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Version finale

33rd Legislature, 1st Session
(December 16, 1985 au March 8, 1988)

Thursday, December 17, 1987 - Vol. 29 N° 159

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Journal des débats

 

(Dix heures quatorze minutes)

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! Mmes les députées, MM. les députés, un moment de recueillement.

Veuillez vous asseoir.

Aux affaires courantes, ce matin, déclarations ministérielles.

Présentation de projets de loi. M. le leader du gouvernement.

M. Gratton: Oui, M. le Président. Je vous prierais d'appeler l'article b du feuilleton, s'il vous plaît.

Projet de loi 110

Le Président: Â l'article b du feuilleton, ce matin, M. le ministre des Communications présente le projet de loi 110, Loi sur la Régie des télécommunications. M. le ministre des Communications.

M. Richard French

M. French: M. le Président, j'ai l'honneur de déposer en deux exemplaires le projet de loi sur la Régie des télécommunications. Ce projet de loi remplace la Loi sur la Régie des services publics. Il institue un organisme qui est désigné sous le nom de Régie des télécommunications.

Cet organisme, composé de trois membres, a pour principale fonction, dans la poursuite des objectifs énoncés, la régulation économique et technique des services de télécommunications. À cette fin, la régie a la compétence exclusive pour délivrer, modifier ou annuler l'autorisation d'exploiter une entreprise dont l'objet est le transport public de communications; fixer les tarifs et les conditions de prestation à l'égard des services de télécommunications fournis par toute société exploitante; décider tout litige relatif à l'application d'un tarif ou à la prestation d'un service de télécommunications.

Cette régie a également pour fonction de veiller au maintien et au développement des services de télécommunications et d'aviser périodiquement le ministre sur l'évolution de la réglementation et son adaptation aux changements socio-économiques, techniques et scientifiques.

Le projet de loi prévoit notamment que la régie, avec l'approbation du gouvernement, peut soustraire un service de télécommunications au contrôle tarifaire lorsqu'elle estime que ce service peut bénéficier d'un niveau de concurrence suffisant pour garantir des prix et des taux justes et raisonnables.

Il est en outre prévu que le ministre peut donner des directives portant sur les objectifs et l'orientation de la régie dans l'exécution de ses fonctions. Ces directives doivent être approuvées par le gouvernement.

Le Président: L'Assemblée accepte-t-elle de se saisir de ce projet de loi 110? Adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président: Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Gratton: M. le Président, de consentement des membres de l'Assemblée, je vous demanderais d'appeler l'article aa du feuilleton, s'il vous plaît.

Le Président: Étant donné, M. le leader de l'Opposition, qu'en vertu de l'article 232 nous sommes à des nouveaux préavis à l'article aa, avons-nous votre consentement pour présenter le projet de loi, ce matin?

M. Gendron: Non, M. le Président. Je préférerais et je souhaiterais même, avant que l'Opposition puisse donner son consentement, avoir l'occasion de parler au ministre du Travail sur cette question ou que le ministre du Travail ait l'occasion de me parler.

Le Président: Alors, M. le leader du gouvernement, en vertu de notre règlement, je n'ai pas le consentement de l'Assemblée pour pouvoir procéder ce matin à la présentation de ce projet de loi. Demain matin, nous pourrons procéder à la présentation si M. le leader le veut bien.

Est-ce qu'il y a d'autres présentations de projets de loi? M. le leader du gouvernement.

M. Gratton: Non, M. le Président.

Le Président: Aucun. Alors, dépôt de documents. M. le ministre de l'Éducation.

Rapport annuel de la Commission consultative de l'enseignement privé

M. Ryan: M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le dix-huitième rapport annuel

de la Commission consultative de l'enseignement privé. Ce rapport couvre l'année 1986-1987.

Le Président: M. le ministre de l'Éducation, votre document est déposé.

Toujours à l'étape de dépôts de documents, M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.

Rapport du Fonds d'assurance-prêts agricoles et forestiers

M. Pagé: M. le Président, j'ai l'honneur de vous soumettre le rapport des activités du Fonds d'assurance-prêts agricoles et forestiers relativement à l'administration de la Loi sur l'assurance-prêts agricoles et forestiers pour l'exercice qui s'est terminé le 31 mars 1987.

Le Président: Votre rapport est déposé, M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation. Vous avez un autre rapport?

Rapport de l'OCA

M. Pagé: De plus, j'ai l'honneur, M. le Président, de vous soumettre le rapport des activités de l'Office du crédit agricole du Québec pour l'exercice financier qui s'est terminé le 31 mars 1987 relativement à l'administration de la Loi favorisant le crédit agricole à long terme par les institutions privées, la Loi sur le crédit agricole, la Loi favorisant l'amélioration des fermes, la Loi favorisant le crédit à la production agricole, la Loi favorisant un crédit spécial pour les producteurs agricoles au cours des périodes critiques, la Loi sur le prêt agricole, la Loi favorisant l'établissement de jeunes agriculteurs et, en conclusion, la Loi favorisant la mise en valeur des exploitations agricoles.

Le Président: Document déposé. M. le ministre de la Justice.

Rapport annuel de la Commission d'appel en matière de lésions professionnelles

M. Marx: Oui, M. le Président. J'ai l'honneur de déposer le rapport annuel 1986-1987 de la Commission d'appel en matière de lésions professionnelles.

Le Président: Document déposé.

Rapport annuel du ministère de la Justice

M. Marx: Aussi, j'aimerais déposer le rapport annuel 1986-1987 du ministère de la Justice.

Avant-projet de loi portant

réforme au Code civil du Québec

du droit des obligations

Enfin, j'aimerais déposer l'avant-projet de loi, Loi portant réforme au Code civil du Québec du droit des obligations.

Il s'agit d'un avant-projet de 1466 articles.

Cet avant-projet de loi a pour objet de réformer le droit des obligations et d'introduire au Code civil du Québec un nouveau livre sur ce sujet, lequel vient s'ajouter au livre deuxième sur la famille déjà adopté et en vigueur, aux livres premier, troisième et quatrième sur les personnes, les successions et les biens et aussi déjà adoptés, ainsi qu'aux livres sixième et neuvième portant sur les priorités, les hypothèques et sur la publicité des droits.

C'est cela, M. le Président. Je ne veux pas lire toutes les notes parce qu'il y en a cinq pages. Merci.

Le Président: Vos trois rapports sont déposés, M. le ministre de la Justice.

M. le ministre des Affaires municipales, toujours à l'étape de dépôt de documents.

Rapport annuel de la SDBJ

M. Bourbeau: M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport annuel pour l'année 1986 de la Société de développement de la Baie James.

Le Président: M. le ministre, votre rapport est déposé.

M. le ministre des Approvisionnements et Services, toujours à l'étape de dépôt de documents. M. le ministre.

Rapport annuel du Bureau de la protection civile

M. Rocheleau: Excusez-moi, M. le Président. J'ai le plaisir de déposer le rapport annuel 1986-1987 du Bureau de la protection civile du Québec.

Le Président: Votre document est déposé, M. le ministre.

Mme la ministre des Communautés culturelles et de l'Immigration.

Rapports annuels du ministère

des Communautés culturelles

et de l'Immigration et du Conseil

des communautés culturelles

et de l'immigration

Mme Robic: M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport annuel 1986-1987 du ministère des Communautés culturelles et de l'Immigration et du Conseil des communautés culturelles et de

l'immigration du Québec.

Le Président: Vos deux rapports sont déposés, Mme la ministre.

M. André Boulerice, membre du Bureau de l'Assemblée

J'ai reçu de M. le chef de l'Opposition et député de Joliette la lettre suivante dont j'aimerais faire part à l'Assemblée: "M. le Président, j'aimerais vous informer que le député de Saint-Jacques, M. André Boulerice, siégera à titre de membre du Bureau de l'Assemblée nationale en remplacement du député de Shefford, M. Roger Paré. Ce remplacement est effectif à compter du 17 décembre prochain. Veuillez accepter, M. le Président, l'expression de mes sentiments distingués." J'aimerais déposer cette lettre.

M. le chef de l'Opposition, vous voulez faire une motion?

M. Chevrette: Si le leader du gouvernement me le permet, je ferais motion pour que l'Assemblée accepte cette nomination.

Le Président: Adopté? La motion de M. le chef de l'Opposition est adoptée. M. le député de Saint-Jacques est maintenant membre du Bureau de l'Assemblée nationale.

Nous allons maintenant procéder au dépôt de rapports de commissions. M. le président de la commission du budget et de l'administration et député de Vanier.

Étude détaillée du projet de loi 74

M. Lemieux: M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport de la commission du budget et de l'administration qui a siégé les 10, 11, 14, 15 et 16 décembre 1987 afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi 74, Loi sur les sociétés de fiducie et les sociétés d'épargne. Le projet de loi a été adopté avec des amendements.

Le Président: Votre rapport est déposé, M. le député de Vanier.

M. le président de la commission des institutions et député de Taillon. M. le député de Taillon, aux dépôts de rapports de commissions.

Vérification des engagements financiers

M. Filion: M. le Président, je dépose le rapport de la commission des institutions qui a siégé les 10, 12, 17 et 18 novembre et le 14 décembre 1987 afin de procéder à la vérification des engagements financiers concernant la Protection du consommateur, les Affaires autochtones, les Affaires intergouvernementales canadiennes et les ministères de la Justice, du Solliciteur général et des Relations internationales pour les mois de janvier à juillet 1987, ainsi que ceux relevant de la compétence du premier ministre pour les mois de janvier 1986 à septembre 1987. Merci, M. le Président.

Le Président: M. le député de Taillon, votre rapport est déposé.

M. le président de la commission de l'aménagement et des équipements et député de Bertrand.

Étude détaillée du projet de loi 69

M. Parent (Bertrand): M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport de la commission de l'aménagement et des équipements qui a siégé le 16 décembre 1987 afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi 69, Loi modifiant la Loi sur les villages nordiques et l'Administration régionale Kativik. Le projet de loi a été adopté avec amendements.

Le Président: Votre rapport est adopté.

Auditions et étude détaillée

des projets de loi 245, 232,

252, 233, 216 et 247

M. Parent (Bertrand): J'ai aussi l'honneur de déposer les rapports de la commission de l'aménagement et des équipements qui a siégé le 16 décembre 1987 afin d'entendre les intéressés et de procéder à l'étude détaillée de projets de loi d'intérêt privé. D'abord, le projet de loi 245, Loi concernant la ville de Verdun, a été adopté avec amendements; le projet de loi 232, Loi concernant la ville de Saint-Léonard, a été adopté avec amendements; le projet de loi 252, Loi concernant la ville de Salaberry-de-Valleyfield, a été adopté avec amendements; le projet de loi 233, Loi concernant la ville de Rock Forest, a été adopté avec amendements; le projet de loi 216, Loi concernant la municipalité régionale de comté de la Rivière-du-Nord, a été adopté avec amendements; le projet de loi 247, Loi concernant la ville de Vaudreuil, a été adopté avec un amendement.

Le Président: Merci, M. le député de

Bertrand. Votre rapport sur le projet de loi 69 est déposé et tous vos autres rapports de commissions sont adoptés.

M. le président de la commission de l'économie et du travail et député de Verchères.

Examen de l'accord de libre-échange entre le Canada et les États-Unis

M. Charbonneau: M. le Président, je dépose ce matin le rapport de notre commission qui a siégé hier afin d'examiner

l'accord de libre-échange entre le Canada et les États-Unis d'Amérique.

Une voix: Sans amendement.

Le Président: Votre rapport est déposé.

Dépôt de pétitions.

Ce matin, il n'y aura pas d'intervention portant sur une violation de droit ou de privilège ou sur un fait personnel.

Avant de procéder à la période régulière de questions et de réponses orales, j'avise tous les membres de cette Assemblée qu'au feuilleton ce matin apparaît un vote qui a été reporté. Alors, nous procéderons à ce vote immédiatement après la période de questions orales.

Je suis prêt à reconnaître une première question principale. Je vais reconnaître Mme la députée de Marie-Victorin en principale. Mme la députée, vous avez la parole.

QUESTIONS ET RÉPONSES ORALES

La réforme de l'aide sociale et la mère au foyer

Mme Vermette: Oui, M. le Président. Depuis le dépôt de la réforme sur l'aide sociale, beaucoup de femmes du Québec s'inquiètent du silence de la ministre déléguée à la Condition féminine. A-t-elle été consultée? Approuve-t-elle le sort dicté aux femmes chefs de familles monoparentales dans cette réforme antifamiliale? Ma question, M. le Président: Comment la ministre déléguée à la Condition féminine peut-elle appuyer une réforme qui refuse de reconnaître à sa juste valeur le travail d'une femme chef de famille qui choisit de rester à la maison pour s'occuper de ses jeunes enfants?

Le Président: Mme la ministre déléguée à la Condition féminine.

Mme Gagnon-Tremblay: M. le Président, la réforme de la sécurité du revenu est une réforme majeure. Le ministre responsable de même que le premier ministre ont mentionné à plusieurs reprises qu'il y aurait une consultation qui permettrait d'apporter des modifications s'il y avait lieu. Pour ma part, je suis en train d'écrire à tous les groupes de femmes au Québec afin de leur faire parvenir le document pour qu'elles puissent en prendre connaissance et me faire leurs recommandations. Je suivrai de très près la commission parlementaire sur le sujet et je pourrai faire des recommandations à mon collègue en temps et lieu.

Le Président: Mme la députée de Maisonneuve, en additionnelle.

Mme Harel: Oui, M. le Président. Mme la ministre déléguée à la Condition féminine entend-elle s'opposer à ce que les femmes les plus pauvres du Québec soient pénalisées? Notamment, sait-elle qu'une femme de 58 ans, par exemple, qui va demander d'être exemptée des mesures, pourrait perdre 43 $ par mois sur son chèque mensuel? Sait-elle qu'une femme chef de famille déclarée non disponible aux mesures parce qu'elle est enceinte depuis plus de six mois verra son chèque coupé de 43 $ par mois?

Le Président: Vous êtes en additionnelle.

Mme Harel: En additionnelle, M. le Président. Entend-elle faire connaître sa position à l'égard des mesures qui vont résulter en des pertes mensuelles pour les femmes du Québec qui décideraient d'assumer la garde d'enfants de plus de deux ans?

Le Président: Mme la ministre déléguée à la Condition féminine.

Mme Gagnon-Tremblay: M. le Président, je suis très heureuse de la question de la députée de Maisonneuve. J'avoue que je commençais à m'ennuyer de ses questions. Par contre, je répète que la commission parlementaire aura justement pour objet de faire toute la lumière sur cette réforme majeure et que je prendrai en considération tous les points qui pourraient être apportés et toutes les recommandations qui seraient faites par les groupes de femmes, y compris, entre autres, la recommandation qui pourrait être faite pour les femmes de 55 ans et plus.

Je suis ce dossier de très près. Il ne faut pas prendre en considération uniquement un seul objet de la réforme, je pense qu'il faut la regarder dans son ensemble. Donc, pour plusieurs, il peut peut-être apparaître que certains sujets peuvent parfois signifier une baisse mais, quand on regarde le tout dans son ensemble, en incluant les allocations familiales, par exemple, les crédits d'impôt et d'autres choses, il appert qu'il ne s'agit pas d'une baisse mais d'une hausse dans plusieurs cas.

M. Chevrette: En additionnelle...

Le Président: M. le chef de l'Opposition, en additionnelle.

M. Chevrette: ...au ministre délégué à la Famille. Dans ces énoncés de politique familiale et compte tenu du taux de dénatalité au Québec, comment peut-il accepter qu'une femme enceinte se voit pénalisée durant seize semaines avant son accouchement et jusqu'à cinq semaines après?

Le Président: M. le ministre délégué à la Famille, à la Santé et aux Services sociaux.

M. Dutil: Merci, M. le Président. Je tiens à féliciter l'Opposition de poser une troisième question en deux semaines sur la famille. Si ce n'était pas la troisième question en deux ans, je pense que ce serait tout à leur intérêt.

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! En réponse à la question, M. le ministre. À l'ordre, s'il vous plaît! M. le ministre, vous avez la parole.

M. Dutil: M. le Président, nous ne sommes pas d'accord avec l'interprétation que fait l'Opposition de la réforme dans l'ensemble de l'aide sociale. C'est une réforme globale qui a une multitude de nouveautés. Je pense que son ensemble sera considéré comme très valable pour la population. Il y a une consultation, on l'a répété. Si des points justifiaient des changements, le ministre a dit très clairement qu'il était prêt à accueillir, avec une écoute très attentive, des changements qui pourraient s'imposer. Mais, si on regarde dans son ensemble la réforme de la sécurité du revenu, non seulement pour les femmes, pour la famille, mais pour l'ensemble des Québécois, il s'agit là d'une excellente réforme. (10 h 30)

Le Président: M. le chef de l'Opposition, en additionnelle.

M. Chevrette: II faudrait peut-être souligner au ministre délégué que c'est difficile de poser une question sur une politique quand elle est inexistante.

Cela étant dit, ma question était très précise.

Des voix: ...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Chevrette: Le ministre accepte-t-il, dans le contexte de dénatalité qu'on vit présentement, qu'on pénalise une femme enceinte, qui bénéficie de l'aide sociale, seize semaines avant et cinq semaines après son accouchement?

Le Président: M. le ministre délégué à la Famille, à la Santé et aux Services sociaux.

M. Dutil: M. le Président, en général, le principal reproche de l'Opposition, c'est de dire qu'il n'y a pas de politique, que les politiques sont inexistantes. On voit que ce n'est pas une raison qui justifie de ne pas poser de question. Je ne pense pas que l'Opposition puisse se défiler sur son silence depuis deux ans sur la politique familiale.

Quant à la réponse précise à la question, je le répète, il s'agit d'une réforme importante, d'une réforme globale aux multiples mesures. Ce n'est pas le moment de commenter cela, à la période de questions, quand on sait qu'une vaste consultation sera faite au Québec. Ce n'est pas le moment, à la période de questions, de parler d'une mesure particulière ou d'une autre mesure particulière hors contexte. C'est un peu comme si on tirait une phrase d'un contexte général et qu'on essayait d'en faire une interprétation très étroite.

Le Président: Je vais maintenant reconnaître une deuxième question principale à M. le député de Verchères.

Engagements du Parti libéral en matière d'assainissement agricole

M. Charbonneau: Merci, M. le Président. Il y a un peu plus de deux ans maintenant, la vice-première ministre, qui était alors critique de l'Opposition en matière d'environnement, avait promis une politique d'assainissement agricole qui devait générer des investissements gouvernementaux de 85 000 000 $ dans les cinq prochaines années. C'était le 28 novembre 1985. Cet engagement stipulait que 55 % du coût des installations d'épuration chez les producteurs agricoles, jusqu'à concurrence de 30 000 $ par producteur, seraient assumés par le gouvernement. Depuis ce temps, le rapport Dagenais, commandé par le ministre de l'Environnement, a suggéré qu'on hausse ce pourcentage à 75 %. L'UPA, qui demandait 90 %, s'est finalement rabattue sur la proposition du rapport Dagenais.

Le Président: La question.

M. Charbonneau: M. le Président, on attend toujours depuis ce temps. Par ailleurs, je voudrais indiquer qu'il y avait deux volets à l'engagement libéral. Il y avait également la promesse de trois projets d'usines pilotes de traitement régionales. À ce moment-là, il y avait déjà deux projets qui fonctionnaient. Ce que le gouvernement a fait depuis ce temps, c'est d'en couper un, d'en abandonner un et de faire en sorte que celui qui était déjà presque réalisé puisse se réaliser.

Le Président: Votre question.

M. Charbonneau: M. le Président, ma première question au ministre de l'Environnement: Quand le gouvernement va-t-il livrer la marchandise et surtout quel type d'aide envisage-t-il d'accorder aux producteurs agricoles?

Le Président: M. le ministre de

l'Environnement.

M. Lincoln: M. le Président, la première réponse est très simple. Le gouvernement va livrer la marchandise bien avant le gouvernement du Parti québécois qui s'est assis dessus pendant neuf ans à ne rien faire.

Une voix: C'est cela. M. Lincoln: C'est sûr!

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! Mesdames les députées, messieurs les députés, s'il vous plaît! M. le ministre de l'Environnement.

M. Lincoln: Pendant qu'ils étaient au pouvoir, on n'a jamais entendu parler de cela. Il a fallu le courage de la vice-première ministre pour parler de et par un engagement formel du Parti libéral. Il a fallu que ce soit notre gouvernement qui mette le comité Dagenais en place pour faire, encore une fois, une recommandation que nous allons suivre.

On est à deux ans dans notre mandat et très bientôt, dans un avenir très prochain, on va annoncer ce programme et vous aurez encore une fois à vous asseoir sur vos grandes paroles.

M. Charbonneau: M. le Président, je pourrais...

Le Président: M. le député de Verchères, en additionnelle.

M. Charbonneau: Je pourrais prendre le même scénario que le ministre et lui dire que pendant qu'ils ont été au pouvoir dans les années soixante-dix...

Le Président: À l'ordre!

M. Charbonneau: ...les ministres...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! Je veux absolument vous reconnaître, M. le député de Verchères, mais vous commencez avant que je vous reconnaisse. En additionnelle, M. le député de Verchères.

M. Charbonneau: M. le Président...

Le Président: Et j'aimerais bien entendre le député de Verchères.

M. Charbonneau: M. le Président, vous vous rappelez sans doute qu'il y a eu des élections le 2 décembre 1985. Nous sommes aujourd'hui le 17 décembre 1987. Quand le ministre va-t-il respecter la parole de son gouvernement et comment va-t-il faire pour investir 85 000 000 $ en cinq ans alors que ces investissements devaient commencer au début de son mandat et que deux ans après, il n'y a pas un sou de dépensé?

Le Président: M. le ministre de l'Environnement.

Une voix: Répondez-lui donc!

M. Lincoln: M. le Président, je trouve cela étonnant de la part du député de Verchères. J'étais de l'autre côté, sur les banquettes de l'Opposition, et je n'ai pas entendu même une seule fois le ministre de l'Agriculture ou le ministre de l'Environnement parler de l'assainissement agricole. Et aujourd'hui, il a le culot de venir nous dire, deux ans après le début de notre mandat, qu'on aurait dû livrer la marchandise tout de suite.

Pendant presque dix ans, ils n'ont rien fait. Ce que je lui dis, c'est qu'on va livrer la marchandise très bientôt. Et peut-être que ce sera plus que les 85 000 000 $ auxquels vous avez fait allusion.

Le Président: M. le député de Verchères, en additionnelle.

M. Charbonneau: En additionnelle au ministre qui a beaucoup de culot. Comment peut-il justifier de nous faire la morale alors que le seul geste qu'il a posé en deux ans dans ce dossier, c'est de couper l'usine qui était en préparation dans le bassin de la rivière L'Assomption? Comment peut-il être pris au sérieux aujourd'hui, deux ans après, alors que le seul geste qui a été fait, c'est de couper une usine qui était en préparation?

Des voix: Bravo! Bravo!

Le Président: M. le ministre de l'Environnement.

M. Lincoln: M. le député de Verchères, M. le Président, essaie de se remonter le moral, mais je vais lui dire, moi, pourquoi on a coupé l'usine.

Quand je suis arrivé au ministère de l'Environnement, c'était le fouillis total dans l'assainissement des eaux. On avait défoncé le budget d'assainissement des eaux urbaines de 250 000 000 $ en une seule année. Il y avait des projets qui étaient dépassés de 100 %. On faisait des calculs de millions, de centaines de millions de dollars, "à la mitaine". Il n'y avait même pas un ordinateur dans le système.

C'est nous qui avons institué le comité Dagenais pour mettre de l'ordre dans cela. Pour ce qui est des recommandations, c'est nous qui avons nommé le vice-président de l'UPA comme membre du comité Dagenais. Mais c'est important de lui répondre. Et pourquoi a-t-on stoppé le projet pilote de l'usine de L'Assomption? C'est que les

prévisions faites par les péquistes, comme toutes leurs prévisions, étaient de 5 000 000 $, mais quand il s'agissait de faire l'usine, c'était presque 10 000 000 $. Alors, on a coupé cela.

Le Président: En conclusion.

M. Lincoln: On a fait un programme plus intelligent. Nous sommes en train de faire un programme...

Le Président: Conclusion.

M. Lincoln: ...pour lui substituer l'usine de la Communauté régionale de l'Outaouais et on a mis de l'argent.

Le Président: En conclusion, M. le ministre.

M. Lincoln: L'ancien ministre de l'Agriculture crie. Qu'a-t-il fait, lui, dans l'agriculture et l'assainissement agricole?

Le Président: En conclusion. En additionnelle.

M. Jolivet: Oui, en additionnelle.

Le Président: Alors, très brièvement. Un instant! Un instant! M. le ministre de l'Environnement, cela faisait quatre fois que je vous rappelais de conclure. En additionnelle, M. le leader adjoint.

M. Jolivet: Oui, en additionnelle au ministre de l'Agriculture, pour faire la différence entre les deux, encore une fois. Le ministre de l'Agriculture avait proposé, avait dit aux agriculteurs qu'au début... (10 h 40)

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Jolivet: Le ministre de l'Agriculture maintient-il la position qu'il a donnée aux agriculteurs, à savoir qu'au début de 1988 ils auraient une réponse? Actuellement, on est près de l'année 1988 et le ministre de l'Environnement n'est pas prêt à donner la réponse. Est-il capable de concilier ces deux faits?

Le Président: M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.

M. Pagé: M. le Président, compte tenu de l'inertie du gouvernement du Parti québécois et de sa contre-performance dans ce dossier, vous ne devriez pas aborder cette question, vous risquez de vous faire beurrer un peu.

M. le Président, c'est un problème qui est aigu. Mon collègue, le ministre de l'Environnement, et moi-même avons mis des équipes au travail, avons bâti un programme d'intervention qui est sérieux et qui aura des résultats, qui s'appuiera notamment sur différents types d'interventions, dont la recherche, des aides substantielles pour les infrastructures et, aussi, évidemment, un programme de gestion des surplus concernant les régions. Encore là, comme dans les autres dossiers en regard de l'agriculture et de l'environnement, notre gouvernement va livrer la marchandise, ce que vous n'avez pas fait, soit dit en passant.

Le Président: Conclusion. Une voix: Quand?

M. Pagé: Dans les meilleurs délais, au début de 1988. Oui, oui.

Des voix: ...

Le Président: Un instant! Un instant!

Un instant, s'il vous plaît! Je voulais reconnaître en principale M. le chef de l'Opposition.

Les services de santé au CLSC du Richelieu

M. Chevrette: M. le Président, le 13 novembre 1985, le premier ministre disait que jamais en cette Chambre on n'entendrait dire que c'était la faute de l'ancien gouvernement. Voilà le début de ma question. On devait, dès la prise du pouvoir, être conscient de ses responsabilités et corriger les aberrations du système. Ce matin, concernant la santé...

Le Président: Un instant! Un instant!

M. Chevrette: ...on apprenait qu'il y a 172 lits de fermés à l'hôpital Sainte-Justine, ce qui ne s'est jamais vu. Ce qu'on avait vu antérieurement, c'était un maximum de 82 lits. Là, c'est 172. Imaginez-vous la politique barbare en santé à l'époque!

M. le Président, de plus, depuis le 14 novembre dernier, le CLSC Richelieu ne donne plus de services à la population. Si vous avez mal au dos, c'est le mardi. Si vous avez des problèmes cardiaques, c'est le mercredi. Comme s'il fallait décider d'avance quel jour on est malade. Les enfants, c'est le vendredi. Les vieux, pensez-y, c'est fermé le samedi et le dimanche, donc, vous tombez au mardi suivant.

Donc, M. le Président, cette politique de santé revigorée de la ministre actuelle a fait en sorte que le député de Chambly a dit, devant les maires du coin: Nous, les CLSC, dorénavant, ce sera du préventif, ce seront les cliniques privées qui feront du curatif. La ministre disait exactement le contraire de cela devant le congrès des

CLSC. Où est la cohérence dans vos politiques? Qu'entendez-vous faire pour pallier au fait que quatre médecins sur dix ont démissioné au CLSC du Richelieu et que, les fins de semaine, tous les services sont fermés maintenant et qu'on a raccourci le nombre d'heures disponibles pour la population du Haut-Richelieu?

Le Président: Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je voudrais simplement, au point de départ, rappeler au chef de l'Opposition que, selon le Bureau de la statistique du Québec, alors que les dépenses en santé, durant la dernière année de votre administration, ont augmenté de 4 %, elles ont augmenté, dès 1986, de 16 %, uniquement dans le domaine de la santé.

Cela étant dit, dans le cas du CLSC du Richelieu, peut-être faudrait-il leur demander pourquoi ils ont choisi, selon les dires du chef de l'Opposition, d'ouvrir des journées et de fermer d'autres journées pour certains services? Je l'ignore, je m'en informerai. Je pense aussi que les établissements ont des responsabilités quant aux décisions qu'ils prennent. Cela ne peut pas être la ministre qui décide que, le lundi, c'est fermé, que, le mardi, c'est ouvert et que, le mercredi, c'est tel genre de services. Nous avons, au contraire, rien enlevé aux CLSC. Nous n'avons ajouté des ressources dans un certain nombre de CLSC. Et au fur et à mesure de nos disponibilités, nous continuerons dans le même sens.

Le Président: M. le chef de l'Opposition, en additionnelle.

M. Chevrette: M. le Président, je voudrais conseiller à la ministre de relire ses questions au moment où elle occupait les banquettes ici. Elle trouvait cela épouvantable ce qui se passe actuellement.

Mais là, je voudrais demander à la ministre: Comment explique-t-elle que déjà quatre médecins sur dix aient démissionné? Comment entend-elle donner suite au beau discours qu'elle a fait devant la Fédération des CLSC du Québec? Quand entend-elle mettre des montants d'argent concrets pour que les CLSC puissent donner les services de première ligne aux citoyens du Québec?

Le Président: Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, le chef de l'Opposition mêle un peu tous les problèmes. Quand il dit qu'il reste six médecins ou que quatre ont quitté, ce sont évidemment des médecins qui, d'eux-mêmes, ont décidé de quitter. Pour quelle raison? Je l'ignore. On sait que le recrutement des médecins en dehors des grandes régions de Québec, de Montréal et de Sherbrooke est difficile. Je pense que ce gouvernement, plus que le gouvernement précédent, a pris ses responsabilités dans ce domaine. Si, des fois, on avait une meilleure collaboration de l'Opposition, peut-être qu'on irait plus vite aussi dans ce domaine-là.

Le Président: M. le chef de l'Opposition, en additionnelle.

M. Chevrette: M. le Président, là c'est rendu que c'est la faute de l'Opposition si la ministre ne prend pas position! Il faut le faire!

Je voudrais rappeler à la ministre... Est-elle consciente que cela faisait onze ans que le CLSC du Richelieu donnait ce genre de services à la population et que, depuis votre arrivée au pouvoir, c'est l'arrêt des services qu'on donnait depuis onze ans? Comment peut-elle expliquer cette incohérence?

Le Président: Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, si ce CLSC existe depuis onze ans, comme le dit le chef de l'Opposition - sans aucun doute qu'il a raison - c'est un des CLSC qui a le budget parmi les plus élevés des CLSC. Encore une fois, je vais m'informer pour savoir quel genre de décision a pu être prise à l'intérieur de cet établissement, mais je pense que ce genre de décision relève du CLSC et non pas de la ministre, sauf que la ministre peut voir s'il y a eu négligence ou mauvais jugement. Mais ces décisions appartiennent aux établissements et ce n'est pas à la ministre de la Santé de décider de toutes les actions qui sont prises dans chacun des 1000 établissements du Québec.

Des voix: Bravo!

Le Président: Je vais maintenant reconnaître en principale, M. le député de Terrebonne.

L'aide du gouvernement aux victimes des inondations du 14 juillet à Montréal

M. Blais: Merci beaucoup, M. le Président. Ma question s'adresse au ministre des Approvisionnements et Services. À la suite des inondations du 14 juillet 1987 qui ont été affligeantes pour la population de Montréal, les dommages pour les sinistrés ont été de plus de 200 000 000 $ juste pour la région de Montréal.

Le gouvernement fédéral, selon les programmes en vigueur, peut payer plus de

170 000 000 $ de ces dommages. D'après le programme que le ministre a lui-même fait adopter au Québec au mois d'août 1987 par le gouvernement libéral actuel, une victime de ces inondations, propriétaire d'une maison principale évaluée à 80 000 $, doit avoir subi des dommages de 6400 $ avant de recevoir le premier dollar d'aide de votre gouvernement.

M. le ministre, comment, vous, ministre de l'Approvisionnement et ministre qui êtes censé aider les sinistrés, responsable du Bureau de la protection civile, pouvez-vous vous satisfaire d'une politique telle que celle-là, alors que le gouvernement précédent demandait à cette même victime de ne payer que 10 % des dommages avec un maximum payable par la victime de 500 $?

Le Président: M. le ministre des Approvisionnements et Services. M. le ministre.

M. Rocheleau: Merci, M. le Président. Je vais simplement apporter une correction pour le député, à savoir que le gouvernement précédent exigeait uniquement un déductible ou une franchise de 500 $. Mais, en fin de compte, le gouvernement précédent ne payait pas du tout et cela, dans plusieurs cas.

Je prends simplement l'exemple des affaissements de sol dans l'est de Montréal, affaissements de sol survenus au mois de juillet 1983. Quand nous avons pris le pouvoir en 1985, ce n'était pas encore réglé. Alors, nous avons établi une politique, une politique cohérente, avec l'approbation de l'Opposition qui, dans le temps, en commission parlementaire, nous faisait des suggestions que nous avons retenues dans le but d'aider davantage le plus démuni et d'éviter de favoriser la personne qui avait les moyens de défrayer elle-même les coûts occasionnés par un sinistre quelconque. (10 h 50)

Pour la région de Montréal, actuellement, nous avons plusieurs dossiers en traitement. Nous avons commencé à payer plusieurs personnes et, ce que je peux dire aujourd'hui, c'est que la politique que nous avons adoptée le 5 août, qui a suivi un décret pour la région de Montréal et pour les autres régions du Québec, c'est qu'elle n'est probablement pas la meilleure des politiques, mais elle est de beaucoup supérieure aux politiques antérieurement appliquées par le gouvernement péquiste.

Le Président: M. le député de Terrebonne, en additionnelle.

M. Blais: Pourquoi le ministre, plutôt que de pratiquer une politique de fédéralisme d'affaissement, ne demande-t-il pas au gouvernement fédéral, comme nous le faisions, d'aider les sinistrés du Québec par respect pour ceux qui sont victimes, plutôt que de faire des politiques restrictives uniquement québécoises? Les sinistrés ne sont pas payés pour les dommages qu'ils ont. Pourquoi n'arrive-t-il pas à demander notre dû au fédéral?

Le Président: M. le ministre des Approvisionnements et Services.

M. Rocheleau: M. le Président, le député de Terrebonne commence à s'exciter un peu. Je profite de l'occasion pour souligner la présence du maire de Montréal avec qui j'ai eu à traiter de ce dossier à plusieurs reprises. Les estimations que nous avons eues, au tout début, pouvaient se chiffrer à quelque 200 000 000 $ de dommages. Les estimations enregistrées actuellement au Bureau de la protection civile sont de l'ordre de 96 000 000 $. À l'intérieur des estimations ce ces biens qui ne sont pas tous jugés certains devront faire partie de l'expertise du traitement pour lequel on prévoit payer à peu près 20 000 000 $. Le gouvernement du Canada sera sollicité pour une participation tout en sachant que les premiers 6 000 000 $ seront défrayés totalement par le gouvernement du Québec. Quant aux autres 6 000. 000 $ à être réclamés, 50 % sont défrayés par le gouvernement du Québec et 50 % par le gouvernement fédéral. Il est faux de prétendre, comme le dit le député de Terrebonne, qu'il y a des dommages de 200 000 000 $. Nous avons des réclamations totalisant actuellement 96 000 000 $. Lorsqu'on aura complété l'analyse et l'étude des dossiers, on aura probablement payé quelque 20 000 000 $. Je lui suggère fortement d'examiner en profondeur la politique, le décret que le gouvernement a passé et les orientations antérieures de son gouvernement alors qu'il prenait des engagements et qu'il ne les respectait pas.

Le Président: M. le député de Terrebonne, en additionnelle.

M. Blais: Est-ce que le ministre qui essaie de dorer la pilule en saluant le maire de Montréal, ce qui est de bon aloi...

Des voix: Ha! ha!

Une voix: Elle est bonne, elle est bonne, elle est bonne!

Une voix: Jaloux!

Une voix: Monsieur Pilule!

Une voix: Jaloux et bavard!

M. Blais: Pourquoi le ministre ne nous dit-il pas...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de Terrebonne, c'est en additionnelle, sans commentaires, que je vous avais reconnu.

M. Blais: C'est ce que je fais, M. le Président.

Le Président: Allez.

M. Blais: Je répète ma question pour la troisième fois: Est-ce que le ministre peut nous dire s'il va aller demander au gouvernement fédéral les sommes auxquelles le Québec a droit? La population lui a donné le mandat de faire respecter la constitution et les victimes sont pleinement justifiées de demander un montant que vous leur refusez en ne voulant pas aller au fédéral demander ce à quoi elles ont droit... Est-ce que vous allez, oui ou non, aller au fédéral demander de l'argent pour les Québécois?

Le Président: M. le ministre des Approvisionnements et Services.

M. Rocheleau: M. le Président, je tiens à répéter au député de Terrebonne que j'ai déjà fait une demande au gouvernement fédéral, à l'honorable Perrin Beatty, qui m'a déjà confirmé que le gouvernement fédéral accepterait volontiers de participer aux coûts qui proviendraient du désastre des pluies torrentielles du 14 juillet dernier. Lorsque nous aurons compilé les chiffres sur l'ensemble des dommages et que nous aurons la facture nette, le gouvernement fédéral va nous envoyer son chèque et sûrement qu'à ce moment-là, je ne ferai pas comme le député de Lévis, je ne garderai pas le chèque dans mes poches durant un mois.

Le Président: Je vais maintenant reconnaître un question principale à la formation ministérielle, M. le député de Saguenay.

Maintien, au Québec, de la surtaxe de 15 % sur le bois d'oeuvre

M. Maltais: Merci, M. le Président. La semaine dernière, le député de Montmagny-L'Islet s'informait auprès du ministre délégué aux Forêts de l'état des négociations entre le Canada et les États-Unis concernant la surtaxe de 15 % sur le bois d'oeuvre. Ce matin, les journaux rapportent qu'une entente est intervenue, mais qu'elle ne concerne pas le Québec. Est-ce que le ministre délégué aux Forêts pourrait nous donner des précisions à ce sujet?

Le Président: M. le ministre délégué aux Forêts.

M. Côté (Rivière-du-Loup): II faut dire,

M. le Président, que c'est un dossier très important et je félicite les députés de la formation ministérielle de le suivre de près.

Des voix: ...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! M. le ministre, vous avez la parole.

M. Côté (Rivière-du-Loup): En effet, M. le Président, à la suite des négociations menées conjointement par le gouvernement du Canada, la Colombie britannique, les fonctionnaires de mon ministère dirigés par les sous-ministres Paillé et Harvey et ceux du ministère du Commerce extérieur qui ont fait un travail extraordinaire dans ce dossier, la ministre du Commerce extérieur, Mme Carney, a annoncé hier des modifications au mémoire d'entente signé en début d'année avec les États-Unis au sujet de la taxe de 15 % sur le bois d'oeuvre. Ces modifications, évidemment, concernent pour l'instant le plus important exportateur de bois d'oeuvre aux États-Unis, qui a imposé à tous les industriels du sciage de sa province, sans exception, des mesures de remplacement égales à la taxe de 15 % imposée en début d'année. Il faut ajouter que la Colombie britannique devait déposer un projet de loi, sur cette question, avant Noël.

Quant au Québec, Mme Carney regrette d'avoir été incapable de donner suite à ma lettre du 4 décembre afin d'inclure toutes les requêtes du Québec avant de modifier l'entente Canada-États-Unis sur le bois d'oeuvre. Tout de même - c'est très important - la modification rendue publique hier corrige en grande partie les injustices subies par les industriels frontaliers qui exportaient aux États-Unis du bois d'oeuvre transformé à partir des billes en provenance des États-Unis.

Des voix: Très bien! Excellent!

Le Président: En principale, M. le leader de l'Opposition.

La création de la Commission des relations du travail

M. Gendron: M. le Président, le 10 décembre dernier, concernant le projet de loi 30 visant la création d'une nouvelle Commission des relations du travail, quelque chose de majeur en termes de gestion future des relations du travail, le ministre du Travail déclarait ceci: "De telles mesures ont besoin d'un consensus minimum pour être mises en place, et il n'est pas question, quant à nous, de créer à la force du poignet un nouvel organisme qui, critiqué tant par les patrons que par les syndicats - écoutez bien le reste - n'aurait aucune crédibilité et ne pourrait pas fonctionner." Cela, c'est le

10 décembre.

Aujourd'hui, sept jours plus tard, la situation est la suivante: La CSN ne veut rien savoir, la FTQ lui donne un appui très mitigé en déclarant qu'il s'agit d'un projet avec une belle coquille vide, sans contenu, le CPQ est contre, la CSD est contre, la CEQ est contre et l'Opposition est également contre parce que nous sommes convaincus que ce projet de loi, dans sa forme actuelle, ne présente aucune garantie de succès pour les objectifs visés.

Ma question au ministre du Travail est très claire: Qu'est-ce que le ministre a voulu dire précisément, le 10 décembre dernier, quand il a affirmé qu'il n'était pas question de procéder dans ce projet de loi sans un minimum de consensus?

Le Président: M. le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu et ministre du Travail.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, je remercie le député d'Abitibi-Ouest et leader de l'Opposition de sa question. Je le remercie également d'avoir consenti, à l'époque, au dépôt du projet de loi. Je le remercie également d'avoir conseillé à sa formation politique que l'on adopte, ici même, à l'Assemblée nationale, de façon unanime, le principe dudit projet de loi. Je le remercie également pour son travail constructif, consciencieux et positif en commission parlementaire où nous avons adopté unanimement, l'ensemble des parlementaires de l'Assemblée nationale, 120 des 144 articles du projet de loi, soit tout près de 85 %. (11 heures)

II restait, quand même, des problèmes au mois de juin. Il y avait des objections importantes et du côté patronal et du côté syndical. Il restait 24 articles qui n'avaient pas été adoptés à l'unanimité. Nous nous sommes mis au travail, tout au long de la période estivale, tout au long de l'automne. Nous avons rencontré l'ensemble des parties et hier, pour information, j'ai communiqué au député d'Abitibi-Ouest les 20 amendements que nous proposons. Trois devraient satisfaire la partie syndicale, trois, la partie patronale, trois sont conjoints patronaux-syndicaux. Ce que je dis au député d'Abitibi-Ouest c'est de reconsidérer ce qu'il m'a souligné hier soir lorsqu'il m'a dit qu'il ne voulait même pas prendre connaissance des amendements. Je lui demande de faire preuve d'ouverture d'esprit pour que je puisse le remercier. S'il en prend connaissance, on aura peut-être un vote unanime en troisième lecture, M. le Président.

Des voix: Bravo! Bravo!

Le Président: En additionnelle, M. le leader de l'Opposition.

M. Gendron: En additionnelle, est-ce que le ministre du Travail sait, au moins, qu'après tout cet extraordinaire travail de collaboration avec un critique extraordinaire, sérieux, qui a fait sa "job", le résultat, à la fin de juin, c'est qu'on ne veut encore rien savoir de ce projet de loi parce que sur des considérations importantes, après avoir pris connaissance des amendements, la résultante est la même? Est-ce que le ministre du Travail se rend compte aujourd'hui, après avoir pris connaissance des amendements, que ce projet de loi ne répond pas plus au consensus que vous exigiez vous-même?

Le Président: M. le ministre du Travail, de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, c'est peut-être parce qu'il est assis à côté du chef de l'Opposition qui, au moment où cette Chambre a procédé à l'adoption de la loi 119 dans l'industrie de la construction, tenait à peu près les mêmes discours. Il parlait à peu près de la même façon. Le leader, qui est un peu son adjoint maintenant, s'inspire des paroles du chef de l'Opposition, s'inspire de cette façon de penser mais, je pense qu'aujourd'hui le chef de l'Opposition aura l'honnêteté de reconnaître que les parties se sont rendu compte, avec le temps, qu'il s'agissait là d'un pas dans la bonne direction.

Je dirai au député d'Abitibi-Ouest que, dans le cas de la loi 30, nous avons, au moment où nous nous parlons, réglé davantage d'objections, toutes proportions gardées, que ce ne fut le cas dans le cas du projet de loi 119 qui fait aujourd'hui l'unanirr é des parties patronale et syndicale.

Le Président: M. le leader de l'Opposition, en additionnelle toujours.

M. Gendron: En additionnelle, est-ce que le ministre est conscient qu'aujourd'hui, le 17 décembre - pas en juin - selon un éditorial de Pierre Vennat, dans La Presse, après avoir fait les consultations avec les instances, il est le seul à avoir l'assurance que son projet de loi 30 répond aux objectifs du dépôt de juin dernier?

Le Président: M. le ministre du Travail, de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, j'ai pris connaissance de l'éditorial de M. Vennat dans La Presse de ce matin et je tiens à vous dire que ce que dit M. Vennat était exact au moment où il a fait

ses consultations, mais que la situation a évolué depuis ce temps.

Des voix: Ah! Ah!

Des voix: Bravo!

Le Président: En principale, M. le député de Lévis.

M. Garon: M. le Président...

Le Président: Non, non, non. M. le député de Lévis, non.

M. Chevrette: Voulez-vous qu'on identifie les grogneux?

Le Président: M. le député de Lévis, en principale.

Étage additionnel au CHUL pour la pédiatrie

M. Garon: M. le Président, en octobre 1985, le ministre de la Santé et des Services sociaux du temps, maintenant chef de l'Opposition, annonçait la répartition des services de pédiatrie dans la région de Québec entre le CHUL et l'hôpital Saint-François-d'Assise. En mars 1986, la ministre autorisait la construction d'un étage additionnel au CHUL, selon une décision du Conseil des ministres de mars 1986. Comme il avait obtenu la construction d'un centre de recherche, construire un étage additionnel pour la pédiatrie, cela économisait des coûts de construction. Depuis ce temps, le centre de recherche a été inauguré, à la fin de l'année 1986, et l'étage additionnel est resté ainsi: quatre murs et un toit. Il n'y a pas de décision additionnelle et le CHUL est toujours en attente de la décision de la ministre pour terminer la construction de l'étage, acheter des équipements et avoir le budget de fonctionnement.

En attendant, les enfants se promènent en taxi - en cours d'opération - entre l'Hôtel-Dieu de Québec et l'hôpital Laval, selon les besoins. Vous pouvez vérifier. C'est encore arrivé les 10 et 12 décembre dernier.

Le Président: Votre question.

M. Garon: Je demanderais à la ministre quand elle va se décider à envoyer sa lettre d'autorisation pour que les travaux de la phase I puissent être complétés en services de pédiatrie. Ils sont déjà acceptés depuis deux ans et elle les a déjà reconnus en acceptant qu'on commence la construction d'un étage additionnel en mars 1986.

Le Président: Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, quand l'Opposition est à court de questions dans le domaine de la santé et des services sociaux, chacun part avec son petit cas particulier. Cela risque de prendre des proportions importantes.

La raison pour laquelle l'autorisation n'a pas encore été donnée, c'est que jamais il n'y avait eu d'argent prévu pour le fonctionnement de ce département de pédiatrie. On avait bien annoncé un beau projet, etc., mais il n'y a jamais eu d'argent prévu pour les frais de fonctionnement. Il me fait plaisir de dire au député de Lévis que nous travaillons activement à ce dossier. Je dois, d'ailleurs, vous dire que les députés de la région de Québec m'ont constamment, je ne dirai pas poursuivie, mais presque harcelée pour qu'une décision se prenne. J'ose espérer que, d'ici peu, nous puissions formaliser la décision et annoncer de quelle façon le budget sera assuré pour le fonctionnement de la pédiatrie au CHUL.

Le Président: M. le député de Lévis, en additionnelle.

M. Garon: Est-ce que la ministre, qui se fait travailler par les députés de la région de Québec pour signer une lettre, peut nous dire quand elle va signer cette lettre et si les pressions vont aboutir à quelque chose, puisqu'une lettre d'autorisation est nécessaire pour compléter les travaux, acheter des équipements et fonctionner? Quand la ministre va-t-elle prendre une décision? C'est en cours depuis deux ans, alors que les travaux sont arrêtés depuis environ un an.

Le Président: Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux. Mme la ministre.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je viens de dire au député de Lévis évidemment, il lui fallait une question additionnelle à tout prix - que le député de Jean-Talon et le député de Louis-Hébert m'ont constamment demandé de faire le suivi de ce dossier. Il ne s'agit pas uniquement d'écrire une lettre. Je sais que mon prédécesseur, le chef de l'Opposition, en écrivait, des lettres. Quand je suis arrivée, il n'y avait pas de fonds prévus pour les lettres qu'il écrivait.

Le Président: En principale, M. le député de Duplessis. À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de Duplessis, en principale.

Construction du CLSC de Fermont

M. Perron: Oui, M. le Président, à la ministre de la Santé et des Services sociaux.

Est-ce que la ministre peut nous dire où en est rendu le dossier de la construction du CLSC de Fermont?

Le Président: Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux. À l'ordre! À l'ordre! Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, on vient de faire la preuve de ce que j'avançais. Quand on est à court de questions, on peut toujours en trouver parmi les 1000 établissements du réseau. C'est la quatrième, ce matin.

Dans le cas du CLSC de Fermont, c'est une question qui a été à l'ordre du jour depuis de nombreuses années, avec des promesses, à certains moments, qui ne se sont pas réalisées. Nous sommes à terminer toute l'étude, également, dans ce dossier. Nous espérons pouvoir, en janvier et en février, avec l'autorisation du Conseil du trésor, donner l'autorisation et prévoir la construction, la rénovation ou le réaménagement du CLSC pour répondre aux besoins de la population.

Le Président: M. le député de Duplessis, en additionnelle.

M. Perron: À la ministre de la Santé et des Services sociaux, toujours sur le même dossier qui est un dossier régional, est-ce que la ministre peut nous confirmer que le dossier du CLSC de Fermont est actuellement rendu au Conseil du trésor?

Le Président: Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux.

Mme Lavoie-Roux: Oui, je peux le confirmer.

M. Chevrette: Une principale.

Le Président: C'est une principale.

M. Chevrette: Une principale sur...

Le Président: M. le chef de l'Opposition...

M. Chevrette: ...Sainte-Justine, M. le Président.

Le Président: ...en principale.

M. Chevrette: On annonce, ce matin, qu'il y a 172 lits de fermés... (11 h 10)

Le Président: M. le chef de l'Opposition, question principale.

M. Chevrette: Sur une question principale, M. le Président, je vous ferai remarquer qu'on ne parle pas de malades en jaquettes, comme vous en parliez du temps où vous étiez ici et qu'on ne parle pas de portes coupées en deux. On vous pose des questions précises sur votre administration.

Fermeture de lits à l'hôpital Sainte-Justine

À Sainte-Justine, M. le Président, on a annoncé 172 lits fermés, ce qui ne s'est jamais vu. Comment la ministre peut-elle concilier cela avec l'amélioration des soins de santé pour les gens de Montréal?

Le Président: Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux. Question de règlement?

M. Gratton: M. le Président, en fait, c'est une demande de directive.

Le Président: Alors, sur une demande de directive, M. le leader du gouvernement.

M. Gratton: Mme la ministre a allégué tantôt le fait qu'on semble être à court de questions du côté de l'Opposition. Est-ce qu'on peut l'être au point de pouvoir poser la même question principale deux fois au cours de la même période de questions, en s'imaginant qu'en la posant comme première et comme dernière on va avoir oublié que c'est la même question?

Le Président: Je permets la question. C'était dans votre préambule que vous aviez allégué cela. Ce n'était pas une question de directive. Je la permets, mais c'est une dernière question pour la période de questions régulière.

M. Chevrette: M. le Président, je croyais que le leader du gouvernement pouvait au moins constater que la ministre n'a pas fait l'ombre d'une allusion à cela dans sa réponse, alors que j'y avais fait allusion dans mon préambule. Je lui pose la question précise.

Le Président: Question.

M. Chevrette: Comme vous vouliez éliminer la médecine de guerre, vous compariez même cela au Liban, je voudrais savoir comment la ministre peut concilier ses beaux discours sur l'amélioration des services de santé, surtout dans la région métropolitaine, quand on n'a jamais fermé plus que 80 ou 82 lits et qu'on nous annonce la fermeture pour des fins budgétaires de 172 lits. Comment peut-elle accepter cela comme ministre de la Santé? Comment peut-elle justifier ses discours sur l'amélioration, alors qu'on vit une véritable détérioration des soins de santé?

Le Président: Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, j'inviterais le député ou le chef de l'Opposition à faire le tour de quelques urgences et à comparer la situation actuelle à ce qu'elle était alors que lui était ministre de la Santé.

Le Président: À l'ordre: À l'ordre! À l'ordrel Mme la ministre.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, à la période de Noël...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, à la période des fêtes à chaque année, pour une période d'environ quinze jours, généralement quinze jours, il y a toujours un nombre de lits qui sont fermés dans certains hôpitaux, parce qu'on sait tous qu'à cette période il y a moins d'achalandage aux services, qu'il y a des gens qui vont en vacances, que les familles, d'une façon générale, n'essaient pas d'entrer à l'hôpital à moins qu'il ne s'agisse d'une situation d'urgence.

Alors, je peux assurer la Chambre qu'il n'y a pas plus de lits fermés durant la période des fêtes et cela n'est pas pour des raisons budgétaires, c'est dans l'administration générale de nos établissements de santé, comme il y en a eu les autres années.

Le Président: Cette dernière réponse met fin à la période régulière de questions pour la journée. M. le leader du gouvernement, je pense que vous avez une demande spéciale à faire.

M. Gratton: Oui, M. le Président. Compte tenu que les échanges de la période de questions ont contribué à recréer une atmosphère de calme et de sérénité, je voudrais proposer, avec le consentement de l'Assemblée, que nous retournions à l'article présentation de projets de loi et que vous appeliez le projet de loi inscrit dans le préavis à l'article aa du feuilleton, s'il vous plaît.

Le Président: Est-ce que j'ai le consentement des membres de cette Assemblée pour retourner à la présentation de projets de loi, aux affaires courantes?

M. Gendron: Un instant, M. le Président. Oui, il y a consentement, parce que...

Le Président: M. le leader de l'Opposition.

M. Gendron: ...effectivement, à la suite des échanges...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Gendron: ...que j'ai eus avec le ministre du Travail, des exigences que l'Opposition avait concernant ce projet de loi ont été satisfaites. En conséquence, l'Opposition est d'accord.

Présentation de projets de loi.

Le Président: Alors, M. le leader du gouvernement, à l'étape de la présentation de projets de loi, je vous reconnais.

M. Gratton: Oui. L'article aa, M. le Président.

Projet de loi 114

Le Président: À l'article aa du feuilleton, M. le ministre du Travail présente le projet de loi 114, Loi modifiant la Loi sur les relations du travail, la formation professionnelle et la gestion de la main-d'oeuvre dans l'industrie de la construction. M. le ministre de la Main-d'Oeuvre.

M. Pierre Paradis

M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, il s'agit du projet de loi 114. Ce projet de loi a pour principal objet d'allonger la période prévue pour les négociations collectives dans l'industrie de la construction, de déplacer, en conséquence, la période de changement d'allégeance syndicale dans cette industrie et de faire coïncider l'entrée en vigueur du choix d'allégeance syndicale des travailleurs avec le début de ces négociations.

Ce projet prévoit, de plus, des dispositions transitoires permettant, notamment, dans l'éventualité où la durée du décret régissant actuellement les conditions du travail dans l'industrie de la construction est prolongée, de reporter le début des prochaines négociations collectives dans cette industrie et d'établir de façon certaine que les associations représentatives syndicales ne soient pas contraintes à faire constater à nouveau leur degré de représentativité. Merci, M. le Président.

Le Président: Merci, M. le ministre. L'Assemblée accepte-t-elle de se saisir de ce projet de loi? Adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président: Adopté.

Votes reportés. Votes reportés. J'attends l'indication des whips des deux formations politiques. M. le whip du gouver-

nement? Alors, que chacun regagne son siège. MM. les whips, êtes-vous prêts?

Une voix: Oui.

Le Président: M. le whip du gouvernement?

Mise aux voix du rapport de la

commission qui a procédé à l'étude détaillée du projet de loi 30

Alors, je mets maintenant aux voix le rapport de la commission de l'économie et du travail qui a étudié en détail le projet de loi 30, Loi constituant la Commission des relations du travail et modifiant diverses dispositions législatives.

Le Président: Que ceux et celles qui sont en faveur de ladite motion veuillent bien se lever, s'il vous plaît.

Le Secrétaire adjoint: MM. Gratton (Gatineau), Saintonge (Laprairie), Marx (D'Arcy McGee), Pagé (Portneuf), Levesque (Bonaventure), Mme Bacon (Chomedey), M. Ryan (Argenteuil), Mme Lavoie-Roux (L'Acadie), MM. Bourbeau (Laporte), Paradis (Brome-Missisquoi), Séguin (Montmorency), Côté (Rivière-du-Loup), Dutil (Beauce-Sud), Mmes Gagnon-Tremblay (Saint-François), Ro-bic (Bourassa), MM. MacDonald (Robert Baldwin), Rémillard (Jean-Talon), Savoie (Abitibi-Est), Vallerand (Crémazie), Lincoln (Nelligan), French (Westmount), Côté (Charlesbourg), Ciaccia (Mont-Royal), Johnson (Vaudreuil-Soulanges), Vallières (Richmond), Gobeil (Verdun), Picotte (Maskinongé), Fortier (Outremont), Rocheleau (Hull), Mme Bégin (Bellechasse), MM. Dauphin (Marquette), Maltais (Saguenay), Philibert (Trois-Rivières), Mme Dougherty (Jacques-Cartier), MM. Lefebvre (Frontenac), Doyon (Louis-Hébert), Mme Trépanier (Dorion), MM. Maciocia (Viger), Middlemiss (Pontiac), Beaudin (Gaspé), Cannon (La Peltrie), Chagnon (Saint-Louis), Lemire (Saint-Maurice), Paradis (Matapédia), Mme Pelchat (Vachon), MM. Rivard (Rosemont), Polak (Sainte-Anne), Assad (Papineau), Kehoe (Chapleau), Baril (Rouyn-Noranda—Témiscamingue), Bélanger (Laval-des-Rapides), Bélisle (Mille-Îles), Mme Hovington (Matane), M. Tremblay (Iberville), Mme Bélanger (Mégantic-Compton), MM. Fortin (Marguerite-Bourgeoys), Gervais (L'Assomption), Trudel (Bourget), Mme Bleau (Groulx), MM. Bradet (Charlevoix), Camden (Lotbinière), Mme Cardinal (Châteauguay), MM. Després (Limoilou), Farrah (Îles-de-la-Madeleine), Forget (Prévost), Gardner (Arthabaska), Gauvin (Montmagny-L'Islet), Gobé (Lafontaine), Hamel (Sherbrooke), Laporte (Sainte-Marie), Dubois (Huntingdon) Bissonnet (Jeanne-Mance), Audet (Beauce-Nord), Leclerc (Taschereau), Hétu (Labelle), Joly (Fabre), Khelfa (Richelieu),

Lemieux (Vanier), Marcil (Beauharnois), Messier (Saint-Hyacinthe), Poulin (Chauveau), Mme Legault (Deux-Montagnes), MM. Thurin-ger (Notre-Dame-de-Grâce), Richard (Nicolet), Tremblay (Rimouski), Théorêt (Vimont), Saint-Roch (Drummond). (11 h 20)

Le Président: Que ceux et celles qui sont contre ladite motion veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint: MM. Chevrette (Joliette), Gendron (Abitibi-Ouest), Perron (Duplessis), Mme Blackburn (Chicoutimi), MM. Blais (Terrebonne), Garon (Lévis), Charbon-neau (Verchères), Mme Juneau (Johnson), MM. Desbiens (Dubuc), Jolivet (Laviolette), Brassard (Lac-Saint-Jean), Filion (Taillon), Gauthier (Roberval), Godin (Mercier), Mme Vermette (Marie-Victorin), MM. Paré (Shefford), Boulerice (Saint-Jacques), Claveau (Ungava), Dufour (Jonquière), Parent (Bertrand), Mme Harel (Maisonneuve), M. Rochefort (Gouin).

Le Président: À l'ordre! À l'ordre! À l'ordre, s'il vous plaît!

Le Secrétaire: Pour: 87

Contre: 22

Abstentions: 0

Le Président: Alors, le rapport de la commission de l'économie et du travail sur le projet de loi 30 est adopté.

Nous allons maintenant continuer les affaires courantes.

Motions sans préavis. M. le ministre des Transports.

Mesdames et messieurs les députés, j'ai reconnu M. le ministre des Transports. M. le ministre des Transports, vous avez maintenant la parole.

Le 18 décembre 1987, Journée nationale de l'Opération Nez rouge

M. Côté (Charlesbourg): M. le Président, je sollicite le consentement de cette Assemblée pour déposer la motion suivante: Que la journée du 18 décembre 1987 soit décrétée Journée nationale de l'Opération Nez rouge.

Le Président: Si je comprends bien, il y a consentement pour débattre cette motion, M. le leader de l'Opposition.

M. Gendron: II y a consentement.

Le Président: Adopté. M. le ministre des Transports.

M. Marc-Yvan Côté

M. Côté (Charlesbourg): M. le Président, vous me permettrez, en tout

premier lieu, de saluer dans les galeries les artisans de cette Opération Nez rouge, qui sont M. Jean-Marie de Koninck, M. Marcel Jobin, M. Denis Pinsonneau, Me Micheline Jacob, Me Rémi Bujold, Claire Mercier, Maurice Bélanger, Philippe Jobin, Michel Légaré, M. Brian Peckford, Marie Tremblay, Hélène Gagné et M. Vézina, président de la Régie de l'assurance automobile.

Mon collègue, ministre de l'Éducation, me signifie que l'Opération Nez rouge a un appui sensible et significatif du ministère de l'Education. Nous nous en réjouissons et nous ne pouvons que solliciter autant de réponses positives de la part de tous les autres collègues de l'Assemblée.

Cette motion vise à faire reconnaître par cette Assemblée que la journée de demain, 18 décembre, soit décrétée Journée nationale de l'Opération Nez rouge. Fondée effectivement par M. Jean-Marie de Koninck, du club de natation Rouge et Or de l'Université Lavai, appuyée par la station radiophonique CHRC et par le corps policier de la ville de Québec, de même que par la Régie de l'assurance automobile du Québec, l'Opération Nez rouge a vu le jour ici, à Québec, en 1984.

Actuellement, il existe 26 Opérations Nez rouge couvrant 195 municipalités dans tout le Québec. Cette Opération Nez rouge n'a aucune connotation avec les couleurs politiques. Ce sont des milliers de bénévoles, des dizaines de milliers de dollars en dons remis à des organismes de jeunes, mais ce sont aussi et sûrement des centaines de tragédies d'évitées.

C'est une organisation qui a progressé de manière fulgurante au cours des années, puisqu'en 1984 on pouvait compter 250 bénévoles ayant transporté tout près de 500 personnes dans la première année d'activité et générant 25 000 $ à des organismes de jeunes; en 1985, 1400 bénévoles pour 2700 personnes transportées, pour 110 000 $; en 1986, 5165 bénévoles pour tout près de 8000 personnes transportées, pour 275 000 $ versés aux jeunes.

Au-delà de cela, il faut compter 1 000 000 $ en dons, en services rendus à la population. Cette opération se poursuit en 1987 sous l'égide et la responsabilité du même Jean-Marie de Koninck et appuyé en cela par la presque-totalité des villes du Québec intéressées à une opération comme celle-là.

Rappelons-le, cette Chambre a voté, en 1986, des amendements au Code de la sécurité routière visant à pénaliser de manière très sévère ceux qui prenaient le volant en état d'ébriété. Rappelons, c'est extrêmement important, que 50 % des accidents au Québec sont causés par ceux qui consomment de l'alcool. Le gouvernement, par l'entremise de la Régie de l'assurance automobile, fait et continuera de faire de nombreux efforts pour tenter de ralentir ou de diminuer la consommation d'alcool par les gens qui conduisent sur les routes du Québec. En cette période de l'année, les moments de réjouissances sont nombreux. C'est une période que tous attendent avec impatience, une période de retrouvailles, de partage et de gaieté. Souvent, et plus souvent qu'autrement, l'alcool est présent. Il faut bien se le dire: Fêter n'est pas criminel. Cependant, conduire son véhicule lorsqu'on a consommé des boissons alcoolisées constitue un manque total de considération pour la vie. Conduire en état d'ébriété, c'est effectivement criminel.

Dans cette optique et compte tenu que le 18 décembre représente une date privilégiée pour ce qu'on appelle communément les "parties" de bureau, notre appui à une organisation telle que l'Opération Nez rouge me semble totalement justifié. Une équipe de Nez rouge, dans ces moments de festivités, dites-vous que c'est une équipe pour la vie.

En terminant, je veux rendre hommage de manière tout à fait particulière à M. Jean-Marie de Koninck, ainsi qu'à son équipe. Je veux féliciter et remercier les postes de radio qui ont joint leurs efforts à ceux de M. de Koninck. Je veux rendre un hommage tout à fait particulier aux corps policiers de tout le Québec qui ont emboîté le pas et aussi à la Régie de l'assurance automobile qui a été l'un des éléments moteurs à appuyer l'Opération Nez rouge. C'est avec fierté, M. le Président, que, pour la première fois, l'Assemblée nationale décrétera et, je l'espère, avec l'assentiment unanime de l'Assemblée, le 18 décembre, Journée de l'Opération Nez rouge. Cela reconnaîtra tout le mérite de ceux qui y travaillent et les incitera à faire beaucoup de petits, pour que toutes les municipalités du Québec bénéficient de ce service en 1988 ou en 1989. Merci et félicitations! (11 h 30)

Le Président: Je remercie M. le ministre des Transports. Je vais maintenant reconnaître M. le député de Lévis sur la même motion.

M. Jean Garon

M. Garon: M. le Président, il me fait plaisir de me joindre à la motion que présente le député de Charlesbourg, comme critique en matière de transports et comme député de la région de Québec, pour féliciter les étudiants de l'Université Laval qui ont été les initiateurs d'une telle opération, qui a eu rapidement beaucoup de succès parce qu'elle correspondait à un besoin à une période en l'année où les gens fêtent un peu plus que d'habitude.

J'aimerais faire remarquer au ministre

que nous voulons davantage souligner cette journée en félicitant ceux qui ont travaillé, les jeunes étudiants de l'Université Laval, qui ont pensé à mettre sur pied une telle opération, que fêter, la journée du 18 décembre, ceux qui prennent un verre. Je pense bien que ceux qu'on veut reconnaître, ce sont ceux qui ont voulu accorder du temps bénévolement au service des gens qui ont pris un verre de trop et et pour faire en sorte qu'il y ait moins d'accidents et que les gens qui ont dépassé la limite pensent à se faire conduire plutôt que conduire eux-mêmes.

Je suis d'accord avec le député de Charlesbourg pour dire que c'est une opération qui sauve sûrement des vies humaines et qui, en ce sens, rend service. Je souhaiterais, d'une façon générale, qu'un tel service existe au Québec et que, à longueur d'année, ceux qui ont pris un verre de trop et qui ne devraient pas conduire ou ceux qui exploitent des endroits où on vend de la boisson puissent téléphoner pour faire reconduire quelqu'un et qu'on en vienne a penser qu'il est mieux de ne pas conduire quand on a pris un verre de trop.

En terminant, je voudrais féliciter ceux qui poursuivent l'oeuvre qui a été amorcée par des étudiants de l'Université Laval et indiquer qu'une meilleure qualité de vie dans une société est souvent due à l'initiative de gens qui ont établi des services qui correspondent à des besoins. Ceux qui l'ont fait dans ce cas-ci, dans la région de Québec, ont donné un exemple susceptible d'être imité dans tout le Québec pour rendre service en cette période de l'année et possiblement à d'autres périodes, où ce service peut aider beaucoup de gens qui ont pris un verre de trop. Je vous remercie, M. le Président.

Le Président: Je remercie M. le député de Lévis. Est-ce qu'il y a d'autres intervenants sur cette motion présentée par M. le ministre des Transports? Est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Président: Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Jacques Rochefort, membre de la commission des affaires sociales

M. Gratton: M. le Président, avec le consentement unanime de l'Assemblée, je voudrais proposer la motion suivante et ainsi déroger à l'article 127 du règlement, qui prévoit qu'un membre d'une commission doit être nommé par la commission de l'Assemblée nationale. De façon à éviter que la commission doive se réunir, on pourrait, de consentement, faire en sorte que le député de Gouin soit membre de la commission des affaires sociales, et ce, conformément aux dispositions de l'article 123 du règlement.

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement pour déroger à l'article 127?

M. Gendron: II y a consentement, M. le Président.

Le Président: Est-ce que cette motion est adoptée?

Une voix: Adopté.

Le Président: Adopté. M. le leader du gouvernement, avis touchant les travaux des commissions.

Avis touchant les travaux des commissions

M. Gratton: M. le Président, j'avise l'Assemblée qu'aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures, de 15 heures à 18 heures et, si nécessaire, de 20 heures à 24 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau, la commission du budget de l'administration entendra les intéressés dans le cas de projets de loi privés et procédera à l'étude détaillée des projets de loi suivants, et ce dans l'ordre ci-après indiqué: le projet de loi d'intérêt privé 244, Loi concernant Les Clairvoyants, compagnie mutuelle d'assurances de dommages, le projet de loi d'intérêt privé 248, Loi concernant la Société autrichienne/Austrian Society, et, finalement, le projet de loi public 108, Loi sur le régime de retraite des agents de la paix en institutions pénales et modifiant diverses dispositions législatives.

De même, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures, de 15 heures à 18 heures et, si nécessaire, de 20 heures à 24 heures, à la salle Louis-Hippolyte-Lafontaine, la commission de l'aménagement et des équipements entendra les intéressés et procédera à l'étude détaillée des projets de loi suivants, et ce, dans l'ordre ci-après indiqué: le projet de loi d'intérêt privé 230, Loi modifiant la charte de la ville de Montréal; le projet de loi d'intérêt privé 228, Loi concernant la ville de Saint-Laurent; le projet de loi 249, Loi modifiant la charte de la ville de Laval, et le projet de loi 193, Loi sur le redressement des limites territoriales de la municipalité de la paroisse de Sainte-Angèle; le projet de loi 111, Loi modifiant la Loi sur la Communauté urbaine de Québec, et, finalement, le projet de loi d'intérêt privé 250, Loi modifiant la charte de la ville de Québec.

J'en profite pour dire immédiatement, à l'intention des membres de l'Assemblée, mais surtout à l'intention des membres de la commission de l'aménagement et des équipements, que, compte tenu que ces projets de loi d'intérêt privé sont étudiés aujourd'hui

devant cette commission, compte tenu également des indications que nous avions selon lesquelles l'Opposition entendait s'opposer assez farouchement à l'adoption du projet de loi 101 au nom du ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, la commission ne sera pas appelée à procéder à l'étude détaillée du projet de loi 101 avant l'ajournement de nos travaux et sera donc convoquée au cours de l'intersession avant la rentrée parlementaire en mars.

Cela étant dit, Mme la Présidente, je voudrais également aviser l'Assemblée qu'après les affaires courantes, jusqu'à 13 heures, et, si nécessaire, de 15 heures à 18 heures, à la salle 101 de l'édifice Pamphile-Le May, la commission des institutions entendra les intéressés et procédera à l'étude détaillée des projets de loi d'intérêt privé suivants et ce, dans l'ordre indiqué: le projet de loi privé 229, Loi modifiant l'acte pour incorporer l'Institut Fraser, et le projet de loi 259, Loi concernant certains immeubles du cadastre de la paroisse de La Malbaie.

Je voudrais également aviser l'Assemblée que, conformément aux dispositions de l'article 28 de la Loi sur la représentation électorale, la commission des institutions procédera à l'étude du rapport préliminaire de la Commission de la représentation électorale et ce, les 2, 3 et, si nécessaire, 4 février 1988.

Finalement, je désire informer l'Assemblée qu'après consultation avec l'Opposition et le député indépendant de Gouin la commission des affaires sociales procédera à une consultation générale sur la politique de santé mentale les 5, 6, 7, 12, 13, 14, 19 et 20 janvier 1988 et ce, selon l'horaire que je dépose à l'instant même.

La Vice-Présidente: Document déposé. Ceci met fin aux avis touchant les travaux des commissions.

Renseignements sur les travaux de l'Assemblée

Nous allons donc passer à la rubrique Renseignements sur les travaux de l'Assemblée. Est-ce qu'il y a des renseignements sur les travaux de l'Assemblée?

M. Gendron: II y en a toujours un. Ça fait quand même à trois ou quatre reprises qu'on souhaite que la fameuse liste des notaires demandée par mon collègue le député de Shefford soit déposée. Je veux bien que le leader du gouvernement nous dise qu'il en prend bonne note sauf que je souhaiterais que le résultat soit meilleur jusqu'à ce jour.

La Vice-Présidente: Merci, M. le leader de l'Opposition.

M. le leader du gouvernement.

M. Gratton: La dernière note que j'ai prise était strictement mentale. J'en fais une note écrite et je répondrai à cette demande demain.

La Vice-Présidente: Merci, M. le leader du gouvernement.

Ceci met fin aux affaires courantes.

Nous allons maintenant passer à la rubrique Affaires du jour.

M. le leader du gouvernement.

M. Gratton: Je vous prierais d'appeler l'article 32, Mme la Présidente.

Projet de loi 113

Prise en considération du

rapport de la commission

qui en a fait l'étude détaillée

La Vice-Présidente: À l'article 32 de notre feuilleton, le leader du gouvernement et ministre délégué à la Réforme électorale propose l'adoption du rapport de la commission de l'Assemblée nationale qui a étudié le projet de loi 113, Loi modifiant le régime de pension et les autres conditions de travail des membres de l'Assemblée nationale.

M. le leader du gouvernement et ministre délégué à la Réforme électorale.

M. Gratton: Compte tenu qu'en commission parlementaire nous avons effectivement adopté deux amendements et que ceux-ci sont d'ordre strictement mineur et technique, je n'ai pas l'intention d'intervenir à ce moment-ci, mais je me réserve évidemment le loisir et j'entends intervenir au moment de l'adoption même du projet de loi qui viendra demain.

La Vice-Présidente: Merci, M. le leader du gouvernement.

M. le leader de l'Opposition et député d'Abitibi-Ouest.

M. Gendron: À peu près pour les mêmes raisons, je pense que lorsqu'on a à intervenir sur un rapport de commission c'est qu'en commission parlementaire il s'est passé des choses majeures, significatives et importantes. Je ne dis pas que le sujet ne l'est pas, je dis qu'en commission on a eu à ratifier article par article les engagements pris lors du débat de deuxième lecture en principe. En conséquence, j'ai le même avis, je ne ferai pas de débat mais j'indique également qu'en ce qui concerne l'Opposition nous gardons, bien sûr, le privilège d'intervenir en troisième lecture.

La Vice-Présidente: Merci, M. le leader

de l'Opposition.

Ceci met fin au débat. II n'y a pas d'autres intervenants de part et d'autre? Je déclare le débat clos. Est-ce que le rapport de la commission de l'Assemblée nationale sur le projet de loi 113, Loi modifiant le régime de pension et les autres conditions de travail des membres de l'Assemblée nationale, est adopté?

Des voix: Adopté.

La Vice-Présidente: Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Gratton: Je vous prie d'appeler l'article 47 du feuilleton, Mme la Présidente.

Projet de loi 90 Adoption

La Vice-Présidente: À l'article 47 de notre feuilleton, la ministre des Affaires culturelles propose l'adoption du projet de loi 90, Loi sur le statut professionnel et les conditions d'engagement des artistes de la scène, du disque et du cinéma.

Mme la ministre des Affaires culturelles. (11 h 40)

Mme Lise Bacon

Mme Bacon: Mme la Présidente, c'est avec grand plaisir que je présente aujourd'hui, pour adoption, le projet de loi 90 sur le statut professionnel et les conditions d'engagement des artistes de la scène, du disque et du cinéma. Cela me fournit l'ultime occasion de réitérer, devant cette Chambre, ma plus vive satisfaction pour le travail accompli et aussi pour le résultat que nos efforts conjugués nous ont permis d'atteindre. Le projet de loi que je vous soumets représente, en effet, l'aboutissement de plusieurs années de ténacité et de persévérance des artistes et des créateurs, et aussi de la volonté du gouvernement, malgré la complexité du problème posé, de faire avancer la cause qu'ils défendaient, soit celle de bénéficier d'un statut professionnel adapté à leur contexte de travail et aussi d'un régime de négociation d'ententes collectives avec ceux qui retiennent leurs services professionnels.

Pour ma part, j'ai d'autant plus raison d'être satisfaite que la démarche que j'avais déterminée au printemps 1986, en convoquant une commission parlementaire sur le statut de l'artiste et du créateur, a porté déjà plusieurs fruits, dont ce projet de loi, et continuera d'en produire encore. En marge de la loi proposée, les dossiers liés au statut de l'artiste progressent, tant au ministère des Affaires culturelles qu'aux autres ministères intéressés. Nous entamons également les travaux qui nous permettront de résoudre les principales difficultés vécues par les artistes dans des domaines qui ne sont pas visés par le présent projet de loi.

Ce projet de loi fera en sorte qu'eux aussi soient dotés d'un statut professionnel conforme à la réalité de leur pratique artistique et qu'ils puissent profiter des bénéfices de leurs oeuvres. La volonté et la détermination dont nous avons fait preuve pour apporter une réponse adéquate aux artistes visés par le présent projet de loi sont garantes de l'engagement que nous prenons envers les créateurs dont les relations contractuelles sont d'une nature autre que celle des relations du travail et qui, par conséquent, ne pouvaient être touchées par ce présent projet de loi.

Ce projet de loi, qui est soumis aujourd'hui à l'approbation de l'Assemblée nationale, a franchi l'étape de la commission parlementaire pour étude article par article. Nous avons tout de même tenu à entendre au préalable les principaux intéressés, puisque cette étape nous a permis d'apporter des modifications qui l'améliorent et en clarifient des aspects importants.

Je voudrais souligner ici la qualité d'écoute des membres de la commission parlementaire et du député de Mercier, tout au long des travaux que nous avons eus, de sorte que les amendements qui ont été apportés ont presque tous été adoptés à l'unanimité, sans altérer la philosophie générale ni l'esprit du projet de loi. Les améliorations que nous avons faites circonscrivent mieux sa portée et précisent son champ d'application. Je voudrais aussi inclure le député de Saint-Jacques que je vois présent en cette Chambre; il avait été le porte-parole de l'Opposition lors de la première commission parlementaire.

Pour les fins de l'établissement d'un régime de relations du travail approprié aux liens contractuels entre les artistes et les producteurs, nous avons prévu des dispositions reconnaissant juridiquement que les artistes sont réputés exercer leur art à leur propre compte, si un ou plusieurs producteurs retiennent leurs services professionnels pour des prestations déterminées. Cette présomption établit clairement que les rapports entre les deux parties ne créent pas de liens de subordination. En conséquence, les contrats collectifs échappent aux lois habituelles des relations du travail et aux règles courantes de la négociation. Aussi, avons-nous défini un régime spécifique conférant aux artistes des droits et obligations analogues à ceux impartis aux autres catégories de travailleurs salariés. Ces droits fondamentaux sont le droit d'association et le droit à la négociation des conditions d'engagement.

Le présent projet de loi légalise des

pratiques existantes et leur assure un support juridique, tout en donnant la possibilité à des associations professionnelles qui n'ont pas d'ententes d'en conclure si les membres le souhaitent. Nous avons construit un cadre qui fixe les règles du jeu, mais suffisamment ouvert au dynamisme et à l'évolution des milieux artistiques pour qu'il ne serve pas d'étouffoir ni à la création, ni aux jeunes artistes, ni aux producteurs. Il nous a fallu créer un espace qui allie la liberté de l'artiste d'adhérer à une association, à ses obligations s'il tire profit des ententes conclues par cette association. Nous avons également dû préserver un juste équilibre entre la stabilité nécessaire aux associations reconnues et les possibilités d'exercice d'une saine démocratie pour laquelle pourront être révisés tant les secteurs de la négociation que les structures de représentation des artistes. Â cet égard, les amendements apportés en commission parlementaire assurent une plus grande stabilité aux associations en prévoyant que leur représentativité ne puisse être remise en question qu'à un moment fixe, soit aux trois ans, après l'obtention d'une reconnaissance.

En accordant le droit à la négociation, nous entérinons des pratiques qui ont cours, mais qui reposent essentiellement sur la bonne foi des parties. Il n'y a aucune raison de croire que là où elle existe cette bonne foi disparaîtra. Il s'agit de la faire surgir si elle a tardé à se manifester et de l'animer par des rapports civilisés à l'abri de règles tacites et informelles. Notre objectif, Mme la Présidente, n'est pas d'instaurer des déséquilibres, encore moins de mettre nos industries culturelles en péril.

En tant qu'État, nous disposons de leviers importants qui servent à protéger les secteurs plus fragiles de notre développement. Nous nous en servons par nos politiques, par nos programmes, par nos lois, par nos règlements afin d'harmoniser nos actions envers les arts et les industries culturelles. Dans cet ensemble de moyens, il n'est que raisonnable que les artistes en tirent leur juste part et qu'ils ne soient plus ceux qui, selon le constat de l'UNESCO, supportent le poids de l'industrie tout en étant ceux qui en bénéficient financièrement le moins.

Je suis convaincue que les milieux culturels québécois ont la maturité requise pour accepter le dialogue franc et ouvert exigé par leur situation d'interdépendance. Ils y sont invités en disposant d'un cadre clair, démocratique et objectif pour le faire. La commission de reconnaissance des associations d'artistes, dont nous proposons la création, sera appelée à jouer un rôle important dans l'application de la loi. Chargée notamment de définir les secteurs de négociation et d'accorder la reconnaissance à l'association qui représen- tera les artistes de ce secteur, elle devra exercer son mandat avec doigté et clairvoyance de manière à favoriser la protection du statut professionnel des artistes en harmonie avec le développement des entreprises de production. Pour cela, nous verrons à doter cette commission des compétences requises. Nous verrons aussi à assurer son intégrité et son impartialité. Nous prévoyons qu'elle soit à l'oeuvre dès avril prochain.

Comme ministre des Affaires culturelles, Mme la Présidente, j'ai le profond sentiment d'avoir rempli un aspect important de ma tâche. Le travail n'est cependant pas terminé. C'est avec la même énergie, la même détermination et avec la collaboration de tous mes collègues que je le poursuivrai dans les mois qui viennent. Mes priorités seront mises, d'une part, sur l'examen détaillé de la situation des créateurs en arts visuels, en littérature, en métiers d'art selon le résultat de cet examen qui sera fait en collaboration avec les artistes impliqués. Le tout pourrait très bien faire l'objet d'un deuxième projet de loi.

D'autre part, avec mes collègues du ministère du Revenu, du ministère des Finances, nous verrons à dégager une solution acceptable et juste aux questions fiscales qui nous ont été soumises. Plusieurs autres dossiers devront être traités, notamment celui du budget du ministère des Affaires culturelles, et ce n'est pas le moindre.

En proposant ce projet de loi novateur dans sa facture et par son objet, le gouvernement pose un geste sans précédent en Amérique du Nord. Une telle innovation était attendue des artistes depuis trop longtemps. Nous avons mis en oeuvre ce qu'il fallait pour leur donner la reconnaissance professionnelle qu'ils réclamaient, appuyés en cela par la population entière. Nous assumons ainsi une double responsabilité de l'État: celle d'accorder des droits à des créateurs et interprètes et les moyens de les faire respecter. Je pense que ces créateurs et interprètes nous font bénéficier de leur talent, et que nous avons aussi la responsabilité de créer pour eux un environnement propice au développement des arts dans le contexte particulier, ce contexte culturel particulier et distinct du Québec. Merci. (11 h 50)

La Vice-Présidente: Merci, Mme la ministre des Affaires culturelles. M. le député de Mercier.

M. Gérald Godin

M. Godin: Mme la Présidente, je pense que ce jour-ci est un jour historique pour le milieu culturel québécois. Il est sûr que l'Opposition joint sa voix à celle de la ministre pour féliciter le gouvernement, une

fois de plus, comme on l'a fait hier. Je tiens aussi à souligner que le processus d'adoption de ce projet de loi en commission parlementaire a été un modèle du genre, pour ce qui touche la collaboration et la bonne entente. Donc, le modus vivendi illustre, je pense, l'importance que, des deux côtés de la Chambre, on attache à ce statut et au rôle que les artistes jouent dans le Québec.

Je voudrais aussi souligner la présence de nos collègues des deux côtés de la Chambre et déplorer qu'on ne soit pas plus nombreux à encourager la ministre à poursuivre son oeuvre. Mme la Présidente, je souligne qu'il y en a parmi nos collègues qui sont ici, je les félicite, mais j'eusse aimé qu'il y en eût davantage. Ce n'est pas un reproche à personne. C'est peut-être la mesure que l'on peut prendre de l'importance que tous nos collègues d'ici, des deux côtés de la Chambre, attachent à ces questions culturelles. Je souhaiterais dans l'avenir qu'il y ait encore plus d'appui et une espèce de coalition des députés pour appuyer la ministre et le ministère dans ses efforts considérables, depuis qu'elle est là surtout, pour que les artistes québécois franchissent un pas de plus.

Maintenant, il est sûr, dans la reconnaissance sociale, fiscale et économique de leur rôle dans le Québec, dans la société québécoise... Nous pouvons dire en conclusion que le boulot a été fait et a été bien fait. Je souligne la présence dans nos galeries du président de l'Union des artistes et d'un des fondateurs du milieu culturel québécois, M. Gratien Gélinas, un comédien que tout le monde respecte. C'est bien lui. On peut dire qu'eux ils y croient, Mme la Présidente, et que c'est parce qu'ils y croient et qu'ils y ont cru que nous avons maintenant à adopter la loi sur le statut de l'artiste, qui confirme, je le répète, l'importance que la création a pour tous les gouvernements et tous les partis du Québec actuellement, dans le passé et dans l'avenir.

Mme la Présidente, merci à ceux qui ont poussé les gouvernements à agir. Merci aux gouvernements qui ont agi. Merci aussi à ceux qui ont réfléchi et moins agi. D'un commun accord, nous tous de ce côté-ci... C'est clair, M. le député de Portneuf, c'est clair? Donc, nous endosserons ce projet de loi de gaieté de coeur, Mme la Présidente, et avec enthousiasme. Merci.

La Vice-Présidente: Merci, M. le député de Mercier. Il n'y a pas de réplique?

M. Boulerice: Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: M. le député de Saint-Jacques.

M. André Boulerice M. Boulerice: Je vous en prie. Vous comprendrez, Mme la Présidente, mon intérêt face à cette loi qui sera adoptée à l'unanimité de l'Assemblée nationale. Intérêt du fait que j'étais déjà, à l'époque de la première consultation jusqu'au mois d'août dernier, responsable de ce dossier pour l'Opposition. Intérêt encore, Mme la Présidente, puisque c'est su et connu de tous que j'ai depuis toujours ce dossier à coeur et que je l'aurai à jamais puisque cela fait partie de ma personnalité. Mais mes premières paroles iront avant tout à celles et ceux qui par leur art permettent aux Québécois et aux Québécoises d'échapper à la grisaille de la vie quotidienne et qui illustrent avec talent le caractère de cette société française d'Amérique qu'est la nôtre.

Sur scène, au théâtre, sur disque, au cinéma, à la télévision, vous contribuez, vous, gens du milieu de la culture, à une des premières qualités de la vie. Comme le disait hier soir à la télévision le président de l'Union des artistes, M. Turgeon, cette loi est une victoire de société et c'est une victoire parce qu'aucun des intervenants n'a joué l'égoïsme, mais plutôt la solidarité. Comme je l'ai souvent dit, tous sont venus ici solidairement et conjointement. Force m'est également de constater que la commission qui a procédé à l'étude détaillée du projet de loi a bien fait son travail puisque l'Opposition officielle, autant que le parti gouvernemental, était en contact constant, ce qui a permis une rédaction d'amendements qui ont satisfait les parties concernées.

Cela est un pas significatif, Mme la Présidente. Cela doit être aussi un premier pas d'une marche qui nous conduira à d'autres reconnaissances pour le milieu de la culture. Puisque nous discutons ici des choses de l'esprit - telle est ma définition de la culture et j'aime le rappeler - et que la culture incite au dépassement autant de la part de ceux et celles qui interprètent que de celui ou celle qui reçoit, je puis assurer le milieu de la culture que le député de Saint-Jacques, membre de la commission de la culture, dont la circonscription est sans doute un chef-lieu du monde culturel, autant montréalais que québécois dans son sens national, que ce député se fera toujours un devoir et très assurément un très grand plaisir d'être à leurs côtés, quel que soit le côté de la Chambre où il se trouvera.

Je vous offre donc, Mme la ministre, de nouveau ma plus entière collaboration dans tout ce qui sera bon pour le milieu de la culture. Je profiterai, encore une fois égoïstement, et je pense que vous y consentirez bien volontiers, de l'occasion, puisqu'on a mentionné la présence de M. Turgeon dans nos galeries, pour souligner le 50e anniversaire d'une des plus prestigieuses organisations culturelles du Québec, située

dans la circonscription de Saint-Jacques, et je parle, vous le savez tous, de l'Union des artistes. Cela aussi ajoute à ma fierté d'être député de Saint-Jacques. J'ose espérer que, de toute façon, comme nous ne siégeons pas dimanche soir, les gens, forcément, délaisseront la télévision des débats et suivront plutôt ce gala du 50e anniversaire de l'Union des artistes qui sera diffusé, à moins que je ne me trompe, sur toutes les chaînes nationales au Québec.

Au début de la commission parlementaire, en 1986, j'invitais la partie gouvernementale à vivre avec l'Opposition le temps d'une paix pour la culture. Voilà que nous l'avons vécu et que, aujourd'hui, nous adopterons à l'unanimité une loi à laquelle nous souscrivons entièrement et que, en définitive, nous sommes peut-être en train de vivre, puisqu'il faut emprunter encore à un grand titre, une des belles histoires des Pays d'en-haut. Je vous remercie, Mme la Présidente.

Mes meilleurs voeux de succès à l'Union des artistes et ma plus profonde considération envers vous, Mme la vice-première ministre.

La Vice-Présidente: Merci, M. le député de Saint-Jacques. M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.

M. Michel Pagé

M. Pagé: Merci, Mme la Présidente. J'interviens, évidemment, pour souligner l'importance de ce projet de loi. Je le fais non seulement comme ministre, mais aussi et surtout comme député de Portneuf. Le projet de loi 90 reçoit aujourd'hui son étape définitive, l'étape de l'adoption, un projet de loi qui était attendu, un niveau d'intervention qui était souhaité. Je peux vous indiquer, pour avoir eu le privilège de siéger, ici, à l'Assemblée nationale du Québec, depuis bientôt quinze ans, que c'est à plusieurs reprises que nous nous sommes penché sur ce sujet, combien important, combien fondamental, en fait, pour les artistes, pour celles et ceux qui, dans leur vécu quotidien, y travaillent, y occupent et y investissent de l'espoir, celles et ceux qui se sont conviés à une formation visant à la diffusion des arts. Combien de fois avons-nous eu ici l'occasion de nous pencher, de réfléchir, de nous questionner, de faire de propositions sur le statut de l'artiste et sur quelle assise juridique il devrait s'asseoir. (12 heures)

Je peux vous indiquer, Mme la Présidente, que c'est avec beaucoup de fierté que nous avons suivi comme collègues le rôle éminemment important, le rôle essentiel joué par ma collègue, Mme la vice-première ministre et ministre des Affaires culturelles du Québec.

Vous savez, pour notre gouvernement, lorsque, par nos actions, par nos lois, par nos réglementations, par nos représentations, par nos déclarations, on évoque le renforcement culturel du Québec, cela passe non seulement par des ententes comme celle de l'accord du lac Meech, cela passe non seulement par une intention très claire, très ferme, très déclarée, très vigilante de protéger notre langue, mais cela passe aussi par la promotion. Cela passe également - cela doit passer - par un support adéquat, par un support renforcé qui était, par sucroît, attendu depuis plusieurs années à l'égard de celles et ceux qui s'occupent et qui travaillent dans la diffusion des arts.

C'est ainsi qu'en 1986, quand ma collègue a appelé une commission parlementaire, certains se sont peut-être interrogés en se disant: Sommes-nous encore conviés à un exercice d'échanges et de discussions qui permettra de faire avancer un peu le dossier pour peut-être conduire à un livre d'une couleur quelconque, peut-être conduire à un avant-projet de loi? Ce dossier attendait depuis tellement longtemps, ce dossier avait fait tellement l'objet de rhétorique plutôt que l'objet d'actions concrètes qu'il était tout à fait explicable que certains intervenants du milieu se questionnent sur l'opportunité ou, en fait, le résultat de cette démarche. Aujourd'hui, cependant, on doit unanimement reconnaître que la démarche de la commission parlementaire de 1986 constituait pour nous une étape importante, mais qui devait conduire à des actions concrètes. Ces actions concrètes ont été démontrées par le projet de loi 90 qu'a déposé ma collègue, ici, à l'Assemblée.

Je vais être bref, Mme la Présidente. Je voudrais vous dire qu'une des actions les plus légitimes, les plus fondamentales pour toute société, pour toute collectivité, c'est de s'assurer du dynamisme de l'interaction du développement de ses arts, de sa culture, de sa musique, de ses lettres, de son théâtre.

Aujourd'hui, peut-être que parmi celles et ceux qui nous écoutent à la télévision, celles et ceux qui prendront connaissance des lois qui sont adoptées, certains se diront: Ils ont adopté une loi au Parlement de Québec visant a donner un encadrement et tracer des avenues, établir des bases susceptibles de sécuriser davantage nos artistes québécois. Mais c'est beaucoup plus que cela. Les leviers qui sont créés, le contexte qui est créé, les avenues qui sont ouvertes, les chemins qui sont tracés dans le milieu des arts par le projet de loi 90 constituent un acquis et un plus, non seulement pour celles et ceux qui sont concernés, mais pour l'ensemble de la société québécoise. C'est une loi qui aura des effets non seulement immédiats, mais qui aura une portée positive profitable, bonifiante pour l'ensemble de

notre société et on doit rendre un hommage pour la farouche détermination et la solidité qu'a témoigné ma collègue, Mme la ministre des Affaires culturelles, qui a non seulement épousé cette cause, mais qui sait - c'est explicable, avec sa force, son expérience -non seulement bien plaider, mais convaincre ses collègues et le Conseil des ministres.

Je voudrais donc, au nom de mes collègues, rendre hommage à - on peut la nommer - Mme Bacon, la féliciter. Même si c'est un pas important qui est posé par le projet de loi 90, nous sommes bien conscients qu'il reste encore beaucoup de chemin à faire. Mais connaissant sa détermination, sa motivation, je suis d'ores et déjà convaincu que les autres éléments de ce dossier seront menés à terme positivement.

Je voudrais évidemment m'associer à mes collègues pour rendre hommage à l'Union des artistes qui célèbre son 50e anniversaire cette année. On sait qu'en fin de semaine la très grande majorité des Québécoises et des Québécois seront probablement rivés au petit écran pour écouter leur gala d'anniversaire et je serai moi-même un de ces spectateurs dimanche soir, le 20. Je voudrais les féliciter, leur rendre hommage. Que d'années de labeur dans des conditions pas faciles: le développement de la radio, l'arrivée de la télévision, des mutations constantes dans le milieu des arts et de la culture. Ils se sont adaptés, ils ont su être audacieux. Comme je l'écrivais dans une petite carte que j'adressais au président, parce qu'on a signalé cet événement par une communication à chacun des députés: "Nous sommes fiers de nos artistes et nous souhaitons qu'ils puissent continuer à témoigner d'autant d'audace et parfois même à bousculer des habitudes." Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Merci, M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation. Il n'y a pas d'autre intervention? Je déclare le débat clos. Est-ce que le projet de loi 90, Loi sur le statut professionnel et les conditions d'engagement des artistes de la scène, du disque et du cinéma, est adopté?

Des voix: Adopté.

Une voix: À l'unanimité.

La Vice-Présidente: Adopté. Mme la ministre des Affaires culturelles.

Mme Bacon: Mme la Présidente, je vous demanderais d'appeler l'article 35 de notre feuilleton.

Projet de loi 59 Adoption

La Vice-Présidente: À l'article 35 de notre feuilleton, la ministre des Affaires culturelles propose l'adoption du projet de loi 59, Loi modifiant la Loi sur le cinéma et la Loi sur la Société de développement des industries de la culture et des communications. Mme la ministre des Affaires culturelles.

Mme Lise Bacon

Mme Bacon: C'est décidément le matin de la culture, Mme la Présidente. J'aimerais vous dire que nos industries culturelles sont importantes et nous le prouvons ce matin en adoptant deux lois du ministère des Affaires culturelles. Je propose donc à cette Chambre l'adoption du projet de loi 59 prévoyant des modifications à la Loi sur le cinéma et à la Loi sur la Société de développement des industries de la culture et des communications.

Ce projet poursuit l'objectif de consolider un secteur d'activité où les enjeux économiques et culturels sont majeurs pour le Québec. Cette loi vise en effet à rendre plus cohérentes les actions et les interventions du gouvernement du Québec dans les secteurs des industries culturelles, des communications et du cinéma. Les industries culturelles sont une composante essentielle de notre développement et le Québec doit inclure les industries culturelles dans ses projets de développement économique de prestige, ceux qui véhiculent à l'étranger l'image de ce que nous sommes, c'est-à-dire une société riche en artistes, créateurs et producteurs. L'apport économique des industries culturelles est important, mais ces industries demeurent fragiles. Elles le sont, parce que leur production en est une à risques élevés. De plus, elles rencontrent la concurrence des multinationales, alors qu'elles sont de petites et moyennes entreprises dont les difficultés de financement sont très grandes.

Nos industries culturelles ont une autre difficulté, celle de trouver le financement nécessaire à leurs activités auprès des institutions financières. Les banques hésitent à financer une production culturelle en raison du risque que comporte ce type de produit. Le Québec a trouvé une solution originale au soutien des industries culturelles en créant des sociétés d'État qui avancent à ces industries des capitaux qu'elles ne peuvent trouver auprès des autres institutions financières. (12 h 10)

En effet, depuis maintenant neuf ans, la SODICC intervient dans le secteur culturel en favorisant la création et le développement d'entreprises culturelles, ce qui contribue à accroître la qualité de leurs produits, leur

authenticité et leur compétitivité. Quant à la Société générale du cinéma du Québec, par ses programmes d'aide, elle soutient qua-tre principales étapes de l'activité cinématographique: le développement constitué de la scénarisation et de la recherche, la production, la diffusion et la promotion. Mais il y a également des interventions législatives, comme la loi sur le livre, la Loi sur le cinéma, qui favorisent aussi les entreprises québécoises sur le marché domestique.

Toutes ces mesures qui viennent compenser, d'ailleurs, en partie seulement, pour l'étroitesse du marché ont permis à nos entreprises, grâce à la force de nos créateurs et artistes de même qu'au dynamisme des gens d'affaires qui oeuvrent dans ce domaine, d'atteindre des résultats intéressants. C'est ainsi que le paysage s'est sensiblement modifié depuis quelques années et que nous assistons aujourd'hui à une véritable structuration, que ce soit dans le secteur de l'audiovisuel, du cinéma ou ailleurs.

Par la loi 109, adoptée à l'unanimité par l'Assemblée nationale en juin 1983, le Québec entreprenait une réforme dans le domaine du cinéma. Un des objectifs prioritaires de cette loi-cadre était la redéfinition du partage du marché intérieur québécois entre les entreprises d'ici et les entreprises étrangères. La loi établissait des règles susceptibles de permettre la réappropriation du marché de la distribution par les distributeurs québécois et ce, par l'instauration de mesures d'encadrement de la profession. Un autre élément était l'augmentation des fonds destinés au secteur privé du cinéma et la création d'un organisme de gestion de ces crédits annuels.

Cependant, lors de mon arrivée au ministère des Affaires culturelles en décembre 1985, j'ai pu constater qu'un certain nombre de problèmes subsistaient. À défaut de la mise en vigueur des règlements qui y sont prévus, toute une partie de la loi demeurait inopérante. Or, il s'agit de règlements d'une portée significative pour l'industrie puisqu'ils contribueront à modifier le cadre actuel du fonctionnement de l'industrie du cinéma dans le sens souhaité par le législateur. L'entente intervenue l'année dernière avec la Motion Picture Export Association of America a ouvert la voie à la mise en application des règlements attendus avec impatience par l'industrie québécoise. Je tiens à informer cette Chambre que le Conseil des ministres a approuvé, hier, les règlements adoptés par la Régie du cinéma, qui sera en mesure de les appliquer effectivement à compter du mois de février prochain.

Il est devenu manifeste, après une expérience de quatre ans de la Loi sur le cinéma et de neuf ans de la Loi sur la

SODICC, que des corrections aux plans organisationnel et structurel des deux lois apporteraient des améliorations substantielles sur le plan du fonctionnement du secteur des industries culturelles. Ce projet de loi prévoit donc l'intégration de la Société générale du cinéma du Québec et de la Société de développement des industries de la culture et des communications et les fonctions dévolues aux deux sociétés seront, à l'avenir, exercées par la société désignée sous le nom de Société générale des industries culturelles ou sous le sigle de SOGIC.

Un autre objectif du projet de loi 59 concerne la clarification des rôles et la simplification de certains processus administratifs. L'Institut québécois du cinéma, constitué de professionnels de l'industrie cinématographique, pourrait à l'avenir jouer pleinement son rôle de conseil, qui est renforcé et facilité. Ainsi, la relation de l'institut avec la ministre titulaire de la loi sera directe, sans lien formel avec la Société générale du cinéma du Québec. Quant à la définition des règles régissant l'industrie du cinéma, qui ont une incidence et un impact directs sur le développement de cette industrie, elle revient au gouvernement et la régie verra à l'application de ces règlements.

D'autres modifications ont aussi été apportées, dont bénéficieront des industries, mais également le grand public et les cinéphiles en particulier. J'ai déjà largement fait état de ces modifications qui concernent le commerce du matériel vidéo qui sera dorénavant réglementé, ce qui permettra de mieux contrôler la piraterie fortement pratiquée dans ce secteur d'activité et aussi de répondre à la question de classification du matériel vidéo.

Il était également urgent qu'une meilleure solution soit trouvée en ce qui concerne la langue des films présentés en salle. L'objectif de l'article 83 de la Loi sur le cinéma est d'assurer la présence du français sur les écrans. Moins de deux ans après l'entrée en vigueur de l'article, l'objectif n'est pas encore atteint. Le problème est fort simple. L'esprit de la loi est contourné et on utilise à profusion des échappatoires de l'article 83. La modification que nous avons retenue est de resserrer l'article 83 sans en changer la structure, de permettre aussi une application souple et une possibilité d'adaptation au comportement de l'industrie.

La constitution d'une société de financement en matière d'industries culturelles avec des moyens d'intervention efficaces constitue une étape importante dans le développement de ce secteur. Et l'entente intervenue avec les Américains et la mise en vigueur sous peu de la réglementation représentent autant de gestes qui

permettront de consolider ce secteur d'activité. Mais, déjà, d'autres questions surgissent qui demandent aussi des solutions appropriées. Au cours des consultations qui ont eu lieu ces derniers mois, les propriétaires de salles ont fait état des difficultés rencontrées par les propriétaires indépendants et il est manifeste que la Loi sur le cinéma n'est pas très loquace sur l'exploitation des films en salle.

Par ailleurs, j'estime qu'il vaut mieux attendre plutôt que d'agir à l'aveuglette. Je me propose donc de mandater un groupe de travail, auquel j'associerai l'Institut québécois du cinéma, pour examiner tout le dossier de l'exploitation en salle et je demanderai de me faire rapport avant l'été prochain. Ce mandat portera sur des aspects tels que la propriété des salles; la propriété des salles commerciales est concentrée à 70 % entre les mains de deux grands circuits. Il portera aussi sur l'accessibilité des films en régions, parce qu'on sait que les salles continuent à fermer; la question de la rénovation des salles sera aussi étudiée, les catégories de permis de salle, la sortie des films en salle par rapport à la sortie en vidéo. Toutes ces questions doivent trouver des réponses appropriées, doivent trouver aussi des solutions adéquates comme celles présentées à cette Chambre concernant les modifications proposées par le projet de loi 59.

Les enjeux pour le Québec dans le domaine culturel et particulièrement en ce qui concerne les industries culturelles sont importants et je sollicite donc de l'Opposition son accord, son appui, afin que nous puissions, comme ce fut le cas en 1983 lors de l'adoption de la Loi sur le cinéma, arriver encore une fois à une décision unanime en cette matière. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Merci, Mme la ministre des Affaires culturelles. M. le député de Mercier.

M. Gérald Godin

M. Godin: Mme la Présidente, les esprits superficiels pourraient croire que c'est l'esprit de Noël qui envahit le Parlement - c'est parce qu'il y a unanimité que je le garantis à la ministre - mais je pense que c'est plus profond que ça. Je pense que, face à des lois qui vont dans le sens du développement culturel du Québec, fondamentalement les deux côtés de la Chambre sont d'accord. Nous sommes conscients tous les deux, aussi bien le Parti libéral que le Parti québécois, que la culture est l'émanation de la réalité profonde du Québec. Donc, nous voterons pour ce projet de loi et nous assurons la ministre que, quand le gouvernement travaille bien comme maintenant, comme dans le cas des projets de loi 90 et 59, il trouve devant lui non pas une Opposition systématique, mais un appui, un soutien et je dirais un complice dans certains cas parce que, le but visé étant tout à fait louable, nous ne pouvons qu'appuyer ce projet de loi.

En revenant à l'esprit de Noël, je dirai en terminant: Paix sur la terre aux parlementaires de bonne volontél Merci beaucoup.

La Vice-Présidente: Merci, M. le député de Mercier.

Je constate qu'il n'y a pas d'autre intervention. Je déclare le débat clos. Est-ce que le projet de loi 59, Loi modifiant la Loi sur le cinéma et la Loi sur la Société de développement des industries de la culture et des communications, est adopté?

Des voix: Adopté.

La Vice-Présidente: Adopté. Mme la ministre des Affaires culturelles.

Mme Bacon: Je vous demanderais d'appeler l'article 13, Mme la Présidente. (12 h 20)

Projet de loi 94 Adoption du principe

Le Vice-Présidente: À l'article 13 de notre feuilleton, le ministre délégué à la Famille, à la Santé et aux Services sociaux propose l'adoption du principe du projet de loi 94, Loi sur le Conseil de la famille. M. le ministre délégué à la Famille, à la Santé et aux Services sociaux.

M. Robert Dutil

M. Dutil: Merci, Mme la Présidente. La semaine dernière, nous avons déposé un projet de loi qui institue un organisme, le Conseil de la famille, qui aura pour fonction de conseiller le ministre sur toute question d'intérêt familial. Le conseil assumera une partie des fonctions du Conseil des affaires sociales et de la famille, dont le nom et la loi sont modifiés en conséquence.

Ce dépôt de projet de loi sur le Conseil de la famille vient d'une décision gouvernementale que nous avons prise et que nous avons regroupée dans un énoncé de politique rendu public également la semaine dernière. Je pense qu'il est important de faire le tour de cet énoncé de politique avant d'aller plus avant sur le Conseil de la famille, afin de bien montrer que le Conseil de la famille fait justement partie d'un tout, d'une orientation, que le Conseil de la famille vient en appui à une politique que le gouvernement entend préconiser dans les années à venir.

Cet énoncé des orientations et de la dynamique administrative de la politique familiale du gouvernement du Québec se retrouve dans un document d'environ une quinzaine de pages où, en tout premier lieu, nous identifions diverses réalités de la famille dans la société québécoise. Bien des sondages, bien des enquêtes - on le mentionne dans ce texte - ont révélé à maintes reprises que la famille demeure la première valeur dans la vie des personnes. Dans l'introduction, nous montrons diverses statistiques concernant le nombre d'enfants dans les familles, nous montrons aussi des différences fondamentales entre la famille d'aujourd'hui et celle d'hier, par exemple, dans les pourcentages de mariages et d'unions de fait, dans les séparations légales et les divorces, dans la proportion croissante de familles monoparentales, dans la présence accrue de mères sur le marché du travail, présence qui, pour les plus jeunes couples, va maintenant au-delà de 70 %. Nous montrons également diverses statistiques concernant la natalité au Québec, le problème de la natalité dont on parle tant, qui fait partie de l'ensemble de la problématique de la famille, qui, comme nous l'avons mentionné, est une préoccupation du gouvernement, bien sûr, mais qui, il est important de le dire et de le répéter, n'est quand même pas la seule préoccupation du gouvernement du Québec concernant la famille.

De cet exposé, nous avons déduit les justifications et les raisons de l'intervention de l'État en matière familiale. Nous avons dégagé certains principes de base fort importants qu'il est bon de rappeler à cette Assemblée, le premier étant que la famille est une valeur collective fondamentale; le second, que le gouvernement a la volonté de contribuer à la cohésion et à la stabilité de la famille et de tenir compte davantage de la spécificité de la réalité familiale; et le troisième, que le gouvernement veut soutenir les parents à titre de premiers responsables légaux et sociaux de la prise en charge des enfants, évitant de se substituer à eux, tout en protégeant l'intérêt de l'enfant.

Il est important de revenir sur ces trois principes de base, à tour de rôle, et de les expliquer davantage. Le premier, c'est que la famille est une valeur collective fondamentale. Il ne faudrait pas minimiser ce point fort important, dans le discours, non seulement des hommes politiques, mais également des autres leaders sociaux, les leaders économiques. Il est important de dire et de répéter que, dans la société, on ne doit plus tenir la famille pour acquise, mais que la famille est une valeur collective fondamentale.

Quant à la volonté de contribuer à la cohésion et à la stabilité de la famille et de tenir compte davantage de sa spécificité, pour ceux qui connaissent le fonctionnement d'un gouvernement, c'est probablement l'un des aspects les plus importants de la politique que nous avons rendue publique la semaine dernière et que j'explique ici, aujourd'hui.

Dans l'appareil gouvernemental, dans l'ensemble des ministères impliqués dans la politique familiale - nous les énumérerons tout à l'heure, nous en préciserons le contour - il est important qu'il y ait des gens qui se préoccupent de ce qui touche indirectement ou directement la famille. Je pense que c'est un des aspects qui a été négligé dans le passé et qui fait qu'on se retrouve, aujourd'hui, dans des situations où des mesures d'un ministère viennent, sous l'aspect de la famille, contredire des mesures que l'on retrouve dans d'autres ministères. Ce principe de base est énoncé d'une façon claire, précise et le gouvernement - et nous verrons plus tard de quelle façon il entend le faire - tient à ce que cette spécificité de la réalité familiale soit tenue en compte dans les ministères qui seront touchés par la politique familiale.

Le troisième principe, fort important également, est celui de soutenir les parents en évitant de se substituer à eux. Il a d'ailleurs fait l'objet d'une motion adoptée à l'unanimité de l'Assemblée nationale et sur laquelle je reviendrai tout à l'heure, la motion du 29 octobre. Ce sont les parents qui sont les premiers responsables légaux et sociaux de la prise en charge des enfants. C'est d'abord et avant tout à eux que l'État doit s'adresser, c'est d'abord et avant tout eux que l'État doit soutenir en essayant d'éviter de se substituer à eux et, nous le précisons bien sûr, tout en protégeant l'intérêt de l'enfant.

De ces principes de base, nous avons déduit une orientation générale. Précisons que cette politique s'appliquera, d'une façon horizontale c'est-à-dire qu'elle s'appliquera à un ensemble de ministères. Il y aura des interventions faites par le ministre délégué à la Famille et par les structures que nous mettons en place dans l'ensemble des ministères concernés.

Et nous en arrivons à l'objectif général de la politique familiale, qui se lit comme suit: Reconnaître l'importance de la famille en tant qu'institution et milieu de vie, notamment par le soutien collectif aux parents qui sont les premiers responsables de la prise en charge des enfants et du milieu familial. De cet objectif général de la politique familiale découlent les objectifs fonctionnels suivants. D'abord, faire en sorte que chaque ministère et organisme gouvernemental concerné assume la dimension familiale et l'intègre dans ses politiques et programmes. C'est ce que l'on appelle "penser famille", tenir compte de la famille, savoir l'effet que peuvent avoir nos politiques sur les familles du Québec.

B. Assurer la concertation gouvernementale nécessaire, en particulier sur le plan de la cohérence et de la concordance des politiques qui doivent répondre à l'objectif général de la politique familiale. Cohérence, cohésion sont deux termes qui reviendront souvent dans notre bouche, qui sont fort importants. Il s'agit d'éviter que des politiques d'un ministère, faute de s'être concerté, viennent annuler des politiques d'autres ministères en ce qui concerne les bienfaits accordés à la famille par le gouvernement.

C. Assurer la même concertation gouvernementale pour faciliter, aux différents ministères et organismes gouvernementaux, l'harmonisation requise avec les autres niveaux de gouvernement et milieux responsables du soutien à apporter aux parents et autres membres de la famille. Ce qui est indiqué ici c'est que le gouvernement n'est évidemment pas le seul intervenant en matière de politique familiale. Les autres intervenants, on peut nommer les principaux rapidement, sont, bien sûr, le milieu de travail, le milieu patronal, le milieu syndical, qui sont évidemment fortement concernés comme l'un des endroits où les gens passent le plus de temps et où les gens doivent trouver des moyens de coordonner leurs activités de travail avec leurs responsabilités parentales. On peut également nommer le milieu scolaire, on peut nommer le milieu municipal, ne fût-ce que sous l'aspect des loisirs, qui est la responsabilité première au niveau municipal et, évidemment, le milieu familial lui-même.

(12 h 30)

En D, dans les objectifs fonctionnels toujours, le gouvernement souhaite favoriser l'expression des familles à l'égard du développement de la politique familiale. C'est là le premier but du projet de loi que nous présentons aujourd'hui, la Loi sur le Conseil de la famille, qui permettra aux organismes familiaux, aux gens qui dans la société sont plus directement intéressés, plus directement concernés par la famille et qui, je tiens à le préciser, depuis de nombreuses années - pour certains organismes - on parle d'une quinzaine d'années - demandent, exigent, travaillent en vue que le gouvernement développe, accepte et établisse une politique familiale, qu'il la mette en place et que cette politique familiale en arrive à donner des résultats concrets pour les parents et les familles dans la société québécoise.

Maintenant, le champ d'application de la politique familiale. Nous avons voulu, dans cet énoncé, identifier les divers secteurs d'activités principales du gouvernement dans la politique familiale. Le tout premier, bien sûr, est le soutien économique aux parents de façon à collaborer au coût de la prise en charge des enfants. C'est un des aspects qui reviennent le plus souvent, ce soutien économique aux parents. On ne peut se contenter d'énoncés de principe, on ne peut se contenter d'avoir des structures dans la politique familiale, dans le gouvernement; il faut également avoir un soutien économique pour les parents.

Lors d'interventions de l'Opposition et d'interventions d'autres milieux, on nous mentionne que, lorsque nous avons rendu public cet énoncé, on ne l'a pas rendu public avec des mesures et on référait à ce moment plus particulièrement à des mesures de soutien économique. Je tiens à préciser tout de suite - et c'est confirmé par la résolution que nous avons adoptée le 29 octobre à l'Assemblée nationale - que depuis deux ans le gouvernement a adopté diverses mesures sur le plan économique qui concernent la famille. Il est bon de relire cette résolution adoptée à l'Assemblée nationale. Le chef de l'Opposition a mentionné qu'elle était différente de la proposition initiale. Évidemment, nous l'avons amendée et nous croyons que nous l'avons fait à juste titre. L'Opposition a quand même voté pour cette résolution. Je pense que c'était très bien. Je veux démontrer ici au chef de l'Opposition et à l'Opposition qu'ils n'ont pas eu tort de voter pour cette résolution.

Je la relis pour bien situer les gens. La proposition disait: "Que cette Assemblée exige du gouvernement libéral qu'il continue à mettre de l'avant des politiques de valorisation de la famille québécoise et qu'il instaure des mesures visant à améliorer les services d'appui et le support financier accordés aux parents à titre de premiers responsables légaux et sociaux de la prise en charge des enfants et du milieu familial".

Mme la Présidente, nous avons adhéré à cette résolution bien qu'elle soit très exigeante pour le gouvernement. Ce que cette résolution dit, c'est que l'Assemblée exige du gouvernement libéral qu'il continue à mettre de l'avant des politiques de valorisation. Cela veut dire deux choses. Cela veut dire qu'il faut en faire davantage. Nous le reconnaissons et c'est ce que l'Opposition, en faisant la proposition, voulait faire. Elle voulait convaincre l'Assemblée qu'il était important dans la politique d'en faire davantage et nous sommes d'accord avec cette proposition. Notre amendement qui a eu pour effet de dire "continuer à mettre de l'avant" vient faire également la démonstration que, dans le passé, le gouvernement a fait des choses pour la politique familiale. Je me rappelle, dans mon discours lors du débat sur cette résolution, avoir lu des passages fort importants - je ne le referai pas aujourd'hui - du discours sur le budget présenté l'année dernière et qui avaient pour effet de réduire considérablement les impôts pour les familles à plus faibles revenus.

J'en profite pour mentionner qu'avec la réforme de l'aide sociale, également, pour

les familles, plusieurs mesures sont envisagées pour les familles, entre autres, qui gardent une personne non employable, une personne handicapée, également pour les familles à faible revenu qui sont au travail et qui, grâce au programme APPORT, pourront augmenter ce revenu de façon substantielle.

Donc, en acceptant cette proposition, l'Assemblée nationale exigeait du gouvernement de faire davantage, ce qui est une nécessité, mais reconnaissait que le gouvernement avait déjà fait des choses, ce qui est la vérité. Je pense que dans une proposition, quand on parvient à mettre ensemble ce qui est la nécessité et la vérité, eh bien, il est normal qu'on en arrive à une proposition unanime de l'Assemblée nationale. Pour ma part, je tiens à féliciter l'ensemble des parlementaires, qu'ils soient de l'Opposition ou du côté ministériel, d'avoir voté pour une proposition exigeante pour le gouvernement, mais pour une proposition qui reconnaît que le gouvernement, dans le passé, a commencé un travail fort complexe, mais, toutefois, fort important pour la famille.

Plusieurs autres champs d'application sont concernés par la politique familiale. Je les énumère rapidement: le travail, quant à ce qui peut faciliter la conciliation des rôles de parents, de travailleurs et de travailleuses; l'habitation à des fins familiales; la famille et le système d'enseignement, du double point de vue de la relation famille-école et de l'intégration de la famille comme élément de connaissance; l'immigration, les communautés culturelles et la famille; les services sociaux et les services de santé aux familles; les services aux familles autochtones; les services de garde; la famille et les loisirs; la justice et le droit de la famille; la sécurité de la famille et de ses membres, surtout sous l'angle de la lutte contre la violence familiale et de la jeunesse en difficulté - je reviendrai, tout à l'heure, plus particulièrement sur ce point qui, à mon avis, est l'un des points les plus importants - la recherche et la coopération sur le développement de la famille et des politiques familiales; la famille et les agents culturels, notamment les médias et la publicité.

À diverses occasions, au fur et à mesure que des politiques, des mesures seront adoptées par le gouvernement, nous aurons l'occasion de revenir dans les divers secteurs d'activité où le gouvernement se sera impliqué comme on le fait, actuellement, au chapitre de la sécurité du revenu par la réforme de l'aide sociale.

Toutefois, je veux parler brièvement de la sécurité de la famille et de ses membres, surtout sous l'angle de la violence conjugale. Je l'avais mentionné lors de mon dernier discours, j'ai l'intention de le répéter à chaque occasion. La violence familiale est un phénomène dont on perçoit maintenant l'ampleur. Elle existait probablement de tout temps, mais semble avoir pris une ampleur plus considérable maintenant. Est-ce parce qu'on la voit davantage, parce que c'est un phénomène mieux connu ou parce qu'il y a vraiment augmentation de la violence familiale?

Quoi qu'il en soit, Mme la Présidente, il est important que, du côté de la violence familiale, l'on ait ce que quelqu'un m'a qualifié - je répète le terme, je le trouve excellent, je pense que c'est la bonne façon de l'exprimer - de gain de civilisation. Il est temps que l'on sache qu'on ne peut frapper sur quelqu'un, qui que ce soit, aussi proche de nous soit-il, sans que ce ne soit considéré comme un crime. C'est un crime de frapper quelqu'un; c'est un crime que la violence familiale, tout autant que n'importe quel autre crime de violence. Je pense qu'il est important que les leaders politiques, les leaders sociaux, les leaders économiques, l'ensemble de la population, non seulement le gouvernement et les élus ici, à l'Assemblée nationale, mais les voisins, les gens qui voient ce genre de phénomène disent, qu'on ne l'accepte plus, qu'on sache que ce n'est pas une affaire privée, mais que c'est un crime sur le plan social. Il est important que ceux qui font de pareils gestes sachent que la société n'a plus l'intention, dans l'avenir, de tolérer ce genre d'acte envers la famille.

Je pense que cette violence familiale non seulement sur les femmes - bien sûr qu'elles en sont les premières victimes -mais également sur les enfants qui en sont des victimes bien souvent pour la vie puisqu'ayant été élevés parfois dans un milieu de violence, ils ont tendance à reproduire ce genre de milieu de violence dans leur avenir, il est important que l'on en mesure toutes les conséquences et que l'on se dise: II faut que cela cesse. (12 h 40)

Ayant identifié les divers secteurs d'activités, l'énoncé a également identifié la dynamique administrative qu'il songeait à mettre en place concernant l'application de la politique familiale. Le Conseil de la famille vient en tout premier lieu. J'y reviendrai tout à l'heure. C'est l'objet de notre discussion plus particulière ce matin.

Je vais au point 2 où l'on mentionne qu'il y a maintenant un ministre dont l'attribution principale est la famille. Le titre du ministre est actuellement "ministre délégué à la Famille, à la Santé et aux Services sociaux", le gouvernement ayant introduit "à la famille" dans le titre du ministre, voulant par là signifier toute l'importance qu'il entend accorder à ce secteur d'activités fort important pour la société québécoise.

L'action des ministères et des

organismes les plus concernés par la famille nous amènera également à voir à ce qu'il y ait une certaine structure administrative dans chacun des ministères concernés. Les ministères et les organismes les plus concernés assureront chez eux la mise en place de mécanismes administratifs propres à faciliter l'intégration de la dimension familiale dans les politiques dont ils sont responsables et partageront la coordination horizontale, notamment, par la concertation avec le Secrétariat à la famille, ci-après désigné.

Les ministères et organismes les plus concernés par la famille élaboreront sur une base régulière des activités, des engagements et des mesures concrétisant l'intégration de la dimension familiale. Mme la Présidente, les ministères et les organismes les plus concernés par la famille feront état, dans leur rapport annuel, du développement de la politique familiale dans tous les aspects pour lesquels ils en sont responsables.

Voilà une façon de procéder éprouvée; éprouvée, parce que la famille n'est pas le premier dossier à portée horizontale qui utilise ce genre de mesures administratives et qui obtient des succès pour les clientèles qui sont défendues. Et devoir inclure la dimension familiale dans ses programmes, devoir élaborer sur une base régulière des activités, des engagements et des mesures, et devoir faire état, dans leur rapport annuel, du développement des mesures concernant la politique familiale pour tous les ministères concernés est fort impliquant pour le gouvernement et nous assure que la politique familiale, dans les prochains mois, dans les prochaines années, avancera non seulement de façon cohérente, mais avancera également d'une façon très rapide pour le mieux-être de l'ensemble des familles du Québec.

Le ministre peut également compter sur le travail d'un Secrétariat à la famille chargé de l'application de ces politiques, chargé du travail de coordination entre les divers ministères. Ce secrétariat est directement sous la responsabilité du ministre délégué à la Famille.

Voilà donc, Mme la Présidente, l'énoncé de principe fort important que nous avons rendu public la semaine dernière. Je tiens à répéter que cet énoncé de principe n'a pas empêché le gouvernement d'appliquer des mesures fort importantes dans le passé pour la famille, mais permettra, à l'avenir, d'en faire davantage, de faire plus avec l'assurance qu'il y aura cohésion et concordance entre les diverses politiques du gouvernement et qu'ainsi la famille québécoise, comme c'était le voeu d'un groupe de plus en plus important dans la population, sera prise en compte dans le développement des politiques gouvernementales.

Nous voici donc au projet de loi 94, Loi sur le Conseil de la famille, qui vient scinder le Conseil des affaires sociales et de la famille en deux conseils, celui des affaires sociales, celui de la famille. Le projet de loi identifie de quelle façon fonctionnera ce Conseil de la famille avec une particularité, toutefois, que je tiens à mentionner, particularité importante qui est le préambule de la Loi sur le Conseil de la famille dont je vais vous faire lecture. "Considérant que la famille est le premier milieu de vie, d'apprentissage et de socialisation et que le bien-être de la famille et des individus qui la composent est la base du bien-être de la société; considérant que la contribution sociale des parents comme premiers responsables des familles et de la prise en charge des enfants mérite d'être soutenue et encouragée par la volonté collective; considérant qu'il y a lieu de favoriser l'expression des familles, de leurs représentants, des milieux et des institutions concernés par les questions d'intérêt familial; considérant qu'il importe d'instituer, suivant ces principes, un organisme pour conseiller le ministre sur toute question d'intérêt familial."

Il est rare qu'on voie dans une loi un préambule aussi engagé sur le plan des valeurs qui y sont développées. Toutefois, nous avons décidé au gouvernement de l'inclure, étant donné l'importance de la valorisation de la famille que ce préambule permet de faire.

Par la suite, nous identifions quel sera cet organisme, son titre, de quelle façon il sera constitué - nous rappelons qu'il se composera de neuf membres - de quelle façon seront nommés ses membres, quel sera le mandat de cet organisme, quels seront ses fonctions, ses pouvoirs et diverses autres choses que nous aurons l'occasion d'étudier plus avant lorsque nous passerons à l'étude détaillée de la Loi sur le Conseil de la famille.

En conclusion, l'énoncé de politique familiale, le dépôt de la Loi sur le Conseil de la famille, est une première étape en vue d'une plus grande cohérence et cohésion. D'autres étapes et mesures suivront à brève échéance. Le gouvernement s'implique fortement dans cet énoncé, je l'ai expliqué tout à l'heure.

En second lieu, je tiens à expliquer qu'il sera important et que j'insisterai dans les mois qui viennent sur l'implication des milieux autres que le gouvernement pour le développement d'une véritable qualité de vie pour les familles dans la société. J'ai parlé plus particulièrement des milieux de travail, qu'ils soient patronal ou syndical, du milieu municipal, du milieu scolaire. Je répète qu'il est important - cela ne se fait probablement pas assez souvent - que les leaders socio-économiques et politiques disent à la

population que leur option pour cette valeur fondamentale qu'est la famille, elle existe. J'ai eu l'occasion, lors d'une entrevue à la radio, de me faire poser la question: M. le ministre délégué à la Famille - on imagine que les ministres n'ont pas de vie familiale -c'est quoi, pour vous, votre famille? J'ai répondu que ma famille, c'était la première valeur de ma vie. Non pas que je n'aime pas le métier que je fais; je trouve que le métier que je fais est extrêmement intéressant, d'autant plus que j'ai un dossier que je considère comme la première valeur de ma vie, celui de la famille. C'est un métier fort intéressant, très accaparant. Je pense que, lorsque l'on place la famille au premier rang de nos valeurs fondamentales personnelles - toute personne qui y réfléchit à fond le fera comme moi - cela nous permet d'envisager le travail de façon différente, de l'organiser de telle sorte que nous ayons du temps à consacrer à notre famille, que nous ayons du temps pour regarder grandir nos enfants, pour les éduquer, pour les voir s'épanouir. Si les leaders politiques de notre société ne le mentionnent pas, ils font une grave omission et c'est une chose qu'il faudra corriger dans l'avenir. J'invite les membres du Parlement à le dire dorénavant dans leurs discours. La famille, c'est quelque chose d'important.

On voit donc que la politique familiale, au niveau du gouvernement, est promise à ce que j'appellerais un lac Meech et, pour être bien sûr qu'il n'y aura pas de fausse interprétation sur ce que je viens de dire, quand je dis que la politique familiale est promise à un lac Meech, je veux dire qu'elle est promise à un grand succès. Merci, Mme la Présidente.

Avis de sanction de projets de loi

La Vice-Présidente: Merci, M. le ministre délégué à la Famille, à la Santé et aux Services sociaux. Avant de reconnaître le prochain intervenant, j'aimerais aviser cette Chambre qu'il y aura sanction de projets de loi ce soir, au cabinet du lieutenant-gouverneur, à 18 heures. M. le chef de l'Opposition.

M. Chevrette: Mme la Présidente, compte tenu de l'heure, je demande l'ajournement du débat.

La Vice-Présidente: Est-ce que cette motion est adoptée?

Une voix: Adopté.

La Vice-Présidente: M. le leader du gouvernement.

M. Richard: Mme la Présidente...

La Vice-Présidente: M. le député de Nicolet.

M. Richard: ...je demanderais que les travaux reprennent à 15 heures.

La Vice-Présidente: Est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

La Vice-Présidente: Adopté. Nous allons donc suspendre nos travaux jusqu'à 15 heures, cet après-midi.

(Suspension de la séance à 12 h 50)

(Reprise à 15 h 7)

Le Vice-Président: Veuillez vous asseoir, s'il vous plaît.

L'Assemblée nationale reprend ses travaux. Nous en sommes aux affaires du jour.

M. le leader du gouvernement.

Avis touchant les travaux des commissions

M. Gratton: Avant que nous revenions là où nous avons laissé ce matin, je voudrais indiquer que, ce matin, dans un avis concernant la commission de l'aménagement et des équipements qui procède présentement à l'étude de certains projets de loi privés, j'ai donné un ordre de préséance quant à l'étude de certains projets de loi. Or, je voudrais simplement indiquer aux membres de l'Assemblée qu'en ce qui concerne les deux derniers projets de loi, soit le projet 111, Loi modifiant la Loi sur la Communauté urbaine de Québec, et le projet de loi d'intérêt privé 250, Loi modifiant la charte de la ville de Québec, que j'avais donnés dans cet ordre-là, nous convenons que, si la commission en décide autrement, elle pourra inverser l'étude de ces deux projets de loi.

Le Vice-Président: Très bien, M. le leader. Nous en prenons acte et informons la commission en conséquence.

Aux affaires du jour, je comprends que nous en sommes à l'article 13 du feuilleton.

Projet de loi 94

Reprise du débat sur l'adoption du principe

Nous allons reprendre le débat sur la motion d'adoption du principe du projet de loi 94, Loi sur le Conseil de la famille, proposé par M. le ministre délégué à la Famille, à la Santé et aux Services sociaux.

Je cède, à ce moment-ci, la parole à

M. le chef de l'Opposition.

M. Guy Chevrette

M. Chevrette: Merci, M. le Président. Vous aurez remarqué cet avant-midi que c'est avec peu de conviction, peu d'emballement que le ministre a présenté son projet de loi. D'ailleurs, sur les 30 minutes qu'il a prises sur le temps de l'Assemblée nationale, il a pris au moins 25 minutes pour parler d'un énoncé de politique familiale pour ensuite en venir au projet de loi lui-même qui est la création d'un Conseil de la famille.

Cette semaine, je crois que c'est mardi, nous avons eu la chance de voir un ministre présenter un énoncé de politique familiale. Tout le monde s'attendait a ce que ce soit quelque chose de fantastique puisqu'on en parle depuis deux ans, qu'on fait des promesses depuis deux ans à la famille, aux associations de familles québécoises. On leur dit carrément que nous allons accoucher d'un plan d'action, de quelque chose de concret. De quoi le ministre a-t-il accouché, M. le Président? D'une souris, d'une coquille absolument vide, si ce n'est que d'une structure de consultation. Imaginez-vous! Depuis sept ans au Québec, les groupes, les fédérations d'associations de familles, les groupes familiaux, les associations de toute nature dans le domaine de la famille attendaient de ce gouvernement qui, depuis deux ans, leur promet mer et monde... On accouche d'une structure de consultation! On scinde en deux le Conseil des affaires sociales et de la famille actuel pour en faire deux entités distinctes. C'est tout ce dont les familles québécoises ont hérité par cet énoncé de politique, par cette structure législative que l'on dépose devant nous. Aujourd'hui, les familles québécoises sont au même point qu'elles étaient le 2 décembre 1985. Elles ont une structure de consultation qui, de toute façon, existait via le Conseil des affaires sociales et de la famille, au Québec. Rien de neuf, rien de concret, une coquille absolument vide!

Le ministre ne semble même pas connaître l'évolution de ce dossier. Le ministre ne semble même pas savoir depuis quand on discute nommément de la famille au Québec. Le ministre ne sait pas que c'est en 1981 que l'ancien ministre de la Santé et des Services sociaux du temps recevait le mandat d'élaborer une politique de la famille; que c'est en 1984 qu'on créait le Secrétariat à la politique familiale; que c'est le 23 octobre 1984 qu'on avait la publication d'un livre vert, au québec, pour les familles québécoises, document devant servir à une vaste consultation publique. Vous vous souviendrez que, le 10 juin 1985, le gouvernement précédent avait procédé c'était M. Lévesque, à l'époque - à la nomination d'un ministre délégué à la Famille; c'était le député de Nicolet, M. Yves Beaumier, qui est devenu titulaire du poste de ministre délégué à la Famille. Le 25 octobre 1985, la grande commission présidée par Maurice Champagne-Gilbert avait publié un premier rapport sur les consultations publiques sous sa responsabilité. Le 5 décembre 1985, trois jours après l'élection de ce gouvernement que nous avons en face de nous, à nouveau, cette commission publiait un nouveau rapport. Elle donnait à la ministre qui venait à peine d'être nommée, Mme Lavoie-Roux, l'actuelle ministre de la Santé et des Services sociaux, un rapport détaillé et complet. Donc, c'est au mois d'avril, à peine trois mois après la nomination de la nouvelle ministre chargée de la famille, que cette dernière avait entre les mains l'ensemble des rapports de la consultation qui avait été menée sur une période de plusieurs mois.

On se retrouve en 1987, au moment où on croyait que la ministre, Mme Lavoie-Roux à l'époque, qui avait la responsabilité du dossier, allait entrer en gare avec le train. Mais, parce qu'on n'était pas capable de rien produire, parce qu'on ne s'était pas penché sur les rapports des consultations, parce qu'on n'était pas prêt à agir concrètement, on change de conducteur. C'est le ministre Dutil, l'actuel ministre délégué à la Famille, qui prend la barre. Tout cela pour en arriver, en décembre 1987, dans une session intensive, à la toute fin d'une session, à la création d'un organisme consultatif.

Qu'attendaient au juste les familles de tout cela, M. le Président? Les familles s'attendaient à voir le ministre des Finances se lever et dire: II y aura les allégements fiscaux pour la famille québécoise. Elles s'attendaient que la ministre de la Condition féminine se lève et dise: Les places en garderie au Québec sont insuffisantes pour aider les jeunes couples, les familles monoparentales, les femmes qui veulent continuer à faire carrière. M. le Président, les gens s'attendaient que la ministre déléguée à la Condition féminine puisse nous annoncer la création de X milliers de places en garderie au Québec. Les familles québécoises s'attendaient également que le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu et du Travail puisse annoncer des amendements au Code du travail, permettant précisément à ces femmes qui travaillent mais qui veulent aussi s'occuper de leurs enfants de bénéficier véritablement d'allégement de travail tout en conservant une sécurité d'emploi. Cela a été demandé dans toutes les tournées de consultation qu'on a eues. Rien de cela. C'est la déception la plus complète de la part des fédérations d'associations de familles au Québec.

C'est la désolation de voir tant de mois

d'efforts, tant d'années d'efforts, sept ans d'efforts pour en arriver à regarder faire un gouvernement qui n'accouche que d'une structure consultative. Pourtant, ces familles espéraient beaucoup parce qu'elles avaient compris, en campagne électorale, que, dans le programme libéral, il y avait au moins des engagements. Il y avait l'engagement de l'instauration d'une politique globale de la famille. C'est le numéro 51 de leurs recommandations. Le numéro 52: La création d'un poste de ministre délégué à la Famille. Cela a été fait. L'intégration des femmes à l'emploi, ce n'est pas fait. Le soutien à la vie économique des familles, élargir l'exemption fiscale relative à la prise en charge des enfants, rien de fait. Pourtant, c'est dans le programme libéral et dans les engagements électoraux des libéraux. Mesures de soutien à la famille, congés parentaux prolongés, accélérer le développement du réseau des garderies, tout cela est dans le programme du Parti libéral, M. le Président, et on n'en retrouve rien dans l'énoncé de politique de ce gouvernement.

M. le Président, ces sociaux-démocrates de fin de semaine qui, avec un sondage en poche, deviennent tout à coup sensibles aux réalités sociales et familiales, se dépêchent à écrire des papiers. Ils font en sorte, pour calmer les citoyens, de produire des papiers. Mais regardons, concrètement, les incohérences et l'absence de cohésion de ce gouvernement. Je regardais le ministre, ce matin, se lever et dire: II y a deux mots que vous allez retrouver souvent dans mon discours, c'est cohérence et cohésion. Il a dit: Cohésion. Nous allons tous, sectorielle-ment parlant, penser famille. Vous allez voir combien on va avoir de la cohésion. Nous aurons de la cohérence, parce que jamais on ne dira le contraire de ce qu'on annonce, jamais on ne fera le contraire de ce qu'on vous dit.

M. le Président, ça, c'est le ministre qui parle la journée de son énoncé de politique. Le lendemain matin - cela n'a pas été long pour être incohérent - croyez-le ou non, le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu qui est censé penser famille au Québec, qu'annonce-t-il? Une révision de la politique de l'aide sociale, et qui sont pénalisées? Les femmes enceintes, les familles monoparentales... Une femme qui a déjà un enfant, si elle est enceinte, elle est pénalisée quatre mois avant son accouchement, c'est-à-dire seize semaines et cinq semaines après l'accouchement. Une drôle de façon de penser famille.

Imaginez-vous que ces gens sont sensibles à la notion de famillel Ces gens ont une sensibilité extrême face au problème de la dénatalité que nous vivons au Québec. Au moment où le Québec est le troisième pays le plus faible sur le plan démographique, M. le Président, sur le plan de sa reproduction, 1,4 enfant par famille, ce même gouvernement qui disait penser famille à compter de mardi passé, mercredi matin, ne pensait plus famille, il pensait à couper les redevances aux femmes qui sont dans l'attente d'un enfant. La même chose pour les couples qui ont un ou deux enfants. S'ils refusent d'adhérer à un des programmes qui leur seront offerts, ils seront coupés de 100 $ par mois. Drôle de façon d'inciter les parents à faible revenu, les plus démunis de notre société, à avoir des enfants. C'est cela qu'on appelle penser famille! Est-ce que c'est penser famille que de faire ce que le ministre des Finances a fait au mois d'avril dernier? Sous prétexte qu'il voulait encourager les familles de trois enfants, 9000 familles au Québec, il a coupé 96 000 familles qui avaient deux enfants, la fameuse prime de disponibilité qu'on donnait aux couples ayant deux enfants; 96 000 couples ont été coupés littéralement. Vous pensez famillel C'est formidable, c'est fantastique, drôle de pensée familiale! Drôle de monde qui s'occupe des familles, drôle de raisonnement!

M. le Président, est-ce que vous pourriez demander à la députée de Groulx de me laisser la possibilité de faire mon exposé sans être dérangé?

Le Vice-Président: Oui, M. le chef de l'Opposition. Je demanderais simplement aux députés d'éviter de faire des causus ou de passer des remarques...

Une voix: ...

(15 h 20)

Le Vice-Président: À l'ordre, s'il vous plattl De la même façon, Mme la députée, ne reprochez pas...

Une voix: ...

Le Vice-Président: Non, mais vous venez de me... Je suis en train de faire une intervention, vous faites exactement la même chose qu'on reproche à une autre députée. Donc, je demanderais à l'ensemble des députés de garder leurs commentaires. Si vous avez des commentaires à faire, je vous inviterai à prendre la parole à votre tour. M. le chef de l'Opposition.

M. Chevrette: Oui, M. le Président. Je vais demander au moins aux mères de famille de cette Chambre d'écouter.

Donc, je dirai que ce gouvernement n'a aucune sensibilité vis-à-vis de la famille, comme il a peu de sensibilité, d'ailleurs, à toute la dimension sociale au Québec. Ce sont des sociaux-démocrates de fin de semaine. Quand le premier ministre voit un sondage et qu'il se rend compte que, pour ce qui est du côté social - est-il bien jugé par la population par rapport aux actions du

gouvernement Bourassa? - le sondage dit "80 % en désaccord avec la vision du gouvernement actuel", houp! il devient un social-démocrate de fin de semaine. Bien oui, il faut s'occuper du social. Il faut faire quelque chose. Aie! le ministre délégué à la Famille, dépêche-toi, écris-nous un énoncé de politique, calme notre monde! Ce sont de grands sociaux-démocrates de fin de semaine. Ils vont essayer de nous faire croire, au moment où on traverse des années de vaches grasses, qu'il était temps, de la part d'un gouvernement, de manifester cette sensibilité, de concrétiser ce que veut dire avoir une pensée famille. C'est toute une pensée. On aurait pu croire qu'il y avait une pensée famille s'il était arrivé avec des mesures fiscales concrètes, et s'il avait déposé une incitation, par exemple, par des mesures fiscales à la naissance d'un deuxième enfant.

On aurait pu penser qu'il pensait famille si on avait accordé la sécurité d'emploi, par exemple, aux femmes désireuses d'avoir un enfant qui voulaient travailler à temps partiel, mais qui voulaient conserver, au moins, une sécurité d'emploi. Là, on aurait dit: II pense famille un peu. On aurait pu penser qu'il commençait, au moins, à penser famille si la ministre déléguée à la Condition féminine s'était levée en cette Chambre et avait dit: Voici ce que j'entends faire, dans le cadre de ma négociation avec le gouvernement fédéral, du 1 800 000 000 $ qu'on ira chercher pour le système de garderie. Moi, j'ai l'intention de présenter à la population du Québec une proposition donnant l'accès à de plus en plus de couples pour les garderies. Rien. Rien, elle ne sait pas où elle s'en va. La ministre s'est levée ce matin - vous l'avez vue comme moi, M. le Président - et a répondu à ma collègue de Marie-Victorin et à ma collègue de Maisonneuve: Voici, il y aura des consultations bientôt. Elle a dit: J'entends bien faire connaître mon opinion au ministre.

Penser famille, c'est y penser même dans l'élaboration des énoncés de politique. Penser famille, c'est avoir eu une concertation au préalable entre le ministre délégué à la Famille, le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu, la ministre déléguée à la Condition féminine, le ministre des Finances, la ministre de la Santé et des Services sociaux. C'est ensemble, dans un comité interministériel qu'on élabore un énoncé de politique globale et qu'on se soumet à la consultation du public mais, au moins, on a eu une pensée famille collective. La preuve en est faite hors de tout doute raisonnable par l'attitude du ministre du Travail et de la Sécurité du revenu. Ils sont loin de penser famille collectivement. Il y en a un qui pense à faire rêver le monde sur des grands principes et l'autre qui détruit la famille par des restrictions dans l'aide sociale. C'est une pensée famille; c'est fantastique.

Cela démontre que chacun de ces ministres, loin de travailler ensemble, ayant comme objectif une vision globale de la famille, travaille sectoriellement, s'amuse avec ses bébelles dans sa cour et ne pense pas à avoir cette vision globale et présenter des programmes concrets d'action qui s'inscrivent dans une politique globale. Loin de là. On n'a rien jusqu'à maintenant qui nous incite à croire quoi que ce soit, à croire les propos du ministre.

D'ailleurs - je le répète - rappelez-vous qu'au début de son exposé, c'est sans aucune conviction que le ministre s'est levé. Il a été forcé de produire un papier rapidement, parce que ces sociaux-démocrates de fin de semaine ayant compris qu'il fallait qu'il fasse quelque chose, les familles québécoises faisant de plus en plus de lobbying, autant auprès de l'Opposition que des députés, le premier ministre a sûrement dit... Il est très fort sur les sondages. Sous les coups de vent, il devient comme une girouette: si le vent est du nord, houpl la tête lui revire et il part de l'autre bord, et, inversement, si le vent change de bord. Mais on dirait qu'il vit dans un pays où les tornades sont fréquentes, parce qu'il virevolte sur son siège. De social-démocrate une fin de semaine, il peut devenir tout à fait insensible à un programme social quelconque, purement et simplement parce que la population ne réagit pas pour le moment. Il se tournera de bord en catastrophe quand le vent tournera de bord. C'est de même qu'on est administré depuis deux ans, M. le Président, au gré du vent, sans conviction profonde, sans vision globale de l'avenir, sans conviction d'aucune nature vis-à-vis des problèmes sociaux. On est à l'ère de la privatisation et de la libre concurrence. On administre l'État comme une chaîne de magasins. Les cannages sont alignés et cela coûte tant par cannage, quel que soit ton revenu. C'est de même qu'on administre. Un État, ce n'est pas cela. Un État, un gouvernement responsable, un gouvernement sensible, c'est un gouvernement qui est là pour redistribuer la richesse à partir des besoins connus de nos concitoyens. C'est cela le rôle de l'État fondamentalement, et ces gens-là ne l'ont pas compris.

Ils reprennent à leur compte l'état de la famille québécoise. On sait que la famille québécoise connaît des problèmes majeurs, et ce n'est pas d'aujourd'hui, c'est depuis une vingtaine d'années. On sait que l'éclatement de la famille... Le mode de vie de la famille, le fonctionnement de la famille ont changé au Québec. Cela ne prend pas un énoncé vide de sens pour reconnaître cela. Tout le monde sait cela. On en est rendu au point où il ne s'agit pas de rêver sur de grands principes, on a atteint le point où les gens demandent des actions concrètes. Et les

actions concrètes, si on croit à la famille, on ne les retrouve pas dans de grands principes d'encadrement père-fils, mère-fille, parents-enfants. C'est bien beau ça, mais ça veut dire quoi concrètement? Comment va-ton transposer dans des programmes concrets le soutien à la famille?

Qu'est-ce qu'on attend pour permettre aux femmes, par exemple, qui, de plus en plus, accèdent au marché du travail, qu'est-ce qu'on attend pour bâtir des programmes concrets avec des mesures d'action concrètes leur permettant de jouer leur rôle de mère, parce qu'elles le veulent, parce qu'elles le désirent, parce qu'elles veulent avoir les moyens de le faire? C'est ça qui serait une politique concrète, de dire, par exemple: Si vous avez un deuxième enfant, l'État vous vient en aide de telle façon que vous puissiez continuer votre carrière tout en étant également dans la possibilité de faire garder votre enfant, de vivre avec votre enfant, de bénéficier de congés parentaux suffisants, d'une sécurité d'emploi aménagée avec des congés, avec ou sans solde, au besoin pour permettre précisément à des couples désireux d'avoir un enfant d'en avoir un sans craindre de perdre leur emploi. Quand on veut encourager la natalité, est-ce qu'on arrive avec des coupures dans des mesures d'aide sociale, des coupures pour la femme sur le point d'accoucher, quand elle est pénalisée quatre mois avant et encore cinq semaines après? Est-ce que c'est cela, avoir une pensée famille?

M. le Président, ce gouvernement fait preuve d'ignorance des besoins de la population et des besoins de la famille. Il fait preuve d'incompétence totale vis-à-vis des mesures à prendre. Les familles québécoises ne sont pas dans l'attente d'une structure de consultation, elles nous ont toutes dit ce qu'elles voulaient. On sait que ce sont des besoins de législation en matière de relations du travail, on sait que ce sont des mesures fiscales. C'est de l'encouragement par le biais de mesures fiscales que les familles attendent. On sait qu'une famille qui a un enfant reçoit 324 $ par année en allocations familiales, imaginez-vous, et pour un deuxième enfant, quelque 480 $. On sait que les statistiques nous disent que cela coûte au moins 2300 $ à 2400 $ au minimum, au strict minimum, pour assurer la vie normale d'un enfant dans une famille.

Est-ce qu'on va rire des familles longtemps? Est-ce que ce sont avec des mesures de ce genre qu'on va encourager la famille québécoise? Est-ce que c'est avec des mesures de ce genre qu'on va encourager les jeunes couples, les femmes et les hommes désireux d'avoir des enfants? On est porté à croire que les jeunes ne veulent pas d'enfants, M. le Président. La plupart en veulent, mais à cause du contexte dans lequel on place l'entité familiale, il n'y a aucune incitation à le faire; au contraire, il y a des barrières dues précisément au statut monétaire, au statut financier, aux possibilités qu'ont les jeunes couples de se faire aider ou de pouvoir compter sur un réseau de garderies. (15 h 30)

C'est absolument aberrant de voir le ministre prendre 25 minutes, ce matin - il a bien compris qu'il ne présentait pas grand-chose comme projet de loi, et cela m'a fait sourire - pour dire, d'une façon plutôt terne: Écoutez, j'ai fait un énoncé de politique, ce sont de beaux principes. Bientôt, je vous viendrai en aide - il disait cela il y a deux ans - bientôt, nous aurons des mesures concrètes. Voilà le premier coup de barre que je donne: je scinde le conseil de la santé et de la famille en deux pour créer un conseil de la famille qui sera beaucoup plus efficace, parce qu'il pourra consulter, il pourra donner des avis au ministre, il pourra le renseigner sur les problèmes vécus. Le ministre aurait avantage à lire la brique de Maurice Champagne-Gilbert qui, lui, a parcouru le Québec, a recueilli à peu près tout ce que les parents avaient à dire dans toutes les régions du Québec. C'est tout colligé, il n'a qu'à ouvrir le volume et à lire, à faire preuve d'un peu d'imagination et à aller s'asseoir avec le ministre des Finances et dire: Écoutez, qu'entendez-vous faire pour la famille? Il faut penser famille. Si on pense famille, pourquoi le ministre délégué à la Famille ne réunit-il pas ses collègues, ceux que j'ai nommés tantôt, la ministre déléguée à la Condition féminine, le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu et ministre du Travail, le ministre des Finances, la ministre de la Santé et des Services sociaux? Qu'ils s'asseoient ensemble et se demandent: Qu'est-ce qu'on peut faire concrètement pour la famille? Si cela avait été le cas, on nous aurait déposé en Chambre une véritable politique familiale, non seulement des principes vides, non seulement le fait qu'on a des orientations. On voit bien par l'énoncé de politique que le ministre semble avoir une volonté politique avec un point d'interrogation; mais une volonté d'action par exemple, on n'en décèle aucune. Aucune volonté d'action! Il manque carrément tout un programme d'action si on veut parler de politique familiale. Il manque un train de mesures législatives pour avoir véritablement une politique familiale concrète, tangible, palpable par les familles québécoises. Mais non, le ministre s'est contenté de remplir le devoir qu'on lui avait demandé, et ce, sans aucune conviction, je le répète, sans aucune conviction.

On s'imagine qu'on va faire taire les gens parce qu'on a nommé un ministre délégué à la Famille qui écrit une

quarantaine de principes dans environ trois ou quatre pages et qui trouve à la page 11, le moyen d'écrire: Une politique de la famille, vous savez, c'est à moyen et long terme. Donc, tout ce qu'on vous a dit durant les élections, tout ce qu'il y a dans le programme du Parti libéral du Québec, tout ce que j'ai écrit dans mon énoncé de politique que je viens de déposer, ne vous faites pas de bile, ce n'est pas pour aujourd'hui. C'est ça qu'il nous dit à toutes fins utiles. Ne vous cassez pas la tête, si vous attendez ça pour aujourd'hui, vous vous trompez parce qu'à la page 11, il faut au moins lui reconnaître ça, il a eu l'honnêteté intellectuelle, dans son cas, je dis bien, d'avertir les parents que ce n'était pas pour aujourd'hui. C'est peut-être la seule belle phrase correcte, concrète et honnête qu'il y a dans ce dépliant-là. Ne vous attendez pas à quelque chose de concret à court terme.

Pourtant, M. le Président, j'ai la conviction profonde que les familles québécoises, que les associations et que la Fédération des associations de familles escomptaient beaucoup parce qu'on venait de sortir de la crise économique. Le ministre des Finances s'est même permis de dire: Oui, c'est vrai, on traverse des années de vaches grasses. Ça veut donc dire que l'argent entre bien au gouvernement. Alors, si on croit à la famille, à ce moment-là, si on pense famille, pourquoi ne pas avoir profité de ces années de vaches grasses pour en faire bénéficier un tant soit peu la famille québécoise? C'est parce qu'on n'y croit pas, M. le Président. On n'y croit pas, c'est le dernier de nos soucis. Ce qui les intéresse, c'est tout ce qui frappe l'oeil, indépendamment qu'on perde des compétences ou qu'on renie des compétences québécoises.

Le libre-échange, ce sont de gros débats, personne ne comprend, et, nous autres, on se gargarise de ça. Le lac Meech, "c'est-tu" beau? "Kid Kodak" se fait poser tous les jours et ça paraît bien. Mais les vrais problèmes du monde, ceux que vivent les familles, les enfants, les familles monoparentales au Québec, les problèmes qu'ils traversent quotidiennement... Ils ont fait confiance à ce gouvernement. Ils ont été élus. Et, de plus en plus, il y a du désenchantement. L'argent entre, mais on ne sait pas où il va! Et la seule marotte qu'ils ont, c'est de dire que c'est la faute de l'ancien gouvernement. Ça doit être la faute de l'ancien gouvernement si le ministre des Finances, la ministre déléguée à la Condition féminine, le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu coupent des subventions aux familles. Oui, ça doit être la faute du PQ.

C'est la faute du PQ si le ministre des Finances a enlevé la prime de disponibilité pour les femmes, pour 96 000 familles ayant deux enfants. Ça doit être la faute du PQ si le ministre du Travail, de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu vient de couper les prestations des femmes enceintes, vient d'enlever une portion de leur maigre pitance mensuelle pour les femmes qui sont sur le point d'accoucher. Ce doit être la faute du PQ si on va enlever 100 $ par mois aux couples qui n'acceptent pas d'adhérer à un programme. Est-ce que c'est la faute du PQ? Est-ce que c'est la faute du PQ si le gouvernement ne profite pas des années de vaches grasses pour créer des places en garderies pour les familles? Est-ce que c'est la faute du PQ - vous deviez faire mieux que nous - si le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu, en plus de ne pas être capable de présenter ses projets de loi à temps, n'a même pas le courage politique de présenter quelques maigres amendements pouvant permettre précisément à l'entité familiale d'avoir un meilleur sort dans les lois du travail? Ce n'est toujours pas la faute du PQ! On leur a dit qu'on ne valait rien et qu'ils seraient meilleurs, mais il n'y a rien de fait pour la famille québécoise, absolument rien!

Ce furent des reculs. Qu'on pense au ministre des Finances, qu'on pense au ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu, ce sont deux reculs évidents. On a même désindexé les familles, on a désindexé l'aide sociale aux trois mois. Ce n'est toujours pas le PQ qui a fait cela! C'est encore un recul de plus. Si on se cassait la tête un tant soit peu, on trouverait une multitude de reculs pour le pauvre, le petit, le salarié moyen, les plus démunis de notre société, et, par ricochet, nos familles les plus démunies de notre société.

Ce gouvernement insensible, ces sociaux-démocrates de fin de semaine qui administrent l'État au gré du vent, est-ce qu'ils ont véritablement pris un virage social quelconque ou s'ils sont convaincus de l'importance d'agir et d'agir vite? Je le disais tantôt, nous avons un grave problème sur le plan démographique: 1,4 enfant par famille. Est-ce qu'on peut faire quelque chose comme État? Oui, à la condition qu'on ait une volonté d'action, non pas une volonté politique pour quelques grands principes. Tout le monde est pour la vertu et la tarte aux pommes, il n'y a pas de problème.

Lisez l'énoncé de politique du ministre, je suis certain qu'il rit dans sa barbe, seul. Il doit être seul à rigoler. Ce qu'il doit rigoler quand il lit cela tout seul! J'espère qu'il n'est pas assez naïf pour penser que le monde ne sait pas lire. J'espère qu'il n'est pas assez naïf pour croire que les associations ne se rendront pas compte qu'il n'y a rien dans cela. J'espère qu'il n'est pas assez naïf pour croire qu'il a franchi un pas de géant en créant une structure consultative.

Parlant de cohérence, je vais en ajouter une autre. Vous rappelez-vous, M. le Président, le fameux rapport Gobeil qui recommandait l'abolition de 20 comités consultatifs? Le gouvernement actuel a dit: C'est fini, pour nous, les structures consultatives, on va aller jaser avec le vrai monde, on va aller voir où il est. Je revois encore le ministre du Loisir qui s'épivardait avec cela - il a quelque chose à déployer, lui - et il disait: Ah! Les structures consultatives! Il "s'effoirait" un peu partout avec cela.

M. le Président, ce gouvernement, chaque fois qu'il a un problème depuis quelques mois, au lieu de prendre le taureau par les cornes, d'agir et de présenter des programmes d'action... Il vient de créer deux structures consultatives. Le Conseil consultatif de la jeunesse. Pourquoi? Parce qu'il ne voulait rien faire pour les jeunes. Il leur a créé un suçon de court terme. Amusez-vous, consultez-vous, dites-nous quels seraient vos besoins! Dites-nous donc quelles sont vos aspirations! C'est cela qu'il a dit aux jeunes. Et là, certains jeunes on dit: Ouais! On a une structure, au moins, j'espère qu'avec cette structure, on va aboutir à quelque chose. Moi, je dis aux jeunes: Vous allez aboutir à quelque chose quand on aura changé de gouvernement. Vous pouvez toujours vous amuser en consultation si vous voulez, cela ne vous donnera rien avec ce gouvernement. (15 h 40)

Qu'est-ce qu'ils ont fait quand ils ont vu que les familles québécoises s'agitaient? Ils ont dit: II faudrait bien les calmer. Notre conseil général a dit: Cela bouge un peu dans les associations de famille. Il faudrait que vous produisiez vite, M. le ministre. Il a réussi à asseoir deux fonctionnaires et ils ont accouché d'un petit texte en disant: À moyen et long terme, vous aurez peut-être quelque chose. C'est à peu près cela, le texte. On a dit: C'est beau, c'est fin, on vous aime bien; les familles, c'est beau, il faut croire à cela, les parents, les enfants, la relation, les liaisons, c'est fantastique. Ils ont dit: Tiens, calmez-vous, le Conseil de la famille. C'est cela qu'ils ont.

Allez-vous me dire que les familles québécoises sont mieux ce matin qu'hier, M. le Président? Absolument pas. On crée un organisme qui risque purement et simplement de reprendre le processus de consultation. On crée une structure de consultation qu'on ridiculisait il y a à peine deux ans. On crée une structure de consultation et on dit: Dites-nous donc quels sont vos problèmes. Qu'est-ce que cela a donné de créer une commission itinérante au Québec qui a recueilli tous les problèmes vécus par la famille? Qu'est-ce que cela aura donné de dépenser des centaines de milliers de dollars pour permettre à des gens de venir s'exprimer, de venir dire ce qu'ils pensent et ce qu'ils voient comme solution au problème, comme remède aux problèmes que vivent les familles? C'est un perpétuel recommencement.

Le gouvernement précédant le gouvernement libéral avait précisément produit un document de réflexion. C'est ce document de réflexion... J'avais envie de dire au ministre ce matin qu'il ne disait pas la vérité parce que je n'ai pas le droit de dire autre chose. J'avais presque envie de lui dire: Est-ce assez épouvantable, effrayant, inconcevable, impardonnable, et je pourrais continuer longtemps, un ministre délégué à la Famille qui ne sait même pas ce qui s'est fait au Québec dans le domaine de la famille depuis sept ans! Il ne sait même pas cela.

Il ne semblait pas savoir que c'était le Parti québécois qui avait lancé le livre vert de réflexion sur la famille québécoise. Il ne semblait pas savoir que Maurice Champagne-Gilbert avait fait une tournée du Québec avec une équipe, qu'il avait colligé cela, qu'il avait produit deux rapports. Il ne semblait pas savoir non plus que c'était le Parti québécois en cette Chambre, le 11 octobre dernier, qui a fait une motion pour en arriver à avoir une politique de la famille. Il ne semblait pas savoir non plus -ou il ne lit pas les journaux - que c'est nous qui avons fait un colloque sur une politique familiale tout dernièrement et qu'on est sensible à la dimension famille et que c'est nous qui avons tracé le chemin là-dessus. Il y a eu un ministre délégué à la famille bien avant que le Parti libéral se décide, après deux ans de pouvoir, à en nommer un. Il en a nommé un mais il a du rattrapage à faire dans ses lectures s'il veut savoir au moins ce qui s'est fait.

Le gouvernement libéral que nous avons en face de nous sera crédible à une condition. Il sera crédible à la condition de passer à l'action. Il sera crédible à la condition de proposer des solutions concrètes, de mettre de l'argent sur la table pour alléger le fardeau fiscal de ces familles, de mettre de l'argent sur la table pour permettre aux jeunes Québécois et aux jeunes Québécoises d'avoir des enfants tout en continuant leur profession ou leur carrière, de mettre sur la table les amendements législatifs qui s'imposent pour permettre une forme de sécurité d'emploi permettant à ces jeunes Québécois et Québécoises d'avoir des enfants s'ils le désirent.

C'est comme cela qu'on s'en sortira. Pas d'un comité consultatif à un autre, pas d'un conseil consultatif à un autre. Les gens en ont soupé d'être consultés. Ils ont crié leurs besoins pendant des mois et des années. Ils attendent concrètement les gestes, M. le Président. C'est là que le gouvernement serait crédible, s'il déposait devant la population des mesures concrètes, des

mesures collant aux réalités, des mesures qui viendraient régler les problèmes que vivent les familles québécoises.

M. le Président, en guise de conclusion, je vous dirai qu'il nous faut cependant demander à ces familles de ne pas se décourager, de ne pas lâcher parce qu'elles ont été bernées, de ne pas abandonner le combat, leur lutte qu'elles font depuis un bon moment parce que ce gouvernement a été insensible à venir jusqu'à aujourd'hui. Je peux dire avec eux que c'est vrai qu'ils ont été bernés, que c'est vrai qu'ils ont été leurrés; c'est vrai qu'on a pris des engagements et qu'on ne les respecte pas, c'est vrai qu'on trahit sa parole quotidiennement de ce côté-là de la Chambre. Mais je demande aux familles québécoises d'espérer, parce qu'elles ont une cause extraordinaire et contre le gros bon sens on ne peut pas toujours vaincre, même si on est insensible.

Un jour ou l'autre, le gros bon sens triomphera. Le Québécois par nature, par essence, dans sa personnalité la plus profonde, c'est un combatif. Il n'abandonnera pas. Les Québécois vont lutter pour obtenir des mesures concrètes. Ils vont venir à bout de gagner contre ce gouvernement social-démocrate de fin de semaine. Ils vont réussir à motiver suffisamment les gens, à mobiliser les gens, les groupes, les associations pour faire bouger ce gouvernement insensible, M. le Président. J'en ai la conviction profonde.

Quant à nous, bien sûr, n'étant pas contre la vertu, une structure de plus, une structure de moins, à ce stade-ci, si ça peut faire plaisir au ministre d'avoir un conseil de la famille, même si son gouvernement ne croit pas aux structures consultatives, on ne se battra pas pendant 40 heures ou 50 heures en commission parlementaire, article par article. Je lui dirai, par exemple, qu'on va crier très haut ici comme formation politique qui a toujours été sensible à la dimension de la famille; nous allons crier très haut et à plusieurs à part cela, pas seulement moi de mon côté, M. le Président, comme responsable du dossier. Il y a plusieurs de mes collègues qui vont s'adresser à cette Chambre et qui vont rappeler les engagements libéraux, qui vont rappeler les engagements électoraux et le programme du Parti libéral, qui vont rappeler à ces mêmes gens qui parfois sont sensibles, vingt-quatre heures à tous les deux ans, à la dimension sociale familiale. On va leur rappeler, M. le Président, qu'ils ont fait rêver du monde et, quant à nous, un jour ou l'autre, ils devront livrer la marchandise. C'est ça notre rôle d'Opposition, tel que nous le considérons.

À toutes fins utiles, si je fais un résumé, le ministre a déposé un papier d'apaisement. Il a voulu apaiser, calmer la famille québécoise ou les familles québécoises. Il a déposé un papier que je considère comme une coquille vide. Rien de concret pour alléger le fardeau fiscal de la famille. Rien pour aider la femme. Rien sur le plan législatif pour aider l'harmonisation et l'organisation de la vie de famille. Rien pour les garderies, je l'ai dit. Rien en allégements fiscaux. Absolument rien, M. le Président. Je répète qu'il y a eu au moins trois reculs évidents pour la famille. Qu'on pense à l'aide sociale déposée par le ministre. Qu'on pense à la désindexation également de l'aide sociale. Qu'on pense à la baisse des frais de scolarité pour les jeunes assistés sociaux, cela aidait la famille de baisser de 100 $ à 25 $. Qu'on pense à la prime d'accessibilité enlevée à 96 000 familles québécoises par le ministre des Finances.

Je comprends maintenant peut-être mieux pourquoi le ministre délégué à la Famille, ce matin, sentait le besoin de dire: Je vais utiliser souvent deux mots: cohésion et cohérence. Pour avoir été aussi incohérent, pour avoir autant manqué de cohésion sur le plan interministériel, M. le Président, je comprends qu'il ait besoin de le crier fort, s'il veut accréditer les notions de cohérence et de cohésion. Je vous dirai, quant à nous, comme formation politique, que nous continuerons à nous définir une politique claire avec des programmes d'action. Pas seulement une volonté politique d'agir, une volonté de passer à l'action, M. le Président, et de véritablement venir en aide aux familles québécoises qui attendent, non pas des voeux pieux d'un gouvernement, non pas des structures consultatives du gouvernement, mais qui attendent du gouvernement qu'il mette en oeuvre les solutions qu'eux-mêmes ont suggérées au gouvernement.

Là-dessus, M. le Président, on pourra dire, à ce moment-là et seulement à ce moment-là, qu'on aura commencé à travailler concrètement pour les familles québécoises. Merci.

Le Vice-Président: Je vais maintenant céder la parole à Mme la députée de Châteauguay. (15 h 50)

Mme Pierrette Cardinal

Mme Cardinal: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir d'intervenir sur le projet de loi 94. Étant moi-même mère de famille et très consciente de l'importance du milieu familial pour l'épanouissement physique et moral de nos enfants, je ne suis pas aussi pessimiste que le chef de l'Opposition, et, dans le projet de loi présenté par le ministre responsable de ce dossier, on établit, de façon explicite, la raison qui incite le gouvernement à présenter une telle loi qui conduira à des gestes concrets.

Plus exactement, quatre facteurs ont

influencé la décision du gouvernement de proposer un énoncé d'orientations. En premier lieu, nous considérons que la famille est le premier milieu de vie, d'apprentissage, de socialisation, et que le bien-être de la famille et des individus qui la composent est la base même du bien-être de la société. En deuxième lieu, on considère que la contribution sociale des parents comme premiers responsables des familles et de la prise en charge des enfants mérite d'être soutenue, encouragée par une volonté collective. En troisième lieu, le gouvernement québécois se doit de favoriser l'expression des familles, de leurs représentants, des milieux et des institutions concernés par des questions d'intérêt familial. Enfin, on considère qu'il importe d'instituer, suivant ces principes, un organisme pour conseiller le ministre sur toute question d'intérêt familial.

Le thème de la famille a fait l'objet d'études, de colloques et de congrès de la part des formations politiques au Québec, mais le gouvernement antérieur n'a pas pris de position ferme autre que de présenter des rapports. Nous, nous avons pris les premières bases d'une politique qui se veut également dans un modèle d'action qui sera global et définitif.

Dans un fascicule distribué par le ministre délégué à la Famille, à la Santé et aux Services sociaux, intitulé La politique familiale, les orientations ont fait le point sur l'état actuel de la famille au Québec, afin d'apporter des solutions réelles. Ce document est récent puisqu'il date de 1985. Sans passer dans l'ensemble des revues de la statistique, contentons-nous de rapporter une d'entre elles qui a d'ailleurs fait l'objet de manchettes à plusieurs reprises au cours des dernières années. Il s'agit de la composition des familles monoparentales et de la présence des mères de famille sur le marché du travail. Ces deux composantes, en effet, ont profondément marqué l'évolution de la famille au Québec, et des raisons d'ordre social et économique ont incité plusieurs changements quant au rôle assumé par les parents.

Au sujet de la proportion des familles monoparentales, on remarque, dans le recensement de 1986, que les familles monoparentales avec enfants de 0 à 24 ans représentent 8 % de l'ensemble des familles et des enfants de 0 à 24 ans à la maison. En ce qui a trait à la présence des mères sur le marché du travail, selon le recensement de 1981, alors que le taux d'activité total des femmes est de 47 %, et que cette proportion atteint 70 % chez les femmes de 20 à 24 ans et de 62 % chez les femmes de 25 à 40 ans, 44,6 % des mères d'enfants de moins de 6 ans occupent un emploi. Et là, il faut repenser les orientations familiales.

Enfin, on ne saurait trop insister sur le phénomène de la fécondité qui accuse une diminution radicale au Québec depuis les 30 dernières années. Une commission parlementaire a étudié, en 1985, toute cette question portant sur l'étude de l'impact culturel, social et économique des tendances démographiques actuelles sur l'avenir du Québec comme société distincte. Dans un tel contexte, il est certain que la réalité familiale est de plus en plus complexe à saisir et à vivre. À l'égard d'une telle situation, le gouvernement se dit fort préoccupé d'assurer une qualité de vie de la famille québécoise, et il convient que la complexité et les difficultés rencontrées par les familles rendent important le soutien collectif qui doit être apporté à la famille.

Dans son énoncé d'orientations, le ministre délégué à la Famille, à la Santé et aux Services sociaux prend soin de faire remarquer, à propos du rôle de l'État, que la principale préoccupation du gouvernement est de chercher à répondre le plus directement possible à cette attente des représentants des familles qui réclament du gouvernement de penser famille - c'est ce que nous faisons - et, au mieux, de soutenir la natalité, le cas échéant, en tenant compte de la réalité familiale dans toutes les politiques où il peut être requis de le faire. Voilà un élément nouveau en plus de la création d'un organisme conseil auprès du gouvernement qui guidera les actions de ce gouvernement dans les nouvelles initiatives politiques et sociales qu'il faudra mettre de l'avant.

Dorénavant, les différents ministères et organismes publics devront tenir compte de ce concept de la famille québécoise, de manière à y insérer les éléments de soutien d'aide susceptibles d'améliorer la qualité de vie de la famille québécoise au nom de la justice, de la sécurité pour tous les membres de la famille.

Enfin, l'objectif général de la politique familiale se résume de la façon suivante: On reconnaît l'importance de la famille en tant qu'institution et milieu de vie, notamment par le soutien collectif aux parents et au milieu familial. Le champ d'application de ce projet de loi couvrira un ensemble de secteurs d'intervention comme le soutien économique aux parents, l'habitation, le travail, les services de garde, la famille et les loisirs, ainsi que l'immigration et bien d'autres.

Comme on le voit, il s'agit de favoriser l'expression des familles à l'égard du développement de la politique familiale, en assurant une meilleure concertation gouvernementale, et de faciliter la tâche aux différents ministères et organismes gouvernementaux à poursuivre ces objectifs. Je dois dire que notre virage social, on veut le prendre globalement, pas à la hâte. Je dois dire que qui va piano va sano, c'est-à-dire qui va lentement va sûrement.

En ce qui a trait à l'organisme conseil proposé par le projet de loi 94, il serait composé de neuf membres, nommés après consultation des organismes familiaux, des milieux et institutions concernés par la politique familiale. Le Conseil de la famille aura pour principale fonction de travailler en étroite collaboration avec la ministre responsable pour veiller aux questions d'intérêt familial avec coordination et diligence.

Il importe de souligner également que le gouvernement du Québec ne met pas de côté tout le travail réalisé au cours des dernières années pour en venir à une réflexion globale sur le thème de la famille. Il tient pour acquis que la plupart de ceux et celles qui se sont exprimés sur la politique familiale au Québec au cours des dernières années ont bien montré qu'il s'agissait d'une responsabilité collective à partager entre les nombreux intervenants.

Toutefois, le ministre a déjà souligné qu'il faut être conscient que le succès de cette politique dépend, en grande partie, du fait que les autres responsables du soutien collectif à apporter aux familles et aux parents s'acquitteront de leur tâche. Le gouvernement reconnaît également que la famille est une valeur collective fondamentale et qu'il entend, au terme de l'énoncé qu'il a proposé, se donner les moyens pour tenir compte davantage de la spécificité de la réalité familiale, contribuer à la cohésion et à la stabilité de la famille et soutenir les parents, premiers responsables légaux et sociaux de la prise en charge des enfants.

Dans un communiqué publié par le ministre délégué à la Santé et aux Services sociaux, il est prévu que l'élaboration de cette politique se fera en deux phases. Le dépôt de cet énoncé constitue la première phase de la politique familiale. La seconde sera marquée par l'annonce au cours de la prochaine année de mesures significatives de soutien aux parents. Les consultations, les travaux de recherche viendront compléter cette phase d'action de la part du gouvernement pour éventuellement en arriver à des réformes importantes touchant la famille au Québec. En ce sens, la constitution du Conseil de la famille devient une première mesure concrète qui assurera aux groupes familiaux une place prépondérante dans la mise en oeuvre de la politique familiale.

Cet énoncé de politique s'inscrit dans la suite logique des interventions du gouvernement du Québec portant sur la famille. Citons, par exemple, les améliorations apportées aux services de garde à l'enfance, les améliorations touchant l'aide pour contrer la violence conjugale - des gestes concrets ont déjà été posés - ainsi que d'autres mesures contenues dans le dernier discours sur le budget du ministre des Finances du

Québec. (16 heures)

À propos de ce dernier discours sur le budget, le ministre des Finances reconnaissait que les familles jouent un rôle essentiel dans la société. Il ajoutait qu'en raison des coûts additionnels associés à la présence d'enfants il apparaît assez clairement qu'ils ont besoin d'être apppuyés, soit par le régime d'imposition, soit par une aide directe de l'Etat. Voilà un engagement clair et précis du gouvernement du Québec pour favoriser l'entrée en vigueur d'autres mesures avantageuses pour la famille.

Ajoutons à cela que la réforme de l'aide sociale, annoncée la semaine dernière par le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre, marque un progrès vers l'élaboration d'une véritable politique québécoise de sécurité du revenu et tient compte de la situation familiale au Québec. Le projet du ministre du Travail est actuellement soumis à la discussion publique. Nous estimons que les mesures inhérentes à ce projet devraient permettre d'améliorer sensiblement le sort d'une majorité de familles défavorisées au Québec. Comme le disait si bien Pierre Vennat, dans un éditorial de La Presse du 16 décembre dernier, le "gouvernement du Québec a démontré une volonté politique gouvernementale de s'engager dans un secteur qui, trop souvent, semblait effrayer les politiciens".

Maintenant, pour revenir au dernier discours sur le budget, on se souviendra que le ministre des Finances annonçait ce jour-là une déduction pouvant atteindre 930 $ pour les familles biparentales et 765 $ pour les familles monoparentales qui ne partagent pas un logement avec un autre adulte. Cette mesure s'appliquera le 1er janvier 1988. Également, à titre d'exemple, une famille biparentale de deux enfants commence aujourd'hui à payer de l'impôt au Québec lorsque son revenu dépasse 13 400 $ et, à l'avenir, cette même famille n'aura aucun impôt à payer avant d'avoir gagné 20 820 $. Ce ne sont que quelques exemples et nous pourrions en citer plusieurs autres.

En somme, le dossier de la politique familiale en est un complexe qui a de nombreuses implications. Le gouvernement du Québec a choisi la voie de la transparence et de la clarté pour harmoniser ses efforts pour un meilleur équilibre de la redistribution des richesses à l'égard des familles dans le besoin. Le gouvernement du Québec n'est pas le seul intervenant qui puisse améliorer la situation sociale et économique des familles québécoises. Plusieurs autres agents dans le milieu peuvent apporter des actions positives en ce qui concerne la qualité de vie des familles. On peut citer les municipalités qui, à cet égard, ont une grande responsabilité dans le domaine des loisirs et de la culture et qui peuvent certainement apporter un

soutien considérable en ce qui concerne la garde des enfants. Dans le monde du travail, la tradition veut qu'on n'ait pas été habitué à se préoccuper de cette importante activité. Reste qu'il est important que les employés des entreprises soient d'abord et avant tout sensibilisés à toute cette question.

L'école, bien sûr, constitue un autre intervenant important. L'importance n'est plus à démontrer quant au rôle que les parents peuvent avoir dans l'éducation de leur enfant. Il vient compléter ce triangle qu'est l'école, la famille et le travail, dont les efforts doivent être à l'avenir harmonisés en vue d'améliorer la qualité de vie des familles. À l'avenir, la famille québécoise évoluera parce que notre société est dynamique. Il ne s'agit pas pour l'État de réglementer l'évolution de la famille du Québec. Il ne s'agit pas non plus d'imposer quelque politique qui aille à l'encontre de la volonté des citoyennes et des citoyens du Québec de former une famille selon un mode qu'ils auront choisi eux-mêmes. Il s'agit essentiellement d'orienter cette aide, ces mesures qui peuvent concourir à aider l'ensemble de la population afin que notre société distincte puisse de mieux en mieux maîtriser son avenir.

Enfin, la dénatalité au Québec est un problème qu'il ne faut pas cacher et la violence conjugale en est un autre qui demande une conscientisation collective et individuelle afin que des mesures incitatives puissent venir corriger ces anomalies de notre société. Tel que s'y engageait le ministre délégué à la Santé et aux Services sociaux, le gouvernement libéral continuera à mettre de l'avant les politiques de valorisation de la famille québécoise et instaurera notamment des mesures visant à améliorer les services d'appui et le support financier aux parents à titre de premiers responsables légaux et sociaux de la prise en charge des enfants et du milieu familial. J'assure donc en cette Chambre mon entière collaboration au ministre responsable de la politique familiale pour qu'il continue à poser des gestes concrets et ce, dans des délais respectables. Merci.

Le Vice-Président: Nous poursuivons nos délibérations et je cède la parole à M. le député de Gouin.

M. Jacques Rochefort

M. Rochefort: Merci, M. le Président. À mon tour, j'aimerais prendre la parole sur le projet de loi qui est devant nous et qui concerne la création du Conseil de la famille. Je commence cette intervention d'une certaine façon très partagé. Autant pour moi, le dossier de la politique familiale revêt une très grande importance - il devrait avoir la priorité dans les décisions prises ici, à l'Assemblée nationale, depuis un certain temps et pour les prochains mois - autant, lorsque je lis le projet de loi qui nous est soumis et l'ensemble des documents qui l'accompagnent, qui nous ont été soumis par le ministre délégué à la Famille, je suis animé par une profonde déception et une surprise extrêmement négative.

M. le Président, tout le monde s'attendait vraiment que le ministre délégué à la Famille, qui occupe cette fonction depuis six mois, arrive aujourd'hui avec un dossier concret, complet, cohérent et rempli de mesures qui prendront effet dans les prochaines semaines, dans les prochains mois pour permettre aux familles, une fois pour toutes, d'obtenir le soutien dont elles ont besoin, la reconnaissance qui leur est due et le statut qui devrait être le leur dans leur société. Le ministre a choisi de déposer la création d'une structure nouvelle et, quant au reste, à espérer qu'un jour il posera les gestes qui devraient normalement suivre par rapport aux responsabilités qui lui ont été confiées.

Les Québécois réfléchissent, cheminent depuis déjà un bon moment par rapport aux questions entourant la famille. Chaque Québécois, chaque Québécoise a été en mesure d'observer, au cours des dernières années, combien la famille québécoise est en crise, combien la famille québécoise vit des moments extrêmement difficiles, combien elle est perturbée par toute l'évolution qu'a connue notre société, par tous les changements de rythme, les changements de mentalité, les changements de valeurs que nous avons connus au cours des dernières années et aussi considérant de cette évolution qu'a connue notre société, combien c'est différent de vivre en famille, d'élever une famille, de poursuivre la vie en famille par rapport à ce que c'était il y a un certain nombre de décennies.

En conséquence, face à cette famille québécoise qui vit une crise, qui vit des perturbations majeures et les effets de ces perturbations, tout le monde en était arrivé à un consensus, croyions-nous à l'époque, sur le fait qu'il fallait faire quelque chose, qu'il fallait passer immédiatement à l'action et qu'on avait là sûrement un beau dossier pour passer à l'action en dehors de toute partisanerie, en dehors de toute division entre les formations politiques, parce que voilà une question qui transcendait les divisions de notre société à partir des formations politiques.

Tout le monde, de tous les milieux, de gauche, de droite, du Parti québécois comme du Parti libéral, des milieux les plus progressistes comme des milieux les moins progressistes, des milieux francophones comme des milieux multiethniques, l'ensemble des milieux, des milieux les plus favorisés comme des milieux les moins favorisés,

l'ensemble des Québécois et des Québécoises s'était entendu, en était arrivé à un consensus qu'il fallait intervenir rapidement pour permettre aux familles québécoises de recevoir ce dont elles ont besoin pour faire face à l'évolution qu'a connue notre société et pour lui permettre de continuer d'occuper une place importante et cela, pour ceux et celles qui souhaitent vivre une vie familiale avec tout ce que cela comporte.

Donc, M. le Président, nous en étions arrivés à des consensus importants, non seulement dus à l'évolution qu'a connue notre société, et donc qu'a connue la famille au cours des dernières décennies, mais aussi à cause des effets démographiques très importants que notre société connaît à la suite de son évolution globale. Pensons à la baisse considérable du taux de natalité que nous connaissons, qui fait que le Québec se retrouve aujourd'hui avec le deuxième plus bas taux de natalité au monde. Pensons au problème du vieillissement de la population, à ce phénomène qui implique des modifications profondes de l'ensemble de notre vie en société et particulièrement de la cellule familiale. Et pensons aussi à toute cette prise en main nécessaire, par les familles, des problèmes sociaux de plus en plus nombreux auxquels elles sont confrontées. (16 h 10)

Or, l'ensemble de ces raisons faisait en sorte que tout le monde s'était entendu susr le fait qu'il fallait bouger, qu'il fallait agir rapidement et agir avec des effets concrets immédiats. D'ailleurs, l'actuel premier ministre, lui-même, lorsqu'il a nommé le député de Beauce-Sud à la direction du dossier de la politique familiale l'été dernier, nous avait dit: Et l'automne qui vient - en parlant de l'automne qui se terminera dans quelques jours - sera marqué particulièrement - par un des dossiers auxquels le premier ministre disait accorder une importance très grande - par le dossier de la politique familiale. Le premier ministre nous avait conviés à un automne famille, à un automne où on discuterait à l'Assemblée nationale, où on poserait des gestes concrets en faveur de la famille québécoise. Le résultat, c'est que tout le monde s'attendait que le ministre délégué à la Famille nous arrive avec une politique de la famille complète, cohérente, intégrée, avec des budgets, des calendriers d'action, des mesures législatives, avec des gestes concrets qui auraient eu pour effet qu'au lendemain de l'adoption de ces mesures, on aurait eu la conviction et on aurait vu concrètement, on aurait pu toucher de façon palpable des changements possibles pour les familles du Québec.

Le résultat de six mois de travail du ministre délégué à la Famille et député de Beauce-Sud, et d'un an et demi de travail de la députée de L'Acadie alors qu'elle avait le dossier avant lui, c'est que ça a pris deux ans pour nous mettre, dans un projet de loi, le premier paragraphe d'un rapport de consultations qui avait été élaboré dans les deux années précédentes et qui arrivait à la conclusion qu'il fallait, dans un premier temps, doter le Québec d'une structure de coordination, de consultation et de pression pour les familles à l'intérieur de l'État québécois, qui était un Conseil de la famille.

Cela a pris deux ans au gouvernement, dont six mois à l'actuel ministre délégué à la Famille, pour arriver avec un projet de loi qui retranscrit mot à mot ou presque ce que le rapport de consultations du groupe sur la politique familiale avait mis deux ans à élaborer et qu'il avait fait connaître il y a déjà deux ans. Ça s'appelle, M. le Président, accoucher d'une souris pour ne pas dire ne pas accoucher du tout. Ça s'appelle faire un pas de tortue. Ça s'appelle exprimer une intention, des voeux pieux.

D'ailleurs, M. le Président, le ministre, par une phrase qu'il se rappelle peut-être, lorsqu'il a été interviewé par Pierre Maisonneuve à l'émission Présent, le matin à 8 h 10 le lendemain du dépôt de son projet de loi... M. Pierre Maisonneuve de Radio-Canada lui dit: Oui, mais, M. le ministre, qu'est-ce qu'il y a de concret dans ce que vous avez fait, en quoi ça change quelque chose? Pouvez-vous me résumer ce que vous avez fait pour le vrai de concret pour le monde, vous, depuis six mois dans votre ministère? Le député de Beauce-Sud, ministre délégué à la Famille, de répondre deux choses: Mon projet de loi implique que le gouvernement du Québec reconnaît maintenant l'importance de la famille dans notre société. Ça lui a pris six mois comme ministre pour nous informer que le gouvernement reconnaît maintenant, que la famille, c'est important dans notre société.

Grande réflexion, grand résultat, vraiment un apport considérable au débat et à l'avancement de la famille au Québec. Il nous annonce que le gouvernement reconnaît maintenant l'importance de la famille au Québec. Ça change beaucoup dans la vie de tous les jours des familles, j'en ai la conviction. La deuxième chose qu'il nous a dite... D'une part, on reconnaît enfin l'importance de la famille. Et la deuxième chose: C'est une intention - et là, je le cite mot à mot - de faire quelque chose dans les prochains mois et les prochaines années pour les familles.

Quand il a été nommé ministre délégué à la Famille, j'imagine, compte tenu qu'il n'y a que 27 ministres dans le gouvernement, pour un peuple de 6 500 000 habitants, avec un budget de 30 000 000 000 $ par année, si on prend un des 27 ministres du Québec et qu'on lui dit: Vous êtes nommé ministre délégué à la Famille, ça doit être parce qu'on accorde une certaine importance à la

famille... J'aurais cru qu'il aurait compris, par sa nomination, qu'il y avait une importance au dossier et à ces questions dans l'État québécois. Deuxièmement, j'aurais cru que l'intention de faire quelque chose découlait directement de sa nomination et, donc, qu'il aurait pu prendre les six mois qui se sont écoulés depuis sa nomination pour faire quelque chose.

Ce n'est pas sérieux, ce qui est déposé. C'est, essentiellement, de la politique. C'est, essentiellement, du patinage de fantaisie. Ils avaient annoncé à tout le monde qu'ils feraient quelque chose. Ah oui! Ils ont fait quelque chose. Ils ont déposé un projet de loi qui dit: On crée un Conseil de la famille, avec absolument rien de concret. Voilà une belle mesure qui vient leurrer les Québécois, qui vient faire en sorte qu'on passe à côté du bateau et, je le répète, à côté d'un sujet qui faisait consensus dans notre société, au-delà de tout ce qui peut nous diviser, notamment les questions politiques partisanes! On avait réussi à faire un consensus au-dessus de ces questions pour, tous ensemble, unir nos voix et poser des gestes concrets dans un consensus. J'ai la conviction que nous aurions eu l'unanimité de l'Assemblée nationale pour prendre des mesures concrètes, pour poser des gestes tangibles, pour donner enfin aux familles ce dont elles ont besoin et ce qu'elles méritent.

M. le Président, cette décision du gouvernement, qui n'est pas seulement la décision du ministre, c'est l'ensemble du gouvernement qui a pris cette décision et qui la dépose aujourd'hui, je pense qu'elle illustre qu'encore une fois ce gouvernement est incapable de faire face aux grands défis de notre société, qu'il est incapable de faire face aux grands enjeux de notre société, qu'il est incapable de poser, aujourd'hui, des gestes en fonction de demain et d'après-demain et qu'il est incapable de saisir un momentum parce qu'il y avait - oui, M. le ministre - un momentum favorable à des gestes concrets pour la famille.

Pour moi, le dossier de la politique familiale est un dossier absolument urgent. Il est absolument urgent que la famille québécoise reçoive un soutien important, substantiel, concret, immédiat pour qu'enfin nous reconnaissions cette contribution absolument majeure à l'évolution, à l'existence et au développement de notre peuple que nous donnent l'ensemble des hommes et femmes qui ont décidé de constituer des familles, d'avoir des enfants et de vivre en famille. Il est absolument urgent que nous donnions un statut, non pas un statut en l'air, dans les nuages, mais un statut avec des éléments, un soutien, une reconnaissance, des moyens concrets à ces familles québécoises. Il est de plus en plus difficile d'avoir des familles au Québec, comme partout ailleurs dans le monde occidental. C'est de plus en plus coûteux. En même temps, les familles vivent avec des perturbations comme jamais dans le passé. Pensons à l'influence des moyens de communication, pensons à la rapidité dans laquelle notre société vit, pensons à l'intensité que connaît l'évolution de notre société, voilà des éléments qui rendent la vie plus difficile au développement et au vécu des familles. Et, en contrepartie de cela, on ne fait rien pour les soutenir, pour les appuyer, pour les reconnaître quant à la contribution absolument phénoménale qu'elles apportent au développement de notre peuple.

On nous dira: Oui, mais on voudra peut-être intégrer la politique de la famille à une politique de la population. C'est le contraire. Si c'est le message qu'on veut nous faire, on va encore nous faire perdre deux ans, faire perdre deux ans aux familles québécoises, faire perdre deux ans au développement, à l'évolution et au progrès du Québec et, en plus, pendant qu'on ne fera rien, on aura une politique de la population. C'est-à-dire que, pour développer et faire progresser notre peuple, le faire croître, le faire grandir, plutôt que d'y aller par une politique familiale, on ouvrira les portes toutes grandes à l'immigration, sans aucune politique d'intégration des immigrants au Québec. Et cela, c'est grave.

J'entends un député me dire: II y en a une. M. le Président, par rapport aux problèmes que connaît l'intégration des immigrants au Québec, par rapport au nombre d'immigrants qui entrent au Québec, par rapport aux politiques et aux orientations du gouvernement depuis le 2 décembre 1985 face à l'immigration, ce n'est pas une politique d'intégration qu'on a. Moi aussi, je suis favorable, comme je l'ai toujours été, à ce qu'il y ait des immigrants qui viennent au Québec, qui viennent enrichir la société et la collectivité québécoise, qui viennent s'associer au peuple du Québec pour poursuivre la route tous ensemble. C'est une richesse, c'est un apport positif. Mais jamais je n'accepterai que notre politique de population, que notre politique face au problème démographique que nous vivons, face au problème de population que nous avons, se limite à une politique d'immigration comme celle que mène actuellement le gouvernement du Québec. Je pense que tout cela doit fonctionner ensemble et cela doit commencer par une politique de la famille. Cela, ce n'est pas démissionner, c'est accepter de relever le défi et de vouloir continuer. (16 h 20)

J'ai le sentiment qu'avec le dossier de politique familiale qui est déposé, aujourd'hui, on a démissionné face à la famille, face au soutien que les familles méritent, d'une part, et que, deuxièmement, dans un autre ordre d'idées, notre

démographie doit connaître pour que notre peuple continue de progresser. M. le Président, je suis convaincu qu'au rythme où nous allons alors que la politique de la famille doit arriver maintenant, doit avoir des effets maintenant, le ministre délégué à la Famille tombe dans le panneau que je décrivais l'automne dernier lorsque je faisais des rencontres sur ces questions. Je disais en riant, en faisant de l'humour, aux groupes que je rencontrais, pour décrire l'urgence qui m'animait par rapport à ce dossier, je disais aux gens: Vous savez, il faut être bien certain que la politique familiale qu'on va adopter ne viendra pas soutenir mes enfants quand ils vont décider de créer des familles.

C'est maintenant qu'il faut que la politique familiale donne des résultats. C'est aux gens de ma génération et des générations qui sont près de la mienne qu'il faut que cette politique s'applique. Ce sont ces gens qu'il faut que la politique familiale vienne soutenir, vienne appuyer, vienne reconnaître, vienne aider, non pas les générations qui vont nous suivre. On va risquer d'être trop tard, M. le Président, à cause des difficultés que rencontrent les familles du Québec et trop tard quant aux problèmes de démographie que nous connaissons.

M. le Président, la situation nécessite une action énergique, rapide et, je le répète, pour une fois qu'on a un dossier qui va faire consensus, qui ne fera pas de litiges entre les différents groupes qu'on retrouve dans notre société, pourquoi ne pas agir maintenant? Est-ce qu'un jour un membre de ce gouvernement va nous expliquer ce qui s'est passé entre les mois d'août et décembre pour accoucher presque d'un faux accouchement? Ce n'est même pas une grosse souris, M. le Président.

M. le Président, pour illustrer combien les retards que nous prenons sont graves, revenons directement à la politique de population, à la politique de la famille par rapport à la démographie. Alors qu'il y a quelques années, on nous disait: Les mesures fiscales devront porter sur le troisième enfant parce que les familles ont généralement deux enfants mais donnons-leur un coup de pouce pour qu'ils en aient un troisième. Il y a quelques années les gens se sont mis à dire: Hum'. Cela commence à être compliqué quand on regarde aller les courbes démographiques. C'est même le deuxième enfant qui commence à poser problème. Il y a de moins en moins de gens qui ont un deuxième enfant. Beaucoup de groupes commençaient à nous dire: II va falloir que vos mesures viennent non pas aider le troisième enfant, on a déjà un problème pour le deuxième, il faut qu'on en vienne à soutenir, à appuyer ceux et celles qui décident librement - parce qu'il faut reconnaître une liberté totale de choix, tous les choix sont bons - il faut faire en sorte que ceux qui veulent avoir des enfants puissent avoir un coup de pouce pour le deuxième.

M. le Président, au train où on s'en va, ce que cela va prendre d'ici à quelques mois, c'est une politique familiale qui vienne donner un coup de pouce au premier enfant. Voilà une belle illustration du coût, des conséquences graves, des retards qui s'accumulent chaque jour, chaque semaine et chaque mois et qui découlent de l'absence de politique, de l'absence de décisions et de l'absence de mesures concrètes de la part du ministre délégué à la Famille.

Plus nous allons attendre, plus cela va être difficile et plus cela deviendra impossible, peut-être inutile de reconnaître et de soutenir les familles québécoises. C'est non seulement l'avenir de la famille québécoise qui est en jeu mais c'est aussi, d'une certaine façon, à moyen terme, l'avenir du peuple québécois tout entier. Dans ce sens, s'il y a un message que je veux donner, que je veux laisser au ministre délégué à la Famille, c'est qu'il retourne vite dans son bureau et qu'il se décide à adopter des mesures concrètes, rapides. C'est facile.

Ceux qui sont intervenus avant moi, lui comme les autres avec ses documents, les députés, ses collègues ministériels, tous, on s'entend sur ce qui doit être fait. Il faut faire en sorte d'apporter des mesures de soutien financier aux familles. Or, cela veut dire des modifications à la fiscalité, des modifications pour avoir des allocations familiales concrètement substantielles pour les familles. Cela veut donc dire un soutien financier. Cela veut donc dire des services.

Arrêtons de parler des garderies et faisons-en. Arrêtons de débattre ces questions et créons des places en garderie, facilitor. la possibilité pour les femmes et les hommes qui veulent avoir des enfants d'avoir aussi une carrière, de pouvoir sortir de la maison. Cela implique des garderies, des structures de soutien dans le milieu, cela implique des modifications aux lois sur le travail. Faisons aussi en sorte qu'on ait des conditions de vie qui permettent aux familles de se récréer. Exigeons que partout où il y a des lieux d'activités, de récréation, de culture qui touchent aux enfants, il y ait des prix familiaux. Il y aurait des réductions pour les enfants accompagnés d'adultes, M. le Président. Faisons donc en sorte que tout ça se fasse rapidement. On s'entend sur ce qui doit être fait. Pourquoi attendre? Pourquoi lésiner?

La pire des conséquences, au-delà de celle que j'ai décrite avec conviction, celle de l'absence de volonté et de décision du ministre, - je conclus là-dessus, M. le Président - c'est que pour tous ces Québécois et ces Québécoises qui attendaient une politique familiale concrète, le message qu'ils viennent de se faire envoyer, livrer par

le gouvernement du Québec, pas par n'importe qui là, par le gouvernement du peuple québécois, c'est: Écoutez, on n'est pas pressé. Ce n'est pas tellement urgent et on va continuer d'y penser. C'est ça le message qu'ils se font livrer.

M. le Président, comment voulons-nous qu'il y ait un impact sur l'évolution des mentalités, sur l'évolution de notre société en général, tant sur les questions de politique familiale que sur les questions de démographie, de natalité, quand le gouvernement lui-même démissionne, plie bagages avant même d'avoir ouvert le dossier? J'exprime donc en concluant une profonde déception, au-delà de toute considération politique, une profonde déception comme citoyen du Québec de voir le gouvernement accoucher d'un faux accouchement. Le gouvernement au fond a démissionné et n'a pas assumé pleinement ses responsabilités par rapport à la famille, puisque, je le répète, il jouissait, non seulement de l'urgence de la situation, mais d'un consensus largement établi dans notre société et qui ne reviendra peut-être pas de sitôt.

Souhaitons-nous tous ensemble que le ministre refasse ses devoirs et qu'au tout début de la nouvelle année 1988 il nous arrive avec un document non pas d'intention, non pas d'espoir, non pas de foi, mais concret, avec des décisions qui feront qu'enfin les familles du Québec auront le soutien, la reconnaissance et le statut qui doit être le leur et en même temps des mesures pour que la famille puisse poursuivre, évoluer et apporter toujours sa contribution au développement et au progrès de notre peuple! Je vous remercie.

Le Vice-Président: M. le leadc du gouvernement.

M. Gratton: Oui, M. le Président, je voudrais proposer l'ajournement du débat.

Le Vice-Président: Cette motion d'ajournement du débat est-elle adoptée?

M. Jolivet: M. le Président...

Le Vice-Président: Oui, M. le leader adjoint de l'Opposition.

M. Jolivet: Juste un instant. Je voudrais savoir qui va avoir le droit de parole ensuite, parce que c'était de notre côté normalement.

Le Vice-Président: Non. Là-dessus, juste un instant. Je veux simplement vous mentionner qu'en vertu de la règle de l'alternance, je dois comprendre, à ce moment-ci, que le député de Gouin, qui est un député indépendant, qui n'est pas de la formation de l'Opposition officielle, a parlé contre le projet de loi et, à la reprise du débat, je reconnaîtrai un député qui voudra parler pour le projet de loi. D'accord?

M. Jolivet: M. le Président...

Le Vice-Président: M. le leader adjoint de l'Opposition. Oui, un instant, une question de règlement.

M. Rochefort: L'Opposition me le permet? M. le Président...

Le Vice-Président: M. le député de Gouin.

M. Rochefort: Oui, oui, sur ce que vous avez dit, parce que je ne voudrais pas donner une interprétation différente à mes propos. M. le Président, il est évident, je pense, qu'il n'y a personne qui va s'opposer à la création d'un Conseil de la famille et donc je ne suis pas contre le projet de loi. Je suis contre l'absence de décision du ministre.

Le Vice-Président: D'accord.

M. Rochefort: Je ne veux pas qu'on interprète le sens de mes propos par rapport au contenu du projet de loi. J'aurais voulu plus.

Le Vice-Président: Non, non.

M. Rochefort: J'aurais voulu plus.

Le Vice-Président: C'est ça, exactement. Je n'interprète pas la nature de vos propos. Je ne vous dis pas que vous êtes contre le Conseil de la famille. Ce n'est pas ça que je vous dis. Je dis simplement que, comme président, si j'ai à juger, disons, des interventions, j'ai compris de vos propos, justement, un peu de la teneur de vos propos, que je dois faire en sorte dans un débat de voir à l'alternance. Dans ce cas-ci, sur la question précise du leader adjoint de l'Opposition, je mentionnais simplement que, quant à moi, suivant la teneur des propos que j'ai entendus, je reconnaîtrai, à ce moment-là, après coup, une intervention du côté ministériel. Sur la même question de règlement, M. le leader adjoint de l'Opposition.

M. Jolivet: Oui, M. le Président, j'aurais aimé, avant que vous preniez votre décision, que je puisse expliquer mon point de vue.

Le Vice-Président: Oui.

M. Jolivet: Parce que là vous venez de rendre votre décision.

Le Vice-Président: Écoutez, ce n'est pas une décision que j'ai à prendre. Vous me demandiez qui aurait la parole. Est-ce que ça peut être quelqu'un de votre côté ou de l'autre côté? Je n'ai pas rendu une décision inflexible, qui n'est pas à changer. Je veux simplement vous donner une espèce d'indication, selon mon point de vue, en reconnaissant quelqu'un du côté ministériel, en l'occurrence le leader du gouvernement pour la demande d'ajournement. Je vous disais que, dans la situation présente, à mon jugement, j'aurais reconnu un député ministériel à ce moment-ci. (16 h 30)

En tout cas, je peux vous entendre quand même, je ne veux pas fixer les règles du jeu au départ, mais je peux vous entendre là-dessus. Non? Cela va? Je pense que c'est selon la teneur de chacun des débats, c'est à l'appréciation de la présidence de décider de l'alternance. D'accord?

Donc, je comprends que la motion d'ajournement est adoptée, n'est-ce pas? La motion d'ajournement est adoptée. Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Gratton: Oui. Si vous voulez appeler l'article 29, M. le Président.

Projet de loi 97

Prise en considération du

rapport de la commission qui '

en a fait l'étude détaillée

Le Vice-Président: À l'article 29 du feuilleton, nous allons maintenant procéder à la prise en considération du rapport de la commission des affaires sociales qui a procédé à l'étude détaillée du projet de loi 97, Loi modifiant la Loi sur les services de santé et les services sociaux, présenté par Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux.

Avant d'entreprendre ce débat, je veux simplement indiquer à la Chambre que, suivant notre règlement, nous avons reçu en temps utile des amendements au projet de loi, soit des amendements aux articles 1, 4 et 7. Nous allons donc procéder au débat. Une fois que le débat sera terminé, nous allons, à ce moment-là, voter sur les amendements. À la suite du vote sur les amendements proposés, nous voterons sur le rapport tel qu'amendé ou non, suivant que les amendements seront adoptés ou non. D'accord?

À ce moment-ci, pour entreprendre le débat à ce stade de l'étude du projet de loi, je vais céder la parole à Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux.

Mme Thérèse Lavoie-Roux Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président. Comme vous venez de le mentionner, nous sommes rendus à la prise en considération du rapport sur le projet de loi 97, rapport qui a été déposé à l'Assemblée nationale hier après-midi. Au moment de l'étude en commission parlementaire de ce projet de loi, nous nous étions entendus pour que trois amendements supplémentaires soient apportés, ce qui ne veut pas dire, M. le Président, que l'Opposition est nécessairement d'accord avec les trois amendements supplémentaires, mais on avait convenu que je les préparerais compte tenu du temps qui nous était alloué, etc.

Alors, j'aimerais déposer... J'imagine que je dois les déposer officiellement, ces trois amendements?

Le Vice-Président: Mme la ministre, simplement pour vous informer que les amendements, suivant notre règlement, doivent être déposés. Ces amendements, à ma connaissance, ont été transmis et déposés en temps utile. Vous pouvez, dans le cadre de votre argumentation, en parler sans problème. Nous avons déjà reçu ces amendements.

Mme Lavoie-Roux: Alors, le premier amendement était... En fait, c'était un sous-amendement à l'article 3.1 qui est modifié par le remplacement de la dernière phrase du deuxième alinéa par la suivante, et je cite: "Ces postes ne peuvent excéder 25 % du nombre de postes qui, parmi l'ensemble des postes prévus au paragraphe deux du premier alinéa, sont destinés à de nouveaux stagiaires."

Très brièvement, on se rappellera qu'un jugement de la Cour d'appel avait demandé que le gouvernement se donne une base juridique quant à l'établissement conditionnel qu'il s'agisse d'internes ou de résidents, en régions éloignées. Comme ceci n'avait fait que l'objet d'une décision du Conseil des ministres, il fallait lui donner une base juridique, et c'est ce que nous avons fait.

Il y a eu une discussion, en particulier pour savoir comment serait exprimée cette limite - parce que, désormais, il fallait mettre dans la loi une limite - quant au nombre de personnes qui pourraient devoir aller en régions éloignées, soit parce que ce sont des médecins hors Québec ou des Québécois qui ont fait leurs études hors Québec, pour une part, ou dans le cas des spécialités qui peuvent être accordées à un nombre supplémentaire de médecins pour justement se spécialiser, d'autre part.

Alors, ce que nous proposons, c'est que ce nombre ne puisse excéder 25 %. Il peut osciller de 0 % à 25 %, mais ce que nous proposons, c'est 25 %.

La deuxième modification touche l'article 37 qui, tel qu'introduit par l'amendement, est modifié par l'addition, à

la fin du quatrième alinéa, de ce qui suit: "Toutefois, seule l'autorisation du conseil d'administration est requise, s'il s'agit d'une charge ou d'une fonction occupée au sein d'une association regroupant la majorité des conseils régionaux ou au sein d'une association de directeurs généraux des services de santé et des services sociaux reconnues par décret à des fins de relations du travail." Et l'article 7 est un article de concordance parce que, dans l'article 4, on s'adresse au directeur général d'un conseil régional, tandis qu'à l'article 7, on s'adresse à un directeur général d'un conseil d'administration.

C'est à la suggestion de l'Opposition qui a fait valoir qu'il serait probablement préférable que l'autorisation de la ministre ne soit pas requise lorsqu'il s'agira d'une tâche qui serait reliée à une association d'établissements ou même à une association reconnue par décret pour fins de relations du travail.

Alors, dans le cas des amendements aux articles 4 et 7, j'imagine que l'Opposition va y souscrire, comme elle l'a fait au moment de l'étude article par article, alors qu'elle n'a pas souscrit à l'amendement que nous avons proposé à l'article 1.

Pour le moment, j'arrête mes explications. Je pense que ce sont les trois amendements qui ont été proposés.

La Vice-Présidente: Merci, Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux. M. le chef de l'Opposition.

M. Guy Chevrette

M. Chevrette: Merci, Mme la Présidente. On se rappellera que ce projet de loi 97, dont Mme la ministre vient de déposer quelques amendements, visait un objectif sur lequel, entre vous et moi, nous étions à peu près tous d'accord. C'était d'éviter les conflits d'intérêts de certaines administrations du réseau ou des établissements des réseaux, des DG, des cadres supérieurs intermédiaires ainsi que des conseils d'administration.

Sur le principe même, je pense qu'il n'y avait pas de cachette. L'Opposition, pas plus que le gouvernement, ne peut tolérer qu'il y ait des gens qui se placent en situation de conflit d'intérêts. Après tout, ce sont les deniers du public qui sont administrés par ces gens et on doit exiger, bien sûr, de toutes ces personnes qui oeuvrent dans le secteur public de la santé le plus grand respect des normes administratives et des directives administratives.

Nous avions dit lors de l'adoption du principe que nous regrettions comme Opposition que cette loi n'ait pas eu la portée générale pour toucher l'ensemble des directions générales, des administrateurs ou des cadres supérieurs de la fonction publique, parapublique et même péripublique.

C'est l'argent du public qui est administré. On a été surpris que ce soit Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux qui dépose une loi pour éviter que les cadres du secteur de la santé et des services sociaux soient placés en position de conflit d'intérêts. On prétendait et on prétend toujours - indépendamment du fait que le projet de loi 97 soit sur la table -que le gouvernement aurait dû déposer un projet de loi beaucoup plus global visant à régir le comportement de l'ensemble des cadres de la fonction publique, parapublique et péripublique.

Selon nous, il y a du monde dans d'autres secteurs. Par exemple, qu'on pense à l'Industrie et Commerce, à la SDI, qu'on pense à la Société des alcools du Québec, qu'on pense à la Caisse de dépôt, qu'on pense à une série de structures des secteurs public, parapublic et péripublic qui vivent des situations de conflit d'intérêts toutes aussi évidentes, sinon plus, qu'on puisse les vivre dans le secteur de la santé et des services sociaux.

On trouve dommage qu'on ait "focussé" la discussion sur les cadres des hôpitaux, sur les administrations hospitalières et que, parce qu'il y a eu quelques articles de journaux -trois ou quatre de suite dans un journal - on ait créé une panique. La ministre de la Santé, se sentant emportée par la panique ou poussée par ses collègues ministres, a réagi pour son secteur, alors que le gouvernement est là pour avoir une vision plus globale, plus générale, de l'administration publique.

Je trouve dommage que ce ne soient que les administrateurs des hôpitaux, des centres hospitaliers, des établissements de santé et de services sociaux qui soient touchés par ces directives, par ces normes, qui devraient toucher l'ensemble de la fonction publique, parapublique et péripublique.

Ceci dit, Mme la Présidente, nous avons étudié assez longuement l'ensemble du dossier en commission parlementaire. Nous avons apporté des amendements. Plusieurs ont été défaits. À mon point de vue, il y a des aberrations dans l'entente. Je vais essayer de les exprimer, parce que plusieurs de nos amendements ont été défaits et, à mon point de vue, ils auraient dus être acceptés. (16 h 40)

Je pense, entre autres, à toute la dimension des conflits d'intérêts qui, automatiquement, déclenchent le processus de déchéance. Quand on sait qu'il y a des situations qui peuvent être très mineures et qui auraient pu, à mon point de vue, commander une suspension d'une semaine, quinze jours, peut-être cinq ou six mois, mais un processus de déchéance, quelle que

soit la gravité de l'acte, c'est carrément abusif, dans certains cas. À mon avis, la ministre va à l'encontre du discours qu'elle a tenu depuis deux ans, à savoir qu'elle voulait responsabiliser les conseils d'administration des institutions de santé et des services sociaux, qu'elle voulait véritablement leur faire jouer un rôle de plus en plus responsable dans l'administration. Elle leur enlève même la possibilité de porter un jugement sur la gravité de l'acte.

C'est une drôle de façon de responsabiliser les gens que de dire: Vous n'avez pas d'autre choix que d'entamer le processus de la déchéance. Imaginez! Normalement quand on reconnaît que des gens sont responsables, que des gens doivent exercer leur jugement quand on veut les revaloriser et les rendre plus responsables, on leur dit: Voici ce que tu fais, c'est le processus de déchéance, point. À mon point de vue, c'est abusif et cela ne cadre pas avec le discours de la ministre, ce n'est pas cohérent avec les propos qu'elle a tenus en cette Chambre autant en deuxième lecture qu'à plusieurs occasions depuis son accession au poste de ministre de la Santé et des Services sociaux. Quand on veut responsabiliser des gens, on leur donne l'occasion, tout au moins, d'exercer leur jugement. C'est un minimum tout à fait normal. Quand on leur dit: Tu n'as pas d'autre solution, n'exerce pas ton jugement, c'est moi qui prends ta place, c'est une mise en tutelle déguisée des conseils d'administration et de leur responsabilité fondamentale de gérer les personnels. À mon point de vue, c'est abusif.

On a également parlé de l'exclusivité des fonctions. C'est une notion qui peut paraître ambigüe pour nos concitoyens et concitoyennes mais qui s'explique assez facilement. On veut que, dorénavant, un cadre intermédiaire, un cadre supérieur ou un directeur général soit engagé exclusivement pour l'établissement. S'il veut faire des choses en dehors, même s'il en a le temps à mort, il ne le pourra plus, à moins que le conseil d'administration ne l'y autorise. C'est la plus belle façon de s'organiser pour faire en sorte qu'on puisse... Cela sera considéré comme une faute majeure, une faute lourde. Alors qu'il y en a qui font cela depuis des années chez les cadres intermédiaires, là, ils seront jugés comme illégaux s'ils oublient d'abord d'avertir et, deuxièmement, s'ils n'ont pas l'autorisation de leur conseil d'administration. À mon point de vue, concernant l'exclusivité de fonction, on aurait pu avoir l'inclusion dans ce projet de loi d'une formule beaucoup plus souple tenant compte, en particulier, des faits passés. Il y a des gens qui, depuis des années, travaillent pour un centre hospitalier, pour un CLSC, un CSS et qui, dans leurs moments de loisirs, remplissent d'autres fonctions au vu et au su de tout le monde, sauf qu'il n'y a pas d'autorisation. Il s'agit qu'on les force à la demander pour que, dans bien des cas, à cause de toutes sortes de conjonctures, on la leur refuse.

Ces gens-là, s'ils devaient continuer, seraient pénalisés. En allant jusque là dans son projet, on pouvait dire au moins que la ministre manifestait une constance de ce côté, en disant: Moi, je pense que quelqu'un qui est directeur général doit être exclusivement à l'emploi d'un centre hospitalier 24 heures par jour, 7 jours par semaine. Nous, on aurait préféré la notion de temps plein: quelqu'un travaille à temps plein dans les heures normalement dévolues aux cadres mais, en dehors de cela, la fin de semaine, par exemple, il n'a pas à quémander une permission pour donner une conférence, par exemple, qui lui rapportera 200 $ ou 300 $, il n'a pas à quémander une permission pour que, la fin de semaine, s'il a des compétences en comptabilité par exemple, il fasse des rapports comptables chez lui, le dimanche. Il n'a pas à quémander des permissions parce qu'il a un revenu additionnel.

Il semble que c'est abusif d'avoir cette notion d'exclusivité totale, d'autant plus que cette exclusivité totale des taches - je le répète aux députés de cette Chambre ainsi qu'à nos concitoyens et concitoyennes - ne sera exigée que des directeurs généraux, des cadres supérieurs et des cadres intermédiaires du secteur de la santé et des services sociaux seulement, non pas des autres secteurs gouvernementaux. Est-ce qu'on exige la même chose des cadres de l'éducation? Est-ce qu'on exige la même chose des cadres de la SAQ, de la Caisse de dépôt et placement? Est-ce qu'on exige la même chose des cadres de différentes administrations collégiales, universitaires? Pas du tout. Vous irez voir un professeur d'université qui fait de la recherche, avec des contrats de recherche fort attrayants, en même temps qu'il est enseignant à l'université.

C'est donc pour les cadres du secteur de la santé et des services sociaux seulement. Je trouve malheureux qu'on n'ait pas compris qu'une mesure de ce genre aurait dû être pensée en fonction de l'ensemble des secteurs administratifs de l'État, des secteurs public, parapublic et même péripublic. Avec cela, on aurait eu une cohérence respectable, à mon point de vue.

Nous avons également discuté, au cours de l'étude de ce projet de loi, de l'illégalité de certaines institutions qui payaient la rémunération à même les fondations hospitalières et cela, pour augmenter le salaire de certains directeurs généraux. Il y a des traditions que je reconnais. Il y a des traditions, bien sûr, qui sont vieilles de quelques années dans plusieurs secteurs, en

particulier dans le secteur anglophone, il faut le dire. C'est dans le secteur anglophone qu'on voit surtout les fondations payer la rémunération des cadres. Cela s'est fait en contravention, dans l'illégalité par rapport aux directives, aux normes de gestion, aux normes administratives du ministère de la Santé et des Services sociaux qui définit le salaire d'un cadre à partir de normes, de grilles qui permettent de dire: Dans tel centre hospitalier, le directeur général reçoit 92 000 $, dans tel autre centre hospitalier un peu moins gros, c'est 75 000 $, etc. On sait que certains directeurs ou cadres ont reçu un surplus d'une fondation.

Malgré la tradition que je reconnais justifiée, malgré le fait que, dans bien des cas, tout cela se fait de bonne foi, plutôt que de régulariser la situation d'une autre façon, la ministre a préféré, au dernier article de la loi, maintenir tous les gens impliqués dans un état d'illégalité, toutes les institutions impliquées, mais en le légalisant, parce que les contrats avaient été signés avant, mais elle aurait pu agir autrement. Je vais essayer de vous expliquer, Mme la Présidente, ce que l'Opposition a suggéré.

Si on part du fait que tout le monde est de bonne foi, mais que c'est illégal... Dans la vie, il arrive très fréquemment qu'on ignore la loi, mais l'ignorance d'une loi ne crée pas nécessairement un droit. On le sait en droit. À partir de là, étant donné que la ministre, dans une clause de son projet de loi, dit carrément que c'est illégal qu'ils prennent de l'argent dans une fondation pour payer des gens, elle aurait pu s'en sortir très différemment, sans pénaliser les individus, en rendant le tout cohérent et conforme. Par exemple, un centre hospitalier qui a engagé un type à raison de 100 000 $ ou 90 000 $ - je sais qu'il y a des salaires assez élevés dans ces secteurs - sait que le directeur général reçoit 10 000 $ ou 15 000 $ d'une fondation pour combler la différence, parce que le directeur général ne serait pas venu à 90 000 $. II venait à 105 000 $, et les 15 000 $ ont été versés par une fondation. La ministre aurait pu accepter, comme mesure dérogatoire, que les centres hospitaliers respectent les contrats globaux du directeur général, les deux contrats, 105 000 $, sans le pénaliser, mais sans prolonger l'illégalité dans le paiement. (16 h 50)

Ça, ça m'apparaît légiférer à l'envers. On ne peut pas légiférer et dire: Un geste est illégal, mais, même s'il est illégal parce qu'il est à cette date-là, on va perpétuer l'illégalité jusqu'en 1991. Je pense qu'on avait l'occasion rêvée de régulariser la situation, de permettre à ces individus de voir leurs contrats respectés, mais qu'ils deviennent payés par le centre hospitalier lui-même pour l'ensemble des deux contrats. Cela aurait été plus correct, plus cohérent, et les fondations n'auraient pas eu à verser, cela aurait été à même les avoirs du centre hospitalier, pour une durée x.

On en a négocié dans la fonction publique un paquet de contrats du genre. Je me souviens d'en avoir signé des conventions collectives. On se ramassait avec des commissions scolaires dans les années 1974-1975 qui payaient plus que les conventions collectives. Qu'est-ce qu'on faisait avec ces gens-là? Je pense que la députée de Jacques-Cartier doit se le rappeler, on appelait ces gens hors structure, hors échelle. Qu'est-ce qu'on faisait avec ces gens-là? Quand ils étaient hors échelle, on leur reconnaissait le droit de conserver leur salaire global. On ne les baissait pas, on ne les pénalisait pas, on respectait ces contrats mais il y avait un certain temps de piétinement pour rejoindre le moment où ils se voyaient capables de s'insérer dans l'échelle parce que les salaires évoluent quand même chaque année, et là, ils étaient intégrés aux nouvelles échelles. C'eût été une façon, non pas de continuer à perpétuer l'illégalité parce que les sommes venaient des fondations, mais carrément de les placer en toute légalité immédiatement, en proposant ce mécanisme et en permettant aux centres hospitaliers de le faire.

Je pense que c'aurait été plus logique que d'avoir, dans une même loi, une clause disant que c'est illégal et la dernière clause disant que, même si c'est illégal, gardez-les jusqu'en 1991. Ç'a l'air un peu fou de légiférer de cette façon parce qu'on avait d'autres moyens sur le plan administratif pour rendre ces individus, non pas vus comme des individus hors-la-loi, mais tolérés comme des hors-la-loi alors qu'on les aurait intégrés à la machine administrative conformément à des possibilités administratives que nous avions.

Je n'ai pas pu comprendre malheureusement. Il faut dire qu'on était sur les dernières minutes de la commission parlementaire. Si on avait pu discuter plus longuement, il me semble qu'on aurait pu convaincre la ministre de procéder par un biais administratif beaucoup plus cohérent, qui aurait eu l'air moins fou sur le plan administratif et qu'on ne se retrouverait pas avec des individus pointés du doigt parce qu'ils sont hors-la-loi par rapport à la loi, mais qui ont un genre d'amnistie temporaire, même si c'est illégal.

Je n'accepte pas cette partie, Mme la Présidente. Je trouve que ce n'est pas comme ça qu'on légifère. Je pense que le législateur est là pour rectifier des tirs, rendre des choses claires. On ne légifère pas pour rendre davantage ambigu.

Il me reste quelques minutes aussi pour parler d'un autre point, la fameuse question des médecins résidents. Encore là, Mme la ministre a essayé d'en passer une petite vite aux médecins résidents et internes. Dans un

projet de loi, imaginez-vous! Et le ministre des Affaires intergouvernementales qui est un homme de droit nous dira que c'est vrai, que ce n'est pas du tout la même chose. Par exemple, est-ce que 25 % des effectifs médicaux pour des régions éloignées, c'est connexe au projet de loi sur les conflits d'intérêts? On ne se retrouvait pas gros, vous savez. Pour un gouvernement qui devait légiférer correctement, ne pas faire de lois fourre-tout, mais qu'on réglerait chaque chose. Si on traite des médecins, ça serait les médecins, si on traite des conflits d'intérêts, ça serait les conflits d'intérêts. Ça devait être ça qu'on nous avait annoncé le 15 décembre 1985, mais on s'est ramassé avec une clause voulant corriger un trou juridique, disait la ministre, parce qu'il y avait eu un jugement de la Cour d'appel qui rendait illégal le fait d'imposer une pénalité éventuelle à un médecin qui ne remplirait pas son engagement de demeurer trois ou quatre ans soit en Abitibi, soit en Gaspésie, soit sur la Côte-Nord.

Et on est tombé d'accord, c'est même l'Opposition qui l'a rappelé à la ministre... Elle a dû retourner au Conseil des ministres, je ne sais pas si elle le dira dans son discours. C'est même l'Opposition qui lui a fait remarquer que, dès qu'elle abandonne son droit de ne pas aller plus haut comme tribunal, c'est le dernier jugement qui prévaut, si tu ne te prévaux pas de ton droit d'appel. Donc, elle tombait dans un trou juridique. Les médecins qui avaient pris l'engagement auraient pu revenir à Montréal ou à Québec, quitter les régions dans lesquelles ils étaient. Là, on a dit à la ministre: II n'y a qu'une seule façon si vous ne voulez pas revenir, c'est de rétroagir dans la loi. Je comprends que c'est plutôt rare que le législateur légifère d'une façon rétroactive, mais c'est arrivé. Et, pour le bien d'une collectivité, à un moment donné, on n'a pas le choix.

Nous, nous avons accepté l'amendement en suggérant à la ministre de rétroagir sur le plan législatif pour permettre, au moins, de garder en place les effectifs qui sont là. Mais, si c'était pour boucher le trou juridique, Mme la ministre aurait très bien pu se contenter de régler exclusivement le trou juridique et ne pas s'ouvrir des portes pour créer des problèmes auprès de résidents et internes. Si elle voulait régler la répartition médicale d'une façon correcte, définitive, la ministre aurait dû présenter un projet de loi non pas pour boucher le trou juridique cette fois-ci, mais pour établir une fois pour toutes la répartition médicale au Québec.

Il va falloir qu'on le fasse une fois pour toutes et qu'on dépose devant l'Assemblée nationale un projet de loi. Il va falloir qu'on écoute en commission parlementaire les universités, la Corporation des médecins, la

Fédération des spécialistes, la Fédération des omnipraticiens, les étudiants en médecine, la Fédération des médecins résidents et internes, qu'on les entende tous, mais, comme législateurs, ensuite, qu'on règle le problème une fois pour toutes, en toute connaissance de cause, après avoir pris l'opinion de chacun, mais non pas profiter d'une loi qui, supposément, touche purement et simplement les conflits d'intérêts pour essayer de régler un problème et créer du mécontentement parce qu'on n'a pas pu entendre les groupes. Il me semble que cela devrait se faire en concertation avec les personnes impliquées, avec les CRSSS pour permettre aux régions éloignées de venir s'exprimer, permettre aux jeunes de dire comment ils voient cela.

Il va falloir une fois pour toutes le régler. Oui, il va falloir le régler. Mais est-ce qu'on va le régler en essayant, d'abord et avant tout, d'asseoir tout le monde dans la plus grande harmonie, en essayant d'avoir un consensus au moins majoritaire ou si on va le régler en essayant d'en passer une vite par le biais d'une autre loi? Il me semble que cela ne se fait pas ainsi. Il me semble que cela ne devrait pas se faire ainsi. Et il me semble que la façon dont on l'a fait n'est pas la meilleure façon de le faire. Quand on veut boucher un trou juridique, on l'identifie et on ne déborde pas les cadres du trou juridique. On ne fait que rectifier les choses qui sont à rectifier par rapport au jugement et on n'essaie pas de se donner plus de pouvoirs qu'on en avait ou plus de marge de manoeuvre qu'on en avait quand on veut corriger un trou juridique. Il me semble que c'est cela qui était clair.

Personnellement, Mme la Présidente, je pense que, pour toute la notion de la répartition des effectifs médicaux, la ministre aurait l'occasion, au tout début de la prochaine session - puisqu'elle n'a pas voulu cette fois-ci - d'asseoir tout son beau monde à une commission parlementaire et de présenter un projet de loi qui va assurer une qualité raisonnable de soins de santé en régions éloignées et qui va demander à chacune des parties en cause de mettre du sien, y compris les universités qui ont un rôle à jouer également, y compris les fédérations médicales et la Corporation des médecins, y compris les jeunes aspirants médecins ou étudiants en médecine ou les jeunes résidents et internes, pour savoir comment ils voient cela, eux. Est-ce qu'ils sont conscients que l'État a le devoir de répartir les médecins dans tout le Québec?

Ce n'est pas seulement cela. Le problème, à part cela, est plus grave que Mme la ministre pouvait le laisser entendre. Je sais qu'elle doit en être très consciente. C'est rendu que dans des régions aussi proches de Montréal que Joliette, aussi proches de Montréal que Saint-Jean, aussi

proches de Montréal que Longueuil, on est privé de psychiatres, par exemple, parce qu'ils sont concentrés presque exclusivement à Montréal et à Québec, et que dans des régions aussi proches que Saint-Hyacinthe, on manque de cardiologues, on manque d'anesthésistes dans plusieurs régions, à proximité même des grands centres. C'est sûr qu'il va falloir faire une discussion, et une discussion très sérieuse, si on veut répondre aux besoins de la population. Le centre du Québec a beau être Québec et Montréal - les deux grosses villes - mais il y a des gens qui paient des impôts, qui paient des taxes et qui ont le droit à des services de qualité. (17 heures)

Justement ce matin, je recevais un télégramme de Mont-Laurier, du comté de Labelle. On nous annonce qu'à Ferme-Neuve, il n'y a plus de médecin. Dans des hôpitaux éloignés, on nous dit qu'il n'y a pas de médecin, qu'il n'y a pas de spécialiste. On va régler cela comment? Non pas en faisant une discussion à l'intérieur d'un projet de loi axé sur les conflits d'intérêts. C'est en faisant un projet de loi et en le déposant dans cette Chambre mais un projet de loi bien identifié, qui dira clairement: Voici comment le gouvernement entend répartir les effectifs médicaux sur son territoire et assurer une médecine de qualité pour l'ensemble des Québécois en concertation avec toutes les personnes intéressées.

Il est sûr qu'on ne ralliera pas tout le monde. Il est sûr qu'on ne réussira pas à avoir l'unanimité. Je suis convaincu qu'avec une commission parlementaire où toutes les personnes auraient, non pas des petites demi-heures, mais, suffisamment de temps pour s'exprimer, - s'il faut prendre trois semaines en commission parlementaire avec six ou sept groupes seulement, on le prendra - on pourrait essayer de faire franchir à chacun le bout nécessaire pour en arriver véritablement à avoir un consensus majoritaire et faire en sorte, qu'au Québec, l'ensemble de notre population reçoive des soins de santé de qualité, où qu'elle soit au Québec. On a droit à cela mais on ne doit pas s'essayer par la bande, s'essayer par un petit amendement supposément, pour boucher un trou juridique, comme Mme la ministre a tenté de le faire.

Je pense que ce n'est pas comme cela qu'on agit quand on veut définitivement régler des problèmes, quand on veut véritablement faire en sorte, qu'au Québec, il se dégage des consensus de temps à autre. Merci.

La Vice-Présidente: Merci, M. le chef de l'Opposition. Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux, sur votre intervention de cinq minutes.

Mme Lavoie-Roux: Bien, j'ai parlé cinq minutes tout à l'heure. Est-ce que j'ai le droit de parole? Mme la Présidente...

La Vice-Présidente: Oui, madame.

Mme Lavoie-Roux: Pourriez-vous me dire si j'ai droit à cinq minutes et ensuite à la réplique?

La Vice-Présidente: Nous sommes ici au stade de la prise en considération. Vous avez droit à cinq minutes après chaque intervention mais il n'y a aucun droit de réplique étant donné que c'est une motion de forme et non une motion de fond. Mme la ministre.

Mme Thérèse Lavoie-Roux

Mme Lavoie-Roux: Vous comprendrez, Mme la Présidente, que cela va être difficile de répondre dans cinq minutes aux assertions du chef de l'Opposition. Dès le départ, je voudrais dire que cela m'étonne beaucoup, et je suis même très surprise d'entendre, tout à coup, le député de Joliette faire un grand plaidoyer sur cette nécessité de faire une meilleure répartition des médecins en régions éloignées.

Je ne dis pas que c'est lui - il n'était pas porte-parole à ce moment-là - mais le porte-parole de l'Opposition, au moment où nous avons présenté la loi 75, et plusieurs s'en souviendront dans cette Chambre, ce projet qui visait justement à établir une meilleure distribution de la main-d'oeuvre médicale au Québec pour justement corriger les inéquités que l'on connaît, corriger les carences que l'on connaît, a finalement acquiescé à la toute fin parce que probablement qu'à ce moment ils avaient eu des représentations qui leur avaient été faites par les régions éloignées, notamment au député d'Abitibi-Ouest, je pense.

Mme la Présidente, cela me fait un peu sourire de sentir tout à coup... Je devrais m'en réjouir par contre. Peut-être qu'à l'avenir, on aura une meilleure collaboration que celle que nous avons eu dans le passé.

Je voudrais aussi ajouter qu'en ce qui a trait à la consultation des gens, depuis près de deux ans maintenant ou un an et demi, existe au ministère de la Santé et des Services sociaux une table de concertation qui réunit tous les intervenants dont le député a parlé: les fédérations des médecins spécialistes, des omnipraticiens, les universités, la Corporation des médecins, les étudiants, les résidents internes et les CRSSS et j'en passe. Ces gens travaillent et tentent d'établir un consensus. Je pense que, sans forcer les choses, nous allons arriver à corriger ces lacunes que tout le monde déplore, la population des régions éloignées, en particulier.

En ce qui a trait aux conflits d'intérêts

et à l'exclusivité d'emploi, on a eu droit à un long discours sur la déchéance de charges dans le cas des conflits d'intérêts. Il faudrait rappeler que nous avons reçu en commission parlementaire tous les principaux intéressés qui touchaient ces deux aspects. Dans le cas des conflits d'intérêts, personne n'a remis en question la question de déchéance.

Dans le cas de l'exclusivité d'emploi, je voudrais corriger une erreur que le député de Joliette, sans le vouloir, sans aucun doute, nous dit: II ne faut pas qu'il y ait d'exclusivité d'emploi dans le cas des cadres intermédiaires. Bien, on a justement voté et on a corrigé ce qui nous apparaissait peut-être excessif dans le cas des cadres intermédiaires à qui on demandait l'exclusivité d'emploi. Alors, je ne sais pas où était le chef de l'Opposition mais je comprends qu'il est très occupé et qu'il peut lui en échapper quelques-unes.

Il dit également: La ministre ne veut pas responsabiliser les conseils d'administration en prévoyant la déchéance de tâche. Je vous ferai remarquer que la question de déchéance de tâche existait dans la loi. Je ne viens pas déresponsabiliser les conseils d'administration, puisque ce sont eux qui devront intervenir s'ils trouvent leur directeur général, leurs cadres intermédiaires ou leurs cadres supérieurs en conflit d'intérêts. Ce n'est pas la ministre. Ce sont les institutions ou les établissements eux-mêmes qui vont devoir le faire. La seule chose qui est ajoutée, c'est que la pénalité est plus sévère qu'elle ne l'était dans le passé.

Mme la Présidente, je sais qu'il me reste une minute. J'aurai l'occasion, probablement, d'intervenir en troisième lecture. Ce qu'il faut rappeler, en terminant, c'est que la ministre de la Santé et des Services sociaux aurait préféré ne pas avoir à intervenir sur toute cette question de conflit d'intérêts et d'exclusivité d'emploi. Si nous avons eu à le faire, c'est que, malheureusement, il y a eu non seulement les cas dont on a pu prendre connaissance dans les journaux, mais il y a eu davantage de cas que les deux ou trois cas dont parle le député de Joliette. Il le sait fort bien lui-même.

Je pense que, même si ce n'est pas facile, nous avons eu le courage de prendre nos responsabilités et que le chef de l'Opposition, lui-même en particulier, sait que plusieurs des lacunes que nous voulons corriger existaient déjà depuis plusieurs années. Il l'a dit d'ailleurs. Au moins nous prenons nos responsabilités vis-à-vis de la population. La population n'en attendait pas moins de nous vis-à-vis de l'administration ou de la saine administration des fonds publics. Dans ce sens, Mme la Présidente, nous espérons que les situations que nous avons eu à déplorer, et non seulement celles-là, seront corrigées, mais que surtout nous pourrons en prévenir d'autres. Également, nous établirons une administration plus transparente de la part des établissements qui devront davantage rendre compte au public de l'utilisation de leurs fonds à l'occasion de leur assemblée annuelle et encore nous sensibiliserons et exigerons des vérificateurs qu'eux aussi voient leur mandat de contrôle -je parle des vérificateurs externes - des budgets des hôpitaux être changés d'une façon qui tienne davantage compte de l'intérêt du public et de l'utilisation des fonds publics. Je vous remercie, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Merci, Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Chevrette: Adopté sur division. Le rapport.

La Vice-Présidente: Si vous me permettez, je vais faire les lectures, M. le chef de l'Opposition, vu qu'il y avait des amendements aussi qui avaient été présentés. Si vous me permettez. Donc, je déclare le débat clos.

M. Chevrette: Oui.

Adoption des amendements

La Vice-Présidente: Débat clos. Les amendements qui ont été proposés par la ministre concernant le projet de loi 97, Loi modifiant la Loi sur les services de santé et les services sociaux sont-ils adoptés?

M. Chevrette: Les amendements?

La Vice-Présidente: Les amendements.

M. Chevrette: II faut bien se comprendre. Les trois derniers?

La Vice-Présidente: Les trois derniers.

M. Chevrette: II y en a un pour lequel on est contre et deux pour.

La Vice-Présidente: Donc...

M. Chevrette: Article 1, on est contre.

La Vice-Présidente: Adopté sur division.

M. Chevrette: Article 4, on est pour. Article 7, on est pour.

La Vice-Présidente: C'est parce qu'on les adopte en bloc, M. le chef de l'Opposition.

M. Chevrette: Adopté sur division.

La Vice-Présidente: Adopté sur division. Le rapport tel qu'amendé de la commission des affaires sociales sur le projet de loi 97, Loi modifiant la Loi sur les services de santé et les services sociaux, est-il adopté?

M. Chevrette: Sur division.

La Vice-Présidente: Adopté sur division. M. le leader du gouvernement.

M. Gratton: Oui, Mme la Présidente. Je suggère que nous suspendions quelques brèves minutes.

La Vice-Présidente: Cette motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

La Vice-Présidente: Adopté. Nous allons suspendre quelques minutes.

(Suspension de la séance à 17 h 9)

(Reprise à 17 h 10)

La Vice-Présidente: À l'ordre, s'il vous plaît!

Nous allons reprendre nos travaux. M. le leader du gouvernement.

M. Gratton: Mme la Présidente, je vous prie, maintenant, d'appeler l'article 25 du feuilleton.

Projet de loi 63

Prise en considération du

rapport de la commission qui

en a fait l'étude détaillée

La Vice-Présidente: À l'article 25 du feuilleton, la ministre de la Santé et des Services sociaux propose l'adoption du rapport de la commission des affaires sociales qui a procédé à l'étude détaillée du projet de loi 63, Loi modifiant la Loi sur la protection de la santé publique et la Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant les affaires sociales.

Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux.

Mme Thérèse Lavoie-Roux

Mme Lavoie-Roux: Mme la Présidente, je vais être très brève, d'ailleurs l'Opposition était d'accord sur ce projet de loi qui vise... Il faut rappeler qu'en 1985, le gouvernement avait adopté une politique pour indemniser les personnes qui pourraient être des victimes de l'immunisation. Comme des cas n'ont pas été couverts à ce moment-là, ce projet de loi vise à couvrir des cas qui se sont déclarés depuis ce temps-là et à prévoir un laps de temps pendant lequel de futures victimes d'immunisation pourraient se prévaloir des réparations qui sont prévues dans la loi sous forme d'indemnités.

Alors, c'est strictement le but de cette modification à la Loi sur la protection de la santé publique et la Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant les affaires sociales.

La Vice-Présidente: Merci, Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Chevrette: Adopté, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: II n'y a pas d'autre intervenant. Donc, est-ce que le rapport de la commission des affaires sociales sur le projet de loi 63, Loi modifiant la Loi sur la protection de la santé publique et la Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant les affaires sociales, est adopté?

Une voix: Adopté.

La Vice-Présidente: Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Gratton: Oui, Mme la Présidente. Nous devrons suspendre pour quelques instants, histoire de donner l'occasion au député de Lévis de se rendre à l'Assemblée pour qu'on puisse ensuite procéder à l'étude de l'article 42 du feuilleton.

Alors, je propose la suspension pour quelques minutes.

La Vice-Présidente: Je vais donc suspendre à loisir.

(Suspension de la séance à 17 h 13)

(Reprise à 17 h 20)

La Vice-Présidente: Vous pouvez vous asseoir. Nous allons reprendre nos travaux. M. le leader du gouvernement.

M. Gratton: Mme la Présidente, je vous prierais d'appeler l'article 42 du feuilleton, s'il vous plaît.

Projet de loi 76 Adoption

La Vice-Présidente: À l'article 42 de notre feuilleton, le ministre des Transports propose l'adoption du projet de loi 76, Loi sur le camionnage.

M. le ministre des Transports.

M. Marc-Yvan Côté M. Côté (Charlesbourg): Mme la

Présidente, je propose l'adoption, compte tenu du fait que nous en avons longuement discuté en deuxième lecture et que nous avons adopté un certain nombre d'amendements lors de l'étude article par article et que nous introduisons un amendement en troisième lecture qui fait suite à l'intervention du député de Lévis où la traduction de l'anglais n'était pas très significative quant à la portée. Cette modification a pour effet de remplacer l'expression "piggyback" par "saddle mount" dans la version anglaise du projet de loi pour désigner la technique du dos d'âne où on a eu une discussion avec le député de Lévis. Effectivement, c'est pour corriger...

Quant au reste, Mme la Présidente, je propose à l'Assemblée, compte tenu du fait que l'une des interventions majeures du député de Lévis consistait à donner aux Québécois la possibilité de transporter des véhicules automobiles, que ce ne soit pas uniquement des transporteurs étrangers, que cette principale question a maintenant été réglée et que j'en ai transmis copie au député de Lévis. On peut dire que, maintenant, il y a des Québécois qui peuvent transporter des voitures automobiles et que c'est dans la normalité des choses. Dans ce sens, je vous propose l'adoption en troisième lecture du projet de loi 76.

La Vice-Présidente: Merci, M. le ministre des Transports. Est-ce qu'il y a d'autres intervenants? M. le député de Lévis.

M. Jean Garon

M. Garon: Mme la Présidente, c'est ma dernière intervention dans le projet de loi 76, Loi sur le camionnage, qui a pour objet de faire une réglementation, une loi nouvelle, qui aura pour effet de permettre aux gens du Québec de vivre un système harmonisé -possiblement harmonisé, on n'est pas encore sûr - entre le gouvernement fédéral, le gouvernement du Québec et les gouvernements des autres provinces.

On sait qu'il y a un certain nombre d'années, un travail avait été mis en marche dans ce sens. Le ministre en a parlé à plusieurs reprises et une entente avait été signée en février 1985 concernant l'harmonisation des règles du camionnage au Canada. Un projet de loi fédéral a été adopté, le projet de loi C-19, et les provinces avaient pris l'engagement de faire l'harmonisation.

Maintenant, par mesure de prudence, nous avons demandé au ministre de ne pas s'harmoniser trop vite, même si le projet de loi est adopté, parce qu'on a déjà vu des gens de l'Ontario ou d'autres provinces, qui avaient accepté l'harmonisation concernant le régime métrique, demander au gouvernement conservateur de maintenir le système anglais. Le Québec s'était harmonisé plus rapidement et s'était converti au système métrique, alors que le gouvernement fédéral avait changé son fusil d'épaule avec le changement de gouvernement et avait décidé de maintenir, à toutes fins utiles, les deux systèmes en place.

Comme l'harmonisation est possible, mais qu'elle n'est pas certaine, parce que les projets de loi n'ont pas été déposés par les autres provinces du Canada, des mesures transitoires ont été prévues dans ce projet de loi pour faire en sorte qu'il n'y ait pas d'harmonisation immédiatement. C'est ainsi que des dispositions concernant certains articles vont pouvoir être mises en application immédiatement, mais que d'autres, concernant l'harmonisation, pourront être retenues en attendant que l'Ontario, les provinces maritimes et d'autres provinces déposent leur projet de loi et qu'on soit bien assuré que les projets de loi qu'ils auront déposés devant leur Parlement vont dans le sens des engagements qui avaient été pris antérieurement.

Ce n'est pas que le projet de loi soit bon ou mauvais, c'est un projet de loi plutôt administratif, mais dont les Québécois craignent l'application parce qu'il s'inscrit dans un cadre de déréglementation. Dans un tel cadre, on a pu observer quand cela s'est fait ailleurs, qu'il y a eu concentration des entreprises. Les entreprises moyennes sont disparues au profit de grandes entreprises de camionnage, le nombre de grandes entreprises a été diminué et, par ailleurs, le nombre de petites entreprises a augmenté parmi les toutes petites entreprises de camionnage. Les gens craignent que l'application de la Loi sur le camionnage ne soit pas faite de façon assez sévère. Quant à la Loi sur la sécurité routière, que le ministre appellera sans doute après l'adoption de ce projet de loi, ils craignent qu'une application pas assez rigoureuse de la loi fasse en sorte que ceux qui s'y soumettent aient des frais additionnels à payer tandis que ceux qui appliqueront le vieux principe "pas vu pas pris" s'en tireront à des coûts moindres. Tous ont fait remarquer qu'ils souhaitent que l'application du projet de loi soit assez rigoureuse pour qu'elle soit égale et équitable pour tous.

Plusieurs ont manifesté une certaine inquiétude par rapport à la déréglementation et particulièrement devant le fait qu'ils pourraient être poursuivis ou ne pas être poursuivis aux États-Unis. Certaines dispositions ont été adoptées au niveau fédéral, mais aux États-Unis, 43 États n'ont pas encore déréglementé. C'est pourquoi, nous avons convenu en commission parlementaire d'adopter des règles transitoires pour que des articles ne soient pas appliqués avant qu'il y ait eu vérification ou entente avec d'autres

États susceptibles d'appliquer les règles d'harmonisation.

Il est évident qu'il est impossible de parler des projets de loi 73 et 76; c'est pour cela que j'ai parlé un peu des deux. Le projet de loi 76 établit un régime qui sera, à toutes fins utiles, le même dans l'ensemble du Canada. C'est pourquoi plusieurs entreprises du Québec sont inquiètes, parce qu'on ne peut pas présumer de l'application qui en sera faite dans les différentes parties du Canada. Certains pourront l'appliquer avec rigueur, d'autres avec plus de mollesse et l'application du régime comptera davantage que la loi elle-même.

Enfin, il y a un autre point qui a été discuté longuement et qui paraît important, c'est de permettre le transport des véhicules automobiles par des camions du Québec. Au cours du débat en commission parlementaire, une entreprise qui avait souhaité, depuis plusieurs années, 12 ou 13 ans, faire du camionnage au Québec, avait jugé opportun de saisir les gens de la commission de sa volonté de s'impliquer dans ce secteur du camionnage et avait fait observer que les amendements qui avaient été introduits auraient pour effet de permettre des contestations qui n'auraient pas été possibles de la même façon si la loi était restée comme elle était lors du dépôt du projet à l'Assemblée nationale. On avait discuté à ce moment-là pour qu'elle puisse obtenir son permis, et ceux qui s'opposaient à l'obtention de son permis ont convenu de retirer leur opposition pour régler ce cas.

Mais il faudra voir dans l'avenir si les gens du Québec qui ont demandé de transporter des véhicules automobiles auront la même possibilité que les gens de l'Ontario. Il ne serait pas normal qu'un secteur... J'ai vérifié, parce qu'en commission parlementaire, on m'a dit que c'était 400 000 000 $ pour l'ensemble du Canada et 160 000 000 $ pour le Québec, 400 000 véhicules à raison d'un peu plus de 300 $ par automobile. Il s'agit d'un marché d'environ 160 000 000 $ pour l'ensemble du Québec, alors qu'on avait l'impression qu'il s'agissait, à un moment donné, de 160 000 000 $ pour le Canada. Il s'agissait de 160 000 000 $ uniquement pour le Québec, c'est une somme d'argent considérable. (17 h 30)

Si ce transport sur le territoire du Québec était effectué par des Québécois, il y aurait beaucoup plus de travail pour ceux qui veulent travailler dans ce secteur. 400 000 véhicules neufs achetés par des Québécois, c'est un nombre considérable, sans compter les véhicules usagés. Il n'est pas normal que les automobiles soient acheminées à partir des usines de l'Ontario par chemin de fer jusqu'à Montréal et de Montréal à Charny, et qu'à partir des usines de l'Ontario, à partir des points de débarquement au Québec ce soient des camionneurs ou des camions de l'Ontario qui viennent prendre ces automobiles au chemin de fer pour les amener vers les garages.

C'est un sujet dont on nous a parlé à l'occasion de la commission parlementaire. Je pense qu'un pas a été fait dans la bonne direction à cette occasion, et il faudra maintenant que les entreprises du Québec se montrent intéressées à occuper ce terrain, ce volet du transport, qui représente des sommes considérables.

Mme la Présidente, nous avions des inquiétudes concernant l'arrimage qui pourrait se faire entre ce projet de loi sur le camionnage et l'entente sur le libre-échange. On sait que l'entente sur le libre-échange a écarté le domaine du transport et il n'y aura pas d'arrimage à l'entente sur le libre-échange du domaine du transport. Le domaine du transport a été écarté, apparemment, parce que les négociateurs canadiens s'étaient fait avoir ou n'avaient pas pu négocier grand-chose dans le domaine du transport, principalement dans le domaine du transport maritime où le Québec est très compétitif.

On observe que des Américains ont réussi à écarter du libre-échange les secteurs où ils sont moins compétitifs que les Canadiens ou les Québécois. Le transport maritime est un exemple, et il n'est pas contenu dans l'entente du libre-échange, pas plus que le reste du transport.

La Loi sur le camionnage ne s'inscrira donc pas dans le cadre de cette entente, et la déréglementation qui a été mise en marche au Canada s'appliquera aux ententes particulières qui auront été faites dans des lois particulières, tant aux États-Unis qu'au fédéral ici ou au fédéral américain, mais, par ailleurs, au niveau de chacun des États américains, très peu d'États ont déréglementé. Et on peut voir que la déréglementation dans le domaine du transport n'est pas sur le pilote automatique aux États-Unis, ce qui veut dire qu'il faut être prudent parce que les grandes compagnies américaines ont une capacité de concurrence et une capacité d'occuper le terrain, s'il n'y a pas de mesures qui puissent protéger les camionneurs québécois.

Il faut aussi bien considérer et se demander: Qui est usager? Parce qu'on parle souvent et ceux qui sont partisans de la déréglementation dans le domaine du transport parlent souvent du service aux usagers. J'aimerais bien qu'on se pose une question, par exemple. Dans le domaine du transport automobile, qui est l'usager? Le manufacturier ontarien qui fait une automobile ou le garage québécois qui fait venir l'automobile pour la vendre à des Québécois? J'ai le sentiment que... D'autant plus sur la facture quand on achète une

automobile, c'est écrit: transport en sus. Donc, si c'est transport en sus, c'est parce que c'est l'acheteur qui paie le transport, et, si c'est celui-ci qui paie le transport, c'est lui qui devrait déterminer qui va faire le camionnage. Il faudrait sans doute se demander si nous ne sommes pas dans un cas de collusion où les manufacturiers d'automobiles de l'Ontario, d'une façon discriminatoire, décident d'utiliser les camionneurs ontariens. À ce moment-là, la Loi relative aux enquêtes sur les coalitions pourrait être utilisée par ces fameux bureaux du Directeur général des enquêtes sur les coalitions pour voir si, dans le domaine du camionnage ou du transport de véhicules automobiles, il n'y a pas collusion entre les manufacturiers qui, dans le fond, sont les expéditeurs, mais qui ne sont pas ceux qui devraient être considérés comme les usagers puisque les usagers sont bien les garages locaux qui vendent les automobiles.

Il semble que la compagnie Honda a accepté d'utiliser les transporteurs québécois, mais que les autres compagnies, d'une façon générale, ont utilisé des transporteurs ontariens. Il faudrait peut-être en aviser le public et dire aux gens que les gens de Ford, les gens de Chrysler, les gens de Buick, les gens de GM, les gens des différentes marques d'automobile, qui sont des distributeurs au Québec, qui vendent leurs automobiles à des Québécois, devraient exiger que le transport au Québec d'automobiles manufacturées en Ontario devrait se faire par des transporteurs québécois, et qu'on se serve de notre pouvoir d'achat au Québec parce que les clients seront des Québécois pour que les vendeurs distributeurs d'automobiles au Québec tiennent compte des intérêts de leurs clients et essaient d'avoir le maximum de retombées économiques, dans le domaine de l'automobile, au Québec, par le transport des automobiles, à défaut d'avoir une grande partie de la fabrication d'automobiles qui a été concentrée - on le sait bien, on l'a vu -en Ontario, avec la volonté du gouvernement fédéral.

J'espère que la nouvelle compagnie Hyundai, qui va travailler au Québec et dont 90 % du marché est le Québec, saura, elle aussi, utiliser des transporteurs québécois et non pas des transporteurs ontariens. Il n'est pas normal que l'on utilise des transporteurs ontariens pour transporter, exclusivement sur le territoire québécois, des automobiles qui seront achetées par des consommateurs québécois. C'est un marché considérable, 160 000 000 $. Nous avons beaucoup discuté de ce point en commission parlementaire pour faire en sorte que les retombées économiques se fassent chez nous. Si on est plus conscient, dans le domaine du transport, des montants considérables des retombées économiques qu'il peut y avoir à la condition d'utiliser nos transporteurs, il y aura des emplois en nombre considérable, dans le domaine du transport, à cause de la manutention de transport qui est faite, à cause d'une grande partie des importations et des exportations au point d'arrivée situé au Québec.

Mme la Présidente, je ne voudrais parler plus longuement sur le projet de loi. Dans six mois, dans un an, les gens verront comment le ministre a utilisé la loi, a appliqué la loi. Une fois le projet de loi adopté, le travail commence pour le ministère des Transports qui devra appliquer la loi. Les gens souhaitent, si la loi est adoptée, qu'elle soit appliquée. Cela a été leur principale demande. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Merci, M. le député de Lévis. Il n'y a pas d'autres interventions? Je comprends que je suis autorisée à faire les écritures en ce qui concerne l'amendement?

Une voix: Oui, Mme la Présidente.

Commission plénière

La Vice-Présidente: Je suis autorisée. Je vais donc faire les amendements. Est-ce que la motion pour se transformer en commission plénière est adoptée?

Des voix: Adopté.

Adoption de l'amendement

La Vice-Présidente: Est-ce que l'amendement du ministre concernant le projet de loi 76, Loi sur le camionnage, est adopté?

Des voix: Adopté.

La Vice-Présidente: Est-ce que le rapport de la commission plénière est adopté?

Des voix: Adopté.

Adoption du projet de loi

La Vice-Présidente: Est-ce que le projet de loi 76, Loi sur le camionnage, est adopté? Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Gratton: Mme la Présidente, est-ce que vous voulez bien appeler l'article 41 du feuilleton, s'il vous plaît?

Projet de loi 73

Adoption La Vice-Présidente: À l'article 41 de

notre feuilleton, le ministre des Transports propose l'adoption du projet de loi 73, Loi modifiant le Code de la sécurité routière et d'autres dispositions législatives.

M. le ministre des Transports.

M. Marc-Yvan Côté

M. Côté (Charlesbourg): Merci, Mme la Présidente. Comme dans le projet de loi 76, le projet de loi 73 vise à introduire au Code de la sécurité routière le Code canadien afin d'être, en quelque sorte, le garde-fou de l'application du projet de loi 76 et de faire en sorte que les gens puissent continuer d'utiliser les routes du Québec de manière sécuritaire. Nous en avons parlé abondamment. Cela a été largement publicisé. (17 h 40)

J'ai transmis, par l'entremise de personnes, hier soir, au député de Lévis, un amendement à l'article 62, l'article 519.41, qui vise à supprimer de son application le nombre 258 parce que, comme le disent les légistes à l'occasion, c'était devenu un article superfétatoire et qu'on retrouve à l'intérieur d'un autre article. Donc, comme la législation la plus simple est celle qui n'est pas là, dans ce sens, Mme la Présidente, nous avons décidé d'apporter un amendement pour faire en sorte que cet article disparaisse. C'est le seul changement que nous avons depuis que nous avons terminé la commission parlementaire qui a étudié la loi, article par article, et que nous avons adopté le rapport de la commission qui a adopté les articles. C'est un projet de loi dont je suis extrêmement fier, tout comme du projet de loi 76, d'ailleurs. Ils vont l'un avec l'autre. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Merci, M. le ministre des Transports. M. le député de Lévis.

M. Jean Garon

M. Garon: Mme la Présidente, nous en sommes à la troisième lecture du projet de loi 73 modifiant la Loi sur le Code de sécurité routière et la Loi sur l'assurance automobile. Nous avions voté pour le principe en deuxième lecture de ce projet de loi. Nous avions étudié les différents articles en commission parlementaire. Il s'agit encore là d'une harmonisation dans le sens de la sécurité routière mais harmonisation dont nous connaîtrons la valeur lorsqu'elle aura été appliquée.

La grande appréhension de tous ceux qui sont venus nous parler du Code de la sécurité routière ne portait pas sur le projet de loi mais les représentations qui nous ont été faites l'ont été beaucoup plus sur l'application de la loi. Ce que les intervenants craignent c'est que les lois ne soient pas appliquées.

Pour vous donner un exemple, Mme la Présidente, des entreprises qui ont plusieurs camions disent qu'avoir un camion en ordre coûte plus cher que d'avoir un camion qui n'est pas en ordre et que tous doivent se plier au Code de sécurité routière parce qu'il y aura des coûts accrus pour tous en vue d'une plus grande sécurité du public. Par ailleurs, pour avoir cette sécurité du public, il faut véritablement que les codes aient été adoptés mais qu'ils soient aussi appliqués de façon rigoureuse pour tous.

Tous ont convenu qu'il fallait qu'il y ait davantage de sécurité. Des enquêtes ont démontré que plusieurs camions n'étaient pas en état d'offrir toute la sécurité qu'ils devraient. Les dispositions de ce code auront pour effet de rendre un peu solidairement responsables les transporteurs, les expéditeurs et les camionneurs, chacun à un niveau différent, pour que la sécurité puisse être en vigueur.

Il y avait un article sur lequel nous avons parlé plus longuement parce que nous voulions que le ministre fasse des changements. Initialement, lors de son discours de deuxième lecture, il semblait malheureux que nous ayons fait des représentations aussi vigoureuses mais, finalement, il a présenté des amendements. Il s'agissait de l'article 88 concernant la délivrance de permis à des personnes handicapées. Le gouvernement qui avait satisfait antérieurement à l'émission de plaques pour le stationnement des personnes handicapées touchait seulement celles qui conduisaient elles-mêmes leur véhicule automobile.

Les groupes de personnes handicapées ont demandé des plaques amovibles qui pourraient être utilisées par les personnes handicapées qui n'utilisent pas une automobile qu'elles conduisent elles-mêmes ou dont elles sont propriétaires, mais qui sont conduites par d'autres personnes. Nous avions fait des représentations dans ce sens, parce qu'il est clair que les gens handicapés qui ne sont pas capables de conduire une automobile sont encore plus handicapés que ceux qui en sont capables.

À ce moment-là, il fallait prévoir que les terrains de stationnement puissent être utilisés aussi par ceux qui ne peuvent pas conduire une automobile, mais qui doivent être transportés par d'autres. Plusieurs exemples avaient été fournis en commission parlementaire. Celui de jeunes enfants qui devraient être laissés sur le bord du trottoir en attendant que leurs parents aillent stationner l'automobile ou encore une personne handicapée qui devrait attendre sur le bord du trottoir que l'automobile soit stationnée. Cela peut prendre un certain temps. Ce n'est quand même pas tous des

terrains de stationnement proches de l'entrée des centres commerciaux.

Il y a un changement qui est apporté à la loi pour ne pas que tout cela soit remis aux municipalités qui ne sont pas équipées pour faire ce genre de travail, soit d'évaluer les personnes handicapées, et ensuite déterminer qui est handicapé et qui ne l'est pas après une analyse, faite d'après les règlements établis par le gouvernement qui détermine le statut d'une personne, pour savoir si elle doit obtenir une vignette amovible de stationnement. Finalement, le ministre a consenti un amendement qui n'est pas le meilleur dans les circonstances, mais qui est moins pire que le régime qui avait été prévu dans le projet de loi.

Nous avons fait des représentations vigoureuses. Les organismes de personnes handicapées comme COFAM, la Confédération des organismes provinciaux de personnes handicapées du Québec, ont fait des représentations et ils auraient souhaité que cette vignette permettant le stationnement de véhicules automobiles sur des terrains de stationnement réservés aux personnes handicapées puissent être délivrées par la Régie de l'assurance automobile. C'est à défaut que la Régie de l'assurance automobile du Québec n'a pas été assez compatissante pour accepter d'émettre les permis. Le ministre n'a pas voulu lui accorder cette autorité, et finalement la responsabilité va échoir à l'Office des personnes handicapées.

Les personnes handicapées auraient aimé être traitées sur le même pied que tous les citoyens et que l'émission de ces vignettes soit faite également par la Régie de l'assurance automobile du Québec. L'amendement du ministre va permettre... C'est mieux que rien, le ministre a fait un bout de chemin, mais il a fallu faire des représentations énergiques. Il a fallu que les associations en fassent également. Il a accepté de faire un bout de chemin, mais il n'a pas voulu tordre les bras de la Régie de l'assurance automobile, de sorte que l'Office des personnes handicapées fera l'émission des vignettes amovibles pour les personnes handicapées qui ne conduisent pas une automobile ou qui ne sont pas propriétaires d'une automobile, alors que celles qui sont propriétaires, les handicapés qui sont propriétaires d'une automobile qui conduisent eux-mêmes leur automobile pourront avoir leur vignette de la Régie de l'assurance automobile du Québec.

À l'application, on verra comment cela va fonctionner. Nous espérons que l'Office des personnes handicapées va collaborer au maximum, mais nous aurions préféré que la délivrance de cette vignette, comme le demandaient les personnes handicapées, soit faite, comme pour tous les autres, par la Régie de l'assurance automobile du Québec.

La Régie de l'assurance automobile du Québec est un organisme qui est habitué à traiter avec les victimes d'accidents d'automobile, qui aurait dû, normalement, se sentir plus à l'aise pour délivrer les vignettes aux personnes handicapées. Le ministre n'a pas voulu les forcer et il n'a pas voulu décider contre l'opinion de la régie qui ne voulait pas le faire. Finalement, c'est pour cette raison que la responsabilité ira à l'Office des personnes handicapées. Il me semble que cette décision, qui représente un pas en avant par rapport à ce que représentait le projet de loi au moment de son dépôt, n'est pas complètement arrêtée. Il faudra, au cours des prochains mois, faire comprendre à la Régie de l'assurance automobile ou au ministre que les personnes handicapées, qui veulent de plus en plus être intégrées dans leur milieu, pouvoir fonctionner le plus normalement possible, auraient aimé sur cette question être traitées administrativement comme les autres, d'autant plus que c'était possible et que la Régie de l'assurance automobile, qui a un réseau de distribution de vignettes, aurait pu facilement faire ce travail après avoir conclu une entente avec l'Office des personnes handicapées sur le statut de ces derniers. (17 h 50)

C'est évident qu'il faut déterminer qui va avoir une vignette, qui ne l'aura pas, dans quel ordre de handicaps une vignette pourra être délivrée et pourra être une vignette amovible, pour que tout le monde ne se retrouve pas avec une vignette, alors qu'ils ne sont pas vraiment handicapés.

Autre point, c'est que les handicapés demandaient que cette vignette soit délivrée gratuitement. Le ministre a choisi que ce sera un montant d'une trentaine de dollars pour la délivrance des vignettes aux personnes handicapées. Là encore, je pense bien que c'est un débat qui n'est pas terminé. Il s'agira de déterminer de quelle façon cette vignette, sur le plan administratif, sera délivrée par l'Office des personnes handicapées et à quel coût. Je suis persuadé que le ministre, surtout à la veille des fêtes, pourra écouter son coeur et pas seulement écouter les fonctionnaires qui pensent uniquement au Conseil du trésor, mais penser... D'autant plus que, tantôt, il va apporter un autre projet de loi où il va aller chercher 200 000 000 $ à la Régie de l'assurance automobile. Quand bien même il laisserait tomber quelques montants... C'est pourquoi la Régie de l'assurance automobile, qui peut laisser aller 200 000 000 $ de ses coffres vers le Conseil du trésor, aurait dû garder un plus gros montant pour délivrer les vignettes amovibles gratuitement aux handicapés qui sont déjà assez pénalisés par le fait qu'ils ont un handicap et qu'ils ne peuvent pas conduire

une automobile ni facilement se déplacer et qui ont déjà assez de se considérer à la charge des personnes qui les transportent. Ce n'est pas toujours facile pour un handicapé de pouvoir fonctionner le plus normalement possible dans les terrains de stationnement où, même quand vous n'êtes pas handicapés du tout, vous pouvez attendre longtemps avant de vous trouver un stationnement.

Il est à souhaiter, également, que les municipalités mettront à la disposition des personnes handicapées, dans les différentes municipalités du Québec, des terrains de stationnement privilégiés pour faire en sorte que les gens de notre société... Cela peut arriver à chacun d'entre nous, quelqu'un qui est très bien aujourd'hui peut être handicapé demain; cela peut être un de nos enfants, un enfant à naître qui aura un handicap à la naissance. Personne n'est exempt d'un handicap à venir. C'est pour cela que dans une société normale, il faut faire en sorte d'avoir le maximum de compassion pour des gens qui n'ont pas eu la chance d'avoir l'utilisation à 100 % de tous leurs membres physiquement ou, encore, qui ont subi des traumatismes qui ne leur laissent plus la chance d'utiliser leur potentiel biophysique, comme ils le souhaiteraient.

Il me semble que, dans une société compatissante, on essaie d'établir des équilibres. Je comprends que dans une société de libre-échange, c'est seulement les gens efficaces qui ont le droit d'avoir tous les privilèges. Dans une société de libre-échange, on pense que le seul critère, c'est l'efficacité. On réalisera très rapidement que pour obtenir la qualité de la vie et avoir une certaine solidarité humaine dans la communauté qui nous entoure, l'efficacité économique n'est pas le seul critère, parce que les gens ne sont pas tous nés avec la même santé, avec la même vigueur, avec la même chance au point de départ et que traiter les gens seulement sur le maximum d'efficacité - on l'apprendra très rapidement - ce n'est pas la meilleure règle pour guider une société normale et qui ne marche pas seulement sur l'informatique.

Dans une société, il y a des personnes qui doivent normalement être conscientes qu'elles vivent dans une société. Quand on est conscient qu'on vit dans une société, il faut se rendre compte qu'il faut essayer de rétablir les équilibres que la nature n'a pas établis.

Je pense que ce projet de loi doit tenir compte de problèmes qui peuvent survenir parce qu'il y a des personnes qui n'ont pas eu la même chance que les autres et que l'article 88 devrait encore être éventuellement amendé pour permettre que ces personnes soient traitées le mieux possible, parce que c'est la règle qui doit être suivie dans une société normale.

Mme la Présidente, nous allons voter pour ce projet de loi, puisque le principe d'avoir une meilleure sécurité routière au Québec est bon. Nous souhaitons que le ministre dispose des ressources nécessaires de la part du ministre des Finances qui a déjà eu l'âme assez dure pour aller chercher 200 000 000 $ dans la caisse des assurés de la Régie de l'assurance automobile. Il veut le faire, le projet de loi n'est pas encore adopté, mais l'intention du ministre des Finances a été annoncée le 30 avril 1987. Le ministre des Transports pourra disposer des fonds suffisants pour appliquer la loi et également pour qu'elle soit appliquée équitablement.

Je suis persuadé que le nouveau ministre du Tourisme pourra annoncer que, sur les routes du Québec, il y a davantage de sécurité, cela sera une façon de faire la promotion pour ceux qui veulent voyager au Québec. Au Québec, on est considéré comme des gens un peu "cowboys" sur nos routes. Quand les Américains viennent ici, ils viennent de nuit parce qu'ils ont peur le jour. Ils trouvent que c'est moins épeurant de voyager la nuit. On a l'habitude parfois de tourner un peu les coins ronds. On n'est pas aussi pires que les Mexicains, on n'est pas aussi pires que les Grecs ou les Athéniens, les Italiens ou même les Parisiens, mais il nous reste encore un peu de sang latin dans les veines et nous n'avons pas le flegme britannique lorsque nous conduisons notre automobile. C'est pourquoi avec cette volonté pour qu'il y ait une plus grande sécurité sur les routes du Québec, le ministre qui aura à voir à l'application de la loi aura un rôle considérable à jouer et il ne pourra pas le jouer si le ministre des Finances lui coupe les fonds, lui coupe les ressources.

Il est très important que le ministre nous dise dans sa réplique sur quel fonds, sur quelles resssources il pourra compter de la part du Conseil du trésor. Le ministre des Finances veut déjà lui siphonner 450 000 000 $ de la caisse de la Régie de l'assurance automobile en quatre ans. En 1986, 1987, 1988, 1989, le Trésor ira chercher 400 000 000 $ dans la caisse consolidée de la Régie de l'assurance automobile. Il faudra que le ministre ait l'assurance d'avoir tous les budgets nécessaires pour administrer une loi qu'il a voulu faire adopter, une loi qui va sûrement améliorer la sécurité routière à condition qu'elle soit appliquée et qu'il ait les ressources humaines et les moyens financiers pour appliquer sa loi.

Mme la Présidente, je ne voudrais pas parler plus longuement sur ce projet de loi, nous aurons l'occasion, au cours des prochains mois, de tracer des bilans et de voir quel est le résultat de l'application du projet de loi 73.

La Vice-Présidente: Merci, M. le député de Lévis. M. le ministre des Transports, en réplique.

M. Marc-Yvan Côté (réplique)

M. Côté (Charlesbourg): Mme la Présidente, je sais que le temps est quand même très limité, puisque nous approchons 18 heures, mais je veux relever deux points de l'intervention du député de Lévis concernant le projet de loi 73. Il a pris soin de parler de tout le phénomène des vignettes pour handicapés, qui a fait l'objet de plusieurs discussions en deuxième lecture en commission parlementaire et il faut bien le dire, de beaucoup de démagogie. Je ne vise pas particulièrement le député de Lévis, partout au Québec il y a eu un peu de démagogie concernant les stationnements pour handicapés.

Il faut se rappeler que la loi 127 qui avait été amendée permettait aux handicapés détenteurs d'un permis de conduire d'avoir sur leur plaque d'immatriculation une indication faisant en sorte qu'ils pouvaient utiliser les stationnements pour handicapés. C'était une première et c'était très intéressant.

L'autre problème qui a subsisté, c'est des parents qui, conduisant un handicapé, voulaient obtenir une vignette mobile, donc détenue par le handicapé, pour être capables d'utiliser les stationnements du Québec. Mais le fait d'augmenter le nombre de permis pour handicapés n'augmente pas le nombre de stationnements. Alors, voici ce que nous avons fait en cours de route. Effectivement, la Régie de l'assurance automobile a agi dans le cadre de ses responabilités puisqu'elle a autorité sur ceux qui ont des permis de même que sur ceux qui ont une immatriculation de voiture et, dans ce sens, elle a agi dans le cadre de ses responsabilités. Effectivement, la régie l'a fait à ma demande, expressément à ma demande, et je la remercie de l'avoir fait.

On voulait étendre cette demande à la régie pour faire en sorte que les 60 000 ou 70 000 autres handicapés au Québec puissent obtenir la vignette, mais il y avait un hic. Il faut que le handicapé soit déclaré comme tel et, pour qu'il soit déclaré comme tel, il faut qu'il passe des examens. À la suggestion du député de Lévis, en conclusion, Mme la Présidente...

La Vice-Présidente: Je m'excuse, compte tenu de l'heure, est-ce qu'il y a consentement? Consentement. Vous pouvez continuer.

M. Côté (Charlesbourg): Merci. C'est à la suggestion du député de Lévis - pas à la mienne - qu'on a conféré à l'Office des personnes handicapées la responsabilité d'émettre ces vignettes. Qui mieux que l'Office des personnes handicapées peut être habilité à reconnaître un handicapé? Certainement pas la Régie de l'assurance automobile du Québec. Dans ce sens, c'est un juste retour des choses, à la bonne place, que tous les gens respecteront partout au Québec. Mais il y a un hic. Ce n'est pas dû au fait qu'on délivrera x milliers de vignettes additionnelles que les stationnements augmenteront. Je l'ai dit, c'est davantage dans la mentalité et dans le respect que nous réussirons à régler un certain nombre de choses. D'abord, pour celui qui a la mobilité, qui est capable de se déplacer, de stationner dans un stationnement de centre commercial et de laisser le stationnement pour handicapés au bénéfice des handicapés. Dans ce sens-là ça m'apparaît extrêmement important et c'est davantage par ce qu'on appelle, dans un vocable un peu plus large, l'éducation, le civisme, qu'on réussira à faire progresser les choses. Dans ce sens-là, c'est avec l'assentiment de tout le monde, l'Office des personnes handicapées, la Régie de l'assurance automobile, l'Opposition et le gouvernement que nous en sommes venus à cette conclusion.

Donc, c'est très heureux. Le projet de loi 73 est un bijou du genre, non seulement pour les stationnements des personnes handicapées, mais l'ensemble du projet de loi 73. Et nous l'appliquerons, je le dis au député de Lévis, avec la même rigueur que nous l'avons fait en 1986 et en 1987 quant à l'application du Code de la sécurité routière. Il y a suffisamment de personnes responsables à la Régie de l'assurance automobile, à la Commission des transports du Québec et au ministère des Transports, et le niveau de responsabilité des agents de la paix est suffisamment élevé pour faire en sorte que ce soit appliqué de manière équitable et juste partout au Québec. Dans ce sens-là, je suis extrêmement heureux de l'avoir fait adopter en deuxième lecture et d'en proposer son adoption en troisième lecture devant l'Assemblée.

Quant à certains autres éléments soulevés par le député de Lévis, j'ai bien l'impression qu'à 20 heures, quand on reprendra avec le projet de loi 62, chacun pourra en avoir pour son argent, parce que j'attends déjà ce moment depuis fort longtemps.

La Vice-Présidente: Merci, M. le ministre des Transports.

Le débat étant clos je comprends que j'ai l'autorisation de cette Chambre pour faire les écritures?

Une voix: Oui.

Commission plénière

La Vice-Présidente: Nous allons donc procéder. Est-ce que la motion pour que l'Assemblée se transforme en commission plénière est adoptée?

Une voix: Adopté.

Adoption de l'amendement

La Vice-Présidente: Est-ce que l'amendement proposé par le ministre des Transports au projet de loi 73 et qui se lit comme suit: "A l'article 62, supprimer dans la deuxième ligne de l'article 519.41 le nombre 258", est adopté?

Une voix: Adopté.

La Vice-Présidente: Est-ce que le rapport de la commission plénière est adopté?

Une voix: Adopté.

Adoption du projet de loi

La Vice-Présidente: Est-ce que le projet de loi 73, Loi modifiant le Code de la sécurité routière et d'autres dispositions législatives, est adopté?

Des voix: Adopté.

La Vice-Présidente: Adopté.

Compte tenu de l'heure, nous allons donc suspendre nos travaux jusqu'à 20 heures ce soir.

(Suspension de la séance à 18 h 4)

(Reprise à 20 h 9)

La Vice-Présidente: À l'ordre, s'il vous plaît:

Nous allons reprendre nos travaux. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Johnson: Mme la Présidente, je vous demanderais d'appeler l'article 37 du feuilleton.

Projet de loi 62 Adoption

La Vice-Présidente: À l'article 37 de notre feuilleton, le ministre des Transports propose l'adoption du rapport de la commission de l'aménagement et des équipements qui a procédé à l'étude détaillée du projet de loi 62, Loi modifiant la Loi sur l'assurance automobile. Je m'excuse, il s'agit de l'adoption du projet de loi 62, Loi modifiant la Loi sur l'assurance automobile.

M. le ministre des Transports.

M. Côté (Charlesbourg): Mme la Présidente, que le député de Lévis tire le premier!

La Vice-Présidente: M. le député de Lévis.

M. Jean Garon

M. Garon: Mme la Présidente, n'étant pas un soldat français à Fontenoy, je tirerai le premier. À Fontenoy, les Français avaient dit aux Anglais: Tirez les premiers. Les Anglais ont tiré les premiers et les Français ont perdu la bataille. C'est pourquoi il ne faut pas attendre l'offre de tirer les premiers, il faut toujours tirer les premiers. Le ministre est de bonne humeur. Je m'en venais sur le boulevard Laurier tout à l'heure et je me disais: Comment se fait-il qu'aucune lumière n'est synchronisée? J'ai dû arrêter à peu près à toutes les lumières. Je me suis dit: C'est pire, pour la sécurité routière, que n'importe quoi parce que, quand les lumières ne sont pas synchronisées, cela fait bouillir d'impatience tous les conducteurs. La meilleure façon de faire en sorte que la sécurité routière soit bien observée, c'est que cela roule. Quand cela ne roule pas suffisamment, c'est là qu'on voit des imprudences se commettre. J'ai dû constater qu'il y a certainement eu quelque chose dans le mécanisme des lumières sur le boulevard Laurier parce que jamais les lumières n'ont été si peu synchronisées.

Mme la Présidente, ce n'est pas le discours que je veux tenir ce soir parce que nous parlons de la Régie de l'assurance automobile, de la Loi sur l'assurance automobile et, encore une fois, des 200 000 000 $ que le ministre des Transports s'est fait siphonner par le ministre des Finances. Le ministre des Finances n'est pas là souvent. Il est là à l'occasion d'une fuite budgétaire, mais, en d'autre temps, il n'est pas là souvent. Ce n'est pas un veilleux! Mais, par ailleurs, il est assez habile pour aller chercher 200 000 000 $ dans les coffres du ministre des Transports, dans le coffre dont il a la sécurité.

Mme la Présidente, je ne recommencerai pas tout mon discours d'hier, mais, pour l'avantage des auditeurs qui n'étaient pas là hier mais qui sont là ce soir, je vais quand même résumer ce que je disais. Essentiellement, le gouvernement libéral aime beaucoup dire qu'il a une bonne administration, sauf qu'il est en train de vider tous les comptes des différentes sociétés d'État qui étaient pleins, pleins de fonds, pleins d'argent: Loto-Québec, 40 000 000 $, plein de fonds, plein d'argent; SOQUIA qui détenait 8 % des parts de Provigo vend ses parts, 47 000 000 $ de bénéfice sur les parts qui avaient été

achetées par le gouvernement pour empêcher une prise de contrôle par une entreprise de l'extérieur du Québec en 1979, si ma mémoire est bonne. Ils vendent les parts 47 000 000 $, mais on entend dire actuellement que, depuis que SOQUIA n'est plus là, apparemment on achète, chez Provigo, davantage de porcs au Danemark. J'ai eu des appels téléphoniques à mon bureau hier disant qu'il y aurait apparemment des changements dans la politique d'achat. C'est quelque chose à vérifier, je ne veux pas aller trop loin, mais j'ai eu des téléphones à mon bureau m'affirmant que des bouchers au comptoir de Provigo auraient dit qu'il y avait eu une entente sur l'achat de porc haché au Danemark.

Je dirai, et c'est pertinent, que ce sont des fonds publics, quand on vend la participation de l'État à différents endroits dans les sociétés d'État. Actuellement, le ministre de l'Agriculture a dit que, dans Culinar où près de 38 % des actions sont détenues par SOQUIA, on veut vendre. À Crustacés de Gaspé, des actions qui avaient été achetées par le gouvernement pour permettre le développement de l'entreprise 100 $ en 1981 ont été vendues 700 $ l'action en 1986, sept fois plus cher. On n'a pas dit à quel point c'était une bonne opération du gouvernement précédent. Actuellement, à la Société des pêches de Newport que les libéraux traitaient d'éléphant blanc, les actions qui avaient été payées 100 $ en 1984-1985, on veut apparemment les vendre 330 $, trois fois point trois plus cher en l'espace de deux ans. Les libéraux disent que l'ancien gouvernement ne savait pas administrer, mais il savait placer, il savait investir.

Aujourd'hui, le ministre des Transports dit: Je ne peux pas laisser les autres faire, ramasser des fonds comme cela. Le ministre des Finances est allé dans le coffre de la Régie de l'assurance automobile et a découvert qu'après la fin de l'année 1985-1986 il y avait 654 100 000 $ de solde des excédents des revenus sur les dépenses. C'est un montant d'argent considérable 654 000 000 $ et cela, grâce à une administration de bon père de famille. Aujourd'hui, étant donné que la famille n'existe quasiment plus, on est en train même de changer le Code civil pour parler de l'homme raisonnable. Cette administration de bon père de famille, un gouvernement raisonnable avait fait en sorte que les fonds s'étaient accumulés: En 1980, 33 000 000 $ d'excédents accumulés; en 1981, 120 700 000 $; en 1982, 195 300 000 $; en 1983, 146 400 000$; en 1984, 233 600 000 $; en 1985, 399 800 000 $; en 1985, à la fin de l'année, 525 700 000 $ et en 1986, 654 000 000 $.

Ce qui fait que, avec les fonds considérables qui étaient accumulés à la

Régie de l'assurance automobile, le ministre des Finances s'est mis à "zieuter" dans la direction de la Régie de l'assurance automobile et a dit: Encore un fonds où on pourra aller siphonner. Dans ce cas, ce n'était pas un fonds du gouvernement. C'était le fonds des assurés. C'est très différent de Loto-Québec, de SOQUIA où les actions appartiennent au ministre des Finances ou au ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, au nom du gouvernement. Dans le cas de la Régie de l'assurance automobile, il s'agit de la caisse des assurés.

On n'a pas le droit de s'approprier le bien d'autrui. Si moi, ce soir - je vois le député de Laurier - j'allais dans ses poches et que je prenais 200 $, je me ferais arrêter par la police. Il dirait: Vous n'avez pas le droit de prendre de l'argent dans la poche d'un autre. Je vois les députés qui sont ici présents: le député de Taschereau à côté du député de Limoilou; si, tout en causant, un prenait de l'argent dans la poche de l'autre, il ne trouverait pas cela normal. Pourtant, le ministre des Finances, que fait-il avec le projet de loi que nous avons devant nous? Il va chercher 200 000 000 $ d'argent qui appartient aux assurés de l'automobile, aux gens qui ont payé des plaques d'immatriculation, qui ont payé leurs permis.

La somme de tout cela accumulée au cours des années, la différence entre les revenus et les dépenses, ça fait des surplus accumulés selon des réserves actuarielles. Là, le ministre dit: Je vais aller en chercher, sauf que, dans ce cas-là, il n'a pas le droit de faire cela. Évidemment, on peut toujours dire, comme Jean-Charles Bonenfant disait: "Le gouvernement peut tout faire, même changer un homme en femme." Il n'a pas dit qu'on pouvait changer une femme en homme, il a dit qu'on pouvait changer un homme en femme. C'était l'exemple qu'il donnait pour dire que le Parlement pouvait tout faire.

Mme la Présidente, changer un homme en femme, si le Parlement peut faire cela, c'est évident qu'il est capable juridiquement, en faisant une loi, d'aller chercher un fonds qui ne lui appartient pas. Mais il s'agit, à ce moment-là, d'une loi abusive qu'on n'a pas le droit de faire, parce que les fonds n'appartiennent pas au ministre des Finances.

À mon avis, le ministre des Finances pouvait faire deux choses: remettre l'argent aux assurés, parce qu'il en avait trop perçu, parce que les primes, les réserves actuarielles, qui avaient été constituées, l'avaient été à un niveau trop élevé par rapport aux dépenses encourues, et que là le surplus devait être distribué aux assurés. Une partie a été distribuée, et je suis persuadé que le ministre des Transports sera content de dire tantôt: Oui, mais un certain montant a été remis aux assurés. Ce n'est pas parce que je vais prendre 200 000 000 $ dans

votre poche et que je vous remets 10 $, que les 190 000 000 $ que j'ai gardés ne vous appartiennent pas. Le ministre a pris une partie du "pot" des assurés et l'a remis aux assurés, une petite partie. Pas un montant considérable, et il vous dira des chiffres tout à l'heure. Je vais lui laisser le plaisir de le dire. Mais en même temps qu'il faisait cela pour couvrir son larcin, il vote une loi pour le ministre des Finances, qui va aller chercher 200 000 000 $: 100 000 000 $ en 1988 et 100 000 000 $ en 1989. (20 h 20)

II voulait le faire cette année; il a fait un amendement pour ne pas le faire cette année parce que le ministre des Finances avait dit que les sommes qu'il irait chercher seraient utilisées selon un plan. Au cours des prochaines semaines, disait le ministre des Finances, le 30 avril dernier, le ministre des Transports vous dira à quelle fin il utilisera ces sommes d'argent. Mais le ministre ne l'a pas dit. Il n'a rien dit, de sorte qu'on se retrouve avec un amendement selon lequel il va faire cela l'an prochain parce que le ministre des Finances, qui avait annoncé que le ministre des Transports dirait à quelles fins il affecterait l'argent au cours des semaines qui viendraient... C'était dit dans son discours sur le budget, je peux vous le lire, au cas où les gens ne me croiraient pas. Il n'y a rien de mieux que de lire ce qui est dit par le ministre des Finances. Il dit: "De plus, grâce à une conjoncture favorable et à des programmes efficaces de réadaptation des victimes de la route, la Régie de l'assurance automobile du Québec a pu dégager une réserve excédentaire." J'ai dit qu'elle s'est constituée à partir de 1980. "Il est normal que ces sommes retournent aux usagers de la route - il le dit lui-même, le ministre des Finances - notamment sous forme de réduction des contributions d'assurance - il a raison - et sous forme d'immobilisations en matière de sécurité routière - là, il erre. - C'est ainsi que la Régie de l'assurance automobile du Québec pourra verser au gouvernement une somme totale de 200 000 000 $ au cours des deux prochaines années pour des immobilisations en sécurité routière sur tout le réseau routier du Québec".

Quand le ministre a dit les deux prochaines années, est-ce qu'il voulait dire cette année ou l'an prochain et l'autre année d'après? À moins qu'il n'ait réalisé que ce n'étaient peut-être pas les termes exacts et qu'il ne pouvait pas aller chercher l'argent pour cette année parce que le ministre avait dit au cours des deux prochaines années. Il n'a pas dit l'année courante, mais les deux prochaines années, et le ministre a amendé son projet de loi pour dire en 1988 et en 1989. Le projet de loi au début disait 1987 et 1988. Il dit: "au cours des deux prochaines années pour des immobilisations en sécurité routière sur tout le réseau routier du Québec".

Le ministre des Transports, disait le ministre des Finances, le 30 avril dernier, indiquera dans les prochaines semaines la programmation des travaux à faire et 60 000 000 $ seront affectés à ces fins dès cette année. Il va aller chercher 100 000 000 $, mais il va en mettre seulement 60 000 000 $ dans la sécurité routière. En passant, l'opération... D'abord, il garde 40 000 000 $ pour lui et il dit: Je vais affecter 60 000 000 $ à la sécurité routière parce que je n'ai pas mis assez d'argent dans le budget du ministère des Transports. C'est cela, au fond, que le ministre des Finances dit dans ses mots, d'un budget gouvernemental.

Cela venait comme deuxième opération, suite consécutive à une opération menée en 1986 où le ministre des Finances était allé chercher 60 000 000 $ par année en disant: II faudrait bien dédommager l'assurance-maladie des sommes qu'elle dépense pour des victimes de l'assurance automobile comme si celles-ci ne payaient pas déjà leurs taxes à l'assurance-maladie comme tout le monde. On va les faire payer deux fois: ils vont payer à l'assurance-maladie et ils vont payer à l'assurance automobile: deux fois pour les services essentiels.

Je sais que le ministre dira: Ah oui, mais l'ancien gouvernement voulait faire la même chose. Il faut faire attention entre les propositions des fonctionnaires et ce que le gouvernement décide. Je suis certain que le ministre aurait bien voulu que les vignettes amovibles pour les handicapés soient faites par la Régie de l'assurance automobile, mais la régie ne voulait pas. Le ministre a mis le poing sur la table. Il a dit: Ah, la régie ne veut pas. Il a dit: ah, l'Office des personnes handicapées. D'autant plus que ça ne dépend pas de lui ça dépend d'un autre, alors, c'était plus facile.

Mais essentiellement, le ministre peut prendre des responsabilités. Il va dire: Oui, mais c'est la Régie de l'assurance automobile qui m'a proposé cela. Ce n'est pas parce que la Régie de l'assurance automobile veut bien paraître aux yeux du gouvernement qu'il faut l'écouter. Le ministre aurait dû résister et dire: Cet argent appartient aux assurés, je suis le gardien de la caisse des assurés, il s'agit de surplus de revenus sur les dépenses à même les cotisations des assurés par rapport aux prestations versées aux victimes d'accidents d'automobile. Je n'ai pas le droit de toucher à cet argent dont je suis, en quelque sorte, le gardien fiduciaire.

Il pourrait demander au ministre de la Justice. Pendant cinq jours, on a étudié un projet de loi où on a parlé des sociétés de fiducie, des sociétés de prêts, on a comparé avec le régime des assurances. Est-ce que quelqu'un qui n'est pas assuré peut aller

siphonner le "pote" des assurés? On a mis toutes sortes de clauses pour s'assurer que les fonds fiduciaires administrés par l'entreprise privée ne seront pas utilisés au profit d'autres personnes que celles à qui ils appartiennent. Comment le gouvernement peut-il avoir un tel comportement quand lui-même va siphonner l'argent qui appartient aux assurés?

Je vois la députée de Johnson qui est estomaquée, elle ne pensait jamais que c'était possible. Elle connaissait la force du député de Charlesbourg quand il était dans l'Opposition. C'était un des députés les plus vigoureux. Rendu au gouvernement, on était certain que cet homme vigoureux garderait le coffre-fort comme un pit bull, qu'il serrerait les dents et que jamais celui qui voudrait prendre les fonds ne pourrait lui faire lâcher prise. Au contraire, le ministre des Finances a été chercher la caisse, c'est juste s'il n'a pas eu un pourboire du ministre des Transports.

Une voix: Ha! Ha!

M. Garon: Non, mais vous allez écouter le ministre des Transports tantôt qui pourrait dire: Je ne suis pas d'accord avec cela. Le ministre des Finances n'aurait pas dû faire cela. Le ministre n'aurait pas dû venir chercher la caisse des assurés de l'automobile.

Demandez à l'ex-Solliciteur général, qui est ici dans cette Chambre, si on a le droit de prendre les fonds qui appartiennent à d'autres, si on a le droit de prendre des fonds qui sont en fiducie, dans un dépôt qui appartient aux assurés de l'automobile? Évidemment, le gouvernement peut toujours faire cela en disant: Oui, je le fais, comme je pourrais déclarer ici ce soir que le député de Taschereau n'est pas un homme, mais une femme. Le gouvernement pourrait faire cela. Jean-Charles Bonenfant disait: Le Parlement peut même changer un homme en femme, mais c'est une fiction légale. Les gens savent que le gouvernement ne peut pas faire de telles choses, réellement, et la population n'admet pas ces choses. Quelquefois, on se demande pourquoi les citoyens n'ont pas tout le respect qu'ils devraient avoir de la chose publique? Pourquoi? Parce que les citoyens se sentent malheureux, mal pris devant une telle initiative du ministre des Finances qui va chercher la caisse des assurés de la Régie de l'assurance automobile dont le ministre des Transports a la garde.

Celui-ci va vous dire: Oui, mais l'ancien gouvernement aurait fait ceci, aurait voulu cela. L'ancien gouvernement ne dirige plus. Il n'est plus là. Quand il arrive quelque chose de mauvais pour la population, le gouvernement dit: C'est l'ancien gouvernement. Quand c'est quelque chose qui a l'air pas mal, il dit: C'est nous autres. Cela veut dire qu'on est forts, nous du Parti québécois, cela fait deux ans qu'on n'est plus là et on mène encore. Nous ne sommes que 23 sur 99 et c'est encore nous qui menons le gouvernement.

Des voix: 22.

M. Garon: 22. Mme la Présidente...

Une voix: 21 et trois-quarts.

La Vice-Présidente: À l'ordre, à l'ordre!

M. Garon: Même à 21, il le dit. Je suis certain que, si on était 20, il dirait encore que c'est nous qui menons. On est forts.

Pensez-vous que les gens pensent qu'on mène autant que cela? Non. La caisse de l'assurance, on a aidé à la constituer, en ayant une gestion rigoureuse et même si le Parti libéral avait combattu vigoureusement, férocement la loi de l'assurance automobile. Il était contre. Il ne voulait pas, un peu comme le ministre de l'Industrie et du Commerce qui n'a pas l'air de vouloir les frégates. (20 h 30)

La volonté politique n'est pas là. Il était contre la loi sur la protection du territoire agricole. Il était contre. Aujourd'hui, ils me font penser un peu aux aboiteaux de Kamouraska. Tout le monde était contre, mais aussitôt qu'ils ont été faits, le gouvernement fédéral a donné une subvention aux gens du coin pour passer des dépliants avec une feuille d'érable rouge pour faire croire au monde qu'ils les avaient faits, tellement le monde trouvait ça beau. Mais ils avaient tous combattu férocement par exemple. Et là, on se retrouve dans une situation...

Je le sais, le ministre des Transports va dire: L'ancien gouvernement voulait. Sauf qu'en politique, le gouvernement décide, c'est lui qui décide. Ce ne sont pas les fonctionnaires. Les fonctionnaires peuvent proposer. Des propositions de fonctionnaires, pendant neuf ans comme ministre, j'aurais pu en remplir un camion. Il y en avait des bonnes et des moins bonnes. Il y en avait qui auraient été pas pires, mais qui n'étaient pas administrables. Le rôle d'un ministre, c'est de choisir, de décider, mais une proposition d'un fonctionnaire, ce n'est pas une décision gouvernementale. Il ne faut pas mélanger ces choses-là. Et le gouvernement doit assumer ses responsabilités. Quand le gouvernement, qui a pris le pouvoir au mois de décembre, a augmenté la taxe sur la gazoline malgré qu'il ait promis de la faire disparaître... La taxe est toujours là d'ailleurs. Ils l'ont enlevée dans le Grand-Nord, dans des régions périphériques éloignées, sachant que ça ne leur coûterait pas cher, mais dans l'ensemble

du Québec, ils se sont dépêchés de l'augmenter. En février 1986, la taxe a augmenté.

Le gouvernement aurait pu dire, par une déclaration très simple du ministre des Finances: Conformément aux engagements électoraux que j'ai faits au cours de la campagne électorale qui ont mené à la victoire du Parti libéral le 2 décembre 1985, à partir de minuit ce soir, il n'y aura plus de taxe. C'est fini, terminé, réglé. Mais là, il dit: Non, c'est la faute de l'ancien gouvernement. Voyons donc! Voyons donc! Un gouvernement, quand c'est changé, c'est changé. À tel point qu'à partir du 13 décembre 1985, c'était le nouveau gouvernement qui était dans le siège du conducteur. C'est lui qui dirigeait, c'est lui qui décidait. Il a décidé et il décide actuellement, imaginez-vous, d'aller chercher 200 000 000 $ dans la caisse des assurés. L'an dernier, il a adopté un projet de loi pour aller chercher 60 000 000 $ par année indexés. Ça veut dire que, sur quatre ans, 1986, 1987, 1988 et 1989, à peu près un mandat de gouvernement - on sera sûrement en élection en 1989, peut-être en 1988 - le gouvernement libéral sera allé chercher 450 000 000 $ dans la caisse des assurés de la Régie de l'assurance automobile. Ces grands défenseurs des gens, ces grands citoyens. Ils ont aboli le Comité de surveillance des étalons pour divertir, mais, en même temps, ils sont allés chercher 450 000 000 $ dans la caisse des assurés, en plus d'avoir augmenté le prix de l'essence en augmentant le taux payé en taxe sur l'essence dès le 4 février 1986. Taxe sur l'essence qui aura rapporté...

On fera le bilan lors de la prochaine campagne électorale pour savoir comment cette taxe aura rapporté avec l'augmentation de février 1986, au cours des quatre années qui ont suivi. Ils se sont dépêchés. En partant, ils ont dit: L'électeur aura oublié. On aura été chercher quelques centaines de millions de dollars en taxes augmentées sur l'essence dès le début de février 1986 et, en plus, on ira chercher 450 000 000 $ de surplus accumulés dans la caisse des assurés. Je défie n'importe qui... Le ministre va le dire, il avait une réserve excédentaire constituée sous le gouvernement du Parti québécois qui, lui, avait une administration rigoureuse. Mais, avec toutes sortes de manipulations, on a essayé de faire croire qu'on administre bien.

Par exemple, quand Hydro-Québec, dans le temps du Parti québécois, faisait 300 000 000 $ de profit, si elle ne payait pas les 300 000 000 $ de profit en dividendes au gouvernement, on mettait, dans les revenus du gouvernement, zéro, pas une "cenne". Aujourd'hui, si Hydro-Québec fait 300 000 000 $ de profit, même si elle ne verse pas un seul sou noir au gouvernement, les libéraux mettent 300 000 000 $ de revenus dans la caisse du gouvernement, comme s'ils les avaient eus alors qu'ils ne les ont jamais eus. Évidemment, cela paraît bien dans les colonnes de chiffres, sauf qu'au point de vue de la comptabilité, cela n'a rien changé. Il paraît qu'on a baissé le déficit de 300 000 000 $, alors qu'on a changé les chiffres de colonnes, un point, c'est tout. Maquillage! Maquillage! On change les colonnes de chiffres et on dit: Voyez comme on est de bons administrateurs. Imaginez-vous!

Mme la Présidente, c'est un peu comme la ministre déléguée à la Condition féminine: beaucoup de voeux. Elle nous dit depuis des mois qu'elle va sortir son rapport et il n'arrive rien. Moi, je suis intéressé, je suis un père de famille de trois filles. Ce sera quoi, leur condition, quand elles vont être plus grandes? Rien! Cela fait des mois. J'écoutais l'autre jour, la télévision - cela a adonné, je n'écoute jamais la télévision -j'appuie sur un bouton et elle était là: Tiens, je vais l'écouter. J'ai entendu ce qu'elle disait. Celle qui l'interviewait disait: Oui, mais vous avez dit telle date, ensuite, c'était au printemps et à l'automne, là, c'est avant Noël, et là, c'est rendu au mois de janvier. Il n'arrive rien.

C'est un peu comme la politique familiale. On voit le ministre de la Beauce, qui est un expert dans les bicyclettes, il a inventé le dérailleur automatique. Je ne sais pas s'il l'utilise pour lui-même, mais il a inventé le dérailleur automatique apparemment, ce serait un inventeur - pour faire changer les vitesses sans dérailler, en déraillant tout seul. Pardon?

Une voix: Des "gears" à bicyclettes.

M. Garon: Non, mais il y a sûrement d'autres mots que "gear".

Il a annoncé sa politique familiale. Imaginez-vous! Il a annoncé un Conseil de la famille. Le gouvernement avait fait disparaître tous les conseils de la famille, plusieurs conseils en disant: Ce sont des organismes inutiles qui coûtent de l'argent. Lui, comme solution, il fonde un Conseil de la famille. Mais, pendant que ses ministres amusent la galerie avec de fausses politiques qui n'en sont pas ou dans lesquelles il n'y a rien de concret, ce sont comme des vents de la mousson qui n'apportent rien, par ailleurs, on voit le ministre des Finances qui ne perd pas le nord. Pendant que ses jeunes ou nouveaux collègues perdent la proie pour l'ombre, lui ne perd pas le nord, il va chercher les fonds. Il serait allé chercher dans la caisse des assurés de la Régie de l'assurance automobile sur quatre ans, 450 000 000 $ qu'il se serait appropriés. Je vois le ministre de la Justice qui est là, les yeux ronds comme des nouveaux dollars. Je

vois le ministre de la Justice. Qu'est-ce qu'il a dit, lui? Si cela avait été un citoyen ordinaire, il aurait dit: Voleur! Et l'aurait fait arrêter par la police.

Des voix: Ha! Ha! Ha!

M. Garon: Mais là, c'est le ministre des Finances dans un Parlement qui peut même changer un homme en femme...

Des voix: Ha! Ha! Ha!

M. Garon: ...qui a décidé que le ministre des Finances pouvait s'approprier des fonds qui appartenaient à qui? Aux assurés. C'est quelque chose. Le ministre de la Justice ne dit pas un mot. Pas un mot. Vous savez, le ministre des Finances est habile. Il a fait cela au ministre des Transports de la même façon qu'il a fait, pendant que la prison de Saint-Joseph qui... C'est le ministre des Finances. Il est habile. La prison de Saint-Joseph avait 36 cellules. Il y avait 72 prisonniers dont la moitié étaient en liberté parce que la communauté collaborait. Il y en avait même qui travaillaient pour la communauté religieuse du coin. Il y en a qui aidaient à nettoyer les rivières, la rivière Chaudière pour la dépolluter. C'était la prison où les prisonniers payaient le plus d'impôt, Mme la Présidente. Ils payaient des impôts. C'est fantastique, 72 prisonniers étaient dans une prison de 36 cellules parce qu'il y en avait la moitié qui étaient dehors.

C'est le contraire à New-Carlisle, dans le comté du ministre des Finances. Il y avait une prison d'environ - je ne me rappelle pas des chiffres précis - 70 cellules à moitié vides où il y avait entre 20 et 30 prisonniers. Savez-vous ce que le ministre des Finances a fait? Il a fermé la prison de Saint-Joseph et il a investi 1 000 000 $ dans la prison chez lui qui était à moitié vide. Il a fermé celle qui était remplie à pleine capacité.

Mme Juneau: Pas vrai?

M. Garon: Oui. Je vous le dis. Ce n'est pas croyable, n'est-ce pas?

La Vice-Présidente: À l'ordre! À l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de Lévis. S'il vous plaît, on est en train de débattre le projet de loi 62. Sachant que vous êtes un des critiques en cette matière, j'aimerais, s'il vous plaît, que vous reveniez sur le sujet. M. le député de Lévis. (20 h 40)

M. Garon: Mme la Présidente, je démontrais l'habileté du ministre des Finances qui n'a pas organisé seulement le ministre des Transports, député de Charlesbourg, il en a organisé d'autres dans cette Chambre. C'est cela que j'expliquais. Il a agi avec habileté mais il n'applique pas les mêmes principes à tous. Les principes qu'il applique à d'autres, il ne se les applique pas à lui-même de sorte qu'aujourd'hui on a des gens, par exemple, de la région de Québec qui s'en vont prisonniers à New-Carlisle. Ils vont voir la Gaspésie à travers les barreaux, cela avec l'encouragement du nouveau ministre du Tourisme.

Quand on regarde cela concrètement, il a pris l'argent des assurés et les assurés ont moins d'argent qu'auparavant. La Régie de l'assurance automobile va être obligée de serrer parce que 450 000 000 $ de moins, cela paraît quelque part. On paiera moins les assurés et on devra éventuellement augmenter les primes. Le ministre va vous dire: Oui, mais on a payé quelques millions. Oui, mais on aurait dû payer tous les millions aux assurés. La caisse est à eux, comme victimes ou comme assurés qui n'ont pas eu d'accident pour faire un genre de dividende, de trop-perçu sur les primes qu'on remet aux assurés. Mais non. Au lieu de remettre l'argent aux assurés... Je vois le député de Jeanne-Mance qui est un député souvent en contact avec les chauffeurs de taxi; va-t-il dire aux chauffeurs de taxi: Le ministre des Finances a siphonné la caisse des assurés dont vous faites partie et le ministre des Transports n'a pas gardé le coffre-fort? C'est lui le gardien en vertu de la loi. C'est lui qui a la responsabilité de garder le coffre-fort. Il ne l'a pas gardé. C'est quelque chose.

Imaginez-vous si cela était arrivé sous le gouvernement précédent. Imaginez-vous! Mais là, c'est devenu monnaie courante. Tous les fonds des organismes ont été siphonnés. Après ça, on dira: Ça ne rapporte pas beaucoup la Régie de l'assurance automobile. Ce n'est pas bon. C'est une loi du Parti québécois, une loi péquiste, pas bonne. Mais on oubliera de dire qu'on est allé chercher 450 000 000 $ dans le "pote" des assurés.

Ils vont vous parler de l'ancien ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, qui a déjà eu un chèque de 11 000 000 $ dans ses poches. Oui. J'en avais. Je vous mets au défi d'en avoir vous autres. J'en avais et je vais vous dire que quinze jours après, j'en avais un autre de 19 000 000 $ cette fois-là. J'allais en chercher de l'argent. Le ministre à Ottawa voulait avoir un peu de publicité. Il m'a dit: Les libéraux ne vous ont pas payé pendant cinq ans. Moi, je vous paie. J'aimerais que le monde le sache. Je l'ai montré aux journalistes. Ils l'ont vu et il m'a dit: Je suis content qu'ils l'aient su. Parce que vous avez été correct, je vais vous donner le reste qu'on vous doit. Vrai comme vous êtes là! Demandez au ministre fédéral de l'Agriculture, John Wise, il va vous le dire. Vrai comme vous êtes là. Je le dis en cette

Chambre, le ministre pourrait vous le dire. La deuxième fois, il a été gêné; il l'a envoyé différemment. Que voulez-vous? Comme j'avais demandé des chèques, il m'a dit: Je voulais que vous l'ayez plus vite, je l'ai apporté directement moi-même. Je ne pouvais pas dire: Je ne le prends pas. J'ai dit: Je le prends.

Une voix: Pour le déposer?

M. Garon: Oui! Cela a été un montant d'argent considérable. Je suis allé chercher entre 35 000 000 $ et 40 000 000 $ au total dans le temps de le dire à l'automne 1984, après le départ des libéraux fédéraux à Ottawa qui, eux, avaient gardé la caisse, eux autres aussi, qu'ils nous devaient. C'est une manie libérale, on dirait, d'être libéral avec la caisse. C'est une manie libérale. Alors, dans ce cas-ci, c'est le ministre des Finances qui l'a prise et qui va chercher l'argent.

Je vois le député de Jeanne-Mance. Il devrait dire aux chauffeurs de taxi: Ça vous coûterait moins cher en assurances, si le ministre des Finances n'avait pas vidé la caisse de 450 000 000 $. Mais comme le ministre des Finances a pris 450 000 000 $, il faut vous imputer des primes pour vos assurances dans le taxi. C'est ça.

Vous savez bien qu'on ne peut pas payer. À 450 000 000 $, ça paraît un peu. Je comprends que l'ancien ministre à Ottawa - comment s'appelait-il - "What is a million", dans le temps de Saint-Laurent, CD. Howe disait: "What is a million?" Bon! Il était au niveau de ceux qui en valent plusieurs. Mais nous autres qui ne sommes pas riches, 1 000 000 $, c'est de l'argent. Le ministre des Finances n'en a pas pris 1 000 000 $, ni 2 000 000 $, mais 450 000 000 $ sur quatre ans, dans un seul mandat du Parti libéral, qu'il sera allé chercher dans la caisse. Imaginez-vous maintenant les primes des assurés de l'automobile! Comment voulez-vous qu'on se compare après ça avec le Massachusetts, qu'on se compare avec différents États américains, qu'on se compare avec des provinces au Canada, quand il ne s'agit plus seulement de primes qu'on paie pour l'assurance, mais de primes qui servent aux forfaits du ministre des Finances qui va vider la caisse?

Comment pourra-t-on se comparer maintenant, en disant: Voici notre efficacité, alors qu'il faudra tenir compte du ministre des Finances qui aura la main dans la poche des assurés en même temps?

Mme la Présidente, c'est fondamental. On est dans un régime d'assurances où le ministre devrait garder les fonds dans une qualité de gardien fiduciaire, protéger les fonds. Oh, je sais que le ministre des Transports va essayer... Et je ne pourrai pas lui répondre parce qu'il n'a pas voulu parler en premier. Il a dit: Je ne parlerai pas. Moi, je peux parler là, mais, lui, il a un petit droit de réplique après. Alors, il va conter des choses, sachant que je ne pourrai pas répondre. Il a eu peur de les dire avant que je parle. Il a eu peur de les dire en premier sachant que je pourrais répondre. Il n'a pas parlé en me disant de parler, sachant que je n'ai pas le droit de réplique. Mais j'aurai en masse le temps au cours des mois et des années qui viendront de parler des 450 000 000 $ qui ont été accaparés par le ministre des Finances.

Je sais que les gens qui m'écoutent doivent dire: Cela n'a quasiment pas de bon sens que le ministre des Finances ait pris 450 000 000 $ dans la caisse des assurés. Bien, c'est cela.

La Vice-Présidente: À l'ordre! À l'ordre!

Une voix: Cela n'a pas de bon sens.

M. Garon: 450 000 000 $ dans la caisse des assurés, puis il va vous le confirmer. Loi de l'an dernier: 60 000 000 $ par année indexés à jamais, il n'y a pas de limite pour elle. La loi ne dit pas que pendant un nombre d'années la loi a été changée pour que la Régie de l'assurance automobile verse au fonds consolidé, au ministre des Finances, 60 000 000 $ indexés par année pour les frais de maladies et d'accidents, frais de santé, sauf qu'il avait déjà payé leurs taxes comme tout le monde. Si demain matin vous faites une crise cardiaque et que vous allez à l'hôpital, vous ne paierez pas, parce que vous allez déjà être assuré avec l'assurance-maladie. Si vous êtes victime d'accident d'automobile, il faut qu'en plus, on vous prenne de l'argent dans l'assurance automobile, en plus de ce que vous avez contribué à l'assurance-maladie. Cela veut dire que vous payez deux fois pour vos frais médicaux.

L'automobiliste aura l'insigne avantage et l'insigne honneur de payer deux fois pour son assurance. Donc, 60 000 000 $ indexés. Deuxièmement, cette année, il a dit: Je n'en ai pas assez. Donc, je vais aller chercher, pendant deux ans, 100 000 000 $ par année. Mais pour dorer la pilule, il dit: Je vais en placer 60 000 000 $ dans la sécurité routière sur le premier 100 000 000 $ que je vais prendre. Pourquoi? Parce qu'il n'a pas mis assez d'argent dans le budget du ministre des Transports. On l'a vu, le budget du ministre des Transports a diminué en valeur réelle. Son budget a diminué en 1986 et a augmenté un peu en 1987, mais pas assez pour rattraper même le budget de 1985. Pourquoi? Parce que c'est dur de négocier des budgets.

Il m'accusait d'en avoir trop. Je me faisais accuser d'en avoir trop pour l'agriculture. On me disait: Vous, on sait

bien, vous en négociez trop. On disait que je faisais peur aux autres. Voyons donc! Parce que j'étais capable, j'avais des députés qui se battaient. Combien de fois Mme la députée de Johnson est intervenue en faveur des agriculteurs? Je pourrais vous nommer le nombre de députés qui intervenaient. Mais là, quand je regarde l'affaire des frégates, on a seize députés libéraux dans la région de Québec et je n'en connais pas un qui est intervenu en faveur des frégates dans la région de Québec auprès du ministre de l'Industrie et du Commerce, excepté le député de Lévis. Je n'en connais pas un seul. Il en demande juste deux. On devrait les avoir tous les six avec le contrat. (20 h 50)

Ce n'est pas le petit Nouveau-Brunswick avec 700 000 citoyens, qui ne paient pas assez de taxes pour se payer une frégate, qui devrait avoir les douze frégates. Ils ont obtenu le contrat de conception des frégates de 7 000 000 000 $. Ils ne paient pas 7 000 000 000 $ de taxes. Cela prendrait plusieurs années avant que le Nouveau-Brunswick paie 7 000 000 000 $ de taxes. Ils auront le contrat de frégates de 7 000 000 000 $ et nous, on va essayer de s'en téter une ou deux. Mme la Présidente, c'est cela la réalité. Ne nous racontons pas d'histoires, c'est cela la réalité. Ce qu'il faut, c'est avoir des députés qui sont plus combatifs, qui ne se font pas siphonner des fonds. Là, on se fait siphonner des fonds.

Le gouvernement fédéral a versé 1 000 000 000 $ dans l'Ouest l'an dernier pour l'agriculture et va verser 1 000 000 000 $ additionnel cette année. Il n'y a rien de trop beau pour l'Ouest, il n'y a rien de trop beau pour les Maritimes, il n'y a rien de trop beau pour l'Ontario, mais quand arrive le tour du Québec, c'est à la graine, à la graine. On dit CF-18, 1 000 000 000 $ sur 20 ans, 50 000 000 $ par année. Dans l'économie du Québec, 50 000 000 $ par année pendant qu'on verse 1 000 000 000 $ par année dans l'économie des trois provinces de l'Ouest. La grosse Saskatchewan avec 900 000 de population, le gros Manitoba avec 950 000 de population, 1 000 000 000 $ qui s'en va là. Au Québec, de petits montants. Les frégates, c'est le gros Nouveau-Brunswick qui va avoir les frégates. Imaginez, 700 000 de population versus 7 000 000 au Québec. Nous, on dit:

Si on pouvait en avoir deux, eux en auraient quatre, ils feraient les plans, ils auraient les experts. Imaginez, 700 000, c'est moins de gens que dans la région de Québec. Ils auraient les six frégates. À partir de là, le contrat de 3 500 000 000 $ et nous, on dirait: Est-ce qu'on pourrait en avoir un peu?

Une voix: Des quêteux.

M. Garon: Oui, comme si on était obligé de mendier...

Une voix: C'est cela.

M. Garon: ...alors que ce sont nos taxes qui vont payer ces frégates. Au Nouveau-Brunswick, ils ne paient quasiment pas de taxes. C'est nous qui allons payer les taxes et les frégates vont être faites là-bas. Qui va payer les taxes dans l'Ouest pour le 1 000 000 000 $ aux cultivateurs de l'Ouest? Ce ne sont pas les taxes perçues en Saskatchewan. Vous pouvez les additionner, vous allez voir ce que cela donne. Ils auront 1 000 000 000 $. Qui paiera? Les taxes des Québécois. C'est cela, la réalité. Le ministre de l'Agriculture dira: J'ai obtenu 38 000 000 $ versus 1 000 000 000 $, mille millions versus 38 000 000 $. Il arrive que ce n'est pas raisonnable et c'est pourquoi je dis au ministre des Transports qui n'est pas un mauvais garçon - j'ai eu l'occasion de le rencontrer en commission parlementaire au cours des derniers jours mais avant qu'il se fasse prendre la caisse, je n'ai pas pu lui parler. Je lui aurais dit: Ne te laisse pas faire par le ministre des Finances. Les ministres des Finances, cela veut toujours prendre de l'argent ici et là. Il faut être sur ses gardes tout le temps par rapport au ministère des Finances, quel que soit le ministre des Finances. Il faut toujours surveiller le ministre des Finances parce que si vous ne regardez pas, il va vous en prendre un morceau.

C'est pourquoi je dis que la responsabilité du ministre des Transports, c'était de garder la caisse. Il nous a dit jusqu'à maintenant: J'étais d'accord, je l'ai même suggéré. Je n'en suis pas revenu, cela n'a pas de bon sens. C'est comme si quelqu'un qui se fait voler avait suggéré au voleur de le voler. Imaginez! Cela n'a pas de bon sens. Je pense qu'il s'est fait avoir, il n'était pas encore familier avec les rouages administratifs. C'est arrivé une fois en 1986, il aurait dû apprendre un peu. Cela arrive une deuxième fois en 1987 avec une autre loi pour aller chercher 100 000 000 $ additionnels par année pendant deux ans. L'an dernier, 60 000 000 $ par année sans limite. J'aurais dit: Ne fais pas cela, ne te laisse pas faire.

C'est le ministre des Finances qui l'a fait et je pense que la responsabilité du ministre des Transports, c'était de dire non, de résister avec toute sa capacité pour dire: Cela, c'est un fonds qui appartient aux assurés, qui ne m'appartient pas. Moi, en vertu de la loi, j'en suis le gardien, c'est moi qui ai la responsabilité de le conserver pour les assurés, pas de le donner au ministre des Finances qui va l'envoyer n'importe où. C'est le fonds des assurés. Il me semble que c'est tellement évident. Quand le ministre de la Justice parle de

devoirs fiduciaires, d'être le gardien de l'argent des autres... Le ministre des Transports en qualité de ministre des Transports, vis-à-vis des fonds de la Régie de l'assurance automobile est le gardien des fonds des assurés de l'assurance automobile. Il n'a pas le droit de laisser prendre la caisse. On parle du mauvais intendant, celui qui laissait dilapider les biens. À ce moment-là, je dis que le ministre des Transports est un mauvais intendant parce qu'il a laissé dilapider les biens de la caisse des assurés, qui appartenaient aux assurés. Il devait les défendre avec la plus grande vigueur, il aurait dû dire: Jamais! Je ne serai pas le ministre des Transports qui verra cette infamie. Cela ne se passera pas sous mon ministère. Il aurait dû dire: Tant que le député de Charlesbourg sera ministre des Transports, jamais le ministre des Finances ne sera capable de prendre une "cenne" dans la caisse des assurés. Il me semble qu'il a collaboré, il me semble même qu'il a été un peu complice dans cette affaire parce que lui-même a dit qu'il en était heureux. Je le vois approuver de la tête, je n'en reviens pas.

Comment les assurés peuvent-ils être défendus si celui qui garde la caisse ne veut même pas la garder? C'est sa responsabilité de la défendre, de la même façon que c'est ma responsabilité de dire que ce n'est pas correct. Comme disait le grand Disraéli, qui est un des concepteurs du parlementarisme britannique: "The duty of the Opposition is to oppose". Oui, parce que c'est fondamental. Les gens demandent pourquoi? Parce que c'est notre responsabilité de démontrer au gouvernement qu'il erre, qu'il a tort. Churchill disait: Quand on mène de grands combats, il faut les mener par tous les moyens, par mer, par terre et par air. Pourquoi? Parce que c'est comme cela qu'il faut se comporter.

Je pense que, là-dedans, le ministre des Transports n'a pas employé tous les moyens qu'il avait à sa disposition pour protéger la caisse des assurés et qu'il n'avait pas le droit de faire cela. Mme la Présidente, je ne vous prendrai pas à témoin, vous m'avez dit, hier, que vous n'aimiez pas cela. Par contre, je dis que les citoyens de nos comtés auront à payer pour cette infamie du ministre des Finances qui est allé chercher l'argent qui ne lui appartenait pas, qui appartenait aux assurés. Dans la loi concernant les artistes, il y aura des fonds. Imaginez-vous si, demain matin, le ministre des Finances voulait aller chercher les fonds dans la caisse des artistes, les gens ne voudraient pas. Si, demain matin, il allait prélever des sommes dans les fonds de la caisse des travailleurs, les gens ne voudraient pas. S'il allait piger dans la caisse de n'importe quel assuré dans une assurance-groupe comme c'est le cas pour le fonds de la Régie de l'assurance automobile qui est une assurance-groupe où tous les assurés du Québec peuvent avoir une assurance collective... C'est leur caisse, leurs fonds, leurs primes, leurs prestations. Le ministre n'a pas le droit de toucher à cela.

De la même façon, il n'aurait pas le droit d'aller chercher quelque somme que ce soit dans la caisse des régimes de retraite, il n'aurait pas le droit, demain matin, de dire: Dans les caisses des régimes de retraite, il y a beaucoup d'argent, j'en prends un peu. Il n'aurait pas le droit de piger dans la caisse des enseignants pour aller chercher une partie de leur régime de retraite, dans un fonds collectif d'assurance, il n'aurait pas le droit d'aller chercher l'argent. Pourquoi? Parce que c'est administré par une société d'État.

Imaginez-vous, demain matin, Mme la Présidente, que la Régie de l'assurance automobile est une régie privée - juste pour vous donner un exemple - où les propriétaires mutualistes sont les assurés, comme on l'a étudié cet après-midi pour Les Clairvoyants, compagnie d'assurance mutuelle. Si la régie avait été une régie mutuelle d'assurance privée, jamais le gouvernement n'aurait pu faire cela parce qu'il aurait été condamné par les tribunaux. Les tribunaux l'auraient condamné, ils auraient dit: Vous n'avez pas le droit d'aller chercher la caisse des assurés, cet argent n'est pas à vous, il appartient aux assurés, aux victimes d'accidents d'automobile ou à ceux qui se sont assurés au cas où ils seraient victimes d'accident d'automobile.

Parce qu'il s'agit d'une société d'État, on va piger dans la caisse. Jamais, cela n'aurait été possible. Il y a quelques courtiers d'assurances ici qui ont déjà parlé. Imaginez-vous s'ils vendaient de l'assurance d'une Régie de l'assurance automobile où ils diraient: En tout temps, le gouvernement viendra siphonner des fonds s'il estime qu'il y en a trop. Pensez-vous qu'ils vendraient beaucoup de cette assurance, librement, alors qu'actuellement, c'est une assurance collective, exactement comme une mutuelle qui appartient à tous les assurés du Québec? Le gouvernement n'a pas le droit de piger dans la caisse ou de venir la chercher et de l'accaparer. C'est fondamental. (21 heures)

Le député de Mille-Iles n'a pas dit un mot, pas un son. Il s'inquiète. Il s'est inquiété l'autre jour en commission parlementaire du cas d'un employé d'une caisse populaire qui serait assuré avec une société d'assurance du Mouvement Desjardins. En cas de faute, la société d'assurance du Mouvement Desjardins ne pourrait pas être en conflit d'intérêts en voulant payer moins l'assuré qui est son employé. Distinction sibylline. Il s'inquétait au cas où. Je me serais attendu qu'il fasse un discours. Il ne s'agit pas de cas de conflits d'intérêts

possibles, il s'agit d'un fait. 450 000 000 $ auront été siphonnés en quatre ans, en 1986, 1987, 1988, 1989, de la caisse de la Régie de l'assurance automobile.

C'est malheureux qu'il n'y ait pas eu plus de commentaires jusqu'à maintenant. Il est évident que, quand tout arrive en même temps en fin de session, les journalistes sont quasiment résignés à ne plus couvrir les débats, parce qu'ils calculent qu'ils ne sont plus capables de choisir. Ils font penser à un maringouin dans un camp de nudistes. Ils ne savent pas par où commencer. Il y en a trop. Le comptoir est trop plein. Je vous dis ceci. Dans chacun de nos comtés, on verra au cours des prochaines semaines, des prochains mois, des députés qui iront dire: Le gouvernement a pris votre caisse en tant qu'automobilistes. Ce gouvernement qui vous disait: Vous payez peut-être un petit peu trop de taxes pour l'assurance automobile dans le temps de notre gouvernement. Mais il ne leur a pas remis l'argent, au contraire, qu'est-ce qu'il a fait? Il l'a pris pour lui.

Mme la Présidente, le ministre a encore une chance de se racheter, il va prendre la parole, c'est la dernière fois qu'il va prendre la parole sur ce projet de loi. Il a la chance de dire: Je ne le ferai pas. Le ministre des Finances n'est pas là, je ne le passerai pas, je ne continuerai pas avec ce projet de loi. Je vais retourner au Conseil des ministres faire valoir les arguments que vous avez présentés ce soir, parce que je pense qu'il y a quelque chose. Je pense que les députés qui l'entourent devraient insister auprès du ministre des Transports pour lui dire: On va t'appuyer au caucus. On va vous appuyer, M. le ministre des Transports, parce que le ministre des Finances est en train de commettre un acte qu'il ne devrait pas commettre.

Mme la Présidente, c'est pourquoi l'Opposition votera le plus vigoureusement possible contre l'adoption de ce projet de loi qui est un projet de loi infâme, qui va être dommageable et pour lequel, éventuellement, les assurés devront payer en prime les 450 000 000 $ que le ministre des Finances aura été chercher. Quel que soit le temps, les assurés devront repayer les 450 000 000 $ qui ne sont plus dans la caisse. Pour payer les victimes d'accidents d'automobile, il manquera 450 000 000 $ et un jour ou l'autre, plus tôt que tard, les assurés devront payer des primes plus élevées pour compenser les 450 000 000 $ que le ministre des Finances sera venu chercher dans leur caisse. Je vous remercie, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Merci, M. le député de Lévis.

M. le ministre des Transports, en réplique.

M. Marc-Yvan Côté (réplique)

M. Côté (Charlesbourg): Merci, Mme la Présidente. Nous sommes à la conclusion de l'adoption en troisième lecture du projet de loi 62. À écouter le député de Lévis, on serait en droit de se demander s'il a été surpris par un tel projet de loi. Je pense qu'il a fait le surpris, mais il ne l'a pas été, puisque ce n'est pas une nouveauté. C'était à l'intérieur du discours sur le budget du début du mois de mai. C'était clair: ZOO 000 000 $. Mais au moment où l'on a déposé à l'Assemblée le projet de loi qui allait concrétiser une mesure du budget, il a fait le personnage le plus étonné de la terre, lui qui a le sens du spectable, du dramatique, le verbe très haut et allant chercher dans l'histoire ou dans les quelques cours qu'il a pu suivre à l'université, quelques extraits de Churchill et de bien des personnes. Je vous prouverai tantôt qu'il a été, à l'occasion, très certainement un mauvais élève.

Le dépôt de ce projet de loi et son adoption vont concrétiser un geste qui a été suscité par la Régie de l'assurance automobile du Québec. Le but, le député de Lévis en a parlé abondamment, prendre 200 000 000 $ à même la réserve de stabilisation de la Régie de l'assurance automobile du Québec et faire un placement, oui, puisqu'il s'agit bien d'un placement dans le réseau routier du Québec, en particulier pour l'entretien du réseau routier qui a subi une dégradation assez phénoménale au cours des neuf années que le PQ a connues au pouvoir. Mais il nous dit, en citant Churchill: II faut attaquer du haut des airs, par la mer et par terre. Qui paie les primes d'assurance automobile? Ce n'est pas un pilote d'avion en sa qualité de pilote d'avion. Ce n'est pas un pilote de bateau en sa qualité de pilote de bateau. Qu'est-ce que nous allons faire avec ces 200 000 000 $? Est-ce qu'ils serviront dans les airs? Non. Est-ce qu'ils serviront sur la mer? Non. Le principe est très simple. Ça va prendre des roues, et des roues, règle générale, ça sert pour des véhicules qui vont sur la terre, et, sur la terre, ça veut dire sur les routes du Québec. Donc, si ça sert pour les véhicules qui vont sur les routes du Québec, ce sont forcément des véhicules qui sont immatriculés et pour lesquels les gens du Québec qui les utilisent paient des primes d'assurance automobile. Et pour un permis de conduire, on paie des primes d'assurance automobile.

Les 200 000 000 $ seront donc retournés à ceux qui paient des primes d'assurance automobile et non pas aux pilotes d'avion et non pas aux pilotes de bateau, ça me paraît très clair. Donc, la régie fait un placement dans la sécurité routière, compte tenu de toute une série de phénomènes déjà bien connus et, en particulier, qu'un blessé

grave sur les routes du Québec coûte à la Régie de l'assurance automobile du Québec 500 000 $. C'est important, il faut se le rappeler.

Est-ce une surprise pour le député de Lévis? Moi, je dis non, ça ne peut pas, puisque, dans le rapport de la Régie de l'assurance automobile du Québec qui a été déposé devant cette Assemblée au mois de mai, il était très clair dans le propos de M. Vézina, son président, que la Régie de l'assurance automobile avait elle-même proposé au ministre des Finances et au ministre des Transports de prendre 200 000 000 $ de la réserve de stabilisation afin de les utiliser sur les routes du Québec pour éliminer des points noirs, pour faire toute une série de choses qui ont trait à la sécurité routière. Ça, c'est clair. Et, en deuxième lecture, je me suis même servi du procès-verbal qui est public de la Régie de l'assurance automobile du Québec témoignant de la véracité des propos que je tenais.

Le député de Lévis dit: Quand on l'a laissé, c'était 525 000 000 $ le fonds de stabilisation. Il était de 654 000 000 $ et on a pigé dedans. On a pigé dedans pour le retourner aux assurés, alors que, dans votre cas, vous n'avez jamais eu le courage de retourner aux assurés quelque bénéfice. Et, avec toute l'emphase qu'on peut y mettre, le député de Lévis dit: C'est le ministre des Finances qui a siphonné, qui a vidé la caisse, peut-être même, avait-il prétendu en deuxième lecture, à l'insu du ministre des Transports. Ne vous inquiétez pas, le ministre des Transports était dans le coup. J'étais très heureux d'être dans le coup parce que ça retournait aux assurés. J'étais dans le coup parce que c'était la volonté de la Régie de l'assurance automobile du Québec, parce que c'était le voeu exprimé par la Régie de l'assurance automobile dès le 9 avril 1987 au moment où le conseil d'administration a pris la décision et a suggéré au ministre des Finances de prendre cette méthode. Ce n'est donc pas le ministre des Finances qui est allé chercher l'argent à la Régie de l'assurance automobile, mais c'est celle-ci qui a offert au ministre des Finances de le faire parce qu'ils sont conscients de ce qu'on peut faire avec 200 000 000 $ sur les routes du Québec et des effets bénéfiques pour tous les usagers de la route. (21 h 10)

Mais on a fait autre chose. Le député de Lévis l'a à peine effleuré tout à l'heure. Pour la première fois de l'histoire de la Régie de l'assurance automobile, l'ascenseur a commencé à redescendre. Il a commencé à redescendre sous ce gouvernement libéral parce qu'on a pris des mesures énergiques quant à la sécurité des gens et quant à l'application du Code de la sécurité routière. Ce qui fait qu'en 1986, le bilan de la sécurité routière au Québec a été le meilleur des 25 dernières années dans tout le Canada. Il y a eu 24 % de diminution des accidents de la route, créant ainsi un excédent des revenus sur les dépenses de 50 000 000 $ que le ministre des Finances a décidé de retourner aux assurés de tout le Québec, soit à ceux qui ont un permis, soit à ceux qui ont une immatriculation. Cela, le député de Lévis n'en a pas parlé. Et c'était une première dans le Québec. Dans ce sens, nous disons à ceux qui ont eu un comportement raisonnable sur les routes du Québec: Continuez dans ce sens et nous allons continuer de vous aider.

Le député de Lévis a dit: Un amendement qui fait en sorte qu'on verse, en 1988-1989, 1989-1990, au lieu des trois années 1987-1988, 1988-1989 et 1989-1990, cela n'a pas de bon sens; 100 000 000 $ l'année prochaine. Cela signifie qu'en 1987-1988, le ministre de Finances et le responsable du Conseil du trésor ont bien géré les finances du Québec et que nous n'en avons pas besoin en l'année 1987-1988. C'est assez extraordinaire et c'est signe d'une maturité de bons gestionnaires le fait que nous n'en ayons pas besoin cette année, mais que les travaux de 60 000 000 $ ont quand même été effectués partout dans le Québec.

Mme la Présidente, le député de Lévis s'est porté en procureur de la défense. Examinons sa preuve. Il a fait un long plaidoyer comme un avocat payé à l'heure. Donc, il s'agissait davantage de remplir le temps que d'amener des arguments de fond. À preuve, qu'a-t-on entendu dire pendant cette heure dramatique où le brillant procureur des assurés, le député de Lévis s'est pourfendu en haut de gamme, en bas de gamme, à la fois sur les idées et sur les tons, à tenter de défendre ses pauvres assurés? On a entendu parler des lumières du boulevard Laurier. On a entendu parler de la prison de Saint-Joseph et des prisonniers qui sont rendus à New Carlisle. On a entendu parler de Churchill. On a entendu parler de siphonner, de vider la caisse. On l'a même entendu dire: "Pour le bénéfice des auditeurs qui n'étaient pas là hier, je vais répéter ce que j'ai dit hier", pour bien s'assurer qu'il s'adresse davantage aux auditeurs et que, s'il n'y en avait pas, peut-être serait-ce bien différent. Donc, l'objectif est bien plus de meubler un discours pour les auditeurs - vous avez bien compris - que, bien sûr, de défendre la cause en tant que procureur. On a même entendu parler de la tournée de deux poètes, le député de Mercier et Gaston Miron; on a entendu parler de cela hier sur le même débat. On a entendu parler... Cela a été la crème et c'est là que je me rends compte que le député de Lévis a probablement fait comme moi à l'occasion, griller quelques cours, et que c'est en voulant recopier les notes des autres qu'il a fait une

erreur. Il a dit: Le Parlement, s'il le veut, peut même changer un homme en femme, citant Jean-Charles Bonenfant et sa maxime. Je vais vous faire une petite leçon, si vous me le permettez, moi, qui n'ai pas suivi de cours de droit. Vous citiez Jean-Charles Bonenfant qui, lui-même, citait R.D. Lumb, un constitutionnaliste britannique qui disait: La seule chose qu'un Parlement ne peut pas faire, c'est de changer un homme en femme.

Des voix: Ah! Ah! Ah!

M. Côté (Charlesbourg): Vous êtes tout à l'envers! Ce n'est pas surprenant. Allez revoir vos notes et vérifier. Faites la correction immédiatement parce que vous pourriez passer pour un mauvais élève. Il est clair que cette maxime a été virée à l'envers comme une bonne partie de l'intervention du député de Lévis concernant le fond et l'essence même de ce projet de loi. Il est clair que, dans le cas du projet de loi 62, viré à l'envers une fois, viré à l'envers deux fois, il semble bien que le député de Lévis l'a fait suffisamment longtemps.

Laissons le procureur pour voir ce que son parti a fait durant ce débat sur la loi 62. Deuxième lecture: C'est une catastrophe! Le gouvernement du Québec et, en particulier le ministre des Finances, s'apprête à siphonner, vider la caisse, voler littéralement, disait-il, les assurés du Québec. C'était grave. Ils étaient 17 ou 18 à intervenir. C'était toute l'armada péquiste qui se levait et tirait en l'air pour dire aux citoyens du Québec: Soulevez-vous, vous êtes victimes d'un vol! C'était devant les caméras, bien sûr. C'est pour cela qu'on était nombreux pour pouvoir dire bonjour à mon oncle, à ma tante et pouvoir dire: Regardez, j'étais là.

Lorsqu'on s'est retrouvé en commission parlementaire, cela a pris une heure et quart. Quand on se retrouve en troisième lecture, on se retrouve avec une intervention, celle du député de Lévis. Mais dans le temps, la télévision. Bien sûr, que c'était tentant la télévision. Cela lui permettait de le faire. Je ne blâme pas le député de Lévis. Surtout quand on est dans sa situation, on veut se faire voir par le plus grand nombre de personnes possible. Cela fait du bien à l'image. Cela peut faire en sorte que beaucoup de gens pensent qu'on peut avoir des talents pour faire autre chose, offrir nos services avec beaucoup plus d'assurance à l'ensemble de la collectivité, aux 5500 nouveaux membres du PQ, cet engouement phénoménal des derniers mois.

Mais, regardons de façon définitive ce que ces gens, qui ont administré le pouvoir pendant neuf ans, ont pu faire. Je prendrai un premier point. À plusieurs reprises le député de Lévis est intervenu en disant: 60 000 000 $, c'était un projet de fonctionnaires, hein! reniant du revers de la main ce que les fonctionnaires peuvent faire. Ha! dit-il, j'aurais pu remplir un camion de projets de fonctionnaires. Celui-là, je peux vous dire qu'il était allé pas mal loin. Là où je l'ai pris, il restait juste à le transmettre au Conseil des ministres.

Je l'ai modifié un peu parce qu'on a fait quelques petits travaux d'ajustement. Dans votre cas, vous vouliez 80 000 000 $ par année. C'était suffisamment loin pour être rendu à 80 000 000 $. Alors que nous avons dit: C'est 60 000 000 $, mais après une entente avec le ministère des Affaires sociales. Qu'est-ce que cela vise? Pas à ce que les citoyens du Québec paient deux fois des primes. Au contraire, c'est pour réparer une erreur qui a été faite par Mme Payette, en 1978, pour la simple et bonne raison qu'on avait, à l'époque, un régime à vendre. Il ne fallait pas qu'il coûte trop cher et on n'avait pas inclus, à l'intérieur des coûts de la Régie de l'assurance automobile, les frais d'hospitalisation reliés aux accidents de la route alors que, dans le régime privé qu'on remplaçait, les accidents de la route et les frais hospitaliers étaient payés par les compagnies privées. Il était juste et normal de rétablir un certain nombre de choses et c'était là le but qui nous a poussés à rétablir les choses.

Ce n'est donc pas payer deux fois les mêmes taxes. C'est faux. De la même manière, le député de Lévis a flirté, un peu, à un certain moment donné, avec les taxes payées ou les primes d'assurance payées par les taxis. Il sait fort bien que les primes d'assurance payées par les taxis, si elles sont élevées, c'est dans le privé, ce n'est pas à la Régie de l'assurance automobile. La preuve en est qu'il y a deux groupes qui, aujourd'hui, ne paient pas les primes qu'ils devraient payer à la Régie de l'assurance automobile: Ce sont les motards et les taxis. Ils paient en deçà de ce qu'ils devraient payer. C'est clair. Alors, quant à l'utilisation de cet exemple, c'est démagogique de la part du député de Lévis.

Mais eux? Quand j'entends le député de Lévis nous dire "siphonner", "vider la caisse", "voler". Où étiez-vous pendant ces neuf années où vous avez siégé côte à côte avec M. Parizeau au Conseil des ministres, lors de cette décision sur un projet de loi qui est passé par le Conseil des ministres, qui a été débattu à l'Assemblée nationale pour lequel vous avez voté? Lorsque vous avez décidé d'aller chercher à Hydro-Québec des profits d'Hydro-Québec, où étiez-vous? Est-ce qu'à ce moment-là vous avez défendu l'intérêt des payeurs de comptes d'électricité qui, en plus, avaient à subir des augmentations de 13 %, de 17 %, de 7 % et de 9 %? Où étiez-vous à ce moment? Où étiez-vous en cette année 1982?

(21 h 20)

Le député de Taillon quant à lui était dans les officines, il préparait les mauvais coups avec celui qui nous a quittés maintenant, son ex-chef. Où étiez-vous, lorsque M. Parizeau est allé siphonner, comme vous dites, à la Régie de l'assurance automobile du Québec, en 1982, 238 000 000 $ contre la volonté même du conseil d'administration de la Régie de l'assurance automobile? Où étiez-vous, brillant procureur, brillant défenseur des assurés? Où étiez-vous? Les gens du comté de Lévis étaient-ils très heureux de vous?

Les assurés du Québec qui supposément aujourd'hui se font siphonner, se font voler, ne se sont-ils pas fait siphonner et voler? Il me semble que vous devriez avoir au moins un minimum d'honnêteté intellectuelle pour reconnaître que vous avez littéralement siphonné contre leur gré les gens de la Régie de l'assurance automobile, alors que Mme Sotiau qui n'a pas été nommée par le Parti libéral à la tête de la Régie de l'assurance automobile s'est opposée avec véhémence à ce que vous avez fait à l'époque. Alors que, dans ce cas-ci, c'est la Régie de l'assurance automobile par son conseil d'administration qui a suggéré au gouvernement du Québec de le faire. N'est-ce pas une situation contraire? Où étiez-vous à ce moment-là?

Le député de Lévis interpellait tous les députés comme pour meubler le temps. On aurait pu passer les 100 à l'Assemblée nationale. Même à un certain moment, il a dit: La députée de Johnson est estomaquée. Je comprends, de vous entendre surtout, et pas nécessairement de vos propos, mais de tout ce que vous avez véhiculé au cours de cette heure.

Mme la Présidente, c'est un choix fort logique qu'a fait la Régie de l'assurance automobile. C'est un choix fort logique que le gouvernement du Québec a fait, puisque les 200 000 000 $ bénéficieront directement aux usagers de la route au Québec: pour être capable de corriger des points noirs, une meilleure signalisation et faire en sorte que partout au Québec...

Circulez. Vous allez encore partir en tournée avec le député de Mercier et le poète Gaston Miron. Circulez. Allez dans le petit rang 2 de l'Épiphanie. Vous allez voir. Allez faire un tour dans différents comtés du Québec où l'argent a été utilisé et vous allez vous apercevoir que les gens l'apprécient. Des gens qui attendaient depuis 20 ans. Des gens qui attendaient des corrections de courbes. Des gens qui attendaient l'élimination de points noirs. Cela a commencé à être fait dès cette année en 1987. Non, le ministre des Transports n'a pas eu le bras tordu par le ministre des Finances. Le ministre des Transports a accepté la proposition de la Régie de l'assurance automobile contrairement à ce que vous aviez fait à l'époque. Il en est très heureux, puisque ça retournera aux usagers.

La réserve actuarielle étant déjà suffisante à la régie et le fonds de stabilisation étant encore bien garni, cela n'affectera en rien les finances de la Régie de l'assurance automobile. Notre prudence, le fait que nous ayons appliqué le Code de la sécurité routière a fait diminuer les accidents de la route et nous avons retourné aux citoyens du Québec 50 000 000 $, qui l'ont été au niveau des permis et de l'immatriculation. C'est davantage cela que retiendront les gens, les assurés, puisque leur fonds est maintenant bien assuré, bien protégé et que cela leur revient à eux, soit sous forme de remise d'assurance, de primes d'assurance, soit par l'utilisation de ces fonds sur les routes du Québec, et je vous propose, Mme la Présidente, l'adoption de ce projet de loi. Merci.

La Vice-Présidente: Merci, M. le ministre des Transports. Le débat étant clos, le projet de loi 62, Loi modifiant la Loi sur l'assurance automobile, est-il adopté?

Une voix: Sur division.

La Vice-Présidente: Adopté sur division. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Johnson: Oui, Mme la Présidente. Je vous demanderais d'appeler l'article 33 du feuilleton.

Projet de loi 15 Adoption

La Vice-Présidente: À l'article 33 de notre feuilleton, le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation propose l'adoption du projet de loi 15, Loi modifiant la Loi sur les terres publiques agricoles et d'autres dispositions législatives. M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.

M. Michel Pagé

M. Pagé: Merci beaucoup, Mme la Présidente. Je ne sais pas si c'est la raclée que le député de Charlesbourg et ministre des Transports vient de donner au député de Lévis ou si c'est le simple fait d'aborder un projet de loi à caractère agricole, mais le député de Lévis s'est senti obligé de remplir ses obligations ailleurs que dans cette Chambre.

Le projet de loi 15, la Loi modifiant la Loi sur les terres publiques agricoles et d'autres dispositions législatives, déposé le 12 mai dernier, dont le principe a été adopté le 29 octobre et le 11 novembre en deuxième lecture, a impliqué l'intervention de certains

de mes collègues, que je remercie principalement pour leur contribution à nos travaux, a fait l'objet d'une commission parlementaire les 26 novembre et 7 décembre où on a eu l'occasion de l'étudier article par article, d'en signifier, d'en informer mes collègues, les membres de cette Assemblée nationale, pour la portée de chacun des articles et de l'ensemble du projet de loi.

Mme la Présidente, je vais tenter d'être bref parce qu'il est déjà 21 h 30 ou presque, on doit se rappeler des motifs qui sont invoqués au soutien de la présentation de ce projet de loi. On se rappellera que la loi actuelle est entrée en vigueur le 1er juillet 1984, cette loi qui posait quand même des problèmes majeurs en regard de son application. Pour l'administration, j'ai fait valoir autant en deuxième lecture qu'en commission parlementaire qu'elle avait comme résultat des difficultés administratives et des difficultés de planification très appréciables au regard de la façon de la gérer sur le territoire.

On se rappellera de plus que cette loi qui porte directement sur près de 10 000 lots qui sont occupés par des citoyennes et des citoyens du Québec, qui pour la très grande majorité d'entre elles et d'entre eux ont la conviction d'être propriétaires du lopin de terre qu'ils occupent, qu'ils habitent, qu'ils ont aménagé, qu'ils ont amélioré, alors qu'en droit, ces gens-là doivent reconnaître, et la situation de droit nous oblige à indiquer à ces gens-là, qu'ils ne sont pas propriétaires, mais qu'ils sont plutôt concessionnaires d'un tel terrain, malgré que, dans plusieurs de ces cas, ces terrains sont occupés par les familles depuis quelques générations sinon plusieurs. On* se rappellera qu'en 1984, on a prévu une modification à la loi qui avait comme effet d'obliger chacun des concessionnaires à entreprendre la démarche visant à la régularisation de leurs titres de propriété. C'était une référence, une étude individuelle sans nécessairement de coordination de l'ensemble des dossiers, mais plutôt une étude ou une référence de la part de l'administration publique parce qu'elle a comme premier devoir et comme première obligation de faciliter les procédures, de les simplifier, de les rendre accessibles aux contribuables du Québec.

Or, la procédure prévue dans la loi de 1984 obligeait évidemment une initiative prise par chacun de nos concitoyennes et concitoyens, en plus d'entraîner évidemment, comme on le sait, des coûts d'application très élevés pour l'administration publique. Il en coûtait près de 500 $ pour administrer l'ensemble du transfert de propriété du secteur public au secteur privé, c'est-à-dire que ces gens qui habitent la région de Grand-Mère, l'Abitibi, Cap-Chat, Mont-Louis, Sainte-Anne-des-Monts en Gaspésie, et qui, pour plusieurs, ont la conviction, même au moment où l'on se parle, qu'ils sont bel et bien propriétaires de leur terrain, devaient en être premièrement informés et devaient entreprendre eux-mêmes ou elles-mêmes les procédures. Cela a donné quoi comme résultat, comme bilan, comme analyse? Une expectative de huit à dix ans avant d'être capable de régulariser l'ensemble de ces titres. Pour la clientèle, cela engendrait évidemment une insatisfaction élevée, de nombreuses demandes de documents parce que chacune de ces personnes devait démontrer soit des titres, soit des plans, devait s'initier évidemment à une procédure de dépôt de documents, de sensibilisation et de démonstration à faire au ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation du Québec. Cela impliquait évidemment des coûts considérables, des tracasseries et aussi des délais qui, dans certains cas, étaient très longs. (21 h 30)

Ce qui est important, c'est que pendant ce temps, de nombreux actes juridiques, que ce soit une hypothèque ou une servitude, consentis par ces concessionnaires légitimement étaient de plein droit complètement nuls. C'est ainsi qu'on a analysé le dossier et que nous présentions au mois de mai 1987 le projet de loi 15, un projet de loi qui a comme objectif de réduire les délais en ce qui concerne la démarche de l'administration publique. Ce délai de huit à dix ans est ramené à environ trois ans, au maximum quatre ans pour la très grande majorité des dossiers, avec une réduction des coûts pour l'administration publique. Là aussi, c'est important, parce que ce sont les taxes, les impôts des concitoyens et des concitoyennes qu'on a à administrer.

Cela a été un engagement très clair, très ferme, très éloquemment évoqué de la part de notre gouvernement que l'une des premières obligations auxquelles on se conviait était de s'assurer qu'on puisse diminuer la taille de l'État, simplifier les procédures et finalement mieux administrer les taxes et les impôts qu'il nous envoie. Nous prévoyons donc en arriver par le projet de loi 15 non seulement à une simplification des procédures, mais à une réduction substantielle des coûts à assumer comme gouvernement et ainsi récupérer, sauver comme on dit, des taxes, des impôts, de l'argent des contribuables qu'on a le mandat d'administrer.

Pour la clientèle, le projet de loi prévoit des éléments très intéressants. Qu'il me suffise de faire référence à l'élimination complète des contraintes administratives dans ce qu'on peut évaluer à environ 80 % des dossiers, c'est-à-dire, pour celles et ceux qui nous écoutent ce soir, qu'au lieu de devoir entreprendre eux-mêmes ces procédures, le ministère que je dirige, par la voie de son équipe de femmes et d'hommes qui

travaillent au ministère, aura l'occasion de visiter chacun des bureaux d'enregistrement du Québec où on a de tels lots en concession et ces gens émettront purement et simplement des lettres patentes à partir des données contenues aux différents registres dans ces bureaux d'enregistrement. Donc, élimination presque totale du coût de délivrance des lettres patentes, régularisation des titres sans aucune autre formalité, sans autre démarche dans la très grande majorité des cas et aussi ce qui est important, validation des actes juridiques qui ont été posés par ces gens de bonne foi.

Le processus de délivrance des lettres patentes est donc complètement modifié. On procédera à une étude systématique canton par canton de tous les dossiers au Québec et j'ai donné la garantie, autant en deuxième lecture qu'en commission parlementaire, que le tout serait fait de la façon la plus objective, la plus honnête, la plus crédible et la plus garante possible pour les administrés du Québec.

Les députés de l'Opposition ont soulevé certaines critiques, certaines interrogations. Est-ce que le fait d'entreprendre les procédures nous-mêmes sans se référer à cette obligation des concitoyennes et des concitoyens peut être associé à des mesures coercitives? J'ai déjà répondu en commission parlementaire que la clientèle n'est plus contrainte de produire à ses frais une demande et tous les documents nécessaires. Aucune formalité ni coût ne sont exigés du citoyen. Régularisation automatique de leur situation de droit comme suite de l'action du ministère. Exceptionnellement, si des preuves sont insuffisantes en regard de la propriété de ces gens-là, il y a possibilité pour le ministre de demander la production de certains documents supplémentaires et toutes les mesures nécessaires seront appliquées pour sauvegarder les droits des concitoyennes et des concitoyens.

J'ai entendu certains des collègues de l'Opposition qui se sont gargarisés, qui, comme d'habitude, ont tenté d'ameuter la population en disant que cette notion de preuve de véritable propriété, de véritable usage pouvait amener des décisions arbitraires. Je rappellerai à mes collègues que cette notion existait dans les lois antérieures, celle de 1921 adoptée il y a déjà 66 ans et aussi celle de 1982. Alors, toutes les dénonciations que mes collègues ont faites en regard de ce pouvoir arbitraire, je me limiterai à leur dire qu'à l'article 32 de la loi actuelle adoptée par l'Assemblée nationale mais présentée par mon prédécesseur, le député de Lévis, on disait qu'en l'absence d'un acte mentionné, le ministre peut, sur production d'une preuve qu'il juge suffisante, reconnaître la personne, etc. qui a droit au titre de propriété. Cela veut donc dire concrètement qu'il n'y a rien de plus contraignant, de plus arbitraire dans cette loi qu'il n'y en avait au moment où l'Assemblée nationale décidait de l'adopter, en 1982, par le biais du député de Lévis et la majorité péquiste.

Les députés ont donc formulé certaines représentations en commission parlementaire. Je pense que le projet de loi a été mieux compris. J'ai eu l'occasion de répondre à plusieurs questions de la part des députés, notamment de la part du député de Laviolette, à qui je dois reconnaître, ce soir, une contribution intéressante, utile. Je peux vous dire, en confidence, en cette fin d'année 1987, alors que j'ai depuis deux ans le privilège d'agir comme ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, que c'est rafraîchissant d'avoir à discuter avec le député de Laviolette, porte-parole de l'Opposition. C'est rafraîchissant parce qu'il est honnête, il est très sincère, il est contributif. Peut-être que les auditeurs diront: Comment un ministre libéral peut-il adresser de telles appréciations au député de Laviolette? Je vous dirai que c'est non seulement un bon voisin pour moi, parce qu'il représente la région qui cotoie le côté nord-ouest de mon comté, mais je pense que le parlementarisme nous commande de reconnaître le travail fait par l'Opposition. À cet égard, je dois dire que le député de Laviolette a joué un rôle intéressant et important dans nos travaux, et je voudrais l'en remercier.

Avant de terminer, je voudrais remercier très sincèrement celles et ceux qui, à mon ministère, ont travaillé sur ce projet de loi, qui m'ont conseillé, avec qui j'ai eu l'occasion d'apporter certaines modifications, de tracer des orientations. Je voudrais remercier les gens du Service de la gestion des terres du ministère, Me Jean Proteau qui travaille chez nous. Vous savez, souventefois, les fonctionnaires travaillent dans l'ombre, préparent des projets, préparent des programmes et on ne reconnaît pas toujours publiquement leur contribution. À Me Jean Proteau, à Me Pierre Labrecque et à Me Myriam Bourget, je voudrais adresser mes remerciements très sincères pour leur contribution dans ce projet de loi.

En terminant, je voudrais vous indiquer la conviction que j'ai que ce projet de loi contribuera à simplifier les procédures pour celles et ceux qui sont administrés en vertu de nos lois. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Merci, M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation. M. le député de Laviolette.

M. Jean-Pierre Jolivet

M. Jolivet: Merci, Mme la Présidente. Je serai bref, étant donné que c'est la

dernière occasion que j'ai de parler sur le projet de loi 15. Je reçois avec beaucoup de plaisir, à titre personnel, mais aussi en tant que membre de ma formation politique, les remarques du ministre à mon égard. Je dirai que j'essaie, comme membre du Parlement, d'agir le mieux possible pour le bien-être de l'ensemble de nos concitoyens et si j'ai des critiques sévères à faire, je ne me gêne pas pour les faire, mais si nous pouvons amener des modifications aux projets de loi... Certains députés libéraux m'ont dit, lors de l'étude de ce projet de loi, qu'ils étaient vraiment intéressés par mes propos parce que j'amenais des cas bien précis sur des questions bien importantes pour clarifier l'ensemble du dossier. Après onze ans comme député, j'ai l'occasion de parler presque quotidiennement, quand je suis à mon bureau de comté, ou par téléphone quand je suis à Québec, des gens qui ont des problèmes et qui m'indiquent comment il faut agir pour essayer de les régler dans les meilleures conditions.

Nous avons dit au ministre que nous étions d'accord avec le principe du projet de loi tel que présenté parce que, effectivement, c'était un principe que nous avions énoncé au moment où mon collègue, le député de Lévis, était ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation. Le ministre a inversé les choses. Ce n'est pas la personne qui demande au ministère de devenir propriétaire de ses lots, mais le ministère qui détermine lui-même qui est propriétaire en lui envoyant directement des lettres patentes. Il y a un danger à ce renversement des rôles et nous l'avons dit au ministre. Le ministre a décidé de continuer dans ce sens et nous ne pouvons pas l'en empêcher. D'ailleurs, le nombre de députés libéraux fait en sorte que nous perdons chaque fois, mais nous avons cependant averti le ministre des dangers qu'il y avait. (21 h 40)

Notre rôle comme membres de l'Opposition est de dire au ministre les dangers qu'il y a, de le lui dire correctement, et ne pas l'empêcher, cependant, de mettre en place le projet de loi qu'il veut bien mettre en place, tout en disant: Soyez très vigilants, de la part de tout le monde qui auront à vivre ces transformations. S'il y a des accrochages en cours de route, comme membres de l'Opposition, nous serons là pour le faire valoir auprès du ministre, et, d'un autre côté, nous espérons que cela n'ouvre pas la porte à des injustices comme celles que mon collègue de Dubuc a mentionnées hier, dans certains dossiers qu'il a très bien expliqués. Dans ce contexte, Mme la Présidente, pour tenir la parole que j'ai donnée, je vais donc vous dire que nous adoptons le projet de loi 15 et que nous allons cependant surveiller de très près la mise en application de ce projet. Je vous remercie, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Merci, M. le député de Laviolette. Je constate qu'il n'y a pas d'autre intervention. Je vais déclarer le débat clos.

Est-ce que le projet de loi 15, Loi modifiant la Loi sur les terres publiques agricoles et d'autres dispositions législatives, est adopté?

Une voix: Adopté.

La Vice-Présidente: Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Johnson: Oui, Mme la Présidente, je vous demanderai d'appeler l'article 34 du feuilleton.

Projet de loi 46 Adoption

La Vice-Présidente: À l'article 34 de notre feuilleton, le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation propose l'adoption du projet de loi 46, Loi sur le financement agricole. M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.

M. Michel Pagé

M. Pagé: Merci, Mme la Présidente. Le projet de loi 46, Loi sur le financement agricole, est un projet de loi qui, par son libellé renvoie peut-être pour certains à une certaine refonte, mais projet de loi, cependant, si on ajoute toute la réglementation... Comme on le sait, une loi est en quelque sorte une ossature, mais la chair généralement est prévue par règlement. Les règlements préliminaires qui ont été déposés en commission parlementaire, et qui seront déposés après l'adoption du projet de loi au Conseil des ministres pour fins d'adoption, témoignent très clairement de cette importante réforme qui sera mise en place à la lumière de l'adoption de ce projet de loi et surtout de son application. Le projet de loi 46 est attendu depuis plusieurs années. Il a fait l'objet, Mme la Présidente - vous en conviendrez très certainement avec moi, parce que vous êtes attentive comme députée de Bellechasse, à toute la problématique du financement agricole au Québec - de plusieurs déclarations du ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation du Québec, mais pas de celui qui vous parle, mais de celui qui l'a précédé. Au congrès de l'Union des producteurs agricoles en 1981, la réforme sur le financement agricole allait venir en 1982. En 1982, au congrès de l'Union des producteurs agricoles, la réforme du financement agricole

allait venir en 1983. En 1983, elle allait venir en 1984. En 1984, il n'y avait plus personne qui le croyait.

Mme la Présidente, le gouvernement de M. Bourassa s'était engagé en campagne électorale, en 1985, à procéder à des modifications majeures du financement agricole au Québec. Qu'a-t-on fait? On a recueilli tout ce qui avait été écrit. On a recueilli tout ce qui avait été dit. Le ministre et l'équipe ministérielle se sont associés à l'Office du crédit agricole du Québec, qui a célébré son cinquantième anniversaire en 1987, un organisme qui a joué un rôle de premier plan, de premier niveau dans le financement agricole au Québec et qui a contribué de façon éminemment importante au développement de l'agriculture du Québec. On s'est associé à ces gens et on s'est donné un cadre de consultation, de fonctionnement qui nous a permis de rencontrer plusieurs organismes, plusieurs groupes directement concernés par le financement agricole, avec la participation de collègues de l'Assemblée nationale, dont Mme la députée de Kamouraska-Témiscouata. Ce soir, je voudrais profiter de cette occasion que j'ai en troisième lecture pour lui témoigner mon appréciation comme ministre au regard de sa contribution à ce processus d'analyse, de réflexion, de consultation et de recommandations au gouvernement, tout comme je voudrais remercier M. le député de Berthier pour sa contribution importante. On sait que le député de Berthier représente un comté agricole, un comté dont un pourcentage important de l'économie s'appuie sur l'activité agricole, et qui a su véhiculer lui aussi les représentations de ces gens, et s'associer à une démarche d'analyse et de recommandations au gouvernement.

Nos objectifs dans ce projet de loi: adapter notre système en fonction de la réalité d'aujourd'hui, des besoins financiers de nos entreprises, de leur capacité de payer et - pour nous, c'était bien important -améliorer le fonctionnement et le contenu des programmes de financement pour les rendre plus adéquats, correspondant davantage aux besoins combien évolutifs de nos fermes québécoises.

On se rappellera qu'avant l'adoption de ce projet de loi, c'étaient huit lois différentes avec chacune ses règlements, avec chacune sa définition et ses dispositions qui administraient le régime de financement agricole du Québec. Une fois l'adoption faite, ces huit lois seront simplifiées en une seule loi. Meilleur suivi auprès de nos clientèles, et ça, qu'il me suffise de me référer à l'approche globale qui est introduite comme principe de fond dans ce projet de loi et qui ne prévoit rien de compliqué, en fait, mais qui aurait dû être fait bien avant. C'est donc dire que chacun des dossiers des agricultrices, des agriculteurs qui ont des besoins en financement, qui prennent la relève en agriculture, qui s'installent, chacun de leur dossier sera étudié globalement, non seulement en fonction de leurs besoins immédiats, mais où on tentera le plus objectivement, le plus honnêtement possible, d'établir leurs besoins financiers à moyen et à long terme, de prévoir aussi le développement sur leur ferme et, par conséquent, prévoir les besoins financiers qui seront inhérents à tel développement dans l'avenir.

Par ce projet de loi, et je suis persuadé que, sur cet élément-là, Mme la députée de Johnson qui écoute mon intervention avec beaucoup d'intérêt, sera en mesure de s'associer à moi, d'adhérer pleinement à ce que je dis, un de nos objectifs, sinon le premier objectif, c'est de s'assurer, à partir de mutations importantes de la taille des entreprises agricoles du Québec, ces entreprises qui produisaient, sous une inspiration qu'on pourrait qualifier d'artisanale, il y a peut-être 30 ans au Québec, ces entreprises qui ont vécu des mutations, qui ont été conviées à des structures nouvelles de production, de mise en marché, qu'il me suffise de me référer à la politique des quotas dans le lait, dans le poulet, dans le didon, dans les oeufs, etc., qui ont vécu des transformations, qui ont atteint une taille tout à fait différente...

Vous savez, exemple concret, que, pour les fermes laitières du Québec, c'est une valeur moyenne de 550 000 $, des fermes qui ont près de 72 % d'équité comparativement à 61 % pour les fermes laitières américaines, mais quand on se réfère à des fermes dont la valeur moyenne est de 500 000 $ avec 72 % d'équité, ça commande des besoins financiers très appréciables, lorsque ces entreprises sont transférées en termes de propriété. Donc, on se devait de favoriser l'accès à la propriété chez nos jeunes qui ont une formation en agriculture, qui ont une expérience en agriculture et qui sont motivés à l'égard de cette profession combien noble et combien importante dans notre société parce qu'elle contribue, évidemment, à nourrir et à alimenter le Québec. (21 h 50)

En 1985, quand la campagne électorale est arrivée, certains ont peut-être eu des doutes à l'égard du caractère sérieux de nos engagements. Et là, je me réfère évidemment à nos opposants. Mais, aujourd'hui, force leur est de constater que nous sommes véritablement passés de la parole aux actes dans ce dossier et que c'est ainsi que des mesures très concrètes, très spécifiques, très encourageantes, susceptibles de favoriser l'accès à la propriété pour les jeunes au Québec, la relève... Dans un premier temps, on doit convenir qu'antérieurement, les subventions... Un prêt

octroyé par une institution financière et garanti par l'Office du crédit agricole du Québec fait l'objet d'une réduction du taux d'intérêt, ce qui veut dire une subvention par le gouvernement. Au ministère que je dirige, ce sont 150 000 000 $ de crédits qui sont votés, qui sont mis à la disposition de l'Office du crédit agricole du Québec.

Antérieurement, avant ce projet de loi, la partie subventionnée d'un emprunt se limitait à 150 000 $. Avec le projet de loi, ce montant est augmenté à 200 000 $, ce qui donne davantage de leviers, notamment pour nos jeunes. On a deux niveaux de subvention, évidemment. On a introduit - et ce sera concrétisé dans la réglementation qui sera adoptée - dans le projet de loi une notion de formation en agriculture pour s'assurer... Comme on le sait, la jeune fille ou le jeune homme qui a une formation en agriculture a de meilleures garanties de succès, de réussite, une fois qu'il sera à la tête de son entreprise. Il est certain que cette conjugaison de la formation et de l'expérience constituera très certainement un atout important pour le succès de nos jeunes dans ces entreprises.

Qu'il me suffise de vous donner des exemples de subventions. Le jeune homme ou la jeune fille qui détiendra un DEC aura un écart de 4 % de subvention. C'est 4 % en plus pour le jeune, si on fait la comparaison avec une personne qui a un prêt qui est en vitesse de croisière à l'office. Sans diplôme d'études collégiales, si on compare les avantages qui seront concédés à ces jeunes aux avantages d'un autre emprunteur - le même que tout à l'heure - qui, lui, est en rythme de croisière, ce sera 2 %. Et, 2 %, pour des prêts pouvant aller jusqu'à plusieurs centaines de milliers de dollars et, pour le premier, 200 000 $, c'est important.

Je vais donner l'exemple d'un jeune producteur laitier qui procéderait à l'achat d'une ferme de 400 000 $ dans nos comtés. L'aide totale sur cinq ans, avant l'élection du Parti libéral du Québec, était d'environ 31 000 $. Or, le jeune homme, la jeune fille qui achetait une ferme évaluée à 400 000 $, dans le temps du précédent gouvernement, les cinq premières années, recevait 31 000 $ d'aide. Prenons le même cas aujourd'hui. On doit se rappeler que, dès le mois de décembre 1985 - on n'a pas attendu - dès notre arrivée, on a présenté et on a adopté en 1986 une loi faisant passer la prime à l'établissement de 8000 $ à 15 000 $. Ce qui veut donc dire que ce jeune homme, cette jeune fille recevrait, aujourd'hui, au moment où l'on se parle, avant même l'adoption de cette loi, non pas 31 000 $, mais un montant pouvant aller jusqu'à 38 000 $ d'aide ou de subvention.

Avec le projet de loi, l'aide sera de près de 45 000 $ pour les cinq premières années, et ce, sans un diplôme d'études collégiales alors qu'avec un diplôme d'études collégiales, ce niveau d'aide sera à un peu plus de 51 000 $ pour les cinq premières années. Voilà des gestes concrets et des mesures précises confirmés dans ce projet de loi qui sont très certainement susceptibles de contribuer à favoriser davantage la relève en agriculture.

Il faut dire aussi que dans la situation actuelle du financement agricole au Québec, alors qu'antérieurement, la conjointe d'un agriculteur ne pouvait bénéficier de ces primes à l'établissement, aujourd'hui, dans le cas qui nous occupe, en plus des 51 000 $, si ce jeune s'associe évidemment à sa conjointe qui joue un rôle très important dans l'entreprise, ils recevront 15 000 $ de plus comme contribution.

Un autre élément très important qui apparaît au projet de loi, c'est l'accréditation du vendeur. Je m'explique. Vous savez, souventefois, les parents qui sont propriétaires d'une entreprise agricole qui vaut 400 000 $, 500 000 $, sont placés devant des choix difficiles, soit de vendre à leur fils à un prix plus bas, parce qu'ils savent pertinemment que leur fils ou leur fille n'a pas suffisamment d'équité, pas suffisamment d'argent de côté - et c'est normal - ils sont jeunes, pour se porter acquéreur d'une entreprise aussi importante et payer le juste prix.

C'est là le premier choix: Vendre au fils, à la fille mais en réduisant le prix et ainsi en cédant pour leur bénéfice une partie importante de leur fonds de retraite parce que la ferme, c'est le fonds de retraite de ces centaines de milliers de couples du Québec qui ont pris la relève en agriculture, qui ont développé leur ferme, qui ont amélioré leur production, qui ont amélioré leur terre et, aujourd'hui, ils se retrouvent, à plus de 50 ans, plus de 60 ans, confrontés à un problème de taille, à savoir comment transférer la propriété et toucher des valeurs pour le bien qu'on a bâti, qu'on a développé.

Alors, leur premier choix c'est de vendre au fils, à la fille mais accepter une réduction du fonds de retraite ou de vendre au voisin qui lui, n'est pas membre de la famille, fermer et mettre fin à la présence familiale sur ce coin de terre et avoir le juste prix dans une démarche de consolidation de l'entreprise du voisin.

C'est ainsi qu'à compter de l'adoption de la loi le vendeur pourra être accrédité par l'Office du crédit agricole en regard du solde du prix de vente. Un exemple concret: ce jeune homme ou cette jeune fille auxquels je référais tout à l'heure qui procède à l'acquisition d'une ferme pour un montant de 400 000 $ pourra emprunter 200 000 $ de l'Office de crédit agricole du Québec, bénéficier de tous les avantages en matières de subventions et d'aide en regard du taux d'intérêt qui est payé, en partie, par l'Office

du crédit agricole et le solde du prix de vente, 200 000 $ pourra être assumé par les parents, par exemple. Et, ce qu'il y a de nouveau, c'est que ce prêt de 200 000 $ consenti par les parents au fils ou à la fille sera pleinement garanti par l'Office du crédit agricole du Québec, donc par le gouvernement.

Dans ma tournée des expositions agricoles, souvent, les parents me disaient: Vous savez, M. le ministre, on hésite à garder un solde de prix de vente parce que, si jamais ils ont de la difficulté, si jamais ils sont malades, si jamais il y avait un divorce nous serions susceptibles de perdre le montant du prêt ainsi consenti. Notre gouvernement, se voulant vigilant et très à l'affût des besoins de nos clientèles, c'est ce pourquoi cette notion a été introduite.

Toutes les bonifications prévues dans ce projet de loi s'appliquent aussi à l'égard des agricultrices du Québec. Je pense que la contribution de notre gouvernement aura été importante et, très certainement, que l'histoire enseignera et donnera comme conclusion une reconnaissance, non seulement verbale, mais de fait par nos lois, par nos mesures à l'égard des droits des agricultrices du Québec.

Vous savez, quand notre gouvernement, quand notre équipe a indiqué, par la voix du premier ministre, par la voix de Mme la ministre déléguée à la Condition féminine, notre intention très claire de faire plus, d'établir des mécanismes, des programmes, des leviers qui feraient en sorte que l'indépendance économique des femmes du Québec serait renforcée, cela s'est concrétisé, entre autres, par nos lois de financement agricole. Je vois Mme la députée de la rive sud de Montréal, de Marie-Victorin, je pense, qui semble avoir des doutes. Je comprends qu'elle est d'un milieu urbain mais je lui dirai ceci: Avec les programmes qui ont été mis en place par notre gouvernement en 1986, - et j'invite Mme la députée de Maisonneuve, sachant qu'elle est bien sensible à ces questions, à écouter attentivement - quand, en 1986, on a dit comme gouvernement qu'en agriculture, on devait passer du partage des tâches au partage des pouvoirs, c'est ce à quoi on référait dans notre plan d'action. (22 heures)

Aujourd'hui, force vous est de reconnaître qu'en ce qui concerne les demandes d'établissement en agriculture, les gens qui s'installent, les gens qui accèdent à la propriété, les gens qui bénéficient de nos programmes, entre autres de nos primes à l'établissement, entre le 1er avril 1987 et le dernier rapport au 10 décembre 1987, l'Office du crédit agricole, sous ma signature et sous celle des régisseurs de l'office, a émis pour 22 000 000 $ de primes à l'établissement, évidemment avec un maximum par personne, de 15 000 $. C'est beaucoup de monde. Dans 63,3 % des cas d'établissement en agriculture, depuis que cette mesure a été adoptée, ceux-ci ont été faits par des femmes. Alors, quand on dit de notre côté que ce n'est pas seulement des slogans, ce n'est pas seulement des livres peu importe la couleur, ce sont véritablement des actions concrètes. Quand je vous disais tantôt que l'histoire enseignera que le gouvernement de M. Bourassa aura contribué de façon significative à faire en sorte que les agricultrices du Québec, celles qui bâtissent l'agriculture, celles qui s'y occupent, celles qui travaillent en moyenne 32 heures par semaine, sans compter toutes les autres obligations qu'elles ont dans le couple, à l'égard des enfants, notamment, notre gouvernement aura livré la marchandise!

Dans ce projet de loi, d'autres dispositions additionnelles, par exemple, toute la notion de ferme complémentaire, sont incluses. Exemple concret: le droit pour une agricultrice qui, avec son conjoint, gère une entreprise, le droit pour elle, si l'entreprise veut prendre de l'expansion, d'acheter la ferme, d'acheter des terrains. La conjointe pourra recevoir un prêt pour elle, comme propriétaire de ce coin de terre, sans qu'on lui fasse obligation d'avoir des animaux, sans qu'on lui fasse obligation d'avoir des bâtiments, des équipements, sans qu'on lui fasse obligation d'avoir un quota. Il suffira pour elle d'acheter cette terre, d'être subventionnée comme agricultrice et d'en vendre le produit, par exemple des céréales, maïs, orge, grain, soya, à l'entreprise d'encadrement dont elle est propriétaire avec son conjoint. Les clauses discriminatoires ont été abolies, Mme la Présidente, et je pense que c'était très important de le faire. Je dois convenir que nous étions très surpris de voir que de telles clauses discriminatoires existaient encore.

Caractère universel de nos dispositions. Les prêts ont été augmentés à 800 000 $, possibilité d'emprunt de 800 000 $ par ferme, par entreprise. La portion subventionnée passe de 150 000 $ à 200 000 $, comme je vous le disais tout à l'heure. Les marges de crédit sont portées, parce que là aussi le financement à court terme est important, même en agriculture, de 100 000 $ à 200 000 $, et ça demeure à 500 000 $ pour les producteurs de céréales et les producteurs de bovins dans les parcs d'engraissement. Le mode de versement se veut plus souple avec ce projet de loi. On sait que les paiements étaient semestriels. Les productrices, les producteurs pourront rembourser à leur rythme, à leur convenance, mensuellement, trimestriellement, semi-annuellement ou annuellement selon le type de production et la capacité de payer des emprunteurs, donc de leurs besoins. Nous

introduisons par ce projet de loi un mécanisme nouveau, un mécanisme très important, à savoir que nous aurons un comité de réexamen des décisions rendues par l'Office du crédit agricole du Québec et ce, peu importe à quel niveau: que ce soit dans les cas de refus, que ce soit dans les cas de montants de prêts autorisés, etc.

Nous aurons un comité de réexamen et j'ai très clairement indiqué notre volonté de faire en sorte que les agriculteurs, les agricultrices, ceux qui ont de l'expérience en agriculture soient représentés à ce comité. Nous avons introduit une notion en commission parlementaire, je voudrais remercier mon collègue le député de Laviolette pour ses propositions dans ce sens, à savoir qu'on a accepté et qu'on a modifié dans le sens de permettre aux gens qui sont visés par des décisions d'être entendus par les comités de réexamen, tout comme évidemment la personne qui aura pris la décision d'office pourra elle aussi être entendue.

Nous avons élargi les conditions d'admissibilité, aux éleveurs de chevaux de courses, entre autres, parce que c'est une industrie importante - on y reviendra un peu plus tard ce soir - tout comme à ceux qui se convient à cette orientation qu'on a donnée au ministère, les cultures en serres, notamment la culture hydroponique, parce qu'on sait qu'on a tout un marché à développer. On peut être davantage autosuffisant dans ces types de production, sans pour autant surendetter nos clientèles, nos agricultrices, nos agriculteurs, nos investisseurs. Ça aussi, c'est une section tout à fait nouvelle des interventions agricoles qui pourraient être couvertes par le financement agricole du Québec.

Toutes ces mesures étaient souhaitées et désirées depuis plusieurs années. Je dois vous dire que la commission parlementaire aura été utile en ce que plusieurs des propositions qui nous ont été formulées seront retenues. Qu'il me suffise de dire qu'en vertu de la loi les prêteurs pourront continuer de consentir des prêts à moyen terme jusqu'à 50 000 $ sans autorisation préalable de l'Office du crédit agricole. C'était demandé par l'Union des producteurs agricoles; c'était demandé par le Mouvement Desjardins; c'était demandé par la Fédération de la relève agricole; c'était demandé aussi par l'Association des technologistes agricoles. La même chose pour les ouvertures de crédit jusqu'à 25 000 $ sans avoir à recevoir l'autorisation de l'office; c'était demandé par les intervenants et c'est accepté. La date d'échéance des premiers remboursements sera prévue au règlement, mais, là aussi, on donne suite à ce qui était demandé en commission parlementaire.

L'amendement à l'article 22 qui propose de calculer la durée du prêt à compter de l'échéance fixée pour le premier versement, c'était demandé et c'est prévu dans la loi, l'amendement aux dispositions de l'article 25, etc., tout comme ces demandes qui nous ont été formulées concernant l'aide apportée aux jeunes. Il me fait plaisir ce soir de confirmer à mes collègues que le règlement prévoira plusieurs modalités concernant l'aide apportée à nos jeunes de façon que l'on puisse tenir compte non seulement de ceux qui ont un diplôme d'études collégiales, de ceux qui, évidemment ont un baccalauréat, un cours universitaire, mais aussi de ceux qui ont un diplôme d'études secondaires, c'est important, avec un profil professionnel ou encore en agriculture. Nous tiendrons compte de tous ces jeunes qui se convient à une formation susceptible de les aider lorsqu'ils seront à la tête de l'entreprise, en considérant évidemment, parce qu'on doit toujours en tenir compte, l'expérience, selon les cas. On sait que deux ans d'université, cela vaut un certain nombre d'années d'expérience. L'assurance que je voudrais donner à mes collègues, ce soir, c'est que nous allons dans le sens des représentations qui nous ont été faites, convaincus que nous sommes que la meilleure façon de légiférer, c'est d'écouter, évidemment, celles et ceux qui sont directement concernés par de tels projets de loi.

Mme la Présidente, c'est l'essentiel du projet de loi que je veux vous référer en troisième lecture ce soir, une modification attendue depuis longtemps, la Loi sur le financement agricole, une réforme du financement agricole qui est progressive et dynamique et, en même temps, une refonte des huit lois, des éléments introductifs de nouvelles orientations. Je voudrais, évidemment, vous témoigner mon appréciation de voir que cette loi sera adoptée ce soir en troisième lecture.

De plus, je voudrais profiter de cette occasion pour remercier mes collègues qui se sont associés à cette démarche, les députés de l'Assemblée nationale, notamment, avec qui les échanges ont été très intéressants, très utiles et très motivants. Je voudrais aussi remercier l'équipe de l'Office du crédit agricole du Québec qui a été intimement et étroitement associée à cette démarche. Souventefois, les critiques dans la population, que ce soit légitime ou non, explicable ou non, sont sévères à l'égard de celles et de ceux qui occupent des postes dans nos ministères, dans nos organismes gouvernementaux. Je voudrais, ce soir, témoigner mon appréciation à l'égard de la contribution à l'élaboration de ce projet de loi avec l'équipe gouvernementale et avec moi comme ministre. Je veux remercier M. Julien Burns, de l'Office du crédit agricole du Québec, Me Charles-Édouard Gagnon, qui est notaire, de l'Office du crédit agricole du Québec, qui a dû déplacer ses vacances pour venir travailler dans l'équipe; toute l'équipe de

régisseurs, de membres qui ont été associés au processus de réflexion. Je veux, en terminant, remercier un grand commis de l'État qui est avec nous, qui est au gouvernement du Québec, à l'Office du crédit agricole depuis plus de 20 ans - 23 ans, je crois - et qui assume la présidence et la responsabilité de l'Office du crédit agricole, Me Camille Moreau, que les agricultrices et les agriculteurs du Québec et les intervenants connaissent pour être profondément impliqué dans le financement agricole au Québec et qui a joué un rôle de premier plan dans les conseils, les avis et les orientations qui m'ont été donnés pour la rédaction de ce projet de loi. Je voudrais le remercier très sincèrement. (22 h 10)

Mme la Présidente, voilà, je souhaite que ce projet de loi soit adopté à l'unanimité. Nous anticipons son adoption, ainsi que l'adoption de ses règlements et la mise en oeuvre de cette pièce de législation très importante dans les meilleurs délais. Merci.

La Vice-Présidente: Merci, M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation. M. le député de Laviolette.

M. Jean-Pierre Jolivet

M. Jolivet: Merci, Mme la Présidente. Le projet de loi apporte des changements, il faut le dire, mais pas au point que ce soit une réforme. Le ministre le sait très bien, c'est une refonte de sept lois, sept règlements. On dit huit lois, huit règlements, parce qu'on abroge la huitième, mais, en fait, c'est sept lois, sept règlements. On l'a vu, d'ailleurs, lors de l'étude de ce projet de loi article par article, quand on reconduisait, presque textuellement, avec des améliorations ajustées au contexte moderne, certaines parties de ces lois qui datent de fort longtemps. D'un autre côté, le ministre a peut-être raison d'une certaine façon, c'est son style, de s'enorgueillir de cette pièce législative, mais il ne faudrait pas qu'il ait l'impression d'avoir fait cela tout seul. L'Opposition, à la suite de la commission parlementaire qui a eu lieu l'automne dernier où des gens sont venus faire part de leurs réticences, de leurs points de vue, a fortement aidé et a contribué largement à ce que cette loi devienne finalement, pour l'avenir, un instrument important pour le financement agricole.

Cependant, le ministre n'a pas répondu à toutes les demandes. Il y en a quelques-unes qui restent en suspens. Le ministre pourra nous dire qu'il accorde davantage aux jeunes qui prennent la relève de leurs parents ou qui achètent une ferme et qui veulent se lancer après avoir obtenu un diplôme d'études collégiales en agriculture, il reste, quand même, qu'il y a à ce chapitre une diminution du nombre d'inscriptions dans les différents collèges. Je prends, à titre d'exemple, celui que j'ai visité durant la tournée que nous avons faite, cet automne, dans tout le Québec, nous les membres du Parti québécois, le collège Macdonald où des jeunes m'ont fait part des problèmes auxquels ils sont confrontés. Or, le ministre ne répond pas adéquatement à toutes leurs demandes. C'est quand même un bon pas dans la bonne direction. Si on se fie à ce que la relève de la Fédération agricole dit, ils auraient aimé avoir plus pour permettre à plus de jeunes d'entrer dans le secteur agricole. Le ministre dit: Un instant, on ne donnera pas tout, il ne faut pas qu'ils s'attendent à tout avoir. C'est ce qu'il nous a répété à plusieurs occasions. Il reste, quand même, que nous allons permettre à ce projet de loi de faire ses preuves dans les années à venir.

D'un autre côté, nous avons fait une tentative en ce qui concerne les femmes en agriculture. Vous le savez, Mme la Présidente, c'est cette année que l'Union des producteurs agricoles a accepté une fédération des femmes agricultrices de telle sorte que nous avons des personnes qui agissent en agriculture et qui sont de plus en plus nombreuses. Mes collègues féminines m'ont demandé de ne pas oublier de le dire, parce qu'effectivement c'est grâce au travail qui avait été fait par les membres du Parti québécois, au mois de juin 1985, où des femmes, en particulier, avaient tenu un sommet, qu'on avait porté attention à ces femmes qui se lançaient en agriculture. C'est ce qui a permis les ajustements qui sont aujourd'hui inscrits dans le projet de loi, même si ces ajustements ne sont pas complètement à leur convenance. Il reste qu'elles avaient demandé qu'on abolisse le critère de 40 ans pour pouvoir participer à certains programmes de financement, en particulier pour la prime d'établissement. Le ministre n'a pas acquiescé à cette demande; il nous a cependant dit qu'il le ferait par l'intermédiaire des programmes et qu'il le réglerait d'une autre façon. C'est à voir, on le verra à l'avenir. Chose certaine, nous aurions préféré le voir à l'intérieur du projet de loi.

Quant au comité de réexamen, on aurait voulu qu'il aille plus loin, qu'il ait même des pouvoirs décisionnels. Le ministre a refusé. On a dit: au moins, s'il suivait l'exemple de ce qui se passe au fédéral où il y a une force morale tellement importante que c'est très rare que le ministre renverse les décisions prises par le comité de révision du fédéral.

Le ministre a, cependant, acquiescé à une de nos demandes, qui était justifiée, celle voulant que la personne qui fait une demande de réexamen puisse être entendue

et que, d'un autre côté, la personne qui a pris la décision, à quelque niveau que ce soit dans l'appareil de l'office, ne soit pas membre du comité de réexamen. Effectivement, le ministre a acquiescé à notre demande. Pour s'assurer que cela se fera de cette façon, il a indiqué que, lorsque l'office réexaminera la demande, il pourra entendre la personne qui demande à être entendue, ainsi que, en contrepartie, la personne qui a pris la décision à l'office, soit au niveau régional ou à d'autres niveaux.

Nous disons que nous sommes devant un projet de loi qui améliore, par la refonte des lois elles-mêmes et des règlements, tout le système du financement agricole. Donc, c'est une modernisation qui était attendue, il faut le dire. Il faut rappeler les promesses que mon collègue avait faites à l'époque et le contexte dans lequel il les avait faites, celui d'une crise économique. Les libéraux commencent à dire qu'elle a existé, alors qu'ils refusaient complètement de l'admettre, dans les années 1982 ou 1983. Les effets se sont fait sentir de telle sorte qu'on n'a pu mettre en place avant les élections le programme que nous avions établi.

D'un autre côté, nous sommes devant ce programme et l'occasion m'est fournie à nouveau de dire que le ministre est en train de faire une supraréglementation, ce qui, à mon avis, Mme la Présidente, est un peu plus pernicieux, si vous me permettez le mot, c'est plus "par en dessous" que le système qu'on avait jusqu'à maintenant. On retrouve cette supraréglementation dans le projet de loi. Là, on a pris tous les règlements et on en a même ajouté en donnant des pouvoirs au ministre. C'est pourquoi nous insistons auprès du ministre pour que, lorsqu'il y aura publication des règlements, entre la publication (ce qu'on appelle la prépublication) et l'adoption finale, il puisse y avoir une commission parlementaire de quelques heures pour permettre à tous les membres du Parlement, que ce soit les membres de l'Opposition ou ceux du côté ministériel, d'étudier les règlements. Le ministre nous a dit qu'il examinait cette demande avec beaucoup d'attention. Je la lui fais à nouveau ce soir, en étant assuré qu'il y acquiescera et qu'il permettra aux membres de l'Assemblée nationale, de quelque côté qu'ils soient, de faire valoir leur point de vue avant que les règlements ne soient adoptés de façon définitive.

Devant ces faits, Mme la Présidente, je ne reprendrai pas tous les propos que le ministre a tenus sur le projet de loi. Je dirai que, dans l'ensemble, il nous satisfait, mais que nous avons cependant des inquiétudes. Nous allons surveiller la mise en application de ce projet de loi et des règlements qui vont suivre, nous allons surveiller le ministre. Nous invitons les membres de l'Union des producteurs agricoles à nous faire parvenir toutes les récriminations qu'ils auront pour que nous puissions avoir la discussion la plus franche possible avec le ministre afin que cette refonte de l'ensemble des programmes de financement agricole soit profitable aux jeunes, aux femmes et à tous ceux qui, de près ou de loin, travaillent dans le domaine de l'agriculture au Québec.

De mon côté, je dois également souligner le travail de moine, si on peut employer ce terme, fait par l'Office du crédit agricole, avec son responsable, M. Moreau, et tous ceux qui ont travaillé au niveau du contentieux à la préparation de ce projet de loi. Nous avons enfin une Loi sur le financement agricole qui répondra, sinon à toutes, du moins aux principales conditions pour que l'agriculture continue de prospérer au Québec, comme tout le monde le souhaite. Je vous remercie, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Merci, M. le député de Laviolette. Je constate qu'il n'y a pas d'autre intervention et je déclare le débat clos. Est-ce que le projet de loi 46, Loi sur le financement agricole, est adopté?

M. Jolivet: Adopté.

M. Pagé: Adopté, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Johnson: Mme la Présidente, je vous demanderais d'appeler l'article 46 du feuilleton. (22 h 20)

Projet de loi 89 Adoption

La Vice-Présidente: À l'article 46 de notre feuilleton, le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation propose l'adoption du projet de loi 89, Loi sur les courses de chevaux. M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.

M. Brassard: Au galop.

M. Michel Pagé

M. Pagé: Merci, Mme la Présidente. J'apprécie beaucoup l'humour du député de Lac-Saint-Jean. Le projet de loi 89, loi sur l'industrie des courses de chevaux au Québec, crée la Commission des courses de chevaux du Québec. Le gouvernement a déposé le projet de loi 89. Il est très probable que plusieurs personnes se sont interrogées sur l'opportunité pour un gouvernement de légiférer, d'intervenir, par exemple, dans le

cadre d'un plan de relance comme celui que j'ai annoncé le 8 septembre dernier à Montréal. Pourquoi le gouvernement se sent-il légitimé d'intervenir, d'aider, de subventionner - selon, notamment, les députés de l'Opposition et selon la perception - cette industrie?

Mme la Présidente, j'entends, par mon propos qui se voudra très bref, mais, quand même, le plus complet possible, vous indiquer l'importance de cette industrie au Québec. Cinq hippodromes détiennent des licences de la Régie des loteries et courses du Québec et un permis d'exploitation de paris mutuels émis par Agriculture Canada. Cette industrie, au Québec, c'est 30 pistes de courses dites amateurs, c'est 8000 chevaux de race Standardbred, 2000 au haras et 3000 en compétition, notamment, et qui consomment des produits agricoles. Vous savez qu'un cheval consomme 2 tonnes par année seulement de fourrage. C'est 19 000 tonnes de fourrage par année consommées par les chevaux. Cela ne vient pas des nuages. Cela ne pousse pas dans les arbres. Cela vient de la production des producteurs et des productrices agricoles du Québec, sans référer aux autres aliments, aux autres nécessités pour ce cheptel important. Tout cela contribue à faire vivre l'économie dans les régions.

Strictement dans l'industrie, si on réfère soit à ceux qui entretiennent les chevaux, qui agissent comme palefreniers, soit à ceux qui les conduisent, soit ceux qui les entraînent, si on réfère aussi aux personnes qui s'occupent sur les cinq hippodromes au Québec opérant sous licence, si on réfère aux gens qui travaillent dans les paris mutuels, dans les restaurants, dans les bars, pour les facilités offertes au public, c'est près de 10 000 emplois directs au Québec. 10 000 emplois qui étaient en danger, qui se retrouvaient dans une situation vulnérable.

C'est ce pourquoi, dès 1986, le ministre des Finances, l'honorable Gérard D. Levesque, annonçait la création d'un comité de travail qui a travaillé, qui a réfléchi, qui a analysé, qui a entendu des groupes, qui a formulé des recommandations. Les recommandations, on les retrouve, dans un premier temps, dans le plan d'investissement qui a été annoncé le 8 septembre dernier, 25 000 000 $ d'investissement pour les cinq hippodromes du Québec sur cinq ans. Pas de l'argent neuf, pas de l'argent qu'on va chercher dans le budget du ministère de l'Agriculture, pas de l'argent qu'on va chercher dans le Développement régional, pas de l'argent qu'on va chercher dans d'autres ministères. Les 25 000 000 $ pour relancer cette industrie sont pris à même les sommes qui nous parviennent de cette industrie annuellement.

Ce qui nous parvient annuellement? Ce n'est pas compliqué, normalement cette industrie devrait rapporter 50 000 000 $ par année dans les coffres publics pour donner de l'argent pour administrer des programmes sociaux, des programmes de santé, des programmes susceptibles de répondre aux besoins de la population. C'est 50 000 000 $ qu'on devrait tirer de cette industrie. Or, l'affaiblissement structurel de cette industrie donne aujourd'hui comme résultat que c'est environ 20 000 000 $ qui sont puisés à même cette industrie, pour les coffres.

L'importance d'intervenir réfère à l'importance des emplois dans ce secteur, dont un pourcentage très important ne pourrait pas se recycler dans d'autres secteurs d'emploi au Québec. Il faut en convenir, il faut le reconnaître. Notre intervention se réfère, de plus, à l'objectif qu'on s'est fixé de dynamiser ce secteur qui est important en termes de revenus pour le gouvernement du Québec. Parce que, vous savez, Mme la Présidente - je vais vous le dire et cela va peut-être vous surprendre -que l'activité récréative et sportive au Québec qui convie le plus grand nombre de spectatrices et de spectateurs, c'est l'industrie des courses de chevaux: 2 000 000 de spectateurs annuellement passent aux guichets pour y assister. Le baseball va chercher 1 800 000, le hockey, 1 500 000 spectateurs. C'est donc une activité qui fait référence à la fois à l'aspect social, l'aspect des loisirs, l'aspect sportif, plus particulièrement chez celles et ceux qui ont l'amour du cheval, si je peux utiliser le terme, qui apprécient cette noble bête et aussi, cela fait référence à un aspect du jeu. Ce sont donc 2 000 000 de personnes par année qui y vont. Il y a eu une chute dramatique, depuis huit ans, sept ans, cinq ans, notamment des paris, une chute aussi en termes d'activités économiques, parce que cela ne touche pas seulement les gens qui y travaillent directement; il y a les fournisseurs d'équipements, les médecins vétérinaires, ceux qui voient à s'assurer de la conduite de l'activité. Cela représente des milliers de jobs au Québec.

Le projet de loi vient créer une commission des courses qui aura juridiction sur l'ensemble de l'activité, une responsabilité qui était tripartite antérieurement. Cette activité était sous la juridiction de la Régie des loteries et courses du Québec avec, comme ministre titulaire, le ministre du Revenu, sous la juridiction de la Société de développement de l'industrie des courses de chevaux du Québec et de Loto-Québec, sous la juridiction du ministre des Finances et du ministère de l'Agriculture. L'entière responsabilité sera maintenant confiée à la Commission des courses de chevaux sous la juridiction du titulaire du ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation du Québec.

On a étudié le projet de loi en deuxième lecture, on l'a étudié article par article. Ce projet de loi en est maintenant à la troisième lecture. Je me limiterai à vous dire, Mme la Présidente, que c'est un projet de loi sectoriel, spécifique, qui concerne une activité importante dans l'économie du Québec. Notre gouvernement, dans ce secteur économique comme dans d'autres secteurs économiques, et on en a fait la preuve concrète, la preuve tangible - veut créer des situations, veut favoriser, veut procéder par des lois ou des réglementations susceptibles de dynamiser, de renforcer ce secteur, pour qu'il soit plus compétitif, plus performant et encore plus contributif à la force économique du Québec.

J'ai bon espoir que la mise en oeuvre de ce projet pourra se faire dès le début de l'année 1988, adopté qu'il le sera ce soir, je l'espère bien, à l'unanimité. Je voudrais remercier celles et ceux qui y ont contribué, mes collègues, notamment M. le député de Mille-Îles, on peut le nommer par son nom, M. Jean-Pierre Bélisle, qui a travaillé de façon utile, de façon importante, qui a consacré beaucoup de temps et beaucoup d'efforts au sein du comité qui a étudié ce problème-là. Je voudrais remercier mes collègues de l'Assemblée nationale de l'appui qui m'a été donné dans la présentation de ce projet de loi, autant lors de l'étude en deuxième lecture qu'en commission parlementaire. Je voudrais remercier toute l'équipe du ministère, que ce soit le Dr Louis Bernard, qui est sous-ministre à la santé animale et au contrôle de la qualité des produits, qui agit actuellement comme président-directeur général de la Société de développement de l'industrie des courses de chevaux; Me Cavanagh, qui est avocat au ministère, le Dr Yvan Rouleau qui a contribué aussi; Me Albert Raymond, qui est vice-président de la Régie des loteries et courses du Québec, et Me Monique Ducharme, qui est fonctionnaire au ministère de la Justice et qui a contribué de façon importante à la rédaction du projet de loi.

Je voudrais remercier l'équipe, les députés et leur témoigner notre confiance et ma confiance comme ministre à l'égard de la relance et du renforcement de cette industrie. Merci.

La Vice-Présidente: Merci, M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation. À l'ordre, s'il vous plaît!

M. le député de Laviolette. (22 h 30)

M. Jean-Pierre Jolivet

M. Jolivet: Merci, Mme la Présidente. Je ne commencerai pas en chantant une chanson, parce que le ministre, sur ce point-là, m'a quasiment donné l'impression qu'il était en train de jouer un air de fête. Jamais deux sans trois, s'est-il dit probablement. Deux projets de loi, ce soir, qui sont adoptés de façon unanime, mais avec quand même les restrictions qu'on a faites et fort probablement un troisième. Il se souviendra d'un après-midi où je lui rappelais que nous serions prêts à adopter ce projet de loi et les autres, mais que si, par hasard, il s'entêtait à vouloir faire adopter le projet de loi 49, nous lui ferions la vie dure. Je peux vous dire que nous aurons l'occasion de rediscuter d'un autre projet de loi, qui s'appelle justement le projet de loi 49, qui, pour moi, est une taxe déguisée. Nous aurons l'occasion d'y revenir en commission parlementaire, mais en lui disant que nous aurons encore de nombreux parlementaires, de notre côté, qui parleront sur ce projet de loi. Mais, comme il a pris la sage décision de faire en sorte que, finalement, ce projet de loi ne sera pas présenté avant les fêtes, afin de laisser aux gens la chance de faire valoir leur point de vue, je peux lui dire que le projet de loi 89 va recevoir notre assentiment.

Le projet de loi 89 va recevoir notre assentiment; nous voilà maintenant arrivé au fil d'arrivée, mais malheureusement - le ministre me souffle lui-même la question que je voulais lui poser - il en manque un. Les députés de Vachon, d'Iberville, de Chambly, le ministre de la Justice à qui j'en ai parlé, le ministre du Revenu à qui j'en ai parlé, le ministre de l'Agriculture à qui j'en ai parlé aussi... Il manque, je vais le lui rappeler, des lévriers. Nous avons mis en place tout un système où on a pris la SODIC, la Société de développement de l'industrie des courses de chevaux du Québec, et, à côté, la partie de la Régie des loteries et courses qui concerne les paris, et on a fait une loi, celle qui est devant nous, la Loi sur les courses de chevaux.

Dans la loi de la régie, il y a une partie qui avait été changée par le ministre des Finances, à ce moment-là, M. Parizeau, et qui disait: Courses de chevaux et autres courses. Or, actuellement, au Québec, il y a des gens dans le coin de Saint-Hubert, en particulier, qui proposent la mise en place d'un cynodrome où il y aura des courses de lévriers et où on investira nombre de millions de dollars pour la création d'emplois, d'une part, et l'investissement, d'autre part. Actuellement, on laisse filer l'ensemble de ces millions vers St. Albans, à quelques milles de Saint-Hubert, aux États-Unis où près de 25 000 000 $ par année venant du Québec s'en vont dans ce secteur, où, je pense, il y a, pour le Québec, une possibilité de récupérer. Il s'agit d'une seule chose. Que le ministre de l'Agriculture, le ministre du Revenu et le ministre de la Justice s'asseoient ensemble et forment un comité qui permettra de faire les pressions qu'il

faut sur le fédéral pour changer l'article 190 du Code criminel fédéral, permettant alors de faire des paris sur des courses de lévriers, et, ensuite, sans aucune aide - les gens sont prêts, ils n'ont pas besoin d'argent - mettre en place tout le système de courses de lévriers. À ce moment-là, nous aurions une loi qui pourrait être la même - on pourrait dire "loi sur les courses de chevaux et de lévriers" - ou une autre loi constitutive de ce secteur pour garder au Québec l'argent qui n'irait pas vers les États-Unis, à moins que ce soit dans la tête du ministre de faire un libre-échange à sens unique, comme on semble le faire actuellement; vers les États-Unis seulement et non pas vers le Québec en plus. Mais je ne pense pas que ce soit ce que recherche le ministre. C'est dans ce sens que je dis: Oui, le projet de loi est intéressant, oui, il met en place tout un système qui va permettre, à la fois, le plan de relance qu'il a proposé de 25 000 000 $ sur cinq ans par la SODIC et d'intervenir dans le secteur des courses de chevaux en allant, comme il l'a dit, auprès de chacun des hippodromes au Québec, soit le Connaught Park, celui de Jonquière, celui de Trois-Rivières, celui de Québec et, finalement, celui de Décarie, à Montréal qui est celui de Campeau Corporation. Et on sait que le ministre, dans les jours qui viennent, devrait faire une nouvelle proposition, puisque le premier plan de relance, en termes d'entente de principe, proposé à Campeau Corporation a été brisé par cette dernière.

Le ministre a dit qu'il était prêt à faire une nouvelle offre pour en arriver à un contrat de mise en place, de réparation des structures et de renouvellement des places là où c'est nécessaire, tout en permettant aussi l'autre partie, celle de son plan pour permettre à l'industrie des courses de chevaux de reprendre du pic ou du poil de la bête si je peux employer cette expression.

Je rappelle aussi qu'un centre d'entraînement et un centre d'hébergement des chevaux ne sont pas obligatoirement près de la piste de courses et que ce pourrait être ailleurs qu'à Décarie si cela ne fonctionne pas et qu'à ce moment-là des gens de Longueuil ont fait des discussions actuellement par le groupe de Laudel qui est le groupe de commissaires industriels du secteur pour présenter la possibilité à la fois d'un centre d'hébergement des animaux et un centre d'entraînement, et peut-être probablement plus tard une piste de course.

Je rappelle tout cela pour vous dire que nous avons fait mention de ces choses au ministre à la fois lors de l'étude du principe du projet de loi, lors de la commission parlementaire qui a étudié le projet de loi article par article. Je le lui rappelle enfin ce soir pour qu'il ne l'oublie pas et que, lorsqu'il aura en main la loi nécessaire pour faire en sorte de donner l'élan qu'il recherche à tout l'ensemble de l'industrie des courses de chevaux, il sache qu'il y a encore d'autres choses à faire et qu'il ne devrait pas perdre de temps pour le faire, mais aller le plus rapidement possible vers les conclusions les plus heureuses.

Donc, dans ce contexte, Mme la Présidente, au nom de l'Opposition, nous lui disons, avec les réticences que nous avons sur certains points et dont nous avons fait mention, que nous sommes d'accord avec le principe du projet de loi et nous espérons qu'à la fois les hippodromes et les gens des associations des hommes à chevaux du Québec profiteront et l'ensemble de la société québécoise profitera de ces investissements de 25 000 000 $ sur les cinq prochaines années et aussi sauront prendre acte que le renouveau dans l'utilisation informatique qu'on connaît actuellement et les paris changés selon les techniques modernes permettront l'essor recherché à la fois par le ministre, par les gens des pistes de courses et par les hommes à chevaux du Québec.

Dans ce contexte, Mme la Présidente, je donne mon accord pour l'adoption finale du projet de loi 89.

La Vice-Présidente: Merci, M. le député de Laviolette. Je constate qu'il n'y a pas d'autre intervenant. Je déclare le débat clos. Est-ce que le projet de loi 89, Loi sur les courses de chevaux, est adopté?

Des voix: Adopté.

La Vice-Présidente: Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Johnson: Oui, Mme la Présidente. Je vous demanderais d'appeler l'article 26 du feuilleton.

Projet de loi 75

Prise en considération du

rapport de la commission qui

en a fait l'étude détaillée

La Vice-Présidente: À l'article 26 de notre feuilleton, le ministre de la Justice propose l'adoption du rapport de la commission des institutions qui a procédé à l'étude détaillée du projet de loi 75 intitulé Code de procédure pénale. M. le ministre de la Justice.

M. Herbert Marx

M. Marx: Merci, Mme la Présidente. Il s'agit de notre Code de procédure pénale, le projet de loi 75. Le projet de code dont l'étude vient d'être complétée constitue plus qu'une simple révision des mécanismes de

poursuite des infractions. Il manifeste en effet la volonté de protéger les droits et libertés des citoyens. Le moment était venu de répondre au besoin de réforme de la procédure pénale dont la révision était en cours depuis plus de dix ans déjà. Durant toutes ces années, les divers intervenants oeuvrant dans les domaines judiciaire ou académique, des praticiens en défense ou en poursuite ont eu la possibilité de critiquer la procédure existante, d'exprimer leurs attentes et de formuler leurs propositions de solutions de rechange.

La commission des institutions tenue en mars dernier sur l'avant-projet de code a été particulièrement fructueuse à cet égard. Il revenait toutefois aux parlementaires de se prononcer sur l'orientation finale du projet. C'est avec leur participation que certains ajustements ont pu être apportés lors de la commission parlementaire qui a suivi la deuxième lecture afin que ce code atteigne un juste équilibre entre les droits et les devoirs des justiciables. (22 h 40)

Le projet de loi que nous adoptons innove en introduisant le constat d'infraction et sert de fondement à toutes les poursuites pénales relatives aux lois et aux règlements du Québec. Cette nouvelle procédure va permettre au justiciable d'être mieux informé en cas de poursuite et de communiquer avec le poursuivant. Ainsi, de nombreux litiges seront solutionnés sans que le défendeur et les témoins n'aient besoin de se déplacer inutilement à la cour et de perdre des journées de travail.

Ce projet de code offre plusieurs nouveaux recours aux justiciables afin de garantir leurs droits et libertés. Prenons, par exemple, la possibilité de demander la rectification d'erreurs de forme qui auraient pu se glisser dans un jugement; la rétractation d'un jugement lorsque le défendeur ne peut présenter sa défense; la réduction de frais judiciaires dans certains cas de déclaration de culpabilité ainsi que la tenue de commissions rogatoires pour obtenir des témoignages qu'il aurait été autrement impossible de recueillir.

De plus, contrairement à la situation actuelle, les défendeurs pourront présenter des moyens préliminaires, soit pour être mieux informés de ce dont ils sont accusés, soit pour que l'instruction se tienne plus près de leur lieu de résidence ou pour faire rejeter l'accusation. En plus de reprendre certains droits consacrés par les chartes pour inciter, par exemple, sur la nécessité d'informer les personnes arrêtées des motifs de leurs arrestations, nous avons pris plusieurs initiatives pour établir les mécanismes nécessaires au respect des droits et libertés de la personne, particulièrement celui du droit à la vie privée.

Au chapitre de la perquisition, le télémandat a été introduit afin de prévenir les perquisitions sans mandat et pour permettre un contrôle judiciaire maximal des atteintes à la vie privée. Dans le même sens, Mme la Présidente, les perquisitions dans les demeures ont été interdites à moins que la vie ou la sécurité d'une personne ne soit en cause. De plus, le droit reconnu par les chartes à la protection des renseignements confidentiels a été affirmé. Le caractère public de la justice et sa transparence ont été également mis de l'avant dans le cadre des règles de l'accès aux documents relatifs à la perquisition. En outre, toutes les dispositions ont été prises pour que les choses saisies soient remises à qui de droit, dans les meilleurs délais, consacrant ainsi le droit à la jouissance paisible des biens.

Le respect du droit à la liberté des citoyens a également conduit à recourir à tous les moyens raisonnables pour éviter que le défendeur ne soit emprisonné. Ainsi, les mesures alternatives à l'emprisonnement s'étendront désormais au jugement rendu par l'ensemble des cours municipales. J'aimerais souligner que, pour emprisonner quelqu'un, par exemple, pour une amende impayée, ça prendra un jugement par écrit, motivé d'un juge. Le projet tient compte aussi du cas des personnes qui peuvent difficilement être retracées parce qu'elles ont déménagé.

Il y est prévu qu'au lieu de décerner un mandat d'emprisonnement, parce qu'elles n'ont pas satisfait au jugement rendu contre elles, le juge pourra décerner un mandat pour qu'elles soient amenées devant le percepteur des amendes, afin qu'elles puissent conclure une entente sur la manière de se conformer au jugement, c'est-à-dire payer l'amende ou consentir à faire des travaux communautaires.

Le projet de code a permis de réviser la loi existante pour en retrancher notamment les éléments désuets, comme l'appel par voie d'exposé de cause et pour éviter le recours abusif à l'appel par voie de procès de novo. Le projet réduit également le pouvoir d'exiger un cautionnement au seul cas où un agent de la paix a des motifs raisonnables de croire que le défendeur risque de quitter le territoire du Québec. De plus, le projet de code clarifie de nombreuses règles appliquées en vertu de la "common law" et de la jurisprudence, donc celle relative à l'arrestation ou à la récidive. Par conséquent, la connaissance du droit pénal ne sera plus restreinte aux seuls initiés et la création d'une procédure uniforme facilitera la compréhension des systèmes de justice pénale.

J'ajouterai, en terminant, que ce projet de loi se révèle nécessaire pour réaliser la réforme des dispositions pénales de nos lois, car les principes et les règles qu'il véhicule doivent servir de base à la mise à jour de

toutes les lois du Québec en matière pénale. Cette épuration de notre loi constituera un autre pas important vers la garantie des droits et libertés des justiciables du Québec.

Mme la Présidente, en terminant, j'aimerais souligner que la loi actuelle, la Loi sur les poursuites sommaires, a été adoptée en 1922, c'est-à-dire 65 années plus tard. Cette année, nous allons adopter un nouveau Code de procédure pénale. Il s'agit d'une réforme majeure dans ce domaine, une réforme importante et c'est cette année qu'on va le faire. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Merci, M. le ministre de la Justice.

M. le député de Taillon.

M. Claude Filion

M. Filion: Merci, Mme la Présidente. Le ministre le sait, lorsque l'Opposition a, dans les projets de loi présentés par le ministère de la Justice, des fleurs à envoyer, elle les envoie directement, mais lorsque l'Opposition a également des critiques à formuler, elle les formule directement également.

Les derniers mots du ministre de la Justice ont été pour signaler à quel point le Code de procédure pénale est une réforme importante, une réforme fondamentale. Bien sûr, nous sommes d'accord, ce projet de loi étant une révision complète de toute la procédure applicable pour la sanction pénale des droits et règlements du Québec, il en découle automatiquement qu'il s'agit là d'une réforme majeure, c'est bien évident. Pour les citoyens qui nous écoutent, je pense qu'il n'y en a pas un ou qu'il y en a très peu qui ne sont pas affectés par le nouveau Code de procédure pénale. Par exemple, toute l'application du Code de la sécurité routière, billets de stationnement, billets de vitesse en montant, toute l'application des lois votées par ce Parlement, par exemple, la Loi sur la qualité de l'environnement, la Loi sur les valeurs mobilières, toutes les sanctions des lois du Parlement du Québec doivent passer par la procédure du nouveau Code de procédure pénale. Donc, point d'entente là-dessus entre les deux partis.

Il s'agit là, bien sûr, d'une réforme majeure. Qu'est-ce qu'un ministre de la Justice ou un gouvernement devrait faire lorsqu'on fait une réforme majeure dans le secteur du droit pénal, donc un secteur du droit qui touche la liberté des individus? Quand on parle de billets de stationnement, il s'agit généralement d'amendes. Lorsqu'on parle d'infractions plus sérieuses à nos lois, il faut voir et comprendre que les peines imposées peuvent aller et vont jusqu'à l'emprisonnement, la sanction la plus sévère qui existe dans nos droits. Enlever la liberté à une personne, il n'existe pas de sanction, de pénalité plus sévère que celle-là.

C'est un projet de loi important. Que doit faire le ministre de la Justice? D'abord, il a présenté un avant-projet de loi, il y a près d'un an. On a tenu une petite commission parlementaire réduite, on a entendu des intervenants, c'est très bien, mais le problème, c'est que le projet de loi 75 qui est ici pour adoption ce soir n'est pas, devrais-je dire, la même chose que l'avant-projet de loi, il a subi plusieurs modifications d'importance de la même façon qu'il y a plusieurs chapitres importants du Code de procédure pénale qui n'ont pas été amendés. (22 h 50)

Nous avons demandé au ministre de la Justice de tenir des consultations particulières au lieu de procéder à toute vapeur, à la fin de la session, alors que nous sommes déjà surchargés, à preuve l'heure à laquelle nous discourons sur ce projet de loi important. L'Opposition a dit au ministre de la Justice: Si votre projet de loi est bon, il ne faudrait pas le cacher, il faudrait demander à quelques organismes qui sont concernés de faire entendre leur point de vue. Il nous dit que c'est important, que c'est majeur. De plus, ce qu'il nous a laissé entendre, c'est que cela ne s'appliquera pas maintenant, ce projet de loi, cela va prendre au moins six mois, peut-être neuf mois, peut-être un an avant qu'il s'applique parce qu'il est nécessaire de bâtir toute une loi d'application du Code de procédure pénale qui, elle, va demander une révision de toutes nos lois dans tous les secteurs d'activité de tous les ministères qui sont ici. Cela va prendre au moins six mois, peut-être un an. Il n'y a donc pas d'urgence. N'importe quel esprit raisonnable comprend qu'il n'y a pas d'urgence.

Le ministre ne voulait pas avoir de consultations trop longues. Je lui ai suggéré de consulter des organismes comme le Barreau, comme la Commission des services juridiques, comme la ville de Montréal. Ce n'est quand même pas demander la lune que d'exiger de simples éclairages de la part d'organismes reconnus tels le Barreau et la Commission des services juridiques. Le ministre nous a répondu que ce n'est pas nécessaire.

J'aimerais, ce soir, vous faire part de lettres dont j'ai déjà fait part en vain au ministre de la Justice. D'abord, en ce qui concerne la Commission des services juridiques, une lettre datée du 7 décembre 1987: "La Commission des services juridiques a fait des recommandations verbales et par écrit sur l'avant-projet de loi relativement au Code de procédure pénale. La commission ne peut, à court terme, procéder à un nouvel examen du projet de loi mais réitère les prises de position qu'elle a déjà exprimées." En deux mots, la Commission des services

juridiques ne pouvait pas, en quelques jours, faire connaître son point de vue sur le Code de procédure pénale. Pour elle, c'était impossible et c'est normal.

Le Barreau du Québec, en date du 7 décembre 1987; ce sont toujours des lettres adressées au ministre de la Justice. La lettre est un peu longue: "À la suite de la présentation du projet de loi 75", celui que nous étudions... Le Barreau n'est quand môme pas le dernier des organismes impliqués dans une réforme du droit pénal. C'est une réforme majeure, nous en convenons. Comment peut-on dire que le Barreau n'est pas intéressé à une réforme du droit? "À la suite de la présentation du projet de loi 75 - c'est écrit par le bâtonnier du Québec, Me Michel Jolin - nous avons transmis aux membres de notre comité - parce que le Barreau avait formé un comité - ce projet de loi afin que ces derniers examinent à nouveau le texte proposé et s'assurent que les grands principes de droit que nous soulevions dans notre mémoire avaient été pris en considération. Nous serons en mesure de vous faire part de nos commentaires écrits dès le vendredi 11 décembre prochain." C'est une lettre du 7 décembre. À cette date, nous commencions l'étude en commission parlementaire avec le ministre. Nous lui avons montré cette lettre, nous lui avons fortement suggéré de tenir une commission parlementaire, ce qu'il n'a pas voulu faire.

En date du 15 décembre, à peu près la dernière journée de notre étude, le Barreau du Québec, sous la plume de Me Michel Jolin, bâtonnier du Québec, nous disait: "Notre comité ne désire que réaffirmer les grands principes de droit qui avaient été soulevés en commission parlementaire. En effet, il est manifeste que les mises en garde du Barreau n'ont pas été retenues par les autorités gouvernementales." Ce n'est pas moi qui parle, c'est le Barreau, l'organisme habilité, en termes de problèmes juridiques, à fournir un éclairage au ministre de la Justice. Le Barreau, c'est un partenaire, en quelque sorte, du ministère de la Justice dans ce dossier, comme dans tous les autres. Qu'a fait le ministre de la Justice? Il a décidé plutôt de procéder à toute vapeur, de passer le rouleau compresseur sur le Code de procédure pénale. Nous avons dû siéger, je ne sais pas combien d'heures, près d'une cinquantaine d'heures, dans les dix derniers jours, pour adopter, à la vapeur, un projet de loi qui contient, selon ses propres dires, une réforme majeure. Ce, sans pouvoir bénéficier de l'éclairage légitime du Barreau du Québec, de la Commission des services juridiques ou des autres organismes qui eux, vont être appelés à vivre avec le projet de loi.

Ce qui a donné quoi, Mme la Présidente? Selon un rapide relevé, il y a eu 56 amendements au Code de procédure pénale, dont certains touchent les droits les plus fondamentaux. C'est comme si le ministre de la Justice avait été pressé d'ajouter à son tableau de chasse le Code de procédure pénale, alors que tout notre travail ne donne rien tant qu'il n'entre pas en vigueur. Pourquoi cette hâte, pourquoi cette précipitation à vouloir adopter un projet de loi? Est-ce pour fournir au leader du gouvernement l'occasion de dire, demain, en faisant le bilan de la session: Écoutez, on a adopté des gros projets de loi, 371 articles, le Code de procédure pénale, une réforme majeure du droit pénal au Québec. Je dis, Mme la Présidente, qu'agir avec une telle désinvolture, dans un dossier qui implique la liberté des individus, n'a aucun sens pour le ministre de la Justice.

Ce Code de procédure pénale sera appliqué dans toutes les Cours municipales, sera appliqué dans toutes les Cours des sessions de la paix, lorsqu'elles siégeront sur une matière sommaire, sera appliqué, en somme, dans toutes les cours où la plupart des citoyens vont ou sont appelés à aller comme témoins ou même comme accusés. Qui ne s'est pas manifesté à une Cour municipale à l'occasion d'une contravention? Qui n'a pas reçu du ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche un billet d'infraction? Est-ce que c'est le type de justice qu'on désire offrir aux Québécois, comme le ministre de la Justice disait tantôt, une justice accessible et de qualité?

Je réponds qu'on ne peut pas, décemment, dire qu'on présente un Code de procédure pénale qui se tient debout. Il y a trop de lacunes dans ce Code de procédure pénale qui, pourtant, part d'une bonne réflexion, qui, pourtant, contient d'excellents principes mais il a été fait trop vite. À preuve, 56 amendements dont certains en bout de table et ensuite on demandera aux juges d'interpréter ces articles et de faire preuve de la plus grande sagesse possible alors que le législateur, dans ce cas-ci, n'a pas pris tout le soin, toute l'attention pour faire un Code de procédure pénale qui se tient de a à z. Il y a eu, je le concède, énormément d'améliorations apportées, lors de la commission parlementaire, lors de l'étude article par article. Le ministre s'est montré ouvert - je le dis aussi fort que je le critique - à plusieurs suggestions formulées par l'Opposition. Mais ce n'est pas vrai qu'entre parlementaires on peut bâtir un Code de procédure pénale qui, sans être parfait... La perfection n'est pas de ce monde, je le sais, et elle n'est pas du Code de procédure pénale et elle ne le sera jamais mais, au moins, qu'on prenne le temps nécessaire pour bien évaluer l'application de certains droits, et je vais donner deux exemples. Premièrement, on a eu un débat là-dessus, je suis convaincu que l'éclairage du

Barreau et de la Commission des services juridiques aurait pu convaincre le ministre. Lors d'une arrestation, nous avons demandé au ministre d'appliquer très strictement la jurisprudence découlant de la charte pour que, dès qu'une personne est arrêtée, elle soit informée immédiatement des motifs de son arrestation et qu'on puisse également l'informer immédiatement de la possibilité pour elle d'avoir recours à un avocat. Le ministre a refusé d'adopter cet amendement qui, pourtant, découle d'une application logique des principes contenus dans la Charte québécoise des droits et libertés de la personne et dans la Charte canadienne des droits et libertés. Je suis convaincu que, si le Barreau et la Commission des services juridiques étaient venus en commission parlementaire, ils auraient également mentionné le même point de vue et le ministre aurait finalement entendu raison. (23 heures)

Deuxième exemple. D'abord, il faut savoir que le Code de procédure pénale est farci de pouvoirs de réglementation qui imposent des frais. On connaît le principe général: En droit criminel, lorsqu'une personne est accusée, elle a le droit de se défendre et, si elle perd sa cause, elle ne paie pas de frais. Mais le simple citoyen qui serait aux prises avec une loi provinciale, à peu près à chaque étape des procédures du Code de procédure pénale il va être aux prises avec des frais. D'abord, un exemple: Un témoignage est déposé au lieu du témoignage du policier qui vous a donné un billet de vitesse. Le type veut se défendre et dit: Bon, je vais faire venir le policier, je veux l'interroger. C'est un droit fondamental, une défense pleine et entière. Je veux l'interroger. À ce moment-là, le citoyen est passible de payer les frais du témoignage du témoin ou du policier, dans certains cas. Et, partout, dans le Code de procédure pénale, on retrouve cette espèce d'obsession qui nous vient directement du Conseil du trésor et à laquelle participe le ministre de la Justice: il faut que la justice soit rentable.

On me souffle à l'oreille - et avec raison, Mme la députée de Marie-Victorin -que cela va coûter cher d'être innocent. Et cela va coûter cher d'être coupable aussi. Alors que, si un individu est accusé d'un crime grave, un meurtre, il a droit au procès devant jury sans frais, le simple citoyen qui veut uniquement contre-interroger le policier qui lui a donné un billet est passible, dans certains cas - pas dans tous les cas - de frais.

Deux exemples où la Charte des droits et libertés, où les principes fondamentaux de notre droit ont été écartés. J'ai dit, et il est vrai, que le ministre s'était montré très ouvert aux amendements proposés par l'Opposition. Mais ce n'est pas vrai que l'Opposition ou les légistes du gouvernement - que je tiens à féliciter, d'ailleurs, parce qu'ils ont fait, dans ce dossier, compte tenu des circonstances, un excellent travail - ce n'est pas vrai que nous tous réunis pendant ces 40 ou 50 heures de commission parlementaire avons pu finalement faire toute la lumière sur le Code de procédure pénale. Pourquoi avoir refusé de prendre deux heures je l'ai demandé au ministre - pour entendre le Barreau, la Commission des services juridiques et la ville de Montréal, peut-être, qui administre un contentieux de masse énorme? C'est une véritable machine à saucisse que constitue le contentieux de la ville de Montréal, à cause du nombre inqualifiable de dossiers qui circulent à la ville de Montréal, en termes de stationnement, d'infractions aux règlements municipaux, d'infractions aux règlements de circulation. C'est énorme, l'activité en Cour municipale de Montréal; il suffit de s'y être rendu à une reprise pour le constater. Neuf ou dix cours, du matin au soir, qui n'arrêtent pas et, dans certains cas, une dizaine de procédures à l'heure.

D'ailleurs, le ministre a montré tellement de désinvolture dans ce projet de loi que, me croyez-vous, il a accusé l'Opposition de "filibuster". Le ministre n'est pas candide, il a lui-même participé à des "filibusters" d'importance lorsqu'il était dans l'Opposition. Il sait fort bien ce qu'est un "filibuster". L'Opposition a présenté une motion. Je fais appel à la grande expérience du leader adjoint du gouvernement. L'Opposition a présenté une motion visant à faire entendre trois groupes en même temps. Nous l'avons débattue pendant quinze minutes. Le ministre nous accuse de "filibuster" son projet de loi qu'il dit être une réforme majeure. Franchement, M. le ministre, lorsque je vous ferai un "filibuster", vous pourrez l'appeler comme tel et vous aurez raison. Je pense qu'il est à peu près inqualifiable d'avoir eu une perception semblable du travail réalisé en commission parlementaire.

Mme la Présidente, une des difficultés majeures du Code de procédure pénale réside dans le fait que ce Code de procédure pénale a dû osciller entre deux principes importants. D'une part, ce que j'appelais tantôt les contentieux de masse, c'est-à-dire, surtout, les contentieux en matière de circulation, de sécurité routière. C'est énorme. À Montréal, à Québec, partout. Mais, ces contentieux de masse entraînent, généralement, des amendes peu élevées. D'un autre côté, il y a aussi l'emprisonnement qui peut découler de l'application de certaines lois, notamment de la Loi sur la qualité de l'environnement, du Code de la sécurité routière, dans certains cas, et, également, d'autres lois comme celle sur les valeurs mobilières.

Le projet de loi suggère de ramasser toutes ces infractions dans un même sac et

de faire la même procédure pour un billet de stationnement pour lequel vous pourriez avoir 10 $ d'amende et pour une infraction à la Loi sur la qualité de l'environnement pour laquelle vous pourriez être condamné à un an de prison. Même procédure pour le contentieux de masse que pour les infractions plus sérieuses qui peuvent conduire à l'emprisonnement et qui conduisent à l'emprisonnement. Ce n'était pas facile pour le ministère, pour le ministre de ramasser cela dans une simple procédure. On a choisi le constat d'infraction. Ce n'est pas mauvais. Je l'ai dit au ministre en commission parlementaire, je le redis ce soir. Ce n'est pas mauvais, sauf qu'il fallait faire attention pour protéger les droits fondamentaux qui découlent de la charte et qui découlent de la tradition du droit pénal et du droit criminel.

Le Barreau écrit dans sa lettre: II est manifeste que les mises en garde du Barreau n'ont pas été retenues par les autorités gouvernementales. En référant aux grands principes de droit, il faisait allusion à quoi?

Il faisait allusion au droit de l'inculpé à une décision impartiale. Il faisait allusion à la présomption d'innocence. Il faisait allusion à la condamnation de l'inculpé sur une preuve inadmissible, mais cela je dois vous avouer que cela a été corrigé. Il faisait allusion au droit de l'inculpé d'être informé immédiatement de ce qu'on lui reproche; malheureusement, cela n'a pas été corrigé. Il faisait allusion au droit de l'inculpé à une défense pleine et entière; malheureusement, ce principe est écorché dans le Code de procédure pénale par certains articles, notamment par celui qui impose des frais à l'accusé qui désire tout simplement se faire valoir et notamment, également, dans la procédure de rétractation de jugement où on demande à l'accusé de faire sa défense avant que ce soit son procès. C'est du jamais vu.

Je vois le député de Vaudreuil-Soulanges, un bon juriste, qui, déjà, sourcille en entendant qu'on pourrait demander à un accusé de faire une défense avant que ce soit son procès. Ce n'est pas moi qui le fais sourciller. C'est le projet de loi, M. le Président, qu'on est en train d'adopter.

Il y a, aussi le respect de la res judicata, bien que je dois dire qu'il y a eu beaucoup d'amélioration à ce chapitre, et le droit de l'inculpé d'avoir les délais nécessaires pour faire connaître son plaidoyer. Je suis généralement satisfait des délais qui sont contenus dans le Code de procédure pénale.

Bref, on l'a vu, un Code de procédure pénale ne doit pas être traité comme une simple loi modifiant un district judiciaire. C'est un peu plus important que cela. Le ministre a cette mauvaise habitude de se montrer désinvolte vis-à-vis de ses projets de loi, plus préoccupé, comme je le disais tantôt, de garnir son tableau de chasse législatif que de faire en sorte que le contenu de ses lois soit vécu par les citoyens de façon honnête, juste, autant en hiver qu'en été, et que ça fonctionne. Mais le ministre, à l'occasion, on dirait, veut pouvoir dire: Écoutez, j'ai adopté, vous savez, le Code de procédure pénale. Il n'entrera pas en vigueur avant au moins un an votre Code de procédure pénale et, à mon avis, il devrait faire l'objet de modifications avant même son entrée en vigueur tellement il contient encore, malgré ses bons côtés, des éléments qui doivent être corrigés. (23 h 10)

M. le Président, les arguments que je vous donne ce soir devraient suffire, je pense, à convaincre le ministre - il n'est pas trop tard - de retarder l'adoption de ce projet de loi pour assurer quoi, finalement? Qu'est-ce qu'on fait ici ce soir? On s'assure que les citoyens puissent avoir accès à une procédure judiciaire qui tienne compte des principes de notre droit. C'est tout.

Le ministre de la Justice, désinvolte comme il l'a été au début de la commission parlementaire - à la fin il l'était moins, mais au début ce n'était pas facile - voyait des "filibusters", comme je le disais tantôt, à la moindre suggestion d'amendement. Mais au fur et à mesure que nous avons progressé dans nos travaux, je dois le souligner, il y a eu énormément d'améliorations. Nous avons tenté de bonifier ce projet de loi et il a été bonifié, quand même, d'une façon relativement importante sur certains points. Mais il y a des points qui demeurent, en tout cas, à mes yeux, et, si j'en parle ce soir à cette heure tardive, c'est parce qu'il y a là-dedans des choses qui me tiennent à coeur et qui devraient tenir à coeur à l'ancien professeur de droit qu'était le ministre de la Justice, soit qu'un citoyen a droit à un procès juste et équitable. Heureusement, d'ailleurs, que le ministre de la Justice fut attentif à certaines de nos suggestions et son équipe qui l'entoure également.

Je voudrais signaler en terminant quelques problèmes importants du projet de loi. D'abord, le ministre a fait allusion tantôt aux mesures alternatives à l'emprisonnement. Le projet de loi contient encore des dispositions qui feront en sorte que la situation actuelle perdurera dans nos prisons, notamment parce que de 40 % à 50 % des places dans les institutions carcérales sont occupées au moment où l'on se parle, par des gens qui n'ont pas payé leurs amendes. Ce sont les chiffres du rapport Landreville qui sont vérifiés et vérifiables: 40 % à 50 % des places en prison. Or, ça coûte aux citoyens 85 $ par jour pour tenir ces gens-là en prison. Regardez le paradoxe, il est frappant: l'État veut se faire payer de l'argent, le citoyen n'a pas d'argent, on l'envoie en prison et ça nous coûte 85 $ par jour. Savez-vous

pourquoi les citoyens ne paient pas dans bien des cas? Parce qu'ils ne peuvent pas payer et ils pourront encore moins payer avec un Code de procédure pénale qui ne finit pas d'ajouter des frais par-dessus des frais, pardessus des frais, par-dessus des frais. Un billet de 20 $ reçu en vertu du Code de procédure pénale pourra facilement grimper dans les trois chiffres avec le code qu'on a là, avec tous les règlements qu'il y a là. D'ailleurs, avec les règlements sur les frais qui vont s'ajouter - le ministre m'a dit qu'il m'enverrait le montant des frais, qu'il me l'envoie - ça ne pourra certainement pas être moins de 100 $.

Le type qui n'a pas pu payer ses 20 $ ou ses 75 $ parce qu'on lui donne un délai de 30 jours seulement pour payer, il reçoit une amende de 50 $ ou 75 $. Le père de famille qui gagne 266 $ et qui a deux bouches à nourrir, plus celle de son épouse, il a prévu ses paies et on lui donne 30 jours pour payer. S'il ne paie pas, toute la procédure s'enclenche. La machine à saucisse part avec des frais à chaque tour de manivelle. Le type qui n'a pas l'argent pour payer l'amende au bout de 30 jours ne l'aura pas plus dans deux mois lorsque le jugement sera rendu et que le montant aura doublé, triplé et quadruplé. Où vont finir ces gens-là? En prison. Est-ce que ce sont des criminels?

Vous m'indiquez qu'il reste deux minutes. S'il ne restait que deux personnes en prison pour défaut de paiement d'amendes, je serais bien plus heureux, mais on en a à peu près la moitié. Non, ce ne sont pas des criminels et l'État, est-ce qu'il y gagne quelque chose? Que gagne l'État à envoyer des gens qui n'ont pas d'argent dans bien des cas? Rien.

Les mesures alternatives à l'emprisonnement, parce que vous m'indiquez qu'il ne reste que deux minutes, c'est beau mais le problème c'est que les mesures compensatoires qu'on va offrir dans certains cas à défaut d'amende ne sont pas prêtes dans toutes les régions du Québec. Il y a des municipalités, celle de Granby j'en suis sûr, où il n'y a pas de service de perception d'amendes, où il n'y a pas de mesures compensatoires. Qu'est-ce que cela veut dire pour ces gens, qu'ils vont avoir un traitement différent de celui qui existe à Montréal? Cela veut dire qu'à Montréal on ne sera pas obligé d'aller en prison mais qu'à Granby on va y aller? M. le ministre, il faut assurer l'uniformité des mesures alternatives à l'emprisonnement partout au Québec. Il faut continuer le travail qui avait été amorcé par le gouvernement du Parti québécois en 1982. Cela fait deux ans que vous êtes au pouvoir et il n'y a rien de fait au moment où l'on se parle. Pourtant, on se dépêche pour adopter un Code de procédure pénale.

Il ne me reste que quelques secondes. Je souligne à nouveau que le projet de loi contient d'excellentes idées, que c'est une bonne réforme, c'est une bonne motivation, il y a eu beaucoup d'améliorations mais il reste malheureusement trop de lacunes dans le projet de loi 75. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président: Je vais maintenant reconnaître M. le ministre de la Justice pour l'exercice de son droit de réplique.

M. Herbert Marx (réplique)

M. Marx: Merci, M. le Président. Premièrement, je veux assurer aux téléspectateurs ce soir que le député de Taillon est un excellent juriste. Cependant, on peut en douter ce soir parce qu'il a fait un discours politique et non pas un discours juridique.

Par exemple, le député a dit, et je trouve cela un peu exagéré, que 45 % à 50 % des détenus dans les prisons québécoises sont là pour non-paiement d'amende. C'est complètement faux. Si ce que le député a dit est vrai, nous avons ce soir 1500 détenus dans nos prisons pour non-paiement d'amende. C'est complètement faux. Tout le monde sait cela. Mais le député de Taillon a fait son discours politique et non un discours juridique.

Il a commencé à dire, sans parler sur le fond, on adopte ce projet de loi à toute vapeur. Mais il a oublié de dire qu'un avant-projet a été déposé en décembre 1986, il y a un an. Nous avons tenu une commission parlementaire au mois de mars 1987 où nous avons entendu, par exemple, le Barreau, la Commission des services juridiques, la ville de Montréal et ainsi de suite. Nous avons pris des notes, nous avons eu un échange d'idées et nous avons modifié l'avant-projet avant de déposer un projet de loi et celui-ci tient compte de toutes ces interventions du Barreau, de la Commission des services juridiques, de la ville de Montréal et ainsi de suite, c'est-à-dire tout le monde qui est venu devant la commission parlementaire. Nous avons pris assez de temps pour nous assurer qu'il s'agit d'un bon projet de loi, un projet qui mérite d'être adopté.

Le député de Taillon a dit que cela ne presse pas d'adopter ce projet de loi parce que cela ne va pas s'appliquer tout de suite, que cela prendra une loi d'application. Mais, M. le Président, cela va de soi que pour rédiger, pour préparer une loi d'application il faut avoir une loi, il faut savoir ce qu'on va appliquer. La nécessité d'adopter ce projet de loi ce soir, à cette session, c'est pour nous donner la possibilité de préparer une loi d'application. (23 h 20)

Le député a aussi abordé la question

des frais. Il a oublié de dire que dans la Loi sur les poursuites sommaires il y a des frais judiciaires. Cela existe dans toutes les provinces canadiennes. Dans toutes les lois sur les poursuites sommaires, il y a des frais. La seule chose avec laquelle le député n'était pas d'accord, c'était le montant des frais. Il veut s'assurer que ce ne seront pas des frais déraisonnables. Je lui ai dit que lorsque nous avons des règlements qui touchent les frais... On va lui envoyer des exemplaires de ces règlements et, de toute façon, à cause de la loi 12 que nous avons adoptée l'an dernier, les règlements seront prépubliés 45 jours avant leur adoption et ce sera même possible, pour les députés de l'Assemblée nationale, d'abroger un règlement, le cas échéant. C'est cela, la loi 12 que nous avons adoptée l'an dernier sur les règlements.

Enfin, j'aimerais dire que quelqu'un qui veut vraiment comprendre la portée de ce projet de loi et les modifications que nous avons faites en commission parlementaire pour bonifier le projet de loi devra lire les débats de la commission parlementaire. Je pense que, comme le député de Taillon l'a dit lui-même, on a fait des modifications, on a accepté des modifications, des amendements de part et d'autre, qu'ils viennent des députés ministériels ou de l'Opposition. Nous avons accepté des amendements pour bonifier le projet de loi. C'est un projet de loi qui est mûr pour adoption et je comprends qu'on va l'adopter ce soir. Merci.

Le Vice-Président: Le débat étant clos, à cette étape de l'étude du projet de loi, est-ce que le rapport de la commission des institutions qui a procédé à l'étude détaillée du projet de loi 75, intitulé Code de procédure pénale, est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président: Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

Adoption

M. Johnson: Afin de donner suite à un consentement qui est intervenu entre les groupes parlementaires, je ferai motion pour adopter le projet de loi.

Le Vice-Président: Très bien. La motion est faite au nom du ministre de la Justice. M. le ministre de la Justice propose maintenant la motion d'adoption du projet de loi 75, Code de procédure pénale. Est-ce que cette motion est adoptée?

Une voix: Adopté.

Le Vice-Président: Oui, évidemment, cela prend un consentement pour procéder à cette étape-ci. Il y a consentement?

Une voix: Consentement. Une voix: C'est implicite.

Le Vice-Président: C'est implicite, donc, consentement. Je devais m'en assurer expressément même si c'était implicite. Le consentement étant là, la motion est adoptée. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Johnson: M. le Président, je vous demanderais d'appeler l'article 27 du feuilleton.

Projet de loi 80

Prise en considération

du rapport de la commission

qui en a fait l'étude détaillée

Le Vice-Président: À l'article 27, nous sommes à la prise en considération du rapport de la commission des institutions qui a procédé à l'étude détaillée du projet de loi 80, Loi modifiant la Loi sur le courtage immobilier, présenté par le ministre de la Justice. Est-ce qu'il y a des interventions à ce stade-ci? Il n'y a pas d'intervention. Est-ce que le rapport est adopté?

Une voix: Adopté.

Le Vice-Président: Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

Adoption

M. Johnson: M. le Président, pour faire suite à un consentement et au nom du ministre de la Justice, je fais motion pour adopter ce projet de loi.

Le Vice-Président: Très bien. Le consentement est acquis pour procéder à cette étape-ci. Est-ce que la motion proposée par M. le ministre de la Justice visant à l'adoption du projet de loi 80, Loi modifiant la Loi sur le courtage immobilier, est adoptée?

Une voix: Adopté.

Le Vice-Président: Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Johnson: M. le Président, je vous demanderais d'appeler l'article 30 du feuilleton.

Projet de loi 98

Prise en considération

du rapport de la commission

qui en a fait l'étude détaillée

Le Vice-Président: À l'article 30, nous allons maintenant procéder à la prise en considération du rapport de la commission des institutions qui a procédé à l'étude détaillée du projet de loi 98, Loi modifiant le Code civil en matière d'indexation de pensions alimentaires. Est-ce qu'il y a des interventions? M. le député de Taillon.

M. Claude Filion

M. Filion: Oui, M. le Président. Vous avez appelé le projet de loi permettant l'indexation de plein droit des pensions alimentaires. Il s'agit finalement d'une clarification du droit actuel, c'est-à-dire d'une mesure adoptée par le gouvernement précédent permettant l'indexation des pensions alimentaires. Dans ce cas-ci, l'indexation sera faite de plein droit. Cependant, et je tiens à le répéter, ce n'est pas une indexation automatique. Le juge a la faculté, le pouvoir, la capacité et la compétence, lors de l'instruction de la requête pour pension alimentaire, de faire en sorte que, pour différents motifs, il n'y ait pas indexation de cette pension alimentaire. Voilà un premier point. Il faudrait corriger l'information qui, malheureusement, a été disséminée à la suite de mauvais communiqués de presse issus du gouvernement à ce sujet.

Deuxièmement, ce projet de loi règle une partie du problème, nous en convenons, mais le problème fondamental en matière de pension alimentaire reste entier, en ce sens que le service de perception des pensions alimentaires connaît, on le sait, énormément de difficultés à cause d'un trop grand nombre de dossiers. Rien dans ce projet de loi ne viendra corriger le mécanisme du service de perception des pensions alimentaires ni permettre - contrairement, encore une fois, à ce qui est répandu - que la "collection", si je peux employer cet anglicisme, des pensions alimentaires se fasse par l'État. Dans tous les cas, ce n'est pas là l'objet du projet de loi. Il faut se déplacer, aller au service de perception des pensions alimentaires; ma collègue de Marie-Victorin traitera tantôt de l'état du service de perception des pensions alimentaires, surtout dans la région de Montréal. Là-dessus, malheureusement, le ministre n'a rien fait depuis deux ans, de sorte qu'il existe encore énormément de problèmes sur le plan de l'administration. Il aurait fallu, comme je l'ai souligné au ministre lors de la commission parlementaire, envisager des mesures plus progressites comme il en existe dans d'autres provinces, notamment au Manitoba, pour permettre que le versement de la pension alimentaire se fasse d'une façon plus rapide, plus automatique, si l'on veut, afin d'éviter le genre de situation où les pensions alimentaires ne sont payées que dans une proportion inférieure à 50 %.

Je tiens à souligner, comme ultime point là-dessus, qu'il reste énormément à faire en matière de pensions alimentaires et que la réflexion là-dessus devrait se poursuivre chez les ministres soi-disant préoccupés par la condition féminine. Donc, il y a 85 % des pensions alimentaires qui sont versées par des hommes à des femmes et 15 % des pensions alimentaires qui sont versées par des femmes à des hommes. Quand même, tout le dossier des pensions alimentaires a généralement été traité par des groupes de femmes qui ont revendiqué, à l'époque, l'indexation qui a été accordée par notre excollègue, M. Marc-André Bédard, alors ministre de la Justice.

Malheureusement, depuis ce temps, il se fait peu de réflexion au palier gouvernemental pour résoudre l'ensemble de la problématique des pensions alimentaires. On n'a qu'à songer, par exemple, aux conséquences fiscales d'une pension alimentaire. La pension alimentaire est déduite en entier du revenu de celui qui la paie, mais est imposée en entier, à 100 %, dans les mains de la personne qui la reçoit. Là-dessus, la réflexion gouvernementale, on n'en voit même pas le commencement d'un début. Alors, se péter les bretelles sur ce projet de loi m'apparaît carrément inopportun, pour ne pas dire indécent, compte tenu des problèmes vécus par les personnes, notamment les femmes, qui sont dans des situations d'extrême dépendance vis-à-vis de leur pension alimentaire, qui ne peuvent pas la "collecter", qui ne peuvent pas la percevoir, devrais-je dire.

En ce sens-là, M. le Président, c'est une étape bien mince et il faut continuer le travail. Peut-être que le travail devrait se faire par d'autres ministres que le ministre de la Justice qui fait sa part, il modifie le Code civil; le Code de procédure civile, c'est déjà fait. Je pense notamment à la ministre déléguée à la Condition féminine que, malheureusement, on n'entend très peu parler sur ces questions depuis deux ans qu'elle est en poste. On a fait le tour, ma collègue de Marie-Victorin et moi, des maisons de femmes au Québec - je vais vous le dire - et des groupes de femmes; les pensions alimentaires, c'est une problématique qui mérite autre chose qu'une politique familiale vide. Même si on a cet article 638 modifié, il demeure, pour l'avoir constaté comme praticien matrimonial à une certaine époque et pour l'avoir constaté encore plus dans nos tournées en écoutant les gens, qu'il y a énormément de chemin à faire. Je vous remercie.

Le Vice-Président: Je vais maintenant reconnaître, comme prochain intervenant,

Mme la députée de Marie-Victorin. (23 h 30)

Mme Cécile Vermette

Mme Vermette: Ah, il est gentil, il va attendre!

M. le Président, effectivement, en ce qui concerne le projet de loi 98, qui a trait à l'indexation des pensions alimentaires pour les femmes, nous sommes tous censés être égaux devant la loi, mais, lorsqu'on arrive aux femmes, il y a des façons d'interpréter le niveau d'égalité juridique des femmes. C'est assez humiliant dans bien des cas parce que les femmes doivent toujours faire la preuve que, pour la contribution ou la pension qui leur revient, vraiment, elles méritent le dû et qu'elles méritent cette pension, qui, très souvent reconnaît plus ou moins l'apport qu'elles ont apporté à l'intérieur de la famille. M. le Président, j'aurais aimé que, dans cette politique, le ministre de la Justice aille beaucoup plus loin en ce qui concerne l'indexation des pensions alimentaires. C'est un problème crucial en ce qui a trait aux mères monoparentales. Lorsque l'on sait qu'à la suite d'un divorce, la première année, il est difficile pour l'homme de se retourner, mais, par contre, il est prouvé que, après la première année, c'est l'homme qui s'enrichit d'environ 42 % et la femme s'appauvrit d'environ 73 % selon le Conseil du statut de la femme. La femme, règle générale, demeure à la maison. Elle a de la difficulté à se trouver un emploi. Elle doit se consacrer à l'éducation de ses enfants. Et il lui est dificile de trouver un travail assez rémunérateur de sorte que cette pauvre femme doit payer les frais de gardienne et tous les frais inhérents comme mère monoparentale. Très souvent, plus souvent qu'autrement surtout, ce qui se passe pour les femmes, c'est la difficulté de percevoir leur pension alimentaire. Elles sont dans un état de dépendance devant le conjoint sur lequel doit reposer la pension alimentaire. Très souvent, il faut entreprendre encore des procédures pour faire valoir un droit qui leur est reconnu.

M. le Président, il aurait fallu qu'on puisse aller beaucoup plus loin au sujet des perceptions et que l'État, comme cela se passe au Manitoba et même en Ontario, institue des mesures beaucoup plus progressives en ce qui concerne la reconnaissance d'un droit tel que les perceptions alimentaires pour les femmes et qu'on ait directement la perception par l'État, afin que justement ces femmes n'aient plus à aller quémander aux tribunaux administratifs la reconnaissance d'un jugement, ce qui est tout simplement une perte de temps et d'énergie, et très souvent une augmentation de stress pour la femme.

Alors, après on se tare qu'un gouvernement bien pensant au nom d'une politique familiale met tout en oeuvre pour assurer une qualité de vie à l'intérieur de la famille. Lorsqu'on parle famille, il faudrait penser aussi à toutes les formes de familles. Que voulez-vous? Dans notre société, plus souvent qu'autrement maintenant, la majorité des mariages aboutissent à une séparation ou un divorce. De plus en plus, nous aurons à vivre ces séparations et ces divorces. Je pense que l'une des préoccupations du gouvernement, c'est d'être... L'art de gouverner, c'est de prévoir. Je crois qu'un gouvernement qui prend ses responsabilités, surtout un gouvernement qui a démontré vis-à-vis des femmes beaucoup d'empressement à aller chercher leur vote, aurait pu démontrer beaucoup plus de ferveur à défendre les intérêts des femmes et démontrer un esprit beaucoup plus progressif vis-à-vis des lois qui favorisent la place et le respect des femmes dans notre société québécoise. C'est un gouvernement très timide à l'égard des femmes. Je pense que c'est un gouvernement qui se préoccupe du droit des femmes lorsque c'est le temps d'acquérir leur vote. Je vous remercie, M. le Président.

M. Herbert Marx

Le Vice-Président: Je cède la parole à M. le ministre de la Justice pour une intervention d'un maximum de cinq minutes

M. Marx: Merci, M. le Président. J'aimerais corriger certaines faussetés sur le fond du projet de loi. C'est vraiment une indexation automatique des pensions alimentaires, de toutes les pensions. Le 1er janvier 1988, toutes les pensions seront automatiquement indexées. C'est quoi cela? S'agit-il d'une indexation automatique ou est-ce une indexation semi-automatique ou ce n'est pas une indexation? C'est quoi? C'est évident, c'est une indexation automatique. En fait, toutes les femmes qui reçoivent une pension alimentaire verront leur pension indexée le 1er janvier 1988. J'aimerais souligner, M. le Président, que le Service de perception du ministère de la Justice indexera aussi automatiquement les pensions qu'il a la responsabilité de percevoir.

En terminant, M. le Président, il est très simple pour les péquistes de dire aujourd'hui: vous n'avez pas fait assez. Mais lorsqu'ils ont été au pouvoir pendant 10 ans, ils n'ont rien fait. Comment se fait-il que les péquistes, lorsqu'ils étaient au pouvoir, n'ont pas prévu une indexation automatique des pensions? Ils ont été au pouvoir pendant dix ans, c'était possible d'adopter une telle loi, et cela n'a pas été fait. M. le Président, ce soir, nous allons adopter ce projet de loi qui prévoit l'indexation automatique des pensions alimentaires. Je pense que c'est une

grande amélioration en ce qui concerne la situation des femmes qui bénéficient d'une pension alimentaire. Merci.

M. Filion: M. le Président, en vertu de notre règlement...

Le Vice-Président: Oui, un instant. M. le député de Taillon, sur une question de règlement.

M. Filion: Oui, en vertu de notre règlement, est-ce que je pourrais adresser une question au ministre sur ses plus récents propos?

Le Vice-Président: Oui, juste un instant. Simplement pour que vous puissez adresser une question, comme l'article 213 le prévoit, je dois avoir le consentement de la personne à qui vous voulez poser la question. Y a-t-il consentement, M. le ministre de la Justice? Il n'y a pas de consentement.

M. Marx: D'accord, il y a consentement.

Le Vice-Président: II y a consentement. Très bien, M. le député de Taillon, mais je vous rappelle une chose: la question doit être brève, la réponse également. Il ne s'agit pas de susciter un nouveau débat.

M. Filion: Pourquoi le ministre de la Justice continue-t-il de dire à la population du Québec, et en particulier aux créanciers de pensions alimentaires, que toutes les pensions alimentaires seront indexées alors que le juge a le pouvoir de ne pas indexer les pensions alimentaires?

Le Vice-Président: M. le ministre de la Justice.

M. Marx: M. le Président, parce que j'ai dit la vérité. Le 1er janvier 1988, toutes les pensions seront indexées. Je pense que c'est simple et que tout le monde comprendra cela. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président: Très bien. Le débat étant clos, le rapport de la commission des institutions qui a procédé à l'étude détaillée du projet de loi 98, Loi modifiant le Code civil en matière d'indexation de pensions alimentaires est-il adopté?

Une voix: Adopté.

Le Vice-Président: Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Johnson: Oui, M. le Président. S'il y avait consentement, je ferais motion au nom du ministre de la Justice pour adopter ce projet de loi.

Le Vice-Président: Y a-t-il consentement pour que nous passions à l'étape suivante de l'adoption du projet de loi?

Une voix: Oui.

Adoption

Le Vice-Président: II y a consentement. En conséquence, la motion du ministre de la Justice proposant l'adoption du projet de loi 98, Loi modifiant le Code civil en matière d'indexation de pensions alimentaires est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président: Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Johnson: M. le Président, je vous demanderais d'appeler l'article 36 du feuilleton.

Projet de loi 61 Adoption

Le Vice-Président: L'article 36 du feuilleton. M. le ministre de la Justice propose maintenant la motion d'adoption du projet de loi 61, Loi modifiant la Loi sur la division territoriale. Y a-t-il des interventions à cette étape-ci?

Une voix: Non.

Le Vice-Président: II n'y a pas d'intervention. Cette motion d'adoption du projet de loi 61 est-elle adoptée?

Une voix: Adopté.

Le Vice-Président: Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Johnson: M. le Président, je vous demanderais d'appeler l'article 38 du feuilleton.

M. Marx: Non, non, il faut l'adopter en premier.

M. Johnson: C'est fait.

Projet de loi 66 Adoption

Le Vice-Président: Nous étions, M. le ministre de la Justice, évidemment en troisième lecture ou au niveau de l'adoption du projet de loi. La même chose pour l'article suivant, l'article 38. M. le ministre propose maintenant la motion d'adoption du projet de loi 66, Loi modifiant la Loi sur la

protection du consommateur. Y a-t-il des interventions?

M. Marx: Oui, M. le Président.

Le Vice-Président: M. le ministre de la Justice.

M. Herbert Marx

M. Marx: M. le Président, cette loi modifie la Loi sur la protection du consommateur afin de donner plus de protection aux consommateurs du Québec. Vous savez, M. le Président, que nous avons, depuis deux ans, adopté un certain nombre de lois pour protéger davantage les consommateurs. Il y a la loi sur les saisies abusives. Pour mettre fin à ces saisies, j'ai demandé en 1984 ou 1985, lorsque j'étais dans l'Opposition, au ministre de la Justice d'adopter une telle loi, cela n'a jamais été fait, nous l'avons fait. (23 h 40)

Deuxièmement, nous avons modifié la Loi Lacombe en ce qui concerne, par exemple, les biens insaisissables des personnes qui sont l'objet d'une saisie. Cela a été adopté également. Troisièmement, nous avons adopté la loi sur les préarrangements funéraires pour protéger davantage les consommateurs qui achètent de tels préarrangements.

J'aimerais insister, sur le fait que presque tous les États, au moins toutes les provinces canadiennes, ont une telle loi et nous sommes la dernière province à adopter une loi sur les préarrangements funéraires. C'est pourquoi nous avons proposé un tel projet de loi et cela a été adopté cette année.

Le projet de loi 66 va encore plus loin dans la protection des consommateurs. Par exemple, il y a des protections en ce qui concerne les contrats à distance. Il y a des protections en ce qui concerne la réparation et le remplacement des odomètres. Il y a également des protections en ce qui concerne certaines offres de crédit.

En terminant, M. le Président, il s'agit d'une loi qui modifie la Loi sur la protection du consommateur, afin de raffermir les droits des consommateurs au Québec. Merci.

Le Vice-Président: Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Shefford.

M. Roger Paré

M. Paré: Merci, M. le Président. Très rapidement, sur le projet de loi 66. Cela va devoir être rapide, parce que c'est un petit projet de loi. C'est un peu amusant de regarder la façon dont procède le ministre de la Justice, responsable de la Protection du consommateur, face à cette responsabilité qu'il a de la protection du consommateur. À chaque session, le ministre vient déposer un petit projet de loi pour montrer qu'il s'occupe de la protection du consommateur, comme quoi il a ce souci, cet intérêt de s'occuper de la protection du consommateur. C'est un projet de loi pour lequel on va voter de ce côté-ci. On est d'accord, parce que cela vient modifier la Loi sur la protection du consommateur, votée par l'ancien gouvernement du Parti québécois.

Donc, cela va dans le bon sens, mais c'est un tout petit projet de loi qui amène quatre modifications. On va faire le tour rapidement - cela vaut la peine - en donnant quelques commentaires, entre autres en ce qui concerne les appareils domestiques. Maintenant, tout comme pour les réparations automobiles, on va préciser sur la facture s'il s'agit de pièces neuves, usagées, réusinées, remises à neuf et le prix sur la facture. Donc, c'est une modification. On va être d'accord, c'est important. C'est une garantie supplémentaire dans le sens qu'il y a plus d'information. Donc, la facture va être plus complète. On va indiquer dessus ce que je viens de vous dire: le morceau qu'on a posé dans la laveuse à vaisselle ou dans le réfrigérateur, c'est une pièce neuve, c'est une pièce réusinée, c'est une pièce usagée et le prix à côté. Donc, on va détailler la facture. C'est un amendement sur lequel on va être d'accord.

On a pu découvrir en commission parlementaire... Ce n'est rien de nouveau; cela y était déjà, mais, à titre d'information, je tiens à le préciser pour les gens qui pourraient nous écouter. Sont inclus, dans les appareils domestiques, les fours micro-ondes. C'est important, il y en a de plus en plus. Donc, je pense qu'il faut le dire. Il faut informer la population qu'advenant un bris à un appareil domestique, dont les fours micro-ondes, c'est couvert par l'Office de la protection du consommateur. Donc, c'est bon de le dire. La facture va être plus complète. C'est un des points.

Le deuxième. Cela protège le consommateur en cas de contrat à distance, dans le sens que ce ne sera pas acceptable que le commerçant perçoive un montant partiel ou total sur la vente effectuée par contrat à distance. C'est une bonne mesure. Je pense que les gens étaient déjà pas mal informés la-dessus, puisqu'on sait combien est traitée et surveillée la vente par les commerçants itinérants.

Une autre chose importante qui est dans la loi, c'est qu'il est interdit d'envoyer une offre de crédit. Là-dessus, j'ai posé la question au ministre et j'espère qu'il va surveiller cela de près, c'est-à-dire un de ses collègues. Pour empêcher que les gens souscrivent à une carte de crédit, il sera défendu que cette adhésion à une carte de crédit se fasse par la poste s'il n'y a pas eu

demande par le consommateur. Donc, cela peut permettre un recours au consommateur, mais de là à ce que le consommateur soit bien informé, qu'il sache la façon de procéder, c'est tout autre chose. Mais, en même temps, le ministre responsable de la privatisation et adjoint au ministre des Finances de l'autre côté - il a d'autres titres qui ne me viennent pas à l'esprit - le député d'Outremont qui a déposé un document important puisqu'il s'agit du document sur le décloisonnement.

C'est la simplification des services financiers. Il s'agit de faire en sorte que les services soient plus rapprochés du consommateur, du citoyen. Est-ce que cela ne va pas dans le sens opposé? Je suis d'accord avec ce qu'on retrouve dans le projet de loi 66, mais il faudrait que le ministre fasse plus que faire adopter son projet de loi, qu'il surveille de près ses collègues pour s'assurer que l'autre projet de loi qui est également déposé de même que les autres qui le seront au printemps ne viennent pas défaire ce qu'on a fait ici.

On retrouve un dernier point dans le projet de loi parce que, comme je vous l'ai dit, c'est un petit projet de loi, et c'est celui de l'odomètre. Quand on changera l'odomètre dans une automobile - le "meter", pour être bien compris - on n'aura pas le droit de le mettre à zéro. Donc, même s'il est neuf, il faudra mettre les chiffres apparaissant sur le vieil odomètre. Mais ce ne sont que six chiffres. Là où c'est important, c'est de savoir, dans les autos usagées, si c'est une voiture qui a fait beaucoup de millage ou non. On ne peut pas le savoir par cela, parce que ce sont six chiffres. Si on a dépassé 90 000 kilomètres, soit 60 000 milles, on ne pourra pas savoir, cela recommence à zéro. Nous avons insisté là-dessus, parce qu'on trouvait important, justement, que l'on oblige à avoir un odomètre de sept chiffres, parce que cela se fabrique et que c'est maintenant disponible, afin que l'on sache si l'auto a fait 40 000 kilomètres, 140 000 kilomètres ou 240 000 kilomètres.

Je dois vous dire que ce n'est pas long à atteindre parce que ma voiture a deux ans et j'ai déjà au-dessus de 150 000 kilomètres de parcourus. Cela amène donc une protection, mais très relative. Elle est tellement relative que l'on n'ira même pas faire ce qu'on fait dans d'autres circonstances, soit des opérations témoins, ce qui fait que la portée est très relative. Mais, comme je vous le dis, ce sont tous des petits points qui vont dans le bon sens. Le ministre va pouvoir dire que, cette année, il s'est occupé du consommateur. Il aura déposé le projet de loi 66. Il y a quatre petites améliorations, dont la dernière avec l'odomètre, et je vous ai démontré que ce que cela apporte est très relatif. Au chapitre de la facturation pour les appareils ménagers, oui, cela va dans le bon sens. C'était déjà reconnu pour les automobiles. On va le reconnaître pour les appareils ménagers. Je dis bravo! On ne peut pas être contre cela. Tout le monde est pour la vertu, mais est-ce que c'est effectivement une protection qui va assez loin?

En ce qui a trait aux autres mesures au sujet du crédit et des contrats à distance, à la condition que d'autres lois d'un autre ministre ne viennent pas les défaire, cela va aussi dans le bon sens. Mais c'est ce qu'aura fait le ministre cette année en ce qui a trait à la protection du consommateur. Pourtant, il a des dossiers très importants qui viennent présentement affecter le consommateur directement chez lui. Même s'il ne fait pas d'achat, il va être victime, finalement, de décisions qui vont être prises et qui sont très importantes. Je vais nommer seulement quelques-unes des situations qui peuvent se produire ou des sujets sur lesquels le ministre aurait dû intervenir, aurait dû se prononcer et il ne l'a pas fait.

Il ne l'a pas fait au point qu'il a dit en commission parlementaire: Je n'ai pas besoin d'intervenir sur tous les sujets, j'ai des ministres sectoriels qui s'en occupent. Ce n'est pas cela, un vrai ministre qui a la conscience, la détermination et la volonté de protéger le consommateur. C'est précisément de surveiller tout ce qui se passe et d'intervenir auprès de ses collègues ou des autres gouvernements pour s'assurer que le consommateur a une protection passablement importante. Mais ce n'est pas ce qui se passe.

Le rééquilibrage des tarifs de Bell Canada, par exemple, c'est un sujet d'actualité. Là-dessus, quand on a posé la question la semaine passée, c'est le ministre des Communications qui s'est senti obligé de se lever, même si j'avais posé la question au ministre de la Justice, pour dire qu'il y avait effectivement eu des échanges. Mais il n'y a pas eu de prise de position publique là-dessus. Je ne le pense pas, parce qu'on l'aurait probablement su si le ministre était intervenu pour donner son point de vue sur la protection du consommateur directement au gouvernement concerné, soit le gouvernement d'Ottawa. Ou, alors, s'il avait émis son opinion publiquement et s'il l'avait transmise à son collègue des Communications, on l'aurait probablement su. Mais non, dans cette situation, dans ce problème de la tarification qui sera ramené en février 1987 pour décision à Ottawa, le ministre responsable de la Protection du consommateur n'est pas intervenu. On n'en a pas entendu parler. On ne sait pas s'il va prendre position en faveur de la demande des ACEFS qui dit que, finalement, si cela passe, cela veut dire que les gens les plus démunis, les personnes les plus affectées par cette décision. Elles vont l'être, c'est une

augmentation sans même que les gens changent la moindre chose sur leur appareil téléphonique, sans même qu'ils fassent plus d'interurbains, ces gens-là seront affectés. Pourtant, le ministre ne s'est pas prononcé là-dessus. (23 h 50)

La publicité destinée aux enfants, il y a déjà une année, on a demandé au ministre de lancer un signal clair; il était même prêt à utiliser la clause dérogatoire si nécessaire. Le ministre attend, mais en attendant il se passe quoi? J'en ai informé le ministre et des plaintes ont été portées. Il y a de la publicité illégale, au moment où l'on se parle, dans la période avant les fêtes, aux heures d'écoute des enfants, où des enfants sont présents dans la publicité. On utilise des enfants de moins de 13 ans à l'heure d'écoute de cette même clientèle. Cela se produit sur une large échelle, mais pourtant le ministre n'a fait aucune sortie là-dessus.

Je sais ce qu'il va me dire: La cause est entendue et on attend les résultats. On attend. Il faudra arrêter d'attendre, puis agir. S'il y a quelque chose d'important aussi, parce qu'on a connu au cours des deux dernières années dans le secteur de la construction un phénomène extraordinaire, cela bat tous les records... Oui, le taux d'intérêt a baissé, la reprise économique, donc cela va mieux. Les gens se sont mis à bâtir, mais pourtant depuis 1985, il y a une loi de votée qui permet au gouvernement de donner des garanties pour les maisons neuves et la rénovation. Ce serait important et, je me souviens, il y a un an et même plus, le ministre avait dit: Oui, oui, on va y voir bientôt. Cela va se faire. Maintenant, on n'entend plus parler du tout des garanties. Le ministre peut dire: Ça ne dépend pas de moi, c'est le ministre du Travail qui est responsable de mettre cela en vigueur, sauf que comme cela concerne la protection du consommateur, ce serait au ministre de la Justice de faire les pressions nécessaires et de s'assurer que ces articles seront mis en vigueur. C'est voté.

Tout ce qu'il s'agit de faire maintenant, c'est de les appliquer, mais on ne le fait pas. Pourtant, c'est majeur, parce que lorsqu'on achète une maison, c'est un achat énorme, c'est un montant important d'investi. Il faudrait être protégé. Non, on ne protège pas quand il s'agit de maisons neuves, de rénovation, même s'il y a des milliers de dollars d'investis, mais on va protéger quand il s'agira d'appareils domestiques.

Oui, on peut faire les deux et on devrait faire les deux. Il y a un dernier sujet sur lequel on entend des commentaires. Ce sont toujours les associations de la protection du consommateur, les ACEF et les autres groupes qui viennent dire leurs inquiétudes face au libre-échange. Les gens manifestent leurs craintes, leurs inquiétudes, mais on n'a jamais entendu le ministre intervenir là-dessus. On ne connaît pas son opinion et on ne sait même pas s'il a pris la peine de regarder les conséquences du libre-échange pour les consommateurs québécois. Je vous avais dit que je ne serais pas long, M. le Président, je vais conclure là-dessus en disant: Oui, on votera pour le projet de loi 66 qui amène des modifications à une loi qui avait été présentée par l'ancien gouvernement, c'est-à-dire la Loi sur la protection du consommateur. Cela amène des petites améliorations, mais le message que je voulais passer - je trouve cela important parce que la session finie, on ne se reverra peut-être pas avant le printemps prochain, - c'est de dire au ministre qu'au moment où l'on se parle, il y a des sujets très importants qui sont dans l'air, il y a des décisions capitales qui seront prises bientôt et qui affecteront le consommateur.

Le ministre, en plus de passer des petites lois à chaque session pour montrer qu'il fait quelque chose pour la protection du consommateur, devrait s'impliquer dans les dossiers majeurs que j'ai nommés qui sont importants, de façon que les consommateurs soient vraiment protégés, mais aussi pour des choses très importantes.

Les sujets que j'ai amenés tantôt sont importants, on sait que ce sera voté bientôt, en tout cas ce sera mis en application. Si le libre-échange passe, c'est le 2 janvier. Le ministre dira: Je n'ai plus le temps, c'est le temps des fêtes. Je ne suis pas sûr que le consommateur aura été protégé et que le ministre responsable aura fait les études nécessaires, aura amené les recommandations appropriées pour protéger le consommateur.

Les deux dernières années alors que le taux de construction était élevé on n'a pas mis en application les deux règlements. Maintenant, la construction diminue, je ne sais pas si le ministre va se décider à faire quelque chose. Mais non, il ne l'a pas fait. Le rééquilibrage des tarifs téléphoniques, c'est pour le mois de février prochain. Est-ce que le ministre finira par dire sa façon de penser là-dessus et intervenir en faveur des consommateurs? On ne le sait pas non plus. Oui, on va voter pour le projet de loi 66, en espérant que dans les domaines que j'ai mentionnés, le ministre interviendra pour prouver aux consommateurs qu'il y a une personne dans ce gouvernement qui a une responsabilité et qui a décidé de prendre ses responsabilités et que, la prochaine fois, on arrivera à la prochaine session avec un autre projet de loi qui modifiera aussi la Loi sur la protection du consommateur, mais qui sera beaucoup plus substantielle. Merci, M. le Président.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président: Je reconnais maintenant M. le ministre de la Justice pour l'exercice de son droit de réplique.

M. Herbert Marx (réplique)

M. Marx: Merci, M. le Président. J'ai compris aujourd'hui, surtout après le discours du député de Shefford, que, quand cela va bien pour les consommateurs du Québec, cela va mal pour le député de Shefford, parce que ce dernier veut avoir quelque chose à critiquer. Malheureusement, il n'y a rien à critiquer en ce qui concerne la protection des droits des consommateurs.

M. le Président, j'ai eu l'occasion d'étudier la situation en Ontario par rapport à la situation au Québec. En Ontario, le ministre responsable de la protection du consommateur a des questions à chaque période de questions, parce que cela va mal en Ontario. Ici, au Québec, cela va bien. J'ai une question aux 15 ou 20 périodes de questions. Cela fait mai au député de Shefford. Qu'est-ce que vous voulez que je vous dise, M. le Président? Nous avons la meilleure loi sur la protection du consommateur. Nous avons un office de la protection du consommateur qui fait un excellent travail; le député de Shefford l'a reconnu souvent. Donc, cela va bien au Québec pour les consommateurs. Malheureusement, quand cela va bien pour les consommateurs québécois, cela va mal pour le député de Shefford.

Il a parlé d'un petit projet de loi. Ce n'est pas une insulte, un petit projet de loi. On peut avoir un projet de loi d'un article qui peut avoir une grande importance. Par exemple, la loi que nous avons adoptée ce soir sur l'indexation automatique des pensions alimentaires, c'est un projet de loi de seulement un article - en fait, de deux articles parce qu'on en a ajouté un deuxième. C'est un petit projet de loi, mais de quelle importance! On peut avoir des projets de loi d'une centaine d'articles qui aient peu d'importance. On peut avoir un projet de loi d'un article qui apporte un changement fondamental dans nos lois et qui protège davantage une certaine classe de personnes comme la loi sur l'indexation automatique des pensions alimentaires qui va affecter beaucoup de Québécoises.

Le député de Shefford a répété à quelques reprises ce soir qu'il est d'accord avec le projet de loi. Il me signale qu'il est encore d'accord, parfait! Il est d'accord avec le projet de loi. Il dit que le projet de loi va raffermir les droits des consommateurs québécois. Si on veut adopter de telles protections, M. le Président, cela prend un projet de loi. On ne peut pas procéder par règlement. On ne peut pas procéder par directive. Cela prend un projet de loi. Nous avons des modifications dans ce projet de loi qui va protéger davantage le consommateur québécois. Il était nécessaire de franchir ces étapes à l'Assemblée nationale, ce que j'ai fait, et je suis très heureux que le député de Shefford soit entièrement d'accord avec ce projet de loi, comme il l'était avec tous les projets de loi que nous avons déposés afin de protéger les consommateurs québécois. Merci, M. le Président.

M. Jolivet: M. le Président, est-ce que le ministre me permet une question?

Le Vice-Président: En vertu de l'article 213...

Une voix: ...

Le Vice-Président: ...je vous permettrai une question. M. le député de Laviolette et leader adjoint de l'Opposition.

M. Jolivet: Oui, M. le Président. À la suite de ce que le ministre vient de dire, s'il avait 45 changements à faire, est-ce que cela veut dire qu'il va nous présenter, à raison d'un par année, 45 projets de loi dans les 45 prochaines années? Est-ce cela qu'il veut dire?

Le Vice-Président: M. le ministre de la Justice, ce n'est pas une question relative au contenu du projet de loi.

Des voix: Ah! Ah! Ah!

Le Vice-Président: Le débat étant clos, est-ce que cette motion du ministre de la Justice proposant l'adoption du projet de loi 66, Loi modifiant la Loi sur la protection du consommateur, est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président: Adopté.

M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Johnson: M. le Président, je vous demanderais d'appeler l'article 39 du feuilleton.

Projet de loi 71 Adoption

Le Vice-Président: À l'article 39 du feuilleton, M. le ministre de la Justice propose l'adoption du projet de loi 71, Loi modifiant de nouveau la Loi sur les tribunaux judiciaires. Est-ce qu'il y a des interventions?

Une voix: Ça n'a pas l'air.

Le Vice-Président: II n'y a pas d'intervention. Est-ce que cette motion est

adoptée?

Une voix: Adopté.

Le Vice-Président: Adopté.

M. le leader adjoint du gouvernement, (minuit)

M. Johnson: M. le Président, je vous demanderais d'appeler l'article 43 du feuilleton.

Projet de loi 77 Adoption

Le Vice-Président: Â l'article 43 du feuilleton, M. le ministre de la Justice propose la motion d'adoption du projet de loi 77, Loi modifiant le Code civil et la Loi sur les bureaux d'enregistrement. Est-ce qu'il y a des interventions? Il n'y a pas d'intervention. Est-ce que cette motion du ministre de la Justice est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président: Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Johnson: M. le Président, je vous demanderais d'appeler l'article 44 du feuilleton.

Projet de loi 78 Adoption

Le Vice-Président: À l'article 44 du feuilleton, M. le ministre de la Justice propose la motion d'adoption du projet de loi 78, Loi modifiant la Loi sur les renvois à la Cour d'appel. Il y a une intervention qui est sollicitée par le député de Taillon. Je cède la parole à M. le député de Taillon.

M. Claude Filion

M. Filion: Merci, M. le Président. Je vais seulement dire quelques mots sur le projet de loi 78 d'apparence inoffensive. Il y a beaucoup d'autres projets de loi également, ceux qu'on adopte rapidement avec le consentement de notre leader, qui sont également d'apparence inoffensive et qui le sont réellement; c'est-à-dire qu'ils sont techniques et à ce moment, je crois bien que cela ne vaut pas la peine d'intervenir. Cependant, en ce qui concerne le projet de loi 78, je voudrais dire quelques mots tout de même pour bien expliquer sa portée.

Ce projet de loi permettra au gouvernement de présenter des demandes d'opinions certifiées à la Cour d'appel, ce qu'on appelle communément les "référés", et permettra au gouvernement d'en appeler à la Cour suprême de la décision certifiée de la Cour d'appel sans devoir retourner devant cette Assemblée nationale pour requérir une autorisation par un débat démocratique.

J'ai eu l'occasion en commission parlementaire de souligner cela au ministre et je le rappelle ce soir. Le référé généralement porte sur un sujet majeur. Il ne porte pas sur une bricole et il ne porte pas sur des sujets non plus sur lesquels l'ensemble des citoyens peuvent porter des litiges devant les tribunaux et à ce moment, tout le processus judiciaire suit son cours normal. Un référé survient lorsqu'un gouvernement, quel qu'il soit, a besoin d'une opinion sur un sujet extrêmement important pour lui et pour les citoyens. À ce moment-là, en s'adressant à la Cour d'appel, le gouvernement obtient l'éclairage de la Cour d'appel généralement dans un délai réduit par rapport aux causes normales. Le problème avec le projet de loi, c'est qu'il soustrait des élus du peuple la possibilité de débattre de la question faisant l'objet du débat majeur et également la possibilité de débattre de l'opportunité de se rendre en Cour suprême pour obtenir la décision de la Cour suprême finale sur le jugement de la Cour d'appel.

Le ministre de l'Éducation est ici, j'ai dans mon dossier, des interventions du ministre de l'Éducation alors qu'il était de ce côté-ci de la Chambre et qu'il avait à ce moment l'occasion, le 8 décembre 1981, de se prononcer sur cette opportunité d'aller à la Cour suprême pour obtenir la décision de la Cour suprême. Cela est important. Maintenant, les élus du peuple n'auront plus le loisir de débattre de sujet, et également de l'opportunité du fond et également de l'opportunité d'aller à la Cour suprême avec le projet de loi. Le problème, c'est que le processus était trop lourd. Cela prenait une loi pour autoriser le gouvernement à aller à la Cour suprême. C'est un peu lourd, j'en conviens et je l'ai dit au ministre.

Ce que je suggérais au ministre au moment de la commission parlementaire, c'est que quand même cette Assemblée nationale ait l'occasion par résolution, par exemple... C'est surprenant, il n'a pas accepté cela. Effectivement, je vois le ministre de l'Éducation qui s'interroge sur ce projet de loi dont on traite. J'avais simplement suggéré ceci: une simple résolution de l'Assemblée nationale permettant un débat démocratique entre élus du peuple. Il faut se souvenir que - je tiens à le souligner - le référé, à notre connaissance, a été employé quatre fois depuis le début. Il a été employé lorsque le maire Drapeau, à l'époque, voulait instaurer la loterie qui portait soit le nom de loterie volontaire ou de contribution volontaire ou de taxe volontaire. Également il a été employé pour décider de la juridiction de la Cour provinciale lorsque le gouvernement avait décidé de hausser le . montant permissible en Cour provinciale. Il a

été également employé, évidemment, sur le droit de veto. C'est à cette occasion que le ministre de l'Éducation était intervenu. Il avait également été employé à une autre occasion sur le rapatriement unilatéral de la constitution. Comme on voit, ce sont là des enjeux d'importance pour les citoyens. Nous avions simplement souligné au ministre que nous percevions comme étant bien fondé l'objectif de sa démarche c'est-à-dire d'accélérer le processus et de ne pas enclencher toute la lourdeur du processus législatif. Nous avions suggéré une simple résolution, un simple débat. Malheureusement, cette suggestion n'a pas été retenue.

Ce que je voudrais dire au ministre de la Justice là-dessus, en terminant, c'est que nous, de l'Opposition, l'avons à l'oeil en ce qui concerne ce projet de loi. Nous l'avons à l'oeil en ce qui concerne les référés qui pourraient être demandés par le gouvernement du Québec à la Cour d'appel sur certaines lois. On peut penser également à cette loi portant sur la réforme de nos structures scolaires. On peut penser à une loi portant sur la velléité libérale de modifier la loi 101. Ce sont tous des sujets importants. M. le Président, sur ces quelques remarques, je voudrais terminer ici mon propos.

Le Vice-Président: Très bien, M. le député de Taillon. Je vais céder la parole au ministre de la Justice pour sa réplique.

M. Herbert Marx (réplique)

M. Marx: M. le Président, il ne faut pas être surpris que j'aie déposé ce projet de loi. J'ai demandé à mon prédécesseur pendant des années de déposer un tel projet de loi en ce qui concerne les avis consultatifs.

Maintenant, si on veut demander un avis consultatif de la Cour d'appel et aller à la Cour suprême du Canada, il faut déposer un projet de loi chaque fois, ce que nous avons fait au moins à deux reprises depuis quelques années. Dans toutes les autres juridictions au Canada, dans toutes les provinces canadiennes, on a une loi qui permet au gouvernement de demander un avis consultatif à la Cour d'appel et qui permet aussi aux deux parties, soit le gouvernement soit une autre partie qui est en cause, de faire appel à la Cour suprême du Canada. Tout ce que ce projet de loi fait... On adopte une procédure qui est déjà en vigueur dans toutes les provinces canadiennes. Je pense qu'il est sage de le faire. En vertu du système et de la procédure que nous avons suivie jusqu'à maintenant, le gouvernement avait la possibilité d'en appeler des décisions de la Cour d'appel à la Cour suprême du Canada, mais les autres parties, ceux qui contestaient la décision ne pouvaient pas aller à la Cour suprême du Canada. Maintenant, cela mettra tous les Québécois sur un pied d'égalité avec le gouvernement. Je pense que cela est important.

En terminant, M. le Président, je pense que le député de Taillon a soulevé une fausse question quand il a dit qu'il faut prévoir la possibilité de débattre les questions à l'Assemblée nationale. L'Assemblée nationale peut se saisir de n'importe quelle question et faire un débat. Il y a des débats le mercredi, le vendredi, il y a des débats d'urgence et ainsi de suite. Donc, ce projet de loi n'empêche pas les députés de discuter de quelque question que ce soit. Donc, je n'ai pas vu la nécessité de prévoir que l'Assemblée nationale puisse débattre une question quelconque. Il va de soi que l'Assemblée nationale puisse débattre de quelque question que ce soit et il n'est pas nécessaire d'entériner une telle possibilité par une loi. Merci, M. le Président. (0 h 10)

Le Vice-Président: Très bien. Le débat étant clos, cette motion du ministre de la Justice proposant l'adoption du projet de loi 78, Loi modifiant la Loi sur les renvois à la Cour d'appel, est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président: Très bien. Le débat étant clos, est-ce que cette motion du ministre de la Justice proposant l'adoption du projet de loi 78, Loi modifiant la Loi sur les renvois à la Cour d'appel, est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président: Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Johnson: M. le Président, je vous demanderais d'appeler l'article 31 du feuilleton.

Projet de loi 105

Prise en considération du

rapport de la commission qui

en a fait l'étude détaillée

Le Vice-Président: À l'article 31 du feuilleton, nous allons maintenant procéder à la prise en considération du rapport de la commission de l'économie et du travail qui a procédé à l'étude détaillée du projet de loi 105, Loi modifiant la Loi sur les sociétés de placements dans l'entreprise québécoise.

Je dois ici aviser l'Assemblée que nous avons reçu en délai utile, conformément au règlement, une proposition d'amendement par M. le ministre de l'Industrie et du Commerce. C'est un amendement à l'article 11 du projet de loi, en foi de quoi nous allons procéder au débat, s'il y a lieu et,

ultérieurement, à la mise aux voix de l'amendement, dans un premier temps, et du rapport de la commission, amendé s'il y a lieu, dans un deuxième temps. M. le ministre de l'Industrie et du Commerce.

M. Daniel Johnson

M. Johnson: Oui, brièvement, M. le Président. Le projet de loi 105 avait pour objet de modifier la loi sur les SPEQ afin de refléter les déclarations ministérielles de décembre 1986, de juin 1987 et du discours sur le budget du 30 avril 1987. Cela visait essentiellement à permettre à des entreprises en démarrage de pouvoir bénéficier de la qualité de corporation admissible aux titres des placements qu'une SPEQ pouvait faire.

À l'occasion de l'étude article par article, et mon propos se limitera à ce sujet, nous avons remarqué en commission parlementaire l'article 11 du projet de loi, qui se lit ainsi: "Le gouvernement peut déterminer que certaines dispositions réglementaires adotées en vertu de la Loi sur les sociétés de placements dans l'entreprise québécoise ont effet à compter du 1er mai 1987."

Une discussion s'étant ensuivie, notamment avec le député de Lévis, il est apparu que nous pouvions assimiler certaines des dispositions de la loi sur les SPEQ à des dispositions fiscales et qu'en conséquence, un des articles de la Loi sur les impôts du Québec, soit l'article 1086, permettait au gouvernement, par décret, d'édicter des règlements prévoyant l'entrée en vigueur de certaines dispositions rétroactivement, permettant même l'entrée en vigueur de règlements de façon rétroactive sans même, dans quelques cas, qu'il y ait publication pour cause d'urgence.

La cause d'urgence est invoquée très souvent en matière de fiscalité. Il n'en restait pas moins que la formulation employée dans l'article 11, comme l'a souligné le député de Lévis, à ce moment-là, pouvait être si large qu'on donnait au gouvernement un pouvoir que l'on pourrait peut-être qualifier d'exorbitant dans les circonstances même si, je le répète, il s'agit là de dispositions de nature quasi fiscales. En effet, que le gouvernement puisse déterminer que certaines dispositions qui n'étaient pas mentionnées, adoptées en vertu de la Loi sur les sociétés de placements dans l'entreprise québécoise, ont effet à compter du 1er mai 1987, c'est une disposition pas mal large.

Ce que nous avons convenu de faire lors de l'étude de cet article, c'est de demander à des juristes de se pencher sur la façon la plus brève, mais, chose certaine, la plus précise, possible d'encadrer l'exercice du pouvoir réglementaire afin que nous donnions véritablement effet au discours sur le budget du 30 avril 1987, alors que le ministre des Finances annonçait certains changements. Il annonçait des changements, notamment dans le resserrement de certaines règles d'interprétation quant au lien de dépendance, par exemple, entre personnes ou dans la notion de personnes liées, afin de bien s'assurer que nous pouvions découvrir quelles sont les personnes qui contrôlent une société, une corporation.

De cette discussion, s'est ensuivi le fait que, très nettement, il était de l'intention du ministre des Finances que ces changements aient lieu le 1er mai 1987. Cela n'a jamais été contesté. Cela visait à resserrer des définitions afin que la fiscalité et les applications fiscales, dans la lettre de la loi sur les SPEQ et dans les règlements qui s'y rapportent, donnent effet très clairement au voeu du ministre des Finances et résultent, dirais-je, en une conformité plus complète de la lettre de la loi avec l'esprit de la loi qui est de voir à l'application, avec la plus grande intégrité possible des notions qui ont présidé à la mise sur pied du programme SPEQ, soit que les véritables personnes qui n'ont pas de lien de dépendance entre elles, qui ne sont pas liées à une corporation admissible forment, par actionnariat, un groupe distinct qui bénéficie de crédits d'impôt dans une société de placements dans l'entreprise québécoise et que, donc, il fallait bien s'assurer que les définitions sur le lien de dépendance et les personnes liées reflétaient cet esprit. Il faut vraiment que ce soient des gens indépendants les uns des autres le plus possible, dans les limites tracées par l'esprit de la loi, que ce soient des personnes vraiment indépendantes qui soient des actionnaires qui bénéficient d'un crédit d'impôt, que ces personnes soient, dis-je, indépendantes des actionnaires qui gèrent la corporation dans laquelle la SPEQ peut investir.

Donc, M. le Président, l'amendement que nous avons déposé à ce sujet se lit ainsi - je me permettrai de le lire pour les débats - "Le gouvernement peut déterminer que les dispositions réglementaires adoptées en vertu de la Loi sur les sociétés de placements dans l'entreprise québécoise relativement à la définition de l'expression "lien de dépendance", "corporation en démarrage" et "personne liée" ont effet à compter du 1er mai 1987 et relativement aux secteurs d'activité ont effet à compter du 18 juin 1987. "Le présent article cesse d'avoir effet le 1er juin 1988."

M. le Président, quant au lien de dépendance, corporation en démarrage et personne liée, ce sont des suites au discours sur le budget du 30 avril. Donc, il y a pouvoir réglementaire, déterminé par règlement, que le 1er mai 1987 est la date d'entrée en vigueur de ces dispositions que j'ai mentionnées.

La référence qui suit, la date du 18

juin 1987, vise à assurer que c'est à l'occasion d'une déclaration ministérielle de cette date que l'aquaculture a été incluse comme secteur d'activité qui est admissible dorénavant, à compter du 18 juin 1987, parmi les corporations dites admissibles au programme des sociétés de placements dans l'entreprise québécoise.

Troisièmement, le dernier paragraphe du nouveau paragraphe 11, enfin, tel que l'amendement le propose, à savoir que le présent article cesse d'avoir effet le 1er juillet 1988, est ce qu'on appelle communément une clause crépusculaire. Donc, d'ici à quelques mois, avec le temps que cela prend, avec le filtrage au bureau des règlements, au bureau des lois, l'adoption éventuelle, etc., nous aurons eu amplement le temps, d'ici le 1er juillet 1988, de pourvoir au changement réglementaire qui était évoqué implicitement, chose certaine, dans le discours sur le budget du 30 avril et dans les déclarations ministérielles de juin 1987 et, de cette façon, le pouvoir - ma foi, assez large -qu'on a constaté en commission parlementaire, de changer certaines dispositions pour leur donner un effet rétroactif prendra fin le 1er juillet 1988.

C'est, à mon sens, un progrès que nous réalisons à ce moment-ci, afin de bien encadrer le pouvoir réglementaire et surtout bien encadrer ce pouvoir dans tous les cas où des dispositions rétroactives sont introduites dans les règlements. C'est donc à cette fin que nous sommes réunis ici, ce soir. (0 h 20)

Le Vice-Président: Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Lévis.

M. Jean Garon

M. Garon: Merci, M. le Président. Le projet de loi 105, Loi modifiant la Loi sur les sociétés de placements dans l'entreprise québécoise est une loi qui a de bons aspects, mais il y en a également qui sont un peu moins bons, particulièrement l'article 2, qui a pour effet de restreindre les catégories d'actionnaires qui auraient pu voir le jour dans des sociétés de placements dans l'entreprise québécoise. Le ministre a voulu qu'il y ait seulement une catégorie, d'actionnaires ou seulement des actionnaires avec plein droit de vote selon une seule catégorie dans une société de placements, de sorte que les gens devront créer autant de sociétés de placements qu'ils voudront faire de fonds pour investir dans différents types d'industries.

Nous aurions trouvé plus souhaitable que, par exemple, dans des régions où les sociétés de placements vont s'implanter, l'on puisse avoir des fonds particuliers avec des catégories d'actionnaires particuliers comme, par exemple, on peut imaginer, dans le territoire de la Gaspésie, un fonds qui investirait davantage dans le secteur touristique, un fonds qui investirait davantage dans le secteur forestier, un autre qui aurait pu investir principalement dans la transformation des produits marins pour faire du développement régional selon différentes catégories, sachant que les gens qui sont versés dans le domaine forestier ne connaissent pas nécessairement la transformation des produits marins et les gens qui connaissent la transformation des produits marins ne connaissent pas nécessairement le secteur hôtelier, la restauration ou le secteur touristique.

Le ministre a choisi de restreindre à une seule catégorie d'actionnaires, s'imaginant que les gens placeraient dans une forme de fonds mutuel pour investir leur argent. Je ne suis pas convaincu que c'est la meilleure formule. Il aurait été préférable de pouvoir mettre, à l'intérieur d'une même société de placements dans l'entreprise québécoise, différents fonds, différentes catégories d'actionnaires dans des fonds particuliers, de sorte que les gens puissent assumer les risques qu'ils veulent assumer selon les catégories d'investissements. Mais il sera toujours loisible aux gens de faire autant de sociétés de placements qu'ils voudront faire d'investissements. Je pense que c'est une lacune, mais le ministre a choisi cette formule. Pour le reste, il s'agit d'amendements mineurs qui vont permettre de faire certains ajustements en fonction de, par exemple, la période de démarrage, etc.

Enfin, le ministre a finalement accepté. Il a été difficile, il n'a pas voulu comprendre immédiatement. Son contentieux semblait résister. Je lui avais dit, en finissant la commission: De toute façon, je pense bien que, revenus entre vous, vous allez présenter un amendement à l'article 11 puisqu'on ne peut pas faire des articles de loi rétroactifs avec un caractère trop général, car la jurisprudence dit que la rétroactivité doit être très particulière. Il s'agit d'un pouvoir exceptionnel et il ne serait pas correct que les tribunaux ou que la loi permette de donner un caractère rétroactif à des dispositions trop générales. Il s'agit d'un caractère abusif, d'une certaine façon, puisque le gouvernement, qui donne un caractère rétroactif, dit aux citoyens, au fond: Au mois de novembre, je fais telle règle de droit qui s'applique à partir du 1er avril, alors que la loi que j'ai mise en vigueur au mois de novembre, vous ne pouviez pas la connaître, mais je vous oblige quand même à la respecter à partir du 1er avril. Vous comprendrez que les tribunaux, qui doivent prendre l'intérêt des personnes humaines individuelles, doivent être très restrictifs dans l'interprétation qu'ils doivent donner à des règles de droit rétroactives qui sont des règles très exceptionnelles.

Finalement, il n'est jamais trop tard pour bien faire. Le ministre, revenu à son bureau, s'est dit - il n'a pas voulu l'admettre devant tout le monde - que le député de Lévis n'avait peut-être pas tort. Aujourd'hui, il apporte un amendement qui va dans le sens de ce que nous lui avions proposé. Tout ce que je souhaite, c'est que le ministre de l'Industrie et du Commerce fasse la même chose dans le secteur des frégates et qu'il se rappelle qu'au lieu d'en demander seulement "au moins deux" au gros Nouveau-Brunswick qui, avec 700 000 de population, sera en charge de la construction de 7 000 000 000 $ de frégates et où le gouvernement du Québec sera obligé de mendier une couple de frégates, il se décide à dire: Nous, du Québec, nous voulons toutes les frégates du deuxième contrat, puisqu'il s'agit d'un contrat de 3 500 000 000 $ et que le Québec verse à Ottawa autour de 25 000 000 000 $ par année en impôts et taxes de toutes sortes. C'est le gouvernement du Québec qui va payer les taxes de toute façon, en grande partie, pour ces frégates. Il n'est pas normal que le gros Nouveau-Brunswick de 700 000 habitants bâtisse les frégates que les taxes des contribuables québécois vont payer.

J'ai dit au ministre de l'Industrie et du Commerce que c'était un projet de loi que nous allons concourir à adopter. Il n'est pas parfait. Il y a certaines dispositions qui sont bonnes. L'article 2 nous paraît trop restrictif, mais, dans l'ensemble, le principe du projet de loi est acceptable. L'étude que nous avons faite en commission parlementaire et les amendements proposés rendent le projet de loi plus acceptable à l'Opposition. J'ai dit au ministre que je ne prendrais pas trop de temps pour l'adoption de son projet de loi, à condition que le temps que nous aurons économisé pour lui, il le consacre entièrement à aller chercher les frégates pour les chantiers maritimes de Lauzon.

Je vois le ministre de l'Éducation. J'espère que maintenant que la session est finie, il aura le temps de signer la lettre d'immobilisation pour l'école secondaire de la municipalité des chutes de La Chaudière parce qu'on sait qu'au Québec - et la ministre déléguée à la Condition féminine est là - le plus haut taux de natalité, c'est dans mon comté. Je n'en suis pas la cause mais j'en suis le représentant et comme on se plaint qu'au Québec il n'y a pas assez d'enfants, il ne faudrait pas que le gouvernement commence à épargner les écoles dans des comtés où les gens sont encore capables de faire des enfants. Nous avons 400 enfants de plus par année seulement dans la moitié de mon comté depuis dix ans - 400 enfants de plus pendant dix ans - et les couples de jeunes sont considérables. Une municipalité comme Bernières a une moyenne d'âge autour de 25 ans seulement et près de 6000 habitants. C'est un comté très jeune et je suis certain que le ministre de l'Éducation ne voudra pas faire attendre plus longtemps les parents qui pourraient retarder la naissance d'enfants en se disant: Le ministre de l'Éducation n'a pas l'air encourageant, il ne veut même pas bâtir d'école.

Alors, il ne faudrait pas que l'action du ministre de l'Éducation contribue à réduire encore les familles au Québec. C'est pourquoi je souhaite que cette décision soit prise le plus tôt possible pour que les gens puissent savoir que dans un an et quelques mois, l'école pourra ouvrir. Et les enfants qui sont déjà en nombre suffisant pour la remplir attendent la décision du ministre de l'Éducation.

M. le Président, je termine sur ces propos en souhaitant que ces deux ministres devant moi, maintenant qu'ils auront plus de temps libre, au lieu de prendre des vacances immédiatement, que le ministre de l'Industrie et du Commerce donne tout son temps pour les six frégates et que le ministre de l'Éducation accepte le projet d'école qui a été voté presque unanimement par les commissaires, 16 à 3, et que nous puissions ensemble participer à la pelletée de terre. Ça m'est arrivé dans le temps dans le comté d'Argenteuil. Maintenant ce sera au tour du ministre de l'Éducation de venir lever une pelletée de terre pour une école dans mon comté. Dans cette perspective, il sera le bienvenu et il constatera que cela fait longtemps qu'il n'a pas été entouré d'autant d'enfants au Québec. Je vous remercie.

Une voix: Bravo!

Le Vice-Président: Merci, M. le député de Lévis, mais je vous avise que comme passager du navire, je commençais à être un peu inquiet, vous changiez de cap assez souvent. J'espère que le capitaine nous maintiendra dans le cap du projet de loi 105.

Donc, pour l'exercice de sa réplique de cinq minutes, M. le ministre de l'Industrie et du Commerce.

M. Daniel Johnson

M. Johnson: Merci, M. le Président. Quatre points: le premier quant au maintien des catégories d'actions, une seule catégorie d'actions dans une SPEQ. J'ai expliqué beaucoup plus longuement que les cinq minutes me le permettent ici en commission parlementaire ce qu'il en était. Il y a un tas de bonnes raisons d'ailleurs que l'on peut retracer au début de 1985 lorsque le programme a été mis en branle par le gouvernement précédent. Je ne sais pas où était le ministre de l'Agriculture d'alors lorsque cela a été voté et que son gouvernement a décidé de fixer dans l'esprit de la loi une seule catégorie, véritablement, afin que

le caractère d'intégrité de la SPEQ soit maintenu. Une seule catégorie d'actions était souhaitable. C'est cela qui était l'esprit à l'époque. C'est ce qui a semblé échapper dans la formulation que le législateur a utilisée à l'époque. C'est ce que nous avons corrigé.

Deuxièmement, de qualifier de mineure l'inclusion de sociétés en démarrage, de corporations en démarrage dans la loi des SPEQ, je ne dirai qu'un mot, c'est grossier d'aller prétendre que c'est un amendement mineur. Cela a fait l'objet du discours sur le budget, c'était souhaité par le milieu, c'était un trou béant dans les programmes d'aide que nous pouvons donner aux entreprises, à la création d'entreprises au Québec, et nous réglons ce problème de cette façon-là.

Le troisième point: ce serait revenu à mon bureau que j'y aurais pensé, n'ayant pas voulu avouer devant tout le monde qu'il y a moyen de resserrer la loi en matière de pouvoir réglementaire à caractère rétroactif. M. le Président, je ne sais pas là non plus où était le député de Lévis. C'est au vu et au su de tout le monde, y compris... D'ailleurs, je vois le député de Rosemont ici ce soir qui, sur place, a indiqué lui aussi son inquiétude de voir une disposition assez large comme celle-là. Le député de La Peltrie a fait valoir la même chose. Je l'ai dit à haute voix avec les juristes du ministère du Revenu, ceux du bureau des lois et ceux du ministère de l'Industrie et du Commerce. (0 h 30)

Nous avons convenu avec le député de Lévis que nous lui ferions parvenir un nouveau texte pour répondre aux questions qu'il avait soulevées. Lui, peut-être, son esprit était-il déjà dans son bureau lorsque nous lui avons parlé. Chose certaine, il avait l'air physiquement très présent. Je prends le député de Rosemont à témoin, le député de Lévis occupait un espace considérable dans la salle, lorsque nous avons parlé à haute voix de ces choses.

Quatrièmement, je vais me porter à la défense de mon collègue, le ministre de l'Éducation, très brièvement, il n'en a pas vraiment besoin. Le projet d'école dont le député de Lévis a fait état a été un des premiers dossiers dont mon collègue a été saisi, comme ministre de l'Éducation. C'est un projet qui était en marche depuis des années; le député de Lévis était alors député de Lévis et ministre dans un gouvernement qui avait le pouvoir de régler ce problème-là. Finalement, les gens du comté de Lévis, heureusement, n'ont pas à attendre que le député de Lévis soit en position d'être en pouvoir. Imaginez-vous, dans l'Opposition, il ne peut pas s'en occuper. Il n'a pas le pouvoir de le faire. C'est le ministre de l'Éducation, le député d'Argenteuil, qui s'occupe effectivement des problèmes et règle les problèmes du comté de Lévis, en matière d'éducation et de construction d'école.

Voilà, c'étaient les quatre points, M. le Président, que je voulais soulever, à ce moment-ci. Je pense qu'ils étaient tous pertinents.

Le Vice-Président: Très bien, M. le ministre. Le dernier était quelque peu hors du projet de loi 105, mais je comprends très bien que vous répondiez à l'argumentation du député de Lévis.

Adoption de l'amendement

Le débat étant terminé, nous allons maintenant procéder à la mise au vote de l'amendement, proposé par M. le ministre de l'Industrie et du Commerce, à l'article 11 du projet de loi. Est-ce que cet amendement est adopté?

Une voix: Adopté.

Le Vice-Président: Adopté. L'amendement est donc intégré au rapport de la commission et, en conséquence, est-ce que le rapport tel qu'amendé de la commission de l'économie et du travail qui a procédé à l'étude détaillée du projet de loi 105, Loi modifiant la Loi sur les sociétés de placements dans l'entreprise québécoise, est adopté?

Une voix: Adopté.

Le Vice-Président: Adopté. Monsieur, pas en tant que ministre de l'Industrie et du Commerce, mais en tant que leader adjoint du gouvernement.

M. Johnson: M. le Président, s'il y avait consentement - vous pourrez le constater - je ferais motion d'adopter le projet de loi 105.

Le Vice-Président: Est-ce qu'il y a consentement à ce que nous dérogions à nos règles de procédure pour passer immédiatement et pour arriver à cette étape finale de l'adoption du projet de loi? Il y a consentement.

M. Garon: Oui.

Adoption du projet de loi

Le Vice-Président: II y a consentement, M. le député de Lévis? Il y a consentement de tous les membres de l'Assemblée. Très bien. Donc, M. le ministre de l'Industrie et du Commerce propose maintenant la motion d'adoption du projet de loi 105, Loi modifiant la Loi sur les sociétés de placements dans l'entreprise québécoise. Est-ce

que cette motion est adoptée. Non? Un instant. Vous voulez intervenir? Très bien.

Donc, M. le député de Lévis pour une intervention de fond.

M. Jean Garon

M. Garon: Alors, M. le Président, on ne peut pas passer sous silence les remarques qu'a faites le ministre de l'Industrie et du Commerce. Par gentilhommerie, pour lui être agréable, nous acceptons de laisser passer son projet de loi ce soir, en dehors des procédures habituelles puisque, entre les deux, normalement, il devrait y avoir une journée. Comme le ministre ne peut pas être présent, apparemment, demain et le leader de l'Opposition m'a fait des représentations, me demandant si je voudrais consentir à être agréable au ministre de l'Industrie et du Commerce, j'ai dit: Comme nous avons été d'accord sur le principe du projet de loi, que nous avons voté en faveur de la prise en considération du rapport, nous serions favorables à lui donner plus de temps à consacrer aux frégates, parce qu'à ce moment-là, demain, il sera libre pour aller travailler pour les frégates. Il pourra nous faire rapport au début de l'année 1988. Mais je lui rappellerai que, dans le domaine des écoles, il n'a pas l'air complètement au courant puisque, entre 1976 et 1985, ont été bâties 7 écoles dans le comté de Lévis, à part les agrandissements.

Le Vice-Président: M. le député de Lévis, puisque l'heure avance considérablement, je vous ferai simplement remarquer qu'à l'étape de l'adoption d'un projet de loi, en vertu de l'article 256 du règlement, "Le débat sur la motion d'adoption d'un projet de loi est restreint à son contenu". En conséquence, je vous prierais de vous en tenir au contenu du projet de loi 105, s'il vous plaît.

M. Garon: M. le Président, je voulais utiliser une analogie pour indiquer au ministre comment les choses peuvent fonctionner quand on veut que cela marche. C'est pour cela que je dis que, tout simplement, il me disait que l'école en question avait commencé sous mon mandat. Je dois dire que ce n'est pas exact, M. le Président. La demande a été présentée au ministre actuel, puisqu'elle n'était pas prête antérieurement. Si cela avait été demandé antérieurement, la réponse serait déjà accordée. Qu'est-ce que vous voulez? On ne peut pas bâtir des écoles alors que les enfants ne sont pas prêts à rentrer dedans. Maintenant, ils sont prêts et le projet devrait être adopté incessamment.

Le ministre présente un projet de loi sur les sociétés de placements dans l'entreprise québécoise, en quelque sorte un projet d'institutions financières, d'investissements, de recherche de fonds locaux et régionaux, qui a été imaginé sous le gouvernement précédent pour faire en sorte qu'on puisse utiliser davantage les capitaux locaux et régionaux au développement local et régional pour ne pas être dépendants des fonds extérieurs. Je vois l'ancien ministre responsable des Pêches. Je me rappelle que, dans le domaine des banques, par exemple, sur le territoire maritime, il fallait toujours référer à Montréal ou à Toronto pour avoir des autorisations parce que personne n'était autorisé à prendre des décisions localement. Les fonds manquaient souvent pour faire du développement régional parce qu'il s'agit de secteurs où les risques peuvent être assez grands. Il faut absolument donner des canaux pour que les capitaux locaux puissent investir dans des entreprises régionales ou locales et assumer eux-mêmes le développement économique.

On dit: Comptons sur nos propres moyens. Les syndicats de travailleurs se sont donné des missions en disant: Comptons sur nos propres moyens. Je me rappelle quand Jacques Gagnon se promenait au Québec, il disait: Les régionaux ne doivent pas attendre après les gens d'ailleurs pour faire leur développement régional. Le député d'Abitibi-Ouest connaît bien cela. Il sait à quel point les gens, localement et régionalement, doivent compter sur leurs propres moyens pour faire leur développement économique. C'est pourquoi le Parti québécois a imaginé la formule des sociétés de placements dans l'entreprise québécoise.

Aujourd'hui, que le ministre, après une expérience de quelques années de cette institution, veuille apporter certains amendements à la loi pour lui donner un cachet particulier qu'il pense meilleur, nous ne pouvons pas nous opposer à cela. Mais il doit se rappeler en même temps que l'imagination au travail, la conception de cette institution est due au gouvernement précédent, et nous sommes fiers de cette institution à la création de laquelle nous avons contribué alors que nous étions au pouvoir. Nous ne voudrions d'aucune façon empêcher son développement dans les années qui viennent. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président: Le débat étant terminé, est-ce que cette motion d'adoption du projet de loi 105, Loi modifiant la Loi sur les sociétés de placements dans l'entreprise québécoise, présentée par M. le ministre de l'Industrie et du Commerce est adoptée?

Des voix: Adopté,

Le Vice-Président: Adopté.

M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Johnson: M. le Président, je vous demanderais d'appeler l'article 13 du feuilleton.

Projet de loi 94

Reprise du débat sur l'adoption du principe

Le Vice-Président: Nous allons reprendre le débat sur la motion présentée par M. le ministre délégué à la Famille, à la Santé et aux Services sociaux visant à l'adoption du principe du projet de loi 94, Loi sur le Conseil de la famille. Comme intervenant, je vais reconnaître Mme la députée de Marie-Victorin.

Mme Cécile Vermette

Mme Vermette: M. le Président, il me fait plaisir de prendre la parole parce que c'est un projet de loi qui était fort attendu depuis très longtemps, qui concerne de nombreuses familles québécoises et qui est d'une importance capitale en raison du problème que nous avons, à l'heure actuelle, au Québec, en ce qui concerne la démographie.

Effectivement, on fera une nuance entre une politique nataliste et une politique familiale, mais dans un cas comme dans l'autre, il faut la volonté politique d'un gouvernement de faire en sorte qu'il y ait un intérêt soutenu pour que nos familles puissent s'agrandir et, d'autre part, la volonté de leur apporter les éléments nécessaires qui favorisent le soutien aux familles.

Souvent, une politique familiale n'est pas tout simplement un problème d'argent. Un bon nombre de parents voudraient bien pouvoir augmenter leur famille et ce n'est pas nécessairement un manque d'argent, mais tout simplement un manque de soutien dans le milieu familial qui les en empêche. (0 h 40)

M. le Président, nous avons un nouveau ministre délégué à la Famille qui devait nous apporter une politique globale, une politique qui devrait tenir compte des différents éléments qui font surface lorsqu'on parle d'une politique familiale et des intérêts de l'ensemble des Québécois et des Québécoises qui forment une famille ici ou qui doivent vivre une situation parentale de quelque nature qu'elle soit, parce que vous savez qu'à l'heure actuelle il y a plus qu'un modèle dans la situation parentale. Il y a les familles élargies, il y a les familles monoparentales, il y a les familles biparentales et on doit avoir une approche particulière pour chacune de ces familles compte tenu des problématiques qui les concernent respectivement.

Le ministre responsable de la politique familiale, lorsqu'il a été nommé en titre a suscité certaines interrogations de la part des groupes et des organismes familiaux. On n'était pas tout à fait convaincu qu'il pourrait donner une politique familiale qui engloberait, justement, l'ensemble de la problématique, parce qu'on regardait un peu d'où il venait, son expérience antérieure et ce n'était qu'une expérience d'homme d'affaires. Il rassurait l'ensemble de ces organismes en disant que son expérience d'homme d'affaires lui permettrait la prudence et favoriserait des aménagements afin de faire des rapprochements entre les entreprises et son gouvernement qui favoriseraient la famille.

Je pense que, M. le Président, il faut beaucoup plus que cette intention d'homme d'affaires de vouloir rapprocher les entreprises par des formules qui favoriseraient une compréhension des besoins de la famille, surtout vis-à-vis de la nouvelle façon dont se développent les familles à l'heure actuelle puisqu'on sait qu'en 1990 il n'y aura que 14 % des couples dont un des conjoints ne travaillera pas. Donc, de plus en plus, la problématique se retourne vers des couples où l'homme et la femme devront travailler, assumeront un travail et devront partager les tâches de la famille. Cela veut dire qu'il faut qu'on s'attarde aux structures du travail, qu'il faut qu'on s'attarde aux garderies, qu'il faut qu'on s'attarde à moult problèmes face à cette orientation des couples où chacun, justement, vit l'égalité, ce qui permet à chacun, à tour de rôle, de mettre à profit ou de mettre à l'épreuve dans certains cas leurs connaissances parentales à l'endroit des enfants.

Est-ce que les interrogations de la société en général, le 19 août 1987, lors de la nomination du ministre Dutil, étaient fondées? Aujourd'hui, lorsqu'on voit la politique qui nous a été déposée, nous pouvons dire que finalement c'est peut-être une politique de diversion familiale, une politique un peu style coquille vide où on s'attache davantage aux structures qu'au contenant plutôt que d'apporter une aide directe à l'ensemble des familles, un soutien direct, parce qu'actuellement des familles sont en état d'urgence au Québec. Lorsqu'on connaît le taux de chômage dans le nombre de familles, lorsqu'on connaît actuellement les problématiques des mères chefs de famille monoparentale, lorsque l'on connaît les problèmes que comporte de plus en plus l'éducation des enfants à l'heure actuelle dans nos sociétés, je pense qu'il y a urgence. Nous n'avons qu'à regarder à l'heure actuelle les listes phénoménales à la DPJ. Les listes d'attente des enfants sont, justement, sujettes à des problèmes d'ordre familial. Je pense qu'il y a là urgence sociale. L'urgence sociale est non pas de mettre des structures et de faire encore de la consultation pour

savoir exactement ce qu'il en est.

Je pense que le débat sur le besoin d'une politique familiale, sur le véritable besoin en matière de soutien aux familles a été plus que largement fait. Il a été commencé sous l'ancien gouvernement parce que celui-ci avait un souci, une préoccupation de la qualité de vie pour les familles québécoises. Un document avait été produit en octobre 1985, mais, malheureusement, les élections étant arrivées en décembre 1985, nous n'avons pas pu mettre de l'avant notre politique tant réclamée par les familles du Québec.

Donc, M. le Président, le gouvernement arrivait, et qu'est-ce qu'il a fait? Il a fait fi complètement d'un ministre délégué à la Famille. Il n'a rien fait, il a attendu jusqu'à ce que la ministre de la Santé et des Services sociaux soit dépassée, plus capable de savoir à quoi s'en tenir et où donner de la tête. Elle était dépassée par son ministère et incapable de mener à bien plusieurs dossiers, dont, notamment, un dossier très important qui est celui de la politique familiale. Donc, on a décidé de mettre un ministre délégué à la Famille, c'est-à-dire de revenir à ce que l'ancien gouvernement avait mis de l'avant, pour favoriser, justement, une politique cohérente vis-à-vis de la famille.

Le nouveau ministre en titre, le ministre Dutil, a décidé que rien n'avait été fait avant lui. Il venait de découvrir que tout était à faire, que tout était à recommencer, que tout était à bâtir. Si c'est son expérience et son champ de connaissance dans le domaine des besoins de la famille, je pense que, le 29 août dans les journaux, quand bon nombre d'organismes se demandaient si le ministre pouvait satisfaire aux exigences de sa tâche ou avoir une compréhension, en tout cas, du dossier, ils n'avaient pas tout à fait tort de se poser de telles questions.

Alors, qu'est-ce qu'il en était? Finalement, tout le monde s'est dit: Est-ce que c'est un gouvernement qui veut gagner du temps? Et, effectivement, c'est un gouvernement qui voulait gagner du temps, alors que, déjà, on avait mis en place ce qu'il fallait. On avait commencé à consulter les organismes et les groupes et, déjà, on avançait des propositions intéressantes qui auraient apporté un soutien direct aux familles et qui auraient été plus heureuses pour les familles québécoises que certaines mesures fiscales qui ont été mises de l'avant et qui favorisaient le troisième enfant. Ma foi, lorsqu'on regarde actuellement le taux de natalité qui est de 1,4, ce n'est pas le troisième enfant qu'il faut favoriser, mais bien le deuxième enfant.

En tant qu'Opposition, nous avons lancé le débat, nous avons tenu un conseil national qui a fait une véritable réflexion sur une politique familiale. On allait de l'avant avec une politique familiale et de l'enfance beaucoup plus vaste, beaucoup plus globale que ce que nous propose actuellement le ministre délégué à la Famille. Je me demandais si le ministre délégué à la Famille finirait par laisser sa prudence, qui lui convient très bien, et s'il aurait un petit peu plus de courage politique, s'il irait un petit peu plus loin et s'il jouerait un rôle de leadership auprès de ses différents collègues au cabinet des ministres. Il semble que ce soit plus que de la prudence qu'affiche le ministre délégué à la Famille actuellement puisqu'il dit: Moi, je ne peux pas prendre position tant que mes collègues ne pourront pas, à cause de leurs divergences et d'une certaine résistance, en arriver à un consensus en ce qui concerne une politique de la famille.

M. le Président, je ne vois pas comment un ministre délégué peut assurer un leadership auprès de ses collègues lorsqu'il est dans l'attente d'un consensus, alors qu'on sait que les politiques familiales font référence à des valeurs et que les valeurs, c'est un thème où il est difficile de s'harmoniser et de trouver une politique à point unique, à chaussure unique. Le nouveau ministre semble capable de vivre avec cet état de fait. Il est capable aussi d'attendre que les gens puissent arriver à tous s'entendre. Je ne sais pas si tout le monde va avoir voix au chapitre. Il semble, M. le Président, qu'encore là on soit loin d'arriver à des politiques qui vont favoriser la famille.

Nous avons eu à nous pencher récemment sur la politique qui a été déposée en ce qui concerne les mesures d'aide sociale, qui ne favorise en rien, mais en rien la politique familiale. Est-ce que c'est le rôle de leadership que veut jouer le ministre délégué à la Famille lorsqu'il dit qu'un de ses principaux objectifs, c'est de faire en sorte que chacun des différents ministères se préoccupe de donner aux parents des moyens d'élever leurs enfants en fonction de la politique familiale? Je ne pense pas que ce soit une façon de faire, je ne crois pas. (0 h 50)

Concernant les politiques d'aide sociale, que va-t-il se passer, finalement, lorsqu'on parle du programme APTE? Seulement dans le volet pour les femmes - je vais laisser de côté tout ce qui concerne les familles à faible revenu - c'est une diminution totale de revenus pour les femmes qui, pendant une grossesse, ou avant ou après, seront considérées comme aptes au travail. Si elles ne vont pas travailler, il y aura une diminution de leurs prestations. C'est incroyable, c'est inadmissible.

Et, on dit, ensuite, que ce ministre joue son rôle de coordonnateur entre les différents ministères et qu'il essaie de convaincre ses collègues de la nécessité de prendre en considération les besoins des

familles québécoises. C'est de la foutaise. Ce n'est pas prendre les Québécoises et les Québécois au sérieux. Ce n'est pas prendre au sérieux les préoccupations des Québécois et des Québécoises. Il y a une chanson qui dit: Paroles, paroles, paroles! C'est un peu le cas de ce gouvernement, ce ne sont que des paroles, des paroles vides de sens, des paroles qui n'ont aucune résonance, des paroles qui ne font plus rire personne. Les familles québécoises s'attendaient à une meilleure réception de la part du ministre délégué à la Famille. Elles s'attendaient, à ce moment-ci, après deux ans de pouvoir de ce gouvernement, après deux ans de réflexion, après deux ans de lecture attentive de tous les documents déposés sur la famille, à des considérations et à des politiques véritables et directes qui pourraient apporter une aide concrète aux familles.

Je pourrais vous donner d'autres exemples. En ce qui concerne les familles qui ont un enfant handicapé, où est le soutien qu'on peut donner à ces familles qui sont épuisées, mais qui veulent garder leur enfant à l'intérieur de la cellule familiale pour lui donner la meilleure chance possible d'intégration sociale. Le répit gardiennage? Ce n'est pas grand-chose, me direz-vous, mais il faut y penser. Il faut avoir une volonté politique de mettre en application des mesures qui font en sorte que, quelle que soit la situation de la famille ou quel que soit l'état physiologique ou intellectuel des enfants ou même du conjoint, ils puissent être maintenus dans une cellule familiale. Vous savez que ce n'est pas facile, aujourd'hui, de maintenir la cellule familiale. C'est fragile, c'est même volatile dans certains cas. Présentement, il faudrait qu'on démontre une volonté réelle d'encourager les familles, d'empêcher leur éclatemt t et de permettre de maintenir ce noyau essentiel pour une société. C'est la base même de notre société.

Encore là, on attend. On attend on ne sait quoi. On laisse passer le train. Évidemment, on vient de changer de conducteur mais on pense que le conducteur n'a pas suffisamment appris à manipuler. On ne sait même pas s'il a suffisamment de connaissances pour conduire le train à la gare. Pour les parents du Québec, c'est un très gros prix à payer. On pouvait s'attendre à beaucoup plus pour les familles québécoises.

Je pourrais vous dire que le nouveau titulaire responsable de la politique familiale a précisé qu'il avait une très grande connaissance des problèmes sociaux, à cause de l'expérience qu'il avait acquise alors qu'il était maire, qu'il était dans le milieu municipal. Il disait: Écoutez, j'ai tellement bien compris les problèmes sociaux que j'ai travaillé à des dossiers à vocation sociale, et il donnait l'exemple du dossier des ambulances de Beauce. J'espère que vous ne vous tromperez pas à ce point avec les politiques familiales parce que c'est bon après le fait. Cela me fait penser un peu au volet des politiques pour les femmes violentées, quand on dit: Oui, oui, oui, bien sûr, on est conscient du problème des femmes violentées. Mais, quand vient le temps de démontrer concrètement et d'une façon tangible qu'on veut agir - pas juste avec des paroles - qu'on veut vraiment apporter des solutions concrètes et favoriser un encadrement, un soutien pour ces femmes, il faut qu'on donne les sommes nécessaires pour répondre aux besoins. Là encore, je pense qu'on est très timide. Je ne pense pas qu'on ait une politique cohérente, globale.

Actuellement, on se targue de beaucoup de choses, mais il en arrive très peu. Finalement, c'est surtout des discours. Mais, pour les discours, ce sont des gens très habiles, très adroits et qui ont finalement très souvent réponse à tous les maux. Et, ma foi du bon Dieu, on peut presque penser qu'ils ont eu la potion magique des schtroumpfs. On se demande si les trois petits tours de magie auxquels ils ont habitué la population du Québec vont toujours faire en sorte qu'on va se retrouver avec un chapeau continuellement plein de surprises, mais de mauvaises surprises, de sorte qu'il n'en reste rien. Ce sont des illusions pour l'ensemble de la population.

Je peux vous dire que les familles québécoises, je pense, mériteraient autre chose que simplement des illusions. Les familles québécoises méritent davantage parce que, si on veut vraiment encourager la famille, si on veut régler les problèmes de natalité que nous connaissons à l'heure actuelle, mettre un terme, justement, à tout ce que l'on connaît à l'heure actuelle et permettre que la famille soit considérée comme étant un objectif valable dans notre société, il faut vraiment trouver les moyens. C'est urgent, il faut les trouver présentement et non pas attendre le bon vouloir de l'ensemble des ministres qui sont plus souvent qu'autrement préoccupés par d'autres détails et d'autres soucis que ceux de favoriser la famille. C'est un gouvernement comptable. C'est peut-être un gouvernement d'hommes d'affaires. Ce sont peut-être des gens qui sont habitués plus à la prudence qu'à autre chose, mais qui ne donnent absolument rien. Une prudence, finalement, à l'extrême qui fait qu'on a les pieds et les mains liés. En d'autres termes, les gens doivent attendre qu'il y en ait qui prennent des décisions valables. Ces décisions tardent toujours à venir et, finalement, c'est la population qui en fait les frais.

M. le Président, je pense que je pourrais vous donner plein d'exemples sur ce qui se passe à l'heure actuelle. Il y a toute la violence faite aux enfants. C'est un volet

dont on ne parle pas beaucoup dans cette politique. Dieu sait combien ces enfants, actuellement, sont vulnérables et fragiles. Ils sont sans défense. Et, généralement, très peu de gens dans la société se soucient de leur intérêt, justement parce qu'ils sont victimes des adultes bien plus souvent qu'autrement. Nous avons vu tout ce qui s'est passé dans les institutions dernièrement. Là où on pensait que c'était la sécurité pour ces enfants, on s'est aperçu que, des fois, c'était assez précaire comme sécurité. Je pense que, si on n'aide pas directement la famille avec tout ce qu'on a comme problèmes, c'est-à-dire les problèmes d'emploi, les problèmes des garderies... Je pourrais vous entretenir longtemps du problème des garderies à l'heure actuelle. Qu'adviendra-t-il d'une politique des garderies? Encore là on attend. On attend toujours. On est à la remorque d'autres politiques. Ce sont les politiques du fédéral, comme si on n'était pas capable ici au Québec d'aller de l'avant et de mettre...

Le Vice-Président: En conclusion, Mme la députée de Marie-Victorin.

Une voix: Merci beaucoup.

Mme Vermette: ...en application des politiques qui nous concernent et qui favoriseraient, justement, les familles québécoises, et surtout les femmes du Québec. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président: Je cède maintenant la parole à M. le député de Lac-Saint-Jean et whip de l'Opposition.

M. Jacques Brassard

M. Brassard: Merci, M. le Président. Je dois vous dire, tout d'abord, que je trouve déplorable que nous abordions cette question à une heure aussi tardive, presque en pleine nuit. Je trouve cela déplorable que le gouvernement appelle un projet de loi de cette nature en pleine nuit, à 1 heure du matin.

M. Jolivet: C'est rire du monde.

M. Brassard: M. le Président, il semble - du moins, c'est ce que nous annonçaient les journaux il y a quelques semaines - que le Parti libéral était décidé à effectuer un virage social et qu'entre autres choses il allait se doter d'une politique de la famille. Magnifique, formidable, d'autant plus que le premier ministre, à plusieurs reprises au cours des deux dernières années, s'était inquiété du phénomène de la dénatalité, entre autres, du phénomène du vieillissement de la société québécoise et de l'absence de mesures et de politiques concrètes pour soutenir et aider la famille québécoise. (1 heure)

Donc, le gouvernement se prépare à effectuer un virage social et, entre autres, à se doter d'une politique de la famille. C'est ce que le ministre responsable nous a révélé récemment. Quand on regarde son énoncé de politique, surgit tout de suite à l'esprit une petite fable de La Fontaine concernant une montagne qui accouchait d'une souris, parce qu'il s'agit véritablement de cela. Voilà que la montagne accouche d'une souris. Le titre est pompeux, cela s'appelle: "La politique familiale, énoncé des orientations et de la dynamique administrative". Le titre pourrait nous indiquer que nous allons nous retrouver en face d'une vraie politique de la famille, mais la réalité est tout autre; quand on en prend connaissance, on se rend compte qu'on est en face, comme le signalait Gilles Lesage dans un éditorial du Devoir, d'une enfilade de voeux pieux, un ramassis de voeux pieux. On plane dans le ciel éthéré des beaux et grands principes. Il est évident qu'on ne peut pas être contre ces principes; peut-on être contre la vertu et la tarte aux pommes? Bien sûr que non! Ces principes sont merveilleux, je vous en cite quelques-uns.

Le gouvernement, dans les limites de sa compétence et de sa responsabilité, veut reconnaître la famille comme valeur collective fondamentale, car son bien-être et celui des individus qui la composent sont considérés comme sous-jacents au bien-être de la société. Y a-t-il quelqu'un au Québec qui peut être contre cela? Évidemment pas. Magnifique, très beau principe, extraordinaire, unanimité, consensus! Nous sommes unanimes sur un principe de cet ordre-là!

Deuxièmement, le gouvernement veut contribuer à la cohésion et à la stabilité de la famille, ainsi que tenir compte davantage de la spécificité de la réalité familiale. Bravo! formidable, attendrissant! On ne peut pas s'opposer non plus à un principe de cette nature.

Troisièmement, le gouvernement veut soutenir les parents à titre de premiers responsables légaux et sociaux de la prise en charge des enfants, évitant de se substituer à eux tout en protégeant l'intérêt de l'enfant. Formidable, un principe extraordinaire également!

Quand on regarde les principes, évidemment personne, pas plus de l'autre côté que de ce côté-ci, le côté de l'Opposition, peut s'opposer à de pareils principes. C'est vraiment de l'ordre des voeux pieux. Par contre, puisque le document s'appelle Politique familiale, il est évident qu'on cherche un peu plus loin. On cherche le plan d'action, la feuille de route, les politiques et les mesures concrètes, les programmes concrets en vue d'atteindre et d'appliquer les principes que je viens de citer, puisqu'il s'agit d'une politique. Dans mon esprit, c'est

comme cela que je vois les choses. Une politique, cela comprend, bien sûr, un certain nombre de principes de base, mais ces principes sont accompagnés de mesures concrètes, d'actions précises, de certains programmes d'action; c'est cela, une politique. Là, cela s'appelle une politique, à ce moment-là. Quand on ne voit que les principes, quand cela ne comporte que des principes, on ne peut pas appeler cela une politique de la famille, cela m'apparatt de la fausse représentation et de la poudre aux yeux.

Alors, on cherche le plan d'action dans tout cela. Des mesures concrètes, il n'y en a nulle trace. Rien, sauf une qui fait l'objet du projet de loi qui est à l'étude, un Conseil consultatif de la famille. C'est évident qu'on ne sera pas contre cela. Qui est contre la mise en place d'un Conseil consultatif de la famille? On va voter pour ce projet de loi, c'est bien sûr, de ce côté-ci, mais c'est la seule et unique mesure concrète qu'on retrouve dans cette supposée politique familiale rendue publique récemment.

Soit dit en passant, il y a une espèce de paradoxe qu'on constate. Depuis deux ans, ce gouvernement s'acharne à supprimer et à abolir les conseils consultatifs à la suite du rapport Gobeil parce que, soi-disant, ce sont des organismes inutiles qui gaspillent des ressources de l'État et qui n'ont pas leur raison d'être et que, par conséquent, on se doit de les supprimer. Je donne deux exemples. On a adopté ici une loi qui abolissait le Conseil consultatif du tourisme. On a également adopté une autre loi qui abolissait le Conseil consultatif de la faune. Selon cette perspective, les conseils consultatifs n'ont pas leur raison d'être et il n'y a pas lieu de les maintenir; il faut les abolir. Par contre, paradoxalement, lorsqu'on se retrouve devant des problèmes cruciaux, des problèmes majeurs et complexes, la réaction du gouvernement - c'est curieux, c'est étrange - c'est de mettre en place un conseil consultatif. D'un côté, on abolit joyeusement, on abolit allègrement les conseils consultatifs et, de l'autre, quand on a à affronter, à faire face à un problème majeur, un problème social important, la réaction de ce gouvernement - et la seule réaction - c'est de mettre en place un conseil consultatif. Cela a été le cas avec la jeunesse. Pendant toute la campagne électorale et pendant des mois, ce gouvernement, ce parti a prétendu qu'il allait résoudre le problème de la jeunesse, le problème du chômage des jeunes, et qu'il allait régler tous les problèmes vécus par les jeunes Québécois. Une fois au pouvoir, qu'est-ce qu'il fait? Quelle est la seule mesure qu'il adopte? Il met en place un Conseil consultatif de la jeunesse. Point final. C'est tout. C'est cela la politique de la jeunesse de ce gouvernement, un Conseil consultatif de la jeunesse, rien d'autre. C'est un peu mince quand on se rappelle les promesses mirobolantes faites aux jeunes lors de la campagne électorale de 1985. Là, on se retrouve devant un problème grave aussi, le problème de la famille québécoise, un problème complexe, un problème social important. Quelle est la réaction de ce gouvernement, la seule et concrète? Créer, mettre en place un Conseil consultatif de la famille. C'est un peu court comme politique. C'est un peu mince, M. le Président. Face à un problème complexe, c'est une solution passablement simpliste que de penser qu'en ayant un Conseil consultatif de la famille on se trouve à attaquer de front et de façon efficace les problèmes vécus par la famille québécoise.

Donc, nul plan d'action, nulle feuille de route, nulle mesure concrète visant à résoudre et à s'attaquer aux multiples problèmes vécus par la famille québécoise. Pourtant, Dieu sait qu'il y a urgence en la matière et tous ceux et toutes celles au Québec qui s'intéressent à cette question en arrivent à la même conclusion: il y a urgence d'agir. Que ce soient les organismes familiaux ou les groupes féminins, les groupes de femmes, tout le monde s'accorde à dire au Québec qu'il est urgent de s'attaquer aux problèmes complexes et multiples vécus par la famille québécoise.

Les solutions ne manquent pas. S'il n'y avait pas eu des études, une recherche, une analyse de la problématique de la famille québécoise, on pourrait dire: II faut faire ce travail-là, mais il est fait. Il a été fait et il a été bien fait par le comité de la consultation sur la politique familiale, qui a remis ses deux rapports en 1986, qui était présidé, comme on le sait, par M. Champagne-Gilbert. Là-dedans, il y a toute une série de recommandations nombreuses, variées, qui concernent toutes les facettes de la famille québécoise et tous les problèmes vécus par la famille québécoise. Il y a plusieurs recommandations. On ne demande même pas au gouvernement d'appliquer les quelque 100 recommandations; il y en a plus d'une centaine. Le comité lui-même s'est dit: II faut fixer des priorités. Il est évident qu'on ne pourra pas appliquer toutes ces recommandations. Il serait important d'en déterminer certaines jugées prioritaires. (1 h 10)

II a fait le travail. On se serait attendu à tout le moins, dans un embryon de politique familiale de la part de ce gouvernement, d'y retrouver l'essentiel des recommandations jugées prioritaires, urgentes à réaliser proposées par le comité de consultation sur la politique familiale. Ce n'est pas du tout le cas. La seule recommandation qu'on y retrouve, c'est celle qui porte sur les structures administratives à mettre en place. On le voit, on a décidé de

créer un Conseil consultatif de la famille. C'est tout. Pour le reste, des mesures concrètes qui concerneraient directement les familles québécoises, rien du tout.

Je vous donne un exemple de ces recommandations jugées prioritaires par le comité: Agir et faire agir pour endiguer le fléau social de la violence familiale et conjugale. Cela aurait été une belle occasion de revoir tout le financement des maisons d'hébergement pour femmes violentées qui connaissent actuellement des problèmes de financement et de fonctionnement au Québec. Plusieurs sont obligées de fermer leurs portes un peu partout au Québec. Il y a un problème grave du côté du réseau des maisons d'hébergement pour femmes violentées et, parmi les mesures prioritaires proposées par le comité de consultation sur la politique familiale, il y avait cette recommandation. Une politique familiale comporte en tout premier lieu et de façon urgente des mesures pour endiguer le fléau social de la violence familiale et conjugale. Or, rien de cela ne se retrouve dans la prétendue politique familiale du gouvernement libéral.

Deuxièmement, on proposait comme mesure urgente, prioritaire également, de réaménager et d'augmenter les sommes allouées aux allocations familiales existantes, de les augmenter substantiellement. L'une des recommandations allait dans le sens d'un réaménagement de façon à permettre aux parents de recevoir un montant plus substantiel chaque mois et à rendre davantage justice aux familles moyennes et aux familles pauvres pour ce qui est des allocations familiales. Rien du tout dans l'énoncé de politique familiale du gouvernement libéral à ce chapitre.

Troisièmement, le comité recommandait d'adapter d'urgence le monde du travail aux besoins des parents. Cela veut dire quoi concrètement? Cela voulait dire adopter des mesures concernant les congés parentaux, les aménagements du temps de travail et de la formation professionnelle. Pas un traître mot dans la supposée politique familiale sur cette question majeure importante concernant les familles québécoises.

Quatrièmement, on recommandait d'assurer trois types de services prioritaires pour les familles: services de garde, services aux adolescents et services sociaux, certains services de santé aux familles. Pour les services de garde, il n'y a rien dans le document qui nous indique que le gouvernement a l'intention de se doter d'une véritable politique de services de garde, d'augmenter les places en garderies, d'augmenter également le financement des garderies, rien de tout cela. Pourtant, selon le comité, c'est un service capital pour les familles québécoises, compte tenu du contexte dans lequel on vit présentement.

Cinquièmement, on parlait d'aider les adolescents et les adolescentes et on faisait référence directement aux maisons de jeunes. Qu'arrive-t-il aux maisons de jeunes présentement? La même chose qu'aux maisons d'hébergement pour femmes violentées: plusieurs ont des problèmes de financement, manquent de fonds, de ressources et doivent souvent fermer leurs portes. On se serait attendu à tout le moins que, dans un énoncé de politique familiale, non seulement on se contente d'énoncer des principes, mais qu'en plus on rende publiques un certain nombre de mesures jugées prioritaires, concrètes pour soutenir vraiment les familles québécoises.

Il n'y avait qu'à puiser dans le rapport du comité de la consultation sur la politique familiale. Il n'y avait qu'à en sélectionner un certain nombre, le travail était fait, le travail de consultation, d'analyse, de recherche des besoins. On avait circonscrit les problèmes, on les avait identifiés et on avait proposé des solutions concrètes à ces problèmes. Il n'y avait donc qu'à puiser dans ce document. Si on voulait s'éviter la tâche de faire une sélection, c'est simple, on n'avait qu'à choisir parmi les priorités sélectionnées par le comité lui-même, dont je viens de parler précédemment. Pas du tout, rien de tout cela, pas de mesure concrète, simplement des voeux pieux. On ne quitte pas le ciel éclairé des beaux principes pour se mettre les pieds sur terre.

Non seulement ces beaux principes ne sont pas accompagnés de mesures concrètes, mais en plus, au moment même où ces beaux principes sont rendus publics, le gouvernement, dans d'autres projets de politique et de réforme, viole impunément, sans vergogne, ces beaux principes énoncés. L'exemple le plus patent, le plus tangible, c'est le projet de réforme de l'aide sociale du ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu. Il y a dans cette réforme des éléments qui vont totalement à l'encontre des principes qu'on retrouve dans l'énoncé de politique familiale. Il y a là des éléments, des faits, des propositions qui sont en complète contradiction avec les beaux principes qu'on retrouve dans l'énoncé de politique familiale, et j'en donne deux exemples, M. le Président.

Dans le projet de réforme sociale, une femme enceinte, à partir de son sixième mois de grossesse, verra sa prestation réduite de 43 $ en raison de sa non-disponibilité aux mesures d'employabilité. Deuxième exemple, une femme chef de famille qui s'acquitte de la garde de son bébé de six mois perdra 24 $ par mois parce que non disponible à participer aux mesures d'employabilité. Un autre exemple: pour assurer la garde d'enfants de plus de deux ans, un homme ou une femme chef de famille monoparentale qui refuse de participer aux mesures

d'employabilité pour s'acquitter de la garde de ses deux enfants de trois et cinq ans verra son chèque mensuel réduit de 53 $. Cela, c'est ce qu'on retrouve dans le projet de réforme de l'aide sociale, des mesures qui vont complètement à l'encontre des beaux principes visant à soutenir, à aider à l'épanouissement de la famille québécoise. C'est vraiment aberrant!

Non seulement il n'y a pas de mesure concrète dans cet énoncé de politique, mais en plus, avant même qu'il soit rendu public, le gouvernement pilote, parraine des réformes majeures, entre autres celle de l'aide sociale, qui sont en contradiction avec les principes qu'on retrouve dans la supposée politique familiale.

M. le Président, on est en face d'une opération poudre aux yeux. Le ministre, d'un côté, en rendant public son énoncé de principe, proclame que, désormais, ce gouvernement va penser famille, mais c'est une pétition de principes qui n'a pas de répercussion dans l'action concrète, l'action politique de ce gouvernement puisque les politiques, les projets et les réformes que ce gouvernement adopte ne respectent pas, ne s'inspirent même pas des beaux principes avec lesquels, évidemment, je suis d'accord, des beaux principes qu'on retrouve dans cet énoncé de politique.

Bien sûr, on va voter pour la mise en place d'un conseil de la famille, on ne peut pas être contre la vertu, c'est bien évident, on ne peut que dénoncer cette opération poudre aux yeux, cette montagne qui accouche d'une souris, cette absence de véritable politique familiale au Québec. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président: Pour la poursuite du débat, pas d'autre intervention? Oui. Je vais céder la parole à M. le député de Laviolette et leader adjoint de l'Opposition. (1 h 20)

M. Jean-Pierre Jolivet

M. Jolivet: Merci, M. le Président. J'attendais que des gens de l'autre côté se lèvent, c'est pour cela que j'ai un peu tardé à me lever. Peut-être contrairement à d'autres, je ne suis pas très heureux de me lever cette nuit, à 1 h 20, pour parler d'une supposée politique familiale. J'ai fait partie, avec mon épouse, de ce que l'on appelle encore, puisqu'il reste encore des cellules de ce genre, les foyers Notre-Dame. À l'époque de mes premières années en 1970, les foyers Notre-Dame avaient soulevé au Québec beaucoup de discussions et un des thèmes dont nous avions discuté à l'époque était: Vers une véritable politique de la famille au Québec. C'était en 1972. En 1973, au moment où je me suis présenté comme candidat pour le Parti québécois pour la première fois, j'avais soulevé ces thèmes eu égard à ce dont nous avions discuté lors de colloques, de rencontres avec beaucoup de couples au Québec. Malheureusement, je n'ai pas été élu cette année-là, mais en 1976 je l'ai été, et mon épouse et moi, ayant six enfants, donc formant une famille nombreuse au Québec aujourd'hui, nous avions toujours cru que l'ensemble des politiques d'un gouvernement devait tendre à favoriser la famille.

On pourrait me dire aujourd'hui, et c'est la façon facile d'y répondre: Pendant les neuf ans que votre gouvernement a été au pouvoir, il n'a pas fait tout ce qui aurait dû être fait. Je serai assez honnête pour dire oui. La question qui nous préoccupe ce soir n'est pas là. La discussion qui a eu lieu au Québec pendant nombre d'années avait amené le gouvernement du Parti québécois à créer justement un poste de ministre délégué à la Famille qui avait comme travail de préparer la politique familiale au Québec. Cette politique a été déposée, on s'en souvient, à la suite du travail volumineux et formidable qui avait été fait par mon collègue, le député de Nicolet, M. Yves Beaumier, assisté d'un comité de travail très important au Québec, qui nous a donné les deux documents dont faisait mention mon collègue qui m'a précédé, le whip du gouvernement, député de Lac-Saint-Jean.

Dès le moment où le parti politique qui forme le gouvernement a pris les rênes du pouvoir, on se serait attendu à ce qu'il dise: Oui, c'est important, il y avait un ministre délégué à la Famille faisant partie du gouvernement précédent et, en conséquence, nous allons en nommer un autre immédiatement. Preuve de ce que je dis, j'étais moi-même ministre délégué aux Forêts. J'avais eu comme mandat, dans l'année où j'ai occupé ce poste, de mettre deux choses en place: d'abord la politique de reboisement intensif dans les forêts québécoises et une politique forestière. C'était tellement important au point de vue économique qu'on a nommé, dès l'arrivée de ce parti au gouvernement, un ministre délégué aux Forêts qui a continué l'oeuvre qui avait été commencée. Mais cela n'a pas été la même chose avec le gouvernement actuel en ce qui concerne la famille. D'abord, une ministre des Affaires sociales surchargée de travail, maintenant ministre de la Santé et des Services sociaux grâce au chef de l'Opposition actuel, qui a été le ministre qui a changé le titre du ministère des Affaires sociales en celui du ministère de la Santé et des Services sociaux. À cette personne on avait adjoint une autre personne, l'adjoint parlementaire, lequel est le député qui est en face de moi, le député de Laurier, qui s'occupait d'une façon particulière des personnes handicapées.

Comme je l'ai vu travailler, j'aurais

pensé qu'il aurait été nommé effectivement ministre délégué à la Famille. Malheureusement, cela n'a pas été fait pour des raisons que l'on ne connaît pas. Une autre personne qui était ministre délégué aux Pêcheries est devenue ministre délégué à la Famille et je me suis un peu amusé en disant que malheureusement ce ministre qui a été nommé est en train de faire un travail qui est un peu futile, d'une certaine façon, parce qu'il vient à l'encontre de tout ce qui a été demandé par la population du Québec et je devrais même dire promis par le Parti libéral lors de la dernière campagne électorale.

Il est évident que nous ne pouvons pas nous opposer à la mise sur pied d'un comité consultatif. Ce serait, à mon avis, vraiment incorrect de le faire. Mais je dois vous dire que ce n'est pas grand-chose ce qu'on nous propose là pour toute une politique de la famille. Moi j'ai l'occasion depuis onze ans de représenter un comté qui est formé de plusieurs parties, le bas du comté, le centre du comté et le haut du comté, où il y a des gens qui ont essayé avec les moyens du bord de se donner tout ce qu'il fallait pour justement aider l'ensemble de la famille. Les groupes que je mentionnais tout à l'heure, les foyers Notre-Dame, il en existe encore à Grand-Mère. Il en existe encore à Saint-Tite. Pour montrer que j'ai encore pour ces gens le respect le plus total du travail qu'ils font, dans ce qu'on appelle le budget hors normes du député, d'année en année, à toutes les fois qu'ils m'ont fait une demande pour les aider, j'ai, par l'intermédiaire du budget qui m'est fourni à l'Assemblée nationale et qui est du ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, aidé dans la mesure du possible ces groupes à travailler pour la famille dans mon comté.

J'ai même participé avec eux à des rencontres. On est allé donner ce que l'on avait comme connaissance, on a aidé ces gens à faire en sorte que justement ils prennent position sur les dossiers qui les concernent comme famille. Que ce soient des dossiers économiques, que ce soient des dossiers concernant la famille, les couples, les difficultés que rencontrent les jeunes, ou, comme on le connaît actuellement dans l'ensemble de mon comté comme partout ailleurs, les maisons des jeunes, que ce soit à La Tuque, à Sainte-Thècle ou à Grand-Mère, les maisons pour les personnes violentées et les personnes, les femmes en difficultés, que ce soit à La Tuque ou à Grand-Mère, par l'intermédiaire du groupe de Shawinigan, puisque c'est régional celui-là... C'est la même chose concernant l'ensemble des garderies, que ce soit à La Tuque, que ce soit à Saint-Tite, que ce soit à Saint-Georges-de-Champlain ou que ce soit à Grand-Mère.

Je dois vous dire, M. le Président, que j'ai, dans mon travail, tout fait pour venir en aide à ces personnes qui, à différents niveaux, travaillent pour le bien-être de la famille au Québec. Je crois à la famille au Québec, je crois à celle que mon épouse et moi formons, mais je sais aussi les difficultés que cela comporte. Cela a l'air de rien, vous savez. La politique telle qu'on nous la présente regarde l'ensemble des ministères. Ce sont des programmes de chacun des ministères dont on n'a aucune connaissance actuellement mais dont on sait que, pour certains, il y a contradiction par rapport au principe qui a été énoncé par le ministre délégué à la Famille.

Je sais ce que cela veut dire. Vous savez, mes jeunes garçons qui ont joué au hockey savent aussi ce que ça coûte à un père de famille, à une famille, pour leur permettre de jouer au hockey. Quand on a l'obligation - parce qu'on est une grosse famille - d'acheter des automobiles plus grosses et quand on a une automobile plus grosse et que tu amènes un enfant, qu'arrive-t-il en contrepartie? C'est que tous les enfants du voisinage voyagent avec toi. Dans ce contexte, eux ne paient rien. Et souvent, que se passe-t-il? C'est que ces personnes souvent n'ont qu'un enfant ou deux enfants au maximum. Tandis que l'autre en a plusieurs. Il y des politiques qui sont faites partout dans le monde qui sont intéressantes. Il va falloir qu'on les considère. Je pense qu'on ne va pas assez loin avec cette politique qui nous est présentée et j'espère qu'on va aller plus loin.

Quelles sont les difficultés qu'ont ces familles quand elles se retrouvent ensemble dans des lieux d'amusement, parce qu'elles ont le droit d'aller s'amuser? On doit payer, pour les enfants, le même prix que pour n'importe quel adulte. Vous savez, pour les gens qui se regroupent par quinzaine, par vingtaine ce qui se passe? Ils ont des prix de réduction. Parce qu'on est une famille, on n'y a pas droit. (1 h 30)

Aux États-Unis, en Ontario, vous avez des prix familiaux. Il y a bien des places au Québec où on n'a pas cela. Il va falloir qu'on s'y penche et permettre qu'on passe au-delà de deux enfants, qu'on aille à un troisième enfant et qu'on aille peut-être même à un quatrième enfant et qu'on ne soit pas considéré, les familles comme la mienne, celle du député de Dubuc, de la députée de Johnson ou d'autres, comme des exceptions telles qu'on se fait regarder avec des gros yeux. Il va falloir qu'on comprenne que la famille au Québec, c'est le moyen de permettre à la nation québécoise de survivre. L'immigration, c'est une chose, c'est nécessaire, mais la famille ici est également importante.

C'est sûr que, parfois, quand je parle de cela à des gens, ils me trouvent un peu farfelu, parce que, eux, ils ont peut-être un enfant, peut-être deux enfants. Combien de

personnes à travers le Québec vont dire qu'on voit les "key children", comme on les appelle, les enfants aux clés, les enfants qui sont laissés tout seuls à la maison, parce que les parents sont obligés de travailler en dehors, parce qu'il n'y a pas de garderie populaire pour leur donner le service?

J'ai eu l'occasion, comme porte-parole de l'Opposition en matière d'éducation, de visiter des garderies en milieu scolaire. Il y a de très beaux exemples. À La Tuque, il y en a une qui vient d'ouvrir. À Grand-Mère, il y a une garderie en milieu populaire; il y a une garderie en garde familiale. Ce n'est pas facile et je les ai aidées à organiser leurs activités. Pourquoi? Parce que j'y crois et je pense que ce qu'on nous propose, c'est un début, mais ce n'est pas suffisant. Ce n'est pas suffisant en regard de ce que ce parti politique a promis. Ce n'est pas suffisant pour les femmes en difficulté. Ce n'est pas suffisant pour les garderies. Ce n'est pas suffisant pour les jeunes.

Je le sais, parce que c'est avec difficulté, représentations par-dessus représentations, qu'on a obtenu de l'argent pour ce qu'on a appelé à Sainte-Thècle la "Shoe-claque". C'est un milieu où des jeunes en difficulté se retrouvent. À Grand-Mère, à la maison des jeunes, à La Tuque, des jeunes ont décidé de bouger et de faire bouger le monde, nous avons ouvert l'automne passé une bâtisse neuve que les gens, les jeunes, ont été chercher en termes d'argent pour leur permettre de bâtir une bâtisse fonctionnelle pour eux.

Je les ai félicités et je les encourage. Mais l'État doit venir en aide à ce monde. L'État doit le faire dans des politiques qui leur permettent... Or, je ne vois pas, dans ce qui nous est présenté, qu'il y a vraiment cette volonté.

Pendant que le ministre vient nous proposer une telle loi, qu'est-ce que l'on fait? On coupe dans des maisons pour les femmes en difficulté, on coupe dans des maisons pour les jeunes. On dit: Bien non, on met plus d'argent. Cela me fait toujours penser à des gens qui disent: On met plus d'argent, mais comme on est plusieurs à le repartager, cela en fait moins pour tout le monde.

Il y a des indexations qui ne sont pas données. Il y a des indexations qui ne permettent pas que des maisons puissent survivre. C'est cela qui est une vraie politique. C'est d'abord de consolider ce qu'il y a là et, ensuite, d'en mettre d'autres. Mais, pour cela, s'il faut consolider, il ne faut pas diviser le gâteau avec plusieurs autres en donnant à d'autres à nouveau, comme à des maisons de femmes violentées, maisons de jeunes ou garderies. Il faut absolument en mettre plus.

J'écoutais ce matin... On avait l'impression, à la période de questions... Je devrais dire hier matin, puisqu'on est déjà rendu à 1 h 30 de la nuit. J'entendais dire des choses épouvantables. C'est qu'on est en train de nous dire qu'avec plus on fait moins. Exemple: l'hôpital Sainte-Justine pour les enfants. On est en train de nous dire qu'avec plus d'argent on en faisait moins.

Est-ce à dire qu'avant, avec moins on en faisait plus? C'est la question qu'il faut se poser, M. le Président. C'était aussi clair que cela, ce que la ministre de la Santé et des Services sociaux nous disait. Nous avons devant nous un beau principe. Nous avons devant nous ce qui nous permet peut-être de dire que la coquille est belle, mais que dans la coquille il n'y a rien, une coquille qui ne fait que répondre à ce petit gouvernement social de fin de semaine. Le conseil général leur a dit: II faut faire cela, le vent est bon. Allons-y! Mais pour cela, il faut sortir quelque chose. Qu'est-ce qu'on fait? Comme je le disais tout à l'heure, on fait comme le ministre de la Justice, on présente un projet de loi d'un article, on présente un projet de loi de deux articles pour montrer qu'on fait quelque chose, pour montrer qu'on a des projets, mais en réalité cela ne change rien.

Comme je lui disais, s'il y a 45 changements, va-t-il présenter 45 projets de loi à raison d'un par année? Et cela va prendre 45 ans pour changer quelque chose. Ce n'est pas de cette façon que cela se fait. Ce n'est pas en nous présentant des projets de loi comme celui-là où il n'y a rien sauf des voeux pieux, et pas plus si on ne donne pas la substance qu'il faut y mettre.

M. le Président, c'est ce qui m'inquiète. Je le dis comme je le pense, avec cette capacité que j'ai depuis onze ans de représenter mon milieu le mieux possible. Juste un exemple: l'époque de la maison de femmes de La Tuque, qu'on appelle Le Toit de l'amitié. Je m'en souviendrai toujours, parce qu'il y a des gens là-bas qui disaient que nous ne l'obtiendrions jamais: Cela n'a pas de bon sens, La Tuque est au fin fond du monde. Ce sont des gens de Montréal qui disaient cela, pas les gens de La Tuque. Les gens de La Tuque, eux, disaient: On va l'avoir, on va s'organiser et on va l'obtenir. Mais les gens de Montréal ou de Québec, le Conseil du statut de la femme, quand on l'a obtenu, ont dit: Comment avez-vous fait? On est tout surpris, parce qu'on n'a même pas de ces maisons à Montréal en nombre suffisant comme celle qu'on avait à La Tuque à l'époque. Il y en avait, mais pas en nombre suffisant. On leur a dit: Nous nous sommes défendus et nous sommes allés jusqu'au bout.

C'est cela que je demande à ce gouvernement. Il a dit pendant la campagne électorale qu'il y avait des changements à faire. Soit! Nous aussi, nous disions qu'il y en avait à faire. Rien n'est parfait dans le

monde. Il y a des corrections à apporter, des changements à apporter. Oui. Mais faire des promesses et ne donner aucun accomplissement à ces promesses, ce que je dis, M. le Président, c'est que cela n'a pas de bon sens.

Nous avons donc devant nous des voeux contre lesquels nous n'avons rien à dire, parce que c'est effectivement ce que tout le monde désire. Mais il faut aller plus loin. Il faut passer maintenant des voeux aux actes. Il faut engraisser les actes. Tout à l'heure, je parlais avec des gens du parti ministériel avant qu'on commence cette discussion. Ils m'ont dit: Ne vous inquiétez pas, il va y avoir de la chair autour de l'os du poulet, si on peut le prendre comme cela. Mais j'ai des craintes juste à penser que cela va être graine à graine, morceau par morceau et de telle sorte que finalement cela va prendre encore des années pour avoir une vraie politique familiale, une politique qui va entrer dans la tête des gens. Une des preuves des difficultés que nous avons: l'Office des personnes handicapées, dont le député de Laurier était responsable. Le ministre responsable du Conseil du trésor a quasiment fait disparaître l'adaptation de domicile. Le député sait de quoi je veux parler. J'ai un cas chez moi. On a beau avoir des structures, si par hasard un ministre du Conseil du trésor décide de couper, il faut que le ministre responsable du dossier se batte pour qu'on ne se le fasse pas enlever.

C'est cela qu'on demande. On demande à ce gouvernement d'aller plus rapidement, de donner plus que ce qui est là. Après deux ans, après la mise en place d'un ministre responsable de la Famille qui était la ministre de la Santé, mais dont la responsabilité a été transposée au ministre délégué à la Famille, on s'aperçoit qu'au moment où il y avait des choses qui s'en venaient, on a bifurqué. On a mis une autre personne qui a commencé des processus, en a continué d'autres pour arriver à nous donner tout simplement un voeu pieux à l'égard duquel nous n'avons pas le choix, M. le Président. Nous devons voter au risque de nous faire dire qu'on est des épouvantables écoeurants.

Je le dis comme je le pense, parce que c'est cela qu'on va se faire dire. Je sais ce que les gens disent une fois qu'ils sont sortis de cette Assemblée, mais, moi, j'ai le courage de le dire ici. C'est cela qu'ils vont dire à l'extérieur. Ils vont dire: Cela n'a pas de bon sens, le PQ va voter contre. Non. Le PQ va voter pour, mais on va demander plus. On va demander que dans les semaines qui viennent, dans les mois qui viennent, il y ait dépôt ici d'une vraie politique familiale beaucoup plus qu'une simple coquille vide qui enrobe quelque chose qui n'est même pas là. Merci, M. le Président.

(1 h 40)

Le Vice-Président: Donc, à ce moment-ci, je vais maintenant reconnaître M. le ministre délégué à la Famille, à la Santé et aux Services sociaux pour l'exercice de son droit de réplique.

M. Robert Dutil (réplique)

M. Dutil: Merci, M. le Président. Je pense qu'on a eu un débat fort intéressant qui n'a toutefois pas porté sur la loi que nous présentons, Loi sur le Conseil de la famille, mais qui a plutôt porté sur des mesures que l'on souhaite venir en vigueur dans le futur, ce que nous avons déjà mentionné. Nous avons mentionné que l'énoncé des orientations était une première étape et qu'il viendrait d'autres étapes ultérieures où nous aurions des mesures fort intéressantes pour les familles.

Je suis heureux de voir que l'Opposition, dans tous les débats qui ont été faits, bien que je n'aie pas toujours apprécié le style spectacle... On se rappelle qu'on avait reproché au gouvernement antérieur d'être l'État-spectacle; nous avons l'Opposition-spectacle. Hormis cet aspect de style, je pense que, globalement, sur le fait qu'il faudra y avoir des mesures supplémentaires, des mesures plus fortes, des mesures plus vives, nous sommes d'accord. Nous sommes tellement d'accord, M. le Président, qu'à la suite d'une proposition de l'ancien chef de l'Opposition, Pierre Marc Johnson, proposition que nous avons amendée, le parti ministériel et le parti d'Opposition ont voté de façon unanime.

Je relis cette proposition pour la remémorer à l'Opposition. Ils semblent l'avoir oubliée. "Que cette Assemblée exige du gouvernement libéral - c'est très impliquant, M. le Président - qu'il continue à mettre de l'avant des politiques de valorisation de la famille québécoise et qu'il instaure des mesures visant à améliorer les services d'appui et le support financier accordé aux parents à titre de premiers responsables légaux et sociaux de la prise en charge des enfants et du milieu familial."

M. le Président, le parti ministériel, avec l'Opposition, a voté en faveur de cette proposition, proposition très impliquante à deux volets. Un premier: il faut faire davantage. Bien sûr, nous le reconnaissons. L'autre volet: le gouvernement, puisqu'on lui demande de continuer à mettre de l'avant des mesures concernant la famille, on admet donc qu'il a depuis deux ans adopté diverses mesures à connotation familiale fort importantes que j'ai eu l'occasion, lors de ce débat sur la motion de l'ancien chef de l'Opposition, de préciser, d'expliquer davantage, entre autres, en citant de larges passages du budget de l'année dernière présenté par le ministre des Finances, en

citant de larges extraits qui concernaient spécifiquement la famille sur le plan de la fiscalité.

Nous sommes donc dans un processus de continuité. Â notre point de vue, il était toutefois important d'adopter des orientations et des principes.

Donc, pour une des rares fois dans un dossier important, car cela n'a pas été le cas pour l'accord du lac Meech où l'Opposition a manifesté son désaccord, cela n'a pas été le cas, comme on le sait, dans l'accord sur le libre-échange où l'Opposition a manifesté son désaccord, dans ce cas-ci, dans le cas des besoins d'avoir des mesures supplémentaires pour une politique familiale, l'Opposition et nous, nous sommes d'accord. Ce n'était pas le but de notre étude actuelle. Le but de notre étude portait sur la Loi sur le Conseil de la famille.

Permettez-moi, M. le Président, de donner une brève explication parce qu'on est revenu dans le débat cet après-midi à plusieurs occasions sur le fait que le gouvernement actuel préconise la création d'un Conseil de la famille alors qu'il avait, semble-t-il, au dire de l'Opposition, mentionné qu'il était contre tout conseil, ce qui est faux.

Une première mauvaise interprétation qu'a faite le chef de l'Opposition cet après-midi, c'est sur l'aspect du mandat du Conseil de la famille. Le Conseil de la famille ne sera pas là pour recommencer la vaste consultation qui a été faite dans tout le Québec au cours des dernières années. Cette consultation est faite. Les recommandations sont présentées, et c'est une base de travail fort excellente que nous avons l'intention d'utiliser.

Ce Conseil de la famille sera là pour conseiller le ministre et également aider le ministre. C'est l'autre point que je désire amener sur l'importance de ce conseil: aider le ministre à influencer les autres intervenants fort importants pour que nos mesures, pour que nos politiques aient un effet concret sur les parents dans la société québécoise. Je fais référence ici au monde du travail, au monde patronal, au monde syndical. Je fais référence aux milieux municipaux et à tous les organismes qui peuvent avoir une influence, de près ou de loin, sur la qualité de vie que nous pouvons dans notre société accorder aux familles québécoises.

Alors, quand l'Opposition nous dit que le gouvernement a préconisé l'abolition de l'ensemble des conseils, c'est tout à fait faux; non pas qu'il ne fallait pas éliminer certains conseils, c'est ce que nous avons fait. On en a mentionné tout à l'heure quelques-uns, celui du tourisme et celui de la faune. Je pourrais vous mentionner également, le Conseil des pêches que j'ai moi-même éliminé, et la Société québécoise des pêches. On pourrait vous mentionner une foule d'autres conseils qui, à notre point de vue, ne correspondaient plus aux besoins de la société d'aujourd'hui ou qui n'avaient pas l'utilité que l'ancien gouvernement avait cru leur donner quand ils les avaient établis.

Ce n'est pas le cas pour la famille. La famille a une telle importance dans la société québécoise et touche tellement l'ensemble des Québécois que le gouvernement, qui n'est pas un gouvernement dogmatique, qui n'a pas pris une position mur à mur sur l'existence ou non des conseils, a jugé fort important de favoriser l'expression des familles et des organismes familiaux auprès du ministre, pour être bien sûr que le suivi se fasse d'une façon très serrée à l'avenir dans les mesures qui seront appliquées au plan de la politique familiale et pour être également sûr que nous obtiendrons un appui très concret de la part de gens qui s'intéressent à la famille, d'un appui très concret des autres intervenants que j'ai mentionnés tout à l'heure.

Voilà mes principales remarques concernant ce projet de loi dont nous adoptons le principe ce soir. Je suis heureux de voir qu'après avoir adopté la motion à l'unanimité le 29 octobre dernier concernant le besoin de mesures d'une politique familiale, encore une fois, l'Opposition va voter pour la création du Conseil de la famille. Je crois bien que, au fur et à mesure que nous adopterons des mesures concernant la famille, nous aurons l'avantage d'avoir un débat intéressant avec l'Opposition et d'obtenir l'assentiment unanime de cette Chambre pour tout ce qui va concerner la famille québécoise, l'amélioration de sa qualité de vie et cela, pour le mieux-être de l'ensemble des Québécois et des Québécoises. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président: Alors, tout simplement, je voudrais aviser nos spectateurs dans les galeries, mesdames et messieurs, que vous êtes les bienvenus, mais que vous ne devez manifester en aucune façon aucun signe d'approbation ou de désapprobation.

Le débat étant terminé à cette étape de l'étude du projet de loi, est-ce que cette motion d'adoption du principe du projet de loi 94, Loi sur le Conseil de la famille, est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président: Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

Renvoi à la commission des affaires sociales

M. Johnson: Oui, M. le Président. Je ferais motion pour déférer ce projet de loi à la commission des affaires sociales.

Le Vice-Président: Est-ce que cette motion de déférence est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président: Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Johnson: M. le Président, je demanderais peut-être au député de Jonquière de se rendre à son siège, cela lui permettra de s'exprimer, le cas échéant, puisque ce projet de loi peut l'intéresser. L'article 18, M. le Président.

Le Vice-Président: À l'article 18 du feuilleton, je devrai requérir, à ce moment-ci, le consentement pour que nous puissions procéder à cette étape de l'étude du projet de loi. Y a-t-il consentement? À l'article 18 du feuilleton, cela concerne le projet de loi 69; c'est pour en arriver à la prise en considération du rapport. Puisque le rapport a été déposé ce matin, nous devons obtenir consentement pour que nous puissions passer à l'étude du rapport.

Une voix: Alors, d'accord.

Projet de loi 69

Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée

Le Vice-Président: II y a consentement, en conséquence de quoi, sur ce consentement, nous allons procéder à la prise en considération du rapport de la commission de l'aménagement et des équipements qui a procédé à l'étude détaillée du projet de loi 69, Loi modifiant la Loi sur les villages nordiques et l'Administration régionale Kativik. Est-ce qu'il y a des interventions? Il n'y a pas d'interventions.

M. Francis Dufour M. Dufour: Un mot seulement...

Le Vice-Président: Oui, M. le député de Jonquière.

M. Dufour: ...juste pour informer cette Chambre et ceux qui ont encore le courage d'écouter ce qui se passe à l'Assemblée nationale à cette heure tardive concernant l'administration des villages nordiques et l'Administration régionale Kativik. (1 h 50)

Pour des parlementaires, c'est vraiment un monde différent et les articles qui s'appliquent tantôt ressemblent à ceux qui sont vécus dans le Sud par rapport au Nord -on peut vraiment parler du Sud par rapport au Nord - tantôt, ces règlements, dis-je, ressemblent étrangement à ceux dans lesquels les municipalités du Québec vivent et lorsque cela arrive dans le Nord, il y a des règles différentes.

Donc, cela peut nous paraître surprenant, mais il semble que ces villages nordiques apprennent avec le temps à s'adapter à un mode de vie différent, ce qui ne les amène pas à vivre une démocratie retardée, mais d'une façon qui se rapproche graduellement de celle des gens du Sud.

Donc, lorsqu'on étudie des projets semblables, nous, nous pourrions être considérés comme la Floride du Nord, ce qui n'est pas tout le temps vrai lorsqu'on voit les tempêtes qu'on vit ici ou les problèmes de froid dans lesquels on vit. Donc, ces gens sont bien préparés pour le faire et je trouve que ce projet de loi leur donne également un instrument pour en profiter pour mieux s'administrer, et pour qu'ils puissent suivre l'évolution générale et les actes de leur municipalité.

Il est évident que j'ai eu le concours du député d'Ungava qui est le député du comté dans lequel sont situés la plupart de ces villages inuit et qui a une plus grande connaissance que moi de ce milieu, mais pour lequel on a pensé présenter certains amendements. Encore, chose curieuse, il semblait que la commission parlementaire était faite seulement pour la forme, pour s'assurer que tout était bien écrit, puisque ce projet de loi découle de l'entente de la Société de la Baie James, c'est-à-dire les ententes qui ont été faites concernant les barrages dans le Nord, ententes faites entre le gouvernement du Québec, donc par l'ex-gouvernement et les Indiens ou les Inuit. On applique ces particularités dans le projet de loi et il semblerait que les seuls amendements ou les seuls changements qu'on peut apporter découlent de la volonté de l'Administration régionale Kativik qui demande au ministre des Affaires muncipales et ministre responsable de ce secteur d'apporter les amendements et il semblerait qu'on peut apporter des amendements tangibles qui font le bonheur de ces gens.

Donc, pour nous, comme membres de l'Opposition, nous serons heureux de concourir à l'approbation de ce projet de loi, puisqu'il répond à leurs voeux. Mais on déplore cependant qu'on n'ait pas - dans nos négociations, entre le gouvernement du Québec et l'Administration régionale Kativik -réussi à amener une évolution aussi rapide que l'Opposition aurait aimé.

Donc, c'est encore un choix du ministre des Affaires municipales et on doit le respecter, puisqu'en le faisant on ne peut pas faire tort à ces gens. Mais nous de l'Opposition, on aurait aimé que le projet de loi ait été plus conforme ou ait correspondu un peu mieux à ce qui se passe dans les villages du Sud ou dans les villages du Québec, parce

que, lorsqu'on parle du Sud, on pense toujours aux vacances, on pense au soleil, on pense à la végétation luxuriante.

Mais ce n'est pas tout a fait ce qui se passe dans la réalité, parce que dans la saison des fêtes qu'on s'apprête à vivre, on peut penser à la neige, on peut peut-être penser à beaucoup plus d'éclairage que dans les villages du Nord, mais aussi à des activités beaucoup plus nombreuses de la part de la population, parce que ces gens-là vivent de chasse et de pêche.

Donc, ce sont des gens qui doivent avoir des institutions adaptées et tant mieux si l'ancien gouvernement a trouvé le moyen, dans une entente avec ces gens-là, de trouver un mode de vie adapté à leurs besoins. Le gouvernement qu'on a en face de nous n'en est que la continuité, pas dans son meilleur, mais la continuité du gouvernement qui l'a précédé et il doit respecter ces ententes.

Quant à nous, les membres de l'Opposition, nous serons heureux de concourir à la prise en considération et si le ministre veut procéder après à l'adoption, nous y concourrons dans la même mesure.

Le Vice-Président: II n'y a pas d'autres interventions. Notre débat étant terminé, est-ce que le rapport de la commission de l'aménagement et des équipements qui a procédé à l'étude détaillée du projet de loi 69... Je m'excuse. D'accord, j'avais compris que vous ne vouliez pas parler. Je vous cède la parole pour une réplique de cinq minutes.

M. André Bourbeau

M. Bourbeau: M. le Président, je ne voudrais pas interrompre votre droit de parole mais simplement pour dire, comme le député de l'Opposition, que je suis très satisfait que nous en soyons à l'étape de l'adoption du projet de loi qui vise à modifier la Loi sur les villages nordiques et l'Administration régionale Kativik. C'est un projet de loi qui vise à apporter certaines modifications à cette loi afin principalement d'assouplir certaines règles applicables dans le monde municipal au nord du Québec. C'est un projet de loi qui améliore la situation, qui tente de moderniser, si je peux dire, les règles administratives qui prévalent dans le milieu nordique. Ce projet de loi fait en sorte de bonifier la situation qui existe dans l'administration municipale des villages nordiques.

Je suis heureux de voir que l'Opposition est disposée à procéder dès maintenant à l'adoption définitive du projet de loi. C'est avec plaisir que nous accepterons ce consentement.

Le Vice-Président: Très bien. Là, c'est vrai. Le débat est terminé à cette étape-ci.

Le rapport de la commission de l'aménagement et des équipements qui a procédé à l'étude détaillée du projet de loi 69, Loi modifiant la Loi sur les villages nordiques et l'Administration régionale Kativik, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président: Adopté. Je comprends qu'il y a consentement pour que nous procédions à l'étape suivante. Consentement. Oui, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Johnson: M. le Président, quitte à ce que vous vérifiiez s'il y a consentement, je ferais motion au nom du ministre des Affaires municipales pour que nous adoptions ce projet de loi.

Le Vice-Président: Bien. Y a-t-il consentement à cet effet? Consentement. M. le leader de l'Opposition.

M. Gendron: II n'y a pas d'objection à ce qu'on fasse la troisième lecture tout de suite, mais mon collègue n'indique qu'il aimerait dire quelques mots sur la troisième lecture.

Adoption

Le Vice-Président: Très bien. Je constate le consentement. Nous arrivons donc à la motion du ministre des Affaires municipales pour l'adoption du projet de loi 69. Je cède la parole à M. le député de Jonquière.

M. Francis Dufour

M. Dufour: M. le Président, nous venons de prendre en considération le rapport et de l'adopter. En adoptant ou en se proposant s'adopter le projet de loi, il est évident, comme je l'ai soulevé, que l'avantage de passer à la deuxième étape rapidement, c'est de nous permettre de compléter nos premières interventions. Je voulais souligner tout à l'heure les différences qu'il y a entre les gens du Nord et les gens du Sud.

Par rapport aux villages inuit et les villes et les villages québécois, les élus municipaux ont une façon différente de se faire élire. Au lieu d'avoir des sièges numérotés, d'avoir des quartiers, parce que dans le Nord les quartiers n'ont aucune consonnance, les villages sont très petits, les gens sont concentrés dans de petits endroits - il est difficile parfois d'avoir des gens pour se présenter aux élections municipales - que fait-on? Il y a des périodes électorales qui ressemblent aux nôtres où les gens s'inscrivent sur une liste en disant qu'ils veulent militer, briguer les suffrages. Lorsqu'il y a plus de gens que le nombre de

sièges ouverts, ces gens procèdent par vote, cela peut arriver, et ce sont ceux qui ont le plus de votes qui sont élus. Je pourrais parler d'un concours de popularité, mais cela veut dire qu'il y a toujours élection s'il y a plus de monde. On ne veut pas se priver de la capacité de ces gens et surtout on veut obtenir les gens les plus compétents pour jouer le rôle d'élus municipaux.

C'est une différence tangible de ce qu'on vit dans les municipalités du Québec, puisqu'on vient d'adopter, il n'y a pas tellement longtemps, la loi 100 qui parle des élections et référendums au Québec. Les élus municipaux se présentent à des sièges numérotés. On a le choix de diviser la ville - juste un choix, la première fois - et les municipalités en quartiers. Ces quartiers sont représentés par des conseillers municipaux. Lorsqu'on élit des gens, les gens décident d'avance dans quel quartier ils vont se présenter. S'il y en a plus que deux dans un quartier, c'est dans ce quartier qu'il y a droit de vote. Dans une élection générale, si tous les sièges sont ouverts et qu'il y a plus qu'une candidature pour l'ensemble des quartiers, il y a toujours une élection, mais des élections pour les conseillers dans des quartiers seulement. Tandis que, dans le Nord, s'il y a plus de candidats que le nombre de candidats recherchés, on procède toujours à une élection générale. (2 heures)

Donc, c'est une différence tangible et le maire, comme tel, est aussi choisi de la même façon. S'il y a plus d'une personne qui veut militer au poste de maire, il devient ipso facto la personne élue maire ou il doit faire face à l'électorat. C'est un exemple assez frappant des différences entre ces gens-là et nous. Il y a l'Association régionale Kativik qui, elle, représente l'ensemble des villages inuit sur le territoire où ces gens sont nommés et on les appelle des administrateurs régionaux. Ces gens-là, on pourrait essayer de faire un rapprochement avec une MRC et cela ressemble drôlement au travail que les MRC accomplissent, mais elles vont beaucoup plus loin.

Donc, ce n'est pas nécessairement le maire qui représente la municipalité à l'Administration régionale Kativik. Cela semble un poste de prestige et ces gens-là sont choisis... cela peut être des élus municipaux comme cela pourrait être d'autres qui sont délégués à la société régionale. Ces gens-là oeuvrent par leur action. La loi reconnaît la façon dont ils sont nommés et aussi la façon dont on choisit le président de cette assemblée qui peut choisir d'être à temps plein. La loi reconnaît que c'est le choix d'un individu d'être à plein temps. Le choix d'être payé dépend de l'ensemble des administrateurs de la société. Il peut donc ne pas être élu par un conseil municipal. Il faut qu'il soit élu d'abord par un conseil municipal pour être président. Après qu'il est président, il peut choisir d'être à temps plein et il perd son poste électoral et il pourait être renommé mais il pourrait aussi être enlevé en tout temps. C'est une particularité qui, à mon sens, peut jouer des tours, parce que cela met un président presque à la merci de ses commettants, donc de ceux qui l'élisent puisqu'ils peuvent le démettre de ses fonctions à n'importe quel moment de son mandat. Donc, en principe, il est élu ou nommé pour deux ans, mais il peut être démis de ses fonctions à n'importe quel moment de son mandat. C'est une particularité importante. Les questions de l'Opposition étaient à savoir si cela ne pourrait pas représenter des problèmes majeurs dans le fonctionnement de cette société puisque, comme ce sont des postes prestigieux, cela veut dire qu'il y a de la représentation, cela veut dire qu'il y a des éléments ou des décisions importantes qui sont prises dans ce milieu, ce qui peut susciter de la controverse comme ce qui peut susciter des différences d'opinions qui pourraient aller jusqu'à faire démettre le président. Il semble que ce soit le voeu de ces gens-là et on se doit de le respecter. Nous avons concouru à l'adoption de cet article, même si, dans les faits, on pense que c'est une obligation très onéreuse par rapport à cette société et à ce milieu.

Une autre particularité qu'on retrouve, c'est que le maire de Naskapi de Schefferville, qui est un village indien, le seul de l'ensemble des villages inuit qui est le représentant officiel régional de la société Kativik... Donc, si cette personne veut, elle n'a pas le choix, elle ne peut pas être remplacée ni démissionner, ce qui fait que, si elle décide de ne pas participer aux délibérations ou si elle refuse d'agir comme directeur régional, elle est immédiatement mise de côté, elle perd son poste de maire puisque les deux fonctions sont jumelées.

J'ai parlé tout à l'heure de la nomination du président et de sa fonction. Je pense que c'était un peu intéressant. En tout cas, c'étaient certainement des éléments différents sur lesquels on peut susciter une réflexion sur les différences entre ces villages. C'est évident qu'il y a aussi des possibilités de siéger par téléphone, à condition que le maire ou le président de la société ou son secrétaire puisse parler à quelques individus par téléphone, dans certains cas, pour prendre certaines décisions urgentes. Il y a peut-être des éléments qui sont... On ne peut pas parler, par exemple, de la publication du budget. Dans les municipalités du Québec, on demande aux municipalités de publier leur budget dans un journal distribué dans les maisons.

Dans les villages inuit, on trouve le moyen de faire cette distribution non pas par

courrier, mais le greffier de la municipalité est obligé de faire la distribution du budget porte à porte. Je ne sais pas s'il y a des numéros de porte et des noms de rue, mais il me semble que ce n'est pas trop complexe. On peut le faire, cela peut se faire et c'est une obligation, mais une obligation pour laquelle il n'y a pas de sanction. Donc, c'est un voeu. L'Assemblée nationale demande à ces gens de se plier à certaines règles, mais sans aucune sanction. Il faut admettre que, pour des gens comme nous, ce sont des particularités différentes de ce qui se passe chez nous.

Quant à l'Administration régionale Kativik, ses budgets supplémentaires sont publics. Elle doit avertir la municipalité, mais il n'y a aucune obligation de publier quoi que ce soit. On avait apporté la suggestion de les afficher quelque part. Le ministre a trouvé cette demande de l'Opposition trop forte et il a décidé de la refuser. Nous pensions pouvoir amener plus de démocratie si les gens étaient mieux informés. C'est un choix gouvernemental, on ne fait que le souligner, sans insister plus que cela. En gros, cela explique le cheminement qu'on a pu maintenir durant cette commission parlementaire.

Quant à moi, j'ai trouvé cela intéressant qu'on parle de ce milieu, c'est une expérience nouvelle. Souhaitons que le ministre des Affaires municipales trouve le moyen, au cours de son travail, de négocier avec les Inuit pour les amener pas nécessairement à copier les Blancs, mais à leur donner une façon de fonctionner qui ressemble à la nôtre afin que, lorsqu'on étudie ces projets de loi, on puisse les comprendre beaucoup plus facilement, sans trop d'explications, en fonction des expériences que nous avons vécues, sans quoi il faudra peut-être demander au ministre, un jour, d'aller se promener dans le Nord pour savoir comment cela se passe. On travaille sur la vie de ces gens et on n'a jamais eu l'occasion de voir de quelle façon ils vivent. C'est une anomalie, à mes yeux. Je ne demande pas une délégation pour aller me promener dans le coin, mais c'est probablement le propre de plusieurs députés de cette Assemblée qui ne savent pas comment cela se passe là-bas, qui n'ont pas vu trop trop. Je pense que le travail parlementaire nous amène à prendre des décisions pour des gens que nous n'avons pas l'occasion de côtoyer réellement, dont on ne connaît pas nécessairement le style de vie.

J'étais très heureux, au cours de l'étude article par article, d'être appuyé par le député d'Ungava qui représente ces grands territoires qui, en fait, couvrent le tiers du territoire du Québec. Le plus grand comté du Québec est celui d'Ungava et c'est l'Opposition qui a l'honneur de l'avoir dans ses rangs. Le député d'Ungava connaît ces gens puisqu'il les côtoie, il les visite régulièrement et on sent que sa démarche est dans le but d'aider. Il faut comprendre que le député d'Ungava a à son actif des démarches très importantes pour les milieux qui ressemblent à cela. Son expérience de vie l'a amené dans d'autres milieux, mais j'ai l'impression qu'il les comprend bien et qu'on lui rend bien cette estime qu'il a pour eux. L'étude de ce projet de loi a été faite le plus sérieusement du monde et on doit se montrer satisfait du travail qu'on rend à terme ce soir. Merci, M. le Président. (2 h 10)

Le Vice-Président: Très bien. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Laviolette et leader adjoint de l'Opposition.

M. Jean-Pierre Jolivet

M. Jolivet: Oui, M. le Président, je vous remercie beaucoup. J'ai écouté avec beaucoup d'attention les propos de mon collègue, le député de Jonquière, qui est porte-parole en matière d'affaires municipales, sur ce projet de loi 69. J'ai décidé d'intervenir compte tenu des vastes territoires que je représente et qui, souvent, donnent l'impression d'être différents des autres, mais, en même temps, semblables. Il a fait une proposition intéressante et, comme leader adjoint, j'ai voulu intervenir parce que, personnellement, je suis libre de répéter cette proposition. Si on veut savoir comment ces gens vivent, quelle est leur façon de voir les choses, il faut aller les visiter, aller voir comment ils vivent chez eux.

J'ai eu l'occasion, comme membre de l'Assemblée nationale, d'aller visiter des gens un peu partout au Québec et même au Canada et je dois vous dire que j'ai été fort surpris de certaines rencontres qu'on a faites. Je donne un exemple: dans les Territoires du Nord-Ouest, à Fort Simpson, à Inuvik, on a rencontré des gens qui ont leur façon de vivre mais qui, en même temps, nous permettent de saisir comment ils voient les choses. Quand je suis dans des lieux comme les réserves chez moi, dans ma région, à Manouane, à Weymontachingue, à Obedjiwan ou dans le secteur de la Haute-Mauricie je peux vous dire que la façon de voir les choses pour nous, les Blancs du Sud, est bien différente de celle de ces personnes. Il faut les bien comprendre à ce moment-là.

Je regarde le projet de loi et je suis tout à fait content que ce soit inscrit dedans parce que ce que le député de Jonquière disait, c'est qu'il faut, en voyant leurs différences, savoir qu'ils peuvent peut-être nous ressembler, mais nous ressembler dans leurs différences et je m'explique. Quand on dit au Québec que nous avons changé les lois municipales pour permettre une partie d'interrogations, une période de questions

orales, ça fait partie d'une tradition qui avait été perdue dans le temps et qui est revenue au conseil municipal où il y a une place attitrée à une période de questions orales de la part des gens qui viennent assister aux séances des conseils municipaux. Or, je lis dans le projet de loi qu'il introduit effectivement une période de questions orales du public lors des séances du conseil d'un village nordique ou de l'Administration régionale Kativik.

Pourquoi est-ce que je dis ça? C'est parce que je peux vous donner un exemple qui s'est produit alors que j'étais porte-parole de l'Opposition en matière d'éducation. Il y a des gens qui voient arriver sur la table un projet de loi contenant quatre articles. Je ne connais pas à fond le milieu pour pouvoir en parler sans prendre des renseignements. Quelle est la personne la mieux désignée pour me renseigner? C'est le député d'Ungava parce que ça concernait une commission scolaire du Nouveau-Québec, commission scolaire qui était sous la responsabilité du ministère de l'Éducation et qui, en même temps, se trouvait dans le comté de mon collègue, le député d'Ungava. Nous nous sommes parlé, il a communiqué avec les gens, et on s'est aperçu que le projet de loi présenté n'avait pas de bon sens. Qu'est-ce qui est arrivé? On a demandé une rencontre avec les gens au ministre de l'Éducation. La rencontre a eu lieu et qu'est-ce qui s'est produit ensuite, M. le Président? Vous vous en souviendrez, j'en ai souvent fait mention, c'est bien simple, le ministre de l'Éducation a retiré son projet de loi, l'a réécrit et, grâce à l'appui de l'Opposition, il a pu le présenter à nouveau même si les délais étaient dépassés et nous avons obtenu un projet de loi de huit articles - quatre en premier lieu, huit en second - qui étaient conformes à la volonté des gens du milieu.

Or, cette partie qu'on appelle dans notre langage ici à l'Assemblée nationale, une commission parlementaire, c'est, en fait, une partie de questions orales. Or, le projet de loi introduit ça et ça va permettre aux gens de pouvoir s'informer de vive voix.

Il est évident, comme le disait mon collègue, que le budget déposé porte à porte par les personnes qui vont le présenter à chacun, c'est une façon de voir qu'on ne peut pas imaginer à Montréal, à Grand-Mère ni à La Tuque. Que fait-on? On utilise les journaux, on annonce à grand pages de publicité, dans les petits journaux en particulier: Discours du maire sur l'ensemble du budget. Ici, ce n'est pas comme ça que ça se produit et c'est pour ça qu'il faut regarder la différence et lui donner la capacité de s'inscrire dans un milieu qui est le leur. Ces gens-là sont à la chasse, à la pêche, ont des activités bien différentes de celles que je peux avoir alors que je prends mon automobile le matin pour aller travailler à tel endroit et pour en revenir le soir. J'ai la télévision qui me donne des nouvelles, j'ai le contact de la radio à toutes les heures.

Donc, le contexte est différent. C'est dans ce sens-là que si on veut, comme élus du peuple, sans faire de dépenses exagérées, je le dis bien, M. le Président, bien comprendre le projet de loi que nous adoptons... Je me fie sur mon collègue, le député de Jonquière qui est un ex-maire connaissant très bien l'ensemble de la matière, je me fie à mon collègue d'Ungava mais je me fie moins au ministre par exemple. Et, avec eux, je sais qu'il y a des choses à faire et je pense que sans que tous les membres fassent partie de la commission, une partie des membres... D'ailleurs ils ont un budget en ce sens, ce n'est pas difficile, il s'agit que la commission se réunisse et détermine que le budget de cette année est pour aller faire une visite dans les villages nordiques en en choisissant quelques-uns, en annonçant leur passage, de sorte qu'ils puissent faire à ce moment une visite qui va leur donner l'heure juste.

Dans ce sens, M. le Président, je ne trouve rien d'anormal. Tout comme nous, membres de la commission de l'éducation, nous avions décidé d'aller faire une rencontre à un congrès qui était l'ACELF. Comme d'autres, le député de Verchères à l'époque avait fait une commission parlementaire itinérante dans tout le Québec sur un sujet donné qui était les jeunes avec le ministre des Communications actuel, qui était le député de Westmount dans l'Opposition. Ils avaient fait des rencontres et avaient pris le pouls sur ce qui était l'ensemble du projet de loi qui avait été adopté sur la protection de la jeunesse.

Donc, pourquoi, dans les questions d'affaires municipales ne pourrait-il pas y avoir une telle rencontre où il y aurait possibilité pour les membres de la commission d'aller sur le champ, sur le vif, voir des choses qui ne sont pas ce qui se vit dans le sud du Québec, dans des milieux où l'organisation est différente, là où la vie est différente, et, en ce sens, être plus à même, lorsqu'ils adopteront des lois pour des villages nordiques, de pouvoir prendre les meilleures décisions?

Je vous dis, M. le Président, que je suis d'accord avec mes collègues. Je me fie à eux. Je n'ai pas le choix. Mais c'est normal que, dans ma formation politique, des gens soient plus versés dans une partie de loi que d'autres. Dans ce sens, le député de Jonquière, qui fait un très bon travail, mérite notre appui et je dois dire qu'effectivement il serait capable avec le groupe de la commission parlementaire d'accompagner le député d'Ungava qui connaît beaucoup plus les lieux parce que je dois vous dire que, lui, il visite son secteur

et je peux vous dire qu'il le connaît, mais que d'autres membres de la commission pourraient connaître davantage et prendre des décisions qui soient plus éclairées.

Quand on regarde l'ensemble du projet de loi, nous pouvons être d'accord avec cela. Nous pouvons cependant dire: On devrait tendre à rendre à peu près semblables l'ensemble des lois concernant les municipalités, tout en sachant qu'il y a des différences marquées entre la façon dont ils fonctionnent et la façon dont on fonctionne dans les municipalités régies par le Code municipal et la Loi sur les cités et villes. Dans ce sens, nous allons appuyer le projet de loi, mais nous aimerions pouvoir, des deux côtés de la Chambre, du côté ministériel comme du côté de l'Opposition, participer à une forme de délégation de la commission parlementaire des affaires municipales pour aller voir les choses. Si le ministre ne veut pas les accompagner, ce n'est pas grave. Mais le ministre pourrait aussi les accompagner. La commission serait d'abord composée des membres, hommes ou femmes, du côté ministériel comme du côté de l'Opposition, capables d'aller saisir ce qui se passe là-bas.

Dans ce sens, M. le Président, à l'instar de mon collègue, j'en fais une demande presque officielle que la commission aura à entériner lors d'une rencontre prévue par les règlements.

Le Vice-Président: Est-ce qu'il y a d'autres interventions? Oui, M. le chef de l'Opposition.

M. Guy Chevrette

M. Chevrette: M. le Président, seulement quelques mots pour vous dire que notre formation politique est heureuse de concourir à l'adoption du projet de loi. On aura remarqué que les projets de loi touchant les régions éloignées, en particulier le Grand-Nord, sont toujours des projets de loi qui sont presque adoptés de nuit, malheureusement, des projets de loi qu'on présente à l'Assemblée nationale au moment où, bien sûr, nos concitoyens et nos concitoyennes ne peuvent malheureusement pas être sensibilisés aux problèmes que vivent ces gens des régions dites éloignées.

M. le Président, je vous rappellerai que notre formation politique a toujours eu une très grande sensibilité vis-à-vis des gens du Grand-Nord. On sait dans quelles conditions de vie, bien souvent, ces gens sont placés, et on les avait trop souvent oubliés dans à peu près tous les secteurs de l'activité. Que ce soit dans le domaine social, que ce soit dans le domaine de l'éducation, que ce soit dans le domaine municipal précisément, dans le domaine de l'habitation, ces gens ont souvent été laissés pour compte.

Depuis au moins une dizaine d'années au Québec, les gouvernements se sont occupés d'eux. Les gouvernements se sont préoccupés de l'habitation de ces gens, de leur système scolaire. Ils s'en sont occupés par des services de santé. Et je sais jusqu'à quel point ces citoyens exigent autant d'attention pourtant de la part des gouvernements que n'importe quelle autre collectivité. (2 h 20)

Je sais jusqu'à quel point ces gens ont été laissés pour compte pendant des années, par exemple, dans le domaine de la santé et des services sociaux. Il ne faut pas croire, parce qu'ils sont éloignés, qu'ils ne vivent pas de problèmes. Ils ont des problèmes majeurs à résoudre et ils n'avaient aucune ressource.

Le gouvernement auquel j'ai eu le bonheur de participer pendant neuf ans s'est toujours préoccupé de ces groupes ethniques qui avaient précisément besoin du soutien de l'État. Ce sont des centaines de milliers de dollars, des millions qu'on a injectés dans l'habitation pour leur donner des logements salubres. On était fier de le faire parce que ce sont des citoyens à part entière, des citoyens qui ont droit à un logement de qualité.

Ce fut la même chose dans le domaine scolaire, dans le domaine de la santé. Le gouvernement du Parti québécois, qui était alors présidé par M. René Lévesque, n'a jamais hésité à injecter des sommes extraordinaires. Je pense qu'on se devait de le faire parce qu'il y avait un rattrapage énorme. Je pense que ce ne sera plus jamais pareil. Quel que soit le gouvernement qui sera en place, on devra toujours, chaque année, améliorer la situation dans tous les secteurs de la vie, de l'activité économique, de l'activité scolaire, dans le domaine social, dans le domaine de la santé, dans le domaine de l'éducation et aussi dans le domaine de l'habitation.

On n'aura donc pas le choix que de continuer sur cette lancée et d'améliorer chaque fois qu'on le peut, chaque année... Tout ce que je formulerais comme voeu, cependant, c'est qu'on puisse le faire à des heures raisonnables, qu'on puisse le faire à des heures où nos concitoyens pourraient être sensibilisés soit par le réseau de télévision qui nous couvre ou encore, du moins, par les nouvelles le soir. À cette heure-ci, c'est bien évident qu'il n'y a pas un journaliste qui peut écrire sur le projet de loi qui nous préoccupe, malheureusement.

Peut-être que l'histoire fera en sorte de nous rappeler les événements nocturnes que nous vivons. Mais, à mon point de vue en tout cas, M. le Président, c'est déjà un pas de considérer que ce mouvement de bonification des lois touchant ces régions est enclenché et irréversible. Quant à nous, comme formation politique, il est évident que nous continuerons dans ce sens à appuyer

toute législation susceptible d'améliorer le sort des gens dans les régions éloignées.

Le Vice-Président: Le débat étant terminé, est-ce que cette motion d'adoption du projet de loi 69, Loi modifiant la Loi sur les villages nordiques et l'Administration régionale Kativik, est adoptée?

Une voix: Adopté.

Le Vice-Président: Adopté. M. le leader adjoint...

Une voix: M. le Président.

Le Vice-Président: Oui, un instant. M. le leader adjoint de l'Opposition.

M. Jolivet: Oui. Avant que le leader adjoint du gouvernement propose autre chose, mon collègue, le député de Jonquière, étant responsable des autres projets de loi à venir, ayant travaillé une très bonne partie de la journée et ayant terminé vers 1 h 30, je crois, la commission parlementaire, avec l'accord de l'Opposition pour dépasser minuit afin d'entendre la Communauté urbaine de Québec, je demanderais si le leader adjoint du gouvernement serait gentil au point de nous accorder quelques minutes de suspension pour nous permettre de nous réajuster par rapport à l'ensemble des projets de loi à venir.

Le Vice-Président: M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Johnson: Oui, M. le Président. J'ai manqué la fin de la dernière phrase du leader adjoint de l'Opposition.

M. Jolivet: ...un moment de suspension. M. Johnson: Pour?

M. Jolivet: Pour que nous puissions regarder l'ensemble des trois projets de loi qui restent à discuter. Nous demandons un moment de répit pour notre collègue, le député de Jonquière, tout simplement pour nous permettre d'aller ajuster le tir sur l'ensemble de nos projets de loi.

Le Vice-Président: Si je comprends, j'ai simplement une demande pour que nous suspendions pendant quelques instants.

M. Jolivet: C'est cela.

Le Vice-Président: Est-ce qu'il y a consentement à cet effet? M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Johnson: M. le Président, si j'ai bien entendu, quelques instants sont en cause: une pause-santé ou pause-santé mentale ou pause-repos du guerrier. De ce côté-ci, je veux indiquer tout de suite que nous sommes prêts à procéder. Par déférence sans doute pour le député de Jonquière, sinon pour ses collègues, nous serions disposés - c'est la suggestion que fait évidemment son vis-à-vis, le ministre des Affaires municipales - à suspendre nos travaux, quitte à ce que nous revenions dans quatre minutes.

Le Vice-Président: Très bien. En conséquence...

M. Jolivet: M. le Président.

Le Vice-Président: Oui, M. le leader adjoint de l'Opposition.

M. Jolivet: En fait, je n'ai pas manqué la partie quand il a parlé de pause-santé mentale. Je pense, M. le Président, que le but de ce que nous avons demandé n'allait pas dans ce sens. Je pense qu'il le comprend très bien. Mon collègue a travaillé toute la journée, il a terminé à 1 h 30... Vous allez me laisser finir.

Le Vice-Président: Je dois être bien là-dessus. Un instant, je ne voudrais pas simplement engendrer un débat là-dessus, qu'on se réponde de gauche à droite et de droite à gauche. Nous sommes actuellement, en ce qui concerne notre règlement, sur consentement. Nous pouvons suspendre nos travaux pendant quelques instants.

Si on a le consentement, on agrée à ce moment-là, je ne vois pas pourquoi on continuerait à débattre une motion qui n'en est pas une. Donc on a un accord des deux côtés de la Chambre. En conséquence, nous allons suspendre nos travaux pour quelques instants.

Nous suspendons pour quelques instants. Quelques instants seulement.

(Suspension de la séance à 2 h 26)

(Reprise à 2 h 33)

Le Vice-Président: Veuillez prendre place, s'il vous plaît, nous allons maintenant poursuivre nos travaux.

M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Johnson: M. le Président, je vous demanderais d'appeler l'article 28 du feuilleton.

Projet de loi 88

Prise en considération

du rapport de la commission

qui en a fait l'étude détaillée

Le Vice-Président: À l'article 28 du feuilleton, nous en sommes maintenant à la prise en considération du rapport de la commission de l'aménagement et des équipe-

ments qui a procédé à l'étude détaillée du projet de loi 88, Loi modifiant la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, la Loi sur les cités et villes et le Code municipal du Québec.

Et je reconnais, comme premier intervenant, M. le député de Jonquière.

M. Francis Dufour

M. Dufour: Merci, M. le Président. Ce projet de loi, que j'avais qualifié d'excessivement important lors de sa présentation, est rendu à l'étape de la prise en considération. Donc, il a fait un grand cheminement de la période de l'adoption du principe jusqu'à ce jour. Il y a des éléments importants qui sont survenus au cours de l'étude.

Il faut se rappeler que lorsque le projet de loi a été présenté, il l'a été avec grand fracas, avec tambours et clairons, en présence de plusieurs ministres dont le ministre des Affaires municipales, le ministre des Transports et responsable du Développement régional, le ministre de l'Environnement, le ministre de l'Agriculture. Donc, un certain nombre de ministres, non pas les moins importants, qui proclamaient tout haut, avec insistance - et je pourrais même dire avec fanfaronnade - que ce projet de loi avait fait l'objet d'un consensus de tous les intervenants.

Quels étaient ces intervenants auxquels on faisait référence et qui avaient donné leur accord? Sur quoi se basait-on pour arriver à ces conclusions ou à cette démonstration qui a paru dans les journaux, comme à la télévision, comme dans les média parlés. Cela s'adressait d'abord à des administrateurs municipaux. Donc, les municipalités locales, les deux unions municipales qui sont l'Union des municipalités du Québec, qui représente, pour la plupart, les villes à caractère urbain et, l'Union des municipalités régionales de comté, les municipalités locales. Ces deux intervenants majeurs avaient fait l'objet d'une vaste consultation, les 5 et 6 août, aux assises Québec-municipalités. Des assises importantes qui avaient été préparées, à ce qu'on dit, d'une façon très élaborée et très très attentionné, de la part du ministre des Affaires municipales, assises auxquelles l'Opposition n'a pas été invitée. Donc, assises où on a entouré d'une façon douillette les élus municipaux, parce qu'on ne voulait pas les perdre, composées d'environ 25 administrateurs municipaux représentant les membres du conseil d'administration de chacun des organismes. En même temps, le ministre de Affaires municipales a cru bon de s'entourer de l'ensemble de ses fonctionnaires et de fonctionnaires de d'autres ministères, probablement, puisque je n'y étais pas. Il faut comprendre que ces gens-là avaient peur de laisser échapper un ou deux membres, deux maires, au cours de cette consultation. On les a donc entourés très fortement, c'était presque du deux pour un. En plus, le ministre des Affaires municipales s'était entouré de collègues pour mener cette consultation.

On est arrivé à un rapport conjoint ou à une déclaration commune à l'effet que tout le monde s'était entendu dans le meilleur des mondes. Enfin, on avait trouvé une solution extraordinaire pour les municipalités régionales de comté. On venait de leur assurer leur survie. On venait de dire aux municipalités régionales de comté: Vous avez été créées, on va vous maintenir. Non seulement va-t-on vous maintenir, mais on va augmenter vos pouvoirs. Et tout ça après cette consultation, après une période de tergiversations avant la consultation, puisque cela a pris presque un an avant qu'on consulte ces gens-là. Ce qui permettait aux différents ministres concernés et concernés par l'environnement comme par l'aménagement du territoire - les ministres que j'ai nommés au début de mon exposé - de claironner tout haut qu'il y avait un accord, un consensus extraordinaire et qu'on pouvait procéder à la mise en place de cette loi, loi 88 qui a fait l'objet de tant d'attention de la part d'autant d'intervenants.

Encore là, dis-je, le ministre des Affaires municipales, même à l'instigation de l'Opposition, n'a pas cru bon dans sa consultation de s'associer à l'Opposition officielle pour en faire une véritable consultation.

On voit le résultat que cela a donné. On voit le résultat. Cela a d'abord donné lieu en commission parlementaire à un débat important au cours duquel l'Opposition a insisté pour qu'il y ait une consultation particulière de différents groupes. Ces consultations particulières ne s'adressaient pas à des inconnus. Elles s'adressaient à des gens extrêmement qualifiés qui pouvaient nous donner un éclairage important sur la nature et sur la valeur de la loi qu'on avait devant nous.

Quels étaient ces intervenants auxquels l'Opposition voulait faire appel? En premier, l'Union des municipalités du Québec qui représente l'ensemble des municipalités du Québec à caractère rural et quelques municipalités à caractère urbain. Et le ministre est resté et demeuré insensible aux demandes inlassables de l'Opposition qui voulait consulter. Une loi d'une pareille importance qui a donné lieu à autant de consultations nous est présentée aux derniers instants d'une session pour être jugée, être acceptée, adoptée sans aucune forme de procès. (2 h 40)

Quand on a vu l'insensibilité du ministre à nos allégations comme à nos prétentions, on a décidé de faire appel à ur

autre groupe, soit à l'Union des municipalités régionales de comté et les municipalités locales. Là, c'était vraiment le noeud du problème, parce que cette union réunit plus de 80 % des municipalités régionales de comté. Donc, plus de 80 % des municipalités régionales de comté font partie de l'Union des municipalités régionales de comté, un organisme responsable, compétent, composé de gens qui vivent tous les jours avec la loi 125, la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, qui a marqué et qui marquera le Québec, une des lois les plus importantes qui ont été adoptées pour le monde municipal, une loi qui a eu des difficultés d'acceptation au départ puisqu'il y a eu de la contestation, mais une loi qui, aujourd'hui, est demandée, exigée et est là pour demeurer selon la volonté des municipalités puisqu'elles croient, avec raison, qu'après sept ans de vécu cela leur donne un instrument de développement comme un important instrument de planification pour l'ensemble du territoire du Québec.

Voilà ce que fait une telle loi et, encore là, le ministre des Affaires municipales, qui devrait reconnaître par sa fonction l'importance de ce deuxième groupe auquel l'Opposition voulait s'adresser pour obtenir la meilleure information parce que nous ne mettons pas en doute les paroles des différents ministres qui nous disent que tout va bien dans le meilleur des mondes, mais c'est bon que l'Opposition aille un peu plus loin de temps en temps, qu'elle creuse et aille voir chez les intervenants ce qu'il y a en dessous de ça et ce qu'ils pensent, ces intervenants-là... Quand c'est fait dans l'Opposition, j'ai l'assurance que c'est une bonne consultation qui a des oreilles pour écouter, contrairement à ce qu'on voit dans certains projets de loi qui nous ont été présentés en fin de session où des gens ont fait de la consultation, mais où on omet que cette consultation soit transmise intégralement ou valablement dans des lois.

Donc, encore une fois le ministre a manqué le bateau. Il ne veut pas rencontrer ces groupes-là. Il aime mieux les rencontrer en dehors de l'Opposition. Il nous le répète à satiété, il aime mieux régler les problèmes derrière les portes pour ne pas que les autres sachent ce qui se passe parce qu'on veut les maintenir dans un état de dépendance parce que même les municipalités régionales de comté pourraient, des fois, être tentées de succomber parce que le ministre des Affaires municipales leur donne une pitance à la cuillère. Il leur donne de petits montants pour fonctionner. Ces sommes sont calculées à la graine. On leur dit: Vous allez fonctionner, on va vous maintenir dans un état de dépendance et si vous n'êtes pas correctes... On ne le sait pas, je ne l'ai pas entendu dire ouvertement par le ministre, mais il y a de mauvaises langues qui disent des fois que le ministre des Affaires municipales pourrait être tenté de retirer ces montants ou de les couper, tant qu'ils ne sont pas donnés. Ce qui n'est pas donné n'appartient pas à qui que ce soit. Donc, il pourrait être tenté de refuser à ces organismes à caractère national le droit de bien représenter ces gens-là. L'Opposition considérait que c'était important, que ce n'était pas un geste farfelu, que ce n'était pas sans raison qu'on voulait les écouter.

Comme d'habitude, si la commande n'est pas passée par son côté, par son bord de la Chambre, le ministre des Affaires municipales ne se rend pas souvent aux désirs de l'Opposition, même si c'est très motivé.

Un troisième groupe auquel on avait fait appel, l'Association des aménagistes régionaux, des gens qui, par fonction, travaillent avec les instruments pour mettre en place l'urbanisme, des gens qui vivent avec la loi, qui l'appliquent dans les questions techniques. Ces gens-là avaient demandé par télégramme de rencontrer la commission parlementaire. Donc, même avec la démonstration très forte de la part de l'Opposition, encore une fois le ministre a décidé qu'il était informé, que c'était ce qui comptait parce qu'il est responsable de la loi.

Un quatrième groupe, la Corporation des secrétaires municipaux du Québec, groupe au-dessus de 1200 secrétaires municipaux, des gens qui connaissent les élus. Encore là, malgré des pressions intenses et, je pense qu'il ne faut pas se le cacher, avec des arguments valables - je n'ai pas l'intention de répéter tous les arguments - le ministre a décidé qu'il ne voulait pas les écouter. Cela a duré environ six heures. Le ministre des Affaires municipales a pris panique à la suite de cela. Il a dit, non seulement il l'a dit, mais il l'a transmis à l'Assemblée nationale, il a été voir son leader et a dit: II n'y a plus rien à faire avec l'Opposition, elle va me bloquer mon projet de loi, je suis poigné. Qu'est-ce que je fais avec cela? Cela a été ses réponses. On a dit: C'est facile. On va menacer d'imposer la motion de clôture. Vous savez, la motion de clôture, il ne faut pas que ce soit pénalisé, c'est un acte important, c'est fait par un Parlement. Cela veut dire qu'on a épuisé tous les moyens pour faire cheminer un projet de loi. Après six heures de débats, le ministre des Affaires municipales n'était plus capable. Il a pris panique, il a dit: On ne peut plus adopter le projet de loi, c'est fini, l'Opposition ne voudra jamais marcher.

Cette menace a pesé pendant quelques instants, pour une journée, sur la commission parlementaire. Entre-temps, pas l'Opposition, mais le ministre des Afaires municipales a réfléchi sérieusement sur les objections apportées, martelées par l'Opposition.

Aujourd'hui, on voit un projet de loi qui a été adopté sur division, mais qui n'est plus du tout ce qu'on avait présenté au départ. Même si les ministres, avant le dépôt du projet de loi, s'étaient vantés que tout le monde était d'accord, on vient de constater que ce projet de loi qu'on a devant nous et qui nous est proposé pour acceptation ne se ressemble pas... en tout cas, il n'a pas le même père. Il a changé du tout au tout. Il y a eu des débats de fond, des débats importants.

Les éléments sur lesquels les deux unions étaient en désaccord... Dans le fond, il y avait une union qui était prête à fonctionner d'une façon, l'autre union était prête à fonctionner d'une autre façon, avec des accommodements, mais peut-être avec des réticences. On a joué, dans le fond, notre rôle d'Opposition. Cela fait que le projet de loi qu'on a devant nous a tellement été bonifié que le ministre des Affaires municipales a l'air un peu plus du ministre des Affaires municipales qu'avant l'étude du projet de loi. Oui, je pense qu'on lui a donné un peu d'erre d'aller, mais je ne sais pas pour combien de temps. On lui donne un peu d'erre d'aller, mais il peut se présenter devant les unions municipales en disant: Le projet de loi qu'on vous a proposé, il est pas mal amélioré, il répond pas mal à vos voeux. On a forcé le ministre à faire des concessions ou des accommodements qui vont satisfaire en grande partie le monde municipal.

C'est un tour de force parce que, quand on connaît le ministre comme je le connais, quand on connaît le ministre et la façon dont il procède, je vais dire... En tout cas, l'Opposition ne lui donnera pas de certificat de compétence, mais on pourra dire au moins qu'on apprécie un peu, pour une fois, la démarche que le ministre des Affaires municipales a faite, mais, sans l'Opposition, il n'aurait pas pu la faire.

À maintes reprises, j'ai offert au ministre des Affaires municipales ma collaboration parce que je lui ai dit qu'il avait besoin qu'on l'appuie, qu'on l'aide et qu'on vienne à son secours, et on l'a fait, on lui a donné le moyen de se valoriser. Je dis bravo à l'Opposition. On a fait un travail... J'espère que le ministre des Affaires municipales va reconnaître le travail de l'Opposition dans ce projet de loi. Voici où on en est rendu...

Une voix: Même l'UPA est...

M. Dufour: C'est-à-dire qu'il y a deux unions. Je pense qu'on a suffisamment trouvé de concessions pour que les modes d'acceptation budgétaire soient acceptables. C'est potable, donc cela va être vivable. Souhaitons que ce projet de loi, qui ne sera pas parfait... Il y a des endroits où le ministre des Affaires municipales aurait pu cheminer un peu plus vite et aller un peu plus loin, mais il ne l'a pas fait. Je pense que c'est un gain important pour le monde municipal. C'est une façon de rassurer les deux unions: l'Union des municipalités régionales de comté, comme l'Union des municipalités du Québec.

Un deuxième élément - celui-là est important - c'est celui du comité de concertation agricole qu'on a voulu mettre sur pied. Bien sûr que le ministre de l'Agriculture, qui avait claironné à tous venants que la loi du zonage agricole était importante... Bien sûr, on le savait, c'est l'actuelle Opposition qui a fait adopter ce projet de loi qui est considéré comme un des joyaux certains de la volonté de l'ancien gouvernement, qui a été de nature à donner des effets bénéfiques et aussi à valoriser la classe agricole. (2 h 50)

Quand vient le temps de l'aménagement du territoire, il faut regarder quels sont les différents intervenants qui sont dans le milieu. Donc, on avait cru bon, par ce projet de loi, d'introduire un comité de concertation agricole qui faisait qu'on avait une deuxième commission d'urbanisme sur le territoire. Cette commission d'urbanisme exigerait de la part des élus municipaux des pirouettes, des tours de force, et les obligerait, non seulement à des concessions, mais à des négociations indéfinies, et on aurait mis les élus municipaux à la merci d'une classe de gens qui, par nature, sont des gens respectables, extrêmement valables. C'est une classe de la société qu'on se doit de protéger, et les maires n'ont pas besoin de loi pour protéger la classe agricole. Je le dis et je le dis ouvertement: Les maires qui ne seront pas capables de protéger ou de voir que la classe agricole, c'est une classe importante et qu'on doit protéger ce secteur de notre société, ne méritent pas d'être maires.

Donc, c'est clair, ça. Il me semble que cela devrait être comme ça, et on n'a pas de raison de vouloir les traiter par casier, c'est-à-dire d'établir des classes différentes dans la société, parce qu'une municipalité, ça regroupe l'ensemble des intervenants. Les députés qui sont dans cette Chambre demeurent dans des municipalités. Les professions différentes qui existent dans la société demeurent dans les sociétés.

Les syndicats, quels qu'ils soient, que ce soit de l'Office de la construction, que ce soit le syndicat des enseignants, comme le syndicat des infirmiers ou des médecins, cela demeure dans les sociétés. Donc, si on accepte comme principe de base qu'on traite une classe différemment des autres, chaque classe de la société pourrait avoir la même prétention, c'est-à-dire que chacune pourrait, chaque fois qu'elle est touchée dans son

vécu, demander d'avoir un comité de concertation pour qu'elle puisse se prononcer sur ce qui se passe dans le zonage de la municipalité, et, en même temps, tenir la municipalité en otage.

Donc, j'ai l'impression que cet article a été introduit dans la loi sans savoir trop ses effets. On ne peut pas permettre des intrusions aussi grandes dans une entité qui dépend de l'Assemblée nationale, qu'on régit par des lois, et sur laquelle on a mis autant d'emphase et autant de travail pour lui donner de l'autonomie.

On donne d'une main et on enlève de l'autre. Je pense que c'était inacceptable, et, de ce côté-là, le comité de concertation demeure, bien sûr, mais il n'a aucun pouvoir. Donc, je pense que c'est un gain extrêmement important, et on pourrait le faire vivre avec un arrêté en conseil. Mais s'il veut avoir des pouvoirs, il va falloir l'amener avec des indications ou avec une loi qui lui permettra de vivre.

Mais je pense que d'ici à ce temps-là, avant que ça se fasse, je vous inviterais sûrement à réfléchir sur les problèmes que peuvent causer des intrusions dans des lois qui sont des lois importantes qui pourraient être de nature à changer la vocation des municipalités.

Si on décide aujourd'hui, par des projets de loi, que les élus municipaux n'ont plus leur place, si on décide qu'il faut leur mettre des anges gardiens à toutes les cinq portes, je pense qu'à ce moment-là, c'est tenir les municipalités en tutuelle, c'est vraiment méconnaître le fonctionnement municipal, parce qu'en fait, les agriculteurs sur le territoire finissent tout le temps par s'entendre avec leur municipalité.

Il est très rare qu'on voie les municipalités en désaccord ou en chicane avec le milieu agricole. Si cela se passe comme ça sur le territoire, pourquoi, nous, à l'Assemblée nationale, décide-t-on d'ajouter des mécanismes, pour faire plaisir à des ministres, probablement, comme pour faire plaisir à d'autres organismes qui sont sur le territoire de l'ensemble du Québec?

Je pense qu'on ne doit pas brimer les municipalités dans leur fonctionnement, et je suis convaincu qu'on aide le ministre en faisant cela, parce qu'on force de la concertation, on force l'action correcte par rapport à un cheminement normal d'une société. Et j'ai l'impression que ce serait le seul endroit dans le monde où on réussit à astreindre ou à brimer le fonctionnement des municipalités par d'autres organismes.

Cela ne se passe pas comme ça ailleurs et c'était une erreur monumentale qui avait été causée à cela. Et probablement que c'est un manque d'expérience de la part peut-être du ministre des Affaires municipales, parce qu'il accepte les commandes de ses collègues. C'est sûrement un manque d'expérience de la part du ministre de l'Agriculture qui voudrait mettre son nom un peu sur toutes les lois qu'on adopte au Québec. Il voudrait suivre les traces de son prédécesseur, mais il ne serait peut-être pas capable de le faire.

Je vais être très gentil, c'est la période des fêtes. Je veux bien lui laisser son titre, son travail. Je veux qu'il réussisse, qu'il fasse un bon ministre, je veux surtout qu'il occupe sa place, mais qu'il ne prenne pas la place de tous les autres.

Je dis la même chose pour le ministre des Affaires municipales. Cela va pour le ministère de l'Agriculture, comme pour le ministère de l'Environnement, comme pour celui des Transports et responsable du Développement régional, s'il y a du développement régional. Il faut que cela se fasse comme cela. C'est chacun à sa place, puis on va trouver... Ah non! Je n'irai pas aussi loin que le ministre des Affaires municipales me le suggère. Chacun à sa place et le gouvernement va mieux se porter, les citoyens du Québec vont mieux s'entendre et mieux se comprendre.

Il y a aussi un autre élément sur lequel le ministère ou le ministre des Affaires municipales n'a pas voulu se rendre au bien-fondé des représentations de l'Opposition. C'est en ce qui concerne l'implantation d'unités de production animale sur le territoire agricole. Cela aussi, c'est une trouvaille, mais ce n'est pas une perle, bien sûr. Le ministre des Affaires municipales va vivre avec ses contradictions, comme avec ses incohérences, comme avec ses propres turpitudes.

D'une part, il y a une municipalité, Saint-Louis-de-Pintendre... Je vais le dire très bien pour que mes propos soient bien rapportés. À Saint-Louis-de-Pintendre, les gens avaient trouvé une formulation pour empêcher les unités de production animale, et quand je parle de production animale, je veux bien identifier que c'est surtout de l'élevage de porc et de l'élevage de volaille, donc, des industries qui émettent des senteurs dans l'atmosphère. Donc, pour protéger le milieu bâti, le milieu où il y a des résidents, la municipalité de Saint-Louis-de-Pintendre avait trouvé une façon en instituant une zone tampon. Donc, en suivant le contour de la municipalité, les gens s'assuraient qu'aucune construction de la nature de celle que je viens de décrire ne s'installe très près des limites des milieux bâtis.

Il me semble donc que c'est une façon normale de traiter le sujet, ce qui n'avait pas pour effet d'enlever les droits acquis. Mais cela semblait inacceptable pour le ministre de l'Agriculture, probablement plus

pour l'Union des producteurs agricoles. Il s'est élevé contre cela. Le ministre de l'Agriculture a donc pris le flambeau rapidement, il a levé la hampe et il a dit: II ne faut pas que cela se passe comme cela et non, cela ne va pas, il a eu le courage de venir dire à un ensemble de préfets: Cela ne va pas, je ne suis pas d'accord avec cela. Il a dit de grandes vérités, il a fait un grand discours aux préfets de comté pour leur dire que la Loi sur la protection du territoire agricole était importante, comme si les préfets ne le savaient pas et pour leur dire en même temps que l'agriculture était une industrie très importante au Québec, une industrie primaire, une industrie de base, etc. Il n'a convaincu personne, mais il parle bien et les gens l'ont écouté.

En même temps, le ministre des Affaires municipales est venu dire: Vous savez, il faut bien faire cela parce que c'est de cette façon qu'il faut que cela se passe, il faut faire attention. Et il y a eu quelques échanges très sérieux entre le maire de Saint-Louis-de-Pintendre qui a défendu son idée d'une façon correcte, très respectueuse et, avec le ministre de l'Agriculture et le ministre des Affaires municipales qui est parti rapidement, ce qui faisait dire à des maires qu'ils se sentaient orphelins. Ils voulaient presque voir le ministre de l'Agriculture à la place du ministre des Affaires municipales parce qu'il semblait mieux défendre ses dossiers.

On a vécu avec cela un certain temps. Il y a certains compromis qui se sont faits et la formule qu'on a trouvée c'est qu'on va appliquer les normes imposées par règlement par le ministère de l'Environnement, ce qui fait que, lorsqu'il y aura une unité de production animale qui va s'installer sur un territoire agricole, on devra se promener avec notre mesure pour savoir s'il y a une maison bâtie quelque part.

Je dis que cela va être une mesure extrêmement difficile à appliquer et aussi qui va causer des problèmes beaucoup plus grands qu'une zone tampon autour de la municipalité parce que à chaque fois qu'il y aura une résidence, il faudra s'assurer que les distances sont respectées. (3 heures)

Donc, il y a un endroit où on dit que c'est 600 mètres qu'il doit y avoir entre une unité de production animale et la résidence, ce qui fait que 600 mètres c'est environ 2000 pieds, un rayon de 2000 pieds à gauche, à droite, en avant, en arrière. Je vous dis que ça va nous prendre du territoire dans le Québec pour installer les nouvelles unités de production animale et ces gens-là seront pénalisés puisqu'on vient contrôler le nombre de ces unités-là. On n'a jamais eu ça dans l'idée. Je ne pense pas que les administrateurs municipaux aient cette idée-là, mais la loi a cet effet-là, donc, on va l'appliquer de cette façon.

Comment va-t-on l'appliquer pour les mesures? Probablement que les agriculteurs vont se promener avec un arpenteur-géomètre qui va s'assurer que les mesures sont correctes. Il y aura des coûts supplémentaires et il y aura sûrement des discussions à savoir si 585 mètres par rapport à 600 mètres, c'est correct. Ça, on ne le sait pas, on n'a pas de résultat, on ne l'a pas mis en pratique, mais la logique qui va découler de cette attitude, donc de l'adoption du principe de ce projet de loi et, un jour, de l'adoption du projet de loi, c'est que ça va créer plus de problèmes que de solutions.

On a devant nous un gouvernement qui, avant l'élection, avait des solutions à tous les problèmes et, aujourd'hui, il y a des problèmes à toutes les solutions. C'est la façon dont on a procédé pour essayer de tout trouver, pour ne pas faire de houle et contenter tout le monde. Tant que le projet de loi n'est pas adopté, ça ne cause pas de problème. L'Opposition va concourir, voter contre le projet de loi, mais ne l'empêchera pas. Ça a donné comme résultat qu'on verra à l'usage, à l'oeuvre et à l'épreuve, que le gouvernement qui, pendant deux ans, n'a pas pris beaucoup de décisions, a pu vivre sur l'erre d'aller de ce qui se passait avant, a pu prendre des décisions qui sont contestées et contestables et qui vont amener sur le territoire du Québec de la contestation, des problèmes importants. Là-dessus, bien sûr, il faut laisser la chance au ministre des Affaires municipales d'avoir ses propres problèmes et de vivre avec. Je pense que le rôle de l'Opposition, c'est de dénoncer fortement les actions que le gouvernement veut poser, mais il faut le laisser faire parce que sans ça, l'Opposition serait le pouvoir et ce ne serait pas normal.

 partir de maintenant, on verra les bienfaits que cette loi pourra apporter et surtout les dommages que ça causera dans certaines parties du territoire et comme les municipalités régionales couvrent l'ensemble des territoires à l'exception de Québec et de Montréal et la Communauté régionale de l'Outaouais, on peut dire que la plus grande partie du territoire du Québec sera touchée par cette loi et je vous prédis d'avance, M. le Président, que cette loi n'aura pas les effets bénéfiques qu'on a bien voulu claironner à coup de trompette avant les fêtes en disant qu'il y a eu unanimité quand on sait que ce projet de loi ne ressemble pas du tout à ce qui nous a été présenté ee premier lieu. Merci, M. le Président.

Une voix: Extraordinaire.

Le Vice-Président: Je cède maintenant la parole à M. le leader de l'Opposition.

M. François Gendron

M. Gendron: Oui, M. le Président. Nous en sommes à l'étape de l'étude du rapport de la commission parlementaire sur le projet de loi 88, Loi modifiant la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, la Loi sur les cités et villes et le Code municipal du Québec. Je pense qu'il est important de relater ce qui s'est passé en commission parlementaire sur ce projet de loi et de relater les intentions du ministre des Affaires municipales pour que les gens qui se serviront éventuellement de ces extraordinaires débats de fin de session sachent qu'encore une fois, grâce à la vigilance de l'Opposition, on a pu éviter le pire en termes d'erreurs qu'aurait pu commettre le ministre des Affaires municipales en s'entêtant à vouloir donner suite à un projet de loi, comme on aura l'occasion d'en voir d'autres - d'ailleurs, dont personne ne voulait dans la forme qu'il avait - en particulier sur la création d'un comité agricole qui avait comme conséquence de soustraire aux élus municipaux une des responsabilités qui leur avaient été conférées dans une loi maîtresse, qui s'appelle la loi 125 sur l'aménagement et l'urbanisme.

Il faut se rappeler que cette loi, c'est une loi majeure de l'ancien gouvernement qui avait pris la peine - je pense que c'est au moins un an et demi - d'expliquer aux intervenants municipaux, qu'ils soient urbains ou ruraux, que dorénavant ils devraient travailler ensemble, ils devraient travailler conjointement sur une première responsabilité qui était celle de s'acquitter de la création de schémas d'aménagement dans les diverses municipalités régionales de comté du Québec.

Il faut se rappeler que lorsqu'on confie un mandat à des élus municipaux du secteur rural et du secteur urbain pour travailler ensemble dans la perspective de préparer un schéma, c'est parce que, en règle générale, on fait un schéma pour mieux recevoir le développement qui va suivre.

Ces MRC se sont bien acquittées de leur première mission, à savoir la préparation de schémas d'aménagement. Le ministre des Affaires municipales arrive avec le projet de loi 88. Les objectifs du projet de loi 88 -c'est peut-être bon de les rappeler prévoient que la municipalité régionale de comté pourra, à une forte majorité de son conseil, acquérir compétence sur un service municipal à l'égard de toutes les municipalités de son territoire. Elle pourra aussi, de la même façon, accepter la délégation d'un pouvoir par le gouvernement. Les municipalités soumises à cette compétence de la municipalité régionale de comté pourront toutefois s'y soustraire.

Le projet contient également des dispositions qui permettront de réviser, à l'initiative de la municipalité régionale de comté, le mode de représentation et de prise de décision du conseil de celle-ci. Il prévoit aussi un allégement de la procédure d'entrée en vigueur des schémas d'aménagement et un resserrement de la cohésion des dispositions relatives à la conformité des règlements d'urbanisme aux plans d'urbanisme de la municipalité.

Enfin - c'était cela qui faisait problème - il permettra aux producteurs agricoles de se prononcer par l'intermédiaire d'un comité de concertation sur certaines modifications au zonage dans une zone agricole.

Quand on fait un projet de loi qui touche des corps intermédiaires aussi importants que l'Union des municipalités du Québec ou l'Union des municipalités régionales de comté, il est important que les principaux partenaires soient à tout le moins en accord avec les changements proposés.

Rapidement, ce qu'on a entendu relativement à ce projet de loi, c'est, entre autres, l'expression de l'UMRCQ qui trouvait que le comportement des différents ministères sectoriels était passablement odieux envers le schéma d'aménagement. Cela donnait des titres comme celui-ci: "L'UMRCQ stigmatise le comportement des ministères sectoriels", parce qu'elle était convaincue que ce n'était pas comme cela qu'il fallait respecter les engagements pris envers la loi 125. Dans un vibrant plaidoyer en faveur du respect de l'autonomie des régions, le président de l'UMRCQ, M. Nicolet, avait eu l'occasion de dénoncer le comportement centralisateur de certains ministères sectoriels qui agissent comme si les MRC n'existaient pas. De cette façon, M. Nicolet donnait le ton au congrès qui a réuni plus de 3000 élus de toutes les régions du Québec à Montréal, à la fin de septembre.

Là, avec des exemples, le président de l'UMRCQ parlait, entre autres, du dérapage du ministère du Tourisme. Il a été poli, il n'a pas parlé du dérapage du ministre du Loisir. On sait qu'il dérape fréquemment, on en a eu un exemple avec la loi 101, une espèce de loi de fou qui avait comme conséquence de réduire à peu près de 80 % le territoire faunique du Québec. L'Opposition, encore là, par sa vigilance, est venue à bout de faire comprendre au ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, qui avait l'indécence de prétendre que ce n'était pas sa faute, que c'était un projet de fonctionnaires... Ce sont les fonctionnaires qui portaient ce projet de loi, il n'avait rien à faire là-dedans, il est juste ministre du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche, imaginez!

M. Nicolet, en ce qui concerne le tourisme dans l'Estrie, a cité l'exemple du développement touristique de l'Estrie. La table des préfets de cette région conteste le rôle que s'est donné l'Association touristique régionale en prétendant que l'Association

touristique, qu'on appelle l'ATR, avait débordé son mandat centré sur la promotion - écoutez bien ce qui suit - pour verser dans des fonctions qui relèvent de notre responsabilité, qui relèvent de la responsabilité des MRC. (3 h 10)

Là, M. Nicolet est arrivé sur l'essentiel du projet de loi, en disant que, lui, il trouvait que ça n'avait pas de bon sens d'instaurer un nouveau concept de démocratie, à savoir que, dorénavant, la majorité simple au sein du conseil de la MRC ne suffirait plus. Dorénavant, cela prendrait une majorité aux deux tiers. Il y a eu toutes sortes de suggestions, 75 % pour le budget. Et il a insisté évidemment sur le fait que le gouvernement entendait soustraire une des responsabilités importantes dévolues à la MRC qui était dorénavant de régler les litiges entre les différents élus et ce qu'on appelle des vocations particulières, des vocations spécifiques comme celle de s'occuper du zonage agricole, de s'occuper du schéma d'aménagement.

Là, le ministre des Affaires muncipales a laissé voir qu'il était certain de son affaire, et, à peine après quelques heures de débat, du jamais vu, on a indiqué que le gouvernement se prévaudrait d'une disposition prescrite dans nos règlements qui s'appelle la motion de clôture.

Là, on a menacé l'Opposition de la baîllonner. On a dit: Six heures d'études en commission parlementaire, c'est assez, et, si vous ne nous donnez pas rapidement le projet de loi 88, vous allez devoir subir la motion de clôture.

Alors, pour ceux qui sont moins familiers avec ces expressions, M. le Président, la motion de clôture, c'est simple, ça veut dire que l'Opposition n'a plus le droit de s'exprimer. L'Opposition ne peut plus dire ce qu'elle pense d'un projet de loi. Le gouvernement, avec sa majorité, prétend qu'il doit procéder, et, en conséquence, au diable les arguments des concernés! Au diable le fait que ceux qui auront à vivre avec la loi soient en accord ou pas! On nous dit: Cela suffit, il n'est pas question d'aller plus loin.

C'est à cela qu'on a assisté. On a eu l'occasion, cependant, de rencontrer tout autant l'UMRCQ que l'UMQ et de leur dire que nous aussi, nous serions d'accord avec eux pour dire que le fameux comité tripartite ou bipartite pour lequel le député de Charlesbourg, le ministre des Pêcheries et de l'Alimentation, le ministre l'Environnement avaient eu de longues discussions au comité ministériel permanent du développement régional, pour leur dire que nous ne voulions pas que, dorénavant, les responsabilités des élus soient fragmentées.

On pense que ça leur appartenait. En conséquence, il y a eu une décision pour retirer le fameux comité concernant toute la question des zones tampons et toute la question de la gestion du territoire agricole. Mais il n'en demeure pas moins que le projet de loi 88 a modifié sensiblement une loi maîtresse, une loi majeure, qui est celle de l'aménagement du territoire, et cela, quelques mois à peine après que les MRC se soient acquittées de leur responsabilité première qui était de faire le schéma d'aménagement.

Nous pensons que, pour ces gens qui commençaient à peine à avoir développé de bonnes relations de fonctionnement conjoint, commun, entre les élus du monde rural et les élus du monde urbain, c'était quand même prématuré. En conséquence... M. le Président, étant donné qu'en troisième lecture, nous n'avons que des dix minutes et que vous m'indiquez que mon temps est presque terminé, je vais être obligé de conclure en disant que, grâce à la vigilance de l'Opposition et de notre critique en matière d'affaires municipales, encore une fois, le ministre des Affaires municipales aura dû retraiter, aura dû entendre raison et convenir que l'Opposition avait raison d'avoir des exigences très fermes et très serrées.

Merci, M. le Président, mais c'est certain que ce n'est parce que le ministre des Affaires municipales a retiré le comité agricole que nous allons changer notre point de vue par rapport au projet de loi 88. Nous serons évidemment contre.

Le Vice-Président: Très bien. Je vais maintenant céder la parole au prochain intervenant. Sur une question de règlement, M. le député d'Ungava.

M. Claveau: Question de règlement, je demande le quorum, M. le Président.

Le Vice-Président: M. le député, je vais vérifier immédiatement.

Alors, nous n'avons pas quorum à ce moment-ci. Je demanderais aux députés de prendre place, s'il vous plaît! Nous avons maintenant quorum. Est-ce qu'il y a un intervenant qui veut se manifester? Je cède donc la parole à M. le député de Bertrand.

M. Jean-Guy Parent

M. Parent (Bertrand): Merci beaucoup, M. le Président. Le projet de loi 88 dont on doit s'entretenir, aujourd'hui, est un projet de loi qui modifie la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, la Loi sur les cités et villes et le Code municipal. Comment est-il possible qu'à 3 h 15 du matin, quelques jours avant Noël, on soit là à discuter du projet de loi 88, en pleine nuit? Si l'on regarde un petit peu le cheminement de ce qui s'est passé et qu'est-ce qui fait que, aujourd'hui, on se retrouve en Chambre, on comprend un peu mieux

pourquoi on doit, ici, du côté de l'Opposition, se battre pour faire comprendre au ministre des Affaires municipales, qu'il y a quelque chose qui ne marche pas.

On se rappellera, M. le Président, que les 5 et 6 août dernier, il y a eu des rencontres Québec-municipalités, rencontres dans lesquelles il y a eu consultation avec les différents groupes intéressés, des groupes qui représentent les municipalités, les municipalités régionales de comté, donc l'Union des municipalités, l'Union des municipalités régionales de comté et les groupes afférents. Cependant, le ministre s'est entêté à présenter, à l'intérieur du projet de loi 88, des modifications profondes concernant les MRC, concernant les municipalités et, M. le Président, cela a fait qu'on s'est ramassés, il y a quelques jours, en commission parlementaire. J'avais le plaisir de présider, à ce moment-là, la commission parlementaire - le ministre vient de quitter. Il est 3 h 15, il n'en peut plus. -de l'aménagement et des équipements et j'écoutais mon collègue, le député de Jonquière, qui demandait, avant qu'on passe à l'étude article par article, effectivement au ministre des Affaires municipales de faire comparaître en commission parlementaire l'Union des municipalités du Québec, l'Union des municipalités régionales de comté, l'UMRCQ, parce que ces deux groupes représentent les intérêts des municipalités du Québec et des municipalités régionales de comté, afin qu'ils puissent venir dire au ministre exactement ce qui ne fonctionne pas à l'intérieur du projet de loi.

Je me souviens, M. le Président, de 1980-1981, alors que moi-même, j'étais maire de la municipalité de Boucherville et qu'il y avait formation des MRC. Il y avait eu toute une bataille, à ce moment-là, parce que les municipalités, les maires des villes, comprenaient difficilement ce qui était en train de se passer, mais avec les explications qu'on nous a données, les maires ont finalement compris l'importance de l'aménagement du territoire, l'importance de la planification à l'échelle régionale, de se regrouper ensemble, de faire des découpages de municipalités régionales de comté, pour faire en sorte qu'il y ait, sur le territoire du Québec, un meilleur aménagement urbain avec tous les services connexes. (3 h 20)

Aujourd'hui, 1987, 6 ans et demi plus tard, le ministre des Affaires municipales décide d'apporter des modifications profondes qui viennent chambarder totalement les règles du jeu et les pouvoirs autant des municipalités que des municipalités régionales de comté. M. le Président, c'est carrément inacceptable de voir l'attitude d'un ministre d'un gouvernement d'irresponsables aller fondamentalement à l'encontre des gens du milieu, c'est-à-dire des dirigeants locaux et des dirigeants des municipalités régionales de comté. Je comprends plus difficilement, parce que le ministre des Affaires municipale a été maire d'une municipalité. Nous étions des municipalités voisines sur la rive sud de Montréal. Il a été maire de la ville de Saint-Lambert. Au moment où il était maire, il avait une version des choses quelque peu différente: l'autonomie municipale, les pleins pouvoirs des muncipalités, des conseils municipaux, c'était important, et je le comprends. J'ai toujours, moi aussi, défendu ces principes.

Comment, aujourd'hui, ce même homme est-il capable de venir légiférer en allant à l'encontre de ces principes fondamentaux? Comment le ministre des Affaires municipales peut-il avoir un tel comportement, aujourd'hui, quelques années plus tard, venir présenter un projet de loi comme le projet de loi 88? Je me l'explique difficilement. Sauf que pour avoir suivi d'assez près le débat en commission parlementaire, j'ai compris que le ministre, et pas seulement sur cette loi, que le ministre ne voulait rien entendre.

Vous savez, M. le Président, il y a un ministre qui ne comprend pas vraiment ce qui est en train de se passer, il y a des fonctionnaires qui lui préparent des projets de loi. Les projets sont là pour soi-disant améliorer ce qu'on a. Il faut qu'un ministre comprenne vraiment ce qu'il est en train de faire, sinon il va se faire passer des lois préparées par des fonctionnaires et qui iront à l'encontre de grands principes. Comment le ministre des Affaires municipales peut-il, aujourd'hui, même avec les modifications apportées au projet de loi 88, tenir encore à ce qu'il y a dedans? Et ce, Dieu merci! grâce au député de Jonquière, qui a dû faire un travail incroyable avec le ministre, un rapport de forces incroyable, en fin de session, pour essayer de faire comprendre à ce ministre que cela n'a pas de sens. On ne se bat pas juste pour se battre. Ce n'est pas amusant, pour qui que ce soit, d'un côté ou de l'autre de la Chambre, à 3 heures du matin, le 18 décembre - 3 h 20 du matin -pour expliquer au ministre des Affaires municipales qu'il présente quelque chose qui n'a pas de sens. Il y a une quinzaine, une vingtaine de modifications qui ont été apportées. Le ministre a décidé de s'asseoir avec mon collègue, le député de Jonquière, et de discuter quand il a vu que cela bloquait totalement. Bien sûr qu'on ne gagnera pas sur le nombre. Ils sont 99 et on est 22. Sauf que le ministre va comprendre qu'il y a des messages qui passent. J'espère que les messages vont passer au-delà du ministre et qu'ils vont se rendre jusqu'aux collègues d'en face, les députés de la formation gouvernementale, pour faire comprendre au ministre des Affaires municipales qu'il est dans l'erreur. D'ailleurs,

ce n'est pas le seul projet de loi. L'attitude du ministre des Affaires municipales n'a aucun sens. D'ailleurs, je ne suis pas le seul à penser comme cela. Le président de l'Union des municipalités régionales de comté, M. Roger Nicolet... Je ne citerai pas les articles, mais il y a beaucoup d'articles de journaux qui analysent le travail du ministre dans le projet de loi 88 et qui sont de mon avis, à savoir que le ministre des Affaires municipales est en train d'errer, de démanteler de façon systématique, à cause du chambardement des pouvoirs, est en train de poser des gestes qui risquent d'être vraiment néfastes.

Le ministre des Affaires municipales n'a pas encore compris le message. Pourtant, le député de Jonquière, pendant plusieurs heures, a passé les messages - et j'étais présent - a expliqué au ministre ce qui n'avait pas de sens. La réaction du ministre a été de rire, de sourire en disant que mon collègue décidait de faire des batailles pour faire des batailles. Je pense que le député de Jonquière sait de quoi il parle; il a été maire pendant 19 ans et il a été président de l'Union des municipalités du Québec. C'est un bonhomme qui s'y connaît passablement en matière municipale. Lorsque le député de Jonquière a expliqué en long et en large ce qui n'allait pas, ce qui était inacceptable, le ministre s'est rendu à plusieurs de ses amendements tout récemment, au cours des dernières heures, au cours des derniers jours. Mais, il reste encore, M. le Président, des choses carrément inacceptables dans le projet de loi 88.

Vous savez, dans ce sens-là, on n'a pas le choix. Avec mes autres collègues ici, je vais effectivement continuer à dénoncer, non seulement l'attitude du ministre mais ce qui se retrouve toujours actuellement dans le projet de loi 88. Pour ma part, j'espère que le ministre entendra les derniers messages qu'on a à lui livrer en cette fin de session, quelques heures avant que nous ajournions pour la période des fêtes. J'espère que les messages que j'ai pu passer, de même que ceux que mes collègues passeront, feront en sorte que le ministre des Affaires municipales pourra se raviser une autre fois. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président: Je cède maintenant la parole à M. le député de Shefford.

M. Roger Paré

M. Paré: Oui, merci M. le Président et bonne nuit parce qu'il faut dire qu'il sera bientôt 3 h 30 du matin. Vous allez me permettre, en commençant, de rappeler certains discours que j'entendais des ministres actuels qui étaient, il n'y a pas tellement d'années, de ce côté-ci de la Chambre et qui dénonçaient avec véhémence le fait que l'on vienne traiter de sujets importants en fin de session, en pleine nuit.

Le Vice-Président: S'il vous plaît! Sur un rappel au règlement. M. le député d'Ungava.

M. Claveau: M. le Président, je constate que mon collègue de Shefford est très peu écouté et je demande le quorum en cette Chambre.

Le Vice-Président: Alors, qu'on appelle les députés.

Qu'on appelle encore les députés s'il vous plaît! Nous avons maintenant quorum, M. le député de Shefford vous pouvez poursuivre. (3 h 30)

M. Paré: Alors, merci beaucoup, M. le Président. Donc, je poursuis où j'en étais rendu. Je me rappelle que les ministres actuels, dont le ministre des Affaires municipales, dénonçaient avec véhémence, il y a à peu près un peu plus de deux ans, le fait que l'on vienne discuter, en pleine nuit, de projets de loi importants et ils avaient promis que ce ne serait plus jamais la même chose, qu'il y aurait moins de législation et qu'elle serait mieux répartie. Eh bien, on se rend compte, à l'étude du rapport de la commission qui a étudié le projet de loi 88, que cela n'a pas changé, qu'il y en a beaucoup et qu'à la dernière journée ou la dernière nuit avant la fin de la session, nous sommes en train de discuter d'un projet de loi qui est fondamental.

Pourquoi est-ce fondamental? Parce que le projet de loi 88, seulement à la lecture du texte, vous allez comprendre, M. le Président, Loi modifiant la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, la Loi sur les cités et villes et le Code municipal du Québec, des lois qui régissent l'ensemble des municipalités du Québec. Donc, on touche à quelque chose de fondamental, on vient modifier la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme.

Moi, je me rappelle au début des années quatre-vingt, lorsque l'ancien gouvernement a implanté les municipalités régionales de comté - c'était important et cela l'est toujours - c'était dans le but de marier - c'est le terme qu'on utilisait à ce moment-là - finalement, les municipalités rurales avec les municipalités urbaines, spécialement en dehors des grandes agglomérations que sont Montréal, Québec et Hull, de faire en sorte qu'on aménage, qu'on concerte les gens, qu'on planifie le développement, mais le planifier en concertation avec les municipalités avoisinantes, ce qui apporte à la fin plus de développement, un meilleur développement, des économies d'énergie, des économies de temps et des économies financières. Donc, la

philosophie qu'il y avait en dessous de cela, c'était profitable pour l'ensemble de la collectivité. C'est une loi qui était importante, une loi majeure et une loi qui a été apportée et discutée au début des années quatre-vingt pour entrer en vigueur aussi dans les mois qui ont suivi. Ce qui a fait en sorte que les municipalités ensemble, à la même table, se sont mises à travailler et à planifier le développement dans des schémas d'aménagement. C'était leur rôle de mettre en place au cours des années des schémas d'aménagement.

C'est sûr qu'après quelques années, alors que les schémas d'aménagement sont déposés, maintenant, on regarde des modifications qui pourraient être intéressantes en ce qui concerne la loi qui régit les municipalités régionales de comté et la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme.

Oui, c'est important de le refaire mais pas de n'importe quelle façon. Pour quelle raison n'a-t-on pas déposé ce projet de loi avant? Pour quelle raison n'a-t-on pas rencontré les intervenants plus rapidement? Pour quelle raison n'avons-nous pas discuté plus amplement avec ces mêmes associations? Je ne parle pas de n'importe quelle association, les associations majeures au Québec, c'est-à-dire l'Union des municipalités du Québec, l'Union des municipalités régionales de comté et l'UPA. Dans le projet de loi, le dernier paragraphe des notes explicatives dit: À la fin, il permettra aux producteurs agricoles de se prononcer, par l'intermédiaire d'un comité de concertation, sur certaines modifications au zonage dans une zone agricole.

Donc, à 3 h 30 du matin, on est en train de parler de quelque chose d'aussi fondamental que des modifications à des lois majeures, c'est-à-dire la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme et la loi 90 sur le zonage agricole. C'est fondamental, et pourtant on a décidé qu'on passait cela à la dernière minute en n'ayant pas suffisamment planifié, en n'ayant pas suffisamment discuté avec les intervenants majeurs. Maintenant, on discute en pleine nuit pendant que les citoyens dorment. C'est la façon de procéder qu'on dénonce et, même en commission parlementaire, on a été menacé de la guillotine, c'est-à-dire interrompre les travaux et empêcher l'Opposition de faire son travail.

Heureusement, notre représentant, le député de Jonquière, a fait un boulot extraordinaire, j'en profite pour le féliciter. L'ancien maire de Jonquière, l'ancien président de l'Union des municipalités du Québec, donc, un homme qui connaît le dossier à fond, il sait de quoi il parle, a permis au ministre de modifier considérablement le projet de loi. Donc, oui, on doit reconnaître que le projet de loi 88, tel qu'il nous revient après la commission parle- mentaire, a été considérablement modifié et amélioré, grâce à l'Opposition qui a fait un boulot extraordinaire, spécialement le député de Jonquière qui a été présent tout le temps, qui n'a pas eu peur d'intervenir, d'amener des modifications sur un sujet qu'il connaissait mieux, j'ai l'impression, que le ministre lui-même. La preuve, c'est que, pour une cinquantaine d'articles, il y en a eu facilement la moitié, sinon plus, qui a été modifiée.

C'est presque incroyable de légiférer de cette façon sur des dossiers aussi fondamentaux. On amène un projet de loi d'une cinquantaine d'articles et, grâce à l'Opposition, à la fin de la commission parlementaire, on a modifié 50 % à 75 % des articles. Cela veut dire, ou bien que c'était mal préparé, que c'était du travail mal fait, ou que le ministre ne savait pas de quoi il parlait. Mais, heureusement, grâce au député de Jonquière, le porte-parole de l'Opposition en matière d'affaires municipales, on a amélioré le projet de loi, mais pas suffisamment, parce qu'à notre avis il y a des principes fondamentaux qui sont touchés là-dedans.

Cela risque d'amener, comme dans bien d'autres projets de loi présentés par le même ministre, plutôt de la confrontation par rapport à la philosophie qui avait amené la mise sur pied des municipalités régionales de comté, qui était la concertation. Nous, on voulait harmoniser les choses, on voulait faire en sorte que les gens s'assoient à la même table pour planifier, mais dans un esprit de concertation en faisant en sorte que les gens planifient, en dialoguant. Mais là on amène plutôt de la confrontation. Ce n'est pas la première fois, spécialement durant cette présente session, et c'est presque incroyable. Dans le domaine de l'habitation, on est train de toucher à - deux minutes seulement, malheureusement - des principes fondamentaux comme l'équité, l'unicité des lois. C'est ce qu'on a fait avec la loi 87. Une autre loi qu'on a discuté tantôt de l'autre côté, la loi 111 sur la Communauté urbaine de Québec, c'est la même chose. On est en train d'installer la confrontation, alors qu'on avait réussi à amener la concertation. Ce va être la même chose, les risques qui sont amenés par le projet de loi 88 avec le fameux comité de concertation. Mais on le conserve. Est-ce que c'est pour sauver la face que le ministre le conserve dans le projet de loi ou si c'est une menace réelle? On ne le sait pas, mais ce qu'on sait, grâce aux interventions de l'Opposition, c'est qu'il est devenu finalement un organisme sans pouvoir. Il faudra amener une nouvelle loi à la suite d'un arrêté en conseil pour être capable de le rendre opérationnel, mais il est toujours dans la loi. Cela veut dire qu'on amène en pleine nuit, à la dernière minute, à l'intérieur des projets

de loi, des comités qui feront en sorte de venir modifier l'esprit, la philosophie qu'on avait amenée dans les municipalités. C'est pour cette raison que nous allons nous opposer au projet de loi 88, même s'il y a eu, grâce à mon collègue de Jonquière, beaucoup de modifications et d'améliorations. Mais, parce qu'à l'intérieur de ce projet de loi on attaque des principes fondamentaux de lois aussi importantes que le zonage agricole et la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, c'est trop fondamental pour que l'on accepte d'adhérer à ces changements qu'on nous impose. Et parce qu'on conserve, à l'intérieur de ce projet de loi, le comité de concertation, on pense que c'est déjà une entrée vers cet esprit de dispute qu'on veut implanter ou que l'on veut laisser s'implanter et on dit que ça n'a pas de bon sens. Il faudrait revenir à la philosophie qui, au début des années quatre-vingt, a motivé cette loi, c'est-à-dire le dialogue entre les municipalités et la concertation pour une meilleure planification de l'avenir. On pense que le projet de loi 88 va plutôt dans le sens inverse, et c'est la raison pour laquelle nous allons malheureusement devoir être contre. Merci, M. le Président.

Une voix: Bravo!

Le Vice-Président: Je cède la parole à Mme la députée de Maisonneuve. (3 h 40)

Mme Louise Harel

Mme Harel: Merci, M. le Président. Ce qui est quand même stimulant dans ce métier que nous faisons ici à l'Assemblée nationale, c'est de pouvoir, à l'occasion, prouver que c'est d'abord et avant tout un métier de généraliste. Les contributions que nous sommes appelés à livrer à cette Assemblée ne portent pas seulement sur des dossiers que nous connaissons bien, mais nous devons également à l'occasion aborder des dossiers qui intéressent nos concitoyens, des dossiers qui sont d'actualité et pour lesquels je plaide en toute modestie que nous n'avons pas nécessairement une spécialité qui est consacrée ou reconnue. C'est le cas, dois-je le dire, de ce projet de loi que nous étudions, en ce qui me concerne. C'est le projet de loi qui modifie la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme.

Vous savez que la fin de la session qui est dans l'erre d'aller depuis le 1er décembre dernier est sans doute, de mémoire de parlementaire qui siège en cette Chambre depuis bientôt sept ans, la fin de session la plus tranquille que j'aie connue. Je me demandais même comment les nouveaux collègues qui sont arrivés depuis deux ans pouvaient imaginer ce qu'ont été les fins des sessions précédentes, étant donné que les ajourne- ments de séances se multipliaient depuis trois semaines à des heures, somme toute, raisonnables et que nous n'avions pas encore eu, malheureusement, ou heureusement plutôt, l'occasion de siéger à des heures indues en plein milieu de la nuit, au moment où il est difficile, admettons-le, de faire du travail législatif qui soit tout à fait valable.

Je pense que même nos concitoyens s'interrogent sur la validité et l'efficacité du travail qu'on peut faire dans cette Assemblée, à de telles heures. Au moment même où on pouvait se féliciter qu'une session se termine, puisque ce sera éventuellement le cas demain, sans que le leader ait appelé des projets de loi à des heures totalement irresponsables et déraisonnables, il faut dire que la mauvaise nouvelle m'a été apprise il y a peut-être une demi-heure de cela, M. le Président, lorsqu'on m'a réveillée chez moi en m'invitant à venir intervenir dans cette Assemblée.

C'était évidemment une mauvaise nouvelle puisqu'on m'informait que le leader du gouvernement avait l'intention de ramener à la surface un projet de loi majeur, un projet de loi qui pourtant devrait solliciter l'appui des partis, un projet de loi portant sur les relations du travail, qu'il avait l'intention, dis-je, de proposer à la dernière minute, à la sauvette, un projet de loi qui, bien au contraire, nécessite l'accord des organismes qui auront à vivre avec les nouvelles structures et l'exercice des nouveaux pouvoirs qui seront ainsi modifiés. C'était donc une mauvaise nouvelle, mais la bonne nouvelle, dois-je vous le dire, c'est que cela nous permettait - c'était une heureuse coïncidence du sort - d'intervenir plus longuement sur le projet de loi 88.

Je dis une heureuse coïncidence du sort parce que c'est certainement un projet de loi qui nous permet d'abord de reconnaître le travail exemplaire mené au cours des dernières semaines par le député de Jonquière. C'est un travail exemplaire parce que c'est évidemment un travail d'une énergie considérable, d'un enthousiasme dont il ne s'est jamais départi au cours des dernières semaines. C'est un juste retour des choses parce que c'est sans doute le seul projet de loi sur lequel un "briefing" avait été demandé pour les députés de l'Opposition. C'est le seul projet de loi, sans doute, que nous avions pu, avec le critique de l'Opposition, le député de Jonquière, examiner en profondeur pour nous familiariser avec ses enjeux extrêmement importants. C'était d'autant plus facile d'intervenir à l'emporte-pièce, ayant participé à ce "briefing" organisé par le député de Jonquière, il y a quelques semaines.

J'ai pu ainsi cette nuit, malheureusement, constater que le fameux comité de

concertation agricole, décrié par de nombreux intervenants au Québec comme pouvant être une deuxième commission d'urbanisme sur le territoire, malgré que ce soit une coquille vide, on peut bien en convenir, était maintenu. J'apprenais donc cette nuit que, ce fameux comité de concertation agricole étant maintenu dans le projet de loi 88, le porte-parole de l'Opposition en matière d'affaires municipales et d'habitation, le député de Jonquière, exhortait ses collègues à voter contre le projet de loi. Il les invitait à prendre la parole à l'occasion de ce débat pour inciter les députés ministériels à faire de même.

M. le Président, je pense que c'est une heureuse coïncidence du sort qu'on puisse complimenter le député de Jonquière pour le travail qu'il réalise en matière d'affaires municipales. Il a fait reprendre ses devoirs au ministre des Affaires municipales à maintes reprises. Cela a été le cas notamment à l'occasion de ce projet de loi puisque, après avoir menacé le député de Jonquière d'une motion de clôture, le ministre, heureusement, se ravisait et il introduisait des amendements à la suite d'une rencontre avec les représentants de l'Union des municipalités régionales de comté du Québec et de l'Union des municipalités du Québec. Ces amendements, il faut en convenir, ont été introduits grâce au travail acharné du député de Jonquière qui a obligé le ministre des Affaires municipales à faire face à ses responsabilités. C'est certainement un devoir auquel s'applique le député de Jonquière depuis deux ans qu'il est porte-parole de l'Opposition en matière d'affaires municipales et d'habitation. Il faut en convenir, il connaît bien le dossier, ayant été maire de Jonquière lui-même. Il connaît à la perfection le langage codé, doit-on l'avouer, qui a cours dans le monde municipal. Le député de Jonquière se débat dans ces dossiers avec une facilité totalement déconcertante en comparaison avec la lourdeur que manifeste le ministre des Affaires municipales et responsable de l'Habitation.

Une voix: Oui, c'est vrai cela.

Mme Harel: M. le Président, en ce qui concerne ce projet de loi, le président de l'Union des municipalités régionales de comté, M. Nicolet, mettait et met toujours le gouvernement en garde contre la tentation toujours présente, de la part des ministères en régions, de court-circuiter les élus des autorités municipales régionales de comté. Notamment, en fait foi un discours prononcé par le président de l'UMRCQ lors du dernier congrès tenu à la fin de l'été dernier et au cours duquel il portait un jugement très sévère en ce sens qu'il y avait encore en régions des centaines de fonctionnaires qui imposaient leur loi, du moins une foule de tracasseries aux administrations municipales et cela - disait-il - dans divers domaines tels l'aménagement du territoire, le développement touristique, l'environnement et la voirie. Il rappelait qu'en environnement il craignait un transfert de responsabilités déguisé du ministère vers les municipalités sans qu'elles disposent pour autant des ressources financières ni du pouvoir décisionnel approprié.

C'est certainement l'occasion, avec ce projet de loi 88, de mettre en garde le ministre des Affaires municipales et ses collègues contre une tentation toujours présente dans les ministères en régions d'imposer leur diktat aux élus des régions.

Je vois que mon temps file, je sens que c'est une contribution de généraliste mais il y a certainement des spécialistes plus avisés que moi qui auront l'occasion d'intervenir durant le présent débat. Je vous remercie.

Des voix: Bravo! C'est très beau!

Le Vice-Président: Je reconnais maintenant M. le député d'Ungava.

M. Christian Claveau

M. Claveau: Merci, M. le Président. C'est avec beaucoup d'intérêt que j'ai participé à une bonne partie de la commission parlementaire qui a étudié article par article le projet de loi 88 lequel, comme on a eu l'occasion de le dire, amène certains amendements à la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, la Loi sur les cités et villes et le Code municipal du Québec.

Lors de ces débats et dans d'autres débats lors de l'étude détaillée article par article de projets de loi touchant la question municipale, j'ai pu me rendre compte que le ministre des Affaires municipales n'était pas particulièrement versé ou intéressé par le développement des MRC comme tel, par l'application des articles de la loi 125 créant les MRC qui ont pour effet de donner aux MRC un certain pouvoir d'intervention dans les milieux, un certain pouvoir de coordination des activités municipales, de mise en commun de services à l'intérieur de certaines régions. (3 h 50)

En effet, M. le Président, lors de l'étude du projet de loi modifiant l'Administration régionale Kativik, le ministre en est même arrivé à dire à un moment donné: Vous savez, une MRC, il ne faut pas se mêler, ce n'est pas une instance politique. Il a dit: C'est une instance administrative de services. Les MRC ne sont pas là pour remplacer le gouvernement, elles ne sont pas là pour remplacer les municipalités et elles restent et devront rester une espèce d'instance de coordination de services, une

instance de style strictement administratif. Je me souviens, à ce moment-là, d'avoir dit au ministre: Écoutez, M. le ministre, plutôt que de faire des lois sur les MRC, si vous le prenez comme cela, donnez-leur simplement une charte d'organisme à but non lucratif qui pourra fonctionner dans le domaine des services. À ce moment-là, on vient de régler le problème. Car, M. le Président, il me semble que, selon cette philosophie avancée par le ministre, on restreint énormément le rôle d'un organisme de concertation en fonction du développement régional, en fonction de la mise en place de services régionaux organisés, structurés pour le mieux-être de toute une population qui doit se partager un même territoire.

M. le Président, on se souviendra que les MRC n'ont pas été mises en place uniquement pour le plaisir de la chose, uniquement pour s'amuser à créer des structures. On se souviendra, M. le Président, qu'il fut un temps où les municipalités rurales étaient en conflit flagrant, perpétuel, avec les grosses villes, les centres urbains qui drainaient chez eux l'ensemble des interventions économiques et sociales, l'ensemble des structures d'accueil pour les nouveaux arrivants ou pour le tourisme, etc., pour tout ce qu'on peut imaginer, les parcs industriels, etc. Ce n'est que par le biais des MRC, en établissant les schémas d'aménagement, qu'on a obligé les élus de toute une région donnée à s'asseoir ensemble pour discuter conjointement de la façon qu'on va développer un territoire donné, incluant différentes administrations municipales. Ce n'est que par ce biais que l'on a réussi à créer une certaine harmonie dans plusieurs des régions du Québec et aussi à permettre aux petites municipalités rurales, peut-être un peu moins fortunées, d'avoir un poids relatif suffisamment important pour pouvoir elles aussi bénéficier d'une certaine amélioration des impacts économiques dans leur milieu. Ce n'est que de cette façon qu'on a réussi à créer des structures d'accueil, des structures de développement social, économique et touristique dans différentes municipalités qui, autrement, auraient dû, à titre individuel, continuer à faire des luttes impliquant des nains contre des géants. On sait que, dans ces cas-là, c'est généralement le géant qui gagne.

Le ministre vient nous dire maintenant: Écoutez, les MRC ne sont pas une instance décisionnelle sur le plan politique - il l'a dit en commission parlementaire - mais elles devraient être strictement une instance administrative, une instance de concertation plus ou moins organisée. À ce moment-là, M. le Président, je dis que le ministre des Affaires municipales fait fausse route et qu'il devrait considérer, au contraire, une MRC comme un centre d'accueil et de discussion de première importance qui ne regroupe que des élus qui ont tous intérêt à travailler pour le mieux-être de leur population; ils ont été élus pour cela et c'est ce qu'ils font. La structure qu'elles se donnent va leur permettre de se donner une table de discussion et de concertation qui doit, elle aussi, être considérée comme une instance politique au sens pur, au sens large, afin qu'il puisse y avoir de véritables débats qui soient à l'origine d'une véritable dynamique de développement régional concerté et non pas d'une dynamique de développement régional dans un contexte de confrontation entre les différents centres urbains et ruraux.

Lors de l'étude de ce projet de loi, l'article 22 du projet de loi qui modifie l'article 148.1, introduisant le comité de concertation agricole, a été largement débattu et, M. le Président, avec toute la meilleure volonté du monde, nous, de l'Opposition, n'avons pu voir dans ce comité de concertation agricole qu'une coquille vide, une coquille qui n'a pas de sens en soi. D'abord, même si la loi était adoptée cette nuit en troisième lecture d'une façon définitive, il faudra attendre que le ministre décide un jour peut-être de mettre en application cet article, parce qu'il n'est pas prévu qu'il va être appliqué automatiquement, probablement, M. le Président parce que la relation existant entre la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme et la loi sur le zonage agricole n'est pas suffisamment claire, probablement aussi parce que les différents ministres impliqués n'ont pas réussi à faire définitivement le point sur ce que doit être ce comité de concertation agricole.

On dit que les municipalités pourront créer, si elles le désirent, un tel comité par le biais d'un règlement qui va leur permettre de mettre en activité un tel comité et on définit qui devrait être à l'intérieur, qui devrait participer à la formation de ce comité.

M. le Président, s'il s'agissait là de quelque chose de vraiment important, s'il s'agissait là d'un élément qui amènerait une bonification majeure autant dans la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme que dans la loi sur le zonage agricole, je crois, M. le Président, qu'on aurait trouvé, au contraire, un moyen de faire en sorte que, partout où il pourrait y avoir des conflits potentiels entre ces deux lois, on ne soit pas obligés de mettre en place un tel comité. Mais, à notre propre demande, le ministre a été obligé de nous répondre en commission parlementaire qu'en fait il n'y a pas vraiment de conflits ou il n'y a pas vraiment de situations qui ne pourraient se résoudre sans passer par un tel comité. Autrement dit, jusqu'à maintenant, les élus municipaux ont pris leurs responsabilités, ont su s'entendre, ont su regarder les lois, ont su réussir à déterminer, dans leurs milieux respectifs, les lignes de

démarcation entre, d'une part, le zonage agricole et, d'autre part, l'aménagement et l'urbanisme et il ne semble pas, à première vue, qu'il soit nécessaire d'ajouter une nouvelle structure. Nous sommes convaincus qu'une telle structure ne restera qu'une coquille sans usage, une coquille qui demeurera vraiment quelque chose d'inopportun même, j'oserais dire, dans certains cas, parce que, par l'application d'une telle réglementation, on enlève la possibilité aux élus municipaux ou le devoir qu'ont les élus municipaux de réussir à trouver des mécanismes de concertation. Par le biais d'un tel comité, on va envoyer la responsabilité à des membres élus en dehors qui, eux, auront éventuellement à prendre des décisions, à se concerter pour conseiller les élus municipaux qui forment les MRC. M. le Président, nous croyons qu'il s'agit là d'une façon d'introduire la zizanie, alors qu'il n'y a pas de meilleur moyen que de s'entendre, que de se parler franchement entre nous, sans avoir à passer par l'intermédiaire des comités ad hoc, qui souvent sont composés de gens qui, une fois leur travail fait, malgré toute la bonne volonté du monde, s'en retourneront chez eux et n'auront pas, M. le Président, à vivre avec la responsabilité de l'application des décisions qu'ils auront suggérées aux élus municipaux.

M. le Président, il s'agit là d'une des raisons pour lesquelles nous ne pouvons être d'accord avec ce projet de loi. Merci.

Le Vice-Président: M. le député de Lac-Saint-Jean. (4 heures)

M. Jacques Brassard

M. Brassard: M. le Président, malgré l'heure tardive, 4 heures du matin, je voudrais commencer mon intervention sur le projet de loi 88 par un hommage au député de Jonquière. Voilà un homme qui a vécu une expérience municipale pendant 22 ans. Il a d'abord été conseiller municipal à la ville d'Arvida. Il est devenu maire de la ville d'Arvida et, après la fusion des municipalités de Kénogami, Jonquière et Arvida, il a été élu premier maire du grand Jonquière fusionné. Il compte 22 ans d'expérience municipale, 22 ans de vécu municipal. J'ajouterais qu'il a non seulement vécu la fusion, la naissance d'une grande ville, mais également la naissance des municipalités régionales de comté. Il a assisté, en tant que maire de Jonquière, à la naissance de la MRC du Fjord, municipalité régionale de comté dont fait partie la ville de Jonquière. Au cours de ces 22 années, il est important de souligner que le député de Jonquière a développé ce qu'on pourrait appeler une sagesse, un pragmatisme et surtout une habitude du consensus. Dieu sait que c'est capital dans le monde municipal, le consensus, la concertation. L'habitude de la concertation, c'est tout à fait essentiel dans le milieu municipal, réussir à s'entendre, réussir à se concerter sur des projets, des objectifs, des politiques. C'est une habitude que toute personne oeuvrant dans le monde municipal doit acquérir et le député de Jonquière l'a acquise depuis bien longtemps.

C'est ce qui fait que le rôle qu'il joue maintenant comme député de l'Opposition et porte-parole en matière municipale est capital compte tenu du fait qu'il a en face de lui un ministre qui doit être mis sous surveillance, un ministre qui doit être suivi à la trace. D'ailleurs, je vous signale qu'il n'est plus parmi nous. Dès que le débat a commencé sur le projet de loi 88, je l'ai vu revêtir son manteau, quitter la place et aller se coucher. C'est ce qui est arrivé. Cela ne semble pas l'intéresser, le débat sur un projet de loi dont il est pourtant le parrain. Ce ministre doit être mis sous surveillance, doit être suivi à la trace. Pourquoi? Parce qu'il fait mal ses devoirs. On ne le constate pas uniquement au sujet du projet de loi 88, mais on s'en est rendu compte depuis deux ans dans tous les projets de loi concernant le monde municipal. On a en face de nous un ministre qui fait mal ses devoirs, qui nous présente du travail bâclé. On l'a vécu dans le passé, on le vit encore avec le projet de loi 88, travail bâclé, devoirs mal faits.

En voulez-vous une preuve, M. le Président? J'ai ici une liasse d'amendements au projet de loi 88, je ne sais combien, plus d'une quarantaine d'amendements, peut-être plus, dont certains sont substantiels. C'est évidemment le signe d'un travail bâclé, d'un devoir mal fait. C'est normal qu'on apporte, en commission parlementaire, des amendements à un projet de loi, mais quand on en apporte autant, cela a une signification, un sens. Cela signifie qu'on est en face d'un devoir mal fait, d'un projet de loi qui a été mal réfléchi, mal pensé, mal conçu. On n'a pas suffisamment réfléchi au projet de loi et on est obligé, à la toute dernière minute, à toute vapeur, d'y apporter toute une série d'amendements dont certains sont substantiels. C'est anormal et il faut le signaler.

Je pense qu'il faut rendre hommage au député de Jonquière qui, dans l'étude, l'analyse, l'examen des projets de loi à caractère municipal, se montre d'une rigueur exemplaire. Heureusement, M. le Président, que le député de Jonquière est rigoureux et qu'il est minutieux parce que, sans cela, on se retrouverait avec des projets de loi municipaux adoptés qui n'auraient aucun sens et qu'il faudrait refaire à la session suivante. C'est ce qui est arrivé avec le projet de loi 88: grâce au travail du député de Jonquière, le projet de loi a été amendé, a été

amélioré, il faut le dire. Il a été amélioré et il est plus présentable maintenant. Je dois en convenir, le projet de loi 88 est maintenant sortable et il est maintenant présentable...

Des voix: Bravo!

M. Brassard: ...grâce au travail du député de Jonquière, le porte-parole de l'Opposition en matière d'affaires municipales.

Il y a des choses intéressantes dans cela; je l'ai déjà signalé à l'occasion du débat en deuxième lecture. Les possibilités de régionalisation des services municipaux en ce qui concerne la MRC m'apparaissent être un élément intéressant, d'autant plus que c'est basé sur le volontariat. C'est tout à fait facultatif, ce n'est pas obligatoire. Les municipalités membres d'une MRC qui le désirent peuvent, à la suite d'un vote comportant une majorité des deux tiers, régionaliser des services. Cela m'apparaît intéressant. Cela se retrouve dans le projet de loi. Il y a le droit de retrait qu'il aurait fallu baliser, mais qu'on n'a pas balisé, malheureusement, au cours de la commission parlementaire.

Le travail du député de Jonquière a été fort utile et fructueux sur la partie du projet de loi concernant le comité de concertation agricole. Là, on voit que nous sommes en face d'un ministre qui n'a pas l'habitude du consensus et de la concertation. Concernant ce comité de concertation agricole, on a vu se dresser tout le monde contre cette nouvelle instance qui venait s'ajouter au comité d'urbanisme déjà existant et déjà prévu par la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme. Tout le monde était contre. L'Union des municipalités régionales de comté, qui regroupe les MRC et les municipalités rurales, était totalement opposée à la mise en place du comité de concertation agricole. L'Union des municipalités du Québec, qui regroupe les villes et les municipalités importantes du Québec, était totalement opposée au comité de concertation agricole. Pour quelles raisons? Je vous en cite quelques-unes extraites de la résolution de l'UMQ: "L'introduction du comité de concertation constitue un accroc au principe de la responsabilité municipale en aménagement" parce qu'on lui donnait des pouvoirs qui, forcément, avaient pour effet de réduire ceux des élus du conseil municipal, c'est inévitable. Alors, ne serait-ce que pour cette raison les unions municipales étaient opposées à la mise en place d'un comité de concertation. "Il consacre le principe voulant qu'un groupe d'intérêts puisse dicter une ligne de conduite à la municipalité et à l'ensemble des citoyens." Je n'ai rien contre les producteurs agricoles, mais si on jugeait bon de mettre en place un comité de concertation agricole je ne vois pas pourquoi, par exemple, les commerçants, les propriétaires de commerces dans une municipalité n'auraient pas réclamé la mise en place d'un comité de concertation commerciale, ou les représentants des entreprises touristiques, etc.

Or, grâce au travail du député de Jonquière, le comité de concertation agricole demeure, mais il est vidé de sa substance. Plusieurs des articles sont abolis, soit les articles 148.4, 148.5 et 148.6. Cela fait que, comme on l'a mentionné, on se retrouve avec une coquille vide qui n'a plus aucun pouvoir. On le laisse en place pour permettre au ministre de l'Agriculture de sauver la face, je suppose. Je ne vois vraiment pas pourquoi on le maintient en place puisqu'il n'y a plus aucun des pouvoirs qu'on prévoyait dans le projet de loi à l'origine.

M. le Président, je conclus comme j'ai commencé, en disant: Heureusement qu'en cette Chambre, pour ce qui est des projets de loi municipaux, il y a le député de Jonquière. Merci, M. le Président! (4 h 10)

Le Vice-Président: Nous allons poursuivre avec M. le député de Terrebonne.

M. Yves Blais

M. Blais: Merci beaucoup, M. le Président. Vous savez bien qu'il est de tradition, lorsqu'on parle la nuit, que chacun des intervenants soit un peu une horloge parlante et dise l'heure. Pour ne pas échapper à la tradition, je veux vous souligner, M. le Président, qu'il est 4 h 10 du matin, ce 18 décembre. Quelques-uns des députés de l'Opposition sont allés se coucher vers minuit, 1 heure; j'étais de ce nombre et, vers 2 h 15, 2 h 20, on m'a rappelé pour me dire: Ce n'est pas un ange qui parle, c'est la "whipperie", il faudrait que tu viennes parler sur la loi 88. J'ai dit: Pourtant, on est en 1987. Non. On est déjà en 1988, c'est la loi 88 ce soir, le 18 décembre, une loi par anticipation. Si c'était vrai, au moins, que c'est une loi qui anticipe certains principes! Mais non! Elle n'anticipe que la date. Pourtant, c'est un sujet bien simple, M. le Président: des correctifs sur les pouvoirs des MRC et, entre guillemets, une espèce d"'accommodation" du zonage agricole.

En commission parlementaire, le critique de l'Opposition, le député de Jonquière, avait présenté des amendements tellement croustillants, comme un pain qui sort du four. Mais non! Le ministre des Affaires municipales n'a pas voulu entendre quoi que ce soit. C'est malheureux! Nous n'aurions pas besoin, M. le Président, de parler cette nuit à 4 h 12 si le ministre des Affaires municipales avait regardé de façon un tant soit peu attentive les amendements

proposés par l'Opposition.

Il arrive, M. le Président, dans la vie des peuples que certains gouvernements adoptent des lois qui sont majeures. Il y en a deux principales qu'on a adoptées: une était la loi 101 et la deuxième était le zonage agricole. Cette loi vient toucher le zonage agricole. On ne touche pas comme on veut à ce bijou législatif. Il faut un joaillier des Affaires municipales pour retailler cette loi. Sinon, partout sur le territoire, on crie: Horreur! Il faut un ministre très attentif. Avec minutie on retravaille des bijoux législatifs comme celui-là.

Quant à moi, je trouve la profession de cultivateur trop noble, trop grande pour permettre à quelqu'un de venir - je dirai un mot qui n'est pas tellement beau - tripoter le zonage agricole, comme si on pouvait faire des zones très grandes, des zones un peu plus petites, de grandes zones, des bébés zones et qu'on s'en aille dans le zonage agricole comme on veut. Non! M. le Président, le zonage agricole est trop important pour qu'on s'en aille, à qui mieux mieux, taillarder dans le territoire québécois et qu'on ne s'occupe pas du sillon nourricier qu'on avait donné aux agriculteurs pendant que nous étions le gouverment. C'est sûr.

M. le Président, avant que l'on ne touche au territoire agricole, on se doit de connaître une chose technique. Avant de dézoner un pouce carré des terres vertes actuelles du Québec, il faut que l'on sache ceci: II y a actuellement au Québec 1 410 000 lots en zones blanches non construits, 1 410 000, M. le Président! Ce sont des lots! Bâtissez des maisons sur ces lots, la moyenne est de 3,3 par maison, disons 3. 1 410 000 multiplié par 3, il y a de la place pour doubler la population du Québec sans qu'on touche d'aucune façon au territoire agricole. C'est important, M. le Président! Il y a de la place pour environ 5 500 000 personnes avant que nous, "dézonassions" un lot! Un lot! En plus, par économie collective, de ces 410 000 lots, il y en a 400 000 qui sont déjà viabilisés. Ils sont déjà tout prêts à recevoir une maison, il y a un système d'eau et d'égout, des chemins, etc. M. le Président, il y a de la place pour 1 200 000 personnes au moins avant qu'un seul iota du territoire agricole ne soit dézoné. Comment se fait-il que...

M. Brassard: Question de règlement.

Le Vice-Président: Question de règlement. M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Brassard: L'intervention de mon collègue est trop intéressante. Je déplore qu'il n'y ait pas quorum.

Le Vice-Président: On attend que les députés entrent à l'Assemblée pour poursui- vre le débat. Évidemment, dans une intervention normale, pour une question de règlement, le temps est comptabilisé dans le temps de l'intervenant. Dans les cas de quorum, ce n'est pas considéré dans le temps de l'intervenant. On suspend les travaux pour quelques instants. Continuez de faire sonner les cloches, s'il vous plaît.

(Suspension de la séance à 4 h 21)

(Reprise à 4 h 32)

Le Vice-Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

Alors, nous avons quorum et nous reprendrons nos débats dans quelques instants, le temps de laisser le député de Terrebonne s'approcher. Nous allons reprendre nos travaux. Au moment de l'appel du quorum, M. le député de Terrebonne, il vous restait cinq minutes pour compléter votre intervention.

M. Blais: Merci, M. le Président. Quand le whip de l'Opposition a demandé le quorum, j'ai cru que le gouvernement ferait de la procrastination, mais, apparemment, la procrastination n'a pas eu lieu et nous recommençons.

M. le Président, je parlais avec beaucoup de flamme, lorsqu'on m'a éteint, du zonage agricole. Je disais que le gouvernement antérieur avait fait un joyau législatif avec la loi sur le zonage agricole. Bien sûr qu'à cette heure-ci les cultivateurs sont sur le point de nous écouter, il est 4 h 37, mais il y a beaucoup d'urbains, j'en suis persuadé, qui nous écoutent. Pour qu'ils nous comprennent bien, on a divisé le Québec en zones blanches et en zones vertes. Ce projet de loi vient essayer de légiférer entre les deux, parce qu'il y a toujours des zones grises entre les zones blanches et les zones vertes, c'est-à-dire des zones entre les deux où on se doit de faire une discussion, où les villes et les cultivateurs se chicanent pour une bande de territoire. C'est pour cela que, dans le projet de loi, on dit: "II permettra aux producteurs agricoles de se prononcer, par l'intermédiaire d'un comité de concertation, sur certaines modifications au zonage dans une zone agricole." Cela veut dire qu'il y a des urbains qui se plaignent des odeurs agricoles qui sont trop rapprochées des zones urbaines.

Aussi, je ne comprends pas - ce n'est pas très odoriférant quand même, je le sais, mais ce sont, tout de même, des odeurs qui sont faites par des produits naturels et qui n'affectent en rien la santé des êtres humains, ce n'est pas toxique - pourquoi on veut éliminer ces odeurs-là par législation avant d'éliminer les odeurs toxiques des industries. Pensons, par exemple, à la mine

Noranda, à Domtar. Ce n'est pas parce que je veux que Domtar ferme, mais avant de commencer à vouloir légiférer sur des zones d'odeurs faites par des produits naturels, comment se fait-il qu'on n'essaie pas d'éliminer les odeurs de l'industrie qui, elle, cette odeur, en plus d'être nauséabonde est néfaste â la santé?

Une voix: Un peu d'ordre, M. le Président.

M. Blais: Alors, le ministre des Affaires municipales s'est embourbé dans ce projet de jumeaux, les deux 8. Je vais les appeler le projet jumeau des deux 8. Ce projet des jumeaux, les deux 8, c'est le projet où le ministre des Affaires municipales s'est embourbé. En voulant clarifier les choses entre le zonage urbain et le zonage agricole, il a mal fait ses devoirs. Grâce à la lucidité, à la clairvoyance, à la perspicacité et souvent à la détermination du député de Jonquière, eh bien l'Opposition a veillé à ce que ce projet de loi, au moins s'il est adopté... Parce que sous le nombre, comme il dit, on va venir à croupir, mais on aura au moins fait notre devoir jusqu'au bout, M. le Président.

M. Garon: La garde ne se rend pas.

M. Blais: Et c'est Horace qui disait: "Que voulez-vous qu'il fît contre trois?"

M. Garon: Qu'il les prenne un par un.

M. Blais: Qu'il mourût ou qu'un "vain" désespoir, alors, le secourût. M. le Président, nous essayons de secourir les agriculteurs et je crois que, pour nous comme pour Horace, c'est un vain désespoir parce que ni le ministre, ni le parti gouvernemental ne se laissent convaincre par des interventions d'une grande valeur quand même. Il y a des interventions de grande valeur et si l'on avait pris les amendements du député de Jonquière en commission parlementaire...

Je terminerai comme j'ai commencé, à l'exemple de mon whip. Le député de l'Opposition responsable du dossier municipal vous a présenté des amendements tout chauds, comme un pain qui sort du four, et le gouvernement n'a pas saisi l'occasion de s'en faire l'ami. Merci beaucoup, M. le Président.

Le Vice-Président: Alors, nous allons maintenant poursuivre avec M. le député de Verchères.

M. Jean-Pierre Charbonneau

M. Charbonneau: Merci, M. le Président. Il est presque 4 h 40, ce matin, et je vous dis que j'ai l'impression qu'il n'y a pas grand monde qui nous écoute et qu'il n'y a pas grand monde, non plus, qui lira le Journal des débats. Mais pour ceux qui, éventuellement, vont se demander pourquoi, au salaire que nous sommes payés maintenant, nous sommes ici, ce serait peut-être important de le préciser.

Moi, je dois vous dire que cela ne me scandalise pas tellement. On est ici, ce soir, à cause du ministre du Travail. On est ici parce que, M. le Président, le ministre du Travail oblige l'Opposition à recourir, dans notre régime parlementaire, au seul instrument qu'il lui reste pour faire en sorte que le gouvernement entende raison et qu'il recule sur un projet de loi important. Dans ce sens-là, le parlement est une arène de combat et en démocratie - c'est cela, la valeur de la démocratie - c'est préférable que les gens se battent d'une façon civilisée dans une arène où il y a des règles de jeu qu'ils ne se battent dans les rues. (4 h 40)

Oui, on est ici à 4 h 40 du matin, après avoir fait une nuit, après avoir, d'une façon un peu enfantine, exigé l'interruption des travaux il y a quelques minutes parce que les députés ministériels n'étaient pas au poste alors qu'ils devaient l'être. Les députés ministériels n'y étaient pas. Selon notre système parlementaire, c'est à la majorité ministérielle de veiller à ce qu'on ne soit pas obligé d'être interrompu à un moment où l'autre. On a fait cela. Ils nous ont fait le coup quand ils étaient de ce côté-ci de la Chambre. C'était de bonne guerre. Quand on n'avait pas l'habileté d'avoir assez de joueurs de ce côté-ci, ils invoquaient le quorum. Ils exigeaient l'interruption des travaux. Cela durait quelques minutes, parfois plus longtemps et cela reprenait. Tout cela peut, en apparence, avoir l'air ridicule, enfantin, inapproprié, mais, encore une fois, il faut se rappeler qu'on est dans un parlement et que le parlement, selon notre tradition, étant une arène de combat, à un moment donné, il faut recourir à certaines armes. C'est ce que l'Opposition fait.

Non pas que le projet de ' loi 88 ne mérite pas des discours. Mais je vais vous dire qu'on a discouru pas mal sur le projet de loi 88. Je vais vous dire qu'à l'heure qu'il est je me serais bien passé de discourir sur le projet de loi 88 et tous mes collègues également, y compris le critique de l'Opposition dans ce domaine, qui a fait un travail remarquable.

Le député de Jonquière et tous les députés de l'Opposition...

Des voix: Ha! Ha! Ha! Bravo!

M. Garon: M. le Président, êtes-vous encore là?

M. Charbonneau: ...se seraient abstenus

de faire ce genre de discours cette nuit.

M. Garon: S'ils veulent siéger de nuit, batinse, qu'ils gardent l'ordre!

Le Vice-Président: Un instant, s'il vous plaît! Je rappellerais à n'importe quel député en cette Assemblée que, si vous avez quelque remarque à faire sur un rappel au règlement, d'invoquer le règlement en vous levant. Autrement, je ne veux pas entendre de remarques désobligeantes.

M. Garon: Aucun.

Le Vice-Président: M. le député de Lévis.

M. Garon: J'invoque le règlement pour que chacun regagne son siège, comme le dit le règlement.

Le Vice-Président: Un instant! Vous invoquez une question de règlement, je vais vous céder la parole et je vais vous écouter.

M. Garon: Je voudrais que vous fassiez respecter le règlement comme c'est votre devoir, sans qu'on soit obligé de le demander chaque fois.

M. Johnson: Sur la question de règlement, M. le Président.

Le Vice-Président: Sur la question de règlement, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Johnson: Sur la question de règlement, de mémoire, M. le Président, sans pouvoir citer l'article parce que ce n'est pas nécessaire, un député doit s'adresser à cette Chambre de son siège. Par ailleurs, je ne crois pas qu'il y ait d'obligation d'occuper son siège en tout temps.

M. Jolivet: M. le Président...

Le Vice-Président: Oui. Sur la même question de règlement, M. le leader adjoint de l'Opposition.

M. Jolivet: En vertu de l'article 35, mon collègue, le député de Verchères, a le droit plein et entier à son temps de parole. Or, une personne qui l'interrompt alors qu'elle n'est pas à son siège ne respecte pas, justement, le règlement. C'est ce que mon collègue de Lévis a voulu dire, soit, d'abord d'être à son siège et, deuxièmement, s'ils veulent interrompre, qu'ils se lèvent sur une question de règlement. Mais qu'ils laissent à mon collègue, le député de Verchères, la possibilité de parler en vertu de l'article 35.

Le Vice-Président: Oui. Sur la même question de règlement, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Johnson: Sur la même question de règlement, M. le leader adjoint de l'Opposition mêle les choses. Lorsqu'on s'adresse à cette Chambre, qu'on est donc reconnu par la présidence, on doit le faire de son siège. Par ailleurs, je soumets qu'il n'y a aucune obligation d'occuper son siège.

M. Jolivet: M. le Président...

Le Vice-Président: Oui, sur la même question de règlement, d'accord, allez-y.

M. Jolivet: Toujours sur la même question de règlement, M. le Président, je n'ai point dit que la personne doit être à son siège, si elle ne veut pas parler. J'ai dit que, si elle veut déranger mon collègue, c'est par une question de règlement qu'elle doit le faire. Pour ce faire, elle doit être à son siège. Si elle dérange mon collègue, à ce moment-là, c'est nous qui allons lui demander, si vous ne le faites pas, de ne pas interrompre mon collègue. S'il veut parler, qu'il parle de son siège. Je n'ai entendu personne de l'autre côté venir défendre le ministre des Affaires municipales qui est parti.

Des voix: Ha! Ha! Ha!

Le Vice-Président: Le dernier point n'était pas conforme au règlement.

M. Jolivet: Oui, je le sais.

Le Vice-Président: Bon. D'accord. Nous sommes dans une assemblée délibérante et je pense que chacun a ses propres responsabilités à prendre. Il y a une tradition qui a toujours prévalu dans les débats à l'Assemblée nationale. Effectivement, si on regarde le règlement, il y a une disposition, à l'article 32, paragraphe 2 de notre règlement, où on dit que les députés "occupent la place qui leur a été assignée par le président, y demeurent assis et gardent le silence à moins d'avoir obtenu la parole." C'est la disposition formelle du règlement sur lequel le président doit se rabattre si, effectivement, les gens ne sont pas capables d'agir par eux-mêmes suivant leur bon sens et leur bon jugement. J'ai déjà rendu une décision antérieurement, qui date du 11 décembre 1986, en ce sens-là. La tradition parlementaire et l'usage permettent aux députés, vous le savez fort bien, de s'asseoir souventefois à d'autres endroits que celui qui leur a été assigné. Les gens vont parler parfois entre eux, parfois même de questions législatives ou de dossiers, à voix basse, pour autant qu'ils ne dérangent pas celui qui intervient.

Le principe de notre règlement veut que celui qui a la parole puisse s'exprimer librement; ce qui veut dire que cette personne peut s'exprimer de telle sorte que chacun ne la dérange pas inutilement, c'est-à-dire que, si elle parle, la personne qui a la parole peut présumer que chacun va la laisser parler. C'est évident que, dans le cadre d'un débat, parfois selon les propos qu'un député peut tenir, dépendamment des circonstances et souvent des heures et du ton, cela va susciter certaines réactions de l'autre côté et certains commentaires qui, souventefois, sont admis dans nos débats.

Si cela ne dérange pas celui qui parle, ils sont tolérés. D'autre part, si les remarques et les réactions qui arrivent de toute part dérangent celui qui a la parole, le président interviendra. En ce sens-là, à ce moment-ci, je veux intervenir et, puisqu'il ne semble pas que la chose puisse se faire facilement, je vais demander à chacun des députés de regagner sa place qui lui a été assignée par la présidence avant de poursuivre nos travaux. Veuillez vous exécuter, s'il vous plaît!

MM. les députés, veuillez regagner vos propres places. M. le député de Chauveau.

M. le député de Chauveau, je vous rappelle à l'ordre une première fois.

Vous pouvez poursuivre, M. le député de Verchères. Il reste une minute pour votre intervention.

M. Charbonneau: Merci, M. le Président. Si je comprends bien, cette querelle de procédure a fait en sorte que je n'aurai pas besoin de me concentrer longtemps pour continuer à faire les dix minutes qui me sont assignées dans le cadre de ce "filibuster".

Alors, je vais rappeler, dans les instants qu'il me reste, que nous sommes ici à cause du ministre du Travail et parce que nous nous opposons à son projet de loi. Nous sommes ici parce que la tradition parlementaire, dont vous venez de parler dans une autre question, donne à l'Opposition l'obligation d'utiliser ce moyen parlementaire qui est de prendre du temps dans un débat et de parler d'une certaine façon non pas pour ne rien dire, parce que les propos que l'on tient sont des propos pertinents au dossier, mais pour tenir des discours qu'on n'aurait pas, à ce moment-ci, à tenir si on n'avait pas choisi de faire le combat politique important qui est de demander au gouvernement de faire comprendre au ministre du Travail que cela n'a aucun bon sens, à la fin de la session parlementaire, de nous imposer et d'imposer au milieu des relations du travail du Québec un projet de loi aussi important sans qu'il y ait un consensus. Parce qu'il n'y a pas consensus autour de ce projet de loi controversé que présente le ministre du Travail, nous sommes obligés, en pleine nuit, de faire ce débat qui, encore une fois, pour des citoyens ordinaires, peut paraître ridicule, mais qui, dans le fond, dans une démocratie, est un signe que le parlementarisme est une valeur importante. Lorsqu'on ne veut pas utiliser la force ou la violence pour faire entendre ses opinions dans une société, il reste des règles du jeu arbitrées d'une façon civilisée que sont les règles parlementaires. Cela existe dans le Parlement du Québec et dans tous les Parlements qui fonctionnent correctement dans le monde entier. (4 h 50)

II n'y a pas à se scandaliser à faire ce que nous faisons, d'autant plus que nous le faisons pour une raison importante, parce qu'on pense que, dans une société comme la nôtre, les relations du travail ne sont pas des choses que l'on impose. Ce sont des choses que l'on adopte par consensus. Comme il n'y a pas de consensus, nous n'acceptons pas que le gouvernement perturbe l'ensemble de ce milieu par un projet de loi qu'il s'apprête à imposer à l'Assemblée nationale par sa majorité ministérielle. Nous allons continuer d'utiliser les petits moyens que nous avons, M. le Président...

M. Vallières: Question de règlement, M. le Président.

M. Charbonneau: ...pour faire ce que nous faisons actuellement.

Le Vice-Président: Un instant! Question de règlement...

M. Vallières: Pourriez-vous m'indiquer, M. le Président...

Le Vice-Président: Un instant!

M. Vallières: ...le temps qu'il reste au député de Verchères...

Le Vice-Président: Un instant! M. le whip du gouvernement, je vous entends sur votre question de règlement.

M. Vallières: Pourriez-vous m'indiquer le temps qu'il reste au député de Verchères?

Le Vice-Président: II lui reste exactement deux secondes. Il complétait son intervention.

M. Charbonneau: M. le Président, je voudrais vous remercier...

Une voix: C'est fini.

M. Charbonneau: ...et remercier le whip du gouvernement...

Des voix: C'est fini.

M. Charbonneau: ...de m'avoir écouté avec autant d'attention.

Une voix: Asseyez-vous. C'est fini.

M. Charbonneau: Merci beaucoup et bonne nuit.

Des voix: À l'ordre, s'il vous plaît! Une voix: Coupez.

Le Vice-Président: Je vais reconnaître le prochain intervenant, Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Jeanne L. Blackburn

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Légiférer à cinq heures du matin, cela a effectivement de quoi surprendre et cela a surtout de quoi surprendre les derniers arrivés, les élus d'il y a seulement deux ans. J'ai eu, à maintes occasions, la possibilité de regarder fonctionner les travaux de la Chambre, è l'époque où les députés libéraux formaient l'Opposition, au moment où on légiférait à des heures plutôt tardives. Il n'y avait pas de mots suffisamment violents pour dénoncer l'irresponsabilité d'un gouvernement qui obligeait la tenue de débats à des heures indues et cela durait des minutes et des minutes simplement pour dire: Écoutez, il est inacceptable qu'on légifère à trois heures, quatre heures ou cinq heures du matin. Pourtant, à l'époque, M. le Président, le gouvernement avait un menu législatif suffisamment important pour qu'à plusieurs occasions, le fait de siéger aussi tard se justifie. On ne peut vraiment pas dire que le menu législatif de l'actuel gouvernement nous oblige à siéger jusqu'à cinq heures du matin. Les lois qu'on a eues, de façon générale...

Une voix: Question de règlement, M. le Président.

Le Vice-Président: Un instant! Sur une question de règlement, M. le député de Laurier.

M. Sirros: Nous sommes à l'étape de l'adoption du projet de loi et la pertinence devrait...

Une voix: Non, c'est la prise en considération du rapport.

M. Sirros: La pertinence, M. le Président.

M. Jolivet: M. le Président, sur la question de règlement.

Le Vice-Président: Sur la même question de règlement.

M. Jolivet: Je pense que le député fait erreur. Nous sommes à la prise en considération et non pas à l'adoption du projet de loi.

Le Vice-Président: Très bien. D'accord. Nous sommes à la prise en considération du rapport de la commission qui a étudié en détail le projet de loi et nos discussions doivent porter sur toute question relative au projet de loi 88 qui a été discuté en commission parlementaire. Je vous demanderais de rattacher vos propos principalement au projet de loi 88 et aux discussions qu'il y a eu sur le sujet.

Mme Blackburn: Oui, M. le Président, et c'est ce que je fais précisément. Le projet de loi 88 est un projet de loi majeur et on est en train d'en disposer, je le rappelle, à cinq heures du matin, alors que, pendant cette session, on a perdu un temps infini. À combien de reprises a-t-on ajourné les travaux de la Chambre faute de menu législatif? Combien de temps avons-nous perdu depuis l'ouverture de la session parce qu'on n'avait pas de menu législatif? Et, à cinq heures du matin, on est en train de disposer d'un projet de loi important. M. le Président, j'ai eu l'occasion d'intervenir sur le projet de loi 88 parce qu'on estimait ensemble que c'était un projet de loi important. Je suis intervenue à au moins deux reprises au cours du débat parce que ce projet de loi était vraiment mal foutu et ce n'est pas la première fois que cela arrive avec ce gouvernement. On a vu le ministre de l'Éducation réécrire complètement un projet de loi. Une réécriture complète! J'ai eu l'occasion de travailler à un projet de loi de deux articles présenté par le ministre de l'Éducation...

M. Jolivet: M. le Président, une question de règlement.

Le Vice-Président: Sur une question de règlement, un instant!

M. Jolivet: Oui.

Le Vice-Président: Je vais vous donner la parole, allez-y!

M. Jolivet: Oui, M. le Président. Mon collègue, le député de Verchères, après avoir fait son travail ici en Chambre, s'en allait à son bureau et le député de Saguenay... M. le Président.

Le Vice-Président: Un instant! Une voix: ...

Question de privilège du député de Laviolette

Le Vice-Président: Tout député, pour avoir la parole, doit l'obtenir de la présidence. Je vous ai donné la parole. Simplement, je veux vous dire ceci, en ce qui a trait aux propos que vous allez tenir en cette Assemblée. Vous comprenez que, comme président d'Assemblée, je ne peux qu'être juge de ce qui se passe dans cette Assemblée. Si vous voulez simplement mentionner des faits qui se passent à ma connaissance dans l'Assemblée, je vais vous entendre. Si vous voulez mentionner des faits qui se passent hors de ma connaissance, je ne puis, d'aucune façon, en juger, cela ne se passe pas dans le cadre de l'Assemblée, ici même, en cette Chambre. Si vos propos se rapportent à ce qui se passe dans l'Assemblée, ici même, dans le salon bleu, je vais vous écouter en tout temps. D'accord? Sur la question de règlement, M. le chef de l'Opposition.

M. Chevrette: Vous êtes le gardien des droits des parlementaires non seulement assis sur votre fauteuil, mais dans toute l'Assemblée nationale. Vous faites office de président de l'Assemblée nationale au moment où vous êtes là. Je voudrais vous rappeler, M. le Président, qu'un parlementaire a tous les droits d'exprimer à la présidence de l'Assemblée nationale, à quelque heure du jour que ce soit - ce sont ses droits les plus fondamentaux - ce qu'il a vu et ce qui portait atteinte aux droits des parlementaires. Ce n'est pas en vertu du règlement, vous le savez, M. le Président. C'est en vertu de la Loi sur l'Assemblée nationale. J'ose espérer que vous allez laisser exprimer le député de Laviolette dans le respect de tous ses droits; sinon, M. le Président, ce n'est pas une menace que je fais à la présidence, loin de là, mais je veux lui rappeler que si la présidence n'applique pas la Loi sur l'Assemblée nationale dans cette enceinte on va devoir aller le crier en un autre lieu. Cela n'a pas de bon sens, ce qui s'est passé.

M. Jolivet: Est-ce que je peux avoir le droit de parole?

Le Vice-Président: Sur cela, oui, je vais vous donner le droit de parole. Je vous rappellerai simplement qu'en ce qui concerne l'Assemblée nationale, en tant que président de l'Assemblée nationale, j'ai un règlement à appliquer, soit les règles de procédure de l'Assemblée nationale. Nous sommes actuellement dans l'Assemblée. Je dois régler... Un instant! Est-ce que je peux m'exprimer, s'il vous plaît? Je dois juger de ce qui se passe à l'Assemblée nationale selon la teneur du règlement. Je comprends que d'autres situations peuvent se passer en dehors d'ici, de l'Assemblée nationale, dans les couloirs du parlement ou ailleurs. À ce moment, je vous dirai simplement qu'au sens du règlement, dans la façon de mener les travaux en cette Assemblée, je ne peux, d'aucune façon, en juger et en aucune façon porter un jugement sur cela et établir quoi que ce soit. Si vous avez, d'autre part, à soulever une question de privilège sur les droits des parlementaires, vous le ferez de la façon dont le règlement le prévoit. On vous dira si c'est recevable ou pas. D'accord? Je vous cède donc la parole, M. le leader adjoint de l'Opposition. (5 heures)

M. Jolivet: M. le Président, à deux occasions dans ma vie de parlementaire, ici comme ministre et en commission parlementaire, il m'est arrivé deux événements, et je n'ai point fait ce que je suis en train de faire. Tout à l'heure, j'ai fait signe à l'un de nos employés de venir me rejoindre ici, à l'arrière. Je suis allé à l'arrière du fauteuil, le député de Saguenay m'a menacé en disant: Rentre en dedans, reste en dedans... Laissez-moi terminer. Je suis sorti pour aller voir mon employé et pour lui demander certains renseignements dont j'avais besoin et, quand je suis revenu ici, la porte était barrée. Il a fallu que je passe par la porte du Parti libéral pour rentrer dans cette Assemblée. C'est le député de Saguenay qui a barré la porte et, quand mon collègue de Verchères a voulu sortir, il lui a dit la même chose. Je l'ai entendu d'ici lui dire: Toi, reste en dedans. C'est exactement ce qu'il m'a dit. Ce sont des menaces en vertu de l'article 35. Cela, je peux le jurer.

Le Vice-Président: Un instant! Un instant! Un instant! À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! Un instant, s'il vous plaît! Il y a une seule façon dont les travaux peuvent se dérouler. Si, en cette Assemblée, toute personne peut intervenir quand elle le veut, sans avoir la parole, en parlant plus fort, je n'y peux rien, je n'y peux absolument rien. Je vais seulement lui demander purement et simplement d'attendre que je lui donne la parole, c'est ce que je fais pour chacun des parlementaires, dans un premier temps.

Dans un deuxième temps, vous me rapportez des propos - vous venez de les donner vous-mêmes - tenus à l'extérieur de l'Assemblée. La porte a beau être barrée, M. le député de Laviolette, leader adjoint de l'Opposition, derrière l'Assemblée, si on m'en fait part et que j'en ai connaissance, le sergent d'armes verra à prendre les dispositions nécessaires. Mais la place du sergent d'armes est ici, à l'Assemblée, et il est à son siège. Il ne peut pas juger de l'ensemble des portes. On n'a pas un gardien à chacune des portes. Je demande simplement la collaboration de l'ensemble des députés et je

souhaite l'avoir, effectivement. Sur la question de règlement.

M. Chevrette: M. le Président, je voudrais très calmement vous rappeler deux choses: On est rendu qu'on entre au parlement et qu'on s'enfarge dans les petits hommes verts et dans les petits hommes bleus, qu'on est fouillé pratiquement pour entrer à l'Assemblée nationale, qu'on n'est même pas capable de faire entrer un visiteur bien à jeun à son bureau. Est-ce que c'est clair? Je vais peser chaque mot que je vais dire, M. le Président. Il est tout à fait aberrant qu'un parlementaire, dans l'exercice même de son devoir de député, ne puisse avoir, en toute sécurité, sans menaces, accès au salon bleu de l'Assemblée nationale.

M. le Président, je m'excuse, mais avec toute la déférence que je peux avoir envers la présidence de l'Assemblée nationale, que ce soit méconnu à vos yeux ou à vos oreilles, c'est tout à fait normal; vous ne pouvez pas avoir des yeux tout le tour de la tête, j'en conviens. Une chose est certaine, par exemple: si vous jugez que cela constitue le privilège d'un député de se lever à l'Assemblée nationale et de s'exprimer clairement à l'Assemblée nationale, de vous, M. le Président, qui êtes le gardien des droits de chacun des députés en cette Chambre, non seulement en vertu de la réglementation, mais en vertu de la législation de l'Assemblée nationale, tel fait mérite instantanément non pas une mise en garde au député qui se lève pour soulever une question de règlement, mais exige de votre part de facto la prise de parole du député. Vous vous levez à maintes reprises de votre siège pour dire: M. le député, vous devez prendre la parole d'un député, vous devez prendre la parole d'un ministre. À plus forte raison, a fortiori, M. le Président, vous devez prendre la parole du député qui se lève pour soulever une question de règlement en vertu de ses droits et privilèges, et non pas faire une mise en garde à un individu qui vient de subir une menace. Non, M. le Président: Nous n'accepterons pas, comme formation politique, d'aucune façon et en aucun temps, qu'un des nôtres, qu'un de nos députés soit menacé dans l'exercice même de ses fonctions et dans ses allées et venues du salon bleu à son bureau. Jamais nous ne saurons tolérer une telle situation!

Vous, M. le Président, devez tenir pour acquis qu'un député qui se lève pour poser une question de règlement, une question de privilège est dans ses droits les plus fondamentaux. Votre rôle premier comme président de l'Assemblée nationale, c'est de vous lever, de suspendre les travaux, s'il le faut, de vérifier la véracité des dires du député et d'agir en conséquence vis-à-vis du fautif. C'est cela que non seulement la réglementation de l'Assemblée nationale vous oblige à faire, mais aussi la Loi sur l'Assemblée nationale. Sinon, M. le Président, je me demande bien à quoi servirait le rôle fondamental de gardien des droits des députés. Je me demande bien à quoi servirait même la Loi sur l'Assemblée nationale, qui serait bafouée à l'intérieur même du salon bleu, le lieu supposément sacro-saint de la Législature et des parlementaires qui la composent. M. le Président, je m'excuse, mais je demanderais, pour le moment, cinq minutes de suspension, parce que je dois parler au leader du gouvernement.

Le Vice-Président: Auparavant... Une voix: À quel propos, M. le...

Le Vice-Président: Juste une seconde. Mon problème, c'est que vous me demandez la parole et que le leader adjoint du gouvernement m'a aussi demandé la parole.

M. Jolivet: Une question de privilège.

Le Vice-Président: Sur une question de privilège, d'accord. Question de privilège.

M. Jolivet: Oui, M. le Président. Je vais essayer d'être calme, parce que cela m'a trop mis en fureur. Article 66: "Toute violation des droits ou privilèges de l'Assemblée ou de l'un de ses membres peut être signalée à l'Assemblée".

Tout à l'heure, tout bonnement, dans les fonctions que j'ai de leader adjoint, pour m'informer auprès d'un des employés de la "whipperie" pour connaître les choses qui doivent se situer dans le temps, j'ai voulu sortir à l'extérieur. Le député de Saguenay m'a dit de façon violente: Toi! Reste en dedans. Il y a des gens en arrière qui pourraient vous le certifier, M. le Président. Je suis sorti à l'extérieur, j'ai parlé avec notre employé. Quand j'ai voulu revenir dans cette Assemblée, la porte à l'arrière de votre fauteuil était barrée. J'aurais eu deux choix: prendre la porte, cette porte, en espérant qu'elle était débarrée, ou la porte du Parti libéral qui était débarrée. Si elle n'eût pas été débarrée, M. le Président, je serais descendu et je serais revenu par une de ces portes en arrière et j'aurais fait valoir mon point de vue.

Je vous le dis simplement, M. le Président. J'ai occupé votre siège et je sais aussi que personne ne peut, en vertu de l'article de notre règlement, faire, par des gestes ou des paroles, violence à un des membres de cette Assemblée. C'est tout cela que je veux dire.

Je vous dis qu'en plus - je l'ai entendu d'ici et des gens pourront vous le dire - mon collègue, le député de Verchères, s'est fait dire la même chose: Toi, reste en dedans. Je pense, M. le Président, que c'est à vous de

me demander de rester en dedans, si je veux rester en dedans, ou à moi de partir, si je le désire. Si mon confrère, le député de Verchères, n'a point entendu, je peux vous dire que des gens ici et moi-même l'avons entendu d'ici. C'est là que j'ai sursauté. C'était la deuxième fois qu'un membre du Parti québécois était, de façon violente, interrompu par le député de Saguenay.

Le Vice-Président: Très bien. Avant de vous reconnaître, je dois simplement, reconnaître ici que vous avez soulevé, suivant la procédure que notre règlement prévoit, une question de privilège, de violation de droit ou de privilège d'un député, en vertu de notre règlement et de la façon appropriée. Vous pouvez soulever ce que vous m'avez dit. En fait, un des privilèges qu'on reconnaît dans l'article 55 de la Loi sur l'Assemblée, c'est que: "Nul ne peut porter atteinte aux droits de l'Assemblée. Constitue notamment une atteinte aux droits de l'Assemblée le fait de, à l'article 7: "attaquer, gêner, rudoyer ou menacer un député dans l'exercice de ses fonctions parlementaires ou un membre du personnel de l'Assemblée dans l'exercice de ses fonctions parlementaires". Comme vous avez soulevé à mon intention ce point, sous forme de question de privilège, je l'ai reçu effectivement. Je ne vous ai nullement arrêté dans le cadre de vos explications. En vertu du règlement, c'est la façon appropriée de le faire.

Je vous dirai également qu'en vertu de l'article 35 du règlement, paragraphe 6° "le député qui a la parole - vous avez la parole à l'Assemblée ici; au paragaphe 9°, on parle de ménager - ne peut imputer des motifs indignes à un député ou refuser d'accepter sa parole". En d'autres termes, cela veut dire qu'on doit toujours présumer, par cet article, que le député qui parle dit effectivement des faits véridiques et on doit prendre sa parole pour acquise, ce que je fais quant aux propos que vous tenez. Je ne suis nullement juge.

Ce que j'ai voulu dire tantôt, c'est que, si vous soulevez une question de règlement pour m'aviser d'une situation à l'extérieur de l'Assemblée quand je n'y suis pas, il est nullement possible pour moi d'être juge là-dessus et rendre une décision à cet égard. Je comprends que la présidence doit faire en sorte de protéger le droit des parlementaires à l'intérieur du parlement. On doit toujours, d'une certaine façon, soulever la question, non pas par une question de règlement, mais par une question de privilège, comme vous l'avez fait.

De mon poste, je vous avouerai que je ne suis pas le sergent d'armes, je ne suis pas, non plus, les gardiens de la sécurité du parlement. Si vous me rapportez une chose, je pourrai vous laisser vous exprimer sur une question de privilège, mais je ne peux être juge de cette situation. La seule façon, sur des faits qui sont passés, de rendre quelqu'un juge de ces faits, de ce qui s'est passé, c'est simplement, comme on l'a déjà vu, à la commission de l'Assemblée nationale qui, elle, devra se prononcer suivant notre règlement.

D'accord, M. le leader adjoint du gouvernement. (5 h 10)

M. Johnson: M. le Président, tout en sachant qu'on ne discute pas d'une question de privilège, je m'en tiendrai à une question de règlement. Ce qui a été soulevé par le chef de l'Opposition et le leader adjoint se rapporte, évidemment, à l'article 2, huitième paragraphe, qui fait état de vos pouvoirs et de vos obligations, je dirais, quant au maintien des droits des membres de cette Assemblée. Il faut mettre les choses en perspective, quand même. Le député de Laviolette et le leader adjoint a fait quelques allégations qui toucheraient la façon dont ses droits, comme membre de l'Assemblée nationale, auraient été mis en péril, disons.

On doit constater, M. le Président, que, de toute façon, les droits, pouvoirs, privilèges des membres de l'Assemblée nationale se résument à l'exercice libre de nos fonctions. L'exercice libre de nos fonctions, à l'égard des faits allégués par le député de Laviolette, aurait trait à l'accès que nous devons avoir, en tout temps, de façon libre à ces lieux. Le député de Laviolette a indiqué que, pour des raisons qu'on pourrait appeler mécaniques, il n'a pu emprunter la porte, qu'il emprunte habituellement et a pu emprunter la porte de l'antichambre ministérielle. Les allégations quant à la façon dont les problèmes mécaniques se seraient produits se laissent attendre à ce moment-ci, et bien mal avisé serait celui qui pourrait prétendre savoir précisément comment cela s'est produit. Quant aux allégations de menaces qui auraient été proférées à l'endroit du député, il m'apparaît, encore une fois, qu'il faut les situer dans le contexte qu'on connaît, qui appelle deux explications.

La première, quant à l'événement que nous avons vécu tout à l'heure, sur un appel au quorum. On aurait souligné, du côté de l'Opposition, l'absence de quorum. Je dois souligner, pour que les faits soient complets, M. le Président - vous en avez été témoin, c'est dans cette Chambre que cela s'est produit, alors que les cloches sonnaient pour appeler les députés - qu'au fur et à mesure - je ne conteste pas que c'est le rôle du gouvernement d'assurer le quorum - que des membres de la majorité ministérielle pénétraient, afin d'atteindre le chiffre magique de 21, chaque fois que ce chiffre était atteint, des membres de l'Opposition quittaient l'Assemblée. Ce sont des choses

qui sont vérifiables et véridiques.

Dans ce contexte, qu'un député ait pu, à l'occasion d'une sortie d'un député, à quelque moment que ce soit, s'adresser à la deuxième personne du singulier - deuxième point - à un collègue, ce qu'on fait habituellement...

Le Vice-Président: M. le leader adjoint du gouvernement, je ne voudrais pas vous laisser continuer à argumenter sur la situation. Je pense que c'est bien clair. Au sens du règlement, un député qui considère que l'un de ses privilèges a été violé ou qu'on a porté atteinte à l'un de ses privilèges peut, proprio motu, se lever, le signaler à l'Assemblée, et je dois prendre sa parole, purement et simplement. Et, à ce moment-là, il a manifesté que l'un de ses privilèges avait été bafoué. C'est cela. Donc, à ce moment-là, la question est faite, point à la ligne. C'est tout. On ne peut pas argumenter sur cette question, à moins qu'on arrive avec des procédures autres, et, à ce moment-là, comme je vous ai dit, ce n'est même pas la présidence qui aura à en juger, mais plutôt la commission de l'Assemblée nationale. D'accord? Bon, à ce moment-ci, cela vide la question, je pense.

M. Chevrette: M. le Président, s'il vous plaîtl

Le Vice-Président: Oui, M. le chef de l'Opposition.

M. Chevrette: Je voudrais bien souligner, M. le Président, que l'un des points fondamentaux, c'est l'entrave au travail du député, qui doit être soulignée dans cette question de privilège. Il y a deux façons d'entraver le travail d'un député. Premièrement, en l'intimidant. Deuxièmement, en lui barrant l'accès possible. Et cela, M. le Président, dans un cas comme dans l'autre, je comprends que vous ne pouvez pas le voir. Je comprends qu'assis à votre fauteuil vous ne pouvez pas être à la fois dans le passage et à l'intérieur de la Chambre. Mais, ce que je veux souligner, M. le Président, c'est que votre devoir fondamental comme président de l'Assemblée nationale, c'est d'être le gardien des droits, autant en dedans qu'en dehors de la Chambre, quand vous êtes dans l'enceinte du parlement. C'est la présidence de l'Assemblée nationale qui est le grand roi et maître, et non pas le sergent d'armes, avec tout le respect que j'ai pour la présidence. Le sergent d'armes est sous les ordres de la présidence de l'Assemblée nationale. Et, dès qu'un fait est porté à l'attention de la présidence, le président peut déléguer son autorité, à des fins d'observance des règlements, au sergent d'armes ou à un cadre quelconque.

Mais, M. le Président, je vous souligne qu'il y a deux faits concrets dans la question de privilège de mon collègue de Laviolette. Premièrement, intimidation, et croyez-le ou non, j'en ai été témoin moi-même, j'étais en haut sans que le député de Saguenay ne me voie et j'ai tout vu faire, j'étais dans les galeries...

Le Vice-Président: Je m'excuse, je vais vous interrompre. Un instant, s'il vous plaît! Simplement ici, je voudrais vous interrompre de la même façon que j'ai interrompu le leader adjoint du gouvernement. De la même façon qu'il ne peut pas plaider sur quelque chose qu'il n'a pas vu... Un instant. Un instant. Je vous dis simplement qu'il ne peut pas plaider sur quelque chose que lui-même n'a pas vu, de même qu'il ne... Oui, je ne vous dis pas que vous ne l'avez pas vu, ce n'est pas ce que je dis. Ce que je dis, c'est que j'ai interrompu le leader adjoint du gouvernement, qui parlait de choses qu'il n'avait pas vues lui-même.

Quant à votre cas, vous pouvez alléguer certaines choses que, vous-même, vous pouvez avoir vues, je suis complètement d'accord avec vous. Vous pouvez soulever une question de privilège, mais la personne - ce que je veux vous dire - qui peut soulever une question de privilège dans le cas présent - cela a été fait - c'est le député qui a vu son propre privilège menacé, d'une certaine façon, son propre privilège "transcendé", et c'est le député de Laviolette qui l'a fait.

Le député de Laviolette a mentionné que son privilège a été brimé de deux façons, soit par des menaces, soit aussi par le fait qu'on l'empêchait de rentrer à l'Assemblée. C'est bien clair, les faits qu'il a énoncés au sens de l'Assemblée, ici, sont des faits tenus pour véridiques. On prend la parole d'un député telle qu'il l'a fait. Je ne peux faire autrement que cela et je ne pourrai pas permettre à chaque député, même s'il a été témoin de l'incident, de venir en témoigner dans l'Assemblée. Le privilège est soulevé par le député de Laviolette. Il a fait état de son privilège et je l'ai reconnu. Je lui ai laissé mentionner les faits en ce qui concerne le privilège qu'il soulevait comme député de l'Assemblée nationale. C'est purement et simplement cette situation. Une question de règlement.

M. Chevrette: Oui, M. le Président. Est-ce que vous pouvez me dire, M. le Président, si, dans les règlements, un député, de quelque circonscription électorale qu'il soit, peut se lever en cette Chambre quand il constate la violation d'un droit d'un membre de l'Assemblée, même si lui n'est pas impliqué? Est-ce qu'un député le peut, en vertu des règlements? Je veux bien que vous interprétiez le règlement de la manière que vous le voudrez, M. le Président, mais je

pourrais, même en l'absence du député ici, me lever et poser une question de règlement. Là, vous êtes en train de me dire que je n'ai pas le droit de parler sur la question de privilège ou sur la question de règlement. Je me suis levé et j'ai identifié ma question comme en étant une de règlement. Avec tout le respect que je dois à la présidence, M. le Président, je pourrais me lever sur une question de règlement... Parce que j'ai vu des choses qui étaient en flagrante violation de notre règlement, sans être impliqué, je pourrais me lever et exiger que la présidence fasse observer les règlements de l'Assemblée nationale et les privilèges des parlementaires, même ceux qui sont absents.

Le Vice-Président: Sur cela, vous avez entièrement raison, ce n'est pas la question que je veux vous rapporter uniquement. Un député peut soulever une question de règlement, même une question de fait personnel, une question de privilège pour un de ses collègues, c'est prévu aux règlements, je suis d'accord avec vous. Ce que je veux vous mentionner, c'est que notre article 68 nous dit: "Le député qui signale la violation d'un droit ou d'un privilège doit se limiter à de brèves explications, qui ne font l'objet d'aucun débat." Tantôt, je ne permettais pas au leader adjoint du gouvernement d'argumenter et de faire un débat sur les propos soulevés par le député de Laviolette ou de poser des questions relativement à la situation ou de tenter de décortiquer le fil des événements; de la même façon un autre député, même s'il a été témoin des incidents, ne pourrait non plus venir reprendre ces événements-là et en faire un débat dans l'Assemblée, puisqu'on dit clairement: "Le député qui signale la violation d'un droit ou d'un privilège doit se limiter à de brèves explications, qui ne font l'objet d'aucun débat."

C'est le point que je voulais vous mentionner, lors de votre intervention. De la même façon que je ne peux laisser le député ministériel, dans le cas présent, faire un débat, je ne peux non plus faire en sorte que chacun des députés s'exprime sur un privilège qui a été soulevé par un collègue. La situation a été décrite par le député suivant le règlement et il n'y a pas de débat qui s'ensuit sur cela. C'est le règlement qui le prévoit.

Donc, nous allons poursuivre les travaux et, au moment de l'interruption sur cette question, la parole était à Mme la... Oui.

M. Chevrette: M. le Président, j'aimerais demander une suspension des travaux de cinq minutes. Vous ne voulez pas? Donc, M. le Président, à défaut, par le leader du gouvernement...

Le Vice-Président: Juste un instant. Je voudrais simplement éviter une chose... M. Garon: ...

Le Vice-Président: À l'ordre, s'il vous plaît! Je veux simplement éviter une chose. Vous avez une question de règlement, vous me dites que vous voulez demander une suspension des débats. Je peux m'enquérir du fait, mais je demanderais que vous ne discutiez pas d'un côté à l'autre avec le leader adjoint du gouvernement, là-dessus. Votre question de règlement, je vous écoute sur la suspension du débat que vous voulez demander.

M. Chevrette: M. le Président, j'ai demandé une suspension brève de cinq minutes. Je ne suis pas intéressé à ce que des événements du genre se reproduisent. Je voulais demander au leader du gouvernement...

Le Vice-Président: Vous avez la parole, brièvement.

M. Chevrette: Écoutez bien, si vous ne voulez rien savoir, continuez, mais on ne fera pas l'opération Renne au nez rouge, ici.

Le Vice-Président: Un instant, s'il vous plaît!

M. Garon: C'est la journée nationale... Une voix: Oui, en plus.

M. Garon: ...qui va commencer au parlement.

Le Vice-Président: Un instant, s'il vous plattl Proprio motu, comme président de l'Assemblée, en vertu de l'article 44, je vais simplement suspendre la séance quelques instants, en demandant expressément une rencontre avec le chef de l'Opposition et le leader adjoint du gouvernement.

(Suspension de la séance à 5 h 22)

(Reprise à 5 h 29)

Le Vice-Président: À l'ordre s'il vous plaît! Alors, nous allons poursuivre nos travaux. Nous en sommes toujours à la prise en considération du rapport de la commission de l'aménagement et des équipements qui a procédé à l'étude détaillée du projet de loi 88 et la parole était à la députée de Chicoutimi. Mme la députée, il vous reste cinq minutes pour votre intervention.

Reprise du débat

Mme Jeanne L. Blackburn (suite)

Mme Blackburn: Merci, M. le Président.

Au moment où j'ai été interrompue par les événements que vous connaissez, j'étais en train d'exprimer à la fois ma déception et mon étonnement à l'endroit de ce gouvernement qui, je le rappelle, après deux ans d'expérience, légifère peu et mal. Aucune des lois qu'on a vues passer ici n'a pu être adoptée sans modifications et même les lois les plus simples avec deux articles. Le projet de loi 88 qui a été présenté ici en Chambre et examiné en commission parlementaire, pour lequel on est en train de prendre en considération le rapport, contient une cinquantaine d'articles. On a dû y apporter quelque trente amendements.

Une trentaine d'amendements sur un projet qui contient une cinquantaine d'articles, et un certain nombre d'articles étant de concordance, on n'a donc pas de modification à y faire, cela veut dire que les articles qui avaient un peu d'importance ont tous été modifiés. Est-ce que c'est une façon sérieuse de légiférer? Est-ce que c'est parce que le ministre des Affaires municipales ne connaît pas son dossier? Est-ce qu'il a fait les consultations suffisantes? Est-ce qu'il est bien encadré? Est-ce qu'il est complètement en dehors de la situation, décroché du réel? On ne sait pas trop pourquoi, sauf qu'on sait qu'actuellement, le gouvernement, dans la majorité de ses lois, ne consulte pas, prépare mal ses dossiers et légifère mal. C'est grâce à la collaboration, je dirais à l'entêtement, à la connaissance d'ailleurs qu'a du dossier le député de Jonquière qu'on a pu bonifier le projet de loi 88.

Cependant, le projet de loi 88 contient une disposition qui pourrait, tout à l'heure, à l'usage, à l'expérience, rendre l'administration ou l'application de ce projet de loi difficile pour ne pas dire laborieuse ou périlleuse, dans certains cas. C'est grâce à la détermination du député de Jonquière que, je le rappelle, on a modifié et atténué la portée du comité de concertation agricole. Non pas parce qu'on estime qu'il est pas important que les agriculteurs aient leur mot à dire dans tout ce qui s'appelle le zonage.

Cependant, quant à l'ouverture faite à l'agriculture, vous pourriez, à un autre moment, répondre à une demande aussi légitime qui viendrait des environne-mentalistes, qui viendrait de la Culture, qui pourrait venir de l'Éducation, qui pourrait venir des Affaires sociales, qui pourrait venir de toute autre question reliée à la gestion des affaires municipales ou des MRC.

M. le Président, le projet de loi 88, malgré les nombreux amendements, malgré les améliorations considérables qui ont été apportées, est un projet de loi contre lequel l'Opposition devra voter. On ne peut accepter de laisser adopter un projet de loi qui risque de semer la discorde au sein des MRC. L'Opposition du Parti québécois a fait preuve beaucoup du sens des responsabilités.

Je m'explique. Légiférer à 5 h 30 du matin, insister sur la nécessité de revoir un projet de loi ou de s'y opposer, sur le fond et non pas sur la forme, c'est avoir le sens des responsabilités. Au moment où le Parti libéral formait l'Opposition, on observait la chose suivante: Les députés de l'Opposition, le porte-parole de l'Opposition dans ce dossier faisait une opposition de forme, jamais de fond. Sa règle était la suivante: Laissons passer des lois avec les plus gros trous possible, de manière à mettre le gouvernement en difficulté. Ils n'avaient aucun respect pour la population et cela les laissait complètement froids d'adopter des projets qui avaient, à l'occasion, on doit le reconnaître, des défauts qui pouvaient être améliorés. Mais l'Opposition d'alors ne travaillait jamais à améliorer les projets de loi, elle les laissait passer avec des trous importants. Ce que nous faisons, M. le Président, c'est précisément essayer d'améliorer la législation, ce qui est notre responsabilité. C'est pourquoi nous voterons contre le projet de loi 88. Je vous remercie.

Le Vice-Président: Je vais maintenant céder la parole à Mme la députée de Marie-Victorin.

Mme Cécile Vermette

Mme Vermette: Oui, M. le Président. Il est malheureux qu'à cette heure aussi tardive, nous ayons affaire à autant de cabotinage de la part de ce gouvernement, un gouvernement qui a de la difficulté à prendre à ses responsabilités, et encore plus, qui a de la difficulté à reconnaître le droit des parlementaires. Lorsque nous voulons faire reconnaître nos droits, nous devons nous présenter ici en cette Chambre à des heures aussi tardives, alors que, pendant une semaine, certains soirs de la semaine, on a complètement fermé la Chambre à cause de manque de menu législatif. Nous nous retrouvons en pleine nuit en train d'argumenter parce que le ministre du Travail, par entêtement, ayant décidé qu'il voulait adopter sa loi à tout prix, est obligé de mettre en application des procédures parlementaires révolues. C'est pour cette raison que nous sommes ici, en cette Chambre, en cette heure aussi tardive, et que nous de l'Opposition devons, à tour de rôle, prendre nos responsabilités pour faire en sorte que le projet de loi du ministre du Travail ne puisse faire l'objet d'une lecture en cette Chambre, parce qu'il n'y a pas de consensus entre les parties impliquées dans ce projet de loi.

Le projet de loi 88 sur lequel nous devons parler qui modifie la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme est un autre projet de loi, où, encore une fois, il a fallu que l'Opposition démontre avec acharnement,

et grâce au député de Jonquière, qui est probablement plus connaisseur dans le domaine municipal que le ministre des Affaires municipales... Il a fallu une étude de cette loi et les amendements qui ont été apportés par notre critique en matière d'affaires municipales pour faire en sorte que ce projet de loi soit modifié à 75 %. Ce n'est pas la première fois que nous avons comme tâche de modifier des projets de loi. Je peux vous garantir que la majorité des projets de loi présentés en cette Chambre ont fait l'objet - pour une bonne partie - de modifications substantielles, qui ont changé, non seulement la forme, mais le fond et l'application des projets de loi.

Nous prenons au sérieux les demandes des groupes impliqués. Nous voulons défendre, de la façon la plus juste possible, les intérêts des différents groupes qui sont concernés par les projets de loi. Nous croyons que c'est le rôle de l'Opposition de le faire de la façon la plus respectable des intérêts de ces gens concernés par les projets de loi. On a passé des heures en commission parlementaire pour étudier le projet de loi 88 et y apporter les modifications nécessaires et, surtout, pour faire en sorte que, dans le milieu municipal, qui est un milieu qui voit accroître ses responsabilités, on maintienne l'harmonie entre les différents intervenants.

Vivre de consensus n'est pas toujours facile à l'intérieur des municipalités et encore moins à l'intérieur des MRC. Souvent il y existe des gens aux intérêts divergents. Il faut essayer de faire concorder ces intérêts pour le mieux-être des citoyens et des contribuables d'une même municipalité. M. le Président, c'est un projet de loi qui, au lieu de favoriser l'harmonisation entre les groupes, au lieu de favoriser la concertation, va favoriser le tiraillement entre les parties, entre l'UPA et les MRC. Bien sûr, nous sommes d'accord que les représentants de l'UPA puissent se faire entendre en ce qui concerne le zonage agricole. Bien sûr qu'il est important qu'ils fassent respecter leurs droits. (5 h 40)

Déjà, beaucoup de mécanismes sont en place, beaucoup de comités sont déjà en place. Je pense qu'il était inutile d'ajouter un comité qui semble, pour le moment, sans rôle spécifique, si ce n'est pour faire plaisir au ministre de l'Agriculture, qui s'était prononcé trop rapidement et sans consultation avec le ministre des Affaires municipales.

C'est un autre aspect de ce gouvernement, où l'absence de dialogue interministériel est de plus en plus visible. Nous sommes pris avec des projets de loi qui font qu'il y a une prise d'orientation qui va à l'encontre d'une décision d'un autre ministère. En fin de compte, ce sont des projets de loi échevelés que nous devons démêler et essayer, avec beaucoup de doigté, parce que justement nous prenons en considération les parties qui sont en présence, d'ajuster et d'équilibrer finalement, de recalibrer les articles de loi qui font l'objet de tant d'incohérence à l'intérieur des projets de loi.

C'est dommage qu'un gouvernement qui, après tant d'années à l'Opposition, semblait finalement se targuer de toutes les façons de faire... si ces gens étaient au pouvoir, jamais ils ne se permettraient de légiférer d'une façon aussi inadéquate. Actuellement, il faut croire que ce gouvernement aurait dû rester davantage dans l'Opposition parce qu'il n'a pas compris encore grand-chose. Ce gouvernement a besoin d'apprendre encore longtemps parce que, justement, il y a certaines personnes à qui il faut répéter longtemps avant qu'elles finissent par comprendre. Il me semble que c'est le cas actuellement de ce gouvernement. Il faut toujours répéter, répéter, répéter afin qu'ils arrivent à faire un petit peu des projets de loi qui commencent à avoir un peu d'allure et qui peuvent se tenir et qui sont acceptables pour l'ensemble de la population québécoise.

À mon avis, nous avons ici des critiques, surtout dans le domaine municipal, qui s'y connaissent. Notre critique prend réellement à coeur les intérêts du monde municipal, parce que lui-même a vécu une bonne partie de son expérience politique dans le domaine des municipalités. Je crois qu'il fait d'une façon plus particulière, en tout cas, l'étude des projets de loi. C'est parce qu'il connaît bien le monde des municipalités qu'il est capable d'apporter un éclairage aussi important pour l'ensemble de l'Assemblée nationale.

Je pense que le ministre actuel des Affaires municipales aurait intérêt à consulter davantage notre critique parce qu'il ferait vraiment de meilleurs projets de loi que le ministre lui-même est capable d'en faire. La preuve, nous l'avons vu circuler à maintes reprises sur le deuxième étage pour vérifier ce qu'on pourrait apporter comme modifications. Je pense qu'il aurait été plus souhaitable, au lieu de se promener comme cela sur le deuxième étage, de faire correctement ses devoirs et vraiment consulter les gens avec qui il avait affaire, et faire en sorte, plutôt que d'arriver à diviser des gens, à développer un esprit d'entraide, de collaboration et de concertation, plutôt que de mettre sur pied des comités bidons qui donnent des pouvoirs discrétionnaires à des ministres. Ce n'est pas la façon de procéder. Je pense que plus ça va, plus nous avançons avec ce gouvernement, c'est toute la démocratie actuellement qui en prend pour son rhume.

De plus en plus, il deviendra difficile

pour les membres de l'Assemblée nationale de se faire entendre. La preuve même, on est en train, à certains moments donnés, de barrer les portes pour rendre de plus en plus difficile l'accès à l'intérieur de l'Assemblée nationale. Il faut le dénoncer parce que c'est dangereux pour l'avenir de nos démocraties.

Je pense que nous sommes des gens élus et que nous avons droit d'enseigne ici dans ce parlement. Nous devons nous faire entendre aussi parce qu'il y va des intérêts de l'ensemble, de la majorité, parce que nous représentons aussi une bonne partie de la population du Québec et qu'elle nous a demandé de bien voir à ce que, justement, la législation et l'administration publique soient faites dans les règles de l'art. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président: Je cède la parole à M. le député de Lévis.

Des voix: Bravo!

M. Jean Garon

M. Garon: M. le Président, je remarque que le ministre de l'Industrie et du Commerce est parti. Il n'a pas continué à diriger les débats au nom du gouvernement. J'estime qu'il en avait honte et qu'il a eu sa leçon. Quant au ministre de l'Environnement, il pourrait peut-être se préoccuper de l'environnement de cette Chambre. Cela pourrait être aussi valable que les voeux pieux qu'il formule dans d'autres domaines.

Quant à ce projet de loi, avec le comité bidon qui va exister en ce qui a trait aux terres agricoles, je me contenterai de lire le communiqué que le gouvernement a émis à partir d'un papier qui vient du cabinet du premier ministre, de son service des communications. Ce communiqué traite d'une pseudo-entente ministérielle sur la limitation des pratiques et usages agricoles en zone agricole.

Pour démontrer à quel point on vend du vent, de la même façon que les conseils de famille du député de Beauce-Sud, du ministre délégué à la Famille ou encore des pseudopolitiques de la ministre déléguée à la Condition féminine, des politiques à venir ou des pseudo-politiques du ministre de l'Environnement, encore des politiques à venir, la meilleure façon de le démontrer est de lire ce communiqué de presse extraordinairement bidon.

Je le lis, M. le Président. C'est donc un papier du cabinet du premier ministre. On lit: "Entente ministérielle", apparemment entre trois ministères. On dit: "Le ministre de l'Environnement, M. Clifford Lincoln, le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, M. Michel Pagé, et le ministre des Affaires municipales, M. André Bourbeau, ainsi que les autres membres du comité ministériel permanent sur l'aménagement et le développement régional que préside M. Marc-Yvan Côté, ministre des Transports, responsable du Développement régional, ont confirmé ce matin qu'une entente était intervenue sur le rôle des municipalités régionales et locales en zone agricole, dans le cadre de l'élaboration des schémas d'aménagement et de l'adoption des règlements locaux et d'urbanisme. Ainsi, les municipalités régionales et locales qui veulent contrôler les pratiques et usages des établissements de production animale pourront introduire dans leur document d'aménagement des dispositions compatibles avec l'actuelle directive du ministère de l'Environnement relatives à la protection de l'air sans toutefois en excéder la portée et les règles..." On ne dit pas qu'on va s'harmoniser avec des règlements ou une loi, mais avec une directive d'un ministère. "Cette politique porte essentiellement sur le respect des normes établissant des distances entre divers types d'établissement et d'affectation du sol. Une telle approche -dit le communiqué - tout en facilitant une meilleure coexistence des diverses fonctions d'utilisation du sol, élimine l'implication de la notion de zone tampon entre la fonction résidentielle et la fonction agricole qu'avaient proposée diverses municipalités. "De plus, le gouvernement s'engage -écoutez bien l'engagement - à réviser le contenu de cette directive et à la transformer d'ici un an en un règlement provincial sur la protection de l'air en milieu agricole."

Vous avez bien compris, M. le Président? On dit qu'on veut que les gens s'harmonisent avec une directive qu'on promet de changer en dedans d'un an. Belle promesse. La directive n'est tellement pas sûre, tellement pas bonne qu'on s'engage à réviser le contenu de la directive et à la transformer d'ici un an en un règlement provincial sur la protection de l'air en milieu agricole. Imaginez-vous! "Par ailleurs, l'examen d'une notion -écoutez bien, l'examen, on va examiner une notion - de réciprocité à être introduite dans le règlement provincial sera envisagé de telle sorte que les normes de distance quant à l'éloignement des établissements agricoles par rapport aux résidences puissent également s'appliquer aux nouvelles résidences par rapport aux exploitations agricoles existantes, sauf pour la ou les résidences d'exploitants agricoles." (5 h 50)

Voyez-vous? On s'engage à examiner une notion de réciprocité qui pourra être introduite dans le règlement provincial qui devra être une révision d'une directive actuelle. On est dans le fort, M. le Président! On est dans quelque chose, là hein? On est dans le vent total. On dit

maintenant: "Quant à la protection contre la pollution des eaux par les établissements de production animale, les ministres concernés ont convenu de s'en tenir au règlement provincial actuel, tout en le révisant pour l'adapter aux besoins nouveaux." La seule chose de sûre, on dit: On va respecter le règlement qui a été fait dans le temps du Parti québécois sur les établissements de production animale, mais cela ne veut pas dire qu'on l'appliquera tel quel. On dit: Lui aussi, on va le réviser plus tard. C'est quelque chose. On est vraiment dans la grande politique, dans les grandes orientations, dans les grandes définitions des affectations territoriales. On dit: "Les municipalités continueraient cependant de s'assurer d'une protection minimale des rives des cours d'eau et des lacs, conformément au cadre annoncé par le gouvernement." Le cadre annoncé par le gouvernement, je le cherche encore. Je n'ai pas le portrait et je n'ai pas le cadre non plus.

On dit de plus: "II a été convenu d'accepter, dans le cadre de la protection contre la pollution de l'air, le concept d'immunité, visant à protéger les droits des producteurs agricoles qui ont recours à des pratiques normales et conformes au règlement provincial ou aux règlements municipaux. Le ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, en collaboration avec le ministère de l'Environnement et le ministère des Affaires municipales, a été mandaté - imaginez-vous! pour examiner les implications et applications de ce concept." Voyez-vous, le ministère de l'Agriculture, trois ministères ont été mandatés pour examiner les implications et applications d'un concept à définir éventuellement. On est dans le fort. On est un peu comme dans le souterrain en face de Grondines. On dit: Quelque chose qui pourrait arriver plus tard. On va analyser. On a mandaté le ministère de l'Agriculture, en collaboration avec le ministère de l'Environnement et le ministère des Affaires municipales, pour examiner les implications et applications d'un concept qu'on va examiner plus tard qui pourrait être introduit dans un règlement qui viendra à la suite de la révision d'une directive administrative. Je vous dis qu'on est dans le solide, on est dans le roc de Gibraltar.

Le ministre de l'Environnement qui nous a habitué à du vent a parti les pompes à pleine machine. Le vent est partout. Il dit: "Enfin, les municipalités régionales de comté pourront procéder à des interventions d'aménagement portant sur la protection de sites ou territoires situés en zone agricole et présentant un intérêt particulier, notamment aux niveaux écologique, historique, récréatif ou autres." Au cas où on en aurait oublié, on dit: Dans les zones agricoles, on mettra des endroits écologiques, historiques et récréatifs ou autres, au cas où on en aurait oublié. "Les ministres ont également retenu le principe de l'établissement d'un comité de concertation lorsqu'une municipalité entend adopter de telles dispositions." En plus de dire que ce sera du vent, on va établir un comité pour discuter du vent qu'on veut établir. "Il appartiendra aux municipalités de former ce comité selon les modalités prévues au projet de loi 88 présenté en première lecture le jeudi 12 novembre dernier." Je comprends que le président des MRC, qui est intelligent, a réagi en disant qu'il n'était pas impressionné. L'UPA, il faut dire qu'elle s'est fait avoir un peu. Ce n'est peut-être pas pour rien qu'on a élu M. Gaudet comme premier vice-président, pour qu'on arrête de remplir les valises. Pourquoi? Parce que, dans ce qu'on vient d'apprendre, on est dans le grand ridicule et on prend les agriculteurs pour des niaiseux, parce qu'il n'y a rien là-dedans. Il y a un communiqué de presse, il n'y a pas de règlement, il n'y a rien.

On dit ensuite en conclusion: "Avec cet ensemble de mesures, les municipalités régionales de comté et les municipalités locales pourront mieux exercer leurs responsabilités d'aménagement sur tout le territoire municipal, tout en respectant les politiques du gouvernement en matière de protection de territoires agricoles, de protection de l'environnement et d'aménagement du territoire." Que ces choses sont bien dites, M. le Président! Il dit: "Enfin, les mesures annoncées pour permettre de concrétiser dans une approche intégrée -imaginez-vous! - les principes qui ont présidé à l'élaboration de la loi 90 sur la protection du territoire agricole et de la loi 125 sur l'aménagement et l'urbanisme tout en favorisant le respect de l'environnement. "Les ministres sont persuadés - oui, ma chère - que les municipalités du Québec de même que les producteurs agricoles souscrivent largement à la philosophie du gouvernement sur cette question et que leur collaboration est assurée."

Le Vice-Président: Conclusion, M. le député.

M. Garon: Le contenu de cette entente fera d'ailleurs l'objet de séances d'information auprès des intervenants impliqués. Apparemment, les séances ne sont pas commencées, les communicateurs ne sachant pas ce qu'ils doivent annoncer.

M. le Président, je n'ai pas besoin d'intervenir plus longuement. C'est une farce, c'est une blague. La protection du territoire agricole est une blaque pour le Parti libéral. De la même façon qu'ils ont voté contre à toutes les étapes, actuellement on fait un comité bidon avec une politique bidon, avec une absence de réglementation, de normes, de mesures sur lesquelles les gens pourront

se baser. On verra rapidement que les gens ne marcheront pas là-dedans parce que les Québécois ne sont pas des valises à remplir par le Parti libéral.

Le Vice-Président: Je cède donc la parole à M. le député de Saint-Jacques.

M. André Boulerice

M. Boulerice: M. le Président, il est très exactement 6 heures, 12 heures à Paris, donc 10 heures GMT, Greenwich mean time, c'est le méridien de Londres, l'heure internationale que doit sans doute comprendre mon collègue de Nelligan. Je ne sais pas s'il y a bien des Parlements dans le monde qui fonctionnent comme celui-là, mais je peux vous dire que... Non? Ahl Malgré tout ce qui peut se passer. D'ailleurs, je ne m'avancerais pas, dans votre cas, à parler d'Haïti quand on se rappelle l'attitude odieuse que vous avez eue quand on a présenté une motion. Il ne faut pas s'avancer sur Haïti.

Donc, il est 6 heures, M. le Président. On a réveillé des députés, mais ils sont bien réveillés. Je pense qu'on va les entendre de l'autre côté. Il y en a d'autres qui sont allés se coucher, par exemple, parce qu'on ne voit pas le ministre des Affaires municipales. Par contre, on voit que la députée de Matane, le député des îles n'y sont pas. Ahî La députée de Matane y est. Bien, on ne le sait pas. Y est-elle ou non? Elle va s'asseoir, elle va rester debout. On ne le sait pas.

Comme je vous le disais, le ministre des Affaires municipales n'y était pas. Je vous ferai remarquer qu'après le traitement odieux qu'il a fait subir aux élus municipaux de la capitale nationale du Québec tantôt, en commission parlementaire, ce n'est pas étonnant qu'il ne soit pas ici pour se montrer. Je vous avoue que ce n'était pas tellement édifiant de voir le sort que le ministre réservait aux représentants de la capitale nationale.

Dans ce dossier, petit "clipping" pour employer le mot de presse: L'UMRCQ, l'Union des municipalités régionales de comté du Québec stigmatise le comportement des ministres sectoriels. Qu'est-ce que des ministres sectoriels? Ce sont des petits ministres qui ont leur petit empire et qui ne veulent pas le lâcher parce qu'ils se sentent bien à l'intérieur de cela.

Dans un vibrant plaidoyer en faveur du respect de l'autonomie des régions, le président de l'Union des municipalités régionales de comté, M. Nicolet, a dénoncé le comportement centralisateur de certains ministères sectoriels, c'est-à-dire les petits seigneurs de la guerre, les Tchang Kaï-Chek qui agissent comme si les MRC n'existaient pas. De cette façon, M. Nicolet a donné le ton au congrès qui a réuni plus de 8000 élus de toutes les régions du Québec. C'était à Montréal, à la fin du mois de septembre de cette année.

Incompréhension des demandes municipales, disait-il, refus d'accepter le concept d'aménagement issu de la loi 125, opposition systématique aux volontés du milieu, vision étroite - et vision étroite, c'est la marque de commerce de la majorité des lois qui ont été adoptées ici - des objectifs à privilégier, autant de symptômes de ces réflexes d'une fonction publique qui vit encore dans une autre ère, celle du centralisme qui répond à un concept dépassé de la société québécoise. (6 heures)

Ce n'est quand même pas un "deux de pique" qui dit cela, c'est le président de l'Union des municipalités régionales de comté du Québec. Je pense qu'il doit quand même avoir un peu une idée de ce qu'il dit. "L'utilisation de critères mal ajustés aux réalités régionales pénalise le développement de certaines régions." On pourrait continuer. C'était dans la revue municipale de novembre 1987. "Bourbeau - c'est le titre; le député de Laporte a pris le nom de son comté au pied de la lettre ce soir et il n'est pas là - entend renforcer les MRC et offrir le droit de retrait aux municipalités." On va renforcer les municipalités régionales de comté mais on va dire aux municipalités: Vous pouvez ne plus être là-dedans. Je ne sais pas où est sa logique mais j'ai bien de la difficulté à comprendre. Le ministre disait... Le ministre des Affaires municipales, M. André Bourbeau, proposera en novembre une loi modifiant la loi 125 sur l'aménagement et l'urbanisme afin de permettre aux municipalités régionales de comté de gérer des ententes intermunicipales tout en accordant aux municipalités locales une plus grande autonomie. Cela vise une consolidation de leur vocation. Et là, il évoquait le droit pour les municipalités de quitter, qu'elles ne seraient plus obligées de payer pour les services qu'elles refuseraient de recevoir. Comment pouvons-nous parler de municipalités régionales de comté, de concertation, quand on part avec un principe comme celui-là? S'il y a des choses que vous ne voulez pas, vous ne les prendrez pas et si ça ne vous intéresse pas, vous les laisserez là. Il n'y a pas de consolidation de la vocation des municipalités régionales de comté. Le seul petit endroit où on leur donne quelque chose, c'est dans l'aménagement du territoire. C'est bien beau, mais je pense qu'il faut avoir quelque chose de plus large comme vision. Vous aviez, dans le bloc-notes que signe M. Juneau dans Le Devoir en septembre 1987...

Une voix: ...

M. Boulerice: M. le Président, vous comprendrez qu'à l'heure tardive où je suis

arrivé, j'aimerais bien que le parti ministériel, fort de ses 99 membres, puisse être là pour écouter. Je constate qu'il y a malheureusement absence de quorum. C'est indécent de faire siéger un Parlement à 6 heures du matin sans avoir de quorum.

Le Vice-Président: Qu'on appelle les députés, s'il vous plaît.

Très bien, M. le Sergent d'armes.

Nous avons maintenant quorum.

Vous pouvez poursuivre, M. le député de Saint-Jacques.

M. Boulerice: On constate, M. le Président, que plusieurs reprennent le chemin de ce qu'on appelle, en langage militaire, le "snake pit". Je ne sais pas s'il y a une barbote en arrière pour les députés libéraux mais elle est bien fréquentée en tout cas, on le voit, en nombre tout au moins.

Mme Bélanger: N'exagérez-pas.

M. Boulerice: Comment, n'exagérez pas, M. le Président, m'entens-je crier de l'autre côté par la députée de Mégantic-Compton, moi qui, jadis, l'ai prise pour une perle! Mais enfin...

Dans La Presse du 23 septembre 1987, ce même ministre absent - il a préféré être jugé par contumace; d'ailleurs, il se sentait coupable au départ, c'était inévitable -disait: Invité à répliquer à M. Nicolet... Où est-il, le député de Nicolet, entre parenthèses? Ça aurait peut-être pu l'intéresser, les municipalités régionales de comté. Ça le préoccupe, ça? Je comprends que dans Laurier il n'y a pas beaucoup de municipalités régionales. Il n'y en a pas beaucoup, c'est comme dans Saint-Jacques, mais nous, nous avons une préoccupation nationale dans Saint-Jacques; tout ce qui concerne le Québec nous concerne. On n'a pas de clôture, le sens du ghetto.

Le ministre disait vouloir être le plus rassurant possible à l'endroit des élus municipaux en affirmant qu'il n'est pas question pour le Québec de remettre en cause les différentes responsabilités conférées aux instances locales, aux MRC dans l'aménagement du territoire, ni restreindre les pouvoirs des élus. Finalement, M. Juneau, dans La Presse, parlait des MRC sur des béquilles. Il suggérait de remplacer le titulaire de ce ministère par la ministre de la Santé et des Services sociaux et de mettre les MRC en salle d'urgence parce que le ministre des Affaires municipales était en train de les handicaper sérieusement. Des MRC sur des béquilles!

Les 94 municipalités régionales de comté viennent de terminer avec succès le premier mandat de leur courte histoire. C'est quand même quelqu'un d'averti. Avec la patience et l'ordre qui caractérisent le milieu municipal, elles ont réussi une opération sans précédent au Québec, disait-il, mettre au point des schémas d'aménagement opérationnels pour l'ensemble du territoire habité. Il poursuivait - c'est là-dessus que je vais conclure: Une telle opération n'a pas manqué de perturber la douce quiétude des ministres et de mettre à l'épreuve la coordination intersectorielle et interministérielle. C'est normal de parler d'absence de coordination, cela ne se parle pas; quand on les interroge, un par un, sur le même sujet, ils se contredisent. On le voit à la période de questions. Vous me faites signe, M. le Président, qu'effectivement je suis dans le ton avec une telle déclaration.

C'est ainsi que le dernier congrès de l'Union des municipalités régionales de comté, qui a eu lieu en fin de semaine dernière à Montréal, a été surtout marqué par des récriminations contre l'indécision gouvernementale. Cette attitude est compréhensible. À quoi auront servi ces années de travail des MRC si le gouvernement se replie, se referme obstinément sur ses positions?

C'est sur un sujet d'une importance aussi capitale pour le Québec qu'un Parlement qui foire depuis le début de la session intensive...

Le Vice-Président: En conclusion, M. le député.

M. Boulerice: ...en ajournant - je conclus, à votre demande, M. le Président -à tout bout de champ, le lundi soir, le mardi, en suspendant en plein milieu pour quinze minutes parce qu'ils se cherchent de l'ouvrage et de la "job", comme on dit en bon Québécois, parce qu'ils n'ont pas de menu législatif, ils vivent au Metrecal, nouvelle cuisine, c'est-à-dire absence de générosité, et là, ils ont le temps, à 6 h 10 du matin, d'essayer d'en passer une petite vite, profitant que les députés sont fatigués, mais les députés du Parti québécois ne sont pas dans le "snake pit", comme on dit dans le langage militaire, ils ne sont pas à la "barbote" en arrière, ils sont debout ici et vont s'y opposer tant et aussi longtemps qu'il y aura encore en ce Parlement un droit de parole. Vous me faites signe que le mien achève...

Le Vice-Président: II est terminé.

M. Boulerice: ...à cause du temps...

Le Vice-Président: II est terminé.

M. Boulerice: ...et non pas de la pertinence de mes propos, je vois dans vos yeux que vous les reconnaissez...

Le Vice-Président: Bon! M. le député de

Saint-Jacques, je vous demande instamment, depuis une minute et dix secondes, de conclure.

M. Boulerice: Je conclus, M. le Président. Déjà dissension de l'autre côté, l'heure tardive fait peut-être réfléchir. L'heure tardive fait réfléchir, c'est manifeste, et on va s'en réjouir. S'il faut les tenir jusqu'à 10 heures pour qu'ils reviennent à la raison...

Le Vice-Président: D'accord, M. le député de Saint-Jacques. Votre temps est terminé. M. le leader de l'Opposition.

M. Gendron: Oui, M. le Président. À ce moment-ci, je voudrais, conformément à nos règlements, en vertu de l'article 100, faire motion pour ajourner le débat. (6 h 10)

Le Vice-Président: II y a un petit problème, M. le leader de l'Opposition, à ce stade-ci. Évidemment, en vertu du règlement, pour faire ladite motion d'ajournement du débat, il faudrait que vous puissiez prendre la parole dans ce débat même et puisque vous avez déjà exercé votre droit de parole, je ne puis vous reconnaître a nouveau un droit de parole. Cette motion est disponible à un député qui n'est pas encore intervenu.

M. le chef de l'Opposition.

M. Chevrette: M. le Président, sur une question de règlement.

Le Vice-Président: Vous vouliez faire la motion?

M. Chevrette: Une question de règlement, d'information.

Le Vice-Président: Oui, allez-y.

M. Chevrette: Je voudrais savoir si, en faisant la motion immédiatement, je conserve mon droit de parole de dix minutes.

Le Vice-Président: Effectivement. Vous utilisez votre droit de parole pour faire la motion d'ajournement. Si la motion d'ajournement est reçue, à ce moment-là, vu que vous n'avez pas commencé votre temps de parole, en faisant la motion d'ajournement, vous êtes le premier à prendre la parole si vous n'avez pas commencé à exercer votre droit de parole. Donc, vous n'avez pas commencé à exercer votre droit de parole, vous ne perdez pas votre droit de parole à ce moment, à mon point de vue, si la motion est rejetée. D'accord?

Motion d'ajournement du débat

M. Chevrette: Donc, M. le Président, en vertu de l'article 100, je propose l'ajournement du débat.

Le Vice-Président: Est-ce que cette motion est... Cette motion n'est pas adoptée évidemment. Donc, en vertu de notre règlement... Non, non, un instanti Je dois m'enquérir traditionnellement sur une motion d'ajournement du débat, je m'enquiers si la motion est agréée, sinon un débat s'ensuit au sens de notre règlement et à l'article 101, on dit: "L'auteur de la motion et un représentant de chaque groupe parlementaire ont chacun un temps de parole de dix minutes. L'auteur de la motion a droit à une réplique de cinq minutes."

Donc, M. le chef de l'Opposition, comme auteur de la motion, je vous reconnais un droit de parole de dix minutes. Mais c'est à vous le droit de parole.

M. Chevrette: Je ne suis pas pour m'obstiner avec vous, M. le Président.

Le Vice-Président: Je veux simplement vous indiquer que vous êtes l'auteur de la motion d'ajournement. M. le leader de l'Opposition ne peut le faire.

M. Chevrette: Mais je croyais que le leader pouvait le faire en mon nom.

Le Vice-Président: Non, pas à ce moment-ci.

M. Chevrette: Mais je vais le faire. Cela me fera 20 minutes en ligne, M. le Président.

Le Vice-Président: Vous avez dix minutes.

M. Guy Chevrette

M. Chevrette: Dix minutes sur la motion, dix minutes sur le rapport par la suite. Si cela change, le poids du nombre nous éliminera.

M. le Président, si je fais la motion d'ajournement à 6 h 12, premièrement c'est en vertu de l'heure. Ce n'est pas une trouvaille que de dire qu'à 6 h 10 au moment où il y a plusieurs parlementaires fatigués et certains épuisés, cela se lit sur le visage, dans la figure de plusieurs, M. le Président... D'ailleurs, il y en a qui auraient avantage précisément à aller se coucher.

M. le Président, après exactement dix heures consécutives de débats en cette Chambre, je pense qu'il n'est pas anormal qu'un député en cette Chambre puisse proposer un ajournement du débat. Je dirais dix heures de fastidieux débats, de difficiles débats, M. le Président, où on a eu peine à maintenir le quorum. Dix heures où à quatre reprises durant cette nuit on a dû faire sonner les cloches pour l'appel des députés.

À une occasion, si ma mémoire est fidèle, vers les 4 h 15 on a dû faire sonner les cloches durant au moins 20 minutes avant d'obtenir le quorum en cette Chambre.

Donc, M. le Président, cette motion veut purement et simplement mettre un terme à un débat qui n'en finit plus, à un débat qui manifestement n'a pas l'air de convaincre le parti ministériel puisqu'il n'a pas participé à ce débat. Depuis au moins minuit, personne n'a participé du côté ministériel si ce n'est par des farces, par des boutades, pour tâcher d'arrêter nos collègues de s'exprimer librement sur plusieurs lois.

On a commencé, M. le Président, à parler de la loi sur Kativik qui fut adoptée au bout d'à peu près une heure de discussions, ce qui est tout à fait normal: adopter une loi, cela prend une heure. Mais au moment même où on traite du rapport d'une des lois les plus contestées en cette Chambre, la loi 88, qui a été contestée par à peu près tous les groupes sociaux, le gouvernement rigole, les représentants gouvernementaux se promènent, les représentants du gouvernement ne sont absolument pas intéressés à faire le débat qui s'impose sur ces lois.

Devant leur refus systématique de participer à ce débat, devant leur refus systématique d'enrichir de leurs propos ce débat, on n'a pas d'autre choix que de déposer une motion d'ajournement. Cet ajournement ne se veut pas un bâillon pour la partie ministérielle, il se veut tout simplement un répit pour leur permettre d'aller se reposer et de revenir un peu en forme. Â ce moment-là, peut-être serez-vous intéressés à discuter des problèmes que vivent les Québécois, que vivent les structures municipales, que vivent les représentants de l'UPA.

De plus, cette intermission que nous suggérons en vertu de l'article 100 de nos règlements permettra aux citoyens du Québec de nous voir oeuvrer en plein jour et de se demander ce qu'on faisait véritablement cette nuit. On pourra leur rappeler, au début, qu'on étudiait le projet de loi 88 et, M. le Président, après la période de questions ce matin, on pourrait continuer le débat sur ce projet de loi 88 qui, entre vous et moi, M. le Président, décidait de l'avenir des MRC, décidait des pouvoirs, à savoir comment les MRC, l'Union des municipalités régionales de comté et les cités et villes pouvaient ensemble avoir une relation correcte, civilisée dans l'administration courante des MRC du Québec. C'est cela, M. le Président. Cette intermission ne vise pas du tout à dire qu'on est fatigués de ce côté-ci de la Chambre. On peut aller très correctement jusqu'à 10 heures et recommencer.

Nos questions sont déjà prêtes, M. le Président, pour demain. Donc, qu'on ne fasse pas des gorges chaudes de l'autre côté. On est prêts. Nos questions sont même décidées. Nos députés sont déjà prêts à interroger la partie ministérielle et à entendre les cassettes traditionnelles, aucune réponse, mais il y aura au moins des questions intelligentes de notre part, M. le Président. C'est cela qu'on vise par cette motion d'ajournement en vertu de l'article 100 de nos règlements. Je comprends que, malheureusement, on ne peut pas l'utiliser à deux ou trois reprises. Nos règlements sont très explicites là-dessus, M. le Président. Il ne peut y avoir qu'une seule motion d'ajournement du débat au cours des délibérations. Si nous avons attendu à cette heure-ci pour la faire - nous avons été tentés de la faire à minuit, à 2 heures et à 4 heures - si nous avons attendu jusqu'à 6 heures, c'est pour permettre aux parlementaires d'entreprendre la prochaine séance, à compter de 10 heures, un peu reposés, dans un climat un peu plus serein que celui dans lequel on a discuté il y a à peine une couple d'heures. C'est pour permettre au ministre du Travail d'aller se reposer pour entreprendre un débat assez ardu sur le projet de loi 30 et également un débat passablement corsé sur le projet de loi 114.

Il faudra au gouvernement, tantôt, beaucoup de consentements de la part de l'Opposition. Le gouvernement, pour réaliser son menu législatif aussi maigre, a absolument quand même besoin, au moment où l'on vous parle, des consentements de l'Opposition. On voudrait le faire dans un climat plutôt serein et non pas dans un climat tendu, comme on l'a vécu tantôt, dans un climat où les parlementaires ne seront pas aigris et tendus, dans un climat relativement calme. Je comprends qu'on dit souvent qu'après la tempête vient le beau temps. C'est un peu ce qu'on ressent depuis quelques minutes en tout cas. Le climat est moins tendu qu'il ne l'a été vers 4 heures ce matin. Je pense qu'à 6 h 15, presque à 6 h 20 du matin, M. le Président, il est temps pour les parlementaires de se reposer pendant au moins quelques minutes avant de reprendre une journée qui sera fort chargée, avant d'entreprendre une journée qui nous permettra - en tout cas, je le souhaite; je l'espère - de légiférer d'une façon correcte, d'une façon sérieuse, et de peut-être mettre un terme - je ne sais pas si la journée suffira - à nos travaux sessionnels avant Noël.

Cette motion, je le répète, M. le Président, n'a qu'un but précis. Après autant d'heures de délibérations, depuis 20 heures hier soir, M. le Président - cela fait donc dix heures et vingt minutes d'affilée - que nous siégeons en cette Chambre, uniquement sur le plan de l'hygiène mentale, c'est déjà passablement trop. C'est tout à fait anormal.

C'est tout à fait aberrant. C'est tout à fait inconcevable, parce qu'on sait que la capacité de travail après autant d'heures sans répit, dans un climat assez tendu... C'est tout à fait normal, je pense, de la part de notre formation politique, que nous proposions cette motion d'ajournement des débats, permettant ainsi de reprendre, après la période de questions, sur cette loi très importante qu'est le projet de loi 88. (6 h 20)

Si aujourd'hui, nous avons un projet de loi potable devant l'Assemblée nationale, M. le Président, il faut en féliciter l'ensemble de mes collègues qui ont travaillé à l'élaboration et à la bonification de ce projet de loi qui n'était pas montrable. Je me souviens encore, quand le ministre des Affaires municipales a déposé ce projet de loi, que les téléphones fusaient à nos bureaux. L'UMRCQ, l'UMQ, l'UPA, tout le monde disait: On n'en veut pas de ce projet de loi. On dirait que le ministre n'a pas assisté à la table Québec-municipalités pour nous arriver avec ce projet-là. Ils ont dit: A-t-il été absent? Pourtant, c'est lui qui dirigeait les travaux. On veut lui donner la chance à ce ministre d'être ici, d'abord, au moment où prendront fin les discussions sur le projet de loi 88.

On voudrait lui donner l'occasion de dire au public, au moment où la cote d'écoute est peut-être un peu plus forte, tout le travail positif qu'a fait mon collègue de Jonquière et tout le travail positif que l'Opposition a fait en ce qui concerne chacun des groupes: l'UMRCQ, l'UMQ et l'UPA, et peut-être dire au ministre pour la première fois, qu'il y aura un projet de loi qui servira notre collectivité. Malheureusement, bien sûr, il ne pourra pas s'attribuer seul le mérite, si on l'avait laissé aller tout seul ce pauvre de lui, comme dirait mon grand-père, il serait donc sur le bord d'un remaniement, il serait ailleurs, vous le savez. Il serait sur les banquettes arrières. On voudrait lui donner la chance d'assister au moins au dernier exposé qu'on a à faire sur ce projet de loi. Vanter les mérites de mes collègues, vanter l'efficacité du travail, bien sûr, qu'on a fourni au cours de ce débat, et faire en sorte aussi que les parlementaires n'aient pas à se tenir la tête au cours des débats à venir, qu'ils soient véritablement réveillés, en forme pour reprendre une journée intéressante en ce qui a trait à la législation, peut-être que ce sera même notre dernière journée de législation.

Le Vice-Président: Je reconnais maintenant, M. le ministre du Travail et ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu.

M. Pierre Paradis

M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, je constate que c'est au pied levé que le chef de l'Opposition a pris la relève de son leader parlementaire qui a été empêché par le règlement de faire cette motion d'ajournement. On a senti dans le plaidoyer du chef de l'Opposition que ce n'était pas vraiment sa motion à lui, que l'on connaît comme un travailleur infatigable, comme quelqu'un qui ne compte pas les heures, comme quelqu'un qui, surtout aux petites heures du matin - il l'a mentionné - retrouve sa bonne humeur. Il vient de nous indiquer qu'il venait de retrouver sa bonne humeur enfin. Dans ce contexte, le chef de l'Opposition ayant retrouvé sa bonne humeur, tout le monde étant à son poste et constatant l'importance pour cette Assemblée de continuer et si possible de terminer nos travaux sur cet important projet de loi 88, nous les invitons à continuer ce travail positif qui se déroule depuis les petites heures du matin.

Des voix: Bravo! Bravo!

M. Blais: Une question de directive.

Le Vice-Président: Oui, une question de directive, M. le député de Terrebonne.

M. Blais: M. le Président, une directive à deux volets. Le premier volet, vu que le parti ministériel n'a pas pris son dix minutes de réplique, est-ce qu'on peut de notre côté en avoir l'usufruit? Une deuxième directive, dans nos règlements, d'une façon intrinsèque, on dit que la personne qui présente une motion comme celle-ci a dix minutes, le parti au pouvoir a dix minutes, et nous avons cinq minutes de réplique et toujours la même personne.

Je vais vous demander en deuxième volet, M. le Président, comment un député, qui a le droit de parole dans cette Chambre, conformément à ce règlement, ne pourrait pas exprimer son idée sur son droit d'arrêter ce débat et ne pourrait pas aller se reposer pour que nous travaillions ensemble dans la plus grande quiétude. Je ne vois pas de règlement qui me permettrait de m'exprimer sur cette motion d'ajournement. Je crois mon droit de parlementaire brimé.

Le Vice-Président: M. le député de Terrebonne, je vais répondre à votre demande de directive en deux volets. Pour le premier volet, je vous dirai que le temps que le parti ministériel n'a pas pris ne peut pas vous être accordé d'aucune façon dans ce cas-ci.

Quant au deuxième volet de votre question, nos règlements prévoient, à l'article 101, dans le cas d'une motion d'ajournement du débat, que l'auteur de la motion et un représentant de chaque groupe parlementaire

ont chacun un temps de parole de dix minutes. Le chef de l'Opposition s'est exprimé pendant dix minutes, étant l'auteur de la motion. Dix minutes étaient réservées au groupe parlementaire ministériel. Le ministre du Travail a exercé son droit de parole et je vous dirai, à ce moment-ci, que si vous voulez vous exprimer comme représentant du groupe parlementaire de l'Opposition, vous avez dix minutes à votre disposition, je vous reconnaîtrai si vous vous levez.

Tel qu'en fait foi la décision que j'ai rendue moi-même ici en cette Chambre le 2 décembre 1986, vous avez droit à votre réplique. Je vais vous expliquer cela clairement. Notre règlement prévoit que, dans le cas précis de la motion d'ajournement du débat, l'auteur de la motion a un droit de parole de dix minutes et un représentant de chaque groupe parlementaire peut bénéficier d'un droit de parole de dix minutes. Donc, le représentant du côté ministériel a exercé son droit de parole, un représentant de l'Opposition peut exercer un droit de parole de dix minutes et l'auteur de la motion conserve toujours sa réplique de cinq minutes. Je reconnais M. le député de Terrebonne pour un droit de parole de dix minutes maximum.

Des voix: Bravo!

M. Yves Blais

M. Blais: Merci beaucoup, M. le Président. Je reconnais là le grand défenseur des droits de parole des députés en cette Chambre. M. le Président, je me voyais un peu outré de ne pas avoir le droit de m'exprimer sur cette motion d'ajournement. Je sais que tous les élus ont une capacité intellectuelle très forte et nous sommes capables d'en absorber beaucoup, mais il faut se dire que nous sommes en fonctionnement constant depuis déjà 22 heures.

Il est bien sûr, M. le Président, que si l'Opposition présente une motion d'ajournement, je ne vois personne dans la population, ni du côté journalistique ni du côté de ceux qui nous regardent ou nous écoutent, trouver que c'est inacceptable de demander une motion d'ajournement. Il faut que, comme le corps, l'esprit se regénère. Il faut, comme le disait un grand poète, que le corps exulte, mais il faut aussi que l'esprit se ressaisisse de temps à autre. C'est pour cela que Dieu nous a donné le sommeil.

M. le Président, ce que je vois ici, c'est qu'on veut nous priver, en plus de ne pas nous permettre les amendements qu'on désirerait à ce projet de loi, alors que nous ne sommes que 20 et de l'autre côté, vous êtes 100. Nous sommes obligés de travailler cinq fois plus fort et la capacité intellectuelle, quoique très grande de ce côté-ci, subit des remous un peu fastidieux après 22 heures de débat.

M. le Président, je trouve justifié et justifiable, intellectuellement raisonnable et intrinsèquement valable que nous demandions l'ajournement du débat. Je sais que vous-même qui n'avez pas le droit de vous exprimer là-dessus, vous seriez l'homme le plus heureux du monde si vous descendiez de votre sedia pour aller vous reposer. Ce n'est pas que vous n'êtes pas capable de porter encore un bon jugement, vous venez de me donner le droit de parole, ce que je reconnais, M. le Président, comme une grandeur d'âme de votre part. Mais l'ajournement, M. le Président, permettrait à nos esprits de se régénérer. Nous pourrions aller chercher des arguments qui convaincraient peut-être le gouvernement que cette loi est incomplète, qu'elle est présentée à des heures indues, mais qu'elle est aussi incomplète en soi et qu'elle est un germe de mécontentement sur tout le territoire du Québec. C'est pour cela que la période de réflexion serait bonne surtout pour le gouvernement.

Vous savez que lorsque toutes les principales associations qui s'occupent des choses urbaines sont contre un projet de loi, il y a certainement matière à réflexion. Si nous avons parlé de ce projet de loi durant au moins douze heures et que le parti qui a le nombre pour lui n'a pas décidé de faire un iota de changement, eh bien c'est qu'il y a certainement place pour s'arrêter et avoir quelques moments de réflexion.

M. le Président, l'UMRCQ, l'UMQ et l'UPA, trois grands organismes reconnus par l'ensemble des gens qui analysent les situations sur le territoire québécois, se sont prononcées contre cette loi, ils y voient ombrage. D'abord, les MRC voient ombrage à leur autorité parce que cette loi dit que les MRC auront plein pouvoir tout en disant aux municipalités qui en font partie qu'elles ont le droit de retrait, c'est impensable! On ne peut pas à la fois avoir plein pouvoir et permettre aux composantes d'un organisme de s'en détacher. (6 h 30)

On ne peut pas donner plein pouvoir à l'un et plein pouvoir à l'autre. Donc, il y aurait une réflexion à faire. Aussi, l'Union des producteurs et des productrices agricoles s'est-elle prononcée contre. Pourquoi? Parce qu'on touche de façon non étudiée à leur territoire agricole. Je disais tantôt que ce bijou législatif que nous avons adopté du temps où nous étions au pouvoir, quand il est touché, il doit l'être avec des cisailles de précision qui répondent à toutes les analyses que les journalistes et les gens du milieu acceptent.

Une voix: Au bistouri.

M. Blais: C'est pourquoi je demandais

la suspension du débat, M. le Président. Mon Dieu! que je vois de bons soldats de l'autre côté. Ils voudraient tous aller trouver repos dans un lit moelleux. Ils le voudraient tous. Mais on leur a dit: Tenez tête à ce petit groupe de 20. Tenez-leur tête! Vous êtes 100. Ils ne sont que 20, tenez-leur tête. Mais sachez qu'on ne travaille pas en vain, on travaille à 20. Parce que la population, même s'il est tard, nos propos vont lui être rapportés. Il est tôt pour certains et il est tard pour d'autres. À 6 h 30, M. le Président, vous savez que c'est la traite des vaches. Les cultivateurs se promènent ce matin avec leurs seaux. Ils se demandent où sont les véritables sots. Ils se le demandent. C'est pourquoi nous avons fait le saut sur la motion d'ajournement. On aimerait que le parti au pouvoir mette son sceau sur cette résolution.

Des voix: Ha! Ha! Ha!

M. Blais: C'est ce que nous aimerions. C'est comme la phrase célèbre du poète qui dit: Un cavalier sur un âne portant sur son sein le seing du roi, l'âne trébucha, les trois "saints" tombèrent. On demandait: Comment écrit-on le mot "sains"? Mais ce n'est pas à 6 h 30 le matin qu'on va trouver comment il s'écrit. Ce ne serait pas sain pour l'esprit. Je demande justement l'ajournement pour que nous soyons un peu aérés rationnellement.

Je trouve beau de la part du parti au pouvoir d'avoir des soldats de cette nature. On leur a dit: Soyez au postel Tenez tête aux 20. Vous êtes 100. C'est donc noble! Je trouve cela extraordinaire, moi. À 100 contre 20, je trouve la victoire extraordinaire. Si j'étais au pouvoir à 100 contre 20 et que j'avais gagné sur le nombre, je me dirais: Mon Dieu, que ma victoire est grande. Que ce jour est noble pour nous et l'histoire rapportera certainement cette nuit mémorable où le projet de loi 88 fut tenu en haleine pendant près de 14 heures. Seulement d'y penser commande l'ajournement, M. le Président. Effleurer le sujet, fût-ce du bout des lèvres, cela commande un ajournement, M. le Président. Je vois les têtes qui oscillent un peu en disant: Si l'oreiller était là à la place de ma main, que je serais donc bien.

Des voix: Ha! Ha! Ha!

M. Blais: Je crois que vous avez raison, mais vous êtes de bons soldats. On vous a dit: Soyez au poste. Que les sentinelles veillent pendant que le capitaine dort. Alors, les sentinelles sont là. L'autre ne s'embourbe pas avec cela, hein. Ah non! Il est parti se coucher dans son beau bourg ou dans son bourg beau - je peux faire une inversion -pendant que vous êtes là, stoïques. Regardez la tenue de ces gens! C'était un peu moins bon au début de la soirée, mais ils ont maintenant repris un peu de sérieux.

Je vois le ministre de l'Environnement. Je le trouve donc courageux. Il a exactement mon âge. C'est fatigant, à cet âge-là, de tenir le coup. Les gens un peu plus jeunes, ça peut aller. Mais quand on arrive à près de 60 ans, il est très difficile d'être debout pendant 50, 60 heures. C'est plus facile quand on est un peu plus jeune. Je vois le député de Brome-Missisquoi qui s'indigne et vocifère comme si le paradis était retourné en enfer, mais ce n'est pas nécessaire, à cette heure-ci, de faire quelques poèmes pour que les gens comprennent que l'esprit est fatigué. On ne peut pas être aussi volubile après 22 heures de travail qu'on l'est à l'aurore, lorsqu'on se lève. Le soleil est toujours plus resplendissant. Quand on a vu venir le soleil, qu'on l'a vu se coucher et qu'on a vu naître la lune, filer les étoiles et qu'on recommence un autre jour, eh, bien on est au crépuscule de nos pensées. C'est pour cela que nos dialogues ou nos discussions n'ont pas la même teneur que si nous étions plus de bonne heure. C'est normal, M. le Président. C'est bien normal.

M. le Président, je suis persuadé que ce petit laïus de bon aloi va certainement faire penser, d'abord, aux sentinelles d'appeler les chefs pour qu'ils viennent, il n'y en a pas un, et leur dire que les analystes de la situation vont trouver que cette veille excessive tourne le parti au pouvoir en dérision et que c'est dérisoire aussi de le faire. C'est pourquoi, M. le Président, je suis persuadé que cette motion d'ajournement répond à l'intelligence, à la rationalisation. Je suis persuadé que même le parti au pouvoir va dire: Nous ajournons immédiatement; nous allons réfléchir à ce projet de loi qui n'est pas bon.

Des voix: Bravol

Le Vice-Président: Je vais maintenant reconnaître M. le chef de l'Opposition pour l'exercice de son droit de réplique.

M. Guy Chevrette (réplique)

M. Chevrette: M. le Président, à entendre mon collègue, vous aurez bien compris que ce n'était pas l'épuisement qui nous faisait demander l'ajournement.

Une voix: C'est eux qui sont épuisés.

M. Chevrette: Vous aurez bien compris, M. le Président, que nous étions très lucides, que nous voulions continuer à débattre du sujet, mais, devant l'apathie et la fatigue évidentes des députés ministériels, nous voulons leur donner une chance d'aller se reposer et de dire ce qu'ils pensent du projet de loi 88, ce qu'ils pensent des demandes de

l'UMRCQ, ce qu'ils pensent de la demande de l'UMQ. Est-ce qu'ils partagent le point de vue des producteurs agricoles? Est-ce qu'ils sont d'accord avec un comité consultatif qui s'ajoute déjà aux procédures de consultation prévues à la loi 125?

Vous n'en avez entendu aucun, M. le Président. Le ministre est parti, comme s'il avait dit à son groupe: Mais, de grâce, n'intervenez pas durant mon absence, vous pourriez peut-être me mettre les pieds dans les plats. Je ne sais pas si c'est de cette façon que cela fonctionne de l'autre côté. Il faut reconnaître qu'ils ont une discipline. Quand il n'y en a pas un qui parle, il n'y en a aucun qui s'ajoute. C'est clair. J'ai remarqué cela. Quand le ministre donne une directive de ne pas parler, il n'y en a plus un qui parle. Évidemment, si ce n'était pas de la cloche, M. le Président, on n'en aurait pas beaucoup devant nous.

Une voix: C'est sûr, il faut le reconnaître.

M. Chevrette: Mais il faut le reconnaître, de ce côté-là, ils sont très disciplinés quand un ministre leur dit: Vous n'avez pas un mot à dire, c'est moi qui suis ministre; c'est moi qui décide de mon projet de loi, du contenu de mon projet de loi. Même si vous n'êtes pas d'accord, taisez-vous.

Une voix: La mise au pas.

M. Chevrette: C'est un peu de même que cela fonctionne. Cela m'apparaît aberrant pour une formation politique qui compte près de 100 députés, soit 99 députés, et on n'a pas entendu un son de cloche. On n'a pas entendu résonner seulement - ré, accent aigu - sur le projet de loi 88. On n'a pas vu un député se lever pour dire: Dans mon comté, les producteurs agricoles sont inquiets de ce qu'il y a dans le projet de loi 88; bravo si on a réussi à le modifier. Aucun d'eux ne l'a dit, aucun, exclusivement le ministre des Affaires municipales. Il faut comprendre que c'est peut-être aussi un désengagement de votre part vis-à-vis de lui. Après avoir présenté un tel projet de loi et après avoir subi les transformations qu'il a subies, en regardant le produit fini comme celui qui vient de nous apparaître au moment de l'étude du rapport, je vous comprends.

Je vous comprends et j'interprète que c'est peut-être de la gêne de votre part. Vous ne reconnaissez plus votre projet, hein? Nous autres non plus, on ne le reconnaît plus, mais on est contents que le produit soit maintenant différent. On est contents de voir que l'UMRCQ est très heureuse du contenu qu'on y retrouve à l'étape de l'étude du rapport. On est très contents de voir que l'UMQ achète également le contenu. On est très contents également que les producteurs agricoles le trouvent maintenant acceptable. Et j'invite le ministre du Travail, de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu à se conformer à ce que son collègue des Affaires municipales a fait dans ce projet de loi. Il a présenté un projet de loi dont personne ne voulait et, avec l'aide de l'Opposition, il l'a transformé pour le rendre acceptable aux yeux de plusieurs groupes. Le ministre est à la veille de nous présenter un projet de loi dont personne ne veut, mais il s'entête. Il ne veut pas. Il va s'obstiner jusqu'à la mort. Personne ne sera d'accord. (6 h 40)

II me semble que le ministre du Travail devrait suivre l'exemple du ministre des Affaires municipales sur cela, être plus souple, accepter que les groupes puissent lui parler, accepter que les groupes puissent lui proposer des choses, accepter de faire des compromis pour rendre acceptable son projet de loi. Après tout, on légifère pour qui? On légifère pour des populations, on légifère pour des gens. Ces gens ont des dirigeants et ont des représentants. Pourquoi toujours chercher à se les mettre en opposition, M. le Président? C'est là le mérite que l'Opposition a eu.

Ma proposition d'ajournement, M. le Président, c'était précisément aussi - c'est un élément additionnel - de permettre au ministre du Travail de lui donner des délais entre 6 h 40 du matin et 10 heures, il a peut-être le temps de faire quelques téléphones à quelques représentants du monde syndical, à quelques représentants du Conseil du patronat pour leur dire: Voici, j'ai des idées à placer sur la table. Est-ce que notre projet pourrait se bonifier dans ce sens? On lui donne le temps. À ce compte, je prétends que ma motion d'ajournement en est une fondée sur le gros bon sens. Rendu à 6 h 40 du matin, il est temps d'avoir un répit.

Le Vice-Président: Le débat étant terminé, nous allons maintenant procéder à la mise aux voix de cette motion d'ajournement. C'est un vote enregistré. Qu'on appelle donc les députés. (6 h 42-6 h 45)

Mise aux voix de la motion

Le Vice-Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

Nous allons maintenant procéder à la mise au vote de la motion d'ajournement du débat portant sur l'adoption du rapport de la commission de l'aménagement et des équipements sur le projet de loi 88.

Que les députés qui sont pour à ladite motion veuillent bien se lever, s'il vous plaît.

Le Secrétaire adjoint: MM. Chevrette (Joliette), Gendron (Abitibi-Ouest), Perron (Duplessis), Blais (Terrebonne), Garon (Lévis), Mme Juneau (Johnson), MM. Jolivet (Laviolette), Brassard (Lac-Saint-Jean), Paré (Shefford), Boulerice (Saint-Jacques), Dufour (Jonquière), Mme Harel (Maisonneuve).

Le Vice-Président: Que les députés qui s'opposent à cette motion veuillent bien se lever, s'il vous plaît.

Le Secrétaire adjoint: MM. Paradis (Brome-Missisquoi), Dutil (Beauce-Sud), Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François), MM. Lincoln (Nelligan), Vallières (Richmond), Mme Bégin (Bellechasse), MM. Maltais (Saguenay), Philibert (Trois-Rivières), Sirros (Laurier), Paradis (Matapédia), Rivard (Rosemont), Kehoe (Chapleau), Mme Hovington (Matane), M. Tremblay (Iberville), Mme Bélanger (Mégantic-Compton), MM. Camden (Lotbinière), Després (Limoilou), Gardner (Arthabaska), Gauvin (Montmagny-L'Islet), Hamel (Sherbrooke), Dubois (Huntingdon) Bissonnet (Jeanne-Mance), Poulin (Chauveau), Tremblay (Rimouski), Saint-Roch (Drummond).

Le Vice-Président: II n'y a pas d'abstentions?

Le Secrétaire: Pour: 12

Contre: 25

Abstentions: 0

Le Vice-Président: Alors, la motion est donc rejetée, et nous allons en conséquence poursuivre le débat. En vertu de notre règlement, plus précisément a l'article 102, M. le chef de l'Opposition vous avez maintenant votre droit de parole de dix minutes sur l'adoption du rapport.

Reprise du débat M. Guy Chevrette

M. Chevrette: Merci, M. le Président. Vous me permettrez au départ, M. le Président, de féliciter mon collègue de Jonquière ainsi que mes collègues qui ont participé à l'examen de cette législation qui, je vous le rappellerai, M. le Président, avait fait l'unanimité de tous les intervenants du milieu, mais contre le projet de loi.

Je me souviens encore, M. le Président, au moment où le ministre a déposé ce projet de loi, des propos du député de Jonquière qui me disait: Écoute bien, je ne vois pas comment on va pouvoir travailler. Il n'y a pas une personne du monde municipal qui désire ce projet de loi. L'Union des producteurs agricoles y est carrément et diamétralement opposée. (6 h 50)

M. le Président, ce projet de loi mettait en péril toutes sortes de principes, même des principes élémentaires de démocratie. Il mettait également en péril, M. le Président, des notions fondamentales en ce qui regarde la protection du territoire agricole, par exemple.

Mais avec un effort soutenu, le député de Jonquière a, avec ses collègues, M. le Président, rencontré les groupes. Tantôt c'était l'UMRCQ, tantôt c'était les représentants de l'UMQ, tantôt c'était des téléphones et des rencontres avec le monde agricole pour en arriver à convaincre le ministre, de peine et de misère, à bout de bras, comme on dit en bon québécois, de modifier ses attitudes, de modifier fondamentalement le contenu même de la loi 88.

Oui, il y en a eu de la négociation, M. le Président, de la négociation tous les jours avec le ministre. Et mon collègue de Jonquière, fort de son expérience dans le monde municipal, a inventorié des formules, voyant que, même à l'intérieur du monde municipal, il y avait des divergences de point de vue aussi.

Il est bien évident que l'UMQ ne voyait pas ça du même oeil que l'UMRCQ et que, d'autre part, il y avait des craintes de l'UMRCQ de voir la trop grande force de l'UMQ dans le dossier. Si bien que mon collègue, à un moment donné, me faisait des propositions comme chef de parti. Il me disait: Je pense que j'ai trouvé la formule. Je pense que j'ai trouvé une piste intéressante sur laquelle on pourrait peut-être trouver un compromis, faire en sorte que les représentants du monde municipal se rencontrent et puissent proposer au ministre un compromis très acceptable pour les deux parties.

Et, effectivement, M. le Président, c'est la suggestion de mon collègue de Jonquière qui a réussi à faire un compromis entre les deux unions de municipalités, l'UMRCQ et l'UMQ. On se retrouve aujourd'hui avec un projet de loi potable, acceptable, qui nous permet de dire: Chapeau! à l'Opposition parce que le monde municipal se reconnaît dans le projet de loi, l'Union des producteurs agricoles se reconnaît dans le projet de loi. Mais malheureusement, on ne reconnaît plus le projet de loi du ministre, par exemple. Et tant mieux!

M. Perron: Question de règlement, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Question de règlement, M. le député de Duplessis.

M. Perron: Je m'excuse auprès de mon collègue qui était en train de parler à cette Chambre, mais on constate qu'on n'a pas quorum, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Je vais vérifier si

on a quorum. On n'a pas quorum, qu'on appelle les députés.

Nous avons quorum, vous pouvez poursuivre, M. le chef de l'Opposition.

M. Chevrette: Merci, Mme la Présidente. Je disais donc que grâce à mon collègue de Jonquière et à l'équipe de députés, après de multiples efforts auprès des deux unions de municipalités, on a réussi, je crois, à rendre potable ce qui était inacceptable. En effet, hier, j'ai pu constater qu'il y avait une satisfaction au niveau des unions. Il y avait enfin un soupir de soulagement parce qu'on croyait, Mme la Présidente, que le ministre s'entêterait avec un projet de loi qui était tout à fait inacceptable pour l'ensemble des groupes impliqués dans ce projet de loi.

Il faut tirer une leçon de ce projet de loi 88. Il faut tirer la leçon suivante. D'abord, une loi, cela ne se présente pas en Chambre tout croche, tout de travers. Une loi, cela doit être testé préalablement auprès des groupes impliqués. Une loi, cela doit au moins être confronté avec les objectifs des groupes qui sont visés. Une telle loi, Mme la Présidente, ne se présente pas à l'Assemblée nationale pour provoquer des réactions négatives, faire en sorte qu'on fasse dépenser du temps et de l'énergie de la part des élus municipaux ou de la part des représentants du monde agricole pour le plaisir de dépenser des énergies et du temps. Ce furent des voyages à Québec pour ces gens. Ce furent des déplacements coûteux pour ces municipalités, ces unions de municipalités. Ce furent, Mme la Présidente, des débats à n'en plus finir avec des fonctionnaires gouvernementaux. Pourquoi? Parce que le ministre ou bien n'avait pas compris les objectifs du monde municipal, ou bien n'avait pas saisi le pouls du monde municipal, ou bien avait négligé de le faire purement et simplement. Si bien que l'on se retrouve avec une loi qui faisait l'unanimité contre.

Ce n'est pas comme cela qu'on légifère. On doit tirer une leçon sur le plan législatif. On ne légifère pas pour se faire plaisir comme ministre. On légifère pour encadrer les agissements du monde. On ne légifère pas pour voir son nom passer à l'histoire, derrière une loi que personne ne voulait. Cela fait un drôle de passé historique. Il y en a de ces gens dans ce gouvernement, Mme la Présidente. Il y a des ministres, en face, qui légifèrent pour laisser leur nom à la postérité. Il ne restera pas grand-chose, s'il n'y a personne qui achète le produit qu'ils veulent leur vendre ou leur donner. Mme la Présidente, c'est ce que ce gouvernement n'a pas compris. Depuis le début - le leader pourrait le faire au niveau de son bilan - je n'ai jamais vu en cette Chambre, de la législation aussi mal foutue. Des projets de loi qui nécessiteraient d'être complètement réimprimés. On ne les reconnaît plus, même les notes explicatives... Il y a des ministres qui sont obligés de changer leurs notes explicatives, ce qui est supposé être l'énoncé même du contenu de la législation qui suit. Ce ne sont pas des farces. Où s'en va-t-on?

C'était supposé pourtant, le 15 décembre 1985... Je ne sais pas si vous vous rappelez. La vice-première ministre, en l'absence du chef, qui, lui, s'était fait battre dans Bertrand, ne pouvait pas être en Chambre, s'était levée, très dignement, les deux mains jointes et avait dit: Nous allons légiférer moins, mais mieux. Ces gens se sont mis à distribuer des projets de loi, une feuille, trois lignes. Là, ils ne se trompaient pas trop, parce qu'une feuille, trois lignes, s'il avait fallu qu'ils s'enfargent dans trois lignes, cela aurait été effrayant. Mais là, ils ont commencé à mettre un peu plus de lignes. Dès qu'un projet de loi avait 10 lignes, c'était fini. Ils s'enfargeaient, Mme la Présidente. Il fallait corriger 8 lignes sur 10. Et, dès qu'il y a plusieurs articles, là, cela n'a plus de bon sens.

Je vais vous dire très honnêtement que les principes sont même changés en deuxième lecture, quand on y va article par article. Les principes mêmes sont modifiés. Ce ne sont pas des farces. Vous appelez cela légiférer? Vous appelez cela avoir le pouls de la population, quand on légifère? Moi, je n'en reviens pas, Mme la Présidente. Je n'ai jamais vu, depuis 2 ans, autant de projets de loi mal foutus. Pourtant, on devait légiférer moins mais mieux. Cela n'a pas de bon sens. Il est absolument temps qu'on puisse au moins s'entendre sur une chose, ici. L'Opposition, en cette Chambre, a fait un travail magistral. L'Opposition a corrigé des projets de loi pour les rendre potables et acceptables. L'Opposition, Mme la Présidente, n'a pas fait d'obstruction systématique. L'Opposition a toujours été constructive, dans le sens qu'elle apportait des amendements vérifiés au préalable, auprès des groupes concernés. (7 heures)

Je me souviens dans le monde du travail, quand mon collègue de l'Abitibi présente un amendement à une loi, c'est parce qu'il a testé les amendements auprès des groupes de salariés, des groupes de syndicats auprès des centrales syndicales. Mme la Présidente, je vous en donnerai un exemple, pour vous montrer comment on légifère tout croche. La ministre de la Santé et des Services sociaux déposait un projet de loi de 13 articles. Rendu en deuxième lecture, croyez-le ou non, elle a fait 13 amendements aux 13 articles. Ne faut-il pas avoir absolument perdu le sens de ce que c'est légiférer? Si on légifère de cette façon, c'est parce qu'on ne connaît pas son dossier. Si on légifère de cette façon, c'est

parce qu'on n'a pas compris les problèmes et, placé devant une réalité avec une Opposition qui se tient debout, on se rend compte que les articles n'ont plus de bon sens et là, on légifère. On ne reconnaît plus les projets de loi, Mme la Présidente. Mais, Dieu merci, si on ne les reconnaît pas, c'est au moins à l'avantage des citoyens, parce qu'on a fait un travail gigantesque de ce côté-là.

Mme la Présidente, je suis très fier, personnellement, très heureux du travail de moines, qu'ont fait certains députés de notre côté. Gratter des projets de loi, préparer des amendements, vérifier ces amendements auprès des groupes concernés, cela a été le cas de mon collègue de Jonquière, de celui de l'Abitibi.

Cela a été le cas de tous les députés qui ont eu à travailler sur des lois, Mme la Présidente. Mais c'est bien sûr que les deux champions de la législation tout croche, qui ne requièrent à peu près jamais l'approbation des gens concernés, ce sont les ministres du Travail et des Affaires municipales. Ils ont le don de présenter de la législation dont personne ne veut. Je ne sais pas pourquoi. Je ne sais pas ce qu'ils cherchent.

On dirait qu'ils veulent être sur la sellette et ils se croient vedettes quand ils sont contestés. Je ne sais pas. Ça n'a pas d'allure de légiférer de cette façon, Mme la Présidente. Quant à moi, je vous dirai que c'est avec beaucoup de fierté qu'on va se présenter devant le monde municipal en ce qui regarde la loi 88. C'est avec beaucoup de fierté qu'on va se présenter devant le monde agricole. Et on n'ira pas les emplir le temps d'un congrès. On leur a prouvé, à ces gens-là, qu'on était capables de faire un travail constructif, de bonifier des projets de loi, de les corriger en fonction des aspirations du milieu. C'est ça le vrai rôle du législateur. Ce n'est pas de se faire plaisir en essayant de passer une loi tout croche.

L'important pour un législateur consciencieux, soucieux de répondre aux véritables besoins, c'est de présenter une loi qui colle aux réalités du milieu, qui vient résoudre les problèmes vécus par le milieu et qui vient transposer dans un texte législatif bien souvent les recettes pensées par les gens du milieu et non pas les petits comités de bénévoles à 400 $.

La Vice-Présidente: Merci, M. le chef de l'Opposition. M. le député de Duplessis.

M. Denis Perron

M. Perron: Merci, Mme la Présidente. Je voudrais d'abord, tout comme mon collègue de Joliette et en même temps chef de l'Opposition à l'Assemblée nationale, féliciter le travail acharné de notre collègue de Jonquière qui, avec son expérience BU cours des dernières années, en particulier au niveau de l'Union des municipalités du Québec en tant que président, a contribué à faire en sorte que la loi 88 soit amendée par le ministre des Affaires municipales.

Il a contribué par sa connaissance du dossier à faire comprendre non seulement à certains ministériels, mais à des gens de l'extérieur, que ce projet de loi se devait d'être amendé et d'être modifié substantiellement pour se rendre à certaines demandes qui ont été effectuées par différents groupes.

Mme la Présidente, il est intéressant de constater que notre collègue de Jonquière, en commission parlementaire, a réussi à forcer ce gouvernement, à forcer le ministre des Affaires municipales à apporter des corrections au projet de loi 88. Cependant, en tant que membres de l'Opposition, nous serions d'accord pour faire des modifications. Nous serions d'accord que le ministre des Affaires municipales apporte des modifications substantielles et en particulier, sur la question du comité de concertation agricole.

Mme la Présidente, vous savez, j'ai beaucoup de craintes face aux attitudes de ce gouvernement mais face surtout aux attitudes du ministre des Affaires municipales qui, en passant, n'a pas été vu depuis une couple d'heures ici à l'Assemblée nationale. Il est probablement en train dé se reposer. Encore là, c'est un signe concret que le ministre des Affaires municipales ne prend pas ses responsabilités. Et lorsque je parle de responsabilités, Mme la Présidente, vous me permettrez sûrement, puisqu'il a été question en commission parlementaire, dé demande qu'on ait en face de nous l'Union des municipalités régionales de comté, l'Union des municipalités du Québec ainsi que l'Union des producteurs agricoles et aussi d'autres organismes que nous voulions entendre en commission parlementaire, ce gouvernement s'est totalement refusé à cela. Cela me rappelle des souvenirs pas très lointains. L'an dernier...

La Vice-Présidente: Mme la députée de Johnson.

Mme Juneau: Je sais que c'est une excellente intervention, mais il n'y a personne pour l'écouter. Je voudrais demander le quorum, madame, s'il vous plaît.

La Vice-Présidente: On va vérifier effectivement, Mme la députée de Johnson, s'il y a quorum. Qu'on appelle les députés!

Vous pouvez continuer M. le député de Duplessis.

M. Perron: Je disais donc, Mme la

Présidente, que lorsqu'on parle de responsabilité ministérielle, ce n'est pas l'actuel ministre des Affaires municipales qui prend ses responsabilités. Il s'efface chaque fois qu'on a un dossier devant l'Assemblée nationale ou encore en commission parlementaire. J'ai un souvenir, en tant que député du comté de Duplessis qui n'est pas tellement loin, face aux attitudes de ce ministre. Qu'on se rappelle, qu'en mai 1986, le ministre des Affaires municipales avait déposé un projet de loi concernant la fermeture de la ville de Schefferville. Qu'on se rappelle, qu'en commission parlementaire, à ce moment-là, nous avions demandé, heure après heure, que le ministre des Affaires municipales entende des organismes, donc des groupes, de différents endroits du Québec, mais en particulier de personnes de Schefferville comme le comité de citoyens, comme certains membres du conseil municipal, comme certains organismes - par exemple l'Union des municipalités du Québec - qui étaient carrément et directement impliqués dans un endroit qu'on appelait Schefferville. Depuis un an et demi que la loi est adoptée, depuis un an et demi que la loi est sanctionnée, le problème des résidents et des résidentes de Schefferville n'est toujours pas réglé. Pourquoi, Mme la Présidente? Parce que le ministre des Affaires municipales n'a aucun sens des responsabilités! Cela, on l'a constaté depuis les deux dernières années, puisqu'il est ministre des Affaires municipales depuis ces deux dernières années.

On est aussi en droit, Mme la Présidente, d'obtenir certains engagements de ce gouvernement. Qu'on se rappelle ce que disait le président de l'Union des municipalités régionales de comté du Québec, M. Roger Nicolet - et cela n'a pas paru dans n'importe quelle revue, Mme la Présidente, mais bien dans La Revue Municipale de novembre 1987, c'est très récent: "Incompréhension des demandes municipales, refus d'accepter le concept d'aménagement issu de la loi 125, opposition systématique aux volontés du milieu, vision étroite des objectifs à privilégier, autant de symptômes de ces réflexes d'une fonction publique qui vit encore dans une autre ère, celle du centralisme qui répond à un concept dépassé de la société québécoise. II est temps que l'appareil étatique comprenne que les régions du Québec, par le biais de leurs instances politiques municipales, entendent dialoguer en ce qui touche leur domaine de compétence dans la dignité et le respect" a affirmé le président de l'UMRCQ. (7 h 10)

Mme la Présidente, lorsqu'on va plus loin, ce même président se posait de sérieuses questions sur différents sujets, par exemple, sur la question du zonage agricole, sur la question de l'environnement et de l'assainissement des eaux. Il disait alors: "Est-il juste, a demandé le président Nicolet, qu'une MRC ne disposant ni des ressources financières ni du pouvoir décisionnel approprié, doive encore assumer une de ces trop nombreuses responsabilités dont personne ne veut? Est-il équitable de transférer aux régions le problème de l'enfouissement sans leur donner un droit d'intervention dans une politique globale des déchets?"

Tout cela pour vous dire que ce gouvernement, et en particulier le ministre des Affaires municipales, fait en sorte que des responsabilités qui lui incombent, que des responsabilités qui doivent être gouvernementales sont retournées vers certains milieux comme l'Union des municipalités régionales de comté du Québec et l'Union des municipalités du Québec ou encore à certains comités agricoles. Là, le gouvernement se départit carrément et même substantiellement de ses responsabilités.

Lorsqu'on parle du projet de loi 88, il ne faut pas oublier non plus que, dans ce projet de loi, on écrit à l'article 22, par exemple, ce qui suit: "Cette loi est modifiée par l'insertion, après l'article 148, de ce qui suit:" Là, on parle du comité de concertation agricole. C'est une modification, à l'article 148.1: "Lorsque le conseil d'une municipalité projette d'adopter une modification au règlement de zonage ayant effet sur un territoire ou une zone visé au paragraphe 5° de l'article 5 ou au paragraphe 1° de l'article 84 et faisant partie de la zone agricole au sens de la Loi sur la protection du territoire agricole, il doit, avant de tenir la consultation prévue aux articles 124 à 130, consulter le comité de concertation agricole".

Puisqu'on parle de la formation de ce comité, j'aurais aimé que le ministre des Affaires municipales, s'il était ici, nous explique ce que veut dire, par exemple, un paragraphe de 148.2, lorsqu'on écrit: "1° au moins la moitié des membres du comité doivent être des producteurs agricoles qui résident sur le territoire de la municipalité et qui ne sont pas des membres du conseil;". J'aurais voulu connaître l'opinion de l'Union des producteurs agricoles en particulier là-dessus. J'aurais voulu connaître l'opinion, tout comme mes collègues de l'Opposition, de l'Union des municipalités régionales de comté du Québec.

Étant donné que ce gouvernement, et encore une fois le ministre des Affaires municipales, ne fait pas son travail, que le ministre des Affaires municipales n'a pas la confiance du député de Duplessis pas plus que celle des autres membres de l'Opposition, pour des raisons que j'ai énumérées tout à l'heure, il est assuré qu'en ce qui nous concerne nous allons voter contre ce projet de loi. Nous allons continuer à travailler d'arrache-pied pour que le ministre

des Affaires municipales prenne ses responsabilités et que cela soit fait d'une façon concrète et aussi honorable envers tout le monde municipal que nous avons en face de nous au Québec et envers tous les organismes qui sont touchés par le projet de loi 88. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Merci, M. le député de Duplessis. M. le député de Terrebonne, n'avez-vous pas parlé sur ce projet de loi?

Des voix: Oui, oui.

M. Blais: Oui, Mme la Présidente. Mais je ne veux pas parler sur le projet de loi, j'ai une directive à vous demander.

La Vice-Présidente: Ahi D'accord. Sur une question de règlement.

M. Blais: Mme la Présidente, j'ai deux questions de directive à vous demander. Je vais commencer par la première, si vous le permettez. Mme la Présidente, il est 7 h 13. Je voudrais vous demander: du point de vue parlementaire, à quelle heure la journée d'hier finit-elle? Je voudrais savoir à quelle heure la journée parlementaire finit, parce que nous travaillons toujours sous la date du 17 décembre et nous sommes rendus à 7 h 13, le 18 décembre?

Comme première directive, j'aimerais savoir à quelle heure se termine la journée d'hier pour un parlementaire?

La Vice-Présidente: M. le député de Terrebonne, ici à l'Assemblée nationale, je tiens à vous dire que nous ne procédons pas en fonction de journées mais en fonction de séances. Nous sommes à la séance d'hier qui se poursuit toujours. Là-dessus, je suis prête à reconnaître le prochain intervenant.

M. Blais: J'avais une deuxième question, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Ah oui! Votre deuxième question.

M. Blais: Mme la Présidente, j'aimerais que vous répondiez au premier volet de ma question avant de vous poser le deuxième. Je vous demande à quelle heure, pour un parlementaire, finit la journée d'hier?

La Vice-Présidente: Comme je vous l'ai dit, M. le député de Terrebonne, ici, nous ne travaillons pas en fonction d'heures, de journées. Nous travaillons en fonction de séances et alors, c'est la séance d'hier qui se poursuit. Là-dessus, je suis prête à reconnaître... Mais, M. le député de Terrebonne, j'ai répondu à votre question.

M. Blais: Mme la Présidente, je vous demande une question en directive. À quelle heure la journée d'hier, pour les parlementaires, s1 arrête-t-elle? Je n'ai pas eu de réponse.

Vous avez dit que nous continuons la journée d'hier. Je suis complètement d'accord avec vous. Mais ma question est la suivante: Pour un parlementaire, à quelle heure la journée d'hier finit-elle? Elle doit avoir une fin.

La Vice-Présidente: Je tiens à vous dire, M. le député de Terrebonne, que nous sommes toujours à la séance du 17 et la séance du 17 se termine à 10 heures ce matin.

M. Blais: À quelle heure, madame? La Vice-Présidente: 10 heures. M. Blais: Merci. Deuxième volet. La Vice-Présidente: M. le député.

M. Blais: Je voudrais vous demander, en deuxième volet. Nous avons droit à une seule motion d'ajournement par séance. Est-ce que cela veut dire que, d'ici à 10 heures, si nous parlons toujours sur le projet de loi 88, à 10 heures et une on pourrait avoir une autre motion d'ajournement sur le même projet de loi?

La Vice-Présidente: Si vous permettez, je vais suspendre à loisir.

(Suspension de la séance à 7 h 17)

(Reprise à 7 h 23)

La Vice-Présidente: À l'ordre, s'il vous plaît! Vous pouvez regagner vos sièges.

J'ai pris ma décision sur la question posée par le député de Terrebonne. Premièrement, M. le député de Terrebonne, je tiens à vous dire que votre question est hypothétique et, comme telle, je n'ai pas à y répondre. Cependant, la séance du 17 peut se poursuivre jusqu'à dix heures ce matin et vous pourrez, à une autre séance, reformuler votre question de règlement.

Là-dessus, je suis prête à reconnaître le prochain intervenant. Mme la députée de Johnson.

Mme Carmen Juneau

Mme Juneau: Merci beaucoup, Mme la Présidente. Je trouve un peu difficile d'intervenir sur un projet de loi comme ça quand il y a eu toutes sortes d'interventions de faites et qu'il y a eu, aussi à la fois de la part des principaux intervenants, c'est-à-dire les MRC du Québec, les 94 MRC ou

municipalités régionales de comté, une contestation publique, une contestation ouverte témoignant fort précisément au ministre des Affaires municipales leur mécontentement face au projet de loi 88.

Les MRC du Québec ont été fondées dans le but d'offrir ensemble des services à une population donnée. Donc, Mme la Présidente, je pense que depuis la formation des MRC, nous nous sommes rendu compte que ces personnes - ce sont des élus aussi, des élus municipaux - ont pris leur situation en main. Ce sont des gens respectables, respectés et ce sont aussi des gens qui ont toujours su prendre leurs responsabilités. Parce que si nous étions en face de gens des MRC qui sont des maires - il faut se le dire - ou des maires suppléants, je pense que ce sont des gens qui ont reçu la confiance de leurs électeurs; sans ça ils ne seraient pas les représentants de municipalités. Et, si ces maires qui ont reçu l'assentiment de leur population se voient en face d'un projet de loi inacceptable, c'est-à-dire un projet de loi qui ne convient pas au service des municipalités régionales de comté, je pense que ce sont les connaisseurs. Ce sont les spécialistes finalement parce que ce sont eux qui, par la suite, doivent se mettre en application des lois qui sont faites ici et qui se répercutent sur le terrain.

Si, Mme la Présidente, les 94 municipalités régionales de comté ne sont pas en accord avec ce projet de loi qui est un projet de loi fort important, il faut se le dire, et si elles ne sont pas en accord, c'est qu'il y a quelque chose.

Là-dessus, Mme la Présidente, je vais rendre un vibrant hommage à mon collègue, le député de Jonquière, critique en matière d'affaires municipales. Si le ministre responsable avait eu autant de crédibilité que mon collègue critique en matière d'affaires municipales, qui a été lui-même maire de la ville de Jonquière et longtemps président de l'UMRCQ, je ne pense pas que nous serions, à 7 heures, ce matin, encore en train de discuter sur ce projet de loi.

Vous comprendrez que, lors de la commission parlementaire pour l'étude article par article du projet de loi, il y a eu 60 % - je ne pense pas me tromper, je ne veux pas induire la Chambre en erreur; loin de moi cette vile pensée, je vais donc me donner un petit coussin - disons entre 50 % et 60 % du projet de loi 88 qui a été refait grâce et à cause du travail incessant de mon collègue, le député de Jonquière. Si tous et chacun ici, à l'intérieur de cette Chambre, surtout le gouvernement que nous avons en face et les ministres sectoriels, faisaient leur travail tout aussi bien que mon collègue de Jonquière l'a fait, je ne pense pas que 50 % à 60 % d'un projet de loi serait à refaire lorsque nous allons étudier, article par article, cedit projet de loi.

Je ne crois pas non plus, Mme la Présidente, que les principaux intervenants, c'est-à-dire les gens pour lesquels la loi doit s'appliquer, seraient tout à fait en désaccord avec ce qui est présenté ici. Je sais que je me répète, mais j'ai l'impression que si on va de l'avant et on "bulldoze" les gens la loi deviendra inopérante, étant donné que cela ne sera pas conforme aux critères pour lesquels la loi est supposée être mise de l'avant. (7 h 30)

Si les 94 municipalités régionales de comté ne sont pas en accord avec le projet de loi 88, c'est que cela brime des gens. Ce sont des élus, Mme la Présidente, tout aussi bien que nous, à une autre échelle, mais ce sont des élus et nous devons avoir le respect de ces élus. Lorsqu'on mérite la confiance, qu'on gagne une élection, c'est parce que plus de personnes que moins ont décidé de nous faire confiance, donc de nous donner un poste qui équivaut à un poste de commande. À cause de ce poste de commande que nous occupons, je pense qu'il est fort important que, chaque fois qu'on doit poser un geste, on prenne en considération ce que cela va donner sur le terrain. À qui allons-nous faire mal ou à qui allons-nous faire du bien? C'est ça la question, Mme la Présidente. Quand on remarque un projet de loi 88, qui est un projet de loi fort important, étant donné, Mme la Présidente, qu'il y a des responsabilités importantes qui seraient transférées aux municipalités régionales de comté, et l'autre volet du projet de loi qui, à mon point de vue, me touche énormément, étant donné que cela parle du zonage agricole.

Le zonage agricole dans mon comté, c'est fort important. Saviez-vous que, dans le comté de Johnson, j'ai tout près de 1500 producteurs agricoles. Cela veut dire que sur mes 35 municipalités, j'ai 31 municipalités rurales. Vous comprendrez que, lorsqu'on parle de zonage agricole dans le comté de Johnson, on parle d'une chose importante. On parle d'une chose importante, et je remarque que, dans le projet de loi 88, le ministre n'a pas voulu laisser tomber le comité de concertation. Pourquoi? Parce qu'il n'a pas voulu laisser tomber son collègue de l'Agriculture. Il voulait lui sauver la face. C'est ça qui est arrivé, parce qu'avec les amendements de mon collègue, le député de Jonquière, le comité dont on parle, c'est un comité qui n'aura aucun effet. Il n'a plus de force, il n'est plus valable, il est inopérant, à cause des amendements qui ont été faits au projet de loi 88.

Mais à cause de son collègue des Affaires municipales, qui s'était étiré le cou une fois de plus, il a laissé le comité de concertation. Mais un comité de concertation qui ne concertera rien, ça ne vaut pas grand-chose. Mme la Présidente, ce projet de

loi a été bonifié, pas à cause du ministre des Affaires municipales. Il dort encore, lui, et il dort sur la "job" et sur la "switch" souvent. C'est cela qu'il fait, pendant qu'on est obligé de faire sa "job" de ce côté-ci. Mais, il n'y a pas juste dans ce projet de loi que le ministre des Affaires municipales dort sur la "job". J'ai ici, Mme la Présidente, une espèce de petite brochure qui a été faite. Et, dans le monde de l'habitation, est-ce que le programme PARCQ a été opérant? Non. Il était tellement mal organisé, qu'on n'a pas été capable de s'en servir.

Dans l'habitation, les personnes se sont élevées contre le ministre Bourbeau. Partout où il passe, il sème la pagaille. Est-ce parce qu'il fait bien son travail? Je ne pense pas, Mme la Présidente. Si un ministre est aussi irresponsable que lui, il faut absolument que l'Opposition soit de plus en plus vigilante pour l'empêcher de faire des bêtises. C'est ça, Mme la Présidente. Donc, notre travail, qu'il soit 1 heure, 2 heures, 3 heures, 5 heures du matin, nous serons là. Nous serons aux aguets. Nous serons vigilants pour empêcher que les ministres sectoriels fassent des bêtises. Je vous remercie, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Je vous remercie, Mme la députée de Johnson. M. le député de Laviolette.

M. Jean-Pierre Jolivet

M. Jolivet: Mme la Présidente, je voudrais, avant de commencer mon intervention, faire une demande de directive. J'aimerais bien que vous écoutiez ma demande de directive. En vertu du règlement, à l'article 185, on dit ceci: "le député qui désire proposer que l'Assemblée se prononce sur une question le fait par motion." À l'article 186, on dit: "Toute motion adoptée devient soit un ordre, soit une résolution de l'Assemblée: un ordre quand l'Assemblée enjoint à une commission, à un député ou à toute autre personne de faire quelque chose;" toute motion est, à ce moment-là, en vertu de l'article 187, soit de fond, soit de forme. Alors, j'ai l'intention de vous présenter une motion, Mme la Présidente, qui demandera à l'Assemblée nationale du Québec d'enjoindre le ministre des Affaires municipales d'être présent ici maintenant et de prendre les dispositions nécessaires pour qu'on l'avertisse et qu'il vienne ici, et qu'en conséquence le ministre des Affaires municipales vienne entendre les derniers intervenants du Parti québécois parce qu'il aura à utiliser son droit de réplique.

Il est important que, après avoir quitté vers les petites heures, il puisse être ici pour au moins nous donner la réplique à tout ce qu'on a dit. Il me semble que c'est tout à fait normal et j'aimerais connaître votre opinion et si cela vous demande du temps de réflexion, je suis prêt à attendre, Mme la Présidente, que vous me le fassiez savoir.

La Vice-Présidente: M. le député de Laviolette, nous en sommes présentement à la prise en considération du rapport concernant le projet de loi 88 et comme telle votre motion est irrecevable. Le débat doit porter là-dessus et c'est là-dessus que je dois vous entendre. M. le député de Laviolette, je suis prête à vous entendre, mais seulement sur la prise en considération du rapport du projet de loi 88.

M. Jolivet: Est-ce que vous me permettez, Mme la Présidente, de vous poser une autre question? Je suis en commission parlementaire et la motion qui nous a été donnée à l'Assemblée nationale concerne l'étude détaillée du projet de loi article par article d'un projet Y. À ce moment-là, je suis en commission parlementaire; les règles de l'Assemblée nationale s'appliquant en commission parlementaire, je peux faire une motion et demander qu'une personne vienne. Vous avez cela continuellement, Mme la Présidente. Je sais que vous ne présidez pas les commissions parlementaires, ce sont des présidents de séance ou des présidents des commissions parlementaires prévus par notre règlement et tout député peut présenter une motion dans laquelle il indique: Je veux entendre telle personne, et même demander qu'un ministre soit présent. Or, je ne vois pas comment il se fait qu'en commission parlementaire, les règles de l'Assemblée nationale s'appliquant, on aurait des règles différentes de celles l'Assemblée nationale.

La Vice-Présidente: M. le député de Laviolette, vous savez qu'ici nous sommes à l'Assemblée nationale; nous ne sommes pas en commission et comme telle votre question est pour le moins hypothétique et là-dessus je suis prête à vous reconnaître, mais sur la prise en considération du rapport de la commission qui a étudié le projet de loi 88. Là-dessus, M. le député de Laviolette, je suis prête à vous reconnaître.

M. Jolivet: Mme la Présidente, je fais une motion formelle pour que le ministre des Affaires municipales soit présent au moment où nous allons entendre les derniers intervenants du Parti québécois pour qu'il puisse faire une réplique ici à l'Assemblée nationale au regard de tout ce qui a été dit depuis maintenant près de dix heures. Il me semble que la normalité des choses veut que le ministre des Affaires municipales soit ici pour répliquer, sinon on va comprendre qu'il n'a rien à dire, comme de coutume.

La Vice-Présidente: En vertu de

l'article 188, M. le député de Laviolette, je vous indiquerais que le député qui désire présenter une motion doit donner un préavis. Or, nous n'avons pas de préavis. Donc, vous n'avez qu'à l'inscrire au feuilleton et je suis prête à vous reconnaître là-dessus, mais je suis prête à vous reconnaître sur la prise en considération du rapport du projet de loi 88.

M. Jolivet: Question de directive, Mme la Présidente. J'aimerais savoir, alors que nous sommes à la fin du débat, semblerait-il, puisque personne de l'autre côté ne veut intervenir, comment je dois m'y prendre, parce que si, à la fin de mon intervention vous vous apercevez que personne d'autre ne veut intervenir, vous allez considérer que le ministre a utilisé son droit de réplique. Comment puis-je demander au ministre des Affaires municipales, qui normalement devrait être ici pour entendre ce que l'on a à dire et ce qu'on a encore à dire, de répliquer à tous mes collègues et à moi sur ce qu'on a dit? Il me semble que la logique veut que le ministre des Affaires municipales prenne ses responsabilités et s'il n'est pas capable de les prendre, que l'Assemblée nationale le somme de venir ici.

La Vice-Présidente: M. le député de Laviolette, je tiens à vous dire que c'est le droit du ministre d'utiliser ou non son droit de réplique et là-dessus nous ne pouvons intervenir. (7 h 40)

M. le député de Taillon.

M. Jolivet: Non.

La Vice-Présidente: Non? M. le député Laviolette.

M. Jolivet: Mme la Présidente, je trouve malheureux que l'ensemble de ce débat qui a eu lieu au cours de la soirée et de la nuit ait eu pour effet de faire en sorte... Mme la Présidente, je peux m'arrêter et cela ne comptera pas sur mon temps si on me dérange.

Ce que j'étais en train de dire, Mme la Présidente, c'est que nous sommes à la fin d'une discussion où le ministre des Affaires municipales n'a été aucunement présent et, pour nous, ce n'est pas nouveau. Il n'est pas présent. Il est, quand il est là, absent d'esprit dans certaines circonstances, puisqu'il n'écoute personne.

Malgré tout cela, le député de Jonquière, notre collègue, qui a fait un travail exceptionnel en est arrivé à faire en sorte que les gens de l'Union des municipalités du Québec, les gens de l'Union des municipalités régionales de comté du Québec, les gens de l'UPA par d'autres intermédiaires, puisqu'on a des contacts et je suis, en termes de responsabilité, à ce niveau...

Mme la Présidente, est-ce que je peux avoir le silence pour travailler ici?

La Vice-Présidente: S'il vous plaît, à l'ordre! Je vous demanderais, si vous avez des...

Des voix: ...

La Vice-Présidente: À l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de Laviolette, vous pouvez continuer.

M. Jolivet: Mme la Présidente, j'ai entendu des choses, encore, en cette Chambre. Vous n'étiez pas présente, mais je voudrais bien que le député de Saguenay évite les menaces qu'il est encore en train de me faire, de fermer les portes.

M. Maltais: Une question de règlement.

La Vice-Présidente: Une question de règlement, M. le député de Saguenay.

M. Maltais: Je pense que le député de Laviolette prend ses rêves pour des réalités. Il y a quand même une limite! Je suis bien assis à mon pupitre; je l'écoute religieusement. S'il peut arrêter d'interrompre cette Chambre pour faire son discours, on va pouvoir l'applaudir. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Cela n'était pas une question de règlement. Là-dessus, M. le député de Laviolette, je vous reconnais.

M. Jolivet: Merci, Mme la Présidente, de me reconnaître ce droit. Mais je l'ai entendu et j'ai des oreilles pour entendre. Ce n'est pas du joli.

Une voix: II n'y a pas de danger!

M. Jolivet: Ce n'est pas du joli quand même. Mme la Présidente, je vous le dis! Mme la Présidente, j'ai l'intention d'intervenir et je vais prendre tout mon temps. Je vais m'asseoir et vous me direz quand je commencerai. Il m'en reste dix.

La Vice-Présidente: S'il vous plaît! Je comprends...

M. Jolivet: Vous me direz à quelle heure je dois commencer.

La Vice-Présidente: Je comprends que vous avez eu une dure séance, mais je demanderais la collaboration de la Chambre afin que nous poursuivions nos travaux dans le meilleur décorum.

M. le chef de l'Opposition.

M. Chevrette: Mme la Présidente, vous demandez la collaboration de la Chambre et je ferai remarquer que, de ce côté-ci, c'est notre collègue qui parle et qu'il n'y a aucun député qui parle, aucun député ne l'interrompt de ce côté-ci de la Chambre. J'espère, quand vous vous lèverez, Mme la Présidente, que vous puissiez pointer du doigt les coupables et non pas ceux qui ne font rien et qui ne demandent pas mieux que de continuer le débat. Vous demandez la collaboration des députés qui ne sont pas à l'ordre, qui ne respectent pas le droit de parole de mon collègue et, cela, c'est la partie ministérielle.

Je veux bien que la présidence se lève et distribue les reproches, mais je n'accepte pas qu'on soit impliqué dans un reproche quand on ne fait rien du tout.

La Vice-Présidente: Cela était une mise au point, M. le chef de l'Opposition. Je vous ai entendu là-dessus et je suis prête à reconnaître le député de Laviolette. M. le député de Laviolette.

M. Jolivet: Merci, Mme la Présidente. Ce que j'étais en train de dire, au moment où on m'a interrompu, c'est ceci: C'est que le ministre des Affaires municipales n'a pas été présent dans l'ensemble de ce débat. Il n'est pas ici, encore une fois. J'ai dit que ce n'était pas nouveau.

Nous avons eu l'occasion de travailler en commission parlementaire. Mon collègue, le député de Jonquière, a réussi, grâce à ses interventions et à tous les collègues qui ont travaillé avec lui à faire en sorte que des changements majeurs soient apportés au projet de loi qui, au départ, ne valait pas la peine d'être présenté.

Ce n'est pas la première fois que cela arrive et il me semble qu'il serait logique que dans un contexte comme celui-là le ministre vienne écouter ce qu'on a à dire, puisque notre collègue a réussi, avec l'Union des municipalités régionales de comté, avec l'Union des municipalités du Québec, par mon intermédiaire et l'intermédiaire de gens de mon bureau et du bureau du chef de l'Opposition... Nous avons parlé avec des gens de l'UPA sur des articles qui les concernent. Je dois vous dire, Mme la Présidente, que nous avons fait un travail colossal avec la petite équipe que nous avons, mais une équipe travaillante. Il me semble que ce n'est pas sorcier de reconnaître que n'eût été ce travail, ce projet de loi ne valait même pas la peine d'être adopté par cette Assemblée nationale.

Vous comprendrez très bien cependant que les gens au pouvoir détenant la majorité feront en sorte que le projet de loi soit quand même adopté. C'est leur droit. Nous les aurons mis en garde contre les difficultés que cela comporte. Nous leur aurons dit qu'il y a eu malheureusement et qu'il y aura malheureusement des gens qui vont subir les contrecoups de ce projet de loi.

Je donnais un exemple lors du discours d'adoption du principe, à savoir que des municpalités dans mon comté m'ont justement averti des dangers de l'adoption de ce projet de loi. Je disais et je le répète, parce que les gens de Grand-Mère ont saisi le message, qu'il y a dans notre région, avec Shawinigan, Shawinigan-Sud, Saint-Georges-de-Champlain et Grand-Mère, un esprit de plus en plus régional. Cet esprit régional a été créé par des gens de bonne foi. Les gens ont dit: On se regroupe dans une MRC en sachant qu'il y a des difficultés. Pour compenser les difficultés entre le secteur urbain et le secteur rural, ils ont décidé de nommer des personnes à des postes de façon à ce qu'une année ce soit un maire venant d'une municipalité urbaine qui soit le préfet et, cette même année - les deux années qui sont sujettes en vertu du règlement - le sous-préfet viendrait du milieu rural. Au cours des deux années suivantes, ce serait l'inverse. Le préfet viendrait du milieu rural et le sous-préfet viendrait du milieu urbain. Tout cela a amené une pensée régionale.

Vous imaginez si le projet de loi était adopté comme tel et si on obligeait les municipalités, sur des décisions qui leur appartiennent, à les prendre elles-mêmes sans être sujettes à des obligations vis-à-vis des autres municipalités... L'exemple que je donnais, à deux tiers des voix, c'était le kiosque touristique de la région de la Mauricie, dans le centre de la Mauricie. S'il était décidé, comme on veut le faire présentement, à la majorité des deux tiers, la ville de Grand-Mère serait pénalisée parce qu'elle aurait deux paiements à faire, un paiement pour la ville de Grand-Mère, parce qu'elle a son propre kiosque touristique, et un autre paiement pour le régional. Les représentants de la ville de Grand-Mère ont dit: Nous sommes prêts à en payer, mais les mêmes quotes-parts, au total, les deux ensemble, tout en assurant la capacité pour l'ensemble des deux kiosques touristiques d'avoir une pensée régionale. La preuve, c'est que la Chambre de commerce de Grand-Mère a proposé un Salon de l'entreprise et de l'entrepreneurship. Les gens de Shawinigan ont trouvé l'idée bonne. Les représentants de la ville de Grand-Mère ont dit: D'accord; associons-nous. Et les deux chambres de commerce, celles de Grand-Mère et de Shawinigan—Shawinigan-Sud, ont mis au point une organisation intéressante.

Est-ce que, par l'intermédiaire d'un projet de loi comme celui-là, on va venir semer la pagaille? Oui, je le pense, Mme la Présidente, et c'est cela que nous disons au ministre. Mais le ministre n'est même pas ici pour nous entendre, pour nous écouter. Comment voulez-vous qu'il corrige cela?

C'est cela le problème. C'est cela le désastre. C'est un ministre qui n'est pas là. Je n'oserais pas employer d'autres qualificatifs, mais je vous dirai qu'il nous donne l'impression, comme le disait ma collègue, de dormir sur la "switch", de dormir sur le travail, de telle sorte qu'il ne se fait pas. C'est ce que nous voulions lui dire, Mme la Présidente. Notre collègue, le député de Jonquière, a dit et ses paroles ont été reprises quasiment mot à mot par le maire de la ville de Québec, M. Pelletier, que c'est un drôle de ministre, c'est un notaire habitué à signer au bas d'une lettre, au bas d'une entente, après que les parties se soient entendues, mais il n'est pas capable de prendre ses responsabilités comme ministre pour que les gens s'entendent. Au contraire, il fait même en sorte que les gens se disputent. Depuis deux ans, mon collègue, lui qui a l'expérience comme maire, lui qui a été responsable de l'Union des municipalités du Québec, répète que c'est un ministre qui, en fait, n'est pas un ministre. C'est une personne qui ne prend pas ses responsabilités. Il met le feu partout. Il enrage le monde de telle sorte que, ce matin, à environ huit heures, il n'a même pas été capable de rester ici pour écouter ce que nous avions à dire. (7 h 50)

Vous pensez qu'après, tout va aller bien comme dans le meilleur des mondes, madame la marquise. Je ne le pense pas, Mme la Présidente. J'essaie de le répéter et je vais le répéter jusqu'au bout. Je vais apppuyer mon collègue de Jonquière qui - il l'a dit -a vu maintenant ses efforts récompensés cette semaine par le maire, M. Pelletier, qui, tout le monde sait très bien, n'est pas péquiste. Mais il avait des choses à dire, il en avait ras-le-bol! Il en avait par-dessus la tête de voir ce que le ministre a fait jusqu'à maintenant. En ce sens, Mme la Présidente, on ne peut accepter de cautionner des gestes comme ceux-là! On ne peut pas se permettre, comme Opposition, de ne pas le dire. Nous avions le goût de le dire, nous l'avons dit! Mme la Présidente, nous allons le dire jusqu'à la fin en appuyant notre collègue de Jonquière plutôt que le ministre.

Des voix: Bravo!

La Vice-Présidente: Merci, M. le député de Laviolette. M. le député de Taillon.

M. Claude Filion

M. Filion: Je vous remercie, Mme la Présidente. Je pense qu'il n'est pas surprenant qu'on travaille à cette heure de la nuit ou du matin sur les projets de loi du ministre des Affaires municipales. Ce que l'Opposition essaie de faire cette nuit, ce matin, c'est de faire le travail que le ministre des Affaires municipales n'a jamais fait. Ce n'est pas compliqué. Là, cela donne des projets de loi qui arrivent à l'Assemblée nationale, qui sont mal foutus, mal ficelés, mal ligotés, on en aura encore un autre exemple peut-être aujourd'hui, j'espère, ou en fin de semaine ou la semaine prochaine quand on parlera du projet de loi sur la commission des relations du travail du ministre du Travail, sa tentative de projet de loi qu'on devrait dire, l'une des nombreuses tentatives du ministre de faire une loi. C'est la même chose pour le ministre des Affaires municipales pour le projet de loi 88. On ne peut pas, dans le domaine municipal, travailler en fonction des intérêts du cabinet du ministre ou en fonction de l'agenda du cabinet du ministre. On a beau dire que les municipalités sont les créatures du gouvernement, mais ce sont des créatures qui ont atteint une certaine maturité et qu'on ne peut pas traiter du revers de la main, comme si c'étaient des pantins au service du gouvernement. Lorsque l'Union des municipalités régionales de comté du Québec stigmatise le comportement des ministères libéraux, notamment face au comportement centralisateur des fonctionnaires, cela traduit une réalité des municipalités qui sont insatisfaites du type de gouvernement que nous sert le ministre des Affaires municipales dans l'ensemble de ses dossiers. Le projet de loi 88 est uniquement symptomatique à ce moment-là d'une administration déficiente, d'une conception déficiente du rôle du ministre des Affaires municipales.

Mme la Présidente, le projet de loi 88 avait pour but d'apporter diverses modifications à la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, à la Loi sur les cités et villes et au Code municipal. Ces modifications ont trait à l'urbanisme ainsi qu'au fonctionnement et aux compétences des municipalités régionales de comté. Je viens de dire, il y a quelques minutes, ce que l'Union des municipalités régionales de comté pense du projet de loi 88. Ainsi, ce projet de loi prévoit que la municipalité régionale de comté pourra, à une forte majorité de son conseil, acquérir compétence sur un service municipal à l'égard de toutes les municipalités de son territoire. Elle pourra aussi, de la même façon, accepter la délégation d'un pouvoir par le gouvernement. La municipalité soumise à cette compétence et la municipalité régionale de comté pourront toutefois s'y soustraire. Je pense que cela vaut la peine de continuer les notes explicatives.

Le projet contenait - notez bien le temps des verbes parce qu'il s'est passé des choses entre le moment où le ministre l'a déposé et le projet de loi tel qu'il est rendu maintenant, on reviendra aux choses importantes - également des dispositions qui

permettraient de réviser, à l'initiative de la municipalité régionale de comté, le mode de représentation et de prise de décision du conseil de celle-ci. Il prévoit aussi un allégement de la procédure d'entrée en vigueur des schémas d'aménagement et un resserrement de la cohésion des dispositions relatives à la conformité des règlements d'urbanisme au plan d'urbanisme de la municipalité.

Enfin, il permettrait aux producteurs agricoles de se prononcer, par l'intermédiaire d'un comité de concertation devenu inopérant, sur certaines modifications au zonage dans une zone agricole. Savez-vous ce qui s'est passé avec le projet de loi 88 qui a été présenté? Est-ce que cela a été suivi, Mme la Présidente, par les parlementaires qui nous restent, ce matin? Ce n'est pas compliqué, n'eût été du travail du député de Jonquière, il n'en resterait plus rien. Les gens n'en voulaient pas, personne n'en voulait. Le député de Jonquière a réussi à l'améliorer, le bonifier sur plusieurs aspects. Malheureusement, on ne pouvait pas, même en apportant les meilleurs amendements du monde, changer le fond de certains principes qui avaient été mal conçus par le ministre des Affaires municipales. Encore une fois, c'est le style de gouvernement qu'on a qui s'imagine que la vérité vient des néons dans les officines ministérielles. Dans un domaine aussi névralgique que les affaires municipales, il faut tenir compte de nos partenaires.

Le ministre des Affaires municipales a été incapable, pendant deux ans, sur le plan politique d'établir sa crédibilité auprès des municipalités, auprès des municipalités régionales de comté. Cela donne le type de problèmes qu'on a vus, cette semaine, autour de la charte de la ville de Québec. Cela donne le type de problèmes qu'on a vus autour du projet de loi 88. Les gens n'en veulent pas. Evidemment, je ne les blâme pas. La Presse - Montréal, 26 octobre 1987. Il faut le faire - Bourbeau entend renforcer les MRC et offrir le droit de retrait aux municipalités. On renforce les MRC mais on donne le droit de retrait aux municipalités. Une belle opération de presse et de relations publiques, peut-être mais les municipalités, les MRC, les parlementaires de l'Opposition ne sont pas dupes des communiqués de presse du ministre des Affaires municipales. Il entend - imaginez-vous - renforcer les MRC mais offrir le droit de retrait aux municipalités. D'ailleurs, je cite les propos du ministre, lui-même, à ce moment-là. Il disait: À partir de maintenant les municipalités locales décideront de ce qu'elles confient aux MRC, a expliqué le ministre Bourbeau, et il y a quand même un droit de retrait pour les municipalités. Celles-ci ne seront donc plus obligées de payer pour les services qu'elles refuseront -il fallait la faire, celle-là - de recevoir des

MRC.

On dirait que le projet de loi 88 est le travail mal fait d'un étudiant de première année en administration publique. À la limite - c'est toujours le ministre - certaines MRC pourraient avoir comme seule responsabilité le schéma d'aménagement et son suivi, précise en outre M. Bourbeau. Les schémas sont, en bonne partie, réalisés par plusieurs MRC, sauf erreur. Bref, on a tenté de jeter de la poudre aux yeux des municipalités et des municipalités régionales de comté. On a oublié de faire le travail de base qui consiste à garder un lien, non pas seulement un lien quand on a un projet de loi, non seulement un lien quand on veut passer une commission, mais, un lien étroit entre les représentants de la population, les dirigeants du gouvernement et les partenaires. Sinon, on paie un prix. Le ministre du Travail et ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu en sait quelque chose. On paie un prix quand on fait défaut de garder un lien étroit avec les organismes qui, eux, vivent chaque jour les réalités des projets de loi qu'on adopte ici. (8 heures)

Les parlementaires en face de nous s'imaginent qu'une fois qu'on a adopté une loi, elle est bonne. Une fois qu'on a adopté une loi, on s'en va sur le terrain pour qu'elle soit vécue, notamment par les municipalités dans ce cas, et par les différents intervenants. C'est pour cela que le ministre des Affaires municipales, député de Laporte, devrait prendre exemple sur le député de Jonquière qui, lui, a gardé ces liens, qui lui connaît l'importance de cette relation étroite qui doit exister entre le gouvernement et les intervenants. C'est comme si on faisait une politique familiale sans consulter les gens. On arriverait avec quoi? Rien. C'est un peu ce qui est arrivé, me chuchote avec raison M. le chef de l'Opposition, dans le cas de la politique familiale. Est-ce qu'on a peur, de l'autre côté, de sortir un petit peu des tours d'ivoire et d'aller voir les gens, de les consulter et de discuter? C'est eux qui vont administrer cela. Ce sont les MRC, ce sont les municipalités régionales de comté et les municipalités. On a peur d'aller à l'UMQ autrement que quand c'est le congrès annuel pour tenter de leur jeter de la poudre aux yeux.

Est-ce qu'on ne devrait pas garder un contact étroit qui permettrait aux parlementaires de passer leurs nuits où ils devraient les passer et de passer leurs journées là où ils devraient les passer de façon efficace? Mais non. On paie, cette nuit et ce matin, avec le projet de loi 88, pour la mauvaise administration du ministre des Affaires municipales. Je vous remercie, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Merci, M. le député

de Taillon. M. le député de Terrebonne.

Motion d'urgence proposant que l'Assemblée étudie les moyens

à prendre pour que les hôpitaux

mettent plus de lits à la disposition des enfants malades

M. Yves Blais

M. Blais: Mme la Présidente, j'aurais une motion d'urgence à présenter à cette Chambre.

Des voix: Ah! Ah! Ah!

M. Blais: Nous sommes informés par les responsables des soins à donner aux enfants malades du Québec que des enfants ne peuvent pas être hospitalisés, malgré des besoins d'hospitalisation pressants et la fermeture de plus de 500 lits alloués aux enfants dans nos hôpitaux au Québec. Je propose la motion d'urgence suivante: "Que l'Assemblée nationale étudie immédiatement les moyens à prendre pour que les enfants malades du Québec aient des lits disponibles en nombre suffisant pour répondre aux besoins."

La Vice-Présidente: M. le député de Terrebonne, en vertu de l'article 188, vous ne pouvez, à ce stade-ci, présenter une motion d'urgence. M. le député de Terrebonne, est-ce une autre question de règlement?

M. Blais: Non, c'est la même, Mme la Présidente. J'aimerais que vous m'expliquiez la non-recevabilité ou la recevabilité de cette motion, parce que quand un besoin urgent se fait sentir, Mme la Présidente... Laissez-moi quinze secondes, si vous me permettez, vous seriez gentille. Si jamais, par exemple, il tombait une bombe atomique sur Montréal à 8 h 5 et qu'on proposait une motion d'urgence, vous nous diriez que l'urgence doit se discuter à 15 heures cet après-midi. Il y a donc un rapport qui nous est parvenu comme quoi des enfants malades ne trouvaient pas de lits disponibles pour se faire soigner. Ne choisissant pas l'heure pour que nos enfants soient malades, c'est à 8 heures. Je demande donc quelle raison vous avez à me donner pour que cette motion ne soit pas recevable.

La Vice-Présidente: Là-dessus, M. le député de Terrebonne, je vous réfère à l'article 188 de notre règlement qui dit que "le député qui désire présenter une motion doit en donner un préavis". Or, il faut que ce préavis apparaisse au feuilleton. Là-dessus, je ne peux recevoir votre motion. En vertu de l'article 188, une motion d'urgence doit figurer au feuilleton et il doit y avoir préavis. M. le leader de l'Opposition.

M. Gendron: Mme la Présidente, c'est on ne peut plus clair que c'est au moment où on est saisi d'une information qu'il y a urgence. En conséquence, je prétends que vos arguments ne sont pas recevables. Mon collègue, le député de Terrebonne, indique qu'il a une motion d'urgence à la suite d'informations qui nous ont été transmises. En conséquence, je pense que cette motion est débattable dès qu'on est saisis d'une information aussi importante, ayant autant de conséquence pour l'avenir du Québec, surtout avec les problèmes de la politique familiale qu'on n'a pas.

Une voix: Surtout les jeunes...

M. Chevrette: II n'y a pas besoin d'avis au feuilleton pour cela.

M. Gendron: Depuis quand, Mme la Présidente, pour présenter une motion d'urgence, faut-il présenter un avis au feuilleton? Par définition, on détruirait l'argument même de l'urgence. Je n'ai jamais présenté une motion d'urgence avec un avis au feuilleton. Par définition, une motion d'urgence, c'est au moment même où le Parlement décide de saisir les parlementaires d'une question importante. Il n'y a aucune référence au feuilleton.

La Vice-Présidente: M. le leader de l'Opposition, présentement, je tiens à vous dire que les débats d'urgence se débattent aux affaires prioritaires, soit aux affaires du jour. Nous sommes présentement, en vertu de notre règlement, rendus aux affaires inscrites au feuilleton c'est-à-dire à l'article 96. D'autant plus que les débats d'urgence, en vertu de l'article 89, le député doit au plus tard une heure avant la période des affaires courantes remettre un écrit de sa demande au président. Là-dessus, on n'a rien reçu, donc votre motion est irrecevable.

M. Gendron: Un instant, Mme la Présidente! Êtes-vous en train de nous dire qu'on ne serait pas rendu aux affaires du jour, à 8 h 5?

Des voix: Ha! Ha! Ha!

M. Gendron: II me semble que c'est on ne peut plus clair qu'à 8 h 5 du matin, après avoir siégé toute la nuit, on est sûrement rendu aux affaires du jour. On vient de commencer une nouvelle journée.

Des voix: Bravo!

La Vice-Présidente: Ce n'est pas la même définition des affaires du jour que celle de notre règlement. Oui, M. le député

de Laviolette.

M. Jolivet: Allez-y!

M. Sirros: Mme la Présidente, je voulais simplement demander...

M. Blais: Vous avez certainement une jurisprudence qui fait exception à une heure fixe pour qu'une urgence arrive. J'en ai au moins une. Lorsque la guerre de 1939-1945 a été déclarée, le Parlement britannique était en pleine session - Mme la Présidente, j'aimerais m'expliquer pendant 15 secondes -M. Churchill a fait une motion d'urgence en plein avant-midi.

La Vice-Présidente: Là-dessus, M. le député de Terrebonne, je vous renvoie à ma décision antérieure. Je ne peux reconnaître votre question de règlement.

M. Jolivet: Mme la Présidente...

La Vice-Présidente: M. le député de Laviolette.

M. Jolivet: ...question de règlement. Vous m'avez dit tout à l'heure que je ne pouvais pas présenter de motion, vous fiant sur l'article 188. Je vous ai dit que, malheureusement, j'ai été obligé d'accepter votre décision. Je vais vous rappeler que, dans les règlements, à la page 26, aux motions sans préavis, à l'article 84, on dit ceci: "Les motions touchant les travaux de l'Assemblée et ne requérant pas de préavis sont prévues par la loi et le présent règlement. "Malgré l'article 188, tout député peut présenter sans préavis une motion de fond." C'est ce que je croyais avoir le droit de faire tout à l'heure. Alors, je me prévaux de ce droit. D'abord, vous devez entendre ma proposition, pour voir si elle est recevable ou pas. Ma proposition est bien simple: Je propose que l'Assemblée nationale du Québec demande au ministre des Affaires municipales d'être ici présent pour venir entendre les derniers discours qui restent à faire du côté du Parti québécois et qu'il puisse enfin répliquer à notre...

La Vice-Présidente: À l'ordre, s'il vous plaît! Nous sommes présentement aux affaires du jour et la motion dont vous faites mention, M. le député de Laviolette, doit être présentée aux affaires courantes. Or, elle est comme telle irrecevable. Là-dessus, je suis prête à reconnaître... M. le député de Laviolette.

M. Jolivet: Je m'excuse, Mme la Présidente. Je voudrais savoir... Je lis bien l'article 84. J'aimerais bien comprendre, c'est une question de directive. Vous me dites que ma motion sans préavis doit arriver aux affaires du jour. J'ai eu l'occasion nombre de fois depuis onze ans de voir le leader du gouvernement ou d'autres personnes faire des motions sans préavis. Je vous pose la question ou la directive suivante... Je ne conteste pas, je pose une question de directive. Non, non, je m'adresse à madame.

La Vice-Présidente: S'il vous plaît!

M. Jolivet: Ma question de directive, Mme la Présidente: Je crois comprendre qu'il n'est aucunement question dans le règlement de faire quelque motion sans préavis que ce soit et qu'il faut le faire à des moments précis dans la journée. (8 h 10)

La Vice-Présidente: M. le député de Laviolette, je tiens à vous référer également à l'article 53 de notre règlement où il est spécifié à quel moment on peut faire des motions sans préavis. Les motions sans préavis, en vertu de l'article 53, se font aux affaires courantes. Or, présentement, nous sommes aux affaires du jour. Donc, c'est pour cela, M. le député de Laviolette, que je dis que votre question de règlement est irrecevable. Là-dessus, je suis prête à reconnaître le prochain intervenant sur la prise en considération du rapport qui a procédé à l'étude détaillée du projet de loi 88. M. le député de Dubuc.

Reprise du débat sur la prise

en considération du rapport

de la commission qui a

étudié le projet de loi

M. Hubert Desbiens

M. Desbiens: Mme la Présidente, j'avais espéré entendre non pas les applaudissements de l'autre côté, mais l'expression de députés du parti ministériel sur un projet de loi d'une telle importance. À 8 h 10 le matin, après avoir siégé toute la nuit, le gouvernement oblige l'Opposition, dans une tentative d'écraser la résistance, de nous "bulldozer", comme on dit... Ce projet de loi 88 est d'une importance extrême quand on sait que c'est le projet de loi modifiant la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, la Loi sur les cités et villes et le Code municipal du Québec. Ce projet de loi touche les fondements mêmes de notre vie municipale. Je vois le ministre délégué à la Famille, à la Santé et aux Services sociaux qui trouve cela drôle ce matin quand on discute d'un projet d'une telle importance. Je comprends que pour lui la démocratie n'a pas grande importance et n'a pas grand prix. Les notes explicatives du projet de loi 88, d'ailleurs, nous indiquent, nous éclairent sur les intentions du ministre des Affaires municipales à cet égard. Il nous dit très bien

qu'il a pour objet d'apporter des...

La Vice-Présidente: J'ai une question de règlement. Effectivement, je vais constater s'il y a quorum. Qu'on appelle les députés! Nous avons donc quorum. Nous pouvons poursuivre, M. le député de Dubuc.

M. Desbiens: Merci, Mme la Présidente. Nous voyons l'intérêt que les membres du gouvernement portent à la démocratie. On nous oblige à discuter d'un projet de loi pendant toute une nuit et on ne se rend même pas à l'Assemblée nationale pour faire valoir son point de vue ou écouter les ultimes représentations fort pertinentes que les membres de l'Opposition, se faisant la voix des MRC, de l'UPA et des municipalités du Québec, font entendre sur ce projet de loi 88. On sait à quel point l'Opposition, particulièrement notre collègue, le député de Jonquière, le maire des maires, comme on l'appellait, à l'époque où il était président de l'Union des municipalités du Québec, comment et avec quelle ardeur, avec quel soin il a étudié en commission parlementaire, ici, à l'Assemblée nationale, le projet de loi 88, lequel a permis tout de même d'apporter des modifications importantes et qui vont sauver au moins l'essentiel. Je me souviens très bien que l'Union des municipalités régionales de comté du Québec a d'une façon très évidente souhaité pouvoir exprimer son opinion. Je sais aussi que, lorsque l'étude de ce projet de loi a commencé, l'Opposition a essayé de faire entendre la voix de l'Union des municipalités du Québec, laquelle a déjà dans son dernier congrès exprimé des réserves fort importantes sur le comportement du ministre actuel et du gouvernement actuel concernant les municipalités du Québec. M. Roger Nicolet, son président, a même dénoncé à un moment donné le comportement centralisateur de certains ministères ou ministres sectoriels.

Je rappelle que le projet de loi a pour objectif, selon les notes explicatives que j'avais commencé à lire quand j'ai été interrompu, d'apporter des modifications à la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, à la Loi sur les cités et villes et au Code municipal. Quand on touche à l'urbanisme, évidemment, on touche, comme je le disais au départ, au coeur même de la vie des citoyens et des citoyennes des municipalités du Québec. Lorsque le gouvernement précédent, soit le gouvernement du Parti québécois, a décidé de voter ou d'adopter la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, la loi 125, cela a marqué une époque importante, je crois, de l'administration au Québec. La loi 125 a été le message très direct à la population du Québec qu'à partir de ce moment-là le gouvernement du Québec cesserait dans certains domaines, au fur et à mesure que la situation évoluerait, d'être le grand meneur de jeu, le grand décideur de tout et de rien, et qu'il reporterait dans les milieux de vie eux-mêmes les décisions qu'il était beaucoup plus réaliste de prendre à l'égard de ces milieux de vie. Donc, c'est la forme de gouvernement qui est le plus près d'eux et qui leur permet justement de s'exprimer; parce qu'ils les rencontrent quotidiennement, parce qu'ils vivent les situations au jour le jour, ces milieux de vie sont gouvernés d'une façon plus proche par les municipalités. C'est le message que le gouvernement a donc décidé d'envoyer à cette époque par la loi 125. C'était un message de décentralisation. Il est important, comme le dit l'Union des municipalités du Québec et l'Union des municipalités régionales de comté du Québec, d'éviter de changer les modalités voulues par la loi 125.

Quand le président de l'Union des municipalités régionales de comté dit que ce gouvernement a une incompréhension totale des demandes municipales, qu'il refuse d'accepter le concept d'aménagement issu de la loi 125, qu'il a une opposition systématique aux volontés du milieu, qu'il a une vision étroite des objectifs à privilégier, le président a parfaitement raison. Il mentionne que ce sont autant de symptômes de ces réflexes d'une fonction publique qui vit encore dans une autre ère.

Mais, là-dessus, je ne suis pas tout à fait d'accord, par exemple, avec le président de l'Union des municipalités régionales de comté parce que ce ne sont pas les fonctionnaires qui décident des politiques. Ce sont les hommes et les femmes politiques qui sont élus pour prendre des décisions politiques. Cela semble un mal répandu dans ce gouvernement que de faire reporter ainsi sur les fonctionnaires les défauts de leur action ou de leur inaction. J'ai très bien vécu ce que l'on a vécu ces derniers mois au ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, alors que le ministre avait donné un message à ses fonctionnaires de réaliser son plan de privatisation. Comme, en cours de route, il arrive que des citoyens sont absolument opposés à ses objectifs, il se cache maintenant en disant: Ce n'est pas un plan du ministre, c'est un plan du ministère. Ce n'est plus un plan politique. C'est un plan des fonctionnaires. Bravo!

Des voix: Bravo! "Let's go!"

M. Desbiens: Je salue l'arrivée du ministre responsable du projet de loi, M. le ministre des Affaires municipales, à 8 h 18. Après nous avoir fait veiller toute la nuit, Mme la Présidente, le ministre vient s'occuper maintenant de son projet de loi. (8 h 20)

Je sais bien que le ministre n'est pas trop inquiet de ce qui se passe et des discussions que l'on peut avoir parce que

cela va mieux en son absence, étant donné qu'on a le maire des maires avec nous qui, lui, est capable de discuter d'affaires municipales.

Des voix: Bravo!

M. Desbiens: Grâce à lui, on aura quand même vu les principaux points du projet de loi 88 et les principales objections soulevées par les municipalités et les municipalités régionales de comté. C'est grâce à notre collègue, le député de Jonquière, un ex-maire d'une très grande expérience, qu'on a pu améliorer le projet de loi 88 sur l'aménagement et l'urbanisme. Évidemment, Mme la Présidente, on n'a pas beaucoup de temps à notre disposition pour en discuter, mais il reste que j'aurais beaucoup aimé rappeler l'attitude et la position de l'UPA. Le ministre nous a dit, au début de l'étude de ce projet de loi, que l'UPA était favorable, sauf que c'est comme tout nouveau tout beau. C'est encore l'exemple que je donne du fameux plan de nègre de notre ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche. C'était tout nouveau tout beau quand les gens l'ont lu la première fois et, au fur et à mesure qu'ils ont étudié le plan, ils ont constaté que cela n'avait ni rime ni bon sens.

Une voix: Un plan de nègre.

M. Desbiens: C'est un peu ce qui se produit présentement dans le cas de l'UPA. L'UPA s'est rendu compte que ce que le ministre des Affaires municipales proposait dans son projet de loi n'était pas si beau que cela paraissait. Après avoir gratté le vernis, les intéressés se sont rendu compte qu'il y a maintenant des dangers à la position qui est défendue par le ministre.

Je vois, Mme la Présidente, que mon temps est expiré. Il y a quand même des dangers dans le projet de loi 88 en ce qui concerne la protection du territoire agricole et c'est tout un aspect à développer. Mme la Présidente, comme vous m'indiquez que mon temps est terminé, je voudrais, une dernière fois, rappeler tout le travail formidable de notre collègue, le député de Jonquière, sur ce projet de loi. Je vous remercie.

Des voix: Bravo!

La Vice-Présidente: M. le député de Terrebonne, sur une question de règlement?

M. Blais: Oui, j'ai une directive, Mme la Présidente. J'aimerais vous demander s'il est permis de demander au ministre des Affaires municipales, vu qu'il a été absent toute la nuit, s'il veut qu'on lui fasse un résumé de nos interventions avant de faire sa réplique?

La Vice-Présidente: Ce n'est pas une question de règlement, M. le député de Terrebonne.

Une voix: Est-ce que vous voulez qu'on fasse...

La Vice-Présidente: Une réplique à la suite de l'intervention du député de Dubuc?

M. André Bourbeau M. Bourbeau: Mme la Présidente. La Vice-Présidente: ...cinq minutes. Une voix: Juste cinq minutes?

M. Bourbeau: En réplique, Mme la Présidente. L'Opposition voulait la présence du ministre des Affaires municipales. Je suis ici...

Des voix: Bravo!

M. Bourbeau: ...comme je l'ai été, d'ailleurs, en moyenne 20 heures sur 24 au cours des trois dernières journées. L'Opposition est au courant. Ces gens m'ont vu partout, ici en Chambre, en commission parlementaire. D'ailleurs, le critique, le député de Jonquière, m'a suivi à peu près partout, sauf que je constate qu'il a disparu de la Chambre depuis quelques heures. Je ne sais pas exactement où il est allé, mais je le comprends, parce que, moi aussi, j'ai dû m'absenter quelques instants. Vous noterez, ainsi que ceux de l'Opposition qui ont encore les yeux ouverts, que le ministre a changé de chemise et aussi de cravate. Ce n'est pas parce que je ne voulais pas travailler, Mme la Présidente, mais c'est une mauvaise habitude que j'ai prise depuis quelques années de changer de chemise et de cravate au moins une fois par 24 heures. Il y en a qui choisissent de faire autrement. Je me suis également fait la barbe, Mme la Présidente, vous pouvez le constater. Il y en a évidemment qui agissent différemment. Il y en a qui gardent toujours la même chemise. Il y en a qui ne se font jamais la barbe. Je vois le député de Taillon, le député de Laviolette, le député de Shefford...

Des voix: ...

M. Filion: Question de règlement.

Une voix: Attaque vicieuse.

La Vice-Présidente: Je vous ai reconnu, M. le député de Taillon.

M. Filion: Je comprends que le ministre des Affaires municipales...

M. Bourbeau: Mme la Présidente, est-ce que...

La Vice-Présidente: Non. J'ai une question de règlement, M. le ministre des Affaires municipales, et je dois l'entendre.

Des voix: Assis.

Des voix: C'est une question de règlement.

La Vice-Présidente: M. le député de Taillon.

M. Filion: Je comprends que le ministre des Affaires municipales n'a pas le goût de parler du projet de loi 88, de l'Union des municipalités du Québec, de l'Union des municipalités régionales de comté ou de l'UPA. J'aimerais, Mme la Présidente, que vous rappeliez à l'ordre...

La Vice-Présidente: Là-dessus, nous sommes présentement à la prise en considération du rapport. M. le ministre des Affaires municipales, vous avez une intervention de cinq minutes. Naturellement, tout discours en cette Chambre doit se rapporter au sujet. Or, le sujet de discussion, maintenant, c'est la prise en considération du rapport.

M. le ministre des Affaires municipales.

M. Bourbeau: Oui, Mme la Présidente. Toujours sur le rapport de la commission parlementaire qui a étudié le projet de loi 88, j'ai suivi attentivement les débats en cette Chambre toute la nuit. D'ailleurs, vous savez que j'ai été ici la plus grande partie de la nuit. Comme je l'ai dit tout à l'heure, je me suis absenté un peu, quelques instants. J'ai suivi avec attention les propos des députés. Quand j'étais en Chambre, évidemment j'ai suivi de mon siège ou d'un siège très près du mien et, lorsque j'étais absent, j'ai suivi par le truchement de la télévision.

Mme la Présidente, une chose est certaine, en dehors des quelques députés de l'Opposition qui, pour des raisons différentes, font de l'obstruction systématique, le projet de loi 88 est largement appuyé par l'ensemble de la population et surtout, et je le souligne, par les deux grandes unions municipales, ce qui est contraire à ce qu'ont affirmé les députés de l'Opposition.

Tant l'Union des municipalités régionales de comté que l'Union des municipalités du Québec ont accepté le projet de loi 88 et ont encouragé le gouvernement à le présenter dans sa forme actuelle. J'ai dans mon dossier une lettre du président de l'UMRCQ et une autre du président de l'Union des municipalités du Québec disant qu'ils acceptent le projet de loi 88 dans sa forme actuelle, tel qu'il est présenté et avec tous les amendements que nous y avons apportés. C'est donc contraire à ce que j'ai entendu tout à l'heure des députés de l'Opposition qui prétendaient qu'on voulait leur passer sur le corps avec un projet de loi qui n'était pas accepté.

Mme la Présidente, vous me faites signe que mon temps est écoulé. J'aurais aimé faire la lecture de ces lettres. Je vois que l'Opposition me fait confiance et qu'elle est d'accord pour dire avec nous non seulement que j'ai les lettres et que je peux en faire la lecture mais également que c'est un bon projet de loi non seulement pour les députés, pour la population mais aussi pour les municipalités et pour l'ensemble de tous ceux qui s'intéressent à la chose municipale au Québec. Je vous remercie.

La Vice-Présidente: Merci, M. le ministre. Question de règlement, M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Brassard: Mme la Présidente, est-ce que le ministre ne pourrait pas déposer ces deux lettres en provenance des deux unions du monde municipal? Je m'indigne du fait qu'il n'ait pas déposé ces lettres à minuit ou à une heure cette nuit, cela nous aurait éclairés, cela aurait éclairé le débat.

La Vice-Présidente: M. le ministre des Affaires municipales.

M. Bourbeau: Mme la Présidente, il m'aurait fait grand plaisir de déposer cette lettre à minuit mais nous n'étions pas à discuter du projet de loi 88 à minuit. J'étais en commission parlementaire avec le critique de l'Opposition qui n'est d'ailleurs pas ici ce matin, en train de discuter du projet de loi sur la Communauté urbaine de Québec.

J'ajoute, Mme la Présidente, que je déposerai les lettres en cette Chambre quand le député de Jonquière sera ici. Il me fera plaisir de le faire.

La Vice-Présidente: M. le député d'Ungava.

M. Claveau: Mme la Présidente, voudriez-vous demander au ministre des Affaires municipales s'il accepte que je lui pose une question à la suite de son intervention?

La Vice-Présidente: En vertu de l'article 212 de notre règlement, un député peut poser une question si on a consentement. Vous ne donnez pas votre consentement, M. le ministre des Affaires municipales? Il n'y a pas de consentement, M. le député d'Ungava. Donc, vous ne pouvez poser votre question.

M. Claveau: ...poser ma question au député de Terrebonne.

Des voix: Ha! Ha! Ha!

M. Blais: J'accepte, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Ce n'est pas inclus dans nos règlements et vous ne pouvez le faire, M. le député d'Ungava. Là-dessus, je suis prête à reconnaître le prochain intervenant. M. le ministre du Travail.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Mme la Présidente, je demanderais à ce que le vote soit reporté à la prochaine séance.

M. Gendron: Non, Mme la Présidente. Je pense que ce serait important de tenir le vote tout de suite parce que, sérieusement, après le vote enregistré, ce serait peut-être important d'envisager sérieusement de respecter les parlementaires pour au moins aller déjeuner. Puisque nous sommes toujours aux affaires courantes, je pense qu'on doit voter immédiatement afin de poursuivre les étapes de ce projet de loi ultérieurement.

M. Chevrette: Vote enregistré.

La Vice-Présidente: À la demande... En fonction de l'article 223 de notre règlement, c'est le privilège du leader de demander le vote reporté. Là-dessus, le vote va être reporté en vertu de cet article. Donc, vote reporté sur la prise en considération...

M. Blais: Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Attendez une minute, M. le député... sur la prise en considération du rapport qui a étudié le projet de loi 88. Oui, M. le député de Terrebonne.

M. Blais: Mme la Présidente, j'aimerais dire que notre règlement stipule bien que c'est le leader du gouvernement qui a ce privilège et non pas un remplaçant. Donc, dans ce cas-ci, j'ai l'impression que la décision pourrait être autre, si on lit bien le règlement.

La Vice-Présidente: Là-dessus, M. le député de Terrebonne, j'aimerais vous référer à l'article 17 de notre règlement où il est bien spécifié que le leader du gouvernement peut être remplacé par un ministre. Or, la personne qui a fait la demande de vote reporté est un ministre. Donc, en vertu de cet article 17, je le reconnais également comme leader du gouvernement. Là-dessus, ceci étant fait, M. le ministre du Travail, quel article du feuilleton voulez-vous qu'on appelle?

M. Paradis (Brome-Missisquoi): L'article 24, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: À l'article 24 du feuilleton, le ministre du Travail propose l'adoption du rapport de la commission qui a procédé à l'étude détaillée du projet de loi 30, Loi constituant la Commission des relations du travail et modifiant diverses dispositions législatives.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Mme la Présidente, sauf erreur, on est rendu à l'étape de l'adoption de la loi.

La Vice-Présidente: Si vous permettez, nous allons suspendre à loisir.

(Suspension de la séance à 8 h 33)

(Reprise à 8 h 35)

La Vice-Présidente: Vous pouvez vous asseoir, nous allons reprendre nos travaux. M. le ministre du Travail.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Merci, Mme la Présidente. Je proposerais l'ajournement de nos travaux jusqu'à 10 heures ce matin.

La Vice-Présidente: Est-ce que cette motion est adoptée?

M. Chevrette: Adopté, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Adopté. Nous allons donc ajourner nos travaux jusqu'à 10 heures de matin.

(Fin de la séance à 8 h 36)

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