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Version finale

33rd Legislature, 2nd Session
(March 8, 1988 au August 9, 1989)

Tuesday, June 7, 1988 - Vol. 30 N° 39

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Journal des débats

 

(Dix heures treize minutes)

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! Un moment de recueillement. Veuillez vous asseoir.

Présence du patriarche d'Antioche

J'ai le très grand plaisir de souligner la présence dans la tribune de Sa Béatitude Ignace-Antoine Hayek, patriarche d'Antioche et de tout l'Orient pour les Syriens catholiques. M. le patriarche.

Nous allons maintenant procéder aux affaires courantes.

Déclarations ministérielles.

Présentation de projets de loi. M. le leader du gouvernement.

M. Gratton: Oui, M. le Président, si vous voulez bien appeler l'article b du feuilleton, s'il vous plaît!

Projet de loi 242

Le Président: À l'article b du feuilleton, j'ai reçu le rapport du directeur de la législation sur le projet de loi 242, Loi concernant le Club des Portes de l'Estrie inc. Le directeur de la législation a constaté que les avis n'ont pas été publiés conformément à nos règlements. Est-ce qu'il y a consentement pour procéder à la présentation de ce projet de loi?

Des voix: Adopté.

Le Président: Adopté.

À l'article b du feuilleton, ce matin, Mme la députée de Johnson présente le projet de loi 242, Loi concernant le Club des Portes de l'Estrie inc. Est-ce que l'Assemblée accepte de se saisir de ce projet de loi?

M. Gratton: Oui. Des voix: Adopté.

Le Président: Adopté.

M. le leader du gouvernement.

Renvoi à la commission du budget et de l'administration

M. Gratton: M. le Président, je voudrais faire motion pour que le projet de loi soit déféré à la commission du budget et de l'administration et pour que le ministre délégué aux Finances et à la Privatisation en soit membre.

Le Président: Est-ce que cette motion de renvoi est adoptée?

Une voix: Adopté.

Le Président: Adopté.

Est-ce qu'il y a d'autres présentations de projets de lot, M. le leader du gouvernement, ce matin?

M. Gratton: Non, M. le Président.

Le Président: Nous allons procéder au dépôt de documents. Mme la ministre des Affaires culturelles et vice-première ministre.

Classement du pont couvert Marchand à Mansfield et Pontefract

Mme Bacon: M. le Président, j'ai l'honneur de déposer l'avis de la Commission des biens culturels du Québec concernant le classement de Mansfield et Pontefract, pont couvert Marchand.

Le Président: Mme la vice-première ministre, votre document est maintenant déposé.

M. le Solliciteur général, toujours à l'étape du dépôt de documents.

Rapport annuel du Bureau du coroner

M. Marx: Oui, M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport annuel 1987 du Bureau du coroner.

Le Président: Votre document est déposé, M. le Solliciteur général.

Dépôt de rapports de commissions, M. le président de la commission...

M. Gratton: M. le Président.

Le Président: M. le leader du gouvernement.

Horaire des consultations sur le projet de loi 34

M. Gratton: À l'étape du dépôt de documents, à la suite d'une entente avec l'Opposition officielle et le député de Gouin, je voudrais déposer l'horaire des consultations particulières de la commission des affaires sociales concernant le projet de loi 34, Loi modifiant la Loi sur les services de santé et les services sociaux et d'autres dispositions législatives.

Le Président: M. le chef de l'Opposition.

M. Chevrette: Est-ce que c'est la liste des intervenants sur la loi 34? Est-ce que le leader pourrait m'indiquer si le nouveau p.-d.g. est toujours le dernier intervenant à 23 heures?

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Gratton: M. le Président, au contraire, le jeudi 9 juin, M. Pierre Lamarche sera là le

premier, le matin.

Le Président: Est-ce que cette motion est adoptée?

M. Gratton: Vous voyez comme cela va bien?

Le Président: Adopté?

Dépôt de rapports de commissions. M. le président de la commission du budget et de l'administration et député de Vanier.

Consultation générale sur le document intitulé "Décloisonnement des intermédiaires"

M. Lemieux: M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport de la commission du budget et de l'administration qui a siégé du 31 mai au 3 juin 1988 afin de procéder à une consultation générale dans le cadre du document intitulé "Décloisonnement des intermédiaires".

Le Président: Votre rapport de commission est déposé, M. le député de Vanier.

M. le président de la commission de l'aménagement et des équipements et député de Bertrand, à l'étape de dépôt de rapports de commissions.

Consultations particulières sur le

document intitulé "Politique d'utilisation

des pesticides en milieu forestier"

M. Parent (Bertrand): M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport de la commission de l'aménagement et des équipements qui a siégé les 1er, 2 et 3 juin 1988 afin de procéder à des consultations particulières sur le document intitulé "Politique d'utilisation des pesticides en milieu forestier".

Le Président: Le rapport de commission est déposé, M. le député de Bertrand.

Dépôt de pétitions, M. le député de Shef-ford.

Parité de l'aide sociale et autres mesures réclamées

M. Paré: Merci, M. le Président. Je demanderais le consentement des membres du gouvernement pour déposer cette pétition.

M. Gratton: D'accord.

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement, M. le leader du gouvernement?

M. Gratton: Oui, M. le Président.

Le Président: Alors procédez, M. le député de Shefford.

M. Paré: Merci, M. le Président. J'ai l'honneur de déposer l'extrait d'une pétition adressée par 626 pétitionnaires de la région de Sherbrooke. Les faits invoqués sont les suivants: "Que des coupures sont faites dans les besoins spéciaux des assistés sociaux, sur la carte de médicaments, dans l'indexation trimestrielle de leur chèque de prestations; que la personne assistée sociale ne se sent pas respectée vu les divers contrôles qui sont effectués."

L'intervention réclamée se résume ainsi: "Qu'on exige la parité de l'aide sociale; que les gains de travail soient au moins ramenés au niveau du seuil de la pauvreté, que des vrais programmes de retour au travail soient implantés, qu'il y ait une hausse des prestations et que l'on cesse les contrôles abusifs auprès des personnes bénéficiaires de l'aide sociale." Je certifie que cet extrait est conforme à l'original de la pétition.

Le Président: M. le député de Shefford, votre pétition est maintenant déposée. Y a-t-il d'autres dépôts de pétitions?

Ce matin, il n'y aura pas d'intervention portant sur une violation de droit ou de privilège ou sur un fait personnel.

Avant de procéder à la période régulière de questions, j'informe les membres de cette Assemblée qu'il y aura un complément de réponse apporté par M. le ministre de l'Énergie et des Ressources, à M. le député de Verchères, à propos du bilan environnemental effectué par Hydro-Québec concernant les centrales au diesel sur la Basse-Côte-Nord, et plus particulièrement sur fa région de La Tabatière. M. le député doit-il être ici, ce matin? Parfait. (10 h 20)

Nous allons procéder maintenant à la période régulière de questions et de réponses orales. Je vais reconnaître, ce matin, en première principale, M. le whip de l'Opposition.

QUESTIONS ET RÉPONSES ORALES

Proposition de résolution demandant

au fédéral de retirer ou de

modifier le projet de loi C-72

M. Brassard: Oui, M. le Président. Hier, le ministre des Affaires intergouvernementales canadiennes indiquait à cette Chambre que le gouvernement entendait prendre des actions pour faire respecter ce qu'il considère comme essentiel, c'est-à-dire le respect de nos compétences sur la langue. On faisait référence, bien sûr, vous vous le rappelez, au projet de loi fédéral sur les langues officielles, le projet de loi C-72, qui s'ingérerait dans des domaines de juridiction québécoise. Je signale également que c'est le devoir du ministre, en vertu même de la loi, de veiller à ce que soit respectée la compétence constitutionnelle du Québec. Ma première question au ministre: Comme première action, comme

premier geste, puisqu'il parle d'actions à poser, est la suivante: le ministre peut-il nous indiquer si son gouvernement est maintenant prêt - il ne l'était pas, il y a quelques semaines - à s'associer à une résolution de l'Assemblée nationale demandant au fédéral de retirer ou d'amender le projet de loi C-72 pour que les compétences du Québec soient respectées?

Le Président: M. le ministre des Relations internationales et ministre délégué aux Affaires intergouvernementales canadiennes. M. le ministre.

M. Rémillard: J'ai mentionné, de fait, hier, qu'à la suite d'un avis que nous avons reçu du ministère de la Justice, il appert que ce projet de loi C-72 est difficilement contestable dans ses principaux éléments, mais qu'il peut soulever des inquiétudes quant à l'application que pourrait lui donner le gouvernement fédéral. En ce sens, j'avais mentionné hier que nous envisagions différentes possibilités d'actions pour faire valoir ces inquiétudes du côté du gouvernement fédéral. Je peux vous dire que je vais expédier une lettre, dans les prochaines heures, au secerétaire d'État, M. Bouchard, pour l'informer de notre position, à savoir que le projet de loi C-72 doit demeurer essentiellement dans les domaines de compétence fédérale, c'est-à-dire se limiter aux institutions fédérales.

Quant à ce qui touche les aspects qui sont de juridiction provinciale, il est essentiel que cette juridiction soit protégée et il peut y avoir, bien sûr, discussion avec le gouvernement fédéral à différents niveaux, mais il n'est absolument pas question que nous puissions accepter que, par le biais de ce projet de loi sur les langues officielles, le gouvernement fédéral vienne s'introduire dans un champ de compétence exclusivement provinciale, surtout lorsqu'il s'agit d'un champ aussi important que celui de la langue. C'est dans ce contexte, M. le Président, que je ferai parvenir dans les prochaines heures une lettre au secrétaire d'État, M. Bouchard.

Le Président: M. le whip de l'Opposition, en additionnelle.

M. Brassard: M. le Président, je reviens à ma question: En plus d'envoyer une missive au secrétaire d'État sur le sujet - ma question était la suivante et il ne l'a pas touchée - est-ce que le ministre est disposé maintenant à ce que l'Assemblée nationale s'associe à l'action du gouvernement et adopte une résolution demandant au gouvernement fédéral - une résolution qui, cette fois, serait adoptée unanimement, je suppose - de retirer les dispositions du projet de loi C-72 de façon que les compétences linguistiques du Québec soient pleinement respectées?

Le Président: M. le ministre des Relations internationales et ministre délégué aux Affaires intergouvernementales canadiennes. M. le ministre.

M. Rémillard: M. le Président, il est difficile de parler en ces termes. On peut difficilement demander de retirer des termes ou des articles du projet de loi C-72, parce que, comme je le mentionnais tout à l'heure, cela dépend de l'application que le gouvernement fédéral va faire. Le député de Lac-Saint-Jean sait très bien que le gouvernement fédéral a un pouvoir de dépenser. Le gouvernement fédéral agit dans ces domaines depuis déjà nombre d'années et, maintenant, il traduit dans une forme législative ce pouvoir de dépenser dans un domaine qui est la langue. Ce que nous lui disons, c'est que, présentement, dans cette loi, il n'y a pas de cadre régulatoire; il n'y a pas de cadre juridique qui nous permette de croire que ce serait vraiment une action du gouvernement fédéral dans un domaine de compétence provinciale, et qui serait donc inconstitutionnelle. Mais à partir de là, je crois qu'il serait difficile de présumer des intentions du gouvernement fédéral.

Le Président: M. le whip de l'Opposition, toujours en additionnelle.

M. Brassard: Le ministre ne convient-il pas que certaines dispositions du projet de loi C-72, en particulier l'article 42, ne peuvent conduire, si elles sont appliquées, qu'à des intrusions, des ingérences du gouvernement fédéral dans les compétences linguistiques? À moins qu'il n'admette ici, en cette Chambre, ce matin, que l'article 42, par exemple, n'est que purement décoratif et qu'une fioriture législative que le gouvernement a placée là, dans son projet de loi, pour mieux le décorer.

Le Président: M. le ministre des Affaires internationales et ministre délégué aux Affaires intergouvernementales canadiennes. M. le ministre.

M. Rémillard: Le député de Lac-Saint-Jean a raison de souligner l'article 42. C'est l'article qui pose problème. Cependant, je me permets de lui souligner que dans l'article 42, il est bien mentionné que plusieurs pouvoirs qui seraient de la capacité du gouvernement fédéral sont utilisés pour encourager les gouvernements provinciaux. Donc, dans la mesure où on respecte la compétence du gouvernement provincial, on ne voit pas de difficultés, d'autant plus qu'il faut se souvenir de ces déclarations, tant du premier ministre du Canada que de plusieurs de ses ministres venus au Québec qui ont dit, à plusieurs reprises, à quel point ils tenaient à ce que la loi 101 soit respectée. Cela ne fait pas tellement longtemps que même le premier ministre du Canada est venu nous affirmer cela ici. Donc, il y a une volonté du côté du gouvernement fédéral de respecter la loi 101. Dans ce

contexte, M. le Président, si on interprète dune façon littérale et grammaticale ce texte de loi, on peut se poser des questions sur une éventuelle capacité du gouvernement fédéral d'utiliser...

Le Président: Conclusion.

M. Rémillard: ...ce projet de loi pour toucher des compétences provinciales, mais le texte de loi, tel qu'il se présente actuellement, se situe dans le champ de la juridiction fédérale.

Le Président: M. le whip de l'Opposition, en additionnelle.

M. Brassard: M. le Président, si le gouvernement fédéral, selon le ministre, a manifesté son intention ferme de respecter la loi 101, où est le problème, à ce moment-là, pour demander au gouvernement fédéral de retirer une disposition, en particulier l'article 42, qui peut conduire, si elle est appliquée, à des ingérences dans les compétences linguistiques du Québec? Où se trouve le problème? Est-ce que, à ce moment-là, le ministre, au moins dans sa lettre au secrétaire d'État, lui demande de retirer ou de corriger l'article 42 pour qu'aucun danger d'intrusion n'existe?

Le Président: M. le ministre des Affaires internationales et ministre délégué aux Affaires intergouvernementales canadiennes. M. le ministre.

M. Rémillard: M. le Président, dans cette lettre, nous voulons préciser que nous entendons faire respecter la compétence législative du Québec sur la langue. Nous entendons faire respecter la loi 101. Dans le contexte actuel, la loi C-72 est constitutionnelle, mais nous disons: Attention, si vous utilisez ce projet de loi pour toucher, affecter des compétences provinciales en ce qui regarde la loi 101, en ce qui regarde la la langue, nous n'hésiterons pas à nous adresser aux tribunaux. Cependant, telle que la loi se présente, elle nous apparaît constitutionnelle.

Le Président: M. le whip de l'Opposition, en additionnelle.

M. Brassard: Le ministre ne convient-il pas que, pour éliminer tout danger potentiel, la meilleure chose à faire pour le gouvernement fédéral et la meilleure chose à demander pour le gouvernement du Québec, c'est que l'article 42 soit retranché, purement et simplement, du projet de loi, de la même façon que, dans l'accord du libre-échange...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Brassard: ...la meilleure façon, c'était de retrancher l'article 6?

Le Président: M. le ministre des Relations internationales et ministre délégué aux Affaires intergouvernementales canadiennes. M. le ministre.

M. Rémillard: M. le Président, tout d'abord l'article 42, je l'ai mentionné, dans plusieurs de ses aspects, se réfère aux gouvernements provinciaux. D'autre part, il faut reconnaître à cette loi C-72 des aspects positifs, notamment la possibilité d'offrir aux francophones hors Québec des services dans leur langue, et en ce qui concerne le domaine de la justice, des services qu'ils n'ont pas. Je me permets de rappeler à l'Opposition les commentaires qu'ils nous ont farts il n'y a pas tellement longtemps, voulant que nous abandonnions les francophones hors Québec. Il ne faudrait pas tenir deux discours II faudrait tout de même être conscient que ce projet de loi C-72 apporte des choses positives pour les francophones hors Québec. Cependant, comme je l'ai mentionné hier, et je le répète, la dualité canadienne ne doit pas se voir de la même façon en ce qui regarde son application pour les provinces anglophones et pour le Québec. Ce n'est pas la même chose Dans ce contexte, je demande simplement au député de Lac-Saint-Jean de prendre aussi en considération que ce projet de loi est très intéressant pour les francophones hors Québec. Il s'agit, pour nous, de dire: Protégeons notre compétence, protégeons la loi 101 et ne venez pas toucher à notre compétence sur la langue. (10 h 30)

Le Président: M. le whip de l'Opposition, toujours en additionnelle.

M. Brassard: Est-ce que le ministre est maintenant en mesure, aujourd'hui, de nous dire si le projet de loi C-72 est conforme à la lettre et à l'esprit de l'accord du lac Meech? Est-ce qu'il est maintenant prêt à nous indiquer que ce projet de loi est conforme à l'esprit et à la lettre de l'accord du lac Meech?

Le Président: M. le ministre des Relations internationales et ministre délégué aux Affaires intergouvernementales canadiennes.

M. Rémillard: M. le Président, dans sa lettre, il peut le respecter, reste à voir dans son application. C'est le but de la lettre que j'envoie au secrétaire d'État. Ce que nous lui disons, c'est justement que nous avons signé une entente et que le gouvernement fédéral et le Québec ont adhéré à l'entente du lac Meech avec cinq autres provinces. Maintenant, il faut bien comprendre que, dans cette entente, on reconnaît la dualité canadienne et on reconnaît la spécificité du Québec. D'une part, il y a deux communautés linguistiques qui sont le fondement même de ce pays et, d'autre part, il y a aussi le Québec qui est une société distincte et qui a le pouvoir de protéger et de promouvoir cette

distinction que représente évidemment, en premier lieu, la langue française. C'est dans ce contexte que j'écris cette lettre au secrétaire d'État.

Le Président: M. le whip de l'Opposition, en additionnelle.

M. Brassard: Est-ce que le ministre ne convient pas que la dualité linguistique, caractéristique fondamentale du Canada qu'on retrouve dans l'accord du lac Meech, inspire et constitue le fondement du projet de loi C-72 et que, contrairement à l'interprétation qu'il vient d'en donner, cela signifie, au Québec, la défense des minorités et de la minorité anglaise, donc cela signifie au Québec la défense et la promotion de l'anglais? C'est ce que cela veut dire.

Le Président: M. le ministre des Relations internationales et ministre délégué aux Affaires intergouvernementales canadiennes.

M. Rémillard: M. le Président, l'entente du lac Meech, c'est la reconnaissance de la dualité canadienne. L'entente du lac Meech, c'est la reconnaissance que le Québec forme une société distincte, avec le pouvoir pour cette Assemblée de protéger et de promouvoir cette distinction. Ce que j'ai mentionné tout à l'heure - je me permets de le répéter - c'est que ce projet de loi C-72 est très intéressant pour les francophones hors Québec. Il faut le comprendre. Je sais que le député de Lac-Saint-Jean m'a déjà dit qu'il fallait avoir des programmes pour faire en sorte que tous les francophones hors Québec puissent venir s'établir au Québec, revenir au Québec. Ce n'est pas notre philosophie. Nous croyons que les francophones ont leur place partout dans ce pays, et par l'entente du lac Meech, nous avons les fondements, les principes qui vont leur permettre, justement, d'avoir leur place dans ce pays. Par la loi C-72, dans la mesure où le gouvernement fédéral respecte le partage des compétences législatives, il pourra respecter ce principe de la dualité, dualité qui ne doit pas être vue d'une façon symétrique, mais en fonction de ce principe important qui est en bonne place dans l'entente du lac Meech, à savoir que le Québec est une société distincte et que cette Assemblée a la compétence, le pouvoir et le devoir de protéger et de promouvoir cette distinction.

Le Président: M. le chef de l'Opposition, en additionnelle.

M. Chevrette: M. le Président, le ministre ne croit-il pas que c'est trop peu et trop tard? Il veut se battre à coups de mouchoir. Il vient de dire que cette Assemblée a le devoir de faire respecter ses compétences. On lui offre précisément l'unanimité de cette Chambre pour appuyer une revendication claire, précise, une volonté politique du peuple québécois, par le biais de cette Assemblée nationale. Ne croit-il pas que c'est une attitude de mollesse que d'envoyer une lettre? Sera-t-elle comprise, oui ou non? Ne croit-il pas que c'est de cette façon qu'on se fait ridiculiser à la longue?

Le Président: M. le ministre des Relations internationales et ministre délégué aux Affaires intergouvernementales canadiennes.

M. Rémillard: M. le Président, je déduis, des questions de l'Opposition, que nous avons l'unanimité. Vous êtes comme nous. Vous voulez, comme nous, faire respecter la juridiction du Québec. Vous voulez protéger la loi 101. On veut faire la même chose. Ce qu'on dit, concernant le projet de loi C-72, c'est que c'est un projet qui, actuellement, relève de la compétence du gouvernement fédéral. Cependant, attention! S'il y a une application qui n'est pas conforme au partage des compétences, nous allons aller devant les tribunaux. Nous allons les contester. C'est dans ce contexte-là, M. le Président, qu'on va agir. Et la lettre est très ferme. La lettre est très claire. Il s'agit de protéger la juridiction du Québec sur la langue.

Le Président: M. le chef de l'Opposition, en additionnelle.

M. Chevrette: M. le Président, le ministre ne reconnaît-il pas qu'il laisse bâtir une assise juridique dans laquelle le Québec sera entraîné et où le fédéral pourra oeuvrer à sa guise, et que nous, les dindons de la farce, nous devrons aller devant les tribunaux pour faire respecter nos juridictions? Alors que, s'il veut des relations harmonieuses, qu'il déclare, d'ores et déjà et au préalable, la volonté du Québec de ne pas voir les lois fédérales empiéter sur ses juridictions!

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le ministre des Relations internationales et ministre délégué aux Affaires intergouvernementales canadiennes.

M. Rémillard: M. le Président, c'est exactement ce que nous allons faire. Je vais écrire au secrétaire d'État et nous allons lui mentionner nos préoccupations et lui dire qu'il doit se conformer à ce que le premier ministre du Canada, à ce que des ministres sont venus nous dire ici. Vous vous souvenez comme moi, M. le chef de l'Opposition - cela ne fait pas tellement longtemps - que le premier ministre du Canada est venu nous dire ici que la loi 101 devait être intouchable. C'est lui-même qui est venu le dire. Combien de ministres fédéraux sont venus nous le dire ici? Eh bien, on va voir. Dans ce projet de loi C-72, ce que nous voulons c'est qu'il y ait l'expression d'une volonté ferme de la part

du gouvernement fédéral d'utiliser ce projet de loi pour établir l'égalité des deux langues officielles, pour aider les francophones hors Québec, pour faire en sorte que ces francophones puissent avoir des services dans leur langue - et je sais que vous n'êtes pas contre cela, je l'espère du moins - mais en ce qui regarde le Québec, reconnaître que le Québec est une société distincte, que la dualité ne doit pas s'appliquer d'une façon symétrique et qu'en ce qui nous regarde, s'il y a utilisation du projet de loi C-72 dans un domaine de compétence provinciale touchant la langue, nous n'hésiterons pas à aller devant les tribunaux. Et, aux dernières nouvelles, M. le Président, il demeure que les tribunaux sont les gardiens ici de notre société démocratique.

Le Président: Alors je vais reconnaître ce matin, une deuxième principale à M. le député de

Taillon.

Divers documents publiés en anglais par l'administration gouvernementale

M. Filion: Merci, M. le Président. Toujours dans la même veine d'angélisme suicidaire, je voudrais dire quelques mots sur l'usage de la langue française au sein de l'administration publique gouvernementale. On sait que ce secteur est sujet à détérioration et, sans contredit, cela tient au message de laisser faire véhiculé par le gouvernement du Parti libéral. Depuis le dernier cas que j'ai soulevé en Chambre, celui de la Commission de formation professionnelle de Montréal qui publiait son bulletin de présentation, le bilan s'alourdit. Le ministère des Finances envoyait des dépliants unilingues anglais à plus de 1000 Québécois francophones. Le ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu envoyait à sa clientèle, bénéficiaire d'aide sociale - plusieurs milliers d'assistés sociaux, je crois - des formulaires en anglais. Mais comme si cette liste n'était pas suffisamment longue, voilà qu'à Rawdon on est incapable, M. le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, de se procurer un livre de règlements de pêche en français...

Le Président: Votre question.

M. Filion: ...parce que, dans ces endroits, il n'y en a plus. Également, une citoyenne de Montréal, qui s'était fait opérer, pour le remplacement d'une valve, à l'Institut de cardiologie de Montréal, reçoit la correspondance du suivi de son opération en anglais seulement.

Le Président: Votre question.

M. Filion: Voici ma question au ministre responsable de la loi 101. Est-ce que le ministre responsable de la loi 101 trouve normaux les cas que je viens de citer? Est-ce qu'il trouve normal qu'au Musée des beaux-arts de Montréal, lorsqu'on loue un appareil, un magnétophone guide-cassette, on nous remette des reçus en anglais seulement?

Le Président: M. le ministre responsable de l'application de la Charte de la langue française.

M. Rivard: M. le Président, le député de Taillon fait allusion à toute une série de...

Des voix:...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Rivard: Le député de Taillon, disais-je, fait allusion à toute une série d'incidents qui concernent la langue utilisée par l'administration dans ses communications. Je dois avouer carrément que, comme le député de Taillon, je ne suis pas heureux du tout de la répétition de tels incidents.

Des voix:...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Rivard: L'administration, M. le Président, en ce qui concerne l'utilisation de la langue française, je l'ai déjà dit en cette Chambre, devrait être impeccable. Elle devrait être la première à donner l'exemple. De toute évidence, très bientôt je vais m'asseoir avec mes collègues et nous allons regarder ensemble de quelle façon nous pouvons pallier cette situation. Vous savez, messieurs et mesdames de l'Opposition, que le gouvernement précédent n'a pas mis dans la loi 101, n'a pas créé de lien qui aurait permis, par exemple, à l'Office de la langue française de regarder de quelle façon l'administration se plie aux directives, aux articles de la loi 101. Je demande à l'Office de la langue française de regarder ce problème-là et je lui demande aussi de publier, appelons cela un guide des directives ou je ne sais trop, qui permettra que les articles de la loi 101 deviennent limpides.

Le Président: M. le député de Taillon, en additionnelle. (10 h 40)

M. Filion: Est-ce que le ministre ne convient pas, pour que la langue de l'administration gouvernementale au Québec demeure française, que la meilleure façon de procéder, c'est la suggestion avancée par l'Opposition depuis six mois, à savoir une enquête complète sur les causes de la dégradation dans l'usage du français et, également, sur les mesures concrètes à appliquer dans les différentes régies, organismes et ministères, pour faire que la langue de l'administration au Québec soit le français?

Le Président: M. le ministre responsable de l'application de la Charte de la langue française.

M. Rivard: Vous savez, M. le Président, il existe 44QQ ministères et organismes et il est évident que, relativement parlant, même si les gestes ou les incidents se multiplient et même s'ils sont tout à fait inacceptables, il n'en demeure pas moins que chacun de ces incidents implique un nombre relativement restreint d'individus. Cependant, j'aimerais attirer l'attention de cette Chambre sur le fait suivant: La loi 101, telle qu'elle est rédigée actuellement, eu égard à la langue de l'administration, comporte quelque chose qui peut en rendre l'application difficile. L'article 15 dit: "L'administration rédige et publie dans la langue officielle ses textes et documents", mais l'article 89 a aussi été mis en place dans la loi par le Parti québécois et il dit: "Dans les cas où la présente loi n'exige pas l'usage exclusif de la langue officielle, on peut continuer à employer à la fois la langue officielle et une autre langue."

En insérant cet article dans la loi, le gouvernement précédent a dilué, a diminué l'impact de l'article 15.

Le Président: M. le député de Taillon, en additionnelle.

M. Filion: Est-ce que le ministre peut prétendre sérieusement...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Filion: ...que, en vertu du texte légal actuel, il ne fait absolument aucun doute que la langue de l'administration, c'est le français et exclusivement le français?

Deuxièmement, M. le Président, est-ce que le ministre ne se rendrait pas à notre requête d'instaurer une enquête complète sur la détérioration de l'usage du français depuis deux ans et demi dans l'administration gouvernementale, attendu qu'à la Régie de l'assurance automobile du Québec, le cadre informatique des programmes, évidemment sur ordinateur, est exclusivement en anglais et que cette situation se retrouve dans d'autres régies, organismes ou ministères?

Le Président: M. le ministre responsable de l'application de la Charte de la langue française.

M. Rivard: Je suis prêt, M. le Président, à recevoir et à prendre connaissance de tous les exemples cités par le député de Taillon et à m'attarder avec mes collègues, qui sont tout à fait conscients de la répétition de ces incidents, pour trouver des solutions.

Le Président: M. le député de Taillon, en additionnelle.

M. Filion: Qu'est-ce que le ministre et le gouvernement attendent pour agir dans le secteur de l'informatique? Le ministre n'est-il pas conscient que, lorsque le gouvernement du Québec utilise des cadres de programme d'ordinateur en anglais, il donne un bien mauvais exemple à toutes les entreprises privées du Québec, alors qu'il existe des programmes français qui sont disponibles sur le marché et qui pourraient être utilisés par tous les ministères, toutes les régies et tous les organismes?

Le Président: M. le ministre responsable de l'application de la Charte de la langue française.

M. Rivard: Sans doute, M. le Président, le député de Taillon voudrait-il transformer le mot "programme" par le mot "logiciel", qui est le terme exact français. Je suis prêt à regarder cela aussi, et je regarde cela, effectivement.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président: M. le député de Taillon, en additionnelle.

M. Filion: Est-ce que je pourrais convaincre le ministre...

Le Président: M. le député de Taillon, en additionnelle.

M. Filion: Le bilan linguistique du ministre, je vais comparer...

Le Président: En additionnelle.

M. Filion: ...le mien aussi n'importe quand.

Est-ce que je pourrais convaincre le ministre, peut-être une fois pour toutes, du bien-fondé de ma requête pour une enquête complète sur la dégradation du français dans l'administration gouvernementale si je lui disais que les Cambodgiens francophones du Québec reçoivent de façon systématique de la Régie des rentes du Québec leur chèque d'allocation familiale accompagné de documents explicatifs rédigés en anglais seulement?

Le Président: M. le ministre responsable de l'application de la Charte de la langue française.

M. Rivard: De toute évidence, M. le Président, la multiplicité des anecdotes et des incidents mentionnés par le député de Taillon...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Rivard: ...m'incite tout simplement à prendre avis de cette question précise. Mais je répète que, lorsque le député de Taillon regarde ce dossier en particulier - d'ailleurs c'est vrai pour les autres éléments du dossier linguistique - il emploie très souvent le terme détérioration, laissant prétendre que le gouvernement du Québec actuel n'applique pas la loi 101. Je

réaffirme que la loi 101 continue d'être appliquée.

Le Président: Alors, la troisième principale à M. le député de Duplessis.

Le refus d'Ottawa d'accorder

aux pêcheurs québécois l'accès

à la zone de 200 milles

M. Perron: Merci. Vendredi dernier, la Société des pêches de Newport débauchait 500 de ses 530 travailleurs et travailleuses...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de Duplessis, en principale. M. le député de Duplessis, en principale.

M. Perron: Pour que les libéraux comprennent bien, mettait à pied... Alors, vendredi dernier, la Société des pêches de Newport mettait à pied 500 de ses 530 travailleurs et travailleuses et, en mars dernier, le groupe Purdel annonçait, pour sa part, le licenciement de 250 de ses employés à l'usine de Rivière-au-Renard. On peut malheureusement prévoir une accélération de ce triste processus de mises à pied dans toutes les régions maritimes du Québec, essentiellement attribuées, d'ailleurs, au refus d'Ottawa d'accorder aux pêcheurs québécois l'accès à la zone économique de 200 milles. Résultat: 600 pêcheurs et 2500 travailleurs et travailleuses d'usines se retrouvent sans travail deux mois plus tôt que prévu. Le ministre délégué aux Pêcheries est-il en mesure de fournir aux pêcheurs, aux travailleurs et aux travailleuses d'usines une garantie qu'enfin, le Québec obtienne satisfaction dans sa requête d'accès à la zone de 200 milles?

Le Président: M. le ministre délégué aux Pêcheries.

M. Picotte: Oui, merci, M. le Président. Je pense que je dois vous mentionner que celui qui vous parle et le ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation ont fait des démarches, depuis au moins un an, en aidant un consortium formé de gens d'affaires pour que les gens des pêches aient accès à la zone de 200 milles. Nous avons fait de nombreux efforts, et je dois associer à ces efforts le député de Duplessis qui, lui aussi, nous a épaulés. Le premier ministre du Québec a lui-même, personnellement, écrit à l'honorable premier ministre du Canada en ce qui concerne l'accès à la zone de 200 milles. Malheureusement, au moment où nous nous parlons, M. Siddon, le ministre fédéral des Pêcheries, n'a pas daigné accorder pour cette année l'accès à cette zone de 200 milles. Oui, le fédéral. Et j'entends le député de Lévis parler du fédéral. Si, depuis 1978, alors que d'autres provinces ont eu accès à la zone de 200 milles, le député de Lévis avait mis sa partisanerie de côté, et s'il avait fait des efforts pour avoir accès à la zone de 200 milles, comme nous le faisons tous ensemble, y compris le député de Duplessis, probablement qu'aujourd'hui on n'aurait pas besoin de le demander, on l'aurait obtenu.

Mais parce que vous n'avez rien fait dans le temps que vous étiez ministre des Pêcheries, M. le député de Lévis, nous sommes obligés, encore une fois, de nous battre pour avoir accès à la zone de 200 milles.

Le Président: M. le député de Duplessis, en additionnelle.

M. Perron: M. le Président..

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de Duplessis, en additionnelle. (10 h 50)

M. Perron: ...je répète la question puisque le ministre n'y a pas répondu. Qu'est-ce que le ministre délégué aux Pêcheries fait, actuellement pour aider les pêcheurs et les travailleurs et travailleuses d'usines à obtenir des garanties du gouvernement fédéral en rapport avec la pêche dans la zone des 200 milles? Qu'a-t-il fait depuis qu'on voit qu'il y a des problèmes dans les régions maritimes du Québec?

Le Président: M. le ministre délégué aux Pêcheries.

M. Picotte: M. le Président, j'ai dit et je répète au député de Duplessis que nous continuons presque quotidiennement à parler avec les gens du fédéral. Vous savez que le plan de pêche se détermine vers la fin de décembre pour une année. Compte tenu du fait qu'au mois de décembre le ministre fédéral n'a pas accepté, dans son plan de pêche, que nous ayons accès à la zone des 200 milles, nous continuons nos efforts avec tous les gens du milieu, y compris celui qui m'a interrogé et ceux du gouvernement pour faire en sorte que, dans le prochain plan de pêche, nous ne soyons pas ignorés. Compte tenu des problèmes que nous vivons, je pense qu'il sera assez facile à M. Siddon de se rendre compte, une fois pour toutes, que nous devons avoir accès à la zone des 200 milles.

Le Président: M. le député de Duplessis, en additionnelle.

M. Perron: M. le Président, le ministre délégué aux Pêcheries a-t-il appuyé très fermement l'industrie québécoise de la pêche, qui réclame de façon formelle une attribution immédiate de nouveaux quotas pour au moins une période de trois semaines afin que ces personnes, travailleurs et travailleuses, obtiennent gain de cause et, au minimum, obtiennent des garanties d'assurance-chômage?

Le Président: M. le ministre délégué aux Pêcheries.

M. Picotte: M. le Président, nous avons appuyé et nous appuyons toute demande en ce sens, d'autant plus que c'est nous qui avons travaillé avec le groupe et le consortium. Nous avons même participé financièrement pour présenter un plan d'action qui pourrait convaincre le fédéral de nous donner accès à la zone des 200 milles. Je dois ajouter que nous avons eu certaines difficultés, l'an passé, entre autres, aux Îles-de-la-Madeleine, en ce qui concerne la pêche. Celui qui vous parle, avec son ministère, de concert avec le ministre responsable, mon collègue le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation et député de Portneuf, avons fait en sorte d'arriver avec un plan pour permettre aux travailleurs et aux travailleuses à la fois de se perfectionner et de pouvoir bénéficier de ce que le député de Duplessis a évoqué tantôt. Nous allons, nous sommes en train d'examiner cette situation rapidement et, si nous devons intervenir, on le fera comme on l'a toujours fait dans le passé.

Le Président: M. le député de Duplessis, en additionnelle.

M. Perron: M. le Président, de quelle façon le ministre délégué aux Pêcheries entend-il aider financièrement les pêcheurs actuellement aux prises avec des versements à la suite de la construction de bateaux allant jusqu'à 55 000 $ par année et qui seront dans l'impossibilité de respecter leurs obligations au cours de l'année 1988?

Le Président: M. le ministre délégué aux Pêcheries.

M. Picotte: Bien que cette partie de la question me semble une question principale, je dois dire que nous sommes présentement à regarder, au ministère, quelle possibilité nous aurions d'aider les gens qui ont effectivement des versements à faire parce qu'ils se sont fait construire des bateaux pour la pêche et qui, pour l'instant, le quota étant épuisé, peuvent avoir certaines difficultés. Nous examinons cela avec les intervenants et, s'il y a lieu d'apporter une aide quelconque, nous le ferons savoir en temps et lieu à ceux qui sont concernés, M. le Président.

Le Président: M. le leader adjoint de l'Opposition, pour une quatrième question principale, ce matin.

Territoires soustraits à la zone verte par la commission de protection

M. Jolivet: Merci, M. le Président, en espérant que le ministre de l'Agriculture aura, ce matin, le temps d'y répondre. Cela concerne la Loi sur le zonage agricole...

Le Président: J'ai toujours accordé le temps, oui.

M. Jolivet: Alors, je recommence: Dans le cadre du processus actuel d'adoption de schémas d'aménagement et de révision du territoire agricole, on s'aperçoit que la Loi sur le zonage agricole subit de plus en plus d'assauts. Dans la région de Lanaudière en particulier, la Commission de protection du territoire agricole accorde davantage que ce qui est demandé par les municipalités. Par exemple, l'exclusion de 3588 hectares demandée s'est transformée en une offre de la Commission de protection du territoire agricole de 7353 hectares. Un autre exemple dans la Mauricie qui a fait les mêmes demandes, où, à Sainte-Marthe de Champlain, on demandait de dézoner 9 hectares et on s'aperçoit que l'offre de la commission est de 1888 hectares.

Le Président: Votre question.

M. Jolivet: Dans ce contexte, est-ce que le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation cautionne ce changement de cap majeur de la Commission de protection du territoire agricole, à savoir de proposer plus en dézonage que ne le demandent les municipalités régionales de comté?

Le Président: M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.

M. Pagé: Merci beaucoup, M. le Président. Je remercie le député de Laviolette de sa question tout à fait pertinente. Il faut bien avoir à l'esprit que la Commission de protection du territoire agricole, à la suite d'une disposition adoptée par l'Assemblée nationale le 1er juillet 1985, est conviée à renégocier avec chacune des MRC du Québec la zone verte et, par conséquent, la zone blanche sur son territoire. C'est, en quelque sorte, le renouvellement d'une démarche qui a eu cours en 1978, à la suite de la présentation du projet de loi et de son adoption ici.

J'ai été informé par l'Union des producteurs agricoles de la question à laquelle vous référez, à savoir que la négociation entre la CPTA et certaines MRC, notamment celles des région de Lanaudière et de la Mauricie, aurait eu comme résultat une proposition de la Commission de protection du territoire agricole de dézoner ou de décréter zone blanche une superficie de sol plus grande que ce qui était demandé par les MRC. Dans le cas de Lanaudière, on réfère, entre autres, aux terres qui sont situées au sud de l'autoroute 40, entre le fleuve Saint-Laurent et l'autoroute 40, qui, comme on le sait, à leur face même, sont très peu propices à l'agriculture.

J'ai rencontré, jeudi dernier, le conseil général de l'Union des producteurs agricoles et j'ai aussi demandé à la Commission de protection du territoire agricole, par son président et ses assistants, de discuter et de répondre à l'Union des producteurs agricoles. C'est très clair, je veux établir très clairement, ici, que le ministre de l'Agriculture, responsable de l'application de cette loi, n'a pas à intervenir, n'a pas à passer des commandes, à faire des commentaires ou quoi que ce soit. La Commission de protection du territoire agricole est un organisme quasi judiciaire. À la suite de cette rencontre, j'ai tous les motifs de croire que l'Union des producteurs agricoles est satisfaite des discussions qu'elfe a eues avec la Commission de protection du territoire agricole. Si besoin en était, en dernier recours-Le Président: Conclusion.

M. Pagé: ...les intervenants du milieu ont un droit de recours au Conseil des ministres et au ministre de l'Agriculture, comme cela a été le cas pour mon prédécesseur dans le cas de l'autoroute 55 à Trois-Rivières et dans celui de Bell Helicopter.

Le Président: M. le leader adjoint de l'Opposition, en additionnelle.

M. Jolivet: Est-ce que le ministre, dans le contexte...

Le Président: En additionnelle.

M. Jolivet: ...qui nous est présenté actuellement, est prêt à demander aux gens de la Commission de protection du territoire agricole de venir en commission parlementaire afin de permettre de faire la lumière sur l'ensemble du dézonage qui se fait actuellement à la suite de la directive qu'il a déposée lui-même en septembre 1986?

Le Président: M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.

M. Pagé: M. le Président, la demande de l'Opposition ne me surprend pas. Ils sont très intéressés à la tenue de commissions parlementaires. À la lumière de la discussion entre l'Union des producteurs agricoles - par son conseil général, c'est-à-dire ses 33 représentants et représentantes - et la Commission de protection du territoire agricole, dans le cadre d'une rencontre que j'ai provoquée la semaine dernière, j'ai tous les motifs de croire que le règlement de ce dossier passera davantage par de meilleures explications et, par conséquent, de meilleures chances de compréhension entre la Commission de protection du territoire agricole et ceux et celles qui font des représentations, dont l'Union des producteurs agricoles, que par la tenue d'une commission parlementaire, ici.

Le Président: M. le leader adjoint de l'Opposition. Cela va. Alors, en principale, je vais reconnaître...

M. Chevrette: Non, M. le Président, en additionnelle.

Le Président: En additionnelle? En additionnelle, M. le chef de l'Opposition.

M. Chevrette: Est-ce que le ministre ne croit pas... Il est quand même un ministre de tutelle, il y a quand même une imputabilité de la Commission de protection du territoire agricole devant le Parlement. Est-ce que le ministre ne croit pas qu'il serait intéressant pour l'ensemble des députés qui ont à expliquer à leurs concitoyens les motifs pour lesquels la commission rend de telles décisions... Est-ce qu'il ne croit pas avantageux pour l'ensemble des parlementaires qui y seraient intéressés de pouvoir discuter avec les représentants de la commission et de connaître les vrais motifs pour mieux renseigner nos concitoyens par la suite?

Le Président: M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.

M. Pagé: M. le Président, la question du chef de l'Opposition est intéressante. Trois éléments de réponse: Le premier. Les organismes ou les groupes concernés dans Lanaudière, la Mauricie et Saint-Maurice ont fait des représentations. Ils ont eu l'occasion de discuter avec la Commission de protection du territoire agricole, tel que je vous le confirmais il y a quelques minutes. Il y a des choses qui ont été éclaircies et qui ont sécurisé, je pense, les requérants, les producteurs agricoles. Deuxième élément. Vous me dites: Ne serait-il pas d'intérêt public qu'une commission parlementaire puisse siéger? Bien, c'est le cas, la commission parlementaire de l'agriculture a un mandat d'initiative. En tout temps, par le biais du mandat d'initiative de la commission parlementaire - je réfère aux règles de fonctionnement de l'Assemblée nationale - vous pouvez communiquer et convoquer la Commission de protection du territoire agricole. (11 heures)

Troisième élément: c'est vrai que le ministre de l'Agriculture est responsable de cette loi devant la Chambre. C'est dans ce sens que je suis disposé, comme je le fais ce matin, à répondre à vos questions, comme j'y ai répondu au moment de l'étude des crédits, comme je suis prêt à répondre à des motions. Il va de soi qu'en dernier recours, si besoin en est, et si la preuve est à démontrer à la suite d'une demande et d'une requête au ministre et au Conseil des ministres, le ministre a le droit d'intervenir et de formuler une recommandation au Conseil des ministres. C'est clair.

Le Président: Je vais reconnaître une principale à M. le député de Richelieu, la cinquième principale ce matin.

Comité de concertation sur le projet de réforme de l'aide sociale

M. Khelfa: Merci, M. le Président. Sachant que le projet de réforme de l'aide sociale vise trois objectifs bien connus et non contestés, considérant également que les programmes d'aide sociale d'emploi actuels, tant provinciaux que fédéraux, ont pour objectif d'améliorer le sort des citoyens et des citoyennes, tout en manifestant mon appui indéfectible aux concitoyens et concitoyennes de mon comté vivant ces conditions de dernier recours et tout en supportant les revendications qui m'ont été exprimées en date du 30 mai dernier, ma question s'adresse au ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu afin de savoir si son ministère serait prêt à collaborer pour la mise en place d'un instrument de concertation et d'évaluation de ces programmes...

Le Président: À l'ordre!

M. Khelfa: ...par un comité qui serait composé des gouvernements provincial, fédéral et municipaux, de l'entreprise privée, des groupes communautaires et des syndicats.

Le Président: M. le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu et du Travail.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, M. le Président. Je remercie le député de Richelieu de sa question, de façon à permettre à l'ensemble des parlementaires de manifester leur approbation également. On connaît la détermination, la ténacité et l'acharnement du député de Richelieu dans tous les dossiers qui touchent son comté.

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Le ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu évalue constamment l'ensemble des mesures qu'il met à la disposition des assistés sociaux. La suggestion qui est faite par le député de Richelieu est d'associer, dans sa région, les groupes socio-économiques, nos partenaires socio-économiques, et d'autres niveaux de gouvernement à ces évaluations. Sur le plan du principe, nous accueillons favorablement, au ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu, cette proposition du député de Richelieu. Quant aux modalités d'application, il faudra que l'ensemble des parties en convienne, le gouvernement fédéral faisant également l'objet de votre requête, les gouvernements municipaux et les groupes socio-économiques.

M. Khelfa: En additionnelle, M. le Président.

Le Président: M. le député de Richelieu, en additionnelle.

M. Khelfa: Les résultats peuvent-ils influencer les programmes à l'avenir pour avoir de meilleures retombées dans le milieu?

Le Président: M. le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, je tiens à assurer le député de Richelieu que, tout comme nous l'avons fait dans le passé, à partir d'évaluations menées à l'interne par le ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu, nous avons déjà apporté des modifications à certains programmes existants et que toute évaluation qui suggère des améliorations au programme que nous mettons à la disposition des assistés sociaux de façon à faciliter leur réintégration au marché du travail, toutes ces bonifications, lorsqu'elles reçoivent l'aval du Conseil du trésor et du Conseil des ministres, sont incorporées à la politique de la sécurité du revenu.

Le Président: En additionnelle, Mme la députée de Maisonneuve.

Mme Harel: Oui, M. le Président. Est-ce que le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu a l'intention d'utiliser le mécanisme de la commission parlementaire pour consulter les organismes du Québec sur l'évalutation qu'ils font de son projet de loi 37?

Le Président: M. le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, M. le Président. Je remercie Mme la députée de Maisonneuve de sa question additionnelle. Comme elle le sait sans doute déjà, nous avons eu l'occasion de tenir, il y a quelques mois, une commission parlementaire où tous les groupes qui ont souhaité se faire entendre ont pu être entendus par l'ensemble des parlementaires. Nous avons, à la suite de cette commission, annoncé des amendements. Le dossier poursuit son cheminement, le conseil général du Parti libéral du Québec de la fin de semaine passée a suggéré des bonifications quant aux plus démunis qui pourraient devenir des victimes. Les corrections appropriées seront annoncées en temps opportun. Ce matin même, le Front commun des assistés sociaux soulignait au ministre qu'il s'agissait là d'un pas dans la bonne direction, et je sais que Mme la députée de Maisonneuve souscrit à cette analyse du Front commun des assistés sociaux.

Le Président: Fin de la période régulière de questions et de réponses.

Je vais maintenant reconnaître M. le ministre de l'Énergie et des Ressources, en complément de réponse à une question posée par

M. le député de Verchères, vendredi dernier. M. le ministre de l'Énergie et des Ressources.

Contamination du sol par les BPC à La Tabatière-Eau intacte

M. Ciaccia: M. le Président, sur la question de La Tabatière, premièrement, je voudrais signaler au député de Verchères que le bilan auquel il faisait allusion ne datait pas de 1986, mais plutôt de 1987 et, pour être plus précis, décembre 1987. Il s'agit d'une expertise menée à la demande d'Hydro-Québec par le groupe APEL En ce qui a trait à la contamination, il est essentiel de distinguer celle des eaux et celle des sois. Concernant les eaux, l'étude démontre qu'il n'y a pas de contamination par les BPC. L'eau n'est pas contaminée par Hydro-Québec.

Concernant les sols, l'étude conclut qu'il y a eu des fuites d'huile sur six des sept sites analysés, sur une superficie approximative de 127 mètres carrés... Hydro-Québec a envoyé des équipes de spécialistes sur place et procédera rapidement à une décontamination des sols. Elle a également établi un plan de redressement pour éviter que de telles situations ne se produisent à nouveau.

Le Président: M. le député de Verchères, en additionnelle.

M. Charbonneau: Je remercie le ministre de sa réponse qui confirme, en partie, les inquiétudes de la population. Est-ce qu'il est conscient, quelle que soit la date de production du bilan, que le bilan environnemental dont on parle faisait état de la contamination des sols, d'un niveau de perturbation maximal, c'est-à-dire très fortement contaminé par les BPC, et que l'entrepôt en question est situé près du lac qui sert d'alimentation en eau potable pour les gens de cette communauté, c'est-à-dire le lac Saint-Charles? D'autre part, est-il au courant qu'en ce qui concerne la contamination des eaux qu'il nie ce matin, le même bilan environnemental parle d'une contamination importante, c'est-à-dire des eaux fortement contaminées?

Est-ce qu'il trouve normal, compte tenu de ce bilan qui a été produit en décembre 1987, ou un an auparavant, que les autorités municipales n'aient pas été saisies de ce dossier, que le ministère de l'Environnement n'ait été saisi du dossier qu'il y a deux semaines à peine, alors que c'est le réseau anglais de Radio-Canada qui l'en a saisi, à la suite de quoi on a envoyé des analystes faire des relevés? Est-ce qu'il trouve normal un tel comportement?

Le Président: M. le ministre de l'Énergie et des Ressources.

M. Ciaccia: M. le Président, je dois avouer qu'il y a des inexactitudes dans les propos du député de Verchères. Le tableau auquel H réfère, je l'ai moi aussi. Il y a des inexactitudes. C'est un rapport de 75 pages et si le député le désire, je suis prêt à le déposer. Le sommaire du tableau n'est pas tout à fait exact. Il n'y a pas de contamination de l'eau potable. C'est pourquoi le ministère des Affaires municipales avait mis sur pied un programme pour l'eau potable parce que cela ne dépendait pas d'Hydro-Québec, cela dépendait d'autre chose. Hydro-Québec n'avait rien à voir avec cela. Maintenant, en ce qui concerne le ministre de l'Environnement et ce dossier, je pourrais plutôt lui laisser le soin de répondre sur les détails de ce dossier en ce qui concerne son ministère.

Le Président: Je vais vous permettre quelques secondes seulement, M. le ministre de l'Environnement. Nous étions en additionnelle à la suite d'une réponse complémentaire.

M. Brassard: À la condition que le député de Verchères ait droit à une additionnelle.

Le Président: II n'y a pas de condition...

M. Brassard: Dans ce cas, il n'y a pas de consentement.

Le Président:... M. le ministre n'avait pas employé tout son temps. Je ne lui permets que quelques secondes seulement. Ce sont les mêmes règles pour un complément de réponse que pour une question additionnelle. Très brièvement, M. le ministre. (11 h 10)

M. Lincoln: Très brièvement, tout ce que je veux dire au député de Verchères, je pourrais lui donner la séquence des événements, depuis l'été 1986 jusqu'à présent. Qu'il me pose une question pendant que je suis en Chambre, ou qu'il me pose une question demain, lors de la période de questions, et je lui répondrai en détail. En fait, je lui relaterai toute la chronologie des événements entre Hydro-Québec, le ministère de l'Environnement, ce que nous avons fait dans ce dossier. Je pense qu'il est ridicule de le faire maintenant. C'est une longue séquence. Je pourrai lui donner toute la séquence de l'été 1986 à 1988. Il n'aura qu'à me poser la question je vais être ici demain.

Le Président: Question de règlement, M. le député de Verchères.

M. Charbonneau: M. le Président, non pas sur le fond, sur une question de règlement. Je ne pense pas, M. le Président, quen vertu du règlement, le ministre puisse utiliser une partie du temps consacré à une réponse pour finalement qualifier l'attitude qu'on a de ce côté-ci, d'autant plus que le problème ne s'adressait pas à

son comportement, mais à celui de son collègue qui est responsable d'Hydro-Québec et c'est ce qui est en cause actuellement.

Le Président: Je retiens que M. le ministre de l'Environnement sera prêt à répondre à une de vos questions, demain, si vous voulez et à donner les détails supplémentaires et additionnels quant au problème soulevé, ce matin, par le complément apporté par M. le ministre de l'Énergie et des Ressources.

Si vous me permettez, ceci met fin à la période régulière de questions et de réponses orales.

Nous allons maintenant procéder aux affaires courantes.

Ce matin, il n'y a pas de vote de reporté.

Avis touchant les travaux des commissions, M. le leader adjoint du gouvernement.

Avis touchant les travaux des commissions

M. Johnson: M. le Président, j'avise cette Assemblée qu'aujourd'hui, après les affaires courantes, jusqu'à 13 heures et de 15 heures à 18 heures, de 20 heures à 24 heures, à la salle du Conseil législatif, la commission du budget et de l'administration procédera à l'étude détaillée du projet de loi 6, Loi modifiant de nouveau la Loi sur les impôts et d'autres dispositions législatives d'ordre fiscal.

De 15 heures à 18 heures et de 20 heures à 24 heures, à la salle Louis-Hippolyte-Lafontaine, la commission de l'économie et du travail procédera à l'étude détaillée du projet de loi 31, Loi modifiant la Loi sur les relations du travail, la formation professionnelle et la gestion de la main-d'oeuvre dans l'industrie de la construction et la Loi sur la formation et la qualification professionnelles de la main-d'oeuvre.

Après les affaires courantes et jusqu'à 13 heures et de 20 heures à 24 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau, la commission de l'aménagement et des équipements poursuivra l'étude détaillée des projets de loi suivants et ce, dans l'ordre ci-après mentionné: le projet de loi 7, Loi sur l'organisation territoriale municipale, le projet de loi 28, Loi modifiant la Loi sur la Communauté urbaine de Québec et d'autres dispositions législatives en matière de promotion et de développement industriel; le projet de loi 24, Loi sur le traitement des élus municipaux.

Après les affaires courantes jusqu'à 13 heures et de 15 heures à 18 heures, à la salle 101 de l'édifice Pamphile-Le May, la commission des institutions procédera à l'étude détaillée des projets de loi suivants, et, ce, dans l'ordre ci-après mentionné: le projet de loi 8, Loi sur l'aide aux victimes d'actes criminels; le projet de loi 3, Loi modifiant le Code civil en matière de copropriété et d'emphytéose; le projet de loi 4, Loi modifiant le Code civil et le Code de procédure civile en matière de séparation de corps; le projet de loi 20, Loi portant abrogation de certaines dispositions législatives.

J'avise également cette Assemblée que le mardi 14 juin 1988, de 15 heures à 18 heures et, si nécessaire, de 21 heures à 24 heures, à la salle Louis-Hippolyte-Lafontaine, la commission du budget et de l'administration entendra les intéressés et procédera à l'étude détaillée des projets de loi d'intérêt privé suivants, et ce, dans l'ordre ci-après mentionné: le projet de loi 206, Loi concernant La Laurentienne mutuelle d'Assurance; le projet de loi 205, Loi concernant la conversion de la Fédération des caisses d'établissement du Québec, des caisses d'épargne et de crédit qui lui sont affiliées et de la Corporation de fonds de sécurité de la Fédération des caisses d'établissement du Québec ainsi que leur fusion avec Société d'entraide économique du Québec inc.; et, finalement le projet de loi 221, Loi modifiant la Loi fusionnant le Trust Général du Canada et la Société d'Administration et de Fiducie.

Le Président: M. le ministre de l'Industrie et du Commerce et leader adjoint du gouvernement, est-ce que vous avez consentement pour déroger à l'article 145, étant donné qu'il y a quatre commissions qui vont siéger aujourd'hui?

M. Johnson: C'est ce qu'on m'indique, M. le Président.

Le Président: M. le leader de l'Opposition, est-ce qu'il y a consentement?

M. Gendron: Cela doit être cela.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président: Alors, j'accepte votre...

M. Gendron: M. le Président, c'est qu'on ne m'a pas indiqué... Mais je voudrais juste avoir une information de M. le leader adjoint du gouvernement.

Le Président: Vous avez la parole, M. le leader de l'Opposition.

M. Gendron: La dérogation porte spécifiquement sur quel ajout? La quatrième commission pour cet avant-midi ou pour toute la journée?

Le Président: Si vous me permettez, M. le leader du gouvernement. Est-ce que vous me permettez M. le leader du gouvernement? C'est pour la commission siégeant jusqu'à 13 heures et de 15 heures à 18 heures, à la salle 101 de l'édifice Pamphile-Le ~ May. C'est la commission des institutions. C'est la quatrième commission qui va siéger à ce moment-là.

M. Gratton: M. le Président...

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Gratton: ...que je sache, il y a seulement trois commissions qui siégeront...

M. Gendron: C'est ce que j'avais comme information; donc, il y a un problème.

M. Gratton: ...et ce matin, et cet après-midi et ce soir. Au préalable, on avait peut-être donné une indication qu'il y en avait une quatrième, mais cela n'est pas le cas au moment où les avis sont donnés ce matin.

Le Président: On indique bien ici, M. le leader du gouvernement, selon le relevé, qu'il y aura quatre commissions qui vont siéger. C'est ce qu'on me donne ici comme relevé.

M. Gendron: Non. Si on vous en donne quatre, M. le Président, il y a un problème.

Le Président: Ce ne sera pas long, M. le leader de l'Opposition. On est à vérifier...

M. Gendron: Oui, oui. Je ne suis pas malheureux.

Le Président: ...selon les notes qu'on m'a remises.

M. le leader du gouvernement.

M. Gratton: M. le Président, la quatrième commission dont il était question était celle qui portait sur le projet de loi 31 et on n'a pas donné d'avis ce matin. Ce serait à 14 heures seulement.

Le Président: Si vous me le permettez, nous allons procéder aux renseignements concernant les travaux de l'Assemblée et on vérifie certaines choses. J'ai demandé à mes greffiers de vérifier. On n'est pas certain actuellement.

Renseignements sur les travaux de l'Assemblée

Concernant les travaux de l'Assemblée, est-ce qu'il y a des questions? Mme la députée de Marie-Victorin, vous avez la parole.

Mme Vermette: Oui, M. le Président.

Le Président: M. le député de Lévis, s'il vous plaît! M. le député de Lévis, j'ai accordé la parole à Mme la députée de Marie-Victorin.

Mme Vermette: Oui, monsieur... M. Garon: ...libéraux.

Le Président: Excusez-moi. M. le député de Lévis, vous étiez devant Mme la députée de Marie-Victorin, tout simplement; ce n'est pas parce que vous dérangiez les travaux de cette Assemblée. Vous étiez en plein devant Mme la députée de Marie-Victorin. C'est simplement pour cela.

Mme la députée de Marie-Victorin.

M. Garon: M. le Président, pourriez-vous faire respecter le règlement pour que les députés s'assoient à leur siège?

Le Président: M. le député de Lévis, sur une question de règlement.

M. Garon: Question de règlement justement. Voulez-vous demander aux députés qu'ils soient assis à leur siège?

Le Président: Je suis entièrement d'accord. M. le leader du gouvernement.

M. Gratton: Oui, M. le Président. Je pense que c'est normal, sauf que le député de Lévis était immédiatement entre la députée de Marie-Victorin, qui voulait me poser une question, et moi-même. C'est peut-être pour cela qu'on a demandé au député de Lévis de s'asseoir.

Une voix: II voulait la cacher. Une voix: II n'est pas transparent.

Le Président: Excusez-moi si vous avez pu interpréter différemment mon intervention, M. le député de Lévis.

Des voix: Manque de transparence.

M. Gratton: Un manque de transparence.

Le Président: M. le député de Lévis, excusez-moi si vous avez pu interpréter différemment mon intervention. C'était simplement parce que j'avais reconnu Mme la députée de Marie-Victorin.

Mme la députée de Marie-Victorin, toujours à l'étape des renseignements sur les travaux de l'Assemblée.

Mme Vermette: Oui, M. le Président. Il y a déjà plusieurs jours, la ministre de la Santé et des Services sociaux s'est engagée à me fournir une réponse à une question que je lui posais concernant le financement des CALACS, les centres qui s'occupent des agressions à caractère sexuel, et je n'ai toujours pas ma réponse. Comme c'est important et vital pour ces centres d'intervention, j'aurais aimé que la ministre puisse me fournir ces détails; de mémoire, elle ne pouvait me dire le montant alloué à ces centres, les CALACS.

M. Gratton: M. le Président, je vais vérifier et faire rapport aussitôt que possible.

Le Président: Est-ce qu'il y a d'autres questions concernant les renseignements sur les

travaux de l'Assemblée?

M. le leader de l'Opposition. Mme la députée.

Avis de sanction d'un projet de loi

J'ai un avis à transmettre aux membres de cette Assemblée. Je vous informe qu'il y aura sanction d'un projet de loi au bureau du lieutenant-gouverneur à 13 heures cet après-midi.

Nous allons maintenant procéder aux affaires du jour. Je vais reconnaître M. le leader du gouvernement. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Johnson: Oui, M. le Président. Je vous demanderais d'appeler l'article 36 du feuilleton.

Projet de loi 110 Adoption

Le Président: À l'article 36 du feuilleton, il s'agit de l'adoption du projet de loi 110, Loi sur la Régie des télécommunications, présenté par M. le ministre des Communications. Je suis prêt à reconnaître M. le ministre des Communications.

M. Richard French

M. French: M. le Président, je comprends que l'Opposition, en l'absence du critique du dossier des communications, a néanmoins quelques commentaires à faire sur ce projet de loi. Je voudrais donc vous signaler que j'aimerais conserver l'ensemble de mes commentaires pour ma réplique à ceux de l'Opposition.

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement, M. le leader de l'Opposition, à la demande de M. le ministre des Communications? (11 h 20)

M. François Gendron

M. Gendron: M. le Président, ce sera plus simple que cela compte tenu d'une série de circonstances. Comme je n'avais que des remarques par lesquelles on aurait aimé reprendre certains éléments qu'on a omis de discuter - en tout cas selon les informations que j'ai - je ne ferai pas d'autres commentaires sur le projet de loi 110, sauf le très court commentaire suivant: Nous sommes convaincus, M. le Président, qu'il s'agit d'un projet de loi qui, en soi, est valable parce qu'il restructure la Régie des services publics dans le domaine des communications. Par contre, nous avions indiqué au ministre concernant les réponses qu'il aurait dû être en mesure de nous fournir en ce qui a trait aux négociations fédérales-provinciales, pour s'assurer que le Québec soit davantage maître d'oeuvre dans toute la question de la téléphonie, à tout le moins en ce qui concerne les communications intraprovin- ciales incluant la fixation des tarifs, que cela aurait dû être réservé exclusivement aux provinces. Les communications internationales, les compétences fédérales, il n'y a pas de problème à vivre avec cela, et les communications interprovinciales seraient de compétence fédérale avec exercice partagé avec les provinces.

Or, la conférence qui a eu lieu a pris fin avec des résultats tout autres: on y a adopté six principes généraux devant servir de fondement à l'élaboration d'une politique nationale, à la réalisation conjointe pour mars 1988 d'une étude de faisabilité et d'un examen des implications au sujet de la concurrence des services interurbains. Le ministre des Communications établissait alors la position du Québec par la formule: La concurrence si nécessaire, mais pas nécessairement la concurrence. Il y a eu la tenue d'une nouvelle conférence en septembre 1987 pour l'approbation d'un protocole d'entente sur l'interconnexion, établissant les règles de base permettant de connecter, partout au Canada, les services et le matériel de télécommunication aux installations des réseaux locaux et interurbains des entreprises de télécommunications.

Cette rencontre de septembre 1987 n'a pas eu lieu et, à la période de questions à l'Assemblée nationale, le 8 décembre dernier, le ministre des Communications disait que cette troisième conférence devait se tenir au cours de l'hiver ou au printemps. Le ministre poursuivait en précisant que le Québec avait fait de nouvelles propositions à ses partenaires provinciaux et au gouvernement fédéral et qu'il tentait de décrire un terrain d'entente. Toutefois, devait-il aussi déclarer: "Je mentirais... si je disais que ce terrain d'entente est identifié." Autrement dit, il devait y avoir une autre conférence où on devait identifier très clairement le terrain d'entente, mais ils ont tous travaillé à identifier ce terrain d'entente pour une rencontre qui n'a pas eu lieu.

On est très heureux de la franchise du ministre. Mais sur le plan concret, des résultats tangibles de nos juridictions, on n'est pas plus avancés. Il n'y a strictement rien de changé. L'enjeu reste exactement le même. Le gouvernement fédéral acceptera-t-il de se départir d'une partie de ses responsabilités afin de permettre au Québec d'assumer des pouvoirs similaires à ceux des sept autres provinces et, par la même occasion, de contrôler la plus grande compagnie de téléphone du Canada?

Les conséquences du statut quo pour le Québec, c'est qu'il y a un déséquilibre sur la question tarifaire, sans partage équitable des responsabilités, sans coordination et harmonisation eu égard à la * responsabilité du CRTC dans les activités de Bell Canada au Québec et à celles de la Régie des services publics à l'endroit des 18 autres compagnies de téléphone desservant le Québec, nombreuses sont ainsi les inégalités régionales dans les tarifs de téléphone. Là, je ne veux pas reprendre des exemples; le ministre le

sait. Cependant, ce que je trouve un peu curieux, c'est que, concernant les déficiences du service régional, il n'y a rien de réglé. À moins de très mal comprendre le projet de loi, je n'ai pas d'indication sérieuse que la nouvelle Régie des services publics créée aura cette capacité d'infléchir, de corriger et de modifier les nombreuses déficiences du service régional.

À titre d'exemple, la Régie des services publics ordonnait à Québec-Téléphone, après analyse des besoins des abonnés concernés, de procéder avant la fin de 1986 à la réalisation de liens de service régional entre certaines municipalités de la région de Québec, Pont-Rouge par rapport à Saint-Apollinaire. Or, ces liens - parce que je ne veux pas prendre une série d'exemples - de services régionaux n'ont pu être rétablis, Bell ayant refusé de procéder aux travaux nécessaires au raccordement de son réseau de la région de Québec à celui de Québec-Téléphone en alléguant que la décision de la Régie des services publics ne rencontrait pas les critères de service régional auxquels le CRTC le tenait de se conformer et craignait que ce raccordement ne constitue un précédent dangereux pour d'autres cas semblables au Québec. Dans son ordonnance, la Régie des services publics avait estimé que les modifications exigées seraient avantageuses pour les abonnés concernés et en aucune manière assumées par les autres abonnés des deux compagnies.

Je veux juste conclure, Mme la Présidente, sur les services régionaux. On peut ainsi conclure avec justesse que la double juridiction en matière de service régional a fait des siennes contre, d'abord, l'accessibilité à des services de télécommunications adaptés aux réels besoins des usagers sur l'ensemble du territoire et dans chacune des régions, l'application des tarifs justes et raisonnables, l'équilibre approprié entre l'intérêt des usagers et les exigences de visibilité des sociétés exploitantes.

Dans sa loi, il y a également toute la question de l'hypothèque, dans sa dimension recherche et développement, pour laquelle on n'a pas eu les réponses qu'on souhaitait. Il y a également tout le volet de la déréglementation. Je pense que lorsque le ministre disait: Toutefois, nous constatons aussi que les services qui pourraient faire l'objet d'une saine concurrence seront chaque année plus nombreux, la nouvelle régie pourra tenir compte de ce phénomène et ainsi alléger la réglementation selon ce que commandera l'intérêt économique des promoteurs et ce que permettra l'intérêt public. C'est le ministre qui citait cela, le 15 octobre, lors du congrès de l'Association des compagnies de téléphone du Québec.

Mais, l'article 34 de la loi 110 autorise, en effet, la RDT à soustraire un service de télécommunications de l'intervention de la même régie pour la fixation des prix au taux des services offerts, si elle estime que ce service peut bénéficier d'un niveau de concurrence suffisant pour garantir des prix à des taux justes et raisonnables, auquel cas la régie doit convoquer une audience publique en vertu de l'article 47.

Je conclus en espérant que le ministre réponde au moins à ces quelques questions. Les questions restent nombreuses. On n'a pas l'impression que cette nouvelle régie va répondre aux problèmes soulevés par le critique au moment où il a eu l'occasion de le faire. Les quelques questions qui demeurent sans réponse, ce sont quels sont ces services qui pourraient ainsi être exonérés de réglementation? Très précisément, quels services pourraient être délestés d'une certaine réglementation?

Qu'est-ce qu'un niveau de concurrence suffisant? Pas de réponse à cela. Qu'est-ce que le ministre entendait, en octobre dernier, par "selon - c'est lui qui parlait - ce que commandera l'intérêt économique des promoteurs et ce que permettra l'intérêt public? Ce qui est commandé l'emportera-t-il sur ce qui est permis? Comment s'harmoniseront les principes de déréglementation et de concurrence de la RDT et du gouvernement, ce dernier qui doit approuver la décision de la régie, s'accordant ainsi un droit de veto? Le législateur se targue ainsi, de nouveau, de belles intentions, mais il n'y a pas l'ombre d'un énoncé de politique gouvernementale en matière de télécommunications qui vient encadrer, baliser, articuler un processus de déréglementation en la matière.

Voilà, Mme la Présidente, les principaux éléments sur lesquels on voulait revenir, en troisième lecture, en espérant que le ministre apporte certaines clarifications. Fondamentalement, c'est à peu près la même chose qu'on voit partout avec ce gouvernement. Une loi qui, en soi, est très légitime, très logique. Par contre, on ne retrouve pas, à l'intérieur de la Régie des services publics, les mécanismes requis, appropriés pour qu'elle agisse sur la problématique soulevée par rapport aux intérêts québécois. Une nouvelle régie, nous, on applaudit. Une nouvelle régie qui a l'air d'une coquille vide, on a des problèmes de conscience. On a des problèmes de sécurité quant à sa capacité d'intervenir, quant à sa capacité de régler les véritables problèmes soulevés, en particulier - et je pense que c'est surtout là-dessus que le ministre devrait nous faire une phrase - est-ce que oui ou non, il a la même conviction que nous, que Québec, comme État, Québec, comme gouvernement, devrait avoir la capacité de contrôler un peu plus ce qui se fait en matière de téléphonie? Dans le secteur de la téléphonie, nous, on pense qu'on est assez grands garçons pour être en mesure d'avoir nous-mêmes la capacité de déterminer et de régir les règles sur lesquelles on veut que les services de télécommunications soient assujettis, en particulier sur le volet du réseau régional et de toutes les questions qui ont été soulevées par le critique, lors du débat de principe en deuxième lecture, par rapport à certaines déficiences, certaines carences, en particulier, concernant les

écarts de tarifs lorsqu'on est à proximité de deux petites régions.

Mme la Présidente, voilà les quelques considérations sur lesquelles on veut attirer l'attention du ministre des Communications, et je tiens à m'excuser, en conclusion, auprès du ministre des Communications, je ne pourrai - je lirai sa réplique - l'entendre considérant que j'ai une réunion importante avec le Directeur général des élections à la suite du bazooka de la semaine dernière. C'est sûrement une question importante à discuter si on ne veut pas s'en faire passer un autre.

La Vice-Présidente: Merci, M. le leader de l'Opposition et député d'Abitibi-Ouest. M. le ministre des Communications, en réplique. (11 h 30)

M. Richard French (réplique)

M. French: Mme la Présidente, enfin le recherchiste du Parti québécois a trouvé un porte-parole! Enfin, toutes ces petites curiosités peuvent-elles être ventilées à l'Assemblée nationale, pas au début du débat, pas en commission parlementaire où on aurait pu discuter à loisir des questions intéressantes soulevées, mais en troisième lecture, en fin de session, au moment où le porte-parole doit incessamment quitter l'Assemblée nationale et sera, donc, complètement ignorant des réponses que je peux apporter à ses questions. C'est fascinant d'apprendre que le Parti québécois est d'accord avec une refonte de la Loi sur la Régie des services publics qui va donc devenir la Régie des télécommunications. Il est malheureux, cependant, pour les abonnés du téléphone, dont ceux d'Abitibi-Ouest, que le Parti québécois ait complètement négligé durant neuf ans cette même régie. C'est pour cette raison qu'il est maintenant nécessaire de la moderniser. Alors, que l'Opposition officielle trouve que ce serait valable de réglementer davantage et d'avoir plus de juridiction, j'en suis, mais il faut quand même dire que nous avons fait plus pour moderniser et pour faire avancer l'état des négociations avec le gouvernement fédéral dans le domaine des télécommunications que nos prédécesseurs n'ont pu le faire durant neuf ans.

Donc, il est un peu saugrenu, un peu surprenant d'apprendre, en troisième lecture, qu'il reste un tas de questions ouvertes, que le Parti québécois brûle de curiosité sur plusieurs points hautement techniques, très intéressants et importants, mais que le critique lui-même n'a pas cru bon de soulever durant l'étude en commission parlementaire. Ce n'est pas parce que nous n'avons pas collaboré avec les membres de l'Opposition officielle dans tout cela puisque nous leur avons, entre autres, fourni nos comparaisons de lois anciennes et nouvelles pour les aider à mieux comprendre ce qui se passait.

Cela me surprend aussi d'entendre le critique de l'Opposition dire que la Régie des services publics ou la Régie des télécommunications est une coquille vide. Si c'est une coquille vide, c'est un peu surprenant puisque cela réglemente 12 % à 14 % des installations de télécommunications au Québec. Vous en savez quelque chose, puisque vous seul parmi l'ensemble des parlementaires avez eu le privilège de comparaître devant cette même régie. Ce n'est pas une coquille vide, c'est un instrument modernisé et efficace qui va prendre ses responsabilités pour la réglementation de ces 12 % à 14 % de l'infrastructure téléphonique du Québec et qui va être capable, nous l'espérons, de le faire davantage à l'avenir après conclusion des négociations avec le gouvernement fédéral dans le domaine de la réglementation des télécommunications.

Le porte-parole de l'Opposition, leader parlementaire de l'Opposition nous interroge sur le progrès de cette négociation. Il nous pose la question: Sommes-nous d'accord avec lui sur la nécessité d'avoir davantage de juridiction? Bien sûr qu'on est d'accord, on est tellement d'accord qu'on ne fait qu'essayer de faire avancer cette question avec nos partenaires du fédéral et les neuf autres provinces, plus les deux territoires. Il faudrait, cependant, souligner que ce n'est pas faute d'efforts du gouvernement québécois actuel, ni des gouvernements québécois précédents que nous n'avons pas pu encore accoucher de cette entente fédérale-provinciale, de cette refonte de la réglementation et de la juridiction dans le domaine de la téléphonie. C'est le même problème qui existait entre 1976 et 1985, c'est la même difficulté à trouver, à l'intérieur de cette bouillabaisse de réglementation télécommunica-tionnelle au pays, la formule qui va commander l'appui des deux territoires, des dix provinces et du gouvernement du Canada. Ce n'est pas plus facile en 1988 que ce ne l'était entre 1976 et 1985.

Maintenant que le député d'Abitibi-Ouest a quitté l'Assemblée nationale, vous me permettrez, Mme la Présidente, d'indiquer, sur cette longue et remarquablement hétérogène collection de questions et d'interrogations, que je n'ai pas l'intention, aujourd'hui, de répondre systématiquement à toutes et à chacune. Ce serait très facile et intéressant de le faire dans un autre contexte, lors d'une commission parlementaire si l'Opposition officielle le voulait, lors d'un débat d'urgence ou d'un débat spécial. On est ouvert à tout cela; ce sont des questions intéressantes et importantes. Cependant, étant donné que l'Opposition officielle n'est représentée que par une seule députée, qui, elle, n'a jamais participé au débat - ce n'est pas une critique que je fais à son égard - je n'ai pas l'intention de m'éterniser sur les questions hautement techniques qui ont été soulevées.

Encore une fois, une Opposition qui se veut sérieuse, une Opposition qui se veut fondée, qui suit une démarche logique aurait soulevé ces questions de façon systématique dès le début du

débat, pendant la commission parlementaire et non pas tardivement, en troisième lecture. Je pense qu'il est clair - et on pouvait le lire sur le visage du député d'Abitibi-Ouest - que le leader parlementaire de l'Opposition se trouvait dans une situation difficile. Je répète que je suis bien content que le recherchiste du Parti québécois ait trouvé quelqu'un pour exprimer ses préoccupations à ce moment-ci, mais je lui demanderais de trouver, une occasion parlementaire propice à la discussion systématique de l'ensemble des questions importantes, mais saugrenues qu'il a posées aujourd'hui. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Cette réplique termine le débat. Est-ce que le projet de loi 110, Loi sur la Régie des télécommunications, est adopté?

Des voix: Adopté.

La Vice-Présidente: Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Johnson: Oui, Mme la Présidente, je vous demanderais d'appeler l'article 5 du feuilleton.

Projet de loi 27 Reprise du débat sur l'adoption du principe

La Vice-Présidente: A l'article 5 de notre feuilleton, le ministre de l'Industrie et du Commerce propose la reprise du débat sur l'adoption du principe du projet de loi 27, Loi sur la Société de promotion économique du Québec métropolitain et modifiant la Loi sur la Société Inter-Port de Québec. M. le ministre de l'Industrie et du Commerce, en réplique.

M. Daniel Johnson (réplique)

M. Johnson: Merci, Mme la Présidente. À cause des horaires assez chargés d'un peu tout le monde au mois de juin, je n'ai pas eu l'occasion de m'exprimer lors de la présentation du projet de loi devant le critique officiel et député de Lévis, il était en un autre lieu. J'avais présumé qu'il avait lu mon intervention ou qu'il l'avait vue à la télévision. Cependant, ses propos d'hier soir - pour ma part, je n'étais pas présent, mais je les ai écoutés à la télévision - laisseraient supposer que le député de Lévis n'a pas lu le projet de loi, n'a pas écouté les interventions faites de ce côté-ci de la Chambre par le député de La Peltrie et moi-même, n'a pas daigné communiquer avec les élus municipaux de sa région et n'a pas suivi le dossier de quelque façon que ce soit.

En effet, Mme la Présidente, hier soir, dans son intervention, le député de Lévis a parlé d'à peu près tout, sauf du projet de loi. Lorsqu'il a mentionné le projet de loi, il l'a fait afin de soulever des points qui le seront, très facilement, à l'occasion de l'étude détaillée de ce projet de loi. Le député de Lévis, dans un discours où la confusion l'a disputé à l'incohérence, a parlé de Provigo, des pêcheries des Îles-de-la-Madeleine, d'un corridor technologique dans la région de Québec qui s'étendrait jusqu'à Saint-Romuald, si j'ai bien compris, et de différentes choses qui indiquent le très haut degré d'ignorance du député de Lévis dans ce dossier. Il a surtout chargé à fond de train, comme c'est son habitude, sur un désengagement des différents paliers de gouvernement face au développement économique de la région de Québec.

Je rappellerai au député de Lévis que ce qui est en cause, c'est une décision du 31 mars dernier - parce que les contrats, les ententes fédérales-provinciales se terminaient - de mettre fin à l'appui financier des gouvernements au développement économique de la région de Québec par le biais de la Société Inter-Port. Ce que nous avons obtenu de ce côté-ci, ce que nous continuons à consentir comme effort et ce que le gouvernement fédéral, d'ailleurs, continue à consentir comme effort, c'est d'utiliser le solde de l'entente fédérale-provinciale - non pas en le versant à nos fonds consolidés du revenu respectifs - des sommes considérables, plus de 2 000 000 $, à l'endroit ou au bénéfice d'institutions, d'organismes de la région du Québec métropolitain afin de les aider à faire la promotion économique de la région de Québec et de s'assurer du développement encore plus pointu, plus stable, plus solide de la région de Québec dans les cinq prochaines années. (11 h 40)

Ce qui est en cause ici, très clairement, c'est un engagement continu, pour cinq années de plus qu'on ne l'aurait cru, du gouvernement du Québec, envers le développement économique de la région de Québec. C'est un engagement qui repose sur des bases beaucoup plus solides, car à la suite de consultations extrêmement larges, toutes faites de collaboration et d'ouverture d'esprit des deux côtés du fleuve Saint-Laurent, le consensus a été réalisé, il a été établi et a permis d'envisager le développement économique de la région du Québec métropolitain à l'intérieur d'un organisme véritablement voué, dont la vocation est consacrée au soutien d'activités de promotion de la très grande région. Parallèlement à cette vocation du nouvel organisme de promotion, sera maintenue la vocation de ce qui était la Société Inter-Port - dans une autre société succédant à Inter-Port - à l'endroit du parc industriel à grand gabarit qui est situé sur la rive sud du Saint-Laurent, en face de Québec.

Il y a, donc, tellement d'espoirs qui sont logés dans ces nouveaux organismes que je ne comprends toujours pas non pas les hésitations du député de Lévis, mais les charges à fond de train qu'il a livrées contre tous ceux qui s'intéressent au développement économique de la région de Québec. Il ignorait de toute évidence

que, depuis des mois, à l'occasion de ces consultations, s'est établi un consensus souhaité de longue date qui fait en sorte qu'on évite les chevauchements de responsabilités des différents organismes, qu'on évite les chevauchements entre la Communauté urbaine de Québec et les MRC de Desjardins et des Chutes-de-la-Chaudière, entre les différentes municipalités qui composent ces MRC et la Communauté urbaine de Québec, et qu'il y a, finalement, grâce au cadre que nous prévoyons dans ces projets de loi, des occasions d'agir sur le développement économique de la région du Québec métropolitain, de façon complémentaire, à même des sommes considérables, plus de 2 000 000 $, consacrées par les gouvernements de niveau supérieur durant les cinq prochaines années, auxquels viendront s'adjoindre, toujours de façon complémentaire, les ressources financières des milieux concernés: la CUQ, les municipalités du côté nord du Saint-Laurent et de la rive sud du Saint-Laurent, par l'intermédaire des MRC.

Cela m'apparaissait extrêmement clair. C'est en réponse à un souhait généralisé de la région du Québec métropolitain, rive nord et rive sud, que nous avons présenté ce projet de loi. Je désespère de jamais faire comprendre au député de Lévis quels sont les objectifs que recherche la région de Québec. Au cours de consultations, à l'occasion des dépôts de mémoires et des sessions de la commission Lapointe et des comités ministériels composés de députés du gouvernement du Québec, donc de l'Assemblée nationale, et de la Chambre des communes, qui représentent la région de Québec, on a découvert la façon de faire agir, comme elles le souhaitaient, toute la région de Québec, toutes ses composantes, dans des cadres unifiés, avec des cibles de développement bien identifiés, avec des outils de développement qui sont à la charge des gouvernements supérieurs et des municipalités en cause. De toutes ces façons, nous avons réussi, après plusieurs mois d'efforts, oui, à réaliser une belle cohérence dans l'action de développement économique du Québec métropolitain, grâce au cadre et aux pouvoirs que nous confions aux différents organismes qui seront, à partir de très bientôt, chargés de s'occuper, en première ligne, du développement économique de la région, car ce sont les gens de la région qui le souhaitaient et ce sont les gens de la région qui seront des parties prenantes à ces activités de développement.

J'anticipe avec un plaisir mitigé, l'occasion que j'aurai de rencontrer le député de Lévis en commission parlementaire pour l'étude détaillée. J'ose croire - je parle au nom de l'ensemble des députés membres de cette commission, de l'ensemble des fonctionnaires qui nous accompagneront, de l'ensemble des attachés politiques qui auront, de part et d'autre, à regarder ce projet de loi - que le député de Lévis ne fera pas souffrir tout ce monde pendant des heures avec des discours où, comme je l'ai indiqué, l'état de son ignorance est étalé au grand jour.

La Vice-Présidente: Merci, M. le ministre de l'Industrie et du Commerce. Cette réplique termine le débat. Est-ce que le principe du projet de loi 27, Loi sur la Société de promotion économique du Québec métropolitain et modifiant la Loi sur la Société Inter-Port de Québec, est adopté?

Une voix: Adopté.

La Vice-Présidente: Adopté? Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

Renvoi à la commission de l'économie et du travail

M. Johnson: Oui, Mme la Présidente. Je fais maintenant motion pour déférer ce projet de loi à la commission de l'économie et du travail pour son étude détaillée.

La Vice-Présidente: Est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

La Vice-Présidente: Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Johnson: Je vous demanderais, Mme la Présidente, d'appeler l'article 6 du feuilleton.

Projet de loi 34 Adoption du principe

La Vice-Présidente: À l'article 6 de notre feuilleton, le ministre délégué à la Famille, à la Santé et aux Services sociaux propose l'adoption du principe du projet de loi 34, Loi modifiant la Loi sur les services de santé et les services sociaux et d'autres dispositions législatives. M. le ministre délégué à la Famille, à la Santé et aux Services sociaux.

M. Robert Dutil

M. Dutil: Mme la Présidente, le projet de loi 34, Loi modifiant la Loi sur les services de santé et les services sociaux, aura pour effet d'instaurer de nouvelles règles en matière de transport ambulancier au Québec. Le transport ambulancier au Québec a subi de profondes modifications au cours des 25 dernières années. Jusqu'à la fin des années soixante, il n'existait aucune réglementation du transport ambulancier, aucun contrôle de la qualité et le niveau de services variait d'une région à l'autre. La qualité des services ambulanciers était strictement dépendante de la rentabilité des activités et de la conscience personnelle qu'avait l'exploitant des besoins de la population à desservir. N'importe

qui pouvait s'improviser ambulancier du jour au lendemain, à la condition de se procurer un véhicule familial et de consentir à le doter d'une sirène et d'une civière.

La situation était la même un peu partout au Canada et même aux États-Unis. Il n'est, donc, pas étonnant que des études majeures réalisées sur les services de santé dans les années soixante, par exemple, celle de la Commission royale d'enquête sur les services de santé, en 1964, aient conclu que l'absence de législation encadrant les services rendus par le personnel ambulancier semblait être une des principales failles dans l'ensemble des services de santé en général.

De son côté, la commission Castonguay-Nepveu dégageait, pour l'organisation des services de santé au Québec, les grands principes directeurs, telles la qualité, l'accessibilité géographique et financière et la complémentarité des services. Ces principes directeurs, en plus de faire mieux percevoir la place des services ambulanciers dans le grand réseau des services de santé, ont servi de guides et de cadres de référence aux démarches ultérieures visant l'amélioration des services ambulanciers. Plusieurs années plus tard, soit en 1972, était adoptée la première législation à traiter des services d'ambulance au Québec. Il s'agissait de la Loi sur la protection de la santé publique, sanctionnée le 21 décembre 1972. Elle apportait un premier encadrement aux services d'ambulance.

Au cours des années 1973 et 1974, les CRSSS étaient mandatés par le ministère de la Santé et des Services sociaux pour étudier les services d'urgence dans leur région respective. L'étude comportait trois volets, soit les services d'urgence hospitaliers, le transport ambulancier et les communications. Cette analyse aboutissait à une série de rapports décrivant un concept d'implantation d'un système de services d'urgence et les services ambulanciers en constituaient un élément majeur qui devait être bien intégré à l'ensemble de la problématique des services d'urgence. À cause des coûts apparemment élevés du système proposé, le ministère des Affaires sociales opta plutôt pour la recherche de solutions précises aux différents problèmes majeurs identifiés. (11 h 50)

Les solutions retenues et mises en application par le ministère en ce qui concernait le transport ambulancier ont été connues dès janvier 1975. Elles avaient trait à la politique de transport des malades, à la politique de subvention des services d'ambulance et à la réglementation. Une politique de transport des malades était effectivement acheminée aux établissements concernés en avril 1975. Celle-ci déterminait les modalités des transferts d'urgence par ambulance entre centres hospitaliers, le transport pour diagnostic et traitement et le transport aérien d'urgence.

Par ailleurs, le ministère annonçait en même temps l'application d'une politique de subvention visant à garantir la rentabilité des entreprises dans les zones ambulancières à faible volume. L'application de cette politique devait être subordonnée à celle du règlement afin de pouvoir bénéficier des systèmes de contrôle réglementaires et à une description précise des zones ambulancières.

C'est le 1er février 1976 qu'était acceptée la première réglementation touchant les services d'ambulance. Elle fixait les conditions minimales pour l'obtention de permis de services d'ambulance, les normes minimales des véhicules et des équipements, les qualifications requises d'un exploitant, d'un préposé et d'un conducteur d'ambulance, de même que certaines règles de fonctionnement, notamment l'obligation de compléter une déclaration de transport pour chaque personne transportée.

Au cours de l'année 1977, le zonage des services d'ambulance était révisé particulièrement pour les régions à densité faible ou moyenne de population. L'objectif était de découper l'ensemble du territoire du Québec de manière telle qu'à partir d'un point de services d'ambulance situé dans une zone toutes les parties du territoire pouvaient être rejointes par un véhicule-ambulance dans un délai maximum de 30 minutes à compter du moment de l'appel et dans des conditions normales de circulation. C'est ainsi que le ministère émettait en 1977, 328 permis d'exploitation répartis dans 195 zones dont 131 étaient subventionnées. Par ailleurs, de façon à rendre les différentes politiques émises sur le transport des malades plus homogènes et plus simples d'application, on reformulait une politique de transport des malades qui entrait en application le 1er décembre 1977. Cette politique prévoyait pour la première fois la gratuité du transport des malades entre établissements.

C'est au cours de la même année que le ministère confiait aux CRSSS le mandat d'assurer la responsabilité de l'application des politiques d'accessibilité des services d'ambulance. À cette fin, les conseils régionaux devaient effectuer toutes les opérations tant administratives que d'information et d'animation relatives au programme d'accessibilité des services d'ambulance, gestion des politiques de subvention, liens contractuels avec les entreprises des zones subventionnées, formation du personnel, recommandations sur l'émission des permis, etc., et également assurer la coordination régionale des activités.

En 1979, la politique de gratuité du transport pour les personnes âgées de 65 ans et plus était acceptée. Un pas de plus était ainsi fait dans l'accessibilité aux services. Par ailleurs, par décret, le ministère décentralisait vers les CRSSS de nouvelles responsabilités en matière de planification, de programmation, de financement et d'évaluation.

En 1980, le ministère décidait de mettre de l'avant une étude de prix de revient pour le

transport ambulancier. Cette étude débouchait sur une tarification unique pour l'ensemble du Québec. Cette tarification était le résultat de l'addition de tous les coûts rencontrés par un détenteur de permis pour exploiter son entreprise, le tout ramené par prise en charge et par kilomètre parcouru avec le client.

En décembre 1981, le projet de loi 27 confiait au CRSSS du Montréal métropolitain la mise sur pied d'une centrale de coordination des urgences. Cette décision suivait le dépôt d'une étude, le rapport Champoux-Dorval, qui portait sur l'accessibilité aux services d'urgence dans la région métropolitaine de Montréal.

En 1981, c'était aussi la mise sur pied par le gouvernement du Québec du système d'évacuation aéromédicale appelé EVAC. Le système était mis sur pied pour pallier à l'éloignement et à l'isolement des gens habitant en régions éloignées. Le système permet de fournir aux malades des régions périphériques du Québec l'accès aux soins d'urgence et aux soins spécialisés nécessaires à leur état, tout en leur assurant, Mme la Présidente, la continuité des soins au cours de leur transport.

Le 8 mars 1984, un protocole d'entente était signé entre la Corporation des services d'ambulance du Québec et le ministère, établissant ainsi des paramètres financiers devant permettre aux entreprises d'atteindre un seuil de rentabilité minimale, d'assurer un meilleur revenu aux ambulanciers et, donc, une meilleure stabilisation de l'emploi. Une prime de disponibilité pour les ambulanciers travaillant sur les véhicules-ambulances dans les zones subventionnées était établie.

En 1984, année particulière s'il en fut pour le Québec dans le transport ambulancier, il y eut, d'abord, une longue période de négociations suivie de moyens de pression de la part des syndiqués du RETAQ, c'est-à-dire du Rassemblement des employés et techniciens ambulanciers du Québec, pour obtenir leur première convention collective. N'ayant abouti à aucune entente, le gouvernement de l'époque, sous la recommandation de l'actuel chef de l'Opposition et député de Joliette alors ministre de la Santé et des Services sociaux, dut aller négocier la loi qu'il venait de faire adopter - puisque les techniciens ambulanciers ne la respectaient pas - et établir par décret les conditions de travail afin de rétablir le service à Montréal. C'est ainsi que l'on s'est retrouvé, au Québec, avec deux systèmes ambulanciers distincts, celui de Montréal et un autre pour la province. Je reviendrai, Mme la Présidente, un peu plus tard sur ces deux aspects.

Comme vous pouvez le constater par la chronologie des événements marquant le transport ambulancier au Québec, de service humanitaire ou charitable offert par des entreprises funéraires, des municipalités ou des organismes bénévoles, le transport ambulancier est devenu, en 1987, une véritable industrie où nous retrou- vons plus de 188 entreprises, dont 176 sont à but lucratif, et pour lesquelles oeuvrent un peu plus de 2300 employés. Les entreprises se répartissent dans 192 zones et 492 véhicules répondent à l'ensemble des demandes de tout le Québec. Le temps-réponse pour la prise en charge d'un bénéficiaire varie selon que l'on se situe en milieu urbain, semi-urbain ou rural, ou encore que le transport soit primaire ou secondaire. Par ailleurs, de service entièrement financé par la clientèle jusqu'à la fin des années soixante, le transport ambulancier puise aujourd'hui ses sources de revenus à même les deniers publics dans une proportion dépassant le cap des 90 %.

En ce qui a trait à la clientèle desservie par le transport ambulancier, elle est légèrement à la baisse depuis 1979. Sans doute les programmes de prévention développés par l'État, l'application des mesures de sécurité sur la route et la prise en charge des cas urgents en régions par le système EVAC ont-ils contribué à cette stabilisation de la demande. On peut aussi remarquer que la clientèle s'est modifiée sensiblement avec le temps. Le transport primaire occupe maintenant plus de 60 % du marché. Pour leur part, les personnes âgées de 65 ans et plus représentent une partie non proportionnelle à leur évolution en nombre avec une augmentation de 32 % entre 1981 et 1985. Quant à la qualité des services, nous avons constaté que l'on pouvait l'améliorer considérant, entre autres, les nouvelles technologies tant pour ce qui est des communications que des instruments et des appareils d'intervention dont, entre autres, la reforme annoncée le 2 mars dernier et dont je parlerai plus abondamment tout à l'heure.

Pour ce qui est de la clientèle, la population du Québec utilise près de 400 000 fois le transport par ambulance en un an. 63 % de ces transports sont du transport primaire et 37 % du transport interétablissements. Les personnes âgées de 65 ans et plus sont la clientèle majoritaire de ce service dans une proportion de 52 %. Une analyse sommaire des statistiques des transports primaires à la centrale de coordination des urgences du CRSSS de Québec révèle ce qui suit: 25 % des transports sont dus à des problèmes cardiaques et à des difficultés respiratoires, 25 % à des problèmes orthopédiques, fractures et accidents de la route, 7 % à des problèmes de psychiatrie, 12 % à des problèmes neurologiques et d'arrêts, d'accidents cardio-vasculaires, et 31 % des transports sont dus à diverses autres raisons, tels diabète, hémorragies, douleurs abdominales, etc.

Une autre donnée intéressante. Nous avons constaté dans la région de Québec, la région 03, que 18 % à 20 % des cas urgents arrivaient aux centres hospitaliers par ambulance, mais que ces 18 % à 20 % d'arrivées contribuaient pour 75 % à 80 % des jours d'hospitalisation. On peut, donc, conclure que ces données nous donnent un aperçu de la gravité des cas transportés par ambulance, mais illustrent aussi la pertinence

d'une intervention rapide et compétente.

En ce qui concerne les maladies cardio-vasculaires, elles sont, comme on le sait, une cause importante de morbidité et de mortalité. L'évolution de la technologie, les connaissances plus poussées et des traitements plus efficaces ont fait repousser de façon radicale les échéances de la morbidité et de la mortalité. Mais si efficaces que soient les soins que l'on peut apporter dans un hôpital, ils sont, la plupart du temps, dépendants de la qualité et de la rapidité de la première intervention. (12 heures)

Le vieillissement de la population, pour sa part, n'est pas sans rapport avec les besoins en services ambulanciers. On sait, en effet, que si l'espérance de vie a augmenté de façon significative depuis plusieurs années, l'espérance de vie en bonne santé, quant à elle, est demeurée stationnaire. Par ailleurs, les personnes âgées demeurent plus longtemps à domicile. L'ambulance constitue souvent, pour un bénéficiaire âgé arrivé à un certain niveau d'incapacité fonctionnelle, le seul moyen d'accès à l'hôpital. Ceci s'applique également pour les personnes âgées vivant dans un centre d'accueil, d'hébergement ou en centre hospitalier de longue durée, dont la moyenne d'âge augmente sans cesse et qui ont fréquemment besoin de soins spécialisés.

Selon la RAAQ et certaines études américaines également, les connaissances actuelles en traumatologie permettent de conclure que la première heure est capitale quant au pronostic des accidents de la route. Plus de 50 % à 60 % des décès d'accidentés de la route ont lieu en-dedans de quelques heures après une blessure causée en général par des hémorragies internes, soit à la tête, à l'abdomen ou au système respiratoire. La majorité de ces blessures sont considérées comme guérissables selon les traitements médicaux habituels. Cependant, l'intervalle entre la blessure et le traitement définitif est critique.

Dans son analyse de la problématique spécifique reliée aux victimes d'accidents de la route, la RAAQ formule l'avis qu'une amélioration de la formation des policiers et des ambulanciers pourrait apporter des bénéfices substantiels pour la victime. À titre d'exemple, mentionnons les fractures de la colonne cervicale qui peuvent causer une quadraplégie. On sait que ces fractures se compliquent assez fréquemment soit pendant le transport ou à l'arrivée à l'hôpital. S'il est difficile, comme nous l'avons mentionné plus haut, de qualifier de façon précise la clientèle des services ambulanciers, ces quelques exemples donnent, néanmoins, un aperçu des besoins de la clientèle pour qui un service rapide et compétent d'ambulanciers représente le moyen d'accès à des services de plus en plus sophistiqués. Ils illustrent aussi l'étroite relation qui existe entre l'intervention première et l'intervention plus spécialisée.

Comme on le sait par les études américaines et la littérature scientifique médicale canadienne, la mise sur pied de politiques et de systèmes visant à améliorer, entre autres, la rapidité des interventions pour le traitement des grands traumatisés a permis de réduire de façon considérable la mortalité, la morbidité, les pertes de productivité, les coûts sociaux et les coûts de réadaptation occasionnés par cette clientèle. Cette analyse de la clientèle et de ses besoins a fait ressortir l'importance du facteur temps, mais aussi du facteur qualité. Ce facteur qualité est d'autant plus important que les distances sont parfois grandes a parcourir. Au chapitre de la qualité des soins, il faut nous assurer du bon état de fonctionnement, de la propreté et de l'asepsie des véhicules, ainsi que du matériel, mais, au-delà de cela, )es équipements doivent être adéquats, la formation du personnel bonifiée et le temps-réponse lors d'une intervention réduit le plus possible.

C'est dans un souci de qualité et de meilleure efficience du service que nous avons annoncé la réforme du 2 mars dernier. Celle-ci prévoit la réorganisation du transport ambulancier dans tout le Québec. Basée sur de nombreux rapports produits à ce jour, citons les rapports Marois, Tremblay, Drouin et, le dernier en lice. le rapport SECOR, la réorganisation vise l'amélioration du niveau de services, la stabilisation de la main-d'oeuvre en régions, l'amélioration des systèmes de contrôle et la rationalisation des opérations et des coûts. Pour atteindre ces objectifs, il faut rappeler les mesures que nous entendons appliquer: la première, l'augmentation de la formation des techniciens ambulanciers à 825 heures; la seconde, une rémunération différente en régions afin de stabiliser l'emploi: la troisième, la mise sur pied de centrales de coordination des appels éventuellement sur l'ensemble du territoire; la quatrième, des normes et standards plus élevés pour les équipements et les véhicules. Je reviendrai au cas particulier de Montréal par la suite, même si la plupart des points mentionnés plus haut vont contribuer, là comme ailleurs, à une augmentation de la qualité de services.

Parlons, dans un premier temps, de la formation. Actuellement, il est important de savoir que celle-ci se situe aux environs de 150 heures en province et de 280 heures à Montréal Pour saisir le bien-fondé du rehaussement de la formation à 825 heures, autant en regions qua Montréal, il suffit de constater que les ambulan ciers en régions passent en moyenne 32 minutes seuls auprès du bénéficiaire Ceux de Montréal font des trajets de beaucoup plus courte durée et bénéficient, de plus, d'une assistance médicale et logistique de haut niveau, mais, par contre, ils font face à des cas lourds de façon plus régulière qu'en régions. De là l'importance de reconnaître rapidement les signes de traumatismes graves. Le rôle du technicien ambulancier a évolué plus vite que les structures qui auraient pu favoriser un meilleur développement et une

intégration plus rapide de ce dernier dans le secteur préhospitalier. Un travail se rapprochant de celui de brancardier au départ, le rôle de technicien ambulancier a évolué avec les années pour prendre une place de plus en plus importante comme intervenant de première ligne.

Souvent dans des conditions extrêmement difficiles, le technicien ambulancier est amené à poser des gestes qui peuvent avoir d'importantes répercussions. Par conséquent, nous croyons que la qualité des services passera sans doute par une hausse du niveau de formation et par l'accès des ambulanciers à des programmes d'actualisation et de connaissances. Il est essentiel qu'ils puissent reconnaître et distinguer les signes physiologiques et les symptômes, qu'ils puissent en apprécier la gravité et qu'ils sachent appliquer l'ensemble des techniques de stabilisation pour répondre aux besoins immédiats de la personne en situation d'urgence.

En ce qui concerne la stabilisation de la main-d'oeuvre, il est important de souligner qu'il existe à ce jour, en régions, de nombreux problèmes, que ce soit la pénurie de main-d'oeuvre, la perte du personnel plus qualifié au profit des grands centres, ou encore le peu d'intérêt que représente un emploi sur appel. Afin de donner aux régions la qualité et le service auxquels elles ont droit, nous devons les doter de moyens qui favoriseront la main-d'oeuvre déjà sur place et les intéresser à faire carrière en technique ambulancière chez eux. Pour ce faire, l'établissement d'horaires précis garantissant un revenu suffisant avec des conditions de travail intéressantes gardera notre main-d'oeuvre plus spécialisée dans les régions respectives. Par la mise sur pied de centrales de coordination, nous diminuerons le temps de réponse en régions. Actuellement, en effet, les zones n'étant pas perméables entre elles, il arrive des situations où par exemple, à cause d'un transfert interétablissements, une zone peut se retrouver momentanément découverte.

Il est important de remédier à cela. Grâce aux centrales de coordination, nous saurons où se trouvent les ambulances et, en cas de besoin, nous pourrons les acheminer aux endroits appropries beaucoup plus rapidement et beaucoup plus efficacement. De plus, la population des régions pourra bénéficier de l'accès au numéro unique, soit le 911. Il est facile de comprendre le problème que pose la mémorisation de multiples numéros d'urgence, que ce soit les numéros des policiers, des pompiers, des ambulances, numéros qui, d'ailleurs, sont différents actuellement dans les régions d'une municipalité à l'autre. Le numéro unique est beaucoup plus sécuritaire et, particulièrement, pour les clientèles du troisième âge et pour les jeunes enfants.

À ces mesures s'ajoute à Montréal la dissociation d'Urgences-santé du CRSSS, à la fois pour des raisons administratives et des raisons opérationnelles. Pour ce faire, la création d'un organisme sans but lucratif, qui intégrera, le cas échéant, les techniciens ambulanciers, viendra, à toutes fins utiles, confirmer la situation qui prévaut depuis 1984 et qui a contribué depuis ce temps à la dégradation des relations du travail. Comme on le sait, la problématique de l'organisation du système ambulancier à Montréal diffère grandement de celle des autres régions du Québec. En effet, le fonctionnement d'Urgences-santé repose sur une grande disponibilité des ressources à tous les niveaux. Techniciens ambulanciers permanents, flottes de véhicules-ambulances suffisantes et aide administrative requise pour assurer le fonctionnement des activités prises en charge par Urgences-santé. Par contre, il existe un problème aigu quant au partage des responsabilités entre les différents intervenants impliqués, c'est-à-dire CSSMM, CRSSS à Montréal, Urgences-santé, établissements, entreprises et syndicats.

Ce problème de nature organisationnelle a atteint une dimension critique qui génère un climat de méfiance et handicape finalement l'efficacité du système ambulancier dans son ensemble. Pour comprendre l'évolution de la situation, rappelons-nous qu'à l'origine Urgences-santé a été créé pour répondre à trois types de problèmes: le manque de coordination dans le transport ambulancier, les difficultés de fonctionnement des services hospitaliers et le développement incohérent de services privés de visites médicales à domicile fonctionnant en marge du réseau hospitalier. Depuis, malgré le fait qu'Ur-gences-santé a été créé pour des fins de coordination et de contrôle, cet organisme est devenu, à la faveur des événements, un intervenant direct dans les opérations des services de transport ambulancier.

Cette implication opérationnelle s'est traduite par la gestion d'une centrale de coordination, une implication dans les gestions des horaires de travail, l'achat et la distribution de fournitures médicales, la supervision sur le terrain, la facturation, le paiement et la prestation de services de formation. Urgences-santé est donc devenu à toutes fins utiles, au fil des ans, impliqué à tous les niveaux de transport ambulancier, nous forçant ainsi à réviser son rôle et celui des employeurs. (12 h 10)

Finalement, M. le Président, il nous faut établir une modalité différente de rétribution des entreprises, que ce soit à Montréal ou en province. À Montréal, un contrat de location dissocié du fonds de salaire y veillera, tandis qu'en province le contrat à budget viendra y pallier en assurant l'entreprise de la marge de manoeuvre nécessaire. Les entreprises vont cesser d'être payées à l'appel. Elles auront dorénavant un budget global avec lequel elles pourront composer, puisque, comme on le sait, les frais fixes ne sont pas nécessairement en rapport direct avec le nombre d'appels, particulièrement en régions. Enfin, le gouvernement du Québec se donne le pouvoir d'aller en soumissions publiques

afin que cessent les trop grandes divergences quant aux tarifs.

M. le Président, le projet de loi 34, Loi modifiant la Loi sur les services de santé et les services sociaux et d'autres dispositions législatives, a été déposé à l'Assemblée nationale afin de donner suite à la réforme annoncée le 2 mars par le gouvernement. Je me suis attardé sur l'historique pour démontrer qu'il était plus que temps d'avoir une réforme en profondeur et sur tout le territoire. Le projet de loi se veut l'outil nécessaire pour mettre cette réforme en place.

De façon sommaire, cette loi instaure de nouvelles règles en matière de transport ambulancier au Québec et prévoit à cette fin, pour la région de Montréal, la création d'une corporation à but non lucratif qui aura pour objet, en lieu et place du Conseil de la santé et des services sociaux de la région métropolitaine de Montréal, d'organiser et de coordonner sur son territoire le transport ambulancier. Pour la réalisation de son objet, la corporation pourra, notamment, favoriser la concertation entre les différents intervenants en matière de transport ambulancier, recevoir les appels de demandes de services d'ambulance, en faire la répartition et exploiter, le cas échéant, un service d'ambulance ou un service d'intervention médicale d'urgence.

La loi prévoit les règles applicables à cette corporation de même que la composition de son conseil d'administration dont les membres sont nommés par le gouvernement. Cette corporation pourra conclure avec tout propriétaire d'ambulances un contrat de location de véhicules et, pour ce faire, procédera par soumissions publiques. Des dispositions particulières sont toutefois prévues pour l'ensemble des premiers contrats à être signés que la corporation devra offrir en priorité aux titulaires actuels de permis d'exploitation de services d'ambulance de la région.

Pour les autres régions du Québec, la loi prévoit que, sur demande du ministre, le conseil régional de la santé et des services sociaux prépare un plan relatif à la coordination du transport ambulancier dans sa région en indiquant à quel organisme ou centre hospitalier est confiée la responsabilité d'une telle coordination. L'organisme ou le centre hospitalier ainsi désigné pourra conclure avec tout exploitant de services d'ambulance qui oeuvre dans la région un contrat afin de disposer du service d'ambulance de cet exploitant ou autoriser une municipalité à faire un tel transport. Les règles prévues ci-haut pour la corporation s'appliqueront alors en faisant les adaptations nécessaires.

Cette loi modifie, compte tenu des changements apportés en matière de transport ambulancier, la Loi sur la protection de la santé publique pour y prévoir principalement la coexistence de règles applicables aux titulaires de permis et aux signataires de contrats en matière de transport ambulancier. Elle resserre en outre les dispositions applicables en matière de suspension et de révocation de permis et modifie la Loi sur la Commission des affaires sociales.

Ce projet prévoit par ailleurs qu'aux fins du Code du travail sont des services publics, tout comme le transport ambulancier, la nouvelle corporation ainsi qu'un organisme qui se voit confier la responsabilité de la coordination du transport ambulancier dans une région donnée.

Enfin, diverses dispositions transitoires sont prévues concernant le transfert à la nouvelle corporation des employés du Conseil régional de la santé et des services sociaux de la région métropolitaine de Montréal oeuvrant au Centre de coordination des urgences de même que le transfert des techniciens ambulanciers à l'emploi des titulaires actuels de permis d'exploitation de services d'ambulance dans la région de Montréal. La protection des droits respectifs de ces employés est aussi assurée et des modifications sont notamment apportées à cette fin à la Loi sur le régime de retraite des employés du gouvernement et des organismes publics pour les employés transférés du conseil à la corporation.

Nous sommes conscients que ce projet de loi modifie des règles en matière de transport ambulancier. Cependant, la population du Québec peut être assurée que c'est dans un but de plus grande qualité et de plus grande efficience du service, auxquelles elle a droit. Je demande donc à cette Assemblée la collaboration de tous et de toutes pour l'adoption du principe de ce projet de loi. Merci.

Le Vice-Président: Nous allons poursuivre le débat avec l'intervention de M. le chef de l'Opposition.

M. Guy Chevrette

M. Chevrette: Merci, M. le Président. Vous me permettrez, d'abord, de dire qu'à la lecture même de ce projet de loi 34 je constate carrément l'abdication des responsabilités d'un ministre et que, à toutes fins utiles, c'est l'aboutissement d'une impuissance ministérielle à faire dégager un consensus dans le système de santé et auprès de tous ceux qui oeuvrent, de près ou de loin, dans le domaine du transport ambulancier.

Ce projet de loi n'est, ni plus ni moins, qu'un seul changement de structures, et je vais le démontrer au cours de mon exposé. Il y a une absence totale dans ce projet de loi de préoccupation face à la qualité des soins. On se préoccupe du transport, mais on ne se préoccupe absolument pas de la qualité des soins qui se donnent dans le transport ambulancier. On constate également que ce projet de loi est tout à fait ou diamétralement opposé à la philosophie libérale, qui est une philosophie de privatisation. Dans le cas présent, on nous présente un projet de loi qui procède à une étatisation, mais pas complète, et je vais le démontrer.

Également, ce projet de loi vient instaurer

deux classes de travailleurs, des travailleurs fonctionnaires d'État, du parapublic, et des travailleurs du privé, et, automatiquement, deux classes de service, un service chromé en transport ambulancier pour Laval et Montréal, mais un service ordinaire pour Longueuil, sur la rive sud, Québec, Trois-Rivières et le reste du Québec. C'est ce que fait le projet de loi. Je vais essayer de le démontrer le plus précisément possible.

Tout d'abord, vous aurez remarqué que le ministre, sans conviction, a lu un texte, sans doute préparé par le nouveau p.-d.g., un texte extrêmement théorique, sans conviction, expliquant ce qu'il voulait faire. Mais ce qu'on a à voter, c'est le contenu d'une loi, ce ne sont pas des voeux pieux. La loi fait suite, est l'aboutissement, à toutes fins utiles, de quatre rapports: le rapport Marois, comme disait le ministre, le rapport Tremblay, le rapport SECOR et, bien sûr, le rapport du RETAQ, qui a été remis au ministre. Ce ministre n'a même pas su répondre en cette Chambre à des questions précises sur la qualité des soins. Je prends l'exemple du Sri Lankais. Le ministre n'a même pas eu en main les rapports concrets sur la façon dont on pouvait contrôler la qualité des services. Ce ministre n'a même pas su rendre publics ces rapports, et il nous présente, bien sûr, sans conviction, un projet de loi qui change des structures. D'où émane ce changement? D'où vient ce changement de structures? Par qui ce changement de structures est-il demandé?

Vous verrez, très concrètement, que le ministre ne s'est même pas inspiré des rapports qui lui ont été remis. Tout d'abord, prenons le rapport Forget. Le rapport Forget a amené une kyrielle de suggestions, de recommandations qui ont été carrément ignorées dans le projet de loi. Le rapport Forget s'est intéressé aux coûts, coûts fortement contestés par les propriétaires. Pourtant, on n'est pas allé voir les propriétaires pour savoir ce qu'ils contestaient dans cela afin qu'ils puissent présenter, formellement, leurs points de vue.

Bien sûr, on a le RETAQ qui, devant la commission Marois, disait carrément - je vous le rappelle, cela remonte à 1986 - par son porte-parole à l'époque, M. Pierre Lamarche, actuel p-d.g.: "Si les techniciens et les techniciennes ambulanciers ont posé, comme objectif, l'étatisation des services préhospitaliers, c'est qu'ils voulaient briser la logique inhérente à la propriété privée, le profit." (12 h 20)

Donc, le ministre se rend exactement à la plaidoirie que faisait M. Pierre Lamarche, actuel p.-d.g. de cette corporation sans but lucratif, devant la commission Marois. C'est une abdication complète de ses responsabilités. Le ministre se devait au moins, je pense, non seulement de consulter les techniciens ambulanciers, mais il y a aussi du personnel professionnel, il y a des infirmiers, des infirmières, des répartiteurs, des directeurs, il y a des propriétaires dans cet ensemble. Quand on présente une loi on se doit au moins, M. le Président, d'avoir permis à un ensemble, ou bien de dégager des consensus, à tout au moins de faire valoir son point de vue. Le ministre s'est carrément rangé derrière la position du RETAQ. D'ailleurs, cette absence de consultation, il se le fera dire... C'est à peine une heure qu'on a interrogé les deux groupes de propriétaires ambulanciers de Montréal et la Corporation des ambulanciers du Québec. Une heure! Imaginez-vous, une heure seulement. Les infirmières ont été ignorées dans leur rôle fondamental qu'elles ont à jouer.

Pour une première fois dans le domaine de la santé et des services sociaux - c'est une première au Québec, vous regarderez toutes les lois dans le domaine de la santé - nous avons un p.-d.g., un président-directeur général. Partout dans le secteur de la santé, que ce soit dans les CSS, les CLSC, les CRSSS, le directeur général relève toujours d'un conseil d'administration présidé par une autre personne. Cette fois-ci c'est un p.-d.g., celui qui devant la commission Marois disait que la seule façon de tasser ou de casser l'entreprise privée - politique pourtant libérale, politique du gouvernement libéral - c'était l'étatisation. M. le Président, le jupon du ministre traîne à terre. Il se démasque avec ce projet de loi.

Ce n'est pas surprenant que les rumeurs veulent que le 2 mars dernier il était accompagné du sous-ministre de la santé dans une cabane à sucre pour dire au RETAQ: Voici, vos problèmes sont réglés. Les rumeurs veulent cela. Le sous-ministre de la santé aurait dit: Vos problèmes sont réglés. Soyez sans crainte, le ministre délégué à la Santé va vous régler cela par des nominations, par une structure qui vous est chère. Ce sont les paroles mêmes des gens du RETAQ qui nous disent: Oui, le sous-ministre de la Santé nous a dit cela. Drôle de façon de dégager des consensus. Regardons la composition même de son projet de loi, de son conseil d'administration: un p.-d.g. ex-négociateur en chef du RETAQ et trois membres des techniciens ambulanciers au conseil d'administration - quatre sur neuf - après cela un membre de la communauté urbaine. Où sont les médecins? Où est le personnel professionnel? Ignoré, M. le Président. Absolument ignoré. Où sont les usagers, dans la composition de son conseil d'administration? Aucun. Y a-t-il un propriétaire, au moins, au conseil d'administration? Aucun. C'est un conseil d'administration taillé sur mesure pour répondre à un objectif bien précis du RETAQ, du regroupement des techniciens.

Absence totale de standards de qualité de soins pour tout le Québec. Le mutisme le plus complet. Ce n'est pas grave. Qui va contrôler la qualité des soins? Trouvez-moi cela dans le projet de loi. Pas un traître mot. Qui décide de l'intervention médicale? Pas un traître mot. Où est la place du "paramedic" dans la structure? On ne sait pas, on l'ignore. Qui a autorité sur les

superviseurs? Sans doute le p. -d. g., M. le Président. Mais on sait que le regroupement des techniciens veut abolir le tri qui se fait par des infirmiers, des infirmières qui répondent aux appels. Où sera la place de ces infirmiers et ces infirmières? On l'ignore complètement. Le ministre dit: Nous allons assurer la sécurité d'emploi. Faudrait-il qu'il ajoute que dans son projet de loi il écrit: Seuls ceux qui figureront sur la liste de transfert auront les droits acquis? C'est dans son projet de loi. Il ne faut quand même pas induire en erreur ceux et celles qui oeuvrent là présentement. Le projet de loi ne donne la sécurité des droits acquis qu'à ceux qui paraîtront sur la liste de transfert. Et cela, le ministre ne le dit pas. Qui fera le triage? Je l'ai dit tantôt: On ne le sait pas. Mais on sait une chose, c'est que le président du RETAQ ne veut plus de triage. Il veut que chaque appel qui est acheminé à Urgences-santé se retrouve dans les urgences. Quel sera le résultat, M. le Président, quand on sait qu'à Urgences-santé on reçoit à peu près 1000 appels par jour et que seulement 250 personnes sont amenées dans les salles d'urgence? S'il n'y a pas de tri, comment Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux va-t-elle se débrouiller avec les salles d'urgence, elle qui a de la misère à aller chercher de l'argent au Conseil du trésor pour régler le problème des urgences? On se retrouvera avec 700 ou 800 personnes dans les urgences parce qu'il n'y aura pas de tri.

D'ailleurs, Toronto vit ce phénomène, et ils sont en train de le modifier parce que cela n'a pas de bon sens. Ici, comme d'habitude, on va aller singer sur Toronto, mais on sait que c'est une formule déjà dépassée et déphasée, qu'on s'interroge énormément sur cette formule et qu'il faut un triage. Non, le ministre se rend à l'argumentation du président des techniciens.

M. le Président, qui donnera l'information? Combien d'informations sont données chaque jour à des citoyens qui appellent, qui ont un petit malaise, qui demandent de l'information? Ce sont les infirmières qui rendent ce service à la population à Montréal. On ne le sait pas d'après le projet de loi. C'est une absence totale de contrôle de la qualité des soins. Où se situera l'intervention médicale dans tout cela? On parle de soins préhospitaliers. Qui aura l'autorité sur la qualité des soins? Un p. -d. g. ou un médecin responsable qui va prendre les décisions qui s'imposent, si on ne veut pas revivre des cas comme celui du Sri Lankais? La qualité des soins était secondaire, ce qui urgeait pour le ministre, c'étaient le chantage et la menace d'une grève le 1er juillet. C'est cela qui comptait, et non pas la qualité du transport ambulancier, la qualité des soins donnés aux patients transportés par ambulance.

Est-ce que le ministre a pris la peine, par exemple, d'aller interroger les spécialistes de l'Université de Sherbrooke qui peuvent définir très clairement le nombre d'heures nécessaire pour la formation d'un technicien ambulancier? N'a-t-il pas plutôt accepté spontanément 825 heures, comme cela, en faisant fi du fait qu'il y a des "paramedics" à qui on refuse même de poser des gestes, alors qu'ils ont une formation à peu près équivalente? Certains ont 2000 heures de formation et on leur refuse de poser des gestes pour sauver des personnes. Il dit que la qualité sera améliorée. Dans le cadre des possibilités qu'a un technicien, est-ce qu'il n'aurait pas mieux valu laisser à des spécialistes le soin de définir quel devrait être le programme-cadre, le nombre d'heures de formation minimal pour un technicien, sous la supervision de spécialistes? Il me semble que, quand on a le souci de la qualité, c'est un peu ce qu'on regarde.

Le ministre n'a même pas d'évaluation de ce que cela va coûter. Ma collègue et moi lui avons posé des questions en commission parlementaire. Il n'a même pas d'évaluation de ce que cela va coûter. Mais non, cela urgeait quand même, M. ne fallait pas faire cela, ce qui urgeait, c'était d'éviter une grève éventuelle. Et on se retrouvera dans le même cul-de-sac qu'avant là-dessus. C'est une question administrative, il n'y a même pas eu d'enquête pour améliorer la situation. On a préféré se rendre à un voeu, à une condition préalable posée aux négociations: Si tu ne nous donnes pas cette loi, on ne négocie pas, surveille-nous bien, on part! Cela, c'est de l'abdication la plus complète.

Le ministre pourrait-il nous dire aussi pourquoi, par exemple, les gens de la rive sud, où il y a une forte agglomération, n'auraient pas la même qualité de services que I'îIe de Laval? Pourquoi les gens de la rive sud, à proximité de Montréal, n'ont-ils pas la qualité de services qu'on retrouve sur l'île de Montréal et sur I'îIe de Laval? Comment peut-il l'expliquer? Comment le ministre peut-il se targuer d'améliorer les services ambulanciers quand il ne touche pas à la ville de Québec, par exemple, pour créer une centrale de coordination pour Québec? Comment le ministre peut-il faire autrement que de dire: C'est absolument vrai, j'ai dû plier, j'ai dû me rendre aux arguments qui étaient pesants, en l'occurrence, à savoir qu'il y aurait peut-être une grève, et je ne voulais pas avoir à y faire face? (12 h 30)

Que le ministre ne vienne pas nous dire qu'il a amélioré la situation! Il crée deux classes de citoyens. La rive sud, on n'est pas trop pressé pour vous, vieillissez tranquilles, on ira vous voir. À Laval, vous l'aviez, on le conserve et on vous donne un président-directeur général avec un conseil d'administration dirigé par un seul groupement de travailleurs et non pas par l'ensemble des catégories de personnel.

M. le Président, plus que cela. Le projet de loi du ministre va permettre à des municipalités riches de se payer un système parallèle. On aura, de par ce projet de loi, des municipalités riches. Il sait bien ce que je veux dire à part

cela et de quel coin je veux parler. Il y aura des municipalités qui se paieront des services chromés, comme on dit en bon québécois, et nos citoyens des milieux moins favorisés, des milieux pauvres, des milieux moins bien nantis auront un service de qualité inférieure. Est-ce cela l'équité dans les services de santé, M. le Président? Depuis l'enquête Castonguay-Nepveu, on a toujours voulu une équité dans les services de santé. C'est une brèche monumentale que le projet de loi vient créer. Je voudrais bien que le ministre me dise comment il pourrait l'empêcher puisque, de par sa loi, il permet à des municipalités... Il ouvre la porte toute grande pour l'iniquité dans les services de transport ambulancier.

Cette loi, également, est tout à fait contraire à la philosophie du Parti libéral, diamétralement opposée à la philosophie du Parti libéral qui est la privatisation. Croyez-le ou non, ce ministre se donne un pouvoir d'étatiser. Il transforme les propriétaires ambulanciers, à toutes fins utiles, en locateurs de tôle, de véhicules, pas plus que cela. Le propriétaire n'a aucun contrôle sur l'utilisation de sa propre machinerie. Il s'arroge le pouvoir d'enlever le permis - donne une préséance au départ bien sûr - quand il veut et sans aucune indemnisation.

M. le Président, je référerai le ministre à des lois qu'on a votées dans cette Chambre. Je pense, par exemple, aux pourvoyeurs qui sont sous bail. Quand le ministre leur enlève le bail de pourvoyeurs, il a l'obligation, de par la loi, de les indemniser d'une façon juste et équitable. Si le gouvernement avait été cohérent, il aurait étatisé au complet ou il aurait laissé cela privé, mais il n'aurait pas fait une étatisation pour plaire à un groupe, ni laissé une privatisation tout à fait fausse dans ses fondements mêmes. On n'étatise pas sans indemniser les gens de façon correcte, à leur juste valeur. Il y a des évaluateurs professionnels qui sont capables de juger ce que vaut une flotte d'ambulances. Il y a des évaluateurs professionnels qui peuvent juger ce que vaut un fonds de commerce. Il y a des évaluateurs professionnels qui peuvent établir si le coût du permis, le rachat des permis, vaut quelque chose. Les propriétaires vont venir nous dire: Étatise-nous au complet ou laisse-nous comme nous sommes. Mais arrange-toi pas pour qu'on meure à petit feu. Ils ont saprement raison! On ne peut pas exproprier des gens de même sans leur offrir au moins une indemnité minimale. Je ne parle pas de leur donner sept fois ce que cela vaut. Je parle de juste prix, de coûts évalués professionnellement, de coûts réels.

Il y a eu une absence de consultation flagrante des propriétaires et c'est par centaines que j'ai reçu des copies conformes de télégrammes adresses au premier ministre Robert Bouras-sa, M. le Président et je n'en ai pas vu un, je n'en ai pas rencontré un dans tout le Québec - et j'ai vérifié auprès de mes collègues - il n'y a pas un propriétaire qui se dit satisfait d'une telle loi qui fausse les règles du jeu. C'est la négation même des règles les plus élémentaires quand on exproprie des gens. On ne les indemnise même pas.

M. le Président, on sait les dommages qu'il y a eu sur certains véhicules. Il y en a un, entre autres, six transmissions brûlées dans une semaine et je pourrais faire venir ce propriétaire pour témoigner. Quel avantage a-t-il à louer seulement de la machinerie quand il ne saura même pas... Ce n'est plus lui qui a le contrôle du gars qui va conduire le véhicule. Où s'en va-t-on avec des systèmes du genre? Ou bien le gouvernement étatise au complet, il indemnise correctement, justement, mais il n'introduit pas un mécanisme où les contrôles seront encore pires qu'ils étaient antérieurement. Cela n'a pas de bon sens. Cela va devenir des coûts astronomiques, et je comprends le ministre, quand je lui pose des questions, de ne pas être capable de me répondre. Si on brûle autant de transmissions et si on fait autant de folies sur les véhicules, c'est bien sûr que le coût horaire va augmenter d'une façon vertigineuse. Qu'est-ce qu'on va avoir? Tantôt, ce sera Tilden qui va louer? Ce sera qui? Qui sont les gens intéressés à vivre dans ce secteur, intéressés à ce secteur si ce ne sont des locateurs de machinerie? On aura beau augmenter le standard des équipements, ce qui fera un coût encore plus grand, ce avec quoi je suis d'accord d'ailleurs, soit d'améliorer le standard des équipements, mais tout en améliorant le standard des équipements, on devrait fixer dans tout le Québec des standards minima de contrôle de soins et aussi de contrôle de services, sinon c'est quoi? Les heures étudiées? Quand un décret dit que, même si vous échouez, vous restez quand même là et vous faites quand même votre travail, cela ne fait pas sérieux comme réforme. Cela ne fait pas du tout sérieux.

M. le Président, je reviens pour dire un mot sur l'équité. Je suis surpris qu'on n'en ait pas profité au moins, parce qu'on l'appelle la corporation sans but lucratif du Montréal métropolitain. Le Montréal métropolitain, que je sache, c'est grand. La rive sud n'échappe pas à cela. Est-ce que les citoyens de la rive sud sont des citoyens de second ordre? Là où le nombre l'exige, combien de fois retrouvons-nous ce bout de phrase dans certaines lois? Québec est une grande ville, avec sa banlieue. Comment se fait-il qu'on n'ait pas pensé à améliorer la qualité des services ambulanciers dans la région de Québec en lui donnant une centrale qui est réclamée depuis un bon bout de temps? Non, M. le Président, ce n'était pas Québec. Ça ne criait pas. Les travailleurs vont demeurer des travailleurs ordinaires du privé. C'était Montréal, travailleurs syndiqués qui deviendront des fonctionnaires de l'État, qui criait, et c'est à eux qu'il fallait répondre. Donc, l'objectif et les notes explicatives d'amélioration de la qualité des soins, mon oeil! Le ministre a eu peur. Le ministre est un

peureux, M. le Président. Il n'a pas voulu faire face à la musique et prendre ses responsabilités.

On crée deux classes de travailleurs. Je suis même inquiet de la position de la CSN, et je le dis comme je le pense. Je suis surpris que la CSN accepte que le ministre délégué à la Famille, à la Santé et aux Services sociaux crée deux classes de travailleurs, qu'il convertisse les ambulanciers et les techniciens ambulanciers de Montréal en fonctionnaires, et les autres, débrouillez-vous dans vos petits secteurs privés. Je suis surpris que la CSN accepte une telle position comme je suis surpris d'ailleurs que la CSN accepte une étatisation à moitié, elle qui chiale contre la qualité des véhicules depuis des années, elle qui dit que les propriétaires sont quasiment des bandits. Comment se fait-il qu'ils n'ont pas exigé du ministre, quant à être partis, parce qu'il tenait ce discours-là très clairement devant la commission Marois. Si les techniciens et techniciennes ambulanciers ont posé comme objectif l'étatisation des services préhospitaliers, c'est qu'ils voulaient briser la logique inhérente à la propriété privée au profit. C'était M. Lamarche qui s'exprimait ainsi. Donc, comment se fait-il que le ministre n'ait pas senti le besoin d'être cohérent de a à z et d'étatiser de a à z, d'indemniser correctement, avec des évaluations professionnelles, l'ensemble des propriétaires? C'eût été à ce moment-là, M. le Président, une façon correcte d'agir.

Quant aux classes de travailleurs, est-ce que cela se transposera dans des classes de services? Est-ce qu'on va instaurer au Québec deux classes de services? Un service de qualité supérieure dans la région métropolitaine de Montréal et des services de second ordre dans le reste du Québec? Je ne suis pas d'accord avec une telle formule, M. le Président. Si on juge opportun au Québec de donner des services ambulanciers de qualité, on ne doit pas faire de zones différentes. On ne doit pas créer des zones différentes. On ne doit pas introduire la notion de disparité même. C'est fondamental dans le domaine de la santé, ça. (12 h 40)

On a toujours parlé d'équité. On a toujours parlé de services adéquats pour tout le monde. On a toujours dit: Où que tu sois au Québec, tu as le droit à des services d'égale qualité. M. le Président, ce gouvernement semble oublier qu'au Québec, on a le droit à ce genre de services. Mais, que voulez-vous, quand on cède au chantage, il faut s'attendre à de telles choses.

M. le Président, croyez-le ou non, le ministre... Pour bien appuyer ma thèse que c'est un fait qu'il plie au chantage, que c'était tout orchestré, je vous ai lu tantôt un extrait, devant la commission Marois, où Pierre Lamarche, actuel p.-d.g. engagé par contrat depuis le 21 mai, disait que les techniciens et les techniciennes voulaient carrément briser la propriété privée dans le domaine ambulancier. Deux jours après la signature du contrat, contrat que le ministre a déposé la semaine passée deux jours après, est-ce que M. Lamarche est à l'ouvrage? Oui. Deux jours après, le 23, il était à une assemblée générale du RETAQ, le Regroupement des techniciens ambulanciers du Québec, et au point - 1, 2, 3, 4, 5 - 5, invité spécial, le directeur de l'organisme sans but lucratif, loi 34. Point suivant: période de questions au p.-d.g. Le 23 mai, l'ordre du jour, le nouveau p.-d.g. qui demandait l'étatisation devant la commission Marois, se présentait, comme premier geste officiel, non pas devant les cadres du CRSSS et les cadres actuels d'Urgences-santé, mais il se présentait à une assemblée générale du Regoupe-ment des techniciens ambulanciers, M. le Président, deux jours après. Et il répondait aux questions des techniciens et des techniciennes ambulanciers.

La semaine dernière, je posais une question au ministre et il a répondu non. J'ai hâte de voir si le président du RETAQ aura la même réponse. Quand je lui demandais: N'est-ce pas là un compromis que vous avez conclu en coulisses? Le ministre a dit: Non. M. le Président, j'ai au moins deux témoins selon lesquels le président a dit: Oui. Oui, et il me faut ma loi pour la fin juin, sinon vous verrez quelque chose en juillet. C'est ce qu'on entend dire présentement, M. le Président. On ne bloque pas une loi pour le plaisir de la bloquer. Mais le ministre a besoin de répondre aux questions. Il a besoin de nous indiquer clairement où il va avec ça. Il a besoin de nous dire comment il veut traiter le monde et cela comprend les professionnels, les cadres, les propriétaires, sinon, l'Opposition va prendre tout le temps voulu pour interroger le ministre et présenter les amendements qui s'imposent.

Je le vois déjà venir le 23 juin en disant: S'il y a des mouvements en juillet, c'est la faute de l'Opposition parce qu'elle ne nous a pas donné une loi. On l'attend déjà, M. le Président. On le voit déjà venir. C'est déjà le bruit qu'il fait courir. Déjà, des membres du RETAQ nous disent ça. On n'est pas là pour un groupe seulement, on est là pour l'adoption d'une loi en fonction de services de qualité à la population. On va faire notre devoir jusqu'au bout, M. le Président. Celui qui est à peine connaisseur vous dira que ce n'est pas un projet de loi qui transforme les services ambulanciers du Québec. On vous dira que c'est un projet loi qui rend, par législation, qui officialise un comité de relations du travail. C'est tout ce qu'est le projet de loi 34. C'est la nomination de personnes qui vont convertir Urgences-santé en un comité de relations du travail plutôt qu'en une corporation dont le souci premier n'est pas exclusivement les relations du travail, mais la qualité des services ambulanciers donnés à la population avec la participation de toutes les catégories de personnel.

Le projet de loi, ce n'est pas un projet de loi sur la qualité des services ambulanciers. C'est tout au plus une ratification légale d'un comité

de relations du travail, un comité de relations professionnelles, comme on dit dans le jargon des conventions collectives, le fruit d'un compromis exécuté par des peureux qui ont peur de prendre leurs responsabilités. Le fruit d'une abdication complète des responsabilités ministérielles et, également, le fruit d'un manque de conscience, d'un manque d'équité envers ceux et celles qui travaillent dans le domaine de la santé, dans le domaine du transport ambulancier. C'est ma perception du projet de loi. Si je n'avais pas eu autant de documents pour m'appuyer, j'aurais compris que, véritablement, le ministre tentait d'améliorer les choses. Mais tout s'est fait en catimini. On a même appris la nomination du p.-d.g., M. le Président, par des gens de Montréal à l'intérieur des structures.

D'habitude, l'honorable premier ministre Robert Bourassa, le vendredi après-midi, à 16 h 30, envoie les nominations aux journalistes. Mais là, cette fois-ci, on l'a appris un peu par la bande. Je comprends pourquoi le ministre délégué à la Santé n'osait pas trop s'afficher. Il se rend carrément à une demande qui n'a pas été évaluée publiquement par l'ensemble des catégories, une demande, cependant, que nous allons scruter à la loupe. Nous allons faire un travail judicieux. Comme parlementaire, je demanderais au ministre s'il tient à sa loi, s'il veut absolument la faire adopter, qu'il s'empresse de répondre aux interrogations en commission parlementaire. Qu'il n'essaie pas de faire de cachettes. Qu'il dise la vérité, toute la vérité, qu'il n'essaie pas, le 23 juin, de faire porter à d'autres l'odieux d'un report de la loi. Absolument pas, on ne le prendrait pas. On se défendra en conséquence.

M. le Président, l'officialisation d'un comité de relations du travail crée un monopole qui, à la longue, peut être extrêmement nocif. Je me souviens, en 1974, quand j'ai siégé à l'enquête Cliche, l'objectif recherché, à ce moment-là, dans tous les problèmes syndicaux qu'on connaissait à l'époque, c'était le monopole. Moi je crains les monopoles. Je suis pour la liberté d'accès syndical. Je crains les monopoles parce que les monopoles, quand ils exercent leurs moyens de pression, il n'y a pas de choix. Dans le domaine de la santé et des services sociaux, quand on est un tant soit peu responsable, on se doit d'avoir toujours les portes ouvertes parce que, ce qui compte d'abord et avant tout, c'est l'individu qu'on va chercher. C'est lui qui doit primer. Vous vous targuez de bâtir des politiques où c'est la personne avant toute chose. Mais si c'est la personne avant toute chose, je regrette, mais cette loi fait fi de la personne.

Nous nous inscrirons en faux tant et aussi longtemps que des amendements majeurs ne seront pas apportés. On révisera notre position si le ministre apporte des amendements à l'étape de l'étude article par article, mais, pour le moment, ce projet de loi ne sent pas bon et ce qui ne sent pas bon n'est pas attirant pour nous, pas au point de nous faire voter pour ce projet de loi en deuxième lecture. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président: Je vais maintenant reconnaître M. le député de Gouin.

M. Rochefort: M. le Président, compte tenu de l'heure, de deux choses l'une: ou on ajourne maintenant ou on accepte de me permettre de faire mon intervention d'un seul trait, c'est-à-dire de prolonger jusqu'à 13 h 10, au choix.

Le Vice-Président: Alors, dans les circonstances, ce n'est pas un ajournement, mais nous allons suspendre nos travaux immédiatement pour les reprendre à 15 heures.

(Suspension de la séance à 12 h 49)

(Reprise à 15 h 3)

La Vice-Présidente: À l'ordre, s'il vous plaît!

Veuillez vous asseoir.

Nous allons reprendre le débat sur l'adoption du principe du projet de loi 34, Loi modifiant la Loi sur les services de santé et les services sociaux et d'autres dispositions législatives. Là-dessus, je suis prête à reconnaître le premier intervenant, M. le député de Gouin.

M. Jacques Rochefort

M. Rochefort: Quelle gentillesse, quelle politesse! J'espère que j'aurai droit aux mêmes applaudissements après mon intervention, Mme la Présidente.

Le projet de loi qui est devant nous, premièrement, comme c'est souvent l'habitude, amène un débat à l'Assemblée nationale. Visiblement, on nous demande, du côté gouvernemental, de débattre le discours qu'a tenu le ministre et des intentions qui ont été mises de l'avant. Dans les faits, celui-ci diffère largement de ce que contient le projet de loi. Deuxièmement, nous nous retrouvons avec un projet de loi qui, finalement, traite essentiellement de deux choses: d'une part - je le reconnais - d'une certaine volonté, d'une certaine capacité législative que conférera le projet de loi 34 au ministre de la Santé et des Services sociaux pour intervenir mieux et plus dans le domaine de l'accessibilité aux services d'urgence pour l'ensemble des citoyens des régions du Québec; d'autre part, une réorganisation, dont je cherche les motifs réels, des services ambulanciers d'urgence dans la grande région de Montréal.

Beaucoup de questions, notamment en ce qui a trait à cette réorganisation à Montréal, sont soulevées par le projet de loi. Il faudrait être en mesure de lire ce qu'il y a entre les lignes pour peut-être mieux comprendre. Il faudrait être en mesure de mieux décoder tous les signaux donnés par différents partenaires au cours des derniers

mois dans ce dossier pour mieux comprendre les motivations du gouvernement. Peut-être faudra-t-il, un jour, s'attendre que le ministre responsable du dossier daigne, en toute transparence, en toute sincérité, en toute honnêteté, nous donner les raisons réelles qui justifient une intervention aussi radicale, aussi massive, faite sans discernement dans ce dossier de l'organisation des services d'urgence dans la grande région de Montréal?

Évidemment, beaucoup de questions sont reliées à cette dimension: la question du directeur général, le phénomène des problèmes reliés aux relations du travail auxquelles on semble vouloir, essentiellement, apporter des réponses par une réorganisation des services, non en fonction des travailleurs, mais de la population, le retrait du mandat au Conseil régional de la santé et des services sociaux, ce qui pourrait laisser supposer qu'il y a peut-être là un jugement négatif posé par le gouvernement sur la façon dont le CRSSS a assumé ses responsabilités. Si tel devait être le cas, je veux immédiatement dire au ministre que je suis en total désaccord avec tout jugement qui pourrait aller dans ce sens. Je pense, au contraire, que le Conseil régional de la santé et des services sociaux du Montréal métropolitain s'est acquitté admirablement bien de sa tâche comme responsable d'Urgences-santé et aucun Montréalais, aucune Montréalaise ne souhaite qu'Urgences-santé disparaisse ou voie son mandat modifié dans le sens d'une réduction de la qualité et de la quantité des services offerts par cet organisme.

J'ajoute aussi dans les éléments que soulève le projet de loi, alors que le rapport de la commission Rochon, dont on peut discuter certaines modalités, va dans le sens d'une orientation fondamentale soit la régionalisation des budgets, l'organisation, la coordination des ressources en santé et en services sociaux au Québec, que, tout à coup, le gouvernement décide de centraliser à Québec, au ministère de la Santé et des Services sociaux, l'organisation des services ambulanciers d'urgence dans la grande région de Montréal. Il le fait en même temps que, pour l'ensemble des autres régions du Québec, on donne maintenant de nouvelles responsabilités aux régions, aux conseils régionaux. Par le projet de loi 34, on va leur demander d'assumer de nouvelles responsabilités dans le domaine des services ambulanciers d'urgence, alors qu'à Montréal, on dit: Non, non, on va faire cela directement de Québec. Là aussi, on ne comprend pas trop les raisons qui font, finalement, qu'on assiste presque à une mise en tutelle par le ministère de la Santé et des Services sociaux à Québec, des services ambulanciers d'urgence médicale dans la grande région de Montréal.

D'autre part - c'est ce sur quoi j'ai l'intention d'intervenir plus largement - ce projet de loi n'apporte aucune garantie de quelque nature que ce soit quant aux services en termes de quantité, en termes de qualité et quant à la façon de les offrir dans la grande région de Montréal. Je m'explique. À l'heure où on se parle, Urgences-santé est bien connu par l'ensemble des intervenants et par la population de la région de Montréal qui, comme je le disais tantôt, s'est bien acquittée de son mandat, a sauvé des centaines et des centaines de vies, a permis à des gens d'avoir accès à des services médicaux dans les minutes requises pour être en mesure de se sortir d'une situation d'urgence médicale. Et on se retrouve avec un projet de loi qui chambarde radicalement l'organisation de ce service, Urgences-santé, je le répète, pour des raisons totalement inconnues, en tout cas, non avouées jusqu'à ce jour, et dans lequel on ne retrouve aucune garantie quant au maintien minimal des services qui existent, à l'heure où nous nous parlons, dans la grande région de Montréal.

Et c'est d'ailleurs, Mme la Présidente, sur ce volet particulier que j'ai l'intention d'intervenir plus largement quant à ce que soulève le projet de loi 34. Je parle de services aux bénéficiaires. Je parte de qualité. Je parle de quantité de services. Je parle de professionnalisme. Je parle de rapidité d'intervention. Le seul élément qui, non seulement, ne vient apporter aucune garantie quant aux services existants mais qui vient soulever des inquiétudes, c'est le ministre lui-même qui l'a abordé ce matin dans son intervention de présentation de son projet de loi quand, finalement, il nous a dit qu'il y a aussi, dans le projet de loi 34, une volonté de rationalisation des services ambulanciers à Montréal. Pour qui sait ce que rationaliser les services dans un domaine ou dans un autre veut dire dans le langage d'un membre du Conseil du trésor, pour qui sait ce que cela veut dire dans la bouche d'un ministre de l'actuel gouvernement, il y a fort à parier que cela veuille dire diminuer des budgets, réduire des ressources, couper dans le personnel, dans les services, dans les équipements. (15 h 10)

Je vois le ministre sourire, Mme la Présidente. Je n'affirme pas que c'est ce qui va se passer. Mais qu'on ne vienne pas nous annoncer qu'en nous disant que la réorganisation se fait entre autres au nom de la rationalisation, cela voudra dire plus de services, plus de personnel, plus d'ambulances. Non. Au minimum, entendons-nous pour dire que cela signifie qu'il y a quelqu'un qui va couper quelque chose quelque part et quelque part dans ce qui touche aux citoyens et aux citoyennes qui, à un moment donné ou un autre de leur vie, devront faire appel à un service d'urgence médicale. Il faut bien comprendre que quand on parle de services d'urgence médicale, on parle de quelqu'un qui est, plus souvent qu'autrement, dans une situation où sa vie est en danger, non pas pour les mois qui viennent, mais dans les minutes qui suivront

l'incident qui a provoqué sa demande, son appel à un service d'urgence médicale.

Donc, en ce sens-là, Mme la Présidente, même si je reconnais et je réaffirme que Urgences-santé s'est bien acquittée de son mandat, même si je reconnais qu'il y a un certain nombre de problèmes qui se sont posés et qu'il y a place pour l'amélioration réelle, là comme ailleurs, il n'y a pas de place pour rationaliser. Il n'y a pas de place pour réduire. Il n'y a personne qui peut dire qu'à Montréal on est trop efficace quand vient le temps d'intervenir dans les services d'urgence. Au contraire, on n'est jamais trop efficace dans l'intervention quant aux services d'urgence médicale, les services d'urgence ambulanciers.

Je pense, Mme la Présidente, qu'il y a là inquiétude et qu'au minimum, cela demanderait de la part du ministre, non pas des engagements dans des discours ou en paroles, mais qu'il y ait des garanties dans la loi que les services actuels seront d'abord protégés et que, deuxièmement, on s'engage à les améliorer parce que, oui, il y a place pour amélioration. Si, effectivement, on améliore, d'une certaine façon, l'accessibilité, la qualité et la quantité des services qui sont maintenant disponibles pour les citoyens de l'ensemble des régions du Québec dans le domaine ambulancier - il était essentiel que cela soit fait - il faudrait aussi qu'on puisse nous garantir, et je le répète, pas par des discours, malheureusement, cela n'a pas de valeur juridique, mais par des dispositions dans le projet de loi, qu'on va au minimum maintenir ce qui existe et qu'on va aussi faire en sorte d'améliorer les quelques éléments qui nécessitent amélioration.

Cela dit, Mme la Présidente, puisqu'on parle des services et puisqu'on parle des bénéficiaires, je pense qu'il est décevant que nous débattions cette question de la réorganisation des services ambulanciers au Québec et à Montréal sans aborder toute la problématique des services d'urgence médicale dans tout le Québec. On sait combien ces services d'urgence ont posé et posent toujours des problèmes majeurs à bon nombre de citoyens au Québec, combien l'accessibilité, c'est-à-dire être en mesure d'avoir un service rapide dans une salle d'urgence, c'est de plus en plus compliqué, combien il y a encore de gens qui sont dans des corridors de salles d'urgence pour des périodes inacceptables, inadmissibles sur le plan humain et sur le plan médical pour le traitement de ces cas. Je sais que la ministre de la Santé et des Services sociaux tente à tout bout de champ de nous faire accroire le contraire. J'ai eu l'occasion encore récemment de visiter deux salles d'urgence d'hôpitaux de la grande région de Montréal, et je me disais: Si la ministre pouvait être avec moi, on pourrait au moins compter ensemble le nombre de personnes qu'il y a dans le corridor.

Il y a une seule personne au Québec qui pense que cela va bien dans les salles d'urgence au Québec, et c'est l'actuelle ministre de la

Santé et des Services sociaux. Je comprends qu'elle est très occupée, mais j'aurais souhaité qu'elle participe au débat soulevé par son ministre délégué pour justement le situer dans toute la problématique des services d'urgence médicale au Québec. On ne peut débattre la question des services ambulanciers sans l'aborder dans son tout global qui est toute la question des problèmes des salles d'urgence au Québec et des services d'urgence. Donc, il y a des problèmes énormes qui ne sont pas plus réglés par ce projet de loi qu'ils ne l'ont été par le plan qui devait régler le problème des salles d'urgence et qui a été présenté il y a déjà deux ans par l'actuelle ministre de la Santé et des Services sociaux.

Il y a un problème d'organisation générale. Il y a aussi un problème de qualité des services dans toute cette problématique des services d'urgence. Je reconnais que le ministre a fait un premier pas et posé un premier geste concret et positif en augmentant substantiellement la qualité et la quantité d'heures de formation des techniciens ambulanciers au Québec. Toutefois, puis-je ajouter, Mme la Présidente, pourquoi y aller à moitié? Pourquoi faire seulement un bon pas en avant au lieu de régler, une fois pour toutes, une question fondamentale? Une des raisons pour lesquelles les services d'urgence au Québec sont dans l'état où ils sont, malgré les efforts déployés à tout bout de champ, à tout moment, par tout le monde pour les améliorer, je pense que c'est surtout parce qu'on y est allé avec des demi-mesures, des demi-réformes et des demi-pas en avant, tout comme le projet de loi 34, eu égard à la formation des techniciens ambulanciers, le fait lui aussi.

Il est temps, une fois pour toutes, que nous reconnaissions la nécessité et que nous prenions la décision, comme Assemblée nationale, qu'il faut au Québec, comme ailleurs en Amérique du Nord, des techniciens, des paramédicaux avec tout ce que cela implique en nombre d'heures de formation, de suivi de la formation, de soutien à cette formation. Il faut qu'en tout temps, dans toute ambulance qui circule sur les routes du Québec, il y ait quelqu'un qui ait non pas la moitié, les deux tiers ou les trois quarts de la formation que requerrait une intervention rapide sur la victime d'un problème nécessitant une intervention d'urgence médicale, mais toute la formation pour intervenir sur tous les éléments qui font que cette personne voit sa vie momentanément en danger, qui requiert une intervention non pas dans une heure, deux heures, quatre heures ou cinq heures, mais immédiate, sur-le-champ, sur le lieu de l'accident. Pourquoi, bon sang, ne pas accepter une fois pour toutes de créer ce poste de "paramedic" dans la société québécoise avec ce que cela implique? Pourquoi faire la moitié de la "job" au lieu de la faire au complet une fois pour toutes?

Deuxièmement, pourquoi ne pas reconnaître aussi que le métier d'urgentologue est une

spécialité médicale fort importante et bien distincte de l'ensemble des autres spécialités? Pourquoi le Québec ne reconnaîtrait-il pas lui aussi, comme bon nombre d'autres sociétés, qu'il doit y avoir dans les salles d'urgence du Québec, dans les services comme Urgences-santé et dans ceux qu'on va créer dans les différentes autres régions du Québec, des médecins dont c'est la spécialité médicale non pas seulement au plan de la formation, mais, au plan de la pratique médicale, d'être des spécialistes de l'urgence médicale au Québec. Pourquoi, encore une fois, avoir des médecins à moitié, aux deux tiers ou aux trois quarts formés pour intervenir au moment le plus déterminant dans une situation où on vivra ou on mourra en l'espace de quelques minutes? Pourquoi n'aurions-nous pas, ici comme ailleurs, des médecins qui ont reçu une formation complète et dont c'est essentiellement la pratique d'être des spécialistes de l'urgence au Québec?

Dans ce sens-là, pendant qu'on parle de médecins, Mme la Présidente, j'ajoute aussi qu'il serait souhaitable que lorsqu'il y a présence de médecins dans les services ambulanciers au Québec on ait, là aussi, la présence de médecins qui ont reçu une formation dans ce domaine. Je pense que c'est un plus qu'il y ait des médecins qui interviennent à l'occasion dans les services ambulanciers au Québec. Ce que je dis n'est pas négatif, c'est une remarque positive et constructive. Quand on se retrouve avec un médecin résident en dermatologie pour intervenir dans un cas de traumatisme sérieux sur le lieu d'un accident d'automobile ou de motocyclette, que voulez-vous, c'est plus utile que ma présence mais ce n'est pas aussi utile que si on avait là un traumatologue qui intervenait sur le lieu où il y a eu un accident qui met en danger la vie de quelqu'un. Donc, sur ce point, je pense que là aussi il faut qu'on complète les réformes et qu'on fasse en sorte de faire le tour une fois pour toutes de cette problématique des services d'urgence. (15 h 20)

J'ajoute aussi, Mme la Présidente: pourquoi, dans les 33 hôpitaux de IHe de Montréal et de ville Laval, faut-il qu'il y ait une salle d'urgence dans tous ces établissements techniquement en mesure de recevoir à peu près, parce qu'il y a un certain nombre de spécialisations qui sont identifiées? Mais pourquoi y a-t-il là obligation d'avoir, avec tout ce que cela représente en personnel, en équipement, des salles d'urgence dans 33 établissements hospitaliers avec ce que cela implique comme pression dans les corridors, sur les étages à cause de malades chroniques qui occupent des lits, etc., pour la pratique médicale? Pourquoi ne pas spécialiser un certain nombre de centres hospitaliers universitaires dont les grandes spécialités médicales et les superspécialités médicales qui feraient qu'ils auraient, eux, une responsabilité particulière, prioritaire dans le domaine du traitement des urgences médicales? Ce n'est pas vrai que tout le monde au Québec peut être bon dans cela.

Je pense que ce raisonnement s'applique aussi dans la grande région de Québec où il y a un grand nombre d'établissements hospitaliers qui, eux aussi, ont tous des vocations, des responsabilités, des obligations en matière d'urgences médicales alors qu'on devrait peut-être mieux concentrer cela dans certains établissements, libérant ainsi d'autres établissements de cette responsabilité pour leur permettre de mieux se consacrer à la médecine, à la chirurgie et permettre ainsi en même temps d'avoir des lieux de grande spécialisation en matière d'urgence.

Je termine en parlant de l'absence aussi d'un seul centre au Québec de grande traumatologie. On le sait, il y en a quelques-uns aux États-Unis. Il n'y en a pas au Québec. Quelqu'un qui se voit dans une situation de très grande urgence médicale due à une traumatologie majeure, on fait ce qu'on peut. On a des médecins extrêmement compétents, des équipements assez sophistiqués, mais on n'a pas un seul lieu au Québec où on pourrait rapatrier cette personne d'où qu'elle soit au Québec pour vraiment s'assurer qu'elle est là dans un milieu où le personnel, où les équipements, où le cadre professionnel fait en sorte qu'on est capable de donner 100 % de ce que requiert l'état de traumatologie majeure de la personne qui se présente à ce service d'établissement hospitalier d'urgence.

Voilà un certain nombre de suggestions que je voulais faire au ministre, que je voulais lancer dans le débat puisque je refuse qu'on aborde par un tout petit biais la question de la problématique des salles d'urgence puisque cette problématique est toujours très problématique - je m'excuse du pléonasme, mais c'est très juste - pose toujours des problèmes et qu'on doit conclure aujourd'hui que tous ces problèmes d'urgence médicale au Québec sont beaucoup plus dus à des demi-réformes, à des demi-pas en avant, qu'une fois pour toutes faire face à l'ensemble du problème. Ce sont des questions pour lesquelles je souhaiterais, un jour, avoir des réactions du gouvernement.

Évidemment, la commission parlementaire que nous aurons, comme l'étude article par article du projet de loi 34, d'une part, j'espère, feront place à un certain nombre de suggestions auxquelles j'ai fait allusion dans mon intervention. Deuxièmement, j'espère que nous y recevrons toutes les garanties requises quant à la quantité et la qualité des services qui doivent être maintenus et améliorés à Montréal, ce que ne fait pas le projet de loi actuellement. Troisièmement, faire en sorte qu'on apporte des réponses à des questions soulevées par ce projet de loi qui semble très loin, mise à part la formation du personnel ambulancier et mise à part cette nouvelle obligation qu'on fera d'avoir des services un peu mieux organisés dans l'ensemble des régions du Québec. Mme la Présidente, on voit

loin, mises à part ces questions, la préoccupation des services aux bénéficiaires, mais beaucoup plus une préoccupation de régler au niveau de la gestion interne un service.

Je vous remercie, Mme la Présidente. J'écouterai avec attention les commentaires du ministre. Je verrai dans quelle mesure son attitude a peut-être été - c'est peut-être prétentieux de ma part - un peu influencée par l'intervention que j'ai faite parce que je pense que, s'il veut poser un geste important et dont il sera fier dans dix ans en matière de services ambulanciers, il devrait peut-être faire le tour de l'ensemble de la problématique des urgences, ce que personne n'a fait jusqu'à maintenant. Merci.

La Vice-Présidente: Merci, M. le député de Gouin. Mme la députée de Marie-Victorin.

Mme Cécile Vermette

Mme Vermette: Oui, merci Mme la Présidente. À mon tour, je dois continuer dans le même sens que ce que mon prédécesseur vient de dire sur les services ambulanciers au Québec, sur le nouveau projet de loi 34. On s'attendrait que la population du Québec soit beaucoup mieux servie par ce gouvernement. Malheureusement, on doit constater que nous devons faire face à un gouvernement qui privilégie davantage les bénéfices particuliers, qui privilégie davantage un gouvernement de patronage ou, quand ce n'est pas du patronage, un gouvernement qui renifle dans quelle direction doit aller le vent pour se maintenir au pouvoir.

C'est à peu près le genre de projets de loi qu'on nous apporte à cette Assemblée nationale, qui nous permettent tout simplement de dire: Tantôt nous allons faire l'affaire, nous allons traiter avec les syndicats, parce que, eux, c'est ce qu'ils veulent, tantôt nous allons voir les patrons, parce que c'est cela qu'ils veulent, tantôt on veut autre chose, sans ligne de conduite, sans ligne de fond, sans ligne directrice majeure. Ils sont sur toutes les notes à la fois, et cela fait une véritable cacophonie. C'est ce camouflage que ce gouvernement essaie actuellement de démontrer par des projets de loi en disant: Écoutez, l'ensemble de la population est favorable à nos nouvelles façons de faire, la situation sociale va très bien actuellement, tout le monde est content et nous applaudit quand nous présentons nos projets de loi et nous dit: Continuez dans ce sens.

C'est inacceptable autant d'inconscience de la part d'un gouvernement à l'heure actuelle. Quand on connaît le nombre d'intervenants de toutes les instances de différents milieux, de quelque niveau que ce soit, à chaque projet de loi, qui dénoncent le manque de responsabilité de ce gouvernement et cette façon de faire sans consultation, sans l'exercice d'un consensus. C'est ce même ministre qui, avec les politiques familiales a fait fi des consensus de l'ensemble des organismes familiaux et qui a apporté exactement sa politique familiale telle qu'il l'avait conçue préalablement. C'est ce même ministre qui nous revient et dont la seule expérience qu'il avait dans le milieu des affaires sociales était au sujet du réseau ambulancier. Mme la Présidente, je me serais attendue à une réforme majeure dans le service ambulancier au Québec, avec cette expérience, cet acquis qu'il avait quand il est arrivé fort de cette expérience, ici, à l'intérieur de ce gouvernement. Quel homme de valeur! Avec autant d'expérience et de vécu, il aurait pu nous apporter une réforme extraordinaire. Et c'est à cela que je m'attendais et que s'attendaient probablement l'ensemble des gens qui travaillent à la coordination des services ambulanciers du Québec.

Effectivement, la réforme dans le milieu du transport ambulancier est une urgence parce que c'est une question de souffle, une question de vie pour l'ensemble des accidentés, l'ensemble des gens du Québec qui doivent affronter un arrêt brusque d'une situation normale, qu'on appelle un accident. Le ministre nous arrive avec un projet de loi fait en catimini pour satisfaire les exigences d'un syndicat, purement et simplement, qui y répond, qui est fait sur mesure pour la région de Montréal. Et on dit aux autres régions: Voilà, débrouillez-vous, organisez-vous tant bien que mal, comme vous pourrez; pour nous, ce n'est pas ce qui est important. Pour nous, ce qui est important, c'est de camoufler l'apparence de paix sociale au Québec en disant: Écoutez, tout le monde, le climat social va très bien. Nous n'avons pas de problème avec les syndicats. On est bien mieux que l'ancien gouvernement qui nous a précédé. Nous, nous voulons réparer la gaffe de 1976, qu'on a faite en 1974-1975, alors que le gouvernement - le gouvernement libéral de l'époque en 1975 - était prêt à signer toutes les conventions collectives et à donner tout ce que les syndicats demandaient pour faire semblant qu'il y avait une paix sociale au Québec. Le climat s'est détérioré parce que, justement, on ne peut pas jouer avec ce genre de fait.

La paix sociale, Mme la Présidente, on ne joue pas à cache-cache avec cela, on ne fait pas semblant et, encore moins, avec un groupe au détriment d'un autre groupe. Vous connaissez bien le proverbe qui dit: "diviser pour régner". C'est à peu près cela qu'on voit actuellement; c'est ce qui s'applique à l'heure actuelle. On met en confrontation des groupes et on les laisse se batailler entre eux. Le gouvernement est là et il regarde flotter les choses en disant: Mon doux que nous sommes un bon gouvernement; on est donc bon! On sait faire les choses. Il n'y a donc pas de problème quand on est là. Il faut savoir à quel prix. À quel prix la population du Québec devra en faire les frais? C'est une question de vie, une question d'instants, une question de secondes qu'on demande aux Québécois de faire, de laisser tomber pour favoriser un climat de

relations sociales du travail. (15 h 30)

Quand on parle de question de secondes, de question de souffle, de question de vie, c'est parce que je suis toujours dans le contexte des ambulances qui répondent à des situations d'urgence. Pour des situations d'urgence, il faut avoir un réseau bien intégré; il faut avoir aussi un service de qualité, qui soit capable de répondre, au fur et à mesure, à la diversité des urgences auxquelles on doit faire face sur ce plan. Il y a de grands polytraumatisés, bien sûr, lors des accidents de la route ou des accidents de moto. On peut voir qu'ici, au Québec, les accidents de moto ont augmenté et cela touche, très souvent, une catégorie de jeunes personnes. On sait qu'une intervention rapide, une manipulation de premier ordre sont très importantes si on veut diminuer les séquelles de ces accidents. Il faut une formation importante.

Je peux vous dire, Mme la Présidente, qu'on est en retard dans ce domaine, au plan de l'organisation de la structure du système ambulancier afin de répondre aux urgences. Si on regarde nos voisins du sud, on constate à quel point ils sont avancés dans le domaine de la prévention et surtout des interventions dans les cas d'urgence. On a l'air de pratiquer la médecine de guerre que ce gouvernement dénonçait. Il ne fait rien pour améliorer cette médecine de guerre; c'est pire, on retourne de plus en plus dans une situation scabreuse. Au lieu d'améliorer des faits, on change des structures. C'est tout ce qu'on trouve comme réponse à nos maux: changer des structures. Cela va loin, changer des structures, cela répare le mal ou le tort causé à une population. Je vous en donne un papier, moi! C'est tout simplement ce qu'on essaie de faire passer à la population. C'est un bon gouvernement parce qu'il change des structures. C'est un bon gouvernement parce qu'il favorise un groupe au détriment d'un autre groupe, toujours en flairant de quel côté cela va lui permettre de se maintenir au pouvoir.

C'est toujours la même attitude. Il n'a pas changé depuis deux ans et demi qu'il est là. On peut prendre chaque projet de loi, un après l'autre, pour s'apercevoir que c'est toujours cela qui se passe. Ce sont des intérêts qui favorisent le maintien au pouvoir pour le pouvoir et non pas pour la population québécoise en général, pour favoriser le développement de notre société ou, encore mieux, pour lui apporter les soins dont elle est en droit de s'attendre, surtout un service essentiel auquel elle est en droit de s'attendre parce que la vie n'a pas de prix. Quand on fait une approche comme celle que le ministre a faite, je pense qu'il n'y a pas de considération pour la vie. Ils sont bons pour la comptabilisation, ils sont bons pour la gérance, ils sont bons pour la gestion, mais quand on arrive à une façon de vivre, à une qualité, là c'est autre chose. Pour eux, c'est assez difficile de qualifier et de quantifier la qualité de vie.

Cela ne fait pas partie de leurs préoccupations. Leurs préoccupations sont d'un autre ordre, à un point tel que, finalement, ils ne sont même pas capables de se rendre compte que les vraies attentes de la population ne sont pas celles qu'ils croient.

À titre d'exemple, je pourrais citer un editorial paru dans la revue Les Affaires - Les Affaires, ce n'est certainement pas l'Opposition - où Jean-Paul Gagné, le 28 mai - cela ne fait pas si longtemps - disait: "Le transport ambulancier, étatisation injustifiée." Étatisation, il faut s'entendre, partielle et pour une région seulement. Dans la région de Montréal, on avait le service Urgences-santé et on le remplace par une corporation qui a été orientée par la partie syndicale. Je ne pense pas que la population du Québec, quand elle a élu le gouvernement libéral, pensait que la CSN ou un tout autre syndicat orienterait les décisions du gouvernement et que ce serait eux qui diraient au gouvernement: Écoutez, vous allez implanter un système de services de santé qui va répondre à nos besoins, vous allez mettre le p.-d.g. de notre côté parce que maintenant, pour la première fois dans notre système de services de santé au Québec, on a un p.-d.g. C'est une première. Il faut le faire! En plus d'être directeur général, il est président du conseil d'administration. Alors il se donne des ordres et il les exécute par la suite. C'est fantastique, comme fonctionnement, comme processus! La démocratie, c'est fantastique a toutes les garanties absolues d'exercice de pouvoir de cette façon-là.

Cela ne me surprend pas de la part de ce gouvernement parce que, la semaine dernière, concernant le recensement, ce même gouvernement, qui avait adopté une loi qui faisait consensus entre les partis, est revenu et a dit: Non, non, on ne respecte plus cela, on s'est aperçus qu'on avait fait une mauvaise affaire, on revient sur notre décision et on change la loi. C'est le même gouvernement qui nomme des gens en place qui pourront être juge et partie. Cela semble être devenu la nouvelle procédure depuis que ce gouvernement est au pouvoir, les gens qui font leur affaire pourront être juge et partie en même temps. Belle façon d'exercer la démocratie, Mme la Présidente.

Comme je le disais, le syndicat a imposé son choix en ce qui concerne le p.-d.g. De plus, la nouvelle façon de faire de ce gouvernement veut qu'on nomme les gens avant même que la loi soit adoptée. Il faut le faire! On appelle cela la transparence d'un gouvernement. C'est fantastique. On nomme les gens avant même que les lois soient adoptées. C'est un danger pour notre démocratie. Il faut le dénoncer, il faut que la population soit au courant de cela. L'apparence d'atmosphère sociale, de situation sociale où tout va bien au Québec, où c'est fantastique et où tout le monde est heureux, il faut le dénoncer, parce que ce n'est pas vrai que ça va si bien que ça au Québec. Cela va bien parce que ces

gens-là ont nommé des gens et leur ont cloué le bec en les nommant et en leur donnant tout ce qui faisait leur affaire, mais pas pour l'ensemble de la population québécoise.

C'est du camouflage éhonté qui n'arrête pas, Mme la Présidente, et ça fait deux ans et demi que cela persiste. C'est ce qu'on a aujourd'hui. Mais demain, qu'est-ce que cela va être? Il faut se poser les véritables questions sur demain. Si, aujourd'hui, ils sont capables de faire cela après seulement deux ans et demi de pouvoir, imaginez-vous donc ce qu'ils vont faire après trois ou quatre ans de pouvoir. On ne pourra plus les arrêter. Il n'y aura plus rien, parce que, de plus, ils auront mis tous leurs petits amis à des postes stratégiques. Cela veut dire qu'ils vont avoir le contrôle absolu. Encore là, ce n'est pas trop pire. Cela ne paraît pas. C'est parce que là ils commencent à faire les nominations. Mais quand tout le monde va être bien en place, cela va être du plafond au plancher. Il n'y aura plus rien à faire. Cela va être le contrôle le plus total. Cela va être incroyable. Et c'est l'ensemble de la population qui va être pratiquement prise en otage par l'exercice d'un pouvoir aussi total.

Alors cela, Mme la Présidente, c'est une première. Le syndicat oriente les décisions du ministre. Le syndicat choisit son patron et de plus il dit: Je veux avoir d'autres garanties. Je veux être sûr de maintenir le contrôle. Là, on va nommer trois personnes à notre conseil d'administration et on n'a pas besoin des gens qui pourraient être concernés et pourraient bien orienter les décisions de la nouvelle corporation. Le syndicat sait absolument ce dont il a besoin pour, lui aussi, se maintenir en place. Donc, deux institutions qui veulent se maintenir en place. Le gouvernement et le syndicat qui veulent garder tous les deux leur monopole et tout le monde est bien heureux, tout le monde est bien content parce que, comme c'est de même, chacun va avoir son champ de juridiction et va pouvoir siéger, trôner et exercer son pouvoir.

Est-ce que c'est cela la démocratie, Mme la Présidente? J'ai peur à entendre et j'ai peur à regarder de tels projets de loi parce que je trouve que pour notre... Ici, on vit dans une civilisation contemporaine et on est obligés de débattre des principes fondamentaux de démocratie dans notre enceinte. Je me demande où se trouve la terre de liberté, Mme la Présidente. Cela devient dangereux. Il est grand temps que les gens commencent à se réveiller. Mais je pense qu'il y en a plusieurs qui commencent à se réveiller.

Pourtant, je regarde la Corporation des services ambulanciers du Québec. Elle s'est réveillée. Ellle a même dit au ministre: Écoutez, votre projet de loi 34 est inacceptable. On ne peut pas l'accepter dans les formes dans lesquelles vous l'avez libellé. Ce n'est pas possible parce qu'on ne sait pas où vous vous en allez. Votre projet de loi est arbitraire. Il n'y a aucune garantie. Même dans les régions, il n'y a aucune obligation des services de santé et des services sociaux d'utiliser des ambulances qui sont déjà en place. Il peut s'il veut. C'est simplement cela qui est écrit dans le projet de loi. Quelle garantie pour ces gens-là qui ont des flottes d'ambulances? Cela va même plus loin. Cela veut dire que, dans certaines régions, si une municipalité n'est pas contente des services ambulanciers offerts, elle peut lancer parallèlement son propre service d'ambulance. Mais cela n'a plus d'allure. Où est-ce qu'on s'en va, Mme la Présidente? Aucune façon. Cela veut dire que c'est de l'arbitraire, du patronage qu'on vient d'institutionnaliser. (15 h 40)

Cela n'a plus d'allure. Cela veut dire que tout cela, le truc d'ambulance, ça va devenir un nid à patronage, selon qu'on aime ou pas les gens et je suis presque en train de dire, si on fournit ou pas à la caisse électorale du Parti libéral. Mais ça, je vais le laisser entre parenthèses parce que, tout de même, on va laisser le bénéfice du doute. Il y en a tellement à l'heure actuelle que je me dis que cela n'a plus d'allure. À un moment donné, il faudra que cela arrête parce que ce sera une hémorragie ou une orgie, en tout cas, de patronage. Cela n'a plus d'allure.

Je ne peux pas concevoir, je ne peux pas accepter que des situations fonctionnent de même. Montréal aura un système extraordinaire. À Montréal, ce sera des employés de l'État. Cela ne donne aucune garantie aux gens qui possèdent des ambulances. Eux seront tout simplement des gens qui vont dire: Je vous prête des ambulances et je n'ai plus rien à faire avec cela; tout ce que je fais, c'est l'ambulance, et je n'ai pas de garantie; si, à un moment donné, vous voulez me retirer mon permis parce que vous trouvez que je ne fais pas assez l'affaire et que je ne vous reviens pas, etc., là, vous pourrez m'enlever mon permis, mais je n'aurai pas de compensation. C'est incroyable. Savez-vous les sommes d'argent que cela représente pour les gens qui ont des flottes d'ambulances? C'est incroyable de traiter de la sorte des gens de l'entreprise privée. Et ce gouvernement se disait un gouvernement qui favorisait l'entreprise privée!

Mme la Présidente, est-ce qu'on peut faire confiance une autre fois à un gouvernement qui se dédit continuellement, qui est prêt à dire n'importe quoi, à renoncer à ses propres engagements pour une chose, pour se maintenir au pouvoir? C'est épouvantable, Mme la Présidente. Mais c'est ça ce gouvernement-là. C'est ça le gouvernement libéral, prêt à renoncer à tous ses engagements, à ses propres engagements, du premier au dernier, pour autant que ceux qu'il retient le favorisent et le gardent le plus longtemps au pouvoir, indépendamment... Pas de ligne directrice, on ne sait pas où on s'en va. Cela n'a pas d'importance. On favorise le patronage. On favorise l'arbitraire. Et que les autres puissent se débrouiller comme ils veulent!

Dans le domaine des services ambulanciers,

je trouve cela inacceptable parce que c'est la vie des gens qui est en cause. Dans certaines autres situations, c'est aussi inacceptable, mais tout de même c'est beaucoup plus abstrait. Là, on arrive et on joue avec la vie des gens. Il aurait été urgent, M. le ministre, de vous attarder davantage à faire en sorte que la province de Québec puisse être fière de son service ambulancier et réponde adéquatement aux besoins de la population québécoise qui est en droit de s'attendre à un meilleur traitement de la part de ce gouvernement à qui elle a fait confiance. À l'heure actuelle, vous leur répondez du revers de la main d'une façon inconséquente et vous leur laissez leur problème entier. Ils devront se débrouiller avec les moyens du bord parce que, malheureusement, ils n'appartiennent pas à la région privilégiée. Et ça, c'est inacceptable. Les gens en régions auront un certain service et les gens de la région de Montréal auront un autre service. Et, plus particulièrement, la région de la Monté-régie, la rive sud de Montréal, qui a toujours demandé à avoir une certaine autonomie, à pouvoir se prendre en main.

Celle-là non plus on ne sait pas comment elle pourra se débrouiller parce que, selon le projet de loi, c'est aussi limitrophe, Montréal et ses régions limitrophes. Quel sera le sens qu'on donnera à cette interprétation de limitrophe et quelles seront les conséquences pour la région de la rive sud de Montréal? On ne le sait pas. On ne sait rien. On nous demande tout simplement, d'une façon aveugle, d'emboîter le pas et de donner notre aval à un projet de loi qui ne répond en rien aux attentes des principaux intéressés, d'une part, et de l'ensemble des gens qui ont toujours travaillé au mieux-être des Québécois et des Québécoises afin de favoriser un meilleur service pour leur répondre, en cas d'urgence, lorsque les gens sont paniques, lorsqu'ils ont besoin d'un réconfort et qu'ils ont besoin d'un service promptement. Eh bien, encore là, on aura failli à la tâche parce qu'on aura préféré travailler pour des intérêts particuliers plutôt que pour l'ensemble de la collectivité et pour le bien-être de l'ensemble des Québécois et des Québécoises.

Je regrette, M. le ministre, mais vous auriez eu avantage à écouter davantage les principaux intéressés. Ils étaient prêts à vous orienter. Ils étaient prêts à vous aider dans votre tâche qui n'est peut-être pas toujours la plus facile, mais lorsqu'on écoute les gens, lorsqu'on écoute les conseils des gens qui ont un vécu une expérience, je pense que vous auriez eu grandement avantage à bonifier votre projet de loi. Tel que vous l'avez libellé, il est inacceptable. Que ce soit l'ensemble des organismes, des propriétaires d'ambulances, que ce soit dans des publications aussi prestigieuses que Les Affaires qui vous dénonce et qui trouve que ce que vous avez fait est inacceptable, M. le ministre, dorénavant, écoutez donc les conseils des gens que vous consultez, si vous les consultez.

La Vice-Présidente: Merci, Mme la députée de Marie-Victorin. M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Jacques Brassard

M. Brassard: Mme la Présidente, quand on est devant un projet de loi comme le projet de loi 34, une première question, la question plus importante qu'un parlementaire doit toujours se poser face à n'importe quel projet de loi, y compris celui-là, Loi modifiant la Loi sur les services de santé et les services sociaux ainsi que d'autres dispositions, en fait concernant les services ambulanciers au Québec, c'est: pourquoi un tel projet de loi? Quels motifs incitent le gouvernement à déposer et à faire adopter tel projet de loi par l'Assemblée nationale? Qu'est-ce qui inspire le ministre qui parraine et qui pilote ce projet de loi à l'Assemblée nationale? Ce sont là les questions qu'il faut se poser. À partir de là, on peut porter un jugement sur le bien-fondé du projet de loi, sur sa qualité et sur sa pertinence.

Or, le ministre tente de nous faire croire que ce projet de loi a été déposé parce qu'il convient, qu'il est urgent et nécessaire d'améliorer la qualité des services ambulanciers au Québec, particulièrement dans la région métropolitaine de Montréal. C'est là la raison, je dirais officielle, invoquée et énoncée par le ministre. Il faut reconnaître cependant, à l'analyse, qu'il s'agit là de ce qu'on peut appeler de la poudre aux yeux puisque la réalité est tout autre. On se rend compte, lorsqu'on scrute et qu'on analyse en profondeur le projet de loi, que l'objectif visé n'est pas, selon les propos mêmes du ministre, une amélioration de la qualité des services. Au contraire, on se rend compte que le projet de loi 34 est en quelque sorte, Mme la Présidente, ce que j'appellerais un acte de capitulation du ministre délégué à fa Famille, à la Santé et aux Services sociaux. C'est un acte de reddition.

Le ministre, par le biais de ce projet de loi déposé à l'Assemblée nationale, fait acte de soumission devant un groupe de pression bien particulier, bien connu, qui s'appelle le Regroupement des employés de transport ambulancier du Québec, mieux connu sous le nom de RETAQ, syndicat affilié à la CSN et dirigé par un président également bien connu qui s'appelle M. Cotton. C'est ça, le projet de loi 34. Une fois qu'on l'a analysé, étudié et scruté, on se rend compte que ce qui inspire ce projet de loi, ce n'est pas l'amélioration des services, mais que ce projet de loi est un acte de capitulation et un geste de reddition, de soumission face à un groupe de pression.

Le ministre a décidé, purement et simplement, de courber l'échiné, de baisser les bras et de s'avouer vaincu devant la force, la puissance et les moyens de ce groupe de pression qui s'appelle RETAQ. On sait que, depuis quelques

années, ce groupe de pression, Regroupement des employés de transport ambulancier du Québec, fait la pluie et le beau temps dans les services ambulanciers au Québec; particulièrement à Montréal, c'est bien évident. Cela s'est traduit par des arrêts de travail, des grèves illégales et par une véritable pagaille à intervalles plus ou moins réguliers dans les services ambulanciers de Montréal, mettant ainsi en cause, forcément, la santé publique. C'est la réalité. Or, ce groupe de pression a formulé, depuis un certain temps, des exigences bien précises, sans équivoque, bien connues. Ce groupe de pression souhaite, veut et revendique l'étatisation, la nationalisation des services ambulanciers au Québec de façon, forcément, que la rémunération, les avantages sociaux, les conditions de travail de ses membres en soient ainsi améliorés puisque ces derniers deviendraient en quelque sorte des employés de l'État et bénéficieraient donc d'un meilleur niveau de salaire et de meilleures conditions de travail. C'est cela, la réalité. (15 h 50)

Ce groupe de pression a formulé face au ministre un véritable ultimatum qui pourrait se résumer ainsi: Ou vous déposez un projet de loi faisant en sorte que le gouvernement va dans le sens de l'étatisation et de la nationalisation des services ambulanciers, ou alors, je vous le dis tout net - c'est ainsi que parle le regroupement ou le syndicat - ce sera de nouveau la pagaille dans les services ambulanciers, ce sera de nouveau des arrêts de travail et ce sera de nouveau une perturbation sans précédent des services ambulanciers à Montréal, mettant ainsi de nouveau en cause la santé publique. C'est cela, la réalité.

Que s'est-il produit? Bien simplement, bien concrètement, c'est que le ministre a plié, le ministre a cédé, le ministre a capitulé sans même combattre. C'est cela qui est un peu étonnant et humiliant de la part du gouvernement. Sans même combattre, le ministre a cédé, le ministre a capitulé devant les pressions et devant l'ultimatum du syndicat des employés de transport ambulancier de Montréal.

Là-dessus, il est bon de rappeler à cette Chambre que tous les observateurs sont d'accord. Si un consensus s'est dégagé parmi tous les observateurs de ce dossier, qui ont analysé et étudié ce dossier, c'est qu'effectivement le projet de loi 34 constitue un acte de capitulation de la part du ministre face à un groupe de pression. Je pense que c'est important que je vous les rappelle, Mme la Présidente, parce qu'un tel consensus unanime ne se voit pas souvent parmi les observateurs de différents horizons.

Jean-Paul Gagné, dans le journal Les Affaires, est très clair. Je vous cite un paragraphe qui se passe de commentaires: "II est de plus en plus évident, écrit-il, que cette politique de transport ambulancier ne vise qu'un but: acheter la paix syndicale. C'est une reddition honteuse du gouvernement devant le RETAQ. On comprend pourquoi Mario Cotton, le président du RETAQ, ne tarit pas d'éloges sur cette nouvelle politique et le choix de Pierre Lamarche comme président du conseil et directeur général de la nouvelle corporation."

Un autre exemple de propos d'observateurs dans ce dossier, Pierre Vennat, La Presse, qui écrit: "Une étude attentive du dossier des relations de travail à Urgences-santé en donne l'explication" parce qu'il se demandait pourquoi un tel projet de loi se retrouve devant l'Assemblée nationale. "Le 23 décembre dernier, écrit-il, les techniciens ambulanciers du Québec affiliés à la Fédération des affaires sociales ' de la CSN annonçaient qu'ils suspendaient jusqu'en mars les moyens de pression qu'ils envisageaient d'exercer pour faire avancer la négociation de leurs conditions de travail." C'est l'ultimatum dont je parlais tantôt: On va arrêter les moyens de pression mais à la condition que... sinon cela va recommencer. Du même souffle, leur président, M. Cotton, faisait savoir que le 29 février constituait pour eux un rendez-vous. C'est le jour du dépôt du projet de loi 34. Le 2 mars, soit au lendemain de la date fatidique, le ministre Dutil déposait son projet de loi et M. Cotton clamait alors qu'il s'agissait d'un jour historique pour son mouvement, bref d'une grande victoire syndicale. Je comprends. Le ministre a complètement cédé devant ces revendications. La conclusion de M. Vennat, dans son commentaire du 21 mai: "L'élaboration d'une politique de santé est trop importante pour se faire sous le coup d'un ultimatum, soit-il patronal ou syndical. Ce n'est malheureusement pas ce que pense le ministre délégué aux Affaires sociales."

Un dernier exemple, celui de Jean Fran-coeur dans Le Devoir. Il est on ne peut plus clair et on ne peut plus dur, on ne peut plus sévère à l'endroit du ministre. Je vous en cite deux paragraphes, Mme la Présidente. "Risquons une hypothèse - une hypothèse très fondée. En rédigeant ce projet de loi dans la fièvre de l'échéance de l'ultimatum lancé par les syndicats de techniciens ambulanciers, le ministre ne s'est pas posé la question. Comment pourrait-on améliorer le transport ambulancier à Montréal? - c'est la question que je posais au tout début -Comment améliorer la qualité des services? Non, non, ce n'est pas la question qu'il s'est posée, mais bien plutôt celle-ci: Que peut-on faire pour conjurer la menace que brandit M. Mario Cotton de jeter la pagaille dans le service? Le projet de loi 34 n'est qu'une reddition sans honneur", dit M. Jean Francoeur; une reddition sans honneur, une reddition honteuse, selon Jean-Paul Gagné.

De la part du ministre délégué à la Famille et à la Santé et aux Services sociaux qui en est à sa première initiative importante, c'est un geste humiliant dont la seule rationalité tient dans le proverbe: Qui veut noyer son chien dit qu'il a la rage. C'est exactement ce que fait le ministre. Mme la Présidente, il est très clair, il est très évident que les motifs qu'on retrouve

derrière ce projet de loi ne sont pas ceux d'améliorer la santé publique, d'améliorer les services ambulanciers au Québec et à Montréal, en particulier. C'est cela qui est humiliant, c'est cela qui est honteux de la part d'un gouvernement, c'est purement et simplement, sans même combattre, sans aucun combat, un acte de capitulation.

Le ministre a cédé à la revendication majeure des employés du transport ambulancier, c'est-à-dire d'étatiser le transport ambulancier. Non seulement il cède à la revendication des employés de transport ambulancier, mais en plus il fait une mauvaise nationalisation. Si, au moins, il avait fait une étatisation qui a du bon sens. Si, au moins, il avait fait une nationalisation qui a de l'allure, qui se tient, qui est cohérente, qui est juste, équitable pour tout le monde et tous les intervenants, à tout le moins, on pourrait dire: C'est là une opération de nationalisation qui se tient debout, qui est cohérente d'un bout à l'autre. Mais ce n'est pas le cas. C'est une mauvaise nationalisation. Une nationalisation injuste. Une nationalisation inéquitable à l'égard, principalement, des entreprises privées de transport ambulancier.

On aurait pu s'attendre qu'un tel gouvernement qui, depuis deux ans et demi, s'est fait le chantre de l'entreprise privée, le défenseur de l'entreprise privée, soit plus délicat, plus juste, plus équitable à l'égard des entreprises privées du secteur ambulancier. Mais non, ce n'est pas le cas. C'est surprenant de voir que ce gouvernement, défenseur acharné, attitré de l'entreprise privée au Québec soit si injuste, si inéquitable à l'égard des entreprises privées du secteur ambulancier en procédant ainsi à une aussi mauvaise nationalisation du service ambulancier. Pourquoi? Parce que si le ministre voulait étatiser le système, il aurait dû le faire au moins complètement. D'abord, les propriétaires d'ambulances deviennent, dans son système boiteux, dans le système bâtard qu'il met en place via le projet de loi 34, des locateurs de tôle, Mme la Présidente, sans contrôle sur l'utilisation des équipements qui leur appartiennent. Aucun contrôle. Ils n'ont aucun contrôle sur les employés puisque les employés deviennent des employés de l'État. Les propriétaires ne sont propriétaires que de la tôle, que des voitures. Ils n'ont évidemment aucun contrôle sur ceux et celles qui vont utiliser ces voitures et ces équipements. Cela n'a aucun sens.

Quant à nationaliser, il aurait dû nationaliser au complet. Deuxièmement, le projet de loi stipule que la corporation peut conclure des contrats de location avec tout propriétaire d'ambulance n'excluant pas ainsi la possibilité pour le gouvernement ou pour d'autres entreprises intéressées d'occuper le marché du transport ambulancier. Cela veut dire que les entreprises qui sont actuellement opérantes et qui ont des équipements et qui ont des véhicules, ne sont pas sûres de pouvoir les louer . à la nouvelle corporation qui est créée par le projet de loi 34. C'est loin d'être sûr. De plus, le projet de loi prévoit que la nouvelle corporation ne sera pas tenue à quelque soumission publique que ce soit. C'est un peu étonnant, c'est le règne de l'arbitraire et du discrétionnaire. (16 heures)

Troisièmement, je parle des entreprises privées du secteur ambulancier. Elles sont totalement exclues de la composition du conseil d'administration. Il n'y a pas un seul représentant au conseil d'administration de la nouvelle corporation alors qu'il y a trois salariés de la nouvelle corporation, qui vont pouvoir y siéger. Comment peut-on sérieusement exclure les propriétaires d'ambulances des centres de décision qui les concerneront directement, puisqu'ils vont demeurer propriétaires des équipements? L'odieux de la décision du ministre, c'est que tout cela sera fait sans aucune forme de compensation ou d'indemnisation aux propriétaires d'ambulances, ce qui risque évidemment de mettre en péril les entreprises privées. C'est ce que le Conseil du patronat, un allié pourtant naturel du gouvernement en place, a dénoncé de façon très vigoureuse, et, forcément aussi, la Corporation des services ambulanciers du Québec qui, dans un communiqué qu'elle rendait public récemment, disait: Nationalisation, oui, mais, à un détail près, il n'y a pas d'indemnisation. On voulait régler un problème de main-d'oeuvre en régions et on crée un problème d'instabilité d'entreprises au Québec.

Au moins, nous, quand on a nationalisé ou étatisé des entreprises, on les a indemnisées. On a accusé à maintes reprises le gouvernement du Parti québécois d'avoir, de façon exagérée, utilisé la procédure de la nationalisation et de l'étatisation. Mais quand on l'a fait, on s'est efforcé d'être juste et équitable à l'égard des entreprises étatisées, et elles ont été convenablement, raisonnablement et justement indemnisées, compensées, ce qui n'est pas le cas présentement à l'égard des entreprises privées du secteur des services ambulanciers à Montréal. C'est absolument insensé, absurde, incompréhensible d'un gouvernement, qui se dit le défenseur des entreprises privées au Québec, le promoteur, le champion des entreprises privées, c'est absolument incompréhensible et inadmissible qu'il soit aussi injuste à l'égard des entreprises privées du secteur ambulancier en les nationalisant, à toutes fins utiles, sans leur donner ni compensation ni indemnisation, en aucune façon.

Il y aurait bien d'autres points, dans ce projet de loi, que j'aurais voulu aborder et, en particulier, puisqu'il me reste quelques minutes, la dimension concernant les infirmières. Voilà un projet de loi où il n'est aucunement question des infirmières qui sont à Urgences-santé. Cela est aussi très étonnant. D'abord, elles ne sont pas représentées au sein du conseil d'administration, ce qui est tout à fait inadmissible, elles n'ont pas été consultées sur le protocole de transfert

des employés et ne savent donc pas ce qui va advenir d'elles. Par conséquent, elles craignent à juste titre d'ère écartées de la nouvelle corporation. Pourtant, elles accomplissent un travail tout à fait essentiel dans le système d'intervention médicale d'urgence. À Urgences-santé, présentement, elles assument deux tâches extêmement importantes qui ont une incidence directe sur l'engorgement des urgences et sur l'état de santé du patient, car on sait que les minutes qui suivent l'appel de détresse sont des minutes déterminantes. Elles font le triage des appels, ces infirmières. Elles analysent les appels et, selon leur jugement et leur formation professionnelle, elles envoient une ressource, une ambulance par exemple, ou elles orientent les bénéficiaires vers des ressources autres que les hôpitaux. Nulle part dans le projet de loi, il n'est question des infirmières ni du rôle essentiel qu'elles jouent présentement à Urgences-santé.

Cela nous paraît, par conséquent, un projet totalement inacceptable, mal fait, mal foutu, une étatisation absurde, mal engagée. Surtout, ce qui est humiliant pour un État, pour un gouvernement, voilà un projet de loi qui est purement et simplement un acte de capitulation devant un groupe de pression qui a lancé un ultimatum au gouvernement et, sans même combattre, le gouvernement a cédé, a plié et s'est écrasé. Pour toutes ces raisons, Mme la Présidente, nous ne pouvons appuyer ce projet de loi. Merci.

La Vice-Présidente: Merci, M. le député de Lac-Saint-Jean. Mme la députée de Johnson.

Mme Carmen Juneau

Mme Juneau: Merci, Mme la Présidente. À mon tour d'intervenir sur le projet de loi 34 que nous discutons ici, à l'Assemblée nationale, en ce 7 juin 1988. Le projet de loi 34 sur les services ambulanciers, à notre point de vue, au point de vue de notre formation politique, est un projet de loi inacceptable parce qu'il ne correspond pas à ce qui aurait été souhaitable et souhaité comme intervention dans le domaine ambulancier.

Inaccepté et inacceptable, parce que le ministre délégué à la Santé et aux Services sociaux n'a décidé de proposer ce projet de loi 34 que pour une chose: éviter une grève prévue pour le début de juillet. Est-ce un momentum? Est-ce un motif assez important? Est-ce un motif grave à ce point qu'on change la tête ou le titre du service ambulancier simplement pour éviter de se tenir debout devant une possible grève qui devait se tenir au début de juillet?

Ce projet de loi "prévoit, en premier lieu, la création d'une corporation qui aura pour objet d'organiser et de coordonner le transport ambulancier sur le territoire du Conseil régional de la santé et des services sociaux de la région de Montréal métropolitain et sur tout territoire limitrophe que pourra déterminer le ministre."

Mme la Présidente, non seulement ma formation politique croit que le ministre n'a pas eu assez de colonne vertébrale pour affronter ce qui était prévu, mais dans presque l'ensemble des médias électroniques ou écrits, on parie de reddition. J'ai ici, devant moi, un écrit de Jean Francoeur du Devoir. M. Francoeur titre: "Reddition humiliante". Ce n'est pas seulement le Parti québécois, l'Opposition officielle du Québec, qui dit que le projet de loi 34 a été fait simplement parce que le ministre n'a pas la colonne vertébrale pour affronter ce qu'il devait affronter. Jean Francoeur dit: "Le projet de loi 34 n'est qu'une reddition sans honneur de la part du ministre délégué à la Famille, à la Santé et aux Services sociaux qui en est à sa première initiative importante. C'est un geste humiliant dont la seule rationalité tient dans le proverbe Qui veut noyer son chien dit qu'il a la rage." Je ne pense pas que quelqu'un de ma formation politique aurait utilisé un terme peut-être aussi sévère que Jean Francoeur, mais nous convenons que ce que le ministre est en train de faire, c'est qu'il est en train de nous démontrer qu'il n'est pas capable de se tenir debout, ni lui, ni sa formation politique. C'est regrettable. Il ne viendra rien régler avec la formation d'une corporation. Ce sont les mêmes gens qui travaillent, ce sont les mêmes employés, à peu de choses près. Tout à l'heure, plus tard dans mon intervention, je vous dirai combien d'employés vont rester à la suite de l'étatisation, de la formation de la corporation et combien d'autres employés, eux, vont aller dans le système privé. Comment croire qu'on va faire deux classes d'employés? Je vais vous en parier tout à l'heure.

Par exemple, je voudrais aussi vous parier de la qualité des services et des soins dans le service ambulancier. Est-ce que la formation d'une corporation va changer quelque chose pour le malade, la personne accidentée, pour celle ou pour celui qui a besoin de soins et qui requiert un service ambulancier? Par le projet de loi 34, par la formation d'une corporation, est-ce que les gens que j'ai en face de moi pourraient me dire si cela va changer quelque chose en termes de services, pour la personne qui fait un infarctus et qui doit avoir recours aux services ambulanciers? Est-ce que cela va changer quelque chose dans le service, pour lui ou pour elle? (16 h 10)

Je ne crois pas que simplement en formant une corporation, on va modifier les services aux malades, et c'est ce à quoi on devrait songer en premier lieu. C'est aux utilisateurs du système qu'on devrait penser en tout premier lieu quand on fait des lois à l'Assemblée nationale. Il ne faut pas camoufler les inquiétudes ou les insécurités d'une personne qui s'occupe du dossier. On devrait, au contraire, penser aux utilisateurs et peut-être réagir d'une façon différente aujourd'hui, à l'Assemblée nationale.

Mme la Présidente, quand une personne a besoin d'un service ambulancier, elle n'a pas

besoin d'une corporation pour dicter des choses à l'extérieur. Cela doit être fait avant, de façon telle que l'utilisateur ne soit pas privé de quoi que ce soit. Nous nous inquiétons fortement du service qui, à mon point de vue, n'aura aucune espèce de changement. Je ne veux pas dire que les gens ne peuvent pas, aujourd'hui, compter sur un service précieux. Je pense que le service est bon, mais je pense qu'il y a toujours place à l'amélioration, quel que soit le domaine où l'on est. Si le ministre s'était assis à une table de concertation avec les principaux intervenants du milieu, peut-être que nous ne serions pas en train de discuter du projet de loi 34 aujourd'hui. Comme je l'ai dit tout à l'heure, une menace de grève est-elle suffisante pour qu'on en arrive à adopter une loi pour changer l'ensemble du système? L'ensemble du système, comprenons-nous, au lieu de s'appeler Urgences-santé, s'appellera corporation. Je ne sais pas si cela va changer quelque chose, dans le fond.

Est-ce qu'on a aussi songé aux infirmières dans ce projet de loi? J'ai lu et relu le projet de loi et je n'ai rien vu, pas un seul mot au sujet des infirmières. J'ai eu beau relire l'ensemble, je n'ai rien vu dans le projet de loi; il n'est pas question des infirmières d'Urgences-santé dans le projet de loi. Elles ne sont ni représentées au conseil d'administration de la nouvelle corporation, ni consultées dans le protocole de transfert, elles sont même très inquiètes à savoir si elles vont pouvoir y rester. Je ne sais même pas si le ministre a songé aux services que les infirmières d'Urgences-santé rendent lors des appels qui parviennent à Urgences-santé. Elles craignent tout simplement - et je crois qu'elles ont raison - d'être écartées de cette nouvelle corporation. Pourtant, comme on le sait partout, à Urgences-santé comme dans les hôpitaux, les infirmières sont indispensables auprès des malades, non seulement pour les soins physiques, car vous comprendrez que les infirmières sont là chaque jour pour remonter le moral de leurs patients et de leurs patientes en plus de les soigner physiquement.

Qu'a-t-on fait avec elles, Mme la Présidente? Il n'en est pas question, pas un traître mot dans le projet de loi 34. Dans Le Devoir, Renée Rowan parle de cette situation que nous considérons comme une situation grave. Vous savez, les infirmières d'Urgences-santé assument deux tâches importantes qui ont une incidence directe sur l'état de santé des patients car les minutes qui suivent un appel téléphonique à Urgences-santé sont de très grande importance pour la personne qui loge l'appel. Premièrement, une personne qui appelle à Urgences-santé a des besoins, elle vit une situation insecure et elle a des besoins très précis. Elle appelle à Urgences-santé et c'est le travail des infirmières soit d'envoyer l'ambulance nécessaire au transport de cette personne ou d'orienter les bénéficiaires vers d'autres ressources que les hôpitaux. Ceci est un volet du travail qu'effectuent les infir- mières d'Urgences-santé.

Plusieurs appels placés à Urgences-santé ne sont que pour demander des informations médicales. Si les infirmières n'étaient pas là pour renseigner, pour faire le triage des appels, qu'est-ce que vous croyez qu'on pourrait vivre, Mme la Présidente? Chaque fois qu'il y aurait un appel à Urgences-santé, il y aurait une ambulance qui partirait à fond de train pour aller voir. Et ce ne serait peut-être pas un cas qui nécessiterait un transport ambulancier. Qu'avez-vous fait, M. le ministre délégué, de la partie fort importante des infirmières dans Urgences-santé? J'espère que, dans les jours qui vont suivre, vous saurez bonifier votre projet de loi en incluant cette partie fort importante que sont les services que les infirmières rendent à Urgences-santé.

Vous savez que ce projet de loi est loin de faire un consensus et si le ministre délégué ne parvient pas à faire le bout de chemin nécessaire, il est inutile de croire que les gens qui utilisent le système ambulancier et ceux qui sont directement rattachés à ce système ambulancier vont changer de cap. Si le ministre ne fait pas des pas en avant, il est inutile de croire que notre formation politique aussi va être d'accord avec ce qu'il nous présente aujourd'hui. Je souhaite ardemment que les interventions que nous ferons ici à l'Assemblée nationale pourront convaincre le ministre qu'il est encore temps de faire des pas en avant pour être en mesure de bonifier son projet de loi afin qu'il corresponde vraiment aux attentes et aux besoins de la population qui requiert un service ambulancier.

Mme la Présidente, nous avons le regret aussi de remarquer que dans le projet de loi 34, l'article 22 créera deux classes d'employés. Il fera une classe d'employés qui seront des fonctionnaires de l'État et il fera une autre classe d'employés qui seront des employés de situation privée, si je peux m'exprimer ainsi. Une classe de fonctionnaires avec des avantages sociaux et une autre classe d'employés dans des entreprises privées comme je vous le disais tout à l'heure.

Je trouve cela un peu exceptionnel quon ait un tel revirement de l'autre côté. Vous savez que les employés de l'État de la région de Montréal posent beaucoup de questions aussi là-dessus. Il s'agit d'une étatisation alors que de l'autre côté le gouvernement... Vous comprendrez que depuis son élection, il parlait de privatiser l'ensemble du système, l'ensemble des services qui relevaient de l'État. Aujourd'hui, on revient à l'étatisation et, en plus de cela, on crée deux classes d'employés.

Je me demande comment un syndicat peut accepter que ces employés soient divisés en deux et qu'une partie peut-être plus chanceuse où le nom sera tiré au hasard... Je ne sais pas comment on va fonctionner pour dire que monsieur ou madame sera dans le service étatisé et, de l'autre côté, son collègue de travail ira dans le

système privé. J'aimerais bien que le ministre puisse répondre à cela, de quelle façon il va procéder pour séparer les employés, en faire deux classes tout à fait différentes. Est-ce qu'on va se tirer aux cheveux? Est-ce qu'on va tirer au hasard? Je ne sais pas comment le ministre... On n'en a pas entendu parler. J'espère qu'il va nous expliquer cela et j'espère aussi qu'il ne créera pas deux classes parmi ces employés-là.

Mme la Présidente, c'est aussi une mise en péril des entreprises privées. Comment, dans le domaine privé, allons-nous pouvoir rivaliser avec un système étatisé quand on sait qu'il n'y a pas d'inquiétude et que ce sont des fonctionnaires qui vont recevoir leur paye à la fin de la semaine? Comment le système privé va-t-il être en mesure de rencontrer les conventions telles que décrétées pour les fonctionnaires? Je pense qu'on est sur le point de créer deux classes de société et c'est tout à fait inacceptable en 1988 qu'on revienne encore une fois avec un système aussi aberrant que celui que je viens de décrire. (16 h 20)

De plus, Mme la Présidente, des propriétaires d'ambulances sont totalement exclus de la composition du conseil d'administration. Comment ces gens-là qui sont dans le milieu, pour certaines personnes, depuis fort longtemps, depuis plusieurs années, vont-ils pouvoir faire entendre leur voix alors qu'ils ne seront pas représentés au conseil d'administration de la corporation? On ne peut pas franchement exclure des centres de décisions les propriétaires que cela concerne directement. Au moment où l'on se parle, je ne pense pas qu'il y ait dans le projet de loi... J'ai vu le ministre prendre des notes. Je suis contente qu'il prenne des notes. Je suis sûre qu'il sera capable de répondre à ma question tout à l'heure. Si j'ai fait fausse route, j'espère qu'il va m'éclairer. Mais ma lecture du projet de loi ne m'a pas permis de déceler qu'il y aurait, au point de vue de la représentation au conseil d'administration, des propriétaires d'ambulances. Je pense que c'est un risque important que le ministre court de mettre en péril des entreprises privées, et c'est, à mon point de vue, inacceptable.

Ce que l'on souhaite, nous, notre formation politique, c'est d'avoir des auditions publiques pour entendre les principaux intervenants du milieu du service ambulancier. Il nous apparaît tout à fait important d'avoir des éclairages nouveaux, non seulement pour aider l'Opposition officielle à trouver un juste milieu, mais aussi pour aider le ministre délégué et le gouvernement à trouver, entre deux maux, je dirais, le moindre, pour la personne qui utilise le service ambulancier, c'est-à-dire la personne qui a besoin de soins importants. Vous comprendrez que, lorsqu'on demande une ambulance, c'est qu'on a vraiment un problème de santé, à peu de choses près, fort important. Si les services ne sont pas adéquats, on peut se retrouver avec des coûts supplémentaires et au prix d'une vie - finalement la vie de la personne, est-ce qu'il y a quelque chose de plus important? - si on ne lui donne pas les soins nécessaires dès le premier instant?

Mme la Présidente, si le ministre ne bonifie pas son projet de loi et s'il refuse d'avancer, de faire quelques pas en avant, à la suite des demandes, non seulement de l'Opposition officielle, mais de tous les intervenants du milieu qui, par la voix des médias, ont fait connaître leur dissidence par rapport à ce que le ministre veut faire passer ici... Vous savez, nous, nous avons le privilège ou la tribune nécessaire pour nous exprimer, pour dire ce que l'on croit d'un projet de loi. Mais les intervenants dans le milieu, dans le monde, n'ont pas toujours la possibilité ou la tribune nécessaire. Donc, ils utilisent les journaux afin de pouvoir s'exprimer publiquement et faire comprendre au ministre responsable et au gouvernement que nous avons en face de nous l'importance de bonifier son projet de loi.

La cerise sur le gâteau, c'est que la corporation n'est pas créée et, depuis le 20 mai, il y a un nouveau président-directeur général, M. Pierre Lamarche, adjoint à l'exécutif de la CSN et conseiller du RETAQ, qui siégera à la tête du conseil d'administration où se retrouveront trois employés de la nouvelle corporation en provenance des rangs du RETAQ. C'est un peu spécial. On est en train de discuter de la corporation. Le p.-d.g est déjà là. Il donne déjà des ordres. Il est déjà en fonction, même avant qu'on ait fini de discuter, même avant que le projet de loi soit adopté. Essayez donc d'expliquer cela au monde ordinaire, aux utilisateurs des services ambulanciers. Essayez donc d'expliquer comment il se fait que, déjà, un p.-d.g. d'une corporation inexistante puisse donner des ordres à une autre entité existante qui s'appelle Urgences-santé. C'est un peu spécial. Je ne sais pas comment le ministre va faire, dans son droit de réplique, pour expliquer à la population en général ce que veut dire l'emploi de ce p.-d.g. qui est entré là je ne sais pas de quelle façon. Je ne sais pas pourquoi le ministre l'a choisi. J'espère qu'il pourra nous le dire.

Mme la Présidente, c'est malheureux que mon temps soit terminé; j'aurais voulu vous parler des soins aux malades...

Une voix: Consentement.

Mme Juneau: Consentement? Est-ce que je peux terminer, Mme la Présidente? Mes vingt minutes sont terminées, je le sais.

La Vice-Présidente: Une courte conclusion.

Mme Juneau: Je dois conclure. Bon.

Ce qui m'inquiète, Mme la Présidente - je vais me dépêcher pour terminer - c'est qu'il peut y avoir une confrontation importante entre les propriétaires d'ambulances, les techniciens ambulanciers et le gouvernement. Le ministre

recule devant une possibilité de grève au début de juillet. Que va-t-il faire lorsqu'il aura mêlé toutes les cordes et que tout le monde sera en train de se battre? Je me le demande. Je pense que le système va coûter plus cher et que le ministre fait fausse route en ce qui a trait au projet de loi 34 tel que rédigé au moment où je vous parle. Je souhaite énormément, autant pour moi-même que pour ma formation politique, qu'il y ait bonification et audiences publiques. Merci beaucoup, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Merci, Mme la députée de Johnson.

M. le député de Fabre.

M. Jean A. Joly

M. Joly: Merci, Mme la Présidente. À mon tour, il m'est agréable d'intervenir sur le projet de loi 34 concernant les services de santé. Bien sûr, jusqu'à maintenant, on a eu l'occasion d'écouter quelques intervenants, le député de Gouin, la députée de Marie-Victorin, le député de Lac-Saint-Jean, la députée de Johnson, pour n'en mentionner que quelques-uns, et tous ont semblé manifester à leur façon, à un moment donné dans leur discours, une certaine forme d'appréhension. Mais, à les écouter tout au long de leur discours, ils nous revenaient... Mis à part tel point ou mis à part tel autre point, ils commençaient à démontrer qu'ils étaient quelque peu d'accord sur certains points et devenaient un peu moins véhéments.

On a écouté l'allocution du ministre Dutil qui a pris passablement de temps parce qu'il se devait d'expliquer à la population la situation qui prévaut aujourd'hui et ce quelle serait avec le nouveau projet de loi. Je pense qu'il se devait de le faire en son âme et conscience et qu'il se devait de prendre le temps nécessaire pour l'expliquer à la population. Pourquoi l'expliquer à la population? Je pense que c'est facile à comprendre, M. le Président. C'est elle qui est concernée. Trois parties sont impliquées: les propriétaires d'ambulances, les techniciens et le gouvernement qui représente la population. Je suis convaincu que peu de gens seront en désaccord avec le ministre parce qu'il a pris le temps nécessaire pour expliquer ce qui devait être expliqué.

J'aimerais quand même vous faire remarquer que ce dossier ne date pas d'hier. Ce dossier a pris ses origines en 1981 quand le rapport Champoux-Dorval recommandait la création d'un centre de coordination des urgences à Montréal. Depuis 1981, plusieurs autres rapports ont été produits, dont le rapport Tremblay, le rapport SECOR et le rapport Drouin. C'est fini, le temps des rapports, M. le Président. Il faut passer à l'action. Le 2 mars dernier, le Conseil des ministres, sur la recommandation du ministre Dutil, a décidé de s'inspirer des recommandations contenues dans ces rapports et du vécu des gens du milieu et le projet de loi a été déposé quelques jours après, le 12 mai. Qu'est-ce qu'on suggérait dans les rapports? On suggérait le statut quo. Il y avait quand même quatre pistes, quatre orientations qui étaient soulevées et qui suggéraient le statut quo. On suggérait la municipalisation, on suggérait de référer aux organismes sans but lucratif et on suggérait la nationalisation. (16 h 30)

Nécessairement, dans tout ceci il y avait aussi les pour et les contre. On avait quand même le choix. Ce choix s'est orienté vers la formation d'un organisme qui aurait un mandat assez particulier, assez spécial. Pourquoi en est-on arrivé là? C'est bien certain que si tout avait été parfait, s'il n'y avait pas eu de lacunes dans le système, si on avait eu 100 % de réussite dans toutes les demandes, on n'aurait sûrement pas pris position. Si on a pris position c'est parce qu'il y avait une déficience du système.

Quels sont ceux qui savent ce qui se passe vraiment dans toute la province? Dans certaines régions, cela peut fonctionner, dans d'autres, cela fonctionne moins bien. Alors, on s'est dit: Est-ce que toute la population du Québec a droit aux mêmes services? Est-ce que toute la population du Québec a droit à la même qualité? Est-ce que toute la population du Québec a le droit de se sentir secure, de se sentir appuyée par un service qui, lorsque demandé, serait efficace? Je pense que se poser la question c'est y répondre.

M. le Président, j'aimerais qu'on regarde un peu ce que la loi 34 va faire. Donc, on dit que la loi 34 déposée à l'Assemblée nationale instaure de nouvelles règles en matière de transport ambulancier au Québec et prévoit à cette fin, pour la région de Montréal, la création d'une corporation sans but lucratif permettant l'intégration des techniciens ambulanciers à cet organisme qui aura pour objet, aux lieu et place du Conseil de la santé et des services sociaux de la région de Montréal métropolitain, d'organiser et de coordonner dans son territoire le transport ambulancier.

Quel est le temps limite normal pour faire un transport ambulancier? Je pense que le temps le plus court est le temps souhaité. J'écoutais ce matin le chef de l'Opposition, le député de Joliette, qui se servait d'une expression pour dire qu'à Laval il y avait déjà un service ambulancier chromé. Je peux vous dire que ce n'est peut-être pas tout à fait le cas. Pour la période des fêtes qui s'en viennent, soit le 24 juin, on a déjà planifié de couper des ambulances. Si à Laval on veut avoir un service ambulancier, actuellement de la façon dont les régions sont définies... Je vous donne juste un petit exemple d'un fait qui est arrivé la semaine dernière. Pour avoir le service ambulancier sur l'île de Laval on se doit de faire une demande à Montréal. L'ambulance était stationnée à l'angle des rues Chambord et Jarry et, dans Saint-François, la demande était quand même assez urgente. Cela a pris 27

minutes. Si on parle de services de qualité, si on parle de services fonctionnels, je ne pense pas qu'on puisse nous reprocher d'essayer de faire une meilleure coordination et de donner un meilleur service à la population.

Qu'est-ce qui se passe aussi en régions? Vous avez quand même 185 propriétaires en régions. Quand je dis en régions, je veux dire dans toute la province. Il y a 492 véhicules répartis un peu partout dans la province. En province, la situation n'est peut-être pas tout à fait la même que dans les grands centres. Vous avez des techniciens qui, tout en étant de bonne foi et en ayant une formation très minime dans bien des cas, agissent un peu selon les anciens systèmes qui étaient les systèmes de pompiers volontaires. Ces gens-là sont en disponibilité, ils attendent que la demande se fasse, que l'appel soit logé, ils laissent leur emploi et vont sur les cas d'urgence. Avez-vous imaginé, M. le Président, de quelle façon on peut s'attendre à une efficacité et un résultat dans de tels cas: quand on prend l'appel, on doit aller chercher le technicien à son ouvrage et, de là, l'amener sur le lieu de l'appel?

Ce sont là des situations qui existent, ce sont des situations qui vont être corrigées par 'e nouveau système, parce qu'il va y avoir une meilleure dispersion des appels, il va y avoir des gens qui vont savoir en tout temps où sont les ambulances. On n'espérera pas que le cas soit livré, comme on dit, à l'hôpital, pour ne pas dire "dumpé" dans bien des cas, parce que c'est souvent l'expression qu'on entend. Il faut le "dumper" et le "dumper" vite et il faut revenir sur place parce qu'il y a un autre appel qui attend. Dans bien des cas, dans certaines régions, il y avait un deuxième appel qui était logé, mais comme l'ambulance était déjà engagée, on attendait le retour de ladite ambulance pour aller chercher le malade, le blessé ou l'accidenté.

Partant de là, je ne pense pas qu'on puisse reprocher à un gouvernement de prendre ses responsabilités et d'aller de l'avant avec le projet de loi. Si on regarde la quantité d'appels qu'il y a dans la province, on nous parle d'environ 400 000 appels par année, dont 28 000 sont en relation directe avec les accidents d'automobile, avec la Régie de l'assurance automobile et 160 000 sont en relation avec le transfert entre les institutions hospitalières. À ce moment-là, ayant très peu de coordination, inutile de vous dire que les déficiences se faisaient sentir lorsque les urgences arrivaient! Ici, dans la grande région, on parle de 1000 appels par jour pour 250 transports par jour. Il faut prendre nos responsabilités, il faut aller de l'avant avec le projet de loi et faire en sorte qu'on ne contribue pas à faire augmenter les statistiques parce qu'on dit qu'il y a quand même plus de 50 % à 60 % des accidentés de la route décèdent quelques heures après une blessure.

On parlait de traumatologie tantôt. J'écoutais le député de Gouin qui ne semblait pas tout à fait renseigné. En fin de semaine, soit le samedi 4 juin, La Presse démontrait dans un article qu'on a un centre de traumatologie à Montréal, qui est l'hôpital du Sacré-Coeur, et c'est tout à l'honneur de l'hôpital du Sacré-Coeur qui, je pense, sera retenu par l'organisation du Grand Prix de la formule I de Montréal pour veiller à la santé des pilotes. Je sais, parce que c'est quand même relativement près de ma région, que l'hôpital du Sacré-Coeur a aussi un héliport. Un peu plus loin dans la déclaration du ministre Côté, on est en train d'envisager la possibilité aussi d'améliorer le service de grands blessés par voie aérienne, par voie d'hélicoptère.

On veut améliorer au sol, on veut améliorer dans les airs, on veut améliorer un peu partout. Si c'est ça qu'on a à nous reprocher, je ne me sens pas mal à l'aise du tout d'avoir à voter sur le projet de loi qu'on nous présente ici. On parle d'aller plus loin. C'est cela que certains des députés de l'Opposition nous ont suggéré. On trouve qu'on ne va pas assez loin dans le projet de loi. Qu'ont-ils fait depuis 1981 à part d'abdiquer et de se mettre à genoux en 1984? On nous reproche de prendre les moyens nécessaires pour éviter des problèmes majeurs en réalisant l'importance de la situation et en trouvant des solutions qui, peut-être aux yeux de tout le monde, ne sont pas parfaites. Peut-être. Mais vous ne pouvez pas enlever la bonne volonté et les acquis qui sont proposés. Si on parle, en ce moment, de donner une qualité de réponse tant dans l'exécution que dans la formation des techniciens ambulanciers, la population est-elle au courant que la moyenne d'heures de formation de nos techniciens est en bas de 150 heures? Cela veut dire l'équivalence d'un cours de trois semaines et demie. Est-ce qu'on va nous reprocher d'aller de l'avant et de demander un minimum de formation de 825 heures? On va demander 21 ou 22 semaines de cours, moyenne 40 heures par semaine. Est-ce que c'est exagéré que de souhaiter d'avoir des techniciens plus chevronnés, mieux équipés, qui, eux aussi, vont se sentir mieux appuyés, ayant les connaissances leur permettant sûrement de développer l'assurance qui leur est absolument nécessaire? (16 h 40)

Si on confie la vie de quelqu'un à ces techniciens, que ce soit des hommes ou des femmes, il faut souhaiter aussi leur donner les outils nécessaires, il faut faire en sorte que, lorsqu'ils seront en régions éloignées et qu'ils auront les connaissances nécessaires, que les régions éloignées puissent les conserver, puissent avoir droit à la même garantie et à la même sécurité. Est-ce que c'est exagéré que de souhaiter avoir un numéro unique pour coordonner tous ces services? Quand arrive le cas d'urgence, arrive aussi le cas de panique. Est-ce qu'on va se rappeler du numéro de téléphone 848-4141 ou 842-5252 ou ainsi de suite? Est-ce que ce n'est pas plus facile de penser avoir un centre de coordination 911 qui dira tout simplement: dans

telle région, on a trois ambulances, il y en a une qui est déjà partie, on va aller chercher le service ailleurs? Ce n'était pas le cas avant. Combien y a-t-il de gens qui sont en état de choc lorsque survient la maladie ou la blessure, et que cela arrive de façon inopinée, de façon impromptue? Cela ne se contrôle pas, la maladie. Si on savait quand c'est pour arriver, on demanderait qu'ils viennent stationner devant la porte et on dirait "on embarque". Mais ce n'est pas le cas, ce n'est pas comme cela que cela marche, la maladie, M. le Président. Cela ne vient pas sur commande.

Alors, les gens d'en face - il y en a de moins en moins - ont toutes les solutions aujourd'hui. Mais qu'ont-ils fait depuis 1981? Cela aussi, je veux le dire à la population, parce que tantôt on a dit qu'il faut que la population le sache. Oui, il faut que la population sache qu'ils n'ont rien fait d'autre que de se mettre à genoux en 1984. C'est tout ce qu'ils ont fait. Des solutions, ils n'en ont pas. Pour nous, il n'est pas question de trouver des coupables, comme je l'ai déjà dit, mais des solutions. Alors, on va vous laisser avec votre passé, vous avez déjà été jugés sur cela. On n'y reviendra pas, ce serait encore pire si on vous jugeait aujourd'hui.

Il y en a un autre qui essaie de revenir, qui est votre chef. Oui, il essaie de revenir, mais il n'a pas l'air de faire l'unanimité. Quand il est parti, il avait seulement 14 % de cote de popularité et il en a 17 %. Nous, des affaires à 14 % et à 17 %, on n'en veut pas, on veut des choses qui vont fonctionner pas loin des 100 %. C'est pourquoi on a un projet de loi, le projet de loi 34, qui est mis de l'avant et qui va sûrement corriger un paquet de lacunes. Ce ne sont pas des lacunes qu'on a identifiées tout seuls, mais qui ont été identifiées par tous ceux qui sont dans le milieu, à l'exception peut-être des propriétaires qui sont en train d'essayer de sauvegarder une partie du gâteau. Je ne peux pas les blâmer, ce sont des entrepreneurs privés, c'est normal. Mais si on établit, à titre de gouvernement, des normes sur la qualité des véhicules, si on permet à tout le monde dans toute la province de jouer la même "game" - excusez l'anglicisme - et que, par le fait même, tout le monde est sécurisé, tout le monde sait qu'on a la même qualité de réponse, est-ce qu'on peut être contre un projet de loi comme cela? Quand on parle de qualité, d'urgence, c'est cela, on parle de coordination et on parle de contrôle, et c'est cela qu'on est en train de mettre de l'avant.

On nous suggérait d'aller plus loin. Je pense qu'on est déjà allé pas mal plus loin que tous ceux qui nous ont précédés, parce qu'on a essayé tout simplement d'étirer le temps, on a acheté un peu de paix. Mais, chez nous, ce n'est pas cela. Vous le voyez très bien. Les syndicats auraient peut-être demandé plus, les propriétaires demanderaient un peu plus, mais, nous, on va vers les vrais besoins de la population. Et peut- être que, d'un côté comme de l'autre, on peut dire que ce n'est pas parfait, mais une chose qu'on peut dire, c'est qu'on va de l'avant, on jette des bases solides. Il me semble que, pour toute la population qui va se coucher le soir et qui va être au courant qu'il y a quelqu'un qui veille, quelqu'un qui est là et qui va répondre, qui va être en disponibilité, qu'il va y avoir du service, qu'il y aura des véhicules qui vont fonctionner... Je ne pense pas qu'on puisse en vouloir à un gouvernement qui prend ses responsabilités, qui continue, en fait, de livrer ce pourquoi il a été élu. C'était un vote qui était quand même sans équivoque et qui continue, si vous voulez, d'après les sondages, de faire plus que l'unanimité ou, du moins, à peu près, puisqu'on nous parle de 66 % de satisfaction dans la population.

Si c'est cela que vous appelez un gouvernement qui ne fonctionne pas, est-ce que vous êtes en train de nous dire que dans la population, ce sont tous des imbéciles? Je ne pense pas que ce soit cela que vous vouliez dire. Si jamais vous lavez pensé, arrêtez de le dire, arrêtez de vous opposer à quelque chose qui est logique. Quand on s'obstine contre quelque chose qui est logique, on devient, par le fait même, absolument illogique.

C'est cela qu'on a entendu depuis le matin. C'est quand même difficile, pour ceux qui sont en retrait, les parlementaires, de ne pas réagir à cela. Parfois, la population ne sait pas, tout ce qu'on entend ici, en Chambre, à l'Assemblée. C'est pour cela que, de temps en temps, il y a un peu d'agressivité qui se manifeste. C'est pour cela qu'à un moment donné, on se doit de dire la vérité. La vérité, c'est qu'on va de l'avant avec ce projet de loi qui est pour le bénéfice de toute la population. Encore là, je suis drôlement convaincu que les gens vont l'apprécier. Sûrement que les gens vont aller vous voir dans vos comtés; ils vont vous poser des questions: Comment se fait-il que vous vous soyez opposés à cela? Comment se fait-il que vous ne soyez pas capables, vous aussi, de vous rallier au gros bon sens? Le gros bon sens, c'est de donner la sécurité à toute la population. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président: Je cède maintenant la parole à M. le député de Duplessis.

M. Denis Perron

M. Perron: Merci, M. le Président. Aujourd'hui, nous sommes en train, encore une fois, à la suite de décisions gouvernementales, de discuter d'un projet de loi qui modifie la Loi sur les services de santé et les services sociaux et d'autres dispositions législatives.

Encore une fois, cela se fait en fin de session; cela se fait avec le rouleau compresseur libéral et cela n'est pas tout à fait nouveau. Je peux vous assurer que depuis le début du mandat

du gouvernement libéral, nous avons vécu, en fin de session, plusieurs occasions où on nous amenait des projets de loi préparés à la pièce et à la petite semaine. Lorsque j'entends le député de Fabre, qui vient d'intervenir, dire qu'on ne devrait pas reprocher au gouvernement libéral d'agir, je pense qu'il faut s'expliquer et le faire clairement.

Le ministre délégué à la Famille se rappelle très bien, lorsqu'il était ministre délégué aux Pêcheries, qu'il est arrivé assez fréquemment qu'en tant que critique en matière de pêcheries, j'étais d'accord avec lui sur certaines positions qu'il prenait. On se parlait assez souvent pour corriger certaines situations. Cela ne veut pas dire que, lorsque je n'étais pas d'accord avec le ministre, je devais m'asseoir et laisser passer le train sans lui dire exactement ce que je pensais de la situation.

Aujourd'hui, avec le projet de loi 34 que nous avons devant nous, je pense qu'il est nécessaire d'intervenir pour dire deux choses: II y a, bien sûr, dans le projet de loi qui nous est présenté certains articles qui vont, dans l'ensemble, avec l'opinion que nous avons en tant que membres de l'Opposition. Cependant, s'il y a, dans un projet de loi, des articles avec lesquels nous ne sommes pas d'accord pour différentes raisons, face à cette décision gouvernementale, on se doit, en tant que membres de l'Opposition, en tant qu'individus, en tant que résidents du Québec, de certaines régions du Québec, de dire exactement l'heure juste, ce qu'on pense et de quelle façon on devrait modifier ce projet de loi. (16 h 50)

Je comprends très bien le ministre délégué à la Famille qui, actuellement, est un peu seul dans ce dossier. Je considère, on le voit ici, en cette Chambre qu'il y a très peu d'interventions des membres du Parti libéral. Dans certains cas, il est pris avec une situation qui, à notre sens, lui a été imposée par des gens qui sont plus hauts que lui au Conseil des ministres et, bien sûr, il s'est plié; il a reculé. Il l'a fait d'une façon directe face à des pressions faites par certains milieux, et peut-être le député de Fabre. Je comprends que c'est une situation difficile pour lui.

Ce que je n'aime pas, en tant que membre de l'Opposition et aussi en tant qu'ancien syndicaliste, c'est de voir que ce gouvernement, lorsqu'il était de ce côté-ci de la Chambre, c'est-à-dire dans l'Opposition, se targuait d'avoir toutes les bonnes solutions et nous accusait d'à peu près tous les torts parce que, dans certains dossiers, nous n'allions pas en consultation générale, pour certains projets de loi dont on avait discuté antérieurement avec les parties.

Vous savez, M. le Président, lorsqu'on regarde un dossier aussi important qu'une loi qui concerne des êtres humains, qui concerne des groupes, on se doit, dans un premier temps, d'être bien préparés et de consulter, de négocier même le contenu du projet de loi avec les personnes concernées, c'est-à-dire avec toutes les parties, à partir des représentants et des représentantes des associations de consommateurs jusqu'aux personnes mêlées au milieu des affaires sociales, en passant par toutes les associations qui veulent bien se faire entendre. Bien sûr, les propriétaires d'ambulances veulent définitivement qu'on les entende. Vous avez les infirmiers et les infirmières, où sont-ils dans l'ensemble de ce dossier? Vous avez les syndicats, vous avez les préposés, vous avez tout le domaine de la répartition. Que l'on sache, avant que le ministre dépose ce projet de loi, il n'a discuté qu'avec un seul groupe, c'est-à-dire des représentants de la CSN. Qu'a-t-il fait auprès de l'ensemble des autres associations syndicales, auprès de l'ensemble de toutes les associations qui représentent les consommateurs? Rien, il a "déboulé" le projet de loi en mai dernier, ici à l'Assemblée nationale, pour nous l'amener, en fin de session, pour discuter de choses aussi importantes.

Je pense que c'est l'ensemble du Québec qui doit savoir que depuis deux ans et demi, ce gouvernement agit exactement de la même façon dans des dossiers importants pour la collectivité québécoise. Qu'on se rappelle, M. le Président - vous le savez très bien - toutes les promesses qui ont été faites au cours de la campagne électorale de 1985 par ce gouvernement, à partir de la parité de l'aide sociale pour les jeunes en passant, bien sûr, par ce qu'ils appelaient dans le temps la médecine de guerre, pour corriger la situation dans les salles d'urgence. Je peux vous dire qu'actuellement, après deux ans et demi, rien n'est corrigé, cela va de pis en pis dans les hôpitaux du Québec, et surtout dans les grands centres comme Montréal et Québec.

On nous amène des lois où on devrait procéder à des négociations avec les parties avant leur dépôt, par la suite, dépôt à l'Assemblée nationale et, par la suite, commission parlementaire ouverte à tout le monde pour que les membres de l'Opposition et la population du Québec sachent exactement ce qui se passe dans tel ou tel dossier. Par la suite, bien sûr, comme c'est toujours le cas concernant les lois, on s'occupera de la commission parlementaire lorsque arrivera le moment de l'étude article par article.

Ce n'est certainement pas la démocratie qui étouffe ce gouvernement. On l'a vu à plusieurs reprises dans le cadre de certaines privatisations, comme Quebecair, Madelipêche, Dofor. Pour Madelipêche, c'était un peu moins pire, c'est vrai, parce que les parties étaient d'accord sur certains points. Mais qu'on se rappelle le dossier de Quebecair et qu'on aille regarder certaines privatisations faites par le gouvernement libéral, où on passe de 884 emplois à environ 250. Cela commence à être grave. Ces gens se targuent de créer des emplois au Québec, d'être les grands vendeurs de la privatisation, et aujourd'hui, on nous arrive à l'Assemblée nationale avec un

projet de loi qui privatise un secteur ambulancier, mais juste pour la région de Montréal.

Que fait-on dans ce dossier pour l'ensemble du Québec? Comme membres de l'Opposition, nous ne voulons pas dire que cela devrait être étatisé ou nationalisé pour tout le Québec. Ce n'est pas cela qu'on dit. Mais on dit que le ministre délégué a la Famille n'agit pas correctement en nous présentant un projet de loi à la pièce sans avoir discuté avec toutes les parties concernées. Et, selon moi, il fait absolument fi de toutes les régions du Québec et, en particulier, de la région de la Côte-Nord.

Lorsqu'on parle de la qualité des soins, qu'est-ce que cela va apporter de plus? Malgré ce que dit le député de Fabre, malgré ce que dit le ministre délégué à la Famille, malgré ce que certains libéraux et certaines libérales ont dit en coulisses, qu'est-ce que cela va apporter de nouveau dans la qualité des soins aux personnes victimes d'accidents ou malades, lorsque ces personnes auront à se faire transporter par ambulance?

Et, M. le Président, c'est un précédent aussi dans le domaine des structures de la santé. Avant même que l'Assemblée nationale ne se soit prononcée sur le projet de loi qui vise à réorganiser le transport ambulancier à Montréal et au Québec, le gouvernement libéral s'assure de la présence d'un président-directeur général pour siéger à la tête du conseil d'administration de la nouvelle corporation. C'est un précédent dans le domaine des structures de la santé. Or, comment peut-on désigner un responsable, un p. -d. g. comme étant le nouveau président-directeur général de la Corporation d'urgences-santé prévue au projet de loi 34 alors qu'elle n'est même pas créée? C'est la question que se posait le chef de l'Opposition officielle et c'est la question que nous nous posons en tant que membres de l'Opposition officielle. Parce que c'est complètement anormal, complètement illogique de faire cela de cette façon-là. Payer quelqu'un, engager quelqu'un avec des pouvoirs avant que le projet de loi soit sanctionné ici à l'Assemblée nationale, c'est-à-dire en cette enceinte, M. le Président.

Et je voudrais rappeler au ministre que, dans l'ensemble des régions du Québec... Il a reçu des télégrammes qui lui ont souligné différents points qui inquiétaient ces gens. Et, ici, je voudrais vous mentionner, par exemple, les services ambulanciers Portier de Schefferville. Les libéraux ne connaissent pas le dossier de Schefferville, mais je le connais. Même le ministre des Affaires municipales ne connaît pas le dossier de Schefferville. Mais il a un de ses propres amis qui vient d'envoyer un télégramme au ministre qui dit: "Nous, les services ambulanciers Portier de Schefferville, membre de la Corporation des services ambulanciers du Québec, vous demandons de retirer le projet de loi 34 et de convoquer une commission parlementaire pour que la Corporation des services ambulanciers et tous les membres intervenants fassent connaître leur position sur la réforme du transport ambulancier du Québec. " Pas une réformette. On parle d'une réforme globale de tout le système ambulancier du Québec. Parce que, comme je le mentionnais tout à l'heure, le ministre et son gouvernement font cela à la pièce.

Un autre télégramme qui est signé par Ambulance à Sept-îles inc., M. Edgard Mallet: "Je, Edgard Mallet, membre de la Corporation des services ambulanciers du Québec, vous demande de retirer le projet de loi 34 et de convoquer une commission parlementaire pour que la Corporation des services ambulanciers et tous les autres intervenants fassent connaître leur position sur la réforme des transport ambulanciers au Québec. "

Un autre télégramme de ma région, M. le Président. "Je, Ambulance Boudreau de Havre-Saint-Pierre, membre de la Corporation des services ambulanciers du Québec, vous demande de retirer le projet de loi 34 et de convoquer une commission parlementaire pour que la Corporation des services ambulanciers du Québec et tous les autres intervenants fassent connaître leur position sur la réforme du transport ambulancier du Québec. "

Et là, j'entends le député de Fabre qui vient de nous dire qu'il y a pratiquement unanimité sur le dossier. Je regrette, mais le député de Fabre n'a pas reçu les documents qu'on a reçus. Il n'a pas regardé le dossier sur le fond II pense que la réformette, proposée dans le projet de loi 34 devant nous, et qui se produit dans la région de Montréal est pour l'ensemble du Québec et que cela va régler tous les problèmes. Lorsqu'on regarde les dossiers sur le fond, lorsqu'on se donne la peine d'étudier l'ensemble des problèmes... Je pense que le député de Fabre n'avait pas du tout raison de dire ce qu'il a dit II a passé son temps à parler plutôt de l'ancien gouvernement. Mais je voudrais aviser le député de Fabre et l'ensemble des libéraux en cette Chambre que c'est vrai que le 2 décembre 1985, vous avez eu un mandat. Votre mandat vous le faites c'est vrai. Mais vous n'avez pas à blâmer régulièrement l'ancien gouvernement. Vous n'avez pas à blâmer le gouvernement. C'est vous qui êtes là. Alors gérez le Québec. Faites-le à votre façon et un jour la population du Québec va vous dire que vous n'avez pas eu raison de le mener de telle ou telle façon. Et c'est cela le système démocratique. (17 heures)

Excusez-moi, M. le Président, mais si le député de Fabre et l'ensemble des membres du gouvernement veulent que l'Opposition s'assoie et ne dise pas un mot sur les affaires toutes croches qui sont faites par ce gouvernement, ce n'est pas l'expression de la démocratie. On a le droit de dire ce qu'on veut en cette Chambre On a le droit d'étudier nos dossiers, et on a le droit de donner notre position et la position de l'ensemble de nos associations dans tout le

Québec. Et c'est cela qu'on fait. On fait notre devoir de citoyens. On fait notre devoir d'élus. Mais on ne le fait pas de la même façon que le font les libéraux en étant toujours d'accord avec tout le monde ou avec des "groupettes". On ne le fait pas de la même façon. On le fait pour l'ensemble de la collectivité du Québec, c'est-à-dire des hommes, des femmes, des enfants et des familles. C'est pour eux qu'on le fait, M. le Président.

Je reviens au projet de loi. Le projet de loi ne peut être adopté avant que se tienne une consultation de toutes les parties intéressées. C'est vrai qu'il va y avoir une commission parlementaire où certaines des parties vont être consultées à partir d'une liste qui a été présentée par qui? Qui a été présentée par le gouvernement libéral, qui a été pratiquement imposée à l'Opposition pour entendre tel ou tel organisme. C'est entendu qu'il peut y avoir, pour certains organismes, des négociations avec le leader de l'Opposition. Cependant, il faut être très restreint dans les présentations que nous faisons au ministre et à son gouvernement, en particulier au leader du gouvernement, pour obtenir que toutes les associations que nous voulons entendre devant cette commission soient là. Parce que là, il y a une marge, et elle est restreinte. Le ministre acceptera exactement et les membres de cette Chambre accepteront aussi ce que je viens de dire parce que c'est la façon dont cela se fait en ce parlement. C'est la façon dont cela se fait en ce parlement lorsqu'il y a des consultations particulières. Mais cela ne veut pas dire qu'on est d'accord avec la liste qui est proposée. On voudrait qu'elle soit beaucoup plus longue. On a eu l'occasion d'ajouter trois ou quatre organismes, c'est sûr. Mais qu'est-ce qu'on va faire avec tous les autres organismes qui voudraient se faire entendre et qui ne seront pas entendus parce qu'on est en fin de session et qu'on subit le rouleau compresseur libéral?

J'entendais le député de Fabre dire qu'il n'y avait pas tellement d'opposition à ce projet de loi. Je voudrais lui rappeler que la Corporation des services ambulanciers du Québec a dit ceci: "Le projet de loi 34 sur les services ambulanciers, une nationalisation à rabais." La même Corporation des services ambulanciers du Québec: "Le projet de loi 34 sur les services ambulanciers, la paix syndicale à tout prix." Donc, à n'importe quel prix! Là, on peut dire que c'est proche du Parti libéral lorsqu'on pense que le Conseil du patronat du Québec - que je sache, son p.-d.g. n'est pas un grand ami du Parti québécois, il est plutôt un grand ami du gouvernement libéral - a dit ceci: "Ce projet de loi est inacceptable, difficilement justifiable de la part d'un gouvernement qui mise sur l'entreprise privée, et constitue une reddition pure et simple devant les forces syndicales qui obtiennent ce secteur depuis quelques années."

M. le Président, je peux vous dire que le projet de loi 34, Loi modifiant la Loi sur les services de santé et les services sociaux et d'autres dispositions législatives, qu'on est en train de discuter, ne fait pas l'unanimité. Cela ne fait pas l'unanimité pour tout le monde. Contrairement à ce que pensent le gouvernement et son ministre délégué à la Famille, il va effectivement y avoir dans l'ensemble du Québec, dans les prochaines semaines et dans les prochains mois, des problèmes qui vont être créés par l'adoption de cette loi ou d'une partie de cette loi à l'Assemblée nationale, surtout dans le domaine ambulancier, parce qu'il n'y a pas eu de consultation avant le dépôt du projet de loi. C'est une réforme partielle malgré que quatre rapports recommandaient une refonte globale de l'ensemble de la loi, en particulier du domaine ambulancier. Cette réforme était qualifiée de majeure par le ministre, et elle s'est traduite par six façons de procéder, et ça, c'est la décision qu'il a prise. C'est une réforme du système de transport ambulancier qui s'imposait, bien sûr, mais pas de la façon dont elle est présentée. Cependant, le ministre ne s'est pas montré à la hauteur de la tâche. Ce qui caractérise cette réforme, c'est avant tout le peu de consultations faites par le ministère de la Santé et des Services sociaux sur ses modalités et son application, sauf peut-être pour un seul groupe, en l'occurrence le RETAQ.

M. le Président, je n'ai rien contre le RETAQ, mais j'en ai, par exemple, contre le fait que ce gouvernement, qui se dit démocratique, ouvert et transparent nous arrive, dans une période de fin de session, avec un projet de loi ou avec d'autres projets de loi aussi importants que ceux que nous avons, mais qui ne corrigent vraiment pas l'ensemble des situations vécues au Québec. Bien sûr, le gouvernement libéral qui dirige les destinées du Québec a vraiment quelquefois de curieuses façons de procéder. D'un côté, le chef du gouvernement déclare à la Chambre de commerce du Québec qu'il ne dit pas non à des expériences pilotes de privatisation en matière de santé; d'un autre côté, son ministre délégué à la Famille et à la Santé et aux Services sociaux présente un projet de loi qui institue, en pratique, la nationalisation du transport ambulancier dans la région métropolitaine de Montréal, sans débat public, sans un vrai débat public et en cachette. Il le fait actuellement a la sauvette et en cachette aussi. Qu'on décide de nationaliser une entreprise privée ou de privatiser un service de l'État pour résoudre un problème de relations du travail est totalement inacceptable. Là-dessus, je suis parfaitement d'accord avec l'auteur de ('editorial de La Presse, M. Pierre Vennat. "Il se peut que la solution présentée par le ministre soit raisonnable, mais l'adoption de ce projet de loi ne saurait se justifier avant que tous les intervenants au dossier, c'est-à-dire les compagnies, les techniciens ambulanciers, mais également les représentants et les représentantes du public puissent intervenir pour étudier toutes les

facettes de ce projet de loi et apporter des recommandations au ministre délégué à la Famille, à la Santé et aux Services sociaux pour qu'on ait quelque chose de plus potable devant nous."

Pour le moment, M. le Président, je termine en vous disant qu'en ce qui me concerne, en tant que député de Duplessis, en tant que représentant du Parti québécois dans la grande région de la Côte-Nord et en tant que député québécois, je suis contre ce projet de loi tel que libellé actuellement. Le ministre a de l'ouvrage à faire pour se conformer à nos voeux et aux voeux de la population de nos régions du Québec. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président: Je reconnais maintenant M. le député de Verchères.

M. Jean-Pierre Charbonneau

M. Charbonneau: M. le Président, une réforme dans n'importe quel domaine signifie des propositions d'interventions qui font en sorte que les principaux problèmes qu'on a identifiés finissent par trouver une solution. Or, on nous a présenté ce projet de loi sur une base un peu fallacieuse. On nous l'a présenté comme étant la réforme du transport ambulancier au Québec.

Quand on y regarde de près, M. le Président, on constate que ce n'est pas une réforme du transport ambulancier, mais plutôt une façon particulière et discutable de régler un problème de relations du travail qui existe depuis des années et qui pourrit depuis des années dans la région de Montréal. Cette proposition ne règle en rien, par ailleurs, les situations difficiles qu'on connaît au chapitre de l'efficacité et de la coordination des services ambulanciers ailleurs que dans la région de Montréal. (17 h 10)

Bien sûr, le projet de loi comporte des bonifications pour assurer une meilleure formation des techniciens ambulanciers et des propositions pour, espérons-le, améliorer la rapidité d'intervention et l'efficacité du service ambulancier ailleurs qu'à Montréal, quoique, à cet égard, M. le Président, il n'est pas du tout certain que l'objectif visé par le projet de loi soit atteint, surtout quand on regarde les cris d'alarme ou les revendications qui nous sont faites d'un peu partout au Québec. Le collègue de Duplessis a mentionné quelques entreprises de sa région qui l'ont alerté. Je pourrais faire la même chose. J'en ai une ici, Les Ambulances Demers, de Beloeil, qui couvrent une bonne partie de la région de Beloeil et de la vallée du Richelieu, ont également demandé au premier ministre de retirer le projet de loi en question et de faire en sorte qu'il y ait une véritable commission parlementaire qui nous permettrait de regarder l'ensemble du dossier et ferait en sorte que la réforme, si on veut qu'il y ait une réforme, réponde aux principaux besoins identifiés mais, aussi, s'appuie sur un consensus.

M. le Président, dans le domaine des services de santé, et en particulier dans les domaines de services de santé en urgence, il est important de s'assurer qu'il y ait un consensus et que ce consensus permette qu'on puisse retrouver le meilleur climat et qu'on puisse identifier les meilleurs types d'interventions pour que la population sort bien servie. Nous, de ce côté-ci de la Chambre, nous nous faisons l'écho de beaucoup de gens qui, depuis le dépôt de ce projet de loi, disent au gouvernement, disent au ministre, disent aux députés libéraux: Écoutez, vous allez trop vite, vous essayez de régler un problème d'une façon incorrecte et en voulant régler le problème de Montréal, vous faites fi des besoins des autres régions et d'une façon correcte de faire en sorte que les situations soient bien évaluées.

C'est cela qui est dommage dans la façon dont le gouvernement se comporte, d'autant plus que ce n'est pas vrai que le gouvernement est pris de court. Le problème dont on parle existe depuis longtemps. Cela fait également longtemps que le gouvernement est saisi de ce dossier. On ne peut pas invoquer aujourd'hui le prétexte qu'ils sont pris de court et qu'il faut qu'ils aillent d'urgence escamoter des solutions, et surtout les imposer, même si ceux qui sont les principaux concernés par l'organisation de ces services disent au gouvernement: Écoutez, cela ne va pas votre affaire. Les solutions que vous nous présentez ne sont pas adéquates.

Un gouvernement peut toujours faire fi des représentations et des récriminations des gens concernés dans la mesure où il y a une situation qui justifie cela. Il n'y en a pas, sauf peut-être une, à Montréal particulièrement. Quelle est-elle, M. le Président? C'est la menace d'un syndicat bien organisé qui a averti le gouvernement que si les propositions ne faisaient pas son affaire, au début de juillet il allait recommencer à faire le bordel, à semer le trouble dans les services ambulanciers dans la région de Montréal.

Dieu sait que ces tactiques et ce genre d'attitude ont prévalu au cours des dernières années qui sont au cœur du problème. À cet égard, comment le gouvernement a-t-il choisi d'intervenir? Est-ce que le gouvernement a décidé d'organiser dune façon différente des services pour que les employés et les employeurs ne se retrouvent plus dans l'obligation ou dans la dynamique de s'affronter? Non. On a proposé des changements de structures qui, dans les faits, ne donnent aucune garantie que le fonctionnement qui sera adopté va éviter les problèmes qu'on connaît.

Qu'est-ce qu'on a décidé de faire? On a créé, il y a quelques années, sous l'autorité du Conseil régional de la santé et des services sociaux à Montréal, un organisme qui s'appelle Urgences-santé qui avait la responsabilité de coordonner les services avec les entreprises privées qui avaient la responsabilité de dispenser... La situation, c'est que les employés de

ces différentes entreprises privées étaient regroupés dans un même syndicat, très militant comme on l'a vu. Donc, on a choisi de transformer la structure Urgences-santé pour en faire une corporation sans but lucratif. Encore là, ce n'est pas la fin du monde. On va plus loin. On dit: Maintenant, pour régler le problème des relations du travail, dorénavant les employés vont cesser d'être des employés des entreprises privées et vont devenir des employés de l'État. Ils vont devenir des fonctionnaires. Curieuse solution venant du Parti libéral qui, chaque fois que, de ce côté-ci, on a eu le malheur de fonctionnariser tel ou tel service, s'est élevé à cor et à cri, a fait des drames nationaux. Aujourd'hui, ce n'est pas important.

La logique et la continuité des logiques, on nous arrive avec une approche qui, non seulement fait en sorte que les employés des compagnies d'ambulances vont relever de l'État, mais au niveau du conseil d'administration de cette nouvelle entreprise, on va se retrouver avec un certain nombre d'intervenants qui ne sont pas représentés, en fait, les propriétaires des ambulances ou des véhicules ne sont pas représentés, mais les salariés, les employés eux, sont représentés. On va se retrouver avec un conseil d'administration où des employés et d'autres types d'intervenants vont avoir la responsabilité d'établir des normes et des barèmes de rémunération et d'ensemble de conditions de travail. On va se retrouver avec un conseil d'administration où des employés vont avoir à décider au conseil d'administration des propositions qui vont leur être faites à eux comme syndiqués et à leur syndicat qui va les représenter.

On s'imagine que cela va régler les problèmes, que les gens qu'on va avoir affectés au conseil d'administration vont faire de si bonnes propositions qu'il n'y aura jamais plus de conflit de travail, ou encore que le syndicat sera placé dans une si drôle de situation d'aller à rencontre des propositions d'un conseil d'administration où il est lui-même représenté, qu'il n'osera pas perturber le service. C'est un peu naïf. Nous, de ce côté-ci, qui sommes proches du monde syndical à bien des égards, je vais vous dire ceci: II y a toujours des limites. Je n'ai pas la conviction que ce genre de mécanisme va nous donner la garantie qu'après coup les problèmes qu'on vit actuellement, depuis des années et pour lesquels, dans le fond, on voudrait que des solutions efficaces soient trouvées, on n'a vraiment aucune garantie que cela va être suffisant.

On fait donc une espèce d'étatisation des services ambulanciers en disant aux employés: Maintenant, vous allez relever de l'État et en disant aux employeurs: Pour cela, on ne vous donne rien en retour. Oubliez les dédommagements. En plus de cela, on vous dit que la corporation qui pourra louer des véhicules, c'est-à-dire vos véhicules, n'est pas obligée de le faire et qu'une fois qu'elle l'aura fait, par ailleurs, vous allez perdre vos permis qui, à bien des égards, se négociaient assez cher jusqu'à tout récemment. Une drôle de mentalité. Une drôle d'approche. Un drôle de précédent. Jamais le Parti québécois n'a osé faire cela, proposer une étatisation dans un secteur et ne pas dédommager les gens qui sont concernés dans ce secteur. Pour des champions de l'entreprise privée, c'est pas mal! Sauf qu'on se demande jusqu'où ce précédent va pouvoir être appliqué et invoqué dorénavant dans d'autres domaines.

Quelle sera l'attitude du gouvernement quand il aura à prendre des décisions semblables dans d'autres secteurs et qu'il aura devant lui des interlocuteurs qui lui diront: Regardez comment vous avez traité les gens dans le secteur ambulancier. Est-ce que vous voulez nous traiter de la même façon, c'est-à-dire sans dédommagement, sans compensation, sans consultation, sans capacité, sans possibilité de se faire entendre lors d'une commission parlementaire avant l'adoption de la loi? (17 h 20)

Tout cela, M. le Président, parce que le syndicat a menacé le ministre et a menacé le gouvernement de perturber la situation au début de juillet. Finalement, d'une certaine façon, c'est le syndicat qui fait la loi maintenant dans ce domaine. Et comme si on n'était pas assuré qu'il le fasse, on est allé jusqu'à choisir le conseiller syndical numéro un dans ce dossier, que je ne connais pas personnellement, qui semble être une personne qui connaît son affaire, mais qui, par ailleurs, a défendu des intérêts bien particuliers depuis un certain nombre d'années, c'est-à-dire les intérêts des syndiqués, des salariés. Et là, ce type se retrouve non seulement directeur général comme cela se fait dans le domaine de la santé et des services sociaux, mais il se retrouve président du conseil d'administration. Il devient donc président-directeur général du nouvel organisme, du conseil d'administration où siégeront des syndiqués qui, dorénavant, seront tous employés de l'État.

On pourrait se dire dans ce contexte que, si c'est une réforme des services ambulanciers au Québec, pourquoi ne pas appliquer le même traitement à l'ensemble des autres techniciens ambulanciers dans les autres régions du Québec? Pourquoi avoir arbitrairement choisi que ce projet de loi, ce système, ne s'appliquerait qu'à Montréal et à Laval, sur l'île Jésus et l'île de Montréal? Qu'est-ce qui est si différent dans ma région, dans la vallée du Richelieu, dans la Montérégie? Qu'est-ce qui est si différent dans la région de Saint-Jérôme ou près de Repentigny, dans les régions Laurentides-Lanaudière, ou à Joliette? Qu'est-ce qui fait qu'il va y avoir deux systèmes de fonctionnement? Est-ce que c'est une raison structurelle, logique, qui ferait en sorte qu'il faut un système particulier à Montréal?

Dans ce cas, pourquoi ne pas avoir imposé le même genre de structure dans d'autres milieux urbains importants comme Québec, par exemple?

Si on nous dit que les milieux urbains nécessitent un type de structure différent de celui des milieux ruraux, cela se comprend. Dans ce cas, on est en droit de se demander si la structure urbaine s'applique dans tous les milieux urbains et s'il y a une structure différente pour les milieux ruraux? Le constat qu'on fait, c'est que non. Il y a une structure particulière pour la région de Montréal, en fait, pour les deux îles. C'est évident que ce sont les deux plus grandes villes du Québec. Mais il y a d'autres milieux urbains densément peuplés au Québec qui souhaiteraient peut-être avoir des structures semblables. Ou encore, il y a peut-être d'autres employés au Québec, d'autres techniciens qui souhaiteraient avoir les mêmes conditions de travail, les mêmes avantages sociaux.

Comment le gouvernement va-t-il justifier par la suite, une fois que les techniciens ambulanciers de la région de Montréal bénéficieront des structures salariales et des avantages qu'il y a dans la fonction publique... Comment va-t-on pouvoir éviter que les employés dans les entreprises privées ailleurs au Québec n'engagent pas, eux aussi, un combat syndical pour obtenir les mêmes avantages? Comment va-t-on justifier qu'à Québec, on se contente de moins qu'à Montréal? Comment va-t-on justifier qu'à Beloeil, on se contente de moins qu'à Montréal? Comment va-t-on justifier qu'au Lac-Saint-Jean, on va se contenter de moins qu'à Montréal? Comment penser que ces revendications, un peu partout quand elles vont naître, ne vont pas créer des problèmes identiques à ceux de Montréal? Quelle va être la réaction du gouvernement à ce moment-là? De nous apporter une autre réforme partielle pour la région du Lac-Saint-Jean, une autre réforme partielle pour la région de Québec, une autre réforme partielle et globale pour la région de Beloeil ou de la vallée du Richelieu, une autre pour la région de Sorel? Je pourrais les nommer comme cela, un peu partout.

On va se retrouver avec une situation ridicule qui va faire en sorte que le gouvernement va être appelé à intervenir d'urgence en urgence pour régler le problème de fonctionnement des Urgences-santé et des services ambulanciers. Pourquoi? Parce que le gouvernement n'a pas eu le courage de mettre ses culottes et d'arriver avec une véritable réforme qui s'applique à tout le monde. Il n'y a pas deux classes de citoyens au Québec. Il y a une classe de citoyens, des gens qui veulent tous, partout au Québec, quel que soit leur lieu de résidence, avoir un service ambulancier efficace, rapide. Ce qui est logique pour les usagers est aussi logique pour les employés, soit, pour le même genre de travail au Québec, avoir le même genre de conditions de travail. C'est pourquoi, M. le Président, on ne peut comprendre la logique du gouvernement de nous arriver avec un projet de loi qui crée deux classes d'usagers, deux classes d'employés, deux classes de travailleurs et qui, au surplus, est fait en fonction d'une reddition sans condition devant un comportement syndical inacceptable. Je n'accepte pas que des syndicats utilisent dans le secteur de la santé des méthodes comme celles utilisées à maintes reprises, à Montréal, par les techniciens ambulanciers. C'est drôle, c'était le genre de discours que vous teniez lorsque vous étiez de ce côté-ci. Je suis convaincu que c'est le genre de discours que, dans votre for intérieur, vous seriez encore capables de tenir; il me semble qu'on doit être unanime à cet égard.

Comme récompense de ce genre d'attitude déplorable... Je ne dis pas que le syndicat avait tort sur toute la ligne. Je dis qu'il avait tort d'utiliser les méthodes qu'il a utilisées à plusieurs reprises, y compris, encore une fois, de faire du chantage sur le gouvernement et sur les élus pour obtenir ce qu'il voulait. Si le gouvernement, après s'être rendu sans condition, avait, au moins, appliqué le système à tout le monde. Là on aurait compris qu'on essayait une nouvelle formule qui donne beaucoup d'avantages à un syndicat, qui donne une certaine récompense à une action militante qui n'était pas toujours des plus reluisantes ou des plus morales, mais, au moins, on aurait compris la logique qui veut qu'on ait un service qui mette sur un même pied les usagers et les dispensateurs de services.

Là, M. le Président, ce qu'on a devant nous, c'est un système bâtard qui va faire que, sur l'île de Montréal et sur l'île Jésus, on va avoir un fonctionnement et qu'ailleurs, au Québec, on en aura un autre. Ce qu'on prépare surtout, c'est beaucoup de problèmes pour les mois et les années qui viennent, partout ailleurs au Québec. Je ne peux pas comprendre comment le gouvernement n'a pas vu cela et mes collègues ne comprennent pas pourquoi, à cause de cela, le gouvernement s'obstine, s'entête à refuser la commission parlementaire. Il vaudrait mieux attendre que l'ensemble des intervenants qui veulent être conviés et invités à cette commission parlementaire, puissent le faire.

Le ministre va nous dire: II va y avoir une commission parlementaire, mais on n'entendra pas tout le monde. Ce que l'on souhaite, c'est d'entendre tout le monde et, surtout, c'est que le gouvernement nous arrive avec un système qui va être le même partout au Québec, c'est-à-dire adapté aux différentes réalités régionales ou sous-régionales, mais qui ne créera pas deux types d'usagers et deux types de dispensateurs de services. Merci, M. le Président

Le Vice-Président: Alors, je vais maintenant céder la parole à M. le député de Jonquière.

M. Francis Dufour

M. Dufour: Merci, M. le Président. Aussi ironique que cela puisse paraître, un gouvernement qui se fait élire sous le signe de la privatisation de certaines sociétés d'État, de plusieurs sociétés d'État, nous arrive, après deux ans et

demi, avec un projet de loi qui dit exactement le contraire de ce qui a été prêché depuis deux ans. On a beaucoup parlé d'efficacité, d'économie. Encore là, dans ce projet de loi, si on se fie à certaines études qui ont été rapportées, on arrive avec la solution la plus coûteuse.

Je pense qu'il y a de quoi s'interroger. Il y a des raisons profondes de discourir parce que c'est impensable qu'on laisse passer des éléments ou une loi aussi importante qui s'applique à une région particulière au Québec, qui s'appelle Montréal. J'ai l'occasion de dire aujourd'hui: Vous savez, quand on parle d'une maladie, d'une grippe à Montréal, c'est presque une maladie mortelle pour l'ensemble du Québec; mais une maladie mortelle en dehors de Montréal devient une grippe passagère pour la région de Montréal. C'est comme cela que je perçois certaines attitudes de ce gouvernement depuis deux ans. Je pourrais parler de n'importe quel problème qui a été soulevé; lorsque cela touche la région de Montréal, cela semble soulever beaucoup plus d'intérêt et beaucoup plus d'action. (17 h 30)

Un autre phénomène aussi qu'on constate dans ce projet de loi, c'est qu'on arrive avec des solutions qui ont déjà été explorées ailleurs. Je me souviens, selon les expériences passées, que dans certains groupes de municipalités, il y a eu des problèmes policiers. On a créé une communauté urbaine. Dans une autre communauté, parce qu'il y avait des problèmes de transport, on a créé une société nouvelle, une corporation qui s'appelle une communauté urbaine, pour régler ces problèmes. Cela a eu des effets sur l'ensemble de la population, il ne faut pas se le cacher. Une compagnie de transport en commun de la ville de Montréal a été étendue à l'ensemble du Québec. Je souscris aux propos tenus par mes collègues qui disaient, avec raison, que les coûts socio-économiques des actions incluses dans ce projet de loi vont se transporter d'une région à l'autre du Québec. Je mets qui que ce soit qui nous écoute au défi de nous dire le contraire. Le transport en commun est un exemple frappant.

Prenons le cas des policiers dans l'ensemble du Québec. Encore là, lorsqu'on a créé des communautés urbaines parce qu'on avait des problèmes policiers dans des régions l'effet qu'on a eu c'est que, peu importe l'endroit au Québec, être policier présente autant de danger, comporte autant de responsabilités, donc on a droit au même salaire. Dieu sait que les différents intervenants, dont les municipalités, ont eu à faire face à ces demandes pressantes, à ces moyens de pression et, en fin de compte, ont été obligés de payer 100 % de ce qui avait été demandé.

Donc, la corporation qu'on met sur pied... Je suis surpris parce que le ministre qui parraine le projet de loi vient du même milieu que moi. Peut-être n'avons-nous pas eu les mêmes expériences mais je suis surpris de voir qu'il n'a pas constaté ces problèmes. Je me souviens que dans des conseils d'administration où on a eu l'occasion de travailler ensemble, on était sur la même longueur d'onde sur beaucoup de sujets. Je suis convaincu qu'il ferait abstraction de par-tisanerie politique et, encore là, il admettrait avec moi que ce qui va se passer à Montréal se transportera d'une région à l'autre au Québec et ce n'est pas la solution la moins coûteuse qu'on met en place.

La Corporation d'urgences-santé qu'on met sur pied a été précédée par d'autres corporations. Il faut penser que Télé-Médic qui avait été implanté à Montréal, a fait des petits, cela s'est aussi transporté à Québec et il y a d'autres régions qui en ont fait l'expérience. Je peux vous parler de l'expérience qu'on a vécue à Jonquière, qui s'appelle Jonquière-Média Là aussi, comme partout ailleurs, c'est un groupe de médecins qui, conscients de leur rôle social - peut-être pour d'autres raisons, mais j'aime mieux parler du rôle social des médecins - avaient mis sur pied un certain nombre d'éléments pour permettre de répondre à des situations d'urgence dans la population. Malheureusement, cela a fait faillite dans certains cas et cela a donné la Corporation urgences-santé qui a eu pour fonction de mettre sur pied un service d'ambulance. Dans d'autres régions, on a repris le sujet. Dans la région de Jonquière, précisément, il existe une corporation qui a pris la succession d'un Télé-Médic probablement semblable, répondant aux mêmes critères que ceux de la région de Montréal et de Québec, mais sans apport gouvernemental si ce n'est la "castonguette", la carte d'assurance-maladie pour payer les médecins quand ils vont dans les maisons.

Chez nous, le Télé-Médic qui avait été mis sur pied par des médecins a disparu et la municipalité, dont j'avais l'honneur d'être le premier magistrat, a mis sur pied, avec la collaboration des groupes bénévoles, un organisme qui s'appelle Jonquière-Média C'est une expérience intéressante et je suis surpris que le gouvernement ne fasse jamais appel à des expériences vécues en régions. D'ailleurs, à la suite d'une tournée d'étude dans les municipalités du Québec, le rapport Parizeau mentionnait qu'il avait été impressionné par ce qui était fait dans les régions. Je vous raconte exactement ce qui s'est passé chez nous, avec la collaboration de la population et d'un groupe de bénévoles qui s'appelle le club Lion, un club très dynamique dans la région de Jonquière et dans le comté, qui a fait du porte à porte pour aller chercher un certain montant d'argent, pas un montant faramineux, on parle d'environ 30 000 $ par année. La municipalité a fourni des locaux à cette corporation, avec un système téléphonique. On a négocié avec les médecins une entente par laquelle ils s'engagent à répondre à des appels d'urgence de toute la municipalité de Jonquière. Il n'y a aucun apport gouvernemental, si ce

n'est ce que je viens de dire, tout à l'heure, les montants qui sont payés par la carte.

Les médecins, en retour, puisqu'ils jouissent de certains avantages fournis autant par la municipalité que par la corporation, remettent à la corporation 20 % des revenus qu'ils reçoivent pour leurs services aux malades. Cela se fait donc sans apport gouvernemental et cela fonctionne, aussi curieusement que cela puisse paraître; c'est un service excessivement apprécié de la population. Mais laissez-moi vous dire que les conducteurs d'automobile ne font pas partie de la corporation, contrairement à ce qu'on voit dans ce système-là. Il y a donc une corporation de sept à huit membres, complètement indépendante, qui est formée par des représentants du club Lions, de la municipalité et des groupes représentatifs du milieu et qui, à mes yeux, fait un travail extraordinaire dans le milieu et qui n'est pas près de faire faillite en tout cas. L'automobile est payée par les cotisations qui sont ramassées dans les foyers. Et, normalement, cela se fait dans deux heures. Le problème est de l'organiser, mais chaque personne est heureuse de donner à cette... C'est un exemple de privatisation. Ce n'est pas une corporation à but lucratif et cela fonctionne.

Mais nous, à Montréal, on trouve des façons différentes de fonctionner. On décide d'une corporation privée. Une corporation privée formée des CRSSS qui prennent des ententes avec un ensemble de services ambulanciers pour donner des services dans la région de Montréal. On dit: Cela ne marche pas. Il y a des problèmes syndicaux. On l'a vu. Il n'y a pas personne qui n'a pas vu à la télévision les réactions, les contestations qui ont été occasionnées par les employés de cette corporation qu'on appelle Urgences-santé, à Montréal. Comment fait-on pour régler cela? Malheureusement, ce n'est pas la première fois que la population québécoise est prise en otage. On l'a vu à maintes et maintes reprises. Comment va-t-on décider d'arrêter cela?

Il faut dire que le précédent gouvernement a mis sur pied un organisme qui donne de bons résultats depuis quelques années. On appelle cela le Conseil des services essentiels. Il me semble que c'est un mécanisme civilisé qui permet autant aux municipalités qu'à des groupes qui ont besoin de donner des services nécessaires à une population. Cela permet de civiliser les actions des gens par rapport aux autres. Et, depuis ce temps-là, curieusement, il n'y a pratiquement plus de grève dans les muncipalités. Pourquoi? Parce qu'il y a un certain nombre de services qui sont reconnus comme étant des services d'urgence et essentiels. À ce moment-là, quand toutes les mesures sont prises, cela permet probablement aux syndiqués de réfléchir. Cela permet à la municipalité de mieux regarder ce qui se passe. Et, par rapport à cela, on vient de régler une partie d'un problème qui existait dans ce domaine.

Le problème policier... Dieu sait si... Je ne pense pas qu'on fasse de discrimination. Mais c'est arrivé de temps en temps qu'on sentait la population prise en otage par certaines pressions syndicales. Est-ce qu'on a pensé à l'étatiser? Cela l'était déjà. Mais la force du nombre faisait que les problèmes continuaient. Est-ce que par rapport à cette étatisation qu'on fait du service ambulancier... Une mauvaise étatisation. Souvenons-nous que lorsque le transport en commun a été mis sur pied en régions, on a été obligé d'acheter les véhicules. Personne n'a été dépossédé de ce qu'il avait. Mais dans ce projet de loi, on dépossède les gens qui sont propriétaires d'ambulances, qu'elles soient bonnes ou qu'elles soient mauvaises, qu'elles soient en bonne condition ou pas. Ce n'est pas la responsabilité. Je pense qu'il y a un principe de base qui dit que des gens qui sont en affaires... Les propriétaires d'ambulances étaient des gens en affaires, qui donnaient un service, qui possédaient des contrats. Bien, pour aucune raison autre qu'un trouble syndical... Ce n'est pas un trouble d'ambulance. (17 h 40)

Si le projet de loi disait qu'à l'avenir on devra mettre sur pied ou qu'on devra avoir des ambulances de telle catégorie, de tel montant d'argent, qui n'ont pas circulé plus de tant de kilomètres, je pourrais peut-être comprendre cela. Ce n'est pas cela qu'on dit. On dit que les employés à l'avenir vont devenir des employés de l'État et, dans le même souffle, on dit que les propriétaires d'ambulances pourront peut-être les louer si la corporation décide de les louer.

De ce côté-là, le projet de loi pèche gravement par rapport à ce qu'on est habitués dans une société de concurrence et aussi dans une société à caractère économique de libre entreprise. Ce n'est plus vrai pour cela. Pourtant, c'est le gouvernement qui nous a habitués, depuis trois ans, au langage de 'plus de sociétés d'Etat", à moins qu'on ait mal compris. Peut-être que le gouvernement voulait dire par "plus de sociétés d'État" - je pense qu'il faut chercher un peu pour trouver cela - que les sociétés d'État qui allaient bien, on pouvait les remettre à l'entreprise privée et que les sociétés d'État qui allaient plus ou moins bien ou les sociétés tout court qui allaient mal, qui n'étaient pas des sociétés d'État, l'État devrait les reprendre. Donc, les mauvaises, les choses qui vont mal, on les reprend et les choses qui vont bien, on les remet à l'entreprise privée. C'est de même qu'on fait une société juste, équitable, raisonnable, sans discrimination. Je me demande où on va avec cette logique, et où on va aller.

Admettons donc clairement que les problèmes de négociations avec le syndicat, il y a peut-être moyen de les civiliser... J'ai mentionné tout à l'heure le Conseil des services essentiels, mais cela prend le gouvernement qui décide, qui applique ses lois. Je me souviens, et vous l'avez dénoncé aussi, dans le domaine de la santé, c'est

arrivé que des groupes de pression ont mis en danger, à un certain moment, des malades dans les hôpitaux. Je me souviens que le gouvernement précédent avait décidé, sûrement pour de bonnes raisons, et pas du premier coup, pas au premier abord, mais après mûre réflexion, de prendre action. Depuis ce temps, il y a des situations d'urgence dans les hôpitaux, mais elfes ne sont pas causées par les employés. Ces situations d'urgence sont causées parce qu'il y a plus de malades, parce qu'il y a plus d'urgences, parce qu'il y a moins d'argent à la disposition des hôpitaux, mais elles ne sont pas causées par des réactions syndicales. Cette loi que vous aviez dénoncée dans le temps... Pour un gouvernement qui n'est pas reconnu pour ses affinités prosyndicales, il était censé la mettre de côté lorsqu'il prendrait le pouvoir. Après deux ans et demi, il y a un certain président du Conseil du trésor qui a dit: On peut s'accommoder de cette loi-là, ce n'est pas une loi parfaite, mais on peut s'en accommoder parce qu'on peut organiser les rapports des uns envers les autres, et on peut décider rapidement ce qui va se faire.

Je ne vois pas la logique d'un gouvernement qui, pour acheter la paix, décide de succomber aux pressions d'un syndicat. J'ai toujours pensé que la paix, ça se gagne. La paix, ça ne s'achète pas. Si on l'achète, c'est une erreur fondamentale. Il faut toujours se rendre compte qu'après l'achat ou après ce qu'on a voulu acheter, on en paie durement le prix. Cela me rappelle une rencontre que j'ai eue il y a deux ans avec quelqu'un qui connaît bien le gouvernement ou les membres du gouvernement actuel. Après une discussion, je lui rappelais qu'il y avait certains problèmes qui pouvaient se poser à l'Assemblée nationale au point de vue gouvernemental, mais c'était difficile parfois de saisir où allait le gouvernement. Cette personne, croyez-le ou non, qui est de tendance, non seulement de tendance, mais libérale, m'a dit: Vous savez, il n'y pas de changement dans ce gouvernement. C'est un gouvernement de cas par cas. Il n'a pas de politique globale de décision. C'est un gouvernement de cas par cas, un gouvernement de pompiers, un gouvernement qui va au plus pressé. Il a la "hose" à la main et il éteint les feux au fur et à mesure qu'ils s'allument. C'est mauvais pour la population. Pourquoi? Parce qu'on établit des règles qui ne s'étendent pas à l'ensemble de la population. On peut voir l'émission de télévision "Le Québec à la carte", mais on ne peut pas avoir des services à la carte individualisés et personnalisés comme l'actuel ministre délégué à la Famille veut le faire. Je pense que, de ce côté-là, on va avoir des problèmes. C'est évident que, quand on veut régler trop vite, quand on veut que les parties s'entendent, on n'arrive pas avec des solutions nécessairement réfléchies qui vont assurer un meilleur service à la population.

Est-ce que, dans les rapports précédents, on avait décelé que la qualité des services ambulanciers était mauvaise? Je pense que le projet de loi le prévoit et, si c'est vrai, il y a toujours moyen de forcer les gens à suivre des cours pour améliorer leur compétence. De ce côté-là, il n'y a pas nécessairement de problèmes. Il fut un temps où les ambulanciers ne possédaient qu'un cours de premiers soins et cela fonctionnait quand même. Cela ne fonctionnait pas bien; il fallait le refaire, l'améliorer et on a prévu ces questions. On a voulu, par des lois, perfectionner les individus pour qu'ils deviennent de meilleurs ambulanciers et pour donner de meilleurs services à la population. Ce projet de loi ne répond pas à ce critère d'amélioration de services; il répond plutôt à un critère de relations syndicales enployeur-employés et, à ce moment-là, on pose des gestes ou on donne des remèdes qui vont plus loin que les besoins qu'on avait devant nous.

Pour ces raisons-là, on doit affirmer que ce projet de loi est inacceptable parce que, à la longue, le remède proposé va causer des problèmes à l'ensemble de la population du Québec. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président: Je cède maintenant la parole à M. le député de Taillon.

M. Claude Filion

M. Filion: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir d'intervenir sur ce projet de loi pour plusieurs raisons. D'abord, je voudrais rafraîchir un peu la mémoire du ministre. Urgences-santé ne s'est pas bâtie du jour au lendemain. Le ministre, par son projet de foi, traite un peu Urgences-santé comme une espèce de petit jeu Lego qu'on pourrait débâtir, rebâtir, dont on peut changer la direction ou enlever des pièces. Le ministre est en train, en quelque sorte, dans le secteur de la santé et dans le secteur des services essentiels, de jouer avec cela comme avec des structures, comme avec des pions. Dans ce sens-là, je voudrais lui rappeler une expérience particulière que j'ai vécue. Au moment où Urgences-santé a été créée en 1981, si ma mémoire est bonne, elle a reçu son premier appel vers le 22 ou le 23 décembre 1981. À ce moment-là, le ministre n'était pas ministre délégué sur la question des ambulances à Montréal. Je voudrais donc rappeler quelque chose à sa mémoire.

D'abord, avant Urgences-santé, c'était à peu près la pagaille sur le territoire montréalais. Il y avait différentes compagnies privées qui desservaient des coins de territoire, qui faisaient à peu près ce qu'elles voulaient. Il y avait eu une faillite retentissante. Le ministre ne se souvient pas de cela. Évidemment, il ne s'intéressait pas au dossier de la santé à ce moment-là, ni au dossier de l'urgence.

Je voudrais rappeler au ministre que si Urgences-santé a pu, quelques jours avant Noël 1981, ouvrir ses portes et recevoir son premier appel, c'est parce qu'il y a beaucoup de gens qui avaient décidé de travailler ensemble. Cela n'a

pas été facile. C'est encore le cas aujourd'hui, sept ans plus tard. Au mois de juin 1988, Urgences-santé tient à la fois à beaucoup de personnes et son succès dépend de beaucoup de facteurs. Le ministre a carrément oublié cela. D'abord, qu'il ait étatisé, qu'il ait nationalisé contrairement à la philosophie de son parti, je pense que cela a été suffisamment bien démontré par le chef de l'Opposition, par le député de Jonquière qui prenait la parole juste avant moi. (17 h 50)

Je voudrais peut-être lui rappeler que dans une organisation "d'urgentologie" - d'ailleurs, c'est une science qui existe, je suis sûr que le ministre la connaît maintenant - il y a plusieurs intermédiaires. Il y a d'abord les techniciens ambulanciers eux-mêmes, ceux qui font le travail. Je les mets toujours en premier. Ce sont ceux qui vivent en première ligne, dans la rue, dans la maison, le premier contact avec la personne qui a besoin de soins de façon urgente. Donc, les techniciens ambulanciers. Les infirmières qui reçoivent les appels, doivent les décoder rapidement, réagir rapidement, donner un conseil médical au téléphone lorsqu'elles sont en mesure de le faire, réagir rapidement sur le fond, sur le plan médical. Les infirmières qui, encore une fois, agissent elles aussi en première ligne. Les propriétaires. Les entreprises qui sont propriétaires, qui sont regroupées, si ma mémoire est bonne, à l'intérieur d'une sorte d'association, il y a quand même quelques dizaines de propriétaires ou d'entreprises propriétaires d'ambulances.

Une voix: 150.

M. Filion: 150. La population, les gens qui doivent d'abord développer certaines habitudes, qui doivent collaborer avec le système, ne pas utiliser le système pour rien, s'en servir uniquement dans les cas d'urgence, uniquement dans les cas de besoin et non pas parce qu'ils ont la grippe depuis trois jours et qu'ils appellent à Urgences-santé pour savoir quoi faire. La population, c'est très important. Il y a aussi les administrateurs, les cadres, ceux qui travaillent dans cette boîte.

Dans les quelques minutes qui me restent, M. le Président, voyons, pour ces six catégories de personnes vitales qui font fonctionner Urgences-santé. Parce que le ministre, dans son bureau, qu'on se comprenne, Urgences-santé, il joue avec cela comme avec un jeu Lego, il bâtit des beaux "organigrouilles" - des organigrammes, j'appelle cela des "organigrouilles" - il choisit un p.-d.g, le nomme avant même que l'organisme existe, avant même que la loi soit adoptée, contrairement à la décence la plus fondamentale d'ailleurs qui voudrait au moins qu'on attende que la volonté de l'Assemblée nationale s'exprime. Bref, il s'amuse avec cela en oubliant les blocs fondamentaux. Qu'est-ce qu'il fait d'abord avec les techniciens ambulanciers? Évidemment, ils ont crié victoire, c'est la gloire totale, pour employer leur expression. Le ministre - et j'emploie peut-être l'expression de Jean Francoeur dans Le Devoir qui dit sans que ce soit nécessaire d'élaborer: "Reddition humiliante". C'est la fin de son editorial du 19 mai, et je le cite: De la part du ministre délégué à la Famille, à la Santé et aux Services sociaux, qui en est à sa première initiative importante, c'est un geste humiliant dont la seule rationalité tient dans le proverbe qui dit: Qui veut noyer son chien dit qu'il a la rage." Je pense que la démonstration du Devoir est éclatante. Je n'ai pas l'intention d'y revenir en ce qui concerne les techniciens ambulanciers.

Deuxième groupe, les infirmières. Qu'est-ce que le ministre, à moins que, dans ses amendements, on apprenne des choses, fait avec cette catégorie de personnes essentielles au fonctionnement d'Urgences-santé qui sont les infirmières qui ont dû recourir aux médias pour alerter l'opinion publique sur leur statut plus ou moins alambiqué ou, je devrais dire, que veut éviter le ministre. Les infirmières d'Urgences-santé ont peur de disparaître avec la réorganisation du service. Comment un ministre - qui n'a quand même pas la responsabilité de tout le gouvernement - délégué à la Santé et aux Services sociaux peut-il faire une réforme en oubliant de rassurer une partie aussi importante de la main-d'oeuvre qui s'appelle les infirmières? C'est carrément inadmissible.

Troisième catégorie, les propriétaires d'entreprises. Là, on verra encore une fois, avec les amendements... Là, on les exproprie sans les indemniser. Alors, messieurs, votre ferraille... On les traite, d'ailleurs, comme s'ils étaient de la ferraille. Messieurs, mesdames, merci beaucoup pour ce que vous avez fait dans le passé, en oubliant la contribution de chacune de ces catégories à la mise sur pied et au fonctionnement d'Urgences-santé depuis sept ans, en particulier, des propriétaires ambulanciers qui ont leurs torts, ils ont leurs problèmes, lis ont tiré la couverte sur leur bord, bien sûr. C'est normal. Ils l'admettent d'ailleurs, mais ils l'ont fait démocratiquement. Là, le ministre les tasse du revers de la main: Merci beaucoup pour tout ce que vous avez fait. Nous autres maintenant, on nationalise, on étatise. Emmenez-nous ce que vous avez, ce que vous avez bâti. On profite de votre expertise. Bonjour la visite. C'est le troisième groupe.

L'autre groupe, les cadres, les administrateurs. On n'a pas besoin d'avoir fait ce que j'ai fait, c'est-à-dire que j'ai eu la chance de m'asseoir avec plusieurs d'entre eux récemment, pour connaître leur état de frustration, d'anxiété, d'incertitude et leur sentiment de profonde injustice que les cadres et les administrateurs d'Urgences-santé éprouvent, alors que le ministre a décidé envers et contre tous de nommer un p.-d.g. à Urgences-santé sans les consulter, sans s'enquérir de ce qu'eux voyaient... Parce que, quand même, ils font fonctionner la boîte depuis

sept ans. Bien avant que le ministre ne s'intéresse même aux questions de transport ambulancier dans la région de Montréal, ces gens-là étaient là. Dans bien des cas, ces cadres sont là depuis le premier appel, parce qu'ils étaient présents au premier appel. Je parle de certains médecins en particulier, je pense à certains cadres qui étaient là lorsque le premier appel est entré à Urgences-santé, bien avant que cette trente-troisième Législature existe, bien avant que le ministre prête serment. On ne peut pas écarter ce bagage de connaissances humaines du revers de la main en disant que c'est secondaire.

Autre groupe, la population. À l'époque, Urgences-santé avait été mise sur pied en mettant la population dans le coup. Mais le ministre, d'abord, n'a pas senti le besoin de la consulter. Cela aurait été simple, je pense, de consulter la population. Dans le projet de loi, j'ai surveillé pour voir quelle implication, quel était le degré de participation que le ministre donnait à la population. Je pense qu'il aurait pu se forcer un peu pour faire participer le monde à cet organisme vital que constitue Urgences-santé.

Bref, puisqu'il ne me reste que trois ou quatre minutes, je dis au ministre qu'on ne peut pas considérer dans un secteur aussi vital, dans ce service essentiel que constitue le transport ambulancier - c'est un transport d'urgence dans 90 % des cas - on ne peut pas considérer le vrai monde comme des canards sauvages, ni comme des blocs, ni comme des morceaux du jeu Lego. Le monde, dans ce secteur, est extrêmement important. Entre 1981 et 1988, si le ministre avait jasé un peu plus longtemps avec les gens, il aurait su qu'il y a eu des conflits, non seulement les conflits de travail que le ministre veut chercher à éviter dans les douze prochains mois, mais des conflits importants entre ces groupes, qui se sont résorbés à force de communications et de dialogues. Le rôle du ministre aurait été de faire en sorte de garder ensemble tous ces intervenants du milieu ambulancier, du milieu de l'urgence à Montréal.

Possiblement, d'ailleurs, que son rôle a été d'ouvrir à cette nouvelle science que constituent les sciences d'urgence ou l'urgentologie, mais non d'arriver et d'avoir le réflexe d'acheter la paix pour les douze prochains mois. Il n'y a pas de pire chose à faire dans ce secteur aussi essentiel que celui de la santé. Je ne souhaite à personne d'avoir à supporter les conséquences d'un travail aussi mal bâclé que celui que nous présente le ministre dans son projet de loi 34, où la qualité des soins... J'aurais aimé avoir plus de temps, mais on y reviendra. Je sais qu'on aura d'autres occasions pour discourir sur le projet de loi 34, peut-être en commission parlementaire ou ailleurs, peut-être à l'occasion de motions ou autrement.

Je voudrais demander au ministre, en terminant, où, dans son projet de loi, est la préoccupation pour la qualité des services et des soins? Où est le service d'évaluation, de contrôle de la qualité des soins? C'est là-dessus qu'on aurait aimé que le ministre se penche avec un petit peu plus de vigueur et un peu moins de complaisance à l'égard de certains groupes. En ce sens-là, M. le Président, je n'ai pas repris l'ensemble, j'ai voulu insister sur un point fondamental, qui est la nécessité de regrouper tous les intervenants dans ce milieu et de faire les choses au grand jour, en pleine collaboration et non pas d'agir à la sauvette par un projet de loi qui, encore une fois, n'a été conçu que pour un des groupes.

Le jeu de Lego du ministre est mal bâti et il ne tiendra pas longtemps. Si la population ne doit pas en supporter les conséquences, j'invite le ministre à remiser son jeu de Lego et à considérer le transport ambulancier à Montréal comme étant un secteur extrêmement fragile où on a besoin de rassembler et non pas de régler cela comme des bebelles. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président: Alors, M. le député de Sainte-Anne.

M. Polak: M. le Président, je demande qu'on suspende jusqu'à 20 heures.

Le Vice-Président: Très bien. Puisque, en fait, nous arrivons à 18 heures, l'Assemblée va maintenant suspendre ses travaux qui reprendront à 20 heures.

(Suspension de la séance à 18 h 1 ) (Reprise à 20 h 5)

La Vice-Présidente: À l'ordre, s'il vous plaît!

Veuillez regagner vos sièges.

Vous pouvez vous asseoir.

Nous allons reprendre le débat sur l'adoption du principe du projet de loi 34, Loi modifiant la Loi sur les services de santé et les services sociaux et d'autres dispositions législatives. Là-dessus, je suis prête à reconnaître le premier intervenant, M. le député de Sainte-Anne.

M. Maximilien Polak

M. Polak: Mme la Présidente, je suis content de parler devant une Assemblée vraiment remplie de députés ministériels et de péquistes, et je les salue. On parle du projet de loi 34 qui a vraiment pour but de proposer de nouvelles règles. Il existe déjà des règles, mais nous proposons de nouvelles règles en matière de transport ambulancier au Québec. Je n'ai pas besoin de vous dire qu'il n'y a pas un Québécois ou une Québécoise qui n'est pas touché par ce qu'on appelle le problème du transport ambulan-

cier.

Nous sommes ici depuis ce matin et nous allons demeurer ici jusque tard ce soir, et quand le ministre a parlé, ce matin, j'ai pris rapidement quelques notes. Le ministre, qui possède des statistiques que nous, simples députés, n'avons pas toujours, nous a dit que 25 % des transports en ambulance concernent des gens qui ont des problèmes cardiaques et des difficultés respiratoires. Ce sont des gens âgés en moyenne de 63 ans. Je n'en suis pas encore là, mais j'approche. De plus, 25 % des transports ambulanciers concernent des cas de fractures ou d'accidents de la route. C'est très important. Âge moyen, 48 ans. En d'autres termes, 50 % de toutes les personnes transportées par les ambulances se trouvent dans ces catégories: problèmes cardiaques ou fractures et accidents de la route.

Mme la Présidente, j'ai été ici tout l'avant-midi et tout l'après-midi, et j'ai écouté mes collègues péquistes parler de ce projet de loi. Je me disais: Que cherchent-ils? Veulent-ils bloquer le projet de loi, sont-ils là pour l'appuyer, sont-ils contre? Finalement, j'en suis arrivé à la conclusion qu'ils veulent dire: Vous faites un bon travail, mais nous ne sommes pas totalement d'accord avec cela. Quant à nous, nous sommes d'accord avec l'approche de notre ministre - il est ici, il est justement à ma gauche - parce qu'il dit: On veut régler une fois pour toutes, partout dans la province de Québec, le problème des ambulances, parce que nous voulons donner un service. Nous pensons d'abord aux bénéficiaires. La personne qui, à un moment donné, aurait besoin de ce service d'ambulanciers va avoir un service, rapide, compétent et efficace. Et, Mme la Présidente, ce n'est pas pour rien que le ministre est arrivé avec ce projet de loi là. Hier soir, dans mon petit appartement, j'ai fait un peu de recherche. Savez-vous qu'on pense souvent qu'un député vit bien à Québec, au mois de juin. On travaille. On prépare nos projets de loi. J'ai regardé cela parce que je voulais intervenir. D'ailleurs, le député de Lévis est venu ici juste pour m'écouter. M. le député de Lévis, je vous remercie pour cette attention. Et là, on dit: On a étudié cela, voici. J'ai noté dans un article du journal Le Devoir du 8 avril. Voici ce qu'ils disent: "Les ambulances risquent d'être introuvables après le 24 avril." Donc, le 8 avril, Le Devoir dit qu'à partir du 24 avril, les ambulances risquent d'être introuvables. Mme la Présidente, comment pensez-vous que vont réagir les personnes âgées qui sont chez elles et qui, en lisant le journal, trouvent cela? Elles vont évidemment s'inquiéter. Elles vont avoir peur. C'est un peu comme une menace d'une grève dans un hôpital. C'est bien beau de dire que cela ne veut rien dire mais il y a toute une catégorie de personnes affectées qui disent: Je m'inquiète de ce qui arrive.

Donc, c'était l'article dans Le Devoir. Mais Le Devoir a dit de cet article, je vous cite: "Six des sept propriétaires...." Parce que, Mme la Présidente, il faut bien comprendre que j'interviens ce soir comme député de la région de Montréal. Je comprends qu'il y a aussi le problème des services ambulanciers en régions. Je ne suis pas spécialiste là-dedans. On a d'autres députés qui sont intéressés. Évidemment que le ministre connaît tout, parce qu'il ne connaît pas seulement la région de Montréal mais le restant de la province. Il couvre le tout. Je voulais juste parler de la région de Montréal. Et quand j'ai lu cet article-là, qui dit que six des sept propriétaires de compagnies d'ambulances menacent - ça ce sont les compagnies qui font le transport des pauvres victimes - de priver la population de leurs services à compter du 25 avril. Le 25 avril, c'était il y a deux mois seulement.

Ensuite, on voit dans Le Devoir du 9 avril, quelques jours plus tard: "Des ambulances qui tombent en panne." Malheureusement, Mme la Présidente, je n'ai que 20 minutes. Le ministre a une heure. Le chef de l'Opposition ou celui qui intervient pour l'Opposition a une heure, mais nous, comme simples députés, nous avons 20 minutes et c'est comme cela que la répartition du travail se fait. Mais savez-vous, j'ai lu cet article-là. C'est une infirmière à l'urgence du centre hospitalier du Sacré-Coeur. Elle a écrit un article dans Le Devoir du 9 avril. Elle s'appelle Éliane Danis. Je félicite Éliane Danis. Lisez l'article, Mme la Présidente. Ce n'est pas possible, c'est un cauchemar, ce qui peut arriver avec un service ambulancier qui ne fonctionne pas bien parce que l'équipement n'était pas là comme on le voulait. Elle n'attaque jamais la compétence du personnel. Elle parle plutôt du matériel. Elle parle plutôt de l'ambulance elle-même. Elle a écrit un article dans Le Devoir du 9 avril. C'est l'infirmière qui parle: J'ai vu le système actuel en escortant du centre hospitalier du Sacré-Coeur de Montréal. Elle est partie de Montréal. Elle est embarquée dans une ambulance jusqu'au centre hospitalier Saint-Sauveur de Val-d'Or.

Montréal-Val-d'Or, ce n'est pas la fin du monde en distance, mais vous voyez le cauchemar, ce qui est arrivé. Une patiente trachéoto-misée sur respirateur. Donc, il y avait des gens qui accompagnaient cette victime. Elle était parmi ceux-là. En tout cas, elle a expliqué l'histoire. L'ambulance ne fonctionnait pas. À un moment donné, il n'y avait plus d'essence, le moteur ne fonctionnait plus. En tout cas, réparation dans un garage. Savez-vous quand ils sont arrivés au centre hospitalier de Saint-Sauveur? À 5 h 30 le matin. Ils sont partis l'après-midi à 15 h 30. Il faut lire cet article pour comprendre qu'il y a des ambulances qui tombent en panne. Quand le ministre nous donne une réponse en disant: J'exige et je suggère d'avoir... on n'aurait plus ce problème. On n'aurait plus ce problème du point de vue de l'efficacité, du point de vue du matériel qui fonctionne bien. Vous voyez bien, quand vous lisez cet article, qu'il est à peu près temps d'apporter une solution.

Mme la Présidente, je continue. On est maintenant le 24 avril. Il y a un article dans La Presse. Je ne cite pas toujours Le Devoir. Cette fois-ci, c'est La Presse, qui rapporte: "Montréal menacée de perdre ses ambulances à minuit." C'est fort, savez-vous? La population lit cela et je ne parle pas seulement des personnes âgées, mais aussi des jeunes. Les personnes s'inquiètent parce qu'on ne sait jamais comment cela frappe. C'est arrivé même chez des députés. Il y a eu, à un moment donné, des accidents ou des choses imprévues. Quelqu'un était bien heureux et bien content d'avoir une ambulance et du personnel compétent pour prendre soin de lui. Donc, le 24 avril, on dit: "Montréal menacée de perdre ses ambulances à minuit." Je cite cet article de La Presse: "Montréal risque d'être privée d'ambulances dès minuit aujourd'hui - c'est le 24 avril 1988 - si une entente n'intervient pas d'ici là entre le gouvernement et la compagnie de transport ambulancier. Du côté syndical, le principal porte-parole, M. Mario Cotton a soutenu que les 800 préposés offriront quand même le service, même si cela a pour conséquence de ne pas retourner le véhicule au propriétaire."

Donc les ambulanciers avaient un conflit de travail très grave et ils ont dit: Nous autres, on va continuer à rendre service. Les propriétaires ont demandé: Comment pourrez-vous faire cela? Les ambulances nous appartiennent. Ils ont dit: On s'en fout; on veut bien servir la population. Je cite l'article: Un de ces derniers, un propriétaire, a fait savoir qu'il n'hésiterait pas à porter plainte pour vol à la police. Pouvez-vous imaginer, Mme la Présidente, la relation de travail entre, d'un côté, l'employeur et, de l'autre, les employés, quand on voit cet article. Le ministre dit: II est à peu près temps qu'on mette fin à cela et qu'on pense, non pas au consommateur, parce qu'un service d'ambulances, savez-vous, ce n'est pas destiné à un consommateur, mais à un bénéficiaire. C'est un bénéficiaire, une personne qui est à la maison ou qui subit un accident sur la route et il est important qu'un personnel rapide, efficace et compétent en prenne soin. C'est justement le but de ce projet de loi. Mme la Présidente, ce n'est vraiment pas , mon domaine, je ne suis pas spécialisé là-dedans, mais quand j'ai rencontré le ministre lors de la préparation de ce projet de loi, je suis devenu vraiment enthousiaste pour ce projet et je lui ai dit: Enfin, quelqu'un va régler ce problème, pas juste à Montréal, mais dans toute la province de Québec.

Mme la Présidente, à un moment donné on reçoit les communiqués de presse - l'Opposition aussi, d'ailleurs - et, dans ce communiqué de presse... À Montréal, nous avons un organisme qui s'appelle Urgences-santé. Des gens me disent: Maximilien, pourquoi est-ce nécessaire de changer Urgences-santé? Cela va bien. On a des problèmes. On sait qu'il y a des problèmes de conflits de travail entre employeur et employés, mais, généralement, ce n'est pas trop pire. Toutefois, le ministre dit: Savez-vous, on veut régler ce problème une fois pour toutes parce qu'on a un très grand problème, un problème de transport interétablissements. Vous savez très bien ce qui arrive, Mme la Présidente. Une ambulance transporte un patient ou une patiente à l'hôpital. L'hôpital dit: C'est rempli, il n'y a pas de place. La pauvre victime... Que fait-on? Est-ce qu'on va la retourner à un autre hôpital? On perd du temps à décider. De temps en temps, il y a aussi des conflits juridictionnels entre les hôpitaux. Certains hôpitaux disent: On a bien fait notre devoir, pas de problèmes; on a tant de patients et on couvre tout. Il n'y a plus d'admission de patients, mais on s'occupe de ceux qui sont entrés. L'autre hôpital dit: Nous sommes ouverts pour en recevoir d'autres. Que va faire l'ambulancier à ce moment-là? Je me rappelle très bien que j'ai moi-même eu un cas dans mon comté, Mme la Présidente, au mois de décembre où une femme a été transportée dans un hôpital. À l'hôpital on a dit: Voici, que voulez-vous? C'est juste avant Noël, il y a moins d'infirmières, moins de médecins, etc., on n'a pas de place pour cette dame. Nous ne sommes pas capables de la recevoir. Voulez-vous, s'il vous plaît, la transporter ailleurs? Ils étaient obligés de la transporter dans un autre centre hospitalier, beaucoup plus loin de l'endroit où la victime se trouvait. Évidemment, cela crée des problèmes parce que très souvent une perte de temps de dix, quinze ou vingt minutes peut signifier beaucoup pour la vie d'une personne.

Donc, le ministre a dit: Nous allons trouver une solution en présentant justement ce projet de loi 34 qui n'est pas du tout une menace pour les propriétaires. Par ce projet de loi, on n'a pas l'intention de dire aux propriétaires: On va vous enlever votre commerce et nous allons étatiser cela. Pas du tout. On n'a pas du tout non plus l'intention de dire aux syndicats: On va vous étatiser, vous êtes maintenant employés de l'État. Ce que le ministre a fait, il a trouvé ce qu'on appelle le chemin du juste milieu. Il a dit aux employés qui étaient là, aux ambulanciers: Voici. Vous voulez faire un bon travail, nous sommes prêts à vous appuyer. Pourquoi? Parce que nous ne pensons pas aux bénéficiaires, on pense à la personne qui a besoin de services et nous voulons le meilleur service, le plus rapide et le plus efficace.

Par ce projet de loi, on a donc donné une occasion à ces gens - je parle toujours de Montréal - d'Urgences-santé de joindre le nouvel organisme qui sera créé sans perdre d'ancienneté, de séniorité, de salaire, etc., et pour leur donner plus de chance. Mme la Présidente, regardez donc la réaction des syndicats. La réaction était très favorable. Ils ont dit: M. le ministre, vous n'êtes pas allé assez loin, vous auriez dû nous étatiser plus. Mais nous avons dit non. Pour nous, ce n'est pas une question d'étatiser. Pour nous, c'est une question de rendre un bon

service parce que nous ne pensons pas aux patrons, nous ne pensons pas aux syndicats, nous pensons aux victimes. Nous pensons à ceux qui ont besoin de ces services.

Mme la Présidente, dans la Gazette, très récemment, après que le ministre ait déposé son projet de loi, il y avait un article. C'est important, il faut que je parle anglais aussi parce que je prends toujours la peine de dire... Dans mon comté, les gens me disent: Savez-vous, Maxi-milien, quand il s'agit d'un projet important, expliquez donc cela de temps en temps en anglais, dites quelques mots, une couple d'expressions. C'est important pour nous de comprendre de quoi il s'agit. Et il s'agit d'un projet important: les ambulances, le transport ambulancier, questions de vie. Tout le monde est d'accord avec cela. (20 h 20)

Qu'est-ce que la Gazette a dit? 'Two cheers for reform". M. le ministre, on vous félicite. Pas une fois, deux fois. 'Two cheers for reform". Ils disent: 'The public has reason to welcome the Bourassa government's changes to Quebec's ambulance system". On dit: Le gouvernement Bourassa, mais le ministre qui est ici s'appelle M. Dutil. Mme la Présidente, ils disent dans la Gazette: "For example, improved coordination and communications should reduce the tendency of ambulances in Montreal to deliver too many patients to one hospital while the neighbour hospital goes unused". En d'autres termes, au lieu d'envoyer tout le monde à l'hôpital, nous, avec le nouveau projet de loi présenté, on va diviser cela, on va être certain où on va être maintenant. Tout le monde va être d'accord avec cela, même nos amis péquistes.

J'ai entendu, cet après-midi, leurs critiques. C'est assez raisonnable, parce qu'ils sont peut-être un peu mal pris. Il y en a qui disent: Mais vous supportez trop. Peut-être que du point de vue du syndicat, ce sont vos amis. Je dis qu'on a un projet de loi au-dessus du parti. Oublions notre allégeance politique. Ce n'est pas la question qu'ils sont avec le syndicat et que nous sommes avec le patronat. Pas du tout. Nous sommes tous pour la population, pour ceux qui ont besoin de ce service. J'étais content cet après-midi d'entendre quelques députés péquistes parler parce que tout de même sur ce point, ils sont très responsables. Ils ont dit: M. le ministre, nous sommes, en principe, pas mal d'accord avec ce que vous dites, sauf que sur quelques modalités, on aimerait avoir des amendements. Je ne sais pas quel amendement sera apporté, mais je peux vous dire une chose, Mme la Présidente, je pense que le ministre va faire de petits amendements ici et là justement pour satisfaire tout le monde. Il s'agit d'un projet, - il ne faut jamais oublier cela, - au-dessus de la partisanerie politique. S'il vous plaît, arrêtons donc de faire de la politique partisane sur le dos de ceux qui sont victimes d'un accident d'automobile dans la rue. Cela n'est pas l'intention de personne.

Je continue de citer la Gazette qui dit: "Ambulances themselves are to be upgraded. Le ministre dit: Les ambulances, cela va très bien, sauf qu'il dit: Je veux améliorer le service. Je vais améliorer la compétence du personnel. "The ambulance technicians union". Le syndicat des techniciens dit: 'The vehicles "hygiene" mechanical fittness and on-board equipment lack far behing North American norms." Donc, ce qu'on dit: II y a du travail à faire au point de vue de la compétence, au point de vue des normes. J'ai donné le cas tout à l'heure de l'infirmière qui est allé à Val-d'Or de Montréal, justement pour montrer qu'il y a du travail à faire. Mais il faut être prudent tout de même concernant le travail déjà fait parce que le ministre n'a jamais dit: Je ne suis pas content que le personnel ne soit pas compétent. Ce n'est pas vrai.

Ce soir, à 18 heures, parce que je savais que je parlerais à 20 heures, j'ai appelé à mon bureau de comté, où il y a un monsieur avec qui je m'entends très bien, qui a un certain âge, qui fait des petits messages pour moi. À un moment donné, il est tombé par terre. C'était il y a à peu près cinq semaines. Il était bleu, gris, rouge, de toutes les couleurs politiques, non politiques, comme vous voulez. On ne savait pas quoi faire. On a appelé tout de suite Urgences-santé. Mme la Présidente, Urgences-santé est arrivée en deux ou trois minutes. Ce monsieur m'a dit ce soir: Maximilien, quand tu parleras ce soir, répète donc mon cas. J'ai dit: Alex - parce que je donne juste le premier nom - je ne mentionnerai pas ton dernier nom parce que c'est une affaire personnelle. Il m'a dit: Parlez donc de mon cas, parce que ce sont des ambulanciers d'Urgences-santé qui m'ont sauvé la vie. Il s'agissait d'une équipe très compétente. Ils sont venus là, en tout cas, ils ont travaillé sur lui... J'avais très peur de regarder cela, cela me faisait un peu peur. Quand il est sorti de là, il a dit: J'avais commencé un peu à rire en entrant à l'hôpital. Il est encore là maintenant, parce que, en fait, Mme la Présidente, il m'écoute ce soir, parce que je lui ai dit: Je te promets de parler de toi. Le ministre n'a jamais dit qu'il n'y a pas de compétence générale, il a simplement dit: Je vais hausser la compétence de ces gens-là, parce qu'il y en a de très bons là-dedans et nous, on va très bien là-dessus.

Mme la Présidente, vous me montrez déjà avec le doigt... Oui, une minute, Mme la Présidente, je comprends très bien. Rapidement, pour finir, j'étais impressionné quand le ministre a dit: Nous, on va s'occuper de la formation des techniciens, parce que cela va passer maintenant à 825 heures. Au lieu de donner 150 heures en province et 280 à Montréal, nous - c'est le ministre qui parle - on va s'occuper d'augmenter le degré de compétence, parce que... Je pourrais citer, Mme la Présidente - j'ai de la documentation devant moi - des accidentés d'automobile avec la colonne vertébrale cassée... Savez-vous

que, si un gars compétent rencontre cette personne - le ministre nous a expliqué cela avec statistiques - il peut sauver, non seulement sa vie, mais il peut éviter qu'il devienne un qua-draplégique. C'est vraiment une matière fascinante.

J'aurais bien aimé continuer, mais il faut que je laisse le terrain à mes amis péquistes. J'espère une chose: qu'on oublie la politique partisane et que, tous ensemble, on appuie ce projet pour le bénéfice de la population du Québec. Merci beaucoup.

Des voix: Bravo!

La Vice-Présidente: Merci, M. le député de Sainte-Anne. M. le député d'Abitibi-Ouest et leader de l'Opposition.

M. François Gendron

M. Gendron: Merci, Mme la Présidente. Cela me fait toujours plaisir de parler après l'éminent député de Sainte-Anne, surtout lorsqu'il prend le ton qu'il a pris: Oublions la politique, oublions nos points de vue partisans, occupons-nous de la population, occupons-nous - autrement dit, même s'il n'en a jamais parlé durant 20 minutes - du principe du projet de loi, parce que c'est ce qu'on est censé faire. En deuxième lecture, on est censé porter un jugement sur le principe d'un projet de loi.

Qu'en est-il, Mme la Présidente, du principe du projet de loi? Très clairement, le principe de ce projet de loi, c'est la création d'une nouvelle corporation qui n'est rien d'autre qu'une étatisation, mais une étatisation qui n'est pas franche, une étatisation un peu hypocrite, injustifiée. On n'a pas le courage d'appeler les choses par leur nom et de dire: Dans le présent cas, nous, comme gouvernement, avons décidé d'étatiser un service ambulancier pour l'ensemble des contribuables québécois. En particulier, ce que j'ai trouvé drôle dans l'intervention du député de Sainte-Anne, c'est lorsqu'il a dit: D'abord, on a un ministre qui sait tout - il a dit cela une fois. Il a dit: Le ministre sait tout du Québec, il a une bonne vision du Québec. C'est rare qu'un ministre peut tout savoir! Deuxièmement, il a trouvé, dit-il, un juste milieu.

Une voix: Pas Dutil.

M. Gendron: Non, pas Dutil, il a trouvé, dit-il, un juste milieu! Il faut le faire, Mme la Présidente. J'ai toujours pensé - cela n'est pas de la partisanerie, M. le député de Sainte-Anne - qu'un législateur, lorsqu'il fait un projet de loi, normalement, il le fait pour des citoyens et des citoyennes et, également, en touchant des gens qui vont vivre soit avec ses avantages, soit avec ses inconvénients. Comment se fait-il que, dans ce projet-là, la plupart des tiers un peu plus neutres et un peu plus objectifs que nous, c'est-à-dire moins touchés par la partisanerie politique ou ce débat de confrontation... Qu'ont-ils dit de ce projet de loi? Ils ont dit exactement ce qu'il en est. Là, rapidement, je vais faire le tour des titres: Reddition humiliante, étatisation injustifiée, projet de loi qui n'a pas un brin de bon sens, qui n'a pas d'allure - cela n'a pas de bon sens - devoir mal fait, élaboration d'une politique de santé trop importante pour se faire sous le coup d'un ultimatum, soit-il patronal ou syndical. C'était plein, c'était partout. Je m'excuse, ce ne sont plus des partisans libéraux ou ceux du Parti québécois, ce sont des tiers qui disent: où s'en vont-ils avec leurs skis? N'oubliez pas que ces gens-là - c'est pour cela que je qualifiais, tantôt, ce projet d'hypocrite - n'ont pas la franchise de débattre de vraies questions de fond. Ce sont les "priva-tisateurs" par excellence; ce sont des gens qui ont comme volonté de rapetisser le plus possible le rôle de l'État. S'il y avait moyen, demain matin, que le Québec ressemble au plus petit coffre d'outils imaginable-Ces gens-là ont vanté partout les mérites de l'entreprise privée. En passant, je n'ai rien contre cela, sauf que nous, nous avions au moins un discours un peu plus "juste milieu". On dit que dans certains cas, dans certaines situations, l'État québécois doit justement se jumeler aux initiatives de l'entreprise privée pour être en mesure de réaliser des choses que seule, parfois, l'entreprise privée n'est pas en mesure de réaliser. Je ne veux pas changer de discours, mais je donne seulement un exemple. Chez nous, il y a bien des gens qui sont pour l'entreprise privée "à mort" et je les approuve, sauf qu'il n'y a personne qui ne reconnaît pas qu'à un certain moment donné, si on n'avait pas eu Rexfor, il y a certaines entreprises qui n'auraient pas passé au travers. Cela est clair et logique. Rexfor, que je sache, c'est une entreprise d'État. C'est ce qu'on appelle la solution d'une économie plus mixte, moins pure, moins noble parce que les principes de la noblesse sont toujours théoriques. (20 h 30)

Dans ce sens-là, si ces gens-là avaient voulu franchement nous dire: Bien nous, on a viré capot; on a changé complètement notre point de vue sur le service ambulancier dans la région métropolitaine et nous pensons, en conscience, que c'est bon, les privatisations étatiques - peu importent les noms - ou une nationalisation... Dans ce cas-là, pourquoi je prétends que c'est un projet de loi hypocrite? Parce que c'est une nationalisation, mais ils n'ont pas le courage d'indemniser ceux qu'ils nationalisent. Des nationalisations, on en a faites des heureuses et des malheureuses, mais on a au moins assumé nos responsabilités en termes de coûts. On ne peut pas faire une nationalisation sans avoir au moins assez de conscience collective, de conscience tout court pour savoir qu'il y a des coûts. Quand on décide d'étatiser ou de

nationaliser, il faut compenser les perdants, il faut compenser ceux qui vont en éprouver des difficultés.

J'entendais également le député de Sainte-Anne: Ces gens-là sont extraordinairement compétents. Je n'ai jamais nié cela, je n'ai jamais pensé que les employés d'Urgences-santé étaient des incompétents, et je n'ai jamais entendu cela de la part d'aucun membre de ma formation politique. Ce n'est pas cela, le problème. La meilleure façon de faire un discours quand on n'a rien à dire sur le principe, c'est de parler d'autre chose. Et c'est ce qui est arrivé avec le député de Sainte-Anne, il ne nous a pas dit grand-chose sur le projet de loi. Il nous a dit que, pour eux, c'était le bien commun, la population, la santé et les personnes. On dit la même chose. Que je sache, Urgences-santé, qui existait dans la région métropolitaine, je ne dis pas qu'il n'y avait pas de lacune, je n'ai jamais dit cela. C'est un service pour offrir le plus rapidement possible ce qu'on doit nécessairement offrir à une société responsable qui veut s'assurer que les citoyens et les citoyennes du Québec qui, malheureusement, auront à un moment donné, à utiliser certains services de cette nature, puissent avoir l'assurance qu'ils ont, dans le monde moderne de 1988, les outils nécessaires pour qu'on puisse rapidement leur offrir les services requis.

Dans ce projet de loi, je pense que le chef de l'Opposition officielle avait raison, en tout cas dans une phrase - en ce qui me concerne, malheureusement, je n'ai pas pu entendre l'ensemble de son discours - alors qu'il disait ceci: "Encore une réforme fondée sur une série de contradictions, n'accordant qu'un changement de structure, une proposition qu'il nous est carrément impossible d'appuyer dans sa forme actuelle." Or, même si je me fais dire par un autre membre de ce gouvernement que le principe d'un projet de loi, cela n'a pas d'importance... Juste une parenthèse, regardez ce qui se passe concernant la commission qui va commencer ses travaux dans 20 ou 25 minutes. Tout le monde est venu dire au ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu que son projet de loi 31 concernant la construction n'aurait pas les effets souhaités pour contrer le travail au noir. C'est unanime, sauf un. Pensez-vous qu'il a attendu d'avoir un retour des personnes concernées sur la compréhension qu'ils ont de ses amendements? Bien non, dès l'adoption du principe, il nous convoquait en commission pour étudier le projet de loi article par article. Je peux vous le dire, Mme la Présidente, je reconnais que le projet qu'on est en train de discuter en commission parlementaire, ce n'est pas du tout le même dont on m'a demandé de débattre le principe en Chambre. Que voulez-vous que je fasse? Quand je fais un discours sur le principe du projet de loi, je suis obligé de parler du projet de loi qu'on connaît, et non pas de celui qu'ils ont en tête, s'il en reste quelque chose après des changements majeurs.

Dans ce sens, le projet de loi que nous avons, c'est clair, est un projet de loi plein de trous, qui nous oblige à nous interroger comme ce n'est pas possible sur l'honnêteté de ces gens par rapport à des choix de société et en particulier sur un virage sans précédent, soit celui de leur discours politique, à savoir qu'ils préfèrent que ce soit l'entreprise privée qui assume la presque totalité de l'économie, des services. Même le premier ministre du Québec... Je cite Pierre Vennat: "Le gouvernement libéral, qui dirige les destinées du Québec, a quelquefois de curieuses façons de procéder." Ce n'est pas moi qui parle, même si je partage cela à 200 %. "D'un côté, son chef, M. Bourassa, déclare à la Chambre de commerce de Québec qu'il ne dit pas non à des expériences pilotes de privatisation en matière de santé. De l'autre, son ministre délégué à la Famille, à la Santé et aux Services sociaux présente un projet de loi qui consiste, en pratique, à nationaliser le transport ambulancier dans la région métropolitaine de Montréal." Et il ajoutait, parce que je ne veux pas le citer au complet, tout le monde l'a lu, j'espère: "Qu'on décide de nationaliser une entreprise privée ou de privatiser un service de l'État pour résoudre un problème de relations du travail est totalement inacceptable, totalement irréfléchi, totalement irresponsable. C'est de cela qu'on doit parler lorsqu'on discute de ce projet-là. Et il ajoutait, en conclusion, pour celui-là: "L'élaboration d'une politique de santé est trop importante pour se faire sous le coup d'un ultimatum de qui que ce soit, d'où qu'il provienne, soit-il patronal ou syndical." Ce n'est pas le discours du député de Sainte-Anne. Ce n'est pas la belle théorie: Nous, on aime les citoyens. On les trouve beaux, gentils et on veut leur offrir des services. Ils avaient un service. Le fond, c'est qu'on nationalise.

Vous conviendrez que je ne suis pas le plus touché par cela dans la région métropolitaine. Je la connais la région métropolitaine parce que nous, qui venons de loin, nous avons l'avantage d'aller en ville de temps en temps. Ce n'est pas nécessairement le cas de ceux de la ville. Nous, nous allons en ville. Nous sommes obligés. Nous sommes habitués et cela ne nous dérange pas d'aller en ville.

Une voix: C'est vrai.

M. Gendron: Mais ce n'est pas parce que je ne suis pas un député de la région métropolitaine que je ne sais pas exactement ce qu'est ce projet de loi. Comment se fait-il que, même une fin de semaine, après une semaine chargée, je n'étais pas aussitôt rendu dans la région, qu'une des premières demandes, les gens qui offrent le service chez nous, Ambulance du Nord inc., Abitibi-Témiscamingue, un service qui, jusqu'à nouvel ordre, n'est sûrement pas le paradis mais est un service de qualité... C'est un service

intéressant. C'est un service professionnel. Et quand les représentants de Ambulance du Nord ont voulu me rencontrer, j'ai dit: Écoutez, c'est un projet de loi pour les gens de Montréal. Là c'était pour les faire parler un peu évidemment. Ils ont dit: Bien non. Écoute, il n'y a pas juste les gens de Montréal là-dedans. Tout le monde passe au "cash". Tout le monde, y compris nous; nous sommes touchés par ce projet de loi. Ce que nous voulons que tu représentes comme député d'Abitibi-Ouest, c'est le point de vue suivant: On s'oppose totalement. Ils ne demandent pas un amendement mineur. On s'oppose totalement au projet de loi 34, M. le ministre. Et on appuie notre corporation à 100 %. Évidemment, ils savaient qu'envoyer cela au ministre ne changerait pas grand-chose. Ils se sont essayés avec le premier ministre. Ils ont envoyé un message au bureau du premier ministre: On ne vous demande, pas des ajustements, mais le retrait du projet de loi 34 et de convoquer une commission parlementaire dans les meilleurs délais pour qu'on ait l'occasion de discuter des trous, des faiblesses, des failles du virage sur un dix cents de votre projet de loi. Je suis honnête. J'ai aussi rencontré des employés. Or, les employés ont dit: Nous espérons, M. Gendron, que vous allez être d'accord avec ce projet de loi. Je leur ai demandé pourquoi ils voulaient que je sois d'accord avec ce projet de loi. Ils ont dit: Ce sera un mosus de bon projet de loi pour nous parce qu'on aura enfin des conditions de travail qui seront valables, avec un salaire horaire qui respectera un peu ce que nous sommes. Et remarquez que je n'ai rien contre cela. Je trouve que les employés avaient des revendications justes et raisonnables à certains égards. Mais je leur ai dit: Écoutez, ce n'est pas parce que quelqu'un, se sentant incapable d'assumer ses responsabiltés ministérielles, a fait un "deal" un peu douteux avec une corporation syndicale, que nous sommes obligés de nous mettre un bandeau sur les yeux et de dire: II n'y a aucun problème. Nous sommes pour cela sachant très bien que c'est un virage sans précédent de ce gouvernement-là, en termes de philosophie et en termes d'orientation.

J'ai été obligé de leur expliquer qu'il n'était pas question que je ne regarde pas cela de plus près. Et j'ai dit: Écoutez, comme des gens normaux et intelligents, avant de nous couler dans le béton, je suis pas mal sûr qu'on va permettre des consultations particulières et nous verrons ce que l'ensemble de ceux qui seront consultés viendront nous dire et nous allons nous faire une opinion. Mais à tout le moins, avant d'entendre les gens qui viendront s'exprimer, j'aurai des questions à poser et j'aurai des choses à dire. Voici quelques-unes des questions que je pose. M. le ministre, expliquez-nous ce virage de comportement, de philosophie et d'orientation entre le sens de votre philosophie comme parti politique où l'État doit se faire le plus petit possible avec le moins d'outils pos- sible - ce qu'on appelle communément toute la place au secteur privé et nous ne devons qu'assumer des services qui sont souvent déficitaires et percevoir des impôts. C'est à peu près cela le rôle de l'État selon vous. Et vous avez combattu les nationalisations dans certains secteurs et là vous en faites une sans indemniser les victimes, sans indemniser les gens concernés. (20 h 40)

Parce que, écoutez, cela ne prend pas, encore là, beaucoup de compétence, d'expérience parlementaire pour comprendre que quand tu es dans le commerce, quel qu'il soit, il y a toujours ce qu'on appelle un valeur d'achalandage. Et là, je n'essaie pas de dire que le service ambulancier est un service commercial. Mais je suis assez intelligent pour savoir que le propriétaire d'ambulances qui s'est équipé et qui offre le service veut à tout le moins... C'est cela que les gens de l'Abitibi sont venus me dire: Moi, ma tôle, qu'elle soit verte ou blanche sur l'ambulance, n'a pas la même valeur si je n'ai plus le permis pour opérer. Je suis convaincu que le ministre comprend cela s'il est un peu sérieux. À partir du moment où on dit dans le projet de loi: Le permis, je ne suis pas sûr, c'est possible, cela va dépendre, c'est la nouvelle corporation qui va décider si vous pouvez avoir un permis d'opération ou non, ces gens-là sont susceptibles d'être complètement écartés du portrait, sans aucune garantie, sans savoir comment on va compenser cette perte qu'on appelle communément, dans le jargon des affaires, la valeur de l'achalandage qui dépasse l'estimation qu'on peut faire des véhicules ambulanciers.

J'aime toujours regarder le point de vue d'autres personnes. Si j'étais dans les patates... Je connais un peu Jean-Paul Gagné. Quand Jean-Paul Gagné, dans Finance ou dans le journal Les Affaires se permet de dire, dans ce cas-là, en ce qui me concerne, avec énormément raison: 'Tout ce qui restera aux entreprises, c'est la possibilité de pouvoir louer leurs véhicules à la nouvelle corporation. Bref, il ne restera que la tôle." Et il commence. Le ministre a sûrement lu cela. Ce projet, Mme la vice-première ministre du gouvernement, ce projet est une aberration sur toute la ligne. Il n'a pas dit "dans le premier paragraphe et dans l'article, troisièmement". Il a dit: "Ce projet est une aberration sur toute la ligne. La nationalisation du transport ambulancier n'est aucunement justifiée. Le service actuel est efficace. En outre, plusieurs des évaluations de coûts sur lesquelles s'est appuyé le gouvernement pour justifier l'étatisation du transport ambulancier sont sous-estimées, sinon erronées." Il continue: "Le projet de loi est une saisie en règle de l'actif intangible des compagnies de transport ambulancier. La nouvelle politique - toujours selon M. Jean-Paul Gagné - accroîtra à coup sûr le coût des transports ambulanciers." Où sont-ils ces supercomptables de ce gouvernement-là? Où sont-ils dans ce dossier-là pour faire une évaluation des colonnes comptables, les

colonnes étant leur seule préoccupation majeure et importante, les colonnes comptables, le reste...

J'écoutais le député de Sainte-Anne. Il ne sait pas de quoi il parle. La population, pensez-vous qu'il s'en occupe? Voyons donc! Ce qui les intéresse, ce sont les colonnes comptables. On l'a vu dans à peu près toutes les décisions prises par ce gouvernement. Pourtant, quelqu'un qui était habitué de traiter de ces questions dit: Comment se fait-il que vous ne vous en occupez pas des colonnes comptables? Les coûts? On parle d'une reddition humiliante. Ce n'est pas moi qui ai inventé le titre. C'est rare que j'écris dans Le Devoir. Jean Francoeur: "Reddition humiliante. On peut reprocher aux auteurs du projet d'avoir coiffé la nouvelle corporation d'un conseil d'administration sur le modèle maintes fois dénoncé d'une pseudo-participation." Parce qu'on a essayé de trouver des poignées pour justifier l'affaire. Il concluait: "Le projet de loi 34 n'est qu'une reddition sans honneur - M. le ministre - de la part du ministre délégué à la Famille qui en est à sa première initiative importante. C'est un geste humiliant...

Une voix: Quelle famille!

M. Gendron: ...dont la seule rationalité tient dans le proverbe: Qui veut noyer son chien dit qu'il a la rage."

On pourrait continuer. On pourrait continuer à en citer une partie de la soirée. Fondamentalement, qu'est-ce que la corporation, qui vit avec le dossier, a dit? "Nationalisation, oui à un détail près. Il n'y a pas d'indemnisation. On voulait régler un problème de main-d'oeuvre en régions et on crée un problème d'instabilité d'entreprise au Québec. L'affaire est probablement sans précédent - c'est ma conclusion, Mme la Présidente - affirme M. Antoine Fabi, président de la Corporation des services ambulanciers du Québec qui représente, etc. Le projet de loi 34, à l'article 22, enlève à des entreprises responsables implantées depuis nombre d'années le pouvoir d'exploiter un service d'ambulances à Montréal. D'un coup de baguette, il transfère leurs employés à un nouvel organisme et les transforme en agences de location de véhicules." Je pense que l'Opposition a raison d'interroger le ministre. Je n'ai pas le temps de le dire parce que mon temps achève, mais c'est écrit noir sur blanc à trois ou quatre reprises.

M. le ministre, il arrive dans la vie parfois qu'il y a des devoirs qui sont mal faits. C'en est un devoir très mal fait. En conséquence, il me semble qu'un ministre responsable, normalement, membre d'un gouvernement responsable, a une alternative. C'est de prendre la décision de refaire ses devoirs et cela ne devrait pas être vexant pour le ministre délégué à la Famille et aux Affaires sociales. Un de ses collègues ne fait que cela, reprendre ses devoirs, et il a bien plus d'expérience que lui. Cela fait deux ans que le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu ne fait qu'une chose: il s'arrange pour avoir le consensus contre lui. Il fait l'unanimité contre lui et, après, il travaille ses affaires tellement qu'on va encore parler d'aide sociale en 1989 et, pourtant, c'est un engagement de ce gouvernement d'avoir, au lendemain de son élection, une réforme majeure de l'aide sociale. Et, on en parle encore. Cela ne fait pas sérieux.

En conclusion, Mme la Présidente, je pense que le ministre devrait poser un geste responsable et nous indiquer qu'un tel projet de loi ne mérite qu'une seule chose: être retiré du portrait. Merci.

La Vice-Présidente: Merci, M. le député d'Abitibi-Ouest et leader de l'Opposition. M. le député de Saint-Jacques.

M. André Boulerice

M. Boulerice: Mme la Présidente, j'aurais inévitablement préféré entendre le député de Sainte-Marie parce qu'on considère une situation à Montréal, mais je vois qu'il est de nouveau absent en Chambre, peu préoccupé des problèmes montréalais...

Des voix: Wo! Wo!

Une voix: Où étiez-vous hier soir?

La Vice-Présidente: À l'ordre, s'il vous plaît!

M. le député de Saint-Jacques, je vous rappelle que certaines commissions siègent présentement et que certains députés ne sont pas en Chambre, mais en train de faire leur travail. Là-dessus, M. le député de Saint-Jacques, je vous demanderais de ne pas soulever l'absence de certains députés, qu'ils sont présentement en commission. Vous pouvez poursuivre.

M. Boulerice: Mme la Présidente, je m'excuse. J'ignorais que les commissions siégeaient durant les périodes de questions.

Des voix: Wo!

La Vice-Présidente: À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Boulerice: J'ai eu, à défaut du député de Sainte-Marie, Mme la Présidente, l'ineffable député de Sainte-Anne qui, aussi coloré que son personnage, nous a invités à une espèce de convivialité, de bonne entente. Soit, je suis peut-être partisan d'une convivialité, d'une bonne entente, mais j'aimerais bien en connaître les conséquences directes pour ce qui est des citoyens et des citoyennes du Québec et de ceux de Montréal. Certes, à l'exemple du député de Sainte-Anne, je suis un député montréalais; je ne siège pas à l'Assemblée nationale de Montréal, je

siège à l'Assemblée nationale du Québec. Je me dois donc, Mme la Présidente, de regarder à la fois la situation en région métropolitaine et de regarder également la situation pour ce qui est de l'ensemble du Québec comme tel.

Le ministre délégué à la Famille, à la Santé et aux Services sociaux veut améliorer le système du transport ambulancier à Montréal et en régions, ce à quoi je n'aurai jamais d'objection. Je ne pense pas que l'on puisse refuser d'améliorer un système essentiel chez nous et un système essentiel pour notre population, sauf que s'il y a amélioration, il y a amélioration bâclée. Il y a une réforme globale où il y a des réformettes. Je pense que c'est plutôt dans la foulée de la deuxième que le ministre délégué à la Famille, à la Santé et aux Services sociaux s'achemine, c'est-à-dire une espèce de réformette rapide, bâclée, partielle sans aller véritablement au fond du problème et sans apporter une solution globale à l'ensemble de ce problème qu'est le transport hospitalier. Je vois d'ailleurs la ministre des Affaires culturelles indiquer son approbation aux interrogations que je pose.

À l'intérieur du projet de loi 34, que nous présente le ministre, on voit... Je m'excuse, Mme la Présidente, est-ce que vous m'avez donné le droit de parole? J'entends quelques solos du Choeur de l'Armée rouge.

La Vice-Présidente: Vous pouvez poursuivre, M. le député de Saint-Jacques.

M. Boulerice: Je vous remercie, Mme la Présidente.

Une voix: De la pertinence.

M. Boulerice: L'alinéa 6 de l'article 149.5 stipule: "La Corporation peut exploiter un service d'ambulances ou un service d'interventions médicales d'urgence". Dans l'éventualité où la nouvelle corporation maintiendrait un tel système, pourquoi ne pas l'étendre à d'autres régions comme Québec, par exemple? Le projet ne prévoit pas cette possibilité. Effectivement, pour ce qui est de Québec et d'autres régions, je pourrais penser à des amis, ici à Québec, M. et Mme Côté, par exemple, comment bénéficieront-ils de ce système? (20 h 50)

De plus, il n'y a aucune disposition qui prévoit les normes et les standards de qualité des soins qui doivent être maintenus et ceci, dans toutes les régions du Québec. Dans le système de transport hospitalier, il y a des choses qui peuvent peut-être sembler anodines pour l'ensemble des députés ici mais qui sont très importantes et qui ne sont pas faites actuellement. La réforme que le ministre veut apporter ne permettra pas d'aller aussi loin que cela. Et cela, c'est une amélioration de la qualité des choses? qui est un exemple... Le ministre pourrait-il répondre à ma question: Combien de fois désinfecte-t-on les ambulances, contrairement à ce qu'on fait dans une chambre où il y a un patient contagieux? À quel rythme changeons-nous draps et couvertures dans les ambulances? Ah! Bien, cela peut paraître anodin, Mme la Présidente, mais absolument rien dans le projet de loi, nonobstant le Choeur de l'Armée rouge qui continue son "chorus line" pour m'empêcher de parler. Cela n'a pas d'importance. Je vais poursuivre. Donc, il n'y a pas cela, Mme la Présidente. Il n'y a pas de profondeur dans le projet de loi comme il n'y a pas de respect des parlementaires de l'Opposition de la part des parlementaires du parti ministériel, notamment le ministre du Tourisme, Mme la Présidente, que je vous demande de rappeler à l'ordre.

La Vice-Présidente: Je vous demanderais, s'il vous plaît, de respecter le... À l'ordre! J'ai reconnu le député de Saint-Jacques. J'aimerais bien entendre son intervention. M. le député de Saint-Jacques.

M. Boulerice: Je suis un peu étonné, Mme la Présidente, d'entendre de la part d'un membre du gouvernement, un ministre, des propos... Enfin, heureusement que la transcription des débats n'en fera pas état. Ce serait gênant. Mais, enfin! Bon, le leader qui s'en mêle en plus. Que voulez-vous! De toute façon, le Québec est témoin de cela depuis le 2 décembre. Mme la Présidente, je n'ai pas...

La Vice-Présidente: S'il vous plaît, à l'ordre! À l'ordre! À l'ordre! M. le député de Saint-Jacques, vous pouvez poursuivre.

M. Boulerice: Heureusement, Mme la Présidente, encore là, qu'il y a votre vigilance parce que, de nouveau, les droits des parlementaires continueraient d'être bafoués.

Alors, si on continue dans ce fameux projet de loi que le ministre nous présente, j'aimerais vous parler des infirmières. Nulle part, dans le projet de loi, il n'est question des infirmières qui sont à Urgences-santé. Elles ne sont pas représentées au nouveau conseil d'administration de la nouvelle corporation dont le directeur général a d'ailleurs été engagé avant même que la corporation soit établie. Elles n'ont pas été consultées sur le protocole de transfert. Bref, et je pense que c'est une inquiétude tout à fait légitime de leur part, elles craignent d'être écartées de la nouvelle convention. Pourtant, leur travail est essentiel dans un système d'interventions médicales d'urgence.

À Urgences-santé, elles assument deux tâches importantes qui ont une incidence directe sur l'engorgement des urgences, qui n'est toujours pas réglé d'ailleurs, même avec les plans de la ministre titulaire de ce ministère, et sur l'état de santé du patient, parce que, vous le savez comme moi, les minutes qui suivent l'appel de détresse sont déterminantes. Le triage des appels

comme tels où on envoie une ressource ou bien on oriente les bénéficiaires vers des ressources autres que les hôpitaux. Il y a aussi tout le conseil-nursing ou Info-Santé. Plusieurs appels qui proviennent à Urgences-santé, que je connais bien, entre parenthèses, parce qu'elle est située dans ma circonscription, sur la rue Saint-Denis, sont des demandes d'informations médicales comme telles. Donc, faire disparaître les infirmières ou les infirmiers, cela veut dire faire arrêter le triage des appels, ce qui signifie en définitive qu'à chaque appel, maintenant, on pourrait envoyer une ambulance comme cela se fait actuellement à Toronto. On peut imaginer les coûts d'un système comme celui-là.

Dans un autre ordre d'idées, Mme la Présidente, il y a un certain irrespect des droits des travailleurs et des travailleuses. Certaines dispositions du projet de loi risquent de faire perdre les emplois de plusieurs travailleurs et travailleuses au Québec. L'article 14 du projet de loi prévoit que le protocole de transfert identifie les employés transférés avec avantages sociaux à la nouvelle corporation. Ainsi, les salariés qui ne sont pas désignés dans le protocole perdent leur sécurité d'emploi. De plus, l'article 19, alinéa 2, stipule que les conventions collectives en vigueur lors du transfert ne s'appliquent qu'à un salarié transféré du CRSSS-MM, le Centre régional de la santé et des services sociaux de Montréal métropolitain, à la corporation. Comment un système peut-il cautionner qu'on bafoue ainsi les droits d'autres salariés? Parce qu'on va établir véritablement deux classes de salariés au Québec: ceux qui ont été étatisés à Montréal et ceux qui sont à l'extérieur de cette région et qui pourront même y être, ne serait-ce que d'une seule foulée, l'espace d'un pont, c'est-à-dire la rive sud de Montréal ou même la rive nord de Montréal puisque le collègue député de Fabre est intervenu.

Ceux-là vont vivre cette distorsion de traitement et d'origine que le projet de loi 34 risque d'amener. Je pense que c'est un sujet dont on devrait se préoccuper. Encore là, mon collègue député d'Abitibi-Ouest et leader de l'Opposition a bien cité l'article de M. Pierre Vennat, l'éditorial de M. Vennat dans La Presse. M. Vennat, ce n'est quand même pas un deux de pique. Je pense qu'il est capable d'une pensée très autonome et très articulée sur des sujets d'importance. M. Vennat le disait bien et je serai peut-être le troisième, le quatrième ou le cinquième, mais cela mérite d'être répété. L'élaboration d'une politique de santé est trop importante pour se faire sous le coup de l'ultimatum, sort-il patronal ou syndical. Au même titre d'ailleurs que d'autres analyses ont été faites et qui, elles, demandent qu'il y ait une vaste consultation au niveau de la population comme telle. Une consultation, d'ailleurs, à laquelle ne se refusent pas les techniciens ambulanciers puisque j'ai parlé avec les deux représentants des techniciens ambulanciers, M. Cotton et son adjoint, et ceux-ci d'ailleurs n'avaient aucune objection à la tenue d'une commission parlementaire qui permettrait, Mme la Présidente, aux intervenants de venir faire connaître leur point de vue. J'ai déjà donné un exemple tantôt à savoir que les infirmières seront exclues, donc, leur mot à dire.

D'une certaine façon aussi, les propriétaires. Je ne ferai pas le discours de la tôlerie, mais il était très pertinent. Il risque peut-être d'y avoir des pertes aussi pour des gens qui ont investi. Ne sont pas représentés au sein du conseil d'administration de la corporation, un paquet de gens qui sont liés à tout cela et qui ne pourront pas se faire entendre. C'est vraiment dommage et navrant qu'un vaste débat ne se fasse pas dans la population. Je le répète, le transport ambulancier est un service essentiel. Le transport ambulancier est une chose et la mise en place d'un système de soins préhospitaliers d'urgence en est une autre également. Faire des techniciens ambulanciers des employés de l'État n'est pas une mauvaise chose en soi. Ce n'est pas là-dessus que mon débat porte. Je ne pense pas que cela va régler immédiatement les problèmes d'engorgement des urgences, ni le manque de médecins et de spécialistes en régions éloignées, notamment dans les urgences.

À ce moment-là, quand on veut refaire une réforme comme l'indique le ministre, pourquoi ne pas reconnaître les urgentologues, pourtant reconnus dans toute l'Amérique du Nord sauf au Québec? Dieu seul sait que cette expérience est intéressante. J'ai eu l'occasion de l'apprécier dans l'État américain de la Floride. (21 heures)

Ce projet de loi doit faire l'objet d'un consensus entre toutes les parties, si le Québec veut se donner un système de soins préhospitaliers d'urgence qui soit efficace pour le bien-être de la population, et ceci dans toutes les régions du Québec et non pas uniquement IHe de Montréal. Je pense que les gens du Saguenay-Lac-Saint-Jean, les gens de la Gaspésie, les gens du Bas-Saint-Laurent, les gens de l'Outaouais comme les gens près de la région métropolitaine, enfin de IHe de Montréal, les gens de la rive sud et de la rive nord, eux aussi, méritent cela. On a déjà dans des éditoriaux... On a cité le journal Les Affaires qui est pourtant un journal fort lu de la part de la partie patronale. L'auteur de l'article ne se gênait pas pour inviter le ministre à retourner faire ses devoirs et à refaire ce projet. Oui, je sais qu'à cause des négociations, puisque les ententes sont venues à échéance le 1er avril dernier... On me corrigera si je ne cite pas la bonne date. On me dit que le climat était quand même bon au début des négociations. Il y a peut-être possibilité d'une grève que certains évoquent. Je ne sais si c'est un terrorisme psychologique que l'on veut faire, mais je suis persuadé que ce n'est pas le cas. Tant qu'à réformer, réformons donc de façon que chacun va y trouver son compte, que

chacune des parties ne se sentira pas lésée et qu'en définitive, ce soit l'ensemble de tout ce système qui pourra être amélioré, qui pourra être bonifié, qui ne sera pas adopté à la vapeur, qui ne créera pas d'insatisfaction, qui ne créera pas de classes et qui permettra au gouvernement d'avoir justement un discours plus cohérent, même si, en définitive, ce projet de loi est une espèce de tête à queue, puisqu'on parle d'étatisation, alors que ce gouvernement s'est toujours réclamé être le gouvernement de la privatisation.

Enfin, il y a quand même certains éléments idéologiques du Parti québécois qu'ils ont l'intention de vouloir reprendre puisque cela a fait ses preuves. Mais il serait vraiment navrant qu'un débat de cette importance, quand on sait que les grandes réformes dans le domaine de la santé ont toujours fait l'objet d'un consensus et qu'en plus, il y a sur la table des études relatives aux soins de santé au Québec, qui sont en premier lieu - qu'on me corrige également si je ne les cite pas par la bonne appellation - le rapport Rochon, le rapport Harnois, je crois, comme il y a eu le rapport Drouin, tout cela. Alors, on pourrait en reprenant ce débat... Je pense que ce serait autant favorable aux techniciens ambulanciers qu'à l'ensemble de la population, aux propriétaires et à l'État d'être capables d'articuler une décision à partir d'observations, de commentaires, de correctifs même, que nous proposent les rapports que je viens de vous énumérer et qui permettraient d'avoir cette vision entière du système de santé au Québec, avec toutes ses composantes, ce qui nous permettrait effectivement d'avoir une politique qui aurait, je suis obligé de le répéter, plus de cohérence que celle qu'on nous a présentée.

Celle qu'on nous présente est issue du rapport Forget qui avait été produit par la firme SECOR en novembre 1987 qui, justement, présentait la situation du transport hospitalier au Québec. La même année, M. Tremblay remettait des études commandées par le ministère de la Santé et des Services sociaux en 1986, portant sur la tarification du transport. Donc, en définitive, on a déjà deux autres études qui se sont ajoutées à celles-ci. Il y a un système ambulancier qui a vécu certaines perturbations depuis 1984: grèves illégales, non-respect de décrets gouvernementaux, bris de véhicules, etc. Arrangeons-nous donc pour avoir une population satisfaite des soins qu'elle paie, qu'elle paie d'ailleurs chèrement. Assurons-nous qu'il y ait une harmonie qui existe entre les différents intervenants et que tout cela, Mme la Présidente, si je peux employer l'expression, s'imbrique dans une politique... - Je vois que vous me faites signe de conclure, quoique mon temps ait malheureusement été rogné par des interventions venant de l'autre côté que je ne qualifierai pas, mais vous connaissez le fond de ma pensée là-dessus... Enfin, je respecterai, même si on m'a volé un peu de mon temps, en fin de compte - donc qui nous permettront, Mme la Prési- dente, comme je vous le dis, d'avoir une vision vraiment embriquées les unes sur les autres, d'un système de santé au Québec avec toutes ses composantes, donc un système qui risque non pas de faire des mécontents, des mécontents locaux et régionaux, mais de faire des contents nationaux. Donc, c'est une politique qui va s'appliquer pour l'ensemble du Québec, avec une certaine gradation s'il le faut, mais où tout sera très clair et dont on pourra être capable de mesurer, immédiatement, l'efficacité, les coûts comme tels et l'impact sur la population. Je vous remercie, Mme la Présidente.

Une voix: Bravo!

La Vice-Présidente: Merci, M. le député de Saint-Jacques. M. le député de Bertrand.

M. Jean-Guy Parent

M. Parent (Bertrand): Merci, Mme la Présidente. Il me fait plaisir, ce soir, d'intervenir sur ce projet de loi 34 puisque j'ai cru comprendre que, par ce projet de loi, le gouvernement voulait poser des gestes qu'il a pourtant ardemment défendus depuis deux ans et demi et aller exactement à l'inverse de ce qu'il a prêché.

Le projet de loi 34, il faut s'en rendre compte se résume à peu près à ceci: La création d'une corporation pour diriger, si on veut, les destinées du service ambulancier dans la région de Montréal. Deux questions se posent à mon point de vue: Pourquoi agit-on de cette façon? Et surtout, en vertu de quel principe le gouvernement actuel agit-il de cette façon?

Pourquoi? Je pense que la réponse est relativement simple. On se rend compte que les conventions collectives sont rendues à échéance et qu'il y a des ultimatums, si j'ai bien compris, de la part du syndicat. Face à cela, le ministre a décidé - on le verra un peu plus tard - de donner suite aux pressions qui étaient faites. Cela me surprend un peu de la part d'un ministre qui, même s'il n'a pas énormément d'expérience comme ministre, a aussi fait de la politique au cours des années. Antérieurement, il a fait de la politique municipale. De voir qu'un ministre succombe facilement à des pressions.... La logique de cela, c'est que le ministre a succombé à des pressions.

Je me demande comment un ministre délégué à la Famille, à la Santé et aux Services sociaux, à la tête de cette nouvelle direction à l'intérieur du ministère des services de santé, dans son premier dossier important, peut agir de cette façon? J'ai de la misère à comprendre. J'espère - j'ai écouté le ministre, cet après-midi - qu'il pourra nous fournir d'autres explications. La façon dont il procède actuellement est nulle. Il n'y a pas d'autre conclusion. C'est non seulement la conclusion que je tire, que le député de Bertrand peut tirer, puisque c'est un point de vue parmi tant d'autres, mais c'est la

conclusion à laquelle plusieurs autres collègues dans cette Chambre sont arrivés, de même que plusieurs analystes et éditorialistes. On n'a qu'à penser à ce qui a pu se lire dans les journaux depuis deux semaines, dans La Presse, dans Le Devoir ou dans Le Soleil, peu importe; tous les éditorialistes, tous ceux qui ont fait l'analyse un peu en profondeur du principe du projet de loi 34 en viennent à une même conclusion. Il me semble que le ministre doit certes comprendre qu'il y a là un message. Je pense que le ministre devrait être capable de comprendre qu'il y a peut-être lieu de retourner faire ses devoirs.

L'autre chose qui est encore plus fondamentale, plus importante, c'est le geste posé par le gouvernement, à savoir: nous allons intervenir, en tant que gouvernement, en tant qu'État, donc nous allons étatiser et nous allons prendre le contrôle. La nationalisation a souvent été décriée par le présent gouvernement tout comme l'ensemble des gestes posés par le précédent gouvernement, par le Parti québécois. Cela me surprend quelque peu. Vous vous souviendrez que, d'une part, j'ai été le critique en matière de privatisation, le critique du ministre délégué à la Privatisation, le ministre Fortier. Ce ministre s'est fait fort, pendant deux ans et demi, d'expliquer à l'Assemblée nationale et à la population du Québec qu'il était important pour ce gouvernement, dans ses fonctions, dans sa vision, dans sa façon de voir les choses, que l'État se retire et qu'on laisse la place à l'entreprise privée. Je veux bien qu'on laisse de la place à l'entreprise privée, je veux bien qu'on s'ingère le moins possible, mais je pense que la position que nous avons toujours défendue de ce côté-ci, c'est de dire: Attention, il y a sûrement des cas où l'État doit continuer d'intervenir. (21 h 10)

II y a sûrement des endroits, des services essentiels qui doivent être fournis, et là, on doit parler peut-être beaucoup plus d'une formule mixte. C'est toujours ce qui a été défendu de ce côté-ci. Mais de l'autre côté, le gouvernement, le Parti libéral a été très clair, très tranché là-dessus: Nous allons vers la privatisation. Plusieurs gestes ont été posés depuis deux ans et demi, des gestes, à mon avis, graves et importants, parmi lesquels des services à la population... On n'a qu'à penser à des services aux citoyens, de transport, par exemple, on n'a qu'à penser à Quebecair. On me dira, bien sûr: C'était déficitaire. Mais allons donc voir ce qui va se passer dans le service ambulancier. Ce qui est incompréhensible, ce qui est inadmissible, ce qui est irrecevable, c'est que tout d'un coup, nous sentons une volte-face. Peut-être qu'on devrait, de ce côté-ci, se réjouir de voir que le gouvernement, du moins le ministre délégué à la Santé et aux Services sociaux a compris qu'il y avait des gestes à poser.

Je me demande comment son collègue, le président du Conseil du trésor, réagit face au projet de loi 34. Je me demande si quelques-uns des collègues du ministre ne lui ont pas passé quelques messages puisque toute leur philosophie, toute la base de l'approche qu'ils ont eue en tant que gouvernement, laquelle n'était pas en accord parce que c'était une approche très rangée vers l'entreprise privée, aujourd'hui, le ministre fait exactement l'inverse. J'avais cru comprendre, au cours de la dernière année, qu'il y avait eu une erreur de parcours, c'est-à-dire que le ministre de l'Industrie et du Commerce avait procédé à une nationalisation quand il a décidé lui-même de se porter acquéreur des chantiers maritimes parce que c'était important, disait-on, pour sauver des emplois de s'assurer que... On sait ce qui est arrivé par la suite, cela a été une erreur monumentale puisque le Québec a perdu tous ses contrats.

Mais un premier geste avait été posé et j'avais dit, à ce moment-là: Je pense que ce gouvernement n'est pas cohérent. D'une part, il agit en disant: Nous retournons ces services à l'entreprise privée et, d'un autre côté, on avait un gouvernement qui posait un geste exactement à l'inverse, et on l'a vu une première fois dans le cas de l'étatisation des chantiers maritimes.

Voici un deuxième geste, et c'est un geste important puisqu'il s'agit des services ambulanciers et des services qui touchent la population. On parle particulièrement, dans le projet de loi, de la grande région de Montréal. Mais comment le ministre, porteur de ce projet de loi 34, peut-il agir de cette façon? Il pourrait peut-être, s'il étart placé dans une situation d'urgence - c'est le cas de dire qu'on est à Urgences-santé - où il n'aurait pas d'autre choix, pour assurer les services, que de faire intervenir l'État. Je pourrais comprendre parce que, en soi, il y a peut-être là un fond qui a du sens. Mais ce qui est inacceptable, c'est qu'on n'est pas dans une situation d'urgence, on n'est pas dans une situation où le ministre devrait agir de cette façon. C'est là qu'on va exactement à l'inverse de tout ce qui a été dit par le gouvernement depuis deux ans et demi.

C'est un bel exemple du fait qu'on administre avec une petite vision et qu'on administre à la petite semaine. J'ai l'impression que si le ministre délégué à la Santé et aux Services sociaux, qui agit de cette façon, avait pris soin de regarder le problème dans son ensemble, avait pris soin de regarder les différentes solutions... Des alternatives lui ont été soumises dans différents rapports. On n'a qu'à penser au rapport Forget qui a été déposé en novembre 1987 et à d'autres rapports qui pouvaient éclairer le ministre sur d'autres solutions. Mais non, le ministre a décidé d'agir de façon ponctuelle dans le cas du dossier des services ambulanciers dans la région de Montréal. C'est une nouvelle approche, c'est un gouvernement qui a décidé de venir jouer un rôle dans des services essentiels Pourtant, c'est ce que le Parti québécois a souvent prêché, qu'on se doit d'intervenir dans certains cas.

Alors, peut-être que, ce soir, je devrais me réjouir et dire au ministre que, finalement, il a compris qu'il fallait intervenir dans certains cas. Mais là, qu'il intervienne, qu'il fasse une étatisation du service ambulancier - on pourrait être d'accord ou en désaccord - cela va beaucoup plus loin que cela. Le projet de loi 34 va dans le sens qu'il crée un peu deux catégories de citoyens. Il y aura ceux qui seront desservis pour la région de Montréal ou la grande région de Montréal ou la périphérie et il y aura le reste du Québec. Or, je ne pense pas que les citoyens du Québec devraient être traités comme étant deux catégories de citoyens.

Parce qu'il y a eu des pressions importantes de faites par le syndicat quant au service des ambulances dans la région de Montréal, on règle ce problème de façon ponctuelle en faisant intervenir le gouvernement. On crée une corporation. On fait en sorte que, dorénavant, non pas dans tout le Québec, mais dans la région de Montréal, lorsque ce projet de loi sera adopté, le service sera étatisé. Mais qu'est-ce qui arrive donc, Mme la Présidente, du service ambulancier dans les autres régions du Québec, ici même à Québec? Je pense que tout le monde sera d'accord pour dire que, dans l'ensemble des régions du Québec, le service est relativement pourri. Le service est relativement mauvais parce que les gens ont à attendre et, parfois, dans ce sens-là, cela cause de sérieux préjudices.

Dans la région de Montréal, justement dans cette région où il y a un achalandage important, je pense qu'Urgences-santé a reçu une cote - comme le disait un des éditorialistes: Une cote A1. C'est-à-dire qu'on peut lui décerner une très bonne cote pour les services. Bien sûr qu'il y a eu des problèmes depuis 1984. Mais je pense qu'on n'était pas rendu à la solution dite ultime: on n'a pas le choix, on agit, on fait intervenir le gouvernement. Je pense que c'est un sérieux précédent qu'on est en train de créer. Ce que le ministre est en train de faire, c'est d'ouvrir la porte à quelque chose d'excessivement dangereux. Lorsque, pour des raisons quelconques, afin d'assurer des emplois, les syndicats feront des pressions dans d'autres domaines, dans d'autres services dits essentiels, on donnera l'exemple de ce qui s'est passé dans le service ambulancier. Et je pense que le ministre devrait être conscient de l'ouverture qu'il est à créer, du précédent qu'il est à créer, dans ce cas particulier avec ce gouvernement particulier.

Perce que, jusqu'à maintenant, on est allé exactement à l'inverse, y compris le premier ministre du Québec. Pas plus tard qu'il y a quelques semaines, devant le conseil d'administration de la Chambre de commerce du Québec, le premier ministre a parlé devant ces gens d'affaires qui demandaient beaucoup de privatisation, qui demandaient, le domaine des services de la santé, de remettre l'administration des hôpitaux, de remettre plusieurs sociétés, organismes qui oeuvrent dans ce domaine et qui sont gouvernementaux ou paragouvernementaux, entre les mains de l'entreprise privée parce qu'ils voulaient jouer leur rôle, disaient-ils. Et, qu'est-ce que le premier ministre a dit face à cela? Écoutez, on fera quelques expériences pour privatiser certains secteurs. Des expériences pilotes, disait-il. Et là, je trouve cela dangereux, mais c'est ce que le premier ministre a annoncé.

Quelques semaines plus tard, le 2 mars, le ministre délégué à la Famille et aux Services sociaux faisait exactement le contraire, non pas une expérience pilote de privatisation de certains services dans le domaine de la santé, mais une expérience pilote dans le sens contraire, une expérience pilote de nationalisation. Comment peut-on être considéré comme sérieux? Comment peut-on être cohérent? (21 h 20)

Mme la Présidente, certains éditorialistes comme Jean Francoeur du journal Le Devoir titrait, le jeudi 19 mai, il y a à peine deux ou trois semaines: "Reddition humiliante." Ce que Jean Francoeur rapporte dans cet editorial, c'est qu'effectivement, le ministre a succombé à des pressions, que le projet de loi 34 n'est qu'une reddition sans honneur de la part du ministre délégué à la Famille, à la Santé et aux Services sociaux. "À sa première initiative importante, c'est un geste humiliant dont la seule rationalité tient dans le proverbe: Qui veut noyer son chien dit qu'il a la rage." On a pu lire d'autres éditoriaux. Entre autres, le 21 mai, dans La Presse, Pierre Vennat dit les choses exactement dans le même sens. Et pourtant, je pense que Pierre Vennat a généralement le sens de donner les deux côtés de la médaille, est capable de donner les deux poids et les deux mesures. Dans ce sens-là, il ne comprend pas comment le premier ministre et ce ministre porteur du projet de loi 34 peuvent agir actuellement en allant dans un sens contraire à toute l'approche qu'ils ont défendue ces dernières années.

Le ministre avait d'autres options qui auraient certainement pu être abordées. Cela aurait été fort compliqué, je le conçois, mais je pense que la moindre des choses, surtout parce qu'on ouvre une porte importante, une nouvelle approche, c'est qu'il y ait eu un débat public. L'important aurait été et serait encore que le ministre, à moins qu'il ne se soit commis absolument, puisse retirer son projet de loi et mener une consultation très large des différents intervenants afin d'envisager non pas une solution qui soit vraiment sporadique, une solution qui touche une région donnée, même si c'est une région importante, même si je fais partie de cette grande région de Montréal... Je pense que le ministre aurait dû, et ce serait tout à son honneur, envisager une solution globale. Cela me fait un peu penser à des dossiers connexes où le ministre délégué à la Famille, à la Santé et aux Services sociaux a annoncé ou fait annoncer par le ministre des Finances quelques mesures concernant la politique familiale, des mesures

dites incitatives, mais des mesures qui ne touchent que quelques secteurs, que quelques morceaux, et il ne nous a pas encore présenté toute cette politique familiale.

Je ne demande pas mieux qu'on nous annonce des choses à la pièce pour autant qu'elles suivent l'énoncé d'une grande politique globale afin qu'on sache exactement où on s'en va. Ce qui est inconcevable, comme dans la politique familiale, où on n'a pas eu l'énoncé global, on n'a pas su vers quoi l'ensemble du gouvernement veut se diriger et ce qu'il veut favoriser, c'est qu'on ne l'a pas plus actuellement dans le domaine des services de santé et de services sociaux. Si le ministre avait été capable de faire ses devoirs, on serait aujourd'hui devant une décision qui serait d'adopter un projet de loi qui donnerait suite à un ensemble. Ce serait un morceau parmi tant d'autres qui sont à venir, et, dans ce sens-là, on pourrait comprendre où s'en va le ministre. Mais il s'en va en sens contraire du trafic, c'est-à-dire cela va exactement dans le sens contraire de ce que le gouvernement nous a prêché depuis deux ans et demi. Comment le ministre qui a fait le rapport Gobeil et le ministre porteur du rapport sur la privatisation, qui s'appelait le rapport Fortier, peuvent-ils aujourd'hui se considérer capables d'aller exactement à l'inverse de ce qui a été prêché il y a un an, il y a un an et demi, il y a deux ans? Dans ce sens-là, M. le Président, je porterai aussi à votre attention les propos de Jean-Paul Gagné dans le journal Les Affaires du 28 mai dernier, soit la semaine dernière. Je me souviens que M. Gagné, quand il a fait une analyse du discours sur le budget du ministre des Finances, a été très élogieux. Il a été très gentil envers le ministre des Finances et le gouvernement en disant: Voilà un budget. Il avait mis beaucoup d'encensement sans être capable peut-être d'aller un peu plus dans les détails, en profondeur. Mais je pense que c'était notre rôle à nous. Ce même M. Gagné, ce même personnage qui a louange le gouvernement sur le fameux budget qui a été prononcé le mois dernier, dit aujourd'hui: "Une étatisation injustifiée." Cela ne doit pas être que tous ces gens-là, que nous de ce côté-ci et sûrement d'autres collègues de l'autre côté, on est tous à côté de la "track", on est tous à côté avec une mauvaise vision des choses et qu'il n'y a que le ministre qui a la bonne. Dans le fond, M. Gagné conclut en disant que la raison pour laquelle on en est arrivé là, c'est parce que le ministre a voulu acheter la paix syndicale. Si c'est ça, M. le Président, je suis drôlement inquiet.

Je ne comprends pas comment le Conseil des ministres - le ministre peut avoir pris une tangente, il peut avoir subi des pressions et avoir voulu régler rapidement un cas - je ne comprends pas comment ses autres collègues du Conseil des ministres, et particulièrement le premier ministre, peuvent actuellement appuyer le ministre dans son action. Pourquoi le premier ministre ne le rappelle-t-il pas à l'ordre et ne lui demande-t-il pas de refaire son devoir? Je pense que d'autres ministres l'ont fait, particulièrement le ministre du Travail, de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu qui a dû refaire ses devoirs à quelques reprises; ses devoirs; il est encore en train de les refaire actuellement. Ce ne serait pas honteux si le ministre délégué à la Famille, à la Santé et aux Services sociaux retirait son projet de loi - il n'est pas trop tard - s'il se faisait entendre et négociait, pour juillet prochain, avec les gens du syndicat pour être sûr que, lorsqu'il posera un geste, s'il a à poser un geste, il ait pris tout en considération, y compris, entre autres, une formule de dédommagement pour ceux qui seront étatisés.

Dans ce sens-là, M. le Président, et je conclus là-dessus, je pense que le ministre délégué à la Famille, à la Santé et aux Services sociaux pourra en sortir grandi. S'il s'entête dans la formule qu'il envisage actuellement, je pense qu'il fait fausse route et, de ce côté-ci, on aura beaucoup de difficulté à dire oui à ce projet de loi. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président: Nous allons maintenant poursuivre le débat avec l'intervention de M. le député de Lévis.

M. Jean Garon

M. Garon: Merci, M. le Président. Nous nous trouvons devant un drôle de gouvernement qui a liquidé et privatisé les principaux instruments de développement économique du Québec, qu'il s'agisse du domaine de l'alimentation, du domaine minier, du domaine des forêts ou de la transformation du bois, etc. En retour, nous avons vu la nationalisation d'un centre commercial à Charlesbourg, l'Atrium, et, aujourd'hui, nous voyons la proposition de la nationalisation du service d'ambulances de la région de Montréal.

J'ai la nette impression, M. le Président, que les grands conseillers du gouvernement, ces bénévoles, ces banquiers qui conseillaient le gouvernement, ou bien ne conseillent plus le gouvernement ou bien le comité a perdu les pédales s'il a conseillé le ministre. Ces grands banquiers qui disaient qu'il fallait, imaginez-vous, faire disparaître le Comité de surveillance des étalons qui coûtait 2000 $ par année, n'auraient sûrement pas conseillé au gouvernement de nationaliser l'Atrium, un centre commercial de Charlesbourg, au fort prix de 11 000 000 $, à moins que cela n'ait réglé des problèmes des amis financiers, propriétaires d'un centre commercial qui ne marchait pas. Aujourd'hui, on se retrouve devant un projet de loi pour nationaliser un service d'ambulances à Montréal. Je dois vous dire, M. le Président, que je cherche la logique et j'ai l'impression qu'il s'agit d'une nouvelle théorie économique. Évidemment, je n'ai

pas encore lu les propos d'Alain Dubuc concernant ce projet, mais il s'agit sûrement d'une nouvelle théorie économique où les deux principaux volets de la nationalisation du gouvernement sont un centre commercial et un service d'ambulances. Je ne vois pas trop la perspective de développement économique qu'entend suivre le gouvernement. (21 h 30)

J'ai vu, dans les journaux, des articles qui, habituellement, inspirent les orateurs du Parti libéral. Mon collègue de Bertrand référait au journal Les Affaires où un editorial de M. Jean-Paul Gagné dit: 'Transport ambulancier, étatisation injustifiée." M. le Président, c'est écrit ici.

Et le député de Beauce-Sud, champion de la privatisation, ne comprenait pas que dans le secteur des pêches une entreprise puisse avoir une participation du gouvernement. Maintenant, il veut nationaliser un service d'ambulances à Montréal. Les commentaires, les propos du journal Les Affaires, ne semblent plus l'inquiéter, lui qui disait avec son autre collègue qu'il fallait diriger le gouvernement comme une "business", comme une entreprise. Aujourd'hui, il veut nationaliser un service d'ambulances. On ne le comprend plus.

On voit également, dans le journal Le Devoir un article du mois de juin, sous la plume de Mme Rowan, qui dit: "Les infirmières d'Ur-gences-santé ont peur de disparaître avec la réorganisation du service." Vous comprendrez que les infirmières dans un service d'ambulances ont un certain rôle à jouer. Elles craignent la solution du ministre.

On voit l'éditorialiste du Devoir, M. Fran-coeur, qui dit à l'égard du ministre: "Reddition humiliante", que le ministre a paniqué. Le ministre n'est pas habitué à faire affaire à Montréal. Là, il s'est trouvé devant un syndicat militant un peu et il a dit: Ouf! La panique l'a pris et il a décidé de proposer de nationaliser le service. C'est pourquoi l'éditorialiste du Devoir parle d'une reddition humiliante parce qu'il reste estomaqué de voir la solution qu'a adoptée le ministre. Il dit même, et il ne mâche pas ses mots: "À côté de ça, les Thermopyles n'étaient qu'un jeu d'enfants. Et Léonidas peut aller se rhabiller." Pourquoi? Parce qu'il se rend bien compte que cela n'a pas de bon sens.

Le journal La Presse. On voit l'éditorial de M. Vennat qui dit: "Ambulances, s'il vous plaît." Lui aussi est estomaqué. Il dit qu'il n'y a pas eu de débat public. Le débat public n'a pas eu lieu. Le ministre, autrefois temporairement aux Pêcheries, qui aura réussi à faire disparaître la moitié de son budget... De 40 000 000 $, il est passé à 20 000 000 $ en l'espace de deux ans. Il se demandait pourquoi on exigeait de l'asphalte ou du gazon coupé autour des usines. Il n'est pas parvenu à comprendre cela en l'espace de deux ans, ne sachant pas que dans les hautes herbes qui entourent les usines se ramasse habituellement la vermine. Il n'a pas réussi à comprendre ce que voulait dire l'hygiène alimentaire. Maintenant, il est rendu dans les ambulances et la politique familiale.

Encore là, il est incapable de faire des consultations appropriées. L'éditorialiste de La Presse dit que toutes ces acceptions auraient nécessité un débat public. On ne décide pas de créer ainsi un nouveau service d'État en catastrophe.

M. le Président, cela commence à faire du monde. On se rend compte qu'il a tellement paniqué que l'ex-conseiller syndical des ambulanciers a été engagé pour la nouvelle corporation avant même que la loi soit votée. Imaginez-vous, M. le Président! Normalement, avant l'adoption d'une loi, on n'a pas le droit d'engager aucune dépense. Le ministre n'a même pas le droit de se servir des fonctionnaires pour faire la loi, pour l'aider dans la vente de la loi ou l'explication de celle-ci parce que la loi est devant le Parlement et l'administration ne peut pas être saisie de la loi avant qu'elle soit adoptée. Évidemment, le ministre qui administre comme une "business", s'est pensé dans son commerce où il pouvait faire ce qu'il voulait.

Ce n'est pas comme cela que ça fonctionne dans l'administration publique. Des règles doivent être respectées et on ne peut pas se comporter comme si une loi avait été adoptée alors qu'elle vient d'être déposée et qu'elle est encore en débat devant l'Assemblée nationale et que le principe n'a même pas été adopté. On ne peut pas engager de dépenses. M. le Président, on est estomaqués.

On voit ici maintenant, encore dans Le Devoir, que les propriétaires d'ambulances tentent de saisir la logique de leur nouveau statut mais n'y comprennent rien. Comprenez-vous? Les infirmières ne sont pas d'accord. Les propriétaires d'ambulances ne sont pas d'accord; ils ne savent pas ce qui leur arrive. Tous les commentateurs se posent des questions et ne comprennent pas ce qui arrive, ne comprennent pas le ministre. Le ministre, lui, a l'air sur le pilote automatique. Je comprends un peu ce qui est arrivé. Le ministre est allé aux Pêches où il a fait une loi inutile sur la transformation des produits marins alors qu'il sait qu'il n'a aucun contrôle sur la vente du poisson par les pêcheurs qui ont pris le poisson parce qu'il n'a pas le contrôle sur les mers, il n'a pas le contrôle sur les voyages des pêcheurs. Il a fait une loi inutile et a continué malgré toutes les démonstrations qui ont été faites à adopter son projet de loi qui ne sera jamais appliqué.

Après cela, le ministre a été nommé à la politique familiale. Et à la politique familiale, il a finalement délivré une souris, un conseil, imaginez-vous! Alors que le comité de privatisation des organismes avait fait en sorte d'essayer d'abolir à peu près tous les conseils qui existaient au gouvernement, que le Parti libéral a fait voter des projets de loi pour abolir les conseils consultatifs, le ministre, comme seule

politique familiale, arrive avec un conseil consultatif. Là, I comprend bien qu'il est en train de se peinturer, il est en train de sentir que le monde ne le voit pas comme un ministre très efficace. Devant le service ambulancier, il a paniqué: II a dit: Les gens vont dire: Jamais deux sans trois. Ils ne comprendront pas si je ne bouge pas. Devant la complexité du problème, devant son ignorance des problèmes dans le domaine ambulancier à Montréal, il a appliqué de lui-même une solution dans un projet de loi que personne ne comprend.

M. le Président, il en arrivera à proposer qu'il y ait deux services ambulanciers au Québec. Imaginez-vous! Un service ambulancier à Montréal et un régime en dehors de Montréal. Un service ambulancier nationalisé à Montréal, connecté sur le fonds consolidé du revenu, avec un syndicat très militant, et en dehors de Montréal, un service privé, la privatisation va continuer, c'est-à-dire que les services privés vont continuer. Peut-on imaginer une solution aussi absurde? Le ministre ne s'est pas donné la peine de connaître ce dossier, ne s'est pas donné la peine ou a eu peur de faire une véritable concertation et de véritablement faire un bon diagnostic. Il a paniqué et il propose aujourd'hui un projet de loi qui n'a pas de sens.

On trouve d'ailleurs dans ce projet de loi toutes sortes d'énoncés qui sont incompréhensibles. Je disais qu'on veut créer deux services d'ambulances: un pour Montréal, un pour le reste du Québec. C'est surprenant quand même pour un ministre qui vient d'une région qui s'enorgueillit de ses entreprises privées, un Beauceron, imaginez-vous, un Beauceron qui va proposer la nationalisation. J'allais dire plus, mais le Président pourrait m'empêcher, mais je vais oser: Un Dutil qui va être contre l'entreprise privée! M. le Président, cela n'a pas de bon sens. Le ministre ne recommanderait pas une telle solution pour ses propres entreprises. Je vois arriver le ministre de la petite et de la moyenne entreprise qui pariait beaucoup plus quand il était à la Chambre de commerce de Montréal que maintenant qu'il est député en cette Chambre.

Il est entré, il était connu un peu. Dans le Parlement, il n'était pas connu. Mais il ne parle pas. Le ministre va sans doute dire qu'il va appuyer le service nationalisé d'ambulances à Montréal, comme si l'entreprise privée n'était pas capable d'être efficace à Montréal dans le domaine des ambulances, comme si c'était seulement à la campagne qu'il fallait avoir des entreprises privées dans le domaine ambulancier? Comme s'il fallait créer deux régimes dans le service ambulancier. (21 h 40)

De plus, le ministre s'est donné des pouvoirs incroyables. On voit que le ministre, qui n'est pas habitué à fonctionner avec l'entreprise publique, essaie d'adopter des règles d'entreprise privée. Il veut faire adopter une clause comme celle-ci: Les contrats de location se font par soumissions publiques et la corporation n'est pas obligée de retenir quelque soumission que ce soit. On comprend que, dans un régime public, on n'est pas obligé de choisir la soumission la plus basse. On n'établit pas dans le projet de loi qu'on fait des soumissions, mais c'est comme s'il n'y en avait pas. Il y a une différence entre le fait de dire qu'on fait faire des soumissions et qu'on peut ne pas prendre la soumission la plus basse - c'est une chose - et dire qu'on fait faire des soumissions et qu'après, on n'est lié en aucune façon par les soumissions, on n'est pas obligé de choisir la meilleure soumission ou quelque soumission que ce soit. Qu'est-ce que c'est que cela? Un autre être hybride. Ou bien on adopte un système d'entreprise privée ou bien on adopte un système d'entreprise publique. Et dans un système d'entreprise publique, la soumission, c'est la règle. Avec un régime de soumissions, il y a un encadrement qui suit.

Le député de Beauce-Sud n'a pas fait ses devoirs. Évidemment, avant de faire des devoirs, H faut acquérir la formation. Lui qui s'est noyé dans la politique familiale est en train de se noyer dans le service ambulancier maintenant. Cela n'a pas de bon sens tout simplement. C'est pourquoi l'unanimité s'est faite contre le projet de loi du ministre qui n'a pas de sens. C'est pourquoi ce projet de loi ne doit pas être adopté. Le ministre doit réfléchir là-dessus. Au contraire, il doit s'engager davantage à rencontrer les gens qui sont touchés à Montréal pour régler le problème, mais de façon efficace et ne pas prendre ce qu'il appelait quand il faisait ses discours, des solutions de socialiste. Imaginez, le député de Beauce-Sud, champion de l'entreprise privée, héros de l'entreprise privée, qui, dans la première mesure concrète qu'il veut adopter, veut nationaliser. Il est clair que le ministre doit refaire ses devoirs, doit retravailler, doit aller consulter les gens du milieu. Il ne peut pas arriver avec des régimes complètement disparates d'un bout à l'autre du Québec et, en même temps, se donner des pouvoirs considérables concernant ce qu'il va accepter par la suite.

Dans son projet, le ministre se donne différents types de pouvoirs en se donnant des marges de manoeuvre arbitraires en fonction de ce qu'il pourra faire éventuellement. Cela n'est pas normal par rapport aux zones limitrophes. On ne peut pas créer des régimes comme celui-là sans créer de l'insatisfaction partout et, surtout, créer de la dissension et de la chicane. Je pensais que le ministre aurait été plus soucieux du consensus social, parce que le transport ambulancier n'est pas un service comme un autre, c'est un service essentiel. Comme tous les services essentiels, il ne doit pas être traité à la légère comme le fait le ministre actuellement. Les soins apportés au malade avant son admission à l'hôpital sont aussi sinon plus importants que ceux qu'il recevra par la suite, parce que tout le monde sait, par exemple, que, pour les crises cardiaques, c'est dans la première demi-heure que

cela se joue, que si on n'a pas été capable d'offrir les services adéquats dans la première demi-heure, un grand nombre de patients n'iront pas plus loin et ne se rendront même pas à l'hôpital. C'est pourquoi les services ambulanciers ne sont pas des services qu'on peut traiter légèrement.

De plus, les propriétaires prétendent que la réforme aura comme conséquence une augmentation des coûts du système. Actuellement, on parle d'un coût du système de 24 000 000 $, à Montréal et il pourrait augmenter à plus de 50 000 000 $. Il ne s'agit pas de choses incohérentes. J'ai un peu été surpris, M. le Président, que le premier ministre nomme le député de Beauce-Sud, qui a bien réussi comme commerçant, mais...

Une voix: Dans le domaine des bicycles.

M. Garon: ...dans le domaine de la bicyclette; on dit même qu'il aurait inventé un dérailleur automatique. Par ailleurs, je me serais beaucoup plus attendu que le premier ministre nomme le ministre qu'il a nommé, qu'il a "appointé" à la loi 101...

Une voix: "Appointé"!

M. Garon: ...ou qu'il a nommé à la 101, comme responsable de la loi 101...

Une voix: Parce que lui déraille.

M. Garon: Je dis "appointé" pour que le nouveau ministre comprenne mieux.

Une voix: C'est cela. Des voix: Ah!

M. Garon: Comprenez-vous. Je dirai que ce ministre, qui s'est signalé sous l'ancien gouvernement, comme le sous-ministre responsable des urgences dans les hôpitaux - on a vu avec quel succès!...

Une voix: II a fermé les urgences.

M. Garon: ...aurait peut-être été le ministre qui aurait pu servir, si le premier ministre avait confiance en lui, la politique sur les services ambulanciers. Mais non! C'est le ministre qui a établi le chaos dans les services d'urgence. Le premier ministre n'a pas jugé bon de le nommer aux ambulances, mais de nommer le député de Beauce-Sud qui aurait été beaucoup mieux dans un autre ministère, plus rapproché du domaine du commerce. Les services ambulanciers, ce n'est pas un commerce; ce n'est pas le commerce des malades. Au contraire, c'est un service essentiel qui doit être traité comme un service essentiel. C'est pourquoi nous ne pouvons pas laisser passer un projet de loi comme celui-là qui crée un être hybride qui ne survivra pas, mais qui va créer des dissensions, des chicanes au Québec et qui va faire créer un service qui ne fonctionnera pas à Montréal.

Il faut que le gouvernement trouve des solutions plus adaptées. C'est pourquoi ce n'est pas le temps, en fin de session, en catastrophe, d'adopter un projet de loi qui n'est pas bon, qui a été mal fait parce qu'il a été mal conçu. Je vous remercie, M. le Président

Le Vice-Président: Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Dubuc.

M. Hubert Desbiens

M. Desbiens: Merci, M. le Président Le projet de loi 34, que le ministre de la santé nous présente vise, comme c'est normal, à régler une situation ou à apporter une amélioration à une situation existante, au Québec.

Je pense qu'il est inutile de rappeler qu'il y a, effectivement, des problèmes dans le système ambulancier au Québec, tout particulièrement à Montréal. On se rappelle les situations conflictuelles qui se sont révélées au fil des mois. La présentation de ce projet de loi de la part du ministre devait donner lieu à une toute nouvelle politique, à une nouvelle orientation du système ambulancier du Québec. Elle s'avère, à toutes fins utiles, un cataplasme sur une jambe de bois et un soi-disant bien qui va empirer le mal ou, en tout cas, qui va créer au Québec au moins deux catégories de citoyens dans le domaine du service ambulancier. Chez nous, dans la région du Saguenay - Lac-Saint-Jean, comme dans les autres régions du Québec, on attendait et on espérait; les ambulanciers avaient aussi présenté au ministre et au gouvernement des propositions en vue d'assurer ou d'améliorer le service et de faire corriger un peu partout au Québec la situation qui prévalait dans ce secteur. (21 h 50)

Une chose est importante. On constate vite, à la lecture du projet de loi 34 que, finalement, ce projet de loi n'assurera en aucune façon le maintien du système d'intervention médicale d'urgence tel qu'il existe présentement à Urgences-santé. On se rend compte que, finalement, ce projet de loi ne vient que répondre ou, comme le soulignait M. Jean Francoeur, dans un article du Devoir du 19 mai, ce projet de loi ne vient que démontrer que ce gouvernement, en particulier le ministre responsable du service ambulancier, fait une reddition humiliante, comme le titrait le Devoir du 19 mai, devant une situation conflictuelle qui a été créée par un organisme syndical. Pour éviter d'avoir à prendre le temps de trouver, avec l'ensemble des usagers du secteur, des solutions véritables aux problèmes qu'on vivait dans la région de Montréal en particulier, il faut bien l'admettre, le ministre a plutôt conclu très rapidement que la façon de régler pour ne pas avoir à affronter les situations, pour

ne pas avoir à crever l'abcès et régler de façon définitive et à l'avantage de la population la situation du service ambulancier, comme le soulignait d'ailleurs un autre journaliste, c'était d'agir comme si un syndicat avait véritablement rédigé ce projet de loi.

Justement, on retrouve dans ce projet de loi la formation du conseil d'administration, sur lequel on retrouve un p.-d.g. qui était un des principaux membres du Regroupement des techniciens ambulanciers du Québec, le RETAQ. Ce même monsieur se retrouve p.-d.g. - c'est la première fois que cette situation existe dans des organismes de cette nature - il a été embauché, il est déjà en poste. Le chef parlementaire du Parti québécois l'a soulevé ici même, à l'Assemblée nationale, lors de la période de questions, et même si le ministre n'a pas voulu répondre clairement à ses questions, tout le monde sait que ce p.-d.g. est embauché, on peut pratiquement dire de façon illégale puisqu'il occupe une fonction qui est prévue dans un projet de loi - non pas dans une loi - dont nous sommes actuellement en train d'étudier le principe. C'est donc un poste qui n'existe pas, en soi, jusqu'à ce que la loi le créant soit adoptée à l'Assemblée nationale. C'est là un autre accroc à notre système parlementaire démocratique que le ministre délégué à la Santé et aux Services sociaux vient de faire.

Ce même p.-d.g. prétendait justement, lorsqu'il faisait de l'action syndicale, que si les techniciennes et les techniciens ambulanciers ont posé comme objectif l'étatisation des services hospitaliers, c'est qu'ils voulaient justement briser la logique inhérente à la propriété privée: le profit. Selon lui, ils aspiraient à lui substituer une logique différente, mieux adaptée au travail qu'ils sont appelés à accomplir et qui, somme toute, demeure encore la préoccupation principale des services publics au Québec: la quantité, la qualité et l'efficience. Ce même p.-d.g. qui, deux ou trois jours après sa nomination, se présentait à nouveau, comme syndiqué cette fois-ci, devant l'assemblée générale spéciale qui avait été convoquée par son syndicat. À l'ordre du jour de l'assemblée générale spéciale ainsi convoquée, on le retrouve très bien: Invité spécial, le directeur de l'organisme sans but lucratif. Période de questions au p.-d.g. Donc une situation tout à fait...

Une voix: Alarmante.

M. Desbiens: ...alarmante, oui c'est bien le mot, pour la population, non seulement pour la population et les usagers, mais aussi, je pense, pour les autres parties au service ambulancier. Parce qu'il y a aussi d'autres personnes actives qui oeuvrent dans ce domaine-là. Pensons seulement à ce qui peut arriver aux infirmiers et infirmières. On sait que les infirmières font actuellement un travail de tri qui fait que, par leurs connaissances médicales, elles peuvent, lorsque quelqu'un en difficulté appelle, repérer s'il y a nécessité ou pas, s'il y a un moyen autre que l'hospitalisation, s'il y a un moyen autre que l'ambulance pour transporter un malade. Alors le système de tri par des infirmières compétentes était une façon, en soi, d'éliminer une partie des coûts qui sont nécessairement reliés au transport ambulancier, par le fait d'aller chercher les malades pour les conduire à un hôpital ou à un autre. Mais aussi, je pense que cela permettait... C'est peut-être plus grave en soi. Si les ambulanciers, dès qu'ils ont un appel, se dirigent avec les ambulances pour répondre aux multiples demandes qu'ils ont chaque jour, il pourrait se retrouver des situations aussi critiques qu'un manque d'ambulances et de voitures. De sorte que, pendant que toutes les voitures seraient parties pour des cas qui n'auraient peut-être pas nécessité un transport ambulancier, des cas véritablement critiques pourraient se produire et on se retrouverait dans l'impossibilité de pouvoir leur rendre les services que leur situation exige. Alors il y a toute cette partie-là aussi du projet de loi qui est en cause ici.

De plus, on sait que ce gouvernement, depuis qu'il est en poste, a prôné - on se souvient très bien des fameux rapports des sages - la privatisation. Or, par ce projet de loi, le ministre se lance dans une privatisation et une privatisation toute croche, une moitié de privatisation, une privatisation qui va être bonne selon lui pour... Excusez-moi. Nationalisation, c'est bien cela que j'avais à l'esprit. Donc, il se lance dans la nationalisation et il le fait de façon toute croche c'est-à-dire que dans une partie où encore il considère... Et cela est pensable aussi puisque ce gouvernement-là, depuis ses débuts, a démontré très clairement dans une foule de secteurs que, pour lui, il y avait deux sortes de Québec. Un Québec qui s'appelle Montréal, la grande ville, la périphérie, la grande région et un Québec qui s'appelle les régions périphériques et qui, elles... Selon leurs actions surtout bien plus que leurs paroles ou contrairement à leurs paroles parce qu'ils parlent des régions périphériques comme étant une de leur priorité, leurs actions et cela en est une supplémentaire, je pense que ce projet de loi du ministre vient contredire leur langage. C'est-à-dire que là, il essaie de cette façon tout à fait incongrue de régler une situation à Montréal en agissant sous le chantage d'un syndicat, par une nationalisation et une nationalisation incomplète, parce que, encore là, les propriétaires d'ambulances, de voitures, la tôle, vont rester avec leur tôle entre les mains. Ils vont pouvoir, bien sûr, faire des soumissions pour obtenir des contrats mais ils vont rester propriétaires. (22 heures)

C'est comme si, lorsqu'on a fait la nationalisation de l'électricité, on avait laissé les poteaux et les lignes téléphoniques à ia Shawini-gan Water and Power et on avait dit: Soumissionnez à Hydro-Québec et on va vous louer ou

on va vous payer vos lignes et vos poteaux téléphoniques. C'est une nationalisation incomplète en ce sens donc, qu'elle ne couvre qu'une région et délaisse les autres régions du Québec, l'ensemble des régions périphériques. C'est aussi une nationalisation incomplète en ce sens qu'elle laisse la tôle aux propriétaires d'ambulances qui n'ont aucun recours, qui n'ont aucune compensation non plus puisqu'on les lèse nécessairement en agissant de la sorte. Ils n'ont aucune compensation pour l'entreprise qu'ils possédaient, qu'ils avaient développée, qu'ils avaient mise au service de la population. Donc, aucune compensation ne leur est assurée et, après quelque temps, on sait que ces entrepreneurs ambulanciers privés devront se retrouver avec leur tôle, Gros-Jean comme devant, mais sans n'avoir pu retirer aucun bénéfice ni même pu être compensés pour les pertes qu'ils devront subir.

Quand on parle de nationalisation, il y a un principe minimal d'équité qui doit être respecté et qui ne semble pas l'être par ce projet de loi 34. Encore une fois, ce qui est absolument incroyable, c'est surtout, qu'on va se retrouver avec des gens qui vont être des fonctionnaires du système ambulancier à Montréal, payés sur une base de fonctionnaire et, dans nos régions, ce seront des ambulanciers toujours au service d'entreprises, de petites entreprises ambulancières et qui seront payés d'une façon différente. Ce n'est certainement pas comme cela, lorsque j'ai rencontré les ambulanciers dans mon comté, dans ma région, qu'ils exprimaient leur volonté. Ce n'est pas du tout de cette façon qu'ils entendaient que leur situation s'améliore. Cela reviendrait à dire qu'un peu partout au Québec, dans ce secteur-là en particulier, puisqu'on a le cas à l'étude, c'est par des pressions, par des menaces, par du chantage, que les gouvernements ou les membres élus de l'Assemblée nationale doivent à l'avenir travailler, étudier, voter des projets de loi et les mettre en application. L'administration publique au Québec, si on se fie à ce projet de loi 34 sur les services ambulanciers, c'est l'acceptation par ce gouvernement que n'importe qui au Québec, n'importe quel groupe qui a le moindrement d'importance et de puissance ou qui a des moyens de faire des pressions particulières, chantage ou autres, puisse faire agir ce gouvernement-là de la façon dont ce groupe particulier le voit pour son bien-être à lui, son petit groupe à lui. Il peut forcer le gouvernement à agir dans le sens de ses intérêts personnels, autrement dit, l'intérêt corporatif ici au sens le plus restrictif possible du terme.

M. le Président, vous comprendrez que, dans ces conditions, le Parti québécois ne va certainement pas voter pour un tel projet de loi, d'autant plus que même la corporation sans but lucratif qui est formée est constituée - c'est le dernier point que je voudrais soulever - des employés mêmes du syndicat, mais que les propriétaires n'ont pas de poste à ce conseil d'administration. Les infirmières et infirmiers qui font partie du système ambulancier n'ont aucun poste à ce conseil d'administration. C'est un modèle tout à fait inédit. C'est un modèle tout à fait nouveau que ce ministre vient de nous inventer. Il ne fait que retarder par son projet de loi... Il ne pourra jamais fonctionner véritablement pour donner un service que la population attend, mais un service aussi, a ceux qui doivent le donner, à ceux qui doivent l'exercer, c'est-à-dire aux employés touchés par ce type de service, qui leur assure des moyens équitables de subsistance et de fonctionnement dans le système pour qu'ils puissent dispenser à la population les services ambulanciers auxquels elle s'attend au Québec. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président: Je vais céder la parole à M. le député de Laviolette et leader adjoint de l'Opposition.

M. Jean-Pierre Jolivet

M. Jolivet: Merci, M. le Président. C'est avec beaucoup d'appréhension, quand la soirée a débuté à 20 heures, que j'attendais le discours du député de Sainte-Anne. Je m'étais fait un scénario dans ma fête et je vais me permettre de le refaire avec vous, puisque, comme moi, vous avez été membre de la trente-deuxième législature.

J'étais à votre place comme vice-président et, à notre place, c'étaient les membres du Parti libéral. Vous les avez vus, comme moi, et si nous avions eu, comme gouvernement à l'époque, à présenter un tel projet de loi, quel aurait été le discours du député de Sainte-Anne, M. le Président? Quel aurait été ce discours? Il serait venu ici en cette Chambre en disant: à l'heure du souper, j'ai eu l'occasion de discuter avec mon épouse et avec des gens de mon comté qui m'ont appelé; je n'ai pas eu le temps de souper. Il fallait que je vienne dire à cette Assemblée que ce projet de loi n'a pas de bon sens.

Je me mettais aussi dans cette ambiance en regardant le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche; quel discours il nous aurait fait! Je me mettais à la place de l'actuel ministre du Travail, de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu et député de Brome-Missisquoi; quel discours il nous aurait fait! Quels péchés d'Israël nous aurait-il mis sur le dos! Devant moi, l'actuel ministre responsable de la Privatisation, alors que, de ce côté-ci, il aurait été député; quel discours il nous aurait fait! Il aurait déchiré sa chemise, il nous aurait traités de tous les maux, m.o.t.s. et m.a.u.x., et là je regarde l'actuel leader du gouvernement, député de Gatineau et ministre du Tourisme. Ah! Il me fait signe que non, mais je sais, M. le Président, et vous étiez aussi présent, quel discours il aurait fait. Il nous aurait dit: Cela n'a pas de bon sens. Ce que vous avez présenté devant l'Assemblée doit être rayé. On doit faire disparaître ce

projet de loi qui n'aurait même jamais dû venir à l'Assemblée nationale.

C'est le discours que ces gens nous auraient tenu. Là, ils nous auraient demandé: Qu'êtes-vous en train de faire? Vous êtes en train de nationaliser. Vous êtes en train de répondre à vos amis, les syndiqués. Vous avez paniqué, nous auraient-ils dit. Ah, je les entends.

J'ai eu l'occasion comme vous, M. le Président, de siéger durant de nombreuses soirées et nuits, en période de fin de session comme la nôtre, qu'on disait intensive dans le temps; aujourd'hui, on pourrait, tout simplement, dire fin de session, parce que de session intensive, il n'y en a pas. Ils n'ont pas de projets de loi. Ce qu'ils nous proposent, ce sont des formules comme celles qu'on a connues la semaine passée: des motions disant qu'il y a urgence de passer à autre chose, d'appliquer d'autres règles et de nous bulldozer. Mais, sur le reste, il n'y a pas grand-chose, mais sauf un projet de loi devant nous, qui nous propose l'inverse de leur pensée.

Qu'est-ce qui s'est passé entre le moment - il y a peu de temps, c'est-à-dire trois ans -où ils étaient dans l'Opposition et le moment où ils sont arrivés au pouvoir? Avant ces mêmes personnes nous ont dit: Privatisation, disparition des conseils consultatifs, disparition des moyens pour permettre aux conseils consultatifs qui demeureront d'agir. Jamais, au grand jamais de nationalisation. C'est ce qu'ils nous ont dit durant la campagne électorale et, aujourd'hui, oh, horreur! qu'est-ce qu'on entend? Ce sont eux qui viennent nous proposer la nationalisation. Nationalisation toute croche, en plus, qui ne répond pas aux besoins de l'ensemble des gens. Ils se font même, en termes québécois, excusez l'expression, "blaster" par les gens qui sont supposés représenter le Conseil du patronat, Ghislain Dufour en particulier. Je n'en reviens pas. Je suis tout étonné. (22 h 10)

Et regardez le discours que le député de Sainte-Anne nous a tenu tout à l'heure. Il n'a pas parlé de son épouse qui l'avait appelé, il ne nous a pas parlé des gens qui l'ont appelé à l'heure du souper. Il est simplement venu nous dire qu'il avait un bon ministre, que le ministre connaissait tout et que ce bon ministre avait décidé cela pour les besoins de la santé publique. Il a commencé à larmoyer, à nous faire passer un peu pour des gens qui ne pensaient pas à la santé publique. Puis, H a essayé de nous dire que ce que le ministre présentait ce soir s'appliquait à l'ensemble du Québec.

J'ai des petites nouvelles pour eux. On peut être en désaccord. On n'a qu'à regarder ce qui s'est passé dans l'histoire du Québec. Quand est arrivée la police, qu'on appelle aujourd'hui la Sûreté du Québec, sinon à des moments où des municipalités, devant des conflits, ne pouvaient plus agir? Une décision a été prise et on a formé la Sûreté du Québec qui est une police nationale.

Le transport en commun. À quel moment a-t-on commencé à mettre en place le transport en commun? C'est quand il y a eu des difficultés dans les grandes villes. À un moment donné, on a essayé d'appliquer cela à tout le Québec. On s'aperçoit que, dans certains cas, ce n'était peut-être pas cela qui était nécessaire. Peut-être qu'une simple régie aurait suffi plutôt qu'une Commission des transports. Et on est arrivé avec des problèmes, des difficultés en cours de route Et là, qu'est-ce qu'on voit? Un gouvernement qui décide, dans ces circonstances, de couper les vivres et qui dit: Débrouillez-vous maintenant.

Souvenez-vous, M. le Président - vous étiez jeune à l'époque, oui, oui - que c'est Mme Claire Kirkland-Casgrain qui, à un moment donné, sous le principe d'ouvrir la forêt au Québec, avait décidé de créer ce que l'on a appelé à l'époque des organisations sans but lucratif en forêt. Je m'en souviens puisque ma région en est une où on l'a fait. Qu'est-ce qu'on a fait? On a mis en marche des organismes qui n'ont pas fonctionné. Quel a été le résultat? On ne pouvait pas laisser libres des territoires pour des gens qui voulaient les avoir. Alors, on a formé ce qu'on appelle des réserves. J'en ai une chez moi, la réserve Saint-Maurice. Regardez l'histoire. Comment sont arrivées les réserves? C'est parce qu'il y avait des difficultés. On a paniqué, on a eu peur et on a fait des choses. Encore aujourd'hui, on se pose des questions sur les besoins de ces réserves. Le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche en est responsable.

Qu'est-on en train de faire? On est en train de régler un problème de relations du travail à Montréal en ne tenant compte que d'une partie des gens concernés, c'est-à-dire les techniciens ambulanciers au Québec. On oublie les infirmières, on oublie les employeurs et on dit en fin de compte: Ce n'est pas grave, nous avons décidé d'agir. Les gens disent qu'il faudrait que le ministre comprenne. J'ai des nouvelles pour eux. Le ministre est un être que j'ai connu en d'autres lieux, en commission parlementaire. Il est têtu comme une mule. Ce qu'il a pensé, c'est fini. Il y a pas autre chose après. Ce qu'on lui a donné comme ordre de la part du bureau du premier ministre, c'est ce qu'il va faire. On va essayer de le convaincre. Mais non, c'est quasiment peine perdue, M. le Président. C'est une cause perdue d'avance. Le ministre sourit parce qu'il sait très bien que j'ai raison. C'est un être têtu. Il a décidé, pour répondre à des pressions, de faire cela.

Quels sont les effets à long terme? C'est que dans ma propre région les gens sont venus me voir. Certains m'ont dit, comme, d'ailleurs, le député d'Abitibi-Ouest le dit, - et je pense que je n'ai pas à cacher l'un ou l'autre - qu'ils seraient heureux, comme syndiqués, de pouvoir profiter de ce qu'on appelle la locomotive de Montréal. La locomotive de Montréal va donner des conditions de travail, des conditions salariales telles que cela va se répercuter ailleurs parce

que la pression va maintenant venir d'ailleurs. On dira: Ce que vous avez fait à Montréal, faites-le chez nous.

En contre-partie, les employeurs vont dire: On n'est plus capables. Un employeur est venu me voir, l'organisation Ambulance 12 12 chez nous, qui est certainement allée voir le député de Saint-Maurice qui n'a pas parlé ce soir de ces problèmes. Que nous disent ces gens? Ils nous disent ceci: Je viens d'acheter une ambulance neuve. Cela vaut des milliers et des milliers de dollars et je ne sais pas ce qui va m'arriver avec la décision que le gouvernement vient de prendre parce que, dans ma tête à moi, ce sont des gens qui étaient pour l'entreprise privée. Aujourd'hui, je me retrouve devant un fait bien difficile à accepter; après les avoir crus, je me sens dans la situation où, en fin de compte, je vais peut-être perdre les sommes que j'ai investies parce qu'on va non pas me nationaliser, mais louer ma tôle, mon ambulance. On va me la louer, mais à quel prix, à quelles conditions? Je ne le sais pas parce que ce n'est pas ce que le ministre va nous dire dans le projet de loi. Il va nous dire: Écoutez, je règle un problème à Montréal. Ce problème, il était urgent qu'on le règle pour un système ambulancier qui répond à des demandes pour l'ensemble des personnes en difficulté et malades.

Mais quel remède de cheval est-on en train de nous faire avaler? On veut régler un gros problème parce qu'on n'a pas le courage de prendre les vraies décisions. On le règle comme cela et après cela on verra. On verra quoi? On verra, donc, des pressions venir de l'ensemble des régions. Et tout le monde le sait - M. le Président, vous êtes certainement à même de le savoir - à l'époque, des gens se plaignaient du système ambulancier parce que cela se faisait dans bien des cas à partir de salons funéraires. Les gens disaient: On n'a pas de services parce qu'il y a un accident qui se produit ici et là et on attend finalement quelqu'un qui va venir ramasser un mort plutôt qu'un blesse qui pourrait être guéri à l'hôpital.

On a connu ces temps-là. C'est fini. Les systèmes dans le Québec se sont perfectionnés. Les gens ont compris qu'il fallait donner mieux et on a mis un système en place. J'ai des amis qui ont travaillé pour des systèmes ambulanciers et qui sont allés suivre les cours qui étaient prévus à l'époque. Et parce qu'on est encore davantage allé vers du travail à temps plein et du travail permanent, ils ont laissé la place à d'autres personnes qui ont suivi d'autres cours et qui donnent aujourd'hui un service convenable en régions. C'est sûr que ce n'est peut-être pas parfait partout, mais c'est mieux que ce n'était. Qu'est-ce que le ministre est en train de leur donner comme message? Nous, du temps de l'Opposition et maintenant au pouvoir, nous avons toujours prôné la privatisation. Parce que nous avons paniqué, parce que nous avons cédé à des pressions, voilà que nous vous proposons une étatisation qui n'est, malheureusement, pas complète; étatisation d'un seul côté.

Dans ce sens, M. le Président, cela nous inquiète. Si j'étais le seul à le dire, si j'étais, après tous mes collègues, venu rajouter à ce qu'ils ont dit, sans nous baser sur des écrits venant d'ailleurs, de gens qui, comme le disait le député de Sainte-Anne, ne devraient pas faire de politique, d'abord en parlant de nous, tout en en faisant lui, cependant... Je pense que ces gens ont soumis des papiers nous indiquant qu'ils ne comprenaient pas le geste du ministre délégué à la Famille, à la Santé et aux Services sociaux. On en arrive, tout simplement, à faire comme mes collègues l'ont dit à se faire l'écho de gens qui disent que l'étatisation du transport ambulancier est injustifiée; que les infirmières d'Urgen-ces-santé ont peur de disparaître avec la réorganisation du service.

Le chef de l'Opposition a posé des questions précises au ministre, mais on est dans un contexte où on sait que la majorité va encore l'emporter avec la décision de fous qu'ils prennent. Malgré tout cela, on va leur laisser la chance de prendre la décision à un moment donné, parce que, faute de combattants, la guerre arrête à un moment donné. Ou encore, ce qui peut arriver dans le système qu'on connaît, c'est que le leader du gouvernement, disant qu'il en a assez d'entendre parler de tout cela, décide de faire une motion ici en cette Chambre pour suspendre les règles, nous ramener en Chambre après discussion en commission parlementaire et nous voir revenir ici maintenant avec des délais à suivre prévus par la décision qu'il aura rendue et, finalement, adopter, d'ici le 23 juin prochain, le projet de loi. (22 h 20)

Mais nous les mettons en garde. Nous leur disons que nous ne pouvons souscrire à une formule telle que présentée et que nous allons tout faire pour les amener à changer d'opinion. Mais, comme je vous le disais, avec ce qu'on a connu la semaine passée - enfin, il y a une semaine en termes de jours puisque c'était jeudi passé - des motions d'urgence présentées par le leader sur des choses qui ne le sont pas, on ne se surprend plus de rien. Ils se sentent tellement forts qu'ils ont décidé de bulldozer le monde.

Dans ce dossier comme dans d'autres, après la décision que le ministre aura prise, voilà qu'une fois le principe adopté il est prêt à entendre du monde. Je dois vous dire que j'ai vécu une commission parlementaire à peu près identique. L'Opposition, une fois le principe adopté, avait demandé, à la suite de discussions qu'on avait eues avec différents groupes, de faire entendre ces groupes en commission parlementaire. Le ministre, de peine et de misère, a finalement accepté d'en entendre deux, parce que ces deux-là avaient eu le courage de venir en commission parlementaire espérant être entendus. Finalement, on s'est retrouvé avec des gens qui n'ont pas été entendus et qui avaient des choses

à dire. La majorité l'a encore emporté en commission parlementaire et le ministre n'a entendu que ceux-là. Voilà qu'on s'est entendu sur les gens qui doivent être entendus la prochaine journée, demain ou jeudi, à une commission parlementaire où on entendra des groupes venir nous parler de ce projet de loi.

Ce que j'espère, c'est que, d'abord, le ministre, au début de la commission ou même dès maintenant dans son droit de réplique, commence à donner des réponses aux questions posées par le chef de l'Opposition; deuxièmement, qu'il écoute, qu'il prenne note et qu'il décide après avoir fait un consensus à partir de ce que les gens lui auront dit. Je vous le dis, M. le Président, j'ai des doutes. Je mets les gens en garde, je leur dis que, si on n'essaie pas tout, on ne peut jamais savoir si on aurait réussi. Alors, essayez de le convaincre. Nous, de l'Opposition, nous avons essayé, nous espérons qu'il a compris quelque chose, même si on peut en douter parfois. On va demander aux gens qui vont venir nous rencontrer en commission parlementaire d'essayer de le convaincre. Peut-être que, vu que cela vient de vous, le ministre va changer d'idée même si, encore une fois, on en doute.

Il reste que nous avons le devoir de tout essayer et nous allons le faire. Nous allons interroger, nous allons apporter des amendements, nous allons voir si le ministre est sérieux dans cette ligne qu'il s'est tracée et qu'il entend suivre d'ici à la fin et s'il comprendra, malgré tout, qu'il vaut mieux reculer sur certains points pour s'assurer que le consensus est fait et rassurer les infirmiers et les infirmières, les techniciens ambulanciers, les propriétaires, l'ensemble des gens qui veulent savoir de la part du gouvernement quelle sorte de services nous aurons désormais et de quelle façon nous allons les offrir à l'ensemble de la collectivité québécoise, où qu'elle se trouve au Québec, en particulier à Montréal dans le contexte qui nous est présenté, mais aussi bien à Québec, à Trois-Rivières ou ailleurs. Des services tels que le ministre a l'intention de les présenter risquent de détériorer la situation, ce que nous ne voulons pas.

Ce que nous désirons le plus, c'est que le ministre soit à même de savoir que nous avons fait un travail constructrf. Malgré ce que le député de Sainte-Anne a voulu insinuer tout à l'heure en disant que nous faisons du travail partisan, je ne pense pas avoir fait un travail partisan ici, ce soir. Je ne suis pas considéré être de ce genre et je pense que je défends l'ensemble des citoyens, d'abord, de mon comté et du Québec que j'ai à représenter et qui font partie de ceux qui ont des choses à dire au gouvernement et qui le disent franchement.

Nous sommes à la fin du débat, puisque le ministre utilisera son droit de réplique. J'espère que, dans son droit de réplique, il pourra donner déjà des indications, à savoir qu'il a changé d'opinion sur certains points et qu'il a l'intention d'apporter des amendements au projet de loi lorsque nous serons en commission parlementaire pour l'étudier article par article. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président: Je reconnais maintenant M. le ministre délégué à la Famille, à la Santé et aux Services sociaux pour l'exercice de son droit de réplique.

M. Robert Dutil (réplique)

M. Dutil: Merci, M. le Président. Je vais exercer mon droit de réplique après une douzaine de députés de l'Opposition qui sont intervenus sur le projet de loi. Si je ne l'ai pas utilisé après chaque intervention, c'est que les interventions se ressemblaient drôlement et que les mêmes arguments sont revenus à tour de rôle.

En ce qui concerne ce projet de loi 34 sur le transport ambulancier dans la province de Québec, je vais parler plus particulièrement des remarques faites par le chef de l'Opposition puisque, règle générale, en touchant celles qu'il a faites, je toucherai l'ensemble des remarques qui ont été faites par les autres parlementaires qui se sont prononcés sur ce projet.

Une première remarque, disait le chef de l'Opposition, c'est que ce projet de loi ne s'occupe pas de la qualité. Des choses importantes se retrouvent dans le projet de loi, pas l'ensemble de la réforme que nous avons annoncée. On sait que nous avons annoncé, entre autres, une formation améliorée, de 825 heures; cela ne se retrouve, évidemment, pas ici et ce n'est pas le propos du projet de loi de le faire.

Les points qui concernent l'amélioration de la qualité dans le projet de loi sont, particulièrement, le contrat-budget et les centrales de coordination. Je vais intervenir, également, sur le triage ou le non-triage, puisqu'on a soulevé la problématique des services infirmiers à Urgences-santé. Je vais parler, tout à l'heure, à propos de la formation, même si ce n'est pas dans le projet de loi, de la façon et dont nous avons fart la consultation sur ce sujet pour en arriver à ce choix qui n'est pas arbitraire, bien sûr, dune formation de 825 heures.

Des contrats-budgets. Pourquoi en arrivons-nous à cette solution? Plus particulièrement en régions, on se retrouve avec certaines difficultés de service parce que nous payons, en grande partie, nos services en considérant le nombre de transports. On sait que dans le service ambulancier, un des problèmes, c'est que le nombre des transports n'est pas égal partout en province. Les régions à plus faible densité de population ont, évidemment, beaucoup moins de transports. Donc, dans un système qui paie au nombre de transports, ils ont beaucoup plus de difficulté à rentabiliser leur entreprise.

Nous passerons, donc, d'un système de paiement aux transports à un système de contrat-budget qui tiendra compte de la quantité

d'heures de disponibilité que nous exigeons des ambulances, réparties d'une façon correcte sur l'ensemble du territoire, de façon à être toujours en mesure d'accorder la qualité de service que nous souhaitons obtenir et dans le délai où nous souhaitons l'obtenir.

Quant aux centrales de coordination, qui sont prévues dans le projet de loi et dont le processus se mettrait en branle d'une façon progressive et non pas d'une façon uniforme et complète dès maintenant, parce qu'on ne veut pas faire une réforme mur à mur, on veut la faire dans un délai qui soit raisonnable et on a prévu, pour ce faire - je l'ai déjà annoncé - un délai d'environ trois ans, quant aux centrales de coordination, dis-je, je pense que les députés qui viennent des régions et qui sont en dehors de l'île de Montréal ou des zones qui bénéficient du numéro unique d'urgence 911, se rendent compte aujourd'hui du bénéfice considérable pour la population qu'apportera l'établissement de centrales de coordination dans l'ensemble du territoire du Québec, pour deux raisons.

La première, un numéro unique en régions, c'est très important. Tous ceux qui vivent dans des municipalités plus petites savent la difficulté de mémoriser trois ou quatre numéros d'urgence pour leur propre municipalité, sans compter le fait que, s'ils se déplacent d'une municipalité à une autre, ils ont à réapprendre et à remémoriser encore deux ou trois autres numéros de téléphone, ce qui n'est pas le cas, actuellement, à Montréal. On sait qu'à Montréal vous pouvez appeler le 911 de quelque endroit que ce soit; même d'une cabine téléphonique sans mettre un seul jeton à l'intérieur de l'appareil, vous pouvez rejoindre le 911 qui peut vous donner le service dont vous avez besoin. Que ce soit les ambulances, les pompiers, la police ou d'autres services d'urgence, ils peuvent vous acheminer ces services dans un temps record. C'est, donc, beaucoup plus facile pour la population du Québec de rejoindre des services d'urgence, une amélioration considérable au plan de la qualité. (22 h 30)

Un autre facteur important des centrales de coordination en régions, qui a été négligé et qu'on passe sous silence dans les critiques qui sont faites par l'Opposition de la réforme que nous faisons, concerne le fait que les centrales de coordination vont permettre d'enlever l'imperméabilité des zones que nous connaissons actuellement. Actuellement, chaque entreprise, dans sa zone, peut offrir le service ambulancier et doit l'offrir de la meilleure façon possible. Mais règle générale, puisqu'on ne sait pas quels sont les transports faits dans cette zone ou s'il y a un transport qui est en cours actuellement, il peut arriver, momentanément, que la zone soit découverte. Advenant le cas d'un autre besoin dans cette zone, le délai de réponse peut être beaucoup plus considérable qu'il n'était prévu initialement pour la simple et bonne raison qu'on n'a pas utilisé les ressources modernes des technologies de communication qui permettraient de déplacer une ambulance d'une autre zone vers le milieu de l'entre-deux zones et de couvrir d'une façon à peu près adéquate le territoire concerné en attendant que l'autre ambulance revienne de son transport. Je pense que, là aussi, c'est un avantage considérable pour les populations en dehors de Montréal.

Un troisième point qui est revenu souvent dans les critiques de l'Opposition est le statut des infirmières. J'ai précisé, à la suite d'une question posée par le chef de l'Opposition à l'Assemblée nationale, que les infirmières, comme toutes les autres personnes qui travaillaient à Urgences-santé, seraient transférées dans la nouvelle corporation. C'est très clair dans le projet de loi. La confusion vient de la façon de fonctionner à Urgences-santé dans le cas des infirmières. Y aura-t-il ou non triage à l'avenir? Le triage veut que les infirmières répondent en première ligne et jugent s'il y a lieu ou non d'envoyer un transport ambulancier. J'ai dit aux infirmières que j'ai rencontrées à de multiples occasions et j'ai dit à tous les gens que j'ai rencontrés à ce sujet qu'il n'est pas question de diminuer la qualité du service à Urgences-santé. C'est un point majeur, c'est un point important. On me dit, par ailleurs, que le fait que l'on fasse un triage a comme conséquence de retarder le transport, de retarder l'arrivée de l'ambulance d'environ trois minutes chez le bénéficiaire. D'autre part, argument aussi impressionnant et aussi valable, on me dit que le fait de faire du triage évite d'envoyer des ambulances à des endroits où on n'en a pas besoin. Cela évite que nous ne soyons à court d'ambulances à certains moments et que nous ne risquions de retarder le transport ambulancier à certains moments de pointe dans la journée.

Donc, vous voyez là deux arguments aussi valables l'un que l'autre, à première vue, qui m'amènent à la prudence et qui me font dire aux infirmières: Quant à votre travail et quant à votre sécurité d'emploi, il n'y a pas de problème. À la limite, s'il y avait diminution du nombre d'infirmières à cause de la réorganisation du système, cela peut se faire par attrition. Il y a un roulement assez considérable parmi les infirmières à Montréal.

Cela étant dit, je ne suis pas certain que, pour la qualité du service à Montréal et pour la qualité de la réponse aux citoyens, la formule qu'on a adoptée actuellement soit la bonne, pour les raisons que je viens de vous mentionner. Je souhaiterais que la nouvelle corporation, lorsqu'elle sera sur pied, puisse regarder la situation et trouver la meilleure solution. Évidemment, il n'y a pas de solution idéale. On comprend que le tri peut être très favorable pour minimiser les ressources que l'on envoie dans le champ, particulièrement pour épargner des coûts considérables. On ne peut pas avoir 200 ambulances à Montréal. Il y en a 80 en temps de pointe. Il est important de faire ce qu'on appelle le triage.

D'autre part, je vous ai donné l'autre argument. Le triage retarde le temps de réponse et cela risque de causer des préjudices à la clientèle. C'est la problématique a laquelle nous sommes confrontés et pour laquelle, avant de prendre des décisions, nous devons attendre d'avoir des études plus approfondies.

Quant a la détermination des 825 heures de formation, le chef de l'Opposition critiquait notre décision, ce matin, en laissant supposer que nous avions sorti ce chiffre d'un chapeau. Je dois vous dire qu'étant donné que le chef de l'Opposition avait lui-même confié un mandat de planification et de coordination des services ambulanciers aux CRSSS sur l'ensemble du territoire de la province, les CRSSS ont eux-mêmes formé une table pour vérifier le besoin en heures de formation et sont eux-mêmes arrivés à ce chiffre, après une vaste consultation qui touchait les employeurs, les médecins, les institutions d'enseignement professionnel, les services préhospitaliers d'urgence, les instances syndicales et les ministères concernés. Donc, tout le monde impliqué dans la question de la formation des techniciens ambulanciers a été consulté et ces gens-là sont arrivés à un consensus pour nous dire que 825 heures constitueraient une formation adéquate. Et, après vérification de leur méthodologie, après vérification du travail qu'ils avaient fait et qui avait été bien fait, M. le Président, nous avons décidé, le 2 mars dernier, de bonifier la formation, qui était de 150 heures en régions - je vous le rappelle - et de 280 heures à Montréal, à 825 heures partout sur le territoire. Et j'insiste là-dessus, M. le Président, parce que...

Des voix: Bravo!

M. Dutil: ...depuis le début, l'Opposition nous dit qu'il y aura dorénavant deux régimes dans la province de Québec et que les régions seront moins bien traitées. On confond. Il y a deux régimes, effectivement, dans la province de Québec, mais c'est le cas actuellement. Et c'est le cas depuis le 24 décembre 1984, soirée mémorable où le chef de l'Opposition lui-même est allé négocier la loi spéciale qu'il avait présentée à l'Assemblée nationale pour s'assurer qu'il n'y aurait pas interruption des services. Voyant que sa loi n'était pas respectée, le chef de l'Opposition lui-même est allé négocier sa propre loi et a décrété des conditions de travail à Montréal et des conditions de formation à Montréal qui ont, justement, établi dans la province de Québec deux poids, deux mesures. Montréal favorisée, les régions oubliées parce que les pressions n'avaient pas été là. C'est ce qui s'est passé. C'est la vérité.

Et quant à l'aspect de l'étatisation dont on nous rebat les oreilles depuis quelques heures, l'étatisation, si elle a été faite, M. le Président, c'est le 24 décembre 1984. Pourquoi? Parce que, cette journée-là, le chef de l'Opposition a décidé de négocier des conditions de travail à la place des employeurs. Parce que, cette journée-là, M. le Président, le chef de l'Opposition a pris des mesures dans un décret qui a remplacé, à toutes fins utiles, les employeurs sur de nombreux autres aspects. Cette journée-là, il n'y avait plus d'employeurs. Il y avait le gouvernement, et il y avait le syndicat, et il y avait une négociation dans un hôtel de Montréal.

Là où l'Opposition confond - parce que nous sommes, justement, en train de rétablir cette chose-là et d'asurer que les régions auront le même service qu'à Montréal - c'est sur des différences de structure, sur des différences de mode de fonctionnement. Elle conclut que cela veut dire des différences de qualité de services. Non, pas du tout, M. le Président. On peut avoir à certains endroits des entreprises privées, à d'autres endroits des entreprises à but non lucratif. J'en profite pour dire que c'est le cas dans la Beauce. En 1976, j'ai eu l'occasion de participer à cela. Et, quand le député de Lévis disait tout à l'heure: Le député de Beauce-Sud ne connaît rien à ce que peuvent être les organisations publiques, je voudrais, tout simplement, mentionner qu'en 1976, étant conseiller municipal, alors que dans notre région, lors de la réforme, les entreprises privées ont décidé de cesser de donner le service, eh bien, les municipalités ont repris, avec le centre hospitalier, le service ambulancier, en formant une corporation à but non lucratif qui s'appelle CAMBI, qui existe maintenant depuis une dizaine d'années et qui fonctionne très bien. C'est un modèle qui n'est ni mieux ni pire qu'ailleurs, mais qui est différent de celui qu'on retrouve à Montréal ou dans d'autres régions où ce sont des organismes à but lucratif qui fonctionnent. Et même actuellement, depuis quelques mois, il existe sur la rive sud de Montréal, une coopérative, propriété des employés, qui exploite un service ambulancier.

Je dis, M. le Président, que plusieurs modèles peuvent cohabiter. Cela ne veut pas dire que les conditions de travail de l'ensemble des employés ne seront pas les mêmes, cela ne veut pas dire qu'ils seront traités différemment. Cela veut dire qu'historiquement les gens se sont débrouillés de façon différente un peu partout dans la province pour s'assurer des services adéquats. Nous les appuyons, quelles que soient leurs structures, sans dogmatisme, sans idéologie, sans considérer qu'un modèle est meilleur que l'autre. (22 h 40)

Quant à la fameuse question de l'indemnisation ou de la compensation, je voudrais, sans parler du fond de la question, tout simplement dire que nous sommes dans une situation tout à fait particulière parce qu'une indemnisation concernant l'achalandage des entreprises en particulier - ce qui a été soulevé cet après-midi par un député - se fait s'il y a des profits dans l'entreprise. C'est évident. Si on veut acheter une entreprise non profitable, il n'y a pas

d'achalandage; donc, il n'y a pas de compensation. Si on achète une entreprise qui a des profits, il peut y avoir achalandage et compensation. Sauf que le seul client, ou à peu près, de ces entreprises, c'est le gouvernement. Vous voyez la situation. Si le gouvernement a, dans le passé, mal négocié et, donc, donné extrêmement cher pour les services, par exemple, en faisant un mauvais calcul, il a donné une plus-value à ces entreprises. On nous dit qu'on devrait racheter ces entreprises en tenant compte de la plus-value que le gouvernement lui-même dans ses négociations aurait donnée. Vous voyez la difficulté, la spécificité de cette question. D'ailleurs on n'a pas l'intention d'étatiser, mais je fais l'hypothèse que soulevait l'Opposition; si on étatisait, ce n'est pas de l'amiante qu'on étatise, M. le Président. On ne prend pas une compagnie qui fonctionne complément en dehors du gouvernement pour l'amener au gouvernement. Nous sommes les pourvoyeurs d'argent à quelque 90 % de ces entreprises. Dans la discussion qui pourrait éventuellement concerner des compensations, je pense que c'est un point très important à considérer.

On m'a parlé de la raison qui faisait que nous dissocions l'organisme sans but lucratif du CRSSS. On nous a demandé pourquoi. Est-ce là un jugement négatif? Non. Ce n'est pas un jugement négatif concernant le CRSSS. Nous constatons que le service ambulancier prend une ampleur considérable et que ce n'est pas la vocation d'un CRSSS, qui est plutôt centré vers la planification et fa coordination de l'ensemble des services de santé et des services sociaux dans une région, d'assumer l'ampleur d'un tel dossier, surtout si nous intégrons les techniciens ambulanciers. Je voulais dire publiquement que toutes les remarques qui pourraient être faites dans le sens que ce geste serait une critique à l'égard du CRSSS sont complètement fausses. Le CRSSS a fait un excellent travail. Il l'a bien fait. Nous en sommes aujourd'hui à une situation qui a évolué, qui a fait que cette entreprise est beaucoup plus grande et qu'il n'y a plus lieu que ce service demeure au CRSSS de Montréal.

On a parlé également de la composition du conseil d'administration. On a fait toutes sortes de remarques. Je pense qu'il serait important que les membres de l'Assemblée prennent note, aux pages 6 et 7, de la composition du conseil d'administration et ils se rendront compte qu'évidemment il n'y a pas que des employés. Le directeur général de la corporation est là, bien sûr. Il y a un membre nommé de la communauté urbaine, un membre des groupes socio-économiques, un membre parmi les directeurs généraux des centres hospitaliers, un membre parmi les coordinateurs de salles d'urgence des centres hospitaliers, un médecin nommé par les médecins qui exercent dans le cadre du service d'intervention et trois membres nommés par les salariés de la corporation. Je pense qu'on avait, tout à l'heure, évité de nommer l'ensemble de ces présences pour se concentrer sur seulement trois membres.

Quant aux consultations particulières, nous les faisons à partir de demain. Seize groupes seront rencontrés, ce qui est plus que nous ne le croyions nécessaire, mais, à la demande de l'Opposition et en consultation avec elle, nous avons accepté de recevoir seize groupes qui permettront de faire toute la lumière si nécessaire.

Je termine mon allocution en disant que le chef de l'Opposition a, ce matin, fait montre d'un caractère virulent, comme il le fait d'habitude à l'Assemblée nationale. C'est un homme courtois et sympathique en dehors de l'Assemblée nationale, je dois le dire, "Dr Jekyll and Mr Hyde". Il faudrait sans doute que le chef de l'Opposition fasse un peu attention à cette mauvaise habitude qu'il a d'être Mr Hyde à l'Assemblée nationale, car il y a un risque qu'il ne devienne Mr Hyde en dehors de l'Assemblée nationale. Je lui suggérerais la lecture de Louis Stevenson, cette magnifique nouvelle où le Dr Jekyll, de façon volontaire, devenait quelqu'un qui n'était pas agréable du tout à entendre et à voir la nuit et qui, par la suite, ne pouvait plus contrôler cet effet et se retrouvait dans la situation d'être constamment Mr Hyde de façon involontaire.

Ce projet de loi règle les problèmes que le chef de l'Opposition a lui-même créés le 24 décembre 1984 à Montréal. C'est ce que nous faisons en vérité. Merci.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président: Le débat étant terminé, nous allons maintenant mettre aux voix la motion d'adoption du principe du projet de loi 34. M. le leader du gouvernement.

M. Gratton: M. le Président, je suggère plutôt que nous reportions le vote à demain, à la fin de la période des affaires courantes.

Le Vice-Président: Très bien. Nous aurons donc un vote par appel nominal à la période des affaires courantes de notre prochaine séance. Très bien, M. le leader du gouvernement.

M. Gratton: Cela étant, je ferais motion pour que nous ajournions nos travaux à demain, 10 heures.

Le Vice-Président: Est-ce que cette motion d'ajournement de nos travaux est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président: Adopté. En conséquence, l'Assemblée ajourne ses travaux qui reprendront demain, le mercredi, 8 juin, à 10 heures.

(Fin de la séance à 22 h 44)

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