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(Dix heures quatorze minutes)
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
À l'ordre, s'il vous plaît! Mmes les députées, MM.
les députés, un moment de recueillement.
Veuillez vous asseoir.
Aux affaires courantes, ce matin, déclarations
ministérielles.
Présentation de projets de loi. M. le leader du gouvernement.
M. Gratton: Oui, M. le Président. Je vous prierais
d'appeler l'article b du feuilleton, s'il vous plaît.
Projet de loi 110
Le Président: Â l'article b du feuilleton, ce matin,
M. le ministre des Communications présente le projet de loi 110, Loi sur
la Régie des télécommunications. M. le ministre des
Communications.
M. Richard French
M. French: M. le Président, j'ai l'honneur de
déposer en deux exemplaires le projet de loi sur la Régie des
télécommunications. Ce projet de loi remplace la Loi sur la
Régie des services publics. Il institue un organisme qui est
désigné sous le nom de Régie des
télécommunications.
Cet organisme, composé de trois membres, a pour principale
fonction, dans la poursuite des objectifs énoncés, la
régulation économique et technique des services de
télécommunications. À cette fin, la régie a la
compétence exclusive pour délivrer, modifier ou annuler
l'autorisation d'exploiter une entreprise dont l'objet est le transport public
de communications; fixer les tarifs et les conditions de prestation à
l'égard des services de télécommunications fournis par
toute société exploitante; décider tout litige relatif
à l'application d'un tarif ou à la prestation d'un service de
télécommunications.
Cette régie a également pour fonction de veiller au
maintien et au développement des services de
télécommunications et d'aviser périodiquement le ministre
sur l'évolution de la réglementation et son adaptation aux
changements socio-économiques, techniques et scientifiques.
Le projet de loi prévoit notamment que la régie, avec
l'approbation du gouvernement, peut soustraire un service de
télécommunications au contrôle tarifaire lorsqu'elle estime
que ce service peut bénéficier d'un niveau de concurrence
suffisant pour garantir des prix et des taux justes et raisonnables.
Il est en outre prévu que le ministre peut donner des directives
portant sur les objectifs et l'orientation de la régie dans
l'exécution de ses fonctions. Ces directives doivent être
approuvées par le gouvernement.
Le Président: L'Assemblée accepte-t-elle de se
saisir de ce projet de loi 110? Adopté?
Des voix: Adopté.
Le Président: Adopté. M. le leader du
gouvernement.
M. Gratton: M. le Président, de consentement des membres
de l'Assemblée, je vous demanderais d'appeler l'article aa du
feuilleton, s'il vous plaît.
Le Président: Étant donné, M. le leader de
l'Opposition, qu'en vertu de l'article 232 nous sommes à des nouveaux
préavis à l'article aa, avons-nous votre consentement pour
présenter le projet de loi, ce matin?
M. Gendron: Non, M. le Président. Je
préférerais et je souhaiterais même, avant que l'Opposition
puisse donner son consentement, avoir l'occasion de parler au ministre du
Travail sur cette question ou que le ministre du Travail ait l'occasion de me
parler.
Le Président: Alors, M. le leader du gouvernement, en
vertu de notre règlement, je n'ai pas le consentement de
l'Assemblée pour pouvoir procéder ce matin à la
présentation de ce projet de loi. Demain matin, nous pourrons
procéder à la présentation si M. le leader le veut
bien.
Est-ce qu'il y a d'autres présentations de projets de loi? M. le
leader du gouvernement.
M. Gratton: Non, M. le Président.
Le Président: Aucun. Alors, dépôt de
documents. M. le ministre de l'Éducation.
Rapport annuel de la Commission consultative de
l'enseignement privé
M. Ryan: M. le Président, j'ai l'honneur de déposer
le dix-huitième rapport annuel
de la Commission consultative de l'enseignement privé. Ce rapport
couvre l'année 1986-1987.
Le Président: M. le ministre de l'Éducation, votre
document est déposé.
Toujours à l'étape de dépôts de documents, M.
le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.
Rapport du Fonds d'assurance-prêts agricoles et
forestiers
M. Pagé: M. le Président, j'ai l'honneur de vous
soumettre le rapport des activités du Fonds d'assurance-prêts
agricoles et forestiers relativement à l'administration de la Loi sur
l'assurance-prêts agricoles et forestiers pour l'exercice qui s'est
terminé le 31 mars 1987.
Le Président: Votre rapport est déposé, M.
le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation. Vous
avez un autre rapport?
Rapport de l'OCA
M. Pagé: De plus, j'ai l'honneur, M. le Président,
de vous soumettre le rapport des activités de l'Office du crédit
agricole du Québec pour l'exercice financier qui s'est terminé le
31 mars 1987 relativement à l'administration de la Loi favorisant le
crédit agricole à long terme par les institutions privées,
la Loi sur le crédit agricole, la Loi favorisant l'amélioration
des fermes, la Loi favorisant le crédit à la production agricole,
la Loi favorisant un crédit spécial pour les producteurs
agricoles au cours des périodes critiques, la Loi sur le prêt
agricole, la Loi favorisant l'établissement de jeunes agriculteurs et,
en conclusion, la Loi favorisant la mise en valeur des exploitations
agricoles.
Le Président: Document déposé. M. le
ministre de la Justice.
Rapport annuel de la Commission d'appel en
matière de lésions professionnelles
M. Marx: Oui, M. le Président. J'ai l'honneur de
déposer le rapport annuel 1986-1987 de la Commission d'appel en
matière de lésions professionnelles.
Le Président: Document déposé.
Rapport annuel du ministère de la
Justice
M. Marx: Aussi, j'aimerais déposer le rapport annuel
1986-1987 du ministère de la Justice.
Avant-projet de loi portant
réforme au Code civil du Québec
du droit des obligations
Enfin, j'aimerais déposer l'avant-projet de loi, Loi portant
réforme au Code civil du Québec du droit des obligations.
Il s'agit d'un avant-projet de 1466 articles.
Cet avant-projet de loi a pour objet de réformer le droit des
obligations et d'introduire au Code civil du Québec un nouveau livre sur
ce sujet, lequel vient s'ajouter au livre deuxième sur la famille
déjà adopté et en vigueur, aux livres premier,
troisième et quatrième sur les personnes, les successions et les
biens et aussi déjà adoptés, ainsi qu'aux livres
sixième et neuvième portant sur les priorités, les
hypothèques et sur la publicité des droits.
C'est cela, M. le Président. Je ne veux pas lire toutes les notes
parce qu'il y en a cinq pages. Merci.
Le Président: Vos trois rapports sont
déposés, M. le ministre de la Justice.
M. le ministre des Affaires municipales, toujours à
l'étape de dépôt de documents.
Rapport annuel de la SDBJ
M. Bourbeau: M. le Président, j'ai l'honneur de
déposer le rapport annuel pour l'année 1986 de la
Société de développement de la Baie James.
Le Président: M. le ministre, votre rapport est
déposé.
M. le ministre des Approvisionnements et Services, toujours à
l'étape de dépôt de documents. M. le ministre.
Rapport annuel du Bureau de la protection
civile
M. Rocheleau: Excusez-moi, M. le Président. J'ai le
plaisir de déposer le rapport annuel 1986-1987 du Bureau de la
protection civile du Québec.
Le Président: Votre document est déposé, M.
le ministre.
Mme la ministre des Communautés culturelles et de
l'Immigration.
Rapports annuels du ministère
des Communautés culturelles
et de l'Immigration et du Conseil
des communautés culturelles
et de l'immigration
Mme Robic: M. le Président, j'ai l'honneur de
déposer le rapport annuel 1986-1987 du ministère des
Communautés culturelles et de l'Immigration et du Conseil des
communautés culturelles et de
l'immigration du Québec.
Le Président: Vos deux rapports sont
déposés, Mme la ministre.
M. André Boulerice, membre du Bureau de
l'Assemblée
J'ai reçu de M. le chef de l'Opposition et député
de Joliette la lettre suivante dont j'aimerais faire part à
l'Assemblée: "M. le Président, j'aimerais vous informer que le
député de Saint-Jacques, M. André Boulerice,
siégera à titre de membre du Bureau de l'Assemblée
nationale en remplacement du député de Shefford, M. Roger
Paré. Ce remplacement est effectif à compter du 17
décembre prochain. Veuillez accepter, M. le Président,
l'expression de mes sentiments distingués." J'aimerais déposer
cette lettre.
M. le chef de l'Opposition, vous voulez faire une motion?
M. Chevrette: Si le leader du gouvernement me le permet, je
ferais motion pour que l'Assemblée accepte cette nomination.
Le Président: Adopté? La motion de M. le chef de
l'Opposition est adoptée. M. le député de Saint-Jacques
est maintenant membre du Bureau de l'Assemblée nationale.
Nous allons maintenant procéder au dépôt de rapports
de commissions. M. le président de la commission du budget et de
l'administration et député de Vanier.
Étude détaillée du projet de loi
74
M. Lemieux: M. le Président, j'ai l'honneur de
déposer le rapport de la commission du budget et de l'administration qui
a siégé les 10, 11, 14, 15 et 16 décembre 1987 afin de
procéder à l'étude détaillée du projet de
loi 74, Loi sur les sociétés de fiducie et les
sociétés d'épargne. Le projet de loi a été
adopté avec des amendements.
Le Président: Votre rapport est déposé, M.
le député de Vanier.
M. le président de la commission des institutions et
député de Taillon. M. le député de Taillon, aux
dépôts de rapports de commissions.
Vérification des engagements financiers
M. Filion: M. le Président, je dépose le rapport de
la commission des institutions qui a siégé les 10, 12, 17 et 18
novembre et le 14 décembre 1987 afin de procéder à la
vérification des engagements financiers concernant la Protection du
consommateur, les Affaires autochtones, les Affaires intergouvernementales
canadiennes et les ministères de la Justice, du Solliciteur
général et des Relations internationales pour les mois de janvier
à juillet 1987, ainsi que ceux relevant de la compétence du
premier ministre pour les mois de janvier 1986 à septembre 1987. Merci,
M. le Président.
Le Président: M. le député de Taillon, votre
rapport est déposé.
M. le président de la commission de l'aménagement et des
équipements et député de Bertrand.
Étude détaillée du projet de loi
69
M. Parent (Bertrand): M. le Président, j'ai l'honneur de
déposer le rapport de la commission de l'aménagement et des
équipements qui a siégé le 16 décembre 1987 afin de
procéder à l'étude détaillée du projet de
loi 69, Loi modifiant la Loi sur les villages nordiques et l'Administration
régionale Kativik. Le projet de loi a été adopté
avec amendements.
Le Président: Votre rapport est adopté.
Auditions et étude
détaillée
des projets de loi 245, 232,
252, 233, 216 et 247
M. Parent (Bertrand): J'ai aussi l'honneur de déposer les
rapports de la commission de l'aménagement et des équipements qui
a siégé le 16 décembre 1987 afin d'entendre les
intéressés et de procéder à l'étude
détaillée de projets de loi d'intérêt privé.
D'abord, le projet de loi 245, Loi concernant la ville de Verdun, a
été adopté avec amendements; le projet de loi 232, Loi
concernant la ville de Saint-Léonard, a été adopté
avec amendements; le projet de loi 252, Loi concernant la ville de
Salaberry-de-Valleyfield, a été adopté avec amendements;
le projet de loi 233, Loi concernant la ville de Rock Forest, a
été adopté avec amendements; le projet de loi 216, Loi
concernant la municipalité régionale de comté de la
Rivière-du-Nord, a été adopté avec amendements; le
projet de loi 247, Loi concernant la ville de Vaudreuil, a été
adopté avec un amendement.
Le Président: Merci, M. le député de
Bertrand. Votre rapport sur le projet de loi 69 est déposé
et tous vos autres rapports de commissions sont adoptés.
M. le président de la commission de l'économie et du
travail et député de Verchères.
Examen de l'accord de libre-échange entre le
Canada et les États-Unis
M. Charbonneau: M. le Président, je dépose ce matin
le rapport de notre commission qui a siégé hier afin
d'examiner
l'accord de libre-échange entre le Canada et les
États-Unis d'Amérique.
Une voix: Sans amendement.
Le Président: Votre rapport est déposé.
Dépôt de pétitions.
Ce matin, il n'y aura pas d'intervention portant sur une violation de
droit ou de privilège ou sur un fait personnel.
Avant de procéder à la période
régulière de questions et de réponses orales, j'avise tous
les membres de cette Assemblée qu'au feuilleton ce matin apparaît
un vote qui a été reporté. Alors, nous procéderons
à ce vote immédiatement après la période de
questions orales.
Je suis prêt à reconnaître une première
question principale. Je vais reconnaître Mme la députée de
Marie-Victorin en principale. Mme la députée, vous avez la
parole.
QUESTIONS ET RÉPONSES ORALES
La réforme de l'aide sociale et la mère
au foyer
Mme Vermette: Oui, M. le Président. Depuis le
dépôt de la réforme sur l'aide sociale, beaucoup de femmes
du Québec s'inquiètent du silence de la ministre
déléguée à la Condition féminine. A-t-elle
été consultée? Approuve-t-elle le sort dicté aux
femmes chefs de familles monoparentales dans cette réforme
antifamiliale? Ma question, M. le Président: Comment la ministre
déléguée à la Condition féminine peut-elle
appuyer une réforme qui refuse de reconnaître à sa juste
valeur le travail d'une femme chef de famille qui choisit de rester à la
maison pour s'occuper de ses jeunes enfants?
Le Président: Mme la ministre
déléguée à la Condition féminine.
Mme Gagnon-Tremblay: M. le Président, la réforme de
la sécurité du revenu est une réforme majeure. Le ministre
responsable de même que le premier ministre ont mentionné à
plusieurs reprises qu'il y aurait une consultation qui permettrait d'apporter
des modifications s'il y avait lieu. Pour ma part, je suis en train
d'écrire à tous les groupes de femmes au Québec afin de
leur faire parvenir le document pour qu'elles puissent en prendre connaissance
et me faire leurs recommandations. Je suivrai de très près la
commission parlementaire sur le sujet et je pourrai faire des recommandations
à mon collègue en temps et lieu.
Le Président: Mme la députée de Maisonneuve,
en additionnelle.
Mme Harel: Oui, M. le Président. Mme la ministre
déléguée à la Condition féminine entend-elle
s'opposer à ce que les femmes les plus pauvres du Québec soient
pénalisées? Notamment, sait-elle qu'une femme de 58 ans, par
exemple, qui va demander d'être exemptée des mesures, pourrait
perdre 43 $ par mois sur son chèque mensuel? Sait-elle qu'une femme chef
de famille déclarée non disponible aux mesures parce qu'elle est
enceinte depuis plus de six mois verra son chèque coupé de 43 $
par mois?
Le Président: Vous êtes en additionnelle.
Mme Harel: En additionnelle, M. le Président. Entend-elle
faire connaître sa position à l'égard des mesures qui vont
résulter en des pertes mensuelles pour les femmes du Québec qui
décideraient d'assumer la garde d'enfants de plus de deux ans?
Le Président: Mme la ministre
déléguée à la Condition féminine.
Mme Gagnon-Tremblay: M. le Président, je suis très
heureuse de la question de la députée de Maisonneuve. J'avoue que
je commençais à m'ennuyer de ses questions. Par contre, je
répète que la commission parlementaire aura justement pour objet
de faire toute la lumière sur cette réforme majeure et que je
prendrai en considération tous les points qui pourraient être
apportés et toutes les recommandations qui seraient faites par les
groupes de femmes, y compris, entre autres, la recommandation qui pourrait
être faite pour les femmes de 55 ans et plus.
Je suis ce dossier de très près. Il ne faut pas prendre en
considération uniquement un seul objet de la réforme, je pense
qu'il faut la regarder dans son ensemble. Donc, pour plusieurs, il peut
peut-être apparaître que certains sujets peuvent parfois signifier
une baisse mais, quand on regarde le tout dans son ensemble, en incluant les
allocations familiales, par exemple, les crédits d'impôt et
d'autres choses, il appert qu'il ne s'agit pas d'une baisse mais d'une hausse
dans plusieurs cas.
M. Chevrette: En additionnelle...
Le Président: M. le chef de l'Opposition, en
additionnelle.
M. Chevrette: ...au ministre délégué
à la Famille. Dans ces énoncés de politique familiale et
compte tenu du taux de dénatalité au Québec, comment
peut-il accepter qu'une femme enceinte se voit pénalisée durant
seize semaines avant son accouchement et jusqu'à cinq semaines
après?
Le Président: M. le ministre délégué
à la Famille, à la Santé et aux Services sociaux.
M. Dutil: Merci, M. le Président. Je tiens à
féliciter l'Opposition de poser une troisième question en deux
semaines sur la famille. Si ce n'était pas la troisième question
en deux ans, je pense que ce serait tout à leur
intérêt.
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! En
réponse à la question, M. le ministre. À l'ordre, s'il
vous plaît! M. le ministre, vous avez la parole.
M. Dutil: M. le Président, nous ne sommes pas d'accord
avec l'interprétation que fait l'Opposition de la réforme dans
l'ensemble de l'aide sociale. C'est une réforme globale qui a une
multitude de nouveautés. Je pense que son ensemble sera
considéré comme très valable pour la population. Il y a
une consultation, on l'a répété. Si des points
justifiaient des changements, le ministre a dit très clairement qu'il
était prêt à accueillir, avec une écoute très
attentive, des changements qui pourraient s'imposer. Mais, si on regarde dans
son ensemble la réforme de la sécurité du revenu, non
seulement pour les femmes, pour la famille, mais pour l'ensemble des
Québécois, il s'agit là d'une excellente réforme.
(10 h 30)
Le Président: M. le chef de l'Opposition, en
additionnelle.
M. Chevrette: II faudrait peut-être souligner au ministre
délégué que c'est difficile de poser une question sur une
politique quand elle est inexistante.
Cela étant dit, ma question était très
précise.
Des voix: ...
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
M. Chevrette: Le ministre accepte-t-il, dans le contexte de
dénatalité qu'on vit présentement, qu'on pénalise
une femme enceinte, qui bénéficie de l'aide sociale, seize
semaines avant et cinq semaines après son accouchement?
Le Président: M. le ministre délégué
à la Famille, à la Santé et aux Services sociaux.
M. Dutil: M. le Président, en général, le
principal reproche de l'Opposition, c'est de dire qu'il n'y a pas de politique,
que les politiques sont inexistantes. On voit que ce n'est pas une raison qui
justifie de ne pas poser de question. Je ne pense pas que l'Opposition puisse
se défiler sur son silence depuis deux ans sur la politique
familiale.
Quant à la réponse précise à la question, je
le répète, il s'agit d'une réforme importante, d'une
réforme globale aux multiples mesures. Ce n'est pas le moment de
commenter cela, à la période de questions, quand on sait qu'une
vaste consultation sera faite au Québec. Ce n'est pas le moment,
à la période de questions, de parler d'une mesure
particulière ou d'une autre mesure particulière hors contexte.
C'est un peu comme si on tirait une phrase d'un contexte général
et qu'on essayait d'en faire une interprétation très
étroite.
Le Président: Je vais maintenant reconnaître une
deuxième question principale à M. le député de
Verchères.
Engagements du Parti libéral en matière
d'assainissement agricole
M. Charbonneau: Merci, M. le Président. Il y a un peu plus
de deux ans maintenant, la vice-première ministre, qui était
alors critique de l'Opposition en matière d'environnement, avait promis
une politique d'assainissement agricole qui devait générer des
investissements gouvernementaux de 85 000 000 $ dans les cinq prochaines
années. C'était le 28 novembre 1985. Cet engagement stipulait que
55 % du coût des installations d'épuration chez les producteurs
agricoles, jusqu'à concurrence de 30 000 $ par producteur, seraient
assumés par le gouvernement. Depuis ce temps, le rapport Dagenais,
commandé par le ministre de l'Environnement, a suggéré
qu'on hausse ce pourcentage à 75 %. L'UPA, qui demandait 90 %, s'est
finalement rabattue sur la proposition du rapport Dagenais.
Le Président: La question.
M. Charbonneau: M. le Président, on attend toujours depuis
ce temps. Par ailleurs, je voudrais indiquer qu'il y avait deux volets à
l'engagement libéral. Il y avait également la promesse de trois
projets d'usines pilotes de traitement régionales. À ce
moment-là, il y avait déjà deux projets qui
fonctionnaient. Ce que le gouvernement a fait depuis ce temps, c'est d'en
couper un, d'en abandonner un et de faire en sorte que celui qui était
déjà presque réalisé puisse se réaliser.
Le Président: Votre question.
M. Charbonneau: M. le Président, ma première
question au ministre de l'Environnement: Quand le gouvernement va-t-il livrer
la marchandise et surtout quel type d'aide envisage-t-il d'accorder aux
producteurs agricoles?
Le Président: M. le ministre de
l'Environnement.
M. Lincoln: M. le Président, la première
réponse est très simple. Le gouvernement va livrer la marchandise
bien avant le gouvernement du Parti québécois qui s'est assis
dessus pendant neuf ans à ne rien faire.
Une voix: C'est cela. M. Lincoln: C'est sûr!
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
À l'ordre, s'il vous plaît! Mesdames les députées,
messieurs les députés, s'il vous plaît! M. le ministre de
l'Environnement.
M. Lincoln: Pendant qu'ils étaient au pouvoir, on n'a
jamais entendu parler de cela. Il a fallu le courage de la vice-première
ministre pour parler de et par un engagement formel du Parti libéral. Il
a fallu que ce soit notre gouvernement qui mette le comité Dagenais en
place pour faire, encore une fois, une recommandation que nous allons
suivre.
On est à deux ans dans notre mandat et très bientôt,
dans un avenir très prochain, on va annoncer ce programme et vous aurez
encore une fois à vous asseoir sur vos grandes paroles.
M. Charbonneau: M. le Président, je pourrais...
Le Président: M. le député de
Verchères, en additionnelle.
M. Charbonneau: Je pourrais prendre le même scénario
que le ministre et lui dire que pendant qu'ils ont été au pouvoir
dans les années soixante-dix...
Le Président: À l'ordre!
M. Charbonneau: ...les ministres...
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! Je
veux absolument vous reconnaître, M. le député de
Verchères, mais vous commencez avant que je vous reconnaisse. En
additionnelle, M. le député de Verchères.
M. Charbonneau: M. le Président...
Le Président: Et j'aimerais bien entendre le
député de Verchères.
M. Charbonneau: M. le Président, vous vous rappelez sans
doute qu'il y a eu des élections le 2 décembre 1985. Nous sommes
aujourd'hui le 17 décembre 1987. Quand le ministre va-t-il respecter la
parole de son gouvernement et comment va-t-il faire pour investir 85 000 000 $
en cinq ans alors que ces investissements devaient commencer au début de
son mandat et que deux ans après, il n'y a pas un sou de
dépensé?
Le Président: M. le ministre de l'Environnement.
Une voix: Répondez-lui donc!
M. Lincoln: M. le Président, je trouve cela
étonnant de la part du député de Verchères.
J'étais de l'autre côté, sur les banquettes de
l'Opposition, et je n'ai pas entendu même une seule fois le ministre de
l'Agriculture ou le ministre de l'Environnement parler de l'assainissement
agricole. Et aujourd'hui, il a le culot de venir nous dire, deux ans
après le début de notre mandat, qu'on aurait dû livrer la
marchandise tout de suite.
Pendant presque dix ans, ils n'ont rien fait. Ce que je lui dis, c'est
qu'on va livrer la marchandise très bientôt. Et peut-être
que ce sera plus que les 85 000 000 $ auxquels vous avez fait allusion.
Le Président: M. le député de
Verchères, en additionnelle.
M. Charbonneau: En additionnelle au ministre qui a beaucoup de
culot. Comment peut-il justifier de nous faire la morale alors que le seul
geste qu'il a posé en deux ans dans ce dossier, c'est de couper l'usine
qui était en préparation dans le bassin de la rivière
L'Assomption? Comment peut-il être pris au sérieux aujourd'hui,
deux ans après, alors que le seul geste qui a été fait,
c'est de couper une usine qui était en préparation?
Des voix: Bravo! Bravo!
Le Président: M. le ministre de l'Environnement.
M. Lincoln: M. le député de Verchères, M. le
Président, essaie de se remonter le moral, mais je vais lui dire, moi,
pourquoi on a coupé l'usine.
Quand je suis arrivé au ministère de l'Environnement,
c'était le fouillis total dans l'assainissement des eaux. On avait
défoncé le budget d'assainissement des eaux urbaines de 250 000
000 $ en une seule année. Il y avait des projets qui étaient
dépassés de 100 %. On faisait des calculs de millions, de
centaines de millions de dollars, "à la mitaine". Il n'y avait
même pas un ordinateur dans le système.
C'est nous qui avons institué le comité Dagenais pour
mettre de l'ordre dans cela. Pour ce qui est des recommandations, c'est nous
qui avons nommé le vice-président de l'UPA comme membre du
comité Dagenais. Mais c'est important de lui répondre. Et
pourquoi a-t-on stoppé le projet pilote de l'usine de L'Assomption?
C'est que les
prévisions faites par les péquistes, comme toutes leurs
prévisions, étaient de 5 000 000 $, mais quand il s'agissait de
faire l'usine, c'était presque 10 000 000 $. Alors, on a coupé
cela.
Le Président: En conclusion.
M. Lincoln: On a fait un programme plus intelligent. Nous sommes
en train de faire un programme...
Le Président: Conclusion.
M. Lincoln: ...pour lui substituer l'usine de la
Communauté régionale de l'Outaouais et on a mis de l'argent.
Le Président: En conclusion, M. le ministre.
M. Lincoln: L'ancien ministre de l'Agriculture crie. Qu'a-t-il
fait, lui, dans l'agriculture et l'assainissement agricole?
Le Président: En conclusion. En additionnelle.
M. Jolivet: Oui, en additionnelle.
Le Président: Alors, très brièvement. Un
instant! Un instant! M. le ministre de l'Environnement, cela faisait quatre
fois que je vous rappelais de conclure. En additionnelle, M. le leader
adjoint.
M. Jolivet: Oui, en additionnelle au ministre de l'Agriculture,
pour faire la différence entre les deux, encore une fois. Le ministre de
l'Agriculture avait proposé, avait dit aux agriculteurs qu'au
début... (10 h 40)
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
À l'ordre, s'il vous plaît!
M. Jolivet: Le ministre de l'Agriculture maintient-il la position
qu'il a donnée aux agriculteurs, à savoir qu'au début de
1988 ils auraient une réponse? Actuellement, on est près de
l'année 1988 et le ministre de l'Environnement n'est pas prêt
à donner la réponse. Est-il capable de concilier ces deux
faits?
Le Président: M. le ministre de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation.
M. Pagé: M. le Président, compte tenu de l'inertie
du gouvernement du Parti québécois et de sa contre-performance
dans ce dossier, vous ne devriez pas aborder cette question, vous risquez de
vous faire beurrer un peu.
M. le Président, c'est un problème qui est aigu. Mon
collègue, le ministre de l'Environnement, et moi-même avons mis
des équipes au travail, avons bâti un programme d'intervention qui
est sérieux et qui aura des résultats, qui s'appuiera notamment
sur différents types d'interventions, dont la recherche, des aides
substantielles pour les infrastructures et, aussi, évidemment, un
programme de gestion des surplus concernant les régions. Encore
là, comme dans les autres dossiers en regard de l'agriculture et de
l'environnement, notre gouvernement va livrer la marchandise, ce que vous
n'avez pas fait, soit dit en passant.
Le Président: Conclusion. Une voix: Quand?
M. Pagé: Dans les meilleurs délais, au début
de 1988. Oui, oui.
Des voix: ...
Le Président: Un instant! Un instant!
Un instant, s'il vous plaît! Je voulais reconnaître en
principale M. le chef de l'Opposition.
Les services de santé au CLSC du
Richelieu
M. Chevrette: M. le Président, le 13 novembre 1985, le
premier ministre disait que jamais en cette Chambre on n'entendrait dire que
c'était la faute de l'ancien gouvernement. Voilà le début
de ma question. On devait, dès la prise du pouvoir, être conscient
de ses responsabilités et corriger les aberrations du système. Ce
matin, concernant la santé...
Le Président: Un instant! Un instant!
M. Chevrette: ...on apprenait qu'il y a 172 lits de fermés
à l'hôpital Sainte-Justine, ce qui ne s'est jamais vu. Ce qu'on
avait vu antérieurement, c'était un maximum de 82 lits.
Là, c'est 172. Imaginez-vous la politique barbare en santé
à l'époque!
M. le Président, de plus, depuis le 14 novembre dernier, le CLSC
Richelieu ne donne plus de services à la population. Si vous avez mal au
dos, c'est le mardi. Si vous avez des problèmes cardiaques, c'est le
mercredi. Comme s'il fallait décider d'avance quel jour on est malade.
Les enfants, c'est le vendredi. Les vieux, pensez-y, c'est fermé le
samedi et le dimanche, donc, vous tombez au mardi suivant.
Donc, M. le Président, cette politique de santé
revigorée de la ministre actuelle a fait en sorte que le
député de Chambly a dit, devant les maires du coin: Nous, les
CLSC, dorénavant, ce sera du préventif, ce seront les cliniques
privées qui feront du curatif. La ministre disait exactement le
contraire de cela devant le congrès des
CLSC. Où est la cohérence dans vos politiques?
Qu'entendez-vous faire pour pallier au fait que quatre médecins sur dix
ont démissioné au CLSC du Richelieu et que, les fins de semaine,
tous les services sont fermés maintenant et qu'on a raccourci le nombre
d'heures disponibles pour la population du Haut-Richelieu?
Le Président: Mme la ministre de la Santé et des
Services sociaux.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je voudrais simplement,
au point de départ, rappeler au chef de l'Opposition que, selon le
Bureau de la statistique du Québec, alors que les dépenses en
santé, durant la dernière année de votre administration,
ont augmenté de 4 %, elles ont augmenté, dès 1986, de 16
%, uniquement dans le domaine de la santé.
Cela étant dit, dans le cas du CLSC du Richelieu, peut-être
faudrait-il leur demander pourquoi ils ont choisi, selon les dires du chef de
l'Opposition, d'ouvrir des journées et de fermer d'autres
journées pour certains services? Je l'ignore, je m'en informerai. Je
pense aussi que les établissements ont des responsabilités quant
aux décisions qu'ils prennent. Cela ne peut pas être la ministre
qui décide que, le lundi, c'est fermé, que, le mardi, c'est
ouvert et que, le mercredi, c'est tel genre de services. Nous avons, au
contraire, rien enlevé aux CLSC. Nous n'avons ajouté des
ressources dans un certain nombre de CLSC. Et au fur et à mesure de nos
disponibilités, nous continuerons dans le même sens.
Le Président: M. le chef de l'Opposition, en
additionnelle.
M. Chevrette: M. le Président, je voudrais conseiller
à la ministre de relire ses questions au moment où elle occupait
les banquettes ici. Elle trouvait cela épouvantable ce qui se passe
actuellement.
Mais là, je voudrais demander à la ministre: Comment
explique-t-elle que déjà quatre médecins sur dix aient
démissionné? Comment entend-elle donner suite au beau discours
qu'elle a fait devant la Fédération des CLSC du Québec?
Quand entend-elle mettre des montants d'argent concrets pour que les CLSC
puissent donner les services de première ligne aux citoyens du
Québec?
Le Président: Mme la ministre de la Santé et des
Services sociaux.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, le chef de l'Opposition
mêle un peu tous les problèmes. Quand il dit qu'il reste six
médecins ou que quatre ont quitté, ce sont évidemment des
médecins qui, d'eux-mêmes, ont décidé de quitter.
Pour quelle raison? Je l'ignore. On sait que le recrutement des médecins
en dehors des grandes régions de Québec, de Montréal et de
Sherbrooke est difficile. Je pense que ce gouvernement, plus que le
gouvernement précédent, a pris ses responsabilités dans ce
domaine. Si, des fois, on avait une meilleure collaboration de l'Opposition,
peut-être qu'on irait plus vite aussi dans ce domaine-là.
Le Président: M. le chef de l'Opposition, en
additionnelle.
M. Chevrette: M. le Président, là c'est rendu que
c'est la faute de l'Opposition si la ministre ne prend pas position! Il faut le
faire!
Je voudrais rappeler à la ministre... Est-elle consciente que
cela faisait onze ans que le CLSC du Richelieu donnait ce genre de services
à la population et que, depuis votre arrivée au pouvoir, c'est
l'arrêt des services qu'on donnait depuis onze ans? Comment peut-elle
expliquer cette incohérence?
Le Président: Mme la ministre de la Santé et des
Services sociaux.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, si ce CLSC existe depuis
onze ans, comme le dit le chef de l'Opposition - sans aucun doute qu'il a
raison - c'est un des CLSC qui a le budget parmi les plus élevés
des CLSC. Encore une fois, je vais m'informer pour savoir quel genre de
décision a pu être prise à l'intérieur de cet
établissement, mais je pense que ce genre de décision
relève du CLSC et non pas de la ministre, sauf que la ministre peut voir
s'il y a eu négligence ou mauvais jugement. Mais ces décisions
appartiennent aux établissements et ce n'est pas à la ministre de
la Santé de décider de toutes les actions qui sont prises dans
chacun des 1000 établissements du Québec.
Des voix: Bravo!
Le Président: Je vais maintenant reconnaître en
principale, M. le député de Terrebonne.
L'aide du gouvernement aux victimes des inondations du
14 juillet à Montréal
M. Blais: Merci beaucoup, M. le Président. Ma question
s'adresse au ministre des Approvisionnements et Services. À la suite des
inondations du 14 juillet 1987 qui ont été affligeantes pour la
population de Montréal, les dommages pour les sinistrés ont
été de plus de 200 000 000 $ juste pour la région de
Montréal.
Le gouvernement fédéral, selon les programmes en vigueur,
peut payer plus de
170 000 000 $ de ces dommages. D'après le programme que le
ministre a lui-même fait adopter au Québec au mois d'août
1987 par le gouvernement libéral actuel, une victime de ces inondations,
propriétaire d'une maison principale évaluée à 80
000 $, doit avoir subi des dommages de 6400 $ avant de recevoir le premier
dollar d'aide de votre gouvernement.
M. le ministre, comment, vous, ministre de l'Approvisionnement et
ministre qui êtes censé aider les sinistrés, responsable du
Bureau de la protection civile, pouvez-vous vous satisfaire d'une politique
telle que celle-là, alors que le gouvernement précédent
demandait à cette même victime de ne payer que 10 % des dommages
avec un maximum payable par la victime de 500 $?
Le Président: M. le ministre des Approvisionnements et
Services. M. le ministre.
M. Rocheleau: Merci, M. le Président. Je vais simplement
apporter une correction pour le député, à savoir que le
gouvernement précédent exigeait uniquement un déductible
ou une franchise de 500 $. Mais, en fin de compte, le gouvernement
précédent ne payait pas du tout et cela, dans plusieurs cas.
Je prends simplement l'exemple des affaissements de sol dans l'est de
Montréal, affaissements de sol survenus au mois de juillet 1983. Quand
nous avons pris le pouvoir en 1985, ce n'était pas encore
réglé. Alors, nous avons établi une politique, une
politique cohérente, avec l'approbation de l'Opposition qui, dans le
temps, en commission parlementaire, nous faisait des suggestions que nous avons
retenues dans le but d'aider davantage le plus démuni et d'éviter
de favoriser la personne qui avait les moyens de défrayer
elle-même les coûts occasionnés par un sinistre quelconque.
(10 h 50)
Pour la région de Montréal, actuellement, nous avons
plusieurs dossiers en traitement. Nous avons commencé à payer
plusieurs personnes et, ce que je peux dire aujourd'hui, c'est que la politique
que nous avons adoptée le 5 août, qui a suivi un décret
pour la région de Montréal et pour les autres régions du
Québec, c'est qu'elle n'est probablement pas la meilleure des
politiques, mais elle est de beaucoup supérieure aux politiques
antérieurement appliquées par le gouvernement
péquiste.
Le Président: M. le député de Terrebonne, en
additionnelle.
M. Blais: Pourquoi le ministre, plutôt que de pratiquer une
politique de fédéralisme d'affaissement, ne demande-t-il pas au
gouvernement fédéral, comme nous le faisions, d'aider les
sinistrés du Québec par respect pour ceux qui sont victimes,
plutôt que de faire des politiques restrictives uniquement
québécoises? Les sinistrés ne sont pas payés pour
les dommages qu'ils ont. Pourquoi n'arrive-t-il pas à demander notre
dû au fédéral?
Le Président: M. le ministre des Approvisionnements et
Services.
M. Rocheleau: M. le Président, le député de
Terrebonne commence à s'exciter un peu. Je profite de l'occasion pour
souligner la présence du maire de Montréal avec qui j'ai eu
à traiter de ce dossier à plusieurs reprises. Les estimations que
nous avons eues, au tout début, pouvaient se chiffrer à quelque
200 000 000 $ de dommages. Les estimations enregistrées actuellement au
Bureau de la protection civile sont de l'ordre de 96 000 000 $. À
l'intérieur des estimations ce ces biens qui ne sont pas tous
jugés certains devront faire partie de l'expertise du traitement pour
lequel on prévoit payer à peu près 20 000 000 $. Le
gouvernement du Canada sera sollicité pour une participation tout en
sachant que les premiers 6 000 000 $ seront défrayés totalement
par le gouvernement du Québec. Quant aux autres 6 000. 000 $ à
être réclamés, 50 % sont défrayés par le
gouvernement du Québec et 50 % par le gouvernement
fédéral. Il est faux de prétendre, comme le dit le
député de Terrebonne, qu'il y a des dommages de 200 000 000 $.
Nous avons des réclamations totalisant actuellement 96 000 000 $.
Lorsqu'on aura complété l'analyse et l'étude des dossiers,
on aura probablement payé quelque 20 000 000 $. Je lui suggère
fortement d'examiner en profondeur la politique, le décret que le
gouvernement a passé et les orientations antérieures de son
gouvernement alors qu'il prenait des engagements et qu'il ne les respectait
pas.
Le Président: M. le député de Terrebonne, en
additionnelle.
M. Blais: Est-ce que le ministre qui essaie de dorer la pilule en
saluant le maire de Montréal, ce qui est de bon aloi...
Des voix: Ha! ha!
Une voix: Elle est bonne, elle est bonne, elle est bonne!
Une voix: Jaloux!
Une voix: Monsieur Pilule!
Une voix: Jaloux et bavard!
M. Blais: Pourquoi le ministre ne nous dit-il pas...
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! M.
le député de Terrebonne, c'est en additionnelle, sans
commentaires, que je vous avais reconnu.
M. Blais: C'est ce que je fais, M. le Président.
Le Président: Allez.
M. Blais: Je répète ma question pour la
troisième fois: Est-ce que le ministre peut nous dire s'il va aller
demander au gouvernement fédéral les sommes auxquelles le
Québec a droit? La population lui a donné le mandat de faire
respecter la constitution et les victimes sont pleinement justifiées de
demander un montant que vous leur refusez en ne voulant pas aller au
fédéral demander ce à quoi elles ont droit... Est-ce que
vous allez, oui ou non, aller au fédéral demander de l'argent
pour les Québécois?
Le Président: M. le ministre des Approvisionnements et
Services.
M. Rocheleau: M. le Président, je tiens à
répéter au député de Terrebonne que j'ai
déjà fait une demande au gouvernement fédéral,
à l'honorable Perrin Beatty, qui m'a déjà confirmé
que le gouvernement fédéral accepterait volontiers de participer
aux coûts qui proviendraient du désastre des pluies torrentielles
du 14 juillet dernier. Lorsque nous aurons compilé les chiffres sur
l'ensemble des dommages et que nous aurons la facture nette, le gouvernement
fédéral va nous envoyer son chèque et sûrement
qu'à ce moment-là, je ne ferai pas comme le député
de Lévis, je ne garderai pas le chèque dans mes poches durant un
mois.
Le Président: Je vais maintenant reconnaître un
question principale à la formation ministérielle, M. le
député de Saguenay.
Maintien, au Québec, de la surtaxe de 15 % sur
le bois d'oeuvre
M. Maltais: Merci, M. le Président. La semaine
dernière, le député de Montmagny-L'Islet s'informait
auprès du ministre délégué aux Forêts de
l'état des négociations entre le Canada et les États-Unis
concernant la surtaxe de 15 % sur le bois d'oeuvre. Ce matin, les journaux
rapportent qu'une entente est intervenue, mais qu'elle ne concerne pas le
Québec. Est-ce que le ministre délégué aux
Forêts pourrait nous donner des précisions à ce sujet?
Le Président: M. le ministre délégué
aux Forêts.
M. Côté (Rivière-du-Loup): II faut dire,
M. le Président, que c'est un dossier très important et je
félicite les députés de la formation ministérielle
de le suivre de près.
Des voix: ...
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! M.
le ministre, vous avez la parole.
M. Côté (Rivière-du-Loup): En effet, M. le
Président, à la suite des négociations menées
conjointement par le gouvernement du Canada, la Colombie britannique, les
fonctionnaires de mon ministère dirigés par les sous-ministres
Paillé et Harvey et ceux du ministère du Commerce
extérieur qui ont fait un travail extraordinaire dans ce dossier, la
ministre du Commerce extérieur, Mme Carney, a annoncé hier des
modifications au mémoire d'entente signé en début
d'année avec les États-Unis au sujet de la taxe de 15 % sur le
bois d'oeuvre. Ces modifications, évidemment, concernent pour l'instant
le plus important exportateur de bois d'oeuvre aux États-Unis, qui a
imposé à tous les industriels du sciage de sa province, sans
exception, des mesures de remplacement égales à la taxe de 15 %
imposée en début d'année. Il faut ajouter que la Colombie
britannique devait déposer un projet de loi, sur cette question, avant
Noël.
Quant au Québec, Mme Carney regrette d'avoir été
incapable de donner suite à ma lettre du 4 décembre afin
d'inclure toutes les requêtes du Québec avant de modifier
l'entente Canada-États-Unis sur le bois d'oeuvre. Tout de même -
c'est très important - la modification rendue publique hier corrige en
grande partie les injustices subies par les industriels frontaliers qui
exportaient aux États-Unis du bois d'oeuvre transformé à
partir des billes en provenance des États-Unis.
Des voix: Très bien! Excellent!
Le Président: En principale, M. le leader de
l'Opposition.
La création de la Commission des relations du
travail
M. Gendron: M. le Président, le 10 décembre
dernier, concernant le projet de loi 30 visant la création d'une
nouvelle Commission des relations du travail, quelque chose de majeur en termes
de gestion future des relations du travail, le ministre du Travail
déclarait ceci: "De telles mesures ont besoin d'un consensus minimum
pour être mises en place, et il n'est pas question, quant à nous,
de créer à la force du poignet un nouvel organisme qui,
critiqué tant par les patrons que par les syndicats - écoutez
bien le reste - n'aurait aucune crédibilité et ne pourrait pas
fonctionner." Cela, c'est le
10 décembre.
Aujourd'hui, sept jours plus tard, la situation est la suivante: La CSN
ne veut rien savoir, la FTQ lui donne un appui très mitigé en
déclarant qu'il s'agit d'un projet avec une belle coquille vide, sans
contenu, le CPQ est contre, la CSD est contre, la CEQ est contre et
l'Opposition est également contre parce que nous sommes convaincus que
ce projet de loi, dans sa forme actuelle, ne présente aucune garantie de
succès pour les objectifs visés.
Ma question au ministre du Travail est très claire: Qu'est-ce que
le ministre a voulu dire précisément, le 10 décembre
dernier, quand il a affirmé qu'il n'était pas question de
procéder dans ce projet de loi sans un minimum de consensus?
Le Président: M. le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu et ministre du Travail.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, je
remercie le député d'Abitibi-Ouest et leader de l'Opposition de
sa question. Je le remercie également d'avoir consenti, à
l'époque, au dépôt du projet de loi. Je le remercie
également d'avoir conseillé à sa formation politique que
l'on adopte, ici même, à l'Assemblée nationale, de
façon unanime, le principe dudit projet de loi. Je le remercie
également pour son travail constructif, consciencieux et positif en
commission parlementaire où nous avons adopté unanimement,
l'ensemble des parlementaires de l'Assemblée nationale, 120 des 144
articles du projet de loi, soit tout près de 85 %. (11 heures)
II restait, quand même, des problèmes au mois de juin. Il y
avait des objections importantes et du côté patronal et du
côté syndical. Il restait 24 articles qui n'avaient pas
été adoptés à l'unanimité. Nous nous sommes
mis au travail, tout au long de la période estivale, tout au long de
l'automne. Nous avons rencontré l'ensemble des parties et hier, pour
information, j'ai communiqué au député d'Abitibi-Ouest les
20 amendements que nous proposons. Trois devraient satisfaire la partie
syndicale, trois, la partie patronale, trois sont conjoints
patronaux-syndicaux. Ce que je dis au député d'Abitibi-Ouest
c'est de reconsidérer ce qu'il m'a souligné hier soir lorsqu'il
m'a dit qu'il ne voulait même pas prendre connaissance des amendements.
Je lui demande de faire preuve d'ouverture d'esprit pour que je puisse le
remercier. S'il en prend connaissance, on aura peut-être un vote unanime
en troisième lecture, M. le Président.
Des voix: Bravo! Bravo!
Le Président: En additionnelle, M. le leader de
l'Opposition.
M. Gendron: En additionnelle, est-ce que le ministre du Travail
sait, au moins, qu'après tout cet extraordinaire travail de
collaboration avec un critique extraordinaire, sérieux, qui a fait sa
"job", le résultat, à la fin de juin, c'est qu'on ne veut encore
rien savoir de ce projet de loi parce que sur des considérations
importantes, après avoir pris connaissance des amendements, la
résultante est la même? Est-ce que le ministre du Travail se rend
compte aujourd'hui, après avoir pris connaissance des amendements, que
ce projet de loi ne répond pas plus au consensus que vous exigiez
vous-même?
Le Président: M. le ministre du Travail, de la
Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, c'est
peut-être parce qu'il est assis à côté du chef de
l'Opposition qui, au moment où cette Chambre a procédé
à l'adoption de la loi 119 dans l'industrie de la construction, tenait
à peu près les mêmes discours. Il parlait à peu
près de la même façon. Le leader, qui est un peu son
adjoint maintenant, s'inspire des paroles du chef de l'Opposition, s'inspire de
cette façon de penser mais, je pense qu'aujourd'hui le chef de
l'Opposition aura l'honnêteté de reconnaître que les parties
se sont rendu compte, avec le temps, qu'il s'agissait là d'un pas dans
la bonne direction.
Je dirai au député d'Abitibi-Ouest que, dans le cas de la
loi 30, nous avons, au moment où nous nous parlons, réglé
davantage d'objections, toutes proportions gardées, que ce ne fut le cas
dans le cas du projet de loi 119 qui fait aujourd'hui l'unanirr é des
parties patronale et syndicale.
Le Président: M. le leader de l'Opposition, en
additionnelle toujours.
M. Gendron: En additionnelle, est-ce que le ministre est
conscient qu'aujourd'hui, le 17 décembre - pas en juin - selon un
éditorial de Pierre Vennat, dans La Presse, après avoir
fait les consultations avec les instances, il est le seul à avoir
l'assurance que son projet de loi 30 répond aux objectifs du
dépôt de juin dernier?
Le Président: M. le ministre du Travail, de la
Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, j'ai pris
connaissance de l'éditorial de M. Vennat dans La Presse de ce
matin et je tiens à vous dire que ce que dit M. Vennat était
exact au moment où il a fait
ses consultations, mais que la situation a évolué depuis
ce temps.
Des voix: Ah! Ah!
Des voix: Bravo!
Le Président: En principale, M. le député de
Lévis.
M. Garon: M. le Président...
Le Président: Non, non, non. M. le député de
Lévis, non.
M. Chevrette: Voulez-vous qu'on identifie les grogneux?
Le Président: M. le député de Lévis,
en principale.
Étage additionnel au CHUL pour la
pédiatrie
M. Garon: M. le Président, en octobre 1985, le ministre de
la Santé et des Services sociaux du temps, maintenant chef de
l'Opposition, annonçait la répartition des services de
pédiatrie dans la région de Québec entre le CHUL et
l'hôpital Saint-François-d'Assise. En mars 1986, la ministre
autorisait la construction d'un étage additionnel au CHUL, selon une
décision du Conseil des ministres de mars 1986. Comme il avait obtenu la
construction d'un centre de recherche, construire un étage additionnel
pour la pédiatrie, cela économisait des coûts de
construction. Depuis ce temps, le centre de recherche a été
inauguré, à la fin de l'année 1986, et l'étage
additionnel est resté ainsi: quatre murs et un toit. Il n'y a pas de
décision additionnelle et le CHUL est toujours en attente de la
décision de la ministre pour terminer la construction de l'étage,
acheter des équipements et avoir le budget de fonctionnement.
En attendant, les enfants se promènent en taxi - en cours
d'opération - entre l'Hôtel-Dieu de Québec et
l'hôpital Laval, selon les besoins. Vous pouvez vérifier. C'est
encore arrivé les 10 et 12 décembre dernier.
Le Président: Votre question.
M. Garon: Je demanderais à la ministre quand elle va se
décider à envoyer sa lettre d'autorisation pour que les travaux
de la phase I puissent être complétés en services de
pédiatrie. Ils sont déjà acceptés depuis deux ans
et elle les a déjà reconnus en acceptant qu'on commence la
construction d'un étage additionnel en mars 1986.
Le Président: Mme la ministre de la Santé et des
Services sociaux.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, quand l'Opposition est
à court de questions dans le domaine de la santé et des services
sociaux, chacun part avec son petit cas particulier. Cela risque de prendre des
proportions importantes.
La raison pour laquelle l'autorisation n'a pas encore été
donnée, c'est que jamais il n'y avait eu d'argent prévu pour le
fonctionnement de ce département de pédiatrie. On avait bien
annoncé un beau projet, etc., mais il n'y a jamais eu d'argent
prévu pour les frais de fonctionnement. Il me fait plaisir de dire au
député de Lévis que nous travaillons activement à
ce dossier. Je dois, d'ailleurs, vous dire que les députés de la
région de Québec m'ont constamment, je ne dirai pas poursuivie,
mais presque harcelée pour qu'une décision se prenne. J'ose
espérer que, d'ici peu, nous puissions formaliser la décision et
annoncer de quelle façon le budget sera assuré pour le
fonctionnement de la pédiatrie au CHUL.
Le Président: M. le député de Lévis,
en additionnelle.
M. Garon: Est-ce que la ministre, qui se fait travailler par les
députés de la région de Québec pour signer une
lettre, peut nous dire quand elle va signer cette lettre et si les pressions
vont aboutir à quelque chose, puisqu'une lettre d'autorisation est
nécessaire pour compléter les travaux, acheter des
équipements et fonctionner? Quand la ministre va-t-elle prendre une
décision? C'est en cours depuis deux ans, alors que les travaux sont
arrêtés depuis environ un an.
Le Président: Mme la ministre de la Santé et des
Services sociaux. Mme la ministre.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je viens de dire au
député de Lévis évidemment, il lui fallait une
question additionnelle à tout prix - que le député de
Jean-Talon et le député de Louis-Hébert m'ont constamment
demandé de faire le suivi de ce dossier. Il ne s'agit pas uniquement
d'écrire une lettre. Je sais que mon prédécesseur, le chef
de l'Opposition, en écrivait, des lettres. Quand je suis arrivée,
il n'y avait pas de fonds prévus pour les lettres qu'il
écrivait.
Le Président: En principale, M. le député de
Duplessis. À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous
plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! M. le
député de Duplessis, en principale.
Construction du CLSC de Fermont
M. Perron: Oui, M. le Président, à la ministre de
la Santé et des Services sociaux.
Est-ce que la ministre peut nous dire où en est rendu le dossier
de la construction du CLSC de Fermont?
Le Président: Mme la ministre de la Santé et des
Services sociaux. À l'ordre! À l'ordre! Mme la ministre de la
Santé et des Services sociaux.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, on vient de faire la
preuve de ce que j'avançais. Quand on est à court de questions,
on peut toujours en trouver parmi les 1000 établissements du
réseau. C'est la quatrième, ce matin.
Dans le cas du CLSC de Fermont, c'est une question qui a
été à l'ordre du jour depuis de nombreuses années,
avec des promesses, à certains moments, qui ne se sont pas
réalisées. Nous sommes à terminer toute l'étude,
également, dans ce dossier. Nous espérons pouvoir, en janvier et
en février, avec l'autorisation du Conseil du trésor, donner
l'autorisation et prévoir la construction, la rénovation ou le
réaménagement du CLSC pour répondre aux besoins de la
population.
Le Président: M. le député de Duplessis, en
additionnelle.
M. Perron: À la ministre de la Santé et des
Services sociaux, toujours sur le même dossier qui est un dossier
régional, est-ce que la ministre peut nous confirmer que le dossier du
CLSC de Fermont est actuellement rendu au Conseil du trésor?
Le Président: Mme la ministre de la Santé et des
Services sociaux.
Mme Lavoie-Roux: Oui, je peux le confirmer.
M. Chevrette: Une principale.
Le Président: C'est une principale.
M. Chevrette: Une principale sur...
Le Président: M. le chef de l'Opposition...
M. Chevrette: ...Sainte-Justine, M. le Président.
Le Président: ...en principale.
M. Chevrette: On annonce, ce matin, qu'il y a 172 lits de
fermés... (11 h 10)
Le Président: M. le chef de l'Opposition, question
principale.
M. Chevrette: Sur une question principale, M. le
Président, je vous ferai remarquer qu'on ne parle pas de malades en
jaquettes, comme vous en parliez du temps où vous étiez ici et
qu'on ne parle pas de portes coupées en deux. On vous pose des questions
précises sur votre administration.
Fermeture de lits à l'hôpital
Sainte-Justine
À Sainte-Justine, M. le Président, on a annoncé 172
lits fermés, ce qui ne s'est jamais vu. Comment la ministre peut-elle
concilier cela avec l'amélioration des soins de santé pour les
gens de Montréal?
Le Président: Mme la ministre de la Santé et des
Services sociaux. Question de règlement?
M. Gratton: M. le Président, en fait, c'est une demande de
directive.
Le Président: Alors, sur une demande de directive, M. le
leader du gouvernement.
M. Gratton: Mme la ministre a allégué tantôt
le fait qu'on semble être à court de questions du
côté de l'Opposition. Est-ce qu'on peut l'être au point de
pouvoir poser la même question principale deux fois au cours de la
même période de questions, en s'imaginant qu'en la posant comme
première et comme dernière on va avoir oublié que c'est la
même question?
Le Président: Je permets la question. C'était dans
votre préambule que vous aviez allégué cela. Ce
n'était pas une question de directive. Je la permets, mais c'est une
dernière question pour la période de questions
régulière.
M. Chevrette: M. le Président, je croyais que le leader du
gouvernement pouvait au moins constater que la ministre n'a pas fait l'ombre
d'une allusion à cela dans sa réponse, alors que j'y avais fait
allusion dans mon préambule. Je lui pose la question précise.
Le Président: Question.
M. Chevrette: Comme vous vouliez éliminer la
médecine de guerre, vous compariez même cela au Liban, je voudrais
savoir comment la ministre peut concilier ses beaux discours sur
l'amélioration des services de santé, surtout dans la
région métropolitaine, quand on n'a jamais fermé plus que
80 ou 82 lits et qu'on nous annonce la fermeture pour des fins
budgétaires de 172 lits. Comment peut-elle accepter cela comme ministre
de la Santé? Comment peut-elle justifier ses discours sur
l'amélioration, alors qu'on vit une véritable
détérioration des soins de santé?
Le Président: Mme la ministre de la Santé et des
Services sociaux.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, j'inviterais le
député ou le chef de l'Opposition à faire le tour de
quelques urgences et à comparer la situation actuelle à ce
qu'elle était alors que lui était ministre de la
Santé.
Le Président: À l'ordre: À l'ordre! À
l'ordrel Mme la ministre.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, à la
période de Noël...
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! Mme
la ministre de la Santé et des Services sociaux.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, à la
période des fêtes à chaque année, pour une
période d'environ quinze jours, généralement quinze jours,
il y a toujours un nombre de lits qui sont fermés dans certains
hôpitaux, parce qu'on sait tous qu'à cette période il y a
moins d'achalandage aux services, qu'il y a des gens qui vont en vacances, que
les familles, d'une façon générale, n'essaient pas
d'entrer à l'hôpital à moins qu'il ne s'agisse d'une
situation d'urgence.
Alors, je peux assurer la Chambre qu'il n'y a pas plus de lits
fermés durant la période des fêtes et cela n'est pas pour
des raisons budgétaires, c'est dans l'administration
générale de nos établissements de santé, comme il y
en a eu les autres années.
Le Président: Cette dernière réponse met fin
à la période régulière de questions pour la
journée. M. le leader du gouvernement, je pense que vous avez une
demande spéciale à faire.
M. Gratton: Oui, M. le Président. Compte tenu que les
échanges de la période de questions ont contribué à
recréer une atmosphère de calme et de
sérénité, je voudrais proposer, avec le consentement de
l'Assemblée, que nous retournions à l'article présentation
de projets de loi et que vous appeliez le projet de loi inscrit dans le
préavis à l'article aa du feuilleton, s'il vous plaît.
Le Président: Est-ce que j'ai le consentement des membres
de cette Assemblée pour retourner à la présentation de
projets de loi, aux affaires courantes?
M. Gendron: Un instant, M. le Président. Oui, il y a
consentement, parce que...
Le Président: M. le leader de l'Opposition.
M. Gendron: ...effectivement, à la suite des
échanges...
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
M. Gendron: ...que j'ai eus avec le ministre du Travail, des
exigences que l'Opposition avait concernant ce projet de loi ont
été satisfaites. En conséquence, l'Opposition est
d'accord.
Présentation de projets de loi.
Le Président: Alors, M. le leader du gouvernement,
à l'étape de la présentation de projets de loi, je vous
reconnais.
M. Gratton: Oui. L'article aa, M. le Président.
Projet de loi 114
Le Président: À l'article aa du feuilleton, M. le
ministre du Travail présente le projet de loi 114, Loi modifiant la Loi
sur les relations du travail, la formation professionnelle et la gestion de la
main-d'oeuvre dans l'industrie de la construction. M. le ministre de la
Main-d'Oeuvre.
M. Pierre Paradis
M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, il s'agit
du projet de loi 114. Ce projet de loi a pour principal objet d'allonger la
période prévue pour les négociations collectives dans
l'industrie de la construction, de déplacer, en conséquence, la
période de changement d'allégeance syndicale dans cette industrie
et de faire coïncider l'entrée en vigueur du choix
d'allégeance syndicale des travailleurs avec le début de ces
négociations.
Ce projet prévoit, de plus, des dispositions transitoires
permettant, notamment, dans l'éventualité où la
durée du décret régissant actuellement les conditions du
travail dans l'industrie de la construction est prolongée, de reporter
le début des prochaines négociations collectives dans cette
industrie et d'établir de façon certaine que les associations
représentatives syndicales ne soient pas contraintes à faire
constater à nouveau leur degré de représentativité.
Merci, M. le Président.
Le Président: Merci, M. le ministre. L'Assemblée
accepte-t-elle de se saisir de ce projet de loi? Adopté?
Des voix: Adopté.
Le Président: Adopté.
Votes reportés. Votes reportés. J'attends l'indication des
whips des deux formations politiques. M. le whip du gouver-
nement? Alors, que chacun regagne son siège. MM. les whips,
êtes-vous prêts?
Une voix: Oui.
Le Président: M. le whip du gouvernement?
Mise aux voix du rapport de la
commission qui a procédé à
l'étude détaillée du projet de loi 30
Alors, je mets maintenant aux voix le rapport de la commission de
l'économie et du travail qui a étudié en détail le
projet de loi 30, Loi constituant la Commission des relations du travail et
modifiant diverses dispositions législatives.
Le Président: Que ceux et celles qui sont en faveur de
ladite motion veuillent bien se lever, s'il vous plaît.
Le Secrétaire adjoint: MM. Gratton (Gatineau), Saintonge
(Laprairie), Marx (D'Arcy McGee), Pagé (Portneuf), Levesque
(Bonaventure), Mme Bacon (Chomedey), M. Ryan (Argenteuil), Mme Lavoie-Roux
(L'Acadie), MM. Bourbeau (Laporte), Paradis (Brome-Missisquoi), Séguin
(Montmorency), Côté (Rivière-du-Loup), Dutil (Beauce-Sud),
Mmes Gagnon-Tremblay (Saint-François), Ro-bic (Bourassa), MM. MacDonald
(Robert Baldwin), Rémillard (Jean-Talon), Savoie (Abitibi-Est),
Vallerand (Crémazie), Lincoln (Nelligan), French (Westmount),
Côté (Charlesbourg), Ciaccia (Mont-Royal), Johnson
(Vaudreuil-Soulanges), Vallières (Richmond), Gobeil (Verdun), Picotte
(Maskinongé), Fortier (Outremont), Rocheleau (Hull), Mme Bégin
(Bellechasse), MM. Dauphin (Marquette), Maltais (Saguenay), Philibert
(Trois-Rivières), Mme Dougherty (Jacques-Cartier), MM. Lefebvre
(Frontenac), Doyon (Louis-Hébert), Mme Trépanier (Dorion), MM.
Maciocia (Viger), Middlemiss (Pontiac), Beaudin (Gaspé), Cannon (La
Peltrie), Chagnon (Saint-Louis), Lemire (Saint-Maurice), Paradis
(Matapédia), Mme Pelchat (Vachon), MM. Rivard (Rosemont), Polak
(Sainte-Anne), Assad (Papineau), Kehoe (Chapleau), Baril
(Rouyn-NorandaTémiscamingue), Bélanger (Laval-des-Rapides),
Bélisle (Mille-Îles), Mme Hovington (Matane), M. Tremblay
(Iberville), Mme Bélanger (Mégantic-Compton), MM. Fortin
(Marguerite-Bourgeoys), Gervais (L'Assomption), Trudel (Bourget), Mme Bleau
(Groulx), MM. Bradet (Charlevoix), Camden (Lotbinière), Mme Cardinal
(Châteauguay), MM. Després (Limoilou), Farrah
(Îles-de-la-Madeleine), Forget (Prévost), Gardner (Arthabaska),
Gauvin (Montmagny-L'Islet), Gobé (Lafontaine), Hamel (Sherbrooke),
Laporte (Sainte-Marie), Dubois (Huntingdon) Bissonnet (Jeanne-Mance), Audet
(Beauce-Nord), Leclerc (Taschereau), Hétu (Labelle), Joly (Fabre),
Khelfa (Richelieu),
Lemieux (Vanier), Marcil (Beauharnois), Messier (Saint-Hyacinthe),
Poulin (Chauveau), Mme Legault (Deux-Montagnes), MM. Thurin-ger
(Notre-Dame-de-Grâce), Richard (Nicolet), Tremblay (Rimouski),
Théorêt (Vimont), Saint-Roch (Drummond). (11 h 20)
Le Président: Que ceux et celles qui sont contre ladite
motion veuillent bien se lever.
Le Secrétaire adjoint: MM. Chevrette (Joliette), Gendron
(Abitibi-Ouest), Perron (Duplessis), Mme Blackburn (Chicoutimi), MM. Blais
(Terrebonne), Garon (Lévis), Charbon-neau (Verchères), Mme Juneau
(Johnson), MM. Desbiens (Dubuc), Jolivet (Laviolette), Brassard
(Lac-Saint-Jean), Filion (Taillon), Gauthier (Roberval), Godin (Mercier), Mme
Vermette (Marie-Victorin), MM. Paré (Shefford), Boulerice
(Saint-Jacques), Claveau (Ungava), Dufour (Jonquière), Parent
(Bertrand), Mme Harel (Maisonneuve), M. Rochefort (Gouin).
Le Président: À l'ordre! À l'ordre! À
l'ordre, s'il vous plaît!
Le Secrétaire: Pour: 87
Contre: 22
Abstentions: 0
Le Président: Alors, le rapport de la commission de
l'économie et du travail sur le projet de loi 30 est adopté.
Nous allons maintenant continuer les affaires courantes.
Motions sans préavis. M. le ministre des Transports.
Mesdames et messieurs les députés, j'ai reconnu M. le
ministre des Transports. M. le ministre des Transports, vous avez maintenant la
parole.
Le 18 décembre 1987, Journée nationale
de l'Opération Nez rouge
M. Côté (Charlesbourg): M. le Président, je
sollicite le consentement de cette Assemblée pour déposer la
motion suivante: Que la journée du 18 décembre 1987 soit
décrétée Journée nationale de l'Opération
Nez rouge.
Le Président: Si je comprends bien, il y a consentement
pour débattre cette motion, M. le leader de l'Opposition.
M. Gendron: II y a consentement.
Le Président: Adopté. M. le ministre des
Transports.
M. Marc-Yvan Côté
M. Côté (Charlesbourg): M. le Président, vous
me permettrez, en tout
premier lieu, de saluer dans les galeries les artisans de cette
Opération Nez rouge, qui sont M. Jean-Marie de Koninck, M. Marcel Jobin,
M. Denis Pinsonneau, Me Micheline Jacob, Me Rémi Bujold, Claire Mercier,
Maurice Bélanger, Philippe Jobin, Michel Légaré, M. Brian
Peckford, Marie Tremblay, Hélène Gagné et M.
Vézina, président de la Régie de l'assurance
automobile.
Mon collègue, ministre de l'Éducation, me signifie que
l'Opération Nez rouge a un appui sensible et significatif du
ministère de l'Education. Nous nous en réjouissons et nous ne
pouvons que solliciter autant de réponses positives de la part de tous
les autres collègues de l'Assemblée.
Cette motion vise à faire reconnaître par cette
Assemblée que la journée de demain, 18 décembre, soit
décrétée Journée nationale de l'Opération
Nez rouge. Fondée effectivement par M. Jean-Marie de Koninck, du club de
natation Rouge et Or de l'Université Lavai, appuyée par la
station radiophonique CHRC et par le corps policier de la ville de
Québec, de même que par la Régie de l'assurance automobile
du Québec, l'Opération Nez rouge a vu le jour ici, à
Québec, en 1984.
Actuellement, il existe 26 Opérations Nez rouge couvrant 195
municipalités dans tout le Québec. Cette Opération Nez
rouge n'a aucune connotation avec les couleurs politiques. Ce sont des milliers
de bénévoles, des dizaines de milliers de dollars en dons remis
à des organismes de jeunes, mais ce sont aussi et sûrement des
centaines de tragédies d'évitées.
C'est une organisation qui a progressé de manière
fulgurante au cours des années, puisqu'en 1984 on pouvait compter 250
bénévoles ayant transporté tout près de 500
personnes dans la première année d'activité et
générant 25 000 $ à des organismes de jeunes; en 1985,
1400 bénévoles pour 2700 personnes transportées, pour 110
000 $; en 1986, 5165 bénévoles pour tout près de 8000
personnes transportées, pour 275 000 $ versés aux jeunes.
Au-delà de cela, il faut compter 1 000 000 $ en dons, en services
rendus à la population. Cette opération se poursuit en 1987 sous
l'égide et la responsabilité du même Jean-Marie de Koninck
et appuyé en cela par la presque-totalité des villes du
Québec intéressées à une opération comme
celle-là.
Rappelons-le, cette Chambre a voté, en 1986, des amendements au
Code de la sécurité routière visant à
pénaliser de manière très sévère ceux qui
prenaient le volant en état d'ébriété. Rappelons,
c'est extrêmement important, que 50 % des accidents au Québec sont
causés par ceux qui consomment de l'alcool. Le gouvernement, par
l'entremise de la Régie de l'assurance automobile, fait et continuera de
faire de nombreux efforts pour tenter de ralentir ou de diminuer la
consommation d'alcool par les gens qui conduisent sur les routes du
Québec. En cette période de l'année, les moments de
réjouissances sont nombreux. C'est une période que tous attendent
avec impatience, une période de retrouvailles, de partage et de
gaieté. Souvent, et plus souvent qu'autrement, l'alcool est
présent. Il faut bien se le dire: Fêter n'est pas criminel.
Cependant, conduire son véhicule lorsqu'on a consommé des
boissons alcoolisées constitue un manque total de considération
pour la vie. Conduire en état d'ébriété, c'est
effectivement criminel.
Dans cette optique et compte tenu que le 18 décembre
représente une date privilégiée pour ce qu'on appelle
communément les "parties" de bureau, notre appui à une
organisation telle que l'Opération Nez rouge me semble totalement
justifié. Une équipe de Nez rouge, dans ces moments de
festivités, dites-vous que c'est une équipe pour la vie.
En terminant, je veux rendre hommage de manière tout à
fait particulière à M. Jean-Marie de Koninck, ainsi qu'à
son équipe. Je veux féliciter et remercier les postes de radio
qui ont joint leurs efforts à ceux de M. de Koninck. Je veux rendre un
hommage tout à fait particulier aux corps policiers de tout le
Québec qui ont emboîté le pas et aussi à la
Régie de l'assurance automobile qui a été l'un des
éléments moteurs à appuyer l'Opération Nez rouge.
C'est avec fierté, M. le Président, que, pour la première
fois, l'Assemblée nationale décrétera et, je
l'espère, avec l'assentiment unanime de l'Assemblée, le 18
décembre, Journée de l'Opération Nez rouge. Cela
reconnaîtra tout le mérite de ceux qui y travaillent et les
incitera à faire beaucoup de petits, pour que toutes les
municipalités du Québec bénéficient de ce service
en 1988 ou en 1989. Merci et félicitations! (11 h 30)
Le Président: Je remercie M. le ministre des Transports.
Je vais maintenant reconnaître M. le député de Lévis
sur la même motion.
M. Jean Garon
M. Garon: M. le Président, il me fait plaisir de me
joindre à la motion que présente le député de
Charlesbourg, comme critique en matière de transports et comme
député de la région de Québec, pour
féliciter les étudiants de l'Université Laval qui ont
été les initiateurs d'une telle opération, qui a eu
rapidement beaucoup de succès parce qu'elle correspondait à un
besoin à une période en l'année où les gens
fêtent un peu plus que d'habitude.
J'aimerais faire remarquer au ministre
que nous voulons davantage souligner cette journée en
félicitant ceux qui ont travaillé, les jeunes étudiants de
l'Université Laval, qui ont pensé à mettre sur pied une
telle opération, que fêter, la journée du 18
décembre, ceux qui prennent un verre. Je pense bien que ceux qu'on veut
reconnaître, ce sont ceux qui ont voulu accorder du temps
bénévolement au service des gens qui ont pris un verre de trop et
et pour faire en sorte qu'il y ait moins d'accidents et que les gens qui ont
dépassé la limite pensent à se faire conduire plutôt
que conduire eux-mêmes.
Je suis d'accord avec le député de Charlesbourg pour dire
que c'est une opération qui sauve sûrement des vies humaines et
qui, en ce sens, rend service. Je souhaiterais, d'une façon
générale, qu'un tel service existe au Québec et que,
à longueur d'année, ceux qui ont pris un verre de trop et qui ne
devraient pas conduire ou ceux qui exploitent des endroits où on vend de
la boisson puissent téléphoner pour faire reconduire quelqu'un et
qu'on en vienne a penser qu'il est mieux de ne pas conduire quand on a pris un
verre de trop.
En terminant, je voudrais féliciter ceux qui poursuivent l'oeuvre
qui a été amorcée par des étudiants de
l'Université Laval et indiquer qu'une meilleure qualité de vie
dans une société est souvent due à l'initiative de gens
qui ont établi des services qui correspondent à des besoins. Ceux
qui l'ont fait dans ce cas-ci, dans la région de Québec, ont
donné un exemple susceptible d'être imité dans tout le
Québec pour rendre service en cette période de l'année et
possiblement à d'autres périodes, où ce service peut aider
beaucoup de gens qui ont pris un verre de trop. Je vous remercie, M. le
Président.
Le Président: Je remercie M. le député de
Lévis. Est-ce qu'il y a d'autres intervenants sur cette motion
présentée par M. le ministre des Transports? Est-ce que cette
motion est adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Président: Adopté. M. le leader du
gouvernement.
M. Jacques Rochefort, membre de la commission des
affaires sociales
M. Gratton: M. le Président, avec le consentement unanime
de l'Assemblée, je voudrais proposer la motion suivante et ainsi
déroger à l'article 127 du règlement, qui prévoit
qu'un membre d'une commission doit être nommé par la commission de
l'Assemblée nationale. De façon à éviter que la
commission doive se réunir, on pourrait, de consentement, faire en sorte
que le député de Gouin soit membre de la commission des affaires
sociales, et ce, conformément aux dispositions de l'article 123 du
règlement.
Le Président: Est-ce qu'il y a consentement pour
déroger à l'article 127?
M. Gendron: II y a consentement, M. le Président.
Le Président: Est-ce que cette motion est
adoptée?
Une voix: Adopté.
Le Président: Adopté. M. le leader du gouvernement,
avis touchant les travaux des commissions.
Avis touchant les travaux des commissions
M. Gratton: M. le Président, j'avise l'Assemblée
qu'aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures,
de 15 heures à 18 heures et, si nécessaire, de 20 heures à
24 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau, la commission du budget de
l'administration entendra les intéressés dans le cas de projets
de loi privés et procédera à l'étude
détaillée des projets de loi suivants, et ce dans l'ordre
ci-après indiqué: le projet de loi d'intérêt
privé 244, Loi concernant Les Clairvoyants, compagnie mutuelle
d'assurances de dommages, le projet de loi d'intérêt privé
248, Loi concernant la Société autrichienne/Austrian Society, et,
finalement, le projet de loi public 108, Loi sur le régime de retraite
des agents de la paix en institutions pénales et modifiant diverses
dispositions législatives.
De même, après les affaires courantes jusqu'à 13
heures, de 15 heures à 18 heures et, si nécessaire, de 20 heures
à 24 heures, à la salle Louis-Hippolyte-Lafontaine, la commission
de l'aménagement et des équipements entendra les
intéressés et procédera à l'étude
détaillée des projets de loi suivants, et ce, dans l'ordre
ci-après indiqué: le projet de loi d'intérêt
privé 230, Loi modifiant la charte de la ville de Montréal; le
projet de loi d'intérêt privé 228, Loi concernant la ville
de Saint-Laurent; le projet de loi 249, Loi modifiant la charte de la ville de
Laval, et le projet de loi 193, Loi sur le redressement des limites
territoriales de la municipalité de la paroisse de Sainte-Angèle;
le projet de loi 111, Loi modifiant la Loi sur la Communauté urbaine de
Québec, et, finalement, le projet de loi d'intérêt
privé 250, Loi modifiant la charte de la ville de Québec.
J'en profite pour dire immédiatement, à l'intention des
membres de l'Assemblée, mais surtout à l'intention des membres de
la commission de l'aménagement et des équipements, que, compte
tenu que ces projets de loi d'intérêt privé sont
étudiés aujourd'hui
devant cette commission, compte tenu également des indications
que nous avions selon lesquelles l'Opposition entendait s'opposer assez
farouchement à l'adoption du projet de loi 101 au nom du ministre du
Loisir, de la Chasse et de la Pêche, la commission ne sera pas
appelée à procéder à l'étude
détaillée du projet de loi 101 avant l'ajournement de nos travaux
et sera donc convoquée au cours de l'intersession avant la
rentrée parlementaire en mars.
Cela étant dit, Mme la Présidente, je voudrais
également aviser l'Assemblée qu'après les affaires
courantes, jusqu'à 13 heures, et, si nécessaire, de 15 heures
à 18 heures, à la salle 101 de l'édifice Pamphile-Le May,
la commission des institutions entendra les intéressés et
procédera à l'étude détaillée des projets de
loi d'intérêt privé suivants et ce, dans l'ordre
indiqué: le projet de loi privé 229, Loi modifiant l'acte pour
incorporer l'Institut Fraser, et le projet de loi 259, Loi concernant certains
immeubles du cadastre de la paroisse de La Malbaie.
Je voudrais également aviser l'Assemblée que,
conformément aux dispositions de l'article 28 de la Loi sur la
représentation électorale, la commission des institutions
procédera à l'étude du rapport préliminaire de la
Commission de la représentation électorale et ce, les 2, 3 et, si
nécessaire, 4 février 1988.
Finalement, je désire informer l'Assemblée qu'après
consultation avec l'Opposition et le député indépendant de
Gouin la commission des affaires sociales procédera à une
consultation générale sur la politique de santé mentale
les 5, 6, 7, 12, 13, 14, 19 et 20 janvier 1988 et ce, selon l'horaire que je
dépose à l'instant même.
La Vice-Présidente: Document déposé. Ceci
met fin aux avis touchant les travaux des commissions.
Renseignements sur les travaux de
l'Assemblée
Nous allons donc passer à la rubrique Renseignements sur les
travaux de l'Assemblée. Est-ce qu'il y a des renseignements sur les
travaux de l'Assemblée?
M. Gendron: II y en a toujours un. Ça fait quand
même à trois ou quatre reprises qu'on souhaite que la fameuse
liste des notaires demandée par mon collègue le
député de Shefford soit déposée. Je veux bien que
le leader du gouvernement nous dise qu'il en prend bonne note sauf que je
souhaiterais que le résultat soit meilleur jusqu'à ce jour.
La Vice-Présidente: Merci, M. le leader de
l'Opposition.
M. le leader du gouvernement.
M. Gratton: La dernière note que j'ai prise était
strictement mentale. J'en fais une note écrite et je répondrai
à cette demande demain.
La Vice-Présidente: Merci, M. le leader du
gouvernement.
Ceci met fin aux affaires courantes.
Nous allons maintenant passer à la rubrique Affaires du jour.
M. le leader du gouvernement.
M. Gratton: Je vous prierais d'appeler l'article 32, Mme la
Présidente.
Projet de loi 113
Prise en considération du
rapport de la commission
qui en a fait l'étude
détaillée
La Vice-Présidente: À l'article 32 de notre
feuilleton, le leader du gouvernement et ministre délégué
à la Réforme électorale propose l'adoption du rapport de
la commission de l'Assemblée nationale qui a étudié le
projet de loi 113, Loi modifiant le régime de pension et les autres
conditions de travail des membres de l'Assemblée nationale.
M. le leader du gouvernement et ministre délégué
à la Réforme électorale.
M. Gratton: Compte tenu qu'en commission parlementaire nous avons
effectivement adopté deux amendements et que ceux-ci sont d'ordre
strictement mineur et technique, je n'ai pas l'intention d'intervenir à
ce moment-ci, mais je me réserve évidemment le loisir et
j'entends intervenir au moment de l'adoption même du projet de loi qui
viendra demain.
La Vice-Présidente: Merci, M. le leader du
gouvernement.
M. le leader de l'Opposition et député
d'Abitibi-Ouest.
M. Gendron: À peu près pour les mêmes
raisons, je pense que lorsqu'on a à intervenir sur un rapport de
commission c'est qu'en commission parlementaire il s'est passé des
choses majeures, significatives et importantes. Je ne dis pas que le sujet ne
l'est pas, je dis qu'en commission on a eu à ratifier article par
article les engagements pris lors du débat de deuxième lecture en
principe. En conséquence, j'ai le même avis, je ne ferai pas de
débat mais j'indique également qu'en ce qui concerne l'Opposition
nous gardons, bien sûr, le privilège d'intervenir en
troisième lecture.
La Vice-Présidente: Merci, M. le leader
de l'Opposition.
Ceci met fin au débat. II n'y a pas d'autres intervenants de part
et d'autre? Je déclare le débat clos. Est-ce que le rapport de la
commission de l'Assemblée nationale sur le projet de loi 113, Loi
modifiant le régime de pension et les autres conditions de travail des
membres de l'Assemblée nationale, est adopté?
Des voix: Adopté.
La Vice-Présidente: Adopté. M. le leader du
gouvernement.
M. Gratton: Je vous prie d'appeler l'article 47 du feuilleton,
Mme la Présidente.
Projet de loi 90 Adoption
La Vice-Présidente: À l'article 47 de notre
feuilleton, la ministre des Affaires culturelles propose l'adoption du projet
de loi 90, Loi sur le statut professionnel et les conditions d'engagement des
artistes de la scène, du disque et du cinéma.
Mme la ministre des Affaires culturelles. (11 h 40)
Mme Lise Bacon
Mme Bacon: Mme la Présidente, c'est avec grand plaisir que
je présente aujourd'hui, pour adoption, le projet de loi 90 sur le
statut professionnel et les conditions d'engagement des artistes de la
scène, du disque et du cinéma. Cela me fournit l'ultime occasion
de réitérer, devant cette Chambre, ma plus vive satisfaction pour
le travail accompli et aussi pour le résultat que nos efforts
conjugués nous ont permis d'atteindre. Le projet de loi que je vous
soumets représente, en effet, l'aboutissement de plusieurs années
de ténacité et de persévérance des artistes et des
créateurs, et aussi de la volonté du gouvernement, malgré
la complexité du problème posé, de faire avancer la cause
qu'ils défendaient, soit celle de bénéficier d'un statut
professionnel adapté à leur contexte de travail et aussi d'un
régime de négociation d'ententes collectives avec ceux qui
retiennent leurs services professionnels.
Pour ma part, j'ai d'autant plus raison d'être satisfaite que la
démarche que j'avais déterminée au printemps 1986, en
convoquant une commission parlementaire sur le statut de l'artiste et du
créateur, a porté déjà plusieurs fruits, dont ce
projet de loi, et continuera d'en produire encore. En marge de la loi
proposée, les dossiers liés au statut de l'artiste progressent,
tant au ministère des Affaires culturelles qu'aux autres
ministères intéressés. Nous entamons également les
travaux qui nous permettront de résoudre les principales
difficultés vécues par les artistes dans des domaines qui ne sont
pas visés par le présent projet de loi.
Ce projet de loi fera en sorte qu'eux aussi soient dotés d'un
statut professionnel conforme à la réalité de leur
pratique artistique et qu'ils puissent profiter des bénéfices de
leurs oeuvres. La volonté et la détermination dont nous avons
fait preuve pour apporter une réponse adéquate aux artistes
visés par le présent projet de loi sont garantes de l'engagement
que nous prenons envers les créateurs dont les relations contractuelles
sont d'une nature autre que celle des relations du travail et qui, par
conséquent, ne pouvaient être touchées par ce
présent projet de loi.
Ce projet de loi, qui est soumis aujourd'hui à l'approbation de
l'Assemblée nationale, a franchi l'étape de la commission
parlementaire pour étude article par article. Nous avons tout de
même tenu à entendre au préalable les principaux
intéressés, puisque cette étape nous a permis d'apporter
des modifications qui l'améliorent et en clarifient des aspects
importants.
Je voudrais souligner ici la qualité d'écoute des membres
de la commission parlementaire et du député de Mercier, tout au
long des travaux que nous avons eus, de sorte que les amendements qui ont
été apportés ont presque tous été
adoptés à l'unanimité, sans altérer la philosophie
générale ni l'esprit du projet de loi. Les améliorations
que nous avons faites circonscrivent mieux sa portée et précisent
son champ d'application. Je voudrais aussi inclure le député de
Saint-Jacques que je vois présent en cette Chambre; il avait
été le porte-parole de l'Opposition lors de la première
commission parlementaire.
Pour les fins de l'établissement d'un régime de relations
du travail approprié aux liens contractuels entre les artistes et les
producteurs, nous avons prévu des dispositions reconnaissant
juridiquement que les artistes sont réputés exercer leur art
à leur propre compte, si un ou plusieurs producteurs retiennent leurs
services professionnels pour des prestations déterminées. Cette
présomption établit clairement que les rapports entre les deux
parties ne créent pas de liens de subordination. En conséquence,
les contrats collectifs échappent aux lois habituelles des relations du
travail et aux règles courantes de la négociation. Aussi,
avons-nous défini un régime spécifique conférant
aux artistes des droits et obligations analogues à ceux impartis aux
autres catégories de travailleurs salariés. Ces droits
fondamentaux sont le droit d'association et le droit à la
négociation des conditions d'engagement.
Le présent projet de loi légalise des
pratiques existantes et leur assure un support juridique, tout en
donnant la possibilité à des associations professionnelles qui
n'ont pas d'ententes d'en conclure si les membres le souhaitent. Nous avons
construit un cadre qui fixe les règles du jeu, mais suffisamment ouvert
au dynamisme et à l'évolution des milieux artistiques pour qu'il
ne serve pas d'étouffoir ni à la création, ni aux jeunes
artistes, ni aux producteurs. Il nous a fallu créer un espace qui allie
la liberté de l'artiste d'adhérer à une association,
à ses obligations s'il tire profit des ententes conclues par cette
association. Nous avons également dû préserver un juste
équilibre entre la stabilité nécessaire aux associations
reconnues et les possibilités d'exercice d'une saine démocratie
pour laquelle pourront être révisés tant les secteurs de la
négociation que les structures de représentation des artistes.
 cet égard, les amendements apportés en commission
parlementaire assurent une plus grande stabilité aux associations en
prévoyant que leur représentativité ne puisse être
remise en question qu'à un moment fixe, soit aux trois ans, après
l'obtention d'une reconnaissance.
En accordant le droit à la négociation, nous
entérinons des pratiques qui ont cours, mais qui reposent
essentiellement sur la bonne foi des parties. Il n'y a aucune raison de croire
que là où elle existe cette bonne foi disparaîtra. Il
s'agit de la faire surgir si elle a tardé à se manifester et de
l'animer par des rapports civilisés à l'abri de règles
tacites et informelles. Notre objectif, Mme la Présidente, n'est pas
d'instaurer des déséquilibres, encore moins de mettre nos
industries culturelles en péril.
En tant qu'État, nous disposons de leviers importants qui servent
à protéger les secteurs plus fragiles de notre
développement. Nous nous en servons par nos politiques, par nos
programmes, par nos lois, par nos règlements afin d'harmoniser nos
actions envers les arts et les industries culturelles. Dans cet ensemble de
moyens, il n'est que raisonnable que les artistes en tirent leur juste part et
qu'ils ne soient plus ceux qui, selon le constat de l'UNESCO, supportent le
poids de l'industrie tout en étant ceux qui en bénéficient
financièrement le moins.
Je suis convaincue que les milieux culturels québécois ont
la maturité requise pour accepter le dialogue franc et ouvert
exigé par leur situation d'interdépendance. Ils y sont
invités en disposant d'un cadre clair, démocratique et objectif
pour le faire. La commission de reconnaissance des associations d'artistes,
dont nous proposons la création, sera appelée à jouer un
rôle important dans l'application de la loi. Chargée notamment de
définir les secteurs de négociation et d'accorder la
reconnaissance à l'association qui représen- tera les artistes de
ce secteur, elle devra exercer son mandat avec doigté et clairvoyance de
manière à favoriser la protection du statut professionnel des
artistes en harmonie avec le développement des entreprises de
production. Pour cela, nous verrons à doter cette commission des
compétences requises. Nous verrons aussi à assurer son
intégrité et son impartialité. Nous prévoyons
qu'elle soit à l'oeuvre dès avril prochain.
Comme ministre des Affaires culturelles, Mme la Présidente, j'ai
le profond sentiment d'avoir rempli un aspect important de ma tâche. Le
travail n'est cependant pas terminé. C'est avec la même
énergie, la même détermination et avec la collaboration de
tous mes collègues que je le poursuivrai dans les mois qui viennent. Mes
priorités seront mises, d'une part, sur l'examen détaillé
de la situation des créateurs en arts visuels, en littérature, en
métiers d'art selon le résultat de cet examen qui sera fait en
collaboration avec les artistes impliqués. Le tout pourrait très
bien faire l'objet d'un deuxième projet de loi.
D'autre part, avec mes collègues du ministère du Revenu,
du ministère des Finances, nous verrons à dégager une
solution acceptable et juste aux questions fiscales qui nous ont
été soumises. Plusieurs autres dossiers devront être
traités, notamment celui du budget du ministère des Affaires
culturelles, et ce n'est pas le moindre.
En proposant ce projet de loi novateur dans sa facture et par son objet,
le gouvernement pose un geste sans précédent en Amérique
du Nord. Une telle innovation était attendue des artistes depuis trop
longtemps. Nous avons mis en oeuvre ce qu'il fallait pour leur donner la
reconnaissance professionnelle qu'ils réclamaient, appuyés en
cela par la population entière. Nous assumons ainsi une double
responsabilité de l'État: celle d'accorder des droits à
des créateurs et interprètes et les moyens de les faire
respecter. Je pense que ces créateurs et interprètes nous font
bénéficier de leur talent, et que nous avons aussi la
responsabilité de créer pour eux un environnement propice au
développement des arts dans le contexte particulier, ce contexte
culturel particulier et distinct du Québec. Merci. (11 h 50)
La Vice-Présidente: Merci, Mme la ministre des Affaires
culturelles. M. le député de Mercier.
M. Gérald Godin
M. Godin: Mme la Présidente, je pense que ce jour-ci est
un jour historique pour le milieu culturel québécois. Il est
sûr que l'Opposition joint sa voix à celle de la ministre pour
féliciter le gouvernement, une
fois de plus, comme on l'a fait hier. Je tiens aussi à souligner
que le processus d'adoption de ce projet de loi en commission parlementaire a
été un modèle du genre, pour ce qui touche la
collaboration et la bonne entente. Donc, le modus vivendi illustre, je pense,
l'importance que, des deux côtés de la Chambre, on attache
à ce statut et au rôle que les artistes jouent dans le
Québec.
Je voudrais aussi souligner la présence de nos collègues
des deux côtés de la Chambre et déplorer qu'on ne soit pas
plus nombreux à encourager la ministre à poursuivre son oeuvre.
Mme la Présidente, je souligne qu'il y en a parmi nos collègues
qui sont ici, je les félicite, mais j'eusse aimé qu'il y en
eût davantage. Ce n'est pas un reproche à personne. C'est
peut-être la mesure que l'on peut prendre de l'importance que tous nos
collègues d'ici, des deux côtés de la Chambre, attachent
à ces questions culturelles. Je souhaiterais dans l'avenir qu'il y ait
encore plus d'appui et une espèce de coalition des députés
pour appuyer la ministre et le ministère dans ses efforts
considérables, depuis qu'elle est là surtout, pour que les
artistes québécois franchissent un pas de plus.
Maintenant, il est sûr, dans la reconnaissance sociale, fiscale et
économique de leur rôle dans le Québec, dans la
société québécoise... Nous pouvons dire en
conclusion que le boulot a été fait et a été bien
fait. Je souligne la présence dans nos galeries du président de
l'Union des artistes et d'un des fondateurs du milieu culturel
québécois, M. Gratien Gélinas, un comédien que tout
le monde respecte. C'est bien lui. On peut dire qu'eux ils y croient, Mme la
Présidente, et que c'est parce qu'ils y croient et qu'ils y ont cru que
nous avons maintenant à adopter la loi sur le statut de l'artiste, qui
confirme, je le répète, l'importance que la création a
pour tous les gouvernements et tous les partis du Québec actuellement,
dans le passé et dans l'avenir.
Mme la Présidente, merci à ceux qui ont poussé les
gouvernements à agir. Merci aux gouvernements qui ont agi. Merci aussi
à ceux qui ont réfléchi et moins agi. D'un commun accord,
nous tous de ce côté-ci... C'est clair, M. le député
de Portneuf, c'est clair? Donc, nous endosserons ce projet de loi de
gaieté de coeur, Mme la Présidente, et avec enthousiasme.
Merci.
La Vice-Présidente: Merci, M. le député de
Mercier. Il n'y a pas de réplique?
M. Boulerice: Mme la Présidente.
La Vice-Présidente: M. le député de
Saint-Jacques.
M. André Boulerice M. Boulerice: Je vous en prie. Vous
comprendrez, Mme la Présidente, mon intérêt face à
cette loi qui sera adoptée à l'unanimité de
l'Assemblée nationale. Intérêt du fait que j'étais
déjà, à l'époque de la première consultation
jusqu'au mois d'août dernier, responsable de ce dossier pour
l'Opposition. Intérêt encore, Mme la Présidente, puisque
c'est su et connu de tous que j'ai depuis toujours ce dossier à coeur et
que je l'aurai à jamais puisque cela fait partie de ma
personnalité. Mais mes premières paroles iront avant tout
à celles et ceux qui par leur art permettent aux Québécois
et aux Québécoises d'échapper à la grisaille de la
vie quotidienne et qui illustrent avec talent le caractère de cette
société française d'Amérique qu'est la
nôtre.
Sur scène, au théâtre, sur disque, au cinéma,
à la télévision, vous contribuez, vous, gens du milieu de
la culture, à une des premières qualités de la vie. Comme
le disait hier soir à la télévision le président de
l'Union des artistes, M. Turgeon, cette loi est une victoire de
société et c'est une victoire parce qu'aucun des intervenants n'a
joué l'égoïsme, mais plutôt la solidarité.
Comme je l'ai souvent dit, tous sont venus ici solidairement et conjointement.
Force m'est également de constater que la commission qui a
procédé à l'étude détaillée du projet
de loi a bien fait son travail puisque l'Opposition officielle, autant que le
parti gouvernemental, était en contact constant, ce qui a permis une
rédaction d'amendements qui ont satisfait les parties
concernées.
Cela est un pas significatif, Mme la Présidente. Cela doit
être aussi un premier pas d'une marche qui nous conduira à
d'autres reconnaissances pour le milieu de la culture. Puisque nous discutons
ici des choses de l'esprit - telle est ma définition de la culture et
j'aime le rappeler - et que la culture incite au dépassement autant de
la part de ceux et celles qui interprètent que de celui ou celle qui
reçoit, je puis assurer le milieu de la culture que le
député de Saint-Jacques, membre de la commission de la culture,
dont la circonscription est sans doute un chef-lieu du monde culturel, autant
montréalais que québécois dans son sens national, que ce
député se fera toujours un devoir et très
assurément un très grand plaisir d'être à leurs
côtés, quel que soit le côté de la Chambre où
il se trouvera.
Je vous offre donc, Mme la ministre, de nouveau ma plus entière
collaboration dans tout ce qui sera bon pour le milieu de la culture. Je
profiterai, encore une fois égoïstement, et je pense que vous y
consentirez bien volontiers, de l'occasion, puisqu'on a mentionné la
présence de M. Turgeon dans nos galeries, pour souligner le 50e
anniversaire d'une des plus prestigieuses organisations culturelles du
Québec, située
dans la circonscription de Saint-Jacques, et je parle, vous le savez
tous, de l'Union des artistes. Cela aussi ajoute à ma fierté
d'être député de Saint-Jacques. J'ose espérer que,
de toute façon, comme nous ne siégeons pas dimanche soir, les
gens, forcément, délaisseront la télévision des
débats et suivront plutôt ce gala du 50e anniversaire de l'Union
des artistes qui sera diffusé, à moins que je ne me trompe, sur
toutes les chaînes nationales au Québec.
Au début de la commission parlementaire, en 1986, j'invitais la
partie gouvernementale à vivre avec l'Opposition le temps d'une paix
pour la culture. Voilà que nous l'avons vécu et que, aujourd'hui,
nous adopterons à l'unanimité une loi à laquelle nous
souscrivons entièrement et que, en définitive, nous sommes
peut-être en train de vivre, puisqu'il faut emprunter encore à un
grand titre, une des belles histoires des Pays d'en-haut. Je vous remercie, Mme
la Présidente.
Mes meilleurs voeux de succès à l'Union des artistes et ma
plus profonde considération envers vous, Mme la vice-première
ministre.
La Vice-Présidente: Merci, M. le député de
Saint-Jacques. M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de
l'Alimentation.
M. Michel Pagé
M. Pagé: Merci, Mme la Présidente. J'interviens,
évidemment, pour souligner l'importance de ce projet de loi. Je le fais
non seulement comme ministre, mais aussi et surtout comme député
de Portneuf. Le projet de loi 90 reçoit aujourd'hui son étape
définitive, l'étape de l'adoption, un projet de loi qui
était attendu, un niveau d'intervention qui était
souhaité. Je peux vous indiquer, pour avoir eu le privilège de
siéger, ici, à l'Assemblée nationale du Québec,
depuis bientôt quinze ans, que c'est à plusieurs reprises que nous
nous sommes penché sur ce sujet, combien important, combien fondamental,
en fait, pour les artistes, pour celles et ceux qui, dans leur vécu
quotidien, y travaillent, y occupent et y investissent de l'espoir, celles et
ceux qui se sont conviés à une formation visant à la
diffusion des arts. Combien de fois avons-nous eu ici l'occasion de nous
pencher, de réfléchir, de nous questionner, de faire de
propositions sur le statut de l'artiste et sur quelle assise juridique il
devrait s'asseoir. (12 heures)
Je peux vous indiquer, Mme la Présidente, que c'est avec beaucoup
de fierté que nous avons suivi comme collègues le rôle
éminemment important, le rôle essentiel joué par ma
collègue, Mme la vice-première ministre et ministre des Affaires
culturelles du Québec.
Vous savez, pour notre gouvernement, lorsque, par nos actions, par nos
lois, par nos réglementations, par nos représentations, par nos
déclarations, on évoque le renforcement culturel du
Québec, cela passe non seulement par des ententes comme celle de
l'accord du lac Meech, cela passe non seulement par une intention très
claire, très ferme, très déclarée, très
vigilante de protéger notre langue, mais cela passe aussi par la
promotion. Cela passe également - cela doit passer - par un support
adéquat, par un support renforcé qui était, par
sucroît, attendu depuis plusieurs années à l'égard
de celles et ceux qui s'occupent et qui travaillent dans la diffusion des
arts.
C'est ainsi qu'en 1986, quand ma collègue a appelé une
commission parlementaire, certains se sont peut-être interrogés en
se disant: Sommes-nous encore conviés à un exercice
d'échanges et de discussions qui permettra de faire avancer un peu le
dossier pour peut-être conduire à un livre d'une couleur
quelconque, peut-être conduire à un avant-projet de loi? Ce
dossier attendait depuis tellement longtemps, ce dossier avait fait tellement
l'objet de rhétorique plutôt que l'objet d'actions
concrètes qu'il était tout à fait explicable que certains
intervenants du milieu se questionnent sur l'opportunité ou, en fait, le
résultat de cette démarche. Aujourd'hui, cependant, on doit
unanimement reconnaître que la démarche de la commission
parlementaire de 1986 constituait pour nous une étape importante, mais
qui devait conduire à des actions concrètes. Ces actions
concrètes ont été démontrées par le projet
de loi 90 qu'a déposé ma collègue, ici, à
l'Assemblée.
Je vais être bref, Mme la Présidente. Je voudrais vous dire
qu'une des actions les plus légitimes, les plus fondamentales pour toute
société, pour toute collectivité, c'est de s'assurer du
dynamisme de l'interaction du développement de ses arts, de sa culture,
de sa musique, de ses lettres, de son théâtre.
Aujourd'hui, peut-être que parmi celles et ceux qui nous
écoutent à la télévision, celles et ceux qui
prendront connaissance des lois qui sont adoptées, certains se diront:
Ils ont adopté une loi au Parlement de Québec visant a donner un
encadrement et tracer des avenues, établir des bases susceptibles de
sécuriser davantage nos artistes québécois. Mais c'est
beaucoup plus que cela. Les leviers qui sont créés, le contexte
qui est créé, les avenues qui sont ouvertes, les chemins qui sont
tracés dans le milieu des arts par le projet de loi 90 constituent un
acquis et un plus, non seulement pour celles et ceux qui sont concernés,
mais pour l'ensemble de la société québécoise.
C'est une loi qui aura des effets non seulement immédiats, mais qui aura
une portée positive profitable, bonifiante pour l'ensemble de
notre société et on doit rendre un hommage pour la
farouche détermination et la solidité qu'a témoigné
ma collègue, Mme la ministre des Affaires culturelles, qui a non
seulement épousé cette cause, mais qui sait - c'est explicable,
avec sa force, son expérience -non seulement bien plaider, mais
convaincre ses collègues et le Conseil des ministres.
Je voudrais donc, au nom de mes collègues, rendre hommage
à - on peut la nommer - Mme Bacon, la féliciter. Même si
c'est un pas important qui est posé par le projet de loi 90, nous sommes
bien conscients qu'il reste encore beaucoup de chemin à faire. Mais
connaissant sa détermination, sa motivation, je suis d'ores et
déjà convaincu que les autres éléments de ce
dossier seront menés à terme positivement.
Je voudrais évidemment m'associer à mes collègues
pour rendre hommage à l'Union des artistes qui célèbre son
50e anniversaire cette année. On sait qu'en fin de semaine la
très grande majorité des Québécoises et des
Québécois seront probablement rivés au petit écran
pour écouter leur gala d'anniversaire et je serai moi-même un de
ces spectateurs dimanche soir, le 20. Je voudrais les féliciter, leur
rendre hommage. Que d'années de labeur dans des conditions pas faciles:
le développement de la radio, l'arrivée de la
télévision, des mutations constantes dans le milieu des arts et
de la culture. Ils se sont adaptés, ils ont su être audacieux.
Comme je l'écrivais dans une petite carte que j'adressais au
président, parce qu'on a signalé cet événement par
une communication à chacun des députés: "Nous sommes fiers
de nos artistes et nous souhaitons qu'ils puissent continuer à
témoigner d'autant d'audace et parfois même à bousculer des
habitudes." Merci, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente: Merci, M. le ministre de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation. Il n'y a pas d'autre
intervention? Je déclare le débat clos. Est-ce que le projet de
loi 90, Loi sur le statut professionnel et les conditions d'engagement des
artistes de la scène, du disque et du cinéma, est
adopté?
Des voix: Adopté.
Une voix: À l'unanimité.
La Vice-Présidente: Adopté. Mme la ministre des
Affaires culturelles.
Mme Bacon: Mme la Présidente, je vous demanderais
d'appeler l'article 35 de notre feuilleton.
Projet de loi 59 Adoption
La Vice-Présidente: À l'article 35 de notre
feuilleton, la ministre des Affaires culturelles propose l'adoption du projet
de loi 59, Loi modifiant la Loi sur le cinéma et la Loi sur la
Société de développement des industries de la culture et
des communications. Mme la ministre des Affaires culturelles.
Mme Lise Bacon
Mme Bacon: C'est décidément le matin de la culture,
Mme la Présidente. J'aimerais vous dire que nos industries culturelles
sont importantes et nous le prouvons ce matin en adoptant deux lois du
ministère des Affaires culturelles. Je propose donc à cette
Chambre l'adoption du projet de loi 59 prévoyant des modifications
à la Loi sur le cinéma et à la Loi sur la
Société de développement des industries de la culture et
des communications.
Ce projet poursuit l'objectif de consolider un secteur d'activité
où les enjeux économiques et culturels sont majeurs pour le
Québec. Cette loi vise en effet à rendre plus cohérentes
les actions et les interventions du gouvernement du Québec dans les
secteurs des industries culturelles, des communications et du cinéma.
Les industries culturelles sont une composante essentielle de notre
développement et le Québec doit inclure les industries
culturelles dans ses projets de développement économique de
prestige, ceux qui véhiculent à l'étranger l'image de ce
que nous sommes, c'est-à-dire une société riche en
artistes, créateurs et producteurs. L'apport économique des
industries culturelles est important, mais ces industries demeurent fragiles.
Elles le sont, parce que leur production en est une à risques
élevés. De plus, elles rencontrent la concurrence des
multinationales, alors qu'elles sont de petites et moyennes entreprises dont
les difficultés de financement sont très grandes.
Nos industries culturelles ont une autre difficulté, celle de
trouver le financement nécessaire à leurs activités
auprès des institutions financières. Les banques hésitent
à financer une production culturelle en raison du risque que comporte ce
type de produit. Le Québec a trouvé une solution originale au
soutien des industries culturelles en créant des sociétés
d'État qui avancent à ces industries des capitaux qu'elles ne
peuvent trouver auprès des autres institutions financières. (12 h
10)
En effet, depuis maintenant neuf ans, la SODICC intervient dans le
secteur culturel en favorisant la création et le développement
d'entreprises culturelles, ce qui contribue à accroître la
qualité de leurs produits, leur
authenticité et leur compétitivité. Quant à
la Société générale du cinéma du
Québec, par ses programmes d'aide, elle soutient qua-tre principales
étapes de l'activité cinématographique: le
développement constitué de la scénarisation et de la
recherche, la production, la diffusion et la promotion. Mais il y a
également des interventions législatives, comme la loi sur le
livre, la Loi sur le cinéma, qui favorisent aussi les entreprises
québécoises sur le marché domestique.
Toutes ces mesures qui viennent compenser, d'ailleurs, en partie
seulement, pour l'étroitesse du marché ont permis à nos
entreprises, grâce à la force de nos créateurs et artistes
de même qu'au dynamisme des gens d'affaires qui oeuvrent dans ce domaine,
d'atteindre des résultats intéressants. C'est ainsi que le
paysage s'est sensiblement modifié depuis quelques années et que
nous assistons aujourd'hui à une véritable structuration, que ce
soit dans le secteur de l'audiovisuel, du cinéma ou ailleurs.
Par la loi 109, adoptée à l'unanimité par
l'Assemblée nationale en juin 1983, le Québec entreprenait une
réforme dans le domaine du cinéma. Un des objectifs prioritaires
de cette loi-cadre était la redéfinition du partage du
marché intérieur québécois entre les entreprises
d'ici et les entreprises étrangères. La loi établissait
des règles susceptibles de permettre la réappropriation du
marché de la distribution par les distributeurs québécois
et ce, par l'instauration de mesures d'encadrement de la profession. Un autre
élément était l'augmentation des fonds destinés au
secteur privé du cinéma et la création d'un organisme de
gestion de ces crédits annuels.
Cependant, lors de mon arrivée au ministère des Affaires
culturelles en décembre 1985, j'ai pu constater qu'un certain nombre de
problèmes subsistaient. À défaut de la mise en vigueur des
règlements qui y sont prévus, toute une partie de la loi
demeurait inopérante. Or, il s'agit de règlements d'une
portée significative pour l'industrie puisqu'ils contribueront à
modifier le cadre actuel du fonctionnement de l'industrie du cinéma dans
le sens souhaité par le législateur. L'entente intervenue
l'année dernière avec la Motion Picture Export Association of
America a ouvert la voie à la mise en application des règlements
attendus avec impatience par l'industrie québécoise. Je tiens
à informer cette Chambre que le Conseil des ministres a approuvé,
hier, les règlements adoptés par la Régie du
cinéma, qui sera en mesure de les appliquer effectivement à
compter du mois de février prochain.
Il est devenu manifeste, après une expérience de quatre
ans de la Loi sur le cinéma et de neuf ans de la Loi sur la
SODICC, que des corrections aux plans organisationnel et structurel des
deux lois apporteraient des améliorations substantielles sur le plan du
fonctionnement du secteur des industries culturelles. Ce projet de loi
prévoit donc l'intégration de la Société
générale du cinéma du Québec et de la
Société de développement des industries de la culture et
des communications et les fonctions dévolues aux deux
sociétés seront, à l'avenir, exercées par la
société désignée sous le nom de
Société générale des industries culturelles ou sous
le sigle de SOGIC.
Un autre objectif du projet de loi 59 concerne la clarification des
rôles et la simplification de certains processus administratifs.
L'Institut québécois du cinéma, constitué de
professionnels de l'industrie cinématographique, pourrait à
l'avenir jouer pleinement son rôle de conseil, qui est renforcé et
facilité. Ainsi, la relation de l'institut avec la ministre titulaire de
la loi sera directe, sans lien formel avec la Société
générale du cinéma du Québec. Quant à la
définition des règles régissant l'industrie du
cinéma, qui ont une incidence et un impact directs sur le
développement de cette industrie, elle revient au gouvernement et la
régie verra à l'application de ces règlements.
D'autres modifications ont aussi été apportées,
dont bénéficieront des industries, mais également le grand
public et les cinéphiles en particulier. J'ai déjà
largement fait état de ces modifications qui concernent le commerce du
matériel vidéo qui sera dorénavant
réglementé, ce qui permettra de mieux contrôler la
piraterie fortement pratiquée dans ce secteur d'activité et aussi
de répondre à la question de classification du matériel
vidéo.
Il était également urgent qu'une meilleure solution soit
trouvée en ce qui concerne la langue des films présentés
en salle. L'objectif de l'article 83 de la Loi sur le cinéma est
d'assurer la présence du français sur les écrans. Moins de
deux ans après l'entrée en vigueur de l'article, l'objectif n'est
pas encore atteint. Le problème est fort simple. L'esprit de la loi est
contourné et on utilise à profusion des échappatoires de
l'article 83. La modification que nous avons retenue est de resserrer l'article
83 sans en changer la structure, de permettre aussi une application souple et
une possibilité d'adaptation au comportement de l'industrie.
La constitution d'une société de financement en
matière d'industries culturelles avec des moyens d'intervention
efficaces constitue une étape importante dans le développement de
ce secteur. Et l'entente intervenue avec les Américains et la mise en
vigueur sous peu de la réglementation représentent autant de
gestes qui
permettront de consolider ce secteur d'activité. Mais,
déjà, d'autres questions surgissent qui demandent aussi des
solutions appropriées. Au cours des consultations qui ont eu lieu ces
derniers mois, les propriétaires de salles ont fait état des
difficultés rencontrées par les propriétaires
indépendants et il est manifeste que la Loi sur le cinéma n'est
pas très loquace sur l'exploitation des films en salle.
Par ailleurs, j'estime qu'il vaut mieux attendre plutôt que d'agir
à l'aveuglette. Je me propose donc de mandater un groupe de travail,
auquel j'associerai l'Institut québécois du cinéma, pour
examiner tout le dossier de l'exploitation en salle et je demanderai de me
faire rapport avant l'été prochain. Ce mandat portera sur des
aspects tels que la propriété des salles; la
propriété des salles commerciales est concentrée à
70 % entre les mains de deux grands circuits. Il portera aussi sur
l'accessibilité des films en régions, parce qu'on sait que les
salles continuent à fermer; la question de la rénovation des
salles sera aussi étudiée, les catégories de permis de
salle, la sortie des films en salle par rapport à la sortie en
vidéo. Toutes ces questions doivent trouver des réponses
appropriées, doivent trouver aussi des solutions adéquates comme
celles présentées à cette Chambre concernant les
modifications proposées par le projet de loi 59.
Les enjeux pour le Québec dans le domaine culturel et
particulièrement en ce qui concerne les industries culturelles sont
importants et je sollicite donc de l'Opposition son accord, son appui, afin que
nous puissions, comme ce fut le cas en 1983 lors de l'adoption de la Loi sur le
cinéma, arriver encore une fois à une décision unanime en
cette matière. Merci, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente: Merci, Mme la ministre des Affaires
culturelles. M. le député de Mercier.
M. Gérald Godin
M. Godin: Mme la Présidente, les esprits superficiels
pourraient croire que c'est l'esprit de Noël qui envahit le Parlement -
c'est parce qu'il y a unanimité que je le garantis à la ministre
- mais je pense que c'est plus profond que ça. Je pense que, face
à des lois qui vont dans le sens du développement culturel du
Québec, fondamentalement les deux côtés de la Chambre sont
d'accord. Nous sommes conscients tous les deux, aussi bien le Parti
libéral que le Parti québécois, que la culture est
l'émanation de la réalité profonde du Québec. Donc,
nous voterons pour ce projet de loi et nous assurons la ministre que, quand le
gouvernement travaille bien comme maintenant, comme dans le cas des projets de
loi 90 et 59, il trouve devant lui non pas une Opposition systématique,
mais un appui, un soutien et je dirais un complice dans certains cas parce que,
le but visé étant tout à fait louable, nous ne pouvons
qu'appuyer ce projet de loi.
En revenant à l'esprit de Noël, je dirai en terminant: Paix
sur la terre aux parlementaires de bonne volontél Merci beaucoup.
La Vice-Présidente: Merci, M. le député de
Mercier.
Je constate qu'il n'y a pas d'autre intervention. Je déclare le
débat clos. Est-ce que le projet de loi 59, Loi modifiant la Loi sur le
cinéma et la Loi sur la Société de développement
des industries de la culture et des communications, est adopté?
Des voix: Adopté.
La Vice-Présidente: Adopté. Mme la ministre des
Affaires culturelles.
Mme Bacon: Je vous demanderais d'appeler l'article 13, Mme la
Présidente. (12 h 20)
Projet de loi 94 Adoption du principe
Le Vice-Présidente: À l'article 13 de notre
feuilleton, le ministre délégué à la Famille,
à la Santé et aux Services sociaux propose l'adoption du principe
du projet de loi 94, Loi sur le Conseil de la famille. M. le ministre
délégué à la Famille, à la Santé et
aux Services sociaux.
M. Robert Dutil
M. Dutil: Merci, Mme la Présidente. La semaine
dernière, nous avons déposé un projet de loi qui institue
un organisme, le Conseil de la famille, qui aura pour fonction de conseiller le
ministre sur toute question d'intérêt familial. Le conseil
assumera une partie des fonctions du Conseil des affaires sociales et de la
famille, dont le nom et la loi sont modifiés en conséquence.
Ce dépôt de projet de loi sur le Conseil de la famille
vient d'une décision gouvernementale que nous avons prise et que nous
avons regroupée dans un énoncé de politique rendu public
également la semaine dernière. Je pense qu'il est important de
faire le tour de cet énoncé de politique avant d'aller plus avant
sur le Conseil de la famille, afin de bien montrer que le Conseil de la famille
fait justement partie d'un tout, d'une orientation, que le Conseil de la
famille vient en appui à une politique que le gouvernement entend
préconiser dans les années à venir.
Cet énoncé des orientations et de la dynamique
administrative de la politique familiale du gouvernement du Québec se
retrouve dans un document d'environ une quinzaine de pages où, en tout
premier lieu, nous identifions diverses réalités de la famille
dans la société québécoise. Bien des sondages, bien
des enquêtes - on le mentionne dans ce texte - ont
révélé à maintes reprises que la famille demeure la
première valeur dans la vie des personnes. Dans l'introduction, nous
montrons diverses statistiques concernant le nombre d'enfants dans les
familles, nous montrons aussi des différences fondamentales entre la
famille d'aujourd'hui et celle d'hier, par exemple, dans les pourcentages de
mariages et d'unions de fait, dans les séparations légales et les
divorces, dans la proportion croissante de familles monoparentales, dans la
présence accrue de mères sur le marché du travail,
présence qui, pour les plus jeunes couples, va maintenant au-delà
de 70 %. Nous montrons également diverses statistiques concernant la
natalité au Québec, le problème de la natalité dont
on parle tant, qui fait partie de l'ensemble de la problématique de la
famille, qui, comme nous l'avons mentionné, est une préoccupation
du gouvernement, bien sûr, mais qui, il est important de le dire et de le
répéter, n'est quand même pas la seule préoccupation
du gouvernement du Québec concernant la famille.
De cet exposé, nous avons déduit les justifications et les
raisons de l'intervention de l'État en matière familiale. Nous
avons dégagé certains principes de base fort importants qu'il est
bon de rappeler à cette Assemblée, le premier étant que la
famille est une valeur collective fondamentale; le second, que le gouvernement
a la volonté de contribuer à la cohésion et à la
stabilité de la famille et de tenir compte davantage de la
spécificité de la réalité familiale; et le
troisième, que le gouvernement veut soutenir les parents à titre
de premiers responsables légaux et sociaux de la prise en charge des
enfants, évitant de se substituer à eux, tout en
protégeant l'intérêt de l'enfant.
Il est important de revenir sur ces trois principes de base, à
tour de rôle, et de les expliquer davantage. Le premier, c'est que la
famille est une valeur collective fondamentale. Il ne faudrait pas minimiser ce
point fort important, dans le discours, non seulement des hommes politiques,
mais également des autres leaders sociaux, les leaders
économiques. Il est important de dire et de répéter que,
dans la société, on ne doit plus tenir la famille pour acquise,
mais que la famille est une valeur collective fondamentale.
Quant à la volonté de contribuer à la
cohésion et à la stabilité de la famille et de tenir
compte davantage de sa spécificité, pour ceux qui connaissent le
fonctionnement d'un gouvernement, c'est probablement l'un des aspects les plus
importants de la politique que nous avons rendue publique la semaine
dernière et que j'explique ici, aujourd'hui.
Dans l'appareil gouvernemental, dans l'ensemble des ministères
impliqués dans la politique familiale - nous les
énumérerons tout à l'heure, nous en préciserons le
contour - il est important qu'il y ait des gens qui se préoccupent de ce
qui touche indirectement ou directement la famille. Je pense que c'est un des
aspects qui a été négligé dans le passé et
qui fait qu'on se retrouve, aujourd'hui, dans des situations où des
mesures d'un ministère viennent, sous l'aspect de la famille, contredire
des mesures que l'on retrouve dans d'autres ministères. Ce principe de
base est énoncé d'une façon claire, précise et le
gouvernement - et nous verrons plus tard de quelle façon il entend le
faire - tient à ce que cette spécificité de la
réalité familiale soit tenue en compte dans les ministères
qui seront touchés par la politique familiale.
Le troisième principe, fort important également, est celui
de soutenir les parents en évitant de se substituer à eux. Il a
d'ailleurs fait l'objet d'une motion adoptée à l'unanimité
de l'Assemblée nationale et sur laquelle je reviendrai tout à
l'heure, la motion du 29 octobre. Ce sont les parents qui sont les premiers
responsables légaux et sociaux de la prise en charge des enfants. C'est
d'abord et avant tout à eux que l'État doit s'adresser, c'est
d'abord et avant tout eux que l'État doit soutenir en essayant
d'éviter de se substituer à eux et, nous le précisons bien
sûr, tout en protégeant l'intérêt de l'enfant.
De ces principes de base, nous avons déduit une orientation
générale. Précisons que cette politique s'appliquera,
d'une façon horizontale c'est-à-dire qu'elle s'appliquera
à un ensemble de ministères. Il y aura des interventions faites
par le ministre délégué à la Famille et par les
structures que nous mettons en place dans l'ensemble des ministères
concernés.
Et nous en arrivons à l'objectif général de la
politique familiale, qui se lit comme suit: Reconnaître l'importance de
la famille en tant qu'institution et milieu de vie, notamment par le soutien
collectif aux parents qui sont les premiers responsables de la prise en charge
des enfants et du milieu familial. De cet objectif général de la
politique familiale découlent les objectifs fonctionnels suivants.
D'abord, faire en sorte que chaque ministère et organisme gouvernemental
concerné assume la dimension familiale et l'intègre dans ses
politiques et programmes. C'est ce que l'on appelle "penser famille", tenir
compte de la famille, savoir l'effet que peuvent avoir nos politiques sur les
familles du Québec.
B. Assurer la concertation gouvernementale nécessaire, en
particulier sur le plan de la cohérence et de la concordance des
politiques qui doivent répondre à l'objectif
général de la politique familiale. Cohérence,
cohésion sont deux termes qui reviendront souvent dans notre bouche, qui
sont fort importants. Il s'agit d'éviter que des politiques d'un
ministère, faute de s'être concerté, viennent annuler des
politiques d'autres ministères en ce qui concerne les bienfaits
accordés à la famille par le gouvernement.
C. Assurer la même concertation gouvernementale pour faciliter,
aux différents ministères et organismes gouvernementaux,
l'harmonisation requise avec les autres niveaux de gouvernement et milieux
responsables du soutien à apporter aux parents et autres membres de la
famille. Ce qui est indiqué ici c'est que le gouvernement n'est
évidemment pas le seul intervenant en matière de politique
familiale. Les autres intervenants, on peut nommer les principaux rapidement,
sont, bien sûr, le milieu de travail, le milieu patronal, le milieu
syndical, qui sont évidemment fortement concernés comme l'un des
endroits où les gens passent le plus de temps et où les gens
doivent trouver des moyens de coordonner leurs activités de travail avec
leurs responsabilités parentales. On peut également nommer le
milieu scolaire, on peut nommer le milieu municipal, ne fût-ce que sous
l'aspect des loisirs, qui est la responsabilité première au
niveau municipal et, évidemment, le milieu familial lui-même.
(12 h 30)
En D, dans les objectifs fonctionnels toujours, le gouvernement souhaite
favoriser l'expression des familles à l'égard du
développement de la politique familiale. C'est là le premier but
du projet de loi que nous présentons aujourd'hui, la Loi sur le Conseil
de la famille, qui permettra aux organismes familiaux, aux gens qui dans la
société sont plus directement intéressés, plus
directement concernés par la famille et qui, je tiens à le
préciser, depuis de nombreuses années - pour certains organismes
- on parle d'une quinzaine d'années - demandent, exigent, travaillent en
vue que le gouvernement développe, accepte et établisse une
politique familiale, qu'il la mette en place et que cette politique familiale
en arrive à donner des résultats concrets pour les parents et les
familles dans la société québécoise.
Maintenant, le champ d'application de la politique familiale. Nous avons
voulu, dans cet énoncé, identifier les divers secteurs
d'activités principales du gouvernement dans la politique familiale. Le
tout premier, bien sûr, est le soutien économique aux parents de
façon à collaborer au coût de la prise en charge des
enfants. C'est un des aspects qui reviennent le plus souvent, ce soutien
économique aux parents. On ne peut se contenter d'énoncés
de principe, on ne peut se contenter d'avoir des structures dans la politique
familiale, dans le gouvernement; il faut également avoir un soutien
économique pour les parents.
Lors d'interventions de l'Opposition et d'interventions d'autres
milieux, on nous mentionne que, lorsque nous avons rendu public cet
énoncé, on ne l'a pas rendu public avec des mesures et on
référait à ce moment plus particulièrement à
des mesures de soutien économique. Je tiens à préciser
tout de suite - et c'est confirmé par la résolution que nous
avons adoptée le 29 octobre à l'Assemblée nationale - que
depuis deux ans le gouvernement a adopté diverses mesures sur le plan
économique qui concernent la famille. Il est bon de relire cette
résolution adoptée à l'Assemblée nationale. Le chef
de l'Opposition a mentionné qu'elle était différente de la
proposition initiale. Évidemment, nous l'avons amendée et nous
croyons que nous l'avons fait à juste titre. L'Opposition a quand
même voté pour cette résolution. Je pense que
c'était très bien. Je veux démontrer ici au chef de
l'Opposition et à l'Opposition qu'ils n'ont pas eu tort de voter pour
cette résolution.
Je la relis pour bien situer les gens. La proposition disait: "Que cette
Assemblée exige du gouvernement libéral qu'il continue à
mettre de l'avant des politiques de valorisation de la famille
québécoise et qu'il instaure des mesures visant à
améliorer les services d'appui et le support financier accordés
aux parents à titre de premiers responsables légaux et sociaux de
la prise en charge des enfants et du milieu familial".
Mme la Présidente, nous avons adhéré à cette
résolution bien qu'elle soit très exigeante pour le gouvernement.
Ce que cette résolution dit, c'est que l'Assemblée exige du
gouvernement libéral qu'il continue à mettre de l'avant des
politiques de valorisation. Cela veut dire deux choses. Cela veut dire qu'il
faut en faire davantage. Nous le reconnaissons et c'est ce que l'Opposition, en
faisant la proposition, voulait faire. Elle voulait convaincre
l'Assemblée qu'il était important dans la politique d'en faire
davantage et nous sommes d'accord avec cette proposition. Notre amendement qui
a eu pour effet de dire "continuer à mettre de l'avant" vient faire
également la démonstration que, dans le passé, le
gouvernement a fait des choses pour la politique familiale. Je me rappelle,
dans mon discours lors du débat sur cette résolution, avoir lu
des passages fort importants - je ne le referai pas aujourd'hui - du discours
sur le budget présenté l'année dernière et qui
avaient pour effet de réduire considérablement les impôts
pour les familles à plus faibles revenus.
J'en profite pour mentionner qu'avec la réforme de l'aide
sociale, également, pour
les familles, plusieurs mesures sont envisagées pour les
familles, entre autres, qui gardent une personne non employable, une personne
handicapée, également pour les familles à faible revenu
qui sont au travail et qui, grâce au programme APPORT, pourront augmenter
ce revenu de façon substantielle.
Donc, en acceptant cette proposition, l'Assemblée nationale
exigeait du gouvernement de faire davantage, ce qui est une
nécessité, mais reconnaissait que le gouvernement avait
déjà fait des choses, ce qui est la vérité. Je
pense que dans une proposition, quand on parvient à mettre ensemble ce
qui est la nécessité et la vérité, eh bien, il est
normal qu'on en arrive à une proposition unanime de l'Assemblée
nationale. Pour ma part, je tiens à féliciter l'ensemble des
parlementaires, qu'ils soient de l'Opposition ou du côté
ministériel, d'avoir voté pour une proposition exigeante pour le
gouvernement, mais pour une proposition qui reconnaît que le
gouvernement, dans le passé, a commencé un travail fort complexe,
mais, toutefois, fort important pour la famille.
Plusieurs autres champs d'application sont concernés par la
politique familiale. Je les énumère rapidement: le travail, quant
à ce qui peut faciliter la conciliation des rôles de parents, de
travailleurs et de travailleuses; l'habitation à des fins familiales; la
famille et le système d'enseignement, du double point de vue de la
relation famille-école et de l'intégration de la famille comme
élément de connaissance; l'immigration, les communautés
culturelles et la famille; les services sociaux et les services de santé
aux familles; les services aux familles autochtones; les services de garde; la
famille et les loisirs; la justice et le droit de la famille; la
sécurité de la famille et de ses membres, surtout sous l'angle de
la lutte contre la violence familiale et de la jeunesse en difficulté -
je reviendrai, tout à l'heure, plus particulièrement sur ce point
qui, à mon avis, est l'un des points les plus importants - la recherche
et la coopération sur le développement de la famille et des
politiques familiales; la famille et les agents culturels, notamment les
médias et la publicité.
À diverses occasions, au fur et à mesure que des
politiques, des mesures seront adoptées par le gouvernement, nous aurons
l'occasion de revenir dans les divers secteurs d'activité où le
gouvernement se sera impliqué comme on le fait, actuellement, au
chapitre de la sécurité du revenu par la réforme de l'aide
sociale.
Toutefois, je veux parler brièvement de la sécurité
de la famille et de ses membres, surtout sous l'angle de la violence conjugale.
Je l'avais mentionné lors de mon dernier discours, j'ai l'intention de
le répéter à chaque occasion. La violence familiale est un
phénomène dont on perçoit maintenant l'ampleur. Elle
existait probablement de tout temps, mais semble avoir pris une ampleur plus
considérable maintenant. Est-ce parce qu'on la voit davantage, parce que
c'est un phénomène mieux connu ou parce qu'il y a vraiment
augmentation de la violence familiale?
Quoi qu'il en soit, Mme la Présidente, il est important que, du
côté de la violence familiale, l'on ait ce que quelqu'un m'a
qualifié - je répète le terme, je le trouve excellent, je
pense que c'est la bonne façon de l'exprimer - de gain de civilisation.
Il est temps que l'on sache qu'on ne peut frapper sur quelqu'un, qui que ce
soit, aussi proche de nous soit-il, sans que ce ne soit considéré
comme un crime. C'est un crime de frapper quelqu'un; c'est un crime que la
violence familiale, tout autant que n'importe quel autre crime de violence. Je
pense qu'il est important que les leaders politiques, les leaders sociaux, les
leaders économiques, l'ensemble de la population, non seulement le
gouvernement et les élus ici, à l'Assemblée nationale,
mais les voisins, les gens qui voient ce genre de phénomène
disent, qu'on ne l'accepte plus, qu'on sache que ce n'est pas une affaire
privée, mais que c'est un crime sur le plan social. Il est important que
ceux qui font de pareils gestes sachent que la société n'a plus
l'intention, dans l'avenir, de tolérer ce genre d'acte envers la
famille.
Je pense que cette violence familiale non seulement sur les femmes -
bien sûr qu'elles en sont les premières victimes -mais
également sur les enfants qui en sont des victimes bien souvent pour la
vie puisqu'ayant été élevés parfois dans un milieu
de violence, ils ont tendance à reproduire ce genre de milieu de
violence dans leur avenir, il est important que l'on en mesure toutes les
conséquences et que l'on se dise: II faut que cela cesse. (12 h 40)
Ayant identifié les divers secteurs d'activités,
l'énoncé a également identifié la dynamique
administrative qu'il songeait à mettre en place concernant l'application
de la politique familiale. Le Conseil de la famille vient en tout premier lieu.
J'y reviendrai tout à l'heure. C'est l'objet de notre discussion plus
particulière ce matin.
Je vais au point 2 où l'on mentionne qu'il y a maintenant un
ministre dont l'attribution principale est la famille. Le titre du ministre est
actuellement "ministre délégué à la Famille,
à la Santé et aux Services sociaux", le gouvernement ayant
introduit "à la famille" dans le titre du ministre, voulant par
là signifier toute l'importance qu'il entend accorder à ce
secteur d'activités fort important pour la société
québécoise.
L'action des ministères et des
organismes les plus concernés par la famille nous amènera
également à voir à ce qu'il y ait une certaine structure
administrative dans chacun des ministères concernés. Les
ministères et les organismes les plus concernés assureront chez
eux la mise en place de mécanismes administratifs propres à
faciliter l'intégration de la dimension familiale dans les politiques
dont ils sont responsables et partageront la coordination horizontale,
notamment, par la concertation avec le Secrétariat à la famille,
ci-après désigné.
Les ministères et organismes les plus concernés par la
famille élaboreront sur une base régulière des
activités, des engagements et des mesures concrétisant
l'intégration de la dimension familiale. Mme la Présidente, les
ministères et les organismes les plus concernés par la famille
feront état, dans leur rapport annuel, du développement de la
politique familiale dans tous les aspects pour lesquels ils en sont
responsables.
Voilà une façon de procéder éprouvée;
éprouvée, parce que la famille n'est pas le premier dossier
à portée horizontale qui utilise ce genre de mesures
administratives et qui obtient des succès pour les clientèles qui
sont défendues. Et devoir inclure la dimension familiale dans ses
programmes, devoir élaborer sur une base régulière des
activités, des engagements et des mesures, et devoir faire état,
dans leur rapport annuel, du développement des mesures concernant la
politique familiale pour tous les ministères concernés est fort
impliquant pour le gouvernement et nous assure que la politique familiale, dans
les prochains mois, dans les prochaines années, avancera non seulement
de façon cohérente, mais avancera également d'une
façon très rapide pour le mieux-être de l'ensemble des
familles du Québec.
Le ministre peut également compter sur le travail d'un
Secrétariat à la famille chargé de l'application de ces
politiques, chargé du travail de coordination entre les divers
ministères. Ce secrétariat est directement sous la
responsabilité du ministre délégué à la
Famille.
Voilà donc, Mme la Présidente, l'énoncé de
principe fort important que nous avons rendu public la semaine dernière.
Je tiens à répéter que cet énoncé de
principe n'a pas empêché le gouvernement d'appliquer des mesures
fort importantes dans le passé pour la famille, mais permettra, à
l'avenir, d'en faire davantage, de faire plus avec l'assurance qu'il y aura
cohésion et concordance entre les diverses politiques du gouvernement et
qu'ainsi la famille québécoise, comme c'était le voeu d'un
groupe de plus en plus important dans la population, sera prise en compte dans
le développement des politiques gouvernementales.
Nous voici donc au projet de loi 94, Loi sur le Conseil de la famille,
qui vient scinder le Conseil des affaires sociales et de la famille en deux
conseils, celui des affaires sociales, celui de la famille. Le projet de loi
identifie de quelle façon fonctionnera ce Conseil de la famille avec une
particularité, toutefois, que je tiens à mentionner,
particularité importante qui est le préambule de la Loi sur le
Conseil de la famille dont je vais vous faire lecture. "Considérant que
la famille est le premier milieu de vie, d'apprentissage et de socialisation et
que le bien-être de la famille et des individus qui la composent est la
base du bien-être de la société; considérant que la
contribution sociale des parents comme premiers responsables des familles et de
la prise en charge des enfants mérite d'être soutenue et
encouragée par la volonté collective; considérant qu'il y
a lieu de favoriser l'expression des familles, de leurs représentants,
des milieux et des institutions concernés par les questions
d'intérêt familial; considérant qu'il importe d'instituer,
suivant ces principes, un organisme pour conseiller le ministre sur toute
question d'intérêt familial."
Il est rare qu'on voie dans une loi un préambule aussi
engagé sur le plan des valeurs qui y sont développées.
Toutefois, nous avons décidé au gouvernement de l'inclure,
étant donné l'importance de la valorisation de la famille que ce
préambule permet de faire.
Par la suite, nous identifions quel sera cet organisme, son titre, de
quelle façon il sera constitué - nous rappelons qu'il se
composera de neuf membres - de quelle façon seront nommés ses
membres, quel sera le mandat de cet organisme, quels seront ses fonctions, ses
pouvoirs et diverses autres choses que nous aurons l'occasion d'étudier
plus avant lorsque nous passerons à l'étude
détaillée de la Loi sur le Conseil de la famille.
En conclusion, l'énoncé de politique familiale, le
dépôt de la Loi sur le Conseil de la famille, est une
première étape en vue d'une plus grande cohérence et
cohésion. D'autres étapes et mesures suivront à
brève échéance. Le gouvernement s'implique fortement dans
cet énoncé, je l'ai expliqué tout à l'heure.
En second lieu, je tiens à expliquer qu'il sera important et que
j'insisterai dans les mois qui viennent sur l'implication des milieux autres
que le gouvernement pour le développement d'une véritable
qualité de vie pour les familles dans la société. J'ai
parlé plus particulièrement des milieux de travail, qu'ils soient
patronal ou syndical, du milieu municipal, du milieu scolaire. Je
répète qu'il est important - cela ne se fait probablement pas
assez souvent - que les leaders socio-économiques et politiques disent
à la
population que leur option pour cette valeur fondamentale qu'est la
famille, elle existe. J'ai eu l'occasion, lors d'une entrevue à la
radio, de me faire poser la question: M. le ministre
délégué à la Famille - on imagine que les ministres
n'ont pas de vie familiale -c'est quoi, pour vous, votre famille? J'ai
répondu que ma famille, c'était la première valeur de ma
vie. Non pas que je n'aime pas le métier que je fais; je trouve que le
métier que je fais est extrêmement intéressant, d'autant
plus que j'ai un dossier que je considère comme la première
valeur de ma vie, celui de la famille. C'est un métier fort
intéressant, très accaparant. Je pense que, lorsque l'on place la
famille au premier rang de nos valeurs fondamentales personnelles - toute
personne qui y réfléchit à fond le fera comme moi - cela
nous permet d'envisager le travail de façon différente, de
l'organiser de telle sorte que nous ayons du temps à consacrer à
notre famille, que nous ayons du temps pour regarder grandir nos enfants, pour
les éduquer, pour les voir s'épanouir. Si les leaders politiques
de notre société ne le mentionnent pas, ils font une grave
omission et c'est une chose qu'il faudra corriger dans l'avenir. J'invite les
membres du Parlement à le dire dorénavant dans leurs discours. La
famille, c'est quelque chose d'important.
On voit donc que la politique familiale, au niveau du gouvernement, est
promise à ce que j'appellerais un lac Meech et, pour être bien
sûr qu'il n'y aura pas de fausse interprétation sur ce que je
viens de dire, quand je dis que la politique familiale est promise à un
lac Meech, je veux dire qu'elle est promise à un grand succès.
Merci, Mme la Présidente.
Avis de sanction de projets de loi
La Vice-Présidente: Merci, M. le ministre
délégué à la Famille, à la Santé et
aux Services sociaux. Avant de reconnaître le prochain intervenant,
j'aimerais aviser cette Chambre qu'il y aura sanction de projets de loi ce
soir, au cabinet du lieutenant-gouverneur, à 18 heures. M. le chef de
l'Opposition.
M. Chevrette: Mme la Présidente, compte tenu de l'heure,
je demande l'ajournement du débat.
La Vice-Présidente: Est-ce que cette motion est
adoptée?
Une voix: Adopté.
La Vice-Présidente: M. le leader du gouvernement.
M. Richard: Mme la Présidente...
La Vice-Présidente: M. le député de
Nicolet.
M. Richard: ...je demanderais que les travaux reprennent à
15 heures.
La Vice-Présidente: Est-ce que cette motion est
adoptée?
Des voix: Adopté.
La Vice-Présidente: Adopté. Nous allons donc
suspendre nos travaux jusqu'à 15 heures, cet après-midi.
(Suspension de la séance à 12 h 50)
(Reprise à 15 h 7)
Le Vice-Président: Veuillez vous asseoir, s'il vous
plaît.
L'Assemblée nationale reprend ses travaux. Nous en sommes aux
affaires du jour.
M. le leader du gouvernement.
Avis touchant les travaux des commissions
M. Gratton: Avant que nous revenions là où nous
avons laissé ce matin, je voudrais indiquer que, ce matin, dans un avis
concernant la commission de l'aménagement et des équipements qui
procède présentement à l'étude de certains projets
de loi privés, j'ai donné un ordre de préséance
quant à l'étude de certains projets de loi. Or, je voudrais
simplement indiquer aux membres de l'Assemblée qu'en ce qui concerne les
deux derniers projets de loi, soit le projet 111, Loi modifiant la Loi sur la
Communauté urbaine de Québec, et le projet de loi
d'intérêt privé 250, Loi modifiant la charte de la ville de
Québec, que j'avais donnés dans cet ordre-là, nous
convenons que, si la commission en décide autrement, elle pourra
inverser l'étude de ces deux projets de loi.
Le Vice-Président: Très bien, M. le leader. Nous en
prenons acte et informons la commission en conséquence.
Aux affaires du jour, je comprends que nous en sommes à l'article
13 du feuilleton.
Projet de loi 94
Reprise du débat sur l'adoption du
principe
Nous allons reprendre le débat sur la motion d'adoption du
principe du projet de loi 94, Loi sur le Conseil de la famille, proposé
par M. le ministre délégué à la Famille, à
la Santé et aux Services sociaux.
Je cède, à ce moment-ci, la parole à
M. le chef de l'Opposition.
M. Guy Chevrette
M. Chevrette: Merci, M. le Président. Vous aurez
remarqué cet avant-midi que c'est avec peu de conviction, peu
d'emballement que le ministre a présenté son projet de loi.
D'ailleurs, sur les 30 minutes qu'il a prises sur le temps de
l'Assemblée nationale, il a pris au moins 25 minutes pour parler d'un
énoncé de politique familiale pour ensuite en venir au projet de
loi lui-même qui est la création d'un Conseil de la famille.
Cette semaine, je crois que c'est mardi, nous avons eu la chance de voir
un ministre présenter un énoncé de politique familiale.
Tout le monde s'attendait a ce que ce soit quelque chose de fantastique
puisqu'on en parle depuis deux ans, qu'on fait des promesses depuis deux ans
à la famille, aux associations de familles québécoises. On
leur dit carrément que nous allons accoucher d'un plan d'action, de
quelque chose de concret. De quoi le ministre a-t-il accouché, M. le
Président? D'une souris, d'une coquille absolument vide, si ce n'est que
d'une structure de consultation. Imaginez-vous! Depuis sept ans au
Québec, les groupes, les fédérations d'associations de
familles, les groupes familiaux, les associations de toute nature dans le
domaine de la famille attendaient de ce gouvernement qui, depuis deux ans, leur
promet mer et monde... On accouche d'une structure de consultation! On scinde
en deux le Conseil des affaires sociales et de la famille actuel pour en faire
deux entités distinctes. C'est tout ce dont les familles
québécoises ont hérité par cet énoncé
de politique, par cette structure législative que l'on dépose
devant nous. Aujourd'hui, les familles québécoises sont au
même point qu'elles étaient le 2 décembre 1985. Elles ont
une structure de consultation qui, de toute façon, existait via le
Conseil des affaires sociales et de la famille, au Québec. Rien de neuf,
rien de concret, une coquille absolument vide!
Le ministre ne semble même pas connaître l'évolution
de ce dossier. Le ministre ne semble même pas savoir depuis quand on
discute nommément de la famille au Québec. Le ministre ne sait
pas que c'est en 1981 que l'ancien ministre de la Santé et des Services
sociaux du temps recevait le mandat d'élaborer une politique de la
famille; que c'est en 1984 qu'on créait le Secrétariat à
la politique familiale; que c'est le 23 octobre 1984 qu'on avait la publication
d'un livre vert, au québec, pour les familles québécoises,
document devant servir à une vaste consultation publique. Vous vous
souviendrez que, le 10 juin 1985, le gouvernement précédent avait
procédé c'était M. Lévesque, à
l'époque - à la nomination d'un ministre
délégué à la Famille; c'était le
député de Nicolet, M. Yves Beaumier, qui est devenu titulaire du
poste de ministre délégué à la Famille. Le 25
octobre 1985, la grande commission présidée par Maurice
Champagne-Gilbert avait publié un premier rapport sur les consultations
publiques sous sa responsabilité. Le 5 décembre 1985, trois jours
après l'élection de ce gouvernement que nous avons en face de
nous, à nouveau, cette commission publiait un nouveau rapport. Elle
donnait à la ministre qui venait à peine d'être
nommée, Mme Lavoie-Roux, l'actuelle ministre de la Santé et des
Services sociaux, un rapport détaillé et complet. Donc, c'est au
mois d'avril, à peine trois mois après la nomination de la
nouvelle ministre chargée de la famille, que cette dernière avait
entre les mains l'ensemble des rapports de la consultation qui avait
été menée sur une période de plusieurs mois.
On se retrouve en 1987, au moment où on croyait que la ministre,
Mme Lavoie-Roux à l'époque, qui avait la responsabilité du
dossier, allait entrer en gare avec le train. Mais, parce qu'on n'était
pas capable de rien produire, parce qu'on ne s'était pas penché
sur les rapports des consultations, parce qu'on n'était pas prêt
à agir concrètement, on change de conducteur. C'est le ministre
Dutil, l'actuel ministre délégué à la Famille, qui
prend la barre. Tout cela pour en arriver, en décembre 1987, dans une
session intensive, à la toute fin d'une session, à la
création d'un organisme consultatif.
Qu'attendaient au juste les familles de tout cela, M. le
Président? Les familles s'attendaient à voir le ministre des
Finances se lever et dire: II y aura les allégements fiscaux pour la
famille québécoise. Elles s'attendaient que la ministre de la
Condition féminine se lève et dise: Les places en garderie au
Québec sont insuffisantes pour aider les jeunes couples, les familles
monoparentales, les femmes qui veulent continuer à faire
carrière. M. le Président, les gens s'attendaient que la ministre
déléguée à la Condition féminine puisse nous
annoncer la création de X milliers de places en garderie au
Québec. Les familles québécoises s'attendaient
également que le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu et du Travail puisse annoncer des amendements
au Code du travail, permettant précisément à ces femmes
qui travaillent mais qui veulent aussi s'occuper de leurs enfants de
bénéficier véritablement d'allégement de travail
tout en conservant une sécurité d'emploi. Cela a
été demandé dans toutes les tournées de
consultation qu'on a eues. Rien de cela. C'est la déception la plus
complète de la part des fédérations d'associations de
familles au Québec.
C'est la désolation de voir tant de mois
d'efforts, tant d'années d'efforts, sept ans d'efforts pour en
arriver à regarder faire un gouvernement qui n'accouche que d'une
structure consultative. Pourtant, ces familles espéraient beaucoup parce
qu'elles avaient compris, en campagne électorale, que, dans le programme
libéral, il y avait au moins des engagements. Il y avait l'engagement de
l'instauration d'une politique globale de la famille. C'est le numéro 51
de leurs recommandations. Le numéro 52: La création d'un poste de
ministre délégué à la Famille. Cela a
été fait. L'intégration des femmes à l'emploi, ce
n'est pas fait. Le soutien à la vie économique des familles,
élargir l'exemption fiscale relative à la prise en charge des
enfants, rien de fait. Pourtant, c'est dans le programme libéral et dans
les engagements électoraux des libéraux. Mesures de soutien
à la famille, congés parentaux prolongés,
accélérer le développement du réseau des garderies,
tout cela est dans le programme du Parti libéral, M. le
Président, et on n'en retrouve rien dans l'énoncé de
politique de ce gouvernement.
M. le Président, ces sociaux-démocrates de fin de semaine
qui, avec un sondage en poche, deviennent tout à coup sensibles aux
réalités sociales et familiales, se dépêchent
à écrire des papiers. Ils font en sorte, pour calmer les
citoyens, de produire des papiers. Mais regardons, concrètement, les
incohérences et l'absence de cohésion de ce gouvernement. Je
regardais le ministre, ce matin, se lever et dire: II y a deux mots que vous
allez retrouver souvent dans mon discours, c'est cohérence et
cohésion. Il a dit: Cohésion. Nous allons tous, sectorielle-ment
parlant, penser famille. Vous allez voir combien on va avoir de la
cohésion. Nous aurons de la cohérence, parce que jamais on ne
dira le contraire de ce qu'on annonce, jamais on ne fera le contraire de ce
qu'on vous dit.
M. le Président, ça, c'est le ministre qui parle la
journée de son énoncé de politique. Le lendemain matin -
cela n'a pas été long pour être incohérent -
croyez-le ou non, le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu qui est censé penser famille au
Québec, qu'annonce-t-il? Une révision de la politique de l'aide
sociale, et qui sont pénalisées? Les femmes enceintes, les
familles monoparentales... Une femme qui a déjà un enfant, si
elle est enceinte, elle est pénalisée quatre mois avant son
accouchement, c'est-à-dire seize semaines et cinq semaines après
l'accouchement. Une drôle de façon de penser famille.
Imaginez-vous que ces gens sont sensibles à la notion de famillel
Ces gens ont une sensibilité extrême face au problème de la
dénatalité que nous vivons au Québec. Au moment où
le Québec est le troisième pays le plus faible sur le plan
démographique, M. le Président, sur le plan de sa reproduction,
1,4 enfant par famille, ce même gouvernement qui disait penser famille
à compter de mardi passé, mercredi matin, ne pensait plus
famille, il pensait à couper les redevances aux femmes qui sont dans
l'attente d'un enfant. La même chose pour les couples qui ont un ou deux
enfants. S'ils refusent d'adhérer à un des programmes qui leur
seront offerts, ils seront coupés de 100 $ par mois. Drôle de
façon d'inciter les parents à faible revenu, les plus
démunis de notre société, à avoir des enfants.
C'est cela qu'on appelle penser famille! Est-ce que c'est penser famille que de
faire ce que le ministre des Finances a fait au mois d'avril dernier? Sous
prétexte qu'il voulait encourager les familles de trois enfants, 9000
familles au Québec, il a coupé 96 000 familles qui avaient deux
enfants, la fameuse prime de disponibilité qu'on donnait aux couples
ayant deux enfants; 96 000 couples ont été coupés
littéralement. Vous pensez famillel C'est formidable, c'est fantastique,
drôle de pensée familiale! Drôle de monde qui s'occupe des
familles, drôle de raisonnement!
M. le Président, est-ce que vous pourriez demander à la
députée de Groulx de me laisser la possibilité de faire
mon exposé sans être dérangé?
Le Vice-Président: Oui, M. le chef de l'Opposition. Je
demanderais simplement aux députés d'éviter de faire des
causus ou de passer des remarques...
Une voix: ...
(15 h 20)
Le Vice-Président: À l'ordre, s'il vous plattl De
la même façon, Mme la députée, ne reprochez
pas...
Une voix: ...
Le Vice-Président: Non, mais vous venez de me... Je suis
en train de faire une intervention, vous faites exactement la même chose
qu'on reproche à une autre députée. Donc, je demanderais
à l'ensemble des députés de garder leurs commentaires. Si
vous avez des commentaires à faire, je vous inviterai à prendre
la parole à votre tour. M. le chef de l'Opposition.
M. Chevrette: Oui, M. le Président. Je vais demander au
moins aux mères de famille de cette Chambre d'écouter.
Donc, je dirai que ce gouvernement n'a aucune sensibilité
vis-à-vis de la famille, comme il a peu de sensibilité,
d'ailleurs, à toute la dimension sociale au Québec. Ce sont des
sociaux-démocrates de fin de semaine. Quand le premier ministre voit un
sondage et qu'il se rend compte que, pour ce qui est du côté
social - est-il bien jugé par la population par rapport aux actions
du
gouvernement Bourassa? - le sondage dit "80 % en désaccord avec
la vision du gouvernement actuel", houp! il devient un social-démocrate
de fin de semaine. Bien oui, il faut s'occuper du social. Il faut faire quelque
chose. Aie! le ministre délégué à la Famille,
dépêche-toi, écris-nous un énoncé de
politique, calme notre monde! Ce sont de grands sociaux-démocrates de
fin de semaine. Ils vont essayer de nous faire croire, au moment où on
traverse des années de vaches grasses, qu'il était temps, de la
part d'un gouvernement, de manifester cette sensibilité, de
concrétiser ce que veut dire avoir une pensée famille. C'est
toute une pensée. On aurait pu croire qu'il y avait une pensée
famille s'il était arrivé avec des mesures fiscales
concrètes, et s'il avait déposé une incitation, par
exemple, par des mesures fiscales à la naissance d'un deuxième
enfant.
On aurait pu penser qu'il pensait famille si on avait accordé la
sécurité d'emploi, par exemple, aux femmes désireuses
d'avoir un enfant qui voulaient travailler à temps partiel, mais qui
voulaient conserver, au moins, une sécurité d'emploi. Là,
on aurait dit: II pense famille un peu. On aurait pu penser qu'il
commençait, au moins, à penser famille si la ministre
déléguée à la Condition féminine
s'était levée en cette Chambre et avait dit: Voici ce que
j'entends faire, dans le cadre de ma négociation avec le gouvernement
fédéral, du 1 800 000 000 $ qu'on ira chercher pour le
système de garderie. Moi, j'ai l'intention de présenter à
la population du Québec une proposition donnant l'accès à
de plus en plus de couples pour les garderies. Rien. Rien, elle ne sait pas
où elle s'en va. La ministre s'est levée ce matin - vous l'avez
vue comme moi, M. le Président - et a répondu à ma
collègue de Marie-Victorin et à ma collègue de
Maisonneuve: Voici, il y aura des consultations bientôt. Elle a dit:
J'entends bien faire connaître mon opinion au ministre.
Penser famille, c'est y penser même dans l'élaboration des
énoncés de politique. Penser famille, c'est avoir eu une
concertation au préalable entre le ministre délégué
à la Famille, le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu, la ministre déléguée
à la Condition féminine, le ministre des Finances, la ministre de
la Santé et des Services sociaux. C'est ensemble, dans un comité
interministériel qu'on élabore un énoncé de
politique globale et qu'on se soumet à la consultation du public mais,
au moins, on a eu une pensée famille collective. La preuve en est faite
hors de tout doute raisonnable par l'attitude du ministre du Travail et de la
Sécurité du revenu. Ils sont loin de penser famille
collectivement. Il y en a un qui pense à faire rêver le monde sur
des grands principes et l'autre qui détruit la famille par des
restrictions dans l'aide sociale. C'est une pensée famille; c'est
fantastique.
Cela démontre que chacun de ces ministres, loin de travailler
ensemble, ayant comme objectif une vision globale de la famille, travaille
sectoriellement, s'amuse avec ses bébelles dans sa cour et ne pense pas
à avoir cette vision globale et présenter des programmes concrets
d'action qui s'inscrivent dans une politique globale. Loin de là. On n'a
rien jusqu'à maintenant qui nous incite à croire quoi que ce
soit, à croire les propos du ministre.
D'ailleurs - je le répète - rappelez-vous qu'au
début de son exposé, c'est sans aucune conviction que le ministre
s'est levé. Il a été forcé de produire un papier
rapidement, parce que ces sociaux-démocrates de fin de semaine ayant
compris qu'il fallait qu'il fasse quelque chose, les familles
québécoises faisant de plus en plus de lobbying, autant
auprès de l'Opposition que des députés, le premier
ministre a sûrement dit... Il est très fort sur les sondages. Sous
les coups de vent, il devient comme une girouette: si le vent est du nord,
houpl la tête lui revire et il part de l'autre bord, et, inversement, si
le vent change de bord. Mais on dirait qu'il vit dans un pays où les
tornades sont fréquentes, parce qu'il virevolte sur son siège. De
social-démocrate une fin de semaine, il peut devenir tout à fait
insensible à un programme social quelconque, purement et simplement
parce que la population ne réagit pas pour le moment. Il se tournera de
bord en catastrophe quand le vent tournera de bord. C'est de même qu'on
est administré depuis deux ans, M. le Président, au gré du
vent, sans conviction profonde, sans vision globale de l'avenir, sans
conviction d'aucune nature vis-à-vis des problèmes sociaux. On
est à l'ère de la privatisation et de la libre concurrence. On
administre l'État comme une chaîne de magasins. Les cannages sont
alignés et cela coûte tant par cannage, quel que soit ton revenu.
C'est de même qu'on administre. Un État, ce n'est pas cela. Un
État, un gouvernement responsable, un gouvernement sensible, c'est un
gouvernement qui est là pour redistribuer la richesse à partir
des besoins connus de nos concitoyens. C'est cela le rôle de
l'État fondamentalement, et ces gens-là ne l'ont pas compris.
Ils reprennent à leur compte l'état de la famille
québécoise. On sait que la famille québécoise
connaît des problèmes majeurs, et ce n'est pas d'aujourd'hui,
c'est depuis une vingtaine d'années. On sait que l'éclatement de
la famille... Le mode de vie de la famille, le fonctionnement de la famille ont
changé au Québec. Cela ne prend pas un énoncé vide
de sens pour reconnaître cela. Tout le monde sait cela. On en est rendu
au point où il ne s'agit pas de rêver sur de grands principes, on
a atteint le point où les gens demandent des actions concrètes.
Et les
actions concrètes, si on croit à la famille, on ne les
retrouve pas dans de grands principes d'encadrement père-fils,
mère-fille, parents-enfants. C'est bien beau ça, mais ça
veut dire quoi concrètement? Comment va-ton transposer dans des
programmes concrets le soutien à la famille?
Qu'est-ce qu'on attend pour permettre aux femmes, par exemple, qui, de
plus en plus, accèdent au marché du travail, qu'est-ce qu'on
attend pour bâtir des programmes concrets avec des mesures d'action
concrètes leur permettant de jouer leur rôle de mère, parce
qu'elles le veulent, parce qu'elles le désirent, parce qu'elles veulent
avoir les moyens de le faire? C'est ça qui serait une politique
concrète, de dire, par exemple: Si vous avez un deuxième enfant,
l'État vous vient en aide de telle façon que vous puissiez
continuer votre carrière tout en étant également dans la
possibilité de faire garder votre enfant, de vivre avec votre enfant, de
bénéficier de congés parentaux suffisants, d'une
sécurité d'emploi aménagée avec des congés,
avec ou sans solde, au besoin pour permettre précisément à
des couples désireux d'avoir un enfant d'en avoir un sans craindre de
perdre leur emploi. Quand on veut encourager la natalité, est-ce qu'on
arrive avec des coupures dans des mesures d'aide sociale, des coupures pour la
femme sur le point d'accoucher, quand elle est pénalisée quatre
mois avant et encore cinq semaines après? Est-ce que c'est cela, avoir
une pensée famille?
M. le Président, ce gouvernement fait preuve d'ignorance des
besoins de la population et des besoins de la famille. Il fait preuve
d'incompétence totale vis-à-vis des mesures à prendre. Les
familles québécoises ne sont pas dans l'attente d'une structure
de consultation, elles nous ont toutes dit ce qu'elles voulaient. On sait que
ce sont des besoins de législation en matière de relations du
travail, on sait que ce sont des mesures fiscales. C'est de l'encouragement par
le biais de mesures fiscales que les familles attendent. On sait qu'une famille
qui a un enfant reçoit 324 $ par année en allocations familiales,
imaginez-vous, et pour un deuxième enfant, quelque 480 $. On sait que
les statistiques nous disent que cela coûte au moins 2300 $ à 2400
$ au minimum, au strict minimum, pour assurer la vie normale d'un enfant dans
une famille.
Est-ce qu'on va rire des familles longtemps? Est-ce que ce sont avec des
mesures de ce genre qu'on va encourager la famille québécoise?
Est-ce que c'est avec des mesures de ce genre qu'on va encourager les jeunes
couples, les femmes et les hommes désireux d'avoir des enfants? On est
porté à croire que les jeunes ne veulent pas d'enfants, M. le
Président. La plupart en veulent, mais à cause du contexte dans
lequel on place l'entité familiale, il n'y a aucune incitation à
le faire; au contraire, il y a des barrières dues
précisément au statut monétaire, au statut financier, aux
possibilités qu'ont les jeunes couples de se faire aider ou de pouvoir
compter sur un réseau de garderies. (15 h 30)
C'est absolument aberrant de voir le ministre prendre 25 minutes, ce
matin - il a bien compris qu'il ne présentait pas grand-chose comme
projet de loi, et cela m'a fait sourire - pour dire, d'une façon
plutôt terne: Écoutez, j'ai fait un énoncé de
politique, ce sont de beaux principes. Bientôt, je vous viendrai en aide
- il disait cela il y a deux ans - bientôt, nous aurons des mesures
concrètes. Voilà le premier coup de barre que je donne: je scinde
le conseil de la santé et de la famille en deux pour créer un
conseil de la famille qui sera beaucoup plus efficace, parce qu'il pourra
consulter, il pourra donner des avis au ministre, il pourra le renseigner sur
les problèmes vécus. Le ministre aurait avantage à lire la
brique de Maurice Champagne-Gilbert qui, lui, a parcouru le Québec, a
recueilli à peu près tout ce que les parents avaient à
dire dans toutes les régions du Québec. C'est tout
colligé, il n'a qu'à ouvrir le volume et à lire, à
faire preuve d'un peu d'imagination et à aller s'asseoir avec le
ministre des Finances et dire: Écoutez, qu'entendez-vous faire pour la
famille? Il faut penser famille. Si on pense famille, pourquoi le ministre
délégué à la Famille ne réunit-il pas ses
collègues, ceux que j'ai nommés tantôt, la ministre
déléguée à la Condition féminine, le
ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu et
ministre du Travail, le ministre des Finances, la ministre de la Santé
et des Services sociaux? Qu'ils s'asseoient ensemble et se demandent: Qu'est-ce
qu'on peut faire concrètement pour la famille? Si cela avait
été le cas, on nous aurait déposé en Chambre une
véritable politique familiale, non seulement des principes vides, non
seulement le fait qu'on a des orientations. On voit bien par
l'énoncé de politique que le ministre semble avoir une
volonté politique avec un point d'interrogation; mais une volonté
d'action par exemple, on n'en décèle aucune. Aucune
volonté d'action! Il manque carrément tout un programme d'action
si on veut parler de politique familiale. Il manque un train de mesures
législatives pour avoir véritablement une politique familiale
concrète, tangible, palpable par les familles québécoises.
Mais non, le ministre s'est contenté de remplir le devoir qu'on lui
avait demandé, et ce, sans aucune conviction, je le
répète, sans aucune conviction.
On s'imagine qu'on va faire taire les gens parce qu'on a nommé un
ministre délégué à la Famille qui écrit
une
quarantaine de principes dans environ trois ou quatre pages et qui
trouve à la page 11, le moyen d'écrire: Une politique de la
famille, vous savez, c'est à moyen et long terme. Donc, tout ce qu'on
vous a dit durant les élections, tout ce qu'il y a dans le programme du
Parti libéral du Québec, tout ce que j'ai écrit dans mon
énoncé de politique que je viens de déposer, ne vous
faites pas de bile, ce n'est pas pour aujourd'hui. C'est ça qu'il nous
dit à toutes fins utiles. Ne vous cassez pas la tête, si vous
attendez ça pour aujourd'hui, vous vous trompez parce qu'à la
page 11, il faut au moins lui reconnaître ça, il a eu
l'honnêteté intellectuelle, dans son cas, je dis bien, d'avertir
les parents que ce n'était pas pour aujourd'hui. C'est peut-être
la seule belle phrase correcte, concrète et honnête qu'il y a dans
ce dépliant-là. Ne vous attendez pas à quelque chose de
concret à court terme.
Pourtant, M. le Président, j'ai la conviction profonde que les
familles québécoises, que les associations et que la
Fédération des associations de familles escomptaient beaucoup
parce qu'on venait de sortir de la crise économique. Le ministre des
Finances s'est même permis de dire: Oui, c'est vrai, on traverse des
années de vaches grasses. Ça veut donc dire que l'argent entre
bien au gouvernement. Alors, si on croit à la famille, à ce
moment-là, si on pense famille, pourquoi ne pas avoir profité de
ces années de vaches grasses pour en faire bénéficier un
tant soit peu la famille québécoise? C'est parce qu'on n'y croit
pas, M. le Président. On n'y croit pas, c'est le dernier de nos soucis.
Ce qui les intéresse, c'est tout ce qui frappe l'oeil,
indépendamment qu'on perde des compétences ou qu'on renie des
compétences québécoises.
Le libre-échange, ce sont de gros débats, personne ne
comprend, et, nous autres, on se gargarise de ça. Le lac Meech,
"c'est-tu" beau? "Kid Kodak" se fait poser tous les jours et ça
paraît bien. Mais les vrais problèmes du monde, ceux que vivent
les familles, les enfants, les familles monoparentales au Québec, les
problèmes qu'ils traversent quotidiennement... Ils ont fait confiance
à ce gouvernement. Ils ont été élus. Et, de plus en
plus, il y a du désenchantement. L'argent entre, mais on ne sait pas
où il va! Et la seule marotte qu'ils ont, c'est de dire que c'est la
faute de l'ancien gouvernement. Ça doit être la faute de l'ancien
gouvernement si le ministre des Finances, la ministre
déléguée à la Condition féminine, le
ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu coupent
des subventions aux familles. Oui, ça doit être la faute du
PQ.
C'est la faute du PQ si le ministre des Finances a enlevé la
prime de disponibilité pour les femmes, pour 96 000 familles ayant deux
enfants. Ça doit être la faute du PQ si le ministre du Travail, de
la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu vient de couper les
prestations des femmes enceintes, vient d'enlever une portion de leur maigre
pitance mensuelle pour les femmes qui sont sur le point d'accoucher. Ce doit
être la faute du PQ si on va enlever 100 $ par mois aux couples qui
n'acceptent pas d'adhérer à un programme. Est-ce que c'est la
faute du PQ? Est-ce que c'est la faute du PQ si le gouvernement ne profite pas
des années de vaches grasses pour créer des places en garderies
pour les familles? Est-ce que c'est la faute du PQ - vous deviez faire mieux
que nous - si le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité
du revenu, en plus de ne pas être capable de présenter ses projets
de loi à temps, n'a même pas le courage politique de
présenter quelques maigres amendements pouvant permettre
précisément à l'entité familiale d'avoir un
meilleur sort dans les lois du travail? Ce n'est toujours pas la faute du PQ!
On leur a dit qu'on ne valait rien et qu'ils seraient meilleurs, mais il n'y a
rien de fait pour la famille québécoise, absolument rien!
Ce furent des reculs. Qu'on pense au ministre des Finances, qu'on pense
au ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu, ce
sont deux reculs évidents. On a même désindexé les
familles, on a désindexé l'aide sociale aux trois mois. Ce n'est
toujours pas le PQ qui a fait cela! C'est encore un recul de plus. Si on se
cassait la tête un tant soit peu, on trouverait une multitude de reculs
pour le pauvre, le petit, le salarié moyen, les plus démunis de
notre société, et, par ricochet, nos familles les plus
démunies de notre société.
Ce gouvernement insensible, ces sociaux-démocrates de fin de
semaine qui administrent l'État au gré du vent, est-ce qu'ils ont
véritablement pris un virage social quelconque ou s'ils sont convaincus
de l'importance d'agir et d'agir vite? Je le disais tantôt, nous avons un
grave problème sur le plan démographique: 1,4 enfant par famille.
Est-ce qu'on peut faire quelque chose comme État? Oui, à la
condition qu'on ait une volonté d'action, non pas une volonté
politique pour quelques grands principes. Tout le monde est pour la vertu et la
tarte aux pommes, il n'y a pas de problème.
Lisez l'énoncé de politique du ministre, je suis certain
qu'il rit dans sa barbe, seul. Il doit être seul à rigoler. Ce
qu'il doit rigoler quand il lit cela tout seul! J'espère qu'il n'est pas
assez naïf pour penser que le monde ne sait pas lire. J'espère
qu'il n'est pas assez naïf pour croire que les associations ne se rendront
pas compte qu'il n'y a rien dans cela. J'espère qu'il n'est pas assez
naïf pour croire qu'il a franchi un pas de géant en créant
une structure consultative.
Parlant de cohérence, je vais en ajouter une autre. Vous
rappelez-vous, M. le Président, le fameux rapport Gobeil qui
recommandait l'abolition de 20 comités consultatifs? Le gouvernement
actuel a dit: C'est fini, pour nous, les structures consultatives, on va aller
jaser avec le vrai monde, on va aller voir où il est. Je revois encore
le ministre du Loisir qui s'épivardait avec cela - il a quelque chose
à déployer, lui - et il disait: Ah! Les structures consultatives!
Il "s'effoirait" un peu partout avec cela.
M. le Président, ce gouvernement, chaque fois qu'il a un
problème depuis quelques mois, au lieu de prendre le taureau par les
cornes, d'agir et de présenter des programmes d'action... Il vient de
créer deux structures consultatives. Le Conseil consultatif de la
jeunesse. Pourquoi? Parce qu'il ne voulait rien faire pour les jeunes. Il leur
a créé un suçon de court terme. Amusez-vous,
consultez-vous, dites-nous quels seraient vos besoins! Dites-nous donc quelles
sont vos aspirations! C'est cela qu'il a dit aux jeunes. Et là, certains
jeunes on dit: Ouais! On a une structure, au moins, j'espère qu'avec
cette structure, on va aboutir à quelque chose. Moi, je dis aux jeunes:
Vous allez aboutir à quelque chose quand on aura changé de
gouvernement. Vous pouvez toujours vous amuser en consultation si vous voulez,
cela ne vous donnera rien avec ce gouvernement. (15 h 40)
Qu'est-ce qu'ils ont fait quand ils ont vu que les familles
québécoises s'agitaient? Ils ont dit: II faudrait bien les
calmer. Notre conseil général a dit: Cela bouge un peu dans les
associations de famille. Il faudrait que vous produisiez vite, M. le ministre.
Il a réussi à asseoir deux fonctionnaires et ils ont
accouché d'un petit texte en disant: À moyen et long terme, vous
aurez peut-être quelque chose. C'est à peu près cela, le
texte. On a dit: C'est beau, c'est fin, on vous aime bien; les familles, c'est
beau, il faut croire à cela, les parents, les enfants, la relation, les
liaisons, c'est fantastique. Ils ont dit: Tiens, calmez-vous, le Conseil de la
famille. C'est cela qu'ils ont.
Allez-vous me dire que les familles québécoises sont mieux
ce matin qu'hier, M. le Président? Absolument pas. On crée un
organisme qui risque purement et simplement de reprendre le processus de
consultation. On crée une structure de consultation qu'on ridiculisait
il y a à peine deux ans. On crée une structure de consultation et
on dit: Dites-nous donc quels sont vos problèmes. Qu'est-ce que cela a
donné de créer une commission itinérante au Québec
qui a recueilli tous les problèmes vécus par la famille?
Qu'est-ce que cela aura donné de dépenser des centaines de
milliers de dollars pour permettre à des gens de venir s'exprimer, de
venir dire ce qu'ils pensent et ce qu'ils voient comme solution au
problème, comme remède aux problèmes que vivent les
familles? C'est un perpétuel recommencement.
Le gouvernement précédant le gouvernement libéral
avait précisément produit un document de réflexion. C'est
ce document de réflexion... J'avais envie de dire au ministre ce matin
qu'il ne disait pas la vérité parce que je n'ai pas le droit de
dire autre chose. J'avais presque envie de lui dire: Est-ce assez
épouvantable, effrayant, inconcevable, impardonnable, et je pourrais
continuer longtemps, un ministre délégué à la
Famille qui ne sait même pas ce qui s'est fait au Québec dans le
domaine de la famille depuis sept ans! Il ne sait même pas cela.
Il ne semblait pas savoir que c'était le Parti
québécois qui avait lancé le livre vert de
réflexion sur la famille québécoise. Il ne semblait pas
savoir que Maurice Champagne-Gilbert avait fait une tournée du
Québec avec une équipe, qu'il avait colligé cela, qu'il
avait produit deux rapports. Il ne semblait pas savoir non plus que
c'était le Parti québécois en cette Chambre, le 11 octobre
dernier, qui a fait une motion pour en arriver à avoir une politique de
la famille. Il ne semblait pas savoir non plus -ou il ne lit pas les journaux -
que c'est nous qui avons fait un colloque sur une politique familiale tout
dernièrement et qu'on est sensible à la dimension famille et que
c'est nous qui avons tracé le chemin là-dessus. Il y a eu un
ministre délégué à la famille bien avant que le
Parti libéral se décide, après deux ans de pouvoir,
à en nommer un. Il en a nommé un mais il a du rattrapage à
faire dans ses lectures s'il veut savoir au moins ce qui s'est fait.
Le gouvernement libéral que nous avons en face de nous sera
crédible à une condition. Il sera crédible à la
condition de passer à l'action. Il sera crédible à la
condition de proposer des solutions concrètes, de mettre de l'argent sur
la table pour alléger le fardeau fiscal de ces familles, de mettre de
l'argent sur la table pour permettre aux jeunes Québécois et aux
jeunes Québécoises d'avoir des enfants tout en continuant leur
profession ou leur carrière, de mettre sur la table les amendements
législatifs qui s'imposent pour permettre une forme de
sécurité d'emploi permettant à ces jeunes
Québécois et Québécoises d'avoir des enfants s'ils
le désirent.
C'est comme cela qu'on s'en sortira. Pas d'un comité consultatif
à un autre, pas d'un conseil consultatif à un autre. Les gens en
ont soupé d'être consultés. Ils ont crié leurs
besoins pendant des mois et des années. Ils attendent
concrètement les gestes, M. le Président. C'est là que le
gouvernement serait crédible, s'il déposait devant la population
des mesures concrètes, des
mesures collant aux réalités, des mesures qui viendraient
régler les problèmes que vivent les familles
québécoises.
M. le Président, en guise de conclusion, je vous dirai qu'il nous
faut cependant demander à ces familles de ne pas se décourager,
de ne pas lâcher parce qu'elles ont été bernées, de
ne pas abandonner le combat, leur lutte qu'elles font depuis un bon moment
parce que ce gouvernement a été insensible à venir
jusqu'à aujourd'hui. Je peux dire avec eux que c'est vrai qu'ils ont
été bernés, que c'est vrai qu'ils ont été
leurrés; c'est vrai qu'on a pris des engagements et qu'on ne les
respecte pas, c'est vrai qu'on trahit sa parole quotidiennement de ce
côté-là de la Chambre. Mais je demande aux familles
québécoises d'espérer, parce qu'elles ont une cause
extraordinaire et contre le gros bon sens on ne peut pas toujours vaincre,
même si on est insensible.
Un jour ou l'autre, le gros bon sens triomphera. Le
Québécois par nature, par essence, dans sa personnalité la
plus profonde, c'est un combatif. Il n'abandonnera pas. Les
Québécois vont lutter pour obtenir des mesures concrètes.
Ils vont venir à bout de gagner contre ce gouvernement
social-démocrate de fin de semaine. Ils vont réussir à
motiver suffisamment les gens, à mobiliser les gens, les groupes, les
associations pour faire bouger ce gouvernement insensible, M. le
Président. J'en ai la conviction profonde.
Quant à nous, bien sûr, n'étant pas contre la vertu,
une structure de plus, une structure de moins, à ce stade-ci, si
ça peut faire plaisir au ministre d'avoir un conseil de la famille,
même si son gouvernement ne croit pas aux structures consultatives, on ne
se battra pas pendant 40 heures ou 50 heures en commission parlementaire,
article par article. Je lui dirai, par exemple, qu'on va crier très haut
ici comme formation politique qui a toujours été sensible
à la dimension de la famille; nous allons crier très haut et
à plusieurs à part cela, pas seulement moi de mon
côté, M. le Président, comme responsable du dossier. Il y a
plusieurs de mes collègues qui vont s'adresser à cette Chambre et
qui vont rappeler les engagements libéraux, qui vont rappeler les
engagements électoraux et le programme du Parti libéral, qui vont
rappeler à ces mêmes gens qui parfois sont sensibles, vingt-quatre
heures à tous les deux ans, à la dimension sociale familiale. On
va leur rappeler, M. le Président, qu'ils ont fait rêver du monde
et, quant à nous, un jour ou l'autre, ils devront livrer la marchandise.
C'est ça notre rôle d'Opposition, tel que nous le
considérons.
À toutes fins utiles, si je fais un résumé, le
ministre a déposé un papier d'apaisement. Il a voulu apaiser,
calmer la famille québécoise ou les familles
québécoises. Il a déposé un papier que je
considère comme une coquille vide. Rien de concret pour alléger
le fardeau fiscal de la famille. Rien pour aider la femme. Rien sur le plan
législatif pour aider l'harmonisation et l'organisation de la vie de
famille. Rien pour les garderies, je l'ai dit. Rien en allégements
fiscaux. Absolument rien, M. le Président. Je répète qu'il
y a eu au moins trois reculs évidents pour la famille. Qu'on pense
à l'aide sociale déposée par le ministre. Qu'on pense
à la désindexation également de l'aide sociale. Qu'on
pense à la baisse des frais de scolarité pour les jeunes
assistés sociaux, cela aidait la famille de baisser de 100 $ à 25
$. Qu'on pense à la prime d'accessibilité enlevée à
96 000 familles québécoises par le ministre des Finances.
Je comprends maintenant peut-être mieux pourquoi le ministre
délégué à la Famille, ce matin, sentait le besoin
de dire: Je vais utiliser souvent deux mots: cohésion et
cohérence. Pour avoir été aussi incohérent, pour
avoir autant manqué de cohésion sur le plan
interministériel, M. le Président, je comprends qu'il ait besoin
de le crier fort, s'il veut accréditer les notions de cohérence
et de cohésion. Je vous dirai, quant à nous, comme formation
politique, que nous continuerons à nous définir une politique
claire avec des programmes d'action. Pas seulement une volonté politique
d'agir, une volonté de passer à l'action, M. le Président,
et de véritablement venir en aide aux familles québécoises
qui attendent, non pas des voeux pieux d'un gouvernement, non pas des
structures consultatives du gouvernement, mais qui attendent du gouvernement
qu'il mette en oeuvre les solutions qu'eux-mêmes ont
suggérées au gouvernement.
Là-dessus, M. le Président, on pourra dire, à ce
moment-là et seulement à ce moment-là, qu'on aura
commencé à travailler concrètement pour les familles
québécoises. Merci.
Le Vice-Président: Je vais maintenant céder la
parole à Mme la députée de Châteauguay. (15 h
50)
Mme Pierrette Cardinal
Mme Cardinal: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir
d'intervenir sur le projet de loi 94. Étant moi-même mère
de famille et très consciente de l'importance du milieu familial pour
l'épanouissement physique et moral de nos enfants, je ne suis pas aussi
pessimiste que le chef de l'Opposition, et, dans le projet de loi
présenté par le ministre responsable de ce dossier, on
établit, de façon explicite, la raison qui incite le gouvernement
à présenter une telle loi qui conduira à des gestes
concrets.
Plus exactement, quatre facteurs ont
influencé la décision du gouvernement de proposer un
énoncé d'orientations. En premier lieu, nous considérons
que la famille est le premier milieu de vie, d'apprentissage, de socialisation,
et que le bien-être de la famille et des individus qui la composent est
la base même du bien-être de la société. En
deuxième lieu, on considère que la contribution sociale des
parents comme premiers responsables des familles et de la prise en charge des
enfants mérite d'être soutenue, encouragée par une
volonté collective. En troisième lieu, le gouvernement
québécois se doit de favoriser l'expression des familles, de
leurs représentants, des milieux et des institutions concernés
par des questions d'intérêt familial. Enfin, on considère
qu'il importe d'instituer, suivant ces principes, un organisme pour conseiller
le ministre sur toute question d'intérêt familial.
Le thème de la famille a fait l'objet d'études, de
colloques et de congrès de la part des formations politiques au
Québec, mais le gouvernement antérieur n'a pas pris de position
ferme autre que de présenter des rapports. Nous, nous avons pris les
premières bases d'une politique qui se veut également dans un
modèle d'action qui sera global et définitif.
Dans un fascicule distribué par le ministre
délégué à la Famille, à la Santé et
aux Services sociaux, intitulé La politique familiale, les
orientations ont fait le point sur l'état actuel de la famille au
Québec, afin d'apporter des solutions réelles. Ce document est
récent puisqu'il date de 1985. Sans passer dans l'ensemble des revues de
la statistique, contentons-nous de rapporter une d'entre elles qui a d'ailleurs
fait l'objet de manchettes à plusieurs reprises au cours des
dernières années. Il s'agit de la composition des familles
monoparentales et de la présence des mères de famille sur le
marché du travail. Ces deux composantes, en effet, ont
profondément marqué l'évolution de la famille au
Québec, et des raisons d'ordre social et économique ont
incité plusieurs changements quant au rôle assumé par les
parents.
Au sujet de la proportion des familles monoparentales, on remarque, dans
le recensement de 1986, que les familles monoparentales avec enfants de 0
à 24 ans représentent 8 % de l'ensemble des familles et des
enfants de 0 à 24 ans à la maison. En ce qui a trait à la
présence des mères sur le marché du travail, selon le
recensement de 1981, alors que le taux d'activité total des femmes est
de 47 %, et que cette proportion atteint 70 % chez les femmes de 20 à 24
ans et de 62 % chez les femmes de 25 à 40 ans, 44,6 % des mères
d'enfants de moins de 6 ans occupent un emploi. Et là, il faut repenser
les orientations familiales.
Enfin, on ne saurait trop insister sur le phénomène de la
fécondité qui accuse une diminution radicale au Québec
depuis les 30 dernières années. Une commission parlementaire a
étudié, en 1985, toute cette question portant sur l'étude
de l'impact culturel, social et économique des tendances
démographiques actuelles sur l'avenir du Québec comme
société distincte. Dans un tel contexte, il est certain que la
réalité familiale est de plus en plus complexe à saisir et
à vivre. À l'égard d'une telle situation, le gouvernement
se dit fort préoccupé d'assurer une qualité de vie de la
famille québécoise, et il convient que la complexité et
les difficultés rencontrées par les familles rendent important le
soutien collectif qui doit être apporté à la famille.
Dans son énoncé d'orientations, le ministre
délégué à la Famille, à la Santé et
aux Services sociaux prend soin de faire remarquer, à propos du
rôle de l'État, que la principale préoccupation du
gouvernement est de chercher à répondre le plus directement
possible à cette attente des représentants des familles qui
réclament du gouvernement de penser famille - c'est ce que nous faisons
- et, au mieux, de soutenir la natalité, le cas échéant,
en tenant compte de la réalité familiale dans toutes les
politiques où il peut être requis de le faire. Voilà un
élément nouveau en plus de la création d'un organisme
conseil auprès du gouvernement qui guidera les actions de ce
gouvernement dans les nouvelles initiatives politiques et sociales qu'il faudra
mettre de l'avant.
Dorénavant, les différents ministères et organismes
publics devront tenir compte de ce concept de la famille
québécoise, de manière à y insérer les
éléments de soutien d'aide susceptibles d'améliorer la
qualité de vie de la famille québécoise au nom de la
justice, de la sécurité pour tous les membres de la famille.
Enfin, l'objectif général de la politique familiale se
résume de la façon suivante: On reconnaît l'importance de
la famille en tant qu'institution et milieu de vie, notamment par le soutien
collectif aux parents et au milieu familial. Le champ d'application de ce
projet de loi couvrira un ensemble de secteurs d'intervention comme le soutien
économique aux parents, l'habitation, le travail, les services de garde,
la famille et les loisirs, ainsi que l'immigration et bien d'autres.
Comme on le voit, il s'agit de favoriser l'expression des familles
à l'égard du développement de la politique familiale, en
assurant une meilleure concertation gouvernementale, et de faciliter la
tâche aux différents ministères et organismes
gouvernementaux à poursuivre ces objectifs. Je dois dire que notre
virage social, on veut le prendre globalement, pas à la hâte. Je
dois dire que qui va piano va sano, c'est-à-dire qui va lentement va
sûrement.
En ce qui a trait à l'organisme conseil proposé par le
projet de loi 94, il serait composé de neuf membres, nommés
après consultation des organismes familiaux, des milieux et institutions
concernés par la politique familiale. Le Conseil de la famille aura pour
principale fonction de travailler en étroite collaboration avec la
ministre responsable pour veiller aux questions d'intérêt familial
avec coordination et diligence.
Il importe de souligner également que le gouvernement du
Québec ne met pas de côté tout le travail
réalisé au cours des dernières années pour en venir
à une réflexion globale sur le thème de la famille. Il
tient pour acquis que la plupart de ceux et celles qui se sont exprimés
sur la politique familiale au Québec au cours des dernières
années ont bien montré qu'il s'agissait d'une
responsabilité collective à partager entre les nombreux
intervenants.
Toutefois, le ministre a déjà souligné qu'il faut
être conscient que le succès de cette politique dépend, en
grande partie, du fait que les autres responsables du soutien collectif
à apporter aux familles et aux parents s'acquitteront de leur
tâche. Le gouvernement reconnaît également que la famille
est une valeur collective fondamentale et qu'il entend, au terme de
l'énoncé qu'il a proposé, se donner les moyens pour tenir
compte davantage de la spécificité de la réalité
familiale, contribuer à la cohésion et à la
stabilité de la famille et soutenir les parents, premiers responsables
légaux et sociaux de la prise en charge des enfants.
Dans un communiqué publié par le ministre
délégué à la Santé et aux Services sociaux,
il est prévu que l'élaboration de cette politique se fera en deux
phases. Le dépôt de cet énoncé constitue la
première phase de la politique familiale. La seconde sera marquée
par l'annonce au cours de la prochaine année de mesures significatives
de soutien aux parents. Les consultations, les travaux de recherche viendront
compléter cette phase d'action de la part du gouvernement pour
éventuellement en arriver à des réformes importantes
touchant la famille au Québec. En ce sens, la constitution du Conseil de
la famille devient une première mesure concrète qui assurera aux
groupes familiaux une place prépondérante dans la mise en oeuvre
de la politique familiale.
Cet énoncé de politique s'inscrit dans la suite logique
des interventions du gouvernement du Québec portant sur la famille.
Citons, par exemple, les améliorations apportées aux services de
garde à l'enfance, les améliorations touchant l'aide pour contrer
la violence conjugale - des gestes concrets ont déjà
été posés - ainsi que d'autres mesures contenues dans le
dernier discours sur le budget du ministre des Finances du
Québec. (16 heures)
À propos de ce dernier discours sur le budget, le ministre des
Finances reconnaissait que les familles jouent un rôle essentiel dans la
société. Il ajoutait qu'en raison des coûts additionnels
associés à la présence d'enfants il apparaît assez
clairement qu'ils ont besoin d'être apppuyés, soit par le
régime d'imposition, soit par une aide directe de l'Etat. Voilà
un engagement clair et précis du gouvernement du Québec pour
favoriser l'entrée en vigueur d'autres mesures avantageuses pour la
famille.
Ajoutons à cela que la réforme de l'aide sociale,
annoncée la semaine dernière par le ministre du Travail et de la
Main-d'Oeuvre, marque un progrès vers l'élaboration d'une
véritable politique québécoise de sécurité
du revenu et tient compte de la situation familiale au Québec. Le projet
du ministre du Travail est actuellement soumis à la discussion publique.
Nous estimons que les mesures inhérentes à ce projet devraient
permettre d'améliorer sensiblement le sort d'une majorité de
familles défavorisées au Québec. Comme le disait si bien
Pierre Vennat, dans un éditorial de La Presse du 16 décembre
dernier, le "gouvernement du Québec a démontré une
volonté politique gouvernementale de s'engager dans un secteur qui, trop
souvent, semblait effrayer les politiciens".
Maintenant, pour revenir au dernier discours sur le budget, on se
souviendra que le ministre des Finances annonçait ce jour-là une
déduction pouvant atteindre 930 $ pour les familles biparentales et 765
$ pour les familles monoparentales qui ne partagent pas un logement avec un
autre adulte. Cette mesure s'appliquera le 1er janvier 1988. Également,
à titre d'exemple, une famille biparentale de deux enfants commence
aujourd'hui à payer de l'impôt au Québec lorsque son revenu
dépasse 13 400 $ et, à l'avenir, cette même famille n'aura
aucun impôt à payer avant d'avoir gagné 20 820 $. Ce ne
sont que quelques exemples et nous pourrions en citer plusieurs autres.
En somme, le dossier de la politique familiale en est un complexe qui a
de nombreuses implications. Le gouvernement du Québec a choisi la voie
de la transparence et de la clarté pour harmoniser ses efforts pour un
meilleur équilibre de la redistribution des richesses à
l'égard des familles dans le besoin. Le gouvernement du Québec
n'est pas le seul intervenant qui puisse améliorer la situation sociale
et économique des familles québécoises. Plusieurs autres
agents dans le milieu peuvent apporter des actions positives en ce qui concerne
la qualité de vie des familles. On peut citer les municipalités
qui, à cet égard, ont une grande responsabilité dans le
domaine des loisirs et de la culture et qui peuvent certainement apporter
un
soutien considérable en ce qui concerne la garde des enfants.
Dans le monde du travail, la tradition veut qu'on n'ait pas été
habitué à se préoccuper de cette importante
activité. Reste qu'il est important que les employés des
entreprises soient d'abord et avant tout sensibilisés à toute
cette question.
L'école, bien sûr, constitue un autre intervenant
important. L'importance n'est plus à démontrer quant au
rôle que les parents peuvent avoir dans l'éducation de leur
enfant. Il vient compléter ce triangle qu'est l'école, la famille
et le travail, dont les efforts doivent être à l'avenir
harmonisés en vue d'améliorer la qualité de vie des
familles. À l'avenir, la famille québécoise
évoluera parce que notre société est dynamique. Il ne
s'agit pas pour l'État de réglementer l'évolution de la
famille du Québec. Il ne s'agit pas non plus d'imposer quelque politique
qui aille à l'encontre de la volonté des citoyennes et des
citoyens du Québec de former une famille selon un mode qu'ils auront
choisi eux-mêmes. Il s'agit essentiellement d'orienter cette aide, ces
mesures qui peuvent concourir à aider l'ensemble de la population afin
que notre société distincte puisse de mieux en mieux
maîtriser son avenir.
Enfin, la dénatalité au Québec est un
problème qu'il ne faut pas cacher et la violence conjugale en est un
autre qui demande une conscientisation collective et individuelle afin que des
mesures incitatives puissent venir corriger ces anomalies de notre
société. Tel que s'y engageait le ministre
délégué à la Santé et aux Services sociaux,
le gouvernement libéral continuera à mettre de l'avant les
politiques de valorisation de la famille québécoise et instaurera
notamment des mesures visant à améliorer les services d'appui et
le support financier aux parents à titre de premiers responsables
légaux et sociaux de la prise en charge des enfants et du milieu
familial. J'assure donc en cette Chambre mon entière collaboration au
ministre responsable de la politique familiale pour qu'il continue à
poser des gestes concrets et ce, dans des délais respectables.
Merci.
Le Vice-Président: Nous poursuivons nos
délibérations et je cède la parole à M. le
député de Gouin.
M. Jacques Rochefort
M. Rochefort: Merci, M. le Président. À mon tour,
j'aimerais prendre la parole sur le projet de loi qui est devant nous et qui
concerne la création du Conseil de la famille. Je commence cette
intervention d'une certaine façon très partagé. Autant
pour moi, le dossier de la politique familiale revêt une très
grande importance - il devrait avoir la priorité dans les
décisions prises ici, à l'Assemblée nationale, depuis un
certain temps et pour les prochains mois - autant, lorsque je lis le projet de
loi qui nous est soumis et l'ensemble des documents qui l'accompagnent, qui
nous ont été soumis par le ministre délégué
à la Famille, je suis animé par une profonde déception et
une surprise extrêmement négative.
M. le Président, tout le monde s'attendait vraiment que le
ministre délégué à la Famille, qui occupe cette
fonction depuis six mois, arrive aujourd'hui avec un dossier concret, complet,
cohérent et rempli de mesures qui prendront effet dans les prochaines
semaines, dans les prochains mois pour permettre aux familles, une fois pour
toutes, d'obtenir le soutien dont elles ont besoin, la reconnaissance qui leur
est due et le statut qui devrait être le leur dans leur
société. Le ministre a choisi de déposer la
création d'une structure nouvelle et, quant au reste, à
espérer qu'un jour il posera les gestes qui devraient normalement suivre
par rapport aux responsabilités qui lui ont été
confiées.
Les Québécois réfléchissent, cheminent
depuis déjà un bon moment par rapport aux questions entourant la
famille. Chaque Québécois, chaque Québécoise a
été en mesure d'observer, au cours des dernières
années, combien la famille québécoise est en crise,
combien la famille québécoise vit des moments extrêmement
difficiles, combien elle est perturbée par toute l'évolution qu'a
connue notre société, par tous les changements de rythme, les
changements de mentalité, les changements de valeurs que nous avons
connus au cours des dernières années et aussi considérant
de cette évolution qu'a connue notre société, combien
c'est différent de vivre en famille, d'élever une famille, de
poursuivre la vie en famille par rapport à ce que c'était il y a
un certain nombre de décennies.
En conséquence, face à cette famille
québécoise qui vit une crise, qui vit des perturbations majeures
et les effets de ces perturbations, tout le monde en était arrivé
à un consensus, croyions-nous à l'époque, sur le fait
qu'il fallait faire quelque chose, qu'il fallait passer immédiatement
à l'action et qu'on avait là sûrement un beau dossier pour
passer à l'action en dehors de toute partisanerie, en dehors de toute
division entre les formations politiques, parce que voilà une question
qui transcendait les divisions de notre société à partir
des formations politiques.
Tout le monde, de tous les milieux, de gauche, de droite, du Parti
québécois comme du Parti libéral, des milieux les plus
progressistes comme des milieux les moins progressistes, des milieux
francophones comme des milieux multiethniques, l'ensemble des milieux, des
milieux les plus favorisés comme des milieux les moins
favorisés,
l'ensemble des Québécois et des Québécoises
s'était entendu, en était arrivé à un consensus
qu'il fallait intervenir rapidement pour permettre aux familles
québécoises de recevoir ce dont elles ont besoin pour faire face
à l'évolution qu'a connue notre société et pour lui
permettre de continuer d'occuper une place importante et cela, pour ceux et
celles qui souhaitent vivre une vie familiale avec tout ce que cela
comporte.
Donc, M. le Président, nous en étions arrivés
à des consensus importants, non seulement dus à
l'évolution qu'a connue notre société, et donc qu'a connue
la famille au cours des dernières décennies, mais aussi à
cause des effets démographiques très importants que notre
société connaît à la suite de son évolution
globale. Pensons à la baisse considérable du taux de
natalité que nous connaissons, qui fait que le Québec se retrouve
aujourd'hui avec le deuxième plus bas taux de natalité au monde.
Pensons au problème du vieillissement de la population, à ce
phénomène qui implique des modifications profondes de l'ensemble
de notre vie en société et particulièrement de la cellule
familiale. Et pensons aussi à toute cette prise en main
nécessaire, par les familles, des problèmes sociaux de plus en
plus nombreux auxquels elles sont confrontées. (16 h 10)
Or, l'ensemble de ces raisons faisait en sorte que tout le monde
s'était entendu susr le fait qu'il fallait bouger, qu'il fallait agir
rapidement et agir avec des effets concrets immédiats. D'ailleurs,
l'actuel premier ministre, lui-même, lorsqu'il a nommé le
député de Beauce-Sud à la direction du dossier de la
politique familiale l'été dernier, nous avait dit: Et l'automne
qui vient - en parlant de l'automne qui se terminera dans quelques jours - sera
marqué particulièrement - par un des dossiers auxquels le premier
ministre disait accorder une importance très grande - par le dossier de
la politique familiale. Le premier ministre nous avait conviés à
un automne famille, à un automne où on discuterait à
l'Assemblée nationale, où on poserait des gestes concrets en
faveur de la famille québécoise. Le résultat, c'est que
tout le monde s'attendait que le ministre délégué à
la Famille nous arrive avec une politique de la famille complète,
cohérente, intégrée, avec des budgets, des calendriers
d'action, des mesures législatives, avec des gestes concrets qui
auraient eu pour effet qu'au lendemain de l'adoption de ces mesures, on aurait
eu la conviction et on aurait vu concrètement, on aurait pu toucher de
façon palpable des changements possibles pour les familles du
Québec.
Le résultat de six mois de travail du ministre
délégué à la Famille et député de
Beauce-Sud, et d'un an et demi de travail de la députée de
L'Acadie alors qu'elle avait le dossier avant lui, c'est que ça a pris
deux ans pour nous mettre, dans un projet de loi, le premier paragraphe d'un
rapport de consultations qui avait été élaboré dans
les deux années précédentes et qui arrivait à la
conclusion qu'il fallait, dans un premier temps, doter le Québec d'une
structure de coordination, de consultation et de pression pour les familles
à l'intérieur de l'État québécois, qui
était un Conseil de la famille.
Cela a pris deux ans au gouvernement, dont six mois à l'actuel
ministre délégué à la Famille, pour arriver avec un
projet de loi qui retranscrit mot à mot ou presque ce que le rapport de
consultations du groupe sur la politique familiale avait mis deux ans à
élaborer et qu'il avait fait connaître il y a déjà
deux ans. Ça s'appelle, M. le Président, accoucher d'une souris
pour ne pas dire ne pas accoucher du tout. Ça s'appelle faire un pas de
tortue. Ça s'appelle exprimer une intention, des voeux pieux.
D'ailleurs, M. le Président, le ministre, par une phrase qu'il se
rappelle peut-être, lorsqu'il a été interviewé par
Pierre Maisonneuve à l'émission Présent, le matin à
8 h 10 le lendemain du dépôt de son projet de loi... M. Pierre
Maisonneuve de Radio-Canada lui dit: Oui, mais, M. le ministre, qu'est-ce qu'il
y a de concret dans ce que vous avez fait, en quoi ça change quelque
chose? Pouvez-vous me résumer ce que vous avez fait pour le vrai de
concret pour le monde, vous, depuis six mois dans votre ministère? Le
député de Beauce-Sud, ministre délégué
à la Famille, de répondre deux choses: Mon projet de loi implique
que le gouvernement du Québec reconnaît maintenant l'importance de
la famille dans notre société. Ça lui a pris six mois
comme ministre pour nous informer que le gouvernement reconnaît
maintenant, que la famille, c'est important dans notre
société.
Grande réflexion, grand résultat, vraiment un apport
considérable au débat et à l'avancement de la famille au
Québec. Il nous annonce que le gouvernement reconnaît maintenant
l'importance de la famille au Québec. Ça change beaucoup dans la
vie de tous les jours des familles, j'en ai la conviction. La deuxième
chose qu'il nous a dite... D'une part, on reconnaît enfin l'importance de
la famille. Et la deuxième chose: C'est une intention - et là, je
le cite mot à mot - de faire quelque chose dans les prochains mois et
les prochaines années pour les familles.
Quand il a été nommé ministre
délégué à la Famille, j'imagine, compte tenu qu'il
n'y a que 27 ministres dans le gouvernement, pour un peuple de 6 500 000
habitants, avec un budget de 30 000 000 000 $ par année, si on prend un
des 27 ministres du Québec et qu'on lui dit: Vous êtes
nommé ministre délégué à la Famille,
ça doit être parce qu'on accorde une certaine importance à
la
famille... J'aurais cru qu'il aurait compris, par sa nomination, qu'il y
avait une importance au dossier et à ces questions dans l'État
québécois. Deuxièmement, j'aurais cru que l'intention de
faire quelque chose découlait directement de sa nomination et, donc,
qu'il aurait pu prendre les six mois qui se sont écoulés depuis
sa nomination pour faire quelque chose.
Ce n'est pas sérieux, ce qui est déposé. C'est,
essentiellement, de la politique. C'est, essentiellement, du patinage de
fantaisie. Ils avaient annoncé à tout le monde qu'ils feraient
quelque chose. Ah oui! Ils ont fait quelque chose. Ils ont déposé
un projet de loi qui dit: On crée un Conseil de la famille, avec
absolument rien de concret. Voilà une belle mesure qui vient leurrer les
Québécois, qui vient faire en sorte qu'on passe à
côté du bateau et, je le répète, à
côté d'un sujet qui faisait consensus dans notre
société, au-delà de tout ce qui peut nous diviser,
notamment les questions politiques partisanes! On avait réussi à
faire un consensus au-dessus de ces questions pour, tous ensemble, unir nos
voix et poser des gestes concrets dans un consensus. J'ai la conviction que
nous aurions eu l'unanimité de l'Assemblée nationale pour prendre
des mesures concrètes, pour poser des gestes tangibles, pour donner
enfin aux familles ce dont elles ont besoin et ce qu'elles méritent.
M. le Président, cette décision du gouvernement, qui n'est
pas seulement la décision du ministre, c'est l'ensemble du gouvernement
qui a pris cette décision et qui la dépose aujourd'hui, je pense
qu'elle illustre qu'encore une fois ce gouvernement est incapable de faire face
aux grands défis de notre société, qu'il est incapable de
faire face aux grands enjeux de notre société, qu'il est
incapable de poser, aujourd'hui, des gestes en fonction de demain et
d'après-demain et qu'il est incapable de saisir un momentum parce qu'il
y avait - oui, M. le ministre - un momentum favorable à des gestes
concrets pour la famille.
Pour moi, le dossier de la politique familiale est un dossier absolument
urgent. Il est absolument urgent que la famille québécoise
reçoive un soutien important, substantiel, concret, immédiat pour
qu'enfin nous reconnaissions cette contribution absolument majeure à
l'évolution, à l'existence et au développement de notre
peuple que nous donnent l'ensemble des hommes et femmes qui ont
décidé de constituer des familles, d'avoir des enfants et de
vivre en famille. Il est absolument urgent que nous donnions un statut, non pas
un statut en l'air, dans les nuages, mais un statut avec des
éléments, un soutien, une reconnaissance, des moyens concrets
à ces familles québécoises. Il est de plus en plus
difficile d'avoir des familles au Québec, comme partout ailleurs dans le
monde occidental. C'est de plus en plus coûteux. En même temps, les
familles vivent avec des perturbations comme jamais dans le passé.
Pensons à l'influence des moyens de communication, pensons à la
rapidité dans laquelle notre société vit, pensons à
l'intensité que connaît l'évolution de notre
société, voilà des éléments qui rendent la
vie plus difficile au développement et au vécu des familles. Et,
en contrepartie de cela, on ne fait rien pour les soutenir, pour les appuyer,
pour les reconnaître quant à la contribution absolument
phénoménale qu'elles apportent au développement de notre
peuple.
On nous dira: Oui, mais on voudra peut-être intégrer la
politique de la famille à une politique de la population. C'est le
contraire. Si c'est le message qu'on veut nous faire, on va encore nous faire
perdre deux ans, faire perdre deux ans aux familles québécoises,
faire perdre deux ans au développement, à l'évolution et
au progrès du Québec et, en plus, pendant qu'on ne fera rien, on
aura une politique de la population. C'est-à-dire que, pour
développer et faire progresser notre peuple, le faire croître, le
faire grandir, plutôt que d'y aller par une politique familiale, on
ouvrira les portes toutes grandes à l'immigration, sans aucune politique
d'intégration des immigrants au Québec. Et cela, c'est grave.
J'entends un député me dire: II y en a une. M. le
Président, par rapport aux problèmes que connaît
l'intégration des immigrants au Québec, par rapport au nombre
d'immigrants qui entrent au Québec, par rapport aux politiques et aux
orientations du gouvernement depuis le 2 décembre 1985 face à
l'immigration, ce n'est pas une politique d'intégration qu'on a. Moi
aussi, je suis favorable, comme je l'ai toujours été, à ce
qu'il y ait des immigrants qui viennent au Québec, qui viennent enrichir
la société et la collectivité québécoise,
qui viennent s'associer au peuple du Québec pour poursuivre la route
tous ensemble. C'est une richesse, c'est un apport positif. Mais jamais je
n'accepterai que notre politique de population, que notre politique face au
problème démographique que nous vivons, face au problème
de population que nous avons, se limite à une politique d'immigration
comme celle que mène actuellement le gouvernement du Québec. Je
pense que tout cela doit fonctionner ensemble et cela doit commencer par une
politique de la famille. Cela, ce n'est pas démissionner, c'est accepter
de relever le défi et de vouloir continuer. (16 h 20)
J'ai le sentiment qu'avec le dossier de politique familiale qui est
déposé, aujourd'hui, on a démissionné face à
la famille, face au soutien que les familles méritent, d'une part, et
que, deuxièmement, dans un autre ordre d'idées, notre
démographie doit connaître pour que notre peuple continue
de progresser. M. le Président, je suis convaincu qu'au rythme où
nous allons alors que la politique de la famille doit arriver maintenant, doit
avoir des effets maintenant, le ministre délégué à
la Famille tombe dans le panneau que je décrivais l'automne dernier
lorsque je faisais des rencontres sur ces questions. Je disais en riant, en
faisant de l'humour, aux groupes que je rencontrais, pour décrire
l'urgence qui m'animait par rapport à ce dossier, je disais aux gens:
Vous savez, il faut être bien certain que la politique familiale qu'on va
adopter ne viendra pas soutenir mes enfants quand ils vont décider de
créer des familles.
C'est maintenant qu'il faut que la politique familiale donne des
résultats. C'est aux gens de ma génération et des
générations qui sont près de la mienne qu'il faut que
cette politique s'applique. Ce sont ces gens qu'il faut que la politique
familiale vienne soutenir, vienne appuyer, vienne reconnaître, vienne
aider, non pas les générations qui vont nous suivre. On va
risquer d'être trop tard, M. le Président, à cause des
difficultés que rencontrent les familles du Québec et trop tard
quant aux problèmes de démographie que nous connaissons.
M. le Président, la situation nécessite une action
énergique, rapide et, je le répète, pour une fois qu'on a
un dossier qui va faire consensus, qui ne fera pas de litiges entre les
différents groupes qu'on retrouve dans notre société,
pourquoi ne pas agir maintenant? Est-ce qu'un jour un membre de ce gouvernement
va nous expliquer ce qui s'est passé entre les mois d'août et
décembre pour accoucher presque d'un faux accouchement? Ce n'est
même pas une grosse souris, M. le Président.
M. le Président, pour illustrer combien les retards que nous
prenons sont graves, revenons directement à la politique de population,
à la politique de la famille par rapport à la démographie.
Alors qu'il y a quelques années, on nous disait: Les mesures fiscales
devront porter sur le troisième enfant parce que les familles ont
généralement deux enfants mais donnons-leur un coup de pouce pour
qu'ils en aient un troisième. Il y a quelques années les gens se
sont mis à dire: Hum'. Cela commence à être
compliqué quand on regarde aller les courbes démographiques.
C'est même le deuxième enfant qui commence à poser
problème. Il y a de moins en moins de gens qui ont un deuxième
enfant. Beaucoup de groupes commençaient à nous dire: II va
falloir que vos mesures viennent non pas aider le troisième enfant, on a
déjà un problème pour le deuxième, il faut qu'on en
vienne à soutenir, à appuyer ceux et celles qui décident
librement - parce qu'il faut reconnaître une liberté totale de
choix, tous les choix sont bons - il faut faire en sorte que ceux qui veulent
avoir des enfants puissent avoir un coup de pouce pour le deuxième.
M. le Président, au train où on s'en va, ce que cela va
prendre d'ici à quelques mois, c'est une politique familiale qui vienne
donner un coup de pouce au premier enfant. Voilà une belle illustration
du coût, des conséquences graves, des retards qui s'accumulent
chaque jour, chaque semaine et chaque mois et qui découlent de l'absence
de politique, de l'absence de décisions et de l'absence de mesures
concrètes de la part du ministre délégué à
la Famille.
Plus nous allons attendre, plus cela va être difficile et plus
cela deviendra impossible, peut-être inutile de reconnaître et de
soutenir les familles québécoises. C'est non seulement l'avenir
de la famille québécoise qui est en jeu mais c'est aussi, d'une
certaine façon, à moyen terme, l'avenir du peuple
québécois tout entier. Dans ce sens, s'il y a un message que je
veux donner, que je veux laisser au ministre délégué
à la Famille, c'est qu'il retourne vite dans son bureau et qu'il se
décide à adopter des mesures concrètes, rapides. C'est
facile.
Ceux qui sont intervenus avant moi, lui comme les autres avec ses
documents, les députés, ses collègues ministériels,
tous, on s'entend sur ce qui doit être fait. Il faut faire en sorte
d'apporter des mesures de soutien financier aux familles. Or, cela veut dire
des modifications à la fiscalité, des modifications pour avoir
des allocations familiales concrètement substantielles pour les
familles. Cela veut donc dire un soutien financier. Cela veut donc dire des
services.
Arrêtons de parler des garderies et faisons-en. Arrêtons de
débattre ces questions et créons des places en garderie,
facilitor. la possibilité pour les femmes et les hommes qui veulent
avoir des enfants d'avoir aussi une carrière, de pouvoir sortir de la
maison. Cela implique des garderies, des structures de soutien dans le milieu,
cela implique des modifications aux lois sur le travail. Faisons aussi en sorte
qu'on ait des conditions de vie qui permettent aux familles de se
récréer. Exigeons que partout où il y a des lieux
d'activités, de récréation, de culture qui touchent aux
enfants, il y ait des prix familiaux. Il y aurait des réductions pour
les enfants accompagnés d'adultes, M. le Président. Faisons donc
en sorte que tout ça se fasse rapidement. On s'entend sur ce qui doit
être fait. Pourquoi attendre? Pourquoi lésiner?
La pire des conséquences, au-delà de celle que j'ai
décrite avec conviction, celle de l'absence de volonté et de
décision du ministre, - je conclus là-dessus, M. le
Président - c'est que pour tous ces Québécois et ces
Québécoises qui attendaient une politique familiale
concrète, le message qu'ils viennent de se faire envoyer, livrer par
le gouvernement du Québec, pas par n'importe qui là, par
le gouvernement du peuple québécois, c'est: Écoutez, on
n'est pas pressé. Ce n'est pas tellement urgent et on va continuer d'y
penser. C'est ça le message qu'ils se font livrer.
M. le Président, comment voulons-nous qu'il y ait un impact sur
l'évolution des mentalités, sur l'évolution de notre
société en général, tant sur les questions de
politique familiale que sur les questions de démographie, de
natalité, quand le gouvernement lui-même démissionne, plie
bagages avant même d'avoir ouvert le dossier? J'exprime donc en concluant
une profonde déception, au-delà de toute considération
politique, une profonde déception comme citoyen du Québec de voir
le gouvernement accoucher d'un faux accouchement. Le gouvernement au fond a
démissionné et n'a pas assumé pleinement ses
responsabilités par rapport à la famille, puisque, je le
répète, il jouissait, non seulement de l'urgence de la situation,
mais d'un consensus largement établi dans notre société et
qui ne reviendra peut-être pas de sitôt.
Souhaitons-nous tous ensemble que le ministre refasse ses devoirs et
qu'au tout début de la nouvelle année 1988 il nous arrive avec un
document non pas d'intention, non pas d'espoir, non pas de foi, mais concret,
avec des décisions qui feront qu'enfin les familles du Québec
auront le soutien, la reconnaissance et le statut qui doit être le leur
et en même temps des mesures pour que la famille puisse poursuivre,
évoluer et apporter toujours sa contribution au développement et
au progrès de notre peuple! Je vous remercie.
Le Vice-Président: M. le leadc du gouvernement.
M. Gratton: Oui, M. le Président, je voudrais proposer
l'ajournement du débat.
Le Vice-Président: Cette motion d'ajournement du
débat est-elle adoptée?
M. Jolivet: M. le Président...
Le Vice-Président: Oui, M. le leader adjoint de
l'Opposition.
M. Jolivet: Juste un instant. Je voudrais savoir qui va avoir le
droit de parole ensuite, parce que c'était de notre côté
normalement.
Le Vice-Président: Non. Là-dessus, juste un
instant. Je veux simplement vous mentionner qu'en vertu de la règle de
l'alternance, je dois comprendre, à ce moment-ci, que le
député de Gouin, qui est un député
indépendant, qui n'est pas de la formation de l'Opposition officielle, a
parlé contre le projet de loi et, à la reprise du débat,
je reconnaîtrai un député qui voudra parler pour le projet
de loi. D'accord?
M. Jolivet: M. le Président...
Le Vice-Président: M. le leader adjoint de l'Opposition.
Oui, un instant, une question de règlement.
M. Rochefort: L'Opposition me le permet? M. le
Président...
Le Vice-Président: M. le député de
Gouin.
M. Rochefort: Oui, oui, sur ce que vous avez dit, parce que je ne
voudrais pas donner une interprétation différente à mes
propos. M. le Président, il est évident, je pense, qu'il n'y a
personne qui va s'opposer à la création d'un Conseil de la
famille et donc je ne suis pas contre le projet de loi. Je suis contre
l'absence de décision du ministre.
Le Vice-Président: D'accord.
M. Rochefort: Je ne veux pas qu'on interprète le sens de
mes propos par rapport au contenu du projet de loi. J'aurais voulu plus.
Le Vice-Président: Non, non.
M. Rochefort: J'aurais voulu plus.
Le Vice-Président: C'est ça, exactement. Je
n'interprète pas la nature de vos propos. Je ne vous dis pas que vous
êtes contre le Conseil de la famille. Ce n'est pas ça que je vous
dis. Je dis simplement que, comme président, si j'ai à juger,
disons, des interventions, j'ai compris de vos propos, justement, un peu de la
teneur de vos propos, que je dois faire en sorte dans un débat de voir
à l'alternance. Dans ce cas-ci, sur la question précise du leader
adjoint de l'Opposition, je mentionnais simplement que, quant à moi,
suivant la teneur des propos que j'ai entendus, je reconnaîtrai, à
ce moment-là, après coup, une intervention du côté
ministériel. Sur la même question de règlement, M. le
leader adjoint de l'Opposition.
M. Jolivet: Oui, M. le Président, j'aurais aimé,
avant que vous preniez votre décision, que je puisse expliquer mon point
de vue.
Le Vice-Président: Oui.
M. Jolivet: Parce que là vous venez de rendre votre
décision.
Le Vice-Président: Écoutez, ce n'est pas une
décision que j'ai à prendre. Vous me demandiez qui aurait la
parole. Est-ce que ça peut être quelqu'un de votre
côté ou de l'autre côté? Je n'ai pas rendu une
décision inflexible, qui n'est pas à changer. Je veux simplement
vous donner une espèce d'indication, selon mon point de vue, en
reconnaissant quelqu'un du côté ministériel, en
l'occurrence le leader du gouvernement pour la demande d'ajournement. Je vous
disais que, dans la situation présente, à mon jugement, j'aurais
reconnu un député ministériel à ce moment-ci. (16 h
30)
En tout cas, je peux vous entendre quand même, je ne veux pas
fixer les règles du jeu au départ, mais je peux vous entendre
là-dessus. Non? Cela va? Je pense que c'est selon la teneur de chacun
des débats, c'est à l'appréciation de la présidence
de décider de l'alternance. D'accord?
Donc, je comprends que la motion d'ajournement est adoptée,
n'est-ce pas? La motion d'ajournement est adoptée. Adopté. M. le
leader du gouvernement.
M. Gratton: Oui. Si vous voulez appeler l'article 29, M. le
Président.
Projet de loi 97
Prise en considération du
rapport de la commission qui '
en a fait l'étude
détaillée
Le Vice-Président: À l'article 29 du feuilleton,
nous allons maintenant procéder à la prise en
considération du rapport de la commission des affaires sociales qui a
procédé à l'étude détaillée du projet
de loi 97, Loi modifiant la Loi sur les services de santé et les
services sociaux, présenté par Mme la ministre de la Santé
et des Services sociaux.
Avant d'entreprendre ce débat, je veux simplement indiquer
à la Chambre que, suivant notre règlement, nous avons reçu
en temps utile des amendements au projet de loi, soit des amendements aux
articles 1, 4 et 7. Nous allons donc procéder au débat. Une fois
que le débat sera terminé, nous allons, à ce
moment-là, voter sur les amendements. À la suite du vote sur les
amendements proposés, nous voterons sur le rapport tel qu'amendé
ou non, suivant que les amendements seront adoptés ou non. D'accord?
À ce moment-ci, pour entreprendre le débat à ce
stade de l'étude du projet de loi, je vais céder la parole
à Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux.
Mme Thérèse Lavoie-Roux Mme Lavoie-Roux: Merci, M.
le Président. Comme vous venez de le mentionner, nous sommes rendus
à la prise en considération du rapport sur le projet de loi 97,
rapport qui a été déposé à
l'Assemblée nationale hier après-midi. Au moment de
l'étude en commission parlementaire de ce projet de loi, nous nous
étions entendus pour que trois amendements supplémentaires soient
apportés, ce qui ne veut pas dire, M. le Président, que
l'Opposition est nécessairement d'accord avec les trois amendements
supplémentaires, mais on avait convenu que je les préparerais
compte tenu du temps qui nous était alloué, etc.
Alors, j'aimerais déposer... J'imagine que je dois les
déposer officiellement, ces trois amendements?
Le Vice-Président: Mme la ministre, simplement pour vous
informer que les amendements, suivant notre règlement, doivent
être déposés. Ces amendements, à ma connaissance,
ont été transmis et déposés en temps utile. Vous
pouvez, dans le cadre de votre argumentation, en parler sans problème.
Nous avons déjà reçu ces amendements.
Mme Lavoie-Roux: Alors, le premier amendement était... En
fait, c'était un sous-amendement à l'article 3.1 qui est
modifié par le remplacement de la dernière phrase du
deuxième alinéa par la suivante, et je cite: "Ces postes ne
peuvent excéder 25 % du nombre de postes qui, parmi l'ensemble des
postes prévus au paragraphe deux du premier alinéa, sont
destinés à de nouveaux stagiaires."
Très brièvement, on se rappellera qu'un jugement de la
Cour d'appel avait demandé que le gouvernement se donne une base
juridique quant à l'établissement conditionnel qu'il s'agisse
d'internes ou de résidents, en régions éloignées.
Comme ceci n'avait fait que l'objet d'une décision du Conseil des
ministres, il fallait lui donner une base juridique, et c'est ce que nous avons
fait.
Il y a eu une discussion, en particulier pour savoir comment serait
exprimée cette limite - parce que, désormais, il fallait mettre
dans la loi une limite - quant au nombre de personnes qui pourraient devoir
aller en régions éloignées, soit parce que ce sont des
médecins hors Québec ou des Québécois qui ont fait
leurs études hors Québec, pour une part, ou dans le cas des
spécialités qui peuvent être accordées à un
nombre supplémentaire de médecins pour justement se
spécialiser, d'autre part.
Alors, ce que nous proposons, c'est que ce nombre ne puisse
excéder 25 %. Il peut osciller de 0 % à 25 %, mais ce que nous
proposons, c'est 25 %.
La deuxième modification touche l'article 37 qui, tel
qu'introduit par l'amendement, est modifié par l'addition, à
la fin du quatrième alinéa, de ce qui suit: "Toutefois,
seule l'autorisation du conseil d'administration est requise, s'il s'agit d'une
charge ou d'une fonction occupée au sein d'une association regroupant la
majorité des conseils régionaux ou au sein d'une association de
directeurs généraux des services de santé et des services
sociaux reconnues par décret à des fins de relations du travail."
Et l'article 7 est un article de concordance parce que, dans l'article 4, on
s'adresse au directeur général d'un conseil régional,
tandis qu'à l'article 7, on s'adresse à un directeur
général d'un conseil d'administration.
C'est à la suggestion de l'Opposition qui a fait valoir qu'il
serait probablement préférable que l'autorisation de la ministre
ne soit pas requise lorsqu'il s'agira d'une tâche qui serait
reliée à une association d'établissements ou même
à une association reconnue par décret pour fins de relations du
travail.
Alors, dans le cas des amendements aux articles 4 et 7, j'imagine que
l'Opposition va y souscrire, comme elle l'a fait au moment de l'étude
article par article, alors qu'elle n'a pas souscrit à l'amendement que
nous avons proposé à l'article 1.
Pour le moment, j'arrête mes explications. Je pense que ce sont
les trois amendements qui ont été proposés.
La Vice-Présidente: Merci, Mme la ministre de la
Santé et des Services sociaux. M. le chef de l'Opposition.
M. Guy Chevrette
M. Chevrette: Merci, Mme la Présidente. On se rappellera
que ce projet de loi 97, dont Mme la ministre vient de déposer quelques
amendements, visait un objectif sur lequel, entre vous et moi, nous
étions à peu près tous d'accord. C'était
d'éviter les conflits d'intérêts de certaines
administrations du réseau ou des établissements des
réseaux, des DG, des cadres supérieurs intermédiaires
ainsi que des conseils d'administration.
Sur le principe même, je pense qu'il n'y avait pas de cachette.
L'Opposition, pas plus que le gouvernement, ne peut tolérer qu'il y ait
des gens qui se placent en situation de conflit d'intérêts.
Après tout, ce sont les deniers du public qui sont administrés
par ces gens et on doit exiger, bien sûr, de toutes ces personnes qui
oeuvrent dans le secteur public de la santé le plus grand respect des
normes administratives et des directives administratives.
Nous avions dit lors de l'adoption du principe que nous regrettions
comme Opposition que cette loi n'ait pas eu la portée
générale pour toucher l'ensemble des directions
générales, des administrateurs ou des cadres supérieurs de
la fonction publique, parapublique et même péripublique.
C'est l'argent du public qui est administré. On a
été surpris que ce soit Mme la ministre de la Santé et des
Services sociaux qui dépose une loi pour éviter que les cadres du
secteur de la santé et des services sociaux soient placés en
position de conflit d'intérêts. On prétendait et on
prétend toujours - indépendamment du fait que le projet de loi 97
soit sur la table -que le gouvernement aurait dû déposer un projet
de loi beaucoup plus global visant à régir le comportement de
l'ensemble des cadres de la fonction publique, parapublique et
péripublique.
Selon nous, il y a du monde dans d'autres secteurs. Par exemple, qu'on
pense à l'Industrie et Commerce, à la SDI, qu'on pense à
la Société des alcools du Québec, qu'on pense à la
Caisse de dépôt, qu'on pense à une série de
structures des secteurs public, parapublic et péripublic qui vivent des
situations de conflit d'intérêts toutes aussi évidentes,
sinon plus, qu'on puisse les vivre dans le secteur de la santé et des
services sociaux.
On trouve dommage qu'on ait "focussé" la discussion sur les
cadres des hôpitaux, sur les administrations hospitalières et que,
parce qu'il y a eu quelques articles de journaux -trois ou quatre de suite dans
un journal - on ait créé une panique. La ministre de la
Santé, se sentant emportée par la panique ou poussée par
ses collègues ministres, a réagi pour son secteur, alors que le
gouvernement est là pour avoir une vision plus globale, plus
générale, de l'administration publique.
Je trouve dommage que ce ne soient que les administrateurs des
hôpitaux, des centres hospitaliers, des établissements de
santé et de services sociaux qui soient touchés par ces
directives, par ces normes, qui devraient toucher l'ensemble de la fonction
publique, parapublique et péripublique.
Ceci dit, Mme la Présidente, nous avons étudié
assez longuement l'ensemble du dossier en commission parlementaire. Nous avons
apporté des amendements. Plusieurs ont été défaits.
À mon point de vue, il y a des aberrations dans l'entente. Je vais
essayer de les exprimer, parce que plusieurs de nos amendements ont
été défaits et, à mon point de vue, ils auraient
dus être acceptés. (16 h 40)
Je pense, entre autres, à toute la dimension des conflits
d'intérêts qui, automatiquement, déclenchent le processus
de déchéance. Quand on sait qu'il y a des situations qui peuvent
être très mineures et qui auraient pu, à mon point de vue,
commander une suspension d'une semaine, quinze jours, peut-être cinq ou
six mois, mais un processus de déchéance, quelle que
soit la gravité de l'acte, c'est carrément abusif, dans
certains cas. À mon avis, la ministre va à l'encontre du discours
qu'elle a tenu depuis deux ans, à savoir qu'elle voulait responsabiliser
les conseils d'administration des institutions de santé et des services
sociaux, qu'elle voulait véritablement leur faire jouer un rôle de
plus en plus responsable dans l'administration. Elle leur enlève
même la possibilité de porter un jugement sur la gravité de
l'acte.
C'est une drôle de façon de responsabiliser les gens que de
dire: Vous n'avez pas d'autre choix que d'entamer le processus de la
déchéance. Imaginez! Normalement quand on reconnaît que des
gens sont responsables, que des gens doivent exercer leur jugement quand on
veut les revaloriser et les rendre plus responsables, on leur dit: Voici ce que
tu fais, c'est le processus de déchéance, point. À mon
point de vue, c'est abusif et cela ne cadre pas avec le discours de la
ministre, ce n'est pas cohérent avec les propos qu'elle a tenus en cette
Chambre autant en deuxième lecture qu'à plusieurs occasions
depuis son accession au poste de ministre de la Santé et des Services
sociaux. Quand on veut responsabiliser des gens, on leur donne l'occasion, tout
au moins, d'exercer leur jugement. C'est un minimum tout à fait normal.
Quand on leur dit: Tu n'as pas d'autre solution, n'exerce pas ton jugement,
c'est moi qui prends ta place, c'est une mise en tutelle déguisée
des conseils d'administration et de leur responsabilité fondamentale de
gérer les personnels. À mon point de vue, c'est abusif.
On a également parlé de l'exclusivité des
fonctions. C'est une notion qui peut paraître ambigüe pour nos
concitoyens et concitoyennes mais qui s'explique assez facilement. On veut que,
dorénavant, un cadre intermédiaire, un cadre supérieur ou
un directeur général soit engagé exclusivement pour
l'établissement. S'il veut faire des choses en dehors, même s'il
en a le temps à mort, il ne le pourra plus, à moins que le
conseil d'administration ne l'y autorise. C'est la plus belle façon de
s'organiser pour faire en sorte qu'on puisse... Cela sera
considéré comme une faute majeure, une faute lourde. Alors qu'il
y en a qui font cela depuis des années chez les cadres
intermédiaires, là, ils seront jugés comme illégaux
s'ils oublient d'abord d'avertir et, deuxièmement, s'ils n'ont pas
l'autorisation de leur conseil d'administration. À mon point de vue,
concernant l'exclusivité de fonction, on aurait pu avoir l'inclusion
dans ce projet de loi d'une formule beaucoup plus souple tenant compte, en
particulier, des faits passés. Il y a des gens qui, depuis des
années, travaillent pour un centre hospitalier, pour un CLSC, un CSS et
qui, dans leurs moments de loisirs, remplissent d'autres fonctions au vu et au
su de tout le monde, sauf qu'il n'y a pas d'autorisation. Il s'agit qu'on les
force à la demander pour que, dans bien des cas, à cause de
toutes sortes de conjonctures, on la leur refuse.
Ces gens-là, s'ils devaient continuer, seraient
pénalisés. En allant jusque là dans son projet, on pouvait
dire au moins que la ministre manifestait une constance de ce
côté, en disant: Moi, je pense que quelqu'un qui est directeur
général doit être exclusivement à l'emploi d'un
centre hospitalier 24 heures par jour, 7 jours par semaine. Nous, on aurait
préféré la notion de temps plein: quelqu'un travaille
à temps plein dans les heures normalement dévolues aux cadres
mais, en dehors de cela, la fin de semaine, par exemple, il n'a pas à
quémander une permission pour donner une conférence, par exemple,
qui lui rapportera 200 $ ou 300 $, il n'a pas à quémander une
permission pour que, la fin de semaine, s'il a des compétences en
comptabilité par exemple, il fasse des rapports comptables chez lui, le
dimanche. Il n'a pas à quémander des permissions parce qu'il a un
revenu additionnel.
Il semble que c'est abusif d'avoir cette notion d'exclusivité
totale, d'autant plus que cette exclusivité totale des taches - je le
répète aux députés de cette Chambre ainsi
qu'à nos concitoyens et concitoyennes - ne sera exigée que des
directeurs généraux, des cadres supérieurs et des cadres
intermédiaires du secteur de la santé et des services sociaux
seulement, non pas des autres secteurs gouvernementaux. Est-ce qu'on exige la
même chose des cadres de l'éducation? Est-ce qu'on exige la
même chose des cadres de la SAQ, de la Caisse de dépôt et
placement? Est-ce qu'on exige la même chose des cadres de
différentes administrations collégiales, universitaires? Pas du
tout. Vous irez voir un professeur d'université qui fait de la
recherche, avec des contrats de recherche fort attrayants, en même temps
qu'il est enseignant à l'université.
C'est donc pour les cadres du secteur de la santé et des services
sociaux seulement. Je trouve malheureux qu'on n'ait pas compris qu'une mesure
de ce genre aurait dû être pensée en fonction de l'ensemble
des secteurs administratifs de l'État, des secteurs public, parapublic
et même péripublic. Avec cela, on aurait eu une cohérence
respectable, à mon point de vue.
Nous avons également discuté, au cours de l'étude
de ce projet de loi, de l'illégalité de certaines institutions
qui payaient la rémunération à même les fondations
hospitalières et cela, pour augmenter le salaire de certains directeurs
généraux. Il y a des traditions que je reconnais. Il y a des
traditions, bien sûr, qui sont vieilles de quelques années dans
plusieurs secteurs, en
particulier dans le secteur anglophone, il faut le dire. C'est dans le
secteur anglophone qu'on voit surtout les fondations payer la
rémunération des cadres. Cela s'est fait en contravention, dans
l'illégalité par rapport aux directives, aux normes de gestion,
aux normes administratives du ministère de la Santé et des
Services sociaux qui définit le salaire d'un cadre à partir de
normes, de grilles qui permettent de dire: Dans tel centre hospitalier, le
directeur général reçoit 92 000 $, dans tel autre centre
hospitalier un peu moins gros, c'est 75 000 $, etc. On sait que certains
directeurs ou cadres ont reçu un surplus d'une fondation.
Malgré la tradition que je reconnais justifiée,
malgré le fait que, dans bien des cas, tout cela se fait de bonne foi,
plutôt que de régulariser la situation d'une autre façon,
la ministre a préféré, au dernier article de la loi,
maintenir tous les gens impliqués dans un état
d'illégalité, toutes les institutions impliquées, mais en
le légalisant, parce que les contrats avaient été
signés avant, mais elle aurait pu agir autrement. Je vais essayer de
vous expliquer, Mme la Présidente, ce que l'Opposition a
suggéré.
Si on part du fait que tout le monde est de bonne foi, mais que c'est
illégal... Dans la vie, il arrive très fréquemment qu'on
ignore la loi, mais l'ignorance d'une loi ne crée pas
nécessairement un droit. On le sait en droit. À partir de
là, étant donné que la ministre, dans une clause de son
projet de loi, dit carrément que c'est illégal qu'ils prennent de
l'argent dans une fondation pour payer des gens, elle aurait pu s'en sortir
très différemment, sans pénaliser les individus, en
rendant le tout cohérent et conforme. Par exemple, un centre hospitalier
qui a engagé un type à raison de 100 000 $ ou 90 000 $ - je sais
qu'il y a des salaires assez élevés dans ces secteurs - sait que
le directeur général reçoit 10 000 $ ou 15 000 $ d'une
fondation pour combler la différence, parce que le directeur
général ne serait pas venu à 90 000 $. II venait à
105 000 $, et les 15 000 $ ont été versés par une
fondation. La ministre aurait pu accepter, comme mesure dérogatoire, que
les centres hospitaliers respectent les contrats globaux du directeur
général, les deux contrats, 105 000 $, sans le pénaliser,
mais sans prolonger l'illégalité dans le paiement. (16 h 50)
Ça, ça m'apparaît légiférer à
l'envers. On ne peut pas légiférer et dire: Un geste est
illégal, mais, même s'il est illégal parce qu'il est
à cette date-là, on va perpétuer
l'illégalité jusqu'en 1991. Je pense qu'on avait l'occasion
rêvée de régulariser la situation, de permettre à
ces individus de voir leurs contrats respectés, mais qu'ils deviennent
payés par le centre hospitalier lui-même pour l'ensemble des deux
contrats. Cela aurait été plus correct, plus cohérent, et
les fondations n'auraient pas eu à verser, cela aurait été
à même les avoirs du centre hospitalier, pour une durée
x.
On en a négocié dans la fonction publique un paquet de
contrats du genre. Je me souviens d'en avoir signé des conventions
collectives. On se ramassait avec des commissions scolaires dans les
années 1974-1975 qui payaient plus que les conventions collectives.
Qu'est-ce qu'on faisait avec ces gens-là? Je pense que la
députée de Jacques-Cartier doit se le rappeler, on appelait ces
gens hors structure, hors échelle. Qu'est-ce qu'on faisait avec ces
gens-là? Quand ils étaient hors échelle, on leur
reconnaissait le droit de conserver leur salaire global. On ne les baissait
pas, on ne les pénalisait pas, on respectait ces contrats mais il y
avait un certain temps de piétinement pour rejoindre le moment où
ils se voyaient capables de s'insérer dans l'échelle parce que
les salaires évoluent quand même chaque année, et
là, ils étaient intégrés aux nouvelles
échelles. C'eût été une façon, non pas de
continuer à perpétuer l'illégalité parce que les
sommes venaient des fondations, mais carrément de les placer en toute
légalité immédiatement, en proposant ce mécanisme
et en permettant aux centres hospitaliers de le faire.
Je pense que c'aurait été plus logique que d'avoir, dans
une même loi, une clause disant que c'est illégal et la
dernière clause disant que, même si c'est illégal,
gardez-les jusqu'en 1991. Ç'a l'air un peu fou de
légiférer de cette façon parce qu'on avait d'autres moyens
sur le plan administratif pour rendre ces individus, non pas vus comme des
individus hors-la-loi, mais tolérés comme des hors-la-loi alors
qu'on les aurait intégrés à la machine administrative
conformément à des possibilités administratives que nous
avions.
Je n'ai pas pu comprendre malheureusement. Il faut dire qu'on
était sur les dernières minutes de la commission parlementaire.
Si on avait pu discuter plus longuement, il me semble qu'on aurait pu
convaincre la ministre de procéder par un biais administratif beaucoup
plus cohérent, qui aurait eu l'air moins fou sur le plan administratif
et qu'on ne se retrouverait pas avec des individus pointés du doigt
parce qu'ils sont hors-la-loi par rapport à la loi, mais qui ont un
genre d'amnistie temporaire, même si c'est illégal.
Je n'accepte pas cette partie, Mme la Présidente. Je trouve que
ce n'est pas comme ça qu'on légifère. Je pense que le
législateur est là pour rectifier des tirs, rendre des choses
claires. On ne légifère pas pour rendre davantage ambigu.
Il me reste quelques minutes aussi pour parler d'un autre point, la
fameuse question des médecins résidents. Encore là, Mme la
ministre a essayé d'en passer une petite vite aux médecins
résidents et internes. Dans un
projet de loi, imaginez-vous! Et le ministre des Affaires
intergouvernementales qui est un homme de droit nous dira que c'est vrai, que
ce n'est pas du tout la même chose. Par exemple, est-ce que 25 % des
effectifs médicaux pour des régions éloignées,
c'est connexe au projet de loi sur les conflits d'intérêts? On ne
se retrouvait pas gros, vous savez. Pour un gouvernement qui devait
légiférer correctement, ne pas faire de lois fourre-tout, mais
qu'on réglerait chaque chose. Si on traite des médecins,
ça serait les médecins, si on traite des conflits
d'intérêts, ça serait les conflits d'intérêts.
Ça devait être ça qu'on nous avait annoncé le 15
décembre 1985, mais on s'est ramassé avec une clause voulant
corriger un trou juridique, disait la ministre, parce qu'il y avait eu un
jugement de la Cour d'appel qui rendait illégal le fait d'imposer une
pénalité éventuelle à un médecin qui ne
remplirait pas son engagement de demeurer trois ou quatre ans soit en Abitibi,
soit en Gaspésie, soit sur la Côte-Nord.
Et on est tombé d'accord, c'est même l'Opposition qui l'a
rappelé à la ministre... Elle a dû retourner au Conseil des
ministres, je ne sais pas si elle le dira dans son discours. C'est même
l'Opposition qui lui a fait remarquer que, dès qu'elle abandonne son
droit de ne pas aller plus haut comme tribunal, c'est le dernier jugement qui
prévaut, si tu ne te prévaux pas de ton droit d'appel. Donc, elle
tombait dans un trou juridique. Les médecins qui avaient pris
l'engagement auraient pu revenir à Montréal ou à
Québec, quitter les régions dans lesquelles ils étaient.
Là, on a dit à la ministre: II n'y a qu'une seule façon si
vous ne voulez pas revenir, c'est de rétroagir dans la loi. Je comprends
que c'est plutôt rare que le législateur légifère
d'une façon rétroactive, mais c'est arrivé. Et, pour le
bien d'une collectivité, à un moment donné, on n'a pas le
choix.
Nous, nous avons accepté l'amendement en suggérant
à la ministre de rétroagir sur le plan législatif pour
permettre, au moins, de garder en place les effectifs qui sont là. Mais,
si c'était pour boucher le trou juridique, Mme la ministre aurait
très bien pu se contenter de régler exclusivement le trou
juridique et ne pas s'ouvrir des portes pour créer des problèmes
auprès de résidents et internes. Si elle voulait régler la
répartition médicale d'une façon correcte,
définitive, la ministre aurait dû présenter un projet de
loi non pas pour boucher le trou juridique cette fois-ci, mais pour
établir une fois pour toutes la répartition médicale au
Québec.
Il va falloir qu'on le fasse une fois pour toutes et qu'on dépose
devant l'Assemblée nationale un projet de loi. Il va falloir qu'on
écoute en commission parlementaire les universités, la
Corporation des médecins, la
Fédération des spécialistes, la
Fédération des omnipraticiens, les étudiants en
médecine, la Fédération des médecins
résidents et internes, qu'on les entende tous, mais, comme
législateurs, ensuite, qu'on règle le problème une fois
pour toutes, en toute connaissance de cause, après avoir pris l'opinion
de chacun, mais non pas profiter d'une loi qui, supposément, touche
purement et simplement les conflits d'intérêts pour essayer de
régler un problème et créer du mécontentement parce
qu'on n'a pas pu entendre les groupes. Il me semble que cela devrait se faire
en concertation avec les personnes impliquées, avec les CRSSS pour
permettre aux régions éloignées de venir s'exprimer,
permettre aux jeunes de dire comment ils voient cela.
Il va falloir une fois pour toutes le régler. Oui, il va falloir
le régler. Mais est-ce qu'on va le régler en essayant, d'abord et
avant tout, d'asseoir tout le monde dans la plus grande harmonie, en essayant
d'avoir un consensus au moins majoritaire ou si on va le régler en
essayant d'en passer une vite par le biais d'une autre loi? Il me semble que
cela ne se fait pas ainsi. Il me semble que cela ne devrait pas se faire ainsi.
Et il me semble que la façon dont on l'a fait n'est pas la meilleure
façon de le faire. Quand on veut boucher un trou juridique, on
l'identifie et on ne déborde pas les cadres du trou juridique. On ne
fait que rectifier les choses qui sont à rectifier par rapport au
jugement et on n'essaie pas de se donner plus de pouvoirs qu'on en avait ou
plus de marge de manoeuvre qu'on en avait quand on veut corriger un trou
juridique. Il me semble que c'est cela qui était clair.
Personnellement, Mme la Présidente, je pense que, pour toute la
notion de la répartition des effectifs médicaux, la ministre
aurait l'occasion, au tout début de la prochaine session - puisqu'elle
n'a pas voulu cette fois-ci - d'asseoir tout son beau monde à une
commission parlementaire et de présenter un projet de loi qui va assurer
une qualité raisonnable de soins de santé en régions
éloignées et qui va demander à chacune des parties en
cause de mettre du sien, y compris les universités qui ont un rôle
à jouer également, y compris les fédérations
médicales et la Corporation des médecins, y compris les jeunes
aspirants médecins ou étudiants en médecine ou les jeunes
résidents et internes, pour savoir comment ils voient cela, eux. Est-ce
qu'ils sont conscients que l'État a le devoir de répartir les
médecins dans tout le Québec?
Ce n'est pas seulement cela. Le problème, à part cela, est
plus grave que Mme la ministre pouvait le laisser entendre. Je sais qu'elle
doit en être très consciente. C'est rendu que dans des
régions aussi proches de Montréal que Joliette, aussi proches de
Montréal que Saint-Jean, aussi
proches de Montréal que Longueuil, on est privé de
psychiatres, par exemple, parce qu'ils sont concentrés presque
exclusivement à Montréal et à Québec, et que dans
des régions aussi proches que Saint-Hyacinthe, on manque de
cardiologues, on manque d'anesthésistes dans plusieurs régions,
à proximité même des grands centres. C'est sûr qu'il
va falloir faire une discussion, et une discussion très sérieuse,
si on veut répondre aux besoins de la population. Le centre du
Québec a beau être Québec et Montréal - les deux
grosses villes - mais il y a des gens qui paient des impôts, qui paient
des taxes et qui ont le droit à des services de qualité. (17
heures)
Justement ce matin, je recevais un télégramme de
Mont-Laurier, du comté de Labelle. On nous annonce qu'à
Ferme-Neuve, il n'y a plus de médecin. Dans des hôpitaux
éloignés, on nous dit qu'il n'y a pas de médecin, qu'il
n'y a pas de spécialiste. On va régler cela comment? Non pas en
faisant une discussion à l'intérieur d'un projet de loi
axé sur les conflits d'intérêts. C'est en faisant un projet
de loi et en le déposant dans cette Chambre mais un projet de loi bien
identifié, qui dira clairement: Voici comment le gouvernement entend
répartir les effectifs médicaux sur son territoire et assurer une
médecine de qualité pour l'ensemble des Québécois
en concertation avec toutes les personnes intéressées.
Il est sûr qu'on ne ralliera pas tout le monde. Il est sûr
qu'on ne réussira pas à avoir l'unanimité. Je suis
convaincu qu'avec une commission parlementaire où toutes les personnes
auraient, non pas des petites demi-heures, mais, suffisamment de temps pour
s'exprimer, - s'il faut prendre trois semaines en commission parlementaire avec
six ou sept groupes seulement, on le prendra - on pourrait essayer de faire
franchir à chacun le bout nécessaire pour en arriver
véritablement à avoir un consensus majoritaire et faire en sorte,
qu'au Québec, l'ensemble de notre population reçoive des soins de
santé de qualité, où qu'elle soit au Québec. On a
droit à cela mais on ne doit pas s'essayer par la bande, s'essayer par
un petit amendement supposément, pour boucher un trou juridique, comme
Mme la ministre a tenté de le faire.
Je pense que ce n'est pas comme cela qu'on agit quand on veut
définitivement régler des problèmes, quand on veut
véritablement faire en sorte, qu'au Québec, il se dégage
des consensus de temps à autre. Merci.
La Vice-Présidente: Merci, M. le chef de l'Opposition. Mme
la ministre de la Santé et des Services sociaux, sur votre intervention
de cinq minutes.
Mme Lavoie-Roux: Bien, j'ai parlé cinq minutes tout
à l'heure. Est-ce que j'ai le droit de parole? Mme la
Présidente...
La Vice-Présidente: Oui, madame.
Mme Lavoie-Roux: Pourriez-vous me dire si j'ai droit à
cinq minutes et ensuite à la réplique?
La Vice-Présidente: Nous sommes ici au stade de la prise
en considération. Vous avez droit à cinq minutes après
chaque intervention mais il n'y a aucun droit de réplique étant
donné que c'est une motion de forme et non une motion de fond. Mme la
ministre.
Mme Thérèse Lavoie-Roux
Mme Lavoie-Roux: Vous comprendrez, Mme la Présidente, que
cela va être difficile de répondre dans cinq minutes aux
assertions du chef de l'Opposition. Dès le départ, je voudrais
dire que cela m'étonne beaucoup, et je suis même très
surprise d'entendre, tout à coup, le député de Joliette
faire un grand plaidoyer sur cette nécessité de faire une
meilleure répartition des médecins en régions
éloignées.
Je ne dis pas que c'est lui - il n'était pas porte-parole
à ce moment-là - mais le porte-parole de l'Opposition, au moment
où nous avons présenté la loi 75, et plusieurs s'en
souviendront dans cette Chambre, ce projet qui visait justement à
établir une meilleure distribution de la main-d'oeuvre médicale
au Québec pour justement corriger les inéquités que l'on
connaît, corriger les carences que l'on connaît, a finalement
acquiescé à la toute fin parce que probablement qu'à ce
moment ils avaient eu des représentations qui leur avaient
été faites par les régions éloignées,
notamment au député d'Abitibi-Ouest, je pense.
Mme la Présidente, cela me fait un peu sourire de sentir tout
à coup... Je devrais m'en réjouir par contre. Peut-être
qu'à l'avenir, on aura une meilleure collaboration que celle que nous
avons eu dans le passé.
Je voudrais aussi ajouter qu'en ce qui a trait à la consultation
des gens, depuis près de deux ans maintenant ou un an et demi, existe au
ministère de la Santé et des Services sociaux une table de
concertation qui réunit tous les intervenants dont le
député a parlé: les fédérations des
médecins spécialistes, des omnipraticiens, les
universités, la Corporation des médecins, les étudiants,
les résidents internes et les CRSSS et j'en passe. Ces gens travaillent
et tentent d'établir un consensus. Je pense que, sans forcer les choses,
nous allons arriver à corriger ces lacunes que tout le monde
déplore, la population des régions éloignées, en
particulier.
En ce qui a trait aux conflits d'intérêts
et à l'exclusivité d'emploi, on a eu droit à un
long discours sur la déchéance de charges dans le cas des
conflits d'intérêts. Il faudrait rappeler que nous avons
reçu en commission parlementaire tous les principaux
intéressés qui touchaient ces deux aspects. Dans le cas des
conflits d'intérêts, personne n'a remis en question la question de
déchéance.
Dans le cas de l'exclusivité d'emploi, je voudrais corriger une
erreur que le député de Joliette, sans le vouloir, sans aucun
doute, nous dit: II ne faut pas qu'il y ait d'exclusivité d'emploi dans
le cas des cadres intermédiaires. Bien, on a justement voté et on
a corrigé ce qui nous apparaissait peut-être excessif dans le cas
des cadres intermédiaires à qui on demandait l'exclusivité
d'emploi. Alors, je ne sais pas où était le chef de l'Opposition
mais je comprends qu'il est très occupé et qu'il peut lui en
échapper quelques-unes.
Il dit également: La ministre ne veut pas responsabiliser les
conseils d'administration en prévoyant la déchéance de
tâche. Je vous ferai remarquer que la question de déchéance
de tâche existait dans la loi. Je ne viens pas déresponsabiliser
les conseils d'administration, puisque ce sont eux qui devront intervenir s'ils
trouvent leur directeur général, leurs cadres
intermédiaires ou leurs cadres supérieurs en conflit
d'intérêts. Ce n'est pas la ministre. Ce sont les institutions ou
les établissements eux-mêmes qui vont devoir le faire. La seule
chose qui est ajoutée, c'est que la pénalité est plus
sévère qu'elle ne l'était dans le passé.
Mme la Présidente, je sais qu'il me reste une minute. J'aurai
l'occasion, probablement, d'intervenir en troisième lecture. Ce qu'il
faut rappeler, en terminant, c'est que la ministre de la Santé et des
Services sociaux aurait préféré ne pas avoir à
intervenir sur toute cette question de conflit d'intérêts et
d'exclusivité d'emploi. Si nous avons eu à le faire, c'est que,
malheureusement, il y a eu non seulement les cas dont on a pu prendre
connaissance dans les journaux, mais il y a eu davantage de cas que les deux ou
trois cas dont parle le député de Joliette. Il le sait fort bien
lui-même.
Je pense que, même si ce n'est pas facile, nous avons eu le
courage de prendre nos responsabilités et que le chef de l'Opposition,
lui-même en particulier, sait que plusieurs des lacunes que nous voulons
corriger existaient déjà depuis plusieurs années. Il l'a
dit d'ailleurs. Au moins nous prenons nos responsabilités
vis-à-vis de la population. La population n'en attendait pas moins de
nous vis-à-vis de l'administration ou de la saine administration des
fonds publics. Dans ce sens, Mme la Présidente, nous espérons que
les situations que nous avons eu à déplorer, et non seulement
celles-là, seront corrigées, mais que surtout nous pourrons en
prévenir d'autres. Également, nous établirons une
administration plus transparente de la part des établissements qui
devront davantage rendre compte au public de l'utilisation de leurs fonds
à l'occasion de leur assemblée annuelle et encore nous
sensibiliserons et exigerons des vérificateurs qu'eux aussi voient leur
mandat de contrôle -je parle des vérificateurs externes - des
budgets des hôpitaux être changés d'une façon qui
tienne davantage compte de l'intérêt du public et de l'utilisation
des fonds publics. Je vous remercie, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente: Merci, Mme la ministre de la
Santé et des Services sociaux.
M. Chevrette: Adopté sur division. Le rapport.
La Vice-Présidente: Si vous me permettez, je vais faire
les lectures, M. le chef de l'Opposition, vu qu'il y avait des amendements
aussi qui avaient été présentés. Si vous me
permettez. Donc, je déclare le débat clos.
M. Chevrette: Oui.
Adoption des amendements
La Vice-Présidente: Débat clos. Les amendements qui
ont été proposés par la ministre concernant le projet de
loi 97, Loi modifiant la Loi sur les services de santé et les services
sociaux sont-ils adoptés?
M. Chevrette: Les amendements?
La Vice-Présidente: Les amendements.
M. Chevrette: II faut bien se comprendre. Les trois derniers?
La Vice-Présidente: Les trois derniers.
M. Chevrette: II y en a un pour lequel on est contre et deux
pour.
La Vice-Présidente: Donc...
M. Chevrette: Article 1, on est contre.
La Vice-Présidente: Adopté sur division.
M. Chevrette: Article 4, on est pour. Article 7, on est pour.
La Vice-Présidente: C'est parce qu'on les adopte en bloc,
M. le chef de l'Opposition.
M. Chevrette: Adopté sur division.
La Vice-Présidente: Adopté sur division. Le rapport
tel qu'amendé de la commission des affaires sociales sur le projet de
loi 97, Loi modifiant la Loi sur les services de santé et les services
sociaux, est-il adopté?
M. Chevrette: Sur division.
La Vice-Présidente: Adopté sur division. M. le
leader du gouvernement.
M. Gratton: Oui, Mme la Présidente. Je suggère que
nous suspendions quelques brèves minutes.
La Vice-Présidente: Cette motion est-elle
adoptée?
Des voix: Adopté.
La Vice-Présidente: Adopté. Nous allons suspendre
quelques minutes.
(Suspension de la séance à 17 h 9)
(Reprise à 17 h 10)
La Vice-Présidente: À l'ordre, s'il vous
plaît!
Nous allons reprendre nos travaux. M. le leader du gouvernement.
M. Gratton: Mme la Présidente, je vous prie, maintenant,
d'appeler l'article 25 du feuilleton.
Projet de loi 63
Prise en considération du
rapport de la commission qui
en a fait l'étude
détaillée
La Vice-Présidente: À l'article 25 du feuilleton,
la ministre de la Santé et des Services sociaux propose l'adoption du
rapport de la commission des affaires sociales qui a procédé
à l'étude détaillée du projet de loi 63, Loi
modifiant la Loi sur la protection de la santé publique et la Loi
modifiant diverses dispositions législatives concernant les affaires
sociales.
Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux.
Mme Thérèse Lavoie-Roux
Mme Lavoie-Roux: Mme la Présidente, je vais être
très brève, d'ailleurs l'Opposition était d'accord sur ce
projet de loi qui vise... Il faut rappeler qu'en 1985, le gouvernement avait
adopté une politique pour indemniser les personnes qui pourraient
être des victimes de l'immunisation. Comme des cas n'ont pas
été couverts à ce moment-là, ce projet de loi vise
à couvrir des cas qui se sont déclarés depuis ce
temps-là et à prévoir un laps de temps pendant lequel de
futures victimes d'immunisation pourraient se prévaloir des
réparations qui sont prévues dans la loi sous forme
d'indemnités.
Alors, c'est strictement le but de cette modification à la Loi
sur la protection de la santé publique et la Loi modifiant diverses
dispositions législatives concernant les affaires sociales.
La Vice-Présidente: Merci, Mme la ministre de la
Santé et des Services sociaux.
M. Chevrette: Adopté, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente: II n'y a pas d'autre intervenant.
Donc, est-ce que le rapport de la commission des affaires sociales sur le
projet de loi 63, Loi modifiant la Loi sur la protection de la santé
publique et la Loi modifiant diverses dispositions législatives
concernant les affaires sociales, est adopté?
Une voix: Adopté.
La Vice-Présidente: Adopté. M. le leader du
gouvernement.
M. Gratton: Oui, Mme la Présidente. Nous devrons suspendre
pour quelques instants, histoire de donner l'occasion au député
de Lévis de se rendre à l'Assemblée pour qu'on puisse
ensuite procéder à l'étude de l'article 42 du
feuilleton.
Alors, je propose la suspension pour quelques minutes.
La Vice-Présidente: Je vais donc suspendre à
loisir.
(Suspension de la séance à 17 h 13)
(Reprise à 17 h 20)
La Vice-Présidente: Vous pouvez vous asseoir. Nous allons
reprendre nos travaux. M. le leader du gouvernement.
M. Gratton: Mme la Présidente, je vous prierais d'appeler
l'article 42 du feuilleton, s'il vous plaît.
Projet de loi 76 Adoption
La Vice-Présidente: À l'article 42 de notre
feuilleton, le ministre des Transports propose l'adoption du projet de loi 76,
Loi sur le camionnage.
M. le ministre des Transports.
M. Marc-Yvan Côté M. Côté
(Charlesbourg): Mme la
Présidente, je propose l'adoption, compte tenu du fait que nous
en avons longuement discuté en deuxième lecture et que nous avons
adopté un certain nombre d'amendements lors de l'étude article
par article et que nous introduisons un amendement en troisième lecture
qui fait suite à l'intervention du député de Lévis
où la traduction de l'anglais n'était pas très
significative quant à la portée. Cette modification a pour effet
de remplacer l'expression "piggyback" par "saddle mount" dans la version
anglaise du projet de loi pour désigner la technique du dos d'âne
où on a eu une discussion avec le député de Lévis.
Effectivement, c'est pour corriger...
Quant au reste, Mme la Présidente, je propose à
l'Assemblée, compte tenu du fait que l'une des interventions majeures du
député de Lévis consistait à donner aux
Québécois la possibilité de transporter des
véhicules automobiles, que ce ne soit pas uniquement des transporteurs
étrangers, que cette principale question a maintenant été
réglée et que j'en ai transmis copie au député de
Lévis. On peut dire que, maintenant, il y a des Québécois
qui peuvent transporter des voitures automobiles et que c'est dans la
normalité des choses. Dans ce sens, je vous propose l'adoption en
troisième lecture du projet de loi 76.
La Vice-Présidente: Merci, M. le ministre des Transports.
Est-ce qu'il y a d'autres intervenants? M. le député de
Lévis.
M. Jean Garon
M. Garon: Mme la Présidente, c'est ma dernière
intervention dans le projet de loi 76, Loi sur le camionnage, qui a pour objet
de faire une réglementation, une loi nouvelle, qui aura pour effet de
permettre aux gens du Québec de vivre un système harmonisé
-possiblement harmonisé, on n'est pas encore sûr - entre le
gouvernement fédéral, le gouvernement du Québec et les
gouvernements des autres provinces.
On sait qu'il y a un certain nombre d'années, un travail avait
été mis en marche dans ce sens. Le ministre en a parlé
à plusieurs reprises et une entente avait été
signée en février 1985 concernant l'harmonisation des
règles du camionnage au Canada. Un projet de loi fédéral a
été adopté, le projet de loi C-19, et les provinces
avaient pris l'engagement de faire l'harmonisation.
Maintenant, par mesure de prudence, nous avons demandé au
ministre de ne pas s'harmoniser trop vite, même si le projet de loi est
adopté, parce qu'on a déjà vu des gens de l'Ontario ou
d'autres provinces, qui avaient accepté l'harmonisation concernant le
régime métrique, demander au gouvernement conservateur de
maintenir le système anglais. Le Québec s'était
harmonisé plus rapidement et s'était converti au système
métrique, alors que le gouvernement fédéral avait
changé son fusil d'épaule avec le changement de gouvernement et
avait décidé de maintenir, à toutes fins utiles, les deux
systèmes en place.
Comme l'harmonisation est possible, mais qu'elle n'est pas certaine,
parce que les projets de loi n'ont pas été déposés
par les autres provinces du Canada, des mesures transitoires ont
été prévues dans ce projet de loi pour faire en sorte
qu'il n'y ait pas d'harmonisation immédiatement. C'est ainsi que des
dispositions concernant certains articles vont pouvoir être mises en
application immédiatement, mais que d'autres, concernant
l'harmonisation, pourront être retenues en attendant que l'Ontario, les
provinces maritimes et d'autres provinces déposent leur projet de loi et
qu'on soit bien assuré que les projets de loi qu'ils auront
déposés devant leur Parlement vont dans le sens des engagements
qui avaient été pris antérieurement.
Ce n'est pas que le projet de loi soit bon ou mauvais, c'est un projet
de loi plutôt administratif, mais dont les Québécois
craignent l'application parce qu'il s'inscrit dans un cadre de
déréglementation. Dans un tel cadre, on a pu observer quand cela
s'est fait ailleurs, qu'il y a eu concentration des entreprises. Les
entreprises moyennes sont disparues au profit de grandes entreprises de
camionnage, le nombre de grandes entreprises a été diminué
et, par ailleurs, le nombre de petites entreprises a augmenté parmi les
toutes petites entreprises de camionnage. Les gens craignent que l'application
de la Loi sur le camionnage ne soit pas faite de façon assez
sévère. Quant à la Loi sur la sécurité
routière, que le ministre appellera sans doute après l'adoption
de ce projet de loi, ils craignent qu'une application pas assez rigoureuse de
la loi fasse en sorte que ceux qui s'y soumettent aient des frais additionnels
à payer tandis que ceux qui appliqueront le vieux principe "pas vu pas
pris" s'en tireront à des coûts moindres. Tous ont fait remarquer
qu'ils souhaitent que l'application du projet de loi soit assez rigoureuse pour
qu'elle soit égale et équitable pour tous.
Plusieurs ont manifesté une certaine inquiétude par
rapport à la déréglementation et particulièrement
devant le fait qu'ils pourraient être poursuivis ou ne pas être
poursuivis aux États-Unis. Certaines dispositions ont été
adoptées au niveau fédéral, mais aux États-Unis, 43
États n'ont pas encore déréglementé. C'est
pourquoi, nous avons convenu en commission parlementaire d'adopter des
règles transitoires pour que des articles ne soient pas appliqués
avant qu'il y ait eu vérification ou entente avec d'autres
États susceptibles d'appliquer les règles
d'harmonisation.
Il est évident qu'il est impossible de parler des projets de loi
73 et 76; c'est pour cela que j'ai parlé un peu des deux. Le projet de
loi 76 établit un régime qui sera, à toutes fins utiles,
le même dans l'ensemble du Canada. C'est pourquoi plusieurs entreprises
du Québec sont inquiètes, parce qu'on ne peut pas présumer
de l'application qui en sera faite dans les différentes parties du
Canada. Certains pourront l'appliquer avec rigueur, d'autres avec plus de
mollesse et l'application du régime comptera davantage que la loi
elle-même.
Enfin, il y a un autre point qui a été discuté
longuement et qui paraît important, c'est de permettre le transport des
véhicules automobiles par des camions du Québec. Au cours du
débat en commission parlementaire, une entreprise qui avait
souhaité, depuis plusieurs années, 12 ou 13 ans, faire du
camionnage au Québec, avait jugé opportun de saisir les gens de
la commission de sa volonté de s'impliquer dans ce secteur du camionnage
et avait fait observer que les amendements qui avaient été
introduits auraient pour effet de permettre des contestations qui n'auraient
pas été possibles de la même façon si la loi
était restée comme elle était lors du dépôt
du projet à l'Assemblée nationale. On avait discuté
à ce moment-là pour qu'elle puisse obtenir son permis, et ceux
qui s'opposaient à l'obtention de son permis ont convenu de retirer leur
opposition pour régler ce cas.
Mais il faudra voir dans l'avenir si les gens du Québec qui ont
demandé de transporter des véhicules automobiles auront la
même possibilité que les gens de l'Ontario. Il ne serait pas
normal qu'un secteur... J'ai vérifié, parce qu'en commission
parlementaire, on m'a dit que c'était 400 000 000 $ pour l'ensemble du
Canada et 160 000 000 $ pour le Québec, 400 000 véhicules
à raison d'un peu plus de 300 $ par automobile. Il s'agit d'un
marché d'environ 160 000 000 $ pour l'ensemble du Québec, alors
qu'on avait l'impression qu'il s'agissait, à un moment donné, de
160 000 000 $ pour le Canada. Il s'agissait de 160 000 000 $ uniquement pour le
Québec, c'est une somme d'argent considérable. (17 h 30)
Si ce transport sur le territoire du Québec était
effectué par des Québécois, il y aurait beaucoup plus de
travail pour ceux qui veulent travailler dans ce secteur. 400 000
véhicules neufs achetés par des Québécois, c'est un
nombre considérable, sans compter les véhicules usagés. Il
n'est pas normal que les automobiles soient acheminées à partir
des usines de l'Ontario par chemin de fer jusqu'à Montréal et de
Montréal à Charny, et qu'à partir des usines de l'Ontario,
à partir des points de débarquement au Québec ce soient
des camionneurs ou des camions de l'Ontario qui viennent prendre ces
automobiles au chemin de fer pour les amener vers les garages.
C'est un sujet dont on nous a parlé à l'occasion de la
commission parlementaire. Je pense qu'un pas a été fait dans la
bonne direction à cette occasion, et il faudra maintenant que les
entreprises du Québec se montrent intéressées à
occuper ce terrain, ce volet du transport, qui représente des sommes
considérables.
Mme la Présidente, nous avions des inquiétudes concernant
l'arrimage qui pourrait se faire entre ce projet de loi sur le camionnage et
l'entente sur le libre-échange. On sait que l'entente sur le
libre-échange a écarté le domaine du transport et il n'y
aura pas d'arrimage à l'entente sur le libre-échange du domaine
du transport. Le domaine du transport a été écarté,
apparemment, parce que les négociateurs canadiens s'étaient fait
avoir ou n'avaient pas pu négocier grand-chose dans le domaine du
transport, principalement dans le domaine du transport maritime où le
Québec est très compétitif.
On observe que des Américains ont réussi à
écarter du libre-échange les secteurs où ils sont moins
compétitifs que les Canadiens ou les Québécois. Le
transport maritime est un exemple, et il n'est pas contenu dans l'entente du
libre-échange, pas plus que le reste du transport.
La Loi sur le camionnage ne s'inscrira donc pas dans le cadre de cette
entente, et la déréglementation qui a été mise en
marche au Canada s'appliquera aux ententes particulières qui auront
été faites dans des lois particulières, tant aux
États-Unis qu'au fédéral ici ou au fédéral
américain, mais, par ailleurs, au niveau de chacun des États
américains, très peu d'États ont
déréglementé. Et on peut voir que la
déréglementation dans le domaine du transport n'est pas sur le
pilote automatique aux États-Unis, ce qui veut dire qu'il faut
être prudent parce que les grandes compagnies américaines ont une
capacité de concurrence et une capacité d'occuper le terrain,
s'il n'y a pas de mesures qui puissent protéger les camionneurs
québécois.
Il faut aussi bien considérer et se demander: Qui est usager?
Parce qu'on parle souvent et ceux qui sont partisans de la
déréglementation dans le domaine du transport parlent souvent du
service aux usagers. J'aimerais bien qu'on se pose une question, par exemple.
Dans le domaine du transport automobile, qui est l'usager? Le manufacturier
ontarien qui fait une automobile ou le garage québécois qui fait
venir l'automobile pour la vendre à des Québécois? J'ai le
sentiment que... D'autant plus sur la facture quand on achète une
automobile, c'est écrit: transport en sus. Donc, si c'est
transport en sus, c'est parce que c'est l'acheteur qui paie le transport, et,
si c'est celui-ci qui paie le transport, c'est lui qui devrait
déterminer qui va faire le camionnage. Il faudrait sans doute se
demander si nous ne sommes pas dans un cas de collusion où les
manufacturiers d'automobiles de l'Ontario, d'une façon discriminatoire,
décident d'utiliser les camionneurs ontariens. À ce
moment-là, la Loi relative aux enquêtes sur les coalitions
pourrait être utilisée par ces fameux bureaux du Directeur
général des enquêtes sur les coalitions pour voir si, dans
le domaine du camionnage ou du transport de véhicules automobiles, il
n'y a pas collusion entre les manufacturiers qui, dans le fond, sont les
expéditeurs, mais qui ne sont pas ceux qui devraient être
considérés comme les usagers puisque les usagers sont bien les
garages locaux qui vendent les automobiles.
Il semble que la compagnie Honda a accepté d'utiliser les
transporteurs québécois, mais que les autres compagnies, d'une
façon générale, ont utilisé des transporteurs
ontariens. Il faudrait peut-être en aviser le public et dire aux gens que
les gens de Ford, les gens de Chrysler, les gens de Buick, les gens de GM, les
gens des différentes marques d'automobile, qui sont des distributeurs au
Québec, qui vendent leurs automobiles à des
Québécois, devraient exiger que le transport au Québec
d'automobiles manufacturées en Ontario devrait se faire par des
transporteurs québécois, et qu'on se serve de notre pouvoir
d'achat au Québec parce que les clients seront des
Québécois pour que les vendeurs distributeurs d'automobiles au
Québec tiennent compte des intérêts de leurs clients et
essaient d'avoir le maximum de retombées économiques, dans le
domaine de l'automobile, au Québec, par le transport des automobiles,
à défaut d'avoir une grande partie de la fabrication
d'automobiles qui a été concentrée - on le sait bien, on
l'a vu -en Ontario, avec la volonté du gouvernement
fédéral.
J'espère que la nouvelle compagnie Hyundai, qui va travailler au
Québec et dont 90 % du marché est le Québec, saura, elle
aussi, utiliser des transporteurs québécois et non pas des
transporteurs ontariens. Il n'est pas normal que l'on utilise des transporteurs
ontariens pour transporter, exclusivement sur le territoire
québécois, des automobiles qui seront achetées par des
consommateurs québécois. C'est un marché
considérable, 160 000 000 $. Nous avons beaucoup discuté de ce
point en commission parlementaire pour faire en sorte que les retombées
économiques se fassent chez nous. Si on est plus conscient, dans le
domaine du transport, des montants considérables des retombées
économiques qu'il peut y avoir à la condition d'utiliser nos
transporteurs, il y aura des emplois en nombre considérable, dans le
domaine du transport, à cause de la manutention de transport qui est
faite, à cause d'une grande partie des importations et des exportations
au point d'arrivée situé au Québec.
Mme la Présidente, je ne voudrais parler plus longuement sur le
projet de loi. Dans six mois, dans un an, les gens verront comment le ministre
a utilisé la loi, a appliqué la loi. Une fois le projet de loi
adopté, le travail commence pour le ministère des Transports qui
devra appliquer la loi. Les gens souhaitent, si la loi est adoptée,
qu'elle soit appliquée. Cela a été leur principale
demande. Merci, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente: Merci, M. le député de
Lévis. Il n'y a pas d'autres interventions? Je comprends que je suis
autorisée à faire les écritures en ce qui concerne
l'amendement?
Une voix: Oui, Mme la Présidente.
Commission plénière
La Vice-Présidente: Je suis autorisée. Je vais donc
faire les amendements. Est-ce que la motion pour se transformer en commission
plénière est adoptée?
Des voix: Adopté.
Adoption de l'amendement
La Vice-Présidente: Est-ce que l'amendement du ministre
concernant le projet de loi 76, Loi sur le camionnage, est adopté?
Des voix: Adopté.
La Vice-Présidente: Est-ce que le rapport de la commission
plénière est adopté?
Des voix: Adopté.
Adoption du projet de loi
La Vice-Présidente: Est-ce que le projet de loi 76, Loi
sur le camionnage, est adopté? Adopté. M. le leader du
gouvernement.
M. Gratton: Mme la Présidente, est-ce que vous voulez bien
appeler l'article 41 du feuilleton, s'il vous plaît?
Projet de loi 73
Adoption La Vice-Présidente: À l'article 41 de
notre feuilleton, le ministre des Transports propose l'adoption du
projet de loi 73, Loi modifiant le Code de la sécurité
routière et d'autres dispositions législatives.
M. le ministre des Transports.
M. Marc-Yvan Côté
M. Côté (Charlesbourg): Merci, Mme la
Présidente. Comme dans le projet de loi 76, le projet de loi 73 vise
à introduire au Code de la sécurité routière le
Code canadien afin d'être, en quelque sorte, le garde-fou de
l'application du projet de loi 76 et de faire en sorte que les gens puissent
continuer d'utiliser les routes du Québec de manière
sécuritaire. Nous en avons parlé abondamment. Cela a
été largement publicisé. (17 h 40)
J'ai transmis, par l'entremise de personnes, hier soir, au
député de Lévis, un amendement à l'article 62,
l'article 519.41, qui vise à supprimer de son application le nombre 258
parce que, comme le disent les légistes à l'occasion,
c'était devenu un article superfétatoire et qu'on retrouve
à l'intérieur d'un autre article. Donc, comme la
législation la plus simple est celle qui n'est pas là, dans ce
sens, Mme la Présidente, nous avons décidé d'apporter un
amendement pour faire en sorte que cet article disparaisse. C'est le seul
changement que nous avons depuis que nous avons terminé la commission
parlementaire qui a étudié la loi, article par article, et que
nous avons adopté le rapport de la commission qui a adopté les
articles. C'est un projet de loi dont je suis extrêmement fier, tout
comme du projet de loi 76, d'ailleurs. Ils vont l'un avec l'autre. Merci, Mme
la Présidente.
La Vice-Présidente: Merci, M. le ministre des Transports.
M. le député de Lévis.
M. Jean Garon
M. Garon: Mme la Présidente, nous en sommes à la
troisième lecture du projet de loi 73 modifiant la Loi sur le Code de
sécurité routière et la Loi sur l'assurance automobile.
Nous avions voté pour le principe en deuxième lecture de ce
projet de loi. Nous avions étudié les différents articles
en commission parlementaire. Il s'agit encore là d'une harmonisation
dans le sens de la sécurité routière mais harmonisation
dont nous connaîtrons la valeur lorsqu'elle aura été
appliquée.
La grande appréhension de tous ceux qui sont venus nous parler du
Code de la sécurité routière ne portait pas sur le projet
de loi mais les représentations qui nous ont été faites
l'ont été beaucoup plus sur l'application de la loi. Ce que les
intervenants craignent c'est que les lois ne soient pas appliquées.
Pour vous donner un exemple, Mme la Présidente, des entreprises
qui ont plusieurs camions disent qu'avoir un camion en ordre coûte plus
cher que d'avoir un camion qui n'est pas en ordre et que tous doivent se plier
au Code de sécurité routière parce qu'il y aura des
coûts accrus pour tous en vue d'une plus grande sécurité du
public. Par ailleurs, pour avoir cette sécurité du public, il
faut véritablement que les codes aient été adoptés
mais qu'ils soient aussi appliqués de façon rigoureuse pour
tous.
Tous ont convenu qu'il fallait qu'il y ait davantage de
sécurité. Des enquêtes ont démontré que
plusieurs camions n'étaient pas en état d'offrir toute la
sécurité qu'ils devraient. Les dispositions de ce code auront
pour effet de rendre un peu solidairement responsables les transporteurs, les
expéditeurs et les camionneurs, chacun à un niveau
différent, pour que la sécurité puisse être en
vigueur.
Il y avait un article sur lequel nous avons parlé plus longuement
parce que nous voulions que le ministre fasse des changements. Initialement,
lors de son discours de deuxième lecture, il semblait malheureux que
nous ayons fait des représentations aussi vigoureuses mais, finalement,
il a présenté des amendements. Il s'agissait de l'article 88
concernant la délivrance de permis à des personnes
handicapées. Le gouvernement qui avait satisfait antérieurement
à l'émission de plaques pour le stationnement des personnes
handicapées touchait seulement celles qui conduisaient elles-mêmes
leur véhicule automobile.
Les groupes de personnes handicapées ont demandé des
plaques amovibles qui pourraient être utilisées par les personnes
handicapées qui n'utilisent pas une automobile qu'elles conduisent
elles-mêmes ou dont elles sont propriétaires, mais qui sont
conduites par d'autres personnes. Nous avions fait des représentations
dans ce sens, parce qu'il est clair que les gens handicapés qui ne sont
pas capables de conduire une automobile sont encore plus handicapés que
ceux qui en sont capables.
À ce moment-là, il fallait prévoir que les terrains
de stationnement puissent être utilisés aussi par ceux qui ne
peuvent pas conduire une automobile, mais qui doivent être
transportés par d'autres. Plusieurs exemples avaient été
fournis en commission parlementaire. Celui de jeunes enfants qui devraient
être laissés sur le bord du trottoir en attendant que leurs
parents aillent stationner l'automobile ou encore une personne
handicapée qui devrait attendre sur le bord du trottoir que l'automobile
soit stationnée. Cela peut prendre un certain temps. Ce n'est quand
même pas tous des
terrains de stationnement proches de l'entrée des centres
commerciaux.
Il y a un changement qui est apporté à la loi pour ne pas
que tout cela soit remis aux municipalités qui ne sont pas
équipées pour faire ce genre de travail, soit d'évaluer
les personnes handicapées, et ensuite déterminer qui est
handicapé et qui ne l'est pas après une analyse, faite
d'après les règlements établis par le gouvernement qui
détermine le statut d'une personne, pour savoir si elle doit obtenir une
vignette amovible de stationnement. Finalement, le ministre a consenti un
amendement qui n'est pas le meilleur dans les circonstances, mais qui est moins
pire que le régime qui avait été prévu dans le
projet de loi.
Nous avons fait des représentations vigoureuses. Les organismes
de personnes handicapées comme COFAM, la Confédération des
organismes provinciaux de personnes handicapées du Québec, ont
fait des représentations et ils auraient souhaité que cette
vignette permettant le stationnement de véhicules automobiles sur des
terrains de stationnement réservés aux personnes
handicapées puissent être délivrées par la
Régie de l'assurance automobile. C'est à défaut que la
Régie de l'assurance automobile du Québec n'a pas
été assez compatissante pour accepter d'émettre les
permis. Le ministre n'a pas voulu lui accorder cette autorité, et
finalement la responsabilité va échoir à l'Office des
personnes handicapées.
Les personnes handicapées auraient aimé être
traitées sur le même pied que tous les citoyens et que
l'émission de ces vignettes soit faite également par la
Régie de l'assurance automobile du Québec. L'amendement du
ministre va permettre... C'est mieux que rien, le ministre a fait un bout de
chemin, mais il a fallu faire des représentations énergiques. Il
a fallu que les associations en fassent également. Il a accepté
de faire un bout de chemin, mais il n'a pas voulu tordre les bras de la
Régie de l'assurance automobile, de sorte que l'Office des personnes
handicapées fera l'émission des vignettes amovibles pour les
personnes handicapées qui ne conduisent pas une automobile ou qui ne
sont pas propriétaires d'une automobile, alors que celles qui sont
propriétaires, les handicapés qui sont propriétaires d'une
automobile qui conduisent eux-mêmes leur automobile pourront avoir leur
vignette de la Régie de l'assurance automobile du Québec.
À l'application, on verra comment cela va fonctionner. Nous
espérons que l'Office des personnes handicapées va collaborer au
maximum, mais nous aurions préféré que la
délivrance de cette vignette, comme le demandaient les personnes
handicapées, soit faite, comme pour tous les autres, par la Régie
de l'assurance automobile du Québec.
La Régie de l'assurance automobile du Québec est un
organisme qui est habitué à traiter avec les victimes d'accidents
d'automobile, qui aurait dû, normalement, se sentir plus à l'aise
pour délivrer les vignettes aux personnes handicapées. Le
ministre n'a pas voulu les forcer et il n'a pas voulu décider contre
l'opinion de la régie qui ne voulait pas le faire. Finalement, c'est
pour cette raison que la responsabilité ira à l'Office des
personnes handicapées. Il me semble que cette décision, qui
représente un pas en avant par rapport à ce que
représentait le projet de loi au moment de son dépôt, n'est
pas complètement arrêtée. Il faudra, au cours des prochains
mois, faire comprendre à la Régie de l'assurance automobile ou au
ministre que les personnes handicapées, qui veulent de plus en plus
être intégrées dans leur milieu, pouvoir fonctionner le
plus normalement possible, auraient aimé sur cette question être
traitées administrativement comme les autres, d'autant plus que
c'était possible et que la Régie de l'assurance automobile, qui a
un réseau de distribution de vignettes, aurait pu facilement faire ce
travail après avoir conclu une entente avec l'Office des personnes
handicapées sur le statut de ces derniers. (17 h 50)
C'est évident qu'il faut déterminer qui va avoir une
vignette, qui ne l'aura pas, dans quel ordre de handicaps une vignette pourra
être délivrée et pourra être une vignette amovible,
pour que tout le monde ne se retrouve pas avec une vignette, alors qu'ils ne
sont pas vraiment handicapés.
Autre point, c'est que les handicapés demandaient que cette
vignette soit délivrée gratuitement. Le ministre a choisi que ce
sera un montant d'une trentaine de dollars pour la délivrance des
vignettes aux personnes handicapées. Là encore, je pense bien que
c'est un débat qui n'est pas terminé. Il s'agira de
déterminer de quelle façon cette vignette, sur le plan
administratif, sera délivrée par l'Office des personnes
handicapées et à quel coût. Je suis persuadé que le
ministre, surtout à la veille des fêtes, pourra écouter son
coeur et pas seulement écouter les fonctionnaires qui pensent uniquement
au Conseil du trésor, mais penser... D'autant plus que, tantôt, il
va apporter un autre projet de loi où il va aller chercher 200 000 000 $
à la Régie de l'assurance automobile. Quand bien même il
laisserait tomber quelques montants... C'est pourquoi la Régie de
l'assurance automobile, qui peut laisser aller 200 000 000 $ de ses coffres
vers le Conseil du trésor, aurait dû garder un plus gros montant
pour délivrer les vignettes amovibles gratuitement aux handicapés
qui sont déjà assez pénalisés par le fait qu'ils
ont un handicap et qu'ils ne peuvent pas conduire
une automobile ni facilement se déplacer et qui ont
déjà assez de se considérer à la charge des
personnes qui les transportent. Ce n'est pas toujours facile pour un
handicapé de pouvoir fonctionner le plus normalement possible dans les
terrains de stationnement où, même quand vous n'êtes pas
handicapés du tout, vous pouvez attendre longtemps avant de vous trouver
un stationnement.
Il est à souhaiter, également, que les
municipalités mettront à la disposition des personnes
handicapées, dans les différentes municipalités du
Québec, des terrains de stationnement privilégiés pour
faire en sorte que les gens de notre société... Cela peut arriver
à chacun d'entre nous, quelqu'un qui est très bien aujourd'hui
peut être handicapé demain; cela peut être un de nos
enfants, un enfant à naître qui aura un handicap à la
naissance. Personne n'est exempt d'un handicap à venir. C'est pour cela
que dans une société normale, il faut faire en sorte d'avoir le
maximum de compassion pour des gens qui n'ont pas eu la chance d'avoir
l'utilisation à 100 % de tous leurs membres physiquement ou, encore, qui
ont subi des traumatismes qui ne leur laissent plus la chance d'utiliser leur
potentiel biophysique, comme ils le souhaiteraient.
Il me semble que, dans une société compatissante, on
essaie d'établir des équilibres. Je comprends que dans une
société de libre-échange, c'est seulement les gens
efficaces qui ont le droit d'avoir tous les privilèges. Dans une
société de libre-échange, on pense que le seul
critère, c'est l'efficacité. On réalisera très
rapidement que pour obtenir la qualité de la vie et avoir une certaine
solidarité humaine dans la communauté qui nous entoure,
l'efficacité économique n'est pas le seul critère, parce
que les gens ne sont pas tous nés avec la même santé, avec
la même vigueur, avec la même chance au point de départ et
que traiter les gens seulement sur le maximum d'efficacité - on
l'apprendra très rapidement - ce n'est pas la meilleure règle
pour guider une société normale et qui ne marche pas seulement
sur l'informatique.
Dans une société, il y a des personnes qui doivent
normalement être conscientes qu'elles vivent dans une
société. Quand on est conscient qu'on vit dans une
société, il faut se rendre compte qu'il faut essayer de
rétablir les équilibres que la nature n'a pas établis.
Je pense que ce projet de loi doit tenir compte de problèmes qui
peuvent survenir parce qu'il y a des personnes qui n'ont pas eu la même
chance que les autres et que l'article 88 devrait encore être
éventuellement amendé pour permettre que ces personnes soient
traitées le mieux possible, parce que c'est la règle qui doit
être suivie dans une société normale.
Mme la Présidente, nous allons voter pour ce projet de loi,
puisque le principe d'avoir une meilleure sécurité
routière au Québec est bon. Nous souhaitons que le ministre
dispose des ressources nécessaires de la part du ministre des Finances
qui a déjà eu l'âme assez dure pour aller chercher 200 000
000 $ dans la caisse des assurés de la Régie de l'assurance
automobile. Il veut le faire, le projet de loi n'est pas encore adopté,
mais l'intention du ministre des Finances a été annoncée
le 30 avril 1987. Le ministre des Transports pourra disposer des fonds
suffisants pour appliquer la loi et également pour qu'elle soit
appliquée équitablement.
Je suis persuadé que le nouveau ministre du Tourisme pourra
annoncer que, sur les routes du Québec, il y a davantage de
sécurité, cela sera une façon de faire la promotion pour
ceux qui veulent voyager au Québec. Au Québec, on est
considéré comme des gens un peu "cowboys" sur nos routes. Quand
les Américains viennent ici, ils viennent de nuit parce qu'ils ont peur
le jour. Ils trouvent que c'est moins épeurant de voyager la nuit. On a
l'habitude parfois de tourner un peu les coins ronds. On n'est pas aussi pires
que les Mexicains, on n'est pas aussi pires que les Grecs ou les
Athéniens, les Italiens ou même les Parisiens, mais il nous reste
encore un peu de sang latin dans les veines et nous n'avons pas le flegme
britannique lorsque nous conduisons notre automobile. C'est pourquoi avec cette
volonté pour qu'il y ait une plus grande sécurité sur les
routes du Québec, le ministre qui aura à voir à
l'application de la loi aura un rôle considérable à jouer
et il ne pourra pas le jouer si le ministre des Finances lui coupe les fonds,
lui coupe les ressources.
Il est très important que le ministre nous dise dans sa
réplique sur quel fonds, sur quelles resssources il pourra compter de la
part du Conseil du trésor. Le ministre des Finances veut
déjà lui siphonner 450 000 000 $ de la caisse de la Régie
de l'assurance automobile en quatre ans. En 1986, 1987, 1988, 1989, le
Trésor ira chercher 400 000 000 $ dans la caisse consolidée de la
Régie de l'assurance automobile. Il faudra que le ministre ait
l'assurance d'avoir tous les budgets nécessaires pour administrer une
loi qu'il a voulu faire adopter, une loi qui va sûrement améliorer
la sécurité routière à condition qu'elle soit
appliquée et qu'il ait les ressources humaines et les moyens financiers
pour appliquer sa loi.
Mme la Présidente, je ne voudrais pas parler plus longuement sur
ce projet de loi, nous aurons l'occasion, au cours des prochains mois, de
tracer des bilans et de voir quel est le résultat de l'application du
projet de loi 73.
La Vice-Présidente: Merci, M. le député de
Lévis. M. le ministre des Transports, en réplique.
M. Marc-Yvan Côté
(réplique)
M. Côté (Charlesbourg): Mme la Présidente, je
sais que le temps est quand même très limité, puisque nous
approchons 18 heures, mais je veux relever deux points de l'intervention du
député de Lévis concernant le projet de loi 73. Il a pris
soin de parler de tout le phénomène des vignettes pour
handicapés, qui a fait l'objet de plusieurs discussions en
deuxième lecture en commission parlementaire et il faut bien le dire, de
beaucoup de démagogie. Je ne vise pas particulièrement le
député de Lévis, partout au Québec il y a eu un peu
de démagogie concernant les stationnements pour handicapés.
Il faut se rappeler que la loi 127 qui avait été
amendée permettait aux handicapés détenteurs d'un permis
de conduire d'avoir sur leur plaque d'immatriculation une indication faisant en
sorte qu'ils pouvaient utiliser les stationnements pour handicapés.
C'était une première et c'était très
intéressant.
L'autre problème qui a subsisté, c'est des parents qui,
conduisant un handicapé, voulaient obtenir une vignette mobile, donc
détenue par le handicapé, pour être capables d'utiliser les
stationnements du Québec. Mais le fait d'augmenter le nombre de permis
pour handicapés n'augmente pas le nombre de stationnements. Alors, voici
ce que nous avons fait en cours de route. Effectivement, la Régie de
l'assurance automobile a agi dans le cadre de ses responabilités
puisqu'elle a autorité sur ceux qui ont des permis de même que sur
ceux qui ont une immatriculation de voiture et, dans ce sens, elle a agi dans
le cadre de ses responsabilités. Effectivement, la régie l'a fait
à ma demande, expressément à ma demande, et je la remercie
de l'avoir fait.
On voulait étendre cette demande à la régie pour
faire en sorte que les 60 000 ou 70 000 autres handicapés au
Québec puissent obtenir la vignette, mais il y avait un hic. Il faut que
le handicapé soit déclaré comme tel et, pour qu'il soit
déclaré comme tel, il faut qu'il passe des examens. À la
suggestion du député de Lévis, en conclusion, Mme la
Présidente...
La Vice-Présidente: Je m'excuse, compte tenu de l'heure,
est-ce qu'il y a consentement? Consentement. Vous pouvez continuer.
M. Côté (Charlesbourg): Merci. C'est à la
suggestion du député de Lévis - pas à la mienne -
qu'on a conféré à l'Office des personnes
handicapées la responsabilité d'émettre ces vignettes. Qui
mieux que l'Office des personnes handicapées peut être
habilité à reconnaître un handicapé? Certainement
pas la Régie de l'assurance automobile du Québec. Dans ce sens,
c'est un juste retour des choses, à la bonne place, que tous les gens
respecteront partout au Québec. Mais il y a un hic. Ce n'est pas
dû au fait qu'on délivrera x milliers de vignettes additionnelles
que les stationnements augmenteront. Je l'ai dit, c'est davantage dans la
mentalité et dans le respect que nous réussirons à
régler un certain nombre de choses. D'abord, pour celui qui a la
mobilité, qui est capable de se déplacer, de stationner dans un
stationnement de centre commercial et de laisser le stationnement pour
handicapés au bénéfice des handicapés. Dans ce
sens-là ça m'apparaît extrêmement important et c'est
davantage par ce qu'on appelle, dans un vocable un peu plus large,
l'éducation, le civisme, qu'on réussira à faire progresser
les choses. Dans ce sens-là, c'est avec l'assentiment de tout le monde,
l'Office des personnes handicapées, la Régie de l'assurance
automobile, l'Opposition et le gouvernement que nous en sommes venus à
cette conclusion.
Donc, c'est très heureux. Le projet de loi 73 est un bijou du
genre, non seulement pour les stationnements des personnes handicapées,
mais l'ensemble du projet de loi 73. Et nous l'appliquerons, je le dis au
député de Lévis, avec la même rigueur que nous
l'avons fait en 1986 et en 1987 quant à l'application du Code de la
sécurité routière. Il y a suffisamment de personnes
responsables à la Régie de l'assurance automobile, à la
Commission des transports du Québec et au ministère des
Transports, et le niveau de responsabilité des agents de la paix est
suffisamment élevé pour faire en sorte que ce soit
appliqué de manière équitable et juste partout au
Québec. Dans ce sens-là, je suis extrêmement heureux de
l'avoir fait adopter en deuxième lecture et d'en proposer son adoption
en troisième lecture devant l'Assemblée.
Quant à certains autres éléments soulevés
par le député de Lévis, j'ai bien l'impression qu'à
20 heures, quand on reprendra avec le projet de loi 62, chacun pourra en avoir
pour son argent, parce que j'attends déjà ce moment depuis fort
longtemps.
La Vice-Présidente: Merci, M. le ministre des
Transports.
Le débat étant clos je comprends que j'ai l'autorisation
de cette Chambre pour faire les écritures?
Une voix: Oui.
Commission plénière
La Vice-Présidente: Nous allons donc procéder.
Est-ce que la motion pour que l'Assemblée se transforme en commission
plénière est adoptée?
Une voix: Adopté.
Adoption de l'amendement
La Vice-Présidente: Est-ce que l'amendement proposé
par le ministre des Transports au projet de loi 73 et qui se lit comme suit: "A
l'article 62, supprimer dans la deuxième ligne de l'article 519.41 le
nombre 258", est adopté?
Une voix: Adopté.
La Vice-Présidente: Est-ce que le rapport de la commission
plénière est adopté?
Une voix: Adopté.
Adoption du projet de loi
La Vice-Présidente: Est-ce que le projet de loi 73, Loi
modifiant le Code de la sécurité routière et d'autres
dispositions législatives, est adopté?
Des voix: Adopté.
La Vice-Présidente: Adopté.
Compte tenu de l'heure, nous allons donc suspendre nos travaux
jusqu'à 20 heures ce soir.
(Suspension de la séance à 18 h 4)
(Reprise à 20 h 9)
La Vice-Présidente: À l'ordre, s'il vous
plaît:
Nous allons reprendre nos travaux. M. le leader adjoint du
gouvernement.
M. Johnson: Mme la Présidente, je vous demanderais
d'appeler l'article 37 du feuilleton.
Projet de loi 62 Adoption
La Vice-Présidente: À l'article 37 de notre
feuilleton, le ministre des Transports propose l'adoption du rapport de la
commission de l'aménagement et des équipements qui a
procédé à l'étude détaillée du projet
de loi 62, Loi modifiant la Loi sur l'assurance automobile. Je m'excuse, il
s'agit de l'adoption du projet de loi 62, Loi modifiant la Loi sur l'assurance
automobile.
M. le ministre des Transports.
M. Côté (Charlesbourg): Mme la Présidente,
que le député de Lévis tire le premier!
La Vice-Présidente: M. le député de
Lévis.
M. Jean Garon
M. Garon: Mme la Présidente, n'étant pas un soldat
français à Fontenoy, je tirerai le premier. À Fontenoy,
les Français avaient dit aux Anglais: Tirez les premiers. Les Anglais
ont tiré les premiers et les Français ont perdu la bataille.
C'est pourquoi il ne faut pas attendre l'offre de tirer les premiers, il faut
toujours tirer les premiers. Le ministre est de bonne humeur. Je m'en venais
sur le boulevard Laurier tout à l'heure et je me disais: Comment se
fait-il qu'aucune lumière n'est synchronisée? J'ai dû
arrêter à peu près à toutes les lumières. Je
me suis dit: C'est pire, pour la sécurité routière, que
n'importe quoi parce que, quand les lumières ne sont pas
synchronisées, cela fait bouillir d'impatience tous les conducteurs. La
meilleure façon de faire en sorte que la sécurité
routière soit bien observée, c'est que cela roule. Quand cela ne
roule pas suffisamment, c'est là qu'on voit des imprudences se
commettre. J'ai dû constater qu'il y a certainement eu quelque chose dans
le mécanisme des lumières sur le boulevard Laurier parce que
jamais les lumières n'ont été si peu
synchronisées.
Mme la Présidente, ce n'est pas le discours que je veux tenir ce
soir parce que nous parlons de la Régie de l'assurance automobile, de la
Loi sur l'assurance automobile et, encore une fois, des 200 000 000 $ que le
ministre des Transports s'est fait siphonner par le ministre des Finances. Le
ministre des Finances n'est pas là souvent. Il est là à
l'occasion d'une fuite budgétaire, mais, en d'autre temps, il n'est pas
là souvent. Ce n'est pas un veilleux! Mais, par ailleurs, il est assez
habile pour aller chercher 200 000 000 $ dans les coffres du ministre des
Transports, dans le coffre dont il a la sécurité.
Mme la Présidente, je ne recommencerai pas tout mon discours
d'hier, mais, pour l'avantage des auditeurs qui n'étaient pas là
hier mais qui sont là ce soir, je vais quand même résumer
ce que je disais. Essentiellement, le gouvernement libéral aime beaucoup
dire qu'il a une bonne administration, sauf qu'il est en train de vider tous
les comptes des différentes sociétés d'État qui
étaient pleins, pleins de fonds, pleins d'argent: Loto-Québec, 40
000 000 $, plein de fonds, plein d'argent; SOQUIA qui détenait 8 % des
parts de Provigo vend ses parts, 47 000 000 $ de bénéfice sur les
parts qui avaient été
achetées par le gouvernement pour empêcher une prise de
contrôle par une entreprise de l'extérieur du Québec en
1979, si ma mémoire est bonne. Ils vendent les parts 47 000 000 $, mais
on entend dire actuellement que, depuis que SOQUIA n'est plus là,
apparemment on achète, chez Provigo, davantage de porcs au Danemark.
J'ai eu des appels téléphoniques à mon bureau hier disant
qu'il y aurait apparemment des changements dans la politique d'achat. C'est
quelque chose à vérifier, je ne veux pas aller trop loin, mais
j'ai eu des téléphones à mon bureau m'affirmant que des
bouchers au comptoir de Provigo auraient dit qu'il y avait eu une entente sur
l'achat de porc haché au Danemark.
Je dirai, et c'est pertinent, que ce sont des fonds publics, quand on
vend la participation de l'État à différents endroits dans
les sociétés d'État. Actuellement, le ministre de
l'Agriculture a dit que, dans Culinar où près de 38 % des actions
sont détenues par SOQUIA, on veut vendre. À Crustacés de
Gaspé, des actions qui avaient été achetées par le
gouvernement pour permettre le développement de l'entreprise 100 $ en
1981 ont été vendues 700 $ l'action en 1986, sept fois plus cher.
On n'a pas dit à quel point c'était une bonne opération du
gouvernement précédent. Actuellement, à la
Société des pêches de Newport que les libéraux
traitaient d'éléphant blanc, les actions qui avaient
été payées 100 $ en 1984-1985, on veut apparemment les
vendre 330 $, trois fois point trois plus cher en l'espace de deux ans. Les
libéraux disent que l'ancien gouvernement ne savait pas administrer,
mais il savait placer, il savait investir.
Aujourd'hui, le ministre des Transports dit: Je ne peux pas laisser les
autres faire, ramasser des fonds comme cela. Le ministre des Finances est
allé dans le coffre de la Régie de l'assurance automobile et a
découvert qu'après la fin de l'année 1985-1986 il y avait
654 100 000 $ de solde des excédents des revenus sur les
dépenses. C'est un montant d'argent considérable 654 000 000 $ et
cela, grâce à une administration de bon père de famille.
Aujourd'hui, étant donné que la famille n'existe quasiment plus,
on est en train même de changer le Code civil pour parler de l'homme
raisonnable. Cette administration de bon père de famille, un
gouvernement raisonnable avait fait en sorte que les fonds s'étaient
accumulés: En 1980, 33 000 000 $ d'excédents accumulés; en
1981, 120 700 000 $; en 1982, 195 300 000 $; en 1983, 146 400 000$; en 1984,
233 600 000 $; en 1985, 399 800 000 $; en 1985, à la fin de
l'année, 525 700 000 $ et en 1986, 654 000 000 $.
Ce qui fait que, avec les fonds considérables qui étaient
accumulés à la
Régie de l'assurance automobile, le ministre des Finances s'est
mis à "zieuter" dans la direction de la Régie de l'assurance
automobile et a dit: Encore un fonds où on pourra aller siphonner. Dans
ce cas, ce n'était pas un fonds du gouvernement. C'était le fonds
des assurés. C'est très différent de Loto-Québec,
de SOQUIA où les actions appartiennent au ministre des Finances ou au
ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, au nom du
gouvernement. Dans le cas de la Régie de l'assurance automobile, il
s'agit de la caisse des assurés.
On n'a pas le droit de s'approprier le bien d'autrui. Si moi, ce soir -
je vois le député de Laurier - j'allais dans ses poches et que je
prenais 200 $, je me ferais arrêter par la police. Il dirait: Vous n'avez
pas le droit de prendre de l'argent dans la poche d'un autre. Je vois les
députés qui sont ici présents: le député de
Taschereau à côté du député de Limoilou; si,
tout en causant, un prenait de l'argent dans la poche de l'autre, il ne
trouverait pas cela normal. Pourtant, le ministre des Finances, que fait-il
avec le projet de loi que nous avons devant nous? Il va chercher 200 000 000 $
d'argent qui appartient aux assurés de l'automobile, aux gens qui ont
payé des plaques d'immatriculation, qui ont payé leurs
permis.
La somme de tout cela accumulée au cours des années, la
différence entre les revenus et les dépenses, ça fait des
surplus accumulés selon des réserves actuarielles. Là, le
ministre dit: Je vais aller en chercher, sauf que, dans ce cas-là, il
n'a pas le droit de faire cela. Évidemment, on peut toujours dire, comme
Jean-Charles Bonenfant disait: "Le gouvernement peut tout faire, même
changer un homme en femme." Il n'a pas dit qu'on pouvait changer une femme en
homme, il a dit qu'on pouvait changer un homme en femme. C'était
l'exemple qu'il donnait pour dire que le Parlement pouvait tout faire.
Mme la Présidente, changer un homme en femme, si le Parlement
peut faire cela, c'est évident qu'il est capable juridiquement, en
faisant une loi, d'aller chercher un fonds qui ne lui appartient pas. Mais il
s'agit, à ce moment-là, d'une loi abusive qu'on n'a pas le droit
de faire, parce que les fonds n'appartiennent pas au ministre des Finances.
À mon avis, le ministre des Finances pouvait faire deux choses:
remettre l'argent aux assurés, parce qu'il en avait trop perçu,
parce que les primes, les réserves actuarielles, qui avaient
été constituées, l'avaient été à un
niveau trop élevé par rapport aux dépenses encourues, et
que là le surplus devait être distribué aux assurés.
Une partie a été distribuée, et je suis persuadé
que le ministre des Transports sera content de dire tantôt: Oui, mais un
certain montant a été remis aux assurés. Ce n'est pas
parce que je vais prendre 200 000 000 $ dans
votre poche et que je vous remets 10 $, que les 190 000 000 $ que j'ai
gardés ne vous appartiennent pas. Le ministre a pris une partie du "pot"
des assurés et l'a remis aux assurés, une petite partie. Pas un
montant considérable, et il vous dira des chiffres tout à
l'heure. Je vais lui laisser le plaisir de le dire. Mais en même temps
qu'il faisait cela pour couvrir son larcin, il vote une loi pour le ministre
des Finances, qui va aller chercher 200 000 000 $: 100 000 000 $ en 1988 et 100
000 000 $ en 1989. (20 h 20)
II voulait le faire cette année; il a fait un amendement pour ne
pas le faire cette année parce que le ministre des Finances avait dit
que les sommes qu'il irait chercher seraient utilisées selon un plan. Au
cours des prochaines semaines, disait le ministre des Finances, le 30 avril
dernier, le ministre des Transports vous dira à quelle fin il utilisera
ces sommes d'argent. Mais le ministre ne l'a pas dit. Il n'a rien dit, de sorte
qu'on se retrouve avec un amendement selon lequel il va faire cela l'an
prochain parce que le ministre des Finances, qui avait annoncé que le
ministre des Transports dirait à quelles fins il affecterait l'argent au
cours des semaines qui viendraient... C'était dit dans son discours sur
le budget, je peux vous le lire, au cas où les gens ne me croiraient
pas. Il n'y a rien de mieux que de lire ce qui est dit par le ministre des
Finances. Il dit: "De plus, grâce à une conjoncture favorable et
à des programmes efficaces de réadaptation des victimes de la
route, la Régie de l'assurance automobile du Québec a pu
dégager une réserve excédentaire." J'ai dit qu'elle s'est
constituée à partir de 1980. "Il est normal que ces sommes
retournent aux usagers de la route - il le dit lui-même, le ministre des
Finances - notamment sous forme de réduction des contributions
d'assurance - il a raison - et sous forme d'immobilisations en matière
de sécurité routière - là, il erre. - C'est ainsi
que la Régie de l'assurance automobile du Québec pourra verser au
gouvernement une somme totale de 200 000 000 $ au cours des deux prochaines
années pour des immobilisations en sécurité
routière sur tout le réseau routier du Québec".
Quand le ministre a dit les deux prochaines années, est-ce qu'il
voulait dire cette année ou l'an prochain et l'autre année
d'après? À moins qu'il n'ait réalisé que ce
n'étaient peut-être pas les termes exacts et qu'il ne pouvait pas
aller chercher l'argent pour cette année parce que le ministre avait dit
au cours des deux prochaines années. Il n'a pas dit l'année
courante, mais les deux prochaines années, et le ministre a
amendé son projet de loi pour dire en 1988 et en 1989. Le projet de loi
au début disait 1987 et 1988. Il dit: "au cours des deux prochaines
années pour des immobilisations en sécurité
routière sur tout le réseau routier du Québec".
Le ministre des Transports, disait le ministre des Finances, le 30 avril
dernier, indiquera dans les prochaines semaines la programmation des travaux
à faire et 60 000 000 $ seront affectés à ces fins
dès cette année. Il va aller chercher 100 000 000 $, mais il va
en mettre seulement 60 000 000 $ dans la sécurité
routière. En passant, l'opération... D'abord, il garde 40 000 000
$ pour lui et il dit: Je vais affecter 60 000 000 $ à la
sécurité routière parce que je n'ai pas mis assez d'argent
dans le budget du ministère des Transports. C'est cela, au fond, que le
ministre des Finances dit dans ses mots, d'un budget gouvernemental.
Cela venait comme deuxième opération, suite
consécutive à une opération menée en 1986 où
le ministre des Finances était allé chercher 60 000 000 $ par
année en disant: II faudrait bien dédommager l'assurance-maladie
des sommes qu'elle dépense pour des victimes de l'assurance automobile
comme si celles-ci ne payaient pas déjà leurs taxes à
l'assurance-maladie comme tout le monde. On va les faire payer deux fois: ils
vont payer à l'assurance-maladie et ils vont payer à l'assurance
automobile: deux fois pour les services essentiels.
Je sais que le ministre dira: Ah oui, mais l'ancien gouvernement voulait
faire la même chose. Il faut faire attention entre les propositions des
fonctionnaires et ce que le gouvernement décide. Je suis certain que le
ministre aurait bien voulu que les vignettes amovibles pour les
handicapés soient faites par la Régie de l'assurance automobile,
mais la régie ne voulait pas. Le ministre a mis le poing sur la table.
Il a dit: Ah, la régie ne veut pas. Il a dit: ah, l'Office des personnes
handicapées. D'autant plus que ça ne dépend pas de lui
ça dépend d'un autre, alors, c'était plus facile.
Mais essentiellement, le ministre peut prendre des
responsabilités. Il va dire: Oui, mais c'est la Régie de
l'assurance automobile qui m'a proposé cela. Ce n'est pas parce que la
Régie de l'assurance automobile veut bien paraître aux yeux du
gouvernement qu'il faut l'écouter. Le ministre aurait dû
résister et dire: Cet argent appartient aux assurés, je suis le
gardien de la caisse des assurés, il s'agit de surplus de revenus sur
les dépenses à même les cotisations des assurés par
rapport aux prestations versées aux victimes d'accidents d'automobile.
Je n'ai pas le droit de toucher à cet argent dont je suis, en quelque
sorte, le gardien fiduciaire.
Il pourrait demander au ministre de la Justice. Pendant cinq jours, on a
étudié un projet de loi où on a parlé des
sociétés de fiducie, des sociétés de prêts,
on a comparé avec le régime des assurances. Est-ce que quelqu'un
qui n'est pas assuré peut aller
siphonner le "pote" des assurés? On a mis toutes sortes de
clauses pour s'assurer que les fonds fiduciaires administrés par
l'entreprise privée ne seront pas utilisés au profit d'autres
personnes que celles à qui ils appartiennent. Comment le gouvernement
peut-il avoir un tel comportement quand lui-même va siphonner l'argent
qui appartient aux assurés?
Je vois la députée de Johnson qui est estomaquée,
elle ne pensait jamais que c'était possible. Elle connaissait la force
du député de Charlesbourg quand il était dans
l'Opposition. C'était un des députés les plus vigoureux.
Rendu au gouvernement, on était certain que cet homme vigoureux
garderait le coffre-fort comme un pit bull, qu'il serrerait les dents et que
jamais celui qui voudrait prendre les fonds ne pourrait lui faire lâcher
prise. Au contraire, le ministre des Finances a été chercher la
caisse, c'est juste s'il n'a pas eu un pourboire du ministre des
Transports.
Une voix: Ha! Ha!
M. Garon: Non, mais vous allez écouter le ministre des
Transports tantôt qui pourrait dire: Je ne suis pas d'accord avec cela.
Le ministre des Finances n'aurait pas dû faire cela. Le ministre n'aurait
pas dû venir chercher la caisse des assurés de l'automobile.
Demandez à l'ex-Solliciteur général, qui est ici
dans cette Chambre, si on a le droit de prendre les fonds qui appartiennent
à d'autres, si on a le droit de prendre des fonds qui sont en fiducie,
dans un dépôt qui appartient aux assurés de l'automobile?
Évidemment, le gouvernement peut toujours faire cela en disant: Oui, je
le fais, comme je pourrais déclarer ici ce soir que le
député de Taschereau n'est pas un homme, mais une femme. Le
gouvernement pourrait faire cela. Jean-Charles Bonenfant disait: Le Parlement
peut même changer un homme en femme, mais c'est une fiction
légale. Les gens savent que le gouvernement ne peut pas faire de telles
choses, réellement, et la population n'admet pas ces choses.
Quelquefois, on se demande pourquoi les citoyens n'ont pas tout le respect
qu'ils devraient avoir de la chose publique? Pourquoi? Parce que les citoyens
se sentent malheureux, mal pris devant une telle initiative du ministre des
Finances qui va chercher la caisse des assurés de la Régie de
l'assurance automobile dont le ministre des Transports a la garde.
Celui-ci va vous dire: Oui, mais l'ancien gouvernement aurait fait ceci,
aurait voulu cela. L'ancien gouvernement ne dirige plus. Il n'est plus
là. Quand il arrive quelque chose de mauvais pour la population, le
gouvernement dit: C'est l'ancien gouvernement. Quand c'est quelque chose qui a
l'air pas mal, il dit: C'est nous autres. Cela veut dire qu'on est forts, nous
du Parti québécois, cela fait deux ans qu'on n'est plus là
et on mène encore. Nous ne sommes que 23 sur 99 et c'est encore nous qui
menons le gouvernement.
Des voix: 22.
M. Garon: 22. Mme la Présidente...
Une voix: 21 et trois-quarts.
La Vice-Présidente: À l'ordre, à
l'ordre!
M. Garon: Même à 21, il le dit. Je suis certain que,
si on était 20, il dirait encore que c'est nous qui menons. On est
forts.
Pensez-vous que les gens pensent qu'on mène autant que cela? Non.
La caisse de l'assurance, on a aidé à la constituer, en ayant une
gestion rigoureuse et même si le Parti libéral avait combattu
vigoureusement, férocement la loi de l'assurance automobile. Il
était contre. Il ne voulait pas, un peu comme le ministre de l'Industrie
et du Commerce qui n'a pas l'air de vouloir les frégates. (20 h 30)
La volonté politique n'est pas là. Il était contre
la loi sur la protection du territoire agricole. Il était contre.
Aujourd'hui, ils me font penser un peu aux aboiteaux de Kamouraska. Tout le
monde était contre, mais aussitôt qu'ils ont été
faits, le gouvernement fédéral a donné une subvention aux
gens du coin pour passer des dépliants avec une feuille d'érable
rouge pour faire croire au monde qu'ils les avaient faits, tellement le monde
trouvait ça beau. Mais ils avaient tous combattu férocement par
exemple. Et là, on se retrouve dans une situation...
Je le sais, le ministre des Transports va dire: L'ancien gouvernement
voulait. Sauf qu'en politique, le gouvernement décide, c'est lui qui
décide. Ce ne sont pas les fonctionnaires. Les fonctionnaires peuvent
proposer. Des propositions de fonctionnaires, pendant neuf ans comme ministre,
j'aurais pu en remplir un camion. Il y en avait des bonnes et des moins bonnes.
Il y en avait qui auraient été pas pires, mais qui
n'étaient pas administrables. Le rôle d'un ministre, c'est de
choisir, de décider, mais une proposition d'un fonctionnaire, ce n'est
pas une décision gouvernementale. Il ne faut pas mélanger ces
choses-là. Et le gouvernement doit assumer ses responsabilités.
Quand le gouvernement, qui a pris le pouvoir au mois de décembre, a
augmenté la taxe sur la gazoline malgré qu'il ait promis de la
faire disparaître... La taxe est toujours là d'ailleurs. Ils l'ont
enlevée dans le Grand-Nord, dans des régions
périphériques éloignées, sachant que ça ne
leur coûterait pas cher, mais dans l'ensemble
du Québec, ils se sont dépêchés de
l'augmenter. En février 1986, la taxe a augmenté.
Le gouvernement aurait pu dire, par une déclaration très
simple du ministre des Finances: Conformément aux engagements
électoraux que j'ai faits au cours de la campagne électorale qui
ont mené à la victoire du Parti libéral le 2
décembre 1985, à partir de minuit ce soir, il n'y aura plus de
taxe. C'est fini, terminé, réglé. Mais là, il dit:
Non, c'est la faute de l'ancien gouvernement. Voyons donc! Voyons donc! Un
gouvernement, quand c'est changé, c'est changé. À tel
point qu'à partir du 13 décembre 1985, c'était le nouveau
gouvernement qui était dans le siège du conducteur. C'est lui qui
dirigeait, c'est lui qui décidait. Il a décidé et il
décide actuellement, imaginez-vous, d'aller chercher 200 000 000 $ dans
la caisse des assurés. L'an dernier, il a adopté un projet de loi
pour aller chercher 60 000 000 $ par année indexés. Ça
veut dire que, sur quatre ans, 1986, 1987, 1988 et 1989, à peu
près un mandat de gouvernement - on sera sûrement en
élection en 1989, peut-être en 1988 - le gouvernement
libéral sera allé chercher 450 000 000 $ dans la caisse des
assurés de la Régie de l'assurance automobile. Ces grands
défenseurs des gens, ces grands citoyens. Ils ont aboli le Comité
de surveillance des étalons pour divertir, mais, en même temps,
ils sont allés chercher 450 000 000 $ dans la caisse des assurés,
en plus d'avoir augmenté le prix de l'essence en augmentant le taux
payé en taxe sur l'essence dès le 4 février 1986. Taxe sur
l'essence qui aura rapporté...
On fera le bilan lors de la prochaine campagne électorale pour
savoir comment cette taxe aura rapporté avec l'augmentation de
février 1986, au cours des quatre années qui ont suivi. Ils se
sont dépêchés. En partant, ils ont dit: L'électeur
aura oublié. On aura été chercher quelques centaines de
millions de dollars en taxes augmentées sur l'essence dès le
début de février 1986 et, en plus, on ira chercher 450 000 000 $
de surplus accumulés dans la caisse des assurés. Je défie
n'importe qui... Le ministre va le dire, il avait une réserve
excédentaire constituée sous le gouvernement du Parti
québécois qui, lui, avait une administration rigoureuse. Mais,
avec toutes sortes de manipulations, on a essayé de faire croire qu'on
administre bien.
Par exemple, quand Hydro-Québec, dans le temps du Parti
québécois, faisait 300 000 000 $ de profit, si elle ne payait pas
les 300 000 000 $ de profit en dividendes au gouvernement, on mettait, dans les
revenus du gouvernement, zéro, pas une "cenne". Aujourd'hui, si
Hydro-Québec fait 300 000 000 $ de profit, même si elle ne verse
pas un seul sou noir au gouvernement, les libéraux mettent 300 000 000 $
de revenus dans la caisse du gouvernement, comme s'ils les avaient eus alors
qu'ils ne les ont jamais eus. Évidemment, cela paraît bien dans
les colonnes de chiffres, sauf qu'au point de vue de la comptabilité,
cela n'a rien changé. Il paraît qu'on a baissé le
déficit de 300 000 000 $, alors qu'on a changé les chiffres de
colonnes, un point, c'est tout. Maquillage! Maquillage! On change les colonnes
de chiffres et on dit: Voyez comme on est de bons administrateurs.
Imaginez-vous!
Mme la Présidente, c'est un peu comme la ministre
déléguée à la Condition féminine: beaucoup
de voeux. Elle nous dit depuis des mois qu'elle va sortir son rapport et il
n'arrive rien. Moi, je suis intéressé, je suis un père de
famille de trois filles. Ce sera quoi, leur condition, quand elles vont
être plus grandes? Rien! Cela fait des mois. J'écoutais l'autre
jour, la télévision - cela a adonné, je n'écoute
jamais la télévision -j'appuie sur un bouton et elle était
là: Tiens, je vais l'écouter. J'ai entendu ce qu'elle disait.
Celle qui l'interviewait disait: Oui, mais vous avez dit telle date, ensuite,
c'était au printemps et à l'automne, là, c'est avant
Noël, et là, c'est rendu au mois de janvier. Il n'arrive rien.
C'est un peu comme la politique familiale. On voit le ministre de la
Beauce, qui est un expert dans les bicyclettes, il a inventé le
dérailleur automatique. Je ne sais pas s'il l'utilise pour
lui-même, mais il a inventé le dérailleur automatique
apparemment, ce serait un inventeur - pour faire changer les vitesses sans
dérailler, en déraillant tout seul. Pardon?
Une voix: Des "gears" à bicyclettes.
M. Garon: Non, mais il y a sûrement d'autres mots que
"gear".
Il a annoncé sa politique familiale. Imaginez-vous! Il a
annoncé un Conseil de la famille. Le gouvernement avait fait
disparaître tous les conseils de la famille, plusieurs conseils en
disant: Ce sont des organismes inutiles qui coûtent de l'argent. Lui,
comme solution, il fonde un Conseil de la famille. Mais, pendant que ses
ministres amusent la galerie avec de fausses politiques qui n'en sont pas ou
dans lesquelles il n'y a rien de concret, ce sont comme des vents de la mousson
qui n'apportent rien, par ailleurs, on voit le ministre des Finances qui ne
perd pas le nord. Pendant que ses jeunes ou nouveaux collègues perdent
la proie pour l'ombre, lui ne perd pas le nord, il va chercher les fonds. Il
serait allé chercher dans la caisse des assurés de la
Régie de l'assurance automobile sur quatre ans, 450 000 000 $ qu'il se
serait appropriés. Je vois le ministre de la Justice qui est là,
les yeux ronds comme des nouveaux dollars. Je
vois le ministre de la Justice. Qu'est-ce qu'il a dit, lui? Si cela
avait été un citoyen ordinaire, il aurait dit: Voleur! Et
l'aurait fait arrêter par la police.
Des voix: Ha! Ha! Ha!
M. Garon: Mais là, c'est le ministre des Finances dans un
Parlement qui peut même changer un homme en femme...
Des voix: Ha! Ha! Ha!
M. Garon: ...qui a décidé que le ministre des
Finances pouvait s'approprier des fonds qui appartenaient à qui? Aux
assurés. C'est quelque chose. Le ministre de la Justice ne dit pas un
mot. Pas un mot. Vous savez, le ministre des Finances est habile. Il a fait
cela au ministre des Transports de la même façon qu'il a fait,
pendant que la prison de Saint-Joseph qui... C'est le ministre des Finances. Il
est habile. La prison de Saint-Joseph avait 36 cellules. Il y avait 72
prisonniers dont la moitié étaient en liberté parce que la
communauté collaborait. Il y en avait même qui travaillaient pour
la communauté religieuse du coin. Il y en a qui aidaient à
nettoyer les rivières, la rivière Chaudière pour la
dépolluter. C'était la prison où les prisonniers payaient
le plus d'impôt, Mme la Présidente. Ils payaient des impôts.
C'est fantastique, 72 prisonniers étaient dans une prison de 36 cellules
parce qu'il y en avait la moitié qui étaient dehors.
C'est le contraire à New-Carlisle, dans le comté du
ministre des Finances. Il y avait une prison d'environ - je ne me rappelle pas
des chiffres précis - 70 cellules à moitié vides où
il y avait entre 20 et 30 prisonniers. Savez-vous ce que le ministre des
Finances a fait? Il a fermé la prison de Saint-Joseph et il a investi 1
000 000 $ dans la prison chez lui qui était à moitié vide.
Il a fermé celle qui était remplie à pleine
capacité.
Mme Juneau: Pas vrai?
M. Garon: Oui. Je vous le dis. Ce n'est pas croyable, n'est-ce
pas?
La Vice-Présidente: À l'ordre! À l'ordre,
s'il vous plaît! M. le député de Lévis. S'il vous
plaît, on est en train de débattre le projet de loi 62. Sachant
que vous êtes un des critiques en cette matière, j'aimerais, s'il
vous plaît, que vous reveniez sur le sujet. M. le député de
Lévis. (20 h 40)
M. Garon: Mme la Présidente, je démontrais
l'habileté du ministre des Finances qui n'a pas organisé
seulement le ministre des Transports, député de Charlesbourg, il
en a organisé d'autres dans cette Chambre. C'est cela que j'expliquais.
Il a agi avec habileté mais il n'applique pas les mêmes principes
à tous. Les principes qu'il applique à d'autres, il ne se les
applique pas à lui-même de sorte qu'aujourd'hui on a des gens, par
exemple, de la région de Québec qui s'en vont prisonniers
à New-Carlisle. Ils vont voir la Gaspésie à travers les
barreaux, cela avec l'encouragement du nouveau ministre du Tourisme.
Quand on regarde cela concrètement, il a pris l'argent des
assurés et les assurés ont moins d'argent qu'auparavant. La
Régie de l'assurance automobile va être obligée de serrer
parce que 450 000 000 $ de moins, cela paraît quelque part. On paiera
moins les assurés et on devra éventuellement augmenter les
primes. Le ministre va vous dire: Oui, mais on a payé quelques millions.
Oui, mais on aurait dû payer tous les millions aux assurés. La
caisse est à eux, comme victimes ou comme assurés qui n'ont pas
eu d'accident pour faire un genre de dividende, de trop-perçu sur les
primes qu'on remet aux assurés. Mais non. Au lieu de remettre l'argent
aux assurés... Je vois le député de Jeanne-Mance qui est
un député souvent en contact avec les chauffeurs de taxi; va-t-il
dire aux chauffeurs de taxi: Le ministre des Finances a siphonné la
caisse des assurés dont vous faites partie et le ministre des Transports
n'a pas gardé le coffre-fort? C'est lui le gardien en vertu de la loi.
C'est lui qui a la responsabilité de garder le coffre-fort. Il ne l'a
pas gardé. C'est quelque chose.
Imaginez-vous si cela était arrivé sous le gouvernement
précédent. Imaginez-vous! Mais là, c'est devenu monnaie
courante. Tous les fonds des organismes ont été siphonnés.
Après ça, on dira: Ça ne rapporte pas beaucoup la
Régie de l'assurance automobile. Ce n'est pas bon. C'est une loi du
Parti québécois, une loi péquiste, pas bonne. Mais on
oubliera de dire qu'on est allé chercher 450 000 000 $ dans le "pote"
des assurés.
Ils vont vous parler de l'ancien ministre de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation, qui a déjà eu un
chèque de 11 000 000 $ dans ses poches. Oui. J'en avais. Je vous mets au
défi d'en avoir vous autres. J'en avais et je vais vous dire que quinze
jours après, j'en avais un autre de 19 000 000 $ cette fois-là.
J'allais en chercher de l'argent. Le ministre à Ottawa voulait avoir un
peu de publicité. Il m'a dit: Les libéraux ne vous ont pas
payé pendant cinq ans. Moi, je vous paie. J'aimerais que le monde le
sache. Je l'ai montré aux journalistes. Ils l'ont vu et il m'a dit: Je
suis content qu'ils l'aient su. Parce que vous avez été correct,
je vais vous donner le reste qu'on vous doit. Vrai comme vous êtes
là! Demandez au ministre fédéral de l'Agriculture, John
Wise, il va vous le dire. Vrai comme vous êtes là. Je le dis en
cette
Chambre, le ministre pourrait vous le dire. La deuxième fois, il
a été gêné; il l'a envoyé
différemment. Que voulez-vous? Comme j'avais demandé des
chèques, il m'a dit: Je voulais que vous l'ayez plus vite, je l'ai
apporté directement moi-même. Je ne pouvais pas dire: Je ne le
prends pas. J'ai dit: Je le prends.
Une voix: Pour le déposer?
M. Garon: Oui! Cela a été un montant d'argent
considérable. Je suis allé chercher entre 35 000 000 $ et 40 000
000 $ au total dans le temps de le dire à l'automne 1984, après
le départ des libéraux fédéraux à Ottawa
qui, eux, avaient gardé la caisse, eux autres aussi, qu'ils nous
devaient. C'est une manie libérale, on dirait, d'être
libéral avec la caisse. C'est une manie libérale. Alors, dans ce
cas-ci, c'est le ministre des Finances qui l'a prise et qui va chercher
l'argent.
Je vois le député de Jeanne-Mance. Il devrait dire aux
chauffeurs de taxi: Ça vous coûterait moins cher en assurances, si
le ministre des Finances n'avait pas vidé la caisse de 450 000 000 $.
Mais comme le ministre des Finances a pris 450 000 000 $, il faut vous imputer
des primes pour vos assurances dans le taxi. C'est ça.
Vous savez bien qu'on ne peut pas payer. À 450 000 000 $,
ça paraît un peu. Je comprends que l'ancien ministre à
Ottawa - comment s'appelait-il - "What is a million", dans le temps de
Saint-Laurent, CD. Howe disait: "What is a million?" Bon! Il était au
niveau de ceux qui en valent plusieurs. Mais nous autres qui ne sommes pas
riches, 1 000 000 $, c'est de l'argent. Le ministre des Finances n'en a pas
pris 1 000 000 $, ni 2 000 000 $, mais 450 000 000 $ sur quatre ans, dans un
seul mandat du Parti libéral, qu'il sera allé chercher dans la
caisse. Imaginez-vous maintenant les primes des assurés de l'automobile!
Comment voulez-vous qu'on se compare après ça avec le
Massachusetts, qu'on se compare avec différents États
américains, qu'on se compare avec des provinces au Canada, quand il ne
s'agit plus seulement de primes qu'on paie pour l'assurance, mais de primes qui
servent aux forfaits du ministre des Finances qui va vider la caisse?
Comment pourra-t-on se comparer maintenant, en disant: Voici notre
efficacité, alors qu'il faudra tenir compte du ministre des Finances qui
aura la main dans la poche des assurés en même temps?
Mme la Présidente, c'est fondamental. On est dans un
régime d'assurances où le ministre devrait garder les fonds dans
une qualité de gardien fiduciaire, protéger les fonds. Oh, je
sais que le ministre des Transports va essayer... Et je ne pourrai pas lui
répondre parce qu'il n'a pas voulu parler en premier. Il a dit: Je ne
parlerai pas. Moi, je peux parler là, mais, lui, il a un petit droit de
réplique après. Alors, il va conter des choses, sachant que je ne
pourrai pas répondre. Il a eu peur de les dire avant que je parle. Il a
eu peur de les dire en premier sachant que je pourrais répondre. Il n'a
pas parlé en me disant de parler, sachant que je n'ai pas le droit de
réplique. Mais j'aurai en masse le temps au cours des mois et des
années qui viendront de parler des 450 000 000 $ qui ont
été accaparés par le ministre des Finances.
Je sais que les gens qui m'écoutent doivent dire: Cela n'a
quasiment pas de bon sens que le ministre des Finances ait pris 450 000 000 $
dans la caisse des assurés. Bien, c'est cela.
La Vice-Présidente: À l'ordre! À
l'ordre!
Une voix: Cela n'a pas de bon sens.
M. Garon: 450 000 000 $ dans la caisse des assurés, puis
il va vous le confirmer. Loi de l'an dernier: 60 000 000 $ par année
indexés à jamais, il n'y a pas de limite pour elle. La loi ne dit
pas que pendant un nombre d'années la loi a été
changée pour que la Régie de l'assurance automobile verse au
fonds consolidé, au ministre des Finances, 60 000 000 $ indexés
par année pour les frais de maladies et d'accidents, frais de
santé, sauf qu'il avait déjà payé leurs taxes comme
tout le monde. Si demain matin vous faites une crise cardiaque et que vous
allez à l'hôpital, vous ne paierez pas, parce que vous allez
déjà être assuré avec l'assurance-maladie. Si vous
êtes victime d'accident d'automobile, il faut qu'en plus, on vous prenne
de l'argent dans l'assurance automobile, en plus de ce que vous avez
contribué à l'assurance-maladie. Cela veut dire que vous payez
deux fois pour vos frais médicaux.
L'automobiliste aura l'insigne avantage et l'insigne honneur de payer
deux fois pour son assurance. Donc, 60 000 000 $ indexés.
Deuxièmement, cette année, il a dit: Je n'en ai pas assez. Donc,
je vais aller chercher, pendant deux ans, 100 000 000 $ par année. Mais
pour dorer la pilule, il dit: Je vais en placer 60 000 000 $ dans la
sécurité routière sur le premier 100 000 000 $ que je vais
prendre. Pourquoi? Parce qu'il n'a pas mis assez d'argent dans le budget du
ministre des Transports. On l'a vu, le budget du ministre des Transports a
diminué en valeur réelle. Son budget a diminué en 1986 et
a augmenté un peu en 1987, mais pas assez pour rattraper même le
budget de 1985. Pourquoi? Parce que c'est dur de négocier des
budgets.
Il m'accusait d'en avoir trop. Je me faisais accuser d'en avoir trop
pour l'agriculture. On me disait: Vous, on sait
bien, vous en négociez trop. On disait que je faisais peur aux
autres. Voyons donc! Parce que j'étais capable, j'avais des
députés qui se battaient. Combien de fois Mme la
députée de Johnson est intervenue en faveur des agriculteurs? Je
pourrais vous nommer le nombre de députés qui intervenaient. Mais
là, quand je regarde l'affaire des frégates, on a seize
députés libéraux dans la région de Québec et
je n'en connais pas un qui est intervenu en faveur des frégates dans la
région de Québec auprès du ministre de l'Industrie et du
Commerce, excepté le député de Lévis. Je n'en
connais pas un seul. Il en demande juste deux. On devrait les avoir tous les
six avec le contrat. (20 h 50)
Ce n'est pas le petit Nouveau-Brunswick avec 700 000 citoyens, qui ne
paient pas assez de taxes pour se payer une frégate, qui devrait avoir
les douze frégates. Ils ont obtenu le contrat de conception des
frégates de 7 000 000 000 $. Ils ne paient pas 7 000 000 000 $ de taxes.
Cela prendrait plusieurs années avant que le Nouveau-Brunswick paie 7
000 000 000 $ de taxes. Ils auront le contrat de frégates de 7 000 000
000 $ et nous, on va essayer de s'en téter une ou deux. Mme la
Présidente, c'est cela la réalité. Ne nous racontons pas
d'histoires, c'est cela la réalité. Ce qu'il faut, c'est avoir
des députés qui sont plus combatifs, qui ne se font pas siphonner
des fonds. Là, on se fait siphonner des fonds.
Le gouvernement fédéral a versé 1 000 000 000 $
dans l'Ouest l'an dernier pour l'agriculture et va verser 1 000 000 000 $
additionnel cette année. Il n'y a rien de trop beau pour l'Ouest, il n'y
a rien de trop beau pour les Maritimes, il n'y a rien de trop beau pour
l'Ontario, mais quand arrive le tour du Québec, c'est à la
graine, à la graine. On dit CF-18, 1 000 000 000 $ sur 20 ans, 50 000
000 $ par année. Dans l'économie du Québec, 50 000 000 $
par année pendant qu'on verse 1 000 000 000 $ par année dans
l'économie des trois provinces de l'Ouest. La grosse Saskatchewan avec
900 000 de population, le gros Manitoba avec 950 000 de population, 1 000 000
000 $ qui s'en va là. Au Québec, de petits montants. Les
frégates, c'est le gros Nouveau-Brunswick qui va avoir les
frégates. Imaginez, 700 000 de population versus 7 000 000 au
Québec. Nous, on dit:
Si on pouvait en avoir deux, eux en auraient quatre, ils feraient les
plans, ils auraient les experts. Imaginez, 700 000, c'est moins de gens que
dans la région de Québec. Ils auraient les six frégates.
À partir de là, le contrat de 3 500 000 000 $ et nous, on dirait:
Est-ce qu'on pourrait en avoir un peu?
Une voix: Des quêteux.
M. Garon: Oui, comme si on était obligé de
mendier...
Une voix: C'est cela.
M. Garon: ...alors que ce sont nos taxes qui vont payer ces
frégates. Au Nouveau-Brunswick, ils ne paient quasiment pas de taxes.
C'est nous qui allons payer les taxes et les frégates vont être
faites là-bas. Qui va payer les taxes dans l'Ouest pour le 1 000 000 000
$ aux cultivateurs de l'Ouest? Ce ne sont pas les taxes perçues en
Saskatchewan. Vous pouvez les additionner, vous allez voir ce que cela donne.
Ils auront 1 000 000 000 $. Qui paiera? Les taxes des Québécois.
C'est cela, la réalité. Le ministre de l'Agriculture dira: J'ai
obtenu 38 000 000 $ versus 1 000 000 000 $, mille millions versus 38 000 000 $.
Il arrive que ce n'est pas raisonnable et c'est pourquoi je dis au ministre des
Transports qui n'est pas un mauvais garçon - j'ai eu l'occasion de le
rencontrer en commission parlementaire au cours des derniers jours mais avant
qu'il se fasse prendre la caisse, je n'ai pas pu lui parler. Je lui aurais dit:
Ne te laisse pas faire par le ministre des Finances. Les ministres des
Finances, cela veut toujours prendre de l'argent ici et là. Il faut
être sur ses gardes tout le temps par rapport au ministère des
Finances, quel que soit le ministre des Finances. Il faut toujours surveiller
le ministre des Finances parce que si vous ne regardez pas, il va vous en
prendre un morceau.
C'est pourquoi je dis que la responsabilité du ministre des
Transports, c'était de garder la caisse. Il nous a dit jusqu'à
maintenant: J'étais d'accord, je l'ai même suggéré.
Je n'en suis pas revenu, cela n'a pas de bon sens. C'est comme si quelqu'un qui
se fait voler avait suggéré au voleur de le voler. Imaginez! Cela
n'a pas de bon sens. Je pense qu'il s'est fait avoir, il n'était pas
encore familier avec les rouages administratifs. C'est arrivé une fois
en 1986, il aurait dû apprendre un peu. Cela arrive une deuxième
fois en 1987 avec une autre loi pour aller chercher 100 000 000 $ additionnels
par année pendant deux ans. L'an dernier, 60 000 000 $ par année
sans limite. J'aurais dit: Ne fais pas cela, ne te laisse pas faire.
C'est le ministre des Finances qui l'a fait et je pense que la
responsabilité du ministre des Transports, c'était de dire non,
de résister avec toute sa capacité pour dire: Cela, c'est un
fonds qui appartient aux assurés, qui ne m'appartient pas. Moi, en vertu
de la loi, j'en suis le gardien, c'est moi qui ai la responsabilité de
le conserver pour les assurés, pas de le donner au ministre des Finances
qui va l'envoyer n'importe où. C'est le fonds des assurés. Il me
semble que c'est tellement évident. Quand le ministre de la Justice
parle de
devoirs fiduciaires, d'être le gardien de l'argent des autres...
Le ministre des Transports en qualité de ministre des Transports,
vis-à-vis des fonds de la Régie de l'assurance automobile est le
gardien des fonds des assurés de l'assurance automobile. Il n'a pas le
droit de laisser prendre la caisse. On parle du mauvais intendant, celui qui
laissait dilapider les biens. À ce moment-là, je dis que le
ministre des Transports est un mauvais intendant parce qu'il a laissé
dilapider les biens de la caisse des assurés, qui appartenaient aux
assurés. Il devait les défendre avec la plus grande vigueur, il
aurait dû dire: Jamais! Je ne serai pas le ministre des Transports qui
verra cette infamie. Cela ne se passera pas sous mon ministère. Il
aurait dû dire: Tant que le député de Charlesbourg sera
ministre des Transports, jamais le ministre des Finances ne sera capable de
prendre une "cenne" dans la caisse des assurés. Il me semble qu'il a
collaboré, il me semble même qu'il a été un peu
complice dans cette affaire parce que lui-même a dit qu'il en
était heureux. Je le vois approuver de la tête, je n'en reviens
pas.
Comment les assurés peuvent-ils être défendus si
celui qui garde la caisse ne veut même pas la garder? C'est sa
responsabilité de la défendre, de la même façon que
c'est ma responsabilité de dire que ce n'est pas correct. Comme disait
le grand Disraéli, qui est un des concepteurs du parlementarisme
britannique: "The duty of the Opposition is to oppose". Oui, parce que c'est
fondamental. Les gens demandent pourquoi? Parce que c'est notre
responsabilité de démontrer au gouvernement qu'il erre, qu'il a
tort. Churchill disait: Quand on mène de grands combats, il faut les
mener par tous les moyens, par mer, par terre et par air. Pourquoi? Parce que
c'est comme cela qu'il faut se comporter.
Je pense que, là-dedans, le ministre des Transports n'a pas
employé tous les moyens qu'il avait à sa disposition pour
protéger la caisse des assurés et qu'il n'avait pas le droit de
faire cela. Mme la Présidente, je ne vous prendrai pas à
témoin, vous m'avez dit, hier, que vous n'aimiez pas cela. Par contre,
je dis que les citoyens de nos comtés auront à payer pour cette
infamie du ministre des Finances qui est allé chercher l'argent qui ne
lui appartenait pas, qui appartenait aux assurés. Dans la loi concernant
les artistes, il y aura des fonds. Imaginez-vous si, demain matin, le ministre
des Finances voulait aller chercher les fonds dans la caisse des artistes, les
gens ne voudraient pas. Si, demain matin, il allait prélever des sommes
dans les fonds de la caisse des travailleurs, les gens ne voudraient pas. S'il
allait piger dans la caisse de n'importe quel assuré dans une
assurance-groupe comme c'est le cas pour le fonds de la Régie de
l'assurance automobile qui est une assurance-groupe où tous les
assurés du Québec peuvent avoir une assurance collective... C'est
leur caisse, leurs fonds, leurs primes, leurs prestations. Le ministre n'a pas
le droit de toucher à cela.
De la même façon, il n'aurait pas le droit d'aller chercher
quelque somme que ce soit dans la caisse des régimes de retraite, il
n'aurait pas le droit, demain matin, de dire: Dans les caisses des
régimes de retraite, il y a beaucoup d'argent, j'en prends un peu. Il
n'aurait pas le droit de piger dans la caisse des enseignants pour aller
chercher une partie de leur régime de retraite, dans un fonds collectif
d'assurance, il n'aurait pas le droit d'aller chercher l'argent. Pourquoi?
Parce que c'est administré par une société
d'État.
Imaginez-vous, demain matin, Mme la Présidente, que la
Régie de l'assurance automobile est une régie privée -
juste pour vous donner un exemple - où les propriétaires
mutualistes sont les assurés, comme on l'a étudié cet
après-midi pour Les Clairvoyants, compagnie d'assurance mutuelle. Si la
régie avait été une régie mutuelle d'assurance
privée, jamais le gouvernement n'aurait pu faire cela parce qu'il aurait
été condamné par les tribunaux. Les tribunaux l'auraient
condamné, ils auraient dit: Vous n'avez pas le droit d'aller chercher la
caisse des assurés, cet argent n'est pas à vous, il appartient
aux assurés, aux victimes d'accidents d'automobile ou à ceux qui
se sont assurés au cas où ils seraient victimes d'accident
d'automobile.
Parce qu'il s'agit d'une société d'État, on va
piger dans la caisse. Jamais, cela n'aurait été possible. Il y a
quelques courtiers d'assurances ici qui ont déjà parlé.
Imaginez-vous s'ils vendaient de l'assurance d'une Régie de l'assurance
automobile où ils diraient: En tout temps, le gouvernement viendra
siphonner des fonds s'il estime qu'il y en a trop. Pensez-vous qu'ils
vendraient beaucoup de cette assurance, librement, alors qu'actuellement, c'est
une assurance collective, exactement comme une mutuelle qui appartient à
tous les assurés du Québec? Le gouvernement n'a pas le droit de
piger dans la caisse ou de venir la chercher et de l'accaparer. C'est
fondamental. (21 heures)
Le député de Mille-Iles n'a pas dit un mot, pas un son. Il
s'inquiète. Il s'est inquiété l'autre jour en commission
parlementaire du cas d'un employé d'une caisse populaire qui serait
assuré avec une société d'assurance du Mouvement
Desjardins. En cas de faute, la société d'assurance du Mouvement
Desjardins ne pourrait pas être en conflit d'intérêts en
voulant payer moins l'assuré qui est son employé. Distinction
sibylline. Il s'inquétait au cas où. Je me serais attendu qu'il
fasse un discours. Il ne s'agit pas de cas de conflits
d'intérêts
possibles, il s'agit d'un fait. 450 000 000 $ auront été
siphonnés en quatre ans, en 1986, 1987, 1988, 1989, de la caisse de la
Régie de l'assurance automobile.
C'est malheureux qu'il n'y ait pas eu plus de commentaires
jusqu'à maintenant. Il est évident que, quand tout arrive en
même temps en fin de session, les journalistes sont quasiment
résignés à ne plus couvrir les débats, parce qu'ils
calculent qu'ils ne sont plus capables de choisir. Ils font penser à un
maringouin dans un camp de nudistes. Ils ne savent pas par où commencer.
Il y en a trop. Le comptoir est trop plein. Je vous dis ceci. Dans chacun de
nos comtés, on verra au cours des prochaines semaines, des prochains
mois, des députés qui iront dire: Le gouvernement a pris votre
caisse en tant qu'automobilistes. Ce gouvernement qui vous disait: Vous payez
peut-être un petit peu trop de taxes pour l'assurance automobile dans le
temps de notre gouvernement. Mais il ne leur a pas remis l'argent, au
contraire, qu'est-ce qu'il a fait? Il l'a pris pour lui.
Mme la Présidente, le ministre a encore une chance de se
racheter, il va prendre la parole, c'est la dernière fois qu'il va
prendre la parole sur ce projet de loi. Il a la chance de dire: Je ne le ferai
pas. Le ministre des Finances n'est pas là, je ne le passerai pas, je ne
continuerai pas avec ce projet de loi. Je vais retourner au Conseil des
ministres faire valoir les arguments que vous avez présentés ce
soir, parce que je pense qu'il y a quelque chose. Je pense que les
députés qui l'entourent devraient insister auprès du
ministre des Transports pour lui dire: On va t'appuyer au caucus. On va vous
appuyer, M. le ministre des Transports, parce que le ministre des Finances est
en train de commettre un acte qu'il ne devrait pas commettre.
Mme la Présidente, c'est pourquoi l'Opposition votera le plus
vigoureusement possible contre l'adoption de ce projet de loi qui est un projet
de loi infâme, qui va être dommageable et pour lequel,
éventuellement, les assurés devront payer en prime les 450 000
000 $ que le ministre des Finances aura été chercher. Quel que
soit le temps, les assurés devront repayer les 450 000 000 $ qui ne sont
plus dans la caisse. Pour payer les victimes d'accidents d'automobile, il
manquera 450 000 000 $ et un jour ou l'autre, plus tôt que tard, les
assurés devront payer des primes plus élevées pour
compenser les 450 000 000 $ que le ministre des Finances sera venu chercher
dans leur caisse. Je vous remercie, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente: Merci, M. le député de
Lévis.
M. le ministre des Transports, en réplique.
M. Marc-Yvan Côté
(réplique)
M. Côté (Charlesbourg): Merci, Mme la
Présidente. Nous sommes à la conclusion de l'adoption en
troisième lecture du projet de loi 62. À écouter le
député de Lévis, on serait en droit de se demander s'il a
été surpris par un tel projet de loi. Je pense qu'il a fait le
surpris, mais il ne l'a pas été, puisque ce n'est pas une
nouveauté. C'était à l'intérieur du discours sur le
budget du début du mois de mai. C'était clair: ZOO 000 000 $.
Mais au moment où l'on a déposé à
l'Assemblée le projet de loi qui allait concrétiser une mesure du
budget, il a fait le personnage le plus étonné de la terre, lui
qui a le sens du spectable, du dramatique, le verbe très haut et allant
chercher dans l'histoire ou dans les quelques cours qu'il a pu suivre à
l'université, quelques extraits de Churchill et de bien des personnes.
Je vous prouverai tantôt qu'il a été, à l'occasion,
très certainement un mauvais élève.
Le dépôt de ce projet de loi et son adoption vont
concrétiser un geste qui a été suscité par la
Régie de l'assurance automobile du Québec. Le but, le
député de Lévis en a parlé abondamment, prendre 200
000 000 $ à même la réserve de stabilisation de la
Régie de l'assurance automobile du Québec et faire un placement,
oui, puisqu'il s'agit bien d'un placement dans le réseau routier du
Québec, en particulier pour l'entretien du réseau routier qui a
subi une dégradation assez phénoménale au cours des neuf
années que le PQ a connues au pouvoir. Mais il nous dit, en citant
Churchill: II faut attaquer du haut des airs, par la mer et par terre. Qui paie
les primes d'assurance automobile? Ce n'est pas un pilote d'avion en sa
qualité de pilote d'avion. Ce n'est pas un pilote de bateau en sa
qualité de pilote de bateau. Qu'est-ce que nous allons faire avec ces
200 000 000 $? Est-ce qu'ils serviront dans les airs? Non. Est-ce qu'ils
serviront sur la mer? Non. Le principe est très simple. Ça va
prendre des roues, et des roues, règle générale, ça
sert pour des véhicules qui vont sur la terre, et, sur la terre,
ça veut dire sur les routes du Québec. Donc, si ça sert
pour les véhicules qui vont sur les routes du Québec, ce sont
forcément des véhicules qui sont immatriculés et pour
lesquels les gens du Québec qui les utilisent paient des primes
d'assurance automobile. Et pour un permis de conduire, on paie des primes
d'assurance automobile.
Les 200 000 000 $ seront donc retournés à ceux qui paient
des primes d'assurance automobile et non pas aux pilotes d'avion et non pas aux
pilotes de bateau, ça me paraît très clair. Donc, la
régie fait un placement dans la sécurité routière,
compte tenu de toute une série de phénomènes
déjà bien connus et, en particulier, qu'un blessé
grave sur les routes du Québec coûte à la
Régie de l'assurance automobile du Québec 500 000 $. C'est
important, il faut se le rappeler.
Est-ce une surprise pour le député de Lévis? Moi,
je dis non, ça ne peut pas, puisque, dans le rapport de la Régie
de l'assurance automobile du Québec qui a été
déposé devant cette Assemblée au mois de mai, il
était très clair dans le propos de M. Vézina, son
président, que la Régie de l'assurance automobile avait
elle-même proposé au ministre des Finances et au ministre des
Transports de prendre 200 000 000 $ de la réserve de stabilisation afin
de les utiliser sur les routes du Québec pour éliminer des points
noirs, pour faire toute une série de choses qui ont trait à la
sécurité routière. Ça, c'est clair. Et, en
deuxième lecture, je me suis même servi du procès-verbal
qui est public de la Régie de l'assurance automobile du Québec
témoignant de la véracité des propos que je tenais.
Le député de Lévis dit: Quand on l'a laissé,
c'était 525 000 000 $ le fonds de stabilisation. Il était de 654
000 000 $ et on a pigé dedans. On a pigé dedans pour le retourner
aux assurés, alors que, dans votre cas, vous n'avez jamais eu le courage
de retourner aux assurés quelque bénéfice. Et, avec toute
l'emphase qu'on peut y mettre, le député de Lévis dit:
C'est le ministre des Finances qui a siphonné, qui a vidé la
caisse, peut-être même, avait-il prétendu en deuxième
lecture, à l'insu du ministre des Transports. Ne vous inquiétez
pas, le ministre des Transports était dans le coup. J'étais
très heureux d'être dans le coup parce que ça retournait
aux assurés. J'étais dans le coup parce que c'était la
volonté de la Régie de l'assurance automobile du Québec,
parce que c'était le voeu exprimé par la Régie de
l'assurance automobile dès le 9 avril 1987 au moment où le
conseil d'administration a pris la décision et a suggéré
au ministre des Finances de prendre cette méthode. Ce n'est donc pas le
ministre des Finances qui est allé chercher l'argent à la
Régie de l'assurance automobile, mais c'est celle-ci qui a offert au
ministre des Finances de le faire parce qu'ils sont conscients de ce qu'on peut
faire avec 200 000 000 $ sur les routes du Québec et des effets
bénéfiques pour tous les usagers de la route. (21 h 10)
Mais on a fait autre chose. Le député de Lévis l'a
à peine effleuré tout à l'heure. Pour la première
fois de l'histoire de la Régie de l'assurance automobile, l'ascenseur a
commencé à redescendre. Il a commencé à redescendre
sous ce gouvernement libéral parce qu'on a pris des mesures
énergiques quant à la sécurité des gens et quant
à l'application du Code de la sécurité routière. Ce
qui fait qu'en 1986, le bilan de la sécurité routière au
Québec a été le meilleur des 25 dernières
années dans tout le Canada. Il y a eu 24 % de diminution des accidents
de la route, créant ainsi un excédent des revenus sur les
dépenses de 50 000 000 $ que le ministre des Finances a
décidé de retourner aux assurés de tout le Québec,
soit à ceux qui ont un permis, soit à ceux qui ont une
immatriculation. Cela, le député de Lévis n'en a pas
parlé. Et c'était une première dans le Québec. Dans
ce sens, nous disons à ceux qui ont eu un comportement raisonnable sur
les routes du Québec: Continuez dans ce sens et nous allons continuer de
vous aider.
Le député de Lévis a dit: Un amendement qui fait en
sorte qu'on verse, en 1988-1989, 1989-1990, au lieu des trois années
1987-1988, 1988-1989 et 1989-1990, cela n'a pas de bon sens; 100 000 000 $
l'année prochaine. Cela signifie qu'en 1987-1988, le ministre de
Finances et le responsable du Conseil du trésor ont bien
géré les finances du Québec et que nous n'en avons pas
besoin en l'année 1987-1988. C'est assez extraordinaire et c'est signe
d'une maturité de bons gestionnaires le fait que nous n'en ayons pas
besoin cette année, mais que les travaux de 60 000 000 $ ont quand
même été effectués partout dans le
Québec.
Mme la Présidente, le député de Lévis s'est
porté en procureur de la défense. Examinons sa preuve. Il a fait
un long plaidoyer comme un avocat payé à l'heure. Donc, il
s'agissait davantage de remplir le temps que d'amener des arguments de fond.
À preuve, qu'a-t-on entendu dire pendant cette heure dramatique
où le brillant procureur des assurés, le député de
Lévis s'est pourfendu en haut de gamme, en bas de gamme, à la
fois sur les idées et sur les tons, à tenter de défendre
ses pauvres assurés? On a entendu parler des lumières du
boulevard Laurier. On a entendu parler de la prison de Saint-Joseph et des
prisonniers qui sont rendus à New Carlisle. On a entendu parler de
Churchill. On a entendu parler de siphonner, de vider la caisse. On l'a
même entendu dire: "Pour le bénéfice des auditeurs qui
n'étaient pas là hier, je vais répéter ce que j'ai
dit hier", pour bien s'assurer qu'il s'adresse davantage aux auditeurs et que,
s'il n'y en avait pas, peut-être serait-ce bien différent. Donc,
l'objectif est bien plus de meubler un discours pour les auditeurs - vous avez
bien compris - que, bien sûr, de défendre la cause en tant que
procureur. On a même entendu parler de la tournée de deux
poètes, le député de Mercier et Gaston Miron; on a entendu
parler de cela hier sur le même débat. On a entendu parler... Cela
a été la crème et c'est là que je me rends compte
que le député de Lévis a probablement fait comme moi
à l'occasion, griller quelques cours, et que c'est en voulant recopier
les notes des autres qu'il a fait une
erreur. Il a dit: Le Parlement, s'il le veut, peut même changer un
homme en femme, citant Jean-Charles Bonenfant et sa maxime. Je vais vous faire
une petite leçon, si vous me le permettez, moi, qui n'ai pas suivi de
cours de droit. Vous citiez Jean-Charles Bonenfant qui, lui-même, citait
R.D. Lumb, un constitutionnaliste britannique qui disait: La seule chose qu'un
Parlement ne peut pas faire, c'est de changer un homme en femme.
Des voix: Ah! Ah! Ah!
M. Côté (Charlesbourg): Vous êtes tout
à l'envers! Ce n'est pas surprenant. Allez revoir vos notes et
vérifier. Faites la correction immédiatement parce que vous
pourriez passer pour un mauvais élève. Il est clair que cette
maxime a été virée à l'envers comme une bonne
partie de l'intervention du député de Lévis concernant le
fond et l'essence même de ce projet de loi. Il est clair que, dans le cas
du projet de loi 62, viré à l'envers une fois, viré
à l'envers deux fois, il semble bien que le député de
Lévis l'a fait suffisamment longtemps.
Laissons le procureur pour voir ce que son parti a fait durant ce
débat sur la loi 62. Deuxième lecture: C'est une catastrophe! Le
gouvernement du Québec et, en particulier le ministre des Finances,
s'apprête à siphonner, vider la caisse, voler
littéralement, disait-il, les assurés du Québec.
C'était grave. Ils étaient 17 ou 18 à intervenir.
C'était toute l'armada péquiste qui se levait et tirait en l'air
pour dire aux citoyens du Québec: Soulevez-vous, vous êtes
victimes d'un vol! C'était devant les caméras, bien sûr.
C'est pour cela qu'on était nombreux pour pouvoir dire bonjour à
mon oncle, à ma tante et pouvoir dire: Regardez, j'étais
là.
Lorsqu'on s'est retrouvé en commission parlementaire, cela a pris
une heure et quart. Quand on se retrouve en troisième lecture, on se
retrouve avec une intervention, celle du député de Lévis.
Mais dans le temps, la télévision. Bien sûr, que
c'était tentant la télévision. Cela lui permettait de le
faire. Je ne blâme pas le député de Lévis. Surtout
quand on est dans sa situation, on veut se faire voir par le plus grand nombre
de personnes possible. Cela fait du bien à l'image. Cela peut faire en
sorte que beaucoup de gens pensent qu'on peut avoir des talents pour faire
autre chose, offrir nos services avec beaucoup plus d'assurance à
l'ensemble de la collectivité, aux 5500 nouveaux membres du PQ, cet
engouement phénoménal des derniers mois.
Mais, regardons de façon définitive ce que ces gens, qui
ont administré le pouvoir pendant neuf ans, ont pu faire. Je prendrai un
premier point. À plusieurs reprises le député de
Lévis est intervenu en disant: 60 000 000 $, c'était un projet de
fonctionnaires, hein! reniant du revers de la main ce que les fonctionnaires
peuvent faire. Ha! dit-il, j'aurais pu remplir un camion de projets de
fonctionnaires. Celui-là, je peux vous dire qu'il était
allé pas mal loin. Là où je l'ai pris, il restait juste
à le transmettre au Conseil des ministres.
Je l'ai modifié un peu parce qu'on a fait quelques petits travaux
d'ajustement. Dans votre cas, vous vouliez 80 000 000 $ par année.
C'était suffisamment loin pour être rendu à 80 000 000 $.
Alors que nous avons dit: C'est 60 000 000 $, mais après une entente
avec le ministère des Affaires sociales. Qu'est-ce que cela vise? Pas
à ce que les citoyens du Québec paient deux fois des primes. Au
contraire, c'est pour réparer une erreur qui a été faite
par Mme Payette, en 1978, pour la simple et bonne raison qu'on avait, à
l'époque, un régime à vendre. Il ne fallait pas qu'il
coûte trop cher et on n'avait pas inclus, à l'intérieur des
coûts de la Régie de l'assurance automobile, les frais
d'hospitalisation reliés aux accidents de la route alors que, dans le
régime privé qu'on remplaçait, les accidents de la route
et les frais hospitaliers étaient payés par les compagnies
privées. Il était juste et normal de rétablir un certain
nombre de choses et c'était là le but qui nous a poussés
à rétablir les choses.
Ce n'est donc pas payer deux fois les mêmes taxes. C'est faux. De
la même manière, le député de Lévis a
flirté, un peu, à un certain moment donné, avec les taxes
payées ou les primes d'assurance payées par les taxis. Il sait
fort bien que les primes d'assurance payées par les taxis, si elles sont
élevées, c'est dans le privé, ce n'est pas à la
Régie de l'assurance automobile. La preuve en est qu'il y a deux groupes
qui, aujourd'hui, ne paient pas les primes qu'ils devraient payer à la
Régie de l'assurance automobile: Ce sont les motards et les taxis. Ils
paient en deçà de ce qu'ils devraient payer. C'est clair. Alors,
quant à l'utilisation de cet exemple, c'est démagogique de la
part du député de Lévis.
Mais eux? Quand j'entends le député de Lévis nous
dire "siphonner", "vider la caisse", "voler". Où étiez-vous
pendant ces neuf années où vous avez siégé
côte à côte avec M. Parizeau au Conseil des ministres, lors
de cette décision sur un projet de loi qui est passé par le
Conseil des ministres, qui a été débattu à
l'Assemblée nationale pour lequel vous avez voté? Lorsque vous
avez décidé d'aller chercher à Hydro-Québec des
profits d'Hydro-Québec, où étiez-vous? Est-ce qu'à
ce moment-là vous avez défendu l'intérêt des payeurs
de comptes d'électricité qui, en plus, avaient à subir des
augmentations de 13 %, de 17 %, de 7 % et de 9 %? Où étiez-vous
à ce moment? Où étiez-vous en cette année 1982?
(21 h 20)
Le député de Taillon quant à lui était dans
les officines, il préparait les mauvais coups avec celui qui nous a
quittés maintenant, son ex-chef. Où étiez-vous, lorsque M.
Parizeau est allé siphonner, comme vous dites, à la Régie
de l'assurance automobile du Québec, en 1982, 238 000 000 $ contre la
volonté même du conseil d'administration de la Régie de
l'assurance automobile? Où étiez-vous, brillant procureur,
brillant défenseur des assurés? Où étiez-vous? Les
gens du comté de Lévis étaient-ils très heureux de
vous?
Les assurés du Québec qui supposément aujourd'hui
se font siphonner, se font voler, ne se sont-ils pas fait siphonner et voler?
Il me semble que vous devriez avoir au moins un minimum
d'honnêteté intellectuelle pour reconnaître que vous avez
littéralement siphonné contre leur gré les gens de la
Régie de l'assurance automobile, alors que Mme Sotiau qui n'a pas
été nommée par le Parti libéral à la
tête de la Régie de l'assurance automobile s'est opposée
avec véhémence à ce que vous avez fait à
l'époque. Alors que, dans ce cas-ci, c'est la Régie de
l'assurance automobile par son conseil d'administration qui a
suggéré au gouvernement du Québec de le faire. N'est-ce
pas une situation contraire? Où étiez-vous à ce
moment-là?
Le député de Lévis interpellait tous les
députés comme pour meubler le temps. On aurait pu passer les 100
à l'Assemblée nationale. Même à un certain moment,
il a dit: La députée de Johnson est estomaquée. Je
comprends, de vous entendre surtout, et pas nécessairement de vos
propos, mais de tout ce que vous avez véhiculé au cours de cette
heure.
Mme la Présidente, c'est un choix fort logique qu'a fait la
Régie de l'assurance automobile. C'est un choix fort logique que le
gouvernement du Québec a fait, puisque les 200 000 000 $
bénéficieront directement aux usagers de la route au
Québec: pour être capable de corriger des points noirs, une
meilleure signalisation et faire en sorte que partout au Québec...
Circulez. Vous allez encore partir en tournée avec le
député de Mercier et le poète Gaston Miron. Circulez.
Allez dans le petit rang 2 de l'Épiphanie. Vous allez voir. Allez faire
un tour dans différents comtés du Québec où
l'argent a été utilisé et vous allez vous apercevoir que
les gens l'apprécient. Des gens qui attendaient depuis 20 ans. Des gens
qui attendaient des corrections de courbes. Des gens qui attendaient
l'élimination de points noirs. Cela a commencé à
être fait dès cette année en 1987. Non, le ministre des
Transports n'a pas eu le bras tordu par le ministre des Finances. Le ministre
des Transports a accepté la proposition de la Régie de
l'assurance automobile contrairement à ce que vous aviez fait à
l'époque. Il en est très heureux, puisque ça retournera
aux usagers.
La réserve actuarielle étant déjà suffisante
à la régie et le fonds de stabilisation étant encore bien
garni, cela n'affectera en rien les finances de la Régie de l'assurance
automobile. Notre prudence, le fait que nous ayons appliqué le Code de
la sécurité routière a fait diminuer les accidents de la
route et nous avons retourné aux citoyens du Québec 50 000 000 $,
qui l'ont été au niveau des permis et de l'immatriculation. C'est
davantage cela que retiendront les gens, les assurés, puisque leur fonds
est maintenant bien assuré, bien protégé et que cela leur
revient à eux, soit sous forme de remise d'assurance, de primes
d'assurance, soit par l'utilisation de ces fonds sur les routes du
Québec, et je vous propose, Mme la Présidente, l'adoption de ce
projet de loi. Merci.
La Vice-Présidente: Merci, M. le ministre des Transports.
Le débat étant clos, le projet de loi 62, Loi modifiant la Loi
sur l'assurance automobile, est-il adopté?
Une voix: Sur division.
La Vice-Présidente: Adopté sur division. M. le
leader adjoint du gouvernement.
M. Johnson: Oui, Mme la Présidente. Je vous demanderais
d'appeler l'article 33 du feuilleton.
Projet de loi 15 Adoption
La Vice-Présidente: À l'article 33 de notre
feuilleton, le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de
l'Alimentation propose l'adoption du projet de loi 15, Loi modifiant la Loi sur
les terres publiques agricoles et d'autres dispositions législatives. M.
le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.
M. Michel Pagé
M. Pagé: Merci beaucoup, Mme la Présidente. Je ne
sais pas si c'est la raclée que le député de Charlesbourg
et ministre des Transports vient de donner au député de
Lévis ou si c'est le simple fait d'aborder un projet de loi à
caractère agricole, mais le député de Lévis s'est
senti obligé de remplir ses obligations ailleurs que dans cette
Chambre.
Le projet de loi 15, la Loi modifiant la Loi sur les terres publiques
agricoles et d'autres dispositions législatives, déposé le
12 mai dernier, dont le principe a été adopté le 29
octobre et le 11 novembre en deuxième lecture, a impliqué
l'intervention de certains
de mes collègues, que je remercie principalement pour leur
contribution à nos travaux, a fait l'objet d'une commission
parlementaire les 26 novembre et 7 décembre où on a eu l'occasion
de l'étudier article par article, d'en signifier, d'en informer mes
collègues, les membres de cette Assemblée nationale, pour la
portée de chacun des articles et de l'ensemble du projet de loi.
Mme la Présidente, je vais tenter d'être bref parce qu'il
est déjà 21 h 30 ou presque, on doit se rappeler des motifs qui
sont invoqués au soutien de la présentation de ce projet de loi.
On se rappellera que la loi actuelle est entrée en vigueur le 1er
juillet 1984, cette loi qui posait quand même des problèmes
majeurs en regard de son application. Pour l'administration, j'ai fait valoir
autant en deuxième lecture qu'en commission parlementaire qu'elle avait
comme résultat des difficultés administratives et des
difficultés de planification très appréciables au regard
de la façon de la gérer sur le territoire.
On se rappellera de plus que cette loi qui porte directement sur
près de 10 000 lots qui sont occupés par des citoyennes et des
citoyens du Québec, qui pour la très grande majorité
d'entre elles et d'entre eux ont la conviction d'être
propriétaires du lopin de terre qu'ils occupent, qu'ils habitent, qu'ils
ont aménagé, qu'ils ont amélioré, alors qu'en
droit, ces gens-là doivent reconnaître, et la situation de droit
nous oblige à indiquer à ces gens-là, qu'ils ne sont pas
propriétaires, mais qu'ils sont plutôt concessionnaires d'un tel
terrain, malgré que, dans plusieurs de ces cas, ces terrains sont
occupés par les familles depuis quelques générations sinon
plusieurs. On* se rappellera qu'en 1984, on a prévu une modification
à la loi qui avait comme effet d'obliger chacun des concessionnaires
à entreprendre la démarche visant à la
régularisation de leurs titres de propriété.
C'était une référence, une étude individuelle sans
nécessairement de coordination de l'ensemble des dossiers, mais
plutôt une étude ou une référence de la part de
l'administration publique parce qu'elle a comme premier devoir et comme
première obligation de faciliter les procédures, de les
simplifier, de les rendre accessibles aux contribuables du Québec.
Or, la procédure prévue dans la loi de 1984 obligeait
évidemment une initiative prise par chacun de nos concitoyennes et
concitoyens, en plus d'entraîner évidemment, comme on le sait, des
coûts d'application très élevés pour
l'administration publique. Il en coûtait près de 500 $ pour
administrer l'ensemble du transfert de propriété du secteur
public au secteur privé, c'est-à-dire que ces gens qui habitent
la région de Grand-Mère, l'Abitibi, Cap-Chat, Mont-Louis,
Sainte-Anne-des-Monts en Gaspésie, et qui, pour plusieurs, ont la
conviction, même au moment où l'on se parle, qu'ils sont bel et
bien propriétaires de leur terrain, devaient en être
premièrement informés et devaient entreprendre eux-mêmes ou
elles-mêmes les procédures. Cela a donné quoi comme
résultat, comme bilan, comme analyse? Une expectative de huit à
dix ans avant d'être capable de régulariser l'ensemble de ces
titres. Pour la clientèle, cela engendrait évidemment une
insatisfaction élevée, de nombreuses demandes de documents parce
que chacune de ces personnes devait démontrer soit des titres, soit des
plans, devait s'initier évidemment à une procédure de
dépôt de documents, de sensibilisation et de démonstration
à faire au ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de
l'Alimentation du Québec. Cela impliquait évidemment des
coûts considérables, des tracasseries et aussi des délais
qui, dans certains cas, étaient très longs. (21 h 30)
Ce qui est important, c'est que pendant ce temps, de nombreux actes
juridiques, que ce soit une hypothèque ou une servitude, consentis par
ces concessionnaires légitimement étaient de plein droit
complètement nuls. C'est ainsi qu'on a analysé le dossier et que
nous présentions au mois de mai 1987 le projet de loi 15, un projet de
loi qui a comme objectif de réduire les délais en ce qui concerne
la démarche de l'administration publique. Ce délai de huit
à dix ans est ramené à environ trois ans, au maximum
quatre ans pour la très grande majorité des dossiers, avec une
réduction des coûts pour l'administration publique. Là
aussi, c'est important, parce que ce sont les taxes, les impôts des
concitoyens et des concitoyennes qu'on a à administrer.
Cela a été un engagement très clair, très
ferme, très éloquemment évoqué de la part de notre
gouvernement que l'une des premières obligations auxquelles on se
conviait était de s'assurer qu'on puisse diminuer la taille de
l'État, simplifier les procédures et finalement mieux administrer
les taxes et les impôts qu'il nous envoie. Nous prévoyons donc en
arriver par le projet de loi 15 non seulement à une simplification des
procédures, mais à une réduction substantielle des
coûts à assumer comme gouvernement et ainsi
récupérer, sauver comme on dit, des taxes, des impôts, de
l'argent des contribuables qu'on a le mandat d'administrer.
Pour la clientèle, le projet de loi prévoit des
éléments très intéressants. Qu'il me suffise de
faire référence à l'élimination complète des
contraintes administratives dans ce qu'on peut évaluer à environ
80 % des dossiers, c'est-à-dire, pour celles et ceux qui nous
écoutent ce soir, qu'au lieu de devoir entreprendre eux-mêmes ces
procédures, le ministère que je dirige, par la voie de son
équipe de femmes et d'hommes qui
travaillent au ministère, aura l'occasion de visiter chacun des
bureaux d'enregistrement du Québec où on a de tels lots en
concession et ces gens émettront purement et simplement des lettres
patentes à partir des données contenues aux différents
registres dans ces bureaux d'enregistrement. Donc, élimination presque
totale du coût de délivrance des lettres patentes,
régularisation des titres sans aucune autre formalité, sans autre
démarche dans la très grande majorité des cas et aussi ce
qui est important, validation des actes juridiques qui ont été
posés par ces gens de bonne foi.
Le processus de délivrance des lettres patentes est donc
complètement modifié. On procédera à une
étude systématique canton par canton de tous les dossiers au
Québec et j'ai donné la garantie, autant en deuxième
lecture qu'en commission parlementaire, que le tout serait fait de la
façon la plus objective, la plus honnête, la plus crédible
et la plus garante possible pour les administrés du Québec.
Les députés de l'Opposition ont soulevé certaines
critiques, certaines interrogations. Est-ce que le fait d'entreprendre les
procédures nous-mêmes sans se référer à cette
obligation des concitoyennes et des concitoyens peut être associé
à des mesures coercitives? J'ai déjà répondu en
commission parlementaire que la clientèle n'est plus contrainte de
produire à ses frais une demande et tous les documents
nécessaires. Aucune formalité ni coût ne sont exigés
du citoyen. Régularisation automatique de leur situation de droit comme
suite de l'action du ministère. Exceptionnellement, si des preuves sont
insuffisantes en regard de la propriété de ces gens-là, il
y a possibilité pour le ministre de demander la production de certains
documents supplémentaires et toutes les mesures nécessaires
seront appliquées pour sauvegarder les droits des concitoyennes et des
concitoyens.
J'ai entendu certains des collègues de l'Opposition qui se sont
gargarisés, qui, comme d'habitude, ont tenté d'ameuter la
population en disant que cette notion de preuve de véritable
propriété, de véritable usage pouvait amener des
décisions arbitraires. Je rappellerai à mes collègues que
cette notion existait dans les lois antérieures, celle de 1921
adoptée il y a déjà 66 ans et aussi celle de 1982. Alors,
toutes les dénonciations que mes collègues ont faites en regard
de ce pouvoir arbitraire, je me limiterai à leur dire qu'à
l'article 32 de la loi actuelle adoptée par l'Assemblée nationale
mais présentée par mon prédécesseur, le
député de Lévis, on disait qu'en l'absence d'un acte
mentionné, le ministre peut, sur production d'une preuve qu'il juge
suffisante, reconnaître la personne, etc. qui a droit au titre de
propriété. Cela veut donc dire concrètement qu'il n'y a
rien de plus contraignant, de plus arbitraire dans cette loi qu'il n'y en avait
au moment où l'Assemblée nationale décidait de l'adopter,
en 1982, par le biais du député de Lévis et la
majorité péquiste.
Les députés ont donc formulé certaines
représentations en commission parlementaire. Je pense que le projet de
loi a été mieux compris. J'ai eu l'occasion de répondre
à plusieurs questions de la part des députés, notamment de
la part du député de Laviolette, à qui je dois
reconnaître, ce soir, une contribution intéressante, utile. Je
peux vous dire, en confidence, en cette fin d'année 1987, alors que j'ai
depuis deux ans le privilège d'agir comme ministre de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation, que c'est rafraîchissant d'avoir
à discuter avec le député de Laviolette, porte-parole de
l'Opposition. C'est rafraîchissant parce qu'il est honnête, il est
très sincère, il est contributif. Peut-être que les
auditeurs diront: Comment un ministre libéral peut-il adresser de telles
appréciations au député de Laviolette? Je vous dirai que
c'est non seulement un bon voisin pour moi, parce qu'il représente la
région qui cotoie le côté nord-ouest de mon comté,
mais je pense que le parlementarisme nous commande de reconnaître le
travail fait par l'Opposition. À cet égard, je dois dire que le
député de Laviolette a joué un rôle
intéressant et important dans nos travaux, et je voudrais l'en
remercier.
Avant de terminer, je voudrais remercier très sincèrement
celles et ceux qui, à mon ministère, ont travaillé sur ce
projet de loi, qui m'ont conseillé, avec qui j'ai eu l'occasion
d'apporter certaines modifications, de tracer des orientations. Je voudrais
remercier les gens du Service de la gestion des terres du ministère, Me
Jean Proteau qui travaille chez nous. Vous savez, souventefois, les
fonctionnaires travaillent dans l'ombre, préparent des projets,
préparent des programmes et on ne reconnaît pas toujours
publiquement leur contribution. À Me Jean Proteau, à Me Pierre
Labrecque et à Me Myriam Bourget, je voudrais adresser mes remerciements
très sincères pour leur contribution dans ce projet de loi.
En terminant, je voudrais vous indiquer la conviction que j'ai que ce
projet de loi contribuera à simplifier les procédures pour celles
et ceux qui sont administrés en vertu de nos lois. Merci, Mme la
Présidente.
La Vice-Présidente: Merci, M. le ministre de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation. M. le
député de Laviolette.
M. Jean-Pierre Jolivet
M. Jolivet: Merci, Mme la Présidente. Je serai bref,
étant donné que c'est la
dernière occasion que j'ai de parler sur le projet de loi 15. Je
reçois avec beaucoup de plaisir, à titre personnel, mais aussi en
tant que membre de ma formation politique, les remarques du ministre à
mon égard. Je dirai que j'essaie, comme membre du Parlement, d'agir le
mieux possible pour le bien-être de l'ensemble de nos concitoyens et si
j'ai des critiques sévères à faire, je ne me gêne
pas pour les faire, mais si nous pouvons amener des modifications aux projets
de loi... Certains députés libéraux m'ont dit, lors de
l'étude de ce projet de loi, qu'ils étaient vraiment
intéressés par mes propos parce que j'amenais des cas bien
précis sur des questions bien importantes pour clarifier l'ensemble du
dossier. Après onze ans comme député, j'ai l'occasion de
parler presque quotidiennement, quand je suis à mon bureau de
comté, ou par téléphone quand je suis à
Québec, des gens qui ont des problèmes et qui m'indiquent comment
il faut agir pour essayer de les régler dans les meilleures
conditions.
Nous avons dit au ministre que nous étions d'accord avec le
principe du projet de loi tel que présenté parce que,
effectivement, c'était un principe que nous avions énoncé
au moment où mon collègue, le député de
Lévis, était ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de
l'Alimentation. Le ministre a inversé les choses. Ce n'est pas la
personne qui demande au ministère de devenir propriétaire de ses
lots, mais le ministère qui détermine lui-même qui est
propriétaire en lui envoyant directement des lettres patentes. Il y a un
danger à ce renversement des rôles et nous l'avons dit au
ministre. Le ministre a décidé de continuer dans ce sens et nous
ne pouvons pas l'en empêcher. D'ailleurs, le nombre de
députés libéraux fait en sorte que nous perdons chaque
fois, mais nous avons cependant averti le ministre des dangers qu'il y avait.
(21 h 40)
Notre rôle comme membres de l'Opposition est de dire au ministre
les dangers qu'il y a, de le lui dire correctement, et ne pas l'empêcher,
cependant, de mettre en place le projet de loi qu'il veut bien mettre en place,
tout en disant: Soyez très vigilants, de la part de tout le monde qui
auront à vivre ces transformations. S'il y a des accrochages en cours de
route, comme membres de l'Opposition, nous serons là pour le faire
valoir auprès du ministre, et, d'un autre côté, nous
espérons que cela n'ouvre pas la porte à des injustices comme
celles que mon collègue de Dubuc a mentionnées hier, dans
certains dossiers qu'il a très bien expliqués. Dans ce contexte,
Mme la Présidente, pour tenir la parole que j'ai donnée, je vais
donc vous dire que nous adoptons le projet de loi 15 et que nous allons
cependant surveiller de très près la mise en application de ce
projet. Je vous remercie, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente: Merci, M. le député de
Laviolette. Je constate qu'il n'y a pas d'autre intervention. Je vais
déclarer le débat clos.
Est-ce que le projet de loi 15, Loi modifiant la Loi sur les terres
publiques agricoles et d'autres dispositions législatives, est
adopté?
Une voix: Adopté.
La Vice-Présidente: Adopté. M. le leader adjoint du
gouvernement.
M. Johnson: Oui, Mme la Présidente, je vous demanderai
d'appeler l'article 34 du feuilleton.
Projet de loi 46 Adoption
La Vice-Présidente: À l'article 34 de notre
feuilleton, le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de
l'Alimentation propose l'adoption du projet de loi 46, Loi sur le financement
agricole. M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de
l'Alimentation.
M. Michel Pagé
M. Pagé: Merci, Mme la Présidente. Le projet de loi
46, Loi sur le financement agricole, est un projet de loi qui, par son
libellé renvoie peut-être pour certains à une certaine
refonte, mais projet de loi, cependant, si on ajoute toute la
réglementation... Comme on le sait, une loi est en quelque sorte une
ossature, mais la chair généralement est prévue par
règlement. Les règlements préliminaires qui ont
été déposés en commission parlementaire, et qui
seront déposés après l'adoption du projet de loi au
Conseil des ministres pour fins d'adoption, témoignent très
clairement de cette importante réforme qui sera mise en place à
la lumière de l'adoption de ce projet de loi et surtout de son
application. Le projet de loi 46 est attendu depuis plusieurs années. Il
a fait l'objet, Mme la Présidente - vous en conviendrez très
certainement avec moi, parce que vous êtes attentive comme
députée de Bellechasse, à toute la problématique du
financement agricole au Québec - de plusieurs déclarations du
ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation du
Québec, mais pas de celui qui vous parle, mais de celui qui l'a
précédé. Au congrès de l'Union des producteurs
agricoles en 1981, la réforme sur le financement agricole allait venir
en 1982. En 1982, au congrès de l'Union des producteurs agricoles, la
réforme du financement agricole
allait venir en 1983. En 1983, elle allait venir en 1984. En 1984, il
n'y avait plus personne qui le croyait.
Mme la Présidente, le gouvernement de M. Bourassa s'était
engagé en campagne électorale, en 1985, à procéder
à des modifications majeures du financement agricole au Québec.
Qu'a-t-on fait? On a recueilli tout ce qui avait été
écrit. On a recueilli tout ce qui avait été dit. Le
ministre et l'équipe ministérielle se sont associés
à l'Office du crédit agricole du Québec, qui a
célébré son cinquantième anniversaire en 1987, un
organisme qui a joué un rôle de premier plan, de premier niveau
dans le financement agricole au Québec et qui a contribué de
façon éminemment importante au développement de
l'agriculture du Québec. On s'est associé à ces gens et on
s'est donné un cadre de consultation, de fonctionnement qui nous a
permis de rencontrer plusieurs organismes, plusieurs groupes directement
concernés par le financement agricole, avec la participation de
collègues de l'Assemblée nationale, dont Mme la
députée de Kamouraska-Témiscouata. Ce soir, je voudrais
profiter de cette occasion que j'ai en troisième lecture pour lui
témoigner mon appréciation comme ministre au regard de sa
contribution à ce processus d'analyse, de réflexion, de
consultation et de recommandations au gouvernement, tout comme je voudrais
remercier M. le député de Berthier pour sa contribution
importante. On sait que le député de Berthier représente
un comté agricole, un comté dont un pourcentage important de
l'économie s'appuie sur l'activité agricole, et qui a su
véhiculer lui aussi les représentations de ces gens, et
s'associer à une démarche d'analyse et de recommandations au
gouvernement.
Nos objectifs dans ce projet de loi: adapter notre système en
fonction de la réalité d'aujourd'hui, des besoins financiers de
nos entreprises, de leur capacité de payer et - pour nous,
c'était bien important -améliorer le fonctionnement et le contenu
des programmes de financement pour les rendre plus adéquats,
correspondant davantage aux besoins combien évolutifs de nos fermes
québécoises.
On se rappellera qu'avant l'adoption de ce projet de loi,
c'étaient huit lois différentes avec chacune ses
règlements, avec chacune sa définition et ses dispositions qui
administraient le régime de financement agricole du Québec. Une
fois l'adoption faite, ces huit lois seront simplifiées en une seule
loi. Meilleur suivi auprès de nos clientèles, et ça, qu'il
me suffise de me référer à l'approche globale qui est
introduite comme principe de fond dans ce projet de loi et qui ne
prévoit rien de compliqué, en fait, mais qui aurait dû
être fait bien avant. C'est donc dire que chacun des dossiers des
agricultrices, des agriculteurs qui ont des besoins en financement, qui
prennent la relève en agriculture, qui s'installent, chacun de leur
dossier sera étudié globalement, non seulement en fonction de
leurs besoins immédiats, mais où on tentera le plus
objectivement, le plus honnêtement possible, d'établir leurs
besoins financiers à moyen et à long terme, de prévoir
aussi le développement sur leur ferme et, par conséquent,
prévoir les besoins financiers qui seront inhérents à tel
développement dans l'avenir.
Par ce projet de loi, et je suis persuadé que, sur cet
élément-là, Mme la députée de Johnson qui
écoute mon intervention avec beaucoup d'intérêt, sera en
mesure de s'associer à moi, d'adhérer pleinement à ce que
je dis, un de nos objectifs, sinon le premier objectif, c'est de s'assurer,
à partir de mutations importantes de la taille des entreprises agricoles
du Québec, ces entreprises qui produisaient, sous une inspiration qu'on
pourrait qualifier d'artisanale, il y a peut-être 30 ans au
Québec, ces entreprises qui ont vécu des mutations, qui ont
été conviées à des structures nouvelles de
production, de mise en marché, qu'il me suffise de me
référer à la politique des quotas dans le lait, dans le
poulet, dans le didon, dans les oeufs, etc., qui ont vécu des
transformations, qui ont atteint une taille tout à fait
différente...
Vous savez, exemple concret, que, pour les fermes laitières du
Québec, c'est une valeur moyenne de 550 000 $, des fermes qui ont
près de 72 % d'équité comparativement à 61 % pour
les fermes laitières américaines, mais quand on se
réfère à des fermes dont la valeur moyenne est de 500 000
$ avec 72 % d'équité, ça commande des besoins financiers
très appréciables, lorsque ces entreprises sont
transférées en termes de propriété. Donc, on se
devait de favoriser l'accès à la propriété chez nos
jeunes qui ont une formation en agriculture, qui ont une expérience en
agriculture et qui sont motivés à l'égard de cette
profession combien noble et combien importante dans notre société
parce qu'elle contribue, évidemment, à nourrir et à
alimenter le Québec. (21 h 50)
En 1985, quand la campagne électorale est arrivée,
certains ont peut-être eu des doutes à l'égard du
caractère sérieux de nos engagements. Et là, je me
réfère évidemment à nos opposants. Mais,
aujourd'hui, force leur est de constater que nous sommes véritablement
passés de la parole aux actes dans ce dossier et que c'est ainsi que des
mesures très concrètes, très spécifiques,
très encourageantes, susceptibles de favoriser l'accès à
la propriété pour les jeunes au Québec, la
relève... Dans un premier temps, on doit convenir
qu'antérieurement, les subventions... Un prêt
octroyé par une institution financière et garanti par
l'Office du crédit agricole du Québec fait l'objet d'une
réduction du taux d'intérêt, ce qui veut dire une
subvention par le gouvernement. Au ministère que je dirige, ce sont 150
000 000 $ de crédits qui sont votés, qui sont mis à la
disposition de l'Office du crédit agricole du Québec.
Antérieurement, avant ce projet de loi, la partie
subventionnée d'un emprunt se limitait à 150 000 $. Avec le
projet de loi, ce montant est augmenté à 200 000 $, ce qui donne
davantage de leviers, notamment pour nos jeunes. On a deux niveaux de
subvention, évidemment. On a introduit - et ce sera
concrétisé dans la réglementation qui sera adoptée
- dans le projet de loi une notion de formation en agriculture pour
s'assurer... Comme on le sait, la jeune fille ou le jeune homme qui a une
formation en agriculture a de meilleures garanties de succès, de
réussite, une fois qu'il sera à la tête de son entreprise.
Il est certain que cette conjugaison de la formation et de l'expérience
constituera très certainement un atout important pour le succès
de nos jeunes dans ces entreprises.
Qu'il me suffise de vous donner des exemples de subventions. Le jeune
homme ou la jeune fille qui détiendra un DEC aura un écart de 4 %
de subvention. C'est 4 % en plus pour le jeune, si on fait la comparaison avec
une personne qui a un prêt qui est en vitesse de croisière
à l'office. Sans diplôme d'études collégiales, si on
compare les avantages qui seront concédés à ces jeunes aux
avantages d'un autre emprunteur - le même que tout à l'heure -
qui, lui, est en rythme de croisière, ce sera 2 %. Et, 2 %, pour des
prêts pouvant aller jusqu'à plusieurs centaines de milliers de
dollars et, pour le premier, 200 000 $, c'est important.
Je vais donner l'exemple d'un jeune producteur laitier qui
procéderait à l'achat d'une ferme de 400 000 $ dans nos
comtés. L'aide totale sur cinq ans, avant l'élection du Parti
libéral du Québec, était d'environ 31 000 $. Or, le jeune
homme, la jeune fille qui achetait une ferme évaluée à 400
000 $, dans le temps du précédent gouvernement, les cinq
premières années, recevait 31 000 $ d'aide. Prenons le même
cas aujourd'hui. On doit se rappeler que, dès le mois de décembre
1985 - on n'a pas attendu - dès notre arrivée, on a
présenté et on a adopté en 1986 une loi faisant passer la
prime à l'établissement de 8000 $ à 15 000 $. Ce qui veut
donc dire que ce jeune homme, cette jeune fille recevrait, aujourd'hui, au
moment où l'on se parle, avant même l'adoption de cette loi, non
pas 31 000 $, mais un montant pouvant aller jusqu'à 38 000 $ d'aide ou
de subvention.
Avec le projet de loi, l'aide sera de près de 45 000 $ pour les
cinq premières années, et ce, sans un diplôme
d'études collégiales alors qu'avec un diplôme
d'études collégiales, ce niveau d'aide sera à un peu plus
de 51 000 $ pour les cinq premières années. Voilà des
gestes concrets et des mesures précises confirmés dans ce projet
de loi qui sont très certainement susceptibles de contribuer à
favoriser davantage la relève en agriculture.
Il faut dire aussi que dans la situation actuelle du financement
agricole au Québec, alors qu'antérieurement, la conjointe d'un
agriculteur ne pouvait bénéficier de ces primes à
l'établissement, aujourd'hui, dans le cas qui nous occupe, en plus des
51 000 $, si ce jeune s'associe évidemment à sa conjointe qui
joue un rôle très important dans l'entreprise, ils recevront 15
000 $ de plus comme contribution.
Un autre élément très important qui apparaît
au projet de loi, c'est l'accréditation du vendeur. Je m'explique. Vous
savez, souventefois, les parents qui sont propriétaires d'une entreprise
agricole qui vaut 400 000 $, 500 000 $, sont placés devant des choix
difficiles, soit de vendre à leur fils à un prix plus bas, parce
qu'ils savent pertinemment que leur fils ou leur fille n'a pas suffisamment
d'équité, pas suffisamment d'argent de côté - et
c'est normal - ils sont jeunes, pour se porter acquéreur d'une
entreprise aussi importante et payer le juste prix.
C'est là le premier choix: Vendre au fils, à la fille mais
en réduisant le prix et ainsi en cédant pour leur
bénéfice une partie importante de leur fonds de retraite parce
que la ferme, c'est le fonds de retraite de ces centaines de milliers de
couples du Québec qui ont pris la relève en agriculture, qui ont
développé leur ferme, qui ont amélioré leur
production, qui ont amélioré leur terre et, aujourd'hui, ils se
retrouvent, à plus de 50 ans, plus de 60 ans, confrontés à
un problème de taille, à savoir comment transférer la
propriété et toucher des valeurs pour le bien qu'on a bâti,
qu'on a développé.
Alors, leur premier choix c'est de vendre au fils, à la fille
mais accepter une réduction du fonds de retraite ou de vendre au voisin
qui lui, n'est pas membre de la famille, fermer et mettre fin à la
présence familiale sur ce coin de terre et avoir le juste prix dans une
démarche de consolidation de l'entreprise du voisin.
C'est ainsi qu'à compter de l'adoption de la loi le vendeur
pourra être accrédité par l'Office du crédit
agricole en regard du solde du prix de vente. Un exemple concret: ce jeune
homme ou cette jeune fille auxquels je référais tout à
l'heure qui procède à l'acquisition d'une ferme pour un montant
de 400 000 $ pourra emprunter 200 000 $ de l'Office de crédit agricole
du Québec, bénéficier de tous les avantages en
matières de subventions et d'aide en regard du taux
d'intérêt qui est payé, en partie, par l'Office
du crédit agricole et le solde du prix de vente, 200 000 $ pourra
être assumé par les parents, par exemple. Et, ce qu'il y a de
nouveau, c'est que ce prêt de 200 000 $ consenti par les parents au fils
ou à la fille sera pleinement garanti par l'Office du crédit
agricole du Québec, donc par le gouvernement.
Dans ma tournée des expositions agricoles, souvent, les parents
me disaient: Vous savez, M. le ministre, on hésite à garder un
solde de prix de vente parce que, si jamais ils ont de la difficulté, si
jamais ils sont malades, si jamais il y avait un divorce nous serions
susceptibles de perdre le montant du prêt ainsi consenti. Notre
gouvernement, se voulant vigilant et très à l'affût des
besoins de nos clientèles, c'est ce pourquoi cette notion a
été introduite.
Toutes les bonifications prévues dans ce projet de loi
s'appliquent aussi à l'égard des agricultrices du Québec.
Je pense que la contribution de notre gouvernement aura été
importante et, très certainement, que l'histoire enseignera et donnera
comme conclusion une reconnaissance, non seulement verbale, mais de fait par
nos lois, par nos mesures à l'égard des droits des agricultrices
du Québec.
Vous savez, quand notre gouvernement, quand notre équipe a
indiqué, par la voix du premier ministre, par la voix de Mme la ministre
déléguée à la Condition féminine, notre
intention très claire de faire plus, d'établir des
mécanismes, des programmes, des leviers qui feraient en sorte que
l'indépendance économique des femmes du Québec serait
renforcée, cela s'est concrétisé, entre autres, par nos
lois de financement agricole. Je vois Mme la députée de la rive
sud de Montréal, de Marie-Victorin, je pense, qui semble avoir des
doutes. Je comprends qu'elle est d'un milieu urbain mais je lui dirai ceci:
Avec les programmes qui ont été mis en place par notre
gouvernement en 1986, - et j'invite Mme la députée de
Maisonneuve, sachant qu'elle est bien sensible à ces questions, à
écouter attentivement - quand, en 1986, on a dit comme gouvernement
qu'en agriculture, on devait passer du partage des tâches au partage des
pouvoirs, c'est ce à quoi on référait dans notre plan
d'action. (22 heures)
Aujourd'hui, force vous est de reconnaître qu'en ce qui concerne
les demandes d'établissement en agriculture, les gens qui s'installent,
les gens qui accèdent à la propriété, les gens qui
bénéficient de nos programmes, entre autres de nos primes
à l'établissement, entre le 1er avril 1987 et le dernier rapport
au 10 décembre 1987, l'Office du crédit agricole, sous ma
signature et sous celle des régisseurs de l'office, a émis pour
22 000 000 $ de primes à l'établissement, évidemment avec
un maximum par personne, de 15 000 $. C'est beaucoup de monde. Dans 63,3 % des
cas d'établissement en agriculture, depuis que cette mesure a
été adoptée, ceux-ci ont été faits par des
femmes. Alors, quand on dit de notre côté que ce n'est pas
seulement des slogans, ce n'est pas seulement des livres peu importe la
couleur, ce sont véritablement des actions concrètes. Quand je
vous disais tantôt que l'histoire enseignera que le gouvernement de M.
Bourassa aura contribué de façon significative à faire en
sorte que les agricultrices du Québec, celles qui bâtissent
l'agriculture, celles qui s'y occupent, celles qui travaillent en moyenne 32
heures par semaine, sans compter toutes les autres obligations qu'elles ont
dans le couple, à l'égard des enfants, notamment, notre
gouvernement aura livré la marchandise!
Dans ce projet de loi, d'autres dispositions additionnelles, par
exemple, toute la notion de ferme complémentaire, sont incluses. Exemple
concret: le droit pour une agricultrice qui, avec son conjoint, gère une
entreprise, le droit pour elle, si l'entreprise veut prendre de l'expansion,
d'acheter la ferme, d'acheter des terrains. La conjointe pourra recevoir un
prêt pour elle, comme propriétaire de ce coin de terre, sans qu'on
lui fasse obligation d'avoir des animaux, sans qu'on lui fasse obligation
d'avoir des bâtiments, des équipements, sans qu'on lui fasse
obligation d'avoir un quota. Il suffira pour elle d'acheter cette terre,
d'être subventionnée comme agricultrice et d'en vendre le produit,
par exemple des céréales, maïs, orge, grain, soya, à
l'entreprise d'encadrement dont elle est propriétaire avec son conjoint.
Les clauses discriminatoires ont été abolies, Mme la
Présidente, et je pense que c'était très important de le
faire. Je dois convenir que nous étions très surpris de voir que
de telles clauses discriminatoires existaient encore.
Caractère universel de nos dispositions. Les prêts ont
été augmentés à 800 000 $, possibilité
d'emprunt de 800 000 $ par ferme, par entreprise. La portion
subventionnée passe de 150 000 $ à 200 000 $, comme je vous le
disais tout à l'heure. Les marges de crédit sont portées,
parce que là aussi le financement à court terme est important,
même en agriculture, de 100 000 $ à 200 000 $, et ça
demeure à 500 000 $ pour les producteurs de céréales et
les producteurs de bovins dans les parcs d'engraissement. Le mode de versement
se veut plus souple avec ce projet de loi. On sait que les paiements
étaient semestriels. Les productrices, les producteurs pourront
rembourser à leur rythme, à leur convenance, mensuellement,
trimestriellement, semi-annuellement ou annuellement selon le type de
production et la capacité de payer des emprunteurs, donc de leurs
besoins. Nous
introduisons par ce projet de loi un mécanisme nouveau, un
mécanisme très important, à savoir que nous aurons un
comité de réexamen des décisions rendues par l'Office du
crédit agricole du Québec et ce, peu importe à quel
niveau: que ce soit dans les cas de refus, que ce soit dans les cas de montants
de prêts autorisés, etc.
Nous aurons un comité de réexamen et j'ai très
clairement indiqué notre volonté de faire en sorte que les
agriculteurs, les agricultrices, ceux qui ont de l'expérience en
agriculture soient représentés à ce comité. Nous
avons introduit une notion en commission parlementaire, je voudrais remercier
mon collègue le député de Laviolette pour ses propositions
dans ce sens, à savoir qu'on a accepté et qu'on a modifié
dans le sens de permettre aux gens qui sont visés par des
décisions d'être entendus par les comités de
réexamen, tout comme évidemment la personne qui aura pris la
décision d'office pourra elle aussi être entendue.
Nous avons élargi les conditions d'admissibilité, aux
éleveurs de chevaux de courses, entre autres, parce que c'est une
industrie importante - on y reviendra un peu plus tard ce soir - tout comme
à ceux qui se convient à cette orientation qu'on a donnée
au ministère, les cultures en serres, notamment la culture hydroponique,
parce qu'on sait qu'on a tout un marché à développer. On
peut être davantage autosuffisant dans ces types de production, sans pour
autant surendetter nos clientèles, nos agricultrices, nos agriculteurs,
nos investisseurs. Ça aussi, c'est une section tout à fait
nouvelle des interventions agricoles qui pourraient être couvertes par le
financement agricole du Québec.
Toutes ces mesures étaient souhaitées et
désirées depuis plusieurs années. Je dois vous dire que la
commission parlementaire aura été utile en ce que plusieurs des
propositions qui nous ont été formulées seront retenues.
Qu'il me suffise de dire qu'en vertu de la loi les prêteurs pourront
continuer de consentir des prêts à moyen terme jusqu'à 50
000 $ sans autorisation préalable de l'Office du crédit agricole.
C'était demandé par l'Union des producteurs agricoles;
c'était demandé par le Mouvement Desjardins; c'était
demandé par la Fédération de la relève agricole;
c'était demandé aussi par l'Association des technologistes
agricoles. La même chose pour les ouvertures de crédit
jusqu'à 25 000 $ sans avoir à recevoir l'autorisation de
l'office; c'était demandé par les intervenants et c'est
accepté. La date d'échéance des premiers remboursements
sera prévue au règlement, mais, là aussi, on donne suite
à ce qui était demandé en commission parlementaire.
L'amendement à l'article 22 qui propose de calculer la
durée du prêt à compter de l'échéance
fixée pour le premier versement, c'était demandé et c'est
prévu dans la loi, l'amendement aux dispositions de l'article 25, etc.,
tout comme ces demandes qui nous ont été formulées
concernant l'aide apportée aux jeunes. Il me fait plaisir ce soir de
confirmer à mes collègues que le règlement prévoira
plusieurs modalités concernant l'aide apportée à nos
jeunes de façon que l'on puisse tenir compte non seulement de ceux qui
ont un diplôme d'études collégiales, de ceux qui,
évidemment ont un baccalauréat, un cours universitaire, mais
aussi de ceux qui ont un diplôme d'études secondaires, c'est
important, avec un profil professionnel ou encore en agriculture. Nous
tiendrons compte de tous ces jeunes qui se convient à une formation
susceptible de les aider lorsqu'ils seront à la tête de
l'entreprise, en considérant évidemment, parce qu'on doit
toujours en tenir compte, l'expérience, selon les cas. On sait que deux
ans d'université, cela vaut un certain nombre d'années
d'expérience. L'assurance que je voudrais donner à mes
collègues, ce soir, c'est que nous allons dans le sens des
représentations qui nous ont été faites, convaincus que
nous sommes que la meilleure façon de légiférer, c'est
d'écouter, évidemment, celles et ceux qui sont directement
concernés par de tels projets de loi.
Mme la Présidente, c'est l'essentiel du projet de loi que je veux
vous référer en troisième lecture ce soir, une
modification attendue depuis longtemps, la Loi sur le financement agricole, une
réforme du financement agricole qui est progressive et dynamique et, en
même temps, une refonte des huit lois, des éléments
introductifs de nouvelles orientations. Je voudrais, évidemment, vous
témoigner mon appréciation de voir que cette loi sera
adoptée ce soir en troisième lecture.
De plus, je voudrais profiter de cette occasion pour remercier mes
collègues qui se sont associés à cette démarche,
les députés de l'Assemblée nationale, notamment, avec qui
les échanges ont été très intéressants,
très utiles et très motivants. Je voudrais aussi remercier
l'équipe de l'Office du crédit agricole du Québec qui a
été intimement et étroitement associée à
cette démarche. Souventefois, les critiques dans la population, que ce
soit légitime ou non, explicable ou non, sont sévères
à l'égard de celles et de ceux qui occupent des postes dans nos
ministères, dans nos organismes gouvernementaux. Je voudrais, ce soir,
témoigner mon appréciation à l'égard de la
contribution à l'élaboration de ce projet de loi avec
l'équipe gouvernementale et avec moi comme ministre. Je veux remercier
M. Julien Burns, de l'Office du crédit agricole du Québec, Me
Charles-Édouard Gagnon, qui est notaire, de l'Office du crédit
agricole du Québec, qui a dû déplacer ses vacances pour
venir travailler dans l'équipe; toute l'équipe de
régisseurs, de membres qui ont été associés
au processus de réflexion. Je veux, en terminant, remercier un grand
commis de l'État qui est avec nous, qui est au gouvernement du
Québec, à l'Office du crédit agricole depuis plus de 20
ans - 23 ans, je crois - et qui assume la présidence et la
responsabilité de l'Office du crédit agricole, Me Camille Moreau,
que les agricultrices et les agriculteurs du Québec et les intervenants
connaissent pour être profondément impliqué dans le
financement agricole au Québec et qui a joué un rôle de
premier plan dans les conseils, les avis et les orientations qui m'ont
été donnés pour la rédaction de ce projet de loi.
Je voudrais le remercier très sincèrement. (22 h 10)
Mme la Présidente, voilà, je souhaite que ce projet de loi
soit adopté à l'unanimité. Nous anticipons son adoption,
ainsi que l'adoption de ses règlements et la mise en oeuvre de cette
pièce de législation très importante dans les meilleurs
délais. Merci.
La Vice-Présidente: Merci, M. le ministre de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation. M. le
député de Laviolette.
M. Jean-Pierre Jolivet
M. Jolivet: Merci, Mme la Présidente. Le projet de loi
apporte des changements, il faut le dire, mais pas au point que ce soit une
réforme. Le ministre le sait très bien, c'est une refonte de sept
lois, sept règlements. On dit huit lois, huit règlements, parce
qu'on abroge la huitième, mais, en fait, c'est sept lois, sept
règlements. On l'a vu, d'ailleurs, lors de l'étude de ce projet
de loi article par article, quand on reconduisait, presque textuellement, avec
des améliorations ajustées au contexte moderne, certaines parties
de ces lois qui datent de fort longtemps. D'un autre côté, le
ministre a peut-être raison d'une certaine façon, c'est son style,
de s'enorgueillir de cette pièce législative, mais il ne faudrait
pas qu'il ait l'impression d'avoir fait cela tout seul. L'Opposition, à
la suite de la commission parlementaire qui a eu lieu l'automne dernier
où des gens sont venus faire part de leurs réticences, de leurs
points de vue, a fortement aidé et a contribué largement à
ce que cette loi devienne finalement, pour l'avenir, un instrument important
pour le financement agricole.
Cependant, le ministre n'a pas répondu à toutes les
demandes. Il y en a quelques-unes qui restent en suspens. Le ministre pourra
nous dire qu'il accorde davantage aux jeunes qui prennent la relève de
leurs parents ou qui achètent une ferme et qui veulent se lancer
après avoir obtenu un diplôme d'études collégiales
en agriculture, il reste, quand même, qu'il y a à ce chapitre une
diminution du nombre d'inscriptions dans les différents collèges.
Je prends, à titre d'exemple, celui que j'ai visité durant la
tournée que nous avons faite, cet automne, dans tout le Québec,
nous les membres du Parti québécois, le collège Macdonald
où des jeunes m'ont fait part des problèmes auxquels ils sont
confrontés. Or, le ministre ne répond pas adéquatement
à toutes leurs demandes. C'est quand même un bon pas dans la bonne
direction. Si on se fie à ce que la relève de la
Fédération agricole dit, ils auraient aimé avoir plus pour
permettre à plus de jeunes d'entrer dans le secteur agricole. Le
ministre dit: Un instant, on ne donnera pas tout, il ne faut pas qu'ils
s'attendent à tout avoir. C'est ce qu'il nous a
répété à plusieurs occasions. Il reste, quand
même, que nous allons permettre à ce projet de loi de faire ses
preuves dans les années à venir.
D'un autre côté, nous avons fait une tentative en ce qui
concerne les femmes en agriculture. Vous le savez, Mme la Présidente,
c'est cette année que l'Union des producteurs agricoles a accepté
une fédération des femmes agricultrices de telle sorte que nous
avons des personnes qui agissent en agriculture et qui sont de plus en plus
nombreuses. Mes collègues féminines m'ont demandé de ne
pas oublier de le dire, parce qu'effectivement c'est grâce au travail qui
avait été fait par les membres du Parti québécois,
au mois de juin 1985, où des femmes, en particulier, avaient tenu un
sommet, qu'on avait porté attention à ces femmes qui se
lançaient en agriculture. C'est ce qui a permis les ajustements qui sont
aujourd'hui inscrits dans le projet de loi, même si ces ajustements ne
sont pas complètement à leur convenance. Il reste qu'elles
avaient demandé qu'on abolisse le critère de 40 ans pour pouvoir
participer à certains programmes de financement, en particulier pour la
prime d'établissement. Le ministre n'a pas acquiescé à
cette demande; il nous a cependant dit qu'il le ferait par
l'intermédiaire des programmes et qu'il le réglerait d'une autre
façon. C'est à voir, on le verra à l'avenir. Chose
certaine, nous aurions préféré le voir à
l'intérieur du projet de loi.
Quant au comité de réexamen, on aurait voulu qu'il aille
plus loin, qu'il ait même des pouvoirs décisionnels. Le ministre a
refusé. On a dit: au moins, s'il suivait l'exemple de ce qui se passe au
fédéral où il y a une force morale tellement importante
que c'est très rare que le ministre renverse les décisions prises
par le comité de révision du fédéral.
Le ministre a, cependant, acquiescé à une de nos demandes,
qui était justifiée, celle voulant que la personne qui fait une
demande de réexamen puisse être entendue
et que, d'un autre côté, la personne qui a pris la
décision, à quelque niveau que ce soit dans l'appareil de
l'office, ne soit pas membre du comité de réexamen.
Effectivement, le ministre a acquiescé à notre demande. Pour
s'assurer que cela se fera de cette façon, il a indiqué que,
lorsque l'office réexaminera la demande, il pourra entendre la personne
qui demande à être entendue, ainsi que, en contrepartie, la
personne qui a pris la décision à l'office, soit au niveau
régional ou à d'autres niveaux.
Nous disons que nous sommes devant un projet de loi qui améliore,
par la refonte des lois elles-mêmes et des règlements, tout le
système du financement agricole. Donc, c'est une modernisation qui
était attendue, il faut le dire. Il faut rappeler les promesses que mon
collègue avait faites à l'époque et le contexte dans
lequel il les avait faites, celui d'une crise économique. Les
libéraux commencent à dire qu'elle a existé, alors qu'ils
refusaient complètement de l'admettre, dans les années 1982 ou
1983. Les effets se sont fait sentir de telle sorte qu'on n'a pu mettre en
place avant les élections le programme que nous avions
établi.
D'un autre côté, nous sommes devant ce programme et
l'occasion m'est fournie à nouveau de dire que le ministre est en train
de faire une supraréglementation, ce qui, à mon avis, Mme la
Présidente, est un peu plus pernicieux, si vous me permettez le mot,
c'est plus "par en dessous" que le système qu'on avait jusqu'à
maintenant. On retrouve cette supraréglementation dans le projet de loi.
Là, on a pris tous les règlements et on en a même
ajouté en donnant des pouvoirs au ministre. C'est pourquoi nous
insistons auprès du ministre pour que, lorsqu'il y aura publication des
règlements, entre la publication (ce qu'on appelle la
prépublication) et l'adoption finale, il puisse y avoir une commission
parlementaire de quelques heures pour permettre à tous les membres du
Parlement, que ce soit les membres de l'Opposition ou ceux du côté
ministériel, d'étudier les règlements. Le ministre nous a
dit qu'il examinait cette demande avec beaucoup d'attention. Je la lui fais
à nouveau ce soir, en étant assuré qu'il y acquiescera et
qu'il permettra aux membres de l'Assemblée nationale, de quelque
côté qu'ils soient, de faire valoir leur point de vue avant que
les règlements ne soient adoptés de façon
définitive.
Devant ces faits, Mme la Présidente, je ne reprendrai pas tous
les propos que le ministre a tenus sur le projet de loi. Je dirai que, dans
l'ensemble, il nous satisfait, mais que nous avons cependant des
inquiétudes. Nous allons surveiller la mise en application de ce projet
de loi et des règlements qui vont suivre, nous allons surveiller le
ministre. Nous invitons les membres de l'Union des producteurs agricoles
à nous faire parvenir toutes les récriminations qu'ils auront
pour que nous puissions avoir la discussion la plus franche possible avec le
ministre afin que cette refonte de l'ensemble des programmes de financement
agricole soit profitable aux jeunes, aux femmes et à tous ceux qui, de
près ou de loin, travaillent dans le domaine de l'agriculture au
Québec.
De mon côté, je dois également souligner le travail
de moine, si on peut employer ce terme, fait par l'Office du crédit
agricole, avec son responsable, M. Moreau, et tous ceux qui ont
travaillé au niveau du contentieux à la préparation de ce
projet de loi. Nous avons enfin une Loi sur le financement agricole qui
répondra, sinon à toutes, du moins aux principales conditions
pour que l'agriculture continue de prospérer au Québec, comme
tout le monde le souhaite. Je vous remercie, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente: Merci, M. le député de
Laviolette. Je constate qu'il n'y a pas d'autre intervention et je
déclare le débat clos. Est-ce que le projet de loi 46, Loi sur le
financement agricole, est adopté?
M. Jolivet: Adopté.
M. Pagé: Adopté, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente: Adopté. M. le leader adjoint du
gouvernement.
M. Johnson: Mme la Présidente, je vous demanderais
d'appeler l'article 46 du feuilleton. (22 h 20)
Projet de loi 89 Adoption
La Vice-Présidente: À l'article 46 de notre
feuilleton, le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de
l'Alimentation propose l'adoption du projet de loi 89, Loi sur les courses de
chevaux. M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de
l'Alimentation.
M. Brassard: Au galop.
M. Michel Pagé
M. Pagé: Merci, Mme la Présidente.
J'apprécie beaucoup l'humour du député de Lac-Saint-Jean.
Le projet de loi 89, loi sur l'industrie des courses de chevaux au
Québec, crée la Commission des courses de chevaux du
Québec. Le gouvernement a déposé le projet de loi 89. Il
est très probable que plusieurs personnes se sont interrogées sur
l'opportunité pour un gouvernement de légiférer,
d'intervenir, par exemple, dans le
cadre d'un plan de relance comme celui que j'ai annoncé le 8
septembre dernier à Montréal. Pourquoi le gouvernement se sent-il
légitimé d'intervenir, d'aider, de subventionner - selon,
notamment, les députés de l'Opposition et selon la perception -
cette industrie?
Mme la Présidente, j'entends, par mon propos qui se voudra
très bref, mais, quand même, le plus complet possible, vous
indiquer l'importance de cette industrie au Québec. Cinq hippodromes
détiennent des licences de la Régie des loteries et courses du
Québec et un permis d'exploitation de paris mutuels émis par
Agriculture Canada. Cette industrie, au Québec, c'est 30 pistes de
courses dites amateurs, c'est 8000 chevaux de race Standardbred, 2000 au haras
et 3000 en compétition, notamment, et qui consomment des produits
agricoles. Vous savez qu'un cheval consomme 2 tonnes par année seulement
de fourrage. C'est 19 000 tonnes de fourrage par année consommées
par les chevaux. Cela ne vient pas des nuages. Cela ne pousse pas dans les
arbres. Cela vient de la production des producteurs et des productrices
agricoles du Québec, sans référer aux autres aliments, aux
autres nécessités pour ce cheptel important. Tout cela contribue
à faire vivre l'économie dans les régions.
Strictement dans l'industrie, si on réfère soit à
ceux qui entretiennent les chevaux, qui agissent comme palefreniers, soit
à ceux qui les conduisent, soit ceux qui les entraînent, si on
réfère aussi aux personnes qui s'occupent sur les cinq
hippodromes au Québec opérant sous licence, si on
réfère aux gens qui travaillent dans les paris mutuels, dans les
restaurants, dans les bars, pour les facilités offertes au public, c'est
près de 10 000 emplois directs au Québec. 10 000 emplois qui
étaient en danger, qui se retrouvaient dans une situation
vulnérable.
C'est ce pourquoi, dès 1986, le ministre des Finances,
l'honorable Gérard D. Levesque, annonçait la création d'un
comité de travail qui a travaillé, qui a réfléchi,
qui a analysé, qui a entendu des groupes, qui a formulé des
recommandations. Les recommandations, on les retrouve, dans un premier temps,
dans le plan d'investissement qui a été annoncé le 8
septembre dernier, 25 000 000 $ d'investissement pour les cinq hippodromes du
Québec sur cinq ans. Pas de l'argent neuf, pas de l'argent qu'on va
chercher dans le budget du ministère de l'Agriculture, pas de l'argent
qu'on va chercher dans le Développement régional, pas de l'argent
qu'on va chercher dans d'autres ministères. Les 25 000 000 $ pour
relancer cette industrie sont pris à même les sommes qui nous
parviennent de cette industrie annuellement.
Ce qui nous parvient annuellement? Ce n'est pas compliqué,
normalement cette industrie devrait rapporter 50 000 000 $ par année
dans les coffres publics pour donner de l'argent pour administrer des
programmes sociaux, des programmes de santé, des programmes susceptibles
de répondre aux besoins de la population. C'est 50 000 000 $ qu'on
devrait tirer de cette industrie. Or, l'affaiblissement structurel de cette
industrie donne aujourd'hui comme résultat que c'est environ 20 000 000
$ qui sont puisés à même cette industrie, pour les
coffres.
L'importance d'intervenir réfère à l'importance des
emplois dans ce secteur, dont un pourcentage très important ne pourrait
pas se recycler dans d'autres secteurs d'emploi au Québec. Il faut en
convenir, il faut le reconnaître. Notre intervention se
réfère, de plus, à l'objectif qu'on s'est fixé de
dynamiser ce secteur qui est important en termes de revenus pour le
gouvernement du Québec. Parce que, vous savez, Mme la Présidente
- je vais vous le dire et cela va peut-être vous surprendre -que
l'activité récréative et sportive au Québec qui
convie le plus grand nombre de spectatrices et de spectateurs, c'est
l'industrie des courses de chevaux: 2 000 000 de spectateurs annuellement
passent aux guichets pour y assister. Le baseball va chercher 1 800 000, le
hockey, 1 500 000 spectateurs. C'est donc une activité qui fait
référence à la fois à l'aspect social, l'aspect des
loisirs, l'aspect sportif, plus particulièrement chez celles et ceux qui
ont l'amour du cheval, si je peux utiliser le terme, qui apprécient
cette noble bête et aussi, cela fait référence à un
aspect du jeu. Ce sont donc 2 000 000 de personnes par année qui y vont.
Il y a eu une chute dramatique, depuis huit ans, sept ans, cinq ans, notamment
des paris, une chute aussi en termes d'activités économiques,
parce que cela ne touche pas seulement les gens qui y travaillent directement;
il y a les fournisseurs d'équipements, les médecins
vétérinaires, ceux qui voient à s'assurer de la conduite
de l'activité. Cela représente des milliers de jobs au
Québec.
Le projet de loi vient créer une commission des courses qui aura
juridiction sur l'ensemble de l'activité, une responsabilité qui
était tripartite antérieurement. Cette activité
était sous la juridiction de la Régie des loteries et courses du
Québec avec, comme ministre titulaire, le ministre du Revenu, sous la
juridiction de la Société de développement de l'industrie
des courses de chevaux du Québec et de Loto-Québec, sous la
juridiction du ministre des Finances et du ministère de l'Agriculture.
L'entière responsabilité sera maintenant confiée à
la Commission des courses de chevaux sous la juridiction du titulaire du
ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation du
Québec.
On a étudié le projet de loi en deuxième lecture,
on l'a étudié article par article. Ce projet de loi en est
maintenant à la troisième lecture. Je me limiterai à vous
dire, Mme la Présidente, que c'est un projet de loi sectoriel,
spécifique, qui concerne une activité importante dans
l'économie du Québec. Notre gouvernement, dans ce secteur
économique comme dans d'autres secteurs économiques, et on en a
fait la preuve concrète, la preuve tangible - veut créer des
situations, veut favoriser, veut procéder par des lois ou des
réglementations susceptibles de dynamiser, de renforcer ce secteur, pour
qu'il soit plus compétitif, plus performant et encore plus contributif
à la force économique du Québec.
J'ai bon espoir que la mise en oeuvre de ce projet pourra se faire
dès le début de l'année 1988, adopté qu'il le sera
ce soir, je l'espère bien, à l'unanimité. Je voudrais
remercier celles et ceux qui y ont contribué, mes collègues,
notamment M. le député de Mille-Îles, on peut le nommer par
son nom, M. Jean-Pierre Bélisle, qui a travaillé de façon
utile, de façon importante, qui a consacré beaucoup de temps et
beaucoup d'efforts au sein du comité qui a étudié ce
problème-là. Je voudrais remercier mes collègues de
l'Assemblée nationale de l'appui qui m'a été donné
dans la présentation de ce projet de loi, autant lors de l'étude
en deuxième lecture qu'en commission parlementaire. Je voudrais
remercier toute l'équipe du ministère, que ce soit le Dr Louis
Bernard, qui est sous-ministre à la santé animale et au
contrôle de la qualité des produits, qui agit actuellement comme
président-directeur général de la Société de
développement de l'industrie des courses de chevaux; Me Cavanagh, qui
est avocat au ministère, le Dr Yvan Rouleau qui a contribué
aussi; Me Albert Raymond, qui est vice-président de la Régie des
loteries et courses du Québec, et Me Monique Ducharme, qui est
fonctionnaire au ministère de la Justice et qui a contribué de
façon importante à la rédaction du projet de loi.
Je voudrais remercier l'équipe, les députés et leur
témoigner notre confiance et ma confiance comme ministre à
l'égard de la relance et du renforcement de cette industrie. Merci.
La Vice-Présidente: Merci, M. le ministre de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation. À l'ordre, s'il
vous plaît!
M. le député de Laviolette. (22 h 30)
M. Jean-Pierre Jolivet
M. Jolivet: Merci, Mme la Présidente. Je ne commencerai
pas en chantant une chanson, parce que le ministre, sur ce point-là, m'a
quasiment donné l'impression qu'il était en train de jouer un air
de fête. Jamais deux sans trois, s'est-il dit probablement. Deux projets
de loi, ce soir, qui sont adoptés de façon unanime, mais avec
quand même les restrictions qu'on a faites et fort probablement un
troisième. Il se souviendra d'un après-midi où je lui
rappelais que nous serions prêts à adopter ce projet de loi et les
autres, mais que si, par hasard, il s'entêtait à vouloir faire
adopter le projet de loi 49, nous lui ferions la vie dure. Je peux vous dire
que nous aurons l'occasion de rediscuter d'un autre projet de loi, qui
s'appelle justement le projet de loi 49, qui, pour moi, est une taxe
déguisée. Nous aurons l'occasion d'y revenir en commission
parlementaire, mais en lui disant que nous aurons encore de nombreux
parlementaires, de notre côté, qui parleront sur ce projet de loi.
Mais, comme il a pris la sage décision de faire en sorte que,
finalement, ce projet de loi ne sera pas présenté avant les
fêtes, afin de laisser aux gens la chance de faire valoir leur point de
vue, je peux lui dire que le projet de loi 89 va recevoir notre
assentiment.
Le projet de loi 89 va recevoir notre assentiment; nous voilà
maintenant arrivé au fil d'arrivée, mais malheureusement - le
ministre me souffle lui-même la question que je voulais lui poser - il en
manque un. Les députés de Vachon, d'Iberville, de Chambly, le
ministre de la Justice à qui j'en ai parlé, le ministre du Revenu
à qui j'en ai parlé, le ministre de l'Agriculture à qui
j'en ai parlé aussi... Il manque, je vais le lui rappeler, des
lévriers. Nous avons mis en place tout un système où on a
pris la SODIC, la Société de développement de l'industrie
des courses de chevaux du Québec, et, à côté, la
partie de la Régie des loteries et courses qui concerne les paris, et on
a fait une loi, celle qui est devant nous, la Loi sur les courses de
chevaux.
Dans la loi de la régie, il y a une partie qui avait
été changée par le ministre des Finances, à ce
moment-là, M. Parizeau, et qui disait: Courses de chevaux et autres
courses. Or, actuellement, au Québec, il y a des gens dans le coin de
Saint-Hubert, en particulier, qui proposent la mise en place d'un cynodrome
où il y aura des courses de lévriers et où on investira
nombre de millions de dollars pour la création d'emplois, d'une part, et
l'investissement, d'autre part. Actuellement, on laisse filer l'ensemble de ces
millions vers St. Albans, à quelques milles de Saint-Hubert, aux
États-Unis où près de 25 000 000 $ par année venant
du Québec s'en vont dans ce secteur, où, je pense, il y a, pour
le Québec, une possibilité de récupérer. Il s'agit
d'une seule chose. Que le ministre de l'Agriculture, le ministre du Revenu et
le ministre de la Justice s'asseoient ensemble et forment un comité qui
permettra de faire les pressions qu'il
faut sur le fédéral pour changer l'article 190 du Code
criminel fédéral, permettant alors de faire des paris sur des
courses de lévriers, et, ensuite, sans aucune aide - les gens sont
prêts, ils n'ont pas besoin d'argent - mettre en place tout le
système de courses de lévriers. À ce moment-là,
nous aurions une loi qui pourrait être la même - on pourrait dire
"loi sur les courses de chevaux et de lévriers" - ou une autre loi
constitutive de ce secteur pour garder au Québec l'argent qui n'irait
pas vers les États-Unis, à moins que ce soit dans la tête
du ministre de faire un libre-échange à sens unique, comme on
semble le faire actuellement; vers les États-Unis seulement et non pas
vers le Québec en plus. Mais je ne pense pas que ce soit ce que
recherche le ministre. C'est dans ce sens que je dis: Oui, le projet de loi est
intéressant, oui, il met en place tout un système qui va
permettre, à la fois, le plan de relance qu'il a proposé de 25
000 000 $ sur cinq ans par la SODIC et d'intervenir dans le secteur des courses
de chevaux en allant, comme il l'a dit, auprès de chacun des hippodromes
au Québec, soit le Connaught Park, celui de Jonquière, celui de
Trois-Rivières, celui de Québec et, finalement, celui de
Décarie, à Montréal qui est celui de Campeau Corporation.
Et on sait que le ministre, dans les jours qui viennent, devrait faire une
nouvelle proposition, puisque le premier plan de relance, en termes d'entente
de principe, proposé à Campeau Corporation a été
brisé par cette dernière.
Le ministre a dit qu'il était prêt à faire une
nouvelle offre pour en arriver à un contrat de mise en place, de
réparation des structures et de renouvellement des places là
où c'est nécessaire, tout en permettant aussi l'autre partie,
celle de son plan pour permettre à l'industrie des courses de chevaux de
reprendre du pic ou du poil de la bête si je peux employer cette
expression.
Je rappelle aussi qu'un centre d'entraînement et un centre
d'hébergement des chevaux ne sont pas obligatoirement près de la
piste de courses et que ce pourrait être ailleurs qu'à
Décarie si cela ne fonctionne pas et qu'à ce moment-là des
gens de Longueuil ont fait des discussions actuellement par le groupe de Laudel
qui est le groupe de commissaires industriels du secteur pour présenter
la possibilité à la fois d'un centre d'hébergement des
animaux et un centre d'entraînement, et peut-être probablement plus
tard une piste de course.
Je rappelle tout cela pour vous dire que nous avons fait mention de ces
choses au ministre à la fois lors de l'étude du principe du
projet de loi, lors de la commission parlementaire qui a étudié
le projet de loi article par article. Je le lui rappelle enfin ce soir pour
qu'il ne l'oublie pas et que, lorsqu'il aura en main la loi nécessaire
pour faire en sorte de donner l'élan qu'il recherche à tout
l'ensemble de l'industrie des courses de chevaux, il sache qu'il y a encore
d'autres choses à faire et qu'il ne devrait pas perdre de temps pour le
faire, mais aller le plus rapidement possible vers les conclusions les plus
heureuses.
Donc, dans ce contexte, Mme la Présidente, au nom de
l'Opposition, nous lui disons, avec les réticences que nous avons sur
certains points et dont nous avons fait mention, que nous sommes d'accord avec
le principe du projet de loi et nous espérons qu'à la fois les
hippodromes et les gens des associations des hommes à chevaux du
Québec profiteront et l'ensemble de la société
québécoise profitera de ces investissements de 25 000 000 $ sur
les cinq prochaines années et aussi sauront prendre acte que le
renouveau dans l'utilisation informatique qu'on connaît actuellement et
les paris changés selon les techniques modernes permettront l'essor
recherché à la fois par le ministre, par les gens des pistes de
courses et par les hommes à chevaux du Québec.
Dans ce contexte, Mme la Présidente, je donne mon accord pour
l'adoption finale du projet de loi 89.
La Vice-Présidente: Merci, M. le député de
Laviolette. Je constate qu'il n'y a pas d'autre intervenant. Je déclare
le débat clos. Est-ce que le projet de loi 89, Loi sur les courses de
chevaux, est adopté?
Des voix: Adopté.
La Vice-Présidente: Adopté. M. le leader adjoint du
gouvernement.
M. Johnson: Oui, Mme la Présidente. Je vous demanderais
d'appeler l'article 26 du feuilleton.
Projet de loi 75
Prise en considération du
rapport de la commission qui
en a fait l'étude
détaillée
La Vice-Présidente: À l'article 26 de notre
feuilleton, le ministre de la Justice propose l'adoption du rapport de la
commission des institutions qui a procédé à l'étude
détaillée du projet de loi 75 intitulé Code de
procédure pénale. M. le ministre de la Justice.
M. Herbert Marx
M. Marx: Merci, Mme la Présidente. Il s'agit de notre Code
de procédure pénale, le projet de loi 75. Le projet de code dont
l'étude vient d'être complétée constitue plus qu'une
simple révision des mécanismes de
poursuite des infractions. Il manifeste en effet la volonté de
protéger les droits et libertés des citoyens. Le moment
était venu de répondre au besoin de réforme de la
procédure pénale dont la révision était en cours
depuis plus de dix ans déjà. Durant toutes ces années, les
divers intervenants oeuvrant dans les domaines judiciaire ou académique,
des praticiens en défense ou en poursuite ont eu la possibilité
de critiquer la procédure existante, d'exprimer leurs attentes et de
formuler leurs propositions de solutions de rechange.
La commission des institutions tenue en mars dernier sur l'avant-projet
de code a été particulièrement fructueuse à cet
égard. Il revenait toutefois aux parlementaires de se prononcer sur
l'orientation finale du projet. C'est avec leur participation que certains
ajustements ont pu être apportés lors de la commission
parlementaire qui a suivi la deuxième lecture afin que ce code atteigne
un juste équilibre entre les droits et les devoirs des justiciables. (22
h 40)
Le projet de loi que nous adoptons innove en introduisant le constat
d'infraction et sert de fondement à toutes les poursuites pénales
relatives aux lois et aux règlements du Québec. Cette nouvelle
procédure va permettre au justiciable d'être mieux informé
en cas de poursuite et de communiquer avec le poursuivant. Ainsi, de nombreux
litiges seront solutionnés sans que le défendeur et les
témoins n'aient besoin de se déplacer inutilement à la
cour et de perdre des journées de travail.
Ce projet de code offre plusieurs nouveaux recours aux justiciables afin
de garantir leurs droits et libertés. Prenons, par exemple, la
possibilité de demander la rectification d'erreurs de forme qui auraient
pu se glisser dans un jugement; la rétractation d'un jugement lorsque le
défendeur ne peut présenter sa défense; la
réduction de frais judiciaires dans certains cas de déclaration
de culpabilité ainsi que la tenue de commissions rogatoires pour obtenir
des témoignages qu'il aurait été autrement impossible de
recueillir.
De plus, contrairement à la situation actuelle, les
défendeurs pourront présenter des moyens préliminaires,
soit pour être mieux informés de ce dont ils sont accusés,
soit pour que l'instruction se tienne plus près de leur lieu de
résidence ou pour faire rejeter l'accusation. En plus de reprendre
certains droits consacrés par les chartes pour inciter, par exemple, sur
la nécessité d'informer les personnes arrêtées des
motifs de leurs arrestations, nous avons pris plusieurs initiatives pour
établir les mécanismes nécessaires au respect des droits
et libertés de la personne, particulièrement celui du droit
à la vie privée.
Au chapitre de la perquisition, le télémandat a
été introduit afin de prévenir les perquisitions sans
mandat et pour permettre un contrôle judiciaire maximal des atteintes
à la vie privée. Dans le même sens, Mme la
Présidente, les perquisitions dans les demeures ont été
interdites à moins que la vie ou la sécurité d'une
personne ne soit en cause. De plus, le droit reconnu par les chartes à
la protection des renseignements confidentiels a été
affirmé. Le caractère public de la justice et sa transparence ont
été également mis de l'avant dans le cadre des
règles de l'accès aux documents relatifs à la
perquisition. En outre, toutes les dispositions ont été prises
pour que les choses saisies soient remises à qui de droit, dans les
meilleurs délais, consacrant ainsi le droit à la jouissance
paisible des biens.
Le respect du droit à la liberté des citoyens a
également conduit à recourir à tous les moyens
raisonnables pour éviter que le défendeur ne soit
emprisonné. Ainsi, les mesures alternatives à l'emprisonnement
s'étendront désormais au jugement rendu par l'ensemble des cours
municipales. J'aimerais souligner que, pour emprisonner quelqu'un, par exemple,
pour une amende impayée, ça prendra un jugement par écrit,
motivé d'un juge. Le projet tient compte aussi du cas des personnes qui
peuvent difficilement être retracées parce qu'elles ont
déménagé.
Il y est prévu qu'au lieu de décerner un mandat
d'emprisonnement, parce qu'elles n'ont pas satisfait au jugement rendu contre
elles, le juge pourra décerner un mandat pour qu'elles soient
amenées devant le percepteur des amendes, afin qu'elles puissent
conclure une entente sur la manière de se conformer au jugement,
c'est-à-dire payer l'amende ou consentir à faire des travaux
communautaires.
Le projet de code a permis de réviser la loi existante pour en
retrancher notamment les éléments désuets, comme l'appel
par voie d'exposé de cause et pour éviter le recours abusif
à l'appel par voie de procès de novo. Le projet réduit
également le pouvoir d'exiger un cautionnement au seul cas où un
agent de la paix a des motifs raisonnables de croire que le défendeur
risque de quitter le territoire du Québec. De plus, le projet de code
clarifie de nombreuses règles appliquées en vertu de la "common
law" et de la jurisprudence, donc celle relative à l'arrestation ou
à la récidive. Par conséquent, la connaissance du droit
pénal ne sera plus restreinte aux seuls initiés et la
création d'une procédure uniforme facilitera la
compréhension des systèmes de justice pénale.
J'ajouterai, en terminant, que ce projet de loi se révèle
nécessaire pour réaliser la réforme des dispositions
pénales de nos lois, car les principes et les règles qu'il
véhicule doivent servir de base à la mise à jour de
toutes les lois du Québec en matière pénale. Cette
épuration de notre loi constituera un autre pas important vers la
garantie des droits et libertés des justiciables du Québec.
Mme la Présidente, en terminant, j'aimerais souligner que la loi
actuelle, la Loi sur les poursuites sommaires, a été
adoptée en 1922, c'est-à-dire 65 années plus tard. Cette
année, nous allons adopter un nouveau Code de procédure
pénale. Il s'agit d'une réforme majeure dans ce domaine, une
réforme importante et c'est cette année qu'on va le faire. Merci,
Mme la Présidente.
La Vice-Présidente: Merci, M. le ministre de la
Justice.
M. le député de Taillon.
M. Claude Filion
M. Filion: Merci, Mme la Présidente. Le ministre le sait,
lorsque l'Opposition a, dans les projets de loi présentés par le
ministère de la Justice, des fleurs à envoyer, elle les envoie
directement, mais lorsque l'Opposition a également des critiques
à formuler, elle les formule directement également.
Les derniers mots du ministre de la Justice ont été pour
signaler à quel point le Code de procédure pénale est une
réforme importante, une réforme fondamentale. Bien sûr,
nous sommes d'accord, ce projet de loi étant une révision
complète de toute la procédure applicable pour la sanction
pénale des droits et règlements du Québec, il en
découle automatiquement qu'il s'agit là d'une réforme
majeure, c'est bien évident. Pour les citoyens qui nous écoutent,
je pense qu'il n'y en a pas un ou qu'il y en a très peu qui ne sont pas
affectés par le nouveau Code de procédure pénale. Par
exemple, toute l'application du Code de la sécurité
routière, billets de stationnement, billets de vitesse en montant, toute
l'application des lois votées par ce Parlement, par exemple, la Loi sur
la qualité de l'environnement, la Loi sur les valeurs mobilières,
toutes les sanctions des lois du Parlement du Québec doivent passer par
la procédure du nouveau Code de procédure pénale. Donc,
point d'entente là-dessus entre les deux partis.
Il s'agit là, bien sûr, d'une réforme majeure.
Qu'est-ce qu'un ministre de la Justice ou un gouvernement devrait faire
lorsqu'on fait une réforme majeure dans le secteur du droit
pénal, donc un secteur du droit qui touche la liberté des
individus? Quand on parle de billets de stationnement, il s'agit
généralement d'amendes. Lorsqu'on parle d'infractions plus
sérieuses à nos lois, il faut voir et comprendre que les peines
imposées peuvent aller et vont jusqu'à l'emprisonnement, la
sanction la plus sévère qui existe dans nos droits. Enlever la
liberté à une personne, il n'existe pas de sanction, de
pénalité plus sévère que celle-là.
C'est un projet de loi important. Que doit faire le ministre de la
Justice? D'abord, il a présenté un avant-projet de loi, il y a
près d'un an. On a tenu une petite commission parlementaire
réduite, on a entendu des intervenants, c'est très bien, mais le
problème, c'est que le projet de loi 75 qui est ici pour adoption ce
soir n'est pas, devrais-je dire, la même chose que l'avant-projet de loi,
il a subi plusieurs modifications d'importance de la même façon
qu'il y a plusieurs chapitres importants du Code de procédure
pénale qui n'ont pas été amendés. (22 h 50)
Nous avons demandé au ministre de la Justice de tenir des
consultations particulières au lieu de procéder à toute
vapeur, à la fin de la session, alors que nous sommes déjà
surchargés, à preuve l'heure à laquelle nous discourons
sur ce projet de loi important. L'Opposition a dit au ministre de la Justice:
Si votre projet de loi est bon, il ne faudrait pas le cacher, il faudrait
demander à quelques organismes qui sont concernés de faire
entendre leur point de vue. Il nous dit que c'est important, que c'est majeur.
De plus, ce qu'il nous a laissé entendre, c'est que cela ne s'appliquera
pas maintenant, ce projet de loi, cela va prendre au moins six mois,
peut-être neuf mois, peut-être un an avant qu'il s'applique parce
qu'il est nécessaire de bâtir toute une loi d'application du Code
de procédure pénale qui, elle, va demander une révision de
toutes nos lois dans tous les secteurs d'activité de tous les
ministères qui sont ici. Cela va prendre au moins six mois,
peut-être un an. Il n'y a donc pas d'urgence. N'importe quel esprit
raisonnable comprend qu'il n'y a pas d'urgence.
Le ministre ne voulait pas avoir de consultations trop longues. Je lui
ai suggéré de consulter des organismes comme le Barreau, comme la
Commission des services juridiques, comme la ville de Montréal. Ce n'est
quand même pas demander la lune que d'exiger de simples éclairages
de la part d'organismes reconnus tels le Barreau et la Commission des services
juridiques. Le ministre nous a répondu que ce n'est pas
nécessaire.
J'aimerais, ce soir, vous faire part de lettres dont j'ai
déjà fait part en vain au ministre de la Justice. D'abord, en ce
qui concerne la Commission des services juridiques, une lettre datée du
7 décembre 1987: "La Commission des services juridiques a fait des
recommandations verbales et par écrit sur l'avant-projet de loi
relativement au Code de procédure pénale. La commission ne peut,
à court terme, procéder à un nouvel examen du projet de
loi mais réitère les prises de position qu'elle a
déjà exprimées." En deux mots, la Commission des
services
juridiques ne pouvait pas, en quelques jours, faire connaître son
point de vue sur le Code de procédure pénale. Pour elle,
c'était impossible et c'est normal.
Le Barreau du Québec, en date du 7 décembre 1987; ce sont
toujours des lettres adressées au ministre de la Justice. La lettre est
un peu longue: "À la suite de la présentation du projet de loi
75", celui que nous étudions... Le Barreau n'est quand môme pas le
dernier des organismes impliqués dans une réforme du droit
pénal. C'est une réforme majeure, nous en convenons. Comment
peut-on dire que le Barreau n'est pas intéressé à une
réforme du droit? "À la suite de la présentation du projet
de loi 75 - c'est écrit par le bâtonnier du Québec, Me
Michel Jolin - nous avons transmis aux membres de notre comité - parce
que le Barreau avait formé un comité - ce projet de loi afin que
ces derniers examinent à nouveau le texte proposé et s'assurent
que les grands principes de droit que nous soulevions dans notre mémoire
avaient été pris en considération. Nous serons en mesure
de vous faire part de nos commentaires écrits dès le vendredi 11
décembre prochain." C'est une lettre du 7 décembre. À
cette date, nous commencions l'étude en commission parlementaire avec le
ministre. Nous lui avons montré cette lettre, nous lui avons fortement
suggéré de tenir une commission parlementaire, ce qu'il n'a pas
voulu faire.
En date du 15 décembre, à peu près la
dernière journée de notre étude, le Barreau du
Québec, sous la plume de Me Michel Jolin, bâtonnier du
Québec, nous disait: "Notre comité ne désire que
réaffirmer les grands principes de droit qui avaient été
soulevés en commission parlementaire. En effet, il est manifeste que les
mises en garde du Barreau n'ont pas été retenues par les
autorités gouvernementales." Ce n'est pas moi qui parle, c'est le
Barreau, l'organisme habilité, en termes de problèmes juridiques,
à fournir un éclairage au ministre de la Justice. Le Barreau,
c'est un partenaire, en quelque sorte, du ministère de la Justice dans
ce dossier, comme dans tous les autres. Qu'a fait le ministre de la Justice? Il
a décidé plutôt de procéder à toute vapeur,
de passer le rouleau compresseur sur le Code de procédure pénale.
Nous avons dû siéger, je ne sais pas combien d'heures, près
d'une cinquantaine d'heures, dans les dix derniers jours, pour adopter,
à la vapeur, un projet de loi qui contient, selon ses propres dires, une
réforme majeure. Ce, sans pouvoir bénéficier de
l'éclairage légitime du Barreau du Québec, de la
Commission des services juridiques ou des autres organismes qui eux, vont
être appelés à vivre avec le projet de loi.
Ce qui a donné quoi, Mme la Présidente? Selon un rapide
relevé, il y a eu 56 amendements au Code de procédure
pénale, dont certains touchent les droits les plus fondamentaux. C'est
comme si le ministre de la Justice avait été pressé
d'ajouter à son tableau de chasse le Code de procédure
pénale, alors que tout notre travail ne donne rien tant qu'il n'entre
pas en vigueur. Pourquoi cette hâte, pourquoi cette précipitation
à vouloir adopter un projet de loi? Est-ce pour fournir au leader du
gouvernement l'occasion de dire, demain, en faisant le bilan de la session:
Écoutez, on a adopté des gros projets de loi, 371 articles, le
Code de procédure pénale, une réforme majeure du droit
pénal au Québec. Je dis, Mme la Présidente, qu'agir avec
une telle désinvolture, dans un dossier qui implique la liberté
des individus, n'a aucun sens pour le ministre de la Justice.
Ce Code de procédure pénale sera appliqué dans
toutes les Cours municipales, sera appliqué dans toutes les Cours des
sessions de la paix, lorsqu'elles siégeront sur une matière
sommaire, sera appliqué, en somme, dans toutes les cours où la
plupart des citoyens vont ou sont appelés à aller comme
témoins ou même comme accusés. Qui ne s'est pas
manifesté à une Cour municipale à l'occasion d'une
contravention? Qui n'a pas reçu du ministère du Loisir, de la
Chasse et de la Pêche un billet d'infraction? Est-ce que c'est le type de
justice qu'on désire offrir aux Québécois, comme le
ministre de la Justice disait tantôt, une justice accessible et de
qualité?
Je réponds qu'on ne peut pas, décemment, dire qu'on
présente un Code de procédure pénale qui se tient debout.
Il y a trop de lacunes dans ce Code de procédure pénale qui,
pourtant, part d'une bonne réflexion, qui, pourtant, contient
d'excellents principes mais il a été fait trop vite. À
preuve, 56 amendements dont certains en bout de table et ensuite on demandera
aux juges d'interpréter ces articles et de faire preuve de la plus
grande sagesse possible alors que le législateur, dans ce cas-ci, n'a
pas pris tout le soin, toute l'attention pour faire un Code de procédure
pénale qui se tient de a à z. Il y a eu, je le concède,
énormément d'améliorations apportées, lors de la
commission parlementaire, lors de l'étude article par article. Le
ministre s'est montré ouvert - je le dis aussi fort que je le critique -
à plusieurs suggestions formulées par l'Opposition. Mais ce n'est
pas vrai qu'entre parlementaires on peut bâtir un Code de
procédure pénale qui, sans être parfait... La perfection
n'est pas de ce monde, je le sais, et elle n'est pas du Code de
procédure pénale et elle ne le sera jamais mais, au moins, qu'on
prenne le temps nécessaire pour bien évaluer l'application de
certains droits, et je vais donner deux exemples. Premièrement, on a eu
un débat là-dessus, je suis convaincu que l'éclairage
du
Barreau et de la Commission des services juridiques aurait pu convaincre
le ministre. Lors d'une arrestation, nous avons demandé au ministre
d'appliquer très strictement la jurisprudence découlant de la
charte pour que, dès qu'une personne est arrêtée, elle soit
informée immédiatement des motifs de son arrestation et qu'on
puisse également l'informer immédiatement de la
possibilité pour elle d'avoir recours à un avocat. Le ministre a
refusé d'adopter cet amendement qui, pourtant, découle d'une
application logique des principes contenus dans la Charte
québécoise des droits et libertés de la personne et dans
la Charte canadienne des droits et libertés. Je suis convaincu que, si
le Barreau et la Commission des services juridiques étaient venus en
commission parlementaire, ils auraient également mentionné le
même point de vue et le ministre aurait finalement entendu raison. (23
heures)
Deuxième exemple. D'abord, il faut savoir que le Code de
procédure pénale est farci de pouvoirs de réglementation
qui imposent des frais. On connaît le principe général: En
droit criminel, lorsqu'une personne est accusée, elle a le droit de se
défendre et, si elle perd sa cause, elle ne paie pas de frais. Mais le
simple citoyen qui serait aux prises avec une loi provinciale, à peu
près à chaque étape des procédures du Code de
procédure pénale il va être aux prises avec des frais.
D'abord, un exemple: Un témoignage est déposé au lieu du
témoignage du policier qui vous a donné un billet de vitesse. Le
type veut se défendre et dit: Bon, je vais faire venir le policier, je
veux l'interroger. C'est un droit fondamental, une défense pleine et
entière. Je veux l'interroger. À ce moment-là, le citoyen
est passible de payer les frais du témoignage du témoin ou du
policier, dans certains cas. Et, partout, dans le Code de procédure
pénale, on retrouve cette espèce d'obsession qui nous vient
directement du Conseil du trésor et à laquelle participe le
ministre de la Justice: il faut que la justice soit rentable.
On me souffle à l'oreille - et avec raison, Mme la
députée de Marie-Victorin -que cela va coûter cher
d'être innocent. Et cela va coûter cher d'être coupable
aussi. Alors que, si un individu est accusé d'un crime grave, un
meurtre, il a droit au procès devant jury sans frais, le simple citoyen
qui veut uniquement contre-interroger le policier qui lui a donné un
billet est passible, dans certains cas - pas dans tous les cas - de frais.
Deux exemples où la Charte des droits et libertés,
où les principes fondamentaux de notre droit ont été
écartés. J'ai dit, et il est vrai, que le ministre s'était
montré très ouvert aux amendements proposés par
l'Opposition. Mais ce n'est pas vrai que l'Opposition ou les légistes du
gouvernement - que je tiens à féliciter, d'ailleurs, parce qu'ils
ont fait, dans ce dossier, compte tenu des circonstances, un excellent travail
- ce n'est pas vrai que nous tous réunis pendant ces 40 ou 50 heures de
commission parlementaire avons pu finalement faire toute la lumière sur
le Code de procédure pénale. Pourquoi avoir refusé de
prendre deux heures je l'ai demandé au ministre - pour entendre le
Barreau, la Commission des services juridiques et la ville de Montréal,
peut-être, qui administre un contentieux de masse énorme? C'est
une véritable machine à saucisse que constitue le contentieux de
la ville de Montréal, à cause du nombre inqualifiable de dossiers
qui circulent à la ville de Montréal, en termes de stationnement,
d'infractions aux règlements municipaux, d'infractions aux
règlements de circulation. C'est énorme, l'activité en
Cour municipale de Montréal; il suffit de s'y être rendu à
une reprise pour le constater. Neuf ou dix cours, du matin au soir, qui
n'arrêtent pas et, dans certains cas, une dizaine de procédures
à l'heure.
D'ailleurs, le ministre a montré tellement de désinvolture
dans ce projet de loi que, me croyez-vous, il a accusé l'Opposition de
"filibuster". Le ministre n'est pas candide, il a lui-même
participé à des "filibusters" d'importance lorsqu'il était
dans l'Opposition. Il sait fort bien ce qu'est un "filibuster". L'Opposition a
présenté une motion. Je fais appel à la grande
expérience du leader adjoint du gouvernement. L'Opposition a
présenté une motion visant à faire entendre trois groupes
en même temps. Nous l'avons débattue pendant quinze minutes. Le
ministre nous accuse de "filibuster" son projet de loi qu'il dit être une
réforme majeure. Franchement, M. le ministre, lorsque je vous ferai un
"filibuster", vous pourrez l'appeler comme tel et vous aurez raison. Je pense
qu'il est à peu près inqualifiable d'avoir eu une perception
semblable du travail réalisé en commission parlementaire.
Mme la Présidente, une des difficultés majeures du Code de
procédure pénale réside dans le fait que ce Code de
procédure pénale a dû osciller entre deux principes
importants. D'une part, ce que j'appelais tantôt les contentieux de
masse, c'est-à-dire, surtout, les contentieux en matière de
circulation, de sécurité routière. C'est énorme.
À Montréal, à Québec, partout. Mais, ces
contentieux de masse entraînent, généralement, des amendes
peu élevées. D'un autre côté, il y a aussi
l'emprisonnement qui peut découler de l'application de certaines lois,
notamment de la Loi sur la qualité de l'environnement, du Code de la
sécurité routière, dans certains cas, et,
également, d'autres lois comme celle sur les valeurs
mobilières.
Le projet de loi suggère de ramasser toutes ces infractions dans
un même sac et
de faire la même procédure pour un billet de stationnement
pour lequel vous pourriez avoir 10 $ d'amende et pour une infraction à
la Loi sur la qualité de l'environnement pour laquelle vous pourriez
être condamné à un an de prison. Même
procédure pour le contentieux de masse que pour les infractions plus
sérieuses qui peuvent conduire à l'emprisonnement et qui
conduisent à l'emprisonnement. Ce n'était pas facile pour le
ministère, pour le ministre de ramasser cela dans une simple
procédure. On a choisi le constat d'infraction. Ce n'est pas mauvais. Je
l'ai dit au ministre en commission parlementaire, je le redis ce soir. Ce n'est
pas mauvais, sauf qu'il fallait faire attention pour protéger les droits
fondamentaux qui découlent de la charte et qui découlent de la
tradition du droit pénal et du droit criminel.
Le Barreau écrit dans sa lettre: II est manifeste que les mises
en garde du Barreau n'ont pas été retenues par les
autorités gouvernementales. En référant aux grands
principes de droit, il faisait allusion à quoi?
Il faisait allusion au droit de l'inculpé à une
décision impartiale. Il faisait allusion à la présomption
d'innocence. Il faisait allusion à la condamnation de l'inculpé
sur une preuve inadmissible, mais cela je dois vous avouer que cela a
été corrigé. Il faisait allusion au droit de
l'inculpé d'être informé immédiatement de ce qu'on
lui reproche; malheureusement, cela n'a pas été corrigé.
Il faisait allusion au droit de l'inculpé à une défense
pleine et entière; malheureusement, ce principe est
écorché dans le Code de procédure pénale par
certains articles, notamment par celui qui impose des frais à
l'accusé qui désire tout simplement se faire valoir et notamment,
également, dans la procédure de rétractation de jugement
où on demande à l'accusé de faire sa défense avant
que ce soit son procès. C'est du jamais vu.
Je vois le député de Vaudreuil-Soulanges, un bon juriste,
qui, déjà, sourcille en entendant qu'on pourrait demander
à un accusé de faire une défense avant que ce soit son
procès. Ce n'est pas moi qui le fais sourciller. C'est le projet de loi,
M. le Président, qu'on est en train d'adopter.
Il y a, aussi le respect de la res judicata, bien que je dois dire qu'il
y a eu beaucoup d'amélioration à ce chapitre, et le droit de
l'inculpé d'avoir les délais nécessaires pour faire
connaître son plaidoyer. Je suis généralement satisfait des
délais qui sont contenus dans le Code de procédure
pénale.
Bref, on l'a vu, un Code de procédure pénale ne doit pas
être traité comme une simple loi modifiant un district judiciaire.
C'est un peu plus important que cela. Le ministre a cette mauvaise habitude de
se montrer désinvolte vis-à-vis de ses projets de loi, plus
préoccupé, comme je le disais tantôt, de garnir son tableau
de chasse législatif que de faire en sorte que le contenu de ses lois
soit vécu par les citoyens de façon honnête, juste, autant
en hiver qu'en été, et que ça fonctionne. Mais le
ministre, à l'occasion, on dirait, veut pouvoir dire: Écoutez,
j'ai adopté, vous savez, le Code de procédure pénale. Il
n'entrera pas en vigueur avant au moins un an votre Code de procédure
pénale et, à mon avis, il devrait faire l'objet de modifications
avant même son entrée en vigueur tellement il contient encore,
malgré ses bons côtés, des éléments qui
doivent être corrigés. (23 h 10)
M. le Président, les arguments que je vous donne ce soir
devraient suffire, je pense, à convaincre le ministre - il n'est pas
trop tard - de retarder l'adoption de ce projet de loi pour assurer quoi,
finalement? Qu'est-ce qu'on fait ici ce soir? On s'assure que les citoyens
puissent avoir accès à une procédure judiciaire qui tienne
compte des principes de notre droit. C'est tout.
Le ministre de la Justice, désinvolte comme il l'a
été au début de la commission parlementaire - à la
fin il l'était moins, mais au début ce n'était pas facile
- voyait des "filibusters", comme je le disais tantôt, à la
moindre suggestion d'amendement. Mais au fur et à mesure que nous avons
progressé dans nos travaux, je dois le souligner, il y a eu
énormément d'améliorations. Nous avons tenté de
bonifier ce projet de loi et il a été bonifié, quand
même, d'une façon relativement importante sur certains points.
Mais il y a des points qui demeurent, en tout cas, à mes yeux, et, si
j'en parle ce soir à cette heure tardive, c'est parce qu'il y a
là-dedans des choses qui me tiennent à coeur et qui devraient
tenir à coeur à l'ancien professeur de droit qu'était le
ministre de la Justice, soit qu'un citoyen a droit à un procès
juste et équitable. Heureusement, d'ailleurs, que le ministre de la
Justice fut attentif à certaines de nos suggestions et son équipe
qui l'entoure également.
Je voudrais signaler en terminant quelques problèmes importants
du projet de loi. D'abord, le ministre a fait allusion tantôt aux mesures
alternatives à l'emprisonnement. Le projet de loi contient encore des
dispositions qui feront en sorte que la situation actuelle perdurera dans nos
prisons, notamment parce que de 40 % à 50 % des places dans les
institutions carcérales sont occupées au moment où l'on se
parle, par des gens qui n'ont pas payé leurs amendes. Ce sont les
chiffres du rapport Landreville qui sont vérifiés et
vérifiables: 40 % à 50 % des places en prison. Or, ça
coûte aux citoyens 85 $ par jour pour tenir ces gens-là en prison.
Regardez le paradoxe, il est frappant: l'État veut se faire payer de
l'argent, le citoyen n'a pas d'argent, on l'envoie en prison et ça nous
coûte 85 $ par jour. Savez-vous
pourquoi les citoyens ne paient pas dans bien des cas? Parce qu'ils ne
peuvent pas payer et ils pourront encore moins payer avec un Code de
procédure pénale qui ne finit pas d'ajouter des frais par-dessus
des frais, pardessus des frais, par-dessus des frais. Un billet de 20 $
reçu en vertu du Code de procédure pénale pourra
facilement grimper dans les trois chiffres avec le code qu'on a là, avec
tous les règlements qu'il y a là. D'ailleurs, avec les
règlements sur les frais qui vont s'ajouter - le ministre m'a dit qu'il
m'enverrait le montant des frais, qu'il me l'envoie - ça ne pourra
certainement pas être moins de 100 $.
Le type qui n'a pas pu payer ses 20 $ ou ses 75 $ parce qu'on lui donne
un délai de 30 jours seulement pour payer, il reçoit une amende
de 50 $ ou 75 $. Le père de famille qui gagne 266 $ et qui a deux
bouches à nourrir, plus celle de son épouse, il a prévu
ses paies et on lui donne 30 jours pour payer. S'il ne paie pas, toute la
procédure s'enclenche. La machine à saucisse part avec des frais
à chaque tour de manivelle. Le type qui n'a pas l'argent pour payer
l'amende au bout de 30 jours ne l'aura pas plus dans deux mois lorsque le
jugement sera rendu et que le montant aura doublé, triplé et
quadruplé. Où vont finir ces gens-là? En prison. Est-ce
que ce sont des criminels?
Vous m'indiquez qu'il reste deux minutes. S'il ne restait que deux
personnes en prison pour défaut de paiement d'amendes, je serais bien
plus heureux, mais on en a à peu près la moitié. Non, ce
ne sont pas des criminels et l'État, est-ce qu'il y gagne quelque chose?
Que gagne l'État à envoyer des gens qui n'ont pas d'argent dans
bien des cas? Rien.
Les mesures alternatives à l'emprisonnement, parce que vous
m'indiquez qu'il ne reste que deux minutes, c'est beau mais le problème
c'est que les mesures compensatoires qu'on va offrir dans certains cas à
défaut d'amende ne sont pas prêtes dans toutes les régions
du Québec. Il y a des municipalités, celle de Granby j'en suis
sûr, où il n'y a pas de service de perception d'amendes, où
il n'y a pas de mesures compensatoires. Qu'est-ce que cela veut dire pour ces
gens, qu'ils vont avoir un traitement différent de celui qui existe
à Montréal? Cela veut dire qu'à Montréal on ne sera
pas obligé d'aller en prison mais qu'à Granby on va y aller? M.
le ministre, il faut assurer l'uniformité des mesures alternatives
à l'emprisonnement partout au Québec. Il faut continuer le
travail qui avait été amorcé par le gouvernement du Parti
québécois en 1982. Cela fait deux ans que vous êtes au
pouvoir et il n'y a rien de fait au moment où l'on se parle. Pourtant,
on se dépêche pour adopter un Code de procédure
pénale.
Il ne me reste que quelques secondes. Je souligne à nouveau que
le projet de loi contient d'excellentes idées, que c'est une bonne
réforme, c'est une bonne motivation, il y a eu beaucoup
d'améliorations mais il reste malheureusement trop de lacunes dans le
projet de loi 75. Je vous remercie, M. le Président.
Le Vice-Président: Je vais maintenant reconnaître M.
le ministre de la Justice pour l'exercice de son droit de réplique.
M. Herbert Marx (réplique)
M. Marx: Merci, M. le Président. Premièrement, je
veux assurer aux téléspectateurs ce soir que le
député de Taillon est un excellent juriste. Cependant, on peut en
douter ce soir parce qu'il a fait un discours politique et non pas un discours
juridique.
Par exemple, le député a dit, et je trouve cela un peu
exagéré, que 45 % à 50 % des détenus dans les
prisons québécoises sont là pour non-paiement d'amende.
C'est complètement faux. Si ce que le député a dit est
vrai, nous avons ce soir 1500 détenus dans nos prisons pour non-paiement
d'amende. C'est complètement faux. Tout le monde sait cela. Mais le
député de Taillon a fait son discours politique et non un
discours juridique.
Il a commencé à dire, sans parler sur le fond, on adopte
ce projet de loi à toute vapeur. Mais il a oublié de dire qu'un
avant-projet a été déposé en décembre 1986,
il y a un an. Nous avons tenu une commission parlementaire au mois de mars 1987
où nous avons entendu, par exemple, le Barreau, la Commission des
services juridiques, la ville de Montréal et ainsi de suite. Nous avons
pris des notes, nous avons eu un échange d'idées et nous avons
modifié l'avant-projet avant de déposer un projet de loi et
celui-ci tient compte de toutes ces interventions du Barreau, de la Commission
des services juridiques, de la ville de Montréal et ainsi de suite,
c'est-à-dire tout le monde qui est venu devant la commission
parlementaire. Nous avons pris assez de temps pour nous assurer qu'il s'agit
d'un bon projet de loi, un projet qui mérite d'être
adopté.
Le député de Taillon a dit que cela ne presse pas
d'adopter ce projet de loi parce que cela ne va pas s'appliquer tout de suite,
que cela prendra une loi d'application. Mais, M. le Président, cela va
de soi que pour rédiger, pour préparer une loi d'application il
faut avoir une loi, il faut savoir ce qu'on va appliquer. La
nécessité d'adopter ce projet de loi ce soir, à cette
session, c'est pour nous donner la possibilité de préparer une
loi d'application. (23 h 20)
Le député a aussi abordé la question
des frais. Il a oublié de dire que dans la Loi sur les poursuites
sommaires il y a des frais judiciaires. Cela existe dans toutes les provinces
canadiennes. Dans toutes les lois sur les poursuites sommaires, il y a des
frais. La seule chose avec laquelle le député n'était pas
d'accord, c'était le montant des frais. Il veut s'assurer que ce ne
seront pas des frais déraisonnables. Je lui ai dit que lorsque nous
avons des règlements qui touchent les frais... On va lui envoyer des
exemplaires de ces règlements et, de toute façon, à cause
de la loi 12 que nous avons adoptée l'an dernier, les règlements
seront prépubliés 45 jours avant leur adoption et ce sera
même possible, pour les députés de l'Assemblée
nationale, d'abroger un règlement, le cas échéant. C'est
cela, la loi 12 que nous avons adoptée l'an dernier sur les
règlements.
Enfin, j'aimerais dire que quelqu'un qui veut vraiment comprendre la
portée de ce projet de loi et les modifications que nous avons faites en
commission parlementaire pour bonifier le projet de loi devra lire les
débats de la commission parlementaire. Je pense que, comme le
député de Taillon l'a dit lui-même, on a fait des
modifications, on a accepté des modifications, des amendements de part
et d'autre, qu'ils viennent des députés ministériels ou de
l'Opposition. Nous avons accepté des amendements pour bonifier le projet
de loi. C'est un projet de loi qui est mûr pour adoption et je comprends
qu'on va l'adopter ce soir. Merci.
Le Vice-Président: Le débat étant clos,
à cette étape de l'étude du projet de loi, est-ce que le
rapport de la commission des institutions qui a procédé à
l'étude détaillée du projet de loi 75, intitulé
Code de procédure pénale, est adopté?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président: Adopté. M. le leader adjoint du
gouvernement.
Adoption
M. Johnson: Afin de donner suite à un consentement qui est
intervenu entre les groupes parlementaires, je ferai motion pour adopter le
projet de loi.
Le Vice-Président: Très bien. La motion est faite
au nom du ministre de la Justice. M. le ministre de la Justice propose
maintenant la motion d'adoption du projet de loi 75, Code de procédure
pénale. Est-ce que cette motion est adoptée?
Une voix: Adopté.
Le Vice-Président: Oui, évidemment, cela prend un
consentement pour procéder à cette étape-ci. Il y a
consentement?
Une voix: Consentement. Une voix: C'est implicite.
Le Vice-Président: C'est implicite, donc, consentement. Je
devais m'en assurer expressément même si c'était implicite.
Le consentement étant là, la motion est adoptée. M. le
leader adjoint du gouvernement.
M. Johnson: M. le Président, je vous demanderais d'appeler
l'article 27 du feuilleton.
Projet de loi 80
Prise en considération
du rapport de la commission
qui en a fait l'étude
détaillée
Le Vice-Président: À l'article 27, nous sommes
à la prise en considération du rapport de la commission des
institutions qui a procédé à l'étude
détaillée du projet de loi 80, Loi modifiant la Loi sur le
courtage immobilier, présenté par le ministre de la Justice.
Est-ce qu'il y a des interventions à ce stade-ci? Il n'y a pas
d'intervention. Est-ce que le rapport est adopté?
Une voix: Adopté.
Le Vice-Président: Adopté. M. le leader adjoint du
gouvernement.
Adoption
M. Johnson: M. le Président, pour faire suite à un
consentement et au nom du ministre de la Justice, je fais motion pour adopter
ce projet de loi.
Le Vice-Président: Très bien. Le consentement est
acquis pour procéder à cette étape-ci. Est-ce que la
motion proposée par M. le ministre de la Justice visant à
l'adoption du projet de loi 80, Loi modifiant la Loi sur le courtage
immobilier, est adoptée?
Une voix: Adopté.
Le Vice-Président: Adopté. M. le leader adjoint du
gouvernement.
M. Johnson: M. le Président, je vous demanderais d'appeler
l'article 30 du feuilleton.
Projet de loi 98
Prise en considération
du rapport de la commission
qui en a fait l'étude
détaillée
Le Vice-Président: À l'article 30, nous allons
maintenant procéder à la prise en considération du rapport
de la commission des institutions qui a procédé à
l'étude détaillée du projet de loi 98, Loi modifiant le
Code civil en matière d'indexation de pensions alimentaires. Est-ce
qu'il y a des interventions? M. le député de Taillon.
M. Claude Filion
M. Filion: Oui, M. le Président. Vous avez appelé
le projet de loi permettant l'indexation de plein droit des pensions
alimentaires. Il s'agit finalement d'une clarification du droit actuel,
c'est-à-dire d'une mesure adoptée par le gouvernement
précédent permettant l'indexation des pensions alimentaires. Dans
ce cas-ci, l'indexation sera faite de plein droit. Cependant, et je tiens
à le répéter, ce n'est pas une indexation automatique. Le
juge a la faculté, le pouvoir, la capacité et la
compétence, lors de l'instruction de la requête pour pension
alimentaire, de faire en sorte que, pour différents motifs, il n'y ait
pas indexation de cette pension alimentaire. Voilà un premier point. Il
faudrait corriger l'information qui, malheureusement, a été
disséminée à la suite de mauvais communiqués de
presse issus du gouvernement à ce sujet.
Deuxièmement, ce projet de loi règle une partie du
problème, nous en convenons, mais le problème fondamental en
matière de pension alimentaire reste entier, en ce sens que le service
de perception des pensions alimentaires connaît, on le sait,
énormément de difficultés à cause d'un trop grand
nombre de dossiers. Rien dans ce projet de loi ne viendra corriger le
mécanisme du service de perception des pensions alimentaires ni
permettre - contrairement, encore une fois, à ce qui est répandu
- que la "collection", si je peux employer cet anglicisme, des pensions
alimentaires se fasse par l'État. Dans tous les cas, ce n'est pas
là l'objet du projet de loi. Il faut se déplacer, aller au
service de perception des pensions alimentaires; ma collègue de
Marie-Victorin traitera tantôt de l'état du service de perception
des pensions alimentaires, surtout dans la région de Montréal.
Là-dessus, malheureusement, le ministre n'a rien fait depuis deux ans,
de sorte qu'il existe encore énormément de problèmes sur
le plan de l'administration. Il aurait fallu, comme je l'ai souligné au
ministre lors de la commission parlementaire, envisager des mesures plus
progressites comme il en existe dans d'autres provinces, notamment au Manitoba,
pour permettre que le versement de la pension alimentaire se fasse d'une
façon plus rapide, plus automatique, si l'on veut, afin d'éviter
le genre de situation où les pensions alimentaires ne sont payées
que dans une proportion inférieure à 50 %.
Je tiens à souligner, comme ultime point là-dessus, qu'il
reste énormément à faire en matière de pensions
alimentaires et que la réflexion là-dessus devrait se poursuivre
chez les ministres soi-disant préoccupés par la condition
féminine. Donc, il y a 85 % des pensions alimentaires qui sont
versées par des hommes à des femmes et 15 % des pensions
alimentaires qui sont versées par des femmes à des hommes. Quand
même, tout le dossier des pensions alimentaires a
généralement été traité par des groupes de
femmes qui ont revendiqué, à l'époque, l'indexation qui a
été accordée par notre excollègue, M.
Marc-André Bédard, alors ministre de la Justice.
Malheureusement, depuis ce temps, il se fait peu de réflexion au
palier gouvernemental pour résoudre l'ensemble de la
problématique des pensions alimentaires. On n'a qu'à songer, par
exemple, aux conséquences fiscales d'une pension alimentaire. La pension
alimentaire est déduite en entier du revenu de celui qui la paie, mais
est imposée en entier, à 100 %, dans les mains de la personne qui
la reçoit. Là-dessus, la réflexion gouvernementale, on
n'en voit même pas le commencement d'un début. Alors, se
péter les bretelles sur ce projet de loi m'apparaît
carrément inopportun, pour ne pas dire indécent, compte tenu des
problèmes vécus par les personnes, notamment les femmes, qui sont
dans des situations d'extrême dépendance vis-à-vis de leur
pension alimentaire, qui ne peuvent pas la "collecter", qui ne peuvent pas la
percevoir, devrais-je dire.
En ce sens-là, M. le Président, c'est une étape
bien mince et il faut continuer le travail. Peut-être que le travail
devrait se faire par d'autres ministres que le ministre de la Justice qui fait
sa part, il modifie le Code civil; le Code de procédure civile, c'est
déjà fait. Je pense notamment à la ministre
déléguée à la Condition féminine que,
malheureusement, on n'entend très peu parler sur ces questions depuis
deux ans qu'elle est en poste. On a fait le tour, ma collègue de
Marie-Victorin et moi, des maisons de femmes au Québec - je vais vous le
dire - et des groupes de femmes; les pensions alimentaires, c'est une
problématique qui mérite autre chose qu'une politique familiale
vide. Même si on a cet article 638 modifié, il demeure, pour
l'avoir constaté comme praticien matrimonial à une certaine
époque et pour l'avoir constaté encore plus dans nos
tournées en écoutant les gens, qu'il y a énormément
de chemin à faire. Je vous remercie.
Le Vice-Président: Je vais maintenant reconnaître,
comme prochain intervenant,
Mme la députée de Marie-Victorin. (23 h 30)
Mme Cécile Vermette
Mme Vermette: Ah, il est gentil, il va attendre!
M. le Président, effectivement, en ce qui concerne le projet de
loi 98, qui a trait à l'indexation des pensions alimentaires pour les
femmes, nous sommes tous censés être égaux devant la loi,
mais, lorsqu'on arrive aux femmes, il y a des façons
d'interpréter le niveau d'égalité juridique des femmes.
C'est assez humiliant dans bien des cas parce que les femmes doivent toujours
faire la preuve que, pour la contribution ou la pension qui leur revient,
vraiment, elles méritent le dû et qu'elles méritent cette
pension, qui, très souvent reconnaît plus ou moins l'apport
qu'elles ont apporté à l'intérieur de la famille. M. le
Président, j'aurais aimé que, dans cette politique, le ministre
de la Justice aille beaucoup plus loin en ce qui concerne l'indexation des
pensions alimentaires. C'est un problème crucial en ce qui a trait aux
mères monoparentales. Lorsque l'on sait qu'à la suite d'un
divorce, la première année, il est difficile pour l'homme de se
retourner, mais, par contre, il est prouvé que, après la
première année, c'est l'homme qui s'enrichit d'environ 42 % et la
femme s'appauvrit d'environ 73 % selon le Conseil du statut de la femme. La
femme, règle générale, demeure à la maison. Elle a
de la difficulté à se trouver un emploi. Elle doit se consacrer
à l'éducation de ses enfants. Et il lui est dificile de trouver
un travail assez rémunérateur de sorte que cette pauvre femme
doit payer les frais de gardienne et tous les frais inhérents comme
mère monoparentale. Très souvent, plus souvent qu'autrement
surtout, ce qui se passe pour les femmes, c'est la difficulté de
percevoir leur pension alimentaire. Elles sont dans un état de
dépendance devant le conjoint sur lequel doit reposer la pension
alimentaire. Très souvent, il faut entreprendre encore des
procédures pour faire valoir un droit qui leur est reconnu.
M. le Président, il aurait fallu qu'on puisse aller beaucoup plus
loin au sujet des perceptions et que l'État, comme cela se passe au
Manitoba et même en Ontario, institue des mesures beaucoup plus
progressives en ce qui concerne la reconnaissance d'un droit tel que les
perceptions alimentaires pour les femmes et qu'on ait directement la perception
par l'État, afin que justement ces femmes n'aient plus à aller
quémander aux tribunaux administratifs la reconnaissance d'un jugement,
ce qui est tout simplement une perte de temps et d'énergie, et
très souvent une augmentation de stress pour la femme.
Alors, après on se tare qu'un gouvernement bien pensant au nom
d'une politique familiale met tout en oeuvre pour assurer une qualité de
vie à l'intérieur de la famille. Lorsqu'on parle famille, il
faudrait penser aussi à toutes les formes de familles. Que voulez-vous?
Dans notre société, plus souvent qu'autrement maintenant, la
majorité des mariages aboutissent à une séparation ou un
divorce. De plus en plus, nous aurons à vivre ces séparations et
ces divorces. Je pense que l'une des préoccupations du gouvernement,
c'est d'être... L'art de gouverner, c'est de prévoir. Je crois
qu'un gouvernement qui prend ses responsabilités, surtout un
gouvernement qui a démontré vis-à-vis des femmes beaucoup
d'empressement à aller chercher leur vote, aurait pu démontrer
beaucoup plus de ferveur à défendre les intérêts des
femmes et démontrer un esprit beaucoup plus progressif vis-à-vis
des lois qui favorisent la place et le respect des femmes dans notre
société québécoise. C'est un gouvernement
très timide à l'égard des femmes. Je pense que c'est un
gouvernement qui se préoccupe du droit des femmes lorsque c'est le temps
d'acquérir leur vote. Je vous remercie, M. le Président.
M. Herbert Marx
Le Vice-Président: Je cède la parole à M. le
ministre de la Justice pour une intervention d'un maximum de cinq minutes
M. Marx: Merci, M. le Président. J'aimerais corriger
certaines faussetés sur le fond du projet de loi. C'est vraiment une
indexation automatique des pensions alimentaires, de toutes les pensions. Le
1er janvier 1988, toutes les pensions seront automatiquement indexées.
C'est quoi cela? S'agit-il d'une indexation automatique ou est-ce une
indexation semi-automatique ou ce n'est pas une indexation? C'est quoi? C'est
évident, c'est une indexation automatique. En fait, toutes les femmes
qui reçoivent une pension alimentaire verront leur pension
indexée le 1er janvier 1988. J'aimerais souligner, M. le
Président, que le Service de perception du ministère de la
Justice indexera aussi automatiquement les pensions qu'il a la
responsabilité de percevoir.
En terminant, M. le Président, il est très simple pour les
péquistes de dire aujourd'hui: vous n'avez pas fait assez. Mais
lorsqu'ils ont été au pouvoir pendant 10 ans, ils n'ont rien
fait. Comment se fait-il que les péquistes, lorsqu'ils étaient au
pouvoir, n'ont pas prévu une indexation automatique des pensions? Ils
ont été au pouvoir pendant dix ans, c'était possible
d'adopter une telle loi, et cela n'a pas été fait. M. le
Président, ce soir, nous allons adopter ce projet de loi qui
prévoit l'indexation automatique des pensions alimentaires. Je pense que
c'est une
grande amélioration en ce qui concerne la situation des femmes
qui bénéficient d'une pension alimentaire. Merci.
M. Filion: M. le Président, en vertu de notre
règlement...
Le Vice-Président: Oui, un instant. M. le
député de Taillon, sur une question de règlement.
M. Filion: Oui, en vertu de notre règlement, est-ce que je
pourrais adresser une question au ministre sur ses plus récents
propos?
Le Vice-Président: Oui, juste un instant. Simplement pour
que vous puissez adresser une question, comme l'article 213 le prévoit,
je dois avoir le consentement de la personne à qui vous voulez poser la
question. Y a-t-il consentement, M. le ministre de la Justice? Il n'y a pas de
consentement.
M. Marx: D'accord, il y a consentement.
Le Vice-Président: II y a consentement. Très bien,
M. le député de Taillon, mais je vous rappelle une chose: la
question doit être brève, la réponse également. Il
ne s'agit pas de susciter un nouveau débat.
M. Filion: Pourquoi le ministre de la Justice continue-t-il de
dire à la population du Québec, et en particulier aux
créanciers de pensions alimentaires, que toutes les pensions
alimentaires seront indexées alors que le juge a le pouvoir de ne pas
indexer les pensions alimentaires?
Le Vice-Président: M. le ministre de la Justice.
M. Marx: M. le Président, parce que j'ai dit la
vérité. Le 1er janvier 1988, toutes les pensions seront
indexées. Je pense que c'est simple et que tout le monde comprendra
cela. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président: Très bien. Le débat
étant clos, le rapport de la commission des institutions qui a
procédé à l'étude détaillée du projet
de loi 98, Loi modifiant le Code civil en matière d'indexation de
pensions alimentaires est-il adopté?
Une voix: Adopté.
Le Vice-Président: Adopté. M. le leader adjoint du
gouvernement.
M. Johnson: Oui, M. le Président. S'il y avait
consentement, je ferais motion au nom du ministre de la Justice pour adopter ce
projet de loi.
Le Vice-Président: Y a-t-il consentement pour que nous
passions à l'étape suivante de l'adoption du projet de loi?
Une voix: Oui.
Adoption
Le Vice-Président: II y a consentement. En
conséquence, la motion du ministre de la Justice proposant l'adoption du
projet de loi 98, Loi modifiant le Code civil en matière d'indexation de
pensions alimentaires est-elle adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président: Adopté. M. le leader adjoint du
gouvernement.
M. Johnson: M. le Président, je vous demanderais d'appeler
l'article 36 du feuilleton.
Projet de loi 61 Adoption
Le Vice-Président: L'article 36 du feuilleton. M. le
ministre de la Justice propose maintenant la motion d'adoption du projet de loi
61, Loi modifiant la Loi sur la division territoriale. Y a-t-il des
interventions à cette étape-ci?
Une voix: Non.
Le Vice-Président: II n'y a pas d'intervention. Cette
motion d'adoption du projet de loi 61 est-elle adoptée?
Une voix: Adopté.
Le Vice-Président: Adopté. M. le leader adjoint du
gouvernement.
M. Johnson: M. le Président, je vous demanderais d'appeler
l'article 38 du feuilleton.
M. Marx: Non, non, il faut l'adopter en premier.
M. Johnson: C'est fait.
Projet de loi 66 Adoption
Le Vice-Président: Nous étions, M. le ministre de
la Justice, évidemment en troisième lecture ou au niveau de
l'adoption du projet de loi. La même chose pour l'article suivant,
l'article 38. M. le ministre propose maintenant la motion d'adoption du projet
de loi 66, Loi modifiant la Loi sur la
protection du consommateur. Y a-t-il des interventions?
M. Marx: Oui, M. le Président.
Le Vice-Président: M. le ministre de la Justice.
M. Herbert Marx
M. Marx: M. le Président, cette loi modifie la Loi sur la
protection du consommateur afin de donner plus de protection aux consommateurs
du Québec. Vous savez, M. le Président, que nous avons, depuis
deux ans, adopté un certain nombre de lois pour protéger
davantage les consommateurs. Il y a la loi sur les saisies abusives. Pour
mettre fin à ces saisies, j'ai demandé en 1984 ou 1985, lorsque
j'étais dans l'Opposition, au ministre de la Justice d'adopter une telle
loi, cela n'a jamais été fait, nous l'avons fait. (23 h 40)
Deuxièmement, nous avons modifié la Loi Lacombe en ce qui
concerne, par exemple, les biens insaisissables des personnes qui sont l'objet
d'une saisie. Cela a été adopté également.
Troisièmement, nous avons adopté la loi sur les
préarrangements funéraires pour protéger davantage les
consommateurs qui achètent de tels préarrangements.
J'aimerais insister, sur le fait que presque tous les États, au
moins toutes les provinces canadiennes, ont une telle loi et nous sommes la
dernière province à adopter une loi sur les
préarrangements funéraires. C'est pourquoi nous avons
proposé un tel projet de loi et cela a été adopté
cette année.
Le projet de loi 66 va encore plus loin dans la protection des
consommateurs. Par exemple, il y a des protections en ce qui concerne les
contrats à distance. Il y a des protections en ce qui concerne la
réparation et le remplacement des odomètres. Il y a
également des protections en ce qui concerne certaines offres de
crédit.
En terminant, M. le Président, il s'agit d'une loi qui modifie la
Loi sur la protection du consommateur, afin de raffermir les droits des
consommateurs au Québec. Merci.
Le Vice-Président: Je vais maintenant céder la
parole à M. le député de Shefford.
M. Roger Paré
M. Paré: Merci, M. le Président. Très
rapidement, sur le projet de loi 66. Cela va devoir être rapide, parce
que c'est un petit projet de loi. C'est un peu amusant de regarder la
façon dont procède le ministre de la Justice, responsable de la
Protection du consommateur, face à cette responsabilité qu'il a
de la protection du consommateur. À chaque session, le ministre vient
déposer un petit projet de loi pour montrer qu'il s'occupe de la
protection du consommateur, comme quoi il a ce souci, cet intérêt
de s'occuper de la protection du consommateur. C'est un projet de loi pour
lequel on va voter de ce côté-ci. On est d'accord, parce que cela
vient modifier la Loi sur la protection du consommateur, votée par
l'ancien gouvernement du Parti québécois.
Donc, cela va dans le bon sens, mais c'est un tout petit projet de loi
qui amène quatre modifications. On va faire le tour rapidement - cela
vaut la peine - en donnant quelques commentaires, entre autres en ce qui
concerne les appareils domestiques. Maintenant, tout comme pour les
réparations automobiles, on va préciser sur la facture s'il
s'agit de pièces neuves, usagées, réusinées,
remises à neuf et le prix sur la facture. Donc, c'est une modification.
On va être d'accord, c'est important. C'est une garantie
supplémentaire dans le sens qu'il y a plus d'information. Donc, la
facture va être plus complète. On va indiquer dessus ce que je
viens de vous dire: le morceau qu'on a posé dans la laveuse à
vaisselle ou dans le réfrigérateur, c'est une pièce neuve,
c'est une pièce réusinée, c'est une pièce
usagée et le prix à côté. Donc, on va
détailler la facture. C'est un amendement sur lequel on va être
d'accord.
On a pu découvrir en commission parlementaire... Ce n'est rien de
nouveau; cela y était déjà, mais, à titre
d'information, je tiens à le préciser pour les gens qui
pourraient nous écouter. Sont inclus, dans les appareils domestiques,
les fours micro-ondes. C'est important, il y en a de plus en plus. Donc, je
pense qu'il faut le dire. Il faut informer la population qu'advenant un bris
à un appareil domestique, dont les fours micro-ondes, c'est couvert par
l'Office de la protection du consommateur. Donc, c'est bon de le dire. La
facture va être plus complète. C'est un des points.
Le deuxième. Cela protège le consommateur en cas de
contrat à distance, dans le sens que ce ne sera pas acceptable que le
commerçant perçoive un montant partiel ou total sur la vente
effectuée par contrat à distance. C'est une bonne mesure. Je
pense que les gens étaient déjà pas mal informés
la-dessus, puisqu'on sait combien est traitée et surveillée la
vente par les commerçants itinérants.
Une autre chose importante qui est dans la loi, c'est qu'il est interdit
d'envoyer une offre de crédit. Là-dessus, j'ai posé la
question au ministre et j'espère qu'il va surveiller cela de
près, c'est-à-dire un de ses collègues. Pour
empêcher que les gens souscrivent à une carte de crédit, il
sera défendu que cette adhésion à une carte de
crédit se fasse par la poste s'il n'y a pas eu
demande par le consommateur. Donc, cela peut permettre un recours au
consommateur, mais de là à ce que le consommateur soit bien
informé, qu'il sache la façon de procéder, c'est tout
autre chose. Mais, en même temps, le ministre responsable de la
privatisation et adjoint au ministre des Finances de l'autre côté
- il a d'autres titres qui ne me viennent pas à l'esprit - le
député d'Outremont qui a déposé un document
important puisqu'il s'agit du document sur le décloisonnement.
C'est la simplification des services financiers. Il s'agit de faire en
sorte que les services soient plus rapprochés du consommateur, du
citoyen. Est-ce que cela ne va pas dans le sens opposé? Je suis d'accord
avec ce qu'on retrouve dans le projet de loi 66, mais il faudrait que le
ministre fasse plus que faire adopter son projet de loi, qu'il surveille de
près ses collègues pour s'assurer que l'autre projet de loi qui
est également déposé de même que les autres qui le
seront au printemps ne viennent pas défaire ce qu'on a fait ici.
On retrouve un dernier point dans le projet de loi parce que, comme je
vous l'ai dit, c'est un petit projet de loi, et c'est celui de
l'odomètre. Quand on changera l'odomètre dans une automobile - le
"meter", pour être bien compris - on n'aura pas le droit de le mettre
à zéro. Donc, même s'il est neuf, il faudra mettre les
chiffres apparaissant sur le vieil odomètre. Mais ce ne sont que six
chiffres. Là où c'est important, c'est de savoir, dans les autos
usagées, si c'est une voiture qui a fait beaucoup de millage ou non. On
ne peut pas le savoir par cela, parce que ce sont six chiffres. Si on a
dépassé 90 000 kilomètres, soit 60 000 milles, on ne
pourra pas savoir, cela recommence à zéro. Nous avons
insisté là-dessus, parce qu'on trouvait important, justement, que
l'on oblige à avoir un odomètre de sept chiffres, parce que cela
se fabrique et que c'est maintenant disponible, afin que l'on sache si l'auto a
fait 40 000 kilomètres, 140 000 kilomètres ou 240 000
kilomètres.
Je dois vous dire que ce n'est pas long à atteindre parce que ma
voiture a deux ans et j'ai déjà au-dessus de 150 000
kilomètres de parcourus. Cela amène donc une protection, mais
très relative. Elle est tellement relative que l'on n'ira même pas
faire ce qu'on fait dans d'autres circonstances, soit des opérations
témoins, ce qui fait que la portée est très relative.
Mais, comme je vous le dis, ce sont tous des petits points qui vont dans le bon
sens. Le ministre va pouvoir dire que, cette année, il s'est
occupé du consommateur. Il aura déposé le projet de loi
66. Il y a quatre petites améliorations, dont la dernière avec
l'odomètre, et je vous ai démontré que ce que cela apporte
est très relatif. Au chapitre de la facturation pour les appareils
ménagers, oui, cela va dans le bon sens. C'était
déjà reconnu pour les automobiles. On va le reconnaître
pour les appareils ménagers. Je dis bravo! On ne peut pas être
contre cela. Tout le monde est pour la vertu, mais est-ce que c'est
effectivement une protection qui va assez loin?
En ce qui a trait aux autres mesures au sujet du crédit et des
contrats à distance, à la condition que d'autres lois d'un autre
ministre ne viennent pas les défaire, cela va aussi dans le bon sens.
Mais c'est ce qu'aura fait le ministre cette année en ce qui a trait
à la protection du consommateur. Pourtant, il a des dossiers très
importants qui viennent présentement affecter le consommateur
directement chez lui. Même s'il ne fait pas d'achat, il va être
victime, finalement, de décisions qui vont être prises et qui sont
très importantes. Je vais nommer seulement quelques-unes des situations
qui peuvent se produire ou des sujets sur lesquels le ministre aurait dû
intervenir, aurait dû se prononcer et il ne l'a pas fait.
Il ne l'a pas fait au point qu'il a dit en commission parlementaire: Je
n'ai pas besoin d'intervenir sur tous les sujets, j'ai des ministres sectoriels
qui s'en occupent. Ce n'est pas cela, un vrai ministre qui a la conscience, la
détermination et la volonté de protéger le consommateur.
C'est précisément de surveiller tout ce qui se passe et
d'intervenir auprès de ses collègues ou des autres gouvernements
pour s'assurer que le consommateur a une protection passablement importante.
Mais ce n'est pas ce qui se passe.
Le rééquilibrage des tarifs de Bell Canada, par exemple,
c'est un sujet d'actualité. Là-dessus, quand on a posé la
question la semaine passée, c'est le ministre des Communications qui
s'est senti obligé de se lever, même si j'avais posé la
question au ministre de la Justice, pour dire qu'il y avait effectivement eu
des échanges. Mais il n'y a pas eu de prise de position publique
là-dessus. Je ne le pense pas, parce qu'on l'aurait probablement su si
le ministre était intervenu pour donner son point de vue sur la
protection du consommateur directement au gouvernement concerné, soit le
gouvernement d'Ottawa. Ou, alors, s'il avait émis son opinion
publiquement et s'il l'avait transmise à son collègue des
Communications, on l'aurait probablement su. Mais non, dans cette situation,
dans ce problème de la tarification qui sera ramené en
février 1987 pour décision à Ottawa, le ministre
responsable de la Protection du consommateur n'est pas intervenu. On n'en a pas
entendu parler. On ne sait pas s'il va prendre position en faveur de la demande
des ACEFS qui dit que, finalement, si cela passe, cela veut dire que les gens
les plus démunis, les personnes les plus affectées par cette
décision. Elles vont l'être, c'est une
augmentation sans même que les gens changent la moindre chose sur
leur appareil téléphonique, sans même qu'ils fassent plus
d'interurbains, ces gens-là seront affectés. Pourtant, le
ministre ne s'est pas prononcé là-dessus. (23 h 50)
La publicité destinée aux enfants, il y a
déjà une année, on a demandé au ministre de lancer
un signal clair; il était même prêt à utiliser la
clause dérogatoire si nécessaire. Le ministre attend, mais en
attendant il se passe quoi? J'en ai informé le ministre et des plaintes
ont été portées. Il y a de la publicité
illégale, au moment où l'on se parle, dans la période
avant les fêtes, aux heures d'écoute des enfants, où des
enfants sont présents dans la publicité. On utilise des enfants
de moins de 13 ans à l'heure d'écoute de cette même
clientèle. Cela se produit sur une large échelle, mais pourtant
le ministre n'a fait aucune sortie là-dessus.
Je sais ce qu'il va me dire: La cause est entendue et on attend les
résultats. On attend. Il faudra arrêter d'attendre, puis agir.
S'il y a quelque chose d'important aussi, parce qu'on a connu au cours des deux
dernières années dans le secteur de la construction un
phénomène extraordinaire, cela bat tous les records... Oui, le
taux d'intérêt a baissé, la reprise économique, donc
cela va mieux. Les gens se sont mis à bâtir, mais pourtant depuis
1985, il y a une loi de votée qui permet au gouvernement de donner des
garanties pour les maisons neuves et la rénovation. Ce serait important
et, je me souviens, il y a un an et même plus, le ministre avait dit:
Oui, oui, on va y voir bientôt. Cela va se faire. Maintenant, on n'entend
plus parler du tout des garanties. Le ministre peut dire: Ça ne
dépend pas de moi, c'est le ministre du Travail qui est responsable de
mettre cela en vigueur, sauf que comme cela concerne la protection du
consommateur, ce serait au ministre de la Justice de faire les pressions
nécessaires et de s'assurer que ces articles seront mis en vigueur.
C'est voté.
Tout ce qu'il s'agit de faire maintenant, c'est de les appliquer, mais
on ne le fait pas. Pourtant, c'est majeur, parce que lorsqu'on achète
une maison, c'est un achat énorme, c'est un montant important d'investi.
Il faudrait être protégé. Non, on ne protège pas
quand il s'agit de maisons neuves, de rénovation, même s'il y a
des milliers de dollars d'investis, mais on va protéger quand il s'agira
d'appareils domestiques.
Oui, on peut faire les deux et on devrait faire les deux. Il y a un
dernier sujet sur lequel on entend des commentaires. Ce sont toujours les
associations de la protection du consommateur, les ACEF et les autres groupes
qui viennent dire leurs inquiétudes face au libre-échange. Les
gens manifestent leurs craintes, leurs inquiétudes, mais on n'a jamais
entendu le ministre intervenir là-dessus. On ne connaît pas son
opinion et on ne sait même pas s'il a pris la peine de regarder les
conséquences du libre-échange pour les consommateurs
québécois. Je vous avais dit que je ne serais pas long, M. le
Président, je vais conclure là-dessus en disant: Oui, on votera
pour le projet de loi 66 qui amène des modifications à une loi
qui avait été présentée par l'ancien gouvernement,
c'est-à-dire la Loi sur la protection du consommateur. Cela amène
des petites améliorations, mais le message que je voulais passer - je
trouve cela important parce que la session finie, on ne se reverra
peut-être pas avant le printemps prochain, - c'est de dire au ministre
qu'au moment où l'on se parle, il y a des sujets très importants
qui sont dans l'air, il y a des décisions capitales qui seront prises
bientôt et qui affecteront le consommateur.
Le ministre, en plus de passer des petites lois à chaque session
pour montrer qu'il fait quelque chose pour la protection du consommateur,
devrait s'impliquer dans les dossiers majeurs que j'ai nommés qui sont
importants, de façon que les consommateurs soient vraiment
protégés, mais aussi pour des choses très importantes.
Les sujets que j'ai amenés tantôt sont importants, on sait
que ce sera voté bientôt, en tout cas ce sera mis en application.
Si le libre-échange passe, c'est le 2 janvier. Le ministre dira: Je n'ai
plus le temps, c'est le temps des fêtes. Je ne suis pas sûr que le
consommateur aura été protégé et que le ministre
responsable aura fait les études nécessaires, aura amené
les recommandations appropriées pour protéger le
consommateur.
Les deux dernières années alors que le taux de
construction était élevé on n'a pas mis en application les
deux règlements. Maintenant, la construction diminue, je ne sais pas si
le ministre va se décider à faire quelque chose. Mais non, il ne
l'a pas fait. Le rééquilibrage des tarifs
téléphoniques, c'est pour le mois de février prochain.
Est-ce que le ministre finira par dire sa façon de penser
là-dessus et intervenir en faveur des consommateurs? On ne le sait pas
non plus. Oui, on va voter pour le projet de loi 66, en espérant que
dans les domaines que j'ai mentionnés, le ministre interviendra pour
prouver aux consommateurs qu'il y a une personne dans ce gouvernement qui a une
responsabilité et qui a décidé de prendre ses
responsabilités et que, la prochaine fois, on arrivera à la
prochaine session avec un autre projet de loi qui modifiera aussi la Loi sur la
protection du consommateur, mais qui sera beaucoup plus substantielle. Merci,
M. le Président.
Des voix: Bravo!
Le Vice-Président: Je reconnais maintenant M. le ministre
de la Justice pour l'exercice de son droit de réplique.
M. Herbert Marx (réplique)
M. Marx: Merci, M. le Président. J'ai compris aujourd'hui,
surtout après le discours du député de Shefford, que,
quand cela va bien pour les consommateurs du Québec, cela va mal pour le
député de Shefford, parce que ce dernier veut avoir quelque chose
à critiquer. Malheureusement, il n'y a rien à critiquer en ce qui
concerne la protection des droits des consommateurs.
M. le Président, j'ai eu l'occasion d'étudier la situation
en Ontario par rapport à la situation au Québec. En Ontario, le
ministre responsable de la protection du consommateur a des questions à
chaque période de questions, parce que cela va mal en Ontario. Ici, au
Québec, cela va bien. J'ai une question aux 15 ou 20 périodes de
questions. Cela fait mai au député de Shefford. Qu'est-ce que
vous voulez que je vous dise, M. le Président? Nous avons la meilleure
loi sur la protection du consommateur. Nous avons un office de la protection du
consommateur qui fait un excellent travail; le député de Shefford
l'a reconnu souvent. Donc, cela va bien au Québec pour les
consommateurs. Malheureusement, quand cela va bien pour les consommateurs
québécois, cela va mal pour le député de
Shefford.
Il a parlé d'un petit projet de loi. Ce n'est pas une insulte, un
petit projet de loi. On peut avoir un projet de loi d'un article qui peut avoir
une grande importance. Par exemple, la loi que nous avons adoptée ce
soir sur l'indexation automatique des pensions alimentaires, c'est un projet de
loi de seulement un article - en fait, de deux articles parce qu'on en a
ajouté un deuxième. C'est un petit projet de loi, mais de quelle
importance! On peut avoir des projets de loi d'une centaine d'articles qui
aient peu d'importance. On peut avoir un projet de loi d'un article qui apporte
un changement fondamental dans nos lois et qui protège davantage une
certaine classe de personnes comme la loi sur l'indexation automatique des
pensions alimentaires qui va affecter beaucoup de
Québécoises.
Le député de Shefford a répété
à quelques reprises ce soir qu'il est d'accord avec le projet de loi. Il
me signale qu'il est encore d'accord, parfait! Il est d'accord avec le projet
de loi. Il dit que le projet de loi va raffermir les droits des consommateurs
québécois. Si on veut adopter de telles protections, M. le
Président, cela prend un projet de loi. On ne peut pas procéder
par règlement. On ne peut pas procéder par directive. Cela prend
un projet de loi. Nous avons des modifications dans ce projet de loi qui va
protéger davantage le consommateur québécois. Il
était nécessaire de franchir ces étapes à
l'Assemblée nationale, ce que j'ai fait, et je suis très heureux
que le député de Shefford soit entièrement d'accord avec
ce projet de loi, comme il l'était avec tous les projets de loi que nous
avons déposés afin de protéger les consommateurs
québécois. Merci, M. le Président.
M. Jolivet: M. le Président, est-ce que le ministre me
permet une question?
Le Vice-Président: En vertu de l'article 213...
Une voix: ...
Le Vice-Président: ...je vous permettrai une question. M.
le député de Laviolette et leader adjoint de l'Opposition.
M. Jolivet: Oui, M. le Président. À la suite de ce
que le ministre vient de dire, s'il avait 45 changements à faire, est-ce
que cela veut dire qu'il va nous présenter, à raison d'un par
année, 45 projets de loi dans les 45 prochaines années? Est-ce
cela qu'il veut dire?
Le Vice-Président: M. le ministre de la Justice, ce n'est
pas une question relative au contenu du projet de loi.
Des voix: Ah! Ah! Ah!
Le Vice-Président: Le débat étant clos,
est-ce que cette motion du ministre de la Justice proposant l'adoption du
projet de loi 66, Loi modifiant la Loi sur la protection du consommateur, est
adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président: Adopté.
M. le leader adjoint du gouvernement.
M. Johnson: M. le Président, je vous demanderais d'appeler
l'article 39 du feuilleton.
Projet de loi 71 Adoption
Le Vice-Président: À l'article 39 du feuilleton, M.
le ministre de la Justice propose l'adoption du projet de loi 71, Loi modifiant
de nouveau la Loi sur les tribunaux judiciaires. Est-ce qu'il y a des
interventions?
Une voix: Ça n'a pas l'air.
Le Vice-Président: II n'y a pas d'intervention. Est-ce que
cette motion est
adoptée?
Une voix: Adopté.
Le Vice-Président: Adopté.
M. le leader adjoint du gouvernement, (minuit)
M. Johnson: M. le Président, je vous demanderais d'appeler
l'article 43 du feuilleton.
Projet de loi 77 Adoption
Le Vice-Président: Â l'article 43 du feuilleton, M.
le ministre de la Justice propose la motion d'adoption du projet de loi 77, Loi
modifiant le Code civil et la Loi sur les bureaux d'enregistrement. Est-ce
qu'il y a des interventions? Il n'y a pas d'intervention. Est-ce que cette
motion du ministre de la Justice est adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président: Adopté. M. le leader adjoint du
gouvernement.
M. Johnson: M. le Président, je vous demanderais d'appeler
l'article 44 du feuilleton.
Projet de loi 78 Adoption
Le Vice-Président: À l'article 44 du feuilleton, M.
le ministre de la Justice propose la motion d'adoption du projet de loi 78, Loi
modifiant la Loi sur les renvois à la Cour d'appel. Il y a une
intervention qui est sollicitée par le député de Taillon.
Je cède la parole à M. le député de Taillon.
M. Claude Filion
M. Filion: Merci, M. le Président. Je vais seulement dire
quelques mots sur le projet de loi 78 d'apparence inoffensive. Il y a beaucoup
d'autres projets de loi également, ceux qu'on adopte rapidement avec le
consentement de notre leader, qui sont également d'apparence inoffensive
et qui le sont réellement; c'est-à-dire qu'ils sont techniques et
à ce moment, je crois bien que cela ne vaut pas la peine d'intervenir.
Cependant, en ce qui concerne le projet de loi 78, je voudrais dire quelques
mots tout de même pour bien expliquer sa portée.
Ce projet de loi permettra au gouvernement de présenter des
demandes d'opinions certifiées à la Cour d'appel, ce qu'on
appelle communément les "référés", et permettra au
gouvernement d'en appeler à la Cour suprême de la décision
certifiée de la Cour d'appel sans devoir retourner devant cette
Assemblée nationale pour requérir une autorisation par un
débat démocratique.
J'ai eu l'occasion en commission parlementaire de souligner cela au
ministre et je le rappelle ce soir. Le référé
généralement porte sur un sujet majeur. Il ne porte pas sur une
bricole et il ne porte pas sur des sujets non plus sur lesquels l'ensemble des
citoyens peuvent porter des litiges devant les tribunaux et à ce moment,
tout le processus judiciaire suit son cours normal. Un
référé survient lorsqu'un gouvernement, quel qu'il soit, a
besoin d'une opinion sur un sujet extrêmement important pour lui et pour
les citoyens. À ce moment-là, en s'adressant à la Cour
d'appel, le gouvernement obtient l'éclairage de la Cour d'appel
généralement dans un délai réduit par rapport aux
causes normales. Le problème avec le projet de loi, c'est qu'il
soustrait des élus du peuple la possibilité de débattre de
la question faisant l'objet du débat majeur et également la
possibilité de débattre de l'opportunité de se rendre en
Cour suprême pour obtenir la décision de la Cour suprême
finale sur le jugement de la Cour d'appel.
Le ministre de l'Éducation est ici, j'ai dans mon dossier, des
interventions du ministre de l'Éducation alors qu'il était de ce
côté-ci de la Chambre et qu'il avait à ce moment
l'occasion, le 8 décembre 1981, de se prononcer sur cette
opportunité d'aller à la Cour suprême pour obtenir la
décision de la Cour suprême. Cela est important. Maintenant, les
élus du peuple n'auront plus le loisir de débattre de sujet, et
également de l'opportunité du fond et également de
l'opportunité d'aller à la Cour suprême avec le projet de
loi. Le problème, c'est que le processus était trop lourd. Cela
prenait une loi pour autoriser le gouvernement à aller à la Cour
suprême. C'est un peu lourd, j'en conviens et je l'ai dit au
ministre.
Ce que je suggérais au ministre au moment de la commission
parlementaire, c'est que quand même cette Assemblée nationale ait
l'occasion par résolution, par exemple... C'est surprenant, il n'a pas
accepté cela. Effectivement, je vois le ministre de l'Éducation
qui s'interroge sur ce projet de loi dont on traite. J'avais simplement
suggéré ceci: une simple résolution de l'Assemblée
nationale permettant un débat démocratique entre élus du
peuple. Il faut se souvenir que - je tiens à le souligner - le
référé, à notre connaissance, a été
employé quatre fois depuis le début. Il a été
employé lorsque le maire Drapeau, à l'époque, voulait
instaurer la loterie qui portait soit le nom de loterie volontaire ou de
contribution volontaire ou de taxe volontaire. Également il a
été employé pour décider de la juridiction de la
Cour provinciale lorsque le gouvernement avait décidé de hausser
le . montant permissible en Cour provinciale. Il a
été également employé, évidemment,
sur le droit de veto. C'est à cette occasion que le ministre de
l'Éducation était intervenu. Il avait également
été employé à une autre occasion sur le
rapatriement unilatéral de la constitution. Comme on voit, ce sont
là des enjeux d'importance pour les citoyens. Nous avions simplement
souligné au ministre que nous percevions comme étant bien
fondé l'objectif de sa démarche c'est-à-dire
d'accélérer le processus et de ne pas enclencher toute la
lourdeur du processus législatif. Nous avions suggéré une
simple résolution, un simple débat. Malheureusement, cette
suggestion n'a pas été retenue.
Ce que je voudrais dire au ministre de la Justice là-dessus, en
terminant, c'est que nous, de l'Opposition, l'avons à l'oeil en ce qui
concerne ce projet de loi. Nous l'avons à l'oeil en ce qui concerne les
référés qui pourraient être demandés par le
gouvernement du Québec à la Cour d'appel sur certaines lois. On
peut penser également à cette loi portant sur la réforme
de nos structures scolaires. On peut penser à une loi portant sur la
velléité libérale de modifier la loi 101. Ce sont tous des
sujets importants. M. le Président, sur ces quelques remarques, je
voudrais terminer ici mon propos.
Le Vice-Président: Très bien, M. le
député de Taillon. Je vais céder la parole au ministre de
la Justice pour sa réplique.
M. Herbert Marx (réplique)
M. Marx: M. le Président, il ne faut pas être
surpris que j'aie déposé ce projet de loi. J'ai demandé
à mon prédécesseur pendant des années de
déposer un tel projet de loi en ce qui concerne les avis
consultatifs.
Maintenant, si on veut demander un avis consultatif de la Cour d'appel
et aller à la Cour suprême du Canada, il faut déposer un
projet de loi chaque fois, ce que nous avons fait au moins à deux
reprises depuis quelques années. Dans toutes les autres juridictions au
Canada, dans toutes les provinces canadiennes, on a une loi qui permet au
gouvernement de demander un avis consultatif à la Cour d'appel et qui
permet aussi aux deux parties, soit le gouvernement soit une autre partie qui
est en cause, de faire appel à la Cour suprême du Canada. Tout ce
que ce projet de loi fait... On adopte une procédure qui est
déjà en vigueur dans toutes les provinces canadiennes. Je pense
qu'il est sage de le faire. En vertu du système et de la
procédure que nous avons suivie jusqu'à maintenant, le
gouvernement avait la possibilité d'en appeler des décisions de
la Cour d'appel à la Cour suprême du Canada, mais les autres
parties, ceux qui contestaient la décision ne pouvaient pas aller
à la Cour suprême du Canada. Maintenant, cela mettra tous les
Québécois sur un pied d'égalité avec le
gouvernement. Je pense que cela est important.
En terminant, M. le Président, je pense que le
député de Taillon a soulevé une fausse question quand il a
dit qu'il faut prévoir la possibilité de débattre les
questions à l'Assemblée nationale. L'Assemblée nationale
peut se saisir de n'importe quelle question et faire un débat. Il y a
des débats le mercredi, le vendredi, il y a des débats d'urgence
et ainsi de suite. Donc, ce projet de loi n'empêche pas les
députés de discuter de quelque question que ce soit. Donc, je
n'ai pas vu la nécessité de prévoir que l'Assemblée
nationale puisse débattre une question quelconque. Il va de soi que
l'Assemblée nationale puisse débattre de quelque question que ce
soit et il n'est pas nécessaire d'entériner une telle
possibilité par une loi. Merci, M. le Président. (0 h 10)
Le Vice-Président: Très bien. Le débat
étant clos, cette motion du ministre de la Justice proposant l'adoption
du projet de loi 78, Loi modifiant la Loi sur les renvois à la Cour
d'appel, est-elle adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président: Très bien. Le débat
étant clos, est-ce que cette motion du ministre de la Justice proposant
l'adoption du projet de loi 78, Loi modifiant la Loi sur les renvois à
la Cour d'appel, est adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président: Adopté. M. le leader adjoint du
gouvernement.
M. Johnson: M. le Président, je vous demanderais d'appeler
l'article 31 du feuilleton.
Projet de loi 105
Prise en considération du
rapport de la commission qui
en a fait l'étude
détaillée
Le Vice-Président: À l'article 31 du feuilleton,
nous allons maintenant procéder à la prise en
considération du rapport de la commission de l'économie et du
travail qui a procédé à l'étude
détaillée du projet de loi 105, Loi modifiant la Loi sur les
sociétés de placements dans l'entreprise
québécoise.
Je dois ici aviser l'Assemblée que nous avons reçu en
délai utile, conformément au règlement, une proposition
d'amendement par M. le ministre de l'Industrie et du Commerce. C'est un
amendement à l'article 11 du projet de loi, en foi de quoi nous allons
procéder au débat, s'il y a lieu et,
ultérieurement, à la mise aux voix de l'amendement, dans
un premier temps, et du rapport de la commission, amendé s'il y a lieu,
dans un deuxième temps. M. le ministre de l'Industrie et du
Commerce.
M. Daniel Johnson
M. Johnson: Oui, brièvement, M. le Président. Le
projet de loi 105 avait pour objet de modifier la loi sur les SPEQ afin de
refléter les déclarations ministérielles de
décembre 1986, de juin 1987 et du discours sur le budget du 30 avril
1987. Cela visait essentiellement à permettre à des entreprises
en démarrage de pouvoir bénéficier de la qualité de
corporation admissible aux titres des placements qu'une SPEQ pouvait faire.
À l'occasion de l'étude article par article, et mon propos
se limitera à ce sujet, nous avons remarqué en commission
parlementaire l'article 11 du projet de loi, qui se lit ainsi: "Le gouvernement
peut déterminer que certaines dispositions réglementaires
adotées en vertu de la Loi sur les sociétés de placements
dans l'entreprise québécoise ont effet à compter du 1er
mai 1987."
Une discussion s'étant ensuivie, notamment avec le
député de Lévis, il est apparu que nous pouvions assimiler
certaines des dispositions de la loi sur les SPEQ à des dispositions
fiscales et qu'en conséquence, un des articles de la Loi sur les
impôts du Québec, soit l'article 1086, permettait au gouvernement,
par décret, d'édicter des règlements prévoyant
l'entrée en vigueur de certaines dispositions rétroactivement,
permettant même l'entrée en vigueur de règlements de
façon rétroactive sans même, dans quelques cas, qu'il y ait
publication pour cause d'urgence.
La cause d'urgence est invoquée très souvent en
matière de fiscalité. Il n'en restait pas moins que la
formulation employée dans l'article 11, comme l'a souligné le
député de Lévis, à ce moment-là, pouvait
être si large qu'on donnait au gouvernement un pouvoir que l'on pourrait
peut-être qualifier d'exorbitant dans les circonstances même si, je
le répète, il s'agit là de dispositions de nature quasi
fiscales. En effet, que le gouvernement puisse déterminer que certaines
dispositions qui n'étaient pas mentionnées, adoptées en
vertu de la Loi sur les sociétés de placements dans l'entreprise
québécoise, ont effet à compter du 1er mai 1987, c'est une
disposition pas mal large.
Ce que nous avons convenu de faire lors de l'étude de cet
article, c'est de demander à des juristes de se pencher sur la
façon la plus brève, mais, chose certaine, la plus
précise, possible d'encadrer l'exercice du pouvoir réglementaire
afin que nous donnions véritablement effet au discours sur le budget du
30 avril 1987, alors que le ministre des Finances annonçait certains
changements. Il annonçait des changements, notamment dans le
resserrement de certaines règles d'interprétation quant au lien
de dépendance, par exemple, entre personnes ou dans la notion de
personnes liées, afin de bien s'assurer que nous pouvions
découvrir quelles sont les personnes qui contrôlent une
société, une corporation.
De cette discussion, s'est ensuivi le fait que, très nettement,
il était de l'intention du ministre des Finances que ces changements
aient lieu le 1er mai 1987. Cela n'a jamais été contesté.
Cela visait à resserrer des définitions afin que la
fiscalité et les applications fiscales, dans la lettre de la loi sur les
SPEQ et dans les règlements qui s'y rapportent, donnent effet
très clairement au voeu du ministre des Finances et résultent,
dirais-je, en une conformité plus complète de la lettre de la loi
avec l'esprit de la loi qui est de voir à l'application, avec la plus
grande intégrité possible des notions qui ont
présidé à la mise sur pied du programme SPEQ, soit que les
véritables personnes qui n'ont pas de lien de dépendance entre
elles, qui ne sont pas liées à une corporation admissible
forment, par actionnariat, un groupe distinct qui bénéficie de
crédits d'impôt dans une société de placements dans
l'entreprise québécoise et que, donc, il fallait bien s'assurer
que les définitions sur le lien de dépendance et les personnes
liées reflétaient cet esprit. Il faut vraiment que ce soient des
gens indépendants les uns des autres le plus possible, dans les limites
tracées par l'esprit de la loi, que ce soient des personnes vraiment
indépendantes qui soient des actionnaires qui bénéficient
d'un crédit d'impôt, que ces personnes soient, dis-je,
indépendantes des actionnaires qui gèrent la corporation dans
laquelle la SPEQ peut investir.
Donc, M. le Président, l'amendement que nous avons
déposé à ce sujet se lit ainsi - je me permettrai de le
lire pour les débats - "Le gouvernement peut déterminer que les
dispositions réglementaires adoptées en vertu de la Loi sur les
sociétés de placements dans l'entreprise québécoise
relativement à la définition de l'expression "lien de
dépendance", "corporation en démarrage" et "personne liée"
ont effet à compter du 1er mai 1987 et relativement aux secteurs
d'activité ont effet à compter du 18 juin 1987. "Le
présent article cesse d'avoir effet le 1er juin 1988."
M. le Président, quant au lien de dépendance, corporation
en démarrage et personne liée, ce sont des suites au discours sur
le budget du 30 avril. Donc, il y a pouvoir réglementaire,
déterminé par règlement, que le 1er mai 1987 est la date
d'entrée en vigueur de ces dispositions que j'ai mentionnées.
La référence qui suit, la date du 18
juin 1987, vise à assurer que c'est à l'occasion d'une
déclaration ministérielle de cette date que l'aquaculture a
été incluse comme secteur d'activité qui est admissible
dorénavant, à compter du 18 juin 1987, parmi les corporations
dites admissibles au programme des sociétés de placements dans
l'entreprise québécoise.
Troisièmement, le dernier paragraphe du nouveau paragraphe 11,
enfin, tel que l'amendement le propose, à savoir que le présent
article cesse d'avoir effet le 1er juillet 1988, est ce qu'on appelle
communément une clause crépusculaire. Donc, d'ici à
quelques mois, avec le temps que cela prend, avec le filtrage au bureau des
règlements, au bureau des lois, l'adoption éventuelle, etc., nous
aurons eu amplement le temps, d'ici le 1er juillet 1988, de pourvoir au
changement réglementaire qui était évoqué
implicitement, chose certaine, dans le discours sur le budget du 30 avril et
dans les déclarations ministérielles de juin 1987 et, de cette
façon, le pouvoir - ma foi, assez large -qu'on a constaté en
commission parlementaire, de changer certaines dispositions pour leur donner un
effet rétroactif prendra fin le 1er juillet 1988.
C'est, à mon sens, un progrès que nous réalisons
à ce moment-ci, afin de bien encadrer le pouvoir réglementaire et
surtout bien encadrer ce pouvoir dans tous les cas où des dispositions
rétroactives sont introduites dans les règlements. C'est donc
à cette fin que nous sommes réunis ici, ce soir. (0 h 20)
Le Vice-Président: Je vais maintenant céder la
parole à M. le député de Lévis.
M. Jean Garon
M. Garon: Merci, M. le Président. Le projet de loi 105,
Loi modifiant la Loi sur les sociétés de placements dans
l'entreprise québécoise est une loi qui a de bons aspects, mais
il y en a également qui sont un peu moins bons, particulièrement
l'article 2, qui a pour effet de restreindre les catégories
d'actionnaires qui auraient pu voir le jour dans des sociétés de
placements dans l'entreprise québécoise. Le ministre a voulu
qu'il y ait seulement une catégorie, d'actionnaires ou seulement des
actionnaires avec plein droit de vote selon une seule catégorie dans une
société de placements, de sorte que les gens devront créer
autant de sociétés de placements qu'ils voudront faire de fonds
pour investir dans différents types d'industries.
Nous aurions trouvé plus souhaitable que, par exemple, dans des
régions où les sociétés de placements vont
s'implanter, l'on puisse avoir des fonds particuliers avec des
catégories d'actionnaires particuliers comme, par exemple, on peut
imaginer, dans le territoire de la Gaspésie, un fonds qui investirait
davantage dans le secteur touristique, un fonds qui investirait davantage dans
le secteur forestier, un autre qui aurait pu investir principalement dans la
transformation des produits marins pour faire du développement
régional selon différentes catégories, sachant que les
gens qui sont versés dans le domaine forestier ne connaissent pas
nécessairement la transformation des produits marins et les gens qui
connaissent la transformation des produits marins ne connaissent pas
nécessairement le secteur hôtelier, la restauration ou le secteur
touristique.
Le ministre a choisi de restreindre à une seule catégorie
d'actionnaires, s'imaginant que les gens placeraient dans une forme de fonds
mutuel pour investir leur argent. Je ne suis pas convaincu que c'est la
meilleure formule. Il aurait été préférable de
pouvoir mettre, à l'intérieur d'une même
société de placements dans l'entreprise québécoise,
différents fonds, différentes catégories d'actionnaires
dans des fonds particuliers, de sorte que les gens puissent assumer les risques
qu'ils veulent assumer selon les catégories d'investissements. Mais il
sera toujours loisible aux gens de faire autant de sociétés de
placements qu'ils voudront faire d'investissements. Je pense que c'est une
lacune, mais le ministre a choisi cette formule. Pour le reste, il s'agit
d'amendements mineurs qui vont permettre de faire certains ajustements en
fonction de, par exemple, la période de démarrage, etc.
Enfin, le ministre a finalement accepté. Il a été
difficile, il n'a pas voulu comprendre immédiatement. Son contentieux
semblait résister. Je lui avais dit, en finissant la commission: De
toute façon, je pense bien que, revenus entre vous, vous allez
présenter un amendement à l'article 11 puisqu'on ne peut pas
faire des articles de loi rétroactifs avec un caractère trop
général, car la jurisprudence dit que la
rétroactivité doit être très particulière. Il
s'agit d'un pouvoir exceptionnel et il ne serait pas correct que les tribunaux
ou que la loi permette de donner un caractère rétroactif à
des dispositions trop générales. Il s'agit d'un caractère
abusif, d'une certaine façon, puisque le gouvernement, qui donne un
caractère rétroactif, dit aux citoyens, au fond: Au mois de
novembre, je fais telle règle de droit qui s'applique à partir du
1er avril, alors que la loi que j'ai mise en vigueur au mois de novembre, vous
ne pouviez pas la connaître, mais je vous oblige quand même
à la respecter à partir du 1er avril. Vous comprendrez que les
tribunaux, qui doivent prendre l'intérêt des personnes humaines
individuelles, doivent être très restrictifs dans
l'interprétation qu'ils doivent donner à des règles de
droit rétroactives qui sont des règles très
exceptionnelles.
Finalement, il n'est jamais trop tard pour bien faire. Le ministre,
revenu à son bureau, s'est dit - il n'a pas voulu l'admettre devant tout
le monde - que le député de Lévis n'avait peut-être
pas tort. Aujourd'hui, il apporte un amendement qui va dans le sens de ce que
nous lui avions proposé. Tout ce que je souhaite, c'est que le ministre
de l'Industrie et du Commerce fasse la même chose dans le secteur des
frégates et qu'il se rappelle qu'au lieu d'en demander seulement "au
moins deux" au gros Nouveau-Brunswick qui, avec 700 000 de population, sera en
charge de la construction de 7 000 000 000 $ de frégates et où le
gouvernement du Québec sera obligé de mendier une couple de
frégates, il se décide à dire: Nous, du Québec,
nous voulons toutes les frégates du deuxième contrat, puisqu'il
s'agit d'un contrat de 3 500 000 000 $ et que le Québec verse à
Ottawa autour de 25 000 000 000 $ par année en impôts et taxes de
toutes sortes. C'est le gouvernement du Québec qui va payer les taxes de
toute façon, en grande partie, pour ces frégates. Il n'est pas
normal que le gros Nouveau-Brunswick de 700 000 habitants bâtisse les
frégates que les taxes des contribuables québécois vont
payer.
J'ai dit au ministre de l'Industrie et du Commerce que c'était un
projet de loi que nous allons concourir à adopter. Il n'est pas parfait.
Il y a certaines dispositions qui sont bonnes. L'article 2 nous paraît
trop restrictif, mais, dans l'ensemble, le principe du projet de loi est
acceptable. L'étude que nous avons faite en commission parlementaire et
les amendements proposés rendent le projet de loi plus acceptable
à l'Opposition. J'ai dit au ministre que je ne prendrais pas trop de
temps pour l'adoption de son projet de loi, à condition que le temps que
nous aurons économisé pour lui, il le consacre entièrement
à aller chercher les frégates pour les chantiers maritimes de
Lauzon.
Je vois le ministre de l'Éducation. J'espère que
maintenant que la session est finie, il aura le temps de signer la lettre
d'immobilisation pour l'école secondaire de la municipalité des
chutes de La Chaudière parce qu'on sait qu'au Québec - et la
ministre déléguée à la Condition féminine
est là - le plus haut taux de natalité, c'est dans mon
comté. Je n'en suis pas la cause mais j'en suis le représentant
et comme on se plaint qu'au Québec il n'y a pas assez d'enfants, il ne
faudrait pas que le gouvernement commence à épargner les
écoles dans des comtés où les gens sont encore capables de
faire des enfants. Nous avons 400 enfants de plus par année seulement
dans la moitié de mon comté depuis dix ans - 400 enfants de plus
pendant dix ans - et les couples de jeunes sont considérables. Une
municipalité comme Bernières a une moyenne d'âge autour de
25 ans seulement et près de 6000 habitants. C'est un comté
très jeune et je suis certain que le ministre de l'Éducation ne
voudra pas faire attendre plus longtemps les parents qui pourraient retarder la
naissance d'enfants en se disant: Le ministre de l'Éducation n'a pas
l'air encourageant, il ne veut même pas bâtir d'école.
Alors, il ne faudrait pas que l'action du ministre de l'Éducation
contribue à réduire encore les familles au Québec. C'est
pourquoi je souhaite que cette décision soit prise le plus tôt
possible pour que les gens puissent savoir que dans un an et quelques mois,
l'école pourra ouvrir. Et les enfants qui sont déjà en
nombre suffisant pour la remplir attendent la décision du ministre de
l'Éducation.
M. le Président, je termine sur ces propos en souhaitant que ces
deux ministres devant moi, maintenant qu'ils auront plus de temps libre, au
lieu de prendre des vacances immédiatement, que le ministre de
l'Industrie et du Commerce donne tout son temps pour les six frégates et
que le ministre de l'Éducation accepte le projet d'école qui a
été voté presque unanimement par les commissaires, 16
à 3, et que nous puissions ensemble participer à la
pelletée de terre. Ça m'est arrivé dans le temps dans le
comté d'Argenteuil. Maintenant ce sera au tour du ministre de
l'Éducation de venir lever une pelletée de terre pour une
école dans mon comté. Dans cette perspective, il sera le bienvenu
et il constatera que cela fait longtemps qu'il n'a pas été
entouré d'autant d'enfants au Québec. Je vous remercie.
Une voix: Bravo!
Le Vice-Président: Merci, M. le député de
Lévis, mais je vous avise que comme passager du navire, je
commençais à être un peu inquiet, vous changiez de cap
assez souvent. J'espère que le capitaine nous maintiendra dans le cap du
projet de loi 105.
Donc, pour l'exercice de sa réplique de cinq minutes, M. le
ministre de l'Industrie et du Commerce.
M. Daniel Johnson
M. Johnson: Merci, M. le Président. Quatre points: le
premier quant au maintien des catégories d'actions, une seule
catégorie d'actions dans une SPEQ. J'ai expliqué beaucoup plus
longuement que les cinq minutes me le permettent ici en commission
parlementaire ce qu'il en était. Il y a un tas de bonnes raisons
d'ailleurs que l'on peut retracer au début de 1985 lorsque le programme
a été mis en branle par le gouvernement précédent.
Je ne sais pas où était le ministre de l'Agriculture d'alors
lorsque cela a été voté et que son gouvernement a
décidé de fixer dans l'esprit de la loi une seule
catégorie, véritablement, afin que
le caractère d'intégrité de la SPEQ soit maintenu.
Une seule catégorie d'actions était souhaitable. C'est cela qui
était l'esprit à l'époque. C'est ce qui a semblé
échapper dans la formulation que le législateur a utilisée
à l'époque. C'est ce que nous avons corrigé.
Deuxièmement, de qualifier de mineure l'inclusion de
sociétés en démarrage, de corporations en démarrage
dans la loi des SPEQ, je ne dirai qu'un mot, c'est grossier d'aller
prétendre que c'est un amendement mineur. Cela a fait l'objet du
discours sur le budget, c'était souhaité par le milieu,
c'était un trou béant dans les programmes d'aide que nous pouvons
donner aux entreprises, à la création d'entreprises au
Québec, et nous réglons ce problème de cette
façon-là.
Le troisième point: ce serait revenu à mon bureau que j'y
aurais pensé, n'ayant pas voulu avouer devant tout le monde qu'il y a
moyen de resserrer la loi en matière de pouvoir réglementaire
à caractère rétroactif. M. le Président, je ne sais
pas là non plus où était le député de
Lévis. C'est au vu et au su de tout le monde, y compris... D'ailleurs,
je vois le député de Rosemont ici ce soir qui, sur place, a
indiqué lui aussi son inquiétude de voir une disposition assez
large comme celle-là. Le député de La Peltrie a fait
valoir la même chose. Je l'ai dit à haute voix avec les juristes
du ministère du Revenu, ceux du bureau des lois et ceux du
ministère de l'Industrie et du Commerce. (0 h 30)
Nous avons convenu avec le député de Lévis que nous
lui ferions parvenir un nouveau texte pour répondre aux questions qu'il
avait soulevées. Lui, peut-être, son esprit était-il
déjà dans son bureau lorsque nous lui avons parlé. Chose
certaine, il avait l'air physiquement très présent. Je prends le
député de Rosemont à témoin, le
député de Lévis occupait un espace considérable
dans la salle, lorsque nous avons parlé à haute voix de ces
choses.
Quatrièmement, je vais me porter à la défense de
mon collègue, le ministre de l'Éducation, très
brièvement, il n'en a pas vraiment besoin. Le projet d'école dont
le député de Lévis a fait état a été
un des premiers dossiers dont mon collègue a été saisi,
comme ministre de l'Éducation. C'est un projet qui était en
marche depuis des années; le député de Lévis
était alors député de Lévis et ministre dans un
gouvernement qui avait le pouvoir de régler ce
problème-là. Finalement, les gens du comté de
Lévis, heureusement, n'ont pas à attendre que le
député de Lévis soit en position d'être en pouvoir.
Imaginez-vous, dans l'Opposition, il ne peut pas s'en occuper. Il n'a pas le
pouvoir de le faire. C'est le ministre de l'Éducation, le
député d'Argenteuil, qui s'occupe effectivement des
problèmes et règle les problèmes du comté de
Lévis, en matière d'éducation et de construction
d'école.
Voilà, c'étaient les quatre points, M. le
Président, que je voulais soulever, à ce moment-ci. Je pense
qu'ils étaient tous pertinents.
Le Vice-Président: Très bien, M. le ministre. Le
dernier était quelque peu hors du projet de loi 105, mais je comprends
très bien que vous répondiez à l'argumentation du
député de Lévis.
Adoption de l'amendement
Le débat étant terminé, nous allons maintenant
procéder à la mise au vote de l'amendement, proposé par M.
le ministre de l'Industrie et du Commerce, à l'article 11 du projet de
loi. Est-ce que cet amendement est adopté?
Une voix: Adopté.
Le Vice-Président: Adopté. L'amendement est donc
intégré au rapport de la commission et, en conséquence,
est-ce que le rapport tel qu'amendé de la commission de
l'économie et du travail qui a procédé à
l'étude détaillée du projet de loi 105, Loi modifiant la
Loi sur les sociétés de placements dans l'entreprise
québécoise, est adopté?
Une voix: Adopté.
Le Vice-Président: Adopté. Monsieur, pas en tant
que ministre de l'Industrie et du Commerce, mais en tant que leader adjoint du
gouvernement.
M. Johnson: M. le Président, s'il y avait consentement -
vous pourrez le constater - je ferais motion d'adopter le projet de loi
105.
Le Vice-Président: Est-ce qu'il y a consentement à
ce que nous dérogions à nos règles de procédure
pour passer immédiatement et pour arriver à cette étape
finale de l'adoption du projet de loi? Il y a consentement.
M. Garon: Oui.
Adoption du projet de loi
Le Vice-Président: II y a consentement, M. le
député de Lévis? Il y a consentement de tous les membres
de l'Assemblée. Très bien. Donc, M. le ministre de l'Industrie et
du Commerce propose maintenant la motion d'adoption du projet de loi 105, Loi
modifiant la Loi sur les sociétés de placements dans l'entreprise
québécoise. Est-ce
que cette motion est adoptée. Non? Un instant. Vous voulez
intervenir? Très bien.
Donc, M. le député de Lévis pour une intervention
de fond.
M. Jean Garon
M. Garon: Alors, M. le Président, on ne peut pas passer
sous silence les remarques qu'a faites le ministre de l'Industrie et du
Commerce. Par gentilhommerie, pour lui être agréable, nous
acceptons de laisser passer son projet de loi ce soir, en dehors des
procédures habituelles puisque, entre les deux, normalement, il devrait
y avoir une journée. Comme le ministre ne peut pas être
présent, apparemment, demain et le leader de l'Opposition m'a fait des
représentations, me demandant si je voudrais consentir à
être agréable au ministre de l'Industrie et du Commerce, j'ai dit:
Comme nous avons été d'accord sur le principe du projet de loi,
que nous avons voté en faveur de la prise en considération du
rapport, nous serions favorables à lui donner plus de temps à
consacrer aux frégates, parce qu'à ce moment-là, demain,
il sera libre pour aller travailler pour les frégates. Il pourra nous
faire rapport au début de l'année 1988. Mais je lui rappellerai
que, dans le domaine des écoles, il n'a pas l'air complètement au
courant puisque, entre 1976 et 1985, ont été bâties 7
écoles dans le comté de Lévis, à part les
agrandissements.
Le Vice-Président: M. le député de
Lévis, puisque l'heure avance considérablement, je vous ferai
simplement remarquer qu'à l'étape de l'adoption d'un projet de
loi, en vertu de l'article 256 du règlement, "Le débat sur la
motion d'adoption d'un projet de loi est restreint à son contenu". En
conséquence, je vous prierais de vous en tenir au contenu du projet de
loi 105, s'il vous plaît.
M. Garon: M. le Président, je voulais utiliser une
analogie pour indiquer au ministre comment les choses peuvent fonctionner quand
on veut que cela marche. C'est pour cela que je dis que, tout simplement, il me
disait que l'école en question avait commencé sous mon mandat. Je
dois dire que ce n'est pas exact, M. le Président. La demande a
été présentée au ministre actuel, puisqu'elle
n'était pas prête antérieurement. Si cela avait
été demandé antérieurement, la réponse
serait déjà accordée. Qu'est-ce que vous voulez? On ne
peut pas bâtir des écoles alors que les enfants ne sont pas
prêts à rentrer dedans. Maintenant, ils sont prêts et le
projet devrait être adopté incessamment.
Le ministre présente un projet de loi sur les
sociétés de placements dans l'entreprise
québécoise, en quelque sorte un projet d'institutions
financières, d'investissements, de recherche de fonds locaux et
régionaux, qui a été imaginé sous le gouvernement
précédent pour faire en sorte qu'on puisse utiliser davantage les
capitaux locaux et régionaux au développement local et
régional pour ne pas être dépendants des fonds
extérieurs. Je vois l'ancien ministre responsable des Pêches. Je
me rappelle que, dans le domaine des banques, par exemple, sur le territoire
maritime, il fallait toujours référer à Montréal ou
à Toronto pour avoir des autorisations parce que personne n'était
autorisé à prendre des décisions localement. Les fonds
manquaient souvent pour faire du développement régional parce
qu'il s'agit de secteurs où les risques peuvent être assez grands.
Il faut absolument donner des canaux pour que les capitaux locaux puissent
investir dans des entreprises régionales ou locales et assumer
eux-mêmes le développement économique.
On dit: Comptons sur nos propres moyens. Les syndicats de travailleurs
se sont donné des missions en disant: Comptons sur nos propres moyens.
Je me rappelle quand Jacques Gagnon se promenait au Québec, il disait:
Les régionaux ne doivent pas attendre après les gens d'ailleurs
pour faire leur développement régional. Le député
d'Abitibi-Ouest connaît bien cela. Il sait à quel point les gens,
localement et régionalement, doivent compter sur leurs propres moyens
pour faire leur développement économique. C'est pourquoi le Parti
québécois a imaginé la formule des sociétés
de placements dans l'entreprise québécoise.
Aujourd'hui, que le ministre, après une expérience de
quelques années de cette institution, veuille apporter certains
amendements à la loi pour lui donner un cachet particulier qu'il pense
meilleur, nous ne pouvons pas nous opposer à cela. Mais il doit se
rappeler en même temps que l'imagination au travail, la conception de
cette institution est due au gouvernement précédent, et nous
sommes fiers de cette institution à la création de laquelle nous
avons contribué alors que nous étions au pouvoir. Nous ne
voudrions d'aucune façon empêcher son développement dans
les années qui viennent. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président: Le débat étant
terminé, est-ce que cette motion d'adoption du projet de loi 105, Loi
modifiant la Loi sur les sociétés de placements dans l'entreprise
québécoise, présentée par M. le ministre de
l'Industrie et du Commerce est adoptée?
Des voix: Adopté,
Le Vice-Président: Adopté.
M. le leader adjoint du gouvernement.
M. Johnson: M. le Président, je vous demanderais d'appeler
l'article 13 du feuilleton.
Projet de loi 94
Reprise du débat sur l'adoption du
principe
Le Vice-Président: Nous allons reprendre le débat
sur la motion présentée par M. le ministre
délégué à la Famille, à la Santé et
aux Services sociaux visant à l'adoption du principe du projet de loi
94, Loi sur le Conseil de la famille. Comme intervenant, je vais
reconnaître Mme la députée de Marie-Victorin.
Mme Cécile Vermette
Mme Vermette: M. le Président, il me fait plaisir de
prendre la parole parce que c'est un projet de loi qui était fort
attendu depuis très longtemps, qui concerne de nombreuses familles
québécoises et qui est d'une importance capitale en raison du
problème que nous avons, à l'heure actuelle, au Québec, en
ce qui concerne la démographie.
Effectivement, on fera une nuance entre une politique nataliste et une
politique familiale, mais dans un cas comme dans l'autre, il faut la
volonté politique d'un gouvernement de faire en sorte qu'il y ait un
intérêt soutenu pour que nos familles puissent s'agrandir et,
d'autre part, la volonté de leur apporter les éléments
nécessaires qui favorisent le soutien aux familles.
Souvent, une politique familiale n'est pas tout simplement un
problème d'argent. Un bon nombre de parents voudraient bien pouvoir
augmenter leur famille et ce n'est pas nécessairement un manque
d'argent, mais tout simplement un manque de soutien dans le milieu familial qui
les en empêche. (0 h 40)
M. le Président, nous avons un nouveau ministre
délégué à la Famille qui devait nous apporter une
politique globale, une politique qui devrait tenir compte des différents
éléments qui font surface lorsqu'on parle d'une politique
familiale et des intérêts de l'ensemble des
Québécois et des Québécoises qui forment une
famille ici ou qui doivent vivre une situation parentale de quelque nature
qu'elle soit, parce que vous savez qu'à l'heure actuelle il y a plus
qu'un modèle dans la situation parentale. Il y a les familles
élargies, il y a les familles monoparentales, il y a les familles
biparentales et on doit avoir une approche particulière pour chacune de
ces familles compte tenu des problématiques qui les concernent
respectivement.
Le ministre responsable de la politique familiale, lorsqu'il a
été nommé en titre a suscité certaines
interrogations de la part des groupes et des organismes familiaux. On
n'était pas tout à fait convaincu qu'il pourrait donner une
politique familiale qui engloberait, justement, l'ensemble de la
problématique, parce qu'on regardait un peu d'où il venait, son
expérience antérieure et ce n'était qu'une
expérience d'homme d'affaires. Il rassurait l'ensemble de ces organismes
en disant que son expérience d'homme d'affaires lui permettrait la
prudence et favoriserait des aménagements afin de faire des
rapprochements entre les entreprises et son gouvernement qui favoriseraient la
famille.
Je pense que, M. le Président, il faut beaucoup plus que cette
intention d'homme d'affaires de vouloir rapprocher les entreprises par des
formules qui favoriseraient une compréhension des besoins de la famille,
surtout vis-à-vis de la nouvelle façon dont se développent
les familles à l'heure actuelle puisqu'on sait qu'en 1990 il n'y aura
que 14 % des couples dont un des conjoints ne travaillera pas. Donc, de plus en
plus, la problématique se retourne vers des couples où l'homme et
la femme devront travailler, assumeront un travail et devront partager les
tâches de la famille. Cela veut dire qu'il faut qu'on s'attarde aux
structures du travail, qu'il faut qu'on s'attarde aux garderies, qu'il faut
qu'on s'attarde à moult problèmes face à cette orientation
des couples où chacun, justement, vit l'égalité, ce qui
permet à chacun, à tour de rôle, de mettre à profit
ou de mettre à l'épreuve dans certains cas leurs connaissances
parentales à l'endroit des enfants.
Est-ce que les interrogations de la société en
général, le 19 août 1987, lors de la nomination du ministre
Dutil, étaient fondées? Aujourd'hui, lorsqu'on voit la politique
qui nous a été déposée, nous pouvons dire que
finalement c'est peut-être une politique de diversion familiale, une
politique un peu style coquille vide où on s'attache davantage aux
structures qu'au contenant plutôt que d'apporter une aide directe
à l'ensemble des familles, un soutien direct, parce qu'actuellement des
familles sont en état d'urgence au Québec. Lorsqu'on
connaît le taux de chômage dans le nombre de familles, lorsqu'on
connaît actuellement les problématiques des mères chefs de
famille monoparentale, lorsque l'on connaît les problèmes que
comporte de plus en plus l'éducation des enfants à l'heure
actuelle dans nos sociétés, je pense qu'il y a urgence. Nous
n'avons qu'à regarder à l'heure actuelle les listes
phénoménales à la DPJ. Les listes d'attente des enfants
sont, justement, sujettes à des problèmes d'ordre familial. Je
pense qu'il y a là urgence sociale. L'urgence sociale est non pas de
mettre des structures et de faire encore de la consultation pour
savoir exactement ce qu'il en est.
Je pense que le débat sur le besoin d'une politique familiale,
sur le véritable besoin en matière de soutien aux familles a
été plus que largement fait. Il a été
commencé sous l'ancien gouvernement parce que celui-ci avait un souci,
une préoccupation de la qualité de vie pour les familles
québécoises. Un document avait été produit en
octobre 1985, mais, malheureusement, les élections étant
arrivées en décembre 1985, nous n'avons pas pu mettre de l'avant
notre politique tant réclamée par les familles du
Québec.
Donc, M. le Président, le gouvernement arrivait, et qu'est-ce
qu'il a fait? Il a fait fi complètement d'un ministre
délégué à la Famille. Il n'a rien fait, il a
attendu jusqu'à ce que la ministre de la Santé et des Services
sociaux soit dépassée, plus capable de savoir à quoi s'en
tenir et où donner de la tête. Elle était
dépassée par son ministère et incapable de mener à
bien plusieurs dossiers, dont, notamment, un dossier très important qui
est celui de la politique familiale. Donc, on a décidé de mettre
un ministre délégué à la Famille,
c'est-à-dire de revenir à ce que l'ancien gouvernement avait mis
de l'avant, pour favoriser, justement, une politique cohérente
vis-à-vis de la famille.
Le nouveau ministre en titre, le ministre Dutil, a décidé
que rien n'avait été fait avant lui. Il venait de
découvrir que tout était à faire, que tout était
à recommencer, que tout était à bâtir. Si c'est son
expérience et son champ de connaissance dans le domaine des besoins de
la famille, je pense que, le 29 août dans les journaux, quand bon nombre
d'organismes se demandaient si le ministre pouvait satisfaire aux exigences de
sa tâche ou avoir une compréhension, en tout cas, du dossier, ils
n'avaient pas tout à fait tort de se poser de telles questions.
Alors, qu'est-ce qu'il en était? Finalement, tout le monde s'est
dit: Est-ce que c'est un gouvernement qui veut gagner du temps? Et,
effectivement, c'est un gouvernement qui voulait gagner du temps, alors que,
déjà, on avait mis en place ce qu'il fallait. On avait
commencé à consulter les organismes et les groupes et,
déjà, on avançait des propositions intéressantes
qui auraient apporté un soutien direct aux familles et qui auraient
été plus heureuses pour les familles québécoises
que certaines mesures fiscales qui ont été mises de l'avant et
qui favorisaient le troisième enfant. Ma foi, lorsqu'on regarde
actuellement le taux de natalité qui est de 1,4, ce n'est pas le
troisième enfant qu'il faut favoriser, mais bien le deuxième
enfant.
En tant qu'Opposition, nous avons lancé le débat, nous
avons tenu un conseil national qui a fait une véritable réflexion
sur une politique familiale. On allait de l'avant avec une politique familiale
et de l'enfance beaucoup plus vaste, beaucoup plus globale que ce que nous
propose actuellement le ministre délégué à la
Famille. Je me demandais si le ministre délégué à
la Famille finirait par laisser sa prudence, qui lui convient très bien,
et s'il aurait un petit peu plus de courage politique, s'il irait un petit peu
plus loin et s'il jouerait un rôle de leadership auprès de ses
différents collègues au cabinet des ministres. Il semble que ce
soit plus que de la prudence qu'affiche le ministre
délégué à la Famille actuellement puisqu'il dit:
Moi, je ne peux pas prendre position tant que mes collègues ne pourront
pas, à cause de leurs divergences et d'une certaine résistance,
en arriver à un consensus en ce qui concerne une politique de la
famille.
M. le Président, je ne vois pas comment un ministre
délégué peut assurer un leadership auprès de ses
collègues lorsqu'il est dans l'attente d'un consensus, alors qu'on sait
que les politiques familiales font référence à des valeurs
et que les valeurs, c'est un thème où il est difficile de
s'harmoniser et de trouver une politique à point unique, à
chaussure unique. Le nouveau ministre semble capable de vivre avec cet
état de fait. Il est capable aussi d'attendre que les gens puissent
arriver à tous s'entendre. Je ne sais pas si tout le monde va avoir voix
au chapitre. Il semble, M. le Président, qu'encore là on soit
loin d'arriver à des politiques qui vont favoriser la famille.
Nous avons eu à nous pencher récemment sur la politique
qui a été déposée en ce qui concerne les mesures
d'aide sociale, qui ne favorise en rien, mais en rien la politique familiale.
Est-ce que c'est le rôle de leadership que veut jouer le ministre
délégué à la Famille lorsqu'il dit qu'un de ses
principaux objectifs, c'est de faire en sorte que chacun des différents
ministères se préoccupe de donner aux parents des moyens
d'élever leurs enfants en fonction de la politique familiale? Je ne
pense pas que ce soit une façon de faire, je ne crois pas. (0 h 50)
Concernant les politiques d'aide sociale, que va-t-il se passer,
finalement, lorsqu'on parle du programme APTE? Seulement dans le volet pour les
femmes - je vais laisser de côté tout ce qui concerne les familles
à faible revenu - c'est une diminution totale de revenus pour les femmes
qui, pendant une grossesse, ou avant ou après, seront
considérées comme aptes au travail. Si elles ne vont pas
travailler, il y aura une diminution de leurs prestations. C'est incroyable,
c'est inadmissible.
Et, on dit, ensuite, que ce ministre joue son rôle de
coordonnateur entre les différents ministères et qu'il essaie de
convaincre ses collègues de la nécessité de prendre en
considération les besoins des
familles québécoises. C'est de la foutaise. Ce n'est pas
prendre les Québécoises et les Québécois au
sérieux. Ce n'est pas prendre au sérieux les
préoccupations des Québécois et des
Québécoises. Il y a une chanson qui dit: Paroles, paroles,
paroles! C'est un peu le cas de ce gouvernement, ce ne sont que des paroles,
des paroles vides de sens, des paroles qui n'ont aucune résonance, des
paroles qui ne font plus rire personne. Les familles québécoises
s'attendaient à une meilleure réception de la part du ministre
délégué à la Famille. Elles s'attendaient, à
ce moment-ci, après deux ans de pouvoir de ce gouvernement, après
deux ans de réflexion, après deux ans de lecture attentive de
tous les documents déposés sur la famille, à des
considérations et à des politiques véritables et directes
qui pourraient apporter une aide concrète aux familles.
Je pourrais vous donner d'autres exemples. En ce qui concerne les
familles qui ont un enfant handicapé, où est le soutien qu'on
peut donner à ces familles qui sont épuisées, mais qui
veulent garder leur enfant à l'intérieur de la cellule familiale
pour lui donner la meilleure chance possible d'intégration sociale. Le
répit gardiennage? Ce n'est pas grand-chose, me direz-vous, mais il faut
y penser. Il faut avoir une volonté politique de mettre en application
des mesures qui font en sorte que, quelle que soit la situation de la famille
ou quel que soit l'état physiologique ou intellectuel des enfants ou
même du conjoint, ils puissent être maintenus dans une cellule
familiale. Vous savez que ce n'est pas facile, aujourd'hui, de maintenir la
cellule familiale. C'est fragile, c'est même volatile dans certains cas.
Présentement, il faudrait qu'on démontre une volonté
réelle d'encourager les familles, d'empêcher leur éclatemt
t et de permettre de maintenir ce noyau essentiel pour une
société. C'est la base même de notre
société.
Encore là, on attend. On attend on ne sait quoi. On laisse passer
le train. Évidemment, on vient de changer de conducteur mais on pense
que le conducteur n'a pas suffisamment appris à manipuler. On ne sait
même pas s'il a suffisamment de connaissances pour conduire le train
à la gare. Pour les parents du Québec, c'est un très gros
prix à payer. On pouvait s'attendre à beaucoup plus pour les
familles québécoises.
Je pourrais vous dire que le nouveau titulaire responsable de la
politique familiale a précisé qu'il avait une très grande
connaissance des problèmes sociaux, à cause de
l'expérience qu'il avait acquise alors qu'il était maire, qu'il
était dans le milieu municipal. Il disait: Écoutez, j'ai
tellement bien compris les problèmes sociaux que j'ai travaillé
à des dossiers à vocation sociale, et il donnait l'exemple du
dossier des ambulances de Beauce. J'espère que vous ne vous tromperez
pas à ce point avec les politiques familiales parce que c'est bon
après le fait. Cela me fait penser un peu au volet des politiques pour
les femmes violentées, quand on dit: Oui, oui, oui, bien sûr, on
est conscient du problème des femmes violentées. Mais, quand
vient le temps de démontrer concrètement et d'une façon
tangible qu'on veut agir - pas juste avec des paroles - qu'on veut vraiment
apporter des solutions concrètes et favoriser un encadrement, un soutien
pour ces femmes, il faut qu'on donne les sommes nécessaires pour
répondre aux besoins. Là encore, je pense qu'on est très
timide. Je ne pense pas qu'on ait une politique cohérente, globale.
Actuellement, on se targue de beaucoup de choses, mais il en arrive
très peu. Finalement, c'est surtout des discours. Mais, pour les
discours, ce sont des gens très habiles, très adroits et qui ont
finalement très souvent réponse à tous les maux. Et, ma
foi du bon Dieu, on peut presque penser qu'ils ont eu la potion magique des
schtroumpfs. On se demande si les trois petits tours de magie auxquels ils ont
habitué la population du Québec vont toujours faire en sorte
qu'on va se retrouver avec un chapeau continuellement plein de surprises, mais
de mauvaises surprises, de sorte qu'il n'en reste rien. Ce sont des illusions
pour l'ensemble de la population.
Je peux vous dire que les familles québécoises, je pense,
mériteraient autre chose que simplement des illusions. Les familles
québécoises méritent davantage parce que, si on veut
vraiment encourager la famille, si on veut régler les problèmes
de natalité que nous connaissons à l'heure actuelle, mettre un
terme, justement, à tout ce que l'on connaît à l'heure
actuelle et permettre que la famille soit considérée comme
étant un objectif valable dans notre société, il faut
vraiment trouver les moyens. C'est urgent, il faut les trouver
présentement et non pas attendre le bon vouloir de l'ensemble des
ministres qui sont plus souvent qu'autrement préoccupés par
d'autres détails et d'autres soucis que ceux de favoriser la famille.
C'est un gouvernement comptable. C'est peut-être un gouvernement d'hommes
d'affaires. Ce sont peut-être des gens qui sont habitués plus
à la prudence qu'à autre chose, mais qui ne donnent absolument
rien. Une prudence, finalement, à l'extrême qui fait qu'on a les
pieds et les mains liés. En d'autres termes, les gens doivent attendre
qu'il y en ait qui prennent des décisions valables. Ces décisions
tardent toujours à venir et, finalement, c'est la population qui en fait
les frais.
M. le Président, je pense que je pourrais vous donner plein
d'exemples sur ce qui se passe à l'heure actuelle. Il y a toute la
violence faite aux enfants. C'est un volet
dont on ne parle pas beaucoup dans cette politique. Dieu sait combien
ces enfants, actuellement, sont vulnérables et fragiles. Ils sont sans
défense. Et, généralement, très peu de gens dans la
société se soucient de leur intérêt, justement parce
qu'ils sont victimes des adultes bien plus souvent qu'autrement. Nous avons vu
tout ce qui s'est passé dans les institutions dernièrement.
Là où on pensait que c'était la sécurité
pour ces enfants, on s'est aperçu que, des fois, c'était assez
précaire comme sécurité. Je pense que, si on n'aide pas
directement la famille avec tout ce qu'on a comme problèmes,
c'est-à-dire les problèmes d'emploi, les problèmes des
garderies... Je pourrais vous entretenir longtemps du problème des
garderies à l'heure actuelle. Qu'adviendra-t-il d'une politique des
garderies? Encore là on attend. On attend toujours. On est à la
remorque d'autres politiques. Ce sont les politiques du fédéral,
comme si on n'était pas capable ici au Québec d'aller de l'avant
et de mettre...
Le Vice-Président: En conclusion, Mme la
députée de Marie-Victorin.
Une voix: Merci beaucoup.
Mme Vermette: ...en application des politiques qui nous
concernent et qui favoriseraient, justement, les familles
québécoises, et surtout les femmes du Québec. Je vous
remercie, M. le Président.
Le Vice-Président: Je cède maintenant la parole
à M. le député de Lac-Saint-Jean et whip de
l'Opposition.
M. Jacques Brassard
M. Brassard: Merci, M. le Président. Je dois vous dire,
tout d'abord, que je trouve déplorable que nous abordions cette question
à une heure aussi tardive, presque en pleine nuit. Je trouve cela
déplorable que le gouvernement appelle un projet de loi de cette nature
en pleine nuit, à 1 heure du matin.
M. Jolivet: C'est rire du monde.
M. Brassard: M. le Président, il semble - du moins, c'est
ce que nous annonçaient les journaux il y a quelques semaines - que le
Parti libéral était décidé à effectuer un
virage social et qu'entre autres choses il allait se doter d'une politique de
la famille. Magnifique, formidable, d'autant plus que le premier ministre,
à plusieurs reprises au cours des deux dernières années,
s'était inquiété du phénomène de la
dénatalité, entre autres, du phénomène du
vieillissement de la société québécoise et de
l'absence de mesures et de politiques concrètes pour soutenir et aider
la famille québécoise. (1 heure)
Donc, le gouvernement se prépare à effectuer un virage
social et, entre autres, à se doter d'une politique de la famille. C'est
ce que le ministre responsable nous a révélé
récemment. Quand on regarde son énoncé de politique,
surgit tout de suite à l'esprit une petite fable de La Fontaine
concernant une montagne qui accouchait d'une souris, parce qu'il s'agit
véritablement de cela. Voilà que la montagne accouche d'une
souris. Le titre est pompeux, cela s'appelle: "La politique familiale,
énoncé des orientations et de la dynamique administrative". Le
titre pourrait nous indiquer que nous allons nous retrouver en face d'une vraie
politique de la famille, mais la réalité est tout autre; quand on
en prend connaissance, on se rend compte qu'on est en face, comme le signalait
Gilles Lesage dans un éditorial du Devoir, d'une enfilade de
voeux pieux, un ramassis de voeux pieux. On plane dans le ciel
éthéré des beaux et grands principes. Il est
évident qu'on ne peut pas être contre ces principes; peut-on
être contre la vertu et la tarte aux pommes? Bien sûr que non! Ces
principes sont merveilleux, je vous en cite quelques-uns.
Le gouvernement, dans les limites de sa compétence et de sa
responsabilité, veut reconnaître la famille comme valeur
collective fondamentale, car son bien-être et celui des individus qui la
composent sont considérés comme sous-jacents au bien-être
de la société. Y a-t-il quelqu'un au Québec qui peut
être contre cela? Évidemment pas. Magnifique, très beau
principe, extraordinaire, unanimité, consensus! Nous sommes unanimes sur
un principe de cet ordre-là!
Deuxièmement, le gouvernement veut contribuer à la
cohésion et à la stabilité de la famille, ainsi que tenir
compte davantage de la spécificité de la réalité
familiale. Bravo! formidable, attendrissant! On ne peut pas s'opposer non plus
à un principe de cette nature.
Troisièmement, le gouvernement veut soutenir les parents à
titre de premiers responsables légaux et sociaux de la prise en charge
des enfants, évitant de se substituer à eux tout en
protégeant l'intérêt de l'enfant. Formidable, un principe
extraordinaire également!
Quand on regarde les principes, évidemment personne, pas plus de
l'autre côté que de ce côté-ci, le côté
de l'Opposition, peut s'opposer à de pareils principes. C'est vraiment
de l'ordre des voeux pieux. Par contre, puisque le document s'appelle Politique
familiale, il est évident qu'on cherche un peu plus loin. On cherche le
plan d'action, la feuille de route, les politiques et les mesures
concrètes, les programmes concrets en vue d'atteindre et d'appliquer les
principes que je viens de citer, puisqu'il s'agit d'une politique. Dans mon
esprit, c'est
comme cela que je vois les choses. Une politique, cela comprend, bien
sûr, un certain nombre de principes de base, mais ces principes sont
accompagnés de mesures concrètes, d'actions précises, de
certains programmes d'action; c'est cela, une politique. Là, cela
s'appelle une politique, à ce moment-là. Quand on ne voit que les
principes, quand cela ne comporte que des principes, on ne peut pas appeler
cela une politique de la famille, cela m'apparatt de la fausse
représentation et de la poudre aux yeux.
Alors, on cherche le plan d'action dans tout cela. Des mesures
concrètes, il n'y en a nulle trace. Rien, sauf une qui fait l'objet du
projet de loi qui est à l'étude, un Conseil consultatif de la
famille. C'est évident qu'on ne sera pas contre cela. Qui est contre la
mise en place d'un Conseil consultatif de la famille? On va voter pour ce
projet de loi, c'est bien sûr, de ce côté-ci, mais c'est la
seule et unique mesure concrète qu'on retrouve dans cette
supposée politique familiale rendue publique récemment.
Soit dit en passant, il y a une espèce de paradoxe qu'on
constate. Depuis deux ans, ce gouvernement s'acharne à supprimer et
à abolir les conseils consultatifs à la suite du rapport Gobeil
parce que, soi-disant, ce sont des organismes inutiles qui gaspillent des
ressources de l'État et qui n'ont pas leur raison d'être et que,
par conséquent, on se doit de les supprimer. Je donne deux exemples. On
a adopté ici une loi qui abolissait le Conseil consultatif du tourisme.
On a également adopté une autre loi qui abolissait le Conseil
consultatif de la faune. Selon cette perspective, les conseils consultatifs
n'ont pas leur raison d'être et il n'y a pas lieu de les maintenir; il
faut les abolir. Par contre, paradoxalement, lorsqu'on se retrouve devant des
problèmes cruciaux, des problèmes majeurs et complexes, la
réaction du gouvernement - c'est curieux, c'est étrange - c'est
de mettre en place un conseil consultatif. D'un côté, on abolit
joyeusement, on abolit allègrement les conseils consultatifs et, de
l'autre, quand on a à affronter, à faire face à un
problème majeur, un problème social important, la réaction
de ce gouvernement - et la seule réaction - c'est de mettre en place un
conseil consultatif. Cela a été le cas avec la jeunesse. Pendant
toute la campagne électorale et pendant des mois, ce gouvernement, ce
parti a prétendu qu'il allait résoudre le problème de la
jeunesse, le problème du chômage des jeunes, et qu'il allait
régler tous les problèmes vécus par les jeunes
Québécois. Une fois au pouvoir, qu'est-ce qu'il fait? Quelle est
la seule mesure qu'il adopte? Il met en place un Conseil consultatif de la
jeunesse. Point final. C'est tout. C'est cela la politique de la jeunesse de ce
gouvernement, un Conseil consultatif de la jeunesse, rien d'autre. C'est un peu
mince quand on se rappelle les promesses mirobolantes faites aux jeunes lors de
la campagne électorale de 1985. Là, on se retrouve devant un
problème grave aussi, le problème de la famille
québécoise, un problème complexe, un problème
social important. Quelle est la réaction de ce gouvernement, la seule et
concrète? Créer, mettre en place un Conseil consultatif de la
famille. C'est un peu court comme politique. C'est un peu mince, M. le
Président. Face à un problème complexe, c'est une solution
passablement simpliste que de penser qu'en ayant un Conseil consultatif de la
famille on se trouve à attaquer de front et de façon efficace les
problèmes vécus par la famille québécoise.
Donc, nul plan d'action, nulle feuille de route, nulle mesure
concrète visant à résoudre et à s'attaquer aux
multiples problèmes vécus par la famille
québécoise. Pourtant, Dieu sait qu'il y a urgence en la
matière et tous ceux et toutes celles au Québec qui
s'intéressent à cette question en arrivent à la même
conclusion: il y a urgence d'agir. Que ce soient les organismes familiaux ou
les groupes féminins, les groupes de femmes, tout le monde s'accorde
à dire au Québec qu'il est urgent de s'attaquer aux
problèmes complexes et multiples vécus par la famille
québécoise.
Les solutions ne manquent pas. S'il n'y avait pas eu des études,
une recherche, une analyse de la problématique de la famille
québécoise, on pourrait dire: II faut faire ce travail-là,
mais il est fait. Il a été fait et il a été bien
fait par le comité de la consultation sur la politique familiale, qui a
remis ses deux rapports en 1986, qui était présidé, comme
on le sait, par M. Champagne-Gilbert. Là-dedans, il y a toute une
série de recommandations nombreuses, variées, qui concernent
toutes les facettes de la famille québécoise et tous les
problèmes vécus par la famille québécoise. Il y a
plusieurs recommandations. On ne demande même pas au gouvernement
d'appliquer les quelque 100 recommandations; il y en a plus d'une centaine. Le
comité lui-même s'est dit: II faut fixer des priorités. Il
est évident qu'on ne pourra pas appliquer toutes ces recommandations. Il
serait important d'en déterminer certaines jugées prioritaires.
(1 h 10)
II a fait le travail. On se serait attendu à tout le moins, dans
un embryon de politique familiale de la part de ce gouvernement, d'y retrouver
l'essentiel des recommandations jugées prioritaires, urgentes à
réaliser proposées par le comité de consultation sur la
politique familiale. Ce n'est pas du tout le cas. La seule recommandation qu'on
y retrouve, c'est celle qui porte sur les structures administratives à
mettre en place. On le voit, on a décidé de
créer un Conseil consultatif de la famille. C'est tout. Pour le
reste, des mesures concrètes qui concerneraient directement les familles
québécoises, rien du tout.
Je vous donne un exemple de ces recommandations jugées
prioritaires par le comité: Agir et faire agir pour endiguer le
fléau social de la violence familiale et conjugale. Cela aurait
été une belle occasion de revoir tout le financement des maisons
d'hébergement pour femmes violentées qui connaissent actuellement
des problèmes de financement et de fonctionnement au Québec.
Plusieurs sont obligées de fermer leurs portes un peu partout au
Québec. Il y a un problème grave du côté du
réseau des maisons d'hébergement pour femmes violentées
et, parmi les mesures prioritaires proposées par le comité de
consultation sur la politique familiale, il y avait cette recommandation. Une
politique familiale comporte en tout premier lieu et de façon urgente
des mesures pour endiguer le fléau social de la violence familiale et
conjugale. Or, rien de cela ne se retrouve dans la prétendue politique
familiale du gouvernement libéral.
Deuxièmement, on proposait comme mesure urgente, prioritaire
également, de réaménager et d'augmenter les sommes
allouées aux allocations familiales existantes, de les augmenter
substantiellement. L'une des recommandations allait dans le sens d'un
réaménagement de façon à permettre aux parents de
recevoir un montant plus substantiel chaque mois et à rendre davantage
justice aux familles moyennes et aux familles pauvres pour ce qui est des
allocations familiales. Rien du tout dans l'énoncé de politique
familiale du gouvernement libéral à ce chapitre.
Troisièmement, le comité recommandait d'adapter d'urgence
le monde du travail aux besoins des parents. Cela veut dire quoi
concrètement? Cela voulait dire adopter des mesures concernant les
congés parentaux, les aménagements du temps de travail et de la
formation professionnelle. Pas un traître mot dans la supposée
politique familiale sur cette question majeure importante concernant les
familles québécoises.
Quatrièmement, on recommandait d'assurer trois types de services
prioritaires pour les familles: services de garde, services aux adolescents et
services sociaux, certains services de santé aux familles. Pour les
services de garde, il n'y a rien dans le document qui nous indique que le
gouvernement a l'intention de se doter d'une véritable politique de
services de garde, d'augmenter les places en garderies, d'augmenter
également le financement des garderies, rien de tout cela. Pourtant,
selon le comité, c'est un service capital pour les familles
québécoises, compte tenu du contexte dans lequel on vit
présentement.
Cinquièmement, on parlait d'aider les adolescents et les
adolescentes et on faisait référence directement aux maisons de
jeunes. Qu'arrive-t-il aux maisons de jeunes présentement? La même
chose qu'aux maisons d'hébergement pour femmes violentées:
plusieurs ont des problèmes de financement, manquent de fonds, de
ressources et doivent souvent fermer leurs portes. On se serait attendu
à tout le moins que, dans un énoncé de politique
familiale, non seulement on se contente d'énoncer des principes, mais
qu'en plus on rende publiques un certain nombre de mesures jugées
prioritaires, concrètes pour soutenir vraiment les familles
québécoises.
Il n'y avait qu'à puiser dans le rapport du comité de la
consultation sur la politique familiale. Il n'y avait qu'à en
sélectionner un certain nombre, le travail était fait, le travail
de consultation, d'analyse, de recherche des besoins. On avait circonscrit les
problèmes, on les avait identifiés et on avait proposé des
solutions concrètes à ces problèmes. Il n'y avait donc
qu'à puiser dans ce document. Si on voulait s'éviter la
tâche de faire une sélection, c'est simple, on n'avait qu'à
choisir parmi les priorités sélectionnées par le
comité lui-même, dont je viens de parler
précédemment. Pas du tout, rien de tout cela, pas de mesure
concrète, simplement des voeux pieux. On ne quitte pas le ciel
éclairé des beaux principes pour se mettre les pieds sur
terre.
Non seulement ces beaux principes ne sont pas accompagnés de
mesures concrètes, mais en plus, au moment même où ces
beaux principes sont rendus publics, le gouvernement, dans d'autres projets de
politique et de réforme, viole impunément, sans vergogne, ces
beaux principes énoncés. L'exemple le plus patent, le plus
tangible, c'est le projet de réforme de l'aide sociale du ministre de la
Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu. Il y a dans cette
réforme des éléments qui vont totalement à
l'encontre des principes qu'on retrouve dans l'énoncé de
politique familiale. Il y a là des éléments, des faits,
des propositions qui sont en complète contradiction avec les beaux
principes qu'on retrouve dans l'énoncé de politique familiale, et
j'en donne deux exemples, M. le Président.
Dans le projet de réforme sociale, une femme enceinte, à
partir de son sixième mois de grossesse, verra sa prestation
réduite de 43 $ en raison de sa non-disponibilité aux mesures
d'employabilité. Deuxième exemple, une femme chef de famille qui
s'acquitte de la garde de son bébé de six mois perdra 24 $ par
mois parce que non disponible à participer aux mesures
d'employabilité. Un autre exemple: pour assurer la garde d'enfants de
plus de deux ans, un homme ou une femme chef de famille monoparentale qui
refuse de participer aux mesures
d'employabilité pour s'acquitter de la garde de ses deux enfants
de trois et cinq ans verra son chèque mensuel réduit de 53 $.
Cela, c'est ce qu'on retrouve dans le projet de réforme de l'aide
sociale, des mesures qui vont complètement à l'encontre des beaux
principes visant à soutenir, à aider à
l'épanouissement de la famille québécoise. C'est vraiment
aberrant!
Non seulement il n'y a pas de mesure concrète dans cet
énoncé de politique, mais en plus, avant même qu'il soit
rendu public, le gouvernement pilote, parraine des réformes majeures,
entre autres celle de l'aide sociale, qui sont en contradiction avec les
principes qu'on retrouve dans la supposée politique familiale.
M. le Président, on est en face d'une opération poudre aux
yeux. Le ministre, d'un côté, en rendant public son
énoncé de principe, proclame que, désormais, ce
gouvernement va penser famille, mais c'est une pétition de principes qui
n'a pas de répercussion dans l'action concrète, l'action
politique de ce gouvernement puisque les politiques, les projets et les
réformes que ce gouvernement adopte ne respectent pas, ne s'inspirent
même pas des beaux principes avec lesquels, évidemment, je suis
d'accord, des beaux principes qu'on retrouve dans cet énoncé de
politique.
Bien sûr, on va voter pour la mise en place d'un conseil de la
famille, on ne peut pas être contre la vertu, c'est bien évident,
on ne peut que dénoncer cette opération poudre aux yeux, cette
montagne qui accouche d'une souris, cette absence de véritable politique
familiale au Québec. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président: Pour la poursuite du débat, pas
d'autre intervention? Oui. Je vais céder la parole à M. le
député de Laviolette et leader adjoint de l'Opposition. (1 h
20)
M. Jean-Pierre Jolivet
M. Jolivet: Merci, M. le Président. J'attendais que des
gens de l'autre côté se lèvent, c'est pour cela que j'ai un
peu tardé à me lever. Peut-être contrairement à
d'autres, je ne suis pas très heureux de me lever cette nuit, à 1
h 20, pour parler d'une supposée politique familiale. J'ai fait partie,
avec mon épouse, de ce que l'on appelle encore, puisqu'il reste encore
des cellules de ce genre, les foyers Notre-Dame. À l'époque de
mes premières années en 1970, les foyers Notre-Dame avaient
soulevé au Québec beaucoup de discussions et un des thèmes
dont nous avions discuté à l'époque était: Vers une
véritable politique de la famille au Québec. C'était en
1972. En 1973, au moment où je me suis présenté comme
candidat pour le Parti québécois pour la première fois,
j'avais soulevé ces thèmes eu égard à ce dont nous
avions discuté lors de colloques, de rencontres avec beaucoup de couples
au Québec. Malheureusement, je n'ai pas été élu
cette année-là, mais en 1976 je l'ai été, et mon
épouse et moi, ayant six enfants, donc formant une famille nombreuse au
Québec aujourd'hui, nous avions toujours cru que l'ensemble des
politiques d'un gouvernement devait tendre à favoriser la famille.
On pourrait me dire aujourd'hui, et c'est la façon facile d'y
répondre: Pendant les neuf ans que votre gouvernement a
été au pouvoir, il n'a pas fait tout ce qui aurait dû
être fait. Je serai assez honnête pour dire oui. La question qui
nous préoccupe ce soir n'est pas là. La discussion qui a eu lieu
au Québec pendant nombre d'années avait amené le
gouvernement du Parti québécois à créer justement
un poste de ministre délégué à la Famille qui avait
comme travail de préparer la politique familiale au Québec. Cette
politique a été déposée, on s'en souvient, à
la suite du travail volumineux et formidable qui avait été fait
par mon collègue, le député de Nicolet, M. Yves Beaumier,
assisté d'un comité de travail très important au
Québec, qui nous a donné les deux documents dont faisait mention
mon collègue qui m'a précédé, le whip du
gouvernement, député de Lac-Saint-Jean.
Dès le moment où le parti politique qui forme le
gouvernement a pris les rênes du pouvoir, on se serait attendu à
ce qu'il dise: Oui, c'est important, il y avait un ministre
délégué à la Famille faisant partie du gouvernement
précédent et, en conséquence, nous allons en nommer un
autre immédiatement. Preuve de ce que je dis, j'étais
moi-même ministre délégué aux Forêts. J'avais
eu comme mandat, dans l'année où j'ai occupé ce poste, de
mettre deux choses en place: d'abord la politique de reboisement intensif dans
les forêts québécoises et une politique forestière.
C'était tellement important au point de vue économique qu'on a
nommé, dès l'arrivée de ce parti au gouvernement, un
ministre délégué aux Forêts qui a continué
l'oeuvre qui avait été commencée. Mais cela n'a pas
été la même chose avec le gouvernement actuel en ce qui
concerne la famille. D'abord, une ministre des Affaires sociales
surchargée de travail, maintenant ministre de la Santé et des
Services sociaux grâce au chef de l'Opposition actuel, qui a
été le ministre qui a changé le titre du ministère
des Affaires sociales en celui du ministère de la Santé et des
Services sociaux. À cette personne on avait adjoint une autre personne,
l'adjoint parlementaire, lequel est le député qui est en face de
moi, le député de Laurier, qui s'occupait d'une façon
particulière des personnes handicapées.
Comme je l'ai vu travailler, j'aurais
pensé qu'il aurait été nommé effectivement
ministre délégué à la Famille. Malheureusement,
cela n'a pas été fait pour des raisons que l'on ne connaît
pas. Une autre personne qui était ministre délégué
aux Pêcheries est devenue ministre délégué à
la Famille et je me suis un peu amusé en disant que malheureusement ce
ministre qui a été nommé est en train de faire un travail
qui est un peu futile, d'une certaine façon, parce qu'il vient à
l'encontre de tout ce qui a été demandé par la population
du Québec et je devrais même dire promis par le Parti
libéral lors de la dernière campagne électorale.
Il est évident que nous ne pouvons pas nous opposer à la
mise sur pied d'un comité consultatif. Ce serait, à mon avis,
vraiment incorrect de le faire. Mais je dois vous dire que ce n'est pas
grand-chose ce qu'on nous propose là pour toute une politique de la
famille. Moi j'ai l'occasion depuis onze ans de représenter un
comté qui est formé de plusieurs parties, le bas du comté,
le centre du comté et le haut du comté, où il y a des gens
qui ont essayé avec les moyens du bord de se donner tout ce qu'il
fallait pour justement aider l'ensemble de la famille. Les groupes que je
mentionnais tout à l'heure, les foyers Notre-Dame, il en existe encore
à Grand-Mère. Il en existe encore à Saint-Tite. Pour
montrer que j'ai encore pour ces gens le respect le plus total du travail
qu'ils font, dans ce qu'on appelle le budget hors normes du
député, d'année en année, à toutes les fois
qu'ils m'ont fait une demande pour les aider, j'ai, par l'intermédiaire
du budget qui m'est fourni à l'Assemblée nationale et qui est du
ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, aidé dans
la mesure du possible ces groupes à travailler pour la famille dans mon
comté.
J'ai même participé avec eux à des rencontres. On
est allé donner ce que l'on avait comme connaissance, on a aidé
ces gens à faire en sorte que justement ils prennent position sur les
dossiers qui les concernent comme famille. Que ce soient des dossiers
économiques, que ce soient des dossiers concernant la famille, les
couples, les difficultés que rencontrent les jeunes, ou, comme on le
connaît actuellement dans l'ensemble de mon comté comme partout
ailleurs, les maisons des jeunes, que ce soit à La Tuque, à
Sainte-Thècle ou à Grand-Mère, les maisons pour les
personnes violentées et les personnes, les femmes en difficultés,
que ce soit à La Tuque ou à Grand-Mère, par
l'intermédiaire du groupe de Shawinigan, puisque c'est régional
celui-là... C'est la même chose concernant l'ensemble des
garderies, que ce soit à La Tuque, que ce soit à Saint-Tite, que
ce soit à Saint-Georges-de-Champlain ou que ce soit à
Grand-Mère.
Je dois vous dire, M. le Président, que j'ai, dans mon travail,
tout fait pour venir en aide à ces personnes qui, à
différents niveaux, travaillent pour le bien-être de la famille au
Québec. Je crois à la famille au Québec, je crois à
celle que mon épouse et moi formons, mais je sais aussi les
difficultés que cela comporte. Cela a l'air de rien, vous savez. La
politique telle qu'on nous la présente regarde l'ensemble des
ministères. Ce sont des programmes de chacun des ministères dont
on n'a aucune connaissance actuellement mais dont on sait que, pour certains,
il y a contradiction par rapport au principe qui a été
énoncé par le ministre délégué à la
Famille.
Je sais ce que cela veut dire. Vous savez, mes jeunes garçons qui
ont joué au hockey savent aussi ce que ça coûte à un
père de famille, à une famille, pour leur permettre de jouer au
hockey. Quand on a l'obligation - parce qu'on est une grosse famille -
d'acheter des automobiles plus grosses et quand on a une automobile plus grosse
et que tu amènes un enfant, qu'arrive-t-il en contrepartie? C'est que
tous les enfants du voisinage voyagent avec toi. Dans ce contexte, eux ne
paient rien. Et souvent, que se passe-t-il? C'est que ces personnes souvent
n'ont qu'un enfant ou deux enfants au maximum. Tandis que l'autre en a
plusieurs. Il y des politiques qui sont faites partout dans le monde qui sont
intéressantes. Il va falloir qu'on les considère. Je pense qu'on
ne va pas assez loin avec cette politique qui nous est présentée
et j'espère qu'on va aller plus loin.
Quelles sont les difficultés qu'ont ces familles quand elles se
retrouvent ensemble dans des lieux d'amusement, parce qu'elles ont le droit
d'aller s'amuser? On doit payer, pour les enfants, le même prix que pour
n'importe quel adulte. Vous savez, pour les gens qui se regroupent par
quinzaine, par vingtaine ce qui se passe? Ils ont des prix de réduction.
Parce qu'on est une famille, on n'y a pas droit. (1 h 30)
Aux États-Unis, en Ontario, vous avez des prix familiaux. Il y a
bien des places au Québec où on n'a pas cela. Il va falloir qu'on
s'y penche et permettre qu'on passe au-delà de deux enfants, qu'on aille
à un troisième enfant et qu'on aille peut-être même
à un quatrième enfant et qu'on ne soit pas
considéré, les familles comme la mienne, celle du
député de Dubuc, de la députée de Johnson ou
d'autres, comme des exceptions telles qu'on se fait regarder avec des gros
yeux. Il va falloir qu'on comprenne que la famille au Québec, c'est le
moyen de permettre à la nation québécoise de survivre.
L'immigration, c'est une chose, c'est nécessaire, mais la famille ici
est également importante.
C'est sûr que, parfois, quand je parle de cela à des gens,
ils me trouvent un peu farfelu, parce que, eux, ils ont peut-être un
enfant, peut-être deux enfants. Combien de
personnes à travers le Québec vont dire qu'on voit les
"key children", comme on les appelle, les enfants aux clés, les enfants
qui sont laissés tout seuls à la maison, parce que les parents
sont obligés de travailler en dehors, parce qu'il n'y a pas de garderie
populaire pour leur donner le service?
J'ai eu l'occasion, comme porte-parole de l'Opposition en matière
d'éducation, de visiter des garderies en milieu scolaire. Il y a de
très beaux exemples. À La Tuque, il y en a une qui vient
d'ouvrir. À Grand-Mère, il y a une garderie en milieu populaire;
il y a une garderie en garde familiale. Ce n'est pas facile et je les ai
aidées à organiser leurs activités. Pourquoi? Parce que
j'y crois et je pense que ce qu'on nous propose, c'est un début, mais ce
n'est pas suffisant. Ce n'est pas suffisant en regard de ce que ce parti
politique a promis. Ce n'est pas suffisant pour les femmes en
difficulté. Ce n'est pas suffisant pour les garderies. Ce n'est pas
suffisant pour les jeunes.
Je le sais, parce que c'est avec difficulté,
représentations par-dessus représentations, qu'on a obtenu de
l'argent pour ce qu'on a appelé à Sainte-Thècle la
"Shoe-claque". C'est un milieu où des jeunes en difficulté se
retrouvent. À Grand-Mère, à la maison des jeunes, à
La Tuque, des jeunes ont décidé de bouger et de faire bouger le
monde, nous avons ouvert l'automne passé une bâtisse neuve que les
gens, les jeunes, ont été chercher en termes d'argent pour leur
permettre de bâtir une bâtisse fonctionnelle pour eux.
Je les ai félicités et je les encourage. Mais
l'État doit venir en aide à ce monde. L'État doit le faire
dans des politiques qui leur permettent... Or, je ne vois pas, dans ce qui nous
est présenté, qu'il y a vraiment cette volonté.
Pendant que le ministre vient nous proposer une telle loi, qu'est-ce que
l'on fait? On coupe dans des maisons pour les femmes en difficulté, on
coupe dans des maisons pour les jeunes. On dit: Bien non, on met plus d'argent.
Cela me fait toujours penser à des gens qui disent: On met plus
d'argent, mais comme on est plusieurs à le repartager, cela en fait
moins pour tout le monde.
Il y a des indexations qui ne sont pas données. Il y a des
indexations qui ne permettent pas que des maisons puissent survivre. C'est cela
qui est une vraie politique. C'est d'abord de consolider ce qu'il y a là
et, ensuite, d'en mettre d'autres. Mais, pour cela, s'il faut consolider, il ne
faut pas diviser le gâteau avec plusieurs autres en donnant à
d'autres à nouveau, comme à des maisons de femmes
violentées, maisons de jeunes ou garderies. Il faut absolument en mettre
plus.
J'écoutais ce matin... On avait l'impression, à la
période de questions... Je devrais dire hier matin, puisqu'on est
déjà rendu à 1 h 30 de la nuit. J'entendais dire des
choses épouvantables. C'est qu'on est en train de nous dire qu'avec plus
on fait moins. Exemple: l'hôpital Sainte-Justine pour les enfants. On est
en train de nous dire qu'avec plus d'argent on en faisait moins.
Est-ce à dire qu'avant, avec moins on en faisait plus? C'est la
question qu'il faut se poser, M. le Président. C'était aussi
clair que cela, ce que la ministre de la Santé et des Services sociaux
nous disait. Nous avons devant nous un beau principe. Nous avons devant nous ce
qui nous permet peut-être de dire que la coquille est belle, mais que
dans la coquille il n'y a rien, une coquille qui ne fait que répondre
à ce petit gouvernement social de fin de semaine. Le conseil
général leur a dit: II faut faire cela, le vent est bon.
Allons-y! Mais pour cela, il faut sortir quelque chose. Qu'est-ce qu'on fait?
Comme je le disais tout à l'heure, on fait comme le ministre de la
Justice, on présente un projet de loi d'un article, on présente
un projet de loi de deux articles pour montrer qu'on fait quelque chose, pour
montrer qu'on a des projets, mais en réalité cela ne change
rien.
Comme je lui disais, s'il y a 45 changements, va-t-il présenter
45 projets de loi à raison d'un par année? Et cela va prendre 45
ans pour changer quelque chose. Ce n'est pas de cette façon que cela se
fait. Ce n'est pas en nous présentant des projets de loi comme
celui-là où il n'y a rien sauf des voeux pieux, et pas plus si on
ne donne pas la substance qu'il faut y mettre.
M. le Président, c'est ce qui m'inquiète. Je le dis comme
je le pense, avec cette capacité que j'ai depuis onze ans de
représenter mon milieu le mieux possible. Juste un exemple:
l'époque de la maison de femmes de La Tuque, qu'on appelle Le Toit de
l'amitié. Je m'en souviendrai toujours, parce qu'il y a des gens
là-bas qui disaient que nous ne l'obtiendrions jamais: Cela n'a pas de
bon sens, La Tuque est au fin fond du monde. Ce sont des gens de
Montréal qui disaient cela, pas les gens de La Tuque. Les gens de La
Tuque, eux, disaient: On va l'avoir, on va s'organiser et on va l'obtenir. Mais
les gens de Montréal ou de Québec, le Conseil du statut de la
femme, quand on l'a obtenu, ont dit: Comment avez-vous fait? On est tout
surpris, parce qu'on n'a même pas de ces maisons à Montréal
en nombre suffisant comme celle qu'on avait à La Tuque à
l'époque. Il y en avait, mais pas en nombre suffisant. On leur a dit:
Nous nous sommes défendus et nous sommes allés jusqu'au bout.
C'est cela que je demande à ce gouvernement. Il a dit pendant la
campagne électorale qu'il y avait des changements à faire. Soit!
Nous aussi, nous disions qu'il y en avait à faire. Rien n'est parfait
dans le
monde. Il y a des corrections à apporter, des changements
à apporter. Oui. Mais faire des promesses et ne donner aucun
accomplissement à ces promesses, ce que je dis, M. le Président,
c'est que cela n'a pas de bon sens.
Nous avons donc devant nous des voeux contre lesquels nous n'avons rien
à dire, parce que c'est effectivement ce que tout le monde
désire. Mais il faut aller plus loin. Il faut passer maintenant des
voeux aux actes. Il faut engraisser les actes. Tout à l'heure, je
parlais avec des gens du parti ministériel avant qu'on commence cette
discussion. Ils m'ont dit: Ne vous inquiétez pas, il va y avoir de la
chair autour de l'os du poulet, si on peut le prendre comme cela. Mais j'ai des
craintes juste à penser que cela va être graine à graine,
morceau par morceau et de telle sorte que finalement cela va prendre encore des
années pour avoir une vraie politique familiale, une politique qui va
entrer dans la tête des gens. Une des preuves des difficultés que
nous avons: l'Office des personnes handicapées, dont le
député de Laurier était responsable. Le ministre
responsable du Conseil du trésor a quasiment fait disparaître
l'adaptation de domicile. Le député sait de quoi je veux parler.
J'ai un cas chez moi. On a beau avoir des structures, si par hasard un ministre
du Conseil du trésor décide de couper, il faut que le ministre
responsable du dossier se batte pour qu'on ne se le fasse pas enlever.
C'est cela qu'on demande. On demande à ce gouvernement d'aller
plus rapidement, de donner plus que ce qui est là. Après deux
ans, après la mise en place d'un ministre responsable de la Famille qui
était la ministre de la Santé, mais dont la responsabilité
a été transposée au ministre délégué
à la Famille, on s'aperçoit qu'au moment où il y avait des
choses qui s'en venaient, on a bifurqué. On a mis une autre personne qui
a commencé des processus, en a continué d'autres pour arriver
à nous donner tout simplement un voeu pieux à l'égard
duquel nous n'avons pas le choix, M. le Président. Nous devons voter au
risque de nous faire dire qu'on est des épouvantables
écoeurants.
Je le dis comme je le pense, parce que c'est cela qu'on va se faire
dire. Je sais ce que les gens disent une fois qu'ils sont sortis de cette
Assemblée, mais, moi, j'ai le courage de le dire ici. C'est cela qu'ils
vont dire à l'extérieur. Ils vont dire: Cela n'a pas de bon sens,
le PQ va voter contre. Non. Le PQ va voter pour, mais on va demander plus. On
va demander que dans les semaines qui viennent, dans les mois qui viennent, il
y ait dépôt ici d'une vraie politique familiale beaucoup plus
qu'une simple coquille vide qui enrobe quelque chose qui n'est même pas
là. Merci, M. le Président.
(1 h 40)
Le Vice-Président: Donc, à ce moment-ci, je vais
maintenant reconnaître M. le ministre délégué
à la Famille, à la Santé et aux Services sociaux pour
l'exercice de son droit de réplique.
M. Robert Dutil (réplique)
M. Dutil: Merci, M. le Président. Je pense qu'on a eu un
débat fort intéressant qui n'a toutefois pas porté sur la
loi que nous présentons, Loi sur le Conseil de la famille, mais qui a
plutôt porté sur des mesures que l'on souhaite venir en vigueur
dans le futur, ce que nous avons déjà mentionné. Nous
avons mentionné que l'énoncé des orientations était
une première étape et qu'il viendrait d'autres étapes
ultérieures où nous aurions des mesures fort intéressantes
pour les familles.
Je suis heureux de voir que l'Opposition, dans tous les débats
qui ont été faits, bien que je n'aie pas toujours
apprécié le style spectacle... On se rappelle qu'on avait
reproché au gouvernement antérieur d'être
l'État-spectacle; nous avons l'Opposition-spectacle. Hormis cet aspect
de style, je pense que, globalement, sur le fait qu'il faudra y avoir des
mesures supplémentaires, des mesures plus fortes, des mesures plus
vives, nous sommes d'accord. Nous sommes tellement d'accord, M. le
Président, qu'à la suite d'une proposition de l'ancien chef de
l'Opposition, Pierre Marc Johnson, proposition que nous avons amendée,
le parti ministériel et le parti d'Opposition ont voté de
façon unanime.
Je relis cette proposition pour la remémorer à
l'Opposition. Ils semblent l'avoir oubliée. "Que cette Assemblée
exige du gouvernement libéral - c'est très impliquant, M. le
Président - qu'il continue à mettre de l'avant des politiques de
valorisation de la famille québécoise et qu'il instaure des
mesures visant à améliorer les services d'appui et le support
financier accordé aux parents à titre de premiers responsables
légaux et sociaux de la prise en charge des enfants et du milieu
familial."
M. le Président, le parti ministériel, avec l'Opposition,
a voté en faveur de cette proposition, proposition très
impliquante à deux volets. Un premier: il faut faire davantage. Bien
sûr, nous le reconnaissons. L'autre volet: le gouvernement, puisqu'on lui
demande de continuer à mettre de l'avant des mesures concernant la
famille, on admet donc qu'il a depuis deux ans adopté diverses mesures
à connotation familiale fort importantes que j'ai eu l'occasion, lors de
ce débat sur la motion de l'ancien chef de l'Opposition, de
préciser, d'expliquer davantage, entre autres, en citant de larges
passages du budget de l'année dernière présenté par
le ministre des Finances, en
citant de larges extraits qui concernaient spécifiquement la
famille sur le plan de la fiscalité.
Nous sommes donc dans un processus de continuité. Â notre
point de vue, il était toutefois important d'adopter des orientations et
des principes.
Donc, pour une des rares fois dans un dossier important, car cela n'a
pas été le cas pour l'accord du lac Meech où l'Opposition
a manifesté son désaccord, cela n'a pas été le cas,
comme on le sait, dans l'accord sur le libre-échange où
l'Opposition a manifesté son désaccord, dans ce cas-ci, dans le
cas des besoins d'avoir des mesures supplémentaires pour une politique
familiale, l'Opposition et nous, nous sommes d'accord. Ce n'était pas le
but de notre étude actuelle. Le but de notre étude portait sur la
Loi sur le Conseil de la famille.
Permettez-moi, M. le Président, de donner une brève
explication parce qu'on est revenu dans le débat cet après-midi
à plusieurs occasions sur le fait que le gouvernement actuel
préconise la création d'un Conseil de la famille alors qu'il
avait, semble-t-il, au dire de l'Opposition, mentionné qu'il
était contre tout conseil, ce qui est faux.
Une première mauvaise interprétation qu'a faite le chef de
l'Opposition cet après-midi, c'est sur l'aspect du mandat du Conseil de
la famille. Le Conseil de la famille ne sera pas là pour recommencer la
vaste consultation qui a été faite dans tout le Québec au
cours des dernières années. Cette consultation est faite. Les
recommandations sont présentées, et c'est une base de travail
fort excellente que nous avons l'intention d'utiliser.
Ce Conseil de la famille sera là pour conseiller le ministre et
également aider le ministre. C'est l'autre point que je désire
amener sur l'importance de ce conseil: aider le ministre à influencer
les autres intervenants fort importants pour que nos mesures, pour que nos
politiques aient un effet concret sur les parents dans la société
québécoise. Je fais référence ici au monde du
travail, au monde patronal, au monde syndical. Je fais référence
aux milieux municipaux et à tous les organismes qui peuvent avoir une
influence, de près ou de loin, sur la qualité de vie que nous
pouvons dans notre société accorder aux familles
québécoises.
Alors, quand l'Opposition nous dit que le gouvernement a
préconisé l'abolition de l'ensemble des conseils, c'est tout
à fait faux; non pas qu'il ne fallait pas éliminer certains
conseils, c'est ce que nous avons fait. On en a mentionné tout à
l'heure quelques-uns, celui du tourisme et celui de la faune. Je pourrais vous
mentionner également, le Conseil des pêches que j'ai
moi-même éliminé, et la Société
québécoise des pêches. On pourrait vous mentionner une
foule d'autres conseils qui, à notre point de vue, ne correspondaient
plus aux besoins de la société d'aujourd'hui ou qui n'avaient pas
l'utilité que l'ancien gouvernement avait cru leur donner quand ils les
avaient établis.
Ce n'est pas le cas pour la famille. La famille a une telle importance
dans la société québécoise et touche tellement
l'ensemble des Québécois que le gouvernement, qui n'est pas un
gouvernement dogmatique, qui n'a pas pris une position mur à mur sur
l'existence ou non des conseils, a jugé fort important de favoriser
l'expression des familles et des organismes familiaux auprès du
ministre, pour être bien sûr que le suivi se fasse d'une
façon très serrée à l'avenir dans les mesures qui
seront appliquées au plan de la politique familiale et pour être
également sûr que nous obtiendrons un appui très concret de
la part de gens qui s'intéressent à la famille, d'un appui
très concret des autres intervenants que j'ai mentionnés tout
à l'heure.
Voilà mes principales remarques concernant ce projet de loi dont
nous adoptons le principe ce soir. Je suis heureux de voir qu'après
avoir adopté la motion à l'unanimité le 29 octobre dernier
concernant le besoin de mesures d'une politique familiale, encore une fois,
l'Opposition va voter pour la création du Conseil de la famille. Je
crois bien que, au fur et à mesure que nous adopterons des mesures
concernant la famille, nous aurons l'avantage d'avoir un débat
intéressant avec l'Opposition et d'obtenir l'assentiment unanime de
cette Chambre pour tout ce qui va concerner la famille
québécoise, l'amélioration de sa qualité de vie et
cela, pour le mieux-être de l'ensemble des Québécois et des
Québécoises. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président: Alors, tout simplement, je voudrais
aviser nos spectateurs dans les galeries, mesdames et messieurs, que vous
êtes les bienvenus, mais que vous ne devez manifester en aucune
façon aucun signe d'approbation ou de désapprobation.
Le débat étant terminé à cette étape
de l'étude du projet de loi, est-ce que cette motion d'adoption du
principe du projet de loi 94, Loi sur le Conseil de la famille, est
adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président: Adopté. M. le leader adjoint du
gouvernement.
Renvoi à la commission des affaires
sociales
M. Johnson: Oui, M. le Président. Je ferais motion pour
déférer ce projet de loi à la commission des affaires
sociales.
Le Vice-Président: Est-ce que cette motion de
déférence est adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président: Adopté. M. le leader adjoint du
gouvernement.
M. Johnson: M. le Président, je demanderais
peut-être au député de Jonquière de se rendre
à son siège, cela lui permettra de s'exprimer, le cas
échéant, puisque ce projet de loi peut l'intéresser.
L'article 18, M. le Président.
Le Vice-Président: À l'article 18 du feuilleton, je
devrai requérir, à ce moment-ci, le consentement pour que nous
puissions procéder à cette étape de l'étude du
projet de loi. Y a-t-il consentement? À l'article 18 du feuilleton, cela
concerne le projet de loi 69; c'est pour en arriver à la prise en
considération du rapport. Puisque le rapport a été
déposé ce matin, nous devons obtenir consentement pour que nous
puissions passer à l'étude du rapport.
Une voix: Alors, d'accord.
Projet de loi 69
Prise en considération du rapport de la
commission qui en a fait l'étude détaillée
Le Vice-Président: II y a consentement, en
conséquence de quoi, sur ce consentement, nous allons procéder
à la prise en considération du rapport de la commission de
l'aménagement et des équipements qui a procédé
à l'étude détaillée du projet de loi 69, Loi
modifiant la Loi sur les villages nordiques et l'Administration
régionale Kativik. Est-ce qu'il y a des interventions? Il n'y a pas
d'interventions.
M. Francis Dufour M. Dufour: Un mot seulement...
Le Vice-Président: Oui, M. le député de
Jonquière.
M. Dufour: ...juste pour informer cette Chambre et ceux qui ont
encore le courage d'écouter ce qui se passe à l'Assemblée
nationale à cette heure tardive concernant l'administration des villages
nordiques et l'Administration régionale Kativik. (1 h 50)
Pour des parlementaires, c'est vraiment un monde différent et les
articles qui s'appliquent tantôt ressemblent à ceux qui sont
vécus dans le Sud par rapport au Nord -on peut vraiment parler du Sud
par rapport au Nord - tantôt, ces règlements, dis-je, ressemblent
étrangement à ceux dans lesquels les municipalités du
Québec vivent et lorsque cela arrive dans le Nord, il y a des
règles différentes.
Donc, cela peut nous paraître surprenant, mais il semble que ces
villages nordiques apprennent avec le temps à s'adapter à un mode
de vie différent, ce qui ne les amène pas à vivre une
démocratie retardée, mais d'une façon qui se rapproche
graduellement de celle des gens du Sud.
Donc, lorsqu'on étudie des projets semblables, nous, nous
pourrions être considérés comme la Floride du Nord, ce qui
n'est pas tout le temps vrai lorsqu'on voit les tempêtes qu'on vit ici ou
les problèmes de froid dans lesquels on vit. Donc, ces gens sont bien
préparés pour le faire et je trouve que ce projet de loi leur
donne également un instrument pour en profiter pour mieux s'administrer,
et pour qu'ils puissent suivre l'évolution générale et les
actes de leur municipalité.
Il est évident que j'ai eu le concours du député
d'Ungava qui est le député du comté dans lequel sont
situés la plupart de ces villages inuit et qui a une plus grande
connaissance que moi de ce milieu, mais pour lequel on a pensé
présenter certains amendements. Encore, chose curieuse, il semblait que
la commission parlementaire était faite seulement pour la forme, pour
s'assurer que tout était bien écrit, puisque ce projet de loi
découle de l'entente de la Société de la Baie James,
c'est-à-dire les ententes qui ont été faites concernant
les barrages dans le Nord, ententes faites entre le gouvernement du
Québec, donc par l'ex-gouvernement et les Indiens ou les Inuit. On
applique ces particularités dans le projet de loi et il semblerait que
les seuls amendements ou les seuls changements qu'on peut apporter
découlent de la volonté de l'Administration régionale
Kativik qui demande au ministre des Affaires muncipales et ministre responsable
de ce secteur d'apporter les amendements et il semblerait qu'on peut apporter
des amendements tangibles qui font le bonheur de ces gens.
Donc, pour nous, comme membres de l'Opposition, nous serons heureux de
concourir à l'approbation de ce projet de loi, puisqu'il répond
à leurs voeux. Mais on déplore cependant qu'on n'ait pas - dans
nos négociations, entre le gouvernement du Québec et
l'Administration régionale Kativik -réussi à amener une
évolution aussi rapide que l'Opposition aurait aimé.
Donc, c'est encore un choix du ministre des Affaires municipales et on
doit le respecter, puisqu'en le faisant on ne peut pas faire tort à ces
gens. Mais nous de l'Opposition, on aurait aimé que le projet de loi ait
été plus conforme ou ait correspondu un peu mieux à ce qui
se passe dans les villages du Sud ou dans les villages du Québec,
parce
que, lorsqu'on parle du Sud, on pense toujours aux vacances, on pense au
soleil, on pense à la végétation luxuriante.
Mais ce n'est pas tout a fait ce qui se passe dans la
réalité, parce que dans la saison des fêtes qu'on
s'apprête à vivre, on peut penser à la neige, on peut
peut-être penser à beaucoup plus d'éclairage que dans les
villages du Nord, mais aussi à des activités beaucoup plus
nombreuses de la part de la population, parce que ces gens-là vivent de
chasse et de pêche.
Donc, ce sont des gens qui doivent avoir des institutions
adaptées et tant mieux si l'ancien gouvernement a trouvé le
moyen, dans une entente avec ces gens-là, de trouver un mode de vie
adapté à leurs besoins. Le gouvernement qu'on a en face de nous
n'en est que la continuité, pas dans son meilleur, mais la
continuité du gouvernement qui l'a précédé et il
doit respecter ces ententes.
Quant à nous, les membres de l'Opposition, nous serons heureux de
concourir à la prise en considération et si le ministre veut
procéder après à l'adoption, nous y concourrons dans la
même mesure.
Le Vice-Président: II n'y a pas d'autres interventions.
Notre débat étant terminé, est-ce que le rapport de la
commission de l'aménagement et des équipements qui a
procédé à l'étude détaillée du projet
de loi 69... Je m'excuse. D'accord, j'avais compris que vous ne vouliez pas
parler. Je vous cède la parole pour une réplique de cinq
minutes.
M. André Bourbeau
M. Bourbeau: M. le Président, je ne voudrais pas
interrompre votre droit de parole mais simplement pour dire, comme le
député de l'Opposition, que je suis très satisfait que
nous en soyons à l'étape de l'adoption du projet de loi qui vise
à modifier la Loi sur les villages nordiques et l'Administration
régionale Kativik. C'est un projet de loi qui vise à apporter
certaines modifications à cette loi afin principalement d'assouplir
certaines règles applicables dans le monde municipal au nord du
Québec. C'est un projet de loi qui améliore la situation, qui
tente de moderniser, si je peux dire, les règles administratives qui
prévalent dans le milieu nordique. Ce projet de loi fait en sorte de
bonifier la situation qui existe dans l'administration municipale des villages
nordiques.
Je suis heureux de voir que l'Opposition est disposée à
procéder dès maintenant à l'adoption définitive du
projet de loi. C'est avec plaisir que nous accepterons ce consentement.
Le Vice-Président: Très bien. Là, c'est
vrai. Le débat est terminé à cette étape-ci.
Le rapport de la commission de l'aménagement et des
équipements qui a procédé à l'étude
détaillée du projet de loi 69, Loi modifiant la Loi sur les
villages nordiques et l'Administration régionale Kativik, est-il
adopté?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président: Adopté. Je comprends qu'il y a
consentement pour que nous procédions à l'étape suivante.
Consentement. Oui, M. le leader adjoint du gouvernement.
M. Johnson: M. le Président, quitte à ce que vous
vérifiiez s'il y a consentement, je ferais motion au nom du ministre des
Affaires municipales pour que nous adoptions ce projet de loi.
Le Vice-Président: Bien. Y a-t-il consentement à
cet effet? Consentement. M. le leader de l'Opposition.
M. Gendron: II n'y a pas d'objection à ce qu'on fasse la
troisième lecture tout de suite, mais mon collègue n'indique
qu'il aimerait dire quelques mots sur la troisième lecture.
Adoption
Le Vice-Président: Très bien. Je constate le
consentement. Nous arrivons donc à la motion du ministre des Affaires
municipales pour l'adoption du projet de loi 69. Je cède la parole
à M. le député de Jonquière.
M. Francis Dufour
M. Dufour: M. le Président, nous venons de prendre en
considération le rapport et de l'adopter. En adoptant ou en se proposant
s'adopter le projet de loi, il est évident, comme je l'ai
soulevé, que l'avantage de passer à la deuxième
étape rapidement, c'est de nous permettre de compléter nos
premières interventions. Je voulais souligner tout à l'heure les
différences qu'il y a entre les gens du Nord et les gens du Sud.
Par rapport aux villages inuit et les villes et les villages
québécois, les élus municipaux ont une façon
différente de se faire élire. Au lieu d'avoir des sièges
numérotés, d'avoir des quartiers, parce que dans le Nord les
quartiers n'ont aucune consonnance, les villages sont très petits, les
gens sont concentrés dans de petits endroits - il est difficile parfois
d'avoir des gens pour se présenter aux élections municipales -
que fait-on? Il y a des périodes électorales qui ressemblent aux
nôtres où les gens s'inscrivent sur une liste en disant qu'ils
veulent militer, briguer les suffrages. Lorsqu'il y a plus de gens que le
nombre de
sièges ouverts, ces gens procèdent par vote, cela peut
arriver, et ce sont ceux qui ont le plus de votes qui sont élus. Je
pourrais parler d'un concours de popularité, mais cela veut dire qu'il y
a toujours élection s'il y a plus de monde. On ne veut pas se priver de
la capacité de ces gens et surtout on veut obtenir les gens les plus
compétents pour jouer le rôle d'élus municipaux.
C'est une différence tangible de ce qu'on vit dans les
municipalités du Québec, puisqu'on vient d'adopter, il n'y a pas
tellement longtemps, la loi 100 qui parle des élections et
référendums au Québec. Les élus municipaux se
présentent à des sièges numérotés. On a le
choix de diviser la ville - juste un choix, la première fois - et les
municipalités en quartiers. Ces quartiers sont représentés
par des conseillers municipaux. Lorsqu'on élit des gens, les gens
décident d'avance dans quel quartier ils vont se présenter. S'il
y en a plus que deux dans un quartier, c'est dans ce quartier qu'il y a droit
de vote. Dans une élection générale, si tous les
sièges sont ouverts et qu'il y a plus qu'une candidature pour l'ensemble
des quartiers, il y a toujours une élection, mais des élections
pour les conseillers dans des quartiers seulement. Tandis que, dans le Nord,
s'il y a plus de candidats que le nombre de candidats recherchés, on
procède toujours à une élection générale. (2
heures)
Donc, c'est une différence tangible et le maire, comme tel, est
aussi choisi de la même façon. S'il y a plus d'une personne qui
veut militer au poste de maire, il devient ipso facto la personne élue
maire ou il doit faire face à l'électorat. C'est un exemple assez
frappant des différences entre ces gens-là et nous. Il y a
l'Association régionale Kativik qui, elle, représente l'ensemble
des villages inuit sur le territoire où ces gens sont nommés et
on les appelle des administrateurs régionaux. Ces gens-là, on
pourrait essayer de faire un rapprochement avec une MRC et cela ressemble
drôlement au travail que les MRC accomplissent, mais elles vont beaucoup
plus loin.
Donc, ce n'est pas nécessairement le maire qui représente
la municipalité à l'Administration régionale Kativik. Cela
semble un poste de prestige et ces gens-là sont choisis... cela peut
être des élus municipaux comme cela pourrait être d'autres
qui sont délégués à la société
régionale. Ces gens-là oeuvrent par leur action. La loi
reconnaît la façon dont ils sont nommés et aussi la
façon dont on choisit le président de cette assemblée qui
peut choisir d'être à temps plein. La loi reconnaît que
c'est le choix d'un individu d'être à plein temps. Le choix
d'être payé dépend de l'ensemble des administrateurs de la
société. Il peut donc ne pas être élu par un conseil
municipal. Il faut qu'il soit élu d'abord par un conseil municipal pour
être président. Après qu'il est président, il peut
choisir d'être à temps plein et il perd son poste électoral
et il pourait être renommé mais il pourrait aussi être
enlevé en tout temps. C'est une particularité qui, à mon
sens, peut jouer des tours, parce que cela met un président presque
à la merci de ses commettants, donc de ceux qui l'élisent
puisqu'ils peuvent le démettre de ses fonctions à n'importe quel
moment de son mandat. Donc, en principe, il est élu ou nommé pour
deux ans, mais il peut être démis de ses fonctions à
n'importe quel moment de son mandat. C'est une particularité importante.
Les questions de l'Opposition étaient à savoir si cela ne
pourrait pas représenter des problèmes majeurs dans le
fonctionnement de cette société puisque, comme ce sont des postes
prestigieux, cela veut dire qu'il y a de la représentation, cela veut
dire qu'il y a des éléments ou des décisions importantes
qui sont prises dans ce milieu, ce qui peut susciter de la controverse comme ce
qui peut susciter des différences d'opinions qui pourraient aller
jusqu'à faire démettre le président. Il semble que ce soit
le voeu de ces gens-là et on se doit de le respecter. Nous avons
concouru à l'adoption de cet article, même si, dans les faits, on
pense que c'est une obligation très onéreuse par rapport à
cette société et à ce milieu.
Une autre particularité qu'on retrouve, c'est que le maire de
Naskapi de Schefferville, qui est un village indien, le seul de l'ensemble des
villages inuit qui est le représentant officiel régional de la
société Kativik... Donc, si cette personne veut, elle n'a pas le
choix, elle ne peut pas être remplacée ni démissionner, ce
qui fait que, si elle décide de ne pas participer aux
délibérations ou si elle refuse d'agir comme directeur
régional, elle est immédiatement mise de côté, elle
perd son poste de maire puisque les deux fonctions sont jumelées.
J'ai parlé tout à l'heure de la nomination du
président et de sa fonction. Je pense que c'était un peu
intéressant. En tout cas, c'étaient certainement des
éléments différents sur lesquels on peut susciter une
réflexion sur les différences entre ces villages. C'est
évident qu'il y a aussi des possibilités de siéger par
téléphone, à condition que le maire ou le président
de la société ou son secrétaire puisse parler à
quelques individus par téléphone, dans certains cas, pour prendre
certaines décisions urgentes. Il y a peut-être des
éléments qui sont... On ne peut pas parler, par exemple, de la
publication du budget. Dans les municipalités du Québec, on
demande aux municipalités de publier leur budget dans un journal
distribué dans les maisons.
Dans les villages inuit, on trouve le moyen de faire cette distribution
non pas par
courrier, mais le greffier de la municipalité est obligé
de faire la distribution du budget porte à porte. Je ne sais pas s'il y
a des numéros de porte et des noms de rue, mais il me semble que ce
n'est pas trop complexe. On peut le faire, cela peut se faire et c'est une
obligation, mais une obligation pour laquelle il n'y a pas de sanction. Donc,
c'est un voeu. L'Assemblée nationale demande à ces gens de se
plier à certaines règles, mais sans aucune sanction. Il faut
admettre que, pour des gens comme nous, ce sont des particularités
différentes de ce qui se passe chez nous.
Quant à l'Administration régionale Kativik, ses budgets
supplémentaires sont publics. Elle doit avertir la municipalité,
mais il n'y a aucune obligation de publier quoi que ce soit. On avait
apporté la suggestion de les afficher quelque part. Le ministre a
trouvé cette demande de l'Opposition trop forte et il a
décidé de la refuser. Nous pensions pouvoir amener plus de
démocratie si les gens étaient mieux informés. C'est un
choix gouvernemental, on ne fait que le souligner, sans insister plus que cela.
En gros, cela explique le cheminement qu'on a pu maintenir durant cette
commission parlementaire.
Quant à moi, j'ai trouvé cela intéressant qu'on
parle de ce milieu, c'est une expérience nouvelle. Souhaitons que le
ministre des Affaires municipales trouve le moyen, au cours de son travail, de
négocier avec les Inuit pour les amener pas nécessairement
à copier les Blancs, mais à leur donner une façon de
fonctionner qui ressemble à la nôtre afin que, lorsqu'on
étudie ces projets de loi, on puisse les comprendre beaucoup plus
facilement, sans trop d'explications, en fonction des expériences que
nous avons vécues, sans quoi il faudra peut-être demander au
ministre, un jour, d'aller se promener dans le Nord pour savoir comment cela se
passe. On travaille sur la vie de ces gens et on n'a jamais eu l'occasion de
voir de quelle façon ils vivent. C'est une anomalie, à mes yeux.
Je ne demande pas une délégation pour aller me promener dans le
coin, mais c'est probablement le propre de plusieurs députés de
cette Assemblée qui ne savent pas comment cela se passe là-bas,
qui n'ont pas vu trop trop. Je pense que le travail parlementaire nous
amène à prendre des décisions pour des gens que nous
n'avons pas l'occasion de côtoyer réellement, dont on ne
connaît pas nécessairement le style de vie.
J'étais très heureux, au cours de l'étude article
par article, d'être appuyé par le député d'Ungava
qui représente ces grands territoires qui, en fait, couvrent le tiers du
territoire du Québec. Le plus grand comté du Québec est
celui d'Ungava et c'est l'Opposition qui a l'honneur de l'avoir dans ses rangs.
Le député d'Ungava connaît ces gens puisqu'il les
côtoie, il les visite régulièrement et on sent que sa
démarche est dans le but d'aider. Il faut comprendre que le
député d'Ungava a à son actif des démarches
très importantes pour les milieux qui ressemblent à cela. Son
expérience de vie l'a amené dans d'autres milieux, mais j'ai
l'impression qu'il les comprend bien et qu'on lui rend bien cette estime qu'il
a pour eux. L'étude de ce projet de loi a été faite le
plus sérieusement du monde et on doit se montrer satisfait du travail
qu'on rend à terme ce soir. Merci, M. le Président. (2 h 10)
Le Vice-Président: Très bien. Je vais maintenant
céder la parole à M. le député de Laviolette et
leader adjoint de l'Opposition.
M. Jean-Pierre Jolivet
M. Jolivet: Oui, M. le Président, je vous remercie
beaucoup. J'ai écouté avec beaucoup d'attention les propos de mon
collègue, le député de Jonquière, qui est
porte-parole en matière d'affaires municipales, sur ce projet de loi 69.
J'ai décidé d'intervenir compte tenu des vastes territoires que
je représente et qui, souvent, donnent l'impression d'être
différents des autres, mais, en même temps, semblables. Il a fait
une proposition intéressante et, comme leader adjoint, j'ai voulu
intervenir parce que, personnellement, je suis libre de répéter
cette proposition. Si on veut savoir comment ces gens vivent, quelle est leur
façon de voir les choses, il faut aller les visiter, aller voir comment
ils vivent chez eux.
J'ai eu l'occasion, comme membre de l'Assemblée nationale,
d'aller visiter des gens un peu partout au Québec et même au
Canada et je dois vous dire que j'ai été fort surpris de
certaines rencontres qu'on a faites. Je donne un exemple: dans les Territoires
du Nord-Ouest, à Fort Simpson, à Inuvik, on a rencontré
des gens qui ont leur façon de vivre mais qui, en même temps, nous
permettent de saisir comment ils voient les choses. Quand je suis dans des
lieux comme les réserves chez moi, dans ma région, à
Manouane, à Weymontachingue, à Obedjiwan ou dans le secteur de la
Haute-Mauricie je peux vous dire que la façon de voir les choses pour
nous, les Blancs du Sud, est bien différente de celle de ces personnes.
Il faut les bien comprendre à ce moment-là.
Je regarde le projet de loi et je suis tout à fait content que ce
soit inscrit dedans parce que ce que le député de
Jonquière disait, c'est qu'il faut, en voyant leurs différences,
savoir qu'ils peuvent peut-être nous ressembler, mais nous ressembler
dans leurs différences et je m'explique. Quand on dit au Québec
que nous avons changé les lois municipales pour permettre une partie
d'interrogations, une période de questions
orales, ça fait partie d'une tradition qui avait
été perdue dans le temps et qui est revenue au conseil municipal
où il y a une place attitrée à une période de
questions orales de la part des gens qui viennent assister aux séances
des conseils municipaux. Or, je lis dans le projet de loi qu'il introduit
effectivement une période de questions orales du public lors des
séances du conseil d'un village nordique ou de l'Administration
régionale Kativik.
Pourquoi est-ce que je dis ça? C'est parce que je peux vous
donner un exemple qui s'est produit alors que j'étais porte-parole de
l'Opposition en matière d'éducation. Il y a des gens qui voient
arriver sur la table un projet de loi contenant quatre articles. Je ne connais
pas à fond le milieu pour pouvoir en parler sans prendre des
renseignements. Quelle est la personne la mieux désignée pour me
renseigner? C'est le député d'Ungava parce que ça
concernait une commission scolaire du Nouveau-Québec, commission
scolaire qui était sous la responsabilité du ministère de
l'Éducation et qui, en même temps, se trouvait dans le
comté de mon collègue, le député d'Ungava. Nous
nous sommes parlé, il a communiqué avec les gens, et on s'est
aperçu que le projet de loi présenté n'avait pas de bon
sens. Qu'est-ce qui est arrivé? On a demandé une rencontre avec
les gens au ministre de l'Éducation. La rencontre a eu lieu et qu'est-ce
qui s'est produit ensuite, M. le Président? Vous vous en souviendrez,
j'en ai souvent fait mention, c'est bien simple, le ministre de
l'Éducation a retiré son projet de loi, l'a réécrit
et, grâce à l'appui de l'Opposition, il a pu le présenter
à nouveau même si les délais étaient
dépassés et nous avons obtenu un projet de loi de huit articles -
quatre en premier lieu, huit en second - qui étaient conformes à
la volonté des gens du milieu.
Or, cette partie qu'on appelle dans notre langage ici à
l'Assemblée nationale, une commission parlementaire, c'est, en fait, une
partie de questions orales. Or, le projet de loi introduit ça et
ça va permettre aux gens de pouvoir s'informer de vive voix.
Il est évident, comme le disait mon collègue, que le
budget déposé porte à porte par les personnes qui vont le
présenter à chacun, c'est une façon de voir qu'on ne peut
pas imaginer à Montréal, à Grand-Mère ni à
La Tuque. Que fait-on? On utilise les journaux, on annonce à grand pages
de publicité, dans les petits journaux en particulier: Discours du maire
sur l'ensemble du budget. Ici, ce n'est pas comme ça que ça se
produit et c'est pour ça qu'il faut regarder la différence et lui
donner la capacité de s'inscrire dans un milieu qui est le leur. Ces
gens-là sont à la chasse, à la pêche, ont des
activités bien différentes de celles que je peux avoir alors que
je prends mon automobile le matin pour aller travailler à tel endroit et
pour en revenir le soir. J'ai la télévision qui me donne des
nouvelles, j'ai le contact de la radio à toutes les heures.
Donc, le contexte est différent. C'est dans ce sens-là que
si on veut, comme élus du peuple, sans faire de dépenses
exagérées, je le dis bien, M. le Président, bien
comprendre le projet de loi que nous adoptons... Je me fie sur mon
collègue, le député de Jonquière qui est un
ex-maire connaissant très bien l'ensemble de la matière, je me
fie à mon collègue d'Ungava mais je me fie moins au ministre par
exemple. Et, avec eux, je sais qu'il y a des choses à faire et je pense
que sans que tous les membres fassent partie de la commission, une partie des
membres... D'ailleurs ils ont un budget en ce sens, ce n'est pas difficile, il
s'agit que la commission se réunisse et détermine que le budget
de cette année est pour aller faire une visite dans les villages
nordiques en en choisissant quelques-uns, en annonçant leur passage, de
sorte qu'ils puissent faire à ce moment une visite qui va leur donner
l'heure juste.
Dans ce sens, M. le Président, je ne trouve rien d'anormal. Tout
comme nous, membres de la commission de l'éducation, nous avions
décidé d'aller faire une rencontre à un congrès qui
était l'ACELF. Comme d'autres, le député de
Verchères à l'époque avait fait une commission
parlementaire itinérante dans tout le Québec sur un sujet
donné qui était les jeunes avec le ministre des Communications
actuel, qui était le député de Westmount dans
l'Opposition. Ils avaient fait des rencontres et avaient pris le pouls sur ce
qui était l'ensemble du projet de loi qui avait été
adopté sur la protection de la jeunesse.
Donc, pourquoi, dans les questions d'affaires municipales ne pourrait-il
pas y avoir une telle rencontre où il y aurait possibilité pour
les membres de la commission d'aller sur le champ, sur le vif, voir des choses
qui ne sont pas ce qui se vit dans le sud du Québec, dans des milieux
où l'organisation est différente, là où la vie est
différente, et, en ce sens, être plus à même,
lorsqu'ils adopteront des lois pour des villages nordiques, de pouvoir prendre
les meilleures décisions?
Je vous dis, M. le Président, que je suis d'accord avec mes
collègues. Je me fie à eux. Je n'ai pas le choix. Mais c'est
normal que, dans ma formation politique, des gens soient plus versés
dans une partie de loi que d'autres. Dans ce sens, le député de
Jonquière, qui fait un très bon travail, mérite notre
appui et je dois dire qu'effectivement il serait capable avec le groupe de la
commission parlementaire d'accompagner le député d'Ungava qui
connaît beaucoup plus les lieux parce que je dois vous dire que, lui, il
visite son secteur
et je peux vous dire qu'il le connaît, mais que d'autres membres
de la commission pourraient connaître davantage et prendre des
décisions qui soient plus éclairées.
Quand on regarde l'ensemble du projet de loi, nous pouvons être
d'accord avec cela. Nous pouvons cependant dire: On devrait tendre à
rendre à peu près semblables l'ensemble des lois concernant les
municipalités, tout en sachant qu'il y a des différences
marquées entre la façon dont ils fonctionnent et la façon
dont on fonctionne dans les municipalités régies par le Code
municipal et la Loi sur les cités et villes. Dans ce sens, nous allons
appuyer le projet de loi, mais nous aimerions pouvoir, des deux
côtés de la Chambre, du côté ministériel comme
du côté de l'Opposition, participer à une forme de
délégation de la commission parlementaire des affaires
municipales pour aller voir les choses. Si le ministre ne veut pas les
accompagner, ce n'est pas grave. Mais le ministre pourrait aussi les
accompagner. La commission serait d'abord composée des membres, hommes
ou femmes, du côté ministériel comme du côté
de l'Opposition, capables d'aller saisir ce qui se passe là-bas.
Dans ce sens, M. le Président, à l'instar de mon
collègue, j'en fais une demande presque officielle que la commission
aura à entériner lors d'une rencontre prévue par les
règlements.
Le Vice-Président: Est-ce qu'il y a d'autres
interventions? Oui, M. le chef de l'Opposition.
M. Guy Chevrette
M. Chevrette: M. le Président, seulement quelques mots
pour vous dire que notre formation politique est heureuse de concourir à
l'adoption du projet de loi. On aura remarqué que les projets de loi
touchant les régions éloignées, en particulier le
Grand-Nord, sont toujours des projets de loi qui sont presque adoptés de
nuit, malheureusement, des projets de loi qu'on présente à
l'Assemblée nationale au moment où, bien sûr, nos
concitoyens et nos concitoyennes ne peuvent malheureusement pas être
sensibilisés aux problèmes que vivent ces gens des régions
dites éloignées.
M. le Président, je vous rappellerai que notre formation
politique a toujours eu une très grande sensibilité
vis-à-vis des gens du Grand-Nord. On sait dans quelles conditions de
vie, bien souvent, ces gens sont placés, et on les avait trop souvent
oubliés dans à peu près tous les secteurs de
l'activité. Que ce soit dans le domaine social, que ce soit dans le
domaine de l'éducation, que ce soit dans le domaine municipal
précisément, dans le domaine de l'habitation, ces gens ont
souvent été laissés pour compte.
Depuis au moins une dizaine d'années au Québec, les
gouvernements se sont occupés d'eux. Les gouvernements se sont
préoccupés de l'habitation de ces gens, de leur système
scolaire. Ils s'en sont occupés par des services de santé. Et je
sais jusqu'à quel point ces citoyens exigent autant d'attention pourtant
de la part des gouvernements que n'importe quelle autre collectivité. (2
h 20)
Je sais jusqu'à quel point ces gens ont été
laissés pour compte pendant des années, par exemple, dans le
domaine de la santé et des services sociaux. Il ne faut pas croire,
parce qu'ils sont éloignés, qu'ils ne vivent pas de
problèmes. Ils ont des problèmes majeurs à résoudre
et ils n'avaient aucune ressource.
Le gouvernement auquel j'ai eu le bonheur de participer pendant neuf ans
s'est toujours préoccupé de ces groupes ethniques qui avaient
précisément besoin du soutien de l'État. Ce sont des
centaines de milliers de dollars, des millions qu'on a injectés dans
l'habitation pour leur donner des logements salubres. On était fier de
le faire parce que ce sont des citoyens à part entière, des
citoyens qui ont droit à un logement de qualité.
Ce fut la même chose dans le domaine scolaire, dans le domaine de
la santé. Le gouvernement du Parti québécois, qui
était alors présidé par M. René Lévesque,
n'a jamais hésité à injecter des sommes extraordinaires.
Je pense qu'on se devait de le faire parce qu'il y avait un rattrapage
énorme. Je pense que ce ne sera plus jamais pareil. Quel que soit le
gouvernement qui sera en place, on devra toujours, chaque année,
améliorer la situation dans tous les secteurs de la vie, de
l'activité économique, de l'activité scolaire, dans le
domaine social, dans le domaine de la santé, dans le domaine de
l'éducation et aussi dans le domaine de l'habitation.
On n'aura donc pas le choix que de continuer sur cette lancée et
d'améliorer chaque fois qu'on le peut, chaque année... Tout ce
que je formulerais comme voeu, cependant, c'est qu'on puisse le faire à
des heures raisonnables, qu'on puisse le faire à des heures où
nos concitoyens pourraient être sensibilisés soit par le
réseau de télévision qui nous couvre ou encore, du moins,
par les nouvelles le soir. À cette heure-ci, c'est bien évident
qu'il n'y a pas un journaliste qui peut écrire sur le projet de loi qui
nous préoccupe, malheureusement.
Peut-être que l'histoire fera en sorte de nous rappeler les
événements nocturnes que nous vivons. Mais, à mon point de
vue en tout cas, M. le Président, c'est déjà un pas de
considérer que ce mouvement de bonification des lois touchant ces
régions est enclenché et irréversible. Quant à
nous, comme formation politique, il est évident que nous continuerons
dans ce sens à appuyer
toute législation susceptible d'améliorer le sort des gens
dans les régions éloignées.
Le Vice-Président: Le débat étant
terminé, est-ce que cette motion d'adoption du projet de loi 69, Loi
modifiant la Loi sur les villages nordiques et l'Administration
régionale Kativik, est adoptée?
Une voix: Adopté.
Le Vice-Président: Adopté. M. le leader
adjoint...
Une voix: M. le Président.
Le Vice-Président: Oui, un instant. M. le leader adjoint
de l'Opposition.
M. Jolivet: Oui. Avant que le leader adjoint du gouvernement
propose autre chose, mon collègue, le député de
Jonquière, étant responsable des autres projets de loi à
venir, ayant travaillé une très bonne partie de la journée
et ayant terminé vers 1 h 30, je crois, la commission parlementaire,
avec l'accord de l'Opposition pour dépasser minuit afin d'entendre la
Communauté urbaine de Québec, je demanderais si le leader adjoint
du gouvernement serait gentil au point de nous accorder quelques minutes de
suspension pour nous permettre de nous réajuster par rapport à
l'ensemble des projets de loi à venir.
Le Vice-Président: M. le leader adjoint du
gouvernement.
M. Johnson: Oui, M. le Président. J'ai manqué la
fin de la dernière phrase du leader adjoint de l'Opposition.
M. Jolivet: ...un moment de suspension. M. Johnson:
Pour?
M. Jolivet: Pour que nous puissions regarder l'ensemble des trois
projets de loi qui restent à discuter. Nous demandons un moment de
répit pour notre collègue, le député de
Jonquière, tout simplement pour nous permettre d'aller ajuster le tir
sur l'ensemble de nos projets de loi.
Le Vice-Président: Si je comprends, j'ai simplement une
demande pour que nous suspendions pendant quelques instants.
M. Jolivet: C'est cela.
Le Vice-Président: Est-ce qu'il y a consentement à
cet effet? M. le leader adjoint du gouvernement.
M. Johnson: M. le Président, si j'ai bien entendu,
quelques instants sont en cause: une pause-santé ou pause-santé
mentale ou pause-repos du guerrier. De ce côté-ci, je veux
indiquer tout de suite que nous sommes prêts à procéder.
Par déférence sans doute pour le député de
Jonquière, sinon pour ses collègues, nous serions disposés
- c'est la suggestion que fait évidemment son vis-à-vis, le
ministre des Affaires municipales - à suspendre nos travaux, quitte
à ce que nous revenions dans quatre minutes.
Le Vice-Président: Très bien. En
conséquence...
M. Jolivet: M. le Président.
Le Vice-Président: Oui, M. le leader adjoint de
l'Opposition.
M. Jolivet: En fait, je n'ai pas manqué la partie quand il
a parlé de pause-santé mentale. Je pense, M. le Président,
que le but de ce que nous avons demandé n'allait pas dans ce sens. Je
pense qu'il le comprend très bien. Mon collègue a
travaillé toute la journée, il a terminé à 1 h
30... Vous allez me laisser finir.
Le Vice-Président: Je dois être bien
là-dessus. Un instant, je ne voudrais pas simplement engendrer un
débat là-dessus, qu'on se réponde de gauche à
droite et de droite à gauche. Nous sommes actuellement, en ce qui
concerne notre règlement, sur consentement. Nous pouvons suspendre nos
travaux pendant quelques instants.
Si on a le consentement, on agrée à ce moment-là,
je ne vois pas pourquoi on continuerait à débattre une motion qui
n'en est pas une. Donc on a un accord des deux côtés de la
Chambre. En conséquence, nous allons suspendre nos travaux pour quelques
instants.
Nous suspendons pour quelques instants. Quelques instants seulement.
(Suspension de la séance à 2 h 26)
(Reprise à 2 h 33)
Le Vice-Président: Veuillez prendre place, s'il vous
plaît, nous allons maintenant poursuivre nos travaux.
M. le leader adjoint du gouvernement.
M. Johnson: M. le Président, je vous demanderais d'appeler
l'article 28 du feuilleton.
Projet de loi 88
Prise en considération
du rapport de la commission
qui en a fait l'étude
détaillée
Le Vice-Président: À l'article 28 du feuilleton,
nous en sommes maintenant à la prise en considération du rapport
de la commission de l'aménagement et des équipe-
ments qui a procédé à l'étude
détaillée du projet de loi 88, Loi modifiant la Loi sur
l'aménagement et l'urbanisme, la Loi sur les cités et villes et
le Code municipal du Québec.
Et je reconnais, comme premier intervenant, M. le député
de Jonquière.
M. Francis Dufour
M. Dufour: Merci, M. le Président. Ce projet de loi, que
j'avais qualifié d'excessivement important lors de sa
présentation, est rendu à l'étape de la prise en
considération. Donc, il a fait un grand cheminement de la période
de l'adoption du principe jusqu'à ce jour. Il y a des
éléments importants qui sont survenus au cours de
l'étude.
Il faut se rappeler que lorsque le projet de loi a été
présenté, il l'a été avec grand fracas, avec
tambours et clairons, en présence de plusieurs ministres dont le
ministre des Affaires municipales, le ministre des Transports et responsable du
Développement régional, le ministre de l'Environnement, le
ministre de l'Agriculture. Donc, un certain nombre de ministres, non pas les
moins importants, qui proclamaient tout haut, avec insistance - et je pourrais
même dire avec fanfaronnade - que ce projet de loi avait fait l'objet
d'un consensus de tous les intervenants.
Quels étaient ces intervenants auxquels on faisait
référence et qui avaient donné leur accord? Sur quoi se
basait-on pour arriver à ces conclusions ou à cette
démonstration qui a paru dans les journaux, comme à la
télévision, comme dans les média parlés. Cela
s'adressait d'abord à des administrateurs municipaux. Donc, les
municipalités locales, les deux unions municipales qui sont l'Union des
municipalités du Québec, qui représente, pour la plupart,
les villes à caractère urbain et, l'Union des
municipalités régionales de comté, les
municipalités locales. Ces deux intervenants majeurs avaient fait
l'objet d'une vaste consultation, les 5 et 6 août, aux assises
Québec-municipalités. Des assises importantes qui avaient
été préparées, à ce qu'on dit, d'une
façon très élaborée et très très
attentionné, de la part du ministre des Affaires municipales, assises
auxquelles l'Opposition n'a pas été invitée. Donc, assises
où on a entouré d'une façon douillette les élus
municipaux, parce qu'on ne voulait pas les perdre, composées d'environ
25 administrateurs municipaux représentant les membres du conseil
d'administration de chacun des organismes. En même temps, le ministre de
Affaires municipales a cru bon de s'entourer de l'ensemble de ses
fonctionnaires et de fonctionnaires de d'autres ministères,
probablement, puisque je n'y étais pas. Il faut comprendre que ces
gens-là avaient peur de laisser échapper un ou deux membres, deux
maires, au cours de cette consultation. On les a donc entourés
très fortement, c'était presque du deux pour un. En plus, le
ministre des Affaires municipales s'était entouré de
collègues pour mener cette consultation.
On est arrivé à un rapport conjoint ou à une
déclaration commune à l'effet que tout le monde s'était
entendu dans le meilleur des mondes. Enfin, on avait trouvé une solution
extraordinaire pour les municipalités régionales de comté.
On venait de leur assurer leur survie. On venait de dire aux
municipalités régionales de comté: Vous avez
été créées, on va vous maintenir. Non seulement
va-t-on vous maintenir, mais on va augmenter vos pouvoirs. Et tout ça
après cette consultation, après une période de
tergiversations avant la consultation, puisque cela a pris presque un an avant
qu'on consulte ces gens-là. Ce qui permettait aux différents
ministres concernés et concernés par l'environnement comme par
l'aménagement du territoire - les ministres que j'ai nommés au
début de mon exposé - de claironner tout haut qu'il y avait un
accord, un consensus extraordinaire et qu'on pouvait procéder à
la mise en place de cette loi, loi 88 qui a fait l'objet de tant d'attention de
la part d'autant d'intervenants.
Encore là, dis-je, le ministre des Affaires municipales,
même à l'instigation de l'Opposition, n'a pas cru bon dans sa
consultation de s'associer à l'Opposition officielle pour en faire une
véritable consultation.
On voit le résultat que cela a donné. On voit le
résultat. Cela a d'abord donné lieu en commission parlementaire
à un débat important au cours duquel l'Opposition a
insisté pour qu'il y ait une consultation particulière de
différents groupes. Ces consultations particulières ne
s'adressaient pas à des inconnus. Elles s'adressaient à des gens
extrêmement qualifiés qui pouvaient nous donner un
éclairage important sur la nature et sur la valeur de la loi qu'on avait
devant nous.
Quels étaient ces intervenants auxquels l'Opposition voulait
faire appel? En premier, l'Union des municipalités du Québec qui
représente l'ensemble des municipalités du Québec à
caractère rural et quelques municipalités à
caractère urbain. Et le ministre est resté et demeuré
insensible aux demandes inlassables de l'Opposition qui voulait consulter. Une
loi d'une pareille importance qui a donné lieu à autant de
consultations nous est présentée aux derniers instants d'une
session pour être jugée, être acceptée,
adoptée sans aucune forme de procès. (2 h 40)
Quand on a vu l'insensibilité du ministre à nos
allégations comme à nos prétentions, on a
décidé de faire appel à ur
autre groupe, soit à l'Union des municipalités
régionales de comté et les municipalités locales.
Là, c'était vraiment le noeud du problème, parce que cette
union réunit plus de 80 % des municipalités régionales de
comté. Donc, plus de 80 % des municipalités régionales de
comté font partie de l'Union des municipalités régionales
de comté, un organisme responsable, compétent, composé de
gens qui vivent tous les jours avec la loi 125, la Loi sur l'aménagement
et l'urbanisme, qui a marqué et qui marquera le Québec, une des
lois les plus importantes qui ont été adoptées pour le
monde municipal, une loi qui a eu des difficultés d'acceptation au
départ puisqu'il y a eu de la contestation, mais une loi qui,
aujourd'hui, est demandée, exigée et est là pour demeurer
selon la volonté des municipalités puisqu'elles croient, avec
raison, qu'après sept ans de vécu cela leur donne un instrument
de développement comme un important instrument de planification pour
l'ensemble du territoire du Québec.
Voilà ce que fait une telle loi et, encore là, le ministre
des Affaires municipales, qui devrait reconnaître par sa fonction
l'importance de ce deuxième groupe auquel l'Opposition voulait
s'adresser pour obtenir la meilleure information parce que nous ne mettons pas
en doute les paroles des différents ministres qui nous disent que tout
va bien dans le meilleur des mondes, mais c'est bon que l'Opposition aille un
peu plus loin de temps en temps, qu'elle creuse et aille voir chez les
intervenants ce qu'il y a en dessous de ça et ce qu'ils pensent, ces
intervenants-là... Quand c'est fait dans l'Opposition, j'ai l'assurance
que c'est une bonne consultation qui a des oreilles pour écouter,
contrairement à ce qu'on voit dans certains projets de loi qui nous ont
été présentés en fin de session où des gens
ont fait de la consultation, mais où on omet que cette consultation soit
transmise intégralement ou valablement dans des lois.
Donc, encore une fois le ministre a manqué le bateau. Il ne veut
pas rencontrer ces groupes-là. Il aime mieux les rencontrer en dehors de
l'Opposition. Il nous le répète à satiété,
il aime mieux régler les problèmes derrière les portes
pour ne pas que les autres sachent ce qui se passe parce qu'on veut les
maintenir dans un état de dépendance parce que même les
municipalités régionales de comté pourraient, des fois,
être tentées de succomber parce que le ministre des Affaires
municipales leur donne une pitance à la cuillère. Il leur donne
de petits montants pour fonctionner. Ces sommes sont calculées à
la graine. On leur dit: Vous allez fonctionner, on va vous maintenir dans un
état de dépendance et si vous n'êtes pas correctes... On ne
le sait pas, je ne l'ai pas entendu dire ouvertement par le ministre, mais il y
a de mauvaises langues qui disent des fois que le ministre des Affaires
municipales pourrait être tenté de retirer ces montants ou de les
couper, tant qu'ils ne sont pas donnés. Ce qui n'est pas donné
n'appartient pas à qui que ce soit. Donc, il pourrait être
tenté de refuser à ces organismes à caractère
national le droit de bien représenter ces gens-là. L'Opposition
considérait que c'était important, que ce n'était pas un
geste farfelu, que ce n'était pas sans raison qu'on voulait les
écouter.
Comme d'habitude, si la commande n'est pas passée par son
côté, par son bord de la Chambre, le ministre des Affaires
municipales ne se rend pas souvent aux désirs de l'Opposition,
même si c'est très motivé.
Un troisième groupe auquel on avait fait appel, l'Association des
aménagistes régionaux, des gens qui, par fonction, travaillent
avec les instruments pour mettre en place l'urbanisme, des gens qui vivent avec
la loi, qui l'appliquent dans les questions techniques. Ces gens-là
avaient demandé par télégramme de rencontrer la commission
parlementaire. Donc, même avec la démonstration très forte
de la part de l'Opposition, encore une fois le ministre a décidé
qu'il était informé, que c'était ce qui comptait parce
qu'il est responsable de la loi.
Un quatrième groupe, la Corporation des secrétaires
municipaux du Québec, groupe au-dessus de 1200 secrétaires
municipaux, des gens qui connaissent les élus. Encore là,
malgré des pressions intenses et, je pense qu'il ne faut pas se le
cacher, avec des arguments valables - je n'ai pas l'intention de
répéter tous les arguments - le ministre a décidé
qu'il ne voulait pas les écouter. Cela a duré environ six heures.
Le ministre des Affaires municipales a pris panique à la suite de cela.
Il a dit, non seulement il l'a dit, mais il l'a transmis à
l'Assemblée nationale, il a été voir son leader et a dit:
II n'y a plus rien à faire avec l'Opposition, elle va me bloquer mon
projet de loi, je suis poigné. Qu'est-ce que je fais avec cela? Cela a
été ses réponses. On a dit: C'est facile. On va menacer
d'imposer la motion de clôture. Vous savez, la motion de clôture,
il ne faut pas que ce soit pénalisé, c'est un acte important,
c'est fait par un Parlement. Cela veut dire qu'on a épuisé tous
les moyens pour faire cheminer un projet de loi. Après six heures de
débats, le ministre des Affaires municipales n'était plus
capable. Il a pris panique, il a dit: On ne peut plus adopter le projet de loi,
c'est fini, l'Opposition ne voudra jamais marcher.
Cette menace a pesé pendant quelques instants, pour une
journée, sur la commission parlementaire. Entre-temps, pas l'Opposition,
mais le ministre des Afaires municipales a réfléchi
sérieusement sur les objections apportées, martelées par
l'Opposition.
Aujourd'hui, on voit un projet de loi qui a été
adopté sur division, mais qui n'est plus du tout ce qu'on avait
présenté au départ. Même si les ministres, avant le
dépôt du projet de loi, s'étaient vantés que tout le
monde était d'accord, on vient de constater que ce projet de loi qu'on a
devant nous et qui nous est proposé pour acceptation ne se ressemble
pas... en tout cas, il n'a pas le même père. Il a changé du
tout au tout. Il y a eu des débats de fond, des débats
importants.
Les éléments sur lesquels les deux unions étaient
en désaccord... Dans le fond, il y avait une union qui était
prête à fonctionner d'une façon, l'autre union était
prête à fonctionner d'une autre façon, avec des
accommodements, mais peut-être avec des réticences. On a
joué, dans le fond, notre rôle d'Opposition. Cela fait que le
projet de loi qu'on a devant nous a tellement été bonifié
que le ministre des Affaires municipales a l'air un peu plus du ministre des
Affaires municipales qu'avant l'étude du projet de loi. Oui, je pense
qu'on lui a donné un peu d'erre d'aller, mais je ne sais pas pour
combien de temps. On lui donne un peu d'erre d'aller, mais il peut se
présenter devant les unions municipales en disant: Le projet de loi
qu'on vous a proposé, il est pas mal amélioré, il
répond pas mal à vos voeux. On a forcé le ministre
à faire des concessions ou des accommodements qui vont satisfaire en
grande partie le monde municipal.
C'est un tour de force parce que, quand on connaît le ministre
comme je le connais, quand on connaît le ministre et la façon dont
il procède, je vais dire... En tout cas, l'Opposition ne lui donnera pas
de certificat de compétence, mais on pourra dire au moins qu'on
apprécie un peu, pour une fois, la démarche que le ministre des
Affaires municipales a faite, mais, sans l'Opposition, il n'aurait pas pu la
faire.
À maintes reprises, j'ai offert au ministre des Affaires
municipales ma collaboration parce que je lui ai dit qu'il avait besoin qu'on
l'appuie, qu'on l'aide et qu'on vienne à son secours, et on l'a fait, on
lui a donné le moyen de se valoriser. Je dis bravo à
l'Opposition. On a fait un travail... J'espère que le ministre des
Affaires municipales va reconnaître le travail de l'Opposition dans ce
projet de loi. Voici où on en est rendu...
Une voix: Même l'UPA est...
M. Dufour: C'est-à-dire qu'il y a deux unions. Je pense
qu'on a suffisamment trouvé de concessions pour que les modes
d'acceptation budgétaire soient acceptables. C'est potable, donc cela va
être vivable. Souhaitons que ce projet de loi, qui ne sera pas parfait...
Il y a des endroits où le ministre des Affaires municipales aurait pu
cheminer un peu plus vite et aller un peu plus loin, mais il ne l'a pas fait.
Je pense que c'est un gain important pour le monde municipal. C'est une
façon de rassurer les deux unions: l'Union des municipalités
régionales de comté, comme l'Union des municipalités du
Québec.
Un deuxième élément - celui-là est important
- c'est celui du comité de concertation agricole qu'on a voulu mettre
sur pied. Bien sûr que le ministre de l'Agriculture, qui avait
claironné à tous venants que la loi du zonage agricole
était importante... Bien sûr, on le savait, c'est l'actuelle
Opposition qui a fait adopter ce projet de loi qui est considéré
comme un des joyaux certains de la volonté de l'ancien gouvernement, qui
a été de nature à donner des effets
bénéfiques et aussi à valoriser la classe agricole. (2 h
50)
Quand vient le temps de l'aménagement du territoire, il faut
regarder quels sont les différents intervenants qui sont dans le milieu.
Donc, on avait cru bon, par ce projet de loi, d'introduire un comité de
concertation agricole qui faisait qu'on avait une deuxième commission
d'urbanisme sur le territoire. Cette commission d'urbanisme exigerait de la
part des élus municipaux des pirouettes, des tours de force, et les
obligerait, non seulement à des concessions, mais à des
négociations indéfinies, et on aurait mis les élus
municipaux à la merci d'une classe de gens qui, par nature, sont des
gens respectables, extrêmement valables. C'est une classe de la
société qu'on se doit de protéger, et les maires n'ont pas
besoin de loi pour protéger la classe agricole. Je le dis et je le dis
ouvertement: Les maires qui ne seront pas capables de protéger ou de
voir que la classe agricole, c'est une classe importante et qu'on doit
protéger ce secteur de notre société, ne méritent
pas d'être maires.
Donc, c'est clair, ça. Il me semble que cela devrait être
comme ça, et on n'a pas de raison de vouloir les traiter par casier,
c'est-à-dire d'établir des classes différentes dans la
société, parce qu'une municipalité, ça regroupe
l'ensemble des intervenants. Les députés qui sont dans cette
Chambre demeurent dans des municipalités. Les professions
différentes qui existent dans la société demeurent dans
les sociétés.
Les syndicats, quels qu'ils soient, que ce soit de l'Office de la
construction, que ce soit le syndicat des enseignants, comme le syndicat des
infirmiers ou des médecins, cela demeure dans les
sociétés. Donc, si on accepte comme principe de base qu'on traite
une classe différemment des autres, chaque classe de la
société pourrait avoir la même prétention,
c'est-à-dire que chacune pourrait, chaque fois qu'elle est
touchée dans son
vécu, demander d'avoir un comité de concertation pour
qu'elle puisse se prononcer sur ce qui se passe dans le zonage de la
municipalité, et, en même temps, tenir la municipalité en
otage.
Donc, j'ai l'impression que cet article a été introduit
dans la loi sans savoir trop ses effets. On ne peut pas permettre des
intrusions aussi grandes dans une entité qui dépend de
l'Assemblée nationale, qu'on régit par des lois, et sur laquelle
on a mis autant d'emphase et autant de travail pour lui donner de
l'autonomie.
On donne d'une main et on enlève de l'autre. Je pense que
c'était inacceptable, et, de ce côté-là, le
comité de concertation demeure, bien sûr, mais il n'a aucun
pouvoir. Donc, je pense que c'est un gain extrêmement important, et on
pourrait le faire vivre avec un arrêté en conseil. Mais s'il veut
avoir des pouvoirs, il va falloir l'amener avec des indications ou avec une loi
qui lui permettra de vivre.
Mais je pense que d'ici à ce temps-là, avant que ça
se fasse, je vous inviterais sûrement à réfléchir
sur les problèmes que peuvent causer des intrusions dans des lois qui
sont des lois importantes qui pourraient être de nature à changer
la vocation des municipalités.
Si on décide aujourd'hui, par des projets de loi, que les
élus municipaux n'ont plus leur place, si on décide qu'il faut
leur mettre des anges gardiens à toutes les cinq portes, je pense
qu'à ce moment-là, c'est tenir les municipalités en
tutuelle, c'est vraiment méconnaître le fonctionnement municipal,
parce qu'en fait, les agriculteurs sur le territoire finissent tout le temps
par s'entendre avec leur municipalité.
Il est très rare qu'on voie les municipalités en
désaccord ou en chicane avec le milieu agricole. Si cela se passe comme
ça sur le territoire, pourquoi, nous, à l'Assemblée
nationale, décide-t-on d'ajouter des mécanismes, pour faire
plaisir à des ministres, probablement, comme pour faire plaisir à
d'autres organismes qui sont sur le territoire de l'ensemble du
Québec?
Je pense qu'on ne doit pas brimer les municipalités dans leur
fonctionnement, et je suis convaincu qu'on aide le ministre en faisant cela,
parce qu'on force de la concertation, on force l'action correcte par rapport
à un cheminement normal d'une société. Et j'ai
l'impression que ce serait le seul endroit dans le monde où on
réussit à astreindre ou à brimer le fonctionnement des
municipalités par d'autres organismes.
Cela ne se passe pas comme ça ailleurs et c'était une
erreur monumentale qui avait été causée à cela. Et
probablement que c'est un manque d'expérience de la part peut-être
du ministre des Affaires municipales, parce qu'il accepte les commandes de ses
collègues. C'est sûrement un manque d'expérience de la part
du ministre de l'Agriculture qui voudrait mettre son nom un peu sur toutes les
lois qu'on adopte au Québec. Il voudrait suivre les traces de son
prédécesseur, mais il ne serait peut-être pas capable de le
faire.
Je vais être très gentil, c'est la période des
fêtes. Je veux bien lui laisser son titre, son travail. Je veux qu'il
réussisse, qu'il fasse un bon ministre, je veux surtout qu'il occupe sa
place, mais qu'il ne prenne pas la place de tous les autres.
Je dis la même chose pour le ministre des Affaires municipales.
Cela va pour le ministère de l'Agriculture, comme pour le
ministère de l'Environnement, comme pour celui des Transports et
responsable du Développement régional, s'il y a du
développement régional. Il faut que cela se fasse comme cela.
C'est chacun à sa place, puis on va trouver... Ah non! Je n'irai pas
aussi loin que le ministre des Affaires municipales me le suggère.
Chacun à sa place et le gouvernement va mieux se porter, les citoyens du
Québec vont mieux s'entendre et mieux se comprendre.
Il y a aussi un autre élément sur lequel le
ministère ou le ministre des Affaires municipales n'a pas voulu se
rendre au bien-fondé des représentations de l'Opposition. C'est
en ce qui concerne l'implantation d'unités de production animale sur le
territoire agricole. Cela aussi, c'est une trouvaille, mais ce n'est pas une
perle, bien sûr. Le ministre des Affaires municipales va vivre avec ses
contradictions, comme avec ses incohérences, comme avec ses propres
turpitudes.
D'une part, il y a une municipalité, Saint-Louis-de-Pintendre...
Je vais le dire très bien pour que mes propos soient bien
rapportés. À Saint-Louis-de-Pintendre, les gens avaient
trouvé une formulation pour empêcher les unités de
production animale, et quand je parle de production animale, je veux bien
identifier que c'est surtout de l'élevage de porc et de l'élevage
de volaille, donc, des industries qui émettent des senteurs dans
l'atmosphère. Donc, pour protéger le milieu bâti, le milieu
où il y a des résidents, la municipalité de
Saint-Louis-de-Pintendre avait trouvé une façon en instituant une
zone tampon. Donc, en suivant le contour de la municipalité, les gens
s'assuraient qu'aucune construction de la nature de celle que je viens de
décrire ne s'installe très près des limites des milieux
bâtis.
Il me semble donc que c'est une façon normale de traiter le
sujet, ce qui n'avait pas pour effet d'enlever les droits acquis. Mais cela
semblait inacceptable pour le ministre de l'Agriculture, probablement plus
pour l'Union des producteurs agricoles. Il s'est élevé
contre cela. Le ministre de l'Agriculture a donc pris le flambeau rapidement,
il a levé la hampe et il a dit: II ne faut pas que cela se passe comme
cela et non, cela ne va pas, il a eu le courage de venir dire à un
ensemble de préfets: Cela ne va pas, je ne suis pas d'accord avec cela.
Il a dit de grandes vérités, il a fait un grand discours aux
préfets de comté pour leur dire que la Loi sur la protection du
territoire agricole était importante, comme si les préfets ne le
savaient pas et pour leur dire en même temps que l'agriculture
était une industrie très importante au Québec, une
industrie primaire, une industrie de base, etc. Il n'a convaincu personne, mais
il parle bien et les gens l'ont écouté.
En même temps, le ministre des Affaires municipales est venu dire:
Vous savez, il faut bien faire cela parce que c'est de cette façon qu'il
faut que cela se passe, il faut faire attention. Et il y a eu quelques
échanges très sérieux entre le maire de
Saint-Louis-de-Pintendre qui a défendu son idée d'une
façon correcte, très respectueuse et, avec le ministre de
l'Agriculture et le ministre des Affaires municipales qui est parti rapidement,
ce qui faisait dire à des maires qu'ils se sentaient orphelins. Ils
voulaient presque voir le ministre de l'Agriculture à la place du
ministre des Affaires municipales parce qu'il semblait mieux défendre
ses dossiers.
On a vécu avec cela un certain temps. Il y a certains compromis
qui se sont faits et la formule qu'on a trouvée c'est qu'on va appliquer
les normes imposées par règlement par le ministère de
l'Environnement, ce qui fait que, lorsqu'il y aura une unité de
production animale qui va s'installer sur un territoire agricole, on devra se
promener avec notre mesure pour savoir s'il y a une maison bâtie quelque
part.
Je dis que cela va être une mesure extrêmement difficile
à appliquer et aussi qui va causer des problèmes beaucoup plus
grands qu'une zone tampon autour de la municipalité parce que à
chaque fois qu'il y aura une résidence, il faudra s'assurer que les
distances sont respectées. (3 heures)
Donc, il y a un endroit où on dit que c'est 600 mètres
qu'il doit y avoir entre une unité de production animale et la
résidence, ce qui fait que 600 mètres c'est environ 2000 pieds,
un rayon de 2000 pieds à gauche, à droite, en avant, en
arrière. Je vous dis que ça va nous prendre du territoire dans le
Québec pour installer les nouvelles unités de production animale
et ces gens-là seront pénalisés puisqu'on vient
contrôler le nombre de ces unités-là. On n'a jamais eu
ça dans l'idée. Je ne pense pas que les administrateurs
municipaux aient cette idée-là, mais la loi a cet
effet-là, donc, on va l'appliquer de cette façon.
Comment va-t-on l'appliquer pour les mesures? Probablement que les
agriculteurs vont se promener avec un arpenteur-géomètre qui va
s'assurer que les mesures sont correctes. Il y aura des coûts
supplémentaires et il y aura sûrement des discussions à
savoir si 585 mètres par rapport à 600 mètres, c'est
correct. Ça, on ne le sait pas, on n'a pas de résultat, on ne l'a
pas mis en pratique, mais la logique qui va découler de cette attitude,
donc de l'adoption du principe de ce projet de loi et, un jour, de l'adoption
du projet de loi, c'est que ça va créer plus de problèmes
que de solutions.
On a devant nous un gouvernement qui, avant l'élection, avait des
solutions à tous les problèmes et, aujourd'hui, il y a des
problèmes à toutes les solutions. C'est la façon dont on a
procédé pour essayer de tout trouver, pour ne pas faire de houle
et contenter tout le monde. Tant que le projet de loi n'est pas adopté,
ça ne cause pas de problème. L'Opposition va concourir, voter
contre le projet de loi, mais ne l'empêchera pas. Ça a
donné comme résultat qu'on verra à l'usage, à
l'oeuvre et à l'épreuve, que le gouvernement qui, pendant deux
ans, n'a pas pris beaucoup de décisions, a pu vivre sur l'erre d'aller
de ce qui se passait avant, a pu prendre des décisions qui sont
contestées et contestables et qui vont amener sur le territoire du
Québec de la contestation, des problèmes importants.
Là-dessus, bien sûr, il faut laisser la chance au ministre des
Affaires municipales d'avoir ses propres problèmes et de vivre avec. Je
pense que le rôle de l'Opposition, c'est de dénoncer fortement les
actions que le gouvernement veut poser, mais il faut le laisser faire parce que
sans ça, l'Opposition serait le pouvoir et ce ne serait pas normal.
 partir de maintenant, on verra les bienfaits que cette loi
pourra apporter et surtout les dommages que ça causera dans certaines
parties du territoire et comme les municipalités régionales
couvrent l'ensemble des territoires à l'exception de Québec et de
Montréal et la Communauté régionale de l'Outaouais, on
peut dire que la plus grande partie du territoire du Québec sera
touchée par cette loi et je vous prédis d'avance, M. le
Président, que cette loi n'aura pas les effets bénéfiques
qu'on a bien voulu claironner à coup de trompette avant les fêtes
en disant qu'il y a eu unanimité quand on sait que ce projet de loi ne
ressemble pas du tout à ce qui nous a été
présenté ee premier lieu. Merci, M. le Président.
Une voix: Extraordinaire.
Le Vice-Président: Je cède maintenant la parole
à M. le leader de l'Opposition.
M. François Gendron
M. Gendron: Oui, M. le Président. Nous en sommes à
l'étape de l'étude du rapport de la commission parlementaire sur
le projet de loi 88, Loi modifiant la Loi sur l'aménagement et
l'urbanisme, la Loi sur les cités et villes et le Code municipal du
Québec. Je pense qu'il est important de relater ce qui s'est
passé en commission parlementaire sur ce projet de loi et de relater les
intentions du ministre des Affaires municipales pour que les gens qui se
serviront éventuellement de ces extraordinaires débats de fin de
session sachent qu'encore une fois, grâce à la vigilance de
l'Opposition, on a pu éviter le pire en termes d'erreurs qu'aurait pu
commettre le ministre des Affaires municipales en s'entêtant à
vouloir donner suite à un projet de loi, comme on aura l'occasion d'en
voir d'autres - d'ailleurs, dont personne ne voulait dans la forme qu'il avait
- en particulier sur la création d'un comité agricole qui avait
comme conséquence de soustraire aux élus municipaux une des
responsabilités qui leur avaient été
conférées dans une loi maîtresse, qui s'appelle la loi 125
sur l'aménagement et l'urbanisme.
Il faut se rappeler que cette loi, c'est une loi majeure de l'ancien
gouvernement qui avait pris la peine - je pense que c'est au moins un an et
demi - d'expliquer aux intervenants municipaux, qu'ils soient urbains ou
ruraux, que dorénavant ils devraient travailler ensemble, ils devraient
travailler conjointement sur une première responsabilité qui
était celle de s'acquitter de la création de schémas
d'aménagement dans les diverses municipalités régionales
de comté du Québec.
Il faut se rappeler que lorsqu'on confie un mandat à des
élus municipaux du secteur rural et du secteur urbain pour travailler
ensemble dans la perspective de préparer un schéma, c'est parce
que, en règle générale, on fait un schéma pour
mieux recevoir le développement qui va suivre.
Ces MRC se sont bien acquittées de leur première mission,
à savoir la préparation de schémas d'aménagement.
Le ministre des Affaires municipales arrive avec le projet de loi 88. Les
objectifs du projet de loi 88 -c'est peut-être bon de les rappeler
prévoient que la municipalité régionale de comté
pourra, à une forte majorité de son conseil, acquérir
compétence sur un service municipal à l'égard de toutes
les municipalités de son territoire. Elle pourra aussi, de la même
façon, accepter la délégation d'un pouvoir par le
gouvernement. Les municipalités soumises à cette
compétence de la municipalité régionale de comté
pourront toutefois s'y soustraire.
Le projet contient également des dispositions qui permettront de
réviser, à l'initiative de la municipalité
régionale de comté, le mode de représentation et de prise
de décision du conseil de celle-ci. Il prévoit aussi un
allégement de la procédure d'entrée en vigueur des
schémas d'aménagement et un resserrement de la cohésion
des dispositions relatives à la conformité des règlements
d'urbanisme aux plans d'urbanisme de la municipalité.
Enfin - c'était cela qui faisait problème - il permettra
aux producteurs agricoles de se prononcer par l'intermédiaire d'un
comité de concertation sur certaines modifications au zonage dans une
zone agricole.
Quand on fait un projet de loi qui touche des corps
intermédiaires aussi importants que l'Union des municipalités du
Québec ou l'Union des municipalités régionales de
comté, il est important que les principaux partenaires soient à
tout le moins en accord avec les changements proposés.
Rapidement, ce qu'on a entendu relativement à ce projet de loi,
c'est, entre autres, l'expression de l'UMRCQ qui trouvait que le comportement
des différents ministères sectoriels était passablement
odieux envers le schéma d'aménagement. Cela donnait des titres
comme celui-ci: "L'UMRCQ stigmatise le comportement des ministères
sectoriels", parce qu'elle était convaincue que ce n'était pas
comme cela qu'il fallait respecter les engagements pris envers la loi 125. Dans
un vibrant plaidoyer en faveur du respect de l'autonomie des régions, le
président de l'UMRCQ, M. Nicolet, avait eu l'occasion de dénoncer
le comportement centralisateur de certains ministères sectoriels qui
agissent comme si les MRC n'existaient pas. De cette façon, M. Nicolet
donnait le ton au congrès qui a réuni plus de 3000 élus de
toutes les régions du Québec à Montréal, à
la fin de septembre.
Là, avec des exemples, le président de l'UMRCQ parlait,
entre autres, du dérapage du ministère du Tourisme. Il a
été poli, il n'a pas parlé du dérapage du ministre
du Loisir. On sait qu'il dérape fréquemment, on en a eu un
exemple avec la loi 101, une espèce de loi de fou qui avait comme
conséquence de réduire à peu près de 80 % le
territoire faunique du Québec. L'Opposition, encore là, par sa
vigilance, est venue à bout de faire comprendre au ministre du Loisir,
de la Chasse et de la Pêche, qui avait l'indécence de
prétendre que ce n'était pas sa faute, que c'était un
projet de fonctionnaires... Ce sont les fonctionnaires qui portaient ce projet
de loi, il n'avait rien à faire là-dedans, il est juste ministre
du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche, imaginez!
M. Nicolet, en ce qui concerne le tourisme dans l'Estrie, a cité
l'exemple du développement touristique de l'Estrie. La table des
préfets de cette région conteste le rôle que s'est
donné l'Association touristique régionale en prétendant
que l'Association
touristique, qu'on appelle l'ATR, avait débordé son mandat
centré sur la promotion - écoutez bien ce qui suit - pour verser
dans des fonctions qui relèvent de notre responsabilité, qui
relèvent de la responsabilité des MRC. (3 h 10)
Là, M. Nicolet est arrivé sur l'essentiel du projet de
loi, en disant que, lui, il trouvait que ça n'avait pas de bon sens
d'instaurer un nouveau concept de démocratie, à savoir que,
dorénavant, la majorité simple au sein du conseil de la MRC ne
suffirait plus. Dorénavant, cela prendrait une majorité aux deux
tiers. Il y a eu toutes sortes de suggestions, 75 % pour le budget. Et il a
insisté évidemment sur le fait que le gouvernement entendait
soustraire une des responsabilités importantes dévolues à
la MRC qui était dorénavant de régler les litiges entre
les différents élus et ce qu'on appelle des vocations
particulières, des vocations spécifiques comme celle de s'occuper
du zonage agricole, de s'occuper du schéma d'aménagement.
Là, le ministre des Affaires muncipales a laissé voir
qu'il était certain de son affaire, et, à peine après
quelques heures de débat, du jamais vu, on a indiqué que le
gouvernement se prévaudrait d'une disposition prescrite dans nos
règlements qui s'appelle la motion de clôture.
Là, on a menacé l'Opposition de la baîllonner. On a
dit: Six heures d'études en commission parlementaire, c'est assez, et,
si vous ne nous donnez pas rapidement le projet de loi 88, vous allez devoir
subir la motion de clôture.
Alors, pour ceux qui sont moins familiers avec ces expressions, M. le
Président, la motion de clôture, c'est simple, ça veut dire
que l'Opposition n'a plus le droit de s'exprimer. L'Opposition ne peut plus
dire ce qu'elle pense d'un projet de loi. Le gouvernement, avec sa
majorité, prétend qu'il doit procéder, et, en
conséquence, au diable les arguments des concernés! Au diable le
fait que ceux qui auront à vivre avec la loi soient en accord ou pas! On
nous dit: Cela suffit, il n'est pas question d'aller plus loin.
C'est à cela qu'on a assisté. On a eu l'occasion,
cependant, de rencontrer tout autant l'UMRCQ que l'UMQ et de leur dire que nous
aussi, nous serions d'accord avec eux pour dire que le fameux comité
tripartite ou bipartite pour lequel le député de Charlesbourg, le
ministre des Pêcheries et de l'Alimentation, le ministre l'Environnement
avaient eu de longues discussions au comité ministériel permanent
du développement régional, pour leur dire que nous ne voulions
pas que, dorénavant, les responsabilités des élus soient
fragmentées.
On pense que ça leur appartenait. En conséquence, il y a
eu une décision pour retirer le fameux comité concernant toute la
question des zones tampons et toute la question de la gestion du territoire
agricole. Mais il n'en demeure pas moins que le projet de loi 88 a
modifié sensiblement une loi maîtresse, une loi majeure, qui est
celle de l'aménagement du territoire, et cela, quelques mois à
peine après que les MRC se soient acquittées de leur
responsabilité première qui était de faire le
schéma d'aménagement.
Nous pensons que, pour ces gens qui commençaient à peine
à avoir développé de bonnes relations de fonctionnement
conjoint, commun, entre les élus du monde rural et les élus du
monde urbain, c'était quand même prématuré. En
conséquence... M. le Président, étant donné qu'en
troisième lecture, nous n'avons que des dix minutes et que vous
m'indiquez que mon temps est presque terminé, je vais être
obligé de conclure en disant que, grâce à la vigilance de
l'Opposition et de notre critique en matière d'affaires municipales,
encore une fois, le ministre des Affaires municipales aura dû retraiter,
aura dû entendre raison et convenir que l'Opposition avait raison d'avoir
des exigences très fermes et très serrées.
Merci, M. le Président, mais c'est certain que ce n'est parce que
le ministre des Affaires municipales a retiré le comité agricole
que nous allons changer notre point de vue par rapport au projet de loi 88.
Nous serons évidemment contre.
Le Vice-Président: Très bien. Je vais maintenant
céder la parole au prochain intervenant. Sur une question de
règlement, M. le député d'Ungava.
M. Claveau: Question de règlement, je demande le quorum,
M. le Président.
Le Vice-Président: M. le député, je vais
vérifier immédiatement.
Alors, nous n'avons pas quorum à ce moment-ci. Je demanderais aux
députés de prendre place, s'il vous plaît! Nous avons
maintenant quorum. Est-ce qu'il y a un intervenant qui veut se manifester? Je
cède donc la parole à M. le député de Bertrand.
M. Jean-Guy Parent
M. Parent (Bertrand): Merci beaucoup, M. le Président. Le
projet de loi 88 dont on doit s'entretenir, aujourd'hui, est un projet de loi
qui modifie la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, la Loi sur les
cités et villes et le Code municipal. Comment est-il possible
qu'à 3 h 15 du matin, quelques jours avant Noël, on soit là
à discuter du projet de loi 88, en pleine nuit? Si l'on regarde un petit
peu le cheminement de ce qui s'est passé et qu'est-ce qui fait que,
aujourd'hui, on se retrouve en Chambre, on comprend un peu mieux
pourquoi on doit, ici, du côté de l'Opposition, se battre
pour faire comprendre au ministre des Affaires municipales, qu'il y a quelque
chose qui ne marche pas.
On se rappellera, M. le Président, que les 5 et 6 août
dernier, il y a eu des rencontres Québec-municipalités,
rencontres dans lesquelles il y a eu consultation avec les différents
groupes intéressés, des groupes qui représentent les
municipalités, les municipalités régionales de
comté, donc l'Union des municipalités, l'Union des
municipalités régionales de comté et les groupes
afférents. Cependant, le ministre s'est entêté à
présenter, à l'intérieur du projet de loi 88, des
modifications profondes concernant les MRC, concernant les municipalités
et, M. le Président, cela a fait qu'on s'est ramassés, il y a
quelques jours, en commission parlementaire. J'avais le plaisir de
présider, à ce moment-là, la commission parlementaire - le
ministre vient de quitter. Il est 3 h 15, il n'en peut plus. -de
l'aménagement et des équipements et j'écoutais mon
collègue, le député de Jonquière, qui demandait,
avant qu'on passe à l'étude article par article, effectivement au
ministre des Affaires municipales de faire comparaître en commission
parlementaire l'Union des municipalités du Québec, l'Union des
municipalités régionales de comté, l'UMRCQ, parce que ces
deux groupes représentent les intérêts des
municipalités du Québec et des municipalités
régionales de comté, afin qu'ils puissent venir dire au ministre
exactement ce qui ne fonctionne pas à l'intérieur du projet de
loi.
Je me souviens, M. le Président, de 1980-1981, alors que
moi-même, j'étais maire de la municipalité de Boucherville
et qu'il y avait formation des MRC. Il y avait eu toute une bataille, à
ce moment-là, parce que les municipalités, les maires des villes,
comprenaient difficilement ce qui était en train de se passer, mais avec
les explications qu'on nous a données, les maires ont finalement compris
l'importance de l'aménagement du territoire, l'importance de la
planification à l'échelle régionale, de se regrouper
ensemble, de faire des découpages de municipalités
régionales de comté, pour faire en sorte qu'il y ait, sur le
territoire du Québec, un meilleur aménagement urbain avec tous
les services connexes. (3 h 20)
Aujourd'hui, 1987, 6 ans et demi plus tard, le ministre des Affaires
municipales décide d'apporter des modifications profondes qui viennent
chambarder totalement les règles du jeu et les pouvoirs autant des
municipalités que des municipalités régionales de
comté. M. le Président, c'est carrément inacceptable de
voir l'attitude d'un ministre d'un gouvernement d'irresponsables aller
fondamentalement à l'encontre des gens du milieu, c'est-à-dire
des dirigeants locaux et des dirigeants des municipalités
régionales de comté. Je comprends plus difficilement, parce que
le ministre des Affaires municipale a été maire d'une
municipalité. Nous étions des municipalités voisines sur
la rive sud de Montréal. Il a été maire de la ville de
Saint-Lambert. Au moment où il était maire, il avait une version
des choses quelque peu différente: l'autonomie municipale, les pleins
pouvoirs des muncipalités, des conseils municipaux, c'était
important, et je le comprends. J'ai toujours, moi aussi, défendu ces
principes.
Comment, aujourd'hui, ce même homme est-il capable de venir
légiférer en allant à l'encontre de ces principes
fondamentaux? Comment le ministre des Affaires municipales peut-il avoir un tel
comportement, aujourd'hui, quelques années plus tard, venir
présenter un projet de loi comme le projet de loi 88? Je me l'explique
difficilement. Sauf que pour avoir suivi d'assez près le débat en
commission parlementaire, j'ai compris que le ministre, et pas seulement sur
cette loi, que le ministre ne voulait rien entendre.
Vous savez, M. le Président, il y a un ministre qui ne comprend
pas vraiment ce qui est en train de se passer, il y a des fonctionnaires qui
lui préparent des projets de loi. Les projets sont là pour
soi-disant améliorer ce qu'on a. Il faut qu'un ministre comprenne
vraiment ce qu'il est en train de faire, sinon il va se faire passer des lois
préparées par des fonctionnaires et qui iront à l'encontre
de grands principes. Comment le ministre des Affaires municipales peut-il,
aujourd'hui, même avec les modifications apportées au projet de
loi 88, tenir encore à ce qu'il y a dedans? Et ce, Dieu merci!
grâce au député de Jonquière, qui a dû faire
un travail incroyable avec le ministre, un rapport de forces incroyable, en fin
de session, pour essayer de faire comprendre à ce ministre que cela n'a
pas de sens. On ne se bat pas juste pour se battre. Ce n'est pas amusant, pour
qui que ce soit, d'un côté ou de l'autre de la Chambre, à 3
heures du matin, le 18 décembre - 3 h 20 du matin -pour expliquer au
ministre des Affaires municipales qu'il présente quelque chose qui n'a
pas de sens. Il y a une quinzaine, une vingtaine de modifications qui ont
été apportées. Le ministre a décidé de
s'asseoir avec mon collègue, le député de
Jonquière, et de discuter quand il a vu que cela bloquait totalement.
Bien sûr qu'on ne gagnera pas sur le nombre. Ils sont 99 et on est 22.
Sauf que le ministre va comprendre qu'il y a des messages qui passent.
J'espère que les messages vont passer au-delà du ministre et
qu'ils vont se rendre jusqu'aux collègues d'en face, les
députés de la formation gouvernementale, pour faire comprendre au
ministre des Affaires municipales qu'il est dans l'erreur. D'ailleurs,
ce n'est pas le seul projet de loi. L'attitude du ministre des Affaires
municipales n'a aucun sens. D'ailleurs, je ne suis pas le seul à penser
comme cela. Le président de l'Union des municipalités
régionales de comté, M. Roger Nicolet... Je ne citerai pas les
articles, mais il y a beaucoup d'articles de journaux qui analysent le travail
du ministre dans le projet de loi 88 et qui sont de mon avis, à savoir
que le ministre des Affaires municipales est en train d'errer, de
démanteler de façon systématique, à cause du
chambardement des pouvoirs, est en train de poser des gestes qui risquent
d'être vraiment néfastes.
Le ministre des Affaires municipales n'a pas encore compris le message.
Pourtant, le député de Jonquière, pendant plusieurs
heures, a passé les messages - et j'étais présent - a
expliqué au ministre ce qui n'avait pas de sens. La réaction du
ministre a été de rire, de sourire en disant que mon
collègue décidait de faire des batailles pour faire des
batailles. Je pense que le député de Jonquière sait de
quoi il parle; il a été maire pendant 19 ans et il a
été président de l'Union des municipalités du
Québec. C'est un bonhomme qui s'y connaît passablement en
matière municipale. Lorsque le député de Jonquière
a expliqué en long et en large ce qui n'allait pas, ce qui était
inacceptable, le ministre s'est rendu à plusieurs de ses amendements
tout récemment, au cours des dernières heures, au cours des
derniers jours. Mais, il reste encore, M. le Président, des choses
carrément inacceptables dans le projet de loi 88.
Vous savez, dans ce sens-là, on n'a pas le choix. Avec mes autres
collègues ici, je vais effectivement continuer à dénoncer,
non seulement l'attitude du ministre mais ce qui se retrouve toujours
actuellement dans le projet de loi 88. Pour ma part, j'espère que le
ministre entendra les derniers messages qu'on a à lui livrer en cette
fin de session, quelques heures avant que nous ajournions pour la
période des fêtes. J'espère que les messages que j'ai pu
passer, de même que ceux que mes collègues passeront, feront en
sorte que le ministre des Affaires municipales pourra se raviser une autre
fois. Je vous remercie, M. le Président.
Le Vice-Président: Je cède maintenant la parole
à M. le député de Shefford.
M. Roger Paré
M. Paré: Oui, merci M. le Président et bonne nuit
parce qu'il faut dire qu'il sera bientôt 3 h 30 du matin. Vous allez me
permettre, en commençant, de rappeler certains discours que j'entendais
des ministres actuels qui étaient, il n'y a pas tellement
d'années, de ce côté-ci de la Chambre et qui
dénonçaient avec véhémence le fait que l'on vienne
traiter de sujets importants en fin de session, en pleine nuit.
Le Vice-Président: S'il vous plaît! Sur un rappel au
règlement. M. le député d'Ungava.
M. Claveau: M. le Président, je constate que mon
collègue de Shefford est très peu écouté et je
demande le quorum en cette Chambre.
Le Vice-Président: Alors, qu'on appelle les
députés.
Qu'on appelle encore les députés s'il vous plaît!
Nous avons maintenant quorum, M. le député de Shefford vous
pouvez poursuivre. (3 h 30)
M. Paré: Alors, merci beaucoup, M. le Président.
Donc, je poursuis où j'en étais rendu. Je me rappelle que les
ministres actuels, dont le ministre des Affaires municipales,
dénonçaient avec véhémence, il y a à peu
près un peu plus de deux ans, le fait que l'on vienne discuter, en
pleine nuit, de projets de loi importants et ils avaient promis que ce ne
serait plus jamais la même chose, qu'il y aurait moins de
législation et qu'elle serait mieux répartie. Eh bien, on se rend
compte, à l'étude du rapport de la commission qui a
étudié le projet de loi 88, que cela n'a pas changé, qu'il
y en a beaucoup et qu'à la dernière journée ou la
dernière nuit avant la fin de la session, nous sommes en train de
discuter d'un projet de loi qui est fondamental.
Pourquoi est-ce fondamental? Parce que le projet de loi 88, seulement
à la lecture du texte, vous allez comprendre, M. le Président,
Loi modifiant la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, la Loi sur les
cités et villes et le Code municipal du Québec, des lois qui
régissent l'ensemble des municipalités du Québec. Donc, on
touche à quelque chose de fondamental, on vient modifier la Loi sur
l'aménagement et l'urbanisme.
Moi, je me rappelle au début des années quatre-vingt,
lorsque l'ancien gouvernement a implanté les municipalités
régionales de comté - c'était important et cela l'est
toujours - c'était dans le but de marier - c'est le terme qu'on
utilisait à ce moment-là - finalement, les municipalités
rurales avec les municipalités urbaines, spécialement en dehors
des grandes agglomérations que sont Montréal, Québec et
Hull, de faire en sorte qu'on aménage, qu'on concerte les gens, qu'on
planifie le développement, mais le planifier en concertation avec les
municipalités avoisinantes, ce qui apporte à la fin plus de
développement, un meilleur développement, des économies
d'énergie, des économies de temps et des économies
financières. Donc, la
philosophie qu'il y avait en dessous de cela, c'était profitable
pour l'ensemble de la collectivité. C'est une loi qui était
importante, une loi majeure et une loi qui a été apportée
et discutée au début des années quatre-vingt pour entrer
en vigueur aussi dans les mois qui ont suivi. Ce qui a fait en sorte que les
municipalités ensemble, à la même table, se sont mises
à travailler et à planifier le développement dans des
schémas d'aménagement. C'était leur rôle de mettre
en place au cours des années des schémas
d'aménagement.
C'est sûr qu'après quelques années, alors que les
schémas d'aménagement sont déposés, maintenant, on
regarde des modifications qui pourraient être intéressantes en ce
qui concerne la loi qui régit les municipalités régionales
de comté et la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme.
Oui, c'est important de le refaire mais pas de n'importe quelle
façon. Pour quelle raison n'a-t-on pas déposé ce projet de
loi avant? Pour quelle raison n'a-t-on pas rencontré les intervenants
plus rapidement? Pour quelle raison n'avons-nous pas discuté plus
amplement avec ces mêmes associations? Je ne parle pas de n'importe
quelle association, les associations majeures au Québec,
c'est-à-dire l'Union des municipalités du Québec, l'Union
des municipalités régionales de comté et l'UPA. Dans le
projet de loi, le dernier paragraphe des notes explicatives dit: À la
fin, il permettra aux producteurs agricoles de se prononcer, par
l'intermédiaire d'un comité de concertation, sur certaines
modifications au zonage dans une zone agricole.
Donc, à 3 h 30 du matin, on est en train de parler de quelque
chose d'aussi fondamental que des modifications à des lois majeures,
c'est-à-dire la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme et la loi 90
sur le zonage agricole. C'est fondamental, et pourtant on a
décidé qu'on passait cela à la dernière minute en
n'ayant pas suffisamment planifié, en n'ayant pas suffisamment
discuté avec les intervenants majeurs. Maintenant, on discute en pleine
nuit pendant que les citoyens dorment. C'est la façon de procéder
qu'on dénonce et, même en commission parlementaire, on a
été menacé de la guillotine, c'est-à-dire
interrompre les travaux et empêcher l'Opposition de faire son
travail.
Heureusement, notre représentant, le député de
Jonquière, a fait un boulot extraordinaire, j'en profite pour le
féliciter. L'ancien maire de Jonquière, l'ancien président
de l'Union des municipalités du Québec, donc, un homme qui
connaît le dossier à fond, il sait de quoi il parle, a permis au
ministre de modifier considérablement le projet de loi. Donc, oui, on
doit reconnaître que le projet de loi 88, tel qu'il nous revient
après la commission parle- mentaire, a été
considérablement modifié et amélioré, grâce
à l'Opposition qui a fait un boulot extraordinaire, spécialement
le député de Jonquière qui a été
présent tout le temps, qui n'a pas eu peur d'intervenir, d'amener des
modifications sur un sujet qu'il connaissait mieux, j'ai l'impression, que le
ministre lui-même. La preuve, c'est que, pour une cinquantaine
d'articles, il y en a eu facilement la moitié, sinon plus, qui a
été modifiée.
C'est presque incroyable de légiférer de cette
façon sur des dossiers aussi fondamentaux. On amène un projet de
loi d'une cinquantaine d'articles et, grâce à l'Opposition,
à la fin de la commission parlementaire, on a modifié 50 %
à 75 % des articles. Cela veut dire, ou bien que c'était mal
préparé, que c'était du travail mal fait, ou que le
ministre ne savait pas de quoi il parlait. Mais, heureusement, grâce au
député de Jonquière, le porte-parole de l'Opposition en
matière d'affaires municipales, on a amélioré le projet de
loi, mais pas suffisamment, parce qu'à notre avis il y a des principes
fondamentaux qui sont touchés là-dedans.
Cela risque d'amener, comme dans bien d'autres projets de loi
présentés par le même ministre, plutôt de la
confrontation par rapport à la philosophie qui avait amené la
mise sur pied des municipalités régionales de comté, qui
était la concertation. Nous, on voulait harmoniser les choses, on
voulait faire en sorte que les gens s'assoient à la même table
pour planifier, mais dans un esprit de concertation en faisant en sorte que les
gens planifient, en dialoguant. Mais là on amène plutôt de
la confrontation. Ce n'est pas la première fois, spécialement
durant cette présente session, et c'est presque incroyable. Dans le
domaine de l'habitation, on est train de toucher à - deux minutes
seulement, malheureusement - des principes fondamentaux comme
l'équité, l'unicité des lois. C'est ce qu'on a fait avec
la loi 87. Une autre loi qu'on a discuté tantôt de l'autre
côté, la loi 111 sur la Communauté urbaine de
Québec, c'est la même chose. On est en train d'installer la
confrontation, alors qu'on avait réussi à amener la concertation.
Ce va être la même chose, les risques qui sont amenés par le
projet de loi 88 avec le fameux comité de concertation. Mais on le
conserve. Est-ce que c'est pour sauver la face que le ministre le conserve dans
le projet de loi ou si c'est une menace réelle? On ne le sait pas, mais
ce qu'on sait, grâce aux interventions de l'Opposition, c'est qu'il est
devenu finalement un organisme sans pouvoir. Il faudra amener une nouvelle loi
à la suite d'un arrêté en conseil pour être capable
de le rendre opérationnel, mais il est toujours dans la loi. Cela veut
dire qu'on amène en pleine nuit, à la dernière minute,
à l'intérieur des projets
de loi, des comités qui feront en sorte de venir modifier
l'esprit, la philosophie qu'on avait amenée dans les
municipalités. C'est pour cette raison que nous allons nous opposer au
projet de loi 88, même s'il y a eu, grâce à mon
collègue de Jonquière, beaucoup de modifications et
d'améliorations. Mais, parce qu'à l'intérieur de ce projet
de loi on attaque des principes fondamentaux de lois aussi importantes que le
zonage agricole et la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, c'est trop
fondamental pour que l'on accepte d'adhérer à ces changements
qu'on nous impose. Et parce qu'on conserve, à l'intérieur de ce
projet de loi, le comité de concertation, on pense que c'est
déjà une entrée vers cet esprit de dispute qu'on veut
implanter ou que l'on veut laisser s'implanter et on dit que ça n'a pas
de bon sens. Il faudrait revenir à la philosophie qui, au début
des années quatre-vingt, a motivé cette loi, c'est-à-dire
le dialogue entre les municipalités et la concertation pour une
meilleure planification de l'avenir. On pense que le projet de loi 88 va
plutôt dans le sens inverse, et c'est la raison pour laquelle nous allons
malheureusement devoir être contre. Merci, M. le Président.
Une voix: Bravo!
Le Vice-Président: Je cède la parole à Mme
la députée de Maisonneuve. (3 h 40)
Mme Louise Harel
Mme Harel: Merci, M. le Président. Ce qui est quand
même stimulant dans ce métier que nous faisons ici à
l'Assemblée nationale, c'est de pouvoir, à l'occasion, prouver
que c'est d'abord et avant tout un métier de généraliste.
Les contributions que nous sommes appelés à livrer à cette
Assemblée ne portent pas seulement sur des dossiers que nous connaissons
bien, mais nous devons également à l'occasion aborder des
dossiers qui intéressent nos concitoyens, des dossiers qui sont
d'actualité et pour lesquels je plaide en toute modestie que nous
n'avons pas nécessairement une spécialité qui est
consacrée ou reconnue. C'est le cas, dois-je le dire, de ce projet de
loi que nous étudions, en ce qui me concerne. C'est le projet de loi qui
modifie la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme.
Vous savez que la fin de la session qui est dans l'erre d'aller depuis
le 1er décembre dernier est sans doute, de mémoire de
parlementaire qui siège en cette Chambre depuis bientôt sept ans,
la fin de session la plus tranquille que j'aie connue. Je me demandais
même comment les nouveaux collègues qui sont arrivés depuis
deux ans pouvaient imaginer ce qu'ont été les fins des sessions
précédentes, étant donné que les ajourne- ments de
séances se multipliaient depuis trois semaines à des heures,
somme toute, raisonnables et que nous n'avions pas encore eu, malheureusement,
ou heureusement plutôt, l'occasion de siéger à des heures
indues en plein milieu de la nuit, au moment où il est difficile,
admettons-le, de faire du travail législatif qui soit tout à fait
valable.
Je pense que même nos concitoyens s'interrogent sur la
validité et l'efficacité du travail qu'on peut faire dans cette
Assemblée, à de telles heures. Au moment même où on
pouvait se féliciter qu'une session se termine, puisque ce sera
éventuellement le cas demain, sans que le leader ait appelé des
projets de loi à des heures totalement irresponsables et
déraisonnables, il faut dire que la mauvaise nouvelle m'a
été apprise il y a peut-être une demi-heure de cela, M. le
Président, lorsqu'on m'a réveillée chez moi en m'invitant
à venir intervenir dans cette Assemblée.
C'était évidemment une mauvaise nouvelle puisqu'on
m'informait que le leader du gouvernement avait l'intention de ramener à
la surface un projet de loi majeur, un projet de loi qui pourtant devrait
solliciter l'appui des partis, un projet de loi portant sur les relations du
travail, qu'il avait l'intention, dis-je, de proposer à la
dernière minute, à la sauvette, un projet de loi qui, bien au
contraire, nécessite l'accord des organismes qui auront à vivre
avec les nouvelles structures et l'exercice des nouveaux pouvoirs qui seront
ainsi modifiés. C'était donc une mauvaise nouvelle, mais la bonne
nouvelle, dois-je vous le dire, c'est que cela nous permettait - c'était
une heureuse coïncidence du sort - d'intervenir plus longuement sur le
projet de loi 88.
Je dis une heureuse coïncidence du sort parce que c'est
certainement un projet de loi qui nous permet d'abord de reconnaître le
travail exemplaire mené au cours des dernières semaines par le
député de Jonquière. C'est un travail exemplaire parce que
c'est évidemment un travail d'une énergie considérable,
d'un enthousiasme dont il ne s'est jamais départi au cours des
dernières semaines. C'est un juste retour des choses parce que c'est
sans doute le seul projet de loi sur lequel un "briefing" avait
été demandé pour les députés de
l'Opposition. C'est le seul projet de loi, sans doute, que nous avions pu, avec
le critique de l'Opposition, le député de Jonquière,
examiner en profondeur pour nous familiariser avec ses enjeux extrêmement
importants. C'était d'autant plus facile d'intervenir à
l'emporte-pièce, ayant participé à ce "briefing"
organisé par le député de Jonquière, il y a
quelques semaines.
J'ai pu ainsi cette nuit, malheureusement, constater que le fameux
comité de
concertation agricole, décrié par de nombreux intervenants
au Québec comme pouvant être une deuxième commission
d'urbanisme sur le territoire, malgré que ce soit une coquille vide, on
peut bien en convenir, était maintenu. J'apprenais donc cette nuit que,
ce fameux comité de concertation agricole étant maintenu dans le
projet de loi 88, le porte-parole de l'Opposition en matière d'affaires
municipales et d'habitation, le député de Jonquière,
exhortait ses collègues à voter contre le projet de loi. Il les
invitait à prendre la parole à l'occasion de ce débat pour
inciter les députés ministériels à faire de
même.
M. le Président, je pense que c'est une heureuse coïncidence
du sort qu'on puisse complimenter le député de Jonquière
pour le travail qu'il réalise en matière d'affaires municipales.
Il a fait reprendre ses devoirs au ministre des Affaires municipales à
maintes reprises. Cela a été le cas notamment à l'occasion
de ce projet de loi puisque, après avoir menacé le
député de Jonquière d'une motion de clôture, le
ministre, heureusement, se ravisait et il introduisait des amendements à
la suite d'une rencontre avec les représentants de l'Union des
municipalités régionales de comté du Québec et de
l'Union des municipalités du Québec. Ces amendements, il faut en
convenir, ont été introduits grâce au travail
acharné du député de Jonquière qui a obligé
le ministre des Affaires municipales à faire face à ses
responsabilités. C'est certainement un devoir auquel s'applique le
député de Jonquière depuis deux ans qu'il est porte-parole
de l'Opposition en matière d'affaires municipales et d'habitation. Il
faut en convenir, il connaît bien le dossier, ayant été
maire de Jonquière lui-même. Il connaît à la
perfection le langage codé, doit-on l'avouer, qui a cours dans le monde
municipal. Le député de Jonquière se débat dans ces
dossiers avec une facilité totalement déconcertante en
comparaison avec la lourdeur que manifeste le ministre des Affaires municipales
et responsable de l'Habitation.
Une voix: Oui, c'est vrai cela.
Mme Harel: M. le Président, en ce qui concerne ce projet
de loi, le président de l'Union des municipalités
régionales de comté, M. Nicolet, mettait et met toujours le
gouvernement en garde contre la tentation toujours présente, de la part
des ministères en régions, de court-circuiter les élus des
autorités municipales régionales de comté. Notamment, en
fait foi un discours prononcé par le président de l'UMRCQ lors du
dernier congrès tenu à la fin de l'été dernier et
au cours duquel il portait un jugement très sévère en ce
sens qu'il y avait encore en régions des centaines de fonctionnaires qui
imposaient leur loi, du moins une foule de tracasseries aux administrations
municipales et cela - disait-il - dans divers domaines tels
l'aménagement du territoire, le développement touristique,
l'environnement et la voirie. Il rappelait qu'en environnement il craignait un
transfert de responsabilités déguisé du ministère
vers les municipalités sans qu'elles disposent pour autant des
ressources financières ni du pouvoir décisionnel
approprié.
C'est certainement l'occasion, avec ce projet de loi 88, de mettre en
garde le ministre des Affaires municipales et ses collègues contre une
tentation toujours présente dans les ministères en régions
d'imposer leur diktat aux élus des régions.
Je vois que mon temps file, je sens que c'est une contribution de
généraliste mais il y a certainement des spécialistes plus
avisés que moi qui auront l'occasion d'intervenir durant le
présent débat. Je vous remercie.
Des voix: Bravo! C'est très beau!
Le Vice-Président: Je reconnais maintenant M. le
député d'Ungava.
M. Christian Claveau
M. Claveau: Merci, M. le Président. C'est avec beaucoup
d'intérêt que j'ai participé à une bonne partie de
la commission parlementaire qui a étudié article par article le
projet de loi 88 lequel, comme on a eu l'occasion de le dire, amène
certains amendements à la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme,
la Loi sur les cités et villes et le Code municipal du
Québec.
Lors de ces débats et dans d'autres débats lors de
l'étude détaillée article par article de projets de loi
touchant la question municipale, j'ai pu me rendre compte que le ministre des
Affaires municipales n'était pas particulièrement versé ou
intéressé par le développement des MRC comme tel, par
l'application des articles de la loi 125 créant les MRC qui ont pour
effet de donner aux MRC un certain pouvoir d'intervention dans les milieux, un
certain pouvoir de coordination des activités municipales, de mise en
commun de services à l'intérieur de certaines régions. (3
h 50)
En effet, M. le Président, lors de l'étude du projet de
loi modifiant l'Administration régionale Kativik, le ministre en est
même arrivé à dire à un moment donné: Vous
savez, une MRC, il ne faut pas se mêler, ce n'est pas une instance
politique. Il a dit: C'est une instance administrative de services. Les MRC ne
sont pas là pour remplacer le gouvernement, elles ne sont pas là
pour remplacer les municipalités et elles restent et devront rester une
espèce d'instance de coordination de services, une
instance de style strictement administratif. Je me souviens, à ce
moment-là, d'avoir dit au ministre: Écoutez, M. le ministre,
plutôt que de faire des lois sur les MRC, si vous le prenez comme cela,
donnez-leur simplement une charte d'organisme à but non lucratif qui
pourra fonctionner dans le domaine des services. À ce moment-là,
on vient de régler le problème. Car, M. le Président, il
me semble que, selon cette philosophie avancée par le ministre, on
restreint énormément le rôle d'un organisme de concertation
en fonction du développement régional, en fonction de la mise en
place de services régionaux organisés, structurés pour le
mieux-être de toute une population qui doit se partager un même
territoire.
M. le Président, on se souviendra que les MRC n'ont pas
été mises en place uniquement pour le plaisir de la chose,
uniquement pour s'amuser à créer des structures. On se
souviendra, M. le Président, qu'il fut un temps où les
municipalités rurales étaient en conflit flagrant,
perpétuel, avec les grosses villes, les centres urbains qui drainaient
chez eux l'ensemble des interventions économiques et sociales,
l'ensemble des structures d'accueil pour les nouveaux arrivants ou pour le
tourisme, etc., pour tout ce qu'on peut imaginer, les parcs industriels, etc.
Ce n'est que par le biais des MRC, en établissant les schémas
d'aménagement, qu'on a obligé les élus de toute une
région donnée à s'asseoir ensemble pour discuter
conjointement de la façon qu'on va développer un territoire
donné, incluant différentes administrations municipales. Ce n'est
que par ce biais que l'on a réussi à créer une certaine
harmonie dans plusieurs des régions du Québec et aussi à
permettre aux petites municipalités rurales, peut-être un peu
moins fortunées, d'avoir un poids relatif suffisamment important pour
pouvoir elles aussi bénéficier d'une certaine amélioration
des impacts économiques dans leur milieu. Ce n'est que de cette
façon qu'on a réussi à créer des structures
d'accueil, des structures de développement social, économique et
touristique dans différentes municipalités qui, autrement,
auraient dû, à titre individuel, continuer à faire des
luttes impliquant des nains contre des géants. On sait que, dans ces
cas-là, c'est généralement le géant qui gagne.
Le ministre vient nous dire maintenant: Écoutez, les MRC ne sont
pas une instance décisionnelle sur le plan politique - il l'a dit en
commission parlementaire - mais elles devraient être strictement une
instance administrative, une instance de concertation plus ou moins
organisée. À ce moment-là, M. le Président, je dis
que le ministre des Affaires municipales fait fausse route et qu'il devrait
considérer, au contraire, une MRC comme un centre d'accueil et de
discussion de première importance qui ne regroupe que des élus
qui ont tous intérêt à travailler pour le mieux-être
de leur population; ils ont été élus pour cela et c'est ce
qu'ils font. La structure qu'elles se donnent va leur permettre de se donner
une table de discussion et de concertation qui doit, elle aussi, être
considérée comme une instance politique au sens pur, au sens
large, afin qu'il puisse y avoir de véritables débats qui soient
à l'origine d'une véritable dynamique de développement
régional concerté et non pas d'une dynamique de
développement régional dans un contexte de confrontation entre
les différents centres urbains et ruraux.
Lors de l'étude de ce projet de loi, l'article 22 du projet de
loi qui modifie l'article 148.1, introduisant le comité de concertation
agricole, a été largement débattu et, M. le
Président, avec toute la meilleure volonté du monde, nous, de
l'Opposition, n'avons pu voir dans ce comité de concertation agricole
qu'une coquille vide, une coquille qui n'a pas de sens en soi. D'abord,
même si la loi était adoptée cette nuit en troisième
lecture d'une façon définitive, il faudra attendre que le
ministre décide un jour peut-être de mettre en application cet
article, parce qu'il n'est pas prévu qu'il va être appliqué
automatiquement, probablement, M. le Président parce que la relation
existant entre la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme et la loi sur le
zonage agricole n'est pas suffisamment claire, probablement aussi parce que les
différents ministres impliqués n'ont pas réussi à
faire définitivement le point sur ce que doit être ce
comité de concertation agricole.
On dit que les municipalités pourront créer, si elles le
désirent, un tel comité par le biais d'un règlement qui va
leur permettre de mettre en activité un tel comité et on
définit qui devrait être à l'intérieur, qui devrait
participer à la formation de ce comité.
M. le Président, s'il s'agissait là de quelque chose de
vraiment important, s'il s'agissait là d'un élément qui
amènerait une bonification majeure autant dans la Loi sur
l'aménagement et l'urbanisme que dans la loi sur le zonage agricole, je
crois, M. le Président, qu'on aurait trouvé, au contraire, un
moyen de faire en sorte que, partout où il pourrait y avoir des conflits
potentiels entre ces deux lois, on ne soit pas obligés de mettre en
place un tel comité. Mais, à notre propre demande, le ministre a
été obligé de nous répondre en commission
parlementaire qu'en fait il n'y a pas vraiment de conflits ou il n'y a pas
vraiment de situations qui ne pourraient se résoudre sans passer par un
tel comité. Autrement dit, jusqu'à maintenant, les élus
municipaux ont pris leurs responsabilités, ont su s'entendre, ont su
regarder les lois, ont su réussir à déterminer, dans leurs
milieux respectifs, les lignes de
démarcation entre, d'une part, le zonage agricole et, d'autre
part, l'aménagement et l'urbanisme et il ne semble pas, à
première vue, qu'il soit nécessaire d'ajouter une nouvelle
structure. Nous sommes convaincus qu'une telle structure ne restera qu'une
coquille sans usage, une coquille qui demeurera vraiment quelque chose
d'inopportun même, j'oserais dire, dans certains cas, parce que, par
l'application d'une telle réglementation, on enlève la
possibilité aux élus municipaux ou le devoir qu'ont les
élus municipaux de réussir à trouver des mécanismes
de concertation. Par le biais d'un tel comité, on va envoyer la
responsabilité à des membres élus en dehors qui, eux,
auront éventuellement à prendre des décisions, à se
concerter pour conseiller les élus municipaux qui forment les MRC. M. le
Président, nous croyons qu'il s'agit là d'une façon
d'introduire la zizanie, alors qu'il n'y a pas de meilleur moyen que de
s'entendre, que de se parler franchement entre nous, sans avoir à passer
par l'intermédiaire des comités ad hoc, qui souvent sont
composés de gens qui, une fois leur travail fait, malgré toute la
bonne volonté du monde, s'en retourneront chez eux et n'auront pas, M.
le Président, à vivre avec la responsabilité de
l'application des décisions qu'ils auront suggérées aux
élus municipaux.
M. le Président, il s'agit là d'une des raisons pour
lesquelles nous ne pouvons être d'accord avec ce projet de loi.
Merci.
Le Vice-Président: M. le député de
Lac-Saint-Jean. (4 heures)
M. Jacques Brassard
M. Brassard: M. le Président, malgré l'heure
tardive, 4 heures du matin, je voudrais commencer mon intervention sur le
projet de loi 88 par un hommage au député de Jonquière.
Voilà un homme qui a vécu une expérience municipale
pendant 22 ans. Il a d'abord été conseiller municipal à la
ville d'Arvida. Il est devenu maire de la ville d'Arvida et, après la
fusion des municipalités de Kénogami, Jonquière et Arvida,
il a été élu premier maire du grand Jonquière
fusionné. Il compte 22 ans d'expérience municipale, 22 ans de
vécu municipal. J'ajouterais qu'il a non seulement vécu la
fusion, la naissance d'une grande ville, mais également la naissance des
municipalités régionales de comté. Il a assisté, en
tant que maire de Jonquière, à la naissance de la MRC du Fjord,
municipalité régionale de comté dont fait partie la ville
de Jonquière. Au cours de ces 22 années, il est important de
souligner que le député de Jonquière a
développé ce qu'on pourrait appeler une sagesse, un pragmatisme
et surtout une habitude du consensus. Dieu sait que c'est capital dans le monde
municipal, le consensus, la concertation. L'habitude de la concertation, c'est
tout à fait essentiel dans le milieu municipal, réussir à
s'entendre, réussir à se concerter sur des projets, des
objectifs, des politiques. C'est une habitude que toute personne oeuvrant dans
le monde municipal doit acquérir et le député de
Jonquière l'a acquise depuis bien longtemps.
C'est ce qui fait que le rôle qu'il joue maintenant comme
député de l'Opposition et porte-parole en matière
municipale est capital compte tenu du fait qu'il a en face de lui un ministre
qui doit être mis sous surveillance, un ministre qui doit être
suivi à la trace. D'ailleurs, je vous signale qu'il n'est plus parmi
nous. Dès que le débat a commencé sur le projet de loi 88,
je l'ai vu revêtir son manteau, quitter la place et aller se coucher.
C'est ce qui est arrivé. Cela ne semble pas l'intéresser, le
débat sur un projet de loi dont il est pourtant le parrain. Ce ministre
doit être mis sous surveillance, doit être suivi à la trace.
Pourquoi? Parce qu'il fait mal ses devoirs. On ne le constate pas uniquement au
sujet du projet de loi 88, mais on s'en est rendu compte depuis deux ans dans
tous les projets de loi concernant le monde municipal. On a en face de nous un
ministre qui fait mal ses devoirs, qui nous présente du travail
bâclé. On l'a vécu dans le passé, on le vit encore
avec le projet de loi 88, travail bâclé, devoirs mal faits.
En voulez-vous une preuve, M. le Président? J'ai ici une liasse
d'amendements au projet de loi 88, je ne sais combien, plus d'une quarantaine
d'amendements, peut-être plus, dont certains sont substantiels. C'est
évidemment le signe d'un travail bâclé, d'un devoir mal
fait. C'est normal qu'on apporte, en commission parlementaire, des amendements
à un projet de loi, mais quand on en apporte autant, cela a une
signification, un sens. Cela signifie qu'on est en face d'un devoir mal fait,
d'un projet de loi qui a été mal réfléchi, mal
pensé, mal conçu. On n'a pas suffisamment réfléchi
au projet de loi et on est obligé, à la toute dernière
minute, à toute vapeur, d'y apporter toute une série
d'amendements dont certains sont substantiels. C'est anormal et il faut le
signaler.
Je pense qu'il faut rendre hommage au député de
Jonquière qui, dans l'étude, l'analyse, l'examen des projets de
loi à caractère municipal, se montre d'une rigueur exemplaire.
Heureusement, M. le Président, que le député de
Jonquière est rigoureux et qu'il est minutieux parce que, sans cela, on
se retrouverait avec des projets de loi municipaux adoptés qui
n'auraient aucun sens et qu'il faudrait refaire à la session suivante.
C'est ce qui est arrivé avec le projet de loi 88: grâce au travail
du député de Jonquière, le projet de loi a
été amendé, a été
amélioré, il faut le dire. Il a été
amélioré et il est plus présentable maintenant. Je dois en
convenir, le projet de loi 88 est maintenant sortable et il est maintenant
présentable...
Des voix: Bravo!
M. Brassard: ...grâce au travail du député de
Jonquière, le porte-parole de l'Opposition en matière d'affaires
municipales.
Il y a des choses intéressantes dans cela; je l'ai
déjà signalé à l'occasion du débat en
deuxième lecture. Les possibilités de régionalisation des
services municipaux en ce qui concerne la MRC m'apparaissent être un
élément intéressant, d'autant plus que c'est basé
sur le volontariat. C'est tout à fait facultatif, ce n'est pas
obligatoire. Les municipalités membres d'une MRC qui le désirent
peuvent, à la suite d'un vote comportant une majorité des deux
tiers, régionaliser des services. Cela m'apparaît
intéressant. Cela se retrouve dans le projet de loi. Il y a le droit de
retrait qu'il aurait fallu baliser, mais qu'on n'a pas balisé,
malheureusement, au cours de la commission parlementaire.
Le travail du député de Jonquière a
été fort utile et fructueux sur la partie du projet de loi
concernant le comité de concertation agricole. Là, on voit que
nous sommes en face d'un ministre qui n'a pas l'habitude du consensus et de la
concertation. Concernant ce comité de concertation agricole, on a vu se
dresser tout le monde contre cette nouvelle instance qui venait s'ajouter au
comité d'urbanisme déjà existant et déjà
prévu par la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme. Tout le monde
était contre. L'Union des municipalités régionales de
comté, qui regroupe les MRC et les municipalités rurales,
était totalement opposée à la mise en place du
comité de concertation agricole. L'Union des municipalités du
Québec, qui regroupe les villes et les municipalités importantes
du Québec, était totalement opposée au comité de
concertation agricole. Pour quelles raisons? Je vous en cite quelques-unes
extraites de la résolution de l'UMQ: "L'introduction du comité de
concertation constitue un accroc au principe de la responsabilité
municipale en aménagement" parce qu'on lui donnait des pouvoirs qui,
forcément, avaient pour effet de réduire ceux des élus du
conseil municipal, c'est inévitable. Alors, ne serait-ce que pour cette
raison les unions municipales étaient opposées à la mise
en place d'un comité de concertation. "Il consacre le principe voulant
qu'un groupe d'intérêts puisse dicter une ligne de conduite
à la municipalité et à l'ensemble des citoyens." Je n'ai
rien contre les producteurs agricoles, mais si on jugeait bon de mettre en
place un comité de concertation agricole je ne vois pas pourquoi, par
exemple, les commerçants, les propriétaires de commerces dans une
municipalité n'auraient pas réclamé la mise en place d'un
comité de concertation commerciale, ou les représentants des
entreprises touristiques, etc.
Or, grâce au travail du député de Jonquière,
le comité de concertation agricole demeure, mais il est vidé de
sa substance. Plusieurs des articles sont abolis, soit les articles 148.4,
148.5 et 148.6. Cela fait que, comme on l'a mentionné, on se retrouve
avec une coquille vide qui n'a plus aucun pouvoir. On le laisse en place pour
permettre au ministre de l'Agriculture de sauver la face, je suppose. Je ne
vois vraiment pas pourquoi on le maintient en place puisqu'il n'y a plus aucun
des pouvoirs qu'on prévoyait dans le projet de loi à
l'origine.
M. le Président, je conclus comme j'ai commencé, en
disant: Heureusement qu'en cette Chambre, pour ce qui est des projets de loi
municipaux, il y a le député de Jonquière. Merci, M. le
Président! (4 h 10)
Le Vice-Président: Nous allons poursuivre avec M. le
député de Terrebonne.
M. Yves Blais
M. Blais: Merci beaucoup, M. le Président. Vous savez bien
qu'il est de tradition, lorsqu'on parle la nuit, que chacun des intervenants
soit un peu une horloge parlante et dise l'heure. Pour ne pas échapper
à la tradition, je veux vous souligner, M. le Président, qu'il
est 4 h 10 du matin, ce 18 décembre. Quelques-uns des
députés de l'Opposition sont allés se coucher vers minuit,
1 heure; j'étais de ce nombre et, vers 2 h 15, 2 h 20, on m'a
rappelé pour me dire: Ce n'est pas un ange qui parle, c'est la
"whipperie", il faudrait que tu viennes parler sur la loi 88. J'ai dit:
Pourtant, on est en 1987. Non. On est déjà en 1988, c'est la loi
88 ce soir, le 18 décembre, une loi par anticipation. Si c'était
vrai, au moins, que c'est une loi qui anticipe certains principes! Mais non!
Elle n'anticipe que la date. Pourtant, c'est un sujet bien simple, M. le
Président: des correctifs sur les pouvoirs des MRC et, entre guillemets,
une espèce d"'accommodation" du zonage agricole.
En commission parlementaire, le critique de l'Opposition, le
député de Jonquière, avait présenté des
amendements tellement croustillants, comme un pain qui sort du four. Mais non!
Le ministre des Affaires municipales n'a pas voulu entendre quoi que ce soit.
C'est malheureux! Nous n'aurions pas besoin, M. le Président, de parler
cette nuit à 4 h 12 si le ministre des Affaires municipales avait
regardé de façon un tant soit peu attentive les amendements
proposés par l'Opposition.
Il arrive, M. le Président, dans la vie des peuples que certains
gouvernements adoptent des lois qui sont majeures. Il y en a deux principales
qu'on a adoptées: une était la loi 101 et la deuxième
était le zonage agricole. Cette loi vient toucher le zonage agricole. On
ne touche pas comme on veut à ce bijou législatif. Il faut un
joaillier des Affaires municipales pour retailler cette loi. Sinon, partout sur
le territoire, on crie: Horreur! Il faut un ministre très attentif. Avec
minutie on retravaille des bijoux législatifs comme celui-là.
Quant à moi, je trouve la profession de cultivateur trop noble,
trop grande pour permettre à quelqu'un de venir - je dirai un mot qui
n'est pas tellement beau - tripoter le zonage agricole, comme si on pouvait
faire des zones très grandes, des zones un peu plus petites, de grandes
zones, des bébés zones et qu'on s'en aille dans le zonage
agricole comme on veut. Non! M. le Président, le zonage agricole est
trop important pour qu'on s'en aille, à qui mieux mieux, taillarder dans
le territoire québécois et qu'on ne s'occupe pas du sillon
nourricier qu'on avait donné aux agriculteurs pendant que nous
étions le gouverment. C'est sûr.
M. le Président, avant que l'on ne touche au territoire agricole,
on se doit de connaître une chose technique. Avant de dézoner un
pouce carré des terres vertes actuelles du Québec, il faut que
l'on sache ceci: II y a actuellement au Québec 1 410 000 lots en zones
blanches non construits, 1 410 000, M. le Président! Ce sont des lots!
Bâtissez des maisons sur ces lots, la moyenne est de 3,3 par maison,
disons 3. 1 410 000 multiplié par 3, il y a de la place pour doubler la
population du Québec sans qu'on touche d'aucune façon au
territoire agricole. C'est important, M. le Président! Il y a de la
place pour environ 5 500 000 personnes avant que nous, "dézonassions" un
lot! Un lot! En plus, par économie collective, de ces 410 000 lots, il y
en a 400 000 qui sont déjà viabilisés. Ils sont
déjà tout prêts à recevoir une maison, il y a un
système d'eau et d'égout, des chemins, etc. M. le
Président, il y a de la place pour 1 200 000 personnes au moins avant
qu'un seul iota du territoire agricole ne soit dézoné. Comment se
fait-il que...
M. Brassard: Question de règlement.
Le Vice-Président: Question de règlement. M. le
député de Lac-Saint-Jean.
M. Brassard: L'intervention de mon collègue est trop
intéressante. Je déplore qu'il n'y ait pas quorum.
Le Vice-Président: On attend que les députés
entrent à l'Assemblée pour poursui- vre le débat.
Évidemment, dans une intervention normale, pour une question de
règlement, le temps est comptabilisé dans le temps de
l'intervenant. Dans les cas de quorum, ce n'est pas considéré
dans le temps de l'intervenant. On suspend les travaux pour quelques instants.
Continuez de faire sonner les cloches, s'il vous plaît.
(Suspension de la séance à 4 h 21)
(Reprise à 4 h 32)
Le Vice-Président: À l'ordre, s'il vous
plaît!
Alors, nous avons quorum et nous reprendrons nos débats dans
quelques instants, le temps de laisser le député de Terrebonne
s'approcher. Nous allons reprendre nos travaux. Au moment de l'appel du quorum,
M. le député de Terrebonne, il vous restait cinq minutes pour
compléter votre intervention.
M. Blais: Merci, M. le Président. Quand le whip de
l'Opposition a demandé le quorum, j'ai cru que le gouvernement ferait de
la procrastination, mais, apparemment, la procrastination n'a pas eu lieu et
nous recommençons.
M. le Président, je parlais avec beaucoup de flamme, lorsqu'on
m'a éteint, du zonage agricole. Je disais que le gouvernement
antérieur avait fait un joyau législatif avec la loi sur le
zonage agricole. Bien sûr qu'à cette heure-ci les cultivateurs
sont sur le point de nous écouter, il est 4 h 37, mais il y a beaucoup
d'urbains, j'en suis persuadé, qui nous écoutent. Pour qu'ils
nous comprennent bien, on a divisé le Québec en zones blanches et
en zones vertes. Ce projet de loi vient essayer de légiférer
entre les deux, parce qu'il y a toujours des zones grises entre les zones
blanches et les zones vertes, c'est-à-dire des zones entre les deux
où on se doit de faire une discussion, où les villes et les
cultivateurs se chicanent pour une bande de territoire. C'est pour cela que,
dans le projet de loi, on dit: "II permettra aux producteurs agricoles de se
prononcer, par l'intermédiaire d'un comité de concertation, sur
certaines modifications au zonage dans une zone agricole." Cela veut dire qu'il
y a des urbains qui se plaignent des odeurs agricoles qui sont trop
rapprochées des zones urbaines.
Aussi, je ne comprends pas - ce n'est pas très odoriférant
quand même, je le sais, mais ce sont, tout de même, des odeurs qui
sont faites par des produits naturels et qui n'affectent en rien la
santé des êtres humains, ce n'est pas toxique - pourquoi on veut
éliminer ces odeurs-là par législation avant
d'éliminer les odeurs toxiques des industries. Pensons, par exemple,
à la mine
Noranda, à Domtar. Ce n'est pas parce que je veux que Domtar
ferme, mais avant de commencer à vouloir légiférer sur des
zones d'odeurs faites par des produits naturels, comment se fait-il qu'on
n'essaie pas d'éliminer les odeurs de l'industrie qui, elle, cette
odeur, en plus d'être nauséabonde est néfaste â la
santé?
Une voix: Un peu d'ordre, M. le Président.
M. Blais: Alors, le ministre des Affaires municipales s'est
embourbé dans ce projet de jumeaux, les deux 8. Je vais les appeler le
projet jumeau des deux 8. Ce projet des jumeaux, les deux 8, c'est le projet
où le ministre des Affaires municipales s'est embourbé. En
voulant clarifier les choses entre le zonage urbain et le zonage agricole, il a
mal fait ses devoirs. Grâce à la lucidité, à la
clairvoyance, à la perspicacité et souvent à la
détermination du député de Jonquière, eh bien
l'Opposition a veillé à ce que ce projet de loi, au moins s'il
est adopté... Parce que sous le nombre, comme il dit, on va venir
à croupir, mais on aura au moins fait notre devoir jusqu'au bout, M. le
Président.
M. Garon: La garde ne se rend pas.
M. Blais: Et c'est Horace qui disait: "Que voulez-vous qu'il
fît contre trois?"
M. Garon: Qu'il les prenne un par un.
M. Blais: Qu'il mourût ou qu'un "vain" désespoir,
alors, le secourût. M. le Président, nous essayons de secourir les
agriculteurs et je crois que, pour nous comme pour Horace, c'est un vain
désespoir parce que ni le ministre, ni le parti gouvernemental ne se
laissent convaincre par des interventions d'une grande valeur quand même.
Il y a des interventions de grande valeur et si l'on avait pris les amendements
du député de Jonquière en commission parlementaire...
Je terminerai comme j'ai commencé, à l'exemple de mon
whip. Le député de l'Opposition responsable du dossier municipal
vous a présenté des amendements tout chauds, comme un pain qui
sort du four, et le gouvernement n'a pas saisi l'occasion de s'en faire l'ami.
Merci beaucoup, M. le Président.
Le Vice-Président: Alors, nous allons maintenant
poursuivre avec M. le député de Verchères.
M. Jean-Pierre Charbonneau
M. Charbonneau: Merci, M. le Président. Il est presque 4 h
40, ce matin, et je vous dis que j'ai l'impression qu'il n'y a pas grand monde
qui nous écoute et qu'il n'y a pas grand monde, non plus, qui lira le
Journal des débats. Mais pour ceux qui, éventuellement,
vont se demander pourquoi, au salaire que nous sommes payés maintenant,
nous sommes ici, ce serait peut-être important de le préciser.
Moi, je dois vous dire que cela ne me scandalise pas tellement. On est
ici, ce soir, à cause du ministre du Travail. On est ici parce que, M.
le Président, le ministre du Travail oblige l'Opposition à
recourir, dans notre régime parlementaire, au seul instrument qu'il lui
reste pour faire en sorte que le gouvernement entende raison et qu'il recule
sur un projet de loi important. Dans ce sens-là, le parlement est une
arène de combat et en démocratie - c'est cela, la valeur de la
démocratie - c'est préférable que les gens se battent
d'une façon civilisée dans une arène où il y a des
règles de jeu qu'ils ne se battent dans les rues. (4 h 40)
Oui, on est ici à 4 h 40 du matin, après avoir fait une
nuit, après avoir, d'une façon un peu enfantine, exigé
l'interruption des travaux il y a quelques minutes parce que les
députés ministériels n'étaient pas au poste alors
qu'ils devaient l'être. Les députés ministériels n'y
étaient pas. Selon notre système parlementaire, c'est à la
majorité ministérielle de veiller à ce qu'on ne soit pas
obligé d'être interrompu à un moment où l'autre. On
a fait cela. Ils nous ont fait le coup quand ils étaient de ce
côté-ci de la Chambre. C'était de bonne guerre. Quand on
n'avait pas l'habileté d'avoir assez de joueurs de ce
côté-ci, ils invoquaient le quorum. Ils exigeaient l'interruption
des travaux. Cela durait quelques minutes, parfois plus longtemps et cela
reprenait. Tout cela peut, en apparence, avoir l'air ridicule, enfantin,
inapproprié, mais, encore une fois, il faut se rappeler qu'on est dans
un parlement et que le parlement, selon notre tradition, étant une
arène de combat, à un moment donné, il faut recourir
à certaines armes. C'est ce que l'Opposition fait.
Non pas que le projet de ' loi 88 ne mérite pas des discours.
Mais je vais vous dire qu'on a discouru pas mal sur le projet de loi 88. Je
vais vous dire qu'à l'heure qu'il est je me serais bien passé de
discourir sur le projet de loi 88 et tous mes collègues
également, y compris le critique de l'Opposition dans ce domaine, qui a
fait un travail remarquable.
Le député de Jonquière et tous les
députés de l'Opposition...
Des voix: Ha! Ha! Ha! Bravo!
M. Garon: M. le Président, êtes-vous encore
là?
M. Charbonneau: ...se seraient abstenus
de faire ce genre de discours cette nuit.
M. Garon: S'ils veulent siéger de nuit, batinse, qu'ils
gardent l'ordre!
Le Vice-Président: Un instant, s'il vous plaît! Je
rappellerais à n'importe quel député en cette
Assemblée que, si vous avez quelque remarque à faire sur un
rappel au règlement, d'invoquer le règlement en vous levant.
Autrement, je ne veux pas entendre de remarques désobligeantes.
M. Garon: Aucun.
Le Vice-Président: M. le député de
Lévis.
M. Garon: J'invoque le règlement pour que chacun regagne
son siège, comme le dit le règlement.
Le Vice-Président: Un instant! Vous invoquez une question
de règlement, je vais vous céder la parole et je vais vous
écouter.
M. Garon: Je voudrais que vous fassiez respecter le
règlement comme c'est votre devoir, sans qu'on soit obligé de le
demander chaque fois.
M. Johnson: Sur la question de règlement, M. le
Président.
Le Vice-Président: Sur la question de règlement, M.
le leader adjoint du gouvernement.
M. Johnson: Sur la question de règlement, de
mémoire, M. le Président, sans pouvoir citer l'article parce que
ce n'est pas nécessaire, un député doit s'adresser
à cette Chambre de son siège. Par ailleurs, je ne crois pas qu'il
y ait d'obligation d'occuper son siège en tout temps.
M. Jolivet: M. le Président...
Le Vice-Président: Oui. Sur la même question de
règlement, M. le leader adjoint de l'Opposition.
M. Jolivet: En vertu de l'article 35, mon collègue, le
député de Verchères, a le droit plein et entier à
son temps de parole. Or, une personne qui l'interrompt alors qu'elle n'est pas
à son siège ne respecte pas, justement, le règlement.
C'est ce que mon collègue de Lévis a voulu dire, soit, d'abord
d'être à son siège et, deuxièmement, s'ils veulent
interrompre, qu'ils se lèvent sur une question de règlement. Mais
qu'ils laissent à mon collègue, le député de
Verchères, la possibilité de parler en vertu de l'article 35.
Le Vice-Président: Oui. Sur la même question de
règlement, M. le leader adjoint du gouvernement.
M. Johnson: Sur la même question de règlement, M. le
leader adjoint de l'Opposition mêle les choses. Lorsqu'on s'adresse
à cette Chambre, qu'on est donc reconnu par la présidence, on
doit le faire de son siège. Par ailleurs, je soumets qu'il n'y a aucune
obligation d'occuper son siège.
M. Jolivet: M. le Président...
Le Vice-Président: Oui, sur la même question de
règlement, d'accord, allez-y.
M. Jolivet: Toujours sur la même question de
règlement, M. le Président, je n'ai point dit que la personne
doit être à son siège, si elle ne veut pas parler. J'ai dit
que, si elle veut déranger mon collègue, c'est par une question
de règlement qu'elle doit le faire. Pour ce faire, elle doit être
à son siège. Si elle dérange mon collègue, à
ce moment-là, c'est nous qui allons lui demander, si vous ne le faites
pas, de ne pas interrompre mon collègue. S'il veut parler, qu'il parle
de son siège. Je n'ai entendu personne de l'autre côté
venir défendre le ministre des Affaires municipales qui est parti.
Des voix: Ha! Ha! Ha!
Le Vice-Président: Le dernier point n'était pas
conforme au règlement.
M. Jolivet: Oui, je le sais.
Le Vice-Président: Bon. D'accord. Nous sommes dans une
assemblée délibérante et je pense que chacun a ses propres
responsabilités à prendre. Il y a une tradition qui a toujours
prévalu dans les débats à l'Assemblée nationale.
Effectivement, si on regarde le règlement, il y a une disposition,
à l'article 32, paragraphe 2 de notre règlement, où on dit
que les députés "occupent la place qui leur a été
assignée par le président, y demeurent assis et gardent le
silence à moins d'avoir obtenu la parole." C'est la disposition formelle
du règlement sur lequel le président doit se rabattre si,
effectivement, les gens ne sont pas capables d'agir par eux-mêmes suivant
leur bon sens et leur bon jugement. J'ai déjà rendu une
décision antérieurement, qui date du 11 décembre 1986, en
ce sens-là. La tradition parlementaire et l'usage permettent aux
députés, vous le savez fort bien, de s'asseoir souventefois
à d'autres endroits que celui qui leur a été
assigné. Les gens vont parler parfois entre eux, parfois même de
questions législatives ou de dossiers, à voix basse, pour autant
qu'ils ne dérangent pas celui qui intervient.
Le principe de notre règlement veut que celui qui a la parole
puisse s'exprimer librement; ce qui veut dire que cette personne peut
s'exprimer de telle sorte que chacun ne la dérange pas inutilement,
c'est-à-dire que, si elle parle, la personne qui a la parole peut
présumer que chacun va la laisser parler. C'est évident que, dans
le cadre d'un débat, parfois selon les propos qu'un député
peut tenir, dépendamment des circonstances et souvent des heures et du
ton, cela va susciter certaines réactions de l'autre côté
et certains commentaires qui, souventefois, sont admis dans nos
débats.
Si cela ne dérange pas celui qui parle, ils sont
tolérés. D'autre part, si les remarques et les réactions
qui arrivent de toute part dérangent celui qui a la parole, le
président interviendra. En ce sens-là, à ce moment-ci, je
veux intervenir et, puisqu'il ne semble pas que la chose puisse se faire
facilement, je vais demander à chacun des députés de
regagner sa place qui lui a été assignée par la
présidence avant de poursuivre nos travaux. Veuillez vous
exécuter, s'il vous plaît!
MM. les députés, veuillez regagner vos propres places. M.
le député de Chauveau.
M. le député de Chauveau, je vous rappelle à
l'ordre une première fois.
Vous pouvez poursuivre, M. le député de Verchères.
Il reste une minute pour votre intervention.
M. Charbonneau: Merci, M. le Président. Si je comprends
bien, cette querelle de procédure a fait en sorte que je n'aurai pas
besoin de me concentrer longtemps pour continuer à faire les dix minutes
qui me sont assignées dans le cadre de ce "filibuster".
Alors, je vais rappeler, dans les instants qu'il me reste, que nous
sommes ici à cause du ministre du Travail et parce que nous nous
opposons à son projet de loi. Nous sommes ici parce que la tradition
parlementaire, dont vous venez de parler dans une autre question, donne
à l'Opposition l'obligation d'utiliser ce moyen parlementaire qui est de
prendre du temps dans un débat et de parler d'une certaine façon
non pas pour ne rien dire, parce que les propos que l'on tient sont des propos
pertinents au dossier, mais pour tenir des discours qu'on n'aurait pas,
à ce moment-ci, à tenir si on n'avait pas choisi de faire le
combat politique important qui est de demander au gouvernement de faire
comprendre au ministre du Travail que cela n'a aucun bon sens, à la fin
de la session parlementaire, de nous imposer et d'imposer au milieu des
relations du travail du Québec un projet de loi aussi important sans
qu'il y ait un consensus. Parce qu'il n'y a pas consensus autour de ce projet
de loi controversé que présente le ministre du Travail, nous
sommes obligés, en pleine nuit, de faire ce débat qui, encore une
fois, pour des citoyens ordinaires, peut paraître ridicule, mais qui,
dans le fond, dans une démocratie, est un signe que le parlementarisme
est une valeur importante. Lorsqu'on ne veut pas utiliser la force ou la
violence pour faire entendre ses opinions dans une société, il
reste des règles du jeu arbitrées d'une façon
civilisée que sont les règles parlementaires. Cela existe dans le
Parlement du Québec et dans tous les Parlements qui fonctionnent
correctement dans le monde entier. (4 h 50)
II n'y a pas à se scandaliser à faire ce que nous faisons,
d'autant plus que nous le faisons pour une raison importante, parce qu'on pense
que, dans une société comme la nôtre, les relations du
travail ne sont pas des choses que l'on impose. Ce sont des choses que l'on
adopte par consensus. Comme il n'y a pas de consensus, nous n'acceptons pas que
le gouvernement perturbe l'ensemble de ce milieu par un projet de loi qu'il
s'apprête à imposer à l'Assemblée nationale par sa
majorité ministérielle. Nous allons continuer d'utiliser les
petits moyens que nous avons, M. le Président...
M. Vallières: Question de règlement, M. le
Président.
M. Charbonneau: ...pour faire ce que nous faisons
actuellement.
Le Vice-Président: Un instant! Question de
règlement...
M. Vallières: Pourriez-vous m'indiquer, M. le
Président...
Le Vice-Président: Un instant!
M. Vallières: ...le temps qu'il reste au
député de Verchères...
Le Vice-Président: Un instant! M. le whip du gouvernement,
je vous entends sur votre question de règlement.
M. Vallières: Pourriez-vous m'indiquer le temps qu'il
reste au député de Verchères?
Le Vice-Président: II lui reste exactement deux secondes.
Il complétait son intervention.
M. Charbonneau: M. le Président, je voudrais vous
remercier...
Une voix: C'est fini.
M. Charbonneau: ...et remercier le whip du gouvernement...
Des voix: C'est fini.
M. Charbonneau: ...de m'avoir écouté avec autant
d'attention.
Une voix: Asseyez-vous. C'est fini.
M. Charbonneau: Merci beaucoup et bonne nuit.
Des voix: À l'ordre, s'il vous plaît! Une voix: Coupez.
Le Vice-Président: Je vais reconnaître le prochain
intervenant, Mme la députée de Chicoutimi.
Mme Jeanne L. Blackburn
Mme Blackburn: Merci, M. le Président.
Légiférer à cinq heures du matin, cela a effectivement de
quoi surprendre et cela a surtout de quoi surprendre les derniers
arrivés, les élus d'il y a seulement deux ans. J'ai eu, à
maintes occasions, la possibilité de regarder fonctionner les travaux de
la Chambre, è l'époque où les députés
libéraux formaient l'Opposition, au moment où on
légiférait à des heures plutôt tardives. Il n'y
avait pas de mots suffisamment violents pour dénoncer
l'irresponsabilité d'un gouvernement qui obligeait la tenue de
débats à des heures indues et cela durait des minutes et des
minutes simplement pour dire: Écoutez, il est inacceptable qu'on
légifère à trois heures, quatre heures ou cinq heures du
matin. Pourtant, à l'époque, M. le Président, le
gouvernement avait un menu législatif suffisamment important pour
qu'à plusieurs occasions, le fait de siéger aussi tard se
justifie. On ne peut vraiment pas dire que le menu législatif de
l'actuel gouvernement nous oblige à siéger jusqu'à cinq
heures du matin. Les lois qu'on a eues, de façon
générale...
Une voix: Question de règlement, M. le
Président.
Le Vice-Président: Un instant! Sur une question de
règlement, M. le député de Laurier.
M. Sirros: Nous sommes à l'étape de l'adoption du
projet de loi et la pertinence devrait...
Une voix: Non, c'est la prise en considération du
rapport.
M. Sirros: La pertinence, M. le Président.
M. Jolivet: M. le Président, sur la question de
règlement.
Le Vice-Président: Sur la même question de
règlement.
M. Jolivet: Je pense que le député fait erreur.
Nous sommes à la prise en considération et non pas à
l'adoption du projet de loi.
Le Vice-Président: Très bien. D'accord. Nous sommes
à la prise en considération du rapport de la commission qui a
étudié en détail le projet de loi et nos discussions
doivent porter sur toute question relative au projet de loi 88 qui a
été discuté en commission parlementaire. Je vous
demanderais de rattacher vos propos principalement au projet de loi 88 et aux
discussions qu'il y a eu sur le sujet.
Mme Blackburn: Oui, M. le Président, et c'est ce que je
fais précisément. Le projet de loi 88 est un projet de loi majeur
et on est en train d'en disposer, je le rappelle, à cinq heures du
matin, alors que, pendant cette session, on a perdu un temps infini. À
combien de reprises a-t-on ajourné les travaux de la Chambre faute de
menu législatif? Combien de temps avons-nous perdu depuis l'ouverture de
la session parce qu'on n'avait pas de menu législatif? Et, à cinq
heures du matin, on est en train de disposer d'un projet de loi important. M.
le Président, j'ai eu l'occasion d'intervenir sur le projet de loi 88
parce qu'on estimait ensemble que c'était un projet de loi important. Je
suis intervenue à au moins deux reprises au cours du débat parce
que ce projet de loi était vraiment mal foutu et ce n'est pas la
première fois que cela arrive avec ce gouvernement. On a vu le ministre
de l'Éducation réécrire complètement un projet de
loi. Une réécriture complète! J'ai eu l'occasion de
travailler à un projet de loi de deux articles présenté
par le ministre de l'Éducation...
M. Jolivet: M. le Président, une question de
règlement.
Le Vice-Président: Sur une question de règlement,
un instant!
M. Jolivet: Oui.
Le Vice-Président: Je vais vous donner la parole,
allez-y!
M. Jolivet: Oui, M. le Président. Mon collègue, le
député de Verchères, après avoir fait son travail
ici en Chambre, s'en allait à son bureau et le député de
Saguenay... M. le Président.
Le Vice-Président: Un instant! Une voix: ...
Question de privilège du député
de Laviolette
Le Vice-Président: Tout député, pour avoir
la parole, doit l'obtenir de la présidence. Je vous ai donné la
parole. Simplement, je veux vous dire ceci, en ce qui a trait aux propos que
vous allez tenir en cette Assemblée. Vous comprenez que, comme
président d'Assemblée, je ne peux qu'être juge de ce qui se
passe dans cette Assemblée. Si vous voulez simplement mentionner des
faits qui se passent à ma connaissance dans l'Assemblée, je vais
vous entendre. Si vous voulez mentionner des faits qui se passent hors de ma
connaissance, je ne puis, d'aucune façon, en juger, cela ne se passe pas
dans le cadre de l'Assemblée, ici même, en cette Chambre. Si vos
propos se rapportent à ce qui se passe dans l'Assemblée, ici
même, dans le salon bleu, je vais vous écouter en tout temps.
D'accord? Sur la question de règlement, M. le chef de l'Opposition.
M. Chevrette: Vous êtes le gardien des droits des
parlementaires non seulement assis sur votre fauteuil, mais dans toute
l'Assemblée nationale. Vous faites office de président de
l'Assemblée nationale au moment où vous êtes là. Je
voudrais vous rappeler, M. le Président, qu'un parlementaire a tous les
droits d'exprimer à la présidence de l'Assemblée
nationale, à quelque heure du jour que ce soit - ce sont ses droits les
plus fondamentaux - ce qu'il a vu et ce qui portait atteinte aux droits des
parlementaires. Ce n'est pas en vertu du règlement, vous le savez, M. le
Président. C'est en vertu de la Loi sur l'Assemblée nationale.
J'ose espérer que vous allez laisser exprimer le député de
Laviolette dans le respect de tous ses droits; sinon, M. le Président,
ce n'est pas une menace que je fais à la présidence, loin de
là, mais je veux lui rappeler que si la présidence n'applique pas
la Loi sur l'Assemblée nationale dans cette enceinte on va devoir aller
le crier en un autre lieu. Cela n'a pas de bon sens, ce qui s'est
passé.
M. Jolivet: Est-ce que je peux avoir le droit de parole?
Le Vice-Président: Sur cela, oui, je vais vous donner le
droit de parole. Je vous rappellerai simplement qu'en ce qui concerne
l'Assemblée nationale, en tant que président de
l'Assemblée nationale, j'ai un règlement à appliquer, soit
les règles de procédure de l'Assemblée nationale. Nous
sommes actuellement dans l'Assemblée. Je dois régler... Un
instant! Est-ce que je peux m'exprimer, s'il vous plaît? Je dois juger de
ce qui se passe à l'Assemblée nationale selon la teneur du
règlement. Je comprends que d'autres situations peuvent se passer en
dehors d'ici, de l'Assemblée nationale, dans les couloirs du parlement
ou ailleurs. À ce moment, je vous dirai simplement qu'au sens du
règlement, dans la façon de mener les travaux en cette
Assemblée, je ne peux, d'aucune façon, en juger et en aucune
façon porter un jugement sur cela et établir quoi que ce soit. Si
vous avez, d'autre part, à soulever une question de privilège sur
les droits des parlementaires, vous le ferez de la façon dont le
règlement le prévoit. On vous dira si c'est recevable ou pas.
D'accord? Je vous cède donc la parole, M. le leader adjoint de
l'Opposition. (5 heures)
M. Jolivet: M. le Président, à deux occasions dans
ma vie de parlementaire, ici comme ministre et en commission parlementaire, il
m'est arrivé deux événements, et je n'ai point fait ce que
je suis en train de faire. Tout à l'heure, j'ai fait signe à l'un
de nos employés de venir me rejoindre ici, à l'arrière. Je
suis allé à l'arrière du fauteuil, le député
de Saguenay m'a menacé en disant: Rentre en dedans, reste en dedans...
Laissez-moi terminer. Je suis sorti pour aller voir mon employé et pour
lui demander certains renseignements dont j'avais besoin et, quand je suis
revenu ici, la porte était barrée. Il a fallu que je passe par la
porte du Parti libéral pour rentrer dans cette Assemblée. C'est
le député de Saguenay qui a barré la porte et, quand mon
collègue de Verchères a voulu sortir, il lui a dit la même
chose. Je l'ai entendu d'ici lui dire: Toi, reste en dedans. C'est exactement
ce qu'il m'a dit. Ce sont des menaces en vertu de l'article 35. Cela, je peux
le jurer.
Le Vice-Président: Un instant! Un instant! Un instant!
À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous
plaît! Un instant, s'il vous plaît! Il y a une seule façon
dont les travaux peuvent se dérouler. Si, en cette Assemblée,
toute personne peut intervenir quand elle le veut, sans avoir la parole, en
parlant plus fort, je n'y peux rien, je n'y peux absolument rien. Je vais
seulement lui demander purement et simplement d'attendre que je lui donne la
parole, c'est ce que je fais pour chacun des parlementaires, dans un premier
temps.
Dans un deuxième temps, vous me rapportez des propos - vous venez
de les donner vous-mêmes - tenus à l'extérieur de
l'Assemblée. La porte a beau être barrée, M. le
député de Laviolette, leader adjoint de l'Opposition,
derrière l'Assemblée, si on m'en fait part et que j'en ai
connaissance, le sergent d'armes verra à prendre les dispositions
nécessaires. Mais la place du sergent d'armes est ici, à
l'Assemblée, et il est à son siège. Il ne peut pas juger
de l'ensemble des portes. On n'a pas un gardien à chacune des portes. Je
demande simplement la collaboration de l'ensemble des députés et
je
souhaite l'avoir, effectivement. Sur la question de
règlement.
M. Chevrette: M. le Président, je voudrais très
calmement vous rappeler deux choses: On est rendu qu'on entre au parlement et
qu'on s'enfarge dans les petits hommes verts et dans les petits hommes bleus,
qu'on est fouillé pratiquement pour entrer à l'Assemblée
nationale, qu'on n'est même pas capable de faire entrer un visiteur bien
à jeun à son bureau. Est-ce que c'est clair? Je vais peser chaque
mot que je vais dire, M. le Président. Il est tout à fait
aberrant qu'un parlementaire, dans l'exercice même de son devoir de
député, ne puisse avoir, en toute sécurité, sans
menaces, accès au salon bleu de l'Assemblée nationale.
M. le Président, je m'excuse, mais avec toute la
déférence que je peux avoir envers la présidence de
l'Assemblée nationale, que ce soit méconnu à vos yeux ou
à vos oreilles, c'est tout à fait normal; vous ne pouvez pas
avoir des yeux tout le tour de la tête, j'en conviens. Une chose est
certaine, par exemple: si vous jugez que cela constitue le privilège
d'un député de se lever à l'Assemblée nationale et
de s'exprimer clairement à l'Assemblée nationale, de vous, M. le
Président, qui êtes le gardien des droits de chacun des
députés en cette Chambre, non seulement en vertu de la
réglementation, mais en vertu de la législation de
l'Assemblée nationale, tel fait mérite instantanément non
pas une mise en garde au député qui se lève pour soulever
une question de règlement, mais exige de votre part de facto la prise de
parole du député. Vous vous levez à maintes reprises de
votre siège pour dire: M. le député, vous devez prendre la
parole d'un député, vous devez prendre la parole d'un ministre.
À plus forte raison, a fortiori, M. le Président, vous devez
prendre la parole du député qui se lève pour soulever une
question de règlement en vertu de ses droits et privilèges, et
non pas faire une mise en garde à un individu qui vient de subir une
menace. Non, M. le Président: Nous n'accepterons pas, comme formation
politique, d'aucune façon et en aucun temps, qu'un des nôtres,
qu'un de nos députés soit menacé dans l'exercice
même de ses fonctions et dans ses allées et venues du salon bleu
à son bureau. Jamais nous ne saurons tolérer une telle
situation!
Vous, M. le Président, devez tenir pour acquis qu'un
député qui se lève pour poser une question de
règlement, une question de privilège est dans ses droits les plus
fondamentaux. Votre rôle premier comme président de
l'Assemblée nationale, c'est de vous lever, de suspendre les travaux,
s'il le faut, de vérifier la véracité des dires du
député et d'agir en conséquence vis-à-vis du
fautif. C'est cela que non seulement la réglementation de
l'Assemblée nationale vous oblige à faire, mais aussi la Loi sur
l'Assemblée nationale. Sinon, M. le Président, je me demande bien
à quoi servirait le rôle fondamental de gardien des droits des
députés. Je me demande bien à quoi servirait même la
Loi sur l'Assemblée nationale, qui serait bafouée à
l'intérieur même du salon bleu, le lieu supposément
sacro-saint de la Législature et des parlementaires qui la composent. M.
le Président, je m'excuse, mais je demanderais, pour le moment, cinq
minutes de suspension, parce que je dois parler au leader du gouvernement.
Le Vice-Président: Auparavant... Une voix: À quel
propos, M. le...
Le Vice-Président: Juste une seconde. Mon problème,
c'est que vous me demandez la parole et que le leader adjoint du gouvernement
m'a aussi demandé la parole.
M. Jolivet: Une question de privilège.
Le Vice-Président: Sur une question de privilège,
d'accord. Question de privilège.
M. Jolivet: Oui, M. le Président. Je vais essayer
d'être calme, parce que cela m'a trop mis en fureur. Article 66: "Toute
violation des droits ou privilèges de l'Assemblée ou de l'un de
ses membres peut être signalée à l'Assemblée".
Tout à l'heure, tout bonnement, dans les fonctions que j'ai de
leader adjoint, pour m'informer auprès d'un des employés de la
"whipperie" pour connaître les choses qui doivent se situer dans le
temps, j'ai voulu sortir à l'extérieur. Le député
de Saguenay m'a dit de façon violente: Toi! Reste en dedans. Il y a des
gens en arrière qui pourraient vous le certifier, M. le
Président. Je suis sorti à l'extérieur, j'ai parlé
avec notre employé. Quand j'ai voulu revenir dans cette
Assemblée, la porte à l'arrière de votre fauteuil
était barrée. J'aurais eu deux choix: prendre la porte, cette
porte, en espérant qu'elle était débarrée, ou la
porte du Parti libéral qui était débarrée. Si elle
n'eût pas été débarrée, M. le
Président, je serais descendu et je serais revenu par une de ces portes
en arrière et j'aurais fait valoir mon point de vue.
Je vous le dis simplement, M. le Président. J'ai occupé
votre siège et je sais aussi que personne ne peut, en vertu de l'article
de notre règlement, faire, par des gestes ou des paroles, violence
à un des membres de cette Assemblée. C'est tout cela que je veux
dire.
Je vous dis qu'en plus - je l'ai entendu d'ici et des gens pourront vous
le dire - mon collègue, le député de Verchères,
s'est fait dire la même chose: Toi, reste en dedans. Je pense, M. le
Président, que c'est à vous de
me demander de rester en dedans, si je veux rester en dedans, ou
à moi de partir, si je le désire. Si mon confrère, le
député de Verchères, n'a point entendu, je peux vous dire
que des gens ici et moi-même l'avons entendu d'ici. C'est là que
j'ai sursauté. C'était la deuxième fois qu'un membre du
Parti québécois était, de façon violente,
interrompu par le député de Saguenay.
Le Vice-Président: Très bien. Avant de vous
reconnaître, je dois simplement, reconnaître ici que vous avez
soulevé, suivant la procédure que notre règlement
prévoit, une question de privilège, de violation de droit ou de
privilège d'un député, en vertu de notre règlement
et de la façon appropriée. Vous pouvez soulever ce que vous
m'avez dit. En fait, un des privilèges qu'on reconnaît dans
l'article 55 de la Loi sur l'Assemblée, c'est que: "Nul ne peut porter
atteinte aux droits de l'Assemblée. Constitue notamment une atteinte aux
droits de l'Assemblée le fait de, à l'article 7: "attaquer,
gêner, rudoyer ou menacer un député dans l'exercice de ses
fonctions parlementaires ou un membre du personnel de l'Assemblée dans
l'exercice de ses fonctions parlementaires". Comme vous avez soulevé
à mon intention ce point, sous forme de question de privilège, je
l'ai reçu effectivement. Je ne vous ai nullement arrêté
dans le cadre de vos explications. En vertu du règlement, c'est la
façon appropriée de le faire.
Je vous dirai également qu'en vertu de l'article 35 du
règlement, paragraphe 6° "le député qui a la parole -
vous avez la parole à l'Assemblée ici; au paragaphe 9°, on
parle de ménager - ne peut imputer des motifs indignes à un
député ou refuser d'accepter sa parole". En d'autres termes, cela
veut dire qu'on doit toujours présumer, par cet article, que le
député qui parle dit effectivement des faits véridiques et
on doit prendre sa parole pour acquise, ce que je fais quant aux propos que
vous tenez. Je ne suis nullement juge.
Ce que j'ai voulu dire tantôt, c'est que, si vous soulevez une
question de règlement pour m'aviser d'une situation à
l'extérieur de l'Assemblée quand je n'y suis pas, il est
nullement possible pour moi d'être juge là-dessus et rendre une
décision à cet égard. Je comprends que la
présidence doit faire en sorte de protéger le droit des
parlementaires à l'intérieur du parlement. On doit toujours,
d'une certaine façon, soulever la question, non pas par une question de
règlement, mais par une question de privilège, comme vous l'avez
fait.
De mon poste, je vous avouerai que je ne suis pas le sergent d'armes, je
ne suis pas, non plus, les gardiens de la sécurité du parlement.
Si vous me rapportez une chose, je pourrai vous laisser vous exprimer sur une
question de privilège, mais je ne peux être juge de cette
situation. La seule façon, sur des faits qui sont passés, de
rendre quelqu'un juge de ces faits, de ce qui s'est passé, c'est
simplement, comme on l'a déjà vu, à la commission de
l'Assemblée nationale qui, elle, devra se prononcer suivant notre
règlement.
D'accord, M. le leader adjoint du gouvernement. (5 h 10)
M. Johnson: M. le Président, tout en sachant qu'on ne
discute pas d'une question de privilège, je m'en tiendrai à une
question de règlement. Ce qui a été soulevé par le
chef de l'Opposition et le leader adjoint se rapporte, évidemment,
à l'article 2, huitième paragraphe, qui fait état de vos
pouvoirs et de vos obligations, je dirais, quant au maintien des droits des
membres de cette Assemblée. Il faut mettre les choses en perspective,
quand même. Le député de Laviolette et le leader adjoint a
fait quelques allégations qui toucheraient la façon dont ses
droits, comme membre de l'Assemblée nationale, auraient
été mis en péril, disons.
On doit constater, M. le Président, que, de toute façon,
les droits, pouvoirs, privilèges des membres de l'Assemblée
nationale se résument à l'exercice libre de nos fonctions.
L'exercice libre de nos fonctions, à l'égard des faits
allégués par le député de Laviolette, aurait trait
à l'accès que nous devons avoir, en tout temps, de façon
libre à ces lieux. Le député de Laviolette a
indiqué que, pour des raisons qu'on pourrait appeler mécaniques,
il n'a pu emprunter la porte, qu'il emprunte habituellement et a pu emprunter
la porte de l'antichambre ministérielle. Les allégations quant
à la façon dont les problèmes mécaniques se
seraient produits se laissent attendre à ce moment-ci, et bien mal
avisé serait celui qui pourrait prétendre savoir
précisément comment cela s'est produit. Quant aux
allégations de menaces qui auraient été
proférées à l'endroit du député, il
m'apparaît, encore une fois, qu'il faut les situer dans le contexte qu'on
connaît, qui appelle deux explications.
La première, quant à l'événement que nous
avons vécu tout à l'heure, sur un appel au quorum. On aurait
souligné, du côté de l'Opposition, l'absence de quorum. Je
dois souligner, pour que les faits soient complets, M. le Président -
vous en avez été témoin, c'est dans cette Chambre que cela
s'est produit, alors que les cloches sonnaient pour appeler les
députés - qu'au fur et à mesure - je ne conteste pas que
c'est le rôle du gouvernement d'assurer le quorum - que des membres de la
majorité ministérielle pénétraient, afin
d'atteindre le chiffre magique de 21, chaque fois que ce chiffre était
atteint, des membres de l'Opposition quittaient l'Assemblée. Ce sont des
choses
qui sont vérifiables et véridiques.
Dans ce contexte, qu'un député ait pu, à l'occasion
d'une sortie d'un député, à quelque moment que ce soit,
s'adresser à la deuxième personne du singulier - deuxième
point - à un collègue, ce qu'on fait habituellement...
Le Vice-Président: M. le leader adjoint du gouvernement,
je ne voudrais pas vous laisser continuer à argumenter sur la situation.
Je pense que c'est bien clair. Au sens du règlement, un
député qui considère que l'un de ses privilèges a
été violé ou qu'on a porté atteinte à l'un
de ses privilèges peut, proprio motu, se lever, le signaler à
l'Assemblée, et je dois prendre sa parole, purement et simplement. Et,
à ce moment-là, il a manifesté que l'un de ses
privilèges avait été bafoué. C'est cela. Donc,
à ce moment-là, la question est faite, point à la ligne.
C'est tout. On ne peut pas argumenter sur cette question, à moins qu'on
arrive avec des procédures autres, et, à ce moment-là,
comme je vous ai dit, ce n'est même pas la présidence qui aura
à en juger, mais plutôt la commission de l'Assemblée
nationale. D'accord? Bon, à ce moment-ci, cela vide la question, je
pense.
M. Chevrette: M. le Président, s'il vous plaîtl
Le Vice-Président: Oui, M. le chef de l'Opposition.
M. Chevrette: Je voudrais bien souligner, M. le Président,
que l'un des points fondamentaux, c'est l'entrave au travail du
député, qui doit être soulignée dans cette question
de privilège. Il y a deux façons d'entraver le travail d'un
député. Premièrement, en l'intimidant.
Deuxièmement, en lui barrant l'accès possible. Et cela, M. le
Président, dans un cas comme dans l'autre, je comprends que vous ne
pouvez pas le voir. Je comprends qu'assis à votre fauteuil vous ne
pouvez pas être à la fois dans le passage et à
l'intérieur de la Chambre. Mais, ce que je veux souligner, M. le
Président, c'est que votre devoir fondamental comme président de
l'Assemblée nationale, c'est d'être le gardien des droits, autant
en dedans qu'en dehors de la Chambre, quand vous êtes dans l'enceinte du
parlement. C'est la présidence de l'Assemblée nationale qui est
le grand roi et maître, et non pas le sergent d'armes, avec tout le
respect que j'ai pour la présidence. Le sergent d'armes est sous les
ordres de la présidence de l'Assemblée nationale. Et, dès
qu'un fait est porté à l'attention de la présidence, le
président peut déléguer son autorité, à des
fins d'observance des règlements, au sergent d'armes ou à un
cadre quelconque.
Mais, M. le Président, je vous souligne qu'il y a deux faits
concrets dans la question de privilège de mon collègue de
Laviolette. Premièrement, intimidation, et croyez-le ou non, j'en ai
été témoin moi-même, j'étais en haut sans que
le député de Saguenay ne me voie et j'ai tout vu faire,
j'étais dans les galeries...
Le Vice-Président: Je m'excuse, je vais vous interrompre.
Un instant, s'il vous plaît! Simplement ici, je voudrais vous interrompre
de la même façon que j'ai interrompu le leader adjoint du
gouvernement. De la même façon qu'il ne peut pas plaider sur
quelque chose qu'il n'a pas vu... Un instant. Un instant. Je vous dis
simplement qu'il ne peut pas plaider sur quelque chose que lui-même n'a
pas vu, de même qu'il ne... Oui, je ne vous dis pas que vous ne l'avez
pas vu, ce n'est pas ce que je dis. Ce que je dis, c'est que j'ai interrompu le
leader adjoint du gouvernement, qui parlait de choses qu'il n'avait pas vues
lui-même.
Quant à votre cas, vous pouvez alléguer certaines choses
que, vous-même, vous pouvez avoir vues, je suis complètement
d'accord avec vous. Vous pouvez soulever une question de privilège, mais
la personne - ce que je veux vous dire - qui peut soulever une question de
privilège dans le cas présent - cela a été fait -
c'est le député qui a vu son propre privilège
menacé, d'une certaine façon, son propre privilège
"transcendé", et c'est le député de Laviolette qui l'a
fait.
Le député de Laviolette a mentionné que son
privilège a été brimé de deux façons, soit
par des menaces, soit aussi par le fait qu'on l'empêchait de rentrer
à l'Assemblée. C'est bien clair, les faits qu'il a
énoncés au sens de l'Assemblée, ici, sont des faits tenus
pour véridiques. On prend la parole d'un député telle
qu'il l'a fait. Je ne peux faire autrement que cela et je ne pourrai pas
permettre à chaque député, même s'il a
été témoin de l'incident, de venir en témoigner
dans l'Assemblée. Le privilège est soulevé par le
député de Laviolette. Il a fait état de son
privilège et je l'ai reconnu. Je lui ai laissé mentionner les
faits en ce qui concerne le privilège qu'il soulevait comme
député de l'Assemblée nationale. C'est purement et
simplement cette situation. Une question de règlement.
M. Chevrette: Oui, M. le Président. Est-ce que vous pouvez
me dire, M. le Président, si, dans les règlements, un
député, de quelque circonscription électorale qu'il soit,
peut se lever en cette Chambre quand il constate la violation d'un droit d'un
membre de l'Assemblée, même si lui n'est pas impliqué?
Est-ce qu'un député le peut, en vertu des règlements? Je
veux bien que vous interprétiez le règlement de la manière
que vous le voudrez, M. le Président, mais je
pourrais, même en l'absence du député ici, me lever
et poser une question de règlement. Là, vous êtes en train
de me dire que je n'ai pas le droit de parler sur la question de
privilège ou sur la question de règlement. Je me suis levé
et j'ai identifié ma question comme en étant une de
règlement. Avec tout le respect que je dois à la
présidence, M. le Président, je pourrais me lever sur une
question de règlement... Parce que j'ai vu des choses qui étaient
en flagrante violation de notre règlement, sans être
impliqué, je pourrais me lever et exiger que la présidence fasse
observer les règlements de l'Assemblée nationale et les
privilèges des parlementaires, même ceux qui sont absents.
Le Vice-Président: Sur cela, vous avez entièrement
raison, ce n'est pas la question que je veux vous rapporter uniquement. Un
député peut soulever une question de règlement, même
une question de fait personnel, une question de privilège pour un de ses
collègues, c'est prévu aux règlements, je suis d'accord
avec vous. Ce que je veux vous mentionner, c'est que notre article 68 nous dit:
"Le député qui signale la violation d'un droit ou d'un
privilège doit se limiter à de brèves explications, qui ne
font l'objet d'aucun débat." Tantôt, je ne permettais pas au
leader adjoint du gouvernement d'argumenter et de faire un débat sur les
propos soulevés par le député de Laviolette ou de poser
des questions relativement à la situation ou de tenter de
décortiquer le fil des événements; de la même
façon un autre député, même s'il a été
témoin des incidents, ne pourrait non plus venir reprendre ces
événements-là et en faire un débat dans
l'Assemblée, puisqu'on dit clairement: "Le député qui
signale la violation d'un droit ou d'un privilège doit se limiter
à de brèves explications, qui ne font l'objet d'aucun
débat."
C'est le point que je voulais vous mentionner, lors de votre
intervention. De la même façon que je ne peux laisser le
député ministériel, dans le cas présent, faire un
débat, je ne peux non plus faire en sorte que chacun des
députés s'exprime sur un privilège qui a été
soulevé par un collègue. La situation a été
décrite par le député suivant le règlement et il
n'y a pas de débat qui s'ensuit sur cela. C'est le règlement qui
le prévoit.
Donc, nous allons poursuivre les travaux et, au moment de l'interruption
sur cette question, la parole était à Mme la... Oui.
M. Chevrette: M. le Président, j'aimerais demander une
suspension des travaux de cinq minutes. Vous ne voulez pas? Donc, M. le
Président, à défaut, par le leader du gouvernement...
Le Vice-Président: Juste un instant. Je voudrais
simplement éviter une chose... M. Garon: ...
Le Vice-Président: À l'ordre, s'il vous
plaît! Je veux simplement éviter une chose. Vous avez une question
de règlement, vous me dites que vous voulez demander une suspension des
débats. Je peux m'enquérir du fait, mais je demanderais que vous
ne discutiez pas d'un côté à l'autre avec le leader adjoint
du gouvernement, là-dessus. Votre question de règlement, je vous
écoute sur la suspension du débat que vous voulez demander.
M. Chevrette: M. le Président, j'ai demandé une
suspension brève de cinq minutes. Je ne suis pas intéressé
à ce que des événements du genre se reproduisent. Je
voulais demander au leader du gouvernement...
Le Vice-Président: Vous avez la parole,
brièvement.
M. Chevrette: Écoutez bien, si vous ne voulez rien savoir,
continuez, mais on ne fera pas l'opération Renne au nez rouge, ici.
Le Vice-Président: Un instant, s'il vous plaît!
M. Garon: C'est la journée nationale... Une voix: Oui, en
plus.
M. Garon: ...qui va commencer au parlement.
Le Vice-Président: Un instant, s'il vous plattl Proprio
motu, comme président de l'Assemblée, en vertu de l'article 44,
je vais simplement suspendre la séance quelques instants, en demandant
expressément une rencontre avec le chef de l'Opposition et le leader
adjoint du gouvernement.
(Suspension de la séance à 5 h 22)
(Reprise à 5 h 29)
Le Vice-Président: À l'ordre s'il vous plaît!
Alors, nous allons poursuivre nos travaux. Nous en sommes toujours à la
prise en considération du rapport de la commission de
l'aménagement et des équipements qui a procédé
à l'étude détaillée du projet de loi 88 et la
parole était à la députée de Chicoutimi. Mme la
députée, il vous reste cinq minutes pour votre intervention.
Reprise du débat
Mme Jeanne L. Blackburn (suite)
Mme Blackburn: Merci, M. le Président.
Au moment où j'ai été interrompue par les
événements que vous connaissez, j'étais en train
d'exprimer à la fois ma déception et mon étonnement
à l'endroit de ce gouvernement qui, je le rappelle, après deux
ans d'expérience, légifère peu et mal. Aucune des lois
qu'on a vues passer ici n'a pu être adoptée sans modifications et
même les lois les plus simples avec deux articles. Le projet de loi 88
qui a été présenté ici en Chambre et examiné
en commission parlementaire, pour lequel on est en train de prendre en
considération le rapport, contient une cinquantaine d'articles. On a
dû y apporter quelque trente amendements.
Une trentaine d'amendements sur un projet qui contient une cinquantaine
d'articles, et un certain nombre d'articles étant de concordance, on n'a
donc pas de modification à y faire, cela veut dire que les articles qui
avaient un peu d'importance ont tous été modifiés. Est-ce
que c'est une façon sérieuse de légiférer? Est-ce
que c'est parce que le ministre des Affaires municipales ne connaît pas
son dossier? Est-ce qu'il a fait les consultations suffisantes? Est-ce qu'il
est bien encadré? Est-ce qu'il est complètement en dehors de la
situation, décroché du réel? On ne sait pas trop pourquoi,
sauf qu'on sait qu'actuellement, le gouvernement, dans la majorité de
ses lois, ne consulte pas, prépare mal ses dossiers et
légifère mal. C'est grâce à la collaboration, je
dirais à l'entêtement, à la connaissance d'ailleurs qu'a du
dossier le député de Jonquière qu'on a pu bonifier le
projet de loi 88.
Cependant, le projet de loi 88 contient une disposition qui pourrait,
tout à l'heure, à l'usage, à l'expérience, rendre
l'administration ou l'application de ce projet de loi difficile pour ne pas
dire laborieuse ou périlleuse, dans certains cas. C'est grâce
à la détermination du député de Jonquière
que, je le rappelle, on a modifié et atténué la
portée du comité de concertation agricole. Non pas parce qu'on
estime qu'il est pas important que les agriculteurs aient leur mot à
dire dans tout ce qui s'appelle le zonage.
Cependant, quant à l'ouverture faite à l'agriculture, vous
pourriez, à un autre moment, répondre à une demande aussi
légitime qui viendrait des environne-mentalistes, qui viendrait de la
Culture, qui pourrait venir de l'Éducation, qui pourrait venir des
Affaires sociales, qui pourrait venir de toute autre question reliée
à la gestion des affaires municipales ou des MRC.
M. le Président, le projet de loi 88, malgré les nombreux
amendements, malgré les améliorations considérables qui
ont été apportées, est un projet de loi contre lequel
l'Opposition devra voter. On ne peut accepter de laisser adopter un projet de
loi qui risque de semer la discorde au sein des MRC. L'Opposition du Parti
québécois a fait preuve beaucoup du sens des
responsabilités.
Je m'explique. Légiférer à 5 h 30 du matin,
insister sur la nécessité de revoir un projet de loi ou de s'y
opposer, sur le fond et non pas sur la forme, c'est avoir le sens des
responsabilités. Au moment où le Parti libéral formait
l'Opposition, on observait la chose suivante: Les députés de
l'Opposition, le porte-parole de l'Opposition dans ce dossier faisait une
opposition de forme, jamais de fond. Sa règle était la suivante:
Laissons passer des lois avec les plus gros trous possible, de manière
à mettre le gouvernement en difficulté. Ils n'avaient aucun
respect pour la population et cela les laissait complètement froids
d'adopter des projets qui avaient, à l'occasion, on doit le
reconnaître, des défauts qui pouvaient être
améliorés. Mais l'Opposition d'alors ne travaillait jamais
à améliorer les projets de loi, elle les laissait passer avec des
trous importants. Ce que nous faisons, M. le Président, c'est
précisément essayer d'améliorer la législation, ce
qui est notre responsabilité. C'est pourquoi nous voterons contre le
projet de loi 88. Je vous remercie.
Le Vice-Président: Je vais maintenant céder la
parole à Mme la députée de Marie-Victorin.
Mme Cécile Vermette
Mme Vermette: Oui, M. le Président. Il est malheureux
qu'à cette heure aussi tardive, nous ayons affaire à autant de
cabotinage de la part de ce gouvernement, un gouvernement qui a de la
difficulté à prendre à ses responsabilités, et
encore plus, qui a de la difficulté à reconnaître le droit
des parlementaires. Lorsque nous voulons faire reconnaître nos droits,
nous devons nous présenter ici en cette Chambre à des heures
aussi tardives, alors que, pendant une semaine, certains soirs de la semaine,
on a complètement fermé la Chambre à cause de manque de
menu législatif. Nous nous retrouvons en pleine nuit en train
d'argumenter parce que le ministre du Travail, par entêtement, ayant
décidé qu'il voulait adopter sa loi à tout prix, est
obligé de mettre en application des procédures parlementaires
révolues. C'est pour cette raison que nous sommes ici, en cette Chambre,
en cette heure aussi tardive, et que nous de l'Opposition devons, à tour
de rôle, prendre nos responsabilités pour faire en sorte que le
projet de loi du ministre du Travail ne puisse faire l'objet d'une lecture en
cette Chambre, parce qu'il n'y a pas de consensus entre les parties
impliquées dans ce projet de loi.
Le projet de loi 88 sur lequel nous devons parler qui modifie la Loi sur
l'aménagement et l'urbanisme est un autre projet de loi, où,
encore une fois, il a fallu que l'Opposition démontre avec
acharnement,
et grâce au député de Jonquière, qui est
probablement plus connaisseur dans le domaine municipal que le ministre des
Affaires municipales... Il a fallu une étude de cette loi et les
amendements qui ont été apportés par notre critique en
matière d'affaires municipales pour faire en sorte que ce projet de loi
soit modifié à 75 %. Ce n'est pas la première fois que
nous avons comme tâche de modifier des projets de loi. Je peux vous
garantir que la majorité des projets de loi présentés en
cette Chambre ont fait l'objet - pour une bonne partie - de modifications
substantielles, qui ont changé, non seulement la forme, mais le fond et
l'application des projets de loi.
Nous prenons au sérieux les demandes des groupes
impliqués. Nous voulons défendre, de la façon la plus
juste possible, les intérêts des différents groupes qui
sont concernés par les projets de loi. Nous croyons que c'est le
rôle de l'Opposition de le faire de la façon la plus respectable
des intérêts de ces gens concernés par les projets de loi.
On a passé des heures en commission parlementaire pour étudier le
projet de loi 88 et y apporter les modifications nécessaires et,
surtout, pour faire en sorte que, dans le milieu municipal, qui est un milieu
qui voit accroître ses responsabilités, on maintienne l'harmonie
entre les différents intervenants.
Vivre de consensus n'est pas toujours facile à l'intérieur
des municipalités et encore moins à l'intérieur des MRC.
Souvent il y existe des gens aux intérêts divergents. Il faut
essayer de faire concorder ces intérêts pour le mieux-être
des citoyens et des contribuables d'une même municipalité. M. le
Président, c'est un projet de loi qui, au lieu de favoriser
l'harmonisation entre les groupes, au lieu de favoriser la concertation, va
favoriser le tiraillement entre les parties, entre l'UPA et les MRC. Bien
sûr, nous sommes d'accord que les représentants de l'UPA puissent
se faire entendre en ce qui concerne le zonage agricole. Bien sûr qu'il
est important qu'ils fassent respecter leurs droits. (5 h 40)
Déjà, beaucoup de mécanismes sont en place,
beaucoup de comités sont déjà en place. Je pense qu'il
était inutile d'ajouter un comité qui semble, pour le moment,
sans rôle spécifique, si ce n'est pour faire plaisir au ministre
de l'Agriculture, qui s'était prononcé trop rapidement et sans
consultation avec le ministre des Affaires municipales.
C'est un autre aspect de ce gouvernement, où l'absence de
dialogue interministériel est de plus en plus visible. Nous sommes pris
avec des projets de loi qui font qu'il y a une prise d'orientation qui va
à l'encontre d'une décision d'un autre ministère. En fin
de compte, ce sont des projets de loi échevelés que nous devons
démêler et essayer, avec beaucoup de doigté, parce que
justement nous prenons en considération les parties qui sont en
présence, d'ajuster et d'équilibrer finalement, de recalibrer les
articles de loi qui font l'objet de tant d'incohérence à
l'intérieur des projets de loi.
C'est dommage qu'un gouvernement qui, après tant d'années
à l'Opposition, semblait finalement se targuer de toutes les
façons de faire... si ces gens étaient au pouvoir, jamais ils ne
se permettraient de légiférer d'une façon aussi
inadéquate. Actuellement, il faut croire que ce gouvernement aurait
dû rester davantage dans l'Opposition parce qu'il n'a pas compris encore
grand-chose. Ce gouvernement a besoin d'apprendre encore longtemps parce que,
justement, il y a certaines personnes à qui il faut
répéter longtemps avant qu'elles finissent par comprendre. Il me
semble que c'est le cas actuellement de ce gouvernement. Il faut toujours
répéter, répéter, répéter afin qu'ils
arrivent à faire un petit peu des projets de loi qui commencent à
avoir un peu d'allure et qui peuvent se tenir et qui sont acceptables pour
l'ensemble de la population québécoise.
À mon avis, nous avons ici des critiques, surtout dans le domaine
municipal, qui s'y connaissent. Notre critique prend réellement à
coeur les intérêts du monde municipal, parce que lui-même a
vécu une bonne partie de son expérience politique dans le domaine
des municipalités. Je crois qu'il fait d'une façon plus
particulière, en tout cas, l'étude des projets de loi. C'est
parce qu'il connaît bien le monde des municipalités qu'il est
capable d'apporter un éclairage aussi important pour l'ensemble de
l'Assemblée nationale.
Je pense que le ministre actuel des Affaires municipales aurait
intérêt à consulter davantage notre critique parce qu'il
ferait vraiment de meilleurs projets de loi que le ministre lui-même est
capable d'en faire. La preuve, nous l'avons vu circuler à maintes
reprises sur le deuxième étage pour vérifier ce qu'on
pourrait apporter comme modifications. Je pense qu'il aurait été
plus souhaitable, au lieu de se promener comme cela sur le deuxième
étage, de faire correctement ses devoirs et vraiment consulter les gens
avec qui il avait affaire, et faire en sorte, plutôt que d'arriver
à diviser des gens, à développer un esprit d'entraide, de
collaboration et de concertation, plutôt que de mettre sur pied des
comités bidons qui donnent des pouvoirs discrétionnaires à
des ministres. Ce n'est pas la façon de procéder. Je pense que
plus ça va, plus nous avançons avec ce gouvernement, c'est toute
la démocratie actuellement qui en prend pour son rhume.
De plus en plus, il deviendra difficile
pour les membres de l'Assemblée nationale de se faire entendre.
La preuve même, on est en train, à certains moments donnés,
de barrer les portes pour rendre de plus en plus difficile l'accès
à l'intérieur de l'Assemblée nationale. Il faut le
dénoncer parce que c'est dangereux pour l'avenir de nos
démocraties.
Je pense que nous sommes des gens élus et que nous avons droit
d'enseigne ici dans ce parlement. Nous devons nous faire entendre aussi parce
qu'il y va des intérêts de l'ensemble, de la majorité,
parce que nous représentons aussi une bonne partie de la population du
Québec et qu'elle nous a demandé de bien voir à ce que,
justement, la législation et l'administration publique soient faites
dans les règles de l'art. Je vous remercie, M. le Président.
Le Vice-Président: Je cède la parole à M. le
député de Lévis.
Des voix: Bravo!
M. Jean Garon
M. Garon: M. le Président, je remarque que le ministre de
l'Industrie et du Commerce est parti. Il n'a pas continué à
diriger les débats au nom du gouvernement. J'estime qu'il en avait honte
et qu'il a eu sa leçon. Quant au ministre de l'Environnement, il
pourrait peut-être se préoccuper de l'environnement de cette
Chambre. Cela pourrait être aussi valable que les voeux pieux qu'il
formule dans d'autres domaines.
Quant à ce projet de loi, avec le comité bidon qui va
exister en ce qui a trait aux terres agricoles, je me contenterai de lire le
communiqué que le gouvernement a émis à partir d'un papier
qui vient du cabinet du premier ministre, de son service des communications. Ce
communiqué traite d'une pseudo-entente ministérielle sur la
limitation des pratiques et usages agricoles en zone agricole.
Pour démontrer à quel point on vend du vent, de la
même façon que les conseils de famille du député de
Beauce-Sud, du ministre délégué à la Famille ou
encore des pseudopolitiques de la ministre déléguée
à la Condition féminine, des politiques à venir ou des
pseudo-politiques du ministre de l'Environnement, encore des politiques
à venir, la meilleure façon de le démontrer est de lire ce
communiqué de presse extraordinairement bidon.
Je le lis, M. le Président. C'est donc un papier du cabinet du
premier ministre. On lit: "Entente ministérielle", apparemment entre
trois ministères. On dit: "Le ministre de l'Environnement, M. Clifford
Lincoln, le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de
l'Alimentation, M. Michel Pagé, et le ministre des Affaires municipales,
M. André Bourbeau, ainsi que les autres membres du comité
ministériel permanent sur l'aménagement et le
développement régional que préside M. Marc-Yvan
Côté, ministre des Transports, responsable du Développement
régional, ont confirmé ce matin qu'une entente était
intervenue sur le rôle des municipalités régionales et
locales en zone agricole, dans le cadre de l'élaboration des
schémas d'aménagement et de l'adoption des règlements
locaux et d'urbanisme. Ainsi, les municipalités régionales et
locales qui veulent contrôler les pratiques et usages des
établissements de production animale pourront introduire dans leur
document d'aménagement des dispositions compatibles avec l'actuelle
directive du ministère de l'Environnement relatives à la
protection de l'air sans toutefois en excéder la portée et les
règles..." On ne dit pas qu'on va s'harmoniser avec des
règlements ou une loi, mais avec une directive d'un ministère.
"Cette politique porte essentiellement sur le respect des normes
établissant des distances entre divers types d'établissement et
d'affectation du sol. Une telle approche -dit le communiqué - tout en
facilitant une meilleure coexistence des diverses fonctions d'utilisation du
sol, élimine l'implication de la notion de zone tampon entre la fonction
résidentielle et la fonction agricole qu'avaient proposée
diverses municipalités. "De plus, le gouvernement s'engage
-écoutez bien l'engagement - à réviser le contenu de cette
directive et à la transformer d'ici un an en un règlement
provincial sur la protection de l'air en milieu agricole."
Vous avez bien compris, M. le Président? On dit qu'on veut que
les gens s'harmonisent avec une directive qu'on promet de changer en dedans
d'un an. Belle promesse. La directive n'est tellement pas sûre, tellement
pas bonne qu'on s'engage à réviser le contenu de la directive et
à la transformer d'ici un an en un règlement provincial sur la
protection de l'air en milieu agricole. Imaginez-vous! "Par ailleurs, l'examen
d'une notion -écoutez bien, l'examen, on va examiner une notion - de
réciprocité à être introduite dans le
règlement provincial sera envisagé de telle sorte que les normes
de distance quant à l'éloignement des établissements
agricoles par rapport aux résidences puissent également
s'appliquer aux nouvelles résidences par rapport aux exploitations
agricoles existantes, sauf pour la ou les résidences d'exploitants
agricoles." (5 h 50)
Voyez-vous? On s'engage à examiner une notion de
réciprocité qui pourra être introduite dans le
règlement provincial qui devra être une révision d'une
directive actuelle. On est dans le fort, M. le Président! On est dans
quelque chose, là hein? On est dans le vent total. On dit
maintenant: "Quant à la protection contre la pollution des eaux
par les établissements de production animale, les ministres
concernés ont convenu de s'en tenir au règlement provincial
actuel, tout en le révisant pour l'adapter aux besoins nouveaux." La
seule chose de sûre, on dit: On va respecter le règlement qui a
été fait dans le temps du Parti québécois sur les
établissements de production animale, mais cela ne veut pas dire qu'on
l'appliquera tel quel. On dit: Lui aussi, on va le réviser plus tard.
C'est quelque chose. On est vraiment dans la grande politique, dans les grandes
orientations, dans les grandes définitions des affectations
territoriales. On dit: "Les municipalités continueraient cependant de
s'assurer d'une protection minimale des rives des cours d'eau et des lacs,
conformément au cadre annoncé par le gouvernement." Le cadre
annoncé par le gouvernement, je le cherche encore. Je n'ai pas le
portrait et je n'ai pas le cadre non plus.
On dit de plus: "II a été convenu d'accepter, dans le
cadre de la protection contre la pollution de l'air, le concept
d'immunité, visant à protéger les droits des producteurs
agricoles qui ont recours à des pratiques normales et conformes au
règlement provincial ou aux règlements municipaux. Le
ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, en
collaboration avec le ministère de l'Environnement et le
ministère des Affaires municipales, a été mandaté -
imaginez-vous! pour examiner les implications et applications de ce concept."
Voyez-vous, le ministère de l'Agriculture, trois ministères ont
été mandatés pour examiner les implications et
applications d'un concept à définir éventuellement. On est
dans le fort. On est un peu comme dans le souterrain en face de Grondines. On
dit: Quelque chose qui pourrait arriver plus tard. On va analyser. On a
mandaté le ministère de l'Agriculture, en collaboration avec le
ministère de l'Environnement et le ministère des Affaires
municipales, pour examiner les implications et applications d'un concept qu'on
va examiner plus tard qui pourrait être introduit dans un
règlement qui viendra à la suite de la révision d'une
directive administrative. Je vous dis qu'on est dans le solide, on est dans le
roc de Gibraltar.
Le ministre de l'Environnement qui nous a habitué à du
vent a parti les pompes à pleine machine. Le vent est partout. Il dit:
"Enfin, les municipalités régionales de comté pourront
procéder à des interventions d'aménagement portant sur la
protection de sites ou territoires situés en zone agricole et
présentant un intérêt particulier, notamment aux niveaux
écologique, historique, récréatif ou autres." Au cas
où on en aurait oublié, on dit: Dans les zones agricoles, on
mettra des endroits écologiques, historiques et récréatifs
ou autres, au cas où on en aurait oublié. "Les ministres ont
également retenu le principe de l'établissement d'un
comité de concertation lorsqu'une municipalité entend adopter de
telles dispositions." En plus de dire que ce sera du vent, on va établir
un comité pour discuter du vent qu'on veut établir. "Il
appartiendra aux municipalités de former ce comité selon les
modalités prévues au projet de loi 88 présenté en
première lecture le jeudi 12 novembre dernier." Je comprends que le
président des MRC, qui est intelligent, a réagi en disant qu'il
n'était pas impressionné. L'UPA, il faut dire qu'elle s'est fait
avoir un peu. Ce n'est peut-être pas pour rien qu'on a élu M.
Gaudet comme premier vice-président, pour qu'on arrête de remplir
les valises. Pourquoi? Parce que, dans ce qu'on vient d'apprendre, on est dans
le grand ridicule et on prend les agriculteurs pour des niaiseux, parce qu'il
n'y a rien là-dedans. Il y a un communiqué de presse, il n'y a
pas de règlement, il n'y a rien.
On dit ensuite en conclusion: "Avec cet ensemble de mesures, les
municipalités régionales de comté et les
municipalités locales pourront mieux exercer leurs
responsabilités d'aménagement sur tout le territoire municipal,
tout en respectant les politiques du gouvernement en matière de
protection de territoires agricoles, de protection de l'environnement et
d'aménagement du territoire." Que ces choses sont bien dites, M. le
Président! Il dit: "Enfin, les mesures annoncées pour permettre
de concrétiser dans une approche intégrée -imaginez-vous!
- les principes qui ont présidé à l'élaboration de
la loi 90 sur la protection du territoire agricole et de la loi 125 sur
l'aménagement et l'urbanisme tout en favorisant le respect de
l'environnement. "Les ministres sont persuadés - oui, ma chère -
que les municipalités du Québec de même que les producteurs
agricoles souscrivent largement à la philosophie du gouvernement sur
cette question et que leur collaboration est assurée."
Le Vice-Président: Conclusion, M. le
député.
M. Garon: Le contenu de cette entente fera d'ailleurs l'objet de
séances d'information auprès des intervenants impliqués.
Apparemment, les séances ne sont pas commencées, les
communicateurs ne sachant pas ce qu'ils doivent annoncer.
M. le Président, je n'ai pas besoin d'intervenir plus longuement.
C'est une farce, c'est une blague. La protection du territoire agricole est une
blaque pour le Parti libéral. De la même façon qu'ils ont
voté contre à toutes les étapes, actuellement on fait un
comité bidon avec une politique bidon, avec une absence de
réglementation, de normes, de mesures sur lesquelles les gens
pourront
se baser. On verra rapidement que les gens ne marcheront pas
là-dedans parce que les Québécois ne sont pas des valises
à remplir par le Parti libéral.
Le Vice-Président: Je cède donc la parole à
M. le député de Saint-Jacques.
M. André Boulerice
M. Boulerice: M. le Président, il est très
exactement 6 heures, 12 heures à Paris, donc 10 heures GMT, Greenwich
mean time, c'est le méridien de Londres, l'heure internationale que doit
sans doute comprendre mon collègue de Nelligan. Je ne sais pas s'il y a
bien des Parlements dans le monde qui fonctionnent comme celui-là, mais
je peux vous dire que... Non? Ahl Malgré tout ce qui peut se passer.
D'ailleurs, je ne m'avancerais pas, dans votre cas, à parler
d'Haïti quand on se rappelle l'attitude odieuse que vous avez eue quand on
a présenté une motion. Il ne faut pas s'avancer sur
Haïti.
Donc, il est 6 heures, M. le Président. On a
réveillé des députés, mais ils sont bien
réveillés. Je pense qu'on va les entendre de l'autre
côté. Il y en a d'autres qui sont allés se coucher, par
exemple, parce qu'on ne voit pas le ministre des Affaires municipales. Par
contre, on voit que la députée de Matane, le député
des îles n'y sont pas. Ahî La députée de Matane y
est. Bien, on ne le sait pas. Y est-elle ou non? Elle va s'asseoir, elle va
rester debout. On ne le sait pas.
Comme je vous le disais, le ministre des Affaires municipales n'y
était pas. Je vous ferai remarquer qu'après le traitement odieux
qu'il a fait subir aux élus municipaux de la capitale nationale du
Québec tantôt, en commission parlementaire, ce n'est pas
étonnant qu'il ne soit pas ici pour se montrer. Je vous avoue que ce
n'était pas tellement édifiant de voir le sort que le ministre
réservait aux représentants de la capitale nationale.
Dans ce dossier, petit "clipping" pour employer le mot de presse:
L'UMRCQ, l'Union des municipalités régionales de comté du
Québec stigmatise le comportement des ministres sectoriels. Qu'est-ce
que des ministres sectoriels? Ce sont des petits ministres qui ont leur petit
empire et qui ne veulent pas le lâcher parce qu'ils se sentent bien
à l'intérieur de cela.
Dans un vibrant plaidoyer en faveur du respect de l'autonomie des
régions, le président de l'Union des municipalités
régionales de comté, M. Nicolet, a dénoncé le
comportement centralisateur de certains ministères sectoriels,
c'est-à-dire les petits seigneurs de la guerre, les Tchang Kaï-Chek
qui agissent comme si les MRC n'existaient pas. De cette façon, M.
Nicolet a donné le ton au congrès qui a réuni plus de 8000
élus de toutes les régions du Québec. C'était
à Montréal, à la fin du mois de septembre de cette
année.
Incompréhension des demandes municipales, disait-il, refus
d'accepter le concept d'aménagement issu de la loi 125, opposition
systématique aux volontés du milieu, vision étroite - et
vision étroite, c'est la marque de commerce de la majorité des
lois qui ont été adoptées ici - des objectifs à
privilégier, autant de symptômes de ces réflexes d'une
fonction publique qui vit encore dans une autre ère, celle du
centralisme qui répond à un concept dépassé de la
société québécoise. (6 heures)
Ce n'est quand même pas un "deux de pique" qui dit cela, c'est le
président de l'Union des municipalités régionales de
comté du Québec. Je pense qu'il doit quand même avoir un
peu une idée de ce qu'il dit. "L'utilisation de critères mal
ajustés aux réalités régionales pénalise le
développement de certaines régions." On pourrait continuer.
C'était dans la revue municipale de novembre 1987. "Bourbeau - c'est le
titre; le député de Laporte a pris le nom de son comté au
pied de la lettre ce soir et il n'est pas là - entend renforcer les MRC
et offrir le droit de retrait aux municipalités." On va renforcer les
municipalités régionales de comté mais on va dire aux
municipalités: Vous pouvez ne plus être là-dedans. Je ne
sais pas où est sa logique mais j'ai bien de la difficulté
à comprendre. Le ministre disait... Le ministre des Affaires
municipales, M. André Bourbeau, proposera en novembre une loi modifiant
la loi 125 sur l'aménagement et l'urbanisme afin de permettre aux
municipalités régionales de comté de gérer des
ententes intermunicipales tout en accordant aux municipalités locales
une plus grande autonomie. Cela vise une consolidation de leur vocation. Et
là, il évoquait le droit pour les municipalités de
quitter, qu'elles ne seraient plus obligées de payer pour les services
qu'elles refuseraient de recevoir. Comment pouvons-nous parler de
municipalités régionales de comté, de concertation, quand
on part avec un principe comme celui-là? S'il y a des choses que vous ne
voulez pas, vous ne les prendrez pas et si ça ne vous intéresse
pas, vous les laisserez là. Il n'y a pas de consolidation de la vocation
des municipalités régionales de comté. Le seul petit
endroit où on leur donne quelque chose, c'est dans l'aménagement
du territoire. C'est bien beau, mais je pense qu'il faut avoir quelque chose de
plus large comme vision. Vous aviez, dans le bloc-notes que signe M. Juneau
dans Le Devoir en septembre 1987...
Une voix: ...
M. Boulerice: M. le Président, vous comprendrez
qu'à l'heure tardive où je suis
arrivé, j'aimerais bien que le parti ministériel, fort de
ses 99 membres, puisse être là pour écouter. Je constate
qu'il y a malheureusement absence de quorum. C'est indécent de faire
siéger un Parlement à 6 heures du matin sans avoir de quorum.
Le Vice-Président: Qu'on appelle les
députés, s'il vous plaît.
Très bien, M. le Sergent d'armes.
Nous avons maintenant quorum.
Vous pouvez poursuivre, M. le député de Saint-Jacques.
M. Boulerice: On constate, M. le Président, que plusieurs
reprennent le chemin de ce qu'on appelle, en langage militaire, le "snake pit".
Je ne sais pas s'il y a une barbote en arrière pour les
députés libéraux mais elle est bien
fréquentée en tout cas, on le voit, en nombre tout au moins.
Mme Bélanger: N'exagérez-pas.
M. Boulerice: Comment, n'exagérez pas, M. le
Président, m'entens-je crier de l'autre côté par la
députée de Mégantic-Compton, moi qui, jadis, l'ai prise
pour une perle! Mais enfin...
Dans La Presse du 23 septembre 1987, ce même ministre
absent - il a préféré être jugé par
contumace; d'ailleurs, il se sentait coupable au départ, c'était
inévitable -disait: Invité à répliquer à M.
Nicolet... Où est-il, le député de Nicolet, entre
parenthèses? Ça aurait peut-être pu l'intéresser,
les municipalités régionales de comté. Ça le
préoccupe, ça? Je comprends que dans Laurier il n'y a pas
beaucoup de municipalités régionales. Il n'y en a pas beaucoup,
c'est comme dans Saint-Jacques, mais nous, nous avons une préoccupation
nationale dans Saint-Jacques; tout ce qui concerne le Québec nous
concerne. On n'a pas de clôture, le sens du ghetto.
Le ministre disait vouloir être le plus rassurant possible
à l'endroit des élus municipaux en affirmant qu'il n'est pas
question pour le Québec de remettre en cause les différentes
responsabilités conférées aux instances locales, aux MRC
dans l'aménagement du territoire, ni restreindre les pouvoirs des
élus. Finalement, M. Juneau, dans La Presse, parlait des MRC sur
des béquilles. Il suggérait de remplacer le titulaire de ce
ministère par la ministre de la Santé et des Services sociaux et
de mettre les MRC en salle d'urgence parce que le ministre des Affaires
municipales était en train de les handicaper sérieusement. Des
MRC sur des béquilles!
Les 94 municipalités régionales de comté viennent
de terminer avec succès le premier mandat de leur courte histoire. C'est
quand même quelqu'un d'averti. Avec la patience et l'ordre qui
caractérisent le milieu municipal, elles ont réussi une
opération sans précédent au Québec, disait-il,
mettre au point des schémas d'aménagement opérationnels
pour l'ensemble du territoire habité. Il poursuivait - c'est
là-dessus que je vais conclure: Une telle opération n'a pas
manqué de perturber la douce quiétude des ministres et de mettre
à l'épreuve la coordination intersectorielle et
interministérielle. C'est normal de parler d'absence de coordination,
cela ne se parle pas; quand on les interroge, un par un, sur le même
sujet, ils se contredisent. On le voit à la période de questions.
Vous me faites signe, M. le Président, qu'effectivement je suis dans le
ton avec une telle déclaration.
C'est ainsi que le dernier congrès de l'Union des
municipalités régionales de comté, qui a eu lieu en fin de
semaine dernière à Montréal, a été surtout
marqué par des récriminations contre l'indécision
gouvernementale. Cette attitude est compréhensible. À quoi auront
servi ces années de travail des MRC si le gouvernement se replie, se
referme obstinément sur ses positions?
C'est sur un sujet d'une importance aussi capitale pour le Québec
qu'un Parlement qui foire depuis le début de la session intensive...
Le Vice-Président: En conclusion, M. le
député.
M. Boulerice: ...en ajournant - je conclus, à votre
demande, M. le Président -à tout bout de champ, le lundi soir, le
mardi, en suspendant en plein milieu pour quinze minutes parce qu'ils se
cherchent de l'ouvrage et de la "job", comme on dit en bon
Québécois, parce qu'ils n'ont pas de menu législatif, ils
vivent au Metrecal, nouvelle cuisine, c'est-à-dire absence de
générosité, et là, ils ont le temps, à 6 h
10 du matin, d'essayer d'en passer une petite vite, profitant que les
députés sont fatigués, mais les députés du
Parti québécois ne sont pas dans le "snake pit", comme on dit
dans le langage militaire, ils ne sont pas à la "barbote" en
arrière, ils sont debout ici et vont s'y opposer tant et aussi longtemps
qu'il y aura encore en ce Parlement un droit de parole. Vous me faites signe
que le mien achève...
Le Vice-Président: II est terminé.
M. Boulerice: ...à cause du temps...
Le Vice-Président: II est terminé.
M. Boulerice: ...et non pas de la pertinence de mes propos, je
vois dans vos yeux que vous les reconnaissez...
Le Vice-Président: Bon! M. le député de
Saint-Jacques, je vous demande instamment, depuis une minute et dix
secondes, de conclure.
M. Boulerice: Je conclus, M. le Président.
Déjà dissension de l'autre côté, l'heure tardive
fait peut-être réfléchir. L'heure tardive fait
réfléchir, c'est manifeste, et on va s'en réjouir. S'il
faut les tenir jusqu'à 10 heures pour qu'ils reviennent à la
raison...
Le Vice-Président: D'accord, M. le député de
Saint-Jacques. Votre temps est terminé. M. le leader de
l'Opposition.
M. Gendron: Oui, M. le Président. À ce moment-ci,
je voudrais, conformément à nos règlements, en vertu de
l'article 100, faire motion pour ajourner le débat. (6 h 10)
Le Vice-Président: II y a un petit problème, M. le
leader de l'Opposition, à ce stade-ci. Évidemment, en vertu du
règlement, pour faire ladite motion d'ajournement du débat, il
faudrait que vous puissiez prendre la parole dans ce débat même et
puisque vous avez déjà exercé votre droit de parole, je ne
puis vous reconnaître a nouveau un droit de parole. Cette motion est
disponible à un député qui n'est pas encore intervenu.
M. le chef de l'Opposition.
M. Chevrette: M. le Président, sur une question de
règlement.
Le Vice-Président: Vous vouliez faire la motion?
M. Chevrette: Une question de règlement,
d'information.
Le Vice-Président: Oui, allez-y.
M. Chevrette: Je voudrais savoir si, en faisant la motion
immédiatement, je conserve mon droit de parole de dix minutes.
Le Vice-Président: Effectivement. Vous utilisez votre
droit de parole pour faire la motion d'ajournement. Si la motion d'ajournement
est reçue, à ce moment-là, vu que vous n'avez pas
commencé votre temps de parole, en faisant la motion d'ajournement, vous
êtes le premier à prendre la parole si vous n'avez pas
commencé à exercer votre droit de parole. Donc, vous n'avez pas
commencé à exercer votre droit de parole, vous ne perdez pas
votre droit de parole à ce moment, à mon point de vue, si la
motion est rejetée. D'accord?
Motion d'ajournement du débat
M. Chevrette: Donc, M. le Président, en vertu de l'article
100, je propose l'ajournement du débat.
Le Vice-Président: Est-ce que cette motion est... Cette
motion n'est pas adoptée évidemment. Donc, en vertu de notre
règlement... Non, non, un instanti Je dois m'enquérir
traditionnellement sur une motion d'ajournement du débat, je m'enquiers
si la motion est agréée, sinon un débat s'ensuit au sens
de notre règlement et à l'article 101, on dit: "L'auteur de la
motion et un représentant de chaque groupe parlementaire ont chacun un
temps de parole de dix minutes. L'auteur de la motion a droit à une
réplique de cinq minutes."
Donc, M. le chef de l'Opposition, comme auteur de la motion, je vous
reconnais un droit de parole de dix minutes. Mais c'est à vous le droit
de parole.
M. Chevrette: Je ne suis pas pour m'obstiner avec vous, M. le
Président.
Le Vice-Président: Je veux simplement vous indiquer que
vous êtes l'auteur de la motion d'ajournement. M. le leader de
l'Opposition ne peut le faire.
M. Chevrette: Mais je croyais que le leader pouvait le faire en
mon nom.
Le Vice-Président: Non, pas à ce moment-ci.
M. Chevrette: Mais je vais le faire. Cela me fera 20 minutes en
ligne, M. le Président.
Le Vice-Président: Vous avez dix minutes.
M. Guy Chevrette
M. Chevrette: Dix minutes sur la motion, dix minutes sur le
rapport par la suite. Si cela change, le poids du nombre nous
éliminera.
M. le Président, si je fais la motion d'ajournement à 6 h
12, premièrement c'est en vertu de l'heure. Ce n'est pas une trouvaille
que de dire qu'à 6 h 10 au moment où il y a plusieurs
parlementaires fatigués et certains épuisés, cela se lit
sur le visage, dans la figure de plusieurs, M. le Président...
D'ailleurs, il y en a qui auraient avantage précisément à
aller se coucher.
M. le Président, après exactement dix heures
consécutives de débats en cette Chambre, je pense qu'il n'est pas
anormal qu'un député en cette Chambre puisse proposer un
ajournement du débat. Je dirais dix heures de fastidieux débats,
de difficiles débats, M. le Président, où on a eu peine
à maintenir le quorum. Dix heures où à quatre reprises
durant cette nuit on a dû faire sonner les cloches pour l'appel des
députés.
À une occasion, si ma mémoire est fidèle, vers les
4 h 15 on a dû faire sonner les cloches durant au moins 20 minutes avant
d'obtenir le quorum en cette Chambre.
Donc, M. le Président, cette motion veut purement et simplement
mettre un terme à un débat qui n'en finit plus, à un
débat qui manifestement n'a pas l'air de convaincre le parti
ministériel puisqu'il n'a pas participé à ce débat.
Depuis au moins minuit, personne n'a participé du côté
ministériel si ce n'est par des farces, par des boutades, pour
tâcher d'arrêter nos collègues de s'exprimer librement sur
plusieurs lois.
On a commencé, M. le Président, à parler de la loi
sur Kativik qui fut adoptée au bout d'à peu près une heure
de discussions, ce qui est tout à fait normal: adopter une loi, cela
prend une heure. Mais au moment même où on traite du rapport d'une
des lois les plus contestées en cette Chambre, la loi 88, qui a
été contestée par à peu près tous les
groupes sociaux, le gouvernement rigole, les représentants
gouvernementaux se promènent, les représentants du gouvernement
ne sont absolument pas intéressés à faire le débat
qui s'impose sur ces lois.
Devant leur refus systématique de participer à ce
débat, devant leur refus systématique d'enrichir de leurs propos
ce débat, on n'a pas d'autre choix que de déposer une motion
d'ajournement. Cet ajournement ne se veut pas un bâillon pour la partie
ministérielle, il se veut tout simplement un répit pour leur
permettre d'aller se reposer et de revenir un peu en forme. Â ce
moment-là, peut-être serez-vous intéressés à
discuter des problèmes que vivent les Québécois, que
vivent les structures municipales, que vivent les représentants de
l'UPA.
De plus, cette intermission que nous suggérons en vertu de
l'article 100 de nos règlements permettra aux citoyens du Québec
de nous voir oeuvrer en plein jour et de se demander ce qu'on faisait
véritablement cette nuit. On pourra leur rappeler, au début,
qu'on étudiait le projet de loi 88 et, M. le Président,
après la période de questions ce matin, on pourrait continuer le
débat sur ce projet de loi 88 qui, entre vous et moi, M. le
Président, décidait de l'avenir des MRC, décidait des
pouvoirs, à savoir comment les MRC, l'Union des municipalités
régionales de comté et les cités et villes pouvaient
ensemble avoir une relation correcte, civilisée dans l'administration
courante des MRC du Québec. C'est cela, M. le Président. Cette
intermission ne vise pas du tout à dire qu'on est fatigués de ce
côté-ci de la Chambre. On peut aller très correctement
jusqu'à 10 heures et recommencer.
Nos questions sont déjà prêtes, M. le
Président, pour demain. Donc, qu'on ne fasse pas des gorges chaudes de
l'autre côté. On est prêts. Nos questions sont même
décidées. Nos députés sont déjà
prêts à interroger la partie ministérielle et à
entendre les cassettes traditionnelles, aucune réponse, mais il y aura
au moins des questions intelligentes de notre part, M. le Président.
C'est cela qu'on vise par cette motion d'ajournement en vertu de l'article 100
de nos règlements. Je comprends que, malheureusement, on ne peut pas
l'utiliser à deux ou trois reprises. Nos règlements sont
très explicites là-dessus, M. le Président. Il ne peut y
avoir qu'une seule motion d'ajournement du débat au cours des
délibérations. Si nous avons attendu à cette heure-ci pour
la faire - nous avons été tentés de la faire à
minuit, à 2 heures et à 4 heures - si nous avons attendu
jusqu'à 6 heures, c'est pour permettre aux parlementaires d'entreprendre
la prochaine séance, à compter de 10 heures, un peu
reposés, dans un climat un peu plus serein que celui dans lequel on a
discuté il y a à peine une couple d'heures. C'est pour permettre
au ministre du Travail d'aller se reposer pour entreprendre un débat
assez ardu sur le projet de loi 30 et également un débat
passablement corsé sur le projet de loi 114.
Il faudra au gouvernement, tantôt, beaucoup de consentements de la
part de l'Opposition. Le gouvernement, pour réaliser son menu
législatif aussi maigre, a absolument quand même besoin, au moment
où l'on vous parle, des consentements de l'Opposition. On voudrait le
faire dans un climat plutôt serein et non pas dans un climat tendu, comme
on l'a vécu tantôt, dans un climat où les parlementaires ne
seront pas aigris et tendus, dans un climat relativement calme. Je comprends
qu'on dit souvent qu'après la tempête vient le beau temps. C'est
un peu ce qu'on ressent depuis quelques minutes en tout cas. Le climat est
moins tendu qu'il ne l'a été vers 4 heures ce matin. Je pense
qu'à 6 h 15, presque à 6 h 20 du matin, M. le Président,
il est temps pour les parlementaires de se reposer pendant au moins quelques
minutes avant de reprendre une journée qui sera fort chargée,
avant d'entreprendre une journée qui nous permettra - en tout cas, je le
souhaite; je l'espère - de légiférer d'une façon
correcte, d'une façon sérieuse, et de peut-être mettre un
terme - je ne sais pas si la journée suffira - à nos travaux
sessionnels avant Noël.
Cette motion, je le répète, M. le Président, n'a
qu'un but précis. Après autant d'heures de
délibérations, depuis 20 heures hier soir, M. le Président
- cela fait donc dix heures et vingt minutes d'affilée - que nous
siégeons en cette Chambre, uniquement sur le plan de l'hygiène
mentale, c'est déjà passablement trop. C'est tout à fait
anormal.
C'est tout à fait aberrant. C'est tout à fait
inconcevable, parce qu'on sait que la capacité de travail après
autant d'heures sans répit, dans un climat assez tendu... C'est tout
à fait normal, je pense, de la part de notre formation politique, que
nous proposions cette motion d'ajournement des débats, permettant ainsi
de reprendre, après la période de questions, sur cette loi
très importante qu'est le projet de loi 88. (6 h 20)
Si aujourd'hui, nous avons un projet de loi potable devant
l'Assemblée nationale, M. le Président, il faut en
féliciter l'ensemble de mes collègues qui ont travaillé
à l'élaboration et à la bonification de ce projet de loi
qui n'était pas montrable. Je me souviens encore, quand le ministre des
Affaires municipales a déposé ce projet de loi, que les
téléphones fusaient à nos bureaux. L'UMRCQ, l'UMQ, l'UPA,
tout le monde disait: On n'en veut pas de ce projet de loi. On dirait que le
ministre n'a pas assisté à la table
Québec-municipalités pour nous arriver avec ce projet-là.
Ils ont dit: A-t-il été absent? Pourtant, c'est lui qui dirigeait
les travaux. On veut lui donner la chance à ce ministre d'être
ici, d'abord, au moment où prendront fin les discussions sur le projet
de loi 88.
On voudrait lui donner l'occasion de dire au public, au moment où
la cote d'écoute est peut-être un peu plus forte, tout le travail
positif qu'a fait mon collègue de Jonquière et tout le travail
positif que l'Opposition a fait en ce qui concerne chacun des groupes: l'UMRCQ,
l'UMQ et l'UPA, et peut-être dire au ministre pour la première
fois, qu'il y aura un projet de loi qui servira notre collectivité.
Malheureusement, bien sûr, il ne pourra pas s'attribuer seul le
mérite, si on l'avait laissé aller tout seul ce pauvre de lui,
comme dirait mon grand-père, il serait donc sur le bord d'un
remaniement, il serait ailleurs, vous le savez. Il serait sur les banquettes
arrières. On voudrait lui donner la chance d'assister au moins au
dernier exposé qu'on a à faire sur ce projet de loi. Vanter les
mérites de mes collègues, vanter l'efficacité du travail,
bien sûr, qu'on a fourni au cours de ce débat, et faire en sorte
aussi que les parlementaires n'aient pas à se tenir la tête au
cours des débats à venir, qu'ils soient véritablement
réveillés, en forme pour reprendre une journée
intéressante en ce qui a trait à la législation,
peut-être que ce sera même notre dernière journée de
législation.
Le Vice-Président: Je reconnais maintenant, M. le ministre
du Travail et ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du
revenu.
M. Pierre Paradis
M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, je
constate que c'est au pied levé que le chef de l'Opposition a pris la
relève de son leader parlementaire qui a été
empêché par le règlement de faire cette motion
d'ajournement. On a senti dans le plaidoyer du chef de l'Opposition que ce
n'était pas vraiment sa motion à lui, que l'on connaît
comme un travailleur infatigable, comme quelqu'un qui ne compte pas les heures,
comme quelqu'un qui, surtout aux petites heures du matin - il l'a
mentionné - retrouve sa bonne humeur. Il vient de nous indiquer qu'il
venait de retrouver sa bonne humeur enfin. Dans ce contexte, le chef de
l'Opposition ayant retrouvé sa bonne humeur, tout le monde étant
à son poste et constatant l'importance pour cette Assemblée de
continuer et si possible de terminer nos travaux sur cet important projet de
loi 88, nous les invitons à continuer ce travail positif qui se
déroule depuis les petites heures du matin.
Des voix: Bravo! Bravo!
M. Blais: Une question de directive.
Le Vice-Président: Oui, une question de directive, M. le
député de Terrebonne.
M. Blais: M. le Président, une directive à deux
volets. Le premier volet, vu que le parti ministériel n'a pas pris son
dix minutes de réplique, est-ce qu'on peut de notre côté en
avoir l'usufruit? Une deuxième directive, dans nos règlements,
d'une façon intrinsèque, on dit que la personne qui
présente une motion comme celle-ci a dix minutes, le parti au pouvoir a
dix minutes, et nous avons cinq minutes de réplique et toujours la
même personne.
Je vais vous demander en deuxième volet, M. le Président,
comment un député, qui a le droit de parole dans cette Chambre,
conformément à ce règlement, ne pourrait pas exprimer son
idée sur son droit d'arrêter ce débat et ne pourrait pas
aller se reposer pour que nous travaillions ensemble dans la plus grande
quiétude. Je ne vois pas de règlement qui me permettrait de
m'exprimer sur cette motion d'ajournement. Je crois mon droit de parlementaire
brimé.
Le Vice-Président: M. le député de
Terrebonne, je vais répondre à votre demande de directive en deux
volets. Pour le premier volet, je vous dirai que le temps que le parti
ministériel n'a pas pris ne peut pas vous être accordé
d'aucune façon dans ce cas-ci.
Quant au deuxième volet de votre question, nos règlements
prévoient, à l'article 101, dans le cas d'une motion
d'ajournement du débat, que l'auteur de la motion et un
représentant de chaque groupe parlementaire
ont chacun un temps de parole de dix minutes. Le chef de l'Opposition
s'est exprimé pendant dix minutes, étant l'auteur de la motion.
Dix minutes étaient réservées au groupe parlementaire
ministériel. Le ministre du Travail a exercé son droit de parole
et je vous dirai, à ce moment-ci, que si vous voulez vous exprimer comme
représentant du groupe parlementaire de l'Opposition, vous avez dix
minutes à votre disposition, je vous reconnaîtrai si vous vous
levez.
Tel qu'en fait foi la décision que j'ai rendue moi-même ici
en cette Chambre le 2 décembre 1986, vous avez droit à votre
réplique. Je vais vous expliquer cela clairement. Notre règlement
prévoit que, dans le cas précis de la motion d'ajournement du
débat, l'auteur de la motion a un droit de parole de dix minutes et un
représentant de chaque groupe parlementaire peut
bénéficier d'un droit de parole de dix minutes. Donc, le
représentant du côté ministériel a exercé son
droit de parole, un représentant de l'Opposition peut exercer un droit
de parole de dix minutes et l'auteur de la motion conserve toujours sa
réplique de cinq minutes. Je reconnais M. le député de
Terrebonne pour un droit de parole de dix minutes maximum.
Des voix: Bravo!
M. Yves Blais
M. Blais: Merci beaucoup, M. le Président. Je reconnais
là le grand défenseur des droits de parole des
députés en cette Chambre. M. le Président, je me voyais un
peu outré de ne pas avoir le droit de m'exprimer sur cette motion
d'ajournement. Je sais que tous les élus ont une capacité
intellectuelle très forte et nous sommes capables d'en absorber
beaucoup, mais il faut se dire que nous sommes en fonctionnement constant
depuis déjà 22 heures.
Il est bien sûr, M. le Président, que si l'Opposition
présente une motion d'ajournement, je ne vois personne dans la
population, ni du côté journalistique ni du côté de
ceux qui nous regardent ou nous écoutent, trouver que c'est inacceptable
de demander une motion d'ajournement. Il faut que, comme le corps, l'esprit se
regénère. Il faut, comme le disait un grand poète, que le
corps exulte, mais il faut aussi que l'esprit se ressaisisse de temps à
autre. C'est pour cela que Dieu nous a donné le sommeil.
M. le Président, ce que je vois ici, c'est qu'on veut nous
priver, en plus de ne pas nous permettre les amendements qu'on
désirerait à ce projet de loi, alors que nous ne sommes que 20 et
de l'autre côté, vous êtes 100. Nous sommes obligés
de travailler cinq fois plus fort et la capacité intellectuelle, quoique
très grande de ce côté-ci, subit des remous un peu
fastidieux après 22 heures de débat.
M. le Président, je trouve justifié et justifiable,
intellectuellement raisonnable et intrinsèquement valable que nous
demandions l'ajournement du débat. Je sais que vous-même qui
n'avez pas le droit de vous exprimer là-dessus, vous seriez l'homme le
plus heureux du monde si vous descendiez de votre sedia pour aller vous
reposer. Ce n'est pas que vous n'êtes pas capable de porter encore un bon
jugement, vous venez de me donner le droit de parole, ce que je reconnais, M.
le Président, comme une grandeur d'âme de votre part. Mais
l'ajournement, M. le Président, permettrait à nos esprits de se
régénérer. Nous pourrions aller chercher des arguments qui
convaincraient peut-être le gouvernement que cette loi est
incomplète, qu'elle est présentée à des heures
indues, mais qu'elle est aussi incomplète en soi et qu'elle est un germe
de mécontentement sur tout le territoire du Québec. C'est pour
cela que la période de réflexion serait bonne surtout pour le
gouvernement.
Vous savez que lorsque toutes les principales associations qui
s'occupent des choses urbaines sont contre un projet de loi, il y a
certainement matière à réflexion. Si nous avons
parlé de ce projet de loi durant au moins douze heures et que le parti
qui a le nombre pour lui n'a pas décidé de faire un iota de
changement, eh bien c'est qu'il y a certainement place pour s'arrêter et
avoir quelques moments de réflexion.
M. le Président, l'UMRCQ, l'UMQ et l'UPA, trois grands organismes
reconnus par l'ensemble des gens qui analysent les situations sur le territoire
québécois, se sont prononcées contre cette loi, ils y
voient ombrage. D'abord, les MRC voient ombrage à leur autorité
parce que cette loi dit que les MRC auront plein pouvoir tout en disant aux
municipalités qui en font partie qu'elles ont le droit de retrait, c'est
impensable! On ne peut pas à la fois avoir plein pouvoir et permettre
aux composantes d'un organisme de s'en détacher. (6 h 30)
On ne peut pas donner plein pouvoir à l'un et plein pouvoir
à l'autre. Donc, il y aurait une réflexion à faire. Aussi,
l'Union des producteurs et des productrices agricoles s'est-elle
prononcée contre. Pourquoi? Parce qu'on touche de façon non
étudiée à leur territoire agricole. Je disais tantôt
que ce bijou législatif que nous avons adopté du temps où
nous étions au pouvoir, quand il est touché, il doit l'être
avec des cisailles de précision qui répondent à toutes les
analyses que les journalistes et les gens du milieu acceptent.
Une voix: Au bistouri.
M. Blais: C'est pourquoi je demandais
la suspension du débat, M. le Président. Mon Dieu! que je
vois de bons soldats de l'autre côté. Ils voudraient tous aller
trouver repos dans un lit moelleux. Ils le voudraient tous. Mais on leur a dit:
Tenez tête à ce petit groupe de 20. Tenez-leur tête! Vous
êtes 100. Ils ne sont que 20, tenez-leur tête. Mais sachez qu'on ne
travaille pas en vain, on travaille à 20. Parce que la population,
même s'il est tard, nos propos vont lui être rapportés. Il
est tôt pour certains et il est tard pour d'autres. À 6 h 30, M.
le Président, vous savez que c'est la traite des vaches. Les
cultivateurs se promènent ce matin avec leurs seaux. Ils se demandent
où sont les véritables sots. Ils se le demandent. C'est pourquoi
nous avons fait le saut sur la motion d'ajournement. On aimerait que le parti
au pouvoir mette son sceau sur cette résolution.
Des voix: Ha! Ha! Ha!
M. Blais: C'est ce que nous aimerions. C'est comme la phrase
célèbre du poète qui dit: Un cavalier sur un âne
portant sur son sein le seing du roi, l'âne trébucha, les trois
"saints" tombèrent. On demandait: Comment écrit-on le mot
"sains"? Mais ce n'est pas à 6 h 30 le matin qu'on va trouver comment il
s'écrit. Ce ne serait pas sain pour l'esprit. Je demande justement
l'ajournement pour que nous soyons un peu aérés
rationnellement.
Je trouve beau de la part du parti au pouvoir d'avoir des soldats de
cette nature. On leur a dit: Soyez au postel Tenez tête aux 20. Vous
êtes 100. C'est donc noble! Je trouve cela extraordinaire, moi. À
100 contre 20, je trouve la victoire extraordinaire. Si j'étais au
pouvoir à 100 contre 20 et que j'avais gagné sur le nombre, je me
dirais: Mon Dieu, que ma victoire est grande. Que ce jour est noble pour nous
et l'histoire rapportera certainement cette nuit mémorable où le
projet de loi 88 fut tenu en haleine pendant près de 14 heures.
Seulement d'y penser commande l'ajournement, M. le Président. Effleurer
le sujet, fût-ce du bout des lèvres, cela commande un ajournement,
M. le Président. Je vois les têtes qui oscillent un peu en disant:
Si l'oreiller était là à la place de ma main, que je
serais donc bien.
Des voix: Ha! Ha! Ha!
M. Blais: Je crois que vous avez raison, mais vous êtes de
bons soldats. On vous a dit: Soyez au poste. Que les sentinelles veillent
pendant que le capitaine dort. Alors, les sentinelles sont là. L'autre
ne s'embourbe pas avec cela, hein. Ah non! Il est parti se coucher dans son
beau bourg ou dans son bourg beau - je peux faire une inversion -pendant que
vous êtes là, stoïques. Regardez la tenue de ces gens!
C'était un peu moins bon au début de la soirée, mais ils
ont maintenant repris un peu de sérieux.
Je vois le ministre de l'Environnement. Je le trouve donc courageux. Il
a exactement mon âge. C'est fatigant, à cet âge-là,
de tenir le coup. Les gens un peu plus jeunes, ça peut aller. Mais quand
on arrive à près de 60 ans, il est très difficile
d'être debout pendant 50, 60 heures. C'est plus facile quand on est un
peu plus jeune. Je vois le député de Brome-Missisquoi qui
s'indigne et vocifère comme si le paradis était retourné
en enfer, mais ce n'est pas nécessaire, à cette heure-ci, de
faire quelques poèmes pour que les gens comprennent que l'esprit est
fatigué. On ne peut pas être aussi volubile après 22 heures
de travail qu'on l'est à l'aurore, lorsqu'on se lève. Le soleil
est toujours plus resplendissant. Quand on a vu venir le soleil, qu'on l'a vu
se coucher et qu'on a vu naître la lune, filer les étoiles et
qu'on recommence un autre jour, eh, bien on est au crépuscule de nos
pensées. C'est pour cela que nos dialogues ou nos discussions n'ont pas
la même teneur que si nous étions plus de bonne heure. C'est
normal, M. le Président. C'est bien normal.
M. le Président, je suis persuadé que ce petit laïus
de bon aloi va certainement faire penser, d'abord, aux sentinelles d'appeler
les chefs pour qu'ils viennent, il n'y en a pas un, et leur dire que les
analystes de la situation vont trouver que cette veille excessive tourne le
parti au pouvoir en dérision et que c'est dérisoire aussi de le
faire. C'est pourquoi, M. le Président, je suis persuadé que
cette motion d'ajournement répond à l'intelligence, à la
rationalisation. Je suis persuadé que même le parti au pouvoir va
dire: Nous ajournons immédiatement; nous allons réfléchir
à ce projet de loi qui n'est pas bon.
Des voix: Bravol
Le Vice-Président: Je vais maintenant reconnaître M.
le chef de l'Opposition pour l'exercice de son droit de réplique.
M. Guy Chevrette (réplique)
M. Chevrette: M. le Président, à entendre mon
collègue, vous aurez bien compris que ce n'était pas
l'épuisement qui nous faisait demander l'ajournement.
Une voix: C'est eux qui sont épuisés.
M. Chevrette: Vous aurez bien compris, M. le Président,
que nous étions très lucides, que nous voulions continuer
à débattre du sujet, mais, devant l'apathie et la fatigue
évidentes des députés ministériels, nous voulons
leur donner une chance d'aller se reposer et de dire ce qu'ils pensent du
projet de loi 88, ce qu'ils pensent des demandes de
l'UMRCQ, ce qu'ils pensent de la demande de l'UMQ. Est-ce qu'ils
partagent le point de vue des producteurs agricoles? Est-ce qu'ils sont
d'accord avec un comité consultatif qui s'ajoute déjà aux
procédures de consultation prévues à la loi 125?
Vous n'en avez entendu aucun, M. le Président. Le ministre est
parti, comme s'il avait dit à son groupe: Mais, de grâce,
n'intervenez pas durant mon absence, vous pourriez peut-être me mettre
les pieds dans les plats. Je ne sais pas si c'est de cette façon que
cela fonctionne de l'autre côté. Il faut reconnaître qu'ils
ont une discipline. Quand il n'y en a pas un qui parle, il n'y en a aucun qui
s'ajoute. C'est clair. J'ai remarqué cela. Quand le ministre donne une
directive de ne pas parler, il n'y en a plus un qui parle. Évidemment,
si ce n'était pas de la cloche, M. le Président, on n'en aurait
pas beaucoup devant nous.
Une voix: C'est sûr, il faut le reconnaître.
M. Chevrette: Mais il faut le reconnaître, de ce
côté-là, ils sont très disciplinés quand un
ministre leur dit: Vous n'avez pas un mot à dire, c'est moi qui suis
ministre; c'est moi qui décide de mon projet de loi, du contenu de mon
projet de loi. Même si vous n'êtes pas d'accord, taisez-vous.
Une voix: La mise au pas.
M. Chevrette: C'est un peu de même que cela fonctionne.
Cela m'apparaît aberrant pour une formation politique qui compte
près de 100 députés, soit 99 députés, et on
n'a pas entendu un son de cloche. On n'a pas entendu résonner seulement
- ré, accent aigu - sur le projet de loi 88. On n'a pas vu un
député se lever pour dire: Dans mon comté, les producteurs
agricoles sont inquiets de ce qu'il y a dans le projet de loi 88; bravo si on a
réussi à le modifier. Aucun d'eux ne l'a dit, aucun,
exclusivement le ministre des Affaires municipales. Il faut comprendre que
c'est peut-être aussi un désengagement de votre part
vis-à-vis de lui. Après avoir présenté un tel
projet de loi et après avoir subi les transformations qu'il a subies, en
regardant le produit fini comme celui qui vient de nous apparaître au
moment de l'étude du rapport, je vous comprends.
Je vous comprends et j'interprète que c'est peut-être de la
gêne de votre part. Vous ne reconnaissez plus votre projet, hein? Nous
autres non plus, on ne le reconnaît plus, mais on est contents que le
produit soit maintenant différent. On est contents de voir que l'UMRCQ
est très heureuse du contenu qu'on y retrouve à l'étape de
l'étude du rapport. On est très contents de voir que l'UMQ
achète également le contenu. On est très contents
également que les producteurs agricoles le trouvent maintenant
acceptable. Et j'invite le ministre du Travail, de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu à se conformer à ce que son
collègue des Affaires municipales a fait dans ce projet de loi. Il a
présenté un projet de loi dont personne ne voulait et, avec
l'aide de l'Opposition, il l'a transformé pour le rendre acceptable aux
yeux de plusieurs groupes. Le ministre est à la veille de nous
présenter un projet de loi dont personne ne veut, mais il
s'entête. Il ne veut pas. Il va s'obstiner jusqu'à la mort.
Personne ne sera d'accord. (6 h 40)
II me semble que le ministre du Travail devrait suivre l'exemple du
ministre des Affaires municipales sur cela, être plus souple, accepter
que les groupes puissent lui parler, accepter que les groupes puissent lui
proposer des choses, accepter de faire des compromis pour rendre acceptable son
projet de loi. Après tout, on légifère pour qui? On
légifère pour des populations, on légifère pour des
gens. Ces gens ont des dirigeants et ont des représentants. Pourquoi
toujours chercher à se les mettre en opposition, M. le Président?
C'est là le mérite que l'Opposition a eu.
Ma proposition d'ajournement, M. le Président, c'était
précisément aussi - c'est un élément additionnel -
de permettre au ministre du Travail de lui donner des délais entre 6 h
40 du matin et 10 heures, il a peut-être le temps de faire quelques
téléphones à quelques représentants du monde
syndical, à quelques représentants du Conseil du patronat pour
leur dire: Voici, j'ai des idées à placer sur la table. Est-ce
que notre projet pourrait se bonifier dans ce sens? On lui donne le temps.
À ce compte, je prétends que ma motion d'ajournement en est une
fondée sur le gros bon sens. Rendu à 6 h 40 du matin, il est
temps d'avoir un répit.
Le Vice-Président: Le débat étant
terminé, nous allons maintenant procéder à la mise aux
voix de cette motion d'ajournement. C'est un vote enregistré. Qu'on
appelle donc les députés. (6 h 42-6 h 45)
Mise aux voix de la motion
Le Vice-Président: À l'ordre, s'il vous
plaît!
Nous allons maintenant procéder à la mise au vote de la
motion d'ajournement du débat portant sur l'adoption du rapport de la
commission de l'aménagement et des équipements sur le projet de
loi 88.
Que les députés qui sont pour à ladite motion
veuillent bien se lever, s'il vous plaît.
Le Secrétaire adjoint: MM. Chevrette (Joliette), Gendron
(Abitibi-Ouest), Perron (Duplessis), Blais (Terrebonne), Garon (Lévis),
Mme Juneau (Johnson), MM. Jolivet (Laviolette), Brassard (Lac-Saint-Jean),
Paré (Shefford), Boulerice (Saint-Jacques), Dufour (Jonquière),
Mme Harel (Maisonneuve).
Le Vice-Président: Que les députés qui
s'opposent à cette motion veuillent bien se lever, s'il vous
plaît.
Le Secrétaire adjoint: MM. Paradis (Brome-Missisquoi),
Dutil (Beauce-Sud), Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François), MM. Lincoln
(Nelligan), Vallières (Richmond), Mme Bégin (Bellechasse), MM.
Maltais (Saguenay), Philibert (Trois-Rivières), Sirros (Laurier),
Paradis (Matapédia), Rivard (Rosemont), Kehoe (Chapleau), Mme Hovington
(Matane), M. Tremblay (Iberville), Mme Bélanger
(Mégantic-Compton), MM. Camden (Lotbinière), Després
(Limoilou), Gardner (Arthabaska), Gauvin (Montmagny-L'Islet), Hamel
(Sherbrooke), Dubois (Huntingdon) Bissonnet (Jeanne-Mance), Poulin (Chauveau),
Tremblay (Rimouski), Saint-Roch (Drummond).
Le Vice-Président: II n'y a pas d'abstentions?
Le Secrétaire: Pour: 12
Contre: 25
Abstentions: 0
Le Vice-Président: Alors, la motion est donc
rejetée, et nous allons en conséquence poursuivre le
débat. En vertu de notre règlement, plus
précisément a l'article 102, M. le chef de l'Opposition vous avez
maintenant votre droit de parole de dix minutes sur l'adoption du rapport.
Reprise du débat M. Guy Chevrette
M. Chevrette: Merci, M. le Président. Vous me permettrez
au départ, M. le Président, de féliciter mon
collègue de Jonquière ainsi que mes collègues qui ont
participé à l'examen de cette législation qui, je vous le
rappellerai, M. le Président, avait fait l'unanimité de tous les
intervenants du milieu, mais contre le projet de loi.
Je me souviens encore, M. le Président, au moment où le
ministre a déposé ce projet de loi, des propos du
député de Jonquière qui me disait: Écoute bien, je
ne vois pas comment on va pouvoir travailler. Il n'y a pas une personne du
monde municipal qui désire ce projet de loi. L'Union des producteurs
agricoles y est carrément et diamétralement opposée. (6 h
50)
M. le Président, ce projet de loi mettait en péril toutes
sortes de principes, même des principes élémentaires de
démocratie. Il mettait également en péril, M. le
Président, des notions fondamentales en ce qui regarde la protection du
territoire agricole, par exemple.
Mais avec un effort soutenu, le député de Jonquière
a, avec ses collègues, M. le Président, rencontré les
groupes. Tantôt c'était l'UMRCQ, tantôt c'était les
représentants de l'UMQ, tantôt c'était des
téléphones et des rencontres avec le monde agricole pour en
arriver à convaincre le ministre, de peine et de misère, à
bout de bras, comme on dit en bon québécois, de modifier ses
attitudes, de modifier fondamentalement le contenu même de la loi 88.
Oui, il y en a eu de la négociation, M. le Président, de
la négociation tous les jours avec le ministre. Et mon collègue
de Jonquière, fort de son expérience dans le monde municipal, a
inventorié des formules, voyant que, même à
l'intérieur du monde municipal, il y avait des divergences de point de
vue aussi.
Il est bien évident que l'UMQ ne voyait pas ça du
même oeil que l'UMRCQ et que, d'autre part, il y avait des craintes de
l'UMRCQ de voir la trop grande force de l'UMQ dans le dossier. Si bien que mon
collègue, à un moment donné, me faisait des propositions
comme chef de parti. Il me disait: Je pense que j'ai trouvé la formule.
Je pense que j'ai trouvé une piste intéressante sur laquelle on
pourrait peut-être trouver un compromis, faire en sorte que les
représentants du monde municipal se rencontrent et puissent proposer au
ministre un compromis très acceptable pour les deux parties.
Et, effectivement, M. le Président, c'est la suggestion de mon
collègue de Jonquière qui a réussi à faire un
compromis entre les deux unions de municipalités, l'UMRCQ et l'UMQ. On
se retrouve aujourd'hui avec un projet de loi potable, acceptable, qui nous
permet de dire: Chapeau! à l'Opposition parce que le monde municipal se
reconnaît dans le projet de loi, l'Union des producteurs agricoles se
reconnaît dans le projet de loi. Mais malheureusement, on ne
reconnaît plus le projet de loi du ministre, par exemple. Et tant
mieux!
M. Perron: Question de règlement, Mme la
Présidente.
La Vice-Présidente: Question de règlement, M. le
député de Duplessis.
M. Perron: Je m'excuse auprès de mon collègue qui
était en train de parler à cette Chambre, mais on constate qu'on
n'a pas quorum, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente: Je vais vérifier si
on a quorum. On n'a pas quorum, qu'on appelle les
députés.
Nous avons quorum, vous pouvez poursuivre, M. le chef de
l'Opposition.
M. Chevrette: Merci, Mme la Présidente. Je disais donc que
grâce à mon collègue de Jonquière et à
l'équipe de députés, après de multiples efforts
auprès des deux unions de municipalités, on a réussi, je
crois, à rendre potable ce qui était inacceptable. En effet,
hier, j'ai pu constater qu'il y avait une satisfaction au niveau des unions. Il
y avait enfin un soupir de soulagement parce qu'on croyait, Mme la
Présidente, que le ministre s'entêterait avec un projet de loi qui
était tout à fait inacceptable pour l'ensemble des groupes
impliqués dans ce projet de loi.
Il faut tirer une leçon de ce projet de loi 88. Il faut tirer la
leçon suivante. D'abord, une loi, cela ne se présente pas en
Chambre tout croche, tout de travers. Une loi, cela doit être
testé préalablement auprès des groupes impliqués.
Une loi, cela doit au moins être confronté avec les objectifs des
groupes qui sont visés. Une telle loi, Mme la Présidente, ne se
présente pas à l'Assemblée nationale pour provoquer des
réactions négatives, faire en sorte qu'on fasse dépenser
du temps et de l'énergie de la part des élus municipaux ou de la
part des représentants du monde agricole pour le plaisir de
dépenser des énergies et du temps. Ce furent des voyages à
Québec pour ces gens. Ce furent des déplacements coûteux
pour ces municipalités, ces unions de municipalités. Ce furent,
Mme la Présidente, des débats à n'en plus finir avec des
fonctionnaires gouvernementaux. Pourquoi? Parce que le ministre ou bien n'avait
pas compris les objectifs du monde municipal, ou bien n'avait pas saisi le
pouls du monde municipal, ou bien avait négligé de le faire
purement et simplement. Si bien que l'on se retrouve avec une loi qui faisait
l'unanimité contre.
Ce n'est pas comme cela qu'on légifère. On doit tirer une
leçon sur le plan législatif. On ne légifère pas
pour se faire plaisir comme ministre. On légifère pour encadrer
les agissements du monde. On ne légifère pas pour voir son nom
passer à l'histoire, derrière une loi que personne ne voulait.
Cela fait un drôle de passé historique. Il y en a de ces gens dans
ce gouvernement, Mme la Présidente. Il y a des ministres, en face, qui
légifèrent pour laisser leur nom à la
postérité. Il ne restera pas grand-chose, s'il n'y a personne qui
achète le produit qu'ils veulent leur vendre ou leur donner. Mme la
Présidente, c'est ce que ce gouvernement n'a pas compris. Depuis le
début - le leader pourrait le faire au niveau de son bilan - je n'ai
jamais vu en cette Chambre, de la législation aussi mal foutue. Des
projets de loi qui nécessiteraient d'être complètement
réimprimés. On ne les reconnaît plus, même les notes
explicatives... Il y a des ministres qui sont obligés de changer leurs
notes explicatives, ce qui est supposé être l'énoncé
même du contenu de la législation qui suit. Ce ne sont pas des
farces. Où s'en va-t-on?
C'était supposé pourtant, le 15 décembre 1985... Je
ne sais pas si vous vous rappelez. La vice-première ministre, en
l'absence du chef, qui, lui, s'était fait battre dans Bertrand, ne
pouvait pas être en Chambre, s'était levée, très
dignement, les deux mains jointes et avait dit: Nous allons
légiférer moins, mais mieux. Ces gens se sont mis à
distribuer des projets de loi, une feuille, trois lignes. Là, ils ne se
trompaient pas trop, parce qu'une feuille, trois lignes, s'il avait fallu
qu'ils s'enfargent dans trois lignes, cela aurait été effrayant.
Mais là, ils ont commencé à mettre un peu plus de lignes.
Dès qu'un projet de loi avait 10 lignes, c'était fini. Ils
s'enfargeaient, Mme la Présidente. Il fallait corriger 8 lignes sur 10.
Et, dès qu'il y a plusieurs articles, là, cela n'a plus de bon
sens.
Je vais vous dire très honnêtement que les principes sont
même changés en deuxième lecture, quand on y va article par
article. Les principes mêmes sont modifiés. Ce ne sont pas des
farces. Vous appelez cela légiférer? Vous appelez cela avoir le
pouls de la population, quand on légifère? Moi, je n'en reviens
pas, Mme la Présidente. Je n'ai jamais vu, depuis 2 ans, autant de
projets de loi mal foutus. Pourtant, on devait légiférer moins
mais mieux. Cela n'a pas de bon sens. Il est absolument temps qu'on puisse au
moins s'entendre sur une chose, ici. L'Opposition, en cette Chambre, a fait un
travail magistral. L'Opposition a corrigé des projets de loi pour les
rendre potables et acceptables. L'Opposition, Mme la Présidente, n'a pas
fait d'obstruction systématique. L'Opposition a toujours
été constructive, dans le sens qu'elle apportait des amendements
vérifiés au préalable, auprès des groupes
concernés. (7 heures)
Je me souviens dans le monde du travail, quand mon collègue de
l'Abitibi présente un amendement à une loi, c'est parce qu'il a
testé les amendements auprès des groupes de salariés, des
groupes de syndicats auprès des centrales syndicales. Mme la
Présidente, je vous en donnerai un exemple, pour vous montrer comment on
légifère tout croche. La ministre de la Santé et des
Services sociaux déposait un projet de loi de 13 articles. Rendu en
deuxième lecture, croyez-le ou non, elle a fait 13 amendements aux 13
articles. Ne faut-il pas avoir absolument perdu le sens de ce que c'est
légiférer? Si on légifère de cette façon,
c'est parce qu'on ne connaît pas son dossier. Si on
légifère de cette façon, c'est
parce qu'on n'a pas compris les problèmes et, placé devant
une réalité avec une Opposition qui se tient debout, on se rend
compte que les articles n'ont plus de bon sens et là, on
légifère. On ne reconnaît plus les projets de loi, Mme la
Présidente. Mais, Dieu merci, si on ne les reconnaît pas, c'est au
moins à l'avantage des citoyens, parce qu'on a fait un travail
gigantesque de ce côté-là.
Mme la Présidente, je suis très fier, personnellement,
très heureux du travail de moines, qu'ont fait certains
députés de notre côté. Gratter des projets de loi,
préparer des amendements, vérifier ces amendements auprès
des groupes concernés, cela a été le cas de mon
collègue de Jonquière, de celui de l'Abitibi.
Cela a été le cas de tous les députés qui
ont eu à travailler sur des lois, Mme la Présidente. Mais c'est
bien sûr que les deux champions de la législation tout croche, qui
ne requièrent à peu près jamais l'approbation des gens
concernés, ce sont les ministres du Travail et des Affaires municipales.
Ils ont le don de présenter de la législation dont personne ne
veut. Je ne sais pas pourquoi. Je ne sais pas ce qu'ils cherchent.
On dirait qu'ils veulent être sur la sellette et ils se croient
vedettes quand ils sont contestés. Je ne sais pas. Ça n'a pas
d'allure de légiférer de cette façon, Mme la
Présidente. Quant à moi, je vous dirai que c'est avec beaucoup de
fierté qu'on va se présenter devant le monde municipal en ce qui
regarde la loi 88. C'est avec beaucoup de fierté qu'on va se
présenter devant le monde agricole. Et on n'ira pas les emplir le temps
d'un congrès. On leur a prouvé, à ces gens-là,
qu'on était capables de faire un travail constructif, de bonifier des
projets de loi, de les corriger en fonction des aspirations du milieu. C'est
ça le vrai rôle du législateur. Ce n'est pas de se faire
plaisir en essayant de passer une loi tout croche.
L'important pour un législateur consciencieux, soucieux de
répondre aux véritables besoins, c'est de présenter une
loi qui colle aux réalités du milieu, qui vient résoudre
les problèmes vécus par le milieu et qui vient transposer dans un
texte législatif bien souvent les recettes pensées par les gens
du milieu et non pas les petits comités de bénévoles
à 400 $.
La Vice-Présidente: Merci, M. le chef de l'Opposition. M.
le député de Duplessis.
M. Denis Perron
M. Perron: Merci, Mme la Présidente. Je voudrais d'abord,
tout comme mon collègue de Joliette et en même temps chef de
l'Opposition à l'Assemblée nationale, féliciter le travail
acharné de notre collègue de Jonquière qui, avec son
expérience BU cours des dernières années, en particulier
au niveau de l'Union des municipalités du Québec en tant que
président, a contribué à faire en sorte que la loi 88 soit
amendée par le ministre des Affaires municipales.
Il a contribué par sa connaissance du dossier à faire
comprendre non seulement à certains ministériels, mais à
des gens de l'extérieur, que ce projet de loi se devait d'être
amendé et d'être modifié substantiellement pour se rendre
à certaines demandes qui ont été effectuées par
différents groupes.
Mme la Présidente, il est intéressant de constater que
notre collègue de Jonquière, en commission parlementaire, a
réussi à forcer ce gouvernement, à forcer le ministre des
Affaires municipales à apporter des corrections au projet de loi 88.
Cependant, en tant que membres de l'Opposition, nous serions d'accord pour
faire des modifications. Nous serions d'accord que le ministre des Affaires
municipales apporte des modifications substantielles et en particulier, sur la
question du comité de concertation agricole.
Mme la Présidente, vous savez, j'ai beaucoup de craintes face aux
attitudes de ce gouvernement mais face surtout aux attitudes du ministre des
Affaires municipales qui, en passant, n'a pas été vu depuis une
couple d'heures ici à l'Assemblée nationale. Il est probablement
en train dé se reposer. Encore là, c'est un signe concret que le
ministre des Affaires municipales ne prend pas ses responsabilités. Et
lorsque je parle de responsabilités, Mme la Présidente, vous me
permettrez sûrement, puisqu'il a été question en commission
parlementaire, dé demande qu'on ait en face de nous l'Union des
municipalités régionales de comté, l'Union des
municipalités du Québec ainsi que l'Union des producteurs
agricoles et aussi d'autres organismes que nous voulions entendre en commission
parlementaire, ce gouvernement s'est totalement refusé à cela.
Cela me rappelle des souvenirs pas très lointains. L'an dernier...
La Vice-Présidente: Mme la députée de
Johnson.
Mme Juneau: Je sais que c'est une excellente intervention, mais
il n'y a personne pour l'écouter. Je voudrais demander le quorum,
madame, s'il vous plaît.
La Vice-Présidente: On va vérifier effectivement,
Mme la députée de Johnson, s'il y a quorum. Qu'on appelle les
députés!
Vous pouvez continuer M. le député de Duplessis.
M. Perron: Je disais donc, Mme la
Présidente, que lorsqu'on parle de responsabilité
ministérielle, ce n'est pas l'actuel ministre des Affaires municipales
qui prend ses responsabilités. Il s'efface chaque fois qu'on a un
dossier devant l'Assemblée nationale ou encore en commission
parlementaire. J'ai un souvenir, en tant que député du
comté de Duplessis qui n'est pas tellement loin, face aux attitudes de
ce ministre. Qu'on se rappelle, qu'en mai 1986, le ministre des Affaires
municipales avait déposé un projet de loi concernant la fermeture
de la ville de Schefferville. Qu'on se rappelle, qu'en commission
parlementaire, à ce moment-là, nous avions demandé, heure
après heure, que le ministre des Affaires municipales entende des
organismes, donc des groupes, de différents endroits du Québec,
mais en particulier de personnes de Schefferville comme le comité de
citoyens, comme certains membres du conseil municipal, comme certains
organismes - par exemple l'Union des municipalités du Québec -
qui étaient carrément et directement impliqués dans un
endroit qu'on appelait Schefferville. Depuis un an et demi que la loi est
adoptée, depuis un an et demi que la loi est sanctionnée, le
problème des résidents et des résidentes de Schefferville
n'est toujours pas réglé. Pourquoi, Mme la Présidente?
Parce que le ministre des Affaires municipales n'a aucun sens des
responsabilités! Cela, on l'a constaté depuis les deux
dernières années, puisqu'il est ministre des Affaires municipales
depuis ces deux dernières années.
On est aussi en droit, Mme la Présidente, d'obtenir certains
engagements de ce gouvernement. Qu'on se rappelle ce que disait le
président de l'Union des municipalités régionales de
comté du Québec, M. Roger Nicolet - et cela n'a pas paru dans
n'importe quelle revue, Mme la Présidente, mais bien dans La Revue
Municipale de novembre 1987, c'est très récent:
"Incompréhension des demandes municipales, refus d'accepter le concept
d'aménagement issu de la loi 125, opposition systématique aux
volontés du milieu, vision étroite des objectifs à
privilégier, autant de symptômes de ces réflexes d'une
fonction publique qui vit encore dans une autre ère, celle du
centralisme qui répond à un concept dépassé de la
société québécoise. II est temps que l'appareil
étatique comprenne que les régions du Québec, par le biais
de leurs instances politiques municipales, entendent dialoguer en ce qui touche
leur domaine de compétence dans la dignité et le respect" a
affirmé le président de l'UMRCQ. (7 h 10)
Mme la Présidente, lorsqu'on va plus loin, ce même
président se posait de sérieuses questions sur différents
sujets, par exemple, sur la question du zonage agricole, sur la question de
l'environnement et de l'assainissement des eaux. Il disait alors: "Est-il
juste, a demandé le président Nicolet, qu'une MRC ne disposant ni
des ressources financières ni du pouvoir décisionnel
approprié, doive encore assumer une de ces trop nombreuses
responsabilités dont personne ne veut? Est-il équitable de
transférer aux régions le problème de l'enfouissement sans
leur donner un droit d'intervention dans une politique globale des
déchets?"
Tout cela pour vous dire que ce gouvernement, et en particulier le
ministre des Affaires municipales, fait en sorte que des responsabilités
qui lui incombent, que des responsabilités qui doivent être
gouvernementales sont retournées vers certains milieux comme l'Union des
municipalités régionales de comté du Québec et
l'Union des municipalités du Québec ou encore à certains
comités agricoles. Là, le gouvernement se départit
carrément et même substantiellement de ses
responsabilités.
Lorsqu'on parle du projet de loi 88, il ne faut pas oublier non plus
que, dans ce projet de loi, on écrit à l'article 22, par exemple,
ce qui suit: "Cette loi est modifiée par l'insertion, après
l'article 148, de ce qui suit:" Là, on parle du comité de
concertation agricole. C'est une modification, à l'article 148.1:
"Lorsque le conseil d'une municipalité projette d'adopter une
modification au règlement de zonage ayant effet sur un territoire ou une
zone visé au paragraphe 5° de l'article 5 ou au paragraphe 1° de
l'article 84 et faisant partie de la zone agricole au sens de la Loi sur la
protection du territoire agricole, il doit, avant de tenir la consultation
prévue aux articles 124 à 130, consulter le comité de
concertation agricole".
Puisqu'on parle de la formation de ce comité, j'aurais
aimé que le ministre des Affaires municipales, s'il était ici,
nous explique ce que veut dire, par exemple, un paragraphe de 148.2, lorsqu'on
écrit: "1° au moins la moitié des membres du comité
doivent être des producteurs agricoles qui résident sur le
territoire de la municipalité et qui ne sont pas des membres du
conseil;". J'aurais voulu connaître l'opinion de l'Union des producteurs
agricoles en particulier là-dessus. J'aurais voulu connaître
l'opinion, tout comme mes collègues de l'Opposition, de l'Union des
municipalités régionales de comté du Québec.
Étant donné que ce gouvernement, et encore une fois le
ministre des Affaires municipales, ne fait pas son travail, que le ministre des
Affaires municipales n'a pas la confiance du député de Duplessis
pas plus que celle des autres membres de l'Opposition, pour des raisons que
j'ai énumérées tout à l'heure, il est assuré
qu'en ce qui nous concerne nous allons voter contre ce projet de loi. Nous
allons continuer à travailler d'arrache-pied pour que le ministre
des Affaires municipales prenne ses responsabilités et que cela
soit fait d'une façon concrète et aussi honorable envers tout le
monde municipal que nous avons en face de nous au Québec et envers tous
les organismes qui sont touchés par le projet de loi 88. Merci, Mme la
Présidente.
La Vice-Présidente: Merci, M. le député de
Duplessis. M. le député de Terrebonne, n'avez-vous pas
parlé sur ce projet de loi?
Des voix: Oui, oui.
M. Blais: Oui, Mme la Présidente. Mais je ne veux pas
parler sur le projet de loi, j'ai une directive à vous demander.
La Vice-Présidente: Ahi D'accord. Sur une question de
règlement.
M. Blais: Mme la Présidente, j'ai deux questions de
directive à vous demander. Je vais commencer par la première, si
vous le permettez. Mme la Présidente, il est 7 h 13. Je voudrais vous
demander: du point de vue parlementaire, à quelle heure la
journée d'hier finit-elle? Je voudrais savoir à quelle heure la
journée parlementaire finit, parce que nous travaillons toujours sous la
date du 17 décembre et nous sommes rendus à 7 h 13, le 18
décembre?
Comme première directive, j'aimerais savoir à quelle heure
se termine la journée d'hier pour un parlementaire?
La Vice-Présidente: M. le député de
Terrebonne, ici à l'Assemblée nationale, je tiens à vous
dire que nous ne procédons pas en fonction de journées mais en
fonction de séances. Nous sommes à la séance d'hier qui se
poursuit toujours. Là-dessus, je suis prête à
reconnaître le prochain intervenant.
M. Blais: J'avais une deuxième question, Mme la
Présidente.
La Vice-Présidente: Ah oui! Votre deuxième
question.
M. Blais: Mme la Présidente, j'aimerais que vous
répondiez au premier volet de ma question avant de vous poser le
deuxième. Je vous demande à quelle heure, pour un parlementaire,
finit la journée d'hier?
La Vice-Présidente: Comme je vous l'ai dit, M. le
député de Terrebonne, ici, nous ne travaillons pas en fonction
d'heures, de journées. Nous travaillons en fonction de séances et
alors, c'est la séance d'hier qui se poursuit. Là-dessus, je suis
prête à reconnaître... Mais, M. le député de
Terrebonne, j'ai répondu à votre question.
M. Blais: Mme la Présidente, je vous demande une question
en directive. À quelle heure la journée d'hier, pour les
parlementaires, s1 arrête-t-elle? Je n'ai pas eu de
réponse.
Vous avez dit que nous continuons la journée d'hier. Je suis
complètement d'accord avec vous. Mais ma question est la suivante: Pour
un parlementaire, à quelle heure la journée d'hier finit-elle?
Elle doit avoir une fin.
La Vice-Présidente: Je tiens à vous dire, M. le
député de Terrebonne, que nous sommes toujours à la
séance du 17 et la séance du 17 se termine à 10 heures ce
matin.
M. Blais: À quelle heure, madame? La
Vice-Présidente: 10 heures. M. Blais: Merci. Deuxième
volet. La Vice-Présidente: M. le député.
M. Blais: Je voudrais vous demander, en deuxième volet.
Nous avons droit à une seule motion d'ajournement par séance.
Est-ce que cela veut dire que, d'ici à 10 heures, si nous parlons
toujours sur le projet de loi 88, à 10 heures et une on pourrait avoir
une autre motion d'ajournement sur le même projet de loi?
La Vice-Présidente: Si vous permettez, je vais suspendre
à loisir.
(Suspension de la séance à 7 h 17)
(Reprise à 7 h 23)
La Vice-Présidente: À l'ordre, s'il vous
plaît! Vous pouvez regagner vos sièges.
J'ai pris ma décision sur la question posée par le
député de Terrebonne. Premièrement, M. le
député de Terrebonne, je tiens à vous dire que votre
question est hypothétique et, comme telle, je n'ai pas à y
répondre. Cependant, la séance du 17 peut se poursuivre
jusqu'à dix heures ce matin et vous pourrez, à une autre
séance, reformuler votre question de règlement.
Là-dessus, je suis prête à reconnaître le
prochain intervenant. Mme la députée de Johnson.
Mme Carmen Juneau
Mme Juneau: Merci beaucoup, Mme la Présidente. Je trouve
un peu difficile d'intervenir sur un projet de loi comme ça quand il y a
eu toutes sortes d'interventions de faites et qu'il y a eu, aussi à la
fois de la part des principaux intervenants, c'est-à-dire les MRC du
Québec, les 94 MRC ou
municipalités régionales de comté, une contestation
publique, une contestation ouverte témoignant fort
précisément au ministre des Affaires municipales leur
mécontentement face au projet de loi 88.
Les MRC du Québec ont été fondées dans le
but d'offrir ensemble des services à une population donnée. Donc,
Mme la Présidente, je pense que depuis la formation des MRC, nous nous
sommes rendu compte que ces personnes - ce sont des élus aussi, des
élus municipaux - ont pris leur situation en main. Ce sont des gens
respectables, respectés et ce sont aussi des gens qui ont toujours su
prendre leurs responsabilités. Parce que si nous étions en face
de gens des MRC qui sont des maires - il faut se le dire - ou des maires
suppléants, je pense que ce sont des gens qui ont reçu la
confiance de leurs électeurs; sans ça ils ne seraient pas les
représentants de municipalités. Et, si ces maires qui ont
reçu l'assentiment de leur population se voient en face d'un projet de
loi inacceptable, c'est-à-dire un projet de loi qui ne convient pas au
service des municipalités régionales de comté, je pense
que ce sont les connaisseurs. Ce sont les spécialistes finalement parce
que ce sont eux qui, par la suite, doivent se mettre en application des lois
qui sont faites ici et qui se répercutent sur le terrain.
Si, Mme la Présidente, les 94 municipalités
régionales de comté ne sont pas en accord avec ce projet de loi
qui est un projet de loi fort important, il faut se le dire, et si elles ne
sont pas en accord, c'est qu'il y a quelque chose.
Là-dessus, Mme la Présidente, je vais rendre un vibrant
hommage à mon collègue, le député de
Jonquière, critique en matière d'affaires municipales. Si le
ministre responsable avait eu autant de crédibilité que mon
collègue critique en matière d'affaires municipales, qui a
été lui-même maire de la ville de Jonquière et
longtemps président de l'UMRCQ, je ne pense pas que nous serions,
à 7 heures, ce matin, encore en train de discuter sur ce projet de
loi.
Vous comprendrez que, lors de la commission parlementaire pour
l'étude article par article du projet de loi, il y a eu 60 % - je ne
pense pas me tromper, je ne veux pas induire la Chambre en erreur; loin de moi
cette vile pensée, je vais donc me donner un petit coussin - disons
entre 50 % et 60 % du projet de loi 88 qui a été refait
grâce et à cause du travail incessant de mon collègue, le
député de Jonquière. Si tous et chacun ici, à
l'intérieur de cette Chambre, surtout le gouvernement que nous avons en
face et les ministres sectoriels, faisaient leur travail tout aussi bien que
mon collègue de Jonquière l'a fait, je ne pense pas que 50 %
à 60 % d'un projet de loi serait à refaire lorsque nous allons
étudier, article par article, cedit projet de loi.
Je ne crois pas non plus, Mme la Présidente, que les principaux
intervenants, c'est-à-dire les gens pour lesquels la loi doit
s'appliquer, seraient tout à fait en désaccord avec ce qui est
présenté ici. Je sais que je me répète, mais j'ai
l'impression que si on va de l'avant et on "bulldoze" les gens la loi deviendra
inopérante, étant donné que cela ne sera pas conforme aux
critères pour lesquels la loi est supposée être mise de
l'avant. (7 h 30)
Si les 94 municipalités régionales de comté ne sont
pas en accord avec le projet de loi 88, c'est que cela brime des gens. Ce sont
des élus, Mme la Présidente, tout aussi bien que nous, à
une autre échelle, mais ce sont des élus et nous devons avoir le
respect de ces élus. Lorsqu'on mérite la confiance, qu'on gagne
une élection, c'est parce que plus de personnes que moins ont
décidé de nous faire confiance, donc de nous donner un poste qui
équivaut à un poste de commande. À cause de ce poste de
commande que nous occupons, je pense qu'il est fort important que, chaque fois
qu'on doit poser un geste, on prenne en considération ce que cela va
donner sur le terrain. À qui allons-nous faire mal ou à qui
allons-nous faire du bien? C'est ça la question, Mme la
Présidente. Quand on remarque un projet de loi 88, qui est un projet de
loi fort important, étant donné, Mme la Présidente, qu'il
y a des responsabilités importantes qui seraient
transférées aux municipalités régionales de
comté, et l'autre volet du projet de loi qui, à mon point de vue,
me touche énormément, étant donné que cela parle du
zonage agricole.
Le zonage agricole dans mon comté, c'est fort important.
Saviez-vous que, dans le comté de Johnson, j'ai tout près de 1500
producteurs agricoles. Cela veut dire que sur mes 35 municipalités, j'ai
31 municipalités rurales. Vous comprendrez que, lorsqu'on parle de
zonage agricole dans le comté de Johnson, on parle d'une chose
importante. On parle d'une chose importante, et je remarque que, dans le projet
de loi 88, le ministre n'a pas voulu laisser tomber le comité de
concertation. Pourquoi? Parce qu'il n'a pas voulu laisser tomber son
collègue de l'Agriculture. Il voulait lui sauver la face. C'est
ça qui est arrivé, parce qu'avec les amendements de mon
collègue, le député de Jonquière, le comité
dont on parle, c'est un comité qui n'aura aucun effet. Il n'a plus de
force, il n'est plus valable, il est inopérant, à cause des
amendements qui ont été faits au projet de loi 88.
Mais à cause de son collègue des Affaires municipales, qui
s'était étiré le cou une fois de plus, il a laissé
le comité de concertation. Mais un comité de concertation qui ne
concertera rien, ça ne vaut pas grand-chose. Mme la Présidente,
ce projet de
loi a été bonifié, pas à cause du ministre
des Affaires municipales. Il dort encore, lui, et il dort sur la "job" et sur
la "switch" souvent. C'est cela qu'il fait, pendant qu'on est obligé de
faire sa "job" de ce côté-ci. Mais, il n'y a pas juste dans ce
projet de loi que le ministre des Affaires municipales dort sur la "job". J'ai
ici, Mme la Présidente, une espèce de petite brochure qui a
été faite. Et, dans le monde de l'habitation, est-ce que le
programme PARCQ a été opérant? Non. Il était
tellement mal organisé, qu'on n'a pas été capable de s'en
servir.
Dans l'habitation, les personnes se sont élevées contre le
ministre Bourbeau. Partout où il passe, il sème la pagaille.
Est-ce parce qu'il fait bien son travail? Je ne pense pas, Mme la
Présidente. Si un ministre est aussi irresponsable que lui, il faut
absolument que l'Opposition soit de plus en plus vigilante pour
l'empêcher de faire des bêtises. C'est ça, Mme la
Présidente. Donc, notre travail, qu'il soit 1 heure, 2 heures, 3 heures,
5 heures du matin, nous serons là. Nous serons aux aguets. Nous serons
vigilants pour empêcher que les ministres sectoriels fassent des
bêtises. Je vous remercie, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente: Je vous remercie, Mme la
députée de Johnson. M. le député de Laviolette.
M. Jean-Pierre Jolivet
M. Jolivet: Mme la Présidente, je voudrais, avant de
commencer mon intervention, faire une demande de directive. J'aimerais bien que
vous écoutiez ma demande de directive. En vertu du règlement,
à l'article 185, on dit ceci: "le député qui désire
proposer que l'Assemblée se prononce sur une question le fait par
motion." À l'article 186, on dit: "Toute motion adoptée devient
soit un ordre, soit une résolution de l'Assemblée: un ordre quand
l'Assemblée enjoint à une commission, à un
député ou à toute autre personne de faire quelque chose;"
toute motion est, à ce moment-là, en vertu de l'article 187, soit
de fond, soit de forme. Alors, j'ai l'intention de vous présenter une
motion, Mme la Présidente, qui demandera à l'Assemblée
nationale du Québec d'enjoindre le ministre des Affaires municipales
d'être présent ici maintenant et de prendre les dispositions
nécessaires pour qu'on l'avertisse et qu'il vienne ici, et qu'en
conséquence le ministre des Affaires municipales vienne entendre les
derniers intervenants du Parti québécois parce qu'il aura
à utiliser son droit de réplique.
Il est important que, après avoir quitté vers les petites
heures, il puisse être ici pour au moins nous donner la réplique
à tout ce qu'on a dit. Il me semble que c'est tout à fait normal
et j'aimerais connaître votre opinion et si cela vous demande du temps de
réflexion, je suis prêt à attendre, Mme la
Présidente, que vous me le fassiez savoir.
La Vice-Présidente: M. le député de
Laviolette, nous en sommes présentement à la prise en
considération du rapport concernant le projet de loi 88 et comme telle
votre motion est irrecevable. Le débat doit porter là-dessus et
c'est là-dessus que je dois vous entendre. M. le député de
Laviolette, je suis prête à vous entendre, mais seulement sur la
prise en considération du rapport du projet de loi 88.
M. Jolivet: Est-ce que vous me permettez, Mme la
Présidente, de vous poser une autre question? Je suis en commission
parlementaire et la motion qui nous a été donnée à
l'Assemblée nationale concerne l'étude détaillée du
projet de loi article par article d'un projet Y. À ce moment-là,
je suis en commission parlementaire; les règles de l'Assemblée
nationale s'appliquant en commission parlementaire, je peux faire une motion et
demander qu'une personne vienne. Vous avez cela continuellement, Mme la
Présidente. Je sais que vous ne présidez pas les commissions
parlementaires, ce sont des présidents de séance ou des
présidents des commissions parlementaires prévus par notre
règlement et tout député peut présenter une motion
dans laquelle il indique: Je veux entendre telle personne, et même
demander qu'un ministre soit présent. Or, je ne vois pas comment il se
fait qu'en commission parlementaire, les règles de l'Assemblée
nationale s'appliquant, on aurait des règles différentes de
celles l'Assemblée nationale.
La Vice-Présidente: M. le député de
Laviolette, vous savez qu'ici nous sommes à l'Assemblée
nationale; nous ne sommes pas en commission et comme telle votre question est
pour le moins hypothétique et là-dessus je suis prête
à vous reconnaître, mais sur la prise en considération du
rapport de la commission qui a étudié le projet de loi 88.
Là-dessus, M. le député de Laviolette, je suis prête
à vous reconnaître.
M. Jolivet: Mme la Présidente, je fais une motion formelle
pour que le ministre des Affaires municipales soit présent au moment
où nous allons entendre les derniers intervenants du Parti
québécois pour qu'il puisse faire une réplique ici
à l'Assemblée nationale au regard de tout ce qui a
été dit depuis maintenant près de dix heures. Il me semble
que la normalité des choses veut que le ministre des Affaires
municipales soit ici pour répliquer, sinon on va comprendre qu'il n'a
rien à dire, comme de coutume.
La Vice-Présidente: En vertu de
l'article 188, M. le député de Laviolette, je vous
indiquerais que le député qui désire présenter une
motion doit donner un préavis. Or, nous n'avons pas de préavis.
Donc, vous n'avez qu'à l'inscrire au feuilleton et je suis prête
à vous reconnaître là-dessus, mais je suis prête
à vous reconnaître sur la prise en considération du rapport
du projet de loi 88.
M. Jolivet: Question de directive, Mme la Présidente.
J'aimerais savoir, alors que nous sommes à la fin du débat,
semblerait-il, puisque personne de l'autre côté ne veut
intervenir, comment je dois m'y prendre, parce que si, à la fin de mon
intervention vous vous apercevez que personne d'autre ne veut intervenir, vous
allez considérer que le ministre a utilisé son droit de
réplique. Comment puis-je demander au ministre des Affaires municipales,
qui normalement devrait être ici pour entendre ce que l'on a à
dire et ce qu'on a encore à dire, de répliquer à tous mes
collègues et à moi sur ce qu'on a dit? Il me semble que la
logique veut que le ministre des Affaires municipales prenne ses
responsabilités et s'il n'est pas capable de les prendre, que
l'Assemblée nationale le somme de venir ici.
La Vice-Présidente: M. le député de
Laviolette, je tiens à vous dire que c'est le droit du ministre
d'utiliser ou non son droit de réplique et là-dessus nous ne
pouvons intervenir. (7 h 40)
M. le député de Taillon.
M. Jolivet: Non.
La Vice-Présidente: Non? M. le député
Laviolette.
M. Jolivet: Mme la Présidente, je trouve malheureux que
l'ensemble de ce débat qui a eu lieu au cours de la soirée et de
la nuit ait eu pour effet de faire en sorte... Mme la Présidente, je
peux m'arrêter et cela ne comptera pas sur mon temps si on me
dérange.
Ce que j'étais en train de dire, Mme la Présidente, c'est
que nous sommes à la fin d'une discussion où le ministre des
Affaires municipales n'a été aucunement présent et, pour
nous, ce n'est pas nouveau. Il n'est pas présent. Il est, quand il est
là, absent d'esprit dans certaines circonstances, puisqu'il
n'écoute personne.
Malgré tout cela, le député de Jonquière,
notre collègue, qui a fait un travail exceptionnel en est arrivé
à faire en sorte que les gens de l'Union des municipalités du
Québec, les gens de l'Union des municipalités régionales
de comté du Québec, les gens de l'UPA par d'autres
intermédiaires, puisqu'on a des contacts et je suis, en termes de
responsabilité, à ce niveau...
Mme la Présidente, est-ce que je peux avoir le silence pour
travailler ici?
La Vice-Présidente: S'il vous plaît, à
l'ordre! Je vous demanderais, si vous avez des...
Des voix: ...
La Vice-Présidente: À l'ordre, s'il vous
plaît! M. le député de Laviolette, vous pouvez
continuer.
M. Jolivet: Mme la Présidente, j'ai entendu des choses,
encore, en cette Chambre. Vous n'étiez pas présente, mais je
voudrais bien que le député de Saguenay évite les menaces
qu'il est encore en train de me faire, de fermer les portes.
M. Maltais: Une question de règlement.
La Vice-Présidente: Une question de règlement, M.
le député de Saguenay.
M. Maltais: Je pense que le député de Laviolette
prend ses rêves pour des réalités. Il y a quand même
une limite! Je suis bien assis à mon pupitre; je l'écoute
religieusement. S'il peut arrêter d'interrompre cette Chambre pour faire
son discours, on va pouvoir l'applaudir. Merci, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente: Cela n'était pas une question
de règlement. Là-dessus, M. le député de
Laviolette, je vous reconnais.
M. Jolivet: Merci, Mme la Présidente, de me
reconnaître ce droit. Mais je l'ai entendu et j'ai des oreilles pour
entendre. Ce n'est pas du joli.
Une voix: II n'y a pas de danger!
M. Jolivet: Ce n'est pas du joli quand même. Mme la
Présidente, je vous le dis! Mme la Présidente, j'ai l'intention
d'intervenir et je vais prendre tout mon temps. Je vais m'asseoir et vous me
direz quand je commencerai. Il m'en reste dix.
La Vice-Présidente: S'il vous plaît! Je
comprends...
M. Jolivet: Vous me direz à quelle heure je dois
commencer.
La Vice-Présidente: Je comprends que vous avez eu une dure
séance, mais je demanderais la collaboration de la Chambre afin que nous
poursuivions nos travaux dans le meilleur décorum.
M. le chef de l'Opposition.
M. Chevrette: Mme la Présidente, vous demandez la
collaboration de la Chambre et je ferai remarquer que, de ce
côté-ci, c'est notre collègue qui parle et qu'il n'y a
aucun député qui parle, aucun député ne
l'interrompt de ce côté-ci de la Chambre. J'espère, quand
vous vous lèverez, Mme la Présidente, que vous puissiez pointer
du doigt les coupables et non pas ceux qui ne font rien et qui ne demandent pas
mieux que de continuer le débat. Vous demandez la collaboration des
députés qui ne sont pas à l'ordre, qui ne respectent pas
le droit de parole de mon collègue et, cela, c'est la partie
ministérielle.
Je veux bien que la présidence se lève et distribue les
reproches, mais je n'accepte pas qu'on soit impliqué dans un reproche
quand on ne fait rien du tout.
La Vice-Présidente: Cela était une mise au point,
M. le chef de l'Opposition. Je vous ai entendu là-dessus et je suis
prête à reconnaître le député de Laviolette.
M. le député de Laviolette.
M. Jolivet: Merci, Mme la Présidente. Ce que
j'étais en train de dire, au moment où on m'a interrompu, c'est
ceci: C'est que le ministre des Affaires municipales n'a pas été
présent dans l'ensemble de ce débat. Il n'est pas ici, encore une
fois. J'ai dit que ce n'était pas nouveau.
Nous avons eu l'occasion de travailler en commission parlementaire. Mon
collègue, le député de Jonquière, a réussi,
grâce à ses interventions et à tous les collègues
qui ont travaillé avec lui à faire en sorte que des changements
majeurs soient apportés au projet de loi qui, au départ, ne
valait pas la peine d'être présenté.
Ce n'est pas la première fois que cela arrive et il me semble
qu'il serait logique que dans un contexte comme celui-là le ministre
vienne écouter ce qu'on a à dire, puisque notre collègue a
réussi, avec l'Union des municipalités régionales de
comté, avec l'Union des municipalités du Québec, par mon
intermédiaire et l'intermédiaire de gens de mon bureau et du
bureau du chef de l'Opposition... Nous avons parlé avec des gens de
l'UPA sur des articles qui les concernent. Je dois vous dire, Mme la
Présidente, que nous avons fait un travail colossal avec la petite
équipe que nous avons, mais une équipe travaillante. Il me semble
que ce n'est pas sorcier de reconnaître que n'eût été
ce travail, ce projet de loi ne valait même pas la peine d'être
adopté par cette Assemblée nationale.
Vous comprendrez très bien cependant que les gens au pouvoir
détenant la majorité feront en sorte que le projet de loi soit
quand même adopté. C'est leur droit. Nous les aurons mis en garde
contre les difficultés que cela comporte. Nous leur aurons dit qu'il y a
eu malheureusement et qu'il y aura malheureusement des gens qui vont subir les
contrecoups de ce projet de loi.
Je donnais un exemple lors du discours d'adoption du principe, à
savoir que des municpalités dans mon comté m'ont justement averti
des dangers de l'adoption de ce projet de loi. Je disais et je le
répète, parce que les gens de Grand-Mère ont saisi le
message, qu'il y a dans notre région, avec Shawinigan, Shawinigan-Sud,
Saint-Georges-de-Champlain et Grand-Mère, un esprit de plus en plus
régional. Cet esprit régional a été
créé par des gens de bonne foi. Les gens ont dit: On se regroupe
dans une MRC en sachant qu'il y a des difficultés. Pour compenser les
difficultés entre le secteur urbain et le secteur rural, ils ont
décidé de nommer des personnes à des postes de
façon à ce qu'une année ce soit un maire venant d'une
municipalité urbaine qui soit le préfet et, cette même
année - les deux années qui sont sujettes en vertu du
règlement - le sous-préfet viendrait du milieu rural. Au cours
des deux années suivantes, ce serait l'inverse. Le préfet
viendrait du milieu rural et le sous-préfet viendrait du milieu urbain.
Tout cela a amené une pensée régionale.
Vous imaginez si le projet de loi était adopté comme tel
et si on obligeait les municipalités, sur des décisions qui leur
appartiennent, à les prendre elles-mêmes sans être sujettes
à des obligations vis-à-vis des autres municipalités...
L'exemple que je donnais, à deux tiers des voix, c'était le
kiosque touristique de la région de la Mauricie, dans le centre de la
Mauricie. S'il était décidé, comme on veut le faire
présentement, à la majorité des deux tiers, la ville de
Grand-Mère serait pénalisée parce qu'elle aurait deux
paiements à faire, un paiement pour la ville de Grand-Mère, parce
qu'elle a son propre kiosque touristique, et un autre paiement pour le
régional. Les représentants de la ville de Grand-Mère ont
dit: Nous sommes prêts à en payer, mais les mêmes
quotes-parts, au total, les deux ensemble, tout en assurant la capacité
pour l'ensemble des deux kiosques touristiques d'avoir une pensée
régionale. La preuve, c'est que la Chambre de commerce de
Grand-Mère a proposé un Salon de l'entreprise et de
l'entrepreneurship. Les gens de Shawinigan ont trouvé l'idée
bonne. Les représentants de la ville de Grand-Mère ont dit:
D'accord; associons-nous. Et les deux chambres de commerce, celles de
Grand-Mère et de ShawiniganShawinigan-Sud, ont mis au point une
organisation intéressante.
Est-ce que, par l'intermédiaire d'un projet de loi comme
celui-là, on va venir semer la pagaille? Oui, je le pense, Mme la
Présidente, et c'est cela que nous disons au ministre. Mais le ministre
n'est même pas ici pour nous entendre, pour nous écouter. Comment
voulez-vous qu'il corrige cela?
C'est cela le problème. C'est cela le désastre. C'est un
ministre qui n'est pas là. Je n'oserais pas employer d'autres
qualificatifs, mais je vous dirai qu'il nous donne l'impression, comme le
disait ma collègue, de dormir sur la "switch", de dormir sur le travail,
de telle sorte qu'il ne se fait pas. C'est ce que nous voulions lui dire, Mme
la Présidente. Notre collègue, le député de
Jonquière, a dit et ses paroles ont été reprises quasiment
mot à mot par le maire de la ville de Québec, M. Pelletier, que
c'est un drôle de ministre, c'est un notaire habitué à
signer au bas d'une lettre, au bas d'une entente, après que les parties
se soient entendues, mais il n'est pas capable de prendre ses
responsabilités comme ministre pour que les gens s'entendent. Au
contraire, il fait même en sorte que les gens se disputent. Depuis deux
ans, mon collègue, lui qui a l'expérience comme maire, lui qui a
été responsable de l'Union des municipalités du
Québec, répète que c'est un ministre qui, en fait, n'est
pas un ministre. C'est une personne qui ne prend pas ses
responsabilités. Il met le feu partout. Il enrage le monde de telle
sorte que, ce matin, à environ huit heures, il n'a même pas
été capable de rester ici pour écouter ce que nous avions
à dire. (7 h 50)
Vous pensez qu'après, tout va aller bien comme dans le meilleur
des mondes, madame la marquise. Je ne le pense pas, Mme la Présidente.
J'essaie de le répéter et je vais le répéter
jusqu'au bout. Je vais apppuyer mon collègue de Jonquière qui -
il l'a dit -a vu maintenant ses efforts récompensés cette semaine
par le maire, M. Pelletier, qui, tout le monde sait très bien, n'est pas
péquiste. Mais il avait des choses à dire, il en avait
ras-le-bol! Il en avait par-dessus la tête de voir ce que le ministre a
fait jusqu'à maintenant. En ce sens, Mme la Présidente, on ne
peut accepter de cautionner des gestes comme ceux-là! On ne peut pas se
permettre, comme Opposition, de ne pas le dire. Nous avions le goût de le
dire, nous l'avons dit! Mme la Présidente, nous allons le dire
jusqu'à la fin en appuyant notre collègue de Jonquière
plutôt que le ministre.
Des voix: Bravo!
La Vice-Présidente: Merci, M. le député de
Laviolette. M. le député de Taillon.
M. Claude Filion
M. Filion: Je vous remercie, Mme la Présidente. Je pense
qu'il n'est pas surprenant qu'on travaille à cette heure de la nuit ou
du matin sur les projets de loi du ministre des Affaires municipales. Ce que
l'Opposition essaie de faire cette nuit, ce matin, c'est de faire le travail
que le ministre des Affaires municipales n'a jamais fait. Ce n'est pas
compliqué. Là, cela donne des projets de loi qui arrivent
à l'Assemblée nationale, qui sont mal foutus, mal ficelés,
mal ligotés, on en aura encore un autre exemple peut-être
aujourd'hui, j'espère, ou en fin de semaine ou la semaine prochaine
quand on parlera du projet de loi sur la commission des relations du travail du
ministre du Travail, sa tentative de projet de loi qu'on devrait dire, l'une
des nombreuses tentatives du ministre de faire une loi. C'est la même
chose pour le ministre des Affaires municipales pour le projet de loi 88. On ne
peut pas, dans le domaine municipal, travailler en fonction des
intérêts du cabinet du ministre ou en fonction de l'agenda du
cabinet du ministre. On a beau dire que les municipalités sont les
créatures du gouvernement, mais ce sont des créatures qui ont
atteint une certaine maturité et qu'on ne peut pas traiter du revers de
la main, comme si c'étaient des pantins au service du gouvernement.
Lorsque l'Union des municipalités régionales de comté du
Québec stigmatise le comportement des ministères libéraux,
notamment face au comportement centralisateur des fonctionnaires, cela traduit
une réalité des municipalités qui sont insatisfaites du
type de gouvernement que nous sert le ministre des Affaires municipales dans
l'ensemble de ses dossiers. Le projet de loi 88 est uniquement symptomatique
à ce moment-là d'une administration déficiente, d'une
conception déficiente du rôle du ministre des Affaires
municipales.
Mme la Présidente, le projet de loi 88 avait pour but d'apporter
diverses modifications à la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme,
à la Loi sur les cités et villes et au Code municipal. Ces
modifications ont trait à l'urbanisme ainsi qu'au fonctionnement et aux
compétences des municipalités régionales de comté.
Je viens de dire, il y a quelques minutes, ce que l'Union des
municipalités régionales de comté pense du projet de loi
88. Ainsi, ce projet de loi prévoit que la municipalité
régionale de comté pourra, à une forte majorité de
son conseil, acquérir compétence sur un service municipal
à l'égard de toutes les municipalités de son territoire.
Elle pourra aussi, de la même façon, accepter la
délégation d'un pouvoir par le gouvernement. La
municipalité soumise à cette compétence et la
municipalité régionale de comté pourront toutefois s'y
soustraire. Je pense que cela vaut la peine de continuer les notes
explicatives.
Le projet contenait - notez bien le temps des verbes parce qu'il s'est
passé des choses entre le moment où le ministre l'a
déposé et le projet de loi tel qu'il est rendu maintenant, on
reviendra aux choses importantes - également des dispositions qui
permettraient de réviser, à l'initiative de la
municipalité régionale de comté, le mode de
représentation et de prise de décision du conseil de celle-ci. Il
prévoit aussi un allégement de la procédure
d'entrée en vigueur des schémas d'aménagement et un
resserrement de la cohésion des dispositions relatives à la
conformité des règlements d'urbanisme au plan d'urbanisme de la
municipalité.
Enfin, il permettrait aux producteurs agricoles de se prononcer, par
l'intermédiaire d'un comité de concertation devenu
inopérant, sur certaines modifications au zonage dans une zone agricole.
Savez-vous ce qui s'est passé avec le projet de loi 88 qui a
été présenté? Est-ce que cela a été
suivi, Mme la Présidente, par les parlementaires qui nous restent, ce
matin? Ce n'est pas compliqué, n'eût été du travail
du député de Jonquière, il n'en resterait plus rien. Les
gens n'en voulaient pas, personne n'en voulait. Le député de
Jonquière a réussi à l'améliorer, le bonifier sur
plusieurs aspects. Malheureusement, on ne pouvait pas, même en apportant
les meilleurs amendements du monde, changer le fond de certains principes qui
avaient été mal conçus par le ministre des Affaires
municipales. Encore une fois, c'est le style de gouvernement qu'on a qui
s'imagine que la vérité vient des néons dans les officines
ministérielles. Dans un domaine aussi névralgique que les
affaires municipales, il faut tenir compte de nos partenaires.
Le ministre des Affaires municipales a été incapable,
pendant deux ans, sur le plan politique d'établir sa
crédibilité auprès des municipalités, auprès
des municipalités régionales de comté. Cela donne le type
de problèmes qu'on a vus, cette semaine, autour de la charte de la ville
de Québec. Cela donne le type de problèmes qu'on a vus autour du
projet de loi 88. Les gens n'en veulent pas. Evidemment, je ne les blâme
pas. La Presse - Montréal, 26 octobre 1987. Il faut le faire - Bourbeau
entend renforcer les MRC et offrir le droit de retrait aux
municipalités. On renforce les MRC mais on donne le droit de retrait aux
municipalités. Une belle opération de presse et de relations
publiques, peut-être mais les municipalités, les MRC, les
parlementaires de l'Opposition ne sont pas dupes des communiqués de
presse du ministre des Affaires municipales. Il entend - imaginez-vous -
renforcer les MRC mais offrir le droit de retrait aux municipalités.
D'ailleurs, je cite les propos du ministre, lui-même, à ce
moment-là. Il disait: À partir de maintenant les
municipalités locales décideront de ce qu'elles confient aux MRC,
a expliqué le ministre Bourbeau, et il y a quand même un droit de
retrait pour les municipalités. Celles-ci ne seront donc plus
obligées de payer pour les services qu'elles refuseront -il fallait la
faire, celle-là - de recevoir des
MRC.
On dirait que le projet de loi 88 est le travail mal fait d'un
étudiant de première année en administration publique.
À la limite - c'est toujours le ministre - certaines MRC pourraient
avoir comme seule responsabilité le schéma d'aménagement
et son suivi, précise en outre M. Bourbeau. Les schémas sont, en
bonne partie, réalisés par plusieurs MRC, sauf erreur. Bref, on a
tenté de jeter de la poudre aux yeux des municipalités et des
municipalités régionales de comté. On a oublié de
faire le travail de base qui consiste à garder un lien, non pas
seulement un lien quand on a un projet de loi, non seulement un lien quand on
veut passer une commission, mais, un lien étroit entre les
représentants de la population, les dirigeants du gouvernement et les
partenaires. Sinon, on paie un prix. Le ministre du Travail et ministre de la
Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu en sait quelque chose.
On paie un prix quand on fait défaut de garder un lien étroit
avec les organismes qui, eux, vivent chaque jour les réalités des
projets de loi qu'on adopte ici. (8 heures)
Les parlementaires en face de nous s'imaginent qu'une fois qu'on a
adopté une loi, elle est bonne. Une fois qu'on a adopté une loi,
on s'en va sur le terrain pour qu'elle soit vécue, notamment par les
municipalités dans ce cas, et par les différents intervenants.
C'est pour cela que le ministre des Affaires municipales, député
de Laporte, devrait prendre exemple sur le député de
Jonquière qui, lui, a gardé ces liens, qui lui connaît
l'importance de cette relation étroite qui doit exister entre le
gouvernement et les intervenants. C'est comme si on faisait une politique
familiale sans consulter les gens. On arriverait avec quoi? Rien. C'est un peu
ce qui est arrivé, me chuchote avec raison M. le chef de l'Opposition,
dans le cas de la politique familiale. Est-ce qu'on a peur, de l'autre
côté, de sortir un petit peu des tours d'ivoire et d'aller voir
les gens, de les consulter et de discuter? C'est eux qui vont administrer cela.
Ce sont les MRC, ce sont les municipalités régionales de
comté et les municipalités. On a peur d'aller à l'UMQ
autrement que quand c'est le congrès annuel pour tenter de leur jeter de
la poudre aux yeux.
Est-ce qu'on ne devrait pas garder un contact étroit qui
permettrait aux parlementaires de passer leurs nuits où ils devraient
les passer et de passer leurs journées là où ils devraient
les passer de façon efficace? Mais non. On paie, cette nuit et ce matin,
avec le projet de loi 88, pour la mauvaise administration du ministre des
Affaires municipales. Je vous remercie, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente: Merci, M. le député
de Taillon. M. le député de Terrebonne.
Motion d'urgence proposant que l'Assemblée
étudie les moyens
à prendre pour que les hôpitaux
mettent plus de lits à la disposition des
enfants malades
M. Yves Blais
M. Blais: Mme la Présidente, j'aurais une motion d'urgence
à présenter à cette Chambre.
Des voix: Ah! Ah! Ah!
M. Blais: Nous sommes informés par les responsables des
soins à donner aux enfants malades du Québec que des enfants ne
peuvent pas être hospitalisés, malgré des besoins
d'hospitalisation pressants et la fermeture de plus de 500 lits alloués
aux enfants dans nos hôpitaux au Québec. Je propose la motion
d'urgence suivante: "Que l'Assemblée nationale étudie
immédiatement les moyens à prendre pour que les enfants malades
du Québec aient des lits disponibles en nombre suffisant pour
répondre aux besoins."
La Vice-Présidente: M. le député de
Terrebonne, en vertu de l'article 188, vous ne pouvez, à ce stade-ci,
présenter une motion d'urgence. M. le député de
Terrebonne, est-ce une autre question de règlement?
M. Blais: Non, c'est la même, Mme la Présidente.
J'aimerais que vous m'expliquiez la non-recevabilité ou la
recevabilité de cette motion, parce que quand un besoin urgent se fait
sentir, Mme la Présidente... Laissez-moi quinze secondes, si vous me
permettez, vous seriez gentille. Si jamais, par exemple, il tombait une bombe
atomique sur Montréal à 8 h 5 et qu'on proposait une motion
d'urgence, vous nous diriez que l'urgence doit se discuter à 15 heures
cet après-midi. Il y a donc un rapport qui nous est parvenu comme quoi
des enfants malades ne trouvaient pas de lits disponibles pour se faire
soigner. Ne choisissant pas l'heure pour que nos enfants soient malades, c'est
à 8 heures. Je demande donc quelle raison vous avez à me donner
pour que cette motion ne soit pas recevable.
La Vice-Présidente: Là-dessus, M. le
député de Terrebonne, je vous réfère à
l'article 188 de notre règlement qui dit que "le député
qui désire présenter une motion doit en donner un
préavis". Or, il faut que ce préavis apparaisse au feuilleton.
Là-dessus, je ne peux recevoir votre motion. En vertu de l'article 188,
une motion d'urgence doit figurer au feuilleton et il doit y avoir
préavis. M. le leader de l'Opposition.
M. Gendron: Mme la Présidente, c'est on ne peut plus clair
que c'est au moment où on est saisi d'une information qu'il y a urgence.
En conséquence, je prétends que vos arguments ne sont pas
recevables. Mon collègue, le député de Terrebonne, indique
qu'il a une motion d'urgence à la suite d'informations qui nous ont
été transmises. En conséquence, je pense que cette motion
est débattable dès qu'on est saisis d'une information aussi
importante, ayant autant de conséquence pour l'avenir du Québec,
surtout avec les problèmes de la politique familiale qu'on n'a pas.
Une voix: Surtout les jeunes...
M. Chevrette: II n'y a pas besoin d'avis au feuilleton pour
cela.
M. Gendron: Depuis quand, Mme la Présidente, pour
présenter une motion d'urgence, faut-il présenter un avis au
feuilleton? Par définition, on détruirait l'argument même
de l'urgence. Je n'ai jamais présenté une motion d'urgence avec
un avis au feuilleton. Par définition, une motion d'urgence, c'est au
moment même où le Parlement décide de saisir les
parlementaires d'une question importante. Il n'y a aucune
référence au feuilleton.
La Vice-Présidente: M. le leader de l'Opposition,
présentement, je tiens à vous dire que les débats
d'urgence se débattent aux affaires prioritaires, soit aux affaires du
jour. Nous sommes présentement, en vertu de notre règlement,
rendus aux affaires inscrites au feuilleton c'est-à-dire à
l'article 96. D'autant plus que les débats d'urgence, en vertu de
l'article 89, le député doit au plus tard une heure avant la
période des affaires courantes remettre un écrit de sa demande au
président. Là-dessus, on n'a rien reçu, donc votre motion
est irrecevable.
M. Gendron: Un instant, Mme la Présidente! Êtes-vous
en train de nous dire qu'on ne serait pas rendu aux affaires du jour, à
8 h 5?
Des voix: Ha! Ha! Ha!
M. Gendron: II me semble que c'est on ne peut plus clair
qu'à 8 h 5 du matin, après avoir siégé toute la
nuit, on est sûrement rendu aux affaires du jour. On vient de commencer
une nouvelle journée.
Des voix: Bravo!
La Vice-Présidente: Ce n'est pas la même
définition des affaires du jour que celle de notre règlement.
Oui, M. le député
de Laviolette.
M. Jolivet: Allez-y!
M. Sirros: Mme la Présidente, je voulais simplement
demander...
M. Blais: Vous avez certainement une jurisprudence qui fait
exception à une heure fixe pour qu'une urgence arrive. J'en ai au moins
une. Lorsque la guerre de 1939-1945 a été déclarée,
le Parlement britannique était en pleine session - Mme la
Présidente, j'aimerais m'expliquer pendant 15 secondes -M. Churchill a
fait une motion d'urgence en plein avant-midi.
La Vice-Présidente: Là-dessus, M. le
député de Terrebonne, je vous renvoie à ma décision
antérieure. Je ne peux reconnaître votre question de
règlement.
M. Jolivet: Mme la Présidente...
La Vice-Présidente: M. le député de
Laviolette.
M. Jolivet: ...question de règlement. Vous m'avez dit tout
à l'heure que je ne pouvais pas présenter de motion, vous fiant
sur l'article 188. Je vous ai dit que, malheureusement, j'ai été
obligé d'accepter votre décision. Je vais vous rappeler que, dans
les règlements, à la page 26, aux motions sans préavis,
à l'article 84, on dit ceci: "Les motions touchant les travaux de
l'Assemblée et ne requérant pas de préavis sont
prévues par la loi et le présent règlement. "Malgré
l'article 188, tout député peut présenter sans
préavis une motion de fond." C'est ce que je croyais avoir le droit de
faire tout à l'heure. Alors, je me prévaux de ce droit. D'abord,
vous devez entendre ma proposition, pour voir si elle est recevable ou pas. Ma
proposition est bien simple: Je propose que l'Assemblée nationale du
Québec demande au ministre des Affaires municipales d'être ici
présent pour venir entendre les derniers discours qui restent à
faire du côté du Parti québécois et qu'il puisse
enfin répliquer à notre...
La Vice-Présidente: À l'ordre, s'il vous
plaît! Nous sommes présentement aux affaires du jour et la motion
dont vous faites mention, M. le député de Laviolette, doit
être présentée aux affaires courantes. Or, elle est comme
telle irrecevable. Là-dessus, je suis prête à
reconnaître... M. le député de Laviolette.
M. Jolivet: Je m'excuse, Mme la Présidente. Je voudrais
savoir... Je lis bien l'article 84. J'aimerais bien comprendre, c'est une
question de directive. Vous me dites que ma motion sans préavis doit
arriver aux affaires du jour. J'ai eu l'occasion nombre de fois depuis onze ans
de voir le leader du gouvernement ou d'autres personnes faire des motions sans
préavis. Je vous pose la question ou la directive suivante... Je ne
conteste pas, je pose une question de directive. Non, non, je m'adresse
à madame.
La Vice-Présidente: S'il vous plaît!
M. Jolivet: Ma question de directive, Mme la Présidente:
Je crois comprendre qu'il n'est aucunement question dans le règlement de
faire quelque motion sans préavis que ce soit et qu'il faut le faire
à des moments précis dans la journée. (8 h 10)
La Vice-Présidente: M. le député de
Laviolette, je tiens à vous référer également
à l'article 53 de notre règlement où il est
spécifié à quel moment on peut faire des motions sans
préavis. Les motions sans préavis, en vertu de l'article 53, se
font aux affaires courantes. Or, présentement, nous sommes aux affaires
du jour. Donc, c'est pour cela, M. le député de Laviolette, que
je dis que votre question de règlement est irrecevable.
Là-dessus, je suis prête à reconnaître le prochain
intervenant sur la prise en considération du rapport qui a
procédé à l'étude détaillée du projet
de loi 88. M. le député de Dubuc.
Reprise du débat sur la prise
en considération du rapport
de la commission qui a
étudié le projet de loi
M. Hubert Desbiens
M. Desbiens: Mme la Présidente, j'avais
espéré entendre non pas les applaudissements de l'autre
côté, mais l'expression de députés du parti
ministériel sur un projet de loi d'une telle importance. À 8 h 10
le matin, après avoir siégé toute la nuit, le gouvernement
oblige l'Opposition, dans une tentative d'écraser la résistance,
de nous "bulldozer", comme on dit... Ce projet de loi 88 est d'une importance
extrême quand on sait que c'est le projet de loi modifiant la Loi sur
l'aménagement et l'urbanisme, la Loi sur les cités et villes et
le Code municipal du Québec. Ce projet de loi touche les fondements
mêmes de notre vie municipale. Je vois le ministre
délégué à la Famille, à la Santé et
aux Services sociaux qui trouve cela drôle ce matin quand on discute d'un
projet d'une telle importance. Je comprends que pour lui la démocratie
n'a pas grande importance et n'a pas grand prix. Les notes explicatives du
projet de loi 88, d'ailleurs, nous indiquent, nous éclairent sur les
intentions du ministre des Affaires municipales à cet égard. Il
nous dit très bien
qu'il a pour objet d'apporter des...
La Vice-Présidente: J'ai une question de règlement.
Effectivement, je vais constater s'il y a quorum. Qu'on appelle les
députés! Nous avons donc quorum. Nous pouvons poursuivre, M. le
député de Dubuc.
M. Desbiens: Merci, Mme la Présidente. Nous voyons
l'intérêt que les membres du gouvernement portent à la
démocratie. On nous oblige à discuter d'un projet de loi pendant
toute une nuit et on ne se rend même pas à l'Assemblée
nationale pour faire valoir son point de vue ou écouter les ultimes
représentations fort pertinentes que les membres de l'Opposition, se
faisant la voix des MRC, de l'UPA et des municipalités du Québec,
font entendre sur ce projet de loi 88. On sait à quel point
l'Opposition, particulièrement notre collègue, le
député de Jonquière, le maire des maires, comme on
l'appellait, à l'époque où il était
président de l'Union des municipalités du Québec, comment
et avec quelle ardeur, avec quel soin il a étudié en commission
parlementaire, ici, à l'Assemblée nationale, le projet de loi 88,
lequel a permis tout de même d'apporter des modifications importantes et
qui vont sauver au moins l'essentiel. Je me souviens très bien que
l'Union des municipalités régionales de comté du
Québec a d'une façon très évidente souhaité
pouvoir exprimer son opinion. Je sais aussi que, lorsque l'étude de ce
projet de loi a commencé, l'Opposition a essayé de faire entendre
la voix de l'Union des municipalités du Québec, laquelle a
déjà dans son dernier congrès exprimé des
réserves fort importantes sur le comportement du ministre actuel et du
gouvernement actuel concernant les municipalités du Québec. M.
Roger Nicolet, son président, a même dénoncé
à un moment donné le comportement centralisateur de certains
ministères ou ministres sectoriels.
Je rappelle que le projet de loi a pour objectif, selon les notes
explicatives que j'avais commencé à lire quand j'ai
été interrompu, d'apporter des modifications à la Loi sur
l'aménagement et l'urbanisme, à la Loi sur les cités et
villes et au Code municipal. Quand on touche à l'urbanisme,
évidemment, on touche, comme je le disais au départ, au coeur
même de la vie des citoyens et des citoyennes des municipalités du
Québec. Lorsque le gouvernement précédent, soit le
gouvernement du Parti québécois, a décidé de voter
ou d'adopter la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, la loi 125, cela a
marqué une époque importante, je crois, de l'administration au
Québec. La loi 125 a été le message très direct
à la population du Québec qu'à partir de ce
moment-là le gouvernement du Québec cesserait dans certains
domaines, au fur et à mesure que la situation évoluerait,
d'être le grand meneur de jeu, le grand décideur de tout et de
rien, et qu'il reporterait dans les milieux de vie eux-mêmes les
décisions qu'il était beaucoup plus réaliste de prendre
à l'égard de ces milieux de vie. Donc, c'est la forme de
gouvernement qui est le plus près d'eux et qui leur permet justement de
s'exprimer; parce qu'ils les rencontrent quotidiennement, parce qu'ils vivent
les situations au jour le jour, ces milieux de vie sont gouvernés d'une
façon plus proche par les municipalités. C'est le message que le
gouvernement a donc décidé d'envoyer à cette époque
par la loi 125. C'était un message de décentralisation. Il est
important, comme le dit l'Union des municipalités du Québec et
l'Union des municipalités régionales de comté du
Québec, d'éviter de changer les modalités voulues par la
loi 125.
Quand le président de l'Union des municipalités
régionales de comté dit que ce gouvernement a une
incompréhension totale des demandes municipales, qu'il refuse d'accepter
le concept d'aménagement issu de la loi 125, qu'il a une opposition
systématique aux volontés du milieu, qu'il a une vision
étroite des objectifs à privilégier, le président a
parfaitement raison. Il mentionne que ce sont autant de symptômes de ces
réflexes d'une fonction publique qui vit encore dans une autre
ère.
Mais, là-dessus, je ne suis pas tout à fait d'accord, par
exemple, avec le président de l'Union des municipalités
régionales de comté parce que ce ne sont pas les fonctionnaires
qui décident des politiques. Ce sont les hommes et les femmes politiques
qui sont élus pour prendre des décisions politiques. Cela semble
un mal répandu dans ce gouvernement que de faire reporter ainsi sur les
fonctionnaires les défauts de leur action ou de leur inaction. J'ai
très bien vécu ce que l'on a vécu ces derniers mois au
ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, alors que le
ministre avait donné un message à ses fonctionnaires de
réaliser son plan de privatisation. Comme, en cours de route, il arrive
que des citoyens sont absolument opposés à ses objectifs, il se
cache maintenant en disant: Ce n'est pas un plan du ministre, c'est un plan du
ministère. Ce n'est plus un plan politique. C'est un plan des
fonctionnaires. Bravo!
Des voix: Bravo! "Let's go!"
M. Desbiens: Je salue l'arrivée du ministre responsable du
projet de loi, M. le ministre des Affaires municipales, à 8 h 18.
Après nous avoir fait veiller toute la nuit, Mme la Présidente,
le ministre vient s'occuper maintenant de son projet de loi. (8 h 20)
Je sais bien que le ministre n'est pas trop inquiet de ce qui se passe
et des discussions que l'on peut avoir parce que
cela va mieux en son absence, étant donné qu'on a le maire
des maires avec nous qui, lui, est capable de discuter d'affaires
municipales.
Des voix: Bravo!
M. Desbiens: Grâce à lui, on aura quand même
vu les principaux points du projet de loi 88 et les principales objections
soulevées par les municipalités et les municipalités
régionales de comté. C'est grâce à notre
collègue, le député de Jonquière, un ex-maire d'une
très grande expérience, qu'on a pu améliorer le projet de
loi 88 sur l'aménagement et l'urbanisme. Évidemment, Mme la
Présidente, on n'a pas beaucoup de temps à notre disposition pour
en discuter, mais il reste que j'aurais beaucoup aimé rappeler
l'attitude et la position de l'UPA. Le ministre nous a dit, au début de
l'étude de ce projet de loi, que l'UPA était favorable, sauf que
c'est comme tout nouveau tout beau. C'est encore l'exemple que je donne du
fameux plan de nègre de notre ministre du Loisir, de la Chasse et de la
Pêche. C'était tout nouveau tout beau quand les gens l'ont lu la
première fois et, au fur et à mesure qu'ils ont
étudié le plan, ils ont constaté que cela n'avait ni rime
ni bon sens.
Une voix: Un plan de nègre.
M. Desbiens: C'est un peu ce qui se produit présentement
dans le cas de l'UPA. L'UPA s'est rendu compte que ce que le ministre des
Affaires municipales proposait dans son projet de loi n'était pas si
beau que cela paraissait. Après avoir gratté le vernis, les
intéressés se sont rendu compte qu'il y a maintenant des dangers
à la position qui est défendue par le ministre.
Je vois, Mme la Présidente, que mon temps est expiré. Il y
a quand même des dangers dans le projet de loi 88 en ce qui concerne la
protection du territoire agricole et c'est tout un aspect à
développer. Mme la Présidente, comme vous m'indiquez que mon
temps est terminé, je voudrais, une dernière fois, rappeler tout
le travail formidable de notre collègue, le député de
Jonquière, sur ce projet de loi. Je vous remercie.
Des voix: Bravo!
La Vice-Présidente: M. le député de
Terrebonne, sur une question de règlement?
M. Blais: Oui, j'ai une directive, Mme la Présidente.
J'aimerais vous demander s'il est permis de demander au ministre des Affaires
municipales, vu qu'il a été absent toute la nuit, s'il veut qu'on
lui fasse un résumé de nos interventions avant de faire sa
réplique?
La Vice-Présidente: Ce n'est pas une question de
règlement, M. le député de Terrebonne.
Une voix: Est-ce que vous voulez qu'on fasse...
La Vice-Présidente: Une réplique à la suite
de l'intervention du député de Dubuc?
M. André Bourbeau M. Bourbeau: Mme la Présidente.
La Vice-Présidente: ...cinq minutes. Une voix: Juste cinq
minutes?
M. Bourbeau: En réplique, Mme la Présidente.
L'Opposition voulait la présence du ministre des Affaires municipales.
Je suis ici...
Des voix: Bravo!
M. Bourbeau: ...comme je l'ai été, d'ailleurs, en
moyenne 20 heures sur 24 au cours des trois dernières journées.
L'Opposition est au courant. Ces gens m'ont vu partout, ici en Chambre, en
commission parlementaire. D'ailleurs, le critique, le député de
Jonquière, m'a suivi à peu près partout, sauf que je
constate qu'il a disparu de la Chambre depuis quelques heures. Je ne sais pas
exactement où il est allé, mais je le comprends, parce que, moi
aussi, j'ai dû m'absenter quelques instants. Vous noterez, ainsi que ceux
de l'Opposition qui ont encore les yeux ouverts, que le ministre a
changé de chemise et aussi de cravate. Ce n'est pas parce que je ne
voulais pas travailler, Mme la Présidente, mais c'est une mauvaise
habitude que j'ai prise depuis quelques années de changer de chemise et
de cravate au moins une fois par 24 heures. Il y en a qui choisissent de faire
autrement. Je me suis également fait la barbe, Mme la Présidente,
vous pouvez le constater. Il y en a évidemment qui agissent
différemment. Il y en a qui gardent toujours la même chemise. Il y
en a qui ne se font jamais la barbe. Je vois le député de
Taillon, le député de Laviolette, le député de
Shefford...
Des voix: ...
M. Filion: Question de règlement.
Une voix: Attaque vicieuse.
La Vice-Présidente: Je vous ai reconnu, M. le
député de Taillon.
M. Filion: Je comprends que le ministre des Affaires
municipales...
M. Bourbeau: Mme la Présidente, est-ce que...
La Vice-Présidente: Non. J'ai une question de
règlement, M. le ministre des Affaires municipales, et je dois
l'entendre.
Des voix: Assis.
Des voix: C'est une question de règlement.
La Vice-Présidente: M. le député de
Taillon.
M. Filion: Je comprends que le ministre des Affaires municipales
n'a pas le goût de parler du projet de loi 88, de l'Union des
municipalités du Québec, de l'Union des municipalités
régionales de comté ou de l'UPA. J'aimerais, Mme la
Présidente, que vous rappeliez à l'ordre...
La Vice-Présidente: Là-dessus, nous sommes
présentement à la prise en considération du rapport. M. le
ministre des Affaires municipales, vous avez une intervention de cinq minutes.
Naturellement, tout discours en cette Chambre doit se rapporter au sujet. Or,
le sujet de discussion, maintenant, c'est la prise en considération du
rapport.
M. le ministre des Affaires municipales.
M. Bourbeau: Oui, Mme la Présidente. Toujours sur le
rapport de la commission parlementaire qui a étudié le projet de
loi 88, j'ai suivi attentivement les débats en cette Chambre toute la
nuit. D'ailleurs, vous savez que j'ai été ici la plus grande
partie de la nuit. Comme je l'ai dit tout à l'heure, je me suis
absenté un peu, quelques instants. J'ai suivi avec attention les propos
des députés. Quand j'étais en Chambre, évidemment
j'ai suivi de mon siège ou d'un siège très près du
mien et, lorsque j'étais absent, j'ai suivi par le truchement de la
télévision.
Mme la Présidente, une chose est certaine, en dehors des quelques
députés de l'Opposition qui, pour des raisons différentes,
font de l'obstruction systématique, le projet de loi 88 est largement
appuyé par l'ensemble de la population et surtout, et je le souligne,
par les deux grandes unions municipales, ce qui est contraire à ce
qu'ont affirmé les députés de l'Opposition.
Tant l'Union des municipalités régionales de comté
que l'Union des municipalités du Québec ont accepté le
projet de loi 88 et ont encouragé le gouvernement à le
présenter dans sa forme actuelle. J'ai dans mon dossier une lettre du
président de l'UMRCQ et une autre du président de l'Union des
municipalités du Québec disant qu'ils acceptent le projet de loi
88 dans sa forme actuelle, tel qu'il est présenté et avec tous
les amendements que nous y avons apportés. C'est donc contraire à
ce que j'ai entendu tout à l'heure des députés de
l'Opposition qui prétendaient qu'on voulait leur passer sur le corps
avec un projet de loi qui n'était pas accepté.
Mme la Présidente, vous me faites signe que mon temps est
écoulé. J'aurais aimé faire la lecture de ces lettres. Je
vois que l'Opposition me fait confiance et qu'elle est d'accord pour dire avec
nous non seulement que j'ai les lettres et que je peux en faire la lecture mais
également que c'est un bon projet de loi non seulement pour les
députés, pour la population mais aussi pour les
municipalités et pour l'ensemble de tous ceux qui s'intéressent
à la chose municipale au Québec. Je vous remercie.
La Vice-Présidente: Merci, M. le ministre. Question de
règlement, M. le député de Lac-Saint-Jean.
M. Brassard: Mme la Présidente, est-ce que le ministre ne
pourrait pas déposer ces deux lettres en provenance des deux unions du
monde municipal? Je m'indigne du fait qu'il n'ait pas déposé ces
lettres à minuit ou à une heure cette nuit, cela nous aurait
éclairés, cela aurait éclairé le débat.
La Vice-Présidente: M. le ministre des Affaires
municipales.
M. Bourbeau: Mme la Présidente, il m'aurait fait grand
plaisir de déposer cette lettre à minuit mais nous
n'étions pas à discuter du projet de loi 88 à minuit.
J'étais en commission parlementaire avec le critique de l'Opposition qui
n'est d'ailleurs pas ici ce matin, en train de discuter du projet de loi sur la
Communauté urbaine de Québec.
J'ajoute, Mme la Présidente, que je déposerai les lettres
en cette Chambre quand le député de Jonquière sera ici. Il
me fera plaisir de le faire.
La Vice-Présidente: M. le député
d'Ungava.
M. Claveau: Mme la Présidente, voudriez-vous demander au
ministre des Affaires municipales s'il accepte que je lui pose une question
à la suite de son intervention?
La Vice-Présidente: En vertu de l'article 212 de notre
règlement, un député peut poser une question si on a
consentement. Vous ne donnez pas votre consentement, M. le ministre des
Affaires municipales? Il n'y a pas de consentement, M. le député
d'Ungava. Donc, vous ne pouvez poser votre question.
M. Claveau: ...poser ma question au député de
Terrebonne.
Des voix: Ha! Ha! Ha!
M. Blais: J'accepte, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente: Ce n'est pas inclus dans nos
règlements et vous ne pouvez le faire, M. le député
d'Ungava. Là-dessus, je suis prête à reconnaître le
prochain intervenant. M. le ministre du Travail.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Mme la Présidente, je
demanderais à ce que le vote soit reporté à la prochaine
séance.
M. Gendron: Non, Mme la Présidente. Je pense que ce serait
important de tenir le vote tout de suite parce que, sérieusement,
après le vote enregistré, ce serait peut-être important
d'envisager sérieusement de respecter les parlementaires pour au moins
aller déjeuner. Puisque nous sommes toujours aux affaires courantes, je
pense qu'on doit voter immédiatement afin de poursuivre les
étapes de ce projet de loi ultérieurement.
M. Chevrette: Vote enregistré.
La Vice-Présidente: À la demande... En fonction de
l'article 223 de notre règlement, c'est le privilège du leader de
demander le vote reporté. Là-dessus, le vote va être
reporté en vertu de cet article. Donc, vote reporté sur la prise
en considération...
M. Blais: Mme la Présidente.
La Vice-Présidente: Attendez une minute, M. le
député... sur la prise en considération du rapport qui a
étudié le projet de loi 88. Oui, M. le député de
Terrebonne.
M. Blais: Mme la Présidente, j'aimerais dire que notre
règlement stipule bien que c'est le leader du gouvernement qui a ce
privilège et non pas un remplaçant. Donc, dans ce cas-ci, j'ai
l'impression que la décision pourrait être autre, si on lit bien
le règlement.
La Vice-Présidente: Là-dessus, M. le
député de Terrebonne, j'aimerais vous référer
à l'article 17 de notre règlement où il est bien
spécifié que le leader du gouvernement peut être
remplacé par un ministre. Or, la personne qui a fait la demande de vote
reporté est un ministre. Donc, en vertu de cet article 17, je le
reconnais également comme leader du gouvernement. Là-dessus, ceci
étant fait, M. le ministre du Travail, quel article du feuilleton
voulez-vous qu'on appelle?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): L'article 24, Mme la
Présidente.
La Vice-Présidente: À l'article 24 du feuilleton,
le ministre du Travail propose l'adoption du rapport de la commission qui a
procédé à l'étude détaillée du projet
de loi 30, Loi constituant la Commission des relations du travail et modifiant
diverses dispositions législatives.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Mme la Présidente, sauf
erreur, on est rendu à l'étape de l'adoption de la loi.
La Vice-Présidente: Si vous permettez, nous allons
suspendre à loisir.
(Suspension de la séance à 8 h 33)
(Reprise à 8 h 35)
La Vice-Présidente: Vous pouvez vous asseoir, nous allons
reprendre nos travaux. M. le ministre du Travail.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Merci, Mme la Présidente.
Je proposerais l'ajournement de nos travaux jusqu'à 10 heures ce
matin.
La Vice-Présidente: Est-ce que cette motion est
adoptée?
M. Chevrette: Adopté, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente: Adopté. Nous allons donc
ajourner nos travaux jusqu'à 10 heures de matin.
(Fin de la séance à 8 h 36)