet de loi.

Mme la Présidente, il y a, évidemment, beaucoup d'autres dispositions dans ce projet de loi dont le député de Laval-des-Rapides a déjà traité ce matin. Tel que le député de Shefford l'avait dit en commission parlementaire, je suis certain qu'il y a peut-être des petits changements dans les articles sur des points très mineurs, mais, en principe, tout le monde est d'accord, ceux qui vivent de cette industrie, ceux qui gagnent leur vie dans cette industrie, les consommateurs, le gouvernement, l'Opposition. Donc, je pense que nous sommes sur une très bonne route et je félicite encore une fois le Solliciteur général. Ce n'est pas comme dans le temps de la législation péquiste. Je me rappelle que très souvent on donnait naissance à ce que j'appelais, du côté de l'Opposition, une souris morte, mais vous avez donné naissance à un très beau bébé. Je vous remercie. (12 h 10)

La Vice-Présidente: Merci, M. le député de Sainte-Anne. M. le député de Mercier.

M. Gérald Godin

M. Godin: Mme la Présidente, je me propose d'appuyer le principe de cette loi parce que je pense qu'elle illustre fort bien le mûrissement et la maturation d'une idée lancée il y a quelques années par notre gouvernement et qui, aujourd'hui, a trouvé dans le député de Chambly l'occasion de devenir

une solution, à mon avis, louable, acceptable et intelligente à ce problème.

Je me suis battu à quelques reprises en tant que membre du Conseil des ministres de l'ancien gouvernement pour les restaurants de la clientèle de ma collègue, la députée de Bourassa et ministre de l'Immigration, pour qu'on protège les minorités culturelles qui ont mis au monde les chaînes de restaurants au Québec qui illustrent fort bien ce que le député de Sainte-Anne citait, que le Québec est doté d'un ensemble de restaurants peu commun en Amérique du Nord, qui attire ici des touristes et qui a pu se développer grâce à l'existence au Québec d'un régime de vin libre.

Mais tout le monde se posait la question de la "tax evasion", comme le diraient mes collègues anglophones, à laquelle il faudrait mettre un terme. Je pense que la solution trouvée par le gouvernement actuel est une bonne solution et nous voterons pour cela avec empressement. On se réjouit qu'entre-temps les restaurants multiethniques au Québec se soient multipliés, aient pu croître et se développer comme les enfants dont parle la Bible. Ils ont maintenant atteint un degré de stabilité financière tel qu'ils envisagent sans trop se plaindre de verser à l'État une partie de leurs profits alors qu'à l'époque où ils ont commencé cela aurait été un scandale pour eux, ils se seraient battus à mort contre toute mesure visant à leur imposer un permis à eux aussi. Maintenant, les choses ont changé, il y a eu une évolution des mentalités, ils ont fait des profits, ils disposent de fonds leur permettant de verser à l'État une contribution fiscale sur les vins qui sont consommés chez eux.

Donc, dans ce domaine comme dans d'autres, on constate que d'un gouvernement à l'autre il y a une continuité et que les erreurs de l'un peuvent profiter à l'autre et surtout faire mûrir les mentalités, faire mûrir les commerçants, faire mûrir les idées. Je constate donc que, le fruit étant mûr, le gouvernement actuel le cueille de la meilleure manière qui soit puisqu'il y a unanimité sur ce projet de loi au Québec. On constate qu'il y a une idée qui a frappé ce gouvernement - au moins une, en tout cas -qui est bonne et à laquelle nous nous associerons totalement, Mme la Présidente. Merci beaucoup.

La Vice-Présidente: Merci, M. le député de Mercier. M. le député de Sainte-Marie.

M. Michel Laporte

M. Laporte: Mme la Présidente, je remercie effectivement et je prends bonne note des propos tenus par le député de Mercier en cette Chambre sur son appui au projet de loi 96 et de ses félicitations à l'endroit du gouvernement actuel. Je comprends bien, étant le représentant d'un des comtés voisins du comté de Mercier, qu'effectivement il y a un très grand nombre de restaurateurs dans la population qu'il dessert qui sont situés dans son comté et qui font ce type de service au niveau du vin libre. Comme je prends très bien aussi ses arguments au sujet des divers essais qu'il a faits au niveau du Conseil des ministres afin d'adopter cette loi-ci que notre gouvernement a mise sur pied.

Mme la Présidente, nous abordons actuellement l'étude du projet de loi 96 visant à apporter des modifications aux lois actuelles: la Loi sur les infractions en matière de boissons alcooliques, la Loi sur les permis d'alcool et la Loi sur la Société des alcools du Québec. Concrètement, la partie de ce projet de loi qui retient le plus l'attention du public, des consommateurs particulièrement et sûrement des restaurateurs, est celle de la vente qu'on appelle communément de vin libre dans les établissements.

J'aurai l'occasion de revenir sur ce sujet précis du vin libre un peu plus tard au cours de mon discours, mais je ne voudrais pas, pour autant, passer sous silence toutes les dispositions traitant du contrôle de la circulation et de la vente des boissons alcooliques au Québec. Il existe de nouvelles habitudes qui, chemin faisant, se popularisent et deviennent une pratique courante. On pourrait citer les exemples suivants. Nous savons tous qu'un commerçant qui vend des boissons doit obtenir des bouteilles qu'on appelle timbrées, avec des timbres dessus, qui indiquent le droit pour l'établissement de vendre aux consommateurs ce type de boissons en particulier. Il arrive et ce, malheureusement, qu'un certain nombre de restaurateurs transvident d'une bouteille timbrée à une autre non timbrée certains des produits qu'ils ont. Ceci leur permet d'éviter le paiement de certains droits appropriés, au détriment de tous ceux qui, eux, respectent la loi.

Il y a aussi ceux qui, par la bande, achètent différents produits alcoolisés soit des États-Unis ou des particuliers. Aussi, il y en a beaucoup qui, peut-être pas par mauvaise volonté, mais on pourrait dire un peu par malhonnêteté, échangent les étiquettes d'une bouteille à l'autre. Ces faits existant, il est important que le gouvernement, pour tous ceux - c'est la grande majorité, on doit quand même le dire - qui respectent les lois et paient les droits, apporte les corrections qui s'imposent, en permettant, entre autres, à la Régie des permis d'alcool d'avoir les outils, par le biais de pénalités, et les mécanismes pour agir afin d'être plus efficace en regard du mandat qu'elle possède. Ce ne sont nullement des modifications qu'on appellerait

tatillonnes. Elles visent, justement, à combler les lacunes qui ont pu être constatées par le Solliciteur général dans la loi actuelle et permettent - il ne faut pas s'en cacher - de récupérer des montants d'argent importants qui nous permettront, à titre de gouvernement, de continuer les actions que nous avons entreprises dans plusieurs domaines.

Ainsi, la Régie des permis d'alcool du Québec pourra, par l'extension de certains de ses pouvoirs, révoquer ou suspendre un permis qui a été délivré à un établissement si celui-ci ne respecte pas les dispositions de la loi. Nous pourrions citer quelques exemples précis d'endroits peu recommandables. D'ailleurs, en manchette, des journaux nous en ont fait part à plusieurs reprises, mais je ne voudrais pas leur faire de publicité ici. Je ne les mentionnerai pas, mais ils se sont vu retirer pour un certain temps leur permis. En pratique, ceci survenait toujours par un effet détourné. Ces mêmes propriétaires pouvaient former une autre compagnie, se revendaient ce commerce l'un l'autre et pouvaient obtenir à nouveau une certaine forme de permis sans qu'on puisse nécessairement apporter - parce que la preuve est difficile -des éléments de preuve justement qui correspondent à la révocation de leur permis et ce permis révoqué pouvait être continué après. Les nouvelles modifications permettront un meilleur respect de la loi car la suspension ou révocation ne sera pas attachée à l'individu, mais à l'établissement en tant que tel. Les personnes qui habitent non loin de ces propriétés et commerces et qui ont eu à vivre ces situations seront, j'en suis persuadé, heureuses de cette approche.

Je vous ferai grâce aussi de tous les détails techniques se rapportant à un meilleur contrôle à exercer sur plusieurs points par la régie. De toute manière, le discours d'introduction que le Solliciteur général nous a livré, fort brièvement, d'ailleurs, vous explique les grandes lignes avec force détails.

Le point sur lequel j'aimerais vous entretenir présentement porte sur un des aspects du projet de loi 96 et traite plus spécifiquement de ce qu'on appelle le vin libre dans les restaurants. Nous avons pu constater depuis environ quatre ans - et je dois dire que, comme député de la région de Montréal, j'ai pu le vérifier à maintes reprises - qu'il s'est développé de nouvelles habitudes de consommation. D'ailleurs, dans le comté que je représente, le comté de Sainte-Marie, j'ai pu remarquer qu'il n'existait pas moins d'une vingtaine d'établissements qui offraient à la fois une nourriture de qualité à leur clientèle et la possibilité d'apporter leur vin. (12 h 20)

Cette pratique, fort répandue dans certains secteurs tant de Montréal, de

Québec et d'autres régions, va en s'accroissant. Il est important de régulariser cette situation du permis en apportant une définition plus précise à la notion d'établissement; précise, parce que la nouvelle définition permettra d'inclure tous les lieux de cet établissement, que ce soit le sous-sol, une terrasse ou tout autre lieu que l'établissement dessert, en introduisant aussi la notion de permis de servir et de permis de vendre.

Ces nouvelles définitions de permis enlèveront ce que j'appellerais toute discrimination existant à l'heure actuelle envers ceux qui détenaient un permis de restaurant sous sa forme actuelle. Elles répondent à la volonté du gouvernement d'exercer un équilibre sur la vente des boissons alcoolisées. Il existait jusqu'à présent une espèce de vide juridique sur cette question et le projet de loi 96 vient combler cette lacune.

Certains arguments ont été apportés. On a pu les entendre par le biais des journaux et surtout aux audiences qu'a tenues la régie. Les premiers arguments que faisaient valoir les opposants au projet de loi, à bon droit je crois bien, c'est que cette pratique était néfaste pour le commerce. Deux principaux arguments ressortaient, à savoir qu'ils possédaient un permis et qu'ils défrayaient un coût pour ce permis. Comme je l'ai dit tantôt, la nouvelle définition de permis de vendre et de permis de servir vient régler cette situation.

Il y avait aussi l'autre situation, où on disait que la taxation sur la vente des produits alcoolisés, surtout en ce qui concerne le vin, faisait en sorte qu'ils avaient une obligation supplémentaire. Il ne faudrait pas cependant, pour ce motif, oublier - on le voit à l'analyse - qu'ils ont aussi certains avantages lorsqu'ils font l'achat ou l'acquisition de caisses de bouteilles de vin à la Société des alcools du Québec, ce qui vient compenser et équilibrer un peu toute cette dimension et toute cette argumentation qui était apportée par ces opposants. De plus, c'est ce qui est, à mon avis, le plus important: les habitudes de consommation ont changé et la clientèle demeure toujours variée.

Tout d'abord, il est bon de souligner que chacun des établissements et restaurants a pour une grande part un type de clientèle qui lui est propre. Il existe toujours, on me dira, un certain pourcentage qui va soit à l'un, soit à l'autre; mais je crois bien, par expérience, ayant eu la possibilité d'aller à tous ces types de restaurants, que chacun a une espèce de clientèle captive. Justement, en raison de cela, rien n'est apparu moins évident que la compétition dite déloyale exercée par les restaurants qui acceptaient que leurs clients apportent leur vin, surtout

lorsque nous constatons que l'achalandage dans les restaurants que j'appellerais traditionnels est demeuré stationnaire, pour ne pas dire en constante évolution. L'un et l'autre peuvent cohabiter sans nécessairement se nuire. Le consommateur, dans cette perspective, n'en sera que mieux servi. On lui offrira une gamme de services, une gamme de choix, il n'en sera que mieux éclairé.

Accepter le vin libre, c'est accepter la possibilité que ceux qui n'en ont pas toujours les moyens puissent quand même aller au restaurant. On pensera, entre autres, aux étudiants et aux étudiantes qui fréquentent passablement ce type de restaurants. On pensera aussi à plusieurs travailleurs et travailleuses. Accepter le vin libre est le reflet aussi d'une écoute de la volonté exprimée par le consommateur québécois. Une société est en constante évolution et nous ne faisons que concrétiser en une loi cette évolution. Cela est très important. Nous n'aurions effectivement aucun avantage à laisser aller, sans la concrétisation de cette loi, les choses comme elles se présentent. Je crois bien que, si on avait laissé perdurer cette situation, l'inéquité aurait été très mal servie, car la situation du vin libre, qui prend de l'ampleur et qui se démarque depuis quatre ans, ne nous permet pas de laisser continuer des choses comme cela.

Le meilleur des exemples que je cite en ce qui concerne ces nouveaux types de restauration et les consommateurs qui fréquentent ces différents établissements, c'est un peu comme les différents concessionnaires d'autos. Ce n'est pas toujours agréable de voir un concessionnaire d'une autre marque se retrouver à côté. Je crois bien que cela stimule le commerçant qui était habitué, peut-être, à une pratique un peu plus stationnaire. On diversifie, par ce fait, les différents produits, surtout les différentes qualités et les différentes approches qu'on offre au consommateur.

Donc, en ce sens, je crois bien que le projet de loi 96 présenté par le Solliciteur général est une très bonne loi et qu'on se doit sans délai de l'adopter. Je vous remercie bien de votre attention, Mme la Présidente, et je souhaite ardemment qu'on puisse procéder le plus rapidement possible.

La Vice-Présidente: Merci, M. le député de Sainte-Marie. Il n'y a pas d'autres intervenants?

M. le Solliciteur général, en réplique.

M. Gérard Latulippe (réplique)

M. Latulippe: Permettez-moi, tout d'abord, Mme la Présidente, de témoigner ma satisfaction de l'attitude de l'Opposition en rapport avec ce projet de loi, une attitude positive, une attitude rationnelle. Je pense que je dois témoigner publiquement ma satisfaction à l'appui que l'Opposition apporte au principe du projet de loi 96.

Peut-être assistons-nous aujourd'hui à la naissance d'une nouvelle Opposition, plus positive, plus rationnelle, plus libérale que celle dont nous avons été témoins depuis décembre 1985. C'est une habitude à prendre et j'invite mon collègue...

M. Filion: Question de règlement, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Question de règlement, M. le député de Taillon.

M. Filion: Est-ce que vous pourriez rappeler au Solliciteur général qu'il en est à sa réplique sur le projet de loi 96 et que la règle de la pertinence s'applique toujours à cette étape de nos travaux?

M. Latulippe: Mme la Présidente, je pourrais peut-être répondre.

La Vice-Présidente: M. le Solliciteur général, sur une question de règlement?

M. Latulippe: Sur une question de règlement, je pourrais peut-être simplement dire comment c'est pertinent, parce que, pendant les moments où l'Opposition est intervenue sur ce projet de loi, chacun des députés est intervenu positivement dans le but de démontrer l'appui qu'il apportait à mon projet de loi. Je veux tout simplement féliciter l'Opposition de cet appui et je pense que c'est dans ce sens qu'on doit interpréter mes propos.

La Vice-Présidente: Si vous me le permettez, M. le Solliciteur général, en vertu de nos règlements, il y un article qui spécifie la pertinence. C'est sûr qu'on ne donne pas une interprétation trop restrictive de la pertinence du débat, mais, tout de même, il faudrait à un moment donné tomber dans le vif du sujet. Je vous demanderais, M. le Solliciteur général, de bien parler de la Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant les boissons alcooliques.

M. Latulippe: Très bien, Mme la Présidente. Je croyais qu'il était pertinent pour nous de souligner le moment où l'Opposition pose des gestes positifs. Je croyais que c'était pertinent pour un ministre de le souligner à cette Assemblée.

Par ailleurs, une des remarques de mon collègue, le député de Taillon, au moment où il a fait ses commentaires sur le projet de loi, c'était de dire que c'est en juin 1985 que le gouvernement précédent avait demandé de tenir des audiences publiques sur

le phénomène dit du vin libre.

Mon collègue est tellement satisfait du projet de loi qu'il nous dit que la source du projet de loi fut l'ancien gouvernement. Je voudrais donner des précisions sur ce point et parler un peu de l'intervention et de la source de ce projet de loi, dire un peu comment on en est finalement arrivé à proposer ce projet de loi.

C'est en 1982 qu'un amendement est proposé à l'article 91, à l'époque par l'ancien gouvernement, de la Loi sur les infractions en matière de boissons alcooliques. Il faut bien se rappeler quel était le problème qu'on voulait cerner à l'époque. Là-dessus, je voudrais citer le rapport de la Régie des permis d'alcool sur le phénomène dit du vin libre: "Au début des années quatre-vingt, une pratique s'est répandue dans certaines régions du Québec et a entraîné des problèmes relatifs à la tranquillité publique. En effet, des organisateurs de soirées se sont mis à louer des salles publiques où aucun permis d'alcool n'était exploité. Ces organisateurs engageaient soit un orchestre, soit un artiste, et vendaient des billets d'entrée pour leurs soirées. Ils incitaient les gens à apporter leurs boissons alcooliques dans ces salles publiques". (12 h 30)

C'est en voulant réglementer à l'époque sur les problèmes de tranquillité publique en rapport avec les salles de réunion que l'on a du même coup créé un vide juridique et une coquille juridique qui a permis l'émergence du vin libre. À ce moment-là, en 1982, on réglementait sur les problèmes relatifs aux salles de réunion. C'est ce qui a amené le gouvernement de l'époque à proposer une modification en 1982, soit l'article 91.1 de la loi qui se lisait comme suit: Le propriétaire, le locataire ou l'occupant d'un local dans lequel le public est admis ne peut permettre que des boissons alcooliques y soient consommées à moins qu'il ne soit détenteur d'un permis pour ce local et qu'il ne s'agisse de boissons qu'il s'est procurées en vertu du permis qu'il détient. C'est cela qu'on réglementait à l'époque.

On avait sur ce point précis fait une exclusion en rapport avec les restaurants. C'est à partir de cette exclusion que, finalement, les consommateurs québécois ont commencé ce qu'on appelle maintenant la pratique du vin libre. À partir de cette coquille juridique qui n'avait pas été voulue par le gouvernement de l'époque, les gens ont commencé à apporter leur vin dans des restaurants, mais autant dans les restaurants qui avaient un permis que dans ceux qui n'en avaient pas. Voyant ce phénomène prendre de l'ampleur, le ministre du Revenu de l'époque décréta un règlement. Là encore, je cite le rapport sur le phénomène dit du vin libre qui nous parle de cette deuxième intervention du gouvernement en rapport avec ce phénomène: "Devant les clameurs publiques et l'intervention de certains restaurateurs, le ministère du Revenu a fait adopter le décret 1740-82 pour obliger les restaurants, détenteurs d'un permis d'alcool, à n'avoir dans leur établissement que des boissons portant le timbre d'une taxe reliée aux débits de boissons."

On venait, finalement, réglementer les cas où des personnes, des citoyens apportaient leur vin dans des restaurants qui détenaient des permis de boisson. On bouchait une partie du vide juridique, les cas du vin libre dans les restaurants qui, effectivement, détenaient des permis d'alcool. Le phénomène, évidemment, puisqu'il s'agissait d'une pression qui provenait des consommateurs, se répandit dans ce qui demeurait un vide juridique, c'est-à-dire le cas des restaurants qui ne détenaient aucun permis. Dans ces cas-là, le vin libre devint une pratique de plus en plus répandue. Par cette réglementation, par cette loi de 1982, on a abouti à un véritable imbroglio administratif et juridique qui a perduré quelques années, au point où, en 1985, le ministre du Tourisme se débarrassa de cette patate chaude qui lui brûlait les mains depuis quelques années pour l'envoyer à la Régie des permis d'alcool qui, effectivement, j'en témoigne, a fait un travail très important dans ce dossier pour démêler cet imbroglio administratif. Il faut bien comprendre qu'à l'époque l'objectif du gouvernement n'était pas de légaliser le vin libre, mais de permettre à la régie de tenir des audiences. D'ailleurs, le mandat même que le ministre du Tourisme donna à la régie était varié. Ce mandat visait tout autant la légalisation du vin libre que son abrogation totale. C'est dans le but de régler cet imbroglio administratif et de s'occuper de cette patate chaude que la régie l'a reçue et elle a fait un travail très important.

Deuxième commentaire que mon collègue, le député de Taillon, a fait dans sa présentation principale: il nous a dit que la loi de 1979 était une réforme importante en matière d'alcool. Â l'époque, il faut bien comprendre que la Commission de contrôle des permis d'alcool devenait la Régie des permis d'alcool. Ce n'était assurément pas une réforme en profondeur de la loi, mais on y apportait des modifications administratives. Il y a donc un bémol à mettre sur ses commentaires, à savoir que la loi de 1979 était fort importante et fondamentale dans le domaine du commerce des boissons alcooliques.

Mon collègue, le député de Taillon, nous a aussi dit qu'il aurait certains commentaires précis à faire en commission parlementaire. Un de ses sujets sera, finalement, la question de la bière. Est-ce que nous devrions permettre ou non aux citoyens d'apporter leur bière dans les restaurants? Il

nous a dit qu'il aurait des commentaires là-dessus. Finalement, j'attendrai le détail des propositions de mon collègue en commission parlementaire pour commenter.

Cependant, à ce stade-ci je voudrais donner un peu notre philosophie. Pour nous, le phénomène que nous voulions légaliser était le phénomène du vin libre. Ces habitudes de consommation qui se sont développées chez les Québécois et les Québécoises, en particulier dans la région de Montréal - on pense à la rue Duluth, entre autres, à la rue Prince-Arthur et ailleurs -étaient axées sur le vin libre, sur le fait que des citoyens apportaient leur vin au restaurant. C'était une nouvelle habitude gastronomique que l'on consacrait. Nous n'avons pas assité jusqu'à maintenant à un phénomène de bière libre. Pendant toutes ces années où, finalement, il n'y avait pas de réglementation, où on vivait cet imbroglio administratif, le phénomène de la bière libre ne s'est pas développé. C'était effectivement essentiellement, d'abord et avant tout, un phénomène axé sur le vin libre, un nouveau type de restauration. C'est pour valider cette pratique qu'effectivement nous adoptons ce projet de loi 96.

Il y a d'autres arguments. D'ailleurs, mon collègue, le député de Sainte-Anne, a fait état des raisons qui nous ont amenés à ne pas inclure la bière dans le permis pour servir. Il en a fait longuement état. Je pense qu'on pourra en parler en commission parlementaire, mais on pourrait, finalement, classifier ses raisons sous trois ordres: la protection de l'environnement, la sécurité publique et la tranquilité publique. Je pense qu'on peut dire aussi, finalement, une certaine volonté du milieu en ce sens.

Je voudrais conclure mes commentaires sur la dernière remarque de mon collègue, le député de Taillon. Il nous a dit que ce projet de loi 96 et la création de deux classes de permis, celui pour vendre et celui pour servir, entrent en contradiction avec le rapport Scowen sur la déréglementation. Il nous a cité ce rapport et particulièrement l'article 2.4. Mon collègue, le député . de Taillon, a l'habitude de faire très bien ses devoirs. Je lui recommanderais de bien lire le rapport Scowen et son article 2.4 et de recommencer ses devoirs dans ce cas-ci. Ledit article 2.4 et le rapport Scowen visent la distribution de boissons alcooliques et portent sur la Loi sur la Société des alcools du Québec. Permettez-moi de vous en lire quelques phrases: "La Loi sur la Société des alcools confère au gouvernement de larges pouvoirs réglementaires en matière de commerce de boissons alcooliques." Les remarques du rapport Scowen visent donc la Loi sur la Société des alcools du Québec. C'est d'ailleurs dans ce rapport que M. Scowen nous dit: "Cette législation a peut-être un riche passé historique, mais le groupe de travail ne croit pas qu'elle ait quelque pertinence en 1986, sauf dans le cas du contrôle de la qualité ou comme véhicule fiscal. Il croit, au contraire, qu'une libéralisation ne ferait qu'assainir ce marché en favorisant une organisation plus rationnelle de la distribution, tout en permettant des rentrées fiscales équivalentes."

Or, les permis que nous créons aujourd'hui, ces classifications de permis, c'est-à-dire le permis pour vendre et le permis pour servir, sont donnés en vertu de la Loi sur les permis d'alcool qui a comme objectif non pas la réglementation en tant que telle, comme la Loi sur la Société des alcools, du commerce de boissons alcooliques, mais le contrôle des débits de boisson. C'est en vertu de cette loi, la Loi sur les permis d'alcool, que les permis sont émis. Cette loi établit un cadre réglementaire en matière d'ordre public, en matière de tranquillité publique. Jamais le rapport Scowen ne dit que nous ne devons pas réglementer en matière d'ordre public ou en matière de tranquillité publique. Je pense qu'il est très important que nous puissions faire cette distinction parce que cette loi ne vient pas en contradiction avec le rapport Scowen, mais en complémentarité. D'ailleurs, le rapport Scowen, lorsqu'il parle de la Loi sur la Société des alcools et lorsqu'il parle du commerce en matière de boissons alcooliques, nous dit que la loi et la réglementation sont pertinentes dans le cas de contrôle de la qualité ou comme véhicule fiscal.

Or, avec ce projet de loi, celui que nous demandons à l'Assemblée d'adopter, précisément nous faisons notre bout de chemin. Nous contribuons, finalement, à améliorer le véhicule fiscal. Nous sommes plus sévères en matière de commerce illégal de boissons alcooliques. Nous avons des dispositions qui visent à empêcher le commerce de timbres ou le "transvidage". Comme gouvernement étant conséquents avec nous-mêmes, conséquents avec ce rapport, nous avons donné des instruments pour concrétiser ce rapport, en particulier cet aspect de véhicule fiscal puisque nous aurons maintenant une loi avec des dents.

Mme la Présidente, je dois à nouveau dire - je pense que c'est à l'unanimité de cette Assemblée - que le gouvernement, encore aujourd'hui, pose un geste positif pour les consommateurs québécois. Je pense que, dorénavant, le commerce des boissons alcooliques au Québec sera mieux réglementé et sera aussi plus en faveur des consommateurs québécois.

La Vice-Présidente: Merci, M. le Solliciteur général.

Le débat étant clos, est-ce que le principe du projet de loi 96, Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant

les boissons alcooliques, est adopté? Des voix: Adopté.

La Vice-Présidente: Adopté. M. le ministre de l'Énergie et des Ressources.

Renvoi à la commission des institutions

M. Ciaccia: Mme la Présidente, je fais motion afin que le présent projet de loi soit déféré à la commission des institutions et que cette commission soit présidée par un président de séance.

La Vice-Présidente: Est-ce que cette motion est adoptée?

Une voix: Adopté.

La Vice-Présidente: M. le ministre de l'Énergie et des Ressources.

M. Ciaccia: Je demanderais le consentement de l'Assemblée afin de suspendre nos travaux jusqu'à 15 heures.

La Vice-Présidente: Est-ce qu'il y a consentement?

Une voix: Consentement.

La Vice-Présidente: Consentement. Nous allons suspendre nos travaux jusqu'à 15 heures, cet après-midi.

(Suspension de la séance à 12 h 44)

(Reprise à 15 h 6)

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît: Veuillez vous asseoir.

Présence de parlementaires et

du consul de la République

fédérale d'Allemagne

Si vous me permettez, avant de procéder aux affaires courantes, il me fait plaisir de vous présenter deux parlementaires de la République fédérale d'Allemagne, M. Norbert Lammert et son épouse ainsi que M. Manfred Schulte.

Nos invités sont accompagnés cet après-midi du consul Karl Erich Rombach. Messieurs et Madame.

Déclarations ministérielles.

Présentation de projets de loi, M. le leader du gouvernement.

M. Gratton: Article b, M. le Président.

Projet de loi 115

Le Président: À l'article b du feuilleton, Mme la ministre des Affaires culturelles présente le projet de loi 115, Loi abrogeant la Loi sur le Conseil d'artisanat. Mme la ministre, vous avez la parole.

Mme Lise Bacon

Mme Bacon: M. le Président, ce projet de loi a pour objet d'abroger la Loi sur le Conseil d'artisanat.

Le Président: M. le leader du gouvernement. L'Assemblée accepte-t-elle de se saisir de ce projet de loi? M. le leader de l'Opposition.

M. Chevrette: Oui, M. le Président, en présumant que c'est l'application du rapport Gobeil.

Le Président: Si j'ai bien compris votre intervention, c'est adopté.

M. Gratton: M. le Président, non, c'est en fonction du fait que le conseil n'a pas siégé depuis 25 ans.

Le Président: C'est quand même adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Gratton: Article c, M. le Président.

Projet de loi 116

Le Président: À l'article c du feuilleton, Mme la ministre. S'il vous plaît! S'il vous plaît! À l'article c, Mme la ministre des Affaires culturelles présente le projet de loi 116, Loi abolissant le Conseil des arts du Québec. Mme la ministre.

Mme Lise Bacon

Mme Bacon: M. le Président, ce projet de loi a pour objet de modifier la Loi sur le ministère des Affaires culturelles afin d'abolir le Conseil des arts du Québec qui ne siège pas depuis de nombreuses années aussi.

Le Président: L'Assemblée accepte-t-elle de se saisir de ce projet de loi? Adopté? Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Gratton: Article d, M. le Président.

Projet de loi 113

Le Président: À l'article d du feuilleton, M. le ministre de l'Énergie et des Ressources présente le projet de loi 113, Loi abrogeant la Loi sur la Société de carto-

graphie du Québec. M. le ministre. M. John Ciaccia

M. Ciaccia: Ce projet de loi abroge la Loi sur la Société de cartographie du Québec qui a été vendue par le gouvernement précédent, M. le Président.

Le Président: M. le leader de l'Opposition.

M. Chevrette: Je voudrais faire remarquer au ministre de l'Énergie et des

Ressources que voilà, là, une privatisation réussie.

Le Président: Entre-temps, est-ce que ce projet de loi à l'étape de la présentation est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président: Adopté.

Dépôt de documents. M. le ministre des Transports et responsable du Développement régional.

Copie du contrat de vente des Boeing 737 de Quebecair

M. Côté (Charlesbourg): M. le Président, merci de votre amabilité de me permettre de faire aujourd'hui ce que l'Opposition m'a empêché de faire hier et ce qui était d'ailleurs souhaité par elle. Je voudrais déposer photocopie du contrat intervenu quant à la vente...

Une voix: Enfin.

Le Président: À l'ordre! À l'ordre! À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Côté (Charlesborug): Le "enfin" vient exactement du même côté de ceux qui ont dit non hier. Une copie du contrat de la vente des Boeing 737, qui permettra à la députée de Maisonneuve de confirmer que c'est en dollars américains.

Le Président: M. le ministre, M. le ministre.

M. Côté (Charlesbourg): Laissez-moi terminer, M. le Président. Au cas...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Côté (Charlesbourg): Au cas où le contrat ne suffirait pas parce que peut-être qu'un contrat n'est pas respecté...

Le Président: Faites la lecture de la liste des documents que vous voulez déposer. Sans commentaire, s'il vous plaît, M. le ministre.

M. Côté (Charlesbourg): Sans commentaire. Au cas où le contrat n'aurait pas été respecté, une photocopie du chèque en dollars américains.

Le Président: À l'ordre! Documents en liasse déposés par le ministre des Transports. M. le ministre de l'Éducation, de l'Enseignement supérieur et de la Science.

Rapports annuels de diverses corporations professionnelles

M. Ryan: J'ai l'honneur de déposer les rapports annuels pour l'exercice 1985-1986 des corporations professionnelles suivantes: l'Ordre des arpenteurs géomètres du Québec, le Barreau du Québec, la Corporation des chiropraticiens professionnels du Québec, l'Ordre des comptables agréés, la Corporation des comptables généraux licenciés, la Corporation des conseillers en relations industrielles, l'Ordre des dentistes, la Corporation des denturologistes, la Corporation des diététistes, la Corporation des ergothéra-peutes, la Corporation - celle-là c'est pour le ministre des Transports et la députée de Maisonneuve - des évaluateurs agréés, l'Ordre des ingénieurs forestiers, la Chambre des notaires, l'Ordre des optométristes, l'Ordre des orthophonistes et audiologistes, l'Ordre des pharmaciens, la Corporation professionnelle des psychologues, la Corporation professionnelle des techniciens dentaires, la Corporation professionnelle des techniciens en radiologie et l'Ordre des technologues des sciences appliquées.

Le Président: Tous ces documents sont déposés. Dépôt de rapports de commissions. M. le Président de la commission de l'aménagement et des équipements.

Consultation générale sur le projet de loi 100

M. Rochefort: M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport de la commission de l'aménagement et des équipements qui a siégé les 4 et 5 septembre ainsi que le 23 octobre dernier afin de procéder à une consultation générale portant sur le projet de loi 100, Loi sur les élections et les référendums dans les municipalités.

Le Président: Rapport de commission déposé.

Pétitions. Cet après-midi il n'y aura aucune intervention portant sur une violation de droit ou de privilège ou sur un fait personnel.

Avant de procéder immédiatement à la période de questions orales, j'aimerais aviser tous les membres de cette Assemblée que nous procéderons à un vote qui a été reporté hier sur une motion présentée par M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de

l'Alimentation. J'aimerais que tous et chacun restent à leur place immédiatement après la période de questions.

Nous allons maintenant procéder à la période de questions orales. M. le député de Lévis en principal.

QUESTIONS ET RÉPONSES ORALES

La vente de Madelipêche et le maintien d'emplois productifs

M. Garon: M. le Président...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Garon: ...dans la Presse de samedi dernier, on voit un appel d'offres pour la vente de Madelipêche, un peu comme un liquidateur qui est en train de faire la liquidation d'actifs d'une entreprise qui ferme. On y dit que le gouvernement a comme principal objectif la relance de l'entreprise et la cessation de subventions hors programme - donc il ne veut plus mettre d'argent dans les pêches aux îles -et il veut aussi consolider l'industrie de la pêche aux îles - on ne sait pas comment -en vue de permettre le maintien d'emplois productifs et la poursuite de la pêche hauturière. Dans le cadre de l'appel d'offres on a l'impression d'une vente comme quand un syndic vend une faillite ou un liquidateur fait une liquidation. Aucune perspective sur le maintien d'emplois à aucun endroit, sauf qu'on dit qu'on veut permettre le maintien d'emplois productifs.

La question s'adresse à celui qui est responsable de la question, je ne sais plus qui. Est-ce que c'est le ministre de l'Agriculture, des Pêches et de l'Alimentation, le ministre de la Privatisation ou le ministre délégué aux Pêches sous la tutelle du ministre de l'Agriculture? À celui que le premier ministre désignera, j'aimerais demander de quelle façon on distingue des emplois productifs, on maintient les emplois productifs par rapport à d'autres emplois qui ne seraient pas productifs et de quelle façon on veut assurer le maintien des emplois ou le développement des emplois dans les pêches aux Îles-de-la-Madeleine?

Le Président: M. le ministre délégué à la Privatisation.

M. Fortier: M. le Président, le député de Lévis a indiqué à plusieurs reprises, m'a-t-on dit, que tôt ou tard on devrait privatiser Madelipêche. J'espère qu'il n'est pas surpris si aujourd'hui le gouvernement prend certaines décisions à ce sujet. Mon collègue, le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation et moi-même sommes allés aux Iles-de-la-Madeleine justement pour indiquer qu'il y avait des problèmes inhérents à Madelipêche présentement et le député de Lévis les connaît très certainement. Nous avons indiqué également que nous avions fait faire une analyse portant sur les différents problèmes inhérents à la structure présente, aux problèmes d'alimentation, aux problèmes de la gestion des bateaux reliés à la production de l'usine et, en particulier, à l'usine principale de Madelipêche. En conséquence, on s'attendait que ceux qui nous font des offres nous disent très clairement de quelle façon ils entendraient régler ces problèmes structurels que vit Madelipêche depuis trois ou quatre années déjà.

C'est la raison pour laquelle nous avons indiqué - vous le savez, M. le député de Lévis - que la production de Madelipêche est vendue sur les marchés internationaux, qu'il est important de produire à un coût concurrentiel par rapport à la concurrence mondiale puisque la production de Madelipêche se vend aux États-Unis, au Japon et ailleurs. En conséquence, il est important que les acheteurs éventuels nous indiquent très clairement de quelle façon ils entendent régler certains problèmes structurels que vit présentement Madelipêche et de quelle façon les emplois productifs pourraient être maintenus aux Iles-de-la-Madeleine.

Le Président: M. le député de Lévis, sur une question additionnelle.

M. Garon: Remarquez, M. le Président, qu'on ne peut pas cacher au ministre que Madelipêche vendait son poisson à quelque part.

Le Président: En additionnelle, M. le député.

M. Garon: Comment les membres du gouvernement peuvent-ils penser que c'est dans une privatisation qu'on publie le 25 octobre et qu'on demande d'avoir des réponses pour le 28 novembre alors que, dans le passé, c'est justement l'entreprise privée qui a fermé boutique? Gorton Pew, en 1976, a été remplacée par le gouvernement.

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Garon: C'est la question justement que je pose. Comment les membres du gouvernement peuvent-ils penser que c'est l'entreprise privée qui va prendre la place et qui va maintenir les emplois alors que le gouvernement a dû prendre la place de l'entreprise privée qui fermait les usines?

Le Président: Avant de reconnaître M. le ministre délégué à la Privatisation, M. le leader de l'Opposition.

M. Chevrette: Je vous demanderais d'appliquer l'article 36, M. le Président, dans le cas du député de Chauveau.

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Gratton: Je veux bien, mais, M. le Président, il ne faudrait quand même pas que le député de Lévis, quand il pose sa question, donne la réponse en plus.

Le Président: J'ai toléré amplement et j'ai été très large quant à la définition d'une question additionnelle. Il y avait peut-être plus qu'une question additionnelle. M. le député de Lévis a peut-être des arguments également. Cela a peut-être été beaucoup plus long que cela ne l'est normalement. Je vais reconnaître immédiatement M. le ministre délégué à la Privatisation.

J'attire l'attention de tous. Peu importe qui a la parole, j'interviendrai, j'ai à faire respecter le règlement. Je demanderais aussi votre collaboration de toute façon pour respecter nos règles lorsqu'il s'agit d'une question additionnelle. M. le ministre.

M. Fortier: M. le Président, je ne voudrais pas que le député de Lévis meure d'apoplexie cet après-midi, on veut le garder avec nous.

Le Président: M. le ministre!

M. Fortier: Mais sérieusement... Je désire indiquer à cette Chambre... Avec les contraintes, M. le Président, comme vous nous l'avez indiqué, il est impossible en quelques minutes d'exposer tous les problèmes structurels que vit présentement Madelipêche. Mais j'indique d'ores et déjà que mon collègue, le ministre délégué aux Pêcheries, déposera en cette Chambre mardi prochain une analyse que nous avons fait faire et qui explicite dans tous les détails les problèmes que vit présentement Madelipêche.

Nous avons dit très clairement, mon collègue et moi-même, que nous espérions que des offres sérieuses nous soient faites dans un esprit de restructuration pour trouver des solutions aux problèmes que nous avons évoqués lors de la conférence de presse.

Nous avons clairement indiqué également que le gouvernement se réservait le droit de n'accepter aucune proposition ou d'en réserver une ou deux si c'était le cas, et que celles qui seront retenues le seront seulement si nous croyons que les objectifs visés par l'opération de privatisation se concrétisent.

Donc, il est très clair, M. le Président, que finalement, le gouvernement sera le seul juge pour déterminer si nos objectifs sont atteints. Si nous croyons que les offres qui nous seront faites éventuellement ne nous permettent pas de rencontrer nos objectifs, nous ne retiendrons pas les offres qui nous seront faites. Il faudra attendre que ces offres-là nous soient faites pour qu'on puisse... (15 h 20)

Le Président: Conclusion.

M. Fortier: ...répondre d'une façon plus précise à la question du député de Lévis.

Une voix: C'est celai

Le Président: M. le député de Lévis, en additionnelle.

M. Garon: M. le Président, je pose la même question que j'ai posée au ministre délégué à la Privatisation: De quelle façon le gouvernement entend-il s'assurer qu'il y aura maintien des emplois? Quelle distinction fait-il entre des emplois productifs et des emplois non productifs? Et de quelle façon va-t-il s'assurer que les emplois seront aux îles, puisque le principal employeur des îles, c'est Madelipêche et Crustacés des îles, sa filiale?

Le Président: M. le ministre délégué à la Privatisation.

M. Fortier: M. le Président, c'est la même question et c'est donc la même réponse. Je vous dis très clairement qu'il y a des problèmes présentement et vous les connaissez. Si vous voulez poser une question traitant spécifiquement du secteur des pêches, je vais demander au ministre délégué aux Pêcheries de vous exposer en une demi-heure quels sont ces problèmes et d'évoquer des éléments de solution. Mais peut-être que le ministre délégué aux Pêcheries voudrait traiter de ce sujet plus particulièrement. Je vous répète ce que je vous ai dit tout à l'heure. Il y a des problèmes structurels qui sont connus des gens des îles. Quand nous sommes allés aux îles, les gens eux-mêmes ont reconnu qu'il y avait des problèmes auxquels ils devaient trouver réponses. Ils n'ont pas été surpris. Bien sûr, il y a une certaine crainte, il y a toujours une crainte quand on remet en question quelque chose qui existe, mais les gens des îles réalisent qu'il y a des problèmes chez Madelipêche et qu'il faut trouver des réponses. Si mon collègue désire donner plus de précisions sur les problèmes touchant les pêcheries plus particulièrement, je crois qu'il est qualifié pour répondre à cette question.

M. Garon: M. le Président.

Le Président: M. le député de Lévis, en additionnelle.

M. Garon: Est-ce que le ministre pourrait nous indiquer que ce qu'il a rencontré aux îles, ce sont surtout 300 personnes qui sont venues manifester, craignant justement que les emplois ne soient pas maintenus par cette privatisation, parce qu'elles savent ce qui s'est passé lorsque Gorton Pew est parti en 1976 et que National Sea n'a pas voulu moderniser et a voulu vendre ses actifs? Est-ce que le ministre pourrait nous dire...

Le Président: M. le député de Lévis, à deux reprises, je vous ai demandé d'être extrêmement bref et de poser votre question sans aucun préambule.

Une voix: II est en maudit...

Le Président: M. le député de Lévis, à qui posez-vous votre question? Est-ce que vous la posez au ministre délégué aux Pêcheries?

M. Garon: Je la pose au même ministre, qui semble être le ministre responsable, le ministre délégué à la Privatisation, parce qu'on me dit que c'est lui qui doit veiller à ce que les objectifs de privatisation soient atteints.

Le Président: Parfait! M. le ministre, en réponse à la question posée par le député de Lévis.

Une voix: Qu'il répète la question.

Le Président: Voulez-vous répéter la question, s'il vous plaît?

M. Garon: Le ministre, contrairement à ce qu'il a dit, n'a-t-il pas plutôt rencontré, aux îles, 300 manifestants...

Une voix: Mécontents.

M. Garon: ...qui sont venus lui faire part de leur inquiétude devant l'annonce qu'il venait faire, parce qu'ils savent que, dans le passé, la privatisation a signifié des pertes d'emplois et des fermetures d'usines avec Gorton Pew et National Sea?

Le Président: M. le ministre délégué à la Privatisation.

M. Fortier: M. le Président, on pourrait rappeler aux gens d'en face qu'eux, pas par une privatisation mais par une nationalisation dans le domaine de l'amiante, nous obligeront à payer au mois de février 1987 une somme de 173 000 000 $, qu'il y a eu perte de 2500 emplois et que l'achat qu'ils ont fait en 1981 n'est pas encore payé. Alors, on n'a pas de leçon à recevoir de vous. M. le Président, nous sommes allés aux îles, nous avons rencontré les employés de Madelipêche, nous avons rencontré les cadres, nous avons rencontré la direction, nous avons rencontré les maires et le préfet des îles. On a voulu informer tous et chacun qui pouvaient avoir une certaine préoccupation à ce sujet. Nous avons été reçus très aimablement. Nous avons engagé le dialogue. Nous nous sommes engagés à déposer le document qui sera déposé ici en Chambre mardi prochain. Les Madelinots seront les premiers informés de toute action que nous prendrons dans ce dossier.

Des voix: Bravo! Une voix: Très bien!

Le Président: Mme la députée de Maisonneuve en principale.

Le produit de la vente des Boeing 737 de Quebecair

Mme Harel: Merci, M. le Président. Ma question s'adresse au ministre des Transports. Il a finalement mis fin au suspense et à la confusion qu'il a lui-même provoquée la semaine dernière en évitant de répondre ou en ne pouvant pas répondre à la question qui lui était posée sur la devise utilisée pour la transaction des deux Boeing 737. Le ministre peut-il d'abord nous confirmer si le prix de vente est bien de 23 000 000 $ américains et si ce prix de vente converti en dollars canadiens est de 32 000 000 $ qui seront versés par CP Air aux actionnaires de Nordair Metro permettant, avec le consentement du gouvernement, de rembourser la moitié de la dette à long terme et de réaliser, par la seule vente des deux appareils 737, un profit de 5 500 000 $ canadiens? Le ministre ne trouve-t-il pas excessif que les actionnaires de Nordair Metro puissent financer la moitié du prix d'achat de 10 000 000 $ par la seule vente des deux avions 737?

Le Président: M. le ministre des Transports.

M. Côté (Charlesbourg): M. le Président, vous conviendrez avec moi que je ne peux pas être plus transparent qu'en déposant le contrat qui lie les deux parties et une copie du chèque.

Quant à la confusion, c'est vous-même qui l'avez créée par vos déclarations et par vos sources d'information qui ne vous ont donné que leur demi-vérité. Vous tombez dans le piège de ceux qui vous informent très mal. Aujourd'hui, vous devez revenir sur des propos que vous avez tenus et vous tentez d'imputer cela au ministre des Transports. Non, contrairement à vous, ce que le ministre des Transports a voulu faire

la semaine dernière, c'est de vérifier et d'avoir entre les mains photocopie du contrat. J'ai même exigé une photocopie du chèque. Est-ce assez clair? Ainsi, je pouvais me lever à un certain moment donné et vous dire: Mme la députée de Maisonneuve, la vérité est là avec le contrat et elle parle d'elle-même. Vos sources vous ont menti et vous avez erré dans les propos que vous avez tenus. Aujourd'hui vous êtes obligée de corriger ce que vous aviez dit à l'époque.

Des voix: Bravo!

Le Président: Mme la députée de Maisonneuve, en additionnelle.

Mme Harel: Merci, M. le Président. N'est-ce pas le ministre lui-même, responsable de la vente, qui s'est révélé incapable de préciser la devise utilisée dans la transaction, lui le ministre responsable de la vente? Est-ce que le ministre peut répondre à la question, à savoir: Ne trouve-t-il pas excessif que les actionnaires Nordair métro puissent réaliser un profit de 5 500 000 $ en dollars canadiens avec la transaction qu'il vient de déposer en cette Chambre leur permettant de financer la moitié du prix d'acquisition de Quebecair?

Le Président: M. le ministre des Transports.

M. Côté (Charlesbourg): Deux éléments de réponse, M. le Président: ce qui était les méchants anglophones de CP Air de l'Ouest qui devaient bénéficier d'un cadeau, c'est maintenant devenu des francophones du Québec. Le cadeau se déplace. Il est rendu entre les mains... Un instant! Ne vous énervez pas! Prenez votre temps!

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! J'ai reconnu M. le ministre des Transports et j'aimerais entendre sa réponse. M. le ministre.

M. Côté (Charlesbourg): Ce qui était la vérité du cadeau aux anglophones de l'Ouest, CP Air, est maintenant rendu un cadeau à des francophones du Québec.

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

Une voix: C'est toujours nous, les perdants.

M. Côté (Charlesbourg): Si Mme la députée de Johnson veut attendre un petit peu, elle va finir par comprendre.

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Côté (Charlesbourg): Avec un petit peu de temps, vous allez finir par comprendre.

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Côté (Charlesbourg): L'autre élément, M. le Président, qu'il est très important de se rappeler... Heureusement, il y a des journaux pour nous le rappeler. En 1982, le directeur de cabinet du chef de l'Opposition actuel, ex-ministre des Transports, a, à l'époque, bien mené le dossier. Vous vous en souviendrez. Ce qui permettait à la Presse à l'époque de titrer: Même si Quebecair fait faillite - cela, c'est un article du 4 décembre 1982 - Hamel aura empoché près de 2 000 000 $. Qu'est-ce que c'est? C'est avoir la vue très courte, la mémoire très courte. Étudiez le dossier et vous reviendrez. C'est avoir l'esprit très court et des visions très courtes de ce qui s'est passé. Si, aujourd'hui, on a été obligé de privatiser Quebecair, c'est votre responsabilité lorsque vous avez manqué la fusion Nordair-Quebecair pour des raisons que vous connaissez.

Le Président: Mme la députée de Maisonneuve, en additionnelle.

Mme Harel: Merci, M. le Président. Est-ce que le ministre peut confirmer à cette Chambre avoir également avantagé CP Air en faisant renoncer le gouvernement et la Société québécoise des transports, par la clause 6.17 du contrat au bon de souscription attaché à la propriété de 34 % des actions de Nordair vendues à CP Air?

Le Président: M. le ministre des Transports. (15 h 30)

M. Côté (Charlesbourg): M. le Président, il faudra certainement en discuter encore bien longtemps avant que l'Opposition finisse par comprendre. Vous arrivez encore avec une question que ceux qui vous informent véhiculent depuis déjà un certain temps. Êtes-vous capable de déposer ici, en cette Chambre, un document qui va prouver la valeur de ce que vous avancez? Venez déposer cela et on va probablement avoir beaucoup de plaisir. C'est probablement la même personne qui vous a fait des évaluations dans un document que vous avez rendu public lors d'une conférence de presse la semaine dernière en ce qui concerne les engagements qui n'auraient pas été pris par les employés de Quebecair...

M. le Président, un instant! En voulez-vous de l'information ou si vous n'en voulez pas?

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! Si vous me le permettez, la période de questions n'est pas un dialogue d'un côté et de l'autre de la Chambre. On ne peut pas

interpeller au milieu d'une réponse ou au milieu d'une question le député que j'ai reconnu. Depuis quelques minutes, on s'interpelle et je ne peux obtenir les réponses ou les questions d'une façon complète. Si vous me le permettez, je demande la collaboration de tous et chacun. Je comprends que c'est un sujet extrêmement urgent et important, mais j'aimerais quand même pouvoir entendre autant les questions que les réponses. M. le ministre des Transports, vous avez la parole en conclusion.

M. Chevrette: Question de règlement, M. le Président.

Le Président: Sur une question de règlement, M. le leader de l'Opposition.

M. Chevrette: L'article 79 dit que la réponse doit se rapporter à un élément de question. On ne veut pas que le ministre se pose des questions et qu'il y réponde. On veut qu'il réponde aux questions qu'on pose.

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Gratton: M. le Président, hier le ministre a voulu donner des informations et on lui a refusé le consentement. Aujourd'hui, on semble encore avoir peur d'écouter ses réponses. Qu'on écoute ses réponses et on comprendra ce qui se passe.

Le Président: Oui. J'ai accepté souvent des préambules extrêmement longs. Il reste que dans une période de questions, advenant le cas où une réponse ne satisfasse pas l'interpellateur, vous avez d'autres moyens. Il peut y avoir en fin d'après-midi un débat de fin de séance, il peut y avoir une interpellation. Il y a tout autre moyen. Il y a également l'article 81 - j'aimerais bien qu'on se le rappelle, je sais que parfois c'est difficile de ne pas avoir la réponse qu'on aimerait bien avoir - qui est très clair et on doit prendre la parole du ministre. M. le ministre, en conclusion, s'il vous plaît.

M. Côté (Charlesbourg): M. le Président, en conclusion. Si jamais les réponses ne suffisent pas, je dois avoir au moins le privilège de répondre aux questions de la manière dont je veux le faire. Vous poserez les questions que vous voulez, c'est votre affaire. On le voit très bien. Et je répondrai aux questions de la manière que je veux. Et si jamais vous n'avez pas suffisamment d'information, je vous invite à rester cet après-midi. On a un petit débat, on va avoir du "fun". Vous allez avoir encore beaucoup plus d'informations que vous n'en voulez.

M. le Président, ce que je disais, c'est probablement, en termes d'évaluation, exactement le même genre d'évaluation que Mme la députée de Maisonneuve a fait dans le cas du supposé cadeau de 3 000 000 $ pour la construction d'un hangar pour l'entretien des CL-215 à Québec alors qu'elle disait que le coût actuel de location à Montréal - écoutez, je ne lirai pas vos documents, c'est ici - c'était aucun prix, alors que sur dix ans c'est un montant de 4 300 000 $. Donc, notre administration nous fait épargner 1 300 000 $ sur ce que vous prônez.

Le Président: Mme la députée de Maisonneuve, question additionnelle. Question additionnelle, Madame.

Mme Harel: M. le Président, je rappelle au ministre que ma question porte sur les bons de souscription. Je veux savoir du ministre pourquoi avoir renoncé de façon définitive à ces bons de souscription alors que la Caisse de dépôt et placement du Québec, Air Canada, le fonds de retraite des policiers et des pompiers ont, eux, réclamé et obtenu la remise de ces bons de souscription au moment de la transaction? Pourquoi avoir renoncé à ces titres qui peuvent se transiger et avoir une valeur sur le marché éventuellement?

Le Président: M. le ministre des Transports.

M. Côté (Charlesbourg): M. le Président, lorsqu'on a demandé aux spécialistes qu'on a consultés quelle était la valeur de ces bons, la réponse a été très claire: Cela ne valait pas grand-chose. C'est aussi clair que cela. Et Mme la députée de Maisonneuve le confirme par sa question "qui peuvent un jour hypothétiquement valoir quelque chose." C'est comme l'Opposition.

Le Président: Mme la députée de Maisonneuve, question additionnelle. À l'ordre! À l'ordre, s'il vous plaît! Mme la députée de Maisonneuve, question additionnelle.

Mme Harel: Oui, M. le Président. Est-ce que le ministre des Transports n'aurait pas dû, dans ce domaine, se calquer sur l'entreprise privée qui, elle, a retenu ces bons de souscription? Est-ce qu'un administrateur d'entreprise privée qui aurait agi comme le gouvernement l'a fait à l'égard de ces bons de souscription n'aurait pas des comptes à rendre à son conseil? Et, M. le ministre, avez-vous peur de convoquer une commission parlementaire pour faire toute la lumière sur cette transaction?

Le Président: M. le ministre des Transports.

M. Côté (Charlesbourg): Nous avons beaucoup moins peur de faire la lumière sur le dossier de Quebecair. Même un éditorialiste du Soleil nous disait récemment qu'on avait donné trop d'information. Quant aux leçons du passé, de ceux qui veulent aujourd'hui nous donner des leçons, puis-je vous référer à un article du 6 décembre de la Presse où c'était un sous-titre: "Les louches silences de M. Clair." Vous allez voir là des choses fort intéressantes sur la transparence de la transaction de l'époque de Quebecair où vous étiez au gouvernement, où M. Landry, M. Parizeau et M. Clair étaient les gens intimement liés dans ce processus qui a empêché la fusion Nordair-Quebecair, ce qui était le rêve de l'aviation et des francophones du Québec. Allez relire cela avant de poser une pareille question et on s'en reparlera.

Le Président: M. le député de...

M. Johnson (Anjou): Question additionnelle au premier ministre M. le Président.

Le Président: M. le chef de l'Opposition, question additionnelle.

M. Johnson (Anjou): Est-ce que le premier ministre écarte totalement la tenue d'une commission parlementaire pour faire la lumière sur cette transaction qui est déjà assez louche?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bourassa: II n'en est pas question pour l'instant d'autant plus que dans... Est-ce que le chef de l'Opposition pourrait me donner le temps de répondre? D'autant plus qu'au cours de cet après-midi même, il y aura un débat sur la privatisation. Je pense qu'il est normal qu'on attende la conclusion du débat. J'inviterais le chef de l'Opposition, s'il a un point de vue à faire valoir, à intervenir à l'occasion de ce débat.

Une voix: II en a le droit.

M. Bourassa: II y en a eu un la semaine dernière. Cela se poursuit cet après-midi. Je ne vois pas pourquoi on aurait trois ou quatre forums en même temps.

M. Johnson (Anjou): Question additionnelle.

Le Président: Question additionnelle, M. le chef de l'Opposition.

M. Johnson (Anjou): Le premier ministre a bien dit: II n'en est pas question pour l'instant. Je dois comprendre qu'il n'écarte pas la possibilité de la tenue d'une commission parlementaire sur le dossier Quebecair?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bourassa: On est toujours ouvert au dialogue. On n'en voit pas la nécessité pour l'instant.

Le Président: M. le député de Terrebonne... M. le député de Lévis. M. le député de Lévis, s'il vous plaît.

M. Blais: Oui, M. le Président.

Le Président: M. le député de Terrebonne, question principale.

Le rythme des investissements dans l'assainissement des eaux

M. Blais: Ma question s'adresse au ministre de l'Environnement. Avant-hier, le ministre déposait le rapport du groupe de travail sur le programme d'assainissement des eaux du Québec, rapport qui reconnaissait la pertinence de ce vaste chantier amorcé par le gouvernement du Parti québécois et recommandait au ministre actuel de l'Environnement de porter à 550 000 000 $ jusqu'en 1991 le rythme annuel des investissements que son gouvernement devrait investir. La question est la suivante. Est-ce que le ministre entend, contrairement à son plan triennal qui fait descendre à 400 000 000 $ en 1988-1989 les investissements consentis par son gouvernement, est-ce qu'il entend hausser ces investissements au rythme de 550 000 000 $ par année jusqu'en 1991?

Le Président: M. le ministre de l'Environnement.

M. Lincoln: Le rythme des investissements, pour s'établir... Si le député de Lévis veut donner la réponse, je vais m'asseoir. J'espère qu'il va nous donner une meilleure réponse que celles qu'il nous donnait quand il était de ce côté-ci de la Chambre.

Le Président: M. le ministre de l'Environnement, en réponse à la question, s'il vous plaît.

M. Lincoln: Le programme d'assainissement des eaux est établi sur un budget de trois ans qui s'est terminé le 31 mars 1986 pour les trois dernières années. Le niveau des investissements pour les trois dernières années était de 450 000 000 $ par an, et le Conseil du trésor du gouvernement sortant avait recommandé que le niveau de 450 000 000 $ par an soit maintenu. Le nouveau budget de trois ans qui a commencé le 1er avril 1986 établissait trois montants,

500 000 000 $ pour l'année en cours, 450 000 000 $ pour l'année prochaine et 400 000 000 $ pour la troisième année, ce qui fait une moyenne de 450 000 000 $, exactement le même montant d'investissements, 1 350 000 000 $, qui avait été budgétisé pour les trois années antérieures.

La différence entre les trois années qui sont en cours et les années antérieures, c'est que, des 1 350 000 000 $ qui avaient été autorisés par le gouvernement antérieur, seulement 1 100 000 000 $ ont été dépensés. Nous on comptait dépenser. On est en train d'examiner le rapport qui vient d'être déposé, hier. Il est possible qu'il y ait des changements, il est possible aussi que le budget qui a été fixé par le Conseil du trésor, l'année dernière, reste exactement le même. (15 h 40)

Le Président: M. le député de Terrebonne.

M. Blais: M. le Président, je ne sais pas comment le ministre fait pour ne pas répondre aux questions. Je lui ai tout simplement demandé - je le sais que c'est 450 000 000 $ et 400 000 000 $ - s'il entend respecter la recommandation Dagenais qui lui demande de porter les investissements annuels à 550 000 000 $. Oui ou non?

M. Lincoln: M. le Président, nous avons établi un comité de travail qui a rendu un rapport officiel il y a deux jours. C'est une des 40 recommandations du comité de travail. Nous n'avons pas l'habitude de prendre des décisions au pied levé. On aime les étudier, on aime approfondir ce que nous allons faire. Je ne sais si c'était le cas pour le gouvernement du Parti québécois, mais le ministre de l'Environnement de ce gouvernement ne prend pas de décisions en vase clos par lui-même. Ce n'est pas moi qui prends ces décisions seul. C'est une décision gouvernementale. Je vais en discuter avec mes collègues. Il est possible qu'on le fasse, il est possible qu'on ne le fasse pas, mais je vais souligner au député que s'il n'y avait pas eu de Société nationale de l'amiante, 50 000 000 $ de dépensés dans le projet Archipel pour rien, des sucreries inutiles et toutes les dépenses folles du gouvernement du Parti québécois, peut-être qu'on aurait pu avoir 550 000 000 $ et plus ces trois dernières années.

Le Président: S'il vous plaît! M. le député de Terrebonne... J'ai demandé à quelques reprises cet après-midi la collaboration de tous, je dis bien de tous.

Une voix:...

Le Président: Non, le député de Terrebonne, M. le leader de l'Oppostion, était déjà levé et je ne l'ai pas reconnu parce que certaines personnes de l'Opposition parlaient encore et la réponse était terminée. Je demande la collaboration de tous et je l'ai demandée à quelques reprises. M. le député de Terrebonne.

M. Blais: Merci, M. le Président. Je demande au ministre de l'Environnement, contrairement à ses dires sur les compagnies d'amiante, qui n'étaient pas pertinentes... Lorsque nous étions au pouvoir vous nous accusiez injustement de ne pas aller chercher notre part pour l'assainissement des eaux à Ottawa. Cela fait dix mois que vous êtes là. Quelles démarches avez-vous faites pour aller chercher notre part qui est de 350 000 000 $ minimum, seulement dans ce dossier?

Le Président: M. le ministre dé l'Environnement.

M. Lincoln: Je vais dire au député, M. le Président, que j'ai fait plus de démarches en neuf mois qu'ils n'en ont fait en neuf ans eux-mêmes. Il y a des démarches qui se poursuivent. On va arriver à des résultats avec le gouvernement fédéral. En attendant, ce que je vais souligner au député, c'est que lorsque le Conseil du trésor du gouvernement antérieur avait produit des budgets de 450 000 000 $, il s'est dépensé, la première année, 111 000 000 $ ou à peu près; la deuxième année, 320 000 000 $; la troisième année, année électorale par coïncidence, 715 000 000 $. Tous les budgets ont été défoncés. Tout allait de l'avant. Je vais dire au député que, quoi qu'il arrive, que ce soit 450 000 000 $, 500 000 000 $ ou quoi que ce soit, nous allons respecter nos budgets, nous allons agir en gestionnaires intelligents et éclairés. Cela ne va pas être la bebelle que vous aviez pendant que vous étiez là.

Le Président: M. le député de Jonquière, en additionnelle.

M. Dufour: Ma question additionnelle s'adressera au ministre des Affaires municipales. Est-ce que le ministre des Affaires municipales pourrait informer son collègue, comme s'informer lui-même, à savoir que ce serait le temps que les ministères se branchent, parce que les municipalités, quand vient le temps de dépenser, sont obligées d'avoir des réponses des ministères d'abord...

Des voix: Question!

Le Président: M. le député de Jonquière, vous êtes en additionnelle. La question, s'il vous plaît.

M. Dufour: En additionnelle, je vais

dire que...

Le Président: Sans préambule.

M. Dufour: Est-ce que le ministre des Affaires municipales pourrait demander à son collègue de se brancher le plus rapidement possible, puisque c'est la période des budgets municipaux et que les municipalités ont besoin d'avoir des réponses en temps et lieu et surtout avant l'année financière suivante?

Le Président: M. le ministre des Affaires municipales.

M. Bourbeau: M. le Président, tout ce que je peux constater, c'est que sous l'ancien gouvernement, on votait des budgets qu'on ne dépensait pas et on dépensait des budgets qui n'étaient pas votés. Alors c'était la confusion la plus totale pour les municipalités. Aujourd'hui, le ministre actuel nous dit: II y aura un budget de tant de millions de dollars, les municipalités savent à quoi s'en tenir et c'est cela, bien administrer!

Le Président: M. le député de Taillon, en principale.

M. Chevrette: M. le Président.

Le Président: Oh! excusez moi! M. le leader de l'Opposition.

L'intervention du ministre du Travail à Pointe-au-Pic

M. Chevrette: M. le Président, est-ce que le ministre du Travail peut nous dire quelles démarches il a spécifiquement entreprises afin de désamorcer la situation explosive à Pointe-au-Pic?

Le Président: M. le ministre du Travail.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, M. le Président. Dès le mois de février, comme ministre du Travail, j'ai rencontré et contacté toutes les parties impliquées incluant, par voie de contact, la partie patronale et, par rencontre, la partie syndicale, qui, comme le sait sans doute le leader de l'Opposition, s'est rendue à mes bureaux le 19 février. Au printemps, à la suite d'une demande de médiation de la CSN, j'ai dû répondre à la centrale syndicale qu'étant donné l'aspect très particulier de ce dossier, la médiation, au sens où l'on entend communément dans le domaine des relations du travail, était impossible.

Devant cette impossibilité, j'ai quand même fouillé les autres voies d'exploration possibles et, grâce à la collaboration des parties impliquées, nous nous sommes entendus sur la possibilité d'assigner et de nommer au dossier une personne-ressource. Il n'était pas facile, à cette époque, de trouver quelqu'un qui accepterait cette lourde responsabilité et qui serait accepté également des parties impliquées. À la suite de nombreuses démarches et de plusieurs pourparlers, l'ancien député du comté de Charlevoix, M. Raymond Mailloux, après avoir été accepté par les deux parties, a accepté la mission de tenter un rapprochement.

M. le Président, si l'Opposition s'enquiert des démarches qui ont été effectuées dans cet important dossier...

Le Président: Allez-y, mais plus brièvement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...je ne voudrais pas lui donner une partie des démarches et qu'elle revienne en additionnelle, etc. Si je peux faire un bilan complet, cela évitera les questions additionnelles. Maintenant, s'ils veulent poser une question additionnelle tout de suite, ils peuvent la poser.

Le Président: Allez-y, M. le ministre. M. le leader de l'Opposition.

M. Chevrette: M. le Président, le bilan, jusqu'à ce jour, on le connaît et on connaît les résultats. Ce qu'on veut savoir, c'est quelles sont les démarches qu'il veut entreprendre pour désamorcer la situation actuelle? Quelles sont les démarches qu'il entend prendre?

Une voix: Futures.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, moi, cela ne me fait rien si le leader de l'Opposition veut s'amuser avec ce dossier. J'ai compris de sa première question - vous m'indiquerez si j'ai bien compris, M. le Président - qu'il voulait savoir quelles étaient les démarches que nous avions entreprises dans le passé. C'est ce que je lui expliquais. Maintenant, s'il veut savoir - s'il n'est pas intéressé à savoir ce qui a été fait, c'est son problème - ce qu'on entend faire, il s'agit d'une autre question et je suis prêt également à répondre à cette autre question.

Vous comprendrez, M. le Président, qu'on ne prend pas le dossier dans un vase clos, à un moment complètement arrêté. Il faut tenir compte de ce qui a été fait dans le passé. Dans le passé, il y a une personne-ressource compétente et respectée par les parties, par la population de Charlevoix et par l'ensemble de la population du Québec qui a agi dans le dossier et qui m'a fait rapport. Cette personne a jugé bon également d'informer la population par la voix des médias d'une partie du rapport qu'elle m'a fait. C'est à partir de ce point qu'on reprend

le dossier.

Je pense que cette personne-ressource, qui est M. Mailloux, a fait part à la population que malgré que les observateurs aient dit que les deux parties étaient enracinées au début et que personne ne bougerait dans le dossier une des parties, au moins, a accepté de bouger dans ledit dossier. Au moment où l'on se parle, il nous faut trouver une autre perle rare qui fera en sorte que les deux parties bougeront dans le sens d'un rapprochement avec le bureau du premier ministre, avec le bureau du ministre du Loisir, de la Chasse, de la Pêche et du Tourisme et avec mon bureau. On s'acharne présentement à trouver cette perle rare.

Le Président: M. le leader de l'Opposition.

M. Chevrette: Une dernière question additionnelle, M. le Président. Est-ce que le ministre du Travail entend donner certains pouvoirs à cette éventuelle perle pour qu'il puisse vraiment jouer avec l'opinion publique en ce sens qu'on sait très bien que, quand un médiateur n'a pas nécessairement un pouvoir de recommandation publique, les parties s'en foutent un peu. Va-t-il donner des pouvoirs précis à ce médiateur spécial qu'il entend trouver? (15 h 50)

Le Président: M. le ministre du Travail.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, vous comprendrez aisément de même que le leader de l'Opposition que si nous définissons le mandat et les pouvoirs, avant de trouver la personne et avant que les partis aient entériné le choix de la personne, nous, nous, si je peux utiliser l'expression, "peinturons dans le coin" et nous éliminons un tas de possibilités qui pourraient se révéler fructueuses.

Avant de répondre à une telle question, j'aimerais que les parties aient accepté une personne et que la personne ait accepté un mandat et que, à ce moment-là, nous le rendions public. Nous essayons de ce côté-ci de la Chambre de faire les choses dans l'ordre.

Le Président: M. le député de Beauce-Nord, en principale.

Entente avec les "majors" américains du cinéma

M. Audet: Merci, M. le Président. Ma question s'adresse à la ministre des Affaires culturelles et concerne le dossier du cinéma. On se rappellera, M. le Président, que ce dossier et la loi 109 ont fait la manchette plus d'une fois dans le passé. L'ancien gouvernement ne cessait d'invoquer la difficulté de négocier avec les "majors" américains pour expliquer que la loi 109 était toujours inopérante dans ses parties les plus essentielles. Or, voici que le 22 octobre dernier, la ministre des Affaires culturelles débloquait le dossier par la signature d'une entente valide pour cinq ans avec les "majors" américains. La ministre pourrait-elle nous expliquer les raisons de ce débloquage subit dans ce dossier et nous mentionner les avantages d'une telle entente pour les distributeurs québécois?

Le Président: Mme la ministre des Affaires culturelles.

Mme Bacon: Je suis surprise que l'Opposition n'ait pas posé de question sur ce sujet, M. le Président. Il est vrai que l'Opposition avait négligé de régler le dossier depuis 1983. Je trouve la question du député fort pertinente. Sous l'ancien gouvernement, le dossier du cinéma a accusé un retard intolérable pour les distributeurs québécois. Cette lenteur leur a fait payer le prix. Nous avons adopté l'approche de ne pas négocier un tel dossier sur la place publique comme le reste de mes collègues le font dans leurs dossiers. Les résultats ont été atteints... Voulez-vous la réponse?

Une voix: Oui.

Mme Bacon: Les résultats ont été atteints de façon encore plus rapide et surtout avec beaucoup plus d'efficacité de cette façon-là, M. le Président. Et nous avons fait reconnaître à nos interlocuteurs la spécificité du Québec à l'intérieur du Canada.

J'estime donc que les résultats constituent un déblocage majeur aux termes de délicates négociations qu'on n'a pas traînées sur la place publique. En vertu de cette entente, nous pouvons maintenant dire que nous pourrons éviter des situations comme celle qu'on a vécue en 1979. On se souviendra à cette époque que les distributeurs américains avaient perturbé l'industrie cinématographique au Québec par la décision qu'ils ont prise de créer une nouvelle division qu'on a appelée les "Classics"; cette division s'octroyait arbitrairement le pouvoir de distribuer au Québec les films qui étaient dévolus aux distributeurs québécois. Je rappelle qu'en vertu de l'entente que nous avons signée, seuls les distributeurs qui ont leur principal établissement au Québec pourront distribuer des films qui sont tournés dans une langue autre que l'anglais.

Les "majors" renoncent donc, M. le Président, à la distribution de tels films à moins d'y avoir investi 100 % des coûts de production. L'entente que nous avons signée assure aux distributeurs québécois l'accès à environ 150 films de langue anglaise par

année puisque les "majors" ne pourront distribuer au Québec que les films pour lesquels ils détiennent des droits de distribution aux États-Unis.

Le Président: M. le député de Saint-Jacques, en additionnelle.

M. Boulerice: En additionnelle à Mme la ministre des Affaires culturelles. Avant de faire ce texte, est-ce qu'elle a eu le temps de lire l'article qu'écrivait dans le Devoir cette critique reconnue qu'est Mme Petrowski et qui s'appelait justement à propos de cette négociation "The color of money".

Le Président: Mme la ministre des Affaires culturelles.

Mme Bacon: M. le Président, je suis étonnée de voir que le député de Saint-Jacques s'adresse à une femme de ménage. Quel mépris il a eu pour ces femmes; M. le Président! Et je veux le lui dire publiquement.

J'aimerais dire, M. le Président, que les humeurs de Mme Petrowski...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît!

Mme la ministre, vous avez la parole.

Mme Bacon: Je prends un peu les humeurs de Mme Petrowski dans cet article comme je prends les humeurs de M. Foglia de la Presse. C'est amusant de voir les humeurs de Mme Petrowski. J'ai préféré lire... Voulez-vous écouter ma réponse?

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

Mme Bacon: J'ai préféré lire les articles qui ont été écrits par des éditorialistes renommés sérieux et qui ont salué ce déblocage majeur pour les Québécois qui nous permettra d'avoir des investissements accrus dans la production cinématographique au Québec. Si nos gens d'en face qui n'ont pas été capables de résoudre ce problème depuis 1983... Vous pouvez vous amuser, M. le chef de l'Opposition. Vous n'avez pas été capable comme gouvernement de régler ce problème.

Le Président: S'il vous plaît!

Mme Bacon: Nous l'avons fait comme nous réglons les autres dossiers. Amusez-vous!

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le député de Taillon, en principale.

Les revendications des procureurs de la couronne

M. Filion: Merci, M. le Président. Ma question s'adresse au Procureur général et concerne la situation dans les palais de justice. Après avoir réussi, on le sait, le tour de force de provoquer un conflit judiciaire sans précédent entre lui-même et les juges, conflit qui n'est toujours pas réglé, soit dit en passant, voilà maintenant que le Procureur général est au centre d'un conflit ouvert avec les procureurs de la couronne qui sont, on le sait, ses propres substituts. Ce conflit entraîne des conséquences désastreuses sur l'administration quotidienne de la justice, créant une situation inadmissible: les causes ne se plaident plus, il y a dix causes de meurtres qui ne trouvent pas preneur chez les procureurs de la couronne, un outrage au tribunal qui circule déjà, bref, la situation est pourrie dans nos palais de justice. Je voudrais savoir du Procureur général, au-delà de ses déclarations pompeuses mais inefficaces d'appui aux procureurs de la couronne, quels gestes concrets il entend poser dans les jours qui viennent pour que ses propres substituts obtiennent justice dans leur dossier de revendications des conditions de travail?

Le Président: M. le Procureur général, ministre de la Justice.

M. Marx: M. le Président, premièrement, il n'y a pas de conflit entre le Procureur général et les juges et il n'y a pas de conflit entre le Procureur général et ses substituts. Je ne pense pas que le député de Taillon soit sérieux quand il me demande de transporter la table des négociations au salon bleu.

Le Président: Une dernière additionnelle, M. le député de Taillon.

M. Filion: M. le Président, le ministre de la Justice a pris position dans ce dossier de façon claire et explicite...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! Vous êtes en additionnelle. Sans préambule!

M. Filion: Est-ce que le ministre de la Justice renie, aujourd'hui, l'appui clair et explicite qu'il a donné aux procureurs de la couronne? Si oui, est-ce qu'il pourrait aviser concrètement les procureurs de la couronne qu'il leur retire son appui?

Le Président: M. le Procureur général et ministre de la Justice.

M. Marx: M. le Président, nous prenons toutes les mesures possibles pour nous entendre avec les substituts, à la satisfaction

des susbstituts, au gouvernement.

Le Président: Fin de la période de questions orales.

Tel qu'annoncé tout à l'heure, messieurs les whips, nous allons procéder au vote qui a été reporté.

Mise au voix de la motion

proposant l'adoption du principe du projet de loi 86

(16 heures)

À l'ordre, s'il vous plaît! Je vais mettre immédiatement aux voix la motion présentée par M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation proposant que le principe du projet de loi 86, Loi abrogeant la Loi sur la Société du parc des expositions agro-alimentaires, soit maintenant adopté.

Que ceux et celles qui sont pour ladite motion veuillent bien se leverl

Le Secrétaire adjoint: MM. Bourassa (Saint-Laurent), Gratton (Gatineau), Marx (D'Arcy McGee), Pagé (Portneuf), Levesque (Bonaventure), Mme Bacon (Chomedey), M. Ryan (Argenteuil), Mme Lavoie-Roux (L'Acadie), MM. Bourbeau (Laporte), Paradis (Brome-Missisquoi), Latulippe (Chambly), Dutil (Beauce-Sud), Mmes Gagnon-Tremblay (Saint-François), Robic (Bourassa), MM. MacDonald (Robert Baldwin), Rémillard (Jean-Talon), Savoie (Abitibi-Est), Vallerand (Crémazie), Lincoln (Nelligan), French (Westmount), Côté (Charlesbourg), Ciaccia (Mont-Royal), Vallières (Richmond), Gobeil (Verdun), Picotte (Maskinongé), Fortier (Outremont), Rocheleau (Hull), Mme Bégin (Bellechasse), MM. Cusano (Viau), Vaillancourt (Orford), Dauphin (Marquette), Maltais (Saguenay), Philibert (Trois-Rivières), Mme Dougherty (Jacques-Cartier), MM. Lefebvre (Frontenac), Sirros (Laurier), Doyon (Louis-Hébert), Beaudin (Gaspé), Cannon (La Peltrie), Chagnon (Saint-Louis), Lemire (Saint-Maurice), Paradis (Matapédia), Mme Pelchat (Vachon), MM. Rivard (Rosemont), Polak (Sainte-Anne), Assad (Papineau), Audet (Beauce-Nord), Baril (Rouyn-Noranda-Témiscamingue), Bélanger (Laval-des-Rapides), Bélisle (Mille-Îles), Mme Hovington (Matane), M. Séguin (Montmorency), Mmes Trépanier (Dorion), Bélanger (Mégantic-Compton), MM. Gervais (L'Assomption), Trudel (Bourget), Mme Bleau (Groulx), MM. Bradet (Charlevoix), Brouillette (Champlain), Camden (Lotbinière), Mme Cardinal (Châteauguay), MM. Després (Limoilou), Forget (Prévost), Gardner (Arthabaska), Gauvin (Montmagny-L'Islet), Hamel (Sherbrooke), Laporte (Sainte-Marie), Dubois (Huntingdon), Bissonnet (Jeanne-Mance), Kehoe (Chapleau), Mme Legault (Deux-Montagnes), MM. Leclerc (Taschereau), Hétu (Labelle), Joly (Fabre), Lemieux (Vanier), Marcil (Beauharnois), Messier (Saint-Hyacinthe), Poulin (Chauveau), Richard (Nicolet),

Tremblay (Rimouski), Thérien (Rousseau), Théorêt (Vimont), Saint-Roch (Drummond).

Le Président: Que ceux et celles qui sont contre veuillent bien se leverl

Le Secrétaire adjoint: MM. Johnson (Anjou), Chevrette (Joliette), Mme Blackburn (Chicoutimi), MM. Jolivet (Laviolette), Garon (Lévis), Rochefort (Gouin), Charbonneau (Verchères), Mme Juneau (Johnson), MM. Gendron (Abitibi-Ouest), Brassard (Lac-Saint-Jean), Filion (Taillon), Gauthier (Roberval), Godin (Mercier), Mme Vermette (Marie-Victorin), MM. Claveau (Ungava), Boulerice (Saint-Jacques), Blais (Terrebonne), Dufour (Jonquière), Parent (Bertrand), Mme Harel (Maisonneuve), M. Desbiens (Dubuc).

Le Secrétaire: Pour: 83

Contre: 21

Abstentions: 0

Le Président: La motion est adoptée.

Nous allons maintenant continuer les affaires courantes.

M. le leader du gouvernement. À l'ordre, s'il vous plaît! La motion est adoptée. Est-ce qu'il y a une motion de déférence, M. le leader du gouvernement?

M. Gratton: Oui, M. le Président.

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! Nos travaux ne sont pas terminés. À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons maintenant continuer les affaires courantes. Je vais céder la parole à M. le leader du gouvernement.

Renvoi à la commission de

l'agriculture, des pêcheries

et de l'alimentation

M. Gratton: Oui, M. le Président. Par rapport à ce projet de loi 86 dont on vient d'adopter le principe, je voudrais faire motion pour qu'il soit déféré à la commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation pour son étude détaillée et que la commission soit présidée par un président de séance.

Le Président: Est-ce que cette motion est adoptée, M. le leader de l'Opposition?

M. Chevrette: Adopté.

Le Président: Adopté. Motions sans préavis. Avis touchant les travaux des commissions, M. le leader du gouvernement.

Avis touchant les travaux des commissions

M. Gratton: Oui, M. le Président. Je

voudrais donner avis que le jeudi 30 octobre, de 10 heures à 12 heures, à la salle du Conseil législatif, la commission de l'éducation procédera à l'étude détaillée des projets de loi suivants et ce, dans l'ordre ci-après indiqué: le projet de loi 29, Loi modifiant la Loi sur le Conseil supérieur de l'éducation; le projet de loi 25, Loi modifiant la Loi sur les investissements universitaires; le projet de loi 26, Loi modifiant la Loi sur le Conseil des universités, et, finalement, le projet de loi 28, Loi modifiant la Loi sur les collèges d'enseignement général et professionnel.

Je désire aviser également cette Assemblée que le jeudi 6 novembre 1986, de 10 heures à 12 h 30, après la période des affaires courantes jusqu'à 18 heures et, si nécessaire, de 20 heures à 22 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau, la commission du budget et de l'administration entendra les intéressés et procédera à l'étude détaillée des projets de loi d'intérêt privé suivants et ce, dans l'ordre ci-après indiqué: d'abord le projet de loi 209, Loi sur l'Hôtel de Lido Inc; ensuite le projet de loi 243, Loi concernant Ressources Chesbar Inc. et, finalement, le projet de loi 244, Loi concernant Les Explorations Muscocho Ltée.

Le Président: J'aimerais communiquer l'avis suivant à cette Assemblée: Jeudi, de 10 heures à 12 heures, la commission des affaires sociales se réunira à la salle Louis-Joseph-Papineau pour vérifier les engagements financiers du ministère de la Santé et des Services sociaux pour les mois de janvier à juin 1986. Est-ce qu'il y a d'autres avis à communiquer à cette Assemblée?

Renseignements sur les travaux de l'Assemblée.

M. Chevrette: M. le Président.

Le Président: M. le leader de l'Opposition. M. le député de Roberval.

Renseignements sur les travaux de l'Assemblée

M. Gauthier: M. le Président, voilà cinq mois, c'est-à-dire le 15 mai 1986, j'ai inscrit une question au feuilleton dans laquelle je demandais au ministre de l'Énergie et des Ressources de me transmettre le contenu intégral de l'entente concernant la cession des installations de production de phénol de l'ancienne usine Gulf de Montréal. Je demandais au ministre du Revenu de nous dévoiler le contenu de l'entente, les avantages fiscaux consentis à la compagnie Ultramar lors de cette entente. Cela fait cinq mois. Je n'ai toujours pas eu de réponse. Est-ce que je pourrais demander au leader du gouvernement s'il entend me donner des réponses à ces questions avant la fin de leur mandat?

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Gratton: Je pense que je peux prendre un engagement formel que oui. On me demande avant la fin du mandat, je dis oui. Sûrement qu'on pourra faire un peu plus rapidement que ce qui est escompté, semble-t-il, par le député. Je vais vérifier auprès de mon collègue de l'Énergie et des Ressources et on le fera le plus tôt possible.

Le Président: Cela va. Je pense que la réponse répondait à tous les articles du règlement. Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Sur l'avis de consultation générale sur la loi 104, Loi sur le Conseil permanent de la jeunesse, les associations de jeunes ont demandé deux choses, qu'il y ait d'abord prolongation des délais et que la commission soit itinérante, j'aimerais savoir du leader si son gouvernement a l'intention de donner suite à la demande des associations de jeunes de prolonger la durée, le délai pour le dépôt des mémoires?

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Gratton: On sait que le délai pour le dépôt des mémoires se termine demain, soit le 30 octobre. Nous aviserons donc dès demain et je pourrai donner les informations que me demande la députée dès le début de la semaine prochaine.

M. Chevrette: M. le Président, je vous demande d'appeler la motion du mercredi et je demande également au leader du gouvernement si la réunion se tient pour le partage du temps.

Reprise du débat sur la motion

proposant d'arrêter les procédures

de privatisation

La Vice-Présidente: Nous allons donc reprendre la reprise du débat qui avait été ajourné le 22 octobre dernier par le leader de l'Opposition sur la motion qui avait été présentée par le député de Bertrand et qui se lisait comme suit: Que cette Assemblée exige l'arrêt des procédures de privatisation et que se tienne une commission parlementaire permettant un large débat afin de faire toute la lumière sur les conséquences contraires à l'intérêt public du démantèlement des sociétés d'État, notamment dans le dossier de Quebecair." M. le député d'Ungava. (16 h 10)

M. Christian Claveau

M. Claveau: Merci. Comme vous venez de le dire, la motion qu'on a à débattre aujourd'hui vise à arrêter un mandat que s'est donné lui-même l'actuel gouvernement, sans prendre en considération les intérêts de ta population du Québec. Nous demandons en plus d'arrêter ce mandat de dernière minute, ce mandat de dilapider les biens du Québec. Nous demandons une commission parlementaire pour en discuter avec la population.

Quand nous disons que l'on doit arrêter les procédures de privatisation - pardon, Mme la Présidente - nous avons de bonnes raisons de le faire. On n'est pas sans savoir ce qui se passe actuellement dans le cas du Manoir Richelieu, une des privatisations de l'actuel gouvernement. La Raffinerie de sucre du Québec, on en parle de moins en moins, mais ce qui s'est passé dans la raffinerie de sucre de Saint-Hilaire, je pense que cela serait intéressant de pouvoir en rediscuter un peu en commission parlementaire, de voir comment les gens ont vécu là-bas, de quelle façon ils ont apprécié la dilapidation d'un de leurs biens, d'une de leurs sources de travail, d'emplois, une source de revenus.

Quebecair, il en est question depuis quelques jours. On voit comment cela se passe. Je ne sais pas si vous le savez, mais il n'y a personne en régions qui aime se faire traiter comme des pizzas. Le terme ne vient pas de moi, il y en a qui savent ici d'où vient le terme. On nous traite de pizzas et on nous fait voyager sur des coucous actuellement. On a droit à mieux que cela. Je pense que les gens des régions devraient venir, ont le droit, en tant que citoyens du Québec, de venir s'exprimer devant cette Assemblée pour démontrer de quel genre de bois on se chauffe, nous, les pizzas du Nord.

Madelipêche, il en a été question tout à l'heure. Je crois qu'il y a encore beaucoup à dire sur le problème de Madelipêche, ce n'est pas nouveau. Si le gouvernement du Québec a dû intervenir dans Madelipêche aux Îles-de-la-Madeleine, je pense qu'il avait raison de le faire, et il serait probablement intéressant, non pas de laisser colporter des supposées interprétations de ce que la population pense, par des gens nommés à des comités ou par un ministre qui va passer quelques heures par-ci, par-là sur les bancs de sable des Îles-de-la-Madeleine. Non, il serait intéressant que les gens viennent nous confirmer ici sur place pour voir si c'est vrai ce qu'il nous dit. Je pense que c'est tout à fait légitime, c'est la moindre des choses.

Quand on s'apprête à dilapider l'ensemble de l'économie d'une région, qu'on prenne le temps de venir en discuter ici à Québec, en commission parlementaire devant l'ensemble des élus, pour qu'on puisse se faire une idée juste. Ce serait probablement plaisant de savoir ce qu'ils ont à dire, de quelle façon vraiment on devrait réagir en tant que société responsable ou qu'élus responsables devant un problème aussi grave que celui, entre autres, de Madelipêche qui risque d'affecter l'ensemble de l'économie d'une région, Mme la Présidente.

Dofor, on s'apprête à vendre Dofor en douce comme si de rien n'était, 650 000 000 $ au minimum. Une valeur d'au moins 650 000 000 $. On va essayer de nous glisser cela en douce comme si c'était à peu près rien, comme si c'était moins que rien, j'oserais dire. On dilapide la Société générale de financement en essayant de nous faire croire qu'après tout c'est quelque chose de tout simplement normal et que cela va passer un peu comme du beurre dans la poêle. On joue avec les intérêts du Québec, les intérêts de la population. Au-delà de 1000 emplois directs dans mon comté dépendent de Domtar qui est à 28 % propriété de la Société générale de financement par le biais de Dofor. Je pense que ces gens auraient quelque chose à dire. Il serait intéressant qu'ils puissent venir discuter, nous présenter leur point de vue, plutôt que de se fier à des supposées hypothèses, des qu'en-dira-t-on, des je-pense-que-j'ai-entendu-dire-que. On aimerait savoir ce qu'ils ont vraiment à nous dire. Si ce gouvernement n'a rien à cacher, il devrait d'emblée, immédiatement, sans rancune, sans remords, tout de suite décréter une commission parlementaire sur la privatisation. À ce moment-là, on serait capable de vérifier si le mandat qu'il s'est donné, le mandat qu'il croit avoir reçu, c'est vraiment le mandat que la population a voulu lui donner au soir du 2 décembre dernier.

J'ai passé une privatisation, mais ce n'était que pour mieux y revenir, il s'agit de SOQUEM, un des fleurons de l'industrie québécoise dans le domaine de l'or, entre autres. Qu'est-ce que SOQUEM? C'est la Société d'exploration minière qui agit, déjà, depuis plus de vingt ans, dans le domaine de l'exploration. En effet, à première vue, SOQUEM semble être une privatisation parfaite, le bel exemple de ce que peut être la privatisation. Soit! Mais allons un peu plus loin dans les données. D'abord, je me demande où se cache le ministre délégué aux Mines, s'il regarde les statistiques...

Une voix: II est en vacances.

M. Claveau: ...il est en vacances - qui émanent du ministère de l'Énergie et des Ressources, direction de la politique et de l'évaluation. Ce n'est pas moi qui l'invente, il y a régression dans la production de la plupart des métaux que l'on a produits au Québec en 1985 et 1986. Il y a régression dans la production du cuivre. On a produit

dans les huit premiers mois de 1986, près de 4 % de moins de cuivre que dans les huit premiers mois de 1985. C'est la même chose dans le domaine du fer où on a diminué notre production de 13,5 % dans les huit premiers mois de 1986. C'est 1 % dans l'or.

Vous me direz que 1 % c'est presque rien, mais 1 % de moins cela représente exactement 179 946 grammes d'or de moins de produits au Québec dans les huit premiers mois de 1986 comparativement aux huit premiers mois de 1985. Quand on sait, Mme la Présidente, que le sommet du prix de l'or en 1985, établi le 19 août 1985, était de 340,90 $ US, alors qu'en 1986 le sommet qu'on vient tout juste d'atteindre dernièrement, le 22 septembre 1986, était de 442,75 $ US, c'est 102 $ US de plus, le sommet qu'on a atteint dans le courant des mois d'août et de septembre entre 1985 et 1986.

Parallèlement à cela qu'est-ce qu'on fait? On diminue la production de l'or. Cela est une vraie politique de développement et cela est une politique d'entrée de fonds dans l'économie québécoise! Le prix monte, on en produit moins! Est-ce comme cela qu'on va vraiment assurer notre développement économique? Est-ce qu'on parle sérieusement quand on dit qu'on est en train d'établir des politiques minières au Québec? En ce qui concerne le zinc, on a diminué notre production de 30,81 %; c'est presque 31 % de moins de zinc qu'on a produit dans les huit premiers mois de 1986 comparativement aux huit premiers mois de 1985. C'est 13,57 %, la diminution de notre production d'amiante pour la même période.

Je me demande ce que le ministre délégué aux Mines fait. Est-ce que le ministre est au courant de ces statistiques? Où est-ce que le ministre s'en va? On ne le sait pas. S'il le sait, lui, je pense qu'il est le seul à le savoir parce que nous n'avons pas entendu parler beaucoup de prises de position pour relancer l'industrie minière.

Alors qu'il essaie de nous faire croire que tout va relativement bien et qu'on distribue ici et là quelques petites subventions, on se rend compte que les chiffres nous disent que la production diminue dans à peu près tous les grands secteurs de l'industrie minière au Québec. Si je m'attarde à l'or, c'est parce que justement il y a un autre phénomène qui se passe. C'est SOQUEM qui arrive. SOQUEM, un des grands producteurs d'or du Québec, propriétaire, avant la privatisation et avant la création de Cambior, de 50 % de la mine Doyon, une des plus belles mines d'or en Amérique, de 37 % de Louvem, de 24 % des Ressources Aiguebelle, de 32 % du groupe Sullivan - quatre sociétés qui oeuvrent dans le domaine des aurifères, c'est-à-dire qui produisent de l'or - et de 100 % de Niobec qui, elle, n'est pas dans le domaine de l'or mais qui, dans le columbium ou niobium, est l'un des premiers producteurs mondiaux. Qu'est-ce qu'on fait? On vend cela. Comment? À quel prix? Voyons voir. (16 h 20)

Quand on évalue actuellement les actifs de Cambior, après la vente, c'est 220 000 000 $ dont SOQUEM, l'ancien SOQUEM se garde 70 000 000 $. Sur 22 000 000 d'actions SOQUEM s'en garde 7 000 000. On évalue les actions à 10 $ l'action au moment de la mise en vente. On met donc en vente 15 000 000 d'actions à 10 $ l'action, c'est cela que l'on vend. Jusque là, tout va bien; tout semble conforme aux règles de l'art.

Mais voilà, Mme la Présidente, que le chat sort du sac. À peine dix semaines plus tard, la valeur de l'action de Cambior à la Bourse est rendue à 15 $, une augmentation de 50 % en dix semaines. Bravo aux économistes qui ont évalué la valeur des actions de Cambior au moment de la vente!

Une voix: Un gouvernement compétent!

M. Claveau: Bravo! On s'est trompé à peine de 50 % sur une période de dix semaines-Une voix: Un détail!

M. Claveau: ...dans un domaine où les actions n'ont pas tendance à jouer si rapidement. De 10 $ l'action, on passe à 15 $ dix semaines plus tard. Qu'est-ce que cela veut dire? Cela veut que, sur 150 000 000 $ investis pour acheter 15 000 000 d'actions, les acheteurs ont encaissé en moins de dix semaines sur la valeur de leurs actions 75 000 000 $, Mme la Présidente. C'est cela que ça veut dire!

Une voix: C'est cela la privatisation.

M. Claveau: Cela veut dire que le gouvernement du Québec, le Parti libéral qui représente malheureusement ce gouvernement actuellement, en sous-évaluant la valeur de l'action des biens qui appartenaient à l'État et qui produisaient, qui étaient rentables et qui permettaient d'entrer de l'argent dans les coffres, tout cela pour pouvoir capitaliser quelques millions pour ajuster son budget de fonctionnement au plus vite, a permis ou a donné l'équivalent de 75 000 000 $ à des acheteurs qui ne sont probablement pas les plus pauvres de la société québécoise, Mme la Présidente. Vous savez comme moi que, lorsqu'il nous reste assez d'argent une fois l'épicerie payée, pour acheter de l'or, c'est probablement parce qu'on s'est déjà payé un peu de loisir. J'ai bien l'impression que c'est probablement encore quelques petits amis qui ont dû en profiter ici et là. 75 000 000 $ que l'on a donnés pour avoir sous-évalué...

Une voix: Un cadeau!

M. Claveau: Au moment où on savait, Mme la Présidente, au moment où toutes les tendances des économistes démontraient que le prix de l'or était à la hausse, au moment où on avait une situation conflictuelle, entre autres en Afrique du Sud, qui est l'un des grands producteurs d'or, l'un de nos principaux concurrents, au moment où on pouvait imaginer que, potentiellement, nos actions, les avoirs des Québécois dans le domaine de l'or, allaient prendre de la valeur, on se dépêche de les vendre à un prix juste assez bas pour être intéressant et pour permettre de trouver rapidement du capital pour injecter dans le fonds consolidé et, de cette façon, réussir à équilibrer les budgets. Après, on dit: Bien, que voulez-vous? On l'a vendu! Tant mieux pour les acheteurs s'ils ont mis 75 000 000 $ dans leur poche! Oui, tant mieux pour les acheteurs peut-être, mais tant pis, par exemple, pour l'ensemble des Québécois qui, depuis des années, investissaient pour créer, par le biais de SOQUEM et de son secteur aurifère, l'un des plus beaux fleurons de l'économie québécoise.

Une voix: Très bien!

M. Claveau: Seulement quelques minutes pour parler de ce qui reste de SOQUEM. Dans le décret 1008-86 du 9 juillet dernier, le gouvernement donnait à SOQUEM jusqu'au 1er septembre pour présenter son plan quinquennal d'action. On est le 29 octobre, Mme la Présidente, probablement que ce décret n'a pas plus de valeur que bien d'autres choses qui ont été faites par l'actuel gouvernement. Toujours est-il que selon nos informations, il n'y a pas encore de plan déposé, il n'y a pas de décision de prise, on ne sait pas où on s'en va. Que va devenir SOQUEM, le petit peu qui reste de SOQUEM? Qu'est-ce qui va en résulter? On n'en a aucune idée. Par contre, en sauveur, en prophète, le ministre délégué aux Mines se promène en régions, il vient faire un tour ici et là et annonce, entre autres, que SOQUEM va aider à relancer l'économie de Chapais-Chibougamau. J'en suis fier, c'est mon patelin. J'étais content, je pensais qu'on allait annoncer quelque chose. J'étais content, j'étais derrière le ministre pour dire: Oui, il faut faire quelque chose.

Mises à part quelques subventions aux compagnies, le ministre annonce en grande pompe que, pour l'exercice financier 1986-1987, SOQUEM va disposer de 1 510 000 $ pour injecter dans l'économie de Chapais-Chibougamau, à condition que ce soit accepté par le Conseil des ministres, parce qu'on n'est pas encore sûr que SOQUEM continue à fonctionner. Son plan n'est pas encore déposé, on ne sait pas où on s'en va, le Conseil des ministres est hésitant, le président du Conseil du trésor a peur que cela lui coûte un peu trop cher. De toute façon, on annonce pour 1986-1987, 1 510 000 $. Cela, c'est de l'aide! Cela, c'est de l'argent! Ce qu'a oublié de dire le ministre délégué aux Mines, c'est qu'en 1985-1986, la même SOQUEM, dans onze projets différents, a injecté dans le même secteur, celui de Chapais-Chibougamau dont il est question, une somme de 1 605 177 $. Le ministre, en sauveur, vient nous annoncer que SOQUEM va investir 100 000 $ de moins que l'an passé. Cela, c'est du développement! Cela, c'est de l'intérêt des régions!

C'est nouveau, parfait. On met de l'argent, oui. Il a oublié de dire qu'on en mettait moins que ce qui avait déjà été investi. Évidemment, il dit qu'on va augmenter à 2 200 000 $ dans les années à venir. Demain matin, on baisse. À partir de l'année prochaine, on en aura moins - cela, il ne l'a pas dit - dans onze projets dans lesquels SOQUEM est déjà impliquée. Voilà quelques-unes des raisons. Entre autres, cet exemple nous a permis de démontrer jusqu'à quel point si on ne fait pas attention, on risque de dilapider l'essence même de l'économie québécoise. Voilà pourquoi, nous, à titre d'Opposition responsable, nous exigeons que ce gouvernement arrête immédiatement ses procédures de privatisation et appelle les gens des régions, ceux qui sont directement conernés, qui perdent leur emploi par la privatisation, à venir s'expliquer en commission parlementaire et montrer jusqu'à quel point c'est odieux de privatiser à outrance et de vendre à rabais l'ensemble des biens collectifs que nous avons mis tant de peine et d'ardeur à nous payer.

Des voix: Bravo!

La Vice-Présidente: Merci, M. le député d'Ungava.

Avant de reconnaître un autre député, j'aimerais aviser cette Chambre de l'entente qu'il y a eu entre les leaders concernant la répartition du temps de parole. Le temps de parole se partagera également entre les deux formations politiques jusqu'à 17 h 45. À 17 h 45, on reconnaîtra un droit de réplique de quinze minutes à l'auteur de la motion.

M. le député de Vimont.

M. Jean-Paul Théoret

M. Théorêt: Merci, Mme la Présidente. Je croyais que l'Opposition demandait ce débat sur la privatisation de certaines sociétés d'État afin de faire part de propositions ou de solutions qui auraient pu aider notre gouvernement à prendre les décisions dans ces dossiers. Mais non, de tous les membres du parti de l'Opposition qui sont

intervenus dans ce débat la semaine dernière et même du député d'Ungava, qui vient de parler pendant près de 20 minutes aujourd'hui, jamais aucun d'entre eux n'a proposé des solutions concrètes pour aider ce débat. Tout ce qu'ils ont fait, c'est strictement critiquer, critiquer et critiquer. Ils ont demandé ce débat tout simplement pour nous dire de reporter nos décisions à plus tard. Ils agissent comme membres de l'Opposition exactement de la même façon qu'ils agissaient lorsqu'ils formaient le gouvernement. Ils fuient leurs responsabilités et, comme gouvernement précédent, ils fuyaient leurs responsabilités. Ils n'avaient pas le courage politique de prendre des décisions et remettaient toujours à plus tard les solutions à apporter aux problèmes. Et on remarque encore aujourd'hui qu'ils ont la même attitude. (16 h 30)

Hier, Mme la Présidente, ils demandaient au ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation de reporter de six mois le projet de loi concernant le parc des expositions agro-alimentaires. Aujourd'hui, ils nous demandent de reporter à plus tard la privatisation de certaines sociétés d'État. Toujours ce même manque de courage face aux problèmes, et ce, simplement parce qu'ils n'ont aucune solution à apporter. Ce qui veut dire qu'au lieu d'étudier ces dossiers fort importants des sociétés d'État appelées à être privatisées, ils les ont tout simplement ignorés, et ce, pendant plusieurs mois. Ils découvrent, à l'ouverture d'une nouvelle session, que des gestes concrets et responsables ont été posés par notre gouvernement et que d'autres seront bientôt posés.

Ils nous disent aujourd'hui: Reportez votre décision à plus tard. Il nous faut du temps pour étudier cela de près. On ne savait pas, disent-ils, qu'on avait à faire face à ces problèmes maintenant. Alors que les membres de l'Opposition semblent ignorer qu'il y a des discussions et que des décisions se prennent sur la privatisation, alors qu'ils nous disent que nous n'avons pas de mandat de la population pour agir dans ces dossiers, un sondage effectué au mois d'août et rendu public démontre que plus de 60 % de la population sait que le gouvernement veut privatiser certaines sociétés d'État et que cette population est d'accord avec cette décision.

Mme la Présidente, les députés de l'Opposition viennent de découvrir qu'il y a un gouvernement sérieux et cohérent avec ce qu'il avait annoncé en période électorale, et un gouvernement d'action. La privatisation de Quebecair n'était une surprise pour personne sauf, bien sûr, pour les députés du Parti québécois qui, d'un seul coup, se réveillent le 21 octobre dernier et nous demandent pourquoi privatiser Quebecair. Ils nous demandent de surseoir à la vente de Quebecair, nous disant d'attendre la décision du fédéral dans ce dossier. Ce réveil soudain des membres de l'Opposition est tout à fait aberrant, mais pas surprenant, et démontre sans équivoque qu'ils ne se souviennent pas de ce qui s'est passé durant la campagne électorale et de ce qui est arrivé le 2 décembre dernier. Autrement dit, ils sont encore dans un profond sommeil, et il nous faut donc les réveiller et leur rappeler les faits. Les faits, c'est que, dans le programme du Parti libéral publié en 1985, il était clairement établi que le nouveau gouvernement favoriserait la privatisation de certaines sociétés d'État et, en particulier, celles où les contribuables québécois devaient constamment payer, à même leurs taxes, les déficits énormes de ces sociétés boiteuses.

En pleine campagne électorale, le ministre actuel, le ministre délégué aux Finances et à la Privatisation, annonçait que Quebecair serait une des premières sociétés à être privatisée afin de mettre fin à un gouffre financier important pour le gouvernement du Québec.

En résumé, Mme la Présidente, tout le monde savait que Quebecair allait être privatisée et pourquoi nous devions, comme gouvernement responsable, agir d'une façon concrète et sans délai dans ce dossier. Sans délai parce que l'imminence de la déréglementation de l'espace aérien canadien venait ajouter une certaine urgence à la restructuration des activités de Quebecair. Déjà, au printemps 1986, plusieurs compagnies dont Nordair Metro, City-Express et Nationair avaient annoncé leur intention de desservir certaines villes du Québec. Donc, avec cette nouvelle concurrence, les problèmes structurels de Quebecair ne pouvaient que s'aggraver et ce, à très court terme si des décisions gouvernementales n'étaient prises.

Regardons ensemble, Mme la Présidente, le contexte dans lequel nous nous trouvions pour effectuer cette transaction et les résultats qui en ont découlé. Un montant de 80 000 000 $ englouti au cours des dernières années, donc déficit par-dessus déficit et aucune solution réaliste en vue pour corriger le déficit chronique de Quebecair. C'est dans ce contexte que notre gouvernement a invité les groupes intéressés à soumettre des propositions pour l'achat de Quebecair, mais ces propositions devaient répondre à quatre objectifs fondamentaux pour que le gouvernement approuve la transaction finale.

Ces objectifs étaient les suivants: 1. maintien de services adéquats en régions; 2. maintien d'une base opérationnelle et d'un centre de décision au Québec; 3. maintien du plus grand nombre possible d'emplois; 4. obtention d'un prix raisonnable. Enfin, Mme la Présidente, les offres devaient être

globales et porter sur l'ensemble des actifs de Quebecair.

Or, il faut bien admettre qu'à cause de la situation financière de Quebecair et également des exigences du gouvernement pour maintenir les services en régions et maintenir le plus d'emplois possible, il est bien évident, dis-je, que le nombre d'acheteurs éventuels n'était pas très élevé. En fait, il y en avait deux, soit le groupe Parent dont l'offre était plus faible et conditionnelle à l'approbation et à la participation de plusieurs intervenants, ce qui n'était d'ailleurs pas assuré; d'autre part, il y avait l'offre du groupe Leblanc qui était de loin la plus intéressante, compte tenu de l'ensemble des objectifs établis par le gouvernement.

Il nous fallait donc agir et prendre notre décision assez rapidement, pour deux raisons: 1. chaque mois de délai pour la prise de décision coûtait aux contribuables québécois 1 000 000 $; 2. une guerre de prix en vue à laquelle Quebecair n'avait pas les moyens financiers de faire face puisque Quebecair, transporteur à coût élevé, était très vulnérable face à une guerre des prix.

En conclusion, Mme la Présidente, oui, nous voulons arrêter l'hémorragie des fonds publics dans les canards boiteux comme Quebecair. Oui, Mme la Présidente, nous voulons renforcer les structures industrielles du Québec en misant sur l'entrepreneurship et le dynamisme du secteur privé québécois. C'est pourquoi nous procédons à la privatisation de certaines sociétés d'État et ce, comme gouvernement responsable de la bonne gestion des finances publiques du Québec. Contrairement aux membres de l'Opposition qui formaient le précédent gouvernement, nous prenons nos responsabilités et passons à l'action. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Merci, M. le député de Vimont. M. le député d'Abitibi-Ouest.

M. François Gendron

M. Gendron: Merci, Mme la Présidente. Je m'en voudrais, comme membre de l'Opposition, de ne pas participer à cette motion dite du mercredi sur une question majeure, sur une question importante quant à l'avenir du développement économique global du Québec.

La motion nous dit clairement que cette Assemblée exige l'arrêt des procédures de privatisation et demande qu'il se tienne une commission parlementaire permettant un large débat afin de faire toute la lumière sur les conséquences contraires à l'intérêt public du démantèlement des sociétés d'État, notamment Quebecair. (16 h 40)

Je viens d'entendre le député de Vimont. J'ai eu l'occasion la semaine dernière d'entendre celui de Matapédia. Cela n'a pas de bon sens comme ces gens n'ont pas l'air d'être intéressés à parler de ce qui se passe. On ne veut pas avoir un discours sur des généralités. Nous aussi, on est en mesure de prendre nos responsabilités. Justement on veut les prendre. Je répète, Mme la Présidente - cela va être mon thème jusqu'aux fêtes, je n'ai pas le choix - que ce gouvernement a l'intention de gouverner avec un double langage en utilisant constamment des situations erronées par rapport aux faits, des objectifs complètement diversifiés par rapport aux objectifs de la vice-première ministre qui avait le culot, lors de l'ouverture de la session, de dire: Nous, nous allons gouverner avec transparence; nous, on va gouverner ouvertement. On va mettre les citoyens et les citoyennes du Québec dans le coup. Comme si le dossier de la privatisation n'était pas assez majeur, pas assez important pour qu'une fois pour toutes on sorte du Parti libéral, du gros club privé du Parti libéral au Québec et qu'on fasse de cette question un débat de société.

Je veux revenir à ce que le député de Matapédia disait: Nous, on est d'accord pour s'interroger sur le rôle des sociétés d'État. Cela ne prend pas un gros quotient pour convenir de cette nécessité. On l'a fait, nous, en privatisant trois sociétés d'État. Par contre, on ne veut pas que les sociétés d'État soient liquidées, comme c'est en train de se faire, sans aucun objectif précis. Je reviens au député de Vimont qui dit: Nous, on veut privatiser parce qu'on veut arrêter l'hémorragie des fonds publics. Soit, je voudrais regarder cela. Mais tout de suite après - encore là, il faut avoir du culot - il dit: On fait cela pour renforcer le développement de l'industrialisation au Québec. J'aimerais qu'il m'explique comment il va renforcer l'industrialisation du Québec en se départissant de Dofor, alors que c'est le bras le plus puissant, le plus capable - là, ce n'est pas juste Gendron qui parle. Tous ceux qui ont regardé cela avec intelligence, en dehors de la partisanerie du Parti libéral, ont dit: Un instant! Quebecair, vous avez remarqué qu'ils n'ont pas parlé trop fort. Cela ne veut pas dire que je suis d'accord avec cela. Je parle des chroniqueurs qui ont regardé cela. Mais quand on est rendu à tout mêler dans le panier de la privatisation, Madelipêche, Dofor... De temps en temps, l'objectif, c'est d'arrêter l'hémorragie des fonds publics; un autre tantôt, c'est d'être capable de faire de la relance industrielle dans des secteurs qui ne sont pas assumés par l'entreprise privée.

Qu'est-ce que c'est, Mme la Présidente, que ce discours-là? Madelipêche, pourquoi pensez-vous que c'est devenu gouvernemental? Pourquoi l'État est-il dans Madelipêche? Encore là, cela ne prend pas une longue analyse. C'est parce que, dans le secteur des îles, pour des facteurs insulaires,

pour des facteurs d'éloignement, c'est la seule industrie importante. Comment cela se fait-il que le privé, pendant sept ou huit ans, neuf ans, dix ans, ne l'a pas développée? Tout le secteur privé dans le secteur des îles, faillite après faillite.

Il y a une responsabilité sociale pour un État, de temps en temps, d'assumer dans des coins de pays quelque chose qui coûte quelque chose. J'aime mieux cela que le chômage et l'aide sociale. Ces gens, cela n'a pas l'air de les déranger. Nous, on va privatiser et, dans quelques années, il n'y aura pas preneur, à moins de faire encore là des prix de régime, des prix d'amis du régime. On va privatiser à rabais. Nous, c'est cela qu'on voudrait faire. Discuter ouvertement dans un débat public parce que c'est un débat important. On n'est pas contre la privatisation, mais on voudrait que ce gouvernement ait la responsabilité non pas du double langage et de parler des deux côtés de la bouche.

La population se rend compte de cela à un moment donné. Quand je les voyais encore à la période de questions se vanter aujourd'hui: 60 % des gens sont d'accord avec nous. C'est faux! Il y a déjà cinq régions qui ne veulent plus rien savoir de vous autres. Regardez le sondage. Il y a cinq régions qui ne veulent rien savoir de vous autres déjà, après neuf mois, en disant: Cela va faire vos... Je ne peux pas le dire en Chambre. Mais la population a compris ce qui a été dit. Sur la privatisation, on me montre que la population est d'accord. C'est encore faux. La population est d'accord sur la thématique de la privatisation. Mais pas sur une privatisation à l'emporte-pièce avec n'importe quel élément d'objectif. De temps en temps, cela va être d'arrêter l'hémorragie. De temps en temps, cela va être de renforcer le développement de l'industrialisation. Comment voulez-vous qu'ils soient crédibles?

Par exemple, quand ils se débarrassent de Dofor dans la SGF, il y a quand même des chroniqueurs qui ont dit: Cela va faire! Attendez un peu, là! Un délai de réflexion. Ce n'est pas Gendron qui demande cela. C'est Paul-André Comeau dans un éditorial très bien tapé. Pensez-vous que Gilles Lesage aujourd'hui félicite ces gens? Privé du coffre à outils. On pourrait prendre une bonne demi-heure si je l'avais. Il dit des choses de fond. Pas des choses aveuglées par la partisanerie. Il dit: Plus les mois passent, plus la démarche pragmatique dont se targue ce gouvernement-là ressemble bien plus à du dogmatisme absolu. Ce n'est pas le député d'Abitibi-Ouest qui vous parle. C'est Gilles Lesage qui en a vu bien d'autres. Mais là, à un moment donné, il dit: "Enough is enough". Là, il trouve que c'est assez, Gilles Lesage, avec les folies des libéraux sur la privatisation. Il dit: Cela n'a pas de bon sens qu'on soit rendu à vendre tout le coffre à outils. Et ces gens vont avoir le culot de nous faire le discours: Nous, on est les promoteurs de la défense des intérêts privés, d'un Québec solide, plus fort, d'un Québec agressif en termes de développement industriel.

Qu'est-ce que c'est cela? La SGF, qu'est-ce qu'elle va pouvoir faire quand elle va être privée de tous ses revenus valables? Comment se fait-il que la SGF soit une société d'État importante qui a pu souscrire, en Abitibi-Témiscamingue, et participer à du développement important dans Normick-Donohue? Pensez-vous que j'aurais, dans mon comté, une usine de papier journal s'il n'y avait pas eu la SGF? Je l'ai encore vérifié hier soir avec les propriétaires qui, justement, veulent mettre la main sur Dofor, et je ne les blâme pas.

Je tiens à le dire publiquement. Si jamais la vente se fait, je vais les appuyer. Je vais appuyer Norwick-Perron. Je vais être d'accord pour Normick-Perron plutôt que vendre cela encore aux amis libéraux, Power Corporation ou ailleurs. Je veux au moins que cela reste dans une multinationale québécoise, Lasarroise, si vous me passez l'expression. Avant de donner mon appui, je leur ai dit notre position, elle n'est pas hypocrite, elle est claire.

On pense que cela n'a pas de bon sens de vendre le Québec en petits morceaux comme ces gens sont en train de le faire. Cela n'a pas de bon sens et on va s'opposer à cela le plus qu'on peut le faire. Plus cela va, plus il y a des appuis, plus il y a des gens qui s'ouvrent les yeux et qui disent: Écoutez, ils sont dangereux ces gens-là. Ils sont dangereux, parce que leurs objectifs sont complètement disparates. Quebecair, c'est arrêter le gouffre financier. Supposons qu'ils aient raison, ils ont vraiment erré, ils ont vraiment trompé la population, Mme la Présidente. Les emplois, c'est terrible, les services... À entendre le ministre des Transports, j'ai l'impression qu'il n'a pas pris souvent Quebecair ou Nordair Metro.

Je tiens à vous dire que je suis un utilisateur régulier: deux fois par semaine. Sur mes quatorze derniers voyages avec Nordair Metro, j'en ai fait deux sans problèmes. Vous m'avez compris. Ce n'est pas un discours d'un ministre qui vit à Charlesbourg, c'est un discours d'un utilisateur concret, pratique, deux fois par semaine. Il y a toujours un pépin avec ce genre d'appareil. Ce n'est pas parce que je ne veux pas voyager en Convair. J'en ai vu d'autres, quand on vit en Abitibi... Mme la Présidente, j'ai voyagé en DC-3, en brouette, mais je veux au moins avoir un peu de respect comme usager. C'est dangereux, sérieusement. À un moment donné, c'est un rotor qui ne marche pas, c'est le moteur qui ne part pas, c'est un autre problème et je

vous donne juste un petit exemple. Ce n'est pas bien compliqué. Je l'utilise pour travailler dans l'avion, pour lire des documents. Comme ce sont des avions qui faisaient du cargo auparavant, le plafonnier de lecture est à deux pieds de mon siège. Quand on respecte des clients, au moins on pourrait corriger cela.

Ces gens ont le culot de faire accroire qu'il y a eu des exigences sur la qualité du service. S'ils avaient un peu de jugement et d'honnêteté, ils ne pourraient pas dire des choses comme celles que j'ai entendues dans cette Chambre du ministre des Transports: "Non, la qualité du service est aussi bonne qu'avant. Il n'y a pas de problèmes, on a maintenu les liaisons." Il le prendra. Je vois le député de Beauce-Nord - qu'est-ce qu'il peut connaître là-dedans - il le prendra Nordair Metro. Il va voir que ce n'est pas drôle, on arrive souvent en retard. Mardi dernier, je suis entré à 14 h 5. Est-ce que je devais entrer à 14 h 5? Non. Pourquoi suis-je entré à 14 h 5? Nordair Metro, petit problème. Il y a de la brume ou je ne sais pas quoi, cela ne part pas comme prévu. Ce n'est pas vrai, Mme la Présidente, qu'on a une qualité de service accrue. Ce n'est pas vrai qu'on a maintenu les liaisons. Ce n'est pas vrai que c'est une privatisation qui s'est faite dans le contexte des exigences qui avaient été posées. C'est juste un exemple.

Si on revient sur le fond du dossier, ce qu'on veut dire aujourd'hui aux gens du gouvernement, c'est qu'on ne veut pas qu'ils ne prennent pas leurs responsabilités, on ne veut pas qu'ils ne prennent pas les décisions, c'est leur affaire. Mais on dit: ayez au moins un peu de ce que j'appellerais d'objectivité pour permettre que des choses aussi majeures pour l'avenir du Québec, des choses aussi importantes se fassent au vu et au su de tout le monde. Cela ne coûterait pas cher de faire un débat de fond là-dessus et de regarder cela. Combien de fois on vous entend dire: Nous, de ce côté, on comprend rien, on ne connaît rien, et cela ne donne rien. Il y a quelque chose qui ne marche pas, parce qu'il y a de plus en plus de gens, pas seulement dans la population, qui disent: Non, être privé du coffre à outils, cela n'a pas de bon sens. Un délai dé réflexion s'impose. M. Bourassa doit cesser de vendre pour vendre. Ce n'est pas Gendron qui parle, ce n'est pas le député d'Abitibi-Ouest qui dit cela, c'est d'autres personnes qui sont un peu moins aveuglées par la partisanerie et qui trouvent que le vase commence à déborder.

Ce n'est pas une question de dire: On avait cela dans le programme. Est-ce que ces gens vont gouverner pendant trois ou quatre ans pour le Parti libéral du Québec? Je veux bien que ce soit un gros club privé fermé. Mais c'est assez. Ils ont été élus par une bonne majorité de la population, je veux respecter cela. Mais c'est faux qu'ils aient été élus pour faire des folies comme ils sont en train d'en faire. (16 h 50)

Dans le domaine de la privatisation, on voudrait qu'effectivement, il y ait des analyses plus sérieuses, plus poussées, et des objectifs. Qu'est ce qu'ils vont faire, Mme la Présidente, avec les revenus de Dofor? Est-ce que vous avez eu une réponse à cette question? Je pourrais demander à chacun des membres, ici, qui sont bien plus portés à répéter des choses qu'ils entendent qu'à se faire une tête et un jugement, est-ce qu'il y en a un parmi les membres, les députés ministériels, qui pourrait me répondre? Qu'est-ce que vous allez faire le gouvernement du Québec avec les 35 000 000 $, 40 000 000 $, 200 000 000 $ ou 300 000 000 $ de la vente de Dofor? Il n'y a pas un sacré monde qui va être capable de me répondre. Il n'y en a pas un qui va être capable de...

Justement, j'en entends dire: Pour payer vos dettes. Pourtant si l'on regarde les dossiers, ce n'est pas cela qui est écrit. Si l'on regarde les dossiers sur lesquels doivent se faire... C'est cela je l'attendais leur réplique rapide insignifiante. Dans le dossier, ce n'est pas cela qui est dit. Nous voulons faire de la privatisation pour renforcer le développement industriel, non pas pour payer des dettes. Vous nous avez dit qu'on ne pouvait pas avoir ce comportement de vendre le coffre à outils pour payer l'épicerie. Qu'est-ce que les perroquets ont répondu rapidement? C'est bien facile de dire: Pour payer vos dettes! Cela va renforcer le Québec celai Mme la Présidente, les dettes ne sont pas si dramatiques que cela. Comment se fait-il que, quelques mois à peine avec le gouvernement, il y a eu effectivement un jugement concernant l'amélioration de la cote financière du Québec? Donc, ils ne me feront pas brailler et ils ne me feront pas peur avec la situation budgétaire. Elle n'est pas dramatique et elle n'est pas si grave que cela.

La balloune est gonflée pour atteindre leurs objectifs partisans de effectivement financer une Baie James 2 indépendamment qu'on en ait besoin, indépendamment des coûts et indépendamment qu'on se vende aux Américains. Cela, c'est important! Cela, c'est important de dégager une marge de manoeuvre pour faire nos folies partisanes. C'est cela qu'on doit dénoncer. Si l'Opposition acceptait - ils sont convaincus de leur thèse - alors, c'est quoi l'inconvénient d'accepter de prendre cela un peu plus mollo, de prendre cela un peu plus tranquille, de regarder cela avec d'autres intervenants, de nous convaincre et de convaincre tous les autres intervenants? Tous les éditorialistes que je pourrais vous citer: les Paul-André Comeau, Gilles Lesage, M. Parizeau. Quand

cela fait votre affaire de le citer M. Parizeau quand il nous rentre dedans, vous aimez celai Qu'est-ce qu'il vient de vous dire là, M. Parizeau? Lui aussi, il réclame un moratoire et il dit: Aie, cela va fairel Cela constitue une dilapidation, cela n'a pas de bon sens. Il dit: Dofor, ce n'est pas un canard boiteux. Révisez votre langage! Révisez votre vocabulaire! À un moment donné, ils vendent parce que ce sont des canards boiteux. Si Dofor est un canard boiteux, ils ne comprennent rien, Mme la Présidente!

Alors, je conclus parce que je veux laisser la chance à d'autres, mais je pense que c'était important de demander à ces gens de prendre le temps d'associer d'une façon un peu plus large, dans un débat aussi fondamental, d'autres points de vue. C'est cela une société progressiste, c'est cela une société qui veut qu'effectivement des débats importants se fassent au grand jour et non pas en s'en allant comme une couleuvre dans tous les sens. De temps en temps, c'est telle affaire qui fait leur affaire et, une autre privatisation... C'est telle autre affaire... Il me semble que ce serait simple de dire: Oui, nous allons accepter d'arrêter cela un peu et nous allons regarder cela d'une façon plus large. Et si vous avez raison, vous continuerez vos folies. Merci.

La Vice-Présidente: Merci, M. le député d'Abitibi-Ouest. Mme la députée de Matane.

Mme Claire-Hélène Hovington

Mme Hovington: Merci, Mme la Présidente. À la suite de la motion présentée par le député de Bertrand, j'aimerais apporter les précisions suivantes et appuyer les démarches entreprises à ce jour par mon gouvernement quant à la privatisation des sociétés d'État.

Si vous voulez bien, il serait bon de présenter un bref historique des réflexions et des prises de décision de notre formation politique. Si l'on reconnaît que l'art de gouverner des 25 ou 30 dernières années est périmé, un changement s'impose. Plusieurs pays occidentaux s'interrogent à l'heure actuelle sur la pertinence de conserver les sociétés d'État, et un certain nombre de ces pays ont déjà amorcé ou réalisé la privatisation de quelques-unes de leurs sociétés, et ceci, pour le mieux-être de leur économie respective. Dans le programme du Parti libéral "Maîtrisons l'avenir" que les gens d'en face ont sûrement eu l'occasion de consulter, ou du moins, dont ils ont dû entendre parler lors de la dernière campagne électorale, dans le cinquième chapitre qui s'intitule "La carte d'un nouveau style de gouvernement", on retrouve les principes suivants, et je cite: "II serait vain que le Québec devienne le terrain d'expérimentation d'un libéralisme idéologique débridé. On ne saurait, par exemple, abandonner les grands programmes universels de santé, d'éducation et de soutien du revenu sans créer un grave traumatisme social. Nous devrons plutôt nous appliquer à humaniser ces programmes, en contrôler plus étroitement les coûts, en décentraliser la gestion dans la mesure du possible. Il faut les maintenir, mais en tentant d'atténuer certains effets indésirables du contrôle étatique.

L'État devra aussi continuer à agir sur l'économie, c'est sûr, mais dans un esprit nouveau. Il cherchera à faire diminuer les coûts de production, à laisser les forces du marché agir et à stimuler la concurrence. Bref, il deviendra le gardien de la compétitivité de nos entreprises.

À notre avis, Mme la Présidente, la question de la privatisation des sociétés d'État est un sujet complexe et il doit être abordé d'une manière réaliste et pratique. D'abord, il ne saurait être question de démanteler des sociétés d'État simplement parce qu'elles sont du domaine public, c'est sûr. Ensuite, il faut tenir compte de l'équilibre économique des régions, particulièrement dans celles où les sociétés d'État sont les principaux ou les seuls employeurs. L'intérêt général est aussi en cause lorsqu'il s'agit de liquider à perte des actifs accumulés avec l'argent des contribuables. Mais l'État ne devrait toutefois pas faire concurrence au secteur privé sans raison valable.

Dans un monde où les PME sont les principales sources de nouveaux emplois, ces grands ensembles que constituent souvent les sociétés d'État ne sont plus, dans la majorité des cas, des leviers appropriés de croissance économique.

Dans le cas où la vente totale ou partielle des sociétés d'État ne serait pas une source importante de revenus pour le gouvernement, le seul fait d'éliminer des canards boiteux contribuerait à réduire substantiellement les dépenses et les besoins futurs en emprunts de l'État.

Le gouvernement s'est engagé à mettre sur pied une unité de travail, présidée par un ministre responsable d'un secteur économique, qui procédera systématiquement et cas par cas à une analyse approfondie de la structure financière, du rendement, du mandat et des orientations futures des sociétés d'État.

C'est à partir de cet examen rigoureux que le gouvernement déterminera si la participation directe des pouvoirs publics demeure utile ou nécessaire ou si les conditions sont propices à une démarche partielle ou totale de privatisation.

Voilà, Mme la Présidente, certains éléments importants du programme du Parti libéral en matière de privatisation. Lorsque le peuple du Québec s'est prononcé lors des élections du 2 décembre dernier, les

électeurs et électrices étaient fort bien renseignés sur les intentions et sur les politiques mises de l'avant par notre formation politique pendant la campagne électorale.

C'est pourquoi, Mme la Présidente, je ne comprends pas l'objet de la motion présentée par le député de Bertrand. À mon avis, notre plate-forme électorale sur le sujet mis en cause était claire. De plus, le choix des électeurs a été tout aussi clair.

Pour poursuivre mon bref historique, Mme la Présidente, au lendemain des élections, le premier ministre nommait un député ministre délégué à la Privatisation. En février 1986, le ministre délégué à la Privatisation rendait public un exposé traçant les orientations et la base des actions que devait prendre notre gouvernement dans sa politique de réorientation et de privatisation de sociétés d'État.

Dans cet exposé, ce dernier soulignait les principes directeurs qui devraient encadrer la démarche et le processus de privatisation et qui peuvent se résumer ainsi:

Le premier principe, Mme la Présidente, c'est une plus grande place au secteur privé, car le gouvernement juge que la production commerciale des biens et services dans l'économie québécoise est du ressort du secteur privé, sauf en des circonstances exceptionnelles.

Le deuxième principe, Mme la Présidente, c'est que l'objectif structurel devrait avoir priorité sur l'objectif financier, c'est-à-dire que la privatisation n'est pas une fin en soi, mais lorsqu'elle s'impose, elle doit viser avant tout à renforcer la structure économique du Québec tout en assurant la présence québécoise dans les secteurs clés de l'économie.

Le troisième principe, Mme la Présidente, est une approche pragmatique. La privatisation doit se faire cas par cas. Elle peut emprunter des voies multiples selon les conditions spécifiques d'une société et de son industrie.

Le quatrième principe de la privatisation; ce sont des règles reconnues. La privatisation, Mme la Présidente, est un processus public qui doit répondre aux normes d'équité et de divulgation qui s'appliquent aux compagnies publiques.

Le cinquième principe de la privatisation est un traitement équitable. Le gouvernement doit s'assurer, en effet, que dans le cadre des rationalisations qui pourraient s'imposer, les employés, les communautés et, le cas échéant, les fournisseurs soient traités équitablement. (17 heures)

Certaines entreprises pourraient être vendues en bloc à des firmes privées déjà existantes, mais la cession d'entreprises pourrait aussi prendre la forme de vente d'actifs et le démembrement d'entreprises et leur partage entre plusieurs acheteurs pourront parfois s'imposer aussi comme la meilleure solution. Aussi, nous entendons effectuer chacune des privatisations en respectant les règles qui s'appliquent à toutes les compagnies ouvertes de propriété privée. Cela implique que nous respections toutes les règles d'éthique, d'équité et de divulgation qui ont cours dans ce type de transactions. Chacune des privatisations sera faite, par conséquent, dans l'observance de la Loi sur les compagnies, de la Loi sur les valeurs mobilières et en tenant compte de la jurisprudence que nous ont donnée les tribunaux.

Cet ensemble de règles a été rodé au fil des ans et donne généralement satisfaction à toutes les parties en cause. Il est toutefois Un domaine où le comportement de l'État devra tenir compte de dimensions qui lui sont particulières. Il s'agit de l'attention à accorder aux groupes qui subiraient des effets négatifs de la privatisation, le cas échéant. À la suite d'une privatisation, des rationalisations jugées nécessaires par les nouveaux propriétaires peuvent se traduire par des mises à pied, voire des fermetures d'établissements. Ainsi, des employés, des fournisseurs ou même des communautés entières seraient peut-être exposés à subir les contrecoups des décisions. Mais le gouvernement entend bien assumer complètement sa responsabilité à l'égard de ces divers groupes. Or, la propriété d'État n'est pas la seule voie qui permette d'assumer cette responsabilité mais, en cette matière aussi, le pragmatisme doit être de rigueur. Il n'existe pas une, mais plusieurs façons d'aborder le problème et, dans chacun des cas où le problème se présentera, chaque possibilité de solution devra être évaluée.

Dans le cas qui nous préoccupe, aujourd'hui, soit la privatisation de Quebecair, toutes les avenues avaient été et ont été envisagées. Afin d'éviter des erreurs comme la privatisation manquée de succursales de la Société des alcools, on s'est quand même assuré qu'il y avait des acheteurs potentiels avant de mettre en branle toute une mécanique lourde et rigide. Les ministres des Transports et de la Privatisation affirmaient en conférence' de presse, le 21 octobre dernier, qu'en effet, après avoir englouti près de 80 000 000 $, l'expérience des cinq dernières années est implacable. Ni un changement de direction de Quebecair, ni des améliorations à la marge des pratiques commerciales ne pouvaient se révéler des solutions réalistes au déficit chronique de Quebecair. Les acquéreurs éventuels devaient procéder plutôt à une restructuration fondamentale des activités afin de rééquilibrer les coûts et les équipements avec le potentiel du réseau.

C'est dans un tel contexte que le gouvernement invita le monde québécois de

l'aviation à soumettre des propositions pour l'achat de Quebecair. Il était évident dans cette démarche que les acheteurs intéressés devaient proposer une solution aux problèmes structurels de Quebecair, un point essentiel à l'obtention du financement de la transaction qu'il proposait. C'est pour ces mêmes raisons que le gouvernement balisa son appel d'offres. Comme le mentionnait tout à l'heure un député, il fallait quatre objectifs. D'abord, le maintien d'un service adéquat aux régions, le maintien aussi d'une base opérationnelle au Québec, le maintien d'un plus grand nombre d'emplois possible et un prix raisonnable. Sous-jacente à cette dernière considération subsistait une volonté nette et explicite du gouvernement de maintenir Quebecair en exploitation tout en cessant de subventionner le transport aérien du Québec. Les pertes atteignaient 1 000 000 $ par mois cette année et cette aventure aura coûté, comme je le disais, plus de 80 000 000 $ au Trésor québécois.

Croyez-moi, hors de tout doute, l'entente conclue entre le gouvernement et le groupe Leblanc se révèle une bonne transaction pour le Québec. Je suis aussi une utilisatrice de Nordair Metro deux fois par semaine. Contrairement à ce que mentionnait le député d'Abitibi-Ouest tout à l'heure, jusqu'à maintenant, je n'ai pas eu à souffrir de retard ou de traumatisme plus qu'il ne faut avec ce service. S'il y a eu quelques retards, c'était dû à la brume et la brume, que je sache, est un caprice de la nature et non pas un caprice de Nordair Metro.

En conclusion, j'aimerais rappeler ce que nous considérons comme étant les deux mots clés de notre gouvernement dans l'approche que nous entendons adopter face à nos sociétés d'État, rigueur et pragmatisme pour chacune d'entre elles. Qu'il s'agisse de privatiser, de réorienter ou même de donner une bénédiction, cela sera fait après une étude sérieuse des objectifs poursuivis à l'origine, des succès, des échecs dans la poursuite de ceux-ci et surtout de la pertinence actuelle de ces mêmes objectifs. Après 20 ans de croissance de l'État dans l'appareil commercial et industriel du Québec, nous croyons qu'une telle remise en question s'impose et nous ne croyons pas nécessaire de mettre un terme à nos procédures de privatisation et nous ne croyons pas nécessaire non plus de tenir une commission parlementaire sur le sujet.

À mon avis, nous avons été clairs et précis dans notre programme Maîtrisons l'avenir tout au long de notre campagne électorale de l'automne dernier ainsi que depuis le 2 décembre dernier, date à laquelle nous avons reçu un mandat tout aussi clair et tout aussi précis de la population. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Merci, Mme la députée de Matane.

Mme la députée de Maisonneuve.

Mme Louise Harel

Mme Harel: Merci, Mme la Présidente. On m'a informée que je disposais de quatorze minutes sur la présente motion. J'aimerais que vous m'informiez, à la clôture de mon intervention, du temps qui m'est imparti.

En écoutant la députée de Matane je me disais: mon doux que c'est donc beau. Le problème est que la privatisation dont elle a parlé, c'est la privatisation sur papier, la privatisation rêvée et que si elle prend ses désirs pour des réalités, malheureusement la privatisation que des centaines et des centaines de personnes vivent au Québec présentement, c'est une bien plus triste réalité. Pas seulement pour les employés qui n'ont plus d'emploi mais aussi pour les régions. Nous aurons l'occasion de l'illustrer rapidement, compte tenu du peu de temps à notre disposition, avec le dossier de Quebecair.

C'est, nous dit-on, pendant la campagne électorale qu'auraient été transmis à l'opinion publique québécoise ces objectifs de privatisation. Je dois vous dire que cela doit en étonner beaucoup qui nous écoutent présentement. Cela doit étonner particulièrement les gens de l'est de Montréal. Je ne sache pas que durant toute cette campagne, à aucun moment, il y ait un candidat libéral qui ait parlé d'un dossier de privatisation. Si c'était dans vos papiers de famille, il faut dire que vous ne les avez pas sortis beaucoup pendant la campagne électorale. Dans l'est, on s'est fait promettre la création d'une zone d'entreprises. Immédiatement après le 2 décembre, on a vu apparaître une immense pancarte indiquant "zone d'entreprises", mais c'est tout ce dont on a entendu parler depuis le 2 décembre. À part la pancarte, rien d'autre ne s'est passé.

Pendant cette campagne, on a beaucoup joué au Père Noël du côté du gouvernement au point de faire des promesses en se faisant aviser, par des gens qui étaient bien informés, des gens qui ont ce mandat d'étudier les dossiers, je pense entre autres au chroniqueur de la Presse, M. Dubuc, et par bien d'autres économistes, qu'en 1985 la marge de manoeuvre n'existe pas et que pour tout gouvernement quel qu'il soit une marge de manoeuvre, ça n'existe plus.

Les Québécois ont dû être assez surpris parce que bon nombre d'entre eux avaient certainement eu l'idée d'élire des gens pragmatiques le 2 décembre dernier. Ils s'étaient fait dire qu'ils allaient ainsi pouvoir se reposer des idéologues du PQ, de leur idéologie de concertation - vous vous rappelez le ministère de l'Emploi et de la Concertation - de leur idéologie de

régionalisation. Vous vous rappelez l'ensemble des régionalisations. Pensons simplement à la mise en place des municipalités régionales de comté et des autres conseils régionaux. Les Québécois s'étaient fait dire... Quelle est la principale préoccupation? Quand ils sont interrogés, quelle que soit la question, un député qui dit: le déficit... Je suis convaincue que la principale préoccupation des gens qui nous écoutent ce soir, c'est l'emploi. Dans tous les sondages, quelle que soit leur allégeance politique, la principale préoccupation des Québécoises et des Québécois, c'est l'emploi.

Ils s'étaient dit: La concertation et la régionalisation, ce n'est peut-être pas ce qui permettra efficacement de créer des emplois. Ils ont pensé qu'ils allaient élire un gouvernement pragmatique, un gouvernement qui, comme il le prétendait à l'époque, allait régler les problèmes au fur et à mesure qu'ils allaient survenir. Devant quel gouvernement se sont-ils réveillés? Devant un gouvernement d'idéologues mais d'une autre sorte d'idéologie: l'abolition de l'Emploi et de la Concertation, mais un nouveau ministère dont personne n'avait entendu parler auparavant, avec un ministre à la Privatisation. (17 h 10)

Plus de régionalisation mais maintenant un adjoint parlementaire directement attaché au premier ministre, à la déréglementation. C'est l'été dernier, en plein mois de juillet, qu'ils se sont réveillés devant des rapports où apparaissait comme une peinture à numéros... Vous savez comment c'est une peinture quand on commence à dessiner un numéro et qu'on ne sait pas vraiment ce qui va apparaître en fin de compte. Les Québécois, on fait ce dessin petit à petit pour se rendre compte avec effroi, indignation et désarroi que le portrait qui en résultait n'était pas exactement ce qu'ils en avaient pensé et que ce n'était pas pour cela qu'ils avaient voté.

Mme la Présidente, on dit de ce gouvernement qu'il est un gouvernement qui, en plein été, rappelons-nous, en juillet, n'a pas simplement sorti les trois rapports de son projet idéologique. Il a sorti aussi en plein juillet... Et les Québécois savent très bien que les deux dernières semaines de juillet sont comme réservées aux vacances. Avec les vacances de la construction, c'est à peu près l'ensemble des entreprises qui ferment, et c'est connu, c'est reconnu, c'est un fait comme acquis dans la société québécoise. Il en est ainsi. Eh bien! Coup de tonnerre. À la fin de juillet, le 30 ou le 31 juillet, le ministre des Transports annonce la vente de Quebecair.

Il faut se rappeler comment cela a été annoncé. Il faut se rappeler que les médias annonçaient que le gouvernement avait eu à choisir entre deux offres: une offre de 21 000 000 $ et une offre beaucoup plus basse d'environ 9 000 000 $ et moins, jusqu'à ce que les médias eux-mêmes et les Québécois apprennent que c'était là un prix de vente maquillé parce que cette offre de 21 000 000 $ dégonflée de tous les ajustements auxquels consentait le gouvernement dans la transaction résultaient en fin de compte en une offre de 10 000 000 $. Mais, évidemment, il a fallu aller fouiller pour connaître les modalités de cette transaction.

Si c'est là la façon publique et transparente de rendre des comptes à la population, Mme la députée de Matane, je demande d'autres démonstrations. Cette offre d'achat qui a été à ce moment retenue par le gouvernement, cette offre d'achat, nous dit le gouvernement qui continue encore maintenant à confondre ces deux offres, qui continue à comparer des offres qui ne sont pas comparables, non pas seulement parce que le montant de l'offre d'achat n'était pas le même... Pourquoi ne sont-ils pas comparables? Cela se comprend très rapidement. Parce que, voyez-vous, quand vous achetez, comme le proposaient les employés de Quebecair, Air Canada et le Fonds de solidarité de la FTQ dans une offre conjointe, quand vous vous proposez d'acheter pour exploiter, dans le jargon de ce métier, cela s'appelle en "going concern", quand vous vous proposez d'exploiter toute la flotte d'avions et que vous achetez pour exploiter les avions, ce n'est pas comme une offre qui est celle qui a été choisie par le ministre des Transports et son collègue à la Privatisation. Ce n'est pas comme l'offre des actionnaires de Nordair Metro qui démantèle Quebecair, qui vend les avions, les deux DC-B, les deux 737 - tout le monde le sait, c'est dans les journaux maintenant - et qui, du même coup, abolit les emplois qui étaient rattachés à l'exploitation de cette flotte. Et on va nous dire que c'est la même transaction.

Mme la Présidente, il y a là une confusion qui est savamment entretenue entre deux offres fondamentalement différentes. L'une qui exploitait la flotte et qui non seulement l'exploitait mais qui avait obtenu une étude fouillée d'un ancien vice-président d'Air Canada qui était en annexe à l'offre d'achat et qui démontrait que, pour être rentabilisée, une entreprise comme Quebecair devait garder toutes ses activités de nolisement. Le nolisement, ce sont les voyages comme certains de nos compatriotes québécois ont pu en faire, en Europe ou ailleurs. Ce sont des activités lucratives, ce sont des activités payantes. Il fallait, disait cette étude qui était faite par un spécialiste reconnu par toutes les parties dans le domaine de l'aviation, conserver toutes les activités de nolisement et conserver intégralement la flotte. C'était là le prix d'une rentabilité de Quebecair.

Qu'est-ce qu'on en a fait? Le gouvernement a choisi une offre qui contient dans ses clauses mêmes, donc avec le consentement du gouvernement, un démantèlement de la flotte, une cessation des activités lucratives, des activités de nolisement. Je pense, entre autres, comme tout le monde peut-être, parce que cela devient de plus en plus connu, à l'entretien des avions-citernes, des CL-215. C'était là une activité qui rapportait à Quebecair. Par qui cette activité va-t-elle maintenant être faite? Par les acheteurs de Quebecair parce que -comment dire? c'est l'autre paradoxe de cette transaction - les acheteurs de Quebecair, ceux qui ont fait l'offre qui est retenue par le gouvernement sont les actionnaires de Nordair Metro et les actionnaires de Nordair Metro sont actionnaires d'une entreprise concurrente de Quebecair. C'est assez facile à comprendre. Quand vous avez une entreprise et que vous la vendez aux actionnaires de votre concurrent, ce serait assez étrange que l'actionnaire de votre concurrent la vende pour la rendre rentable en même temps, comme l'ont dit bien des personnes en cette Chambre, avec la déréglementation pour se faire à eux-mêmes concurrence.

Le moins qu'on puisse dire, c'est qu'il y a là une contradiction assez importante et fondamentale. C'est de façon systématique que l'entreprise Quebecair a été dénigrée. Toujours on a parlé des 100 000 000 $ de dettes. Les états financiers de Quebecair en date du 31 décembre 1985 - évidemment, dans des états financiers, vous avez des dettes, mais vous n'avez pas que des dettes dans des états financiers, vous avez aussi des actifs - montrent 110 000 000 $ de dettes, oui, et 124 000 000 $ d'actifs. C'est facile à comprendre. C'est comme une maison que vous achetez. Vous avez une hypothèque de 110 000 000 $, sauf que votre évaluation municipale serait de 124 000 000 $. L'évaluation de la valeur réelle de Quebecair est bien supérieure au montant des actifs. Dans le domaine de l'aviation, c'est bien différent des autres secteurs d'activité. Quand on pense à un avion, il ne faut pas y penser comme à une auto. Quand on achète une auto, on sait qu'au bout de cinq ou six ans, elle va être dépréciée. Quand on achète un avion, on dit qu'un avion cela ne se déprécie pas. Cela s'apprécie. C'est-à-dire que cela augmente de valeur constamment. Plus encore au moment, comme c'est le cas présentement, où on vit une diminution des coûts du pétrole, des coûts du carburant, quand on diminue ces coûts, il y a des types d'avions qui augmentent de prix.

On dit que le marché, dans le jargon, est "boomé". C'était cela la réalité de la flotte d'avions dont se départit actuellement l'acquéreur de Quebecair. Plus encore. Qu'est-ce que le gouvernement a fait? Il n'a pas attendu l'approbation de la Commission canadienne des transports, parce que je vous rappelle qu'il y a 58 municipalités régionales de comté, chambres de commerce, municipalités, conseils régionaux de développement, des régions de l'Abitibi, de la Gaspésie, de la Côte-Nord, des Îles-de-la-Madeleine qui ont fait opposition devant la Commission canadienne des transports à Ottawa et qui réclament un examen public de la transaction. C'est qu'il doit y avoir un problème. Peut-être que les députés de ces régions, comme la députée de Matane, n'ont pas pu prendre connaissance encore de l'ensemble des oppositions qui viennent des régions, mais elles sont très nombreuses et publiques. Je dois vous dire que d'avoir remis, sans l'approbation de la Commission canadienne des transports, sans qu'il y ait encore eu clôture de la vente - parce que c'est juste une offre d'achat qui est acceptée, il n'y a pas encore clôture de la vente, ce n'est pas encore signé - aux mains de l'acheteur les clés de l'entreprise Quebecair, d'avoir obligé les administrateurs à démissionner immédiatement et de les avoir remplacés par des administrateurs nommés par l'acheteur qui n'a pas encore conclu la vente, des administrateurs... Le ministre le sait très bien parce que le ministre des Transports a lui-même nommé l'avocat Raynold Langlois, qui était procureur des acheteurs et qui se retrouve comme administrateur à Quebecair, dont le bureau, Langlois, Trudeau, a intenté des poursuites contre la Société québécoise de transport et le gouvernement pour obtenir plus que ce qui avait été consenti comme ajustement par le gouvernement lui-même.

On peut dire que c'est un circuit assez fermé et je dois vous dire - familial, sans doute - que dans le domaine de l'emploi, le gouvernement ne peut pas plaider innocence. Déjà un rapport qu'il avait lui-même commandé en date de juin dernier mentionnait que la problématique du choix de CP Air allait amener la possibilité de 300 mises à pied et la mise à pied également de 30 à 60 pilotes sur les 110 qu'embauchait Quebecair. Le gouvernement ne peut donc pas plaider innocence dans le domaine de l'emploi. Il a beau maintenir que les emplois sont assurés, il y a 274 employés qui, au moment où on se parle, sont à la recherche d'un emploi. (17 h 20)

Le ministre aurait intérêt, non pas à écouter simplement la haute direction, mais il aurait aussi intérêt à rencontrer ou, tout au moins, à répondre aux lettres des employés. Des employés ont été informés après vingt ans... Parce que Quebecair, ce n'est pas une créature du Parti québécois et du gouvernement du Parti québécois; Quebecair, cela existe depuis 40 ans, Mme la Présidente, cela fait partie du patrimoine

québécois. Il y a des employés qui, après 20 ans de services, après 27 ans de services, ont été avisés qu'ils étaient mis à pied le jour même, on a requis leur départ. Si c'est cela, simplement gérer des fonds publics, c'est scandaleux. Je vous remercie.

La Vice-Présidente: Merci, Mme la députée de Maisonneuve. M. le ministre des Transports.

M. Marc-Yvan Côté

M. Côté (Charlesbourg): Mme la Présidente, je suis extrêmement heureux d'avoir l'occasion de disposer de 25 minutes pour être capable de répondre au genre d'affirmations qu'on vient d'entendre de Mme la députée de Maisonneuve qui se fait le porte-voix d'individus qui aujourd'hui, bien sûr, dans certains cas ont perdu leur emploi et qui, dans certains cas, manipulent littéralement Mme la députée de Maisonneuve qui elle, à son tour, tente de manipuler aussi l'ensemble des citoyens du Québec en donnant des demi-vérités et toute une série de faussetés que je vais tenter, pendant les courtes 25 minutes que j'ai, de corriger.

La Vice-Présidente: M. le ministre, il y a un terme antiparlementaire que vous avez prononcé vis-à-vis de la députée de Maisonneuve et j'aimerais bien que vous le retiriez. Vous avez dit "faussetés", que la députée de Maisonneuve disait des faussetés. Vous savez, M. le ministre des Transports, que c'est un terme antiparlementaire et je vous demanderais de le retirer.

M. Côté (Charlesbourg): On va changer cela pour demi-vérité. Mme la Présidente, comme, effectivement, le temps est limité, je pense que nous devrons être très clairs et ne pas courir beaucoup de choses en même temps. Mme la députée de Maisonneuve dit que le Parti libéral n'a jamais parlé de privatisation durant la campagne électorale. Madame, vous n'êtes pas sortie de l'est de Montréal, vous auriez dû sortir, parce qu'il s'en est parlé partout. Moi, personnellement, j'ai toujours parlé de privatisation et, au premier chapitre, de celle de Quebecair. C'est clair et j'ai fait quelques comtés dans le Québec et on en a parlé. C'était très clair dans le programme du Parti libéral. Ce que je constate, c'est que vous ne savez pas davantage lire aujourd'hui, dans l'Opposition, que vous ne saviez lire durant la campagne électorale et c'est ce qui fait que vous ne savez pas aujourd'hui ce qu'est la vérité.

Pour ceux qui veulent comprendre le dossier et qui ont comme objectif de comprendre ce qui s'est passé, le dossier est effectivement très clair, très limpide et très transparent, beaucoup plus que la transaction ou tout ce qui a entouré la décision du gouvernement précédent d'investir les deniers publics dans le dossier de Quebecair en 1981. Mme la Présidente, oui, nous avons privatisé Quebecair et je veux le dire et le redire très fort. Elle a été vendue à l'entreprise privée, à l'entreprise privée à laquelle elle aurait dû toujours appartenir, n'eût été la volonté de certains individus qui, il faut l'admettre, sur le plan idéologique partagent très bien la volonté de Mme la députée de Maisonneuve. C'est le rêve d'un Québec indépendant et d'une fleur de lys sur une queue d'avion qui arrive à Paris et qui est reçu avec tapis rouge et tambour battant. Cela a été le rêve des Landry, cela a été le rêve de ceux qui pensent encore que le Québec pourra devenir indépendant.

On nous a dit tout à l'heure: Cela a été fait en plein milieu de l'été, un 31 juillet. Vous ne vous rappelez pas la déclaration et la question que vous avez posée en Chambre le 22 mai ou le 21 mai dernier, alors que vous disiez que le gouvernement avait annoncé par la voix de mon collègue, le député d'Outremont, de Paris, la privatisation de Quebecair? Le 22 mai, est-ce que c'est le 31 juillet? L'annonce des intentions du gouvernement avait été faite dès le mois de janvier. On avait très clairement indiqué que, fin juin, le dossier serait clos. Venir nous dire aujourd'hui qu'on a donné des délais additionnels pour permettre à Air Creebec de déposer une proposition était malhonnête de la part des... Et de vouloir privatiser en plein milieu de l'été... Voyons-donc! Trouvez d'autres raisons pour défendre votre dossier, vous en avez véritablement besoin.

Ce qui est fondamental en ce qui concerne le dossier, Mme la Présidente, c'est que les citoyens du Québec, eux, ont compris depuis déjà fort longtemps. Le vote du 2 décembre 1985 était très clair et, contrairement à ce que vous dites dans votre exposé, si on avait si mal fait, est-ce que les sondages auraient donné au Parti libéral 2 % de plus qu'en décembre 1985 et la transaction de Quebecair était effectuée à ce moment? Est-ce que vous dites la vérité aujourd'hui? La population a compris et elle vous juge. Vous avez choisi d'être le porte-parole et le porte-voix de personnes qui, aujourd'hui, dans certains cas, subissent des diminutions de salaire et le porte-parole de certains individus qui vous manipulent. Quant à moi, j'ai choisi d'être le porte-parole des 6 000 000 de Québécois qui en avaient assez de payer quotidiennement de leurs impôts et d'investir dans Quebecair 1 000 000 $ par mois en plus des dettes qu'il aurait fallu payer et dont on se parlera tout à l'heure.

Mme la Présidente, oui, effectivement, nous avons vendu Quebecair et elle est

vendue. C'est une question de temps quant à la finalisation du dossier. C'est une question de temps quant à la décision de la Commission canadienne des transports. Lorsque Mme la députée de Maisonneuve fait allusion à quelque 50 organismes et individus qui ont déposé un mémoire devant la Commission canadienne des transports, ce n'est pas le fait que le député de Duplessis envoie un mémoire à la Commission canadienne des transports qui éclaire davantage le dossier. Cela en fait un. C'est clair. Ce n'est pas le fait que les syndicats qu'on connaît déjà de par leur opposition devant la Commission canadienne des transports déposent un document, qui ajoute des éléments neufs au dossier. La Commission canadienne des transports - il faut le dire à la population - dans les dix dernières années n'a refusé qu'un seul cas de transaction et c'était le cas d'une compagnie d'Angleterre qui voulait acquérir des équipements chez nous. Cela a été refusé et c'est la seule fois où cela a été refusé. Dans tous les autres cas cela a été accepté.

Pour vous dire jusqu'à quel point vous êtes manipulés, vous vous êtes promenés et d'autres individus se sont promenés au Québec et ont fait en sorte de mal informer les citoyens qui, eux, sous la foi de ces informations, ont transmis des demandes à la Commission canadienne des transports pour être entendus. Je veux vous donner des exemples de votre mauvaise information et cela est très clair. Prenons-en un premier et je vais vous en donner six pour vous demander d'être prudente à l'avenir.

Vous m'avez dit en Chambre qu'il y avait un document qui était celui de M. Dufour. Deux signatures doivent certainement suffire à vous prouver que c'est M. Parent qui a signé. M. Parent a signé dans les deux cas, et la lettre de transmission et le mémoire transmis au ministre des Transports qui, à l'époque, faisait une analyse très sérieuse de la situation le 9 avril. Bien sûr, il voulait en tant qu'employé devenir propriétaire de Quebecair, c'était légitime et c'était normal. Leur analyse disait fort bien que les régions du Québec devraient être éventuellement desservies non pas par des avions à turbopropulseur parce que les gens là-bas ne le comprendront pas, mais par des avions à hélices. Ce que d'ailleurs Air Canada a annoncé hier, les partenaires d'hier des gens et des employés. C'est là que cela a accroché, parce que les pilotes voulaient maintenir la flotte de Boeing 737.

Lorsque vous parlez de M. Glenn, le spécialiste, s'il était si influent, M. Glenn, et si connaissant dans le monde de l'aviation, comment cela se fait-il que la compagnie qui a commandité l'étude n'a pas retenu ses brillantes recommandations et qu'elle a annoncé hier, même dans le cas de Nordair, qu'ils allaient maintenant desservir les régions avec des avions à hélices, ce que fait actuellement Nordair Metro? Expliquez-moi cela?

Le deuxième dossier. Lors des engagements financiers, informé par ceux qui étaient dans mon dos, vous vous en souviendrez, vous m'avez interrogé sur le fait que Lavalin n'avait pas engagé une seule personne alors qu'il devait y en avoir dix. Je vous ai dit: Méfiez-vous des informations que vous avez. Mes informations sont en ce sens qu'il y en a et j'ai vérifié. Il y en a quatorze, non pas dix, mais quatorze, une deuxième mauvaise information.

Troisièmement, la semaine dernière, vous êtes intervenue en parlant de M. Desmond Ryan, probablement une carte d'affaire refilée par quelques employés frustrés qui cherchent les bibites un peu partout pour tenter de mettre du sable dans l'engrenage au lieu de collaborer à faire de Quebecair actuelle une compagnie rentable dans laquelle ils peuvent obtenir des actions, s'ils le veulent, comme employés et éventuellement encaisser des profits. Vous avez dit: M. Desmond Ryan, c'est la preuve très claire, deux cartes d'affaire. Est-ce qu'on vous avait dit en même temps que M. Desmond Ryan n'était payé que par une seule compagnie maintenant, depuis le 1er août, depuis le moment où les nouveaux acquéreurs ont pris la responsabilité de l'administration de Quebecair? Est-ce qu'on vous a dit qu'il occupait le poste par intérim en prenant le temps de trouver un successeur? On a oublié de vous dire cela. Tout ce qu'on vous a donné ce sont deux cartes, et vous êtes partie avec deux cartes en disant: Voilà la preuve irréfutable que les gens de Nordair Metro prennent le contrôle total de Quebecair et que c'est Nordair Metro qui en tirera profit. (17 h 30)

Quatrièmement, les transactions financières. Document que vous avez déposé vendredi dernier lors d'une conférence de presse; c'est très clair et ce n'est pas mon document, c'est le vôtre. Engagement qui n'aurait pas été pris par les employés de Quebecair. Location du hangar à conifères: 3 000 000 $ par le gouvernement; par les employés, aucun. Ce qui est totalement faux! Totalement faux! Vérifiez entre 423 000 $ et 450 000 $ par année sur dix ans, cela fait de 4 230 000 $ à 4 500 000 $ par rapport à 3 000 000 $, c'est donc 1 000 000 $ de plus que coûtait l'offre des employés par rapport à celle de Nordair Metro. La vérité a tout de même ses droits, la vérité a ses droits, et c'est, elle, la vérité toute crue.

Autre dossier. Lorsque vous vous êtes levée sur un pseudo-scandale avec les cadeaux des Boeing 737 à CP Air, c'était épouvantable, on avait fait un cadeau de millions de dollars, sauf qu'on avait oublié de

vous informer que cela avait été effectivement payé en dollars américains. Moi, au moins, j'ai eu la précaution, parce que le doute s'est installé dans mon esprit lorsque vous avez posé la question, croyant que vous étiez bien informée, le doute s'est installé dans mon esprit et je suis allé vérifier, contrat en main. J'ai même pu croire un certain moment que le nouveau patron de la députée de Maisonneuve était saint Thomas, et j'ai dit: II me faudrait une photocopie du chèque. J'ai déposé aujourd'hui photocopie du contrat et photocopie du chèque.

Le quatrième dossier sur lequel vous avez erré au sujet des Boeing 737. Encore sur les mises à pied. Et vous venez de le répéter aujourd'hui. Vendredi dernier, vous disiez à la presse: 274 mises à pied... Je vais vous informer pour vous donner le score très juste, permettez-moi l'expression "l'heure juste" au sujet des emplois à Quebecair, ce qui est très clair. Vendredi dernier, vous avez dit: II y a 274 personnes de mises à pied. C'était faux! Et j'espère que ce n'est pas antiparlementaire, Mme la Présidente. C'était faux parce que, vendredi dernier, le 24 octobre, il y avait 106 personnes mises à pied et 58 personnes qui avaient démissionné pour un total de 164. C'était cela la vérité le 24, au moment où vous avez fait votre conférence de presse.

M. Filion: Question de règlement, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Question de règlement, M. le député de Taillon.

M. Filion: Pourriez-vous rappeler au ministre des Transports que, en vertu de nos règles, il doit s'adresser à la présidence et non pas à un député en particulier?

La Vice-Présidente: S'il vous plaît: Effectivement, en vertu des règles de cette Chambre, tout orateur qui a la parole doit s'adresser à la présidence et j'aimerais que ce règlement soit respecté.

M. Côté (Charlesbourg): Mme la

Présidente, je vais respecter... Et le député de Taillon, dans ce cas-là, avait fort raison. Je ne peux m'adresser à la députée de Maisonneuve, je vais m'adresser à vous en étant fort conscient que vous allez transmettre intégralement à la députée ce que j'ai à vous dire.

Oui, effectivement, Mme la Présidente, lorsque la députée de Maisonneuvre - ça va aller comme cela? Cela va pour le député de Taillon? - a, vendredi dernier, informé la population qu'il y avait 274 emplois de perdus, c'était faux! Il y en avait 106, et 58 personnes avaient décidé d'aller ailleurs. Pour vous tenir au fait, Mme la Présidente, de ce qui se passe chaque jour et pour vous prouver que nous suivons, aujourd'hui même, la situation est différente puisqu'il y a effectivement d'autres personnes qui ont été mises à pied, pour votre information. Le nombre n'est plus de 164 puisqu'il s'est ajouté d'autres personnes qui ont été mises à pied. Nous suivons quotidiennement la situation, et notre but est d'informer la population. Dans ce cas-là comme dans les autres cas, vous avez erré et vous avez très bien erré, Mme la Présidente, par l'entremise de la députée de Maisonneuve, sur le dossier. Je ne veux pas prêter de mauvaises intentions à la députée de Maisonneuve puisque je pense qu'elle est sincère dans ce dossier et qu'elle veut transmettre de l'information à la population, mais ce sont ses sources d'information qui, elles, visent autre chose. C'est là que j'ai dit, Mme la Présidente, que la députée de Maisonneuve était manipulée.

Quel aurait été l'idéal dans le dossier de Quebecair? On peut leur en parler puisqu'ils étaient au pouvoir à ce moment-là. Le rêve de l'aviation de tous les francophones a toujours été de faire une fusion entre Nordair et Quebecair pour avoir un transporteur de deuxième niveau dans tout le Québec. Qui a fait "foirer" la transaction en 1981? C'est exactement celui qui, aujourd'hui, est un conseiller extérieur, qui s'appelle Bernard Landry, parce que lui, je peux le nommer, il n'est plus député et, Dieu merci, il ne le sera plus jamais. Bernard Landry, oui. Parce qu'il a étudié à Paris, il a, comme plusieurs des citoyens d'en face, fait le rêve de débarquer à Paris, de faire dérouler le tapis rouge avec une fleur de lys sur la queue de l'avion. C'était cela, le rêve de ces gens-là. Avec la complicité de celui qui, aujourd'hui, est directeur du cabinet du chef de l'Opposition, qui était ministre des Transports et qui est intervenu dans le dossier, qui a réglé le dossier alors que le ministre des Finances de l'époque, M. Parizeau, était à l'extérieur du Québec, à Paris - la vérité a ses droits - et on lui a trafiqué cela dans le dos au Conseil des ministres pendant qu'il était à Paris. Ce n'est pas étonnant qu'hier il ait répété que Quebecair devait être privatisé. Dieu sait que, sur le plan idéologique, il y a certains liens entre la pensée de M. Parizeau et celle de Mme la députée de Maisonneuve.

Oui, effectivement, pourquoi a-t-on privatisé Quebecair? Pour quatre raisons fondamentales. La première, parce que Quebecair était devenue ingouvernable. Les dirigeants de Quebecair, ceux qui avaient des postes très élevés, n'allaient plus au bureau du ministre des Transports de qui ils relevaient mais avaient porte ouverte au bunker, où résidait soi-disant la crème du PQ à l'époque, et au cabinet du premier ministre. Année après année, on a fait miroiter les possibilités d'un Quebecair

rentable. Je vais vous donner deux exemples. Si chacun lisait les documents que nous avons déposés... personne ne peut contester ces documents. Nous avons travaillé, mon collègue d'Outremont et moi-même, avec nos équipes pour tenter de mettre la vérité sur la place publique. Ce sont des documents qui peuvent être discutés n'importe quand. Amenez des preuves contraires aux chiffres qu'il y a là-dedans. En 1985, les dirigeants de Quebecair disaient: Déficit prévisible de 3 700 000 $ Résultat mirobolant: 11 900 000 $, comme dans certains cas, cautionné par l'administration précédente. Le 31 décembre, on vendait un Boeing 737 pour diminuer le déficit et on arrivait avec un déficit de 8 400 000 $. On avait dit qu'il y aurait redressement en 1986...

Une voix: Par le nolisement.

M. Côté (Charlesbourg): Oui, par le nolisement... redressement du déficit prévu de 3 500 000 $ alors que, dans les six premiers mois de l'année, il y avait un déficit d'exploitation de 1 000 000 $ par mois. C'est cela. Si Quebecair était devenue ingouvernable, c'était votre faute et votre responsabilité comme gouvernement. Ce que vous avez fait, c'est que vous avez toujours cautionné et mis de l'argent non pas pour des principes de saine administration, pas pour que l'entreprise privée puisse, elle, demeurer responsable de ce qu'elle doit être, soit l'aviation à travers le Québec, mais vous avez cautionné l'administration en place pendant bien longtemps et il y a des documents pour le prouver.

Très rapidement, je parlerai d'un document que j'ai eu la chance de trouver. C'est celui qui est signé par le président du comité de vérification. Très intéressant! Il est signé par tous les membres du comité de vérification dont les noms vous sont très bien connus: Mme Denise Martin qui, je pense, a été une très bonne collaboratrice du député actuel de Taillon et du leader de l'Opposition, à l'époque du ministère du Travail, une personne très reconnue; M. Réjean Blain, de même que M. Vézina, président de la Régie de l'assurance automobile. C'est clair. Voici ce qu'ils disaient en février 1986 de l'administration que vous nous avez laissée: "II s'agit bien plus de comportements et d'attitudes qui font que les membres du conseil d'administration ont beaucoup de difficulté, premièrement, à suivre le cheminement du raisonnement et de la logique qui déterminent les décisions de la direction; deuxièmement, à bien saisir les motifs de changement de cap; troisièmement, à porter sur des projets précis un jugement éclairé, faute d'information et d'outils d'appréciation; quatrièmement, à saisir l'évolution de la situation de l'entreprise, faute de rapports réguliers, simples, concis et présentés sous une même forme; cinquièmement, à poser des questions qui semblent trop souvent apparaître comme étant non pertinentes et déplacées par rapport à une bonne connaissance du secteur de l'aviation civile." (17 h 40)

Je ne veux pas tout vous lire, mais il y a encore des petits bouts. Vous verrez que vous aviez un bon contrôle sur l'administration de Quebecair. Vous ne saviez pas ce qui se passait là-dedans parce qu'il n'y avait pas de volonté de savoir. Je n'ai parlé à personne des lois ailleurs.

Mme la Présidente, plus loin, on dit: "Nous doutons que les calculs concernant les coûts de revient et les projections des ventes de nouveaux projets présentés au conseil d'administration ont toujours originé ou ont toujours été validés par le service des finances. Nous nous interrogeons également sur la qualité des calculs des prix de revient puisqu'ils semblent être volatiles et s'adapter aux circonstances. "En effet, il faudrait plutôt tenter de répondre aux questions suivantes - écoutez bien et prenez des notes parce que cela s'est passé sous votre responsabilité, sous votre administration - premièrement, qui a décidé de l'opération cargo? À partir de quelles études et analyses? Qui a décidé de l'achat de l'équipement? Combien cela a-t-il coûté et combien en coûte-t-il pour les conserver dans nos hangars? Deuxièmement, qui est ou où sont les responsables de la perte encourue dans la faillite Jet Lines. Le vérificateur externe est d'avis que le vice-président aux finances ne peut être mis en cause. Troisièmement, qui a entraîné l'entreprise sur de nouvelles routes en faisant miroiter des marchés qui se sont avérés ou bien inexistants - voir le poisson de Sept-Îles -ou bien beaucoup plus compétitifs que prévu sur Boston, Toronto, New York en termes de nolisement?"

Ce n'est pas Marc-Yvan Côté, ministre des Transports, qui pose ce jugement-là, ce sont des gens que vous avez nommés au conseil d'administration de Quebecair qui ont porté un jugement sur l'administration. Et c'était votre responsabilité de la surveiller. Vous nous avez donc laissé un bébé mal administré à cause de votre volonté de voir flotter dans les airs une compagnie qui véhiculait à l'extérieur la fleur de lys et c'était là l'essentiel de vos préoccupations.

Quebecair, il faut le dire, était techniquement en faillite. Il faut se le dire parce que la vérité est là. Au cours des deux dernières années, 12 000 000 $ de déficit ou à peu près, c'est très important. Des dettes accumulées d'au-delà 60 000 000 $, dont 11 000 000 $ exigibles en 1986 et 31 000 000 $ exigibles au cours des quatre prochaines années, c'est clair, vous nous avez laissé le bébé et vous avez

dit: Débrouillez-vous avec.

Plus que cela, Mme la Présidente, au mois de juillet dernier le président du conseil d'administration, M. Lizotte, m'avait demandé 8 000 000 $ additionnels pour être capable de finir l'année.

C'est clair que la qualité du service aux régions a été notre préoccupation et les emplois aussi. Si nous avions fait ce que le PQ voulait que l'on fasse, soit obtenir le plus grand prix en faisant abstraction des emplois, nous aurions effectivement reçu beaucoup plus au plan monétaire et cela aurait aidé à éponger davantage le déficit, l'impasse de 1 700 000 000 $ que vous nous avez laissé. Mais non, nous avons décidé de jouer franc jeu, livres ouverts. Lorsque j'entends l'Opposition venir nous critiquer sur la transparence et exiger une commission parlementaire pour faire toute la lumière, c'est avoir une mémoire sélective des événements du passé. Je ne voudrais que vous citer les louches silences de M. Clair. Puisque vous avez tantôt cité M. Alain Dubuc, permettez-moi de le faire aussi et de vous renvoyer la pareille. Et c'était très clair.

Il disait: "En principe, les chiffres cités plus haut auraient pu être connus de tous. Pourtant, il a fallu fouiller, gratter pour les obtenir parce que le ministre des Transports, Michel Clair, a placé son intervention sous le sceau du plus grand secret. Ce n'est que harcelé à l'Assemblée nationale qu'il a consenti à révéler quelques éléments du casse-tête au compte-gouttes, à coups de demi-vérités, ce qui est le lot de ce qui nous est véhiculé aujourd'hui."

Puisqu'il ne me reste qu'une minute, Mme la Présidente, je peux vous dire que la transaction qui a été faite l'a été dans les plus grands intérêts de l'ensemble des citoyens du Québec qui aujourd'hui n'ont plus, et depuis le 1er août, à payer le déficit d'opération de Quebecair, puisque ce sont les nouveaux actionnaires et acquéreurs qui paient de leur propre poche les déficits d'opération.

Les gens des régions, puisque vous en parlez souvent, n'ont plus à payer, comme le disait le député de Matapédia, deux tickets que vous leur avez imposés, le premier pour prendre l'avion et le deuxième à même leurs propres taxes, pour payer les déficits d'exploitation de Quebecair. C'était cela la vérité, c'était cela l'héritage que vous aviez laissé aux régions et c'est pour cela que vous avez mangé une bonne volée sur le plan électoral le 2 décembre et que, dans la veine où vous allez, vous êtes en train de vous en préparer une superbe pour les prochaines. Laissez-moi vous dire qu'on va continuer de vous surveiller. Faites votre travail d'Opposition comme vous devez le faire, à l'Assemblée nationale et arrêtez d'aller dans les régions colporter toutes sortes de demi-vérités...

La Vice-Présidente: M. le ministre, pourriez-vous conclure?

M. Côté (Charlesbourg): Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Merci, M. le ministre des Transports. En réplique, M. le député de Bertrand.

M. Jean-Guy Parent (réplique)

M. Parent (Bertrand): Merci, Mme la Présidente. Conclure après quatre heures de mini-débat sur la question de la privatisation et la demande qui a été faite d'un moratoire, d'une commission parlementaire, ce n'est pas facile d'arriver à une conclusion. Cependant, dans un premier temps, je prendrai les derniers propos du ministre des Transports et lui rappelerai que s'il trouvait honteux que les Québécois aient à payer une facture d'environ 1 000 000 $ par mois pour assurer le transport aérien avec Quebecair, il faudrait peut-être se rappeler qu'actuellement les mêmes Québécois paient environ 20 000 000 $ pour le transport en commun dans la seule ville de Montréal.

Vous avez eu votre tour, M. le ministre. Si vous le permettez, Mme la Présidente, j'aimerais être respecté aussi. Quand cela fait mal, on crie fort de l'autre côté.

La Vice-Présidente: S'il vous plaît: S'il vous plaît! Continuez, M. le député de Bertrand.

M. Parent (Bertrand): Le ministre délégué à la Privatisation mentionnait la semaine dernière que le député de Bertrand n'était pas tellement au courant de ce qui se passait ou de ce qui s'était passé ces dernières années dans le milieu des affaires. Je me permets de rappeler, avec toute la dignité et le respect du ministre, que je pense avoir fait ma marque dans ce domaine et je n'aimerais pas que l'arrogance du ministre à ces propos fasse en sorte qu'on puisse engendrer un débat sur ce point. Cependant, je rappellerais au ministre délégué à la Privatisation qu'il s'est passé des choses dans le milieu des affaires entre 1960 et 1986. Et lorsque le ministre mentionne que, durant toute cette période, il s'est passé des choses, mais que la vraie question sur le dossier de la privatisation actuellement qu'il faut se poser, c'est s'il y a des gens ici capables d'assumer les responsabilités... Si le député de Bertrand veut se poser ces questions, moi je connais les réponses. Et là il a enchaîné avec plusieurs exemples que le milieu des affaires

avait évolué.

J'aimerais, dans un premier temps, dire que, moi aussi, j'ai évolué dans ce milieu des affaires que je respecte énormément. Je pense que le milieu des affaires, que l'ensemble des Québécois et des Québécoises qui ont évolué ces dix ou quinze dernières années ont marqué beaucoup de points en ce qui a trait à leur capacité de prendre leurs responsabilités. Lorsque le ministre qui est responsable de la privatisation, de même que tous ses collègues du Parti libéral qui forme le gouvernement, s'appuient sur cette donnée, je pense qu'on a manqué un peu le débat. Je pense que c'est un peu pour cette raison qu'il faudrait assurément avoir un débat beaucoup plus prolongé parce qu'on ne s'entend pas où on est rendu dans le développement au Québec. (17 h 50)

Moi aussi, je connais les Serge Saucier, les Bernard Lamarre de Lavalin, les Pierre Péladeau, les Perron de Normick-Perron, les Beaudoin, les Royer de Bombardier. Ce sont des gens pour qui j'ai beaucoup d'estime. Ce sont des gens de qui, je pense, on peut dire qu'ils sont rendus à avoir des entreprises qui ont fait beaucoup de chemin. Cependant, entre cela et remettre aujourd'hui l'ensemble des sociétés d'État au secteur privé, je pense qu'il y a une marge. Je m'explique. Une marge dans le sens que les sociétés et particulièrement là où s'engage un débat de fond concernant l'avenir de ce qui va se passer avec la Société générale de financement et particulièrement de Dofor, j'aimerais qu'on puisse nous nommer ici à l'Assemblée nationale une entreprise québécoise qui aura les reins, les moyens financiers d'acheter le bloc de 28 % des actions de la compagnie Domtar.

Oui, parce qu'on parle de 400 000 000 $, 450 000 000 $, strictement sur ce bloc d'actions. J'aimerais savoir quelle est la compagnie québécoise qui aura les reins assez solides pour le faire. Je ne dis pas qu'on n'a pas des fleurons, des entreprises et des hommes d'affaires qui n'ont pas évolué. Prenons le cas de Québécor, par exemple. Ses actifs se situent autour de 200 000 000 $, 250 000 000 $. Chapeau, M. Péladeau. Attention! On n'est pas capable de prendre seuls la relève. On ne s'entend pas nécessairement sur la maturité. Là où on ne s'entend pas non plus, c'est sur le rôle que doit jouer le gouvernement du Québec rendu en 1986. D'une part, on nous dit: On doit se retirer. Je viens du secteur privé. Il y en a d'autres dans cette salle qui viennent du secteur privé. Je pense qu'on est d'accord pour que l'État soit le moins interventionniste possible.

Là-dessus, je suis d'accord et ma position est très claire, sauf à des conditions. Ces conditions doivent être respectées que ce soit pour les emplois, pour protéger, au

Québec, les intérêts entre les mains des Québécois, que ce soit pour la continuité. Je pense que ce sont des points drôlement importants. Je ne pense pas qu'on ait la réponse lorsqu'on la cherche particulièrement dans le cas du dossier de Dofor.

Ce qu'on ne réalise pas c'est qu'au cours des dernières années il y a eu un chemin de fait. Le ministre délégué à la Privatisation a rendu un hommage, si on peut dire, en disant: Oui, c'est merveilleux ce qui s'est passé ces dernières années, chapeau à la communauté. Mais oui, mais cela s'est passé et cela s'est passé sous différents gouvernements. Je ne pense pas que ce soit seulement à cause des gouvernements, mais si aujourd'hui on a des entreprises qui sont rendues à une plus grande maturité, si on a des gens qui commencent à entrevoir des marchés internationaux, à s'implanter un peu partout à travers le monde, c'est parce qu'on leur a fourni ces dernières années des outils de développement. C'est parce qu'on leur a fourni des supports, c'est parce qu'on a été des tuteurs.

Là où on ne s'entend pas, c'est qu'on ne peut pas remettre à l'entreprise privée tout le paquet demain matin sur un plateau d'argent. On ne peut pas faire cela, Mme la Présidente. On n'a pas la capacité de le faire et on le verra de par les offres qui seront apportées de ce côté. C'est là qu'on ne s'entend pas. Ce n'est pas un petit débat politique pour faire de la politicaillerie. Je pense que le débat s'élève au-dessus de cela.

Est-ce qu'on a réalisé que dans le domaine des pâtes et papiers au Québec, on a investi, entre 1977 et 1985, au-delà de 4 000 000 000 $ seulement dans la modernisation des équipements? Est-ce qu'on réalise que tout cela s'est produit au Québec parce que le gouvernement du Québec agissait comme bras financier dans Domtar et dans Donohue? 1 200 000 000 $ dans cette période à Domtar à Windsor; 79 000 000 $ à Dolbeau, toujours à Domtar. À Saint-Félicien, Donohue: 300 000 000 $ investis. À Clermont, Donohue: 150 000 000 $. À Amos, Donohue: 200 000 000 $. 2 000 000 000 $ d'investis dans ces deux entreprises, Domtar et Donohue, dont, comme Québécois, nous sommes propriétaires.

Ce qu'il faut comprendre c'est que la concurrence sur le marché international fait en sorte qu'on a à peine rejoint les grands dans ce domaine. Que ce soit les États-Unis, que ce soit la Scandinavie, le Québec n'arrive pas à la cheville de ces gens par rapport à la récupération qu'il a faite et je m'explique. On devra au cours des années 1986 à 1996, au cours des dix prochaines années, au Québec, investir dans le domaine des pâtes et papiers au-delà de 4 000 000 000 $, c'est-à-dire, au cours des dix prochaines années, une moyenne de

400 000 000 $ strictement pour continuer à être capables de garder une concurrence au niveau international. Quelle entreprise au Québec aura les reins assez forts pour être capable non seulement de financer l'acquisition des blocs d'actions de Donohue et de Domtar, mais de mettre les sommes nécessaires à la recherche et au développement, de mettre les montants nécessaires pour moderniser les équipements, parce que la concurrence internationale est féroce dans ce domaine? C'est là qu'il faut voir. C'est pour cela que, si le gouvernement veut se retirer graduellement, on en discutera en commission parlementaire.

Au cours de l'année 1985, il y a eu des émissions d'actions pour au-delà de 80 000 000 $. Un député a mentionné précédemment: L'Opposition chiâle, critique et ne fait aucune proposition. Bien oui, et à l'émission qui passera ce soir, Tribune, dans une face à face que j'ai enregistré hier soir avec le ministre de l'Industrie et du Commerce, il y a eu des suggestions de faites, vous verrez ce soir. J'ai apprécié - vous le verrez - que votre collègue, le ministre de l'Industrie et du Commerce, ait eu une ouverture par rapport à la commission parlementaire, puisqu'il parle d'une possibilité au mois de janvier. Il y aurait peut-être lieu que vous vous consultiez. Ce même ministre de l'Industrie et du Commerce vient de la grande entreprise. Il vient de Power Corporation, et il sait ce que c'est, il sait ce dont on parle. Mais le 30 ou le 31 mai, le journal Les Affaires citait que le ministre de l'Industrie et du Commerce était inquiet: Doit-on conserver les sociétés d'État? Qu'est-ce qu'on doit faire avec la SGF? Je pense que ce sont des préoccupations.

Mme la Présidente, étant donné que le temps nous presse, je vous dirai qu'il y a des questions à se poser. J'ai préparé une douzaine de questions. Si, à toutes ces questions, les députés dans cette Chambre, d'un côté ou de l'autre, sont capables de répondre, c'est parce qu'on est capable de procéder à ce que le gouvernement dit avoir comme mandat. Mais je ne pense pas qu'on ait ces réponses. Je les cite en terminant, les questions et les vraies questions qu'il faut se poser en cette Chambre en tant que responsables de l'avenir économique du Québec.

Qui, au Québec, peut acheter le bloc d'actions de 28 % de la Domtar, c'est-à-dire faire un déboursé de l'ordre de 400 000 000 $ à 450 000 000 $? Qu'arri-vera-t-il si la Consolidated Bathurst, propriété de Power Corporation, achète Domtar? Que se passera-t-il si l'acheteur, que ce soit l'acheteur de Donohue ou de Domtar, se départit de ses intérêts dans un an ou deux en faveur d'entreprises étrangères? Qu'arrivera-t-il? Qu'est-ce qu'on fera à partir de cela?

Quatrièmement, est-ce qu'on est conscients que, pour l'acquéreur, il faudra investir chaque année, dans le domaine de la recherche, du développement et de la modernisation, plus de 400 000 000 $? Est-ce que la Société générale de financement sans Dofor peut jouer le rôle de premier plan qu'elle joue actuellement dans le développement économique?

Pourquoi et en vertu de quoi, Mme la Présidente, peut-on vendre des actifs de Dofor, des actifs, soit dit en passant, rentables, parce qu'on fait au-delà de 4 000 000 $ de profits par mois au moment où on se parle. En vertu de quelle stratégie se débarrasse-t-on actuellement des intérêts qu'on a dans les produits forestiers? Qu'arrivera-t-il à notre nouvelle politique forestière dans le cas où le bloc d'actions de Domtar serait acheté par Consol? Avez-vous réalisé que 40 % des concessions forestières au Québec viendraient dans les mains d'un seul propriétaire? Posez-vous ces questions-là.

Quel est le plan de stratégie du développement économique au Québec de ce gouvernement? Qu'est-ce qui presse et qu'est-ce qui est si urgent actuellement pour passer le rouleau compresseur sur des sociétés d'État, puisqu'on n'a pas affaire à un canard boiteux, on ne perd pas d'argent à tous les mois? Le journal Finances du 13 octobre - et je termine là-dessus - Mme la Présidente, mentionnait que dans la seule semaine du 6 octobre, la compagnie Dofor qu'on veut vendre a pris une plus-value de 28 000 000 $. En une seule semaine, Mme la Présidente.

Est-on conscient que dans le dossier de la vente de Dofor, seulement dans cette période, on a fait un gain en termes de Québécois, et cela nous appartient?

Dernière question. Lorsqu'on aura vendu notre plus important coffre d'outils et payé les dépenses courantes, qu'est-ce qui va arriver l'année prochaine et dans les années futures pour renflouer les coffres de l'État?

Je n'ai pas la prétention ni ma formation politique, Mme la Présidente, d'avoir le monopole de la vérité, mais je ne pense pas non plus que de l'autre côté on ait le monopole de la vérité et, pour cette raison, nous demandons un débat public. Je vous remercie beaucoup.

Des voix: Bravo!

La Vice-Présidente: Merci, M. le député de Bertrand. Le débat étant clos, nous allons mettre aux voix la motion du député de Bertrand.

M. Chevrette: Mme la Présidente, il y a eu une entente pour reporter le vote à demain.

La Vice-Présidente: Y a-t-il consentement pour le report du vote?

M. Gratton: Mme la Présidente, je suggère, comme le prévoit l'article 223, qu'on prenne le vote aux affaires courantes demain.

La Vice-Présidente: Le vote sera donc reporté aux affaires courantes de demain et nous allons ajourner nos travaux jusqu'à 14 heures demain.

(Fin de la séance à 18 h 1)

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