To use the Calendar, Javascript must be activated in your browser.
For more information

Home > Parliamentary Proceedings > Assembly Proceedings > Journal des débats (Hansard) of the National Assembly

Advanced search in the Parliamentary Proceedings section

Start date must precede end date.

Skip Navigation LinksJournal des débats (Hansard) of the National Assembly

Version finale

34th Legislature, 1st Session
(November 28, 1989 au March 18, 1992)

Thursday, June 7, 1990 - Vol. 31 N° 51

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Journal des débats

 

(Dix heures douze minutes)

Le Président: Alors, mesdames, messieurs les députés, nous allons nous recueillir quelques instants.

Je vous remercie. Veuillez vous asseoir.

Présence de l'ambassadeur du Burundi

J'ai le très grand plaisir de souligner la présence dans la tribune de l'ambassadeur de la République du Burundi, Son Excellence M. Philippe Kanonko.

Nous allons maintenant procéder aux affaires courantes.

Il n'y a pas de déclaration ministérielle.

Présentation de projets de loi publics. M. le leader de l'Opposition.

M. Chevrette: M. le Président, j'aimerais qu'on appelle l'article b du feuilleton.

Projet de loi 191

Le Président: À l'article b du feuilleton, Mme la députée de Marie-Victorin présente le projet de loi suivant, Loi sur le Conseil québécois de la toxicomanie. Alors, Mme la députée de Marie-Victorin.

Mme Cécile Vermette

Mme Vermette: Oui, M. le Président. Je dépose le projet de loi 191. Ce projet de loi institue un organisme, le Conseil québécois de la toxicomanie, qui aura pour fonction de conseiller le ministre désigné par le gouvernement sur toute question reliée à la toxicomanie.

Le Président: Simplement, nous avons des visiteurs dans nos galeries. Je voudrais vous rappeler une disposition de notre règlement qui fait que le public est admis dans les tribunes, mais doit se tenir assis et en silence. Tout signe d'approbation ou de désapprobation lui est interdit.

Une voix:...

Le Président: Donc, je comprends très bien, mais nos dispositions réglementaires... S'il vous plaît! Alors, nos dispositions réglementaires prévoient qu'on ne doit faire aucun signe d'approbation ou de désapprobation dans les galeries.

Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie du projet de loi 191, Loi sur le Conseil québécois de la toxicomanie?

M. Pagé: Accepté, M. le Président.

Le Président: Adopté. Mme la députée de Marie-Victorin.

Mme Vermette: En relation avec le dépôt du projet de loi 191, je sollicite le consentement de cette Chambre afin de pouvoir déposer un court vidéo intitulé Toxicomanie, une lutte à organiser", qui a été tiré du forum provincial sur la toxicomanie tenu à Longueuil, le 3 mars 1990. Ce document ne serait pas considéré comme un document officiel de l'Assemblée et ce pour des raisons de conservation et d'archives, mais serait distribué dans chacun de vos bureaux par l'intermédiaire de l'Assemblée nationale. Je dépose donc le document audiovisuel en question.

Le Président: Un instant, s'il vous plaît. M. le... Un instant.

Une voix: Est-ce qu'il y a consentement?

Le Président: Oui. M. le leader du gouvernement.

M. Pagé: m. le président, je retiens que mme la députée dépose un projet de loi aujourd'hui. nous retenons de plus qu'elle demande le consentement pour déposer un vidéo se référant aux colloques qui se sont tenus concernant le dossier qu'elle a analysé. nous ne pouvons donner notre consentement au dépôt d'un tel document. cependant, je suis persuadé que le ministre de la santé recevra avec beaucoup d'intérêt le document si vous le lui faites parvenir.

Le Président: Donc, il n'y a pas de consentement. M. le leader de l'Opposition.

M. Chevrette: M. le Président, il est de coutume en cette Chambre que, lorsqu'il y a des initiatives de prises par un député, un groupe de députés, ledit parlementaire ait le privilège d'informer la Chambre d'un travail qu'il a fait ou le groupe parlementaire a le privilège d'informer la Chambre sur les rapports d'activités. En l'occurrence, le rapport d'activités ou de l'initiative prise par la députée de Marie-Victorin, c'est un colloque provincial qui a été tenu à Longueuil, dans sa circonscription électorale, sur la rive sud de Montréal et qui reflète un peu ce que les citoyens émanant de tous les milieux pensent du problème crucial qu'est la toxicomanie au Québec.

M. le Président, je demanderais tout au moins au leader du gouvernement qu'il considère ce dépôt pour fins d'information et non pour fins de conservation au niveau des archives.

Le Président: J'ai une sollicitation à l'effet

que le document sera remis pour distribution. alors, c'est la demande présentée. est-ce qu'il y a consentement ou pas? m. le leader du gouvernement.

M. Pagé: M. le Président, pour répondre au leader de l'Opposition, Mme la députée peut très facilement, de son propre chef, adresser copie de ce document audiovisuel à chacun des députés ici à l'Assemblée nationale sans que ce soit déposé ici.

Le Président: Très bien. En conséquence, ce sera l'initiative de la députée. Au lieu du Secrétariat de l'Assemblée, c'est elle-même qui pourra faire la distribution à l'ensemble des députés.

Au niveau de la présentation de projets de loi pour les projets de loi d'intérêt privé. M. le leader du gouvernement, pour la présentation de projets de loi d'intérêt privé. M. le leader du gouvernement.

M. Pagé: M. le Président, l'article f du feuilleton, s'il vous plaît.

Projet de loi 257

Le Président: À l'article f du feuilleton, j'ai reçu le rapport du directeur de la législation sur le projet de loi 257, Loi concernant la Régie intermunicipale de gestion des déchets sur IHe de Montréal. Le directeur de la législation a constaté que les avis ont été faits et publiés conformément aux règles de fonctionnement des projets de loi d'intérêt privé. Je dépose ce rapport. En conséquence, M. le député de Marquette présente le projet de loi d'intérêt privé 257, Loi concernant la Régie intermunicipale de gestion des déchets sur 111e de Montréal. Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi?

Des voix: Adopté.

Le Président: Adopté. Alors, M. le leader du gouvernement.

Renvoi à la commission de l'aménagement et des équipements

M. Pagé: Je fais motion pour que le projet de loi soit déféré à la commission de l'aménagement et des équipements et pour que le ministre des Affaires municipales en soit membre.

Le Président: Est-ce que cette motion est adoptée?

M. Chevrette: Adopté.

Le Président: Adopté. Toujours au dépôt de projets de loi d'intérêt privé, M. le leader du gouvernement.

M. Pagé: L'article j.

Projet de loi 229

Le Président: À l'article j du feuilleton, j'ai reçu le rapport du directeur de la législation sur le projet de loi 229, Loi modifiant la charte de Le Club de golf de Saint-Hyacinthe limitée. Le directeur de la législation a constaté que les avis ont été faits et publiés conformément aux règles de fonctionnement des projets de loi d'intérêt privé. Je dépose ce rapport. En conséquence, M. le député de Saint-Hyacinthe présente le projet de loi d'intérêt privé 229, Loi modifiant la charte de Le Club de golf de Saint-Hyacinthe limitée. Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi?

M. Chevrette: Adopté. Le Président: Adopté.

M. Pagé: M. le Président, avant de faire motion et de remercier le député de Saint-Hyacinthe de la présentation de ce projet de loi, je suis persuadé que vous m'autoriserez à saluer l'ex-député de Saint-Hyacinthe qui a siégé avec nous pendant un certain nombre d'années, M. Fabien Cordeau.

Renvoi à la commission du budget et de l'administration

Alors, M. le Président, je fais motion pour que le projet de loi soit déféré à la commission du budget et de l'administration et pour que Mme la ministre déléguée aux Finances en soit membre.

Le Président: Est-ce que cette motion est adoptée? Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Pagé: L'article g, M. le Président.

Projet de loi 255

Le Président: À l'article g du feuilleton, j'ai reçu le rapport du directeur de la législation sur le projet de loi 255, Loi concernant Société de fiducie Bankers' Trust. Le directeur de la législation a constaté que les avis ont été faits et publiés conformément aux règles de fonctionnement des projets de loi d'intérêt privé. Je dépose ce rapport. En conséquence, M. le député d'Orford présente le projet de loi d'intérêt privé 255, Loi concernant Société de fiducie Bankers' Trust. Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi?

M. Chevrette: Adopté.

Le Président: Adopté. M. le leader du

gouvernement.

Renvoi à la commission du budget et de l'administration

M. Pagé: M. le Président, je fais motion pour que le projet de loi soit déféré à la commission du budget et de l'administration et pour que Mme la ministre déléguée aux Finances en soit membre.

Le Président: Est-ce que cette motion est adoptée?

M. Chevrette: Adopté.

Le Président: Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Pagé: J'appelle l'article h.

Projet de loi 256

Le Président: À l'article h du feuilleton, j'ai reçu le rapport du directeur de la législation sur le projet de loi 256, Loi concernant Compagnie Trust Royal. Le directeur de la législation a constaté que les avis ont été faits et publiés conformément aux règles de fonctionnement des projets de loi d'intérêt privé. Je dépose ce rapport. En conséquence, M. le député d'Orford présente le projet de loi d'intérêt privé 256, Loi concernant Compagnie Trust Royal. Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi?

Des voix: Adopté.

Le Président: Adopté. M. le leader du gouvernement.

Renvoi à la commission du budget et de l'administration

M. Pagé: M. le Président, je fais motion pour que le projet de loi soit lui aussi déféré à la commission du budget et de l'administration et pour que Mme fa ministre déléguée aux Finances en soit membre.

Le Président: Est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Président: Adopté. Maintenant au niveau du dépôt de documents.

Dépôt de rapports de commissions.

Dépôt de pétitions.

Interventions portant sur une violation de droit ou de privilège ou sur un fait personnel.

J'ai reçu ce matin, en temps utile, deux avis soulevant des questions de fait personnel. D'abord un avis de M. le ministre des Affaires municipales, responsable de l'Habitation, concernant des commentaires faits par le député de Jonquière à la période de questions d'hier, le mercredi 6 juin, relativement à des propos que le ministre aurait tenus à l'endroit de l'UMRCQ. ensuite un avis de m. le député d'abitibi-ouest, leader adjoint de l'opposition, concernant des propos que le ministre de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation lui aurait prêtés au sujet des plans régionaux en agriculture et de l'aide à l'abattoir de la sarre. ces deux avis, ces deux demandes d'intervention sur une question de fait personnel sont conformes à notre règlement. je vais donc, dans un premier temps reconnaître m. le ministre de l'agriculture et, dans un deuxième temps, m. le député d'abitibi-ouest.

Je vous demanderai simplement une chose. C'est extrêmement difficile pour le président de se concentrer en regardant ses documents. J'ai à ma droite et à ma gauche des gens qui parlent et ça me... Non. Je n'ai pas dit que vous... Mais je reconnaîtrai que principalement de ma droite, à ce moment-ci...

Des voix: Ah!

Le Président: Peut-être qu'à vos sièges ça ne vous dérange pas mais, de ce côté-ci, je pourrais vous dire que c'est énormément dérangeant. Donc, j'apprécierais que l'ensemble des députés donnent leur collaboration. Donc, les deux avis, du ministre des Affaires municipales dans un premier temps et du député d'Abitibi-Ouest dans un deuxième temps. Je rappelle que suivant le règlement les explications sur ces questions doivent être brèves et formulées de façon à ne susciter aucun débat et à ne porter que sur la question soulevée. Je vais reconnaître en premier M. le ministre des Affaires municipales, responsable de l'Habitation.

M. Picotte: Merci, M. le Président. La raison pour laquelle vous avez entendu des mots tantôt, c'est que vous m'aviez identifié comme ministre de l'Agriculture et vous tentiez de récidiver. C'est la raison pour laquelle vous avez entendu des voix.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président: J'espère que vous n'en faites pas une question de fait personnel. Vous avez la parole.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président: Alors, vous avez la parole.

Affirmation faite par le député de Jonquière M. Yvon Picotte

M. Picotte: Merci, M. le Président. Hier, à la période de questions, M. le député de Jonquière, dans son préambule, affirmait que j'avais exprimé mon intolérance à l'endroit de l'Union des municipalités régionales de comté et je cite ses propos: "Après avoir exprimé son intolérance à l'égard d'une secte religieuse, voilà que le ministre des Affaires municipales récidive envers l'Union des municipalités régionales de comté en déclarant, sur les ondes d'une station radiopho-nique de Montréal, que, dans le fond, l'Union des municipalités régionales de comté ne représente que 20 % de la population du Québec et qu'on pourrait bien se passer d'elle." Après avoir mis au défi le député de Jonquière de me prouver que les paroles qu'il avait utilisées pour me poser la question étaient exactes, il a déposé, en cette Chambre, une copie de la transcription d'une émission d'information diffusée sur les ondes d'une station de radio du réseau Télémédia, en l'occurrence CKAC, en date du 31 mai 1990.

Lorsqu'on prend connaissance, M. le Président, du document déposé, on constate que le député de Jonquière m'attribue des propos tenus par l'animateur de l'émission, M. Jacques Cami-rand, que je vous cite d'ailleurs, et voici les propos de M. Camirand. C'est clair, net et précis. M. Camirand dit ceci: "Toutefois, compte tenu de la représentativité des deux organismes, le ministre des Affaires municipales, M. Yvon Picotte, est prêt à aller de l'avant sans la participation de l'UMRCQ qui ne regroupe que 20 % de la population québécoise." Ça, ce sont les propos de M. Camirand qui en a entendu un autre, à la conférence de presse, dire qu'il était représentant de 80 % de la population. Non seulement, il me les attribue, ces paroles-là, mais il les amplifie, M. le Président, le député de Jonquière, en affirmant que j'aurais même dit qu'on pourrait très bien se passer de l'UMRCQ. Les propos de M. Camirand sont interprétés par M. le député de Jonquière comme étant les miens, alors que je n'ai pas prononcé de telles paroles.

Afin de rectifier les faits, M. le Président, je désire, avec le consentement de cette Chambre, déposer la transcription de la conférence de presse au complet que j'ai tenue ici même, à l'Assemblée nationale, le 31 mai dernier, portant sur la réponse du gouvernement aux demandes des municipalités. M. le Président, je ne peux terminer mon intervention sans vous exprimer ma déception face au manque de profondeur de l'intervention du député de Jonquière. Si cette question avait été formulée...

Le Président: Une question de règlement, M. le leader de l'Opposition.

M. Chevrette: M. le Président, vous avez pris la peine dans votre... Avant même que vous permettiez au ministre des Affaires municipales de prendre la parole, M. le Président, vous avez pris des précautions en lui disant: On doit rappeler les faits, point final, s'en tenir aux faits, point final, et ne pas porter de jugement sur les propos des autres. On rétablit les faits, mais on ne porte pas de jugement, M. le Président.

Le Président: S'il vous plaît! Effectivement, les derniers propos que vous énoncez, M. le ministre, font en sorte d'amener à susciter un débat et de tels propos, à ce moment-ci, ne sont pas reconnus par le règlement. Je vous prierais de vous en abstenir.

M. Picotte: M. le Président, je pense que... Le moins que je puisse dire, c'est que je m'inscris en faux contre cette désinformation. Je sais évidemment que - parce que je connais le député de Jonquière - il a, bien sûr, beaucoup d'expérience dans ce domaine-là. Il a travaillé à l'Union... Il a été président de l'Union des municipalités et je suis certain que le député de Jonquière reconnaîtra son erreur, M. le Président, pour éviter que l'UMRCQ...

M. Chevrette: M. le Président, question de règlement.

Le Président: Je vous avais rappelé à l'ordre tantôt. Effectivement, les derniers propos que vous mentionnez, toujours dans le cadre de l'article 71, ne sont pas admissibles parce que ça va susciter un débat. Donc, vous pouvez rétablir la situation et dire: Les propos que j'ai mentionnés sont tels, ce n'était pas ça, et je m'inscris en faux contre les propos que le député a rapportés. Ça va. Point à la ligne. C'est fini. D'accord? Sur une question de règlement. M. le leader de l'Opposition.

M. Chevrette: M. le Président, c'est une question de règlement en bonne et due forme, cette fois-ci, pour les motifs suivants: Dès qu'on laisse un député rectifier les faits et même, M. le Président, laisser croire à ce moment-là au niveau de l'intervention que c'est le député qui est dans l'erreur alors que le ministre des Affaires municipales se lève, M. le Président, pour rectifier les faits qu'un journaliste rapporte mal, c'est très différemment... Non, mais je veux poser ma question de règlement. Qu'on me laisse finir.

Le Président: Je vais commencer par écouter ce qu'on me demande. Mais simplement, je vous mets en garde, M. le leader de l'Opposition, de ne pas déborder sur le fond de la question précédente.

M. Chevrette: M. le Président, le ministre des Affaires municipales a-t-il, oui ou non, à vos yeux, relevé les propos d'un journaliste? Disait-il: Le journaliste m'impute des propos, donc je rectifie les faits en déposant...

Des voix: Non, non, non.

M. Chevrette: M. le Président, êtes-vous président ou si c'est eux autres?

Le Président: Vous pouvez vous exprimer. Je vous ai écouté attentivement. Évidemment qu'il y a certaines réactions qui sont venues de l'autre côté. Vous savez fort bien qu'à l'Assemblée, je l'ai déjà dit, le président n'est pas un préfet de discipline. Il est d'usage, il est de coutume parfois, quand quelqu'un prononce certains propos, qu'on ait des réactions, d'un côté ou de l'autre, qui peuvent être admissibles. La coutume permet que la présidence les tolère en autant que ça ne dérange pas l'intervenant. Si ça dérange l'intervenant, c'est à lui de le soulever de façon appropriée, très simplement. Je vous demande d'écouter les propos du leader de l'Opposition. (10 h 30)

M. Chevrette: Je vous souligne très proprement que l'article 32 n'était pas respecté au moment où j'avais la parole. Merci, M. le Président.

Le Président: Là-dessus, je vais mettre ça bien clair. Si vous avez une intervention à l'article 32, vous faites l'intervention suivant le règlement. La présidence peut accepter parfois, et c'est d'usage - vous-même comme parlementaire, à l'occasion, sur les propos d'un parlementaire, d'un ministre ou d'un député, vous pouvez faire certaines réactions verbales qui sont entendues par vos collègues et par vos confrères de votre côté également, et la présidence aussi. La présidence ne se lève pas à tout moment. Simplement la présidence se lèvera si les paroles dites ou les interventions des députés qui n'ont pas reçu la permission de parler à ce moment-là par la présidence dérangent les collègues ou dérangent l'Assemblée. Si ça vous dérange, vous soulevez l'article 32, le président va se lever et il le fera appliquer intégralement ou proprio motu. Dans certaines circonstances, si, moi-même, je me rends compte que ça me dérange énormément tout autant que l'orateur je vais me lever immédiatement. C'est ce que je fais usuellement.

M. Chevrette: C'est exactement ce que je vous ai dit, M. le Président, et je vous remercie. Donc, M. le Président, je reprends ma question de règlement. Ma question de règlement était la suivante. En permettant au ministre des Affaires municipales à la fin de son intervention d'at- tribuer des motifs de mauvaise foi au député de Jonquière, ça constitue de facto, pour le député de Jonquière, une question de privilège parce que la question de fait personnel qui est posée n'a pas pour objectif d'imputer des motifs à un député qui a prononcé des mots en cette Chambre, mais de rectifier les faits, point. Et dès que vous permettez au ministre, dans sa question de fait personnel, d'imputer des intentions ou des motifs au député de Jonquière, vous lui créez de facto une question de privilège à lui aussi.

Le Président: Alors, sur la même question de règlement, M. le leader du gouvernement.

M. Pagé: M. le Président, je comprends que les dispositions relatives à l'article portant sur le droit d'un député de soulever une question de fait personnel doivent être encadrées de façon très stricte pour que ça ne suscite pas des débats à n'en plus finir, ou des réactions ou des répliques de part et d'autre. Cependant, j'interprète les propos du ministre des Affaires municipales comme n'étant pas, mais pas du tout, une imputation de motifs au député de Jonquière. Ce qu'on doit retenir du propos et de la question de fait personnel soulevée par le ministre des Affaires municipales, c'est très simple. Le ministre des Affaires municipales allègue, et je crois qu'il a démontré que les propos qui lui ont été imputés par le député de Jonquière auraient dû être imputés au journaliste, M. Camirand, qui y a référé. Ce n'est pas plus compliqué que ça.

Le Président: Très bien. Effectivement, si on veut prêter des intentions quand on veut faire une correction, comme c'est le cas, comme dans tout discours, on contrevient... C'est une question de règlement, conformément à l'article 35 de nos règles de procédure, et un député est fondé à se lever pour faire une question de règlement sur l'article 35.

Quand le ministre a mentionné certaines conclusions à son exposé, je lui ai rappelé, à votre demande d'ailleurs - vous vous êtes levé immédiatement - que ses paroles étaient contraires à l'esprit du règlement. Je lui ai cédé la parole pour conclure. Il a conclu, il a ajouté certains propos et, à ce moment-là, je lui ai rappelé à nouveau, à votre demande, que c'était contraire au règlement. Je pense que ça clôt la discussion. La présidence peut déplorer le fait qu'on puisse aller à rencontre du règlement, mais, à ce moment-là, les personnes concernées doivent se lever et soulever une question de règlement.

M. le ministre a demandé le dépôt de certains documents. Est-ce que ce dépôt de documents est accepté?

Une voix: Consentement.

Le Président: II y a consentement au dépôt de ces documents. Maintenant, je vais reconnaître M. le député d'Abitibi-Ouest et leader adjoint de l'Opposition sur une question de fait personnel également.

Propos du ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation

M. François Gendron

M. Gendron: Oui, M. le Président. Très simplement, hier soir, à deux occasions, dans deux extraits précis des propos du ministre de l'Agriculture, j'estime que le ministre de l'Agriculture a tenu des propos diffamatoires qui constituent une attaque grave contre ma personne, sur le plan de ma crédibilité et de mon honnêteté intellectuelle, et je voudrais citer ce qu'il a dit.

Le ministre de l'Agriculture dit ceci et, dans le document que je vous ai envoyé, M. le Président, les deux éléments précis pour lesquels vous avez retenu ma question de fait personnel ont été soulignés: "On ne peut pas tenir ce discours-là devant la caméra et venir s'asseoir à côté du ministre par la suite et venir lui dire: M. Pagé - je cite toujours le Journal des débats d'hier - Michel, je suis bien content. Ce que vous avez fait comme gouvernement dans le plan de développement régional, ça a été un succès sur toute la ligne, dixit le député d'Abitibi-Est."

Des voix:...

M. Gendron: Un instant! "...dixit le député d'Abitibi-Est." Bon, là, je n'en fais pas un plat. C'est évident qu'il faisait une erreur. Il s'est trompé parce que le député d'Abitibi-Est ne parle pas souvent.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Gendron: II s'adressait au député d'Abitibi-Ouest et il le sait. Donc, mon point n'est pas là-dessus. Il y a une erreur au Journal des débats; il voulait dire le député d'Abitibi-Ouest et non d'Abitibi-Est.

Et il a ajouté: "...lui-même où j'ai appliqué au nom du gouvernement du Québec, un programme spécifique à l'Abitibi, l'an dernier, qui a été un vif succès." Pourquoi, M. le Président, sur ce premier fait, je prétends que le ministre a mis ma crédibilité et mon honnêteté intellectuelle en doute, c'est que, dès la publication de son plan régional, dont il a parlé hier dans les termes que je viens de citer, j'émettais un communiqué de presse que je peux déposer en cette Chambre pour faire la preuve du contraire: "Le député d'Abitibi-Ouest et leader de l'Opposition of- ficielle - 18 mai 1989 - du Québec, M. François Gendron, considère que l'annonce faite par le ministre de l'Agriculture, M. Pagé, ne constitue aucunement de l'argent neuf pour le développement de l'agriculture", et le titre du communiqué était le suivant: "Un faux cadeau et une mesure compensatoire."

Deuxième élément sur le même fait évoqué par le ministre de l'Agriculture. Le lendemain, j'émettais un nouveau communiqué pour faire la preuve que, depuis quatre ans, compte tenu des critères des programmes régionaux en Abitibi, le ministère avait économisé au-delà de 3 000 000 $ sur le dos des agriculteurs du Québec et, c'est important, son collègue, l'ancien député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue, disait ceci... La preuve que c'est inexact que j'aurais vanté son plan de développement régional, c'est que son ex-collègue, le député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue, affirme lui-même qu'on s'est fait avoir. C'est suffisant pour le premier point.

Deuxième élément mensonger, erroné, faux. Oui. Je cite le ministre de l'Agriculture qui disait ceci: "II a mis en relief le fait que je lui ai dit, comme ministre: Peux-tu me donner un coup de main - en parlant des abattoirs régionaux -comme député, pour faire en sorte que les bêtes produites dans ton comté ne soient pas abattues en Ontario, mais plutôt dans ton comté. Bien, il m'a dit: Michel, sais-tu, c'est compliqué ce que tu me demandes là. Tu m'en demandes pas mal. C'est mes clientèles. Tu ne pourras pas m'aider, laissant voir clairement que je n'avais pas la préoccupation de maintenir l'abattoir ouvert."

Or, encore là, M. le Président, je peux déposer en cette Chambre deux communiqués et de nombreuses lettres où j'ai indiqué au ministre de l'Agriculture - je suis obligé, M. le Président, parce que c'est là-dessus qu'il a mis mon intégrité en doute... et je cite juste un paragraphe, au ministre de l'Agriculture, dans un communiqué: "II importe, M. le ministre, à la suite des nombreuses représentations que j'ai effectuées à votre cabinet ainsi qu'à vous-même, que nous maintenions un centre d'abattage régional parce que c'est vital pour assurer la survie de l'abattage de nos bêtes chez nous plutôt qu'en Ontario." Et, à deux reprises, parce qu'il reste un élément, il m'a demandé d'essayer d'intéresser des entreprises privées, parce que le secteur public avait fait la preuve - ça, c'est l'État -qu'il ne pouvait pas faire fonctionner les abattoirs. Mais je pourrais déposer les nombreuses démarches de M. Paul-Ange Morin, qui est venu à mon bureau à de multiples reprises, pour essayer de réanimer le Centre d'abattage de La Sarre; même chose pour M. Serge Alarie qui a déposé un projet, lors de la biennale, pour relancer l'abattage. Donc, propos mensongers, faux et erronés.

Le Président: Ceci clôt la question. M. le

leader du gouvernement.

M. Pagé: M. le Président, seulement une question.

Des voix:...

M. Pagé: Non, aucun commentaire.

Le Président: C'est une question de règlement, je vais l'écouter.

M. Pagé: M. le Président, en vertu de notre règlement, croyez-vous qu'un député qui soulève une question de fait personnel, ça lui ouvre la porte à adresser des qualificatifs de "mensonger", de "menteur" à d'autres collègues de cette Chambre?

Le Président: M. le leader de l'Opposition sur la même question.

M. Chevrette: Sur la question de règlement, M. le Président. Notre règlement est très explicite. On ne peut pas traiter des personnes, mais on a le droit de qualifier des propos. (10 h 40)

Le Président: C'est une question qui a été disputée à plusieurs occasions à l'Assemblée. Le règlement est quand même clair: "Le député qui a la parole ne peut imputer des motifs indignes à un député ou refuser d'accepter sa parole". Entre dire qu'un député ou un membre de l'Assemblée est menteur dans ce qu'il dit et dire qu'il dit des propos mensongers, je pense que la distinction est très mince. Ça dépend, évidemment, du contexte. Dans le cas présent, c'est aux limites de l'acceptation de notre règlement. De toute façon, sur une question de fait personnel, j'ai accepté l'intervention du député d'Abitibi-Ouest. J'ai été à quelques occasions sur le point de me lever puisque de la même façon qu'on a dit au ministre des Affaires municipales tantôt: Corrigez la situation, dites ce que vous avez à dire concernant les propos, a savoir si les propos vous appartiennent ou non, c'est la même chose pour le député d'Abitibi-Ouest et on ne doit pas engager un débat. Vous avez été à la limite de tenter de faire une démonstration. Ce que vous pouvez faire dans une question de fait personnel, c'est de rappeler des mots qui ont été dits par quelqu'un et dire: Je n'ai pas dit ça ou mes propos, ce que j'ai dit, c'est telle chose précisément, mais sans argumenter là-dessus. Vous étiez au point de l'argumentation. La question est close. La situation est claire et finie. Et nous allons maintenant passer, à l'étape suivante de nos travaux.

Période de questions et réponses orales des députés.

Je vais reconnaître en première question principale, M. le chef de l'Opposition.

QUESTIONS ET RÉPONSES ORALES

Informer les Québécoises et les Québécois sur la conférence des premiers ministres

M. Parizeau: M. le Président, ma question s'adresse à la vice-première ministre, ayant trait, bien sûr, aux négociations qui ont lieu à Ottawa à l'heure actuelle. Je voudrais, à cet égard, cependant, en commençant, au début de mon préambule, indiquer qu'hier, en cette Chambre, il y a eu entre la vice-première ministre et moi un cours débat quant à l'identité de la personne du bureau du premier ministre qui m'avait rejoint au téléphone. Vérification faite, elle avait raison. J'avais tort Je la prie d'accepter mes excuses.

Cela étant dit, M. le Président, les premiers ministres du Canada entament aujourd'hui une cinquième journée de négociations à huis clos à Ottawa. Les quelques rares informations qui réussissent à filtrer sont inquiétantes: Engagement, peut-être, pour un Sénat élu. Renonciation du droit de veto quant à la diminution du poids politique du Québec, pour n'en citer que quelques-unes de ces bribes d'information que nous recevons. hier, dans un sondage non scientifique, sans doute, mais qui a regroupé quelque 4500 appels téléphoniques, le réseau tva indiquait que 94 % de ceux qui avaient appelé le poste considéraient, selon l'expression utilisée par le poste tva, que le premier ministre était en train de se faire avoir. est-ce que la vice-première ministre peut nous indiquer s'il est de l'intention du premier ministre d'informer adéquatement les québécoises et les québécois de l'état de ces tractations en nous déléguant aujourd'hui son ministre aux affaires intergouvernementales canadiennes pour rendre compte à l'assemblée, comme je l'ai demandé au premier ministre hier, en début de soirée, au nom de l'opposition officielle?

Le Président: Mme la vice-première ministre.

Mme Bacon: Je pense, M. le Président, que le chef de l'Opposition, qui insiste tellement lui-même pour que le premier ministre du Québec revienne au Québec, me permettra de lui dire bien amicalement, M. le Président, de revenir les deux pieds sur terre lui-même. Et, une fois pour toutes, je pense que son vieux rêve présidentiel et républicain pour le 24 juin ne se réalisera pas.

M. le Président, le climat à Ottawa, dans les négociations, est bon. Il y a des progrès. Il n'y a pas d'entente, mais il y a des progrès, M. le Président. Quant à la réforme du Sénat, on ne discute en ce moment que des paramètres. Le chef de l'Opposition... Vous êtes là vous? Le chef de l'Opposition, M. le Président, ne devrait pas s'inquiéter de la fermeté du premier ministre, mais s'en réjouir et ne pas lui demander de

quitter sa chaise. Le premier ministre se fait l'avocat de tous les Québécois, tous les Québécois, et un avocat ne quitte pas sa cause quand il la défend bien, M. le Président.

Des voix: Bravo! Bravo!

Le Président: En question complémentaire.

M. Parizeau: M. le Président, je conclus donc que la demande que nous avons faite d'être renseignés en cette Chambre sur l'état des tractations par le ministre des Affaires intergouvemementales, que cette demande ne sera pas satisfaite. C'est la conclusion que je tire de ce que la vice-première ministre vient de nous dire. Est-ce que la vice-première ministre peut nous dire aussi si elle considère que les engagements sur la réforme du Sénat, sur son caractère élu, sur le poids politique du Québec, sur le maintien du droit de veto... Est-ce que des compromis de ce genre-là, c'est conciliable avec les propos du 28 mars du ministre délégué aux Affaires intergouvernementales canadiennes, lorsqu'il disait des propositions additionnelles avancées par les provinces dissidentes: "II ne s'agit pas pour nous - et je le cite - de balayer du revers de la main ces résolutions, mais il n'est pas question pour nous de discuter de leur contenu tant que l'entente du lac Meech ne sera pas acceptée, ratifiée, partie de notre constitution." Fin de la citation. Est-ce qu'à l'heure actuelle le premier ministre respecte cet engagement?

Le Président: Mme la vice-première ministre.

Mme Bacon: M. le Président, en ce moment, la position du Québec qui a été clairement exprimée depuis des années... Encore récemment, le premier ministre l'a exprimée clairement, avec fermeté. Elle est exprimée avec calme. Elle est exprimée avec le respect des autres. Si on veut que les autres nous respectent, il faut aussi les respecter.

Le Président: Alors, en question principale, M. le député de Lac-Saint-Jean.

Garanties que le Québec peut offrir aux provinces récalcitrantes

M. Brassard: En principale, M. le Président. Plus les jours passent, plus cela confirme les appréhensions de l'Opposition qui, d'ailleurs, disait, avant même que la conférence ne débute, qu'il ne faudrait pas que le premier ministre s'y rende, position partagée par le ministre de la Santé et des Services sociaux du gouvernement qui, lui, disait: On n'a pas d'affaire là.

Des voix: Oui, oui.

M. Brassard: Plus les jours passent, plus cela confirme les appréhensions que la conférence est devenue un guet-apens, un traquenard dans lequel le premier ministre du Québec se trouve piégé. Nous ne sommes pas seuls à penser ainsi, d'ailleurs, le...

Une voix: M. le Président, s'il vous plaît.

Le Président: Sur une question de règlement, M. le leader de l'Opposition.

M. Chevrette: M. le Président, sur une question de règlement. Cette fois-ci, j'invoque l'article 32 qui dit qu'on doit être capable de s'exprimer librement sans entendre ces murmures, ce chuchotement continuel. Et je vous le dis, M. le Président, je pense que vous vous devez de les reconnaître quand ils s'expriment aussi fortement. On les reconnaît de notre propre siège, et je pourrais vous les indiquer; c'est ce que j'entends faire dans les prochaines minutes.

Le Président: Alors, je ne peux que souhaiter que tous les députés acceptent de se conformer au règlement et de respecter le droit de parole de chacun. Alors, M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Brassard: Je suis persuadé, M. le Président, que c'est aussi l'opinion du peuple du Québec. On l'a vu hier, comme le rappelait le chef de l'Opposition, par le biais de ce sondage fait par Télémétropole, les Québécois sont maintenant convaincus que leur premier ministre est en train de se faire avoir. Non seulement il est en train de se commettre sur la réforme du Sénat, mais on apprend, de plus, que le premier ministre du Québec envisage d'offrir des garanties aux dissidents, aux récalcitrants, dans le but de les rallier à l'accord du lac Meech, par le biais d'une déclaration politique.

Ma question à la vice-première ministre: Comment le Québec peut-il offrir de telles garanties aux provinces récalcitrantes, alors que ces garanties ne peuvent que compromettre ou atténuer la portée déjà fort modeste de l'accord du lac Meech pour le Québec, ce qui serait contraire, en plus, au sens et à l'esprit de la motion adoptée par cette Assemblée le 5 avril dernier?

Le Président: Mme la vice-première ministre. (10 h 50)

Mme Bacon: M. le Président, le député de Lac-Saint-Jean parle de sondages qui ont cours. Moi, je vous parlerai du sondage du 25 septembre 1989 où, en toute démocratie, la population du Québec s'est exprimée en faveur du parti que nous représentons, M. le Président.

Le Président: Question de règlement, M. le

leader du gouvernement.

M. Pagé: Pourriez-vous vous assurer que l'article 32 soit intégralement respecté?

Le Président: Effectivement, la même demande, la même réponse. Je ne peux que souhaiter que tous les parlementaires, des deux côtés, respectent l'esprit du règlement. Mme la vice-première ministre.

Mme Bacon: M. le Président, au moment où les intérêts supérieurs du Québec sont en cause, au moment où ils sont discutés, je demanderais à l'Opposition un peu de retenue. N'affaiblissons pas le Québec en manquant de sens des responsabilités en cette Chambre. C'est ça, le visage que nous offrons à la nation canadienne, en ce moment.

Le Président: En question complémentaire, M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Brassard: La vice-première ministre pourrait-elle admettre que l'Opposition s'inquiète à juste titre, parce qu'on est convaincus, la population du Québec aussi, que les intérêts fondamentaux du Québec sont mal défendus présentement à Ottawa par le premier ministre du Québec? Est-ce que la vice-première ministre pourrait, au nom de son gouvernement et du premier ministre lui-même, prendre l'engagement, devant cette Chambre, que le Québec ne signera pas une déclaration politique qui prévoirait l'introduction d'une clause Canada dans la constitution, dans les mois qui suivront l'échéance du 23 juin?

Le Président: Mme la vice-première ministre.

Mme Bacon: M. le Président, le député de Lac-Saint-Jean sait très bien que le premier ministre du Québec défend les intérêts de tous les Québécois. Il a même l'appui de son ami Lucien Bouchard. Et il reçoit des télégrammes d'anciens députés péquistes qui lui disent: J'ai confiance en vous, M. le premier ministre. Je pense qu'il faudrait peut-être en tenir compte aussi.

M. le Président, nous n'affaiblirons pas le Québec et nous n'abandonnerons pas notre droit de veto. Je dois dire qu'à écouter le Parti québécois ce matin et l'Opposition officielle, on a l'impression que les masques tombent. On a vraiment l'impression que les masques tombent. On voit enfin le vrai visage du Parti québécois pour qui l'unité et la solidarité de tous les Québécois ne sont nécessaires que pour des fins partisanes, pour des fins électoralistes, pour la souveraineté du Québec, qui est leur vision des choses.

Des voix: Bravo!

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! En question complémentaire, M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Brassard: La vice-première ministre oublie-t-elle que Lucien Bouchard a demandé à M. Bourassa de revenir à Québec, aussi? Mais je reviens à ma question, M. le Président, parce que je n'ai pas eu de réponse. Pourrait-elle s'écarter un peu de ses papiers et répondre à la question que je lui ai posée tout à l'heure? Si elle veut que nous soyons solidaires, est-ce qu'elle est en mesure de dire à cette Chambre, de garantir à cette Chambre que le premier ministre ne signera pas de déclaration politique comportant, prévoyant l'introduction d'une clause Canada qui assurerait la primauté de la Charte sur la clause de la société distincte - c'est ça que ça veut dire - ou prévoyant l'introduction d'une clause Canada dans la constitution dans les mois qui suivraient l'échéance du 23 juin? Est-ce qu'elle est en mesure de nous garantir que le premier ministre, à Ottawa, ne signera pas de déclaration politique comportant cet élément-là?

Le Président: Mme la vice-première ministre.

Mme Bacon: Vous me permettrez, M. le Président, de m'interroger sur le fait que le député de Lac-Saint-Jean au fédéral reste à Ottawa, quand il demande à notre premier ministre de s'en revenir au Québec.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Bacon: M. le Président, notre position...

Des voix:....

Mme Bacon: ...est claire, elle est ferme, elle est calme, elle est précise et nous défendons entièrement la position que nous avons toujours défendue, M. le Président, qui est toujours la même.

Quant à vos pieux et pathétiques appels, M. le Président, quant à vos pieux et pathétiques appels, j'aimerais dire à l'Opposition: Vous repasserez. Oui, j'écris ce que je dis, M. le Président, parce que ces gens-là font tellement de désinformation qu'ils peuvent dire le contraire de ce que je dis aujourd'hui, comme ils l'ont fait pour le député de Maskinongé et ministre des Affaires municipales.

Une voix: Oui.

Mme Bacon: Les Québécois, M. le Président...

Le Président: S'il vous plaît.

Mme Bacon: Oui, c'est vrai. On ne signera pas une clause Canada, M. le Président. Oui, c'est vrai. Et les Québécois ne seront jamais dupes, jamais dupes de votre stratégie purement électoraliste. Vous allez perdre l'oxygène que vous recherchez, M. le Président.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président: En question complémentaire.

M. Brassard: M. le Président, puisqu'il est beaucoup question, ces temps-ci, de sauver la face, la vice-première ministre pourrait-elle m'expliquer comment le premier ministre du Québec peut se permettre, peut permettre à MM. Filmon et Wells de sauver la face sans faire de compromis, sans faire de concession, donc sans perdre la face lui-même aux yeux des Québécois? Parce que c'est ça le véritable piège. Le premier ministre du Québec est placé dans la position de dire aux récalcitrants: Vous ne perdrez pas la face, moi, je vais la perdre.

Le Président: Mme la vice-première ministre.

Mme Bacon: M. le Président, quand on tente de faire ce genre de démagogie, ça peut se retourner contre soi et ça peut nous choisir comme cible. M. le Président, quand on respecte les autres comme le fait le premier ministre du Québec, avec fermeté, avec calme, je le répète et "rerépète", on ne perd pas la face et on ne la fait pas perdre aux autres.

Une voix: Très bien.

Le Président: En question principale, M. le député de Joliette.

Sujet de discussion à la conférence des premiers ministres

M. Chevrette: m. le président, le 28 mars 1990, le ministre délégué aux affaires intergouvernementales canadiennes disait, à la suite de la proposition présentée par le chef de l'opposition: votre proposition, la seule réserve que j'aurais face à cette motion, c'est qu'elle ne va pas assez loin.

Une voix: C'est ça.

M. Chevrette: Vous ne vous rappelez pas de ça, M. le Président, en cette Chambre? On ne va pas assez loin. Nous ne discuterons pas, M. le Président, des propositions de M. McKenna, pas plus que nous ne discuterons des propositions de M. Wells, pas plus que nous ne discuterons des propositions de M. Getty, de M. Devine, de M.

Vander Zalm. Il ne voulait pas discuter de rien. Pourriez-vous m'expliquer de quoi on discute présentement?

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président: Mme la vice-première ministre.

Mme Bacon: m. le président, je m'aperçois que le plus grand problème qu'ont les gens d'en face, c'est de ne pas être là, de ne pas être présents dans cette salle où sont réunis les premiers ministres. je regrette, m. le chef de l'opposition, vous n'êtes pas premier ministre.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président: En complémentaire.

M. Chevrette: M. le Président, ça ne répond pas à ma question. Si le ministre des Affaires canadiennes ne voulait même pas discuter d'un iota émanant des autres provinces, est-ce qu'on pourrait me dire si le premier ministre respecte la résolution votée à l'Assemblée nationale, le 5 avril dernier, à l'effet de ne discuter de rien, de dire tout d'abord: On vote Meech et, après ça, on se reparlera? Est-ce qu'elle considère que l'esprit et la lettre de la motion du 5 avril sont présentement respectés par le premier ministre du Québec?

Le Président: Mme la vice-première ministre.

Mme Bacon: Je crois, M. le Président, que l'essentiel, dans cette discussion - et je ne suis pas là pour discuter, c'est le premier ministre qui est là... Je fais confiance au premier ministre comme la population lui a fait confiance, M. le Président. On n'accepte pas d'amendement à Meech. C'est ça qui est important. Et je voudrais que l'Opposition le comprenne une fois pour toutes et cesse d'énerver la population, M. le Président. (11 heures)

Le Président: En complémentaire.

M. Chevrette: M. le Président, est-ce que la population n'est pas plus énervée présentement de ne pas savoir ce qui se passe en catimini et en cachette à Ottawa? Est-ce que la population du Québec, M. le Président, n'est pas en droit de se demander si le Parti libéral, avec son premier ministre, n'agit pas par électoralisme en cachant et en faisant en catimini ce qu'il a refusé de faire ouvertement suite à une des résolutions de l'Assemblée nationale?

Le Président: Mme la vice-première ministre.

Mme Bacon: M. le Président, je me demande si on doit répondre à une telle question. Mais je dois dire, encore fois, M. le Président, que ce n'est pas à faire de la démagogie qu'on va régler ce problème. On le fait, encore une fois, M. le Président, dans le calme, dans la fermeté et dans le respect des autres. C'est ça, M. le Président: si on veut être respecté, respectons les autres.

M. Chevrette: M. le Président...

Le Président: Alors, une dernière question additionnelle.

M. Chevrette: M. le Président, le respect des autres n'exclut pas... Est-ce que la vice-première ministre est en train de nous dire que ce qui prime pour le premier ministre du Québec, c'est le respect des 10 personnes qui ne veulent pas adhérer à une résolution qu'ils ont dûment signée? Est-ce que le respect ne commence pas par respecter les citoyens du Québec...

Le Président: S'il vous plaît!

M. Chevrette: ...et l'Assemblée nationale du Québec?

Des voix: Bravo! Bravo!

Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît! Alors, à la question, Mme la vice-première ministre.

Mme Bacon: M. le Président, j'ai toujours remarqué que le respect se manifeste davantage dans le calme et la sérénité. Je rappellerais, peut-être, le leader de l'Opposition au calme et à la sérénité.

Le premier ministre, encore une fois, et je le répète, est le défenseur de tous les Québécois pendant qu'il est là, à Ottawa, à négocier avec les autres premiers ministres...

Une voix: À quatre pattes.

Mme Bacon: II le fait... Vous voulez répéter ça? Posez-la, la question, si vous voulez le répéter.

Une voix: Répondez. Commencez par répondre.

Le Président: S'il vous plaît! Alors, on demande le respect de l'article 32 et ça s'applique à tous les parlementaires. Évidemment que des réactions de ce genre-là, d'un côté ou de l'autre, engendrent inévitablement un débat et des situations qui sortent du cadre régulier du règlement. Mme la vice-première ministre.

Mme Bacon: M. le Président, une chaise vide n'a jamais rien réglé; c'est le premier ministre lui-même qui l'a dit. et ce n'est pas en quittant l'autre côte de la rivière, comme on a déjà vu en 1981, m. le président, qu'on va régler ça.

Des voix: Bravo!

Le Président: En question principale, M. le député de Lévis.

M. Garon: M. le Président, pour apporter ma contribution à ce que la vice-première ministre passe une bonne journée et garde sa bonne humeur proverbiale et sa jovialité qui est de commune renommée, je vais poser ma question au ministre des Transports.

Des voix: Ha, ha, ha!

Secteurs de travail et reconnaissance de l'ANCAl

M. Garon: La grève des camionneurs artisans se poursuit toujours, même si le ministre a rencontré...

Le Président: Un instant. M. le député, s'il vous plaît. Il y a un rappel au règlement, M. le leader du gouvernement.

M. Pagé: Pourriez-vous m'indiquer si le préambule à la question du député de Lévis est acceptable, tel que formulé?

Une voix: On ne peut pas empêcher un coeur d'aimer.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de Lévis, je vous invite à poser une question, mais votre préambule doit être relatif à votre question. Si c'est au ministre des Transports, pas de commentaire à la vice-première ministre. Allez-y avec votre question, s'il vous plaît.

M. Garon: Comme l'a dit un député, on ne peut pas empêcher un coeur d'aimer, M. le Président.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Garon: Mais la grève des camionneurs artisans, M. le Président, se poursuit toujours, même si le ministre a rencontré les représentants de l'Association, de l'ANCAl. Le ministre a dû se rendre compte qu'il n'y avait pas de péril à rencontrer les représentants des camionneurs qui se comportent, comme tout le monde le souligne depuis qu'ils sont à Québec comme... Rarement on a vu une manifestation aussi sereine et aussi exemplaire.

Une voix: C'est vrai.

M. Garon: M. le Président, ma question au ministre est la suivante: Est-ce que le ministre pourrait faire le point sur la rencontre d'hier et nous indiquer où en est la discussion concernant les secteurs de travail et la reconnaissance de l'ANCAl?

Le Président: Alors, M. le ministre des Transports.

M. Elkas: M. le Président, effectivement, le tout se fait dans le calme parce qu'on n'a pas écouté le député de Lévis.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Elkas: J'ai rencontré hier après-midi les représentants de l'ANCAl. J'ai le plaisir d'informer cette Chambre que la négociation s'est faite dans le calme et qu'on a repris tous les sujets dont on avait discuté avec eux. J'ai demandé à mes collègues, le ministre de l'Environnement, le ministre des Affaires municipales, la ministre de l'Énergie et des Ressources, de confirmer leur engagement pris lors de rencontres précédentes. Cela va être fait par écrit, je vais le leur remettre cet après-midi. J'ai répété l'engagement qu'on a fait au niveau du gel des permis. J'ai réitéré ma volonté de maintenir l'organisme de courtages régionaux dans les régions totalement zonées. J'ai offert de mettre sur pied une équipe d'inspecteurs de 30 personnes pour enquêter sur des pratiques de courtage illégal. Je me suis engagé à faire venir en cette ville, cet après-midi, l'Association des constructeurs de routes et grands travaux du Québec pour rencontrer ces gens. Il me semble que ces gens, les représentants de l'ANCAl, sont sortis de là très satisfaits des rencontres qu'on a eues hier après-midi. Puis, on va poursuivre les discussions cet après-midi.

Le Président: En question complémentaire, M. le député de Lévis.

M. Garon: M. le Président, le ministre peut-il nous dire si l'élargissement des secteurs de travail et la reconnaissance de l'ANCAl sont à l'ordre du jour de la rencontre d'aujourd'hui et s'il a l'intention de faire une nouvelle proposition sur ces deux points en particulier?

Le Président: Alors, M. le ministre des Transports.

M. Elkas: M. le Président, les discussions se continuent.

Le Président: En complémentaire.

M. Garon: Est-ce que le ministre peut nous dire si le fait de mettre 30 contrôleurs routiers à la fin d'août, ça rencontre l'engagement de l'ancien ministre qui parlait de 400 pour le 1er avril 1990? Est-ce que, cette fois - il a dit qu'il le ferait par écrit - il s'est occupé d'avoir l'engagement également par écrit du président du Conseil du trésor qui, lui, ne semble pas se préoccuper beaucoup des engagements des ministres sectoriels?

Le Président: Alors, M. le ministre des Transports.

M. Elkas: M. le Président, je vais déposer un projet auprès du Conseil des ministres ces mois-ci concernant le contrôle routier dans son entier. Le contrôleur routier, comme le député de Lévis le sait, c'est une personne qui est multi-discipiinaire. Et au cours de cette discussion on a avancé l'emploi de certains individus, 30 individus, qui vont s'occuper d'ailleurs de la question du courtage illégal. C'est une méthode de gestion, il me semble, qui est très saine.

Le Président: En additionnelle, M. le député de Lévis.

M. Garon: M. le Président, je répète ma question: Est-ce que le ministre s'est assuré - on l'a entendu dire et j'aimerais qu'il me confirme si c'est exact - qu'il y aurait 30 contrôleurs routiers au mois d'août, 200 l'an prochain - j'aimerais savoir à quelle date - et est-ce qu'il s'est assuré qu'il avait l'autorisation du président du Conseil du trésor pour engager ces fonds ou est-ce un engagement personnel et, ensuite, il ira voir le président du Conseil du trésor sans savoir quelle sera la réponse du Conseil du trésor?

Le Président: Alors, M. le ministre des Transports.

M. Elkas: Je ne crois pas que ça regarde le député de Lévis. Je m'en vais au Conseil des ministres avec ma demande et ça ne le regarde pas.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Chevrette: je m'excuse, m. le président. m. le président, une question de règlement. (11 h 10)

Le Président: sur une question de règlement... un instant! s'il vous plaît! alors, question de règlement, m. le leader de l'opposition.

M. Chevrette: Question de règlement. M. le Président, cette attitude désinvolte dans le Parlement... Je vous réfère que c'est un droit. Ce n'est même pas une question de privilège ni de règlement; c'est une attitude face à la loi même de l'Assemblée nationale. Il est du devoir de

l'Opposition de questionner le pouvoir, le gouvernement, sur ses intentions et sur son agir. C'est la deuxième fois par un deuxième ministre, en cette Chambre, qu'on se fait répondre, de ce côté-ci de la Chambre, que ce n'est pas de nos affaires. Bien, quand il répond que ce n'est pas de nos affaires, c'est à la population qu'il dit: Ça ne vous regarde pas!

Une voix: C'est ça.

Ml. Chevrette: Et on va jouer notre rôle. Je demanderais au ministre de prendre au sérieux son rôle. Même s'il est nouveau en cette Chambre, qu'il apprenne qu'il doit répondre devant la population et qu'on incarne cette population.

Une voix: Voilà! Une voix: C'est ça. Une voix: Wo! Wo!

Le Président: Alors, sur la même question de règlement, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Johnson: Oui, M. le Président. Ce que le ministre des Transports, de toute évidence, a signifié, et ce que j'ai déjà moi-même formulé en cette Chambre, c'est qu'à partir du moment où on s'enqùiert auprès d'un membre du Conseil exécutif, de toute évidence, du contenu d'un mémoire - parce que c'est ça qui est en cause et c'est ça que le ministre a évoqué - des recommandations qui seraient éventuellement soumises au Conseil des ministres et, évidemment, qu'on présume de la décision du Conseil des ministres, on déborde largement les questions d'intérêt, d'actualité, d'urgence, etc., qui sont en cause. C'est tout ce que le ministre signifiait, M. le Président.

Le Président: Le règlement prévoit, à l'article 81, qiTaucun rappel au règlement ne peut être fondé sur l'opinion que la réponse à une question posée à un ministre est insatisfaisante." Je peux comprendre que l'Opposition peut déplorer la façon de répondre d'un ministre, peut déplorer le contenu d'une réponse, mais, à ce moment-là, la présidence... S'il vous plaît! La présidence n'a pas à juger. Je pense que le juge ultime, c'est la population, et vous avez soulevé le point exactement, suivant la question que vous pouvez faire. La conclusion que vous avez donnée est là.

M. Chevrette: M. ie Président, je reviens sur une question...

Le Président: Sur la question de règlement?

M. Chevrette: ...de règlement et je vais vous expliquer pourquoi. Un ministre a le droit de dire qu'il y va de l'intérêt public de ne pas répondre. Un ministre peut répondre, M. le Président, que, compte tenu de la situation, 0 préfère s'abstenir. Il peut utiliser des propos, dans sa réponse, avec lesquels on peut être en désaccord. Mais aller se lever de son siège et dire que ce n'est pas de nos affaires, c'est une tout autre paire de pantalons, M. le Président, et celle-là, on ne l'endosse pas.

M. Jolivet: C'est vrai.

Le Président: Effectivement, on peut invoquer l'article 82. L'article 82 dit que le ministre doit refuser de répondre à une question "si sa réponse aurait pour effet de contrevenir aux paragraphes 2° et 3" de l'article 35", peut-être dans certaines circonstances ou s'il juge la réponse contraire à l'intérêt public. Le règlement le prévoit.

Mais je vous dis, moi, comme président, évidemment, que, si la réponse est insatisfaisante et que vous voudriez une réponse autre du ministre, je ne peux modifier sa réponse et je ne peux l'obliger à répondre non plus. Si le ministre décide de ne pas répondre à une question et se rassoit, il y a des possibilités prévues au règlement, un débat de fin de séance; ça ne s'applique pas en juin, je le comprends. Mais, autrement, le juge de la situation, c'est la population. La présidence ne peut forcer un ministre à répondre à une question en lui disant: Répondez à la question telle que posée. C'est chaque ministre qui décide de la façon de répondre et c'est la population qui décidera en bout de ligne.

Nous passons maintenant à...

M. Garon: Une question.

Le Président: Question additionnelle, M. le député de Lévis.

M. Garon: Ce que je veux demander au ministre, c'est très simple: Est-ce qu'il prend l'argent de sa poche pour payer les contrôleurs? S'il ne prend pas l'argent de sa poche, est-ce que, à ce moment-là, il a pris des engagements personnels, mais ne sait pas s'il va être autorisé par le Conseil du trésor? Ou est-ce qu'actuellement, préalablement à ce qu'il a dit aux gens de l'ANCAl pour les 30 camionneurs au mois d'août et pour les 200 au cours de l'année, il a obtenu les engagements budgétaires? Est-ce qu'il a obtenu les autorisations? Ou, tout simplement, s'engage-t-il à aller les demander au Conseil du trésor qui pourra le renvoyer avec son petit bonheur comme l'ancien ministre et, à ce moment-là, il va dire: Bien, j'ai essayé et je n'ai pas été capable?

Le Président: Alors, M. le ministre des Transports.

M. Elkas: M. le Président, tout ce que je peux répondre au député de Lévis et aux membres opposants, c'est qu'on me dit qu'on doit suivre des processus. Moi, je suis prêt à présenter ça au Conseil des ministres étape par étape, à revenir en Chambre et à l'informer.

Une voix: C'est ça.

Le Président: En question principale, M. le député de D'Arcy-McGee.

M. Libman: O.K. C'est une question pour le ministre des Affaires sociales et on attend son retour, peut-être.

Une voix: II va revenir.

Le Président: Alors, M. le leader du gouvernement.

M. Pagé: M. le Président, le ministre de la Santé et des Services sociaux était avec nous jusqu'à il y a quelques minutes et, si j'ai bien compris, il a été demandé. Peut-être pourrions-nous passer la question et revenir au député.

Le Président: Effectivement, le ministre s'est absenté; donc, nous allons prendre une question principale de l'Opposition officielle et nous reviendrons avec vous pour la question supplémentaire, dès le retour du ministre. Alors, en question principale, M. le député de Shefford.

Appel de propositions pour la construction de logements

M. Paré: Oui, merci, M. le Président. En matière de logement social comme dans beaucoup d'autres domaines, c'est l'incertitude, l'inquiétude et le mécontentement. La ville de Montréal affirme que le programme de mise de fond du gouvernement québécois est en train de favoriser l'étalement au détriment de la ville de Montréal. À cause de la mésentente du gouvernement québécois avec le gouvernement fédéral, on ne sait toujours pas, rendu au mois de juin, combien il y va y avoir de HLM qui vont être réalisés cette année et on ne sait pas, non plus, combien de coopératives d'habitation et d'organismes sans but lucratif seront autorisés. Puisque la rencontre avec le gouvernement fédéral était prévue pour le 22 mal dernier, que ça a été reporté seulement à la fin du mois de juillet, en pleines vacances, et que ce sera peut-être encore reporté, est-ce que le ministre des Affaires municipales et responsable de l'habitation, peut nous dire quand il prévoit, finalement, aller en appel de propositions pour satisfaire aux 192 projets concernant les coopératives d'habitation et les organismes sans but lucratif?

Le Président: M. le ministre des Affaires municipales et responsable de l'habitation.

M. Picotte: II me semble, M. le Président, que c'est facile à comprendre. D'ailleurs, j'ai eu l'occasion de l'expliquer au député de Shefford et je vais le lui réexpliquer. Pour aller en appel de propositions, il faut connaître l'ensemble et la totalité des budgets. Comme nous n'avons qu'une partie des budgets, nous irons en appel de propositions au moment où nous saurons -de quelle somme nous disposons pour aller en appel de propositions. Je l'ai déploré moi de même. C'est moi qui lui ai acheminé, sans qu'il m'en fasse la demande, la copie d'une lettre que j'ai envoyée à M. Redway, le condamnant d'avoir modifié la date de la conférence fédérale-provinciale. Je lui disais que ça nous causait des problèmes. Je pense, M. le Président, que je ne peux pas expliquer davantage qu'en disant que, tant que nous ne connaîtrons pas la part que le fédéral va mettre dans les budgets, nous ne pourrons décider vers quel nombre de logements nous irons et combien d'appels d'offres seront lancés. Dès que ce sera fait, nous irons dans les meilleurs délais. Je répète encore une fois, M. le Président, que c'est moi-même qui ai signifié à M. Redway mon désaccord là-dessus et c'est moi-même qui ai expédié cette copie de ma lettre, sans qu'on me le demande, au député de Shefford, pour lui démontrer ma collaboration. Donc, il aurait dû comprendre déjà, mais je le répète quand même.

Le Président: En complémentaire, M. le député de Shefford.

M. Paré: Oui, M. le Président, en complémentaire. Dû à ce retard, est-ce que le ministre peut nous dire s'il croit qu'il va être encore possible de respecter l'engagement qui avait été pris par le premier ministre lui-même, le 6 septembre dernier, à l'effet de réaliser exactement 2812 logements en HLM durant les années 1990-1991 ou s'il s'agit, encore une fois, d'un engagement du premier ministre qui ne sera pas tenu?

Le Président: M. le ministre.

M. Picotte: M. le Président, c'est encore pire que je le croyais. J'ai eu l'occasion de démontrer, en commission parlementaire, que, quand on fait le total de toutes nos interventions en habitation, non seulement on en a fait plus que l'ancien gouvernement, plus que promis, mais on a au moins décidé une chose, nous: eux qui prétendent qu'on ne défend pas les démunis, on a décidé de mettre tous nos programmes en faveur des démunis, contrairement à eux.

Et, aujourd'hui, il me demande si on va respecter nos engagements. M. le Président, le passé étant garant de l'avenir, je dis au député de Shefford: Oui, effectivement, et c'est vérifia-

bie n'importe quand, les chiffres ont été mis sur la table. Alors, je dis au député de Shefford: Nous allons respecter nos engagements. Et c'est bien sûr que, s'il y a un retard de quelques mois à cause de la situation que je viens de souligner, M. le Président, il faut déjà dire que, parfois, on va en appel d'offres pour deux ans et que le retard qu'on prend à l'intérieur d'une année est hautement compensé par l'autre année qui est déjà mise en marche avant même que l'année ne soit arrivée. C'est donc facile à comprendre, M. le Président. Il sait tout ça.

Le Président: Alors, avant de vous reconnaître en question complémentaire, je vais demander la collaboration de tous les députés, s'il vous plaît. En complémentaire.

M. Paré: Oui. Merci, M. le Président. Justement, le passé étant garant de l'avenir, je suis très inquiet par rapport aux engagements du premier ministre.

J'aimerais savoir si, effectivement, vous êtes en mesure, ce matin, de reconfirmer que, durant les années 1990 et 1991, on va réaliser les 2812 logements promis ou si, au contraire, on va faire comme on est en train de faire dans certaines municipalités où on les avait annoncés en septembre dernier et où on commence à remettre en doute, et on demande à la Société d'habitation du Québec d'examiner l'opportunité de réaliser ces dossiers avec un exemple bien précis, Saint-Prime. (11 h 20)

M. Picotte: M. le Président...

Le Président: M. le ministre.

M. Picotte: Ça fait déjà suffisamment de temps que le député de Shefford est critique en habitation pour savoir que, quand une construction d'habitation est annoncée, il faut d'abord, par la suite, trouver des terrains. Or, il sait très bien, qu'à Côte-des-Neiges, à Montréal, par exemple, il y a une pénurie de terrains. Il n'y en a pas. Il faut toujours bien commencer par trouver un terrain avant de construire l'habitat. Même si on a dit qu'on le construirait, ce n'est pas dans un espace aérien, un habitat, ça ne se situe pas entre ciel et terre, ça se situe sur un terrain. Donc, les étapes se suivent et, dès qu'on a ça, on construit.

Alors, il peut y avoir de légers retards dans certains cas. Parlez-moi donc des endroits où il y a devancement et, à partir de ce moment-là, vous allez équilibrer et vous allez être en mesure de poser une question qui fera en sorte qu'il y aura du discernement au lieu de ne pas en avoir.

Le Président: Nous allons passer à la question principale suivante. Je comprends, M. le député de D'Arcy-McGee, que vous reviendrez demain pour votre question principale. Alors, en question principale maintenant, Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve.

Indemnité en cas de fermeture d'usine et de licenciement

Mme Harel: M. le Président, il y a trois ans, la compagnie de matelas Simmons de Saint-Henri déménageait à Cornwall en Ontario. Après 96 ans d'opération, 163 hommes et femmes, dont la plupart avaient plus de 25 ans d'ancienneté, étaient mis à pied sans aucune des modestes indemnités prévues à la convention. Une sentence arbitrale est venue tout récemment leur donner raison. Les deux jours par année de service qui doivent leur être payés devront l'être par la compagnie. C'est 1 000 000 $ qui leur est dû.

Devant l'entêtement de la compagnie, suite à cette décision arbitrale de porter en appel la décision, la FTQ a décidé de lancer un boycottage des 80 000 matelas Simmons vendus au Québec, M. le Président, et réclame du ministre de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle une législation qui protège et oblige le versement de payes de séparation comme en Ontario. Qu'est-ce que le ministre attend pour inclure la protection d'une indemnité lors des licenciements et des fermetures trop nombreuses qui se produisent présentement, M. le Président?

Le Président: M. le ministre de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle.

M. Bourbeau: M. le Président, la députée de Hochelaga-Maisonneuve souligne un point extrêmement intéressant et extrêmement important auquel je suis particulièrement sensible. La députée de Hochelaga-Maisonneuve sait que j'ai annoncé, en mars 1989, dans le cadre de la stratégie d'adaptation de la main-d'oeuvre québécoise aux nouvelles réalités du marché, un plan d'action gouvernementale qui, actuellement, se met en place morceau par morceau. Dans ce plan d'action là il y a une réforme de la loi sur la qualification et la formation professionnelle de la main-d'oeuvre, et c'est à l'occasion de la réforme de cette loi que seront prises les décisions dont parie la députée de Hochelaga-Maisonneuve.

Le Président: Question complémentaire.

Mme Harel: M. le Président, les travaux de la commission parlementaire sont déjà terminés depuis trois mois maintenant. Quelles recommandations le ministre entend-il faire à son gouvernement et quand, plus précisément?

Le Président: M. le ministre.

M. Bourbeau: M. le Président, la députée de Hochelaga-Maisonneuve confond deux lois. La Loi sur les normes du travail, dont elle vient de parler, et l'autre loi dont je viens de parler, qui est la loi qui régit les commissions de formation professionnelle. Or, le problème dont elle parle ne touche pas, ne dépend pas de la Loi sur les normes du travail, celle que nous avons étudiée en commission parlementaire il y a trois mois, mais plutôt de la Loi sur la qualification et la formation professionnelles de la main-d'oeuvre. Donc, dès que nous allons amorcer l'étude du projet de loi que je compte déposer à l'automne, la députée de Hochelaga-Maisonneuve, je l'espère, pourra voir des améliorations sensibles au problème qu'elle a soulevé.

Le Président: En complémentaire.

Mme Harel: M. le Président, le ministre reconnaît-il que pour la seule région de Montréal et pour l'année 1989 seulement, en excluant les entreprises sous juridiction fédérale, en excluant la majorité des entreprises qui, en vertu de la loi dont il parie justement, n'envoient pas leur avis - et je voudrais déposer la liste, M. le Président - 113 entreprises ont fermé leurs portes, 7700 travailleurs et travailleuses ont été licenciés, la plupart toujours sans aucune protection au moment de la fermeture.

Combien de centaines de fermetures d'entreprises le ministre va-t-il attendre pour enfin agir en matière de protection des travailleurs licenciés?

Le Président: Alors, y a-t-il consentement au dépôt du document par Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve?

Des voix: Consentement.

Le Président: Consentement. Alors, le document est déposé. M. le ministre, pour la réponse.

M. Bourbeau: M. le Président, je suis très sensible aux problèmes dont vient de parier la députée de Hochelaga-Maisonneuve et j'ai la ferme intention d'agir le plus rapidement possible dans ce dossier-là. Mais il y a un maximum de travail que peut accomplir un ministre ou un gouvernement en l'espace de quelques mois. Après la Loi sur la reforme de l'aide sociale, la Loi sur les régimes complémentaires de retraite, la Loi sur les normes du travail, on arrive maintenant à la loi dont je viens de parier tout à l'heure. Je pense que réformer quatre lois en moins de deux ans, c'est quand même pas si mal.

Le Président: Alors, pour une question principale, M. le député d'Abitibi-Ouest et leader adjoint...

Accessibilité des immigrants aux cours de français

M. Gendron: Oui, très rapidement... Le Président: ...de l'Opposition.

M. Gendron: ...parce qu'il nous reste peu de temps. Je voudrais poser ma question à la ministre de l'Immigration. Compte tenu que, de plus en plus, il serait important que les immigrants que le Québec reçoit de partout puissent s'intégrer mieux et plus rapidement à la communauté francophone et que, manifestement, il y a des retards indus et que les listes d'attente s'allongent pour permettre que ces gens-là puissent avoir un minimum d'aide et d'apprentissage de la langue française au niveau des COR, est-ce que la ministre pourrait indiquer à cette Chambre si on attend le fameux résultat du brasse-camarades qui se passe à Ottawa pour exiger que les délais soient plus courts et que le gouvernement fédéral ne coupe pas de 25 %, comme c'est son intention?

Mme Gagnon-Tremblay: M. le Président, je dois mentionner qu'il est totalement faux de dire que les immigrants ne peuvent pas s'inscrire à des cours de français. Je dois vous dire que le gouvernement a créé deux programmes québécois de francisation et qu'actuellement il y a encore place pour des nouveaux venus pour s'inscrire à ces deux programmes, le PQFI, qui se donne dans les COFI et un autre programme aussi qui demande une association avec des groupes communautaires. Cependant, je dois vous dire que, au niveau du programme PNFE, le programme national de cours de français, de formation, qui n'est pas un cours de francisation, mais bien d'adaptation sur le marché du travail, nous sommes, c'est vrai, en négociation avec le gouvernement fédéral. Actuellement, les négociations vont bon train et, dès que nous aurons terminé ces négociations, nous pourrons, à ce moment-là, rappeler les personnes qui ont déjà fait des demandes, dans le but de pouvoir donner ces cours le plus rapidement possible.

Le Président: Alors, c'est la fin de la période de questions.

Il n'y a pas de votes reportés.

Motions sans préavis. Aux motions sans préavis, M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Brassard: M. le Président, je solliciterais le consentement de cette Chambre pour qu'on puisse débattre et adopter le plus rapidement possible cette motion qui se lit comme suit: "Que cette Assemblée, étant donné l'ampleur des enjeux des négociations constitutionnelles en cours à Ottawa, demande la convocation de la commission parlementaire des institutions aux fins d'entendre, dès cet après-midi, le ministre

délégué aux affaires intergouvernementales canadiennes afin qu'il fasse, au nom de la transparence, un rapport sur l'état des négociations."

Le Président: Alors, est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion, M. le leader du gouvernement?

M. Pagé: Pour tous les motifs invoqués par Mme la vice-première ministre, pas de consentement, M. le Président.

Le Président: Donc, il n'y a pas de consentement.

Toujours aux motions sans préavis, M. le député de Gouin.

M. Boisclair: Compte tenu aussi des propos tenus par le ministre de la Main-d'oeuvre et de la Sécurité du revenu, j'aimerais qu'on puisse débattre de la motion suivante: "Que l'Assemblée nationale du Québec, à l'occasion de la campagne de boycott contre les matelas Simmons, regrette, à l'instar de la ville de Montréal et de la Chambre de commerce du Montréal métropolitain, la décision des dirigeants de la compagnie d'en appeler de la sentence arbitrale qui reconnaît le droit des 163 employés licenciés de réclamer leur prime de séparation pour la perte de leur emploi occasionnée par le déménagement de l'usine à Cornwall, en Ontario."

Une voix: Bravo!

Le Président: Alors, est-ce qu'il y a consentement pour que nous débattions de cette motion? M. le leader du gouvernement.

M. Pagé: Pas de consentement, M. le Président.

Le Président: Donc, pas de consentement.

Avis touchant les travaux des commissions. M. le leader adjoint du gouvernement. (11 h 30)

Avis touchant les travaux des commissions

M. Lefebvre: Oui, M. le Président. De 12 heures à 13 heures, aujourd'hui, de 15 heures à 18 heures et de 20 heures à 24 heures, à la salle Louis-Hippolyte-Lafontaine, la commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation procédera à l'étude détaillée des projets de loi suivants, et ce, dans l'ordre ci-après indiqué: Le projet de loi 15, Loi sur la mise en marché des produits agricoles, alimentaires et de la pêche et modifiant d'autres dispositions législatives; projet de loi 34, Loi modifiant la Loi sur le financement agricole, après les affaires courantes, jusqu'à 13 h 30, à la salle Louis-Joseph-Papineau.

M. Pagé: À partir de midi.

M. Lefebvre: À partir de midi, M. le Président, jusqu'à 13 h 30, à la salle Louis-Joseph-Papineau. La commission de l'aménagement et des équipements complétera ses consultations particulières dans le cadre de l'étude du projet de loi 65, Loi modifiant la Loi sur la qualité de l'environnement De 15 heures à 18 heures et de 20 heures à 22 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau, la commission de l'aménagement et des équipements procédera à des consultations particulières dans le cadre de l'étude du projet de loi 60, Loi sur la Société québécoise de récupération et de recyclage. Merci, M. le Président.

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement pour dérogation à l'article 143 relativement aux heures où les travaux de la commission de l'aménagement et des équipements seront tenus?

Une voix: Consentement.

Le Président: Consentement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président.

Le Président: M. le ministre de l'Environnement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): La commission de l'aménagement et des équipements, pour la Loi modifiant la Loi sur la qualité de l'environnement, c'est à quelle heure que vous avez dit qu'est le début des travaux?

Le Président: M. le leader adjoint du gouvernement, si vous voulez nous indiquer à nouveau.

M. Lefebvre: À partir de midi. Le Président: C'est très bien.

M. Chevrette: II y a consentement dans toutes les discussions.

Le Président: Oui. J'ai compris, c'est de midi à 13 h 30. Oui, M. le leader de l'Opposition.

M. Chevrette: Je pense que, dans le cas des audiences des groupes que l'on doit entendre, je suis d'accord avec le leader du gouvernement qu'on peut modifier l'avis et leur demander de procéder immédiatement, pour le cas précis de l'environnement.

Le Président: II y a consentement à cet effet-là?

Des voix: Consentement.

Le Président: Donc, la commission va se tenir immédiatement jusqu'à 13 h 30. Très bien.

Aux renseignements sur les travaux de l'Assemblée. Est-ce qu'il y a des questions? Il n'y a pas de question. Ceci met donc fin à la période des affaires courantes. M. le député de La Prairie, s'il vous plaît! Il est de coutume dans l'Assemblée, de tradition, qu'on ne passe jamais entre la masse et la présidence.

Débat restreint sur les rapports

des commissions qui ont étudié

les crédits pour l'année financière 1990-1991

Donc, nous arrivons maintenant aux affaires du jour. Aux affaires du jour, nous avons une affaire prioritaire. Aux affaires prioritaires, maintenant, il s'agit du débat restreint sur les rapports des commissions qui ont étudié les crédits budgétaires pour l'année financière 1990-1991. Ce débat est restreint, donc nous devons organiser le temps, répartir le temps entre les formations politiques. Est-ce qu'il y a un député qui veut intervenir immédiatement? Nous pourrons procéder à la conférence des leaders pendant ce temps-là. Est-ce qu'il y a un intervenant?

M. Pagé: M. le Président.

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Pagé: M. le Président, je prévois que la conférence des leaders va déboucher sur un partage du temps entre les deux formations politiques et, au besoin, on devra le prendre en compte si une demande nous est formulée par les représentants des députés indépendants. Ce que je vous propose, c'est qu'on amorce immédiatement le débat puisqu'il est déjà 11 h 34. Je présume que l'entente devrait déboucher sur un partage du temps où le ministre pourra avoir une certaine enveloppe et aussi un droit de réplique. Et on reviendra dans quelques minutes.

Le Président: M. le leader de l'Opposition.

M. Chevrette: C'est un débat restreint de deux heures, M. le Président?

Le Président: Exactement.

M. Chevrette: Je suis prêt à faire une proposition, mais je pense qu'on va être obligés de le faire en arrière.

Le Président: Bien, écoutez, c'est préférable d'avoir une conférence avec la présidence et les deux leaders. Il est de tradition, généralement, qu'on peut enclencher le débat et que nous faisons le partage du temps lors de la première intervention. D'accord? Je vais reconnaître sur ce débat, comme premier intervenant, M. le président du Conseil du trésor. J'invite immédiatement les deux leaders à l'arrière pour une conférence des leaders. Donc, M. le ministre délégué à l'Administration et à la Fonction publique et président du Conseil du trésor, vous avez la parole.

M. Daniel Johnson

M. Johnson: M. le Président, nous sommes ici à la fin d'un bloc important - c'est le moins qu'on puisse dire - de nos travaux législatifs, c'est-à-dire celui de l'étude des crédits du gouvernement du Québec pour l'année 1990-1991, les crédits étant la somme des programmes de dépenses des différents ministères qui sont soumis pour analyse, étude et adoption éventuelle aux députés, en vertu du contrôle législatif des dépenses. Nous avons été amenés à déposer ces crédits dans un contexte particulièrement difficile, M. le Président. Oui, nous sommes à la fin d'une décennie qui a été marquée par des changements très profonds de l'économie, y compris de l'économie du Québec, l'ouverture des frontières à la concurrence de plus en plus féroce que se livrent entre elles les différentes régions du globe, des besoins de plus en plus criants, à certains égards, de toutes nos sociétés et des moyens, à travers tout ça, qui diminuaient, des moyens que les gouvernements cherchent avec une attention et une insistance croissante, afin de rencontrer, dans un contexte de concurrence, des besoins nouveaux, des besoins extrêmement élevés.

On a vu, depuis une dizaine d'années, comment nous avons dû affronter des crises financières et budgétaires. Il suffit de se souvenir comment, au début des années quatre-vingt, les employés du secteur public ont été traités par le gouvernement qui nous a précédés: des coupures de salaire de quelque 20 % qui permettaient de boucler les comptes de plus de 500 000 000 $. En dollars d'il y a 10 ans, il faut se rendre compte que ça signifierait une coupure unilatérale, sans convention collective, de plus de 1 000 000 000 $ si on faisait ça aujourd'hui. Alors, on se rend compte de l'ampleur des coupures qui avaient été réalisées à l'époque. On peut toujours questionner l'opportunité des choix qui ont été faits, mais on doit constater qu'ils ont été faits afin de réaliser des équilibres financiers, notamment, parce qu'au fil des ans le poids de la dette, du service de la dette, des emprunts contractés par le gouvernement d'alors imposait des contraintes réelles sur la croissance des dépenses qui est toujours limitée par la capacité de payer des contribuables.

Nous avons donc, il y a quelques années, hérité de cette situation et avons dû prendre quelques décisions, des décisions qui coulaient de la source suivante, M. le Président: avoir comme

priorité de redresser les finances publiques en nous attaquant à l'évolution structurelle des programmes de dépense du gouvernement, afin de diminuer ce taux de croissance. Alors, nous avons dû prendre des mesures, ma foi, particulièrement difficiles. Nous avons dû, avec la solidarité de tous les députés de la majorité ministérielle, nous convier à des exercices, extrêmement pénibles à l'occasion, de choix, d'arbitrage que nous avions à faire afin de réduire la croissance des dépenses.

Et je m'en voudrais de ne pas remercier ici l'ensemble de la deputation ministérielle pour la solidarité qui a été manifestée par tout ce groupe politique dans des objectifs qui étaient ceux que nous avions proposés à la population: assurer une croissance des dépenses de l'État qui est conforme à la capacité de payer des contribuables en ayant à l'esprit qu'on devait d'abord assurer que cette capacité, déjà beaucoup surtaxée, devait retrouver une quelconque marge de manoeuvre afin de véritablement libérer l'espace économique qu'occupait le gouvernement.

C'est la trame générale qui nous a amenés, depuis cinq ans, à prendre des décisions et à réduire, effectivement, les taux de croissance des dépenses publiques comme nous l'avons démontré amplement et comme les documents que nous avons en main permettent à l'ensemble des députés de le constater.

Mais, de façon plus immédiate, malgré les efforts déjà consentis pendant quatre ou cinq ans, la confection des comptes de dépenses, des comptes publics, des crédits de dépenses, de-vrais-je dire, du gouvernement du Québec en 1990-1991, s'est heurtée, néanmoins, à d'autres obstacles: d'abord, la nécessité de maintenir la capacité des contribuables de financer les services publics à l'intérieur d'un seuil acceptable, acceptable étant celui que les comparaisons avec nos voisins peuvent nous dicter. Nous ne vivons pas en vase clos. Nous avons à affronter la concurrence. Nous avons à nous assurer que les ponctions fiscales qui pèsent sur nos contribuables ne sont pas tellement supérieures à ce qui se fait ailleurs qu'on décourage l'emploi, qu'on décourage l'investissement et qu'on décourage donc le développement économique. (11 h40)

Nous avons donc dû respecter, d'abord et avant tout, cette capacité de payer des contribuables. Alors, il était au centre même de l'exercice budgétaire de cette année de ne pas augmenter les impôts des particuliers québécois. Nous avons même réussi - le ministre des Finances l'a d'ailleurs dit, et nous l'avons tous répété de ce côté-ci - par des indexations pleines et entières, à libérer des centaines de millions de dollars de revenus disponibles, notamment à l'intention des familles québécoises. Nous avons dû, par ailleurs, nous assurer d'un contrôle rigoureux des coûts. Nous avons dû nous pencher sur les moyens d'accroître l'efficacité de la gestion de tous ces services publics et nous avons dû, compte tenu de ces éléments, prendre en compte, en l'absence de mesures concrètes de réduction de dépenses additionnelles, que nous en serions à un taux de croissance, cette année par rapport à l'an dernier, dans les dépenses publiques, de 7,5 %, ce qui est carrément inacceptable dans la situation financière que nous connaissons, si on veut maintenir le cap sur les objectifs que j'ai décrits.

Devant toutes ces difficultés, il s'en ajoutait une autre, M. le Président, celle de l'intention manifeste et les décisions concrètes du gouvernement fédéral d'envoyer une pression additionnelle sur les provinces, notamment les provinces qui ont un profil économique comme celui du Québec, en transférant une partie du déficit fédéral sur les provinces, en leur occasionnant des manques à gagner au niveau des revenus de transfert du gouvernement fédéral qui nous imposaient, à nous aussi, des mesures additionnelles au-delà de toutes celles que j'ai indiquées en raison du contexte que j'ai indiqué et des objectifs que nous poursuivons.

Nous avons donc dû prendre en compte, M. le Président, l'ensemble de cette situation pour en arriver, afin de confectionner les crédits, à retenir quelques voies permettant d'entrer à l'intérieur des objectifs que les Québécois ont les moyens d'endurer. De façon exceptionnelle, nouvelle, un comité ministériel de revue de programmes de l'ensemble des activités gouvernementales a été mis sur pied par le premier ministre du Québec. J'ai eu l'honneur et l'occasion de présider ce comité avec quelques collègues et de faire rapport éventuellement au gouvernement sur les choix qui s'offraient à nous afin de respecter les objectifs fondamentaux de croissance des dépenses publiques.

On a donc vu que nous avons, en bout de ligne, décidé de comprimer des dépenses en confectionnant les crédits, par opposition à ne rien faire du tout et laisser la machine continuer, comprimer les crédits d'un peu plus de 400 000 000 $. Ça a été fait, M. le Président, de deux façons: L'une qui procède de choix délibérés et spécifiques de différents ministères qui seront annoncés au fil des semaines ou, alors, qui font l'objet de mesures administratives internes dans certains ministères, d'une part, et, d'autre part, d'une décision, je dirais philosophique, de partage des coûts de certaines activités avec d'autres acteurs intéressés en toute première ligne à la gestion et à l'administration de ces activités.

Je m'explique en deux ou trois mots. Décentralisation du financement scolaire. Il nous est apparu opportun, légitime même, de faire en sorte que certaines décisions à l'égard du système de l'éducation, du réseau de l'éducation, soient prises au niveau local, le mieux placé, dans certaines circonstances, pour prendre ces décisions, faire ces choix et ces arbitrages, et

c'est ce que nous avons décidé de faire. Nous n'enlevons rien à personne, je le répète, par ce geste de décentralisation du financement scolaire. À terme, plus de 300 000 000 $ seront en cause, seront donc à la charge de commissions scolaires locales qui financeront ces besoins, à même l'assiette fiscale locale sur laquelle et par rapport à laquelle, pourrions-nous dire, lorsqu'on se compare avec nos voisins et d'autres juridictions, il y a une marge de manoeuvre réelle qui s'ouvre aux instances locales pour utiliser cette forme de financement. Il n'y a aucune marge que ce soit au niveau de l'impôt sur le revenu des particuliers car, effectivement, M. le Président, nous avons à bien tenir en compte les désavantages que signifieraient pour le Québec des hausses d'impôt sur le revenu des particuliers dans un contexte, je le répète, concurrentiel.

Nous avons donc procédé à certaines compressions de dépenses spécifiques à des programmes et à des activités. Libre à chaque ministère de faire ses choix. Deuxièmement, à des compressions dites paramétriques, c'est-à-dire qui affectent l'ensemble des ministères que l'on convie à une gestion particulièrement serrée de certains postes de dépenses. Et, troisièmement, à des diminutions de coûts pour le gouvernement du Québec qui se sont traduites par un transfert de responsabilités et de ressources financières aux instances locales. Je veux que ce soit bien clair, M. le Président. On n'a pas pelleté quoi que ce soit vers quelque instance que ce soit. Nous avons, dans la décentralisation du financement scolaire, mis entre les mains des commissions scolaires des responsabilités additionnelles, donc, un pouvoir décisionnel au niveau local, et, en parallèle, avons doté les commissions scolaires d'un pouvoir de financement de ces besoins qui sont maintenant à leur charge, qui sont de leur ressort et de leurs responsabilités.

M. le Président, ça a été de toute évidence l'exercice le plus difficile à réaliser à l'occasion de la confection des crédits. On sait les portes qui sont ouvertes maintenant vers l'avenir vers des discussions, des rencontres, des entretiens avec nos partenaires des instances locales. Nous aurons, et nous l'avons annoncé, à regarder de façon très attentive dans les semaines et les mois qui viennent l'ensemble des relations financières du gouvernement du Québec et des instances locales, afin d'en arriver peut-être à un nouveau partage de nos responsabilités ayant à l'esprit que, dans chaque cas où des nouveaux partages de responsabilités seraient convenus ou se produiraient, nous aurons - et c'est l'engagement que nous avons contracté - à prévoir des sources de financement à l'endroit de ces nouvelles responsabilités. Il est exclu que nous nous comportions dans ces matières comme des gens qui restreindraient la capacité de payer du milieu local tout en imposant au milieu local des responsabilités additionnelles. Les deux vont de pair. C'est d'ailleurs ce que nous avons fait. La preuve est là. Le transfert aux commissions scolaires locales d'une partie des décisions qui affectent le milieu local s'est accompagné de modifications que nous proposons, et qui sont d'ailleurs débattues en cette Assemblée ces jours-ci, modifications à la capacité des instances locales d'aller chercher le financement qui permet de remplir des responsabilités.

Donc, premier aspect particulièrement difficile, mais qui ne nous empêchait cependant pas, M. le Président, c'est ce que je veux souligner à ce moment-ci, de retenir certaines priorités importantes et de les doter en crédits additionnels dans certains cas. Il y a deux façons de considérer qu'il y a des crédits additionnels. Ou alors on ajoute de façon spécifique des postes de dépenses, des programmes, de l'argent par-dessus ce que, mécaniquement, un ministère peut dégager. Ou alors on peut exempter, dans les cas de correction des taux de croissance, des dépenses qui font en sorte que nous sommes appelés à réduire les programmes, réduire la main-d'oeuvre, réduire différentes activités pour tout le monde afin que tout le monde contribue aux équilibres financiers. (11 h 50)

Nous pouvons, par ailleurs, décider d'exempter certaines missions prioritaires de cet effort collectif que nous devons faire. À partir du moment où le gouvernement décide qu'il y a des objectifs à atteindre et qu'en toute solidarité, normalement, tout le monde est convié à faire sa part, vous me permettrez de prétendre, M. le Président, que d'exempter tout le réseau de la santé et le réseau de l'éducation et de l'enseignement supérieur de mesures de compressions que tous les autres ministères, activités et missions doivent soutenir, c'est l'équivalent de dégager, dans ce contexte extrêmement serré, une marge de manoeuvre ou d'insister et de souligner que le gouvernement retient certaines priorités.

C'est ce que nous avons fait, M. le Président, à deux titres. Nous avons très littéralement évité toute compression. Quand on sait, et je le répète, que les dépenses évoluaient à un rythme tel qu'on aurait défoncé les 7,5 % de croissance par année, nous avons, même dans ces circonstances difficiles, exempté le réseau de la santé et celui de l'éducation et de l'enseignement supérieur de toutes sortes de compressions. Nous avons fait de même avec le ministère de l'Environnement. J'ajouterais, comme deuxième illustration à la façon d'enrichir une mission gouvernementale, que nous avons ajouté des crédits neufs, additionnels au ministère de l'Environnement après l'avoir exempté de toutes les compressions que j'ai mentionnées tout à l'heure. Ça m'apparaît, M. le Président, quelque chose de particulièrement substantiel à avoir réalisé.

Il m'apparaît, M. le Président, que nous avons rencontré les exigences que nous nous étions nous-mêmes définies. Si nous avons, afin

d'affronter la concurrence nouvelle des plus féroces, à mieux instruire nos ressources humaines, il faut exempter de compressions les réseaux d'éducation et d'enseignement, et c'est ce que nous avons fait. Si on doit assurer, comme c'est l'objectif numéro un d'un gouvernement civilisé, des soins de santé de qualité à l'ensemble de notre population, on doit, comme nous l'avons fait, exempter de toutes compressions, même dans des circonstances financières difficiles, le réseau de la santé et des services sociaux. Si on doit retenir comme priorité celle de la protection de notre environnement, c'est exactement ce que nous avons réussi à faire en exemptant de compressions ce ministère et en y ajoutant incidemment des sommes peu banales et très significatives.

Nous avons donc réussi, M. le Président, malgré des difficultés réelles et constantes, à fermer les livres, si vous me passez l'expression, à un niveau de crédits qui est acceptable pour les contribuables québécois et qui permet, à cause des choix que nous avons effectués, de la façon que nous les avons faits, de rencontrer les missions fondamentales et prioritaires du gouvernement du Québec et même d'en ajouter, dans les circonstances, à ces missions. M. le Président...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Je m'excuse, M. le ministre, de vous interrompre. Je voudrais quand même faire rapport de la conférence des leaders avec la présidence quant au partage du temps. Il reste cinq minutes comme droit de réplique à un membre du gouvernement. Les députés indépendants n'auront pas de temps à leur disposition. Le reste du temps est partagé à 50 % entre le groupe gouvernemental et l'Opposition officielle. Le temps qui n'est pas utilisé par un groupe accroît à l'autre.

Sur ce, M. le ministre, je tiens à vous informer que vous avez déjà 19 minutes d'utilisées et que vous avez 57 minutes et demie utilisables par le côté ministériel. M. le ministre et président du Conseil du trésor.

M. Johnson: M. le Président, j'étais donc en train de démontrer d'une façon extrêmement claire - et je vois, de ce côté-ci, qu'on est d'accord avec moi - que, dans des circonstances extrêmement difficiles, alors qu'on s'est donné nous-mêmes des objectifs extrêmement rigoureux et extrêmement sévères, nous avons réussi à protéger et même à enrichir les missions fondamentales du gouvernement du Québec en matière de services à nos concitoyens.

Mais on voit, dans cet exercice, M. le Président, que nous avons dû, depuis quelques années et de façon extrêmement pointue cette année, remettre en cause le rôle du gouvernement. Je ne veux pas faire le long historique des décisions que nous avons prises en matière de présence du gouvernement dans l'économie, de réglementation de différents secteurs économiques. Je ne veux que retenir que tous ces gestes se résument dans notre capacité de respecter des objectifs de dépenses qui sont à la mesure et des besoins de la population et de la capacité de pouvoir payer pour tous ces services. À travers un exercice aussi rigoureux, on a donc à regarder plus attentivement qu'à l'accoutumée quelles sont les pistes que nous devrons emprunter à l'avenir. Nous avons déjà, à l'occasion des crédits 1990-1991, prévu, à certains égards - je l'ai expliqué - un réaménagement des responsabilités entre les différents niveaux de gouvernement. Je l'ai illustré avec l'exemple du financement scolaire.

Ça ne peut pas être terminé, M. le Président. Les défis financiers que nous avons à rencontrer dans les prochaines années, lorsqu'on regarde de plus près l'évolution naturelle de certains postes de dépenses, nous incitent à regarder de façon extrêmement particulière, singulière les gestes que nous aurons à poser pour compenser certaines augmentations inévitables de coûts dans certains services, et je pense à la santé. Nous aurons à adopter une nouvelle approche, en matière de gestion des dépenses publiques, si nous voulons offrir à nos concitoyens les services de qualité d'un niveau ou d'une étendue que nous connaissons déjà et dont nous nous sommes dotés. Tout en respectant leur capacité de payer pour ces services, nous devons nécessairement redéfinir le rôle du secteur public. Nous avons à nous interroger constamment sur la place que nous occupons. Nous avons à nous occuper constamment de contrôler la place déjà occupée et nous avons à nous demander chaque jour si la place que nous occupons est permanente.

Il m'apparaît essentiel de réévaluer partout le rôle et le coût du secteur public. Nous avons à remettre en cause les services afin de juger si leur utilité est toujours aussi grande que celle qui était souhaitée ou réelle lors de l'implantation de différents programmes. Nous avons à composer avec l'évolution que notre société a connue. Nous avons à soupeser la distribution financière des services. Nous avons à réexaminer jusqu'à quel point nos concitoyens tiennent véritablement à certains services qu'ils, non pas prennent pour acquis, mais prennent ou acceptent comme permanents sans jamais s'en préoccuper, sans jamais remettre en cause leur coût, leur étendue, leur ampleur, mais surtout les objectifs qui ont été retenus, parce que même les objectifs changent dans une société. On peut, à un moment donné, souhaiter un développement des programmes sociaux, débridé à la limite, illimité dans la mesure où il n'y a pas de limite à la demande de services. On peut souhaiter la même chose au niveau économique, qu'il n'y aurait pas de limite à soutenir, de toutes sortes de façons, l'implantation industrielle où que ce soit. On peut décider qu'à la limite il n'y en a pas de

limite à la protection de l'environnement et que tout doit être subordonné à cette mission. On peut, dans tous les domaines - je viens de donner trois exemples - dans chaque cas, décider que c'est la seule priorité, qu'elle est illimitée et qu'on met toutes nos ressources à atteindre les objectifs à l'intérieur de l'une ou l'autre de ces missions. (12 heures)

Malheureusement, M. le Président, la vie n'est pas aussi simple, nous le savons tous, et un gouvernement doit réaliser l'équilibre entre le soutien à l'économie, à l'emploi, à la création de la richesse, à la prospérité de la société, ce qui lui permet de dégager les ressources qui permettent de créer, soutenir et faire croître les programmes de protection sociale, le tout dans un contexte où on doit faire preuve de prudence afin de ne pas dégrader davantage notre environnement et fatiguer davantage la terre qui en a beaucoup enduré, notamment depuis les débuts de la révolution industrielle.

À l'intérieur de toutes ces missions, y compris la mission administrative qui fournit en infrastructures physiques ou de services comme la justice, l'ensemble d'une société, nous avons donc à réaliser le meilleur équilibre possible à la lumière du seul critère objectif que nous ayons à notre disposition, celui de la capacité de payer des contribuables québécois. Nous devons commencer avec cette mesure. Nous devons nous fier à cette seule ressource. Nous devons tenir compte de son caractère éminemment fragile, à partir du moment où, lorsque l'équilibre entre les différentes missions est rompu, la capacité de payer des Québécois en est affectée.

L'équilibre qui serait en faveur de programmes sociaux qui ne sont plus contrôlés pour répondre à toutes les demandes qui peuvent être formulées de façon illimitée atteint la capacité même des contribuables d'affronter leur propre avenir. Le développement industriel sans frontières ni limites peut sembler attrayant quant à la prospérité qu'il crée dans les poches de tous les Québécois, parce qu'il allège davantage leur fardeau fiscal; il n'en reste pas moins qu'il nuit en parallèle, et dans le même moment, à la qualité de notre environnement, à moins que l'on n'y consacre des sommes croissantes pour le protéger.

Et on peut arriver à des limites, lorsqu'on se compare avec ce qui se fait ailleurs, où notre désir de protéger et de surprotéger certaines valeurs nous empêche de progresser dans d'autres secteurs. C'est cet équilibre que nous avons à réaliser et, à partir du moment où on accepte que le seul critère, le critère principal, le premier qui doit nous guider est la capacité de nos concitoyens de se payer ces différents services, on doit remettre en cause, à l'intérieur de chacune des missions gouvernementales, chaque activité qu'on y retrouve, qui s'y est ajoutée ou greffée au fil des générations.

Les objectifs recherchés il y a 20 ans, les circonstances observées il y a 15 ans, les moyens qu'on pouvait avoir à notre disposition il y a 10 ans sont toutes des notions qui ont évolué depuis et qui permettent fort légitimement à un gouvernement de réexaminer si les objectifs poursuivis à l'origine sont toujours pertinents ou ne peuvent pas être mieux atteints, qui permettent à un gouvernement de tenir compte de l'évolution des besoins, à la baisse comme à la hausse, de différentes clientèles depuis une génération ou 15 ans ou 20 ans, et qui obligent également un gouvernement qui veut accomplir son devoir de façon responsable à tenir compte de ceux qui nous entourent lorsque vient le moment de financer ces différents programmes.

C'est l'exercice auquel le ministre des Finances m'a convié bien spécifiquement à l'occasion du discours sur le budget du mois d'avril. Le discours sur le budget indique que les défis d'équilibre des finances publiques sont encore à relever, que ce qu'on peut avoir accompli depuis plusieurs années demeure à parfaire et à compléter. C'est un programme, un projet persistant. C'est un projet que nous devons continuer à travailler, car il y a un problème persistant dans les finances publiques, pour les quelques prochaines années, qui nous mènerait à un déséquilibre financier de quelque 700 000 000 $ chaque année; c'est ce qu'indique le discours sur le budget.

Afin de réaliser nos équilibres financiers et les objectifs que nous nous sommes donnés, nous devons avoir à l'esprit, être conscients que des gestes majeurs doivent être posés dans les prochaines années afin de maintenir cette capacité des Québécois de payer pour les services gouvernementaux. Nous avons à regarder les structures, les coûts des différentes activités, à voir comment elles ont évolué depuis quelques années et comment leur coût en a été affecté. Nous avons à vérifier et revérifier l'efficacité des programmes, à voir, au-delà de la structure des coûts, à quel coût unitaire certains objectifs sont rencontrés. Nous avons à redéfinir les besoins essentiels de la société québécoise. À partir du moment où il y a un problème de 1 000 000 000 $, on doit regarder ce qui est essentiel, le conserver et se délester de ce qui l'est moins afin de respecter toujours - et c'est la seule pierre de touche qu'un gouvernement responsable peut utiliser - la capacité de payer du contribuable québécois.

Nous avons la responsabilité de ne rien exclure lorsque des exercices de cette nature s'enclenchent. Nous avons à regarder avec des yeux neufs des situations nouvelles. Car si nous avons à prendre des décisions qui respectent toujours l'équilibre des missions gouvernementales, mais qui nous amènent à mettre des accents sur des nouvelles préoccupations de notre société, tout en examinant la variété des sources de financement qui peuvent exister, en

mettant dans l'équation les partages de responsabilités des différentes instances, institutions et organismes de notre société, en regardant le potentiel de financement de certains services par l'utilisateur même de ces services, tout dans cette équation extrêmement complexe doit faire l'objet d'une remise en cause si on veut véritablement jeter des bases solides, donc durables, pour les équilibres financiers du gouvernement du Québec et le respect de la capacité de payer des contribuables québécois.

C'est donc avec une certaine humilité, je dirais, M. le Président, que, d'ici quelques mois, le gouvernement aura à regarder l'ensemble des activités gouvernementales. Une humilité qui vient du fait qu'il faut quand même se rendre compte de la difficulté de la tâche, de sa complexité, car le travail que nous avons à abattre en politique - c'est la raison essentielle pour laquelle nous sommes tous ici - est d'une telle ampleur qu'on peut difficilement prétendre, à la fin d'une carrière qui durerait toute une vie, avoir accompli tout ce qu'il y avait à accomplir.

C'est donc une simple étape, dans le fond, dans ce cadre beaucoup plus large, que nous aurons à traverser d'ici quelques mois. J'aurai, et mes collègues, les députés, et l'ensemble des membres de l'Assemblée nationale auront, au fil des mois et des années à venir, à continuer - j'en suis profondément convaincu - à prendre des décisions extrêmement difficiles devant le manque de ressources relatif, compte tenu des besoins qui sont manifestés dans notre société de plus en plus informée, de plus en plus exigeante à l'endroit de ses gouvernements. Nous aurons à nous rendre compte que nos ressources ne sont pas à la mesure des besoins formulés et exprimés. (12 h 10)

Et je m'amuse toujours lorsque je relis les discours sur le budget de celui qui, aujourd'hui, est le chef de l'Opposition. Longtemps, alors qu'il était là à tout le moins, a-t-on eu l'impression que les ressources étaient illimitées, qu'on pouvait emprunter tant qu'on voulait, que ce n'était pas l'argent qui manquait, mais les projets dispendieux. M. le Président, ça ne dure qu'un temps, des comportements comme ceux-là, et arrive le moment où on doit payer les factures; arrive l'instant où, l'inventaire étant fait, on s'aperçoit qu'on a dépassé les bornes et, heureusement, arrive en même temps cette conscience que le travail peut être fait si on se concentre sur l'essentiel. L'essentiel, c'est le sort de nos concitoyens. Le sort de nos concitoyens est d'abord et avant tout lié à des choix personnels que leur liberté leur permet de faire. Nos concitoyens sont d'autant plus libres qu'ils ont chacun les ressources disponibles pour se réaliser.

À partir du moment où nous avons fait nos devoirs, et notre devoir, d'équiper les gens, si je peux m'exprimer ainsi, avec une formation qui leur permet d'affronter l'avenir, avec une sécurité de santé et de services sociaux qui leur permet d'affronter l'avenir plus sereinement et avec plus d'assurance, nous avons le devoir d'alléger, au maximum, le fardeau financier que l'État fait peser sur nos concitoyens. C'est à la lumière de cet objectif que la constitution d'un budget de dépenses d'un gouvernement doit se faire. C'est en respectant cet objectif de façon constante depuis cinq ans que le gouvernement actuel a réussi à réduire le fardeau fiscal des Québécois et à maintenir des services et, j'irais dire, à ajouter certains services à la gamme de ceux qui étaient disponibles, notamment, il ne faut pas négliger de le dire et je le dirai en terminant, en remettant en cause certaines activités, une certaine présence de l'État dans l'économie, certains poids réglementaires et législatifs qui pouvaient peser sur des domaines d'activité fort variés, mais qui ont toutes eu comme résultat, toutes ces décisions, de libérer davantage la spontanéité entrepreneuriale, économique, communautaire même, du Québec.

M. le Président, je suis particulièrement fier d'avoir pu contribuer, avec des collègues, en équipe, à remettre les finances publiques du Québec sur la bonne voie. Je ne peux que souhaiter, alors que les défis sont toujours là, que nous aurons tous le temps de les attaquer, mais surtout que nous aurons tous la chance de pouvoir les relever avec succès. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le président du Conseil du trésor. Je reconnais maintenant M. le député de Labelle. M. le député.

M. Jacques Léonard

M. Léonard: M. le Président, je viens d'entendre l'autopanégyrique du président du Conseil du trésor, qui avait déposé ses crédits au mois de mars dernier, à la fin du mois de mars, lesquels nous ont conduits au budget du mois d'avril dernier. M. le Président, je voudrais rétablir une chose en partant. Ce gouvernement se vante sans arrêt d'avoir réduit l'écart fiscal entre l'Ontario et le Québec, et il en fait sa gloire. Il s'en vante constamment en disant que, sous l'ancien gouvernement, c'était une chose épouvantable, que l'écart entre l'Ontario et le Québec s'était agrandi et qu'eux-mêmes avaient corrigé la situation ou auraient corrigé la situation. rétablissons donc les faits, en partant, sur cela, parce qu'il est important que la population le sache. lorsque nous avons pris le pouvoir en 1976, pour ne pas aller trop loin dans l'histoire, l'écart fiscal entre l'ontario et le québec était de 20 %, 20 % plus élevé au québec. et ceux qui venaient de laisser le gouvernement étaient

les gens d'en face, exactement l'actuel premier ministre du Québec qui dit qu'il se spécialise dans la fiscalité ou qui se prétend un super en fiscalité. Pendant les six ans où il a été au gouvernement, l'écart fiscal avait atteint 20 % entre l'Ontario et le Québec. Et vous vous rappellerez que, durant ces années de gouvernement libéral, de 1970 à 1976, les budgets augmentaient à des taux faramineux d'une année à l'autre, de l'ordre de 15 % à 20 % par année. C'était ça, la réalité. De sorte que, lorsque nous sommes arrivés, l'État avait un budget considérable, faisait face à des problèmes qu'il n'arrivait plus à solutionner et la population se rappelle très bien qu'elle n'avait pas d'autre choix que de battre le gouvernement de l'actuel premier ministre, au pouvoir à l'époque. Ils l'ont battu. Ils ont bien fait.

Et, si nous revenons à cette question de l'écart fiscal, qu'est-il arrivé entre 1976 et 1985? L'écart fiscal a diminué de 20 % à 10 %. Nous avons corrigé la situation pourrie qu'ils nous avaient laissée en ramenant l'écart fiscal de 20 % à 10 %. Ce sont ces gens-là qui nous avaient laissé la situation pourrie et nous l'avons ramenée. M. le président du Conseil du trésor se vante qu'ils l'ont baissé. De combien l'ont-ils baissé? Bien, de 1985 à maintenant, de 3,5 %. Mais ce qu'ils refusent de dire, ce qu'ils ne disent pas, c'est que, dans le temps où eux l'ont baissé, ils ont surchargé les municipalités. C'est ça, la réalité. Tandis que nous, tout en réduisant l'écart fiscal, nous avons soulagé la fiscalité des municipalités, nous avons subventionné les commissions scolaires pour leurs dépenses, pour leurs enveloppes courantes, tandis qu'eux n'ont pas touché à ça.

Nous avons fait cela, réduire l'écart fiscal de 20 % à 10 %, tout en essuyant la pire crise économique qu'il y ait eu depuis 1929, dans les années 1981-1982, alors que, pour casser l'inflation que nous avaient justement léguée nos prédécesseurs, les gouvernements occidentaux - et celui du Québec était doublement coupable là-dedans - ont dû prendre des mesures draconiennes pour réduire l'inflation en augmentant les taux d'intérêt, ce qui a cassé l'économie. Nous avons pris des décisions difficiles, mais que nous devions prendre pour équilibrer les budgets du Québec, équilibrer et stimuler en même temps l'économie au Québec. Nous avons lancé, nous avons défini un programme de relance qui a eu des effets considérables, tout en réduisant l'écart fiscal de 20 %à10 %.

Ces messieurs se sont amenés au pouvoir avec une bonne situation financière. Le Québec s'en était sorti. L'économie, au Québec, s'en était sortie plus vite qu'en Ontario et plus vite qu'au Canada dans les autres provinces et même qu'aux États-Unis parce que les effets du programme de relance économique que nous avions lancé en 1983 se sont fait sentir et, déjà, en 1985, les équilibres financiers du gouvernement étaient plus faciles à atteindre.

Ils ont donc pris le pouvoir dans une bonne situation économique. Tout le monde reconnaît que l'économie est sur une lancée ou a connu une progression très intéressante de 1982, immédiatement après la crise, jusqu'à 1989-1990. Ils ont pris une bonne situation. Ils ont profité des décisions difficiles que nous avions prises, que nous devions prendre. Ils en ont profité. Je dirais que c'est le Québec qui en a profité, mais eux veulent s'en attribuer le mérite. Et, à partir de là, ils se sont mis à clamer, en écrivant un petit texte "L'urgence d'un redressement", par exemple, que nous avions laissé le Québec dans une situation épouvantable, ce qui est faux. (12 h 20)

Pour accréditer cette idée, ils ont changé les méthodes comptables. Quel que soit le mérite d'un tel changement, parce que nous pouvons admettre que nous devons, à l'occasion, changer de méthode comptable, d'ailleurs sur la recommandation du Vérificateur général, ils ont, à partir de là, transformé, par en arrière, tous les chiffres que le gouvernement avait produits et toutes les données sur lesquelles le gouvernement antérieur s'était basé pour prendre ses décisions. Évidemment, c'est avec intérêt, parce que ça les servait. Ils ont essayé d'accréditer l'idée que nos déficits étaient beaucoup plus élevés que ce qui avait été déclaré auparavant. Ce qui était faux. Mais, au moins, disons que, sur la base des mêmes données comptables, ils auraient pu, ils auraient dû mettre des séries d'au moins cinq ans pour bien montrer les différences dans les toutes premières pages de leur document financier, dans le livre des crédits, dans le livre du discours sur le budget; ils auraient dû le faire. Pour le savoir et pour faire ces rétablissements, M. le Président, il faut être comptable. Et, même en étant comptable, il faut chercher plusieurs heures pour rétablir tout ça, pour ne pas se tromper. Et ils viennent nous dire ici qu'ils sont transparents alors qu'au fond tout est une affaire de camouflage.

M. le Président, au cours de ces débats, nous les avons accusés, à juste titre, de faire du camouflage et du tripotage de chiffres, les deux béquilles de ce gouvernement. C'est ça qu'ils ont fait. C'est comme ça qu'ils se comportent. Alors, ils ont payé des dépenses d'avance, deux, trois jours avant la fin de l'année, pour présenter un budget où les taux d'augmentation des dépenses n'étaient pas trop élevés, où les déficits, sup-posément, baissaient alors qu'en réalité ils montaient. Nous avons cette réalité dans le budget de 1989-1990, notamment, 738 000 000 $ de dépenses d'avance. Leur vrai déficit, cette année, n'est pas de 1 600 000 000 $; il est de 2 100 000 000 $ environ, lorsqu'on fait les vrais rétablissements. Comme par hasard, lorsqu'ils ont présenté leurs chiffres, ils sont revenus à une base sur données réelles pour bien indiquer que leurs dépenses n'augmentaient pas trop.

M. le Président, dans ces crédits, dans ce discours sur le budget, nous avons effectivement les résultats de ces camouflages et de ces tripotages. Le discours sur le budget nous a amené de dures réalités qu'on a d'ailleurs essayé de camoufler, remarquez bien encore une fois, parce que - c'est connu par tous les économistes gouvernementaux ou autres dans l'entreprise privée, mais disons par les économistes occidentaux, surtout en Amérique du Nord - l'année 1990 est une année de ralentissement économique. Ralentissement ne veut pas dire récession, mais signifie que la croissance économique a diminué. On augmente encore, mais moins que dans les autres années.

Alors, comment expliquer que, juste en période de ralentissement économique, on ait eu le budget que nous avons eu, on ait eu les crédits que nous avons connus? Parce que, M. le Président, il y a une question d'image. Ils ont tripoté les chiffres, camouflé les chiffres dans les années antérieures et, maintenant, on ne peut pas toujours tout camoufler, on ne peut pas toujours tout tripoter; il y a un moment où la vérité apparaît. C'était, évidemment, important de présenter une belle image avant l'élection, pour se faire réélire. Les gens, au moment de l'élection, pensaient que toute la situation était parfaite, que les taxes allaient baisser, que l'économie roulait bon train, que, surtout, il n'y aurait pas d'augmentation de taxes et que, à partir de l'élection, avec tous les engagements électoraux qui avaient été pris, on pouvait s'attendre à une relance, à une période dorée du gouvernement. C'était le 25 septembre dernier.

Or, au cours de l'automne, subitement nous apprenons que la situation se détériore. Il n'y a aucune raison - tout est connu - pour laquelle la situation se détériorerait. Mais déjà, le 6 novembre dernier, il y a eu au Conseil des ministres une décision à l'effet de geler les crédits. Le président du Conseil du trésor, qui s'est absenté, a nié qu'il y avait gel des crédits, mais nous avons eu la copie de cette décision du Conseil des ministres. Évidemment, on n'emploie pas le mot "gel", mais cela signifie que, dans tous les ministères, tout ce qui n'est pas engagé juridiquement ne sera pas honoré. Et, donc, tout est retardé. C'est ce qu'on appelle dans les faits un gel. Pourquoi un gel au mois de novembre, alors que la situation économique n'avait pas changé? On savait qu'on était en période de ralentissement économique. Elle n'avait pas changé.

Le temps passe, M. le Président, et puis, au cours de l'hiver, surtout, différentes nouvelles apparaissent par-ci, par-là. Au hasard d'un congrès, d'un colloque, il y a un ministre qui rend une décision, qui indique des intentions. Ça commence long comme un pouce, mais ça achève long comme un pied. On a eu dans ce style le cas, par exemple, de l'Impôt foncier scolaire. Lorsque nous avions eu, en 1979-1980, le pacte

fiscal, l'entente avec les municipalités, l'échange du champ de l'impôt foncier scolaire vers les municipalités, la reprise de la taxe de vente par le gouvernement à partir des municipalités, et le financement des commissions scolaires uniquement par le gouvernement ou presque exclusivement par le gouvernement, nous avions établi un pacte à ce moment-là. Et, tout à coup, on apprend que le gouvernement va ouvrir le champ de l'impôt foncier scolaire à nouveau. Le champ de l'impôt foncier scolaire, qui était resté très mince pour des raisons constitutionnelles, sera ouvert davantage aux commissions scolaires. Alors, c'est une bonne nouvelle pour les commissions scolaires, pense-t-on. Elles s'en réjouissent, du premier coup. Mais quand les crédits sortent, M. le Président, qu'arrive-t-il? La masse budgétaire d'opération des commissions scolaires publiques n'est indexée que de 1 %, alors que l'indexation est de 5 %. Ça veut dire tout simplement que le gouvernement ne fait plus face à ses obligations, qu'il refile aux commissions scolaires ses responsabilités qui avaient été reconnues par tout le monde en 1980. Il n'en a pas parlé au départ. En réalité, ce qu'on m'a dit, c'est que les commissions scolaires, en fait, bénéficient d'une augmentation de taxes ou de revenus de 13 000 000 $ - 13 000 000 $ - sur un transfert global de 320 000 000 $. C'est 13 000 000 $ dont on parie.

On a parié d'un programme de péréquation pour adoucir le tournant, c'est une chose; mais, là encore, c'est un cataplasme, M. le Président, parce que le système qu'il y avait avant était correct. Et, là-dessus, il y a des choses absolument illogiques qui ne correspondent pas à ce que nous avions décidé comme société depuis 1960. L'éducation doit être accessible à tous - accessible à tous - et les écoles, les services scolaires doivent être les mêmes partout au Québec. C'était ça, l'objectif de notre société en 1960: donner une chance égale à tous en ce qui concerne l'éducation qui est un des biens les plus fondamentaux de la personne.

Alors, pour des raisons de trésorerie, pour des raisons d'image de ce gouvernement, pour éviter qu'on ne lui dise qu'il doit augmenter ses taxes, pour des raisons d'image, donc, il refile aux autres le fardeau d'aller chercher les revenus qu'il leur faut pour assumer leurs responsabilités. Et ce que ça produira, c'est qu'on va revenir à un système d'inégalités quant à l'éducation, c'est ça qui se produira. (12 h 30)

Les écoles, les services scolaires sont les mêmes en Gaspésie. Les besoins quant à l'éducation sont les mêmes en Gaspésie, les mêmes au Saguenay-Lac-Saint-Jean, les mêmes dans les Laurentides, les mêmes en Abitibi-Témiscamingue que dans les municipalités qui sont riches. Pourtant, la proportion des taxes que les gens devront verser pour s'assurer les mêmes services sera beaucoup plus grande compte tenu du revenu

de ces gens.

M. le Président, il n'y a pas de progrès de la part de ce gouvernement. J'entendais le président du Conseil du trésor tout à l'heure faire un grand discours philosophique. Je pense qu'il se met à parler de philosophie justement parce qu'il sait très bien que les chiffres démentent ce qu'il est en train de faire. Alors, dans toute cette opération qui concerne les municipalités, les commissions scolaires, on n'a pas parlé des 2 % de taxe de vente parce que, si c'est vrai que ce pacte fiscal, comme ils disent, n'existait pas et qu'on veut le déchirer, que le gouvernement retourne aux municipalités les 2 % de la taxe de vente qu'il avait pris en 1979-1980. Pas un mot là-dessus. Pas un mot. C'est comme si ça n'existait pas. Mais c'est ça que les municipalités possédaient comme champ de taxation en 1979-1980, au moment du pacte fiscal. Si on n'est plus d'accord avec le pacte fiscal, qu'on ait le courage de le dire, de le défaire, de le défaire au complet et de remettre aux municipalités les champs que le gouvernement leur avait repris en 1979-1980.

M. le Président, dans tout cela, nous avions une situation économique qui était saine, qui est encore saine, qui s'est ralentie et, pourtant, au dernier discours sur le budget, nous avons vu que les crédits, disent-ils, n'ont pas augmenté beaucoup, qu'ils ont augmenté sur une base comparable de 6,2 %, cette fois, en remettant les 738 000 000 $ dans le circuit parce que, cette fois-là, il faut comparer à son avantage et, donc, on met vraiment les chiffres sur une base comparable, alors que sur une base strictement comptable, l'augmentation est de 7,9 %. Ils veulent que leur image en soit une où les dépenses n'augmentent pas trop et, donc, cette fois-là, ça les sert de mettre les chiffres sur une base comparable. Ils l'ont fait et c'est pour cela que nous les accusons de tripotage.

M. le Président, donc, ils ont une image à préserver. Ce qu'ils font, c'est qu'ils rétablissent les crédits sur une base comparable et, en même temps, ils commencent à distiller les mesures fiscales dans le discours sur le budget, avant que le discours ne soit fait. Je viens de parler de la taxation scolaire et municipale, beaucoup d'autres exemples sur lesquels je reviendrai. Mais remarquez bien que, simplement en termes de ralentissement économique, ce gouvernement, pour financer des crédits qui augmentent seulement de 6,2 %, alors que l'inflation est d'au-delà de 5 %, a augmenté les taxes de 1 219 000 000 $. Et, toujours selon ces déclarations et selon ces chiffres, le rendement de l'impôt sur le revenu, lui, a augmenté de 14 %, soit de 1 442 000 000 $. Pourquoi, tout à coup, être obligé d'augmenter les taxes autant, 14 % dans l'impôt sur le revenu et 1 219 000 000 $ sur les taxes? Parce que, justement, il est victime de l'image qu'il avait voulu présenter à l'élection et que, maintenant, la vérité des chiffres réapparaît.

L'élection étant passée, on donne le gros coup tout de suite après et, après, on veut se donner de la marge pour les années suivantes. M. le Président, je trouve que c'est une façon d'administrer qui méprise les Québécois, finalement, parce que c'est de ça dont il s'agit, H les manipule, il manipule leur portefeuille simplement pour se faire réélire, simplement pour se faire réélire. La vérité économique apparaît après. On la dit après les moments importants.

M. le Président, je reviendrai sur les crédits, mais je reviens sur les dispositions qu'a prises ce gouvernement pour aller chercher des revenus additionnels dans la poche des contribuables.

Ils ont, comme je le disais, transféré aux commissions scolaires et aux municipalités un fardeau considérable de 320 000 000 $ par année, sur une base annuelle, simplement dans ce que j'ai expliqué tout à l'heure. Ils ont, en plus, augmenté les frais de scolarité. Les universités ont besoin de fonds, c'est connu, et spécialement les universités francophones ont besoin de fonds additionnels, de beaucoup de fonds additionnels.

Le gouvernement, l'an dernier, a mis quelques millions d'argent neuf, je dis bien quelques millions parce que, dans une grande déclaration, lors du discours sur le budget, où il augmentait ces fonds de 60 000 000 $, un certain nombre de ces millions avait déjà été annoncé et engagé l'année précédente, ce qui équivalait à peu près à 20 000 000 $ ou autour de là, un autre montant de 20 000 000 $ a été accordé pour des fins spécifiques et il restait pratiquement 20 000 000 $, qui étaient une augmentation de la base budgétaire de ces universités. 20 000 000 $ sur au-delà de 1 000 000 000 $ ou plus, M. le Président.

Quelle est la solution? Parce que le problème n'est pas réglé, M. le Président. Ils ont simplement indexé, cette année, l'enveloppe des universités. Le problème n'est pas réglé, pas plus d'ailleurs qu'au cégep il n'est réglé. Mais, dans les universités, ce gouvernement, parce que ce n'est pas l'imagination qui pleut, a trouvé le moyen de dégeler ce qu'on appelle les frais de scolarité qui étaient fixes depuis 1962-1965 ou environ, selon les universités - environ 1965, pour les dernières augmentations, mais pas dans tous les secteurs - ce qui avait permis à beaucoup de francophones, en particulier, d'avoir accès à l'université, à beaucoup de gens. La population universitaire s'était accrue de façon considérable par rapport à un objectif que nous visions. Nous n'avions pas encore rattrapé ce que faisait l'Ontario, mais nous avions fait des progrès dans ce sens.

Par rapport à cela, il faut dire que le gouvernement, dans les dernières années, n'avait pas subventionné comme il le fallait les universités, compte tenu de l'afflux nouveau d'étudiants qu'il y avait. Donc, c'est réel, le problème du sous-financement des universités. Il demande

donc aux étudiants de payer et il appelle ça une décision par laquelle les universités vont devoir aller chercher plus d'argent, une décision correcte où les usagers qui bénéficient doivent payer. (12 h 40)

M. le Président, je pense que c'a été là tout le débat de la société dans les années soixante, soixante-dix, parce que, s'il y a des cas où c'est vrai, où c'est réel, où il y a des parents qui aident leurs enfants jusqu'au niveau universitaire, il y a beaucoup de familles où ce n'est pas le cas, où les parents ne subventionnent plus leurs enfants, même pour des études universitaires, ne les aident plus à partir de l'âge de 18 ans, justement l'âge où on accède à l'université. Et ça, c'est un cas particulièrement vrai actuellement, surtout avec le phénomène de l'éclatement des familles. M. le Président, cette mesure équivaut à empêcher un grand nombre d'étudiants, et de bons étudiants, d'avoir accès à l'université.

Bien sûr, on dit qu'on va corriger le financement ou l'aide aux étudiants, qu'il y a des mesures dont il faut reconnaître qu'elles sont correctes et qu'elles vont aider les étudiants, mais, finalement, on corrige. Qu'en est-il du système fondamental, du choix que nous avions fait de financer l'enseignement universitaire par le public? Aujourd'hui, sans corriger les différences, et je dirais, jusqu'à un certain point, les inéquités en ce qui concerne le partage des fonds de dotation entre les universités, on subventionne toutes les universités sur le même modèle, pour leur fonctionnement, sans se préoccuper du reste et puis, maintenant, les universités francophones, dans tout le système, seront pénalisées en ce qui concerne l'excellence. Il faut bien voir les conséquences des gestes - et des décisions - que nous avons posés, que ce gouvernement a posés en augmentant les frais de scolarité, parce que si, au moins, il avait corrigé autre chose, en même temps il y aurait peut-être plus d'équité dans le financement entre les différentes universités au Québec.

Quels que soient les chiffres et les démonstrations que l'on fait, il reste qu'il y a deux systèmes auxquels certaines universités participent, dont celui d'avantages fiscaux quant aux fonds de dotation et aux donations aux universités, alors que d'autres n'ont que le financement public pour assurer leur enseignement et augmenter leurs recherches. De ceci, le gouvernement n'en a pratiquement ou n'en a pas du tout parié dans son budget, comme d'un autre secteur qui est celui d'Hydro-Québec.

Le gouvernement inscrit dans ses comptes les revenus complets d'Hydro-Québec, les résultats financiers d'Hydro-Québec, et le résultat définitif de l'année à Hydro-Québec se reflète au complet dans le chiffre du déficit du gouvernement. Alors, quand il touche à Hydro-Québec, aux factures d'Hydro-Québec, au prix de l'électricité au Québec, il influence directement son budget et son déficit. Qu'est-ce qu'il a fait? Cette année, le résultat du financement des augmentations d'Hydro-Québec va avoir comme conséquence d'ajouter, au-dessus de l'inflation, 133 000 000 $ de plus dans les coffres du gouvernement et 229 000 000 $ l'an prochain. C'est une taxe déguisée parce que ce dont je parle, c'est l'excédent de l'augmentation sur l'inflation. Il n'y avait pas de raison d'augmenter au-delà de l'inflation, mais cette augmentation résulte en une augmentation de taxes de 133 000 000 $, M. le Président. Considérable!

Encore une décision qu'il fait prendre par d'autres, qu'il fait assumer par d'autres, comme Hydro-Québec, comme il a fait avec les commissions scolaires, comme il a fait avec les étudiants en faisant augmenter les frais de scolarité par les universités. Ce gouvernement se camoufle derrière les autres en ce qui concerne les augmentations de taxes. des augmentations qu'il a sorties à son budget, évidemment des augmentations sur lesquelles il fait son petit couplet moral, il y a celle sur le tabac qui lui donne 133 000 000 $, celle sur l'alcool qui lui donne 103 000 000 $, donc 236 000 000 $ qu'il a annoncés dans son budget. il a aussi augmenté la surtaxe des entreprises de 12 % à 15 % avec un rendement de 104 000 000 $. mais ce qu'il n'a pas dit, c'est que cette augmentation s'inscrit aussi dans un contexte où le profit déclaré ou présumé des entreprises va baisser, de sorte que l'impôt sur le revenu des entreprises non seulement n'augmente pas, mais va baisser de 3 % cette année. tous les particuliers augmentent leurs frais, leurs taxes, se voient augmenter leurs taxes, leurs frais. alors que le rendement de l'impôt sur le revenu des entreprises va baisser, celui de l'impôt sur les particuliers va augmenter de 14 %; mais celui de l'impôt sur le revenu des entreprises va baisser de 3 %.

Et ce n'est pas tout. Nous avons eu l'occasion d'en parier, en ce qui concerne l'immatriculation, le gouvernement a produit un programme supposé de 1 700 000 000 $ dans les transports, qu'il entend faire financer en bonne partie par la Régie de l'assurance automobile du Québec, jusqu'à concurrence d'environ 100 000 000 $, faisant en sorte que la Régie de l'assurance automobile du Québec, qui était une régie d'assurances, qui était en quelque sorte la compagnie d'assurances pour les Québécois, va devenir une caisse de financement pour des travaux routiers.

Or, qu'en est-il de ces travaux routiers, M. le Président? Mon collègue critique de l'Opposition en la matière, le député de Lévis, a bien démontré que ces 1 700 000 000 $ étaient de la poudre aux yeux; il l'a bien démontré. Au fond, il n'y aura pas de fonds additionnels significatifs d'injectés dans les transports pour les cinq prochaines années, tout au plus 100 000 000 $. Parce que si l'on met les crédits accordés dans

le réseau routier sur une base comparative, ces crédits n'augmentent pas. Au contraire, cette année, en 1989-1990, ces crédits étaient de 1 020 000 000 $; ils seront de 1 020 000 000 $ en 1990-1991. En termes réels, c'est une baisse de 50 000 000 $ dans les crédits des transports.

En dollars constants, le gouvernement du Québec a investi, de 1981 à 1985-1986, le gouvernement du Parti québécois a investi, en dollars constants, 3 500 000 000 $. Et le gouvernement du Québec, à l'époque, avait fait des efforts considérables pour maintenir le réseau routier dans un bon état, même si, durant cette période, il y a eu une crise économique majeure. Mais le gouvernement libéral, de 1986 à 1990, a dépensé 3 000 000 000 $, soit exactement 445 000 000 $ de moins, en dollars constants, que pendant les cinq dernières années de pouvoir du Parti québécois. Donc, sur une même période, c'est 500 000 000 $ de moins que le gouvernement du Parti libéral a investis dans les travaux routiers. Pourtant, la conjoncture économique est excellente. Il n'y a pas de raison, il n'y a aucune raison pour que les crédits diminuent. Et ce que nous voyons présentement, c'est que le budget du ministère des Transports diminue en ce qui concerne la construction et les réparations majeures. Le budget des transports diminue de façon considérable.

M. le Président, nous avons là un gouvernement qui ne respecte pas ses engagements, qui fait des programmes pour la frime, dans lesquels il n'y a absolument aucuns crédits nouveaux, en jouant encore une fois sur les mots. Nous en avons un exemple patent et mon collègue des transports va en parler ultérieurement.

Je voudrais toucher quelques autres secteurs, par exemple, un secteur qui intéresse beaucoup les Québécois, qui est au coeur de leurs activités de tous les jours, un secteur qui est d'ailleurs très créateur d'emplois, ce qu'on ignore généralement, qui est celui des affaires culturelles. Le budget 1990-1991, comme l'a dit mon collègue, constitue l'enterrement de la promesse libérale de 1985 à l'effet de consacrer 1 % du budget global de l'État au budget du ministère des Affaires culturelles. C'était un engagement ferme en 1985, réitéré à chaque année par la suite. Ça a été promis pour le premier mandat, puis pour 1990-1991. Mais ce qu'on peut conclure, c'est que cet engagement, toujours non réalisé, confirme le désengagement du gouvernement du Parti libéral en matière d'affaires culturelles. Le budget du ministère des Affaires culturelles, encore pour 1990-1991, ne représente toujours que 0,73 % du budget global de l'État, loin derrière le 1 %. Aujourd'hui il atteint 261 000 000 $ sur un budget global de 35 800 000 000 $. Alors, il manque 100 000 000 $ pour que la promesse, pour que l'engagement du Parti libéral soit réalisé. 100 000 000 $ qu'il manque. Considérable.

Lors du discours sur le budget, le ministre des Finances annonçait une somme additionnelle de 72 000 000 $ pour le secteur des affaires culturelles, mais cela ne modifie aucunement le budget du ministre. Il est indiqué, d'ailleurs, à la page 7 de l'annexe A du budget, que le plan d'accélération des investissements du secteur public n'affecte pas les prévisions de dépenses en 1990-1991, puisqu'il s'agit d'investissements financés par emprunt subventionné dont l'impact budgétaire ne se fera sentir qu'au moment où le service de la dette devra être payé. Donc, dans les crédits: rien. Et on apprend en plus qu'en matière d'équipement culturel, les 72 000 000 $ annoncés par le gouvernement seront financés, 32 000 000 $ par le gouvernement, ultérieurement, pas sur le budget de cette année, mais 40 000 000 $ par les partenaires. Donc, cela veut dire qu'il s'agit encore une fois des municipalités qui devront injecter 40 000 000 $ et des promoteurs privés. Donc, il faut conclure que le gouvernement se désengage encore une fois de ce secteur. (12 h 50)

M. le Président, dans le discours sur le budget, autre engagement non réalisé, celui de l'environnement. Le discours sur le budget 1990-1991 fait part d'une augmentation des crédits du ministère de l'Environnement de l'ordre de 55 000 000 $ au total. Mais, cependant, la part la plus importante de ces crédits, 40 000 000 $, est allouée au service de la dette du programme d'assainissement des eaux. Il s'agit donc de travaux qui sont déjà faits. Et on est loin de ce que le ministre de l'Environnement attendait, 50 000 000 $ pour la prévention en matière de protection de l'environnement. Le ministre avait dit à l'époque qu'il démissionnerait s'il n'avait pas ses 50 000 000 $. Nous avons vu qu'il n'a pas démissionné, même s'il n'a eu que 15 000 000 $, même s'il n'y a eu aucune amélioration finalement à son budget, qu'il a déclaré lui-même que ses fonds étaient déjà épuisés et qu'il ne pouvait plus rien faire. Tout le monde a compris que compte tenu qu'il n'avait pas fait la prévention qu'il aurait dû faire, par exemple dans l'incendie de pneus de Saint-Basile, compte tenu qu'il n'avait pas fait la prévention, les coûts simplement pour corriger, pour réparer la situation, viendraient éponger une très large partie de son budget.

M. le Président, voilà quelques exemples, deux exemples que je viens de donner. Mais, dans un contexte où le gouvernement est dans une période de ralentissement économique, où il aurait dû, vraisemblablement, stimuler l'économie avant qu'elle ne tombe complètement, le gouvernement a préféré se camoufler, dire simplement que le gouvernement fédéral lui avait coupé les transferts fédéraux et prendre prétexte de cela pour présenter un budget où les taxes augmentent considérablement au Québec. M. le Président, le gouvernement fédéral avait diminué ses transferts de 221 000 000 $ seulement. Le

gouvernement ici a augmenté ses taxes de 1 219 000 000 $, juste les taxes, et le rendement de l'impôt sur le revenu, lui, a augmenté de 1 442 000 000 $. Si on additionne les deux, dans les coffres du gouvernement cette année il va rentrer 2 500 000 000 $ de plus. Qu'est-ce que viennent faire 221 000 000 $? C'est le dixième de cette somme de plus qui rentre dans les coffres du gouvernement. S'il n'avait pas joué dans les chiffres, s'il n'avait pas tripoté les chiffres, l'image du gouvernement aurait pu être très différente cette année. Mais c'est lui qui est coupable de ce qui arrive et, aujourd'hui, il est obligé de réparer la situation. Il est obligé d'augmenter les taxes de façon considérable pour maintenir une image qui aurait dû être présentée correctement au moment de l'élection, qui aurait dû être présentée en toute transparence, ce qui n'a pas été le cas, M. le Président.

Maintenant, quelles sont les perspectives du ministre des Finances et du Conseil du trésor? On nous parle, dans le discours sur le budget notamment, du chapitre VI, de l'annexe E et des perspectives où ce gouvernement prétend qu'il doit aller chercher chaque année 700 000 000 $ simplement pour équilibrer ses revenus. Dans un des coins de son discours, nous avons vu que le ministre des Finances avait dit qu'il commencerait des négociations avec le fédéral, qu'il voulait reprendre les discussions en ce qui concerne les transferts fiscaux. J'ai de forts doutes, M. le Président, sur les résultats de telles négociations, parce que, depuis 1985-1990 - disait le ministre des Finances - nous avons essayé sur tous les tons d'avoir plus d'argent du fédéral, alors qu'en fait il en a moins. Et l'une des preuves, c'est bien cette année, alors que les transferts fédéraux sont coupés de 221 000 000 $. Ou bien, il est inefficace ou bien il ne se rend pas compte de la réalité et il rêve en pensant qu'il va aller chercher davantage de fonds au gouvernement fédéral.

Moi, je pense, M. le Président, que sur un plan bien réaliste, il est utopique de sa part d'aller chercher des fonds additionnels chez un gouvernement qui est endetté comme l'est le gouvernement fédéral, qui est endetté de 352 000 000 000 $, chiffre du 31 mars. La seule part du Québec, là-dedans, pour le service de la dette, c'est 10 000 000 000 $, M. le Président. 10 000 000 000 $, en termes d'intérêts, et on est très loin du service de la dette du Québec qui est de 1 500 000 000 $ ou de cet ordre-là, de 3 000 000 000 $ plutôt.

M. le Président, c'est utopique. C'est, à mon sens, une parole qui a été dite par le ministre des Finances, qui a été écrite dans son document, mais il n'y a rien à l'appui de cette assertion qui nous laisse croire que le gouvernement peut aller chercher des fonds additionnels au gouvernement fédéral, absolument pas. Et nous pensons plutôt que c'est l'inverse. Et nous voyons, année après année, le gouvernement fédéral se battre de façon désespérée, pour essayer d'équilibrer son budget, sans y parvenir. Parce que, cette année, il a déclaré qu'il voulait limiter son déficit à 28 000 000 000 $, il sera très probablement largement au-dessus de 30 000 000 000 $. Et, puis, on peut s'attendre qu'au cours de l'automne, le ministre fédéral des Finances, pour rentrer dans son plan de résorption du déficit, va présenter un budget supplémentaire où les provinces écoperont, encore une fois, et écoperont davantage.

Si le ministre des Finances était sérieux, ou celui qui le remplace était sérieux, il nous dirait quand il va rencontrer son homologue du gouvernement fédéral ou les gens du gouvernement fédéral pour aller négocier. Le ministre des Finances en titre m'a répondu, à une question, très vaguement: Au cours de l'été. Peut-être bien qu'il pense jouer au golf avec les gens du gouvernement fédéral au cours de l'été, mais ça ne règle pas les problèmes financiers du Québec, M. le Président, et les perspectives sur ce plan-là sont très moroses, très noires plutôt. Et je ne vois pas comment on peut sérieusement penser qu'on va aller chercher 1 000 000 000 $ ou 2 000 000 000 $ au gouvernement fédéral alors que, justement, le gouvernement fédéral essaie de se sortir de plus en plus de toutes sortes de programmes. Alors que, maintenant, il négocie avec des provinces, d'autres provinces dites récalcitrantes, dans le cas du lac Meech, à qui il fait des promesses, à qui il donne des sommes pour l'agriculture - surtout dans l'Ouest, pas au Québec - à qui il donne des sommes pour les pêcheries dans les Maritimes, à qui il promet toutes sortes de choses, jamais au Québec, il sera encore plus endetté et plus en déficit en réalisant toutes ces promesses que maintenant. Et donc, je ne vois aucunement aucune chance pour le Québec d'aller chercher davantage de fonds. Ce n'est pas que je ne le souhaiterais pas mais, M. le Président, je pense que ce n'est pas là la voie et puis, de toute façon, lorsque nous allons chercher des fonds au fédéral, ce sont des fonds que nous aurons à payer. Alors, nous demandons de l'argent au fédéral, aux autres, de l'argent qu'ils devront venir chercher chez nous pour payer les promesses qu'ils nous font. C'est ça la réalité. Alors, M. le Président...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le député, compte tenu de l'heure, en vertu de l'article 21, je vais suspendre les travaux de cette Assemblée à 15 heures et en vous indiquant qu'il reste 12 minutes à votre formation politique. Comme vous avez la parole à l'ajournement du débat, vous pourrez poursuivre avec 12 minutes. Alors, les travaux de cette Assemblée sont suspendus jusqu'à 15 heures.

(Suspension de la séance à 12 h 59)

(Reprise à 15 h 5)

Le Vice-Président (M. Cannon): À l'ordre, s'il vous plaît!

Veuillez vous asseoir, s'il vous plaît!

Au moment de la suspension de nos travaux, à 13 heures, nous étions à débattre les affaires prioritaires. Il s'agissait du débat restreint sur les rapports des commissions qui ont étudié les crédits budgétaires pour l'année financière 1990-1991, déposés le 6 juin 1990. Je vais maintenant reconnaître M. le député de Labelle, en indiquant à la formation de l'Opposition qu'il reste 12 minutes au débat et, au parti ministériel, 18 minutes.

M. Léonard: M. le Président, je veux simplement conclure ce que je disais cet avant-midi. Le gouvernement a pris prétexte qu'il avait reçu 221 000 000 $ de moins du gouvernement fédéral pour lui faire passer sur le dos toute espèce de choses, d'augmentations de taxes et d'impôts qu'il a décidées, le tout, finalement, en accusant le gouvernement fédéral de pelleter une partie de son déficit sur lui-même. Il en a pelleté six fois plus ou dix fois plus dans les organismes publics, parapublics et les réseaux municipalités, commissions scolaires, HydroQuébec, étudiants, etc. Partout, il a fait ça.

En plus, M. le Président, il a assorti le tout d'un discours sur la décentralisation qui, dès qu'ils en parle deux minutes, on s'aperçoit très bien qu'il ne s'agit là que de transférer des taxes et des impôts aux autres, responsabilités qu'il ne veut pas prendre d'augmenter les impôts. Alors, lorsqu'on parie de décentralisation, on parie aussi de la façon dont les décisions sont prises. Mais le président du Conseil du trésor ne connaît rien là-dedans; on le voit dès qu'il se met à ouvrir la bouche.

M. le Président, il y a aussi un autre élément que j'ai touché et qui, à mon sens, mérite d'être développé parce qu'il y a eu, dans ce budget, l'annonce d'un supposé immense projet de travaux de voirie, de construction de routes et d'améliorations routières qui s'est révélé, à l'analyse des chiffres, n'être rien. Sur cinq ans, il n'y a rien de plus. Je voudrais laisser le temps qu'il me reste à mon collègue critique de l'Opposition officielle en matière de transport, le député de Lévis. Merci beaucoup, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Cannon): Merci, M. le député de Labelle. M. le député de Saint-Louis.

M. Jacques Chagnon

M. Chagnon: M. le Président, vous ne m'en voudrez pas, en commençant ces propos, de réfuter quelques propos du député de Labelle qui nous a fait carrément de la comptabilité-fiction pendant cette dernière heure pour laquelle il nous a présenté sa version des crédits.

Le député de Labelle oublie qu'il a été lui-même, dans le précédent gouvernement, ministre de l'Aménagememt du territoire dans un gouvernement de la confusion financière. Entre 1975-1976, ou à partir de 1976 jusqu'en 1985, dans l'annexe E du budget qui nous amène le sommaire des opérations financières pour tous les gouvernements de 1970 à 1990 - je lui suggère fortement une relecture de ce document - pas une année sous l'administration du Parti québécois les déficits n'ont été inférieurs, à l'exception d'une année, à 1 000 000 000 $.

Non seulement cela, mais les besoins financiers nets du gouvernement, c'est-à-dire l'argent qu'on a véritablement emprunté année après année pour financer le gouvernement... De 1976-1977, première année du premier mandat du gouvernement du Parti québécois, jusqu'à 1985-1986, dernière année, chacune de ces années, le déficit s'est accru de façon spectaculaire; chacune des années, au moins 1 000 000 000 $, 1 500 000 000 $ d'emprunts réels pour financer les opérations du gouvernement. en 1980-1981, année référendaire, 2 300 000 000 $; 2 200 000 000 $ en 1982-1983; 2 250 000 000 $ en 1983-1984. le gouvernement précédent a pris la situation financière de 1976 avec un déficit accumulé de 5 000 000 000 $; il l'a lui-même, en l'espace de neuf ans... 5 000 000 000 $ de déficit accumulé pour tous les gouvernements depuis 1867. en 10 ans, le gouvernement du parti québécois a passé le déficit accumulé de la province de 5000000000$ à 25 000000000$, ce qui fait qu'année après année nous avons à payer des intérêts sur ces emprunts qui dépassent largement le niveau même du budget du ministère des transports dont le député de lévis va vouloir nous parier tout à l'heure.

M. le Président, pour le bénéfice des gens qui nous écoutent, l'exercice de l'adoption des crédits, c'est un des moments privilégiés pour l'Assemblée nationale et pour les membres de l'Assemblée nationale d'exercer un contrôle réel sur le gouvernement. Le gouvernement fait la présentation de ses crédits, donc, il annonce ses choix prioritaires, les choix du gouvernement, ministère par ministère, les priorités du gouvernement. nous avons, cette année, une augmentation de crédits de 6,2 %, donc, les dépenses vont augmenter pour l'année 1990-1991 de 6,2 % par rapport à ce qu'elles étaient l'an dernier. chaque ministère a défendu ses crédits dans les différentes commissions parlementaires et les députés, des deux côtés de la chambre, ont pu analyser quelles seront pour chacun des ministères les actions prioritaires pour l'année en cours et l'année à venir.

Nous avons un budget qui dépassera cette année 35 000 000 000 $. Le président du Conseil du trésor mentionnait - et ce, il faut l'en féliciter - avoir réussi par le biais de la mise sur pied d'un comité de la revue de programmes

à freiner l'augmentation des dépenses gouvernementales de 411 000 000 $, ce qui est énorme compte tenu des circonstances. Mais, sur ce, je l'invite et je nous invite tous à éviter de faire en sorte que trop de programmes dans le gouvernement, dans les ministères connaissent la sédimentation de ce qu'on appelle un programme qui existe, donc, l'opportunité où le bien-fondé devient de moins en moins réel année après année, et qu'il nous faudra éventuellement remettre en question. Donc, le comité de la revue de programmes pourrait, si le gouvernement le voulait, commencer à siéger tout de suite pour préparer les crédits de l'an prochain.

Un effet important sur les crédits de 1990-1991, M. le Président, a été le résultat de la négociation dans le secteur public et para-public. Nous pouvons tout de suite imaginer, compte tenu de l'importance des sommes en jeu dans cette négociation, soit un peu plus de la moitié du budget du gouvernement, soit 35 000 000 000 $ divisés par deux, 17 500 000 000 $, un peu plus de la moitié du budget de* l'ensemble du gouvernement sert à financer la masse salariale et les bénéfices marginaux de l'ensemble des employés du secteur public et des secteurs parapublics.

Nous avons constaté que, suite à la négociation dans les deux principaux réseaux - je pense à la santé et aux services sociaux, je pense à l'éducation - nous avons constaté que la négociation a été basée sur une amélioration des services à la clientèle. Ce qui fera que dans le secteur de l'éducation primaire et secondaire seront créés 130 postes permettant de répondre à l'alourdissement des clientèles handicapées, plus 290 postes d'enseignant au primaire, pour baisser les moyennes de groupe, pour faire en sorte que les moyennes de 27 élèves, par exemple, puissent baisser à 26 élèves par classe moyenne, à travers le Québec; 120 postes d'enseignant seront ainsi injectés dans notre système d'éducation pour la formation de groupes d'élèves handicapés, plus 65 postes de niveau secondaire pour les besoins de formation générale; 150 postes pour le niveau secondaire seront des postes qui auront comme spécificité de répondre à l'harmonisation de la formation professionnelle qui, comme vous le savez, a été modifiée pour permettre aux jeunes et aux adultes de pouvoir recevoir une formation professionnelle de niveau secondaire qui soit adéquate, mais en même temps, dans des locaux et avec des services qui soient similaires.

Quant au niveau collégial, le résultat de la négociation fera en sorte que nous créerons 300 postes dans le secteur régulier et le secteur professionnel pour permettre au réseau collégial de pouvoir soit faire des baisses moyennes de ses clientèles ou encore d'offrir, dans certaines régions, un choix de cours qui soit un peu plus large que celui que nous avons connu jusqu'à date.

Parmi les effets importants de la dernière négociation sur les crédits 1990-1991, il faut mentionner l'effet tout à fait spécial et récurrent de l'équité salariale. comme cela a été mentionné dans "les opérations budgétaires, renseignements supplémentaires sur les crédits", l'équité salariale nous coûtera cette année 153 500 000 $. l'équité salariale a été accordée aux employés syndiqués du secteur public, et des augmentations de base, qui correspondent, pour l'année 1990-1991, à 5,13 % du budget de l'état. mais, en plus, 150 000 employés bénéficieront de redressements qui sont provoqués par le système d'équité salariale intégré à nos échelles salariales; donc, 150 000 employés bénéficieront de ces redressements en 1990 et en 1991. pour l'essentiel, ces employés seront des employés féminins parce que l'équité salariale a permis de faire en sorte que, sur le poids des tâches de chacun des membres, de chacun des groupes d'employés dans la fonction publique, on puisse, dorénavant, rémunérer les femmes et les hommes de façon la plus juste possible, ce qui nous permettra, dans une volonté de justice d'abord sociale par rapport à nos employés, de faire en sorte d'équilibrer les niveaux de rémunération. équilibrer les niveaux de rémunération impliquera une dépense de 250 000 000 $ sur les deux prochaines années et de 150 000 000 $, 153 500 000 $, plus justement, pour l'année qui vient. mais, essentiellement, ces emplois à prédominance féminine qui seront touchés feront en sorte que 130 000 de nos employés féminins verront une amélioration de leur condition salariale.

Dans le cas de la santé et des services sociaux, M. le Président, encore une fois, les choix du gouvernement auront été des choix qui correspondront aux nouvelles réalités sociales que connaît le Québec. Premièrement, souvenons-nous tous que, dans le cadre des modifications aux masses salariales dans le secteur de la santé et des services sociaux, nous nous rappellerons, définitivement, quels ont été la volonté et l'effort gouvernemental qui auront été investis, entre autres dans les primes et allocations accordées aux infirmières et infirmiers. Le travail de nuit et le travail de fin de semaine seront dorénavant nettement mieux rétribués. Bacheliers, bachelières auront droit à une reconnaissance de leur statut dans les hôpitaux et dans tout le service de la santé et cela, c'est un phénomène, cela est une nouveauté qui découle directement de la négociation et des ententes que nous avons eues avec chacun des groupes d'employés.

J'ajoute, M. le Président, que c'est la première fois, à ma connaissance, depuis que la mécanique de la négociation des conventions collectives s'est instaurée, en 1968, négociation globale pour l'ensemble des employés des secteurs public et parapublic, qu'un gouvernement réussissait à faire deux rondes de négociations sans avoir une ronde négociée et une ronde décrétée. C'est la première fois qu'un gouvernement réussit cet exploit depuis 22 ans.

Des voix: Bravo! (15 h 20)

M. Chagnon: Les choix en matière de santé qu'un gouvernement doit avoir, doit prioriser, sont ceux-ci. Le ministère de la Santé investira 46 300 000 $, donc 46 000 000 $, à cause d'un phénomène social que nous vivons tous - tout autour de nous, nous nous en apercevons, nous le vivons - le vieillissement de la population. Les 46 000 000 $ seront investis dans les hôpitaux, court terme, pour faire bénéficier les gens les plus âgés, les personnes, les citoyens et citoyennes les plus âgés de notre société, de services rapides, de services correspondant davantage à leurs besoins et avec de l'équipement, l'équipement spécialisé pour les besoins des personnes âgées, des besoins, donc, de gérontologie. 28 000 000 $, M. le Président, seront aussi investis, injectés dans le système de santé et, dans ce cadre-là, davantage dans le système de service social, d'adaptation sociale, pour le maintien à domicile des personnes âgées. Nous savons tous comment il peut être extrêmement difficile de voir des personnes âgées quitter leur foyer parce que c'est devenu un peu trop difficile pour elles de pouvoir parfois faire leurs repas, parfois faire le ménage de leur appartement. Eh bien, l'État considère cela comme étant une priorité de garder les gens dans leur domicile. Les personnes âgées du Québec auront droit à des services qui équivaudront à 28 000 000 $: 10 800 000 $, M. le Président, pour le désengor-gement des salles d'urgence et 5 600 000 $ pour le maintien à domicile et pour aider au maintien à domicile des personnes handicapées.

Donc, première priorité, la santé; deuxième priorité, l'éducation; troisième priorité, l'environnement. Il est intéressant de constater, M. le Président, à la lecture même de ce document, document qui vient nous indiquer comment seront partagées les sommes afférentes à l'environnement, comment elles seront donc dépensées. Il y aura un ajout direct de 15 000 000 $ au ministère de l'Environnement pour ses opérations courantes et, donc, la majorité de cette somme ira à la gestion des milieux environnementaux. Le principal élément de croissance de ce programme s'explique par l'ajout de crédits de 10 600 000 $ à titre de développement prioritaire. Ces sommes seront affectées, entre autres, à la consolidation des opérations régionales, pour 3 600 000 $, au programme de réduction des rejets industriels, pour 2 000 000 $, et à la restauration des sites contaminés pour 3 300 000 $. Le secteur de l'évaluation des impacts environnementaux bénéficiera, pour sa part, d'un ajout de ressources de 1 600 000 $. Donc, 15 000 000 $ de services supplémentaires à la population donnés par une augmentation de crédits au ministère de l'Environnement et au-delà de 200 postes créés pour le ministère de l'Environnement. Ajoutons à cela, pour le service de la dette donc, une augmenta- tion de 24 000 000 $, presque 25 000 000 $, pour le service d'amélioration et d'assainissement des eaux usées du Québec. Combinons avec cela la volonté gouvernementale de décentraliser.

Nous avons remarqué, nous avons réussi à savoir que l'Opposition n'était pas d'accord avec une redistribution de la fiscalité scolaire. Je peux vous dire que les commissions scolaires avec qui j'ai parlé depuis un mois et demi se sont montré enchantées de la démarche gouvernementale et perçoivent de la part du gouvernement, pour la première fois depuis au-delà d'une quinzaine d'années, une démonstration vigoureuse, une démonstration vivante et bien réelle d'une volonté de décentralisation de ce gouvernement, de notre gouvernement, du gouvernement libéral. Et ce n'est que le premier pas. Nous aurons à faire aussi plusieurs rencontres avec le secteur municipal pour nous assurer que les services rendus et la qualité des services rendus à la population soient administrés le plus près des citoyennes et citoyens du Québec. M. le Président, je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Cannon): Merci, M. le député de Saint-Louis. M. le député de Lévis, en vous rappelant qu'il reste à votre formation parlementaire 11 minutes.

M. Garon: Pardon?

Le Vice-Président (M. Cannon): 11 minutes. M. Jean Garon

M. Garon: M. le Président, comme disait Boileau: Ce qui est clair est facile à énoncer, et se conçoit bien...

Le Vice-Président (M. Cannon): Un instant, M. le député de Lévis. S'il vous plaît! Je demanderais aux collègues de la Chambre de bien vouloir respecter le temps de parole des autres collègues, de la même manière qu'on a respecté le temps de parole du dernier collègue qui vient d'intervenir. M. le député de Lévis.

M. Garon: M. le Président, essentiellement, ce que je veux dire, c'est que le ministre responsable du Conseil du trésor ne peut pas recevoir de félicitations pour les crédits qu'il nous présente aujourd'hui. D'autant plus que la plupart des députés libéraux pensaient, après l'énoncé des crédits, que c'étaient des mauvais crédits, particulièrement et surtout en matière de transport, puisque j'ai vu combien de députés libéraux qui m'ont dit: Ça n'a pas de bon sens, qui n'étaient pas contents. Mais lorsque le discours sur le budget est arrivé, ils se sont mis à faire des discours en laissant entendre que maintenant ils avaient les sommes d'argent nécessaires. Alors qu'on réalise qu'entre les

crédits et le budget il n'y a pas eu une cenne de plus dans les transports, pas une cenne de plus dans la voirie, pas une cenne de plus dans les routes régionales. Alors, comment des députés qui étaient mécontents au moment du dépôt des crédits peuvent-ils devenir contents, pourraient-ils devenir contents au moment du budget alors qu'il n'y a pas une cenne de plus, à moins qu'ils ne se soient fait emplir comme des valises? Je vous dirais même, M. le Président, que j'ai l'impression que le ministre des Finances et le ministre responsable du Conseil du trésor ont abusé des nouveaux ministres, le ministre-député de Richmond, M. Vallières, et le ministre responsable du Transport, M. Elkas. Il s'agit de deux nouveaux ministres qui ne connaissent peut-être pas toutes les règles de la Loi sur l'administration financière, tous les "flignes-flagnes" qu'il y avait dans le budget et qui ont peut-être pensé de bonne foi qu'il y avait des budgets accrus alors que les budgets accrus ne sont pas là, parce que le ministre des Finances a parlé de budget de base et que ça ne se réfère pas au budget de base, au budget de l'année précédente, mais à un concept financier de négociation du ministère des Finances avec les ministères sectoriels.

Sauf que la réalité, M. le Président, que les gens vont voir apparaître tout au cours de l'été et au cours de l'automne, si la situation n'est pas changée, c'est que le budget du transport pour la voirie régionale, pour le budget de construction et de rénovation majeure, des routes régionales et des autres routes est diminué de 42 %, c'est-à-dire qu'il part de 172 000 000 $, et puis ça apparaît aux livres, à 105 000 000 $, 172 000 000 $ l'an dernier à 105 000 000 $ cette année. Et ça veut dire beaucoup moins de travaux parce que même 105 000 000 $ ça n'achète pas la même quantité de travaux que 105 000 000 $ l'an dernier. Il y a une inflation de 5 %. Ça veut dire, à ce moment-là, que 172 000 000 $ de l'an dernier qui était déjà une petite année en voirie régionale, si on compare aux années antérieures, ne sera même pas du même montant mais va baisser de 42 %. Comment veut-on que des camionneurs - ce n'est pas pour rien que les camionneurs se retrouvent devant le parlement - puissent faire leurs paiements, eux dont le principal travail vient des travaux du ministère de la voirie? Comment veut-on qu'ils puissent faire leurs paiements, parce qu'ils vont tous payer des frais d'intérêt plus élevés sur leur camion? Je dois vous dire que des camionneurs, quand ça emprunte pour payer leur camion ça n'a pas le taux privilégié des banques, ça paie un peu plus cher que nos taux d'intérêt qui sont beaucoup plus élevés que les taux américains, que les taux sont très élevés mais pour faire des paiements plus importants, plus considérables sur leur camion que l'an dernier, ils auront des revenus beaucoup moins élevés, puisque ie budget de la voirie dans les régions va baisser de 42 %.

C'est pour ça.

Le ministre responsable du Conseil du trésor savait qu'en même temps le ministre des Finances se préparait à aller chercher 363 000 000 $ de plus dans la poche des automobilistes et dans la caisse de la Régie de l'assurance automobile du Québec. On va chercher 363 000 000 $ de plus, mais on ne fera pas plus de travaux que l'an dernier dans l'ensemble du budget et dans la voirie régionale, beaucoup moins de travaux que l'an dernier. C'est pourquoi, j'ai rendu les chiffres publics, chiffres qui m'ont été fournis d'ailleurs par le ministère lui-même dans les demandes pour la préparation de l'étude des crédits en commission parlementaire. J'ai additionné le budget de construction et le budget de rénovation ou d'entretien des routes et, quand on additionne les deux ensemble, on se rend compte que, dans la plupart des régions, sinon dans toutes les régions, les budgets sont baissés de façon drastique au point de vue de la voirie régionale. (15 h 30)

Je comprends que le ministre Vallières, ministre des Transports, ministre délégué à la voirie, va dire: Oui, mais c'est parce que, cette année, on va faire plus de travaux à Montréal. Je comprends qu'il va faire plus de travaux dans l'ouest de Montréal; M. Elkas s'est occupé de son coin, le ministre des Transports. Sauf qu'il aurait dû y avoir des sommes d'argent additionnelles pour payer ces travaux-là, pour ne pas pénaliser les gens de l'ensemble des régions du Québec. Parce que les gens qui vont faire leurs paiements sur leur camion, les gens qui ont des familles à faire vivre dans les différentes régions du Québec, qu'il s'agisse de l'Abitibi-Témiscamingue, du Bas-Saint-Laurent, de la Côte-Nord, du Saguenay-Lac-Saint-Jean, de l'Estrie ou de la Mauricie, eux autres, ils ne feront pas des remboursements aux banques avec des prières. Ils ne pourront pas dire: On a les voeux pieux du Conseil du trésor. Ils ne pourront pas dire: On a les voeux pieux du ministre des Finances. Les banques vont leur demander de l'argent et, comme leur principal fournisseur, c'est le ministère des Transports, je pense que le ministère des Transports ne fera pas les travaux dans les différentes régions, tant en termes de construction que d'entretien. Tous ces gens-là vont être pénalisés.

Ce n'est pas pour rien qu'actuellement, on voit que les gens se soulèvent dans les différentes régions parce qu'ils se rendent compte que ça ne va pas. 2000 camionneurs sont venus devant le parlement, les propriétaires de camions-remorque. Pourquoi sont-ils venus devant le parlement? Pensez-vous qu'ils sont venus faire un voyage de touristes? Ils ont dit: On va prendre nos camions et on va aller voir Québec.

Une voix: Oui.

M. Garon: C'est parce qu'il y a des problèmes. Ils nous disent: Vous nous avez embarqués dans une concurrence avec les États-Unis, alors que, maintenant, on a des taux d'intérêt beaucoup plus élevés que les États-Unis. On paie nos licences à un prix beaucoup plus élevé, nos permis. Nos assurances sont plus chères et la gazoline est beaucoup plus chère, et vous nous demandez de concurrencer avec les Américains? Eux autres paient tout ça meilleur marché. Comment voulez-vous qu'on arrive?

Les gens aujourd'hui, les camionneurs artisans sont devant le parlement. Pourquoi? Parce qu'ils disent: On a des problèmes. Vous ne livrez pas la marchandise. Ils sont rendus à demander au gouvernement essentiellement d'appliquer ses lois. Et, ce matin, quand j'ai demandé au ministre des Transports: Avant de faire des offres à l'ANCAl ou aux représentants de l'ANCAl, avez-vous obtenu les autorisations? Il m'a dit: Je vais suivre le processus. Il avait l'air tout perdu. Sauf qu'un ministre ne peut pas faire plus d'autorisations qu'il est autorisé à en faire. Le ministre, quand il dépense de l'argent, ne dépense pas son argent personnel, il dépense l'argent du gouvernement et, pour ça, il doit être autorisé à le faire. Un ministre ne peut pas signer des dépenses de 500 000 $, de 600 000 $ ou de 1 000 000 $, comme s'il avait le droit de le faire. Il faut qu'il soit autorisé par le Conseil du trésor.

On sait que l'ex-ministre des Transports, le député de Charlesbourg, qui avait la réputation d'être un matamore dans le Parti libéral, s'est fait renvoyer aux bananes, sinon aux prunes, aux fraises ou aux framboises par le ministre responsable du Conseil du trésor. Il a dit: Non, vous n'aurez pas de contrôle routier. Il avait pris des engagements sur la demande qu'il faisait. Il avait dit en commission parlementaire: Je veux avoir un contrôle routier. S'il n'y a pas de contrôle routier, pour appliquer de façon juste, équitable et uniforme les lois 73 et 76 sur le Code de la sécurité routière et sur la Loi sur le camionnage, cette loi-là est inutile. C'est évident qu'il faut avoir l'inspection pour contrôler. Il pariait même de 400 personnes. Mais le président du Conseil du trésor lui a dit non. Le président du Conseil du trésor n'est pas seulement arrogant avec l'Opposition, il l'est même avec ses collègues. Il a renvoyé, imaginez-vous, le député de Charlesbourg. Le député de Charlesbourg, ça passe pour le matamore du gouvernement, l'homme le plus féroce du gouvernement. Et pourtant, le président du Conseil du trésor lui dit: Va te faire cuire un oeuf! Et, quand il sera cuit, vous reviendrez nous voir.

Une voix: À deux jaunes.

M. Garon: Ce matin, vous voyiez le nouveau ministre des Transports, qui sait à peine où se trouvent les routes au Québec; lui, sans autorisa- tion, il fait des engagements avec les camionneurs et il va réussir où l'ex-ministre n'a pas réussi? Moi, si j'étais lui... J'ai dit aux gens: Vous devez être prudents. Si j'étais le nouveau ministre, j'essaierais d'avoir les autorisations avant de prendre des engagements pour ne pas bourrer le monde, essentiellement pour ne pas bourrer le monde.

Le gouvernement, on va me dire, veut faire ça. Le gouvernement a le droit de faire ce qu'il veut, mais il a le devoir de donner l'heure juste. Il ne peut pas parier des deux coins de la bouche en même temps. S'il ne dépense pas l'argent, il ne dépense pas l'argent. S'il dépense l'argent, il dépense l'argent, mais il n'a pas le droit de donner deux versions en même temps. Puis, un ministre ne peut pas prendre des engagements... Je me rappelle, comme l'ancien ministre des Affaires municipales avant 1976 qui envoyait des lettres à des municipalités dans le Québec, 350 000 000 $ quand on est arrivés au pouvoir en 1976, des lettres où il disait: Je m'engage à recommander au Conseil du trésor. Puis, il y avait des municipalités qui avaient bâti là-dessus, sauf qu'une recommandation... Quand un ministre dit: Je m'engage à recommander au Conseil du trésor, ça ne veut strictement rien dire tant qu'il n'a pas été autorisé à faire tels engagements et autorisé par le Conseil du trésor si c'est le Conseil du trésor, et par le Conseil du trésor et le Conseil des ministres, si c'est nécessaire.

M. le Président...

Le Vice-Président (M. Cannon): En conclusion, M. le député de Lévis, s'il vous plaît.

M. Garon: Je conclus en disant que nous allons faire une bataille d'enfer là-dessus. Pourquoi? La bataille que les députés libéraux ne font pas, on va la faire, nous autres, parce que les gens du Québec ont le droit de vivre, les camionneurs du Québec ont le droit de vivre, les camionneurs artisans du Québec ont le droit de vivre, les entrepreneurs en construction de routes du Québec ont le droit de vivre et ceux qui font la réparation de routes ont le droit de vivre. Il doit y en avoir pour tous, surtout dans une période difficile où l'État, et je termine là-dessus, qui est le plus fort des nôtres, est utile à la condition qu'il travaille pour les citoyens et non pas contre eux. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Cannon): Merci, M. le député de Lévis. Pour l'exercice de votre droit de réplique, M. le ministre, je vous rappelle que vous avez cinq minutes.

M. Daniel Johnson (réplique)

M. Johnson: Merci, M. le Président. C'est toujours avec une pointe d'humour que je me

sens obligé de répondre au député de Lévis qui reproche à différents membres du gouvernement de ne pas savoir, de ne pas connaître l'importance de l'argent des contribuables. Venant de celui qui a traîné un chèque de 11 000 000 $, payable au Trésor public québécois, pendant des jours et des jours, avec des centaines de milliers de dollars que ça a coûté, venant d'une formation politique qui est en voie - en fait, j'ai vécu un "filibuster" de quatre heures hier en commission, M. le Président - d'empêcher le gouvernement d'édicter une loi qui constituerait un service aux organismes publics pour qu'ils empruntent à des taux inférieurs au taux du marché, nous épargnant ainsi entre 40 000 000 $ et 60 000 000 $ par année, M. le Président, je suis toujours impressionné de voir le député de Lévis et le député de Labelle prétendre que les fonds publics, les équilibres financiers, la croissance des dépenses et la capacité de payer des Québécois les intéressent. Les gestes qu'ils posent et qu'ils ont posés personnellement, à répétition, ont toujours démontré le contraire, à tel point que, pour la première fois depuis une dizaine d'années, nous avons dû, devant l'évolution des coûts des dépenses publiques, devant le poids incontournable du service de la dette contractée par les gens qui nous ont précédés, notamment par le chef de l'Opposition, nous avons dû, cette année, regarder plus attentivement que jamais auparavant comment nous pouvions confectionner des crédits qui permettaient de respecter l'équilibre difficile que nous devons maintenir devant les demandes illimitées de tous les secteurs de la population.

En matière d'éducation et d'enseignement supérieur, en matière de ressources humaines donc, les demandes sont illimitées. En matière d'environnement, les demandes sont illimitées. En matière de santé et de services sociaux, les demandes sont illimitées. En matière d'infrastructures, physique ou administrative, les demandes sont illimitées. Mais il y a une chose qui n'est pas illimitée, c'est la capacité du contribuable québécois de payer pour ces services.

Ce que nous avons tenté de faire, c'est de maintenir, d'une part, l'équilibre des services gouvernementaux souhaités par la population. Nous avons décidé de dégager, soit en exemptant de compressions financières ou, alors, par ajout net de ressources, nous avons tenté de souligner que nous portions une attention particulière à la mission éducative, à la mission de santé et à la mission environnementale. C'est ce que nous avons réussi à faire à la lumière de la seule mesure qui permet véritablement de juger si un gouvernement se comporte de façon responsable. (15 h 40)

Le fardeau fiscal que nous imposons à nos concitoyens est la mesure que nous devons retenir à chaque décision que nous prenons. On voit, M. le Président - les chiffres et les séries historiques sont là pour le montrer - que ceux qui nous ont précédés se sont comportés comme si les ressources financières étaient illimitées. On se souvient des discours de nos amis d'en face lorsqu'ils occupaient ces banquettes. Ce n'était pas l'argent qui manquait, c'étaient les projets qui manquaient. On n'avait cure de l'autre côté de se demander comment ça pouvait s'appliquer ou influencer la cote de crédit du Québec, comment ça pouvait raffermir ou affaiblir la capacité concurrentielle de nos entreprises, qu'est-ce que ça pouvait signifier pour la création d'emplois permanents, durables, à plein temps pour les Québécois.

Jamais, dans toutes les années où le gouvernement a été mené par les gens d'en face, n'a-t-il été question une seule fois de se soucier des équilibres financiers et de notre capacité de payer, sauf lorsqu'ils avaient le nez, pas sur la vitre, à travers la vitre. À un point tel, que ce sont les fonctionnaires et 300 000 Québécois qui se dévouent encore corps et âme au service de leurs concitoyens, qui se sont fait dire "vos salaires sont trop élevés" par les gens qui leur avaient consenti ces salaires. C'est ça qui est arrivé et c'est ce que nous avons évité. À tel point que cette année, non seulement avons-nous réussi à protéger le pouvoir d'achat de nos employés, mais comme l'a démontré le député de Saint-Louis, nous avons enrichi davantage le portefeuille avec raison, justice et équité...

Le Vice-Président (M. Cannon): En conclusion, s'il vous plaît, M. le ministre.

M. Johnson: ...avec raison, justice et équité de centaines de milliers d'employés, à 80 % des femmes qui, traditionnellement, avaient été moins bien payées qu'elles ne le méritaient. C'est là qu'on a mis nos priorités, M. le Président. On n'a pas mis nos priorités sur un fardeau fiscal trop élevé, on n'a pas mis nos priorités sur les emprunts toujours trop élevés, sur un déficit insoutenable, on a mis nos priorités sur l'environnement, l'éducation, la santé et sur la rémunération adéquate des employés qui ont été méprisés par le gouvernement qui nous avait précédés.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Cannon): Alors, conformément à l'article 288 du règlement, je vais maintenant mettre aux voix les rapports regroupés des commissions qui ont étudié les crédits budgétaires pour l'année financière 1990-1991 et le projet de loi sur les crédits 1990-1991. Est-ce que les rapports regroupés des commissions qui ont étudié les crédits budgétaires pour l'année financière 1990-1991 sont adoptés?

Une voix: Vote.

Le Vice-Président (M. Cannon): Alors, qu'on appelle les députés! (15 h 43-15 h 52)

Mise aux voix des rapports regroupés

Je vais d'abord mettre aux voix les rapports regroupés des commissions qui ont étudié les crédits budgétaires pour l'année financière 1990-1991.

Que ceux et celles qui sont en faveur de cette motion veuillent bien se lever!

Le Secrétaire adjoint: M. Pagé (Port neuf), Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François), M. Paradis (Brome-Missisquoi), Mme Bacon (Chomedey), M. Ryan (Argenteuil), M. Vallerand (Crémazie), M. Côté (Rivière-du-Loup), M. Sirros (Laurier), M. Savoie (Abitibi-Est), M. Tremblay (Outremont), M. Cherry (Sainte-Anne), Mme Robic (Bourassa), M. Dutil (Beauce-Sud), M. Lefebvre (Frontenac), M. Johnson (Vaudreuil), M. Cusano (Viau), M. Picotte (Maskinongé), Mme Robillard (Chambly), M. Houde (Bert hier), M. Maciocia (Viger), M. Maltais (Saguenay), M. Middlemiss (Pontiac), M. Philibert (Trois-Rivières), M. Beau-din (Gaspé), M. Bélisle (Mille-Îles), M. Hamel (Sherbrooke), M. St-Roch (Drummond), Mme Pelchat (Vachon), M. Marcil (Salaberry-Soulanges), M. Lemire (Saint-Maurice), M. Poulin (Chauveau), M. Tremblay (Rimouski), M. Benoit (Orford), M. Williams (Nelligan), M. Dauphin (Marquette), M. Kehoe (Chapleau), M. Fradet (Vimont), M. Lemieux (Vanier), M. Messier (Saint-Hyacinthe), M. Richard (Nicolet-Yamaska), M. Charbonneau (Saint-Jean), M. Bélanger (Laval-des-Rapides), M. Chenail (Beauharnois-Huntingdon), M. Gautrin (Verdun), M. Larouche (Anjou), M. Khelfa (Richelieu), Mme Hovington (Matane), M. LeSage (Hull), M. Bergeron (Deux-Montagnes), M. Borde-leau (Acadie), Mme Boucher Bacon (Bourget), M. Audet (Beauce-Nord), M. Parent (Sauvé), Mme Bélanger (Mégantic-Compton), M. Camden (Lotbi-nière), M. Brouillette (Champlain), M. Bradet (Charlevoix), Mme Cardinal (Châteauguay), M. Després (Limoilou), M. Farrah (Îles-de-la-Madeleine), M. Forget (Prévost), Mme Loiselle (Saint-Henri), M. Lafrenière (Gatineau), M. MacMillan (Papineau).

Le Vice-Président (M. Cannon): Que ceux et celles qui sont contre cette motion veuillent bien se lever!

Le Secrétaire adjoint: M. Parizeau (L'Assomption), M. Chevrette (Joliette), M. Perron (Duplessis), Mme Blackburn (Chicoutimi), M. Garon (Lévis), Mme Harel (Hochelaga-Maisonneuve), M. Jolivet (Laviolette), M. Baril (Arthabaska), Mme Juneau (Johnson), M. Dufour (Jonquière), M. Lazure (La Prairie), M. Gendron (Abitibi-Ouest), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Léonard (Labelle).

Des voix: Bravo!

Le Secrétaire adjoint: Mme Vermette (Ma-rie-Victorin), M. Paré (Shefford), M. Morin (Du-buc), Mme Caron (Terrebonne), M. Boisclair (Gouin), M. Bourdon (Pointe-aux-Trembles), M. Trudel (Rouyn-Noranda-Témiscamingue), Mme Du-puis (Verchères), M. Beaulne (Bertrand).

M. Libman (D'Arcy-McGee).

Le Secrétaire: pour: 64 contre: 24

Le Vice-Président (M. Cannon): Par conséquent, la motion est adoptée.

Projet de loi 79

Présentation, adoption du principe et adoption

En conséquence, M. le ministre délégué à l'Administration et à la Fonction publique et président du Conseil du trésor, au nom du ministre des Finances, propose que l'Assemblée soit saisie du projet de loi 79, Loi n° 2 sur les crédits, 1990-1991, qu'elle en adopte le principe et qu'elle adopte le projet de loi proprement dit.

Que ceux et celles qui sont en faveur de cette motion veuillent bien se lever.

Des voix: Même vote.

M. Pagé: Alors, M. le Président, je demanderais le consentement pour qu'on réfère au même vote, en additionnant, évidemment, le député de Roberval, ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, et M. le ministre des Transports, député de Robert-Baldwin.

Le Vice-Président (M. Cannon): Alors, il y a consentement, M. le leader de l'Opposition? Consentement. Alors, en conséquence, la motion est adoptée.

Alors, le projet de loi 79, Loi n° 2 sur les crédits, 1990-1991, est donc adopté.

M. le leader du gouvernement.

M. Pagé: M. le Président, je vous inviterais à appeler l'article 43 du feuilleton, s'il vous plaît.

Projet de loi 25

Prise en considération du rapport de la commission qui en a tait l'étude détaillée

Le Vice-Président (M. Cannon): Alors, à l'article 43 du feuilleton, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission de l'éducation sur le projet de loi 25, Loi sur l'aide financière aux étudiants. En conséquence, je

reconnais M. le ministre de l'Éducation.

Alors, nous allons attendre quelques instants, M. le ministre de l'Éducation, afin de permettre aux autres collègues de se rendre aux différentes commissions.

Alors, chers collègues, s'il vous plaît. Alors, M. le ministre de l'Éducation.

M. Claude Ryan

M. Ryan: M. le Président, à cette étape importante de l'examen du projet de loi 25 traitant de l'aide financière aux étudiants, il sera utile de faire une brève revue des étapes qu'a franchies ce projet avant d'arriver à un point qui est tout proche, maintenant, de l'étape finale de l'approbation par la Chambre.

On se souviendra que le gouvernement avait entrepris, il y a déjà trois ans, une réforme majeure du régime de l'aide aux étudiants, à la suite des nombreuses représentations dont il avait été saisi par les milieux étudiants et par les responsables d'établissements d'éducation chargés de l'application du régime de prêts et bourses aux étudiants. (16 heures)

En avril 1989, le gouvernement publiait un énoncé d'orientation intitulé "L'aide financière aux étudiants dans les années quarante", dans lequel 25 propositions de changement étaient formulées par le gouvernement en comparaison du régime actuel. Cet énoncé fut publié pour être soumis à la discussion publique. Pendant tout l'automne, on entendit toutes sortes de points de vue au sujet des propositions contenues dans l'énoncé d'orientation. En décembre 1989, j'avais l'honneur de déposer dans cette Chambre le projet de loi 25, lequel traduisait en des propositions législatives les grandes modifications déjà annoncées dans l'énoncé d'orientation d'avril 1989. Fidèles à une promesse que nous avions faites, nous soumettions le projet de loi à l'examen de la commission parlementaire de l'éducation en février. La commission siégea pendant presque trois semaines, si mes souvenirs sont bons. Elle entendit tous les groupes intéressés, toutes les associations, tous les établissements qui avaient des représentations à lui faire, y compris certaines personnes qui avaient demandé à témoigner à titre individuel.

Au terme de ces auditions parlementaires de la commission de l'éducation, le Parlement reprenait ses travaux réguliers à la mi-mars de cette année et, très tôt dans la session, nous engagions le débat de principe sur le projet de loi 25. Le projet de loi fut adopté par l'Assemblée au début d'avril, dans son principe, et nous reçûmes alors le mandat de retourner en commission parlementaire pour un examen article par article du projet de loi. La commission parlementaire s'est réunie les 8, 9, 10 et 15 mai dernier et, grâce à l'esprit de collaboration qui s'était institué entre tous les députés faisant partie de la commission, celle-ci pouvait faire rapport à l'Assemblée nationale il y a déjà deux semaines environ: travail accompli, mission complétée, et la commission pouvait faire rapport à l'Assemblée nationale qu'elle avait apporté plusieurs modifications bonifiant le projet de loi.

Parmi les modifications que la commission parlementaire a pu apporter au projet de loi, je voudrais mentionner les suivantes, M. le Président. On se souviendra que dans la version originelle les étudiants souffrant d'un handicap ou d'une déficience majeure se voyaient traiter sur un pied d'égalité avec tous les autres candidats à l'aide financière. Le gouvernement avait pensé bien agir faisant écho à des représentations, dont il est souvent saisi, voulant que tout le monde soit traité sur un pied d'égalité. Il s'était dit que là où un étudiant souffrant d'une déficience majeure disposerait des ressources financières nécessaires pour financer lui-même ses études, il n'y avait pas lieu de lui donner de l'aide financière de manière différente des étudiants ordinaires. On nous a fait valoir en commission parlementaire que le cas des étudiants souffrant d'une déficience majeure n'est pas du tout comparable à celui d'un étudiant ordinaire. Non seulement les cas où ces étudiants peuvent gagner de l'argent sont-ils extrêmement rares, mais là où ils font un petit peu de revenus par des travaux d'appoint, ils en ont triplement besoin par rapport à l'étudiant ordinaire. Et le gouvernement, attentif aux représentations qu'on lui avait soumises, a décidé de modifier le texte du projet de loi et, en vertu de la modification apportée en commission parlementaire, tous les étudiants souffrant d'une déficience majeure ou d'un handicap grave seront admis directement et automatiquement à la bourse sans avoir à passer d'abord par le prêt, comme le veut l'économie générale du régime des prêts et bourses.

On s'était inquiété aussi des étudiants qui revenaient aux études après avoir passé deux ans sur le marché du travail. La manière dont le projet de loi était formulé originellement pouvait induire des pertes d'avantages pour des étudiants qui auraient suivi, par exemple, des études à temps plein pendant une période de deux ans. Avec la modification que nous avons apportée au projet de loi, l'étudiant se trouve grandement avantagé de ce point de vue et j'en suis très heureux.

On avait beaucoup critiqué la sévérité des pouvoirs d'enquête attribués au ministre dans le projet initial. Le gouvernement, agissant de bonne foi, avait voulu harmoniser la Loi de l'aide financière aux étudiants avec la Loi sur l'aide sociale. Nous avions emprunté littéralement de la Loi sur l'aide sociale, les dispositions sur le pouvoir d'enquête du ministre qui avaient été inscrites dans le projet initial. Après avoir entendu les représentations qui nous furent faites

et considéré que la situation des étudiants qui sollicitent l'aide financière du gouvernement pour la poursuite de leurs études est très différente, à maints égards, de la situation de la personne qui sollicite l'aide sociale, nous avons conclu que le ministre n'avait pas besoin des pouvoirs d'enquête très sévères, très étendus que lui attribuait la version originelle et nous avons amendé le projet de loi de manière que le ministre soit doté de pouvoirs de vérification qui nous apparaissent suffisants, comme ils l'ont été jusqu'à ce jour, pour permettre au ministre de s'acquitter de tous ses devoirs avec l'efficacité qu'on est en droit d'exiger de lui.

Il en va de même des pénalités. Nous avions, même dans le régime actuel des prêts et bourses, des pénalités beaucoup trop sévères, des pénalités absolument disproportionnées à la nature des infractions susceptibles d'être commises. Si, par exemple, un étudiant soumettait une demande d'aide avec un délai de quelques jours à peine, il était exposé à perdre la moitié de l'aide financière à laquelle il avait droit, une pénalité sans aucune commune mesure avec la nature de l'infraction.

Il y avait d'autres cas... On proposait de l'exclure, je pense que c'est pour cinq ans, de l'aide financière pour des choses qui pouvaient souvent être en soi des peccadilles. Alors, le gouvernement a écouté ce qu'on lui avait dit, et j'étais heureux d'entendre le porte-parole de l'Opposition signaler en commission que le gouvernement écoutait beaucoup. Le gouvernement, écoutant ce qu'on lui avait dit, a décidé d'adoucir les pénalités prévues dans le projet de loi sur l'aide financière de manière que l'étudiant qui commet une faute contre l'économie ou les lois du régime encourt une pénalité et que cette pénalité soit davantage accordée à la nature de l'infraction commise. Je pense que tout le monde sera très heureux de ces dispositions.

De même, le pouvoir de dérogation qui est attribué au ministre dans le projet de loi a connu certains élargissements. Je donne un exemple. Dans le cas de l'étudiant qui aurait dépassé le nombre de périodes d'études, de sessions d'études qui permettent d'être admis à la bourse ou au prêt, dans ces cas-là, le ministre se voit attribuer le pouvoir de permettre l'accès au prêt, s'il y a des raisons sérieuses qui le justifient. Ces décisions du ministre seront prises, comme on le sait, après qu'un comité consultatif attaché au ministre aura formulé son opinion et entendu, au besoin, les personnes concernées.

Voilà quelques améliorations que nous avons apportées à l'occasion des travaux en commission. Et vers la fin des travaux de la commission, c'est-à-dire lorsque nous eûmes pratiquement terminé les travaux, j'avais le plaisir de communiquer à la commission des modifications que le gouvernement a également décidé d'apporter à l'économie même du régime.

On. se souviendra que j'annonçais en particulier que le gouvernement accordait, pour un étudiant inscrit dans un établissement collégial ou universitaire situé dans une région périphérique, une allocation spéciale de 210 $ par semestre, 420 $ par année, si le lieu de résidence des parents de l'étudiant est situé dans une autre région. Nous faisions droit, par cette mesure, à une demande qui nous avait été faite par de nombreuses personnes voulant que si un étudiant est obligé de partir de Montréal pour aller s'inscrire à un cours d'océanographie à Rimouski où il est exclusivement offert, à ce moment-là, il recevra une allocation spéciale qui constituera en même temps un encouragement à l'inscription dans les universités périphériques. C'est pour renforcer la vocation des universités périphériques et faire comprendre aux étudiants de tout le Québec qu'on y offre des cours de première qualité, que cette mesure a été instituée dans le projet de loi. (16 h 10)

Des voix: Bravo!

M. Ryan: Autre amélioration très importante pour les familles de cultivateurs ou de pêcheurs. Vous savez qu'on avait prévu dans le projet de loi que l'actif des parents qui est exempt des calculs pour les fins de la contribution parentale dans le cas d'une demande de bourse est actuellement de 50 000 $; dans le projet de loi nous portions cet actif à 90 000 $. Mais les représentants des producteurs agricoles et des pêcheurs nous ont dit: 90 000 $ pour un cultivateur ça ne veut pas dire grand-chose. Un cultivateur le moindrement important aujourd'hui a des actifs qui dépassent les 400 000 $, 500 000 $, 600 000 $ et 700 000 $. Et sur la plupart de ces actifs il ne réalise que des revenus liquides très modestes dans une année. Il doit encourir des charges très lourdes. Et on nous a dit si vous le grevez pour le montant qui est prévu ici toute valeur supérieure à 90 000 $, vous lui portez un coup très dur en partant. Ça peut être assez dur pour que son fils ou sa fille soit empêché de s'inscrire aux études collégiales ou universitaires. Nous avons étudié très attentivement les représentations qui nous avaient été faites et nous avons décidé de porter de 90 000 $ à 250 000 $ l'exemption consentie pour les actifs de parents de fils de cultivateur ou de pêcheur. Ça c'est une revendication....

Des voix: Bravo!

M. Ryan: ...je vois le ministre des Approvisionnements et Services qui est député de Beauce-Sud. Le ministre m'avait écrit, il y a une dizaine de jours, à ce sujet-là. Je lui ai dicté une lettre en fin de semaine dans laquelle je l'informais de ce changement qui avait été approuvé par le cabinet à une réunion où il était absent, étant retenu ailleurs par ses devoirs.

Mais je suis bien content pour nos collègues de toute l'Assemblée nationale des deux côtés de la Chambre d'annoncer cette amélioration, de confirmer cette amélioration dont j'ai déjà fait part à la commission parlementaire au début de mai. Nous avons également amélioré les dépenses de transport des étudiants; des allocations versées aux étudiants pour les dépenses de transport. Dans le projet que nous avions conçu nous resserrions la vis peut-être un petit peu trop. Et là, nous avons des mesures qui seront plus accordées aux besoins réels. Pour tout étudiant qui peut utiliser le transport en commun pour se rendre à l'établissement qu'il fréquente, il y aura une allocation minimum pouvant aller de 11 $ par semaine au montant équivalent au coût réel encouru par l'étudiant. Ça veut dire que, dans toutes les régions urbaines où il y a des transports en commun, l'étudiant se verra allouer chaque semaine un montant qui lui permettra de se rendre à son établissement et d'en revenir sans qu'il soit obligé d'encourir des déboursés personnels pour ça. Et là où le transport en commun n'est pas disponible, une allocation hebdomadaire consentie à l'étudiant est portée à 30 $ par semaine.

On nous avait dit aussi, il y a une table qui sert à établir la contribution des parents. Comme on le sait quand on établit l'aide à laquelle a droit l'étudiant on établit d'abord la contribution de ses parents, sa contribution à lui, la contribution de ses parents. Pour établir la contribution de ses parents, il faut fixer le niveau de revenu qui va être considéré pour les fins de la contribution parentale. Or, on nous a dit qu'on fixait le niveau de revenus trop bas, qu'il fallait le monter un petit peu de manière que les parents à revenus plus modestes soient exemptés de la contribution parentale. Alors, dans la dernière version du projet de loi, nous avons porté le seuil des revenus qui est le plus bas dans l'échelle de contribution parentale de 1000 $ qu'il était à 2730 $. Alors, c'est un changement considérable qui vient s'ajouter à toutes les bonifications déjà inscrites dans le projet initial.

Finalement, on nous avait dit: II y a les étudiants inscrits dans des établissements privés d'enseignement professionnel post-secondaires qui eux ont accès actuellement au prêt et non pas accès à la bourse. On nous avait dit: C'est discriminatoire par rapport aux étudiants qui suivent des cours professionnels dans un établissement public et ça l'est d'autant plus dans certaines disciplines que quelques disciplines sont offertes par des établissements privés et ne le sont pas par des établissements publics. Je donne un exemple. Un étudiant ou une étudiante qui veut suivre un cours de mode aujourd'hui. Où est-ce que vous pensez que cette personne va s'inscrire au niveau collégial? Elle va aller au collège de Lasalle à Montréal c'est là qu'est le centre de l'enseignement de la mode de niveau collégial. Or, le collège de Lasalle est un collège privé. Alors, l'étudiant qui s'inscrivait là n'avait droit qu'au prêt. Avec l'amélioration que nous avons décidé d'apporter il aura droit également à la bourse.

J'ai parlé tantôt des pénalités. Le Protecteur du citoyen était venu nous faire des représentations très élaborées en commission parlementaire. Il trouvait que nous étions un petit peu trop sévères, M. le Président. Nous l'avons écouté avec attention. Nous avons tenu compte de ses représentations et je pense que le Protecteur du citoyen pourrait être fier de la participation qu'il a eue à l'élaboration du projet de loi sur les prêts et bourses parce que sa contribution aura été retenue.

J'ajoute un dernier point. Au début des auditions de la commission parlementaire, des réunions pour l'étude article par article, l'Opposition a déposé une demande, dès le début des travaux. Elle a dit: Nous aimerions bien connaître le projet de règlement qui accompagnera le texte de loi. Parce que, dans ces lois comportant des allocations financières, des fois, le plus important est dans le règlement et non pas dans le texte de loi, M. le Président. Nous savons tous cela. Alors, l'Opposition nous a dit fort opportunément qu'elle aimerait connaître le texte du règlement aussi avant de pouvoir se prononcer définitivement sur le texte du projet de loi.

Or, je fus très heureux, à la séance de la commission parlementaire tenue le 15 mai, de porter à la connaissance des députés le texte d'un projet de loi adopté provisoirement par le gouvernement et que j'avais été autorisé à porter à la connaissance de la commission, de manière à pouvoir recueillir ses observations et ses recommandations avant que je présente une version définitive au gouvernement. Les députés ont pu se rendre compte à cette occasion que, dans le projet de règlement, le gouvernement respecte intégralement toutes les orientations, tous les engagements qu'il avait annoncés à diverses étapes du cheminement de ce projet, c'est-à-dire depuis la publication du document d'orientation en avril 1989 jusqu'à ce jour. La commission a fait encore quelques propositions d'améliorations dont nous tiendrons compte pour la présentation d'un projet de règlement définitif au gouvernement dans les jours qui vont suivre.

Il me fait plaisir de conclure ceci, en signalant que, dès que le projet de loi aura reçu la sanction de l'Assemblée nationale, nous verrons à ce qu'il soit ratifié ou sanctionné par le lieutenant-gouverneur, et, ensuite, je m'empresserai de soumettre au gouvernement un projet de règlement dont je souhaite qu'il entre en vigueur le plus tôt possible de manière que, dans les meilleurs délais, nous puissions commencer à gérer le programme des prêts et bourses en vue de l'année 1990-1991, suivant les dispositions, les normes, les modalités et les conditions définies dans le projet de loi 25.

M. le Président, j'exprime ma vive satisfaction pour l'excellent travail accompli autour de ce projet de loi et je souhaite que nous puissions procéder à la prise en considération du rapport et, ensuite, dans les meilleurs délais, à l'adoption définitive.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le ministre. Je reconnais maintenant M. le député d'Abitibi-Ouest et leader adjoint de l'Opposition officielle. M. le député.

M. François Gendron

M. Gendron: Oui, M. le Président. Il me fait plaisir de prendre la parole sur un projet de loi majeur, important, qui s'inscrit dans un contexte qu'il y a lieu de rappeler? C'est suite à la décision d'augmenter les frais de scolarité d'une façon très significative, très majeure, c'est-à-dire quelque chose qui ne s'est jamais vu, de 130 % sur deux ans, que, dans la même déclaration, le ministre de l'Éducation annonçait qu'il procéderait, au cours de l'année, à un nouveau régime d'aide financière aux étudiants.

Je pense qu'il a rappelé assez correctement ce qui s'est passé en commission parlementaire puisque, à la fin de son laïus, il indiquait qu'il avait hâte que nous commencions l'étude du rapport de la commission et c'est ce que nous faisons. Nous sommes présentement à l'étude du rapport de la commission de l'éducation sur les amendements, sur les modifications sur le projet de loi 25 qui, effectivement, a subi des modifications, dans certains cas, significatives, dans d'autres cas, beaucoup moins et, dans d'autres cas, absence totale d'ouverture, comme c'est la responsabilité d'un gouvernement d'avoir de la sensibilité sur des choses et d'en avoir moins sur d'autres, selon sa vision des choses, puisque c'est lui qui est mandaté pour diriger l'État, et c'est ainsi que la population du Québec a voulu que les choses se passent puisque nous vivons dans un tel régime. (16 h 20)

Je ne peux pas faire tout l'historique de ce projet de loi. Je le ferai plus lors de la troisième lecture où on aura l'occasion, à ce moment-là, de fermer toute la façon dont s'est déroulée la problématique du projet de loi 25 et des éléments l'entourant.

Aujourd'hui, on a à adopter ou pas ou à prendre en considération, M. le Président, le rapport de la commission de l'éducation sur le projet de loi 25, qui est l'assise sur laquelle viendront s'appliquer les diverses mesures dans le futur concernant l'aide aux étudiants, soit sous forme de prêt, soit sous forme de bourse, et le gouvernement a choisi de procéder par voie législative pour que les règlements puissent avoir une assise juridique, ce qui est familier et ce qui est régulier, ce qui est courant.

Avant de revenir au premier aspect, parce qu'il y a toutes sortes de façons d'aborder un rapport de commission, il est exact que moi, j'aimerais mieux commencer par le début plutôt que par ce que le ministre a fait, par la fin, en disant qu'à la toute fin il était heureux de nous déposer les règlements. Bien sûr, mais il faut dire aux membres de cette commission que les règlements que nous avons obtenus comportent 82 articles et que, dans certains cas, il y a jusqu'à 18 alinéas par article, ce qui vous démontre et ce qui signifie combien, dans l'application du régime de prêts et bourses, c'est bien clair que plus souvent qu'autrement, c'est aux règlements que nous allons devoir nous référer pour savoir ce à quoi les étudiantes et les étudiants du Québec auront droit, qu'ils soient du niveau collégial ou du niveau universitaire.

Je répète et je trouve anormal, et ce n'est pas parce que, encore là, les gens d'en face applaudissaient leur dieu que c'est normal de procéder comme ça... C'est le monde à l'envers. Il y a toujours, contrairement à ce qu'on entend des fois, la chance de composer avec une Opposition responsable et, je pense, un critique responsable en éducation qui connaît le domaine et qui sait qu'il n'y aurait pas intérêt à pénaliser les étudiantes et les étudiants du Québec pour faire de la politique. Ce n'est pas mon genre, ce n'est pas mon style, ce n'est pas le style de l'Opposition, contrairement à ce que j'ai entendu il n'y a pas plus tard que 45 minutes dans la réplique de cinq minutes du président du Conseil du trésor qui disait: Nous, évidemment, on ne connaît rien, on ne sait pas compter, on ne sait pas ce que c'est que des chiffres, on n'a aucune espèce d'idée de s'assurer que l'État prenne des décisions qui respectent la capacité de payer des contribuables. C'est ça qu'on s'est fait dire tantôt pendant cinq minutes. Si j'avais le même comportement, c'est évident qu'on ne serait même pas rendus où on est là, M. le Président, on ne parierait même pas de ça, parce qu'on serait probablement encore en commission, parce que nous avions le droit, comme Opposition responsable, de dire: M. le ministre, vous savez bien que même si on a le projet de loi... Quand vous me demandez: Qu'est-ce que vous pensez, entre autres, de l'article 11? Qu'est-ce que vous pensez de l'article 4? Et, juste dans l'article 4, je pense qu'on se référait aux règlements à cinq reprises. Alors, j'aurai beau dire ce que vous voulez sur l'article 4, je peux être pour, je peux être contre, je peux être dans les patates, je peux être correct ou incorrect, il n'en demeure pas moins que je ne sais pas de quoi je parie puisque, de toute façon, la plupart des dispositions du projet de loi 25 se référaient à des articles où on voit l'application concrète, le vécu, les modalités, la procédure, l'application et la signification à l'intérieur des règlements.

C'est vrai que, dès le début des travaux, nous avons fait une motion afin d'avoir copie des

règlements. Les gens qui applaudissaient, tantôt, le ministre de l'Éducation, parce qu'il a toujours, toujours, toujours fait les choses d'une façon extraordinaire selon eux. Je le répète, pour eux, c'est une idole. Ils n'ont jamais eu de ministre de l'Éducation au Québec d'une aussi grande envergure. Et ils vont le répéter. Mais, il n'en demeure pas moins, comme je l'ai dit tantôt, qu'on a toujours un ministre qui procède de la même façon, tout le temps. On n'a jamais entre les mains le projet de loi qu'on nous demande d'étudier.

Donc, ce que nous étudions, on ne sait jamais, quand on nous demande... Parce qu'il a commencé de même, il a dit: On a adopté le principe telle date. Oui, mais quand j'ai adopté le principe du projet de loi 25, et dans probablement trois, quatre semaines, lorsqu'il sera réimprimé, compte tenu du grand nombre d'amendements, il n'y a personne objectivement, qui a une tête sur les épaules, qui va être capable de dire: Je reconnais le projet de loi 25 qui a été déposé - je l'ai ici là - au tout début d'avril. Entre le dépôt d'un projet de loi où on nous demande de faire l'étude sur son principe et la finalisation du processus législatif qui nous conduit à la troisième lecture, il y a trop souvent un écart qui est une mauvaise habitude législative, qui n'est pas correcte, et le ministre, lui, met ça sur le dos de son écoute extraordinaire.

Je vous donnerai un exemple tantôt de son écoute extraordinaire. Le projet de loi normalement devait contenir la disposition la plus importante dans ses orientations en avril, et c'est pour ça d'ailleurs que je vous indique tout de suite qu'on va être collaborateurs, mais qu'on va être contre. On ne peut pas être pour ça. Ce qu'il y avait de plus important dans ses orientations en avril, c'était les étudiants à temps partiel. Enfin, dorénavant, on permettrait à des étudiants qui étudieront à temps partiel... Et en passant, pour ceux qui sont moins familiers avec ces notions-là, c'est le lot, on est rendu à presque plus de 50 % d'étudiants, dans l'ensemble du Québec, qui ont un statut d'étudiant à temps partiel.

Êtes-vous au courant que, pour ces 50 % en partant, c'est fini là? Eux autres, ils n'ont droit à ni prêt ni bourse. C'était ça la mesure la plus extraordinaire de ses orientations d'avril. Et en commission, on a eu beau lui faire la preuve, on a eu beau entendre toutes sottes de témoins, on a eu beau être des fois un petit peu plus déterminés, un petit peu plus agressifs, on a toujours eu la même réponse de ce ministre attentif, de ce ministre ouvert, de ce ministre qui écoute terriblement la population et les groupes qui le consultent. La réponse a été: Non, j'ai des vérifications à faire.

En avril, quand il l'a mis dans son papier, dans ses orientations, si on avait eu affaire à un ministre sérieux, ses vérifications, il les aurait faites. C'est lui qui a dit dans ses orientations en avril: Je souhaite pouvoir offrir un régime de prêts et bourses aux étudiants à temps partiel. Donc, c'est clair qu'on a commencé par une motion. Est-ce qu'on peut avoir les règlements? Rapidement, on s'est fait battre. Rapidement, les ministériels de l'autre côté de la table ont dit: Vous n'avez pas besoin de ça. Ce n'est pas grave. On a un mandat ici pour étudier article par article même si ça n'a pas de signification.

Alors, comme, je le répète, notre objectif était que le plus rapidement possible cette loi là soit adoptée dans toutes ses phases pour que les étudiants eux ne soient pas pénalisés, pour que les étudiantes du Québec ne soient pas pénalisées, on a procédé. Et c'est vrai qu'en commission, on a procédé, on a travaillé sérieusement, on a fait notre job sérieusement, comme c'est toujours le cas. Mais c'est certain que si on avait pu obtenir les règlements au préalable plutôt qu'à la fin... Parce que c'est comme un processus à l'envers. À partir du moment où on a fini un travail avec des instruments que nous n'avions pas, qui auraient facilité le travail, de venir se vanter qu'on a pu mettre la main dessus le dernier jour de la commission parlementaire, moi, je ne trouve pas que c'est très méritoire. Je ne trouve pas que c'est très logique. (16 h 30)

Moi, je n'aurais pas dit ça. Je ne serais pas content comme ministre de dire: Je vous les ai donnés le dernier jour. J'étais très heureux, quand tout a été fini, que vous puissiez mettre la main sur les règlements. Je comprends! Là enfin, on pouvait prendre connaissance de l'ensemble de la portée du projet de loi. Mais, ce n'est pas une façon de faire. Sur le nombre d'amendements apportés, une cinquantaine ont été apportés, Ça vous donne une idée comment ses projets de loi ne sont jamais prêts. Ça vous donne une idée que, quand il arrive en commission, de deux choses l'une, ou il veut se faire applaudir en phase finale, ce qu'il n'a pas besoin de faire, puisque, de toute façon, ces gens-là l'applaudissent sur tout en partant, quoi qu'il fasse. Quoi qu'il fasse, de quelque manière qu'il le fasse, qu'il reprenne ses devoirs cinq fois, dix fois, ça n'a pas d'importance, ça, c'est garanti. Donc, je ne vois pas pourquoi il procède de même. Et je le répète, je préférerai toujours des législateurs qui déposent un projet de loi ou un ministre qui dépose un projet de loi qui comporte l'ensemble des éléments sur lesquels on demande à une Opposition ou à des parlementaires d'étudier le projet de loi.

La nature des amendements qui ont été apportés. Regardons ça un peu. Regardons c'était quoi, la nature des amendements à apporter. Il y en a une série qui portait sur l'élargissement du programme de bourses aux étudiants à temps partiel, en termes d'échanges, en termes de discussions, et également aux étudiants du collégial. Mais, je vous l'ai dit, on a eu beau

marteler ces situations-là, on a eu beau reprendre ces situations-là, on a eu beau citer la CEQ, citer les rapports des centrales, citer les rapports d'une multitude d'associations étudiantes, pas d'ouverture. Et moi, quand il y a un mur de briques, s'il a 20 pieds d'épais ou s'il a 200 pieds de hauteur, je n'ai pas la réputation de dire: Je vais essayer pareil de le défoncer. Et c'est ce qui est arrivé, on ne l'a pas défoncé, au détriment des étudiants, bien sûr, au détriment d'une bonification que nous aurions souhaitée.

Deux autres notions majeures dans ce projet de loi là. C'était la notion d'autonomie, au niveau des critères d'autonomie, pour éliminer la notion de résidence ailleurs qu'à la résidence des parents. Là, on aurait aimé ça que le ministre soit plus souple pour tenir compte d'une réalité moderne. La réalité d'aujourd'hui, en 1990, n'est pas celle des années trente. Et là, je ne porterai pas de jugement sur la sagesse ou l'âge du ministre, mais des fois il me dépasse, il ne me paraît pas vivre à la même époque que nous. Il ne me paraît pas vivre en 1990, sur certains éléments. Et en 1990, il faut savoir qu'il y a des familles qui sont éclatées. Il faut savoir qu'il y a beaucoup de gens qui, même si on écrit dans un règlement que ce sont encore les parents qui ont la responsabilité de leurs enfants, il faut savoir qu'il y a beaucoup de ces familles-là qui, malheureusement, n'aident pas leurs jeunes, n'aident pas les enfants aux études collégiales ou universitaires. Ça, c'est une réalité de 1990, ce n'est pas une réalité des années trente. Et dans la notion d'autonomie, faire en sorte que nous ayons un nouveau régime qui permette qu'on accorde plus de valeur à l'autonomie d'un jeune, ça c'était un objectif que nous poursuivions. Et là-dessus, je vous avoue franchement qu'on n'a pas pu avancer beaucoup. On n'a pas pu avancer, pour ne pas dire ne pas bouger du tout.

J'ai un exemple qui me passe par la tête. Souvent, il n'y a rien de mieux que les choses qu'on connaît le plus. J'ai une fille qui étudie ici à l'Université Laval. Elle a étudié deux ans à Sherbrooke. Ça fait trois ans que sa résidence, ce n'est pas 15, rue Dubuc à La Sarre, c'est: deux ans à Sherbrooke et un an à Québec. Pensez-vous que ce ne serait pas normal qu'on commence à considérer - et là, je ne parle même pas de son âge, elle va avoir bientôt 22 ans - que c'est une étudiante pleine et entière et, en conséquence, qu'elle ne devrait pas avoir constamment un lien avec 15, rue Dubuc, qui est ma résidence privée. Là, on nous a dit: Oui, mais écoutez, question de salaire et question de capacité de payer et de responsabilité familiale, ce sont tes enfants. Je le sais, ce n'est pas ça que je discute. Je dis qu'on aurait voulu que la notion d'autonomie puisse progresser un peu plus dans l'économie générale du projet de loi, et on n'y est pas arrivé. Et pourtant, ça, c'est une réalité à laquelle les jeunes sont très sensibles parce que c'est normal qu'il en soit ainsi, et c'est comme ça, en 1990, que ça se passe, de toute façon. Échec là-dessus. On a proposé deux ou trois amendements, ils n'ont pas été retenus, bien sûr. On a voulu, nous, inclure le 1er cycle pour le remboursement d'une partie de la dette d'étude; amendement non retenu. C'est pour montrer qu'en commission, on a essayé de faire notre travail, nous.

Le ministre se glorifiait, tantôt, en disant... Il est habile, le ministre de l'Éducation, ça, je reconnais ça, pour dire les choses à sa façon - parce que ma phrase n'était pas finie - et pour prendre les bouts qui font son affaire: J'ai été, disait-il, très impressionné par le rapport du Protecteur du citoyen qui trouvait qu'on allait loin dans la question, dans tout le chapitre V au complet. En passant, la demande était le retrait total; la demande de tous les groupes et du Protecteur du citoyen, ce n'était pas "on va fricoter là-dedans", c'était: Retrait total du chapitre V, articles 47 à 52. C'était ça, la demande. Est-ce que le résultat, c'est ça? Non, messieurs; non, non, non, le résultat, ce n'est pas ça, trompez-vous pas. Même si tantôt, il disait "nous, écoutez, on est des gens qui voulaient s'harmoniser", il faut le faire; il faut le faire, essayer de nous faire accroire que le rationnel de ces articles-là, c'est parce que c'était dans l'autre loi de fou, la loi de l'aide sociale qui, je ne le souhaite pas, va créer, M. le Président - on va le regretter collectivement - des remous graves cet été quand elle va s'appliquer dans sa totalité. Je n'ai pas hâte de vivre le 1er juillet, quand l'ensemble des assistés sociaux apprendront ce qui va leur arriver par la tête.

J'ai cité un exemple cette semaine, les aberrations. Tu ne partages pas un loyer, tu es tout seul, tu ne connais même pas tes deux voisins; ce n'est pas grave, tu as une coupure parce qu'eux autres, ils ont interprété, par règlement, qu'il y a une notion de partage de logement dans l'air ou dans l'atmosphère ou dans la stratosphère. Et j'ai cité des cas, des cas précis: tel monsieur, il me montre ce que ça lui coûte par mois, il reste tout seul dans son 2 1/2, on l'a coupé quand même de 89 $. Le 1er juillet, n'oubliez pas que ces gens-là vont vivre l'ensemble de l'application de la loi de fou. Parce que la loi de fou, pour ceux qui ne savent pas ce que c'est, c'est la Loi sur l'aide sociale, c'est la loi avec les boubous macoutes, c'est la loi qui fait la guerre aux pauvres et non à la pauvreté. C'est la loi qui multiplie toutes les intrusions contre la Charte des droits, c'est la loi qui a été décriée par la Charte des droits, par les organismes qui ont un peu de sensibilité pour le respect des personnes, comme l'Assemblée des évêques. Très pertinent, M. le Président, parce que c'était son explication pour dire: On avait mis la même chose dans la loi des prêts et bourses, on avait mis les mêmes dispositions par

harmonisation.

Pensez-vous que ça peut être crédible, un tel argument? C'est impensable qu'on puisse considérer les étudiants, qui sont des demandeurs de prêts et bourses, qui sont des demandeurs d'aide financière, comme, entre guillemets, des fraudeurs d'aide sociale. Pensez-vous que ça a du bon sens sur le plan des principes? C'est ça que ça voulait dire. Ça voulait dire que presque par notion ante, si vous me permettez l'expression, on présumait que ces gens-là auraient des comportements de nature douteuse qui auraient fait que ça prenait un mécanisme aussi lourd de vérification et d'enquête que celui qu'on a mis dans la Loi sur l'aide sociale concernant les assistés sociaux - je suis très pertinent - qui fait la guerre aux pauvres et non la guerre à la pauvreté parce qu'eux autres, prendre des mesures pour corriger la pauvreté qui s'agrandit, les poches de pauvreté qui se multiplient au Québec, ils ne connaissent pas ça. On ne connaît aucun programme concret qui permet de corriger ça. Mais s'attaquer aux pauvres, aux plus démunis, des exemples, on en a tous les jours et on en a juste en face du parlement. (16 h 40)

Donc, quand le ministre dit "on a progressé, j'ai enlevé, tout de suite aux revendications qui m'ont été faites, les pouvoirs d'enquête", il a raison. Il a raison. Mais il a gardé les pouvoirs de vérification. Alors que - je ne change pas d'opinion et j'ai fait des vérifications - il les avait de toute façon; il les a de toute façon dans la loi générale du ministère. Il pouvait très bien, comme ministre de l'Éducation... Il le fait tout le temps de toute façon partout. Écoutez! Avez-vous un ministre qui est plus "dérogateur" que celui-là? Même ses amis les plus intimes disent: II y a deux choses: on reconnaît qu'il est un grand travailleur, on reconnaît qu'il connaît ses dossiers - je n'ai jamais mis ça en cause - mais on reconnaît en même temps qu'il faut que tout lui passe dans les mains; qu'il est très centralisateur. Et, en plus, il faut que M. le ministre... Je ne sais pas s'il veut, pour la postérité, avoir une multitude de petits calepins noirs, je ne sais pas si c'est pour en mettre très épais, parce que j'en vois souvent sortir de sa poche; son petit calepin noir, ça a l'air précieux. Et il note toutes sortes de choses. Je ne sais pas si c'est pour l'histoire, je ne sais pas si c'est pour les archives. Mais il n'en demeure pas moins qu'il a rarement passé, dans un Parlement, un ministre qui tient tant à avoir des pouvoirs de dérogation: Laissez-moi regarder ça et moi, je vous garantis que l'âge d'admission à l'école, on va le régler.

Il en a parlé là-dedans aussi. Il dit: Je suis heureux de dire que nous avons élargi, rendu plus souples les pouvoirs de dérogation. Et, dans le présent cas, il a raison. Dans le présent cas, il a raison. C'est beau. Je le félicite. D'ailleurs, je le lui avais dit quand on a fait les crédits. Quand on a fait les crédits du ministère de l'Éducation, j'ai dit que je terminerais - parce que je ne suis pas rendu là - en disant au ministre qu'entre le projet de loi 25 sur lequel il nous a demandé de se prononcer en principe et le projet de loi 25 final qui permettra aux étudiants d'avoir de l'aide financière, il y a une très large différence, mais en termes de bonification. Et je ne change pas d'avis que les étudiants auront un meilleur régime que celui qu'on nous a montré lors du dépôt du projet de loi 25. Ils auront un meilleur régime globalement, ce qui va permettre, effectivement, que certains étudiants souffrent moins d'endettement et aient un peu plus de facilité à avoir un soutien financier, quand ils en ont besoin, pour poursuivre leurs études.

Donc, le chapitre Vérification et enquête et Dispositions pénales, nous, on voulait le retirer, parce que c'est ça que le monde demandait. C'est ça que le Protecteur du citoyen demandait. C'est ça que les intervenants demandaient. Le ministre n'a pas retiré le chapitre. Le ministre n'a décidé de ne retirer que l'aspect enquête, et c'est mon rôle de le noter, parce que ça s'est passé en commission et qu'on étudie le rapport de la commission. Dans le rapport de la commission, vous ne trouverez que la moitié de la demande générale. Ça signifie que le ministre est resté sur ses demi-positions en prenant la moitié de ce qu'on lui demandait d'enlever.

Au niveau des dispositions pénales, nous avons apporté un amendement afin d'éliminer la notion de "aurait dû savoir". À l'article 53 du projet de loi, nous, on trouve un peu dur, et on ne change pas d'avis, "est passible d'une amende d'au moins 250 $ et d'au plus 1500 $" - et là, ça va être changé; donc, ce n'est pas sur les chiffres que j'en ai, parce que le ministre a effectivement réduit le niveau des amendes - "...qui fait une déclaration alors qu'elle sait ou aurait dû savoir". Nous, sur la notion de "aurait dû savoir", on pense qu'il y aurait eu lieu, compte tenu que, souvent, ce sont des jeunes de bonne foi... De prétendre qu'ils doivent connaître les règlements avant de les avoir lus et d'avoir cette capacité de tout savoir, bien on pense qu'effectivement, le ministre aurait pu être plus souple.

Le ministre a apporté d'autres amendements positifs. Je les cite. Au niveau des critères d'autonomie, il a retiré la notion d'avoir occupé un emploi à temps plein: article 4, dixièmement, dans les règlements, parce que ce n'est que dans les règlements qu'on a pu voir ça. Alors, là-dessus, je dis au ministre: Je pense que vous êtes sur la bonne voie. Je ne parlerai pas trois jours là-dessus; c'est une bonne mesure. Alors, bravo, au nom des étudiants. Je suis content.

Le ministre a assoupli certains délais pour produire une demande. Encore là, je pense que le ministre, cette fois-là, a écouté les revendications des intervenants et celles de l'Opposition parce que ça n'avait pas de bon sens. Il y avait

certains délais pour produire une demande qui étaient d'une rigueur à peu près de la détermination, des fois, des accusations du ministre de l'Éducation quand il les porte avec le geste que vous connaissez tous et, souvent, il finit ça en disant: Moi, j'aime ça quand on a des propos virils, déterminés. Là-dedans, il y avait trop de virilité parce que, à un moment donné, ce n'était pas de la virilité, c'étaient des abus systématiques. Heureusement, le ministre a eu un peu d'ouverture et il a décidé d'améliorer et d'assouplir. Bravo! pour cette disposition.

Il a inclus que dans le cas des étudiants atteints d'une déficience fonctionnelle... Et là, il fallait l'entendre encore tantôt, je n'en reviens pas! Je n'en reviens pas! C'est bon, la conclusion, mais quand un ministre de l'Éducation commence sa phrase en nous disant: M. le Président, nous, il nous apparaissait, pour un principe d'égalité universel - et là, je le cite au texte - "que même un étudiant qui est atteint d'une déficience majeure ou d'un handicap grave"... Nous, on pensait, dans notre bonne foi, dans notre bonne simplicité qu'il fallait traiter ces gens-là d'une façon égale, comme s'ils étaient exactement considérés comme les autres. Alors, ça a pris des heures, il a fallue presque faire une crise avec un groupe à un moment donné qui est venu dire au ministre: Écoutez, nous autres, les handicapés... Supposons qu'ils sont complètement incapables de voir... Et on a eu un excellent témoignage d'un type qui a eu le courage de faire ses études de droit, aveugle complètement. Il a fait ses études de droit jusqu'au bout. Il a obtenu son diplôme. Il ne peut pas être reçu avocat cependant parce que les examens du Barreau, c'est compliqué et il faudrait traduire ça avec un système. Et il a tout conté ça au ministre, pour montrer que ces gens-là ont des besoins spécifiques. À la fin, le ministre a conclu: D'accord, j'achète votre affaire et j'apporte une modification. Mais quelle difficulté à faire la démonstration que des handicapés visuels ou des gens souffrant d'une déficience majeure grave ou d'un handicap grave n'auraient jamais dû être considérés sur le même plan que les autres.

Puisque vous m'indiquez qu'il ne me reste qu'une minute, je ne peux pas faire ma minute ailleurs qu'à sa place, c'est-à-dire c'est sur l'autre exemple. Quand j'ai parlé de hausser la notion d'actif pour les agriculteurs. Le ministre disait: J'ai envoyé une lettre au député de Beauce, il était content et tout ça. Moi, je peux vous dire qu'on l'a traîné ce bout-là avec des exemples de Rouyn-Noranda et de mon comté. Je suis arrivé avec des cas précis, en disant qu'il empêchait systématiquement à des producteurs agricoles que leurs enfants aient droit à des prêts et bourses parce qu'on donnait une valeur artificielle à un quota de lait, en disant: Un quota de lait, ça vaut 300 000 $, mais ça ne donne pas d'argent dans les poches des parents pour aider le jeune aux études. Et les frais de scolarité, tu ne les paies pas en quotas de lait. Ça ne se paie pas de même. Oui, M. le Président, je vais conclure. Tu es obligé de les payer en argent.

Alors, puisque vous me demandez de conclure, je vais respecter le temps qui m'est alloué. Je dis en conclusion: Oui, on a travaillé convenablement; oui, M. le ministre, je suis content de procéder rapidement parce que je veux que les étudiants puissent bénéficier d'un régime qui est amélioré. Et, comme je vous avais dit que ma conclusion, ça serait aux crédits, entre le dépôt de votre projet de loi et le résultat final: Oui, il y a une nette amélioration, et nous sommes très heureux que les étudiants et les étudiantes du Québec puissent bénéficier des améliorations qui ont été apportées par le ministre de l'Éducation sur plusieurs points.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député d'Abitibi-Ouest. Je reconnais maintenant M. le député de Jacques-Cartier. M. le député.

M. Neil Cameron

M. Cameron: Merci, M. le Président. Aujourd'hui, c'est un sujet sur lequel je préfère parler en anglais. I would not take up too much of the Assembly's time on the issue of grants and bursaries to students, which, I think, has now been given an exhaustive and thourough analysis by the Member from Abitibi-Ouest. (16 h 50)

I would repeat that in general, we support the position of the Government on the Bill, and the general course of action that it has taken, and, on the whole, the amendments that have subsequently been added appear to us as mainly improving the Legislation. But I would add one qualifying remark that, I hope, may be useful; and that is that it appears to me from the amendments and from the discussions on the different roles of students who are full-time or at "temps partiel" that the Minister or the Ministry is attempting to achieve a regime of perfect justice by distributing loans and grants in such a fashion as to be most fair and most equitable to students. This is a nice idea in theory, but from what I observe inside the actual educational system it is not highly realistic, because it does not allow for the intelligent behaviour of the students themselves, when examining the loans and grants that are available to them.

In other words, whether or not they are a full-time student or a part-time student, or whether they apply for a loan or a bursary itself depends on what they calculate as the means by which they can maximize the amount of money they can have available for that year in school. So, consequently, if you adjust the loans or you

adjust the bursaries with the idea of aiding one group or another, what will happen is simply that the group will change its behaviour to provide whatever gives it the best deal. I will therefore suggest, in practical terms, that it will be a good idea for the Ministry to monitor very closely exactly what happens to, let us say, a sample group of loans and bursaries made next year, and find out how that compares with previous years, and in the following year, and on that basis consider the possibility of subsequent amendments to the law. Merci, M. le Président

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Jacques-Cartier. Je reconnais maintenant, Mme la députée de Chicoutimi. Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Jeanne L Blackburn

Mme Blackburn: M. le Président, il y aura bientôt cinq ans que je suis en cette Chambre. J'ai vu passer tous les projets de loi préparés par le ministre de l'Éducation comme un certain nombre de projets de loi. Il y a une chose remarquable avec les projets de loi présentés par le ministre de l'Éducation, ce sont sans doute les plus mal faits. Aucun des projets de loi qui ont été déposés par le ministre de l'Éducation n'a pu passer avec quelque modification tant il était fait de façon négligente, je dirais, et qui ne reflétait pas la pensée du ministre. Tout se passe avec le ministre de l'Éducation comme si, délibérément, il choisissait de faire des projets de loi fortement influencés, à l'occasion, par des fonctionnaires - en ce qui concerne ce projet de loi là ça me semble évident - qui avaient connu un certain nombre de frustrations et qui voulaient tellement resserrer le projet de loi qu'on pouvait même le faire au détriment des droits de la personne. Et le ministre laisse passer ça. Je pense que, quand mon collègue parle d'habilité du ministre, c'est de ça dont il parle. Il a cette habilité de vous déposer un projet de loi sur lequel il craint nécessairement de la contestation...

M. Tremblay: Question de privilège, M. le Président. Je demanderais la pertinence du débat.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le député, ce n'est pas une question de privilège, premièrement. Alors, Mme la députée, je vais continuer à vous écouter.

Mme Blackburn: M. le Président, délibérément le ministre choisit de déposer des projets de loi sachant pertinemment qu'en raison des...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): J'apprécierais avoir l'ordre. Je continue à vous écouter religieusement.

Mme Blackburn: M. le Président, délibérément, le ministre de l'Éducation choisit de déposer des projets de loi dans lesquels il y a des grands trous, des projets de loi qu'il sait d'avance qu'ils seront contestés tant ils échappent au sens commun dans certains de leurs aspects, parce que ça lui permet de laisser ses fonctionnaires passer un peu de leurs frustrations particulièrement dans ce projet de loi, mais plus particulièrement il le fait parce qu'il sait qu'il pourra dire après: J'ai aidé ceux qui voulaient faire faire des modifications, je suis à l'écoute. Je trouve ça très facile. Il en avait tellement mis dans le chapitre sur les vérifications et les enquêtes que le Protecteur du citoyen lui-même a cru utile de venir lui dire: Ça n'a pas de bon sens. C'est de bonne stratégie, évidemment, il nous apporte plus de 60 modifications sur un projet de loi qui a une cinquantaine d'articles, et ça paraît bien, il a écouté. C'est facile dans ces circonstances-là. C'est facile, sauf qu'il va trop loin. Le projet de loi sur l'instruction publique plus de 1000 amendements. Il y a eu un projet de loi sur la commission scolaire de Chisasibi, un projet de loi de quatre articles, qui a été écrit au complet. Il a dû le réécrire. Et c'est toujours comme ça. Et ensuite, une fois l'exercice terminé, il dit: Écoutez, je suis très à l'écoute de tous ceux qui viennent en commission parlementaire faire valoir leur opinion là-dessus. Chose facile, puisque, délibérément, il choisit de ne pas présenter un projet de loi qui aurait, dans la plupart de ses aspects, retenu les grands courants de pensée, les grandes objections ou les grandes représentations qui ont été faites à son sujet.

Le projet de loi que nous avons contenait une disposition intéressante en ce qui touche l'accès au régime d'aide financière des étudiants à temps partiel. Surprise et déception, ils n'y auront pas droit cette année. Et pourtant, les étudiants à temps partiel, M. le Président, c'est 50 % des étudiants dans nos collèges et dans nos universités, et, dans 80 % des cas pour l'Université du Québec à Montréal, ce sont des femmes dont on sait tous que le revenu est le tiers plus bas que celui de hommes, qui ont de plus en plus la responsabilité de subvenir aux besoins de la famille. Et le programme n'est pas accessible à ces personnes.

M. le Président, le projet de loi qui a été déposé, on le reconnaît, a été amélioré. Ça n'aurait pas eu de bon sens s'il avait été passé tel quel. Mais une remarque importante a été faite par le Protecteur du citoyen: il fait trop recours au pouvoir réglementaire. Moi, je me rappelle les discours complètement scandalisés de l'Opposition libérale de l'époque qui disait: Vous abusez des règlements, trop de recours au pouvoir réglementaire, ça n'a pas de bon sens, nous autres, quand on va prendre le pouvoir, le recours au pouvoir réglementaire, ce n'est pas vrai, le moins de règlement possible. On n'a

jamais, mais jamais vu autant de pouvoir réglementaire dans les projets de loi et dans tous les projets de loi, pas seulement dans le projet de loi du ministre de l'Éducation. Tous les projets de loi sans exception abusent du recours au pouvoir réglementaire. Le règlement qui accompagnera ce projet de loi, M. le Président, 82 articles, mais il y a certains articles qui ont plus de 18 alinéas. C'est énorme. D'ailleurs, c'a été l'objet des remarques du Protecteur du citoyen qui disait: On n'aurait pas le droit, normalement, dans un tel projet de loi, de retrouver des dispositions dans un règlement. Le législateur a la responsabilité de se prononcer de façon claire sur les principes qui sous-tendent les projets de loi qu'il dépose, alors que, pour ce projet de loi, beaucoup beaucoup de mesures vont se retrouver dans les règlements sur lesquels le législateur n'a aucun droit de parole, et c'est inacceptable.

M. le Président, ce n'est pas l'Opposition qui le dit, c'est le Protecteur du citoyen, et le ministre a trop souvent recours, et cela, c'est reconnu par ses collègues comme par tout le monde, au pouvoir discrétionnaire. Ça lui fait donc plaisir de pouvoir écrire individuellement à 2000, 3000, 4000 ou 10 000 personnes, de ce que je sais, au Québec, pour dire: Voilà, je vous ai accordé ça. Ma grande générosité tout à coup. C'est comme s'il sortait l'argent de ses poches. Il serait peut-être mieux et plus souhaitable qu'il y ait des règles claires, accessibles et connues par tous, de manière que tout le monde puisse s'en prévaloir. Parce que le problème, avec un pouvoir discrétionnaire, c'est seuls ceux qui connaissent l'existence de cette possibilité qui peuvent faire la demande, et faut-il encore qu'on soit informé. J'y reviens, au pouvoir discrétionnaire du ministre en matière de dérogation à l'âge d'admission à l'école. C'est inacceptable, injuste, inéquitable, parce que seules les personnes qui ont pu envoyer leurs enfants en prématernelle, qui ont développé leurs enfants, peuvent un peu se qualifier, celles qui ont l'information et celles qui ont l'argent pour faire passer les expertises professionnelles. M. le Président, le recours au pouvoir discrétionnaire du ministre, c'est son défaut. (17 heures)

Mais il y a quelque chose qui est passé un peu inaperçu dans ce projet de loi et que je déplore infiniment, c'est-à-dire pas passé inaperçu, sur lequel le ministre a refusé de revenir. Deux des articles du projet de loi laissent l'impression que seuls les étudiants bénéficiaires de l'aide financière aux étudiants prolongeraient indûment leurs études. Je rappelle ces articles du projet de loi, M. le Président. Le premier qui prévoit qu'on accordera une déduction, qu'on réduira de 25 % la dette d'étude des étudiants qui termineront leurs études dans les délais requis. La mesure est intéressante. Personne ne peut être contre ça. Il aurait été souhaitable que ça s'applique aussi au premier cycle; ça s'appli- que au deuxième cycle. Mais qu'est-ce que ça veut dire? Ça veut dire: Bien, si vous terminez ça dans les délais requis, on vous récompense, ce qui n'est pas mauvais. Mais l'autre mesure, elle limite l'accès aux bourses pour un certain nombre pour une période donnée. Alors, si vous êtes inscrit à un bac où il est prévu huit sessions, vous aurez droit peut-être à neuf ou dix sessions.

Ce que ça laisse entendre, c'est que seuls les étudiants qui bénéficient de l'aide financière aux étudiants auraient la mauvaise habitude de prolonger indûment leurs études et ça n'est pas vrai. Ça n'est pas vrai, les chiffres le démontrent. Ça n'est pas le fait des étudiants bénéficiaires de l'aide financière aux étudiants qui prolongent indûment leurs études. C'est le fait des étudiants de façon générale et, plus particulièrement, de ceux qui n'ont pas accès aux prêts et bourses parce que les parents paient pour eux. Alors, pourquoi faut-il laisser dans ce projet de loi l'impression que seulement les étudiants qui vont s'endetter prolongent leurs études? Je pense, M. le Président, que le ministre aurait dû, parce que ça fait porter un préjugé sur ces étudiants-là, rayer cet article-là du projet de loi.

M. le Président, le projet de loi qui est déposé, on y a apporté un certain nombre de modifications intéressantes, il va sans dire. Cependant, il aurait été intéressant qu'on ait en même temps les règlements, mais qu'on ait en même temps un projet de loi beaucoup plus conforme à ce qu'étaient les représentations qui avaient été faites par les étudiants et par les différents collèges et universités. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la députée. Je reconnais maintenant la prochaine intervenante, Mme la députée de Terrebonne. Mme la députée.

Mme Jocelyne Caron

Mme Caron: Merci, M. le Président. Je suis très heureuse de prendre la parole sur le projet de loi 25, Loi sur l'aide financière aux étudiants. Lorsqu'on sait à quel point le programme de prêts et bourses est important, doublement important, bien sûr, à cause du dégel des frais de scolarité, vous en conviendrez, nous nous devions, comme membres de l'Opposition, de surveiller de près ce projet de loi.

Aussi vrai qu'il faut dénoncer avec ardeur les lacunes des projets de loi, aussi vrai nous faut-il reconnaître les améliorations apportées. Lors de l'adoption du projet de loi 9 modifiant la Loi sur l'instruction publique, je déplorais la non-réceptivité du ministre à nos demandes ainsi qu'à celles des intervenants du milieu. Je tiens à souligner que le ministre de l'Éducation a démontré, par la loi 25, qu'il pouvait, à l'oc-

casion, non seulement écouter, mais apporter des correctifs essentiels, lorsque nous étions très tenaces, bien sûr. Par la loi 25, le ministre nous a agréablement surpris en donnant réponse à de nombreuses préoccupations présentées en commission parlementaire, autant par les associations étudiantes que par ceux et celles qui ont présenté des mémoires ainsi que par les membres de l'Opposition.

La loi 25 bonifie, bien sûr, le programme actuel de prêts et bourses, ce qui nous apparaît primordial devant l'écart qui se maintient toujours entre le nombre de diplômés du Québec et celui de l'Ontario, car il ne faut jamais oublier les embûches énormes qui se dressent sur le chemin de nos étudiants et que, malgré cette loi, de nombreux étudiants et de nombreuses étudiantes ne pourront poursuivre leurs études.

Parmi les éléments positifs, on peut rappeler l'aide sous forme de bourses uniquement pour les étudiants atteints d'une déficience fonctionnelle majeure. C'est un élément auquel nous tenions beaucoup, qui a été présenté en commission, et il nous apparaissait normal que le ministre en tienne compte.

L'augmentation des exemptions pour les parents propriétaires d'un domaine agricole est des plus positives. L'ajout d'un montant de 420 $ pour les candidats inscrits en région ainsi que la disparition de la notion d'emploi à temps plein pour les critères d'autondmie doivent aussi être soulignés comme positifs.

Malgré ces nombreux amendements apportés grâce au travail fait en commission, certains irritants demeurent toujours et je prendrai quelques minutes pour les relever. Plusieurs mémoires recommandaient des mesures précises pour informer les parents sur la contribution parentale qui est calculée par la Direction des prêts et bourses. Malheureusement, ce problème bien réel vécu annuellement par les étudiantes et les étudiants du Québec ne trouvent pas encore de solution concrète à la lecture de la réglementation. On touche ici le problème numéro un des étudiants. Puisque plus de 40 % des parents refusent toujours de verser cette contribution aux étudiants, il y aurait lieu de préciser et de donner réponse à tous les intervenants qui ont demandé des modifications dans ce sens.

La deuxième préoccupation a trait à la recommandation du Protecteur du citoyen concernant l'article 39 qui précise les modalités advenant un retard dans la présentation d'une demande. Je l'avais rappelé lors de la première intervention et je tiens à le rappeler à nouveau. Le Protecteur du citoyen nous mentionnait: "S'il est normal que les étudiants, pour la bonne marche du système, respectent les délais sous peine de sanctions, ne devrait-il pas en être de même pour le ministère? Est-il déraisonnable de penser que, dans le même but de fonctionnement harmonieux du régime, on pourrait également fixer des délais précis au ministère pour le traitement des dossiers? Et une inobservance de ces délais ne pourrait-elle entraîner une pénalité que devrait verser le ministère à l'étudiant qui a respecté les exigences réglementaires et qui est victime des délais abusifs? J'invite le législateur à se poser cette question. Cependant, à partir de l'expérience vécue, je peux affirmer, pour ma part, qu'il y a eu des cas où des étudiants, pour survivre, ont dû emprunter et payer des intérêts parce que l'aide financière leur a été versée avec un retard considérable par la faute du ministère. En toute équité - le Protecteur du citoyen concluait - je crois que la présente législation devrait prévoir le remboursement des intérêts que l'étudiant doit assumer lorsque de telles situations se présentent, et j'en fais une recommandation." L'Opposition partage entièrement cette recommandation et elle n'a pas été retenue par le ministre.

On doit également déplorer que le ministre ait maintenu dans l'article 4, paragraphe 9°, au niveau des critères d'autonomie, l'obligation d'avoir résidé ailleurs qu'à la résidence des parents. On sait que les jeunes demeurent de plus en plus longtemps chez leurs parents, même s'ils travaillent à temps partiel ou à temps plein. C'est devenu une nouvelle tradition chez nos jeunes de demeurer très longtemps à la résidence familiale. Cette mesure nous apparaît donc non conforme à la réalité.

Le problème des étudiants et des étudiantes à temps partiel reste entier puisque le pourcentage de ces étudiants ne cesse de s'élever et que la majorité de ces étudiants à temps partiel, il est important de le rappeler, sont des femmes. Il faut insister pour que le ministre applique le plus rapidement possible ce régime pour les étudiants à temps partiel. On sait que si les femmes choisissent d'étudier à temps partiel, c'est parce qu'elles vivent des conditions particulières. La majorité d'entre elles se retrouvent chef de famille et doivent faire face à des obligations. Donc, elles ne peuvent étudier à temps complet. Il faut donc insister à nouveau pour que le ministre tente d'apporter le plus rapidement possible des modifications pour assurer un régime de prêts et bourses pour les étudiants à temps partiel.

Enfin, M. le Président, le travail accompli par tous les membres de la commission fut exemplaire et tous les participants, le ministre et le porte-parole officiel en tête ont démontré un esprit de collaboration remarquable pour améliorer le régime d'aide financière aux étudiants au-delà de toute partisanerie. C'est très rare que l'on peut souligner ce fait, mais je tenais à le souligner. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Cannon): Merci, Mme la députée. S'il n'y a aucun autre intervenant, M. le ministre de l'Éducation? Non? Bon. Alors, donc, à l'article 43 de notre feuilleton, est-ce que le rapport de la commission de l'éducation

quant à la prise en considération du projet de loi 25, Loi sur l'aide financière aux étudiants, est adopté?

Des voix: Adopté.

M. Gendron: Sur division.

Le Vice-Président (M. Cannon): Sur division.

M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Lefebvre: Oui, M. le Président, je vous inviterais maintenant à appeler l'article 24 du feuilleton, s'il vous plaît.

Projet de loi 69 Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Cannon): à l'article 24 du feuilleton, m. le ministre de l'éducation propose l'adoption du principe du projet de loi 69, loi modifiant la loi sur l'instruction publique et la loi sur l'enseignement privé. alors, m. le ministre. (17 h 10)

M. Claude Ryan

M. Ryan: M. le Président, c'est avec grand plaisir que j'assume au nom du gouvernement la lourde responsabilité de présenter le projet de loi 69 à l'Assemblée nationale et à la population du Québec. Dès la campagne qui précédait l'élection de 1985, le Parti libéral du Québec avait pris l'engagement de responsabiliser les établissements d'enseignement à tous les niveaux. Dans le secteur de l'enseignement primaire et secondaire, il s'était engagé à maintenir un système où l'école, tout en étant davantage invitée à se donner une personnalité propre, demeurerait rattachée à une commission scolaire formée de membres élus au suffrage universel par leurs concitoyens. Aux commissions scolaires, le Parti libéral avait promis un rôle plus clairement défini dans une Loi sur l'instruction publique refaite et modernisée, de manière à mieux répondre aux besoins d'aujourd'hui. Il avait également promis aux commissions scolaires d'en faire des partenaires respectés en matière de pédagogie, de financement et de gestion scolaire.

Le projet de loi 69 marque une nouvelle étape sur la route balisée d'actes concrets que nous avons suivie ensemble depuis 1985. Dès 1987, le gouvernement, conformément à un engagement pris en 1985, réaménageait les règles budgétaires qui guident la gestion des affaires scolaires. Il offrait aux commissions scolaires de nouvelles règles budgétaires où une place beaucoup plus large était laissée à l'initiative des commissions scolaires et à la souplesse dans les méthodes de gestion. Cette première initiative fut suivie, il y a deux ans, d'une nouvelle mesure assurant que le financement des commissions scolaires serait réalisé à l'avenir à l'intérieur d'un cadre général étalé sur trois ans, de manière à procurer une plus grande stabilité dans la gestion des affaires scolaires. En juillet 1989, la nouvelle Loi sur l'instruction publique adoptée en décembre 1988 entrait en vigueur. Cette loi venait confirmer, en le précisant davantage, le rôle central défini aux commissions scolaires, à titre de dispensatrices majeures des services éducatifs de niveaux primaire et secondaire sur leurs territoires respectifs. Cette réforme d'envergure sera complétée en novembre prochain par l'application qui sera faite pour la première fois de la nouvelle Loi sur les élections scolaires.

Avec le projet de loi 69, nous ouvrons un autre volet majeur de l'aggiornamento des commissions scolaires. Nous abordons de front Is question de leur financement. Sur ce sujei délicat, la loi 107 était demeurée muette, le législateur s'étant borné à reprendre, dans le nouvelle Loi sur l'instruction publique, les dispositions existantes dans l'ancienne loi. Mai: des problèmes aigus se posaient. Les deu> fédérations regroupant les commissions scolaires pour catholiques et les commissions scolaires pour protestants ne se lassaient point de les souligner depuis déjà plusieurs années. Les commissions scolaires formulaient à cet égard deux critiques majeures. Tout d'abord, elles dénonçaient avec vigueur la diminution des ressources réelles mises à leur disposition pour l'accomplissement de leur mission. En second lieu, elles déploraient la situation de dépendance accrue à l'endroit du bon vouloir gouvernemental dans laquelle elles furent plongées par suite de l'adoption, en 1979, de la loi 57, laquelle transférait aux municipalités la quasi-totalité du champ de l'impôt foncier.

Le gouvernement était conscient de ces difficultés. Mais aux prises lui-même avec des contraintes financières multiples, il dut chercher, pendant plus de quatre ans, des avenues de solution. Il aura fallu le sommet de mars dernier sur le financement des commissions scolaires pour qu'un déblocage se produise. À l'occasion de ce somment, convoqué par la Fédération des commissions scolaires catholiques du Québec et l'Association des commissions scolaires protestantes du Québec, le gouvernement avait été invité à faire part de ses intentions. Désigné pour intervenir à ces assises au nom du gouvernement, je fus autorisé à informer les commissions scolaires que des modifications significatives seraient apportées, dès cette année, au mode de financement des commissions scolaires. Je fus également autorisé à préciser que les modifications iraient dans le sens d'une plus grande responsabilisation des commissions scolaires.

La seconde étape de l'opération fut réservée au président du Conseil du trésor. Lors du dépôt

des crédits à l'Assemblée nationale, le 28 mars dernier, ce dernier dévoilait, en effet, la nature des changements arrêtés par le gouvernement. Il annonçait, entre autres, que le gouvernement entendait confier aux commissions scolaires la responsabilité budgétaire du fonctionnement de leurs équipements locaux en échange d'un accès élargi des commissions scolaires au champ de l'impôt foncier. La nouvelle formule de financement prêta, à l'époque, à toutes sortes d'interprétations, souvent contradictoires. J'aurai tantôt l'occasion d'en résumer les implications réelles au plan fiscal et financier.

Pour que puissent se réaliser les modifications annoncées dans le livre des crédits et confirmées, ensuite, dans le discours sur le budget, il fallait, cependant, procéder sans délai à des modifications à la Loi sur l'instruction publique. Tel est précisément l'objet du projet de loi 69. Je tenterai maintenant de résumer le contenu et la portée du projet de loi.

Le projet de loi 69 vient, tout d'abord, modifier l'équilibre établi par la loi 57 de 1979 en matière de financement des institutions politiques locales. En vertu de la loi 57, les commissions scolaires s'étaient vu confinées, sans avoir été même consultées à ce sujet, à une portion de plus en plus étroite du champ de l'impôt foncier. Tandis qu'en 1978-1979, elles percevaient des revenus fiscaux dont la valeur était égale à 1,44 $ par 100 $ d'évaluation, cette part n'avait cessé de décroître par suite de l'application de la loi 57, et, en 1989-1990, elle n'était plus que de 0,11 $. Ce résultat avait été rendu possible par l'effet de la règle voulant que les commissions scolaires soient habilitées, sauf à la suite d'un référendum, à ne toucher que ie plus faible des deux montants suivants sous forme de revenus fiscaux, soit un montant équivalent à un plafond de 6 % sur les dépenses admissibles pour fins de subvention, soit un montant pouvant aller jusqu'à un maximum de 0,25 $ par 100 $ d'évaluation. Elles avaient droit de toucher seulement le plus faible des deux montants. Ça, c'est très important.

Pour compenser les effets négatifs de cette politique sous l'angle de l'égalité des chances, la loi 57 contenait une mesure de péréquation garantissant aux commissions scolaires moins nanties l'accès à un niveau minimum de ressources. Mais cette mesure de péréquation fondée sur le rendement de l'évaluation uniformisée fut conçue de telle manière qu'elle contribua souvent à élargir plutôt qu'à réduire l'écart entre commissions scolaires à l'aise et commissions scolaires moins pourvues. À mesure que les années passaient, la formule de financement définie dans la loi 57 créait un carcan de plus en plus étouffant pour les commissions scolaires. Celles-ci en réclamaient, avec une insistance croissante, le remplacement par une formule plus équitable.

Les commissions scolaires n'étaient pas seules à souffrir des effets de la loi 57. Sous l'empire de cette loi, le gouvernement avait, en effet, été obligé d'assumer des charges financières de plus en plus lourdes envers les commissions scolaires. En 1989-1990, la part des subventions gouvernementales dans les revenus des commissions scolaires était de plus de 92 %. Outre que cette situation créait une dépendance dangereuse des commissions scolaires envers le gouvernement, une dépendance qui menaçait à la longue de mettre en jeu, sinon l'existence même, du moins la liberté des commissions scolaires, elle imposait aussi au gouvernement un fardeau dont le poids était devenu très lourd. Pendant que s'accentuait au Québec ce déséquilibre, une double constatation s'imposait à l'attention du gouvernement et de n'importe quel observateur objectif: d'une part, contrairement aux autres sources de taxation, la propriété foncière était moins lourdement grevée par le fisc au Québec que dans toutes les autres provinces canadiennes et, d'autre part, les commissions scolaires avaient accès dans les autres provinces à une part de l'impôt foncier variant le plus souvent de 25 % à 40 % de leurs revenus, tandis qu'au Québec cette part n'était plus que de 8 %. (17 h 20)

Par les décisions qu'annonçait en mars dernier le président du Conseil du trésor, le gouvernement a voulu réaliser deux objectifs: d'abord, transférer aux commissions scolaires la responsabilité des dépenses consacrées au fonctionnement des équipements scolaires et, deuxièmement, fournir aux commissions scolaires les sources de revenus dont elles auront besoin à cette fin.

Les dépenses que le gouvernement transfère aux commissions scolaires sont les dépenses reliées au fonctionnement des équipements. Ces dépenses embrassent plus précisément l'entretien et les réparations relatifs aux terrains, aux bâtiments, à l'ameublement, au mobilier, à l'appareillage, à l'outillage et au matériel roulant propres à l'enseignement et aux moyens d'enseignement. Elles embrassent aussi l'entretien ménager, c'est-à-dire les activités reliées au maintien de la salubrité et de la propreté dans les immeubles, la consommation énergétique, c'est-à-dire les coûts relatifs au chauffage, à l'éclairage, à la climatisation et à la ventilation des immeubles, et, enfin, la protection et la sécurité, c'est-à-dire les systèmes d'alarme, l'embauche de concierges, de gardiennage, etc. Ces dépenses ne comprennent pas cependant - je pense qu'il faut que ceci soit très clair - la construction et l'agrandissement d'écoles, l'achat de mobilier, d'appareillage et d'outillage, les améliorations et transformations de nature capitalisable et les autres dépenses d'investissement. Toutes ces dépenses continueront, en effet, d'être subventionnées par le gouvernement tout comme les dépenses de fonctionnement encourues au titre des surfaces excédentaires ou de l'éloi-gnement. L'ensemble des dépenses dont la

responsabilité est transférée aux commissions scolaires représente, après actualisation, une somme de 312 000 000 $ pour l'exercice 1990-1991.

Afin de garantir aux commissions scolaires les revenus dont elles auront besoin pour faire face à leurs responsabilités nouvelles concernant les équipements scolaires, le gouvernement a inscrit dans le projet de loi 69 un montant de base - ceci est capital, un montant de base - auquel toute commission scolaire devra avoir accès, soit par la taxation, soit par la péréquation. Les commissions scolaires comptant plus de 1000 élèves auront droit à un montant de base de 500 $ par élève pondéré plus une allocation initiale de 150 000 $. Quant aux commissions scolaires comptant moins de 1000 élèves, elles auront droit à un montant de base de 650 $ par élève pondéré. Pour chaque commission scolaire, le nombre des élèves sera pondéré de manière à tenir compte des charges financières plus lourdes découlant de facteurs comme l'inscription à l'école secondaire, l'inscription en formation professionnelle - ça coûte beaucoup plus cher de former un élève en formation professionnelle que de l'instruire en formation générale - les élèves qui présentent des difficultés d'adaptation et d'apprentissage. Les modalités de cette pondération seront établies par réglementation du gouvernement.

Pour l'année 1990-1991, les facteurs de pondération suivants seront proposés au gouvernement: un élève inscrit en maternelle, 0,50 $; un élève inscrit au primaire, 1 $ - le montant de base, c'est 1 $; ça, c'est l'élève inscrit au primaire - l'élève inscrit en secondaire général, 1,50 $; l'élève inscrit au secondaire professionnel, jeune ou adulte, 2 $; l'élève inscrit à l'éducation des adultes en formation générale, 0,75 $; et l'élève handicapé, 3,50 $. Les montants de base inscrits dans le projet de loi 69 ont été établis à partir du coût total des subventions gouvernementales pour le fonctionnement des équipements scolaires actualisés pour l'année 1990-1991, à partir aussi des revenus fiscaux des commissions scolaires pour l'année 1989-1990 et, enfin, d'une somme ajoutée de 40 000 000 $ dont l'objet est l'accroissement de la marge de manoeuvre des commissions scolaires. Le coût total des montants de base ainsi établis a été réparti en fonction de la clientèle pondérée de chaque commission scolaire.

Comment les commissions scolaires pourront-elles se procurer les revenus dont elles auront besoin pour financer les dépenses reliées au fonctionnement de leurs équipements, dont elles seront désormais responsables? La réponse à cette question se trouve, comme il se doit, dans le projet de loi 69. En premier lieu, les commissions scolaires se verront attribuer un accès élargi à l'impôt foncier. Sous la loi 57, les commissions scolaires ne pouvaient se procurer, sous forme de revenus fiscaux, que le plus faible des deux montants suivants, soit 6 % de leurs dépenses admissibles à des fins de subvention d'équilibre ou un maximum de 0,25 $ de taxe par 100 $ d'évaluation.

Une fois que le projet de loi 69 sera devenu loi, les commissions scolaires seront habilitées à recourir à l'impôt foncier pour se procurer des revenus équivalents au seuil défini par les montants de base inscrits dans la loi, et ce, jusqu'à concurrence de 0,35 $ par 100 $ d'évaluation. Si le seuil défini par les montants de base, c'est-à-dire le nombre des élèves pondérés multiplié par 500 $, dans le cas d'une commission scolaire comptant plus de 1000 élèves, si ce seuil défini par les montants de base est atteint par un niveau de taxation inférieur au maximum de 0,35 $ par 100 $ d'évaluation, la commission scolaire ne sera pas autorisée à dépasser ce niveau de taxation.

Si, au contraire, le seuil défini par les montants de base n'est pas atteint par un niveau de taxation égal à 0,35 $ par 100 $ d'évaluation, la différence entre le produit de l'impôt foncier et le seuil défini par les montants de base sera versée à la commission scolaire à l'aide d'une formule de péréquation à la fois nouvelle et plus simple dont le financement sera assuré par le gouvernement.

La formule actuelle de péréquation tient compte du rendement de l'impôt foncier normalisé. Au dire de la Fédération des commissions scolaires catholiques du Québec, laquelle en a fait à plusieurs reprises la démonstration irréfutable, la formule actuelle engendre des inéquités prononcées d'une commission scolaire à l'autre. Sous l'empire de cette formule, des écarts variant de 3 % à 10 % ont été observés dans le niveau des revenus autonomes des commissions scolaires.

La nouvelle formule de péréquation est, au contraire, très simple, très facile d'application et plus équitable. À toute commission scolaire, elle garantira, en effet, un niveau de revenus autonomes égal au seuil de ressources auquel lui donneront droit les montants de base définis dans la loi. Lorsqu'il sera établi que, sur la base d'un taux de taxation de 0,35 $ par 100 $ d'évaluation, la commission scolaire aurait accès à des revenus inférieurs à ceux que définissent les montants de base, la commission scolaire aura droit à une subvention de péréquation égale à la différence entre les deux montants, et ce, même dans les cas où la commission scolaire aurait décidé de se satisfaire d'un taux de taxation inférieur à 0,35 $ par 100 $ d'évaluation.

Lorsque j'ai laissé entrevoir certains changements aux commissions scolaires en mars dernier, je pris soin de les prévenir que les changements envisagés par le gouvernement, quelles qu'en dussent être la nature et l'ampleur, ne sauraient entraîner à court terme un accroissement majeur de la marge de manoeuvre financière des commissions scolaires. Cet avertisse-

ment s'imposait en raison des contraintes financières dont doit continuellement tenir compte le gouvernement par suite du niveau d'endettement très élevé auquel il doit faire face. Il permet de mieux situer la marge de manoeuvre accrue dont bénéficieront les commissions scolaires à la suite des changements que vient confirmer le projet de loi 69. La marge de manoeuvre accrue des commissions scolaires sera de 40 000 000 $. Elle découlera de l'effet combiné des nouvelles responsabilités financières des commissions scolaires, des ressources fiscales accrues auxquelles elles auront accès et de la nouvelle formule de péréquation.

La valeur des changements que nous proposons devra être mesurée à l'aide de critères vérifiables. En particulier, par l'examen des résultats concrets qui en découleront pour les commissions scolaires, par l'observation des charges fiscales accrues qu'ils entraîneront pour les citoyens et par les conséquences qui en découleront pour l'équilibre général des finances publiques au Québec. (17 h 30)

En ce qui touche les commissions scolaires, le critère le plus sûr qu'on puisse emprunter, c'est celui de la valeur nette des revenus autonomes qu'elles toucheront de l'opération par rapport à ceux dont elles eussent disposé sous la formule actuelle de financement. Il faut aussi vérifier la valeur de ces revenus autonomes non seulement pour l'ensemble des commissions scolaires, mais aussi pour chaque commission scolaire individuelle. Pour l'ensemble des commissions scolaires, la marge de manoeuvre accrue sera de 40 000 000 $, comme je viens de l'indiquer. Il y a là un gain net très appréciable, car il représente plus de 12 % de la valeur totale des dépenses transférées aux commissions scolaires. Ce n'est pas négligeable. Une marge de manoeuvre accrue de 12 % par rapport aux dépenses qui sont transférées, je pense que ça doit être souligné avec vigueur. Pour chaque commission scolaire, les revenus par élève pondéré auxquels donnera accès la nouvelle formule fourniront la mesure la plus concrète de l'impact des changements envisagés. Soulignons en premier lieu que près de 40 % des commissions scolaires retireront des revenus autonomes accrus de plus de 50 $ par élève pondéré, par suite de l'application de la nouvelle formule. En outre, un autre 45 % des commissions scolaires retireront des revenus autonomes accrus allant de 1 $ à 50 $ par élève pondéré. Pour ces dernières commissions scolaires, la nouvelle formule représente un gain. Quant aux commissions scolaires qui sortiraient perdantes du transfert envisagé, il y en a une trentaine, M. le Président, le gouvernement a prévu à leur intention un programme de subventions de transition dont les effets pourront s'étaler sur une période de deux à quatre ans, de manière à réduire au minimum les effets négatifs des changements envisagés et à leur donner le temps de se rattraper, à l'aide de la valeur accrue que prendra la propriété foncière et des revenus accrus qui en découleront inévitablement. Pour la plupart des commissions scolaires dites perdantes, le manque à gagner sera inférieur à 25 $ par élève pondéré et sera compensé, pendant la période de transition, par des subventions permettant d'assurer - et ceci doit être souligné clairement - que chaque commission scolaire sans exception aura accès au minimum à des revenus autonomes accrus d'au moins 5 %. Si l'on traduit en revenus autonomes par élève pondéré les ressources propres auxquelles auront accès les commissions scolaires, on constate que, pour la très grande majorité d'entre elles, les revenus par élève pondéré varieront de 510 $ à 550 $. On remarque aussi que les commissions scolaires qui auront accès à des revenus autonomes supérieurs à la moyenne seront surtout les commissions scolaires comptant un nombre d'élèves relativement moins élevé. On remarque que les commissions scolaires comptant 1000 ou 1200 élèves ou moins retireront des revenus autonomes accrus par élève pondéré qui seront plus considérables, et ça se comprend parce qu'elles n'ont pas la même marge en matière d'économie d'échelle. Les commissions scolaires à forte clientèle, celles qui ont plus de 10 000 élèves chacune, disposeront par contre de revenus autonomes de l'ordre de 505 $ à 515 $, soit des montants inférieurs à la moyenne. Ces résultats témoignent que la nouvelle formule permettra une redistribution équitable des ressources. La nouvelle formule procurera aux commissions scolaires, pour la gestion de leurs équipements scolaires, des ressources adaptées à la taille et aux besoins propres de chacune.

Ces données que je viens de citer constituent la réponse la plus éloquente que l'on puisse offrir à ceux qui prétendent que la nouvelle formule engendrera des inégalités accrues entre les commissions scolaires et entre les régions. Si elle engendre des inégalités ce seront des inégalités favorables aux commissions scolaires plus modestes, aux régions moins pourvues, et des inégalités, dont les régions mieux pourvues devront surtout porter le poids. En matière de taxation, il subsistera évidemment des écarts significatifs dans le niveau de l'imposition foncière à travers le Québec, tandis que dans certaines régions la grande majorité sinon la totalité des commissions scolaires devront percevoir une taxe équivalente au maximum de 0,35 $ par 100 $ d'évaluation pour atteindre le seuil de revenus défini par les montants de base. Le taux de taxation requis pour atteindre ce seuil demeurera inférieur, dans d'autres régions, au maximum de 0,35 $ par 100 $ d'évaluation défini dans la loi. Mais, en contrepartie, l'augmentation du compte de taxes sera généralement plus faible dans les régions où le niveau de taxation passera à 0,35 $ par 100 $ d'évaluation, et elle sera plus élevée dans les régions où le

taux de taxation demeurera inférieur au maximum de 0,35 $.

Pour prendre deux exemples, en Gaspésie, le taux actuel de taxation est de 0,25 $. Ce taux passera à 0,35 $, soit une augmentation de 40 % du compte de taxes sur une maison unifamiliale de valeur moyenne. À Montréal, par contre, le taux de taxation actuel est de 0,068 $, 0,06 $ seulement par 100 $ d'évaluation; il passera à 0,1544 $ par 100 $ d'évaluation, soit une augmentation du compte de taxes de l'ordre de 127 %: 40 % en Gaspésie, 127 % dans les comtés de la région de Montréal.

Si l'on examine la hausse du fardeau fiscal en dollars plutôt qu'en pourcentage - et c'est ce qui compte pour le contribuable au bout de la ligne, il veut bien savoir combien il sera appelé à débourser sous forme de taxes - on arrive à des constatations non moins intéressantes. Dans le comté de Bonaventure, par exemple, le compte de taxes sur une maison unifamiliale de valeur moyenne augmentera d'une trentaine de dollars. Dans un comté du nord-est de Montréal, et le comté que j'ai à l'esprit est celui de Bourassa, l'augmentation sera voisine de 100 $. La différence s'explique évidemment par les écarts prononcés dans la valeur des propriétés. On soulignera que les augmentations envisagées sont loin d'être négligeables, et je n'en disconviens aucunement. Mais nous ne saurions continuer d'inviter le gouvernement à procurer les ressources nécessaires aux institutions scolaires et de l'inviter à assurer en même temps un équilibre plus satisfaisant dans les finances publiques, sans consentir à des ajustements importants dans les charges respectives du gouvernement, des institutions et des citoyens eux-mêmes.

Les deux objectifs que l'on souhaiterait pouvoir poursuivre en même temps sont chacun nobles, ont chacun une valeur indiscutable, mais ils ne sauraient être atteints, à moins que chacun, à son niveau propre, n'accepte de faire sa juste part. Qui pourra prétendre que l'effort demandé à la population est démesuré quand l'on songe à la valeur inestimable des services que les écoles publiques et les commissions scolaires rendent à la population du Québec et quand l'on songe que l'augmentation envisagée du fardeau fiscal restera bien inférieure au coût que des milliers de citoyens encourent chaque année pour le tabac ou l'alcool, par exemple.

Ainsi que le gouvernement l'a signalé à maintes reprises, l'augmentation moyenne du compte de taxes sera d'environ 100 $ par propriété pour l'ensemble du Québec. La hausse sera plus prononcée dans les centres urbains où la valeur de la propriété foncière a connu, ces dernières années, une progression accélérée. Elle sera, par contre, plus modeste dans les régions périphériques où la valeur de la propriété a augmenté beaucoup moins rapidement.

En outre, le remboursement accordé par le gouvernement aux contribuables à revenu modes- te, ce remboursement qui est accordé au titre de l'impôt foncier, continuera de s'appliquer; il s'appliquera même, à compter de cette année, pour un nombre beaucoup plus élevé de contribuables à la suite des ajustements annoncés par le ministre des Finances dans le dernier discours sur le budget concernant les seuils d'admissibilité. Je souligne que les locataires à revenu modeste ont également droit à semblable remboursement de manière qu'un locataire à revenu modeste qui se verrait transférer, comme on peut s'y attendre, une partie de l'augmentation de taxes découlant des changements envisagés aura droit, en compensation, à un remboursement fiscal à la fin de l'année. Il en ira de même du rentier à revenu très modeste dont le seul bien est sa propriété. Ce rentier aura droit, comme actuellement et même plus qu'actuellement, à un remboursement d'impôt foncier qui viendra diminuer et même annuler, dans certains cas, le fardeau fiscal accru découlant des mesures dont nous avons parlé. (17 h 40)

Le gouvernement a souligné à maintes reprises sa volonté de contribuer, par les mesures envisagées, à une plus grande responsabilisation des commissions scolaires. On ne saurait invoquer de témoignage plus fiable quant à la valeur des mesures annoncées par le gouvernement que celui des commissions scolaires elles-mêmes. Le langage emprunté à cet égard par les porte-parole des commissions scolaires ne prête à aucune équivoque, à aucune distorsion de leur pensée véritable.

De toutes les réactions auxquelles a donné lieu l'annonce des changements envisagés, les plus explicites, les plus éloquentes, les plus responsables et les plus représentatives sont celles qu'a formulées la Fédération des commissions scolaires catholiques du Québec par la voix de son président général, M. Guy d'Anjou. Celui-ci s'est prononcé sans ambiguïté en faveur des mesures annoncées par le gouvernement. Je pourrais citer, à ce sujet, de nombreux textes, mais les commentaires les plus clairs nous viennent d'une lettre que le président de la Fédération des commissions scolaires catholiques du Québec adressait le 19 avril dernier au premier ministre.

Dans cette lettre à M. Bourassa, M. Guy d'Anjou réfutait, une à une, les principales objections soulevées à rencontre du projet de réforme. "Après avoir souligné que les mesures annoncées le 28 mars par le président du Conseil du trésor constituent un juste retour des choses - je cite M. d'Anjou - et sont - je le cite de nouveau - ni plus ni moins que la pleine reconnaissance du caractère local des services rendus par les commissions scolaires et de leur compétence administrative en la matière." M. d'Anjou concluait ainsi, et je cite: "Les propositions de réforme du gouvernement en matière de financement scolaire vont dans le sens d'une

gestion plus efficace des équipements d'éducation primaire et secondaire et sont donc dans l'intérêt de la collectivité sans toutefois pénaliser indûment les contribuables locaux." Fin de la citation.

Parmi les commissions scolaires - j'ai parlé tantôt d'une trentaine - qui ne retireront guère de gains monnayables, dans l'immédiat, des changements annoncés, certaines ont exprimé leur inquiétude au sujet de la réforme que vient confirmer le projet de loi 69. À ces commissions scolaires, je rappelle qu'aucune commission scolaire ne sera perdante financièrement et que toutes, sans exception, retireront des avantages considérables au plan politique plus large qui doit nous préoccuper tous. Après avoir vécu 10 années de marginalisation fiscale, financière et politique, les commissions scolaires obtiennent en effet, par le projet de loi 69, un juste rééquilibrage des forces qui n'enlève rien à d'autres institutions, mais qui leur permet d'envisager l'avenir avec une confiance accrue. Elles se voient confirmées financièrement et fiscalement dans le rôle qu'a déjà défini pour elles au plan pédagogique et administratif la nouvelle Loi sur l'instruction publique. Elles sont appelées à jouir d'une marge de responsabilité accrue dont l'effet sera, je le souhaite vivement, une gestion sans cesse plus efficace des affaires scolaires, une participation accrue des citoyens à la gestion de l'éducation et une plus grande estime de la population pour les services éminents que rendent les commissions scolaires.

Parmi les implications des changements annoncés, je ne saurais passer sous silence celles qui se relient à l'équilibre général des finances gouvernementales et celles qui affectent plus immédiatement les municipalités.

À l'annonce des décisions gouvernementales, les municipalités, par la voix des deux unions qui les regroupent, ont réagi avec vigueur. La loi 57 les avait habituées à considérer que le champ de l'impôt foncier leur était, à toutes fins utiles, acquis d'une manière pratiquement exclusive. Les réaménagements arrêtés par le gouvernement à cet égard nous rappellent, cependant, que les décisions concernant l'affectation des champs de taxation appartiennent en dernière analyse au gouvernement et à l'Assemblée nationale. De toutes les provinces canadiennes, le Québec était la seule où les commissions scolaires s'étaient vues graduellement exclues du champ de l'imposition foncière. Il était aussi la province où la ponction fiscale exercée sur la propriété foncière était la moins élevée, en raison surtout du fardeau très lourd que fait peser sur le Trésor public une dette qui a tragiquement augmenté sous l'ancien gouvernement. Le gouvernement actue! devait en outre faire face à des contraintes très serrées pour l'établissement des prévisions budgétaires de l'exercice 1990-1991. Ayant déjà réussi, par ailleurs, au cours des quatre dernières années, à ramener les autres sources majeures d'imposition à un niveau de rendement concurrentiel par rapport aux autres provinces canadiennes, et particulièrement par rapport à l'Ontario, le gouvernement ne voulait ni ne pouvait envisager de recréer en ce domaine les déséquilibres coûteux auxquels il fut remédié par les trois budgets antérieurs du ministre des Finances.

Dans ce contexte extrêmement serré, le gouvernement a conclu qu'une ponction pouvait et devait être exercée sur l'impôt foncier. Les moyens qu'il a choisis pour le faire étaient d'autant plus indiqués qu'ils permettront de procurer aux commissions scolaires, outre les revenus dont elles auront besoin pour pourvoir elles-mêmes au financement du fonctionnement des équipements, permettront de leur procurer en outre l'absence de toute compression budgétaire pour l'exercice actuel et l'indexation de toutes leurs dépenses autres que salariales pour l'exercice 1990-1991; et à cela vient s'ajouter en plus une marge de manoeuvre accrue de 40 000 000 $ pour l'ensemble des commissions scolaires en 1990-1991.

Le moyen retenu par le gouvernement permettra également de réduire de 191 000 000 $ pour l'année 1990-1991 et de 272 000 000 $ pour l'année 1991-1992 les subventions de fonctionnement versées aux commissions scolaires. Cette diminution des subventions gouvernementales n'enlève rien aux commissions scolaires, bien au contraire, car celles-ci disposeront dès cette année d'une marge financière accrue pour faire face à leurs dépenses. Elle permettra en outre au gouvernement d'accroître les services fournis à la population dans d'autres domaines, tout en maintenant le déficit de fonctionnement du gouvernement à un niveau très proche de celui de la dernière année.

En ce qui touche les municipalités, il est vrai que le choc produit par les mesures annoncées le 28 mars dernier a été brutal. Il est également vrai que le contexte dans lequel le gouvernement a dû agir ne se prêtait pas à des négociations en bonne et due forme. On comprend, dans ces circonstances, que la réaction des municipalités -ait été très vive. Mais une fois passé l'effet du choc initial, il faut bien se rendre compte que les mesures annoncées par le gouvernement n'ont pas été révoquées et ne sauraient l'être pour l'exercice budgétaire 1990-1991. Il y a également lieu de présumer, à moins d'avis contraire, que le gouvernement, qui a voulu instituer des modifications aussi importantes dans le champ de la fiscalité scolaire, qui a assumé les risques politiques inhérents à cet exercice, devait avoir à l'esprit des changements dont la nature et les effets ne seraient pas seulement transitoires, mais seraient durables.

Dans ce contexte, il faut adopter une attitude de réalisme plutôt que de rancoeur. De l'expérience des dernières semaines, je retiens, pour ma part, les éléments suivants. Tout

d'abord, l'accès élargi des commissions scolaires à l'impôt foncier ne diminuera en rien le niveau des ressources fiscales que percevaient les municipalités avant les récentes mesures gouvernementales. Dans l'immédiat, aucune municipalité ne souffrira de perte de revenu par suite des décisions du gouvernement. (17 h 50)

En second lieu, en ce qui touche le rôle et l'aménagement des pouvoirs locaux, l'expérience des dernières semaines nous a rappelé avec force la place très importante des municipalités dans le paysage politique québécois, et le gouvernement reconnaît cette place sans aucune espèce de réticence. Mais les événements des dernières semaines nous ont également rappelé que les commissions scolaires sont elles aussi un élément essentiel de notre tradition politique locale et qu'elles sont bien davantage qu'un simple relai administratif du ministère de l'Éducation.

Troisièmement, en ce qui touche les changements qui pourraient être apportés à l'avenir à la fiscalité scolaire et municipale, nous serons tous plus conscients que jamais, à la suite de l'exercice des dernières semaines, de l'étroite interaction entre ces deux types de fiscalité et de la nécessité d'une concertation plus grande que par le passé entre le gouvernement, les municipalités et les commissions scolaires. Je me réjouis, à cet égard, de la reprise prochaine des échanges entre les municipalités et le gouvernement. Je me réjouis également de la formation récente, par le premier ministre, d'un comité ministériel qui sera appelé à se pencher sur ces questions et où seront appelés à siéger tous les ministres intéressés, y compris le ministre de l'Éducation et le ministre des Affaires municipales. Voilà une façon de procéder qu'on ne retrouvait pas dans la méthode de travail qui inspira la loi 57 en 1979.

Quatrièmement, en ce qui touche les rapports entre les commissions scolaires et les municipalités, nous savons tous que des liens de collaboration de plus en plus nombreux et intéressants se sont établis ces dernières années entre ces deux pouvoirs locaux, surtout dans le domaine des équipements communautaires où, de plus en plus souvent, commissions scolaires et municipalités unissent leurs efforts afin de fournir à la population des services de qualité. Chaque fois que le gouvernement a été invité à participer à la réalisation de projets issus de pareils efforts de collaboration entre les commissions scolaires et les municipalités, il a adopté une attitude ouverte et positive. Ces expériences de collaboration entre commissions scolaires, municipalités et autres corps communautaires ont permis d'ajouter, dans plusieurs municipalités du Québec, des équipements communautaires de première qualité qui n'auraient pas été concevables en l'absence d'une participation de tous ces éléments soutenus par le complément finan- cier qu'apportait, à son niveau, le gouvernement. Cette collaboration du ministère de l'Éducation à la réalisation de projets de concertation impliquant tous les agents d'un milieu - je pense que plusieurs députés dans cette Chambre se souviennent d'expériences qui ont été réalisées chez eux dans ce sens, tant du côté ministériel que du côté de l'Opposition - la collaboration du ministère de l'Éducation à des projets de cette nature demeurera acquise pour l'avenir. Je la considère comme un des plus beaux acquis des dernières années. J'ai été heureux de recevoir, encore ces jours derniers, M. le Président, des lettres d'autorités municipales m'assurant, par-delà toute la controverse des dernières semaines, qu'elles sont heureuses de participer à des projets de cette nature. J'en recevais justement une de la région que représente le député de Beauharnois, pas plus tard que ce matin.

Nous avons la chance d'avoir au Québec un système scolaire qui établit un juste équilibre entre les responsabilités dévolues à l'autorité centrale, c'est-à-dire au ministère de l'Éducation, et celles qui sont confiées à des commissions scolaires, formées de membres élus au suffrage universel par leurs concitoyens. À ces deux paliers de responsabilités, la loi 107 est vanue ajouter une consécration plus nette du rôle propre de l'école dans le bon fonctionnement de notre système scolaire et de la participation nécessaire, voire indispensable, des parents dans le bon fonctionnement de l'école.

La politique du gouvernement a toujours été, et elle demeure, de viser à maintenir et à renforcer cet équilibre démocratique extrêmement impressionnant. Le gouvernement a maintes fois exprimé ses convictions quant à la nécessité d'un ministère de l'Éducation fort et doté de pouvoirs suffisants pour assurer la direction efficace du système d'enseignement. Le gouvernement prouve également, par des gestes concrets, sa foi dans le rôle indispensable des commissions scolaires en matière d'éducation, un rôle qui doit s'exercer non seulement par l'accroissement des subventions en provenance de Québec, mais par une implication plus substantielle et plus directe des commissions scolaires elles-mêmes dans le financement de leurs dépenses de fonctionnement.

Le projet de loi 69 vise à préciser et à renforcer le rôle des commissions scolaires dans un secteur où il avait subi, depuis 10 ans, une dangereuse érosion. Ce redressement répond à un besoin maintes fois exprimé par les commissions scolaires. Il traduit aussi une conviction profonde du gouvernement. Je souhaite, en conséquence, que le projet de loi 69 reçoive l'appui de l'Assemblée nationale, car ce projet de loi n'a pas d'autre but que l'amélioration de la démocratie scolaire et la promotion d'un équilibre plus sain dans la gestion des finances publiques au Québec.

Le Vice-Président (M. Cannon): Merci, M. le ministre de l'Éducation. Je suis maintenant prêt à

reconnaître le prochain intervenant, M. le leader adjoint de l'Opposition.

M. Gendron: Oui, M. le Président, compte tenu de l'heure, je demanderais à ce moment-ci la suspension du débat.

Le Vice-Président (M. Cannon): Alors, est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Cannon): Adopté. Nous allons suspendre les travaux jusqu'à 20 heures.

(Suspension de la séance à 17 h 56)

(Reprise à 20 h 1)

Le Vice-Président (M. Cannon): Veuillez vous asseoir, s'il vous plaît. M. le député d'Abi-tibi-Ouest et leader adjoint de l'Opposition.

M. François Gendron

M. Gendron: Oui, M. le Président. Suite au discours du ministre porteur du projet de loi 69, loi intitulée Loi modifiant la Loi sur l'instruction publique et la Loi sur l'enseignement privé, il m'apparaît fondamental, prioritaire et d'une très grande importance de donner ce que j'appellerais, moi en tout cas, l'envers de la médaille qui a été présentée par le ministre de l'Éducation.

J'ai aussi le sentiment - ça fait déjà 14 ans que je suis en cette Chambre - de discuter, ce soir, d'un projet de loi majeur, à conséquences graves en termes de renversement d'un vécu sur la fiscalité municipale des 10 dernières années, lequel vécu ne peut se transformer du revers de la main, comme le ministre l'a indiqué, sans qu'il y ait des conséquences sérieuses, graves, tout autant pour les municipalités du Québec, les MRC du Québec, les commissions scolaires du Québec, le tissu rural du Québec que pour nos traditions historiques sur certaines décisions prises suite à de très longs échanges, à de très longs débats, ce que nous appelons communément des pactes majeurs importants, des réformes qui engagent, dans le fond, toute la société.

Le projet de loi 69 intitulé, comme je l'ai mentionné tantôt, Loi modifiant la Loi sur l'instruction publique... est, en soi, un faux titre uniquement pour dire: Dorénavant, l'État se désengage de sa responsabilité première d'assumer Pentièreté ou la plus grande partie des coûts en éducation au Québec, puisque la question de l'éducation au Québec doit être une question nationale. Si la santé au Québec est une question nationale, l'éducation doit être une question nationale. Je l'ai dit souvent en cette Chambre, je vais le répéter, je ne pense pas être quelqu'un qui ait l'habitude de parler des deux côtés de la bouche. Et, en ce sens-là, il est impossible, je pense, de titrer le projet de loi 69 comme s'il s'agissait d'une simple modification à la Loi sur l'instruction publique, alors que, dans le fond, il s'agit de modifier le régime fiscal que nous connaissons au Québec depuis les 10 dernières années.

C'est un projet de loi qui vient élargir le pouvoir de taxation des commissions scolaires de même que celui du Conseil de l'île de Montréal, parce que lui aussi a un pouvoir de taxation, en fixant de nouvelles limites à ce pouvoir. Et sur le plan technique, il faut quand même que les gens comprennent une chose, ça peut être un peu ardu pour des non-initiés, mais je me dois le plus simplement que je pense, en tout cas, être en mesure de l'illustrer de la façon suivante. La réforme dirait dorénavant, en termes de nouvelles limites, 0,35 $ du 100 $ de l'évaluation au lieu de 0,25 $ uniformisé des immeubles imposables inclus dans l'assiette foncière des commissions scolaires. Et ce montant-là est établi par un jeu d'opérations comptables, un jeu d'opérations mécaniques que je n'ai pas l'intention, moi, de détailler, le jeu d'opérations de la mécanique qui fait que les commissions scolaires pourraient aller chercher tant de millions de plus dans le champ d'impôt foncier scolaire. On aura l'occasion, lors des étapes subséquentes si jamais on réussit à les franchir, d'expliquer la mécanique. Moi, je veux rester sur le principe. Et le principe, il n'est pas compliqué, c'est de chambouler le régime que nous connaissions depuis les 10 dernières années. Le projet de loi fixe également de nouvelles règles relatives à la subvention de péréquation versée aux commissions scolaires dont les ressources fiscales sont jugées insuffisantes. Après avoir situé le sujet d'un projet de loi, lorsqu'on a la responsabilité d'en faire l'étude au niveau du principe, il est important quand même de le placer dans quel contexte historique ce projet de loi nous arrive-t-il par la tête? Parce qu'il nous arrive par la tête d'une façon tout à fait irrespectueuse des traditions de conciliation, d'échanges, de longues discussions avec l'ensemble des intervenants impliqués. Afin de mieux comprendre et de mieux saisir toute la portée de toutes les implications du présent projet de loi, il est utile de rappeler certains faits ou certains événements qui ont présidé à sa présentation catastrophique. Quelques mots sur le pacte fiscal de 1979, parce que tout part de là. La loi fiscale, qui fut adoptée le 21 décembre 1979, modifiait de façon importante le régime fiscal des municipalités du Québec de même qu'elle réduisait de façon considérable le pouvoir de taxation des commissions scolaires. Ça, on ne nie pas ça, c'est un fait parce qu'il faut parler franc. C'est la conférence Québec-municipalités de juin 1978 qui avait préludé à l'accord de 1979. Cette consultation avait elle-même été précédée du rapport Bélanger-Castonguay, dans les années

soixante, et du rapport Tremblay, dans les années cinquante. Donc, quand on a accouché de cette réforme en 1979, ce n'était pas quelque chose qu'on avait concocté en quelques semaines, comme c'est le cas avec la loi que le ministre nous présente ce soir. C'était une longue réflexion qui avait amené à la conclusion qu'au Québec, le champ foncier ne pouvait pas véritablement être occupé par toutes sortes de partenaires.

Le problème qui se posait alors aux municipalités était le suivant. Leurs dépenses augmentaient rapidement à cause d'une urbanisation intensive. C'est normal parce qu'on était dans un Québec en progression, en développement, dans le temps, ce qui n'est plus le cas aujourd'hui malheureusement, alors que leurs revenus n'augmentaient malheureusement pas au même rythme. Déjà, à cette époque, les revenus des municipalités provenaient en grande partie de l'impôt foncier qu'elles se partageaient avec les commissions scolaires. Cette situation amenait le gouvernement à compenser les pertes municipales par des subventions qui ne cessaient d'augmenter tout comme la dépendance. Et n'oubliez pas que, lorsqu'un gouvernement maintient un régime de subventions, il maintient ce que je viens de dire, un régime de dépendance et de soumission, et on l'a vécu. Je n'ai pas envie de vous rappeler ce dont, moi-même, j'ai eu connaissance comme maire, comme conseiller municipal d'une toute petite municipalité. Nous avions droit à quelque chose pour autant que, collectivement, nous faisions le sacrifice de monter un bon dossier, de se taper une dépense d'une couple de 1000 $, à trois ou quatre conseillers et le maire, pour se rendre à Québec et venir pleurnicher, chez l'un, chez l'autre, dépendamment des couleurs politiques. Dépendamment de plusieurs situations conjoncturelles, nous retournions avec notre petit bonheur ou, de temps en temps, nous retournions avec notre petite récompense, encore là, dépendamment si on avait une bonne calotte rouge ou une bonne calotte bleue, parce que c'est de même que ça fonctionnait.

Deux options s'offraient au gouvernement à ce moment-là. La première impliquait l'absorption graduelle des fonctions traditionnellement des municipalités. Cela conduisait ultimement à la prise en charge par le gouvernement de certaines fonctions locales. Ou la seconde option, celle qu'au Parti québécois, on a toujours choisie, celle de l'autonomie, celle de la responsabilité, celle de l'indépendance... (20 h 10)

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Gendron: Oui, celle de l'indépendance. Il ne faut pas avoir peur des mots. Nous, on pense que le pouvoir municipal, étant plus près de Québec que d'Ottawa, il est beaucoup plus normal de lui permettre qu'il fasse ses propres choix, qu'il prenne ses propres décisions et, pour ce faire, il fallait réformer la fiscalité et c'est ce que nous avons fait.

Lors de l'adoption des principes de la réforme de la fiscalité, le gouvernement transféra aux municipalités le champ de l'impôt foncier scolaire normalisé. Le gouvernement reconnaissait ainsi que l'impôt foncier local ne pouvait servir à financer les dépenses de l'éducation au niveau local puisque la quantité et la qualité, et j'y reviendrai tantôt, des services fondamentaux en éducation - et ça, c'est un point clé, c'est un point majeur que, de l'autre côté, vous devriez comprendre - ne devraient pas dépendre de la richesse foncière d'une municipalité.

Le gouvernement reconnaissait également qu'il avait la responsabilité de répartir équi-tablement le financement de l'éducation et qu'il devait s'assurer que les besoins fondamentaux des Québécois et des Québécoises étaient satisfaits partout en vertu des mêmes règles, en vertu des mêmes normes, en vertu des mêmes dispositions. Ce n'est pas parce que nous sommes à Val-Saint-Gilles, une petite municipalité à 900 kilomètres et quelques de Québec, que les jeunes de Val-Saint-Gilles n'ont pas droit à une éducation de même qualité que ceux de Westmount, que ceux de Mont-Royal, que ceux de n'importe Quelle partie du Québec.

Au-delà de cet engagement, les commissions scolaires étaient libres d'offrir des services particuliers. C'est pourquoi, en 1979, contrairement à ce qu'on a véhiculé, on avait décidé de conserver aux commissions scolaires une part de l'impôt foncier, et cette part, en principe, devait servir à financer - écoutez le terme - les dépenses qu'on appelait, à l'époque, non éligibles ou non admissibles, suivant l'expression, aux subventions du gouvernement et répondre aux besoins spécifiques de chacune des régions. Cet impôt a été délimité à un taux maximal de 0,25 $ par 100 $ d'évaluation ou à 6 % de la dépense nette de chaque commission scolaire. La législation a fait en sorte que l'impôt foncier des commissions scolaires ne contribue, depuis ce temps, que pour 2 % à 6 % de leurs revenus.

Si nous en sommes rendus à la loi que le ministre vient de déposer, c'est qu'il y a des règles qui n'ont pas joué dans le sens qu'elles devaient jouer. Et pour ce faire, je suis obligé de vous parler du sous-financement des commissions scolaires parce que c'est exact que les commissions scolaires sont sous-financées. Vous parlez à quelqu'un qui connaît le monde de l'éducation, qui a vécu dans le monde de l'éducation, qui est proche du milieu de l'éducation, qui a eu la chance quelque temps d'être ministre de l'Éducation, et je suis en mesure de dire que, lorsque les commissions scolaires du Québec prétendent qu'elles sont sous-financées, elles ont raison. Ce n'est pas là-dessus qu'il y a un désaccord.

Le gouvernement n'a pas tenu ses engagements. Le gouvernement, quelque gouvernement

que ce soit, n'a pas tenu ses engagements, puisque depuis quelques années le sous-financement chronique des commissions scolaires les a amenées à puiser dans leurs revenus provenant de l'impôt foncier pour couvrir des dépenses dites admissibles et payer les coûts des décisions prises par l'État: politique d'éducation, régime pédagogique, application de lois et de règlements comme la loi sur l'accès à l'information ainsi que celle sur la santé et la sécurité du travail.

Cette situation, qui aurait dû être corrigée dès le départ, a empiré jusqu'au résultat que l'on connaît aujourd'hui. Et le résultat que l'on connaît aujourd'hui, c'est un document dont tout le monde pourrait prendre connaissance, qui fait on ne peut plus clair qu'avec l'enseignement régulier, préscolaire, primaire et secondaire, avec les changements au niveau de l'enseignement professionnel, avec les mesures particulières à l'enseignement, avec les services complémentaires à l'élève, avec les moyens d'enseignement réduits, comme les bibliothèques... Depuis quelques années le gouvernement a dit aux bibliothèques: Vous trouvez qu'elles sont désuètes, vos bibliothèques, vous avez raison, mais nous on ne vous donne pas d'argent pour les modifier. Ça c'est le gouvernement actuel. On ne vous donne pas d'argent pour améliorer le sort de vos bibliothèques.

Au niveau de la lourdeur administrative... Et là je cite un document de la fédération: Notre enquête auprès des commissions scolaires a de plus révélé que 85 % des commissions scolaires interrogées considèrent que les ressources humaines et financières qu'elles affectent pour répondre - écoutez bien ça - au diktat bureaucratique dont elles n'ont pas le contrôle, hypothèquent les services dont aurait besoin leur clientèle. Et encore, ce pourcentage grimperait si les commissions scolaires se conformaient entièrement aux exigences bureaucratiques qu'elles ne considèrent pas toutes justifiées, soit dit en passant.

Et à titre d'exemple, elles mentionnent toutes les belles exigences de cet extraordinaire ministre centralisateur. Les contrôles lourds et fréquents exigés par le ministère de l'Éducation à propos des effectifs jeunes, mais surtout du côté des adultes. Imaginez, une déclaration mensuelle de clientèles parce que c'est un moyen de contrôler le financement. Les contrôles du personnel. Exemple: Une foule de renseignements sont demandés pour le système PERCOS. Les dérogations au régime pédagogique, j'en parlais pas plus tard qu'avant-midi. L'âge d'admission, il y a des coûts à ça parce qu'il faut que des professionnels de l'enseignement des commissions scolaires fassent l'évaluation si le jeune a assez de capacité pour être admis, même s'il n'a pas l'âge de fréquentation, selon la règle établie; on appelle ça les dérogations. Les annexes aux états financiers. Les commissions scolaires en sont presque rendues à hypothéquer la pédagogie pour rencontrer les impératifs bureaucratiques de ce gouvernement-là.

Ils ont fait également une série d'exigences sur les exigences légales. Donnons des exemples: Loi sur les élections scolaires. Il y a un décret qui est passé en 1990, il coûte 1 300 000 $: pas une cenne aux commissions scolaires. Loi sur l'instruction publique. L'application de la loi 107 est évaluée à 30 000 000 $ dont 15 000 000 $ uniquement pour l'article 292 dont toutes les commissions scolaires sont venues nous parler lorsqu'on a eu des consultations sur la loi 107, et ça s'appelle la garde du midi, l'obligation de faire la surveillance du midi. Et les collègues qui étaient aux commissions savent de quoi je parle. La Loi sur la santé et la sécurité du travail, le Code du bâtiment, les règlements généraux relatifs à la sécurité dans les édifices publics, la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels. Et je m'arrête là parce que la liste serait trop longue.

Qu'est-ce que j'ai voulu illustrer par cette note? Uniquement ce que je disais tantôt. Il est exact que les commissions scolaires, depuis 10 ans, ont été "clenchées". La Fédération des commissions scolaires catholiques du Québec, les amis de ce régime-là, évalue à 840 000 000 $ les pertes encourues par sous-indexation des compressions pratiquées dans les budgets des commissions scolaires depuis 1980; 64 % d'entre elles sont présentement déficitaires. Le déficit moyen: 450 000 $ par commission scolaire. Et plus de 80 % des revenus de la taxe scolaire et de la péréquation servent maintenant à compenser le manque à gagner des subventions gouvernementales plutôt qu'à financer des activités locales, comme cela aurait dû être le cas. Parce qu'il faut l'expliquer, la formule. M. le ministre n'en a pas dit un mot. Dans le pacte de la fiscalité, lorsqu'on a dit aux commissions scolaires: Vous avez le pouvoir de taxer, limité à 0,25 $ ou 6 %, si le gouvernement avait continué à considérer admissible ce qu'il avait toujours fait, les années préalables, il n'y a personne ce soir qui serait obligé de parler de la loi dont on parle. Personne, ce soir, ne serait obligé de parler de ça, parce que tel que le pacte était fait, les 6 % ou les 0,25 $ lui auraient permis de jouer le rôle pour lequel il avait été créé, c'est-à-dire les adaptations locales, parce que toutes les commissions scolaires n'ont pas exactement la même philosophie d'initier des choses à leur taille, à leur mesure ou qui correspondent à leurs besoins spécifiques. (20 h 20)

Par ailleurs, la fédération considère que les mécanismes de péréquation et les normes applicables à l'impôt foncier scolaire sont inéquitables, inappropriées et discriminatoires. L'effort fiscal le plus important étant exigé des contribuables les moins favorisés, c'est pourquoi elle proposait en 1988 des recommandations précises

au gouvernement par le biais d'une nouvelle formule de financement, visant à améliorer le niveau des ressources des institutions scolaires, à augmenter leur autonomie dans l'utilisation des ressources mises à leur disposition et à réduire les disparités régionales. Mais j'aurais aimé ça que le ministre ait l'honnêteté de dire que cette formule qu'elles demandaient, ça représentait 75 000 000 $ de plus en taxes foncières et 39 000 000 $ en péréquation, pour une somme de 114 000 000 $. Ce n'est pas ce que la loi 69 va leur permettre de faire.

Après plusieurs mois d'attente d'une réponse à leur proposition, la fédération décidait de tenir en mars dernier un sommet sur le financement, même si on a eu droit à une leçon du père spirituel de l'éducation au Québec, en disant qu'on ne pouvait pas appeler ça un sommet. Parce que vous vous rappelez ça, un sommet, il faut que le gouvernement soit partenaire. Donc, il était irrespectueux de l'historique québécois. Parce que, quand on n'est que deux parties, on appelle ça un colloque. Ils ont eu droit à un discours de 15 minutes du maître à penser sur la notion des termes au Québec. Ça ne pouvait pas être un sommet. Mais dans toute leur publicité, les commissions scolaires ont quand même dit qu'elles faisaient un sommet sur la crise du financement ou du sous-financement des commissions scolaires. C'était sûr que ce sommet-là, c'était pour alerter l'opinion publique et également obtenir enfin une réponse du gouvernement. Parce que, imaginez que leur cher premier ministre de ce gouvernement, absent depuis quatre jours pour aller encore nous vendre en petits morceaux...

Des voix: Wo! Wo! Des voix: Oui, oui! M. Lefebvre: M. le Président...

Le Vice-Président (M. Cannon): M. le leader adjoint du gouvernement, sur une question de règlement.

Des voix: La pertinence. M. Gendron: C'est quoi?

M. Lefebvre: c'est assez clair, m. le président, non seulement ça ne respecte pas la pertinence, c'est grossier, c'est vulgaire, ça va à rencontre du règlement, non seulement de la loi...

Une voix: Question de règlement, M. le Président.

M. Lefebvre: Non, non...

Une voix: II n'y a aucune question de règlement dans ce que le leader... Des voix:...

Le Vice-Président (M. Cannon): Un instant, un instant, s'il vous plaît! De toute façon, messieurs, je vais les prendre les unes après les autres. Vous allez terminer, M. le leader adjoint du gouvernement, après quoi je vais écouter l'intervention de M. le leader de l'Opposition.

M. Lefebvre: Ce n'est pas, M. le Président, sur la pertinence que je soulève ma question de règlement. C'est en vertu de l'article 35, paragraphe 6°, qui dit ceci: "Le député qui a la parole - en l'occurrence, le leader adjoint de l'Opposition - ne peut imputer des motifs indignes à un député ou refuser d'accepter sa parole." Alors il vient de prêter des motifs indignes, M. le Président, au premier ministre du Québec qui, au moment où on se parle, est à protéger ses intérêts à lui, les intérêts des gens de son comté et les intérêts de tous les Québécois. De dire, M. le Président, que le premier ministre est à vendre le Québec, c'est non seulement contraire à l'esprit du règlement, c'est répugnant de la part d'un parlementaire qui est ici depuis 14 ans. Alors, ma question de règlement, M. le Président, c'est l'article 35, 6° et la pertinence, l'article 211 du règlement.

Le Vice-Président (M. Cannon): M. le leader adjoint de l'Opposition.

M. Gendron: Je ne veux même pas plaider, M. le Président, vous le savez bien, il n'y a aucune question de règlement. D'ailleurs, la preuve la plus claire, c'est qu'à deux reprises il a changé de sujet pour finir en disant que ce n'était pas la pertinence et, à la fin, en mentionnant que c'était la pertinence.

J'ai le droit de porter des jugements sans les attribuer à une personne spécifiquement. J'ai dit que le gouvernement était en train de modifier le régime fiscal et j'ai donné comme exemple, dans ce que je disais, que le premier ministre du Québec était en train de vendre le Québec en petits morceaux. Et c'est une réflexion que j'ai le droit de penser. Il n'y a pas de motif indigne là-dessus. C'est une opinion dans le cadre, strictement, d'un droit de parole. Ça s'est fait régulièrement en cette Chambre et, en aucune façon, il n'y avait là une question de règlement en ce qui me concerne, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Cannon): Alors. MM. et Mmes les députés, effectivement, l'article 35, 6° indique que "le député qui a la parole ne peut imputer des motifs indignes à un député ou refuser d'accepter sa parole". Et, évidemment, à l'article 239 qui porte sur la pertinence, surtout en seconde lecture, j'ai eu l'occasion, aupara-

vant, d'expliquer largement l'interprétation de cette notion de pertinence. Toutefois, je dirais que nous arrivons presque à la limite de ce qui est acceptable et de ce qui est inacceptable. Alors, je vous demanderais, M. le député, de poursuivre votre intervention tout en étant bien conscient de la présence de l'article 35, 6°. Merci.

M. Gendron: Merci, M. le Président. Alors, après plusieurs mois d'attente d'une réponse à la proposition, le même premier ministre qui avait qualifié que leurs demandes étaient raisonnables, ce dernier reconnaissait que le système actuel provoquait des inéquités entre les commissions scolaires - là je parle du ministre de l'Éducation - s'était alors engagé, au nom du gouvernement, à apporter des ajustements à la fois sur la formule de financement local découlant de la loi 57 et sur la formule de péréquation, et ce, dès la prochaine année budgétaire. Il révélait toutefois que le gouvernement envisageait d'aller au-delà d'une simple augmentation du pouvoir de taxation et qu'il comptait transférer aux commissions scolaires certaines responsabilités donnant, à titre d'exemple, l'entretien des bâtiments. C'est là que le chat est sorti du sac. Et je cite un article du Devoir du lundi 1er mars: Québec pourrait permettre aux commissions scolaires de taxer davantage les contribuables. Le 5 mars, on apprenait que le gouvernement, supposément bon comptable, après six et sept ans de prospérité, paniquait, par sa mauvaise administration et ses mauvais choix de budgétisation et que, dorénavant, il était disposé à changer la formule de la fiscalité pour permettre aux commissions scolaires de taxer davantage les contribuables, parce que ça ne leur fait pas peur, eux, de taxer directement les contribuables. Et l'article était signé, bien sûr, par quelqu'un qui s'intéresse aux questions éducatives depuis des années, Jean-Pierre Proulx, du Devoir. Première brèche dans le dossier de la fiscalité.

Le budget 1990-1991. Le dépôt des crédits 1990-1991 est venu confirmer les avancés du ministre de l'Éducation et l'étude des crédits provisoires de son ministère a permis de préciser davantage l'ampleur des mesures préconisées. En effet, le livre des crédits déposé le 27 mars dernier révèle, pages 11 à 13 - mais là je n'ai pas le temps de lire les pages 11 à 13 dans le livre des crédits - que les commissions scolaires se verraient désormais confier, écoutez bien ça, la pleine responsabilité de la gestion et du financement des équipements scolaires. Cette responsabilisation accrue entraînera cependant une baisse nette de 191 000 000 $ des subventions de fonctionnement qui leur sont versées par l'État. En année scolaire, cette baisse équivaut à 272 400 000 $. Elles auront, par contre, accès à un élargissement de leur pouvoir de taxation de même qu'à une bonification de la péréquation de l'ordre de 27 500 000 $ et d'un ajout de 7 700 000 $ pour pallier aux pertes nettes de revenus, suite à ces réaménagements. La révision du financement et l'ouverture du champ d'impôt foncier leur permettra également de bénéficier d'une marge de manoeuvre financière accrue.

La journée suivante, le ministre de l'Éducation vient donner un ordre de grandeur à l'accroissement du pouvoir de taxation des commissions scolaires. C'est 320 000 000 $ d'argent additionnel qu'elles iront chercher dans la poche des contribuables québécois dès le 1er juillet 1990, si on avait l'indécence d'accepter un tel projet de loi. (20 h 30)

Par ailleurs, le livre des crédits du ministère de l'Éducation, déposé dernièrement, nous permet d'établir que le niveau des revenus autonomes des commissions scolaires sera dorénavant égal à la somme des éléments suivants: le revenu actuel de taxation, 264 000 000 $ et 47 600 000 $ de péréquation. Le montant correspondant à la décentralisation du fonctionnement des équipements, 312 000 000 $. La marge de manoeuvre' additionnelle provenant de l'État, 40 500 000 $. De plus, une hausse de subventions de péréquation de l'ordre de 34 600 000 $ pour l'année scolaire de 1990-1991 est prévue de même qu'un montant de 5 300 000 $ pour pallier aux pertes de revenus à la suite du réaménagement proposé. C'est quoi la position des intervenants? Après les discours qu'elle a tenus depuis des années pour réclamer une plus grande responsabilisation des commissions scolaires, la Fédération ne peut que se montrer favorable, au plan des principes, à l'orientation qu'a prise le gouvernement. Par contre, son président ne se fait pas d'illusion sur les décisions du gouvernement à l'égard des commissions scolaires. Il tient à préciser que la marge de manoeuvre demeure tout à fait insuffisante en regard des besoins actuels. 40 000 000 $ versus 75 000 000 $ réclamés, voir Le Soleil du 20 avril, le Telbec du 15 mai 1990. Dans un article du Soleil sur l'impôt foncier, on disait ceci: Une mauvaise décision de Québec.

Et pourtant ces grands sages qui ont toujours la vérité, qui sont censés défendre les intérêts des Québécois, quand on les accuse qu'ils ne sont pas des vendeurs des intérêts des Québécois, comme par hasard à peu près toutes les opinions qu'on peut lire, autant ces jours-ci qu'ailleurs sur cette question-là, et je le verrai tantôt... Quand c'est rendu que l'UPA, l'Union des producteurs agricoles dit que la loi 69 est grave et dangereuse et conséquentielle pour les régions rurales, et j'y reviendrai tantôt, ça signifie qu'on ne parle pas à travers notre chapeau, on n'est pas uniquement ce que j'appellerais des gens qui parlent conformément à l'option que nous défendons ou strictement en tant qu'Opposition comme on dit. Quand M. Claude Masson du Soleil disait: L'impôt foncier, une mauvaise décision de Québec, lui au moins,

avait le mérite non seulement de le dire mais de le prouver avec des arguments, et je voudrais en citer quelques-uns. voilà qu'en deux temps, trois mouvements, en raison de compressions fédérales de la mauvaise conjoncture économique et de la forte croissance des dépenses dans le domaine de la santé et de l'éducation, le gouvernement libéral décide en catastrophe, en irresponsable, de partager le champ de l'impôt foncier entre les municipalités et les commissions scolaires et d'autoriser celles-ci à utiliser jusqu'à 10 % ou 15 % de cette forme de taxation limitée jusqu'ici à 6 %. au départ, ça devait de se limiter à 75 000 000 $ et présentement nous en sommes rendus à des sommes de 320 000 000 $. il ajoutait: la décision prise à la vapeur par le gouvernement bourassa est tout croche. je répète: la décision est tout croche. ces grands sages, ces hommes prudents, compétents, bons gestionnaires, grands administrateurs de l'état! incohérente, injuste et injustifiée. il me semble que ça commence à en faire épais sur la tartine. cette tartine-là n'était pas beurrée par celui qui vous parle. c'était beurré par des gens qui suivent ces questions-là. je répète: injuste, incohérente, injustifiée et tout croche. et je m'arrête là parce que j'en ai d'autres. et je continue. par ailleurs, certaines commissions scolaires membres ou non de la fédération ont exprimé en marge des déclarations de la fédération leur mécontentement quant à la décision prise par le gouvernement. ici, je pourrais en citer plusieurs, plusieurs commissions scolaires qui ont pris la peine de m'envoyer des lettres et des résolutions, et le ministre les a reçues aussi. la commission scolaire des cascades-l'achigan, dans un extrait d'une réunion de cette commission scolaire, disait ceci: ii est proposé par m. le commissaire untel et appuyé par m. le commissaire untel que nous indiquions au ministre de l'éducation que nous ne sommes pas d'accord avec une perception d'impôt foncier accru pour compenser une coupure de subvention de l'ordre de 1 900 000 $ à notre commission scolaire. à la commission scolaire la neigette: on n'a pas du tout le goût de fêter à la suite de la décision encore malheureuse de ce gouvernement-là. la commission scolaire saint-jean: la taxe scolaire pourrait doubler de 0,19 $ à 0,35 $ à saint-jean et de 0,13 $ à 0,31 $ à iberville. m. jacques demers, le président de la commission scolaire catholique de sherbrooke réagissait ainsi, et regardez ce qu'il vous dit, chers répondeurs: "je suis en désaccord avec le gouvernement qui nous impose des responsabilités supplémentaires d'un coût aussi élevé que 191 000 000 $." ce sont des présidents de commission scolaire, m. le président. sherbrooke: "l'odieux de la taxe sans marge de manoeuvre, cadeau empoisonné, déçoit les commissions scolaires." on pourrait lire ça pendant une demi-heure. "cadeau empoisonné", on est habitué, cadeau de grec.

Proposition gouvernementale de financement des commissions scolaires, regardez bien ce qu'on disait dans un article de Christian Pelletier: "Accentuation grave des inégalités sociales au détriment des régions rurales." Ceux qui ne connaissent pas le Québec de base, moi, je connais le Québec de base. J'ai été ministre responsable des régions, j'ai été ministre responsable de l'OPDQ, j'ai fait trois fois le tour du Québec et c'a paru au moins pour me rendre compte que, si nous n'avions pas les ressources des régions du Québec, je suis loin d'être sûr qu'on aurait le produit national brut qu'on a. Les régions du Québec, puisque les ressources sont là, n'ont pas le droit d'être traitées comme elles le sont par ce gouvernement-là depuis quatre ans; elles n'ont pas le droit d'être traitées en parent pauvre, elles n'ont pas le droit d'être traitées de façon inéquitable, que ce soit dans le domaine du transport, dans le domaine de la santé, des affaires sociales ou dans n'importe quel domaine; il y a iniquité grave et c'est dit par l'UMRCQ, c'est dit par l'UPA, c'est dit par l'auteur que je viens de citer. Et tous ces gens-là seraient dans le tort, M. le Président? Tous ces gens-là seraient dans les patates? Nous, on dit non. On dit que ces gens-là ont des opinions et qu'ils ont des opinions arrêtées, assises et fondées.

Les deux unions municipales, elles, qu'est-ce qu'elles ont dit de cette belle loi? L'UMQ et l'UMRCQ reconnaissent que les problèmes financiers des commissions scolaires sont réels. Comme critique de l'éducation, je n'en disconviens pas, je l'ai dit, ça fait trois fois. Elles ont cependant la conviction que la taxe foncière ne constitue pas une source de revenu appropriée pour financer l'éducation et pour garantir l'universalité de ce service. La remise en cause de la quasi-exclusivité de leur champ d'impôt foncier et, par surcroît, les moyens utilisés par le gouvernement pour y arriver ont soulevé un tollé de protestations, et pour cause, puisqu'on mettait fin sauvagement, brutalement au pacte fiscal lui-même.

Il faut rappeler que la décision de revoir le financement municipal avait été prise le 6 novembre 1989, réunion du Conseil des ministres. Dans une note sur laquelle on avait mis la main, où, d'une façon encore là odieuse, sans même aviser le ministre des Affaires municipales, sans même que le ministre des Affaires municipales ait le courage de lever le petit doigt pour défendre les municipalités, un décret que nous avons entre les mains, c'était très clair, on a le décret au complet et ça disait ceci, et c'est signé par M. Benoît Morin, secrétaire général du Conseil exécutif: ...suite à une décision du Conseil des ministres, de demander au ministre concerné, en concertation avec le ministre des Finances et le président du Conseil du trésor, de présenter, avant le 20 décembre 1989, des plans d'action visant à réduire les dépenses dans les secteurs suivants: santé et éducation... Regardez bien le

paragraphe suivant: Confier au ministre des Affaires municipales, en concertation avec le ministre des Finances et le président du Conseil du trésor, le soin de présenter, d'ici le 1er avril 1990, un projet de réforme municipale. Et ça, c'est dans un décret du gouvernement. (20 h 40)

La remise en cause de ce pacte fiscal a créé des remous majeurs, légitimes de la part des deux unions. En cours de route, l'UMQ, tout en réaffirmant sa volonté de faire respecter le pacte de 1979, accepte toutefois, dans un esprit de partenariat - et ça, c'est elle; ce n'est pas nous, mais c'est elle - une actualisation, en 1990, de la proportion du champ d'impôt scolaire consacré aux commissions scolaires en 1980, c'est-à-dire 75 000 000 $, mais s'opposent farouchement au transfert unilatéral des factures gouvernementales qu'on essaie de leur refiler, parce que c'est ça que ça veut dire. Je peux bien employer des beaux mots, mais ce que ça veut dire, c'est que, dorénavant, c'est le contribuable, c'est le payeur Baptiste qui devra assumer d'une façon plus importante les coûts éducatifs que l'État devrait assumer puisque c'est une question nationale, c'est une question majeure et, si on veut faire de l'éducation une priorité, il faut se comporter comme un gouvernement qui n'a pas la parole à droite et le geste à gauche. Il faut avoir la parole et le geste du même côté, ce qui n'est pas le cas dans ce dossier-là.

En conséquence, elle demande au gouvernement de convoquer des assises Québec-municipalités s'ils veulent changer les règles du jeu. Les 320 000 000 $ annoncés par le ministre de l'Éducation de même qu'un document du ministère des Finances et des Affaires municipales énumé-rant des hypothèses de transfert de responsabilités aux municipalités dont le coût pourrait atteindre 1 400 000 000 $, ont l'effet d'une bombe dans le milieu municipal, et ça, ça nous était révélé le 3 avril 1990: "L'iceberg fait surface. Surcharge de 1 400 000 000 $ ajoutée aux 320 000 000 $ de taxes scolaires?" Et là, on apprenait, par petits morceaux, le début des intentions de ce gouvernement-là et ça donnait même lieu à un titre que certains avaient trouvé très audacieux, antiparlementaire, mais comme il ne s'adresse à personne de cette Chambre, certains en avaient parié, ça ne me gêne pas de le répéter, c'est vrai, "Putasserie politique", selon l'Union des municipalités du Québec, M. Camille Rouillard. "Putasserie politique". Et il n'y a pas d'autre terme parce qu'on leur a fait ça dans leur dos, sans les mettre dans le coup, et n'oubliez pas que la putasserie est annoncée le 4 avril. Mais n'oubliez pas que le décret de ce même gouvernement, hypocrite sur cette question-là, hypocrite sur cette question-là...

Des voix: Ah!

M. Lefebvre: Question de règlement, M. le Président.

M. Gendron: Le même gouvernement...

Le Vice-Président (M. Cannon): Sur une question de règlement, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Lefebvre: M. le Président, deux propos non parlementaires dans la même phrase: "putasserie", ce n'est pas parlementaire et ça s'adresse au gouvernement ou a un député, de son côté à lui ou du nôtre; c'est non parlementaire, et hypocrite également, M. le Président, c'est non parlementaire, que ce soit dit par lui ou qu'il rapporte les paroles d'un tiers, tout journaliste qu'il soit, c'est non parlementaire, M. le Président, et je vous demande de ramener le député à l'ordre, de lui demander de retirer ses propos non parlementaires. Et il le sait d'ailleurs, M. le Président, il vous a prévenu, avant même de le dire, que c'était non parlementaire.

M. Gendron: M. le Président, une seconde sur la question...

Le Vice-Président (M. Cannon): M. le leader adjoint de l'Opposition.

M. Gendron: Encore là, il ne s'agit pas du tout d'une question de règlement. C'est la vieille tactique d'un adjoint qui ne connaît pas son règlement. J'ai pris la peine, M. le Président, de vous dire que si j'adressais ces propos à un parlementaire de cette Chambre vous auriez raison de me rappeler à l'ordre. J'ai pris la peine de vous le dire. Ce n'est pas ce que j'ai fait. Je citais...

Une voix: Fait indirectement.

M. Gendron: Non, pas du tout. Je citais un article de journal, ça c'est la pratique. Et le règlement, dans le fond, M. le Président, vous avez assez d'expérience pour savoir que c'est beaucoup plus les coutumes de cette Chambre qui sont le véritable règlement. Et il a toujours été de coutume que lorsqu'on citait intégralement, sans aucune nuance, un titre de journal, nous étions complètement et parfaitement dans la légalité parlementaire, et vous le savez. Donc, il n'y a pas de question de règlement.

M. Lefebvre: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Cannon): M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Lefebvre: Alors, j'aimerais savoir du député, puisqu'il invoque la coutume. La coutume, c'est basé sur une jurisprudence. Alors, s'il peut me citer, et à vous également, évidemment, une seule cause qui justifie son propos, qu'il peut

faire indirectement ce qu'il n'a pas le droit de faire directement, M. le Président, je vais me rasseoir. On ne peut pas citer le texte d'un journaliste qui, en soi, est non parlementaire. C'est faire indirectement ce qu'on n'a pas le droit de faire directement. Et le député qui est ici depuis 14 ans, c'est ce qu'il nous dit, mais je dois vous rappeler que ça ne paraît pas, le sait très bien, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Cannon): Bon, alors, chers collègues, je vous rappelle le recueil des décisions concernant la procédure parlementaire, aux articles qui concernent... L'article 35,7° paroles interdites. Propos non-parlementaires: interdiction de faire indirectement ce qu'il n'est pas permis de faire directement. Une décision rendue par Mme Bégin, notre collègue de Bel-lechasse, le 9 juin 1986. Au fait, la décision, c'est de lire un extrait d'un article de journal qui contient des paroles interdites par le règlement, c'est faire indirectement... S'il vous plaît! S'il vous plaît, MM. les leaders. C'est de faire indirectement ce qu'il n'est pas permis de faire directement. Alors, M. le député, je vous demanderais de vous restreindre quant à l'usage des documents qui sont des articles de journaux, qui sont effectivement non parlementaires ou antiparlementaires dans l'usage de l'Assemblée, et je vous demande de poursuivre.

M. Gendron: Depuis, les unions municipales ont posé cinq conditions minimales suivant la reprise du dialogue avec le gouvernement en vue de dénoncer la crise persistante. Et dans les conditions qu'elles ont posées, pour dénouer la crise persistante, elles ont été on ne peut plus claires. J'en cite une: "Quatrièmement, tenue de véritables assises Québec-municipalités. Publication le plus tôt possible par le gouvernement de l'ensemble de son projet de décentralisation et de transfert des responsabilités au niveau local. Identification par le gouvernement des sources de financement liées à chaque responsabilité. Inscription à l'agenda de la question du financement scolaire pour discussion et révision. L'implication directe du ministre des Finances et du ministre des Affaires municipales pour diriger conjointement l'élaboration. Voilà les conditions qu'elles ont posées. "Ces exigences sont des conditions minimales en deçà desquelles nos membres n'accepteront pas de reprise de dialogue avec le gouvernement. M. le premier ministre, ce que nous attendons, c'est que le chef du gouvernement annonce officiellement la convocation des parties." Et c'était signé conjointement par les deux présidents d'union.

En réponse à cette lettre, le premier ministre leur fait part de la création d'un comité ministériel dont le ministre dans son discours disait: Je suis heureux d'être membre d'un comité ministériel avec d'autres collègues pour partager toutes ces belles réflexions qu'on va faire. Et le ministre des Affaires municipales annonçait: Québec crée un comité interministériel pour élaborer une nouvelle entente fiscale avec les municipalités. Également, dans La Presse, on annonçait: "Les derniers obstacles sont levés entre les MRC et le Québec." Pourtant, il faut souligner que la question du financement scolaire qui pourrait être abordée à ces assises, selon le premier ministre, ne pouvait être mise en cause parce que, dans un autre document, qui, en ce qui me concerne, s'appelle la note 7... Là, c'est le premier ministre qui parle.

Il a envoyé une lettre à M. Desrosiers. Il dit très clairement ceci et c'est signé: Premier ministre du Québec, M. Robert Bourassa. Et je cite: "À cet égard, il convient également de mentionner que la question du financement scolaire pourra être abordée à l'occasion de ces assises..." Mais écoutez bien la suite: "...sans cependant remettre en cause l'approche que le gouvernement a privilégiée dans son dernier budget." Nous avons la vérité. Nous sommes assis sur notre vérité. On aura beau faire les colloques qu'on voudra, vous poserez les conditions que vous voudrez, on annoncera dans la presse un peu partout qu'il y a reprise du dialogue, le premier ministre du Québec leur dit: II n'est pas question de remettre en cause...

Je comprends qu'ils peuvent avoir certains doutes et être tentés d'y aller quand on sait comment le premier ministre se comporte avec la parole donnée en cette Chambre. Quand on le voit agir à Ottawa, je comprends comment ces gens-là peuvent être dans l'inquiétude.

Une voix: Du calme!

M. Gendron: Je suis très calme. Parce qu'on s'est fait dire ici: Pas question de changer un iota. Et surprenez-vous pas qu'on apprenne ce soir qu'il y a un règlement à l'entente Meech parce qu'encore une fois, on aura vendu le Québec, on aura vendu les intérêts du Québec. Surprenez-vous pas de ça.

Une voix: Ça fera un Meech oui!

M. Gendron: Et ça fera ce que les municipalités pensaient.

M. Lefebvre: Question de règlement, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Cannon): M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Lefebvre: On vient d'associer le premier ministre du Québec au propos qui est le suivant: On a vendu les intérêts du Québec.

Une voix: C'est faux! (20 h 50)

M. Lefebvre: M. le Président, c'est évident que c'est non parlementaire. Et je vous demande d'indiquer au député qu'il doit retirer ces derniers propos-là. Ça fait au moins cinq ou six fois, depuis 45 minutes, qu'il récidive. On est tolérants parce qu'il est supposément leader adjoint de l'Opposition. De deux choses l'une, il est carrément ignorant de ce qu'est un propos parlementaire ou non parlementaire, ou il est malhonnête. C'est l'un ou l'autre, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Cannon): Non, non. Écoutez! Écoutez! Un instant, s'il vous plaît! Un instant! J'ai écouté attentivement les propos du député et, en vertu des articles qui gouvernent la conduite d'une adoption de principe, l'article 239, quant à la pertinence, est bien clair: Le député peut se servir, à l'occasion, d'exemples. Et le propos que le député a tenu depuis 45 minutes a porté exclusivement sur le projet de loi qui nous concerne. Et oui, il s'est servi, à quelques occasions, d'exemples. Alors, M. le député je vous demanderais de poursuivre, s'il vous plaît.

M. Gendron: Oui, je vous indique, M. le Président...

M. Lefebvre: M. le Président. M. le Président.

M. Gendron: Je vous indique, M. le Président, que...

M. Lefebvre: M. le Président. M. Gendron: ...je commence-Le Vice-Président (M. Cannon): M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Lefebvre: M. le Président, ma question de règlement ne portait pas sur la pertinence, mais sur le propos non parlementaire. M. le Président, est-ce que vous êtes en train de m'indiquer qu'on peut prétendre et qu'on peut dire, et que ce serait parlementaire, que le premier ministre est à vendre le Québec au moment où on se parle?

Une voix: C'est indigne! C'est indigne!

M. Lefebvre: Est-ce que ça c'est parlementaire, M. le Président? Non seulement c'est non parlementaire, mais c'est indigne d'un parlementaire qui siège à l'Assemblée nationale, peu importe de quel côté il siège, M. le Président.

Des voix:...

Le Vice-Président (M. Cannon): Non. Un instant! Un instant, s'il vous plaît! J'ai écouté attentivement les propos tenus par le député et leader adjoint de l'Opposition et, à mon avis, puisque je n'ai pas dit qu'il s'agissait de propos non parlementaires, il ne s'agit pas de propos non parlementaires. Poursuivez, s'il vous plaît, M. le député.

M. Gendron: De toute façon, je le sais, je connais leur tactique. Je citais le premier ministre et le premier ministre a dit: II n'est pas question de revenir là-dessus. J'ai indiqué que c'était normal pour les deux unions d'être ambivalentes, parce que ce ne serait pas la première fois. Il n'y a rien d'antiparlementaire là-dedans, c'est la lettre du premier ministre.

Notre position, puisqu'on a tout fait pour me voler le plus de temps possible sur le temps que j'avais...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Gendron: La preuve, c'est qu'à quatre reprises, M. le Président, vous avez indiqué qu'il ne s'agissait pas du tout de questions de règlement. Et le leader adjoint s'est levé quatre fois inutilement uniquement pour me faire perdre du temps.

Notre position, elle est claire. Notre position, elle est très claire et je vais la résumer dans les 10 dernières minutes qui me restent. L'éducation doit demeurer une responsabilité de l'État et doit être financée par l'Etat québécois parce que c'est une question nationale. C'est une question qui ne peut pas permettre des inéquités à gauche et à droite et qui ne peut pas également faire que, parce qu'on est dans certains petits milieux, on n'aurait pas droit au même type de qualité éducative.

Je donne deux exemples. Alain Dubuc dit ceci...

Une voix: C'est un péquiste, ça.

M. Gendron: Non, ce n'est pas très péquiste, ça. C'est son droit, par exemple, c'est son droit le plus sacré, mais ce n'est pas ça que je mets en cause. Mais quand M. Alain Dubuc dit: "Si l'idée de confier certaines responsabilités au niveau du gouvernement le plus proche des citoyens est raisonnable - écoutez ce qu'il dit - elle introduira un élément d'inégalité qui contrevient au principe de l'universalité." Là, je suis au niveau des principes, pour ceux que ça intéresse. Et nous sommes à l'adoption d'un projet de loi au niveau du principe. Et moi, je ne suis pas d'accord avec un principe qui va bousiller le principe de l'universalité en éducation. Je ne suis pas d'accord. Et voici ce qu'il ajoutait, et je sais qu'il a raison et je sais qu'il y en a beaucoup qui pensent comme l'Opposition officielle, l'UPA, l'UMRCQ. Je sais que certains ont dit: L'UMRCQ, il n'y a rien là, c'est rural, ça, c'est du monde rural; donc, ce n'est pas

important, pas besoin de considérer ça. On fera la preuve. Je continue. "Les équipements scolaires sont une partie intégrante de la qualité de l'éducation." Écoutez la phrase suivante. "En se débarrassant de certaines responsabilités, le gouvernement québécois fera en sorte que l'environnement scolaire ne sera pas le même partout et que la qualité de l'éducation - et regardez ce qui suit - variera selon la richesse des milieux." Pour des gens qui se disent libéraux - et là, je ne parle pas du parti politique - pour des gens qui se disent libéraux d'opinion, demeurer insensibles à des notions aussi fondamentales que celles que je viens d'illustrer et que d'autres ont illustrées, moi, je n'en reviens pas. Ça me fait mal, sincèrement, ça me fait mal. Ça fait mal à beaucoup de gens, parce que c'est quelque chose de grave. Je le disais tantôt. Si je peux retrouver la lettre de l'UPA.

Les gens de l'UPA, on peut leur reprocher ce que vous voudrez, mais ce sont des gens qui ont les deux pieds sur terre, règle générale. Ce sont des gens qui vivent dans le monde rural. Voici ce qu'ils disaient. "Le débat actuel remet en cause ces principes d'équité, et nous croyons que le milieu rural écopera et subira plus que tout autre milieu la réforme du projet de loi 69." Vu la constance et surtout la valeur moindre de sa richesse foncière, ils ajoutent: "Les données qu'on a - c'est l'UPA qui parle - à notre disposition sont très éloquentes et indiquent que la valeur de l'indice de richesse foncière per capita s'accroît en proportion de la taille des villes, favorisant manifestement les citoyens des cités plus vastes au détriment des localités plus petites et révélant ainsi le caractère nettement régressif des mesures envisagées. Les représentations que vous faites sont justes - parce que c'est l'UPA qui écrit à M. Nicolet - et assureront au milieu rural que nous représentons respectivement sous des angles différents un développement respectueux des spécificités propres du Québec des régions, un développement porteur d'avenir pour les localités rurales." Je ne parle pas de vous autres. Parce que je te dis qu'un développement porteur d'avenir avec le Parti libéral dans les régions du Québec, ce n'est pas le discours qui se tient dans les régions, si vous connaissez les régions du Québec. Et ils continuaient: "À l'opposé du modèle gouvernemental, ce modèle est un facteur de dégradation du milieu qui vous est imposé."

M. le Président, ce n'est quand même pas moi qui ai inventé le document du Québec Deux Québec dans un du Conseil des affaires sociales. C'est un document grave, "conséquentieT. Il me semble que, si j'étais gouvernement, je serais préoccupé par ça. Ça n'a pas l'air "pantoute" de les préoccuper. On est en train de développer un modèle qui a comme conséquence d'affaiblir graduellement la richesse et la valeur des régions. On marche allègrement là-dedans et on applaudit les porteurs de telles décisions. Nous, on ne marchera pas là-dedans. C'est-y clair? Nous, on ne marchera pas là-dedans. On ne peut pas marcher là-dedans, parce que ça n'a pas de sens de créer tant d'inéquité dans le monde rural.

Tout en étant conscients de la situation difficile des commissions scolaires, je l'ai dit, je l'ai répété, tout en étant conscients de la nécessité de corriger la formule de péréquation, je l'ai dit, je l'ai dit publiquement, je l'ai dit à la Fédération... Tout en étant conscients de réajuster le sens des 6 % ou du 0,25 $ qui devaient être réajustés, pour permettre la couleur locale, on est tous conscients de ces choses-là... Mais ce dont nous sommes surtout conscients dans ce dossier-là, c'est que c'est un changement de cap, c'est un virement à 180°, pour ne pas dire 360°, sans consultations, d'une façon... Et je l'ai dit tantôt, je n'ai pas le choix, M. le Président, là, je n'emploierai pas le terme, mais, vous le savez - décret du 6 novembre - qu'on a dit travailler là-dessus. Publiquement, c'était sorti au mois de mars ou avril, et c'est dans le budget. Le 6 novembre, on dit: Sortez une nouvelle proposition pour "clencher" les contribuables québécois, ce qui aura comme conséquence de créer des inégalités en éducation. (21 heures)

Moi, je ne peux pas venir en cette Chambre, être critique de l'Opposition officielle en éducation et défendre un dossier qui a comme conséquences de rapetisser, d'affaiblir et d'atténuer la valeur de l'éducation dans toutes les régions du Québec. Je vous le dis, M. le Président, je ne marcherai pas là-dedans. L'Opposition ne marche pas là-dedans. L'UMRCQ ne marche pas là-dedans. L'Union des municipalités du Québec ne marche pas là-dedans. L'UPA ne marche pas là-dedans. Et il y a une série de commissions scolaires qui ne marchent pas là-dedans. Mais ce n'est pas nouveau - et je conclus là-dessus - qu'est-ce que vous voulez? vous avez la vérité. C'est pour ça qu'il y a des camionneurs devant le parlement. C'est pour ça qu'il y en avait il y a 15 jours. C'est pour ça que les assistés sociaux, cet été, j'ai peur, M. le Président, et ça fait plusieurs fois que je le dis, j'ai peur de ce que nous allons vivre quand ils apprendront tout ce qui va leur arriver le 1er juillet avec votre belle réforme qui fait la guerre non pas à la pauvreté, mais qui fait la guerre aux pauvres.

Avec autant, M. le Président - et je conclus - de décisions qui ont toujours comme conséquences de rapetisser, d'affaiblir, d'atténuer et de taxer le contribuable davantage, surtout sur une question aussi fondamentale que l'éducation, vous faites fausse route et ma responsabilité, c'était de vous dénoncer.

Une voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Cannon): Merci, M. le leader adjoint de l'Opposition et député d'Abiti-bi-Ouest. Le prochain intervenant sur l'adoption de principe du projet de loi 69, M. le député de Sauvé.

M. Marcel Parent

M. Parent: Alors, merci, M. le Président. Je suis très à l'aise d'ailleurs pour prendre la parole sur ce projet de loi qui apporte diverses modifications à la Loi sur l'instruction publique relativement aux modalités de financement des commissions scolaires et du Conseil scolaire de (Ile de Montréal.

C'est ainsi que ce projet de loi élargit le pouvoir de taxation des commissions scolaires et du Conseil scolaire de IHe de Montréal en rehaussant les limites permises par la loi. Il fait toutefois obligation au Conseil de répartir entre les commissions scolaires de l'île de Montréal la totalité du produit de la taxe qu'il impose en appliquant certaines règles fixées dans la loi.

Le projet de loi habilite le gouvernement à adopter des règlements pour déterminer certaines règles relatives à l'établissement du produit maximal de la taxe qui peut être imposée par les commissions scolaires. Ce projet de loi remplace les règles relatives à la subvention de péréquation que le ministre de l'Éducation verse aux commissions scolaires.

Le projet de loi vient également corriger, à l'intérieur de la Loi sur l'instruction publique, certaines imprécisions. Le projet de loi modifie aussi la Loi sur l'enseignement privé afin d'actualiser pour l'année scolaire 1990-1991 les montants de base par élève pour la détermination des subventions à verser à une institution déclarée d'intérêt public ou reconnue pour fins de subventions. Le projet de loi édicté aussi des dispositions transitoires et finales.

Alors, pour bien saisir la perspective et la portée du projet de loi 69, deux points principaux me paraissent intéressants: premièrement, la revalorisation nécessaire du niveau scolaire et, deuxièmement, la situation financière du gouvernement du Québec. Ces deux lignes directrices sont particulièrement importantes dans la mesure où on se rend compte que les demandes de biens et services formulées auprès de l'État québécois deviennent, si l'on n'y prend garde, illimitées en considération de la capacité de payer des contribuables.

Il n'y a pas de gouvernement moderne qui échappe à cette réalité d'ordre économique, d'abord, et de laquelle découle une série de choix de plus en plus judicieux. Or, dans l'élaboration de ce projet de loi, le gouvernement québécois doit tenir compte d'un ensemble de facteurs dont la nécessaire revalorisation du palier scolaire. La réalité est telle qu'au fur et à mesure qu'évoluait le secteur scolaire, on s'est aperçu que sa marge de manoeuvre diminuait dans le temps. Et pourtant, il ne s'agit aucunement de mettre en position de concurrence les niveaux scolaire et municipal, mais bien d'équilibrer les ressources mises à la disposition de chacun des paliers gouvernementaux en fonction des mandats ou objectifs qui leurs sont dévolus.

En réalité, la marge de manoeuvre du niveau scolaire remonte aux années soixante-dix. À cette époque, l'État québécois exerçait au sein de la société une influence grandissante dans les moindres secteurs d'activité. Les uns en étaient satisfaits, d'autres, moins. Mais quoi qu'il en soit, l'expansion de l'État québécois a, à plusieurs égards, aidé le Québec à se mettre à l'heure du modernisme et à, coup sûr, à améliorer sa qualité de vie.

La vapeur s'est renversée dans le sillon de la récession économique qui a frappé de plein fouet l'ensemble des pays industrialises. On s'est alors retournés pour axer l'action gouvernementale autour d'une priorité, à savoir: faire plus avec moins.

Les périodes de stabilité et de croissance économique qui ont suivi n'ont pas diminué la prudence des gouvernements et on ne peut nier non plus que les gagnants d'un pacte comme celui de 1979, par exemple, furent les municipalités pendant que le niveau scolaire voyait diminuer son influence, son rôle, au sein de leur communauté.

Et on a souvent oublié, Mme la Présidente, que les premières municipalités au Québec étaient des municipalités scolaires. Les premiers gouvernements locaux n'étaient pas des municipalités municipales, passez-moi l'expression, mais bien des gouvernements scolaires. Ils font partie de l'histoire du Québec et on a tenté, en 1979, de leur enlever, pour des raisons que je n'ai pas à juger, un droit qui leur était acquis depuis longtemps.

Ce projet de loi qui nous est soumis aujourd'hui aura un effet bénéfique, celui de redonner au niveau scolaire la place qui lui revient. Cette implication plus grande et plus concrète engendra, à son tour, un degré de responsabilité plus élevé, augmentant d'autant la qualité de l'enseignement au Québec.

On se plaint, M. le Président, que les gens désertent les élections scolaires. On se plaint que les gens ignorent ce palier de gouvernement qui a la responsabilité de former la relève de demain. Eh bien, je pense qu'avec le projet de loi 69, le gouvernement a fait un effort pour revaloriser et redonner sa place, dans l'histoire politique du Québec, aux commissions scolaires.

Voilà bien l'un des effets positifs que produira ce projet de loi puisque le niveau scolaire se rapprochera, comme il se doit, de la communauté. Cet aspect de la qualité de gestion apparaît important dans la mesure où on réclame, depuis plusieurs années, un tel rapprochement entre les administrateurs, d'une part, et les administrés, d'autre part.

Un autre aspect de la qualité de l'enseignement concerne ce trait d'union qui doit être effectué entre l'école et le marché du travail. En effet, on insiste depuis longtemps sur cette nécessité d'assurer à nos jeunes la meilleure transition possible avec le marché du travail. Or, trop souvent, l'une des conditions essentielles n'était pas remplie pour répondre à cet objectif, soit la communication directe avec les divers intervenants. Or, l'impact positif à moyen et à long terme du milieu scolaire avec, par exemple, le secteur industriel, ne fait pas de doute. Il assure une harmonie pour ce qui a trait au passage de l'école au travail, pour mettre toutes les chances de notre côté et améliorer notre position concurrentielle du fait que nos jeunes seront mieux préparés en vue de faire face au défi de demain.

M. le Président, au début de mes remarques, je mentionnais que les ressources de l'État québécois n'étaient pas illimitées. Un gouvernement qui cherche à mieux légiférer ne peut oublier cette réalité, au nom de la saine gestion des fonds publics. L'Opposition officielle devra bien saisir cette notion de saine gestion, elle qui a formé un gouvernement entre les années 1976 et 1985 et n'hésitait pas à se lancer dans des dépenses somptuaires. Cette situation fut tellement évidente, M. le Président, que le gouvernement du Parti québécois s'est retrouvé sans marge de manoeuvre lorsque la conjoncture économique fut plus difficile. Privées de ressources suffisantes, on se souviendra que les régions du Québec ont littéralement été abandonnées à elles-mêmes jusqu'au retour du gouvernement du Parti libéral.

Des voix: Bravo!

M. Parent: D'autre part, l'important dossier des paiements de transferts aux provinces intervient également dans l'évaluation des dépenses du gouvernement québécois. Cette situation créée par le gouvernement fédéral engendra nécessairement un manque à gagner. Et l'enjeu est de taille, puisqu'on doit parler d'une diminution de l'ordre de 1 300 000 000 $, laquelle situation oblige le Québec à redoubler de prudence avant de s'engager dans des programmes divers. (21 h 10)

Ainsi, malgré un certain contrôle des coupures et des compressions des dépenses effectuées depuis les 15 ou 20 dernières années, les dépenses publiques continuent de croître à mesure que la demande des biens de service et la qualité augmente elle aussi. Et là, je n'ai même pas abordé la question des taux d'intérêt qui a une incidence directe sur l'administration des finances publiques de tous les paliers de gouvernement. M. le Président, voilà, je pense, le véritable enjeu, le véritable contexte dans lequel se présente cette législation soumise par le gouvernement du Québec. Le contexte tient compte, d'une part, d'un nécessaire rapprochement entre les administrateurs et les administrés, en plus de tenir compte de la capacité de payer des contribuables, d'autre part.

Et en terminant, je soulignerai que, dans l'histoire de l'éducation au Québec, un tel projet arrive à point. Depuis le temps que l'on discute de décentralisation, de cette nécessité de remettre les pouvoirs dans les mains de ceux et celles qui sont directement impliqués dans la vie des citoyens, pas de doute alors qu'on appréciera le sens et la portée de ce projet de loi, une fois qu'ils seront appliqués. Dans ce contexte, il s'agit véritablement d'un virage axé autour de la volonté d'assurer une meilleure qualité de l'enseignement au Québec et cette loi augmentera enfin la responsabilisation de ceux et celles qui administrent le dossier scolaire. En somme, M. le Président, le présent gouvernement libéral présente cette législation en étant persuadé de ses bienfaits dans les différentes communautés des régions du Québec. On en appréciera d'ailleurs les avantages à son usage, mais dès lors que ces paramètres visent à améliorer la qualité de vie de l'ensemble des intervenants dans ce dossier, je suis assuré à l'avance de son succès quant à l'atteinte d'un objectif fondamental, soit la revalorisation du palier scolaire. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Cannon): Merci, M. le député de Sauvé. M. le député de Jacques-Cartier.

M. Neil Cameron

M. Cameron: Merci, M. le Président. Encore je pense que ce serait une bonne idée de m'exprimer en anglais sur ce sujet. Chaque fois que je suis ici, je souhaiterais employer plus de français et une meilleure qualité de français en discutant des affaires publiques. J'espère aussi que le ministre et tous les députés préféreraient une adresse claire et raisonnable dans n'importe quelle langue. Pour le temps actuel, je voudrais penser que je reste raisonnable en français, mais je sais bien que je parle avec clarté seulement en anglais.

I will begin by noting that this law is again one to which, in principle, neither I or my party take any objection, although we did raise initial doubts about the exact mechanisms by which it was being applied. That is to say, the sudden sharp change from the taxation procedures applying under Law 57 of 1979 was a brutal shock for the municipalities. I notice that the Minister himself used this expression to describe it. I thought at first that the consequence might be a long period of bitter confrontration between the Québec government and the province's mayors, which would not do much to serve the public interest in general. However, while there

are still possibly some detailed grievances to be addressed, I noticed, in watching a recent frank exchange between the President of the Treasury Board and an informal conference of mayors last Friday evening, that more harmonious relations are apparently being restored. The more militant mayors would probably claim this was because they put a good scare into the Government; the Government because they have been sensible and accommodating. But in any event, we seem to be now in a position to deal with the substance of the reform itself.

As I have noted in a previous address, I believe that both academic professionals, and citizens generally, would largely agree with the Minister that the previous regime applied by Law 57, while it had some attractive features for the municipalities, led to far too great an amount of centralization, and gave far too little discretionary taxing and spending power to the individual boards. After all, school boards throughout most of North America only 40 years ago functioned very well, sometimes better than they do now, raising almost all of their revenues from local taxes.

A reform of the kind undertaken in this law should ultimately be beneficial for the general process of education in Québec, because local expenditures, locally initiated, are more likely to be for sensible and affective purposes. I would like to see eventual reforms over the next few years, that will go even further. Evenly introduction of a voucher system. Let me explain something of this system briefly.

This is an argument that is being used increasingly in education in the Western world, notably in the United States, where it has achieved bipartisan political support. It amounts to the argument that Departments of Education should make use of some kind of voucher or transfer document, a little like a food stamp, only applied to education, which could not be converted into cash, but which could be used by parents or students to decide what kind of education they wanted for their children, in the case of parents, or for the students themselves when they are passed a certain age. The advantage of such a regime is that it makes possible both a more equitable system, answering some of the problems of inequity that were raised by the Deputy for Abitibi-Ouest, while, at the same time, managing something that is within the control of government finances. It also allows the maximum amount of individual decision and individual freedom in the course of education.

I believe a general movement in the direction of greater freedom in Québec education as is true everywhere in the West, will be inevitable in the 1990's and beneficial. This will be the case, I think, for several reasons, which I wanted to briefly explain, M. le Président, before concluding.

The first is that, in the 1990's, education is going to present increasingly painful costs to all governments, for simply the same reasons that other public bodies have. That is, despite the fact that student enrolments are not growing as rapidly as they once were, because there was such a large amount of hiring of teachers and other academic professionals in the 1960's and the 1970's, most of them will be at the top of their earning power in the 1990's and, therefore, represent the largest financial burden to the school boards, to the colleges and to the universities. So there is a problem, in other words, in the schools, that is somewhat similar to Hydro-Quebec's problem with sub-contracting, that is to say if all the hiring is done, a permanent staff with tenure, with union contracts, with staggering salaries, will eventually ruin virtually any government. There is bound to be some kind of problem as to how to deal with this by the latter 1990's.

On the other hand, as the baby-boom generation all reach the age where they, themselves, have children in school, are worried about them and, no doubt, are becoming enthusiastic politicians on the school boards, the pressure to deliver the maximum quality of education for our young people will be greater than ever. In combination, these two things mean that the use of centralized authority will become more and more difficult. Therefore, the direction that is being taken by the Ministry of Education and by the minister at the moment is the right direction. I just think that, some day, he will have to go a great deal further than he has gone right now. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Cannon): Merci, M. le député de Jacques-Cartier. Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Jeanne L Blackburn

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. M. le Président, le projet de loi 69, comme ce gouvernement, restera à l'histoire comme le champion des taxes régressives. En effet, ce projet de loi s'ajoute à des dizaines de mesures fiscales, tarifaires ou encore de désassurance, de restriction à l'accès aux services qui ont des effets catastrophiques sur la qualité de vie des plus démunis au Québec.

Ce projet de loi, en fait, remet fondamentalement en question le droit des citoyens et des citoyennes du Québec, selon qu'ils demeurent dans les grands centres ou en régions, à l'accès à des services comparables. C'est ça que vient faire ce projet de loi. En effet, selon que vous demeuriez à Saint-Siméon, dans le comté de Bonaventure, ou à Sainte-Edwidge, au Lac-Saint-Jean, si vous voulez conserver une qualité de services comparable à Chicoutimi, Québec ou Montréal, vous devrez payer jusqu'au double de plus de taxes scolaires, et c'est comme ça que ça

s'appelle quand on n'a plus comme priorité l'éducation au Québec, quand on a comme priorité de boucler et de ne pas porter ses responsabilités. (21 h 20)

M. le Président, un des arguments qui étaient le plus fréquemment utilisés pour justifier le projet de loi 69, c'était de dire: Le gouvernement n'a plus les moyens, notre capacité de taxer est au maximum. Rien de plus faux, mais rien aussi de plus malhonnête quant au fond, sur le raisonnement, parce que, M. le Président, le gouvernement prétend ne plus avoir de marge de manoeuvre et être incapable de lever de nouvelles taxes. Comment appelle-t-il les taxes qui seront levées par les commissions scolaires ou qui seront levées par les municipalités? Ce ne sont pas des nouvelles taxes. La seule différence, c'est parce que le gouvernement ne veut pas être obligé de prendre ses responsabilités et de dire aux citoyens: Si on veut conserver l'équité dans certains services au Québec, il faut accepter qu'on paie un peu plus de taxes. La seule façon qu'il avait de le faire et de se déresponsabiliser, c'était de transférer sur le dos des municipalités et des commissions scolaires cette responsabilité et le projet de loi, c'est ça que ça fait. N'allez pas me dire qu'on n'ira pas chercher plus de sous pour boucler. On va les chercher, sauf que le gouvernement ne prend pas la responsabilité, qui est la sienne, de s'assurer de le faire, parce que, selon lui, ce serait trop impopulaire.

M. le Président, j'entendais tantôt le député de Sauvé qui, ce soir, invoque comme argument pour appuyer ce projet de loi la nécessité d'accroître l'autonomie des commissions scolaires, il n'y a rien de plus choquant à entendre quand, comme moi, on a passé des dizaines d'heures en commission parlementaire à étudier les projets de loi 106 et 107 qui viennent réduire à néant la responsabilité des commissions scolaires en matière pédagogique. Il ne reste plus rien comme responsabilité aux commissions scolaires en matière pédagogique. Le gouvernement et son ministre ont entièrement pris et occupé tous les champs. La seule responsabilité qu'on donne aux commissions scolaires, ça va être d'entretenir les édifices. C'est ça, le problème. Et on vient nous dire: II faut donner un peu plus de responsabilités aux commissions scolaires. Ça, il faut le faire, vous savez. Il faut le faire et ça frise la malhonnêteté.

M. le Président, en fait, ce qu'il faut comprendre, c'est que ce projet de loi a été déposé en catastrophe, sans consultation, au mépris le plus fondamental des partenaires premiers du gouvernement que sont les municipalités. Pour quelle raison? Parce que, dans le budget 1990-1991 du fédéral, le fédéral décidait de pelleter une partie de son déficit dans la cour des provinces. Évidemment, le Québec écopait: 200 000 000 $ de moins dans les transferts en enseignement supérieur et en santé.

Le gouvernement du Québec aurait pu, à cette occasion, choisir de remettre en question le fédéralisme canadien. Il aurait pu. Il aurait pu, M. le Président, d'autant que l'occasion était belle. Le Canada anglais ne veut rien savoir de lac Meech, les conditions les plus minimales que le Québec art jamais posées. Le Québec et son gouvernement auraient pu dire: Assez, c'est assez. Non seulement ça n'est plus rentable, mais le journal Les Affaires estime que le Québec, de façon générale, est pénalisé par le biais des transferts. Il paie plus d'impôt que ce qu'il retire.

Le gouvernement aurait pu dire: Assez, c'est assez; vous ne voulez pas de Meech? très bien, on se retire; ou encore, on questionne fondamentalement le fédéralisme, d'autant qu'il est de moins en moins rentable, il nous coûte cher. Est-ce que c'est ce qu'il a fait? Non. Les études ont beau démontrer que ce n'est pas rentable, le gouvernement qui a reçu le pelletage du déficit du fédéral dans sa cour n'a pas décidé de prendre ses responsabilités. Il s'est tourné vers les commissions scolaires, vers les citoyens, vers les municipalités et il a pelleté son déficit dans la cour des municipalités. C'est ça que le gouvernement a fait.

M. le Président, le gouvernement aurait pu choisir à cette occasion d'informer très sérieusement les Québécois et les Québécoises sur les avantages et les inconvénients du fédéralisme. Ce n'est pas ce qu'il a choisi. Il a encore choisi la fuite en avant, M. le Président.

Le gouvernement a déposé un projet de loi en catimini, sans consultation des municipalités, mais, qui plus est, dans le dos du ministre des Affaires municipales. Il faut le faire. Il faut le faire. Avec des amis comme ça, vous savez, on se passe d'ennemis. M. le Président, ce gouvernement a réussi à retourner dos à dos des partenaires qui avaient réussi à établir des collaborations dans différents secteurs, partenaires qui s'appellent les commissions scolaires et les municipalités. Là on les retourne dos à dos parce que les commissions scolaires, évidemment, on les a affamées. Quand vous affamez les commissions scolaires, quand vous affamez quelqu'un, la première possibilité que vous lui donnez d'aller chercher des revenus, il ne dira pas non.

Alors, le gouvernement a trouvé le moyen. Il a littéralement affamé les commissions scolaires. Les commissions scolaires en commission parlementaire n'en demandaient pas tant, M. le Président. Ils demandaient simplement de réajuster, de leur permettre de choisir entre la meilleure des hypothèses, c'est-à-dire 6 % ou 0,25 $ des 100 $ d'évaluation. Le gouvernement et son ministre ont refusé. Elles n'en demandaient pas tant. Elles disaient au ministre: Écoutez, laissez-nous choisir l'une ou l'autre de ces hypothèses mais, je vous en prie, donnez-nous un financement qui nous permette, avec cet argent addi-

tionnel, de répondre à nos propres priorités. Parce que de plus en plus le gouvernement coupe les ressources aux commissions scolaires, les commissions scolaires se voient contraintes, avec les faibles taxes qu'elles retirent, de répondre aux objectifs du gouvernement.

Elles ne pouvaient plus, les commissions scolaires, se donner des programmes qui correspondaient à leurs besoins. Le gouvernement les a affamées, les a affamées, et ensuite il a dit: Ah, bravo, on va vous donner un pouvoir de taxation. Ce que nous savons, cependant, pertinemment, c'est que le gouvernement et les années à venir vont nous le prouver. Ce gouvernement va couper les subventions aux commissions scolaires dans la même proportion que les commissions scolaires vont aller chercher des taxes. Tout le monde le sait. On fait semblant et les commissions scolaires aussi parce qu'elles se disent dans le fond: Écoute, au moins, ça nous permet de respirer peut-être un an ou deux. Mais tout le monde le sait pertinemment. C'est que le gouvernement va réduire ses subventions dans la même proportion où les commissions scolaires vont aller chercher des nouveaux revenus avec les taxes.

Le gouvernement aura réussi à envoyer dos à dos les commissions scolaires et les municipalités comme il l'a fait, d'ailleurs, avec beaucoup d'habileté - mais curieusement, c'est toujours le même ministre - entre les universités et les étudiants. Les universités bien financées n'auraient pas réclamé à cor et à cri le dégel des frais de scolarité, M. le Président, et je pense plus particulièrement aux universités du Québec, à l'Université de Sherbrooke; elles étaient contre un dégel des frais de scolarité jusqu'à ce qu'on les affame suffisamment et que le ministre leur dise: Écoutez, vous êtes en arrière de moi pour le dégel des frais de scolarité parce que... ne comptez pas sur moi pour augmenter vos budgets.

Alors, qu'est-ce que les universités... Est-ce qu'elles avaient une possibilité, une alternative? Non, M. le Président. Elles se sont tournées du côté du ministre. Elles ont dit: Oui, on est d'accord. On va vendre votre idée de dégeler les frais de scolarité. On a retourné dos à dos les universités et les étudiants. Mais avec le résultat, et l'histoire nous le dira, les prochaines années nous le diront, que les universités n'auront pas plus de budgets, continueront à être sous-financées, sauf que ça coûtera plus cher pour aller à l'université et ce ne sera pas accessible à tout le monde. C'est ça le problème.

Ce gouvernement va passer à l'histoire comme le gouvernement des taxes régressives. Qu'est-ce que c'est qu'une taxe régressive, M. le Président? C'est une taxe qui s'applique aveuglément, quel que soit le revenu des personnes. Et je vais vous en donner un exemple. Je l'ai fait comme ça, sur le coin de la table. Il y en a tellement d'exemples, de taxes, de tarifications qui sont venues réduire la qualité de vie des plus démunis que c'est scandalisant. M. le Président, dès son élection en 1985, le gouvernement prenait deux décisions. Je m'en rappellerai toujours parce que ça m'avait frappée. La première décision, c'était de réduire les impôts pour les hauts revenus. Ceux qui avaient des revenus de 70 000 $, 75 000 $ par année et plus réussissaient à remettre dans leurs poches environ 80 000 000 $ par année.

Mais, dans la même session, on décidait de ne plus indexer trimestriellement les allocations des bénéficiaires d'aide sociale, et l'on économisait 31 000 000 $. On économisait 31 000 000 $ sur ceux qui sont les plus démunis au Québec, sur ceux pour lesquels on est incapable de créer de l'emploi encore aujourd'hui. Et on continue de les affamer parce qu'on ne fait pas la guerre à la pauvreté au Québec avec ce gouvernement, on fait la guerre aux pauvres. (21 h 30)

M. le Président, des exemples. À la Régie du logement, il va en coûter 25 $ pour ouvrir un dossier. Vous et moi, les députés, on le ferait, on n'a pas trop de problèmes. Sauf que celui dont le logement coûte le tiers de ses revenus, il n'aura pas le moyen de sortir les 25 $ pour aller se défendre contre les abus d'un propriétaire. Mais le propriétaire va pouvoir y aller, cependant; ça, c'est régressif.

M. le Président, pour enregistrer une association en vertu de la troisième partie de la Loi sur les compagnies, il en coûtait 25 $. C'est sans but lucratif. C'est généralement pour venir en aide à ses concitoyens. C'est bénévole. Il en coûte 100 $ actuellement. L'accès à l'information à la CARRA, qui est la Commission administrative des régimes de retraite et d'assurances, on va être obligés de payer pour y avoir accès.

La "désassurance" des services de santé, M. le Président, ce n'est pas grave. On donnait droit à des examens dentaires pour des enfants de moins de 14 ans, deux fois par année. Ce gouvernement l'a porté à huit mois. Moi, ça ne me dérangera pas beaucoup; mes enfants, ils vont y aller au besoin. Et s'ils ont besoin d'y aller aux quatre ou cinq mois, ils vont y aller. Sauf que si vous êtes pauvres, ils ne peuvent pas y aller. C'est ça une taxe régressive, M. le Président.

La désassurance de certains médicaments, moi non plus, ça ne me dérangera pas. En plus, j'ai une carte d'assurance-maladie additionnelle. Je vais aller chercher mes médicaments parce que je suis, en plus, assurée. Mais ce n'est pas le cas pour les assistés sociaux, ce n'est pas le cas pour les personnes âgées.

Le resserrement des critères d'admissibilité aux HLM. Ce sont souvent des familles monoparentales et souvent des femmes qui ont besoin d'une qualité de logement à laquelle elles n'ont pas accès en raison des revenus qui sont faibles. On le sait, les femmes gagnent le tiers de moins de revenus que les hommes. Un étude canadienne

qui vient juste d'être déposée nous apprend que 50 % des femmes vivent en dessous du seuil de la pauvreté; c'est énorme. On a resserré les critères. En resserrant les critères, on affecte encore une fois les plus démunis.

On s'apprête, par le biais du projet de loi qui est sur la table, à faire une ponction dans le Régime d'assurance automobile du Québec. Mais avant ça, qu'est-ce qu'on a fait? On a modifié cette loi-là de manière que les femmes au foyer n'aient pas le droit de compensation pour perte de revenus, parce que, supposément, des revenus, elles n'en ont pas. Curieusement, ces femmes paient des assurances automobiles, mais elles n'ont pas la même couverture. Elles n'ont pas droit à cette couverture-là. Curieusement, les listes d'attente s'allongent lorsque vous êtes victime d'un accident de voiture et que vous avez à faire évaluer votre dossier pour fins de compensation. Mais on fait une ponction là-dedans pour aller mettre ça sur les routes. M. le Président, qui est-ce qui paie là-dedans? Ce sont les plus démunis. Vous et moi, ça ne nous dérangera pas beaucoup, nous avons une assurance-revenu, une garantie d'être au moins six mois, peut-être un an, peut-être plus, je ne le sais pas, avec un revenu décent, 80 % ou 100 % des revenus. Ça ne nous dérangera pas, ça, sauf que ça dérange encore une fois les plus démunis.

Les tarifs d'électricité. Que vous soyez fortuné, que vous gagniez 50 000 $, 75 000 $ ou 10 000 $ par année, votre facture d'électricité, au 1er janvier 1991, aura crû de 23 %. Quand on sait que les foyers les moins bien chauffés, qui coûtent les plus cher en électricité, ce sont les personnes les plus défavorisées qui les occupent. M. le Président, ça aussi, ça s'appelle une taxe régressive.

Le resserrement des critères d'admissibilité à l'aide juridique, c'est un déni de justice. Il nous arrive souvent de penser que les États-Unis sont moins avancés que nous en matière de programmes sociaux. Pourtant, tout citoyen, quel que soit son revenu, peut avoir recours à l'aide juridique. S'il veut se choisir un avocat à ses propres frais, il peut le faire, mais tout le monde y a droit. Ici, on a tellement resserré les critères qu'une personne qui travaille au salaire minimum n'a plus accès à l'aide juridique, mais elle ne peut pas non plus se payer d'avocat. Donc, on vient de nier à toute une catégorie de Québécois et de Québécoises le droit à la justice.

La taxation scolaire, je le rappelle, vient introduire une iniquité fondamentale en ce qui a trait à l'accès à des services égaux. J'écoutais tout à l'heure le député de Sauvé qui disait: Cette loi vient aussi modifier la Loi sur l'enseignement privé. Je n'oserai pas m'embarquer là-dessus parce que, chaque fois, ça me rend furieuse. On a continué à développer le réseau privé, parce que les gens qui sont capables de se le payer, y compris dans les régions, vont pouvoir envoyer leurs enfants à l'école privée, tandis que ceux qui ne le pourront pas vont avoir des écoles où il y aura de moins bonnes bibliothèques, de moins bons locaux, moins de services. Mais qu'à cela ne tienne, ceux qui sont privilégiés pourront toujours se tourner du côté des écoles privées parce que le ministre est fort là-dessus. Il a continué à développer les écoles privées, évidemment, au détriment des écoles publiques.

M. le Président, le ministre, avec son gouvernement, a rompu unilatéralement le pacte fiscal municipal, sans consultation, au plus grand mépris d'autres élus au Québec. Une attitude aussi méprisante est totalement inqualifiable. Moi, je veux bien qu'Ottawa soit méprisant à notre endroit, mais on réplique, j'espère, quand on a le goût de se tenir debout, à moins que le premier ministre ne soit en train de nous vendre, ce qui ne m'étonnerait pas, M. le Président. Mais on peut réagir lorsque le gouvernement fédéral ou les députés fédéraux viennent s'en prendre aux élus...

M. Lefebvre: Question de règlement, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Cannon): M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Lefebvre: Je ne sais pas si on peut dire que l'exemple vient de haut. L'exemple vient du député d'Abitibi-Ouest que vous avez ramené à l'ordre tout à l'heure, M. le Président. La députée de Jonquière parce qu'elle manque d'originalité... De Chicoutimi. Ce n'est pas élogieux pour vous de vous comparer au député de Jonquière, je m'excuse.

Mme Marois: Une question de règlement. Je pense que les propos que...

Le Vice-Président (M. Cannon): Je vais me lever, Mme la députée. Mme la députée de Taillon.

Mme Marois: Ça m'étonne chaque fois. Le leader adjoint du gouvernement se lève sur une question de règlement pour ramener à l'ordre une collègue qui intervient sur un dossier en utilisant des propos tout à fait parlementaires et lui-même utilise un argument et tient des propos qui, eux, ne le sont pas, M. le Président.

M. Lefebvre: M. le député, je me suis tout simplement excusé de l'avoir...

Le Vice-Président (M. Cannon): M. le leader adjoint du gouvernement, je vous reconnais.

M. Lefebvre: M. le Président, je disais tout à l'heure que Mme la députée de Chicoutimi a repris des propos du leader adjoint de l'Opposi-

tion à l'effet qu'on était, au moment où on se parie, en train de vendre le Québec. Je considère ces propos-là comme étant non parlementaires. Si, M. le Président, vous êtes d'accord avec moi, vous allez lui intimer l'ordre de retirer ces propos. C'est aussi simple que ça, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Cannon): Je demande à tous les députés, ici ce soir en Chambre, de bien vouloir respecter le règlement, les coutumes et les convenances que nous avons ici en cette Chambre. Je demanderai à la députée de poursuivre son intervention, lui soulignant qu'il lui reste à peine deux minutes.

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Il m'en reste assez...

M. Lefebvre: Question de règlement, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Cannon): M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Lefebvre: Je vous demande, M. le Président, de vous prononcer. Si vous considérez que les propos de la députée de Chicoutimi sont parlementaires, je vous demande de le dire. Si vous considérez qu'ils ne sont pas parlementaires, je vous demande de le dire et je me plierai à votre décision, M. le Président.

Mme Blackburn: Question de règlement, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Cannon): Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: Est-ce que le leader adjoint a le droit de remettre en question la décision du président? C'est la première chose qu'on m'a apprise ici en Chambre, qu'on n'avait pas à remettre en question une décision du président. Il a rendu sa décision.

Le Vice-Président (M. Cannon): J'ai effectivement rendu une décision. Je vous ai demandé, Mme la députée, maintenant de conclure. Il vous reste une minute et quelques secondes.

Mme Blackburn: Oui, M. le Président, suffisamment pour conclure...

M. Lefebvre: Question de règlement, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Cannon): M. le leader adjoint du gouvernement, j'ai rendu une décision et je demande à la députée de Chicoutimi de terminer son intervention. Est-ce que vous avez l'intention de soulever la même question de règlement?

M. Lefebvre: Oui, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Cannon): Alors, je m'excuse, M. le leader adjoint du gouvernement, je ne vous reconnais pas. J'ai demandé à la députée de conclure. J'ai rendu une décision sur cette question-là. Vous pouvez tirer les conclusions que vous désirez, M. le leader adjoint du gouvernement. J'ai rendu une décision. J'ai demandé à Mme la députée de conclure. (21 h 40)

Mme Blackburn: M. le Président, une minute pour conclure, simplement pour dire aux députés du gouvernement que, s'ils avaient le courage de tenir ici les propos qu'ils tiennent en dehors de la Chambre, ils s'inquiéteraient de ce qui est en train de se passer à Ottawa, au moins autant que nous nous inquiétons au nom des Québécois et des Québécoises, M. le Président. On est en train de maquignonner le lac Meech, M. le Président. Je ne sais pas si c'est parlementaire ou non, mais c'est une réalité. Et, M. le Président, le projet de loi qui est sur la table est totalement inacceptable et il s'est fait au plus grand mépris...

Le Vice-Président (M. Cannon): En conclusion, s'il vous plait!

Mme Blackburn: ...des premiers partenaires de ce gouvernement que sont les municipalités. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Cannon): Merci, Mme la députée. Je suis maintenant prêt à reconnaître le prochain intervenant, à moins, M. le ministre de l'Éducation, que vous n'ayez une intervention à formuler? Alors, M. le député de Rimouski, s'il vous plaît.

M. Michel Tremblay

M. Tremblay (Rimouski): M. le Président, il me fait plaisir d'apporter mon point de vue au sujet du projet de loi 69 que nous avons, ici devant nous, à prendre en considération, en première lecture.

Après avoir entendu la députée de Chicoutimi, dans ses propos, remettre en cause l'ensemble des taxes que nous avons ici au Québec, je m'interroge un peu sur la volonté de l'Opposition de donner au gouvernement les moyens d'aller chercher les sommes nécessaires pour offrir aux Québécois et aux Québécoises une qualité d'enseignement que tout le monde recherche.

J'entendais la députée de Chicoutimi nous dire que le fait d'augmenter ou d'aller chercher un peu plus de taxation dans l'assiette fiscale des municipalités, ça avait pour effet de nuire à la taxation des municipalités. Je dois vous dire que le fait qu'on ait élargi quelque peu le champ de taxation des commissions scolaires n'enlève rien aux municipalités et ça donne aux commis-

sions scolaires une marge de manoeuvre supplémentaire pour pouvoir offrir des services de qualité et, en même temps, des infrastructures scolaires adéquates pour la population du Québec, la population scolaire.

Lorsque la députée de Chicoutimi prétend que nous nous soustrayons, à ce moment-là, à notre responsabilité pédagogique, je lui rappellerai que nous, du gouvernement du Québec actuel, le gouvernement libéral, nous avons pris en considération toute la responsabilité pédagogique de l'enseignement élémentaire et secondaire au Québec. Et, à preuve, nous avons présentement une convention collective de signée avec tous les personnels de ce niveau-là et nous avons donné des augmentations de salaire à tous ces personnels. Et le fait d'avoir donné des augmentations de salaire rend ces personnels-là plus heureux, plus efficaces et, en même temps, améliore la qualité de l'enseignement. Nous avons également, comme gouvernement, ajouté au-delà de 250 professeurs dans le réseau de l'enseignement élémentaire et secondaire, ce que l'Opposition n'a jamais été capable de faire pendant les 10 années où elle a été au pouvoir. Nous avons aussi diminué le nombre d'élèves, de deux, à la première année de l'élémentaire, de façon à améliorer l'aspect pédagogique de ce secteur-là.

Alors, se faire dire par la députée de Chicoutimi que nous n'avons aucune responsabilité ou encore aucune intention d'améliorer l'aspect pédagogique dans le réseau de l'enseignement élémentaire et secondaire, ce sont des propos, à mon sens, qui ne se tiennent pas, qui ne se défendent pas quand on tient compte de la somme d'argent, comme gouvernement, que nous avons consentie pour améliorer les salaires des professeurs: au-delà de 77 000 000 $, ce n'est tout de même pas négligeable. Nous sommes, à ce moment-là, en mesure d'affirmer que l'appareil et que les services éducatifs seront nettement améliorés du fait que nous avons nécessairement consenti des sommes énormes et considérables pour le mieux-être du personnel enseignant.

Nous avons un aspect, nous, tant du contenu que du contenant. D'une part, nous voulons améliorer les infrastructures scolaires. Par l'intermédiaire de la ponction de taxes que nous allons chercher au niveau du milieu scolaire, nous allons, à ce moment-là, donner une marge de manoeuvre supplémentaire à nos commissions scolaires pour pouvoir mieux gérer leurs infrastructures scolaires, soit les écoles, les gymnases, les salles de cours, les salles de récréation, le système de ventilation, de climatisation, etc. Alors, la commission scolaire pourra profiter d'un supplément de 40 000 000 $ pour pouvoir leur donner un petit peu plus de responsabilités vis-à-vis de l'ensemble du parc immobilier qu'ils ont à gérer. Alors, contrairement à ce que la députée de Chicoutimi vient de prétendre et vient de dire, nous avons une préoccupation pour l'aspect pédagogique, ce que vous n'avez jamais eu comme gouvernement pendant les 10 années où vous avez été au pouvoir.

Une voix: Ça, c'est vrai.

M. Tremblay (Rimouski): Nous, nous avons une préoccupation pédagogique et, en même temps, une préoccupation pour améliorer les infrastructures scolaires de l'ensemble de la province de Québec.

Des voix: Bravo! Bravo!

M. Tremblay (Rimouski): Les finances des commissions scolaires, on pourrait en parler longtemps. Les commissions scolaires avaient globalement, dans la province de Québec, environ 150 000 000 $ de surplus accumulés, ce qui n'est pas énorme, j'en conviens, mais au moins qui leur donnait une certaine marge de manoeuvre. Elles étaient en sous-financement. Pourquoi étaient-elles en sous-financement? Vous êtes-vous posé la question, Mme la députée de Chicoutimi, vous qui êtes si familière...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le député, je vous prierais de vous adresser à la présidence dans votre exposé.

M. Tremblay (Rimouski): M. le Président, je m'en excuse profondément, je vais m'adresser à la présidence.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): C'est ça.

M. Tremblay (Rimouski): M. le Président, Mme la députée de Chicoutimi, est-ce qu'elle s'est posé la question, elle, sur le coût de la vie entre 1976 et 1985? Ça a coûté 84 %, eux, pendant qu'ils étaient au pouvoir, et ils ont indexé pour environ 44 %, laissant un écart de 40 %. C'est pour ça qu'on a un sous-financement dans l'ensemble du réseau, tant scolaire que collégial et universitaire. Cependant, nous, du gouvernement du Québec, du gouvernement actuel, nous avons pris nos responsabilités et nous avons injecté des sommes dans tout le réseau: élémentaire, collégial, universitaire et en recherche. Et nous sommes capables de livrer la marchandise deux fois mieux qu'eux l'ont fait pendant le temps où ils étaient là.

Des voix: Bravo!

Une voix: Ça, c'est un bon discours.

M. Tremblay (Rimouski): Quand j'entendais larmoyer, M. le Président, tout à l'heure la députée de Chicoutimi qui a la larme facile, qui semble vouloir dire qu'au Québec tout va mal, ainsi de suite, elle ne prend pas en considération les sommes considérables que nous avons consenties comme gouvernement pour améliorer l'en-

semble du réseau scolaire, collégial et universitaire. Seulement pour les universités en région, nous avons ajouté 5 200 000 $ dans le dernier budget; 5 200 000 $ pour trois universités en région: Chicoutimi, Rimouski et Abitibi. Et ça, jamais ils ne l'ont fait, eux. Ils n'ont même pas eu le courage d'indexer les enveloppes de fonctionnement. Dans les cégeps, ça a été la même affaire. Les cégeps ont eu des enveloppes de fonctionnement indexées pendant que, eux, ils n'indexaient pas les enveloppes de fonctionnement.

Tous les professeurs ont vu leur salaire coupé de 20 %. Tous les professeurs au Québec ont vu leur salaire coupé de 20 %. Imaginez-vous le climat que ça donnait dans les écoles et dans les institutions que nous avions. C'est le gouvernement précédent qui a fait ça. Nous, au contraire, nous avons respecté notre parole, nous avons respecté nos enseignants et nous leur avons consenti des augmentations de salaire convenables et acceptables et des conventions signées.

Des voix: Bravo!

M. Tremblay (Rimouski): M. le Président, lorsque j'entends la députée de Chicoutimi nous reprocher notre manque d'investissements au niveau de l'enseignement professionnel, nous avons ajouté 100 000 000 $ au niveau secondaire pour les enseignements professionnels. Aucun gouvernement n'avait osé adapter cette formation professionnelle aux besoins de 1990. Nous l'avons fait.

M. le Président, c'est un peu choquant de voir de quelle manière l'Opposition traite le gouvernement actuel, parce que nous agissons, parce que nous prenons nos responsabilités. On semble vouloir nous blâmer de vouloir améliorer et donner un service adéquat à la population du Québec, surtout à la population scolaire. (21 h 50)

J'entendais Mme la députée de Chicoutimi, M. le Président, tout à l'heure, nous dire qu'en Gaspésie, par exemple, dans le comté de Bona-venture, il y aurait une taxation supérieure à celle de Montréal ou des grands centres. Nous avons un régime de péréquation qui viendra équilibrer, qui viendra ajuster et en même temps créer une espèce d'équilibre pour l'ensemble de la province de Québec. Comme le niveau de taxation ou les immobilisations sont moins fortes dans les petits centres, nécessairement, il y aura une compensation qui viendra ajuster.

Alors, M. le Président, je vous dirai bien honnêtement que je serai tout à fait favorable aux dispositions du projet de loi 69. J'en conviens, je sais que c'est un peu un projet de loi qui nous oblige à faire une ponction de taxation au niveau de la population en général, mais cependant il faut comprendre que cette taxation va servir à améliorer les services au niveau des commissions scolaires, et c'est ça qu'il faut comprendre. Vous n'avez pas eu le courage de taxer. La seule chose que vous avez eu le courage de faire, le gouvernement précédent, ça a été d'endetter la province de Québec. En 1976, nous avions un déficit accumulé de 5 000 000 000 $. En 1985, nous avions 25 000 000 000 $ de déficit accumulé avec un service de la dette nettement difficile à absorber en 1985 et présentement. C'est toute la différence du monde. Pendant qu'ils endettaient la province de Québec, nous nous essayons d'améliorer les finances de la province de Québec. M. le Président, soyez assuré que je vais souscrire au projet de loi 69 et qu'il me fera plaisir de l'appuyer en temps et lieu. Je vous remercie.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Rimouski. Je reconnais maintenant le prochain intervenant, Mme la députée de Marie-Victorin. Mme la députée.

Mme Cécile Vermette

Mme Vermette: Merci, M. le Président. C'est avec intérêt que j'ai écouté le député de Rimouski, parce que je me disais: À un moment donné, il va bien arriver à nous apporter la situation réelle dans le milieu de l'éducation à l'heure actuelle, et peine perdue. En fart, j'ai l'impression que ce gouvernement et les membres de ce gouvernement, les députés et les élus, ont de la difficulté à voir actuellement que nous sommes rendus en 1990, qu'ils sont à leur deuxième mandat et que justement ils avaient fait des promesses électorales en 1985, disant qu'ils étaient là pour améliorer la situation. Nous sommes devant un deuxième mandat et nous voyons, nous devons faire un constat que plus ça avance, en fin de compte, plus la situation est épouvantable. Dans le domaine de l'éducation, on en a un fait à l'heure actuelle. Les municipalités, en fin de compte, sont obligées à l'heure actuelle de supplier le gouvernement de les consulter, alors qu'elles n'ont pas été du tout consultées; on a pris des décisions unilatéralement en ce qui concerne le champ de taxation en ce qui concerne les commissions scolaires. Les déficits au niveau des commissions scolaires se sont accumulés en fait à peu près de 625 000 000 $ depuis 1985 et, quant au système d'éducation, même l'éducation qu'on donne à nos enfants, jamais aujourd'hui, actuellement, les résultats n'ont été si peu efficaces. Qu'on regarde au niveau du primaire le nombre d'échecs, le nombre d'enfants qui ont des problèmes, des troubles de comportement ou qui doivent avoir affaire à des psychologues ou à toute autre mesure d'appui pour leur permettre de pouvoir continuer. Qu'on regarde au niveau secondaire le nombre d'enfants qui abandonnent leurs études, au niveau collégial,

le nombre de jeunes qui carrément s'en vont du circuit, parce qu'on n'est pas capables de trouver un système d'éducation qui correspond adéquatement à nos jeunes d'aujourd'hui, parce qu'on n'arrête pas continuellement de changer ces systèmes par des programmes-cadres, des programmes de tout ordre, de sorte qu'actuellement on peut dire qu'on a peut-être, selon ce gouvernement, les meilleures écoles, tes meilleurs profs, les meilleurs programmes. La seule chose qu'on pourrait constater à l'heure actuelle, c'est qu'il n'y a que les élèves qui sont impossibles, dans le système actuel de l'éducation. En fart, quand j'écoutais le député de Rimouski, c'est à peu près le constat qui me revenait en tête. Je me disais: Ça ne se peut pas.

Mais il faut manquer d'une certaine forme d'éclairage pour arriver à parler de cette façon-là. Je me dis: C'est peut-être normal dans leur cas parce que, lorsqu'on les questionne à la période de questions, c'est très difficile d'avoir des réponses, d'une part, et, quand on leur demande des faits précis, on se fait répondre de l'autre côté que ce n'est pas nos affaires, de ne pas se mêler de ça, que ça ne nous regarde pas.

Mais ce gouvernement oublie une chose: c'est que nous représentons le peuple du Québec, de la même façon qu'eux aussi, ils ont été élus pour représenter les Québécois et les Québécoises. Et manquer d'éthique, de cette façon-là, je trouve ça inadmissible. C'est faire preuve, en tout cas, d'un esprit étroit, d'un esprit qui n'est pas capable véritablement de faire sa propre critique. Il n'y a rien de plus dangereux que des gens qui sont convaincus de leur raisonnement et c'est un peu ce que nous avons actuellement. Quand j'écoute certains députés de l'autre côté de la Chambre, je suis obligée malheureusement de dire: Eh bien, plus on avance dans le temps, plus c'est pareil.

J'aimerais, M. le Président, soulever le fait que jamais nous, de ce côté-ci de la Chambre, nous n'avons, en tout cas, fait en sorte de mettre le Québec dans une situation aussi désavantageuse et jamais nous n'avons porté d'actes de trahison par rapport à l'ensemble des Québécois. Nous avons toujours voulu faire en sorte qu'au Québec nous soyons des gens fiers, dignes et nobles. Nous avons toujours défendu les intérêts particuliers des Québécois. Lorsque nous allions à Ottawa, nous étions capables de nous tenir debout et nous n'étions pas prêts à vendre le Québec aussi facilement.

Actuellement, on pourrait peut-être se demander pourquoi il y a tellement de camions tout autour, ici. C'est peut-être le temps de "crater" le Parlement et de l'envoyer à Ottawa parce que ça me semble...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Mme la députée, je vous rappelle, en étant très large, vous savez, la règle de la pertinence, et vous la connaissez très bien. Je voudrais vous rappeler que nous discutons du projet de loi 69, Loi modifiant la Loi sur l'instruction publique. Je vous permets de continuer votre intervention.

Mme Vermette: Je vous remercie, M. le Président. Mais je ne faisais qu'un parallèle entre les propos qu'affirmait le député de Rimouski et son étroitesse d'esprit ou son manque de critique par rapport à son gouvernement. Je trouvais que, inévitablement, je ne pouvais pas faire autrement que de faire ce parallèle, à l'heure actuelle, qui me semble très important parce qu'il y va de l'ensemble, un peu comme domaine de l'éducation, de notre avenir, M. le Président. Et, quand on parle de l'avenir d'un peuple, quand on parle de l'avenir, en fait, de nos jeunes, je crois qu'il est essentiel de démontrer exactement l'attitude, le comportement des gens qui sont au pouvoir à l'heure actuelle et quelle forme de démarche ils entreprennent pour défendre nos intérêts, et ce, dans tous les domaines, autant dans le domaine de l'éducation et plus particulièrement, M. le Président, au moment où il se passe des choses les plus essentielles, les plus cruciales pour notre avenir en tant que peuple collectif.

M. le Président, bien sûr qu'on se pose une question: Est-ce qu'il y a un premier ministre ici, au Québec? Est-ce qu'on est capables de compter sur ce même premier ministre et qu'il est capable de ramener à l'ordre ses ministres pour leur dire que ce qui est important, c'est non pas de se faire du capital politique en tant que ministres, mais de se faire beaucoup plus du capital politique en servant les intérêts du peuple québécois? Actuellement, ceci semble échapper à la majorité de ces ministres et semble aussi échapper à notre premier ministre. Je ne sais pas s'il a perdu le contrôle, où il en est rendu. Tout ce qu'on peut savoir, c'est que, depuis cinq jours, on ne le voit pas, on n'en entend pas parler ici, à l'Assemblée nationale. On a beau essayer de le questionner, de lui demander: Où vous orientez-vous, M. le premier ministre? Envoyez-nous un émissaire ici, au moins, à Québec, pour savoir exactement la situation. Peine...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Mme la députée, je vais vous lire l'article 239. "Le débat porte exclusivement sur l'opportunité du projet de loi, sur sa valeur intrinsèque, ou sur tout autre moyen d'atteindre les mêmes fins." J'attire votre attention sur l'article 239 et je vous permets de continuer votre intervention sur l'adoption du principe du projet de loi 69. (22 heures)

Mme Vermette: Oui, merci, M. le Président. Alors, ce que je suis en train de dire, M. le Président, c'est important. C'est important de s'occuper de notre avenir en tant que peuple et c'est important de s'occuper de l'avenir de nos jeunes aussi dans le domaine de l'éducation en

leur permettant de pouvoir compter sur un service d'éducation de qualité au Québec, un service d'éducation qui, peu importe la classe sociale à laquelle nous appartenons, fait en sorte que nous pouvons avoir un enseignement de qualité, à l'élémentaire, au secondaire, au collégial et même à l'université.

Bien sûr, tout le monde sait que, dans le domaine de la recherche, nous avons actuellement un énorme retard et qu'il est très important de reprendre ce retard. Il faut prendre les bouchées doubles, parce que, si nous voulons être concurrentiels sur l'ensemble des différents marchés, il nous faut, oui, former une main-d'oeuvre de qualité. Cette main-d'oeuvre de qualité se prépare très tôt et c'est vraiment en donnant aux étudiants un enseignement de qualité et des institutions aussi de qualité.

Pourquoi, M. le Président, favoriser uniquement l'élite? Pourquoi favoriser... Est-ce que les cerveaux se tiennent uniquement dans les écoles privées ou dans une forme d'élitisme? Je ne le crois pas. Il y a beaucoup de jeunes qui appartiennent au système public et qui sont tout aussi brillants. Malheureusement, si on ne leur apporte pas l'aide nécessaire ou un service d'éducation adéquat et de qualité, ils n'auront pas la chance de mettre à profit leur potentiel et ça, c'est désastreux. Je pense que ce qu'il nous faut actuellement c'est de mettre des efforts substantiels pour faire en sorte qu'au Québec, au niveau primaire et au niveau secondaire, nos écoles répondent aux besoins de la société moderne et future et à ses exigences pour nous permettre d'avoir justement des gens bien formés et des gens capables d'avoir un raisonnement qui favorise des décisions qui correspondent aux aspirations les plus profondes des gens d'ici, les gens du Québec, les gens de chez nous.

M. le Président, je ne vois pas pourquoi, unilatéralement, le gouvernement, le ministre des Affaires municipales enfin - c'est lui qui a eu le mauvais sort dans cette joute-là - a fait en sorte de prendre des décisions sans convoquer ses partenaires les plus importants, les maires des différentes municipalités, les gens des MRC et les unions de municipalités. Pourquoi ne pas les avoir consultés, alors qu'il se préparait à apporter des réformes substantielles dans le champ de la taxation, qui auront aussi des conséquences importantes sur les contribuables de celles-ci, puisqu'on verra les taxes augmenter dans les différentes villes du Québec en fonction de cette nouvelle imposition du niveau des taxes foncières qui seront prélevées par les commissions scolaires? Et là, on change complètement les règles du jeu.

Vous savez que, lorsqu'il y a eu l'entente fiscale de 1979, les municipalités ont laissé tomber certains privilèges pour vraiment se donner complètement à leurs nouvelles responsabilités dans le domaine de l'impôt foncier et, là, tout ça se voit chambardé du jour au lendemain sans qu'on ne les avertisse et sans crier gare. D'autant plus, M. le Président, qu'il faut sûrement relever le fait que, de plus en plus, on demande aux municipalités d'apporter un effort accru dans tous les champs d'activité. À cause de certaines formes de désengagement, de déresponsabilisation de l'État, le rôle des municipalités est de plus en plus lourd et on les appauvrit de plus en plus. On n'aura pas le choix. Si ce n'est pas ce gouvernement-ci qui va percevoir des taxes, ce sera ce gouvernement, le gouvernement des municipalités. À un moment donné, je pense que, effectivement, nous allons faire en sorte que la population dans son ensemble, c'est elle qui fera les frais de toutes ces prises de décisions inconsidérées de la part d'un gouvernement qui n'est pas capable de prendre de véritables responsabilités et, même plus, qui n'est pas capable d'avertir ses partenaires au moment où il est en train de faire de véritables et de profonds changements dans les règles du jeu.

Il est inacceptable, M. le Président, qu'un tel gouvernement se comporte de cette façon, d'une façon aussi cavalière à l'endroit, à part ça, d'amis privilégiés qu'il avait depuis de nombreuses années. En fait, tout le domaine des municipalités, on le sait fort bien, avait une tendance importante envers le gouvernement libéral et on s'aperçoit qu'actuellement on a beau être des bons amis de ce gouvernement, la parole donnée, on se demande ce que ça représente dans certains cas. Et on est obligé de constater, à l'heure actuelle, que, malheureusement, on avait fait confiance, dans le domaine des municipalités, des commissions scolaires, au gouvernement, mais que cette relation, en tout cas, elle a été rompue à un moment donné. Pourquoi? Pour permettre de faire plaisir à certains, mais tout en défavorisant un autre groupe.

Je ne crois pas qu'on puisse appeler cela gouverner que de favoriser un groupe au détriment d'un autre groupe. Je trouve que c'est tout simplement se déresponsabiliser en tant que gouvernement. Or, je sais fort bien que, de plus en plus, actuellement, il y aura, en tout cas, des échanges entre les différents niveaux de gouvernement local, c'est-à-dire les commissions scolaires et les municipalités. Il aurait été plus heureux, par contre, qu'on favorise un rapprochement entre ces deux groupes plutôt que de toujours maintenir un rapport de forces, qui n'est pas heureux, ce rapport de forces, pour la population parce qu'il empêche certaines fois d'avoir un esprit, non pas de compétition, mais de partenariat, qui est très important parce que, tout compte fait, M. le Président, ce sont toujours les mêmes contribuables qui sont les mêmes utilisateurs des services qui sont donnés tantôt par les villes et tantôt par les commissions scolaires.

Je pense qu'il faudrait prendre en compte que cette population, à un moment donné, il

faudrait peut-être l'alléger quelque part et arrêter de faire que ce soit toujours ces mêmes personnes qui doivent faire les frais des différentes orientations des gouvernements de cette façon-là. Or, je pense, M. le Président, que la loi 69 est vraiment une grave erreur. Elle ne favorisera pas non plus le développement attendu au niveau de nos commissions scolaires. Il aurait fallu en 1985, lorsque ce gouvernement a pris le pouvoir, qu'il prenne vraiment ses responsabilités dans le domaine de l'éducation et qu'il favorise justement le manque à gagner au niveau des commissions scolaires et, plutôt que laisser aller les bâtisses, de laisser aller l'ensemble des équipements dans un état de décrépitude, prendre ses responsabilités, les favoriser et permettre justement que les commissions scolaires puissent, elles aussi, accroître leurs dépenses convenablement sans être prises dans un entonnoir et être obligées, encore une fois, de se retourner vers les champs de taxation pour répondre adéquatement aux besoins de la population dans le domaine scolaire.

On dit toujours que ça dépend de la façon dont on traite nos écoles, que l'avenir d'un pays peut prendre une orientation importante. Je me demande si vraiment nous sommes convaincus que l'éducation est peut-être une des plus fortes richesses d'un peuple, parce que plus nos gens seront adéquatement éduqués, plus ils auront facilement accès aussi aux systèmes d'éducation, plus nous formerons des gens compétents, des gens qui seront qualifiés et qui pourront prendre les responsabilités qui s'imposent au moment de développement soit économique, industriel, culturel, à tout autre niveau. Et l'éducation devrait être, en tout cas, une priorité pour un gouvernement parce que c'est la base même de tout l'avenir d'un peuple, plutôt que d'y aller d'une façon aussi parcimonieuse, tel qu'on est en train de le faire.

Plutôt que de remettre ses responsabilités à d'autres ordres de gouvernement, je pense que le gouvernement devrait faire des efforts substantiels, que le ministre de l'Éducation, dans le domaine de l'éducation, devrait vraiment accroître davantage son aide substantielle pour permettre justement que les commissions scolaires, en fait, ne soient pas obligées de tordre les bras des contribuables, de tordre aussi les bras de leurs collègues dans le domaine municipal pour qu'on puisse répondre plus adéquatement aux besoins du domaine scolaire. (22 h 10)

Donc, M. le Président, je pense que le gouvernement a de la difficulté dans ce domaine comme dans bien d'autres aussi à prendre ses véritables responsabilités. Nous voyons bien, nous savons bien que c'est encore les petits qui font toujours les frais. Nous savons que, dans certaines régions, ils seront plus durement pénalisés que dans certaines grandes villes comme Montréal ou dans l'ouest de Montréal et que, effec- tivement, il y en aura qui, malheureusement, ne pourront plus garder une maison parce que, là, ça ne paraîtra pas trop, mais plus ça ira, plus les taxes augmenteront et ils auront des difficultés, à un moment donné, sur le plan financier. Ils devront choisir d'autres quartiers pour envoyer leurs enfants à l'école. Et encore une fois, ce seront des jeunes, des enfants qui seront pénalisés et qui auront de la difficulté à recevoir des services d'éducation suffisants et de qualité, non pas parce que les enseignants ne sont pas capables de donner un enseignement de qualité, mais parce qu'on ne pourra pas leur donner tout le matériel pédagogique. On ne pourra pas, finalement, leur permettre un encadrement qui favorise une qualité de vie dans le domaine de l'enseignement. Et je pense que c'est très important de développer ce réflexe d'une qualité de vie dans le milieu de l'enseignement et ce, au niveau du primaire et au niveau du secondaire puisque c'est là qu'on développe le désir, le goût d'apprendre et le goût de vouloir aller beaucoup plus loin.

M. le Président, je trouve ça dommage qu'à l'heure actuelle on passe une loi de cette façon-là, qu'on passe une loi qui touche d'une façon aussi inaccoutumée le système de la taxe foncière, tant au niveau municipal qu'au niveau scolaire. Et encore une fois, il faut le rappeler, ceci s'est fait pratiquement en cachette, sans que les principaux "concernés" puissent être mis au courant. Ils ont été mis devant des faits, ils ont dû s'ajuster, ils ont dû frapper plusieurs fois encore pour qu'on les écoute et, encore une fois, c'est parce que l'Opposition a fait une farouche offensive vis-à-vis de ce projet de loi, ce qui fait en sorte qu'on pourra arriver à de meilleurs résultats. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (m. bissonnet): merci, mme la députée. je reconnais maintenant mme la députée de matane. mme la députée, la parole est à vous.

Mme Claire-Hélène Hovington

Mme Hovington: Merci, M. le Président. D'abord, avant d'entrer dans le vif du sujet du projet de loi 69, permettez-moi, M. le Président, de faire une mise au point vis-à-vis de certains propos que l'Opposition a tenus depuis le début de ce débat, c'est-à-dire le député d'Abitibi-Ouest et la députée de Chicoutimi qui accusaient le premier ministre du Québec d'être en train de vendre le Québec à Ottawa.

Je voudrais lire ici un communiqué de presse qui sort à l'instant, en provenance du cabinet du premier ministre et qui dit: Le premier ministre du Québec...

Mme Marois: M. le Président, question de règlement!

Mme Hovington: ...M. Robert Bourassa... Mme Marois: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît! Mme la députée, j'ai une question de règlement. Mme la députée de...

Mme Marois: Oui. M. le Président...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît! S'il vous plaît! Mme la députée de Taillon, je vous cède la parole sur une question de règlement.

Mme Marois: Merci, M. le Président. Est-ce que, lors du débat que nous avons à ce moment-ci, il est possible de sortir complètement du sujet, de faire une déclaration ministérielle, à toutes fins pratiques, ou de lire un communiqué qui ne concerne en aucune espèce de façon la question dont nous discutons?

Une voix: Vous ne savez même pas ce qu'il y a dedans.

Mme Marois: Je veux savoir, M. le Président, si cela est possible.

Une voix: Elle ne sait même pas ce qu'il y a dedans.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, je vais vous écouter sur la question de règlement, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Lefebvre: M. le Président, à deux ou trois reprises, à l'occasion de l'intervention du député d'Abitibi-Ouest, à l'occasion de l'intervention de la députée de Chicoutimi, à l'occasion de l'intervention d'autres députés de l'Opposition, on a fait référence aux discussions qui se tiennent actuellement à Ottawa entre les différents premiers ministres du Canada et le premier ministre fédéral. Je ne répéterai pas ce qu'on a mentionné relativement a l'attitude du premier ministre du Québec, vous vous en souviendrez. Et celui qui vous a précédé sur le banc a eu à décider sur des interventions que j'ai faites. Au moment où on se parle, M. le Président, on a des informations à l'effet que le premier ministre du Québec se serait retiré de la table de négociations à Ottawa. Je considère, M. le Président, compte tenu de tout...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le leader, premièrement, je tiens à vous dire que j'ai écouté la question de règlement de Mme la députée de Marie-Victorin et...

Mme Marois: De Taillon.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): ...de

Taillon, je m'excuse, et je vous écoute vous-même, mais je n'ai pas encore entendu Mme la députée de Matane me dire ce qu'elle voulait me dire. Je ne peux pas vous dire à ce moment-ci sur quoi porterait la question de règlement. Mais je tiens à dire à la députée de Matane, comme à tous les députés qui siègent dans cette Assemblée, que, lorsqu'on étudie un projet de loi en deuxième lecture, il y a l'article 239, on peut faire des exemples dans un projet de loi...

Une voix: Des parallèles.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Des parallèles... Madame vous avez presque utilisé les mots que je voulais utiliser. Et je tiens à vous dire, au niveau de la pertinence... Et j'attire votre attention à l'effet que vous êtes sur le projet de loi 69, l'adoption du principe de la Loi modifiant la Loi sur l'instruction publique. Mais, au moment où je vous parle, je ne peux pas entendre de questions de règlement parce que je n'ai pas entendu les propos que vous vouliez dire. Je vous cède la parole, Mme la députée de Matane.

Mme Hovington: Merci, M. le Président. Je vais parler justement du projet de loi 69, M. le Président, projet de loi sur le financement des commissions scolaires. Ce projet vient corriger une situation de déséquilibre dans le domaine scolaire et plusieurs tentatives du gouvernement et plusieurs projets de loi du gouvernement justement viennent faire en sorte d'améliorer les situations au Québec. Et ceci, encore ce soir on en a un exemple, M. le Président, dans la personne du premier ministre, M. Robert Bourassa, qui vient de se retirer de la conférence constitutionnelle à Ottawa, justement pour préserver l'avenir des Québécois et de toutes les Québécoises du Québec. M. Bourassa travaille actuellement pour l'avenir des Québécois et des Québécoises à Ottawa. En ce sens, il n'est pas en train de vendre le Québec.

Comme le projet de loi de M. Ryan, ce soir, vise à corriger une situation de déséquilibre dans le monde scolaire, un déséquilibre qui remonte à la fin des années soixante-dix, et qui n'a fait que croître depuis lors, je voudrais utiliser le temps qui m'est alloué, dans cette discussion sur le principe, pour montrer la pertinence et le bien-fondé...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît, Mme la députée, je voudrais demander à vos collègues du côté ministériel de bien écouter votre intervention. Mme la députée, vous pouvez poursuivre.

Mme Hovington: ...de ce projet de loi. Eu égard aux problèmes du financement de l'éducation primaire et secondaire au Québec, et pour bien saisir la raison .d'être du projet de loi

présenté par le ministre de l'Éducation et de l'Enseignement supérieur, il faut absolument jeter un regard sur le financement de l'éducation primaire et secondaire au début des années quatre-vingt-dix chez nous, ici au Québec. Ce regard doit être guidé par trois grandes considérations: D'abord, la première considération est relative au contexte budgétaire du début de la présente décennie. Et la seconde, au palier décisionnel que représentent les commissions scolaires. Enfin, la troisième considération tient aux mérites - et aux mérites au pluriel, M. le Président - des dispositions du projet de loi proprement dit. le financement de l'éducation primaire et secondaire constitue, nous le savons, une priorité budgétaire chez nous depuis la révolution tranquille. les dépenses en matière d'éducation primaire et secondaire ont connu une croissance importante dans les années soixante et dans les années soixante-dix pour mettre en place le réseau d'écoles primaires et secondaires. jusqu'en 1979, m. le président, ces dépenses étaient financées, en grande partie, par le gouvernement et en partie par l'impôt foncier scolaire. mais en 1979, à la suite d'une entente avec les municipalités, la part du gouvernement du financement de l'éducation primaire et secondaire s'est accrue, et celle de l'impôt foncier a diminué à travers l'imposition de la règle du 6 % ou du 0,25 $ du 100 $ d'évaluation. la croissance de la part gouvernementale du financement a donc été augmentée de façon très substantielle. elle a crû en fait de plus de 5 % pour atteindre près de 94 % du financement total, tandis que celle des commissions scolaires était ramenée à 6 %. (22 h 20)

Cette entente, qui a presque sorti les commissions scolaires du champ foncier et transféré au gouvernement la quasi-totalité du financement de l'éducation primaire et secondaire, a été réalisée dans un contexte où l'état des finances publiques importait peu. Aux équilibres budgétaires, l'administration péquiste préférait la fuite en avant dans l'endettement, M. le Président. Ainsi, pour le gouvernement péquiste du temps, partisan d'un État toujours en manque de responsabilités, il allait de soi que l'État doive financer presque entièrement l'éducation primaire et secondaire au Québec et ceci, bien sûr, sans égard à l'état des finances publiques ni non plus sans égard pour le caractère concurrentiel de la fiscalité québécoise.

Et on sait que c'est au milieu de la décennie quatre-vingt que cette vision des choses est apparue dépassée, en raison, notamment, de la mondialisation des économies. On s'est rendu compte qu'avec cette mondialisation de l'économie le Québec est placé directement en concurrence avec ses voisins de l'Ontario ou ses voisins des États de la Nouvelle-Angleterre pour sa fiscalité et que cette concurrence est une donnée incontournable de notre époque. C'est essentiel, pour permettre aux citoyens et citoyennes du Québec de maintenir leur niveau de vie dans ce monde de grande transformation économique.

Et, conscient de cette nécessité, le gouvernement libéral a profité des années de prospérité de la décennie quatre-vingt pour redresser d'abord les finances publiques et améliorer ensuite la compétitivité de notre fiscalité. À cet égard, nous avons réduit l'écart avec l'Ontario. Cet écart, vous vous souvenez, M. le Président, était de 10 % pour les particuliers en 1985. Cet écart a été réduit à 2,3 % en 1990. Pour l'écart fiscal entre les entreprises, il en va absolument de même. Cet écart était de 10,5 % en 1985 pour les entreprises et il n'est plus maintenant que de 3,5 % en 1990.

La période de prospérité a donc permis cette amélioration de la compétitivité de notre fiscalité tout en continuant d'assumer la quasi-totalité du financement de l'éducation primaire et secondaire, et cette situation a été rendue possible par ces années de grande prospérité. Mais le ralentissement économique que nous connaissons maintenant, la diminution des paiements de transfert de l'ordre de 1 300 000 000 $, l'augmentation des frais de la dette constituée par l'administration péquiste ne permettent plus de continuer dans cette voie sans compromettre soit l'avenir des jeunes générations en haussant le déficit, soit en anéantissant les progrès réalisés par la fiscalité québécoise.

Le gouvernement, M. le Président, n'a plus les moyens de financer 94 % de l'enseignement primaire et secondaire. Le contexte économique oblige le gouvernement à faire davantage appel aux commissions scolaires dans le financement de l'éducation primaire et secondaire. Leurs contributions de 6 % à ce financement n'apparaissent plus adéquates, à la lumière de circonstances économiques où la croissance économique est à peine supérieure à 1 % par rapport à 3 % en 1987 et 1988. C'est, M. le Président, le premier motif qui a amené le gouvernement à revoir l'entente de 1979 sur l'impôt foncier.

Le second motif qui a amené le gouvernement à revoir cette entente tient au fait que les commissions scolaires ont, au fil des ans, vu leur part de l'impôt foncier diminuer. Cette part représentant 8,8 % en 1980-1981 a chuté à 7,4 % en 1989-1990, soit de 1,4 %, ce qui est évidemment très significatif. Cela a eu pour effet que les commissions scolaires ne retirent plus que 264 000 000 $ en 1989-1990 de l'impôt foncier, tandis que les municipalités ont recueilli 3 300 000 000 $ pour la même année; 264 000 000 $ pour les commissions scolaires, 3 300 000 000 $ pour les municipalités. L'ordre de grandeur est révélateur, M. le Président, de la sous-représentation des commissions scolaires dans le champ de l'impôt foncier et de la surreprésentation des municipalités dans le champ foncier.

Le troisième motif qui a amené le gouver-

nement à revoir cette entente de 1979 tient au fait que cette sous-représentation des commissions scolaires n'a aucune équivalence dans les autres provinces. Il n'existe pas d'endroit au Canada, pas un seul endroit au Canada, où la part du financement des commissions scolaires à même l'impôt foncier est aussi mince. Dans la plupart des autres provinces canadiennes, et particulièrement en Ontario, on a su conserver en matière de financement scolaire, un régime beaucoup plus équilibré que celui qui prévaut aujourd'hui au Québec. L'impôt foncier contribue au minimum dans les autres provinces à 25 % du financement scolaire. Le quatrième motif à l'origine de la révision par le gouvernement de l'entente de 1979 tient au fait qu'elle s'est faite aux dépens des commissions scolaires comme palier inférieur de gouvernement.

Après ce que je viens d'exposer, M. le Président, il est assez facile de comprendre que les commissions scolaires, comme palier de responsabilité locale, ont été très affaiblies par la loi 57 de 1979. Au moment de son adoption, cette loi 57 avait été présentée par le gouvernement péquiste comme un renforcement de l'autonomie locale. Or, M. le Président, ce renforcement de l'autonomie locale n'en était pas un, dans la mesure où l'on renforçait les pouvoirs des municipalités en leur assurant une quasi-exclusivité du champ d'impôt foncier et, surtout, en renforçant le contrôle de l'État sur les commissions scolaires. Est-ce là un renforcement de l'autonomie locale, lorsque l'on rend plus dépendant un tiers vis-à-vis de l'État ou ne serait-ce pas plutôt une centralisation? En effet, ce que les gens d'en face ont fait, M. le Président, c'est de faire passer une centralisation pour un renforcement de l'autonomie locale.

M. le Président, j'en arrive maintenant au projet de loi proprement dit. Le projet de loi 69 présenté par le ministre de l'Éducation et de l'Enseignement supérieur vient-il corriger la situation de déséquilibre créée par la loi 57 de 1979? En fait, il vise à redonner aux commissions scolaires certaines responsabilités et les moyens de les assurer à travers un accès plus large au champ d'impôt foncier. Il aura d'abord pour effet - et c'est important - d'améliorer l'enracinement local de commissions scolaires et ce, à plusieurs niveaux tant culturel qu'économique. Au plan économique, un meilleur enracinement local contribuera à faciliter l'établissement de liens entre les entreprises et les écoles, ce qui n'est pas négligeable dans le contexte de nos énormes besoins en formation professionnelle, faciliter l'établissement de liens entre les entreprises et les écoles.

Le projet de loi a aussi l'avantage de rapprocher le citoyen du palier de responsabilité que représentent les commissions scolaires. C'est un secret de polichinelle, M. le Président, que depuis quelques années, peut-être même une dizaine d'années, le palier scolaire ne suscite plus guère d'intérêt pour les citoyens. Aux élections scolaires, les très faibles taux de participation sont, à cet égard, hautement révélateurs. Le ralentissement des commissions scolaires comme palier significatif d'autorité ne pourrait, à ce chapitre, qu'être bénéfique. Les citoyens se sentiront davantage concernés par la vie scolaire dans leur milieu, dans la mesure d'une contribution plus significative de leur part.

Le projet de loi 69 a aussi un autre avantage, celui d'augmenter les ressources et les dispositions des commissions scolaires. Les commissions scolaires disposeront, avec cette loi, de plus ou moins 40 000 000 $ de plus pour faire face à des besoins d'équipement, d'entretien, d'immobilisations. On connaît déjà, M. le Président, l'état de certaines de nos écoles. Un certain nombre ont grandement besoin d'amélioration et de restauration.

Et il y a un autre avantage au projet de loi présenté par le ministre, qui mérite aussi d'être souligné. Ce projet de loi met fin à une tendance à l'exclusion des commissions scolaires du champ foncier. Les commissions scolaires puiseront dans le champ de l'impôt foncier une somme de l'ordre de 320 000 000 $ en 1990-1991, et l'année 1990-1991 marque ainsi le retour dans un champ d'impôt qui avait été traditionnellement le leur avant 1979. Et, par la même occasion, la part des commissions scolaires dans le financement de leurs activités passera de 6 %, qui était leur niveau depuis 1979, à 12 %. Si l'on considère que même en doublant elle demeurera nettement inférieure à la moyenne canadienne, il s'agit là d'un simple réajustement des choses.

Pour les raisons que j'ai évoquées, M. le Président, le projet de loi présenté par le ministre Ryan est pleinement justifié. La situation de déséquilibre créée par la loi 57 de 1979 devait être corrigée. Les commissions scolaires retrouveront les éléments essentiels à la vitalité du niveau de juridiction qu'elles représentent dans notre société. Elles sont, au même titre que les municipalités, des lieux essentiels à l'expression de la démocratie locale. Le gouvernement, pour sa part, continuera de financer l'éducation primaire et secondaire dans des termes qui sont compatibles autant avec ses ressources qu'avec les idéaux d'accessibilité et de qualité de l'éducation qui sont les siens. (22 h 30)

Et en ce qui concerne la capacité concurrentielle de la fiscalité québécoise, elle sera, par ce projet de loi, préservée. Et c'est là une grande chose, dans le contexte économique actuel, où il faut être extrêmement soucieux de notre prospérité économique et surtout éviter d'ériger des obstacles qui auraient pour effet de remettre en cause les gains précieux que nous ont permis les années de grande prospérité de la seconde moitié du milieu de cette décennie. Et,

quant aux municipalités, le projet de loi ne modifie en rien, mais en rien la situation actuelle. Elles n'auront pas à augmenter leurs taxes à cause des dispositions de ce projet de loi. Et notre gouvernement continue de les considérer comme des partenaires essentiels dans tous les dossiers les concernant de près ou de loin. C'est pour cette raison, M. le Président, que je défendrai le projet de loi présenté par le ministre de l'Éducation et de l'Enseignement supérieur. Merci, M. le Président.

Des voix: Bravo.

Le Vice-Président (M. Cannon): Merci, Mme la députée de Matane. M. le député de Pointe-aux-Trembles.

M. Michel Bourdon

M. Bourdon: M. le Président, le projet de loi qui est devant nous est présenté dans les termes suivants. Dans les notes explicatives, on dit: "Ce projet de loi apporte diverses modifications à la Loi sur l'instruction publique relativement aux modalités de financement des commissions scolaires et du Conseil scolaire de l'île de Montréal." Cependant, la réalité que ce projet de loi recouvre est plus vaste. Il s'agit d'un nouveau partage fiscal que le gouvernement a décidé unilatéralement d'appliquer aux élus locaux, aux régions du Québec, sans tenir compte d'aucune manière des représentations des intéressés. En effet, il s'agit techniquement d'appliquer aux commissions scolaires et au Conseil scolaire de l'île de Montréal les changements fiscaux que le gouvernement a décidé unilatéralement d'apporter pour l'ensemble des commissions scolaires du Québec. Chacun sait de quoi il s'agit. On retourne vers les commissions scolaires 280 000 000 $ de dépenses, les dépenses d'entretien et d'immobilisation qui, avant, étaient assumées par le gouvernement du Québec et on les fait, du même souffle, taxer pour 320 000 000 $, leur laissant une espèce de commission de l'ordre de 40 000 000 $ ce qui, à l'égard de l'ensemble des besoins des commissions scolaires, est bien peu d'argent. Et par ailleurs, on soulage le budget du gouvernement du Québec de 280 000 000 $. Et donc, on a raison, du côté de l'Opposition officielle, de dire et de répéter que c'est une façon hypocrite de faire taxer par d'autres; le gouvernement se sert du niveau scolaire pour effectuer une ponction fiscale qui va coûter en moyenne 140 $ par année par famille. Et, de cette manière, il pense alléger ses difficultés budgétaires, dont il est vrai qu'elles proviennent en partie du gouvernement d'Ottawa, qui a réduit toujours davantage, depuis quelques années, les sommes qu'il dépense au Québec.

Par ailleurs, on peut comprendre les municipalités de voir d'un mauvais oeil qu'un champ de taxation qui leur avait été réservé en 1979 leur soit restreint. Et, à cet égard, je voudrais rappeler, M. le Président, que la loi 57 de 1979 n'avait d'aucune manière comme résultat d'enlever de l'autonomie aux commissions scolaires. Elle venait plutôt sanctionner un nouveau pacte fiscal; on ne répétera jamais assez que celui-là avait été convenu et négocié et que celui qui est devant nous maintenant est imposé aux interlocuteurs locaux. rappelons qu'avant 1979, m. le président, les municipalités se finançaient par l'impôt foncier et diverses sources locales, mais qu'elles recevaient un quart de la taxe de vente qui, à l'époque, était de 8 %. le pacte qui a été fait a impliqué, de la part des municipalités, qu'il fallait renoncer à leur part d'une taxe évolutive, qui est la taxe de vente. évolutive dans le sens que, à mesure que les dépenses augmentaient, les municipalités avaient un quart de la taxe de vente qui venait dans leurs coffres. on y substituait une taxe qui n'est pas évolutive, qui est la taxe foncière, une taxe dont on dit qu'elle est régressive, parce que la valeur de la propriété ne correspond pas toujours à la capacité de payer de ceux qui l'habitent; des retraités, par exemple, qui habitent une résidence sur ihe de montréal, peuvent avoir des revenus insuffisants, mais, si la valeur de leur propriété augmente, leur taxe foncière fait qu'ils doivent payer davantage. pour les municipalités, il y avait, en contre-partie, de leur réserver la quasi-exclusivité du champ de l'impôt foncier, puisqu'on réservait aux commissions scolaires 0,25 $ du 100 $ d'évaluation, ou 6 % des dépenses nettes de chaque commission scolaire.

C'était donc un pacte, et le gouvernement, pour le briser, nous invoque maintenant un certain nombre de choses. Par exemple, on parle d'instituer une plus grande participation par une plus grande taxation. Je pense, M. le Président, qu'il s'agit là d'un argument assez creux. Je ne pense pas que c'est en taxant davantage que les gens vont participer davantage au niveau scolaire. Par ailleurs, sur l'île de Montréal, il faut bien ajouter, M. le Président, que le gouvernement ne se contente pas de forcer une hausse de la taxe scolaire, qui va atteindre, sur l'île de Montréal, 121 % - elle va plus que doubler, la taxe scolaire - mais dans le dernier budget on a encore une fois attaqué les élus locaux et régionaux, en particulier dans la Communauté urbaine de Montréal, en annonçant aussi l'intention de l'État de se désengager quant au financement des dépenses d'opération du transport en commun. Dans le cas de la Communauté urbaine de Montréal, M. le Président, cela va représenter entre 150 000 000 $ et 175 000 000 $ qui vont tomber soit sur les épaules des contribuables, encore une fois par l'impôt foncier, soit sur les usagers des transports en commun, et dans des proportions qui sont vraiment insupportables. On a parlé que la carte d'autobus et de métro, par exemple, devrait passer d'un peu plus de 30 $ à

90 $ par mois, pour rencontrer ces nouvelles dépenses.

Il y a donc, M. le Président, une volonté du gouvernement de pelleter ses problèmes financiers sur les autres et de taxer d'une façon hypocrite en envoyant d'autres que lui au front, dans l'espoir que la population ne verra pas la source de cette taxation. La source, c'est le gouvernement du Québec, qui envoie 320 000 000 $ de taxes vers le niveau local, à même l'impôt foncier. (22 h 40)

La raison pour laquelle le champ foncier a été réservé presque exclusivement aux municipalités, en 1979, M. le Président, c'est que la valeur foncière a un certain rapport, dans les municipalités, avec les services municipaux qui sont dispensés. Alors qu'au plan scolaire nous disions et nous disons encore qu'il s'agit d'une responsabilité nationale et que c'est à même les revenus de l'ensemble du Québec qu'il faut les financer. Autrement, la qualité de l'éducation risque de dépendre de la valeur des maisons et je comprends mal de voir des députés ministériels, qui viennent de régions où l'évaluation foncière est notablement plus basse que dans des centres comme Montréal et Québec, nous dire l'enthousiasme qu'ils éprouveront à être traités d'une façon inégale. À cet égard, je pense que ça n'est pas correct de prétendre que la qualité de l'éducation reçue devrait dépendre de la valeur des propriétés dans un milieu. L'éducation au Québec doit être nationale. Sa responsabilité financière doit porter sur notre gouvernement national.

Donc, M. le Président, on va créer des inégalités importantes puisque la qualité de l'éducation va être fonction de la valeur des maisons. Par ailleurs, ce qu'on a devant nous comme projet n'est qu'un début d'un mouvement plus vaste. On sait, M. le Président, qu'il a été révélé que le Conseil du trésor avait des plans pour retourner au plan local jusqu'à 1 400 000 000 $ de dépenses. On peut donc voir que, si les dépenses d'opération des transports en commun doivent revenir aux municipalités - et, dans le cas de l'île de Montréal, ça va être catastrophique, il faut le répéter - si les dépenses d'immobilisations, d'entretien et de fonctionnement des écoles reviennent aux commissions scolaires, c'est des pans complets des missions de l'État qui sont retournés au plan local par un gouvernement qui, après, peut se vanter d'avoir un déficit qui, dit-il, n'est pas trop important, mais, en pratique, c'est parce qu'il aura pelleté son déficit sur d'autres.

Dans le fond, le gouvernement, dans cette matière, ressemble à quelqu'un qui, maltraité dans son entreprise, traite mal sa famille chez lui, en ce sens que personne, du côté ministériel, ne met vraiment en cause le régime politique fédéral qui fait que le Québec verse bien plus qu'il ne reçoit et que le Québec reçoit de moins en moins. Mais nos élus municipaux et scolaires, ça, on est fantasque pour leur rentrer dedans. Alors, on vend le Québec à Ottawa et on frappe sur les élus au Québec. Je pense, M. le Président, que c'est tout à fait une mauvaise orientation et que le gouvernement devrait cesser de s'orienter dans cette direction-là.

Il est évident, par ailleurs, que les commissions scolaires ont des besoins financiers grandissants et que les compressions des dernières années les ont placées dans une situation compliquée. Mais je répète que, dans les 320 000 000 $ qui leur sont retournés sous forme de taxes qu'elles devront prélever, le gouvernement les autorise à taxer pour 320 000 000 $, mais il leur prélève 280 000 000 $, ne leur laissant qu'un faible, qu'un maigre montant de 40 000 000 $. Je pense donc qu'à cet égard-là le ministre de l'Éducation et le gouvernement nous amènent des mesures qui sont susceptibles de nuire à la qualité de l'éducation dans nos écoles, et surtout de la rendre inégale d'un quartier à l'autre, d'une région à l'autre.

M. le Président, je pense que, quand on parle du pacte fiscal de 1979, que le gouvernement a déchiré et jeté au panier sans aucune consultation des intéressés, il faut bien parler aussi de ce qu'on appelle les "en lieu" de taxes. Le mot peut paraître compliqué. La réalité est toute simple, c'est que les deux gouvernements, le provincial et le fédéral, ont des immeubles dans les villes, dans les régions, sur lesquels ils versent des "en lieu" de taxes puisque les gouvernements ne peuvent pas être imposés les uns les autres.

Cependant, on estime que, pour ce qui est du gouvernement de Québec, les "en lieu" de taxes couvrent à peine 50 % de ce que coûterait le versement d'une véritable taxe foncière. Lors du pacte de 1979, c'était 40 %. En 1983, le gouvernement que nous formions à l'époque a augmenté à 50 % et, depuis, il n'y a plus rien. Pour une ville comme Montréal, le handicap est sérieux. La ville de Montréal évalue son manque à gagner à une trentaine de millions de dollars et l'île et la ville de Montréal sont handicapées puisqu'il y a sur leur territoire une très forte concentration d'hôpitaux, d'écoles et d'universités, donc, de services publics qui ne paient pas leur juste part de l'impôt foncier.

Et, dans ce sens-là, il y a quelque chose de cynique lorsque le gouvernement, qui décide que les contribuables vont payer plus de taxes foncières, se met lui-même à l'abri de la taxe foncière en ne payant pas ses taxes comme tout le monde. Et on pourrait penser que les gouvernements, parce que le fédéral fait de même, devraient être des bons citoyens et payer leurs taxes comme tout le monde.

M. le Président, il y a également un autre sujet qui est abordé dans la loi 69, celui du financement de l'enseignement privé où, pour l'essentiel, le gouvernement applique une formule

qui fait qu'on ajoute 8 % au financement, sans l'indexer comme il l'était auparavant, sur ce qui est versé au réseau scolaire puisque la part du gouvernement du Québec au financement du réseau scolaire vient d'être réduite de 280 000 000 $.

Donc, on ajuste une situation que le gouvernement lui-même avait créée en faisant en sorte qu'on change les données de la fiscalité au Québec. Et, à cet égard, M. le Président, je voudrais dire qu'il y a, dans les décisions gouvernementales, un peu de la mentalité que les commissions scolaires et les municipalités sont des gouvernements inférieurs, des succursales dont on peut racler les fonds de tiroirs quand, à Québec, on manque un peu d'argent.

Et, à cet égard-là, je trouve que ça augure mal de ce qui devrait être fait au Québec pour que les régions aient plus de ressources et plus de pouvoirs pour s'acquitter de leurs responsabilités. Car j'estime, quant à moi, que l'idée d'avoir un Québec souverain devrait s'accompagner, dans ce pays à construire, d'une plus grande décentralisation et du retour, vers les régions, de pouvoirs plus importants. Or, ce que le gouvernement est en train de faire comme tripotage de la fiscalité va dans le sens contraire, puisqu'il prive les régions de moyens d'action, qu'il enlève aux municipalités une partie de l'assiette fiscale pour, dans le fond, l'imposer aux commissions scolaires qui, elles, ne demandaient pas nécessairement cette formule, mais voulaient avoir un financement plus adéquat. Et, à cet égard, le gouvernement utilise vis-à-vis des commissions scolaires exactement le même procédé que vis-à-vis des universités dont tout le monde convenait qu'elles sont sous-financées. Dans le cas des universités, on remplace les contribuables qui devront payer une taxe foncière plus importante par les étudiants qui vont voir leurs frais de scolarité augmenter d'une façon très importante, sans, et il faut le dire, que les universités, qui se sont faites un peu complices de ce fardeau qu'on refilait aux étudiantes et étudiants, reçoivent nécessairement le fruit de l'opération qu'elles ont aidé à conduire. (22 h 50)

Je crois donc, M. le Président, que cette loi est mauvaise dans son essence et son principe, puisqu'elle va imposer des taxes supplémentaires aux gens, sans égard à leur capacité de payer, qu'elle va réduire l'assiette fiscale des municipalités, qu'elle va laisser les commissions scolaires avec un problème de financement qui va demeurer important et, surtout, parce qu'il s'agit d'un pacte, d'une entente sanctionnée par une loi que le gouvernement avait faite avec les élus locaux et que ce gouvernement-là déchire au début de son deuxième mandat qui va être le mandat de l'arrogance, le mandat de l'impuissance vis-à-vis du gouvernement fédéral, le mandat des taxes. On disait, parfois, qu'un gouvernement démocratique, c'est le gouvernement du peuple, par le peuple, pour le peuple. De ce gouvernement, je pense qu'on peut de plus en plus dire que c'est le gouvernement de la taxe, par la taxe, pour la taxe.

Le Vice-Président (M. Cannon): Merci, M. le député de Dubuc. M. le député de Verdun.

Une voix: De Pointe-aux-Trembles. M. Henri-François Gautrin

M. Gautrin: Je pensais que c'était le député de Pointe-aux-Trembles qui venait de...

Le Vice-Président (M. Cannon): Excusez! Oui.

M. Gautrin: Merci, M. le Président. C'est avec plaisir et un peu d'émotion qu'actuellement je m'adresse à cette Chambre. Après avoir entendu, par l'orateur précédent, des propos voulant que le premier ministre soit en train de vendre le Québec. Je dois dire que je suis extrêmement fier, à l'heure actuelle, de la manière brillante, constante avec laquelle notre premier ministre défend actuellement la position du Québec à Ottawa.

Mais revenons au vif du sujet pour parler du financement des commissions scolaires. M. le Président, le député d'Abitibi-Ouest a dit, en terminant son allocution: II s'agit d'un changement de cap. Oui, il s'agit d'un changement de cap par rapport aux positions que prenait le gouvernement précédent. Oui, il s'agit d'un changement de cap parce que cette loi reconnaît, comme nous l'avons toujours fait, l'importance des commissions scolaires, importance des commissions scolaires qui a été reconnue par la loi 107 qui a bien précisé les rôles de chacun des intervenants au niveau scolaire, importance des commissions scolaires qui a été reconnue, par ce gouvernement, par la loi 106 qui a précisé les moyens d'élire les commissaires, importance des commissions scolaires que nous reconnaissons ici dans cette loi, et en leur donnant de nouvelles responsabilités, en leur donnant les moyens d'assumer ces nouvelles responsabilités.

Rapidement, M. le Président, essayons de revenir à la loi 57. La loi 57 adoptée en 1979, est celle, comme l'a rappelé l'orateur précédent, qui a réformé la fiscalité au niveau scolaire. Avant la loi 57, les commissions scolaires pouvaient, en utilisant la taxation foncière, financer à peu près de 30 % de leurs dépenses à partir de leurs revenus autonomes. Après le "passage" de la loi 57, 6 %, en moyenne, des revenus des commissions scolaires pouvaient provenir de leurs revenus autonomes, c'est-à-dire des revenus de la taxation foncière. Perte notoire de responsabilité, perte notoire d'autonomie. Et nous voulons, actuellement, pouvoir redonner l'autonomie aux commissions scolaires.

Regardons comment ont évolué les éléments de la loi 57. En 1980-1981, compte tenu des restrictions dans la loi 57, une commission scolaire recevait à peu près 0,18 $ par 100 $ d'évaluation. À cause de la limite prévue dans la loi 57 des 6 % de dépenses admissibles, en 1989-1990, seulement 0,12 $ étaient obtenus par les commissions scolaires sur les 100 $ d'évaluation. Donc, lente érosion de l'autonomie des commissions scolaires, lente érosion du pouvoir des commissions scolaires de générer leurs propres revenus.

Dans la loi 69 et dans le discours sur le budget, on a clairement voulu responsabiliser à nouveau les commissions scolaires, les responsabiliser en leur transférant la responsabilité du fonctionnement des équipements scolaires. De quoi s'agit-il? De la responsabilité de l'entretien et de la réparation, de la responsabilité de l'entretien ménager, de la responsabilité sur le plan financier de la consommation énergétique et de la responsabilité de la protection et de la sécurité. Un transfert de responsabilités évalué à à peu près 300 000 000 $ ou 307 000 000 $.

Nous leur transférons des responsabilités, parce que nous croyons réellement que ces gouvernements locaux doivent être et sont des gouvernements responsables. Pour leur transmettre des responsabilités, il fallait aussi leur donner les moyens d'assumer ces responsabilités et la loi 69, que nous avons devant nous, M. le Président, est clairement une réforme de la loi 57, une réforme de la fiscalité des commissions scolaires et un moyen qui leur est donné d'assumer ces nouvelles responsabilités. Ensemble, regardons quels sont ces moyens.

Premièrement, une réforme de champ de la taxation foncière en autorisant les commissions scolaires à aller jusqu'à 0,35 $ des 100 $ d'évaluation. J'ai écouté l'orateur précédent prétendre, à tort - et je vais vous dire pourquoi - que ceci aurait permis de dire que les commissions scolaires, où l'évaluation est élevée auront plus de revenus que les commissions scolaires où l'évaluation est plus faible. À première vue, on aurait certainement pu conclure cela, mais la loi prévoit un mécanisme de péréquation. Il est important de comprendre comment va fonctionner ce mécanisme de péréquation pour rendre maintenant justice à toutes les régions du Québec. Au contraire, cette loi-là, au lieu de créer une injustice entre les régions éloignées et les régions urbaines, va recréer la justice dans les revenus des commissions scolaires, qu'elles soient dans les régions périphériques, qu'elles soient dans les régions plus éloignées des grands centres urbains ou dans les centres urbains.

Regardons comment va fonctionner le mécanisme de péréquation; il est assez simple, vous allez comprendre. Nous évaluons l'équivalent étudiants, les étudiants pondérés d'une commission scolaire, étudiants qui sont pondérés en fonction de leur niveau d'études: 1, pour ceux qui sont au primaire; 1,5, pour ceux qui sont au secondaire, enfin, il y a un mécanisme pour obtenir, dans chaque commission scolaire, le nombre d'étudiants pondérés. Ensuite, très simplement, on dit: En fonction du nombre d'étudiants que chaque commission scolaire va avoir, chaque commission scolaire va recevoir ou devrait recevoir 500 $ par étudiant pondéré; 500 $ par étudiant pondéré, qu'elle va aller chercher soit par les 0,35 $ par 100 $ d'évaluation ou, si elle n'arrive pas à obtenir ses dépenses autorisées par les 0,35 $ des 100 $ d'évaluation, par le mécanisme de péréquation, le gouvernement les lui assurera, parce que nous croyons à l'égalité, à l'égalité des chances de chacun des enfants quels qu'ils soient. Qu'il habite dans un milieu urbain ou qu'il habite dans un milieu rural, chacun et chaque enfant a droit à l'éducation. Pour assurer cela, le mécanisme de péréquation va assurer à chaque commission scolaire de recevoir l'équivalent de 500 $ par étudiant pondéré. Il y a là, M. le Président, un élément majeur de justice et de recherche d'égalité qui est la poursuite de la justice sociale, qui a toujours été l'apanage du Parti libéral du Québec. (23 heures)

M. le Président, en résumé, cette loi 69 vient préciser deux choses: d'une part, responsabiliser les commissions scolaires, leur donner le moyen d'assumer leurs nouvelles responsabilités; d'autre part, assurer une justice sociale, assurer une égalité entre les régions, assurer une égalité entre les villes et les campagnes pour permettre à chaque enfant, à chaque petit Québécois de pouvoir avoir l'éducation à laquelle il a droit. Parce que cette loi, M. le Président, est fondamentalement juste, je pense que nous devons voter tous ensemble en faveur de la loi 69. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Cannon): Merci, M. le député de Verdun. M. le député de Dubuc.

M. Gérard R. Morin

M. Morin: Merci, M. le Président. Je vous ferai une confidence en débutant. J'ai été fortement tenté de modifier mes propos pour répliquer un peu à tous les intervenants du côté ministériel, d'autant plus que, bien sûr, lorsqu'ils s'attaquent ou qu'ils interviennent ou que leurs propos touchent à l'aspect purement scolaire, puisqu'il s'agit de la loi 69 sur l'instruction publique, sans être de leur avis, je comprends leurs propos. Mais, lorsqu'on s'attaque ou on touche le moindrement à la loi 57, là, je sens une méconnaissance profonde de la fiscalité municipale. Même le dernier intervenant admettait, peut-être inconsciemment, que le présent projet de loi constituait une réforme de la fiscalité municipale. Enfin, si c'est le cas, c'est

une curieuse façon de procéder. On conviendra que lorsqu'on veut réformer une politique, on veut réformer une loi, on procède avec une loi qui amende cette même loi.

À tout événement, M. le Président, j'ai fortement l'impression que la loi qui est devant nous n'est ni plus ni moins que le produit d'un rapport de force entre deux ministres, soit d'abord le ministre de l'Éducation qui, on le sait, a toujours été très réactionnaire ou réfractaire à cette Loi sur la fiscalité municipale, et cela depuis fort longtemps, et, d'autre part, le ministre des Affaires municipales qui, lui, nous a avoué indirectement son incapacité à résister à la tentation du gouvernement. Il a fallu qu'il se plie aux directives du Conseil des ministres de novembre dernier.

Il faut quand même, M. le Président, que le gouvernement ait beaucoup d'audace, pour ne pas dire du culot, pour s'attaquer à la Loi sur la fiscalité municipale parce que, il faut le reconnaître, le projet de loi 69 a cet effet direct. Si c'est du culot ou de l'audace, M. le Président, c'est parce que, pendant les années 1970 à 1976 où le Parti libéral était au pouvoir, le problème du financement des municipalités existait déjà. On sait que le gouvernement, pendant ces années, n'a pas eu le courage politique de légiiérer sur le financement municipal et c'est pour ça que je dis que tout en n'ayant pas eu le courage politique pendant ces années-là, ce même gouvernement vient aujourd'hui s'attaquer à une loi qui, quand même, est beaucoup plus importante qu'on peut le penser. Le deuxième exemple de manque de courage, c'est, bien sûr, le manque de courage du gouvernement devant ses soi-disant difficultés financières. Bien, avoir le courage politique, c'est y aller avec l'imposition de taxes directes et en supporter l'odieux plutôt que de passer par les taxes au niveau du champ foncier et de se libérer, bien sûr, de ses obligations auprès des commissions scolaires.

Je disais tout à l'heure, M. le Président, que la Loi sur la fiscalité municipale est une loi qui n'est pas comme les autres. On dit assez fréquemment, d'ailleurs, on utilise l'expression de "pacte sur la fiscalité municipale", on utilise même cette expression plus souvent qu'on utilise la loi 57. C'est parce que ça indique que c'est une loi qui a été longue. D'ailleurs, vous me permettrez peut-être de rappeler toutes les commissions qui ont précédé, parce que vous savez, depuis les années soixante, le problème du financement des municipalités était existant. Je pense que, sans faire un survol exhaustif, il y aurait peut-être lieu de rappeler quelques étapes ou les réflexions qui ont eu lieu pendant toutes ces années, en partant peut-être de la Commission royale d'enquête sur la fiscalité municipale, la commission Bélanger, qui a eu lieu entre les années 1963 et 1965.

Il y a eu aussi une commission d'étude sur les problèmes intermunicipaux, une commission d'étude sur les problèmes intermunicipaux de l'île de Montréal; La Commission provinciale d'urbanisme, qui proposait l'idée d'amener les municipalités à prendre en charge l'aménagement du milieu urbain; il y a eu aussi le plan REMUR, dans les années soixante-dix, qui proposait la formation de villes de 8000 à 10 000 et la création de communautés urbaines; il y a eu, en 1971, le livre blanc sur la réforme municipale, qui proposait la création de 131 communautés régionales; il y a eu la Commission de refonte des lois municipales, commission qui a siégé entre les années 1971 et 1976, qui visait l'adoption d'une seule loi générale en remplacement de la Loi sur les cités et villes et du Code municipal, enfin, il y a aussi la fameuse conférence provinciale-municipale de 1975, qui traitait d'urbanisme et des finances municipales.

Voilà quelques commissions, des travaux qui illustrent bien que la situation du financement des municipalités existait depuis fort longtemps. Et c'est pour ça que je dis que le présent gouvernement fait preuve de beaucoup d'audace, voire même de culot d'intervenir dans une loi alors que, lorsqu'il était au pouvoir, il n'a pas eu le courage... parce qu'il faut le reconnaître, cette Loi sur la fiscalité municipale a provoqué beaucoup de tiraillements. Ça n'a pas été une loi facile.

On sait que cette loi avait pour but, bien sûr, d'accorder une véritable autonomie aux municipalités. Et vous me permettrez de rappeler les principaux éléments qui composaient et qui composent la loi 57 et aussi de démontrer jusqu'à quel point la situation a rétrogradé depuis. On se souvient que cette proposition ou ce pacte proposait à l'ensemble des municipalités certains échanges: d'abord, une reprise du produit de la taxe de vente de la part du gouvernement; d'autre part, on libérait totalement ou, enfin, à 94 % tout le champ foncier aux municipalités; le gouvernement s'engageait à établir les "en lieu" de taxes pour environ 40 % à 50 % des immobilisations ou des immeubles, c'est-à-dire, du gouvernement, du public et du parapublic, et, enfin, certains éléments de la loi, qui touchaient l'évaluation municipale, permettaient d'introduire certains éléments au rôle d'évaluation.

Mais, tout cela n'était considéré, à ce moment-là, que comme le début d'une réforme fiscale municipale, donc qui devait être complétée par la suite. Mais, loin de là. M. le Président, cette réforme fiscale a été loin d'être complétée. C'est la rétrogradation d'année en année, et particulièrement depuis que le Parti libéral est au pouvoir, depuis 1986. Il faut rappeler, d'abord, que pour le paiement des taxes du gouvernement sur la base de 50 % des valeurs qui devait normalement être augmentée, c'a été le statu quo. Et que dire de l'expérience, M. le Président, d'un élément fort important de cette loi entourant l'évaluation municipale, particulièrement l'article 65.1 qui a amené une multitude de

contestations des évaluations, particulièrement au niveau de l'industrie et qui a provoqué des baisses majeures, voire catastrophiques pour certaines municipalités au niveau de leur évaluation. (23 h 10)

À tout cela, rappelons l'ajout des responsabilités, sans que ces responsabilités soient accompagnées de l'aspect économique. Alors, voilà plusieurs exemples qui démontrent qu'en plus d'avoir une loi fiscale qui a été adoptée en 1979, qui devait être complétée, en plus de ne pas l'avoir été, se voit coupée de plusieurs de ses aspects importants. Et le comble du malheur, nous avons devant nous la loi 69. Ça, c'est presque incroyable, il faut être ici pour le croire. Je pense que je serais chez moi et je n'y croirais pas. C'est impensable. C'est vraiment ne pas reconnaître l'importance de cette loi. Et sans souhaiter de malheur au gouvernement, je pense bien que ce qu'il considère comme des partenaires au niveau des unions municipales... Je pense bien que les cinq conditions exigées par le monde municipale et auxquelles le gouvernement semble vouloir répondre, c'est un dossier qu'il sera intéressant de suivre...

Je disais que le comble du malheur, justement, est cette loi qui est un amendement à la Loi sur l'instruction publique, mais qui, finalement, en plus de briser ce pacte de 1980, ne règle pas le financement des commissions scolaires. Le leader adjoint, cet après-midi, je pense, en faisait la démonstration à partir de l'introduction ou de certains propos compris dans le discours sur le budget où il était très clairement démontré que, d'une part, le gouvernement se désiste de certains engagements vis-à-vis du monde scolaire pour finalement lui refiler la facture auprès du champ foncier. En plus, ces statuts, c'est peut-être l'aspect le plus scandaleux. C'est, de la part d'un ministre de l'Éducation, assujettir la qualité de l'éducation à l'indice des richesses des municipalités ou de la communauté. Je pense que le premier souci d'un ministre de l'Éducation - et cela on le sait depuis la réforme des années soixante - est l'universalité, le même degré ou le même niveau de qualité d'éducation pour l'ensemble du Québec. Ça, je pense que ça doit être l'objectif numéro un du ministre de l'Éducation. On sait fort bien que, permettre à une commission scolaire d'élargir son champ foncier, bien sûr, au niveau du principe et sur le plan politique des commissions scolaires, ça peut paraître intéressant, mais quand on connaît la disparité qui peut exister entre les différentes régions, entre les différentes municipalités, je pense qu'on assujettit la qualité de l'enseignement à cette disparité. Et je suis convaincu que d'ici un an, deux ans, trois ans, peut-être moins, il faudra faire le constat que cette loi est allée au détriment d'une égalité ou de l'universalité de la qualité de l'enseignement à travers le Québec. Évidemment, cette inégalité ou la disparité, au niveau municipal, peut se concevoir davantage, puisque les gens peuvent fort bien, à partir de leur indice de richesse, déterminer les services qu'ils veulent bien se donner, puisqu'il peut s'agir de loisirs sportifs, culturels, urbains, enfin, différentes choses à différents niveaux. Mais lorsqu'on touche à la scolarité, à l'éducation, je pense qu'on ne peut pas se permettre les mêmes disparités.

Finalement, en conclusion, M. le Président, le présent projet de loi n'a qu'un seul but en fait, c'est de donner suite aux directives du Conseil des ministres de novembre dernier où on mandatait le président du Conseil du trésor, le ministre des Affaires municipales et le ministre des Finances, je pense, à s'attaquer au champ foncier municipal, parce que c'est dans cette optique-là... Qu'on ne vienne pas faire accroire à cette Chambre que le but de la loi 69, c'est de corriger des lacunes au niveau scolaire. Ce n'est pas ça du tout. D'ailleurs, on n'a qu'à regarder l'origine. D'où vient ce projet de loi? Il vient de directives du gouvernement, du Conseil des ministres, dans la perspective de la préparation de son budget. C'est ça la véritable raison du gouvernement. Alors, j'avise le ministre que, s'il a eu la collaboration de l'Opposition en commission parlementaire au niveau du projet de loi 25, il ne l'aura pas, que ce soit en commission ou autrement, pour ce qui est du projet de loi 69.

Ce projet de loi est un exemple, le plus bel exemple d'amateurisme. C'est l'exemple d'un ministre réactionnaire à cette loi fiscale de 1980. C'est un projet de loi d'un ministre non conscient des effets que pourrait avoir ce projet de loi, soit, je le répète, d'assujettir la qualité de l'enseignement ou de l'éducation à l'indice de richesse des milieux de vie des municipalités, des communautés et, partant de là, provoquer une disparité dans la qualité de l'enseignement à travers le Québec.

Alors, M. le Président, je vous remercie et vous devez bien vous douter que c'est, non pas avec plaisir, mais avec regret, parce qu'il aurait été si intéressant de voter en faveur d'une loi améliorant, bonifiant la Loi sur la fiscalité municipale, mais, dans les circonstances, vous comprendrez que je devrai voter contre ce présent projet de loi. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Cannon): Merci, M. le député de Dubuc. Toujours dans la poursuite du débat sur l'adoption du projet de loi 69, M. le député de Beauharnois-Huntingdon.

M. André Chenail

M. Chenail: M. le Président, en m'adressant aujourd'hui à l'Assemblée nationale sur le projet de loi 69, Loi modifiant la Loi sur l'instruction publique et la Loi sur l'enseignement privé, je ne peux m'empêcher de réfléchir sur l'importance de

notre rôle de législateur et sur l'effet de cette loi dans les commissions scolaires. Ce projet de loi, qui apporte des modifications sur l'instruction publique relativement aux modalités du financement des commissions scolaires, nous a permis, durant cette session, de comprendre la fragilité financière des commissions scolaires dans les différentes régions du Québec et surtout de créer de l'intérêt pour un développement équitable.

Le projet de loi déposé par mon collègue, le ministre de l'Éducation, de l'Enseignement supérieur et de la Science permet aux commissions scolaires d'accroître leurs revenus à même l'impôt foncier. Cette réforme permettra aux administrateurs scolaires une autonomie plus grande à l'égard du gouvernement et le gouvernement libéral, par ce projet de loi, normalise la situation. m. le président, si on regarde un peu en arrière, le gouvernement péquiste a complètement manqué de vision avec ce qu'on appelle le pacte de 1979. le gouvernement péquiste ne laissait presque plus de marges de manoeuvre aux administrateurs des commissions scolaires, leur imposant des méthodes de gestion ne correspondant pas à leur réalité. ce que l'on propose aujourd'hui, nous, du gouvernement libéral, c'est le partage des responsabilités avec les pouvoirs locaux. nous ne pouvons agir seuls et les commissaires scolaires élus démocratiquement ont le droit à leur autonomie. partager des responsabilités avec des pouvoirs locaux est la vision de l'actuel gouvernement du québec, cette façon de travailler permet d'agir localement, favorisant ainsi le travail et les postes de commissaires et d'administrateurs scolaires. bien sûr, des gens sont heureux de cette réforme et d'autres l'ont peu appréciée. la mauvaise humeur des municipalités m'a beaucoup touché. ayant été maire de la municipalité de sainte-clothilde pendant près de dix ans, la réaction des municipalités a été celle de gestionnaires défendant avec acharnement une autonomie fiscale. cependant, elles auraient tort d'ignorer certains faits et de ne pas voir plus loin que leurs propres affaires. en effet, comme vous le savez déjà, la dépendance des commissions scolaires québécoises envers les subventions est un fait unique en amérique du nord. partout ailleurs, l'école publique est financée à 40 % et plus par l'impôt foncier. par exemple, dans la plupart des états américains, les commissions scolaires tirent moins de 50 % de leur revenu des subventions gouvernementales. et, au canada, le financement scolaire s'établit à 25 %. ce nouveau partage, m. le président, répond donc aux besoins des commissions scolaires en leur assurant une stabilité dans les sources de revenu. dans ces conditions, elles pourront régler des problèmes particuliers qui, habituellement, passaient inaperçus dans des administrations trop centralisées. le partage de responsabilités avec les pouvoirs locaux, voilà la vision du projet de loi.

Les projets de loi d'ordre financier auxquels le gouvernement fédéral a participé lors de la présentation de son budget ne nous ont pas aidés. Nous avons dû assumer un manque à gagner de 1 300 000 000 $. Ainsi, la récession économique a amené avec elle plusieurs réalités qu'on aurait préféré ignorer. Mais le gouvernement y a fait face avec réalité. Le gouvernement québécois, en tant que gestionnaire des fonds publics, a eu une décision à prendre. Le gouvernement du Québec a des devoirs et il doit répondre aux besoins de la population. Avec cette législation qui est soumise aujourd'hui, sans doute que la population y gagnera.

Il faut préciser, M. le Président, que la décision du gouvernement libéral d'accorder un pouvoir de taxation aux commissions scolaires n'entravera aucunement l'autonomie des municipalités. En effet, l'impôt foncier des contribuables québécois restera de 15 % inférieur à celui de l'Ontario. Après la hausse des frais de scolarité, après la hausse des taxes scolaires, les municipalités resteront avec une marge de manoeuvre de 1 000 000 000 $ de taxes foncières. Voilà, M. le Président, un retour à la nornale. Nous devons redonner aux commissions scolaires la place qui leur revient.

Dans un mémoire présenté en 1988, la Fédération des commissions scolaires du Québec a eu raison de conclure en disant que l'effort fiscal des contribuables québécois au financement des coûts d'éducation n'est pas proportionnel à la richesse du milieu et que les plus grands efforts sont fournis par les milieux les moins favorisés. Ainsi, le pacte péquiste de 1969 a été jugé inéquitable par ceux-ci. Par exemple, un milieu rural comme mon comté de Beauharnois-Huntingdon ne peut atteindre le maximum de 0,25 $ par 100 $ d'évaluation, alors qu'à Montréal, il est de 0,07 $ par 100 $ d'évaluation. Avec ce projet de loi, nous aurons droit à une répartition plus équitable. Ainsi, avec ce projet de loi, le gouvernement, en plus de proposer le partage des responsabilités, nous parle d'équité. Voilà la vision du gouvernement libéral. En termes clairs, la réforme présentée par mon collègue, le ministre de l'Éducation, de l'Enseignement supérieur et de la Science signifie que, pour une année financière complète des commissions scolaires, l'élargissement de l'impôt foncier pourrait atteindre 320 000 000 $, soit 121 % de plus que pour l'année 1989. Depuis 1979, le gouvernement québécois subventionne 95 % des coûts des commissions scolaires contre moins de la moitié en Ontario.

Avec un retour à l'autonomie financière, cette formule devrait susciter un regain d'intérêt dans la population, plus particulièrement chez les parents pour la gestion des affaires scolaires. Le gouvernement péquiste de 1979 aurait dû savoir qu'on ne peut économiser si on ne sait pas

combien ça coûte. Leurs économistes devraient savoir qu'en 1979 le pacte a été fait sur le dos des commissions scolaires.

M. le Président, à mon avis, la qualité de l'éducation réside dans le fait que nous devons savoir à quoi sert chaque dollar investi. Les administrateurs scolaires démotivés ne le savent plus. Dans ce sens, le projet de loi 69 mobilisera et responsabilisera ceux-ci. C'est ça, la vision de gestion moderne du gouvernement libéral: le partage des responsabilités, une gestion équitable et la qualité de l'enseignement. Il est certain que le projet de loi peut déranger. Toute réforme et tout changement dérange des choses établies, mais certaines situations nous placent face à des réalités que l'on doit affronter et, là, nous devons trouver des solutions durables. Alors, sans accroître notre déficit et sans augmenter les impôts, le ministre de l'Éducation a trouvé une solution qui convient à l'une et l'autre des parties.

M. le Président, tout évolue d'une façon rapide et le monde de l'éducation tout autant. Le marché du travail évolue et des nouvelles technologies apparaissent régulièrement dans tous les secteurs d'activité. Nous devons favoriser et être le plus possible de cette nouvelle connaissance. Nous devons adopter et favoriser des méthodes de gestion ouvertes et, en même temps, rigoureuses. Le mode de financement que propose le projet de loi 69 répond aux besoins présents. M. le Président, la réforme du financement scolaire s'impose et celle que propose le gouvernement libéral continue d'assurer un pas dans la bonne direction. L'essence même de notre tradition en matière scolaire, c'est de remettre l'existence d'organismes qui assurent en même temps des responsabilités administratives et des responsabilités pédagogiques. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Cannon): Merci, M. le député de Beauharnois-Huntingdon. Mme la députée de Taillon.

Mme Marois: Oui, M. le Président. À ce moment-ci de nos travaux, je crois que, tel qu'il a été entendu entre les leaders, nous proposons l'ajournement de nos travaux.

Le Vice-Président (M. Cannon): Est-ce que cette motion est adoptée?

M. Lefebvre: L'ajournement du débat.

Mme Marois: L'ajournement du débat, pardon.

M. Lefebvre: Oui, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Cannon): Alors l'ajournement du débat est adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Lefebvre: Oui, M. le Président. On n'appelle rien d'autre ce soir et, dans les circonstances, je fais donc motion pour ajourner les travaux à demain matin, 10 heures.

Le Vice-Président (M. Cannon): Est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Cannon): Adopté. Alors les travaux de cette Assemblée sont terminés et sont reconvoqués pour demain matin, le vendredi 8 juin, à 10 heures.

(Fin de la séance à 23 h 28)

Document(s) related to the sitting