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(Dix heures dix minutes)
Le Président: Mmes et MM. les députés, nous
allons nous recueillir quelques instants. Merci, veuillez vous asseoir.
Présence du Haut-Commissaire
de la république islamique
du Pakistan
J'ai le très grand plaisir de souligner la présence dans
la tribune du Haut-Commissaire de la république islamique du Pakistan,
Son Excellence M. Sayed Munad Ahmed Khairi.
Nous allons entreprendre les affaires courantes.
M. Pagé: M. le Président...
Le Président: Oui, M. le leader du gouvernement.
Retour du député de Bonaventure
M. Pagé: ...avant d'aborder les affaires courantes, je
suis persuadé qu'il m'est permis, par l'ensemble des
députés, de saluer, de souligner et de témoigner notre
appréciation pour le retour du député de Bonaventure parmi
nous, qui célèbre aujourd'hui son 34e anniversaire de vie
politique comme député.
Des voix: Bravo!
Le Président: Nous allons entreprendre les affaires
courantes.
Alors, il n'y a pas de déclarations ministérielles.
Présentation de projets de loi.
Dépôt de documents. M. le ministre de l'Enseignement
supérieur et de la Science. M. le leader, au nom du ministre.
Décret concernant l'approbation
du plan quinquennal d'investissements
universitaires
M. Pagé: M. le Président, qu'il me soit permis, au
nom de mon collègue, de déposer le décret 548-90
concernant l'approbation du plan quinquennal d'investissements universitaires
pour la période du 1er juin 1989 au 31 mai 1994, tel que
prévu.
Le Président: Alors, ce document est déposé.
M. le ministre délégué à l'Administration et
à la Fonction publique et président du Conseil du
trésor.
Rapport d'étape sur le programme d'accès
à
l'égalité pour les femmes de la
fonction
publique du Québec et rapport annuel
de la Commission administrative des
régimes de retraite et d'assurances
M. Johnson: Oui, M. le Président, il me fait plaisir de
déposer deux rapports: d'abord, le rapport d'étape sur le
programme d'accès à l'égalité pour les femmes de la
fonction publique du Québec et le rapport annuel 1989 de la Commission
administrative des régimes de retraite et d'assurances.
Le Président: Alors, ces rapports sont
déposés. M. le ministre de la Justice.
Rapport annuel de l'Office de la protection du
consommateur
M. Rémillard: M. le Président, il me fait plaisir
de déposer le rapport annuel de l'Office de la protection du
consommateur.
Le Président: Ce rapport est déposé. M. le
ministre de l'Industrie, du Commerce et de la Technologie.
Rapports annuels du Centre de recherche
industrielle du Québec et de la
Société
de développement des
coopératives
M. Tremblay (Outremont): M. le Président, il me fait
plaisir de déposer le rapport annuel du Centre de recherche industrielle
du Québec, ainsi que le rapport annuel de la Société de
développement des coopératives.
Le Président: Alors, ces rapports sont
déposés. M. le ministre des Transports et ministre de la
Sécurité publique.
Rapports annuels du ministère des Transports et
de la Commission de police du Québec
M. Elkas: m. le président, j'ai l'honneur de
déposer le rapport annuel 1988-1989 du ministère des transports
et le rapport annuel 1989 de la commission de police du québec.
Le Président: Ces rapports sont déposés. Mme
la ministre déléguée aux Finances.
Rapport annuel sur les caisses d'épargne et de
crédit
Mme Robic: M. le Président, il me fait plaisir de
déposer le rapport annuel sur les caisses d'épargne et de
crédit pour 1989.
Le Président: Ce rapport est déposé. M. le
ministre délégué aux Mines.
Rapport annuel de la Société
québécoise d'exploration minière
M. Savoie: Oui, M. le Président, il me fait plaisir de
déposer le rapport annuel de la Société
québécoise d'exploration minière pour l'année
1989-1990.
Le Président: Ce rapport est également
déposé. M. le ministre délégué aux
Forêts.
Rapport annuel de REXFOR
M. Côté (Rivière-du-Loup): M. le
Président, permettez-moi de déposer le rapport annuel de REXFOR
couvrant la période du 1er avril 1989 au 31 mars 1990.
Le Président: Ce rapport est déposé.
Rapport annuel de la Commission de la fonction
publique
J'ai reçu le rapport annuel de la Commission de la fonction
publique pour l'exercice financier terminé le 31 mars 1990. Je
dépose ce document.
Rapport du Vérificateur général
sur
les frais d'administration de la Commission de la
fonction publique
J'ai également reçu le rapport du Vérificateur
général sur les frais d'administration de la Commission de la
fonction publique pour l'exercice terminé le 31 mars 1990. Je
dépose ce document.
Dépôt de rapports de commissions. M. le président de
la commission de l'économie et du travail et député de
Laval-des-Rapides.
Étude détaillée du projet de loi
77
M. Bélanger: M. le Président, j'ai l'honneur de
déposer le rapport de la commission de l'économie et du travail
qui a siégé le 19 juin 1990 afin de procéder à
l'étude détaillée du projet de loi 77, loi modifiant la
loi sur les mines et la loi concernant les droits sur les mines. le projet de
loi a été adopté avec des amendements.
Consultation générale sur la situation
et les perspectives de l'énergie électrique au
Québec
J'ai aussi l'honneur de vous déposer le rapport de la commission
de l'économie et du travail qui a siégé les 8, 9, 10, 15,
16, 17, 22, 23, 24, 29, 30 et 31 mai 1990 afin de procéder à une
consultation générale et de tenir des audi- tions publiques sur
la situation et les perspectives de l'énergie électrique au
Québec. Merci.
Le Président: Ces rapports sont déposés. M.
le président de la commission du budget et de l'administration et
député de Vanier.
Consultation et étude détaillée
du projet de loi 229
M. Lemieux: M. le Président, j'ai l'honneur de
déposer le rapport de la commission du budget et de l'administration qui
a siégé le 19 juin 1990 afin de procéder à la
consultation des intéressés et à l'étude
détaillée du projet de loi d'intérêt privé
229, Loi modifiant la charte de Le Club de golf de Saint-Hyacinthe
limitée. Le projet de loi a été adopté.
Consultation et étude détaillée
du projet de loi 249
De plus, M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le
rapport de la commission du budget et de l'administration qui a
siégé le 19 juin 1990 afin de procéder à la
consultation des intéressés et à l'étude
détaillée du projet de loi d'intérêt privé
249, Loi concernant Assurance-vie Desjardins et La Sauvegarde Compagnie
d'Assurance sur la Vie Itée. Le projet de loi a été
adopté avec des amendements.
Consultation et étude détaillée
du projet de loi 237
Permettez-moi, M. le Président, de déposer de nouveau le
rapport de la commission du budget et de l'administration qui a
siégé le 19 juin 1990 afin de procéder à la
consultation des intéressés et à l'étude
détaillée du projet de loi d'intérêt privé
237, Loi concernant K. & M. Investments Ltd. Le projet de loi a
été adopté avec des amendements.
Consultation et étude détaillée
du projet de loi 253
M. le Président, j'ai l'honneur aussi de déposer le
rapport de la commission du budget et de l'administration qui a
siégé le 19 juin 1990 afin de procéder à la
consultation des intéressés et à l'étude
détaillée du projet de loi d'intérêt privé
253, Loi concernant La Laurentienne, corporation mutuelle de gestion et La
Laurentienne Vie, compagnie d'assurance inc. Le projet de loi a
été adopté avec des amendements.
Consultation et étude détaillée
du projet de loi 247
Pour terminer, M. le Président, permettez-moi de déposer
le rapport de la commission du budget et de l'administration qui a
siégé le 19
juin 1990 afin de procéder à la consultation des
intéressés et à l'étude détaillée du
projet de loi d'intérêt privé 247, Loi concernant la
Compagnie de Fiducie Impériale. Le projet de loi a été
adopté.
Le Président: Puisqu'il s'agit de projets de loi
d'intérêt privé, est-ce que chacun de ces rapports est
adopté?
Des voix: Adopté.
Le Président: Adopté. Maintenant, M. le
président de la commission des institutions et député de
Rouyn-Noranda-Témiscamingue.
Étude détaillée du projet de loi
68
M. Trudel: M. le Président, j'ai l'honneur de
déposer le rapport de la commission des institutions qui a
siégé les 18 et 19 juin 1990 afin de procéder à
l'étude détaillée du projet de loi 68, Loi modifiant la
Loi sur l'organisation policière et modifiant la Loi de police et
diverses dispositions législatives. Ce projet de loi a été
adopté avec des amendements.
Le Président: Ce rapport est déposé.
Maintenant, dépôts de pétitions. M. le
député de Bertrand, au niveau des dépôts de
pétitions.
Amender le projet de loi 75
conformément
aux recommandations de l'Association
provinciale des fruiteries du Québec
M. Beaulne: Merci, M. le Président. Je dépose
l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée
nationale par 1777 pétitionnaires, citoyens et citoyennes de Brassard,
Saint-Lambert, Saint-Hubert et Boucherville. Les faits invoqués sont les
suivants: "Considérant que plus de 90 % des revenus des fruiteries
proviennent de la vente de produits périssables; "Considérant que
le commerce des fruiteries exige un approvisionnement quotidien qui peut
comporter plusieurs arrivages; "Considérant que la minutie, la
manipulation fréquente et délicate qu'exigent les produits
périssables des fruiteries les oblige à une flexibilité
dans le nombre d'employés requis; "Considérant que les fruiteries
du Québec sont un important débouché pour les producteurs
maraîchers locaux du Québec; "Considérant que les
fruiteries emploient un grand nombre de jeunes et d'étudiants;
"Considérant que l'ouverture des fruiteries le dimanche ajoute à
la qualité de vie des Québécois et reçoit l'appui
de 78 % des Québécois consultés par IQOP;"
L'intervention réclamée se résume ainsi: "Que
l'Assemblée nationale intervienne auprès du ministre de
l'Industrie, du Commerce et de la Technologie afin qu'il amende le projet de
loi 75 sur l'ouverture des commerces le dimanche conformément aux
recommandations formulées par l'Association provinciale des fruiteries
du Québec."
Le Président: Cette pétition est
déposée. Maintenant, M. le député de
Laviolette.
Réduire les heures d'affaires et empêcher
la commercialisation du dimanche
M. Jolivet: Merci, M. le Président. Je dépose
l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée
nationale par 358 pétitionnaires, travailleurs et travailleuses,
commerçants et commerçantes des dépanneurs Couche-Tard du
Québec. Les faits invoqués sont les suivants: "Considérant
que les signataires sont contre l'ouverture des commerces le dimanche;"
Et l'intervention réclamée se résume ainsi: "Que
l'Assemblée nationale du Québec amende le projet de loi 75 sur
les heures d'affaires tel que présenté par le gouvernement en
demandant au ministre de l'Industrie, du Commerce et de la Technologie de
réduire les heures en semaine et d'assurer dans les faits la protection
du dimanche, tel que proposé par la coalition." Je certifie que cet
extrait est conforme au règlement, M. le Président. (10 h 20)
Le Président: Cette pétition est
déposée. Maintenant, M. le député de Duplessis.
Surseoir à la fermeture
d'Alipêche
M. Perron: Merci, M. le Président. Je dépose
l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée
nationale par 912 pétitionnaires, citoyens et citoyennes de
Sept-îles. Les faits invoqués sont les suivants:
"Considérant que l'usine de Sept-îles est la plus moderne sur la
Côte-Nord; "Considérant que les infrastructures portuaires de 15
000 000 $ ont été investies pour appuyer l'industrie des
pêches à Sept-îles; "Considérant que,
géographiquement, Sept-îles est à proximité des
bancs de poisson; "Considérant que plus de 200 emplois
générant des milliers de dollars dans l'économie de
Sept-îles disparaîtront;"
Et l'intervention réclamée se résume ainsi: "Que
l'Assemblée nationale fasse le nécessaire afin que,
premièrement, le ministre Pagé sursoie à la
décision de fermer l'usine Alipêche; deuxièmement, qu'une
rencontre soit cédulée entre les parties impliquées avant
que toute décision soit prise." Je certifie que cet extrait est conforme
au règlement et à l'original de la pétition. Merci, M. le
Président.
Le Président: Cette pétition est
déposée.
Interventions portant sur une violation de droit ou de privilège
ou sur un fait personnel.
J'ai reçu en temps utile une lettre de M. le député
de D'Arcy-McGee faisant part de son intention de soulever une question de fait
personnel lors de la période des affaires courantes d'aujourd'hui. Dans
le cadre du débat sur la motion de censure d'hier à cette
Assemblée, le député allègue que Mme la
députée de Chicoutimi l'aurait accusé d'avoir
comparé la situation des anglophones du Québec à celle des
Noirs d'Afrique du Sud. M. le député de D'Arcy-McGee
désire s'expliquer brièvement sur ces faits et les rectifier.
Intervention portant sur une question de fait
personnel
Je vais donc céder la parole à M. le député
de D'Arcy-McGee en lui rappelant que ses remarques doivent être
brèves et formulées de manière à ne susciter aucun
débat. M. le député de D'Arcy-McGee.
Allégation de la députée de
Chicoutimi au sujet du députe de D'Arcy-McGee
M. Robert Libman
M. Libman: Merci, M. le Président. Hier, on a
attribué à mon égard des propos qui sont fortement
dommageables. D'ailleurs, ce n'était pas la première fois. Et,
pour cette raison, j'aimerais profiter de cette occasion, et c'est mon droit de
le faire, afin d'apporter les corrections qui s'imposent.
J'aimerais souligner qu'il ne s'agit pas tout simplement de certains de
mes propos qui auraient été mal nuancés ou mal
interprétés; je parle de mensonges déréglés
attaquant ma réputation de façon directe. Lorsque je rencontre
des gens qui me reprochent d'avoir soi-disant comparé le gouvernement au
régime nazi, comparé les anglophones du Québec aux Noirs
d'Afrique du Sud ou souhaité l'assimilation des francophones à
travers la province, je suis carrément outré et
profondément insulté. Il m'est souvent impossible de
déterminer la source exacte de ces rumeurs qui, vous en conviendrez avec
moi, M. le Président, sont fortement préjudiciables.
Hier, pendant le débat sur la motion de censure, les paroles de
Mme la députée de Chicoutimi à mon égard ont
été les suivantes.* Elle a comparé le traitement que le
Québec fait aux Anglo-Québécois à celui qui est
fait aux Noirs d'Afrique du Sud. Elle a continué ainsi: "Quand on ose
comparer la situation qui est faite aux Anglo-Québécois, ici,
à la situation qui est faite dans l'apartheid de l'Afrique du Sud, c'est
non seulement démagogique, mais c'est totalement irresponsable."
M. le Président, permettez-moi d'apporter les corrections qui
s'Imposent. Je n'ai jamais, et en aucun moment, prononcé ce que la
députée de Chicoutimi a le culot de prétendre. Le fait
d'insinuer que j'aie dit quelque chose qui pouvait, à la limite
même, ressembler à ces propos est une véritable abomination
de la vérité, une insulte personnelle à mon égard.
Mais, plus grave encore, ce genre de commentaire rabaisse l'importance de la
lutte contre l'apartheid en Afrique du Sud et me semble typique d'une
affirmation gratuite faite sans regard des conséquences qui pourraient
en découler.
Alors, en terminant, M. le Président, pour ces raisons, je
sollicite l'appui de cette Chambre en demandant à la
députée de Chicoutimi de démontrer sa bonne foi en
retirant ses propos.
Le Président: Alors, j'ai une demande du
député de D'Arcy-McGee, est-ce que, madame... Je comprends. Comme
nous avons eu aussi, cette semaine, à la même question de fait
personnel, une demande, on s'est enquis auprès du ministre s'il
acceptait de retirer ses propos; je demande la même chose à Mme la
députée de Chicoutimi, si elle accepte de retirer ses propos. Mme
la députée de Chicoutimi.
Mme Blackburn: M. le Président, vous allez me permettre
simplement de souligner que j'ai rapporté ce que
généralement le député de D'Arcy-McGee appelle la
rumeur. Alors, si ça l'offense, M. le Président, je retire mes
propos.
Le Président: Très bien. Alors, l'incident est
maintenant terminé. S'il vous plaît! M. le député,
s'il vous plaît!
Alors, avant de passer à la période de questions et
réponses orales des députés, je voudrais vous aviser qu'il
y aura un vote au moment de la rubrique des motions sans préavis, vote
qui requiert l'approbation des deux tiers des membres de l'Assemblée.
Donc, vote au moment de la rubrique: Motions sans préavis.
QUESTIONS ET RÉPONSES ORALES
Nous allons maintenant passer à la période des questions
et réponses orales des députés. Je vais reconnaître,
en première question principale, M. le chef de l'Opposition.
Report de la ratification de l'accord du lac
Meech
M. Parizeau: M. le Président, je veux d'abord saluer le
retour en Chambre du premier ministre; j'espère que son voyage à
Mystic a été pour lui une source d'inspirations utiles,
singulièrement à l'égard de l'avenir ou du manque d'avenir
de l'accord du lac Meech. Il a fait un certain nombre de déclarations
aux journaux, là-bas, et je voudrais, ce matin, si c'est possible,
pouvoir expliciter un certain nombre de choses
que nous avons entendues du premier ministre.
D'abord, le premier ministre pourrait-il nous indiquer, dans cette
Chambre et, si possible, formellement, qu'il n'a pas l'intention d'accepter de
reporter l'échéance du 23 juin quant à la ratification de
l'accord et de la résolution d'accompagnement? Est-ce qu'il peut nous
donner, dans cette Chambre, l'assurance qu'il n'est pas question de reporter
l'échéance du 23 juin? Vous comprendrez, M. le Président,
que je tiens à ce qu'on soit très explicite à cet
égard. Nous avons reçu trois bâillons en cinq jours. Le
premier ministre du Québec, à l'heure actuelle, demande au
Manitoba d'établir un bâillon. Il a tout le temps voulu pour nous
bâillonner dans cette Chambre pour faire passer le report du 23 juin.
Alors, on comprendra, puisque nous arrivons à la fin de cette session,
que je demande au premier ministre: A-t-il l'intention de nous bâillonner
et de faire en sorte que la date du 23 juin soit reportée?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Bourassa: Je suis également très heureux, M. le
Président, de retrouver le chef de l'Opposition après quelques
jours d'absence. Nous nous étions vus ensemble, côte à
côte, au banquet de la Société Saint-Jean-Baptiste, jeudi
soir dernier. Je suis heureux de retrouver également mon ami, le leader
parlementaire. Dans ces derniers jours de session, je me sens toujours un peu
plus courtois à son endroit, étant donné les consentements
unanimes dont nous avons besoin pour-Une voix: Ha, ha, ha!
M. Bourassa: ...terminer à une heure raisonnable.
M. le Président, j'ai dit à plusieurs reprises que nous ne
pouvions pas concevoir comment nous pourrions prolonger au-delà du 23
juin. Il y a des raisons politiques que j'ai énoncées. Ça
fait quand même trois ans que nous discutons. À trois reprises,
comme je le disais hier, nous nous sommes réunis, l'ensemble des
premiers ministres avec le premier ministre du Canada, et, unanimement, nous
nous sommes réjouis de la réintégration du Québec
dans la grande famille canadienne. Nous ne voyons pas en quoi nous pourrions
accepter de prolonger encore une fois ce qui a été discuté
à de très nombreuses reprises. J'ai, de fait, mentionné
hier qu'il m'apparaissait préférable, dans l'intérêt
du Canada, dans l'intérêt du Québec, dans
l'intérêt du Manitoba, dans l'intérêt des
autochtones, que le Manitoba choisisse, si c'est nécessaire, de
raccourcir son processus des audiences publiques de manière à
sauvegarder la ratification de l'accord du lac Meech. (10 h 30)
Comme je le disais hier, gouverner, c'est choisir. Et choisir entre une
décision qui met en cause, d'une façon particulièrement
grave, l'unité du pays et le prolongement de ces audiences publiques
pour permettre aux autochtones de donner leur point de vue, alors que ces
mêmes autochtones, depuis 10 jours, empêchent la tenue de ces
audiences qui auraient pu leur permettre de donner leur point de vue, je crois
que le choix, dans l'intérêt du pays, m'apparaît assez
simple. C'est dans ce contexte-là que j'ai répondu à des
questions aux journalistes sur l'attitude que pourrait prendre le Manitoba.
Mais, nous l'avons dit, moi et le ministre responsable des affaires
canadiennes et du dossier constitutionnel, il n'est pas du tout question pour
le gouvernement du Québec de prolonger au-delà du 23 juin puisque
c'est juridiquement irréaliste. Comment pouvons-nous penser que nous
pourrions, dans trois jours, avoir 11 Parlements, 11 débats dans
certains cas avec la ratification du Sénat, notamment dans le cas du
gouvernement fédéral, comment penser que nous pourrions avoir 11
résolutions adoptées par 11 Parlements? La question du chef de
l'Opposition est académique.
Le Président: En question complémentaire, M. le
chef de l'Opposition.
M. Parizeau: M. le Président, puis-je demander si le
premier ministre accepterait cependant qu'une sorte de signature
rétroactive du Manitoba lui soit acceptable? C'est-à-dire que la
date du 23 ne serait donc pas changée, mais on s'entendrait pour que,
rétroactivement, le Manitoba, quand II sera au bout de son processus de
consultations, puisse non seulement signer, mais que sa signature soit
considérée rétroactivement. Il y a un scénario qui
est élaboré à cet égard à l'heure actuelle;
est-ce que le premier ministre y souscrit?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Bourassa: Personne ne m'a parlé d'un tel
scénario et je ne vois pas comment il pourrait être
réalisé. Nous sommes tenus... Et, évidemment, nous avons
là à examiner les implications juridiques. Il y a quelques
opinions qui sont données, que le gouverneur général
pourrait, possiblement, proclamer l'accord du lac Meech. Je veux dire qu'il y a
toutes sortes de débats juridiques qu'on peut avoir. Mais la
constitution semble claire, c'est le 23 juin qui est la date ultime et, pour
prolonger au-delà du 23 juin, il faut un amendement constitutionnel,
adopté par 11 Parlements, avec, évidemment, l'hypothèse
que des modifications pourraient être apportées à ces
résolutions. Notamment, on voudrait probablement, étant
donné que, si c'était le cas, ce serait pour discuter la question
des autochtones, pour inclure la question des autochtones, apporter un autre
amendement, pour ce qui a trait
aux autochtones, à la clause Canada. Je sais que le chef de
l'Opposition a accepté une société distincte pour les
autochtones, si mon souvenir est bon. Non? Ah! Je m'excuse. Alors, il semble
que... Je sais qu'au début de la rencontre il était hostile,
mais, à la fin de la rencontre, il aurait accepté de leur
promettre une société distincte. De toute façon, il
pourrait répondre... Je suis heureux de voir que ce n'est pas tout
à fait ce que les journaux ont rapporté parce que le chef de
l'Opposition a toujours dit que la société distincte n'avait pas
tellement d'importance...
Le Président: En conclusion, M. le premier ministre.
M. Bourassa: ...pouf le Québec, mais que la
société distincte aurait de l'importance pour les autochtones.
Alors, j'avais vu un autre illogisme de mon ami, le chef de l'Opposition, et je
suis heureux de voir que, ce matin, il pourra clarifier son point de vue.
Ce que je dis, c'est que, si nous prolongeons au-delà du 23 juin
- je termine, M. le Président; il faut quand même admettre que ce
sont des questions importantes, on peut prendre quelques secondes de plus pour
éclairer nos amis de l'Opposition - à ce moment-là, la
question des autochtones va être à l'ordre du jour. Alors, on
recommence la négociation pour un autre trois ans et le Québec
veut respecter encore une fois - je termine, M. le Président - la
résolution du mois d'août 1986. J'espère qu'on s'en
souvient dans le Canada, qu'on s'en souvient à Terre-Neuve, qu'on s'en
souvient au Manitoba; nous avons décidé unanimement en 1986 de
régler d'abord la question du Québec qui avait été
exclu du processus du rapatriement de la constitution...
Le Président: M. le premier ministre.
M. Bourassa: ...par le gouvernement du temps. C'est ça
qu'était l'objectif de la ronde du Québec et c'est ça qui
doit demeurer l'objectif.
Le Président: En complémentaire, M. le chef de
l'Opposition.
M. Parizeau: M. le Président, vous me permettrez
simplement en commençant de dire que ce que le premier ministre a
présenté comme étant ma position à l'égard
des autochtones n'est pas exact Ce que je leur ai suggéré, en
vertu des 15 principes de 1983 et de la résolution de 1985 de cette
l'Assemblée nationale, contre laquelle les libéraux ont
voté à l'époque...
Des voix: Oui! Oui!
M. Parizeau: ...ce sont des nations distinctes. cela étant
dit, m. le président, je reviens à un autre scénario.
à ottawa, à l'heure actuelle, on discute activement de la
possibilité, après le 23 juin, de représenter l'accord du
lac Meech, tous ses amendements et la résolution d'accompagnement avec
un nouveau délai de trois ans et on recommence tout. Le premier ministre
a fait certains commentaires, hier, à cet égard. Pourrait-il
être un peu plus explicite aujourd'hui en cette Chambre? Est-ce qu'il
exclut ce scénario-là?
Une voix: Oui ou non?
Le Président: Alors, M. le premier ministre.
M. Bourassa: M. le Président, nous avons dit et
répété, à plusieurs reprises, que nous n'avions pas
l'intention de retourner à la table constitutionnelle si l'accord du lac
Meech n'était pas ratifié le 23 juin 1990, pour une raison bien
simple et à laquelle je me suis référé tantôt
C'est que l'objectif de cette négociation était de régler
la question du Québec. Toutes les provinces, en 1981, ont pu faire des
demandes et ont vu certaines de leurs demandes acceptées. Le
Québec n'a pas eu l'opportunité de faire ses propositions
étant donné qu'il a été exclu du processus de
rapatriement. Donc, nous avons voulu rétablir, corriger, réparer
cette injustice dont le Québec a été l'objet en 1981 et
nous avons fait des demandes qui ont finalement été
acceptées le 30 avril 1987, le 3 juin 1987 et le 9 juin 1990, à
trois reprises. On a dit: On est d'accord. On va tout faire pour que ce soit
accepté et on a dit que, si ça ne l'était pas, nous ne
voyions pas comment nous pourrions retourner à la table de
négociation si l'on rejette les demandes qui ont déjà
été acceptées à trois reprises; et ça
s'applique également dans le cas des autochtones. Je me suis abstenu de
participer à une conférence constitutionnelle il y a trois ans
parce que nous ne faisions pas partie de la constitution canadienne. C'est
pourquoi j'ai dit hier aux autochtones, je leur ai dit qu'en toute logique,
s'ils veulent avoir une chance de régler le problème des
autochtones, qu'ils acceptent; qu'ils renoncent à tuer l'accord du lac
Meech comme ils le répètent sur tous les tons depuis quelques
jours; que s'ils veulent avoir une chance d'avoir le gouvernement autonome,
déjà...
Le Président: En conclusion.
M. Bourassa: ...je termine là-dessus, M. le
Président, et c'est quand même important qu'on accorde quelques
secondes. Non, mais ce que je veux dire au chef de l'Opposition, c'est que,
s'ils veulent avoir une chance d'avoir le gouvernement autonome,
déjà nous l'acceptons dans les faits. Le ministre responsable des
autochtones a déjà accepté dans les faits de discuter la
question du gouvernement autonome. S'ils veulent la voir inscrite dans la
constitution, qu'ils acceptent
l'accord du lac meech au lieu de vouloir tuer l'accord du lac meech et
retarder indéfiniment la réalisation d'un de leurs objectifs les
plus importants.
Le Président: En complémentaire, M. le chef de
l'Opposition.
M. Parizeau: Avec un peu d'ironie, M. le Président, je
pourrais dire que je suis certain que la profession de foi que vient de faire
le premier ministre va impressionner les autochtones considérablement!
(10 h 40)
Cela étant dit, je reviens à une autre question. Compte
tenu de ce que vient de dire le premier ministre, est-ce qu'il a l'intention de
demander au gouvernement fédéral, advenant l'échec de
Meech, d'annuler les opérations de ce comité de la Chambre des
communes qui, dès le 16 juillet prochain, doit commencer à
élaborer une clause Canada dont une des sources d'inspiration du premier
ministre, le constitution-naliste Daniel Proulx, disait vendredi que
c'était une erreur que le premier ministre avait faite d'accepter
l'élaboration de cette clause Canada qui, dans certaines circonstances,
pourrait être irréparable? Le premier ministre, advenant
l'échec de Meech, a-t-il l'intention de demander au gouvernement
fédéral d'annuler ce comité de la Chambre des communes
pour élaborer une clause Canada?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Bourassa: M. le Président, je veux dire au chef de
l'Opposition quand même que ma déclaration de foi pour les
autochtones repose sur des faits bien concrets. Il en a parlé dans son
préambule. Nous avons accepté comme principe, au gouvernement, au
Conseil des ministres, le gouvernement autonome. Nous l'avons fait même
en décembre 1988. On a eu l'entente en 1975, la première fois
qu'il y avait une entente en Amérique du Nord entre un gouvernement et
des groupes autochtones pour le développement de la Baie James. Ce sont
quand même des faits concrets. Pourquoi serions-nous moins
crédibles que le Parti québécois pour...
Une voix:...
M. Bourassa: Non, mais M. le... C'était dans le
préambule du chef de l'Opposition, ça. M. le Président, le
chef de l'Opposition vient de citer M. Daniel Proulx qui a dit que, dans la
négociation que nous avons menée il y a deux semaines, le
Québec avait fait des gains considérables pour ce qui a trait
à la réforme du Sénat. Ça, il n'en parle pas, M. le
Président. Il ne parle pas des gains considérables - et
ça, c'est concret -que le Québec gardait la proportion de ses
sénateurs, que l'Ontario avait accepté de renon- cer à six
sénateurs. et je veux rendre hommage à m. peterson qui, ce matin,
est à terre-neuve pour défendre l'accord du lac meech et la
réintégration du québec.
Des voix: Bravo!
Le Président: Je vais demander la collaboration de toute
l'Assemblée. M. le premier ministre, je vous demanderais de conclure
rapidement, s'il vous plaît.
Une voix: Meech va aller à l'eau.
Le Président: S'il vous plaît! S'il vous
plaît! En conclusion, rapidement, M. le premier ministre.
M. Bourassa: M. le Président, ça me permet de
signaler que, contrairement à 1981, le Québec n'est pas
isolé. Il a l'appui de la plupart des provinces du Canada pour
défendre la réintégration de l'accord du lac Meech. C'est
une différence importante avec 1981.
Je termine en parlant de la clause Canada. Le gouvernement
précédent - et je ne le blâme pas - avait fait preuve
d'ouverture sur la clause Canada. Il avait fait preuve d'ouverture sur la
formule d'amendement constitutionnel, la formule 7-50, votre fameux 7-50. Le
gouvernement avait fait preuve d'ouverture, je dirais de
témérité plus que d'ouverture...
Le Président: M. le premier ministre, en conclusion, s'il
vous plaît!
M. Bourassa: ...évidemment, on m'a rappelé toutes
les clauses Canada que le gouvernement du Parti québécois avait
proposées. Lui, il pouvait en proposer des clauses Canada, mais nous, on
ne pouvait même pas accepter d'en discuter. C'est ça, la
différence entre les deux partis. Lui, il pouvait en proposer en parlant
de monarchie constitutionnelle et moi, je ne pouvais pas accepter d'en
discuter, M. le Président. Soyez donc un peu plus logiques dans vos
questions.
Le Président: En complémentaire, M. le chef de
l'Opposition.
M. Parizeau: M. le Président, puisqu'il n'y avait aucune
raison que le premier ministre accepte de mettre à l'ordre du jour de la
deuxième ronde l'établissement d'une clause Canada, puisque, en
somme, c'était la règle d'unanimité - il suffisait qu'il
dise non et il n'y en avait pas, dans le document d'accompagnement,
d'élaboration d'une clause Canada - c'a été sa
décision de faire mettre ça à l'ordre du jour. Il pouvait
dire non. Il n'a pas dit non.
Alors, dans ces conditions, je lui pose la question et une question qui,
fondamentalement,
est très simple. Si Meech ne passe pas, est-ce qu'il va demander
au gouvernement fédéral de faire annuler le comité de la
Chambre des communes qui doit commencer à préparer une clause
Canada à partir du 16 juillet? C'est simple comme question, M. le
Président. Pourquoi il ne peut pas répondre, le premier ministre?
Oui ou non?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Bourassa: M. le Président, d'abord, je m'étonne
que le chef de l'Opposition... Je répondrai à sa question dans
quelques secondes, mais il dit que, bon, on ne doit pas discuter de la clause
Canada. J'ai dit tantôt que son gouvernement avait accepté non
seulement d'en discuter, mais avait fait des propositions. Lui-même, il y
a quelques jours, avec les autochtones, s'était engagé, dans une
clause, dans un préambule, à ce qu'on tienne compte des
autochtones. Je veux dire, dans ses discussions il pariait de nation distincte
ou société distincte. En passant, les autochtones ont
refusé la résolution à laquelle vous avez
référé tantôt. Ils la trouvaient trop restrictive.
Alors, cessez de pavoiser avec des résolutions qu'eux-mêmes ont
refusées.
M. le Président, la question, pour répondre à mon
ami, le leader parlementaire, j'ai refusé, jusqu'à
maintenant...
Une voix: Soyez gentil.
M. Bourassa: Oui, je serai gentil et prudent avec lui. J'ai
répondu, jusqu'à maintenant, que je n'ai pas l'intention
d'élaborer sur des scénarios d'échec. Je comprends qu'il
faudra le faire peut-être d'ici quelques heures si le Manitoba maintient
son point de vue, mais je n'ai pas l'intention, alors qu'il demeure une chance
très mince, je l'admets... Mais il y a deux semaines aussi, il y a des
journées où tout le monde pensait que c'était fini et, le
lendemain, on s'était entendus. Soyons prudents dans nos jugements.
Tenons compte qu'il reste encore trois jours. Je dis au chef de l'Opposition
que, lorsque nous connaîtrons le sort définitif de l'accord du lac
Meech, nous aurons, à ce moment-là, l'occasion et
l'opportunité de faire connaître le point de vue du gouvernement
vis-à-vis des points qui intéressent le chef de l'Opposition. Je
comprends très bien sa question, mais je lui dis qu'il est quelques
jours en avance sur la réponse qu'il pourrait recevoir.
Le Président: En question principale, M. le
député de Lévis.
Demande de rencontre avec le premier ministre par les
camionneurs artisans
M. Garon: M. le Président, ma question va s'adresser au
premier ministre. Par les réponses données hier par le ministre
des Transports, on se rend compte que la stratégie du ministre -
usée, dirait le député de Louis-Hébert - des
Transports a consisté et consiste toujours à nier les
problèmes des camionneurs et à tenter de discréditer les
dirigeants et l'Association nationale des camionneurs indépendants.
Le ministre aurait dû reconnaître que les dirigeants de
l'ANCAl ont réussi, au cours des 15 derniers jours, à garder le
contrôle de plus de 2000 camionneurs autour du parlement, ou dans les
endroits environnants, malgré leur insatisfaction grandissante,
notamment en raison du manque de volonté du ministre des Transports de
régler le conflit. Or, comme les camionneurs ont compris que le
sous-ministre des Transports relevait davantage du premier ministre que du
ministre des Transports et qu'ils aimeraient avoir une relation directe avec
celui qui mène, ils ont demandé à avoir une rencontre avec
le premier ministre.
Ma première question. J'aimerais demander s'il y a eu une
rencontre hier au bureau du premier ministre concernant la grève de
l'ANCAl. Si oui, quelle a été la nature des conclusions de la
rencontre? Si non, est-ce qu'il doit y avoir aujourd'hui une rencontre entre le
premier ministre ou quelqu'un de son bureau et les dirigeants de l'ANCAl?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Bourassa: Comme je suis revenu hier, j'avais été
en communication téléphonique avec mes collaborateurs qui ont eu
des conversations téléphoniques avec les dirigeants des
camionneurs. À ma connaissance, il n'y a pas de rencontre qui soit
prévue, ou confirmée plutôt, aujourd'hui. J'aurai un
Conseil des ministres qui suivra la période de questions. Sûrement
que nous aurons l'occasion d'en discuter à ce moment-là. Mais le
ministre des Transports a fait des propositions. À ce qu'on me dit, il y
a plusieurs points qui sont réglés. Il y a eu cinq points qui ont
été réglés. Donc, il y a eu des progrès dans
les négociations. Ce n'est pas l'impasse totale. Il y a eu des
progrès dans les négociations. Nous espérons que ces
progrès se poursuivront dans les prochaines heures de manière
à régler cette situation.
Le Président: En complémentaire.
M. Garon: M. le Président, comme l'ancien ministre des
Transports reconnaissait l'ANCAl comme une association représentative et
que le ministre actuel nie ce caractère représentatif, est-ce que
le premier ministre considère que l'ANCAl est une association
représentative des camionneurs artisans au Québec? (10 h 50)
Le Président: M. le premier ministre.
M. Bourassa: Le député de Lévis n'a pas la
tradition d'interpréter très fidèlement les propos que
nous tenons de ce côté-ci de la Chambre. Parfois il les colore
d'un minimum de partisane-rie. C'est compréhensible, devant la faiblesse
de ses arguments, de compenser par la partisanerie. M. le Président,
nous avons accepté, le ministre des Transports a accepté de
discuter avec eux des dizaines d'heures ou ses représentants, ses
collègues ont accepté de discuter avec eux à de
très nombreuses reprises depuis deux semaines. Alors, je ne vois pas la
pertinence de la question du député de Lévis.
Le Président: En complémentaire.
M. Garon: M. le Président, est-ce que le premier ministre
considère que l'ANCAl est une association qui est vraiment
représentative du monde du camionnage artisan au Québec ou s'il
considère que l'ANCAl n'est pas assez représentative pour
être reconnue comme association représentative et
considérée comme telle?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Bourassa: Ça applaudit un peu moins fort là, de
ce côté-là. De toute façon, j'ai dit au
député de Lévis que cinq des sept points avaient
été réglés, qu'il restait deux points à
être réglés. Et nous espérons que, dans ces deux
points-là, avec tous les aspects qui peuvent être soulevés
directement ou indirectement par le député de Lévis, on
puisse arriver à une conclusion acceptable aux deux parties.
Le Président: En complémentaire.
M. Garon: M. le Président, est-ce que le premier ministre
considère comme une proposition sérieuse de faire une commission
parlementaire à la mi-septembre alors qu'il y a 2000 camionneurs
à Québec depuis plus de 15 jours, 16 jours aujourd'hui, que les
travaux de voirie baisseront de 42 % cette année dans les
différentes régions du Québec, que plusieurs camionneurs
sont menacés d'avoir une saisie de leur camion et que, s'il n'y a pas de
règlement des questions ces jours-ci, plusieurs retourneront chez eux
pour se faire saisir leur camion parce qu'il y a un manque d'ouvrage dans ce
secteur-là? Est-ce que le premier ministre a l'intention de
régler le problème tout de suite ou s'il considère que
reporter des rencontres en septembre, c'est sérieux?
M. Bourassa: M. le Président... Le Président:
M. le premier ministre.
M. Bourassa: ...on sait que l'Opposition, constamment, chaque
fois qu'il y a un problème, n'hésite pas à proposer une
commission par- lementaire et je pense que c'est un forum qui peut être
approprié. Mais rien n'exclut entretemps, et le ministre l'a dit
à plusieurs reprises... Le ministre fait quand même un travail
très exceptionnel dans un dossier comme celui-là. C'est quand
même un dossier qui est exigeant. Vous en avez connu, vous aussi, des
dossiers qui n'étaient pas faciles à régler et on pourrait
parler des solutions que vous avez apportées. Mais, comme je ne veux pas
faire de partisanerie dans ces derniers jours de la première partie de
la session, j'éviterai d'être un peu désobligeant pour mes
amis d'en face.
Mais, ce que je dis, c'est qu'il n'y a pas de contradiction entre la
tenue d'une commission parlementaire dans quelques semaines, au mois de
septembre, et la poursuite des négociations et de la concertation d'ici
ce moment-là. Je veux dire: II n'y a pas de contradiction entre les deux
étapes de manière à arriver à une solution
acceptable.
Le Président: Dernière question additionnelle, M.
le député de Lévis.
M. Garon: Est-ce que le premier ministre considère que
l'amélioration des secteurs de travail est une proposition valable de la
part des camionneurs artisans puisque, comme la tarte diminue, ils aimeraient
avoir une plus grosse pointe d'une tarte diminuée pour garder à
peu près la même quantité de travail? Est-ce qu'il
considère que c'est une demande justifiée dans une année
où les taux d'intérêt augmentent ou s'il considère
qu'il est mieux que tes gens fassent faillite pour que le nombre des
camionneurs diminue plutôt que d'augmenter la pointe de la tarte?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Bourassa: On sait qu'avec la commission parlementaire comme
aboutissement l'objectif est de rechercher - étant donné les
circonstances économiques qui évoluent constamment pour ce
secteur comme pour d'autres - une solution durable qui s'applique à
moyen et à long termes. Tout le monde est d'accord que ce n'est pas un
problème facile, qu'il y a des mutations économiques qui nous
forcent à nous adapter.
Cela étant dit, nous voulons poursuivre la négociation de
la façon la plus intensive possible et c'est ce que le ministre fait
depuis quelques semaines d'une façon la plus efficace possible et d'une
façon très déterminée. Alors, je pense bien que le
député de Lévis ne peut pas contredire le gouvernement sur
sa volonté politique très ferme d'arriver à un
règlement acceptable aux deux parties.
Le Président: En question principale, M. le
député de Pointe-aux-Trembles.
Augmentation du contrat du Centre d'accueil
juif
M. Bourdon: Dans le rapport du comité Bernard sur le
processus d'octroi des contrats gouvernementaux, on retrouve deux
recommandations significatives. Là première, c'est de faire en
sorte qu'il y ait une rotation du fonctionnaire représentant la
Corporation d'hébergement sur les comités de sélection
dans la santé et, la deuxième, d'éliminer le
critère du coût prévu des travaux pour établir le
nombre des membres des comités de sélection, et de porter ce
nombre à cinq dès qu'il y a un appel d'offres public. On comprend
aisément la recommandation sur la rotation du fonctionnaire quand on se
souvient du rôle joué par M. Vincent Rochette, ami de l'actuel
ministre, militant libéral et membre de 16 comités de
sélection, ayant octroyé à 14 reprises des contrats
à des firmes d'allégeance libérale bien connue, dont
à sept reprises...
Des voix: Ah!
Le Président: S'il vous plaît!
M. Bourdon: ...à des membres du comité de finances
du premier ministre, en 1983.
Le Président: Un instant! J'ai un rappel au
règlement. M. le leader du gouvernement, sur un rappel au
règlement.
M. Pagé: Vous savez, ce n'est pas le fait de poser une
question qui permet au député, dans le cadre du préambule,
de faire jouer un disque 78 tours...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Pagé: ...qui est vieux, qui est usé. Posez-la,
la question, et on va y répondre, M. le député. Plus vous
allez aller vite, plus on va pouvoir répondre à un plus grand
nombre de questions. C'est ça, l'efficacité des travaux
parlementaires.
Le Président: Alors, sur la même question de
règlement, M. le...
M. Chevrette: M. le Président, je pense... Le
Président: ...leader de l'Opposition.
M. Chevrette: ...qu'un 78 tours est encore moins long que
plusieurs cassettes qu'on a entendues au niveau de la période des
questions, ce matin.
Des voix: Oui!
M. Chevrette: Et, je m'excuse, il y a un petit peu de
décence à afficher. Un petit peu de décence, s'il vous
plaît, M. le leader.
Le Président: Alors, s'il vous plaît! S'il vous
plaît! Évidemment, le règlement dit: Autant la
réponse que la question doivent être brèves.
J'espère qu'on appliquera la même rigueur des deux
côtés de l'Assemblée pour faire en sorte que les questions
soient brèves et que les réponses soient brèves
également. Donc, à votre question, maintenant, M. le
député de Pointe-aux-Trembles.
M. Bourdon: Quant à la deuxième recommandation, on
se souviendra que l'Opposition officielle avait souligné qu'on avait
recours systématiquement à une sous-évaluation des
coûts prévus des projets pour avoir recours à des
comités de seulement trois personnes plus faciles à manipuler.
Les chiffres que nous a fournis le ministre...
Le Président: Votre question, s'il vous plaît.
M. Bourdon: ...de la Santé et des Services sociaux
confirment cette accusation.
Au ministre de la Santé et des Services sociaux: Est-ce que le
ministre peut nous confirmer que, dans le cas du Centre d'accueil juif dont la
partie structure fut accordée à M. Marcel Laurin, membre du
comité de finances du premier ministre en 1983, le coût initial
fixé à 9 000 000 $ est maintenant rendu à 16 500 000
$?
Des voix: Oh! Oh!
Le Président: M. le ministre de la Santé et des
Services sociaux.
M. Côté (Charlesbourg): M. le Président, je
suis très heureux, à deux jours de la fin de la session, que le
député de Pointe-aux-Trembles puisse faire un baroud d'honneur.
On se rappellera avec quel fracas il avait annoncé son arrivée en
Chambre...
Des voix: Ah oui! Ah oui!
M. Côté (Charlesbourg): ...avec toute une
série de documents qui devaient littéralement décapiter
à peu près tous les membres du cabinet actuel, en particulier
celui qui vous parle, et, finalement, ça s'est écrasé
assez rapidement, merci. Je comprends qu'à l'occasion il faut avoir
quelques satisfactions personnelles et c'est vrai aussi pour le
député de Pointe-aux-Trembles. Je vais lui donner l'occasion de
continuer ce matin.
Dans son préambule, il affirme à nouveau... Il n'y a rien
comme un taureau qui fonce sans regarder où il va, M. le
Président, il finit par se frapper sur un mur.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Côté (Charlesbourg): II annonce, ce matin: 14
contrats ont été donnés à des ingénieurs
libéraux, alors que lui-même, dans une conférence de
presse, reconnaissait qu'il devait y avoir deux ou trois ingénieurs
péquis-tes.
Des voix: Ah! Ah!
M. Côté (Charlesbourg): Ça manque de logique
un petit peu parce que, forcément, s'ils ont choisi, comme vous le
dites, des libéraux, c'est qu'il y en a peut-être un petit peu
plus qu'il n'y a de péquistes, comme vous l'aviez si bien dit.
Quant aux deux recommandations du comité Bernard, rotation...
M. Brassard: Ce n'est pas fort! (11 heures)
M. Côté (Charlesbourg): M. le Président,
voulez-vous rappeler à l'ordre le député de
Lac-Saint-Jean, s'il vous plaît? Merci. Quant aux deux questions plus
fondamentales posées par le comité Bernard, c'est deux
recommandations qui sont à être analysées actuellement et
qui parlent de rotation du secrétaire. Nous les abordons avec beaucoup
d'intérêt. Nous ferons nos recommandations à M.
Benoît Morin que le premier ministre a chargé du dossier.
Quant à la deuxième, avoir cinq personnes sur des
comités, je rappelle au député de Pointe-aux-Trembles que
le Parti libéral, le gouvernement n'a pas attendu que le PQ soit dans
l'Opposition pour faire en sorte que ce soit nous qui acceptions d'en nommer
cinq. Alors que les règles gouvernementales - c'est aussi dit dans le
comité Bernard - en prévoient trois, nous en nommons cinq,
au-delà de 10 000 000 $.
Quant à la recommandation de cinq tout le temps, je peux vous
dire que, demain matin, ça fait mon affaire et n'importe quand.
Le Président: En complémentaire, M. le
député.
M. Bourdon: M. le Président, le ministre pourrait-il nous
dire comment il se fait que dans le centre d'accueil juif, le coût de 9
000 000 $ est passé à 16 500 000 $ et que la première
évaluation ne tenait pas compte du coût de la cuisine kascher dans
un centre hospitalier juif, ne tenait pas compte du coût du
stationnement, ne tenait pas compte des honoraires aux firmes professionnelles,
ne tenait pas compte de l'indexation et ne tenait pas compte du coût du
mobilier?
Le Président: M. le ministre.
M. Côté (Charlesbourg): M. le Président,
lorsqu'on est allés en commission parlementaire, l'Opposition a
utilisé le nombre maximum d'heu- res permis par le règlement pour
étudier les crédits du ministère. Ce qu'il nous dit
aujourd'hui, c'est moi qui le lui ai donné comme réponse. Grosse
révélation, grosse trouvaille! Vous avez perdu votre temps
à chercher, puisque je vous l'ai donné en commission
parlementaire, sur tous les dossiers que vous avez demandés. Alors, ne
pensez pas que vous révélez quelque chose de tout à fait
extraordinaire, de sensationnel. Ce n'est même pas de la grosseur d'un
bourdon, ce que vous avez trouvé!
Le Président: S'il vous plaît! S'il vous
plaît! Alors, en complémentaire, M. le député de
Pointe-aux-Trembles.
M. Bourdon: M. le Président, une question en deux
volets.
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
M. Bourdon: Est-ce que le ministre peut nous dire s'il a enfin
trouvé dans la masse de documents...
Le Président: Un instant! Je veux rappeler à
l'ordre. Je ne sais pas si ça vient de ma droite, je ne peux pas
identifier. Je vous rappelle à l'ordre là-dessus, je vous
prierais de respecter la dignité de l'Assemblée, s'il vous
plaît! Votre question.
M. Bourdon: Je vous remercie, M. le Président.
Première... régulièrement... Est-ce que le ministre peut
nous dire s'il a enfin trouvé, dans la masse de documents qu'il a
apportés du ministère des Transports, le document que lui aurait
remis M. Rochette, lors d'une instance libérale, et qui était un
relevé de tous les contrats octroyés depuis des années
dans le réseau de la santé et des services sociaux?
Deuxièmement, le ministre peut-il nous dire si c'est parce qu'il
s'occupe d'embauché et de contrats dans tous les ministères qu'il
a besoin d'entretenir, dans son cabinet politique, une petite armée de
38 personnes?
Le Président: M. le ministre.
M. Côté (Charlesbourg): Alors, comme vous pouvez le
constater, M. le Président, c'est un pot-pourri de questions et,
évidemment, c'est un pot-pourri de fin de session pour tenter de tout
ramasser, comme je vous l'ai dit tantôt, et tenter de sauver au moins le
visage de celui qui a tenté d'éclabousser bien du monde.
À la première question, même si elle ne se rattache
d'aucune manière à la première, quant à la liste,
vous le savez fort bien, c'est une liste qui était publique et
distribuée. Vous revenez pour tenter, finalement, d'en beurrer le plus
large possible et de laisser des soupçons comme vous l'avez toujours
fait
Deuxièmement, le ministre s'occupe des électeurs de
Charlesbourg, que ça vous plaise ou pas. Le ministre va continuer de
s'occuper des affaires de Charlesbourg et de défendre
l'intérêt des citoyens de Charlesbourg, peu importe leur couleur
politique, de la même manière qu'il a toujours répondu dans
les cas - Johnson, Shef-ford, Duplessis - dans tous les cas qui lui avaient
été demandés à l'époque où il
était au ministère des Transports, comme à la
Santé, respectant chacun des parlementaires ayant été
élu démocratiquement. Ça, il va continuer de le faire.
Quant aux 38 personnes qui oeuvrent au cabinet du ministre des
Transports, je vous rappelle tout simplement et très bonnement,
très très bonnement, que 11 000 000 000 $, c'est le tiers du
budget du gouvernement du Québec et 38 personnes pour répondre
à vos demandes et à celles des citoyens, ce n'est pas beaucoup.
Voilà!
Le Président: En question principale, M. le
député de Lévis.
Fiches d'embauché des employés
occasionnels au ministère des Transports
M. Garon: M. le Président, hier, le ministre
délégué aux Transports a contredit les propos qu'il tenait
en Chambre le 15 juin où il affirmait que son cabinet avait en sa
possession le registre des 30 000 occasionnels afin de savoir le nom des
personnes inscrites au fichier pour transmettre cette information aux
députés. Qu'est-ce qu'il disait le 15 juin? Il disait: II est
tout à fait normal, quand un député ou une
députée en cette Chambre nous appelle afin de savoir si un
employé occasionnel parmi les quelque 30 000 employés
occasionnels qui sont inscrits au registre, veut savoir, par exemple, quel est
l'ordre de priorité dans lequel ils sont classés - est-ce qu'ils
sont 150e, 200e, 300e, 600e sur la liste - il faut qu'on puisse disposer de
cette information. Alors cette information est effectivement colligée
à l'intérieur de mon cabinet afin d'en transmettre l'information
auprès de la deputation qui, à juste titre, comme on le
mentionnait tantôt, peut obtenir de l'information sur l'état d'un
dossier d'un commettant. Et hier, M. le Président, il a dit qu'il ne
recevait pas toutes les demandes d'emploi faites au ministère des
Transports. Il a dit: "Mon cabinet ne reçoit pas toutes les demandes
d'emploi occasionnel qui sont faites à l'intérieur des
différents districts ou des différentes régions." Alors,
M. le Président...
Le Président: Un instant, s'il vous plaît! Je vais
demander la collaboration et l'attention de tous les membres de
l'Assemblée, s'il vous plaît. Votre question, M. le
député de Lévis.
M. Garon: Ma question est très simple. Le ministre peut-il
nous dire la vérité? Les fiches d'embauché du personnel
occasionnel au ministère des Transports sont-elles acheminées et
centralisées à son cabinet comme il nous l'a dit la semaine
dernière ou si elles ne sont pas toutes envoyées à son
cabinet comme il l'a dit hier? C'est oui ou non?
Le Président: M. le ministre délégué
aux Transports.
M. Vallières: M. le Président, vous me voyez
déçu que le député de Lévis soit en
quatrième question seulement, aujourd'hui. Je m'attendais qu'il soit
mieux considéré. M. le Président, je veux
répéter au député de Lévis ce que je lui ai
déjà dit. On ne dispose pas au cabinet, chez nous, des 30 000
demandes qui sont actuellement fichées à la Direction des
ressources humaines du ministère des Transports. C'est bien clair, M. le
Président.
Je veux indiquer également et je rappelle au député
de Lévis que, face à ses interrogations vis-à-vis du droit
que j'ai, comme ministre, d'obtenir des fiches nominatives comme celles que le
Parti québécois a rendues publiques récemment, c'a
été confirmé encore hier en entrevue
téléphonique par le président de la Commission
d'accès à l'Information, oui, le ministre avait le droit d'avoir
ces fiches en sa possession.
Je répète au député de Lévis que
ça me paraît important que ces fiches, un nombre limité
qu'on a en main, nous servent à bien informer la deputation. Et quand
une demande nous arrive sur un fichier qui date de 1986, 1987 ou 1988, on va
à la Direction des ressources humaines pour obtenir l'information
requise. De la même manière, M. le Président, que je disais
hier qu'il est important qu'on puisse donner une information de qualité
à la deputation, j'indiquais récemment que le
député de Shefford m'avait fait une demande verbale. On va tenter
d'y répondre.
M. le Président, il y a aussi des députés qui font
des demandes écrites au ministre des Transports afin de
s'enquérir de l'état de certains dossiers. Je vous disais qu'on
traitait les dossiers par ordre d'ancienneté, par ordre d'inscription au
fichier. Je veux, M. le Président, pour appuyer mes propos, indiquer en
cette Chambre qu'il y a des députés qui le font. Ils font bien
leur travail d'ailleurs. Je ne veux pas les beurrer avec ça. Ça
me rappelle, entre autres, que le député de Duplessis...
Une voix: Ah non!
Le Président: En conclusion, M. le ministre, s'il vous
plaît.
M. Vallières: ...s'est déjà adressé
à mon prédécesseur, M. le Président...
Le Président: En conclusion.
M. Vallières: ...oui en concluant, par écrit,
concernant l'inscription au fichier ministériel d'un électeur de
son comté...
Des voix: Ah! Ah!
M. Vallières: ...qui lui disait que c'était sa
seule ressource pour obtenir gain de cause. Il s'était adressé
à mon prédécesseur en mars 1989 et
précisément sur une erreur de deux ans dans un dossier, M. le
Président, une erreur de deux ans qu'a pu corriger mon collègue
aux Transports à l'époque, j'ai ici, la lettre, M. le
Président. Je veux la déposer. On a corrigé le
problème. Ça témoigne de l'importance que les cabinets
politiques aient un minimum d'informations afin de corriger des erreurs qui
pourraient pénaliser des individus une vie de temps, M. le
Président.
Des voix: Bravo! Bravo! Bravo!
Le Président: j'ai bien compris, m. le ministre, que vous
vouliez déposer le document? est-ce qu'il y a consentement au
dépôt du document?
Une voix: Oui, oui, oui.
Une voix: N'Importe quel temps. (11 h 10)
Le Président: Très bien. S'il vous plaît! Le
document est déposé. Question... M. le ministre, oui.
M. Vallières: Je veux simplement indiquer qu'il y a dans
la lettre du député de Duplessis des informations nominatives et,
donc, les gens qui en feront usage pourront le faire en toute connaissance de
cause.
Le Président: Ce document est déposé. En
question complémentaire, M. le député de Lévis.
M. Garon: M. le Président, comment le ministre peut-il
expliquer que certaines fiches sont dans son cabinet et que d'autres n'y sont
pas? Qu'est-ce qui fait que des fiches se retrouvent à son cabinet et
que d'autres restent au ministère? Quelle est la logique du
système? Comment le ministre peut-il justifier l'existence d'un double
système d'embauché, un à partir du cabinet et un autre au
ministère?
Le Président: M. le ministre délégué
aux Transports.
M. Vallières: M. le Président, je suis à la
veille d'inviter le député de Lévis à venir passer
une journée à mon cabinet, pour voir toute la procédure
qu'on utilise dans le traitement des dossiers.
M. le Président, je veux immédiatement profiter de cette
deuxième question du député de Lévis pour corriger
ce qu'il disait hier, à l'effet que celui qui vous parle n'aurait pas le
droit d'avoir en sa possession des fiches du type de celles qui ont
été rendues publiques par sa formation politique. J'ai le
"transcript" de ce que disait hier le président de la Commission
d'accès à l'information; il disait: "Alors, on parle actuellement
dans un cas qui fait les manchettes évidemment d'un ministère. Il
est évident que le ministre titulaire d'un ministère, au sens de
notre loi, est définitivement une personne qui a qualité pour
recevoir les renseignements au sein d'un organisme."
Je pense, M. le Président, que ça contredit les propos du
député de Lévis et le député de Lévis
essaie encore, sur la mauvaise voie malheureusement, parce qu'il s'était
acharné récemment à démontrer que je n'avais pas le
droit d'avoir en ma possession des fiches nominatives, ce qu'on a
démontré maintenant.
Pour ce qui est, M. le Président, de savoir comment on fonctionne
dans le traitement des dossiers à l'Intérieur d'un cabinet, II le
sait pertinemment bien, M. le Président. Je pense qu'il a
déjà été ministre dans un gouvernement et il
sait très bien que les cabinets s'organisent du mieux qu'ils le peuvent,
M. le Président, pour répondre en priorité, entre autres,
aux députés qui s'intéressent à certains dossiers,
de môme qu'à certains électeurs et électrices qui
sont en droit de le faire, M. le Président.
Une voix: C'est ça.
Le Président: C'est la fin de la période de
questions. Il n'y a pas de votes reportés. Cependant, je vous rappelle
que nous aurons probablement un vote aux motions sans préavis. Je vais
donc reconnaître, pour cette motion, M. le leader du gouvernement, au nom
du premier ministre.
M. Pagé: M. le Président, au nom du premier
ministre et député de Saint-Laurent, conformément aux
articles 5 et...
Le Président: Un instant! Je vais requérir
l'attention des gens. C'est une motion importante puisque les deux tiers des
votes de l'Assemblée sont nécessaires à son adoption. Je
pense que tous les députés méritent bien de pouvoir
entendre la motion et tout le monde doit donc écouter. M. le leader du
gouvernement.
Nomination de membres de l'Institut de recherche et
d'information sur la rémunération
M. Pagé: Merci, M. le Président. Je vous disais
qu'au nom du premier ministre et député de Saint-Laurent,
conformément aux articles 5 et 8 de la Loi sur le régime de
négociation des conventions collectives dans les secteurs public
et parapublic, je propose que Mme Nicole P. Gendreau soit nommée
membre du conseil d'administration et présidente de l'Institut de
recherche et d'information sur la rémunération pour un mandat de
cinq ans à compter d'aujourd'hui, le 20 juin 1990; que Mme
Hélène Wavrock soit nommée de nouveau membre du conseil
d'administration et vice-présidente de l'Institut de recherche et
d'information sur la rémunération pour un mandat de cinq ans
à compter du 20 juin 1990; que M. Louison Ross soit nommé membre
du conseil d'administration et vice-président de l'Institut de recherche
et d'information sur la rémunération pour la durée non
écoulée du mandat de la vice-présidente à
remplacer, soit du 20 juin 1990 au 30 novembre 1993; que, conformément
à l'article 7 de cette loi, M. Louison Ross soit nommé à
nouveau membre du conseil d'administration et vice-président de
l'Institut de recherche et d'information sur la rémunération,
pour un mandat se terminant le 19 juin 1995.
Le Président: Nous allons procéder au vote sur
cette motion. Donc, nous appelons les députés. (11 h 15 - 11 h
16)
Le Président: Mmes et MM. les députés,
veuillez prendre place s'il vous plaît. Alors, nous allons maintenant
mettre aux voix la motion présentée par M. le leader du
gouvernement au nom de M. le premier ministre. Que ceux et celles qui sont en
faveur de cette motion veuillent bien se lever s'il vous plaît!
Le Secrétaire adjoint: M. Pagé (Portneuf), M.
Bissonnet (Jeanne-Mance), Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François), M.
Paradis (Brome-Missisquoi), M. Levesque (Bonaventure), Mme Bacon (Chomedey), M.
Ryan (Argenteuil), M. Côté (Charlesbourg), M. Bourbeau (Laporte),
M. Valle-rand (Crémazie), M. Côté (Rivière-du-Loup),
M. Vallières (Richmond), M. Savoie (Abitibi-Est), M. Séguin
(Montmorency), M. Tremblay (Outremont), M. Rémillard (Jean-Talon), M.
Cherry (Sainte-Anne), Mme Robic (Bourassa), M. Dutil (Beauce-Sud), Mme
Frulla-Hébert (Marguerite-Bourgeoys), M. Elkas (Robert-Baldwin), M.
Lefebvre (Frontenac), M. Johnson (Vaudreuil), M. Cusano (Viau), M. Picotte
(Maskinongé), M. Ciaccia (Mont-Royal), Mme Robillard (Chambly), M.
Blackburn (Roberval), Mme Bleau (Groulx), M. Houde (Berthier), M. Maciocia
(Viger), M. Maltais (Saguenay), M. Rivard (Rosemont), Mme Trépanier
(Dorion), M. Middlemiss (Pontiac), M. Beaudin (Gaspé), Mme Dionne
(Kamouraska-Témiscouata), M. Hamel (Sherbrooke), M. St-Roch (Drummond),
Mme Pelchat (Vachon), M. Marcil (Salaberry-Soulanges), M. Lemire
(Saint-Maurice), M. Leclerc (Taschereau), M. Poulin (Chauveau), M.
Thérien (Rousseau), M. Tremblay (Rimouski), M. Benoit (Orford), M.
Williams (Nelligan), M. Kehoe (Cha-pleau), M. Doyon (Louis-Hébert), M.
Fradet (Vimont), M. Lemieux (Vanier), M. Messier (Saint-
Hyacinthe), M. Richard (Nicolet-Yamaska), M. Charbonneau (Saint-Jean),
Mme Bégin (Belle-chasse), M. Bélanger (Laval-des-Rapides), M.
Gauvin (Montmagny-L'Islet), M. Chenail (Beauharnois-Huntingdon), M. Gautrin
(Verdun), M. Larouche (Anjou), M. Khelfa (Richelieu), M. Gobé
(LaFontaine), Mme Hovington (Matane), M. Joly (Fabre), M. LeSage (Hull), M.
Bergeron (Deux-Montagnes), M. Bordeleau (Acadie), Mme Boucher Bacon (Bourget),
M. Audet (Beauce-Nord), M. Parent (Sauvé), Mme Bélanger
(Mégantic-Compton), M. Camden (Lotblnlère), M. Brouillette
(Champlain), M. Bradet (Charlevoix), Mme Cardinal (Châteauguay), M.
Després (Limoilou), M. Farrah (Îles-de-la-Madeleine), M. Forget
(Prévost), Mme Loiselle (Saint-Henri), M. Lafrenière (Gatineau),
M. Lafrance (Iberville), M. MacMillan (Papineau), M. Parizeau (L'Assomption),
M. Chevrette (Joliette), M. Perron (Duplessis), Mme Blackburn (Chicoutimi), Mme
Marois (Taillon), M. Garon (Lévis), Mme Harel (Hochelaga-Maisonneuve),
M. Jolivet (Laviolette), M. Baril (Arthabaska), Mme Juneau (Johnson), M. Dufour
(Jonquière), M. Lazure (La Prairie), M. Gendron (Abitibi-Ouest), M.
Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Léonard (Labelle), Mme Vermette
(Marie-Victorin), M. Paré (Shef-ford), M. Claveau (Ungava), M. Boulerice
(Sainte-Marie-Saint-Jacques), M. Morin (Dubuc), Mme Caron (Terrebonne), M.
Boisclair (Gouin), M. Bourdon (Pointe-aux-Trembles), M. Trudel
(Rouyn-Noranda-Témiscamingue), Mme Dupuis (Verchères), M. Beaulne
(Bertrand), Mme Carrier-Perreault (Les Chutes-de-la-Chaudière), M.
Libman (D'Arcy-McGee), M. Holden (Westmount), M. Atkinson
(Notre-Dame-de-Grâce), M. Cameron (Jacques-Cartier).
Le Président: Y en a-t-il qui s'opposent à la
motion? Y a-t-il des abstentions?
Le Secrétaire: pour: 114 contre: 0
Le Président: Alors, la motion est adoptée. Nous
allons maintenant passer aux avis touchant les travaux des commissions.
Avis touchant les travaux des commissions
M. Pagé: M. le Président.
Le Président: Oui, M. le leader du gouvernement.
M. Pagé: Avant que le leader adjoint ne donne les avis
pour aujourd'hui, pourriez-vous demander aux députés de demeurer
et d'être attentifs compte tenu qu'il y a de nombreux avis et que tout le
monde va s'en porter mieux et le fonctionnement du Parlement aussi?
Le Président: Je suis complètement d'accord avec
vous, d'autant plus qu'on souligne, chaque
jour, cette même disposition à savoir que les
députés devraient écouter. À tous les jours,
après que les avis sont donnés, il y a un ou deux
députés qui viennent au fauteuil de la présidence ou
même à la table en demandant: Pouvez-vous me dire à quel
endroit telle commission va siéger et à quelle heure? C'est plus
facile que chacun écoute en demeurant à sa place.
Donc, M. le leader adjoint du gouvernement, pour les avis touchant les
travaux des commissions.
M. Lefebvre: M. le Président, alors j'avise
l'Assemblée qu'aujourd'hui, après les affaires courantes,
jusqu'à 13 heures, de 15 heures à 18 heures et de 20 heures
à minuit, à la salle du Conseil législatif, la commission
des affaires sociales procédera à l'étude
détaillée du projet de loi 76, Loi modifiant la Loi sur la
sécurité du revenu et la Loi sur la santé et la
sécurité du travail.
De 15 heures à 18 heures, à la salle
Louis-Hippolyte-Lafontaine, la commission du budget et de l'administration
procédera à l'étude détaillée du projet de
loi 78, Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant les
régimes de retraite des secteurs public et parapu-blic.
De 20 heures à minuit, à la salle
Louis-Hippolyte-Lafontaine, la commission de l'économie et du travail
procédera à l'étude détaillée des projets de
loi suivants, et ce, dans l'ordre ci-après indiqué: le projet de
loi 63, Loi modifiant la Loi sur le Centre de recherche industrielle du
Québec; le projet de loi 56, Loi modifiant la Loi sur la
Société des alcools du Québec et d'autres dispositions
législatives.
J'avise également cette Assemblée qu'aujourd'hui,
après les affaires courantes, jusqu'à 13 heures, de 15 heures
à 18 heures et de 20 heures à minuit, à la salle
Louis-Joseph-Papineau, la commission de l'aménagement et des
équipements entendra les intéressés et procédera
à l'étude détaillée des projets de loi
d'intérêt privé suivants, et ce, dans l'ordre
ci-après indiqué: projet de loi 205, Loi concernant le Bureau des
délégués spécial des municipalités
régionales de comté de Vaudreuil-Soulanges, de
Beauharnois-Salaberry et du Haut-Saint-Laurent; le projet de loi 243, Loi
concernant le régime de rentes de ville de Laval; le projet de loi 200,
Loi modifiant la charte de la ville de Montréal; le projet de loi 259,
Loi concernant la municipalité de Deschambault et la municipalité
de la paroisse Notre-Dame-de-Portneuf; le projet de loi 221, Loi concernant la
ville d'Anjou; le projet de loi 248, Loi concernant la ville de
Victoriaville.
Ces avis, M. le Président, annulent ceux donnés le 12 juin
en ce qui concerne le projet de loi d'intérêt privé 257,
Loi concernant la Régie intermunicipale de gestion des déchets
sur IHe de Montréal. Merci, M. le Président.
Le Président: Merci, M. le leader adjoint du
gouvernement.
Aux renseignements sur les travaux de l'Assemblée, est-ce qu'il y
a des questions?
Une voix: Non.
Le Président: II n'y a pas de questions.
Nous allons maintenant procéder aux affaires du jour. Si vous
voulez m'indiquer le premier sujet qui fera l'objet de nos débats, M. le
leader adjoint du gouvernement.
M. Lefebvre: L'article 51 du feuilleton, M. le
Président.
Le Président: À l'article 51 du feuilleton... Je
prierais les députés de quitter le plus rapidement possible, s'il
vous plaît!
Projet de loi 75 Adoption
Alors, Mmes, MM. les députés, nous allons maintenant
procéder aux affaires du jour. À l'article 51 du feuilleton, M.
le ministre de l'Industrie, du Commerce et de la Technologie propose la motion
d'adoption du projet de loi 75, Loi sur les heures et les jours d'admission
dans les établissements commerciaux. Je suis prêt à
reconnaître un premier intervenant. Alors, M. le ministre de l'Industrie,
du Commerce et de la Technologie.
M. Gérald Tremblay
M. Tremblay (Outremont): Nous sommes aujourd'hui rendus, M. le
Président, à l'étape finale du projet de loi 75 sur les
heures et les jours d'admission dans les établissements commerciaux,
soit l'adoption du projet de loi. Cette étape mettra fin à une
situation inéquitable qui a cours depuis trop longtemps dans le secteur
du commerce de détail.
Au début de la commission publique et de la consultation
publique, je mentionnais qu'il était essentiel de garder une ouverture
d'esprit constante dans la recherche d'une solution et que la solution retenue
devait permettre aux consommateurs, aux travailleurs et aux commerçants
d'être gagnants. Dès le départ, je savais qu'aucune
solution ne pourrait rallier le consensus de tous les intervenants puisque les
intérêts étaient diamétralement opposés.
Toutefois, tous les intervenants sans exception ont eu la possibilité de
faire valoir publiquement leur position.
Après plus de 160 heures de consultation, personne ne peut me
reprocher de ne pas avoir été à l'écoute.
Jusqu'à la dernière minute, j'ai discuté de la solution
retenue avec les 92 membres de la deputation ministérielle et avec
les groupes impliqués dans le dossier qui sont
représentatifs de toutes les régions du Québec. Les
discussions ont été franches et honnêtes. Une
décision a été arrêtée et c'est le
résultat législatif que nous adoptons aujourd'hui.
Gouverner, c'est décider, comme le dit si souvent la
députée de Taillon. J'ai donc fait un choix. Le choix que j'ai
fait est une synthèse du point de vue de tous les intervenants et un
équilibre entre les trois principes fondamentaux que je ne cesse de
répéter depuis six mois, soit l'équité entre tous
les commerçants, les besoins réels des consommateurs et la
qualité de vie de la population, notamment celle des travailleurs et des
travailleuses.
Ces trois principes trouvent leur application dans la nouvelle loi.
Premièrement, tous les commerçants dans le secteur de
l'alimentation sont maintenant égaux devant la loi. Les règles du
jeu sont claires et sont les mêmes pour tous. Deuxièmement, le
consommateur, que l'on a tendance trop souvent à oublier, pourra
maintenant satisfaire ses besoins réels dans tous les secteurs en
pouvant magasiner huit heures additionnelles sur semaine. Quant à ses
besoins de base dans le secteur plus particulier de l'alimentaire, le
consommateur aura droit à un meilleur service hors les heures normales,
tel le dimanche, mais ce service sera offert dans un concept de
dépannage. Il pourra donc s'approvisionner en denrées
alimentaires quand il le voudra, où il le voudra, au prix qu'il le
voudra. (11 h 30)
Enfin, le troisième principe, la qualité de vie de la
population, notamment celle des travailleurs et des travailleuses. Le projet de
loi consacre le principe d'une journée de repos et limitera au minimum
le nombre d'employés appelés à travailler hors les heures
normales dans le secteur du commerce. La nouvelle Loi sur les heures et les
jours d'admission dans les établissements commerciaux, M. le
Président, est une loi uniforme qui s'applique à l'ensemble du
territoire du Québec. Pour en assurer l'application, le ministre de
l'Industrie, du Commerce et de la Technologie partagera avec les
municipalités les pouvoirs d'inspection, ce qui permettra
d'accélérer l'audition des infractions en Cour municipale.
L'augmentation de façon importante des amendes aura de plus un
effet dissuasif certain. Nous avons maintenant, M. le Président, une loi
applicable, gérable et durable, une loi adaptée à la
réalité d'aujourd'hui. Je remercie tous ceux et celles qui ont
participé avec moi à la recherche d'une solution et à
l'élaboration du projet de loi. Je mentionnerai plus
particulièrement les membres de la commission de l'économie et du
travail, les avocats du comité de législation et du bureau des
lois, les fonctionnaires et les membres de mon ministère, et plus
particulièrement une collaboratrice de mon cabinet. M. le
Président, le moment est venu de passer à d'autres choses tout
aussi importantes. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le ministre.
Je reconnais maintenant la prochaine intervenante, au nom du groupe
parlementaire de l'Opposition officielle, Mme la députée de
Taillon. Mme la députée.
Mme Pauline Marois
Mme Marois: Merci, M. le Président. Après avoir
fini un peu tôt ce matin, je dirai cependant que c'est enfin en plein
jour que l'on va discuter d'un projet de loi qui concerne des milliers de
personnes au Québec. Parce que, pour les fins de nos débats, et
pour les gens qui nous écoutent, nous avons longuement discuté du
projet de loi sur les heures d'affaires, mais nous l'avons fart plutôt la
nuit, alors que personne ne nous entendait. Nous en sommes à la
troisième lecture et j'ai encore un mince espoir - et je peux l'avoir -
qu'il n'est peut-être pas trop tard pour désespérer, pour
faire en sorte que le ministre entende enfin la voix de la majorité,
pour que le ministre soit sensible à un dernier cri d'alarme. Ou
peut-être qu'il pense comme l'une de ses collègues qui lui disait,
vendredi dernier: Ne t'en fais pas. Ce n'est qu'un mauvais moment à
passer.
Oui, vous avez raison. Probablement, M. le Président, que pour le
ministre, c'est un mauvais moment à passer. C'est bien sûr que
c'est un moment un peu triste parce que l'Opposition qui essaie de faire
entendre la voix de la majorité s'est sentie et se sent toujours, M. le
Président, bâillonnée par les procédures que l'on a
utilisées ici, à l'Assemblée nationale, pour éviter
le débat, M. le Président. Alors, bien sûr, pour le
ministre, je le répète, c'est un mauvais moment à passer.
Mais vous poserez la question à ceux et celles qui vont travailler le
dimanche et ils vont être de plus en plus nombreux; et je ne le
souhaiterais pas, mais je sais que l'avenir, malheureusement, me donnera
raison. Vous leur demanderez, M. le Président, vous demanderez au
ministre qu'il leur demande si, pour eux, c'est un mauvais moment à
passer qui n'est pas un peu long, M. le Président.
Je crois que c'est bien mal démarrer sa carrière
politique, puisque le ministre a été élu il y a à
peine un an, même pas un an, de procéder dans une première
loi importante avec un bâillon. On empêche l'Opposition de faire
son travail. On empêche l'Opposition d'être la porte-parole, non
pas d'une minorité, M. le Président, non pas d'un "lobby", mais
d'une majorité, M. le Président.
Et je vais prendre tout mon temps, M. le Président, pour redire
ce matin, j'espère patiemment - mais, vous savez, la patience a ses
limites, comme en toute chose - que je ne partage pas le choix de
société dans lequel le ministre veut nous engager. Et je suis
persuadée,
M. le Président, que des milliers de travailleurs et de
travailleuses, de consommateurs et de consommatrices, de propriétaires
de leur entreprise pensent aussi comme moi. Le ministre, par la loi qu'il nous
propose d'adopter, nous engage dans un modèle de société
qui n'est pas le nôtre, qui est beaucoup plus près du
modèle américain où consommation et production prennent le
pas sur d'autres valeurs qui sont pourtant beaucoup plus significatives et
sûrement beaucoup plus importantes pour l'ensemble de notre vie
collective. Ce sont des valeurs d'échanges, de communication entre les
personnes, de ressourcement culturel, de loisirs, et cela, pour permettre au
plus grand nombre de les exercer en même temps, au même moment.
Je dis au ministre qu'il serait souhaitable, préférable,
et que nous voudrions qu'une journée dans la semaine soit davantage
réservée à une préoccupation qui va concerner plus
l'être que l'avoir. Est-ce que c'est trop demander, M. le
Président? Parce que, chaque fois, d'une façon pernicieuse, dans
les discours que j'ai entendus, on a laissé entendre que la position que
défendait l'Opposition, que la position que nous défendions,
était quétaine, qu'elle était réactionnaire,
qu'elle était un regard vers le passé. Je n'ai jamais eu
l'impression que j'étais quétaine quand je défendais des
valeurs. Je n'ai jamais pensé que je pouvais être
réactionnaire à défendre les besoins des travailleurs et
des travailleuses, et aussi la réalité des consommateurs et des
consommatrices.
En fait, le ministre nous répète ad nauseam que
l'Opposition ne prend fait et cause que pour les travailleurs et les
travailleuses et un certain groupe de commerçants. Remarquez que je vous
dirai que c'est déjà pas mal et que, à choisir entre
défendre les intérêts de ceux et celles qui ont souvent des
conditions de travail précaires, qui doivent mettre les bouchées
doubles pour maintenir leur commerce à flot, à choisir entre
ceux-là et celles-là et tous les B.C.B.G. de ce monde en mal de
vivre et de consommer, je sais de quel côté je me loge.
Et, pour rassurer le ministre, je vais lui en parler, des consommateurs
et des consommatrices. Parce que, toujours, toujours, il y revient et encore
hier soir: Vous préoccupez-vous des besoins des consommateurs et des
consommatrices? Vous savez, M. le Président, là-dessus non plus,
je n'ai pas trop de leçons à recevoir. L'une de mes
premières fonctions a été d'être impliquée,
auprès de consommateurs et de consommatrices, dans une ACEF. Une ACEF,
c'est une Association coopérative d'économie familiale qui se
préoccupe de défendre et de protéger les
intérêts de consommateurs. J'ai fait de l'animation. J'ai fait de
l'information. J'ai travaillé avec des gens qui vivaient des situations
pénibles. J'ai fait de l'éducation budgétaire et j'ai
même fait de la consultation budgétaire. J'ai aidé des gens
à monter des budgets. J'ai aidé des gens à faire une
planification de bouts de chandelle parce qu'ils étaient mal pris, parce
qu'ils ne savaient pas comment se sortir du merdier de l'endettement.
Ces mêmes ACEF sont venues témoigner en commission
parlementaire et nous ont présenté un point de vue - je dirais
comme certains de mes collègues - rafraîchissant, un point de vue
qui est celui, probablement plus profond, de ce que nous sommes justement comme
personnes qui vivons dans une société, de ce dont nous avons
besoin pour nous développer. Je vais me permettre de citer à
nouveau le mémoire des ACEF parce que je crois que c'est un vrai bijou,
d'abord en termes de recherche, en termes de réflexion et en termes de
profondeur. Alors, ce que nous dit le mémoire des ACEF, c'est qu'on
semble oublier que le consommateur est un être humain, avec des besoins
et vivant en société. On nous dit: "Le consommateur est un
être social. Le consommateur citoyen est un être social à
part entière, avec ses besoins, ses habitudes et ses activités
autres que commerciales, un être en liaison et en communication avec
d'autres personnes et d'autres groupes de personnes. (11 h 40) "S'il est pourvu
de besoins immenses de consommation, comme le soutiennent certains intervenants
dans ce dossier, il n'est pas pour autant dépourvu de besoins de
tendresse, de réconfort, d'affirmation, de confirmation,
d'actualisation, de besoins humains, M. le Président. Cette
évidence, ce consensus social nous semble tellement oublié et
menacé par les tenants de l'ouverture des établissements
commerciaux le dimanche que nous devons nous y arrêter et l'articuler le
plus humainement possible." Je dirai au ministre, tout à l'heure,
comment, par ces nouvelles règles, il permettra à une multitude
de commerces d'ouvrir le dimanche.
Je continue à citer le mémoire. "Pour que cela s'exerce ou
se réalise, le consommateur-être social, ça prend un
certain nombre d'heures libres qui sont communes aux autres. Il y a un besoin
d'uniformité au niveau du calendrier hebdomadaire social où nous
avons des disponibilités. Ce concept n'est pas sorcier et est reconnu
par tous les sociologues qui le nomme précisément le minimum de
conformité sociale." Au Québec, c'est principalement le samedi
soir que l'on voulait saccager, dans un premier temps; heureusement, on est
revenu à la raison. "Au Québec, c'est principalement le samedi
soir et le dimanche que s'exerce ce minimum. Le consommateur est un être
familial. La famille, source importante d'épanouissement et de
transmission de valeurs sociales. L'écoute pour les enfants, ce n'est
pas très mystérieux, c'est un moment précieux et
merveilleux qui permet un épanouissement réciproque. On ne peut
pas le remplacer par une bebelle dominicale achetée au centre
commercial."
On nous parle, et je n'y reviendrai pas, du temps de
disponibilité des hommes et des femmes qui vivent au Québec, pour
que ces personnes puissent aller faire leurs achats. On nous fait la preuve, en
noir sur blanc, que le principal problème des chefs de famille
monoparentale, sur lequel on se penche quand ça nous arrange, ce n'est
pas un manque de temps, c'est un manque d'argent. Elles sont pauvres, elles
sont démunies, elles ont besoin d'aide et elles n'ont pas besoin
nécessairement d'acheter plus; de toute façon, elles n'ont pas
les moyens d'acheter plus.
Alors, le consommateur aussi un être d'amitié. L'homme est
un être social, nous le répétons. Le besoin de parler de
nous-mêmes, d'entendre l'autre, de rêvasser, de saisir
l'éclair d'un regard, d'apprécier un sourire, le besoin de tout
et de rien, ce cristal dans l'amitié. Il y a certains jours où
les amis se rassemblent; s'ils le veulent bien, ils s'organisent plein
d'activités. M. le Président, au cas où ça
inquiéterait mes amis d'en face, et j'espère que non, ce n'est
pas quétaine de faire référence à ces
réalités-là et ce n'est pas inimaginable de penser que,
pour la majorité d'entre nous, quelque part dans la
frénésie de nos activités, on puisse prendre un moment
où on va accorder un peu plus d'attention à ces
réalités, le consommateur, être de loisir et de culture."
Je le répète aussi, l'ACEF le disait: "Le consommateur, un
être spirituel, pas nécessairement et seulement au sens religieux
du terme, mais un être de l'esprit qui a besoin de se ressourcer, qui a
besoin de réfléchir sur ce qu'il est, sur ce qu'il veut devenir.
"Mais arrêtons-nous un instant - je cite toujours l'ACEF - l'instant est
là entier avec une inquiétante interrogation. Allons-nous
guillotiner le dimanche? Oui, il y a des besoins d'accès, d'accès
à l'oxygène aussi, c'est-à-dire à la
possibilité de se ressourcer n'importe où, mais ailleurs que dans
les établissements commerciaux, le dimanche. Et c'est de cette question
d'hygiène mentale et de qualité de vie qu'aussi les gestionnaires
doivent tenir compte."
C'est cette position-là aussi que je défends, M. le
Président, quand je défends les droits et les besoins des
consommateurs et des consommatrices. Est-ce que le ministre est rassuré
sur mes préoccupations quant à cette catégorie de
personnes qu'il craignait que nous ne représentions pas bien ou que nous
représentions mal? Alors, qu'il se rassure. Mais, dans son cas, je dois
dire, M. le Président, que je ne suis pas rassurée. Je ne suis
pas rassurée sur l'avenir qu'il nous propose comme socifpé. Je
vais revenir d'ailleurs un peu plus loin dans mon intervention sur la
réponse aux besoins des consommateurs et des consommatrices, et sur les
besoins qu'ils ont, qu'ils nous disent, mais sur les capacités qu'ils
ont aussi de répondre à ces besoins, compte tenu du rythme de la
hausse de consommation.
Avant d'aller plus loin, et ce sera bref, je vais faire un peu
d'histoire, parce que je sens,
M. le Président, que la mémoire flanche de l'autre
côté de cette Chambre. Alors, on va faire ensemble un petit peu
d'histoire. C'est de la bien petite histoire, mais ce n'est jamais inutile de
s'en souvenir.
Nous avons adopté en 1984 une loi sur les heures d'affaires.
Cette loi était basée sur un certain nombre de principes et,
à rencontre du ministre actuel, voulait s'inspirer et s'inspirait - ce
qui n'est pas le cas maintenant - d'un consensus entre les intervenants. Un
consensus, ça ne veut pas dire l'unanimité. Un consensus,
ça veut dire que chacun avait fait son petit bout de chemin et avait
fait des compromis. Mais c'est ça aussi, vivre dans une
société. Si on veut arriver à des consensus, il faut
parfois faire des compromis. Alors, le ministre d'alors était
arrivé, avec les partenaires, à un consensus - pas à
l'unanimité, je le dis bien - un consensus qui faisait que chacun avait
mis, selon une expression populaire, un peu d'eau dans son vin. Cette loi a
été adoptée en 1984. Nous avons quitté le pouvoir
en 1985, probablement d'ailleurs parce que nous n'avons pas été
assez à l'écoute des gens qui nous disaient de prendre attention
à certains de leurs besoins. Et probablement que c'est une des raisons
fondamentales qui a fait en sorte qu'on a décidé que ce
n'était plus à nous qu'on allait confier la responsabilité
du gouvernement.
Donc, M. le Président, en 1984 nous avons adopté cette loi
qui a fait consensus, je le dis bien. Le gouvernement qui est devant nous, M.
le Président, ne l'a jamais fait appliquer. Et, quand on me parle des
décrets passés par le gouvernement en ce qui concerne les
exemptions, M. le Président, on peut en parler longtemps, mais je ne
ferai pas perdre de temps aux membres de cette Assemblée. Tous les
décrets, sans exception, qui prévoient que l'on exempte certains
commerces de la loi sur les heures d'affaires ont été
passés par ce gouvernement qui est en face de nous, M. le
Président, et qui dit maintenant que cette loi est un chef-d'oeuvre de
désorganisation. C'est ce qu'on nous dit actuellement en face. Tous les
décrets, sans aucune exception. Le seul décret passé par
notre gouvernement sous la responsabilité du ministre de
l'époque, M. Biron, était un décret demandant à
certains commerces dans les marchés publics de se conformer à la
nouvelle loi, mais, pour ce faire - parce que, évidemment, il ne faut
pas agir, je pense, de façon sauvage et c'était correct - le
ministre avait donné un délai aux commerces concernés, de
telle sorte qu'ils puissent décider s'ils allaient effectivement
fonctionner vingt-quatre heures par jour ou moins, si on veut, ou sept jours
par semaine, offrir des services le dimanche et, à ce moment-là,
respecter la règle des trois employés en tout temps ou s'ils
allaient adopter d'autres règles, M. le Président, et se
prévaloir aussi de la possibilité d'ouvrir, mais à
l'intérieur des plages
prévues dans l'horaire habituel.
Alors, pour l'histoire, il faut bien s'en souvenir, de cela. Et si,
aujourd'hui, on croit que cette loi est mal foutue, c'est parce qu'on n'a tout
simplement pas assumé ses responsables. Et je vais être bonne
joueuse, M. le Président: ce n'était pas le ministre actuel qui
occupait cette responsabilité-là, mais c'est son gouvernement et
il doit être solidaire de son gouvernement C'est donc ce gouvernement
qui, effectivement, a accepté des exceptions et n'a pas fait appliquer
la loi. On s'amuse aujourd'hui et on dit: C'était ridicule, les amendes,
tellement ridicule. Mais encore si on les avait fait appliquer à
répétition, elles auraient perdu leur ridicule. On est bien
conscient de ça, M. le Président. Vous savez, quand il y a une
volonté politique qui se marque, qui éclaire et qu'on intervient,
habituellement les gens comprennent les règles du jeu et acceptent de
les respecter. Mais, quand on fait en sorte que, du plus haut niveau, on laisse
des exceptions se créer, qu'on laisse aller des gens qui sont dans
l'illégalité sans intervenir, bien aussi on donne un signal que
c'est possible, que ça ne vaut pas la peine de respecter la loi, que, de
toute façon, aucune sanction ne sera appliquée, si minime
soit-elle, cette sanction. (11 h 50)
Alors, voilà pour un léger rappel de l'histoire en ce qui
concerne les actions que notre gouvernement a posées et dont je suis
fière, et dont je continue à être fière. Parce que,
actuellement, M. le Président, on a tellement bien appris à vivre
avec ce consensus que la majorité des gens qui s'opposent à la
loi actuelle et même à ses amendements, à la loi
proposée telle qu'amendée, même ces gens-là, M. le
Président, reviennent au consensus de 1984 et nous proposent de
conserver les règles sur lesquelles on s'était entendus à
ce moment-là. Cela veut dire que ça ne devait pas être si
mal comme loi, que ça devait avoir quelques aspects un peu positifs et
que ce n'était pas seulement cette espèce de chef-d'oeuvre
d'incohérence, nous dit le ministre, devant lequel on se retrouve.
On va continuer la suite de l'histoire, ce n'est jamais mauvais. Quand
on veut savoir où on s'en va, il faut savoir d'où on vient, M. le
Président. Un mandat a été confié au
député de Nicolet-Yamaska, au début du mandat de ce
gouvernement. Il y a un mandat de recherche, d'étude, qui a
été confié pour consulter les partenaires, pour savoir
quelles étaient les difficultés rencontrées par la loi. La
conclusion a été la même que celle que je tire, M. le
Président. Ça ne fait pas 20 ans, c'était au début
du mandat; c'était en 1987, si je ne m'abuse. Il est arrivé, M.
le Président, ce député qui a fait honnêtement son
travail, après avoir consulté 47 groupes, fait le tour du
Québec, à la conclusion que la loi de 1984 n'était pas
mal, que, si elle était appliquée, les gens cesseraient de se
plaindre, parce que le fait qu'elle ne soit pas appliquée a
créé des iniquités, M. le Président. C'est à
cela qu'est arrivé le député de Nicolet-Yamaska. Son
ministre n'a pas retenu les propositions qu'il faisait, ni son gouvernement ni
les deux ministres qui ont occupé la fonction de ministre de l'Industrie
et du Commerce, soit M. Johnson et M. MacDonald. M. MacDonald est même
allé à rencontre carrément du projet qui avait
été déposé par le député de
Nicolet-Yamaska. Il s'est juste fait un peu rabrouer et la loi a
été envoyée aux oubliettes. Il proposait d'ouvrir, le
dimanche, une plage quelque part entre 11 heures et 17 heures.
Et on va continuer. Le nouveau ministre arrive et il dit: Chef-d'oeuvre
d'incohérence, nous allons donc consulter. Il fait fi de toutes les
consultations qu'il y avait eu préalablement et il dit: Écoutez,
nous devons entendre les principaux concernés; ce qu'ils ont dit
à l'un de mes collègues n'était peut-être pas tout
à fait juste, on va reprendre le tout. Il me dit, M. le
Président: La députée de Taillon a refusé de
consulter les gens. Elle s'est opposée à ce qu'on consulte. Pas
du tout, M. le Président. Je me suis opposée à ce que l'on
consulte sans que le ministre ne dise où il voulait aller. C'est
à cela, M. le Président, que je me suis opposée,
d'ailleurs, tellement que j'ai voté pour la motion qui nous demandait de
consulter. On ira voir au Journal des débats, mais je pense que
le ministre ne me contredira pas, il sait ça aussi, hein?
J'ai voté pour le projet de consultation. Sauf que ce que je
souhaitais, c'est que les intervenants qui allaient venir témoigner
devant nous, à notre table, on ne leur fasse pas perdre de temps, qu'ils
sachent où se logeait le gouvernement. Mais le ministre a
préféré se retrancher derrière quelques grands
principes qu'il va contredire d'ailleurs par la loi, si nous l'adoptons, M. le
Président. Il s'est retranché derrière quelques beaux
principes. Il a regardé l'Opposition et il a dit: C'est drôle, une
Opposition qui prend position, hein, alors qu'on devrait écouter les
gens, qu'on devrait les consulter, M. le Président. Oui, moi, je voulais
bien les consulter, mais je voulais qu'ils sachent où nous nous logions,
de telle sorte qu'ils puissent dire: Non, nous ne sommes pas d'accord pour
telle ou telle raison. Oui, nous sommes d'accord, parce que cela répond
à tel et tel besoin. C'est ça que j'attendais du ministre et ce
n'était pas un refus de consulter, M. le Président, c'est
évident.
Et la suite des choses, M. le Président, m'a donné raison
et je regrette de le dire, parce que je n'ai pas le goût d'avoir raison
pour avoir raison et je ne me bats pas ici juste pour me faire plaisir hein? Ce
serait bien plus simple, vous savez, de me faire plaisir. Je pourrais m'occuper
d'autres choses. La suite des choses m'a donné raison. Le ministre a
entendu les gens. Il l'a fait correctement et on a bien travaillé en
commission; M. le Président, vous avez participé à nos
travaux et ça a été intéres-
sant de travailler avec la formation gouvernementale, j'en
conviens. C'était toujours un peu nébuleux, mais, au moins,
c'était intéressant.
Cela étant dit, qu'est-ce qui est arrivé par
la suite? Lorsque le ministre a déposé son projet de loi,
évidemment, le 15 mai... Le 15 mai, pour les gens qui nous
écoutent, c'est la date limite où on peut déposer un
projet de loi si on veut qu'il soit adopté par l'Assemblée
nationale. Vous savez, dans d'autres Parlements, on prend des années
à adopter des lois. Ce n'est pas souhaitable et ce n'est pas ce que je
voudrais, non plus; mais, entre prendre des années et prendre six
semaines pour en regarder un qui concerne des dizaines de milliers de personnes
et où on sait qu'il y a des objections, qu'il n'y a pas consensus
effectivement et que c'est difficile... On ne sait pas ce que veut le ministre
et il consulte. Il dépose un projet de loi le 15 mai, la date limite. Il
nous donne à peine six semaines pour le regarder. Remarquez que ce n'est
pas fini parce que l'histoire va se continuer. Il nous apporte les amendements
la veille. Le jour môme de l'adoption, il amende 25 articles du projet de
loi et le projet de loi en a 34, bon. Je pense ce que je dis n'est pas trop
bote, n'est pas trop faux.
Alors, donc, la suite, c'est quoi? C'est un
mécontentement général à l'égard du projet
de loi qu'il nous dépose le 15 mal. Et je ne l'ai pas inventé, M.
le Président! Puis, là, je ne les al pas sorties mes
pétitions ce matin. Je devrais peut-être. Mon tiroir tient ouvert
parce qu'elles sont trop épaisses, les nombreuses pétitions qui
regroupent des centaines et des centaines de noms de gens, des milliers de noms
de gens qui sont en désaccord avec le projet de loi du ministre et
même avec les nouvelles mesures qu'il apporte. Alors, effectivement,
quand il a consulté, sans savoir où il allait, sur la base de
beaux principes théoriques sur lesquels il va revenir dans son projet de
loi, M. le Président, je n'avais peut-être pas tort de lui
demander où il s'en allait. Parce que, actuellement, on se retrouve avec
une unanimité, sauf que l'unanimité, c'est contre la position du
ministre. Donc, la suite des choses est celle que l'on avait prévue.
J'espère - je le dis parce que je le pense - que la suite des choses
pour le projet, si nous l'adoptons, ne sera pas celle que je prévoie
parce que ce n'est pas très beau, M. le Président, ce saccage que
l'on fait du dimanche, cette remise en question que l'on fait de nos
règles d'organisation, qui vient intervenir dans les conditions de vie
et de travail de milliers de personnes.
Je continue, M. le Président. Le ministre nous a dit
à quelques reprises pendant les travaux de la commission: Vous savez,
nous n'aurons pas le choix: ou c'est du vrai dépannage, donc quelques
personnes, ou c'est l'ouverture. Et ça, je pourrais le citer en
retournant au texte des débats de la commission. Il a même dit
à un moment: Si on marque le pas vers une certaine ouverture, cela veut
dire, à toutes fins pratiques, que c'est la libéralisation des
heures de commerce à plus ou moins long terme. Pourquoi? Parce qu'il
nous a dit en commission, et il l'a répété à
plusieurs reprises, c'est incontrôlable, c'est trop complexe, les
exceptions qu'on doit prévoir. Il a essayé de ne pas en faire
d'exceptions, il a vu ce que ça donnait. Il a été
obligé de revenir sur cela. Il a réintroduit dans son projet de
loi tout un tas d'exceptions.
Alors, moi, je conclus, je tire des conclusions à l'analyse que
le ministre fait. Comme il nous dit que ce n'est pas possible de
contrôler le vrai dépannage et que, si l'on va dans le sens d'une
plus grande ouverture, ce n'est qu'une étape vers l'ouverture
complète, je comprends que le ministre va vers une plus grande
ouverture, que ce n'est donc qu'une étape vers l'ouverture
complète des commerces et donc la libéralisation des heures, ce
qui veut dire plus de loi du tout, arrangez-vous comme vous voudrez, la loi de
la jungle, le capitalisme sans bride et sans encadrement. C'est à cela
que l'on risque d'arriver. De toute façon, comme II a réussi par
sa loi à mécontenter à peu près tout le monde, du
grand au plus petit, évidemment les pressions vont recommencer
dès que l'on aura adopté la loi, j'en suis persuadée, M.
le Président. Je lisais môme le communiqué des grandes
chaînes d'alimentation qui nous disait: C'est un pas dans la bonne
direction. Le ministre est dans la bonne direction. Évidemment, nous
souhaiterions davantage, mais nous reviendrons plus tard. Alors, on verra plus
tard. (12 heures)
Après l'histoire, regardons maintenant les faits.
Les faits, ce sont ces affirmations qu'à différentes reprises le
ministre ou certains de ses collègues ont faites et quelques demandes
qui nous ont été présentées à la commission,
et je dis bien quelques mémoires, pas beaucoup; probablement que l'on
peut les compter sur les cinq doigts de la main, M. le Président, sur
les 91 mémoires que nous avons eus. Et là, ce sont les
magnifiques principes. Pourquoi une loi sur les heures d'affaires? Pourquoi
nous occuper de cela? Pourquoi un gouvernement se mêlerait-il de
décider à quelle heure les gens vont magasiner, vont aller
acheter leurs produits alimentaires? Alors, c'étaient les beaux
principes. Ça fait toujours très bien, d'ailleurs, quand c'est
énoncé et, vraiment, on a l'air, nous, à côté
de ça, qui souhaitons un peu d'encadrement, qui souhaitons des mesures
réglementaires, un peu bizarres, un peu spéciaux parce que
là, on dit: Liberté de consommer, liberté de produire,
liberté de commercer, M. le Président. Ça nous a
été servi à quelques reprises pendant la commission
parlementaire quand on a entendu les mémoires et le ministre avait l'air
de se laisser séduire par ces mythes-là.
On va les reprendre les uns après les autres, M. le
Président. On va commencer par la
liberté de travailler. À tous les groupes qui sont venus
devant la commission, à tous, nous avons demandé, qu'il s'agisse
des travailleurs ou des travailleuses ou qu'il s'agisse des gens d'affaires,
des propriétaires d'entreprise, de petite, moyenne ou grande entreprises
sans exception, et je suis persuadée de ça parce que j'avais une
série de questions, une grille de questions, et, chaque fois, nous les
posions... Si ce n'était pas nous, c'était la partie
gouvernementale. Chaque fois, nous demandions aux travailleurs: Est-ce qu'il
est possible d'avoir un droit de refus complet de travailler lorsqu'on vous
demande de venir le jeudi soir, le vendredi soir, le samedi ou le dimanche? Et,
chaque fois, on nous a dit: Lorsqu'il existe, il est théorique, ce droit
de refus, M. le Président, parce que, si nous refusons plusieurs fois,
on ne nous demande plus non plus de travailler des heures en semaine, de telle
sorte qu'on voit nos heures être réduites, parce que, souvent, on
est sur appel. Quand je parle de travail précaire, je ne parle pas de
choses qui n'existent pas. On ira leur demander, aux gens qui sont sur les
planchers, dans les épiceries et dans les commerces de détail, si
ce n'est pas du travail précaire. Donc, il vient un moment où ils
n'ont plus la possibilité de dire non, parce qu'on ne leur offre
même pas d'heures en semaine. Donc, ils comprennent bien vite que leur
intérêt, c'est de dire oui pour travailler le samedi et de dire
oui pour travailler le dimanche, s'ils veulent travailler tout court, M. le
Président. C'est ça, la liberté de travailler.
Et quand je l'ai demandé aux employeurs, ils y ont mis la
même honnêteté, M. le Président, aucun ne m'a dit que
la liberté totale et complète existe. Je leur demandais:
Voulez-vous mettre, dans vos contrats de travail, dans vos conventions
collectives, la possibilité d'un droit de refus complet, ce qui veut
dire, quand vous le demanderez a quelqu'un le dimanche, s'il dit: Non, je ne
veux pas, il pourra toujours l'exercer? Chaque fois, tout le monde, sans
exception, m'a dit: Non, je ne peux pas mettre ça dans mon contrat de
travail. Je ne peux pas mettre ça dans ma convention collective. Eh
bien, s'il ne peut pas le mettre dedans, ça veut dire qu'il ne veut pas
l'exercer, hein? Bon. Donc, le droit de refus, on a beau se faire de beaux
grands discours, il n'existe pas. Allez voir sur le plancher des vaches et vous
allez vous rendre compte que c'est ça, la réalité, et que
nous n'errons pas.
Parlons maintenant de cette magnifique... Ah oui! D'ailleurs, soit dit
en passant, c'est intéressant de noter que le droit de refus, dans les
conventions collectives où il y en a, pour une grande majorité -
et je ne l'invente pas là, c'est pris dans le document qui a
été fait par le ministère - le droit de refus est
accompagné d'une petite clause qui prévoit que, oui, on peut
refuser si on se trouve un remplaçant. Alors, voilà pour le droit
de refus!
Maintenant, le droit de commercer. La liberté de commercer.
Alors, ouvre qui veut. Le ministre nous dit même: Les commerçants
s'entendront entre eux pour décider s'ils n'ouvrent pas; ils
s'autodisciplineront. Ça en prend juste un, M. le Président, qui
n'a pas le goût de fonctionner dans la discipline de la majorité.
Et, qu'est-ce que vous voulez, dans une société où
effectivement c'est démocratique, mais dans une société
où il n'y a pas de règles non plus, on prend la règle qui
nous convient. On la définit pour nous. Or, si la majorité
s'entend, il peut y avoir quelqu'un quelque part et, s'il est plus fort que les
autres et décide d'ouvrir pendant toutes les heures qui lui sont
permises, qu'est-ce que vous pensez que ça fait, M. le Président?
Eh bien, évidemment, il va chercher des parts du marché que
d'autres occupaient. Alors, les autres n'ont pas le choix, M. le
Président. Ils doivent, à leur tour, ouvrir. Alors, la
liberté de commercer, là, je veux bien, mais elle a ses
limites.
D'ailleurs, je vais citer le ministre lui-même. Il me cite
à l'occasion. Parfois, il ne finit pas ses phrases, mais je vais les
finir, moi. Je vais prendre tout son paragraphe. Le 11 juin 1990, lors de nos
débats à l'Assemblée nationale - c'est récent,
hein, le 11 juin 1990; évidemment, c'est normal que ce soit
récent, ça fait juste depuis le 15 mai qu'on a la loi et on a
commencé , à l'étudier le 11 juin - le ministre disait et
je le cite: Pour avoir été commerçant dans le
passé, vous allez voir. Allez-y dans les centres commerciaux le vendredi
soir de 19 heures à 21 heures. Il n'y a presque personne, mais on reste
ouvert. On dit: Bien, on a le droit d'ouvrir 62 heures par semaine. Tout le
monde ferme, les jeudi et vendredi, à 21 heures. Donc, on reste ouvert.
J'ai voulu créer une nouvelle dynamique en ouvrant jusqu'à 22
heures - là, il a changé d'idée, c'est heureux - prenant
pour acquis qu'on faisait affaire avec des commerçants matures et qu'on
faisait affaire avec des gens qui pouvaient se dire: Bon, bien, ce n'est pas
une obligation d'ouvrir, c'est uniquement une possibilité d'ouvrir.
Mais, deux phrases avant, il avait dit: C'est une possibilité d'ouvrir,
mais, comme tout le monde ouvre, on n'a pas le choix d'ouvrir. Donc, il faut
ouvrir. Alors là, on repassera, hein! On repassera pour la
liberté de commercer.
Troisième élément... Puis ça, là, le
ministre va me répliquer peut-être tantôt: Oui, mais on a
resserré les heures, ce n'est pas comme c'était. Trois dimanches,
entre le 1er décembre et le 25 décembre, où tout va
être ouvert de 9 heures le matin à 21 heures le soir. On va voir
s'il y a liberté de commercer, on va voir, qui va ouvrir et qui va
fermer. Puis, le dimanche, avec les nouvelles règles, on va voir la
liberté de commercer, qui va l'exercer puis comment elle va
s'exercer.
Alors là, évidemment, possibilité de commercer,
possibilité de produire, possibilité de travailler, j'en ai
parlé, tout à l'heure, sur le
droit de refus. Mais on nous a dit: Mais que faites-vous des
étudiants, que faites-vous des jeunes qui souhaiteraient,
évidemment, aller gagner leur vie et qui courent après nos
emplois, après les emplois qu'on peut leur offrir? Bien, là
aussi, je l'ai demandé aux gens qui en ont, des commerces, comment
ça se passait. Oui, ils en embauchent, des jeunes, oui, ils en
embauchent, des étudiants. Remarquez bien qu'avec 15 % de taux de
chômage chez les 15-18 ans, c'est pas mal non plus, on a besoin de gagner
sa croûte.
Mais, ce que l'on nous dit, c'est qu'aussitôt que ces
personnes-là peuvent se faire mettre sur une liste d'ancienneté
qui leur permette de refuser de travailler le dimanche elles le font, c'est
immédiat. Alors, on peut s'en reparler, là encore, de la
volonté de travailler à tout prix et à n'importe quel
moment.
Maintenant, on a vu un bloc: commercer, travailler, consommer. On va
voir l'autre volet. Quel est le marché dont on parle? Quelles sont les
personnes qui vivent dans ce marché? Quel est l'emploi dans ce
marché? On va parler un petit peu de prix, M. le Président. Ce
n'est pas inutile, c'est un débat qui concerne le commerce de
l'alimentation et le commerce de détail.
L'alimentation, on va commencer par celui-là parce que c'est
celui-là que l'on commence, actuellement, à ouvrir le dimanche,
d'une façon plus significative et plus importante. Dans le domaine de
l'alimentation, M. le Président, les ventes ont crû, ont
monté, ont augmenté, depuis 1981, à un rythme de 1,6 % par
année, la progression des ventes. La population, M. le Président,
a augmenté - et j'ai fait les calculs - au même rythme sur la
même période. Autrement dit, on ne mange pas davantage que l'on
mangeait par le passé, famille après famille, et la seule hausse
que l'on peut constater, c'est la hausse de la population qui fait en sorte
qu'évidemment on augmente la consommation pas de 10 %, de 1,6 % par
année, qui est essentiellement le rythme d'augmentation de la
population, ce qui veut dire, M. le Président, que ce marché est
saturé. Ça veut dire, ça, saturé, qu'il y a assez
de produits en vente qu'il y a assez de magasins qui en offrent pour
répondre aux besoins des consommateurs et des consommatrices et que, si
on en ajoute d'autres, effectivement, on risque de voir péricliter et de
voir se fermer les portes de quelques autres parce qu'on ne mangera pas plus
parce qu'on va avoir plus d'heures pour aller magasiner, pour aller s'acheter
de l'alimentation. (12 h 10)
Poursuivons le raisonnement. Si on augmente les heures possibles de
consommation, bien, qu'est-ce que ça aura comme effet, si on ne mange
pas plus, si on n'achète pas plus? Ça va faire que c'est ou le
propriétaire qui va baisser ses prix et qui va donc réduire sa
marge de profit ou, évidemment, le consommateur qui va payer quelque
part un peu plus cher pour le produit.
Quand on me dit: Oui, mais est-ce que ça n'aura pas un effet de
création d'emplois, M. le Président? Voyons donc! Comment
ça peut-il avoir un effet de création d'emplois si on ne vend pas
plus? Et nos marges de profits, ce n'est pas des grandes marges de profits,
dans le secteur alimentaire, c'est les volumes. Plus on vend,
évidemment, plus on va chercher du fric. Mais si on ne vend pas de gros
volumes, vous savez, sur une "canne" de tomates, on fait une cenne, deux
cennes, c'est comme ça que ça marche. Ce n'est pas des profits
par produit qui sont très élevés. Bon. Alors, si on ne
vend pas plus, parce qu'il n'y a pas plus de monde, qu'on ouvre plus longtemps
parce qu'il faut être plus présent aux consommateurs et
consommatrices, est-ce qu'on va embaucher des gens nouveaux? Si on embauche des
gens nouveaux, ça va nous coûter plus cher. Voyons, M. le
Président, il me semble que c'est à l'évidence clair.
Et le ministre nous dit: "Vous exagérez, vous en mettez; voyons,
ce n'est pas comme ça que ça va se passer", quand on lui dit
qu'il y a des risques de faillites dans le secteur du commerce de
l'alimentation et du commerce de détail. Là, M. le
Président, on ne prend pas nos rêves pour des
réalités. C'est-à-dire nos rêves, malheureusement,
je dirais, deviennent des réalités, ce matin. Évidemment,
on est dans une mauvaise conjoncture, je le sais bien, M. le Président,
et je le déplore, d'ailleurs, j'espère que le ministre va le
déplorer avec moi et qu'il va un peu causer au gouverneur
général de la Banque du Canada qui n'a pas l'air de comprendre
qu'il est en train de nous mettre sur le dos une crise qui va nous coûter
des milliers d'emplois.
Revenons au nombre de faillites. Il y en a actuellement des faillites.
Je ne l'invente pas. Ce matin, dans Le Soleil, section Économie,
le mercredi 20 juin: "Près du quart des faillites d'affaires sont
survenues dans les commerces de détail". Les faillites ont
augmenté de 30 %, le quart est dans le domaine du commerce de
détail. Ça, c'est sur l'ensemble du Canada. Et, au Québec,
c'est 30 %.
Alors, écoutez, M. le Président, il faut qu'on soit
logique quelque part. Il faut qu'on soit capable de faire l'analyse un peu du
marché pour se rendre compte que, si on permet des heures plus longues,
c'est évident que ne consommant pas plus... Et du côté du
commerce de détail, la hausse a été de 3,6 %. Ce n'est pas
trop trop faramineux, si on considère qu'il y a eu le "baby-boom" qui a
fait en sorte qu'on a construit des maisons, qu'on est allé s'acheter
des biens durables, ce qui explique un peu cette hausse de 3,6 % qui est plus
haute que la consommation en alimentation. Alors, il ne faut pas être
grand clerc là pour comprendre qu'il y en a un risque du
côté des faillites.
Je refouillais dans les dossiers encore ce
matin parce que j'essaie désespérément et je me
sens vraiment comme quelqu'un qui ne sait plus quel argument utiliser pour
convaincre le ministre que ça n'a pas d'allure, ce qu'il est en train de
faire. Je refouillais encore dans mes dossiers ce matin. Les dépanneurs
font de 15 % à 20 % de leurs ventes le dimanche, M. le Président.
S'ils font 15 % à 20 % de leurs ventes le dimanche, que la loi qui est
devant nous va permettre d'ouvrir davantage de commerces, évidemment, M.
le Président, c'est une part de leur marché qu'on va aller
chercher, voyons. Et chez les dépanneurs, effectivement, les marges ne
sont pas plus hautes qu'ailleurs. Les prix sont parfois un peu plus
élevés et pas beaucoup, on nous l'a prouvé dans les
différents documents qui nous ont été
présentés. Alors, 15 % à 20 % du chiffre d'affaires qui se
fait le dimanche.
Et puis maintenant, là, pour que le ministre soit bien conscient
qu'effectivement, avec sa règle des cinq et du surveillant, et des gens
aux pilules et des gens à la fabrication, il faut qu'il soit bien
conscient qu'il n'ouvre pas quelques commerces. Je vais lui rappeler quelques
chiffres. On va aller voir dans nos documents, ici, pour savoir comment est
constitué le marché de l'alimentation au Québec. On aime
bien ça se comparer à l'Ontario, on va le faire tantôt,
mais comment il est constitué? en 1988, ça ne doit pas avoir
changé beaucoup, ça change, mais quand même... alors, en
1988, les entreprises du secteur alimentaire, selon la taille, étaient
constituées, m. le président, de la façon suivante: aucun
employé - donc, ce qui veut dire que le propriétaire
lui-même assume toutes les heures - 14,7 % des petites entreprises; les
entreprises de un à neuf employés, 62,3 % des petites
entreprises; de dix à vingt-cinq employés, 15,2 % des petites
entreprises. ce qui donne 92,2 % de toutes les petites entreprises qui, avec la
nouvelle loi, risquent de pouvoir ouvrir le dimanche.
Les grandes entreprises forment 2,7 % du secteur de l'alimentation.
Alors, quand le ministre me dit que, non, il ne va pas vers l'ouverture, que
son critère de cinq, ça va juste permettre un meilleur
dépannage, un ajustement, j'ai des doutes. Parce que si on peut
fonctionner, pour 80 %, à moins de neuf employés
déjà, peut-être que le dimanche, s'il y en a deux ou trois
qui ne vont pas travailler, tous les autres vont pouvoir ouvrir. Et ça,
c'est dans le document qu'a publié le ministre lui-même. Alors,
s'il ne me dit pas qu'on a un pas dans la porte vers l'ouverture des commerces
le dimanche, je ne sais pas de quoi on parle, on doit s'être
trompé de débat et on doit s'être trompé de loi. En
tout cas, je n'ai pas l'impression que, moi, je me suis trompée. Mais
j'aimerais bien que le ministre soit conscient de ça aussi et qu'il
porte un peu attention à cette préoccupation-là.
Je vais conclure sur ces éléments-là - emplois,
faillites, types d'entreprise, saturation de marché - par une conclusion
que tirait le document lui-même. Avant de tirer cette conclusion, je vais
rappeler au ministre aussi que, si son parti pense que le Québec est une
société distincte, il n'a pas tort. Même dans le commerce,
il faut savoir que la structure de propriété, c'est-à-dire
qui possède les commerces au Québec, comment c'est
organisé par rapport au marché ontarien, la structure de
propriété des commerces ici, c'est 70 % qui sont
possédés par des commerçants indépendants, des gens
d'affaires qui ont une ou deux boutiques, un ou deux marchés
d'alimentation. Inversement, le marché ontarien est constitué de
grandes surfaces ou de grandes corporations qui possèdent et des grandes
et des moyennes surfaces. Alors, on fonctionne dans des marchés
totalement différents. Alors, quand on nous fait des comparaisons - eux,
ils ont fait ça, et eux, ils fonctionnent comme ça - essayons
donc de nous regarder, de regarder là où on est et de savoir ce
que l'on veut, nous, pour nous, au lieu d'essayer de saccager tout le
marché devant lequel on est.
Tirons la conclusion, M. le Président. Et je la tire du document
produit par le ministère, je ne l'ai pas inventée: La plupart des
agents économiques qui se prononcent sur l'opportunité de
libéraliser la Loi sur les heures d'affaires des établissements
commerciaux font état d'impacts plus ou moins importants. Or, à
notre connaissance, il n'existe pas d'étude sérieuse qui permette
d'orienter le décideur à propos de ces aspects du
problème. Alors, ma thèse vaut sûrement la thèse du
ministre à cet égard-là.
Voilà pour ce qui est de l'aspect du marché, des prix, de
l'emploi et des illusions que l'on essaie de créer aux gens en leur
faisant croire que, non, le dimanche on n'ouvre pas ou si peu ou à
peine. On ira voir quand ça se passera et quand les moyennes surfaces et
les grandes surfaces auront trouvé toutes espèces de moyens de
faire en sorte qu'on installe des caisses automatiques. Le ministre aime
ça, il est responsable de la technologie; je vais lui envoyer une petite
bobine là-dessus, un petit vidéo qui montre comment on peut
installer des caisses qui font la lecture, où le consommateur fait faire
lui-même la lecture des prix. Et comme dans son projet de loi il a
prévu, de toute façon, des agents de sécurité, ils
pourront surveiller les consommateurs qui font eux-mêmes la lecture des
prix. Et vous allez voir que ça prend pas mal moins de monde sur les
grandes surfaces pour les faire fonctionner. Et, après, on ira vers
autre chose. (12 h 20)
En fait, je vois que le temps coule. M. le Président, je vous
dirai que je suis tout simplement outrée de la façon dont on a
traité l'Opposition et les voix que nous voulons faire entendre ici, et
qui sont pourtant celles de la majorité. On a bousculé nos
règles. Je vais le
rappeler parce que je pense que ce n'est pas inutile: le 15 mai, le
ministre a déposé un projet de loi comprenant 34 articles; le 15
mai, ce qui nous donnait un mois et demi à peine - parce que nos travaux
finissent le 22 juin - un mois et demi pour analyser, regarder, étudier
cette loi. Dès le premier jour où la loi a été
rendue publique, des tollés de protestations sont venus de partout, de
toutes les régions du Québec, de tous les groupes, peu importe
qu'ils aient été du bord des consommateurs, du bord des
commerçants ou des travailleurs et des travailleuses; de partout.
Le 15 mai, le ministre nous dépose sa loi. Le 11 juin, il annonce
déjà des amendements; bien sûr, il n'avait pas le choix,
c'était la révolution littéralement. C'est amusant,
d'ailleurs, de voir que certains collègues du ministre qui ont
voté hier soir, cette nuit, pour la loi, ça n'a pas l'air de les
déranger trop, trop que leurs gens soient contre, mais c'est unanime
dans beaucoup de régions du Québec, qu'on soit contre cette loi.
Encore lundi, à Matane, tous les commerçants ont
débrayé, tous les gens qui travaillent dans les commerces sont
sortis.
Alors, on nous a déposé, hier matin, je le
répète, 25 articles amendés sur 34 articles du projet de
loi. Il devait y avoir des problèmes, certain, quelque part; je ne dois
pas être toute seule à penser qu'il y en avait, en tout cas.
Le 11 juin, il nous annonce que, dans le fond, jusqu'à 22 heures
tous les soirs, le samedi y compris, peut-être que ça n'a pas
beaucoup de bon sens; alors, il dit: On va ramener ça à 21
heures. Et il dit: Peut-être que quatre personnes, dans le fond, ce n'est
pas suffisant pour en ouvrir assez le dimanche, des commerces, ça fait
qu'on va en rajouter un autre; le patron ne peut pas être compté
dans les quatre personnes, on va mettre le patron, son gérant, son
représentant en sus des quatre personnes. Ça, ce sont les deux
amendements qu'il nous a annoncés le 11 juin.
Trois semaines plus tard, ici... Pas trois semaines, trois jours plus
tard, il nous annonce que ce n'est plus comme ça que ça va
marcher, mais que là, il a révisé un peu les heures en
semaine et ce ne sera plus jusqu'à 21 heures. Je ne sais pas si vous me
suivez; c'est un peu compliqué, je comprends. Je recommence. La
première proposition, c'était à 22 heures, tous les soirs,
du lundi au samedi. La deuxième, il a dit: Ça va être
à 21 heures, du lundi au vendredi; on va ramener le samedi à 18
heures. Là, la dernière - c'est pour ça que j'ai encore de
l'espoir, ce matin, je me dis qu'il y a encore espoir qu'il change
d'idée - il a ramené le lundi à 19 heures, le mardi
à 19 heures, le mercredi à 21 heures, le jeudi, il laisse
ça à 21 heures et, le samedi, il revient à 17 heures qu'on
avait déjà dans la loi.
Alors, vous comprendrez, M. le Président, que, quand on nous fait
taire, parce que c'est ça qu'on fait - le bâillon, pour que les
gens qui nous écoutent comprennent bien, ça veut dire qu'on nous
fait taire, qu'on n'a plus le droit de parier, qu'on n'a plus le droit de
présenter des amendements, qu'on n'a plus le droit de s'exprimer sur la
loi - quand il nous fait taire, je me pose de sérieuses questions, quand
lui, en trois semaines, a changé trois fois d'avis sur son projet de
loi. Il me semble que c'est un peu odieux, à ce moment-ci, de nous
imposer ce qu'il nous impose. Je le lui rappelle parce qu'on a tendance
à dire: Ah! c'est juste l'Opposition! Bien, l'Opposition, elle
représente du monde et du monde qui, un jour, va s'en souvenir. Il y a
un prix à payer à ne pas respecter la démocratie.
Je vais revenir sur cette fameuse exemption du dimanche, où on
augmente à cinq personnes, où on a reconnu les marchés aux
puces. On les avait exclus, soit dit en passant, dans le premier projet de loi;
ça aussi, c'est une modification qui est venue.
Il y a de mes collègues qui ont été un peu durs
à l'endroit d'une entreprise qui oeuvre dans les superpharmacies; je ne
la nommerai pas. Mais je vais revenir un petit peu sur cette
réalité-là. Je suis assez d'accord - là-dessus, je
pense que je vais honnêtement reconnaître que le ministre n'est
sans doute à la solde de personne, sauf qu'il reste que pendant toute la
commission parlementaire il y a eu un "lobbying" absolument présent,
d'une façon continue, de la part des superpharmacies. Il y a eu, pendant
toute la commission parlementaire, présence d'un "lobbyist"
représentant les superpharmacies. Le résultat net et, je le
répète - le ministre ne m'a peut-être pas entendue, je ne
dis pas qu'il est à la solde de qui que ce soit - mais le
résultat net fait en sorte, M. le Président, que ce qui a
provoqué le tollé de la part de milliers de marchands à
travers le Québec, c'est qu'un commerçant oeuvrant dans les
superpharmacies. Quelques-uns oeuvrant dans les superpharmacies avaient
profité, effectivement, d'exemptions pour prendre des parts de
marché auxquelles les autres commerçants, en respectant la loi,
n'avaient pas droit. Or, la loi, ce qu'elle fait, elle entérine le fait
que ces superpharmacies pourront continuer à opérer avec les
nouveaux critères que nous retrouvons dans le projet de loi actuel. La
loi ne corrige pas ce qui a amené le ministre - et il va en convenir -
à consulter et à vouloir remettre de l'équité entre
les commerçants.
On a vu des grandes pages publiées dans les journaux hier. Dans
six mois on en aura d'autres. Est-ce qu'on en a vu des superpharmacies qui ont
publié des grandes pages dans les journaux pour nous dire que cette loi
était odieuse et inéquitable à leur endroit? Or, le
lendemain de la fin de la commission parlementaire, M. le Président, on
a eu droit a des grandes pages de publicité dans les médias pour
nous dire comment on était généreux d'être ouvert
tous les jours de la semaine, qu'on était même un ami, M. le
Président.
Vous me dites qu'il me reste à peine cinq minutes. Le ministre -
et je vais le saluer pour ça - nous a dit: Écoutez, si j'ai
modifié ma loi, même depuis le 15 mai où je l'ai
déposée, c'est parce que j'ai été capable
d'être à l'écoute. J'aime ça entendre dire ça
parce que ce sont les gens grands qui acceptent qu'effectivement ils font des
erreurs des fois. Et, moi, j'en ai fait déjà dans ma vie et je
suis capable de le reconnaître. Alors il dit... Et je le blâme
parce qu'il ne m'a pas donné de temps pour en débattre, mais je
ne le blâme pas sur le fond et sur le fait qu'il ait bonifié, en
cours de route, son projet de loi. Mais je dis que je n'ai même pas eu le
temps de pouvoir en débattre avec vous. Vous ne m'avez pas permis de le
faire. Mais il dit: Si j'ai fait ça, c'est parce que j'ai
écouté les gens. J'aimerais ça qu'il m'écoute ce
matin et qu'il continue dans la bonne voie.
Mais je vais lui faire remarquer quelque chose. Je sais que ça va
encore le choquer sûrement. Il me dit: J'ai écouté les
gens. J'ai ramené à 19 heures, le lundi soir et le mardi soir,
les heures d'ouverture de tous les commerces d'alimentation et de
détail. Il me dit: J'ai écouté l'Association des marchands
de meubles qui est membre de la Coalition, d'ailleurs. Il a probablement
écouté des gens qui sont venus, comme M. Bovet faire des
représentations correctes. Ça fait partie des règles du
jeu. Il faut en faire quand on veut quelque chose. Il les a
écoutés. Parce que dans le commerce de détail le
tollé était absolument incommensurable, immense, géant,
gigantesque! Personne n'était d'accord avec le ministre. Il les a
écoutés. Il a ramené à 19 heures, les lundi, mardi.
Il a dit: C'est un compromis.
Je lui dis: Si vous avez écouté quelques
commerçants, M. le Président, est-ce que le ministre ne peut pas
écouter quelques dizaines de milliers de travailleurs et de
travailleuses et quelques centaines de propriétaires de commerces et
retenir aussi leurs propositions qui doivent sûrement être aussi
importantes, aussi significatives que celles que lui ont faites quelques
commerçants, en étant tout en leur droit de le faire, M. le
Président? Est-ce qu'il ne pourrait pas aussi entendre ce point de vue
là - il me semble qu'il représente un bon nombre de personnes -
et revenir à une ouverture le mercredi soir, comme le demande la
Coalition? Revenir à 18 heures, les lundi et mardi soirs. Allez donc les
voir, les travailleurs et les travailleuses qui vont voir leurs journées
allongées, qui vont voir leur travail se précariser. Je
n'exagère pas, M. le Président. Je les vois, je leur parie. Je
discute avec ces gens-là et j'essaie de faire valoir leur point de vue.
Entendez-les, M. le Président, comme vous en avez entendu d'autres qui
ont obtenu réponse à leurs pressions.
En fait, M. le Président, je plaide une dernière fois. Je
plaide pour l'équilibre entre les droits des travailleurs et des
travailleuses, entre les besoins des consommateurs et des consommatrices, pour
la qualité de la vie, pour que l'on accorde plus de temps à
l'être qu'à l'avoir et, surtout, pour que soit entendu en cette
Chambre le Québec réel, le Québec des régions, le
Québec des villes. (12 h 30)
Je plaide, M. le Président, pour que nous respections notre
culture, notre patrimoine, notre histoire et ce Québec-là vous
dit, M. le Président et dit, à travers vous, au ministre, que
vous errez, que votre orientation est mauvaise. Ce Québec-là,
c'est celui des travailleurs et des travailleuses, c'est celui des gens
d'affaires, des propriétaires de leurs entreprises. C'est celui aussi
des consommateurs et des consommatrices et ce Québec-là, M. le
Président, vous dit, si nous adoptons cette loi, qu'il se
souviendra.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la
députée de Taillon. Je reconnais maintenant la prochaine
intervenante, Mme la députée de Vachon.
Mme Pelchat: Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Mme la
députée.
Mme Christiane Pelchat
Mme Pelchat: M. le Président, j'ai envie de citer ma
collègue, la députée de Taillon, et vous dire: Je suis
furieuse, M. le Président. Je suis en colère, M. le
Président. C'est comme ça que la députée de Taillon
a ouvert le débat hier soir. Moi aussi, M. le Président, je suis
furieuse et je suis en colère, au même titre que la
députée de Taillon. Je suis surtout déçue, M. le
Président, et je dois vous dire que je suis même estomaquée
de voir la facilité avec laquelle l'Opposition officielle, en cette
Chambre, les députés péquis-tes tentent de manipuler
l'opinion publique. Ça, c'est très décevant, surtout de la
part de la députée de Taillon, qui n'est pas une nouvelle venue
en politique, M. le Président, qui a même été
ministre et qui sait très bien qu'il faut se méfier des "lobbies"
et des intérêts corporatistes qui nous sollicitent tous les jours,
M. le Président.
M. le Président, cette loi, et c'est important de le rappeler, et
je vais le rappeler parce qu'il y a des choses qui ont été
galvaudées ici... Je regrette, je n'utiliserai pas de propos
antiparlementaires pour dire que c'était mensonger, mais je vais essayer
de remettre un peu à l'ordre les propos qui ont été tenus
par les membres de l'Opposition. Premièrement, M. le Président,
la loi, ce qu'elle vise, c'est de régulariser et de préciser les
heures d'ouverture des commerces. Deuxièmement, M. le Président,
la loi élimine une
bonne partie des exceptions qui avaient été introduites
par le gouvernement péquiste, en 1984. Ça aussi, c'est de
l'histoire, Mme la députée de Taillon, et il faut revenir
là-dessus une fois de temps en temps aussi. Cette loi, M. le
Président, élargit le commerce de détail de cinq heures de
plus par semaine pour les établissements non alimentaires. M. le
Président, cinq heures, pas dix heures, pas quinze heures, pas vingt
heures, cinq heures! La qualité de vie des travailleurs et des
travailleuses de la société québécoise. Cinq heures
de plus, Mme la députée de Taillon.
Ce n'est pas vrai, M. le Président, de dire que les travailleurs
de commerce de détail vont travailler le dimanche. Ils vont travailler
cinq heures de plus par semaine, s'ils n'excèdent pas 39 ou 40 heures de
travail; sinon ce sera des employés à temps partiel qui feront le
travail. Est-ce que j'ai besoin de rappeler à la députée
de Taillon la Loi sur les normes du travail qui interdit à un
commerçant ou à un employeur de faire travailler une personne
pendant plus de 40 heures? Est-ce que j'ai besoin de lui rappeler cela, elle
qui a été ministre? Ce n'est pas vrai, M. le Président. Et
je vois le député de Duplessis qui est assis à
côté de la députée de Taillon...
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Si vous voulez vous
adresser à la présidence, s'il vous plaît.
Mme Pelchat: Oui, absolument. Je vais le citer, M. le
Président. Hier soir, il a dit que Zellers pourrait ouvrir le dimanche.
Ce n'est pas vrai que Zellers va pouvoir ouvrir le dimanche. Ce n'est pas vrai
que Brault et Martineau va pouvoir ouvrir le dimanche, qu'ils comptent 4, 5, 10
ou 15 employés; ce n'est pas vrai. J'espère que c'est clair,
là, M. le député de Duplessis, et pour tous les membres de
cette Chambre aussi. C'est important de le dire, c'est de la
désinformation.
M. le Président, Zellers, Brault et Martineau - nommez-les tous -
vont pouvoir ouvrir cinq heures de plus par semaine, cinq heures. Les
dépanneurs, M. le Président, qui existent et qui opèrent
en ce moment vont pouvoir continuer d'opérer sept jours par semaine,
vingt-quatre heures par jour, comme ils le font à l'heure actuelle. Bien
plus, M. le Président, bien plus, les dépanneurs, dont la
députée de Taillon parlait, et j'entendais aussi le
député de Pointe-aux-Trembles en parler hier, les Provi-Soir, les
magasins Couche-Tard, La Maisonnée, tous ces dépanneurs qui font
partie de chaînes, avec l'élargissement du nombre
d'employés, quand on passe de trois à quatre, vont pouvoir
améliorer leurs services, M. le Président. C'était un
souci de ces gens-là, les dépanneurs et les dépanneurs qui
font partie des chaînes.
Pour moi, ce qui est le plus important dans cette loi - et ça va
toucher la députée de Taillon parce qu'on va parier de la rive
sud, de la Montérégie, M. le Président, c'est bien
important de le souligner... Cette loi vise à instaurer une règle
unique pour tous les établissements qui vendent de l'alimentation. Ces
établissements pourront être ouverts toute la semaine. Le lundi et
le mardi jusqu'à 19 heures. Une heure de plus que ce qu'ils font en ce
moment. Le mercredi, le jeudi et le vendredi jusqu'à 21 heures. Le
samedi jusqu'à 17 heures. L'élément vraiment nouveau de
cette loi, c'est qu'en dehors de ces heures les commerces qui vendent de
l'alimentaire avec quatre employés et moins pourront ouvrir le dimanche.
On est passé de trois à quatre. C'est ça qui
déchaîne l'Opposition officielle! C'est ça qui fait en
sorte qu'on a l'impression à les écouter parler qu'il y a un
tollé de protestations. Mais je regrette infiniment! À
Saint-Hubert et à Longueuil, il n'y a personne qui se bat dans les
autobus pour savoir comment il va utiliser ses cinq heures de plus pour
magasiner! Vous savez, ce n'est pas vrai, M. le Président. C'est de la
désinformation. On est passé de trois employés à
quatre employés pour le dimanche.
Cette règle unique pour le secteur alimentaire vient enlever - on
parle de privilèges et la députée de Taillon s'en
souviendra - un privilège que le gouvernement péquiste, le
gouvernement du Parti québécois, avait donné aux gros
marchés publics. Dans ce cas-là, le ministre de l'époque -
et je vais le dire, M. le Président, parce qu'il y en a eu de la
démagogie qui s'est faite ici et vous me permettrez de le dire aussi -
avait des chouchous. C'est ça qu'il avait. Il avait identifié, il
avait exempté par règlement certains établissements, non
pas certains types. Mme la députée de Taillon, je ne vous ai pas
interrompue, je vous demande de m'écouter. M. le Président, je le
répète, il a exempté certains types
d'établissements, nommés et cités comme tels dans le
règlement.
Je vais vous donner des exemples qui sont situés sur la rive sud
de Montréal. La députée de Taillon est élue depuis
1989 dans le comté de Taillon. Ça ne fait pas tellement longtemps
qu'elle est sur la rive sud de Montréal. Elle a été
à Québec un bout de temps, elle a été à
ville d'Anjou un bout de temps. Elle est sur la rive sud. Je vais lui parier de
notre région à Mme la députée, notre région.
Ce règlement qui a été adopté en 1984, ce qu'il
disait, c'est ça - on exemptait: La Loi sur les heures d'affaires des
établissements commerciaux ne s'applique pas à un
établissement commercial dont l'activité exclusive est la vente
de fruits et légumes frais ou de fromage ou de nourriture en contenants
scellés au préalable ou de poissons et de fruits de mer ou de
produits de boulangerie ou de la viande qui opérait le 12 janvier 1985
dans un marché public. Ce n'est pas de la discrimination, M. le
Président? Je vais vous les nommer ceux qui ont été
exemptés en 1984. Je ne nommerai
pas les 11. Je vais vous nommer ceux qui nous concernent, soit la rive
sud de Montréal. On va s'en tenir à ça. Les
privilégiés du ministre Biron sur la rive sud de Montréal
c'étaient: Grand marché de la Rive-Sud, boulevard Taschereau
à Greenfield-Park, Le Marché Village, boulevard Taschereau
à Brossard, les Halles de Longueuil, chemin Chambly, Longueuil,
comté de Taillon. Ces gens-là étaient exemptés.
C'est comme ça que sur la Loi sur les heures d'affaires le fouillis
total a commencé. Moi, dans mon comté, dans le comté de
Taillon, dans le comté de...
Mme Marois: Une question de règlement.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Une question de
règlement, Mme la députée de Taillon.
Mme Marois: J'aimerais rectifier des faits, M. le
Président, si vous me le permettez, en vertu de l'article...
Mme Pelchat:...
Le Vice-Président (m. bissonnet): s'il vous plaît,
s'il vous plaît! mme la députée. je vais écouter la
question de règlement, s'il vous plaît. mme la
députée.
Mme Marois: Je voudrais rectifier des faits, M. le
Président, et je vous demande en vertu de quel article je peux le
faire.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît,
M. le leader adjoint du gouvernement.
M. Lefebvre: La députée de Taillon pose une
question dont elle connaît sûrement la réponse. Elle peut ne
pas être en accord avec les propos de fa députée de Vachon,
alors elle devra vivre avec.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Mme la
députée...
M. Lefebvre: Si vous croyez que madame se trompe.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, Mme la
députée, je pourrai vous reconnaître en vertu de l'article
212 après le discours de Mme la députée...
Mme Marois: C'est une question de directive.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Oui, une question de
directive.
Mme Marois: Vous allez voir, à m'entendre, que je ne veux
soulever aucun débat. La députée affirme une chose que moi
je peux réfuter. Je croyais que lorsqu'on a...
M. Lefebvre: Une question de règlement. (12 h 40)
Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît!
S'il vous plaît! S'il vous plaît! Sur la question de
règlement, M. le député.
M. Lefebvre: Oui, M. le Président. Mme la
députée de Taillon peut effectivement soulever une question de
directive et s'informer auprès de la présidence d'un droit
qu'elle aurait en cette Chambre, sauf qu'elle ne doit pas profiter de cette
question de directive pour parier du fond.
M. Claveau: M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît!
Je vais terminer, M. le député. Sur la question de
règlement, M. le député.
M. Claveau: Oui, M. le Président. Ma collègue de
Taillon a en main les preuves écrites pour réfuter les
propos...
Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît!
S'il vous plaît!
S'il vous plaît, M. le député de
Laval-des-Rapides!
Alors, Mme la députée, en vertu de l'article 212, je vous
informe que-Une voix:...
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Un instant! L'article
212 sert à intervenir après le discours de la
députée de Vachon, si elle a utilisé des propos que vous
auriez utilisés dans votre discours. Ce n'est pas l'article
après. Évidemment, si vous avez des propos, vous pouvez toujours
en faire une question de privilège.
Mme Marois: Mais, M. le Président, je vais me
prévaloir d'un autre article au règlement. Je veux avoir votre
aide. Je ne fais pas ça pour emmerder personne. Le 214. Bon. Là,
on dit ici: "Lorsqu'un ministre cite, même en partie, un document, tout
député peut lui demander de le déposer..." La
députée cite un document qui serait un décret, j'aimerais
ça qu'elle le dépose, M. le Président. Bon, alors,
effectivement, elle fait affaire... Alors, j'aimerais qu'elle le dépose,
M. le Président, sinon je me prévaudrai de 212.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît!
C'est-à-dire qu'en vertu de 214, Mme la députée...
Des voix:...
Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît!
C'est à un ministre que vous pouvez
demander le dépôt d'un document.
Écoutez, c'est une question d'opinion. Mme la
députée de Vachon, si vous voulez conclure, s'il vous
plaît!
Mme Pelchat: Comment ça, si je veux conclure? M. le
Président, combien me reste-t-il de temps?
Une voix: Cinq minutes.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Mme la députée,
il vous reste 30 secondes.
Une voix: Comment ça?
Le Vice-Président (M. Bissonnet): II vous reste 30
secondes, Mme la députée.
Mme Pelchat: Bien, M. le Président... Une voix:
...la question de règlement.
Mme Pelchat: ...j'espère que vous avez enlevé de
mon temps les questions de règlement.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Mme la
députée, vous savez très bien que, quand il y a des
questions de règlement, ça s'impute sur le discours que le
député est en train d'exprimer. C'est la tradition et la
jurisprudence et je vous informe qu'il vous reste 30 secondes.
Mme Pelchat: Merci, M. le Président. Mais vous me
confirmez que, la députée de Taillon, ça lui fait mal ce
que j'ai à dire, et qu'elle ne veut pas l'écouter parce qu'elle a
pris à peu près trois minutes de mon temps. Mais je veux juste
vous dire, M. le Président, une chose bien importante. Chez nous, sur la
rive sud de Montréal, les marchands de fruits et légumes
Taschereau, La Pinière, sur le chemin Chambly, C'est-Si-Bon, eux autres,
ils n'ont pas été exemptés par ce merveilleux
règlement. Eux autres, ils voyaient leur clientèle volée,
M. le Président, par ces marchés qui sont exemptés. C'est
de là que part tout le problème, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Voulez-vous conclure,
Mme la députée?
Mme Pelchat: En terminant, M. le Président, je veux juste
vous dire quelque chose. Hier, mes collègues, le député de
Saint-Maurice et le député de Fabre, ont fait allusion à
de l'intimidation et qu'ils se sont sentis agressés par des "lobbyists".
Eh bien, moi aussi, M. le Président, je me suis sentie agressée
par des "lobbyists", et je voudrais vous dire que, en tant que
députée, me faire dire que, si je vote sur un projet de loi, je
vais me faire battre à la prochaine élection parce que j'ai 114
voix de majorité, eh bien, M. le Président, ça vaut la
peine de se lever pour défendre les intérêts de la
population.
Des voix: Bravo! Bravo!
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Question de
règlement, Mme la députée.
Une voix: ...M. le Président.
Mme Marois: Alors, M. le Président...
Des voix:...
Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît!
J'ai eu une question de règlement, M. le député. Je ne
peux pas en prendre deux en même temps.
Mme Marois: En vertu de 212, ça n'a pas de
priorité?
M. Audet: M. le Président, c'est qu'en vertu...
Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le
député. M. le député. S'il vous plaît! M. le
député, je m'excuse, j'ai reconnu Mme la députée de
Taillon sur une question de règlement. Je ne peux pas en prendre deux en
même temps, voyez-vous.
Mme Marois: M. le Président, j'ai toujours un peu de
difficulté... Je vais le lire, le décret. Ça va être
ennuyeux, mais on va le lire.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Un instant, là.
Mme la députée, juste avant de... Sur 212, je vais vous lire 212
parce que je pense qu'il faut expliquer l'article 212.
Mme Marois: Allez-y.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): 'Tout
député estimant que ses propos ont été mal compris
ou déformés peut donner de très brèves explications
sur le discours - s'il vous plaît, M. le député - qu'il a
prononcé." Ou qu'elle a prononcé. "Il doit donner ces
explications immédiatement après l'intervention qui les suscite.
Elles ne doivent apporter aucun élément nouveau à la
discussion, ni susciter de débat."
Alors, voyez-vous, Mme la députée, c'est que ce sont
après les dépôts... Selon le discours que vous avez
prononcé, s! quelqu'un avait été contraire à votre
discours, vous pourriez, à ce moment-là, poser une question
à la députée sur le discours en vertu de 212. Vous pouvez
toujours utiliser l'article 213 pour poser une question à un
député qui vient de terminer son discours si le
député vous en donne la permis-
sion. Et, effectivement, s'il y a un autre cas, c'est qu'à ce
moment-là, si vous ne pouvez pas recourir à ces deux articles, il
vous reste l'article 71 pour les faits personnels et vous devez envoyer un avis
une heure avant la période des affaires courantes.
M. Chevrette: Question de règlement.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Question de
règlement, M. le leader de l'Opposition officielle.
M. Chevrette: S'ils veulent se congratuler au sein de leur parti,
allez-vous-en dans les... Question de règlement.
Le Vice-Président (m. bissonnet): s'il vous plaît,
m. le député de saint-maurice. s'il vous plaît, je vous
demande d'être attentif, d'être à l'ordre, m. le
député.
M. Chevrette: C'est sa seule façon de montrer qu'il est
ici, lui.
Une voix: Ah!
Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le
député...
M. Chevrette: Question de règlement, M. le
Président. M. le Président, en vertu du règlement, quand
quelqu'un dit des choses fausses et qu'il n'est pas dans la Chambre pour se
défendre, on a le droit, en vertu du règlement, de
rétablir les faussetés, même si un individu n'est pas en
cette Chambre.
M. le Président, l'objet de la question de règlement est
le suivant. Nous avons la preuve écrite, noir sur blanc, que Mme la
députée de Vachon a dit des faussetés sur un de nos
collègues...
Une voix: Question de règlement, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît!
S'il vous plaît! S'il vous plaît! S'il vous plaît, sur la
question de règlement, M. le leader adjoint du gouvernement, je vais
permettre au député de compléter et je reviendrai. Je ne
peux pas en prendre deux en même temps.
Bon, je vais entendre M. le leader de l'Opposition,
brièvement.
M. Chevrette: M. le Président, en vertu du
règlement, il est bel et bien dit, noir sur blanc, que l'on peut
rectifier des choses qui sont fausses. Et, M. le Président, on a le
document écrit comme quoi Mme la députée de Vachon, et je
vous pose la question comme président de l'Assemblée nationale,
délibérément, a affirmé des faussetés. En
vertu de notre règlement, on a donc le droit...
Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît!
M. le député, s'il vous plaît. S'il vous plaît! S'il
vous plaît! M. le député. M. le député, il y
a... S'il vous plaît! S'il vous plaît! On ne peut, n'est-ce pas? on
ne peut refuser d'accepter la parole d'un député en vertu de
l'article 35.6°. Et c'est une question d'opinion...
M. Chevrette: Question de règlement.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Question de
règlement.
M. Chevrette: Ce n'est pas une question d'opinion, M. le
Président, c'est un livre écrit. On pourra le lire noir sur blanc
comme quoi c'est une fausseté, c'est un mensonge!
Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous
plaît!
M. Chevrette: Est-ce clair?
Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît!
S'il vous plaît! M. le leader adjoint du gouvernement.
M. Lefebvre: M. le Président, le leader de l'Opposition -
et ce n'est pas la première fois qu'il procède de cette
façon-là - au moment où il soulève une question de
règlement, M. le Président, il est en complète
dérogation avec le règlement lui-même. Au moment où
il soulève sa question de règlement, il prétend que la
députée de Vachon a menti. Ça, c'est contraire à
nos règlements, M. le Président, vous êtes en... 35.5°,
35.6°, 35.7° de notre règlement. Je vous demande, M. le
Président, même si le leader est en train de soulever une question
de règlement, je vous demande de lui intimer l'ordre de retirer de son
propos le fait qu'il a prétendu que la députée de Vachon
avait menti. Il n'a pas le droit de dire ça, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît!
M. le leader de l'Opposition officielle et Mme la députée de
Taillon, la seule façon d'accuser quelqu'un ici, c'est en vertu de
l'article 315 et ça prend une motion pour mettre en question la conduite
d'un membre du Parlement agissant en cette qualité. Alors, M. le leader,
je vous demanderais de retirer vos paroles sur ce que vous avez dit sur le
député...
M. Chevrette: M. le Président...
Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous
plaît...
M. Chevrette: ...comment puis-je retirer... Je vais vous poser
une question de directive, avant.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Oui. Là, je vous
demande... M. le député, avant d'entendre votre question de
directive, M. le leader, ce que je vous dis, c'est que, pour accuser, pour
mettre en cause les paroles de quelqu'un, il faut faire une motion en
conséquence. Question de directive...
Nous allons suspendre les travaux de cette Assemblée quelques
instants.
(Suspension de la séance à 12 h 50)
(Reprisée 12 h 59)
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Veuillez vous asseoir,
s'il vous plaît!
Alors, compte tenu de l'heure, je suspends les travaux jusqu'à 15
heures.
(Suspension de la séance à 13 heures)
(Reprise à 15 h 7)
Le Vice-Président (M. Bissonnet): À l'ordre, s'il
vous plaît!
Si vous voulez prendre place, s'il vous plaît.
Vous pouvez vous asseoir.
Alors, peu avant la suspension de 13 heures, plus
précisément à 12 h 44, M. le leader de l'Opposition
officielle, à l'occasion d'un rappel au règlement, s'est
exprimé de la façon suivante: "M. le Président, l'objet de
la question de règlement est le suivant. Nous avons la preuve
écrite, noir sur blanc, que Mme la députée de Vachon a dit
des faussetés sur un de nos collègues... " Épreuve du
Journal des débats, référence R-4866, page 2.
Quelques secondes plus tard, il ajoutait: "M. le Président, on a le
document écrit comme quoi, prouvant que Mme la députée de
Vachon, et je vous pose la question comme président de
l'Assemblée nationale, comme quoi la députée de Vachon,
délibérément, a affirmé des faussetés".
Épreuve du Journal des débats, référence
R-4866, page 3. Enfin, M. le leader de l'Opposition officielle a conclu en
affirmant: "Ce n'est pas une question de règlement, M. le
Président, c'est un livre écrit, on pourra le lire noir sur blanc
comme quoi c'est une fausseté, c'est un mensonge". Epreuve du Journal
des débats, référence R-4867, page 1.
Entre ces interventions et à leur suite, j'ai rappelé,
d'une part, l'article 35. 6 selon lequel on ne peut refuser d'accepter la
parole d'un député et, d'autre part, l'article 315 qui stipule
qu'"une motion est nécessaire pour mettre en question la conduite d'un
membre du Parlement agissant en cette qualité. " À la suite de
quoi, j'ai expressément et formellement demandé à M. le
leader de l'Opposition officielle de retirer ses paroles.
Épreuve du Journal des débats,
référence R-4867, page 2. Puis, à la suite d'une
brève suspension, j'ai suspendu la séance jusqu'à 15
heures. Voilà pour les faits.
À ce stade-ci, je me dois, M. le leader de l'Opposition
officielle, de vous rappeler à nouveau non seulement l'article 35.
6° du règlement, mais aussi une série de décisions de
mes prédécesseurs, de mes collègues et de moi-même
qui réprouvent et condamnent sans équivoque comme non
parlementaire l'usage, en cette Assemblée, des mots "fausseté",
faux", "mensonge", "mensonger", "menteur", "mentir", en plus de l'expression
"tromper la Chambre et délibérément dit des
faussetés".
Dès lors, il ne fait aucun doute, M. le leader de l'Opposition
officielle, que vos propos, selon lesquels Mme la députée de
Vachon aurait délibérément affirmé des
faussetés et aurait proféré un mensonge, violant
ostensiblement les dispositions de l'article 35. 6° du règlement.
C'est pourquoi, M. le leader de l'Opposition officielle, je vous demande une
nouvelle fois de retirer les propos que je viens de citer.
M. le leader de l'Opposition.
Une voix: Est-ce qu'on pourrait suspendre les débats, M.
le Président?
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Vous voulez suspendre
les débats, M. le député. Alors, je suspends les travaux
de cette Assemblée pour quelques instants.
(Suspension de la séance à 15 h 11)
(Reprise à 15 h 20)
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Je constate l'absence du
leader parlementaire de l'Opposition officielle. Alors, je suspends la demande.
Nous allons maintenant poursuivre le débat sur l'adoption du projet de
loi 75 et je suis prêt à donner la parole au prochain intervenant.
Je suis prêt à reconnaître, M. le député
d'Ungava. M. le député.
M. Christian Claveau
M. Claveau: M. le Président, c'est sur une mauvaise note
que nous avons dû suspendre les travaux juste avant 13 heures cet
après-midi parce que, M. le Président, il y a des gens en cette
Chambre qui n'ont aucun respect pour la vérité, qui n'ont aucun
respect quant à la valeur de ce qui est écrit et au sens à
donner aux textes tels qu'ils sont écrits.
M. le Président, je me dois de citer au texte la Gazette
officielle du 12 janvier 1985, 117e année no 2, qui dit ceci: "Le
ministre de l'Industrie et du Commerce donne avis, conformément à
l'article 6 de la Loi modifiant la Loi
sur les heures d'affaires des établissements commerciaux, 1984,
chapitre 17, qu'il accorde à certains établissements commerciaux
dont l'activité exclusive est la vente de denrées alimentaires et
opérant à chaque jour avec plus de trois personnes en même
temps dans l'établissement pour en assurer le fonctionnement, lesquels
exercent leurs activités dans les marchés publics et dont les
noms apparaissent en annexe - c'est très clair - un délai
jusqu'au 30 juin 1986 pour se conformer aux dispositions de la Loi sur les
heures d'affaires des établissements commerciaux (L.R.Q., chapitre H-2)
à la condition qu'ils n'augmentent pas leur nombre d'employés
d'ici cette date. Québec, le 20 décembre 1984."
Des voix: Bravo!
M. Claveau: Et on retrouve après la liste non pas de 11,
comme le disait la députée de Vachon, mais tout près de
trois pages, deux pages complètes d'établissements qui sont
exemptés jusqu'au 30 juin 1986. On leur donne un délai de
conformité pour être en règle avec la loi. On leur dit:
Dans le contexte où vous vous trouvez et à cause des
antécédents, à cause de votre passé, on vous
reconnaît jusqu'au 30 juin 1986 pour vous conformer à la nouvelle
loi. C'est clair, c'est précis. Ça ne laisse pas place à
interprétation. Quand la députée de Vachon vient affirmer
en cette Chambre que le gouvernement a préféré ou a
donné des chances à des chouchous - pour reprendre ses propres
termes - et quand elle dit que ces chouchous-là ont été
exemptés de la loi sur les heures d'affaires en 1984, le moins que l'on
puisse dire c'est qu'elle a quelque peu déformé la
réalité; qu'elle a quelque peu interprété librement
ce qu'il y a de véritablement écrit, M. le Président;
qu'elle n'a pas beaucoup de respect pour la valeur des textes et pour leur
contenu, et que si ses propos sont à l'image de son gouvernement, eh
bien, on comprendra facilement comment il se fait que le gouvernement auquel
elle est associée, dont elle fait partie interprète à sa
guise à peu près l'ensemble des activités dans cette
société. Les propos de la députée de Vachon sont
indignes d'une parlementaire qui se veut respectueuse des décrets du
gouvernement et respectueuse de la portée des textes qui sont
publiés dans la Gazette officielle du Québec.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Excusez, M. le
député. Est-ce que vous voulez fermer la porte à
l'arrière, s'il vous plaît? Merci. Je m'excuse de vous avoir
interrompu. M. le député, si vous voulez poursuivre.
M. Claveau: Oui, M. le Président. Lorsqu'on se
réfère à des documents, lorsqu'on se réfère
à des textes officiels, on doit les citer dans le sens tel qu'ils sont
écrits. On doit respecter l'esprit et la lettre. On n'a pas le droit, M.
le Président, d'essayer de cacher son incompétence, son
incapacité, son insouciance, j'irais même jusqu'à dire son
impuissance à gouverner, derrière des textes qui ont
été écrits par d'autres qui gouvernaient avant, mais qui
avaient leurs responsabilités à coeur, qui étaient
capables de mettre leur culotte et de déterminer les délais tels
qu'ils se doivent.
On a voulu en 1984, le 20 décembre 1984 très
précisément, donner un délai de conformité par
respect aussi pour les activités antérieures de certaines
entreprises qui voyaient leur comportement, leur façon de faire, leur
marge de bénéfice et éventuellement même leur survie
compromis avec l'arrivée d'une nouvelle loi si cette loi-là
s'était appliquée sans délai. Alors, respectueux du
cheminement de la société, le ministre d'alors a prévu des
délais pour se conformer. C'est ça, essentiellement, le
décret qu'on a sous les yeux. Des délais de conformité, ce
que l'on voit dans toutes les lois, M. le Président, lorsqu'on change
fondamentalement des façons de faire établies sur une habitude ou
sur des lois antérieures.
Dans la Loi sur les forêts, votée en 1987, il y avait un
délai de conformité de trois ans jusqu'au 31 mars 1990. On
donnait trois ans de délai de conformité à l'entreprise et
on l'a fait respecter; au 1er avril 1990, l'entreprise était conforme.
Et c'est le gouvernement du Parti libéral qui l'a fait. Il n'y a rien
d'anormal, il n'y a rien de honteux, il n'y a rien de scandaleux à
donner des délais de conformité lorsqu'on vient modifier
fondamentalement les façons de faire, les habitudes établies
alors même que l'on met en danger la vie de certaines entreprises et d'un
nombre important de travailleurs dans ces entreprises. Il n'y a rien de honteux
à ça. Et on n'a pas le droit, M. le Président, d'induire
la Chambre en erreur, de raconter n'importe quelle salade pour essayer de faire
donner un sens contraire à ce que veut dire le texte.
M. le Président, dans ce sens-là, je ne peux approuver en
aucune façon, absolument en aucune façon, et je sais même
très pertinemment que plusieurs de mes collègues de l'aile
ministérielle n'approuvent pas non plus, pas plus que moi, les propos de
la députée de Vachon en cette Chambre qui s'en vient
interpréter, à sa guise, en faussant carrément le sens du
décret du 20 décembre 1984. M. le Président, on ne peut se
permettre ça, sinon la Chambre, la démocratie n'a plus aucune
valeur. Le Parlement n'a plus de valeur en soi.
M. le Président, on nous répète à
satiété que ce décret est à la base du
problème. Allez donc, M. le Président! Allez donc! Qu'un
délai de conformité soit à la base d'un problème?
Il faut vraiment ne pas avoir le courage de ses propres actes, et c'est le cas
du ministre actuel et de son gouvernement. Qu'est-ce qu'ils ont fait, ces
gens-là, M. le Président, au 30 juin 1986? Est-ce qu'ils ont
appliqué le décret tel que les entre-
prises s'y attendaient? Parce que ça faisait un an et demi, 18
mois, qu'elles savaient que le décret existait, et elles devaient
s'être préparées en conséquence. Est-ce que ces
gens-là, M. le Président, ont appliqué le décret au
30 juin 1986? Non, M. le Président. Non! Ils n'ont pas eu le courage de
faire appliquer le décret tel qu'ils auraient dû le faire. Ils
voulaient gouverner, cependant. Ils se sont fait élire en 1985 en disant
à tout le monde qu'ils allaient gouverner mieux que le gouvernement
antérieur. Mais gouverner, M. le Président, ça ne veut pas
dire se promener en limousine. Ça veut dire, entre autres, savoir
prendre ses responsabilités et savoir faire respecter les engagements du
gouvernement et les lois qui ont été votées tant et aussi
longtemps, pour le moins, qu'on ne les a pas changées.
Au 30 juin 1986, la loi n'avait pas été changée et
le gouvernement a craché littéralement sur le décret par
laxisme, par incompétence, par incapacité, et il a permis que
cela se continue dans le temps. Il a même fait en sorte que des gens
investissent et continuent à investir tout en sachant qu'ils
n'étaient pas légaux, M. le Président.
L'illégalité ne donne pas de droits acquis. Ce n'est pas parce
qu'on pratique illégalement pendant un certain temps qu'il y a quand
même des droits acquis à partir de cette
illégalité-là, M. le Président. Le fait que je
conduise rapidement sur les routes pendant un an sans me faire prendre ne veut
pas dire que le jour où on me donnera un "ticket" j'aurai acquis le
droit de pouvoir conduire plus vite parce que ça fait un an qu'on ne me
donne pas de "ticket". Ce n'est pas vrai! (15 h 30)
M. le Président, ce gouvernement n'a pas voulu donner de
"ticket", n'a pas voulu faire appliquer la loi et n'a pas voulu faire appliquer
les décrets qui allaient avec la loi. Et, ayant été
lui-même, donc, la cause du problème, aujourd'hui, il essaie de
légaliser ou de donner des droits acquis à ceux qui ont agi dans
l'illégalité. Ceci est inacceptable. Ceci est carrément
inacceptable et c'est encore plus insultant pour les parlementaires que nous
sommes lorsque des députés en cette Chambre, à l'instar et
à l'exemple de la députée de Vachon, viennent donner un
sens aux articles de loi et un sens au décret qui est absolument
contraire à la réalité, contraire à l'essence
même du décret et à sa raison d'être. Mon temps est
terminé. Je vous remercie.
Des voix: Bravo!
Le Vice-Président (M. Cannon): Merci, M. le
député d'Ungava. Mme la députée de Terrebonne.
Mme Jocelyne Caron Mme Caron: Merci, M. le Président. Les
députés ministériels s'étonnent de nos vives
réactions. Mais il y a des limites, M. le Président, à
endurer un gouvernement qui ne respecte aucune règle, qui nous applique
le bâillon, qui nous met des motions de clôture et, quand ce n'est
pas suffisant, qui nous tient des propos déformant
délibérément la vérité, comme ceux que nous
a tenus la députée de Vachon ce matin.
Ce gouvernement se spécialise dans la déformation de la
réalité. On nous impose un bâillon et on nous dépose
en vrac 25 articles amendés sur 34 articles, qui ne corrigent aucunement
les lacunes fondamentales de cette loi qui va passer à l'histoire pour
son ambiguïté, une ambiguïté qui s'est retrouvée
en commission parlementaire et qui s'est retrouvée dans tous les propos
du ministre, M. le Président. Ce ministre qui, en commission
parlementaire, nous a dit être d'accord avec un amendement et voter
contre, M. le Président, qui nous a dit que sa loi défendait la
fermeture des magasins le dimanche et qui, dans les faits, permet l'ouverture
des magasins le dimanche. Un ministre qui nous a dit dans ses répliques
que ses amendements, ses 25 articles amendés, n'apportaient pas
d'amendements majeurs et qui, tout de suite après, dans une autre
réplique, nous a dit qu'il y avait deux amendements majeurs.
M. le Président, cette loi est une loi caméléon.
C'est une loi de camouflage qui tourne autour de l'article 4. Ce fameux
article, le ministre refusait et a refusé à plusieurs reprises en
commission parlementaire d'en discuter parce qu'il savait très bien que
tout ce qu'on réussissait à faire, c'était de jouer sur
les tournures de phrases, mais qu'on ne changeait rien au fond de cette
loi.
On s'est même permis en cette Chambre, M. le Président,
plusieurs députés ministériels l'ont fait, de
déprécier tous les efforts qui avaient été faits
pour une concertation dans le milieu. On a dénigré le travail de
la Coalition contre l'ouverture des commerces. Ces gens, qui ont
participé régulièrement en commission parlementaire, qui
ont déposé des mémoires, qui ont déposé des
lettres, qui ont signé des pétitions - nous avons reçu des
télégrammes aussi, M. le Président; uniquement dans mon
comté, dans le comté de Terrebonne, 109
télégrammes, ce n'est pas rien - ces gens-là avaient
réussi à faire une concertation, non seulement d'un seul groupe,
M. le Président, mais aussi il y avait des consommateurs dans cette
Coalition. Le ministre nous parle toujours
Il y avait des représentants des consommateurs, des
représentants des non-alimentaires, des représentants des
travailleurs et des travailleuses, des représentants des
dépanneurs, des représentants des épiciers, M. le
Président. Cette Coalition a témoigné d'un souci de
concertation assez exceptionnel et a démontré une
présence. Ils ne se sont pas déplacés pour rien, M. le
Président. Partout, dans les réunions régionales,
ils étaient là pour expliquer au ministre ce qu'ils avaient
à lui dire pour défendre leurs droits, mais le ministre
n'était pas là, M. le Président. On a poursuivi une
opération de subtilité en déposant nos amendements, tout
en restant inébranlable sur le principe fondamental, c'est-à-dire
qu'on voulait ouvrir le dimanche. Ce ministre, marchand d'illusions, est
resté enfermé dans sa tour d'ivoire en gardant une seule petite
fenêtre ouverte vers les grands espaces. Le ministre a
littéralement refusé de comprendre, d'entendre la voix de la
majorité. Mais le ministre semble s'être trouvé un ami dans
cette petite tour d'ivoire parce que, vous savez, on trouve de tout lorsqu'on
présente un tel projet de loi, un projet caméléon - je le
répète - qui couvre de grandes surfaces, évidemment.
À partir de là, à partir de ce principe
fondamental, il n'a cherché qu'à pondre des amendements pour
cacher la réalité de l'article 4. Vous savez, M. le
Président, on ne peut écraser impunément, même
préserver dans une tour d'ivoire les 400 000 travailleurs et
travailleuses, les commerçants et les commerçantes des moyennes
et petites surfaces. Les épiciers, les dépanneurs, on ne peut les
écraser au profit des géants de la consommation. On ne peut
écraser non plus les 40 organismes de consommateurs qui se sont
opposés à ce projet de loi. Qu'est-ce que dit, dans les faits,
l'article 4? L'article 4 permet l'ouverture le dimanche parce qu'il y a cinq
personnes qui peuvent être présentes, sans oublier les personnes
affectées à la sécurité, à la boulangerie ou
à la pâtisserie. Dans les faits, on peut ouvrir le dimanche,
même si le ministre refuse de le reconnaître.
Que réclamait la Coalition? On a tenté de faire croire que
cette loi était pour venir en aide aux travailleurs. Toute la Coalition,
consommateurs inclus, réclamait une qualité de vie. Qu'est-ce que
c'est, une qualité de vie? Pour les travailleurs, c'est avoir le droit
à un temps de repos, à un temps d'arrêt. Et, pour les
consommateurs, c'est avoir le droit d'avoir un temps pour d'autres
activités que la consommation.
La députée de Vachon nous disait: On ajoute uniquement
cinq heures en semaine. Elle oubliait ce qu'on ajoutait le dimanche, elle n'a
pas parlé de cet article 4. On n'ajoute que cinq heures, plus au moins
30 minutes, à chacune des journées, lundi, mardi et mercredi.
Parce que, si le magasin est fermé à 7 heures, les
employés ne partent pas à 7 heures. Donc, on ajoutait au moins
six heures et demie, sans oublier que ces gens-là ne sont pas rendus
à la maison. Et, avec les garderies, qu'est-ce qui se passe? Les
coûts, pour les travailleurs qui vont laisser leurs enfants à la
garderie jusqu'à cette heure-là, non, le ministre n'y a
absolument pas pensé.
La qualité de vie. Ma collègue, la députée
de Taillon, qui a fait un travail extraordinaire sur ce projet de loi, a
présenté le point de vue de la Fédération des ACEF,
qui était très clair. Ça, ce sont des organismes de
consommateurs, il y en avait 40. Moi, je vais citer une autre
fédération - puisque je ne veux pas répéter ce que
la députée de Taillon a dit - la Fédération
nationale des associations de consommateurs du Québec; elle aussi
regroupe beaucoup de consommateurs. Elle disait clairement: La FNACQ
défend une approche globale de l'intérêt du consommateur et
de la consommatrice considérant que le niveau d'acheteur devrait
être dépassé pour faire place à la notion de
bien-être et de qualité de vie de toute personne dans notre
société. Nous refusons d'instituer une course à la
consommation plutôt que d'accorder aux consommateurs et aux
consommatrices une journée dans la semaine pour se reposer, pour
s'adonner à des loisirs, à des activités culturelles ou
sportives et à des rencontres amicales ou familiales.
Pour la Fédération nationale des consommateurs, il
s'avère évident que cette campagne en faveur de l'ouverture des
magasins le dimanche a été brillamment orchestrée par les
grandes entreprises, au détriment des petits commerçants, des
travailleurs et des travailleuses, des consommateurs et des consommatrices, et
ceci, dans le but d'augmenter leur part de marché et leurs profits.
Alors, quand on vient nous parier et nous faire des leçons sur ce que
les consommateurs veulent, nous en avons suffisamment. Vous savez, un organisme
de consommateurs, ce n'est pas uniquement pour demander de la consommation,
c'est pour demander une qualité de vie et c'est pour demander aussi le
côté éducatif de la consommation. (15 h 40)
Si le ministre pense que tout est réglé avec cette loi, eh
bien, il va avoir des surprises parce que je suis convaincue que, comme pour
tous les projets de loi que nous avons vus défiler durant cette session,
ce sera, l'an prochain, une reprise du projet de loi. Le ministre a dit: Non
merci à fa Coalition et non merci à l'Opposition. Il tente
maintenant de nous faire croire que son "non merci" signifiait un "oui"
à la fermeture le dimanche. Nous avons eu une leçon dans le
passé là-dessus, M. le Président. On sait que le "non
merci" de 1980 qui devait dire un "oui", bien, il n'a rien réglé
parce que le problème constitutionnel, il est encore entier. Eh bien,
cette loi 75, elle fait exactement la même chose; son "non merci" qui
veut dire un "oui", il ne règle rien, le problème reste entier.
Si le ministre ne corrige pas cette loi immédiatement, à cette
session, eh bien, il nous reste une chose à dire au ministre, et
l'Opposition et la Coalition: À la prochaine, M. le ministre.
Des voix: Bravo!
Le Vice-Président (M. Cannon): Merci, Mme la
députée de Terrebonne. M. le député de
Bertrand.
M. François Beaulne
M. Beaulne: Merci, M. le Président. Mon intervention sur
ce projet de loi va porter sur un point particulier. Vu que le processus est
particulièrement avancé et qu'à moins
d'événements imprévisibles, le projet risque d'être
adopté avant l'ajournement de la session, j'aimerais plaider, comme je
l'ai fait depuis le tout début, pour qu'une certaine flexibilité
soit introduite au niveau du traitement des fruiteries qui sont membres de
l'Association provinciale des fruiteries du Québec.
Nous avons examiné les arguments qui ont été
invoqués à rencontre de ce projet de loi qui, soit dit en
passant, "insatisfait" presque tout le monde. Je partage entièrement et
j'appuie entièrement les revendications des travailleurs et des
travailleuses, les arguments qui sont invoqués par les
propriétaires de magasins, également, qui jugent
injustifié le prolongement des heures d'affaires. Mais je pense qu'en ce
qui concerne les fruiteries, on a oublié et on a évité de
discuter sérieusement d'un secteur qui concerne et qui touche
principalement les jeunes, les étudiants, les producteurs
maraîchers locaux du Québec.
Lorsque nous avons étudié en commission ce projet de loi,
et, M. le ministre, vous étiez présent, les représentants
des fruiteries ont eu l'occasion de venir exposer en détail les motifs
qui militaient en faveur d'une flexibilité plus grande et d'un
traitement spécial en ce qui concerne leurs opérations, en raison
du fonctionnement de leurs activités, en raison des contributions
à l'emploi, principalement chez les jeunes et principalement chez les
employés occasionnels, en raison également de leur contribution
aux débouchés pour les produits des agriculteurs et des
producteurs maraîchers locaux. Et, si je peux vous donner comme exemple
quelque chose que je vis dans mon comté, vous avez tous entendu parier
de la municipalité de Saint-Amable. Vous pouvez bien verser des larmes
de crocodile sur les pneus qui y ont brûlé, mais je vais vous dire
que 60 % de la production d'asperges de cette municipalité est
acheminée via les fruiteries de la rive sud sur les marchés et
auprès des consommateurs.
D'autre part, j'aimerais également souligner que dans cette
question vous avez eu l'occasion de remarquer que, depuis le début de la
semaine, j'ai présenté des pétitions défendant les
droits des fruiteries. Laissez-moi vous dire et vous apporter quelques
précisions sur ces pétitions-là. Elles n'ont pas
été orchestrées depuis des mois. Elles ont
été organisées à la dernière minute, avec
les moyens du bord, depuis vendredi soir dernier. Depuis trois jours, vous avez
pu remarquer que j'ai déposé dans cette Chambre des
pétitions contenant 15 000 noms. J'en ai encore qui arrivent et que je
vais déposer d'ici à la fin de la semaine. Ces pétitions
sont signées par les consommateurs de villes dans toutes les
régions du Québec qui appuient de façon
générale les positions de la Coalition contre l'ouverture des
magasins le dimanche, mais qui, néanmoins, demandent qu'on jette un
regard particulier sur le commerce des fruiteries. Quand je parte de fruiteries
ici, je parie principalement de celles qui sont membres de l'Association
provinciale des fruiteries et non pas le style grand supermarché comme
on voit dans la région de Québec, ici.
M. le Président, j'aimerais demander au ministre, compte tenu de
l'étape où on est rendus dans l'adoption de ce projet de loi, si
au moins au niveau de la réglementation il ne pourrait pas discuter avec
les porte-parole de l'Association des fruiteries du Québec des
accommodements qui feraient en sorte de minimiser les retombées
négatives pour ces gens-là. J'aimerais également, d'autre
part, profiter des quelques minutes que j'ai pour intervenir sur ce sujet pour
vous demander de prévoir des délais d'adaptation raisonnables que
vous pourrez discuter avec les principaux concernés de façon que
les jeunes entrepreneurs qui ont mis sur pied, qui ont investi
énormément, et j'en connais moi-même pour en avoir
plusieurs dans mon comté... J'aimerais que vous prévoyiez des
délais d'adaptation pour que ces jeunes entrepreneurs qui ont investi
énormément dans la mise sur pied de ces commerces ne soient pas
pénalisés et ne soient pas acculés à la faillite ou
ne soient pas réduits à l'inopération par suite de
l'application de cette loi.
Je pense, M. le Président, que dans ce débat, finalement,
ce qui ressort, c'est que ce sont toujours les gros, ceux qui sont
organisés, qui font valoir leur point de vue. Ce sont toujours ceux qui
ont des intérêts particuliers à défendre. Je dois
reconnaître, sans entrer dans le secret des dieux et sans être dans
le secret des dieux, que je crois que vous avez vous-même, M. le
ministre, cédé à quelques-unes de ces pressions-là.
Vous avez annoncé des amendements prévoyant aux vendeurs de
matériel routier, de piscines, enfin toutes sortes de commerces
quelconques... vous avez prévu des accommodements pour ces
gens-là. Vous avez également prévu des accommodements pour
les horticulteurs, pour les antiquaires, pour un certain nombre d'autres
commerces dans certaines activités qui, à mon avis, ne
m'apparaissent aucunement ajouter à la qualité de vie, comme le
font les fruiteries.
Et, d'ailleurs, je vous rappellerai un sondage effectué à
deux reprises par l'Association provinciale des fruiteries qui,
irréversiblement, a démontré à chaque fois que 80 %
de la population appuyaient l'ouverture des petites fruiteries le dimanche.
Et, d'ailleurs, je vous ferai remarquer qu'il y a quelque chose
d'incohérent et d'inconséquent dans le fait que certaines de ces
petites fruiteries-là ont même vu le jour grâce à des
subven-
tions du gouvernement via les corporations de
développement économique communautaire, en particulier dans le
centre-sud de Montréal et dans l'est de Montréal.
Alors, je trouve tout à fait inconséquent
que, d'une part, le gouvernement offre des fonds à des gens et, surtout,
à des jeunes entrepreneurs pour mettre sur pied des petits commerces et
que, par la suite, on vienne leur couper le cou par des mesures comme celles
qui sont introduites dans ce projet de loi.
En conclusion, M. le ministre, je pense que le temps est
venu que les masques tombent et que ceux qui versent des larmes de crocodile
sur la situation de l'emploi chez les jeunes, sur la situation de l'emploi chez
les étudiants qui vont être frappés d'augmentation de frais
de scolarité, que ceux qui versent des larmes de crocodile sur les
producteurs maraîchers du Québec et principalement les producteurs
locaux se rendent à l'évidence que, dans ce débat, qui
est, au fond, un débat de société, ce sont encore une fois
les petits qui vont faire les frais d'arrangements qui, somme toute, ne
conviennent à personne. Je vous remercie, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Cannon): Merci, M. le
député de Bertrand. Mme la députée de
Chicouti-mi.
Mme Jeanne L. Blackburn
Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Le projet de
loi qui est déposé et qui est à l'examen actuellement, du
ministre de l'Industrie, du Commerce et de la Technologie, c'est une
espèce de bouillie infecte et, curieusement, il aura réussi
à indisposer à peu près tout le monde, M. le
Président. (15 h 50)
M. le Président, il refuse aux gens la
possibilité de s'exprimer pour voir s'il n'y aurait pas lieu de revenir
sur une décision malheureuse, à mon avis, un entêtement
inacceptable dans ce dossier. Il a imposé le bâillon pour museler
l'Opposition. L'Opposition est muselée, mais je peux me permettre de
dire qu'également les députés ministériels le sont,
M. le Président. Non seulement l'Opposition est-elle muselée,
mais les députés ministériels le sont par les
règles qui régissent ce qu'on appelle la ligne de parti.
M. le Président, je m'interrogeais sur nos
positions. Avions-nous raison, tort? Étions-nous en train de nous
enfermer dans un discours qui ne correspondait pas à la
réalité? Alors, je me suis informée auprès de
députés ministériels, à l'occasion de
déplacements, d'échanges et au moment où on prenait un
café et un sandwich, parce qu'il était 3 ou 4 heures du matin,
quels étaient leurs sentiments à cet égard. Et,
curieusement, pour une bonne partie, je dirais pour une partie, ça s'est
séparé peut-être - je ne saurais pas le quantifier parce
que c'est toujours un peu dangereux. Il y a définitivement des
députés qui sont en faveur du projet de loi sans aucune nuance et
sans aucune distinction. Ils étaient en faveur du projet de loi
déposé, ils sont toujours en faveur du projet de loi en cours de
modification, après modification. Ils étaient en faveur de
n'importe quel projet de loi, du moment que ça venait de la partie
ministérielle. Je le dis, pour certains avec indifférence
peut-être, d'autres avec cynisme ou d'autres par intérêt
Mais il y en a certainement qui sont de cette catégorie.
Par ailleurs, nombreux - et je n'oserais pas vous demander votre avis
là-dessus - sont les députés libéraux qui ont les
commentaires suivants et je vous les cite, je suis certaine qu'ils vont se
reconnaître. Il y en a un qui m'a dit: Écoutez, il faut vous
rassurer. C'est beaucoup moins pire que ce qui nous menaçait il y a
seulement deux ou trois semaines. Si vous saviez comment on a travaillé;
on a fini par se convaincre que c'est encore moins pire que ce qui se
présentait avant. Ce n'est pas moi; c'est un député
libéral. Et là, M. le Président, si jamais on me dit: II
faudrait que vous les nommiez, je suis prête à le faire. Je crois
que ce ne serait pas très souhaitable pour ces personnes-là, je
ne voudrais pas les mettre mal à l'aise, mais je pourrais le faire.
M. le Président, un autre est tout à fait
contre parce qu'il m'a dit: Écoutez, j'ai fait beaucoup de tourisme. Je
suis allé en Europe. La tradition est toute autre et ils vivent bien,
sauf que, pour les Européens, la valeur fondamentale n'est pas la
consommation, c'est la qualité de vie. Le dimanche, ils ont toutes
sortes de choses à faire. Ils vont visiter les musées, ils se
promènent dans les parcs, ils vont visiter la famille, ils lisent, ils
font des activités ensemble, ils font d'autres activités, ils ne
se croient pas obligés de faire de la consommation. Et il m'a dit: Moi,
le modèle américain, ça ne me convient pas beaucoup. Ce
n'est pas un député d'une région, c'est un
député d'une ville. Un autre m'a dit: Moi, vous savez, les
valeurs américaines, je m'en serais bien passé. Un autre m'a dit:
La situation des employés à faible revenu m'inquiète, les
travailleurs à faible revenu. Pour un autre: Voilà! Les femmes
qui sont sur le marché du travail n'auront même plus de
prétexte pour ne pas faire elles-mêmes le marché ' parce
que ça va être ouvert le dimanche. Enfin, elle m'a dit: Moi,
ça me permettait de dire: Écoute, je travaille; quand je sors, le
marché est bondé ou est fermé. Alors, mon mari le faisait.
Là, je n'aurai même plus ce prétexte-là. Un autre me
dit: Mes marchands ont fait plusieurs représentations et ils ne sont pas
d'accord.
Un autre dit: Les travailleurs chez nous ont fait des
pressions. Ils sont venus à mon bureau. Je les ai rencontrés. Ils
ne sont pas d'accord. On n'avait pas vraiment besoin de ça dans notre
région. Mais un autre a ajouté, beaucoup plus
franc: Je suis obligé de vous dire qu'il n'y a pas moyen de le
faire changer d'avis. On aura tout essayé. Cette question se passe, tout
ce débat se passe comme si la question de la qualité de vie du
Québec, de sa culture particulière, de son caractère
distinct - pour utiliser un terme que vous connaissez bien - c'est comme si
ça lui échappait. Il dit: On n'a rien pu faire. A leur avis, ce
projet de loi n'était pas indispensable mais à terme, ce qu'ils
me disent tous: C'est moins pire que ce qui nous pendait sur la tête.
Alors, ils se sont résignés, pour ne pas dire ils ne se sont pas
nécessairement ralliés. D'ailleurs, on a vu hier soir qu'ils sont
sortis de la Chambre parce qu'ils n'ont pas voulu voter.
M. le Président, le projet de loi et les amendements qui ont
été déposés, le bâillon qui a
été imposé aux députés de l'Opposition, le
bâillon qui a été imposé à tous ceux et
celles qui sont contre ce projet de loi, le bâillon en vertu des
règles de solidarité ministérielle qui sont
imposées aux députés ministériels en cette Chambre
fait qu'on est en train d'adopter un projet de loi qui est mauvais, M. le
Président, un projet de loi dont on n'a pas mesuré les effets,
d'abord, sur les travailleurs et les travailleuses. Vous êtes-vous
imaginé que le travailleur ou la travailleuse qui va travailler le soir
jusqu'à 19 heures, lundi et mardi, ensuite, de 8 heures à 21
heures - et là ça va être un horaire éclaté,
évidemment - tous les jours de la semaine jusqu'au samedi soir, 17
heures et, ensuite, pendant un mois, en décembre, pendant tout le mois,
avez-vous imaginé quelle va être la qualité de vie de ces
personnes? Est-ce qu'elles auront droit, comme tout le monde, de pratiquer des
sports, d'aller, à l'occasion, au cinéma ou au
théâtre, d'avoir des activités sociales, de recevoir des
amis, de partager un repas en famille? Elles vont se retrouver à la...
Quand vous terminez à 19 heures et que vous arrivez à la maison
à 19 h 30, 20 heures ou 20 h 30, si vous êtes dans la grande
région de Montréal, croyez-vous que ça va leur permettre
d'avoir une qualité de vie décente, M. le Président? On
n'a pas mesuré les effets de cette loi-là sur la qualité
de vie des travailleurs.
On n'a pas non plus mesuré les effets sur la qualité de
vie et sur l'avenir des petits propriétaires. Il y a 4500
dépanneurs, M. le Président, au Québec. En fait, le
dépannage au Québec est venu solutionner un peu le
problème que nous avions depuis que les femmes étaient
entrées sur le marché du travail. Il fallait pouvoir acheter du
lait, du pain et du beurre à l'occasion, lorsque ça manquait
à la maison, et il est vrai que, les marchés d'alimentation
fermés, ça pénalisait du monde. On a trouvé une
solution originale, intéressante et adaptée, et, le
dépanneur, je maintiens que c'est une solution qui nous ressemble et qui
est intéressante parce que c'est devenu, pour beaucoup de petits
quartiers, l'équivalent de l'ex-magasin général. Je
rappelais que même les enfants dans un quartier peuvent être
rassurés s'ils se sentent mal pris; ils peuvent facilement se
réfugier dans un dépanneur; ils se savent en
sécurité. On a créé ça dans notre milieu.
Ça s'est fait de façon naturelle et spontanée. Et qui ne
connaît pas des propriétaires qui sont des immigrants, de nouveaux
arrivants, qui, avec leur petite famille, s'installent et s'intègrent
parfaitement à leur quartier? Ils connaissent le nom de leurs voisins,
de leurs clients et de leurs clientes, ils attendent les nouveaux venus. J'en
connais un en particulier, je trouve ça intéressant, chez qui ma
fille va et, là, ils attendaient l'arrivée du bébé
comme si c'avait été le leur. Mais ils font ça pour toute
leur clientèle, M. le Président. Ça fait vivre leur
famille, ça leur permet de s'intégrer et ça leur permet de
payer les études de leurs enfants. 4500 dépanneurs, 3500 qui sont
des propriétaires privés et qui sont souvent en collaboration
avec leur époux ou leur épouse.
M. le Président, on n'a pas mesuré les effets de ce projet
de loi. On n'en connaît pas les conséquences. L'Opposition a
été muselée parce qu'on a imposé le bâillon,
et la partie ministérielle l'est plus ou moins en raison des
règles de solidarité ministérielle. Alors, M. le
Président, si le ministre est honnête, si ce gouvernement est
sincère, ils vont accepter que les députés
ministériels votent librement sur cette loi, M. le Président.
Voilà le voeu que je formule. Je vous remercie.
Le Vice-Président (M. Cannon): Merci, Mme la
députée de Chicoutimi. Je suis prêt à
reconnaître le prochain intervenant, M. le chef de l'Opposition
officielle.
M. Jacques Parizeau
M. Parizeau: M. le Président, je prends quelques minutes
cet après-midi pour intervenir dans ce débat, non pas pour
aborder les modalités du projet de loi lui-même, tous mes
collègues en cette Chambre le font et personne ne le fait avec autant de
compétence, je pense, que la députée de Taillon. Mais,
puisqu'on nous a imposé un bâillon sur ce projet de loi, c'est du
bâillon dont je vais parler, parce qu'il me paraît fondamental de
protester à cet égard, de protester au nom de l'Assemblée
nationale, au nom des droits du législateur. (16 heures)
Vous me direz: Ce n'est qu'un bâillon parmi trois. Oui,
effectivement, nous sommes dans cette situation tout à fait
particulière d'avoir trois bâillons en cinq jours au cours de la
même session. Ça ne s'était jamais vu, il est important de
le souligner. Mais, des trois bâillons, celui qui s'applique à la
loi que nous examinons actuellement a un aspect tout à fait particulier.
Vingt-cinq amendements ont été déposés après
que le bâillon eût été annoncé. Extraordinaire
situation,
M. le Président. Vingt-cinq amendements d'un projet
de loi comme celui-là, en fait, en transforment complètement la
portée. La loi que nous avons devant nous après l'imposition du
bâillon est très différente de la loi que nous avons
discutée avant. Très différente. Et, pourtant, on nous
dit: En fait, la loi que vous avez devant vous après le bâillon,
nous reconnaissons que ce n'est pas la même loi qu'il y avait au
début. Mais, puisque le bâillon a été imposé,
alors, acceptez ces 25 amendements sans discussion. C'est-à-dire,
à toutes fins pratiques, M. le Président, qu'on se sert des
règles de la Chambre, ou plutôt de la suspension d'un certain
nombre de règles de la Chambre, pour gouverner par décret. C'est
ça que l'on fait.
Et il est important, je pense, que le ministre, qui est
relativement nouveau dans cette Chambre, comprenne la portée du geste
qu'il a posé. Il dit: D'abord, il y aura bâillon. Donc, à
partir d'un certain moment, vous n'aurez plus le droit de parler. Et,
maintenant qu'on vous a avertis qu'il y a bâillon, bien, voici des
amendements si nombreux, d'une telle substance que ça change
profondément le sens de la loi. Mais vous n'aurez plus le droit de
parler parce qu'à partir de ce moment, nous gouvernons par
décret. Parce que c'est ça que ça veut dire.
J'en ai vu passer, des bâillons dans cette Chambre,
des suspensions de règles. Le plus souvent, je pense, depuis une
vingtaine d'années, il s'agissait de raisons, j'allais dire parfaitement
compréhensibles: des grèves qui durent trop longtemps et qui
mettent en péril la santé, la sécurité des gens.
Souvent aussi, des grèves qui duraient à ce point longtemps que
ça mettait en péril l'année scolaire des enfants. Oui,
ça, on le comprend.
Ce gouvernement aura cependant innové sur le plan
des bâillons ou de la suspension des règles. On se comprend,
ça n'est pas tout à fait identique sur le plan juridique, mais,
enfin, je pense que pour ceux qui nous entendent cet après-midi, c'est
suffisamment proche l'un de l'autre pour qu'on puisse établir une
certaine identification.
Quand j'ai vu ce gouvernement, il y a quelques mois,
suspendre les règles pour faire passer à la vapeur un projet de
loi applicable à une corporation, l'institut Armand-Frappier, qui n'a
finalement réglé ce qui devait être réglé que
six mois plus tard, je ne pouvais pas m'empêcher, M. le Président,
de dire: Moi, je n'ai jamais vu ça, jusqu'à maintenant, dans
cette Chambre. Le gouvernement décrète parce qu'il a quelque
chose à cacher. Je l'ai dit souvent, je continue de le penser. Ce qui a
été fait à l'occasion du dossier de l'institut
Armand-Frappier, il y a des choses qui ne sont pas claires là-dedans et
qui n'ont pas pu être claires parce qu'on a levé les règles
pour arrêter le débat.
Là, cette fois-ci, aujourd'hui, c'est d'une nature
différente, ce que fait le gouvernement.
Et, sur la base d'un projet de loi initial, vous, de
l'Opposition, avez pu parler un peu. Maintenant, il est temps que vous cessiez
de parier. Alors, on vous dit: Vous cesserez de parier. Et maintenant, voici 25
amendements qui changent profondément le sens du projet de loi et nous
vous avertissons que vous n'aurez pas un mot à dire
là-dessus.
M. le Président, je ne retrouve pas dans ces gestes
notre vieux et cher Parlement. Ça n'est pas comme ça qu'il a
fonctionné pendant des années, quel que soit le parti au pouvoir.
Ce qui se passe à l'égard de ce bâillon met en
péril, pas seulement l'immédiat, met en péril bien des
choses à venir. Quand on commence à réagir comme
ça, il n'y a plus grand-chose pour arrêter un gouvernement. La
prochaine session, ce sera quoi, quatre bâillons? Est-ce que cette
idée de déposer des amendements après que le bâillon
soit imposé va se propager, on va faire ça de plus en plus
souvent? Le moindrement que quelque chose n'est pas réglé dans
l'opinion publique et qu'on sent qu'il y a une certaine agitation chez les gens
et que l'Opposition cherche à traduire ce que les gens pensent, on les
arrêtera, on arrêtera toute discussion et on dira: Maintenant,
voici le décret, voici tous les amendements que nous avons
décidé d'imposer.
C'est toute une porte que le ministre de l'Industrie, du
Commerce et de la Technologie, avec l'acceptation de son Conseil des ministres,
bien sûr, c'est tout un précédent qu'il est en train
d'établir. Et je l'avertis à l'avance - jusqu'aux prochaines
élections, M. le Président, nous allons avoir à vivre
ensemble longtemps - que le précédent qu'il cherche à
établir aujourd'hui, il va vivre avec longtemps parce que son
gouvernement ne résistera pas à la tentation de continuer
à faire des opérations comme celle-là. Il n'aurait jamais
dû accepter ça. Il y a des gens qui nous regardent, qui nous
écoutent cet après-midi, qui vont dire: Mais qu'est-ce que c'est
que ce bâillon qui permet, cependant, à l'Opposition de continuer
de parler comme nous le faisons cet après-midi?
Il faut dire que le bâillon établit un moment,
des heures après lesquelles il faut cesser de parier et où le
projet de loi est accepté automatiquement. C'est pour ça que dans
le cas de ce bâillon, comme des deux autres, nous parions jusqu'à
la fin du temps qui nous a été imposé par le gouvernement.
Et nous utiliserons toutes les minutes que le bâillon nous autorise avec
toutes les conséquences que ça peut impliquer quant à la
législation du gouvernement. M. le Président, on a cherché
à nous empêcher de parier à partir d'un certain moment.
Nous allons parier jusqu'au dernier moment, dans les trois cas de ces
bâillons, pour protester contre un traitement de l'Assemblée
nationale, du législateur de la population du Québec, de cette
population du Québec qui continue tous les jours encore à
présenter des pétitions quant à ce
projet de loi, qui continue de discuter de la chose dans l'opinion
publique, où pour une foule de gens au Québec la question de
l'ouverture des heures d'affaires des magasins, ce n'est pas
réglé.
Et je termine, M. le Président. Dans l'esprit des gens, ce n'est
pas réglé. Dans le nôtre, nous de l'Opposition officielle,
ce n'est pas réglé non plus. Le gouvernement a
décidé que c'était réglé au mépris de
toutes les règles fondamentales, de l'esprit des règles que nous
avions pratiquées si longtemps dans cette Assemblée nationale et
que le gouvernement a décidé, à tort, il le paiera,
à tort, de violer. Merci.
Le Vice-Président (M. Cannon): Merci, M. le chef de
l'Opposition. Je vais maintenant reconnaître le prochain intervenant, M.
le député de Shefford.
M. Roger Paré
M. Paré: Oui, merci, M. le Président. Eh bien, moi
aussi je vais passer mes commentaires pour une dernière fois sur le
projet de loi 75 et je vais vous dire tout de suite, M. le Président,
que je n'utiliserai pas les mots que j'ai entendus des gens de mon comté
comme commentaires par rapport à ce projet de loi là lorsqu'ils
en ont pris connaissance et avec les appels que j'ai encore de façon
régulière parce que je dois vous dire que ce serait certainement
antiparlementaire, mais ce serait au moins significatif de ce que les gens
pensent de ce projet de loi là. (16 h 10)
Et quand on regarde la façon dont le gouvernement, dont le
ministre actuel, membre du gouvernement libéral, se comporte, c'est
exactement à l'image du comportement qu'on connaît depuis 1985,
à peu près dans tous les projets de loi qui touchent des sujets
litigieux. Comment est-ce qu'ils s'y prennent? Et regardez bien ça,
c'est standard, c'est régulier, c'est en même temps
indécent, mais c'est comme ça que ça se produit. Quand on
prend un problème... Si je voulais l'imager, c'est comme si on prenait
quelqu'un, un patient, et on disait: On va te tuer, tellement on met ça
grave, exagéré, inacceptable, abominable. On va te tuer. Et on
finit par ramener les choses un peu. On regarde les 25 amendements et les
modifications. On ramène les choses en disant: Bien non, on va vous
couper les deux jambes seulement, et dites-nous merci pour avoir fait
ça, parce qu'on va vous payer la chaise roulante. C'est exactement comme
ça qu'on se comporte de l'autre côté, à peu
près dans tous les sujets qu'on traite: On ne te tue pas, n'aie pas
peur, on va juste te couper les deux jambes et tu vas te promener en chaise
roulante. C'est quoi, dans la loi 75, la façon dont on a traité
et surtout dont nous allons traiter les gens du secteur concerné, qui
sont par centaines de milliers; ça, il ne faut pas l'oublier?
Ce qu'on modifie, ce sont les heures de travail pour des dizaines de
milliers de travailleurs et de travailleuses, de propriétaires de
commerces qui sont aussi des travailleurs et des travailleuses. Et dans la
majorité des cas, ce sont des gens qui sont touchés alors qu'ils
ne pensaient même pas qu'ils étaient dans la joute. Le
problème, c'est que ce gouvernement-là, depuis 1985, a
laissé faire ou a modifié lui-même, par décret
très souvent, le nombre d'exceptions. Et c'est devenu une situation
intolérable, celle qu'on connaît. Pourquoi? Parce que, ou on n'a
pas appliqué la loi de l'autre côté, ou on a
augmenté le nombre d'exceptions, ce qui fait en sorte que maintenant on
se dit: Regardez le problème s'il est grand. Il y a tellement
d'exceptions que, de toute façon, il faut modifier ça. Et il est
question d'équité. Les gens qui vont être touchés,
mais qui ne se pensaient pas concernés se sont dit: Le gouvernement va
régler ça à un moment donné, il va mettre ses
culottes longues, il va prendre ses responsabilités. Il y a des
problèmes avec des pharmacies, il y a des problèmes avec des
fruiteries, il doit être capable de régler ça.
Il y en a, des solutions. Si le gouvernement avait voulu, il aurait
réglé ça par rapport aux exceptions ou par rapport aux
domaines les plus sensibles, les plus complexes ou ceux qu'on a laissé
faire et qui, finalement, nous ont amené un problème. Mais ce
n'est pas ça qui est arrivé. Dans ce qu'on nous apporte
maintenant, on touche tout le monde. J'écoutais une
députée, de l'autre côté, qui disait, ce matin: Ce
n'est pas grave, on rajoute cinq heures par semaine. C'est facile à
dire, ça, quand on ne les subit pas. J'ai entendu, de 'l'autre
côté, dire: Ce sont les heures permises, les gens ne sont pas
obligés de les faire. Ce n'est pas comme ça que ça
fonctionne, le commerce. Quand c'est ouvert, c'est ouvert, sinon les clients
vont ailleurs. Et quand les clients vont ailleurs, ça nous amène
des situations comme celles qu'on connaît, alors que les faillites sont
plus fortes au Québec qu'ailleurs, et à un pourcentage
très important en ce qui concerne les commerces de détail et les
commerces en général.
Donc, on augmente les heures. Peut-être que ça ne nous
touche pas personnellement ici, sauf que, quand on vote, on s'en prend à
la vie des citoyens qui sont concernés. A 8 heures, le matin, je dois
vous le dire, ce n'est pas très drôle, alors que, de plus en plus,
j'avais l'impression, en tout cas, que la société devait s'en
aller vers une qualité de vie meilleure. Alors que les syndicats se
battent dans les entreprises et partout ailleurs, pourquoi une diminution des
heures? Et nous autres, ici, on est quoi? À contre-courant, trop
innocents pour se rendre compte des vrais besoins et des désirs de la
population? Nous, on dit: Écoutez bien, vous n'êtes pas dans le
même monde que les autres ou
bien on va faire en sorte que vous ne soyez pas dans le même monde
que les autres, on va vous étirer les heures. Vous autres, la
qualité de vie et tout ça, ce n'est pas pour vous autres, c'est
pour les autres. Parce que, comme il n'y aura pas plus d'argent à
dépenser, bien, il n'y aura pas plus de salaire à donner.
Ça veut dire: pas plus d'emplois créés ou plus d'emplois,
mais des "jobines", par exemple, où on va partager le gâteau en
sachant très bien que, dans ce secteur-là, ce ne sont pas les
salaires les plus élevés, au moment où on se parle, ce ne
sont déjà pas les salaires les plus élevés.
Et là, on se dit: Si on n'augmente pas le gâteau, on va le
partager à plus de monde. Ça veut dire qu'on s'en vient un peu
comme aux États-Unis. Vous avez raison, on s'en vient un peu comme aux
États-Unis où, effectivement, ce n'est pas nécessairement
là que c'est le meilleur. Il y a des millions de pauvres aux
États-Unis, ne l'oubliez pas. Il y a des millions de gens qui sont au
salaire, peut-être pas minimum, mais à un salaire très bas,
alors que nous, on s'est battus ici, au cours des dernières
années, pour avoir des conditions de vie qui sont de mieux en mieux. On
voulait avoir les meilleures, mais là, on régresse, on recule. On
se dit: II faut que les gens aient le temps de magasiner. On aurait dû
avoir, si c'était ça, à nos bureaux, des
délégations de gens venir demander: M. le député,
faites quelque chose, on veut aller magasiner. Il n'y a personne qui est venu
me voir parce qu'il n'a pas eu le temps d'aller magasiner ou il n'y a personne
qui est mort de faim parce qu'il n'a pas été capable d'acheter sa
nourriture. On n'a pas vu ça. Il y a seulement quelques personnes, qui
ont des profits commerciaux à faire, qui sont venues nous voir, quelques
personnes., même pas cinq, même pas pour calculer sur les doigts
d'une main. Les autres n'ont pas dit ça. Les consommateurs ne sont pas
venus en demander davantage, surtout qu'on sait que la population vieillit; les
gens âgés ont plus de temps pour magasiner, eux autres, parce
qu'ils ne travaillent pas.
Il y a des centaines de milliers de gens sur l'assurance-chômage,
d'autres sur l'aide sociale et les travailleurs ont diminué le nombre
d'heures... Donc, normalement, si on diminue le nombre d'heures de travail, les
gens ont de plus en plus le temps de magasiner. Pourtant, on va forcer les gens
à travailler plus. Ça veut dire quoi, comme qualité de
vie, pour les gens qui sont propriétaires de commerces ou travailleurs
dans ces mêmes commerces? Ça veut dire qu'ils vont finir leur
journée le lundi et le mardi à 19 heures; les mercredi, jeudi et
vendredi, là, c'est 21 heures. Qu'ils n'essaient pas de se trouver
d'autres occupations, ils sont pris jusqu'à 21 heures, c'est toute la
soirée. Ils avaient encore deux soirs au moins... Ou au moins on aurait
pu leur laisser deux soirs pour avoir une vie un peu plus
régulière, comme les autres. Que ce soit seulement pour
être en famille, deux repas par semaine, il me semble qu'on ne demande
pas l'impossible. En tout cas, de l'autre côté, quand vous allez
nous servir le beau discours de la famille, je vous dis tout de suite: Mon
oeil, ça ne "pognera" plus! Parce qu'on a beau dire ce qu'on voudra,
proposer ce qu'on voudra et surtout tenir les discours qu'on voudra bien, par
les gestes qu'on pose, on est en train d'enlever l'essence même de la
famille. Ce n'est pas surprenant qu'il y ait dénatalité et qu'il
y ait bris de mariages de plus en plus: on ne fait rien pour aider les gens
à être ensemble, à se parler. Ne pas être capables de
souper ensemble un seul soir par semaine pour des gens qui travaillent, pas
seulement dans l'alimentation, dans l'ensemble du secteur commercial, c'est
beau comme politique familiale, c'est vraiment beau, c'est extraordinaire!
Comment ces gens-là vont-ils pouvoir avoir des activités
aussi? Finir à 19 heures, aller se changer, aller souper; ça veut
dire qu'ils sont même exclus des loisirs, de la culture, de la formation
professionnelle, de l'éducation des adultes. Voyons donc, on n'a pas le
droit de faire ça à des gens. Ce n'est pas comme ça qu'on
améliore le sort d'une société. Et le dimanche, on fait la
même chose. Je suis convaincu d'une chose: Probablement qu'à
l'automne, on va être encore ici en train de modifier cette
loi-là, parce que ce gouvernement légifère très
mal. Il n'a aucune sensibilité à l'égard de la population
parce qu'il est plutôt pris par quelques-uns qui financent la caisse
électorale. Mais il n'a pas de sensibilité à
l'égard de l'ensemble de la population. Donc, les lois ne peuvent pas
s'adapter. On s'en rend compte par les nombreuses lois qu'on discute ici, sur
lesquelles on nous met le bâillon et les autres qu'on n'a même pas
appelées encore. On les a déposées, ou on ne les voulait
pas, ou on ne voulait pas qu'on en discute parce qu'elles ne sont pas
présentables, dans bien des cas, mais là, parmi les lois qui sont
déposées, il y en a au moins quatre où ce sont des
corrections de l'autre session. On avait dit qu'elles ne seraient pas
applicables, elles ont été votées quand même, elles
ont été votées probablement de nuit aussi, dans certains
cas, si je me rappelle bien, et là, on est ici pour les corriger.
On serait normalement en train de légiférer en toute
connaissance de cause et en ayant une seule préoccupation,
l'intérêt de la population et l'intérêt
spécialement de la partie de la population qui est concernée par
les lois qui nous concernent. Donc, M. le Président, on ne fait pas
ça, surtout en sachant que lorsque l'on tient le discours, de l'autre
côté, que l'on veut aider le consommateur davantage, eh bien, la
réaction vient des consommateurs eux-mêmes, puisque les seuls gens
qui sont venus me voir en délégation représentant les
syndicats, le clergé, les municipalités, l'ensemble des clubs de
l'âge d'or, les AFEAS, ils sont venus me voir en me disant:
Non, nous, on ne veut pas de modifications. Des consommateurs, des
associations de consommateurs, la réponse est venue de ces
gens-là et ce n'est pas ça qu'ils demandent. Je suis convaincu
d'une chose, c'est une erreur qu'on est en train de faire et j'espère
que vous allez vous en rendre compte avant de voter, M. le ministre. Merci, M.
le Président.
Le Vice-Président (M. Cannon): Merci, M. le
député de Shefford. Je suis prêt à reconnaître
le prochain intervenant, Mme la députée de Marie-Victorin. (16 h
20)
Mme Cécile Vermette
Mme Vermette: Merci, M. le Président. M. le
Président, nous avons devant nous une loi que beaucoup de consommateurs
ont qualifiée d'injustifiable, d'inéquitable et surtout
d'injuste, une loi qui fait appel à des notions de supercherie, de
trompe-l'oeil parce que, dans les faits, ce qu'on nous dit qui ne sera pas
exercé en réalité - et je me réfère à
l'ouverture du dimanche - bien, ce ne sont que de vains mots, puisque la
façon dont le projet de loi est libellé... Bien sûr que,
dans le domaine de Talimenterie" et dans le domaine des pharmacies, bien
sûr ces commerces à grande surface pourront ouvrir le dimanche. Il
n'y aura vraiment plus de difficulté pour ces commerces de pouvoir
offrir des services à l'ensemble de la population, et ce, dans toutes
les régions du Québec, M. le Président.
Injustifiable, parce que, encore une fois, plein de gens avaient
demandé au ministre de surseoir à son orientation, de prendre le
temps de légiférer mieux et de faire en sorte que l'ensemble des
intérêts, autant des petits commerçants que des
consommateurs et des gros commerçants, soit vraiment concilié
dans un projet de loi. C'est le rôle d'un législateur de concilier
les intérêts des uns et des autres et de faire en sorte que chacun
puisse considérer qu'il a été traité d'une
façon juste et équitable, M. le Président. Peine perdue,
le nombre de pétitions qui ont été déposées
à l'Assemblée nationale, le nombre de recommandations qui ont
été faites auprès du ministre pour lui demander de
reconsidérer cette façon de vouloir écrire son projet de
loi... Peine perdue, à un point tel, M. le Président, que
même du côté ministériel on faisait, en fait, des
sentiments de culpabilité à l'endroit de bons citoyens qui sont
venus ici demander au ministre de reconsidérer son projet de loi. On est
arrivés ici en nous disant: Nous ne tolérerons pas plus longtemps
que des consommateurs ou une coalition, en fait, de personnes viennent nous
faire des pressions indues pour qu'on puisse changer notre orientation.
M. le Président, je ne comprends pas ce genre de discours
là. Je ne peux pas comprendre que des parlementaires qui ont
été élus pour représenter les intérêts
diversifiés de la popula- tion puissent considérer, parce qu'on
les approche pour leur demander de prendre en compte leurs
intérêts, qu'on appelle ça faire des pressions indues et
que ces pressions-là indues... Parce qu'elles font appel à de la
conciliation, à de la concertation, parce qu'elles se sont
regroupées ça devient une pression indue, d'autant plus que la
plupart des ces gens-là qui appartiennent à cette
coalition-là ne font pas l'objet, M. le Président, de gros
intérêts corporatifs ou n'ont pas des sommes d'argent
considérables. Ce sont des individus qui se sont sentis
concernés, directement impliqués parce que c'étaient des
intérêts vitaux quant à eux, de survie quant à eux,
qu'ils voulaient défendre. Et c'est pour ces raisons qu'ils ont cru aux
gens qu'ils ont élus pour les représenter à
l'Assemblée nationale, à ces gens pour défendre leurs
intérêts, et c'est à eux qu'ils ont adressé leurs
revendications, leurs demandes. Qu'est-ce qu'ils ont en retour comme
considération? C'est qu'on dénonce ici à
l'Assemblée nationale le fait que la Coalition ait fait des pressions
indues sur des députés pour faire en sorte que le ministre puisse
comprendre, revenir à de meilleurs sentiments face aux
intérêts de ces petits commerçants et des consommateurs, M.
le Président.
Je trouve ça inacceptable, inqualifiable de la part de
parlementaires d'avoir de tels propos, des propos qui font en sorte qu'on
essaie de trouver toujours un coupable, peu importe, pourvu que le gouvernement
puisse se "déresponsabiliser" des actions qu'il pose, des projets de loi
et des orientations qu'il impose à l'ensemble de la population. Je
trouve ça inacceptable, irresponsable de la part, en fait, d'un
gouvernement de qualifier des individus qui ne sont que de bons citoyens, qui
défendent leurs intérêts, en fait... de faire en sorte
qu'à ces gens-là on donne une réputation de personnes qui
essaient tout simplement de mettre des pressions inacceptables sur le
gouvernement, comme si c'étaient des fraudeurs, M. le Président.
Je ne pense pas, quand on essaie de défendre nos intérêts,
qu'on est des fraudeurs ou qu'on appartient à des gens qui essaient de
soudoyer, en fait, les représentants qui sont dûment élus
pour nous représenter. Je ne crois pas, M. le Président. Et
j'espère que le gouvernement pourra, en tout cas, à un moment
donné, arriver à comprendre que c'est légitime pour
n'importe qui, pour n'importe quelle personne de se regrouper en coalition pour
défendre ses intérêts. Ça fait partie de la
démocratie au Québec et j'espère que ça va
être considéré, encore une fois, comme de la
démocratie au Québec et que ce n'est pas ce
gouvernement-là qui va faire taire tout le monde.
Il y a des règles parlementaires qui s'appliquent ici, à
l'intérieur de l'Assemblée nationale, qui font en sorte que, oui,
par un bâillon, on ne puisse aller plus loin dans l'étude d'un
projet de loi, mais j'espère qu'ils n'iront pas aussi loin, dans la
population, par leurs menaces, en tant
que parlementaires, pour faire taire l'ensemble de la population du
Québec. Assez, c'est assez, M. le Président.
Je considère qu'actuellement, M. le Président, le
bâillon a été inutilement appliqué dans ce cas-ci.
Une loi qui, en fait, n'a fait l'objet que de vingt-quatre heures
d'étude. On n'a même pas pu aller sur le fond; on s'en est tenus
toujours sur la forme et quand le ministre nous arrive et qu'il nous dit:
Écoutez, moi, je vous arrive avec 24 amendements, que personne n'a pu
regarder, s'y pencher, ou discuter, je pense que c'est "inconsiderable", M. le
Président, de la part d'un gouvernement de réagir et d'avoir si
peu de respect pour ses institutions.
Oui, ça fait partie du jeu des règles parlementaires
d'utiliser, M. le Président, des motions au début d'un projet de
loi avant de commencer l'étude article par article. Bien sûr que
ça fart partie de la procédure et, probablement, parce que le
ministre est très "neuf1, il était très
empressé à pouvoir passer son projet de loi, probablement que ce
manque d'expérience fait en sorte que nous avons été
obligés d'arrêter le débat et de ne pas pouvoir aller
beaucoup plus loin dans ce débat-là. Ceci fait en sorte que nous
sommes obligés actuellement, non pas de nous attarder, en fait, sur les
amendements qui ont été apportés, parce qu'il y en a
vraiment beaucoup trop, nous sommes obligés de les prendre dans
l'approche globale et de démontrer au ministre que, dans son approche
globale, il y a plein de choses qui ont été laissées en
suspens et qui n'ont pas été prises en considération et,
notamment, M. le Président, la défense des intérêts
des petits commerçants et, aussi, du consommateur, M. le
Président.
Quand on parle au niveau des petits commerçants, et j'aimerais
bien pouvoir vous en parler de ces petits commerçants-là qui,
même dans les dépanneurs, c'est sur les heures
excédentaires des heures régulières qu'ils font leur marge
de profit et c'est ça qu'on est en train de leur couper à l'heure
actuelle. Quand on sait que, dans certains petits dépanneurs, le peu de
profits qu'ils peuvent faire durant les heures travaillées, M. le
Président, et ça va même dans certains cas, M. le
Président, au péril de leur vie. Je pense que le petit peu qu'ils
peuvent faire, par leur travail, on devrait plutôt les aider à
continuer dans leur travail et non pas leur développer une
compétition insurmontable parce que, justement, c'est comme, vous savez,
des géants par rapport à des petits, très petits, et ils
n'ont aucun moyen de défense. Ils devront subir cette libre concurrence
et faire en sorte que leur marge de profit, qui permettrait, en tout cas, de
pouvoir espérer au moins de s'en tirer tant bien que mal par la somme de
leur travail, eh bien, M. le Président, ils seront remis en question
dans cette approche parce que, encore une fois... Le ministre prétend
toujours que les chaînes d'alimentation ne seront pas
nécessairement ouvertes le dimanche, elles le pourront maintenant, M. le
Président. Durant la période des fêtes, on change
complètement l'horaire de travail et durant le mois de décembre,
on devra faire face à un nouvel horaire de travail de sorte que
l'ensemble des petits commerçants devront affronter la concurrence avec
des plus gros, de très gros même, avec certains monopoles et
ça sera difficile. Et là, comme on sait qu'on a une
instabilité économique à l'heure actuelle, ça sera
difficile et même plusieurs disparaîtront, M. le Président,
j'en suis convaincue. (16 h 30)
Le Vice-Président (M. Cannon): Merci, Mme la
députée de Marie-Victorin. M. le député de
Rouyn-Noranda-Témiscamingue.
M. Rémy Trudel
M. Trudel: Oui, M. le Président, il faut que quelqu'un
intervienne à cette Assemblée nationale malgré le
bâillon, malgré les mesures qui ont été
présentées par le gouvernement, pour parler fort pour les
familles du Québec. Ce qui est devant nous aujourd'hui, avec tout ce que
l'on connaît du processus maintenant, nous n'avons pas l'impression qu'en
aucun moment dans toute cette discussion, si encore on peut qualifier le
processus de raisonnable, on a pu raisonnablement discuter, il ne semble pas
que la voix des familles ait été écoutée.
Je profiterai de ce court moment pour essayer d'exprimer ce que les
groupements familiaux, dont le Conseil de la famille, ont dit carrément
au ministre responsable de ce projet de loi. Ce dont il est fondamentalement
question dans ce projet, en dehors de 65, 70, 82, 95 heures, c'est d'un
changement de valeurs dans notre société. Et ça, le
ministre, qu'il le veuille ou non, il va être obligé de le
reconnaître. Quelle est sa légitimité, la
légitimité sociale dont il dispose pour opérer un tel
changement? On va en parler un petit peu. Oui, un changement de valeurs parce
que, essentiellement - et je ne veux pas arrêter sur les détails -
d'autres comme la députée de Taillon ont très bien
décrit ce que cela voulait dire pour les familles en
général, mais pour les familles d'employés, pour les
employés eux-mêmes et pour les propriétaires de petits
commerces, ce que ça pouvait signifier dans la
réalité.
La valeur fondamentale qui est impliquée dans ce projet de loi:
on veut commercialiser, commercialiser à tout prix, céder au
"lobby" du profit, céder au "lobby" de l'argent, céder au "lobby"
de la consommation. Comme le dit souvent l'un de mes collègues, ce
gouvernement a des objectifs mais il n'a pas de principes. Lorsqu'on a un
certain nombre de valeurs fondamentales dans une société, on fait
en sorte que les instruments, les outils que l'on met à la disposition
de cette collectivité viennent renfor-
cer, viennent augmenter la valeur ou le partage de ces valeurs dans
cette société. Est-ce que, franchement, le projet de loi qui est
devant nous, le projet de loi 75 prend partie pour les familles du
Québec? Réponse: Non. C'est très clair.
Dans la région de l'Abitibi-Témiscamingue - parce qu'il
faut parler, il faut dire ce que les gens de nos comtés, les gens qui
vivent la réalité quotidienne veulent vivre comme valeurs
fondamentales - est-ce qu'on a eu de grandes pétitions? Est-ce qu'on a
eu de grandes réclamations des gens de la région de
l'Abitibi-Témiscamingue pour dire: M. le ministre, ouvrez-nous donc
ça le plus largement possible. Ouvrez donc la porte pour qu'il y ait de
plus en plus de concurrence et qu'on soit pris, en quelque sorte, pour ouvrir
parce qu'on veut sauver le minimum de nos commerces. La réponse, c'est
non. Le ministre disait hier soir: Quand je suis allé à la
chambre de commerce à Rouyn-Noranda et que je leur ai expliqué,
ils ont tous compris. Bien, s'ils ont tous compris, pourquoi publient-ils cette
semaine dans les hebdos de la région qu'ils vont tenter de se former une
association pour s'auto-contrôler? Parce que le gouvernement ne prendrait
pas ses responsabilités, ils veulent former une association
régionale pour essayer d'interdire à ceux qui seraient
tentés d'ouvrir et forcer ces gens-là eux-mêmes à
ouvrir leur commerce. Et là, on va se réveiller avec toutes
sortes de situations. On va se réveiller - parce que si les micros
étaient un petit peu plus forts à cette Assemblée on
entendrait et le public entendrait le bruit que les gens de l'ANCAl font dehors
-avec des situations comme celles-là où on va être
obligés d'employer tous les moyens pour forcer, en quelque sorte,
à consacrer une valeur qui est consacrée dans la
société québécoise.
J'ai été extrêmement surpris, sinon renversé,
lorsque, hier soir ou ce matin encore, le ministre, se faisant applaudir par
tous ses collègues, a dit: Chez nous, la décision des
modifications, la décision de ce projet de loi, ça a
été pris en collégialité. J'ai écouté
tout le monde. Ah là! j'ai été renversé! Mais
où était la ministre responsable et déléguée
à la Famille? Où était la voix de la famille dans ce
gouvernement? Est-ce que quelqu'un avait pris le soin de dire au caucus des
députés, au Conseil des ministres: Nous avons une politique
familiale, une supposée politique familiale? Nous avons un avis formel
du Conseil de la famille du Québec, pas de n'importe quel organisme, un
organisme qui se penche uniquement sur les valeurs familiales et qui a
publié, il y a quelques mois, un document dont on a dit: Mais c'est
merveilleux! C'est un instrument extraordinaire! "Penser et agir famille". Nous
voulons, au Québec, privilégier les valeurs familiales. On veut
tellement ça qu'on va vous donner un instrument, une grille, des
critères pour évaluer toute politique gouvernementale. Où
était la voix des familles, au
Conseil des ministres et au caucus? Est-ce que, comme d'autres
députés, on s'est tus? Qui a parlé et a parlé fort
pour les familles des employés, pour les familles monoparentales, pour
la solidarité de la famille au Québec? Qui a parlé de ces
valeurs? Qui a passé ce projet de loi à travers la grille de
"Penser et agir famille"? Conclusion: personne.
Personne n'a pris la défense des familles du Québec.
Même le Conseil de la famille, très récemment, a accompli
son travail; lui, ce Conseil, il a pris la grille de "Penser et agir famille".
Il a passé sa réflexion à travers cette grille. Le projet
de loi, il l'a épluché. Conclusion, très simple,
très très simple, la conclusion, et ce n'est pas n'importe qui
qui compose ce Conseil. Il y a des gens qui y ont réfléchi
longuement. Conclusion: maintenir les restrictions quant aux heures d'ouverture
des commerces le dimanche. Si vous avez à allonger les heures pour
faciliter les obligations de certaines familles, allez-y sur quelques heures
durant la semaine - quelques heures durant la semaine - ne touchez pas au
dimanche. Ne désacralisez pas. Ne commercialisez pas à outrance
la vie de la famille au Québec. Il n'y a personne, et certainement pas
le ministre, qui a passé cette loi à travers la grille de "Penser
et agir famille". On ne veut pas écouter.
Les gens des régions qui disent que cette loi va modifier
fondamentalement aussi les comportements dans nos groupes familiaux, on ne veut
pas les écouter. On a du gros monde, on a du grand monde qui vient faire
du "lobbying" à notre porte et, nous, on préfère
écouter ces gens-là. Les petits employés de commerce, les
familles de ces employés, les familles monoparentales, les gens en
difficulté, on ne veut pas écouter la réclamation de ces
gens. Je dis qu'un jour vous paierez pour cela et que la voix des familles dans
ce gouvernement n'existe pas. Vous préférez travailler pour la
commercialisation et le changement de valeurs dans le sens américain du
terme. Vous récolterez ce que vous aurez semé dans quelques
années et, nous, nous allons continuer, pour les familles du
Québec, de parler fort, comme on le réclame partout dans la
société.
Le Vice-Président (M. Cannon): Merci, M. le
député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue. Je suis prêt
maintenant à reconnaître le prochain intervenant, M. le
député de Beauce-Nord.
M. Jean Audet
M. Audet: M. le Président, quand est-ce que le
gouvernement va se brancher? Quand est-ce que le ministre va mettre ses
culottes? Quand est-ce que le ministre va mettre ses culottes et sa ceinture,
M. le Président? C'est ce qu'on entendait l'an passé, il y a deux
ans, concernant justement les heures d'ouverture des établisse-
ments, des commerces.
On a déchiré son linge, sa chemise à
cause d'un bâillon. Le printemps dernier, se tenait une commission
parlementaire. Le ministre avait décidé de faire une commission
parlementaire et des auditions pour entendre des groupes. L'Opposition a eu le
droit de parole pour questionner ces groupes-là, pour connaître
leurs souhaits et leurs intentions. (16 h 40)
Ça fait quatre ans, M. le Président, qu'on
parle de cette loi-là, des problèmes qu'elle cause. On nous dit:
Ce n'est pas drôle, après vingt heures, arriver avec un
bâillon. C'est vrai que ce n'est pas drôle pour un gouvernement de
mettre des bâillons quand il y a des projets de loi comme ceux-là.
Mais, M. le Président, et la députée de Chicoutimi l'a
soulevé hier soir, suite à l'intervention de mon collègue
de Saint-Maurice, elle parlait justement du rôle du député.
Elle lisait textuellement le rôle du député où elle
mentionnait que le rôle du député, c'est entre autres de
participer aux commissions parlementaires et de proposer des amendements. C'est
ce qu'elle disait, proposer des amendements. C'est le rôle du
parlementaire.
Lorsqu'on a commencé l'étude du projet de loi
article par article, lorsqu'on a tenté de le faire, plutôt, les
amendements qui ont été proposés par l'Opposition, mais
à des conditions, M. le Président, à la condition qu'on
saute certains articles pour commencer où elle voulait bien commencer
les travaux de la commission ou l'étude du projet de loi article par
article...
L'Opposition dit qu'elle s'est fait flouer, mais je pense
plutôt que c'est l'Opposition qui s'est flouée parce que, si elle
avait voulu, de bonne foi, commencer l'étude du projet de loi article
par article à l'article 1 puis, en cours d'étude, par exemple,
arriver avec une motion ou deux motions, peut-être qu'on aurait pu les
regarder, mais il n'y a aucune des discussions qui s'est faite sur la base du
projet de loi comme tel.
On crie fort à cause d'un bâillon, M. le
Président. J'ai écouté attentivement le chef de
l'Opposition, tantôt, qui est venu faire son intervention. Il a
parié strictement du bâillon et non pas du fond du dossier. Mais,
dans le contexte, où en est-on rendus avec cette loi-là?
Où en est-on rendus dans le débat aujourd'hui? Je n'ai pas
entendu un mot du chef de l'Opposition sur les fruiteries, sur le
problème de la loi actuelle, le problème que ça cause, par
exemple, aux pharmacies et tout ça. Parce que ça va causer des
incidences quand même importantes pour certains secteurs
d'activité. Aucun mot là-dessus. Aucun mot, M. le
Président.
Pourquoi on en est là aujourd'hui? On en a
parié ce matin, puis je veux y revenir parce que, pour moi, ça
m'apparaît très important parce que notre système
parlementaire est basé sur nos coutumes et nos traditions. On ne peut
pas arriver du jour au lendemain et faire fi de tout ce qui s'est fait avant
pour produire ou faire une loi, quelle qu'elle soit.
Dans le débat qui nous préoccupe, les heures
d'affaires, moi, je me réfère à la loi 59, pour laquelle
on a fait tout un plat ce matin à cause du décret qui avait
été fait en 1986 par notre gouvernement, sans parier - ma
collègue de Vachon l'a soulevé - du décret de 1985. Je
vous réfère à la loi 59, à l'article 5.2 qui dit
justement: Un établissement commercial, opérant avec plus de
trois personnes - c'est la loi 59, M. le Président, ce n'est pas notre
loi à nous, c'est la loi 59... "Un établissement commercial,
opérant avec plus de trois personnes, qui vend des produits visés
au paragraphe 7° - le paragraphe 7°, c'est les produits
pharmaceutiques, hygiéniques et sanitaires - de l'article 5 ainsi que
des denrées alimentaires et des menus articles, à la date de la
sanction de la présente loi, n'est pas tenu de restreindre son personnel
à trois personnes ou de cloisonner la partie où s'effectue la
vente des denrées alimentaires, à la condition qu'il obtienne une
autorisation du ministre... "Une demande d'autorisation à cet effet doit
être faite au ministre avant le 1er septembre 1984."
Il me semble que c'est clair, M. le Président. Et si
on se réfère au décret de 1986, le décret a
été fait en conformité avec la loi de 1984 et c'est
mentionné textuellement, ceux qui n'avaient pas augmenté depuis
le 20 juin 1984. Alors le ministre, ici, a reconnu par décret, comme la
loi de M. Biron le permettait en vertu de l'article 5.2, de permettre à
certains établissements de se conformer à la loi.
Le député d'Ungava disait tantôt: Oui,
nous, on en a fait un décret pour les marchés publics, tout
ça, pour qu'ils se conforment. Bien oui, M. le Président, si on a
fait un décret pour qu'ils se conforment, c'est parce qu'ils
étaient hors-la-loi. Lorsque la police arrête votre automobile sur
la route parce que vous avez un feu clignotant qui ne fonctionne pas, elle vous
arrête, elle vous donne 48 heures pour vous conformer. C'est parce que
vous êtes hors-la-loi, M. le Président. Alors, si on a permis en
1985, en janvier 1985 aussi... En janvier 1985, M. le Président,
à cette période-là de l'année, il n'est pas coutume
que cette Chambre siège ici. Alors, peut-être que les
députés de l'Opposition, à ce moment-là, auraient
souhaité poser des questions sur ce décret-là ou se faire
entendre. Pas du tout. C'était à l'extérieur des travaux
parlementaires réguliers, M. le Président.
Et ce n'est pas un reproche que je fais au ministre de
l'époque, M. Biron, parce que, vous savez, j'ai lu
considérablement pour connaître les intentions du
législateur sur la loi 59. On disait, entre autres, à cette
époque: 800 petits commerçants réclament le droit de
travailler le dimanche, et on parie justement des marchés publics et
tout ça. Et le ministre Biron, dans un article,
dit: Oui, on fait cette loi. On va permettre une certaine ouverture
parce que les attitudes des consommateurs ont changé. On magasine de
plus en plus à l'européenne dans des petits centres, dans des
petits marchés, tout ça, dans des boutiques
spécialisées. On va permettre à ces gens-là de les
inscrire à l'intérieur de la loi et ils vont pouvoir
opérer en toute légalité parce que présentement, au
moment où on se parle, si la loi est respectée à la
lettre, ils vont devoir fermer, M. le Président. Alors, il y a une
ouverture dans la loi de M. Biron, qui a été
créée.
À cette époque-là, M. le Président, je n'ai
rien vu de ce qu'on entend dans l'Opposition, aujourd'hui: crier tout haut que
si on permettait à ces gens-là d'ouvrir le dimanche leur
qualité de vie était menacée, que des petits
dépanneurs, des petites entreprises familiales devraient fermer leurs
portes parce que ça vient directement les concurrencer, M. le
Président.
Pas un mot, à cette époque-là. Aujourd'hui, on fait
les grands cris, on déchire son linge parce qu'on vient ajouter une
personne, M. le Président, dans la loi 59, dans la loi de 1984. Est-ce
qu'on a vu des faillites dans les dépanneurs, M. le Président,
parce qu'on a permis à des marchés publics de se conformer?
Est-ce que le taux de divorces a augmenté, M. le Président? Je ne
pense pas. Je n'ai pas de données, moi, qui me confirment ça. Je
ne suis pas contre la loi qu'a faite le ministre Biron, pas du tout. Mais, ce
que je veux que les gens comprennent, c'est qu'à cette
époque-là, déjà, on sentait un changement dans les
habitudes des consommateurs, et il l'a dit à un moment donné. Il
dit: II faudra peut-être revenir dans deux, trois, quatre, cinq ans pour
changer cette loi-là.
Et puis je dis la même chose aujourd'hui. Ma collègue de
Taillon l'a soulevé, ce matin. On s'en va vers la libéralisation.
Bien oui, elle l'a compris et déjà, en 1984, son ministre de
l'Industrie et du Commerce le disait. On s'en va vers une
libéralisation, comme dans plusieurs pays, d'ailleurs, ça existe.
On s'en va vers une libéralisation. On n'a pas le choix, les attitudes
changent. On parie de la dénatalité. Avant 1970... Je viens de la
Beauce, M. le Président, et s'il y a un endroit au Québec
où il y a des grosses familles, je pense que c'est chez moi. Les grosses
familles au Québec, M. le Président, c'est avant 1969, avant la
loi des heures d'affaires. Si on veut charrier et associer ça à
ça, on va le faire. Les grosses familles, il y en avait avant qu'il y
ait des lois qui régissent les établissements commerciaux, M. le
Président.
Voyons donc! Ça ne tient toujours bien pas debout de dire des
affaires comme ça. Ça ne tient pas debout du tout. Enfin, je veux
terminer là-dessus, M. le Président. Il y a eu des amendements
d'apportés. Je veux féliciter le ministre et les membres de la
commission qui ont travaillé avec nous là-dessus parce que je
pense qu'il y a certains éléments dans le projet de loi qui
inquiétaient beaucoup de commerces de détail et tout ça.
Les amendements qu'on apporte, aujourd'hui, je pense, vont venir les rassurer
et ce n'est pas, je pense, cinq heures de plus... Parce que, si on regarde dans
les centres d'achat, la plage qui existait avant, les heures d'affaires qui
existaient avant, les centres d'achat, le matin, ça ouvre vers 9 heures,
9 h 30. Ils ont le droit d'ouvrir une heure avant, mais ils ne le font pas
parce que la coutume, parce que l'usage, parce qu'il n'y a pas de client avant
cette heure-là, c'est simple.
Je suis convaincu qu'à l'usage, M. le Président, on verra
qu'on aura eu raison dans ce projet de loi là et je ne suis pas
convaincu, M. le Président, si j'ai encore la chance d'être ici
dans sept, huit, dix ans, et si par hasard l'Opposition se retrouve au pouvoir,
que ce n'est pas eux qui feront une loi ou qui amenderont cette loi-là
pour libéraliser davantage, parce que les habitudes des consommateurs
auront changé encore plus.
Je termine là-dessus, M. le Président. On a parié
aussi de certaines choses, de certaines pressions qui ont été
faites sur les députés.
Le Vice-Président (M. Cannon): En conclusion, s'il vous
plaît, M. le député, puisque votre temps est
terminé.
M. Audet: Oui, je conclus et je voulais juste terminer sur une
note d'un député anglais, Edmund Burke qui a été
connu pour ses écrits sur le parlementarisme, et qui disait une chose:
"Votre représentant est élu pour mettre ses énergies et
son jugement à votre service. S'il sacrifie celui-ci au détriment
de votre opinion, il ne vous sert pas, il vous trahit." Alors, dans le but de
servir au meilleur de mon jugement mes électeurs, M. le
Président, j'appuierai et je voterai pour le projet de loi. Merci, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Cannon): Merci, M. le
député de Beauce-Nord. Le prochain intervenant, M. le
député de Sainte-Marie-Saint-Jacques.
M. André Boulerice
M. Boulerice: M. le Président, vous entendez comme moi le
bruit de l'extérieur. Vous entendez comme moi. Voilà 2000
camionneurs, M. le Président, qui sont depuis 16, 18 jours devant ce
parlement et qui n'ont comme maigre pitance pour leur patience, pour leurs
revendications, que le mépris du ministre des Transports qui leur offre
une belle petite commission parlementaire. Mépris de la population, M.
le Président, mépris du Parlement, de la part de ce ministre que
j'aurais cru démocrate, mais qui se fait complice, avec son leader, dans
cette oeuvre de destruction de la démocratie à l'Assemblée
nationale: Bâillon!
Bâillon pour imposer sa loi. (16 h 50)
Le député de Beauce-Nord a dit que le ministre avait mis
ses culottes. Oui, M. le Président, il a mis ses culottes à
l'envers, comme le bon roi Dagobert, quand on regarde son projet de loi.
Des voix: Ho! Ho!
M. Boulerice: II a mis ses culottes à l'envers comme le
bon roi Dagobert, mais, malheureusement, il n'y a pas de Saint-Éloi pour
le ramener à la raison. J'ose espérer que le leader adjoint va
l'inspirer de l'histoire de notre littérature pour lui trouver une
citation pour contrebalancer la mienne. Mais ceci n'est pas l'essentiel de mon
propos.
Le député de Beauce-Nord minimisait cette notion qui, en
1990, est sur les lèvres de tous les gens, la qualité de vie. On
s'en sert pour parler de la culture, en disant que c'est une des principales
qualités de la vie. On s'en sert pour l'environnement, en disant que
c'est une principale qualité de la vie. Mais que va-t-il arriver avec
les employés de ces magasins? le député de beauce-nord,
dans sa brillante intervention de tantôt, disait que ça ne fera
pas augmenter le taux des divorces. j'étais content, hier soir,
d'entendre le leader adjoint de l'opposition et député
d'abitibi-ouest parler du monoparentalisme. et je suis, sans aucun doute
probablement, le député qui représente une circonscription
où ce taux est le plus fort, de familles monoparentales qui sont, vous
le savez comme moi, à 85 %, composées de femmes comme chefs de
famille. ce sont elles, pour la plupart, que l'on retrouve dans ces petits
commerces. que va-t-il arriver de la qualité de la vie? que va-t-il
arriver de la relation entre cette mère que l'on souhaite avoir au
travail, certes, mais qui aura de moins en moins de temps à consacrer
à ses enfants? alors qu'on sait fort bien qu'il y a des problèmes
de garderie, au québec, et qu'une garderie, même si elle est
bonne, ne remplace pas la présence maternelle ou la présence
paternelle. et le député de beauce-nord fait fi d'un des
éléments principaux de ça. le ministre, de surcroît,
nous dit: oui, mais c'est facultatif, ils pourront ouvrir s'ils le veulent;
s'ils ne le veulent pas, ils n'ouvriront pas. essayons donc de regarder une
autre optique, m. le président. on sait qu'une très grande partie
de ces employés n'ont pas de protection syndicale, malheureusement. le
patron, et je ne pourrai pas l'en blâmer, va vouloir essayer de soutenir
la concurrence qui existe, donc, va obliger à travailler durant ces
heures. et cette mère de famille ou ce père de famille qui osera
refuser, que va-t-il lui arriver? eh bien, il sera remercié de ses
services. loin d'avoir créé de l'emploi, on va plutôt
créer du chômage, avec une loi comme celle-là, parce qu'il
y a des gens qui, en leur âme et conscience, devront faire un choix.
Je ne sais pas quelle vision "économisiste" a le ministre
là-dedans, mais j'essayais de faire le calcul. J'ai 100 $ par semaine
à dépenser. Est-ce que je vais en dépenser plus - parce
qu'on dépense en fonction de nos revenus - parce que les magasins sont
ouverts plus longtemps? Si c'est ça, j'ai besoin de cours
d'économie familiale et d'aller voir l'Association des consommateurs qui
va m'apprendre à gérer un budget. Et je pense qu'à ce
niveau-là le travail a été fait. Et les
Québécois sont quand même soucieux de la bonne
gérance de leur propre budget. Est-ce que je vais dépenser
plus?
Est-ce que, M. le Président, l'augmentation du chiffre d'affaires
et des ventes va être telle qu'on va en venir non pas à une
stagnation des prix, ce qui serait souhaitable, mais même à une
baisse des prix, à cause de l'offre et de la demande? Voyons-donc, M. le
Président! Est-ce que, sous prétexte que durant tout le mois de
décembre les magasins vont être ouverts, vous allez acheter plus
de cadeaux pour vos enfants cette année que vous n'en avez acheté
durant les années précédentes? Vous vous êtes,
chaque année, fixé un budget et vous allez le respecter, cette
année comme les années précédentes. Les heures
d'ouverture n'auront aucune influence sur la gestion de votre portefeuille, M.
le Président. Mais vous risquez, par contre, la surprise de voir ce
Nintendo, ce gadget électronique qu'aiment bien les enfants et surtout
les adolescents, et probablement que les enfants du ministre aussi sont des
amateurs de ce jeu... Eh bien, je serais curieux de voir, est-ce que le prix va
baisser? Je pense que la question peut se poser au ministre. Il y a
peut-être bien des chances, M. le Président, tout au contraire,
que le prix augmente, parce que, plus d'éclairage, et les tarifs
d'Hydro-Québec augmentent. Le ministre l'avoue lui-même. Plus
d'éclairage dans le magasin, plus de chauffage. S'ils ne chauffent pas
au gaz, ils chauffent à l'électricité, donc plus de
dépenses. Le magasin étant plus utilisé au niveau de
l'entretien, ça va en prendre encore un petit peu plus. Et je vous le
dis: Je ne dépenserai pas plus que le montant que je m'étais
fixé, M. le Président. J'ai bien l'impression, moi, de
représenter M. et Mme Tout-le-Monde dans mon quartier. Je viens de fa
classe moyenne moi aussi. Je ne dépenserai pas plus que ce que j'avais
prévu. Et ce n'est pas le fait qu'on ait "extensionné" les heures
d'ouverture qui va me faire gagner plus.
Mais ce que je vais voir, par contre, M. le Président, c'est la
dégradation de la qualité de la vie dans mon quartier, qui est un
quartier résidentiel avec certaines rues commerçantes où,
là, on va commencer à s'enfarger le dimanche, (e soir, dans les
camions de livraison qui vont venir porter la marchandise. Parce que, si le
magasin ouvre, il faut qu'il y ait des marchan-
dises. Et si par malheur les marchandises manquent, le bon
commerçant va appeler pour en avoir le plus rapidement possible. Donc,
toute cette qualité de vie qui existe dans mon quartier, ça va
être mis en balance par ce projet de loi que le ministre nous propose.
Enfin, pas qu'il nous propose, M. le Président, mais qu'il nous impose
par un bâillon, le troisième. Vous me faites signe que c'est deux,
M. le Président, je m'excuse de vous corriger, c'est trois
bâillons que le ministre nous impose, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Cannon): C'était pour vous
indiquer qu'il vous restait deux minutes pour votre intervention. Je ne faisais
pas le décompte.
M. Boulerice: Je vous remercie, M. le Président, mais j'ai
été quand même heureux de vous informer que nous en
étions au troisième bâillon. Et je vois d'ailleurs dans
votre figure, puisque vous êtes démocrate, que vous
n'appréciez pas et que, malheureusement, la gestion de ce bâillon
qu'on vous impose de faire vous tourmente, M. le Président. C'est
dommage que vous ne puissiez pas intervenir dans cette Chambre et faire
entendre une voix qui concorderait avec ta mienne, parce que vous êtes
père de famille, vous aussi. Vous êtes consommateur, M. le
Président. Et, naturellement, vous ne souhaitez pas que les magasins de
meubles, quand même, aient les mêmes heures d'ouverture que les
tavernes, M. le Président. Sans aucun doute. On n'en est pas rendus
à ce point-là.
Donc, le projet de loi qui nous est imposé par ce gouvernement
est un mépris total de la population. Premièrement, c'est, au
départ, un premier mépris à l'égard d'un de ses
collègues, le député de Nicolet-Yamaska, qui avait
âprement travaillé là-dessus. Je trouve ça
injurieux, M. le Président, que le ministre ait balayé du revers
de la main ce qu'avait fait notre collègue de Nicolet-Yamaska avec
beaucoup de sincérité et beaucoup d'honnêteté.
Le Vice-Président (M. Cannon): En conclusion, s'il vous
plaît, M. le député. (17 heures)
M. Boulerice: En conclusion, M. le Président, quand on a
vu le nombre de pétitions déposées en cette Chambre, le
nombre de pétitions qui, malheureusement, n'ont pas pu être
déposées en cette Chambre parce qu'elles avaient un vice de
forme, quand on voit cette série impressionnante de
télégrammes, de lettres venant de municipalités, de maires
de villes... Puisque j'ai parlé du roi Dagobert, je vais être
oblige de citer un autre conte de notre enfance, pariant du roi qui
était nu, M. le Président. The king's cloak", le roi est nu, M.
le Président. Le ministre est seul à penser en cette Chambre
qu'il a raison avec sa loi alors que tout le monde lui dit: Non, vous avez
tort. Le roi est nu, M. le Président, et il ne s'en aperçoit pas.
Il aurait pu, par contre, réussir à s'en rendre compte, mais il
ne l'a pas fait. Il persiste? Il sera vaincu, M. le Président,
électoralement.
Le Vice-Président (M. Cannon): Merci, M. le
député de Sainte-Marie-Saint-Jacques. Je suis maintenant
prêt à reconnaître le prochain intervenant, M. le
député de Pointe-aux-Trembles.
M. Michel Bourdon
M. Bourdon: M. le Président, après mon
collègue de Sainte-Marie-Saint-Jacques, je voudrais revenir sur le bruit
lancinant que nous entendons dans cette Chambre. On sait que derrière
les camions des camionneurs artisans on trouve une boîte, une benne,
d'après le dictionnaire, et que la boîte se termine par un panneau
à bascule, une porte, et la façon que les 2000 camionneurs ont
trouvée de se faire entendre du gouvernement c'est, avec des cordes,
faire basculer la porte basculante ou le panneau basculant, ce qui fait un
bruit qui est proche du tam-tam. Alors, les coups de panneau à bascule
sur la benne sont aux camionneurs ce que le tam-tam était pour l'Indien
de temps immémoriaux. Ils veulent se faire entendre et ça fait 16
jours qu'ils sont ici, autour du parlement, à vouloir se faire
entendre.
Le Vice-Président (M. Cannon): M. le leader adjoint du
gouvernement.
M. Lefebvre: II est peut-être temps que le
député de Pointe-aux-Trembles sorte du bois et qu'il arrive au
projet de loi qui nous occupe, les heures d'affaires.
Une voix: Oui.
Le Vice-Président (M. Cannon): Alors, effectivement, M. le
député de Pointe-aux-Trembles, je vous rappelle le
règlement de la pertinence. Sans doute que vous étiez dans votre
préambule. Je vous invite à continuer s'il vous plaît.
M. Bourdon: J'y viens. M. le Président, les consommateurs,
les employés, les commerçants voulaient aussi se faire entendre
et l'Opposition officielle était d'accord avec eux. Or, le gouvernement
a choisi de consacrer autant de temps, en commission, au débat sur qui
devrait être reçu, parce qu'on demandait que les
intéressés soient reçus, que de temps que ça aurait
pris pour les entendre. Après ça, des députés sont
venus dire: Mais la Coalition contre l'ouverture le dimanche nous disait, dans
les corridors, son désaccord avec la loi. M. le Président, il
faut être conséquent. Si on ne veut pas se faire parier dans les
corridors, si on ne veut pas
recevoir des coups de portes à bascule sur les bennes, on
écoute le monde quand le monde veut parler. Et c'est ce que le
gouvernement ne veut pas faire.
Le prétexte que le ministre invoque, M. le Président,
c'est de dire: Je les ai déjà consultés. Mais il les a
consultés sur le problème des heures d'ouverture. Il ne les a pas
consultés sur un projet précis qui est devant nous. Or, ce
projet-là, M. le Président, n'est pas acceptable pour bon nombre
de raisons. La preuve qu'il est inacceptable, c'est que l'immense
majorité des gens que ça concerne sont violemment hostiles au
projet de loi. Dans ce sens-là, il n'y a rien de plus éloquent
que d'avoir ensemble les patrons et leurs employés, les associations de
consommateurs et même les municipalités sur qui le gouvernement
dompe encore une fois, par le projet de loi qui est devant nous, une partie de
ses responsabilités. La benne libérale veut domper sur les
municipalités du Québec l'application de la loi sur les heures
d'ouverture.
On dit, dans le projet de loi, M. le Président, que le
ministère de l'Industrie et du Commerce ou la municipalité fera
appliquer la loi. On sait ce qui arrive, M. le Président, dans une
bureaucratie: quand tout le monde est responsable de quelque chose, personne ne
s'occupe de cette chose. Et on connaît l'état des relations du
gouvernement avec les municipalités. Leur donner le mandat impopulaire
de vérifier l'application d'une loi incohérente, c'est, je pense,
un autre moyen de ne pas appliquer ce mauvais texte législatif qu'on a
devant nous.
À cet égard, M. le Président, chaque fois que le
gouvernement est mal pris depuis cinq ans, il y a une cassette qui part
automatiquement: Ce serait la faute du gouvernement qui a été au
pouvoir de 1976 à 1985. C'est quasi automatique. On part la cassette. M.
le Président, les cassettes, comme les disques, finissent par s'user. La
population estime, après cinq ans, que ceux qui sont en face gouvernent
par eux-mêmes et avec leur arrogance actuelle. Ils ne peuvent plus se
cacher derrière le gouvernement d'avant. Je pense que cette loi va
passer à l'histoire comme une loi mal inspirée, inspirée
par des groupes d'intérêts particuliers puissants, au
détriment de l'ensemble de plus de 300 000 personnes qui travaillent
dans le commerce.
Bien sûr que la loi du dimanche ne porte que sur l'alimentation.
Mais on la change d'une façon fondamentale, de deux manières: la
loi précédente disait que le dimanche, c'est le dépannage
qui était assuré et on s'assurait que ce n'était que du
dépannage en disant qu'il n'y aurait pas plus que trois personnes
à travailler en tout temps. Donc, le joueur qui voulait ouvrir le
dimanche ne devait opérer qu'avec trois personnes tous les autres jours
de la semaine. Qu'est-ce qu'on fait maintenant? On dit cinq, M. le
Président. Le député de Beauce-Nord dit quatre, mais il
omet de dire que c'est quatre plus le propriétaire ou son
représentant, donc, ça fait cinq. Et ça veut dire qu'une
entreprise comme Provigo, qui était très en faveur de la loi et
qui, elle, n'a pas besoin de faire basculer la porte arrière de la botte
de son camion économique, elle a des moyens autres de se faire entendre
et elle se fait entendre. Alors, ils pourront les lundi et mardi... Auparavant,
ça fermait à 18 heures; là, ça serait 19 heures
avec le projet de loi. Pourquoi? Pour leur permettre d'entrer sur le terrain
des dépanneurs. C'est clair, c'est évident et ils pourront ouvrir
plus tôt le matin, à 8 heures, pourquoi? Parce que les
dépanneurs ont la proximité des consommateurs et, aussi, des
heures d'ouverture différentes.
Quant au dimanche, on ne met même pas de quelle heure à
quelle heure. Ça pourrait être de minuit à 23 h 59 et on
dit que ça ne sera plus trois personnes en tout temps, mais cinq
seulement ce jour-là ou en dehors des heures normales. Ça veut
dire qu'un supermarché pourrait opérer avec quatre caisses et une
personne pour garnir les tablettes, à partir de 7 heures, le lundi et le
mardi et plus tard que 21 heures, le mercredi et le jeudi. C'est ça, M.
le Président, qui est mauvais dans ce projet de loi, c'est le choix qui
est fait par le gouvernement d'aider les grandes chaînes, qui
éprouvent certaines difficultés à s'en tirer, en
empiétant sur le terrain des entreprises plus petites.
Quand je dis entreprise plus petite, M. le Président, je ne parle
pas que des toutes petites entreprises. Il y a des entreprises comme les
Canadian Tire qui ont fait valoir leur opposition ferme à ce projet de
loi qui vient chambarder un domaine où il y avait quelques
problèmes, mais pas des problèmes qui justifient ce que le
gouvernement est en train de faire et qui va perturber les employés de
ces entreprises et les propriétaires des plus petites entreprises.
C'est sûr, M. le Président, qu'un épicier qui verra
son concurrent ouvrir le dimanche n'aura guère d'autre choix que de
perdre de l'argent ou d'ouvrir lui-même le dimanche.
Quant aux consommateurs au nom desquels cette mesure particulière
qui favorise des intérêts particuliers est prise, il est sûr
qu'ils paieront le coût des salaires supplémentaires et des frais
supplémentaires que les entreprises devront assumer.
Dans le cas des plus petits commerces, M. le Président, les gens
qui sont propriétaires devront, comme les employés, subir
l'inconvénient d'ouvrir des heures plus longues la semaine et d'ouvrir
le dimanche si leurs concurrents le font. C'est ça qui est, en gros,
l'état de ce projet de loi que le gouvernement nous impose par le
bâillon. En commission parlementaire, on n'a pas pu faire le débat
avec les intéressés, le gouvernement préférait
bâiller en écoutant d'une oreille distraite l'Opposition
plutôt que d'entendre les intéressés. Et c'est pour
ça qu'on a des bruits de bennes; c'est, pour ça que les
camionneurs
essaient de se faire entendre en faisant du bruit, parce que, dans le
cas des camionneurs, s'ils ne veulent pas faire du bruit maintenant, ils seront
entendus à la mi-septembre. Vous savez, il y a un premier ministre qui
avait dit: La reine ne négocie pas avec ses sujets. Et là, ce
qu'on nous dit, c'est: La reine n'écoute pas ses sujets; qu'ils jouent
du tam-tam, qu'ils fassent du bruit avec leur benne de camion, on s'en fiche.
On est en cours de deuxième mandat, on a été élus
et on doit favoriser les intérêts particuliers importants... (17 h
10)
Le Vice-Président (M. Cannon): En conclusion s'il vous
plaît, M. le député.
M. Bourdon:... et c'est ce qu'on fait par ce projet de loi, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Cannon): Merci, M. le
député de Pointe-aux-Trembles. M. le député de
Duplessis.
M. Denis Perron
M. Perron: Merci, M. le Président. Dans un premier temps,
je voudrais vous souligner combien il est décevant pour certains
députés qui sont ici depuis maintenant près de 14 ans, et
d'autres qui sont ici depuis plus longtemps, de voir le non-respect de ce qui
s'est passé sur l'heure du dîner, vers 12 h 30, de la part de la
députée de Vachon. Personnellement, et antérieurement aux
déclarations qu'elle a faites ici en cette Chambre, j'avais du respect
pour la députée de Vachon. Mais je me pose de sérieuses
questions maintenant. Ce qui s'est passé est extrêmement
déplorable, ce que je considère comme le tripotage de la
vérité qui est écrite dans des documents gouvernementaux.
Je considère aussi ses allusions comme étant de la petite
politicaillerie.
Le Vice-Président (M. Cannon): Je m'excuse, M. le
député de Duplessis, sur une question de règlement. M.
leader adjoint du gouvernement.
M. Lefebvre: Je ne vais pas insister. Vous avez entendu le
député de Duplessis comme moi. Je vous demanderais de l'inciter
à la plus grande prudence pour ne pas pécher contre les
dispositions des articles 35 et suivants, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Cannon): Alors, merci, M. le leader
adjoint du gouvernement. Je rappellerai simplement à tout le monde, ici,
qu'on ne peut pas attaquer la conduite d'un député en cette
Chambre. J'invite le député de Duplessis à respecter le
règlement et aussi à poursuivre son intervention.
M. Perron: Alors, merci, M. le Président. Je disais donc
que, quant à moi, c'était du tripotage de la
vérité, c'était de la politicaillerie et c'était
même de la malhonnêteté intellectuelle que de voir cette
députée de Vachon intervenir en citant un document...
Le Vice-Président (M. Cannon): M. le leader adjoint du
gouvernement.
M. Lefebvre: M. le Président, vous savez, sous
prétexte qu'on se retrouve en fin de session et que, jusqu'à un
certain point, le gouvernement est sujet au consentement de l'Opposition,
ça ne veut pas dire qu'on va laisser passer n'importe quoi, M. le
Président. Avec toute la délicatesse voulue dans les
circonstances, j'ai indiqué au député de Duplessis que les
règles de l'article 35.5, 6 et 7 existaient et elles existent encore.
Vous avez réalisé que ça n'a absolument rien donné.
Alors, là, je vous demanderais d'être un peu plus ferme et de lui
indiquer qu'il ne peut pas prétendre que la députée de
Vachon a tripoté la vérité. Il ne peut pas dire ça,
M. le Président. Il ne peut pas dire ça. Je comprends que
l'exemple vient de haut; il vient du leader de l'Opposition, mais il ne peut
pas dire ça. Il y a des règles à respecter, et ça
vaut pour lui, particulièrement lui qui est là depuis 14 ans.
M. Jolivet: M. le Président, sur la question de
règlement.
Le Vice-Président (M. Cannon): M. le député
de Laviolette.
M. Jolivet: Oui, M. le Président, vous avez entendu comme
moi les mots sur lesquels le leader adjoint du gouvernement a insisté.
Je n'ai jamais entendu le député de Duplessis dire ce que le
leader adjoint du gouvernement semble vouloir dire. Alors, comme vous l'avez
fait, M. le Président, je voudrais bien demander au député
de Duplessis de continuer son intervention en respectant les règles, ce
qu'il avait fait avant, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Cannon): Avant que le
député de Duplessis ne poursuive son intervention, je voudrais
rappeler aux gens de la Chambre l'article 32 quant au décorum. Nous
sommes à l'Assemblée nationale du Québec et le
décorum exige que tous et chacun d'entre nous, lorsque nous avons la
parole, nous respections le règlement. Par ailleurs, j'ajouterai que,
quant aux termes non parlementaires, il y a le mot "malhonnêteté
intellectuelle" qui a été déclaré non parlementaire
par la députée de Bellechasse, le 3 décembre 1986. La
jurisprudence est à la page 4708. Alors, j'invite le
député de Duplessis à se conformer au règlement et
je lui demande de poursuivre son intervention.
M. Perron: Alors, merci, M. le Président. Je vais donc
continuer mon intervention. Et ce que
je peux dire au moins en cette Chambre, c'est qu'il n'y a personne, en
cette Chambre, ni à l'extérieur de cette Chambre qui va
m'empêcher de penser ce que je veux de la députée de Vachon
- est-ce assez clair? - de penser ce que je veux face à ce qu'a dit la
députée de Vachon.
M. le Président, on a parlé dans cette Chambre, surtout de
la part des libéraux, peu importe le député qui se levait
en cette Chambre, incluant la députée de Vachon, le
député de Beauce-Nord et d'autres députés aussi, on
a parié des fameux décrets. Il est vrai que la loi de 1984 qui a
été adoptée par l'ancien gouvernement du Parti
québécois permettait des décrets. Elle permettait des
décrets de dérogation et des décrets qui apportaient des
avis de conformité envers certaines entreprises du Québec. C'est
vrai. Mais je crois fermement, après avoir lu ce que j'ai lu, que le
seul et unique décret qui art été passé par
l'ancien gouvernement était un décret qui imposait par avis
à des entreprises de se conformer à la loi, contrairement
à ce qu'a dit et à ce qu'a répété en cette
Chambre la députée de Vachon.
Et les dérogations, toutes les dérogations sans exception,
incluant le dossier dont on parle actuellement et que la députée
de Vachon a soulevé, toutes les dérogations, les vraies, ont
été amenées par le gouvernement libéral que nous
avons en face de nous. Décret sur décret, décision sur
décision, en conformité, bien sûr, avec la loi, mais c'est
ce qui a permis d'amener l'imbroglio que nous avons aujourd'hui. Et c'est la
raison pour laquelle nous avons cette loi devant cette l'Assemblée
nationale. Est-ce assez clair? L'ancien gouvernement du Parti
québécois n'a jamais passé de décret de
dérogation. C'est ce qu'on s'évertue à vous dire depuis
qu'on discute de ce projet de loi, autant en commission parlementaire qu'ici
même, à cette Assemblée nationale.
M. le Président, je ne peux accepter, sous aucune
considération, que les députés ministériels qui
ont, bien sûr, la majorité en cette Chambre, se permettent de dire
à peu près n'importe quoi, n'importe quand, sur n'importe qui,
sur des paroles qui sont dites ici, en cette Chambre, et encore moins sur des
documents qui sont écrits, pour les interpréter à leur
façon.
M. le Président, pour revenir au projet de loi 75, on sait
très bien que l'achalandage et les besoins de la clientèle ne
justifiaient pas une extension des heures de commerce le dimanche. Il n'y a pas
assez de Québécois et de Québécoises qui
travaillent six jours par semaine, du matin au soir, pour justifier d'ouvrir
des commerces le dimanche. Et, pour les urgences, il y a, comme je le disais
hier soir, des dépanneurs et c'est amplement suffisant en ce qui a trait
au territoire québécois.
Deuxièmement, la loi n'oblige pas, elle permet. C'est vrai. Mais
qu'arrivera-t-il du petit commerçant de vêtements ou de souliers
dans un centre commercial où les gros demeureront ouverts tous les
soirs? Laissera-t-il sa clientèle éventuelle se diriger vers les
plus gros commerçants au risque de périr? Se résoudra-t-il
à ajouter une trentaine d'heures par semaine à son horaire de
travail personnel ou réduira-t-il ses profits en embauchant plus de
personnel? M. le Président, nous ne sommes tout de même pas
à New York, ou encore à Tokyo, pour justifier pareille
mesure.
Troisièmement, les clients n'avaient pas besoin d'une telle
flexibilité. Le petit commerçant ne peut se la payer, le
travailleur verra ses horaires de plus en plus brisés et, pour survivre,
même les gros commerçants devront hausser leurs prix car personne
n'achètera deux paires de souliers de plus simplement parce que les
magasins sont ouverts tard le soir ou encore le dimanche. Le ministre a
simplement mal fait ses devoirs. Il est évident que les nouveaux
horaires compliqueront la tâche de nombreux travailleurs et
travailleuses, et surtout des travailleuses qui, déjà, ayant des
enfants d'âge scolaire, devaient se débrouiller avec les horaires
scolaires et les garderies.
Quatrièmement, M. le Président, pour revenir sur la
clientèle, il faut admettre que, souvent, les clients ne sont même
pas conscients qu'en exigeant ainsi une libéralisation des heures de
commerce ils se trouvent non seulement à forcer d'autres
Québécois et Québécoises à travailler un
jour autrefois considéré comme férié, mais
s'exposent eux-mêmes à ce que, éventuellement, leur propre
employeur les force à faire de même un de ces quatre matins. (17 h
20)
M. le Président, d'autre part, dans l'optique du Parti
libéral du Québec et, en particulier, du ministre de l'Industrie
et du Commerce, les autorités gouvernementales n'ont pas vraiment tenu
compte des particularités régionales, préférant
imposer une loi qui pourrait, tout au plus, satisfaire les
établissements à grande surface de plancher et les marchands des
grandes villes comme Québec et Montréal. Et, pour le comté
de Duplessis, M. le Président, je vais vous lire ici une lettre que je
viens de^ recevoir de la Chambre de commerce de Sept-îles, et ce n'est
pas des amis du PQ, pour votre information, ce n'est pas des amis du
député de Duplessis.
Le Vice-Président (M. Cannon): je m'excuse, m. le
député de duplessis, votre temps est écoulé. en
conclusion, rapidement, s'il vous plaît.
M. Perron: Parfait, M. le Président. D'ailleurs, c'est une
lettre que le ministre a en main actuellement et où on dit ceci - en
conclusion: "La chambre de commerce de Sept-îles, appuyée par
l'ensemble des marchands de Sept-îles, s'oppose à ce projet de loi
sur les heures d'ouverture des commerces, considérant que cette
loi n'a sa raison d'être que pour les grands centres urbains. "En
région, cette loi n'entraîne que des dépenses
supplémentaires pour des revenus identiques, considérant les
longues heures que les propriétaires auront à faire et le peu de
clients qui s'en accommoderont. Nous n'avons pas le bassin de population pour
entretenir des heures d'ouverture semblables et nous croyons fermement que ce
projet de loi ne doit pas être mis de l'avant. "La chambre de commerce de
Sept-îles croit que le respect des heures d'ouverture déjà
existantes serait la solution pour tous et pour toutes. Nous espérons,
M. le député, que vous nous appuierez dans nos démarches -
écoutez bien - et nous comptons sur vous afin de nous aider à
faire avorter ce projet de loi."
J'endosse entièrement les propos de cette chambre de commerce, M.
le Président. Pour une fois au cours des dernières années,
je suis d'accord avec cette chambre de commerce qui est de majorité
libérale. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Cannon): Merci, M. le
député de Duplessis. Je suis maintenant prêt à
reconnaître le prochain intervenant, M. le député de
Gouin.
NI. André Boisclair
M. Boisclair: Merci, M. le Président. Il est dommage que
l'article 32 de notre règlement ne s'applique pas pour les gens qui sont
à l'extérieur de cette Assemblée, puisqu'il y a bien des
gens qui font du bruit et le font sans doute avec raison.
M. le Président, vous me permettrez, d'abord et avant tout, de
revenir très rapidement, parce que je ne voudrais quand même pas
outrepasser les règles que se sont données les membres de cette
Assemblée, et vous dire que, lorsque j'ai écouté tout
à l'heure la députée de Vachon qui a cité une
partie d'un décret, elle a oublié de souligner qu'il s'agissait
bien là d'un délai de conformité que se donnait le
gouvernement. Et ça, il faut bien le comprendre. Nous avions tous admis
qu'il y avait des gens qui étaient dans l'illégalité;
cependant, nous leur avions permis un certain délai avant de se rendre
conformes à la réglementation.
Mais ce que la députée de Vachon a oublié, et pour
le bénéfice de cette Assemblée, M. le Président,
j'aimerais vous en parler... Elle dit: On avait des chouchous. Elle disait que
les gens du Parti québécois avaient des chouchous. Mais
permettez-moi, M. le Président, en vous parlant de ce projet de loi
là, de vous parler des chouchous du gouvernement actuel. Permettez-moi
de vous lire un extrait de la Gazette officielle du 25 janvier 1987:
"Règlement sur des exemptions d'application de la Loi sur les heures
d'affaires des établissements commerciaux." Là, on voit qui sont
les véritables chouchous, M. le Président. La loi sur les heures
d'affaires des établissements commerciaux ne s'applique pas. On donne
une exemption, mais ce n'est pas un délai de conformité. On donne
une exemption en 1987. "La Loi sur les heures d'affaires des
établissements commerciaux ne s'applique pas à un
établissement commercial dont l'activité exclusive est la vente
de fruits et légumes frais ou de fromages, de nourriture en contenants
scellés..." et ainsi on continue. Première exemption, M. le
Président.
Deuxième exemption: "La loi ne s'applique pas à des
établissements commerciaux dont l'activité exclusive est la vente
de menus articles de moins de 20 $ lorsque l'aire de vente est au plus de 20
mètres carrés dans un marché aux puces." Deuxième
exception, M. le Président. S'il y a des gens qui ont des chouchous,
pour reprendre les propos de la députée de Vachon, ce ne sont pas
les gens qui forment l'Opposition, c'est les gens qui sont en face, qui ont
perpétué le problème qu'ils dénoncent pourtant avec
autant de vigueur aujourd'hui. m. le président, j'ai
écouté avec beaucoup d'attention le ministre dans plusieurs de
ses interventions. j'aimerais lui dire, avec toute la simplicité qu'on
peut avoir, qu'à force de rationaliser, à force de vouloir
imposer une logique qui ne correspond pas à la réalité, on
oublie un élément fondamental du comportement humain: on ne peut
pas, m. le président, essayer d'expliquer le comportement humain en
prenant des chiffres, en prenant des règles mathématiques, en
prenant de grands principes. il y aura toujours des éléments qui
seront irrationnels dans le comportement humain. il y aura toujours des
éléments qui échapperont à notre
compréhension. si ce n'était pas le cas, m. le président,
les sciences économiques seraient des sciences exactes. et si,
justement, les sciences économiques ne sont pas des sciences exactes,
c'est qu'il y aura toujours des règles imprévisibles, qu'il y
aura toujours certaines exceptions, parce que le comportement humain, de par sa
nature même, m. le président, comportera toujours un
élément d'irrationalité. je peux comprendre le ministre
qui nous fait de beaux discours, qui nous parle d'équilibre, qui nous
pat\e d'équité, qui nous parle de logique, mais il oublie cet
élément fondamental, m. le président, il oublie cette
réalité qui compose notre tissu social et cette
réalité qui est forgée par nos valeurs, par notre
histoire, par notre vécu, par nos moeurs au québec. d'oublier
cette réalité-là et de vouloir tout normaliser en imposant
une logique peut-être implacable, à force de parler
d'équilibre, à force de parler de normes, on passe souvent, m. le
président, à côté de la réalité.
Bien sûr, M. le Président, on aura beau argumenter sur la
représentativité de chacune de nos positions que l'on
défend respectivement, de dire qu'on a, un groupe parlementaire ou
l'autre,
plus d'appui l'un que l'autre, mais une chose est sûre, M. le
Président, c'est qu'il n'y a personne - la députée de
Vachon avait raison là-dessus - dans les rues qui se bat pour demander
une extension des heures d'affaires. Il n'y a personne. Au contraire, les
représentations que nous avons reçues à nos bureaux... Je
peux vous parler des représentations que j'ai eues, des SIDAC; la SIDAC
de la rue Masson, M. le Président, dans le comté de Gouin, la
SIDAC de la rue Saint-Hubert, qui est en bonne partie aussi dans le
comté de Gouin, et en bonne partie aussi dans le comté de Dorion,
comté de la ministre responsable, déléguée à
la Famille. Les gens de la SIDAC Saint-Hubert, M. le Président, sont
venus me rencontrer à mon bureau et ils m'ont manifesté à
plusieurs reprises leur opposition à l'égard de ce projet de loi
là, parce qu'il faut bien comprendre une chose, M. le Président,
la réalité de ces commerces, de ces artères commerciales
là, quelle sera la situation lorsqu'on connaît, à l'heure
actuelle, le taux de disponibilité sur ces artères commerciales
là?
Quelle sera la situation, lorsqu'on se retrouvera avec des commerces qui
seront ouverts et d'autres qui ne le seront pas? Parce que la loi n'oblige pas
Couverture, elle la permet, mais ce qui est très clair, c'est
qu'à cause de situations financières difficiles pour certains
commerces ils n'auront pas les moyens d'ouvrir et de répondre à
la proposition du ministre. Plusieurs commerces n'auront pas la
possibilité et les disponibilités financières pour ouvrir
jusqu'à 19 heures les lundi et mardi, ne pourront pas ouvrir non plus le
mercredi jusqu'à 21 heures.
Et à cause de cette réalité-là on
créera, immédiatement, dès que cette loi sera en
application, un déséquilibre. On risque d'affaiblir un pôle
important du développement économique dans la région de
Montréal. Et, M. le Président, à Montréal, on ne
parle pas d'un nombre insignifiant de commerces. À Montréal, M.
le Président, il y a 10 000 commerces de rue qui emploient plus de 50
000 hommes et femmes de Montréal et la majorité de ces
commerces-là, M. le Président, sont des commerces de type
familial. Il est de notre devoir, M. le Président, de défendre
les intérêts de ces petites et moyennes entreprises qui sont
justifiées d'appréhender les conséquences d'une
libéralisation des heures d'affaires, M. le Président; surtout
dans un contexte où il n'y a aucune mesure de transition pour faciliter
cette concurrence accrue qu'aura à vivre l'ensemble des
commerçants.
M. le Président, il y a un principe fondamental. Lorsque
quelqu'un a 100 $ à dépenser pour acheter des biens de
consommation, pour acheter de la nourriture ou pour acheter des
vêtements, une chose est claire, M. le Président, ce n'est pas en
extensionnant les heures d'ouverture qu'on va augmenter les dépenses de
consommation. Au contraire, M. le Président, cette libéralisation
accrue des heures d'affaires n'augmentera en rien les revenus des commerces,
mais, ce qu'elle va faire, elle augmentera les dépenses de l'ensemble
des commerces, M. le Président.
M. le Président, les SIDAC ne pourront pas assumer une
règle qui sera variable d'un commerce à l'autre. La
fidélité de la clientèle, M. le Président, est
directement liée à la possibilité d'avoir accès
à l'ensemble des commerces à des heures qui seront les
mêmes pour l'ensemble des commerces. Ce projet de loi risquera, à
mon avis, d'affaiblir grandement un des pôles économiques, qui est
fondamental dans le comté de Gouin, que sont les deux artères
commerciales où les commerçants sont regroupés en SIDAC,
M. le Président. (17 h 30)
M. le Président, la question derrière tout le
débat, et je pense que les gens l'auront bien compris, l'ensemble des
parlementaires en cette Chambre l'aura compris, les gens qui nous
écoutent aussi l'auront compris: s'il y a autant de positions claires et
arrêtées à l'égard du projet de loi que nous
étudions aujourd'hui, c'est parce qu'il y a des enjeux financiers
importants. Les gens et les commerces se battent pour des parts de
marché et ça, ce sont des questions de piastres et de cents, ce
sont des questions de gros sous. Et ce débat, hélas, se fera sur
le dos des travailleuses, des travailleurs québécois, de
l'ensemble des petits commerçants, propriétaires de
dépanneurs. Le ministre, pourtant, le sait très bien et il n'en
parie pas souvent, c'est rare qu'on l'en a entendu parier.
En Ontario - on aime bien comparer avec ce qui se passe en Ontario -
tout le monde reconnaîtra qu'il y a une libéralisation beaucoup
plus grande qui existe, et de façon historique. Et par tradition, il y a
toujours eu, en Ontario, une libéralisation plus grande des heures
d'affaires. Cependant, ça ne nous empêchera pas de constater un
phénomène important de décroissance relative des grandes
surfaces dans l'alimentation. Cette décroissance-là,
malgré une libéralisation des heures d'affaires, continue de se
manifester. Alors, au lieu de répondre aux préoccupations qui
sont manifestées, véhiculées par la majorité des
Québécois et Québécoises... Qui a reçu, dans
cette Chambre, des représentations appuyant ce projet de loi là?
Quel éditorialiste est venu appuyer le ministre dans son projet de loi
et dans sa démarche? Personne, M. le Président. Les gestes que
l'Opposition a posés, en commission parlementaire et dans cette Chambre,
sont légitimes. Mais ce qu'on a fait, c'est qu'après environ
vingt heures de débat on est venu nous imposer le bâillon, on nous
a empêchés de parier.
Je conclurai, M. le Président, en vous disant que nous avons
raison de craindre les conséquences de ce projet de loi,
particulièrement à Montréal où on retrouve - dans
mon comté, M. le Président - un petit dépanneur par
coin de rue, par pâté de maisons. Que va-t-il arriver de
ces gens-là qui sont propriétaires de leur commerce, qui ont
trimé dur toute leur vie pour un jour arriver à devenir
propriétaire? On risque, en quelques minutes, sans même
prévoir de mesures de transition, sans doute de mettre fin à la
plupart de ces opérations commerciales là.
M. le Président, je suis un de ceux qui sont fiers de la position
qu'a prise l'Opposition officielle dans ce débat-là, fiers de la
position qu'a prise la porte-parole, la députée de Taillon, dans
ce dossier-là et fiers aussi de l'ensemble des gens, hommes et femmes
députés qui ont participé à la commission
parlementaire et qui ont tout fait pour faire entendre le point de vue
légitime de milliers de Québécois et de
Québécoises. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (m. bissonnet): merci, m. le
député. nous poursuivons la discussion de ce projet de loi et je
reconnais maintenant le député de dubuc. m. le
député.
M. Gérard R. Morin
M. Morin: Merci, M. le Président. Hier soir - enfin, je
devrais dire la nuit dernière - lors de mon intervention, j'ai
tenté d'attirer l'attention du ministre sur le manque de clarté
de son projet de loi et, aussi, j'ai attiré son attention sur les
difficultés qu'il pourrait y avoir dans l'application de cette loi de la
part des municipalités. Et c'est sur ces deux points que je voudrais
revenir, puisque le ministre a quand même eu une réaction,
prétendant que les amendements corrigeaient ce que... Et je vais revenir
à la charge pour démontrer au ministre que ce projet de loi n'est
pas clair, au moins quant aux articles que j'ai mentionnés. Et je
prierais le ministre de croire que je ne le fais pas par arrogance. Je
profiterai même de l'occasion pour lui rendre hommage pour avoir quand
même la patience d'être toujours présent en Chambre, ce que
ne font pas toujours les ministres. Et, normalement, malgré tout ce
qu'on peut avoir de critiques a apporter au sujet de son projet de loi, il faut
quand même reconnaître qu'il est là, au moins, pour les
écouter. Je pense que c'est une forme de respect, c'est une façon
de respecter le point de vue de l'Opposition.
Donc, je reviens à ces articles 2 et 3. L'article 2 se lit comme
suit, et je prends le titre amendé: "Sous réserve des articles
3.1 à 12, le public ne peut être admis dans un
établissement commercial qu'entre...", etc., 8 heures, 9 heures. Je
considérerais, puisque ce paragraphe fait référence
à des heures et à des journées d'ouverture... Pourquoi?
Parce que, autant la langue française peut nous permettre de faire
beaucoup de fantaisie, je pense qu'il n'est pas impossible d'écrire
simplement avec cette langue française. Et le titre devrait se lire
comme suit pour éviter la confusion... Hier, j'ai mentionné que
le problème de la loi actuelle entourait beaucoup son observance, le
respect de la loi; et cela était dû, pour une bonne partie,
à son manque de clarté. Pourquoi n'écririons-nous pas, M.
le Président - je m'adresse au ministre aussi - "Sous réserve des
articles 3.1 à 12, le public peut être admis dans un
établissement commercial", et faire l'énumération. Une
phrase tout simplement positive, sans plus.
Je reviens à l'article 3 qui, lui, évidemment, se
réfère aux fermetures. L'article 3 se lit comme suit: "Sous
réserve des articles 4 à 12, le public ne peut être
admis..." Donc une forme semi-négative. Pourquoi? Ne serait-il pas plus
simple d'écrire: "Sous réserve des articles 4 à 12, le
public ne peut pas être admis dans un établissement commercial"?
On dirait que la simplicité - je ne sais pas si ce sont des
spécialistes qui vous ont conseillé - on dirait qu'aujourd'hui,
écrire simplement, c'est défendu. Il faut s'assurer avant
d'adopter une loi, qu'elle puisse être contestée.
Le deuxième point que je voudrais signaler au ministre, c'est sa
grande naïveté par rapport au monde municipal. Là-dessus...
Encore, si je ris, ce n'est pas par ironie ou par arrogance, mais je ne peux
pas me retenir. Il pense que le monde municipal, après ce qu'on lui a
fait - et on sait ce qui s'en vient au niveau du transport en commun, etc. -
c'est un monde de bonne humeur qui va accueillir cette loi. Il va dire:
Fiez-vous sur nous autres. On va vous appliquer ça comme il faut. Les
amendes qu'on pouvait récolter, ça va consolider les fonds de la
municipalité. On va pouvoir mettre beaucoup de choses en branle. Je
pense honnêtement qu'il fait erreur. Il fait erreur au niveau du principe
et quant à l'application sur le plan technique...
Je lisais tout à l'heure l'article 4, celui qui est devenu 5,
suite à l'amendement, concernant le nombre de personnes. J'imagine
l'inspecteur ou la police, je l'imagine dans sa tournée le soir qui va
appeler: Chef, qu'est-ce que je fais? Combien sont-ils? C'est incroyable.
Toutefois, si rétablissement offre en vente, conformément au
deuxième alinéa, des denrées alimentaires, le public ne
peut y être y admis, conformément au premier alinéa, que si
au plus quatre personnes assurent, en dehors des heures prévues à
l'article 2, ainsi que le dimanche et les jours visés à l'article
3, le fonctionnement de l'établissement ou - ce n'est pas terminé
- de la partie distincte et cloisonnée. Non? Il faudra vérifier
ce que ça veut dire, une cloison. D'habitude ils ont un revolver, mais
il va falloir qu'ils aient un pied-de-roi de l'autre bord. En tout cas.
Écoutez, M. le Président, je blague un peu parce qu'il faut bien
le faire à travers les heures. Il y a un temps pour être
sérieux. Ça fait rire le ministre, ça ne peut pas faire de
tort. Pour autant qu'on ne reste pas comme ça, parce que c'est mauvais
pour les rides, mais pour un certain temps, c'est
bon.
Maintenant, je voudrais aborder l'aspect de la libéralisation des
commerces. Je me demande d'où vient cette soi-disant pression. Pression
que je qualifie de purement artificielle. Parce que les problèmes - ou
le peu de pressions, s'il y en a eu - sont davantage reliés à la
non-observance de la présente loi où, finalement, il y a eu de
l'exagération qui a permis à certains établissements de
dire: Voici, si la loi n'est pas respectée, aussi bien permettre
l'ouverture à tout le monde. C'est à ce niveau-là que
vient la pression.
Hier, je faisais lecture d'une partie du rapport ou du mémoire
qui avait été présenté par le Conseil de la famille
qui, lui, basait tout son mémoire sur la conciliation des
responsabilités familiales avec les responsabilités
professionnelles. Je rappellerais au ministre que j'adhère
entièrement à ce principe défendu par le Conseil de la
famille, sans toutefois y revenir.
Mais ce qu'on vient... Et on nous rebat les oreilles assez
fréquemment sur un élément, à savoir que les
habitudes du consommateur ont changé énormément. On se
croirait vraiment sur une autre planète. Bien sûr, on est
prêt à admettre que les habitudes ont changé, mais elles
n'ont pas changé dans le sens d'un besoin en termes de temps. Ce n'est
pas ça, le problème. Je vais en faire la démonstration,
d'autant plus que parmi les mémoires que j'ai lus il n'y en a pas
tellement qui se sont arrêtés à cet aspect. On s'est
arrêté beaucoup sur les heures de travail des employés de
ces commerces. Mais on a oublié de faire l'analyse des heures de travail
de l'ensemble des travailleurs et des travailleuses. (17 h 40)
On sait, et je le rappellerai, qu'au cours des 20 dernières
années, pour autant que les secteurs primaire et secondaire sont
concernés, les heures de travail sont passées de 48 à 40,
et ce, sans tenir compte des conditions de travail, des bénéfices
marginaux qui ont augmenté au niveau des vacances, des congés de
toutes sortes, donc qui permettent de se libérer à l'occasion. Le
secteur tertiaire, bien sûr, qui est en moyenne, au moment où on
se parle, de 36 heures... Et si on donnait quelques exemples... Je pense qu'il
ne devrait pas avoir de problèmes à faire ses emplettes.
Le monde de l'enseignement, ça ne devrait pas poser de
problème. Même en dehors de la période estivale, je pense
qu'il reste un petit peu de temps. Les fonctionnaires en général,
c'est quoi? 35 heures par semaine? Ce n'est pas trop dramatique. Les services
professionnels, ça va même jusqu'à 30 heures par semaine.
Et on soutient assez fréquemment que la moyenne d'âge... On est
dans une société vieillissante, donc, le pourcentage des
retraités sur l'ensemble des consommateurs commence à être
important. Je ne crois pas que ces gens-là, bien qu'on entende souvent
dire de la part des retraités:
Aïe, sais-tu que je me demande comment je faisais dans le temps que
je travaillais... On nous répète souvent ça: Ma
journée est bien pleine. Je ne réussis pas à faire tout ce
que je voudrais faire. C'est le langage des retraités d'aujourd'hui.
Bien, c'est peut-être parce qu'ils accordent beaucoup de temps aux
emplettes, aux commissions. Je ne crois pas que la demande de prolonger les
heures d'ouverture vienne de ces gens-là. Il y a une autre classe,
aussi, de la société, les sans-travail. On le déplore,
mais ils font partie de notre société, soit au niveau du
chômage ou de l'assistance sociale. Je ne crois pas que ces
gens-là manquent de temps. Et je ne dis pas ça par ironie. C'est
une réalité.
Donc, M. le Président, il est clair que... Seulement une minute.
Je vais en profiter pour faire une autre démonstration que c'est
purement une pression artificielle qu'on essaie de nous passer. Tout à
l'heure, tout juste avant d'intervenir, j'avais ma collègue qui
m'apportait le résultat d'un sondage de la chambre de commerce des
Moulins. C'est tellement objectif. Ce n'est pas dans mon comté. Je ne
peux même pas en tirer profit sur le plan électoral. Alors, le
ministre va sans doute lui accorder une grande attention. C'est le
résultat du sondage qui a eu lieu entre le 11 et le 18 juin. Comme il me
reste peu de temps, je vais tout simplement donner les résultats.
J'aurais aimé faire l'énumératioh de toutes les questions,
enfin, les préambules, etc. Quels sont les résultats? Etes-vous
favorable à l'ouverture le dimanche? Oui, 19,4 %; contre, 69 %; il y a
quelques indécis. On les comprend. La confusion de la loi... À un
moment donné, il y en a qui doivent essayer de la comprendre et ils ne
sont pas fixés encore. Concernant l'ouverture le soir sur semaine: 42,7
% se disent favorables, mais 46,5 % disent non. On leur demande:
Désirez-vous le statu quo? Ah! c'est curieux, hein! C'est là
qu'on cherche la fameuse pression; 77,5 % disent oui, aussi bien le statu quo.
C'est peut-être qu'ils ont commencé à lire le projet de loi
et qu'ils se sont découragés...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Morin: 11,7 % ont dit non. Et il y a encore des
indécis, probablement, qui ont continué à lire le projet
parce qu'ils sont plus perspicaces et qu'ils essaient de le comprendre. Et,
êtes-vous favorable à l'ouverture le soir et le dimanche? Un petit
20,2 %; non, 69 %.
Alors, mon temps est terminé. Je voulais quand même attirer
l'attention du ministre. Je ne sais pas si c'est encore possible qu'il apporte
des amendements, mais si je ne l'ai pas convaincu, c'est impossible. Bien, je
pense que mes collègues qui m'ont précédé ont
raison, on va se retrouver à l'automne avec des amendements parce que je
pense qu'il faut reconnaître qu'il y a déjà des
problèmes avant même que la loi soit adoptée.
Je vous remercie, M. le Président, de
m'avoir accordé tout ce temps, ainsi que le ministre de m'avoir
accordé son attention.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député. Je reconnais maintenant le prochain intervenant, M. le
député de Nicolet-Yamaska. M. le député de
Nicolet-Yamaska.
M. Maurice Richard
M. Richard: M. le Président, j'ai eu l'avantage, je pense,
de participer à toutes les étapes de ce fameux dossier des heures
d'affaires au Québec, depuis maintenant au-delà de trois ans, de
participer à l'évolution de ce dossier-là parce que,
effectivement, il a évolué.
Dans un premier temps, j'aimerais vous faire rapidement le portrait du
commerce au détail au Québec et, dans un deuxième temps,
le plus sérieusement possible, vous expliquer, en fait, d'une
façon vulgarisée, le projet de loi que nous avons devant
nous.
Au niveau du portrait du monde du commerce au détail, ça
totalise au-delà de 420 000 salariés; 78 300 sont des personnes
qui oeuvrent au niveau du monde alimentaire, dans l'alimentation. Le nombre de
commerces au détail au niveau des établissements, 67 000; en
alimentation particulièrement, 14 300. C'est donc dire que
l'alimentation, ça équivaut à un cinquième des
commerces au détail au Québec. En ce qui a trait à la
masse globale monétaire du monde du commerce au détail, c'est
au-delà de 40 000 000 000 $; en alimentation, l'équivalent de 11
000 000 000 $. Quelle que soit la variable que l'on puisse considérer au
niveau statistique, on retient donc que le secteur de l'alimentation est le
plus important secteur du commerce au détail au Québec.
M. le Président, au niveau des types d'entreprises, en fonction
de leur grosseur, où seulement les patrons travaillent en
copropriété, on retrouve 14,7 % des entreprises; de 1 à 9
employés, 62,3 % de nos entreprises au Québec; de 10 à 25
employés, 15,2 %; de 26 employés jusqu'à 49, 5,1 %.
Ça, globalement, c'est ce qu'on appelle la PME, la petite
entreprise.
Au niveau de la moyenne entreprise, donc entre 50 et 99 employés,
c'est seulement 2 % de nos entreprises au Québec; au niveau de la
très grande entreprise, ce n'est même pas 1 %, c'est 0,7 %.
Avant de vérifier, en fait, article par article, ce projet de loi
que nous avons devant nous, j'aimerais vous faire part que des marchés
publics au Québec, il y en a 300; au niveau des fruiteries, il y en a
une centaine; il y a 100 fruiteries au Québec; au niveau des pharmacies,
ce qu'on appelle des assez grandes pharmacies, c'est 400 unités; les
marchés aux puces, 45; là, on ne parle pas d'arrière-cour,
on ne parie pas de ce que l'on appelle des marchés aux puces très
locaux dans les hangars et derrière les maisons, on parie de
marchés aux puces structurés, dans d'anciens centres d'achats,
dans des entrepôts qui ont été loués, et il y en a
45 à travers le Québec.
Maintenant, M. le Président, chacun a sa méthode
d'intervenir, mais la problématique ou le dossier, c'est un projet de
loi que nous avons. Je me suis permis d'ajuster le projet de loi en y ajoutant
les amendements et je vais essayer de vous vulgariser ça de façon
que l'on sache exactement ce que nous avons dans ce projet de loi.
L'article 1, c'est très simple, ça dit tout simplement que
c'est un projet de loi qui va servir à réglementer les
établissements commerciaux de vente au détail au
Québec.
L'article 2, et là c'est un élément majeur du
projet de loi, c'est ce qu'on appelle la plage horaire, quelles heures vont
être permises pour l'ouverture. On nous dit: du lundi au mardi, de 8
heures le matin à 19 heures; les mercredi, jeudi et vendredi, de 8
heures le matin à 21 heures. Le samedi, nous conservons 8 heures le
matin à 17 heures. On ajoute aussi à l'article 2 la
période des fêtes, en fait, tout le mois de décembre
où l'ensemble des commerces au détail au Québec pourra
ouvrir durant la période de décembre, ce qui était
jusqu'à maintenant, dans ce qu'on appelle la loi 84, deux semaines
seulement.
L'article 3, c'est simple. L'article 3, c'est qu'on identifie, par
exemple: Le 1er janvier, est-ce que ça vous tenterait de ne rien faire?
Le 2... Et on parie du jour de Pâques, le lundi de Pâques, et on
identifie toute une série de ce qu'on appelle les jours
fériés au Québec.
L'article 4 - le coeur du projet de loi - identifie clairement que dans
le domaine de l'alimentation - tout ce qui se mange et tout ce qui se boit -
dans le domaine alimentaire au Québec, quelqu'un pourra ouvrir en dehors
des heures standard; quatre personnes, n'incluant pas le propriétaire ou
son mandataire.
Les articles 5, 6 et 7 - là je me permets surtout de ne pas vous
les lire parce que c'est très technique, et là je suis un peu
d'accord avec mes prédécesseurs qui ont pris la parole tout
à l'heure. C'est vrai que c'est technique un projet de loi, mais je
pense qu'on ne peut pas éviter ça. C'est d'abord légal, un
projet de loi, parce qu'il faut l'appliquer, la loi, et ce n'est pas une
histoire d'à peu près. Il faut absolument qu'il y ait des
précisions. Mais, à la lecture, ce n'est pas le genre de texte
qu'on lit avant de se coucher le soir, laissez-moi vous le dire, ou bien on
aurait tendance à dormir rapidement. Les articles 5, 6 et 7, ce sont les
exceptions, ce qu'on appelle les exemptions à la loi, qui sont les
suivantes: produits pharmaceutiques, hygiéniques et sanitaires - vous
avez compris que ça voulait dire pharmacies - les restaurants, tout ce
qui est essence, huile à moteur, huile à chauffage, les fleurs,
les produits d'horticulture, les
articles d'artisanat, les oeuvres d'art, les antiquités, les
marchandises usagées. (17 h 50)
Là, je m'arrête pour dire que ça, effectivement,
c'est ce qu'on appelle les marchés aux puces, entre autres. Les
marchés aux puces, c'est inscrit dans la loi, on leur permettra...
Contrairement à la loi de 1984 où on avait dit: "Vous avez le
droit de vendre du neuf, 20 $ et moins", on spécifie que ce sera
maintenant 50 $ et moins. Mais là où il y a une modification
majeure, c'est qu'on dit aussi que "les menus articles", pour ne pas porter
à interprétation au niveau légal, ce seront des articles,
de petits articles, mais de 50 $ et moins. On sait l'ambiguïté. Je
me rappelle bien, entre autres, une comparaison que Mme la
députée de Taillon faisait. On peut prendre une caméra
Pentax dans la main: menu article, mais au minimum 359 $. En partant de
là, à ce niveau-là dans le projet de loi, il y a une nette
amélioration, il y a une clarification où on doit
féliciter les légistes parce qu'ils ont dit: Là, ce ne
sera pas compliqué, c'est 50 $ et moins. Je n'ai aucun doute à
savoir si la Pentax en question va être étiquetée 50 $,
ça va sûrement être 359 $ de la même façon.
Dans les exemptions, on ajoute, entre autres, la vente d'automobiles,
d'embarcations et de machineries agricoles, fournitures scolaires, piscines, en
début de semaine les lundi et mardi, parce que ce sont des types
d'entreprises où la clientèle est en soirée sur semaine.
Mais on ne leur donne pas ce qu'ils avaient dans l'ancienne loi et ce qu'ils
ont eu jusqu'à maintenant, c'est-à-dire l'autorisation de faire
la vente, entre autres, de piscines le dimanche. Ce n'est pas le cas, sauf
qu'on régularise la possibilité pour ces entreprises-là de
vendre les soirs sur semaine jusqu'à 21 heures au maximum. Or, c'est
l'ensemble des exemptions dans le projet de loi qui sont identifiées
d'une façon très technique - et c'est savoureux à lire -
les articles 5,6 et 7.
Au niveau de l'article 8, ce qu'on inscrit dans l'article 8, c'est qu'on
dit, par exemple, que, dans un centre de ski, la boutique du centre de ski,
à l'interne, aura le droit de fonctionner en dehors des heures
d'affaires standard. Et c'est, je pense, facile à saisir comme
possibilité. Alors, ça fait partie de la réglementation,
à l'article 8.
Au niveau de l'article 9, c'est l'article le plus religieux du projet de
loi, celui qui dit que, si vous êtes parmi ceux et celles qui devez non
pas subir, mais qui devez pratiquer le sabbat à partir du vendredi soir
à minuit jusqu'au samedi soir, vous aurez la permission d'ouvrir votre
commerce le dimanche en respectant, par contre, la règle de quatre
employés excluant le patron.
L'article 10... Je sais, mesdames et messieurs, que c'est aride parce
qu'on y va vraiment sur la technique et je n'ai pas du tout l'intention de
faire le drôle dans ça; je veux vraiment vous exprimer ce que je
pense qui est dans le dossier en le vulgarisant le plus possible. À
l'article 10, ce sont les zones limitrophes et tout ce qu'on appelle aussi
zones touristiques. À l'article 5.3 du projet de loi de 1984, projet de
loi de M. Biron à l'époque, on donnait toute la latitude et
l'autorité absolue au ministre. Il n'y avait aucune balise, aucune
norme. C'était son autorité d'émettre la permission dans
une zone touristique, autant pour la grandeur de la zone que pour la
durée de ce permis. Ce que nous faisons dans les articles 10, 11 et 12,
c'est qu'on dit: II faudrait que le ministre de l'Industrie et du Commerce
regarde comme il faut, avec le ministre du Tourisme, ce qui doit être
fait, quelles sont les zones et qu'il consulte le milieu local et le milieu
régional avant d'émettre un permis de zone.
Par la suite, il y a d'autres articles, entre autres, les articles 16
à 23, tout ce que sont les pénalités. Et là, on y
va avec des dents. On dit, première offense, de 1500 $ à 3000 $
en donnant au juge la permission de regarder quels ont été les
revenus durant la journée. En fait, c'est ça, sensiblement, le
projet de loi que nous avons devant nous.
Je termine en vous disant que je suis très fier d'y avoir
participé. Ce n'est pas facile. C'est un projet de loi societal et c'est
impossible, dans ce dossier-là, d'avoir l'unanimité. Il faut donc
trancher. Je tiens à remercier sincèrement tous les membres de la
commission, incluant M. le ministre, d'avoir travaillé avec ardeur et
d'avoir écouté particulièrement les députés
- et je suis très au fait de ça - d'avoir écouté
les députés, non seulement les députés
ministériels, mais aussi les députés de l'Opposition pour
bâtir ce projet de loi. Et ce que j'espère, c'est qu'on l'applique
le plus rapidement possible et dans toute son intégralité.
Une voix: Bravo!
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député. M. le leader adjoint du gouvernement, en vertu de
l'article 213.
M. Lefebvre: Oui, M. le Président. En vertu de l'article
213, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le
député de Nicolet-Yamaska, est-ce que vous autorisez le
député de Frontenac à vous poser une question en vertu de
l'article 213?
M. Richard: Sûrement, avec plaisir.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, la question
devrait être brève, M. le député, et la
réponse également.
M. Lefebvre: M. le Président, certaines interventions et
certains discours des membres de l'Opposition laissent entendre qu'avec
l'adoption
de la loi 75 on pourrait vendre des chaussures, des meubles, des
vêtements le dimanche. J'aimerais que le député nous
éclaire sur ce point-là, M. le Président.
M. Jolivet: M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît,
M. le leader adjoint du gouvernement... M. le député de
Laviolette, je m'excuse.
M. Jolivet: M. le Président, vous savez qu'en vertu de
l'article 213 nous posons une question sur le discours qui vient d'être
prononcé et non pas sur des choses qu'on voudrait entendre, qui donne un
droit de parole additionnel au député de Nicolet-Yamaska.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît!
Question très brève, M. le député.
M. Lefebvre: M. le Président, j'aimerais que le
député de Nicolet-Yamaska réponde à la question
suivante: Est-ce que le dimanche on pourra, avec l'adoption du projet de loi
75, vendre des meubles, des chaussures, des vêtements? Le dimanche!
M. Jolivet: M. le Président, je m'excuse...
Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le
député de Laviolette. S'il vous plaît. M. le
député de Laviolette.
M. Jolivet: M. le Président, l'article 213, est-ce que
vous pourriez, simplement pour me l'indiquer, le lire, s'il vous plaît?
Il comprendra qu'il n'a pas raison de poser une question comme
celle-là.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, l'article 213:
'Tout député peut demander la permission de poser une question au
député qui vient de terminer une intervention. La question et la
réponse doivent être brèves." Alors, je permets la
question.
M. Richard: Très brève? Pas le droit.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci. Alors, compte
tenu de l'heure, je suspends les travaux jusqu'à 20 heures. Les travaux
de cette Assemblée sont suspendus jusqu'à 20 heures.
(Suspension de la séance à 17 h 57)
(Reprise à 20 h 6)
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
Veuillez prendre place, s'il vous plaît. Nous allons maintenant
poursuivre le débat sur la motion d'adoption du projet de loi 75, Loi
sur les heures et les jours d'admission dans les établissements
commerciaux. je suis prêt à reconnaître un intervenant. mme
la députée de verchères.
Mme Luce Dupuis
Mme Dupuis: Merci, M. le Président. Au début de son
discours, le ministre de l'Industrie, du Commerce et de la Technologie nous a
parle des conséquences de l'ancienne loi, comme il dit, avec ses
nombreuses exceptions - je ferai simplement souligner - qui avaient
été apportées par le Parti libéral. Il nous a
parlé des conséquences d'iniquité, de frustration chez les
travailleurs, d'injustice et d'incitation à enfreindre la loi. Tous des
éléments qu'il voulait corriger par une nouvelle loi dont les
principes, je pense, étaient des plus nobles et qui étaient:
équité dans les commerces, besoins réels des consommateurs
et qualité de vie des travailleurs et des travailleuses.
Le ministre nous a parlé de l'équilibre qu'il a
essayé de garder, de maintenir par son nouveau projet de loi. Mais
seulement s'est-il interrogé sur l'équilibre nécessaire
chez un être humain? Et c'est dans ce but d'équilibre, M. le
Président, que je me contenterai de vous lire un texte sublime des ACEF.
Il vous a déjà été lu, il vous a déjà
été relu. Mais puisqu'on vous ressert la même nourriture,
depuis pratiquement une journée ou deux, présentée d'une
façon différente, chacun avec sa personnalité, aussi bien
choisir de vous resservir la nourriture peut-être la plus comestible
qu'il nous a été possible d'entendre ces derniers jours, le texte
des ACEF.
Et je me permettrai, M. le Président, de vous dire l'effet qu'a
eu ce texte sur moi lorsque je l'ai découvert. J'étais en
commission, un peu fatiguée, même choquée du projet de loi
et, lorsque j'ai lu le texte, j'ai comme eu l'impression, une sensation de
bien-être qui a fait que je ne sentais plus ma fatigue. C'est dans cet
esprit, M. le ministre, que je vous le relis en espérant qu'il aura sur
vous les mêmes effets que sur moi. C'est titré - je prendrai le
paragraphe d - "Le consommateur-citoyen a besoin d'un minimum de
conformité sociale pour se maintenir en interrelation avec les autres".
Et ceux qui ne l'ont pas encore entendu, je pense qu'ils auraient
intérêt à l'écouter attentivement. C'est un texte
rafraîchissant. "Le consommateur, en dehors de son travail et de son
sommeil, est un être social dont les occasions d'entretenir des liens
avec les autres individus et avec la nature doivent être
préservées pour assurer son minimum vital d'où se
dégage le minimum social pour une vie harmonieuse en
société. Les liens familiaux, pris dans un sens large, se nouent
en fin de semaine et principalement le dimanche. Ils se manifestent par le
temps libre consacré aux enfants, par la visite des parents aux
grands-parents, par le
réconfort apporté aux personnes sur un lit d'hôpital
ou dans un centre d'accueil - et j'en passe. Quel est le moment
privilégié pour tisser des liens d'amitié autour d'une
partie de cartes, d'un pique-nique, de bonnes discussions - et le reste?
À quel moment s'exercent les activités de décompression
psychologique? Activités de plein air, assistance à des
spectacles ou expositions, activités culturelles, de loisir, suite
à une semaine de labeur qui se veut de plus en plus longue. Quand nous
arrêterons-nous surtout pour faire le plein de ressources spirituelles?
La réponse va de soi, c'est le dimanche que notre culture et notre
tradition ont choisi pour exercer ces activités. Le minimum de
conformité sociale pour une vie sociale équilibrée exige
le maintien d'une journée par semaine exempte d'activités de
travail et de commerce pour le plus grand nombre possible de
Québécois."
C'est certain que j'aurais pu faire un extrait, vous le dire dans mes
propres mots, mais, encore là, on va dire: C'est l'Opposition. Ce
texte-là n'est pas de l'Opposition. Il est, précisément,
d'un groupe associé aux consommateurs. Oui, il faut consommer. C'est
bien sûr qu'il faut consommer, mais pour des besoins normaux, des besoins
fondamentaux: se nourrir, se loger, s'habiller. Mais il y a aussi d'autres
besoins et je pense que, par le texte que l'ACEF nous fournit,
précisément, cette autre nourriture est tout aussi essentielle,
et seuls des moments de loisir peuvent nous l'accorder.
Un peu plus loin, il nous parle des conséquences a moyen et
à long terme sur les individus et la vie en société. Il y
a un prix à payer pour un choix de société, parce qu'on
peut bien parler des heures d'ouverture mais, selon moi, maintenant, au moment
où on en est rendus dans la discussion, ce n'est qu'un prétexte.
On voit très bien que ce sont deux manières, deux philosophies
qui s'affrontent, deux manières de voir la société, deux
manières de vouloir établir les règles d'une
société dans laquelle nous voulons vivre. Et je reviens au texte:
"La technique de marketing appelée "apprentissage passif est à la
base de l'amalgame magasinage, activités culturelles et de loisir.
Amener les gens à se divertir en magasinant est le gage du succès
de la vente le dimanche; les études américaines le prouvent. Son
application, par contre, entraînerait une plus grande commercialisation
de la vie et serait à l'opposé du développement d'une
consommation rationnelle et réfléchie de la part des
consommateurs. Elle viendrait saper une bonne partie du travail
d'éducation - consultations budgétaires, cours sur le budget,
prévention et le reste - des associations de consommateurs au
Québec."
Et on sait que, de plus en plus, les gens consomment des cours aussi,
veulent justement parfaire leur éducation, ce qu'on leur enlève
en allongeant les heures de travail et les heures de magasinage. Le magasinage
le dimanche avec son flot de publicité, de rabais et autres techniques
de marketing accentuerait le message incessant de notre société
de consommation que le bonheur vient de la consommation des objets. Sans
vouloir faire la morale à mes collègues d'en face, eh bien, je
pense justement que s'ils veulent faire une bonne réflexion, et
peut-être remettre en cause leur système de valeurs, ce serait
peut-être intéressant qu'ils écoutent. Il n'y aurait pas de
contrepartie pour nous rappeler que les personnes s'épanouissent
davantage dans leurs relations avec les autres, parents, enfants, amis, dans
leurs contacts avec la nature à travers des loisirs, des
activités culturelles. Le commerce dominical ferait compétition
aux visites dans les hôpitaux, dans les centres d'accueil, aggravant
ainsi l'isolement de ces personnes. Et, je pense que l'isolement n'est pas que
dans les centres d'accueil. Il faut voir, il faut subir, il faut constater le
dialogue de sourds qui s'est établi depuis quelques jours pour voir dans
quel isolement s'est enfermé le gouvernement. Il servirait aussi de
masque à une véritable politique du loisir et d'activités
culturelles enrichissantes, souhaitées par les citoyens.
C'est à quoi, M. le ministre, je vous amène à
réfléchir et j'utilise ma dernière minute pour vous
favoriser, par ce texte, une réflexion, mais une réflexion qui
porte sur des valeurs humaines et non sur des valeurs monétaires. Merci,
M. le Président.
Le Président: Je cède la parole à M. le
député de Lévis.
M. Jean Garon
M. Garon: M. le Président, plusieurs pensent que c'est
inutile de prendre la parole à ce moment-ci, que le gouvernement a fait
son lit et que le ministre est décidé d'une façon
irrémédiable, mais, comme j'ai pris pour devise, il y a plusieurs
années, que le possible est déjà fait, que l'impossible se
fera et que le succès est le fruit du dernier essai, je me dis que je
n'ai pas le droit de laisser passer une dernière tentative de le
convaincre.
Pourquoi? Parce que, vous savez, une Opposition officielle ne peut pas
faire une bataille sur un projet si elle sent qu'elle n'a pas l'appui de la
population. Parce qu'à ce moment-là les gens vont dire que
l'Opposition est déconnectée et va se faire ridiculiser. Mais, au
contraire, quand l'Opposition sent que, dans la population, une vaste
majorité des gens sont d'accord avec la position qu'elle tient, qui en
grande partie est issue de la population, c'est son devoir de faire son travail
d'Opposition et de s'opposer au projet de loi qui est
présenté.
D'ailleurs, M. le Président, le ministre lui-même n'est pas
entièrement sûr, puisque, sur 35 articles, s'il y a eu 25
amendements, c'est parce qu'il y a un certain nombre de choses qui
balancent. Il y a un certain nombre de choses dont on n'est pas certain,
puisqu'on sent qu'il faut faire des changements, et les changements
apportés ne sont pas bien meilleurs que les propositions
antérieures. C'est pourquoi, M. le Président, c'est le rôle
de l'Opposition de prendre tout le temps nécessaire pour faire valoir
les arguments contre un projet de loi. C'est son rôle, c'est ça,
le système démocratique. Je comprends qu'il y a des endroits
où il n'y en a pas d'Opposition, mais quand il n'y en a pas dans les
Parlements on voit qu'elle se manifeste dans les rues.
Regardons ce qui se passe en Europe de l'Est, il n'y a pas beaucoup de
Parlements en Europe de l'Est, il y a des partis uniques. On voit aux nouvelles
le soir à la télévision que des dizaines, des centaines de
milliers de personnes sont dans les rues pour manifester leur façon de
voir les choses. C'est ça qui se passe. Quand les camionneurs ne sont
plus entendus par les ministres, quand les ministres prennent des engagements,
pendant trois ans de temps, et qu'il ne se passe rien concrètement,
finalement, les camionneurs se retrouvent devant le Parlement parce qu'ils
veulent faire entendre leur voix. Ils veulent se faire écouter et ils
veulent aussi rappeler au gouvernement les engagements qu'il a pris et qu'il
n'a pas respectés.
Quand l'Opposition parle et quand elle exprime l'opinion populaire,
c'est aussi une façon de faire la démocratie. La
démocratie, ce n'est pas la démocratie de Mussolini qui fait
marcher les gens au pas. Ce n'est pas ça, la démocratie. Ce n'est
pas avoir tous le même pas dans l'armée, la démocratie. Ce
n'est pas ça, la démocratie. Au contraire, c'est l'ensemble des
voix d'une population qui s'exprime en vue d'un consensus. C'est un ensemble de
gens qui ne sont pas nécessairement unanimes. Quand le ministre dit:
"Vis-à-vis des heures d'affaires, il n'y a pas d'unanimité",
c'est ce qu'il a dit de plus vrai dans tous ses discours. C'est vrai qu'il n'y
a pas d'unanimité et je pense qu'il n'y en aura jamais
d'unanimité. Sauf qu'en démocratie, ce n'est pas
l'unanimité seulement qui prévaut, c'est ce qu'on appelle le
consensus. Le consensus... (20 h 20)
II y a un vaste consensus au Québec, pour que le dimanche soit
respecté, pas uniquement pour des fins religieuses, aussi pour des fins
religieuses, mais pour des fins de loisirs, pour des fins familiales.
Ça, je pense qu'il y a un vaste consensus. Moi, je pense, quand les gens
font des sondages, au lieu de demander à des gens: Êtes-vous pour
l'ouverture des magasins le dimanche? Des gens répondent, pensant que ce
sont les autres qui vont travailler et pas eux autres, le dimanche. Là,
n'importe qui peut dire oui. Si vous demandiez aux mêmes personnes:
Seriez-vous pour que le travail se fasse le dimanche, mais aussi dans votre
domaine? Là, on aurait plus l'heure juste. Je pense aux banquiers, par
exemple, qui ferment à 15 heures. Si on leur disait: Vous allez ouvrir
le samedi, vous allez ouvrir le dimanche, vous allez être ouverts le
soir, je vais vous dire qu'il y a bien des banquiers qui...
Une voix: ...fermeraient.
M. Garon: ...raisonneraient différemment. Il y a bien des
entreprises qui raisonneraient différemment parce que, essentiellement,
c'est une fonction, c'est une conception de la société. Quand on
dit qu'au Québec, par exemple, on a besoin d'une politique familiale,
moi, je me dis qu'une politique comme la loi qu'on a devant nous, c'est un clou
dans le cercueil de la politique familiale. Pourquoi? Parce qu'on va rendre la
tâche plus difficile aux conjoints. Ce n'était pas difficile
avant, lorsqu'il y en avait un des deux qui était à la maison et
un des deux qui était à l'extérieur du foyer. Mais
maintenant, parce que tout coûte plus cher, pour différentes
raisons également, d'autres raisons, que des gens, les deux conjoints de
plus en plus sont sur le marché du travail, je ne pense pas qu'on rende
service en faisant en sorte que les heures soient le moins ajustées
possible.
Dans les écoles, autrefois, c'était plus simple, pourtant.
Pourtant, on se rappelle, dans nos écoles autrefois, il y avait des
gardiens de salles pour garder les enfants après l'école pour
qu'ils puissent jouer, ou il y avait des gardiens d'études pour ceux qui
voulaient que leurs enfants étudient et ils arrivaient à la
maison à l'heure du souper. Aujourd'hui, depuis qu'on a des parents qui
travaillent, qui sont de plus en plus sur le marché du travail, on
dirait qu'on a oublié le bon sens qu'il y avait autrefois. Aujourd'hui,
dans les écoles, je vais vous dire que c'est fermé pas longtemps
après que la classe est finie. Il n'y a plus de gardien de salles, il
n'y a plus de gardien d'études, et il y a bien des enfants avec la
clé dans le cou qui s'en vont à la maison et qui attendent que
les parents arrivent.
J'ai reçu un téléphone il n'y a pas longtemps de
quelqu'un qui m'a laissé son numéro de téléphone.
J'ai essayé de le rejoindre, ça ne répondait pas. À
un moment donné, finalement, j'ai appelé à 15 h 30, et
c'est une jeune voix d'enfant qui m'a répondu. Je lui ai demandé:
Est-ce que je peux parler à Un tel? La petite fille m'a dit: Mon papa,
il n'est pas là; tu sais, mes parents sont séparés. Bon!
J'ai dit: Est-ce que ta maman est là? Elle a dit: Non, maman, elle
travaille. Elle va arriver vers 17 h 30. J'ai dit: Est-ce qu'il y a quelqu'un
d'autre à la maison? Elle a dit: Non, je suis toute seule. Elle a dit:
Tu sais, je suis assez grande. Elle m'a dit qu'elle avait autour de sept ans.
À 15 h 30, sa mère va arriver à 17 h 30. Son père
n'est pas là. Il vient faire un tour, j'imagine, de temps en temps. Mais
pourquoi faire en sorte qu'aujourd'hui on dise:
Bien maintenant, au lieu de travailler jusqu'à 17 heures, vous
allez travailler jusqu'à 19 heures? La vie familiale n'est pas
organisée. En Grèce, ce serait peut-être différent.
Ils ferment le midi, mais ils soupent à partir de 20 heures ou de 21
heures. Nous autres, on n'a pas les mêmes habitudes. Aujourd'hui,
organiser une vie familiale avec des heures d'affaires comme on veut mettre en
place, ça n'a pas de bon sens. Ce n'est pas ça, notre culture. On
ne peut pas copier les gens qui sont ailleurs. Mais quand on dit: Oui,
mais...
J'ai entendu la députée de Kamouraska-Témiscouata
l'autre jour. Je n'en suis pas revenu. Je me suis dit: II faut vraiment
être déconnectée pour tenir des propos comme ça.
Comme si c'était la foule en délire dans Kamouraska pour que les
magasins soient ouverts le dimanche et qu'on était rendu dans une
société pluraliste. Je dois vous dire que c'est pluraliste
à moitié, dans Kamouraska. Pourtant, je dois vous dire que je
connais ça pas mal. Les Garon viennent de là et il y en a encore
pas mal là. Quand Miner a écrit un livre de sociologie, Familles
typiques de Québécois, il a choisi le village de Saint-Denis qui
est composé à 50 % de Garon. Alors j'imagine que c'est un peu
représentatif. Je dois vous dire que je n'ai pas l'impression que c'est
la foule en délire sur le pluralisme dans Kamouraska. J'ai l'impression
que c'est encore pas mal un ensemble de valeurs culturelles, où les gens
se retrouvent facilement et où le consensus est facile à faire.
je suis persuadé qu'il n'y a pas de rage d'ouvrir jusqu'à 19
heures le lundi et le mardi, jusqu'à 21 heures le mercredi, le jeudi et
le vendredi, et d'élargir l'ouverture des magasins le dimanche. je suis
convaincu que, dans nicolet... je vois le député de nicolet qui
m'écoute. je ne le voyais pas comme le penseur, de rodin, mais bien
juste. il a le doigt sur l'oreille, le menton appuyé dans la main et il
a l'air de réfléchir à ce que je dis et il a l'air de
dire: ça a du bon sens parce que, dans nicolet, c'est comme dans
kamouraska. je suis persuadé que c'est la même chose dans nicolet.
c'est la même chose dans kamouraska que dans nicolet, et dans un grand
nombre de municipalités, et de petites municipalités. alors,
pourquoi changer des valeurs culturelles en faisant accroire aux gens que c'est
ça, le modernisme?
J'expliquais hier qu'en Europe, ça ferme le dimanche. Il y a des
places où c'est ouvert. Aux États-Unis, c'est plus ouvert. Est-ce
que notre société est basée uniquement sur le commerce?
Est-ce que la seule valeur qu'il faut valoriser, c'est le commerce? Est-ce
qu'en dehors du commerce il n'y a rien dans la vie? Ce n'est pas vrai. Il y a
autre chose. Et, essentiellement, c'est ça qu'on dit. Il y a d'autres
valeurs qu'il faut privilégier. Il y a d'autres valeurs dont il faut
tenir compte, tenir compte aussi de celle-là, mais faire en sorte que
les gens puissent vivre d'une façon normale, dans une
société normale, mais aussi dans une société qui
nous ressemble. Je vous remercie, M. le Président.
Le Président: Je vais maintenant reconnaître M. le
député d'Abitibi-Ouest et leader adjoint de l'Opposition.
M. François Gendron
M. Gendron: oui, m. le président, ce n'est pas facile de
revenir sur ce sujet contentieux, litigieux, mais, comme mon collègue
vient de le faire et comme beaucoup d'autres de mes collègues l'ont
fait, c'est obligatoire, en tout cas en ce qui me concerne. j'avais l'occasion
de le dire hier soir, assez tard. j'aime mieux le reprendre à une heure
un peu moins tardive. en ce qui me concerne, c'est fondamental. on peut bien
faire les discours qu'on voudra, mais le principe que je voudrais
développer dans les 10 minutes qui me sont allouées, c'est oui,
le sujet porte effectivement les parlementaires à
réfléchir sur le modèle de société qu'on
veut se donner. et, au-delà de quelque opinant ou opinante que ce soit,
moi, j'estime qu'on ne peut pas, d'un côté de la bouche,
véhiculer dans la société, depuis cinq ou six ans, la
nécessité de s'orienter davantage vers des demandes de
réduction de travail - c'est le cas pour la plupart des travailleurs que
je connais, syndiqués ou non syndiqués - et s'orienter vers une
société dite de loisirs. d'un côté, on voit que la
cellule familiale en prend pour son rhume depuis plusieurs années. on
voit également l'éclatement des familles, on voit les
hôpitaux bondés, on voit le phénomène de la drogue,
le rapport bertrand - l'ancien chef de cabinet du bureau du premier ministre -
qui indiquait combien ce serait moins coûteux de dépenser beaucoup
d'argent pour éviter qu'il y ait tant de gens qui se lancent dans toutes
sortes de faux-fuyants, d'artifices. moi, je vis dans une région qui,
pendant plusieurs années, malheureusement, a eu le plus haut taux de
suicide dans les régions du québec. c'est des raisons, en partie,
de disparité des petites communautés. c'est rendu que c'est
dû, à certains égards, à des politiques de
gouvernement et, en particulier, aux vôtres qui ont toujours la
même conséquence, d'affaiblir le plus possible les régions.
ça, qu'est-ce que vous voulez, c'est fatigant d'entendre ça, mais
c'est tellement une réalité observable, c'est tellement une
réalité qui a été décrite par tout autre
intervenant que nous. je répète, "deux québec dans un", ce
n'est pas françois gendron qui a écrit ça, ce n'est pas le
pq, ce n'est pas l'exécutif du parti québécois et ce n'est
pas le chef de l'opposition officielle. c'est un conseil plus objectif qui a
écrit ça et la réalité qui est là-dedans,
ça dit quoi? ça dit: ii faut repenser nos modèles de
développement. et là, on discute d'une loi sur les heures
d'af-
faires où, manifestement, la logique commanderait au moins de
laisser aux citoyens et aux citoyennes du Québec une journée de
tranquillité par semaine. La paix! Ils feront ce qu'ils voudront.
J'ai entendu des gens... Bon, bien sûr que ça peut
faciliter les relations familiales au sens très large du terme, et je
pourrais vous lire un commentaire d'un honorable juge qui disait combien
ça peut être bienfaisant pour un grand-père de pouvoir
visiter ses enfants et tout ça, mais je ne veux pas entrer dans ces
considérations-là que je trouve valables. Je veux tout simplement
dire que ce qui est le plus valable, c'est de laisser les gens tranquilles une
journée par semaine. Ça, ce n'est pas bien, bien dur à
comprendre et ce n'est pas compliqué.
Et, quand on est élu dans une région, parce que j'ai fait
des commentaires et, hier, le ministre de l'Industrie et du Commerce, qui a la
patience, comme certains l'ont signalé... Ça, moi aussi je trouve
ça correct de sa part, parce qu'il y en a plusieurs qui s'en foutent. Un
bâillon puis on ne les revoit même pas. Au moins, il a le
mérite de rester ici. Je suis loin d'être sûr que ça
va l'influencer, mais, au moins, il a le mérite d'être
présent, d'écouter et de faire voir que de temps en temps
ça le tiraille un peu. Alors, ça, ça mérite
d'être souligné. Moi, je tiens à le souligner.
Puis, ça en tiraillait d'autres aussi, de son côté,
parce que moi, j'aimerais ça que dans sa réplique, sous sa
responsabilité ministérielle, il invite... Ça se fait,
ça, comme ministre, il n'y a rien qui vous empêche de faire
ça, comme ministre, de faire un vote libre et de le dire ouvertement en
cette Chambre, que vos répondeurs automatiques ont tous la
liberté de voter comme ils l'entendent. Je ne sais pas si ça
donnerait, M. le Président... (20 h 30)
M. Lefebvre: Question de règlement, M. le
Président.
Le Président: Un instant. Sur une question de
règlement, M. le leader adjoint du gouvernement.
M. Lefebvre: Très rapidement, un répondeur
automatique, je considère que non seulement ce n'est pas parlementaire,
mais c'est blessant pour tous les députés de cette
Assemblée, que ce soient ceux qui siègent de ce
côté-ci ou ceux de l'autre côté, M. le
Président.
Le Président: Écoutez, vous pouvez
considérer que c'est blessant. Je pense que c'est des propos qui
appartiennent à chacun des parlementaires et ceux qui sont aptes
à en juger, ce sont nos auditeurs et, en bout de ligne, les
électeurs. Vous avez la parole, M. le leader adjoint de
l'Opposition.
M. Gendron: Oui, M. le Président, et très
sincèrement, j'ai l'impression que quand on se comporte comme on l'a vu,
et vous voyez la réaction, alors s'il y a des gens auxquels le chapeau
fait bien, c'est leur affaire. Ce n'est pas mon problème. Mais,
écoutez, quand je portais ces propos-là... J'en vois ici
même, dans cette salle, qui se faisaient un plaisir de signer des
pétitions contre l'ouverture le dimanche. Il y en a ici dans la salle,
présentement, des parlementaires, pas avant Jésus-Christ, parce
que les pétitions ne circulaient pas avant Jésus-Christ, elles
circulaient il y a quelques mois. Nommez-les? Oui, le député de -
je ne sais pas son comté parce qu'on ne l'a pas entendu...
Une voix: Prévost.
M. Gendron: ...souvent - Prévost. Le député
de Prévost a signé une pétition et correctement parce que
lui était contre ça, du moins quand il a signé la
pétition. Le député de Prévost, le
député de Labelle, la députée de Groulx, et je
pourrais continuer parce que la liste est longue. La liste est très
longue, mais je veux leur laisser leur liberté. Mais ça illustre
comment, M. le ministre, ce n'est pas exact que dans ce dossier-là vous
avez, je pense, un projet de loi qui nous permettrait de dire: Voilà
enfin la solution heureuse! Et, surtout, descendre la situation
antérieure alors que, pas plus tard que le 19 juin, Mme
Claire-Hélène Hovington, députée de Matane,
recevait un télégramme: Projet de loi 75, 90 % des
commerçants de Matane ont voté en défaveur, contre le
projet de loi 75. Considérant telle affaire. Considérant telle
affaire. Considérant telle affaire.
Moi, je pense que dans la réalité du Québec de
base, dans la réalité de ce que nous sommes comme
société québécoise, c'est non au dimanche et
laissons les gens faire le choix d'une journée par semaine, comme ils
l'entendent. Une journée par semaine où ils auront l'alternative
de faire les choix qu'ils désirent. Et j'avais l'occasion de vous le
dire, vous disiez dans votre réplique: Oui, j'ai visité l'Abitibi
et tout ça, et ils ont compris ça. Ils ont peut-être
écouté ce que vous avez dit, mais ils n'ont sûrement pas
compris l'équilibre que vous souhaitez parce que ce serait votre
argument puisque, comme mon collègue de
Rouyn-Noranda-Témiscamingue le signalait... Juste aujourd'hui,
là, j'ai reçu des dizaines de téléphones, des gens
de l'Abitibi-Témiscamingue, en disant: Tu le sais que ça n'a pas
de bon sens. À 8 heures le matin, ce n'est pas le modèle de chez
nous, commencer à ouvrir les commerces à 8 heures le matin, et
surtout le lundi jusqu'à 19 heures.
Juste à y penser, je n'en reviens pas. Qui peut penser qu'il y a
une logique d'ouvrir les commerces un lundi soir jusqu'à 19 heures. Je
ne suis pas capable. Je ne suis pas capable. Et je ne serai pas plus capable,
même si le ministre nous dit: Écoutez, on est dans un contexte de
libéra-
lisation. il a reçu un mémoire, je lisais ça.
j'aurais pu le prendre ligne par ligne et défaire ça. le
mémoire de la défense des commerçants artisans du
québec, yvon garceau, président. allocution de m. yvan
bussières, premier vice-président exécutif et chef des
opérations, provigo inc., et porte-parole du mouvement. il a droit
à son opinion, mais quand il dit ceci... ce seront probablement mes
dernières phrases, puisqu'en 10 minutes on ne peut pas tout dire.
regardez comme c'est beau: au commerçant qui veut servir son client le
dimanche, nous disons: faites-le, vous en avez la liberté. au
commerçant qui ne veut pas ouvrir le dimanche, nous disons: ne le faites
pas, vous en avez la liberté. nous respecterons votre choix.
C'est des phrases, mais quand on est dans le commerce, M. le ministre,
et vous devez au moins savoir ça, dans un petit village, dans une petite
communauté... Et des petites communautés, il y en a beaucoup
plus, dans le Québec, que des grands centres. Ce n'est pas vrai que des
deux ferronneries, à La Sarre, s'il y en a une qui ouvre, l'autre va
pouvoir rester fermer; ce n'est pas vrai, ça ne marche pas de
même. Et ce n'est pas vrai que, s'il y a trois types de commerces de
même nature dans une ville de 10 000 habitants, il y en a deux qui vont
ouvrir et l'autre va pouvoir rester fermé parce que vous lui en laissez
la liberté; ça ne marche pas de même avec la concurrence,
surtout pas dans un petit milieu. Et c'est normal parce que ça s'est
toujours fait comme ça. La concurrence normale, c'est avec les
intervenants dans le même domaine, dans le même secteur.
Dans ce sens-là, M. le Président, puisque vous m'indiquez
que mon temps est terminé, il est évident qu'on ne peut souscrire
à ça parce que, objectivement, nous croyons qu'entre votre
produit final et les correctifs à être apportés à ce
qui existait il vaudrait mieux apporter des correctifs à ce qui existait
que d'arriver avec une espèce de "blender" dans lequel il y a de tout,
dont personne ne sera satisfait et qui va créer une confusion, des
problèmes à n'en plus finir.
Le Président: Alors, je cède la parole à M.
le député dïberville.
M. Yvon Lafrance
M. Lafrance: Merci, M. le Président. J'ai
décidé d'intervenir sur ce projet de loi qu'on débat
déjà depuis de nombreuses heures, comme on le sait, non pas par
plaisir, mais par souci d'équité. Je suis en effet surpris et
même outré d'entendre tout ce que j'ai entendu à date. En
fait, depuis plusieurs jours, on a l'impression d'entendre un tourne-disque ou
une cassette. Et j'aimerais peut-être suggérer à
l'Opposition d'intituler cette cassette 3-20, parce qu'on entend
continuellement: 'Trois bâillons en cinq jours, ça ne s'est jamais
vu" ou "20 heures en commission parlementaire, ça ne s'est jamais vu".
En fait, Mme la députée de Chicoutimi l'a mentionné cette
nuit, je pense, à 3 heures ce matin. Mme la députée de
Taillon l'a mentionné ce matin, tout de suite après la reprise
des travaux parlementaires. Même Mme la députée de
Verchères a avoué, tout à l'heure, qu'elle était un
peu gênée de se répéter un peu parce que ce
même texte revenait encore. Alors, j'aimerais peut-être
suggérer à l'Opposition d'intituler sa cassette, pour cette
session, 3-20 et peut-être de la déposer à la
bibliothèque comme souvenir.
M. le Président, je suis surpris et même un peu
estomaqué de voir l'Opposition s'offusquer par ce qu'ils appellent trois
bâillons et du jamais vu, parce que trois bâillons, selon nous,
c'est un peu provoqué par eux. Je dis ça peut-être pour le
bénéfice de nos téléspectateurs, contrairement
à ce qu'on a peut-être pu insinuer, un bâillon, ce n'est pas
faire fi de la majorité, ce n'est pas faire fi de la population. Un
bâillon, ce n'est qu'une mesure administrative qui est très
malheureuse et qui est faite pour passer outre les barrages ou les blocages de
procédure parlementaire, lesquels évidemment sont initiés
par l'Opposition. C'est un peu, si vous voulez, un cercle vicieux. Si on
était pour faire une analogie, dans une petite communauté, un
petit village de 125 résidants, si, par coalition, quelques-uns de ces
citoyens-là décidaient de retarder toutes les procédures
municipales, il va de soi qu'inévitablement le conseil municipal devrait
se réunir et dire: Écoutez, nous devons continuer à
travailler, nous devons continuer à aller de l'avant. Alors, c'est
précisément ce qui se passe, malheureusement.
J'écoutais M. le chef de l'Opposition un peu plus tôt. Je
ne pense pas que ce soit aujourd'hui, j'ai un peu perdu la trace des heures et
des jours, même. Mais M. le chef de l'Opposition nous accusait, nous, les
députés ministériels, de ne pas connaître le
rôle de l'Opposition. En fait, moi qui suis un nouveau parlementaire,
puisque j'ai été élu depuis neuf mois seulement, j'ai
très vite appris évidemment, que, le rôle de l'Opposition,
c'est de s'opposer. Et je suis quand même surpris de voir que, souvent,
ça va en deçà de toute logique, selon moi. En fait, on
réalise qu'il s'agit d'une statégie, une stratégie
parlementaire. En fait, stratégie, c'est peut-être un grand mot,
parce que c'est subtil un peu, de la stratégie. C'est plutôt de la
tactique, de la tactique parlementaire. (20 h 40)
Alors, cette session-ci, elle a été identifiée
comme la session où trois lois, évidemment, seraient
retardées; la loi 50, dont la population a besoin à cause de
l'argent que nous devons percevoir à même la Régie de
l'assurance automobile du Québec, la loi 69 qui touche la
fiscalité municipale et scolaire, qui fut retardée grandement et,
finalement, la loi 75 que nous
débattons, comme je l'ai dit, depuis de nombreuses et nombreuses
heures. En fait, tous les arguments, toutes les procédures sont
valables. C'est pourquoi on a entendu le député d'Ungava, l'autre
soir, en commission parlementaire, nous parler de brochets, puis de truites.
Puis, ce matin, le député de Pointe-aux-Trembles, aux petites
heures du matin, nous parlait de barracudas, puis de poissons rouges. En fait,
c'est pour ça, M. le Président, que vingt heures à
entendre de tels propos, c'est très long. Mme la députée
de Taillon, aussi, nous a dit qu'elle devait légiférer la nuit.
Alors, nous nous retrouvons, évidemment, très malheureux
d'être obligés de faire ça. Mais, c'est à cause de
ces procédures-là que nous devons le faire. Nous devons, en fait,
continuer à passer nos lois en toute intégrité et en toute
légitimité. Et pour rassurer M. le député
d'Abitibi-Ouest, je n'ai pas du tout l'impression d'être un
répondeur automatique. Je peux, M. le Président, me
référer au député de Lévis qui est toujours
très coloré dans ses propos... Je disais donc qu'il est toujours
très coloré dans ses propos, peut-être à cause de la
faiblesse de ses arguments, et qui aurait réussi à comparer le
projet de loi à un chameau, hier soir, en pleine nuit.
M. le Président, il est vrai que nous n'avons pas connu de
"démonstration" pour faire changer ce projet de loi. En fait, dans le
beau comté d'Iberville que je représente, je n'ai jamais vu de
"démonstration" devant la porte de mon bureau pour faire changer cette
loi. Et ça n'a jamais été l'objectif, d'ailleurs, de ce
gouvernement, d'attendre de telles "démonstrations". Nous avons
décidé d'agir, comme l'a dit M. le ministre, par souci d'une
meilleure équité, par souci de justice dans l'évolution de
notre société, dans l'évolution de notre
communauté. En fait, c'est dû aux transformations du commerce de
détail, comme on l'a dit à plusieurs reprises, surtout dans le
domaine alimentaire.
Alors, il y a trois raisons principales. Tout d'abord, la question de
spécialisation et de raffinement dans les commerces;
deuxièmement, le décloisonnement des activités
commerciales. Alors qu'autrefois on allait dans les quincailleries pour
acheter, évidemment, de la quincaillerie, dans les pharmacies pour
acheter des médicaments, nous retrouvons, aujourd'hui, sous un
même toit, tous ces articles. Et, finalement, c'est par besoin des
consommateurs que nous avons décidé - voilà plusieurs
mois, plusieurs années, en fait, que ce projet de loi est en discussion
- d'agir. Alors, si M. le député de Lévis dit qu'il n'a
pas senti de pressions dans son comté pour changer cette loi, je peux
vous dire très honnêtement, M. le Président, que je n'ai
senti, dans le comté d'Iberville, aucune pression contre le projet de
loi. Et je dis ça très honnêtement J'ai reçu... Je
vais à des dizaines d'activités par semaine lorsque je suis dans
mon comté, et à cinq ou six durant les fins de semaine lorsque
nous sommes en session et je n'ai jamais, jamais été
abordé sur le sujet. En fait, voilà peut-être deux mois,
j'ai eu trois appels téléphoniques et c'était du
comté voisin, Saint-Jean, et les trois personnes qui m'ont appelé
déploraient la possibilité d'ouverture le dimanche, ce que nous
n'avons pas fait. Cette semaine, j'ai reçu 41 messages, M. le
Président, 41 messages venant du comté de Saint-Jean, des
messages que j'aurais aimé retracer, mais malheureusement les
"origina-teurs"... On ne peut pas savoir exactement leur adresse. Ce sont tous
des messages identiques faits à la mitraillette. Ça dit: Nous
sommes contre les heures d'ouverture pour les magasins, c'est non acceptable,
avec un nom. J'aurais aimé accuser réception, mais faute
d'information, je n'ai pas pu le faire.
Alors vous me dites, M. le Président, qu'il me reste quelques
secondes seulement. J'aimerais conclure. J'aimerais conclure en
félicitant tout d'abord M. le ministre pour la façon dont il a
travaillé. Il a passé, il nous le confirmait hier, plus de 160
heures de son temps sur ce projet de loi et il a écouté 84
groupes qui sont venus se faire entendre. J'aimerais le féliciter, donc,
pour la souplesse d'esprit dont il a fait preuve durant tout le processus de
cette loi. C'est une loi, M. le Président, qui se devait d'être
révisée. C'est une loi qui s'ajuste aux années
quatre-vingt-dix et c'est une loi qui est dans l'optique libérale de
libéraliser les commerces. Je vous remercie, M. le Président.
Des voix: Ah!
Le Président: Est-ce qu'il y a d'autres interventions? Mme
la députée de Hochelaga-Maisonneuve. Oui?
Mme Dupuis: J'invoque l'article 212, M. le Président.
Le Président: Mme la députée de
Verchères.
Mme Dupuis: le député d'iberville m'a fait dire des
choses qui ne respectaient ni mes paroles ni l'esprit. alors, je lui
demanderais de bien vouloir les retirer.
Le Président: Écoutez, madame, l'article 212... Un
instant, à l'article 212 on dit: Tout député estimant que
ses propos ont été mal compris ou déformés peut
donner de très brèves explications sur le discours qu'il a
prononcé." Ça fait que si vous estimez que vos propos ont
été déformés ou ont été mal compris,
loisible à vous d'invoquer 212, mais donnez de brèves
explications sur les propos que vous estimez avoir été
déformés, très brièvement, en quelques
secondes.
Mme Dupuis: Le député d'Iberville dit que
j'étais gênée. Mais pas du tout J'ai dit simplement qu'on a
eu à servir la même nourriture au
ministre dans l'esprit qu'on est obligés de la lui servir souvent
parce qu'il ne comprend pas. Alors c'était dans...
Le Président: D'accord. Mme Dupuis: ...mais
non...
Le Président: Je suis maintenant prêt à
reconnaître la prochaine intervenante, Mme la députée de
Hochelaga-Maisonneuve.
Mme Louise Harel
Mme Harel: Merci, M. le Président. Plutôt qu'une loi
synthèse comme le prétend le député d'Outremont et
ministre de l'Industrie et du Commerce, c'est une loi Ponce Pilate, M. le
Président, qui est devant nous, parce que, essentiellement, ce que le
ministre feint d'ignorer, c'est ce vieil adage que tout juriste connaît
et apprend dès les premières études de droit, qu'entre le
fort et le faible c'est la liberté qui opprime et le droit qui
affranchit. Sous prétexte de l'oublier et d'introduire plus de
liberté, ce que le ministre fait, M. le Président, c'est qu'il
aggrave le déséquilibre entre les forts et les faibles en
feignant d'ignorer que c'est la loi seule qui peut affranchir ceux qui n'ont
pas les moyens de parler aussi fort que d'autres, M. le Président.
Je me demande toujours comment il se fait que, dans un deuxième
mandat, un gouvernement puisse devenir aussi arrogant. Ce n'est pas les
individus un par un, évidemment, mais comment se fait-il que dans ce
deuxième mandat... Ça ne fait pas un an, maintenant, on n'en est
même pas à un an, et le gouvernement a réussi à se
mettre à dos, mais là, avec une vitesse assez exceptionnelle, des
groupes dans notre société aussi différents que les
municipalités. Il faut bien comprendre que les édiles municipaux
n'étaient pas nécessairement tous favorables aux gens de ce
côté-ci de l'Assemblée, M. le Président. Pourtant,
maintenant, il y a, on peut dire, une sorte d'unanimité contre les
gestes posés par le gouvernement.
Les municipalités, les commissions scolaires, malgré tout,
ne sont pas satisfaites, mais pas du tout, du camouflage qui a servi au
gouvernement pour essuyer son déficit en faisant semblant de leur en
donner un peu plus. Les camionneurs, évidemment la réalité
que l'on vit à Québec nous le prouve maintenant... Il faudrait
ajouter les étudiants, Hydro-Québec. Il faudrait encore ajouter
la construction. Et, évidemment, je ne parle pas du dossier que je
continue à étudier en commission parlementaire, ce soir
même, qui est celui des personnes démunies dans notre
société, sans emploi, et qui requièrent l'aide sociale.
(20 h 50)
D'où vient ce syndrome du deuxième mandat? Je n'arrive pas
à ne pas me poser la question à savoir comment il se fait qu'un
gouvernement, dans un deuxième mandat, a la tentation d'additionner les
mauvais coups et de chercher du trouble parce que, essentiellement, c'est de
trouble dont il s'agit maintenant. Quand le ministre prétend que sa loi
est une loi synthèse, c'est une loi fourre-tout finalement, c'est une
loi où il se lave les mains des résultats, parce qu'il sait ou,
s'il ne le sait pas, il devrait savoir que les résultats au bout de la
ligne, c'est évidemment du trouble. Pense-t-il sincèrement que
les travailleurs organisés en syndicat vont facilement accepter de
rouvrir leur convention et d'aménager leur vie en fonction des
directives, des décisions que le Parlement aura prises.
M. le Président, il est de commune renommée qu'on doit
tenter le plus possible de ne pas ajouter à des conflits de travail dans
notre société par des interventions législatives
inconsidérées et intempestives. Et on a appris, au fil des
décennies, a régler ici, par législation, la question du
congé de maternité, la question de la sécurité et
de la santé au travail, la question des régimes de retraite, des
fonds de pension pour que ça ne soit plus des sujets controversés
qui donnent lieu à des conflits de travail et que ce soit des avantages
acquis dans la société qui ne nécessitent plus des
rapports de force constants. Et là, c'est exactement l'inverse. Le
ministre renvoie sur-le-champ dans le terrain, il va renvoyer une accentuation
des conflits de travail, des rapports de force, par une loi qui
déséquilibre ce qui était fragile, mais ce qui avait
été acquis et considéré comme acquis depuis
quelques décennies.
M. le Président, je veux immédiatement, avant que vous me
disiez que mon temps est écoulé, rendre hommage, par cette
intervention, à ma collègue de Taillon et à mes
collègues qui ont, avec elle, très sérieusement d'abord
étudié toutes les hypothèses. Je sais avec quelle
sincérité ma collègue de Taillon s'est posé,
dès qu'elle a eu la responsabilité du dossier, la question de la
voie à suivre, de la vision qu'elle devait avoir dans ce dossier et je
sais de source sûre, avec certitude, M. le Président, qu'elle
avait mis sur la table toutes les hypothèses en disant que
l'idéal était de partir sans préjugé pour choisir
la meilleure. Et l'approche qu'elle a eue, M. le Président, c'est
finalement celle de choisir le droit qui affranchit les gens qui ont plus de
problèmes dans notre société plutôt que de choisir
la liberté qui sert à ceux qui, de toute façon, ont les
moyens de décider pour eux et pour les autres.
Je veux rendre hommage aussi, parce que c'est exceptionnel - ça
fait neuf ans que je siège dans ce Parlement et je ne pense pas me
rappeler avoir vu une opposition non parlementaire aussi assidue, aussi
présente en commission comme en Assemblée - c'est absolument
exceptionnel et je sais qu'ils sont là-haut, qu'ils sont attentifs,
qu'ils le font d'une certaine façon en
se préparant, une fois le combat livré ici, à le
livrer sur le terrain, parce qu'il y a une chose que les
députés... Et j'entendais le député d'Iberville se
plaindre d'un débat de vingt heures en commission. Il y a une chose
qu'on sait quand on vient siéger au Parlement, M. le Président,
c'est qu'on ne se convaincra pas d'un côté et de l'autre de la
Chambre. Moi, quand je descends du deuxième au salon bleu, je sais
très bien que je ne vais convaincre aucun député de
l'autre côté du bien-fondé de mes arguments. Ils sont
élus exactement pour résister. Et même si je les
convainquais, la seule façon pour eux d'y donner suite, c'est de sortir,
plutôt que de voter de mon côté, parce que c'est ça
aussi qui est arrivé au moment du vote sur la prise en
considération du rapport. Il faut bien dire qu'il y a des
députés gouvernementaux ministériels qui sont sortis,
c'est leur façon de dire qu'ils sont du même bord, mais qu'ils ne
peuvent pas changer de côté. Mais on sait très bien qu'en
descendant ici, ce n'est pas qu'on va convaincre. Et ce n'est pas en
prétendant qu'on n'est pas du même avis qu'on peut
bâillonner l'Opposition parce que, voyez-vous, M. le Président,
c'est évident - je le répète comme bien d'autres de mes
collègues l'ont répété - que ce processus... Je
pense au projet de loi 42 sur la santé et la sécurité au
travail; huit semaines de commission parlementaire. C'était le ministre
Frechette qui était responsable du dossier parce que, malgré
tout, dans ce processus, on y est toujours gagnant et la démocratie y
est gagnante.
M. le Président, je veux simplement souligner que trois
bâillons, ça n'a pas de bon sens, c'est bien évident, comme
ça n'a pas de bon sens également, les amendements introduits au
moment de la prise en considération. Vous vous rendez compte, c'est un
nouveau projet de loi. Un nouveau projet de loi que le ministre a sorti de sa
boite à surprise, mais une boîte à surprise où il
continue à se laver les mains comme Ponce Pilate le faisait. Je rappelle
la seule solution, la solution, qui, selon nous... Oui, ce n'est pas simple,
choisir; c'est aussi délaisser, laisser de côté, mais
choisir une sorte de société dans laquelle on pense qu'il y a des
façons plus adéquates de vivre prioritairement pour les humains,
pour les personnes, et dans cette société - on n'est pas aux
États-Unis et on n'est pas non plus au Canada - de notre
côté, on privilégie les commerces qui sont
propriétés individuelles et personnelles, les commerces de
détail. C'est évident que de notre côté,
après avoir mûrement réfléchi, on a
décidé d'appuyer les commerces de dépannage alimentaire et
pharmaceutique qui fonctionnent avec au plus quatre personnes parce qu'il
s'agit, finalement, de ces commerces qui sont gérés par une
famille, soit par le couple ou avec l'appui des enfants ou d'une belle-soeur ou
d'un cousin. C'est ce commerce familial qu'on a décidé d'appuyer,
M. le Président. Oui, et on en est fiers, de ce côté de
l'Assemblée. Merci.
Le Président: Je cède maintenant la parole à
M. le député d'Arthabaska.
M. Jacques Baril
M. Baril: Oui, M. le Président, c'est la troisième
fois que je parle sur ce projet de loi. Et on se fait reprocher, on se fait
même accuser de prendre le temps de cette Chambre, de retarder l'adoption
de ce projet de loi complètement inutilement. Pourtant, dans notre
système parlementaire, c'est un moyen que l'Opposition a pour essayer de
faire comprendre au gouvernement que le canal qu'il utilise pour arriver ses
fins, ce n'est pas le bon.
Je suis certain que plusieurs de mes collègues ont fait
l'historique de ce projet de loi. Ça fera cinq ans bientôt que ce
gouvernement est là. Il y a eu un comité formé du
député de Nicolet, entre autres, qui a fait une tournée du
Québec pour connaître l'opinion des gens, le désir des
gens, à savoir: Qu'est-ce qu'ils veulent? Quels seraient leurs besoins
en frais d'ouverture de leur commerce? Ce comité a fait un rapport.
Après ça, il y a eu la commission parlementaire, ici, à
l'Assemblée nationale qui a entendu une multitude d'organismes qui sont
venus faire part de leur intention, de leur opinion face aux heures
d'ouverture. Le gouvernement a décidé autrement, de ne pas tenir
compte des demandes de ces personnes-là ou de la grande majorité
de ces personnes-là, et dépose un projet de loi.
En commission parlementaire, l'Opposition officielle a essayé par
toutes sortes de moyens, encore une fois, de faire entendre raison au
gouvernement, a même déposé une motion à l'effet
qu'au lieu de commencer, comme tous les projets de loi, à étudier
d'abord le titre de la loi, de commencer à l'étudier, d'aller au
coeur du problème, soit de passer par l'article 4. Comme d'habitude, le
gouvernement a fait le sourd, n'a tenu compte d'aucune demande de l'Opposition,
d'aucune demande des concitoyens et des concitoyennes et a déposé
son propre projet de loi. (21 heures)
On se retrouve ici maintenant, en troisième lecture, et on nous
accuse encore de retarder l'adoption de ce projet de loi.
Pourtant, M. le Président, c'aurait été facile pour
ce gouvernement, d'abord, d'entendre et d'écouter la population. Et si,
aujourd'hui, il tient à tout prix à faire voter cette loi pour le
23 juin, il aurait eu un choix au moins à faire, soit de convoquer la
Chambre beaucoup plus tôt, avant le 13 mars comme il l'a fait... On
aurait été prêts avant à venir ici, en Chambre,
siéger puisqu'on dit que le gouvernement veut absolument... On me fait
signe que le règlement... Ça se peut que le règlement
exige que ça commence seulement le 13 mars. Bon. C'est possible. Mais,
quand même, le gouvernement aurait sans doute
pu trouver d'autres moyens pour amener ce projet de loi en commission
parlementaire, en déposant son budget plus tôt. Parce qu'on sait
que le dépôt du budget avec l'étude des crédits,
ça retarde la législation. On aurait pu faire ça plus
tôt. On n'aurait pas eu besoin d'attendre, de retarder tout ça. On
aurait pu en discuter franchement.
Au lieu de nous imposer le bâillon sur trois projets de loi, on
aurait pu, entre autres, au niveau de la loi 50, sur le régime
d'assurance automobile dans lequel le gouvernement s'autorise à piger
des fonds pour construire des routes... Le gouvernement aurait très bien
pu retarder ça à l'automne s'il tenait tellement à cette
loi-là. C'est une loi fiscale. Ça ne dérangeait rien. Le
ministre des Finances l'a annoncée dans son budget; il n'y avait rien
là. Il aurait pu attendre à l'automne et prendre tout le temps
pour discuter de ce projet de loi.
Si le leader du gouvernement a mal planifié ses travaux, s'il a
mal planifié ses projets de loi, qu'on ne vienne pas nous accuser, nous,
et dire qu'on retarde l'adoption des projets de loi. C'est une chose. Il faut
connaître la façon de fonctionner en cette Chambre. C'est le
gouvernement qui appelle les projets de loi et c'est nous qui en discutons. Ce
n'est pas à nous de dire au leader: Apporte tel ou tel projet.
Donc, M. le Président, on s'efforce par les moyens que nous avons
d'interpréter, de faire connaître au gouvernement ce que les
citoyens et les citoyennes de notre comté nous amènent, nous
apportent, nous écrivent, nous font connaître comme objections
à ce projet de loi. Ça m'a étonné d'entendre tout
à l'heure le député d'Iberville dire: Moi, je n'ai jamais
entendu parler de ça dans mon comté. Il n'y a personne qui crie
il n'y a personne qui vient me voir pour s'opposer à ça. Je ne
comprends pas comment il se fait que ce sont uniquement des
députés de l'Opposition qui reçoivent des lettres, des
télégrammes, des pétitions. Les gens viennent nous voir.
Il y a 15 jours, un employé du centre d'achats de Victoriaville est venu
me rencontrer pour me dire qu'il avait fait circuler une pétition
à l'intérieur du centre d'achats, à Victoriaville; il y
avait 475 signatures sur sa pétition. Je n'ai pas pu la déposer
parce qu'elle n'était pas réglementaire, elle n'était pas
conforme. Je savais que je n'aurais pas le consentement, donc j'ai dit: On ne
l'amènera pas. Mais ces employés du centre d'achats, à
Victoriaville, s'opposaient à ce projet de loi, n'étaient
aucunement d'accord et ne voulaient rien savoir de ce projet de loi.
Donc, pourquoi les gens viennent-ils voir seulement les
députés du Parti québécois, les
députés de l'Opposition? Serait-ce, M. le Président, que
les gens commencent à s'apercevoir que leur député au
pouvoir est tellement coupé de la réalité que ça ne
donne absolument rien d'aller le voir pour aller faire connaître leurs
revendications?
M. Jolivet: Ça doit être ça.
M. Baril: Est-ce que c'est parce qu'ils s'aperçoivent de
plus en plus que ce gouvernement devient sourd aux attentes et aux demandes des
citoyens? Il y a des questions à se poser, M. le Président. Je me
demande pourquoi, après cinq ans, si on accuse le gouvernement du Parti
québécois de l'époque d'avoir fart une loi qui
n'était pas à point, qui n'était pas
désirée, pourquoi, d'abord, ne l'ont-ils pas fait appliquer telle
qu'elle était? Ça aurait peut-être réglé des
problèmes. On n'aurait peut-être pas été
obligés d'amener ça ici. Et, après autant de temps,
pourquoi cette hâte à passer cette loi, à faire passer le
rouleau compresseur sur la procédure de l'Assemblée nationale
pour être capable de se vanter... Est-ce pour être capable de se
vanter d'avoir passé une loi et d'avoir réglé le
problème? Le problème ne sera pas réglé. Il
s'aggrave, M. le Président. Le problème va être plus grave
avec cette loi qu'avec l'autre. D'ailleurs, les gens nous le disent. Les gens,
à tout prendre, aimeraient beaucoup mieux garder le statu quo que
d'être obligés de vivre avec cette loi. Ce qui est
étonnant, M. le Président, c'est de constater que, même si
on ouvrait les magasins durant les heures de semaine, si on augmentait le
nombre d'heures des commerces d'alimentation les fins de semaine, c'est pour la
même population, et les gens n'achèteront pas plus à cause
qu'on étire les heures d'ouverture, les heures d'affaires. Il me semble
que ça, c'est la logique même. Et de voir, en tant que grands
administrateurs, en tant qu'hommes et femmes d'affaires, ces gens du
gouvernement s'acharnent à démontrer à la population... Ce
n'est pas en augmentant les heures d'affaires que les gens vont faire plus
d'affaires. Tu as le même revenu, tu fais un petit train de vie et tu
achètes ce que tu veux avoir avec l'argent dont tu disposes. Et, que ce
soit à 20 heures ou à 15 heures, tu n'achèteras pas plus
de produits ou tu n'achèteras pas plus d'aliments si c'est les fins de
semaine. C'est juste que tu vas changer les modes de fonctionnement de la
population et c'est les commerces qui vont en souffrir parce qu'ils vont
être obligés de garder leur commerce ouvert avec personne dedans.
Ça va être quoi, l'avantage, M. le Président, d'augmenter
les heures d'ouverture quand tu n'as personne dans les commerces?
Depuis des générations, on a une habitude, au
Québec, que le dimanche c'est fermé. Pourquoi tout chambarder
ça pour rien? Ça va donner quoi de plus, hein? Il me semble que
le ministre, il est encore temps... On dit qu'il a apporté plusieurs
amendements. Il est encore temps pour le ministre, il me semble, de dire: Bon,
bien, là, c'est assez, crime! Je ne suis pas capable de faire
l'unanimité puis, sans faire l'unanimité, je ne suis pas capable
de ramasser la majorité, seulement. On va reculer, on va regarder
ça encore mieux, on va consulter le monde et on va
voir ce qu'on peut aménager. Parce que, tant qu'à faire
une toi, tu ne peux pas changer ça tous les ans, une loi. Pourquoi ne
pas la faire immédiatement pour que ça réponde au moins
à la majorité des gens impliqués?
Il me semble que le ministre, de bonne foi, devrait essayer de
comprendre que nous autres, de notre bord, c'est ce qu'on a essayé de
lui faire comprendre, de retarder... On est au mois de juin, là, qu'il
retarde ça au mois de septembre, octobre, quand on va rouvrir la
session, et on rediscutera ça à fond, on essaiera de voter
ensemble une loi qui va répondre réellement aux besoins de la
population.
Des voix: Bravo!
Le Président: Est-ce qu'il y a d'autres interventions?
Alors, M. le député de Labelle.
M. Jacques Léonard
M. Léonard: M. le Président, à l'instar de
mes collègues, je vais souligner que ce débat se produit
après un des trois bâillons que nous avons connus au cours de la
semaine, ce qui est un record, un non-dit dans l'Assemblée
nationale.
Ces bâillons se sont produits alors que le gouvernement a
déposé une avalanche de lois le 15 mai dernier, alors qu'il
n'avait rien fait au cours du printemps, qu'il s'est traîné les
pieds durant tout le printemps, à ne rien faire, alors que le premier
ministre lui-même a perdu son temps dans des débats
constitutionnels qui ne mènent à rien, comme on le voit. Surtout,
il faut se poser la question: Pourquoi ces projets de loi arrivent à ce
moment-ci avec un bâillon?
Ce gouvernement a pris l'habitude de pousser sur des projets de loi dans
des périodes où la population pouvait avoir le moins conscience
de ce qui se passait à l'Assemblée nationale et, surtout, pouvait
le plus vite oublier les conséquences des projets de loi qui
étaient amenés ici. C'est ce que nous voyons dans le cas des
heures d'affaires. Ces gens-là en parlent depuis quatre ans. Ils n'ont
rien réglé, ils n'ont pas appliqué la loi qui
précédait, qui était quand même raisonnable et qui,
si elle avait été appliquée, aurait réglé
bien des situations et n'aurait pas fait que la situation actuelle
dégénère comme nous la connaissons.
Alors, ils imposent le bâillon après vingt-trois heures
pour éviter qu'on n'en débatte, en pensant que les gens s'en
iraient en vacances, oublieraient puis, quand ils reviendraient, ils n'auraient
plus le courage de resoulever la question. C'est vrai dans le cas de la Loi sur
les heures d'affaires. C'est exactement la même chose dans le cas de la
loi 50 sur la Régie de l'assurance automobile du Québec, par
laquelle ils veulent aller voler 877 000 000 $ aux assurés de la
Régie de l'assurance automobile du Québec, millions qui
appartiennent aux assurés alors que le ministre des Finances veut aller
prendre le sac.
Même chose aussi dans le cas de la loi 69 en ce qui concerne
l'impôt foncier scolaire. Les gens s'apercevront, lorsqu'ils recevront
leur compte, soit en été, soit à l'automne, soit à
Noël, dépendant de la facturation des commissions scolaires, que
leurs taxes auront doublé, mais, à ce moment-là, plus
personne ne parlera de la loi parce qu'on l'aura votée,
étudiée, en vitesse, avant les vacances, pendant que les gens
pensent à autre chose, pensent à leurs vacances, et surtout
oublieront après cette période de vacances. (21 h 10)
M. le Président, ça, ce sont les circonstances dans
lesquelles le gouvernement traite les situations difficiles, essaie de
régler des cas controversés. Nous en sommes là. C'est
ça la réalité. Maintenant, sur le fond. Pourquoi un
gouvernement doit-il s'occuper des heures d'affaires? Ma première
réaction, c'a été de me dire: Le gouvernement ne devrait
pas se mêler de ça. Ça a été ça tout
bonnement parce que, finalement, chacun pourrait ouvrir et qu'est-ce que
ça changerait? En réalité, c'est une bonne question
à mon sens parce que, dans un pays non organisé où
l'économie est primaire, oui, ça pourrait se passer comme
ça. Le gouvernement n'aurait pas à statuer sur les heures
d'affaires. Mais nous sommes dans un pays moderne, dans un pays qui s'est
développé, où il y a des habitudes de vie qui sont prises,
où il y a une industrie qui fonctionne à des heures fixes,
où il y a une économie organisée, et bien
organisée. Et là, les problèmes commencent à se
poser.
Première considération, c'est que dans un pays comme le
nôtre la concurrence, qui est un phénomène correct, qui est
un phénomène qui amène l'abaissement des coûts pour
la population, joue. Face à un service très large qu'on veut
offrir, les marchands doivent ouvrir. Si l'un ouvre quatre-vingt-dix heures,
l'autre ne peut pas ouvrir soixante heures, parce qu'il va perdre des clients
qui vont s'en aller vers celui qui ouvre quatre-vingt-dix heures. Et nous
voyons tout de suite qu'il faut avoir des heures fixes, parce que
l'intérêt d'un commerçant ça va être d'ouvrir
le plus longtemps possible, d'offrir le plus large service possible, par
rapport aux autres, si on laisse la concurrence s'installer quant à
l'ouverture des heures d'affaires. Immédiatement, on admet que le
gouvernement doit intervenir parce que, s'il ne le faisait pas, celui qui est
le mieux organisé, celui qui disposerait de capitaux, celui qui pourrait
payer des employés le plus longtemps possible ouvrirait et donnerait
beaucoup de service pour un temps. Il le ferait durant six mois, un an, le
temps de faire faire faillite à ses concurrents, puis après il
réduirait ses coûts et il augmenterait ses prix. C'est
ça.
Et c'est pratiquement la même situation que l'on retrouve quant
à la création de monopoles. Or, les monopoles, ce ne sont pas
simplement les grandes entreprises à plusieurs centaines de milliers de
travailleurs. Ce sont aussi des monopoles locaux qui peuvent s'instaurer
à la faveur de réglementations trop larges ou de
réglementations qui n'existent pas. Or, nous en sommes là. Les
monopoles locaux, par rapport à d'autres, qui font que les autres vont
crever, alors qu'il va en émerger un ou deux et dans le cas
idéal, pour ces monopoles, un seul. Et là, il fera la pluie et le
beau temps. C'est ça la réalité.
Or, dans le Québec, il y a différentes
considérations qu'il faut amener aussi sur la table pour bien voir que
le gouvernement doit intervenir dans la question des heures d'affaires.
D'abord, l'immensité du territoire. La diversité du territoire.
Si on peut avoir des situations dans des milieux très urbains,
très densément peuplés, on peut concevoir qu'il y ait de
grandes surfaces. Mais dans des régions moins densément
peuplées, ce n'est pas la même situation. Mais si on laisse par
les heures d'affaires, par l'ouverture la plus large possible des heures
d'affaires, si on laisse les commerçants décider, le plus fort
prendra le monopole, les autres vont pérécliter, vont
périr et, finalement, le service à la population, au bout d'un
certain temps, va en souffrir et ce sera pire que maintenant. Pire que
maintenant!
Et c'est ça qu'il faut voir dans le temps comme
législateurs. Il nous faut tout de suite traiter ces questions. Et les
coûts qui y sont associés vont inévitablement
évoluer en fonction de la situation de ces commerçants dans le
territoire. Deuxième considération ou la troisième,
plutôt, maintenant.
Nous avons déjà traité cette question sous d'autres
angles, sous l'angle de l'aménagement du territoire, sous l'angle de
l'urbanisme. Rappelez-vous les lois que nous avons passées à ce
sujet, les programmes que nous avons mis sur pied. Nous avons
considéré, autour des années 1982-1983, par exemple, qu'il
était important de densifier les tissus urbains que nous avons. Et nous
n'en avons pas tellement, mais ceux que nous avons, nous devons les
protéger. Ça nous a donné des programmes importants comme
ceux de la rénovation de la Plaza Saint-Hubert, comme la création
de la loi sur les SIDAC, des sociétés à l'intérieur
des villes et des villages, pour la bonne raison qu'il fallait que les
commerçants se mettent ensemble pour présenter une meilleure
image du village ou de la ville dans laquelle ils étaient, pour les
amener à travailler ensemble. De sorte que la clientèle
retrouvait chez elle, quel que soit le milieu, des magasins modernes, avec des
devantures attrayantes. De sorte, aussi, que les gens s'habituaient à
rester dans leur village, à rester dans leur ville et à nourrir,
en dehors de l'industrie, qui, souvent, faisait vivre la ville ou le village,
d'autres industries secon- daires qui arrivaient et, ensuite, des commerces qui
s'implantaient et qui fournissaient des services de bonne qualité
à la population.
Si on laisse ou si on favorise uniquement les grandes surfaces, bien
sûr, il va s'en implanter. Mais les grandes surfaces, pour vivre, ont
besoin d'une grande population. Et donc, pour avoir les mêmes services,
il faut se déplacer sur de beaucoup plus grandes distances. Et quand on
compare les prix de la marchandise que l'on achète, il faut aussi y
intégrer le coût du transport; et ça, ce n'est pas un
calcul que l'on fait toujours, que l'on fait souvent parce qu'on a tendance
à l'oublier, simplement parce qu'on veut aller ailleurs, bien sûr,
mais on oublie le coût qui y est associé.
Alors, ce à quoi je voulais en venir, c'est qu'une
société comme la nôtre doit vivre avec une diversité
de commerces. Il y a des grandes surfaces? Très bien. Il y a des petits
magasins? Très bien. Ils favorisent la vie urbaine, favorisent la vie
dans le village. Il faut concevoir les deux. Mais quand, par une
réglementation ou une loi sur les heures d'affaires, on favorise
uniquement les grandes surfaces, je pense que là on fait fausse route,
on fait erreur et qu'il faut revenir en arrière là-dessus parce
qu'on va le payer tôt ou tard. Et au fond, ce que l'on fait en favorisant
les grandes surfaces, c'est qu'on favorise un type de société, un
type de civilisation basé sur la voiture, basé sur
l'étalement urbain. Et quand on considère tous les coûts
que cela implique, ils sont énormes, immenses; on ne peut pas se
permettre de tels coûts. Au contraire, actuellement, les coûts des
services publics, des services collectifs sont déjà
considérables. Il faut arrêter la facture et II faut tout de suite
légiférer, réglementer en conséquence, de sorte
qu'on ne les augmente pas.
M. le Président, je termine. Il faut absolument que le ministre
en tienne compte. Déjà, il a descendu de 84 à 72, à
70 heures; c'est déjà mieux que c'était, mais ce n'est
vraiment pas suffisant. Et les gens qui sont ici et qui se sont
mobilisés représentent la plus grande partie de la population,
celle que nous devons considérer en légiférant.
Le Président: Je cède maintenant la parole à
M. le député de La Prairie. (21 h 20)
M. Denis Lazure
M. Lazure: Merci, M. le Président Le ministre qui pilote
ce projet de loi venait tout juste de commencer à comprendre les
demandes qui étaient exprimées par l'Opposition. Mais
l'Opposition se faisait, au fond, le porte-parole de milliers de personnes
à travers le Québec qui suppliaient le ministre de changer son
projet de loi. Elles le suppliaient M. le Président moi, j'ai rarement
vu autant de personnes suivre fidèle-
ment les séances d'une commission parlementaire, de
représentants des différents commerces d'alimentation et de
pharmacie, depuis quelques semaines. Et il commençait à
comprendre, la preuve c'est qu'il a apporté, sur 34 articles, 25
amendements. C'est beaucoup ça, 25 articles sur 34 qui sont
amendés. Donc, des heures, pas tellement nombreuses - une vingtaine
d'heures au maximum, vingt ou vingt-cinq heures - ces heures-là,
contrairement à ce que le parti ministériel, le parti
gouvernemental disait, n'étaient pas des heures perdues. Ce sont des
heures au cours desquelles le ministre a fini par comprendre, un peu, les
doléances de tout ce monde-là.
Et, il a baissé le nombre d'heures d'ouverture, il a
apporté plusieurs amendements, mais ce n'est toujours pas satisfaisant.
Et on se sert, pour mettre fin aux discussions qui semblaient éclairer
le ministre et donner partiellement raison à la population, on se sert
encore du bâillon, on abuse du pouvoir gouvernemental pour dire à
l'Opposition: Vous arrêtez de parler, fini, silence. Nous, on sait ce qui
est bon pour la population et on va procéder. Trois fois dans l'espace
d'une semaine, on nous a dit ça, M. le Président. C'est un record
dans l'enceinte de cette Assemblée nationale. Jamais on n'a eu trois
bâillons dans l'espace d'une semaine.
Les heures d'ouverture sur semaine sont encore trop longues. Tout le
monde nous dit qu'ouvrir jusqu'à 19 heures, les lundi et mardi,
ça vient perturber la vie familiale, et on le dit avec raison. Il faut
comprendre que la plupart, la majorité en tout cas, des employés
dans les marchés d'alimentation, sont des femmes et, souvent, des femmes
qui ont de jeunes enfants, et des femmes qui ont des enfants, souvent, en
garderie, garderies scolaires ou autres garderies. Et, dans l'état
actuel des choses, le lundi soir, le mardi soir, le mercredi soir,
actuellement, ces femmes-là peuvent aller prendre leur enfant à
une heure normale où la garderie ferme, où la plupart des
garderies ferment. En prolongeant jusqu'à 19 heures, les lundi et mardi,
on impose un fardeau additionnel aux parents, aux mères en particulier
qui, dans bien des cas, devront changer leur mode de vie, devront,
peut-être changer la garde de leur enfant.
Et, M. le Président, nous, de l'Opposition, nous disions:
Prolongeons les heures le mercredi soir, comme le jeudi et le vendredi c'est la
règle actuellement, et nous pensons, d'après ce que la population
nous dit, que ça sera amplement satisfaisant. Le ministre s'entête
et veut donner satisfaction aux propriétaires de grandes chaînes,
essentiellement. Ça n'est plus du dépannage alimentaire que le
ministre autorise, ce n'est pas vrai. Parce que, quand il dit cinq et plus,
cinq plus le pâtissier, cinq plus le boulanger, ça commence
à faire du monde. Et là, on va voir des chaînes
Importantes, pas très très grandes, mais grandes et moyennement
grandes, et non plus des petites chaînes ou des dépanneurs, on va
donc voir arriver dans la compétition, dans la concurrence du
marché, une concurrence tellement forte que plusieurs dépanneurs
devront fermer leurs portes.
Alors, injustice pour le véritable petit dépanneur, d'une
part, injustice pour la mère, les parents, les enfants qui vont
être perturbés par ces nouveaux horaires et, finalement, encore
une fois, pour des intérêts qui sont à très court
terme. Ces chaînes s'imaginent augmenter leur chiffre d'affaires.
Peut-être le feront-elles pour quelque temps, à très court
terme. Mais il y a quand même un équilibre qui va
s'établir, il y a une masse totale d'argent dans les budgets familiaux
qui va aux achats pharmaceutiques, aux achats alimentaires.
M. le Président, il y a aussi la question du dimanche. En ouvrant
très grandes les portes à l'ouverture de ces chaînes
moyennes et moyennement grandes, le ministre va imposer le fardeau du travail
dominical qui, il n'y a pas si longtemps, était même interdit dans
nos moeurs - interdit dans nos moeurs il n'y a pas si longtemps, M. le
Président. Il va maintenant imposer à des milliers d'adultes le
travail le dimanche, il va, dans une large mesure, perturber la vie dominicale
des familles le seul jour, à toutes fins pratiques, de plus en plus, M.
le Président, où les deux parents se retrouvent ensemble, se
retrouvent avec les enfants, surtout les jeunes couples. On sait maintenant
qu'au moins les trois quarts des jeunes femmes dans les couples travaillent
hors du foyer en plus de travailler au foyer, ont double emploi. Mais
là, plusieurs de ces femmes devront travailler le dimanche. Encore une
fois, les pressions mercantiles - n'ayons pas peur des mots - les pressions
mercantiles des grandes chaînes pharmaceutiques ou alimentaires ont fait
plier le ministre. Il sait fort bien, le ministre, que c'est une injustice
qu'il commet vis-à-vis du foyer moyen, en forçant des milliers de
femmes et d'hommes à travailler le dimanche et en les privant d'une vie
familiale normale.
C'est important qu'il y ait au moins une journée par semaine
où la grande majorité des familles se retrouvent ensemble pour
pouvoir communiquer, pour pouvoir passer des heures de loisirs en famille. De
plus en plus on se plaint des brisures de communication qui existent non
seulement dans le couple, mais entre les parents et les enfants. Et là,
M. le Président, par un geste inspiré de préoccupations
strictement commerciales, on vient faire un accroc, une brisure dans le tissu
social, dans le tissu familial.
Il y a quand même des valeurs dans notre société qui
sont plus importantes, qui devraient primer les valeurs strictement
commerciales. Il est bien évident, en plus, qu'en faisant ce que le
ministre fait actuellement on ne fait que mettre le pied dans la porte, et
c'est ça qui est
dangereux. Il établit un précédent dangereux
où on peut prédire avec certitude que, d'ici à quelques
années, il y aura beaucoup plus de commerces qui seront ouverts le
dimanche. Je ne pense pas que ce soit ça que la société
québécoise désire. Peut-être que ça existe et
que c'est désiré dans d'autres sociétés mais, au
Québec, je pense que - et ça été prouvé
amplement par les représentants de différents groupes - la
majeure partie de la population au Québec désire maintenir une
journée de repos, une journée familiale qui a toujours
été traditionnellement la journée du dimanche.
M. le Président, je regrette beaucoup, comme mes collègues
de ce côté-ci de la Chambre, que le ministre se soit
impatienté si rapidement, parce qu'il aurait pu encore diminuer les
heures d'ouverture sur semaine et il aurait pu rétrécir cette
porte qu'il ouvre le dimanche à un abus qu'on peut prévoir. Je
termine, M. le Président, en déplorant cette absence de
compréhension du ministre qui, cependant, montrait un tout début
de bonne volonté. C'est dommage que, par son impatience, il ne nous
démontre pas jusqu'où sa bonne volonté pouvait le mener.
Merci, M. le Président.
Une voix: Bravo!
Le Président: Je reconnais maintenant M. le
député de Lac-Saint-Jean et whip de l'Opposition.
M. Jacques Brassard
M. Brassard: M. le Président, c'est malheureux, mais je
pense qu'on est en face d'un cas exemplaire de ce qu'on pourrait appeler
"comment ne pas légiférer". C'est tout à fait exemplaire.
C'est la façon et la méthode qu'il faut rejeter en matière
de législation. (21 h 30)
Reprenons rapidement le scénario. Il y a d'abord eu une
consultation - c'est bien, c'est excellent - consultation qui permettait
à tous les intervenants de se faire entendre, sauf qu'ils se faisaient
entendre sur rien. Il n'y avait pas de projet gouvernemental. Alors, ils
donnaient leur point de vue sur toute la question des heures d'affaires, mais
ils ne pouvaient pas porter un jugement ou une évaluation sur le projet
du gouvernement, il n'y en avait pas. Il y avait un document synthèse
tout au plus. Alors, déjà une consultation qui comporte une
lacune essentielle. Mais le ministre nous avait dit à ce
moment-là qu'il se mettait à l'écoute de la population et
à l'écoute des intervenants et des intéressés, et
ça a donné lieu à un projet de loi. Quand on a pris
connaissance de ce projet de loi là qui devait être une
synthèse disait le ministre - drôle de synthèse - on s'est
rendu compte qu'au lieu d'écouter le ministre avait fait la sourde
oreille pendant toute la consultation, puisqu'on ne retrouvait rien dans le
projet de loi qui cor- responde aux attentes, aux aspirations et aux demandes
formulées par les divers intervenants intéressés.
Alors, le projet de loi franchit l'étape de l'adoption de
principe et puis se retrouve en commission. Normalement, un projet de loi de
cette importance aurait dû connaître de longues heures
d'étude en commission. Ça s'est limité à treize
heures, et puis la clôture est tombée, le bâillon est
tombé. Retour en Chambre, remise du rapport, dépôt du
rapport, fini, plus d'étude, plus d'analyse, plus de travaux en
commission où c'est pourtant le lieu privilégié où
un projet de loi doit être étudié, examiné article
par article. Évidemment, l'Opposition a joué son rôle, le
rôle qui lui revient, celui de s'opposer farouchement à une
méthode aussi brutale de mettre fin à des débats
démocratiques sur un sujet aussi important. On s'est opposés
farouchement au bâillon et à la clôture. Et puis, tout d'un
coup, peu de temps après, on se retrouve avec, sur la table du
secrétaire général, une trentaine d'amendements
substantiels, alors que le projet de loi ne comporte que 34 articles. Bref, on
se retrouve avec, sur la table du secrétaire général, un
nouveau projet de loi, un projet de loi complètement nouveau,
complètement différent de celui qui avait été
l'objet du débat en deuxième lecture, complètement
différent.
Ce projet de loi entièrement nouveau ne fera l'objet d'aucun
examen, en commission parlementaire, c'est vraiment inouï, c'est vraiment
inouï. Normalement, quand on apporte une avalanche d'amendements comme
ça, ça se fait en commission parlementaire et ça implique
évidemment le prolongement de l'analyse et de l'examen, parce qu'on se
retrouve devant un projet de loi radicalement nouveau. Pas du tout. Aucun des
amendements n'a été étudié, n'a été
analysé, aucun, puisqu'il y avait le bâillon. Alors, pas question
de retourner en commission parlementaire. Les amendements n'ont même pas
été lus par le président. Au moins, dans le cas du projet
de loi du ministre de l'Éducation sur la fiscalité scolaire, le
président a eu la décence de nous lire les amendements et M. le
Président, il a même permis au ministre de nous expliquer les
amendements, parce qu'on ne pouvait pas le faire, on n'a pas pu aller en
commission pour regarder les amendements. Mais là, même pas. Ce
sont des numéros, une liste de numéros et puis, c'est tout. Aucun
examen des amendements pourtant substantiels qui transforment radicalement le
projet de loi.
Vraiment, c'est la façon dont il ne faut pas
légiférer. C'est tout à fait exemplaire à cet
effet, et on se retrouve avec un projet de loi qui ne fait l'affaire de
personne, sauf des grands de l'alimentation qui ont trouvé une oreille
attentive du côté du ministre et qui ont obtenu, en gros,
satisfaction quant à leurs exigences. Mais, pour le reste, ce projet de
loi, même amendé, ne satisfait personne, mécontente tout
le
monde. On regarde les horaires qui y sont imposés. Mes
collègues l'ont signalé à maintes reprises. On
réduit le nombre d'heures, j'en conviens, c'est un petit pas dans la
bonne direction, mais c'est loin de satisfaire les intervenants et les
intéressés, particulièrement les travailleurs de
l'alimentation qui verront leurs soirées du lundi et du mardi
bousillées complètement. À partir du moment où
ça se termine à 19 heures le lundi et le mardi, c'est
évident que voilà des soirées bousillées pour les
travailleurs de l'alimentation. Le mercredi aussi, puisque ça se
terminera à 21 heures. Et puis on arrive au dimanche.
Le dimanche, alors là, vraiment, c'est presque la
libéralisation de l'ouverture des commerces d'alimentation. On
était à trois personnes. Le ministre avait évoqué
qu'il pouvait passer à quatre. Amendements. On se retrouve avec cinq,
plus les pâtissiers, les boulangers dans les commerces d'alimentation,
plus les pharmaciens et leurs aides dans les pharmacies. Ce qui fait que,
pratiquement, les grandes surfaces, la plupart des grandes surfaces
d'alimentation pourront ouvrir le dimanche; c'est évident, avec non pas
juste cinq personnes, mais cinq, six, sept personnes puisqu'il faut compter la
sécurité, le pâtissier, le boulanger, le pharmacien et ses
aides dans une pharmacie à grande surface. Alors, c'est la
libéralisation. C'est la libéralisation!
Alors que le ministre prétendait qu'il voulait défendre le
vrai dépannage, c'est tout le contraire qui se produit, c'est tout le
contraire qui se produit. Absence d'équité totale à
l'égard de ces dépanneurs et une telle loi - on peut le
prédire - ça va avoir des effets dévastateurs chez les
petits dépanneurs et les petits commerçants en alimentation.
C'est évident, mon collègue de La Prairie le notait tout à
l'heure. Le volume d'affaires n'augmentera pas à partir de la sanction
du lieutenant-gouverneur. Quand le lieutenant-gouverneur va signer, va parapher
la loi, le volume des ventes n'augmentera pas automatiquement; il va rester le
même. La tarte est la même. C'est le partage qui va changer au
détriment des petits, au détriment des dépanneurs, des
vrais dépanneurs et des commerçants, au profit des grandes
surfaces qui pourront ouvrir le dimanche.
Écoutez, ça saute aux yeux. Le volume des affaires, le
volume des ventes ne connaîtra pas une augmentation substantielle parce
que la loi est adoptée et qu'il y a une nouvelle loi. Il va rester le
même, mais il va se déplacer, il va y avoir des transferts -
ça c'est évident - vers les grands, les grandes surfaces et ce
sont les petits qui vont en souffrir et qui vont devoir, dans bien des cas,
fermer leur porte. Et on verra se multiplier les fermetures et les faillites
des petits commerçants et des petits dépanneurs, vous pouvez en
être assurés. Il n'y a pas besoin d'être prophète
pour dire ça. C'est ça qui va se produire, c'est évident,
avec une loi semblable.
Par conséquent, visiblement, on légifère trop vite
sur des projets de loi majeurs, sur des sujets fondamentaux qui impliquent
toute la société québécoise, sans prendre le temps
qu'il faut. Moi, je trouve scandaleux qu'un projet de loi de cette nature et de
cette importance n'ait pas pu être examiné article par article par
une commission parlementaire. Il a été radicalement
transformé par des amendements. Aucun des amendements n'a
été examiné. C'est digne d'une république
d'opérette, d'une république de bananes, une façon de
légiférer comme ça. Ça n'a pas de bon sens. C'est
carrément inacceptable, cette façon de voter des lois au
Québec. Et ce n'est pas juste dans ce cas-là, c'est dans bien
d'autres cas également et il faudra que ça cesse. Il faudra
revoir ça, ça n'a pas de bon sens!
Alors en conclusion, M. le Président, c'est vraiment la confusion
la plus totale. Le ministre voulait clarifier les choses, c'est le contraire
qui se produit. La confusion augmente à la suite d'une improvisation
évidente et il est clair que le mécontentement non seulement va
être maintenu, mais va grandir au Québec au sujet de cette
loi-là. Et vous aurez à en payer le prix.
Le Président: Je cède la parole à M. le
député de Jonquière. (21 h 40)
M. Francis Dufour
M. Dufour: Merci, M. le Président. Depuis ce matin on est
terrés dans un lieu, dans une commission parlementaire qui traite de
problèmes touchant les municipalités comme les citoyens de ces
municipalités et le ministre aurait peut-être intérêt
à regarder ce qui s'y passe puisque, dans ces commissions
parlementaires, l'Opposition a son mot à dire; elle est souventefois
écoutée et permet de bonifier les lois, et tout le monde s'en
porte mieux. Souvent, on prend des intervenants qui ont différents
points de vue et on finit par les asseoir ensemble et par leur faire accepter
ce que, nous, nous décidons comme parlementaires pour essayer
d'améliorer leur milieu de vie et la vie des élus municipaux.
C'est de même que ça se passe dans une commission
parlementaire.
Donc, ce soir, si j'interviens, c'est parce que je crois
sincèrement et fondamentalement que c'est une loi importante. C'est une
loi qui a pour effet de chambarder les habitudes de vie, une loi qui a
été, j'en conviens, largement publicisée - largement
"consensusisée", comme je pourrais dire - pour laquelle il y a eu
beaucoup de consultations. Mais il faut regarder le résultat. Ce soir,
20 juin, est-ce que les résultats sont à la hauteur des attentes
qui ont été suscitées et est-ce que le ministre peut
avouer ou admettre qu'il est content de son bébé, de
son dernier-né? C'est ça. Moi, je voudrais
être convaincant. Je voudrais que le ministre puisse entendre vraiment ce
que, moi, je ressens très fortement envers ce projet de loi. Ça
touche nos milieux de vie à nous, nos familles, nos amis et aussi des
milieux de vie importants, non seulement des gens, mais aussi des travailleuses
et des travailleurs, des propriétaires et, on pourrait dire aussi, des
franchisés assez souvent, d'après les représentations
qu'on a eues.
Bien sûr, l'expérience politique que je
poursuis depuis un certain nombre d'années, depuis ma 28e
année... Je ne dépasse pas le doyen de l'Assemblée
nationale, mais, au moins, je pense parler de choses que je connais, et
lorsqu'on voit... Et il s'agirait de se demander: Est-ce que cette loi a
été demandée par l'ensemble des travailleurs et des
travailleuses? Est-ce qu'elle a été demandée par
l'ensemble des commerçants? Moi, je pense, hors de tout doute, qu'on
peut répondre: Non, ça n'a pas été demandé
par tout ce beau monde-là, mais ça répond à des
critères. On ne le saura peut-être jamais, mais on peut supposer,
penser que ça vient de personnes qui ont intérêt, qui y
trouvent leur intérêt. Mais, devant le tollé de
protestations, devant les nombreuses requêtes qui nous ont
été présentées, je pense bien que tout le monde ne
peut pas être de mauvaise foi. Il y a des gens là-dedans qui,
vraiment, s'opposent non pas pour s'opposer... Le ministre pourrait nous
prêter des intentions comme Opposition en disant: Bien oui, tout ce qui
se passe sur le territoire, c'est la faute de l'Opposition. Si c'était
vrai, vous ne pourriez plus tenir. Je pense que toute la vie du gouvernement
serait en danger. Ce n'est pas 40 % ou 45 % qu'on aurait dans les sondages; ce
serait probablement 65 % ou 70 %. Ce n'est pas juste des
Québécois d'origine francophone. J'ai bien l'impression que
l'opposition vient de tous les groupes et il s'en rencontre un large
éventail dans l'ensemble de la population du Québec, quelle que
soit son origine.
Effectivement, je vois des amendements qu'on n'a pas pu
voir, malheureusement, en commission parlementaire. Encore là, je suis
toujours pris avec mon travail, à un endroit plutôt qu'à un
autre, mais je suis pareil avec intérêt ce qui se passe. Les
amendements que le ministre a apportés jettent un peu de lest, mais
ça ne contente pas tout de même les intervenants. Moi, je ne vois
pas que nos habitudes de vie vont être améliorées si tous
les commerces ouvrent à 8 heures. Le ministre pourra rétorquer:
Bien oui, mais ils ne sont pas obligés. Mais, connaissant le jeu de
l'offre et de la demande et connaissant la compétition féroce qui
existe entre tous les partenaires, c'est évident, c'est clair hors de
tout doute dans mon esprit, et je peux le démontrer dans les faits, que,
lorsque quelqu'un va ouvrir, les autres vont suivre forcément. Le
ministre pourra toujours nous dire: Bien oui, ils peuvent s'entendre entre eux
autres. Moi, je pense que, de ce côté-là, on n'a pas
à faire la preuve. C'est l'évidence même. Ça tiendra
ce que ça tiendra, mais ça va finir par arrêter et,
à ce moment-là, tout va être ouvert.
Bien sûr, l'ouverture à 8 heures, je ne pense
pas que ça contente qui que ce soit et que ça améliore le
train de vie, ou la qualité de vie des individus ou des citoyens et des
citoyennes du Québec. Quant à l'abaissement des heures au
début de la semaine, déjà, en commençant à 8
heures... Si on regarde, par exemple, le langage que vous nous tenez souvent,
que vous voulez favoriser la famille, améliorer le milieu de vie des
enfants, des parents, et lorsqu'on sait - et Dieu sait combien il y a de
femmes, parce que ce ne sont pas des salaires qui sont payés très
fort et il y a beaucoup de femmes qu'on rencontre là-dedans. C'est
malheureux encore, mais c'est ce qui se passe. Les femmes travaillent
là-dedans, donc, dans les commerces, vont laisser leur maison de plus
bonne heure. Donc, les enfants ne seront même pas partis pour
l'école. Ça veut dire que déjà on arrache encore la
mère au foyer le plus possible et, même si te commerce ferme
à 19 heures, le jeune va avoir déjà une bonne partie de la
soirée d'écoulée dans son milieu de vie à lui,
parce que ses études, il les fait comment? Il les fait souventefois
avant de souper ou après le souper, immédiatement. La mère
peut s'en occuper, peut donner un peu de son temps, peut ramasser ou
améliorer les liens qui existent dans la famille.
Donc, si le commerce ferme à 19 heures, ça ne
veut pas nécessairement dire que les employés sont rendus chez
eux à 19 h 5, 19 h 10 ou 19 h 15. ça veut dire, assez souvent,
avant que la caisse soit calculée, etc., ça veut dire des fois 20
heures, 20 h 30, autant pour le travailleur que pour le propriétaire.
c'est ça que j'appelle briser un consensus qui existe.
En ce qui concerne le dimanche, parce que je vais toucher
les points qui, à mes yeux, sont très sensibles, si le peuple ou
si les Québécois et les Québécoises ont
décidé que, pour eux, le dimanche, c'était un jour
consacré à leur famille, qui était consacré
à renouer des liens avec leur milieu, pourquoi ne respecterait-on pas
ça? C'est quoi, cette volonté de vouloir faire consommer les
gens, même malgré eux? Est-ce que c'est absolument
nécessaire que les gens aient le pouvoir et le désir de consommer
sept jours de temps?
Je comprends que le ministre est intransigeant
jusqu'à maintenant. Je ne vois pas de signe évident qu'il va
casser. Je ne suis pas sûr qu'on va le convaincre, mais il faudrait
peut-être qu'il fasse acte d'humilité. Il pourrait regarder ce qui
se passe. Vous savez, il n'y a rien comme un gouvernement qui décide de
se fermer les oreilles et de ne plus écouter ce qui se passe dans la
population. C'est le meilleur signe qui pointe à l'horizon à
l'effet qu'on est mûr pour devenir
l'Opposition.
Vous savez, il n'y a rien qui ressemble plus à un gouvernement
qu'un autre gouvernement. Mais qu'il tombe dans les mêmes travers...
C'est bien sûr que les gouvernements peuvent avoir d'autres
préoccupations, mais les travers d'un gouvernement, c'est souventefois
penser qu'il devient propriétaire de ce qu'on lui a confié comme
bon gérant. C'est ça. On n'est pas des gérants de magasin,
on est des gérants du bonheur national brut. Pour le faire, je pense
qu'il faut qu'on ait le goût de le faire. Quand on n'écoute plus,
c'est parce qu'on perd le goût de le faire, et les gens comprennent
ça assez rapidement.
Je pense que, sur une raison ou un domaine aussi fondamental, on a tous
intérêt à réfléchir et à s'assurer que
les commerçants vont être protégés. Je ne veux pas,
au grand jamais, que cette loi qu'on s'apprête à passer cause la
disparition de beaucoup de petits commerçants et la perte d'emploi de
beaucoup de petits employés. Ça ne se remplace pas
nécessairement par d'autres, parce que la consommation est toujours en
relation avec les revenus de l'ensemble des gens, avec ce que les gens ont
comme revenus. On ne donne pas, en règle générale, ce
qu'on n'a pas, mais on ne dépense pas ce qu'on n'a pas.
Donc, il y a beaucoup d'interrogations et, en même temps, ce n'est
peut-être pas la meilleure année. Avec les taux
d'intérêt élevés qu'on subit, ces gens-là
vont avoir à se battre fort, ce qui veut dire qu'on condamne,
probablement et sûrement, les gens à des pertes d'emploi, on
condamne définitivement des commerces à disparaître et je
pense que, de ce côté-là, on n'y gagne rien; tout le monde
y perd, y compris le ministre et son gouvernement. On peut peut-être,
pendant de nombreuses fois, s'opposer à ce que la population pense, mais
trois fois dans la fin de semaine, c'est beaucoup trop, à mon point de
vue, et, dans ce cas-ci, on touche encore plus largement à ce consensus
et déjà vous avez tout en main pour réparer ce qu'on
s'apprête à faire, ce que je considère comme une erreur
monumentale. Merci, M. le Président. (21 h 50)
Le Président: Je cède à ce moment-ci la
parole à M. le député de Laviolette.
M. Jean-Pierre Jolivet
M. Jolivet: Merci, M. le Président. Mon Dieu! Mon Dieu!
Jusqu'à quand devrai-je subir les difficultés que vous m'amenez?
semble dire le ministre dans les rencontres que nous avons eues depuis
plusieurs jours. Êoignez de moi ce calice que je ne saurais boire. Ce
sont peut-être des choses qui nous permettraient de dire à M. le
ministre que ce qu'il a subi ici, à l'intérieur, c'est
peut-être le présage, malheureusement, de ce qui pourrait se
passer maintenant à l'extérieur.
Le ministre, à mon avis, commet une erreur monumentale, mais
cette erreur qu'il commet, M. le Président, aurait pu être d'un
tout autre ordre, s'il avait décidé de suivre la première
idée qu'il avait eue et que son parti a toujours eue. Finalement,
ça l'aurait peut-être amené à ne subir qu'une seule
fois les difficultés qu'il aura peut-être à subir dans
quelques mois ou dans quelques années. Il aurait dû dire, comme
plusieurs de ses collègues le pensaient, comme le ministre qui l'avait
précédé le pensait: Enfin, tant qu'à manger les
difficultés que j'ai à manger dans cette salle, aussi bien,
à ce moment-là, les avoir une seule fois: libéralisons
à plein. Ouvrons les magasins, tous les commerces d'alimentation, les
pharmacies, les magasins de meubles, tous les commerces une seule fois et
faisons ce geste; on aura à manger le coup une fois et l'Opposition
prendra tous les moyens pour nous empêcher, mais on a la majorité
et on va le faire.
Le ministre va me dire, M. le Président: Ce n'est pas la voie que
j'ai choisie. Soit! Mais la voie qu'il a choisie, c'est la voie, justement, qui
va nous amener à plus ou moins long terme à une pression
exercée par l'ensemble de la population. Même s'il nous dit qu'il
n'a pas eu de pression de leur part, au moins nous nous imaginons qu'il en a
connu de ses collègues, des gens qui sont au gouvernement, qu'il a eu
des pressions justement des grands par rapport aux petites et aux moyennes
surfaces.
J'ai regardé avec beaucoup d'attention, M. le Président,
les pas que le député de Nicolet-Yamaska a faits, le
"virevoltage" qu'il a fait ici à cette Assemblée. Je le plains et
en même temps je devrais même le féliciter d'être un
homme de parti en pilant sur son orgueil, en pilant même sur ses
convictions, lui qui, comme vous le savez, a fait un travail convenable,
même s'il y avait des imperfections qui pouvaient être
corrigées. Mais être capable de revenir en cette salle et appuyer
un tel projet, M. le Président, ça, ça nous
déconcerte.
Nous sommes, je l'ai dit à M. le ministre, le relais de ceux qui
n'ont pas de voix ici à l'intérieur. Le clivage qu'on a connu
pendant la commission parlementaire sur un projet vague, des idées qui
étaient énoncées sur un document qui était
très bien fait, mais sur aucun projet précis qui est devenu
ensuite un projet de loi... Je peux dire qu'il y a eu du clivage. M. le
ministre en est conscient. Clivage entre ceux qui sont des petits
propriétaires proches de leurs employés et qui sont en face de
nous et qui nous disaient, en face de nous, et qui l'ont
répété à plusieurs occasions... Consommateurs,
propriétaires, commerçants, travailleurs, toutes ces personnes
nous ont dit: C'est à long terme que vous allez nous avoir.
C'est un peu ce qu'on semble vouloir dire encore une fois par notre
bouche, que ces gens n'ont pas de voix à l'intérieur. Ils feront
à
l'extérieur, maintenant, ce qu'ils ont à faire, puisque le
ministre ne veut pas changer d'idée. D'un autre côté,
clivage des personnes qui se trouvent en arrière de moi, en haut. Grands
propriétaires, Métro, Steinberg, les gens de Provigo, les gens
des chambres de commerce, des gens d'une association, semblerait-il, de
consommateurs, mais demandez au député de Saint-Maurice,
concernant le Service d'aide aux consommateurs de Shawinigan, si c'est en
arrière de moi ou si c'est en avant de moi. Il va vous répondre
qu'il est en avant de moi et qu'il représente bien plus les
consommateurs que ceux qui sont en arrière de moi.
Je dois vous dire, M. le Président, que je suis, comme je l'ai
dit depuis le début, très émotif dans ce dossier parce que
je représente des gens qui ont justement une émotivité
importante, celle de dire que le ministre est en train de commettre une erreur.
Malgré tous les efforts que nous aurons pris, malgré le peu de
temps qui nous a été donné pour le faire, nous avons dit
tout ce que nous avions à dire. Nous en aurions encore à ajouter.
Mais une chose est certaine, c'est que, même si on voulait les ajouter,
je ne pense pas être capable de convaincre le ministre. Il a pris sa
décision et, comme le disait l'éditorialiste du journal,
aujourd'hui, il vivra avec sa décision. Le ministre, cependant, avec ce
qu'on appelle la guillotine parlementaire - les trois qui sont devant nous -
devra vivre aussi avec une façon de faire les choses qui est anormale
dans ce Parlement. C'est un Parlement où on a le droit d'exprimer nos
opinions, d'utiliser tous les moyens que le règlement nous donne, comme
les gens d'en face, lorsqu'ils étaient à l'Opposition, ont eu le
droit de le faire, et ils l'ont exercé sans avoir de bâillon, en
aucune façon.
Le ministre est très sûr de ses opinions et de ses
collègues, malgré ce que l'on a venant de l'intérieur du
caucus et, comme je le disais, même de certains ministres de ce
gouvernement qui m'ont dit ici, en cette salle, alors qu'on avait des
intermèdes, qu'il n'y avait pas d'urgence à passer cette
loi-là, pas plus, comme le disait mon collègue d'Arthabaska,
qu'il n'y avait d'urgence à passer la loi qui va venir siphonner, dans
la caisse de la Régie de l'assurance automobile du Québec, des
millions. Parce que, dans le cas de la RAAQ, c'est une loi fiscale qui
s'applique au moment où elle est décrétée par le
ministre des Finances. Deuxièmement, quant à celle-ci, il aurait
pu y avoir un délai. Et le ministre, même s'il m'a dit qu'il
n'avait en aucune façon pris l'engagement de l'adopter à la fin
de la session, j'ai lu des journaux, j'ai entendu des gens qui l'ont
répété à satiété, le ministre a dit
qu'il voulait un projet de loi au printemps. Et quand on dit ça... Pour
moi, le printemps se termine demain.
Le ministre est sûr de lui-même malgré les gens, les
députés qui assistaient à la commission parlementaire et
qui ont fait valoir leur opinion à l'encontre de celle du ministre par
les questions qu'ils posaient. Parce que le député d'Or-ford
représentait très bien ce que le ministre pensait. Tandis que le
député de Drummond représentait pas mal ce qu'on pensait
aussi. Mais le député de Drummond n'a pas été
à la commission parlementaire qui a étudié le projet de
loi article par article et on sait pourquoi. On sait que le
député, hier soir, a quitté la salle; on l'a vu à
la télévision. Ça ne nous rend pas dupes de ses
idées, il nous l'a dit d'ailleurs. Et dans ce sens, si le ministre est
sûr, il devrait nous donner, dans le droit de réplique, comme ma
collègue de Chicoutimi l'a indiqué, comme mon collègue
d'Abitibi-Ouest l'a indiqué... est-ce qu'il est prêt à
donner à tous et à chacun de ses collègues le pouvoir de
décider en libre conscience, sans aucune difficulté après,
s'ils décidaient dans ce sens-là?
Parce qu'il y a eu des cas comme ceux-là où, dans notre
propre parti politique, on a laissé des gens s'exprimer. Un exemple: le
député de Drummond, Michel Clair, sur la Régie de
l'assurance automobile du Québec, s'est levé dans cette salle
à rencontre de ce que l'on pensait parce que, dans sa conscience, il ne
voulait pas prendre position pour le projet de loi. Il l'a fait. Il n'a jamais
été pénalisé pour l'avoir fait. Quelques mois
après, il a été nommé ministre du Revenu. Nous
avons eu aussi d'autres personnes qui ont décidé autre chose, qui
ont même décidé de traverser la salle, comme le
député de Sainte-Marie, M. Bisaillon, à l'époque.
Ils ont pris leur décision, ils ont été capables de
prendre leurs responsabilités, comme la députée d'hier. Je
l'ai félicitée de l'avoir fait au su et au vu de tout le monde
parce que ça exprimait ce qu'elle ressent, ce qui fait en sorte qu'elle
exprimait aussi ce que les gens de son comté ressentent et des gens d'un
comté proche du sien, aussi, qui le ressentent, mais qui n'osent pas
l'exprimer.
Je vous donne un exemple typique, les commissions scolaires. Le ministre
des Affaires municipales n'a jamais été présent à
aucun des votes. Le ministre des Affaires municipales, après le vote,
est entré dans cette salle, hier; on l'a tous vu. On sait qu'il
était en désaccord, et la façon de l'exprimer,
c'était d'être à l'extérieur. Je pourrais nommer des
ministres qui n'ont pas voté encore une fois sur la loi du ministre.
J'ai hâte de les voir voter ce soir. Je ne suis pas sûr de les
voir. Et je sais pourquoi ils ne voteront pas. Ils vont être absents
parce qu'ils ne veulent pas voter sur ce projet de loi là. Sauf qu'ils
sont soumis à un principe qui est la majorité d'un caucus: Ou j'y
suis, ou je le quitte. Je ne peux pas avoir le principe d'une porte ouverte ou
fermée; il faut que la porte soit ouverte ou qu'elle soit fermée.
Et dans ce sens, j'attends la réplique du ministre.
C'est le dernier moment que nous aurons en cette salle pour savoir ce
que le ministre pense. Est-ce qu'il a décidé, à partir de
toute l'argu-
mentation qui lui a été donnée, de changer
d'idée? Avec le visage que je lui vois, je pense que non. Mais, au
moins, on aura exprimé par notre voix ce que des milliers et des
milliers de citoyens au Québec, des travailleurs et travailleuses, des
commerçants et commerçantes, des propriétaires, des gens,
hommes ou femmes, qui sont des consommateurs, ce que tout le monde exprime
aujourd'hui, par notre voix, qu'ils sont en désaccord avec cette loi et
trouvent que cette loi n'a aucun bon sens. Merci, M. le Président. (22
heures)
Le Président: Avant de procéder plus loin, je
constate la présence dans l'Assemblée du leader de l'Opposition
et, suite à la demande formulée par le président des
travaux, cet après-midi, afin de faire retirer certains propos
prononcés par le leader de l'Opposition, je réitère la
demande de la présidence au leader de l'Opposition de retirer des propos
qui ont été prononcés ce matin. Est-ce que vous retirez
vos propos, M. le député? M. le leader de l'Opposition.
M. Chevrette: M. le Président, je vais me conformer
à votre directive, parce que j'ai l'intention d'intervenir sur le fond
de la motion.
Le Président: Donc, vous retirez vos propos. Très
bien.
Je suis maintenant prêt à reconnaître un prochain
intervenant. Alors, je reconnais maintenant M. le leader de l'Opposition.
M. Guy Chevrette
M. Chevrette: M. le Président, je vais intervenir sur
cette question, parce que je considère que la vérité a ses
droits en cette Chambre. La vérité a ses droits, M. le
Président, et l'honnêteté intellectuelle a aussi ses
droits. Je n'aurais jamais pensé, M. le Président, qu'on serait
forcés comme parlementaires, à tour de rôle pendant
plusieurs minutes, pendant cinq heures, d'exiger la franchise,
l'honnêteté intellectuelle. M. le Président, quand on est
député, qu'on est élu dans une circonscription
électorale et qu'on se permet de ne même pas avoir la rigueur de
lire concrètement et correctement un texte, on mérite à
peine d'avoir le titre de député. Surtout, M. le
Président, quand on se targue d'appartenir à une formation
politique qui a une certaine rigueur. Cet avant-midi, M. le Président,
j'ai utilisé des mots dans cette Chambre que je ne regrette même
pas, j'ai utilisé des mots qui avaient toute leur signification, sauf
d'être parlementaires, mais qui n'en demeurent pas moins
profondément justes, corrects, et conformes aux définitions que
l'on trouve dans les dictionnaires, M. le Président.
M. le Président, quand on n'est pas capable de lire un texte
correctement, puis qu'on ose, de son siège, affirmer, par exemple, qu'il
y a eu des préférés, des chouchous, qu'on dit qu'il y a 11
détaillants qui ont eu des faveurs, alors qu'il y en a trois pages qui
n'ont pas eu de faveurs, qui ont eu une ordonnance de se conformer à une
loi et, quand on lit un peu plus loin, dans le même texte, que, le 25
février 1987, c'est eux du Parti libéral qui, comme par hasard,
ne mettent pas d'obligation de se conformer, il faut avoir du culot, il faut
avoir du toupet, il faut être malhonnête intellectuellement, M. le
Président, il faut manquer de rigueur et on mériterait
d'être dans une classe de l'équivalent d'une maternelle, M. le
Président. C'est à peu près ça qui s'est
passé dans cette Chambre. Ça, vous appelez ça de la
rigueur? Faites les signes que vous voudrez, vous manquez complètement
d'honnêteté intellectuelle envers la population du Québec.
C'est ça fondamentalement que vous êtes.
Après avoir écouté du monde - ce n'est pas
d'aujourd'hui qu'on parle, M. le Président, des heures d'affaires -
l'ex-ministre de l'Industrie et du Commerce, M. MacDonald, dans cette Chambre,
a essayé de passer un sapin au Québec, aux
Québécois, aux Québécoises. Et, par la suite, est
arrivé un grand dieu des routes qui ne magasine pas le dimanche, M. le
Président, et qui a décidé d'imposer ses volontés
après avoir écouté tout le monde. Ça ne ressemblait
même pas à l'ombre de ce que le député de Nicolet
avait écouté, lui. Et, s'il avait eu le courage politique de se
tenir debout, ce député de Nicolet, M. le Président, s'il
avait eu le courage politique, il aurait fait respecter ce que les gens lui
avaient dit, ce que les gens lui avaient confié et qu'il avait eu le
courage, à l'époque, d'écrire. Mais, là, il se
reconnaît dans un texte de loi qui ne ressemble même pas à
ce qu'il avait entendu, à ce que les gens lui avaient dit de faire,
à ce que les gens lui avaient dit de transposer sous forme de texte
législatif, M. le Président.
Fondamentalement, le Parti libéral a eu un parti pris, un parti
pris contre la classe ouvrière, M. le Président, dans le domaine
de l'alimentation, contre les petits propriétaires de commerce, M. le
Président, Et, dans quelques minutes, on se lèvera pour
applaudir. Vous remarquerez - je vous mets au défi et vous les verrez,
M. le Président - ils vont applaudir à tout rompre un ministre
qui aura rendu service à quelques gros "lobbies" au détriment
d'une collectivité, au détriment des consommateurs
québécois, M. le Président, oui, au détriment des
consommateurs québécois, au détriment de petits commerces
qui faisaient vivre des salariés, qui faisaient vivre des familles. Et
ça, ce n'est pas grave. Les gros "lobbies" prendront de plus en plus de
puissance au détriment de la collectivité
québécoise. Et là, le ministre se gonflera d'orgueil. Mais
dans cinq ans, dans dix ans, on dira: Qui a pensé à ça? Et
probablement avant ça, M. le Président. Parce que, si je me fie
sur ce que j'ai entendu auprès des membres de la Coalition contre, ils
vont vous rappeler sans cesse et rappeler à la cliente-
le - et je les incite à faire ça, M. le Président -
quotidiennement que c'est grâce à ce ministre débonnaire
qui a pensé aux gros. On va lui rappeler que nous, les petits, on avait
une pensée différente. vous savez, je me souviens. ça
été la devise de beaucoup de monde, ça, je me souviens. je
me souviens qu'il y a eu un ministre qui a écouté, mais qui
n'avait rien compris de ce que les gens voulaient. je me souviens qu'au
québec il y avait des salariés qui ne voulaient pas voir changer
ça. je me souviens qu'il y avait du monde qui croyait à une
certaine valeur de ce que ça représente, le septième jour
de la semaine. je me souviens qu'il y avait des petits commerçants et
des familles sur un coin de rue qui vivaient à trois ou quatre avec
l'aide de ce petit dépanneur. je me souviens que j'avais des heures
normales de travail. je me souviens que j'avais des journées normales de
travail. je me souviens que j'avais une semaine normale de travail. je me
souviens, m. le président, que je pouvais espérer vivre une vie
normale. oui, je me souviens. et j'espère qu'on va le lui rappeler
quotidiennement, quotidiennement, et qu'on va le lui rappeler dans certains
comtés en particulier, surtout des comtés fragiles à 114.
je suppose qu'on va rappeler, m. le président, que ces gens-là
ont, d'une façon arrogante, fait fi à peu près de toutes
les consultations populaires, fait fi à peu près de tous les
consensus qui se dégageaient. quand, dans un comté aussi petit
que matane, les commerçants prennent la peine de débrayer en
plein après-midi pour aller faire ressentir tout le poids de leur
indignation et leur dire: ce n'est pas ça qu'on veut comme
collectivité. ce n'est pas ça qu'on veut vivre-mais, m. le
président, la coalition qui est contre, oui, je l'invite, m. le
président, par votre intermédiaire - je dois passer par vous -
à rappeler constamment que ces gens qui ont la vérité
à tout prix... ils ont toute la vérité, ces
gens-là. il y a seulement eux autres qui ont raison. il y a seulement
eux autres qui ont compris le bon sens. et je vois le ministre, m. le
président, là, qui va répondre: écoutez, moi, j'ai
écouté. il y a une différence, il y a un monde entre
écouter et comprendre. il y a un monde. je ne sais pas combien...
Je n'ai pas rencontré, à part certains gros "lobbies", du
monde qui m'a dit: Chevrette défend donc cette loi-là. Au
contraire, partout où je suis passé, on m'a dit: Qu'est-ce qui
lui prend de faire ça? Qu'est-ce qui prend au gouvernement de faire
ça? Qu'est-ce qui prend au gouvernement de ne pas écouter la
population? Qu'est-ce qui prend au gouvernement de ne pas écouter ces
petits commerçants? Qu'est-ce qui prend au gouvernement de ne pas
écouter ces travailleurs? Pourquoi le gouvernement ne
légtfère-t-il pas dans le sens du consensus de la
majorité? C'est ça fondamentalement que j'ai entendu. Je l'ai
entendu à Montréal. Je l'ai entendu à Joliette.
Je l'ai entendu à peu près partout au Québec. Mais
pourquoi, M. le Président, un gouvernement peut-il s'entêter
à légiférer contre un consensus vraiment majoritaire?
M. le Président, à écouter certains gros "lobbies",
on vendrait n'importe quoi dans les pharmacies. On vendrait n'importe quoi le
dimanche dans n'importe quoi. On ne se soucie même pas de la valeur des
gens. M. le Président - et je vais vous le dire, ce que je pense-un
gouvernement qui commence à se fouter des valeurs des individus, un
gouvernement qui se fout éperdument des valeurs de ses concitoyens,
c'est un gouvernement en décadence. Un gouvernement qui ne croit plus
aux valeurs auxquelles les citoyens attachent une importance... (22 h 10)
Ils peuvent rire de l'autre côté. Vous pouvez rire. Riez.
Mais, pour certains et pour plusieurs citoyens du Québec, le dimanche,
ça a une valeur certaine. Riez. Mais vous viendrez vous expliquer
auprès de mes dépanneurs. Vous viendrez vous expliquer
auprès des travailleurs. Vous viendrez expliquer votre arrogance
auprès d'une majorité de la population et, dans quelques
années, si jamais votre loi fait les ravages qu'on peut escompter et que
les monopoles prennent de plus en plus de force au niveau de l'alimentation,
vous viendrez expliquer ce que vous avez fait aux yeux des consommateurs. Vous
viendrez expliquer aux petits Québécois qui auront dû
fermer, parce que la concurrence était devenue déloyale, que vous
avez été un gouvernement qui a pensé à la
collectivité au Québec.
Je termine en vous disant, M. le Président, que la
vérité a ses droits, en cette Chambre. Quand un
député n'est pas capable seulement de lire les paragraphes noir
sur blanc, c'est un député très petit, M. le
Président. Et un gouvernement qui se fout des consensus de la
population, c'est un gouvernement qui est appelé à être
remplacé à très court terme.
Le Président: Je vais maintenant reconnaître M. le
ministre de l'Industrie, du Commerce et de la Technologie, dans l'exercice de
son droit de réplique.
M. Gerald Tremblay (réplique)
M. Tremblay (Outremont): M. le Président, je voterai
bientôt en faveur du projet de loi 75, Loi sur les heures et les jours
d'admission dans les établissements commerciaux. Le dossier des heures
d'affaires fait partie de mon quotidien depuis huit mois. En tant que ministre
de l'Industrie, du Commerce et de la Technologie, je me suis engagé
à trouver une solution à une situation qui s'aggravait de semaine
en semaine, et ceci, principalement à cause de l'iniquité de la
loi.
La député de Taillon a beaucoup parié de
valeurs. J'aimerais vous en parler un peu, des valeurs; pas de celles
des autres, mais des miennes. De mon père, j'ai hérité
certaines valeurs dont la justice et le besoin de contribuer au bien-être
d'une société. Je me suis impliqué pour enseigner aux
jeunes, pendant un certain nombre d'années, l'importance de
l'initiative, du jugement, du sens des responsabilités et du sens des
affaires. Lorsque la majeure partie des intervenants assistaient, à la
fin des années soixante-dix, passivement à la liquidation des
petites entreprises québécoises, je me suis impliqué pour
concevoir un concept qui est appelé, aujourd'hui, le redressement des
entreprises. Lorsqu'en 1981 300 000 petits épargnants risquaient de
perdre leurs épargnes, je me suis impliqué pour redresser les
Caisses d'entraide économique. J'ai accepté, en 1986, la
présidence de la Société de développement
industriel du Québec pour aider les petites entreprises à devenir
plus prospères. Oui, je suis un petit Québécois et,
lorsque j'ai décidé de m'impliquer en politique, c'est pour
exercer une influence directe sur les décisions qui sont appelées
à marquer notre avenir collectif.
Un projet de loi, pour moi, c'est très sérieux, parce que
ça affecte des êtres humains. Les heures d'affaires affectent
toute la population. Lorsqu'on m'accuse d'avoir déposé 25
amendements, qu'on soit donc, au moins, honnête. Il y a eu trois
amendements majeurs, dont deux que j'avais déjà annoncés.
J'ai passé la fin de semaine à relire, relire et relire le projet
de loi pour qu'il y ait le moins de failles possible et pour qu'il soit le plus
parfait possible.
J'ai été également très prudent dans ma
démarche. J'ai mis de l'avant les trois principes:
l'équité, les besoins réels et la qualité de la
vie. J'ai consulté, M. le Président, jusqu'à la
dernière minute, tous les intervenants, sans exception. Encore
aujourd'hui, j'ai écouté attentivement pendant plus de huit
heures, pour un total de 200 heures de consultations, incluant la
préparation de la loi. Plus j'écoute, plus je suis sûr de
mon choix. L'Opposition continue à interpréter mon silence, mon
regard et ma présence comme de l'orgueil, de l'entêtement et on a
ajouté tout à l'heure comme de l'intransigeance, de l'arrogance
et du mépris. On m'accuse d'avoir subi des pressions. Je dois vous dire
qu'en mon âme et conscience je n'ai subi de pressions d'aucun
intervenant, qu'il soit gros ou petit.
Malgré l'excellente présentation de ce matin de la
députée de Taillon, elle n'a pu me convaincre que la position
qu'elle a toujours défendue dans ce dossier aurait été
préférable à celle qui sera adoptée bientôt.
La décision que j'ai prise, je l'ai prise dans le meilleur
intérêt de la collectivité québécoise.
L'avenir nous dira qui a raison et je vivrai avec ma décision. Mais
l'avenir, M. le Président, nous oblige à travailler davantage
ensemble pour bâtir une société d'avenir qui favorisera le
développement social, culturel et économique du Québec.
J'ai confiance en l'avenir. Je suis prêt à relever un autre
défi et j'ai bien hâte de passer à autre chose.
Des voix: Bravo!
Le Président: Le débat étant terminé,
nous allons maintenant procéder à la mise aux voix de la motion
d'adoption du projet de loi 75.
Une voix: Vote enregistré.
Le Président: Vote enregistré, donc qu'on appelle
les députés! (22 h 18 - 22 h 27)
Le Président: MM. et Mmes les députés, je
vous invite à prendre vos places, s'il vous plaît.
S'il vous plaît, MM. et Mmes les députés! À
l'ordre, s'il vous plaît! Je requiers la collaboration des
députés, s'il vous plaît. Mmes les députées,
MM. les députés! S'il vous plaît!
Nous allons maintenant mettre aux voix la motion d'adoption du projet de
loi 75, Loi sur les heures et les jours d'admission dans les
établissements commerciaux.
Que ceux et celles qui sont en faveur de cette motion veuillent bien se
lever, s'il vous plaît.
Le Secrétaire adjoint: M. Bourassa (Saint-Laurent), M.
Pagé (Portneuf), Mme Bacon (Cho-medey), M. Bourbeau (Laporte), M.
Côté (Rivière-du-Loup), M. Tremblay (Outremont), M. Elkas
(Robert-Baldwin), M. Lefebvre (Frontenac)...
Le Président: S'il vous plaît! S'il vous
plaît!
Le Secrétaire adjoint: ... M. Cusano (Viau), M. Picotte
(Maskinongé), Mme Robillard (Chambly), M. Blackburn (Roberval), M.
Maciocia (Viper), M. Middlemiss (Pontiac), M. Bélisle
(Mille-Îles), Mme Dionne (Kamouraska-Témiscouata), Mme Pelchat
(Vachon), M. Lemire (Saint-Maurice), M. Poulin (Chauveau), M. Thérien
(Rousseau), M. Benoit (Orford), M. Williams (Nelligan), M. Kehoe (Chapleau), M.
Doyon (Louis-Hébert), M. Fradet (Vimont), M. Richard (Nicolet-Yamas-ka),
Mme Bégin (Bellechasse), M. Bélanger (Laval-des-Rapides), M.
Gauvin (Montmagny-L'Islet), M. Chenail (Beauharnois-Huntingdon), M. Gautrin
(Verdun), M. Larouche (Anjou), M. Khelfa (Richelieu), M. Gobé
(LaFontaine), Mme Ho-vington (Matane), M. Joly (Fabre), M. LeSage (Hull), M.
Bergeron (Deux-Montagnes), M. Borde-leau (Acadie), M. Audet (Beauce-Nord), M.
Parent (Sauvé), M. Camden (Lotbinière), M. Bradet (Charlevoix),
Mme Cardinal (Châteauguay), M. Farrah (Îles-de-la-Madeleine), M.
Forget (Prévost), Mme Loiselle (Saint-Henri), M. Lafrenière
(Gatineau), M. Lafrance (Iberville), M. MacMillan (Papineau).
Le Président: Que ceux et celles qui sont
contre ce projet de loi veuillent bien se lever, s'il vous
plaît.
Le Secrétaire adjoint: M. Chevrette (Joliette), M. Perron
(Duplessis), Mme Blackburn (Chicoutimi), Mme Marois (Taillon), M. Garon
(Lévis), Mme Harel (Hochelaga-Maisonneuve), M. Jolivet (Laviolette), M.
Baril (Arthabaska), M. Dufour (Jonquière), M. Lazure (La Prairie), M.
Gendron (Abitibi-Ouest), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Léonard
(Labelle), Mme Vermette (Ma-rie-Victorin), M. Claveau (Ungava), M. Boulerice
(Sainte-Marie-Saint-Jacques), M. Morin (Dubuc), Mme Caron (Terrebonne), M.
Boisclair (Gouin), M. Bourdon (Pointe-aux-Trembles), M. Trudel
(Rouyn-Noranda-Témiscamingue), Mme Dupuis (Verchères), M. Beaulne
(Bertrand), Mme Carrier-Perreault (Les Chutes-de-la-Chaudière).
M. Libman (D'Arcy-McGee).
Le Président: Est-ce qu'il y a des abstentions? S'il vous
plaît! S'il vous plaît!
Le Secrétaire: pour: 50 contre: 25
Le Président: La motion est adoptée. M. le leader
du gouvernement.
Projet de loi 50
Prise en considération du rapport de la
commission
M. Pagé: M. le Président, j'appelle la prise en
considération du rapport sur le projet de loi 50, Loi modifiant la Loi
sur la Régie de l'assurance automobile du Québec et d'autres
dispositions législatives, qui est prévue à l'article 44
du feuilleton.
Le Président: Alors, à l'article 44 du feuilleton,
nous allons maintenant prendre en considération le rapport de la
commission de l'aménagement et des équipements sur le projet de
loi 50, Loi modifiant la Loi sur la Régie de l'assurance automobile du
Québec et d'autres dispositions législatives. Je prierais les
députés, s'il vous plaît, qui doivent quitter
l'Assemblée, de le faire le plus rapidement possible et en silence.
Mmes et MM. les députés, s'il vous plaît. Je
requiers la collaboration des députés, s'il vous plaît.
S'il vous plaît! Mmes et MM. les députés, s'il vous
plaît, je vous invite à l'extérieur de l'Assemblée.
Nous devons procéder aux travaux.
Je suis donc prêt à reconnaître un premier
intervenant, M. le ministre des Transports.
M. Sam L Elkas M. Elkas: M. le Président, le
député de
Lévis, président de la commission de l'aménagement
et des équipements qui a reçu le mandat d'étudier le
projet de loi 50, a soumis son rapport mardi matin à cette Chambre. Sans
honneur, a-t-il tenu à souligner. En effet, M. le Président, il
n'a pas de quoi être fier puisque lui et les autres membres de sa
formation politique n'ont jamais permis que l'étude
détaillée du projet de loi puisse commencer. On n'a eu droit
qu'à une litanie de mesures dilatoires qui n'ont fait que tuer le temps
puisque nous ne pouvions jamais procéder à l'étude
réelle du projet de loi 50. Les membres de l'Opposition s'insurgeaient
contre le fait qu'il n'y avait que treize heures de débat, treize
longues heures de débat, M. le Président, et je vous dis qu'il
aurait pu y en avoir cent treize, ça n'aurait changé absolument
rien.
Reprenons, si vous voulez bien, M. le Président, les motions qui
ont été proposées par les membres de l'Opposition. Il y a
eu huit motions, treize heures, M. le Président. Cela,
déjà, en dit beaucoup. La première motion me demandait
d'entendre le Vérificateur général. La lettre de
réponse du Vérificateur général à la
requête du député de Lévis a été
déposée à la commission. Elle était très
très claire.
Le Vérificateur a tenu à rappeler qu'il s'agissait de la
souveraineté du Parlement. "Le Vérificateur général
n'a pas à porter de jugement sur les décisions prises par le
Parlement", écrit-il. La lettre dit également que le
Vérificateur général n'est pas au-dessus du Parlement,
mais qu'il en est le préposé et que toute vérification ne
doit pas mettre en cause le bien-fondé des politiques et des objectifs
de programmes d'un organisme public ou d'un organisme du gouvernement.
La deuxième motion a demandé d'entendre le conseil
d'administration de la Régie de l'assurance automobile du Québec.
Si on avait procédé en toute bonne foi à l'étude
détaillée du projet de loi, le président de la
Régie, M. Jean-Paul Vézina, qui était dans la salle avec
moi-même, aurait pu répondre à toutes les questions des
membres de l'Opposition qui traitaient d'ailleurs de la loi 50. Mais ce
n'était pas leur intention, de toute évidence.
La troisième motion a fait appel à la
Fédération de l'âge d'or du Québec. Avec cette
troisième motion, nous entamions un retour au passé, avec des
discours centrés sur le projet de loi 92 sur la réforme de
l'assurance automobile du Québec adopté au printemps de 1989,
après son étude en commission parlementaire par les mêmes
membres de l'Opposition. On a tenté par tous les moyens d'établir
un lien entre le projet de loi 92 et le projet de loi 50, en insinuant que le
gouvernement tentait de s'enrichir sur le dos des personnes âgées
en ce qui concerne les indemnisations d'accidents d'automobile.
Après une quatrième motion demandant l'ajournement et tous
les discours qui s'ensuivi-
rent, nous sommes passés à la motion cinq qui a
été, évidemment, une suite logique à la motion
trois. Ils ont demandé d'entendre la Fédération des femmes
du Québec. Là encore, il s'agissait de poursuivre le même
argument incidieux: établir un lien entre la loi 92 et le projet de loi
50. On accusait donc maintenant le gouvernement de pénaliser les femmes
au foyer et les personnes âgées.
Les modifications qui ont été apportées à la
Loi sur l'assurance automobile du Québec, entrées en vigueur le
1er janvier 1990, ont injecté plus de 70 000 000 $ en indemnités
supplémentaires annuelles à l'ensemble des victimes de la route.
En plus, d'autres augmentations sont prévues pour les années
1991, 1992 et 1993. Tant au niveau des groupes de l'âge d'or comme des
représentants des groupes féminins, des contacts avaient
déjà été faits par les gens de la Régie et
d'autres rencontres étaient prévues, ainsi que des campagnes de
publicité pour mieux diffuser l'information en ce qui concerne les
modalités d'indemnisation pour ces groupes en particulier. La
futilité de cette motion était donc évidente.
M. le Président, une tactique d'intimidation par excellence: une
sixième motion, cette fois pour convoquer les représentants de
l'Association nationale des camionneurs artisans inc. J'étais heureux de
la présence à la commission d'un groupe de camionneurs,
très nombreux et j'ai parlé longuement avec quelques-uns d'entre
eux, après l'ajournement. Ils ont pu entendre de leurs propres oreilles,
les propos de membres de l'Opposition et comprendre à quel point les
gestes posés par ceux-ci étaient pour des fins partisanes. (22 h
40)
La 7e motion convoquait l'Association des victimes d'accidents
d'automobiles du Québec. Avec toute la sympathie que j'ai pour ces
malheureuses victimes d'accident de la route, M. le Président, leurs cas
ne concernent pas le projet de loi 50, sinon pour mettre en évidence le
besoin de réfection des routes du Québec pour améliorer le
bilan routier. Mais je ne crois pas que c'était l'intention de auteurs
de cette motion.
Finalement, M. le Président, une 8e motion convoquant le
Protecteur du citoyen. La Régie a en permanence dans ses locaux deux
représentants du bureau du Protecteur du citoyen. Ces personnes
discutent sur une base continuelle des dossiers litigieux avec les
fonctionnaires responsables. La Régie est au service de plus de 4 000
000 de Québécois. M. le Président, il est normal qu'il y
ait des cas difficiles à solutionner. Le député de
Lévis a cité en long et en large le rapport annuel du Protecteur
du citoyen, en mentionnant lui-même qu'il existait une excellente
collaboration avec la Régie. En 1988, sur 35 895 demandes
d'indemnisation, il y a eu au moins 1000 plaintes, dont la majorité
s'est avérée non fondée. À mon avis, compte tenu du
volume, le bilan est assez favorable. Pourquoi faire venir le Protecteur du
citoyen pour entendre dire que les choses vont bien, sinon pour retarder
encore, M. le Président, l'étude du projet qui nous
concernait?
Huit motions dilatoires en treize heures, M. le Président,
voilà le bilan de la commission. Ce n'est, en effet, pas un bilan
honorable pour les membres de l'Opposition. J'ai quand même espoir, M. le
Président, que nous pourrons, malgré tout, voter l'adoption de ce
projet de loi afin de libérer les sommes nécessaires au
financement du plan quinquennal du ministère des Transports dont
l'objectif est d'améliorer la sécurité du réseau
routier du Québec, auquel les Québécois ont droit et
qu'ils attendent avec impatience. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Cannon): Merci, M. le ministre des
Transports. Je suis maintenant prêt à reconnaître le
prochain intervenant, M. le député de Lévis.
M. Jean Garon
M. Garon: M. le Président, je vous dirai que le ministre,
ce soir, en pariant une dizaine de minutes, un peu plus de dix minutes, a
parlé, je dirais, à peu près plus longtemps qu'il a
parlé pendant les treize heures de la commission parlementaire où
il n'a à peu près pas ouvert la bouche et il n'a pas pris la
peine de répondre aux questions qui lui étaient
présentées par les membres de la commission. Normalement,
l'étude en commission parlementaire d'un projet de loi, c'est une
étude détaillée, article par article, et qui est
précédée d'une période de remarques
préliminaires et suivie d'une période de motions
préliminaires avant de faire l'étude article par article.
Normalement, à ce stade de l'étude d'un projet de loi, les
membres de la commission peuvent poser des questions en général
sur le projet de loi. M. le Président, on a eu la surprise de notre vie
de voir un ministre qui n'a répondu à aucune question, qui a dit:
Je répondrai à ça plus tard. Mais il ne nous avait pas dit
que plus tard, c'était un bâillon, de telle sorte que, à
aucun moment, le ministre n'a expliqué son projet de loi, n'a
répondu aux questions qui lui ont été posées.
Ça, c'est absolument anormal, pourtant on ne peut pas dire que le
ministre, c'est un ministre fatigué. Contrairement à ce qu'a pu
dire le député de Louis-Hébert, qui disait que les
commissions parlementaires, ça use les ministres, c'était son
deuxième projet de loi. Il y avait eu un petit projet de loi
antérieurement, la loi 26, dans le domaine des transports. La loi 26
était, avec la loi 50 sur la Régie de l'assurance automobile, la
deuxième loi dans le domaine des transports. Il me fait signe qu'il y en
avait deux autres dans le domaine de la sécurité publique, mais
quand même, je ne peux pas dire que le
ministre était usé, qu'il était
épuisé, et puis, j'avais l'impression un peu qu'il venait se
reposer en commission parlementaire parce qu'il se disait: Pendant que je suis
là, les camionneurs ne peuvent pas me demander d'aller les
rencontrer.
Ça faisait un peu son affaire d'être en commission
parlementaire, sauf qu'il n'a répondu à rien. Il n'a pas
répondu aux remarques préliminaires et il n'a pas voulu qu'on
entende aucun des groupes qu'on a proposé d'entendre. Pourquoi? Parce
que le ministre était au-dessus de ça. Malgré qu'il aille
chercher, avec le projet de loi, 877 000 000 $ - ce n'est pas une loi de
pinotte, là - 877 000 000 $ à la Régie de l'assurance
automobile, 625 000 000 $ pour, dit-il, le réseau routier alors qu'il
n'y a aucune augmentation de crédits pour le réseau routier en
1990, 1991 et 1992, selon les prévisions même du ministre des
Finances.
Cette année, on ira chercher 363 000 000 $ sans qu'il n'y ait
aucun travail additionnel dans le domaine routier. Mais le ministre... Pas
d'explication, 625 000 000 $ plus des montants d'argent considérables
pour des fins d'ambulances. Et même des sommes rétroactives, M. le
Président, parce que le décret gouvernemental qui avait
été fait antérieurement en 1988 n'était pas
régulier. Le Conseil des ministres, avec tous les avis juridiques qu'il
pouvait avoir, avec toute la batterie d'experts qu'il peut avoir, n'est
même pas foutu de faire des règlements légaux, de sorte que
dans le projet de loi on parle d'aller chercher 9 100 000 $ pour l'exercice
financier 1988-1989 pour les ambulances, 37 200 000 $ pour l'exercice financier
1989-1990 et 37 500 000 $ pour l'exercice 1990-1991, en même temps que
l'indexation pour les années à venir, ad vitam aetemam.
M. le Président, c'est quelque chose. Un gouvernement qui fait
des règlements illégaux malgré la batterie d'experts,
à son rythme, pas pressé, pas de "filibuster", pas d'étude
de l'Opposition. Il les fait tout seul ses règlements, il n'a même
pas à avoir l'approbation de l'Opposition. Bien il a réussi,
malgré ça, à faire un règlement illégal. Et
aujourd'hui il est obligé, par un projet de loi, de demander de ratifier
des sommes qui ont déjà été versées ou
encore d'autoriser rétroactivement à verser des sommes que la
Régie n'aurait pas versées parce qu'elle n'avait pas le droit de
les verser, malgré le règlement du gouvernement. On ne le sait
pas, on ne l'a jamais su. Le ministre ne nous l'a jamais dit. Sauf qu'il va
demander ces sommes-là. Ce qui veut dire, si on tient compte des
années 1990, 1991, 1992, 1993, 1994, cinq ans, avec une indexation de 5
%, 877 000 000 $ que le ministre va aller chercher dans les fonds de la
Régie pour verser au ministre des Finances, alors que l'argent
n'appartient pas à la Régie. C'est l'argent des assurés;
il n'appartient pas au ministre des Finances, il n'appartient pas au
gouvernement. Et on ira siphonner la Régie de 877 000 000 $. Ce qui
arrivera, M. le Président...
Ça n'arrive pas comme première mesure, c'est la
deuxième fois, la troisième fois, depuis que les libéraux
sont au pouvoir, qu'on siphonne la Régie. On a également, en
1986, voté une loi pour aller chercher 60 000 000 $ par année,
indexés, pour verser à l'assurance-maladie. Ça veut dire
qu'en 1986, 1987, 1988, 1989, 1990, sur cinq ans, comme il s'agit d'un montant
indexé, 326 000 000 $, sans compter les sommes qui seront versées
en 1991, 1992, 1993, 1994, où il y aura encore au moins 250 000 000 $.
Plus 200 000 000 $, en 1988 et 1989, à raison de 100 000 000 $ par
année, en disant que c'était pour des fins de
sécurité routière dans la construction de routes, etc., et
on constate que les fonds n'ont pas augmenté, ce que je
démontrerai dans quelques minutes.
M. le Président, il s'agit de sommes d'argent
considérables: 326 000 000 $ entre 1986 et 1990 pour verser à la
Régie de l'assurance-maladie; 200 000 000 $, apparemment pour le
ministre des Finances, on disait pour des fins de construction routière
alors que ça n'ira pas là, ça n'est pas allé
là. Et dans les années à venir, 625 000 000 $,
prétendument pour les transports, alors que ça n'apparaît
pas dans les crédits anticipés du ministre des Finances, et un
autre montant d'argent considérable pour des fins d'ambulances. (22 h
50)
Pour les fins d'ambulances, M. le Président, décision
gouvernementale absurde où, croyez-le ou non, quand ce ne sera pas la
Régie de l'assurance automobile, ce sera, pour les ambulances, 70 $ du
voyage plus le kilométrage; quand ça sera pour la Régie de
l'assurance automobile, à chaque voyage, ce sera 1500 $ plus le
kilométrage. En quoi ça va coûter 1430 $ de plus que pour
tous les autres de transporter une victime d'accident d'automobile? 1500 $ du
voyage plus le kilométrage, dans la région de Montréal.
Pourquoi? En quoi ça coûte plus cher? Personne ne le sait, on n'a
jamais eu d'explication et quand on l'a demandé à la commission
parlementaire sur les transports, le ministre, député de
Charlesbourg à ce moment-là, je vais vous dire qu'il avait l'air
aussi surpris que nous autres. Le président-directeur
général de la Régie également. Je vais vous dire
que c'était motus et bouche cousue. Pas grand-chose à dire non
plus et il semblait aussi estomaqué que nous autres.
Et le ministre, quand je lui ai posé la question la
première fois, n'avait pas l'air d'être au courant. Mais je vais
vous dire, quand il essayait de m'expliquer qu'il voulait administrer la
Régie comme un homme d'affaires... Trouvez-moi l'homme d'affaires qui
administrerait la Régie au point de vue des ambulances, comme l'a fait
le député de Beauce-Sud, lorsqu'il est passé à la
famille et je vais vous dire qu'il n'y a pas un commerce qui serait encore en
vie au Québec.
Ils seraient tous en faillite, tous en faillite parce que c'est absurde.
Quand vous contez ça aux gens, ils vous regardent, ils ont de la peine
à vous croire. À tel point que, quand le leader de l'Opposition
m'avait conté ça, j'avais demandé qu'il vienne faire les
représentations lui-même en commission parlementaire. Je
n'étais pas capable de croire ça, tellement je trouvais que
c'était absurde.
Le député de Joliette était venu avec moi. On a
commencé les questions. Je regardais, j'étais spectateur de cette
interrogation, parce que ça s'était passé dans une autre
commission parlementaire avec le député de Beauce-Sud qui
était ministre et qui venait chercher, il demandait 1500 $ du voyage
d'ambulance plus le kilométrage, alors que pour tous les autres dans
notre société, ça va être 70 $ du voyage.
Je vois un député encore là qui me regarde, l'air
ahuri; lui aussi ne comprend pas. Il n'y a personne qui comprend. Je vais vous
dire que si, à chaque fois qu'on a un homme d'affaires en politique il
fait ça, le gouvernement au complet va tomber en faillite. Si c'est
ça administrer comme un homme d'affaires, je vais vous dire que
j'espère qu'il n'y en aura pas beaucoup en politique, parce que,
à 1500 $ du voyage d'ambulance, alors que pour les autres, c'est 70 $,
essayons de trouver une explication; moi, je ne suis pas capable de
comprendre.
Je mets même au défi la vice-première ministre qui
me regarde, l'air surprise, de m'expliquer ça. Pourquoi la Régie
de l'assurance automobile, par décision du gouvernement, doit payer 1500
$ du voyage plus le kilométrage alors que, pour les autres, ce sera 70
$? Pourquoi ça coûte 1430 $ de plus? Pourquoi? Je ne suis pas
capable de comprendre.
Je vais vous dire que le député qui est ministre des
Transports n'a pas l'air à comprendre lui non plus parce qu'il n'a pas
donné une seconde d'explication. Et tous ceux à qui on demande la
question au gouvernement nous regardent tous comme s'ils n'avaient pas
été là lorsque la décision s'est prise. Ils ont
l'air estomaqués eux aussi, parce que ça n'a pas de bon sens.
Ça n'a pas de bon sens. On a l'impression que le Conseil des ministres
au complet est tombé sur la tête. Ça n'a pas de bon sens.
1500 $ du voyage d'ambulance, quelle que soit la distance, puisque le
kilométrage est en plus. Apparemment, pour sortir l'ambulance de
l'hôpital et aller chercher un blessé, même si c'est
à trois coins de rue et aller le mener à l'hôpital, trois
coins de rue plus loin, 1500 $ plus le kilométrage. Ce n'est pas le
kilométrage qui va coûter cher, mais 1500 $ du voyage. Si c'est un
autre que la Régie de l'assurance automobile, 70 $. Je vois la ministre
des Affaires culturelles, imaginez-vous si elle avait eu cet argent-là
pour les bibliothèques ou pour d'autres fins! Je lui demande à
elle aussi, si elle veut me répondre à ça. Comment
ça se fait que ça coûte 1500 $ du voyage par décret
gouvernemental, un voyage d'ambulance, alors que pour tous les autres dans la
société, ce sera 70 $? Je demande des explications.
Les éditorialistes qui aiment ça commenter les choses,
j'aimerais ça qu'ils me trouvent une explication. Il y a des gens qui
écrivent dans les journaux et qui ont des explications, des fois, sur
toutes sortes de sujets, j'aimerais ça qu'ils m'en trouvent une seule
concernant le service ambulancier, pour essayer de nous expliquer pourquoi
ça coûte 1500 $ du voyage pour la Régie de l'assurance
automobile, alors que c'est 70 $ pour les autres. Pas d'explication.
Quand on a demandé, M. le Président, d'entendre des
organismes, le Vérificateur général. C'est son travail; il
est payé à peu près 100 000 $ par année, il
pourrait peut-être bien donner un avis. D'autant plus que la loi dit,
à l'article 45 du Vérificateur général: quand c'est
important... De lui-même, on n'aurait même pas besoin de lui
demander. Des fois, j'ai dit et je le répète: J'aimerais
ça avoir Kenneth Dye comme Vérificateur général
à Québec. Lui, il en donne des avis à Ottawa. Il ne s'agit
pas de quelques piastres là. Il a répondu à ma lettre. Il
a dit: Quand je ferai mon rapport annuel, je pourrai en parler. Il ne dit pas
qu'il n'en parlera pas, il dit: Quand je ferai mon rapport annuel. Sauf que si
la caisse est partie... C'est un peu comme si un policier disait, si je
l'appelais alors qu'il se faisait un vol de banque: J'irai quand le vol sera
fait. Vous allez me dire qu'il aurait peut-être été mieux
d'agir par prévention, d'agir avant. Le Vérificateur
général, c'est un peu comme le gouvernement, il dit: Je
répondrai dans mon rapport annuel, plus tard. J'aurais aimé qu'il
me donne une opinion immédiatement et c'est pour ça que j'ai
demandé à la commission de le convoquer à la commission.
Les libéraux n'ont pas voulu. Les députés du Parti
québécois ont voulu et, si les libéraux avaient voulu, il
aurait été obligé de venir donner son opinion.
La Régie de l'assurance automobile, je voulais l'entendre en
commission. Nous, on prétend que la loi ne permet pas de faire ce que
veut faire le ministre avec la loi 50. J'ai même avisé, en
commission parlementaire, que la Régie de l'assurance automobile avait
un article 16 et, un article 16.1, qui dit que le conseil d'administration ne
peut pas être poursuivi pour les actes qu'il accomplit de bonne foi ou
les actes légaux qu'il accomplit, et j'ai dit que, si on versait
l'argent et si j'étais responsable de la Régie un jour, je
n'aurais aucune crainte de prendre des poursuites contre un conseil
d'administration qui aurait fait des actes illégaux. Parce qu'il n'est
pas possible qu'on ait demandé des sommes d'argent aussi
considérables sans avis juridique, on n'en a produit aucun et, chaque
fois qu'on veut faire comparaître quelqu'un devant la commission pour
dire: Est-ce qu'il y a un avis juridique, le ministre n'a pas parlé
de
ces avis juridiques, ne veut pas en parler, au contraire, il sait
à peine qu'il est dans le parlement.
Je dois vous dire que le ministre, concernant cette loi-là, les
explications... Je défie n'importe quel journaliste ou n'importe quel
commentateur de lire les propos du ministre en commission parlementaire; le
temps de la commission a duré 13 heures et le ministre n'a pas pris 15
minutes. Pour 877 000 000 $, ça fait cher la minute! Pourquoi? Parce
qu'il ne s'est pas donné la peine. On a voulu faire entendre la
Régie de l'assurance automobile pour lui demander: Avez-vous le droit de
dépenser des sommes d'argent pour la sécurité
routière, alors que votre loi dit quand la sécurité
routière peut être touchée, quand vous pouvez toucher
à la sécurité routière? C'est défini
à l'article 2, paragraphe d, de la loi où on dit que, la
sécurité routière - et on spécifie les deux cas
dans la loi - c'est, premièrement, quand il s'agit du comportement des
automobilistes, comportement, ça peut vouloir dire mettre la ceinture
ou, encore, quand il s'agit de la sécurité routière pour
des fins d'inspection des véhicules moteurs, par exemple, si les
véhicules n'ont pas de freins, des freins défectueux ou si
l'automobile n'est pas en bon état, là, la Régie a le
droit d'intervenir, pour ne pas qu'il y ait des automobiles qui circulent sur
la route qui sont en mauvais état ou, encore, lorsque les comportements
des automobilistes ne sont pas corrects, la Régie peut intervenir.
Mais elle n'est pas là, la Régie, pour prendre des sommes
d'argent de l'assurance pour mettre des couches d'asphalte, des couches de
gravelle, pour payer pour les barres blanches. On est dans une époque
nouvelle, M. le Président, où le ministre des Transports... Quand
les gens avaient demandé la route à quatre voies vers le lac
Saint-Jean, l'ancien ministre avait promis un grand bout à Stoneham,
vers le parc des Laurentides, où, récemment, il est allé
faire une conférence de presse devant les critiques
générales. Il y est allé et il a promis des barres
blanches. Je dois vous dire que c'est un événement historique. Je
n'avais jamais vu, moi, un ministre promettre des barres blanches. J'ai
déjà vu des gens qui ont promis des routes de gravelle, des
couches d'asphalte, des nouvelles routes, des autoroutes, mais promettre des
barres blanches, là, je me dis: Là, on est vraiment rendu dans le
fond de la chaudière pour promettre des barres blanches, pour
présenter des bilans ou des projets ou en disant qu'au cours des
prochaines années on va dépenser tant de millions pour les barres
blanches. Je dois vous dire que je n'avais vu ça. (23 heures)
Je vois la vice-première ministre qui me regarde. Pour moi, elle
n'a pas lu les articles de journaux qui ont rapporté les paroles du
ministre qui avait promis des barres blanches, qui avait dit qu'au cours des
prochaines années il dépense- rait 30 000 000 $ pour faire des
barres blanches. Je vais vous dire que les gens auraient aimé mieux
entendre parler des fonds de routes en dessous des barres blanches. Ils
auraient été plus intéressés. Mais le gouvernement
en est rendu là, alors ce n'est pas surprenant qu'on se retrouve avec un
réseau routier complètement bousillé,
détérioré sous le gouvernement actuel. Ce n'est pas
surprenant qu'on se retrouve devant des manifestations de camionneurs comme
jamais auparavant. Le gouvernement a été chanceux, hein, que les
associations de camionneurs ne viennent pas en même temps. Ils sont venus
à 15 jours d'intervalle l'un de l'autre. Mais quand c'est rendu à
3000 camionneurs pendant plusieurs jours et, ensuite, 15 jours après,
2000 à 3000 autres camionneurs qui sont ici autour du parlement ou
dispersés dans des centres de la ville de Québec depuis... C'est
la 16e journée aujourd'hui, ce sera la 17e journée demain s'ils
sont encore là. Ça fait quelque chose, M. le
Président.
Ce n'est sans doute pas parce que les gens sont heureux s'ils viennent
par milliers demander au gouvernement tout simplement de respecter ses
engagements. On a cru au ministre, nous autres. Pendant trois ans, il nous a
dit des choses, l'ancien ministre, député de Charlesbourg. Et le
ministre actuel ne répond plus et le sous-ministre dit: Le ministre est
changé, vous devez oublier tous les engagements du ministre
antérieur. Les camionneurs sont ahuris. Ils disent: On a cru que les
promesses du gouvernement faites par l'ancien ministre, député de
Charlesbourg, seraient respectées, parce que c'étaient des
promesses du gouvernement par un ministre qui parlait au nom du gouvernement,
qui avait l'autorité de parler au nom du gouvernement et, en même
temps, on se rend compte que le sous-ministre, que tout le monde sait proche du
premier ministre... Vous savez, les camionneurs ont vraiment compris rapidement
que M. Bard était proche du premier ministre. Alors, ils l'ont
marqué sur leurs pancartes pour montrer qu'ils le savaient. Pourquoi?
Parce qu'ils se rendent bien compte, les camionneurs, et c'est pour ça
qu'on a demandé de les entendre eux aussi... Pourquoi? Parce que, dans
le rapport de la Régie de l'assurance automobile, il est indiqué
qu'une des principales mesures de sécurité routière qu'il
pourrait y avoir c'est le contrôle routier que revendiquent justement les
camionneurs.
Et, comme on parle d'argent de la Régie de l'assurance
automobile, il n'était pas inconvenant ni impensable qu'on demande
à l'Association nationale des camionneurs artisans de venir nous
rencontrer. Puis, si la commission avait eu à siéger, on aurait
demandé aussi d'entendre l'autre association, dont M. Miller est le
président, l'Association des propriétaires de camions-remorques
indépendants. Parce que la Régie elle-même dit, dans son
rapport: Une des façons d'améliorer la sécurité
routière, c'est qu'il y ait
un véritable contrôle routier au Québec. Exactement.
Les revendications des deux associations de camionnage qui ont dit: On
était d'accord avec le député de Charlesbourg lorsqu'il
nous promettait ça, mais il l'a promis pendant trois ans puis il ne l'a
pas fait.
M. le Président, on a demandé aussi d'entendre
l'Association des victimes d'accidents d'automobile du Québec. J'imagine
que ça les intéresse si on vide la caisse de 877 000 000 $. C'est
leur argent à eux puisqu'ils sont des assurés victimes
d'accidents d'automobile. Ce n'était pas anormal. On a demandé
également d'entendre la Fédération des femmes du
Québec. Pourquoi? Parce que, avec la réforme, le changement de la
loi en juin 1989, on a économisé sur le dos des femmes,
essentiellement les mères de famille qui sont à la maison, plus
particulièrement, ou les autres conjoints qui sont à la maison et
qui n'ont pas d'emploi. Mais le plus grand nombre touché, ce sont les
mères de famille qui sont à la maison et, avec la réforme,
on ne veut plus, on ne peut plus leur supposer un emploi comme avant et elles
sont coupées par le fait même. La Fédération des
femmes du Québec s'était plainte de ça justement par un
communiqué en janvier 1990. On voulait les entendre. On parle de
politique familiale. Est-ce qu'on va faire une politique familiale en
commençant d'abord par pénaliser les femmes ou les conjoints qui
sont à la maison?
M. le Président, on voulait entendre aussi la
Fédération des clubs de l'âge d'or du Québec.
Pourquoi? C'est un autre groupe qui a été pénalisé
par la réforme de la loi de juin 1990 puisqu'on dit qu'à partir
de 64 ans leurs prestations sont coupées de 25 % et, à 68 ans,
terminées. On coupera 25 % par année; 25 % à 64 ans, 25 %
à 65 ans, 25 % à 66 ans, 25 % à 67 ans par rapport
à la rémunération d'emploi qui est supposée
à une victime d'accident d'automobile puis, après ça,
terminée. À 68 ans, plus une cenne pour la
rémunération d'emploi. Est-ce qu'on ne pense pas que la
Fédération de l'âge d'or est intéressée ou
n'est pas intéressée? Pourquoi essayer d'économiser des
sommes d'argent sur le dos des gens les moins fortunés, les personnes
âgées qui n'ont pas le temps de se refaire et, en plus, victimes
d'accidents d'automobile ou, encore, les conjoints à la maison qui
restent, la plupart du temps, à la maison pour s'occuper de leurs
enfants à temps plein. Alors que tout le monde dit que ça
prendrait une politique familiale, on aura eu un clou de cercueil dans la
politique familiale avec les conjoints à la maison qui n'ont pas
d'emploi à l'extérieur du foyer, comme on vient avec les heures
d'affaires, pénaliser ceux qui sont au travail.
M. le Président, ce n'était pas inconvenant de demander
à ces gens de venir nous renseigner, nous rencontrer et puis nous dire
quelles difficultés rencontrait le Protecteur du citoyen.
Le Protecteur du citoyen a des pages dans son rapport annuel qui
concernent les délais de la Régie de l'assurance automobile. Il
fait plusieurs représentations sur ce qui devrait être fait pour
améliorer l'administration de la Loi sur la Régie de l'assurance
automobile au Québec. On voulait l'entendre. Pourquoi? Parce que le
ministre va chercher 877 000 000 $ par cette loi-là, seulement au cours
des cinq prochaines années, sans compter les années... Je n'ai
pas voulu additionner les chiffres après cinq ans, mais, seulement en
cinq ans, il va chercher 877 000 000 $. Il me semble qu'il n'était pas
inconvenant de rencontrer ou de demander de rencontrer ceux qui sont
touchés par ces mesures.
On voulait demander également au Club automobile du
Québec, une association de protection de consommateurs dans le domaine
de l'automobile. Et, également, l'Association de protection des
automobilistes. On aurait voulu leur demander, également. Ce n'est pas
inconvenant, ça. Ce sont les gens qui s'occupent de protection des
automobilistes. Le ministre dit: Je ne veux rien savoir. Pourtant, il aurait
été le premier à approuver et favoriser ces rencontres
parce qu'il arrive. Il n'a pas de doctorat global. Il était dans le
téléphone avant. Pas directement dans le téléphone,
mais pour la compagnie de téléphone. Il était pour Bell
Canada. Il n'est pas dit que quelqu'un qui travaille pour une compagnie de
téléphone est spécialiste de l'assurance automobile, ce
n'est pas évident. Ça aurait été une bonne chose
pour lui d'entendre ces gens-là pour comprendre davantage leur situation
plutôt que refuser de les entendre. J'ai été surpris. Je
comprends qu'il vient de l'ouest de Montréal, mais ça n'aurait
pas été mauvais. Le ministre de l'Éducation a
déjà dit que le député de D'Arcy-McGee devrait
sortir un peu, ça déniaise. Je pense aussi que ça aurait
valu pour le ministre des Transports de sortir un peu de l'ouest de
Montréal et d'aller voir un peu ce qui se passe dans les
différentes régions du Québec ou, au moins, on
était prêt à demander aux gens de venir en commission
parlementaire sans déplacer le ministre pour qu'il vienne prendre
connaissance de leurs problèmes. Ça déniaise aussi les
ministres de connaître ces problèmes-là.
Mais non, le ministre a refusé. M. le Président, quand on
parle de treize heures de commission parlementaire et bâillon
après treize heures, ça là, M. le Président, c'est
un précédent historique. Je suis persuadé que dans tout
Parlement démocratique du monde occidental il n'y a pas un Parlement
démocratique du monde occidental où on a bâillonné
le Parlement et l'Opposition sur un projet de loi de nature fiscale, où
on va chercher 877 000 000 $ après treize heures de débats en
commission parlementaire et sans vouloir entendre davantage l'étude du
projet de loi. Je suis persuadé que c'est un
précédent.
Si on fait une recherche, si des étudiants
veulent faire un projet de recherche et qu'ils regardent ce qui se passe
ailleurs dans les pays démocratiques du monde, je suis persuadé
qu'ils n'auront pas de précédent où on bâillonne le
Parlement, bâillonne l'Opposition après treize heures de
débats. Alors qu'on est en train de dénaturer la Régie de
l'assurance automobile, une compagnie d'assurances qui appartient à tous
les contribuables du Québec obligatoirement assurés en vertu de
la loi - il y a 4 000 000 d'assurés - et qu'on vide la caisse, que le
ministre des Finances part avec la caisse, avec la complicité du
ministre des Transports qui est supposé être le gardien de la
caisse... C'est lui qui serait supposé de dire non au nom des
automobilistes. Au contraire, il tient le sac, il tient la poche pendant que le
ministre des Finances met l'argent.
Moi j'ai appris à la petite école que celui qui aide
à faire un crime est aussi coupable que celui qui le commet. Pourquoi
c'est un crime? Ce n'est pas l'argent du ministre des Finances, ce n'est pas
l'argent du gouvernement, c'est l'argent des assurés, c'est l'argent des
victimes d'accidents d'automobile et on n'a pas le droit de s'accaparer leur
fonds, leur argent. S'il y en a de trop, et que la Régie de l'assurance
automobile... J'ai bien dit que ce n'est pas fini ce débat-là.
Même si vous avez mis le bâillon, ce n'est pas fini. Ce n'est pas
fini! La Régie de l'assurance automobile n'avait pas le droit de
collecter de l'argent plus qu'elle en avait besoin pour fins d'assurance
automobile. (23 h 10)
Ou elle en a trop, ou elle n'en a pas trop. Si elle en a trop, c'est
parce qu'elle en a perçu trop et elle devrait le remettre aux
assurés. Si elle n'en a pas trop et verse de l'argent dont elle a
besoin, à ce moment-là, elle devrait augmenter les primes pour
payer les prestations des assurés. Ça veut dire qu'il y aura des
augmentations de prime pour les assurés dans les mois qui viennent;
c'est ça que ça veut dire. Vous savez qu'on parie, avec ce
montant d'argent là, avec la loi de 1986 et la loi de 1988, de
près de 1 500 000 000 $; on parie de beaucoup d'argent. On ne parie pas
de pinottes, là, on parie de 1 500 000 000 $ qu'on aurait
été siphonner de la caisse de la Régie de l'assurance
automobile.
J'étais content, j'ai vu un editorial dans Le Soleil
récemment, ce matin. J'ai dit: Bon! Un éditorialiste qui
écrit. Ce n'est pas simple, il faut regarder le projet de loi, il faut
l'analyser. J'ai dit: Je comprends que ce n'est pas simple, ça prend un
petit peu de travail. Mais je trouve ça de valeur qu'on prêche
actuellement, qu'on explique ce qui se passe et qu'il n'y ait pas plus de
commentaires de la part de nos éditorialistes, de nos gens qui
commentent l'actualité, de nos gens qui sont là pour jouer un
rôle un peu moralisateur par rapport à ce qui se fait dans le
parlement. Mais ça viendra parce qu'on ne peut pas faire un hold-up de
cette ampleur sans que ça paraisse à un moment donné.
Ça reviendra, vous savez, parce qu'on ne peut pas faire des choses comme
ça sans...
Vous savez, le gouvernement, on lui avait dit, en commission
parlementaire: Vous n'avez pas le droit d'aller chercher de l'argent pour des
fins d'ambulances. Ah! Il y a des gens qui se pensaient au-dessus de ça.
Aujourd'hui, on est obligé de faire un projet de loi rétroactif
parce qu'on n'avait pas le droit On avait raison, l'Opposition avait raison,
malgré toute l'expertise qui est avec le gouvernement pour faire les
projets de règlement. On avait raison. Là, on est obligé
d'aller chercher des sommes rétroactivement, parce qu'on n'avait pas le
droit.
Aujourd'hui, quand le ministre essaie de faire croire, après
ça, que c'est pour mettre plus d'argent dans les routes, alors qu'on
voit que, dans le budget du ministre des Finances, il n'y a pas d'argent
additionnel pour les routes... Il n'y a pas d'argent additionnel pour les
routes, j'en ai fait la démonstration. Par rapport à 1989, il y a
moins d'argent, en termes de travaux, pour les routes, en 1990, puisqu'il y a
le même montant d'argent au total, 1 020 000 000 $; avec le taux
d'inflation à 4,8 %, ça veut dire, avec le taux que prend le
ministre des Finances, 49 000 000 $ de moins de travaux en 1990. Ça va
vouloir dire aussi moins de travaux en 1991 qu'en 1989. Et si on additionne
1990, 1991 et 1992 ensemble, en dollars constants de 1989, et on fait la
moyenne, il y aura une moyenne, pour ces trois années-là, de
moins d'argent qu'en 1989. Et on dit qu'en 1993-1994 il pourra y avoir un peu
plus d'argent, c'est-à-dire 104 000 000 $ sur deux ans, à la
condition que le taux d'inflation ne dépasse pas 5 %. Je vais vous dire
que celui qui peut gager qu'il y aura un taux d'inflation qui ne sera pas
supérieur à 5 % en 1991, ii est bon. Parce qu'avec la TPS qui
s'en vient il y en a qui parient, seulement en termes d'augmentation... Le
gouvernement fédéral reconnaît une augmentation de 1,2 % de
l'inflation. Et il y en a d'autres qui disent que l'inflation pourrait
augmenter, l'an prochain, seulement à cause de la taxe sur les produits
et services du gouvernement fédéral, de 2 %à3 %.
En attendant, on pénalise les gens, on les siphonne et on fait
des bâillons après trois heures de débat, dans un cas, et
dans le cas des heures d'affaires, vingt heures de débat. Je vais vous
dire que ce n'est pas un jour glorieux, ce n'est pas une session glorieuse pour
le gouvernement. Et, si les gens ne sont pas capables de faire leur travail
mieux que ça, c'est au premier ministre d'assumer ses
responsabilités. Il faut être capable de faire des projets de loi.
J'en ai fait 60, comme ministre; je n'ai pas fait un bâillon une seule
fois. J'ai fait une Loi sur la protection des terres agricoles, qui
était une loi considérable; on n'a pas fait de bâillon. On
a entendu tout le monde, on est allé même dans les régions
pour les entendre. Et, une fois que la
loi a été déposée, on a entendu tous ceux
qui voulaient être entendus également. Et on a fait tout le
débat que l'Opposition a bien voulu faire dans le temps, sans faire de
bâillon.
Dans d'autres cas, j'ai vu même - je vois le député
de Portneuf qui est ici - la loi sur le parc agro-alimentaire de
Montréal, où il y avait même une entente entre le
gouvernement du Québec et Montréal. L'Opposition n'a pas voulu
passer le projet de loi au mois de décembre de l'année 1984 - si
ma mémoire est bonne, décembre 1984. Chacun est venu parler,
même ceux qui ne connaissaient rien dans le domaine agricole, pour
empêcher que ça passe. Il y a même le député
de Nelligan qui était venu faire un discours à ce
moment-là; il n'avait aucune idée de quoi il s'agissait, mais il
parlait pour parier, pour prendre le temps. On n'a pas adopté le projet
de loi à Noël parce qu'on n'a pas voulu faire de bâillon,
même s'il y avait une entente entre le gouvernement du Québec, le
ministère de l'Agriculture et la ville de Montréal. Et on n'a pas
essayé de faire de simagrées, on a pris notre biscuit parce qu'on
a dit: Ce n'est pas comme ça qu'on va faire des lois. Et on a attendu
plus tard pour passer la loi. Parce que c'est comme ça que ça
fonctionne, un Parlement. Un Parlement qui fait des bâillons comme il le
fait, après quelques heures de débat comme ça, ce n'est
pas un gouvernement qui a beaucoup de fierté et ce n'est pas, surtout,
un gouvernement qui a le sens démocratique.
C'est le premier ministre qui est responsable. Le premier ministre est
responsable. C'est le premier ministre, quand même, qui a fait
"l'appointement" de ses ministres. C'est le premier ministre également
qui, dans des questions comme ça, donne son autorisation. C'est clair
que le premier ministre, il a fallu qu'il donne son autorisation pour
procéder de cette façon-là. Mais ce n'est pas à
l'honneur du gouvernement. Ce n'est pas à l'honneur du gouvernement
qu'on ait procédé de cette façon-là dans un projet
de loi comme celui-là. Ah! je comprends, ça va permettre de faire
quoi? Ça va permettre de passer une loi, de force, sans débat,
sans débat, mais ce n'est pas de cette façon-là qu'on
fonctionne dans une société démocratique.
M. le Président, vous savez, l'Opposition, quand on regarde... On
a l'impression, quand le gouvernement considère l'Opposition, qu'il
considère qu'on est en charge de bâtons de Popsicle. On vient nous
téter des consentements. On vient nous téter des consentements,
mais je vais vous dire qu'on a l'impression de rester avec des bâtons de
Popsicle.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Garon: Ce n'est pas comme ça qu'on fonctionne dans une
société. Dans une société normale, il y a des
débats ouverts...
Le Vice-Président (M. Cannon): M. le député,
en conclusion, s'il vous plaît.
M. Garon: Oui, M. le Président. Dans une
société normale avec des débats ouverts, les gens ont
droit de participer dans une société démocratique et
l'Opposition a un rôle à jouer pour faire valoir le point de vue
de ceux qui ne sont pas d'accord avec le projet de loi. Et je peux vous dire,
quand je regarde le nombre de ministres qui ne sont pas capables de
répondre aux questions qu'on pose concernant le projet de loi, qui n'ont
même pas d'explication, qui se réfugient dans le silence et
après ça font des bâillons, sans avoir même
expliqué leur projet de loi, c'est parce qu'on est bien
gêné d'expliquer le projet de loi. Et je peux vous dire que ce
projet de loi passera, au nom du gouvernement, comme un projet de loi honteux,
honteux, dont il se souviendra longtemps et qu'on donnera comme exemple comme
mauvais projet de loi dans les cours de droit de nos facultés de droit.
Je vous remercie, M. le Président.
Le Vice-Président (m.
cannon): merci, m. le
député de lévis. je suis prêt à
reconnaître le prochain intervenant. mme la députée de
terre-bonne.
Mme Jocelyne Caron
Mme Caron: Merci, M. le Président. M. le Président,
cette troisième motion de clôture, ce troisième
bâillon est né, bien sûr, de l'impatience du ministre des
Transports. Il faut dire, à sa décharge, qu'il était
peut-être préoccupé, un petit peu distrait par les
camionneurs qui envahissent le tour du parlement. Il faut dire que ce
dossier-là il était un petit peu moins impatient de le
régler. Il était moins pressé. Aller chercher de l'argent
dans les poches des contribuables ou dans la caisse des assurés de la
Régie de l'assurance automobile, ça c'est pressant. Mais
régler des problèmes, ça c'est un petit peu moins pressant
pour le ministre des Transports. Donc, pour aller chercher de l'argent, treize
heures de commission ça semblait suffisant. Régler le
problème des camionneurs, bien, ils sont encore ici depuis seize jours
et ils attendent toujours la bonne volonté du ministre des
Transports.
Donc, la motion de clôture est née de l'impatience du
ministre. Mais le projet de loi 50, lui, il est né de l'appétit
vorace, je dirais même féroce, M. le Président, de ce
gouvernement devant les surplus de la caisse de la Régie de l'assurance
automobile. Depuis des mois, le Conseil des ministres, le président du
Conseil du trésor en tête, scrute attentivement tous les moyens
possibles et impossibles - et quand c'est impossible on passe une nouvelle loi
- pour aller chercher de l'argent, mais surtout sans que les contribuables ne
s'en aperçoivent. Ça c'est la préoccupation
première. Il ne faut pas que les
contribuables s'en aperçoivent trop. C'est évident
qu'à cet égard la caisse de la Régie de l'assurance
automobile constituait une cible extraordinaire. Ça ne paraît pas
tellement. Les contribuables, on ne vient pas leur en demander à
nouveau. On prend la caisse tout simplement. C'étaient donc 877 000 000
$ à portée de la main, une vraie mine d'or pour le
gouvernement.
Qui a permis ce surplus de la caisse de la Régie de l'assurance
automobile? Bien, ce sont les automobilistes. Donc, qui devrait
bénéficier de ces surplus? Bien, les assurés
eux-mêmes. On devrait diminuer les coûts pour les assurés si
- et c'est là la question importante - la Régie fonctionne
à merveille. Mais est-ce qu'elle fonctionne à merveille, M. le
Président? Est-ce que la Régie de l'assurance automobile est
efficace et satisfaisante? Est-ce que cette grande compagnie d'assurances
collectives accomplit sa mission première? On va la relire sa mission
première... (23 h 20)
Le Vice-Président (M. Cannon): M. le député
de Duplessis.
M. Perron: Je m'excuse auprès de ma collègue.
Est-ce que vous pourriez demander le quorum, s'il vous plaît.
Le Vice-Président (M. Cannon): Oui. Douze. Qu'on appelle
les députés, s'il vous plaît! Ça va. Je constate
effectivement qu'il y a quorum. Mme la députée de Terrebonne, si
vous voulez poursuivre votre intervention s'il vous plaît.
Mme Caron: Merci, M. le Président. Ça confirme ce
que je disais tantôt: la préoccupation première, c'est
vraiment d'aller chercher de l'argent et non pas d'entendre les arguments de
l'Opposition.
Donc, en avril 1977, la réforme de l'assurance automobile du
gouvernement du Québec, qui était faite, il faut se le rappeler,
par le ministère des Consommateurs, des Coopératives et des
Institutions financières, c'était très clair. On disait:
Nous nous sommes fixé comme objectif d'assurer une indemnisation
meilleure et rapide - retenez bien - de toutes les victimes. Les dommages
corporels représentent les pertes les plus importantes socialement.
Donc, on voulait être rapide.
Pour voir si cette Régie fonctionne vraiment bien, on va prendre
un exemple bien concret, M. le Président. Que faire en cas d'accident de
la route? Je me demande si le ministre le sait. D'abord, je vous conseille
beaucoup de patience parce que ça ne prend pas seulement treize heures
d'étude en commission ou d'un dossier pour régler un
problème avec la Régie de l'assurance automobile. Il faut d'abord
compléter, bien sûr, un rapport, qui va être
évalué; c'est plus que treize heures, c'est plus que seize jours.
Et là, si on évalue positivement le dossier, il y a une
indemnité de remplacement. Ah mais là, je ne vous souhaite pas,
M. le Président, d'être une personne au foyer, d'être une
mère de famille ou d'être une personne âgée ou un
étudiant ou une étudiante, parce que, en partant, vous êtes
pénalisé, parce que le travail que vous accomplissez n'a aucune
valeur.
Et là, si vous avez le malheur d'avoir une rechute, eh bien,
c'est la grande aventure qui commence: Bureau de la révision de la
Régie de l'assurance automobile du Québec: entre un an, un an et
demi. Si la décision est négative, ce qui arrive dans 80 % des
cas, eh bien là vous faites un appel à la Commission des affaires
sociales et, là, préparez-vous parce que de la patience... C'est
de la patience infinie qu'il faut. Parce que c'est de deux à trois ans
minimum pour être entendu.
Ce que je vous donne là, M. le Président, ce ne sont pas
des cas d'exception. En juin 1990, il y avait 4300 personnes au Québec
qui attendaient au Bureau de révision et le nombre était encore
plus élevé à la Commission des affaires sociales. Si, par
malheur, vous êtes victime d'un acccident de la route en travaillant ou
que vous êtes déjà une victime d'accident du travail, eh
bien là c'est la grande partie de ping-pong en règle, M. le
Président, parce que là on va vous transférer entre la
CSST et la Régie de l'assurance automobile et là vous en avez
pour des années à essayer de trouver une solution.
Est-ce qu'on se demande de l'autre côté que fait la
personne en attendant, pour vivre? Qu'est-ce qu'elle fait? Est-ce que ces gens
font du bureau de comté? Sûrement, ils ont dû en rencontrer
des personnes victimes d'accident d'automobile, mais qu'est-ce qu'elles font?
Elles vivent sur leurs économies, M. le Président. Certaines
doivent vendre leur maison, dépenser l'argent de la vente de la maison
et, en dernier recours, l'aide sociale, en attendant, qu'elles devront remettre
si jamais elles gagnent leur cause.
Est-ce que ça répond vraiment au but visé? Non.
Vous vous souvenez le slogan, M. le Président? C'était: "La
personne avant toute chose". Avec des procédures bureaucratiques aussi
longues, ce n'est plus la personne avant toute chose, M. le Président,
pas du tout.
En résumé, avant d'aller chercher les surplus de la caisse
de la Régie de l'assurance automobile, on doit se poser les questions
suivantes: Est-ce que, dans les faits, la Régie a réussi à
établir une efficacité dans le traitement des dossiers en
révision? Non, M. le Président. Est-ce qu'elle a réussi
à établir une efficacité dans le traitement des dossiers
en appel à la Commission des affaires sociales? Non, M. le
Président. Est-ce qu'on a réussi à établir des
mesures plus équitables pour l'évaluation des indemnités
de remplacement pour les personnes au foyer, pour les mères de famille,
pour les personnes âgées, pour les étudiants et les
étudiantes? Non, M. le Président. Est-ce que les
accidentés restés invalides reçoivent présentement
des indemnités équitables, par rapport au coût de la vie?
Non, M. le Président. Si la Régie de l'assurance automobile
réussit à remplir toutes ces conditions à la base
même de sa mission et non celles qu'on veut lui donner maintenant, si,
après tout ça, il reste de l'argent - ce dont je doute fort - et
qu'elle ne sait vraiment plus quoi faire, M. le Président, bien, elle
pourra toujours réduire les primes de l'assurance automobile, M. le
Président. Quant à moi, ce serait la première bonne
nouvelle pour les consommateurs depuis le 25 septembre dernier. Merci, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Cannon): Merci, Mme la
députée de Terrebonne. M. le député de
Bertrand.
M. François Beaulne
M. Beaulne: Merci, M. le Président. Lorsqu'elle a
été créée, en 1977, la Régie de l'assurance
automobile du Québec visait essentiellement cinq objectifs que je vous
rappellerai. D'abord, elle visait une indemnisation meilleure et rapide, au
plus bas coût possible; deuxièmement, elle visait à
réduire les coûts d'administration de l'assurance automobile et
à assurer que le coût global de l'assurance reflète le
service que les Québécois en retirent; troisièmement, elle
visait une accessibilité de l'assurance à tous;
quatrièmement, elle visait à améliorer le bilan routier du
Québec par l'établissement de mesures de sécurité
routière afin de diminuer les coûts du régime;
cinquièmement, elle visait à favoriser le développement
des entreprises québécoises en canalisant vers le secteur public
une partie des fonds générés par l'assurance
automobile.
En fait, la question qui avait motivé à l'époque la
ministre Lise Payette pour introduire ce projet de loi était
essentiellement le problème central qui était celui du retour aux
assurés, sous forme de compensations, des primes perçues. La
Régie de l'assurance automobile est avant tout une compagnie
d'assurances. Or, toute bonne compagnie d'assurances se conforme aux politiques
suivantes: ou bien elle augmente les primes lorsque la conjoncture l'exige, ou
bien, elle baisse les primes pour faire bénéficier les
assurés qui se conforment à ses objectifs.
Le gouvernement du Québec a eu comme objectif parallèle,
depuis déjà plusieurs années, d'améliorer la
sécurité routière. Cet objectif s'est manifesté de
plusieurs façons par une campagne de publicité bien
orchestrée contre l'alcool au volant, par l'imposition de cours
obligatoires pour les plus jeunes, en prévision d'obtenir leur permis de
conduire, par le resserrement du système de points de
démérite, par le resserrement également des
pénalités pour conduite avec facultés affaiblies.
Les surplus accumulés par la Régie auraient
été une bonne occasion de réduire les primes pour ceux qui
se conforment à ces objectifs et qui se conforment au Code de la route.
Grâce aux surplus accumulés, la Régie aurait pu
également introduire des mesures incitatives financières de
façon que, outre les mesures pénalisantes comme le resserrement
des pénalités concernant la conduite avec facultés
affaiblies, outre le resserrement des pénalités pour conduite
avec alcool, outre l'imposition de cours obligatoires avant l'obtention de
permis de conduire pour les plus jeunes, elle aurait pu utiliser les surplus
pour introduire des mesures financières, parce qu'on sait tous que les
mesures financières sont souvent les mesures les plus efficaces au
niveau de l'incitation des citoyens à se conformer aux objectifs que
l'on veut bien promouvoir. Au contraire, le dernier budget laissait
présager des augmentations dans les frais d'immatriculation et dans les
frais d'enregistrement des véhicules automobiles. D'ailleurs, il n'y a
pas si longtemps, la ville de Québec était ici témoin des
protestations des propriétaires de motos qui, justement, venaient
protester contre l'augmentation substantielle de leurs frais d'enregistrement.
(23 h 30)
M. le Président, si la caisse était vide ou si elle
accusait un déficit important, on comprendrait que de telles mesures
incitatives ne puissent être appliquées et on comprendrait
également que le gouvernement, de façon à renflouer la
caisse, envisage d'augmenter les primes et d'augmenter la perception de
certains frais. Mais ce n'est pas le cas. Ce n'est pas le cas du tout. En fait,
c'est même l'inverse. Depuis sa création, la caisse a
enregistré un surplus permanent, sauf, si je me rappelle bien, aux
années 1982 et 1983. Et, en 1989, lors du dernier exercice financier, la
caisse indiquait un surplus de 283 000 000 $.
Voilà, M. le Président, de quoi mettre en pratique ce que
font toutes les bonnes compagnies d'assurances, c'est-à-dire
prévoir des remboursements de primes ou des abaissements de frais
d'enregistrement pour ceux qui se conforment aux objectifs, entre autres, de la
sécurité routière et des normes établies pour la
protection et la sécurité sur les routes.
Le gouvernement nous dit qu'il veut utiliser une partie des fonds, une
partie du surplus de la Régie pour assurer la sécurité
routière. Ce qu'il entend par assurer la sécurité
routière, ce n'est pas développer des mesures incitatives pour
que les gens soient amenés à être plus prudents, à
être plus conscients lorsqu'ils conduisent, mais ces mesures se veulent
plutôt strictement matérielles dans le sens d'améliorer la
voirie et d'améliorer les routes. Je ne pense pas que ce soient
là des mesures fortement incitatives. Bien sûr, lorsque les routes
sont en bonne condition, principalement en hiver, II y a moins de risques
d'accidents. D'ailleurs, vous avez pu le constater. Des études ont
démontré qu'un grand nombre
d'accidents qui se sont déroulés dans la région du
pont-tunnel Louis-Hippolyte-Lafontaine à Montréal ont
été causés, en partie, par le mauvais état de la
chaussée, particulièrement en hiver.
C'est vrai que des routes en bonne condition facilitent et
améliorent la sécurité routière, mais je ne pense
pas qu'utiliser les fonds de la Régie de l'assurance automobile du
Québec pour réparer les routes sort la façon la plus
directe et la plus incitative pour que les citoyens se conforment davantage aux
objectifs du Code de la route et aux mesures de sécurité auxquels
le gouvernement du Québec a essayé de sensibiliser les citoyens
depuis déjà bon nombre d'années.
Cela étant dit, M. le Président, j'aimerais
également faire remarquer que le projet de loi qui nous est
présenté nous cause certains problèmes. Il nous cause
certains problèmes, d'abord, en fonction de son contenu, mais
également en fonction de la forme. Je ne reviendrai pas sur la forme et
sur la façon dont le projet de loi est piloté à
l'Assemblée nationale en imposant un bâillon à
l'Opposition, en limitant les discussions sur ce projet de loi. Mais j'aimerais
surtout insister sur la nature de précédents.
J'ai eu l'occasion, à deux reprises, de revenir sur ce sujet.
Mais je pense qu'il est important de prendre en considération le fait
que, lorsqu'on veut inculquer aux citoyens le sens de la participation, le sens
du civisme pour amener le plus grand nombre possible à se conformer
à des objectifs de meilleure qualité de vie dans la
société, il est important que les fonds qui ont été
désignés pour certains objectifs, on les conserve pour les
objectifs assignés et non pas qu'on les détourne vers
d'autres.
Nous allons vers l'an 2000, nous allons vers une époque où
de nombreuses initiatives vont être prises dans des secteurs où,
jusqu'ici, nous avons à peine amorcé des développements.
Je parle principalement du domaine de l'environnement, je parle du domaine de
la recherche technologique et, possiblement, également, de la formation
professionnelle de la main-d'oeuvre. Ce sont des secteurs en mouvance, ce sont
des secteurs qui vont exiger des sommes importantes, des investissements
importants et ce sont des secteurs qui vont exiger un partenariat avec
l'entreprise privée, avec les milieux universitaires, avec les
différents partenaires concernés et, en grande partie
également, avec les usagers, avec les bénéficiaires ou
avec la population en général.
Dans ce contexte, je pense qu'il est de mauvais présage de faire
de la loi 50 un précédent parce que je suis convaincu que la
population va le garder à l'esprit et dorénavant, lorsque le
gouvernement - lorsque je dis "le gouvernement", je parle du gouvernement du
Québec, indépendamment du parti qui est au pouvoir - du
Québec va vouloir constituer des fonds pour des objectifs bien
précis, des fonds comme, par exemple, dans le domaine de
l'environnement, la Société de recyclage et de
récupération qui va être appelée à
administrer des fonds perçus via des consignes, bien, à ce
moment-là, je pense que le détournement des fonds que l'on veut
faire via la loi 50 est de nature à instaurer une
incrédibilité...
Le Vice-Président (M. Cannon): En conclusion, s'il vous
plaît.
M. Beaulne: ...un manque de confiance dans...
Le Vice-Président (M. Cannon): M. le député
de Bertrand, en conclusion, s'il vous plaît, rapidement.
M. Beaulne: Alors, M. le Président, je limiterai mes
remarques à ces quelques points et j'aimerais encore rappeler à
mes collègues du gouvernement le danger que constitue ce
précédent. Je vous remercie.
Le Vice-Président (M. Cannon): Merci, M. le
député de Bertrand. M. le député de
Rouyn-Noranda-Témiscamingue.
M. Rémy Trudel
M. Trudel: Merci, M. le Président. Oui, c'est important
d'intervenir fermement sur la prise en considération du rapport de la
commission qui a étudié ce projet de loi 50 parce que, d'abord,
nous pourrions dire depuis quelques jours, depuis quelques semaines, en fait:
Les projets de loi se suivent et les procédures et la méthode
pour les adopter se ressemblent; c'est comme les jours. On a
décidé de suivre une seule et unique méthode: lorsque
ça ne fait pas notre affaire du côté gouvernemental,
lorsqu'on pense que l'Opposition va expliquer peut-être trop bien
à la population son désir qu'on ne dénature pas les
choses, qu'on ne dénature pas l'objet pour lequel a été
créée la Régie de l'assurance automobile du Québec,
bien, on impose un bâillon. On l'a fait et ça semble être
devenu un élément fondamental de ce gouvernement au niveau du
processus législatif. On dénature les choses, on dénature
le processus, on dénature la façon dont, démocratiquement,
même si parfois ça peut être difficile, ça peut
être long, on veut faire passer absolument ces projets de loi. (23 h
40)
C'est comme ça que ça s'est passé dans le cas de la
loi 75 sur les heures d'ouverture des commerces, des magasins. C'est comme
ça que ça s'est passé on ne peut plus du côté
de la loi 69 pour permettre aux commissions scolaires d'être les
dépanneurs du gouvernement sur le plan financier, d'aller chercher
au-delà de 300 000 000 $ au niveau des commissions scolaires parce que
le gouvernement avait décidé qu'il
y avait objet, au niveau des commissions scolaires, pour répondre
à des besoins, mais, correspondant à cet objet,
c'est-à-dire le devoir de légiférer pour aller chercher
plus de fonds ou pour réaménager ses budgets, point de courage,
point de décision. On dit tout simplement: On va présenter des
lois qui vont dénaturer des choses. Et c'est ça qui va finir par
jouer un mauvais tour, c'est certain, à ce gouvernement.
Dès le moment où on a commencé à lancer les
ballons, au début de la saison d'hiver, autour du prochain budget du
gouvernement du Québec, on a dit: Oui, on a des besoins majeurs au
niveau de la rénovation du réseau routier et quiconque dans cette
Assemblée vit dans une région périphérique en
particulier se rend bien compte des besoins immenses qu'il y a, du retard qu'on
a accumulé et de la situation quasi scandaleuse qui se présente
dans une région comme l'Abitibi-Témiscamingue. Il faut le
répéter encore une fois, c'est le député de
Pontiac, sauf erreur, qui avait préparé un rapport sur
l'état du réseau tertiaire au Québec. Et le propre rapport
Middlemiss disait, il y a trois ou quatre ans: Dans la région de
l'Abitibi-Témiscamingue, je suis obligé de lire la
réalité, dans cette grande région qui fournit des
matières premières à l'ensemble du Québec en
matière de forêts... Il le sait parce que, dans son comté,
près de son comté, dans les municipalités limitrophes, il
y a des industries qui viennent s'approvisionner en ressources
forestières. C'est la même chose au niveau des métaux, au
niveau des mines: nous approvisionnons le reste du Québec. Le
député Middlemiss nous a préparé, je dois le dire,
un bon diagnostic, un très bon diagnostic qui montrait un bon portrait,
un portrait désolant pour la région de
l'Abitibi-Témiscamingue parce que ces gens-là sont toujours
considérés comme des citoyens de deuxième zone. Seulement
11 % du réseau routier tertiaire dans la région de
l'Abitibi-Témiscamingue est pavé, par comparaison à un
taux d'au-delà de 45 % pour les autres régions du
Québec.
Comment accepter cette différence, comment accepter de tels
écarts surtout pour une région et surtout pour les citoyens et
les citoyennes d'une région qui fournit de larges quantités de
ressources naturelles pour permettre de faire vivre le secteur manufacturier
dans les plus grands centres, les centres urbains? Pour ces gens-là, on
reprend la très vieille expression: Dans le fond, vous habitez un camp.
Vous habitez un camp minier, vous habitez un camp forestier, vous habitez un
camp agricole. Et on sait ce que ça veut dire comme définition
historique. On vient chercher ce qu'il y a de bon ici, on sort ça
à l'extérieur, les gens circulent. Et on ne vous laissera pas
prendre la catégorie des citoyens de première zone au
Québec ou être égaux aux autres citoyens du Québec;
on va vous confiner dans une situation extrêmement difficile parce qu'on
sait, de toute façon, que vous êtes pris pour gagner votre vie, on
sait que vous avez besoin de travail, on sait que vous avez des familles et on
sait aussi qu'en termes de distances géographiques vous êtes
éloignés des centres urbains et on sait, finalement, que vous
n'êtes que 2,8 % de la population du Québec.
Même si vous fournissez 14 % des ressources agricoles, de la
production agricole - le ministre de l'Agriculture le sait très bien -
même si on sait que vous fournissez une très large part des
ressources forestières au Québec pour permettre à
l'industrie des pâtes et papiers de vivre dans beaucoup d'autres
régions au Québec, et c'est la même chose au niveau des
mines, bien sûr: au-delà de 55 % des ressources minérales
du Québec sont fournies par cette région; on va aller chercher
non seulement ce qui est en dessous, mais également ce qui est
au-dessus, ce qui est sur le sol, les ressources de la terre et, en retour,
tout ce qu'on vous dit, c'est: Continuez à vivre dans des conditions
extrêmement difficiles.
Ce que ce gouvernement dit: Nous allons aller, avec cette loi 50, piger
dans la caisse qui servirait peut-être à aider à donner un
réseau routier qui a un peu d'allure pour la région de
l'Abitibi-Témiscamingue, pour les régions du Québec, pour
le Québec. Pourquoi dénaturer les choses comme cela? Quand on a
pris la décision d'agir dans telle ou telle direction, il faut, dans un
deuxième mouvement, se donner la possibilité de réaliser
ces actions. Non, ce gouvernement a choisi d'aller piger dans la caisse qui a
été prévue, qui a été constituée pour
un autre objet, et ça, ce n'est pas correct. Après coup, on se
surprendra que plusieurs députés, de quelque côté
que ce soit dans cette Assemblée, au cours de discussions et au cours
d'échanges, diront: Mais, finalement, vous savez, le métier ou la
responsabilité d'être député, ce n'est pas tellement
considéré par la population. On a encore vu, très
récemment, des sondages ou des indications sur le niveau où
était situé, dans la perception de la population, le rôle
du député.
Et pourquoi? Pourquoi? Il faut se le demander. Pourquoi cette perception
si difficile, parmi la population, quant aux responsabilités que nous
occupons? C'est parce qu'il se passe des choses comme celles que nous
étudions ce soir. C'est parce que l'on détourne l'attention, que
l'on dénature les choses. On vous a dit, en 1977: On se fera une caisse
pour se donner une mutuelle d'assurance. Douze ans plus tard, on dit: Vous
savez, là, l'histoire de se constituer une caisse et de dire: Si vous
êtes prudents et si vous circulez sur les routes du Québec avec
une plus grande marge de sécurité, on va baisser vos primes,
erreur, mensonge. Ce que l'on vous dit aujourd'hui, c'est qu'on vous a
joué un sacré tour et nous allons aller piger dans votre caisse.
C'est ça qui est inacceptable, de dénaturer les choses, et
voilà pourquoi il nous faut être contre ce projet de loi.
J'ai eu l'occasion - en terminant, M. le
Président - de discuter librement même avec des
députés de la majorité ministérielle, à
l'époque du budget, avant ou après le budget, qui disaient
très ouvertement: Finalement, les citoyens et les citoyennes, lorsqu'on
leur dit: Nous levons une taxe pour tel objet, pour réaliser tel geste,
pour réaliser telle politique, ils acceptent plus facilement parce qu'on
dit: Voyez pourquoi nous avons besoin de cet argent. Ce qui se passe ici, c'est
tout à fait le contraire. Dommage pour les régions, dommage pour
le parlementarisme, dommage pour ceux et celles qui prônent de telles
méthodes et dommage pour ce gouvernement qui, un jour, se le fera bien
dire par la population. Merci, M. le Président. (23 h 50)
Le Vice-Président (M. Cannon): Merci, M. le
député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue. Mme la
députée de Marie-Victorin.
Mme Cécile Vermette
Mme Vermette: Oui, merci, M. le député. C'est
regrettable, M. le député, qu'il faille, dans cette enceinte,
toujours parler sur des lois. C'est la troisième loi sur laquelle je
dois parler, d'ici la fin de cette session, et c'est toujours des
bâillons. Nous avons dû être victimes de bâillons, ici,
de ce côté de la Chambre, parce que ce gouvernement, en fait, a
préféré, plutôt que de prendre le temps de
légiférer et de voir d'une façon plus prudente à la
gestion de la présentation de ses lois, au niveau de la fin de session,
y aller avec une certaine forme de laxisme et faire en sorte qu'actuellement
nous voilà pris, en fait, avec un autre bâillon. Et nous devons
soulever ce fart à la population. C'est inacceptable qu'en si peu de
temps, à la fin d'une session, nous devions, justement, arriver à
la conclusion que ce gouvernement empêche les parlementaires de
s'exprimer et ça, ça représente un des droits les plus
fondamentaux de tout membre, ici, à cette Assemblée
nationale.
Bien sûr, la réforme de la Régie de l'assurance
automobile du Québec est un sujet très important, un sujet
d'actualité parce que beaucoup de Québécois et de
Québécoises sont concernés par une telle réforme de
l'assurance automobile au Québec et parce que ce sont des fonds qui
viennent des poches des contribuables. C'est avec ces sommes d'argent
là, M. le Président, qu'aujourd'hui nous devons nous apercevoir
que ce gouvernement prend peu en considération la capacité de
payer de ses contribuables, puisque, M. le Président, compte tenu de la
caisse, compte tenu des profits qu'autogère cette assurance automobile
au Québec, nous nous serions attendus davantage qu'un gouvernement qui
comprend les besoins de sa population allège, d'une part, soit par une
meilleure indemnité ou par de meilleures primes, les taux que doivent
payer les contribuables au niveau de leurs primes d'assurance ou, s'ils sont
victimes d'un accident, favorise de meilleures indemnités. Eh bien, non,
le gouvernement a préféré, M. le Président, piger
dans cette caisse, qui était très, très fructueuse, un
montant considérable pour payer, en fait, les factures courantes de la
gestion courante de ce gouvernement.
C'est une bonne façon de déguiser, en fait, l'imposition,
les taxes. C'est une sorte de camouflage qui fait en sorte que nos
contribuables ont l'impression que ce gouvernement est un bon gouvernement,
qu'il n'impose pas vraiment beaucoup de taxes, comme au dernier budget, et
qu'ils l'ont échappé belle, n'ont pas eu d'augmentation
d'impôts. Mais, M. le Président, il faut dénoncer
l'imposture, car il y a imposture. Et l'imposture, c'est: on fait ce qu'on ne
pourrait pas faire parce que c'est trop impopulaire de prélever des
impôts, de les augmenter. Donc, on trouve une façon plus
sournoise, en fait, d'aller chercher de l'argent chez les contribuables et de
faire en sorte qu'au lieu de les favoriser on leur donne une surcharge, un
fardeau au niveau des différentes primes qu'ils auront à
subir.
Si, au moins, cet état de choses avait favorisé un
meilleur réseau routier. Mais ce n'est pas le cas. Regardons les routes
du Québec, à l'heure actuelle, dans quel état elles sont,
ces routes du Québec. Jamais le réseau routier n'a
été aussi cahoteux, M. le Président. Ce n'est pas
possible. On a de la difficulté à circuler à certains
endroits, c'est même dangereux. Je pense que nous nous serions attendus,
du moins, à une meilleure application des sommes d'argent qui sont
versées. Mais, au contraire, nous voyons bien que tout ce que le
gouvernement essaie de faire, c'est maintenir, en tout cas, peu importe que ce
soit dans le réseau de la santé, dans le réseau routier ou
dans le réseau de l'écologie... C'est des coupures drastiques un
peu partout. C'est à se demander ce qu'on fait avec les sommes d'argent
qu'on prélève un peu partout, avec les excédents qu'on a
été capables, justement... Parce que antérieurement le
gouvernement du Parti québécois a été capable
d'apporter des réformes qui s'imposaient pour favoriser davantage les
contribuables.
Qu'est-ce qui se passe avec ce gouvernement? Où vont toutes ces
sommes d'argent là? Parce que, à l'oeil, comme ça, de
même, on ne peut pas voir de résultats tellement concluants. Et je
trouve assez difficile pour un parlementaire de ne pas soulever toutes ces
occasions où le gouvernement opère une action de camouflage.
C'est inacceptable. Je pense que ce n'est pas une façon très
responsable de gouverner, bien au contraire. Et aussi, on essaie de faire
semblant ou de faire accroire aux contribuables que tout va bien et que c'est
pour leur mieux-être, que c'est pour les favoriser davantage qu'on est
obligé d'opérer certaines transactions financières, que,
tout compte fait, il n'y a rien là, qu'il ne faut surtout pas en
discuter, parce que les gens de l'Opposition, bien sûr, eux, tout ce
qu'ils
cherchent à faire, c'est de l'obstruction. M. le
Président, ce n'est sûrement pas faire de l'obstruction que de
vouloir favoriser le mieux-être de nos contribuables et, qui plus est,
les favoriser au niveau des primes, dans leurs cotisations au niveau de
l'assurance automobile, ou leur permettre d'avoir de meilleures
indemnités, s'ils sont victimes d'accident.
Ce qui est regrettable, c'est que, lorsque nous avions fait cette
réforme en 1967, il faut se rappeler que cette réforme a
demandé du courage de la part du gouvernement péquiste, à
ce moment-là, parce que l'ensemble des gens du gouvernement
libérai n'était pas tellement favorable à un telle
réforme. On se souviendra. Nous avons dû convaincre la population,
d'une part, qu'elle était bénéfique pour elle et, d'autre
part, tous les gens qui étaient impliqués dans l'assurance
automobile et tous les gens qui voyaient ça d'un très mauvais
oeil.
On avait peur aussi que ça encourage davantage
l'irresponsabilité de certains conducteurs. Mais, au contraire, on s'est
aperçu que des mesures additionnelles avaient été
apportées, qui favorisaient la sécurité routière et
que le nombre d'accidents avait diminué. C'est pourquoi, M. le
Président, nous avons pu avoir de beaux bénéfices, des
bénéfices très importants au niveau de l'assurance
automobile, ce qui était très appréciable, à mon
avis, et qui démontrait une très bonne gestion de la part du
gouvernement péquiste.
Qu'en ont fait les libéraux, eux qui s'opposaient à cette
réforme de l'assurance automobile? Là, comme dans bien d'autres
domaines, M. le Président, ils se sont réjouis des mesures
qu'avait prises l'ancien gouvernement pour les favoriser dans leur politique et
dans leur gestion. Mais ça se limite uniquement à ce
niveau-là. Il faut dire qu'en 1989 l'excédent des revenus sur les
dépenses était de 283 000 000 $. Belle somme! Une somme qui
aurait pu permettre, en tout cas, une stabilité au niveau de l'assurance
automobile, d'importantes baisses des primes et des augmentations
substantielles des indemnités qu'elle aurait pu verser aux victimes de
la route ou peut-être faire les deux en même temps, M. le
Président. Mais, encore une fois, il faut se rappeler que l'ensemble des
gens, des économistes considérait que la réforme qui a
été apportée en 1977 était bénéfique
pour l'ensemble de nos contribuables, qu'elle les favorisait grandement et
qu'elle permettait à ceux qui ne pouvaient escompter avoir une forme de
protection au niveau des blessures corporelles peu importe la nature de la
faute, de prétendre à une indemnité. Je pense que nous
avons favorisé la qualité de vie de nos concitoyens et que nous
avons appris à les responsabiliser.
Ce même gouvernement, actuellement, par sa façon d'agir et
par sa façon d'aller chercher, de piger des fonds dans un endroit qui
était leur mutuelle d'assurance au niveau de l'automobile, eh bien,
encore une fois, est en train de les décevoir, est en train de
dégonfler, en fait, les profits que pouvait percevoir l'assurance
automobile du Québec et, encore une fois, nous devons dénoncer
l'imposture que fait ce gouvernement à l'endroit de l'ensemble de ces
contribuables, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Cannon): Merci, Mme la
députée. Je vais maintenant reconnaître M. le
député de Dubuc.
M. Gérard R. Morin
M. Morin: Merci, M. le Président. Je ne sais pas si vous
avez déjà entendu une annonce à la
télévision, M. le Président, une annonce de bière.
Elle dit qu'il y a des dizaines de raisons de choisir la bière 50, mais
que la meilleure est sous le bouchon. Si on voulait faire un corollaire et
faire la promotion de l'Assemblée nationale, on pourrait dire que le
ministre aussi a plusieurs raisons d'adopter le projet de loi 50, mais que,
là, la meilleure raison est sous le bâillon. Effectivement, sauf
que là, avec un bâillon, la fermentation est moins longue.
Mais ça permet quand même de réfléchir un
petit peu et particulièrement depuis que le ministre nous a
adressé des menaces en commission à l'effet que, si nous
continuions à nous opposer, nous ne verrions aucuns travaux dans notre
comté. Il a pris la peine de nommer chacun des six députés
en commission et je vous prie de me croire que ça nous a
ébranlés, M. le Président, car, finalement, ce que nous
faisions en commission, nous tentions de sensibiliser le ministre à
consulter les gens, à entendre les organismes, entre autres le
Protecteur du citoyen pour qu'il vienne nous entretenir de ses propres
recommandations qui touchent le paiement d'expertises médicales, les
remboursements exigés de façon abusive, les délais
administratifs trop longs, les remises d'auditions, (minuit)
Aussi, M. le Président, c'est dommage que le ministre ne soit pas
là parce que, concernant l'autre ministre, parrain du projet de loi 75
qui a toujours été là, ça fait curieux, mais je
suis convaincu que vous allez lui transmettre les messages. C'était la
même préoccupation pour ce qui est du Vérificateur
général, qui aurait sans doute été d'un grand
intérêt en venant nous entretenir des aspects de gestion et tout
ce qui entoure les ajustements de nature financière du projet de
loi.
M. le Président, je voudrais aussi vous demander de dire au
ministre que, lorsque nous lui avons demandé d'entendre la Régie,
c'était bien sûr de nous sécuriser parce que nous avons
accusé le ministre de dénaturer la mission de l'assurance
automobile.
Nous lui avons aussi demandé, M. le Président, d'entendre
l'Association des victimes, parce
qu'on sait que ceux qui sont le plus en mesure de venir témoigner
de situations, c'est, bien sûr, ceux et celles qui ont été
victimes d'accidents de la route.
Si je tiens mes propos, M. le Président, c'est pour faire amende
honorable auprès du ministre, pour qu'il sache bien que nous n'avions
aucunement l'intention de le rabrouer, de boycotter son projet de loi. Surtout
que je ne voudrais pas - je retarde un peu parce qu'il y a un changement
à la présidence et ça dérange toujours un petit peu
les orateurs - que le ministre pénalise la population de mon
comté parce que j'ai utilisé les droits parlementaires. Excusez,
je vais en profiter... Je suis demandé au téléphone - oui,
ça va. Ah! Très bien merci.
M. le Président, c'était le bureau régional du
ministère des Transports. Ah oui, on vient de m'aviser de ne pas
m'inquiéter concernant les coupures concernant la menace du ministre
parce qu'il n'y avait rien de prévu de toute façon dans mon
comté. Donc, c'était du "bluff", M. le Président. Donc, je
cesse d'être inquiet, parce que je me sens moins victime de menaces;
c'était du "bluff". Et c'est là qu'on voit qu'avec le projet de
loi 50, le gouvernement se donne toute la latitude de gratter, avec ses gros
doigts, jusqu'au fond des tiroirs, de la caisse d'assurance automobile, et le
scandale qu'il faut dénoncer, c'est qu'il n'y a rien pour le
réseau routier dans les régions périphériques.
M. le Président, vous lui ferez le message. J'accuse le ministre
d'ignorer les régions depuis fort longtemps, depuis trop longtemps.
D'ailleurs, la révolte commence à gronder au
Saguenay-Lac-Saint-Jean où les crédits pour la construction ont
été coupés de moitié, alors que l'entretien a
été réduit presque à néant. Quand la
population de ma région se verra imposer des hausses substantielles au
niveau de l'immatriculation automobile et que la qualité du
réseau routier continuera à se détériorer, je vous
garantis que le ministre entendra parler de la région et, là, ce
ne sera pas du "bluff1. Au chapitre des routes régionales et
malgré une situation catastrophique, c'est l'inertie totale.
Que dire des projets locaux où des travaux prévus en 1989
ne figurent même pas au programme des réalisations de 1990? Je
m'étais emballé, M. le Président, j'avais perdu toute
inquiétude, mais j'y pense; est-ce que le ministre ferait une telle
chose? Je me demande si je ne me suis pas trop sécurisé trop
vite. Comme la seule façon d'assouvir sa vengeance sur nos travaux
parlementaires, comme il ne peut pas couper de travaux parce qu'il n'y en a pas
de prévus, est-ce que le ministre pourrait prendre l'asphalte qui a
été posée l'an dernier pour la transporter sur le
boulevard Métropolitain? Je ne crois pas que le ministre fasse
ça, c'est un bon garçon. De toute façon, je regrette qu'il
ne soit pas là pour nous entendre. C'est pour ça que je compose
d'une façon sérieuse, de façon laconi- que, de
façon ironique parce que, finalement, vaut mieux en rire qu'en pleurer.
et je termine cette intervention ici. je vous remercie, m. le
président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député. Je reconnais maintenant la prochaine intervenante, Mme la
députée de... M. le député...
M. Claveau: Question de règlement.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Question de
règlement, M. le député d'Ungava.
M. Claveau: M. le Président, auriez-vous l'obligeance
d'appeler le quorum?
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Je vais vérifier,
M. le député. Non, je m'excuse, je n'ai pas demandé
d'appeler, s'il vous plaît là. C'était 21 avec moi. Je
compte dans ces 21 là. Alors, je reconnais maintenant Mme la
députée de Ver-chères.
Mme Luce Dupuis
Mme Dupuis: Merci, M. le Président. Au sujet du transfert
d'argent de l'assurance automobile, j'ai envie, moi, de vous donner la vision
d'un citoyen ordinaire que j'ai vu dans mon comté, la semaine
dernière, qui me dit: Qu'est-ce qui se passe, qu'est-ce qu'ils vont
faire avec notre argent qu'on a versé? Et il dit: Moi je pensais que
c'était pour, si on avait un accident, qu'on soit sûr d'être
bien indemnisé des deux côtés. Tu peux être victime
d'un accident parce que tu le subis, mais tu peux aussi être victime
parce que tu l'as provoqué accidentellement. Il dit: Mais qu'est-ce
qu'ils vont faire avec ça? Il dit: On n'en aura plus. Il se
questionnait.
Tout ça pour dire qu'il y avait un questionnement. Le
questionnement du citoyen ordinaire face à cette inquiétude de
perdre ses fonds, de ne plus avoir cette assurance-là m'amène moi
aussi à me questionner si on peut se permettre de dévier les
fonds des fins auxquelles ils avaient été destinés sans
que le gouvernement puisse perdre ou conserver la confiance du public. Le
public manque d'information. Le public est inquiet. Et pas seulement sur ce
geste-là, sur des gestes constants. Il est inquiet et là comme je
disais, M. le Président, je vous donne la version, les impressions du
citoyen ordinaire de comté qui est peut-être mal informé,
mais qui, je pense, reflète l'ensemble de la population.
Nous on est plus au courant parce qu'on est dans le milieu. Mais ce
n'est pas dit que le citoyen ordinaire est aussi informé de tout
ça. Donc, inquiet aussi de dire: Oui, mais nos taxes, sur ses comptes de
taxes, il dit: Ils viennent piger, la commission scolaire vient piger dans le
champ foncier. C'est un peu mêlé. Il me parlait d'assurance
automobile, il me parlait de commis-
sion scolaire, d'un ensemble, mais tout ça dénotait quoi?
Une certaine inquiétude. Et c'est de ça que je voudrais vous
faire part, de ces inquiétudes que vivent présentement les
citoyens de nos comtés.
Et moi, ça m'amène à me questionner sur les motifs,
les objectifs visés, s'ils ont été respectés et si
on peut se permettre de dévier, de changer des choses comme ça,
sans que le citoyen soit vraiment informé. Les objectifs étaient
quoi? D'indemniser le plus rapidement possible, le mieux possible, les victimes
d'accidents. J'ai vécu, dans mon comté un cas où il y a eu
- c'était assez pathétique - une bataille entre la
responsabilité de la CSST et celle de l'assurance automobile. Vous allez
me dire que c'est peut-être un cas unique. C'est peut-être le
hasard, mais il reste que j'ai une victime d'un accident de travail.
Forcément, il se promène un petit peu plus en auto, il ne
travaille pas. Ça ne veut pas dire qu'il n'est pas capable de sortir de
chez lui. Et le pauvre, il a un accident d'auto par-dessus.
Et là, c'est là que la saga a commencé, M. le
Président. C'était la CSST qui relançait la balle à
l'assurance automobile, l'assurance automobile relançait la balle
à la CSST et, finalement, ce pauvre type était en train de perdre
sa maison. Il n'y avait rien de réglé et c'a fini en me disant:
Si la députée n'est pas capable de régler ça, il
dit: Moi je vais aller me suicider. C'est bien sûr que je n'ai pas
marché dans le coup, ça ne m'a pas... Ça, vous pouvez le
croire ou ne pas le croire, je ne vous dis pas qu'il va le faire, c'est certain
que c'était pour mettre de la pression. Mais tout ça, ça
dénote quand même un état d'esprit, une inquiétude
et c'est là que je me dis... (0 h 10)
Moi, quand je voyais ça, je disais: Mais ça va donc bien
mal dans l'assurance automobile. Qu'est-ce qui se passe? Ils n'ont plus
d'argent ou quoi puisqu'on a tant de difficultés à indemniser nos
victimes d'accidents d'automobile? J'ai dit: Ça doit être mal
administré. Et là, j'apprends que, non, ils ont des surplus.
Donc, c'était prémédité. Donc, le fait de vouloir,
sur le dos des accidentés, économiser de l'argent, c'était
prévu, prémédité pour, après ça,
faire dévier les fonds de cette assurance-là, qui étaient
prévus pour ces victimes-là, pour les routes et les affecter
à autre chose que pour leur but premier qui était, M. le
Président, fondé sur des bases humanitaires.
L'autre objectif, c'était de réduire les coûts
d'administration de l'assurance automobile et assurer les coûts globaux
de l'assurance et des services que les Québécois en retirent.
Bon. Bien indemniser les victimes, moi, j'ai eu des cas, en tout cas, qui
démontrent que ça n'a pas été le cas. Ils auraient
pu, avec une économie pareille, je pense, baisser les primes d'assurance
automobile. Non, au contraire, on affecte les sommes à d'autres fins.
C'est là que je me demande si, moralement, un gouvernement peut se
permettre de changer les fins comme ça, les motifs, les objectifs.
Légalement, il peut peut-être le faire, mais moralement, est-ce
qu'il a le droit de faire une chose pareille et d'insécuriser la
population? Moi, ça m'amène à me poser ces
questions-là.
Et là, on voit que c'est une constante de la part du gouvernement
de piger un petit peu partout. Je ne dirai pas: de mentir à la
population, mais disons de cacher ou de dire des demi-vérités. On
dit dans le budget: On n'augmente pas les impôts. On ne taxe pas plus.
Mais, nom de Dieu! on regarde tous les gestes qui s'accumulent, un petit ici et
un petit peu là, et encore un petit peu là, et on taxe encore un
petit peu là, mais globalement, ça fait quoi? C'est toujours pris
dans les poches des contribuables. C'est de l'impôt
déguisé, M. le Président. Mais on n'a pas
l'honnêteté de le dire, de le dire franchement. Il me semble
qu'une faute avouée est mieux pardonnée. Il me semble. Au moins,
s'il disait: On n'augmente pas les impôts, mais, par contre, par
différents moyens qui n'affecteront pas toujours les mêmes, des
fois, ça va être les automobilistes, d'autres fois, ça va
être des propriétaires de maisons... Et le dire franchement
à la population, il me semble que ça amènerait à
revaloriser et amener plus de crédibilité aux
députés, aux élus. Parce qu'il ne faut pas se le cacher,
il ne faut pas penser que la population a une confiance inébranlable en
ses élus. Je pense que ce n'est pas par des gestes comme ceux-là
qu'on va amener la population à regagner la confiance qu'elle doit avoir
dans ses élus. Et je pense qu'on a encore là une énorme
côte à remonter pour regagner notre crédibilité. Et
ça, ça m'inquiète un peu de voir cette
réaction-là des gens parce qu'ils ont l'impression qu'on leur
ment tout le temps, qu'on ne leur demande pas la permission, qu'on ne les
consulte pas, que, parce qu'on est élus, on a tous les droits, on se
croit infaillibles. Et là, je m'aperçois en plus que c'est encore
pire, qu'on passe des choses de force et qu'on ne respecte pas l'Opposition,
qu'on ne respecte pas nos institutions démocratiques. Ça,
ça m'inquiète un peu.
Ça m'amène à parler du troisième
bâillon. Je ne sais pas si c'est le deuxième ou le
troisième, mais, de toute façon, il y en a eu trois et on ne sait
pas dans quel ordre. Et ça aussi, c'est inquiétant, je pense.
C'est inquiétant, pas le fait qu'on nous bâillonne, pas le fait
qu'on passe des nuits blanches pour contester et utiliser tous les moyens qui
nous sont permis, mais je pense que c'est inquiétant au niveau de la
démocratie. Et c'est inquiétant... J'ai peur, moi, de la
réaction du public qui peut exercer son droit de parole dans la rue par
des manifestations. Je vous remercie, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la
députée. Je reconnais maintenant le
prochain intervenant, M. le député de Gouin. M. le
député.
M. André Boisclair
M. Boisclair: Merci, M. le Président. C'est gentil. M. le
Président, si nous sommes ici à cette heure tardive - minuit et
quart - à discuter du projet de loi 50, c'est parce que l'Opposition a
cru bon utiliser - et je le dis sans cachette - l'ensemble des moyens
parlementaires qui sont à sa disposition pour faire valoir son point de
vue et prendre tous les moyens nécessaires pour s'assurer que ce projet
de loi puisse être au moins discuté de façon convenable.
Faut-il rappeler que ce projet de loi là, comme le projet de loi 75
concernant la Loi sur les heures d'affaires, a fait l'objet, lui aussi, d'un
bâillon? M. le Président, c'était la troisième fois
que l'Opposition subissait un bâillon. Pour les gens qui ne sont pas
familiers et qui nous écoutent à cette heure tardive, par un
bâillon, le gouvernement abuse de sa majorité et vient tout
simplement empêcher l'Opposition de s'exprimer.
Nous nous retrouvons, malgré cette heure tardive, tous ici pour
manifester notre opposition et utiliser le peu de moyens parlementaires qui
nous restent pour faire valoir notre point de vue concernant le projet de loi
50. Il faut comprendre, M. le Président, que ce n'est pas de
gaieté de coeur que nous nous retrouvons ici à minuit et quart et
que nous serons ici sans doute une partie de la nuit. Mais nous sommes ici
parce que l'Opposition croit de son devoir d'utiliser l'ensemble des moyens qui
sont à sa disposition pour faire valoir son opposition, comme je le
disais tout à l'heure.
M. le Président, 4 000 000 d'automobilistes se font
dépouiller. C'est ça, monsieur, la dure réalité
lorsqu'on étudie le projet de loi 50. La réforme de l'assurance
automobile, proposée par le gouvernement libéral à travers
le projet de loi 50, équivaut à un véritable
détournement de fonds aux dépens des automobilistes du
Québec. Les 877 000 000 $ que le gouvernement libéral veut
siphonner de la caisse des assurés appartiennent aux automobilistes et
non pas au ministre des Finances. Et une chose est claire, M. le
Président; ceux qui contribuent à cette caisse sont ceux qui,
chaque année, renouvellent leur permis de conduire et contribuent
à cette caisse. Au lieu, M. le Président, d'augmenter les
indemnités, au lieu d'augmenter la protection des automobilistes, on va
tout simplement... et au lieu aussi de diminuer les primes qu'on demande aux
automobilistes qui renouvellent leur permis, on va prendre cet argent-là
et on va s'en servir à financer des projets qui n'ont rien à voir
avec la caisse des assurés.
De 1991-1992 à 1994-1995, M. le Président, le gouvernement
libéral siphonnera 109 000 000 $ Indexés par année pour
l'assurance-maladle et pour le transport ambulancier. On prendra de l'argent
qui appartient aux assurés et qui devrait normalement leur revenir pour
financer le transport ambulancier et une partie de l'as-surance-maladie. Et de
plus, M. le Président, ce n'est pas tout, 475 000 000 $ iront pour des
travaux de voirie. Tout le monde connaît la situation piteuse -
disons-le, piteuse - de nos routes. Un trou n'attend pas l'autre à
Montréal. Au lieu d'en faire une véritable priorité, au
lieu d'injecter les crédits nécessaires au ministère des
Transports, on va voler et siphonner la caisse qui appartient aux
assurés pour financer les travaux de voirie, M. le Président. Cet
argent-là, ces cotisations de la Régie de l'assurance automobile,
M. le Président, seront utilisées à d'autres fins que
celles prévues par la loi et serviront d'une espèce de taxe que
l'État peut maintenant détourner pour payer des dépenses
courantes.
M. le Président, il est très clair que si on juge que les
réserves de la Régie de l'assurance automobile sont trop
élevées, il faut les ramener à des proportions plus justes
en réduisant les primes que les automobilistes ont à payer, en
augmentant aussi les compensations versées aux accidentés de la
route ou les deux à la fois. La pratique érigée en
système par le gouvernement libéral de puiser dans la caisse de
la Régie de l'assurance automobile pour des fins autres que celles
prévues à la loi est d'autant plus odieuse que le gouvernement ne
réalise même pas, avec ces sommes, les investissements dans le
réseau routier qu'il s'engage à faire chaque fois qu'il y a un
discours sur le budget, chaque fois qu'il y a une campagne électorale
afin de dorer... Il agit ainsi, M. le Président, afin de dorer la pilule
aux automobilistes. (0 h 20)
M. le Président, la stratégie est très simple et
les gens ne sont pas dupes. Ils comprendront rapidement. On affirme à
une opinion publique exaspérée par l'état du réseau
routier que les sommes qu'on puise dans la caisse des assurés serviront
à régler ce problème. Mais, M. le Président, encore
une fois, la Régie de l'assurance automobile a versé les
centaines de millions demandés au fonds consolidé du revenu. Bien
malin, M. le Président, bien malin celui qui pourra dire quelle
direction prendront ces millions. L'analyse du budget du ministre des
Transports de 1988-1989 et de 1989-1990 confirme qu'au cours des années,
le gouvernement libéral a siphonné 200 000 000 $ de la caisse de
la Régie, révèle très bien, M. le Président,
qu'au contraire, on a consacré, pendant cette période, 202 000
000 $ de moins au réseau routier que si on avait tout simplement
maintenu le rythme des investissements de 1985-1986, dernière
année du gouvernement du Parti québécois. Ici, II n'y a
personne, II n'y a personne qui est venu contredire ces chiffres-là, M.
le Président.
Cette fois-ci encore, les centaines de millions que le
projet de loi 50 Ira chercher dans
la caisse des assurés au cours des cinq prochaines années
ne serviront pas à l'amélioration de nos routes, m. le
président. les propres chiffres du ministre des finances
démontrent en effet que le budget de construction, de conservation du
réseau routier québécois diminuera en termes réels
au cours des trois prochaines années. ce n'est qu'en 1993-1994 et en
1994-1995 que ce budget augmentera de 104 000 000 $ par rapport aux
dépenses de 1989-1990, et ça, m. le président, si le taux
d'inflation demeure en deçà de 5 %, ce qui est très loin
d'être certain. m. le président, il peut se passer bien des choses
d'ici 1994-1995. le taux d'inflation a le temps d'augmenter, les taux
d'intérêt ont le temps d'augmenter, les prévisions
budgétaires ont le temps de changer, les prévisions à
l'égard du déficit ont, elles aussi, le temps de changer, m. le
président. donc, nous n'avons aucune garantie que les sommes qu'on
prévoit pourtant consacrer à l'amélioration du
réseau routier serviront vraiment à l'amélioration du
réseau routier. et au lieu d'en faire une priorité, m. le
président, comme je le disais, on prendra les fonds de la régie
et on les emploiera à d'autres fins que celles prévues par la loi
sur la régie de l'assurance automobile du québec.
Seulement pour l'année en cours, M. le Président, le
budget des routes demeure exactement au même niveau que l'an dernier, 1
020 000 000 $, ce qui équivaut à une baisse de 49 000 000 $
lorsqu'on tient compte de l'inflation. Pourtant, M. le Président, et si
le projet de loi 50 est adopté, ce qui semble bien le cas, M. le
Président, la Régie de l'assurance automobile du Québec
devra verser 150 000 000 $ de plus au gouvernement cette année,
supposément pour des investissements supplémentaires dans le
réseau routier.
M. le Président, en agissant ainsi, le ministre des Transports et
son gouvernement sont venus dénaturer les objectifs mêmes du
régime. Le projet de loi 50 constitue une nouvelle étape dans un
processus amorcé en 1986 par l'actuel gouvernement libéral et qui
vise à dénaturer une des plus belles réalisations de
l'État québécois, soit le régime public d'assurance
automobile mis en place par le gouvernement du Parti québécois
et, rappelons-le, à l'égard des gens, et c'est bon de le rappeler
à ceux et celles qui ont voté ce projet de loi-là...
Quelle était la position de nos amis d'en face? Quelle était la
position des membres du gouvernement actuel à l'égard de la
réforme proposée par le Parti québécois? Ils s'y
sont opposés, M. le Président, ont utilisé l'ensemble des
moyens qui leur étaient permis par le règlement pour voter contre
ce projet de loi et pour s'assurer que ce projet de loi ne devienne pas loi.
Contre vents et marées, M. le Président, le Parti
québécois a tenu à son engagement et a fait que la
Régie de l'assurance automobile du Québec est devenue force de
loi. Et aujourd'hui, j'entendais le ministre des
Transports citer en exemple la Régie de l'assurance automobile du
Québec. Il disait même que c'est un régime qui est
envié par l'ensemble des autres provinces canadiennes. On dit même
que c'est un régime qui est étudié par d'autres pays dans
le monde, particulièrement en Europe. Bien malin, M. le
Président... Ces gens-là ont la mémoire courte. Ils ont
voté contre ce projet de loi et aujourd'hui, à qui mieux mieux,
à qui veut l'entendre, ils se permettent de se péter les
bretelles et de vanter ce régime-là, partout, M. le
Président, à ceux et celles qui veulent l'entendre.
La réforme de 1977, M. le Président, avait un objectif
très clair, fondamental, assurer aux automobilistes
québécois une indemnisation meilleure, rapide et au plus bas
coût possible, au plus bas coût possible. Nulle part, ni dans les
documents qui ont servi de base à la réforme, ni dans la loi
telle qu'adoptée et amendée par la suite, à plusieurs
reprises, on ne confère à la Régie le pouvoir de charger
des primes plus élevées que nécessaire et de constituer
ainsi une réserve allant largement au-delà des besoins du
régime d'assurance. Au lieu de diminuer les primes exigées, au
lieu d'améliorer la protection, au lieu d'améliorer les
indemnités, on va prendre cet argent-là, on va utiliser les
surplus à d'autres fins que celles prévues par la loi.
De quel droit, M. le Président, la Régie de l'assurance
automobile se transforme-t-elle ainsi en percepteur de taxes pour le compte du
gouvernement, plutôt que de défendre les intérêts de
ses assurés et de ses bénéficiaires? De quel droit, M. le
Président, accepte-t-elle de financer, sur une base
régulière, les dépenses courantes du gouvernement qui
n'ont rien à voir avec sa mission et, en même temps, de serrer la
vis aux victimes d'accidents de la route, plus particulièrement aux
personnes âgées, aux personnes demeurant au foyer, ce qui
pénalise plus particulièrement les mères de famille? m. le
président, je conclurai en disant qu'il n'y a personne dans cette
chambre qui n'a pas eu de problème avec les gens de l'assurance
automobile du québec. la situation est loin d'être parfaite, on le
voit de façon quotidienne dans l'ensemble de nos journaux:
problèmes avec la régie de l'assurance automobile,
accidentés qui ont des problèmes avec l'administration de la
régie. m. le président, par le projet de loi 50, le gouvernement
libéral refuse aux assurés de bénéficier des fruits
d'un régime qui a réduit les coûts de l'assurance et de
profiter de l'amélioration du bilan et de la sécurité
routière dont ils sont les principaux responsables. m. le
président, je conclurai en disant que ce projet de loi est un mauvais
projet de loi et que j'espère que l'ensemble des membres de cette
chambre-Le Vice-Président (m. bissonnet): merci, m. le
député. je reconnais maintenant le prochain intervenant, m. le
député de pointe-aux-trem-
bles.
M. Pagé: M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Oui, je m'excuse, M. le
leader du gouvernement.
M. Pagé: M. le Président, si vous le permettez, de
consentement avec le leader de l'Opposition, je voudrais qu'on suspende
peut-être deux minutes nos travaux pour que le leader de l'Opposition et
moi puissions revenir.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, suite à
votre demande, M. le député, je suspends les travaux de cette
Assemblée pour quelques instants.
(Suspension de la séance à 0 h 27)
(Reprise à 0 h 32)
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Mes chers
collègues, si vous voulez prendre place, s'il vous plaît!
M. le leader du gouvernement.
Avis touchant les travaux des commissions
M. Pagé: Merci, M. le Président. Comme suite des
avis que j'ai eu l'occasion de donner ce matin pour les travaux des commissions
parlementaires aujourd'hui et de consentement avec l'Opposition officielle, je
désire aviser cette Assemblée, qu'aujourd'hui, soit le 21 juin,
après les affaires courantes, à la salle du Conseil
législatif, la commission de l'aménagement et des
équipements entendra les intéressés et procédera
à l'étude détaillée des projets de loi
d'intérêt privé suivants, et ce, dans l'ordre
ci-après indiqué: le projet de loi d'intérêt
privé 259, Loi concernant la municipalité de Deschambault et la
municipalité de la paroisse Notre-Dame-de-Portneuf; le projet de loi
d'intérêt privé 257, Loi concernant la Régie
intermunicipale de la gestion des déchets sur l'Ile de
Montréal.
M. Chevrette: M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le leader de
l'Opposition officielle.
M. Chevrette: Je pense qu'on s'était entendus pour ne pas
fixer d'heure précise, mais que les gens ou les groupes soient
disponibles après les affaires courantes. Alors, ça veut dire
vers 11 h 15 demain.
M. Pagé: Effectivement, M. le Président,...
Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le leader du
gouvernement.
M. Pagé: ...dans le cas du projet de loi 259, la
commission a amorcé l'audition de groupes intéressés ou
concernés par le projet de loi. Ils poursuivront leurs travaux demain
dans la perspective évidemment de les compléter, ça va de
soi. Le projet de loi 257, quant à lui, des groupes de
l'extérieur doivent être convoqués. Ils ont
été effectivement convoqués et l'objectif, c'est que
l'ensemble des gens intéressés à se faire entendre
puissent se faire entendre demain dans le courant de la séance. C'est ce
qui peut amener des changements dans les heures de la convocation demain
matin.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le
député de Salaberry-Soulanges.
M. Marcil: M. le Président, j'ai participé à
une commission parlementaire pendant toute la soirée et
l'après-midi. Le président et la présidente de la
commission ont eu également de la difficulté à identifier
ma circonscription.
Question, M. le ministre: Tous les groupes qui s'étaient
annoncés pour le projet de loi 257, pouvez-vous nous affirmer qu'ils
vont tous être convoqués pour demain? On prend une décision
à minuit et trente-cinq minutes.
M. Pagé: Je peux vous donner l'assurance. Le premier
élément, c'est que le motif pour lequel l'étude du projet
de loi 257, initialement prévue pour aujourd'hui, a été
retardée, c'est que, premièrement, on nous a indiqué qu'il
y avait des choses à régler dans le projet de loi concernant
à la fois, soit le ministère des Affaires municipales ou le
ministère de l'Environnement, premier élément.
Deuxième élément, des gens qui prévoyaient venir
témoigner et qui s'opposaient ou qui questionnaient l'opportunité
d'adopter ce projet de loi, voyant la modification à l'avis, ne se sont
pas rendus à Québec. Ces gens-là ont été
contactés en soirée. Tous les efforts seront faits pour que ces
intervenants-là puissent venir témoigner demain, ainsi que ceux
qui appuyaient le projet de loi et qui venaient demander à
l'Assemblée nationale de l'adopter et qui sont demeurés à
Québec.
M. Marcil: M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Très rapidement,
M. le député de Salaberry-Soulanges.
M. Marcil: Ce matin, après la période de questions,
il y avait des groupes qui s'étaient présentés pour ce
projet de loi et on leur a dit en commission parlementaire qu'il est presque
certain qu'il ne sera pas déposé dans cette session-ci. Il
faudrait s'assurer qu'ils soient présents.
M. Pagé: Je peux vous donner l'assurance
comme leader du gouvernement, et, d'ailleurs, ça a fait l'objet
de discussions avec l'Opposition et moi, que l'ensemble des groupes directement
ou indirectement concernés, favorables ou défavorables, ont
été contactés, seront contactés et, de toute
façon, auront suffisamment de temps pour se rendre à
Québec demain et venir témoigner devant la commission.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce qu'il y a
consentement de la part des membres pour déroger à l'article 53
afin que cette commission ait lieu demain à 13 heures? Consentement?
Alors, votre avis est donné, M. le ministre.
M. Chevrette: M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Oui, M. le leader de
l'Opposition officielle.
M. Chevrette: II se peut qu'à cause du menu
législatif ce soit à 15 heures, mais qu'ils soient disponibles
à compter de ou après la période des affaires
courantes.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, l'avis est
donné à ce que ce soit à 13 heures demain et que ça
pourrait débuter à 15 heures. L'article 53. Nous poursuivons le
débat avec M. le député de Pointe-aux-Trembles.
M. Bourdon: M. le Président...
Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le
député de Pointe-aux-Trembles, je m'excuse. Est-ce qu'il y a
consentement pour déroger à l'avis de convocation de sept jour
pour les témoins?
Une voix: Oui, ça va de soi.
Projet de loi 50
Reprise du débat sur la prise en
considération du rapport de la commission
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Consentement?
Très bien. M. le député de Pointe-aux-Trembles, sur le
projet de loi 50.
M. Michel Bourdon
M. Bourdon: M. le Président, l'Opposition officielle a
raison, je pense, de combattre énergiquement le projet de loi 50. En
effet, une des mesures importantes que le gouvernement du Parti
québécois avait adoptées lors de son premier mandat, de
1976 à 1981, est battue en brèche par le gouvernement actuel qui,
d'ailleurs, avait voté contre l'institution de la Régie de
l'assurance automobile. En effet, M. le Président, on assiste, depuis
plusieurs années, à des détournements successifs des
sommes d'argent que la
Régie de l'assurance automobile perçoit des 3 400 000
automobilistes du Québec aux fins d'administrer un régime
d'assurances.
Et, à cet égard, en matière d'assurances, les
assurés, ce qui fait partie de leur contrat avec l'assureur qui, en
l'occurrence est une Régie d'État, c'est d'avoir une couverture
des risques, une indemnisation rapide et une amélioration de la
sécurité routière qui va de soi, puisque, dans la mesure
où la Régie contribue à responsabiliser les conducteurs
d'automobiles, dans la mesure il y a moins d'accidents, ça
économise des sommes que les automobilistes placent dans la caisse, dans
le fonds de la Régie de l'assurance automobile.
Et on a parlé d'un véritable détournement de fonds,
M. le Président, et je pense que le mot n'est pas trop fort, puisque les
gens, en renouvelant leur plaque, contribuent à une assurance. Ils ont
donc le droit de voir ces sommes utilisées pour indemniser et non pas
détournées à d'autres fins par un gouvernement qui manque
d'argent.
À propos, M. le Président, je vous demanderais de
vérifier le quorum, parce que je pense qu'il y a plus de monde dans le
fumoir qu'en Chambre. (Oh 40)
Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le
député, vous n'avez qu'à me demander de vérifier le
quorum et je vais le faire. Alors, qu'on appelle les députés,
s'il vous plaît!
Une voix:...
Le Vice-Président (M. Bissonnet): 21. 1, 2,
3,4,5,6,7,8,9,10...
On va poursuivre. On m'informe qu'il y a des commissions qui
siègent actuellement. M. le député de
Pointe-aux-Trembles.
M. Bourdon: M. le Président, la loi 50, qui prévoit
de soutirer 125 000 000 $ par année pendant cinq années à
la Régie de l'assurance automobile, c'est-à-dire un
détournement de l'ordre de 625 000 000 $, a pour raison officielle,
dit-on, que ces sommes-là vont être consacrées à
améliorer le réseau routier qui, admettons-le, en a grandement
besoin. Cependant, les chiffres mêmes fournis par le gouvernement aux
crédits nous montrent que tel n'est pas le cas. On dépense
à peine quelques millions de plus cette année que l'année
dernière à l'amélioration du réseau routier et,
à cause de l'inflation, quelques millions de plus, ça veut dire,
en termes réels, moins d'argent que l'année dernière.
Pourtant, les besoins sont très importants.
Je ne mentionnerai que le fait, dans l'est de Montréal, que le
boulevard Henri-Bourassa, qui est une artère importante pour le
développement économique de l'est de Montréal et du bout
de IHe, est dans un état lamentable. Il suffit de l'emprunter une fois
pour le regretter. C'est plein de trous, mal éclairé, et
ça n'a d'aucune
manière l'air d'un boulevard. D'ailleurs, mon collègue de
LaFontaine s'est engagé formellement, lors de la dernière
campagne électorale, à faire refaire ce boulevard pour le rendre
digne d'une métropole, parce que c'est compliqué d'attirer de
l'industrie quand on se prétend dans une ville et qu'on se retrouve avec
un chemin qui est presque un chemin de brousse.
Pourtant, si on en juge par les derniers crédits, il est probable
que ce projet soit en danger pour cette année, malgré les
emprunts, les détournements successifs qu'on fait à la
Régie de l'assurance automobile, parce que la loi 50 qu'on veut nous
passer par le bâillon, parce qu'on ne veut pas que les assurés
soient mis au courant ou soient convoqués en commission parlementaire
par les diverses organisations auxquelles ils appartiennent pour discuter de la
"passe", ce n'est pas le seul moyen que le gouvernement a trouvé - ces
125 000 000 $ - de piger dans la caisse de la Régie de l'assurance
automobile.
La loi 19, en 1986, a prévu que la Régie verse un montant
de 60 000 000 $ par année, indexé à l'assurance-maladie.
En quatre ans, il s'agit d'un montant de 257 000 000 $. La loi 62 a
forcé la Régie à verser 200 000 000 $ au fonds
consolidé pour, disait-on, des fins de sécurité
routière. Par décret, le gouvernement a, d'autre part,
décidé que la Régie financerait une partie de la
réforme du transport ambulancier à raison de 35 000 000 $ par
année. C'est donc dire, M. le Président, que l'assuré se
fait conter des histoires. On lui dit qu'il verse des sommes à un fonds
d'assurances, à une caisse d'assurances, pour se protéger contre
certains risques. En 1977, quand Mme Lise Payette a instauré la mesure,
il avait été bien expliqué que le régime qui durait
depuis longtemps n'avait plus de bon sens. En effet, les personnes victimes
d'accidents d'automobile attendaient jusqu'à dix ans avant d'être
indemnisées et ce sont les tribunaux et les avocats qui prenaient une
part importante des dépenses. On a donc fait la réforme, mais
ça a été une réforme réussie. Maintenant,
elle est mise en danger parce qu'on pige dedans systématiquement pour
faire autre chose. Or, dans nos bureaux de comté, M. le
Président, de plus en plus de personnes se plaignent de la lenteur,
notamment, des mécanismes d'appel quand on n'est pas satisfait d'une
décision de la Régie. À la Commission des affaires
sociales, cela prend maintenant en moyenne douze mois avant de voir son cas
décidé.
Il faudrait donc donner des indemnités plus
généreuses, avoir un mécanisme d'appel plus rapide et,
pourquoi pas, baisser les primes si les comportements des automobilistes ont
fait que les risques ont diminué et que la Régie a plus d'argent
qu'il ne lui est nécessaire pour fonctionner. Dans ce sens-là,
pour récupérer 125 000 000 $ ici, 35 000 000 $ là, le
gouvernement diminue la confiance que les gens peuvent avoir dans un
régime d'assurance et la confiance qu'ils peuvent avoir dans
l'intervention du gouvernement dans un secteur. Il s'agirait donc de battre
cette loi et de faire en sorte que la Régie de l'assurance automobile
serve à ce pourquoi elle a été créée,
obtenir des primes des automobilistes pour verser des indemnités et
s'occuper de sécurité routière. Merci.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député. Je reconnais maintenant la prochaine intervenante, Mme la
députée des Chutes-de-la-Chaudière. Mme la
députée.
Mme Denise Carrier-Perreault
Mme Carrier-Perreault: Merci, M. le Président. Nous sommes
ici dans cette Chambre pour la prise en considération du rapport de la
commission de l'aménagement et des équipements qui devait porter
sur l'étude article par article du projet de loi 50. Oui, M. le
Président, je dis bien qui devait porter sur l'étude article par
article du projet de loi 50 car aucun article, je dis bien aucun article, n'a
pu être étudié lors de cette commission. Je tiens à
le préciser puisque moi-même j'étais membre de la
commission et j'étais membre avec cinq autres de mes collègues de
l'Opposition officielle, nous étions là tous les cinq pour cette
commission.
Dans les faits, on n'a pas réussi à aller plus loin que
les remarques préliminaires où, à tour de rôle, nous
avons exposé notre point de vue et soulevé différentes
questions. Aucune réponse de la part du ministre, complètement
muet. Donc, à nos interrogations, aucune réponse. Nous sommes
ensuite passés aux motions préliminaires. On a dit: S'il ne nous
répond pas à nous, le ministre, peut-être que si on fait
venir des gens, eux autres pourront nous apporter un éclairage
différent, peut-être aussi que le ministre va finalement
répondre à ces questions qu'on se pose et auxquelles on veut
avoir des réponses. Par ces motions préliminaires, on a
demandé de rencontrer des personnes-ressources, différents
groupes qui ont été touchés par le dernier projet de loi,
la loi 92.
Au bout de treize heures, le ministre des Transports n'en pouvait plus,
pas de nous répondre, pas de nous donner des réponses, il n'en
pouvait plus de nous entendre. J'entendais tout à l'heure, d'ailleurs,
le député d'Iberville qui, en début de soirée,
lorsqu'on pariait dans le cadre de l'adoption du projet de loi 75, disait que
les députés de l'Opposition faisaient jouer une cassette. Il nous
suggérait même un titre pour notre cassette, pas très
original, je dois l'avouer, il nous suggérait le titre: 3-20. Trois pour
trois bâillons, 20 pour vingt heures de commission. J'imagine que
peut-être que tout à l'heure, étant donné que le
député d'Iberville est ici dans cette Chambre, il pourra nous
suggérer un autre titre du même genre, 3 pour troisième
bâillon, 13 pour treize heures de commission. (0 h 50)
J'entendais aussi le député de Lac-Saint-Jean, pour le
citer parce que je trouve que l'expression convient fort bien, qui nous disait
que le gouvernement avait l'épiderme sensible. Ça fait quelques
fois qu'on le dit et on continue toujours de le vérifier. Le
gouvernement a vraiment l'épiderme sensible et particulièrement
le ministre des Transports parce que c'est un record, M. le Président:
troisième bâillon, treize heures de commission.
Quand il nous disait tout à l'heure, M. le ministre des
Transports, que... Bon, il nous a fait un rapport d'une dizaine de minutes. En
fait, c'est vrai qu'il a parlé peut-être plus ce soir sur le
projet de loi 50 et sur ce qui s'est passé en commission qu'il nous a
parlé à nous, qu'il nous a donné de réponses en
commission. C'est tout à fait exact de dire ça. Il nous disait,
ce soir, qu'on a demandé des groupes et que ça n'avait pas de bon
sens de demander des groupes. Il nous disait presque qu'on était de
mauvaise foi. En tout cas, ça ressemblait drôlement à
ça. Quel mal y a-t-il, M. le Président, à demander
à rencontrer le Vérificateur général? Si le
ministre avait donné des réponses à nos questions
lorsqu'on lui exposait nos interrogations durant les motions
préliminaires, on n'aurait pas eu besoin de demander à rencontrer
ces groupes-là, mais en aucun moment on a eu de réponse.
D'ailleurs, le ministre aurait dû être préparé
à répondre à ces questions-là. On voulait savoir
s'il y avait des opinions juridiques d'émises. Est-ce que la
Régie de l'assurance automobile a le droit de transférer ou
est-ce qu'on a le droit de siphonner comme ça? Est-ce que le
gouvernement a le droit de siphonner des fonds, comme ça, à la
Régie de l'assurance automobile? Ça lui avait été
posé comme question lors de l'étude des crédits. Il y
avait même l'avocat de la Régie qui était là, Me
Gélinas, et c'est très clair. C'est tout écrit,
d'ailleurs, dans l'étude des crédits. Sur cette
question-là, Me Gélinas avait dit: On pourra en reparler lors de
l'étude du projet de loi. C'est en plein ça qui est écrit
là. Alors, normalement, le ministre aurait dû être
préparé. Il devait bien s'attendre à ce qu'on lui pose
cette question lors de l'étude article par article du projet de loi.
Absolument pas. Alors on a demandé à parler au
Vérificateur général. On a demandé aussi à
rencontrer d'autres groupes, c'est vrai. Évidemment, le ministre n'a pas
accepté qu'on rencontre le Vérificateur général,
alors on a continué. On a demandé à rencontrer la
Fédération de l'âge d'or et la Fédération des
femmes du Québec. Le ministre nous disait tout à l'heure que
ça n'avait rien à voir, que c'était un projet de loi qui
avait été voté l'an dernier sauf que, M. le
Président, je regrette, mais il y a peut-être quelque chose. Il y
a sûrement un rapport entre les deux. En tout cas, il y a des gens qui
s'interrogent et ce n'est pas seulement l'Opposition.
La Fédération des femmes du Québec, entre autres,
M. le Président, dans un article récent... On sait que la loi 92
a été mise en application seulement depuis janvier 1990. Alors,
là, on se rend compte de certains effets de cette loi et la
Fédération des femmes du Québec estimait justement, dans
un article daté du mois de janvier, qu'il y a tellement de recul dans la
nouvelle loi 92 qu'on peut se demander à qui profiteront les sommes
supplémentaires annoncées à grand frais de
publicité. Bien là, nous autres, on avait comme une
réponse, voyez-vous, M. le Président. Le ministre nous annonce,
avec le projet de loi 50 qui est devant nous, qu'il va transférer les
fonds. Il nous le dit clairement, c'est très clair: Ce projet de loi
donne suite au discours sur le budget en prévoyant que la
société verse au fonds consolidé - au fonds
consolidé, c'est écrit ici. On nous dit que c'est pour faire des
routes, mais ce n'est pas ça qui est écrit là. C'est
écrit au fonds consolidé du revenu - pour l'exercice financier
1990-1991 du gouvernement et pour les quatre exercices financiers
subséquents, une redevance aux fins d'immobilisation en matière
de sécurité routière dont le montant et la
périodicité des paiements sont fixés par la loi. C'est
écrit en toutes lettres dans les notes explicatives du projet de loi. Il
nous explique qu'il y a aussi des sommes qui vont être versées au
Conseil de la santé et des services sociaux, à la Corporation
Urgences-santé de la région du Montréal
métropolitain, selon la répartition déterminée par
le ministre de la Santé et des Services sociaux, une contribution au
coût du transport ambulancier dont le montant et la
périodicité des versements sont versés par la loi. C'est
tout écrit. Les montants sont même écrits là-dedans,
M. le Président. On va chercher carrément 877 000 000 $ en cinq
ans dans les fonds de la Régie d'assurance automobile. Je pense que
c'est un peu normal que l'Opposition se pose des questions.
C'est évident que ce projet de loi est peut-être moins
connu dans la population, M. le Président, et a été moins
discuté par la population que celui sur les heures d'affaires, par
exemple. On le sait, les heures d'affaires, il y a eu des gens qui sont venus,
on a eu des représentations mais, pour ce projet-ci, c'est un petit peu
plus subtil au fond et ça prend du temps avant de toucher les
assurés et c'est un peu moins connu dans la population, mais ça
ne veut pas dire que l'Opposition, parce que la population connaît un peu
moins le projet de loi, qu'il ne faut pas qu'elle fasse son travail. C'est
à ce moment-là, je pense, que l'Opposition doit absolument faire
son travail. Le raisonnement du gouvernement est simple dans ce
dossier-là. C'est que le gouvernement nous dit... Il nous dit comme
ça: Écoutez, on a une période financière difficile,
on manque de sous quelque part et on a besoin d'aller chercher des sous. Donc,
on ne va pas donner des impôts supplémentaires, ça,
ça ne
paraît pas bien. Ça ne paraît pas bien, le
gouvernement ne passe pas... En tout cas, ça ne vole pas haut dans la
population quand le gouvernement augmente beaucoup les impôts. Alors,
c'est bien simple, à ce moment-là, on dit: On a des fonds -
ça, il nous le dit, il nous l'a dit, le ministre - c'est une bonne
gestion, on a des fonds dans la caisse des assurés, dans la caisse de la
Régie de l'assurance automobile. On va aller les chercher plutôt
que d'emprunter ou plutôt que de lever des impôts
supplémentaires. C'est une partie de son raisonnement. Pour faire avaler
un peu mieux la pilule, pour nous faire avaler un peu mieux le tout, il nous
enrobe ça en nous disant: Tout le monde nous dit que les routes sont en
mauvais état. Les routes, c'est la sécurité
routière, c'est dangereux pour les usagers, alors on va prendre cet
argent-là, puis on va mettre ça sur les routes. On va faire de
l'asphalte, des barres blanches; on va réparer les routes. Sauf que ce
qui est écrit là et ce qu'on a pu voir aux crédits - c'a
été démontré, je pense, par le critique de
l'Opposition, de façon assez claire - c'est que les fonds qui sont
siphonnés dans la caisse des assurés de la Régie de
l'assurance automobile ne s'en vont pas nécessairement aux Transports
où on va faire des routes. Ce n'est pas ça qui est dit. On dit:
Au fonds consolidé et, après, on va faire ce qu'on veut avec.
Puis le porte-parole des Transports du côté de l'Opposition
officielle, dans le budget, lorsqu'il a fait l'étude du budget, a
démontré qu'il n'y en avait pas plus d'argent pour les routes.
Alors, qu'on arrête de nous dire qu'on met ça sur les routes quand
il n'y a pas une cenne de plus pour les routes. Même si c'était le
cas, M. le Président, ce n'est pas le cas, mais même si
c'était le cas, sur le fonds, le principe, sur le principe de la chose,
nous autres, on soutient que c'est un hold-up, que ça ne se fait pas de
prendre l'argent de l'assurance automobile, l'argent de la caisse des
assurés, pour le mettre dans le fonds consolidé du
gouvernement.
On peut bien vouloir faire des routes, mais pas sur le dos des usagers.
Cette caisse-là a été formée vraiment pour les
indemnités. S'il y a trop d'argent, qu'on baisse les primes, mais qu'on
n'aille pas enlever l'argent de la caisse. C'est pour ça que moi, je
suis contre le projet de loi. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la
députée des Chutes-de-la-Chaudière. Je reconnais
maintenant le prochain intervenant, M. le député de Shefford. M.
le député.
M. Roger Paré
M. Paré: Oui. Merci, M. le Président. Eh bien! le
projet de loi 50, lorsqu'on regarde le titre, Loi modifiant la Loi sur la
Régie de l'assurance automobile du Québec et d'autres
dispositions législatives, on peut s'imaginer qu'effectivement ça
va toucher les polices d'assurance ou le régime d'assurance automobile
des Québécois. Est-ce que c'est pour l'améliorer? Est-ce
que c'est pour en diminuer les avantages? Il faut le lire, effectivement, pour
s'apercevoir qu'il ne s'agit pas d'améliorations, mais absolument pas,
pour les conducteurs québécois. Il s'agit plutôt d'une loi
qui remplit un mandat confié au ministre des Transports par le ministre
des Finances. Il s'agit de lire une seule phrase dans les notes explicatives
pour s'apercevoir ce qu'est ce projet de loi: "...ce projet donne suite au
discours sur le budget en prévoyant que la Société verse
au fonds consolidé du revenu... "Ce qu'on est en train de dire, c'est
simple, c'est que le gouvernement a décidé de vider la caisse de
la Régie de l'assurance automobile du Québec.
Je me rappelle que, lorsque le ministre des Finances a lu son discours
sur le budget, de l'autre côté, on s'est levés debout,
parce que le ministre a dit: Cette année, oui, il y a une augmentation
du déficit, mais il n'y aura pas d'augmentation d'impôts et
presque pas d'augmentation de taxes. C'était de toute beauté. De
l'autre côté, on disait que, malgré le ralentissement
économique, on était capable de ne pas aller chercher davantage
d'argent ou ça laissait entendre qu'on était capable de ne pas
aller chercher davantage d'argent dans les poches des contribuables. Pourtant,
qu'est-ce qu'on fait depuis quelques jours, ici, à l'Assemblée
nationale? On se rend compte que chacun des ministres, en tout cas de
ministères importants, est en train de venir chercher l'argent des
contribuables d'une façon indirecte, d'une façon cachée,
par un projet de loi touchant des institutions autres que directement les
ministères.
Hier, c'était le projet de loi du ministre de l'Éducation
concernant les commissions scolaires. Il y avait une phrase semblable;
ça donnait le pouvoir au ministre de l'Éducation d'obliger les
commissions scolaires à aller chercher de l'argent dans les poches des
contribuables via les taxes foncières. Donc, le gouvernement ne le fait
pas directement; il fait faire par les commissions scolaires ce que lui ne
voulait pas faire ici, publiquement, c'est-à-dire aller chercher
davantage d'argent dans les poches des contribuables. Donc, le gouvernement
économise en se retirant, finalement, d'une partie des coûts de
l'éducation et en obligeant les commissions scolaires à aller
chercher l'argent dans les poches des contribuables pour financer
l'éducation. (1 heure)
Ce soir, c'est un autre ministre qui fait la même chose. Pour
répondre à un ordre, un commandement du ministre des Finances, eh
bien, il va aller chercher dans les poches des contribuables, via la
Régie de l'assurance automobile, l'argent dont il a besoin pour le fonds
consolidé du revenu. Pourtant, ce n'était pas ça
l'objectif,
les fondements mêmes de la Régie de l'assurance automobile
du Québec. Et c'est bon, peut-être, de se rappeler ce qui s'est
passé là-dedans. Ça faisait des années et des
années que des organismes de protection du consommateur, des
syndiqués, des gens d'à peu près toutes les associations
demandaient au gouvernement de mettre sur pied une régie d'État
au niveau de l'assurance automobile du Québec, parce que c'était
devenu inacceptable. Pour les vicimes, c'étaient toujours des
procédures au civil qui prenaient beaucoup de temps et qui
coûtaient très cher. Et pourtant, le projet a été
sur les tablettes pendant des années, jusqu'à ce que le
gouvernement du Parti québécois décide, lui, de rendre
à terme les projets et de mettre sur pied la Régie de l'assurance
automobile du Québec. Je pense que c'est bon de se le rappeler et de
rendre hommage à des gens qui le méritent. Je pense ici à
Mme Lise Payette qui a présenté le projet de loi, qui l'a
défendu et qui a dû en faire la promotion un peu partout au
Québec. C'était très contesté. Ce n'était
pas pensable que ce soit une société d'État qui puisse
assurer les Québécois, et spécialement les jeunes parce
que ça n'avait plus de bon sens. Pour les jeunes, en 1974, 1975, 1976,
des fois ça coûtait plus cher pour se protéger, s'assurer
que de s'acheter l'automobile. Les paiements étaient plus
élevés pour l'assurance que pour l'automobile. L'État a
décidé d'intervenir pour aider tous les citoyens, mais
peut-être d'une façon particulière les plus jeunes. Donc,
Mme Payette s'est promenée dans le décor en disant que, oui, une
société d'État pouvait donner un très bon service,
un bon rendement, une bonne protection et être rentable. Maintenant, on
en a la preuve. La preuve est très concluante puisque, maintenant, le
gouvernement libéral décide d'aller chercher l'argent dont il a
besoin pour ses revenus consolidés dans la caisse de la Régie de
l'assurance automobile du Québec. Ça paraît bien, le
gouvernement dit: Je n'augmente pas les impôts ni les taxes. Mais il va
chercher l'argent dans les coffres de la Régie de l'assurance automobile
du Québec.
Pourtant, c'est une société d'État, une
régie, une assurance à laquelle tous les conducteurs et les
conductrices du Québec participent. Une assurance, habituellement,
ça veut dire qu'on a la protection et qu'on paie les primes en fonction
du nombre d'accidents, finalement des indemnités. Et lorsque c'est une
assurance qui nous appartient, comme ça, une assurance d'État,
ça veut dire que quand c'est rentable, lorsqu'on a payé les
Indemnités et tous les frais, finalement les dettes de la Régie,
s'il y a des profits Importants, habituellement les bénéficiaires
de la police, c'est-à-dire les contribuables, ceux qui sont
assurés peuvent s'attendre à une diminution: diminution de prime,
diminution de permis ou diminution de plaque d'Immatriculation. Donc, si on ne
vidait pas la caisse, les Québécois auraient pu s'attendre
à une diminution importante de leurs primes, puisque la caisse est
pleine. Au lieu de faire ça, le gouvernement a décidé
d'aller chercher les fonds qui sont dans la caisse. C'est exactement ça
qu'on retrouve dans le projet de loi 50, c'est-à-dire cette compagnie,
cette société d'État, cette Régie de l'assurance
automobile du Québec qui faisait des profits, qui aurait pu les
retourner de différentes façons, soit donner de meilleurs
indemnités aux victimes d'accidents d'automobile ou diminuer les primes.
Là, ils ne pourront plus penser à ça parce que,
maintenant, la Régie devient une Société et le
gouvernement va aller puiser les fonds de la Société pour mettre
dans son fonds de roulement. Donc, c'est une taxe cachée, une taxe
déguisée que le gouvernement va chercher dans les poches,
finalement, des conducteurs et conductrices du Québec.
Et tout ça, on dit que c'est pour le beau principe. C'est pour se
donner de meilleures routes. Ça, c'est seulement un argument sur lequel
on peut même se questionner par rapport à sa
véracité. Si c'est vrai qu'on va chercher des dizaines de
millions dans les coffres de la Régie de l'assurance automobile, en
prétextant que c'est pour améliorer l'état des routes au
Québec puisque, à travers tous les comtés, tout le
territoire québécois, nos routes sont dans un état
lamentable... Il y a même des centaines de ponts au Québec qui,
présentement, sont dans un état dangereux, c'est reconnu. On
aurait pu, à tout le moins, penser qu'ils nous ont dit la
vérité et que l'argent qu'ils vont chercher dans les coffres de
la Régie, ça va être pour améliorer l'état de
nos routes. C'est ce qu'on nous a dit. Puis on s'aperçoit, notre
critique, le député de Lévis, l'a prouvé à
maintes reprises, que l'argent qu'on va chercher...
M. Brassard: Question de règlement, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Question de
règlement.
M. Brassard: Je m'excuse. Mon collègue est tellement
intéressant qu'on a sûrement besoin du quorum.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Le quorum est complet.
Si vous voulez poursuivre, M. le député.
M. Brassard: Complet, 22?
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Vingt et un.
M. Brassard: Oui?
M. Paré: Merci, M. le Président. Ce que
J'étais en train de dire, c'est qu'on a fait
accroire aux Québécois que, parce qu'on va chercher leur
argent comme assurés dans la caisse de la Régie de l'assurance
automobile du Québec, on investirait davantage dans les routes; mais
c'est complètement faux, et tous les députés ici en sont
conscients. Qu'on regarde seulement les budgets qu'on nous a donnés pour
les comtés, pour la voirie municipale, c'est une diminution presque
partout: moins d'argent.
En ce qui concerne, maintenant, la construction, l'immobilisation et
l'entretien, dans bien des comtés, l'argent investi cette année
pour les nouvelles routes, c'est zéro. Diminution de plusieurs dizaines
de millions de dollars au ministère des Transports pour les routes,
cette année, et on nous a fait accroire que l'argent qu'on allait
chercher dans la caisse de la Régie de l'assurance automobile du
Québec, c'était pour des routes, alors que la
réalité - et là, on le voit maintenant - c'est une
diminution considérable en termes de plusieurs dizaines de millions de
dollars pour la construction des routes. On nous a leurrés, on nous a
trompés. C'est tout simplement que le gouvernement a
décidé d'aller chercher ça pour le fonds
consolidé.
Donc, la loi est tellement claire: ce n'est pas une loi pour
améliorer les conditions des automobilistes québécois; ce
n'est pas une loi pour améliorer le régime comme tel, qui
était très bon, grâce à Mme Payette et au
gouvernement du Parti québécois. Ce n'est même pas une loi
pour améliorer les routes au Québec, c'est tout simplement pour
mettre dans les coffres du gouvernement. Donc, ça veut dire qu'on ne
doit pas s'attendre à des diminutions de primes, à des
diminutions du coût du permis, à des diminutions des primes
d'assurances, puisque le gouvernement va prendre l'argent; c'est une taxe qu'il
va chercher d'une façon indirecte. Et je le répète, la loi
est tellement claire, ce projet donne suite au discours sur le budget en
prévoyant que la société verse au fonds consolidé
du revenu... C'est non pas un projet de loi pour aider les automobilistes, mais
c'est un projet de loi pour venir - finalement, je ne peux pas utiliser le mot
- mais venir chercher, dans la caisse de la Régie de l'assurance
automobile, qui appartient aux assurés du Québec, les fonds qu'on
avait accumulés et qui auraient pu nous permettre finalement une
diminution de primes.
C'est très malheureux. Merci. M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député. Je reconnais le prochain intervenant, M. le
député d'Ungava. M. le député d'Ungava.
Motion d'ajournement du débat
M. Claveau: M. le Président, si vous me permettez, avant
de commencer ma brève intervention, je voudrais faire motion à
l'effet qu'en vertu des dispositions de l'article 100 du Règlement de
l'Assemblée nationale nous ajournions le débat en cours.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Votre motion est
recevable, M. le député. En vertu de l'article 100, je vais
rappeler aux parlementaires comment est réparti le temps.
M. Pagé: Dix, dix.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Oui, oui, je sais.
Alors, l'auteur de la motion, vous avez une période de dix minutes. Un
représentant de chaque groupe parlementaire et l'auteur de la motion ont
un droit de réplique.
Alors, je vous reconnais, M. le député d'Ungava, pour une
période de dix minutes, au maximum.
M. Brassard: Allons nous reposer. M. Christian Claveau
M. Claveau: Oui, M. le Président. D'abord, M. le
Président, deux grands événements sont a souligner en ce
moment. Je voudrais profiter de l'occasion, si vous me permettez, pour
souhaiter un joyeux et magnifique anniversaire à notre collègue,
la députée des Chutes-de-la-Chaudière.
Des voix: Bravo!
M. Claveau: Vous en conviendrez, M. le Président, c'est
une curieuse façon de commencer son anniversaire, surtout que ça
arrive juste une fols par année. L'autre chose, M. le Président,
qui, je pense, mérite d'être soulignée au moment où
l'on se parle, c'est l'arrivée de l'été. Vous savez
que...
M. Brassard: Ah! bien, bravo!
M. Claveau: Vous savez que c'est au solstice de juin...
Une voix: Au moins, on est d'accord sur ça. (1 h 10)
M. Claveau: ...que l'été cogne à nos portes
et, M. le Président, il convient, par la même occasion, de
souhaiter que tous les automobilistes de la grande région
montréalaise s'arment de patience, de leur suggérer d'être
bien patients, parce que, avec ce qu'on voit se préparer, ils vont avoir
un été très chaud, d'autant plus que le même
ministre ne nous garantit pas non plus que la Sûreté du
Québec nous accompagnera avec tous ses services durant la période
estivale. D'autre part, M. le Président, quant à nous, des
régions, nous aurions souhaité pouvoir bénéficier
ou attendre un peu, à l'occasion, sur nos routes et c'est de bonne
grâce que nous aurions collaboré avec le ministère des
Transports pour faire
en sorte de lui permettre de réparer les nombreux
trous et crevasses que l'on retrouve sur les routes des régions du
Québec. Enfin, nous n'en aurons pas beaucoup l'occasion cet
été.
M. le Président, il est 1 h 10 du matin. Nous sommes
en train de discuter un projet de loi de très grande importance et pour
lequel, en plus, on nous a imposé un bâillon en commission
parlementaire, un projet de loi qui va permettre au gouvernement de liquider
tous les surplus, tous les fonds qui ont été accumulés
péniblement au cours des années par les automobilistes,
propriétaires de véhicules automobile et qui se retrouvent
à la Régie de l'assurance automobile du Québec et des
fonds qui devraient servir d'abord et avant tout pour les raisons pour lesquels
ils ont été payés. C'est en pleine nuit, M. le
Président, alors que les actionnaires, si vous me permettez d'utiliser
l'expression, les bailleurs de fonds de la Régie de l'assurance
automobile du Québec, ne sont pas là pour nous écouter,
que l'on va en parler. Comment peut-on imaginer, M. le Président, une
société, une compagnie qui profiterait du fait que tous ses
actionnaires sont en vacances pour faire son assemblée
générale? Et bien, c'est, en gros, ce que nous faisons. Nous
discutons d'un projet de loi de très haute importance qui va avoir des
impacts non négligeables sur la facturation de la Régie de
l'assurance automobile du Québec, sur le niveau des primes qu'elle va
devoir exiger à plus ou moins long terme à l'ensemble des
automobilistes du Québec et nous le faisons alors que les automobilistes
sont au repos, en train de reprendre des forces pour s'attaquer à une
nouvelle journée de labeur dès le lever du jour.
M. le Président, il me semble que c'est là
une mécanique tout à fait inacceptable dans une
société qui se veut démocratique. On a beau, M. le
Président, imposer des bâillons aux députés en cette
Chambre, les empêcher de parler, les empêcher de s'exprimer, mais
j'espère et je souhaite de tout coeur, M. le Président, que
l'ignominie n'ira pas jusqu'à faire en sorte que les principaux
intéressés dans la population ne pourront pas participer ou, du
moins, assister comme spectateurs au "hold-up" qu'on est en train de leur faire
subir.
M. le Président, je suis d'avis, étant
donné les circonstances, étant donné l'heure tardive,
étant donné que, d'après le visage dégarni que nous
offre la Chambre en face de nous, plusieurs ministres semblent être
usés à la corde, pour reprendre une expression qui a
déjà été utilisée en cette Chambre par un
député de l'aile ministérielle, alors que plusieurs
ministres semblent plutôt maganés, eh bien, qu'il serait
peut-être de bon aloi de permettre à ceux qui vivotent encore un
tant soit peu d'aller se reposer avant de ne pouvoir remplir convenablement
leurs fonctions et nous reviendrions, M. le Président, tout le monde,
frais et dispos, en cette Chambre demain pour reprendre au grand jour ce
débat sur un "hold-up" qui demeurera historique.
M. le Président, vous êtes à même
de constater vous-même, de votre siège, que nous, de l'Opposition,
devons être vigilants pour nous assurer de ne pas parler dans le vide,
pour nous assurer qu'il y ait au moins quorum en cette Chambre. C'est le
minimum que l'on puisse exiger de la démocratie, M. le Président.
C'est le minimum que l'on est en droit de s'attendre, nous, de l'Opposition,
que le gouvernement assure le quorum en cette Chambre. Et on est juste à
la ligne de flottaison quand on n'est pas un peu sous l'eau, M. le
Président. Et, à tout bout de champ, il faut revenir et rappeler
à nos collègues de l'aile ministérielle qu'à cause
de la mauvaise planification de son gouvernement, à cause d'un laxisme
qui, pour nous, est très difficile à expliquer, eh bien, ils sont
obligés de passer des nuits blanches en cette Chambre à former
quorum et à nous écouter pour pouvoir refaire les messages aux
populations qui les ont élus. Parce que ces populations-là
devront compter sur eux pour avoir le message, étant donné
qu'à l'heure où nous siégeons, elles risquent fort
d'être occupées à d'autres tâches.
M. le Président, il me semble donc que ce n'est
là qu'une question de bon aloi, de savoir-vivre que de permettre
à nos collègues de l'aile ministérielle d'aller se reposer
eux aussi, peut-être pour avoir l'oreille plus alerte dès la
reprise des travaux, à 10 heures demain matin, et aussi, de toute
évidence, pour s'assurer que les intéressés, que ceux sur
qui on va braquer le revolver dans quelques heures, soient au moins au courant
des dangers que l'on risque de leur faire subir et que l'on va
nécessairement leur faire subir.
Il y a une espèce d'inconvenance, M. le
Président, à siéger jour et nuit sur des lois aussi
fondamentales. N'ayez crainte, en ce qui nous concerne, nous, de l'Opposition,
restons alertes et vigilants quelle que soit l'heure; c'est bien connu. Nous
sommes à la disposition de la population vingt-quatre heures par jour et
nous allons tenir le coup tant et aussi longtemps qu'il le faudra pour nous
assurer que les intérêts de nos commettants, que les
intérêts de ceux que nous représentons en cette Chambre
soient respectés par ce gouvernement, M. le Président. Et je peux
vous assurer qu'en ce qui nous concerne, nous sommes tout à fait
disposés à siéger jour et nuit, jusqu'à la fin de
juillet s'il le faut, pour s'assurer que les lois qui vont être
votées en cette Chambre le seront en toute honnêteté, en
toute connaissance de cause et en toute conformité avec les
intérêts de l'ensemble de la population du Québec et non
pas pour faire en sorte que l'on prenne les caprices de quelques-uns pour les
besoins de tout le monde, comme c'est le cas, par exemple, comme on a pu le
voir pas plus tard que tout à l'heure avec la Loi sur les heures
d'affaires.
Là, M. le Président, si je fais cette motion,
ce n'est pas pour nous faciliter la tâche à nous,
parce que de toute façon, nous sommes là pour ça.
Nous avons été élus pour travailler pour la population et
nous serons là tant et aussi longtemps qu'il le faudra pour s'assurer
que les intérêts de la population sont bien
représentés et que les lois reflètent vraiment les
aspirations fondamentales du peuple du Québec. Mais, par contre, comme
nous voyons qu'il y a quelques bancs libres en face de nous et qu'il semble y
avoir un problème de concentration de la part de nos collègues du
côté ministériel, eh bien, M. le Président, c'est en
pensant à eux que je me suis permis de faire cette motion d'ajournement.
Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député. M. le leader du gouvernement.
M. Michel Pagé
M. Pagé: M. le Président, pour le
bénéfice de celles et ceux qui nous écoutent, c'est une
motion qui est présentée par l'Opposition en vertu des
dispositions du règlement et qui vise purement et simplement à
retarder de quelques minutes l'étude du projet de loi en cours, au
moment de la prise en considération du rapport. C'est pour gagner du
temps. Je retiens que le député nous indiquait dans un premier
temps que l'objectif de sa démarche, c'était que les
députés puissent aller se reposer et, se référant
évidemment à ceux qu'il connaît plus intimement,
c'est-à-dire ses collègues de l'Opposition officielle, il sentait
que ses collègues avaient besoin d'aller se reposer, de se
rafraîchir, etc. Je conviens que l'heure est tardive. Mais il reste
seulement deux jours de travaux à l'Assemblée nationale du
Québec, deux jours de travaux, M. le Président. Il ne reste
même pas quarante-huit heures de travaux à l'Assemblée
nationale du Québec. Donc, on doit tout faire ce qui humainement
possible pour adopter le plus grand nombre de lois qui sont au feuilleton. Et
ça, c'est le mandat du leader du gouvernement. Je retiens donc que
l'Opposition ne veut pas siéger malgré qu'il ne reste que
quarante-huit heures, que, par la suite, les députés seront dans
leur comté, seront en vacances parlementaires. Partant de là, M.
le Président, compte tenu de la faiblesse des arguments de l'Opposition,
je vous dis tout de suite que je n'ai pas l'intention d'utiliser tout le temps
de la réplique et qu'on est prêts à disposer de la
motion.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, pour la formation
du groupe parlementaire de l'Opposition officielle, M. le député
de Lac-Saint-Jean et whip de l'Opposition officielle.
(1 h 20)
M. Jacques Brassard M. Brassard: Je vais me risquer, M. le
Président, à essayer de convaincre le leader du gouvernement de
la pertinence de la motion d'ajournement de mon collègue d'Ungava, qui
m'a pris un peu par surprise, je dois le dire. J'ai été un peu
surpris de sa motion, ce n'était pas prévu. C'est, comme on dit,
une action purement spontanée de sa part, mais je l'écoutais,
puis j'ai vite compris que, ma foi, c'était une motion tout à
fait pertinente, appropriée dans les circonstances, non pas pour gagner
du temps, comme vient de l'insinuer, de façon quasiment malveillante, le
leader du gouvernement, non, non. Ce n'est pas pour gagner du temps, ni en
perdre, c'est pour des motifs très sérieux.
D'abord, je dirais que cette motion-là a été
présentée dans l'intérêt du leader du gouvernement
lui-même. Visiblement, depuis le début de la session, il faut bien
le reconnaître, même si j'ai beaucoup d'amitié pour lui, il
faut reconnaître qu'il est complètement désemparé.
Il est complètement désemparé. Il est absolument incapable
de programmer ou de planifier sa législation de façon
intelligente, convenable. Il est incapable de faire en sorte que les
députés de l'Assemblée nationale puissent
légiférer et étudier des lois dans des conditions
intelligentes, convenables et acceptables. C'est l'improvisation la plus
absolue, une présentation anarchique de son menu législatif. On
ne sait pas trop où il s'en va, quelles sont les lois auxquelles il
tient. Vraiment, c'est désolant.
Je trouve ça désolant parce que la réputation du
député de Portneuf va sortir de cette session-là
amochée, amochée, il faut le dire. C'est quand même un
parlementaire de longue date, qui est ici depuis fort longtemps, plus longtemps
que moi d'ailleurs. Il a un mandat de plus que moi. Donc, c'est un vieux
parlementaire, malgré son âge pas très avancé, c'est
un vieux parlementaire. Et là, il va sortir de cette session-là
avec une réputation de leader amochée, défaite, parce
qu'il va avoir raté sa législation. Il va l'avoir
présentée de façon tellement désordonnée,
tellement improvisée, sans objectif, cahotique, que sa réputation
de leader va, je pense, être complètement bousillée.
J'ai l'impression que le premier ministre va en tenir compte dans les
mois qui viennent. Parce que le leader aurait besoin de la nuit qui reste, du
temps qui reste, pour réfléchir à ce qu'il convient de
faire, en termes de menu législatif, identifier les projets de loi qu'il
veut faire adopter et, entre autres, le projet de loi 50, je pense qu'il
devrait le laisser sur le carreau, ça m'apparaît
évident.
Donc, cette motion se fait par le député d'Ungava, dans
l'intérêt même du leader du gouvernement, mais c'est aussi
dans l'intérêt des ministériels. Regardez ça, M. le
Président, regardez ça. C'est la première fois, moi, que
je vois que c'est l'Opposition qui assure le quorum. Habituellement, et j'ai
déjà été whip du gouvernement deux ans et demi, M.
le Président, je
connais ça, le métier de whip, et je sais que, comme whip
du gouvernement, une des tâches qu'on a, c'est d'assurer le quorum. Ce
sont les ministériels qui assurent le quorum. Et là, ce soir,
cette nuit, c'est le contraire. Si les députés de l'Opposition
entraient dans leur bureau, là, vous auriez de la misère, vous
suspendriez pas mal longtemps cette nuit. Vous auriez de la misère
à assurer le quorum. Regardez les banquettes vides.
Donc, les ministériels, je pense, sont fatigués,
désemparés...
M. MacMillan: Question de règlement, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Quelle est votre
question de règlement, M. le député de Papineau?
M. MacMillan:...
Le Vice-Président (M. Bissonnet): C'est en vertu de quel
article?
M. MacMillan: J'ai oublié l'article, le numéro de
l'article. C'est juste pour mentionner qu'on est 25 en train de manger du
poulet dans la salle du bureau du whip...
Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît,
M. le député...
M. MacMillan: ...si on peut les appeler, ce serait correct.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): ...ce n'est pas
pertinent.
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le
député, si vous voulez poursuivre.
M. Brassard: Au lieu de manger du poulet, M. le Président,
ils devraient aller rencontrer leur leader et s'expliquer avec lui. Ce serait
pas mal plus utile pour le Parlement et pour l'intérêt
supérieur des Québécois, pour reprendre une expression
couramment utilisée par le premier ministre. Donc, c'est dans
l'intérêt des ministériels, cette motion d'ajournement.
Vous êtes visiblement fatigués, épuisés et, surtout,
vous ne savez pas où le gouvernement s'en va. Vraiment, on voit,
à vos visages dépités, vous êtes des
députés dépités...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Brassard: ...on s'en rend compte visiblement que vous
êtes un peu perdus et même pas mal perdus dans tout ça et
vous auriez besoin d'un repos mérité. Ça vous permettrait
de réfléchir et ça vous permettrait d'avoir des
échanges fructueux avec votre leader du gouvernement pour que vous
puissiez vous expliquer ensemble pour savoir où vous vous en allez parce
que, nous, on ne le sait pas trop où vous vous en allez. Et c'est dans
l'intérêt du peuple lui-même, cette motion
d'ajournement.
Le projet de loi 50, le meilleur usage qu'on peut en faire, c'est de le
laisser au feuilleton pour plusieurs mois, le laisser faisander. Il
mérite ça, le projet de loi 50, parce que je suis convaincu qu'au
bout de quelques mois, à la reprise de la session d'automne, le
gouvernement aura eu le temps de changer son opinion et son point de vue sur un
projet de loi qui constitue - je l'ai dit à maintes reprises dans cette
Chambre - un véritable hold-up, un braquage par deux ou trois
"pistoleros" du gouvernement, pour accaparer 650 000 000 $ et plus, presque 800
000 000 $, dans la caisse des automobilistes - presque 900 000 000 $ - un
siphonnage éhonté, scandaleux au détriment des
automobilistes du Québec, un détournement de la vocation et de la
mission de la Régie elle-même. Alors, je pense qu'un ajournement
s'impose. Ça permettrait ainsi aux automobilistes du Québec de
reprendre le volant, demain matin, avec, au moins, la satisfaction de voir que
le projet de loi 50 n'a pas franchi l'étape qu'on voulait lui faire
franchir cette nuit et de susciter peut-être un peu d'espoir chez les
millions d'automobilistes du Québec, un peu d'espoir que le gouvernement
retrouve la raison et convienne qu'un hold-up pareil, c'est non seulement un
scandale, mais ça ne se fait pas, c'est inadmissible, c'est inacceptable
et, à ce moment-là, peut-être en retrouvant la raison,
qu'il accepte de remettre à plus tard le hold-up et même de
l'annuler purement et simplement.
Alors, M. le Président, au début, j'étais surpris
de la motion de mon collègue d'Ungava parce que, je vous l'avoue bien
franchement, il y a des gestes spontanés qui se passent parfois dans un
Parlement, ça en est un, mais la spontanéité, parfois, est
de mise dans l'Assemblée nationale, parce que je connais mon
collègue d'Ungava et je suis sûr que ça vient du coeur.
Ça vient du coeur et ça vient d'une compréhension profonde
des intérêts du Parlement du Québec, de l'Assemblée
nationale, bafouée dans ses droits les plus fondamentaux par le
gouvernement, depuis une semaine, bafouée dans ses droits. Trois
bâillons, c'est quelque chose de tout à fait inusité.
Ça ne s'est jamais vu, c'est du jamais vu. Alors donc, le
député d'Ungava, voyant ses droits bafoués, a eu comme un
cri du coeur, il a présenté cette motion d'ajournement et je
demande au gouvernement de l'accepter.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député. Je reconnais maintenant M. le député
d'Ungava, en vertu de votre droit de réplique et avec un maximum de cinq
minutes. M. le député
d'Ungava.
M. Christian Claveau (réplique)
M. Claveau: M. le Président, de toute évidence...
Je regarde encore une fois, en terminant, les banquettes vides en cette Chambre
et je me dis que, quoiqu'on en dise, il doit y en avoir plusieurs qui sont
déjà partis sous d'autres deux...
Une voix: On va manquer de poulet.
M. Claveau: ...et, quant à ceux qui sont
intéressés par le poulet, peut-être qu'ils
s'intéressent plus à l'agriculture et étant donné
les nouvelles dispositions du libre-échange qui mettent en péril
nos éleveurs de poulet au Québec, quant à
l'accessibilité au marché américain, eh bien, ils ont
décidé de soutenir le marché en consommant du poulet de
nuit au Parlement. C'est peut-être là une oeuvre très
louable, c'est de la philanthropie au sens pur, mais ça ne justifie
peut-être pas qu'on en profite pour aller ponctionner 877 000 000 $.
Alors que tout le monde a le dos tourné en mangeant du poulet, on va
vider la caisse. M. le Président, je constate que, effectivement, il y a
plusieurs de nos collègues qui sont quelque peu fatigués. Et, de
toute façon, il y a quelque chose de fondamentalement immoral, de
clairement immoral et inadmissible dans le fait qu'on nous oblige à
opérer, à fonctionner de nuit, pour passer des projets de loi
aussi importants que celui-là. On l'a fait depuis le début de la
semaine.
M. le Président, on peut accuser l'Opposition de tout ce qu'on
voudra, de l'autre côté de la Chambre, mais il n'est reste pas
moins un fait, c'est que, s'il fallait qu'à l'image du
Nou-veau-Brunswick ce gouvernement soit seul en Chambre, il y a longtemps qu'il
ne resterait même plus d'automobilistes au Québec. Une chance que
l'Opposition est là pour défendre les intérêts des
Québécois et Québécoises. Une chance que nous
sommmes vigilants et que nous restons dispos, même à une heure
aussi avancée de la nuit.
Des voix:...
M. Claveau: M. le Président, j'entends toutes sortes de
rumeurs en cette Chambre. On se croirait dans un poulailler. Ce qui fait preuve
du peu d'intérêt que ces gens-là peuvent avoir pour nos
propos. Etant donné, même, la difficulté que certains ont
à comprendre l'intérêt de nos interventions, j'en suis
même à me demander s'il n'y en a pas quelques-uns qui se
promènent avec des bouchons dans les oreilles, pour être bien
certains de ne rien entendre et, surtout, de ne pas changer d'idée. Si
on faisait un petit sondage à main levée, on aurait
peut-être des surprises, et il y en a peut-être quelques-uns qui
seraient obligés de lever la main en disant: Oui, M. le
Président, je m'en excuse, j'avais un bouchon dans les oreilles. Et, en
disant ça, je ne regarde personne.
Toujours est-il que ça n'a plus de bon sens. On est toujours
à rechercher le quorum. On a vu qu'au moment du dernier vote, tout
à l'heure, on n'était même pas encore rendus à
minuit, et il y avait à peine 50 % des députés
ministériels qui étaient présents en cette Chambre.
Imaginez-vous qu'est-ce que ça va être lorsque l'on aura à
voter, aux petites heures du matin, sur le projet de loi en question, le projet
de loi 50, qui est pourtant un projet de loi très important, et qui
risque de modifier passablement le comportement des automobilistes
québécois, de ceux qui payent, qui ont alimenté la
cagnotte depuis une bonne douzaine d'années, et qui, aujourd'hui, se
voient dépouillés de ce bien qu'ils ont accumulé avec les
années, pour satisfaire le président du Conseil du trésor
qui veut à tout prix, envers et contre tous, sans considération
aucune que ses colonnes comptables balancent en fin d'exercice.
Là-dessus, M. le Président, je crois que c'est le temps de passer
au vote, et j'en suis même à me demander...
Une voix:...
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Si vous voulez terminer,
M. le député.
M. Claveau: Ah, on me dit, M. le Président, que,
effectivement, je dois donner une chance à mes collègues de
l'aile ministérielle, sinon on risque de renverser le gouvernement sur
ce vote-là, dans la mesure-Le Vice-Président (M. Bissonnet):
Si vous voulez conclure, s'il vous plaît.
M. Claveau: ...où leurs banquettes sont terriblement
dégarnies. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce que la motion du
député d'Ungava d'ajourner le débat est
adoptée?
Une voix: Vote nominal.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Vote enregistré.
Qu'on appelle les députés! (1 h 35 - 1 h 41)
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Si vous voulez prendre
place, s'il vous plaît! Si vous voulez vous asseoir, s'il vous
plaît. S'il vous plaît! Mmes, MM. les députés, en
vertu de l'article 32, nous allons procéder à un vote. Je vous
demande votre collaboration entière.
M. Boulerice: Ah! le 32, je respecte ça.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le
député de Sainte-Marie-Saint-Jacques, à l'ordre,
s'il vous plaît. S'il vous plaît! Je vais mettre aux voix la motion
du député d'Ungava, motion d'ajournement du débat. Que
ceux et celles qui sont pour cette motion, veuillent bien se lever.
Le Secrétaire adjoint: Mme Blackburn (Chi-coutimi), Mme
Marois (Taillon), M. Garon (Lévis), M. Jolivet (Laviolette), M. Baril
(Arthabaska), Mme Juneau (Johnson), M. Dufour (Jonquière), M. Lazure (La
Prairie), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Léonard (Labelle), Mme
Vermette (Marie-Victorin), M. Paré (Shefford)...
Des voix: Bravo, bravo!
Le Secrétaire adjoint: ... M. Claveau (Unga-va), M.
Boulerice (Sainte-Marie-Saint-Jacques), M. Morin (Dubuc), Mme Caron
(Terrebonne), M. Boisclair (Gouin), M. Trudel
(Rouyn-Noran-da-Témiscamingue), Mme Dupuis (Verchères), Mme
Carrier-Perreault (Les Chutes-de-la-Chaudière).
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Que ceux et celles qui
sont contre cette motion veuillent bien se lever.
Le Secrétaire adjoint: M. Pagé (Portneuf), Mme
Gagnon-Tremblay (Saint-François), Mme Bacon (Chomedey), M.
Côté (Rivière-du-Loup), M. Cusano (Viau), M. Picotte
(Maskinongé)...
Des voix: II vote! Il vote! Oh!
Le Secrétaire adjoint: ...Mme Robillard (Chambly), M.
Blackburn (Roberval), Mme Bleau (Groulx), M. Maciocia (Viger), Mme
Trépanier (Dorion), M. Middlemiss (Pontiac), M. Beaudin (Gaspé),
Mme Dionne (Kamouraska-Témiscouata), M. St-Roch (Drummond), Mme Pelchat
(Vachon), M. Paradis (Matapédia), M. Marcil (Salaberry-Soulanges), M.
Lemire (Saint-Maurice), M. Pou-lin (Chauveau), M. Benoit (Orford), M. Williams
(Nelligan), M. Kehoe (Chapleau), M. Doyon (Louis-Hébert), M. Messier
(Saint-Hyacinthe), M. Charbonneau (Saint-Jean), Mme Bégin
(Belle-chasse), M. Bélanger (Laval-des-Rapides), M. Gauvin
(Montmagny-L'Islet), M. Gautrin (Verdun), M. Larouche (Anjou), M. Khelfa
(Richelieu), M. Gobé (LaFontaine), Mme Hovington (Matane), M. Joly
(Fabre), M. LeSage (Hull), M. Bordeleau (Acadie), M. Audet (Beauce-Nord), M.
Parent (Sauvé), M. Camden (Lotbinière), M. Bradet (Charlevoix),
M. Farrah (Îles-de-la-Madeleine), M. Forget (Prévost), Mme
Loiselle (Saint-Henri), M. Lafrenière (Gatineau), M. Lafrance
(Iberville), M. MacMillan (Papineau).
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce qu'il y a des
députés qui s'abstiennent? M. le secrétaire. le
secrétaire: pour: 20 contre: 47
Le Vice-Président (M. Bissonnet): La motion est donc
rejetée et nous poursuivons le débat sur le projet de loi 50. Je
reconnais M. le député d'Ungava.
Une voix: Bravo!
Reprise du débat sur la prise en
considération du rapport de la commission
M. Christian Claveau
M. Claveau: Vous voyez, M. le Président, juste avec le
résultat du vote, j'avais presque raison, dans la mesure où 47
étant la moitié de 94 et qu'il y a 92 députés
libéraux, eh bien, on est tout juste à la moitié des
troupes en place. Ce qui veut dire, M. le Président, que, comme on
suppose que la majorité va voter sur l'adoption finale de ce projet de
loi, il eût été intéressant pour la population du
Québec de savoir que, pour le moins, les députés qui
auront à voter sur ce projet de loi étaient présents lors
des débats. Dans ce sens-là, M. le Président, je pense
que, voyant l'état des troupes et le niveau du moral des troupes du
gouvernement, le leader du gouvernement aurait eu avantage à accepter
notre motion d'ajournement.
Ceci dit, M. le Président, par rapport au projet de loi 50,
d'abord vous me permettrez d'exprimer ma désolation, mon désaveu
quant à la façon cavalière dont le gouvernement a
traité l'Opposition. Remarquez que ce n'est pas la première fois
durant cette session que l'on nous impose un bâillon. On l'a dit, mais on
ne l'a pas encore assez dit et on ne le dira jamais assez, M. le
Président. Trois bâillons en autant de jours, c'est quelque chose
d'inusité. C'est sûrement une première dans l'histoire
parlementaire québécoise. J'en suis même à me
demander si ce gouvernement, cherchant une façon d'entrer dans le livre
des records Guinness, n'a pas considéré que c'était
là la meilleure façon que l'on se rappelle de lui sans avoir
à trop bouger. C'est la meilleure façon de faire un record qui ne
demande pas beaucoup d'efforts. Comme ce gouvernement a une tendance à
l'inertie, eh bien, c'est sans hésiter qu'il s'est lancé dans
cette façon de faire qui, de toute évidence, est la façon
la plus paresseuse qui soit d'adopter un projet de loi et d'éviter
d'amener au grand jour la problématique ou de débattre de la
problématique que soulève un projet de loi en particulier et,
dans le cas présent, le projet de loi 50 qui modifie substantiellement
la façon de faire de la Régie de l'assurance automobile du
Québec, en allant lui chercher, M. le Président, 877 000 000 $.
Et ça, j'ai comme l'impression que ce n'est qu'un début, parce
que, le jour où on aura commencé à piger
allègrement, année après année, dans la caisse
de la Régie de l'assurance automobile du Québec, il va
devenir plutôt difficile de s'en passer.
Ce n'est qu'un début, M. le Président, et ces 877 000 000
$ que l'on enlève délibérément et sans consentement
aux assurés de l'assurance automobile, eh bien, ça va se traduire
uniquement et très rapidement par une brèche dans le barrage qui
va aller en s'élargissant continuellement et qui va faire qu'un jour ou
l'autre on va considérer...
M. Boulerice: Question de règlement, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Question de
règlement, s'il vous plaît, M. le député de
Sainte-Marie-Saint-Jacques.
M. Boulerice: En vertu de l'article 32, il m'est
extrêmement difficile, même étant de ce côté,
à côté de mon collègue, le député
d'Un-gava, d'entendre ses propos tellement la rumeur est forte venant de
l'autre côté, M. le Président. (1 h 50)
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Mes chers
collègues, je vous demande votre collaboration en vertu de l'article 32.
Les députés doivent observer le règlement et contribuer au
maintien du décorum de l'Assemblée. Je vous demande votre
collaboration. M. le député d'Ungava, si vous voulez
poursuivre.
M. Claveau: Oui, M. le Président. Je disais qu'on est en
train d'introduire une nouvelle coutume qui va se généraliser
très rapidement, qu'on le veuille ou non. À partir du moment
où on établit le principe que l'on peut aller chercher de
l'argent à volonté dans les surplus de la Régie de
l'assurance automobile, eh bien, il sera très difficile, par la suite,
de s'en passer. Et, lorsque l'on aura finalisé la ponction des premiers
877 000 000 $ dont il est question actuellement, on continuera, M. le
Président. Et la coutume sera établie, et les assurés,
dans le domaine de l'automobile au Québec, continueront, sans le
vouloir, malgré eux, année après année, à
payer pour le gouvernement, à payer des choses qui ne relèvent
absolument pas de leur responsabilité en tant qu'assurés.
Quand je me paie une assurance, c'est une assurance que je me paie. Ce
ne sont pas des routes, ce ne sont pas des services, ce n'est pas l'inertie
d'un gouvernement, c'est des assurances. Et dans ce sens-là, M. le
Président, en toute logique et en toute honnêteté, lorsque
la compagnie ou, dans le cas présent, lorsque la Régie de
l'assurance automobile va bien, c'est à ses assurés, c'est
à ceux qui ont mis l'argent dans la cagnotte qu'elle doit en faire
profiter, soit par des réductions de primes, soit par des augmentations
de compensations, soit par un plus vaste éventail de produits de
couverture de risques. Enfin, il y a différentes modalités que la
Régie peut prendre pour faire bénéficier de cet
argent-là ceux qui ont payé.
M. le Président, le gouvernement dit: Ah, il y a de l'argent qui
traîne! Il faut le ramasser, ça n'a pas d'allure. On ne peut pas
laisser traîner de l'argent. J'imagine le président du Conseil du
trésor, en chasseur invétéré, avide de fonds ou de
liquidités, qui muni, habillé de sa "suit" de déguisement,
de sa "suif...
Une voix: Superman!
M. Claveau: ...de camouflage, avec ses grandes bottes de robeur
et sa casquette sur la tête, armé d'un 12 à deux coups,
part à la chasse de fonds disponibles, un peu comme on voit le petit
bonhomme qui chasse continuellement dans Bugs Bunny et qui revient souvent
bredouille.
Une voix: Roadrunner!
M. Claveau: Le premier que le ministre rencontre sur son chemin,
avec son 12 en main, c'est le ministre des Affaires municipales. Il le voit
derrière un buisson, avec 320 000 000 $ de liquidité. Sans
hésiter, il braque et le ministre crache!
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Claveau: 320 000 000 $. Peu importe ce qu'en pensent les
municipalités, peu importe ce qu'en pense les contribuables dans les
municipalités, peu importe ce qu'en pensent les MRC, ce n'est pas
important et il faut sauver sa peau; on a le "gun" sur la tempe. Eh bien, on
crache! Et le ministre des Affaires municipales, pour sauver sa peau, laisse
tomber les 320 000 000 $. Le président du Conseil du trésor s'en
empare et continue sa chasse. Ce n'est pas assez, parce que ses colonnes
comptables ne balancent toujours pas et le ministre des Finances lui dit: Non,
il ne faut plus taxer, là! Il ne faut pas taxer. Il faut passer pour un
bon gouvernement. On ne peut pas se permettre de taxer plus directement. Il
faut faire peser la responsabilité sur le dos de quelqu'un d'autre.
Comment voulez-vous que l'on passe pour un gouvernement qui sait administrer si
on taxe plus? Déjà qu'on en a pris pas mal dans les taxes et
déjà qu'on a de la difficulté à remplir nos
promesses électorales. Alors, il faut trouver quelqu'un qui va payer
à notre place. Et le ministre continue sa chasse. Qui rencontre-t-il? Le
ministre des Transports caché derrière la boîte d'un dix
roues, devant le parlement!
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Claveau: Et il part aux trousses du ministre des Transports
qui ne peut bénéficier de
l'appui des camionneurs pour l'aider à se cacher. Alors, il finit
par le coincer, lui braque son 12, parce qu'il avait deux coups; il lui en
reste encore un. Là, il se rend compte que le ministre des Transports
avait 877 000 000 $ dans son portefeuille. 877 000 000 $, vous imaginez le
plaisir, vous imaginez la joie, vous imaginez jusqu'à quel point le
ministre responsable du Conseil du trésor était heureux de
trouver comme ça, par hasard, 877 000 000 $ en beaux "bills" du
Dominion! Surtout qu'à la même époque son chef était
de l'autre côté de la rivière Outaouais en train de
discuter de sa façon de rester dans le Dominion. Il pense que c'est
peut-être même sa dernière chance de mettre la patte sur de
l'argent avec la face de la reine et il s'en empare immédiatement, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Si vous voulez
conclure.
M. Claveau: Sans considération pour ceux qui l'ont
payé cet argent, il s'en empare.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Si vous voulez conclure,
M. le député.
Des voix: Consentement.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Si vous voulez conclure,
votre temps est écoulé.
M. Claveau: En trois mots, M. le Président...
Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous
plaît!
M. Claveau: ...en disant qu'en constatant la réaction de
cette Chambre à mes propos je suis convaincu que la deputation a enfin
compris qu'on ne peut pas se permettre de cambrioler un peuple
éternellement. Merci, M. le Président.
Des voix: Bravo!
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Je reconnais maintenant
M. le député de La Prairie. M. le député.
M. Denis Lazure
M. Lazure: Merci, M. le Président. Si à 2 heures du
matin, en ce jeudi 21 juin, le début de l'été, si à
cette heure tardive on doit parier du projet de loi 50, projet de loi qui
amende la Loi sur la Régie de l'assurance automobile, c'est
essentiellement parce que le ministre des Transports a fait preuve
d'impatience, d'inexpérience. Imaginez-vous qu'après à
peine treize heures de débats en commission parlementaire, treize
heures, ce ministre dit: C'est fini, je vous ai assez entendus, je n'ai pas
besoin d'en savoir plus. Moi, j'ai un boulot à faire, j'ai une job
à faire, il faut que j'aille chercher les 877 000 000 $; alors, j'ai
besoin de cette loi-là.
Quand on pense, M. le Président, que la loi qu'il veut changer,
c'est une loi qui, en 1977, a été débattue pendant 225
heures en commission parlementaire. Le gouvernement du Parti
québécois de l'époque n'a pas mis le bâillon
à l'Opposition, l'Opposition qui était contre ce projet de loi.
Cette Opposition a dû regretter, depuis toutes ces années, d'avoir
voté contre ce projet de loi. La loi qui a créé la
Régie de l'assurance automobile, c'est une des meilleures lois que le
gouvernement du Québec s'est jamais données. Avant 1976, la
population réclamait une régie d'État parce que les
victimes d'accidents devaient passer des mois, des mois et des mois en cour
pour obtenir des règlements plus ou moins satisfaisants et devaient
payer des primes très élevées.
Le gouvernement du Parti québécois, lorsqu'il arrive en
1976, tient ses engagements et tout de suite se met à l'oeuvre pour
écrire ce projet de loi. Mme Lise Payette a été un
modèle de patience, contrairement au ministre des Transports. Si, au
moins, le ministre des Transports avait pris ce temps qu'il a refusé de
donner à la commission pour aller régler le problème des
camionneurs artisans, on l'aurait peut-être un peu mieux compris, on
l'aurait peut-être à moitié excusé. Non seulement il
n'a pas pris ce temps-là pour aller régler le problème des
camionneurs artisans, mais il s'est entêté à fermer ses
livres au bout de treize heures; plus de commission parlementaire. (2
heures)
M. le Président, c'est un troisième bâillon, c'est
la troisième fois que ce gouvernement nous dit: L'Opposition,
fermez-vous, vous n'avez rien à dire, même s'il s'agit, dans ce
projet de loi qu'on discute, d'un geste qui va transformer la Régie de
l'assurance automobile. Du jour au lendemain, la Régie de l'assurance
automobile devient un percepteur d'impôt. Ce n'est plus une caisse de
mutuelle d'assurances, c'est un percepteur d'impôt.
C'est une loi qui va dénaturer complètement le rôle
de la Régie. C'est une loi, en même temps, qui vient
pénaliser les citoyennes et les citoyens qui ont été de
bons conducteurs, qui ont eu moins d'accidents. Normalement, dans une compagnie
d'assurances, lorsque vous avez une police et que vos accidents sont peu
nombreux, avec l'augmentation des fonds dans la caisse, ou bien on augmente les
indemnités ou on baisse les primes. Ce n'est pas ce que le gouvernement
du Parti libéral fait. Il y a beaucoup d'argent dans la caisse parce
qu'elle a été bien administrée, parce que la population a
été prudente. On prend cette réserve-là et on s'en
sert pour renflouer des dépenses qui ont été faites par le
gouvernement, un gouvernement qui n'a pas le courage de dire à la
population: Nous avons besoin de vous taxer, nous avons besoin d'augmenter les
impôts.
Un gouvernement qui prend des moyens détournés pour aller
chercher ces sommes d'argent.
Ce matin, dans le journal Le Devoir, Gilles Lesage, qui est un
éditorialiste et un chroniqueur parlementaire très
expérimenté, très sage, qui observe la vie parlementaire
depuis longtemps, commentait cet abus du gouvernement actuel de mettre fin
à des débats après à peine quinze, vingt,
vingt-cinq heures de débat en commission parlementaire. Il avait des
mots très durs pour le gouvernement, et ce n'est pas l'habitude de
Gilles Lesage d'avoir des mots durs pour le gouvernement du Parti
libéral, mais il en a eu ce matin. Il a dit, en particulier: II y a au
moins un de ces trois projets de loi qui devrait être remis à
l'automne, et c'est le projet de loi 50. M. Lesage, comme nous le disons dans
l'Opposition, démontre clairement que ce projet de loi va changer la
nature de la Régie de l'assurance automobile. Il démontre
clairement que c'est un geste qui vient tromper la bonne foi de la population,
c'est un geste désespéré de ce gouvernement qui a besoin
d'argent et qui n'a pas le courage d'augmenter les impôts ou d'augmenter
les taxes.
M. le Président, je pense que l'Opposition est en bonne compagnie
avec ce journaliste chevronné, expérimenté, qui n'est pas
un extrémiste mais qui dit au gouvernement: Écoutez, pensez-y
bien, il n'y a pas d'urgence, ce n'est pas vrai qu'il y a une urgence à
bouleverser complètement le fonctionnement de la Régie de
l'assurance automobile. c'est vrai qu'il n'y a pas d'urgence. le gouvernement
n'a pas pu démontrer l'urgence, il a même refusé qu'on
entende en commission parlementaire les dirigeants de la régie de
l'assurance automobile. c'eut été normal de les entendre. ce
gouvernement a refusé que nous entendions le vérificateur
général du québec. nous voulions demander au
vérificateur général si c'était bien légal
ce que le gouvernement était en train de faire. c'était
légitime de vouloir demander ça au vérificateur, qui est
un peu le surveillant de l'administration publique au québec. là
aussi, le ministre a dit: non. c'est un ministre qui dit non. il a dit non aux
camionneurs artisans qui sont ici depuis deux semaines; il dit non à la
population qui veut entendre les dirigeants de la régie de l'assurance
automobile, qui veut entendre le vérificateur général.
M. le Président, c'est une triste semaine pour la vie
parlementaire, pour la démocratie parce que les 29 députés
de l'Opposition représentent quand même 40 % de la population qui
ont voté en septembre dernier. 50 % ont voté pour les
libéraux, 40 % pour le Parti québécois. Cette population,
ces 40 %, nous parlons en leur nom et nous pensons que dans un projet de loi
aussi important que celui que le ministre des Transports nous a
présenté, il faut prolonger les discussions. Et maintenant que le
ministre a refusé, maintenant que le leader et son gouver- nement ont
fermé les livres, le seul recours qui reste à ce gouvernement
s'il veut se ressaisir un peu, revenir au sens commun, c'est d'écouter
notre voeu, de répondre: Oui, remettons ce projet de loi à
l'automne. Il est prématuré. Il n'y a pas d'urgence. Il n'y a pas
péril en la demeure, et nous allons prendre le temps de l'expliquer
à la population. Moi, je mets au défi nos collègues du
parti ministériel d'aller rencontrer leurs électeurs dans les
semaines qui viennent. Si le projet était remis à l'automne, ils
ou elles auraient le temps d'aller rencontrer les électeurs, les
électrices et de leur expliquer pourquoi il est si urgent de changer la
vocation de la Régie de l'assurance automobile du Québec. Je les
mets au défi d'y aller en compagnie d'un député de
l'Opposition et je me rends volontaire tout de suite, surtout pour les
députés du parti ministériel qui sont dans la
Montérégie. Ça me ferait plaisir de les accompagner dans
une espèce de débat public. Je pense que le moins qu'on puisse
lui demander, au parti ministériel, c'est de faire, au cours des
semaines qui viennent, avec la population, le genre de discussion que le
ministre des Transports a refusé en commission. Alors, M. le
Président, je souhaite, en terminant, que le gouvernement se ressaisisse
et qu'il laisse de côté ce projet pour y revenir cet automne.
Merci.
Le Vice-Président (M. Cannon): Merci, M. le
député de La Prairie. Le prochain intervenant, M. le
député d'Arthabaska.
M. Jacques Baril
M. Baril: Oui, M. le Président, pour une autre fois,
j'interviens sur le projet de loi 50. Je pensais qu'avec mes collègues
on réussirait à convaincre le ministre des Transports de prendre
tout le temps qu'il fallait pour évaluer tous les impacts des
conséquences de ce projet de loi. J'ai participé activement
à la commission parlementaire durant les quatorze heures environ que
nous avons discuté, et nous n'avons pas été capables
d'obtenir une réponse du ministre sur toutes les questions qu'on lui
posait. Le ministre s'est borné à dire: Commençons
à étudier article par article, et on répondra à vos
questions. On a demandé au ministre d'entendre différents
organismes pour connaître leur opinion sur la façon dont le
gouvernement s'y prenait ou s'y prend pour augmenter ses fonds, augmenter ses
revenus, pour soi-disant faire des travaux de construction de routes dans les
régions. Le gouvernement, M. le Président, depuis deux, trois
jours, juste à le voir, de la façon dont il mène nos
travaux, qu'il dirige nos travaux ici à l'Assemblée nationale, on
s'aperçoit que c'est un gouvernement complètement perdu, un
gouvernement complètement déboussolé et, comme diraient
les jeunes, un gouvernement complètement sauté, parce qu'on
abolit toutes les règles de procédure
en Chambre pour trois projets de loi, dont un sur les
heures d'affaires. Je ne comprends pas, encore une fois - je l'ai dit cet
après-midi - l'urgence qu'il pouvait y avoir à faire une loi
où il n'y a à peu près personne qui est d'accord avec
ça, qui ne va rapporter rien au gouvernement de toute façon.
Hier, le feu était pogné pour se
dépêcher d'autoriser les commissions scolaires à aller
percevoir 320 000 000 $ de taxes de plus au niveau des contribuables
québécois. Et durant ce temps-là, lui, le gouvernement se
retire du financement des commissions scolaires pour environ 307 000 000 $.
Donc, il met encore de l'argent dans ses poches. Il le fait payer par les
contribuables. Aujourd'hui, on se retrouve encore avec ce même
gouvernement perdu, déboussolé, désorienté, qui va
s'emparer d'argent dans la réserve des fonds de l'assurance automobile
du Québec pour construire des routes, qu'on nous dit; 875 000 000 $ avec
la ponction qu'ils vont venir faire pour payer un système, un service
d'ambulanciers complètement sauté également pour la
région de Montréal. Ces gens-là ont voté cette loi
ici pour donner des services, avantager leurs amis pour qu'ils donnent un
service à 1500 $ du coup par ambulance pour un accidenté. Je ne
comprends pas, absolument pas, M. le Président, que ça puisse
coûter 1500 $ pour transporter un accidenté de la route quand,
pour un blessé ou un malade, ça coûte 70 $. Imaginez-vous
la marge qu'il y a entre les deux. C'est inexplicable. (2 h 10)
Ce gouvernement, depuis ce printemps, a agi un peu comme
dans la fable de La Fontaine. On se souvient du lièvre et de la tortue,
c'était à celui qui arriverait le premier au fil
d'arrivée. Le lièvre, se voyant comparer à une tortue, se
moquait, riait, gambadait, courait dans le bois, se ridiculisait. C'est un peu
ce que le gouvernement fait. Il saute sur tout ce qu'il voit. Il est perdu,
complètement perdu. Et, pendant ce temps, la tortue, elle, cheminait
vers le fil d'arrivée.
Dans le contexte qu'on vit présentement, la tortue,
M. le Président, c'est l'arrivée de l'assurance automobile.
Depuis 13 ans qu'elle fonctionne, lentement, tranquillement, elle a rendu des
services aux gens. Elle a amélioré le système, pendant que
ces gens-là, en 1977, avaient voté contre la loi. Ils
étaient complètement contre ça, c'était
épouvantable, parce qu'on s'attaquait aux avocats, qui auraient beaucoup
moins d'ouvrage. Les vendeurs d'assurance, c'était épouvantable,
on les menait à la ruine. Donc, ce gouvernement, qui formait
l'Opposition à l'époque, était complètement contre
le projet de loi créant la Régie de l'assurance automobile.
Aujourd'hui, ils font comme le lièvre; ils courent
après tous les fonds qu'ils peuvent aller chercher, tous les surplus
qu'ils peuvent aller chercher, entre autres. Et comment pensez-vous,
M. le Président, que les administrateurs de la
Régie de l'assurance automobile, qui deviendra la Société
de l'assurance automobile, la SAAQ, maintenant, qu'il faudra s'habituer
à dire... Quelle motivation ces gens-là auront de continuer
à administrer, à donner des services ou à améliorer
les services aux accidentés, quand ils savent maintenant qu'à
partir d'aujourd'hui, plus ils vont avoir de surplus, plus le gouvernement va
venir fouiller dedans? C'est complètement, M. le Président,
réorienter dangereusement la Régie de l'assurance automobile
quant à la raison pour laquelle elle avait été
créée. Et, dans leur course folle vers un objectif qu'on ne
connaît pas, on ne sait plus trop où ils veulent arriver,
où ils veulent atterrir, le gouvernement actuel - comme je l'ai dit -
dans le dernier budget, a annoncé pour plusieurs centaines de millions
de dollars d'augmentation de taxes au niveau des contribuables. Mais ce n'est
pas eux qui vont avoir l'odieux d'aller les chercher. Ils ont utilisé
toutes sortes de moyens, toutes sortes de façons, celui dont on parie
présentement en est un.
Il y a également au niveau des commissions scolaires
où on a élargi l'assiette fiscale. Vous avez ce gouvernement qui
a autorisé une augmentation des coûts d'électricité;
avec la TPS, en dedans de 18 mois, ça va faire à peu près
24 % d'augmentation. C'est toujours les contribuables qui vont payer, M. le
Président. Il ne faut pas oublier ça. Et plus Hydro augmente ses
profits, plus elle remet des redevances au gouvernement. Il y a aussi
l'augmentation des frais de scolarité au niveau de l'université.
Qui va payer? C'est encore les contribuables. Il y a les taxes sur les
cigarettes. Remarquez bien que ça, ça ne me fait pas mal parce
que je ne fume pas, mais, de toute façon, pour ceux qui fument, c'est
encore une taxe indirecte pareil. M. le Président, je suis certain parce
qu'il y a plusieurs personnes qui m'en ont parié: Encore les cigarettes!
Mais, comme je vous dis, là-dessus, je ne peux pas faire une grosse
bataille, parce que, étant un non-fumeur depuis de nombreuses
années, pour ne pas dire n'ayant à peu près jamais
fumé... De toute façon, c'est quand même une taxe indirecte
que le gouvernement va chercher.
Donc, on a un gouvernement en face de nous qui,
après un manque de prévoyance, depuis les cinq dernières
années que ce gouvernement administre, après avoir profité
d'une croissance économique remarquable grâce au programme que le
Parti québécois avait mis en place pour traverser la crise de
1981-1982, ce gouvernement, à cause d'un manque de prévoyance,
actuellement, est un peu comme un oiseau qui arrive dans la maison: il se
garroche dans toutes les vitres. Il se sent poigne. Il se garroche partout. Il
ne sait plus où aller. Et, actuellement, tout ce qui bouge, ce
gouvernement trouve le moyen d'essayer de le saisir au passage pour le mettre
dans la cagnotte, toujours pour démontrer que ce
sont de bons administrateurs, lis n'augmentent pas les taxes. Ils
administrent bien. Ils n'augmentent pas le déficit. Et, quand on
compare, on analyse tout ça, on s'aperçoit, M. le
Président, que, même si ce gouvernement dit qu'il a coupé
le déficit budgétaire du Québec en deux, on
s'aperçoit, M. le Président - et le Vérificateur
général le dit lui-même - qu'il n'y a rien là. Ce
n'est pas vrai. On reste avec le même déficit, excepté
qu'ils ont changé les méthodes comptables. Donc, j'avais
espéré un bout de temps, M. le Président, en commission
parlementaire, pouvoir ébranler un peu le ministre des Transports pour
qu'il accepte de rencontrer des organismes.
Je termine en disant simplement, M. le Président, qu'avec toutes
les heures que nous avons passées, 13 ou 14 heures en commission
parlementaire, avec je ne sais combien d'heures qu'on discute ici, en Chambre,
si on avait préservé ça et légiféré
comme du monde, je vais dire comme du monde, on aurait facilement pu entendre
quatre ou cinq organismes, avec une heure chacun. On aurait pu prendre une
heure pour savoir quels organismes seraient venus. En six heures, on aurait
entendu tout le monde qu'on voulait entendre et on aurait pu bonifier ce projet
de loi pour qu'il puisse répondre exactement aux besoins du gouvernement
et aux besoins de la population.
Ça me fait penser, et je vais finir là-dessus, que ce soit
n'importe quel congrès, des fois, au Conseil national du Parti
québécois, on est des procéduriers, des fois on va
s'obstiner une heure de temps au micro pour savoir comment s'y prendre pour
arriver à quelque chose. Ça prendrait cinq minutes, le discuter
et le décider, mais comment faire pour arriver là, on va prendre
une heure pour, après ça, prendre cinq minutes pour la
décision. C'est un peu ce que c'est, prendre la décision. C'est
ce qu'on fait ici, actuellement. Ça va faire 20, 25 heures qu'on
discute, à peu près complètement pour rien, pour essayer
de faire comprendre au gouvernement de changer son mode de fonctionnement. Si
on avait pris tout ce temps-là pour essayer de discuter, gratter et
approfondir article par article le projet de loi, je vous garantis, M. le
Président, qu'on aurait réussi à s'entendre et on aurait
fait comprendre au gouvernement que, dans l'intérêt des
Québécois, il fait fausse route.
Le Vice-Président (M. Cannon): Merci, M. le
député d'Arthabaska. Mme la députée de Johnson.
Mme Carmen Juneau
Mme Juneau: Merci beaucoup, M. le Président. M. le
Président, je ne sais pas si je dois vous dire bonjour ou bonsoir,
puisqu'on est rendu à 2 h 15 du matin, dans la nuit du 20 au 21 juin
1990. De toute façon, M. le Président, je dois faire mon
intervention et je dois vous dire qu'aujourd'hui, j'ai eu une surprise de
taille. J'ai eu une surprise de taille parce qu'à la période de
questions - je dois dire hier, mais ce matin, parce qu'on ne s'est pas
couché encore - on a vu arriver le ministre des Finances. Ça
faisait une secousse qu'il n'était pas venu. Il est arrivé, le
teint hâlé, il avait l'air en forme, il était remis
complètement de ses problèmes de santé, en un jour bien
extraordinaire pour lui puisque c'était son 34e anniversaire de vie
parlementaire. On peut dire, M. le Président, que tous les
parlementaires, de chaque côté de la Chambre, l'ont applaudi. Je
pense que c'est une chose extraordinaire, un homme ou une femme qui fait 34 ans
de vie parlementaire. Il faut le souligner. Je pense que c'est important,
surtout qu'il relève de problèmes de santé. On
était heureux de le voir revenir. On n'est pas mesquins, absolument pas,
M. le Président.
Par contre, j'ai eu aussi une déception. Je dois vous expliquer
que j'ai eu une déception. Parce que, quand je l'ai vu arriver, je
pensais qu'il s'en venait nous annoncer des choses extraordinaires. J'ai dit:
Mon Dieu! Le ministre des Finances qui arrive aujourd'hui, ça doit avoir
une signification. Il doit venir nous dire que le projet de loi 50 va
être mis de côté jusqu'à l'automne, puisque ça
ne presse pas pour le faire adopter. Et, compte tenu que c'est lui qui
était au début de cette initiative, puisque c'est lui, dans son
discours sur le budget, qui nous a annoncé qu'il irait faire des
ponctions dans la Régie - ce n'est pas lui qui exécute, mais
c'est lui qui l'a annoncé dans son budget - là, je me suis dit:
Ah bien, bravo! Bravo, on va l'applaudir, pas seulement parce qu'il est revenu
et qu'on est contents qu'il soit en santé, mais parce qu'il vient nous
dire qu'il retire le projet de loi 50, en disant: Ça ne presse pas, ne
nous énervons pas, à l'automne ça va faire pareil. (2 h
20)
Quelle déception, M. le Président. Il ne nous a pas dit un
mot, sauf sourire et nous remercier de l'avoir applaudi. Quelle
déception! Franchement, M. le Président, je ne suis pas la seule
à avoir remarqué ça. Je suis persuadée que les
autres parlementaires pensaient qu'il avait un message à venir nous
livrer. Je suis persuadée de ça. Je suis
désappointée et je ne suis pas la seule. En plus de ça,
c'est que tout le monde le dit: II n'y a pas de feu en la demeure. La
Régie est là pour rester, elle va être là encore cet
automne puis le gouvernement n'aurait pas l'odieux de nous avoir mis un
troisième bâillon, il n'y avait rien qui pressait, et on aurait eu
le temps, en commission parlementaire, d'étudier, article par article...
On ne s'est même pas rendus au premier article. Treize heures, floue!
Pouf! Fini! Taisez-vous! Vous n'avez plus rien à dire, vous autres.
Assoyez-vous dans votre coin et ne menez pas de train. Je m'excuse, on n'a pas
été élus pour ne pas mener de train. On a
été élus pour faire notre travail; on a été
élus pour
passer au peigne fin les lois que le gouvernement libéral nous
présente. M. le Président, il ne faut pas croire que le projet de
loi 50 est un projet de loi dithyrambique, loin de là. C'est loin
d'être un élogieux projet de loi. Le projet de loi 50, ça
veut dire que pour les cinq ans à venir il y aura 877 000 000 $ de moins
dans la caisse des assurés. Cette année, on en parie là.
On essaie de faire en sorte que les principaux intéressés,
c'est-à-dire les assurés du Québec, soient au courant que
le gouvernement libéral va aller faire des ponctions dans la caisse de
la Régie de l'assurance automobile.
Moi, j'ai une proposition à vous faire, M. le Président.
Vu que le ministre des Finances a été trop gêné pour
le faire aujourd'hui, on pourrait peut-être vous faire la proposition que
tous les députés en cette Chambre... On va s'en aller chez nous
pour les vacances d'été, la session se termine au moins vendredi
ou samedi; en tout cas, on va travailler fort. On pourrait prendre
l'été pour envoyer des communiqués a nos assurés de
la Régie de l'assurance automobile, leur dire qu'il va y avoir des
rencontres dans chacune des municipalités de chacun de nos comtés
et aller leur dire que, là, le gouvernement libéral
s'apprête à faire une ponction dans leur caisse. Là, on
verrait une réaction. Là, on pourrait dire que le monde est
informé, que les principaux intéressés sont
informés, les gens qui paient l'immatriculation, qui paient des plaques
et qui sont assurés avec la Régie de l'assurance automobile. On
pourrait leur dire que, d'ici cinq ans, on n'en repariera plus... Quand on aura
fini l'adoption du projet de loi 50, c'est-à-dire une autre fois qu'on
va intervenir parce qu'on a le bâillon, disons que... on est
encadrés... Quand on va avoir terminé et que le projet de loi va
être adopté, pour les quatre autres années qui vont suivre,
on n'en entendra pas parier, mais doucement, le gouvernement va aller chercher
des sous dans la caisse pour supposément les mettre dans les chemins.
Mais si je vous disais que, cette année, la ponction qui se fait dans la
Régie de l'assurance automobile, M. le Président, ça ne
donnera pas une cenne noire. Bien au contraire, dans toutes les régions
du Québec, on va avoir une diminution.
Je pourrais vous faire l'état de la situation, M. le
Président. Dans la région du Bas-Saint-Laurent, on va avoir 9 600
000 $ de moins cette année pour la construction des routes. Ça,
c'est en dollars constants. Ça équivaut à 41 % de moins
que le budget de l'année dernière. Dans
l'Abitibi-Témiscamingue, le comté de mon collègue, il a
raison de chialer, il n'aura rien lui non plus. Il y a 12 600 000 $ de moins.
Ça fait 40 % de moins dans son comté. Ils en ont besoin. Dans
Drummond-Yamaska - le député de Drummond est là, il
devrait chialer - il va y avoir 11 100 000 $ de moins, c'est-à-dire 45 %
de moins dans sa région. Il devrait faire venir ses assurés de la
Régie de l'assurance automobile et leur expliquer exactement ce qui va
se passer. Dans Chaudiè-re-Appalaches, 15 600 000 $ de moins, 39 % de
moins du budget. Dans Saguenay-Lac-Saint-Jean, mon collègue est
intervenu tout à l'heure, il va y avoir 10 600 000 $ de moins, 42 %.
Dans l'Est rie, c'est chez nous, M. le Président. L'Es-trie, 14 700 000
$ de moins, 54 %. Ce n'est pas une mince affaire. Moi, je vais le dire au monde
dans mon coin. Je vais leur dire. Dans la Mauri-cie-Bois-Francs, 9 900 000 $ de
moins, 39 % de moins. Dans l'Outaouais, 18 000 000 $ de moins, ça
égale 60 %. Il faut comprendre pourquoi on a des camionneurs dehors.
C'est eux autres qui charroyent la "gamotte" pour mettre dans les chemins.
Une voix: De la gravelle.
Mme Juneau: Si on n'a plus d'argent pour faire les chemins dans
nos régions... Aie! moi, au printemps, M. le Président,
là, mes autobus scolaires restent pris, puis les camions à lait,
qui voyagent le lait de mes producteurs agricoles, ils calent jusqu'aux
essieux.
Une voix: Hein!
Mme Juneau: Bien, cette année, je vais avoir moins
d'argent, puis, pourtant, on fait une ponction dans la Régie de
l'assurance automobile.
Moi, quand je compte, deux et deux, ça fait quatre. Mais quand
j'essaie de compter puis que l'autre 2 n'est pas là, bien, ça ne
fait pas 4. Puis là, le gouvernement va chercher de l'argent dans la
Régie, dans la caisse des assurés, puis il ne le remet pas
où il est supposé de le mettre. C'est pour ça que les
camions sont dehors. Les gens n'ont pas d'argent, puis on va continuer de
voyager dans des nids de poules. Vous savez ce que c'est, des nids de poules,
hein? Ce sont des trous dans les chemins de gravier. C'est ça qu'on a
chez nous puis, au printemps, ce n'est pas drôle, parce qu'il y a des
ventres-de-boeuf aussi.
M. le Président, ce gouvernement-là gouverne à la
petite semaine, puis, ce qu'il vient de faire là, c'est une honte. Puis,
la proposition que je vous fait, j'espère que vous allez en tenir
compte. Donnez-nous l'été, donnez-nous notre saison estivale, nos
vacances! Ça ne nous fait rien de laisser tomber nos vacances. On va
aller dire à nos assurés de l'assurance automobile du
Québec que le gouvernement libéral est en train de fouiller dans
leur caisse, puis qu'il ne le remettra pas où il dit qu'il va le mettre.
Ça fait que là, à mon point de vue, le gouvernement
libéral a tout intérêt à mettre son projet de loi au
frais, puis peut-être que le ministre des Finances va arriver avec son
prochain budget puis dire: Non, non, on n'a plus besoin de ça,
là, ça va bien notre affaire, on laisse tomber ça, puis
ça va être, pour tout le monde, un bienfait.
Merci.
Le Vice-Président (M. Cannon): Merci, Mme la
députée de Johnson. Mme la députée de Taillon.
Mme Pauline Marois
Mme Marois: Merci, M. le Président. Alors,
évidemment, comme un certain nombre de mes collègues,
j'interviens ce soir, au moment de la prise en considération du rapport
sur le projet de loi 50.
En fait, il faut bien se rappeler que, comme l'a dit ma collègue
qui m'a précédée, c'est l'une des trois lois pour
lesquelles le gouvernement a imposé un bâillon. Évidemment,
je n'ai pas à vous rappeler, M. le Président - puisque vous en
êtes un membre eminent - que l'Assemblée nationale est le lieu
d'expression institutionnelle de notre démocratie. C'est l'endroit
où s'adoptent les lois qui régissent les liens qu'il y a entre
les institutions, qui régissent les contrats qu'il y a entre les
individus et les institutions. C'est ici, finalement, que nous adoptons les
grands projets qui vont permettre, par des programmes, par des lois, par des
mesures, par de nouveaux régimes d'assurance qui vont nous permettre de
répondre aux besoins de nos concitoyens et de nos concitoyennes.
Quand le gouvernement propose un certain nombre d'orientations, pour
lesquelles il demande un débat à l'Assemblée nationale,
c'est qu'il juge que c'est suffisamment important pour que, effectivement, ce
soit un débat public, un débat où l'ensemble des points de
vue vont pouvoir être apportés. Ce sont des
éléments, des projets suffisamment importants pour qu'on prenne
le temps de voir les pour et les contre de chacun des projets qui sont devant
nous.
Or, le rôle fondamental...
M. Boulerice: Excusez, M. le Président, est-ce que vous
pourriez vérifier le quorum, s'il vous plaît?
Le Vice-Président (M. Cannon): Oui, M. le
député. Effectivement, qu'on appelle les députés,
s'il vous plaît. Effectivement, nous avons quorum. Vous pouvez
poursuivre, Mme la députée de Taillon. (2 h 30)
Mme Marois: Merci, M. le Président.
Alors, comme je le mentionnais, effectivement, le rôle fondamental
d'un parti d'opposition au sein du parlementarisme, au sein de
l'Assemblée nationale, c'est de faire valoir des points de vue que le
gouvernement aurait omis de considérer, c'est de faire valoir les droits
de personnes qui se verraient brimées à l'égard de
ceux-ci. Et c'est fondamental, pour que nous puissions exercer ce
rôle-là, que nous puissions avoir le temps nécessaire pour
discuter, échan- ger, proposer. Or, on assiste depuis quelques jours
à un simulacre de démocratie, M. le Président, puisque,
dans le cas de trois lois majeures qui concernent des contrats
socio-économiques ou des contrats plus formels, des pactes entre le
gouvernement et certaines institutions, trois lois fondamentales en ce qui
concerne des principes qui régissent notre société, pour
ces trois lois-là, on nous aura imposé le silence. Lorsqu'on dit
le bâillon, c'est un mot bien amusant qui peut avoir l'air d'un jeu, mais
ce n'est pas un jeu que de siéger à l'Assemblée nationale.
Et le bâillon, ça veut dire, pour l'Opposition,
l'impossibilité d'influencer d'une façon significative les
projets de loi que le gouvernement va adopter, Opposition ou non. Vous savez,
dans d'autres régimes que l'on voit se détruire à l'heure
actuelle, pour lesquels on applaudit lorsqu'ils s'effondrent, ça
s'appelle de la dictature.
De quoi s'agissait-il dans les trois lois dont nous parlons, et
particulièrement celle que nous étudions actuellement? Dans un
premier temps, je parlerai de celle pour laquelle je suis intervenue assez
longuement en cette Chambre et qui concerne les heures d'ouverture des
établissements commerciaux, où, effectivement, il y a eu mais un
tollé, M. le Président, de protestations. Peu importe ce
tollé, peu importe que l'Opposition essaie de faire valoir ce point de
vue, c'est comme si nous n'existions pas et c'est comme si, effectivement, la
majorité n'avait plus voix au chapitre, ne pouvait plus, par
l'intermédiaire de membres de l'Opposition dont c'est le rôle, je
le rappelle, M. le Président, n'avait plus la possibilité de
s'exprimer, de dire ce qu'elle avait à dire. Un deuxième pacte,
celui du gouvernement du Québec avec les municipalités. Nous
avons entendu des règles, nous avons entendu ensemble des modes fiscaux,
si on veut, des façons d'aller chercher des taxes pour les
municipalités et les rôles respectifs des uns et des autres
à l'égard, par exemple dans le cas du pacte
Québec-municipalités, de l'impôt foncier.
Le Vice-Président (M. Cannon): M. le député
de Sainte-Marie-Saint-Jacques, sur une question de règlement.
M. Boulerice: M. le Président, est-ce que vous pourriez
faire respecter le deuxième paragraphe de l'article 32 qui prive ma
collègue de bénéficier du troisième paragraphe?
Le Vice-Président (M. Cannon): Effectivement, l'article 32
de notre règlement concerne le décorum de l'Assemblée. Je
rappelle aux collègues que les députés doivent observer le
règlement et contribuer au maintien du décorum à
l'Assemblée. Ils occupent la place qui leur a été
assignée par le président, y demeurent assis et gardent le
silence à moins d'avoir obtenu la parole. Ils doivent s'abstenir de tout
ce qui peut nuire à
l'expression d'autrui et au bon fonctionnement. Alors, je demanderais
aux députés de prendre les fauteuils qui leur ont
été assignés. Vous pouvez poursuivre, Mme la
députée de Taillon.
Mme Marois: Alors merci, M. le Président. Je rappelais
donc des pactes majeurs qui concernent un contrat social avec une population:
les heures d'affaires, un pacte qui concerne un contrat entre le gouvernement
et les municipalités et un troisième pacte qui est, lui, beaucoup
plus formel puisque l'on parle d'un régime d'assurance, de l'assurance
automobile, entre, effectivement, un gouvernement et des assurés, par
l'intermédiaire d'une régie. La loi qui est devant nous remet en
question les fondements mêmes de ce pacte, qui est un régime
d'assurance. Et là, je vais prendre un article qui était
publié au début de juin, il y a à peine quelques jours, en
fait, le 7 juin dernier, sous la plume de M. Marc Bellemare, qui était
publié dans La Presse et qui s'intitule "La saignée de la
RAAQ". Je vais lire quelques paragraphes et je vais me permettre de les
commenter pour expliquer en quoi on dénature le principe même du
régime d'assurance automobile du Québec. Alors, on nous dit: "La
Régie de l'assurance automobile est un monopole d'État. Elle
occupe seule, sans concurrence, tout le marché de l'assurance... Sa
clientèle est captive. Les automobilistes - qui sont des cotisants -
comme les victimes - qui sont des bénéficiaires - doivent
transiger avec elle. Ils n'ont pas le choix".
Dans ce contexte, M. le Président, évidemment, pour que
cela puisse se produire, on établit des cotisations que vont payer les
personnes qui sont effectivement les automobilistes, qui vont fournir donc
à une caisse, laquelle on utilisera pour indemniser les victimes, pour
s'assurer que les personnes qui vivent un accident de la route, peu importe
leur situation, qu'elles soient au travail, ou étudiantes, ou chefs de
famille, puissent être indemnisées, puissent voir leur revenu
remplacé au moment d'un accident.
Quand la caisse prend plus d'importance, parce qu'il y a une certaine
amélioration, par exemple, de la part des conducteurs qui font moins
d'accidents, normalement on devrait baisser les primes, M. le Président,
ou indemniser davantage les victimes, mais pas se servir d'une caisse pour
aller taxer finalement et faire en sorte qu'on dénature fondamentalement
le régime devant lequel on se trouve, M. le Président. Toute en
dénaturant ce régime, tout en remettant en question le principe
fondamental de l'assurance, où un cotisant retire ce qu'il a mis s'il
rencontre un risque - dans le cas présent, un accident d'auto - il
m'apparaît absolument inacceptable que l'on ait bâillonné
l'Opposition et que l'on n'ait pas permis d'aller plus en profondeur dans ce
projet. Je vous remercie, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Cannon): Merci, Mme la
députée de Taillon. M. le député de Richelieu.
M. Khelfa: M. le Président, en vertu de l'article 213,
est-ce que je peux poser une question à la députée de
Taillon?
Le Vice-Président (M. Cannon): Mme la
députée de Taillon, acceptez-vous que le député de
Richelieu vous pose une question, en vertu de l'article 213?
M. Boulerice: M. le Président, question de
règlement.
Le Vice-Président (M. Cannon): Un instant, s'il vous
plaît, M. le député. Est-ce que...
Mme Marois: Oui, certainement.
Le Vice-Président (M. Cannon): Oui. M. le
député de Richelieu, s'il vous plaît! Alors, je vais
écouter votre intervention aussitôt... Est-ce que ça porte
sur cette question-là? Alors, allez-y, M. le député de
Sainte-Marie-Saint-Jacques?
M. Boulerice: je suis vraiment offusqué, m. le
président, que l'on méprise vos rappels à l'ordre lorsque
vous invoquez l'article 32. je vous prierais de regarder à votre
droite.
Le Vice-Président (M. Cannon): Vous me demandez de faire
quoi, M. le député?
M. Boulerice: De faire appliquer le règlement et... le
mépris que l'on témoigne à votre égard.
Le Vice-Président (M. Cannon): Je ne vois pas de
problème ici à l'article 32, mon cher collègue.
M. Boulerice: Est-ce que vous pouvez m'indiquer à quel
fauteuil est assigné M. le député de
Rivière-du-Loup?
Le Vice-Président (M. Cannon): M. le député
de Rivière-du-Loup est assis dans son fauteuil.
M. Boulerice: De Rimouski, je m'excuse. Des voix: Ha, ha,
ha!
Le Vice-Président (M. Cannon): M. le leader du
gouvernement.
M. Pagé: M. le Président, une autre belle tentative
de la part du député de Sainte-Marie-Saint-Jacques. Je vous
inviterais à reconnaître le député de Richelieu qui
a une très très brève question à vous poser.
Très brève, qui
commandera, j'en suis persuadé, une très brève
réponse.
Le Vice-Président (M. Cannon): Mme la
députée de Taillon a consenti. M. le député de
Richelieu, votre question, s'il vous plaît!
M. Khelfa: Merci, M. le Président. La
députée de Taillon et ses collègues de l'Opposition n'ont
pas arrêté d'utiliser la cassette à savoir qu'ils sont
bâillonnés et qu'ils n'ont pas le droit de parole. Ce que je ne
comprends pas, c'est que depuis lundi, précisément, ils n'ont pas
arrêté de parler pour dire continuellement la même chose.
Avez-vous d'autres cassettes, d'autres informations plus pertinentes, plus
professionnelles? Merci.
Le Vice-Président (M. Cannon): Mme la
députée de Taillon.
Mme Marois: M. le Président, je pense que notre
collègue n'a pas compris le règlement de l'Assemblée
nationale. Un bâillon signifie que, peu importé ce que nous dirons
ici, le projet de loi sera adopté, M. le Président. Nous tentons
donc de faire valoir notre point de vue, de telle sorte que, quelque part, la
raison puisse revenir chez ce gouvernement et qu'il amende donc le projet de
loi que nous étudions, mais que nous étudions à faux,
puisque nous ne pourrons, dans les faits, faire en sorte que ce gouvernement
nous permette d'intervenir et de changer ce projet de loi qui est devant
nous.
Le Vice-Président (M. Cannon): Merci, Mme la
députée et M. le député de Richelieu. M. le leader
adjoint de l'Opposition et député d'Abiti-bi-Ouest.
M. Perron: M. le Président, question de règlement.
Est-ce que je pourrais demander le quorum, s'il vous plaît? Je m'excuse
auprès de mon collègue, juste avant qu'il parle. Je voudrais au
moins...
Le Vice-Président (M. Cannon): M. le député
de Duplessis invoque le quorum. Alors, qu'on appelle les députés!
(2 h 40)
Une voix: C'est ça.
Le Vice-Président (M. Cannon): Alors, le quorum est
maintenant complet. M. te député d'Abitibi-Ouest.
M. François Gendron
M. Gendron: M. le Président, j'entendais la , brillante
question du député "Kaffala"...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Gendron: Excusez, du député de Richelieu! Et il
ne faut pas vraiment se surprendre qu'il y ait un peu...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Gendron: ...de jovialité à cette heure-ci, mais
qu'il y ait surtout des propos qui sont repris par plusieurs intervenants.
Parce que, sincèrement - et, là, je vais être très
sérieux - c'est le leader du gouvernement qui appelle les projets de loi
et c'est le leader du gouvernement qui appelle l'adoption du rapport du projet
de loi 50 où, d'une façon très sérieuse - et,
là, peut-être que le député de Richelieu
était moins attentif; il a le droit d'en manquer des bouts - entre
autres, le whip de l'Opposition officielle avait fait la preuve, on ne peut
plus claire, qu'il s'agissait littéralement d'un vol, qu'il s'agissait
d'un hold-up, parce qu'on ne peut pas, comme parlementaires, accepter d'adopter
un projet de loi pour établir des règles aux fins que des
cotisants, qui se sont cotisés largement à des coûts fort
élevés - regardons le coût des plaques d'immatriculation,
regardons le coût des permis - qui ont réussi à
dégager une marge de manoeuvre pour les fins pour lesquelles on a
créé un projet de loi...
J'ai toujours pensé qu'une loi, après qu'elle a
été créée, il faut qu'elle serve aux fins pour
lesquelles les législateurs ont eu l'occasion de la voter. Et si, au
moins, les motifs pour lesquels on nous fait croire, premièrement, qu'il
y a urgence - je vais faire un peu une intervention, comme leader adjoint de
l'Opposition... Est-ce qu'il y a urgence? Bien non, on ne peut pas plaider
l'urgence, parce que les mêmes qui prétendent que c'est utile,
requis, nécessaire et urgent d'aller faire un "hold-up" à la
caisse, de quelque 800 000 000 $, sous prétexte qu'on va appliquer
ça dans un programme de réfection du réseau routier, bien,
ils sont dans les patates! Ils ne sont même pas dans le réseau
routier, ils sont dans les patates!
Prenons le discours sur le budget, leur discours sur le budget, pas le
nôtre, leur discours sur le budget, M. le Président. Je vous
défie de me trouver, à l'"item" Transports, à quelle place
il est indiqué qu'en 1990 il y aura un rond de plus qui va être
dépensé. Il n'y a pas une cent de plus qui va être
dépensée. Ça prend quand même un certain culot pour
retenir des parlementaires jusqu'à 3 heures, 5 heures ou 6 heures du
matin, jour après jour, et s'étonner qu'on répète
les mêmes choses. Mais, effectivement, on est sur trois projets de loi
qui ont la même signification. Le gouvernement se déguise, comme
je vous l'ai dit, en exécutif. Il dit: II n'y a plus d'Opposition, vous
n'avez pas d'affaire là, même si on a été aussi
élus que vous autres, M. le député de Richelieu.
Ce n'est pas moi qui ai décidé tout seul de venir
siéger ici. C'est parce que ma population
m'a envoyé siéger ici. Donc, j'ai un droit de parole, en
vertu de nos règles, et je l'utilise d'autant plus que vous avez
empêché que les débats se fassent là où
c'était prévu qu'ils se passent.
Une voix: Ce n'est pas vrai!
M. Gendron: Quand je vois... Ce n'est pas vrai! C'est encore des
gens qui en ont manqué des bouts et c'est un peu normal, parce qu'il y a
quelques jeunots qui arrivent, quelques jeunots qui ne connaissent pas le
projet de loi, qui ne connaissent pas le règlement. Et, avant
d'apprendre comment ça fonctionne... Une chose qui est certaine, des
bâillons après 15 heures, moi, ça fait 14 ans que je suis
dans la "shop", comme on dit, et je n'ai pas vu ça souvent.
Une voix:...
M. Gendron: Je n'ai jamais vu ça. Et, pourtant, on s'en
est fait imposer trois, M. le Président, trois d'affilée pour de
faux motifs. C'est ça qui est le plus grave, trois pour de faux motifs.
J'entendais ma collègue de Johnson. Elle faisait un peu un rappel...
Une voix:...
M. Gendron: ... Non, ce n'est pas tout pareil. Elle faisait un
rappel des pertes, cette année, au niveau du réseau routier et je
regarde, moi, ce que je vais subir en Abitibi-Témiscamin-gue: une
légère coupure de 40 % du budget.
Je me rappelle, le ministre des Mines nous disait: Où avez-vous
pris ça? Sérieusement, II ne comprenait pas ça. Alors,
j'ai fait sortir les fiches que l'Opposition a le droit d'avoir lorsqu'on
étudie les crédits et je lui ai expliqué une soustraction
parce que, lui, il ne comprend pas ça, c'est un notaire. Il faisait
juste additionner les tarifs qu'il chargeait. Les soustractions, II ne
comprenait pas ça. Alors, j'ai regardé, je lui ai montré
sur les fiches que l'on reçoit et, entre la colonne 1989-1990, pour le
programme 3, j'ai fait l'un moins l'autre et j'ai fait la même chose pour
le programme 2. Tu additionnes l'un et l'autre et ça donne le montant.
Ce n'était pas bien compliqué comme exercice, mais il ne
comprenait pas ça. Il est convaincu que nos chiffres étaient
erronés. Alors, j'ai demandé: Faites-moi la preuve que nos
chiffres sont erronés. Et quand je lui ai prouvé que le
communiqué de presse émis par mon collègue de Lévis
était basé sur des renseignements fournis en commission
parlementaire par le Parti libéral, par le gouvernement en place lors de
l'étude des crédits, bien, on ne l'a pas réentendu.
Ça, on est plus habitués à ça, à ne pas trop
l'entendre.
Alors, je reviens sur le fond, M. le Président. Il est
évident que nous, on ne se laissera pas "hold-uper" des sommes aussi
invraisem- blables sur de faux motifs sur le fond et de faux motifs sur
l'urgence. Je le répète, au discours des crédits, pas
question, pas une cent d'argent neuf pour les travaux routiers. Alors, quels
étaient les motifs que le Parti libéral avait? S'il n'en a pas
d'autres que de faire ce qu'il a toujours fait, un gouvernement qui veut,
hypocritement, cacher des hausses de taxes directes imposées aux
contribuables, qui n'a pas le courage de mettre ses pantalons, même s'il
y en a qui portent et la ceinture et les bretelles, il faudrait avoir le
courage d'afficher vos responsabilités et dire: Bien, écoutez, on
avait une loi qui a créé une réserve pour les
assurés au niveau de la Régie de l'assurance automobile, bien,
ça, ça va rester à sa place parce que ces gens-là
ont cotisé pour ça. Tant mieux si la caisse a réussi
à créer un peu de surplus. Ça permettra peut-être de
corriger les lenteurs qui n'ont pas de bon sens au niveau de certains
remboursements qui sont dus à des accidentés au niveau de
l'assurance automobile, juste apporter des correctifs administratifs, non pas
corriger la loi. C'est une des meilleures lois qui n'a jamais été
passée au Québec et je suis assez bien placé pour en
parler.
Ce n'est pas l'heure pour faire des propos émotifs, mais, moi,
j'ai perdu mon père dans un accident d'automobile et je me rappelle ce
qu'on a eu: zéro, rien et il n'avait aucune responsabilité. Sauf
que, dans le temps, il y avait une loi qui s'appelait l'IVAC; il fallait faire
la preuve qu'il n'avait aucune responsabilité. Ce n'est que quatre ans
et demi plus tard que, par procès, on a établi la preuve
qu'effectivement il n'avait aucune responsabilité. Ça nous a
donné un beau montant de 10 000 $, 4600 $ de factures d'avocat, en 1960.
Il restait 5200 $ pour ma mère et sept enfants dont le plus jeune avait
deux ans. C'était ça, le régime qu'on a connu.
Au moins, avec la Loi sur l'assurance automobile, on ne peut plus mettre
des familles sur le pavé pour ce seul motif parce que au moins la loi
permet, lorsque des citoyens du Québec subissent des
inconvénients de cette nature, qu'ils puissent recevoir un minimum de
garantie de revenu. Dorénavant, ces citoyens-là auront le droit
d'être inquiets parce que, là, la caisse, on l'assèche
graduellement, on l'assèche pour de faux motifs. À un moment
donné, il va falloir la remplir parce qu'un fonds qui a
été accumulé suite à ce que je viens de vous
indiquer devrait pouvoir servir aux fins pour lesquelles on l'a
créé, surtout quand chacune des régions au niveau de la
voirie se fait couper son enveloppe, que ses travaux sont coupés et
qu'on a prétendu qu'il y avait urgence et qu'on nous a imposé le
bâillon.
C'est surtout ça qui est grave et un peu démentiel avec ce
gouvernement-là: peu importent les règles, peu importe où
on est rendu, on se déguise en exécutif, il n'y a plus de
parlementaires, il n'y a plus d'Opposition. Si vous
voulez siéger en exécutif, traversez la rue, allez au
"bunker", on le connaît, on sait où c'est, mais ici, c'est
l'Assemblée nationale. À l'Assemblée nationale, il y aura
toujours une Opposition et l'Opposition va s'acquitter de ses
responsabilités, surtout quand on est convaincus qu'on défend les
citoyens sur de réels principes qui sont en cause. (2 h 50)
En conclusion, je pense qu'ici il s'agissait d'un réel principe
en cause. On ne vide pas une cagnotte quand elle a été
prévue pour rendre des services à des contribuables, surtout
lorsqu'il n'y a pas urgence.
Le Vice-Président (M. Cannon): Merci, M. le leader adjoint
de l'Opposition. M. le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques.
M. André Boulerice
M. Boulerice: M. le Président, certains de mes
collègues sont étonnés d'un tel projet de loi. Moi, je
vais vous dire que je ne suis absolument pas étonné d'un tel
projet de loi. D'ailleurs, ce projet de loi, M. le Président, il a
été prévu au XVIIe siècle - je ne fais pas allusion
au ministre des Finances - par Jean de La Fontaine, dans une fable qui
s'appelle Le serpent et la lime. Vous devez bien vous douter que le serpent est
le ministre, M. le Président, et je vais vous la conter.
On conte qu'un serpent, voisin d'un horloger, c'était pour
l'horloger - vous le comprenez bien, M. le Président - un mauvais
voisinage, entra dans sa boutique et, cherchant à manger, n'y trouva
pour tout potage qu'une lime d'acier qu'il se mit à ronger. Cette lime
lui dit, sans se mettre en colère: Pauvre ignorant, que
prétends-tu faire? Tu te prends à plus dur que toi, petit serpent
à tête folle. Plutôt que d'emporter de moi seulement le
quart d'une obole, tu te romprais toutes les dents. Je ne crains que celles du
temps. Ceci s'adresse à vous, esprit du dernier ordre qui,
n'étant bon à rien, cherchez surtout à mordre. Vous vous
tourmentez vainement. Croyez-vous que vos dents impriment leurs outrages sur
tant de beaux ouvrages? Ils sont pour vous d'airain, d'acier et de
diamants.
Vous voyez, M. le Président, que l'histoire se
répète. Ça, ce n'est pas du "Kafka", de Richelieu, c'est
du Jean de La Fontaine, de France. Vous voyez, M. le Président, que
l'histoire se répète. Je vols, d'ailleurs, la ministre des
Affaires culturelles acquiescer à mon propos, M. le
Président...
Le Vice-Président (M. Cannon): M. le député
de LaFontalne.
M. Gobé: Est-ce que le député pourrait
déposer le document qu'il a cité, s'il vous plaît, selon le
règlement?
Le Vice-Président (M. Cannon): En vertu de nos articles,
M. le député, seuls des ministres peuvent déposer des
documents. Voulez-vous poursuivre, s'il vous plaît?
M. Boulerice: La Fontaine ayant fait beaucoup d'enseignement, je
suis heureux de voir que vous en faites également auprès du
député de LaFontaine. Il n'est pas propriétaire de
LaFontaine, ni au propre, ni au figuré, il le verra à la
prochaine élection.
Cette arnaque, M. le Président, eh bien, comme je viens de vous
l'expliquer, elle a été prévue il y a des années
par, justement, un visionnaire. On a eu, M. le Président, Bonnie and
Clyde de la loi 75. Remarquez que c'était Clyde and Clyde, il n'y avait
pas de Bonnie dans leur groupe, mais il y a eu quand même Bonnie and
Clyde de la loi 75, qui a été le premier "hold-up" qui s'est fait
dans cette Chambre et, maintenant, il y a la bande à Bonnot qui est en
train de faire l'arnaque à la RAAQ, c'est-à-dira la Régie
de l'assurance automobile du Québec.
J'ai l'impression que le Québec, actuellement, M. le
Président, a une immigration d'AI Capone incroyable. Il cherche par tous
les moyens à faire main basse sur les quelques deniers qui sont les
fruits des impôts et des taxes que paient les Québécois
à des fins très précises, M. le Président, mais
dont le gouvernement... Je vais prendre une autre fable de La Fontaine, La
cigale et la fourmi. La cigale ayant chanté tout l'été se
retrouva à l'automne fort dépourvue, ou à l'hiver fort
dépourvue puisque ce gouvernement, si bon gestionnaire, avec une
économie si florissante, avec tellement de sous, ça allait
tellement bien... Eh bien, voilà, M. le Président, que les Al
Capone sont en train - Capone, corne si dice in italian - sont en train, M. le
Président, d'aller ramasser de l'argent à des fins qui sont
totalement l'inverse de ce pourquoi il a été donné par les
Québécois.
Le leader adjoint de l'Opposition a fait état d'un drame
personnel qu'il a vécu. Fort heureusement, ça n'a pas
tourné comme ça, mais ce matin, en me dirigeant vers le
parlement, avec un de mes collègues, nous avons eu malheureusement un
accident de voiture, M. le Président. Ah! La tôle, c'est bien
assuré. Mais si, par malheur, M. le Président, moi qui ai un
permis de conduire depuis l'âge de 16 ans, si par malheur, tout cet
argent, lors du renouvellement du permis de conduire qui a été
fait, se retrouve soudainement disparu et que mon collègue et moi avions
été blessés au point mâme d'être dans
l'Incapacité d'exercer nos fonctions, donc, sans aucun revenu, M. le
Président, où l'argent aurait-il été pris? Mais
nulle part. On est en train de vider les caisses, M. le Président. C'est
l'arnaque, M. le Président. C'est l'arnaque, M. le Président.
SI c'était pour des motifs nobles, comme on dit, on va poncer
temporairement pour accorder
le fameux 1 % à la culture, cette promesse reniée depuis
cinq ans, à ce moment-là, bon, j'aurais dit: Voilà! Enfin,
il y a une Bonnie dans Bonnie and Clyde et je ne me serais pas plaint. Mais ce
n'est malheureusement pas le cas, M. le Président. C'est
supposément pour du pavage et de l'asphalte quand tous mes
collègues ont fait, M. le Président, la démonstration la
plus évidente, la plus évidente, qu'il n'y a pas un sou qui va
véritablement aller à la voirie et que les routes vont rester
dans l'état piteux dans lequel elles sont actuellement. On n'a pas
besoin d'aller bien loin pour s'en rendre compte. Juste à circuler un
petit peu aux alentours de la région de Montréal et même
ici à Québec, on s'en rend compte. Et, naturellement, M. le
Président, comme tous les crimes se commettent, selon les statistiques,
la nuit, eh bien, c'est vers 3 heures du matin, c'est vers 3 heures du matin,
M. le Président, que ce crime est commis parce qu'on a imposé un
bâillon, M. le Président.
Trois bâillons, M. le Président, trois bâillons. On a
bâillonné l'Opposition qui est en définitive les veilleurs
de nuit du trésor national, si je peux employer cette image. Trois
bâillons, M. le Président, et non pas deux comme vous me
l'indiquez. Trois bâillons, M. le Président, trois bâillons
pour nous empêcher de faire ce pourquoi nous avons été
mandatés. Y avait-il, d'ailleurs, dans leur programme
électoral... Remarquez que ce qui est écrit, ils ne le font pas.
Ça, c'est normal. C'est typiquement libéral. Y avait-il, M. le
Président, dans leur programme électoral, un article dans lequel
le Parti libéral s'engageait à piller la Régie de
l'assurance automobile du Québec? Bien, voyons donc, M. le
Président! Et ça va aller où après, à la
Caisse de dépôt et de placement, un coup parti? Mais je veux dire,
M. le Président, s'ils sont à court, je vais apporter mon modeste
tribut. Je vais leur donner 20 Tommy dollars" de la banque du Parti
libéral du Québec et échangeables pour faveurs politiques.
C'est un cadeau que ces braves camionneurs qui attendent
désespérément dehors au froid depuis près de trois
semaines... M. le Président, je vais le donner à la caisse. Comme
ça, ça pourra couvrir ce qu'ils essaient d'arnaquer ailleurs. Ces
braves camionneurs qui attendent encore, M. le Président. Donc, M. le
Président, de nuit comme toujours, de nuit, rapace... On se sert de la
nuit, de la pénombre, pensant qu'on ne sera pas vu. Heureusement qu'il y
a la télédiffusion des débats, grâce d'ailleurs au
gouvernement du Parti québécois. Mais, M. le Président, si
j'ai cité La Fontaine... Je ne sais pas qui il veut citer, lui, mais, en
tout cas, on verra. (3 heures)
Le Vice-Président (M. Cannon): M. le leader du
gouvernement.
M. Pagé: M. le Président, je ne citerai
certainement pas le député qui a la parole actuellement.
Cependant, je me dois de relever une inexactitude. c'est avec le gouvernement
libéral, en 1976, avec m. jean-noël lavoie comme président,
que la télédiffusion des débats a été
"initiée" sous forme d'expérience ici, à
l'assemblée nationale. n'est-ce pas exact?
Le Vice-Président (M. Cannon): Bon. La question
d'information de part et d'autre est faite. Je ne crois pas que nous allons
ouvrir un débat là-dessus. Simplement pour vous dire qu'il vous
reste dix secondes pour conclure, M. le député de
Sainte-Marie-Saint-Jacques.
M. Boulerice: "a beau mentir qui vient de loin" et "le crime ne
paie pas", m. le président. ce sont deux maximes que le leader du
gouvernement devrait se rappeler. mais j'ai bien peur que, comme dans une autre
fable que je ne citerai pas, le ministre n'ait point appris, m. le
président. je vous remercie.
Le Vice-Président (M. Cannon): Merci, M. le
député de Sainte-Marie-Saint-Jacques. M. le député
de Duplessis.
M. Denis Perron
M. Perron: Merci, M. le Président. Encore une fois, et
c'est la troisième au cours de cette fin de session, notre
législation québécoise est sous l'effet du rouleau
compresseur du Parti libéral du Québec. On se rappellera que, la
première fois, ce fut lors de l'étude du projet de loi 69 se
rapportant à l'instruction publique et à l'enseignement
privé. La deuxième fois, c'était pour la loi 75,
c'est-à-dire hier et aujourd'hui, sur les heures d'affaires. Et, ce
soir, nous sommes maintenant devant la loi 50, Loi modifiant la Loi sur la
Régie de l'assurance automobile du Québec. M. le
Président, il est maintenant 3 h 2 et nous sommes toujours en train de
discuter de cette loi qui nous est imposée par le gouvernement
libéral, avec, en tête, le leader du gouvernement qui, à ce
que je sache, ne sait pas trop où il se dirige face à cette fin
de session.
M. le Président, concernant le projet de loi qui modifie la Loi
sur la Régie de l'assurance automobile du Québec, il est dommage
que tout ça se passe en pleine nuit, devant une majorité de nos
concitoyens et de nos concitoyennes qui sont actuellement au lit, qui donnent,
qui n'ont même pas connaissance de ce qui se passe ici en cette Chambre.
Et je vous assure que l'Opposition fait ce qu'elle peut pour justement
permettre...
M. le Président, si la députée de
Kamouraska-Témiscouata veut intervenir, elle peut le faire au moment
où je parle. Disons que je peux m'asseoir et qu'elle peut parler. Et,
encore, elle peut parler après que j'aurai termine. Alors, vous pouvez
l'inviter à faire de même. Elle a le droit de parole en cette
Chambre. Si elle ne peut le faire ou si elle ne veut pas le faire, qu'elle
laisse les autres parler en toute conscience et en toute connaissance de
cause. Parce que vous ne savez même pas ce qui est en train de vous
arriver actuellement, ce que vous êtes en train de faire avec une des
meilleures lois québécoises. Alors, si vous voulez parler, vous
vous levez, vous faites comme nous, on fait de ce côté-ci, vous
dites ce que vous avez à dire et, après ça, vous vous
assoyez et vous vous fermez la trappe.
Des voix: Wo!
Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous
plaît!
M. Perron: Alors, M. le Président, l'Opposition fait ce
qu'elle peut. C'est bien sûr que nous faisons l'essentiel, face à
ce rouleau compresseur, pour faire en sorte que la loi soit la meilleure
possible. Mais, compte tenu de la position gouvernementale, il est
extrêmement difficile d'avoir un projet de loi qui éventuellement
sera bonifié.
Face à ce gouvernement irresponsable qui se fout
éperdument de la démocratie... Et je peux vous dire que cette
démocratie ne l'étouffé pas par les temps qui courent et
ne l'a pas étouffé, non plus, au cours des cinq dernières
années. Cette session, dans laquelle nous sommes, en plein mois de juin,
encore une fois - maintenant il est 3 h 5 du matin - a été mal
préparée, mal planifiée. En somme, rien ne va plus dans ce
gouvernement qui ne comprend rien aux événements qui se passent
actuellement au Québec. Il a des agissements qui sont
dénaturés concernant les heures d'affaires...
Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît,
M. le député de LaFontaine! S'il vous plaît!
M. Perron: M. le Président, est-ce que je peux demander le
quorum, s'il vous plaît?
Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît.
Appelez les députés, s'il vous plaît.
Si vous voulez poursuivre votre intervention, M. le député
de Duplessis, s'il vous plaît.
M. Perron: Merci, M. le Président. Il est vraiment
déplorable de voir qu'on n'est même pas capables d'avoir le quorum
en cette Chambre avec la majorité ministérielle. Comme je le
disais tout à l'heure, M. le Président, les agissements de ce
gouvernement libéral sont dénaturés concernant les heures
d'affaires. Ce gouvernement n'a rien compris des effets négatifs
causés par la loi 69 qui permet aux commissions scolaires de taxer
localement pour remplacer le gouvernement libéral qui se cache
derrière des paravents pour ne pas taxer lui-même. Ce qui donne
des résultats que, dans les milieux, dans nos régions, le
gouvernement ira chercher un montant de quelque 325 000 000 $.
Et maintenant, nous avons une ponction qui est prévue par le
projet de loi 50; dans les poches des citoyens et des citoyennes du
Québec, qui paient à même leur permis de conduire et
à même leur permis d'immatriculation de l'argent depuis de
nombreuses années et qui devraient voir une réduction de leur
prime, on se rend compte que ce gouvernement va chercher un montant de plus de
300 000 000 $ pour permettre de financer les épiceries de fin de
semaine. Parce que je doute fortement que ces quelque 300 000 000 $ et plus
vont être appliqués dans le domaine de la voirie et, en
particulier, de la voirie régionale.
M. le Président, ce gouvernement, plein de promesses avant les
élections et pendant les élections générales... Je
vais vous en donner quelques cas très précis.
Sur la Côte-Nord, de Tadoussac à Blanc-Sablon, en avril
1988, promesse de l'ancien ministre des Transports et actuel ministre de la
Santé et des Services sociaux, promesse de 58 000 000 $, sur une
période de trois ans, pour réparer et corriger la route 138,
entre Tadoussac et Havre-Saint-Pierre; 134 000 000 $ promis et signés
par l'actuel gouvernement, en date du 5 mai 1989, dans le cadre d'une entente
régionale, dans le domaine du développement économique, 20
000 000 $ de déboursés après 14 mois. M. le
Président, la route 138, entre Havre-Saint-Pierre et Mingan, dans le
comté de Duplessis, 3 000 000 $ de promesses électorales, en
août et septembre derniers; remplies: 500 000 $ au cours de
l'année 1990-1991. Entre Vieux-Fort et Blanc-Sablon, promesse
libérale: 7 000 000 $ dans le domaine routier; zéro au moment
où on se parle, aucun engagement et refus total du ministre
délégué aux Transports ainsi que du ministre des
Transports d'investir de l'argent dans cette région isolée du
Québec. Tout ça pour aller chercher des votes au cours d'une
campagne électorale.
M. le Président, je peux vous dire ceci, c'est que les gens,
actuellement, en Basse-Côte-Nord-du-Golfe-Saint-Laurent, dans le
comté de Duplessis et sur la Côte-Nord, sont en train de
s'organiser pour, justement, réfuter l'ensemble des positions qu'a
tenues ce Parti libéral au cours de la dernière année. (3
h 10)
Et ça ira aussi pour la 50 que nous avons devant nous
actuellement. Et vous allez le payer. Je veux vous dire que vous allez le payer
et vous allez même le payer très cher au cours des prochains mois
et des prochaines années. Vous allez vous rendre compte, au cours de la
prochaine campagne électorale - et celle-là, on l'attend - que la
crédibilité que vous aviez antérieurement grâce aux
promesses que vous faisiez et que vous n'avez, d'ailleurs, jamais tenues est en
train d'en prendre pour son rhume. Tout ce que je souhaite, c'est que, pour
l'en-
semble des libéraux et, en particulier, dans les grandes
régions du Québec, Bas-Saint-Laurent-Gaspésie, le
comté de Saguenay, dans d'autres régions comme l'Outaouais - oui,
l'Outaouais -comme la Beauce et ailleurs, la majorité libérale
que vous avez actuellement va tomber comme des mouches au cours des prochaines
élections. Vous êtes en train de créer vous autres
mêmes votre propre tombe. Vous avez ouvert la porte, au cours de cette
session parlementaire, par vos agissements négatifs envers la population
du Québec, et Dieu sait combien vous allez devoir le payer au cours des
prochains mois et des prochaines années. Soyez assurés de
ça.
Je voudrais terminer en vous disant qu'en aucun temps je n'accepterai
que les régions du Québec soient touchées comme elles le
sont actuellement par des décisions libérales et qu'en aucun
temps je n'accepterai de favoriser les attitudes qui furent prises par ce
gouvernement au cours de cette session parlementaire. Merci, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député. Je reconnais maintenant M. le député de
Labelle. M. le député de Labelle.
M. Jacques Léonard
M. Léonard: M. le Président, nous nous retrouvons
encore avec une loi sur laquelle on a mis le troisième bâillon.
Mes collègues en ont fait état. J'y reviens aussi parce que c'est
un fait inhabituel en cette Chambre qu'on impose des bâillons sur des
lois parce qu'on a mal prévu ou, si on a bien prévu, justement,
c'est qu'on voulait se camoufler. Lorsque nous avons pris connaissance du
budget le printemps dernier, nous nous sommes rendu compte immédiatement
que, malgré la déclaration qu'il y avait de faite dans ce budget,
il était évident qu'on essayait de camoufler une hausse
substantielle des taxes dans toutes sortes de directions. Cette hausse de 1 219
000 000 $ qu'il ne faut pas oublier se retrouvait chez toutes sortes
d'organismes du gouvernement ou chez d'autres organismes parapublics. C'a
été des déclarations faites au cours de l'hiver, avant le
budget, il y en a eu d'autres pendant le budget et d'autres après le
budget.
L'une de celles après le budget touchait justement la
Régie de l'assurance automobile du Québec. Après les
étudiants, après Hydro-Québec, après les
commissions scolaires, voilà qu'on arrivait à la Régie de
l'assurance automobile du Québec chez laquelle on voulait aller chercher
150 000 000 $ cette année, plus un montant de 32 000 000 $ pour le
transport des handicapés, qui est exactement une ponction, encore une
fois, du budget. Donc, si l'on calcule sur cinq ans: 877 000 000 $. Une somme
considérable que le gouvernement a essayé de camoufler chez des
organismes de façon indirecte.
M. le Président, pour que les Québécois n'en
parlent pas comme dans les autres cas de bâillon, on a imposé ce
bâillon dans la fin de la session. On a amené la loi très
tard, le plus tard possible, dans l'espoir que les Québécois
oublieraient rapidement durant les vacances et après les vacances,
qu'ils n'auraient pas le goût de reprendre toute cette question et qu'ils
paieraient sans crier davantage.
M. le Président, c'est que le gouvernement n'a pas eu le courage
d'augmenter l'impôt sur le revenu parce que, justement, il voulait
préserver l'image qu'il n'augmente pas les taxes ou les impôts. En
réalité, c'est toujours le Québécois qui paie, dans
tout cela.
Il le fait, cette fois, de façon pernicieuse, vicieuse, parce
que, au fond, pour sauver son image, il affecte une Régie d'État
qui avait fait ses preuves et qui était destinée à bien
d'autres choses qu'à collecter des fonds pour le gouvernement. La
Régie de l'assurance automobile du Québec est une entreprise
d'assurance, qui a été fondée en 1977-1978 et dont
l'objectif, fondamentalement, est de faire de l'assurance contre les accidents,
contre les risques d'accidents corporels dus aux automobiles. Son bilan a
été excellent, on l'a vu au cours des années. D'ailleurs,
une étude de spécialistes de la question, faite en 1986, a
démontré que le bilan de la RAAQ était excellent. Non
seulement ce fut un succès dès les premières années
de son implantation, parce que les Québécois en ont
profité largement, qu'ils étaient beaucoup moins inquiets sur le
plan de la sécurité des personnes quant aux accidents de voiture,
mais l'institution comme telle avait aussi d'autres fonctions qui
étaient de faire de la prévention routière qui irait dans
le même sens. Et cette prévention routière, qu'on retrouve
à l'article 2 d de la loi, de la mission de la Régie de
l'assurance automobile du Québec, a eu des résultats
intéressants qui ont amené la baisse des coûts de
l'assurance elle-même et qui ont résulté dans des surplus
à la Régie de l'assurance automobile du Québec. Ces
surplus sont dus à une bonne performance de toutes les mesures de
prévention routière.
J'ai eu l'occasion de diriger, d'être le ministre responsable de
la Régie de l'assurance automobile, et déjà nous avions
mis en route des programmes de publicité sur la sécurité
routière. Qu'on se rappelle le verre qui se brisait, et ça,
ça en a été un des grands programmes de publicité
de la Régie qui a eu son succès, qui a amené une
accumulation de surplus. Mais il faut voir aussi que l'accumulation de ces
surplus n'est pas due uniquement à cette prévention
routière, parce que la Régie de l'assurance automobile a
accumulé et accumule des réserves actuarielles
considérables, c'est-à-dire des fonds pour faire face à
ses obligations futures, par rapport aux accidentés qui ont droit
à des rentes pour le reste de leur vie, notamment, que ce soit des
accidentés complètement ou partiellement
handicapés.
Or, ce qui se passe au cours des dernières années et
surtout ce qui s'accélère dans les toutes dernières
années, c'est que le taux réel de rendement est exceptionnel. Le
taux d'intérêt réel sur les placements de la Régie
de l'assurance automobile du Québec à la Caisse de
dépôt et placement du Québec est exceptionnel, de sorte
qu'il s'est accumulé des surplus combinés aux effets positifs des
campagnes de sécurité routière, combinés à
des changements d'attitude chez les conducteurs d'automobile du Québec,
qui sont plus prudents, qui conduisent moins vite, qui font plus attention et
qui sont plus conscients, justement à cause des campagnes de
publicité, des risques extrêmement graves ou des accidents
extrêmement graves, et des conséquence graves, donc, qui viennent
à la suite de ces accidents. alors, il s'est accumulé des surplus
conjoncturels, en bonne partie, ce qui n'empêche pas que,
éventuellement, on pourrait devoir faire face à une
réalité complètement différente. on escompte, sur
le plan actuariel, des taux de rendement réel de 5 %, de 6 %. en
réalité, ils sont actuellement de 8 %, 9 %, mais ils pourraient
très bien revenir à 2 %, 3 %, comme ils se retrouvent dans les
pays industrialisés occidentaux. et ça, ça minerait ou
ça toucherait les surplus actuariels de réserve à la
régie de l'assurance automobile du québec. (3 h 20)
Donc, il faut être prudent et, lorsque le gouvernement ouvre une
porte comme il le fait actuellement dans l'utilisation de ces surplus, lorsque
le ministre des Finances vient chercher des surplus dus à une situation
conjoncturelle, il ouvre une porte extrêmement dangereuse. Il l'a fait
dans le cas d'Hydro-Québec, en incorporant les profits
d'Hydro-Québec à son déficit pour réduire son
déficit. Maintenant, il touche à la Régie de l'assurance
automobile du Québec. Il touchera à d'autres régies ou
sociétés d'État. Et je pense qu'il est dangereux d'aller
dans cette vole parce que, au fond, on vient d'inverser complètement
tous les principes d'administration publique en ce qui concerne ces
sociétés d'État. Le risque que nous courons, c'est que le
gouvernement opère sur une base de "pay as you go", c'est-à-dire
que, finalement, il siphonne tous les surplus, y compris les réserves
actuarielles, et qu'il prenne en charge, année après
année, les coûts de l'assurance automobile du Québec, de
telle sorte que, finalement, les accidentés n'auront plus aucune
garantie d'assurance, comme il arrive dans une société
d'assurances. M. le Président, ce faisant, on abuse actuellement de la
mission de prévention routière de la Régie de l'assurance
automobile du Québec. Et il est absolument faux de dire que c'est dans
la mission de la Régie d'aller réparer des ponts, des routes,
sous prétexte de sécurité routière. Ce n'est
absolument pas la mission de la Régie. Merci, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député. Je reconnais maintenant M. le député de
Jonquière. M. le député.
M. Francis Dufour
M. Dufour: Merci, M. le Président. Vous savez
qu'intervenir, à cette heure-ci, concernant une attitude ou une
décision gouvernementale qui a pour effet, d'abord, de bâillonner
les parlementaires, pas bâillonner dans le sens de ne pas avoir le droit
de parler, mais bâillonner dans le sens de vouloir passer des lois
coûte que coûte, puisqu'ils ont la force du nombre... Donc, ils
pensent et croient qu'eux seuls ont la vérité. Et, en agissant de
cette façon, bien sûr, ils nous obligent à les
dénoncer. Même s'il y a moins de personnes qui nous
écoutent, ça ne veut pas dire que la vérité n'a pas
ses droits. Et, lorsqu'on examine ce qui se passe actuellement, on n'a rien
pour se réjouir, rien pour réjouir la démocratie.
Rappelons-nous que la démocratie, ça part. de loin, ce n'est pas
d'hier. Il y a beaucoup de gens qui se sont battus et qui sont morts pour faire
appliquer la démocratie. Et, encore aujourd'hui, on sent, dans d'autres
pays, des gens qui ont la volonté de s'exprimer, de faire valoir leurs
droits, et, pour nous de l'Opposition, nous avons l'obligation de
dénoncer des situations qui sont inacceptables. Il s'agit de regarder ce
projet de loi qui détourne, à toutes fins pratiques, une
régie d'État des fins pour lesquelles elle a été
créée. Et si on veut regarder...
Je voudrais en profiter, dans le temps de mon discours, pour saluer
l'arrivée inopinée du ministre de la Sécurité
publique et des Transports, mon ex-collègue. C'est dommage que la
télévision ne puisse pas faire le tour de la salle. On aurait
peut-être des beaux points de vue, des belles photos qu'on pourrait
transmettre dans les foyers.
Cela étant dit, on a détourné, M. le
Président, les fins pour lesquelles la Régie de l'assurance
automobile a été créée. Il s'agit de regarder cette
loi, au chapitre R-4, où on dit que "la Régie a pour fonctions:
d'appliquer le régime d'indemnisation des victimes de dommages corporels
- donc ça n'a aucune relation avec le réseau routier -
d'appliquer le régime de compensation des dommages matériels -
encore là, ça, c'est les dommages causés aux automobiles -
d'appliquer le Code de la sécurité routière,
"l'immatriculation, les permis et licences, les normes de
sécurité; de promouvoir la sécurité en ce qui a
trait au comportement des usagers et des véhicules. Donc, on pourrait
continuer là-dessus pour savoir les fonctions, les pouvoirs et à
aucun endroit on ne peut trouver quelque mesure qui nous permette de confirmer
ou d'autoriser le comportement du gouvernement.
D'ailleurs, on l'avait dénoncé, ce n'est pas la
première fois que le gouvernement va piger dans la caisse des usagers de
l'automobile, qui, eux, ont accepté de mettre des fonds, peut-être
pas volontairement, dans une cagnotte qui leur permet de se garantir une
sécurité et en même temps d'avoir des revenus leur
permettant de faire face à des situations qui sont non souhaitables et
qui, en même temps, permettent que le gouvernement n'ait pas à
subvenir à des besoins causés par l'usage de l'automobile ou par
des automobilistes.
Donc, on est aujourd'hui le 21 juin et on est obligés de regarder
ça d'une façon discutable et dénonçable. Si on
regarde ce qui se passe depuis les cinq dernières années, il faut
constater que le gouvernement du Québec n'a pas investi d'une
façon très forte dans le réseau routier, mais on a
réussi à pressurer les automobilistes de 1 300 000 000 $ de plus
au cours de l'année qu'on vit actuellement, et qu'en retour on leur
remet 1 300 000 000 $ de plus qu'en 1985. Donc, il n'y a pas de valorisation;
c'est de l'argent brut, c'est de l'argent qui se compare, sans aucune
valorisation des montants investis en 1985. Le gouvernement, en retour,
réussit à investir 200 000 000 $ de plus qu'en 1985, ce qui veut
donc dire qu'il y a un net pour le gouvernement du Québec de 1 100 000
000 $. Contrairement à ce qui se passait en 1985, un investissement de 1
$ sur 2 $, pressuré sur l'automobiliste, actuellement on est rendus
à 1 $ sur 3 $, un tiers. Donc, il n'y a pas de quoi se vanter. Ça
veut dire qu'il y a des gens qui, allègrement, non pas se remplissent
les poches... Mais un gouvernement qui réussit à distraire de
l'argent des fins pour lesquelles il a été perçu,
ça, c'est à dénoncer.
Il s'agit de faire le tour un peu des régions du Québec
pour se rendre compte que personne ne trouve satisfaction de l'attitude ou des
décisions gouvernementales concernant la réparation, l'entretien
et l'investissement sur la construction du réseau routier. Si on veut
faire examiner ce qui se passe chez nous, au Saguenay-Lac-Saint-Jean, il n'y a
rien à se gargariser, ni à chanter le cocorico, puisque chez nous
il y a une autoroute qui s'appelle l'autoroute 70, Alma-La Baie, qui, depuis
les cinq dernières années, n'a pas tellement avancé.
Malgré de nombreuses discussions avec le ministre des Transports,
on n'a pas réussi à le convaincre d'investir et on a
cherché tous les prétextes pour refuser les investissements dans
cette route. Ce qui fait qu'au rythme où on va, ça prendra
sûrement plusieurs années avant que cette route soit
complétée. Pourtant, il y a de l'argent. Le gouvernement
fédéral, dans une entente signée il y a déjà
cinq ans, n'a pas réussi à dépenser cet argent-là.
Ce n'est pas un manque d'argent, c'est un manque de volonté
politique.
Si on veut regarder dans les réseaux routiers locaux, il y a
déjà quatre ans, dans une tournée qu'on avait l'occasion
de faire dans l'ensemble des régions du Québec, un des plus gros
griefs que les municipalités adressaient au gouvernement du
Québec, c'était qu'il délaissait la voirie locale. Donc,
encore là, manque d'investissements et constatation
générale que le réseau se détériorait de
plus en plus. C'est à ça qu'on assiste un peu partout. La semaine
dernière, on avait l'occasion de rencontrer une délégation
de la région de l'Outaouais et, pourtant, cette région n'est pas
reconnue comme une région péquiste. Cinq députés
sur cinq, plus un ministre ou un ministre délégué viennent
rencontrer l'Opposition pour lui faire part de ce qui se passait chez eux. (3 h
30)
En 1990, cette région n'a pas encore de lien direct avec le reste
du Québec, ce qui fait que les gens de l'Outaouais, s'ils veulent
communiquer avec Montréal ou Québec, ils sont obligés de
passer par l'Ontario. Je ne sais pas si c'était de nature à
raffermir les liens ou à développer les régions, mais il
me semble qu'un des premiers éléments nécessaires au
développement économique, ça réside dans le
réseau routier et dans les moyens de transport. Mais ce gouvernement,
qui se prétend des grands gestionnaires, des grands administrateurs, des
connaisseurs, des gens qui veulent favoriser le développement
économique... On ne sent pas cette volonté, ce désir de
développer nos régions, puisque les réseaux routiers dans
tout l'ensemble du Québec, peut-être à part le comté
de Bona-venture... Ils ont réussi à laisser aller tout le
réseau. C'est des belles promesses. C'est des promesses fallacieuses en
disant: Faire plus avec moins.
Je regarde, justement, un de nos collègues du Lac-Saint-Jean, qui
est ici ce soir...
M. Jolivet: Qui nous écoute.
M. Dufour: Je n'ai pas déjà fini, M. le
Président? Ça n'a pas de bon sens. J'en ai encore pour au moins
une dizaine de minutes.
M. Pagé: C'est regrettable, mais...
M. Dufour: Je regrette. C'est sûr que je vais conclure,
mais, quand je regarde le député de Lac-Saint-Jean qui a fait un
certain nombre de promesses approuvées par le reste de son gouvernement
et que je vois le peu de résultats qu'on a chez nous, il n'y a pas de
quoi se féliciter et on dort regretter... Il a fait des promesses, le
ministre-Une voix: Le député de Roberval!
M. Dufour: Non, de Roberval, du Lac-Saint-Jean, mais pas nous
autres...
M. Pagé: M. le Président, je confirme... M. le
Président, m'est-il permis de confirmer tout ce que...
Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous
plaît!
M. Pagé: Effectivement, le député du
comté de Lac-Saint-Jean a fait beaucoup de promesses...
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Si vous voulez conclure,
M. le député.
M. Dufour: Vous savez que je parlais du Lac-Saint-Jean dans son
tout.
Des voix: Ah bon!
M. Dufour: Non pas dans une partie! Je pense que le
député de Roberval a compris ce que je voulais dire. D'ailleurs,
son sourire voulait en dire gros, parce que son sourire ne fait que cacher son
incapacité à livrer la marchandise, comme tout le reste, comme
son gouvernement! Je vous remercie.
Des voix: Ah!
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député. M. le député de Lac-Saint-Jean.
M. Jacques Brassard
M. Brassard: Merci. Un petit moment d'inattention. J'excuse mon
collègue de Laviolet-te. Il parlera après moi et il aura des
choses intéressantes...
M. Jolivet: Question de règlement, M. le Président.
Je m'excuse.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Sur la question de
règlement, M. le député.
M. Jolivet: M. le Président, vous avez remarqué le
député de Lac-Saint-Jean parce qu'il s'est levé, mais je
vais vous dire que j'attendais que le député de Taschereau se
lève pour pouvoir intervenir. Comme il ne se...
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Ce n'est pas une
question de règlement, M. le député.
M. Jolivet: M. le Président...
Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous
plaît!
M. Jolivet: Qu'on ne m'accuse pas de quelque chose que je n'ai
pas fait.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le
député, le député de Lac-Saint-Jean s'est
levé avant vous et je l'ai reconnu avant vous.
Je vous permets de poursuivre votre intervention.
M. Brassard: M. le Président, il est plus de 3 h 30 du
matin. C'est la nuit et vous savez que la nuit, c'est le temps par excellence
du cambriolage. C'est la nuit que les voleurs et les cambrioleurs se glissent
parfois chez nous pour nous dépouiller de nos biens. Parfois, c'est avec
effraction, même, en défonçant les serrures ou en brisant
les fenêtres. La nuit, c'est le temps du cambriolage. C'est pour
ça que nous étudions le projet de loi 50 en pleine nuit, parce
que c'est une loi de cambriolage.
C'est une loi qui permet au gouvernement de cambrioler 4 000 000
d'automobilistes. Et...
M. Pagé: Son passe-partout réglementaire.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le leader du
gouvernement, s'il vous plaît, l'article 32, vous le connaissez
très bien et je vous demanderais votre collaboration. M. le
député, si vous voulez poursuivre.
M. Brassard: M. le Président, il y a peut-être
quelques automobilistes insomniaques qui nous écoutent encore ce matin
et je voudrais les alerter que, très bientôt, dans peu de temps,
la main du gouvernement va se glisser dans la poche de leur pantalon pour la
vider. C'est ça qui va se produire. Ils vont se faire vider, cambrioler
par le gouvernement. 877 000 000 $, ce n'est pas rien. C'est ce qu'avait
accumulé la Régie de l'assurance automobile au fil des
années grâce à une gestion sage, prudente, efficace; 877
000 000 $, des centaines de millions de dollars par année de surplus
d'opération parce que la Régie gérait bien. Voilà
que le gouvernement s'apprête à effectuer un véritable
cambriolage, un véritable vol qualifié, à se saisir de ces
centaines de millions de dollars pour s'en servir à d'autres fins, pour
financer des dépenses courantes.
Normalement, le gouvernement aurait dû faire ce que tout
gouvernement doit faire quand il manque d'argent, un gouvernement qui a du
courage et qui est capable d'assumer ses responsabilités,
c'est-à-dire imposer des impôts, augmenter les impôts ou
augmenter le déficit, ou augmenter les taxes, assumer pleinement ses
responsabilités. Mais, évidemment, manquant de courage, faisant
preuve d'hypocrisie, le gouvernement a décidé d'opérer
plutôt un cambriolage, un "hold-up", de vider la caisse de la
Régie pour s'en servir et se dispenser ainsi d'augmenter les
impôts ou les taxes. C'est ainsi qu'il va aller chercher, par un
véritable vol qualifié, presque 900 000 000 $. Ce n'est pas loin
d'un milliard de dollars, ça, ce n'est pas rien. Ce n'est pas
insignifiant, ce n'est pas négligeable.
Ça, c'est ce que les assurés avalent
accumulé au fil des années. Ça leur revenait de
droit. C'est ça, un régime d'assurance. Un régime
d'assurance, ce n'est pas compliqué, vous payez des primes et, en
retour, vous avez des services. Vous avez des services sous forme
d'indemnités quand vous avez un accident. C'est simple comme
régime. Un régime d'assurance, c'est d'une très grande
simplicité. Les assurés paient des primes et, quand il leur
arrive un accident, ils ont des indemnités. Et, quand il y a des surplus
dans le régime d'assurance, bien, ça doit profiter aux
assurés, les assurés doivent en profiter. Comment et de quelle
façon? Ça peut prendre diverses formes, soit de diminuer les
primes - c'est déjà arrivé de diminuer les primes - ou
encore on augmente les indemnités. Ça aussi c'est des choses qui
ont déjà été faites dans le passé.
Mais normalement, puisque la Régie dégage des surplus
importants depuis quelques années, ça aurait dû se traduire
par une amélioration, une bonification du régime d'assurance,
mais ce n'est pas à ça qu'on assiste. On assiste à un vol,
un cambriolage, un "hold-up" du gouvernement sur la caisse des assurés,
des automobilistes assurés. Pour s'en servir à quelles fins, nous
dit-on, prétend-on? Pour s'en servir à des fins de projets de
voirie. Ça, c'est la meilleure, en plus. Non seulement on procède
à un cambriolage, mais, en plus, on le fait suivre d'un acte hypocrite.
On prétend qu'on finance des travaux de voirie alors que ce n'est pas du
tout le cas. Il suffit de comparer les budgets, il n'y a aucune augmentation
des budgets, cette année, par rapport à l'an passé,
aucune. Il y a même une légère diminution des budgets de
voirie. Alors, ça signifie quoi? Où ira cet argent, fruit du
cambriolage de la caisse de la Régie? Où ira-t-il? Ah! Ça,
on l'ignore, mais il y a une chose qui est sûre, c'est qu'il n'ira pas
dans les projets de construction et d'entretien du réseau routier.
Ça, c'est évident, c'est clair et net. À examiner,
à jeter un simple coup d'oeil sur le livre des crédits, vous vous
rendez compte que le budget n'a pas augmenté cette année par
rapport à l'an passé, et probablement pas tellement plus l'an
prochain non plus. Donc, 877 000 000 $ qu'on va chercher. (3 h 40)
Si, au moins, ça se traduisait par des travaux de voirie dans nos
régions, si au moins ça se traduisait par une augmentation des
projets d'entretien du réseau dans nos régions, le réseau
routier qui est dans un état lamentable partout, bien, ça ne
changerait pas la nature de l'acte commis, ça demeurerait toujours un
cambriolage, un vol qualifié et un "hold-up", ça ne changerait
pas la nature de l'acte commis, mais ça jetterait un baume sur cet
acte-là parce que ça se traduirait par des travaux précis,
concrets dans nos réglons. Mais ce ne sera pas le cas. La meilleure
preuve que ce ne sera pas le cas, c'est les camionneurs qu'on trouve devant le
parlement depuis plus d'une semaine. Qu'est-ce qu'ils réclament, ces
camionneurs-là? Ils réclament des travaux de voirie. Leur
gagne-pain principal, à ces camionneurs en vrac, ça vient des
travaux de voirie, surtout à partir de la fameuse formule 75-25. C'est
de là que vient leur principal gagne-pain.
Pourquoi sont-ils devant le parlement? C'est parce qu'ils ont vu chuter
la part de leurs revenus parce que les travaux de voirie ont diminué
substantiellement et vont diminuer encore davantage cette année. Ils
sont devant le parlement avec leurs camions et ils attendent que le
gouvernement réponde à leurs exigences, mais ce ne sera
certainement pas le cas, à l'examen des budgets. C'est pour ça
que ça traîne; le problème perdure et il pourrit parce que
le gouvernement est incapable de répondre à leurs attentes,
n'ayant pas les budgets requis. C'est un problème budgétaire
qu'on a en face du parlement, c'est un problème de budget. Accordez les
budgets de voirie requis, suffisants, et je suis convaincu que les camionneurs
vont rentrer vite chez eux pour travailler. Ils restent là parce qu'ils
n'ont pas de travail. Ils n'ont pas de travail parce qu'il n'y a pas de budget,
parce qu'il n'y a pas de crédits.
M. le Président, en cette nuit du plus grand cambriolage du
siècle au Québec, 877 000 000 $, je pense que les
députés de l'Opposition ont raison d'alerter la population
à ce sujet-là.
Des voix: Bravo!
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député de Lac-Saint-Jean. Je reconnais maintenant M. le
député de Laviolette. M. le député.
M. Jean-Pierre Jolivet
M. Jolivet: Merci, M. le Président. Je vous remercie de me
reconnaître cette fois-ci. Je comprends que vous avez été
obligé d'en reconnaître un autre tout à l'heure parce que
j'avais hésité à me lever, espérant que le
député de Taschereau puisse intervenir. Comme il ne semble pas
vouloir le faire, je me réserve donc le droit d'intervenir.
M. Boulerice: M. le Président, je m'excuse, est-ce que
vous pourriez vérifier le quorum, s'il vous plaît?
M. Jolivet: Ah bien nonl
Le Vice-Président (M. Bissonnet): II y a quorum, monsieur.
SI vous voulez poursuivre, s'il vous plaît.
M. Boulerice: M. le Président, est-ce que vous pourriez
faire respecter l'article 32 dans son Intégralité, s'il vous
plaît?
Le Vice-Président (M. Bissonnet): En vertu de l'article
32, le quorum a été vérifié, l'ordre était
maintenu. Est-ce que les députés dont la place a
été assignée par la présidence peuvent prendre leur
place respective, s'il vous plaît, en vertu de la demande du
député de Sainte-Marie-Saint-Jacques? Je vous remercie. M. le
député de Laviolette, si vous voulez poursuivre.
M. Jolivet: Merci, M. le Président. Je profite de la
circonstance, à 3 h 45, pour saluer la présence du
député de Drummond qui n'a pu assister, pour les raisons que l'on
connaît, au vote sur une motion d'adoption du projet de loi 75 qui
concerne l'ouverture et la fermeture des commerces. Vous savez, M. le
Président, j'aurais aimé l'entendre sur le sujet qui est en
discussion parce que je sais qu'il a énormément de raisons
d'espérer que la décision que nous prenons cette nuit ait des
avantages pour sa région, pour son comté.
Vous avez remarqué, M. le Président, lors des deux autres
motions, que le ministre responsable du dossier - en particulier, je regarde le
ministre de l'Industrie, du Commerce et de la Technologie - intervenait, en
vertu du règlement; toutes les fois qu'il y avait un
député de l'Opposition qui le faisait, il prenait son droit de
parole de cinq minutes. Je salue donc la présence - comme l'indiquait
mon collègue de Jonquière tout à l'heure - du ministre des
Transports, dont ce serait la responsabilité de défendre ce
projet de loi de la Régie de l'assurance automobile du Québec. Il
aurait dû prendre, à mon avis, M. le Président, des cinq
minutes, tel que le règlement le lui permet, puisque nous sommes
à la prise en considération du rapport. Mais le ministre ne l'a
pas jugé bon. Alors, je me suis dit: Fort probablement, c'est parce
qu'il est en négociation. Il est en négociation avec les gens qui
sont à l'extérieur et qui espèrent beaucoup de ce ministre
pour régler leur problème de camionnage. Mais je ne sais pas s'il
était là, présent à ces rencontres, ou si
c'était une autre personne du cabinet du premier ministre qui essayait
de régler ce problème avant qu'arrive la fête nationale des
Québécois et Québécoises. Mais il y a une chose qui
est certaine, c'est que je doute que l'utilisation qui ' doit être faite
de l'argent qu'on va venir chercher dans la caisse de la Régie de
l'assurance automobile du Québec serve nécessairement à ce
yque le ministre, dans son discours d'introduction, nous a dit.
Vous savez, M. le Président, nous sommes en droit de nous poser
de sérieuses questions. Le ministre de la Main-d'oeuvre et de la
Sécurité du revenu, comme on l'appelle, a été
longuement questionné par ma collègue, la députée
de Hochelaga-Maisonneuve, sur l'utilisation de l'argent de la caisse de
Simmons. Et le ministre, à l'époque, avait fait un moratoire pour
éviter que l'argent qui appartenait aux individus, hommes ou femmes, qui
avaient travaillé chez
Simmons, les matelas Simmons - il faut bien se le rappeler - que ces
gens-là aient droit à l'argent qu'ils avaient investi par
l'intermédiaire de leur fonds de pension. On a même dit que
c'était épouvantable, que c'était abominable, que
ça n'avait pas de bon sens, M. le Président, qu'une compagnie
s'en aille avec la caisse, que des individus, hommes et femmes, qui avaient
travaillé toute leur vie, qui avaient mis de l'argent dans une caisse
voient le patron sacrer le camp - comme on dit au Québec - avec la
caisse. Mais voilà que le gouvernement donne un mauvais exemple.
Lui-même, dans un caisse qui, normalement, doit être
utilisée par ceux qui la paient, soit pour la diminution de leurs primes
d'assurance, soit pour une diminution du montant d'argent qu'ils doivent payer
pour avoir une plaque d'immatriculation, soit pour une diminution de leur
permis de conduire ou, encore, si on ne fait pas ces diminutions, pour une
augmentation de l'argent qui est disponible au cas où ils auraient,
malheureusement, un accident, voilà que le gouvernement se dit: Au lieu
de faire un retour sur l'investissement, pour les individus - soit par l'un ou
l'autre des moyens dont j'ai fait mention - moi, je prends cet argent-là
et je l'investis en l'envoyant d'abord au fonds consolidé, sans garantir
que cet argent-là sera utilisé aux fins pour lesquelles ils nous
disent que le projet de loi est fait.
C'est, M. le Président, épouvantable. Comme gouvernement,
comment se fait-il qu'il passe un moratoire? Comment se fait-il qu'il discute
pendant longtemps à savoir de quelle façon il obligera la
compagnie de matelas Simmons à remettre aux individus l'argent qu'ils
ont placé dans leur fonds de pension et que lui-même agisse
autrement? C'est un exemple qui est mauvais, M. le Président. L'exemple
venant de haut, on dit, selon les termes latins qu'on apprenait quand on
était dans les collèges classiques d'autrefois: Exemplum tradit,
l'exemple trahit le geste posé par le ministre. Le ministre
représente ie gouvernement et, comme il représente le
gouvernement, comment peut-il demander à une société
privée d'agir et de remettre entre les mains des individus ce qu'ils ont
placé eux-mêmes et, en même temps, se donner le pouvoir, par
législation, d'aller lui-même chercher dans les poches des
individus ce qu'ils ont placé pour les besoins de leur protection
lorsqu'ils sont accidentés? (3 h 50)
C'est épouvantable, M. le Président. C'est tellement vrai
que les craintes que nous avons... Et j'aurai l'occasion au cours de cette
nuit, je l'espère, de questionner à nouveau le ministre
délégué aux Forêts sur un dossier à peu
près semblable. Nous faisons par la loi de REXFOR - et je le
donne, m. le président, comme exemple - un investissement du double de
celui qui est là. on augmente le fonds de rexfor de 175 000 000 $
et personne ne nous garantit... les
questions ont été posées au ministre en commission
parlementaire et jamais il n'a été capable de me répondre.
Même je dois vous dire, M. le Président, qu'on a été
obligés de suspendre à ce moment-là. Et le ministre s'est
posé des questions avec ses employés et ses avocats en disant:
Est-ce que le député de Laviolette a raison? Est-ce que l'argent
qu'on investit comme gouvernement dans REXFOR n'aura pas pour but d'augmenter,
à ce moment-là, les dividendes et qu'un jour, le gouvernement,
s'apercevant que REXFOR fait des dividendes, fait des bénéfices,
en arrive à dire: Je reprends ça et je décide de faire ce
que je veux avec ça? Je vous dis, M. le Président, que c'est un
exemple qui est mauvais, un exemple qui trahit l'intention
ministérielle. Or, comment voulez-vous, si le gouvernement agit de cette
façon-là, que les employeurs privés ne veuillent pas faire
la même chose? Et comment voulez-vous empêcher les employeurs
privés de le faire, si le gouvernement donne l'exemple, M. le
Président?
Vous comprendrez très bien, M. le Président, mon
désarroi devant les décisions gouvernementales, devant le
ministre qui nous écoute - maintenant qu'il est arrivé en cette
Chambre - et qui, je l'espère, pourra répondre à mes
interrogations avant que mon collègue, qui doit suivre après moi,
ne parle. Vous savez, M. le Président, le ministre, en vertu du
règlement, a le droit d'utiliser cinq minutes pour me donner des
réponses à mes questions. C'est le seul moyen qu'il a, lors de la
prise en considération du rapport, de pouvoir intervenir et utiliser son
droit de réplique. Mais, comme il ne semble pas m'écouter et
qu'il parle au ministre délégué aux Forêts, j'ai
l'impression qu'il est en train de discuter justement de ce dont je parlais
tout à l'heure et qu'il est en train de donner des mauvais conseils au
ministre délégué aux Forêts qui va vouloir un jour
utiliser les dividendes et les bénéfices de REXFOR pour justement
donner des services que je ne connais pas et je ne suis pas sûr que la
société les aura. Alors, M. le Président, je vous dis,
avec toute la franchise que j'ai: Je voterai contre cette décision
gouvernementale.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député de Laviolette. Je reconnais maintenant le leader de
l'Opposition officielle et député de Joliette. M. le leader.
M. Guy Chevrette
M. Chevrette: M. le Président, ce sera sans doute un de
mes derniers discours pour la journée, pour la présente
séance, à moins que je ne sois forcé de revenir à
la charge sur la loi concernant l'organisme de transport de Montréal, ou
encore sur la Loi sur la qualité de l'environnement, ou encore sur la
SQAE, ou encore sur quelques rapports concernant les courses de chevaux et
concernant la mise en marché de produits agricoles. Donc, M. le
Président, à 3 h 54, je serai le dernier en ce qui regarde-Une
voix: Je ne suis pas si c'est le dernier. Une voix: Du matin.
M. Chevrette: Du matin, je dis bien, oui, 3 h 54 du matin, je
serai le dernier, M. le Président, au niveau de l'étude du
rapport de la Loi sur la RAAQ, à m'exprimer. Et, M. le Président,
j'ai perdu tout espoir. J'ai perdu tout espoir de convaincre le ministre que,
d'abord, il a fait trois gaffes majeures. La première gaffe, M. le
Président, la première erreur fondamentale, c'est de n'avoir
absolument pas compris le sens du parlementarisme et d'avoir carrément,
M. le Président, voulu bâillonner le Parlement à peine
après quelques heures - treize heures, m'a-t-on dit - treize heures,
bâillonner un Parlement pour effectuer - et c'est là sa
deuxième erreur fondamentale - un des rapts, un des vols
qualifiés, M. le Président, de la caisse de la Régie de
l'assurance automobile du Québec, 877 000 000 $ disait mon
collègue de Lac-Saint-Jean sur une période relativement courte.
M. le Président, c'est vraiment... Et je suis sûr que ce
gouvernement-là, en plus de ça, augmentera les tarifs d'ici peu.
Ce soir, au moment où on a appelé le projet de loi en cette
Chambre, M. le Président, il y a un monsieur de Québec qui
m'appelait et qui me disait: Écoutez, le gouvernement, il va l'avoir son
argent, là; je suis un paraplégique et j'aimerais qu'on pense aux
accidentés du travail. J'ai dû lui expliquer pendant au moins cinq
longues minutes, lui dire: Écoutez, ce n'est pas pour corriger les
primes versées aux accidentés du travail. C'est là la
troisième erreur, M. le Président.
L'argent qui est versé par les assurés, l'argent qui est
versé pour ceux qui ont des véhicules automobiles, qui sont
propriétaires de permis de conduire ou encore qui sont détenteurs
de permis de conduire ou propriétaires de véhicules
immatriculés, cet argent-là ne sert pas - dans ce que je qualifie
de vol qualifié -ne servira pas aux propriétaires, ne servira pas
à l'assuré qui a le droit et qui est en droit de s'attendre,
parce que c'est un peu une mutuelle que l'on a faite avec cet argent-là,
ne servira malheureusement pas, et c'est ce que je disais à M.
Lebrasseur: Ne vous fiez pas sur le gouvernement actuel pour améliorer
les indemnités qui seront versées aux accidentés, non...
Ils viennent chercher ça et, la première année, croyez-le
ou non, on ne sait même pas où va l'argent. Parce que le ministre
a dit: Écoutez, ça va sur les routes. Écoutez, à
moins qu'on soit tous des malades, puis j'en douterais, sur 125 il doit y avoir
quelques lumières, sur 125... M. le Président, croyez-le ou non,
dans nos comtés, il n'y a pas une cenne de travaux neufs. Pas une
cenne.
Moi, j'ai deux protocoles qui sont à être terminés,
parce que, sinon, je n'aurais pas un sou de dépensé. Et, avant
1993, il n'y a pas un projet d'envisagé. Puis le ministre se lève
de son siège et dit: C'est pour investir dans les routes. Bonne
mère du ciel! Le député de Rousseau se lève et dit:
Écoutez, on n'en met pas cette année, parce qu'on en a mis pas
mal et les routes sont en bon état. Il dit, à peu près
cinq minutes après, dans le même discours - et vous le lirez, le
discours du député de Rousseau, vous allez vous amuser - cinq
minutes après, il dit: Le gouvernement, il était temps qu'il
investisse et c'est nous autres qui le faisons, les libéraux; on va
investir massivement parce que nos routes en ont besoin. Elles étaient
trop belles pour en mettre en 1990, puis elles sont tellement laides qu'il faut
qu'ils mettent un milliard et quelques centaines de millions sur quelques
années.
Une voix: Ce n'est pas vrai!
M. Chevrette: Écoutez, ça frise le ridicule, M. le
Président, ça frise le ridicule. Donc, trois erreurs, trois
gaffes monumentales, M. le Président, qui sont commises par ce ministre
qui, malheureusement, est arrivé ici avec un gros nom. Lui et Cosgrove
devaient défoncer, à peu près, les murs du temple et faire
résonner cette Assemblée nationale. Il y en a un qui n'a
même pas franchi la porte, puis l'autre qui est à la veille de la
prendre, M. le Président.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Chevrette: Ce n'est pas des farces. M. le Président, je
suis obligé de me rendre à l'évidence. Qu'est-ce que vous
avez fait concrètement dans le domaine du transport? À moins que
vous ne mettiez en pratique l'argument du ministre actuel de la Santé,
prédécesseur de l'actuel ministre des Transports, qui disait: Ce
n'est peut-être pas dans le bon comté. Je me suis mis à
vérifier ça. Je lui ai dit que c'était peut-être
parce qu'on a été élu dans le mauvais comté.
Mais je me suis mis à regarder dans le comté voisin, c'est
un petit copain libéral qui est là. Il y a un petit pont,
ça fait trois élections qu'il fait pour un petit pont de 400 000
$, puis ils ont annoncé qu'il n'aurait pas son petit pont. Donc, j'ai
dit: Donc, ils n'ont pas d'argent. Ils n'ont pas d'argent, même pour
faire un petit pont dans un comté, après trois élections
pour le petit pont. Duplessis bâtissait un pont et, après
ça, il creusait les rivières, mais, eux autres, ils promettent
les ponts puis l'eau coule, mais là il n'y a plus de pont pour
traverser.
Ça fait dur, votre affaire. Réveillez-vous.
Réveillez-vous, ça n'a pas de bon sens. Essayez de... Cessez de
faire croire au monde que vous allez chercher de l'argent pour améliorer
les routes. Vous ne mettez rien sur les routes cette année, dans tous
les comtés. Et regardez les programmations 1992-1993, dans vos
comtés, regardez-les et venez nous dire où est-ce que vous allez
mettre l'argent que vous allez chercher à la Régie. C'est pour
équilibrer un budget, M. le Président. Ils mettent ça dans
le fonds consolidé du Québec et ça ne va pas dans les
routes, malheureusement. Et ça, ce n'est pas correct. (4 heures)
Ça, M. le Président, on n'acceptera pas ça et
même s'il me disait aujourd'hui qu'il prendra l'argent pour le mettre sur
les routes, s'il nous disait la vérité, là, toute la
vérité et seulement que la vérité et s'il disait:
Je vais le mettre sur les routes, bien il faudrait qu'il nous le prouve
d'abord. Mais encore là, M. le Président, ça ne serait pas
correct parce que la mutuelle que s'est donnée l'Assemblée
nationale pour les assurés de l'automobile, ce n'était pas une
mutuelle pour "patcher" les routes, ce n'était pas une mutuelle pour
réparer les ponts, ce n'était pas une mutuelle pour corriger des
courbes, ce n'était pas une mutuelle pour bâtir des routes.
C'était une mutuelle, M. le Président, pour garantir la personne
avant toute chose. Et les accidentés de la route nous appellent et nous
disent: Vont-ils corriger les indemnités? Je suis devenu
paraplégique et je n'ai pas d'indemnité correcte, décente,
M. le Président. Non. À l'un d'entre eux, j'ai été
obligé de dire carrément: Non, ce n'est pas ça. Ils sont
supposés en investir sur la réparation, la réfection du
réseau routier, M. le Président. Mais c'est faux, c'est ce qu'il
y a de plus faux, M. le Président. On n'a qu'à regarder nos
programmations.
Donc, M. le Président, il me semble qu'un ministre a avantage
à dire toute la vérité en cette Chambre. Qu'est-ce qu'ils
font cette année avec l'argent qu'ils vont chercher?
Une voix: Ils font dur!
M. Chevrette: Qu'est-ce qu'ils font, M. le Président? Et
ça, je vous avoue bien honnêtement, M. le Président, qu'on
est plusieurs députés en cette Chambre et j'ai
vérifié auprès des deux côtés de la Chambre -
des deux côtés de la Chambre - et j'ai toujours la même
réponse. Je n'ai rien de neuf, je n'ai rien de neuf. Je n'ai pas de
travaux, je n'ai pas de travaux, je n'ai pas de travaux. Autant du
côté ministériel que de l'Opposition. Que faites-vous avez
l'argent?
Une voix: Ouais?
M. Chevrette: Que faites-vous, M. le Président, avec
l'argent? C'est ça, fondamentalement. Il va falloir que vous disiez la
vérité, M. le Président. J'espère que vous allez la
dire, M. le Président, parce que, actuellement, et je conclus
là-dessus, on n'est pas en mesure, d'abord de répondre
adéquatement à nos con-
citoyens. On n'est pas pour leur dire, nous, que les sommes d'argent
qu'ils iront chercher serviront au réseau routier parce que ce serait
contraire à la vérité, M. le Président, et on n'est
pas pour leur dire non plus que, dorénavant, leur argent aurait pu
servir à diminuer les primes. C'est chose faite maintenant. Ils s'en
servent pour un équilibre budgétaire, M. le Président.
Donc, M. le Président, j'invite le ministre, même si je
suis bien conscient que le poids du nombre, bientôt, lui donnera raison
à court terme... Je suis persuadé que si le ministre a un
tantinet d'esprit d'équité par rapport aux assurés, je
pense qu'il devrait, au moins, M. le Président, avoir la
délicatesse de nous informer correctement où va l'argent.
Des voix: Bravo! Bravo!
Le Vice-Président (M. Cannon): Merci, M. le leader
parlementaire de l'Opposition. Puisqu'il n'y a pas de réplique, est-ce
que la motion...
Des voix: On veut le ministre. On veut le ministre. On veut le
ministre.
Le Vice-Président (M. Cannon): Alors, est-ce que la motion
de prise en considération du rapport de la commission de
l'aménagement et des équipements sur le projet de loi 50, Loi
modifiant la Loi sur la Régie de l'assurance automobile du Québec
et d'autres dispositions législatives, est adoptée?
Une voix: Vote nominal.
Le Vice-Président (M. Cannon): Alors, qu'on appelle les
députés! (4 h 5 - 4 h 12)
Mise aux voix du rapport
Le Vice-Président (M. Cannon): Je mets maintenant aux voix
le rapport de la commission de l'aménagement et des équipements
relatif à l'étude du projet de loi ainsi que le projet de loi 50,
Loi modifiant la Loi sur la Régie de l'assurance automobile du
Québec et d'autres dispositions législatives.
Que ceux et celles qui sont en faveur de cette motion veuillent bien se
lever.
Le Secrétaire adjoint: M. Pagé (Portneuf), Mme
Gagnon-Tremblay (Saint-François), M. Paradis (Brome-Missisquoi), M.
Côté (Rivière-du-Loup)...
Des voix: Bravo! Bravo!
Le Secrétaire adjoint: ...M. Elkas (Robert-Baldwin), M.
Cusano (Viau), Mme Robillard (Chambly), M. Blackburn (Roberval), Mme Bleau
(Groulx), Mme Trépanier (Dorion), M. Middlemiss
(Pontiac), M. Beaudin (Gaspé), Mme Dionne
(Kamouraska-Témiscouata), M. St-Roch (Drummond), Mme Pelchat (Vachon),
M. Marcil (Salaberry-Soulanges), M. Lemire (Saint-Maurice), M. Leclerc
(Taschereau), M. Poulin (Chauveau), M. Thérien (Rousseau), M. Benoit
(Orford), M. Williams (Nel-ligan), M. Kehoe (Chapleau), M. Fradet (Vimont), M.
Messier (Saint-Hyacinthe), M. Charbonneau (Saint-Jean), Mme Bégin
(Bellechasse), M. Bélanger (Laval-des-Rapides), M. Gauvin
(Montmagny-L'Islet), M. Gautrin (Verdun), M. Larouche (Anjou), M. Khelfa
(Richelieu), M. Gobé (LaFon-taine), Mme Hovington (Matane), M. Joly
(Fabre), M. LeSage (Hull), M. Bordeleau (Acadie), Mme Boucher Bacon (Bourget),
M. Audet (Beauce-Nord), M. Parent (Sauvé), M. Camden
(Lotbi-nière), M. Farrah (Îles-de-la-Madeleine), M. Forget
(Prévost), Mme Loiselle (Saint-Henri), M. La-france (Iberville), M.
MacMillan (Papineau).
Le Vice-Président M. Cannon): Que ceux et celles qui sont
contre cette motion veuillent bien se lever.
Le Secrétaire adjoint: M. Chevrette (Joliette), M. Perron
(Duplessis), Mme Blackburn (Chicoutimi)...
Des voix: Bravo! Bravo!
Le Secrétaire adjoint: ...M. Garon (Lévis), M.
Jolivet (Laviolette), Mme Juneau (Johnson), M. Dufour (Jonquière), M.
Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Léonard (Labelle), Mme Vermette
(Ma-rie-Victorin), M. Paré (Shefford), M. Claveau (Ungava), M. Boulerice
(Sainte-Marie-Saint-Jacques), M. Morin (Dubuc), Mme Caron (Terre-bonne), M.
Boisclair (Gouin), M. Bourdon (Pointe-aux-Trembles), M. Trudel
(Rouyn-Noranda-Témis-camingue), Mme Dupuis (Verchères), M.
Beaulne (Bertrand), Mme Carrier-Perreault (Les Chutes-de-la-Chaudière).
le secrétaire adjoint: pour: 46
Contre: 21
M. Boulerice: Ha! ça baisse tout le temps...
Le Vice-Président (M. Cannon): Le rapport est donc
adopté. M. le leader du gouvernement.
M. Pagé: M. le Président, j'appelle, à ce
moment-ci, l'article 13 du feuilleton, soit le projet de loi 67, Loi sur le
Conseil métropolitain de transport en commun de la région de
Montréal.
Projet de loi 67 Adoption du principe
Le Vice-Président (M. Cannon): Alors, à l'article
13 du feuilleton, M. le ministre des
Transports propose l'adoption du principe du projet de loi
67, Loi sur le Conseil métropolitain de transport en commun et modifiant
diverses dispositions législatives. Je suis donc prêt à
reconnaître M. le ministre des Transports.
M. Sam L. Elkas
M. Elkas: M. le Président, l'honorable
lieutenant-gouverneur a pris connaissance de ce projet de loi. Il en recommande
l'étude à l'Assemblée.
M. le Président, le 15 mai dernier,
l'Assemblée nationale a accepté de débattre le projet de
loi, la Loi sur le Conseil métropolitain de transport en commun et
modifiant diverses dispositions législatives. Il me fait plaisir
d'exposer aujourd'hui quels sont les objectifs visés par ce projet de
loi et de décrire les principaux éléments de son
contenu.
Le grand objectif de ce projet de loi consiste à
rendre le transport en commun plus attrayant pour l'utilisateur. Pour cela, il
faut absolument donner une plus grande cohérence à l'organisation
des services. Concrètement, les objectifs découlant de cet
idéal consistent à accroître la clientèle des
réseaux de transport en commun, à améliorer l'offre en
coordonnant les services, en intégrant la tarification et en planifiant
les grandes infrastructures dans une perspective d'ensemble et, finalement,
à partager entre les sociétés les coûts de transport
en commun à la charge des municipalités.
Au début des années soixante dix, plusieurs
projets d'infrastructures, élaborés par la CUM et par le
ministère des Transports, ont amené le gouvernement à
mettre sur pied, en 1976, un groupe de travail spécial chargé de
préparer et d'énoncer la politique sur le transport des personnes
dans la région de Montréal. Publié en 1977, le rapport du
CTRM préconisait un ensemble de mesures touchant l'organisation et le
financement du transport dans la région et, notamment, la
création d'un organisme consultatif à caractère
régional, ce qu'on appelait le COTREM. En juin 1982, le ministère
des Transports déposait une proposition gouvernementale concernant
l'organisation et le financement du transport en commun dans la région
de Montréal.
Avant d'aller plus loin, il m'apparaît important, M.
le Président, de rappeler brièvement les principales
étapes qui ont mené à la création d'une telle
structure. Ce besoin s'est affirmé à mesure qu'on s'est
donné une vue d'ensemble du transport des personnes dans la
région de Montréal. En effet, au cours des dernières
années, les infrastructures de transport se sont rapidement
développées dans la région de Montréal.
Progressivement, les intéressés se sont rendu compte que la
planification, la mise en place et l'exploitation des infrastructures des
services de transport devraient être l'objet d'une coordination entre les
autorités responsables. Malheureusement, la commission parlementaire qui
fut tenue en 1982 fit ressortir l'absence de consensus entre les
intéressés, entraînant ainsi l'abandon de ce projet de
restructuration. (4 h 20)
Quelque cinq ans plus tard, soit lors des audiences de la
commission parlementaire de l'aménagement et des équipements
tenues en 1987, la plupart des intervenants ont demandé une meilleure
concertation dans l'organisation des services à l'échelle de la
région de Montréal.
Compte tenu des opinions exprimées lors de ces
audiences, le ministère des Transports décidait alors d'instaurer
une table de concertation régionale. Les travaux de la table de
concertation ont débouché sur le constat que l'absence
d'harmonisation des services de transport en commun est à l'origine de
la plupart des problèmes que connaît la région de
Montréal en ce domaine: le manque d'intégration des structures
tarifaires et l'incompatilité des systèmes de perception; une
absence de correspondance entre les différents services de transport
adapté; une absence de mécanismes de négociation et de
partage des coûts applicables à l'ensemble des autorités
organisatrices pour l'utilisation conjointe d'infrastructures (par exemple, les
terminus d'autobus et les voies réservées); finalement, l'absence
d'une source commune où la clientèle puisse trouver l'information
sur les services offerts par l'ensemble des 22 autorités organisatrices
actives dans la région de Montréal.
En novembre 1988, le Conseil des ministres confiait au
ministère des Transports le mandat de mettre au point, dans le cadre des
travaux de la table de concertation régionale, une structure de
coordination qui pourrait recevoir l'appui des principaux
intéressés. Mon prédécesseur soumettait un document
de réflexion à ce sujet en février 1989. Ce document
résumait les principaux problèmes et annonçait les
principales interventions.
M. le Président, cet outil de travail a atteint son
but en alimentant les réflexions et discussions entre les
différents partenaires, si bien que le 11 septembre dernier les
principaux dirigeants municipaux du Grand Montréal concluaient une
entente en vue de la création d'un organisme régional de
transport. Dix jours plus tard, soit le 21 septembre 1989, le premier ministre
du Québec et le ministre des Transports, en présence des
principaux élus du Grand Montréal, annonçaient un accord
de principe entre le gouvernement du Québec et les élus
municipaux concernant la création d'un organisme régional de
transport.
Le transport des personnes dans la région de
Montréal constitue une préoccupation majeure pour le gouvernement
du Québec. On constate que le volume des déplacements
s'accroît constamment. Divers facteurs expliquent le déclin
relatif du transport en commun: Une augmenta-
tion du niveau de vie permet à un nombre croissant de familles
d'avoir deux ou même trois véhicules; la proportion des femmes
travaillant hors du foyer est en croissance; la nature de leurs
déplacements (lieu de travail, achats, garderie, domicile) les
amène à préférer l'automobile à cause de sa
commodité; la performance et le confort des automobiles se sont beaucoup
améliorés depuis une vingtaine d'années; la population
s'accroît dans les banlieues; les lieux de travail se dispersent.
Il en résulte que le réseau autoroutier est utilisé
à pleine capacité et, en plus, il nécessite des
réparations majeures. Cela signifie qu'il est difficile d'accommoder
plus de voitures dans l'état actuel du réseau et qu'il faudra
trouver d'autres solutions. Nous devons donc, M. le Président, nous
tourner vers le transport en commun.
Il nous faut toutefois tenir compte du nombre croissant de voyageurs qui
utilisent plus d'un réseau de transport en commun. Cette
réalité doit amener les sociétés de transport
à reconnaître que cette clientèle est leur clientèle
commune et à travailler ensemble: pour mieux répondre aux besoins
de cette clientèle; pour rendre leurs services plus concurrentiels en
vue de répondre aux attentes des clientèles potentielles.
Ceci implique tout d'abord la nécessité d'harmoniser les
services offerts par les différentes autorités en ce qui
concerne, notamment, les points de raccordement, la tarification et les
horaires. De plus, au niveau financier, il devient impérieux de
régulariser les effets financiers découlant de l'utilisation d'un
réseau par les non-résidents puisque l'importance de ce
phénomène est appelée à croître.
M. le Président, tel que je l'ai mentionné au
début, le projet de loi sur le Conseil métropolitain de transport
en commun a pour objectif fondamental de rendre le transport en commun plus
attrayant pour l'utilisateur en minimisant les obstacles découlant du
fait que l'organisation des services relève de plusieurs
autorités. Le gouvernement privilégie ainsi, de façon non
équivoque, une approche orientée vers la clientèle.
C'est pourquoi le projet de loi met à la disposition du Conseil
métropolitain de transport en commun les outils permettant
d'accroître la clientèle des réseaux. Ainsi, nous comptons
en arriver à un meilleur équilibre entre ce mode de transport et
l'utilisation de l'automobile en milieu urbain, dans une perspective
d'amélioration de la qualité de l'environnement et du
développement économique.
En conséquence, le projet de loi confie au Conseil
métropolitain de transport en commun les pouvoirs requis pour
améliorer la qualité de ses services: en intégrant la
tarification; en planifiant les grandes infrastructures dans une perspective
d'ensemble; en veillant à la coordination des services offerts à
la clientèle inter- réseaux.
Finalement, le projet de loi inclut les dispositions habilitantes pour
que le Conseil métropolitain fixe lui-même le partage, entre les
sociétés de transport, des coûts du transport en commun
à la charge des municipalités.
Le gouvernement a aussi retenu des principes qui déterminent le
partage des responsabilités entre les sociétés de
transport et le Conseil métropolitain ainsi que le mode d'organisation
et de fonctionnement de ce dernier.
La première famille de principes comprend la primauté du
pouvoir local dans l'organisation des services ainsi que la simplicité
et la légèreté de la structure régionale. Ceci a
pour conséquence que les sociétés de transport conservent
à peu près intégralement leurs pouvoirs en matière
d'exploitation et que l'on confie au Conseil métropolitain les pouvoirs
essentiels à l'exécution de sa mission de concertation. Il s'agit
d'un conseil politique, d'un lieu de discussion et de concertation, et non
d'une administration.
La deuxième famille de principes est reliée à
l'équité de la représentation de chaque entité et
à l'implantation d'un processus décisionnel qui soit fonctionnel.
Dans cette optique, la représentation au sein du CMTC reflète
approximativement le pourcentage de la population de chaque entité. De
plus, aucune entité n'a la majorité des votes, favorisant ainsi
la réalisation de compromis. Finalement, la taille du Conseil a
été limitée à un maximum de 13 personnes.
Les autres principes retenus sont du domaine financier. Ils favorisent
un partage fondé sur la capacité de payer et visent la
responsabilité entière de chaque société de
transport.
En conséquence, le potentiel fiscal a été retenu
comme facteur de partage financier. De plus, le projet de loi autorise le
Conseil métropolitain à adopter des règles de partage des
déficits des sociétés pour faire en sorte qu'une
société absorbe seule les répercussions négatives
de ses décisions en matière de tarification et d'évolution
de son déficit.
Le territoire du Conseil correspond à celui des trois
sociétés de transport tel que proposé par les élus
municipaux. Ce territoire couvre le déplacement interréseaux
effectué en transport en commun, c'est-à-dire 75 % des
déplacements observés.
D'autre pari:, M. le Président, l'inclusion des cités
nécessitera des amendements à la loi. Cette inclusion pourrait se
produire une fois que le Conseil aura fait ses premiers pas et que ces
questions fondamentales auront été réglées.
Je voudrais maintenant, M. le Président, décrire les
principaux rôles qui seront rattachés à la mission du
Conseil métropolitain. Essentiellement, le Conseil métropolitain
de transport en commun est un conseil politique, un lieu de concertation et de
décision. Il n'organise pas les
services. Cette responsabilité continue à être
assumée par les sociétés de transport. Aussi, ses
tâches administratives sont minimes. (4 h 30)
Le Conseil aura la responsabilité de fixer les tarifs pour des
déplacements interrives, c'est-à-dire les déplacements des
usagers qui, en traversant un cours d'eau, passent du territoire d'une
société de transport à celui d'une autre
société, ainsi que pour les déplacements
interréseaux, soit lorsque l'utilisateur se sert du service plus que
d'une société.
Le Conseil décidera des grandes infrastructures interrives, par
exemple, un prolongement du réseau du métro à
l'extérieur du territoire de la Communauté urbaine de
Montréal et des infrastructures utilisées conjointement par deux
sociétés ou plus, notamment, des terminus. Le Conseil
métropolitain verra aussi à partager entre les
sociétés de transport les coûts du transport à la
charge des municipalités. L'entente intervenue en septembre dernier
entre les représentants municipaux prévoit déjà une
formule de partage financier. Il suffira donc de la concrétiser par une
décision du Conseil métropolitain, une fois celui-ci
formé, puisque le projet de loi accorde tous les pouvoirs requis pour
l'adoption d'une telle formule.
Le projet de loi prévoit aussi que la formule de partage
financier doit être adoptée ou modifiée à
l'unanimité des voix. La formule de partage financier convenue entre les
intéressés en septembre 1989 comporte principalement les
éléments suivants. Premièrement, les recettes provenant de
la vente du laissez-passer régional sont partagées entre les
sociétés en fonction du lieu de résidence de l'acheteur.
Deuxièmement, les déficits des trois sociétés de
transport ainsi que la part supportée par la Communauté urbaine
de Montréal du Service de la dette encourue pour construire le
réseau de métro qui existe sont consolidés et mis en
commun. Sur la base des budgets de 1990, la somme ainsi consolidée
atteint 248 800 000 $. Troisièmement, la somme ainsi consolidée
est réduite du montant de la subvention accordée au CMTC par le
gouvernement. Pour 1990, il s'agit d'une subvention de 26 500 000 $. Certaines
sommes sont exclues du partage. Il s'agit de l'écart entre le prix du
laissez-passer local et le prix moyen du laissez-passer des trois
sociétés ainsi que de l'écart entre le taux de croissance
du déficit d'une société et le taux moyen de croissance du
déficit des trois sociétés. Finalement, la somme
consolidée moins la subvention est repartagée entre trois
sociétés de transport selon le potentiel fiscal uniformisé
de chacune des entités.
Le Conseil métropolitain verra à la coordination des
services de transport en commun et de transport adapté. Ce rôle
n'est cependant pas décisionnel. Il s'agit de concertation. Il existera
par la formation de comités dont le mandat et la composition seront
décidés par le Conseil. Les travaux des comités techniques
qui relèvent de la table de concertation pourront donc être
poursuivis sous la direction du Conseil métropolitain. D'autre part, le
projet de loi prévoit qu'un représentant du ministère des
Transports et un autre du ministère des Affaires municipales pourront
participer aux travaux de chacun de ces comités.
Je voudrais, maintenant, M. le Président, décrire la
composition du Conseil ainsi que son processus de prise de décision.
Tout d'abord, le Conseil sera composé de 13 membres. Il comprendra le
président du comité exécutif de la CUM, 6 élus de
la ville de Montréal, 2 élus des autres villes de la CUM, 2
élus de la ville de Laval, et 2 élus provenant du conseil
d'administration de la Société de transport de la Rive-Sud de
Montréal.
Les décisions seront prises à la double majorité,
c'est-à-dire qu'il faudra un vote favorable à la fois de la
majorité des représentants de la ville de Montréal et de
la majorité des représentants des autres entités. Prenez
note, M. le Président, que le président du comité
exécutif de la CUM n'a pas droit de vote. La création du Conseil
métropolitain de transport en commun et le rôle qu'on a choisi de
lui confier commandent un réaménagement des
responsabilités en matière d'infrastructures de transport en
commun. Ce réaménagement constitue en effet le second objet du
projet de loi. Et le partage des responsabilités prévu au projet
de loi tient compte des prolongements existants et à venir du
métro et des trains de banlieue à l'extérieur du
territoire de la Communauté urbaine de Montréal. Les principes
qui ont inspiré le partage proposé sont: l'unité du
réseau, un réseau doit avoir un seul propriétaire et un
seul exploitant; l'efficacité, c'est-à-dire la capacité de
prendre des décisions et de réaliser des travaux une fois que les
objectifs sont fixés; l'efficience, c'est-à-dire un meilleur
usage possible des ressources disponibles.
En ce qui a trait au métro et aux trains de banlieue, le partage
des responsabilités sera le suivant. La responsabilité de
planifier les infrastructures et de décider de leur réalisation
appartiendra au Conseil métropolitain. Le Conseil exercera ses
responsabilités pour les infrastructures reliant les territoires des
deux sociétés. Pour les infrastructures qui ne débordent
pas le territoire d'une société de transport, c'est la
société concernée qui sera responsable. La
propriété des infrastructures reviendra à la STCUM. La
STCUM est l'exploitant et doit, à ce titre, détenir tous les
droits nécessaires; la propriété ne doit pas être
morcelée. Dans ce sens, la CUM devra remettre à la STCUM les
titres qu'elle détient, de la même façon que la ville de
Montréal l'a fait pour le réseau initial du métro. Les
pouvoirs d'acquisition, d'expropriation et de construction seront
confiés à la STCUM. Dans le cas du métro, ces pouvoirs
seront transférés de la CUM à la STCUM. Il s'agit
de l'arrangement le plus logique, puisque la STCUM est l'exploitant et
possède la meilleure connaissance des besoins possibles et
contraintes.
L'exploitation du métro et des trains de banlieue relève
de la STCUM, qui assumera cette fonction sur le territoire des trois
sociétés. Celle-ci est déjà l'exploitant de ces
modes de transport. Le projet de loi prévoit par ailleurs que la CUM
sera responsable de la programmation des investissements et de la
réalisation des emprunts pour la construction du métro, et ce,
même dans le territoire de la STL et de la STLSM. En effet, la CUM
ressort comme l'entité la plus apte à jouer le rôle
d'emprunteur parce qu'elle gère déjà les emprunts
réalisés pour le réseau existant. Elle jouit de la
meilleure reconnaissance sur les marchés financiers, ce qui lui permet
d'emprunter à un meilleur coût. Il s'agit d'un rôle
d'exécutant dans le cas des projets dont la réalisation a
été décidée par la CMTC. La CUM et les
municipalités qui la composent seront conjointement et solidairement
responsables des obligations contractées par la Communauté.
Je voudrais signaler que les consultations effectuées
auprès des intéressés depuis le dépôt du
projet de loi amènent des ajustements qui seront soumis lors de
l'étude détaillée du projet de loi par la commission
permanente de l'aménagement et des équipements. L'extension du
métro sur le territoire de la STL ou de la STRSM comprend des
installations qui pourront être réalisées par la
municipalité ou la société concernée. Ces
installations comprennent les aménagements en surface, tels que les
débarcadères, les salles d'attente, les boutiques et les voies
d'accès entre la surface et les quais du métro. La
municipalité aura la priorité pour accepter de réaliser
ces installations et en être propriétaire. Si elle refuse, la STL
ou la STRSM aura alors la possibilité d'agir. Enfin, la STCUM pourrait
exécuter les travaux, le cas échéant, mais ne pourrait
être propriétaire. (4 h 40)
Cet arrangement se veut conforme aux principes d'autonomie
décisionnelle de chaque société sur le territoire. Il
s'inspire aussi de préoccupations pratiques, puisque la STL et la STRSM
pourront ainsi concevoir, posséder et exploiter des raccordements au
métro situé sur leur territoire. Quant au financement des
infrastructures de métro et de trains de banlieue, les consultations
amènent à proposer les changements suivants. La CUM conserve la
responsabilité qu'elle exerce présentement d'emprunter pour
assurer le financement de la construction du métro et de l'achat du
matériel roulant du métro. La STCUM conserve, pour sa part, la
responsabilité de financer tous les investissements en matière
des trains de banlieue, ainsi que l'entretien et les réparations des
infrastructures et des équipements du métro. Enfin, dans le
territoire de la STL et de la STRSM, les aménagements de surface et les
voies d'accès aux quais des stations de métro seront
financés par la municipalité ou la société dans le
territoire dans lequel la station est située.
Je me propose également, M. le Président, de soumettre
d'autres amendements lors de l'étude en commission parlementaire. Ces
amendements ont principalement pour but de préciser la portée de
certains articles afin qu'ils reflètent fidèlement la
volonté des intéressés en ce qui a trait aux
responsabilités du Conseil métropolitain.
En conclusion, M. le Président, il m'ap-paraît que la
création du Conseil métropolitain de transport en commun est
aujourd'hui une nécessité. Le CMTC constituera un outil
privilégié pour aborder la planification et l'exploitation des
services de transport en commun dans une perspective régionale. Le
gouvernement veut profiter du consensus intervenu entre les principaux
dirigeants de la CUM et les trois sociétés de transport et se
joindre à eux afin de donner suite à un projet qui
bénéficiera, en tout premier lieu, aux principaux
intéressés, c'est-à-dire les utilisateurs des services de
transport en commun. Il convient que le gouvernement intervienne afin de
permettre aux sociétés de transport d'arriver à une
véritable coordination des services ainsi qu'à un partage
équitable du coût des équipements et des services. C'est
aussi pour atteindre la plus haute qualité des services de transport en
commun possible, et ceci à un meilleur coût pour la
collectivité, que je présente le projet de loi pour créer
le Conseil métropolitain, définir son rôle et ses
responsabilités. Je vous remercie, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Cannon): Merci, M. le ministre des
Transports. Je suis maintenant prêt à reconnaître le
prochain intervenant, M. le député de Lévis.
M. Jean Garon
M. Garon: M. le Président, si les
téléspectateurs nous regardent et se demandent si nous avons la
barbe longue, ils ont raison, puisque nous siégeons depuis hier matin et
presque sans interruption depuis quatre jours, puisque c'est ce gouvernement
d'improvisateurs qui nous présente des projets de loi à la
dernière minute. Le meilleur exemple, c'est le projet de loi que nous
avons devant nous, le projet de loi 67, Loi sur le Conseil métropolitain
de transport en commun et modifiant diverses dispositions législatives,
qui a été déposé devant le Parlement par le
ministre des Transports le 15 mai 1990.
Le ministre dit: Je mène ça comme l'entreprise
privée. Sauf qu'on va ajourner le 22 à minuit au maximun,
d'après nos règlements et qu'il présente son projet de loi
à 4 h 15, le 21 juin. Demandons-nous pas pourquoi le nombre des
faillites a augmenté de 30 % depuis le début de
1990 au Québec, qu'on a un record de tous les temps dans le
nombre des faillites au Québec en 1990 sous ce gouvernement
d'improvisateurs, qui est bien plus fort pour mettre la main sur la caisse de
la Régie de l'assurance automobile du Québec, sans débat,
que pour faire des lois pensées, réfléchies. Un
gouvernement d'improvisateurs. Quand on se demande ce qu'est un parlementaire,
je vous dirais, si je comparais à un ingénieur ou à un
architecte: Si un ingénieur faisait son plan à moitié et
que le pont était à moitié fait, s'il faisait courir des
risques au public, vous diriez: Cet ingénieur ne doit pas pratiquer; si
l'architecte fait les plans d'une bâtisse, des plans à
moitié faits, des structures à moitié calculées,
des travaux à moitié réalisés, des murs
fissurés qui mettent en danger la sécurité du public, vous
diriez: Mauvais architecte. Mais d'un parlementaire qui n'est pas capable de
présenter son projet de loi en temps, de faire les débats eh
temps, de jour, comme tout le monde, et qui est obligé de
présenter, parce qu'il n'a pas su faire ses devoirs quand c'était
le temps, un projet de loi à 4 h 15 du matin, le 21 juin, avec
près de 2000 à 3000 camionneurs qui dorment dans leur boîte
de camion, alors qu'il y a trois semaines, c'étaient 3000 autres qui
étaient un peu partout sur des terrains de stationnement du
Québec pour demander des rencontres avec le ministre, vous diriez: Si
l'entreprise privée était menée comme ça, ce n'est
peut-être pas le genre de ministre dont on a besoin dans un gouvernement.
Bien, c'est ça que nous avons devant nous, M. le Président, et
c'est pourquoi, vous et moi, nous sommes ici, à 4 h 45, en train de
débattre un projet de loi sur le transport en commun.
Je dis aux téléspectateurs qui nous regardent: N'ajustez
pas votre appareil, on a la barbe longue, parce qu'on ne s'est pas encore fait
la barbe. On ira tout à l'heure - il y aura peut-être une
demi-heure d'ajournement entre la fin de la session d'hier, à 9 heures
ou 9 h 30, et la reprise de la session de ce matin, à 10 heures -prendre
une douche rapide. On aura des députés à moitié
morts, des ministres à moitié endormis qui ne répondent
pas aux questions et qui essaieront d'élaborer des projets de loi qui
vont toucher des centaines de milliers de personnes, avec les
conséquences qu'on a. Heureusement, il y a une justice immanente. Le
Seigneur disait dans l'Évangile: Qui triomphera par l'épée
périra par l'épée. Aujourd'hui, ce Parlement, qui veut
nous faire siéger de force jour et nuit, est en train de se faire dire:
Wo, là, par un député indien, à Winnipeg, qui est
en train de remettre la monnaie de sa pièce au gouvernement, en disant:
Wo, là! Moi seul vous arrêterai dans vos oeuvres
machiavéliques où vous êtes en train de faire des
débats... D'abord, c'était les premiers ministres, pendant une
semaine, à huis clos, camouflés, comme si c'était une
"gang" de maffiosi qui était en train de se répartir le pot.
Ça, c'était la constitution du Canada.
J'ai eu l'occasion, pendant cette semaine, de rencontrer des
journalistes américains, des journalistes de la BBC de Londres, qui me
disaient: On n'a jamais vu un pareil cirque. Alors qu'on faisait la
constitution de l'indépendance américaine, au XVIIIe
siècle, les gens étaient mieux informés de ce qui se
passait à ce moment-là, alors qu'on n'avait pas de
télévision, pas de radio, pas de téléphone.
Malgré cela, les gens savaient mieux ce qui se passait dans la
constitution américaine. Les gens participaient davantage à son
élaboration. Il y avait des débats fantastiques, à ce
moment-là, dans ce qui a été les débats
peut-être les plus commentés dans l'histoire du monde, lors de la
constitution américaine. Les gens étaient fiers de faire une
constitution, puis, aujourd'hui, ils parlent de leur constitution comme d'un
évangile.
Nous, on a une constitution qui ressemble un peu à une maladie
honteuse. Une constitution qui est discutée en cachette. Une
constitution qui est faite en cachette par des gens, apparemment, qui se font
plaquer au plancher ou bien barrer les portes pour pouvoir les faire rester de
force dans la bâtisse. Aujourd'hui, même les premiers ministres qui
ont été là disent: C'est d'une façon indigne que le
débat s'est fait, où les gens ont l'impression d'avoir appartenu
à une "gang" de maffiosi.
M. le Président, ça, c'est le Canada, voyez-vous?
Ça, c'est le Canada. C'est pour ça qu'aujourd'hui vous ne voyez
pas beaucoup de gens. Au congrès libéral qui commence à
Calgary aujourd'hui, on a vu que ça a commencé par un brouhaha
indescriptible où les gens, encore là, parlent de la constitution
canadienne, et ils sont dans un genre de cirque. Ce n'est pas étonnant
que les gens d'ailleurs qui viennent ici, qu'il s'agisse de grands journalistes
américains ou britanniques, regardent ce qui se passe et sont
estomaqués de voir un tel fouillis. C'est la même façon de
délibérer et de faire des lois de ce gouvernement. (4 h 50)
J'ai eu l'occasion d'assister au mois d'août... J'allais dire si
on regarde même en Russie; pourtant, en Russie et dans les pays d'Europe
de l'Est, qui ne sont pas considérés comme des modèles de
démocratie, on peut voir aux nouvelles, à tous les jours, tous
les débats qui se font sur l'élaboration de la constitution. Des
dizaines et même des centaines de milliers de personnes qui manifestent
leur approbation ou leur désapprobation. Aujourd'hui, on regarde le
Canada, on dit... Je comprends qu'on a dit que la Sainte Vierge ou le pape,
quand il y a eu les déclarations à Fatima, aurait dit - vrai ou
faux - Pauvre Canada! Je comprends. Ça devait être vrai. Ceux qui
en doutaient... En tout cas, nous-mêmes, on est en train de dire: Pauvre
Canada! Avec des gens qui font des textes de loi qui sont des
improvisations.
J'ai eu l'occasion d'assister, M. le Président, au début
de cette commission parlementaire à Montréal, à une
consultation au mois d'août 1987. À ce moment-là, le
député de Charlesbourg, qui s'en est bien repenti par la suite,
avait bien voulu déplacer la commission parlementaire dans son ensemble
à Montréal, avec tout le "kit": les enregistrements, les
appareils sophistiqués. Tout avait été
déplacé à des coûts considérables, pensant
sans doute que les salles seraient bondées, que les gens participeraient
aux débats. Je dois vous dire qu'on s'est retrouvés au mois
d'août 1987, tous ensemble, un grand nombre de Québécois,
dans une salle qui avait l'air plutôt d'une cave et avec un journaliste
qui est venu faire un tour, qui a daigné nous faire l'honneur de sa
présence, un dénommé Francoeur du journal Le Devoir.
Et on avait vraiment l'impression d'être entre nous, alors qu'on
avait l'air vraiment de petits poissons rouges dans un aquarium, on ne
dérangeait pas la conversation dans le salon.
Mais les gens de Montréal ne sont pas venus. Personne n'est venu.
Ah! Il y a bien eu des gens qui sont venus présenter leur mémoire
et, l'espace d'une heure, ils venaient nous rencontrer et ils repartaient.
Nous, nous étions entre nous. Je me rappelle, de notre
côté: le député de Jonquière, du
Saguenay-Lac-Saint-Jean, le député de Dubuc, qui a pris sa
retraite depuis le temps; j'étais là également comme
député de Lévis. On avait l'air de parlementaires - et
même d'autres du Parti libéral - au mois d'août qui
n'avaient rien d'autre à faire qu'aller s'asseoir dans un hôtel,
dans le soubassement, comme si on n'avait pas assez d'imagination au mois
d'août, pour aller s'asseoir dans une telle bâtisse. Et même
les gens de l'endroit qui devaient, apparemment, être là dans des
consultations n'étaient pas présents; et même les
médias suivaient à peine les débats.
C'est sans doute pourquoi, lorsqu'est arrivé le plan d'action
pour les années 1988 à 1998, cette fois-là, le
député de Charlesbourg, ministre des Transports, avait
décidé que le débat se ferait au parlement de
Québec, qu'il n'y aurait pas de déplacement et que tout se
passerait ici au salon rouge. Il s'est dit à ce moment-là que
tout se passerait ici au salon rouge: Si ça n'intéresse pas plus
les gens que nous allons consulter, alors, à ce moment-là,
ça ne donne rien de déplacer tous ces appareils-là; aussi
bien que ceux que ça intéresse viennent rencontrer les gens au
parlement, ça coûtera moins cher. C'est ça, la
réalité, M. le Président.
Aujourd'hui, on se retrouve devant un projet de loi improvisé,
comme d'habitude, avec apparemment une série d'amendements qu'on n'a pas
encore vus à 4 h 55 maintenant, ce matin du 21 juin, alors que la
session doit ajourner le 22 juin, à minuit au plus tard, demain. Le 23,
il y aura un feu sur les plaines d'Abraham, pour ceux qui voudront y aller.
Là, on sera le 23; le 24, ce sera à Montréal, le dimanche,
et le 25, il y aura congé pour que les gens qui auront trop
fêté le samedi et le dimanche puissent se reposer.
Mais essentiellement, M. le Président, c'est que le ministre
vient de nous dire qu'il y a eu - un bel euphémisme - des ajustements;
dans le langage parlementaire, ça veut dire qu'il y aura sans doute une
série d'amendements dont on n'a pas vu encore l'ombre et qui nous seront
distribués à la dernière minute. Après ça,
ce n'est pas surprenant qu'on ait des lois qui soient mal foutues. Je vois Mme
la députée de Groulx qui suit le débat dans un
enthousiasme délirant et qui est convaincue. Là, encore
l'appareil ne montre pas la députée parce qu'il faudrait dire:
N'ajustez pas vos appareils. On est en session parlementaire. Il y en a qui
regardent, il y en a d'autres qui dorment, il y en a d'autres qui, même
s'ils ont la tête penchée sur le poing comme le penseur de Rodin,
ce que vous pourriez entendre, c'est plutôt des ronflements que les
rouages du cerveau qui sont en ebullition. Pourquoi? C'est parce que c'est le
Parlement de Québec dans toute sa splendeur sous un gouvernement
d'improvisateurs.
M. le Président, vous comprenez pourquoi des fois, moi, je me
demande, comme parlementaire qui suis ici depuis un certain nombre
d'années, que, si le Parlement n'est pas respecté comme il le
devrait, c'est peut-être qu'il ne fait pas tout ce qu'il faut pour
être respectable. On ne peut pas respecter un Parlement qui travaille de
cette façon-là. On ne peut pas respecter un Parlement - je le
comprends - qui travaille de cette façon-là parce qu'il y a un
manque de respect des électeurs, il y a un manque de respect des
citoyens dans cette façon de travailler qui n'a pas de bon sens. Ce
n'est pas comme ça.
Vous savez les camionneurs qui sont là dehors, ils n'ont pas le
droit de conduire leur camion plus que tant d'heures de suite, pas plus que
huit heures, depuis le nouveau Code sur la sécurité
routière, parce qu'on dit qu'ils constituent après ça des
dangers pour le public. Nous, on a le droit de légiférer à
peu près 24 heures par jour des lois qui vont affecter des millions de
personnes, des centaines de milliers de personnes, même des millions dans
certains cas. Tantôt la loi de la RAAQ du Québec, la RAAQ, 4 000
000 d'automobilistes. Mais là, on fait main basse sur la caisse, 877 000
000 $. C'est ça justement. Et là actuellement on va faire une loi
qui va toucher tout le transport en commun, de nuit, avec des
députés à moitié endormis, avec d'autres qui sont
dans leurs bureaux attendant le son des cloches pour venir faire un tour au
Parlement pour prendre un vote sur un débat qu'ils n'ont pas suivi et
qui se lèveront quand le whip leur dira de se lever et qui s'asseoiront
quand il leur dira de s'asseoir, qui ouvriront la bouche s'il leur dit de
l'ouvrir et qui la refermeront s'il leur dit de la fermer. Ce n'est pas
ça un Parlement. Ce n'est pas ça.
Moi, je pense que c'est une parodie de Parlement. On se demande
après ça pourquoi les citoyens n'ont pas un grand respect du
Parlement. Je pense que le gouvernement actuel fait tout ce qu'il peut imaginer
pour dégrader le Parlement. Le premier ministre, mou, assez que je pense
qu'il faudrait faire une enquête. Là, je voyais l'autre jour, en
fin de semaine dans les journaux qu'on se demande pourquoi les grenouilles sont
en train de disparaître de la terre. Il y a un phénomène
incroyable qui se passe, les grenouilles sont en train de disparaître.
Les animaux amphibies sont en train de disparaître, personne ne sait
exactement pourquoi. Il y en a qui disent que c'est la pollution. Mais en tout
cas les grenouilles disparaissent. Le symbole des Québécois, la
grenouille, les "frogs", est en train de disparaître. C'est
peut-être un signe avant-coureur.
Mais, par ailleurs, je suis en train de me demander si on ne devrait pas
faire une enquête sur le premier ministre qui serait peut-être un
verterbré qui est en train de se transformer en inverterbré. On
l'a vu au lac Meech. Il a un manque de colonne vertébrale. Mais pour
faire siéger le Parlement de nuit, par exemple, là il n'a pas son
pareil. Il a des résultats, par exemple: des lois mal faites, des lois
à moitié étudiée, des lois escamotées.
J'entends un député qui dit: II gagne des élections. Il
gagne des élections, mais il part quasiment comme la fuite en Egypte.
Rappelons-nous 1976, il est parti. J'ai prédit que la prochaine fois il
partirait avant les prochaines élections, il partirait d'une
façon plus humiliante qu'en 1976, parce que ceux qui avaient dit qu'il
avait pris sa leçon se rendront compte qu'il n'a pas pris de
leçon, que c'est le même homme avec les mêmes
problèmes qui se génèrent actuellement. (5 heures)
Rappelons nous qu'en 1976, de 1974 à 1975 et 1976, le Parlement
était quasiment en état de siège permanent. C'est en train
de redevenir la même situation parce que tous ont le sentiment
très net qu'il n'y a plus de gouvernement aux commandes, qu'il n'y a
plus personne qui dirige ce gouvernement-là. C'est pour ça qu'on
a des projets de loi qui sont à moitié
présentés.
M. le Président, sur le principe du projet de loi, il n'y a pas
grand monde qui peut dire grand-chose contre un principe normal qui est
d'essayer de regrouper, sur un territoire, comme la région de
Montréal, un Conseil métropolitain de transport en commun, selon
le projet qui nous est présenté. Sauf que ce n'est pas sur le
principe, tout le monde va être pour le principe. Le problème va
être dans les modalités et c'est pourquoi le ministre, qui a
dû déposer son projet de loi le 15 mai en Chambre, ne l'a pas
apporté devant le Parlement avant le 21 juin, plus de cinq semaines plus
tard. Mais, ensuite, il va demander de faire l'étude d'un projet de loi
qui a presque 30 pages, 25 pages, 101 articles. Il veut essayer de faire
ça en dépassant le mur du son, en ayant à peine le temps
de lire les articles et en essayant de faire des pressions sur les
députés de l'Opposition pour qu'ils donnent toutes sortes de
consentements pour essayer d'aller le plus rapidement possible, et là en
utilisant tous ceux qui ont des mécanismes de pression à
utiliser, pour essayer de faire en sorte que la loi soit adoptée avant
l'ajournement de la session.
C'est ça, le genre de gouvernement qu'on a devant nous
aujourd'hui. Ne nous trompons pas: si le transport en commun ne marche pas
mieux, si le transport en commun est rendu de moins en moins
sécuritaire... Parce que je vais vous dire une chose: Si seulement il y
avait plus de sécurité dans le métro de Montréal,
il y aurait sans doute beaucoup plus d'utilisation du transport en commun,
plutôt que de voir des titres comme ceux qu'on voyait dans la La
Presse du 15 mars 1990: "Forte hausse de la criminalité dans le
métro". Si on avait juste réglé ce
problème-là, on aurait réglé un gros
problème et les personnes âgées qui sont de grands
utilisateurs potentiels du transport en commun pourraient utiliser davantage le
métro, mais à condition de s'y sentir en sécurité.
Quand on dit, par exemple, que c'est l'endroit de prédilection pour des
luttes de "gangs", ça ne fait pas un métro qui est très
sécuritaire. On aura beau faire tous les palabres qu'on voudra, toutes
les ententes qu'on voudra, j'ai l'impression qu'il agit exactement comme des
poissons rouges dans un bocal, un aquarium, qui ne dérangent pas la
conversation du salon. Il serait bien mieux d'assurer une certaine
sécurité dans le métro pour faire en sorte que les gens
n'aient pas peur de prendre le métro. Il s'agirait aussi de mieux
planifier ce qui se fait.
Ici, le projet de loi crée donc le Conseil métropolitain
de transport en commun, un organisme qui sera chargé de faciliter les
déplacements interréseaux dans la région de
Montréal. C'est une structure qu'on dit légère où
les sociétés de transport locales gardent leur autonomie
entière. Il contient également des dispositions concernant les
projets de développement du métro à l'extérieur du
territoire de la Communauté urbaine de Montréal. Il y a un
certain nombre de questions qu'il faut se poser concernant ce projet de loi. Ce
projet de loi pourra-t-il améliorer le transport en commun à
Montréal et solutionner les vrais problèmes du transport en
commun? En voulant respecter l'autonomie des sociétés de
transport locales, qui est un objectif louable, le Conseil, par ailleurs,
aura-t-il la capacité et les pouvoirs nécessaires pour prendre
les décisions essentielles au bon fonctionnement du transport en commun
à Montréal?
Le ministre disait tout à l'heure: Le Conseil
métropolitain va être un organisme de concertation et de
décision. On verra à l'usage. C'est
facile actuellement de créer un organisme régional. Il
faudra voir si la pondération des choses a été
réalisée et si tout ce qui doit entourer le fonctionnement de cet
organisme-là a été bien pensé. Cent un articles, il
s'agit de beaucoup de dispositions qui concernent l'aménagement, la mise
sur pied et le fonctionnement d'un tel organisme.
Je vois le député de Gaspé qui est venu ici par
sympathie, sans doute, pour son collègue, mais j'ai l'impression qu'il
n'est pas le principal préoccupé. Je me serais attendu à
voir les députés de Montréal présents ici. Je vois
le député de Gaspé. Je ne suis pas sûr que ce soit
le principal intéressé, même si les gens de Gaspé,
quand ils partent de Gaspé, ont la réputation d'aller rester
à Montréal. Mais lui, en attendant, il est plutôt à
Sainte-Thérèse-de-Gaspé, proche du quai.
Je vois aussi le député de Drummond. Le
député de Drummond est présent. Il n'a pas la
réputation de parler souvent, mais il est présent. Je ne suis pas
sûr que c'est le principal concerné aussi par le projet.
Je vois le député de Rivière-du-Loup. Il y en a qui
disent qu'il n'est pas sorti du bois, mais ce soir il est ici. Le
député de Rivière-du-Loup, je ne suis pas certain que
c'est le principal intéressé par le projet. Je ne suis pas
certain.
Je vois le député de Portneuf qui est ici un peu par
devoir à cause de sa mauvaise planification des travaux; on est tous ici
un peu à cause de lui pour payer pour sa mauvaise planification des
travaux. Je ne suis pas certain, par ailleurs, que c'est parce qu'il est le
plus touché par le projet.
Je vois le député de Gatineau, de Papineau, Papineau. Il
ne parle pas souvent, ça fait que je ne me rappelle pas toujours le nom
de son comté, mais je sais qu'il est de l'Outaouais. Ce n'est pas encore
le député le plus concerné par le projet.
M. le Président, par ailleurs, ici, on voit nos
députés de la région de Montréal. On n'en a pas
beaucoup, on ne peut pas en amener beaucoup, en avoir autant ici
présents. Mais nos députés sont ici et ils vont prendre la
parole en plus. Il y a des députés de l'Opposition qui vont
prendre la parole, qui sont de la région de Montréal: le
député de Bertrand, de la rive sud, le député de
Pointe-aux-Trembles, de Montréal, qui est ici présent, d'autres
qui écoutent ensemble au bureau du whip les débats qui sont aussi
présents. Dans Laval, les gens, on ne peut pas avoir de
député pour les représenter, on n'en a pas élu.
Mais c'est frappant de voir à quel point les députés de
Montréal ne sont pas présents. Les députés de
Itle de Montréal, je peux vous dire qu'il y en a 2 sur 33. Il y a
la députée de Bourget, qu'on me dit, et le député
de Verdun, 2 sur 33. Ça ne fait pas extraordinaire. Je vais vous dire
que ce n'est pas parce qu'il manque de transport en commun dans la
région de Québec qu'ils n'ont pas pu se rendre au Parlement parce
qu'on est là depuis hier matin. Alors, ce n'est pas une grosse
préoccupation pour le transport en commun. Quand même qu'on nous
dirait que c'est l'urgence nationale, je vois bien qu'il faut faire un acte de
foi considérable parce que ce n'est pas la présence des
députés libéraux de Montréal qui nous incite
à le croire.
Ah! Je dois dire que vous, M. le Président, vous êtes
présent, un peu par devoir, je pense bien, parce que vous êtes
obligé de tenir le fort; si vous ne teniez pas le fort, ça fait
longtemps qu'on aurait fermé la Chambre. C'est tout à votre
honneur et je sais qu'en dedans de vous-même vous ne pouvez pas le dire,
comme président, mais vous n'êtes pas d'accord avec cette
façon d'opérer, de voter la nuit comme si on était des
taupes. On est comme des taupes. Des taupes, on sait que ça travaille la
nuit, ça a la réputation de ne pas voir clair. On sait qu'une
taupe s'enfonce dans son trou et ça travaille la nuit, apparemment. De
toute façon, ça ne voit pas clair. Ça fait que, que
ça travaille la nuit ou le jour, c'est pareil. On aurait l'impression
qu'un député travaillerait davantage le jour plutôt que de
travailler comme une taupe, mais qu'est-ce que vous voulez? (5 h 10)
Autre point qu'il faut souligner: A-t-on assuré la
viabilité financière de l'organisme? L'article 71 stipule que
l'engagement financier du gouvernement prend fin le 31 décembre 1994.
Qu'arrivera-t-il après? Il n'y a pas un mot dans le projet de loi. Et je
vais lire l'article pour que les gens, que leurs commettants se rappellent
qu'apparemment ils ne se sont pas préoccupés davantage de ce qui
dépasse 1994. On dit: "Le gouvernement accorde au Conseil, pour la
période du 1er janvier 1990 au 31 décembre 1994, une subvention
d'au plus 144 400 000 $ qu'il verse par tranche annuelle à la date et
aux conditions qu'il fixe." Donc, un financement qui est assuré jusqu'en
1994, mais sans dépasser le 31 décembre 1994, avec un montant
maximum. Qu'arrivera-t-il s'il y a des dépassements de coûts? On
ne le sait pas. Qu'arrivera-t-il après 1994? On ne le sait pas
davantage.
Les définitions concernant les équipements de transport
dits interrégionaux sont-elles adéquates, satisfaisantes et
claires pour tous les intéressés? Par exemple, les articles 2 et
88, paragraphe k), concernant la définition d'un déplacement
interrégional et la propriété des équipements
régionaux sont-ils acceptables par tous? Je vais lire les articles, vous
allez voir à quel point, quand on parle d'équipements
interrégionaux, on est dans le vague. On est drôlement dans le
vague. On s'entendra sur ce que ça dit par la suite. Il faut faire un
acte de foi, là encore, à moins qu'il n'y ait d'autres
amendements du ministre.
Qu'est-ce qu'il dit l'article 2? On dit: "Le
transport en commun régional est celui qui permet à une
personne de se déplacer du réseau de transport en commun d'une
société à celui d'une autre société ou,
à l'intérieur d'un même réseau, du territoire d'une
société à celui d'une autre." Je dois vous dire que, comme
définition, c'est un peu extensible, mais on ne peut pas dire que c'est
très précis. Et, à l'article 88, que je vais lire,
paragraphe k), on se rend compte, encore là, qu'il s'agit d'un article
qui ne pèche pas par un excès de clarté. Je vais vous le
lire: "La Société est seule propriétaire de ses ouvrages
et immeubles nécessaires à l'exploitation du réseau de
métro. La Communauté doit transférer gratuitement à
la Société tous les droits immobiliers, ainsi que leurs titres,
biens meubles et autres droits qu'elle peut détenir en relation avec le
réseau de métro. Le service de la dette afférente aux
biens de la Société de transport est réparti comme un
déficit de ladite Société et le service de la dette
afférente aux autres biens et droits acquis à l'origine par la
Communauté est réparti comme une dépense de la
Communauté. Cependant, lorsqu'une extension du réseau de
métro est faite sur le territoire de la Société de
transport de la ville de Laval ou des municipalités dont le territoire
fait partie du territoire de la Société de transport de la rive
sud de Montréal, la Société ne conserve que la partie
souterraine du réseau et elle doit transférer à la
municipalité sur le territoire de laquelle l'extension a
été réalisée les biens, droits et titres
immobiliers qu'elle a pu acquérir à cette fin en surface ou
au-dessus du sol."
On sait qu'il y a eu des débats, qu'il n'y avait pas entente
là-dessus entre, principalement, les gens de Laval et les gens de la
communauté urbaine ou de la STCUM. Mais on verra s'il y a eu entente et
s'il y a eu des changements concernant ces articles de loi. Concernant la
STRSM, on n'en a pas entendu parler, on ne sait pas ce qu'elle en pense.
Mais, j'ai remarqué que le ministre, dans son allocution, a
laissé entendre qu'il y aurait des amendements concernant les
dispositions qu'on trouve au paragraphe k) de l'article 88, sans le nommer,
quand il parlait des infrastructures à la surface de la terre par
rapport aux infrastructures souterraines, à savoir qu'il pourrait y
avoir des changements. M. le Président, ce qui veut dire qu'encore une
fois c'est un projet de loi qui a été déposé le 15
mai 1990, mais qui était loin de faire l'unanimité.
Deuxièmement, l'incohérence du gouvernement en
matière de transport en commun à Montréal. Les
orientations du gouvernement concernant le transport en commun à
Montréal sont de plus en plus confuses. Le plan de l'ancien ministre des
Transports prévoyait, au niveau du développement, le prolongement
de la ligne 5 du métro jusqu'à Montréal-Nord, 200 000 000
$, et de la ligne 2 vers les Bois-Francs, 100 000 000 $, l'aménagement
de l'es- tacade sur la rive sud de Montréal pour les autobus, 85 000 000
$, et la mise en service d'un train de banlieue vers Châteauguay, 35 000
000 $. Le plan Côté prévoyait également la
modernisation du train de banlieue vers Deux-Montagnes au coût de 175 000
000 $. Vous aurez l'occasion de voir quelles sont les parties de ces sommes
d'argent là qui sont dépensées; on verra que c'est peu
avancé.
Lors de la commission parlementaire, en janvier 1989, le ministre
Côté, député de Charlesbourg, avait donné son
accord au prolongement de la ligne 5 vers Anjou et à la construction de
la ligne 1, à Montréal-Nord, pour 500 000 000 $. Le
développement de ces infrastructures devait se réaliser sur un
échéancier de 13 ans, simultanément à la
modernisation du train vers Deux-Montagnes. Ce compromis permettait de
concilier les volontés du gouvernement exprimées dans le plan et
les demandes de la Communauté urbaine de Montréal. La campagne
électorale est venue chambarder tout cela. Alors, qu'il y avait eu un
tas de consultations, de tentatives de faire des consensus, les engagements
électoraux en 1989 ont porté sur des sujets où il n'y
avait eu aucune consultation. C'est quelque chose, M. le Président. Mais
je suppose que ça doit faire partie de ce qu'on appelle la
vérité révélée. La vérité
révélée, c'est un genre de postulat ou d'axiome qui n'a
pas besoin de démonstration. Alors, possiblement que ça fait
partie des postulats ou des axiomes, et qu'il n'y a pas besoin de
démonstration. Mais la campagne électorale est venue chambarder
tout cela.
Il faudrait demander aux élus ce qu'ils en pensent ou aux gens
représentant les sociétés qui sont ensemble, puisque,
à l'article 2, on dit bien qui va se regrouper. On dit ici: "Les
sociétés de transport en commun sont la Société de
transport de la Communauté urbaine de Montréal, la
Société de transport de la ville de Laval et la
Société de transport de la rive sud de Montréal." Il
faudrait qu'ils nous disent, au fond, ce sur quoi ils sont d'accord, s'ils sont
d'accord avec le plan qui est allé en consultation ou sur les
engagements de la campagne électorale, ou s'ils pensent que ça
devrait être les deux.
En août 1989, quatre ententes ont été conclues entre
le gouvernement du Québec et les autorités municipales et de
transport en commun de la région de Montréal. Ces ententes
portent sur le prolongement du métro à Laval, sur la rive sud de
Montréal et dans l'est de Montréal, sur la modernisation du train
de banlieue vers Deux-Montagnes, sur la création de l'organisme
régional de transport communément appelé ORT et sur les
études pour élaborer les solutions à long terme de
l'autoroute Métropolitaine. Le prolongement du métro à
Laval d'ici 1995, 150 000 000 $, et le début des études pour le
prolongement vers Brassard n'ont jamais été débattus dans
le cadre du plan Côté. Qu'il
s'agisse du dépôt du plan ou de l'étude
en commission parlementaire, ça n'a jamais fait l'objet de
consultations; pourtant, c'est ça qui a fait l'objet d'engagements
électoraux. De plus, ces ententes atténuent le compromis
intervenu lors de la commission parlementaire de janvier 1989 sur la
réalisation de la ligne 5 vers Anjou et de la ligne 7, puisqu'elles font
davantage référence à des études qu'à des
travaux. Ça, c'est très important de se le rappeler.
Est-ce que les gens vont se satisfaire de cette
façon-là? Il faudra qu'ils nous le disent. Nous autres, comme
parlementaires, c'est bien difficile de défendre les gens puisqu'ils se
défendent eux-mêmes. Comme avocat, une chose qu'on a apprise...
C'est pour ça que ça aide d'être avocat, des fois, comme
parlementaire, parce que l'avocat sait qu'il ne peut pas défendre son
client plus qu'il ne veut lui-même se défendre; autrement,
ça fait un drôle de mandat. (5 h 20)
Alors, c'est pour ça qu'il va falloir se demander:
Qu'est-ce que les intervenants en pensent, clairement? Comment expliquer un tel
revirement entre la commission parlementaire sur le plan Côté, qu[
ne contenait aucun projet de développement de métro à
l'extérieur de la Communauté urbaine de Montréal, et la
campagne électorale? Qu'est-ce qui est arrivé? Quel chemin de
Damas le premier ministre a-t-il rencontré? Est-ce qu'il a
été, comme saint Paul sur son cheval, démonté sur
le chemin de Damas? On ne le sait pas, mais espérons que la commission
parlementaire qui suivra éventuellement le projet de loi nous permettra
de faire la lumière sur ces engagements nouveaux. Les gens de Laval et
de la rive sud devraient se méfier des promesses du gouvernement,
puisqu'il n'a même pas d'argent pour respecter les
échéanciers du plan Côté. Les engagements du plan de
10 ans - on aura l'occasion d'y revenir - sont loin d'être
réalisés, bien que, actuellement, on affame les
différentes régions au Québec, puisque les travaux de
voirie régionale, dans les différentes régions du
Québec, ont baissé cette année de 42 %. Malgré
tout, dans la région de Montréal, on est loin de la
réalisation du plan qui est allé en consultation et pour lequel
il y avait eu consensus lors de l'étude en commission parlementaire.
Le gouvernement se désengage du transport en commun.
Il refile la facture aux municipalités. En 1989, le gouvernement du
Québec a versé une contribution de 207 000 000 $ pour les
dépenses d'opération de la STCUM. Cette contribution
représente près de 29 % des dépenses totales de la
Société, qui se sont élevées la même
année à 726 000 000 $. Le projet du gouvernement de
transférer aux municipalités l'entière
responsabilité financière du fonctionnement d'un système
de transport en commun, tel qu'annoncé lors du discours sur le budget,
aura des conséquences graves sur l'avenir du transport en commun,
à Montréal et au Québec. En effet, selon les projections
de coûts de la STCUM, de 1990 à 1993, cette dernière
prévoit un manque à gagner de 49 000 000 $ en 1990, de 64 000 000
$ en 1991, de 76 000 000 $ en 1992, et de 93 000 000 $ en 1993. Le transfert
aux municipalités de leurs responsabilités financières
pour le fonctionnement du transport en commun pourrait se traduire par une
augmentation des tarifs aux usagers de l'ordre de 40 %, selon Le
Président de la Conférence des maires de la banlieue de
Montréal, M. Michel Leduc.
Ici on voit, par exemple, les coupures de journaux, suite
au discours du budget. On se rend compte qu'à ce moment-là la
directrice générale indiquait, dans une déclaration, que
le coût de la carte de transport en commun pourrait augmenter à
94,67 $, si les menaces indiquées au budget du ministre des Finances en
1990 se matérialisaient. Je sais qu'il y en a qui ont dit que
c'était une chasse aux sorcières. Mais, habituellement, ces
dépenses-là, concrètement, le gouvernement ne les annonce
pas pendant que la session est en cours. C'est sans doute pourquoi le
ministre-Non, c'est le truc. J'ai vu ça du gouvernement Trudeau,
à Ottawa. J'ai souvent vu que les menaces, par exemple, aux
pêcheurs arrivaient toujours au mois de juillet alors que le monde
était en vacances. Comme le disait Notre-Sei-gneur - je pense bien que
le ministre a pris ça pour lui - je viendrai comme un voleur. Mais il
parlait de la mort, à ce moment-là. Entendons-nous. Je vois que
le ministre essaye de forcer pour faire l'adoption de la structure avant
l'ajournement. J'ai l'impression que ça cache des lendemains amers. J'ai
l'impression que les lendemains amers vont venir après minuit, le 22
juin.
Le désengagement qui est contenu dans le budget...
Les municipalités sont peut-être bien naïves; quand elles ont
entrepris les discussions avec le gouvernement sur le financement scolaire,
elles pensaient se faire mettre le pied dans la porte pour 75 000 000 $. On a
réalisé qu'ils l'ont mis pour 320 000 000 $ et qu'elles ont
été surprises. Mais, comme beaucoup de ces maires-là sont
beaucoup plus libéraux que maires, la réaction a
été mitigée, et on aurait voulu qu'on les défende
plus dans certains cas qu'ils se défendaient eux-mêmes.
Et c'est pourquoi, dans le cas du transport en commun... Et
vous remarquerez, je le dis, c'est enregistré. Je comprends qu'à
5 h 25, M. le Président, ça ne se bouscule pas encore dans les
autobus pour aller au poste de télévision pour écouter mon
discours, mais les quelques-uns qui sont devant la télévision,
qui sont insomniaques et qui écoutent encore la télévision
à presque 5 heures et demie le matin du 21 juin, début de
l'été, au moment où le soleil a dû commencer
à se lever - même les taupes rentrent dans leur trou -
éventuellement, M. le Président, se rappelleront et ils vont
dire: Le député de Lévis
nous avait dit de nous méfier du gouvernement, après le 22
juin, qu'il y a une "opérationalisa-tion" du budget du ministre des
Finances entrant en opération après le 22 juin et que ça
ne serait pas au cours de la session, mais possiblement entre la
Saint-Jean-Baptiste et la Confédération ou au cours du mois de
juillet, pour que ça passe le plus inaperçu possible. Ils
pourront dire que le député de Lévis, même s'il
n'est pas de Montréal, les avait avertis de se méfier d'un
gouvernement qui adopte les lois de nuit et qui adopte aussi des mesures
impopulaires le plus subrepticement possible, comme il le fait pour la caisse
de la Régie de l'assurance automobile et en changeant le nom de la RAAQ
pour la SAAQ, parce qu'il va partir avec le sac.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Garon: En se désengageant de l'aide à
l'exploitation du transport en commun, le maintien de la participation du
gouvernement dans le développement des infrastructures ne veut plus rien
dire. Remarquez bien, en se désengageant, le gouvernement va
peut-être bien financer le métro, mais est-ce qu'il va le financer
avec son désengagement du financement, de sa participation au
développement des infrastructures? Là, on verra. Mais je dis
à ceux qui n'ont pas lu le budget du ministre des Finances de le relire.
Parce que là, les chiffres sont escomptés. Il faut, quand on
regarde le budget, avoir les yeux vis-à-vis des trous pour bien voir ce
qui est marqué dans le budget. Et on se rendra compte que le
gouvernement veut se désengager du transport en commun. Dans ce
désengagement de l'aide à l'exploitation du transport en commun,
le maintien de la participation du gouvernement dans le développement
des infrastructures ne veut pas dire grand-chose.
Comme les municipalités et les usagers seront incapables
d'assumer seuls les opérations du transport en commun, il ne se fera
plus de développement d'infrastrutures de transport en commun. Il faut
bien se dire la vérité. C'est ça qui pend au bout du nez
de ceux qui sont dans le transport en commun. Et j'émettrais ma
première mise en garde concrète, pas première, mais une
autre mise en garde concrète: le vrai plan d'action du transport en
commun de l'ex-ministre des Transports, le député de
Charlesbourg, tarde à se mettre en marche. Alors que 60 % du temps est
écoulé concernant la première partie du plan d'action
quinquennal contenu dans le plan Côté, c'est-à-dire qu'il y
a trois années de passées sur cinq, le gouvernement n'a
dépensé ou engagé que 24 % des montants prévus pour
les cinq premières années.
J'ai remarqué, M. le Président, que le ministre n'est pas
présent; c'est à peu près le seul ministre qui n'est
jamais présent quand on discute ses projets de loi. J'ai remarqué
que même le ministre de l'Éducation, qui est bien plus vieux que
lui, est présent. Il n'a pas manqué une minute. Il a
assisté à tous les débats. J'ai remarqué que le
ministre des Finances, même parfois malade, assistait aux débats
en ce qui concerne son ministère; mais le ministre des Transports, lui,
il est au-dessus de ça. Il n'est là pour aucun de ses projets de
loi. Il demande à ses députés d'être là; lui,
il n'y est pas. Il ne donne pas l'exemple. Il n'est pas là pour les
camionneurs. Il n'est pas là pour ses projets de loi. Il est absent. On
aimerait ça qu'il soit là et qu'il s'intéresse un peu
à son projet de loi. Mais il semble que la merveille que devait
représenter ce nouveau ministre des Transports issu de l'ouest de
Montréal n'a pas besoin d'être présente lors des
débats qui concernent ses projets de loi. Même le
député de Papineau est là, un peu découragé,
la tête appuyée sur la main, et qui se dit: Comment ça se
fait que moi, de l'Outaouais, qui n'aurai pas un seul de ces véhicules
qui va passer sur mon territoire, je suis présent pour écouter le
débat et participer au débat? Mais le ministre, qui est
supposé être le maître d'oeuvre, est complètement
désintéressé. (5 h 30) tantôt, les gens de la
communauté urbaine, les gens de la société de transport de
laval ou encore de la strsm, ils ne nous l'ont pas encore dit, vont nous
demander d'étudier jour et nuit, d'être là le ventre
à terre pour étudier leur projet de loi. mais, alors qu'on en
parle en chambre, le ministre est au-dessus de ça, il n'est pas
présent. je ne sais pas s'il est allé voir si les camions sont
encore là. peut-être qu'il est allé faire le tour du
parlement pour compter les camions, voir s'il y en a autant ou s'il y en a
d'autres, avertir le ministre de l'environnement qu'apparemment on prendrait
des poursuites concernant l'environnement parce qu'il y a des camions autour du
parlement. on a entendu ça aux nouvelles tantôt. en tout cas, le
ministre n'est pas là. pourtant, alors que 60 % du temps s'est
écoulé concernant la première partie du plan d'action
quinquennal contenu dans te plan côté, trois années sur
cinq, le gouvernement n'a dépensé, au cours des trois
premières années sur cinq ans, que 24 % des montants
prévus pour les cinq premières années. de 1988 à
1990, 134 000 000 $ ont été dépensés ou
engagés, alors que le plan côté prévoyait investir
554 000 000 $, m. le président. c'est quelque chose: 134 000 000 $ sur
554 000 000 $.
Au cours des trois premières années, le gouvernement a
dépensé en moyenne 66 000 000 $ de moins par année que ses
prévisions. Pour atteindre ses objectifs et respecter ses
échéanciers d'ici 1993, il devra dépenser, en 1991-1992,
420 000 000 $, soit 210 000 000 $ par année. Imaginez-vous! Sera-t-il
capable de faire ça, alors qu'on a vu qu'actuellement dans les travaux
qu'il fait à Montréal il y a du craquèle-ment, qu'on est
obligés de changer des plans et
devis sur lesquels on taponne depuis des années,
parce qu'on s'est trompé, on a fait des erreurs, et je reviendrai
là-dessus. On n'a même pas posé le béton qu'on avait
spécifié dans le devis. Sera-t-il capable de faire ces
investissements qui étaient prévus dans le plan? Aura-t-il les
budgets pour le faire, compte tenu des dépassements de coûts du
volet routier et du plan de transport dans la région de Montréal?
Si on regarde le bilan du transport dans la région de Montréal,
le volet du transport en commun pour la période de 1988 à 1992,
en millions de dollars, on se rend compte que pour la conservation des acquis,
alors qu'on pensait dépenser, de 1988 à 1992, 288 000 000 $, il y
a seulement, au bout de trois ans, 125 000 000 $ de dépensés, sur
288 000 000 $ sur cinq ans.
Pour l'amélioration, il devait dépenser 70
000 000 $ sur cinq ans: au bout de trois ans, on a dépensé la
fabuleuse somme de 6 600 000 $ sur 70 000 000 $. Pour les questions du
développement, imaginez-vous, on devait dépenser 196 000 000 $
entre 1988 et 1992: après trois ans, on n'aurait pas
dépensé 196 000 000 $, mais un gros 2 000 000 $: un gros plan!
Donc, sur 554 000 000 $, 133 600 000 $ de dépensés. Pour le
développement: 2 000 000 $ sur 196 000 000 $, imaginez-vous! Ça
va bien. Les gens doivent être rassurés à Montréal.
Alors, vous voyez que dans la théorie c'est beau, mais dans la pratique
ça ne marche pas autant. Il y a des crevaisons à bien des places
pour ne pas que ça avance plus que ça.
Ce qui distingue les actions du gouvernement en
matière de transport à Montréal, ce sont les
dépassements de coûts des travaux. Même si on ne
dépense pas l'argent qu'on devait dépenser, beaucoup moins, on
réussit quand même à dépasser les coûts qu'on
avait prévus, pas parce qu'on est débordés, parce qu'on en
fait beaucoup moins que ce qu'on avait prévu, mais, quand même,
ceux qu'on fait, on n'est pas capables de contrôler les coûts. Il y
a des dépassements considérables. À la lumière des
trois premières années de réalisation du plan
Côté dans la région de Montréal, il nous
apparaît que ce plan a été improvisé, qu'il a
été déposé en catastrophe et que le
ministère des Transports fait les plans et devis au fur et à
mesure de l'avancement des travaux. On a vu ce que ça donne dans le
domaine des frégates. On va voir ce que ça donne dans le domaine
des transports, des dépassements de coûts. Les travaux pour le
plan de transport dans la région de Montréal ont
dépassé les coûts prévus, lors des soumissions, de
plus de 30 % l'an dernier. Même si on dépense plus que jamais pour
les plans et devis et la surveillance... C'est à tel point que le
Vérificateur général s'en plaignait dans son rapport du 31
mars 1987, où il disait qu'alors que sous l'ancien gouvernement on
faisait pour 3,60 $ de travaux avec 1 $ de plans et devis et de surveillance le
gouvernement actuel, en 1986, était rendu à 2,81 $.
Alors, vous voyez, M. le Président, que ce n'est pas
fantastique, l'administration actuelle. On dit: On va administrer cela comme
une entreprise privée, oui. Lors de l'étude des crédits de
1990-1991 du ministre des Transports, le ministre Vallières a
indiqué qu'il y aurait encore des dépassements importants cette
année pour les travaux dans la région de Montréal.
Il l'a dit d'avance. Il a dit: L'année vient de
commencer et je peux vous dire d'avance qu'il va y avoir des gros
dépassements. En plus de faire l'objet de dépassements
importants, il y a eu des changements de matériaux dans les travaux de
construction dans la région de Montréal l'an dernier. Le ministre
délégué aux Transports a confirmé, lors de
l'étude des crédits de son ministère, le 30 mai 1990,
qu'on utilisait un type de béton différent de celui qui avait
été spécifié aux plans et devis. On fait faire des
soumissions sur du béton plus cher et, quand on fait les travaux, on
utilise du béton moins cher.
Une belle planification! Ça fait curieux. Comment se
fait-il que les plans et devis n'ont pas été respectés? On
dit qu'ils ont été bien faits. Les travaux préparatoires
aux plans étaient-ils suffisants et étaient-ils bien
réalisés? De plus, il arrive que ces ouvrages, dont les
coûts ont dépassé largement les montants établis
lors des soumissions et dont les plans et devis n'ont pas été
respectés, montrent déjà des signes visibles et une
inquiétante détérioration après moins d'un an de
leur réalisation. Ça craque!
On voyait même que du béton qui avait
été fait, il y a quelque 20 ou 30 années, n'avait pas
encore craqué et du béton fait l'an dernier, sous ce
gouvernement-là, avait déjà commencé à
craquer. C'est quelque chose, M. le Président. Bref, ça sent
l'improvisation et on a l'impression que le plan Côté a
été déposé en catastrophe pour montrer que le
gouvernement avait des orientations en matière de transport dans la
région de Montréal. Mais, aujourd'hui, il est clair qu'il ne sait
pas où il va. C'est pareil dans le transport comme dans le
développement régional. Ça fait dur.
C'est le ministre délégué aux
Transports qui l'a dit lui-même. Le ministre des Transports fonctionne
à la mitaine. Je cite le ministre des Transports lui-même en
commission parlementaire, lors des travaux de la commission de
l'aménagement et des équipements le 30 mai 1990. N'est-il pas
étonnant que des travaux dans la région de Montréal se
réalisent de façon aussi régulière quand le
ministre lui-même a déclaré en commission parlementaire ce
qui suit, et je vous le cite, M. le Président: Oui, là, il y a un
problème. Je me rends compte qu'aux Transports - là, je ne sais
pas si dans les autres ministères, c'est pareil - il y a très peu
de choses qui sont informatisées. Apparemment, il y a le cabinet du
ministre; c'est lui qui a les applications des occasionnels et, là,
c'est informatisé! Il a dit: II
y a très peu de choses d'informatisées. On va essayer de
voir à ça. Il a commencé par informatiser les emplois pour
mieux pouvoir les contrôler. J'aîmerais - ajoute-t-il - pouvoir
répondre de façon beaucoup plus instantanée à
certaines questions de cette nature. Mais on est littéralement
obligé de faire toutes nos recherches actuellement à la mitaine
dans les différents dossiers. Je promets au député de
Lévis ce type d'information là. Normalement, on devrait
être capable rapidement de lui donner une réponse. Mais, là
encore, ce n'est même pas fait par ordinateur. On va chercher
l'information et la cueillir à l'intérieur de documents dont on
dispose à la mitaine. Mais je vais vous les remettre.
Vous voyez, M. le Président, le ministre lui-même se plaint
de son ministère et accuse son ministère, après avoir
été un nouvel arrivé au ministère depuis l'automne
dernier, d'être un ministère qui marche à la mitaine. Ce
n'est pas rassurant, M. le Président. Et c'est pour ça que, dans
le transport en commun, j'espère que les gens qui représentent
Laval, la Communauté urbaine ou la rive sud de Montréal ont pris
des assurances, parce qu'encore là l'Opposition ne peut pas les
défendre plus qu'ils ne se défendent eux-même. L'Opposition
ne peut pas être plus aguerrie qu'ils ne sont aguerris. L'Opposition ne
peut pas être plus soupçonneuse qu'ils ne sont soupçonneux.
L'Opposition ne peut pas vérifier plus qu'ils ne lui demandent de
vérifier. L'Opposition ne peut pas faire un travail plus grand que ce
qu'ils ne font eux-mêmes. (5 h 40)
C'est important, M. le Président, ce que je dis là. Je le
dis et je sais que mes paroles sont enregistrées. Je le sais, mais ceux
qui marchent seulement sur des actes de foi doivent se rappeler il est aussi
dit dans l'Évangile que la foi sans les oeuvres, ça
n'impressionne pas le Seigneur. Souvent, j'ai vu le ministre des Transports qui
a fait le plan d'action 1988-1998 avoir beaucoup de choix, mais je vais vous
dire que les oeuvres n'apparaissent pas souvent.
C'est pourquoi, M. le Président, je suis méfiant. Je suis
méfiant vis-à-vis de ce plan-là et je vois que j'ai
réussi à vous convaincre. Je vois que le député de
Papineau s'est levé. Il regarde le plafond et se demande, sans doute, ce
qui va lui tomber sur la tête. Il est inquiet lui aussi. Je sens que la
députée de Groulx est inquiète elle aussi. Elle est assise
la tête dans la main et elle se dit: A 5 h 40, qu'est-ce que je fais
là? Je vois que le député de Rivière-du-Loup nous a
abandonnés, il est retourné dans le bois. Je vois que le
député de Saint-Hyacinthe est venu faire un tour. Il y a un
député qui est loin, là, je ne suis pas capable de le
reconnaître parce que je ne vois pas si loin que ça, mais il s'est
assis proche de la porte, prêt à sortir à tout
événement: S'il arrive quelque chose, je suis prêt à
partir. Je vois que le député de Drummond a changé de
banc. Il dit: Si on peut partir pour se faire la barbe. Il a essayé de
se mettre le plus loin possible de la télévision pour que les
gens ne se demandent pas pourquoi il est tellement découragé de
la vie qu'il ne se rase plus.
Alors, c'est ça. On est dans cette situation-là, M. le
Président, et je m'excuse auprès des
téléspectateurs qui nous regardent. Je ne suis pas
découragé, mais le gouvernement nous oblige à
siéger. Il est 5 h 40. Tantôt, on va aller changer de chemise,
changer de cravate si on a le temps, se raser, se passer une serviette dans la
face et recommencer, parce qu'on marche jour et nuit au Parlement. Ne vous
demandez pas pourquoi, après ça, les lois s'en vont cahin-caha.
Les gens qui gardent l'heure avec leurs chronomètres n'en croient pas
leurs yeux. Ils voient les secondes, les minutes, les heures passer et ils se
disent: Qu'est-ce qu'on fait encore là assis sur notre chaise? Ça
n'a pas de bon sens, M. le Président, d'avoir un Parlement qui
siège de cette façon-là, mais sous le gouvernement
Bourassa on a un gouvernement qui légifère de cette
façon-là. C'est anormal. On disait qu'on voulait faire plus avec
moins; bien, on réussit à faire moins avec plus. Je vous
remercie, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Je vous remercie M. le
député de Lévis. Je suis prêt à
reconnaître le prochain intervenant, M. le député de
Bertrand. M. le député, vous avez la parole.
M. François Beaulne
M. Beaulne: Merci, M. le Président. Le projet de loi 67
est un projet de loi qui est important, du moins pour nous de la grande
région métropolitaine de Montréal.
M. Garon: M. le Président, je n'ai pas fait de chichi en
faisant mon discours, mais j'aimerais ça qu'il y ait quorum pendant que
mon collègue, le député de Bertrand, parle.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Qu'on appelle les
députés. Faites sonner la cloche, s'il vous plaît.
Si vous voulez prendre place, s'il vous plaît. Je reconnais
maintenant le prochain intervenant, M. le député de Bertrand.
M. Beaulne: Merci, M. le Président. Comme j'ai eu
l'occasion de le dire avant notre interruption, le projet de loi 67, qui porte
sur le Conseil métropolitain de transport en commun, revêt pour
nous, de la région du grand Montréal métropolitain, une
importance particulière. Ce projet de loi crée le Conseil
métropolitain de transport en commun, un organisme qui sera
chargé de faciliter les déplacements interréseaux dans la
région de Montréal.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): ...mes chers
collègues, à entendre M. le député. Je demanderais
votre collaboration, en vertu de l'article 32; vous savez ce que je veux dire.
M. le député, vous pouvez poursuivre.
M. Beaulne: C'est une structure assez légère
puisqu'elle conserve l'autonomie entière des autorités locales.
Ce projet de loi contient également des dispositions concernant les
projets de développement du métro à l'extérieur du
territoire de la Communauté urbaine de Montréal.
M. le Président, je ne peux souligner suffisamment l'importance
pour la grande région de Montréal de ce projet de loi puisqu'il
insuffle un nouvel élan à l'intégration des services de
transport en commun. J'aimerais également moi aussi, en guise de
remarques préliminaires, souligner l'irresponsabilité du
gouvernement d'appeler un projet d'une telle importance à moins de
vingt-quatre heures avant l'ajournement de la session, à 5 h 50 le 21
juin.
J'aimerais également, comme l'a fait mon collègue de
Lévis...
Une voix: M. le Président, j'invoque le règlement.
Il me semble qu'il y a une atmosphère de gare de trains.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît.
Chers collègues, je vous demande de respecter le règlement, en
vertu de l'article 32. La parole est au député de Bertrand, et je
demande votre collaboration, s'il vous plaît. M. le député.
(5 h 50)
M. Beaulne: Merci, M. le Président. Effectivement, ce
n'est pas parce qu'on discute de transport en commun qu'il faudrait qu'il y
ait, dans cette Assemblée, une atmosphère de gare de trains.
J'aimerais également, moi aussi, déplorer l'absence du ministre
des Transports pendant ce débat contrairement à plusieurs de ses
autres collègues, je dirais même à la majorité de
ses autres collègues qui ont suivi assidûment les débats
sur les projets de loi qui tombent sous leur juridiction. J'ai eu l'occasion de
participer au débat sur la Régie de l'assurance automobile du
Québec et, là non plus, il n'était pas présent. Je
trouve que c'est un manque de responsabilité pour quelqu'un qui cherche
à améliorer ses projets de loi ou du moins à
écouter les points de vue de ceux qui sont principalement
concernés par ses projets.
D'autre part, j'aimerais également, M. le Président,
souligner qu'il y a bon nombre de projets de loi, dont celui-ci, qui
intéressent une grande partie de la population et qui ont pour objectif
de contribuer à la meilleure gouverne du Québec et je voudrais
surtout dissiper l'impression que le public pourrait avoir que c'est parce que
l'Opposition empêche le processus normal de se dérouler que bon
nombre de projets de loi ne seront pas ou ne risquent pas d'aboutir avant la
fin de la prochaine session. J'espère que celui-ci aura l'occasion de
déboucher. Je ne puis en garantir l'issue puisque c'est un projet de loi
de 101 articles. Je rappellerai tout simplement que ces retards dans le
processus législatif sont dus à une mauvaise planification de
l'échéancier de la part du gouvernement. Le budget a
été présenté en retard. On a tergiversé
pendant plusieurs jours sur la saga du lac Meech pour en arriver à la
situation actuelle où, à moins de vingt-quatre heures de
l'ajournement, il y a encore des projets de loi importants comme celui-ci qui
n'ont pas été étudiés comme ils devraient
l'être, avec le sérieux avec lequel ils devraient
l'être.
Ceci étant dit, M. le Président, j'aimerais
également profiter de l'occasion pour souligner votre excellent travail
puisque j'ai remarqué que, parmi ces longues heures tardives que nous
avons vécues ces derniers jours, vous avez toujours été
celui qui nous a accompagnés.
Des voix: Bravo! Bravo! Bravo!
Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît!
Je vous remercie de votre appréciation, M. le député, et
je vous permets de continuer votre exposé.
Une voix: Question de règlement, M. le Président.
Est-ce que l'article 32 va à l'égard du président aussi?
Non?
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le
député, s'il vous plaît! M. le député, si
vous voulez poursuivre.
M. Beaulne: Le projet de loi 67 est particulièrement
important pour nous, de la région métropolitaine de
Montréal, parce qu'il inaugure en quelque sorte ce concept de
partenariat qui devrait exister dans le développement économique
de la région. Jusqu'ici, malheureusement trop souvent, nous avons
assisté à des prises de position, à des méfiances
et également à des politiques qui étaient plus ou moins
incohérentes selon qu'elles étaient adoptées par un
conseil municipal ou une communauté urbaine située sur IHe de
Montréal, sur la rive nord de Montréal ou sur la rive sud de
Montréal. Je pense qu'il est important de concevoir le
développement économique de la grande région sous forme de
partenariat parce que la ville de Montréal et les municipalités
situées sur I Ile de Montréal ont quelque chose à apporter
à l'ensemble de la région de la même façon que la
population qui s'est établie sur la rive nord de Montréal, dans
la région de Laval et dans les municipalités de la rive sud a
également quelque chose à contribuer au développement. Et
il ne s'agit pas de con-
cevoir le développement de la grande région
métropolitaine comme une espèce de partie de souque à la
corde où la rive nord, la rive sud ou 111e de Montréal tire
chacun sur la "couverte" pour obtenir les retombées les plus grandes
possible. Il faut que cette région se développe sur la base du
partenariat et, pour ce faire, il faut des outils. Il faut des outils, et un
système de transport en commun coordonné est un des outils
principaux. Dans ce contexte, le projet de loi 67 revêt toute
l'importance qu'on devrait lui accorder.
Ce projet est important, d'autre part, parce qu'il va contribuer
à améliorer la qualité de vie dans la grande région
métropolitaine. On connaît déjà les problèmes
que soulève l'engorgement du trafic à Montréal, les heures
que perdent les résidents de la rive sud pour se rendre à
Montréal via les ponts, les heures que perdent les résidents de
Laval pour se rendre également, eux, sur IHe de Montréal. Ce
projet de loi, en améliorant la qualité et en intégrant le
système de transport en commun à Montréal, aura comme
objectif de réduire le trafic sur les ponts qui mènent à
Montréal, aura comme objectif de réduire l'utilisation des
véhicules automobiles de façon à réduire
également le niveau de pollution, le niveau de
détérioration des routes et le niveau de qualité de vie
qui se dégrade dans l'île de Montréal. Par contre, ce
projet de loi pourra également permettre aux étudiants qui
habitent la rive sud ou qui habitent Laval, et qui doivent se rendre dans les
institutions d'éducation de Montréal, de le faire de façon
beaucoup plus efficace à des coûts moindres. Il permettra
également aux travailleurs qui habitent les régions où
sévit un chômage élevé sur l'île de
Montréal de trouver de l'emploi, soit sur la rive nord ou sur la rive
sud ou, en particulier, dans mon comté de Bertrand, où nous avons
moins de 3 % de chômage. C'est donc dire que les occasions d'emploi
existent.
Nous venons, par exemple, d'inaugurer à Boucherville le centre de
distribution régionale de Honda au coût de 20 000 000 $.
Bientôt, la compagnie Molson va implanter un projet d'une envergure
semblable. La possibilité d'emplois, elle existe pour les travailleurs
et les travailleuses qui résident dans l'est de Montréal ou dans
les parties du sud-ouest de Montréal, où des problèmes de
chômage sévissent. Encore faut-il que ces gens, pour
bénéficier du potentiel d'emplois qui existe dans les
régions comme la rive sud de Montréal ou la ville de Laval, qui,
elle aussi, se développe, encore faut-il que ces gens-là puissent
se déplacer pour avoir accès à leur travail ou à
ces occasions de travail. Ainsi, la mise sur pied d'un système de
transport en commun coordonné permettra cette espèce de
mouvement, cet échange entre les différentes communautés
constituantes de la grande région métropolitaine et facilitera le
développement économique de cette grande région dans le
concept du par- tenariat plutôt que dans le concept de l'opposition.
D'autre part, la création du Conseil métropolitain
s'inscrit dans la mouvance générale du maintien des coûts
de transport en commun à un niveau raisonnable. De plus en plus, les
coûts augmentent et les frais qui sont imputés aux usagers du
service en commun dans la grande région métropolitaine de
Montréal augmentent. Ce n'est sûrement pas de nature à
inciter les usagers à utiliser davantage le système de transport
en commun et à réduire l'utilisation des automobiles comme
plusieurs planificateurs l'ont indiqué et comme le désire la
majorité de la population. Le système actuel, tel qu'il est
conçu, de façon morcelée, basé surtout, dans les
communautés à l'extérieur de IHe de Montréal, sur
l'utilisation des autobus, est un système à moyen et à
long terme qui est insoutenable. Il est insoutenable parce que les coûts
d'opération d'un système comme celui-là sont beaucoup plus
élevés que ne le sont les coûts afférents à
l'opération de trains de banlieue, à l'opération du
métro ou au prolongement du métro. D'ailleurs, les
problèmes qu'a vécus la STRSM au cours de la dernière
année en témoignent. Ce n'est pas parce que la
société est mal gérée, c'est parce que la
société fait face, finalement, à un problème
qu'elle ne pourra jamais régler à moins que l'on ne trouve une
façon de faire en sorte que les autobus deviennent un service accessoire
à la mise au point d'un système de transport en commun
coordonné, plutôt que l'instrument principal et coûteux de
l'application de ce transport. Finalement, la mise sur pied de ce Conseil
s'inscrit dans la tendance moderne de l'aménagement des grandes villes.
(6 heures)
J'ai eu l'occasion, il y a quelques années, comme consul du
Canada à San Francisco, de connaître particulièrement le
système de transport en commun qui regroupe les villes de la baie de San
Francisco, le système BART. Ce système est un système dont
on pourrait facilement s'inspirer dans la grande région
métropolitaine de Montréal, puisqu'il combine à la fois
l'utilisation d'autobus dans les grands centres principaux, l'utilisation de
trains de banlieue et l'utilisation de métros dans les centres les plus
peuplés et à travers la baie de San Francisco. Et finalement, ce
projet est important, parce qu'il est le fruit de la concertation entre les
municipalités, les élus et les sociétés de
transport concernées. Jusqu'ici, nous avions eu une certaine
difficulté, dans la grande région métropolitaine de
Montréal, de trouver une sorte d'unanimité ou de trouver un
terrain d'entente commun. Eh bien, nous avons réussi à
dépasser cette étape lorsque les partenaires concernés ont
accepté de s'engager dans la voie de l'ORT et d'accepter la mise sur
pied de ce Conseil métropolitain de transport, d'ailleurs, projet sur
lequel ils insistent pour une adoption rapide et
expéditive.
Ceci étant dit, M. le Président, il demeure que certains
points doivent être éclaircis. En voulant respecter l'autonomie
des sociétés de transport locales, on peut se poser la question,
à savoir si le Conseil aura la capacité et les pouvoirs
nécessaires pour prendre les décisions essentielles au bon
fonctionnement du transport en commun dans la région de Montréal.
Autre point à éclaircir, c'est toute la question de la
viabilité financière de l'organisme. L'article 71 stipule que
l'engagement financier du gouvernement prendra fin le 31 décembre 1994.
On peut se demander en toute bonne foi ce qui arrivera après et ce qui
est prévu suite à cette échéance du 31
décembre 1994. Voilà un point qu'il serait intéressant et
utile d'élucider.
D'autre part, il faudrait également préciser - et
peut-être aurons-nous l'occasion de le faire dans le contexte de
l'étude plus détaillée en commission - il y aurait
peut-être lieu d'élucider les définitions concernant les
équipements de transport dits - et je cite - interrégionaux. Ces
équipements sont-ils adéquats? Ces définitions
conviennent-elles aux principaux partenaires concernés? Sont-elles
satisfaisantes? Sont-elles claires pour tous les principaux partenaires? Comme
a eu l'occasion de le souligner mon collègue de Lévis, par
exemple, les articles 2 et 88, paragraphe k, concernant la définition
d'un déplacement interrégional et la propriété des
équipements régionaux, demeurent une question qu'il faudrait
préciser, à savoir si elle est acceptable par les principaux
partenaires intéressés?
M. le Président, je pense qu'il est important d'assurer la
viabilité financière de cet organisme. C'est bien beau
d'introduire des projets de loi qui mettent sur pied des structures, mais les
structures, finalement, n'ont de valeur que pour autant qu'elles sont
dotées des outils et des ressources suffisantes pour fonctionner. Si
j'en juge par l'expérience récente que nous avons vécue,
on peut sérieusement se poser des questions quant à l'engagement
du gouvernement sur la viabilité financière de l'organisme. En
1989, le gouvernement du Québec avait versé, comme l'a fait
remarquer mon collègue de Lévis, une contribution de 207 000 000
$ pour les dépenses d'opération de la STCUM. Cette contribution
représente à peine 29 % des dépenses totales de la
société qui, pour la même année, s'élevaient,
si je me rappelle bien, à 762 000 000 $.
Le projet du gouvernement de transférer aux municipalités
l'entière responsabilité financière du fonctionnement des
systèmes de transport en commun, tel qu'annoncé dans le dernier
discours sur le budget, aura des conséquences graves sur l'avenir du
transport en commun à Montréal et au Québec. Je ne
reviendrai pas sur les commentaires des présidents des différents
organismes à ce sujet, mais simplement pour indiquer au ministre qu'il y
a ici une question qui devrait être élucidée au cours des
prochaines discussions sur le projet de loi et certainement dans les premiers
mois de l'application de la loi. En effet, selon les projections de coûts
de la STCUM, de 1990 à 1993, on prévoit un manque à gagner
de 49 000 000 $ en 1990, de 64 000 000 $ en 1991, de 76 000 000 $ en 1992 et de
93 000 000 $ en 1993. Le transfert aux municipalités de la
responsabilité financière du fonctionnement du transport en
commun pourrait se traduire par une augmentation des tarifs aux usagers de
l'ordre de 40 %, selon le président de la Conférence des maires
de banlieue de Montréal, M. Michel Leduc.
Ce ne sont, vous me direz, que des projections. Il est à
souhaiter que ces hausses des frais pour les usagers ne se concrétisent
pas. C'est d'autant plus l'urgence que revêt l'intégration du
système de transport en commun à Montréal. Finalement, M.
le Président, puisque vous m'indiquez que mon temps de parole
achève, j'aimerais conclure en disant que, d'abord, la création
de l'organisme régional de transport, l'ORT, comme on l'a appelé
à Montréal, l'introduction de la loi 67 créant le Conseil
métropolitain de transport en commun, sont un pas dans la bonne
direction vers la modernisation de tout le réseau du transport en commun
de la grande région métropolitaine de Montréal, sont un
pas dans la bonne direction du développement économique de la
région, dans un esprit de partenariat plutôt que dans un esprit
d'affrontement et sont, également, un pas dans la bonne direction des
échanges, à la fois de main-d'oeuvre et de capital dans le
développement économique de notre région. Je vous
remercie.
Le Vice-Président (M. Cannon): Merci, M. le
député de Bertrand. Sur une question de règlement, M. le
député de Chauveau.
M. Pouiin: Une question de privilège, M. le
Président. Je voudrais, avec tout le respect que j'ai pour le
député de Terrebonne, rappeler, au nom du ministre des
Transports, quand il précisait que le ministre n'était pas ici
pour écouter les débats, je voudrais rappeler au
député de Terrebonne que, dans les deux salons, il y a des
télévisions où on peut écouter les débats et
aussi, il y a des perroquets. Donc, je voudrais rappeler au
député de Terrebonne...
Une voix: ...au député de Terrebonne...
M. Pouiin: Le député de Bertrand, excusez. Pardon?
Le député de Bertrand, justement. Je voudrais rappeler que, dans
les deux salons, on peut suivre facilement les débats et on n'est pas
obligé d'être ici, au salon.
Le Vice-Président (M. Cannon): O.K. Je pense que c'est
effectivement... Un instant, s'il vous plaît, M. le député
de Richelieu. Effective-
ment, il ne s'agissait pas là d'une question de privilège,
M. le député de Chauveau. Il est bien sûr qu'un
député ne peut pas intimer des propos ou enfin, indiquer qu'un
autre parlementaire n'est pas présent ici, dans cette Chambre.
Effectivement, c'est le point. Je pense qu'il y avait une autre question de
règlement quelque part. M. le député de Richelieu?
M. Khelfa: Je vais laisser faire, je crois que...
Le Vice-Président (M. Cannon): Alors, merci beaucoup, M.
le député. M. le député de Pointe-aux-Trembles.
M. Michel Bourdon
M. Bourdon: M. le Président, la présentation du
projet de loi sur le Conseil métropolitain de transport en commun
illustre parfaitement la situation de la métropole dans le Québec
libéral d'aujourd'hui. Ce Conseil métropolitain de transport en
commun est le résultat d'une concertation souhaitée depuis
longtemps entre toutes les composantes du transport en commun de la
métropole et de sa ceinture. En effet, M. le Président, on met
enfin ensemble les ressources de la Société de transport de la
Communauté urbaine de Montréal avec les sociétés de
transport équivalentes sur la rive sud de Montréal et à.
Laval.
Je dis que c'est révélateur de l'état de la
métropole dans le Québec libéral d'aujourd'hui, c'est que
la session finit le 22 à minuit et on nous appelle le projet de loi au
Parlement, à 4 h 15 du matin, le 21. C'est dire tout le cas qu'on porte
aux 3 000 000 de population qui sont touchés, M. le Président,
par le Conseil métropolitain de transport en commun. Alors que le
même gouvernement, pour ce qui concernait son administration,
était autrement plus vigilant. La loi 50, qui va lui permettre de piger
au-delà de 800 000 000 $ dans la Régie de l'assurance automobile
du Québec, ça fait un bout de temps qu'elle a été
déposée, que l'Opposition a été
bâillonnée et qu'elle a été adoptée. La loi
69, qui lui permet de garrocher vers les commissions scolaires, au
détriment des municipalités, 320 000 000 $ de son budget,
ça, c'est depuis longtemps discuté point par point. L'Opposition
a été bâillonnée et le projet de loi a
été adopté. (6 h 10)
Et on arrive à un problème qui est crucial, c'est le sort
des transports en commun pour 3 000 000 de Québécois sur 7 000
000; on le fait à la sauvette, à la dernière minute, et
dans l'indifférence quasi générale. Je pense, M. le
Président, qu'il faut le déplorer. Cependant, je trouve et notre
groupe parlementaire trouve, que le Conseil métropolitain de transport
en commun est une excellente initiative, quand on regarde les notes
explicatives du projet de loi et qu'on voit le mandat du Conseil:
établir les tarifs des services de transport en commun régionaux
pour que les gens de la rive sud ou de Laval, lorsqu'ils circulent vers
Montréal, aient droit à une carte à un prix raisonnable et
qui soit valide dans tous les réseaux. De plus, on dit que le Conseil
décidera et planifiera la réalisation d'infrastructures communes
aux sociétés et répartira entre elles les revenus
provenant de la vente des titres de transport donnant accès aux trois
réseaux.
Alors, M. le Président, il était important que ce Conseil
métropolitain de transport en commun voie le jour, et sa composition
reflète un équilibre souhaitable entre les intérêts
de la métropole et ceux de sa ceinture. En effet, M. le
Président, le projet de loi prévoit qu'il y aura six membres
nommés par la ville de Montréal, au Conseil; deux nommés
par les villes de banlieue de l'île de Montréal; deux par la rive
sud de Montréal; et deux par Laval. Et on prévoit, dans le
fonctionnement, que ça prend une double majorité de ces deux fois
six représentants pour que les décisions se prennent au Conseil
métropolitain de transport. C'est donc heureux, M. le Président,
qu'il y ait un tel équilibre.
Maintenant, il y une question que la création de la
Société pose, M. le Président; c'est: quel est l'avenir du
transport en commun dans la métropole et sa ceinture, à
l'égard de l'implication du gouvernement du Québec?
Là-dessus, on peut entretenir des craintes, quand on lit dans le
discours sur le budget l'intention du ministre des Finances de cesser toutes
les contributions du gouvernement du Québec au budget de fonctionnement
des sociétés de transport, ce qui ne touche pas que
Montréal, Laval et la rive sud, mais l'ensemble du Québec; on ne
peut qu'être effrayés. Pour la seule Société de
transport de la Communauté urbaine de Montréal, le manque
à gagner, M. le Président, serait de 207 000 000 $ par
année. Et la carte d'autobus-métro, on l'a dit, devrait, pour
financer ça, passer a au-delà de 90 $ par mois, ce qui est
carrément incroyable et impensable.
Il y a une chose évidente, c'est que le Conseil
métropolitain de transport, une de ses raisons d'être, c'est de
développer le transport en commun et de le rendre plus efficace. Or, si
le gouvernement du Québec se retire du financement du transport en
commun, on ne parlera plus de développement et on aura de la peine, M.
le Président, à simplement maintenir ce qui existe
déjà comme transport en commun. Or, ce ne sont pas les projets
qui manquent, et le gouvernement s'était engagé, avant la
dernière élection, à un certain nombre de projets. Par
exemple, sur l'île de Montréal, il y a une disproportion
incroyable entre les moyens de transport en commun de l'ouest de 111e et les
moyens de transport en commun de l'est de l'île. À cet
égard, on peut parler d'une véritable discrimination. Il y a,
à l'ouest de la rue Saint-Laurent, sur 111e de
Montréal, près de 40 stations de métro dans les
directions ouest et nord-ouest, alors qu'à l'est de la rue
Saint-Laurent, il n'y a même pas 15 stations de métro vers l'est.
Plus précisément, la ligne centrale Henri-Bourassa jusqu'à
Berri-UQAM joue sa fonction et déborde, alors que vers l'ouest, il y a
une ligne qui va jusqu'à Angrignon, et que, de Lionel-Groulx à
Côte-Vertu, il y a une autre ligne dans l'axe nord-sud, mais à
l'ouest de Montréal, alors que pour l'est il n'y a aucun
équivalent. m. le président, on a les dernières stations
de métro vers l'est de montréal dans le prolongement de la ligne
numéro 5, qui dessert elle aussi l'ouest de snowdown, à travers
outremont, et, jusqu'à la sation de saint-michel, il y a quelque 5
stations de métro qui vont vers l'est dans la ligne 5. il y en a une
douzaine qui vont vers honoré-beaugrand mais, rendu là, ça
s'arrête là.
L'autre disproportion flagrante - et je m'étonne qu'aucun
député ministériel de l'île de Montréal ne
s'en offusque - c'est qu'il y a deux lignes de trains de banlieue dans l'ouest
de Montréal, une qui fait Rigaud-centre-ville et l'autre qui fait
Deux-Montagnes-centre-ville, alors que, dans l'est, il n'y en a pas, sauf un
projet improvisé à la dernière minute d'un train qui relie
Repentigny à ville Saint-Laurent, pour soulager un peu la circulation
à cause des travaux sur l'autoroute métropolitaine et qui est
sûrement un grand soulagement aux problèmes de circulation sur
l'autoroute métropolitaine puisque, dans les "parkings" de dissuasion de
cette ligne de train, il y a 125 voitures en moyenne, chaque jour, qui se
garent. Alors, on peut dire que le centre-ville et l'autoroute
métropolitaine, à cause de ce train, qui est comme passé
devant la face des gens de l'est pour une période temporaire de six
mois, on s'évite 125 voitures, ce qui, à la grosseur de la
métropole, est vraiment très peu.
Donc, M. le Président, à l'est de la rue Saint-Laurent,
les gens, qui sont des contribuables, n'ont pas les transports en commun
rapides qu'il y a vers l'ouest. Et je ne reproche pas à l'ouest de les
avoir, je suis heureux qu'il les ait, mais il faudrait que les francophones de
l'est aient une mesure d'égalité et il faudrait que les
députés ministériels de l'est se manifestent à un
moment donné et disent que les transports en commun, ça ne
devrait pas exister que pour une partie de l'île de Montréal.
M. le Président, j'entends le ministre protester. Il y a deux
lignes de trains de banlieue dans l'ouest, il n'y en a pas dans l'est! Il y a
une quarantaine de stations de métro dans l'ouest de l'île de
Montréal, il y en a à peine une quinzaine dans l'est. Je
n'invente rien! Il y a une nomme politique qui a dit un jour que les faits sont
têtus. Alors, ces faits-là sont têtus, et le ministre a un
travail sérieux à faire. S'il veut donner des moyens de transport
à l'est de Montréal, qu'il se compare un tant soit peu à
ce qu'il y a dans l'ouest. Pourquoi y a-t-il un train entre Rigaud et le
centre-ville, entre Deux-Montagnes et le centre-ville et qu'il n'y en a pas
dans l'est? Qu'est-ce qu'on attend, sur la ligne de train qui est peu
utilisée, qui est au sud de l'île de Montréal, en
parallèle à la rue Notre-Dame, pour en faire une voie rapide pour
les autobus, ce qui serait autrement moins coûteux qu'une ligne de train,
alors que, pour Deux Montagnes, pour une population pas plus grande que celle
de l'est, on est en train de dépenser 175 000 000 $, M. le
Président?
Alors, moi, je ne suis pas de ces Québécois qui remercient
ceux qui font qu'on est maltraités au plan du transport en commun, entre
autres, et je pense, M. le Président, que ce qui est
révélateur d'une mentalité - c'est un editorial
récent du quotidien The Gazette qui le disait - c'est que,
étant donné le train qui relie Repentigny à Ahuntsic et
ville Saint-Laurent, la ligne numéro 7 de métro qui doit relier
la station Pie IX, dans l'est, à Montréal-Nord, n'était
plus nécessaire. Quand on connaît un peu la géographie de
Montréal, M. le Président, dire que, vu qu'un train part de
Repentigny, arrête dans Rivière-des-Prairies et joint le
métro à Ahuntsic et ville Saint-Laurent au nord-est, ça
rend inutile un métro entre l'intersection Pie-IX et Sherbrooke
jusqu'à Montréal-Nord à travers les quartiers de Rosemont
et ça desservirait aussi Anjou, Saint-Léornard et
Montréal-Nord, il y a, là-dedans, l'esprit de dire que l'ouest de
Montréal étant doté d'un métro souterrain
ramifié - et c'est tant mieux, je n'ai rien contre le fait qu'il l'ait -
l'est, qu'il s'arrange! (6 h 20)
M. le Président, ce gouvernement, à cet égard, doit
porter le poids de ses promesses électorales. En 1985, on promettait
d'allonger le métro vers l'est de Montréal. En 1989, on
promettait de l'allonger plutôt à Laval, et il y a une
électrice de mon comté de Pointe-aux-Trembles qui me
résumait très bien la question, M. le Président, pendant
la campagne électorale. Elle m'a dit: Nous, le métro, ils nous
l'ont promis en 1985. On ne l'a pas eu et ils ne le promettent même plus
en 1989. Laval va avoir le même processus: on leur promet en 1989, ils ne
l'auront pas, puis on ne leur promettra même plus à
l'élection d'après.
M. le Président, il faudrait que le gouvernement nous donne
bientôt des indications. Est-ce que la modernisation, au coût de
175 000 000 $, du train Deux-Montagnes-centre-ville va être la seule
chose faite en transport en commun et est-ce que l'est va être
laissé pour compte encore une fois? Je pense que c'est des questions
auxquelles on doit répondre, car le Conseil métropolitain de
transport en commun doit relier ensemble tous les morceaux du "puzzle" du
transport en commun dans la métropole du Québec.
M. le Président, je pense que ça a une
grande importance, parce que le transport en commun est important
à la fois sur le plan économique et sur le plan social. Sur le
plan social, parce que c'est fort étrange de voir que les parties de
l'agglomération de Montréal où les revenus sont plus bas
et les gens ont moins de mobilité et moins d'automobiles, sont moins
bien desservis en transport en commun. Il y a là un illogisme auquel le
gouvernement devrait mettre fin.
M. le Président, l'autre sujet d'inquiétude,
évidemment, qu'on doit entretenir, c'est que des transports en commun
efficaces, ça suppose des coûts très considérables.
Or, le ministre devra nous dire, à un moment donné, où se
situe le gouvernement. Est-ce qu'il a l'intention de se désengager comme
il l'annonce dans son budget, ou est-ce que cet alignement-là a
été changé? Autrement, on ne développera pas les
transports en commun dans la métropole et sa ceinture. À cet
égard, M. le Président, le gouvernement de l'Ontario, dans son
dernier budget, a annoncé pour Toronto 5 000 000 000 $ d'investissements
en transport en commun sur dix ans, soit 500 000 000 $ par année, alors
qu'à Montréal le métro souterrain, on n'en parle pas, il
n'y en a pas de ligne en construction actuellement. Les lignes retenues, la
ligne 5 vers Montréal-Nord ou ville d'Anjou et la ligne 7 dans l'axe
nord-sud à l'est, on ne sait pas trop quel sort on va subir.
En commission parlementaire, on avait dit que la modernisation du train
de Deux-Monta-gnes-centre-ville se ferait en même temps que le
métro dans l'est: pour la partie ouest, ça va bien; pour la
partie est, il n'y a rien qui vient. Or, je pense, M. le Président, que
ce serait important que le gouvernement nous fasse savoir bientôt ce
qu'il a l'intention de consacrer comme ressource au transport en commun dans la
métropole; autrement, on aura un Conseil métropolitain de
transport en commun qui fera un travail indispensable à l'égard
des titres de transport, des tarifs d'une région à l'autre, qui
fera le travail de coordination qui s'impose aussi, et là-dessus, je
pense que les autorités de Montréal, de Laval et de la rive sud
ont manifesté une grande maturité en s'entendant sur un cadre
pour organiser le transport en commun au plan régional de la grande
région de Montréal. Mais, il reste du côté de
Québec à savoir si cette concertation-là, qui est un des
atouts de la métropole, qui rejoint les autres formes de concertation
qu'on connaît entre les chambres de commerce, la ville de
Montréal, les syndicats, pour trouver des moyens de relancer
l'économie de la métropole, pour trouver les moyens de
réduire les inégalités, si cette concertation en
matière de transport en commun ne se buttera pas au même obstacle
que la concertation chez les agents de développement économique,
qui est l'indifférence inouïe du gouvernement du Québec au
sort de la métropole.
M. le Président, je pense que c'est essen- tiel, parce que la
métropole et sa ceinture forment vraiment l'ossature du Québec au
plan économique et que si la métropole va, ça a des
retombées pour l'ensemble du Québec. Si on laisse
dépérir la métropole, je pense qu'on affaiblit l'ensemble
du Québec.
Et, dans ce sens-là, M. le Président, on ne peut
qu'espérer qu'au plan économique les projets avancent et qu'au
plan du transport en commun, qui a un lien non seulement avec le social mais
aussi avec l'économie, il y ait des investissements qui soient
annoncés bientôt par le gouvernement et que les promesses qui ont
été fartes soient tenues. Je reviens, M. le Président,
à la relation est-ouest sur IHe de Montréal. Le métro
n'est absolument pas développé et ramifié dans l'est. On
prend une carte et on regarde le boulevard Saint-Michel et
Honoré-Beaugrand, près du pont-tunnel, et ça entame
à peine le territoire du bout de IHe de Montréal. Et ça,
c'est une situation à corriger, M. le Président.
Dans l'est, on a eu plusieurs cadeaux des gouvernements qui se sont
succédé à Québec. L'autoroute
Métropolitaine, c'est la même réalité: la partie la
plus monstrueuse de l'autoroute est dans l'est, en hauteur, ce qui divise les
quartiers, ce qui pollue et qui est une source de sous-développement
urbain alors qu'à l'ouest, on l'a faite en surface ou en
tranchées. Et mon idée, M. le Président, n'est pas
d'aucune manière de reprocher à l'ouest d'être bien et
d'avoir des transports en commun acceptables. Le problème, M. le
Président, c'est qu'on fait à peu près rien dans l'est. Et
ça, je pense que ça doit changer et que la première chose
à faire pour que ça change, c'est que la ligne de métro 7
promise soit faite. Elle a été promise à l'élection
de 1985. Bien, faites-là à quelque part avant l'élection
des années quatre-vingt-dix, la prochaine élection, et qu'on
cesse de dire que parce que, temporairement, on a donné le train
à l'est, parce qu'il y a des travaux de réfection de l'autoroute
Métropolitaine, que le train de Repentigny rend inutile le lien nord-sud
par un métro souterrain sous le boulevard Pie-IX.
Alors, M. le Président, je pense que le Conseil
métropolitain de transport en commun est une chose très heureuse,
qui va coordonner et peut donner de l'essor au transport en commun tant
à Montréal qu'à Laval et sur la rive sud. Et ça
méritait mieux qu'un appel, qu'une présentation en Chambre le 21,
dans un Parlement qui doit terminer ses travaux à minuit le 22.
Mais on ne peut pas refaire le passé. Souhaitons, M. le
Président, qu'on ait non seulement un instrument de planification, de
coordination et de réalisation d'un meilleur transport pour la
métropole et sa ceinture, mais que Québec se décide
à mettre des ressources. Maintenant que l'ouest de l'île est bien
desservi en transport en commun, passons à l'est.
Et je pense, M. le Président, que, de cette manière, on
aura fait un pas en avant avec la
création du Conseil métropolitain de transport en commun.
Je vous remercie.
Le Vice-Président (M. Cannon): Merci, M. le
député de Pointe-aux-Trembles. Mme la députée de
Marie-Victorin.
Mme Cécile Vermette
Mme Vermette: M. le Président, bien sûr, nous avons
un projet de loi et nous ne pouvons pas être contre la vertu, puisque ce
projet de loi institue un Conseil métropolitain de transport, qu'il
favorisera et facilitera les déplacements régionaux, et qu'il
permettra d'établir de meilleurs tarifs au niveau des services de
transport en commun.
Alors, M. le Président, bien sûr qu'au niveau du transport
en commun nous avons eu une grande commission parlementaire en janvier 1989
où, déjà, on faisait état de la situation. Ils
relevaient, en fait, plusieurs failles dans notre système de transport
en commun, l'urgence et l'importance de se pencher sur cette
problémati-que-ià et d'apporter des solutions adéquates
pour permettre un meilleur service au niveau du transport en commun. (6 h
30)
Bien sûr, nous savons tous qu'un transport en commun peut avoir de
la difficulté au niveau de sa rentabilité, puisque, par principe,
c'est favoriser l'ensemble de la population qui utilise le service en commun.
Et la notion de service en commun n'est pas nécessairement une question
de rentabilité, mais davantage de favoriser le plus grand nombre
possible de citoyens et de citoyennes qui doivent se déplacer par des
moyens de transport à leur disposition qui facilitent leurs
déplacements d'une région à une autre. On sait fort bien
que la région métropolitaine de Montréal s'est de plus en
plus étendue à ces différentes régions qui sont
dans la ceinture de Montréal et, notamment, nous pouvons inclure
maintenant, lorsque nous parlons du problème de transport en commun, les
régions de la ville de Laval et les régions aussi de la rive sud
de Montréal.
Moi, M. le Président, j'aimerais davantage parler du
problème de transport de la rive sud de Montréal puisque
j'appartiens à cette partie de la ville qu'on appelle la grande
banlieue. Je peux vous dire à quel point le problème sur la rive
sud de Montréal est vraiment important. Il faut trouver, actuellement,
des solutions rapides pour faire en sorte que cette population soit bien servie
par un transport en commun. Non pas que la compagnie de transport, la STRSM, ne
fasse pas des efforts substantiels, ainsi que les différentes banlieues
de la rive sud, pour permettre à leurs concitoyens de recevoir un
service adéquat, mais nous devons toujours articuler ce service dans une
interdépendance entre les différentes régions, ne
seraient-ce que celle de Montréal et aussi la région de
Laval.
Vous savez fort bien que maintenant, de plus en plus, les gens se
déplacent rapidement, ont besoin, ne serait-ce que pour
différents déplacements, pour leur travail, pour leurs
études, utilisent le transport en commun. Et nous devrions de plus en
plus faciliter ce mode de transport alors que nous avons
énormément de problèmes à traverser les ponts de la
rive sud de Montréal pour nous rendre dans la grande région
métropolitaine. Il faut vivre ce cauchemar de la rive sud pour savoir
à quel point, maintenant, de plus en plus, est difficile pour la
population de la rive sud, le transport au niveau routier, lorsqu'on regarde
à tous les matins les longues files qui sont aux abords de nos ponts et
à quel point il serait essentiel de développer un transport en
commun plus adéquat et qui favorise un plus grand étalement de la
circulation.
Nous avons longtemps parlé de la gestion de la circulation sur la
rive sud. Nous avons dit à quel point il était important de
trouver des solutions pour faire en sorte que cette circulation soit mieux
répartie que ces bouchons que l'on retrouve à l'entrée des
ponts, que l'on retrouve sur tous les différents ponts, autant le pont
Jacques-Cartier, le pont Champlain et le pont dans la région de
Châteauguay... Toute cette circulation est dense, lente et fait en sorte
que bon nombre de nos concitoyens ont de la difficulté à se
rendre à leur travail et, dans plusieurs cas aussi, décourage
certains à venir s'installer dans les différentes régions.
Plus souvent qu'autrement, maintenant, certaines grandes compagnies songent
à délaisser le centre urbain de Montréal pour installer
leur siège social plus spécifiquement dans les différentes
banlieues justement à cause de ce problème de circulation sur nos
ponts.
Donc, M. le Président, il serait souhaitable, en fait, de
reprendre les travaux de la commission parlementaire en ce qui concerne le
transport en commun sur l'ensemble du Grand Montréal, y incluant la rive
sud. Nous savons fort bien qu'à ce moment-là le gouvernement
avait projeté, en fait, le prolongement du réseau dans sa grande
ceinture en incluant aussi le prolongement de la ligne de métro 5
à Anjou et la construction d'une ligne de métro 7, de la ligne 1
à Montréal-Nord. Tout ça, M. le Président, devait
se faire dans un développement sur une période de treize ans.
Aussi, on devait, en même temps, entreprendre la modernisation des trains
vers la région de Deux-Montagnes. Alors, tout ça devait
être favorisé dans une harmonisation entre les engagements
financiers du gouvernement et les municipalités. Mais voilà qu'on
se rend compte que ce n'étaient que de bons voeux pieux de la part de ce
gouvernement puisqu'on refile maintenant cette responsabilité aux
municipalités. On leur a fait miroiter une possibilité de
développement et, une fois que tout le monde est sur son appétit
et qu'on a fait miroiter la possibilité d'améliorer
substantiellement ce réseau de
transport en commun, on leur refile une responsabilité sans trop
savoir, maintenant, comment elles arriveront à atteindre leurs
objectifs.
Le Conseil qu'on vient de créer, le Conseil qu'on veut instituer,
le Conseil métropolitain de transport en commun veut respecter
l'autonomie des sociétés de transport locales. Alors, est-ce que
ce Conseil, qui est naissant, aura la capacité et les pouvoirs
nécessaires pour prendre les décisions essentielles au bon
fonctionnement du transport en commun à Montréal? Et pour ce, M.
le Président, il faut voir à ce que, justement, cette autonomie
soit préservée et que le gouvernement puisse faire en sorte que
ce Conseil puisse non pas avoir des préoccupations d'ordre financier
à long terme sur le plan de sa survie, puisque l'article 71 stipule que
l'engagement financier du gouvernement prend fin le 31 décembre
1994.
Qu'arrivera-t-il après cette échéance? Est-ce
qu'encore une fois on sera devant absolument plus rien? Est-ce que ce n'est
déjà pas un bébé mort-né si on ne lui donne
pas la possibilité et la chance de compter sur un financement
adéquat, un financement qui permettra de penser à des
réalisations à long terme? Lorsqu'on parle de transport en commun
de cet ordre de grandeur, bien sûr, tout ça doit s'étaler
sur une longue période, une période tout de même qui
permettrait d'envisager hors de tout doute et sans problème financier
l'avenir du système du réseau routier à Montréal et
dans les différentes régions de Montréal, incluant la rive
sud et incluant la ville de Laval.
Au niveau des différents équipements de transport dits
interrégionaux, en fait, il pourrait regarder tout ça dans son
ensemble. Est-ce que ces équipements, la définition qu'on en
fait, est-ce que c'est adéquat et satisfaisant, assez clair pour tous
les intéressés? Il reste encore beaucoup de questions en suspens,
et je pense que nous devrions nous pencher davantage et permettre au ministre
d'apporter certains éclaircissements pour faire en sorte qu'il n'y ait
pas de confusion et que tout le monde ait le même langage puisqu'il
s'agira d'une concertation à établir, d'une coordination au
niveau aussi de l'ensemble des décisions qui devront être prises,
qui concernent autant les différentes régions que nous avons
mentionnées plus haut.
Donc, M. le Président, bien sûr, c'est un pas dans la bonne
direction. Le Conseil métropolitain de transport en commun, bien
sûr, répond à des aspirations maintes fois formulées
par les intéressés, mais faut-il encore donner des moyens de
viabilité à ce Conseil et faire en sorte qu'il ait les meilleures
chances de succès escompté, qu'il favorise aussi les transports
interrégionaux et qu'il favorise l'ensemble de la population par des
cotisations au niveau de la CAM, les cartes qu'on appelle les cartes de
transport mensuelles, et qu'on n'en vienne pas à être
obligés de payer des prix exorbitants.
Je pense, M. le Président, que la nouvelle tendance, lorsque le
gouvernement se désengage au niveau du transport en commun, notamment au
niveau du transport de la CUM, on peut s'apercevoir qu'en fait il y a beaucoup
d'interrogations pour savoir si vraiment le gouvernement est prêt
à s'engager à donner un service de qualité pour tous ces
citoyens qui doivent utiliser ce transport en commun? Où met-il ses
priorités puisque le gouvernement, en fait, a versé une
contribution de 207 000 000 $ pour les dépenses d'opération de la
STCUM? Cette contribution représente près de 29 % des
dépenses totales de la Société qui se sont
élevées, la même année, à 726 000 000 $. (6 h
40)
Le projet du gouvernement de transférer aux municipalités
l'entière responsabilité financière du fonctionnement des
systèmes de transport en commun, tel qu'annoncé lors du discours
sur le budget, aura des conséquences excessivement grandes sur l'avenir
du transport en commun à Montréal et au Québec. En fait,
on doit s'attendre qu'une contribution substantielle soit demandée aux
usagers pour permettre, encore une fois, un service de qualité au niveau
du transport en commun. Et, M. le Président, je trouve ça
inacceptable pour l'ensemble de ces usagers qui doivent espérer un
service de qualité parce que ces mêmes usagers sont des payeurs de
taxes, ce sont des gens qui n'ont pas le choix de prendre d'autres moyens que
les services en commun et qui peuvent se permettre, par l'utilisation de ces
services en commun, d'espérer un service de meilleure qualité.
Vous savez, dans le transport en commun, plus les gens utilisent ce transport
en commun, plus ils favorisent la survie du transport en commun et un service
de qualité.
Donc, il faut encourager les usagers à prendre le service du
transport en commun, à utiliser le métro, les autobus et les
trains de banlieue davantage qu'ils ne le font à l'heure actuelle. Parce
qu'on s'aperçoit, bien que beaucoup d'usagers utilisent leur automobile,
qu'il n'y a qu'un usager à l'intérieur de l'automobile et qu'il
serait favorable, en tout cas davantage, de permettre, par des campagnes de
sensibilisation, l'utilisation du transport en commun beaucoup plus que nous ne
le faisons à l'heure actuelle. Mais pour ça, il ne faut pas les
décourager en leur demandant un prix exorbitant pour le billet du
transport en commun et, aussi, il faut peut-être que le gouvernement
favorise les sociétés de transport, par des contributions
financières beaucoup plus qu'il ne le fait à l'heure actuelle. Et
plutôt que de se désengager dans le transport en commun, il
devrait favoriser davantage l'implication du gouvernement pour faire en sorte
que l'ensemble des usagers puisse espérer, puisse escompter, en fait, un
prix raisonnable en ce qui concerne la dépense au moment de l'achat de
la carte ou d'un billet
pour prendre ou utiliser ces différents modes de transport
offerts par le service...
M. Garon: M. le Président, je m'excuse, mais je trouve
ça...
Le Vice-Président (M. Cannon): M. le député
de Lévis, sur une question de règlement, je présume?
M. Garon: II est 6 h 40. Si on veut nous faire siéger
jusqu'à cette heure-là, il faudrait au moins qu'il y ait le
quorum dans l'Assemblée, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Cannon): Effectivement, je constate
qu'il n'y a pas quorum. Donc, qu'on appelle les députés, je vous
prie.
Effectivement, Mme la députée, vous pouvez poursuivre.
Mme Vermette: Oui, M. le Président. On s'aperçoit,
M. le Président, et je comprends l'heure tardive à laquelle nous
devons, ici, en cette Chambre, se pencher sur les différents projets de
loi et si je souligne cette heure tardive... Je comprends fort bien que le
gouvernement, à l'heure actuelle, a choisi de légiférer
durant la nuit plutôt que durant le jour pour des raisons qui lui
appartiennent parce que, vous save2, lorsqu'on est au gouvernement, il
appartient au gouvernement d'appeler ses propres lois et de voir à la
gestion, à l'adoption de ses différentes lois.
Quant à nous, du côté de l'Opposition, nous devons,
en fait, favoriser les intérêts de l'ensemble de la population et
c'est notre... Quant à nous, c'est notre rôle, un de nos
principaux rôles, de soulever, en fait, toutes les actions prises par le
gouvernement qui pourraient causer un préjudice à l'ensemble de
nos concitoyens et concitoyennes au niveau du Québec. Et notamment, M.
le Président, au niveau... Je parlais, du transport en commun. Je
parlais aussi, M. le Président, de la facturation, en fait, au niveau du
transport en commun, surtout pour le contribuable. Bien sûr, qui devra
payer la note si le gouvernement se désengage de plus en plus de ses
responsabilités versus le transport en commun? Bien sûr, on devra
se retourner une fois de plus vers les usagers que je considère
déjà comme étant lourdement taxés à l'heure
actuelle par toutes formes de taxes indirectes.
Nous avons vu, encore une fois, au niveau de la loi que nous avons
passée, la loi 50, il n'y a pas si longtemps, sur laquelle on s'est
penchés, que c'est une loi qui touchait encore le transport, où
on allait siphonner, en fait, la caisse de l'assurance automobile qui est, en
fin de compte, une contribution volontaire, vous me direz, de tous les
automobilistes qui participent à ce régime. Mais, encore une
fois, le gouvernement va siphonner dans cette caisse-là pour la gestion
courante, en fart, des dépenses du gouvernement. Mais, encore faut-il se
le rappeler, M. le Président, c'est toujours l'usager qui fait les frais
de toute cette pratique gouvernementale, à l'heure actuelle. Je trouve
inadmissible qu'un gouvernement n'ait pas plus le respect de ses concitoyens et
concitoyennes et qu'il aille continuellement gruger dans leur portefeuille.
L'incapacité de ce gouvernement à administrer les impôts et
les taxes de nos contribuables, et ce, de plus en plus...
M. le Président, c'est vrai que ce projet de loi permettra
à l'ensemble des municipalités de travailler dans un esprit de
concertation à améliorer le système de transport en commun
au niveau de la qualité du service pour favoriser les
déplacements des usagers interrégionaux et aussi pour
établir un tarif qui nous semble, en tout cas, et qui permettra aux gens
d'avoir une uniformité au niveau des différents modes, une
uniformité au niveau du coût, du prix, en fait, du transport en
commun. Mais, faut-il encore le rappeler, M. le Président, il faut
assurer à ce Conseil un avenir viable et, pour lui assurer cet avenir
viable, ce n'est sûrement pas tel que stipulé par l'article 71,
alors que le gouvernement, après le 31 décembre 1994, ne donnera
plus de financement à l'organisme. En fait, ce n'est pas clair. Il
faudra que le ministre nous apporte des éclaircissements pour le
mieux-être et pour, en fait, l'intérêt de l'ensemble des
usagers au niveau du transport en commun. Je vous remercie, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Cannon): Merci, Mme la
députée de Marie-Victorin. Est-ce qu'il y a d'autres intervenants
sur le projet de loi? M. le ministre, pour l'exercice de votre droit de
réplique.
M. Sam L Elkas (réplique)
M. Elkas: M. le Président, brièvement, j'aimerais
remercier les membres de l'Opposition de leur appui dans ce projet de loi.
Comme vous le savez, l'intérêt est le même, soit chez nous
ou chez vous. On a toujours démontré du sérieux dans la
promotion du transport en commun dans la région de Montréal et on
sait tous que c'est une chose qui nous préoccupe, le fait que... Ce
n'est pas un mystère qu'on est pris à regarder de jour en jour
les ponts remplis de trafic avec les automobilistes qui refusent de prendre le
transport en commun. On s'interroge, à savoir pourquoi ifs ne le
prennent pas.
Il est évident que ce sont des choses qui vont nous coûter
assez cher à gérer, vu que le transport en commun ne semble pas
être l'alternative que ces gens désirent. Par contre, c'est le
défi qu'on regarde et on espère le rencontrer. Il est faux de
penser que le gouvernement, de ce côté, n'est pas
intéressé à avoir les services offerts dans l'est de 111e.
Des montants d'argent
assez importants ont été déposés
dernièrement par le Conseil des ministres, à savoir qu'on est
pour faire des études pour le prolongement des lignes de métro
dans l'est de Montréal. (6 h 50)
Quant aux trains de banlieue, il est important de prendre avantage des
services ou infrastructures qui sont déjà en place. Le train de
Rigaud est un service qui a été protégé d'ailleurs
par le gouvernement opposant en 1981, après de grandes batailles. La
ligne de Deux-Montagnes, on comprend aussi que c'est un service qui va
être abandonné si le gouvernement n'agit pas. On parie de 22 000
passagers par jour, qui est un nombre assez important à transporter, ces
22 000 personnes, les mettre dans les automobiles, ce n'est pas
nécessairement la réponse.
Pour la rive sud, nous avons des plans assez importants, assez
intéressants aussi, parce que nous sommes en train de faire des
études sur le projet Estacade. Quant au train de Châ-teauguay, le
gouvernement est en train aussi de négocier avec Conrail pour nous
permettre de transporter les gens de Châteauguay à
Montréal. La ligne de Pointe-aux-Trembles qu'on a dernièrement
instaurée est un exemple de bonne volonté de notre part. Alors,
oui, on croit fermement que les municipalités de la rive sud, Laval et
Montréal, devraient agir et planifier leur avenir dans le transport en
commun. Voici, on leur donne un outil et un outil qui sera précieux pour
ces gens-là. Ça va permettre d'agir ensemble au lieu d'être
divisé sur bien des sujets.
Alors, M. le Président, je remercie encore les membres de la
Chambre pour l'appui qu'on a et je propose l'adoption du principe du projet de
loi 67 sur le Conseil métropolitain de transport en commun.
Le Vice-Président (M. Cannon): Merci, M. le ministre.
Est-ce que la motion proposant l'adoption du principe du projet de loi 67, Loi
sur le Conseil métropolitain de transport en commun et modifiant
diverses dispositions législatives, est adoptée? M. le whip.
M. Brassard: Pour démontrer notre bon esprit de
collaboration, nous allons adopter le projet de loi.
Le Vice-Président (M. Cannon): Donc, ce projet est
adopté. M. le leader substitut et ministre de l'Environnement.
Renvoi à la commission de l'aménagement
et des équipements
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, M. le Président. Je
fais motion dans les circonstances pour que ledit projet de loi soit
déféré à la commission de l'aménagement et
des équipements pour étude détaillée.
Le Vice-Président (M. Cannon): Est-ce que cette motion est
adoptée?
M. Brassard: Adopté.
Le Vice-Président (M. Cannon): Adopté. M. le leader
par interim du gouvernement.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, M. le Président. Je
vous demanderais d'appeler l'article 12 du feuilleton.
Projet de loi 65 Adoption du principe
Le Vice-Président (M. Cannon): À l'article 12 du
feuilleton, M. le ministre de l'Environnement propose l'adoption du principe du
projet de loi 65, Loi modifiant la Loi sur la qualité de
l'environnement. Alors, M. le ministre, vous avez la parole.
M. Pierre Paradis
M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président,
aujourd'hui, l'Assemblée nationale du Québec est appelée
à discuter des principes du projet de loi 65, Loi modifiant la Loi sur
la qualité de l'environnement. Vous n'êtes pas sans savoir, M. le
Président, les nombreux problèmes existant en matière de
sol contaminé, problèmes qui sont davantage connus de la
population depuis quelques années. Pour solutionner ces problèmes
de terrains contaminés, l'application du principe du pollueur-payeur
nous apparaît incontestablement la solution la plus appropriée.
D'ailleurs, je vous rappellerai, M. le Président, que le Parti
libéral du Québec s'était engagé, lors de la
dernière campagne électorale, à mettre en application le
principe du pollueur-payeur. permettez-moi, tout d'abord, d'expliquer
brièvement l'origine du principe et de situer le contexte historique de
ce projet de loi avant d'en aborder le contenu proprement dit. depuis le
début du siècle, surtout durant sa première moitié,
le québec a connu un essor industriel marqué qui s'est traduit
par des effets positifs sur l'économie, mais qui a eu en même
temps des conséquences sur notre environnement. au fil des ans, le
québec a connu des fermetures d'entreprises et l'arrêt
d'activités industrielles, soit en raison de conditions
économiques moins propices 4>u encore, en raison du vieillissement
des industries. le québec s'est ainsi retrouvé, principalement
dans la région de montréal, avec des terrains industriels vacants
qui constituaient bien souvent un attrait pour les promoteurs immobiliers
désireux d'y construire des complexes résidentiels, commerciaux
et même industriels. cependant, on découvrait en même temps
que
dans bien des cas, il devenait impossible de réutiliser ces
mêmes terrains à d'autres fins, en raison de la contamination de
ceux-ci, à la suite de rejets liés aux opérations
journalières, de déversements accidentels ou encore
d'enfouissement de substances dangereuses. On devenait également
confrontés à la quasi-impossibilité d'obliger les
propriétaires antérieurs à décontaminer les
terrains pour les remettre dans leur état initial pour divers motifs,
telles la faillite, la dissolution de compagnie et l'absence de moyens
légaux. Ainsi, des dizaines de terrains contaminés demeurent,
encore aujourd'hui, inutilisables et la liste de ceux-ci s'allonge
continuellement.
Par ailleurs, nous avons su apporter certaines améliorations
quant à la gestion des substances dangereuses. Notamment l'adoption de
la Loi sur la qualité de l'environnement en 1972 a permis de
délimiter le cadre légal des interventions du ministère de
l'Environnement du Québec en matière de terrains
contaminés. Cette pièce législative accorde des pouvoirs
au ministère, lui permettant d'intervenir sur des terrains
contaminés, lors de situations particulières. L'article 25 de
cette loi, M. le Président, que vous connaissez bien, permet ainsi au
ministre d'ordonner aux responsables de la source de contamination de cesser
définitivement ou temporairement ou de limiter, selon les conditions
qu'il impose, l'émission, le dépôt, le dégagement ou
le rejet de ce contaminant.
D'autre part, en vertu des pouvoirs accordés dans cette loi, le
ministre ne peut ordonner aux propriétaires de terrains
contaminés de décontaminer ceux-ci que lorsque la situation est
considérée comme étant urgente et que le ministre
démontre que cela a été fait accidentellement ou
contrairement aux dispositions de la présente loi ou des
règlements du gouvernement. Par la suite, le ministère de
l'Environnement du Québec a élaboré une politique de
réhabilitation des terrains contaminés afin de déterminer
les orientations quant à la réutilisation sécuritaire de
ces terrains. Publiée en avril 1988, cette politique mise
essentiellement sur la bonne volonté des propriétaires de ces
terrains de se conformer aux orientations du ministère dans ce
domaine.
Les objectifs de cette politique de réhabilitation, et je vous
les rappelle, M. le Président, se résument comme suit:
Premièrement, empêcher que l'utilisation de terrains
contaminés ne s'effectue au détriment de la santé, de
l'environnement et des biens; deuxièmement, favoriser la
récupération des ressources en permettant et en rendant possible
le réemploi des terrains contaminés, dans la mesure où le
niveau de décontamination atteint est sécuritaire, et pour les
usagers et pour l'environnement; troisièmement, s'assurer que les sols
contaminés seront gérés de façon
adéquate.
Bref, nous devons admettre que la politique de réhabilitation des
terrains contaminés ne donne que des orientations en matière de
réemploi de sols contaminés, sans obligation pour les
propriétaires de ces terrains de s'y conformer. D'autre part, signalons
qu'une entente fédérale-provinciale sur les sites orphelins a
été conclue en octobre 1989. Cette entente porte notamment sur
l'assainissement des lieux contaminés orphelins à risque
élevé.
Le fait que les médias ait fortement fait état de
contamination de terrains existants, par exemple à Murdochville et
à Val-d'Or, à Saint-Jean-sur-Richelieu, à Duparquet et,
plus récemment, dans une partie de l'est de Montréal, ces faits
donc rendus publics ont entraîné une prise de conscience
collective de notre héritage en matière de contamination de
terrains. Ceci a permis, notamment, une sensibilisation accrue aux limites de
notre pouvoir législatif quant à la capacité d'ordonner
aux responsables de la contamination de ramasser, enlever, recueillir ou de
neutraliser le contaminant et de décontaminer ou restaurer
l'environnement.
D'autre part, lorsque le projet de loi 65 a été
déposé à l'Assemblée nationale en mai dernier,
j'avais indiqué que peu de pays occidentaux disposaient d'une telle
structure législative, quelques rares pays ayant adopté une
législation visant à se protéger contre la contamination
des sols. Ainsi, nous rappellerons brièvement que des mesures
législatives ont été adoptées aux
États-Unis, dans l'État du New Jersey en 1984, permettant au
gouvernement de cet État d'intervenir auprès des industries
susceptibles de contaminer les sols. En vertu de cette loi, 'The Environmental
Cleaning Responsibility Act", les industries doivent caractériser leurs
terrains. (7 heures)
Par le fait même, les résultats obtenus sont
comparés à des critère préétablis et,
lorsqu'il y a présence de contaminants à des concentrations
excédant le niveau naturel, il peut devenir nécessaire de
procéder à des travaux de restauration. De même, les
Pays-Bas ont adopté, en 1983, une loi sur la décontamination des
sols, qui oblige tout promoteur à caractériser le sol et l'eau
souterraine avant toute correction et/ou réutilisation du sol. Depuis
janvier 1988, les entreprises doivent également caractériser les
terrains avant de s'y installer et effectuer une nouvelle
caractérisation au moment où elles désirent modifier ou
vendre leurs installations, afin de vérifier si les terrains sont dans
le même état qu'au moment de l'acquisition. Dans la
négative, les entreprises doivent réaliser les travaux de
decontamination.
Dans ce même ordre d'idées, M. le Président,
mentionnons que d'autres pays européens réfléchissent
actuellement sur la possibilité d'adopter des législations
similaires. Il est important de noter que la France, la Belgique et la
République fédérale d'Allemagne sont déjà
à l'avant-garde au niveau de la politique de gestion
des déchets. D'ici peu, il est à prévoir que ces
trois États européens disposeront d'outils législatifs et
réglementaires dans le domaine de la gestion des sols comtaminés.
Nous pouvons d'ores et déjà remarquer que le Québec sera
la première province canadienne à se munir d'outils
législatifs et réglementaires dans le domaine de la
décontamination des sols pollués, si l'Assemblée nationale
consent à l'adoption du présent projet de loi. D'ailleurs, ce
projet de loi nous permettra de corriger, entre autres, la situation qui
prévaut actuellement, et qui consiste à transférer des
coûts de décontamination des terrains à l'ensemble de la
société. Il s'agit non seulement d'éviter que la
décontamination et la restauration fassent les frais de l'ensemble de la
population, mais que les pollueurs assument systématiquement leurs
responsabilités en matière de décontamination des sols.
Inutile de rappeler les malheureux exemples que l'on connaît actuellement
au Québec.
Il nous apparaît légitime que le ministère de
l'Environnement assume, du même coup, un leadership dans la mise en place
de jalons administratifs requis pour appliquer le principe pollueur-payeur.
C'est dans cet esprit, M. le Président, que nous avons
déposé, le 10 mai dernier, à l'Assemblée nationale
du Québec, le projet de loi 65. Dans ce même ordre d'idées,
plusieurs intervenants que nous avons entendus lors de notre commission
parlementaire, les 5, 6 et 7 juin dernier, ont exprimé clairement leur
accord au principe même pollueur-payeur; 15 organismes ont eu alors
l'occasion de se faire entendre et contribuer ainsi à la bonification du
texte législatif. Ainsi, nous voulons corriger, par ce projet de loi,
deux lacunes dans la législation actuelle: soit de nous permettre d'agir
plus efficacement et de renforcer l'application du principe pollueur-payeur. En
effet, l'objet du projet de loi est donc de s'assurer que toute contamination
de l'environnement puisse conduire, lorsqu'elle dépasse certains
niveaux, à une intervention du ministre en vue d'exiger du pollueur une
étude de caractérisation, et une décontamination des sols
et des eaux souterraines polluées. Il nous apparaît tout à
fait justifié que celui qui est à l'origine de la contamination
soit tenu responsable de la décontamination.
Actuellement, comme je l'indiquais précédemment, la Loi
sur la qualité de l'environnement ne permet pas au ministre d'ordonner
la décontamination, sauf en cas d'urgence, ou à moins de faire la
preuve d'une contamination de terrains adjacents. Ainsi, cette absence de
pouvoir d'ordonnance restreint le champ d'intervention du ministre dans ce
domaine, ce qui limite considérablement l'application du principe
pollueur-payeur que nous retrouvons à l'intérieur du projet de
loi 65. Il s'agit, dans les faits, de corriger la situation qui prévaut
actuellement et qui consiste à transférer les coûts de la
décontamination des terrains à l'ensemble de la population du
Québec. En adoptant le projet de loi 65, l'Assemblée nationale du
Québec donnerait au ministre de l'Environnement les moyens légaux
nécessaires pour lui permettre de s'assurer que le responsable d'une
contamination soit tenu de décontaminer l'environnement qu'il a
pollué. Sans nécessairement entrer dans les dédales
juridiques, notons que ces moyens légaux auront des impacts importants,
tant au chapitre de la prévention de la contamination des sols qu'aux
fins d'assurer au ministre de l'Environnement la possibilité d'aller
chercher les fonds nécessaires à la décontamination et
à la restauration des terrains pollués. Par le fait même,
la société québécoise n'aurait plus à
assumer systématiquement la décontamination des sols
pollués par une entreprise comme c'est le cas, actuellement, à
Saint-Jean-sur-Richelieu, où le gouvernement vient d'autoriser une
dépense de 3 100 000 $ pour procéder aux activités de
restauration des propriétés privées et publiques
situées à proximité des terrains de la compagnie Balmet
Canada inc.
Aussi le ministre de l'Environnement pourra, en vertu de nouveaux
pouvoirs d'ordonnance contenus dans le projet de loi, obtenir le rang de
créancier privilégié sur les biens meubles et immeubles de
tout contrevenant à une ordonnance de décontamination des sols.
Les mesures législatives et réglementaires que nous
préconisons auraient par ailleurs des effets bénéfiques
quant à la bonne gestion des substances dangereuses par les entreprises,
en leur rappelant que le gouvernement pourrait exiger une
décontamination advenant la découverte de la présence de
contaminants sur leur terrain et sur les terrains avoisinants. En fait, ces
effets, loin d'être négligeables, permettraient de conscien-tiser
les entreprises à cet état de fait et ainsi d'éviter que
se répètent les erreurs commises dans le passé.
Cette pièce législative, M. le Président, vise
ainsi à fournir au ministre de l'Environnement les pouvoirs
nécessaires pour éviter que certaines situations que nous avons
connues récemment ne se reproduisent. En lui permettant d'agir au moment
où il constate la présence de contaminants dans l'environnement,
le projet de loi permettra de renforcer l'application du principe
"pollueur-payeur". Si nous voulons nous assurer que le responsable de la
contamination défraie seul les coûts de la décontamination
et si nous voulons encourager les entreprises à gérer
adéquatement leurs rejets dans l'environnement, ce projet de loi devient
une nécessité. L'époque où l'on assistait,
impuissants, au démantèlement de complexes industriels,
abandonnant du même coup de vastes terrains contaminés,
deviendrait alors révolue. En somme, le projet de loi 65 a
été élaboré dans le but de doter le
ministère des outils légaux et réglementaires lui
permettant de remplir son mandat de façon plus adéquate et plus
efficace qu'il ne le fait actuellement.
Les nombreuses situations auxquelles il a dû
faire face depuis le milieu des années quatre-vingt ont
contribué à préciser les besoins du ministère en
matière de pouvoir législatif et réglementaire. Devant les
différentes expériences trop souvent décevantes que nous
avons vécues dans le passé, nous avons à faire face
à deux situations dans des cas de contamination des sols. Dans un
premier cas, l'entreprise responsable de la contamination est toujours en
opération et facilement identifiable. Dans un deuxième cas, la
source de contamination est difficile à identifier, l'entreprise ayant
cessé ses activités. Ces expériences passées nous
ont amenés à proposer des orientations et des mesures
législatives permettant d'apporter les correctifs nécessaires en
matière de contamination des sols. Ainsi, lorsque le responsable de la
contamination est identifiable, nous désirons donner au ministre de
l'Environnement des pouvoirs lui permettant d'ordonner la
décontamination de l'environnement, lorsque la situation le commande.
Des dispositions très claires sont présentes dans le projet de
loi afin de pouvoir exiger la decontamination de l'environnement par celui ou
celle qui l'a contaminé. En vertu des principes énoncés
dans le projet de loi, le ministre aura le pouvoir d'ordonner au responsable de
la contamination la caractérisation puis la décontamination de
l'environnement, lorsque le niveau de contamination le commandera.
L'approbation du projet de loi aurait ainsi pour effet d'éviter
qu'une entreprise qui a contaminé son terrain puisse, sous
prétexte qu'il n'y a pas d'urgence, ne procéder à aucun
des travaux correctifs. Dans le passé, plusieurs exemples abondent en ce
sens. (7 h 10)
D'autre part, le projet de loi 65 prévoit une certaine souplesse
quant aux mesures que nous pourrions ordonner aux propriétaires de
terrains contaminés alors qu'ils n'ont pas été
responsables de ladite contamination. À titre d'exemple, nous n'avons
qu'à penser aux très grands nombres de terrains qui ont
été contaminés dans le passé par des entreprises
ayant cessé leurs activités. Ces terrains, localisés
principalement dans les régions urbaines, sont habituellement la
propriété de personnes ou de municipalités et assurent un
bon potentiel de réutilisation à des fins résidentielles,
commerciales ou autres. Par ailleurs, on peut penser aux propriétaires
de terrains qui ne sont pas nécessairement informés des
activités qui se sont déroulées dans le passé sur
ces terrains et qui ignorent probablement le degré de contamination de
ceux-ci. Dans ces cas, nous devions nous assurer qu'aucune réutilisation
de ces terrains ne se fasse sans une décontamination préalable,
de manière à éviter que la présence de
contamination ne puisse porter atteinte à la santé publique.
À cet effet, nous proposons deux mesures dans le projet de loi 65,
mesures qui s'adressent aux propriétaires de sols contaminés sans
qu'ils aient été responsables de la con- tamination.
La première de ces mesures, le ministre peut signifier au
propriétaire un avis l'informant que son terrain est contaminé
au-delà d'un certain niveau et cet avis est inscrit au bureau
d'enregistrement. Seconde mesure, le ministre exige, de la part du
propriétaire d'un terrain contaminé, une demande d'autorisation
avant que celui-ci ne procède à une modification d'usage de son
terrain. Pour ce qui est de l'entreprise qui démantèle ses
installations, des dispositions sont également prévues dans le
projet de loi 65 afin de soumettre le démantèlement à
diverses exigences lorsqu'il concerne certaines activités reconnues
comme polluantes pour les sols. Ainsi, le propriétaire du terrain devra
obtenir l'autorisation du ministre avant de procéder au
démantèlement. Nous pourrons alors nous assurer que le
démantèlement d'équipements et de bâtiments sera
accompagné d'une caractérisation et, éventuellement, d'une
décontamination du terrain. Le principe pollueur-payeur sera donc
appliqué en intervenant dès le démantèlement,
évitant que le terrain demeure contaminé par la suite.
Une entreprise qui aura contaminé son terrain, suite à ses
activités, sera donc obligée de le décontaminer, alors
qu'actuellement de grandes entreprises ont fermé leurs portes sans avoir
complété, malheureusement, la décontamination de leur
terrain. D'autre part, le ministère de l'Environnement pourra obtenir le
rang de créancier privilégié sur les biens meubles et
immeubles de tout contrevenant à une ordonnance de
décontamination des sols grâce à des nouveaux pouvoirs
d'ordonnance contenus dans le projet de loi 65. Il est prévu que les
sanctions seront plus élevées dans le cas de non-respect par une
entreprise d'une ordonnance ministérielle pour les infractions
subséquentes à la première.
En terminant, M. le Président, je rappellerai que l'ensemble des
dispositions législatives réglementaires aura pour effet, du
moins, c'est l'objectif que nous nous fixons, de renforcer l'application du
principe pollueur-payeur dans la décontamination des sols
pollués. Alors qu'il y a des intervenants, dont le président de
l'Association des manufacturiers canadiens, qui osent encore prétendre
et déclarer publiquement, en pariant du projet de loi 65, que la
protection de l'environnement constitue un objectif social pour lequel il est
impossible de ne pas accorder son support, mais qui ajoute, du même
souffle, que personne n'est mort sur un coin de rue au Québec, je
répliquerai au porte-parole, M. Richard Le Hir, en rappelant que nous
sommes d'avis que le projet de loi 65 s'avère nécessaire et
utile, car des gestes sont attendus depuis déjà trop longtemps.
Par exemple, à Saint-Jean-sur-Richelieu, il y a des enfants avec un taux
de plombémie élevé dans le sang.
Enfin, je peux vous assurer que cette pièce législative
constitue une étape importante afin de doter le Québec d'outils
préventifs et sécuritaires
en matière de protection de l'environnement. De plus, le principe
pollueur-payeur contenu et renforcé par le projet de loi a
été appuyé par les divers intervenants tout
dernièrement en commission parlementaire. Je sollicite maintenant
l'appui de tous les membres de cette Assemblée nationale. Merci, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Cannon): Merci, M. le ministre de
l'Environnement. M. le député de La Prairie.
M. Denis Lazure
M. Lazure: Merci, M. le Président. Enfin, le ministre de
l'Environnement appelle la discussion sur son projet de loi. Enfin! Il laissait
planer le doute dans l'esprit des journalistes depuis quelques jours que
peut-être son fameux projet de loi pollueur-payeur ne serait pas
adopté parce que, peut-être, le Parti québécois
s'opposerait. Je pense que le ministre a généralement des
performances qui se situent à un niveau plus élevé que
ça. J'ai été très déçu hier
d'entendre les journalistes me raconter ce que le ministre leur a
raconté depuis quelques jours. Alors, qu'il soit bien clair tout de
suite que le Parti québécois appuie ce projet de loi, que le
Parti québécois a toujours été d'avis que le
pollueur devait payer pour les pots cassés.
Alors, je ne peux que blâmer sévèrement le ministre
pour le retard qu'il apporte à commencer sa discussion du projet de loi,
à peine 48 heures, moins de 48 heures avant la fin des travaux de la
session. Ce n'est pas sérieux, moins de 48 heures, le jeudi matin 21
juin, à 7 h 15, alors que le projet est déposé depuis plus
d'un mois. Non seulement on peut s'interroger sur la volonté politique
du ministre de voir son projet adopté avant la fin de la session, mais
on peut s'interroger aussi sur les dissensions qui existent au sein du Conseil
des ministres, dissensions qui ne sont pas nouvelles. On l'a vu il y a quelque
temps, lorsque le ministre de l'Industrie et du Commerce a avoué
finalement que, oui, les gens qu'il défend, notamment le Conseil du
patronat, s'opposaient à plusieurs choses émanant du
ministère de l'Environnement. Par exemple, ils s'opposaient à ce
que le Bureau d'audiences publiques, à la demande du ministre - ce que
la loi lui permet de faire, ce que la loi lui permet de faire, je le
répète, même si, à tout bout de champ, le ministre
dit: Oh! la loi est incomplète, la loi a des trous, (a loi n'est pas
assez forte... La loi actuelle lui permet de demander des audiences publiques
sur n'importe quel projet. Mais on sait fort bien que, s'il n'y a pas
d'audiences publiques sur les grands projets industriels de 1 000 000 000 $ et
plus, c'est parce que le Conseil du patronat ne veut pas qu'il y en ait. Et le
ministre, depuis quelque temps, nous dit: Bon, là, écoutez, je
pense que nos chicanes internes sont finies au Conseil des ministres, mais il
faut que je discute avec mon collègue de l'Ontario. M. le
Président, on est alors un peu à la merci du bon vouloir du
ministre de l'Environnement de l'Ontario.
Mais je reviens au projet de loi. Le ministre nous avait dit, en
novembre dernier, au moment de la mini-session qui a suivi l'élection:
Je vais présenter, durant la session - m'avait-il dit et avait-il dit
aux journalistes, c'est-à-dire la session de novembre et décembre
- un projet de loi qui va permettre au gouvernement, à mon
ministère, d'intervenir à la Balmet, par exemple, ou dans
d'autres situations semblables; c'est ça qu'il nous avait dit. M. le
Président, la session s'est terminée, pas de projet de loi. Et on
arrive à la session du printemps, ça traîne, ça
traîne. Et, en bout de piste, à la mi-mai, le ministre
dépose enfin son projet de loi. À la demande de l'Opposition, il
a accepté - je dois le reconnaître, il a bien collaboré -
que la commission parlementaire de l'aménagement et des
équipements rencontre un certain nombre de groupes, d'individus, pour
consultation. Et là, on s'est rendu compte que le ministre n'avait pas
fait ses devoirs, que le ministre avait été négligent.
Même s'il savait et s'il avait dit publiquement, depuis novembre 1989,
qu'il allait présenter un projet de loi, il n'avait fait aucune
consultation. Groupe après groupe, on s'est fait dire, en commission
parlementaire: Nous n'avons pas été consultés, alors qu'il
a eu amplement le temps, entre novembre et mai, de consulter les groupes. Pas
de consultations! (7 h 20)
M. le Président, nous pensons que la performance du ministre est
décevante depuis sa nomination à l'Environnement. Avant lui, sa
prédécesseure immédiate, rappelons-le, en arrivant
à son poste, avait fait une déclaration-choc, disant aux
journalistes: Mon prédécesseur - disait-elle, celle qui est
maintenant ministre de l'Énergie - Cliff - disait-elle, entre guillemets
- est un beau parleur, Cliff fait de beaux discours, mais Cliff ne livre pas la
marchandise. Mme la prédécesseure du ministre actuel a dit
ça textuellement, je lui montrerai les coupures de journaux. Moi, j'ai
rendu hommage à la franchise de la ministre quand elle a dit ça;
je lui ai rendu hommage, parce que j'étais parfaitement d'accord avec
elle, parfaitement d'accord. Le Cliff en question avait endormi la population;
le Cliff en question, par ses beaux discours, avait endormi les journalistes,
les groupes écologiques. Le ministre le sait, le ministre sourit
actuellement, parce qu'au fond de lui-même il est d'accord aussi avec le
verdict de sa prédécesseure vis-à-vis du
dénommé Cliff.
Arrive la ministre actuelle de l'Énergie à
l'Environnement. Elle a brassé un peu. Elle a brassé; à un
moment donné, elle a montré la porte au président du
Bureau d'audiences publiques, le bon Dr Goldbloom. Pourquoi? Là aussi,
elle a fait preuve de courage. Pourquoi l'a-t-elle
mis à la porte? elle l'a mis à la porte parce que le bon
dr goldbloom, président du bureau d'audiences publiques du
ministère de l'environnement, imaginez-vous, a dit - ii a
été cité dans les journaux - à un moment
donné, avant que ne débutent les travaux de la commission sur les
déchets dangereux, la commission charbonneau... le dr goldbloom,
président du bureau d'audiences publiques de l'environnement, a dit: mme
la ministre - il l'a dit par écrit, à part ça - je vous
conseille de ne pas trop en dire au public parce que, si le public en sait
trop, le public va s'inquiéter. alors, là encore, une
deuxième fois en quelques mois, la ministre qui a
précédé le ministre actuel a fait preuve de courage. elle
lui a dit, au dr goldbloom: fini! vous êtes dépassé, vous
êtes déphasé. elle a eu le courage de lui nommer un
remplaçant. bravo!
Malheureusement, après l'élection, la ministre n'a pas
été renommée à ce poste. Le député de
Brome-Missisquoi, jeune politicien compétent, vigoureux, ambitieux,
ex-candidat à la chefferie et prometteur, oui, comme le
député de Saguenay le dit, très prometteur... Je ne sais
pas s'il sera aussi prometteur après un an ou deux à
l'Environnement, par exemple; ça, on verra. Mais arrive le
député de Brome-Missisquoi. Lui, qu'est-ce qu'il nous dit? Le
député de Brome-Missisquoi nous dit, en arrivant: Enfin,
l'action. Ça, ça reprend un peu le slogan qu'il avait en 1983,
lors de la campagne à la chefferie; son "motto", son slogan,
c'était: Enfin, Paradis. Il s'en souvient, il sourit: Enfin, Paradis.
C'était beau comme "motto", mais c'était surtout très
modeste. C'était très humble, très humble: Enfin, Paradis
vint, enfin le Christ vint. Alors, ce jeune homme, ambitieux, compétent,
dynamique, sans complexe d'infériorité: Enfin, Paradis vint.
Alors, il est nommé ministre de l'Environnement. Il est normal
qu'il revienne avec le même "motto", le même slogan; normal. Alors
là, il dit: Enfin, l'action. On s'attend, M. le Président,
à ce qu'il y ait de l'action. Quelle action? Quelle action? Au bout de
cinq ou six semaines, il nous annonce, en grande conférence de presse,
avec tableau à l'appui, etc., l'action. C'est quoi, l'action qu'il nous
propose? Un grand changement de son organigramme, un grand changement de sa
structure, tout à fait typique d'une attitude bureaucratique,
"juridico-bureaucratique" parce que le ministre de l'Environnement est un
avocat de formation. Il a plaidé déjà pour plusieurs
producteurs agricoles, par exemple. Donc, l'action c'est le changement
d'organigramme. La structure du ministère va changer. Et ça, on
le sait, M. le Président. Quiconque a été proche d'un
gouvernement sait que chaque sous-ministre, dans chaque ministère, a
toujours dans son tiroir supérieur un nouveau plan pour le nouveau
ministre qui va arriver. Je vois le ministre délégué aux
Forêts qui a été fonctionnaire longtemps et il m'approuve.
Il a l'air de m'ap-prouver. C'est vrai ça. Il a été
fonctionnaire longtemps et il le sait. Alors, les fonctionnaires étaient
contents quand ils ont vu que le ministre était disposé à
faire un nouvel organigramme. Bravo!
Mais, M. le Président, ce que le ministre ne nous a pas dit,
c'est qu'il avait cru, lui, son premier ministre, son chef du parti, le premier
ministre actuel. Il l'avait cru. Il avait fait confiance à la parole de
son chef lorsque, durant la campagne électorale, son chef avait promis
solennellement: L'environnement va devenir la priorité numéro un
dans un gouvernement du Parti libéral. Numéro un. Rien de moins.
Et, à cet égard, nous allons, dès la première
année fiscale, consacrer 50 000 000 $ de plus... 50 000 000 $, c'est de
l'argent ça. Parce que le budget de fonctionnement du ministère
de l'Environnement, au moment où le premier ministre faisait cette
promesse, en août 1989, le budget de fonctionnement était autour
de 100 000 000 $ par année. Alors, ajouter d'un coup 50 000 000 $, c'est
un bel effort.
Alors, le député de Brome-Missisquoi s'est dit: L'affaire
est belle. Avec mon plan de carrière qui m'amène à la
chefferie éventuelle, je fais un stage à l'Environnement. Il y a
un gros pot qui m'attend, 50 000 000 $, je vais pouvoir faire des merveilles
avec cet argent. Le ministre de l'Environnement a été naïf,
M. le Président. Il a été candide, bien intentionné
et je comprends que c'était tentant de vouloir ce portefeuille de
l'Environnement, si on y attachait cette promesse de 50 000 000 $, d'augmenter
de 50 % le budget de fonctionnement. On peut faire beaucoup de choses avec une
augmentation de 50 000 000 $. Le ministre de l'Environnement a cru à
ça. Nous, de ce côté-ci, on était bien sceptiques.
On souhaitait que l'environnement puisse bénéficier d'une telle
augmentation. Mais, par contre, on était habitués aux promesses
brisées du chef du Parti libéral. On était habitués
à ça. Alors le ministre de l'Environnement, peu de temps
après sa nomination, nous disait, de semaine en semaine: Oui, ça
s'en vient. Inquiétez-vous pas. J'ai confiance. On va les avoir, les 50
000 000 $. Et, finalement, on a eu le chiffre précis, M. le
Président: 15 000 000 $, même pas le tiers de la promesse de
l'engagement, même pas.
Mais le ministre de l'Environnement aurait dû faire un peu
l'historique du mandat de 1985 à 1989 du ministère de
l'Environnement. Il se serait aperçu que le Conseil des ministres dont
il a fait partie durant tout ce temps-là avait posé un geste
très symptomatique en arrivant au pouvoir, très symptomatique. En
arrivant au pouvoir, ce gouvernement du Parti libéral, dès la
première année fiscale 1986-1987, coupe le budget de
l'Environnement de 24 %. Le budget de l'Environnement, qui était de 87
000 000 $ pour le budget de fonctionnement, est tombé d'un coup à
71 000 000 $. Si le ministre de l'Environnement avait eu une perspective le
moindrement historique...
Et je comprends qu'il ne l'ait pas, la perspective historique. C'est un
jeune, comme je disais tantôt, plutôt ambitieux qui a un bon plan
de carrière, il regarde en avant. C'est bon de regarder de temps
à autre en arrière pour mieux savoir d'où on vient,
d'où notre équipe vient. Il a fait partie de cette
équipe-là, lui, de 1985 à 1989; il en a fait partie. Et il
n'aurait pas dû croire son chef, quand son chef a dit: Je veux augmenter
de 50 000 000 $, parce que son chef avait baissé de 24 % le budget de
l'environnement. M. le Président, ces remarques préliminaires,
c'était pour quand même situer dans son contexte le fonctionnement
du gouvernement actuel eu égard à l'environnement.
Donc, on est heureux que le ministre ait enfin déposé,
pour discussion, son projet. Et on est heureux aussi d'avoir l'occasion
justement de comparer la performance de ce gouvernement actuel en
matière environnementale avec la performance du gouvernement du Parti
québécois. Rappelons que c'est le gouvernement du Parti
québécois qui a créé le ministère de
l'Environnement, que c'est le gouvernement du Parti québécois
aussi, par exemple, qui a créé, qui a mis sur pied le groupe qui
fait les études de recherche en matière de déchets
dangereux, qui a remis, sous la pression du ministre, il y a quelques jours, un
rapport daté d'avril-mai 1990. Le ministre avait hâte d'avoir ce
rapport-là. Ça lui prenait pour exercer un peu de pression
auprès de ses collègues du Conseil des ministres pour avoir le
feu vert sur son projet de loi. Ça lui prenait, il fallait dramatiser la
situation. Le rapport n'était pas dû, à ce
moment-là, le ministre le sait très bien; moi, je le sais en tout
cas; moi je le sais, parce que les fonctionnaires nous l'ont dit.
Le ministre a un problème avec les fonctionnaires. En arrivant,
il a fait sa grande réforme sur papier, l'organigramme. Après
ça, il s'est dit: Maintenant, j'ai plu à mes fonctionnaires,
surtout aux hauts fonctionnaires, il faut maintenant que je plaise aux groupes
écologiques. Il faut maintenant que je fasse plaisir aux groupes
environnementaux. Comment faire ça? Comment en faire des alliés?
Je vais leur démontrer que je suis prêt à brasser la cage.
Là, il s'est mis, M. le Président, à enguirlander
publiquement ses fonctionnaires; publiquement, ce ministre de l'Environnement a
eu des paroles très dures pour ses fonctionnaires, comme je n'en ai
jamais entendu, moi, dans ma carrière en politique. Jamais, je n'ai vu
ça.
Et il se plaint après ça que ses fonctionnaires ne lui
sont pas toujours loyaux. Par exemple, tout récemment, un journaliste a
rendu public le fait que, dans l'est de Montréal, sur la base militaire
de Longue-Pointe, il y avait un degré de contamination au plomb
très élevé, jusqu'à 30 fois plus
élevé qu'à la Balmet, de Saint-Jean. Et, faisant bien
leurs devoirs, pas à la demande de l'Environnement, pas du tout, la
Défense nationale, les Forces armées canadiennes prennent
sur elles de faire une étude des sols. Elles font cette étude,
envoient le rapport au ministère de l'Environnement en janvier 1990.
Lorsque, en mai 1990, cinq mois plus tard, le journaliste de La Presse
fait cette révélation, le ministre, suite aux questions que
je lui pose à l'Assemblée nationale... (7 h 30)
Mme Vermette: Sur une question de règlement, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Cannon): Oui, Mme la
députée de Marie-Victorin, sur une question de
règlement.
Mme Vermette: Oui, M. le Président, je demanderais le
quorum, s'il vous plaît. Comme on discute d'un problème...
Le Vice-Président (M. Cannon): Oui, madame. Effectivement,
je vais compter. Alors, qu'on appelle les députés s'il vous
plaît.
Alors, ça va. Nous avons maintenant quorum. M. le
député de La Prairie, simplement pour vous dire que vous avez
déjà utilisé 20 minutes sur votre temps
d'intervention.
M. Lazure: Merci, M. le Président. Alors, maintenant que
les députés du parti ministériel commencent à
apparaître en Chambre, je vais continuer, avec votre permission, mon
exposé. J'étais en train de relater le drôle de climat qui
existe au ministère de l'Environnement, entre le ministre et ses
fonctionnaires. J'étais en train de dire que le ministre, après
avoir enguirlandé ses fonctionnaires de verte façon dès
son arrivée au ministère, ne devait pas se surprendre si ses
fonctionnaires ne lui étaient pas aussi loyaux qu'il le souhaiterait. Je
donnais comme exemple le rapport de la Défense nationale qui
était parvenu à son ministère, en janvier 1990, sur une
situation très grave, et dont le ministre a ignoré l'existence
jusqu'en mai 1990, et il appris l'existence de ce rapport parce que le
journaliste a fait cette révélation dans les médias. M. le
Président, je pense que c'est grave lorsqu'on crée un climat de
travail dans un ministère tel qu'un rapport extrêmement
sérieux n'est pas soumis à l'attention du ministre. C'est grave
et c'est le symptôme d'un malaise profond.
Le projet de loi, donc, est en retard; il était promis pour
novembre, décembre 1989, pas de nouvelles. Ensuite, arrive le printemps;
il est déposé à la mi-mai et, à notre demande, le
ministre accepte de rencontrer des groupes et les groupes nous
révèlent à ce moment-là qu'ils n'ont pas
été consultés sur un projet de loi aussi important. C'est
un projet qui a été improvisé et je vais passer tout de
suite au coeur du problème. Le coeur du problème, c'est que le
ministre, il l'a répété encore tantôt, se vante
qu'avec ce projet de loi le Québec aura l'une des lois les
plus fortes, les plus sévères non seulement en
Amérique, mais au monde. Je pense qu'il a dit qu'il y a seulement la
Hollande et le New Jersey qui vont dépasser, en force, cette loi, si
ça devient une loi. on a parlé de dents longues, de dents fortes,
de dents solides. mais, à un moment donné, le 12 mai, donc
quelques jours après le dépôt du projet de loi, alain
dubuc, éditorialiste à la presse, intitule son article:
"où est la mâchoire?" où est la mâchoire? je me
permets de citer quelques extraits de cet editorial. "mais une loi avec des
dents n'a de sens que si le gouvernement a déjà une
mâchoire. c'est-à-dire des outils et des réflexes qui lui
permettront de mordre." parce que c'est ça que le ministre veut. il veut
mordre le pollueur. je suis d'accord avec lui jusque-là, mais à
condition qu'il ait une mâchoire, comme le dit m. dubuc. "sinon, cette
loi ne sera qu'un bout de papier de plus. il est beaucoup plus facile de faire
adopter la loi la plus sévère au canada, bien
protégé par les murs de l'assemblée nationale, que de
diriger, sur le terrain, le meilleur ministère de l'environnement."
quelle sagesse dans ces paroles! quelle sagesse! "par exemple, avec une telle
loi, la balmet aurait-elle pu contaminer un quartier de saint-jean?" on va y
revenir tantôt. "dans le cas de la balmet, on a laissé des
pollueurs notoires ouvrir une usine. on a ensuite attendu cinq ans avant de
mesurer le degré de contamination. et un an plus tard, les travaux de
décontamination ne sont toujours pas entrepris." c'est vrai, m. le
président. ils ne sont toujours pas entrepris. "ces délais
insensés, où se côtoient - tenez-vous bien -
incompétence et impuissance - les deux "i" du ministre,
incompétence et impuissance - ne seront pas changés par la loi.
le seul progrès, c'est que québec pourra récupérer
plus d'argent si une entreprise recourt à la faillite pour éviter
de faire face à ses obligations." et même ça, ce n'est pas
sûr. "autrement dit - je termine l'extrait de l'article de m. dubuc dans
la presse - les gangsters de l'environnement, comme marc levy ou la
famille singerman - de la balmet - pourront continuer à faire des coups
d'argent tout en préparant leur retraite sous le ciel bleu de la
floride, bien loin du québec et de sa loi bien dentée." (7 h
40)
M. le Président, c'est exactement ce que la plupart des
groupements nous ont dit en commission parlementaire. La plupart des
groupements nous ont dit: Cette loi-là - et je mets le ministre au
défi de me contredire, s'il veut m'écouter - si elle avait
été en vigueur depuis X mois, n'aurait pas permis au gouvernement
actuel de faire payer le pollueur. Elle ne l'aurait pas permis. Il n'y a rien
dans ce projet de loi qui permet de faire payer le vrai pollueur, si le vrai
pollueur est non solvable et si le vrai pollueur a pris la fuite. Rien dans ce
projet de loi, absolument rien. À cet égard, le projet de loi,
c'est un grand coup d'épée dans l'eau par le chevalier de
Brome-Missisquoi, un grand coup d'épée dans l'eau.
Ce que les groupes nous ont dit, c'est: M. le ministre, de grâce,
créez un fonds spécial de décontamination pour le
passé et pour l'avenir. Quelques mots sur cette suggestion d'un fonds de
décontamination, M. le Président, puisque c'est revenu dans
presque toutes les interventions, y compris, évidemment, celles de
l'Opposition qui réclame la création d'un tel fonds depuis des
mois. Pour l'avenir, la formule d'un tel fonds est facile à mettre sur
pied. Tout le monde convient qu'un tel fonds serait constitué par la
cotisation des entreprises, qui pourrait varier selon que l'entreprise pollue
plus ou moins, un peu comme le système à la Commission de la
santé et de la sécurité du travail où l'entreprise
est cotisée selon le degré de sécurité et selon le
nombre d'accidents dans l'entreprise. Donc, pour l'avenir, la constitution d'un
tel fonds, c'est simple, mais encore faut-il qu'il y ait une volonté
politique de la part de ce gouvernement, ce qui n'est pas le cas,
malheureusement. Et, pour le passé, il va falloir, évidemment,
que ce fonds spécial de décontamination soit constitué de
façon mixte par le gouvernement, par les fonds publics et, en partie,
par les entreprises qui ont été reconnues comme polluant
l'environnement.
M. le Président, ce projet de loi auquel nous concourons quant
à son principe, quant à son objectif... Je vous le dis tout de
suite: Nous allons voter en faveur de l'adoption du principe pour dissiper le
malentendu, les doutes que le ministre a laissé planer depuis
quarante-huit heures. Nous allons voter, M. le leader - dont je salue
l'arrivée en Chambre - pour l'adoption de ce principe du
pollueur-payeur.
Une voix: Merci. Une voix: Bravo!
M. Lazure: Merci. Mais je disais, M. le leader,
brièvement, sans tout répéter, que cette loi qui a
beaucoup de dents doit avoir une mâchoire aussi. Elle doit avoir une
mâchoire. Je le répète, presque tous les groupes ont
même envoyé des messages hier, M. le Président - j'ai des
messages que je pourrai lire au besoin - que le ministre a reçus...
Une voix: Au besoin.
M. Lazure: ...de l'Union des municipalités du
Québec, de la ville de Montréal, de la ville de Québec, de
l'Union des municipalités régionales de comté, de
plusieurs groupements importants dans notre société, et qui
disent au ministre: Votre projet de loi, nous en sommes, mais, de grâce,
mettez-y une mâchoire, mettez-y le mécanisme d'un fonds
spécial de décontamination. M. le Président, on ne demande
pas au ministre
les 35 000 000 $ que son patron lui avait promis et qu'il n'a pas mis
dans la caisse. On ne lui demande pas ça, mais, en partant du bilan des
lieux, des sites où il y a des déchets dangereux au
Québec, 71 actuellement, selon le dernier rapport, on lui dit: Faites
donc une clarification une fois pour toutes. Le ministre de l'Éducation,
qui est arrivé aussi tantôt, va comprendre parce que c'est un bon
planificateur, le ministre de l'Éducation; dans son réseau de
l'éducation, il est habitué à ça.
Nous disons au ministre de l'Environnement: Vous devez faire une
planification pour décontaminer les 71 sites dangereux parce qu'il n'y
en a pas de planification actuellement. Comme ses prédécesseurs,
Cliff dont je parlais tantôt, et sa prédécesseure, le
ministre fonctionne de crise en crise, comme un pompier. Sauf que lui, il n'est
pas allé comme pompier, comme Cliff était allé à
Saint-Basile. Lui, le ministre de l'Environnement, n'est pas allé
à Saint-Amable. Il est resté ici à Québec. Et,
à la fin, il est allé faire un tour, à la fin, à la
fin. Il est allé donner la main devant les caméras aux pompiers
volontaires de Saint-Amable.
Ça, c'est un autre style. C'est un style peut-être plus
moderne que le style de Cliff. Mais le ministre ne planifie pas. Le ministre se
promène de crise en crise, de Saint-Basile à Saint-Jean, à
Balmet, de Saint-Jean à Saint-Amable, de Saint-Amable à Duparquet
en Abitibi, de Duparquet en Abitibi à l'est de Montréal. Il se
promène de crise en crise au gré des révélations
des journalistes, alors que les groupes lui disent, que nous lui disons: Prenez
donc l'exemple sur certains de vos collègues qui font une
planification.
Les 71 sites, personne ne s'attend à ce qu'ils soient
décontaminés dans l'espace d'un an, deux ans, trois ans. Bon.
Faites un plan quinquennal. Faites un plan et dites-nous par où vous
allez commencer. Dites-nous: Nous allons décontaminer d'ici un an tel
site, telle région et, à cet égard, nous allons obtenir
tel argent, nous allons constituer un fonds de décontamination. Loi ou
pas loi, M. le Président, il faut qu'il y ait un fonds de
décontamination parce que le problème principal, ce n'est pas la
pollution par les industries qui se produit actuellement. Celle-là, elle
est assez bien contrôlée. Les industries polluantes qui
fonctionnent toujours dans leurs entreprises contrôlent de mieux en mieux
le degré de pollution de l'environnement, mais le problème
principal, ce sont les sites du passé où, ou bien le
propriétaire est disparu depuis 10 ans, 15 ans, 20 ans ou bien le
propriétaire n'est pas solvable. C'est ça qui est le
problème. Tout le monde le sait. Le ministre fait semblant de ne pas le
savoir. Il devrait le savoir. C'est ça, le problème. Il est bien
circonscrit, le problème. Et, à cet égard, son projet de
loi ne réglera strictement rien. Son projet de loi ne règle rien
quant aux sites orphelins.
Et, là, il va me dire: Ah! Attention - il l'a dit d'ailleurs
tantôt - il y a un fonds fédéral-provincial. Il en parle
à satiété de ce fonds fédéral-provincial.
Qu'en est-il? À peine 200 000 000 $ pour cinq ans. Pour cinq ans, 200
000 000 $, donc 40 000 000 $ par année, mais ça, ce n'est pas
pour le Québec. C'est pour l'ensemble du Canada.
Le ministre, encore une fois, dans sa naïveté, se dit: Bien,
je vais pousser bien fort, puis je vais peut-être avoir proche des 40 000
000 $, proche du total, juste pour le Québec. Il m'a dit, à un
moment donné: Premier arrivé, premier servi dans ce
fonds-là. Bon. Je lui ai posé la question récemment, M. le
Président: combien d'argent il a reçu à date? Zéro.
Zéro sou. Puis, ça fait longtemps, ça fait au moins six
mois que le fonds est annoncé. Au moins six mois. Le ministre, une de
ses premières déclarations publiques après sa nomination,
c'était sur ce fonds fédéral-provincial justement.
Donc, aucun argent à date. Mais, même s'il avait le total
de l'argent de ce fonds fédéral-provincial de
décontamination, ça ne fait que 40 000 000 $ par année.
C'est évident qu'il ne l'aura pas. Et, quand on connaît le
pourcentage de ces fonds fédéraux-provinciaux qui viennent au
Québec par rapport à l'Ontario, on peut se poser des questions,
M. le Président. Alors, si, pour décontaminer Balmet, le ministre
a dû prendre la totalité de l'argent à son budget pour
1990-1991, soit 3 300 000 $, la totalité, imaginez-vous...
Des voix:...
M. Lazure: M. le Président, est-ce que je pourrais avoir
un peu d'ordre dans la Chambre? (7 h 50)
Le Vice-Président (M. Cannon): Oui, merci. J'invite mes
collègues à respecter l'article 32, et même ceux qui me
font signe et qui viennent d'arriver en cette Chambre. S'il vous plaît,
continuez, M. le député.
M. Lazure: M. le Président, je disais que le ministre se
fait des illusions. S'il pense que la réponse à la
décontamination des sites orphelins, c'est le fameux fonds
fédéral-provincial, c'est de la foutaise. L'urgence, c'est de
créer ce fonds strictement québécois, en deux volets, un,
pour l'avenir, à partir de maintenant, selon le modèle de la
CSST, et l'autre, pour le passé, un fonds mixte où le
gouvernement devra nécessairement mettre des sommes d'argent
importantes. Et qu'il étale la décontamination sur 5 ans, sur 10
ans, peu importe, mais qu'il nous présente un plan, de grâce. Mais
il refuse jusqu'ici de présenter un plan.
Et, là, j'arrive à un autre aspect du fonctionnement de
son ministère: le côté secret, le manque de transparence.
J'ai donné l'exemple tantôt: il y a un secret même entre les
hauts
fonctionnaires de son ministère et le ministre. Ils lui cachent
un rapport important pendant six mois. En plus, son ministère refuse, il
y a quelques mois, de donner des renseignements à la commission
Charbonneau. Le ministre a dû intervenir, faire une colère pour
que ses fonctionnaires donnent des renseignements à la commission
Charbonneau. M. le Président, la condition élémentaire
pour que la population collabore à la préservation de la
qualité de l'environnement au Québec, c'est la transparence,
c'est l'information. Et ce gouvernement nous démontre, de semaine en
semaine, qu'il n'a pas le goût d'être transparent, qu'il ne veut
pas mettre la population de son côté.
Un autre aspect inquiétant dans le fonctionnement du
ministère de l'Environnement, c'est - et c'est en rapport avec le manque
de transparence - l'absence d'audiences publiques. Un des meilleurs outils pour
prévenir la pollution de l'environnement, c'est la tenue des audiences
publiques. Lorsqu'un nouveau projet industriel - par exemple: alumineries,
raffineries, aciéries, peu importe - est planifié, on devrait
tenir des audiences. Nous avons réclamé à plusieurs
reprises la mise en application des articles n, p, etc., qui permettraient et
qui obligeraient le gouvernement à tenir des audiences publiques. Dans
le moment, il est exempté de tenir des audiences sur les grands projets,
mais il peut le faire. Le ministre peut le faire, je le répète,
et il pourrait encore le faire dans le projet de Lauralco, qui est situé
dans le comté du leader gouvernemental. Il y a beaucoup de gens qui sont
inquiets des retombées environnementales du projet Lauralco, aluminerie
de près de 1 000 000 000 $. Et le ridicule de la situation, M. le
Président, c'est que le Bureau d'audiences publiques, à grands
frais, fait des audiences publiques pour un projet d'agrandissement de marinas
de 400 000 $. Et là, pour un projet de 900 000 000 $, pas d'audiences,
pas nécessaire.
Et, dans la machine gouvernementale, on pousse l'audace jusqu'à
vouloir faire adopter un projet de loi privé pour faire en sorte qu'une
expropriation de terre à Deschambault soit soustraite aux
mécanismes habituels de la Commission de protection du territoire
agricole. Moi, ça m'étonne quand on sait que le
député de Portneuf est en même temps ministre de
l'Agriculture et qu'il est supposé être le protecteur des
agriculteurs, "supposé être" le protecteur. Il semble trouver
normal que les autorités municipales de Deschambault veuillent passer
à côté de la Commission de protection du territoire
agricole.
Nous sommes en train d'étudier ce projet de loi. Je reviens au
projet de loi du ministre de l'Environnement pour dire que nous
déplorons, donc, l'absence d'un fonds de décontamination; nous
déplorons aussi l'absence d'un fonds de compensation aux victimes. Vous
savez, de plus en plus ailleurs on s'est rendu compte que la contamination, en
particulier par le plomb, chez les enfants pouvait causer des dommages à
moyen terme, à long terme, qui sont maintenant mesurables. Il y a
actuellement, aux États-Unis, des causes devant les tribunaux de
poursuites par des parents d'enfants qui ont été victimes
d'empoisonnement au plomb. Si, par malheur, au Québec, dans quelques
années, il s'avérait que ces enfants devenus adolescents ou
adultes ont des handicaps intellectuels, notamment - parce que le plomb chez
les enfants, on le sait, affecte le fonctionnement des cellules
cérébrales - ou des invalidités importantes et qu'ils
voulaient poursuivre, ils vont se retrouver un peu comme le ministre de
l'Environnement devant des propriétaires fantômes qui, comme la
famille Singerman, par des tours de passe-passe a réussi à se
libérer de toute obligation ou bien qui sont rendus en Floride ou en
Jamaïque. Ces parents, ces individus n'auront pas de recours, pas de
compensation financière.
Alors, nous avons dit au ministre en commission parlementaire: Pourquoi
ne pas créer un fonds de compensation aux victimes environnementales,
comme il y a des fonds de compensation pour les victimes d'actes criminels, par
exemple? D'ailleurs, c'est à se demander si, dans certains cas,
ça ne devrait pas être ce fonds de compensation aux victimes
d'actes criminels. Polluer l'environnement comme on le fait dans certaines
entreprises, notamment au plomb, c'est criminel. Là-dessus, le
député de Brome-Missisquoi et moi, on s'entend très bien.
On a le même diagnostic. Mais que ce soit par le fonds de compensation
aux victimes d'actes criminels ou par un autre fonds spécial aux
victimes environnementales, nous disons au ministre: De grâce, il faut
constituer un fonds pour les victimes. Mais, à cet égard, il n'a
pas répondu non plus à nos voeux.
Il y a une autre modification que le ministre devrait apporter au projet
de loi. On sait - dans le passé, on l'a vu à quelques reprises -
que bien souvent il faut qu'il y ait un lien très étroit entre le
ministère de l'Environnement et le ministère de la Santé
lorsqu'il arrive une catastrophe quelconque ou lorsqu'on découvre un
lieu très contaminé, un lien très étroit
Santé-Environnement. Parce que, si la population s'inquiète au
sujet de l'environnement, c'est d'abord et avant tout parce que la population,
à bon droit, se dit: Ma santé, celle de ma famille, de mes
enfants est en cause. C'est ça. Ce n'est pas toujours parce qu'il y a
des blessures graves au tissu environnemental, physique, géographique,
mais c'est surtout à cause de menaces à la santé. On sait
que les deux ministères, Environnement d'une part et Santé
d'autre part, ne fonctionnent pas de façon harmonieuse. Alors, nous
disons au ministre: Mettez donc dans votre projet de loi, lorsque vous vous
donnez le pouvoir d'émettre une ordonnance pour décontaminer un
terrain ou pour faire une étude de
caractérisation, l'obligation - ça vous protégera
parce que ça forcera vos fonctionnaires à mieux faire leur
travail - d'informer votre collègue de la Santé pour qu'il
informe les départements de santé communautaire. Il n'en a pas
parlé tantôt dans ses remarques. J'espère qu'il en tiendra
compte.
Troisièmement, les normes par lesquelles le ministre va pouvoir
décider d'émettre une ordonnance: le degré de
contamination à tel ou tel métal, par exemple, et le seuil, le
niveau au-delà duquel automatiquement le ministre émettrait une
ordonnance pour étudier le sol et décontaminer. Ça, c'est
le projet de règlement que le ministre nous a soumis. Nous, et plusieurs
groupements, avons demandé que ce projet de règlement, d'abord,
soit amélioré. (8 heures)
Le ministre était d'accord. Il y avait des lacunes dans ce projet
de règlement, dans les barèmes, dans les normes, le pourcentage
de telle ou telle substance qui devient un dangereux contaminant à
partir de tel degré. Mais les gens lui ont dit aussi: Ce n'est pas
suffisant d'avoir cette échelle; il faut que vous gardiez la notion de
risque et de danger. Il n'en a pas parlé ce matin. L'autre jour, il
avait dit: Oui, ça a du bon sens; je pense qu'on va la garder. Il fait
signe que oui, tant mieux. J'espère que le ministre va tenir compte,
lorsque nous étudierons ce projet de loi article par article, des
nombreuses suggestions qui lui ont été faites.
M. le Président, je vois qu'il me reste à peine quelques
minutes. En résumé, nous concourons au principe du
pollueur-payeur. Nous allons voter favorablement pour l'adoption de principe de
ce projet de loi. Nous avions hâte d'aborder la discussion de ce projet
de loi. Nous ne comprenons pas - peut-être que c'est le leader qui
pourrait nous donner les vraies raisons - pourquoi ça a pris tant de
temps avant que ce projet soit déposé pour discussion. Le projet,
il est connu depuis la mi-mai. Ça a pris au moins un mois. Tout à
coup, on le dépose moins de 48 heures avant la fin des travaux. C'est un
projet important, très important.
Il ne faudrait surtout pas que le ministre, comme il a commencé
à le faire depuis quarante-huit heures - vous n'étiez pas ici, M.
le leader -laisse entendre aux journalistes: Bien, peut-être qu'il ne
passera pas et ce sera à cause du Parti québécois.
Une voix: J'étais ici.
M. Lazure: Vous étiez ici? Bon. Comme leader, vous devriez
être sensible à ce genre d'insinuation qui n'est pas très
bienveillante. Nous avons toujours collaboré. Mais nous blâmons le
ministre d'avoir attendu si longtemps avant d'aborder la discussion, d'avoir
attendu à 7 heures le matin, l'avant-dernier jour de la session. Il sait
très bien qu'il y a le débat que l'on fait actuellement, mais
qu'il y aura ensuite, obligatoirement, une étude article par article. Il
le sait très bien. Il a reçu plusieurs recommandations de
groupements importants, j'en ai parlé tantôt.
En résumé, nous allons dire oui au projet de loi, mais
nous disons aussi, M. le Président, qu'il faut que le ministre, une fois
pour toutes, cesse d'être naïf vis-à-vis de son premier
ministre, qu'il cesse d'attendre les fameux 50 000 000 $. Il peut continuer ses
luttes et nous le supportons. Je le supporte dans sa lutte, il le sait.
D'ailleurs, il demande mon aide, mon support à tout bout de champ. Je
pense que, parfois, je l'aide plus que plusieurs de ses collègues du
Conseil des ministres. Ça, je comprends ça. Je suis prêt
à lui continuer mon aide. Le ministre de l'Éducation, je pense,
est un allié aussi du ministre de l'Environnement.
Mais son Conseil des ministres, particulièrement le
président du Conseil du trésor qui, par hasard - parce qu'il faut
avoir la perspective historique, il faut garder la perspective historique -
était le compétiteur du ministre de l'Environnement il n'y a pas
si longtemps, en 1983... En 1983, on se retrouvait avec trois candidats
à la chefferie du Parti libéral: le député actuel
de Saint-Laurent, qui est premier ministre, le député de
Vaudreuil, qui est président du Conseil du trésor, et le
député de Brome-Missisquoi, qui est ministre de l'Environnement.
C'est le trio de 1983 qu'on retrouve. Et le pauvre ministre de l'Environnement,
bien là, il est coincé entre ses deux ex-adversaires. J'admire
son courage. Ça prend du courage. Mais il a besoin de plus de support de
ses collègues du Conseil des ministres. Mais qu'il arrête de
penser que son chef va tenir ses engagements. Son chef ne tient pas ses
engagements. Son chef né prend pas au sérieux l'environnement. Ce
gouvernement du Parti libéral ne prend pas au sérieux les causes
de l'environnement. Il intervient en pompier lorsqu'il est obligé
d'intervenir. Il avait coupé - M. le leader, vous faisiez partie de ce
gouvernement en 1986-1987 - vous aviez coupé le budget de fonctionnement
de l'environnement de 24 %, du jamais vu, alors que la situation
économique était prospère. Vous n'étiez pas en
crise économique à ce moment-là. Donc, c'est la
volonté politique, M. le Président, qui est en cause dans ce
gouvernement. Comme Alain Dubuc le disait si bien: On a beau avoir la loi avec
les dents les plus longues, si on n'a pas la volonté politique, c'est
une grande illusion.
Le ministre a souvent invoqué sa loi déficiente. Quand ce
n'était pas la loi déficiente, il invoquait la lenteur ou
l'incompétence de ses fonctionnaires ou, encore, il invoquait l'absence
de budget, parce que le ministre est souvent porté à avouer son
impuissance devant telle ou telle situation. Il avoue son impuissance:
Qu'est-ce que je peux faire? Je n'y peux rien, j'ai seulement 26 inspecteurs.
Une police verte pour
tout le Québec, M. le Président, de 26 personnes. Comment
voulez-vous qu'il y ait une observance sérieuse de la loi? Non seulement
de la prochaine loi, la future loi, mais même la loi actuelle n'est pas
observée. Imaginez-vous une région aussi grande que
l'Abitibi-Témiscamingue, région importante parce que 31 des sites
contaminés dangereux sur les 74, 31 sont en
Abitibi-Témis-camingue. Imaginez-vous que dans cette région il
n'y a que cinq polices vertes, cinq inspecteurs. Côte-Nord, région
encore plus vaste, quatre inspecteurs.
M. le Président, il est temps que ce gouvernement s'affirme de
façon concrète, par des budgets appropriés, et qu'il fasse
preuve de plus de sérieux. Il est temps, en plus d'avoir des lois avec
des dents, qu'on ait aussi une volonté politique d'agir, de cesser de
parler. À cet égard, une dernière remarque sur les aspects
punitifs de la loi, les amendes. Nous sommes d'accord pour augmenter les
amendes. Qu'on ait le record du maximum d'amendes, bravo! Mais il y a quand
même un aspect négatif à ça, M. le Président.
Lorsque les amendes minimales sont tellement élevées, des
centaines de milliers de dollars, les juges - et ça, la jurisprudence en
témoigne - exigent une preuve beaucoup plus étanche, beaucoup
plus forte et, dans un sens, bien souvent ça a un effet contraire
à l'effet recherché. Alors, je mets en garde le ministre, qui
veut établir un record en Amérique, même au monde, pour
pouvoir se vanter d'avoir les pénalités les plus
élevées, que ceci peut avoir un effet boomerang.
Finalement, sur cette question de pénalités et de juges,
l'Opposition officielle, le Parti québécois propose dans son
programme la mise sur pied d'un tribunal de l'environnement. Nous pensons qu'un
tribunal de l'environnement serait de nature à accélérer
les causes qui vont devant les tribunaux, d'une part. D'autre part, en
créant graduellement tout un groupe de juges spécialisés
en litiges environnementaux, nous aurions un meilleur service, un peu comme au
Tribunal du travail nous avons un meilleur service que dans une cour
générale. Je souhaiterais, M. le Président, que le
ministre tienne compte de cette excellente suggestion que le Parti
québécois lui fart depuis longtemps.
Alors, je termine, M. le Président, mon intervention en
répétant que nous concourons à l'adoption du principe de
ce projet de loi. Nous déplorons le manque de consultation, le retard
apporté par le ministre à nous déposer ce projet de loi,
des mois et des mois, six mois - il en a parlé pendant six mois avant de
le déposer - mais nous lui disons: Mieux vaut tard que jamais. Nous
allons collaborer à l'examen de ce projet de loi et j'espère
qu'il sera plus réceptif qu'il ne l'a été sur le projet de
loi 60. Nous lui avons fait des recommandations d'amendements sur le projet de
loi 60 et il les a rejetées du revers de la main. Ça m'a surpris,
je dois dire.
Je ne sais pas pourquoi il a fait ça, mais j'ai hâte de
voir à l'étude article par article du projet de loi 65 s'il sera
plus réceptif, et je le souhaite. (8 h 10)
Alors, je veux, au nom de l'Opposition, souhaiter, une fois encore, que
ce projet de loi soit bonifié comme l'Union des municipalités le
demande, comme l'Union des municipalités régionales de
comté du Québec le demande, les départements de
santé communautaire, la ville de Montréal et la ville de
Québec. Alors, de grâce, que le ministre écoute les
groupements, écoute l'Opposition et, de grâce, qu'il ne nous
impose pas le bâillon non plus! Merci.
Le Président: Je suis prêt à
reconnaître le prochain intervenant, M. le député de
Bertrand.
M. François Beaulne
M. Beaulne: Merci, M. le Président. En dépit de
l'heure tardive ou, devrais-je dire, de l'heure matinale, j'ai demandé
d'intervenir sur ce projet de loi, parce qu'il peut avoir des incidences
importantes dans la région à laquelle j'appartiens, en
Montérégie, et particulièrement dans le comté que
j'ai l'honneur de représenter à l'Assemblée nationale, le
comté de Bertrand, qui sont des régions d'industrialisation
croissante et qui sont également, malheureusement, des régions
où on assiste à une prolifération de sites d'enfouissement
et de sites orphelins.
Vous me permettrez, M. le Président, pour le
bénéfice de mes concitoyens, de rappeler l'objet de ce projet de
loi. Ce projet de loi permet au ministre de l'Environnement, lorsqu'il a des
motifs de croire qu'un contaminant est présent dans l'environnement,
d'ordonner aux responsables de la contamination de lui fournir une étude
de caractérisation et un programme de décontamination ou de
restauration de l'environnement contaminé.
Par ailleurs, lorsqu'il constate la présence d'un contaminant
dans l'environnement, le ministre peut également rendre une ordonnance
enjoignant aux responsables de ramasser, d'enlever, de recueillir ou de
neutraliser le contaminant et de décontaminer ou de restaurer
l'environnement. Ce projet de loi prévoit aussi que le ministre,
lorsqu'il constate la présence d'un tel contaminant dans le sol, peut
signifier au propriétaire un avis indiquant que ce sol est
contaminé. Suite à l'enregistrement de l'avis, le
propriétaire devra procéder à certains travaux, demander
l'autorisation du ministre et lui fournir une étude de
caractérisation et un programme de décontamination ou de
restauration du sol contaminé. Ce qui est également
intéressant dans ce projet de loi, c'est que quiconque exerce une
activité susceptible de contaminer le sol devra, avant de
procéder à certains travaux, demander l'autorisation du ministre
et lui fournir les
documents requis.
M. le Président, comme j'ai eu l'occasion de le mentionner tout
à l'heure, lors de l'étude du projet de loi 67, il est à
déplorer que, pour des raisons qui tiennent de la planification de
l'échéancier et du menu législatif que nous
présente le gouvernement, nous soyons appelés à
étudier ce projet de loi à peine 24 heures avant l'ajournement de
la session.
J'aimerais prendre les minutes qui me sont allouées pour
souligner les aspects positifs de ce projet de loi, en indiquer les faiblesses
et suggérer certaines améliorations qu'on pourrait y apporter.
Permettez-moi d'abord de parler des aspects positifs. Le projet de loi
consacre, en fait, le principe du pollueur-payeur. C'est un aspect positif,
puisqu'une certaine iniquité s'est introduite dans le
développement industriel de notre société, du fait que
pour procurer des bénéfices, pour enrichir quelques-uns, des
corporations et des individus ont, à toutes fins pratiques,
saccagé le patrimoine commun et ont, parfois, affecté
l'environnement de façon importante et à des coûts
énormes.
Je pense que, pour une fois, nous voyons consacrer le principe du
pollueur-payeur dans un projet de loi. Il est trop facile pour une compagnie
d'échapper à ses responsabilités en raison des structures
inadéquates d'amendes. Mon collègue, le porte-parole, le
député de La Prairie, a émis certaines réticences
quant à la politique des amendes. Je dois avouer que, malgré
tout, il est intéressant de constater que le projet de loi, ici,
relève le seuil des amendes minimales ainsi que des amendes maximales.
On passe d'une amende minimale de 12 000 $ à une amende minimale de 50
000 $ et d'une amende maximale de 500 000 $ à une amende maximale de 1
000 000 $.
Je vous rappellerai, M. le Président, malgré la
disposition de ces amendes, que celles-ci sont bien loin de compenser les
coûts que le gouvernement doit assumer, principalement suite aux
incidents écologiques majeurs. Je vous rappellerai que la facture se
monte déjà au-delà de 35 000 000 $ en ce qui concerne les
BPC de Saint-Basile. Nous n'avons pas d'estimation globale encore de ce qu'il
en coûtera à Saint-Amable, mais je puis d'ores et
déjà prévoir que les montants seront également
assez importants, principalement pour la décontamination du site de
l'incendie. Il est également trop facile pour des compagnies de se
dérober à leurs responsabilités, soit en déclarant
faillite ou en déposant leur bilan.
Une autre amélioration, un autre aspect positif que j'aimerais
souligner de ce projet de loi, c'est qu'il permet de s'attaquer au
problème de la contamination des sols. Pour représenter la
municipalité de Saint-Amable dans le comté de Bertrand, où
nous aurons à faire face à un sérieux problème de
contamination du site où s'est déroulé l'incendie de
pneus, j'ose croire que ce projet de loi nous permettra de procéder avec
plus de célérité à la caractérisation des
sols et à la décontamination du site contaminé, mais
surtout qu'il permettra au ministre de l'Environnement d'intervenir rapidement
dans la problématique de la prolifération des sites
d'enfouissement. Un grand nombre de sites d'enfouissement sont potentiellement
des endroits où des déchets contaminés pourront être
entreposés. Il y a des mesures législatives qui prévoient
une certaine surveillance de ces sites, mais, malheureusement, on ne peut pas
tout surveiller et les risques sont énormes que des sites
d'enfouissement, de prime abord inoffensifs, se transforment en sites
d'enfouissement de déchets dangereux.
Cela étant dit, M. le Président, j'aimerais quand
même souligner certaines faiblesses du projet de loi. D'abord,
laissez-moi vous dire que nous attachons l'importance qu'il faut à
l'environnement pour souhaiter que ce projet de loi ne soit pas uniquement une
coquille vide. Il est facile d'émettre, de pondre des projets de loi
qui, de prime abord, répondent aux souhaits de la population,
particulièrement en matière d'environnement, mais gardons-nous
d'adopter un projet de loi uniquement sur la base de ces beaux principes sans
vérifier si derrière les principes qui y sont
énoncés se trouvent effectivement les ressources pour l'appliquer
de façon efficace.
Vous me permettrez ici, M. le Président, tout comme mon
collègue de La Prairie, d'émettre certaines réserves et
d'exprimer certains doutes à ce sujet, puisque le budget du
ministère de l'Environnement, comme on le répète à
satiété de ce côté-ci de la Chambre, est
insuffisant. Il n'atteint même pas 1 % de l'ensemble des dépenses
budgétaires du gouvernement du Québec. Le ministère de
l'Environnement ne dispose que de 26 inspecteurs pour l'ensemble du
Québec. Alors, encore une fois, il faudrait, pour que ce projet de loi
ait les dents qu'il doit avoir, qu'il ne demeure pas uniquement au feuilleton
des coquilles vides.
D'autre part, certaines précisions devraient être
apportées au projet pour corriger certaines lacunes. La majorité
des groupes qui se sont fait entendre par la commission de l'aménagement
et des équipements se sont dits en faveur du projet de loi 65.
Cependant, plusieurs d'entre eux ont mentionné des lacunes importantes
dans cette loi. Parmi celles-ci, j'aimerais souligner, d'abord,
l'imprécision quant à la distinction entre "pollueur-payeur" et
"propriétaire-payeur". (8 h 20)
Le projet que nous soumet le ministre de l'Environnement contient des
dispositions qui lui permettront d'exiger à la fois d'un pollueur ou
d'un propriétaire d'un terrain contaminé qu'il procède
à une étude de caractérisation et qu'il soumette un plan
de décontamination. L'ensemble des intervenants s'entend pour dire que,
dans le cas où les pollueurs sont connus, les dispositions
contenues dans le projet de loi sont équitables. Là,
cependant, où le bât blesse, c'est lorsque le ministre exigera du
propriétaire d'un terrain des mesures correctrices alors que, souvent,
celui-ci ne sera pas responsable de la contamination. Dans la plupart des cas,
il aura acquis ce terrain sans même connaître son état de
contamination. Ces dispositions qui sont contenues particulièrement aux
articles 31.42 à 31.50 sont généralement mal accueillies
par les intervenants que nous avons eu l'occasion d'écouter en
commission et, entre autres, par les municipalités dont des extraits de
leurs mémoires ont été présentés au
ministre.
Mon collègue de La Prairie a également insisté sur
la nécessité de créer un fonds pour la
décontamination. Je ne reviendrai pas là-dessus. Simplement, je
voudrais souligner que les groupes qui ont participé aux audiences sur
le projet de loi 65 ont insisté sur la nécessité de
créer un fonds dans lequel on pourrait puiser les sommes
nécessaires à la décontamination des terrains, dans les
cas où les responsables des méfaits seraient introuvables.
J'aimerais simplement, ici, ouvrir une petite parenthèse dans le
contexte de ce que nous avons vécu dernièrement et,
particulièrement, dans le contexte du débat sur la Loi modifiant
la Loi sur la Régie de l'assurance automobile du Québec. J'ai eu
l'occasion, dans le contexte de ce débat, de souligner l'effet dangereux
de précédent que créait la loi 50. Ici, nous recommandons
la création d'un fonds pour la décontamination. Nous avons
examiné en commission la mise sur pied de la Société de
récupération et de recyclage du Québec. Je suis sûr
que, d'ici à la fin de cette Législature, nous aurons l'occasion
de nous pencher sur la création d'autres fonds, que ce soit en
matière de formation professionnelle, de recherche et de
développement ou d'environnement.
Permettez-moi ici, M. le ministre, encore une fois, de vous demander
que, si vous acceptez de procéder à la création d'un
fonds, comme nous vous le suggérons, les sommes recueillies par ce fonds
soient destinées aux objectifs pour lesquels ils auront
été recueillis.
Enfin, au niveau des faiblesses que j'aimerais souligner, j'aimerais
insister sur l'intervention qu'ont faite les départements de
santé communautaire lors des audiences. Lors de la participation du
comité de santé environnementale, les départements de
santé communautaire ont soulevé une question, d'ailleurs,
à laquelle a fait allusion mon collègue. En effet, les DSC
déplorent le fait que le projet de loi 65 ne contienne aucune
disposition qui oblige le ministre à informer les autorités de
santé publique lorsqu'il constate des cas de contamination. Le
ministère de l'Environnement a son rôle au niveau de
l'identification des sources de contamination et des sites de contamination.
Mais l'analyse et l'évaluation des risques que cette contamination
comporte pour la santé du public, ce sont les professionnels de la
santé qui les font et qui ont la responsabilité de les faire.
Dans ce sens, j'insiste sur les recommandations qu'a apportées
également mon collègue de La Prairie sur le besoin de communiquer
le plus rapidement possible et de la façon la plus efficace possible les
renseignements dont dispose le ministère de l'Environnement aux
départements de santé communautaire.
Après avoir indiqué certaines des faiblesses que comporte
le projet de loi, j'aimerais souligner certaines améliorations et
apporter certaines suggestions quant à la bonification du projet.
D'abord, comme je l'ai indiqué, il est nécessaire qu'on distingue
de façon très précise les responsabilités du
pollueur d'un terrain de celles du propriétaire. Il est à la fois
injuste et illogique de forcer un propriétaire à
décontaminer un terrain, alors que celui-ci n'en est pas responsable. De
plus, il faut se demander s'il est logique de criminaliser des activités
antérieures qui se sont déroulées dans le respect des lois
et des règlements existants à ce moment-là.
A l'instar des groupes qui se sont présentés fors des
consultations particulières, nous réclamons, nous, de ce
côté-ci de la Chambre, du gouvernement qu'il crée un fonds
dans lequel on puiserait les sommes nécessaires à la
décontamination des sols de terrains où il n'est plus possible de
retrouver les pollueurs. Ces fonds pourraient être constitués
à partir de cotisations versées par les industries, un peu
à la manière du fonctionnement de la Commission de la
santé et de la sécurité du travail.
Lors des consultations particulières, M. le ministre, vous avez
consenti à ce que les règlements votés en vertu de cette
loi soient discutés publiquement. J'aimerais vous rappeler cet
engagement et vous rappeler que tous les intervenants ont également
manifesté des réserves importantes quant au projet de
règlement déposé en même temps que le projet de
loi.
J'aimerais également vous rappeler que les experts qui
décident des normes réglementaires devront expliquer leur choix
à la population. Nous recommandons également d'apporter des
modifications pour réintroduire dans le projet de loi 65 la notion de
risque ou de danger pour la santé et l'environnement. Cet ajout vous
donnera, M. le ministre, les pouvoirs nécessaires et assez larges en
matière de sols contaminés. De plus, ces modifications, à
mon avis, contribueront à conserver la logique de l'actuelle Loi sur la
qualité de l'environnement.
Finalement, permettez-moi de dénoncer le fait que le ministre,
dans ce projet de loi, se donne des pouvoirs pour le moins
discrétionnaires. En effet, aucune disposition ne comporte des
obligations pour le ministre. Tous les articles relatifs à la
décontamination des sols et de l'environnement indiquent, sur la base de
la lecture que j'ai faite du projet, "que le ministre
peut demander que l'on répare les dégâts". Nous
pensons que, si le gouvernement croit vraiment en la nécessité de
restaurer l'environnement, le ministre devrait être obligé
d'exiger les études de caractérisation et la
décontamination dans tous les cas où la santé et la
sécurité de la population sont menacées.
En conclusion, M. le Président, j'aimerais encore rappeler que
nous endossons le principe de ce projet de loi, mais que nous souhaitons qu'il
ne demeure pas une coquille vide. Merci.
Le Président: Je cède maintenant la parole à
M. le député de Saguenay.
M. Ghislain Maltais
M. Maltais: Merci, M. le Président. Si le proverbe est
toujours juste que l'avenir est à ceux qui se lèvent tôt,
alors, le projet de loi 65 connaîtra un avenir fort imposant.
Brièvement, M. le Président, j'aimerais bien sûr intervenir
sur le principe de la loi 65. Cette loi qui arrive après plusieurs
années va permettre de corriger pour l'avenir ce qui va se passer au
Québec. Enfin, le principe du pollueur-payeur sera reconnu, bien
encadré et dicté aussi par une réglementation qui aura des
dents. M. le Président, la loi 65 ne viendra pas corriger ce qui a
été laissé aller au cours des 50 dernières
années. Mais la loi 65 préviendra dans l'avenir les catastrophes
qu'on a peut-être connues trop souvent, hélas! au
Québec.
J'aimerais, dans un premier temps, remercier le critique de l'Opposition
pour sa contribution en commission parlementaire, même ici à
l'Assemblée nationale. Effectivement, malgré qu'on ait des
divergences d'opinions sur certains points, le critique en matière
d'environnement et député de La Prairie a fait un travail
remarquable, positif. Et je pense qu'on doit le féliciter pour son
apport. Tout en n'étant pas totalement d'accord sur les principes qu'il
a énoncés, il a apporté quand même des choses
très positives. Je l'écoutais attentivement sur le fonds pour la
dépollution. (8 h 30)
Moi, j'ai apporté, M. le Président, au ministre une
suggestion qui, je pense, dans l'avenir, pourra être mise de l'avant,
c'est-à-dire le principe que chaque compagnie qui transite des
matières dangereuses, soit pour sa fabrication, son transport ou sa
vente, soit munie d'une assurance ou d'une caution responsabilité parce
que je ne vois pas que ce soit l'ensemble des Québécois et des
Québécoises au Québec qui aient à payer pour les
activités d'une compagnie qui a pour but de faire des
bénéfices. Or, il est évident que la responsabilité
du pollueur-payeur appartient à ceux et à celles qui transigent
dans ces matières. Et la suggestion que j'ai faite au ministre, c'est
que, lors des émissions des permis d'usine, que ce soit au niveau des
municipalités ou au niveau du gouvernement, ces certificats d'assurance
ou de caution soient bien affichés dans les usines. En cas de
désastre, on pourra se retourner, non pas vers une compagnie qui vient
de déclarer faillite, mais vers une compagnie d'assurances responsable,
une assurance contamination. Et je pense que c'est de cette façon que,
dans les autres pays, on est venu à bout de s'assurer que le principe du
pollueur-payeur soit totalement respecté.
J'ai eu l'opportunité, M. le Président, au cours du mois
de mai de faire la tournée de toutes les régions du
Québec. On s'aperçoit que tout le monde a ses produits dangereux,
tout le monde a ses produits dans chacune des régions,
particulièrement dans la mienne où on a ceux des autres. On doit
vivre avec, M. le Président. On ne viendra pas corriger par la loi 65
les BPC entreposés à Saint-Basile et transférés
à Manie 2. Ce n'est pas vrai. On ne viendra pas corriger ça. Mais
si la loi avait été appliquée en 1980, en 1979, on aurait
pu corriger, M. le député de La Prairie. On aurait pu le faire.
Malheureusement, ce n'était pas fait et on ne peut rendre collectivement
responsable la société qui a laissé aller au cours des
cinquante dernières années des actes avec lesquels on est pris
aujourd'hui. Or, le principe du pollueur-payeur va faire une chose, cependant.
C'est qu'à l'avenir, on va protéger notre collectivité
québécoise de ces désastres qu'on a connus dans le
passé. Je pense que le ministre, d'abord, pour régler les sites
orphelins, avec le principe de la loi 65 du pollueur-payeur, c'est un pas en
avant comme on n'avait jamais connu au Québec.
Il est évident qu'on voudrait immédiatement, à la
grandeur du Québec, corriger tous les sites dangereux. On ne voudrait
pas qu'il y ait d'autres Saint-Amable, d'autres Balmet, d'autres BPC de
Saint-Basile. C'est évident qu'on ne veut pas ça. Il n'y a
personne au Québec qui veut ça. Malheureusement, la loi 65 ne
pourra corriger toutes ces choses-là sauf que ce qui est important,
c'est de s'assurer qu'il n'y en ait plus dans l'avenir. C'est pour ça
que la loi 65 a des dents. Elle arrive au bon point. La nouvelle attitude qui
se développe parmi la population - et on est en mesure de s'en rendre
compte dans chacune de nos régions - c'est que les gens sont beaucoup
plus sensibles et sont prêts à passer à l'action même
dans leurs habitudes de vie et ça, il faut le reconnaître que
c'est une nouvelle philosophie qui va permettre l'application d'une loi comme
la loi 65 qui, elle, a des dents. Il est évident que la loi 65, par
exemple, ne fera pas le bonheur de toutes les entreprises.
Déjà, au Conseil du patronat, lorsqu'on est venu en
commission parlementaire, M. Dufour s'est inscrit contre le principe de la loi
65, mais le gouvernement va au-delà des responsabilités des
entreprises. Il y va de la vie humaine et la vie humaine - j'en profiterai
pour
répondre à M. Dufour - n'a pas de prix. La vie d'un enfant
n'a pas de prix. Ça vaut tout l'ensemble du Conseil du patronat. Et
là-dessus, je félicite la rigueur du ministre qui n'a pas eu peur
de l'imposer à certaines personnes qui, pour des intérêts
financiers, en particulier, étaient contre le projet de loi 65. Or,
aujourd'hui, la grande responsabilité que le ministre a, c'est bien
sûr de protéger l'ensemble des Québécois et des
Québécoises et c'est ce qu'il consacre dans la loi 65. Je suis
heureux d'entendre dire que l'Opposition va concourir, tout à l'heure,
en commission parlementaire et probablement cet après-midi à
l'adoption. Je suis heureux qu'enfin, elle ait compris ensemble qu'il faut
s'élever au-delà de la politique pour protéger la
qualité de vie qui, finalement, M. le Président, est
l'héritage qu'on donnera à nos enfants dans le futur. Merci
beaucoup.
Le Président: Or, nous allons poursuivre ce débat
avec l'intervention de M. le chef de l'Opposition.
M. Jacques Parizeau
M. Parizeau: M. le Président, même si l'heure
à laquelle nous examinons ce projet de loi en deuxième lecture
est - comment dire? - assez inédite, j'ai tenu à participer au
débat au point où nous en sommes, parce que la question me semble
avoir tellement d'importance. À bien des égards, notre
société a été lente à comprendre la
nécessité du contrôle, de l'examen, de l'observance de
normes d'environnement un peu serrées. Il y a peut-être un
phénomène de société ici à cet
égard-là.
Je me souviens encore lorsque nous avons mis en place le programme
d'épuration des eaux municipales, à la fin des années mil
neuf cent soixante-dix, à quel point le contraste était choquant
entre un Québec où 90 % des eaux municipales ne subissaient aucun
traitement, alors qu'ailleurs en Amérique du Nord, les proportions
étaient souvent inversées. Et à l'égard de la
contamination industrielle, nous sommes... Au fond, là encore, notre
société a pris des retards importants. Et je comprends que le
ministre de l'Environnement aujourd'hui, partagé en un certain sens, est
tiraillé par deux préoccupations qui sont vraiment concurrentes
pour lui. D'une part, une bonne partie de son temps et de son énergie
est consacrée à éteindre des feux. Qu'il le veuille ou
non, ce sont les circonstances qui s'imposent à lui. Et d'autre part, il
arrive à point nommé pour essayer de présenter - comment
dire? - une sorte de perspective un peu plus générale,
basée sur des pouvoirs plus importants que ceux dont il disposait
jusqu'à maintenant. Et ce n'est jamais facile d'établir une sorte
de perspective générale quand, de semaine en semaine, on
éteint des feux.
Une perspective générale, une politique
générale à l'égard de la pollution industrielle
doit comporter toute une série d'éléments qui s'appuient
les uns et les autres. Il y en a même qui disent: Au fond, il faudrait
avoir une sorte de charte de l'environnement, avec des droits et des
obligations clairement définis. Je comprends que le ministre n'en est
pas là, pour les raisons que je viens d'expliquer, et donc que, dans le
domaine de la législation, il est un peu forcé de faire ce qu'il
fait dans la vie de tous les jours, c'est-à-dire d'aller au plus
pressé. Et à cet égard, bien que ce projet de loi,
à mon sens, n'aille pas assez loin, ne comporte pas tous les
éléments qu'il devrait comporter, ne présente pas les
perspectives dont j'ai parlé tout à l'heure, néanmoins, je
pense que le ministre a besoin, de la part de tous ceux qui siègent en
cette Assemblée nationale, d'un coup de main pour au moins être
capable de franchir cette étape-là.
Il reste néanmoins que je ne peux pas m'empêcher, au moins
en quelques minutes, d'essayer un peu de tracer une perspective, parce que j'ai
l'impression que tôt ou tard, on va être amenés à
regarder systématiquement ensemble les trois volets de la perspective.
(8 h 40)
Le premier des volets a trait aux pouvoirs juridiques, simplement
juridiques, dont le ministre et le ministère de l'Environnement doivent
être dotés. Là, cependant, comme toujours dans ces domaines
juridiques compliqués, il faut avoir un certain nombre d'idées
claires, il faut faire très attention de ne pas se laisser embarquer par
des slogans.
Pollueur-payeur, ça peut vouloir dire bien des choses. Qu'est-ce
que ça veut dire exactement? Et puis surtout, pollueur-payeur, il faut
examiner ça, toujours en essayant d'avoir quelques idées un peu
claires là-dessus, il faut examiner ça pour tout ce qui est le
passé et tout ce qui est l'avenir. Ce n'est pas pareil. Il faut qu'on
fasse attention, par exemple, de ne pas projeter les dispositions qu'on peut
avoir à l'égard de l'avenir et qui peuvent aller jusqu'à
la criminalisation de certains actes et, rétroactivement, renvoyer
ça sur des entreprises qui ont posé des gestes dans le
passé, mais dans le cadre des lois et des règlements
existants.
On doit à cet égard et, inévitablement,
établir une distinction entre ce qui va se faire à partir
d'aujourd'hui et ce qui a été lait avant. Ça ne veut pas
nécessairement dire qu'on tolère ce qui a été
passé avant. Ça ne veut pas nécessairement dire qu'on
l'accepte. Ça ne veut pas nécessairement dire qu'on ne le fait
pas corriger. Ça veut simplement dire que, sur le plan juridique,
ça ne se présente pas de la même façon et il faut
que ces deux situations se traduisent dans les textes. il est clair aussi,
toujours dans l'ordre juridique, qu'il faut établir une. distinction
entre l'obligation ou bien l'intervention discrétionnaire. à cet
égard, je ne peux pas m'empêcher de
penser, je pense que le député de Bertrand y faisait
allusion tout à l'heure, que, dans le projet de loi que nous avons
devant nous, le ministre 'peut" souvent et "doit pas" très souvent. Et
Dieu sait, on le sait tous, pour tous ceux qui ont eu à administrer des
lois, à quel point il y a une différence fondamentale entre "le
ministre doit" et "le ministre peut". Dans un domaine comme celui de
l'environnement surtout, "le ministre peut", ça le rend
inévitablement - comment dire? - la cible de quantité de
pressions: Surtout, n'intervenez pas, vous savez, l'entreprise pourrait fermer;
ou bien, n'exagérez pas, l'entreprise a des difficultés
financières à l'heure actuelle, il ne faut pas pousser ça
trop loin; ou bien, n'intervenez pas parce que, de toute façon, telle ou
telle entreprise a fait des pressions directes pour nous demander que vous
n'interveniez pas.
Je ne veux pas dire par là que le ministre va invariablement
céder, mais il est évident qu'il ne peut pas ne pas tenir compte
de pressions qui peuvent lui venir de ses collègues. Encore une fois, je
ne mets pas en cause le ministre lui-même, la personne du ministre, en
disant ça. C'est le système qui veut ça. Alors que "le
ministre doit" a un tout autre sens. Permettez-moi, à cet égard,
d'établir un parallèle avec le ministre du Revenu. Le ministre du
Revenu, la plupart du temps, on ne lui dit pas "le ministre peut"; on lui dit
"le ministre doit", parce que, là, il s'agit de collecter des
impôts et on se rend compte à quel point on ne va pas être
discrétionnaire. Mais, enfin, c'est un pas.
Les dispositions, je pense, du cadre législatif que nous avons
devant nous, ne sont certainement pas aussi claires que je le souhaiterais, ne
vont pas suffisamment loin, autant, en tout cas, que je le souhaiterais. Mais
reconnaissons que c'est tout de même un pas.
Deuxième volet de la perspective: les moyens et interventions.
À cet égard, je dois dire au ministre de l'Environnement ce que
mes deux collègues qui m'ont précédé ont dit aussi,
ce que tant d'organismes, de municipalités lui ont
suggéré: il va lui falloir, au ministre, un fonds de
décontamination. Je pense que c'est inévitable, en particulier,
à l'égard du passé, pour reprendre la distinction que
j'établissais tout à l'heure. Je pense qu'on ne s'en tirera pas.
S'il n'y a pas un fonds de décontamination, le ministère de
l'Environnement va se retrouver constamment avec des feux à
éteindre, des circonstances où, de toute façon, les
pouvoirs qu'il se donne dans la loi ne lui fourniront aucun des moyens
financiers nécessaires, et il ne pourra tout de même pas aller,
chaque fois, à l'occasion de chaque feu à éteindre, voir
le Conseil du trésor pour obtenir un montant ad hoc, satisfaisant pour
une opération, et recommencer deux ou trois mois plus tard. Je pense
que, s'il y a une leçon qu'on peut tirer des quelques dernières
années, c'est justement la nécessité d'un fonds de
décontamination permettant de régler les problèmes,
insolubles sans cela, et qui se présentent au fur et à mesure
où le temps avance.
Je suis certain, M. le Président, qu'il faut discuter davantage
de cette question d'un fonds de décontamination, voir comment et par qui
il pourrait être financé. J'ai entendu, tout à l'heure, ce
que disait le député de Saguenay, et il y a quelque chose
d'intéressant. Ça pourrait être une alternative, ce que
disait le député de Saguenay, mais il faudrait examiner le type
d'assurance dont il parlait. Le concept est intéressant. Je me pose
simplement la question, mais encore il faudrait l'examiner: est-ce que c'est
bon pour l'avenir seulement? Et je pense qu'il faut répondre oui. La
formule de l'assurance est peut-être intéressante pour l'avenir.
Mais je ne suis pas certain que ça enlève la
nécessité d'un fonds de décontamination pour le
passé. On ne va pas trouver des compagnies d'assurances qui vont
accepter d'assurer des risques rétroactifs. Ça ne se fait pas
dans le domaine de l'assurance. Alors comprenons-nous bien, il peut y avoir,
là, des combinaisons de formules, toujours à partir de la
distinction que j'établissais tout à l'heure entre le
passé et l'avenir. Regardons ces choses-là, M. le
Président. C'est important. En un certains sens, sans ces moyens
d'intervention là, je pense que le ministre ne pourra pas faire tout ce
que, sur le plan juridique, le projet de loi 65 l'autoriserait de faire.
Et troisièmement, troisième aspect de ce volet, M. le
Président, la volonté politique, bien sûr, et l'efficience
du ministère. Et ça, je reconnais les intentions du ministre. Je
reconnais volontiers qu'il veut changer les choses, qu'il a pris certains
risques, par certaines de ses déclarations jusqu'à maintenant
à l'égard de son ministère, en particulier, pour essayer
de traduire sa volonté d'avancer dans ce domaine. Mais reconnaissons que
nous sommes bien loin du compte. L'épisode de la Balmet, M. le
Président, est un épisode navrant, sur le plan de l'efficience de
l'action gouvernementale. Pensons que, en gros, le phénomène de
la contamination d'un certain nombre de terrains au plomb, à la Balmet,
est connu depuis l'été 1988, par des journaux, par des reportages
de cet hebdomadaire qui s'appelle le Canada français et qui,
à la suite d'une enquête, a révélé un certain
nombre de choses, dont on pouvait peut-être trouver à
l'époque que ce n'était pas scientifique, mais dont il se
révélera, d'ailleurs, par la suite qu'il avait parfaitement
raison. Ça aura pris un an, à la suite de ces divulgations, pour
qu'on commence à faire certains prélèvements de sol, et
qu'on constate que, effectivement, la situation était assez dangereuse.
Et un an plus tard, ça prendra un an de plus pour qu'on commence les
travaux de décontamination. Deux ans. (8 h 50)
II est évident qu'on ne peut plus continuer à fonctionner
comme ça. Et, quand on voit, à
l'heure actuelle, avec quelle lenteur les choses avancent dans les sites
contaminés au plomb dans l'est de Montréal, il faut bien se dire
que, sur le plan de l'efficience, sur le plan de l'efficacité du
ministère de l'Environnement, nous sommes, à l'heure actuelle,
très très loin du compte. Et on pourra passer toutes les lois
qu'on voudra, si on n'arrive pas à améliorer l'efficacité
de ce ministère, on va se retrouver exactement dans la situation d'un
gouvernement qui aurait des lois fiscales admirables et qui ne serait pas
capable de ramasser le produit des impôts. C'est exactement ça.
Ça ne nous viendrait pas à l'idée qu'on puisse dire:
Ça prendra quatre ans pour vérifier une déclaration
d'impôt, ou ça prendra deux ans, ou bien ça sera pas du
tout. Eh bien, c'est la même chose quand on parle de la contamination au
plomb, là, comprenons bien qu'il s'agit de quelque chose d'au moins
aussi impératif pour notre société que de collecter les
taxes. Et ça, il va bien falloir, M. le Président, si le
gouvernement veut montrer le sérieux de ses intentions, qu'il mette dans
le ministère de l'Environnement l'argent, oui, le personnel, oui, du
personnel de qualité, oui, des cadres qui font fonctionner correctement
- il y en a de tous les genres, des cadres - c'est à cette
aune-là, à partir de ce test, qu'on s'assurera que les intentions
qu'on voit commencer à s'exprimer par le projet de loi que nous avons
devant nous, que le gouvernement et le ministre ont vraiment l'intention
d'aboutir.
Cela étant dit, cependant, et avec toutes les réserves que
je viens d'exprimer, M. le Président, ainsi que le critique en
matière d'environnement de l'Opposition officielle l'a dit tout à
l'heure, nous voterons en faveur de ce projet de loi en deuxième
lecture.
Le Président: II n'y a pas d'autre intervention? Alors, le
débat étant terminé, est-ce que la motion d'adoption du
principe du projet de loi 65, Loi modifiant la Loi sur fa qualité de
l'environnement, est adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Président: Adopté. M. le leader du
gouvernement.
M. Pagé: Alors, M. le Président, j'appelle
maintenant l'article 9... Ah! je m'excuse.
Renvoi à la commission de l'aménagement
et des équipements
Alors, je fais motion, M. le Président, pour que le projet de loi
que nous venons d'adopter en deuxième lecture, le projet de loi 65 sur
la qualité de l'environnement, soit déféré à
la commission de l'aménagement et des équipements, pour son
étude détaillée. Et ensuite, j'appelle l'article 9 du
feuilleton, se référant au projet de loi 59, Loi modifiant la Loi
sur la Société québécoise d'assainissement des
eaux.
Le Président: Alors, est-ce que cette motion de
déférence est adoptée?
Une voix: Adopté.
Le Président: Adopté. Est-ce que vous appelez
l'article 9, M. le leader du gouvernement?
Projet de loi 59 Adoption du principe
Alors, à l'article 9, M. le ministre de l'Environnement propose
maintenant la motion d'adoption du principe du projet de loi 59, Loi modifiant
la Loi sur la Société québécoise d'assainissement
des eaux. Je vais donc donner la parole à M. le ministre de
l'Environnement.
M. Pierre Paradis
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, M. le
Président. L'Assemblée nationale est aujourd'hui appelée
à discuter du principe du projet de loi 59, Loi modifiant la Loi sur la
Société québécoise d'assainissement des eaux.
Ce projet de loi a pour objet de modifier, compte tenu de la
constitution de la municipalité en vertu de la Loi sur la
réorganisation municipale du territoire de la municipalité de la
Côte-Nord-du-Golfe-Saint-Laurent, la désignation des
municipalités sur le territoire desquelles la Société
québécoise d'assainissement des eaux peut, à certaines
conditions, concevoir, construire, améliorer, agrandir, mettre en marche
ou financer des réseaux d'égout ou d'aqueduc ou des installations
de traitement de l'eau potable. Je souhaite, M. le Président, obtenir
l'appui unanime de cette Assemblée afin de permettre la
réalisation du programme d'intervention spéciale sur le
territoire de la Côte-Nord. Merci, M. le Président.
Le Président: Merci, M. le ministre. Je vais maintenant
céder la parole à M. le député de La Prairie.
M. Denis Lazure
M. Lazure: M. le Président, je dois dire tout de suite,
d'entrée de jeu, que l'Opposition est favorable à l'adoption du
principe de ce projet de loi... Merci beaucoup. Comme vous voyez, nous
collaborons, habituellement, surtout lorsqu'on ne nous met pas de bâillon
dans la gorge, lorsqu'on ne fait pas fonctionner le claquoir du préfet
de discipline en disant: Silence! plus de commission parlementaire! comme
ça s'est fait dans trois cas, après à peine
quelques heures de débat. Quand on n'utilise pas ces
techniques-là, l'Opposition collabore, M. le Président, de
façon exemplaire, surtout en matière environnementale, lorsqu'il
s'agit du bien-être de nos concitoyens de la Côte-Nord.
Je rappelle, durant ces brèves remarques, que la
Société québécoise d'assainissement des eaux est un
fleuron du gouvernement du Parti québécois. C'est une des
nombreuses initiatives du gouvernement du Parti québécois en
matière d'amélioration de l'environnement. Le chef de
l'Opposition y a fait allusion, tout à l'heure, dans ses remarques au
sujet du projet de loi 65. Le gouvernement du Parti québécois,
à partir de 1978, a mis sur pied un programme d'assainissement des eaux,
où il a fallu mettre les bouchées doubles, où il a fallu
investir des milliards de dollars en assumant, avec les municipalités,
jusqu'à 90 % des coûts des infrastructures. Nous avions à
réparer le retard accusé suite aux années d'administration
du Parti libéral, de 1970 à 1976, par le premier ministre actuel,
qui était premier ministre à l'époque, de 1970 à
1976, les années durant lesquelles le gouvernement
fédéral, avec l'argent de nos impôts, distribuait des
centaines et des centaines de millions de dollars à l'Ontario pour que
l'Ontario, avec ses municipalités, assainisse ses eaux municipales.
Pendant ce temps-là, le gouvernement du Parti libéral, de
1970 à 1976, avait les yeux fermés sur ce problème,
complètement fermés. Il n'avait d'yeux que pour la Baie James.
Rappelons-nous ça. Pendant qu'on n'avait d'yeux que pour la Baie James,
le gouvernement fédéral avec l'Ontario dépensait des
centaines et des centaines de millions de dollars de notre argent, si bien que,
lorsque nous sommes arrivés au pouvoir, en 1976, nous avons dû
assumer presque en entier les coûts de ce programme considérable
d'assainissement des eaux, puisque le fédéral n'avait plus
d'argent. Nous avons pris nos responsabilités. Nous avons
créé cette Société québécoise
d'assainissement des eaux qui a fait un excellent travail, qui continue de
faire un excellent travail avec les municipalités.
Et ce projet de loi, comme le ministre de l'Environnement vient de le
dire, est un projet de loi qui vient compléter à toutes fins
pratiques l'application des divers programmes d'assainissement des eaux pour
quelques municipalités de la Côte-Nord, notamment dans le
comté de Duples-sis. Je sais que mon collègue de Duplessis est
d'accord avec ce projet de loi. C'est pourquoi, au nom de l'Opposition, M. le
Président, nous concourons et nous allons voter en faveur de l'adoption
de ce projet de loi. Merci.
Le Président: II n'y a pas d'autre intervention? En
conséquence, est-ce que la motion d'adoption du principe du projet de
loi 59, Loi modifiant la Loi sur la Société
québécoise d'assainissement des eaux, est adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Président: Adopté. M. le leader du
gouvernement.
Renvoi à la commission de l'aménagement
et des équipements
M. Pagé: M. le Président, je fais motion pour que
ledit projet de loi soit déféré à la commission de
l'aménagement et des équipements pour étude
détaillée, lui aussi.
Le Président: Est-ce que cette motion est
adoptée?
M. Chevrette: Adopté.
Le Président: Adopté. (9 heures)
M. Pagé: M. le Président, j'appellerais la prise en
considération du rapport, à l'article 46, sur le projet de loi
sur la Société québécoise de
récupération et de recyclage. Il n'y avait pas d'intervention
prévue.
Le Président: C'est l'article 46 du feuilleton. Ça
s'appelait le projet de loi 60.
M. Pagé: Alors, M. le Président, j'appelle
l'article 43 du feuilleton, soit la prise en considération du rapport
sur le projet de loi 47, Loi modifiant le Code civil du Québec
concernant le partage du patrimoine familial.
Projet de loi 47
Prise en considération du rapport de la
commission qui en a fait l'étude détaillée
Le Président: Très bien. En conséquence,
nous allons maintenant procéder à la prise en
considération du rapport de la commission des institutions qui a
procédé à l'étude détaillée du projet
de loi 47, Loi modifiant le Code civil du Québec concernant le partage
du patrimoine familial.
Nous avons reçu certains amendements concernant ce rapport,
amendements présentés par Mme la ministre
déléguée à la Condition féminine et ministre
responsable de la Famille et qui concernent l'article 462.3 du Code civil,
ainsi que l'article 817 du Code de procédure civile; un troisième
amendement concerne une modification au titre du projet de loi 47. Est-ce qu'il
y a des interventions sur ce rapport? Mme la ministre...
M. Chevrette: M. le Président, juste une seconde.
Le Président: Oui, M. le leader de l'Opposition.
M. Chevrette: M. le Président, pour fins d'accommodation,
nous avons convenu que seule la ministre ferait son discours ce matin parce
qu'elle a des engagements. Et compte tenu que la critique n'y est pas, on
reportera dans le temps l'adoption du rapport comme tel. Il y aura seulement
une partie de faite.
Le Président: Alors, très bien. En
conséquence, je vais céder la parole à M. le leader du...
D'accord?
M. Pagé: M. le Président, je veux confirmer ce
qu'indique le leader de l'Opposition, effectivement, pour les deux projets de
loi proposés par Mme la ministre. J'appelle la prise en
considération de ces deux projets de loi, soit le projet de loi 47 et le
projet de loi 61. Dans les deux cas, Mme la ministre va nous livrer son
intervention et Mme la critique de l'Opposition officielle pourra intervenir
plus tard, au cours de la séance.
Le Président: Très bien. En conséquence,
nous aurons, disons, la discussion sur le rapport. Après le débat
sur le rapport de la commission, nous procéderons, à ce
moment-là, au vote sur les amendements proposés par Mme la
ministre, vote en bloc sur les amendements et, ultérieurement, au vote
sur le rapport tel qu'amendé, s'il y a lieu. Donc, Mme la ministre
déléguée à la Condition féminine et ministre
responsable de la Famille, je vous cède la parole.
Mme Violette Trépanier
Mme Trépanier: Merci, M. le Président. Le 2 mai
dernier, je déposais en cette Chambre le projet de loi 47 ayant pour
objet de clarifier certaines dispositions du Code civil du Québec en ce
qui a trait aux droits économiques des époux. Les modifications
proposées dans ce projet de loi visaient à contrer des
iniquités qui, selon certains, auraient pu résulter d'une
interprétation littérale de l'article 462.5 concernant
l'établissement de la valeur du patrimoine familial. Il était
important de clarifier la question de la plus-value acquise par un bien
possédé avant le mariage et qui fait partie du patrimoine
familial entre le moment de l'acquisition de ce bien et la date du mariage. Il
nous fallait également modifier le texte de loi pour établir
clairement que les sommes provenant de la vente de biens reçus par
succession, legs ou donation et qui servent à l'achat d'un bien du
patrimoine familial font en sorte que la valeur de ce bien remployé doit
être déduite de la valeur nette du patrimoine familial ainsi que
la plus-value afférente.
Depuis le dépôt de ce projet de loi, plusieurs intervenants
nous ont fait connaître leurs commentaires, leurs suggestions et leurs
recommandations en regard de la loi. Parmi les points soulevés, les plus
importants étaient la question du remploi des biens autres que ceux
acquis au moyen de sommes échues par succession, legs ou donation. J'ai
jugé opportun de présenter en commission parlementaire un
amendement ayant comme objectif d'étendre la déduction de la
valeur nette du patrimoine familial permise en vertu de l'article 462.5 aux
biens du patrimoine familial acquis en remploi d'un bien de même nature
possédé au moment du mariage. En plus d'accorder à un bien
du patrimoine payé avant le mariage un traitement équivalent au
remploi des biens payés au moyen de sommes provenant d'une succession,
d'un legs ou d'une donation, cette solution comporte aussi d'autres
mérites. Elle enlève un irritant pour les gens qui songent
à se remarier et qui désirent protéger le patrimoine
déjà accumulé malgré son remplacement pour le
destiner aux enfants nés de mariages antérieurs. Tout au long du
processus qui a mené aux décisions dont je viens de faire
état, mon objectif a toujours été de rechercher le plus
large consensus possible et de prendre en compte les avis exprimés par
divers organismes, notamment le Barreau du Québec, la Chambre des
notaires, le Conseil du statut de la femme et certains groupes de femmes. C'est
dans cet esprit que s'inscrivent les amendements que j'ai déposés
à la suite de l'étude article par article en commission
parlementaire.
En ce qui a trait au jugement sur le partage en cas de divorce, certains
intervenants ont fait valoir qu'étant donné le libellé du
premier alinéa de l'article 462.3, à l'effet qu'en cas de
séparation de corps, de dissolution ou d'annulation du mariage, la
valeur du patrimoine familial des époux est divisée entre eux, il
y avait risque que le tribunal ne soit pas habilité a statuer sur le
partage du patrimoine familial au moment où il prononce le jugement de
divorce. À leur avis, il ne pourrait le faire que 31 jours après
son prononcé, étant donné que la Loi sur le divorce
prévoit que le jugement de divorce ne prend effet que 31 jours
après son prononcé. Par souci de clarté, nous proposons
donc de modifier l'article 817 du Code de procédure civile pour
prévoir spécifiquement que le tribunal pourra statuer au
même moment que la séparation de corps, la nullité du
mariage ou le divorce, ou ultérieurement, si les circonstances le
justifient, sur les questions relatives au patrimoine familial et aux autres
droits patrimoniaux résultant du mariage.
À la lecture de l'article 462.3 du Code civil du Québec,
nous constatons que le législateur a prévu, avec raison, que
lorsqu'un partage a eu lieu à l'occasion d'une séparation de
corps, il n'y a pas de nouveau partage si, sans qu'il y ait eu reprise
volontaire de la vie commune, il y a ultérieurement dissolution ou
nullité de mariage. Plusieurs intervenants nous ont fait valoir que
cette disposition aurait avantage à être plus spécifique
dans le cas de second partage. Pour éviter toute confusion et clarifier
le texte, une
modification est donc proposée à l'article 462.3 pour
prévoir qu'en cas de nouveau partage, la date de reprise de la vie
commune remplace celle du mariage pour l'application des règles du
patrimoine familial.
En conclusion, les nouveaux amendements qui sont soumis à cette
Assemblée visent à clarifier les intentions du législateur
et, comme je l'ai souligné précédemment, font l'objet d'un
large consensus. Lorsqu'elle a été informée plus tôt
cette semaine de notre intention de déposer ces nouveaux amendements, la
bétonnière du Québec nous a fait part de sa satisfaction
et de sa conviction qu'ils viendraient clarifier efficacement certains aspects
de la Loi sur le patrimoine familial.
Pour ma part, je suis persuadée que grâce aux amendements
auxquels l'Opposition officielle a collaboré dans un esprit d'ouverture,
cette loi pourra rejoindre encore plus efficacement ses objectifs
d'équité. Je vous remercie.
Le Président: Alors, M. le leader du gouvernement.
M. Pagé: M. le Président, tel que convenu, je
demande l'ajournement du débat sur la prise en considération du
rapport concernant le projet de loi 47 et je...
Le Président: Alors, est-ce que cette motion d'ajournement
du débat est adoptée? Adopté. M. le leader du
gouvernement.
M. Pagé: M. le Président, je vous invite à
appeler l'article 47 du feuilleton se référant au projet de loi
61, Loi modifiant la Loi sur les services de garde à l'enfance.
Projet de loi 61
Prise en considération du rapport de la
commission qui en a fait l'étude détaillée
Le Président: Alors, l'article 47 du feuilleton. Nous
allons maintenant prendre en considération le rapport de la commission
des affaires sociales qui a procédé à l'étude
détaillée du projet de loi 61, Loi modifiant la Loi sur les
services de garde à l'enfance.
Est-ce qu'il y a des interventions? Mme la ministre
déléguée à la Condition féminine et ministre
responsable de la Famille.
Mme Violette Trépanier
Mme Trépanier: M. le Président, le projet de loi 61
modifiant la Loi sur les services de garde à l'enfance a pour but
d'inclure dans le mandat de l'Office des services de garde à l'enfance
une disposition lui permettant de remplir toute autre fonction que peut lui
confier le gouvernement.
En juin 1989, le gouvernement a annoncé que des sommes seraient
dégagées afin de défrayer les coûts associés
à l'implantation d'un régime d'assurance collective et de
congé de maternité pour le personnel des garderies. Le
gouvernement concrétisait son engagement, en janvier 1990, en confirmant
qu'une subvention équivalant à 50 % du coût d'un tel
régime, jusqu'à un maximum de 3 % de la masse salariale, sera
versée par le gouvernement aux garderies employeurs qui choisiront
d'adhérer à un tel régime. Cette subvention servira
à couvrir 100 % des coûts du programme de congé de
maternité.
Afin de respecter cet engagement, le gouvernement a confié
à l'Office des services de garde à l'enfance un mandat de preneur
et d'administrateur du régime d'assurance collective et de congé
de maternité proposé aux employés des garderies. Il a
voulu que ce soit l'Office qui effectue les travaux requis puisqu'il
était le mieux habilité à le faire. (9 h 10)
Afin de respecter l'échéance du 1er juillet 1990, date de
la mise en vigueur du régime, l'Office a procédé à
la préparation de la concrétisation juridique de ce
régime. Aussi, l'Office a préparé la modification que nous
avons adoptée en commission parlementaire lundi dernier. Il a
accepté la proposition d'assurance et il doit voir maintenant a la mise
en vigueur du régime. L'Office a rempli adéquatement la
tâche qui lui avait été confiée.
Diverses étapes ont été franchies par l'Office des
services de garde à l'enfance afin de déterminer quelle compagnie
d'assurances sera choisie. L'Office des services de garde avait
préalablement commandé une étude de faisabilité
à une firme spécialisée d'actuaires sous la supervision du
Conseil du trésor. Dans le cadre de cette étude, il a fallu
recueillir et analyser des renseignements sur les régimes d'avantages
sociaux ayant cours dans des entreprises du secteur privé de taille et
de mission similaires aux garderies. Le choix des protections s'est
effectué avec la collaboration, je tiens à le souligner, de
représentants de Concertaction inter-régionale des garderies du
Québec, de l'Association des propriétaires de garderies du
Québec et de la CSN.
En janvier 1990, un appel d'offres public a paru dans divers quotidiens.
Deux compagnies d'assurances déposèrent une proposition en bonne
et due forme. Elles furent entendues devant un comité de
sélection regroupant tant des membres de l'Office des services de garde,
du Conseil du trésor que d'un actuaire-conseil venant d'une firme
indépendante. Ce comité arrêta son choix sur la SSQ
Mutuelle d'assurance puisqu'elle avait, entre autres, déposé la
soumission la plus basse.
Comme je l'ai mentionné au début de mon intervention, le
gouvernement a confié à l'Office des services de garde à
l'enfance le mandat
d'être preneur et administrateur de ce régime. Cependant,
les fonctions et pouvoirs confiés à l'Office de par sa loi
n'incluaient pas nécessairement ces responsabilités
spécifiques. Il n'est pas démontré clairement que les
fonctions de veiller à ce que soient assurés des services de
garde de qualité, d'offrir un soutien technique et professionnel aux
personnes oeuvrant dans les services de garde ou d'accorder des subventions
comprennent le fait d'être preneur et administrateur d'un régime
tel que proposé. Il a été donc jugé essentiel de
proposer une modification à la Loi sur les services de garde à
l'enfance au plan de la sécurité juridique et ainsi éviter
toute ambiguïté d'interprétation que nécessiterait le
fait d'être preneur et administrateur d'un régime d'assurance.
Lors de la commission parlementaire, la députée des
Chutes-de-la-Chaudière a mentionné, dans ses remarques
préliminaires, son inquiétude face à l'ajout d'un article
aussi large. Je tiens à indiquer, pour le bénéfice des
membres de cette Assemblée, que la rédaction d'une formulation
aussi large permettra, dans l'avenir, d'accorder d'autres mandats jugés
nécessaires par le gouvernement afin que l'Office, qui est responsable
du développement et du contrôle d'un secteur en pleine
évolution, se dote de moyens plus efficaces pour l'avenir.
En terminant, je m'en voudrais d'oublier de vous rappeler les effets
bénéfiques que ce régime d'assurance collective et de
congé de maternité procurera à tous les employés
des garderies au Québec. Ceci est un pas en avant dans
l'amélioration de leurs conditions de travail. Je vous remercie.
Le Président: Est-ce qu'il y a d'autres interventions? Il
n'y a pas d'autres interventions. M. le leader du gouvernement.
M. Pagé: Tel que convenu, je demande l'ajournement du
débat sur la prise en considération de ce rapport.
Le Président: Est-ce que cette motion d'ajournement est
adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Président: Adopté.
M. Pagé: Et je vous invite à appeler l'article 48
du feuilleton, M. le Président, pour entendre la prise en
considération du rapport du projet de loi 70.
Projet de loi 70
Prise en considération du rapport de la
commission qui en a fait l'étude détaillée
Le Président: À l'article 48 du feuilleton, nous
allons maintenant prendre en considération le rapport de la commission
des affaires sociales qui a procédé à l'étude
détaillée du projet de loi 70, Loi concernant l'adoption et
modifiant le Code civil du Québec, le Code de procédure civile et
la Loi sur la protection de la jeunesse. Nous avons également
reçu des amendements transmis en temps utile par Mme la
députée de Marie-vïctorin. Alors, je suis prêt
à reconnaître un premier intervenant. M. le ministre
délégué à la Santé.
M. Christos Sirros
M. Sirros: Merci, M. le Président. Le projet de loi 70, M.
le Président, vise effectivement à assouplir les
procédures en matière d'adoption internationale, à
réduire un certain nombre d'étapes qui sont là
actuellement et donc, à raccourcir, finalement, les délais, M. le
Président. Ça a été discuté, comme vous le
savez, en deuxième lecture et ça a aussi reçu l'aval, en
quelque sorte, de l'Opposition. Nous l'avons étudié article par
article également en commission parlementaire et, dans sa grande
majorité, le projet de loi a été adopté sans
amendement. Je constate que la députée de Marie-Victorin voudrait
apporter quelques amendements. On en discutera, mais je suis convaincu que les
arguments qui ont été faits lors de l'étude article par
article du projet de loi, M. le Président, seront remis sur le parquet
de l'Assemblée. Le gros bon sens de ces arguments pour, finalement,
repousser, j'imagine... Les mêmes amendements qui auraient
été discutés en commission parlementaire seraient
ramenés ici.
Mais, M. le Président, ce qu'il est important de retenir de ce
projet de loi, c'est que, finalement, non seulement le projet de loi vise
à rendre les procédures plus flexibles et, ce faisant, à
raccourcir les délais, mais il devient très important, M. le
Président, de savoir que l'un des effets majeurs de ce projet de loi
sera effectivement le recentrage, en quelque sorte, du rôle que le
service gouvernemental aura à jouer dans la question des adoptions
internationales, de l'adoption des enfants hors du Québec.
M. le Président, le projet de loi permet trois voies
différentes par lesquelles on pourrait procéder pour faire
l'adoption d'un enfant né hors Québec, c'est-à-dire soit
de maintenir la situation actuelle, qui est que la personne passe par le
service gouvernemental - et je vous fais remarquer qu'actuellement c'est la
seule façon légale de procéder. Ceci change de
façon assez radicale, en ouvrant donc deux autres portes.
Premièrement, la porte d'un organisme agréé et non pas
d'un organisme reconnu, telle qu'est la situation actuelle; donc, on souhaite
aussi voir la naissance d'autres organismes qui voudraient s'impliquer dans le
domaine de l'adoption internationale, afin de permettre l'accroissement des
sources, en quelque sorte, et des contacts qu'on
peut avoir dans d'autres pays. La troisième voie, M. le
Président, qui est une voie qui a souvent été
réclamée par des parents en faisant des adoptions, c'est la voie
des contacts directs. En termes de contacts directs, ça veut dire que
les parents peuvent entreprendre eux-mêmes leurs démarches, en
demandant la vérification du ministre, afin de s'assurer, telles que
sont nos connaissances, que les procédures suivies sont les
procédures régulières dans le pays où se fait
l'adoption. Les parents pourraient, par la suite, compléter leur
adoption ici, au Québec, M. le Président, sans
difficulté.
Il y a un point sur lequel on a discuté assez chaudement, je
dirais, en commission parlementaire. J'imagine que ça va faire l'objet
des amendements de la députée, et c'est toute la question de la
possibilité, pour des tierces personnes, d'agir comme
intermédiaires dans des procédures d'adoption, M. le
Président.
Nous avons choisi, et très délibérément - et
je le disais en commission parlementaire - de ne pas retenir cette
possibilité, M. le Président, parce que, d'une part, c'est le
sens et ce sont les tendances qui existent sur le plan international où
plusieurs pays, à travers surtout, je dirais, les discussions qui se
font au niveau de La Haye, M. le Président, autour de la question de
l'adoption des enfants sur le plan international ainsi que de la protection des
droits des enfants, où le mouvement se développe de plus en plus
de ne pas permettre des intermédiaires privés, tierces personnes
agissant, afin de compléter des adoptions internationales, pour un
autre, parce que, M. le Président, la dynamique qui peut se
développer avec l'utilisation des associations à but non lucratif
est une garantie meilleure, tant pour l'intérêt des enfants que
pour l'avenir de ces enfants dans leur famille adoptive. Le choix que nous
avons fait ici, c'est que nous ne voulons pas voir l'émergence au
Québec d'un genre de carrière ou de profession, si on peut parler
ainsi, de courtier d'enfants, si je peux le libeller ainsi.
Vous comprendez, M. le Président, qu'on oeuvre dans un domaine
très émotif, dans un domaine où on touche les sentiments
les plus profonds et qu'il s'agit de s'assurer qu'on met, d'une part, toutes
les chances du côté de la défense des intérêts
de l'enfant, mais, également, de la défense des
intérêts, je dirais, des parents qui veulent adopter, M. le
Président, en s'as-surant que les choses se fassent sans l'intervention
pécuniaire qui peut en résulter en reconnaissant des individus
privés qui feraient ça non pas pour du bénévolat,
M. le Président, mais contre une certaine
rémunération.
Alors, nous sommes convaincus qu'avec de la bonne volonté et
l'appui des associations de parents, des organismes gouvernementaux ainsi que
des parents eux-mêmes, nous pourrons envisager une augmentation du nombre
des adoptions, M. le Président. Ce serait l'autre étape à
laquelle il faudrait qu'on s'attaque dans les quelques mois à venir,
c'est-à-dire d'investir nos énergies afin de s'assurer qu'on
puisse développer d'autres contacts dans les pays et les sources
d'où peuvent provenir des enfants pour les parents qui veulent adopter
des enfants nés hors Québec et de pouvoir ainsi trouver des
foyers pour les enfants qui sont abandonnés dans d'autres pays, M. le
Président, et qui pourraient ainsi envisager un meilleur avenir ici.
Je sais que la nuit a été longue pour plusieurs de mes
collègues et je ne m'attarderai pas plus sur ce point-ci. Je crois que
nous avons amplement fait la démonstration que le projet de loi
assouplit effectivement les procédures, raccourcira les délais et
augure bien pour l'émergence d'une nouvelle coopération entre les
organismes qui font de l'adoption, les associations de parents, les services
gouvernementaux et les parents eux-mêmes. Je suis convaincu que nous
oeuvrons tous, dans ce cas-ci, pour nous assurer qu'un certain nombre d'enfants
abandonnés dans d'autres pays puissent trouver un avenir meilleur ici
tout en permettant à une famille d'ici qui veut effectivement fonder une
famille avec des enfants, de combler son désir.
Sur ce, je termine et, si besoin il y a, on pourra revenir avec une
intervention à la suite des amendements de Mme la députée
de Marie-Victorin. Merci, M. le Président.
Le Président: Alors, merci, M. le ministre
délégué à la Santé et aux Services sociaux.
M. le leader du gouvernement.
M. Pagé: Alors, merci, M. le Président. Je demande
l'ajournement du débat sur la prise en considération de ce
rapport.
Le Président: Très bien. Uniquement avant
ça, je veux informer l'Assemblée que les amendements que nous
avons reçus de Mme la députée de Marie-Victorin, dont deux
amendements à l'article 12 du projet de loi qui concerne la Loi sur la
protection de la jeunesse et plus particulièrement les articles 135.1.1
et 135.1.3 de la Loi sur la protection de la jeunesse, ces amendements seront
mis aux voix à la fin du débat sur le rapport. Ils seront mis au
vote en bloc. Est-ce que la motion d'ajournement du débat est
adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Président: Adopté. M. leader du
gouvernement.
M. Pagé: Alors, M. le Président, il est 9 h 23 en
ce matin du jeudi 21 juin. Je veux remercier l'ensemble des collègues
des deux côtés de la Chambre qui, je pense, ont travaillé
de façon très utile, très sereine, très calme,
malgré le fait que la fin de session et les circonstances
nous aient obligés à siéger une séance de 23
heures et même un peu plus. Je voudrais remercier le personnel, vos
adjoints qui sont à la table, et tout le personnel qui ont dû
s'astreindre à passer une nuit. Pour moi, c'est la deuxième fois
que j'ajourne ou que je termine une séance à 9 h 15 le matin. Je
dois faire part au leader de l'Opposition que, la première fois
où j'ai terminé les travaux d'une séance à 9 h 30
le lendemain matin, c'était de ma faute, si le leader du gouvernement
avait dû faire en sorte de siéger toute la nuit. Cette
année, j'ai dû me soumettre et faire en sorte, compte tenu des
nombreuses interventions importantes, fondées de l'Opposition, de
convier l'ensemble de mes collègues à siéger
jusqu'à 9 heures. Alors, M. le Président, je vous demande, en
vous remerciant encore une fois, d'ajourner nos travaux à ce matin 10
heures.
Le Président: Alors, est-ce que cette motion d'ajournement
de nos travaux est adoptée?
Une voix: Adopté.
Le Président: Adopté. En conséquence,
l'Assemblée nationale ajourne ses travaux qui reprendront ce matin, le
jeudi 21 juin, à 10 heures.
(Fin de la séance à 9 h 24)