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Version finale

34th Legislature, 1st Session
(November 28, 1989 au March 18, 1992)

Wednesday, June 20, 1990 - Vol. 31 N° 60

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Journal des débats

 

(Dix heures dix minutes)

Le Président: Mmes et MM. les députés, nous allons nous recueillir quelques instants. Merci, veuillez vous asseoir.

Présence du Haut-Commissaire

de la république islamique

du Pakistan

J'ai le très grand plaisir de souligner la présence dans la tribune du Haut-Commissaire de la république islamique du Pakistan, Son Excellence M. Sayed Munad Ahmed Khairi.

Nous allons entreprendre les affaires courantes.

M. Pagé: M. le Président...

Le Président: Oui, M. le leader du gouvernement.

Retour du député de Bonaventure

M. Pagé: ...avant d'aborder les affaires courantes, je suis persuadé qu'il m'est permis, par l'ensemble des députés, de saluer, de souligner et de témoigner notre appréciation pour le retour du député de Bonaventure parmi nous, qui célèbre aujourd'hui son 34e anniversaire de vie politique comme député.

Des voix: Bravo!

Le Président: Nous allons entreprendre les affaires courantes.

Alors, il n'y a pas de déclarations ministérielles.

Présentation de projets de loi.

Dépôt de documents. M. le ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science. M. le leader, au nom du ministre.

Décret concernant l'approbation

du plan quinquennal d'investissements universitaires

M. Pagé: M. le Président, qu'il me soit permis, au nom de mon collègue, de déposer le décret 548-90 concernant l'approbation du plan quinquennal d'investissements universitaires pour la période du 1er juin 1989 au 31 mai 1994, tel que prévu.

Le Président: Alors, ce document est déposé. M. le ministre délégué à l'Administration et à la Fonction publique et président du Conseil du trésor.

Rapport d'étape sur le programme d'accès à

l'égalité pour les femmes de la fonction

publique du Québec et rapport annuel

de la Commission administrative des

régimes de retraite et d'assurances

M. Johnson: Oui, M. le Président, il me fait plaisir de déposer deux rapports: d'abord, le rapport d'étape sur le programme d'accès à l'égalité pour les femmes de la fonction publique du Québec et le rapport annuel 1989 de la Commission administrative des régimes de retraite et d'assurances.

Le Président: Alors, ces rapports sont déposés. M. le ministre de la Justice.

Rapport annuel de l'Office de la protection du consommateur

M. Rémillard: M. le Président, il me fait plaisir de déposer le rapport annuel de l'Office de la protection du consommateur.

Le Président: Ce rapport est déposé. M. le ministre de l'Industrie, du Commerce et de la Technologie.

Rapports annuels du Centre de recherche

industrielle du Québec et de la Société

de développement des coopératives

M. Tremblay (Outremont): M. le Président, il me fait plaisir de déposer le rapport annuel du Centre de recherche industrielle du Québec, ainsi que le rapport annuel de la Société de développement des coopératives.

Le Président: Alors, ces rapports sont déposés. M. le ministre des Transports et ministre de la Sécurité publique.

Rapports annuels du ministère des Transports et de la Commission de police du Québec

M. Elkas: m. le président, j'ai l'honneur de déposer le rapport annuel 1988-1989 du ministère des transports et le rapport annuel 1989 de la commission de police du québec.

Le Président: Ces rapports sont déposés. Mme la ministre déléguée aux Finances.

Rapport annuel sur les caisses d'épargne et de crédit

Mme Robic: M. le Président, il me fait plaisir de déposer le rapport annuel sur les caisses d'épargne et de crédit pour 1989.

Le Président: Ce rapport est déposé. M. le ministre délégué aux Mines.

Rapport annuel de la Société québécoise d'exploration minière

M. Savoie: Oui, M. le Président, il me fait plaisir de déposer le rapport annuel de la Société québécoise d'exploration minière pour l'année 1989-1990.

Le Président: Ce rapport est également déposé. M. le ministre délégué aux Forêts.

Rapport annuel de REXFOR

M. Côté (Rivière-du-Loup): M. le Président, permettez-moi de déposer le rapport annuel de REXFOR couvrant la période du 1er avril 1989 au 31 mars 1990.

Le Président: Ce rapport est déposé.

Rapport annuel de la Commission de la fonction publique

J'ai reçu le rapport annuel de la Commission de la fonction publique pour l'exercice financier terminé le 31 mars 1990. Je dépose ce document.

Rapport du Vérificateur général sur

les frais d'administration de la Commission de la fonction publique

J'ai également reçu le rapport du Vérificateur général sur les frais d'administration de la Commission de la fonction publique pour l'exercice terminé le 31 mars 1990. Je dépose ce document.

Dépôt de rapports de commissions. M. le président de la commission de l'économie et du travail et député de Laval-des-Rapides.

Étude détaillée du projet de loi 77

M. Bélanger: M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport de la commission de l'économie et du travail qui a siégé le 19 juin 1990 afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi 77, loi modifiant la loi sur les mines et la loi concernant les droits sur les mines. le projet de loi a été adopté avec des amendements.

Consultation générale sur la situation et les perspectives de l'énergie électrique au Québec

J'ai aussi l'honneur de vous déposer le rapport de la commission de l'économie et du travail qui a siégé les 8, 9, 10, 15, 16, 17, 22, 23, 24, 29, 30 et 31 mai 1990 afin de procéder à une consultation générale et de tenir des audi- tions publiques sur la situation et les perspectives de l'énergie électrique au Québec. Merci.

Le Président: Ces rapports sont déposés. M. le président de la commission du budget et de l'administration et député de Vanier.

Consultation et étude détaillée du projet de loi 229

M. Lemieux: M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport de la commission du budget et de l'administration qui a siégé le 19 juin 1990 afin de procéder à la consultation des intéressés et à l'étude détaillée du projet de loi d'intérêt privé 229, Loi modifiant la charte de Le Club de golf de Saint-Hyacinthe limitée. Le projet de loi a été adopté.

Consultation et étude détaillée du projet de loi 249

De plus, M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport de la commission du budget et de l'administration qui a siégé le 19 juin 1990 afin de procéder à la consultation des intéressés et à l'étude détaillée du projet de loi d'intérêt privé 249, Loi concernant Assurance-vie Desjardins et La Sauvegarde Compagnie d'Assurance sur la Vie Itée. Le projet de loi a été adopté avec des amendements.

Consultation et étude détaillée du projet de loi 237

Permettez-moi, M. le Président, de déposer de nouveau le rapport de la commission du budget et de l'administration qui a siégé le 19 juin 1990 afin de procéder à la consultation des intéressés et à l'étude détaillée du projet de loi d'intérêt privé 237, Loi concernant K. & M. Investments Ltd. Le projet de loi a été adopté avec des amendements.

Consultation et étude détaillée du projet de loi 253

M. le Président, j'ai l'honneur aussi de déposer le rapport de la commission du budget et de l'administration qui a siégé le 19 juin 1990 afin de procéder à la consultation des intéressés et à l'étude détaillée du projet de loi d'intérêt privé 253, Loi concernant La Laurentienne, corporation mutuelle de gestion et La Laurentienne Vie, compagnie d'assurance inc. Le projet de loi a été adopté avec des amendements.

Consultation et étude détaillée du projet de loi 247

Pour terminer, M. le Président, permettez-moi de déposer le rapport de la commission du budget et de l'administration qui a siégé le 19

juin 1990 afin de procéder à la consultation des intéressés et à l'étude détaillée du projet de loi d'intérêt privé 247, Loi concernant la Compagnie de Fiducie Impériale. Le projet de loi a été adopté.

Le Président: Puisqu'il s'agit de projets de loi d'intérêt privé, est-ce que chacun de ces rapports est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président: Adopté. Maintenant, M. le président de la commission des institutions et député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue.

Étude détaillée du projet de loi 68

M. Trudel: M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport de la commission des institutions qui a siégé les 18 et 19 juin 1990 afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi 68, Loi modifiant la Loi sur l'organisation policière et modifiant la Loi de police et diverses dispositions législatives. Ce projet de loi a été adopté avec des amendements.

Le Président: Ce rapport est déposé.

Maintenant, dépôts de pétitions. M. le député de Bertrand, au niveau des dépôts de pétitions.

Amender le projet de loi 75 conformément

aux recommandations de l'Association

provinciale des fruiteries du Québec

M. Beaulne: Merci, M. le Président. Je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale par 1777 pétitionnaires, citoyens et citoyennes de Brassard, Saint-Lambert, Saint-Hubert et Boucherville. Les faits invoqués sont les suivants: "Considérant que plus de 90 % des revenus des fruiteries proviennent de la vente de produits périssables; "Considérant que le commerce des fruiteries exige un approvisionnement quotidien qui peut comporter plusieurs arrivages; "Considérant que la minutie, la manipulation fréquente et délicate qu'exigent les produits périssables des fruiteries les oblige à une flexibilité dans le nombre d'employés requis; "Considérant que les fruiteries du Québec sont un important débouché pour les producteurs maraîchers locaux du Québec; "Considérant que les fruiteries emploient un grand nombre de jeunes et d'étudiants; "Considérant que l'ouverture des fruiteries le dimanche ajoute à la qualité de vie des Québécois et reçoit l'appui de 78 % des Québécois consultés par IQOP;"

L'intervention réclamée se résume ainsi: "Que l'Assemblée nationale intervienne auprès du ministre de l'Industrie, du Commerce et de la Technologie afin qu'il amende le projet de loi 75 sur l'ouverture des commerces le dimanche conformément aux recommandations formulées par l'Association provinciale des fruiteries du Québec."

Le Président: Cette pétition est déposée. Maintenant, M. le député de Laviolette.

Réduire les heures d'affaires et empêcher la commercialisation du dimanche

M. Jolivet: Merci, M. le Président. Je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale par 358 pétitionnaires, travailleurs et travailleuses, commerçants et commerçantes des dépanneurs Couche-Tard du Québec. Les faits invoqués sont les suivants: "Considérant que les signataires sont contre l'ouverture des commerces le dimanche;"

Et l'intervention réclamée se résume ainsi: "Que l'Assemblée nationale du Québec amende le projet de loi 75 sur les heures d'affaires tel que présenté par le gouvernement en demandant au ministre de l'Industrie, du Commerce et de la Technologie de réduire les heures en semaine et d'assurer dans les faits la protection du dimanche, tel que proposé par la coalition." Je certifie que cet extrait est conforme au règlement, M. le Président. (10 h 20)

Le Président: Cette pétition est déposée. Maintenant, M. le député de Duplessis.

Surseoir à la fermeture d'Alipêche

M. Perron: Merci, M. le Président. Je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale par 912 pétitionnaires, citoyens et citoyennes de Sept-îles. Les faits invoqués sont les suivants: "Considérant que l'usine de Sept-îles est la plus moderne sur la Côte-Nord; "Considérant que les infrastructures portuaires de 15 000 000 $ ont été investies pour appuyer l'industrie des pêches à Sept-îles; "Considérant que, géographiquement, Sept-îles est à proximité des bancs de poisson; "Considérant que plus de 200 emplois générant des milliers de dollars dans l'économie de Sept-îles disparaîtront;"

Et l'intervention réclamée se résume ainsi: "Que l'Assemblée nationale fasse le nécessaire afin que, premièrement, le ministre Pagé sursoie à la décision de fermer l'usine Alipêche; deuxièmement, qu'une rencontre soit cédulée entre les parties impliquées avant que toute décision soit prise." Je certifie que cet extrait est conforme au règlement et à l'original de la pétition. Merci, M. le Président.

Le Président: Cette pétition est déposée.

Interventions portant sur une violation de droit ou de privilège ou sur un fait personnel.

J'ai reçu en temps utile une lettre de M. le député de D'Arcy-McGee faisant part de son intention de soulever une question de fait personnel lors de la période des affaires courantes d'aujourd'hui. Dans le cadre du débat sur la motion de censure d'hier à cette Assemblée, le député allègue que Mme la députée de Chicoutimi l'aurait accusé d'avoir comparé la situation des anglophones du Québec à celle des Noirs d'Afrique du Sud. M. le député de D'Arcy-McGee désire s'expliquer brièvement sur ces faits et les rectifier.

Intervention portant sur une question de fait personnel

Je vais donc céder la parole à M. le député de D'Arcy-McGee en lui rappelant que ses remarques doivent être brèves et formulées de manière à ne susciter aucun débat. M. le député de D'Arcy-McGee.

Allégation de la députée de Chicoutimi au sujet du députe de D'Arcy-McGee

M. Robert Libman

M. Libman: Merci, M. le Président. Hier, on a attribué à mon égard des propos qui sont fortement dommageables. D'ailleurs, ce n'était pas la première fois. Et, pour cette raison, j'aimerais profiter de cette occasion, et c'est mon droit de le faire, afin d'apporter les corrections qui s'imposent.

J'aimerais souligner qu'il ne s'agit pas tout simplement de certains de mes propos qui auraient été mal nuancés ou mal interprétés; je parle de mensonges déréglés attaquant ma réputation de façon directe. Lorsque je rencontre des gens qui me reprochent d'avoir soi-disant comparé le gouvernement au régime nazi, comparé les anglophones du Québec aux Noirs d'Afrique du Sud ou souhaité l'assimilation des francophones à travers la province, je suis carrément outré et profondément insulté. Il m'est souvent impossible de déterminer la source exacte de ces rumeurs qui, vous en conviendrez avec moi, M. le Président, sont fortement préjudiciables.

Hier, pendant le débat sur la motion de censure, les paroles de Mme la députée de Chicoutimi à mon égard ont été les suivantes.* Elle a comparé le traitement que le Québec fait aux Anglo-Québécois à celui qui est fait aux Noirs d'Afrique du Sud. Elle a continué ainsi: "Quand on ose comparer la situation qui est faite aux Anglo-Québécois, ici, à la situation qui est faite dans l'apartheid de l'Afrique du Sud, c'est non seulement démagogique, mais c'est totalement irresponsable."

M. le Président, permettez-moi d'apporter les corrections qui s'Imposent. Je n'ai jamais, et en aucun moment, prononcé ce que la députée de Chicoutimi a le culot de prétendre. Le fait d'insinuer que j'aie dit quelque chose qui pouvait, à la limite même, ressembler à ces propos est une véritable abomination de la vérité, une insulte personnelle à mon égard. Mais, plus grave encore, ce genre de commentaire rabaisse l'importance de la lutte contre l'apartheid en Afrique du Sud et me semble typique d'une affirmation gratuite faite sans regard des conséquences qui pourraient en découler.

Alors, en terminant, M. le Président, pour ces raisons, je sollicite l'appui de cette Chambre en demandant à la députée de Chicoutimi de démontrer sa bonne foi en retirant ses propos.

Le Président: Alors, j'ai une demande du député de D'Arcy-McGee, est-ce que, madame... Je comprends. Comme nous avons eu aussi, cette semaine, à la même question de fait personnel, une demande, on s'est enquis auprès du ministre s'il acceptait de retirer ses propos; je demande la même chose à Mme la députée de Chicoutimi, si elle accepte de retirer ses propos. Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Blackburn: M. le Président, vous allez me permettre simplement de souligner que j'ai rapporté ce que généralement le député de D'Arcy-McGee appelle la rumeur. Alors, si ça l'offense, M. le Président, je retire mes propos.

Le Président: Très bien. Alors, l'incident est maintenant terminé. S'il vous plaît! M. le député, s'il vous plaît!

Alors, avant de passer à la période de questions et réponses orales des députés, je voudrais vous aviser qu'il y aura un vote au moment de la rubrique des motions sans préavis, vote qui requiert l'approbation des deux tiers des membres de l'Assemblée. Donc, vote au moment de la rubrique: Motions sans préavis.

QUESTIONS ET RÉPONSES ORALES

Nous allons maintenant passer à la période des questions et réponses orales des députés. Je vais reconnaître, en première question principale, M. le chef de l'Opposition.

Report de la ratification de l'accord du lac Meech

M. Parizeau: M. le Président, je veux d'abord saluer le retour en Chambre du premier ministre; j'espère que son voyage à Mystic a été pour lui une source d'inspirations utiles, singulièrement à l'égard de l'avenir ou du manque d'avenir de l'accord du lac Meech. Il a fait un certain nombre de déclarations aux journaux, là-bas, et je voudrais, ce matin, si c'est possible, pouvoir expliciter un certain nombre de choses

que nous avons entendues du premier ministre.

D'abord, le premier ministre pourrait-il nous indiquer, dans cette Chambre et, si possible, formellement, qu'il n'a pas l'intention d'accepter de reporter l'échéance du 23 juin quant à la ratification de l'accord et de la résolution d'accompagnement? Est-ce qu'il peut nous donner, dans cette Chambre, l'assurance qu'il n'est pas question de reporter l'échéance du 23 juin? Vous comprendrez, M. le Président, que je tiens à ce qu'on soit très explicite à cet égard. Nous avons reçu trois bâillons en cinq jours. Le premier ministre du Québec, à l'heure actuelle, demande au Manitoba d'établir un bâillon. Il a tout le temps voulu pour nous bâillonner dans cette Chambre pour faire passer le report du 23 juin. Alors, on comprendra, puisque nous arrivons à la fin de cette session, que je demande au premier ministre: A-t-il l'intention de nous bâillonner et de faire en sorte que la date du 23 juin soit reportée?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bourassa: Je suis également très heureux, M. le Président, de retrouver le chef de l'Opposition après quelques jours d'absence. Nous nous étions vus ensemble, côte à côte, au banquet de la Société Saint-Jean-Baptiste, jeudi soir dernier. Je suis heureux de retrouver également mon ami, le leader parlementaire. Dans ces derniers jours de session, je me sens toujours un peu plus courtois à son endroit, étant donné les consentements unanimes dont nous avons besoin pour-Une voix: Ha, ha, ha!

M. Bourassa: ...terminer à une heure raisonnable.

M. le Président, j'ai dit à plusieurs reprises que nous ne pouvions pas concevoir comment nous pourrions prolonger au-delà du 23 juin. Il y a des raisons politiques que j'ai énoncées. Ça fait quand même trois ans que nous discutons. À trois reprises, comme je le disais hier, nous nous sommes réunis, l'ensemble des premiers ministres avec le premier ministre du Canada, et, unanimement, nous nous sommes réjouis de la réintégration du Québec dans la grande famille canadienne. Nous ne voyons pas en quoi nous pourrions accepter de prolonger encore une fois ce qui a été discuté à de très nombreuses reprises. J'ai, de fait, mentionné hier qu'il m'apparaissait préférable, dans l'intérêt du Canada, dans l'intérêt du Québec, dans l'intérêt du Manitoba, dans l'intérêt des autochtones, que le Manitoba choisisse, si c'est nécessaire, de raccourcir son processus des audiences publiques de manière à sauvegarder la ratification de l'accord du lac Meech. (10 h 30)

Comme je le disais hier, gouverner, c'est choisir. Et choisir entre une décision qui met en cause, d'une façon particulièrement grave, l'unité du pays et le prolongement de ces audiences publiques pour permettre aux autochtones de donner leur point de vue, alors que ces mêmes autochtones, depuis 10 jours, empêchent la tenue de ces audiences qui auraient pu leur permettre de donner leur point de vue, je crois que le choix, dans l'intérêt du pays, m'apparaît assez simple. C'est dans ce contexte-là que j'ai répondu à des questions aux journalistes sur l'attitude que pourrait prendre le Manitoba.

Mais, nous l'avons dit, moi et le ministre responsable des affaires canadiennes et du dossier constitutionnel, il n'est pas du tout question pour le gouvernement du Québec de prolonger au-delà du 23 juin puisque c'est juridiquement irréaliste. Comment pouvons-nous penser que nous pourrions, dans trois jours, avoir 11 Parlements, 11 débats dans certains cas avec la ratification du Sénat, notamment dans le cas du gouvernement fédéral, comment penser que nous pourrions avoir 11 résolutions adoptées par 11 Parlements? La question du chef de l'Opposition est académique.

Le Président: En question complémentaire, M. le chef de l'Opposition.

M. Parizeau: M. le Président, puis-je demander si le premier ministre accepterait cependant qu'une sorte de signature rétroactive du Manitoba lui soit acceptable? C'est-à-dire que la date du 23 ne serait donc pas changée, mais on s'entendrait pour que, rétroactivement, le Manitoba, quand II sera au bout de son processus de consultations, puisse non seulement signer, mais que sa signature soit considérée rétroactivement. Il y a un scénario qui est élaboré à cet égard à l'heure actuelle; est-ce que le premier ministre y souscrit?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bourassa: Personne ne m'a parlé d'un tel scénario et je ne vois pas comment il pourrait être réalisé. Nous sommes tenus... Et, évidemment, nous avons là à examiner les implications juridiques. Il y a quelques opinions qui sont données, que le gouverneur général pourrait, possiblement, proclamer l'accord du lac Meech. Je veux dire qu'il y a toutes sortes de débats juridiques qu'on peut avoir. Mais la constitution semble claire, c'est le 23 juin qui est la date ultime et, pour prolonger au-delà du 23 juin, il faut un amendement constitutionnel, adopté par 11 Parlements, avec, évidemment, l'hypothèse que des modifications pourraient être apportées à ces résolutions. Notamment, on voudrait probablement, étant donné que, si c'était le cas, ce serait pour discuter la question des autochtones, pour inclure la question des autochtones, apporter un autre amendement, pour ce qui a trait

aux autochtones, à la clause Canada. Je sais que le chef de l'Opposition a accepté une société distincte pour les autochtones, si mon souvenir est bon. Non? Ah! Je m'excuse. Alors, il semble que... Je sais qu'au début de la rencontre il était hostile, mais, à la fin de la rencontre, il aurait accepté de leur promettre une société distincte. De toute façon, il pourrait répondre... Je suis heureux de voir que ce n'est pas tout à fait ce que les journaux ont rapporté parce que le chef de l'Opposition a toujours dit que la société distincte n'avait pas tellement d'importance...

Le Président: En conclusion, M. le premier ministre.

M. Bourassa: ...pouf le Québec, mais que la société distincte aurait de l'importance pour les autochtones. Alors, j'avais vu un autre illogisme de mon ami, le chef de l'Opposition, et je suis heureux de voir que, ce matin, il pourra clarifier son point de vue.

Ce que je dis, c'est que, si nous prolongeons au-delà du 23 juin - je termine, M. le Président; il faut quand même admettre que ce sont des questions importantes, on peut prendre quelques secondes de plus pour éclairer nos amis de l'Opposition - à ce moment-là, la question des autochtones va être à l'ordre du jour. Alors, on recommence la négociation pour un autre trois ans et le Québec veut respecter encore une fois - je termine, M. le Président - la résolution du mois d'août 1986. J'espère qu'on s'en souvient dans le Canada, qu'on s'en souvient à Terre-Neuve, qu'on s'en souvient au Manitoba; nous avons décidé unanimement en 1986 de régler d'abord la question du Québec qui avait été exclu du processus du rapatriement de la constitution...

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bourassa: ...par le gouvernement du temps. C'est ça qu'était l'objectif de la ronde du Québec et c'est ça qui doit demeurer l'objectif.

Le Président: En complémentaire, M. le chef de l'Opposition.

M. Parizeau: M. le Président, vous me permettrez simplement en commençant de dire que ce que le premier ministre a présenté comme étant ma position à l'égard des autochtones n'est pas exact Ce que je leur ai suggéré, en vertu des 15 principes de 1983 et de la résolution de 1985 de cette l'Assemblée nationale, contre laquelle les libéraux ont voté à l'époque...

Des voix: Oui! Oui!

M. Parizeau: ...ce sont des nations distinctes. cela étant dit, m. le président, je reviens à un autre scénario. à ottawa, à l'heure actuelle, on discute activement de la possibilité, après le 23 juin, de représenter l'accord du lac Meech, tous ses amendements et la résolution d'accompagnement avec un nouveau délai de trois ans et on recommence tout. Le premier ministre a fait certains commentaires, hier, à cet égard. Pourrait-il être un peu plus explicite aujourd'hui en cette Chambre? Est-ce qu'il exclut ce scénario-là?

Une voix: Oui ou non?

Le Président: Alors, M. le premier ministre.

M. Bourassa: M. le Président, nous avons dit et répété, à plusieurs reprises, que nous n'avions pas l'intention de retourner à la table constitutionnelle si l'accord du lac Meech n'était pas ratifié le 23 juin 1990, pour une raison bien simple et à laquelle je me suis référé tantôt C'est que l'objectif de cette négociation était de régler la question du Québec. Toutes les provinces, en 1981, ont pu faire des demandes et ont vu certaines de leurs demandes acceptées. Le Québec n'a pas eu l'opportunité de faire ses propositions étant donné qu'il a été exclu du processus de rapatriement. Donc, nous avons voulu rétablir, corriger, réparer cette injustice dont le Québec a été l'objet en 1981 et nous avons fait des demandes qui ont finalement été acceptées le 30 avril 1987, le 3 juin 1987 et le 9 juin 1990, à trois reprises. On a dit: On est d'accord. On va tout faire pour que ce soit accepté et on a dit que, si ça ne l'était pas, nous ne voyions pas comment nous pourrions retourner à la table de négociation si l'on rejette les demandes qui ont déjà été acceptées à trois reprises; et ça s'applique également dans le cas des autochtones. Je me suis abstenu de participer à une conférence constitutionnelle il y a trois ans parce que nous ne faisions pas partie de la constitution canadienne. C'est pourquoi j'ai dit hier aux autochtones, je leur ai dit qu'en toute logique, s'ils veulent avoir une chance de régler le problème des autochtones, qu'ils acceptent; qu'ils renoncent à tuer l'accord du lac Meech comme ils le répètent sur tous les tons depuis quelques jours; que s'ils veulent avoir une chance d'avoir le gouvernement autonome, déjà...

Le Président: En conclusion.

M. Bourassa: ...je termine là-dessus, M. le Président, et c'est quand même important qu'on accorde quelques secondes. Non, mais ce que je veux dire au chef de l'Opposition, c'est que, s'ils veulent avoir une chance d'avoir le gouvernement autonome, déjà nous l'acceptons dans les faits. Le ministre responsable des autochtones a déjà accepté dans les faits de discuter la question du gouvernement autonome. S'ils veulent la voir inscrite dans la constitution, qu'ils acceptent

l'accord du lac meech au lieu de vouloir tuer l'accord du lac meech et retarder indéfiniment la réalisation d'un de leurs objectifs les plus importants.

Le Président: En complémentaire, M. le chef de l'Opposition.

M. Parizeau: Avec un peu d'ironie, M. le Président, je pourrais dire que je suis certain que la profession de foi que vient de faire le premier ministre va impressionner les autochtones considérablement! (10 h 40)

Cela étant dit, je reviens à une autre question. Compte tenu de ce que vient de dire le premier ministre, est-ce qu'il a l'intention de demander au gouvernement fédéral, advenant l'échec de Meech, d'annuler les opérations de ce comité de la Chambre des communes qui, dès le 16 juillet prochain, doit commencer à élaborer une clause Canada dont une des sources d'inspiration du premier ministre, le constitution-naliste Daniel Proulx, disait vendredi que c'était une erreur que le premier ministre avait faite d'accepter l'élaboration de cette clause Canada qui, dans certaines circonstances, pourrait être irréparable? Le premier ministre, advenant l'échec de Meech, a-t-il l'intention de demander au gouvernement fédéral d'annuler ce comité de la Chambre des communes pour élaborer une clause Canada?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bourassa: M. le Président, je veux dire au chef de l'Opposition quand même que ma déclaration de foi pour les autochtones repose sur des faits bien concrets. Il en a parlé dans son préambule. Nous avons accepté comme principe, au gouvernement, au Conseil des ministres, le gouvernement autonome. Nous l'avons fait même en décembre 1988. On a eu l'entente en 1975, la première fois qu'il y avait une entente en Amérique du Nord entre un gouvernement et des groupes autochtones pour le développement de la Baie James. Ce sont quand même des faits concrets. Pourquoi serions-nous moins crédibles que le Parti québécois pour...

Une voix:...

M. Bourassa: Non, mais M. le... C'était dans le préambule du chef de l'Opposition, ça. M. le Président, le chef de l'Opposition vient de citer M. Daniel Proulx qui a dit que, dans la négociation que nous avons menée il y a deux semaines, le Québec avait fait des gains considérables pour ce qui a trait à la réforme du Sénat. Ça, il n'en parle pas, M. le Président. Il ne parle pas des gains considérables - et ça, c'est concret -que le Québec gardait la proportion de ses sénateurs, que l'Ontario avait accepté de renon- cer à six sénateurs. et je veux rendre hommage à m. peterson qui, ce matin, est à terre-neuve pour défendre l'accord du lac meech et la réintégration du québec.

Des voix: Bravo!

Le Président: Je vais demander la collaboration de toute l'Assemblée. M. le premier ministre, je vous demanderais de conclure rapidement, s'il vous plaît.

Une voix: Meech va aller à l'eau.

Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît! En conclusion, rapidement, M. le premier ministre.

M. Bourassa: M. le Président, ça me permet de signaler que, contrairement à 1981, le Québec n'est pas isolé. Il a l'appui de la plupart des provinces du Canada pour défendre la réintégration de l'accord du lac Meech. C'est une différence importante avec 1981.

Je termine en parlant de la clause Canada. Le gouvernement précédent - et je ne le blâme pas - avait fait preuve d'ouverture sur la clause Canada. Il avait fait preuve d'ouverture sur la formule d'amendement constitutionnel, la formule 7-50, votre fameux 7-50. Le gouvernement avait fait preuve d'ouverture, je dirais de témérité plus que d'ouverture...

Le Président: M. le premier ministre, en conclusion, s'il vous plaît!

M. Bourassa: ...évidemment, on m'a rappelé toutes les clauses Canada que le gouvernement du Parti québécois avait proposées. Lui, il pouvait en proposer des clauses Canada, mais nous, on ne pouvait même pas accepter d'en discuter. C'est ça, la différence entre les deux partis. Lui, il pouvait en proposer en parlant de monarchie constitutionnelle et moi, je ne pouvais pas accepter d'en discuter, M. le Président. Soyez donc un peu plus logiques dans vos questions.

Le Président: En complémentaire, M. le chef de l'Opposition.

M. Parizeau: M. le Président, puisqu'il n'y avait aucune raison que le premier ministre accepte de mettre à l'ordre du jour de la deuxième ronde l'établissement d'une clause Canada, puisque, en somme, c'était la règle d'unanimité - il suffisait qu'il dise non et il n'y en avait pas, dans le document d'accompagnement, d'élaboration d'une clause Canada - c'a été sa décision de faire mettre ça à l'ordre du jour. Il pouvait dire non. Il n'a pas dit non.

Alors, dans ces conditions, je lui pose la question et une question qui, fondamentalement,

est très simple. Si Meech ne passe pas, est-ce qu'il va demander au gouvernement fédéral de faire annuler le comité de la Chambre des communes qui doit commencer à préparer une clause Canada à partir du 16 juillet? C'est simple comme question, M. le Président. Pourquoi il ne peut pas répondre, le premier ministre? Oui ou non?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bourassa: M. le Président, d'abord, je m'étonne que le chef de l'Opposition... Je répondrai à sa question dans quelques secondes, mais il dit que, bon, on ne doit pas discuter de la clause Canada. J'ai dit tantôt que son gouvernement avait accepté non seulement d'en discuter, mais avait fait des propositions. Lui-même, il y a quelques jours, avec les autochtones, s'était engagé, dans une clause, dans un préambule, à ce qu'on tienne compte des autochtones. Je veux dire, dans ses discussions il pariait de nation distincte ou société distincte. En passant, les autochtones ont refusé la résolution à laquelle vous avez référé tantôt. Ils la trouvaient trop restrictive. Alors, cessez de pavoiser avec des résolutions qu'eux-mêmes ont refusées.

M. le Président, la question, pour répondre à mon ami, le leader parlementaire, j'ai refusé, jusqu'à maintenant...

Une voix: Soyez gentil.

M. Bourassa: Oui, je serai gentil et prudent avec lui. J'ai répondu, jusqu'à maintenant, que je n'ai pas l'intention d'élaborer sur des scénarios d'échec. Je comprends qu'il faudra le faire peut-être d'ici quelques heures si le Manitoba maintient son point de vue, mais je n'ai pas l'intention, alors qu'il demeure une chance très mince, je l'admets... Mais il y a deux semaines aussi, il y a des journées où tout le monde pensait que c'était fini et, le lendemain, on s'était entendus. Soyons prudents dans nos jugements. Tenons compte qu'il reste encore trois jours. Je dis au chef de l'Opposition que, lorsque nous connaîtrons le sort définitif de l'accord du lac Meech, nous aurons, à ce moment-là, l'occasion et l'opportunité de faire connaître le point de vue du gouvernement vis-à-vis des points qui intéressent le chef de l'Opposition. Je comprends très bien sa question, mais je lui dis qu'il est quelques jours en avance sur la réponse qu'il pourrait recevoir.

Le Président: En question principale, M. le député de Lévis.

Demande de rencontre avec le premier ministre par les camionneurs artisans

M. Garon: M. le Président, ma question va s'adresser au premier ministre. Par les réponses données hier par le ministre des Transports, on se rend compte que la stratégie du ministre - usée, dirait le député de Louis-Hébert - des Transports a consisté et consiste toujours à nier les problèmes des camionneurs et à tenter de discréditer les dirigeants et l'Association nationale des camionneurs indépendants.

Le ministre aurait dû reconnaître que les dirigeants de l'ANCAl ont réussi, au cours des 15 derniers jours, à garder le contrôle de plus de 2000 camionneurs autour du parlement, ou dans les endroits environnants, malgré leur insatisfaction grandissante, notamment en raison du manque de volonté du ministre des Transports de régler le conflit. Or, comme les camionneurs ont compris que le sous-ministre des Transports relevait davantage du premier ministre que du ministre des Transports et qu'ils aimeraient avoir une relation directe avec celui qui mène, ils ont demandé à avoir une rencontre avec le premier ministre.

Ma première question. J'aimerais demander s'il y a eu une rencontre hier au bureau du premier ministre concernant la grève de l'ANCAl. Si oui, quelle a été la nature des conclusions de la rencontre? Si non, est-ce qu'il doit y avoir aujourd'hui une rencontre entre le premier ministre ou quelqu'un de son bureau et les dirigeants de l'ANCAl?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bourassa: Comme je suis revenu hier, j'avais été en communication téléphonique avec mes collaborateurs qui ont eu des conversations téléphoniques avec les dirigeants des camionneurs. À ma connaissance, il n'y a pas de rencontre qui soit prévue, ou confirmée plutôt, aujourd'hui. J'aurai un Conseil des ministres qui suivra la période de questions. Sûrement que nous aurons l'occasion d'en discuter à ce moment-là. Mais le ministre des Transports a fait des propositions. À ce qu'on me dit, il y a plusieurs points qui sont réglés. Il y a eu cinq points qui ont été réglés. Donc, il y a eu des progrès dans les négociations. Ce n'est pas l'impasse totale. Il y a eu des progrès dans les négociations. Nous espérons que ces progrès se poursuivront dans les prochaines heures de manière à régler cette situation.

Le Président: En complémentaire.

M. Garon: M. le Président, comme l'ancien ministre des Transports reconnaissait l'ANCAl comme une association représentative et que le ministre actuel nie ce caractère représentatif, est-ce que le premier ministre considère que l'ANCAl est une association représentative des camionneurs artisans au Québec? (10 h 50)

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bourassa: Le député de Lévis n'a pas la tradition d'interpréter très fidèlement les propos que nous tenons de ce côté-ci de la Chambre. Parfois il les colore d'un minimum de partisane-rie. C'est compréhensible, devant la faiblesse de ses arguments, de compenser par la partisanerie. M. le Président, nous avons accepté, le ministre des Transports a accepté de discuter avec eux des dizaines d'heures ou ses représentants, ses collègues ont accepté de discuter avec eux à de très nombreuses reprises depuis deux semaines. Alors, je ne vois pas la pertinence de la question du député de Lévis.

Le Président: En complémentaire.

M. Garon: M. le Président, est-ce que le premier ministre considère que l'ANCAl est une association qui est vraiment représentative du monde du camionnage artisan au Québec ou s'il considère que l'ANCAl n'est pas assez représentative pour être reconnue comme association représentative et considérée comme telle?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bourassa: Ça applaudit un peu moins fort là, de ce côté-là. De toute façon, j'ai dit au député de Lévis que cinq des sept points avaient été réglés, qu'il restait deux points à être réglés. Et nous espérons que, dans ces deux points-là, avec tous les aspects qui peuvent être soulevés directement ou indirectement par le député de Lévis, on puisse arriver à une conclusion acceptable aux deux parties.

Le Président: En complémentaire.

M. Garon: M. le Président, est-ce que le premier ministre considère comme une proposition sérieuse de faire une commission parlementaire à la mi-septembre alors qu'il y a 2000 camionneurs à Québec depuis plus de 15 jours, 16 jours aujourd'hui, que les travaux de voirie baisseront de 42 % cette année dans les différentes régions du Québec, que plusieurs camionneurs sont menacés d'avoir une saisie de leur camion et que, s'il n'y a pas de règlement des questions ces jours-ci, plusieurs retourneront chez eux pour se faire saisir leur camion parce qu'il y a un manque d'ouvrage dans ce secteur-là? Est-ce que le premier ministre a l'intention de régler le problème tout de suite ou s'il considère que reporter des rencontres en septembre, c'est sérieux?

M. Bourassa: M. le Président... Le Président: M. le premier ministre.

M. Bourassa: ...on sait que l'Opposition, constamment, chaque fois qu'il y a un problème, n'hésite pas à proposer une commission par- lementaire et je pense que c'est un forum qui peut être approprié. Mais rien n'exclut entretemps, et le ministre l'a dit à plusieurs reprises... Le ministre fait quand même un travail très exceptionnel dans un dossier comme celui-là. C'est quand même un dossier qui est exigeant. Vous en avez connu, vous aussi, des dossiers qui n'étaient pas faciles à régler et on pourrait parler des solutions que vous avez apportées. Mais, comme je ne veux pas faire de partisanerie dans ces derniers jours de la première partie de la session, j'éviterai d'être un peu désobligeant pour mes amis d'en face.

Mais, ce que je dis, c'est qu'il n'y a pas de contradiction entre la tenue d'une commission parlementaire dans quelques semaines, au mois de septembre, et la poursuite des négociations et de la concertation d'ici ce moment-là. Je veux dire: II n'y a pas de contradiction entre les deux étapes de manière à arriver à une solution acceptable.

Le Président: Dernière question additionnelle, M. le député de Lévis.

M. Garon: Est-ce que le premier ministre considère que l'amélioration des secteurs de travail est une proposition valable de la part des camionneurs artisans puisque, comme la tarte diminue, ils aimeraient avoir une plus grosse pointe d'une tarte diminuée pour garder à peu près la même quantité de travail? Est-ce qu'il considère que c'est une demande justifiée dans une année où les taux d'intérêt augmentent ou s'il considère qu'il est mieux que tes gens fassent faillite pour que le nombre des camionneurs diminue plutôt que d'augmenter la pointe de la tarte?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bourassa: On sait qu'avec la commission parlementaire comme aboutissement l'objectif est de rechercher - étant donné les circonstances économiques qui évoluent constamment pour ce secteur comme pour d'autres - une solution durable qui s'applique à moyen et à long termes. Tout le monde est d'accord que ce n'est pas un problème facile, qu'il y a des mutations économiques qui nous forcent à nous adapter.

Cela étant dit, nous voulons poursuivre la négociation de la façon la plus intensive possible et c'est ce que le ministre fait depuis quelques semaines d'une façon la plus efficace possible et d'une façon très déterminée. Alors, je pense bien que le député de Lévis ne peut pas contredire le gouvernement sur sa volonté politique très ferme d'arriver à un règlement acceptable aux deux parties.

Le Président: En question principale, M. le député de Pointe-aux-Trembles.

Augmentation du contrat du Centre d'accueil juif

M. Bourdon: Dans le rapport du comité Bernard sur le processus d'octroi des contrats gouvernementaux, on retrouve deux recommandations significatives. Là première, c'est de faire en sorte qu'il y ait une rotation du fonctionnaire représentant la Corporation d'hébergement sur les comités de sélection dans la santé et, la deuxième, d'éliminer le critère du coût prévu des travaux pour établir le nombre des membres des comités de sélection, et de porter ce nombre à cinq dès qu'il y a un appel d'offres public. On comprend aisément la recommandation sur la rotation du fonctionnaire quand on se souvient du rôle joué par M. Vincent Rochette, ami de l'actuel ministre, militant libéral et membre de 16 comités de sélection, ayant octroyé à 14 reprises des contrats à des firmes d'allégeance libérale bien connue, dont à sept reprises...

Des voix: Ah!

Le Président: S'il vous plaît!

M. Bourdon: ...à des membres du comité de finances du premier ministre, en 1983.

Le Président: Un instant! J'ai un rappel au règlement. M. le leader du gouvernement, sur un rappel au règlement.

M. Pagé: Vous savez, ce n'est pas le fait de poser une question qui permet au député, dans le cadre du préambule, de faire jouer un disque 78 tours...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Pagé: ...qui est vieux, qui est usé. Posez-la, la question, et on va y répondre, M. le député. Plus vous allez aller vite, plus on va pouvoir répondre à un plus grand nombre de questions. C'est ça, l'efficacité des travaux parlementaires.

Le Président: Alors, sur la même question de règlement, M. le...

M. Chevrette: M. le Président, je pense... Le Président: ...leader de l'Opposition.

M. Chevrette: ...qu'un 78 tours est encore moins long que plusieurs cassettes qu'on a entendues au niveau de la période des questions, ce matin.

Des voix: Oui!

M. Chevrette: Et, je m'excuse, il y a un petit peu de décence à afficher. Un petit peu de décence, s'il vous plaît, M. le leader.

Le Président: Alors, s'il vous plaît! S'il vous plaît! Évidemment, le règlement dit: Autant la réponse que la question doivent être brèves. J'espère qu'on appliquera la même rigueur des deux côtés de l'Assemblée pour faire en sorte que les questions soient brèves et que les réponses soient brèves également. Donc, à votre question, maintenant, M. le député de Pointe-aux-Trembles.

M. Bourdon: Quant à la deuxième recommandation, on se souviendra que l'Opposition officielle avait souligné qu'on avait recours systématiquement à une sous-évaluation des coûts prévus des projets pour avoir recours à des comités de seulement trois personnes plus faciles à manipuler. Les chiffres que nous a fournis le ministre...

Le Président: Votre question, s'il vous plaît.

M. Bourdon: ...de la Santé et des Services sociaux confirment cette accusation.

Au ministre de la Santé et des Services sociaux: Est-ce que le ministre peut nous confirmer que, dans le cas du Centre d'accueil juif dont la partie structure fut accordée à M. Marcel Laurin, membre du comité de finances du premier ministre en 1983, le coût initial fixé à 9 000 000 $ est maintenant rendu à 16 500 000 $?

Des voix: Oh! Oh!

Le Président: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Côté (Charlesbourg): M. le Président, je suis très heureux, à deux jours de la fin de la session, que le député de Pointe-aux-Trembles puisse faire un baroud d'honneur. On se rappellera avec quel fracas il avait annoncé son arrivée en Chambre...

Des voix: Ah oui! Ah oui!

M. Côté (Charlesbourg): ...avec toute une série de documents qui devaient littéralement décapiter à peu près tous les membres du cabinet actuel, en particulier celui qui vous parle, et, finalement, ça s'est écrasé assez rapidement, merci. Je comprends qu'à l'occasion il faut avoir quelques satisfactions personnelles et c'est vrai aussi pour le député de Pointe-aux-Trembles. Je vais lui donner l'occasion de continuer ce matin.

Dans son préambule, il affirme à nouveau... Il n'y a rien comme un taureau qui fonce sans regarder où il va, M. le Président, il finit par se frapper sur un mur.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Côté (Charlesbourg): II annonce, ce matin: 14 contrats ont été donnés à des ingénieurs libéraux, alors que lui-même, dans une conférence de presse, reconnaissait qu'il devait y avoir deux ou trois ingénieurs péquis-tes.

Des voix: Ah! Ah!

M. Côté (Charlesbourg): Ça manque de logique un petit peu parce que, forcément, s'ils ont choisi, comme vous le dites, des libéraux, c'est qu'il y en a peut-être un petit peu plus qu'il n'y a de péquistes, comme vous l'aviez si bien dit.

Quant aux deux recommandations du comité Bernard, rotation...

M. Brassard: Ce n'est pas fort! (11 heures)

M. Côté (Charlesbourg): M. le Président, voulez-vous rappeler à l'ordre le député de Lac-Saint-Jean, s'il vous plaît? Merci. Quant aux deux questions plus fondamentales posées par le comité Bernard, c'est deux recommandations qui sont à être analysées actuellement et qui parlent de rotation du secrétaire. Nous les abordons avec beaucoup d'intérêt. Nous ferons nos recommandations à M. Benoît Morin que le premier ministre a chargé du dossier.

Quant à la deuxième, avoir cinq personnes sur des comités, je rappelle au député de Pointe-aux-Trembles que le Parti libéral, le gouvernement n'a pas attendu que le PQ soit dans l'Opposition pour faire en sorte que ce soit nous qui acceptions d'en nommer cinq. Alors que les règles gouvernementales - c'est aussi dit dans le comité Bernard - en prévoient trois, nous en nommons cinq, au-delà de 10 000 000 $.

Quant à la recommandation de cinq tout le temps, je peux vous dire que, demain matin, ça fait mon affaire et n'importe quand.

Le Président: En complémentaire, M. le député.

M. Bourdon: M. le Président, le ministre pourrait-il nous dire comment il se fait que dans le centre d'accueil juif, le coût de 9 000 000 $ est passé à 16 500 000 $ et que la première évaluation ne tenait pas compte du coût de la cuisine kascher dans un centre hospitalier juif, ne tenait pas compte du coût du stationnement, ne tenait pas compte des honoraires aux firmes professionnelles, ne tenait pas compte de l'indexation et ne tenait pas compte du coût du mobilier?

Le Président: M. le ministre.

M. Côté (Charlesbourg): M. le Président, lorsqu'on est allés en commission parlementaire, l'Opposition a utilisé le nombre maximum d'heu- res permis par le règlement pour étudier les crédits du ministère. Ce qu'il nous dit aujourd'hui, c'est moi qui le lui ai donné comme réponse. Grosse révélation, grosse trouvaille! Vous avez perdu votre temps à chercher, puisque je vous l'ai donné en commission parlementaire, sur tous les dossiers que vous avez demandés. Alors, ne pensez pas que vous révélez quelque chose de tout à fait extraordinaire, de sensationnel. Ce n'est même pas de la grosseur d'un bourdon, ce que vous avez trouvé!

Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît! Alors, en complémentaire, M. le député de Pointe-aux-Trembles.

M. Bourdon: M. le Président, une question en deux volets.

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Bourdon: Est-ce que le ministre peut nous dire s'il a enfin trouvé dans la masse de documents...

Le Président: Un instant! Je veux rappeler à l'ordre. Je ne sais pas si ça vient de ma droite, je ne peux pas identifier. Je vous rappelle à l'ordre là-dessus, je vous prierais de respecter la dignité de l'Assemblée, s'il vous plaît! Votre question.

M. Bourdon: Je vous remercie, M. le Président. Première... régulièrement... Est-ce que le ministre peut nous dire s'il a enfin trouvé, dans la masse de documents qu'il a apportés du ministère des Transports, le document que lui aurait remis M. Rochette, lors d'une instance libérale, et qui était un relevé de tous les contrats octroyés depuis des années dans le réseau de la santé et des services sociaux? Deuxièmement, le ministre peut-il nous dire si c'est parce qu'il s'occupe d'embauché et de contrats dans tous les ministères qu'il a besoin d'entretenir, dans son cabinet politique, une petite armée de 38 personnes?

Le Président: M. le ministre.

M. Côté (Charlesbourg): Alors, comme vous pouvez le constater, M. le Président, c'est un pot-pourri de questions et, évidemment, c'est un pot-pourri de fin de session pour tenter de tout ramasser, comme je vous l'ai dit tantôt, et tenter de sauver au moins le visage de celui qui a tenté d'éclabousser bien du monde.

À la première question, même si elle ne se rattache d'aucune manière à la première, quant à la liste, vous le savez fort bien, c'est une liste qui était publique et distribuée. Vous revenez pour tenter, finalement, d'en beurrer le plus large possible et de laisser des soupçons comme vous l'avez toujours fait

Deuxièmement, le ministre s'occupe des électeurs de Charlesbourg, que ça vous plaise ou pas. Le ministre va continuer de s'occuper des affaires de Charlesbourg et de défendre l'intérêt des citoyens de Charlesbourg, peu importe leur couleur politique, de la même manière qu'il a toujours répondu dans les cas - Johnson, Shef-ford, Duplessis - dans tous les cas qui lui avaient été demandés à l'époque où il était au ministère des Transports, comme à la Santé, respectant chacun des parlementaires ayant été élu démocratiquement. Ça, il va continuer de le faire.

Quant aux 38 personnes qui oeuvrent au cabinet du ministre des Transports, je vous rappelle tout simplement et très bonnement, très très bonnement, que 11 000 000 000 $, c'est le tiers du budget du gouvernement du Québec et 38 personnes pour répondre à vos demandes et à celles des citoyens, ce n'est pas beaucoup. Voilà!

Le Président: En question principale, M. le député de Lévis.

Fiches d'embauché des employés occasionnels au ministère des Transports

M. Garon: M. le Président, hier, le ministre délégué aux Transports a contredit les propos qu'il tenait en Chambre le 15 juin où il affirmait que son cabinet avait en sa possession le registre des 30 000 occasionnels afin de savoir le nom des personnes inscrites au fichier pour transmettre cette information aux députés. Qu'est-ce qu'il disait le 15 juin? Il disait: II est tout à fait normal, quand un député ou une députée en cette Chambre nous appelle afin de savoir si un employé occasionnel parmi les quelque 30 000 employés occasionnels qui sont inscrits au registre, veut savoir, par exemple, quel est l'ordre de priorité dans lequel ils sont classés - est-ce qu'ils sont 150e, 200e, 300e, 600e sur la liste - il faut qu'on puisse disposer de cette information. Alors cette information est effectivement colligée à l'intérieur de mon cabinet afin d'en transmettre l'information auprès de la deputation qui, à juste titre, comme on le mentionnait tantôt, peut obtenir de l'information sur l'état d'un dossier d'un commettant. Et hier, M. le Président, il a dit qu'il ne recevait pas toutes les demandes d'emploi faites au ministère des Transports. Il a dit: "Mon cabinet ne reçoit pas toutes les demandes d'emploi occasionnel qui sont faites à l'intérieur des différents districts ou des différentes régions." Alors, M. le Président...

Le Président: Un instant, s'il vous plaît! Je vais demander la collaboration et l'attention de tous les membres de l'Assemblée, s'il vous plaît. Votre question, M. le député de Lévis.

M. Garon: Ma question est très simple. Le ministre peut-il nous dire la vérité? Les fiches d'embauché du personnel occasionnel au ministère des Transports sont-elles acheminées et centralisées à son cabinet comme il nous l'a dit la semaine dernière ou si elles ne sont pas toutes envoyées à son cabinet comme il l'a dit hier? C'est oui ou non?

Le Président: M. le ministre délégué aux Transports.

M. Vallières: M. le Président, vous me voyez déçu que le député de Lévis soit en quatrième question seulement, aujourd'hui. Je m'attendais qu'il soit mieux considéré. M. le Président, je veux répéter au député de Lévis ce que je lui ai déjà dit. On ne dispose pas au cabinet, chez nous, des 30 000 demandes qui sont actuellement fichées à la Direction des ressources humaines du ministère des Transports. C'est bien clair, M. le Président.

Je veux indiquer également et je rappelle au député de Lévis que, face à ses interrogations vis-à-vis du droit que j'ai, comme ministre, d'obtenir des fiches nominatives comme celles que le Parti québécois a rendues publiques récemment, c'a été confirmé encore hier en entrevue téléphonique par le président de la Commission d'accès à l'Information, oui, le ministre avait le droit d'avoir ces fiches en sa possession.

Je répète au député de Lévis que ça me paraît important que ces fiches, un nombre limité qu'on a en main, nous servent à bien informer la deputation. Et quand une demande nous arrive sur un fichier qui date de 1986, 1987 ou 1988, on va à la Direction des ressources humaines pour obtenir l'information requise. De la même manière, M. le Président, que je disais hier qu'il est important qu'on puisse donner une information de qualité à la deputation, j'indiquais récemment que le député de Shefford m'avait fait une demande verbale. On va tenter d'y répondre.

M. le Président, il y a aussi des députés qui font des demandes écrites au ministre des Transports afin de s'enquérir de l'état de certains dossiers. Je vous disais qu'on traitait les dossiers par ordre d'ancienneté, par ordre d'inscription au fichier. Je veux, M. le Président, pour appuyer mes propos, indiquer en cette Chambre qu'il y a des députés qui le font. Ils font bien leur travail d'ailleurs. Je ne veux pas les beurrer avec ça. Ça me rappelle, entre autres, que le député de Duplessis...

Une voix: Ah non!

Le Président: En conclusion, M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Vallières: ...s'est déjà adressé à mon prédécesseur, M. le Président...

Le Président: En conclusion.

M. Vallières: ...oui en concluant, par écrit, concernant l'inscription au fichier ministériel d'un électeur de son comté...

Des voix: Ah! Ah!

M. Vallières: ...qui lui disait que c'était sa seule ressource pour obtenir gain de cause. Il s'était adressé à mon prédécesseur en mars 1989 et précisément sur une erreur de deux ans dans un dossier, M. le Président, une erreur de deux ans qu'a pu corriger mon collègue aux Transports à l'époque, j'ai ici, la lettre, M. le Président. Je veux la déposer. On a corrigé le problème. Ça témoigne de l'importance que les cabinets politiques aient un minimum d'informations afin de corriger des erreurs qui pourraient pénaliser des individus une vie de temps, M. le Président.

Des voix: Bravo! Bravo! Bravo!

Le Président: j'ai bien compris, m. le ministre, que vous vouliez déposer le document? est-ce qu'il y a consentement au dépôt du document?

Une voix: Oui, oui, oui.

Une voix: N'Importe quel temps. (11 h 10)

Le Président: Très bien. S'il vous plaît! Le document est déposé. Question... M. le ministre, oui.

M. Vallières: Je veux simplement indiquer qu'il y a dans la lettre du député de Duplessis des informations nominatives et, donc, les gens qui en feront usage pourront le faire en toute connaissance de cause.

Le Président: Ce document est déposé. En question complémentaire, M. le député de Lévis.

M. Garon: M. le Président, comment le ministre peut-il expliquer que certaines fiches sont dans son cabinet et que d'autres n'y sont pas? Qu'est-ce qui fait que des fiches se retrouvent à son cabinet et que d'autres restent au ministère? Quelle est la logique du système? Comment le ministre peut-il justifier l'existence d'un double système d'embauché, un à partir du cabinet et un autre au ministère?

Le Président: M. le ministre délégué aux Transports.

M. Vallières: M. le Président, je suis à la veille d'inviter le député de Lévis à venir passer une journée à mon cabinet, pour voir toute la procédure qu'on utilise dans le traitement des dossiers.

M. le Président, je veux immédiatement profiter de cette deuxième question du député de Lévis pour corriger ce qu'il disait hier, à l'effet que celui qui vous parle n'aurait pas le droit d'avoir en sa possession des fiches du type de celles qui ont été rendues publiques par sa formation politique. J'ai le "transcript" de ce que disait hier le président de la Commission d'accès à l'information; il disait: "Alors, on parle actuellement dans un cas qui fait les manchettes évidemment d'un ministère. Il est évident que le ministre titulaire d'un ministère, au sens de notre loi, est définitivement une personne qui a qualité pour recevoir les renseignements au sein d'un organisme."

Je pense, M. le Président, que ça contredit les propos du député de Lévis et le député de Lévis essaie encore, sur la mauvaise voie malheureusement, parce qu'il s'était acharné récemment à démontrer que je n'avais pas le droit d'avoir en ma possession des fiches nominatives, ce qu'on a démontré maintenant.

Pour ce qui est, M. le Président, de savoir comment on fonctionne dans le traitement des dossiers à l'Intérieur d'un cabinet, II le sait pertinemment bien, M. le Président. Je pense qu'il a déjà été ministre dans un gouvernement et il sait très bien que les cabinets s'organisent du mieux qu'ils le peuvent, M. le Président, pour répondre en priorité, entre autres, aux députés qui s'intéressent à certains dossiers, de môme qu'à certains électeurs et électrices qui sont en droit de le faire, M. le Président.

Une voix: C'est ça.

Le Président: C'est la fin de la période de questions. Il n'y a pas de votes reportés. Cependant, je vous rappelle que nous aurons probablement un vote aux motions sans préavis. Je vais donc reconnaître, pour cette motion, M. le leader du gouvernement, au nom du premier ministre.

M. Pagé: M. le Président, au nom du premier ministre et député de Saint-Laurent, conformément aux articles 5 et...

Le Président: Un instant! Je vais requérir l'attention des gens. C'est une motion importante puisque les deux tiers des votes de l'Assemblée sont nécessaires à son adoption. Je pense que tous les députés méritent bien de pouvoir entendre la motion et tout le monde doit donc écouter. M. le leader du gouvernement.

Nomination de membres de l'Institut de recherche et d'information sur la rémunération

M. Pagé: Merci, M. le Président. Je vous disais qu'au nom du premier ministre et député de Saint-Laurent, conformément aux articles 5 et 8 de la Loi sur le régime de négociation des conventions collectives dans les secteurs public

et parapublic, je propose que Mme Nicole P. Gendreau soit nommée membre du conseil d'administration et présidente de l'Institut de recherche et d'information sur la rémunération pour un mandat de cinq ans à compter d'aujourd'hui, le 20 juin 1990; que Mme Hélène Wavrock soit nommée de nouveau membre du conseil d'administration et vice-présidente de l'Institut de recherche et d'information sur la rémunération pour un mandat de cinq ans à compter du 20 juin 1990; que M. Louison Ross soit nommé membre du conseil d'administration et vice-président de l'Institut de recherche et d'information sur la rémunération pour la durée non écoulée du mandat de la vice-présidente à remplacer, soit du 20 juin 1990 au 30 novembre 1993; que, conformément à l'article 7 de cette loi, M. Louison Ross soit nommé à nouveau membre du conseil d'administration et vice-président de l'Institut de recherche et d'information sur la rémunération, pour un mandat se terminant le 19 juin 1995.

Le Président: Nous allons procéder au vote sur cette motion. Donc, nous appelons les députés. (11 h 15 - 11 h 16)

Le Président: Mmes et MM. les députés, veuillez prendre place s'il vous plaît. Alors, nous allons maintenant mettre aux voix la motion présentée par M. le leader du gouvernement au nom de M. le premier ministre. Que ceux et celles qui sont en faveur de cette motion veuillent bien se lever s'il vous plaît!

Le Secrétaire adjoint: M. Pagé (Portneuf), M. Bissonnet (Jeanne-Mance), Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François), M. Paradis (Brome-Missisquoi), M. Levesque (Bonaventure), Mme Bacon (Chomedey), M. Ryan (Argenteuil), M. Côté (Charlesbourg), M. Bourbeau (Laporte), M. Valle-rand (Crémazie), M. Côté (Rivière-du-Loup), M. Vallières (Richmond), M. Savoie (Abitibi-Est), M. Séguin (Montmorency), M. Tremblay (Outremont), M. Rémillard (Jean-Talon), M. Cherry (Sainte-Anne), Mme Robic (Bourassa), M. Dutil (Beauce-Sud), Mme Frulla-Hébert (Marguerite-Bourgeoys), M. Elkas (Robert-Baldwin), M. Lefebvre (Frontenac), M. Johnson (Vaudreuil), M. Cusano (Viau), M. Picotte (Maskinongé), M. Ciaccia (Mont-Royal), Mme Robillard (Chambly), M. Blackburn (Roberval), Mme Bleau (Groulx), M. Houde (Berthier), M. Maciocia (Viger), M. Maltais (Saguenay), M. Rivard (Rosemont), Mme Trépanier (Dorion), M. Middlemiss (Pontiac), M. Beaudin (Gaspé), Mme Dionne (Kamouraska-Témiscouata), M. Hamel (Sherbrooke), M. St-Roch (Drummond), Mme Pelchat (Vachon), M. Marcil (Salaberry-Soulanges), M. Lemire (Saint-Maurice), M. Leclerc (Taschereau), M. Poulin (Chauveau), M. Thérien (Rousseau), M. Tremblay (Rimouski), M. Benoit (Orford), M. Williams (Nelligan), M. Kehoe (Cha-pleau), M. Doyon (Louis-Hébert), M. Fradet (Vimont), M. Lemieux (Vanier), M. Messier (Saint-

Hyacinthe), M. Richard (Nicolet-Yamaska), M. Charbonneau (Saint-Jean), Mme Bégin (Belle-chasse), M. Bélanger (Laval-des-Rapides), M. Gauvin (Montmagny-L'Islet), M. Chenail (Beauharnois-Huntingdon), M. Gautrin (Verdun), M. Larouche (Anjou), M. Khelfa (Richelieu), M. Gobé (LaFontaine), Mme Hovington (Matane), M. Joly (Fabre), M. LeSage (Hull), M. Bergeron (Deux-Montagnes), M. Bordeleau (Acadie), Mme Boucher Bacon (Bourget), M. Audet (Beauce-Nord), M. Parent (Sauvé), Mme Bélanger (Mégantic-Compton), M. Camden (Lotblnlère), M. Brouillette (Champlain), M. Bradet (Charlevoix), Mme Cardinal (Châteauguay), M. Després (Limoilou), M. Farrah (Îles-de-la-Madeleine), M. Forget (Prévost), Mme Loiselle (Saint-Henri), M. Lafrenière (Gatineau), M. Lafrance (Iberville), M. MacMillan (Papineau), M. Parizeau (L'Assomption), M. Chevrette (Joliette), M. Perron (Duplessis), Mme Blackburn (Chicoutimi), Mme Marois (Taillon), M. Garon (Lévis), Mme Harel (Hochelaga-Maisonneuve), M. Jolivet (Laviolette), M. Baril (Arthabaska), Mme Juneau (Johnson), M. Dufour (Jonquière), M. Lazure (La Prairie), M. Gendron (Abitibi-Ouest), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Léonard (Labelle), Mme Vermette (Marie-Victorin), M. Paré (Shef-ford), M. Claveau (Ungava), M. Boulerice (Sainte-Marie-Saint-Jacques), M. Morin (Dubuc), Mme Caron (Terrebonne), M. Boisclair (Gouin), M. Bourdon (Pointe-aux-Trembles), M. Trudel (Rouyn-Noranda-Témiscamingue), Mme Dupuis (Verchères), M. Beaulne (Bertrand), Mme Carrier-Perreault (Les Chutes-de-la-Chaudière), M. Libman (D'Arcy-McGee), M. Holden (Westmount), M. Atkinson (Notre-Dame-de-Grâce), M. Cameron (Jacques-Cartier).

Le Président: Y en a-t-il qui s'opposent à la motion? Y a-t-il des abstentions?

Le Secrétaire: pour: 114 contre: 0

Le Président: Alors, la motion est adoptée. Nous allons maintenant passer aux avis touchant les travaux des commissions.

Avis touchant les travaux des commissions

M. Pagé: M. le Président.

Le Président: Oui, M. le leader du gouvernement.

M. Pagé: Avant que le leader adjoint ne donne les avis pour aujourd'hui, pourriez-vous demander aux députés de demeurer et d'être attentifs compte tenu qu'il y a de nombreux avis et que tout le monde va s'en porter mieux et le fonctionnement du Parlement aussi?

Le Président: Je suis complètement d'accord avec vous, d'autant plus qu'on souligne, chaque

jour, cette même disposition à savoir que les députés devraient écouter. À tous les jours, après que les avis sont donnés, il y a un ou deux députés qui viennent au fauteuil de la présidence ou même à la table en demandant: Pouvez-vous me dire à quel endroit telle commission va siéger et à quelle heure? C'est plus facile que chacun écoute en demeurant à sa place.

Donc, M. le leader adjoint du gouvernement, pour les avis touchant les travaux des commissions.

M. Lefebvre: M. le Président, alors j'avise l'Assemblée qu'aujourd'hui, après les affaires courantes, jusqu'à 13 heures, de 15 heures à 18 heures et de 20 heures à minuit, à la salle du Conseil législatif, la commission des affaires sociales procédera à l'étude détaillée du projet de loi 76, Loi modifiant la Loi sur la sécurité du revenu et la Loi sur la santé et la sécurité du travail.

De 15 heures à 18 heures, à la salle Louis-Hippolyte-Lafontaine, la commission du budget et de l'administration procédera à l'étude détaillée du projet de loi 78, Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant les régimes de retraite des secteurs public et parapu-blic.

De 20 heures à minuit, à la salle Louis-Hippolyte-Lafontaine, la commission de l'économie et du travail procédera à l'étude détaillée des projets de loi suivants, et ce, dans l'ordre ci-après indiqué: le projet de loi 63, Loi modifiant la Loi sur le Centre de recherche industrielle du Québec; le projet de loi 56, Loi modifiant la Loi sur la Société des alcools du Québec et d'autres dispositions législatives.

J'avise également cette Assemblée qu'aujourd'hui, après les affaires courantes, jusqu'à 13 heures, de 15 heures à 18 heures et de 20 heures à minuit, à la salle Louis-Joseph-Papineau, la commission de l'aménagement et des équipements entendra les intéressés et procédera à l'étude détaillée des projets de loi d'intérêt privé suivants, et ce, dans l'ordre ci-après indiqué: projet de loi 205, Loi concernant le Bureau des délégués spécial des municipalités régionales de comté de Vaudreuil-Soulanges, de Beauharnois-Salaberry et du Haut-Saint-Laurent; le projet de loi 243, Loi concernant le régime de rentes de ville de Laval; le projet de loi 200, Loi modifiant la charte de la ville de Montréal; le projet de loi 259, Loi concernant la municipalité de Deschambault et la municipalité de la paroisse Notre-Dame-de-Portneuf; le projet de loi 221, Loi concernant la ville d'Anjou; le projet de loi 248, Loi concernant la ville de Victoriaville.

Ces avis, M. le Président, annulent ceux donnés le 12 juin en ce qui concerne le projet de loi d'intérêt privé 257, Loi concernant la Régie intermunicipale de gestion des déchets sur IHe de Montréal. Merci, M. le Président.

Le Président: Merci, M. le leader adjoint du gouvernement.

Aux renseignements sur les travaux de l'Assemblée, est-ce qu'il y a des questions?

Une voix: Non.

Le Président: II n'y a pas de questions.

Nous allons maintenant procéder aux affaires du jour. Si vous voulez m'indiquer le premier sujet qui fera l'objet de nos débats, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Lefebvre: L'article 51 du feuilleton, M. le Président.

Le Président: À l'article 51 du feuilleton... Je prierais les députés de quitter le plus rapidement possible, s'il vous plaît!

Projet de loi 75 Adoption

Alors, Mmes, MM. les députés, nous allons maintenant procéder aux affaires du jour. À l'article 51 du feuilleton, M. le ministre de l'Industrie, du Commerce et de la Technologie propose la motion d'adoption du projet de loi 75, Loi sur les heures et les jours d'admission dans les établissements commerciaux. Je suis prêt à reconnaître un premier intervenant. Alors, M. le ministre de l'Industrie, du Commerce et de la Technologie.

M. Gérald Tremblay

M. Tremblay (Outremont): Nous sommes aujourd'hui rendus, M. le Président, à l'étape finale du projet de loi 75 sur les heures et les jours d'admission dans les établissements commerciaux, soit l'adoption du projet de loi. Cette étape mettra fin à une situation inéquitable qui a cours depuis trop longtemps dans le secteur du commerce de détail.

Au début de la commission publique et de la consultation publique, je mentionnais qu'il était essentiel de garder une ouverture d'esprit constante dans la recherche d'une solution et que la solution retenue devait permettre aux consommateurs, aux travailleurs et aux commerçants d'être gagnants. Dès le départ, je savais qu'aucune solution ne pourrait rallier le consensus de tous les intervenants puisque les intérêts étaient diamétralement opposés. Toutefois, tous les intervenants sans exception ont eu la possibilité de faire valoir publiquement leur position.

Après plus de 160 heures de consultation, personne ne peut me reprocher de ne pas avoir été à l'écoute. Jusqu'à la dernière minute, j'ai discuté de la solution retenue avec les 92 membres de la deputation ministérielle et avec

les groupes impliqués dans le dossier qui sont représentatifs de toutes les régions du Québec. Les discussions ont été franches et honnêtes. Une décision a été arrêtée et c'est le résultat législatif que nous adoptons aujourd'hui.

Gouverner, c'est décider, comme le dit si souvent la députée de Taillon. J'ai donc fait un choix. Le choix que j'ai fait est une synthèse du point de vue de tous les intervenants et un équilibre entre les trois principes fondamentaux que je ne cesse de répéter depuis six mois, soit l'équité entre tous les commerçants, les besoins réels des consommateurs et la qualité de vie de la population, notamment celle des travailleurs et des travailleuses.

Ces trois principes trouvent leur application dans la nouvelle loi. Premièrement, tous les commerçants dans le secteur de l'alimentation sont maintenant égaux devant la loi. Les règles du jeu sont claires et sont les mêmes pour tous. Deuxièmement, le consommateur, que l'on a tendance trop souvent à oublier, pourra maintenant satisfaire ses besoins réels dans tous les secteurs en pouvant magasiner huit heures additionnelles sur semaine. Quant à ses besoins de base dans le secteur plus particulier de l'alimentaire, le consommateur aura droit à un meilleur service hors les heures normales, tel le dimanche, mais ce service sera offert dans un concept de dépannage. Il pourra donc s'approvisionner en denrées alimentaires quand il le voudra, où il le voudra, au prix qu'il le voudra. (11 h 30)

Enfin, le troisième principe, la qualité de vie de la population, notamment celle des travailleurs et des travailleuses. Le projet de loi consacre le principe d'une journée de repos et limitera au minimum le nombre d'employés appelés à travailler hors les heures normales dans le secteur du commerce. La nouvelle Loi sur les heures et les jours d'admission dans les établissements commerciaux, M. le Président, est une loi uniforme qui s'applique à l'ensemble du territoire du Québec. Pour en assurer l'application, le ministre de l'Industrie, du Commerce et de la Technologie partagera avec les municipalités les pouvoirs d'inspection, ce qui permettra d'accélérer l'audition des infractions en Cour municipale.

L'augmentation de façon importante des amendes aura de plus un effet dissuasif certain. Nous avons maintenant, M. le Président, une loi applicable, gérable et durable, une loi adaptée à la réalité d'aujourd'hui. Je remercie tous ceux et celles qui ont participé avec moi à la recherche d'une solution et à l'élaboration du projet de loi. Je mentionnerai plus particulièrement les membres de la commission de l'économie et du travail, les avocats du comité de législation et du bureau des lois, les fonctionnaires et les membres de mon ministère, et plus particulièrement une collaboratrice de mon cabinet. M. le Président, le moment est venu de passer à d'autres choses tout aussi importantes. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le ministre. Je reconnais maintenant la prochaine intervenante, au nom du groupe parlementaire de l'Opposition officielle, Mme la députée de Taillon. Mme la députée.

Mme Pauline Marois

Mme Marois: Merci, M. le Président. Après avoir fini un peu tôt ce matin, je dirai cependant que c'est enfin en plein jour que l'on va discuter d'un projet de loi qui concerne des milliers de personnes au Québec. Parce que, pour les fins de nos débats, et pour les gens qui nous écoutent, nous avons longuement discuté du projet de loi sur les heures d'affaires, mais nous l'avons fart plutôt la nuit, alors que personne ne nous entendait. Nous en sommes à la troisième lecture et j'ai encore un mince espoir - et je peux l'avoir - qu'il n'est peut-être pas trop tard pour désespérer, pour faire en sorte que le ministre entende enfin la voix de la majorité, pour que le ministre soit sensible à un dernier cri d'alarme. Ou peut-être qu'il pense comme l'une de ses collègues qui lui disait, vendredi dernier: Ne t'en fais pas. Ce n'est qu'un mauvais moment à passer.

Oui, vous avez raison. Probablement, M. le Président, que pour le ministre, c'est un mauvais moment à passer. C'est bien sûr que c'est un moment un peu triste parce que l'Opposition qui essaie de faire entendre la voix de la majorité s'est sentie et se sent toujours, M. le Président, bâillonnée par les procédures que l'on a utilisées ici, à l'Assemblée nationale, pour éviter le débat, M. le Président. Alors, bien sûr, pour le ministre, je le répète, c'est un mauvais moment à passer. Mais vous poserez la question à ceux et celles qui vont travailler le dimanche et ils vont être de plus en plus nombreux; et je ne le souhaiterais pas, mais je sais que l'avenir, malheureusement, me donnera raison. Vous leur demanderez, M. le Président, vous demanderez au ministre qu'il leur demande si, pour eux, c'est un mauvais moment à passer qui n'est pas un peu long, M. le Président.

Je crois que c'est bien mal démarrer sa carrière politique, puisque le ministre a été élu il y a à peine un an, même pas un an, de procéder dans une première loi importante avec un bâillon. On empêche l'Opposition de faire son travail. On empêche l'Opposition d'être la porte-parole, non pas d'une minorité, M. le Président, non pas d'un "lobby", mais d'une majorité, M. le Président.

Et je vais prendre tout mon temps, M. le Président, pour redire ce matin, j'espère patiemment - mais, vous savez, la patience a ses limites, comme en toute chose - que je ne partage pas le choix de société dans lequel le ministre veut nous engager. Et je suis persuadée,

M. le Président, que des milliers de travailleurs et de travailleuses, de consommateurs et de consommatrices, de propriétaires de leur entreprise pensent aussi comme moi. Le ministre, par la loi qu'il nous propose d'adopter, nous engage dans un modèle de société qui n'est pas le nôtre, qui est beaucoup plus près du modèle américain où consommation et production prennent le pas sur d'autres valeurs qui sont pourtant beaucoup plus significatives et sûrement beaucoup plus importantes pour l'ensemble de notre vie collective. Ce sont des valeurs d'échanges, de communication entre les personnes, de ressourcement culturel, de loisirs, et cela, pour permettre au plus grand nombre de les exercer en même temps, au même moment.

Je dis au ministre qu'il serait souhaitable, préférable, et que nous voudrions qu'une journée dans la semaine soit davantage réservée à une préoccupation qui va concerner plus l'être que l'avoir. Est-ce que c'est trop demander, M. le Président? Parce que, chaque fois, d'une façon pernicieuse, dans les discours que j'ai entendus, on a laissé entendre que la position que défendait l'Opposition, que la position que nous défendions, était quétaine, qu'elle était réactionnaire, qu'elle était un regard vers le passé. Je n'ai jamais eu l'impression que j'étais quétaine quand je défendais des valeurs. Je n'ai jamais pensé que je pouvais être réactionnaire à défendre les besoins des travailleurs et des travailleuses, et aussi la réalité des consommateurs et des consommatrices.

En fait, le ministre nous répète ad nauseam que l'Opposition ne prend fait et cause que pour les travailleurs et les travailleuses et un certain groupe de commerçants. Remarquez que je vous dirai que c'est déjà pas mal et que, à choisir entre défendre les intérêts de ceux et celles qui ont souvent des conditions de travail précaires, qui doivent mettre les bouchées doubles pour maintenir leur commerce à flot, à choisir entre ceux-là et celles-là et tous les B.C.B.G. de ce monde en mal de vivre et de consommer, je sais de quel côté je me loge.

Et, pour rassurer le ministre, je vais lui en parler, des consommateurs et des consommatrices. Parce que, toujours, toujours, il y revient et encore hier soir: Vous préoccupez-vous des besoins des consommateurs et des consommatrices? Vous savez, M. le Président, là-dessus non plus, je n'ai pas trop de leçons à recevoir. L'une de mes premières fonctions a été d'être impliquée, auprès de consommateurs et de consommatrices, dans une ACEF. Une ACEF, c'est une Association coopérative d'économie familiale qui se préoccupe de défendre et de protéger les intérêts de consommateurs. J'ai fait de l'animation. J'ai fait de l'information. J'ai travaillé avec des gens qui vivaient des situations pénibles. J'ai fait de l'éducation budgétaire et j'ai même fait de la consultation budgétaire. J'ai aidé des gens à monter des budgets. J'ai aidé des gens à faire une planification de bouts de chandelle parce qu'ils étaient mal pris, parce qu'ils ne savaient pas comment se sortir du merdier de l'endettement.

Ces mêmes ACEF sont venues témoigner en commission parlementaire et nous ont présenté un point de vue - je dirais comme certains de mes collègues - rafraîchissant, un point de vue qui est celui, probablement plus profond, de ce que nous sommes justement comme personnes qui vivons dans une société, de ce dont nous avons besoin pour nous développer. Je vais me permettre de citer à nouveau le mémoire des ACEF parce que je crois que c'est un vrai bijou, d'abord en termes de recherche, en termes de réflexion et en termes de profondeur. Alors, ce que nous dit le mémoire des ACEF, c'est qu'on semble oublier que le consommateur est un être humain, avec des besoins et vivant en société. On nous dit: "Le consommateur est un être social. Le consommateur citoyen est un être social à part entière, avec ses besoins, ses habitudes et ses activités autres que commerciales, un être en liaison et en communication avec d'autres personnes et d'autres groupes de personnes. (11 h 40) "S'il est pourvu de besoins immenses de consommation, comme le soutiennent certains intervenants dans ce dossier, il n'est pas pour autant dépourvu de besoins de tendresse, de réconfort, d'affirmation, de confirmation, d'actualisation, de besoins humains, M. le Président. Cette évidence, ce consensus social nous semble tellement oublié et menacé par les tenants de l'ouverture des établissements commerciaux le dimanche que nous devons nous y arrêter et l'articuler le plus humainement possible." Je dirai au ministre, tout à l'heure, comment, par ces nouvelles règles, il permettra à une multitude de commerces d'ouvrir le dimanche.

Je continue à citer le mémoire. "Pour que cela s'exerce ou se réalise, le consommateur-être social, ça prend un certain nombre d'heures libres qui sont communes aux autres. Il y a un besoin d'uniformité au niveau du calendrier hebdomadaire social où nous avons des disponibilités. Ce concept n'est pas sorcier et est reconnu par tous les sociologues qui le nomme précisément le minimum de conformité sociale." Au Québec, c'est principalement le samedi soir que l'on voulait saccager, dans un premier temps; heureusement, on est revenu à la raison. "Au Québec, c'est principalement le samedi soir et le dimanche que s'exerce ce minimum. Le consommateur est un être familial. La famille, source importante d'épanouissement et de transmission de valeurs sociales. L'écoute pour les enfants, ce n'est pas très mystérieux, c'est un moment précieux et merveilleux qui permet un épanouissement réciproque. On ne peut pas le remplacer par une bebelle dominicale achetée au centre commercial."

On nous parle, et je n'y reviendrai pas, du temps de disponibilité des hommes et des femmes qui vivent au Québec, pour que ces personnes puissent aller faire leurs achats. On nous fait la preuve, en noir sur blanc, que le principal problème des chefs de famille monoparentale, sur lequel on se penche quand ça nous arrange, ce n'est pas un manque de temps, c'est un manque d'argent. Elles sont pauvres, elles sont démunies, elles ont besoin d'aide et elles n'ont pas besoin nécessairement d'acheter plus; de toute façon, elles n'ont pas les moyens d'acheter plus.

Alors, le consommateur aussi un être d'amitié. L'homme est un être social, nous le répétons. Le besoin de parler de nous-mêmes, d'entendre l'autre, de rêvasser, de saisir l'éclair d'un regard, d'apprécier un sourire, le besoin de tout et de rien, ce cristal dans l'amitié. Il y a certains jours où les amis se rassemblent; s'ils le veulent bien, ils s'organisent plein d'activités. M. le Président, au cas où ça inquiéterait mes amis d'en face, et j'espère que non, ce n'est pas quétaine de faire référence à ces réalités-là et ce n'est pas inimaginable de penser que, pour la majorité d'entre nous, quelque part dans la frénésie de nos activités, on puisse prendre un moment où on va accorder un peu plus d'attention à ces réalités, le consommateur, être de loisir et de culture." Je le répète aussi, l'ACEF le disait: "Le consommateur, un être spirituel, pas nécessairement et seulement au sens religieux du terme, mais un être de l'esprit qui a besoin de se ressourcer, qui a besoin de réfléchir sur ce qu'il est, sur ce qu'il veut devenir. "Mais arrêtons-nous un instant - je cite toujours l'ACEF - l'instant est là entier avec une inquiétante interrogation. Allons-nous guillotiner le dimanche? Oui, il y a des besoins d'accès, d'accès à l'oxygène aussi, c'est-à-dire à la possibilité de se ressourcer n'importe où, mais ailleurs que dans les établissements commerciaux, le dimanche. Et c'est de cette question d'hygiène mentale et de qualité de vie qu'aussi les gestionnaires doivent tenir compte."

C'est cette position-là aussi que je défends, M. le Président, quand je défends les droits et les besoins des consommateurs et des consommatrices. Est-ce que le ministre est rassuré sur mes préoccupations quant à cette catégorie de personnes qu'il craignait que nous ne représentions pas bien ou que nous représentions mal? Alors, qu'il se rassure. Mais, dans son cas, je dois dire, M. le Président, que je ne suis pas rassurée. Je ne suis pas rassurée sur l'avenir qu'il nous propose comme socifpé. Je vais revenir d'ailleurs un peu plus loin dans mon intervention sur la réponse aux besoins des consommateurs et des consommatrices, et sur les besoins qu'ils ont, qu'ils nous disent, mais sur les capacités qu'ils ont aussi de répondre à ces besoins, compte tenu du rythme de la hausse de consommation.

Avant d'aller plus loin, et ce sera bref, je vais faire un peu d'histoire, parce que je sens,

M. le Président, que la mémoire flanche de l'autre côté de cette Chambre. Alors, on va faire ensemble un petit peu d'histoire. C'est de la bien petite histoire, mais ce n'est jamais inutile de s'en souvenir.

Nous avons adopté en 1984 une loi sur les heures d'affaires. Cette loi était basée sur un certain nombre de principes et, à rencontre du ministre actuel, voulait s'inspirer et s'inspirait - ce qui n'est pas le cas maintenant - d'un consensus entre les intervenants. Un consensus, ça ne veut pas dire l'unanimité. Un consensus, ça veut dire que chacun avait fait son petit bout de chemin et avait fait des compromis. Mais c'est ça aussi, vivre dans une société. Si on veut arriver à des consensus, il faut parfois faire des compromis. Alors, le ministre d'alors était arrivé, avec les partenaires, à un consensus - pas à l'unanimité, je le dis bien - un consensus qui faisait que chacun avait mis, selon une expression populaire, un peu d'eau dans son vin. Cette loi a été adoptée en 1984. Nous avons quitté le pouvoir en 1985, probablement d'ailleurs parce que nous n'avons pas été assez à l'écoute des gens qui nous disaient de prendre attention à certains de leurs besoins. Et probablement que c'est une des raisons fondamentales qui a fait en sorte qu'on a décidé que ce n'était plus à nous qu'on allait confier la responsabilité du gouvernement.

Donc, M. le Président, en 1984 nous avons adopté cette loi qui a fait consensus, je le dis bien. Le gouvernement qui est devant nous, M. le Président, ne l'a jamais fait appliquer. Et, quand on me parle des décrets passés par le gouvernement en ce qui concerne les exemptions, M. le Président, on peut en parler longtemps, mais je ne ferai pas perdre de temps aux membres de cette Assemblée. Tous les décrets, sans exception, qui prévoient que l'on exempte certains commerces de la loi sur les heures d'affaires ont été passés par ce gouvernement qui est en face de nous, M. le Président, et qui dit maintenant que cette loi est un chef-d'oeuvre de désorganisation. C'est ce qu'on nous dit actuellement en face. Tous les décrets, sans aucune exception. Le seul décret passé par notre gouvernement sous la responsabilité du ministre de l'époque, M. Biron, était un décret demandant à certains commerces dans les marchés publics de se conformer à la nouvelle loi, mais, pour ce faire - parce que, évidemment, il ne faut pas agir, je pense, de façon sauvage et c'était correct - le ministre avait donné un délai aux commerces concernés, de telle sorte qu'ils puissent décider s'ils allaient effectivement fonctionner vingt-quatre heures par jour ou moins, si on veut, ou sept jours par semaine, offrir des services le dimanche et, à ce moment-là, respecter la règle des trois employés en tout temps ou s'ils allaient adopter d'autres règles, M. le Président, et se prévaloir aussi de la possibilité d'ouvrir, mais à l'intérieur des plages

prévues dans l'horaire habituel.

Alors, pour l'histoire, il faut bien s'en souvenir, de cela. Et si, aujourd'hui, on croit que cette loi est mal foutue, c'est parce qu'on n'a tout simplement pas assumé ses responsables. Et je vais être bonne joueuse, M. le Président: ce n'était pas le ministre actuel qui occupait cette responsabilité-là, mais c'est son gouvernement et il doit être solidaire de son gouvernement C'est donc ce gouvernement qui, effectivement, a accepté des exceptions et n'a pas fait appliquer la loi. On s'amuse aujourd'hui et on dit: C'était ridicule, les amendes, tellement ridicule. Mais encore si on les avait fait appliquer à répétition, elles auraient perdu leur ridicule. On est bien conscient de ça, M. le Président. Vous savez, quand il y a une volonté politique qui se marque, qui éclaire et qu'on intervient, habituellement les gens comprennent les règles du jeu et acceptent de les respecter. Mais, quand on fait en sorte que, du plus haut niveau, on laisse des exceptions se créer, qu'on laisse aller des gens qui sont dans l'illégalité sans intervenir, bien aussi on donne un signal que c'est possible, que ça ne vaut pas la peine de respecter la loi, que, de toute façon, aucune sanction ne sera appliquée, si minime soit-elle, cette sanction. (11 h 50)

Alors, voilà pour un léger rappel de l'histoire en ce qui concerne les actions que notre gouvernement a posées et dont je suis fière, et dont je continue à être fière. Parce que, actuellement, M. le Président, on a tellement bien appris à vivre avec ce consensus que la majorité des gens qui s'opposent à la loi actuelle et même à ses amendements, à la loi proposée telle qu'amendée, même ces gens-là, M. le Président, reviennent au consensus de 1984 et nous proposent de conserver les règles sur lesquelles on s'était entendus à ce moment-là. Cela veut dire que ça ne devait pas être si mal comme loi, que ça devait avoir quelques aspects un peu positifs et que ce n'était pas seulement cette espèce de chef-d'oeuvre d'incohérence, nous dit le ministre, devant lequel on se retrouve.

On va continuer la suite de l'histoire, ce n'est jamais mauvais. Quand on veut savoir où on s'en va, il faut savoir d'où on vient, M. le Président. Un mandat a été confié au député de Nicolet-Yamaska, au début du mandat de ce gouvernement. Il y a un mandat de recherche, d'étude, qui a été confié pour consulter les partenaires, pour savoir quelles étaient les difficultés rencontrées par la loi. La conclusion a été la même que celle que je tire, M. le Président. Ça ne fait pas 20 ans, c'était au début du mandat; c'était en 1987, si je ne m'abuse. Il est arrivé, M. le Président, ce député qui a fait honnêtement son travail, après avoir consulté 47 groupes, fait le tour du Québec, à la conclusion que la loi de 1984 n'était pas mal, que, si elle était appliquée, les gens cesseraient de se plaindre, parce que le fait qu'elle ne soit pas appliquée a créé des iniquités, M. le Président. C'est à cela qu'est arrivé le député de Nicolet-Yamaska. Son ministre n'a pas retenu les propositions qu'il faisait, ni son gouvernement ni les deux ministres qui ont occupé la fonction de ministre de l'Industrie et du Commerce, soit M. Johnson et M. MacDonald. M. MacDonald est même allé à rencontre carrément du projet qui avait été déposé par le député de Nicolet-Yamaska. Il s'est juste fait un peu rabrouer et la loi a été envoyée aux oubliettes. Il proposait d'ouvrir, le dimanche, une plage quelque part entre 11 heures et 17 heures.

Et on va continuer. Le nouveau ministre arrive et il dit: Chef-d'oeuvre d'incohérence, nous allons donc consulter. Il fait fi de toutes les consultations qu'il y avait eu préalablement et il dit: Écoutez, nous devons entendre les principaux concernés; ce qu'ils ont dit à l'un de mes collègues n'était peut-être pas tout à fait juste, on va reprendre le tout. Il me dit, M. le Président: La députée de Taillon a refusé de consulter les gens. Elle s'est opposée à ce qu'on consulte. Pas du tout, M. le Président. Je me suis opposée à ce que l'on consulte sans que le ministre ne dise où il voulait aller. C'est à cela, M. le Président, que je me suis opposée, d'ailleurs, tellement que j'ai voté pour la motion qui nous demandait de consulter. On ira voir au Journal des débats, mais je pense que le ministre ne me contredira pas, il sait ça aussi, hein?

J'ai voté pour le projet de consultation. Sauf que ce que je souhaitais, c'est que les intervenants qui allaient venir témoigner devant nous, à notre table, on ne leur fasse pas perdre de temps, qu'ils sachent où se logeait le gouvernement. Mais le ministre a préféré se retrancher derrière quelques grands principes qu'il va contredire d'ailleurs par la loi, si nous l'adoptons, M. le Président. Il s'est retranché derrière quelques beaux principes. Il a regardé l'Opposition et il a dit: C'est drôle, une Opposition qui prend position, hein, alors qu'on devrait écouter les gens, qu'on devrait les consulter, M. le Président. Oui, moi, je voulais bien les consulter, mais je voulais qu'ils sachent où nous nous logions, de telle sorte qu'ils puissent dire: Non, nous ne sommes pas d'accord pour telle ou telle raison. Oui, nous sommes d'accord, parce que cela répond à tel et tel besoin. C'est ça que j'attendais du ministre et ce n'était pas un refus de consulter, M. le Président, c'est évident.

Et la suite des choses, M. le Président, m'a donné raison et je regrette de le dire, parce que je n'ai pas le goût d'avoir raison pour avoir raison et je ne me bats pas ici juste pour me faire plaisir hein? Ce serait bien plus simple, vous savez, de me faire plaisir. Je pourrais m'occuper d'autres choses. La suite des choses m'a donné raison. Le ministre a entendu les gens. Il l'a fait correctement et on a bien travaillé en commission; M. le Président, vous avez participé à nos travaux et ça a été intéres-

sant de travailler avec la formation gouvernementale, j'en conviens. C'était toujours un peu nébuleux, mais, au moins, c'était intéressant.

Cela étant dit, qu'est-ce qui est arrivé par la suite? Lorsque le ministre a déposé son projet de loi, évidemment, le 15 mai... Le 15 mai, pour les gens qui nous écoutent, c'est la date limite où on peut déposer un projet de loi si on veut qu'il soit adopté par l'Assemblée nationale. Vous savez, dans d'autres Parlements, on prend des années à adopter des lois. Ce n'est pas souhaitable et ce n'est pas ce que je voudrais, non plus; mais, entre prendre des années et prendre six semaines pour en regarder un qui concerne des dizaines de milliers de personnes et où on sait qu'il y a des objections, qu'il n'y a pas consensus effectivement et que c'est difficile... On ne sait pas ce que veut le ministre et il consulte. Il dépose un projet de loi le 15 mai, la date limite. Il nous donne à peine six semaines pour le regarder. Remarquez que ce n'est pas fini parce que l'histoire va se continuer. Il nous apporte les amendements la veille. Le jour môme de l'adoption, il amende 25 articles du projet de loi et le projet de loi en a 34, bon. Je pense ce que je dis n'est pas trop bote, n'est pas trop faux.

Alors, donc, la suite, c'est quoi? C'est un mécontentement général à l'égard du projet de loi qu'il nous dépose le 15 mal. Et je ne l'ai pas inventé, M. le Président! Puis, là, je ne les al pas sorties mes pétitions ce matin. Je devrais peut-être. Mon tiroir tient ouvert parce qu'elles sont trop épaisses, les nombreuses pétitions qui regroupent des centaines et des centaines de noms de gens, des milliers de noms de gens qui sont en désaccord avec le projet de loi du ministre et même avec les nouvelles mesures qu'il apporte. Alors, effectivement, quand il a consulté, sans savoir où il allait, sur la base de beaux principes théoriques sur lesquels il va revenir dans son projet de loi, M. le Président, je n'avais peut-être pas tort de lui demander où il s'en allait. Parce que, actuellement, on se retrouve avec une unanimité, sauf que l'unanimité, c'est contre la position du ministre. Donc, la suite des choses est celle que l'on avait prévue. J'espère - je le dis parce que je le pense - que la suite des choses pour le projet, si nous l'adoptons, ne sera pas celle que je prévoie parce que ce n'est pas très beau, M. le Président, ce saccage que l'on fait du dimanche, cette remise en question que l'on fait de nos règles d'organisation, qui vient intervenir dans les conditions de vie et de travail de milliers de personnes.

Je continue, M. le Président. Le ministre nous a dit à quelques reprises pendant les travaux de la commission: Vous savez, nous n'aurons pas le choix: ou c'est du vrai dépannage, donc quelques personnes, ou c'est l'ouverture. Et ça, je pourrais le citer en retournant au texte des débats de la commission. Il a même dit à un moment: Si on marque le pas vers une certaine ouverture, cela veut dire, à toutes fins pratiques, que c'est la libéralisation des heures de commerce à plus ou moins long terme. Pourquoi? Parce qu'il nous a dit en commission, et il l'a répété à plusieurs reprises, c'est incontrôlable, c'est trop complexe, les exceptions qu'on doit prévoir. Il a essayé de ne pas en faire d'exceptions, il a vu ce que ça donnait. Il a été obligé de revenir sur cela. Il a réintroduit dans son projet de loi tout un tas d'exceptions.

Alors, moi, je conclus, je tire des conclusions à l'analyse que le ministre fait. Comme il nous dit que ce n'est pas possible de contrôler le vrai dépannage et que, si l'on va dans le sens d'une plus grande ouverture, ce n'est qu'une étape vers l'ouverture complète, je comprends que le ministre va vers une plus grande ouverture, que ce n'est donc qu'une étape vers l'ouverture complète des commerces et donc la libéralisation des heures, ce qui veut dire plus de loi du tout, arrangez-vous comme vous voudrez, la loi de la jungle, le capitalisme sans bride et sans encadrement. C'est à cela que l'on risque d'arriver. De toute façon, comme II a réussi par sa loi à mécontenter à peu près tout le monde, du grand au plus petit, évidemment les pressions vont recommencer dès que l'on aura adopté la loi, j'en suis persuadée, M. le Président. Je lisais môme le communiqué des grandes chaînes d'alimentation qui nous disait: C'est un pas dans la bonne direction. Le ministre est dans la bonne direction. Évidemment, nous souhaiterions davantage, mais nous reviendrons plus tard. Alors, on verra plus tard. (12 heures)

Après l'histoire, regardons maintenant les faits. Les faits, ce sont ces affirmations qu'à différentes reprises le ministre ou certains de ses collègues ont faites et quelques demandes qui nous ont été présentées à la commission, et je dis bien quelques mémoires, pas beaucoup; probablement que l'on peut les compter sur les cinq doigts de la main, M. le Président, sur les 91 mémoires que nous avons eus. Et là, ce sont les magnifiques principes. Pourquoi une loi sur les heures d'affaires? Pourquoi nous occuper de cela? Pourquoi un gouvernement se mêlerait-il de décider à quelle heure les gens vont magasiner, vont aller acheter leurs produits alimentaires? Alors, c'étaient les beaux principes. Ça fait toujours très bien, d'ailleurs, quand c'est énoncé et, vraiment, on a l'air, nous, à côté de ça, qui souhaitons un peu d'encadrement, qui souhaitons des mesures réglementaires, un peu bizarres, un peu spéciaux parce que là, on dit: Liberté de consommer, liberté de produire, liberté de commercer, M. le Président. Ça nous a été servi à quelques reprises pendant la commission parlementaire quand on a entendu les mémoires et le ministre avait l'air de se laisser séduire par ces mythes-là.

On va les reprendre les uns après les autres, M. le Président. On va commencer par la

liberté de travailler. À tous les groupes qui sont venus devant la commission, à tous, nous avons demandé, qu'il s'agisse des travailleurs ou des travailleuses ou qu'il s'agisse des gens d'affaires, des propriétaires d'entreprise, de petite, moyenne ou grande entreprises sans exception, et je suis persuadée de ça parce que j'avais une série de questions, une grille de questions, et, chaque fois, nous les posions... Si ce n'était pas nous, c'était la partie gouvernementale. Chaque fois, nous demandions aux travailleurs: Est-ce qu'il est possible d'avoir un droit de refus complet de travailler lorsqu'on vous demande de venir le jeudi soir, le vendredi soir, le samedi ou le dimanche? Et, chaque fois, on nous a dit: Lorsqu'il existe, il est théorique, ce droit de refus, M. le Président, parce que, si nous refusons plusieurs fois, on ne nous demande plus non plus de travailler des heures en semaine, de telle sorte qu'on voit nos heures être réduites, parce que, souvent, on est sur appel. Quand je parle de travail précaire, je ne parle pas de choses qui n'existent pas. On ira leur demander, aux gens qui sont sur les planchers, dans les épiceries et dans les commerces de détail, si ce n'est pas du travail précaire. Donc, il vient un moment où ils n'ont plus la possibilité de dire non, parce qu'on ne leur offre même pas d'heures en semaine. Donc, ils comprennent bien vite que leur intérêt, c'est de dire oui pour travailler le samedi et de dire oui pour travailler le dimanche, s'ils veulent travailler tout court, M. le Président. C'est ça, la liberté de travailler.

Et quand je l'ai demandé aux employeurs, ils y ont mis la même honnêteté, M. le Président, aucun ne m'a dit que la liberté totale et complète existe. Je leur demandais: Voulez-vous mettre, dans vos contrats de travail, dans vos conventions collectives, la possibilité d'un droit de refus complet, ce qui veut dire, quand vous le demanderez a quelqu'un le dimanche, s'il dit: Non, je ne veux pas, il pourra toujours l'exercer? Chaque fois, tout le monde, sans exception, m'a dit: Non, je ne peux pas mettre ça dans mon contrat de travail. Je ne peux pas mettre ça dans ma convention collective. Eh bien, s'il ne peut pas le mettre dedans, ça veut dire qu'il ne veut pas l'exercer, hein? Bon. Donc, le droit de refus, on a beau se faire de beaux grands discours, il n'existe pas. Allez voir sur le plancher des vaches et vous allez vous rendre compte que c'est ça, la réalité, et que nous n'errons pas.

Parlons maintenant de cette magnifique... Ah oui! D'ailleurs, soit dit en passant, c'est intéressant de noter que le droit de refus, dans les conventions collectives où il y en a, pour une grande majorité - et je ne l'invente pas là, c'est pris dans le document qui a été fait par le ministère - le droit de refus est accompagné d'une petite clause qui prévoit que, oui, on peut refuser si on se trouve un remplaçant. Alors, voilà pour le droit de refus!

Maintenant, le droit de commercer. La liberté de commercer. Alors, ouvre qui veut. Le ministre nous dit même: Les commerçants s'entendront entre eux pour décider s'ils n'ouvrent pas; ils s'autodisciplineront. Ça en prend juste un, M. le Président, qui n'a pas le goût de fonctionner dans la discipline de la majorité. Et, qu'est-ce que vous voulez, dans une société où effectivement c'est démocratique, mais dans une société où il n'y a pas de règles non plus, on prend la règle qui nous convient. On la définit pour nous. Or, si la majorité s'entend, il peut y avoir quelqu'un quelque part et, s'il est plus fort que les autres et décide d'ouvrir pendant toutes les heures qui lui sont permises, qu'est-ce que vous pensez que ça fait, M. le Président? Eh bien, évidemment, il va chercher des parts du marché que d'autres occupaient. Alors, les autres n'ont pas le choix, M. le Président. Ils doivent, à leur tour, ouvrir. Alors, la liberté de commercer, là, je veux bien, mais elle a ses limites.

D'ailleurs, je vais citer le ministre lui-même. Il me cite à l'occasion. Parfois, il ne finit pas ses phrases, mais je vais les finir, moi. Je vais prendre tout son paragraphe. Le 11 juin 1990, lors de nos débats à l'Assemblée nationale - c'est récent, hein, le 11 juin 1990; évidemment, c'est normal que ce soit récent, ça fait juste depuis le 15 mai qu'on a la loi et on a commencé , à l'étudier le 11 juin - le ministre disait et je le cite: Pour avoir été commerçant dans le passé, vous allez voir. Allez-y dans les centres commerciaux le vendredi soir de 19 heures à 21 heures. Il n'y a presque personne, mais on reste ouvert. On dit: Bien, on a le droit d'ouvrir 62 heures par semaine. Tout le monde ferme, les jeudi et vendredi, à 21 heures. Donc, on reste ouvert. J'ai voulu créer une nouvelle dynamique en ouvrant jusqu'à 22 heures - là, il a changé d'idée, c'est heureux - prenant pour acquis qu'on faisait affaire avec des commerçants matures et qu'on faisait affaire avec des gens qui pouvaient se dire: Bon, bien, ce n'est pas une obligation d'ouvrir, c'est uniquement une possibilité d'ouvrir. Mais, deux phrases avant, il avait dit: C'est une possibilité d'ouvrir, mais, comme tout le monde ouvre, on n'a pas le choix d'ouvrir. Donc, il faut ouvrir. Alors là, on repassera, hein! On repassera pour la liberté de commercer.

Troisième élément... Puis ça, là, le ministre va me répliquer peut-être tantôt: Oui, mais on a resserré les heures, ce n'est pas comme c'était. Trois dimanches, entre le 1er décembre et le 25 décembre, où tout va être ouvert de 9 heures le matin à 21 heures le soir. On va voir s'il y a liberté de commercer, on va voir, qui va ouvrir et qui va fermer. Puis, le dimanche, avec les nouvelles règles, on va voir la liberté de commercer, qui va l'exercer puis comment elle va s'exercer.

Alors là, évidemment, possibilité de commercer, possibilité de produire, possibilité de travailler, j'en ai parlé, tout à l'heure, sur le

droit de refus. Mais on nous a dit: Mais que faites-vous des étudiants, que faites-vous des jeunes qui souhaiteraient, évidemment, aller gagner leur vie et qui courent après nos emplois, après les emplois qu'on peut leur offrir? Bien, là aussi, je l'ai demandé aux gens qui en ont, des commerces, comment ça se passait. Oui, ils en embauchent, des jeunes, oui, ils en embauchent, des étudiants. Remarquez bien qu'avec 15 % de taux de chômage chez les 15-18 ans, c'est pas mal non plus, on a besoin de gagner sa croûte.

Mais, ce que l'on nous dit, c'est qu'aussitôt que ces personnes-là peuvent se faire mettre sur une liste d'ancienneté qui leur permette de refuser de travailler le dimanche elles le font, c'est immédiat. Alors, on peut s'en reparler, là encore, de la volonté de travailler à tout prix et à n'importe quel moment.

Maintenant, on a vu un bloc: commercer, travailler, consommer. On va voir l'autre volet. Quel est le marché dont on parle? Quelles sont les personnes qui vivent dans ce marché? Quel est l'emploi dans ce marché? On va parler un petit peu de prix, M. le Président. Ce n'est pas inutile, c'est un débat qui concerne le commerce de l'alimentation et le commerce de détail.

L'alimentation, on va commencer par celui-là parce que c'est celui-là que l'on commence, actuellement, à ouvrir le dimanche, d'une façon plus significative et plus importante. Dans le domaine de l'alimentation, M. le Président, les ventes ont crû, ont monté, ont augmenté, depuis 1981, à un rythme de 1,6 % par année, la progression des ventes. La population, M. le Président, a augmenté - et j'ai fait les calculs - au même rythme sur la même période. Autrement dit, on ne mange pas davantage que l'on mangeait par le passé, famille après famille, et la seule hausse que l'on peut constater, c'est la hausse de la population qui fait en sorte qu'évidemment on augmente la consommation pas de 10 %, de 1,6 % par année, qui est essentiellement le rythme d'augmentation de la population, ce qui veut dire, M. le Président, que ce marché est saturé. Ça veut dire, ça, saturé, qu'il y a assez de produits en vente qu'il y a assez de magasins qui en offrent pour répondre aux besoins des consommateurs et des consommatrices et que, si on en ajoute d'autres, effectivement, on risque de voir péricliter et de voir se fermer les portes de quelques autres parce qu'on ne mangera pas plus parce qu'on va avoir plus d'heures pour aller magasiner, pour aller s'acheter de l'alimentation. (12 h 10)

Poursuivons le raisonnement. Si on augmente les heures possibles de consommation, bien, qu'est-ce que ça aura comme effet, si on ne mange pas plus, si on n'achète pas plus? Ça va faire que c'est ou le propriétaire qui va baisser ses prix et qui va donc réduire sa marge de profit ou, évidemment, le consommateur qui va payer quelque part un peu plus cher pour le produit.

Quand on me dit: Oui, mais est-ce que ça n'aura pas un effet de création d'emplois, M. le Président? Voyons donc! Comment ça peut-il avoir un effet de création d'emplois si on ne vend pas plus? Et nos marges de profits, ce n'est pas des grandes marges de profits, dans le secteur alimentaire, c'est les volumes. Plus on vend, évidemment, plus on va chercher du fric. Mais si on ne vend pas de gros volumes, vous savez, sur une "canne" de tomates, on fait une cenne, deux cennes, c'est comme ça que ça marche. Ce n'est pas des profits par produit qui sont très élevés. Bon. Alors, si on ne vend pas plus, parce qu'il n'y a pas plus de monde, qu'on ouvre plus longtemps parce qu'il faut être plus présent aux consommateurs et consommatrices, est-ce qu'on va embaucher des gens nouveaux? Si on embauche des gens nouveaux, ça va nous coûter plus cher. Voyons, M. le Président, il me semble que c'est à l'évidence clair.

Et le ministre nous dit: "Vous exagérez, vous en mettez; voyons, ce n'est pas comme ça que ça va se passer", quand on lui dit qu'il y a des risques de faillites dans le secteur du commerce de l'alimentation et du commerce de détail. Là, M. le Président, on ne prend pas nos rêves pour des réalités. C'est-à-dire nos rêves, malheureusement, je dirais, deviennent des réalités, ce matin. Évidemment, on est dans une mauvaise conjoncture, je le sais bien, M. le Président, et je le déplore, d'ailleurs, j'espère que le ministre va le déplorer avec moi et qu'il va un peu causer au gouverneur général de la Banque du Canada qui n'a pas l'air de comprendre qu'il est en train de nous mettre sur le dos une crise qui va nous coûter des milliers d'emplois.

Revenons au nombre de faillites. Il y en a actuellement des faillites. Je ne l'invente pas. Ce matin, dans Le Soleil, section Économie, le mercredi 20 juin: "Près du quart des faillites d'affaires sont survenues dans les commerces de détail". Les faillites ont augmenté de 30 %, le quart est dans le domaine du commerce de détail. Ça, c'est sur l'ensemble du Canada. Et, au Québec, c'est 30 %.

Alors, écoutez, M. le Président, il faut qu'on soit logique quelque part. Il faut qu'on soit capable de faire l'analyse un peu du marché pour se rendre compte que, si on permet des heures plus longues, c'est évident que ne consommant pas plus... Et du côté du commerce de détail, la hausse a été de 3,6 %. Ce n'est pas trop trop faramineux, si on considère qu'il y a eu le "baby-boom" qui a fait en sorte qu'on a construit des maisons, qu'on est allé s'acheter des biens durables, ce qui explique un peu cette hausse de 3,6 % qui est plus haute que la consommation en alimentation. Alors, il ne faut pas être grand clerc là pour comprendre qu'il y en a un risque du côté des faillites.

Je refouillais dans les dossiers encore ce

matin parce que j'essaie désespérément et je me sens vraiment comme quelqu'un qui ne sait plus quel argument utiliser pour convaincre le ministre que ça n'a pas d'allure, ce qu'il est en train de faire. Je refouillais encore dans mes dossiers ce matin. Les dépanneurs font de 15 % à 20 % de leurs ventes le dimanche, M. le Président. S'ils font 15 % à 20 % de leurs ventes le dimanche, que la loi qui est devant nous va permettre d'ouvrir davantage de commerces, évidemment, M. le Président, c'est une part de leur marché qu'on va aller chercher, voyons. Et chez les dépanneurs, effectivement, les marges ne sont pas plus hautes qu'ailleurs. Les prix sont parfois un peu plus élevés et pas beaucoup, on nous l'a prouvé dans les différents documents qui nous ont été présentés. Alors, 15 % à 20 % du chiffre d'affaires qui se fait le dimanche.

Et puis maintenant, là, pour que le ministre soit bien conscient qu'effectivement, avec sa règle des cinq et du surveillant, et des gens aux pilules et des gens à la fabrication, il faut qu'il soit bien conscient qu'il n'ouvre pas quelques commerces. Je vais lui rappeler quelques chiffres. On va aller voir dans nos documents, ici, pour savoir comment est constitué le marché de l'alimentation au Québec. On aime bien ça se comparer à l'Ontario, on va le faire tantôt, mais comment il est constitué? en 1988, ça ne doit pas avoir changé beaucoup, ça change, mais quand même... alors, en 1988, les entreprises du secteur alimentaire, selon la taille, étaient constituées, m. le président, de la façon suivante: aucun employé - donc, ce qui veut dire que le propriétaire lui-même assume toutes les heures - 14,7 % des petites entreprises; les entreprises de un à neuf employés, 62,3 % des petites entreprises; de dix à vingt-cinq employés, 15,2 % des petites entreprises. ce qui donne 92,2 % de toutes les petites entreprises qui, avec la nouvelle loi, risquent de pouvoir ouvrir le dimanche.

Les grandes entreprises forment 2,7 % du secteur de l'alimentation. Alors, quand le ministre me dit que, non, il ne va pas vers l'ouverture, que son critère de cinq, ça va juste permettre un meilleur dépannage, un ajustement, j'ai des doutes. Parce que si on peut fonctionner, pour 80 %, à moins de neuf employés déjà, peut-être que le dimanche, s'il y en a deux ou trois qui ne vont pas travailler, tous les autres vont pouvoir ouvrir. Et ça, c'est dans le document qu'a publié le ministre lui-même. Alors, s'il ne me dit pas qu'on a un pas dans la porte vers l'ouverture des commerces le dimanche, je ne sais pas de quoi on parle, on doit s'être trompé de débat et on doit s'être trompé de loi. En tout cas, je n'ai pas l'impression que, moi, je me suis trompée. Mais j'aimerais bien que le ministre soit conscient de ça aussi et qu'il porte un peu attention à cette préoccupation-là.

Je vais conclure sur ces éléments-là - emplois, faillites, types d'entreprise, saturation de marché - par une conclusion que tirait le document lui-même. Avant de tirer cette conclusion, je vais rappeler au ministre aussi que, si son parti pense que le Québec est une société distincte, il n'a pas tort. Même dans le commerce, il faut savoir que la structure de propriété, c'est-à-dire qui possède les commerces au Québec, comment c'est organisé par rapport au marché ontarien, la structure de propriété des commerces ici, c'est 70 % qui sont possédés par des commerçants indépendants, des gens d'affaires qui ont une ou deux boutiques, un ou deux marchés d'alimentation. Inversement, le marché ontarien est constitué de grandes surfaces ou de grandes corporations qui possèdent et des grandes et des moyennes surfaces. Alors, on fonctionne dans des marchés totalement différents. Alors, quand on nous fait des comparaisons - eux, ils ont fait ça, et eux, ils fonctionnent comme ça - essayons donc de nous regarder, de regarder là où on est et de savoir ce que l'on veut, nous, pour nous, au lieu d'essayer de saccager tout le marché devant lequel on est.

Tirons la conclusion, M. le Président. Et je la tire du document produit par le ministère, je ne l'ai pas inventée: La plupart des agents économiques qui se prononcent sur l'opportunité de libéraliser la Loi sur les heures d'affaires des établissements commerciaux font état d'impacts plus ou moins importants. Or, à notre connaissance, il n'existe pas d'étude sérieuse qui permette d'orienter le décideur à propos de ces aspects du problème. Alors, ma thèse vaut sûrement la thèse du ministre à cet égard-là.

Voilà pour ce qui est de l'aspect du marché, des prix, de l'emploi et des illusions que l'on essaie de créer aux gens en leur faisant croire que, non, le dimanche on n'ouvre pas ou si peu ou à peine. On ira voir quand ça se passera et quand les moyennes surfaces et les grandes surfaces auront trouvé toutes espèces de moyens de faire en sorte qu'on installe des caisses automatiques. Le ministre aime ça, il est responsable de la technologie; je vais lui envoyer une petite bobine là-dessus, un petit vidéo qui montre comment on peut installer des caisses qui font la lecture, où le consommateur fait faire lui-même la lecture des prix. Et comme dans son projet de loi il a prévu, de toute façon, des agents de sécurité, ils pourront surveiller les consommateurs qui font eux-mêmes la lecture des prix. Et vous allez voir que ça prend pas mal moins de monde sur les grandes surfaces pour les faire fonctionner. Et, après, on ira vers autre chose. (12 h 20)

En fait, je vois que le temps coule. M. le Président, je vous dirai que je suis tout simplement outrée de la façon dont on a traité l'Opposition et les voix que nous voulons faire entendre ici, et qui sont pourtant celles de la majorité. On a bousculé nos règles. Je vais le

rappeler parce que je pense que ce n'est pas inutile: le 15 mai, le ministre a déposé un projet de loi comprenant 34 articles; le 15 mai, ce qui nous donnait un mois et demi à peine - parce que nos travaux finissent le 22 juin - un mois et demi pour analyser, regarder, étudier cette loi. Dès le premier jour où la loi a été rendue publique, des tollés de protestations sont venus de partout, de toutes les régions du Québec, de tous les groupes, peu importe qu'ils aient été du bord des consommateurs, du bord des commerçants ou des travailleurs et des travailleuses; de partout.

Le 15 mai, le ministre nous dépose sa loi. Le 11 juin, il annonce déjà des amendements; bien sûr, il n'avait pas le choix, c'était la révolution littéralement. C'est amusant, d'ailleurs, de voir que certains collègues du ministre qui ont voté hier soir, cette nuit, pour la loi, ça n'a pas l'air de les déranger trop, trop que leurs gens soient contre, mais c'est unanime dans beaucoup de régions du Québec, qu'on soit contre cette loi. Encore lundi, à Matane, tous les commerçants ont débrayé, tous les gens qui travaillent dans les commerces sont sortis.

Alors, on nous a déposé, hier matin, je le répète, 25 articles amendés sur 34 articles du projet de loi. Il devait y avoir des problèmes, certain, quelque part; je ne dois pas être toute seule à penser qu'il y en avait, en tout cas.

Le 11 juin, il nous annonce que, dans le fond, jusqu'à 22 heures tous les soirs, le samedi y compris, peut-être que ça n'a pas beaucoup de bon sens; alors, il dit: On va ramener ça à 21 heures. Et il dit: Peut-être que quatre personnes, dans le fond, ce n'est pas suffisant pour en ouvrir assez le dimanche, des commerces, ça fait qu'on va en rajouter un autre; le patron ne peut pas être compté dans les quatre personnes, on va mettre le patron, son gérant, son représentant en sus des quatre personnes. Ça, ce sont les deux amendements qu'il nous a annoncés le 11 juin.

Trois semaines plus tard, ici... Pas trois semaines, trois jours plus tard, il nous annonce que ce n'est plus comme ça que ça va marcher, mais que là, il a révisé un peu les heures en semaine et ce ne sera plus jusqu'à 21 heures. Je ne sais pas si vous me suivez; c'est un peu compliqué, je comprends. Je recommence. La première proposition, c'était à 22 heures, tous les soirs, du lundi au samedi. La deuxième, il a dit: Ça va être à 21 heures, du lundi au vendredi; on va ramener le samedi à 18 heures. Là, la dernière - c'est pour ça que j'ai encore de l'espoir, ce matin, je me dis qu'il y a encore espoir qu'il change d'idée - il a ramené le lundi à 19 heures, le mardi à 19 heures, le mercredi à 21 heures, le jeudi, il laisse ça à 21 heures et, le samedi, il revient à 17 heures qu'on avait déjà dans la loi.

Alors, vous comprendrez, M. le Président, que, quand on nous fait taire, parce que c'est ça qu'on fait - le bâillon, pour que les gens qui nous écoutent comprennent bien, ça veut dire qu'on nous fait taire, qu'on n'a plus le droit de parier, qu'on n'a plus le droit de présenter des amendements, qu'on n'a plus le droit de s'exprimer sur la loi - quand il nous fait taire, je me pose de sérieuses questions, quand lui, en trois semaines, a changé trois fois d'avis sur son projet de loi. Il me semble que c'est un peu odieux, à ce moment-ci, de nous imposer ce qu'il nous impose. Je le lui rappelle parce qu'on a tendance à dire: Ah! c'est juste l'Opposition! Bien, l'Opposition, elle représente du monde et du monde qui, un jour, va s'en souvenir. Il y a un prix à payer à ne pas respecter la démocratie.

Je vais revenir sur cette fameuse exemption du dimanche, où on augmente à cinq personnes, où on a reconnu les marchés aux puces. On les avait exclus, soit dit en passant, dans le premier projet de loi; ça aussi, c'est une modification qui est venue.

Il y a de mes collègues qui ont été un peu durs à l'endroit d'une entreprise qui oeuvre dans les superpharmacies; je ne la nommerai pas. Mais je vais revenir un petit peu sur cette réalité-là. Je suis assez d'accord - là-dessus, je pense que je vais honnêtement reconnaître que le ministre n'est sans doute à la solde de personne, sauf qu'il reste que pendant toute la commission parlementaire il y a eu un "lobbying" absolument présent, d'une façon continue, de la part des superpharmacies. Il y a eu, pendant toute la commission parlementaire, présence d'un "lobbyist" représentant les superpharmacies. Le résultat net et, je le répète - le ministre ne m'a peut-être pas entendue, je ne dis pas qu'il est à la solde de qui que ce soit - mais le résultat net fait en sorte, M. le Président, que ce qui a provoqué le tollé de la part de milliers de marchands à travers le Québec, c'est qu'un commerçant oeuvrant dans les superpharmacies. Quelques-uns oeuvrant dans les superpharmacies avaient profité, effectivement, d'exemptions pour prendre des parts de marché auxquelles les autres commerçants, en respectant la loi, n'avaient pas droit. Or, la loi, ce qu'elle fait, elle entérine le fait que ces superpharmacies pourront continuer à opérer avec les nouveaux critères que nous retrouvons dans le projet de loi actuel. La loi ne corrige pas ce qui a amené le ministre - et il va en convenir - à consulter et à vouloir remettre de l'équité entre les commerçants.

On a vu des grandes pages publiées dans les journaux hier. Dans six mois on en aura d'autres. Est-ce qu'on en a vu des superpharmacies qui ont publié des grandes pages dans les journaux pour nous dire que cette loi était odieuse et inéquitable à leur endroit? Or, le lendemain de la fin de la commission parlementaire, M. le Président, on a eu droit a des grandes pages de publicité dans les médias pour nous dire comment on était généreux d'être ouvert tous les jours de la semaine, qu'on était même un ami, M. le

Président.

Vous me dites qu'il me reste à peine cinq minutes. Le ministre - et je vais le saluer pour ça - nous a dit: Écoutez, si j'ai modifié ma loi, même depuis le 15 mai où je l'ai déposée, c'est parce que j'ai été capable d'être à l'écoute. J'aime ça entendre dire ça parce que ce sont les gens grands qui acceptent qu'effectivement ils font des erreurs des fois. Et, moi, j'en ai fait déjà dans ma vie et je suis capable de le reconnaître. Alors il dit... Et je le blâme parce qu'il ne m'a pas donné de temps pour en débattre, mais je ne le blâme pas sur le fond et sur le fait qu'il ait bonifié, en cours de route, son projet de loi. Mais je dis que je n'ai même pas eu le temps de pouvoir en débattre avec vous. Vous ne m'avez pas permis de le faire. Mais il dit: Si j'ai fait ça, c'est parce que j'ai écouté les gens. J'aimerais ça qu'il m'écoute ce matin et qu'il continue dans la bonne voie.

Mais je vais lui faire remarquer quelque chose. Je sais que ça va encore le choquer sûrement. Il me dit: J'ai écouté les gens. J'ai ramené à 19 heures, le lundi soir et le mardi soir, les heures d'ouverture de tous les commerces d'alimentation et de détail. Il me dit: J'ai écouté l'Association des marchands de meubles qui est membre de la Coalition, d'ailleurs. Il a probablement écouté des gens qui sont venus, comme M. Bovet faire des représentations correctes. Ça fait partie des règles du jeu. Il faut en faire quand on veut quelque chose. Il les a écoutés. Parce que dans le commerce de détail le tollé était absolument incommensurable, immense, géant, gigantesque! Personne n'était d'accord avec le ministre. Il les a écoutés. Il a ramené à 19 heures, les lundi, mardi. Il a dit: C'est un compromis.

Je lui dis: Si vous avez écouté quelques commerçants, M. le Président, est-ce que le ministre ne peut pas écouter quelques dizaines de milliers de travailleurs et de travailleuses et quelques centaines de propriétaires de commerces et retenir aussi leurs propositions qui doivent sûrement être aussi importantes, aussi significatives que celles que lui ont faites quelques commerçants, en étant tout en leur droit de le faire, M. le Président? Est-ce qu'il ne pourrait pas aussi entendre ce point de vue là - il me semble qu'il représente un bon nombre de personnes - et revenir à une ouverture le mercredi soir, comme le demande la Coalition? Revenir à 18 heures, les lundi et mardi soirs. Allez donc les voir, les travailleurs et les travailleuses qui vont voir leurs journées allongées, qui vont voir leur travail se précariser. Je n'exagère pas, M. le Président. Je les vois, je leur parie. Je discute avec ces gens-là et j'essaie de faire valoir leur point de vue. Entendez-les, M. le Président, comme vous en avez entendu d'autres qui ont obtenu réponse à leurs pressions.

En fait, M. le Président, je plaide une dernière fois. Je plaide pour l'équilibre entre les droits des travailleurs et des travailleuses, entre les besoins des consommateurs et des consommatrices, pour la qualité de la vie, pour que l'on accorde plus de temps à l'être qu'à l'avoir et, surtout, pour que soit entendu en cette Chambre le Québec réel, le Québec des régions, le Québec des villes. (12 h 30)

Je plaide, M. le Président, pour que nous respections notre culture, notre patrimoine, notre histoire et ce Québec-là vous dit, M. le Président et dit, à travers vous, au ministre, que vous errez, que votre orientation est mauvaise. Ce Québec-là, c'est celui des travailleurs et des travailleuses, c'est celui des gens d'affaires, des propriétaires de leurs entreprises. C'est celui aussi des consommateurs et des consommatrices et ce Québec-là, M. le Président, vous dit, si nous adoptons cette loi, qu'il se souviendra.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la députée de Taillon. Je reconnais maintenant la prochaine intervenante, Mme la députée de Vachon.

Mme Pelchat: Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Mme la députée.

Mme Christiane Pelchat

Mme Pelchat: M. le Président, j'ai envie de citer ma collègue, la députée de Taillon, et vous dire: Je suis furieuse, M. le Président. Je suis en colère, M. le Président. C'est comme ça que la députée de Taillon a ouvert le débat hier soir. Moi aussi, M. le Président, je suis furieuse et je suis en colère, au même titre que la députée de Taillon. Je suis surtout déçue, M. le Président, et je dois vous dire que je suis même estomaquée de voir la facilité avec laquelle l'Opposition officielle, en cette Chambre, les députés péquis-tes tentent de manipuler l'opinion publique. Ça, c'est très décevant, surtout de la part de la députée de Taillon, qui n'est pas une nouvelle venue en politique, M. le Président, qui a même été ministre et qui sait très bien qu'il faut se méfier des "lobbies" et des intérêts corporatistes qui nous sollicitent tous les jours, M. le Président.

M. le Président, cette loi, et c'est important de le rappeler, et je vais le rappeler parce qu'il y a des choses qui ont été galvaudées ici... Je regrette, je n'utiliserai pas de propos antiparlementaires pour dire que c'était mensonger, mais je vais essayer de remettre un peu à l'ordre les propos qui ont été tenus par les membres de l'Opposition. Premièrement, M. le Président, la loi, ce qu'elle vise, c'est de régulariser et de préciser les heures d'ouverture des commerces. Deuxièmement, M. le Président, la loi élimine une

bonne partie des exceptions qui avaient été introduites par le gouvernement péquiste, en 1984. Ça aussi, c'est de l'histoire, Mme la députée de Taillon, et il faut revenir là-dessus une fois de temps en temps aussi. Cette loi, M. le Président, élargit le commerce de détail de cinq heures de plus par semaine pour les établissements non alimentaires. M. le Président, cinq heures, pas dix heures, pas quinze heures, pas vingt heures, cinq heures! La qualité de vie des travailleurs et des travailleuses de la société québécoise. Cinq heures de plus, Mme la députée de Taillon.

Ce n'est pas vrai, M. le Président, de dire que les travailleurs de commerce de détail vont travailler le dimanche. Ils vont travailler cinq heures de plus par semaine, s'ils n'excèdent pas 39 ou 40 heures de travail; sinon ce sera des employés à temps partiel qui feront le travail. Est-ce que j'ai besoin de rappeler à la députée de Taillon la Loi sur les normes du travail qui interdit à un commerçant ou à un employeur de faire travailler une personne pendant plus de 40 heures? Est-ce que j'ai besoin de lui rappeler cela, elle qui a été ministre? Ce n'est pas vrai, M. le Président. Et je vois le député de Duplessis qui est assis à côté de la députée de Taillon...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Si vous voulez vous adresser à la présidence, s'il vous plaît.

Mme Pelchat: Oui, absolument. Je vais le citer, M. le Président. Hier soir, il a dit que Zellers pourrait ouvrir le dimanche. Ce n'est pas vrai que Zellers va pouvoir ouvrir le dimanche. Ce n'est pas vrai que Brault et Martineau va pouvoir ouvrir le dimanche, qu'ils comptent 4, 5, 10 ou 15 employés; ce n'est pas vrai. J'espère que c'est clair, là, M. le député de Duplessis, et pour tous les membres de cette Chambre aussi. C'est important de le dire, c'est de la désinformation.

M. le Président, Zellers, Brault et Martineau - nommez-les tous - vont pouvoir ouvrir cinq heures de plus par semaine, cinq heures. Les dépanneurs, M. le Président, qui existent et qui opèrent en ce moment vont pouvoir continuer d'opérer sept jours par semaine, vingt-quatre heures par jour, comme ils le font à l'heure actuelle. Bien plus, M. le Président, bien plus, les dépanneurs, dont la députée de Taillon parlait, et j'entendais aussi le député de Pointe-aux-Trembles en parler hier, les Provi-Soir, les magasins Couche-Tard, La Maisonnée, tous ces dépanneurs qui font partie de chaînes, avec l'élargissement du nombre d'employés, quand on passe de trois à quatre, vont pouvoir améliorer leurs services, M. le Président. C'était un souci de ces gens-là, les dépanneurs et les dépanneurs qui font partie des chaînes.

Pour moi, ce qui est le plus important dans cette loi - et ça va toucher la députée de Taillon parce qu'on va parier de la rive sud, de la Montérégie, M. le Président, c'est bien important de le souligner... Cette loi vise à instaurer une règle unique pour tous les établissements qui vendent de l'alimentation. Ces établissements pourront être ouverts toute la semaine. Le lundi et le mardi jusqu'à 19 heures. Une heure de plus que ce qu'ils font en ce moment. Le mercredi, le jeudi et le vendredi jusqu'à 21 heures. Le samedi jusqu'à 17 heures. L'élément vraiment nouveau de cette loi, c'est qu'en dehors de ces heures les commerces qui vendent de l'alimentaire avec quatre employés et moins pourront ouvrir le dimanche. On est passé de trois à quatre. C'est ça qui déchaîne l'Opposition officielle! C'est ça qui fait en sorte qu'on a l'impression à les écouter parler qu'il y a un tollé de protestations. Mais je regrette infiniment! À Saint-Hubert et à Longueuil, il n'y a personne qui se bat dans les autobus pour savoir comment il va utiliser ses cinq heures de plus pour magasiner! Vous savez, ce n'est pas vrai, M. le Président. C'est de la désinformation. On est passé de trois employés à quatre employés pour le dimanche.

Cette règle unique pour le secteur alimentaire vient enlever - on parle de privilèges et la députée de Taillon s'en souviendra - un privilège que le gouvernement péquiste, le gouvernement du Parti québécois, avait donné aux gros marchés publics. Dans ce cas-là, le ministre de l'époque - et je vais le dire, M. le Président, parce qu'il y en a eu de la démagogie qui s'est faite ici et vous me permettrez de le dire aussi - avait des chouchous. C'est ça qu'il avait. Il avait identifié, il avait exempté par règlement certains établissements, non pas certains types. Mme la députée de Taillon, je ne vous ai pas interrompue, je vous demande de m'écouter. M. le Président, je le répète, il a exempté certains types d'établissements, nommés et cités comme tels dans le règlement.

Je vais vous donner des exemples qui sont situés sur la rive sud de Montréal. La députée de Taillon est élue depuis 1989 dans le comté de Taillon. Ça ne fait pas tellement longtemps qu'elle est sur la rive sud de Montréal. Elle a été à Québec un bout de temps, elle a été à ville d'Anjou un bout de temps. Elle est sur la rive sud. Je vais lui parier de notre région à Mme la députée, notre région. Ce règlement qui a été adopté en 1984, ce qu'il disait, c'est ça - on exemptait: La Loi sur les heures d'affaires des établissements commerciaux ne s'applique pas à un établissement commercial dont l'activité exclusive est la vente de fruits et légumes frais ou de fromage ou de nourriture en contenants scellés au préalable ou de poissons et de fruits de mer ou de produits de boulangerie ou de la viande qui opérait le 12 janvier 1985 dans un marché public. Ce n'est pas de la discrimination, M. le Président? Je vais vous les nommer ceux qui ont été exemptés en 1984. Je ne nommerai

pas les 11. Je vais vous nommer ceux qui nous concernent, soit la rive sud de Montréal. On va s'en tenir à ça. Les privilégiés du ministre Biron sur la rive sud de Montréal c'étaient: Grand marché de la Rive-Sud, boulevard Taschereau à Greenfield-Park, Le Marché Village, boulevard Taschereau à Brossard, les Halles de Longueuil, chemin Chambly, Longueuil, comté de Taillon. Ces gens-là étaient exemptés. C'est comme ça que sur la Loi sur les heures d'affaires le fouillis total a commencé. Moi, dans mon comté, dans le comté de Taillon, dans le comté de...

Mme Marois: Une question de règlement.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Une question de règlement, Mme la députée de Taillon.

Mme Marois: J'aimerais rectifier des faits, M. le Président, si vous me le permettez, en vertu de l'article...

Mme Pelchat:...

Le Vice-Président (m. bissonnet): s'il vous plaît, s'il vous plaît! mme la députée. je vais écouter la question de règlement, s'il vous plaît. mme la députée.

Mme Marois: Je voudrais rectifier des faits, M. le Président, et je vous demande en vertu de quel article je peux le faire.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Lefebvre: La députée de Taillon pose une question dont elle connaît sûrement la réponse. Elle peut ne pas être en accord avec les propos de fa députée de Vachon, alors elle devra vivre avec.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Mme la députée...

M. Lefebvre: Si vous croyez que madame se trompe.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, Mme la députée, je pourrai vous reconnaître en vertu de l'article 212 après le discours de Mme la députée...

Mme Marois: C'est une question de directive.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Oui, une question de directive.

Mme Marois: Vous allez voir, à m'entendre, que je ne veux soulever aucun débat. La députée affirme une chose que moi je peux réfuter. Je croyais que lorsqu'on a...

M. Lefebvre: Une question de règlement. (12 h 40)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît! S'il vous plaît! S'il vous plaît! Sur la question de règlement, M. le député.

M. Lefebvre: Oui, M. le Président. Mme la députée de Taillon peut effectivement soulever une question de directive et s'informer auprès de la présidence d'un droit qu'elle aurait en cette Chambre, sauf qu'elle ne doit pas profiter de cette question de directive pour parier du fond.

M. Claveau: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît! Je vais terminer, M. le député. Sur la question de règlement, M. le député.

M. Claveau: Oui, M. le Président. Ma collègue de Taillon a en main les preuves écrites pour réfuter les propos...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît! S'il vous plaît!

S'il vous plaît, M. le député de Laval-des-Rapides!

Alors, Mme la députée, en vertu de l'article 212, je vous informe que-Une voix:...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Un instant! L'article 212 sert à intervenir après le discours de la députée de Vachon, si elle a utilisé des propos que vous auriez utilisés dans votre discours. Ce n'est pas l'article après. Évidemment, si vous avez des propos, vous pouvez toujours en faire une question de privilège.

Mme Marois: Mais, M. le Président, je vais me prévaloir d'un autre article au règlement. Je veux avoir votre aide. Je ne fais pas ça pour emmerder personne. Le 214. Bon. Là, on dit ici: "Lorsqu'un ministre cite, même en partie, un document, tout député peut lui demander de le déposer..." La députée cite un document qui serait un décret, j'aimerais ça qu'elle le dépose, M. le Président. Bon, alors, effectivement, elle fait affaire... Alors, j'aimerais qu'elle le dépose, M. le Président, sinon je me prévaudrai de 212.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît! C'est-à-dire qu'en vertu de 214, Mme la députée...

Des voix:...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît! C'est à un ministre que vous pouvez

demander le dépôt d'un document.

Écoutez, c'est une question d'opinion. Mme la députée de Vachon, si vous voulez conclure, s'il vous plaît!

Mme Pelchat: Comment ça, si je veux conclure? M. le Président, combien me reste-t-il de temps?

Une voix: Cinq minutes.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Mme la députée, il vous reste 30 secondes.

Une voix: Comment ça?

Le Vice-Président (M. Bissonnet): II vous reste 30 secondes, Mme la députée.

Mme Pelchat: Bien, M. le Président... Une voix: ...la question de règlement.

Mme Pelchat: ...j'espère que vous avez enlevé de mon temps les questions de règlement.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Mme la députée, vous savez très bien que, quand il y a des questions de règlement, ça s'impute sur le discours que le député est en train d'exprimer. C'est la tradition et la jurisprudence et je vous informe qu'il vous reste 30 secondes.

Mme Pelchat: Merci, M. le Président. Mais vous me confirmez que, la députée de Taillon, ça lui fait mal ce que j'ai à dire, et qu'elle ne veut pas l'écouter parce qu'elle a pris à peu près trois minutes de mon temps. Mais je veux juste vous dire, M. le Président, une chose bien importante. Chez nous, sur la rive sud de Montréal, les marchands de fruits et légumes Taschereau, La Pinière, sur le chemin Chambly, C'est-Si-Bon, eux autres, ils n'ont pas été exemptés par ce merveilleux règlement. Eux autres, ils voyaient leur clientèle volée, M. le Président, par ces marchés qui sont exemptés. C'est de là que part tout le problème, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Voulez-vous conclure, Mme la députée?

Mme Pelchat: En terminant, M. le Président, je veux juste vous dire quelque chose. Hier, mes collègues, le député de Saint-Maurice et le député de Fabre, ont fait allusion à de l'intimidation et qu'ils se sont sentis agressés par des "lobbyists". Eh bien, moi aussi, M. le Président, je me suis sentie agressée par des "lobbyists", et je voudrais vous dire que, en tant que députée, me faire dire que, si je vote sur un projet de loi, je vais me faire battre à la prochaine élection parce que j'ai 114 voix de majorité, eh bien, M. le Président, ça vaut la peine de se lever pour défendre les intérêts de la population.

Des voix: Bravo! Bravo!

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Question de règlement, Mme la députée.

Une voix: ...M. le Président.

Mme Marois: Alors, M. le Président...

Des voix:...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît! J'ai eu une question de règlement, M. le député. Je ne peux pas en prendre deux en même temps.

Mme Marois: En vertu de 212, ça n'a pas de priorité?

M. Audet: M. le Président, c'est qu'en vertu...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le député. M. le député. S'il vous plaît! M. le député, je m'excuse, j'ai reconnu Mme la députée de Taillon sur une question de règlement. Je ne peux pas en prendre deux en même temps, voyez-vous.

Mme Marois: M. le Président, j'ai toujours un peu de difficulté... Je vais le lire, le décret. Ça va être ennuyeux, mais on va le lire.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Un instant, là. Mme la députée, juste avant de... Sur 212, je vais vous lire 212 parce que je pense qu'il faut expliquer l'article 212.

Mme Marois: Allez-y.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): 'Tout député estimant que ses propos ont été mal compris ou déformés peut donner de très brèves explications sur le discours - s'il vous plaît, M. le député - qu'il a prononcé." Ou qu'elle a prononcé. "Il doit donner ces explications immédiatement après l'intervention qui les suscite. Elles ne doivent apporter aucun élément nouveau à la discussion, ni susciter de débat."

Alors, voyez-vous, Mme la députée, c'est que ce sont après les dépôts... Selon le discours que vous avez prononcé, s! quelqu'un avait été contraire à votre discours, vous pourriez, à ce moment-là, poser une question à la députée sur le discours en vertu de 212. Vous pouvez toujours utiliser l'article 213 pour poser une question à un député qui vient de terminer son discours si le député vous en donne la permis-

sion. Et, effectivement, s'il y a un autre cas, c'est qu'à ce moment-là, si vous ne pouvez pas recourir à ces deux articles, il vous reste l'article 71 pour les faits personnels et vous devez envoyer un avis une heure avant la période des affaires courantes.

M. Chevrette: Question de règlement.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Question de règlement, M. le leader de l'Opposition officielle.

M. Chevrette: S'ils veulent se congratuler au sein de leur parti, allez-vous-en dans les... Question de règlement.

Le Vice-Président (m. bissonnet): s'il vous plaît, m. le député de saint-maurice. s'il vous plaît, je vous demande d'être attentif, d'être à l'ordre, m. le député.

M. Chevrette: C'est sa seule façon de montrer qu'il est ici, lui.

Une voix: Ah!

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le député...

M. Chevrette: Question de règlement, M. le Président. M. le Président, en vertu du règlement, quand quelqu'un dit des choses fausses et qu'il n'est pas dans la Chambre pour se défendre, on a le droit, en vertu du règlement, de rétablir les faussetés, même si un individu n'est pas en cette Chambre.

M. le Président, l'objet de la question de règlement est le suivant. Nous avons la preuve écrite, noir sur blanc, que Mme la députée de Vachon a dit des faussetés sur un de nos collègues...

Une voix: Question de règlement, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît! S'il vous plaît! S'il vous plaît! S'il vous plaît, sur la question de règlement, M. le leader adjoint du gouvernement, je vais permettre au député de compléter et je reviendrai. Je ne peux pas en prendre deux en même temps.

Bon, je vais entendre M. le leader de l'Opposition, brièvement.

M. Chevrette: M. le Président, en vertu du règlement, il est bel et bien dit, noir sur blanc, que l'on peut rectifier des choses qui sont fausses. Et, M. le Président, on a le document écrit comme quoi Mme la députée de Vachon, et je vous pose la question comme président de l'Assemblée nationale, délibérément, a affirmé des faussetés. En vertu de notre règlement, on a donc le droit...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît! M. le député, s'il vous plaît. S'il vous plaît! S'il vous plaît! M. le député. M. le député, il y a... S'il vous plaît! S'il vous plaît! On ne peut, n'est-ce pas? on ne peut refuser d'accepter la parole d'un député en vertu de l'article 35.6°. Et c'est une question d'opinion...

M. Chevrette: Question de règlement.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Question de règlement.

M. Chevrette: Ce n'est pas une question d'opinion, M. le Président, c'est un livre écrit. On pourra le lire noir sur blanc comme quoi c'est une fausseté, c'est un mensonge!

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît!

M. Chevrette: Est-ce clair?

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît! S'il vous plaît! M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Lefebvre: M. le Président, le leader de l'Opposition - et ce n'est pas la première fois qu'il procède de cette façon-là - au moment où il soulève une question de règlement, M. le Président, il est en complète dérogation avec le règlement lui-même. Au moment où il soulève sa question de règlement, il prétend que la députée de Vachon a menti. Ça, c'est contraire à nos règlements, M. le Président, vous êtes en... 35.5°, 35.6°, 35.7° de notre règlement. Je vous demande, M. le Président, même si le leader est en train de soulever une question de règlement, je vous demande de lui intimer l'ordre de retirer de son propos le fait qu'il a prétendu que la députée de Vachon avait menti. Il n'a pas le droit de dire ça, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît! M. le leader de l'Opposition officielle et Mme la députée de Taillon, la seule façon d'accuser quelqu'un ici, c'est en vertu de l'article 315 et ça prend une motion pour mettre en question la conduite d'un membre du Parlement agissant en cette qualité. Alors, M. le leader, je vous demanderais de retirer vos paroles sur ce que vous avez dit sur le député...

M. Chevrette: M. le Président...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît...

M. Chevrette: ...comment puis-je retirer... Je vais vous poser une question de directive, avant.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Oui. Là, je vous demande... M. le député, avant d'entendre votre question de directive, M. le leader, ce que je vous dis, c'est que, pour accuser, pour mettre en cause les paroles de quelqu'un, il faut faire une motion en conséquence. Question de directive...

Nous allons suspendre les travaux de cette Assemblée quelques instants.

(Suspension de la séance à 12 h 50)

(Reprisée 12 h 59)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Veuillez vous asseoir, s'il vous plaît!

Alors, compte tenu de l'heure, je suspends les travaux jusqu'à 15 heures.

(Suspension de la séance à 13 heures)

(Reprise à 15 h 7)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): À l'ordre, s'il vous plaît!

Si vous voulez prendre place, s'il vous plaît.

Vous pouvez vous asseoir.

Alors, peu avant la suspension de 13 heures, plus précisément à 12 h 44, M. le leader de l'Opposition officielle, à l'occasion d'un rappel au règlement, s'est exprimé de la façon suivante: "M. le Président, l'objet de la question de règlement est le suivant. Nous avons la preuve écrite, noir sur blanc, que Mme la députée de Vachon a dit des faussetés sur un de nos collègues... " Épreuve du Journal des débats, référence R-4866, page 2. Quelques secondes plus tard, il ajoutait: "M. le Président, on a le document écrit comme quoi, prouvant que Mme la députée de Vachon, et je vous pose la question comme président de l'Assemblée nationale, comme quoi la députée de Vachon, délibérément, a affirmé des faussetés". Épreuve du Journal des débats, référence R-4866, page 3. Enfin, M. le leader de l'Opposition officielle a conclu en affirmant: "Ce n'est pas une question de règlement, M. le Président, c'est un livre écrit, on pourra le lire noir sur blanc comme quoi c'est une fausseté, c'est un mensonge". Epreuve du Journal des débats, référence R-4867, page 1.

Entre ces interventions et à leur suite, j'ai rappelé, d'une part, l'article 35. 6 selon lequel on ne peut refuser d'accepter la parole d'un député et, d'autre part, l'article 315 qui stipule qu'"une motion est nécessaire pour mettre en question la conduite d'un membre du Parlement agissant en cette qualité. " À la suite de quoi, j'ai expressément et formellement demandé à M. le leader de l'Opposition officielle de retirer ses paroles.

Épreuve du Journal des débats, référence R-4867, page 2. Puis, à la suite d'une brève suspension, j'ai suspendu la séance jusqu'à 15 heures. Voilà pour les faits.

À ce stade-ci, je me dois, M. le leader de l'Opposition officielle, de vous rappeler à nouveau non seulement l'article 35. 6° du règlement, mais aussi une série de décisions de mes prédécesseurs, de mes collègues et de moi-même qui réprouvent et condamnent sans équivoque comme non parlementaire l'usage, en cette Assemblée, des mots "fausseté", faux", "mensonge", "mensonger", "menteur", "mentir", en plus de l'expression "tromper la Chambre et délibérément dit des faussetés".

Dès lors, il ne fait aucun doute, M. le leader de l'Opposition officielle, que vos propos, selon lesquels Mme la députée de Vachon aurait délibérément affirmé des faussetés et aurait proféré un mensonge, violant ostensiblement les dispositions de l'article 35. 6° du règlement. C'est pourquoi, M. le leader de l'Opposition officielle, je vous demande une nouvelle fois de retirer les propos que je viens de citer.

M. le leader de l'Opposition.

Une voix: Est-ce qu'on pourrait suspendre les débats, M. le Président?

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Vous voulez suspendre les débats, M. le député. Alors, je suspends les travaux de cette Assemblée pour quelques instants.

(Suspension de la séance à 15 h 11)

(Reprise à 15 h 20)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Je constate l'absence du leader parlementaire de l'Opposition officielle. Alors, je suspends la demande. Nous allons maintenant poursuivre le débat sur l'adoption du projet de loi 75 et je suis prêt à donner la parole au prochain intervenant. Je suis prêt à reconnaître, M. le député d'Ungava. M. le député.

M. Christian Claveau

M. Claveau: M. le Président, c'est sur une mauvaise note que nous avons dû suspendre les travaux juste avant 13 heures cet après-midi parce que, M. le Président, il y a des gens en cette Chambre qui n'ont aucun respect pour la vérité, qui n'ont aucun respect quant à la valeur de ce qui est écrit et au sens à donner aux textes tels qu'ils sont écrits.

M. le Président, je me dois de citer au texte la Gazette officielle du 12 janvier 1985, 117e année no 2, qui dit ceci: "Le ministre de l'Industrie et du Commerce donne avis, conformément à l'article 6 de la Loi modifiant la Loi

sur les heures d'affaires des établissements commerciaux, 1984, chapitre 17, qu'il accorde à certains établissements commerciaux dont l'activité exclusive est la vente de denrées alimentaires et opérant à chaque jour avec plus de trois personnes en même temps dans l'établissement pour en assurer le fonctionnement, lesquels exercent leurs activités dans les marchés publics et dont les noms apparaissent en annexe - c'est très clair - un délai jusqu'au 30 juin 1986 pour se conformer aux dispositions de la Loi sur les heures d'affaires des établissements commerciaux (L.R.Q., chapitre H-2) à la condition qu'ils n'augmentent pas leur nombre d'employés d'ici cette date. Québec, le 20 décembre 1984."

Des voix: Bravo!

M. Claveau: Et on retrouve après la liste non pas de 11, comme le disait la députée de Vachon, mais tout près de trois pages, deux pages complètes d'établissements qui sont exemptés jusqu'au 30 juin 1986. On leur donne un délai de conformité pour être en règle avec la loi. On leur dit: Dans le contexte où vous vous trouvez et à cause des antécédents, à cause de votre passé, on vous reconnaît jusqu'au 30 juin 1986 pour vous conformer à la nouvelle loi. C'est clair, c'est précis. Ça ne laisse pas place à interprétation. Quand la députée de Vachon vient affirmer en cette Chambre que le gouvernement a préféré ou a donné des chances à des chouchous - pour reprendre ses propres termes - et quand elle dit que ces chouchous-là ont été exemptés de la loi sur les heures d'affaires en 1984, le moins que l'on puisse dire c'est qu'elle a quelque peu déformé la réalité; qu'elle a quelque peu interprété librement ce qu'il y a de véritablement écrit, M. le Président; qu'elle n'a pas beaucoup de respect pour la valeur des textes et pour leur contenu, et que si ses propos sont à l'image de son gouvernement, eh bien, on comprendra facilement comment il se fait que le gouvernement auquel elle est associée, dont elle fait partie interprète à sa guise à peu près l'ensemble des activités dans cette société. Les propos de la députée de Vachon sont indignes d'une parlementaire qui se veut respectueuse des décrets du gouvernement et respectueuse de la portée des textes qui sont publiés dans la Gazette officielle du Québec.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Excusez, M. le député. Est-ce que vous voulez fermer la porte à l'arrière, s'il vous plaît? Merci. Je m'excuse de vous avoir interrompu. M. le député, si vous voulez poursuivre.

M. Claveau: Oui, M. le Président. Lorsqu'on se réfère à des documents, lorsqu'on se réfère à des textes officiels, on doit les citer dans le sens tel qu'ils sont écrits. On doit respecter l'esprit et la lettre. On n'a pas le droit, M. le Président, d'essayer de cacher son incompétence, son incapacité, son insouciance, j'irais même jusqu'à dire son impuissance à gouverner, derrière des textes qui ont été écrits par d'autres qui gouvernaient avant, mais qui avaient leurs responsabilités à coeur, qui étaient capables de mettre leur culotte et de déterminer les délais tels qu'ils se doivent.

On a voulu en 1984, le 20 décembre 1984 très précisément, donner un délai de conformité par respect aussi pour les activités antérieures de certaines entreprises qui voyaient leur comportement, leur façon de faire, leur marge de bénéfice et éventuellement même leur survie compromis avec l'arrivée d'une nouvelle loi si cette loi-là s'était appliquée sans délai. Alors, respectueux du cheminement de la société, le ministre d'alors a prévu des délais pour se conformer. C'est ça, essentiellement, le décret qu'on a sous les yeux. Des délais de conformité, ce que l'on voit dans toutes les lois, M. le Président, lorsqu'on change fondamentalement des façons de faire établies sur une habitude ou sur des lois antérieures.

Dans la Loi sur les forêts, votée en 1987, il y avait un délai de conformité de trois ans jusqu'au 31 mars 1990. On donnait trois ans de délai de conformité à l'entreprise et on l'a fait respecter; au 1er avril 1990, l'entreprise était conforme. Et c'est le gouvernement du Parti libéral qui l'a fait. Il n'y a rien d'anormal, il n'y a rien de honteux, il n'y a rien de scandaleux à donner des délais de conformité lorsqu'on vient modifier fondamentalement les façons de faire, les habitudes établies alors même que l'on met en danger la vie de certaines entreprises et d'un nombre important de travailleurs dans ces entreprises. Il n'y a rien de honteux à ça. Et on n'a pas le droit, M. le Président, d'induire la Chambre en erreur, de raconter n'importe quelle salade pour essayer de faire donner un sens contraire à ce que veut dire le texte.

M. le Président, dans ce sens-là, je ne peux approuver en aucune façon, absolument en aucune façon, et je sais même très pertinemment que plusieurs de mes collègues de l'aile ministérielle n'approuvent pas non plus, pas plus que moi, les propos de la députée de Vachon en cette Chambre qui s'en vient interpréter, à sa guise, en faussant carrément le sens du décret du 20 décembre 1984. M. le Président, on ne peut se permettre ça, sinon la Chambre, la démocratie n'a plus aucune valeur. Le Parlement n'a plus de valeur en soi.

M. le Président, on nous répète à satiété que ce décret est à la base du problème. Allez donc, M. le Président! Allez donc! Qu'un délai de conformité soit à la base d'un problème? Il faut vraiment ne pas avoir le courage de ses propres actes, et c'est le cas du ministre actuel et de son gouvernement. Qu'est-ce qu'ils ont fait, ces gens-là, M. le Président, au 30 juin 1986? Est-ce qu'ils ont appliqué le décret tel que les entre-

prises s'y attendaient? Parce que ça faisait un an et demi, 18 mois, qu'elles savaient que le décret existait, et elles devaient s'être préparées en conséquence. Est-ce que ces gens-là, M. le Président, ont appliqué le décret au 30 juin 1986? Non, M. le Président. Non! Ils n'ont pas eu le courage de faire appliquer le décret tel qu'ils auraient dû le faire. Ils voulaient gouverner, cependant. Ils se sont fait élire en 1985 en disant à tout le monde qu'ils allaient gouverner mieux que le gouvernement antérieur. Mais gouverner, M. le Président, ça ne veut pas dire se promener en limousine. Ça veut dire, entre autres, savoir prendre ses responsabilités et savoir faire respecter les engagements du gouvernement et les lois qui ont été votées tant et aussi longtemps, pour le moins, qu'on ne les a pas changées.

Au 30 juin 1986, la loi n'avait pas été changée et le gouvernement a craché littéralement sur le décret par laxisme, par incompétence, par incapacité, et il a permis que cela se continue dans le temps. Il a même fait en sorte que des gens investissent et continuent à investir tout en sachant qu'ils n'étaient pas légaux, M. le Président. L'illégalité ne donne pas de droits acquis. Ce n'est pas parce qu'on pratique illégalement pendant un certain temps qu'il y a quand même des droits acquis à partir de cette illégalité-là, M. le Président. Le fait que je conduise rapidement sur les routes pendant un an sans me faire prendre ne veut pas dire que le jour où on me donnera un "ticket" j'aurai acquis le droit de pouvoir conduire plus vite parce que ça fait un an qu'on ne me donne pas de "ticket". Ce n'est pas vrai! (15 h 30)

M. le Président, ce gouvernement n'a pas voulu donner de "ticket", n'a pas voulu faire appliquer la loi et n'a pas voulu faire appliquer les décrets qui allaient avec la loi. Et, ayant été lui-même, donc, la cause du problème, aujourd'hui, il essaie de légaliser ou de donner des droits acquis à ceux qui ont agi dans l'illégalité. Ceci est inacceptable. Ceci est carrément inacceptable et c'est encore plus insultant pour les parlementaires que nous sommes lorsque des députés en cette Chambre, à l'instar et à l'exemple de la députée de Vachon, viennent donner un sens aux articles de loi et un sens au décret qui est absolument contraire à la réalité, contraire à l'essence même du décret et à sa raison d'être. Mon temps est terminé. Je vous remercie.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Cannon): Merci, M. le député d'Ungava. Mme la députée de Terrebonne.

Mme Jocelyne Caron Mme Caron: Merci, M. le Président. Les députés ministériels s'étonnent de nos vives réactions. Mais il y a des limites, M. le Président, à endurer un gouvernement qui ne respecte aucune règle, qui nous applique le bâillon, qui nous met des motions de clôture et, quand ce n'est pas suffisant, qui nous tient des propos déformant délibérément la vérité, comme ceux que nous a tenus la députée de Vachon ce matin.

Ce gouvernement se spécialise dans la déformation de la réalité. On nous impose un bâillon et on nous dépose en vrac 25 articles amendés sur 34 articles, qui ne corrigent aucunement les lacunes fondamentales de cette loi qui va passer à l'histoire pour son ambiguïté, une ambiguïté qui s'est retrouvée en commission parlementaire et qui s'est retrouvée dans tous les propos du ministre, M. le Président. Ce ministre qui, en commission parlementaire, nous a dit être d'accord avec un amendement et voter contre, M. le Président, qui nous a dit que sa loi défendait la fermeture des magasins le dimanche et qui, dans les faits, permet l'ouverture des magasins le dimanche. Un ministre qui nous a dit dans ses répliques que ses amendements, ses 25 articles amendés, n'apportaient pas d'amendements majeurs et qui, tout de suite après, dans une autre réplique, nous a dit qu'il y avait deux amendements majeurs.

M. le Président, cette loi est une loi caméléon. C'est une loi de camouflage qui tourne autour de l'article 4. Ce fameux article, le ministre refusait et a refusé à plusieurs reprises en commission parlementaire d'en discuter parce qu'il savait très bien que tout ce qu'on réussissait à faire, c'était de jouer sur les tournures de phrases, mais qu'on ne changeait rien au fond de cette loi.

On s'est même permis en cette Chambre, M. le Président, plusieurs députés ministériels l'ont fait, de déprécier tous les efforts qui avaient été faits pour une concertation dans le milieu. On a dénigré le travail de la Coalition contre l'ouverture des commerces. Ces gens, qui ont participé régulièrement en commission parlementaire, qui ont déposé des mémoires, qui ont déposé des lettres, qui ont signé des pétitions - nous avons reçu des télégrammes aussi, M. le Président; uniquement dans mon comté, dans le comté de Terrebonne, 109 télégrammes, ce n'est pas rien - ces gens-là avaient réussi à faire une concertation, non seulement d'un seul groupe, M. le Président, mais aussi il y avait des consommateurs dans cette Coalition. Le ministre nous parle toujours

Il y avait des représentants des consommateurs, des représentants des non-alimentaires, des représentants des travailleurs et des travailleuses, des représentants des dépanneurs, des représentants des épiciers, M. le Président. Cette Coalition a témoigné d'un souci de concertation assez exceptionnel et a démontré une présence. Ils ne se sont pas déplacés pour rien, M. le

Président. Partout, dans les réunions régionales, ils étaient là pour expliquer au ministre ce qu'ils avaient à lui dire pour défendre leurs droits, mais le ministre n'était pas là, M. le Président. On a poursuivi une opération de subtilité en déposant nos amendements, tout en restant inébranlable sur le principe fondamental, c'est-à-dire qu'on voulait ouvrir le dimanche. Ce ministre, marchand d'illusions, est resté enfermé dans sa tour d'ivoire en gardant une seule petite fenêtre ouverte vers les grands espaces. Le ministre a littéralement refusé de comprendre, d'entendre la voix de la majorité. Mais le ministre semble s'être trouvé un ami dans cette petite tour d'ivoire parce que, vous savez, on trouve de tout lorsqu'on présente un tel projet de loi, un projet caméléon - je le répète - qui couvre de grandes surfaces, évidemment.

À partir de là, à partir de ce principe fondamental, il n'a cherché qu'à pondre des amendements pour cacher la réalité de l'article 4. Vous savez, M. le Président, on ne peut écraser impunément, même préserver dans une tour d'ivoire les 400 000 travailleurs et travailleuses, les commerçants et les commerçantes des moyennes et petites surfaces. Les épiciers, les dépanneurs, on ne peut les écraser au profit des géants de la consommation. On ne peut écraser non plus les 40 organismes de consommateurs qui se sont opposés à ce projet de loi. Qu'est-ce que dit, dans les faits, l'article 4? L'article 4 permet l'ouverture le dimanche parce qu'il y a cinq personnes qui peuvent être présentes, sans oublier les personnes affectées à la sécurité, à la boulangerie ou à la pâtisserie. Dans les faits, on peut ouvrir le dimanche, même si le ministre refuse de le reconnaître.

Que réclamait la Coalition? On a tenté de faire croire que cette loi était pour venir en aide aux travailleurs. Toute la Coalition, consommateurs inclus, réclamait une qualité de vie. Qu'est-ce que c'est, une qualité de vie? Pour les travailleurs, c'est avoir le droit à un temps de repos, à un temps d'arrêt. Et, pour les consommateurs, c'est avoir le droit d'avoir un temps pour d'autres activités que la consommation.

La députée de Vachon nous disait: On ajoute uniquement cinq heures en semaine. Elle oubliait ce qu'on ajoutait le dimanche, elle n'a pas parlé de cet article 4. On n'ajoute que cinq heures, plus au moins 30 minutes, à chacune des journées, lundi, mardi et mercredi. Parce que, si le magasin est fermé à 7 heures, les employés ne partent pas à 7 heures. Donc, on ajoutait au moins six heures et demie, sans oublier que ces gens-là ne sont pas rendus à la maison. Et, avec les garderies, qu'est-ce qui se passe? Les coûts, pour les travailleurs qui vont laisser leurs enfants à la garderie jusqu'à cette heure-là, non, le ministre n'y a absolument pas pensé.

La qualité de vie. Ma collègue, la députée de Taillon, qui a fait un travail extraordinaire sur ce projet de loi, a présenté le point de vue de la Fédération des ACEF, qui était très clair. Ça, ce sont des organismes de consommateurs, il y en avait 40. Moi, je vais citer une autre fédération - puisque je ne veux pas répéter ce que la députée de Taillon a dit - la Fédération nationale des associations de consommateurs du Québec; elle aussi regroupe beaucoup de consommateurs. Elle disait clairement: La FNACQ défend une approche globale de l'intérêt du consommateur et de la consommatrice considérant que le niveau d'acheteur devrait être dépassé pour faire place à la notion de bien-être et de qualité de vie de toute personne dans notre société. Nous refusons d'instituer une course à la consommation plutôt que d'accorder aux consommateurs et aux consommatrices une journée dans la semaine pour se reposer, pour s'adonner à des loisirs, à des activités culturelles ou sportives et à des rencontres amicales ou familiales.

Pour la Fédération nationale des consommateurs, il s'avère évident que cette campagne en faveur de l'ouverture des magasins le dimanche a été brillamment orchestrée par les grandes entreprises, au détriment des petits commerçants, des travailleurs et des travailleuses, des consommateurs et des consommatrices, et ceci, dans le but d'augmenter leur part de marché et leurs profits. Alors, quand on vient nous parier et nous faire des leçons sur ce que les consommateurs veulent, nous en avons suffisamment. Vous savez, un organisme de consommateurs, ce n'est pas uniquement pour demander de la consommation, c'est pour demander une qualité de vie et c'est pour demander aussi le côté éducatif de la consommation. (15 h 40)

Si le ministre pense que tout est réglé avec cette loi, eh bien, il va avoir des surprises parce que je suis convaincue que, comme pour tous les projets de loi que nous avons vus défiler durant cette session, ce sera, l'an prochain, une reprise du projet de loi. Le ministre a dit: Non merci à fa Coalition et non merci à l'Opposition. Il tente maintenant de nous faire croire que son "non merci" signifiait un "oui" à la fermeture le dimanche. Nous avons eu une leçon dans le passé là-dessus, M. le Président. On sait que le "non merci" de 1980 qui devait dire un "oui", bien, il n'a rien réglé parce que le problème constitutionnel, il est encore entier. Eh bien, cette loi 75, elle fait exactement la même chose; son "non merci" qui veut dire un "oui", il ne règle rien, le problème reste entier. Si le ministre ne corrige pas cette loi immédiatement, à cette session, eh bien, il nous reste une chose à dire au ministre, et l'Opposition et la Coalition: À la prochaine, M. le ministre.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Cannon): Merci, Mme la députée de Terrebonne. M. le député de Bertrand.

M. François Beaulne

M. Beaulne: Merci, M. le Président. Mon intervention sur ce projet de loi va porter sur un point particulier. Vu que le processus est particulièrement avancé et qu'à moins d'événements imprévisibles, le projet risque d'être adopté avant l'ajournement de la session, j'aimerais plaider, comme je l'ai fait depuis le tout début, pour qu'une certaine flexibilité soit introduite au niveau du traitement des fruiteries qui sont membres de l'Association provinciale des fruiteries du Québec.

Nous avons examiné les arguments qui ont été invoqués à rencontre de ce projet de loi qui, soit dit en passant, "insatisfait" presque tout le monde. Je partage entièrement et j'appuie entièrement les revendications des travailleurs et des travailleuses, les arguments qui sont invoqués par les propriétaires de magasins, également, qui jugent injustifié le prolongement des heures d'affaires. Mais je pense qu'en ce qui concerne les fruiteries, on a oublié et on a évité de discuter sérieusement d'un secteur qui concerne et qui touche principalement les jeunes, les étudiants, les producteurs maraîchers locaux du Québec.

Lorsque nous avons étudié en commission ce projet de loi, et, M. le ministre, vous étiez présent, les représentants des fruiteries ont eu l'occasion de venir exposer en détail les motifs qui militaient en faveur d'une flexibilité plus grande et d'un traitement spécial en ce qui concerne leurs opérations, en raison du fonctionnement de leurs activités, en raison des contributions à l'emploi, principalement chez les jeunes et principalement chez les employés occasionnels, en raison également de leur contribution aux débouchés pour les produits des agriculteurs et des producteurs maraîchers locaux. Et, si je peux vous donner comme exemple quelque chose que je vis dans mon comté, vous avez tous entendu parier de la municipalité de Saint-Amable. Vous pouvez bien verser des larmes de crocodile sur les pneus qui y ont brûlé, mais je vais vous dire que 60 % de la production d'asperges de cette municipalité est acheminée via les fruiteries de la rive sud sur les marchés et auprès des consommateurs.

D'autre part, j'aimerais également souligner que dans cette question vous avez eu l'occasion de remarquer que, depuis le début de la semaine, j'ai présenté des pétitions défendant les droits des fruiteries. Laissez-moi vous dire et vous apporter quelques précisions sur ces pétitions-là. Elles n'ont pas été orchestrées depuis des mois. Elles ont été organisées à la dernière minute, avec les moyens du bord, depuis vendredi soir dernier. Depuis trois jours, vous avez pu remarquer que j'ai déposé dans cette Chambre des pétitions contenant 15 000 noms. J'en ai encore qui arrivent et que je vais déposer d'ici à la fin de la semaine. Ces pétitions sont signées par les consommateurs de villes dans toutes les régions du Québec qui appuient de façon générale les positions de la Coalition contre l'ouverture des magasins le dimanche, mais qui, néanmoins, demandent qu'on jette un regard particulier sur le commerce des fruiteries. Quand je parte de fruiteries ici, je parie principalement de celles qui sont membres de l'Association provinciale des fruiteries et non pas le style grand supermarché comme on voit dans la région de Québec, ici.

M. le Président, j'aimerais demander au ministre, compte tenu de l'étape où on est rendus dans l'adoption de ce projet de loi, si au moins au niveau de la réglementation il ne pourrait pas discuter avec les porte-parole de l'Association des fruiteries du Québec des accommodements qui feraient en sorte de minimiser les retombées négatives pour ces gens-là. J'aimerais également, d'autre part, profiter des quelques minutes que j'ai pour intervenir sur ce sujet pour vous demander de prévoir des délais d'adaptation raisonnables que vous pourrez discuter avec les principaux concernés de façon que les jeunes entrepreneurs qui ont mis sur pied, qui ont investi énormément, et j'en connais moi-même pour en avoir plusieurs dans mon comté... J'aimerais que vous prévoyiez des délais d'adaptation pour que ces jeunes entrepreneurs qui ont investi énormément dans la mise sur pied de ces commerces ne soient pas pénalisés et ne soient pas acculés à la faillite ou ne soient pas réduits à l'inopération par suite de l'application de cette loi.

Je pense, M. le Président, que dans ce débat, finalement, ce qui ressort, c'est que ce sont toujours les gros, ceux qui sont organisés, qui font valoir leur point de vue. Ce sont toujours ceux qui ont des intérêts particuliers à défendre. Je dois reconnaître, sans entrer dans le secret des dieux et sans être dans le secret des dieux, que je crois que vous avez vous-même, M. le ministre, cédé à quelques-unes de ces pressions-là. Vous avez annoncé des amendements prévoyant aux vendeurs de matériel routier, de piscines, enfin toutes sortes de commerces quelconques... vous avez prévu des accommodements pour ces gens-là. Vous avez également prévu des accommodements pour les horticulteurs, pour les antiquaires, pour un certain nombre d'autres commerces dans certaines activités qui, à mon avis, ne m'apparaissent aucunement ajouter à la qualité de vie, comme le font les fruiteries.

Et, d'ailleurs, je vous rappellerai un sondage effectué à deux reprises par l'Association provinciale des fruiteries qui, irréversiblement, a démontré à chaque fois que 80 % de la population appuyaient l'ouverture des petites fruiteries le dimanche.

Et, d'ailleurs, je vous ferai remarquer qu'il y a quelque chose d'incohérent et d'inconséquent dans le fait que certaines de ces petites fruiteries-là ont même vu le jour grâce à des subven-

tions du gouvernement via les corporations de développement économique communautaire, en particulier dans le centre-sud de Montréal et dans l'est de Montréal.

Alors, je trouve tout à fait inconséquent que, d'une part, le gouvernement offre des fonds à des gens et, surtout, à des jeunes entrepreneurs pour mettre sur pied des petits commerces et que, par la suite, on vienne leur couper le cou par des mesures comme celles qui sont introduites dans ce projet de loi.

En conclusion, M. le ministre, je pense que le temps est venu que les masques tombent et que ceux qui versent des larmes de crocodile sur la situation de l'emploi chez les jeunes, sur la situation de l'emploi chez les étudiants qui vont être frappés d'augmentation de frais de scolarité, que ceux qui versent des larmes de crocodile sur les producteurs maraîchers du Québec et principalement les producteurs locaux se rendent à l'évidence que, dans ce débat, qui est, au fond, un débat de société, ce sont encore une fois les petits qui vont faire les frais d'arrangements qui, somme toute, ne conviennent à personne. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Cannon): Merci, M. le député de Bertrand. Mme la députée de Chicouti-mi.

Mme Jeanne L. Blackburn

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Le projet de loi qui est déposé et qui est à l'examen actuellement, du ministre de l'Industrie, du Commerce et de la Technologie, c'est une espèce de bouillie infecte et, curieusement, il aura réussi à indisposer à peu près tout le monde, M. le Président. (15 h 50)

M. le Président, il refuse aux gens la possibilité de s'exprimer pour voir s'il n'y aurait pas lieu de revenir sur une décision malheureuse, à mon avis, un entêtement inacceptable dans ce dossier. Il a imposé le bâillon pour museler l'Opposition. L'Opposition est muselée, mais je peux me permettre de dire qu'également les députés ministériels le sont, M. le Président. Non seulement l'Opposition est-elle muselée, mais les députés ministériels le sont par les règles qui régissent ce qu'on appelle la ligne de parti.

M. le Président, je m'interrogeais sur nos positions. Avions-nous raison, tort? Étions-nous en train de nous enfermer dans un discours qui ne correspondait pas à la réalité? Alors, je me suis informée auprès de députés ministériels, à l'occasion de déplacements, d'échanges et au moment où on prenait un café et un sandwich, parce qu'il était 3 ou 4 heures du matin, quels étaient leurs sentiments à cet égard. Et, curieusement, pour une bonne partie, je dirais pour une partie, ça s'est séparé peut-être - je ne saurais pas le quantifier parce que c'est toujours un peu dangereux. Il y a définitivement des députés qui sont en faveur du projet de loi sans aucune nuance et sans aucune distinction. Ils étaient en faveur du projet de loi déposé, ils sont toujours en faveur du projet de loi en cours de modification, après modification. Ils étaient en faveur de n'importe quel projet de loi, du moment que ça venait de la partie ministérielle. Je le dis, pour certains avec indifférence peut-être, d'autres avec cynisme ou d'autres par intérêt Mais il y en a certainement qui sont de cette catégorie.

Par ailleurs, nombreux - et je n'oserais pas vous demander votre avis là-dessus - sont les députés libéraux qui ont les commentaires suivants et je vous les cite, je suis certaine qu'ils vont se reconnaître. Il y en a un qui m'a dit: Écoutez, il faut vous rassurer. C'est beaucoup moins pire que ce qui nous menaçait il y a seulement deux ou trois semaines. Si vous saviez comment on a travaillé; on a fini par se convaincre que c'est encore moins pire que ce qui se présentait avant. Ce n'est pas moi; c'est un député libéral. Et là, M. le Président, si jamais on me dit: II faudrait que vous les nommiez, je suis prête à le faire. Je crois que ce ne serait pas très souhaitable pour ces personnes-là, je ne voudrais pas les mettre mal à l'aise, mais je pourrais le faire.

M. le Président, un autre est tout à fait contre parce qu'il m'a dit: Écoutez, j'ai fait beaucoup de tourisme. Je suis allé en Europe. La tradition est toute autre et ils vivent bien, sauf que, pour les Européens, la valeur fondamentale n'est pas la consommation, c'est la qualité de vie. Le dimanche, ils ont toutes sortes de choses à faire. Ils vont visiter les musées, ils se promènent dans les parcs, ils vont visiter la famille, ils lisent, ils font des activités ensemble, ils font d'autres activités, ils ne se croient pas obligés de faire de la consommation. Et il m'a dit: Moi, le modèle américain, ça ne me convient pas beaucoup. Ce n'est pas un député d'une région, c'est un député d'une ville. Un autre m'a dit: Moi, vous savez, les valeurs américaines, je m'en serais bien passé. Un autre m'a dit: La situation des employés à faible revenu m'inquiète, les travailleurs à faible revenu. Pour un autre: Voilà! Les femmes qui sont sur le marché du travail n'auront même plus de prétexte pour ne pas faire elles-mêmes le marché ' parce que ça va être ouvert le dimanche. Enfin, elle m'a dit: Moi, ça me permettait de dire: Écoute, je travaille; quand je sors, le marché est bondé ou est fermé. Alors, mon mari le faisait. Là, je n'aurai même plus ce prétexte-là. Un autre me dit: Mes marchands ont fait plusieurs représentations et ils ne sont pas d'accord.

Un autre dit: Les travailleurs chez nous ont fait des pressions. Ils sont venus à mon bureau. Je les ai rencontrés. Ils ne sont pas d'accord. On n'avait pas vraiment besoin de ça dans notre région. Mais un autre a ajouté, beaucoup plus

franc: Je suis obligé de vous dire qu'il n'y a pas moyen de le faire changer d'avis. On aura tout essayé. Cette question se passe, tout ce débat se passe comme si la question de la qualité de vie du Québec, de sa culture particulière, de son caractère distinct - pour utiliser un terme que vous connaissez bien - c'est comme si ça lui échappait. Il dit: On n'a rien pu faire. A leur avis, ce projet de loi n'était pas indispensable mais à terme, ce qu'ils me disent tous: C'est moins pire que ce qui nous pendait sur la tête. Alors, ils se sont résignés, pour ne pas dire ils ne se sont pas nécessairement ralliés. D'ailleurs, on a vu hier soir qu'ils sont sortis de la Chambre parce qu'ils n'ont pas voulu voter.

M. le Président, le projet de loi et les amendements qui ont été déposés, le bâillon qui a été imposé aux députés de l'Opposition, le bâillon qui a été imposé à tous ceux et celles qui sont contre ce projet de loi, le bâillon en vertu des règles de solidarité ministérielle qui sont imposées aux députés ministériels en cette Chambre fait qu'on est en train d'adopter un projet de loi qui est mauvais, M. le Président, un projet de loi dont on n'a pas mesuré les effets, d'abord, sur les travailleurs et les travailleuses. Vous êtes-vous imaginé que le travailleur ou la travailleuse qui va travailler le soir jusqu'à 19 heures, lundi et mardi, ensuite, de 8 heures à 21 heures - et là ça va être un horaire éclaté, évidemment - tous les jours de la semaine jusqu'au samedi soir, 17 heures et, ensuite, pendant un mois, en décembre, pendant tout le mois, avez-vous imaginé quelle va être la qualité de vie de ces personnes? Est-ce qu'elles auront droit, comme tout le monde, de pratiquer des sports, d'aller, à l'occasion, au cinéma ou au théâtre, d'avoir des activités sociales, de recevoir des amis, de partager un repas en famille? Elles vont se retrouver à la... Quand vous terminez à 19 heures et que vous arrivez à la maison à 19 h 30, 20 heures ou 20 h 30, si vous êtes dans la grande région de Montréal, croyez-vous que ça va leur permettre d'avoir une qualité de vie décente, M. le Président? On n'a pas mesuré les effets de cette loi-là sur la qualité de vie des travailleurs.

On n'a pas non plus mesuré les effets sur la qualité de vie et sur l'avenir des petits propriétaires. Il y a 4500 dépanneurs, M. le Président, au Québec. En fait, le dépannage au Québec est venu solutionner un peu le problème que nous avions depuis que les femmes étaient entrées sur le marché du travail. Il fallait pouvoir acheter du lait, du pain et du beurre à l'occasion, lorsque ça manquait à la maison, et il est vrai que, les marchés d'alimentation fermés, ça pénalisait du monde. On a trouvé une solution originale, intéressante et adaptée, et, le dépanneur, je maintiens que c'est une solution qui nous ressemble et qui est intéressante parce que c'est devenu, pour beaucoup de petits quartiers, l'équivalent de l'ex-magasin général. Je rappelais que même les enfants dans un quartier peuvent être rassurés s'ils se sentent mal pris; ils peuvent facilement se réfugier dans un dépanneur; ils se savent en sécurité. On a créé ça dans notre milieu. Ça s'est fait de façon naturelle et spontanée. Et qui ne connaît pas des propriétaires qui sont des immigrants, de nouveaux arrivants, qui, avec leur petite famille, s'installent et s'intègrent parfaitement à leur quartier? Ils connaissent le nom de leurs voisins, de leurs clients et de leurs clientes, ils attendent les nouveaux venus. J'en connais un en particulier, je trouve ça intéressant, chez qui ma fille va et, là, ils attendaient l'arrivée du bébé comme si c'avait été le leur. Mais ils font ça pour toute leur clientèle, M. le Président. Ça fait vivre leur famille, ça leur permet de s'intégrer et ça leur permet de payer les études de leurs enfants. 4500 dépanneurs, 3500 qui sont des propriétaires privés et qui sont souvent en collaboration avec leur époux ou leur épouse.

M. le Président, on n'a pas mesuré les effets de ce projet de loi. On n'en connaît pas les conséquences. L'Opposition a été muselée parce qu'on a imposé le bâillon, et la partie ministérielle l'est plus ou moins en raison des règles de solidarité ministérielle. Alors, M. le Président, si le ministre est honnête, si ce gouvernement est sincère, ils vont accepter que les députés ministériels votent librement sur cette loi, M. le Président. Voilà le voeu que je formule. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Cannon): Merci, Mme la députée de Chicoutimi. Je suis prêt à reconnaître le prochain intervenant, M. le chef de l'Opposition officielle.

M. Jacques Parizeau

M. Parizeau: M. le Président, je prends quelques minutes cet après-midi pour intervenir dans ce débat, non pas pour aborder les modalités du projet de loi lui-même, tous mes collègues en cette Chambre le font et personne ne le fait avec autant de compétence, je pense, que la députée de Taillon. Mais, puisqu'on nous a imposé un bâillon sur ce projet de loi, c'est du bâillon dont je vais parler, parce qu'il me paraît fondamental de protester à cet égard, de protester au nom de l'Assemblée nationale, au nom des droits du législateur. (16 heures)

Vous me direz: Ce n'est qu'un bâillon parmi trois. Oui, effectivement, nous sommes dans cette situation tout à fait particulière d'avoir trois bâillons en cinq jours au cours de la même session. Ça ne s'était jamais vu, il est important de le souligner. Mais, des trois bâillons, celui qui s'applique à la loi que nous examinons actuellement a un aspect tout à fait particulier. Vingt-cinq amendements ont été déposés après que le bâillon eût été annoncé. Extraordinaire situation,

M. le Président. Vingt-cinq amendements d'un projet de loi comme celui-là, en fait, en transforment complètement la portée. La loi que nous avons devant nous après l'imposition du bâillon est très différente de la loi que nous avons discutée avant. Très différente. Et, pourtant, on nous dit: En fait, la loi que vous avez devant vous après le bâillon, nous reconnaissons que ce n'est pas la même loi qu'il y avait au début. Mais, puisque le bâillon a été imposé, alors, acceptez ces 25 amendements sans discussion. C'est-à-dire, à toutes fins pratiques, M. le Président, qu'on se sert des règles de la Chambre, ou plutôt de la suspension d'un certain nombre de règles de la Chambre, pour gouverner par décret. C'est ça que l'on fait.

Et il est important, je pense, que le ministre, qui est relativement nouveau dans cette Chambre, comprenne la portée du geste qu'il a posé. Il dit: D'abord, il y aura bâillon. Donc, à partir d'un certain moment, vous n'aurez plus le droit de parler. Et, maintenant qu'on vous a avertis qu'il y a bâillon, bien, voici des amendements si nombreux, d'une telle substance que ça change profondément le sens de la loi. Mais vous n'aurez plus le droit de parler parce qu'à partir de ce moment, nous gouvernons par décret. Parce que c'est ça que ça veut dire.

J'en ai vu passer, des bâillons dans cette Chambre, des suspensions de règles. Le plus souvent, je pense, depuis une vingtaine d'années, il s'agissait de raisons, j'allais dire parfaitement compréhensibles: des grèves qui durent trop longtemps et qui mettent en péril la santé, la sécurité des gens. Souvent aussi, des grèves qui duraient à ce point longtemps que ça mettait en péril l'année scolaire des enfants. Oui, ça, on le comprend.

Ce gouvernement aura cependant innové sur le plan des bâillons ou de la suspension des règles. On se comprend, ça n'est pas tout à fait identique sur le plan juridique, mais, enfin, je pense que pour ceux qui nous entendent cet après-midi, c'est suffisamment proche l'un de l'autre pour qu'on puisse établir une certaine identification.

Quand j'ai vu ce gouvernement, il y a quelques mois, suspendre les règles pour faire passer à la vapeur un projet de loi applicable à une corporation, l'institut Armand-Frappier, qui n'a finalement réglé ce qui devait être réglé que six mois plus tard, je ne pouvais pas m'empêcher, M. le Président, de dire: Moi, je n'ai jamais vu ça, jusqu'à maintenant, dans cette Chambre. Le gouvernement décrète parce qu'il a quelque chose à cacher. Je l'ai dit souvent, je continue de le penser. Ce qui a été fait à l'occasion du dossier de l'institut Armand-Frappier, il y a des choses qui ne sont pas claires là-dedans et qui n'ont pas pu être claires parce qu'on a levé les règles pour arrêter le débat.

Là, cette fois-ci, aujourd'hui, c'est d'une nature différente, ce que fait le gouvernement.

Et, sur la base d'un projet de loi initial, vous, de l'Opposition, avez pu parler un peu. Maintenant, il est temps que vous cessiez de parier. Alors, on vous dit: Vous cesserez de parier. Et maintenant, voici 25 amendements qui changent profondément le sens du projet de loi et nous vous avertissons que vous n'aurez pas un mot à dire là-dessus.

M. le Président, je ne retrouve pas dans ces gestes notre vieux et cher Parlement. Ça n'est pas comme ça qu'il a fonctionné pendant des années, quel que soit le parti au pouvoir. Ce qui se passe à l'égard de ce bâillon met en péril, pas seulement l'immédiat, met en péril bien des choses à venir. Quand on commence à réagir comme ça, il n'y a plus grand-chose pour arrêter un gouvernement. La prochaine session, ce sera quoi, quatre bâillons? Est-ce que cette idée de déposer des amendements après que le bâillon soit imposé va se propager, on va faire ça de plus en plus souvent? Le moindrement que quelque chose n'est pas réglé dans l'opinion publique et qu'on sent qu'il y a une certaine agitation chez les gens et que l'Opposition cherche à traduire ce que les gens pensent, on les arrêtera, on arrêtera toute discussion et on dira: Maintenant, voici le décret, voici tous les amendements que nous avons décidé d'imposer.

C'est toute une porte que le ministre de l'Industrie, du Commerce et de la Technologie, avec l'acceptation de son Conseil des ministres, bien sûr, c'est tout un précédent qu'il est en train d'établir. Et je l'avertis à l'avance - jusqu'aux prochaines élections, M. le Président, nous allons avoir à vivre ensemble longtemps - que le précédent qu'il cherche à établir aujourd'hui, il va vivre avec longtemps parce que son gouvernement ne résistera pas à la tentation de continuer à faire des opérations comme celle-là. Il n'aurait jamais dû accepter ça. Il y a des gens qui nous regardent, qui nous écoutent cet après-midi, qui vont dire: Mais qu'est-ce que c'est que ce bâillon qui permet, cependant, à l'Opposition de continuer de parler comme nous le faisons cet après-midi?

Il faut dire que le bâillon établit un moment, des heures après lesquelles il faut cesser de parier et où le projet de loi est accepté automatiquement. C'est pour ça que dans le cas de ce bâillon, comme des deux autres, nous parions jusqu'à la fin du temps qui nous a été imposé par le gouvernement. Et nous utiliserons toutes les minutes que le bâillon nous autorise avec toutes les conséquences que ça peut impliquer quant à la législation du gouvernement. M. le Président, on a cherché à nous empêcher de parier à partir d'un certain moment. Nous allons parier jusqu'au dernier moment, dans les trois cas de ces bâillons, pour protester contre un traitement de l'Assemblée nationale, du législateur de la population du Québec, de cette population du Québec qui continue tous les jours encore à présenter des pétitions quant à ce

projet de loi, qui continue de discuter de la chose dans l'opinion publique, où pour une foule de gens au Québec la question de l'ouverture des heures d'affaires des magasins, ce n'est pas réglé.

Et je termine, M. le Président. Dans l'esprit des gens, ce n'est pas réglé. Dans le nôtre, nous de l'Opposition officielle, ce n'est pas réglé non plus. Le gouvernement a décidé que c'était réglé au mépris de toutes les règles fondamentales, de l'esprit des règles que nous avions pratiquées si longtemps dans cette Assemblée nationale et que le gouvernement a décidé, à tort, il le paiera, à tort, de violer. Merci.

Le Vice-Président (M. Cannon): Merci, M. le chef de l'Opposition. Je vais maintenant reconnaître le prochain intervenant, M. le député de Shefford.

M. Roger Paré

M. Paré: Oui, merci, M. le Président. Eh bien, moi aussi je vais passer mes commentaires pour une dernière fois sur le projet de loi 75 et je vais vous dire tout de suite, M. le Président, que je n'utiliserai pas les mots que j'ai entendus des gens de mon comté comme commentaires par rapport à ce projet de loi là lorsqu'ils en ont pris connaissance et avec les appels que j'ai encore de façon régulière parce que je dois vous dire que ce serait certainement antiparlementaire, mais ce serait au moins significatif de ce que les gens pensent de ce projet de loi là. (16 h 10)

Et quand on regarde la façon dont le gouvernement, dont le ministre actuel, membre du gouvernement libéral, se comporte, c'est exactement à l'image du comportement qu'on connaît depuis 1985, à peu près dans tous les projets de loi qui touchent des sujets litigieux. Comment est-ce qu'ils s'y prennent? Et regardez bien ça, c'est standard, c'est régulier, c'est en même temps indécent, mais c'est comme ça que ça se produit. Quand on prend un problème... Si je voulais l'imager, c'est comme si on prenait quelqu'un, un patient, et on disait: On va te tuer, tellement on met ça grave, exagéré, inacceptable, abominable. On va te tuer. Et on finit par ramener les choses un peu. On regarde les 25 amendements et les modifications. On ramène les choses en disant: Bien non, on va vous couper les deux jambes seulement, et dites-nous merci pour avoir fait ça, parce qu'on va vous payer la chaise roulante. C'est exactement comme ça qu'on se comporte de l'autre côté, à peu près dans tous les sujets qu'on traite: On ne te tue pas, n'aie pas peur, on va juste te couper les deux jambes et tu vas te promener en chaise roulante. C'est quoi, dans la loi 75, la façon dont on a traité et surtout dont nous allons traiter les gens du secteur concerné, qui sont par centaines de milliers; ça, il ne faut pas l'oublier?

Ce qu'on modifie, ce sont les heures de travail pour des dizaines de milliers de travailleurs et de travailleuses, de propriétaires de commerces qui sont aussi des travailleurs et des travailleuses. Et dans la majorité des cas, ce sont des gens qui sont touchés alors qu'ils ne pensaient même pas qu'ils étaient dans la joute. Le problème, c'est que ce gouvernement-là, depuis 1985, a laissé faire ou a modifié lui-même, par décret très souvent, le nombre d'exceptions. Et c'est devenu une situation intolérable, celle qu'on connaît. Pourquoi? Parce que, ou on n'a pas appliqué la loi de l'autre côté, ou on a augmenté le nombre d'exceptions, ce qui fait en sorte que maintenant on se dit: Regardez le problème s'il est grand. Il y a tellement d'exceptions que, de toute façon, il faut modifier ça. Et il est question d'équité. Les gens qui vont être touchés, mais qui ne se pensaient pas concernés se sont dit: Le gouvernement va régler ça à un moment donné, il va mettre ses culottes longues, il va prendre ses responsabilités. Il y a des problèmes avec des pharmacies, il y a des problèmes avec des fruiteries, il doit être capable de régler ça.

Il y en a, des solutions. Si le gouvernement avait voulu, il aurait réglé ça par rapport aux exceptions ou par rapport aux domaines les plus sensibles, les plus complexes ou ceux qu'on a laissé faire et qui, finalement, nous ont amené un problème. Mais ce n'est pas ça qui est arrivé. Dans ce qu'on nous apporte maintenant, on touche tout le monde. J'écoutais une députée, de l'autre côté, qui disait, ce matin: Ce n'est pas grave, on rajoute cinq heures par semaine. C'est facile à dire, ça, quand on ne les subit pas. J'ai entendu, de 'l'autre côté, dire: Ce sont les heures permises, les gens ne sont pas obligés de les faire. Ce n'est pas comme ça que ça fonctionne, le commerce. Quand c'est ouvert, c'est ouvert, sinon les clients vont ailleurs. Et quand les clients vont ailleurs, ça nous amène des situations comme celles qu'on connaît, alors que les faillites sont plus fortes au Québec qu'ailleurs, et à un pourcentage très important en ce qui concerne les commerces de détail et les commerces en général.

Donc, on augmente les heures. Peut-être que ça ne nous touche pas personnellement ici, sauf que, quand on vote, on s'en prend à la vie des citoyens qui sont concernés. A 8 heures, le matin, je dois vous le dire, ce n'est pas très drôle, alors que, de plus en plus, j'avais l'impression, en tout cas, que la société devait s'en aller vers une qualité de vie meilleure. Alors que les syndicats se battent dans les entreprises et partout ailleurs, pourquoi une diminution des heures? Et nous autres, ici, on est quoi? À contre-courant, trop innocents pour se rendre compte des vrais besoins et des désirs de la population? Nous, on dit: Écoutez bien, vous n'êtes pas dans le même monde que les autres ou

bien on va faire en sorte que vous ne soyez pas dans le même monde que les autres, on va vous étirer les heures. Vous autres, la qualité de vie et tout ça, ce n'est pas pour vous autres, c'est pour les autres. Parce que, comme il n'y aura pas plus d'argent à dépenser, bien, il n'y aura pas plus de salaire à donner. Ça veut dire: pas plus d'emplois créés ou plus d'emplois, mais des "jobines", par exemple, où on va partager le gâteau en sachant très bien que, dans ce secteur-là, ce ne sont pas les salaires les plus élevés, au moment où on se parle, ce ne sont déjà pas les salaires les plus élevés.

Et là, on se dit: Si on n'augmente pas le gâteau, on va le partager à plus de monde. Ça veut dire qu'on s'en vient un peu comme aux États-Unis. Vous avez raison, on s'en vient un peu comme aux États-Unis où, effectivement, ce n'est pas nécessairement là que c'est le meilleur. Il y a des millions de pauvres aux États-Unis, ne l'oubliez pas. Il y a des millions de gens qui sont au salaire, peut-être pas minimum, mais à un salaire très bas, alors que nous, on s'est battus ici, au cours des dernières années, pour avoir des conditions de vie qui sont de mieux en mieux. On voulait avoir les meilleures, mais là, on régresse, on recule. On se dit: II faut que les gens aient le temps de magasiner. On aurait dû avoir, si c'était ça, à nos bureaux, des délégations de gens venir demander: M. le député, faites quelque chose, on veut aller magasiner. Il n'y a personne qui est venu me voir parce qu'il n'a pas eu le temps d'aller magasiner ou il n'y a personne qui est mort de faim parce qu'il n'a pas été capable d'acheter sa nourriture. On n'a pas vu ça. Il y a seulement quelques personnes, qui ont des profits commerciaux à faire, qui sont venues nous voir, quelques personnes., même pas cinq, même pas pour calculer sur les doigts d'une main. Les autres n'ont pas dit ça. Les consommateurs ne sont pas venus en demander davantage, surtout qu'on sait que la population vieillit; les gens âgés ont plus de temps pour magasiner, eux autres, parce qu'ils ne travaillent pas.

Il y a des centaines de milliers de gens sur l'assurance-chômage, d'autres sur l'aide sociale et les travailleurs ont diminué le nombre d'heures... Donc, normalement, si on diminue le nombre d'heures de travail, les gens ont de plus en plus le temps de magasiner. Pourtant, on va forcer les gens à travailler plus. Ça veut dire quoi, comme qualité de vie, pour les gens qui sont propriétaires de commerces ou travailleurs dans ces mêmes commerces? Ça veut dire qu'ils vont finir leur journée le lundi et le mardi à 19 heures; les mercredi, jeudi et vendredi, là, c'est 21 heures. Qu'ils n'essaient pas de se trouver d'autres occupations, ils sont pris jusqu'à 21 heures, c'est toute la soirée. Ils avaient encore deux soirs au moins... Ou au moins on aurait pu leur laisser deux soirs pour avoir une vie un peu plus régulière, comme les autres. Que ce soit seulement pour être en famille, deux repas par semaine, il me semble qu'on ne demande pas l'impossible. En tout cas, de l'autre côté, quand vous allez nous servir le beau discours de la famille, je vous dis tout de suite: Mon oeil, ça ne "pognera" plus! Parce qu'on a beau dire ce qu'on voudra, proposer ce qu'on voudra et surtout tenir les discours qu'on voudra bien, par les gestes qu'on pose, on est en train d'enlever l'essence même de la famille. Ce n'est pas surprenant qu'il y ait dénatalité et qu'il y ait bris de mariages de plus en plus: on ne fait rien pour aider les gens à être ensemble, à se parler. Ne pas être capables de souper ensemble un seul soir par semaine pour des gens qui travaillent, pas seulement dans l'alimentation, dans l'ensemble du secteur commercial, c'est beau comme politique familiale, c'est vraiment beau, c'est extraordinaire!

Comment ces gens-là vont-ils pouvoir avoir des activités aussi? Finir à 19 heures, aller se changer, aller souper; ça veut dire qu'ils sont même exclus des loisirs, de la culture, de la formation professionnelle, de l'éducation des adultes. Voyons donc, on n'a pas le droit de faire ça à des gens. Ce n'est pas comme ça qu'on améliore le sort d'une société. Et le dimanche, on fait la même chose. Je suis convaincu d'une chose: Probablement qu'à l'automne, on va être encore ici en train de modifier cette loi-là, parce que ce gouvernement légifère très mal. Il n'a aucune sensibilité à l'égard de la population parce qu'il est plutôt pris par quelques-uns qui financent la caisse électorale. Mais il n'a pas de sensibilité à l'égard de l'ensemble de la population. Donc, les lois ne peuvent pas s'adapter. On s'en rend compte par les nombreuses lois qu'on discute ici, sur lesquelles on nous met le bâillon et les autres qu'on n'a même pas appelées encore. On les a déposées, ou on ne les voulait pas, ou on ne voulait pas qu'on en discute parce qu'elles ne sont pas présentables, dans bien des cas, mais là, parmi les lois qui sont déposées, il y en a au moins quatre où ce sont des corrections de l'autre session. On avait dit qu'elles ne seraient pas applicables, elles ont été votées quand même, elles ont été votées probablement de nuit aussi, dans certains cas, si je me rappelle bien, et là, on est ici pour les corriger.

On serait normalement en train de légiférer en toute connaissance de cause et en ayant une seule préoccupation, l'intérêt de la population et l'intérêt spécialement de la partie de la population qui est concernée par les lois qui nous concernent. Donc, M. le Président, on ne fait pas ça, surtout en sachant que lorsque l'on tient le discours, de l'autre côté, que l'on veut aider le consommateur davantage, eh bien, la réaction vient des consommateurs eux-mêmes, puisque les seuls gens qui sont venus me voir en délégation représentant les syndicats, le clergé, les municipalités, l'ensemble des clubs de l'âge d'or, les AFEAS, ils sont venus me voir en me disant:

Non, nous, on ne veut pas de modifications. Des consommateurs, des associations de consommateurs, la réponse est venue de ces gens-là et ce n'est pas ça qu'ils demandent. Je suis convaincu d'une chose, c'est une erreur qu'on est en train de faire et j'espère que vous allez vous en rendre compte avant de voter, M. le ministre. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Cannon): Merci, M. le député de Shefford. Je suis prêt à reconnaître le prochain intervenant, Mme la députée de Marie-Victorin. (16 h 20)

Mme Cécile Vermette

Mme Vermette: Merci, M. le Président. M. le Président, nous avons devant nous une loi que beaucoup de consommateurs ont qualifiée d'injustifiable, d'inéquitable et surtout d'injuste, une loi qui fait appel à des notions de supercherie, de trompe-l'oeil parce que, dans les faits, ce qu'on nous dit qui ne sera pas exercé en réalité - et je me réfère à l'ouverture du dimanche - bien, ce ne sont que de vains mots, puisque la façon dont le projet de loi est libellé... Bien sûr que, dans le domaine de Talimenterie" et dans le domaine des pharmacies, bien sûr ces commerces à grande surface pourront ouvrir le dimanche. Il n'y aura vraiment plus de difficulté pour ces commerces de pouvoir offrir des services à l'ensemble de la population, et ce, dans toutes les régions du Québec, M. le Président.

Injustifiable, parce que, encore une fois, plein de gens avaient demandé au ministre de surseoir à son orientation, de prendre le temps de légiférer mieux et de faire en sorte que l'ensemble des intérêts, autant des petits commerçants que des consommateurs et des gros commerçants, soit vraiment concilié dans un projet de loi. C'est le rôle d'un législateur de concilier les intérêts des uns et des autres et de faire en sorte que chacun puisse considérer qu'il a été traité d'une façon juste et équitable, M. le Président. Peine perdue, le nombre de pétitions qui ont été déposées à l'Assemblée nationale, le nombre de recommandations qui ont été faites auprès du ministre pour lui demander de reconsidérer cette façon de vouloir écrire son projet de loi... Peine perdue, à un point tel, M. le Président, que même du côté ministériel on faisait, en fait, des sentiments de culpabilité à l'endroit de bons citoyens qui sont venus ici demander au ministre de reconsidérer son projet de loi. On est arrivés ici en nous disant: Nous ne tolérerons pas plus longtemps que des consommateurs ou une coalition, en fait, de personnes viennent nous faire des pressions indues pour qu'on puisse changer notre orientation.

M. le Président, je ne comprends pas ce genre de discours là. Je ne peux pas comprendre que des parlementaires qui ont été élus pour représenter les intérêts diversifiés de la popula- tion puissent considérer, parce qu'on les approche pour leur demander de prendre en compte leurs intérêts, qu'on appelle ça faire des pressions indues et que ces pressions-là indues... Parce qu'elles font appel à de la conciliation, à de la concertation, parce qu'elles se sont regroupées ça devient une pression indue, d'autant plus que la plupart des ces gens-là qui appartiennent à cette coalition-là ne font pas l'objet, M. le Président, de gros intérêts corporatifs ou n'ont pas des sommes d'argent considérables. Ce sont des individus qui se sont sentis concernés, directement impliqués parce que c'étaient des intérêts vitaux quant à eux, de survie quant à eux, qu'ils voulaient défendre. Et c'est pour ces raisons qu'ils ont cru aux gens qu'ils ont élus pour les représenter à l'Assemblée nationale, à ces gens pour défendre leurs intérêts, et c'est à eux qu'ils ont adressé leurs revendications, leurs demandes. Qu'est-ce qu'ils ont en retour comme considération? C'est qu'on dénonce ici à l'Assemblée nationale le fait que la Coalition ait fait des pressions indues sur des députés pour faire en sorte que le ministre puisse comprendre, revenir à de meilleurs sentiments face aux intérêts de ces petits commerçants et des consommateurs, M. le Président.

Je trouve ça inacceptable, inqualifiable de la part de parlementaires d'avoir de tels propos, des propos qui font en sorte qu'on essaie de trouver toujours un coupable, peu importe, pourvu que le gouvernement puisse se "déresponsabiliser" des actions qu'il pose, des projets de loi et des orientations qu'il impose à l'ensemble de la population. Je trouve ça inacceptable, irresponsable de la part, en fait, d'un gouvernement de qualifier des individus qui ne sont que de bons citoyens, qui défendent leurs intérêts, en fait... de faire en sorte qu'à ces gens-là on donne une réputation de personnes qui essaient tout simplement de mettre des pressions inacceptables sur le gouvernement, comme si c'étaient des fraudeurs, M. le Président. Je ne pense pas, quand on essaie de défendre nos intérêts, qu'on est des fraudeurs ou qu'on appartient à des gens qui essaient de soudoyer, en fait, les représentants qui sont dûment élus pour nous représenter. Je ne crois pas, M. le Président. Et j'espère que le gouvernement pourra, en tout cas, à un moment donné, arriver à comprendre que c'est légitime pour n'importe qui, pour n'importe quelle personne de se regrouper en coalition pour défendre ses intérêts. Ça fait partie de la démocratie au Québec et j'espère que ça va être considéré, encore une fois, comme de la démocratie au Québec et que ce n'est pas ce gouvernement-là qui va faire taire tout le monde.

Il y a des règles parlementaires qui s'appliquent ici, à l'intérieur de l'Assemblée nationale, qui font en sorte que, oui, par un bâillon, on ne puisse aller plus loin dans l'étude d'un projet de loi, mais j'espère qu'ils n'iront pas aussi loin, dans la population, par leurs menaces, en tant

que parlementaires, pour faire taire l'ensemble de la population du Québec. Assez, c'est assez, M. le Président.

Je considère qu'actuellement, M. le Président, le bâillon a été inutilement appliqué dans ce cas-ci. Une loi qui, en fait, n'a fait l'objet que de vingt-quatre heures d'étude. On n'a même pas pu aller sur le fond; on s'en est tenus toujours sur la forme et quand le ministre nous arrive et qu'il nous dit: Écoutez, moi, je vous arrive avec 24 amendements, que personne n'a pu regarder, s'y pencher, ou discuter, je pense que c'est "inconsiderable", M. le Président, de la part d'un gouvernement de réagir et d'avoir si peu de respect pour ses institutions.

Oui, ça fait partie du jeu des règles parlementaires d'utiliser, M. le Président, des motions au début d'un projet de loi avant de commencer l'étude article par article. Bien sûr que ça fart partie de la procédure et, probablement, parce que le ministre est très "neuf1, il était très empressé à pouvoir passer son projet de loi, probablement que ce manque d'expérience fait en sorte que nous avons été obligés d'arrêter le débat et de ne pas pouvoir aller beaucoup plus loin dans ce débat-là. Ceci fait en sorte que nous sommes obligés actuellement, non pas de nous attarder, en fait, sur les amendements qui ont été apportés, parce qu'il y en a vraiment beaucoup trop, nous sommes obligés de les prendre dans l'approche globale et de démontrer au ministre que, dans son approche globale, il y a plein de choses qui ont été laissées en suspens et qui n'ont pas été prises en considération et, notamment, M. le Président, la défense des intérêts des petits commerçants et, aussi, du consommateur, M. le Président.

Quand on parle au niveau des petits commerçants, et j'aimerais bien pouvoir vous en parler de ces petits commerçants-là qui, même dans les dépanneurs, c'est sur les heures excédentaires des heures régulières qu'ils font leur marge de profit et c'est ça qu'on est en train de leur couper à l'heure actuelle. Quand on sait que, dans certains petits dépanneurs, le peu de profits qu'ils peuvent faire durant les heures travaillées, M. le Président, et ça va même dans certains cas, M. le Président, au péril de leur vie. Je pense que le petit peu qu'ils peuvent faire, par leur travail, on devrait plutôt les aider à continuer dans leur travail et non pas leur développer une compétition insurmontable parce que, justement, c'est comme, vous savez, des géants par rapport à des petits, très petits, et ils n'ont aucun moyen de défense. Ils devront subir cette libre concurrence et faire en sorte que leur marge de profit, qui permettrait, en tout cas, de pouvoir espérer au moins de s'en tirer tant bien que mal par la somme de leur travail, eh bien, M. le Président, ils seront remis en question dans cette approche parce que, encore une fois... Le ministre prétend toujours que les chaînes d'alimentation ne seront pas nécessairement ouvertes le dimanche, elles le pourront maintenant, M. le Président. Durant la période des fêtes, on change complètement l'horaire de travail et durant le mois de décembre, on devra faire face à un nouvel horaire de travail de sorte que l'ensemble des petits commerçants devront affronter la concurrence avec des plus gros, de très gros même, avec certains monopoles et ça sera difficile. Et là, comme on sait qu'on a une instabilité économique à l'heure actuelle, ça sera difficile et même plusieurs disparaîtront, M. le Président, j'en suis convaincue. (16 h 30)

Le Vice-Président (M. Cannon): Merci, Mme la députée de Marie-Victorin. M. le député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue.

M. Rémy Trudel

M. Trudel: Oui, M. le Président, il faut que quelqu'un intervienne à cette Assemblée nationale malgré le bâillon, malgré les mesures qui ont été présentées par le gouvernement, pour parler fort pour les familles du Québec. Ce qui est devant nous aujourd'hui, avec tout ce que l'on connaît du processus maintenant, nous n'avons pas l'impression qu'en aucun moment dans toute cette discussion, si encore on peut qualifier le processus de raisonnable, on a pu raisonnablement discuter, il ne semble pas que la voix des familles ait été écoutée.

Je profiterai de ce court moment pour essayer d'exprimer ce que les groupements familiaux, dont le Conseil de la famille, ont dit carrément au ministre responsable de ce projet de loi. Ce dont il est fondamentalement question dans ce projet, en dehors de 65, 70, 82, 95 heures, c'est d'un changement de valeurs dans notre société. Et ça, le ministre, qu'il le veuille ou non, il va être obligé de le reconnaître. Quelle est sa légitimité, la légitimité sociale dont il dispose pour opérer un tel changement? On va en parler un petit peu. Oui, un changement de valeurs parce que, essentiellement - et je ne veux pas arrêter sur les détails - d'autres comme la députée de Taillon ont très bien décrit ce que cela voulait dire pour les familles en général, mais pour les familles d'employés, pour les employés eux-mêmes et pour les propriétaires de petits commerces, ce que ça pouvait signifier dans la réalité.

La valeur fondamentale qui est impliquée dans ce projet de loi: on veut commercialiser, commercialiser à tout prix, céder au "lobby" du profit, céder au "lobby" de l'argent, céder au "lobby" de la consommation. Comme le dit souvent l'un de mes collègues, ce gouvernement a des objectifs mais il n'a pas de principes. Lorsqu'on a un certain nombre de valeurs fondamentales dans une société, on fait en sorte que les instruments, les outils que l'on met à la disposition de cette collectivité viennent renfor-

cer, viennent augmenter la valeur ou le partage de ces valeurs dans cette société. Est-ce que, franchement, le projet de loi qui est devant nous, le projet de loi 75 prend partie pour les familles du Québec? Réponse: Non. C'est très clair.

Dans la région de l'Abitibi-Témiscamingue - parce qu'il faut parler, il faut dire ce que les gens de nos comtés, les gens qui vivent la réalité quotidienne veulent vivre comme valeurs fondamentales - est-ce qu'on a eu de grandes pétitions? Est-ce qu'on a eu de grandes réclamations des gens de la région de l'Abitibi-Témiscamingue pour dire: M. le ministre, ouvrez-nous donc ça le plus largement possible. Ouvrez donc la porte pour qu'il y ait de plus en plus de concurrence et qu'on soit pris, en quelque sorte, pour ouvrir parce qu'on veut sauver le minimum de nos commerces. La réponse, c'est non. Le ministre disait hier soir: Quand je suis allé à la chambre de commerce à Rouyn-Noranda et que je leur ai expliqué, ils ont tous compris. Bien, s'ils ont tous compris, pourquoi publient-ils cette semaine dans les hebdos de la région qu'ils vont tenter de se former une association pour s'auto-contrôler? Parce que le gouvernement ne prendrait pas ses responsabilités, ils veulent former une association régionale pour essayer d'interdire à ceux qui seraient tentés d'ouvrir et forcer ces gens-là eux-mêmes à ouvrir leur commerce. Et là, on va se réveiller avec toutes sortes de situations. On va se réveiller - parce que si les micros étaient un petit peu plus forts à cette Assemblée on entendrait et le public entendrait le bruit que les gens de l'ANCAl font dehors -avec des situations comme celles-là où on va être obligés d'employer tous les moyens pour forcer, en quelque sorte, à consacrer une valeur qui est consacrée dans la société québécoise.

J'ai été extrêmement surpris, sinon renversé, lorsque, hier soir ou ce matin encore, le ministre, se faisant applaudir par tous ses collègues, a dit: Chez nous, la décision des modifications, la décision de ce projet de loi, ça a été pris en collégialité. J'ai écouté tout le monde. Ah là! j'ai été renversé! Mais où était la ministre responsable et déléguée à la Famille? Où était la voix de la famille dans ce gouvernement? Est-ce que quelqu'un avait pris le soin de dire au caucus des députés, au Conseil des ministres: Nous avons une politique familiale, une supposée politique familiale? Nous avons un avis formel du Conseil de la famille du Québec, pas de n'importe quel organisme, un organisme qui se penche uniquement sur les valeurs familiales et qui a publié, il y a quelques mois, un document dont on a dit: Mais c'est merveilleux! C'est un instrument extraordinaire! "Penser et agir famille". Nous voulons, au Québec, privilégier les valeurs familiales. On veut tellement ça qu'on va vous donner un instrument, une grille, des critères pour évaluer toute politique gouvernementale. Où était la voix des familles, au

Conseil des ministres et au caucus? Est-ce que, comme d'autres députés, on s'est tus? Qui a parlé et a parlé fort pour les familles des employés, pour les familles monoparentales, pour la solidarité de la famille au Québec? Qui a parlé de ces valeurs? Qui a passé ce projet de loi à travers la grille de "Penser et agir famille"? Conclusion: personne.

Personne n'a pris la défense des familles du Québec. Même le Conseil de la famille, très récemment, a accompli son travail; lui, ce Conseil, il a pris la grille de "Penser et agir famille". Il a passé sa réflexion à travers cette grille. Le projet de loi, il l'a épluché. Conclusion, très simple, très très simple, la conclusion, et ce n'est pas n'importe qui qui compose ce Conseil. Il y a des gens qui y ont réfléchi longuement. Conclusion: maintenir les restrictions quant aux heures d'ouverture des commerces le dimanche. Si vous avez à allonger les heures pour faciliter les obligations de certaines familles, allez-y sur quelques heures durant la semaine - quelques heures durant la semaine - ne touchez pas au dimanche. Ne désacralisez pas. Ne commercialisez pas à outrance la vie de la famille au Québec. Il n'y a personne, et certainement pas le ministre, qui a passé cette loi à travers la grille de "Penser et agir famille". On ne veut pas écouter.

Les gens des régions qui disent que cette loi va modifier fondamentalement aussi les comportements dans nos groupes familiaux, on ne veut pas les écouter. On a du gros monde, on a du grand monde qui vient faire du "lobbying" à notre porte et, nous, on préfère écouter ces gens-là. Les petits employés de commerce, les familles de ces employés, les familles monoparentales, les gens en difficulté, on ne veut pas écouter la réclamation de ces gens. Je dis qu'un jour vous paierez pour cela et que la voix des familles dans ce gouvernement n'existe pas. Vous préférez travailler pour la commercialisation et le changement de valeurs dans le sens américain du terme. Vous récolterez ce que vous aurez semé dans quelques années et, nous, nous allons continuer, pour les familles du Québec, de parler fort, comme on le réclame partout dans la société.

Le Vice-Président (M. Cannon): Merci, M. le député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue. Je suis prêt maintenant à reconnaître le prochain intervenant, M. le député de Beauce-Nord.

M. Jean Audet

M. Audet: M. le Président, quand est-ce que le gouvernement va se brancher? Quand est-ce que le ministre va mettre ses culottes? Quand est-ce que le ministre va mettre ses culottes et sa ceinture, M. le Président? C'est ce qu'on entendait l'an passé, il y a deux ans, concernant justement les heures d'ouverture des établisse-

ments, des commerces.

On a déchiré son linge, sa chemise à cause d'un bâillon. Le printemps dernier, se tenait une commission parlementaire. Le ministre avait décidé de faire une commission parlementaire et des auditions pour entendre des groupes. L'Opposition a eu le droit de parole pour questionner ces groupes-là, pour connaître leurs souhaits et leurs intentions. (16 h 40)

Ça fait quatre ans, M. le Président, qu'on parle de cette loi-là, des problèmes qu'elle cause. On nous dit: Ce n'est pas drôle, après vingt heures, arriver avec un bâillon. C'est vrai que ce n'est pas drôle pour un gouvernement de mettre des bâillons quand il y a des projets de loi comme ceux-là. Mais, M. le Président, et la députée de Chicoutimi l'a soulevé hier soir, suite à l'intervention de mon collègue de Saint-Maurice, elle parlait justement du rôle du député. Elle lisait textuellement le rôle du député où elle mentionnait que le rôle du député, c'est entre autres de participer aux commissions parlementaires et de proposer des amendements. C'est ce qu'elle disait, proposer des amendements. C'est le rôle du parlementaire.

Lorsqu'on a commencé l'étude du projet de loi article par article, lorsqu'on a tenté de le faire, plutôt, les amendements qui ont été proposés par l'Opposition, mais à des conditions, M. le Président, à la condition qu'on saute certains articles pour commencer où elle voulait bien commencer les travaux de la commission ou l'étude du projet de loi article par article...

L'Opposition dit qu'elle s'est fait flouer, mais je pense plutôt que c'est l'Opposition qui s'est flouée parce que, si elle avait voulu, de bonne foi, commencer l'étude du projet de loi article par article à l'article 1 puis, en cours d'étude, par exemple, arriver avec une motion ou deux motions, peut-être qu'on aurait pu les regarder, mais il n'y a aucune des discussions qui s'est faite sur la base du projet de loi comme tel.

On crie fort à cause d'un bâillon, M. le Président. J'ai écouté attentivement le chef de l'Opposition, tantôt, qui est venu faire son intervention. Il a parié strictement du bâillon et non pas du fond du dossier. Mais, dans le contexte, où en est-on rendus avec cette loi-là? Où en est-on rendus dans le débat aujourd'hui? Je n'ai pas entendu un mot du chef de l'Opposition sur les fruiteries, sur le problème de la loi actuelle, le problème que ça cause, par exemple, aux pharmacies et tout ça. Parce que ça va causer des incidences quand même importantes pour certains secteurs d'activité. Aucun mot là-dessus. Aucun mot, M. le Président.

Pourquoi on en est là aujourd'hui? On en a parié ce matin, puis je veux y revenir parce que, pour moi, ça m'apparaît très important parce que notre système parlementaire est basé sur nos coutumes et nos traditions. On ne peut pas arriver du jour au lendemain et faire fi de tout ce qui s'est fait avant pour produire ou faire une loi, quelle qu'elle soit.

Dans le débat qui nous préoccupe, les heures d'affaires, moi, je me réfère à la loi 59, pour laquelle on a fait tout un plat ce matin à cause du décret qui avait été fait en 1986 par notre gouvernement, sans parier - ma collègue de Vachon l'a soulevé - du décret de 1985. Je vous réfère à la loi 59, à l'article 5.2 qui dit justement: Un établissement commercial, opérant avec plus de trois personnes - c'est la loi 59, M. le Président, ce n'est pas notre loi à nous, c'est la loi 59... "Un établissement commercial, opérant avec plus de trois personnes, qui vend des produits visés au paragraphe 7° - le paragraphe 7°, c'est les produits pharmaceutiques, hygiéniques et sanitaires - de l'article 5 ainsi que des denrées alimentaires et des menus articles, à la date de la sanction de la présente loi, n'est pas tenu de restreindre son personnel à trois personnes ou de cloisonner la partie où s'effectue la vente des denrées alimentaires, à la condition qu'il obtienne une autorisation du ministre... "Une demande d'autorisation à cet effet doit être faite au ministre avant le 1er septembre 1984."

Il me semble que c'est clair, M. le Président. Et si on se réfère au décret de 1986, le décret a été fait en conformité avec la loi de 1984 et c'est mentionné textuellement, ceux qui n'avaient pas augmenté depuis le 20 juin 1984. Alors le ministre, ici, a reconnu par décret, comme la loi de M. Biron le permettait en vertu de l'article 5.2, de permettre à certains établissements de se conformer à la loi.

Le député d'Ungava disait tantôt: Oui, nous, on en a fait un décret pour les marchés publics, tout ça, pour qu'ils se conforment. Bien oui, M. le Président, si on a fait un décret pour qu'ils se conforment, c'est parce qu'ils étaient hors-la-loi. Lorsque la police arrête votre automobile sur la route parce que vous avez un feu clignotant qui ne fonctionne pas, elle vous arrête, elle vous donne 48 heures pour vous conformer. C'est parce que vous êtes hors-la-loi, M. le Président. Alors, si on a permis en 1985, en janvier 1985 aussi... En janvier 1985, M. le Président, à cette période-là de l'année, il n'est pas coutume que cette Chambre siège ici. Alors, peut-être que les députés de l'Opposition, à ce moment-là, auraient souhaité poser des questions sur ce décret-là ou se faire entendre. Pas du tout. C'était à l'extérieur des travaux parlementaires réguliers, M. le Président.

Et ce n'est pas un reproche que je fais au ministre de l'époque, M. Biron, parce que, vous savez, j'ai lu considérablement pour connaître les intentions du législateur sur la loi 59. On disait, entre autres, à cette époque: 800 petits commerçants réclament le droit de travailler le dimanche, et on parie justement des marchés publics et tout ça. Et le ministre Biron, dans un article,

dit: Oui, on fait cette loi. On va permettre une certaine ouverture parce que les attitudes des consommateurs ont changé. On magasine de plus en plus à l'européenne dans des petits centres, dans des petits marchés, tout ça, dans des boutiques spécialisées. On va permettre à ces gens-là de les inscrire à l'intérieur de la loi et ils vont pouvoir opérer en toute légalité parce que présentement, au moment où on se parle, si la loi est respectée à la lettre, ils vont devoir fermer, M. le Président. Alors, il y a une ouverture dans la loi de M. Biron, qui a été créée.

À cette époque-là, M. le Président, je n'ai rien vu de ce qu'on entend dans l'Opposition, aujourd'hui: crier tout haut que si on permettait à ces gens-là d'ouvrir le dimanche leur qualité de vie était menacée, que des petits dépanneurs, des petites entreprises familiales devraient fermer leurs portes parce que ça vient directement les concurrencer, M. le Président.

Pas un mot, à cette époque-là. Aujourd'hui, on fait les grands cris, on déchire son linge parce qu'on vient ajouter une personne, M. le Président, dans la loi 59, dans la loi de 1984. Est-ce qu'on a vu des faillites dans les dépanneurs, M. le Président, parce qu'on a permis à des marchés publics de se conformer? Est-ce que le taux de divorces a augmenté, M. le Président? Je ne pense pas. Je n'ai pas de données, moi, qui me confirment ça. Je ne suis pas contre la loi qu'a faite le ministre Biron, pas du tout. Mais, ce que je veux que les gens comprennent, c'est qu'à cette époque-là, déjà, on sentait un changement dans les habitudes des consommateurs, et il l'a dit à un moment donné. Il dit: II faudra peut-être revenir dans deux, trois, quatre, cinq ans pour changer cette loi-là.

Et puis je dis la même chose aujourd'hui. Ma collègue de Taillon l'a soulevé, ce matin. On s'en va vers la libéralisation. Bien oui, elle l'a compris et déjà, en 1984, son ministre de l'Industrie et du Commerce le disait. On s'en va vers une libéralisation, comme dans plusieurs pays, d'ailleurs, ça existe. On s'en va vers une libéralisation. On n'a pas le choix, les attitudes changent. On parie de la dénatalité. Avant 1970... Je viens de la Beauce, M. le Président, et s'il y a un endroit au Québec où il y a des grosses familles, je pense que c'est chez moi. Les grosses familles au Québec, M. le Président, c'est avant 1969, avant la loi des heures d'affaires. Si on veut charrier et associer ça à ça, on va le faire. Les grosses familles, il y en avait avant qu'il y ait des lois qui régissent les établissements commerciaux, M. le Président.

Voyons donc! Ça ne tient toujours bien pas debout de dire des affaires comme ça. Ça ne tient pas debout du tout. Enfin, je veux terminer là-dessus, M. le Président. Il y a eu des amendements d'apportés. Je veux féliciter le ministre et les membres de la commission qui ont travaillé avec nous là-dessus parce que je pense qu'il y a certains éléments dans le projet de loi qui inquiétaient beaucoup de commerces de détail et tout ça. Les amendements qu'on apporte, aujourd'hui, je pense, vont venir les rassurer et ce n'est pas, je pense, cinq heures de plus... Parce que, si on regarde dans les centres d'achat, la plage qui existait avant, les heures d'affaires qui existaient avant, les centres d'achat, le matin, ça ouvre vers 9 heures, 9 h 30. Ils ont le droit d'ouvrir une heure avant, mais ils ne le font pas parce que la coutume, parce que l'usage, parce qu'il n'y a pas de client avant cette heure-là, c'est simple.

Je suis convaincu qu'à l'usage, M. le Président, on verra qu'on aura eu raison dans ce projet de loi là et je ne suis pas convaincu, M. le Président, si j'ai encore la chance d'être ici dans sept, huit, dix ans, et si par hasard l'Opposition se retrouve au pouvoir, que ce n'est pas eux qui feront une loi ou qui amenderont cette loi-là pour libéraliser davantage, parce que les habitudes des consommateurs auront changé encore plus.

Je termine là-dessus, M. le Président. On a parié aussi de certaines choses, de certaines pressions qui ont été faites sur les députés.

Le Vice-Président (M. Cannon): En conclusion, s'il vous plaît, M. le député, puisque votre temps est terminé.

M. Audet: Oui, je conclus et je voulais juste terminer sur une note d'un député anglais, Edmund Burke qui a été connu pour ses écrits sur le parlementarisme, et qui disait une chose: "Votre représentant est élu pour mettre ses énergies et son jugement à votre service. S'il sacrifie celui-ci au détriment de votre opinion, il ne vous sert pas, il vous trahit." Alors, dans le but de servir au meilleur de mon jugement mes électeurs, M. le Président, j'appuierai et je voterai pour le projet de loi. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Cannon): Merci, M. le député de Beauce-Nord. Le prochain intervenant, M. le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques.

M. André Boulerice

M. Boulerice: M. le Président, vous entendez comme moi le bruit de l'extérieur. Vous entendez comme moi. Voilà 2000 camionneurs, M. le Président, qui sont depuis 16, 18 jours devant ce parlement et qui n'ont comme maigre pitance pour leur patience, pour leurs revendications, que le mépris du ministre des Transports qui leur offre une belle petite commission parlementaire. Mépris de la population, M. le Président, mépris du Parlement, de la part de ce ministre que j'aurais cru démocrate, mais qui se fait complice, avec son leader, dans cette oeuvre de destruction de la démocratie à l'Assemblée nationale: Bâillon!

Bâillon pour imposer sa loi. (16 h 50)

Le député de Beauce-Nord a dit que le ministre avait mis ses culottes. Oui, M. le Président, il a mis ses culottes à l'envers, comme le bon roi Dagobert, quand on regarde son projet de loi.

Des voix: Ho! Ho!

M. Boulerice: II a mis ses culottes à l'envers comme le bon roi Dagobert, mais, malheureusement, il n'y a pas de Saint-Éloi pour le ramener à la raison. J'ose espérer que le leader adjoint va l'inspirer de l'histoire de notre littérature pour lui trouver une citation pour contrebalancer la mienne. Mais ceci n'est pas l'essentiel de mon propos.

Le député de Beauce-Nord minimisait cette notion qui, en 1990, est sur les lèvres de tous les gens, la qualité de vie. On s'en sert pour parler de la culture, en disant que c'est une des principales qualités de la vie. On s'en sert pour l'environnement, en disant que c'est une principale qualité de la vie. Mais que va-t-il arriver avec les employés de ces magasins? le député de beauce-nord, dans sa brillante intervention de tantôt, disait que ça ne fera pas augmenter le taux des divorces. j'étais content, hier soir, d'entendre le leader adjoint de l'opposition et député d'abitibi-ouest parler du monoparentalisme. et je suis, sans aucun doute probablement, le député qui représente une circonscription où ce taux est le plus fort, de familles monoparentales qui sont, vous le savez comme moi, à 85 %, composées de femmes comme chefs de famille. ce sont elles, pour la plupart, que l'on retrouve dans ces petits commerces. que va-t-il arriver de la qualité de la vie? que va-t-il arriver de la relation entre cette mère que l'on souhaite avoir au travail, certes, mais qui aura de moins en moins de temps à consacrer à ses enfants? alors qu'on sait fort bien qu'il y a des problèmes de garderie, au québec, et qu'une garderie, même si elle est bonne, ne remplace pas la présence maternelle ou la présence paternelle. et le député de beauce-nord fait fi d'un des éléments principaux de ça. le ministre, de surcroît, nous dit: oui, mais c'est facultatif, ils pourront ouvrir s'ils le veulent; s'ils ne le veulent pas, ils n'ouvriront pas. essayons donc de regarder une autre optique, m. le président. on sait qu'une très grande partie de ces employés n'ont pas de protection syndicale, malheureusement. le patron, et je ne pourrai pas l'en blâmer, va vouloir essayer de soutenir la concurrence qui existe, donc, va obliger à travailler durant ces heures. et cette mère de famille ou ce père de famille qui osera refuser, que va-t-il lui arriver? eh bien, il sera remercié de ses services. loin d'avoir créé de l'emploi, on va plutôt créer du chômage, avec une loi comme celle-là, parce qu'il y a des gens qui, en leur âme et conscience, devront faire un choix.

Je ne sais pas quelle vision "économisiste" a le ministre là-dedans, mais j'essayais de faire le calcul. J'ai 100 $ par semaine à dépenser. Est-ce que je vais en dépenser plus - parce qu'on dépense en fonction de nos revenus - parce que les magasins sont ouverts plus longtemps? Si c'est ça, j'ai besoin de cours d'économie familiale et d'aller voir l'Association des consommateurs qui va m'apprendre à gérer un budget. Et je pense qu'à ce niveau-là le travail a été fait. Et les Québécois sont quand même soucieux de la bonne gérance de leur propre budget. Est-ce que je vais dépenser plus?

Est-ce que, M. le Président, l'augmentation du chiffre d'affaires et des ventes va être telle qu'on va en venir non pas à une stagnation des prix, ce qui serait souhaitable, mais même à une baisse des prix, à cause de l'offre et de la demande? Voyons-donc, M. le Président! Est-ce que, sous prétexte que durant tout le mois de décembre les magasins vont être ouverts, vous allez acheter plus de cadeaux pour vos enfants cette année que vous n'en avez acheté durant les années précédentes? Vous vous êtes, chaque année, fixé un budget et vous allez le respecter, cette année comme les années précédentes. Les heures d'ouverture n'auront aucune influence sur la gestion de votre portefeuille, M. le Président. Mais vous risquez, par contre, la surprise de voir ce Nintendo, ce gadget électronique qu'aiment bien les enfants et surtout les adolescents, et probablement que les enfants du ministre aussi sont des amateurs de ce jeu... Eh bien, je serais curieux de voir, est-ce que le prix va baisser? Je pense que la question peut se poser au ministre. Il y a peut-être bien des chances, M. le Président, tout au contraire, que le prix augmente, parce que, plus d'éclairage, et les tarifs d'Hydro-Québec augmentent. Le ministre l'avoue lui-même. Plus d'éclairage dans le magasin, plus de chauffage. S'ils ne chauffent pas au gaz, ils chauffent à l'électricité, donc plus de dépenses. Le magasin étant plus utilisé au niveau de l'entretien, ça va en prendre encore un petit peu plus. Et je vous le dis: Je ne dépenserai pas plus que le montant que je m'étais fixé, M. le Président. J'ai bien l'impression, moi, de représenter M. et Mme Tout-le-Monde dans mon quartier. Je viens de fa classe moyenne moi aussi. Je ne dépenserai pas plus que ce que j'avais prévu. Et ce n'est pas le fait qu'on ait "extensionné" les heures d'ouverture qui va me faire gagner plus.

Mais ce que je vais voir, par contre, M. le Président, c'est la dégradation de la qualité de la vie dans mon quartier, qui est un quartier résidentiel avec certaines rues commerçantes où, là, on va commencer à s'enfarger le dimanche, (e soir, dans les camions de livraison qui vont venir porter la marchandise. Parce que, si le magasin ouvre, il faut qu'il y ait des marchan-

dises. Et si par malheur les marchandises manquent, le bon commerçant va appeler pour en avoir le plus rapidement possible. Donc, toute cette qualité de vie qui existe dans mon quartier, ça va être mis en balance par ce projet de loi que le ministre nous propose. Enfin, pas qu'il nous propose, M. le Président, mais qu'il nous impose par un bâillon, le troisième. Vous me faites signe que c'est deux, M. le Président, je m'excuse de vous corriger, c'est trois bâillons que le ministre nous impose, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Cannon): C'était pour vous indiquer qu'il vous restait deux minutes pour votre intervention. Je ne faisais pas le décompte.

M. Boulerice: Je vous remercie, M. le Président, mais j'ai été quand même heureux de vous informer que nous en étions au troisième bâillon. Et je vois d'ailleurs dans votre figure, puisque vous êtes démocrate, que vous n'appréciez pas et que, malheureusement, la gestion de ce bâillon qu'on vous impose de faire vous tourmente, M. le Président. C'est dommage que vous ne puissiez pas intervenir dans cette Chambre et faire entendre une voix qui concorderait avec ta mienne, parce que vous êtes père de famille, vous aussi. Vous êtes consommateur, M. le Président. Et, naturellement, vous ne souhaitez pas que les magasins de meubles, quand même, aient les mêmes heures d'ouverture que les tavernes, M. le Président. Sans aucun doute. On n'en est pas rendus à ce point-là.

Donc, le projet de loi qui nous est imposé par ce gouvernement est un mépris total de la population. Premièrement, c'est, au départ, un premier mépris à l'égard d'un de ses collègues, le député de Nicolet-Yamaska, qui avait âprement travaillé là-dessus. Je trouve ça injurieux, M. le Président, que le ministre ait balayé du revers de la main ce qu'avait fait notre collègue de Nicolet-Yamaska avec beaucoup de sincérité et beaucoup d'honnêteté.

Le Vice-Président (M. Cannon): En conclusion, s'il vous plaît, M. le député. (17 heures)

M. Boulerice: En conclusion, M. le Président, quand on a vu le nombre de pétitions déposées en cette Chambre, le nombre de pétitions qui, malheureusement, n'ont pas pu être déposées en cette Chambre parce qu'elles avaient un vice de forme, quand on voit cette série impressionnante de télégrammes, de lettres venant de municipalités, de maires de villes... Puisque j'ai parlé du roi Dagobert, je vais être oblige de citer un autre conte de notre enfance, pariant du roi qui était nu, M. le Président. The king's cloak", le roi est nu, M. le Président. Le ministre est seul à penser en cette Chambre qu'il a raison avec sa loi alors que tout le monde lui dit: Non, vous avez tort. Le roi est nu, M. le Président, et il ne s'en aperçoit pas. Il aurait pu, par contre, réussir à s'en rendre compte, mais il ne l'a pas fait. Il persiste? Il sera vaincu, M. le Président, électoralement.

Le Vice-Président (M. Cannon): Merci, M. le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques. Je suis maintenant prêt à reconnaître le prochain intervenant, M. le député de Pointe-aux-Trembles.

M. Michel Bourdon

M. Bourdon: M. le Président, après mon collègue de Sainte-Marie-Saint-Jacques, je voudrais revenir sur le bruit lancinant que nous entendons dans cette Chambre. On sait que derrière les camions des camionneurs artisans on trouve une boîte, une benne, d'après le dictionnaire, et que la boîte se termine par un panneau à bascule, une porte, et la façon que les 2000 camionneurs ont trouvée de se faire entendre du gouvernement c'est, avec des cordes, faire basculer la porte basculante ou le panneau basculant, ce qui fait un bruit qui est proche du tam-tam. Alors, les coups de panneau à bascule sur la benne sont aux camionneurs ce que le tam-tam était pour l'Indien de temps immémoriaux. Ils veulent se faire entendre et ça fait 16 jours qu'ils sont ici, autour du parlement, à vouloir se faire entendre.

Le Vice-Président (M. Cannon): M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Lefebvre: II est peut-être temps que le député de Pointe-aux-Trembles sorte du bois et qu'il arrive au projet de loi qui nous occupe, les heures d'affaires.

Une voix: Oui.

Le Vice-Président (M. Cannon): Alors, effectivement, M. le député de Pointe-aux-Trembles, je vous rappelle le règlement de la pertinence. Sans doute que vous étiez dans votre préambule. Je vous invite à continuer s'il vous plaît.

M. Bourdon: J'y viens. M. le Président, les consommateurs, les employés, les commerçants voulaient aussi se faire entendre et l'Opposition officielle était d'accord avec eux. Or, le gouvernement a choisi de consacrer autant de temps, en commission, au débat sur qui devrait être reçu, parce qu'on demandait que les intéressés soient reçus, que de temps que ça aurait pris pour les entendre. Après ça, des députés sont venus dire: Mais la Coalition contre l'ouverture le dimanche nous disait, dans les corridors, son désaccord avec la loi. M. le Président, il faut être conséquent. Si on ne veut pas se faire parier dans les corridors, si on ne veut pas

recevoir des coups de portes à bascule sur les bennes, on écoute le monde quand le monde veut parler. Et c'est ce que le gouvernement ne veut pas faire.

Le prétexte que le ministre invoque, M. le Président, c'est de dire: Je les ai déjà consultés. Mais il les a consultés sur le problème des heures d'ouverture. Il ne les a pas consultés sur un projet précis qui est devant nous. Or, ce projet-là, M. le Président, n'est pas acceptable pour bon nombre de raisons. La preuve qu'il est inacceptable, c'est que l'immense majorité des gens que ça concerne sont violemment hostiles au projet de loi. Dans ce sens-là, il n'y a rien de plus éloquent que d'avoir ensemble les patrons et leurs employés, les associations de consommateurs et même les municipalités sur qui le gouvernement dompe encore une fois, par le projet de loi qui est devant nous, une partie de ses responsabilités. La benne libérale veut domper sur les municipalités du Québec l'application de la loi sur les heures d'ouverture.

On dit, dans le projet de loi, M. le Président, que le ministère de l'Industrie et du Commerce ou la municipalité fera appliquer la loi. On sait ce qui arrive, M. le Président, dans une bureaucratie: quand tout le monde est responsable de quelque chose, personne ne s'occupe de cette chose. Et on connaît l'état des relations du gouvernement avec les municipalités. Leur donner le mandat impopulaire de vérifier l'application d'une loi incohérente, c'est, je pense, un autre moyen de ne pas appliquer ce mauvais texte législatif qu'on a devant nous.

À cet égard, M. le Président, chaque fois que le gouvernement est mal pris depuis cinq ans, il y a une cassette qui part automatiquement: Ce serait la faute du gouvernement qui a été au pouvoir de 1976 à 1985. C'est quasi automatique. On part la cassette. M. le Président, les cassettes, comme les disques, finissent par s'user. La population estime, après cinq ans, que ceux qui sont en face gouvernent par eux-mêmes et avec leur arrogance actuelle. Ils ne peuvent plus se cacher derrière le gouvernement d'avant. Je pense que cette loi va passer à l'histoire comme une loi mal inspirée, inspirée par des groupes d'intérêts particuliers puissants, au détriment de l'ensemble de plus de 300 000 personnes qui travaillent dans le commerce.

Bien sûr que la loi du dimanche ne porte que sur l'alimentation. Mais on la change d'une façon fondamentale, de deux manières: la loi précédente disait que le dimanche, c'est le dépannage qui était assuré et on s'assurait que ce n'était que du dépannage en disant qu'il n'y aurait pas plus que trois personnes à travailler en tout temps. Donc, le joueur qui voulait ouvrir le dimanche ne devait opérer qu'avec trois personnes tous les autres jours de la semaine. Qu'est-ce qu'on fait maintenant? On dit cinq, M. le Président. Le député de Beauce-Nord dit quatre, mais il omet de dire que c'est quatre plus le propriétaire ou son représentant, donc, ça fait cinq. Et ça veut dire qu'une entreprise comme Provigo, qui était très en faveur de la loi et qui, elle, n'a pas besoin de faire basculer la porte arrière de la botte de son camion économique, elle a des moyens autres de se faire entendre et elle se fait entendre. Alors, ils pourront les lundi et mardi... Auparavant, ça fermait à 18 heures; là, ça serait 19 heures avec le projet de loi. Pourquoi? Pour leur permettre d'entrer sur le terrain des dépanneurs. C'est clair, c'est évident et ils pourront ouvrir plus tôt le matin, à 8 heures, pourquoi? Parce que les dépanneurs ont la proximité des consommateurs et, aussi, des heures d'ouverture différentes.

Quant au dimanche, on ne met même pas de quelle heure à quelle heure. Ça pourrait être de minuit à 23 h 59 et on dit que ça ne sera plus trois personnes en tout temps, mais cinq seulement ce jour-là ou en dehors des heures normales. Ça veut dire qu'un supermarché pourrait opérer avec quatre caisses et une personne pour garnir les tablettes, à partir de 7 heures, le lundi et le mardi et plus tard que 21 heures, le mercredi et le jeudi. C'est ça, M. le Président, qui est mauvais dans ce projet de loi, c'est le choix qui est fait par le gouvernement d'aider les grandes chaînes, qui éprouvent certaines difficultés à s'en tirer, en empiétant sur le terrain des entreprises plus petites.

Quand je dis entreprise plus petite, M. le Président, je ne parle pas que des toutes petites entreprises. Il y a des entreprises comme les Canadian Tire qui ont fait valoir leur opposition ferme à ce projet de loi qui vient chambarder un domaine où il y avait quelques problèmes, mais pas des problèmes qui justifient ce que le gouvernement est en train de faire et qui va perturber les employés de ces entreprises et les propriétaires des plus petites entreprises.

C'est sûr, M. le Président, qu'un épicier qui verra son concurrent ouvrir le dimanche n'aura guère d'autre choix que de perdre de l'argent ou d'ouvrir lui-même le dimanche.

Quant aux consommateurs au nom desquels cette mesure particulière qui favorise des intérêts particuliers est prise, il est sûr qu'ils paieront le coût des salaires supplémentaires et des frais supplémentaires que les entreprises devront assumer.

Dans le cas des plus petits commerces, M. le Président, les gens qui sont propriétaires devront, comme les employés, subir l'inconvénient d'ouvrir des heures plus longues la semaine et d'ouvrir le dimanche si leurs concurrents le font. C'est ça qui est, en gros, l'état de ce projet de loi que le gouvernement nous impose par le bâillon. En commission parlementaire, on n'a pas pu faire le débat avec les intéressés, le gouvernement préférait bâiller en écoutant d'une oreille distraite l'Opposition plutôt que d'entendre les intéressés. Et c'est pour ça qu'on a des bruits de bennes; c'est, pour ça que les camionneurs

essaient de se faire entendre en faisant du bruit, parce que, dans le cas des camionneurs, s'ils ne veulent pas faire du bruit maintenant, ils seront entendus à la mi-septembre. Vous savez, il y a un premier ministre qui avait dit: La reine ne négocie pas avec ses sujets. Et là, ce qu'on nous dit, c'est: La reine n'écoute pas ses sujets; qu'ils jouent du tam-tam, qu'ils fassent du bruit avec leur benne de camion, on s'en fiche. On est en cours de deuxième mandat, on a été élus et on doit favoriser les intérêts particuliers importants... (17 h 10)

Le Vice-Président (M. Cannon): En conclusion s'il vous plaît, M. le député.

M. Bourdon:... et c'est ce qu'on fait par ce projet de loi, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Cannon): Merci, M. le député de Pointe-aux-Trembles. M. le député de Duplessis.

M. Denis Perron

M. Perron: Merci, M. le Président. Dans un premier temps, je voudrais vous souligner combien il est décevant pour certains députés qui sont ici depuis maintenant près de 14 ans, et d'autres qui sont ici depuis plus longtemps, de voir le non-respect de ce qui s'est passé sur l'heure du dîner, vers 12 h 30, de la part de la députée de Vachon. Personnellement, et antérieurement aux déclarations qu'elle a faites ici en cette Chambre, j'avais du respect pour la députée de Vachon. Mais je me pose de sérieuses questions maintenant. Ce qui s'est passé est extrêmement déplorable, ce que je considère comme le tripotage de la vérité qui est écrite dans des documents gouvernementaux. Je considère aussi ses allusions comme étant de la petite politicaillerie.

Le Vice-Président (M. Cannon): Je m'excuse, M. le député de Duplessis, sur une question de règlement. M. leader adjoint du gouvernement.

M. Lefebvre: Je ne vais pas insister. Vous avez entendu le député de Duplessis comme moi. Je vous demanderais de l'inciter à la plus grande prudence pour ne pas pécher contre les dispositions des articles 35 et suivants, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Cannon): Alors, merci, M. le leader adjoint du gouvernement. Je rappellerai simplement à tout le monde, ici, qu'on ne peut pas attaquer la conduite d'un député en cette Chambre. J'invite le député de Duplessis à respecter le règlement et aussi à poursuivre son intervention.

M. Perron: Alors, merci, M. le Président. Je disais donc que, quant à moi, c'était du tripotage de la vérité, c'était de la politicaillerie et c'était même de la malhonnêteté intellectuelle que de voir cette députée de Vachon intervenir en citant un document...

Le Vice-Président (M. Cannon): M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Lefebvre: M. le Président, vous savez, sous prétexte qu'on se retrouve en fin de session et que, jusqu'à un certain point, le gouvernement est sujet au consentement de l'Opposition, ça ne veut pas dire qu'on va laisser passer n'importe quoi, M. le Président. Avec toute la délicatesse voulue dans les circonstances, j'ai indiqué au député de Duplessis que les règles de l'article 35.5, 6 et 7 existaient et elles existent encore. Vous avez réalisé que ça n'a absolument rien donné. Alors, là, je vous demanderais d'être un peu plus ferme et de lui indiquer qu'il ne peut pas prétendre que la députée de Vachon a tripoté la vérité. Il ne peut pas dire ça, M. le Président. Il ne peut pas dire ça. Je comprends que l'exemple vient de haut; il vient du leader de l'Opposition, mais il ne peut pas dire ça. Il y a des règles à respecter, et ça vaut pour lui, particulièrement lui qui est là depuis 14 ans.

M. Jolivet: M. le Président, sur la question de règlement.

Le Vice-Président (M. Cannon): M. le député de Laviolette.

M. Jolivet: Oui, M. le Président, vous avez entendu comme moi les mots sur lesquels le leader adjoint du gouvernement a insisté. Je n'ai jamais entendu le député de Duplessis dire ce que le leader adjoint du gouvernement semble vouloir dire. Alors, comme vous l'avez fait, M. le Président, je voudrais bien demander au député de Duplessis de continuer son intervention en respectant les règles, ce qu'il avait fait avant, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Cannon): Avant que le député de Duplessis ne poursuive son intervention, je voudrais rappeler aux gens de la Chambre l'article 32 quant au décorum. Nous sommes à l'Assemblée nationale du Québec et le décorum exige que tous et chacun d'entre nous, lorsque nous avons la parole, nous respections le règlement. Par ailleurs, j'ajouterai que, quant aux termes non parlementaires, il y a le mot "malhonnêteté intellectuelle" qui a été déclaré non parlementaire par la députée de Bellechasse, le 3 décembre 1986. La jurisprudence est à la page 4708. Alors, j'invite le député de Duplessis à se conformer au règlement et je lui demande de poursuivre son intervention.

M. Perron: Alors, merci, M. le Président. Je vais donc continuer mon intervention. Et ce que

je peux dire au moins en cette Chambre, c'est qu'il n'y a personne, en cette Chambre, ni à l'extérieur de cette Chambre qui va m'empêcher de penser ce que je veux de la députée de Vachon - est-ce assez clair? - de penser ce que je veux face à ce qu'a dit la députée de Vachon.

M. le Président, on a parlé dans cette Chambre, surtout de la part des libéraux, peu importe le député qui se levait en cette Chambre, incluant la députée de Vachon, le député de Beauce-Nord et d'autres députés aussi, on a parié des fameux décrets. Il est vrai que la loi de 1984 qui a été adoptée par l'ancien gouvernement du Parti québécois permettait des décrets. Elle permettait des décrets de dérogation et des décrets qui apportaient des avis de conformité envers certaines entreprises du Québec. C'est vrai. Mais je crois fermement, après avoir lu ce que j'ai lu, que le seul et unique décret qui art été passé par l'ancien gouvernement était un décret qui imposait par avis à des entreprises de se conformer à la loi, contrairement à ce qu'a dit et à ce qu'a répété en cette Chambre la députée de Vachon.

Et les dérogations, toutes les dérogations sans exception, incluant le dossier dont on parle actuellement et que la députée de Vachon a soulevé, toutes les dérogations, les vraies, ont été amenées par le gouvernement libéral que nous avons en face de nous. Décret sur décret, décision sur décision, en conformité, bien sûr, avec la loi, mais c'est ce qui a permis d'amener l'imbroglio que nous avons aujourd'hui. Et c'est la raison pour laquelle nous avons cette loi devant cette l'Assemblée nationale. Est-ce assez clair? L'ancien gouvernement du Parti québécois n'a jamais passé de décret de dérogation. C'est ce qu'on s'évertue à vous dire depuis qu'on discute de ce projet de loi, autant en commission parlementaire qu'ici même, à cette Assemblée nationale.

M. le Président, je ne peux accepter, sous aucune considération, que les députés ministériels qui ont, bien sûr, la majorité en cette Chambre, se permettent de dire à peu près n'importe quoi, n'importe quand, sur n'importe qui, sur des paroles qui sont dites ici, en cette Chambre, et encore moins sur des documents qui sont écrits, pour les interpréter à leur façon.

M. le Président, pour revenir au projet de loi 75, on sait très bien que l'achalandage et les besoins de la clientèle ne justifiaient pas une extension des heures de commerce le dimanche. Il n'y a pas assez de Québécois et de Québécoises qui travaillent six jours par semaine, du matin au soir, pour justifier d'ouvrir des commerces le dimanche. Et, pour les urgences, il y a, comme je le disais hier soir, des dépanneurs et c'est amplement suffisant en ce qui a trait au territoire québécois.

Deuxièmement, la loi n'oblige pas, elle permet. C'est vrai. Mais qu'arrivera-t-il du petit commerçant de vêtements ou de souliers dans un centre commercial où les gros demeureront ouverts tous les soirs? Laissera-t-il sa clientèle éventuelle se diriger vers les plus gros commerçants au risque de périr? Se résoudra-t-il à ajouter une trentaine d'heures par semaine à son horaire de travail personnel ou réduira-t-il ses profits en embauchant plus de personnel? M. le Président, nous ne sommes tout de même pas à New York, ou encore à Tokyo, pour justifier pareille mesure.

Troisièmement, les clients n'avaient pas besoin d'une telle flexibilité. Le petit commerçant ne peut se la payer, le travailleur verra ses horaires de plus en plus brisés et, pour survivre, même les gros commerçants devront hausser leurs prix car personne n'achètera deux paires de souliers de plus simplement parce que les magasins sont ouverts tard le soir ou encore le dimanche. Le ministre a simplement mal fait ses devoirs. Il est évident que les nouveaux horaires compliqueront la tâche de nombreux travailleurs et travailleuses, et surtout des travailleuses qui, déjà, ayant des enfants d'âge scolaire, devaient se débrouiller avec les horaires scolaires et les garderies.

Quatrièmement, M. le Président, pour revenir sur la clientèle, il faut admettre que, souvent, les clients ne sont même pas conscients qu'en exigeant ainsi une libéralisation des heures de commerce ils se trouvent non seulement à forcer d'autres Québécois et Québécoises à travailler un jour autrefois considéré comme férié, mais s'exposent eux-mêmes à ce que, éventuellement, leur propre employeur les force à faire de même un de ces quatre matins. (17 h 20)

M. le Président, d'autre part, dans l'optique du Parti libéral du Québec et, en particulier, du ministre de l'Industrie et du Commerce, les autorités gouvernementales n'ont pas vraiment tenu compte des particularités régionales, préférant imposer une loi qui pourrait, tout au plus, satisfaire les établissements à grande surface de plancher et les marchands des grandes villes comme Québec et Montréal. Et, pour le comté de Duplessis, M. le Président, je vais vous lire ici une lettre que je viens de^ recevoir de la Chambre de commerce de Sept-îles, et ce n'est pas des amis du PQ, pour votre information, ce n'est pas des amis du député de Duplessis.

Le Vice-Président (M. Cannon): je m'excuse, m. le député de duplessis, votre temps est écoulé. en conclusion, rapidement, s'il vous plaît.

M. Perron: Parfait, M. le Président. D'ailleurs, c'est une lettre que le ministre a en main actuellement et où on dit ceci - en conclusion: "La chambre de commerce de Sept-îles, appuyée par l'ensemble des marchands de Sept-îles, s'oppose à ce projet de loi sur les heures d'ouverture des commerces, considérant que cette

loi n'a sa raison d'être que pour les grands centres urbains. "En région, cette loi n'entraîne que des dépenses supplémentaires pour des revenus identiques, considérant les longues heures que les propriétaires auront à faire et le peu de clients qui s'en accommoderont. Nous n'avons pas le bassin de population pour entretenir des heures d'ouverture semblables et nous croyons fermement que ce projet de loi ne doit pas être mis de l'avant. "La chambre de commerce de Sept-îles croit que le respect des heures d'ouverture déjà existantes serait la solution pour tous et pour toutes. Nous espérons, M. le député, que vous nous appuierez dans nos démarches - écoutez bien - et nous comptons sur vous afin de nous aider à faire avorter ce projet de loi."

J'endosse entièrement les propos de cette chambre de commerce, M. le Président. Pour une fois au cours des dernières années, je suis d'accord avec cette chambre de commerce qui est de majorité libérale. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Cannon): Merci, M. le député de Duplessis. Je suis maintenant prêt à reconnaître le prochain intervenant, M. le député de Gouin.

NI. André Boisclair

M. Boisclair: Merci, M. le Président. Il est dommage que l'article 32 de notre règlement ne s'applique pas pour les gens qui sont à l'extérieur de cette Assemblée, puisqu'il y a bien des gens qui font du bruit et le font sans doute avec raison.

M. le Président, vous me permettrez, d'abord et avant tout, de revenir très rapidement, parce que je ne voudrais quand même pas outrepasser les règles que se sont données les membres de cette Assemblée, et vous dire que, lorsque j'ai écouté tout à l'heure la députée de Vachon qui a cité une partie d'un décret, elle a oublié de souligner qu'il s'agissait bien là d'un délai de conformité que se donnait le gouvernement. Et ça, il faut bien le comprendre. Nous avions tous admis qu'il y avait des gens qui étaient dans l'illégalité; cependant, nous leur avions permis un certain délai avant de se rendre conformes à la réglementation.

Mais ce que la députée de Vachon a oublié, et pour le bénéfice de cette Assemblée, M. le Président, j'aimerais vous en parler... Elle dit: On avait des chouchous. Elle disait que les gens du Parti québécois avaient des chouchous. Mais permettez-moi, M. le Président, en vous parlant de ce projet de loi là, de vous parler des chouchous du gouvernement actuel. Permettez-moi de vous lire un extrait de la Gazette officielle du 25 janvier 1987: "Règlement sur des exemptions d'application de la Loi sur les heures d'affaires des établissements commerciaux." Là, on voit qui sont les véritables chouchous, M. le Président. La loi sur les heures d'affaires des établissements commerciaux ne s'applique pas. On donne une exemption, mais ce n'est pas un délai de conformité. On donne une exemption en 1987. "La Loi sur les heures d'affaires des établissements commerciaux ne s'applique pas à un établissement commercial dont l'activité exclusive est la vente de fruits et légumes frais ou de fromages, de nourriture en contenants scellés..." et ainsi on continue. Première exemption, M. le Président.

Deuxième exemption: "La loi ne s'applique pas à des établissements commerciaux dont l'activité exclusive est la vente de menus articles de moins de 20 $ lorsque l'aire de vente est au plus de 20 mètres carrés dans un marché aux puces." Deuxième exception, M. le Président. S'il y a des gens qui ont des chouchous, pour reprendre les propos de la députée de Vachon, ce ne sont pas les gens qui forment l'Opposition, c'est les gens qui sont en face, qui ont perpétué le problème qu'ils dénoncent pourtant avec autant de vigueur aujourd'hui. m. le président, j'ai écouté avec beaucoup d'attention le ministre dans plusieurs de ses interventions. j'aimerais lui dire, avec toute la simplicité qu'on peut avoir, qu'à force de rationaliser, à force de vouloir imposer une logique qui ne correspond pas à la réalité, on oublie un élément fondamental du comportement humain: on ne peut pas, m. le président, essayer d'expliquer le comportement humain en prenant des chiffres, en prenant des règles mathématiques, en prenant de grands principes. il y aura toujours des éléments qui seront irrationnels dans le comportement humain. il y aura toujours des éléments qui échapperont à notre compréhension. si ce n'était pas le cas, m. le président, les sciences économiques seraient des sciences exactes. et si, justement, les sciences économiques ne sont pas des sciences exactes, c'est qu'il y aura toujours des règles imprévisibles, qu'il y aura toujours certaines exceptions, parce que le comportement humain, de par sa nature même, m. le président, comportera toujours un élément d'irrationalité. je peux comprendre le ministre qui nous fait de beaux discours, qui nous parle d'équilibre, qui nous pat\e d'équité, qui nous parle de logique, mais il oublie cet élément fondamental, m. le président, il oublie cette réalité qui compose notre tissu social et cette réalité qui est forgée par nos valeurs, par notre histoire, par notre vécu, par nos moeurs au québec. d'oublier cette réalité-là et de vouloir tout normaliser en imposant une logique peut-être implacable, à force de parler d'équilibre, à force de parler de normes, on passe souvent, m. le président, à côté de la réalité.

Bien sûr, M. le Président, on aura beau argumenter sur la représentativité de chacune de nos positions que l'on défend respectivement, de dire qu'on a, un groupe parlementaire ou l'autre,

plus d'appui l'un que l'autre, mais une chose est sûre, M. le Président, c'est qu'il n'y a personne - la députée de Vachon avait raison là-dessus - dans les rues qui se bat pour demander une extension des heures d'affaires. Il n'y a personne. Au contraire, les représentations que nous avons reçues à nos bureaux... Je peux vous parler des représentations que j'ai eues, des SIDAC; la SIDAC de la rue Masson, M. le Président, dans le comté de Gouin, la SIDAC de la rue Saint-Hubert, qui est en bonne partie aussi dans le comté de Gouin, et en bonne partie aussi dans le comté de Dorion, comté de la ministre responsable, déléguée à la Famille. Les gens de la SIDAC Saint-Hubert, M. le Président, sont venus me rencontrer à mon bureau et ils m'ont manifesté à plusieurs reprises leur opposition à l'égard de ce projet de loi là, parce qu'il faut bien comprendre une chose, M. le Président, la réalité de ces commerces, de ces artères commerciales là, quelle sera la situation lorsqu'on connaît, à l'heure actuelle, le taux de disponibilité sur ces artères commerciales là?

Quelle sera la situation, lorsqu'on se retrouvera avec des commerces qui seront ouverts et d'autres qui ne le seront pas? Parce que la loi n'oblige pas Couverture, elle la permet, mais ce qui est très clair, c'est qu'à cause de situations financières difficiles pour certains commerces ils n'auront pas les moyens d'ouvrir et de répondre à la proposition du ministre. Plusieurs commerces n'auront pas la possibilité et les disponibilités financières pour ouvrir jusqu'à 19 heures les lundi et mardi, ne pourront pas ouvrir non plus le mercredi jusqu'à 21 heures.

Et à cause de cette réalité-là on créera, immédiatement, dès que cette loi sera en application, un déséquilibre. On risque d'affaiblir un pôle important du développement économique dans la région de Montréal. Et, M. le Président, à Montréal, on ne parle pas d'un nombre insignifiant de commerces. À Montréal, M. le Président, il y a 10 000 commerces de rue qui emploient plus de 50 000 hommes et femmes de Montréal et la majorité de ces commerces-là, M. le Président, sont des commerces de type familial. Il est de notre devoir, M. le Président, de défendre les intérêts de ces petites et moyennes entreprises qui sont justifiées d'appréhender les conséquences d'une libéralisation des heures d'affaires, M. le Président; surtout dans un contexte où il n'y a aucune mesure de transition pour faciliter cette concurrence accrue qu'aura à vivre l'ensemble des commerçants.

M. le Président, il y a un principe fondamental. Lorsque quelqu'un a 100 $ à dépenser pour acheter des biens de consommation, pour acheter de la nourriture ou pour acheter des vêtements, une chose est claire, M. le Président, ce n'est pas en extensionnant les heures d'ouverture qu'on va augmenter les dépenses de consommation. Au contraire, M. le Président, cette libéralisation accrue des heures d'affaires n'augmentera en rien les revenus des commerces, mais, ce qu'elle va faire, elle augmentera les dépenses de l'ensemble des commerces, M. le Président.

M. le Président, les SIDAC ne pourront pas assumer une règle qui sera variable d'un commerce à l'autre. La fidélité de la clientèle, M. le Président, est directement liée à la possibilité d'avoir accès à l'ensemble des commerces à des heures qui seront les mêmes pour l'ensemble des commerces. Ce projet de loi risquera, à mon avis, d'affaiblir grandement un des pôles économiques, qui est fondamental dans le comté de Gouin, que sont les deux artères commerciales où les commerçants sont regroupés en SIDAC, M. le Président. (17 h 30)

M. le Président, la question derrière tout le débat, et je pense que les gens l'auront bien compris, l'ensemble des parlementaires en cette Chambre l'aura compris, les gens qui nous écoutent aussi l'auront compris: s'il y a autant de positions claires et arrêtées à l'égard du projet de loi que nous étudions aujourd'hui, c'est parce qu'il y a des enjeux financiers importants. Les gens et les commerces se battent pour des parts de marché et ça, ce sont des questions de piastres et de cents, ce sont des questions de gros sous. Et ce débat, hélas, se fera sur le dos des travailleuses, des travailleurs québécois, de l'ensemble des petits commerçants, propriétaires de dépanneurs. Le ministre, pourtant, le sait très bien et il n'en parie pas souvent, c'est rare qu'on l'en a entendu parier.

En Ontario - on aime bien comparer avec ce qui se passe en Ontario - tout le monde reconnaîtra qu'il y a une libéralisation beaucoup plus grande qui existe, et de façon historique. Et par tradition, il y a toujours eu, en Ontario, une libéralisation plus grande des heures d'affaires. Cependant, ça ne nous empêchera pas de constater un phénomène important de décroissance relative des grandes surfaces dans l'alimentation. Cette décroissance-là, malgré une libéralisation des heures d'affaires, continue de se manifester. Alors, au lieu de répondre aux préoccupations qui sont manifestées, véhiculées par la majorité des Québécois et Québécoises... Qui a reçu, dans cette Chambre, des représentations appuyant ce projet de loi là? Quel éditorialiste est venu appuyer le ministre dans son projet de loi et dans sa démarche? Personne, M. le Président. Les gestes que l'Opposition a posés, en commission parlementaire et dans cette Chambre, sont légitimes. Mais ce qu'on a fait, c'est qu'après environ vingt heures de débat on est venu nous imposer le bâillon, on nous a empêchés de parier.

Je conclurai, M. le Président, en vous disant que nous avons raison de craindre les conséquences de ce projet de loi, particulièrement à Montréal où on retrouve - dans mon comté, M. le Président - un petit dépanneur par

coin de rue, par pâté de maisons. Que va-t-il arriver de ces gens-là qui sont propriétaires de leur commerce, qui ont trimé dur toute leur vie pour un jour arriver à devenir propriétaire? On risque, en quelques minutes, sans même prévoir de mesures de transition, sans doute de mettre fin à la plupart de ces opérations commerciales là.

M. le Président, je suis un de ceux qui sont fiers de la position qu'a prise l'Opposition officielle dans ce débat-là, fiers de la position qu'a prise la porte-parole, la députée de Taillon, dans ce dossier-là et fiers aussi de l'ensemble des gens, hommes et femmes députés qui ont participé à la commission parlementaire et qui ont tout fait pour faire entendre le point de vue légitime de milliers de Québécois et de Québécoises. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (m. bissonnet): merci, m. le député. nous poursuivons la discussion de ce projet de loi et je reconnais maintenant le député de dubuc. m. le député.

M. Gérard R. Morin

M. Morin: Merci, M. le Président. Hier soir - enfin, je devrais dire la nuit dernière - lors de mon intervention, j'ai tenté d'attirer l'attention du ministre sur le manque de clarté de son projet de loi et, aussi, j'ai attiré son attention sur les difficultés qu'il pourrait y avoir dans l'application de cette loi de la part des municipalités. Et c'est sur ces deux points que je voudrais revenir, puisque le ministre a quand même eu une réaction, prétendant que les amendements corrigeaient ce que... Et je vais revenir à la charge pour démontrer au ministre que ce projet de loi n'est pas clair, au moins quant aux articles que j'ai mentionnés. Et je prierais le ministre de croire que je ne le fais pas par arrogance. Je profiterai même de l'occasion pour lui rendre hommage pour avoir quand même la patience d'être toujours présent en Chambre, ce que ne font pas toujours les ministres. Et, normalement, malgré tout ce qu'on peut avoir de critiques a apporter au sujet de son projet de loi, il faut quand même reconnaître qu'il est là, au moins, pour les écouter. Je pense que c'est une forme de respect, c'est une façon de respecter le point de vue de l'Opposition.

Donc, je reviens à ces articles 2 et 3. L'article 2 se lit comme suit, et je prends le titre amendé: "Sous réserve des articles 3.1 à 12, le public ne peut être admis dans un établissement commercial qu'entre...", etc., 8 heures, 9 heures. Je considérerais, puisque ce paragraphe fait référence à des heures et à des journées d'ouverture... Pourquoi? Parce que, autant la langue française peut nous permettre de faire beaucoup de fantaisie, je pense qu'il n'est pas impossible d'écrire simplement avec cette langue française. Et le titre devrait se lire comme suit pour éviter la confusion... Hier, j'ai mentionné que le problème de la loi actuelle entourait beaucoup son observance, le respect de la loi; et cela était dû, pour une bonne partie, à son manque de clarté. Pourquoi n'écririons-nous pas, M. le Président - je m'adresse au ministre aussi - "Sous réserve des articles 3.1 à 12, le public peut être admis dans un établissement commercial", et faire l'énumération. Une phrase tout simplement positive, sans plus.

Je reviens à l'article 3 qui, lui, évidemment, se réfère aux fermetures. L'article 3 se lit comme suit: "Sous réserve des articles 4 à 12, le public ne peut être admis..." Donc une forme semi-négative. Pourquoi? Ne serait-il pas plus simple d'écrire: "Sous réserve des articles 4 à 12, le public ne peut pas être admis dans un établissement commercial"? On dirait que la simplicité - je ne sais pas si ce sont des spécialistes qui vous ont conseillé - on dirait qu'aujourd'hui, écrire simplement, c'est défendu. Il faut s'assurer avant d'adopter une loi, qu'elle puisse être contestée.

Le deuxième point que je voudrais signaler au ministre, c'est sa grande naïveté par rapport au monde municipal. Là-dessus... Encore, si je ris, ce n'est pas par ironie ou par arrogance, mais je ne peux pas me retenir. Il pense que le monde municipal, après ce qu'on lui a fait - et on sait ce qui s'en vient au niveau du transport en commun, etc. - c'est un monde de bonne humeur qui va accueillir cette loi. Il va dire: Fiez-vous sur nous autres. On va vous appliquer ça comme il faut. Les amendes qu'on pouvait récolter, ça va consolider les fonds de la municipalité. On va pouvoir mettre beaucoup de choses en branle. Je pense honnêtement qu'il fait erreur. Il fait erreur au niveau du principe et quant à l'application sur le plan technique...

Je lisais tout à l'heure l'article 4, celui qui est devenu 5, suite à l'amendement, concernant le nombre de personnes. J'imagine l'inspecteur ou la police, je l'imagine dans sa tournée le soir qui va appeler: Chef, qu'est-ce que je fais? Combien sont-ils? C'est incroyable. Toutefois, si rétablissement offre en vente, conformément au deuxième alinéa, des denrées alimentaires, le public ne peut y être y admis, conformément au premier alinéa, que si au plus quatre personnes assurent, en dehors des heures prévues à l'article 2, ainsi que le dimanche et les jours visés à l'article 3, le fonctionnement de l'établissement ou - ce n'est pas terminé - de la partie distincte et cloisonnée. Non? Il faudra vérifier ce que ça veut dire, une cloison. D'habitude ils ont un revolver, mais il va falloir qu'ils aient un pied-de-roi de l'autre bord. En tout cas. Écoutez, M. le Président, je blague un peu parce qu'il faut bien le faire à travers les heures. Il y a un temps pour être sérieux. Ça fait rire le ministre, ça ne peut pas faire de tort. Pour autant qu'on ne reste pas comme ça, parce que c'est mauvais pour les rides, mais pour un certain temps, c'est

bon.

Maintenant, je voudrais aborder l'aspect de la libéralisation des commerces. Je me demande d'où vient cette soi-disant pression. Pression que je qualifie de purement artificielle. Parce que les problèmes - ou le peu de pressions, s'il y en a eu - sont davantage reliés à la non-observance de la présente loi où, finalement, il y a eu de l'exagération qui a permis à certains établissements de dire: Voici, si la loi n'est pas respectée, aussi bien permettre l'ouverture à tout le monde. C'est à ce niveau-là que vient la pression.

Hier, je faisais lecture d'une partie du rapport ou du mémoire qui avait été présenté par le Conseil de la famille qui, lui, basait tout son mémoire sur la conciliation des responsabilités familiales avec les responsabilités professionnelles. Je rappellerais au ministre que j'adhère entièrement à ce principe défendu par le Conseil de la famille, sans toutefois y revenir.

Mais ce qu'on vient... Et on nous rebat les oreilles assez fréquemment sur un élément, à savoir que les habitudes du consommateur ont changé énormément. On se croirait vraiment sur une autre planète. Bien sûr, on est prêt à admettre que les habitudes ont changé, mais elles n'ont pas changé dans le sens d'un besoin en termes de temps. Ce n'est pas ça, le problème. Je vais en faire la démonstration, d'autant plus que parmi les mémoires que j'ai lus il n'y en a pas tellement qui se sont arrêtés à cet aspect. On s'est arrêté beaucoup sur les heures de travail des employés de ces commerces. Mais on a oublié de faire l'analyse des heures de travail de l'ensemble des travailleurs et des travailleuses. (17 h 40)

On sait, et je le rappellerai, qu'au cours des 20 dernières années, pour autant que les secteurs primaire et secondaire sont concernés, les heures de travail sont passées de 48 à 40, et ce, sans tenir compte des conditions de travail, des bénéfices marginaux qui ont augmenté au niveau des vacances, des congés de toutes sortes, donc qui permettent de se libérer à l'occasion. Le secteur tertiaire, bien sûr, qui est en moyenne, au moment où on se parle, de 36 heures... Et si on donnait quelques exemples... Je pense qu'il ne devrait pas avoir de problèmes à faire ses emplettes.

Le monde de l'enseignement, ça ne devrait pas poser de problème. Même en dehors de la période estivale, je pense qu'il reste un petit peu de temps. Les fonctionnaires en général, c'est quoi? 35 heures par semaine? Ce n'est pas trop dramatique. Les services professionnels, ça va même jusqu'à 30 heures par semaine. Et on soutient assez fréquemment que la moyenne d'âge... On est dans une société vieillissante, donc, le pourcentage des retraités sur l'ensemble des consommateurs commence à être important. Je ne crois pas que ces gens-là, bien qu'on entende souvent dire de la part des retraités:

Aïe, sais-tu que je me demande comment je faisais dans le temps que je travaillais... On nous répète souvent ça: Ma journée est bien pleine. Je ne réussis pas à faire tout ce que je voudrais faire. C'est le langage des retraités d'aujourd'hui. Bien, c'est peut-être parce qu'ils accordent beaucoup de temps aux emplettes, aux commissions. Je ne crois pas que la demande de prolonger les heures d'ouverture vienne de ces gens-là. Il y a une autre classe, aussi, de la société, les sans-travail. On le déplore, mais ils font partie de notre société, soit au niveau du chômage ou de l'assistance sociale. Je ne crois pas que ces gens-là manquent de temps. Et je ne dis pas ça par ironie. C'est une réalité.

Donc, M. le Président, il est clair que... Seulement une minute. Je vais en profiter pour faire une autre démonstration que c'est purement une pression artificielle qu'on essaie de nous passer. Tout à l'heure, tout juste avant d'intervenir, j'avais ma collègue qui m'apportait le résultat d'un sondage de la chambre de commerce des Moulins. C'est tellement objectif. Ce n'est pas dans mon comté. Je ne peux même pas en tirer profit sur le plan électoral. Alors, le ministre va sans doute lui accorder une grande attention. C'est le résultat du sondage qui a eu lieu entre le 11 et le 18 juin. Comme il me reste peu de temps, je vais tout simplement donner les résultats. J'aurais aimé faire l'énumératioh de toutes les questions, enfin, les préambules, etc. Quels sont les résultats? Etes-vous favorable à l'ouverture le dimanche? Oui, 19,4 %; contre, 69 %; il y a quelques indécis. On les comprend. La confusion de la loi... À un moment donné, il y en a qui doivent essayer de la comprendre et ils ne sont pas fixés encore. Concernant l'ouverture le soir sur semaine: 42,7 % se disent favorables, mais 46,5 % disent non. On leur demande: Désirez-vous le statu quo? Ah! c'est curieux, hein! C'est là qu'on cherche la fameuse pression; 77,5 % disent oui, aussi bien le statu quo. C'est peut-être qu'ils ont commencé à lire le projet de loi et qu'ils se sont découragés...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Morin: 11,7 % ont dit non. Et il y a encore des indécis, probablement, qui ont continué à lire le projet parce qu'ils sont plus perspicaces et qu'ils essaient de le comprendre. Et, êtes-vous favorable à l'ouverture le soir et le dimanche? Un petit 20,2 %; non, 69 %.

Alors, mon temps est terminé. Je voulais quand même attirer l'attention du ministre. Je ne sais pas si c'est encore possible qu'il apporte des amendements, mais si je ne l'ai pas convaincu, c'est impossible. Bien, je pense que mes collègues qui m'ont précédé ont raison, on va se retrouver à l'automne avec des amendements parce que je pense qu'il faut reconnaître qu'il y a déjà des problèmes avant même que la loi soit adoptée.

Je vous remercie, M. le Président, de

m'avoir accordé tout ce temps, ainsi que le ministre de m'avoir accordé son attention.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député. Je reconnais maintenant le prochain intervenant, M. le député de Nicolet-Yamaska. M. le député de Nicolet-Yamaska.

M. Maurice Richard

M. Richard: M. le Président, j'ai eu l'avantage, je pense, de participer à toutes les étapes de ce fameux dossier des heures d'affaires au Québec, depuis maintenant au-delà de trois ans, de participer à l'évolution de ce dossier-là parce que, effectivement, il a évolué.

Dans un premier temps, j'aimerais vous faire rapidement le portrait du commerce au détail au Québec et, dans un deuxième temps, le plus sérieusement possible, vous expliquer, en fait, d'une façon vulgarisée, le projet de loi que nous avons devant nous.

Au niveau du portrait du monde du commerce au détail, ça totalise au-delà de 420 000 salariés; 78 300 sont des personnes qui oeuvrent au niveau du monde alimentaire, dans l'alimentation. Le nombre de commerces au détail au niveau des établissements, 67 000; en alimentation particulièrement, 14 300. C'est donc dire que l'alimentation, ça équivaut à un cinquième des commerces au détail au Québec. En ce qui a trait à la masse globale monétaire du monde du commerce au détail, c'est au-delà de 40 000 000 000 $; en alimentation, l'équivalent de 11 000 000 000 $. Quelle que soit la variable que l'on puisse considérer au niveau statistique, on retient donc que le secteur de l'alimentation est le plus important secteur du commerce au détail au Québec.

M. le Président, au niveau des types d'entreprises, en fonction de leur grosseur, où seulement les patrons travaillent en copropriété, on retrouve 14,7 % des entreprises; de 1 à 9 employés, 62,3 % de nos entreprises au Québec; de 10 à 25 employés, 15,2 %; de 26 employés jusqu'à 49, 5,1 %. Ça, globalement, c'est ce qu'on appelle la PME, la petite entreprise.

Au niveau de la moyenne entreprise, donc entre 50 et 99 employés, c'est seulement 2 % de nos entreprises au Québec; au niveau de la très grande entreprise, ce n'est même pas 1 %, c'est 0,7 %.

Avant de vérifier, en fait, article par article, ce projet de loi que nous avons devant nous, j'aimerais vous faire part que des marchés publics au Québec, il y en a 300; au niveau des fruiteries, il y en a une centaine; il y a 100 fruiteries au Québec; au niveau des pharmacies, ce qu'on appelle des assez grandes pharmacies, c'est 400 unités; les marchés aux puces, 45; là, on ne parle pas d'arrière-cour, on ne parie pas de ce que l'on appelle des marchés aux puces très locaux dans les hangars et derrière les maisons, on parie de marchés aux puces structurés, dans d'anciens centres d'achats, dans des entrepôts qui ont été loués, et il y en a 45 à travers le Québec.

Maintenant, M. le Président, chacun a sa méthode d'intervenir, mais la problématique ou le dossier, c'est un projet de loi que nous avons. Je me suis permis d'ajuster le projet de loi en y ajoutant les amendements et je vais essayer de vous vulgariser ça de façon que l'on sache exactement ce que nous avons dans ce projet de loi.

L'article 1, c'est très simple, ça dit tout simplement que c'est un projet de loi qui va servir à réglementer les établissements commerciaux de vente au détail au Québec.

L'article 2, et là c'est un élément majeur du projet de loi, c'est ce qu'on appelle la plage horaire, quelles heures vont être permises pour l'ouverture. On nous dit: du lundi au mardi, de 8 heures le matin à 19 heures; les mercredi, jeudi et vendredi, de 8 heures le matin à 21 heures. Le samedi, nous conservons 8 heures le matin à 17 heures. On ajoute aussi à l'article 2 la période des fêtes, en fait, tout le mois de décembre où l'ensemble des commerces au détail au Québec pourra ouvrir durant la période de décembre, ce qui était jusqu'à maintenant, dans ce qu'on appelle la loi 84, deux semaines seulement.

L'article 3, c'est simple. L'article 3, c'est qu'on identifie, par exemple: Le 1er janvier, est-ce que ça vous tenterait de ne rien faire? Le 2... Et on parie du jour de Pâques, le lundi de Pâques, et on identifie toute une série de ce qu'on appelle les jours fériés au Québec.

L'article 4 - le coeur du projet de loi - identifie clairement que dans le domaine de l'alimentation - tout ce qui se mange et tout ce qui se boit - dans le domaine alimentaire au Québec, quelqu'un pourra ouvrir en dehors des heures standard; quatre personnes, n'incluant pas le propriétaire ou son mandataire.

Les articles 5, 6 et 7 - là je me permets surtout de ne pas vous les lire parce que c'est très technique, et là je suis un peu d'accord avec mes prédécesseurs qui ont pris la parole tout à l'heure. C'est vrai que c'est technique un projet de loi, mais je pense qu'on ne peut pas éviter ça. C'est d'abord légal, un projet de loi, parce qu'il faut l'appliquer, la loi, et ce n'est pas une histoire d'à peu près. Il faut absolument qu'il y ait des précisions. Mais, à la lecture, ce n'est pas le genre de texte qu'on lit avant de se coucher le soir, laissez-moi vous le dire, ou bien on aurait tendance à dormir rapidement. Les articles 5, 6 et 7, ce sont les exceptions, ce qu'on appelle les exemptions à la loi, qui sont les suivantes: produits pharmaceutiques, hygiéniques et sanitaires - vous avez compris que ça voulait dire pharmacies - les restaurants, tout ce qui est essence, huile à moteur, huile à chauffage, les fleurs, les produits d'horticulture, les

articles d'artisanat, les oeuvres d'art, les antiquités, les marchandises usagées. (17 h 50)

Là, je m'arrête pour dire que ça, effectivement, c'est ce qu'on appelle les marchés aux puces, entre autres. Les marchés aux puces, c'est inscrit dans la loi, on leur permettra... Contrairement à la loi de 1984 où on avait dit: "Vous avez le droit de vendre du neuf, 20 $ et moins", on spécifie que ce sera maintenant 50 $ et moins. Mais là où il y a une modification majeure, c'est qu'on dit aussi que "les menus articles", pour ne pas porter à interprétation au niveau légal, ce seront des articles, de petits articles, mais de 50 $ et moins. On sait l'ambiguïté. Je me rappelle bien, entre autres, une comparaison que Mme la députée de Taillon faisait. On peut prendre une caméra Pentax dans la main: menu article, mais au minimum 359 $. En partant de là, à ce niveau-là dans le projet de loi, il y a une nette amélioration, il y a une clarification où on doit féliciter les légistes parce qu'ils ont dit: Là, ce ne sera pas compliqué, c'est 50 $ et moins. Je n'ai aucun doute à savoir si la Pentax en question va être étiquetée 50 $, ça va sûrement être 359 $ de la même façon. Dans les exemptions, on ajoute, entre autres, la vente d'automobiles, d'embarcations et de machineries agricoles, fournitures scolaires, piscines, en début de semaine les lundi et mardi, parce que ce sont des types d'entreprises où la clientèle est en soirée sur semaine. Mais on ne leur donne pas ce qu'ils avaient dans l'ancienne loi et ce qu'ils ont eu jusqu'à maintenant, c'est-à-dire l'autorisation de faire la vente, entre autres, de piscines le dimanche. Ce n'est pas le cas, sauf qu'on régularise la possibilité pour ces entreprises-là de vendre les soirs sur semaine jusqu'à 21 heures au maximum. Or, c'est l'ensemble des exemptions dans le projet de loi qui sont identifiées d'une façon très technique - et c'est savoureux à lire - les articles 5,6 et 7.

Au niveau de l'article 8, ce qu'on inscrit dans l'article 8, c'est qu'on dit, par exemple, que, dans un centre de ski, la boutique du centre de ski, à l'interne, aura le droit de fonctionner en dehors des heures d'affaires standard. Et c'est, je pense, facile à saisir comme possibilité. Alors, ça fait partie de la réglementation, à l'article 8.

Au niveau de l'article 9, c'est l'article le plus religieux du projet de loi, celui qui dit que, si vous êtes parmi ceux et celles qui devez non pas subir, mais qui devez pratiquer le sabbat à partir du vendredi soir à minuit jusqu'au samedi soir, vous aurez la permission d'ouvrir votre commerce le dimanche en respectant, par contre, la règle de quatre employés excluant le patron.

L'article 10... Je sais, mesdames et messieurs, que c'est aride parce qu'on y va vraiment sur la technique et je n'ai pas du tout l'intention de faire le drôle dans ça; je veux vraiment vous exprimer ce que je pense qui est dans le dossier en le vulgarisant le plus possible. À l'article 10, ce sont les zones limitrophes et tout ce qu'on appelle aussi zones touristiques. À l'article 5.3 du projet de loi de 1984, projet de loi de M. Biron à l'époque, on donnait toute la latitude et l'autorité absolue au ministre. Il n'y avait aucune balise, aucune norme. C'était son autorité d'émettre la permission dans une zone touristique, autant pour la grandeur de la zone que pour la durée de ce permis. Ce que nous faisons dans les articles 10, 11 et 12, c'est qu'on dit: II faudrait que le ministre de l'Industrie et du Commerce regarde comme il faut, avec le ministre du Tourisme, ce qui doit être fait, quelles sont les zones et qu'il consulte le milieu local et le milieu régional avant d'émettre un permis de zone.

Par la suite, il y a d'autres articles, entre autres, les articles 16 à 23, tout ce que sont les pénalités. Et là, on y va avec des dents. On dit, première offense, de 1500 $ à 3000 $ en donnant au juge la permission de regarder quels ont été les revenus durant la journée. En fait, c'est ça, sensiblement, le projet de loi que nous avons devant nous.

Je termine en vous disant que je suis très fier d'y avoir participé. Ce n'est pas facile. C'est un projet de loi societal et c'est impossible, dans ce dossier-là, d'avoir l'unanimité. Il faut donc trancher. Je tiens à remercier sincèrement tous les membres de la commission, incluant M. le ministre, d'avoir travaillé avec ardeur et d'avoir écouté particulièrement les députés - et je suis très au fait de ça - d'avoir écouté les députés, non seulement les députés ministériels, mais aussi les députés de l'Opposition pour bâtir ce projet de loi. Et ce que j'espère, c'est qu'on l'applique le plus rapidement possible et dans toute son intégralité.

Une voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député. M. le leader adjoint du gouvernement, en vertu de l'article 213.

M. Lefebvre: Oui, M. le Président. En vertu de l'article 213, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le député de Nicolet-Yamaska, est-ce que vous autorisez le député de Frontenac à vous poser une question en vertu de l'article 213?

M. Richard: Sûrement, avec plaisir.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, la question devrait être brève, M. le député, et la réponse également.

M. Lefebvre: M. le Président, certaines interventions et certains discours des membres de l'Opposition laissent entendre qu'avec l'adoption

de la loi 75 on pourrait vendre des chaussures, des meubles, des vêtements le dimanche. J'aimerais que le député nous éclaire sur ce point-là, M. le Président.

M. Jolivet: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît, M. le leader adjoint du gouvernement... M. le député de Laviolette, je m'excuse.

M. Jolivet: M. le Président, vous savez qu'en vertu de l'article 213 nous posons une question sur le discours qui vient d'être prononcé et non pas sur des choses qu'on voudrait entendre, qui donne un droit de parole additionnel au député de Nicolet-Yamaska.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît! Question très brève, M. le député.

M. Lefebvre: M. le Président, j'aimerais que le député de Nicolet-Yamaska réponde à la question suivante: Est-ce que le dimanche on pourra, avec l'adoption du projet de loi 75, vendre des meubles, des chaussures, des vêtements? Le dimanche!

M. Jolivet: M. le Président, je m'excuse...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le député de Laviolette. S'il vous plaît. M. le député de Laviolette.

M. Jolivet: M. le Président, l'article 213, est-ce que vous pourriez, simplement pour me l'indiquer, le lire, s'il vous plaît? Il comprendra qu'il n'a pas raison de poser une question comme celle-là.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, l'article 213: 'Tout député peut demander la permission de poser une question au député qui vient de terminer une intervention. La question et la réponse doivent être brèves." Alors, je permets la question.

M. Richard: Très brève? Pas le droit.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci. Alors, compte tenu de l'heure, je suspends les travaux jusqu'à 20 heures. Les travaux de cette Assemblée sont suspendus jusqu'à 20 heures.

(Suspension de la séance à 17 h 57)

(Reprise à 20 h 6)

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

Veuillez prendre place, s'il vous plaît. Nous allons maintenant poursuivre le débat sur la motion d'adoption du projet de loi 75, Loi sur les heures et les jours d'admission dans les établissements commerciaux. je suis prêt à reconnaître un intervenant. mme la députée de verchères.

Mme Luce Dupuis

Mme Dupuis: Merci, M. le Président. Au début de son discours, le ministre de l'Industrie, du Commerce et de la Technologie nous a parle des conséquences de l'ancienne loi, comme il dit, avec ses nombreuses exceptions - je ferai simplement souligner - qui avaient été apportées par le Parti libéral. Il nous a parlé des conséquences d'iniquité, de frustration chez les travailleurs, d'injustice et d'incitation à enfreindre la loi. Tous des éléments qu'il voulait corriger par une nouvelle loi dont les principes, je pense, étaient des plus nobles et qui étaient: équité dans les commerces, besoins réels des consommateurs et qualité de vie des travailleurs et des travailleuses.

Le ministre nous a parlé de l'équilibre qu'il a essayé de garder, de maintenir par son nouveau projet de loi. Mais seulement s'est-il interrogé sur l'équilibre nécessaire chez un être humain? Et c'est dans ce but d'équilibre, M. le Président, que je me contenterai de vous lire un texte sublime des ACEF. Il vous a déjà été lu, il vous a déjà été relu. Mais puisqu'on vous ressert la même nourriture, depuis pratiquement une journée ou deux, présentée d'une façon différente, chacun avec sa personnalité, aussi bien choisir de vous resservir la nourriture peut-être la plus comestible qu'il nous a été possible d'entendre ces derniers jours, le texte des ACEF.

Et je me permettrai, M. le Président, de vous dire l'effet qu'a eu ce texte sur moi lorsque je l'ai découvert. J'étais en commission, un peu fatiguée, même choquée du projet de loi et, lorsque j'ai lu le texte, j'ai comme eu l'impression, une sensation de bien-être qui a fait que je ne sentais plus ma fatigue. C'est dans cet esprit, M. le ministre, que je vous le relis en espérant qu'il aura sur vous les mêmes effets que sur moi. C'est titré - je prendrai le paragraphe d - "Le consommateur-citoyen a besoin d'un minimum de conformité sociale pour se maintenir en interrelation avec les autres". Et ceux qui ne l'ont pas encore entendu, je pense qu'ils auraient intérêt à l'écouter attentivement. C'est un texte rafraîchissant. "Le consommateur, en dehors de son travail et de son sommeil, est un être social dont les occasions d'entretenir des liens avec les autres individus et avec la nature doivent être préservées pour assurer son minimum vital d'où se dégage le minimum social pour une vie harmonieuse en société. Les liens familiaux, pris dans un sens large, se nouent en fin de semaine et principalement le dimanche. Ils se manifestent par le temps libre consacré aux enfants, par la visite des parents aux grands-parents, par le

réconfort apporté aux personnes sur un lit d'hôpital ou dans un centre d'accueil - et j'en passe. Quel est le moment privilégié pour tisser des liens d'amitié autour d'une partie de cartes, d'un pique-nique, de bonnes discussions - et le reste? À quel moment s'exercent les activités de décompression psychologique? Activités de plein air, assistance à des spectacles ou expositions, activités culturelles, de loisir, suite à une semaine de labeur qui se veut de plus en plus longue. Quand nous arrêterons-nous surtout pour faire le plein de ressources spirituelles? La réponse va de soi, c'est le dimanche que notre culture et notre tradition ont choisi pour exercer ces activités. Le minimum de conformité sociale pour une vie sociale équilibrée exige le maintien d'une journée par semaine exempte d'activités de travail et de commerce pour le plus grand nombre possible de Québécois."

C'est certain que j'aurais pu faire un extrait, vous le dire dans mes propres mots, mais, encore là, on va dire: C'est l'Opposition. Ce texte-là n'est pas de l'Opposition. Il est, précisément, d'un groupe associé aux consommateurs. Oui, il faut consommer. C'est bien sûr qu'il faut consommer, mais pour des besoins normaux, des besoins fondamentaux: se nourrir, se loger, s'habiller. Mais il y a aussi d'autres besoins et je pense que, par le texte que l'ACEF nous fournit, précisément, cette autre nourriture est tout aussi essentielle, et seuls des moments de loisir peuvent nous l'accorder.

Un peu plus loin, il nous parle des conséquences a moyen et à long terme sur les individus et la vie en société. Il y a un prix à payer pour un choix de société, parce qu'on peut bien parler des heures d'ouverture mais, selon moi, maintenant, au moment où on en est rendus dans la discussion, ce n'est qu'un prétexte. On voit très bien que ce sont deux manières, deux philosophies qui s'affrontent, deux manières de voir la société, deux manières de vouloir établir les règles d'une société dans laquelle nous voulons vivre. Et je reviens au texte: "La technique de marketing appelée "apprentissage passif est à la base de l'amalgame magasinage, activités culturelles et de loisir. Amener les gens à se divertir en magasinant est le gage du succès de la vente le dimanche; les études américaines le prouvent. Son application, par contre, entraînerait une plus grande commercialisation de la vie et serait à l'opposé du développement d'une consommation rationnelle et réfléchie de la part des consommateurs. Elle viendrait saper une bonne partie du travail d'éducation - consultations budgétaires, cours sur le budget, prévention et le reste - des associations de consommateurs au Québec."

Et on sait que, de plus en plus, les gens consomment des cours aussi, veulent justement parfaire leur éducation, ce qu'on leur enlève en allongeant les heures de travail et les heures de magasinage. Le magasinage le dimanche avec son flot de publicité, de rabais et autres techniques de marketing accentuerait le message incessant de notre société de consommation que le bonheur vient de la consommation des objets. Sans vouloir faire la morale à mes collègues d'en face, eh bien, je pense justement que s'ils veulent faire une bonne réflexion, et peut-être remettre en cause leur système de valeurs, ce serait peut-être intéressant qu'ils écoutent. Il n'y aurait pas de contrepartie pour nous rappeler que les personnes s'épanouissent davantage dans leurs relations avec les autres, parents, enfants, amis, dans leurs contacts avec la nature à travers des loisirs, des activités culturelles. Le commerce dominical ferait compétition aux visites dans les hôpitaux, dans les centres d'accueil, aggravant ainsi l'isolement de ces personnes. Et, je pense que l'isolement n'est pas que dans les centres d'accueil. Il faut voir, il faut subir, il faut constater le dialogue de sourds qui s'est établi depuis quelques jours pour voir dans quel isolement s'est enfermé le gouvernement. Il servirait aussi de masque à une véritable politique du loisir et d'activités culturelles enrichissantes, souhaitées par les citoyens.

C'est à quoi, M. le ministre, je vous amène à réfléchir et j'utilise ma dernière minute pour vous favoriser, par ce texte, une réflexion, mais une réflexion qui porte sur des valeurs humaines et non sur des valeurs monétaires. Merci, M. le Président.

Le Président: Je cède la parole à M. le député de Lévis.

M. Jean Garon

M. Garon: M. le Président, plusieurs pensent que c'est inutile de prendre la parole à ce moment-ci, que le gouvernement a fait son lit et que le ministre est décidé d'une façon irrémédiable, mais, comme j'ai pris pour devise, il y a plusieurs années, que le possible est déjà fait, que l'impossible se fera et que le succès est le fruit du dernier essai, je me dis que je n'ai pas le droit de laisser passer une dernière tentative de le convaincre.

Pourquoi? Parce que, vous savez, une Opposition officielle ne peut pas faire une bataille sur un projet si elle sent qu'elle n'a pas l'appui de la population. Parce qu'à ce moment-là les gens vont dire que l'Opposition est déconnectée et va se faire ridiculiser. Mais, au contraire, quand l'Opposition sent que, dans la population, une vaste majorité des gens sont d'accord avec la position qu'elle tient, qui en grande partie est issue de la population, c'est son devoir de faire son travail d'Opposition et de s'opposer au projet de loi qui est présenté.

D'ailleurs, M. le Président, le ministre lui-même n'est pas entièrement sûr, puisque, sur 35 articles, s'il y a eu 25 amendements, c'est parce qu'il y a un certain nombre de choses qui

balancent. Il y a un certain nombre de choses dont on n'est pas certain, puisqu'on sent qu'il faut faire des changements, et les changements apportés ne sont pas bien meilleurs que les propositions antérieures. C'est pourquoi, M. le Président, c'est le rôle de l'Opposition de prendre tout le temps nécessaire pour faire valoir les arguments contre un projet de loi. C'est son rôle, c'est ça, le système démocratique. Je comprends qu'il y a des endroits où il n'y en a pas d'Opposition, mais quand il n'y en a pas dans les Parlements on voit qu'elle se manifeste dans les rues.

Regardons ce qui se passe en Europe de l'Est, il n'y a pas beaucoup de Parlements en Europe de l'Est, il y a des partis uniques. On voit aux nouvelles le soir à la télévision que des dizaines, des centaines de milliers de personnes sont dans les rues pour manifester leur façon de voir les choses. C'est ça qui se passe. Quand les camionneurs ne sont plus entendus par les ministres, quand les ministres prennent des engagements, pendant trois ans de temps, et qu'il ne se passe rien concrètement, finalement, les camionneurs se retrouvent devant le Parlement parce qu'ils veulent faire entendre leur voix. Ils veulent se faire écouter et ils veulent aussi rappeler au gouvernement les engagements qu'il a pris et qu'il n'a pas respectés.

Quand l'Opposition parle et quand elle exprime l'opinion populaire, c'est aussi une façon de faire la démocratie. La démocratie, ce n'est pas la démocratie de Mussolini qui fait marcher les gens au pas. Ce n'est pas ça, la démocratie. Ce n'est pas avoir tous le même pas dans l'armée, la démocratie. Ce n'est pas ça, la démocratie. Au contraire, c'est l'ensemble des voix d'une population qui s'exprime en vue d'un consensus. C'est un ensemble de gens qui ne sont pas nécessairement unanimes. Quand le ministre dit: "Vis-à-vis des heures d'affaires, il n'y a pas d'unanimité", c'est ce qu'il a dit de plus vrai dans tous ses discours. C'est vrai qu'il n'y a pas d'unanimité et je pense qu'il n'y en aura jamais d'unanimité. Sauf qu'en démocratie, ce n'est pas l'unanimité seulement qui prévaut, c'est ce qu'on appelle le consensus. Le consensus... (20 h 20)

II y a un vaste consensus au Québec, pour que le dimanche soit respecté, pas uniquement pour des fins religieuses, aussi pour des fins religieuses, mais pour des fins de loisirs, pour des fins familiales. Ça, je pense qu'il y a un vaste consensus. Moi, je pense, quand les gens font des sondages, au lieu de demander à des gens: Êtes-vous pour l'ouverture des magasins le dimanche? Des gens répondent, pensant que ce sont les autres qui vont travailler et pas eux autres, le dimanche. Là, n'importe qui peut dire oui. Si vous demandiez aux mêmes personnes: Seriez-vous pour que le travail se fasse le dimanche, mais aussi dans votre domaine? Là, on aurait plus l'heure juste. Je pense aux banquiers, par exemple, qui ferment à 15 heures. Si on leur disait: Vous allez ouvrir le samedi, vous allez ouvrir le dimanche, vous allez être ouverts le soir, je vais vous dire qu'il y a bien des banquiers qui...

Une voix: ...fermeraient.

M. Garon: ...raisonneraient différemment. Il y a bien des entreprises qui raisonneraient différemment parce que, essentiellement, c'est une fonction, c'est une conception de la société. Quand on dit qu'au Québec, par exemple, on a besoin d'une politique familiale, moi, je me dis qu'une politique comme la loi qu'on a devant nous, c'est un clou dans le cercueil de la politique familiale. Pourquoi? Parce qu'on va rendre la tâche plus difficile aux conjoints. Ce n'était pas difficile avant, lorsqu'il y en avait un des deux qui était à la maison et un des deux qui était à l'extérieur du foyer. Mais maintenant, parce que tout coûte plus cher, pour différentes raisons également, d'autres raisons, que des gens, les deux conjoints de plus en plus sont sur le marché du travail, je ne pense pas qu'on rende service en faisant en sorte que les heures soient le moins ajustées possible.

Dans les écoles, autrefois, c'était plus simple, pourtant. Pourtant, on se rappelle, dans nos écoles autrefois, il y avait des gardiens de salles pour garder les enfants après l'école pour qu'ils puissent jouer, ou il y avait des gardiens d'études pour ceux qui voulaient que leurs enfants étudient et ils arrivaient à la maison à l'heure du souper. Aujourd'hui, depuis qu'on a des parents qui travaillent, qui sont de plus en plus sur le marché du travail, on dirait qu'on a oublié le bon sens qu'il y avait autrefois. Aujourd'hui, dans les écoles, je vais vous dire que c'est fermé pas longtemps après que la classe est finie. Il n'y a plus de gardien de salles, il n'y a plus de gardien d'études, et il y a bien des enfants avec la clé dans le cou qui s'en vont à la maison et qui attendent que les parents arrivent.

J'ai reçu un téléphone il n'y a pas longtemps de quelqu'un qui m'a laissé son numéro de téléphone. J'ai essayé de le rejoindre, ça ne répondait pas. À un moment donné, finalement, j'ai appelé à 15 h 30, et c'est une jeune voix d'enfant qui m'a répondu. Je lui ai demandé: Est-ce que je peux parler à Un tel? La petite fille m'a dit: Mon papa, il n'est pas là; tu sais, mes parents sont séparés. Bon! J'ai dit: Est-ce que ta maman est là? Elle a dit: Non, maman, elle travaille. Elle va arriver vers 17 h 30. J'ai dit: Est-ce qu'il y a quelqu'un d'autre à la maison? Elle a dit: Non, je suis toute seule. Elle a dit: Tu sais, je suis assez grande. Elle m'a dit qu'elle avait autour de sept ans. À 15 h 30, sa mère va arriver à 17 h 30. Son père n'est pas là. Il vient faire un tour, j'imagine, de temps en temps. Mais pourquoi faire en sorte qu'aujourd'hui on dise:

Bien maintenant, au lieu de travailler jusqu'à 17 heures, vous allez travailler jusqu'à 19 heures? La vie familiale n'est pas organisée. En Grèce, ce serait peut-être différent. Ils ferment le midi, mais ils soupent à partir de 20 heures ou de 21 heures. Nous autres, on n'a pas les mêmes habitudes. Aujourd'hui, organiser une vie familiale avec des heures d'affaires comme on veut mettre en place, ça n'a pas de bon sens. Ce n'est pas ça, notre culture. On ne peut pas copier les gens qui sont ailleurs. Mais quand on dit: Oui, mais...

J'ai entendu la députée de Kamouraska-Témiscouata l'autre jour. Je n'en suis pas revenu. Je me suis dit: II faut vraiment être déconnectée pour tenir des propos comme ça. Comme si c'était la foule en délire dans Kamouraska pour que les magasins soient ouverts le dimanche et qu'on était rendu dans une société pluraliste. Je dois vous dire que c'est pluraliste à moitié, dans Kamouraska. Pourtant, je dois vous dire que je connais ça pas mal. Les Garon viennent de là et il y en a encore pas mal là. Quand Miner a écrit un livre de sociologie, Familles typiques de Québécois, il a choisi le village de Saint-Denis qui est composé à 50 % de Garon. Alors j'imagine que c'est un peu représentatif. Je dois vous dire que je n'ai pas l'impression que c'est la foule en délire sur le pluralisme dans Kamouraska. J'ai l'impression que c'est encore pas mal un ensemble de valeurs culturelles, où les gens se retrouvent facilement et où le consensus est facile à faire. je suis persuadé qu'il n'y a pas de rage d'ouvrir jusqu'à 19 heures le lundi et le mardi, jusqu'à 21 heures le mercredi, le jeudi et le vendredi, et d'élargir l'ouverture des magasins le dimanche. je suis convaincu que, dans nicolet... je vois le député de nicolet qui m'écoute. je ne le voyais pas comme le penseur, de rodin, mais bien juste. il a le doigt sur l'oreille, le menton appuyé dans la main et il a l'air de réfléchir à ce que je dis et il a l'air de dire: ça a du bon sens parce que, dans nicolet, c'est comme dans kamouraska. je suis persuadé que c'est la même chose dans nicolet. c'est la même chose dans kamouraska que dans nicolet, et dans un grand nombre de municipalités, et de petites municipalités. alors, pourquoi changer des valeurs culturelles en faisant accroire aux gens que c'est ça, le modernisme?

J'expliquais hier qu'en Europe, ça ferme le dimanche. Il y a des places où c'est ouvert. Aux États-Unis, c'est plus ouvert. Est-ce que notre société est basée uniquement sur le commerce? Est-ce que la seule valeur qu'il faut valoriser, c'est le commerce? Est-ce qu'en dehors du commerce il n'y a rien dans la vie? Ce n'est pas vrai. Il y a autre chose. Et, essentiellement, c'est ça qu'on dit. Il y a d'autres valeurs qu'il faut privilégier. Il y a d'autres valeurs dont il faut tenir compte, tenir compte aussi de celle-là, mais faire en sorte que les gens puissent vivre d'une façon normale, dans une société normale, mais aussi dans une société qui nous ressemble. Je vous remercie, M. le Président.

Le Président: Je vais maintenant reconnaître M. le député d'Abitibi-Ouest et leader adjoint de l'Opposition.

M. François Gendron

M. Gendron: oui, m. le président, ce n'est pas facile de revenir sur ce sujet contentieux, litigieux, mais, comme mon collègue vient de le faire et comme beaucoup d'autres de mes collègues l'ont fait, c'est obligatoire, en tout cas en ce qui me concerne. j'avais l'occasion de le dire hier soir, assez tard. j'aime mieux le reprendre à une heure un peu moins tardive. en ce qui me concerne, c'est fondamental. on peut bien faire les discours qu'on voudra, mais le principe que je voudrais développer dans les 10 minutes qui me sont allouées, c'est oui, le sujet porte effectivement les parlementaires à réfléchir sur le modèle de société qu'on veut se donner. et, au-delà de quelque opinant ou opinante que ce soit, moi, j'estime qu'on ne peut pas, d'un côté de la bouche, véhiculer dans la société, depuis cinq ou six ans, la nécessité de s'orienter davantage vers des demandes de réduction de travail - c'est le cas pour la plupart des travailleurs que je connais, syndiqués ou non syndiqués - et s'orienter vers une société dite de loisirs. d'un côté, on voit que la cellule familiale en prend pour son rhume depuis plusieurs années. on voit également l'éclatement des familles, on voit les hôpitaux bondés, on voit le phénomène de la drogue, le rapport bertrand - l'ancien chef de cabinet du bureau du premier ministre - qui indiquait combien ce serait moins coûteux de dépenser beaucoup d'argent pour éviter qu'il y ait tant de gens qui se lancent dans toutes sortes de faux-fuyants, d'artifices. moi, je vis dans une région qui, pendant plusieurs années, malheureusement, a eu le plus haut taux de suicide dans les régions du québec. c'est des raisons, en partie, de disparité des petites communautés. c'est rendu que c'est dû, à certains égards, à des politiques de gouvernement et, en particulier, aux vôtres qui ont toujours la même conséquence, d'affaiblir le plus possible les régions. ça, qu'est-ce que vous voulez, c'est fatigant d'entendre ça, mais c'est tellement une réalité observable, c'est tellement une réalité qui a été décrite par tout autre intervenant que nous. je répète, "deux québec dans un", ce n'est pas françois gendron qui a écrit ça, ce n'est pas le pq, ce n'est pas l'exécutif du parti québécois et ce n'est pas le chef de l'opposition officielle. c'est un conseil plus objectif qui a écrit ça et la réalité qui est là-dedans, ça dit quoi? ça dit: ii faut repenser nos modèles de développement. et là, on discute d'une loi sur les heures d'af-

faires où, manifestement, la logique commanderait au moins de laisser aux citoyens et aux citoyennes du Québec une journée de tranquillité par semaine. La paix! Ils feront ce qu'ils voudront.

J'ai entendu des gens... Bon, bien sûr que ça peut faciliter les relations familiales au sens très large du terme, et je pourrais vous lire un commentaire d'un honorable juge qui disait combien ça peut être bienfaisant pour un grand-père de pouvoir visiter ses enfants et tout ça, mais je ne veux pas entrer dans ces considérations-là que je trouve valables. Je veux tout simplement dire que ce qui est le plus valable, c'est de laisser les gens tranquilles une journée par semaine. Ça, ce n'est pas bien, bien dur à comprendre et ce n'est pas compliqué.

Et, quand on est élu dans une région, parce que j'ai fait des commentaires et, hier, le ministre de l'Industrie et du Commerce, qui a la patience, comme certains l'ont signalé... Ça, moi aussi je trouve ça correct de sa part, parce qu'il y en a plusieurs qui s'en foutent. Un bâillon puis on ne les revoit même pas. Au moins, il a le mérite de rester ici. Je suis loin d'être sûr que ça va l'influencer, mais, au moins, il a le mérite d'être présent, d'écouter et de faire voir que de temps en temps ça le tiraille un peu. Alors, ça, ça mérite d'être souligné. Moi, je tiens à le souligner.

Puis, ça en tiraillait d'autres aussi, de son côté, parce que moi, j'aimerais ça que dans sa réplique, sous sa responsabilité ministérielle, il invite... Ça se fait, ça, comme ministre, il n'y a rien qui vous empêche de faire ça, comme ministre, de faire un vote libre et de le dire ouvertement en cette Chambre, que vos répondeurs automatiques ont tous la liberté de voter comme ils l'entendent. Je ne sais pas si ça donnerait, M. le Président... (20 h 30)

M. Lefebvre: Question de règlement, M. le Président.

Le Président: Un instant. Sur une question de règlement, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Lefebvre: Très rapidement, un répondeur automatique, je considère que non seulement ce n'est pas parlementaire, mais c'est blessant pour tous les députés de cette Assemblée, que ce soient ceux qui siègent de ce côté-ci ou ceux de l'autre côté, M. le Président.

Le Président: Écoutez, vous pouvez considérer que c'est blessant. Je pense que c'est des propos qui appartiennent à chacun des parlementaires et ceux qui sont aptes à en juger, ce sont nos auditeurs et, en bout de ligne, les électeurs. Vous avez la parole, M. le leader adjoint de l'Opposition.

M. Gendron: Oui, M. le Président, et très sincèrement, j'ai l'impression que quand on se comporte comme on l'a vu, et vous voyez la réaction, alors s'il y a des gens auxquels le chapeau fait bien, c'est leur affaire. Ce n'est pas mon problème. Mais, écoutez, quand je portais ces propos-là... J'en vois ici même, dans cette salle, qui se faisaient un plaisir de signer des pétitions contre l'ouverture le dimanche. Il y en a ici dans la salle, présentement, des parlementaires, pas avant Jésus-Christ, parce que les pétitions ne circulaient pas avant Jésus-Christ, elles circulaient il y a quelques mois. Nommez-les? Oui, le député de - je ne sais pas son comté parce qu'on ne l'a pas entendu...

Une voix: Prévost.

M. Gendron: ...souvent - Prévost. Le député de Prévost a signé une pétition et correctement parce que lui était contre ça, du moins quand il a signé la pétition. Le député de Prévost, le député de Labelle, la députée de Groulx, et je pourrais continuer parce que la liste est longue. La liste est très longue, mais je veux leur laisser leur liberté. Mais ça illustre comment, M. le ministre, ce n'est pas exact que dans ce dossier-là vous avez, je pense, un projet de loi qui nous permettrait de dire: Voilà enfin la solution heureuse! Et, surtout, descendre la situation antérieure alors que, pas plus tard que le 19 juin, Mme Claire-Hélène Hovington, députée de Matane, recevait un télégramme: Projet de loi 75, 90 % des commerçants de Matane ont voté en défaveur, contre le projet de loi 75. Considérant telle affaire. Considérant telle affaire. Considérant telle affaire.

Moi, je pense que dans la réalité du Québec de base, dans la réalité de ce que nous sommes comme société québécoise, c'est non au dimanche et laissons les gens faire le choix d'une journée par semaine, comme ils l'entendent. Une journée par semaine où ils auront l'alternative de faire les choix qu'ils désirent. Et j'avais l'occasion de vous le dire, vous disiez dans votre réplique: Oui, j'ai visité l'Abitibi et tout ça, et ils ont compris ça. Ils ont peut-être écouté ce que vous avez dit, mais ils n'ont sûrement pas compris l'équilibre que vous souhaitez parce que ce serait votre argument puisque, comme mon collègue de Rouyn-Noranda-Témiscamingue le signalait... Juste aujourd'hui, là, j'ai reçu des dizaines de téléphones, des gens de l'Abitibi-Témiscamingue, en disant: Tu le sais que ça n'a pas de bon sens. À 8 heures le matin, ce n'est pas le modèle de chez nous, commencer à ouvrir les commerces à 8 heures le matin, et surtout le lundi jusqu'à 19 heures.

Juste à y penser, je n'en reviens pas. Qui peut penser qu'il y a une logique d'ouvrir les commerces un lundi soir jusqu'à 19 heures. Je ne suis pas capable. Je ne suis pas capable. Et je ne serai pas plus capable, même si le ministre nous dit: Écoutez, on est dans un contexte de libéra-

lisation. il a reçu un mémoire, je lisais ça. j'aurais pu le prendre ligne par ligne et défaire ça. le mémoire de la défense des commerçants artisans du québec, yvon garceau, président. allocution de m. yvan bussières, premier vice-président exécutif et chef des opérations, provigo inc., et porte-parole du mouvement. il a droit à son opinion, mais quand il dit ceci... ce seront probablement mes dernières phrases, puisqu'en 10 minutes on ne peut pas tout dire. regardez comme c'est beau: au commerçant qui veut servir son client le dimanche, nous disons: faites-le, vous en avez la liberté. au commerçant qui ne veut pas ouvrir le dimanche, nous disons: ne le faites pas, vous en avez la liberté. nous respecterons votre choix.

C'est des phrases, mais quand on est dans le commerce, M. le ministre, et vous devez au moins savoir ça, dans un petit village, dans une petite communauté... Et des petites communautés, il y en a beaucoup plus, dans le Québec, que des grands centres. Ce n'est pas vrai que des deux ferronneries, à La Sarre, s'il y en a une qui ouvre, l'autre va pouvoir rester fermer; ce n'est pas vrai, ça ne marche pas de même. Et ce n'est pas vrai que, s'il y a trois types de commerces de même nature dans une ville de 10 000 habitants, il y en a deux qui vont ouvrir et l'autre va pouvoir rester fermé parce que vous lui en laissez la liberté; ça ne marche pas de même avec la concurrence, surtout pas dans un petit milieu. Et c'est normal parce que ça s'est toujours fait comme ça. La concurrence normale, c'est avec les intervenants dans le même domaine, dans le même secteur.

Dans ce sens-là, M. le Président, puisque vous m'indiquez que mon temps est terminé, il est évident qu'on ne peut souscrire à ça parce que, objectivement, nous croyons qu'entre votre produit final et les correctifs à être apportés à ce qui existait il vaudrait mieux apporter des correctifs à ce qui existait que d'arriver avec une espèce de "blender" dans lequel il y a de tout, dont personne ne sera satisfait et qui va créer une confusion, des problèmes à n'en plus finir.

Le Président: Alors, je cède la parole à M. le député dïberville.

M. Yvon Lafrance

M. Lafrance: Merci, M. le Président. J'ai décidé d'intervenir sur ce projet de loi qu'on débat déjà depuis de nombreuses heures, comme on le sait, non pas par plaisir, mais par souci d'équité. Je suis en effet surpris et même outré d'entendre tout ce que j'ai entendu à date. En fait, depuis plusieurs jours, on a l'impression d'entendre un tourne-disque ou une cassette. Et j'aimerais peut-être suggérer à l'Opposition d'intituler cette cassette 3-20, parce qu'on entend continuellement: 'Trois bâillons en cinq jours, ça ne s'est jamais vu" ou "20 heures en commission parlementaire, ça ne s'est jamais vu". En fait, Mme la députée de Chicoutimi l'a mentionné cette nuit, je pense, à 3 heures ce matin. Mme la députée de Taillon l'a mentionné ce matin, tout de suite après la reprise des travaux parlementaires. Même Mme la députée de Verchères a avoué, tout à l'heure, qu'elle était un peu gênée de se répéter un peu parce que ce même texte revenait encore. Alors, j'aimerais peut-être suggérer à l'Opposition d'intituler sa cassette, pour cette session, 3-20 et peut-être de la déposer à la bibliothèque comme souvenir.

M. le Président, je suis surpris et même un peu estomaqué de voir l'Opposition s'offusquer par ce qu'ils appellent trois bâillons et du jamais vu, parce que trois bâillons, selon nous, c'est un peu provoqué par eux. Je dis ça peut-être pour le bénéfice de nos téléspectateurs, contrairement à ce qu'on a peut-être pu insinuer, un bâillon, ce n'est pas faire fi de la majorité, ce n'est pas faire fi de la population. Un bâillon, ce n'est qu'une mesure administrative qui est très malheureuse et qui est faite pour passer outre les barrages ou les blocages de procédure parlementaire, lesquels évidemment sont initiés par l'Opposition. C'est un peu, si vous voulez, un cercle vicieux. Si on était pour faire une analogie, dans une petite communauté, un petit village de 125 résidants, si, par coalition, quelques-uns de ces citoyens-là décidaient de retarder toutes les procédures municipales, il va de soi qu'inévitablement le conseil municipal devrait se réunir et dire: Écoutez, nous devons continuer à travailler, nous devons continuer à aller de l'avant. Alors, c'est précisément ce qui se passe, malheureusement.

J'écoutais M. le chef de l'Opposition un peu plus tôt. Je ne pense pas que ce soit aujourd'hui, j'ai un peu perdu la trace des heures et des jours, même. Mais M. le chef de l'Opposition nous accusait, nous, les députés ministériels, de ne pas connaître le rôle de l'Opposition. En fait, moi qui suis un nouveau parlementaire, puisque j'ai été élu depuis neuf mois seulement, j'ai très vite appris évidemment, que, le rôle de l'Opposition, c'est de s'opposer. Et je suis quand même surpris de voir que, souvent, ça va en deçà de toute logique, selon moi. En fait, on réalise qu'il s'agit d'une statégie, une stratégie parlementaire. En fait, stratégie, c'est peut-être un grand mot, parce que c'est subtil un peu, de la stratégie. C'est plutôt de la tactique, de la tactique parlementaire. (20 h 40)

Alors, cette session-ci, elle a été identifiée comme la session où trois lois, évidemment, seraient retardées; la loi 50, dont la population a besoin à cause de l'argent que nous devons percevoir à même la Régie de l'assurance automobile du Québec, la loi 69 qui touche la fiscalité municipale et scolaire, qui fut retardée grandement et, finalement, la loi 75 que nous

débattons, comme je l'ai dit, depuis de nombreuses et nombreuses heures. En fait, tous les arguments, toutes les procédures sont valables. C'est pourquoi on a entendu le député d'Ungava, l'autre soir, en commission parlementaire, nous parler de brochets, puis de truites. Puis, ce matin, le député de Pointe-aux-Trembles, aux petites heures du matin, nous parlait de barracudas, puis de poissons rouges. En fait, c'est pour ça, M. le Président, que vingt heures à entendre de tels propos, c'est très long. Mme la députée de Taillon, aussi, nous a dit qu'elle devait légiférer la nuit. Alors, nous nous retrouvons, évidemment, très malheureux d'être obligés de faire ça. Mais, c'est à cause de ces procédures-là que nous devons le faire. Nous devons, en fait, continuer à passer nos lois en toute intégrité et en toute légitimité. Et pour rassurer M. le député d'Abitibi-Ouest, je n'ai pas du tout l'impression d'être un répondeur automatique. Je peux, M. le Président, me référer au député de Lévis qui est toujours très coloré dans ses propos... Je disais donc qu'il est toujours très coloré dans ses propos, peut-être à cause de la faiblesse de ses arguments, et qui aurait réussi à comparer le projet de loi à un chameau, hier soir, en pleine nuit.

M. le Président, il est vrai que nous n'avons pas connu de "démonstration" pour faire changer ce projet de loi. En fait, dans le beau comté d'Iberville que je représente, je n'ai jamais vu de "démonstration" devant la porte de mon bureau pour faire changer cette loi. Et ça n'a jamais été l'objectif, d'ailleurs, de ce gouvernement, d'attendre de telles "démonstrations". Nous avons décidé d'agir, comme l'a dit M. le ministre, par souci d'une meilleure équité, par souci de justice dans l'évolution de notre société, dans l'évolution de notre communauté. En fait, c'est dû aux transformations du commerce de détail, comme on l'a dit à plusieurs reprises, surtout dans le domaine alimentaire.

Alors, il y a trois raisons principales. Tout d'abord, la question de spécialisation et de raffinement dans les commerces; deuxièmement, le décloisonnement des activités commerciales. Alors qu'autrefois on allait dans les quincailleries pour acheter, évidemment, de la quincaillerie, dans les pharmacies pour acheter des médicaments, nous retrouvons, aujourd'hui, sous un même toit, tous ces articles. Et, finalement, c'est par besoin des consommateurs que nous avons décidé - voilà plusieurs mois, plusieurs années, en fait, que ce projet de loi est en discussion - d'agir. Alors, si M. le député de Lévis dit qu'il n'a pas senti de pressions dans son comté pour changer cette loi, je peux vous dire très honnêtement, M. le Président, que je n'ai senti, dans le comté d'Iberville, aucune pression contre le projet de loi. Et je dis ça très honnêtement J'ai reçu... Je vais à des dizaines d'activités par semaine lorsque je suis dans mon comté, et à cinq ou six durant les fins de semaine lorsque nous sommes en session et je n'ai jamais, jamais été abordé sur le sujet. En fait, voilà peut-être deux mois, j'ai eu trois appels téléphoniques et c'était du comté voisin, Saint-Jean, et les trois personnes qui m'ont appelé déploraient la possibilité d'ouverture le dimanche, ce que nous n'avons pas fait. Cette semaine, j'ai reçu 41 messages, M. le Président, 41 messages venant du comté de Saint-Jean, des messages que j'aurais aimé retracer, mais malheureusement les "origina-teurs"... On ne peut pas savoir exactement leur adresse. Ce sont tous des messages identiques faits à la mitraillette. Ça dit: Nous sommes contre les heures d'ouverture pour les magasins, c'est non acceptable, avec un nom. J'aurais aimé accuser réception, mais faute d'information, je n'ai pas pu le faire.

Alors vous me dites, M. le Président, qu'il me reste quelques secondes seulement. J'aimerais conclure. J'aimerais conclure en félicitant tout d'abord M. le ministre pour la façon dont il a travaillé. Il a passé, il nous le confirmait hier, plus de 160 heures de son temps sur ce projet de loi et il a écouté 84 groupes qui sont venus se faire entendre. J'aimerais le féliciter, donc, pour la souplesse d'esprit dont il a fait preuve durant tout le processus de cette loi. C'est une loi, M. le Président, qui se devait d'être révisée. C'est une loi qui s'ajuste aux années quatre-vingt-dix et c'est une loi qui est dans l'optique libérale de libéraliser les commerces. Je vous remercie, M. le Président.

Des voix: Ah!

Le Président: Est-ce qu'il y a d'autres interventions? Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve. Oui?

Mme Dupuis: J'invoque l'article 212, M. le Président.

Le Président: Mme la députée de Verchères.

Mme Dupuis: le député d'iberville m'a fait dire des choses qui ne respectaient ni mes paroles ni l'esprit. alors, je lui demanderais de bien vouloir les retirer.

Le Président: Écoutez, madame, l'article 212... Un instant, à l'article 212 on dit: Tout député estimant que ses propos ont été mal compris ou déformés peut donner de très brèves explications sur le discours qu'il a prononcé." Ça fait que si vous estimez que vos propos ont été déformés ou ont été mal compris, loisible à vous d'invoquer 212, mais donnez de brèves explications sur les propos que vous estimez avoir été déformés, très brièvement, en quelques secondes.

Mme Dupuis: Le député d'Iberville dit que j'étais gênée. Mais pas du tout J'ai dit simplement qu'on a eu à servir la même nourriture au

ministre dans l'esprit qu'on est obligés de la lui servir souvent parce qu'il ne comprend pas. Alors c'était dans...

Le Président: D'accord. Mme Dupuis: ...mais non...

Le Président: Je suis maintenant prêt à reconnaître la prochaine intervenante, Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve.

Mme Louise Harel

Mme Harel: Merci, M. le Président. Plutôt qu'une loi synthèse comme le prétend le député d'Outremont et ministre de l'Industrie et du Commerce, c'est une loi Ponce Pilate, M. le Président, qui est devant nous, parce que, essentiellement, ce que le ministre feint d'ignorer, c'est ce vieil adage que tout juriste connaît et apprend dès les premières études de droit, qu'entre le fort et le faible c'est la liberté qui opprime et le droit qui affranchit. Sous prétexte de l'oublier et d'introduire plus de liberté, ce que le ministre fait, M. le Président, c'est qu'il aggrave le déséquilibre entre les forts et les faibles en feignant d'ignorer que c'est la loi seule qui peut affranchir ceux qui n'ont pas les moyens de parler aussi fort que d'autres, M. le Président.

Je me demande toujours comment il se fait que, dans un deuxième mandat, un gouvernement puisse devenir aussi arrogant. Ce n'est pas les individus un par un, évidemment, mais comment se fait-il que dans ce deuxième mandat... Ça ne fait pas un an, maintenant, on n'en est même pas à un an, et le gouvernement a réussi à se mettre à dos, mais là, avec une vitesse assez exceptionnelle, des groupes dans notre société aussi différents que les municipalités. Il faut bien comprendre que les édiles municipaux n'étaient pas nécessairement tous favorables aux gens de ce côté-ci de l'Assemblée, M. le Président. Pourtant, maintenant, il y a, on peut dire, une sorte d'unanimité contre les gestes posés par le gouvernement.

Les municipalités, les commissions scolaires, malgré tout, ne sont pas satisfaites, mais pas du tout, du camouflage qui a servi au gouvernement pour essuyer son déficit en faisant semblant de leur en donner un peu plus. Les camionneurs, évidemment la réalité que l'on vit à Québec nous le prouve maintenant... Il faudrait ajouter les étudiants, Hydro-Québec. Il faudrait encore ajouter la construction. Et, évidemment, je ne parle pas du dossier que je continue à étudier en commission parlementaire, ce soir même, qui est celui des personnes démunies dans notre société, sans emploi, et qui requièrent l'aide sociale. (20 h 50)

D'où vient ce syndrome du deuxième mandat? Je n'arrive pas à ne pas me poser la question à savoir comment il se fait qu'un gouvernement, dans un deuxième mandat, a la tentation d'additionner les mauvais coups et de chercher du trouble parce que, essentiellement, c'est de trouble dont il s'agit maintenant. Quand le ministre prétend que sa loi est une loi synthèse, c'est une loi fourre-tout finalement, c'est une loi où il se lave les mains des résultats, parce qu'il sait ou, s'il ne le sait pas, il devrait savoir que les résultats au bout de la ligne, c'est évidemment du trouble. Pense-t-il sincèrement que les travailleurs organisés en syndicat vont facilement accepter de rouvrir leur convention et d'aménager leur vie en fonction des directives, des décisions que le Parlement aura prises.

M. le Président, il est de commune renommée qu'on doit tenter le plus possible de ne pas ajouter à des conflits de travail dans notre société par des interventions législatives inconsidérées et intempestives. Et on a appris, au fil des décennies, a régler ici, par législation, la question du congé de maternité, la question de la sécurité et de la santé au travail, la question des régimes de retraite, des fonds de pension pour que ça ne soit plus des sujets controversés qui donnent lieu à des conflits de travail et que ce soit des avantages acquis dans la société qui ne nécessitent plus des rapports de force constants. Et là, c'est exactement l'inverse. Le ministre renvoie sur-le-champ dans le terrain, il va renvoyer une accentuation des conflits de travail, des rapports de force, par une loi qui déséquilibre ce qui était fragile, mais ce qui avait été acquis et considéré comme acquis depuis quelques décennies.

M. le Président, je veux immédiatement, avant que vous me disiez que mon temps est écoulé, rendre hommage, par cette intervention, à ma collègue de Taillon et à mes collègues qui ont, avec elle, très sérieusement d'abord étudié toutes les hypothèses. Je sais avec quelle sincérité ma collègue de Taillon s'est posé, dès qu'elle a eu la responsabilité du dossier, la question de la voie à suivre, de la vision qu'elle devait avoir dans ce dossier et je sais de source sûre, avec certitude, M. le Président, qu'elle avait mis sur la table toutes les hypothèses en disant que l'idéal était de partir sans préjugé pour choisir la meilleure. Et l'approche qu'elle a eue, M. le Président, c'est finalement celle de choisir le droit qui affranchit les gens qui ont plus de problèmes dans notre société plutôt que de choisir la liberté qui sert à ceux qui, de toute façon, ont les moyens de décider pour eux et pour les autres.

Je veux rendre hommage aussi, parce que c'est exceptionnel - ça fait neuf ans que je siège dans ce Parlement et je ne pense pas me rappeler avoir vu une opposition non parlementaire aussi assidue, aussi présente en commission comme en Assemblée - c'est absolument exceptionnel et je sais qu'ils sont là-haut, qu'ils sont attentifs, qu'ils le font d'une certaine façon en

se préparant, une fois le combat livré ici, à le livrer sur le terrain, parce qu'il y a une chose que les députés... Et j'entendais le député d'Iberville se plaindre d'un débat de vingt heures en commission. Il y a une chose qu'on sait quand on vient siéger au Parlement, M. le Président, c'est qu'on ne se convaincra pas d'un côté et de l'autre de la Chambre. Moi, quand je descends du deuxième au salon bleu, je sais très bien que je ne vais convaincre aucun député de l'autre côté du bien-fondé de mes arguments. Ils sont élus exactement pour résister. Et même si je les convainquais, la seule façon pour eux d'y donner suite, c'est de sortir, plutôt que de voter de mon côté, parce que c'est ça aussi qui est arrivé au moment du vote sur la prise en considération du rapport. Il faut bien dire qu'il y a des députés gouvernementaux ministériels qui sont sortis, c'est leur façon de dire qu'ils sont du même bord, mais qu'ils ne peuvent pas changer de côté. Mais on sait très bien qu'en descendant ici, ce n'est pas qu'on va convaincre. Et ce n'est pas en prétendant qu'on n'est pas du même avis qu'on peut bâillonner l'Opposition parce que, voyez-vous, M. le Président, c'est évident - je le répète comme bien d'autres de mes collègues l'ont répété - que ce processus... Je pense au projet de loi 42 sur la santé et la sécurité au travail; huit semaines de commission parlementaire. C'était le ministre Frechette qui était responsable du dossier parce que, malgré tout, dans ce processus, on y est toujours gagnant et la démocratie y est gagnante.

M. le Président, je veux simplement souligner que trois bâillons, ça n'a pas de bon sens, c'est bien évident, comme ça n'a pas de bon sens également, les amendements introduits au moment de la prise en considération. Vous vous rendez compte, c'est un nouveau projet de loi. Un nouveau projet de loi que le ministre a sorti de sa boite à surprise, mais une boîte à surprise où il continue à se laver les mains comme Ponce Pilate le faisait. Je rappelle la seule solution, la solution, qui, selon nous... Oui, ce n'est pas simple, choisir; c'est aussi délaisser, laisser de côté, mais choisir une sorte de société dans laquelle on pense qu'il y a des façons plus adéquates de vivre prioritairement pour les humains, pour les personnes, et dans cette société - on n'est pas aux États-Unis et on n'est pas non plus au Canada - de notre côté, on privilégie les commerces qui sont propriétés individuelles et personnelles, les commerces de détail. C'est évident que de notre côté, après avoir mûrement réfléchi, on a décidé d'appuyer les commerces de dépannage alimentaire et pharmaceutique qui fonctionnent avec au plus quatre personnes parce qu'il s'agit, finalement, de ces commerces qui sont gérés par une famille, soit par le couple ou avec l'appui des enfants ou d'une belle-soeur ou d'un cousin. C'est ce commerce familial qu'on a décidé d'appuyer, M. le Président. Oui, et on en est fiers, de ce côté de l'Assemblée. Merci.

Le Président: Je cède maintenant la parole à M. le député d'Arthabaska.

M. Jacques Baril

M. Baril: Oui, M. le Président, c'est la troisième fois que je parle sur ce projet de loi. Et on se fait reprocher, on se fait même accuser de prendre le temps de cette Chambre, de retarder l'adoption de ce projet de loi complètement inutilement. Pourtant, dans notre système parlementaire, c'est un moyen que l'Opposition a pour essayer de faire comprendre au gouvernement que le canal qu'il utilise pour arriver ses fins, ce n'est pas le bon.

Je suis certain que plusieurs de mes collègues ont fait l'historique de ce projet de loi. Ça fera cinq ans bientôt que ce gouvernement est là. Il y a eu un comité formé du député de Nicolet, entre autres, qui a fait une tournée du Québec pour connaître l'opinion des gens, le désir des gens, à savoir: Qu'est-ce qu'ils veulent? Quels seraient leurs besoins en frais d'ouverture de leur commerce? Ce comité a fait un rapport. Après ça, il y a eu la commission parlementaire, ici, à l'Assemblée nationale qui a entendu une multitude d'organismes qui sont venus faire part de leur intention, de leur opinion face aux heures d'ouverture. Le gouvernement a décidé autrement, de ne pas tenir compte des demandes de ces personnes-là ou de la grande majorité de ces personnes-là, et dépose un projet de loi.

En commission parlementaire, l'Opposition officielle a essayé par toutes sortes de moyens, encore une fois, de faire entendre raison au gouvernement, a même déposé une motion à l'effet qu'au lieu de commencer, comme tous les projets de loi, à étudier d'abord le titre de la loi, de commencer à l'étudier, d'aller au coeur du problème, soit de passer par l'article 4. Comme d'habitude, le gouvernement a fait le sourd, n'a tenu compte d'aucune demande de l'Opposition, d'aucune demande des concitoyens et des concitoyennes et a déposé son propre projet de loi. (21 heures)

On se retrouve ici maintenant, en troisième lecture, et on nous accuse encore de retarder l'adoption de ce projet de loi.

Pourtant, M. le Président, c'aurait été facile pour ce gouvernement, d'abord, d'entendre et d'écouter la population. Et si, aujourd'hui, il tient à tout prix à faire voter cette loi pour le 23 juin, il aurait eu un choix au moins à faire, soit de convoquer la Chambre beaucoup plus tôt, avant le 13 mars comme il l'a fait... On aurait été prêts avant à venir ici, en Chambre, siéger puisqu'on dit que le gouvernement veut absolument... On me fait signe que le règlement... Ça se peut que le règlement exige que ça commence seulement le 13 mars. Bon. C'est possible. Mais, quand même, le gouvernement aurait sans doute

pu trouver d'autres moyens pour amener ce projet de loi en commission parlementaire, en déposant son budget plus tôt. Parce qu'on sait que le dépôt du budget avec l'étude des crédits, ça retarde la législation. On aurait pu faire ça plus tôt. On n'aurait pas eu besoin d'attendre, de retarder tout ça. On aurait pu en discuter franchement.

Au lieu de nous imposer le bâillon sur trois projets de loi, on aurait pu, entre autres, au niveau de la loi 50, sur le régime d'assurance automobile dans lequel le gouvernement s'autorise à piger des fonds pour construire des routes... Le gouvernement aurait très bien pu retarder ça à l'automne s'il tenait tellement à cette loi-là. C'est une loi fiscale. Ça ne dérangeait rien. Le ministre des Finances l'a annoncée dans son budget; il n'y avait rien là. Il aurait pu attendre à l'automne et prendre tout le temps pour discuter de ce projet de loi.

Si le leader du gouvernement a mal planifié ses travaux, s'il a mal planifié ses projets de loi, qu'on ne vienne pas nous accuser, nous, et dire qu'on retarde l'adoption des projets de loi. C'est une chose. Il faut connaître la façon de fonctionner en cette Chambre. C'est le gouvernement qui appelle les projets de loi et c'est nous qui en discutons. Ce n'est pas à nous de dire au leader: Apporte tel ou tel projet.

Donc, M. le Président, on s'efforce par les moyens que nous avons d'interpréter, de faire connaître au gouvernement ce que les citoyens et les citoyennes de notre comté nous amènent, nous apportent, nous écrivent, nous font connaître comme objections à ce projet de loi. Ça m'a étonné d'entendre tout à l'heure le député d'Iberville dire: Moi, je n'ai jamais entendu parler de ça dans mon comté. Il n'y a personne qui crie il n'y a personne qui vient me voir pour s'opposer à ça. Je ne comprends pas comment il se fait que ce sont uniquement des députés de l'Opposition qui reçoivent des lettres, des télégrammes, des pétitions. Les gens viennent nous voir. Il y a 15 jours, un employé du centre d'achats de Victoriaville est venu me rencontrer pour me dire qu'il avait fait circuler une pétition à l'intérieur du centre d'achats, à Victoriaville; il y avait 475 signatures sur sa pétition. Je n'ai pas pu la déposer parce qu'elle n'était pas réglementaire, elle n'était pas conforme. Je savais que je n'aurais pas le consentement, donc j'ai dit: On ne l'amènera pas. Mais ces employés du centre d'achats, à Victoriaville, s'opposaient à ce projet de loi, n'étaient aucunement d'accord et ne voulaient rien savoir de ce projet de loi.

Donc, pourquoi les gens viennent-ils voir seulement les députés du Parti québécois, les députés de l'Opposition? Serait-ce, M. le Président, que les gens commencent à s'apercevoir que leur député au pouvoir est tellement coupé de la réalité que ça ne donne absolument rien d'aller le voir pour aller faire connaître leurs revendications?

M. Jolivet: Ça doit être ça.

M. Baril: Est-ce que c'est parce qu'ils s'aperçoivent de plus en plus que ce gouvernement devient sourd aux attentes et aux demandes des citoyens? Il y a des questions à se poser, M. le Président. Je me demande pourquoi, après cinq ans, si on accuse le gouvernement du Parti québécois de l'époque d'avoir fart une loi qui n'était pas à point, qui n'était pas désirée, pourquoi, d'abord, ne l'ont-ils pas fait appliquer telle qu'elle était? Ça aurait peut-être réglé des problèmes. On n'aurait peut-être pas été obligés d'amener ça ici. Et, après autant de temps, pourquoi cette hâte à passer cette loi, à faire passer le rouleau compresseur sur la procédure de l'Assemblée nationale pour être capable de se vanter... Est-ce pour être capable de se vanter d'avoir passé une loi et d'avoir réglé le problème? Le problème ne sera pas réglé. Il s'aggrave, M. le Président. Le problème va être plus grave avec cette loi qu'avec l'autre. D'ailleurs, les gens nous le disent. Les gens, à tout prendre, aimeraient beaucoup mieux garder le statu quo que d'être obligés de vivre avec cette loi. Ce qui est étonnant, M. le Président, c'est de constater que, même si on ouvrait les magasins durant les heures de semaine, si on augmentait le nombre d'heures des commerces d'alimentation les fins de semaine, c'est pour la même population, et les gens n'achèteront pas plus à cause qu'on étire les heures d'ouverture, les heures d'affaires. Il me semble que ça, c'est la logique même. Et de voir, en tant que grands administrateurs, en tant qu'hommes et femmes d'affaires, ces gens du gouvernement s'acharnent à démontrer à la population... Ce n'est pas en augmentant les heures d'affaires que les gens vont faire plus d'affaires. Tu as le même revenu, tu fais un petit train de vie et tu achètes ce que tu veux avoir avec l'argent dont tu disposes. Et, que ce soit à 20 heures ou à 15 heures, tu n'achèteras pas plus de produits ou tu n'achèteras pas plus d'aliments si c'est les fins de semaine. C'est juste que tu vas changer les modes de fonctionnement de la population et c'est les commerces qui vont en souffrir parce qu'ils vont être obligés de garder leur commerce ouvert avec personne dedans. Ça va être quoi, l'avantage, M. le Président, d'augmenter les heures d'ouverture quand tu n'as personne dans les commerces?

Depuis des générations, on a une habitude, au Québec, que le dimanche c'est fermé. Pourquoi tout chambarder ça pour rien? Ça va donner quoi de plus, hein? Il me semble que le ministre, il est encore temps... On dit qu'il a apporté plusieurs amendements. Il est encore temps pour le ministre, il me semble, de dire: Bon, bien, là, c'est assez, crime! Je ne suis pas capable de faire l'unanimité puis, sans faire l'unanimité, je ne suis pas capable de ramasser la majorité, seulement. On va reculer, on va regarder ça encore mieux, on va consulter le monde et on va

voir ce qu'on peut aménager. Parce que, tant qu'à faire une toi, tu ne peux pas changer ça tous les ans, une loi. Pourquoi ne pas la faire immédiatement pour que ça réponde au moins à la majorité des gens impliqués?

Il me semble que le ministre, de bonne foi, devrait essayer de comprendre que nous autres, de notre bord, c'est ce qu'on a essayé de lui faire comprendre, de retarder... On est au mois de juin, là, qu'il retarde ça au mois de septembre, octobre, quand on va rouvrir la session, et on rediscutera ça à fond, on essaiera de voter ensemble une loi qui va répondre réellement aux besoins de la population.

Des voix: Bravo!

Le Président: Est-ce qu'il y a d'autres interventions? Alors, M. le député de Labelle.

M. Jacques Léonard

M. Léonard: M. le Président, à l'instar de mes collègues, je vais souligner que ce débat se produit après un des trois bâillons que nous avons connus au cours de la semaine, ce qui est un record, un non-dit dans l'Assemblée nationale.

Ces bâillons se sont produits alors que le gouvernement a déposé une avalanche de lois le 15 mai dernier, alors qu'il n'avait rien fait au cours du printemps, qu'il s'est traîné les pieds durant tout le printemps, à ne rien faire, alors que le premier ministre lui-même a perdu son temps dans des débats constitutionnels qui ne mènent à rien, comme on le voit. Surtout, il faut se poser la question: Pourquoi ces projets de loi arrivent à ce moment-ci avec un bâillon?

Ce gouvernement a pris l'habitude de pousser sur des projets de loi dans des périodes où la population pouvait avoir le moins conscience de ce qui se passait à l'Assemblée nationale et, surtout, pouvait le plus vite oublier les conséquences des projets de loi qui étaient amenés ici. C'est ce que nous voyons dans le cas des heures d'affaires. Ces gens-là en parlent depuis quatre ans. Ils n'ont rien réglé, ils n'ont pas appliqué la loi qui précédait, qui était quand même raisonnable et qui, si elle avait été appliquée, aurait réglé bien des situations et n'aurait pas fait que la situation actuelle dégénère comme nous la connaissons.

Alors, ils imposent le bâillon après vingt-trois heures pour éviter qu'on n'en débatte, en pensant que les gens s'en iraient en vacances, oublieraient puis, quand ils reviendraient, ils n'auraient plus le courage de resoulever la question. C'est vrai dans le cas de la Loi sur les heures d'affaires. C'est exactement la même chose dans le cas de la loi 50 sur la Régie de l'assurance automobile du Québec, par laquelle ils veulent aller voler 877 000 000 $ aux assurés de la Régie de l'assurance automobile du Québec, millions qui appartiennent aux assurés alors que le ministre des Finances veut aller prendre le sac.

Même chose aussi dans le cas de la loi 69 en ce qui concerne l'impôt foncier scolaire. Les gens s'apercevront, lorsqu'ils recevront leur compte, soit en été, soit à l'automne, soit à Noël, dépendant de la facturation des commissions scolaires, que leurs taxes auront doublé, mais, à ce moment-là, plus personne ne parlera de la loi parce qu'on l'aura votée, étudiée, en vitesse, avant les vacances, pendant que les gens pensent à autre chose, pensent à leurs vacances, et surtout oublieront après cette période de vacances. (21 h 10)

M. le Président, ça, ce sont les circonstances dans lesquelles le gouvernement traite les situations difficiles, essaie de régler des cas controversés. Nous en sommes là. C'est ça la réalité. Maintenant, sur le fond. Pourquoi un gouvernement doit-il s'occuper des heures d'affaires? Ma première réaction, c'a été de me dire: Le gouvernement ne devrait pas se mêler de ça. Ça a été ça tout bonnement parce que, finalement, chacun pourrait ouvrir et qu'est-ce que ça changerait? En réalité, c'est une bonne question à mon sens parce que, dans un pays non organisé où l'économie est primaire, oui, ça pourrait se passer comme ça. Le gouvernement n'aurait pas à statuer sur les heures d'affaires. Mais nous sommes dans un pays moderne, dans un pays qui s'est développé, où il y a des habitudes de vie qui sont prises, où il y a une industrie qui fonctionne à des heures fixes, où il y a une économie organisée, et bien organisée. Et là, les problèmes commencent à se poser.

Première considération, c'est que dans un pays comme le nôtre la concurrence, qui est un phénomène correct, qui est un phénomène qui amène l'abaissement des coûts pour la population, joue. Face à un service très large qu'on veut offrir, les marchands doivent ouvrir. Si l'un ouvre quatre-vingt-dix heures, l'autre ne peut pas ouvrir soixante heures, parce qu'il va perdre des clients qui vont s'en aller vers celui qui ouvre quatre-vingt-dix heures. Et nous voyons tout de suite qu'il faut avoir des heures fixes, parce que l'intérêt d'un commerçant ça va être d'ouvrir le plus longtemps possible, d'offrir le plus large service possible, par rapport aux autres, si on laisse la concurrence s'installer quant à l'ouverture des heures d'affaires. Immédiatement, on admet que le gouvernement doit intervenir parce que, s'il ne le faisait pas, celui qui est le mieux organisé, celui qui disposerait de capitaux, celui qui pourrait payer des employés le plus longtemps possible ouvrirait et donnerait beaucoup de service pour un temps. Il le ferait durant six mois, un an, le temps de faire faire faillite à ses concurrents, puis après il réduirait ses coûts et il augmenterait ses prix. C'est ça.

Et c'est pratiquement la même situation que l'on retrouve quant à la création de monopoles. Or, les monopoles, ce ne sont pas simplement les grandes entreprises à plusieurs centaines de milliers de travailleurs. Ce sont aussi des monopoles locaux qui peuvent s'instaurer à la faveur de réglementations trop larges ou de réglementations qui n'existent pas. Or, nous en sommes là. Les monopoles locaux, par rapport à d'autres, qui font que les autres vont crever, alors qu'il va en émerger un ou deux et dans le cas idéal, pour ces monopoles, un seul. Et là, il fera la pluie et le beau temps. C'est ça la réalité.

Or, dans le Québec, il y a différentes considérations qu'il faut amener aussi sur la table pour bien voir que le gouvernement doit intervenir dans la question des heures d'affaires. D'abord, l'immensité du territoire. La diversité du territoire. Si on peut avoir des situations dans des milieux très urbains, très densément peuplés, on peut concevoir qu'il y ait de grandes surfaces. Mais dans des régions moins densément peuplées, ce n'est pas la même situation. Mais si on laisse par les heures d'affaires, par l'ouverture la plus large possible des heures d'affaires, si on laisse les commerçants décider, le plus fort prendra le monopole, les autres vont pérécliter, vont périr et, finalement, le service à la population, au bout d'un certain temps, va en souffrir et ce sera pire que maintenant. Pire que maintenant!

Et c'est ça qu'il faut voir dans le temps comme législateurs. Il nous faut tout de suite traiter ces questions. Et les coûts qui y sont associés vont inévitablement évoluer en fonction de la situation de ces commerçants dans le territoire. Deuxième considération ou la troisième, plutôt, maintenant.

Nous avons déjà traité cette question sous d'autres angles, sous l'angle de l'aménagement du territoire, sous l'angle de l'urbanisme. Rappelez-vous les lois que nous avons passées à ce sujet, les programmes que nous avons mis sur pied. Nous avons considéré, autour des années 1982-1983, par exemple, qu'il était important de densifier les tissus urbains que nous avons. Et nous n'en avons pas tellement, mais ceux que nous avons, nous devons les protéger. Ça nous a donné des programmes importants comme ceux de la rénovation de la Plaza Saint-Hubert, comme la création de la loi sur les SIDAC, des sociétés à l'intérieur des villes et des villages, pour la bonne raison qu'il fallait que les commerçants se mettent ensemble pour présenter une meilleure image du village ou de la ville dans laquelle ils étaient, pour les amener à travailler ensemble. De sorte que la clientèle retrouvait chez elle, quel que soit le milieu, des magasins modernes, avec des devantures attrayantes. De sorte, aussi, que les gens s'habituaient à rester dans leur village, à rester dans leur ville et à nourrir, en dehors de l'industrie, qui, souvent, faisait vivre la ville ou le village, d'autres industries secon- daires qui arrivaient et, ensuite, des commerces qui s'implantaient et qui fournissaient des services de bonne qualité à la population.

Si on laisse ou si on favorise uniquement les grandes surfaces, bien sûr, il va s'en implanter. Mais les grandes surfaces, pour vivre, ont besoin d'une grande population. Et donc, pour avoir les mêmes services, il faut se déplacer sur de beaucoup plus grandes distances. Et quand on compare les prix de la marchandise que l'on achète, il faut aussi y intégrer le coût du transport; et ça, ce n'est pas un calcul que l'on fait toujours, que l'on fait souvent parce qu'on a tendance à l'oublier, simplement parce qu'on veut aller ailleurs, bien sûr, mais on oublie le coût qui y est associé.

Alors, ce à quoi je voulais en venir, c'est qu'une société comme la nôtre doit vivre avec une diversité de commerces. Il y a des grandes surfaces? Très bien. Il y a des petits magasins? Très bien. Ils favorisent la vie urbaine, favorisent la vie dans le village. Il faut concevoir les deux. Mais quand, par une réglementation ou une loi sur les heures d'affaires, on favorise uniquement les grandes surfaces, je pense que là on fait fausse route, on fait erreur et qu'il faut revenir en arrière là-dessus parce qu'on va le payer tôt ou tard. Et au fond, ce que l'on fait en favorisant les grandes surfaces, c'est qu'on favorise un type de société, un type de civilisation basé sur la voiture, basé sur l'étalement urbain. Et quand on considère tous les coûts que cela implique, ils sont énormes, immenses; on ne peut pas se permettre de tels coûts. Au contraire, actuellement, les coûts des services publics, des services collectifs sont déjà considérables. Il faut arrêter la facture et II faut tout de suite légiférer, réglementer en conséquence, de sorte qu'on ne les augmente pas.

M. le Président, je termine. Il faut absolument que le ministre en tienne compte. Déjà, il a descendu de 84 à 72, à 70 heures; c'est déjà mieux que c'était, mais ce n'est vraiment pas suffisant. Et les gens qui sont ici et qui se sont mobilisés représentent la plus grande partie de la population, celle que nous devons considérer en légiférant.

Le Président: Je cède maintenant la parole à M. le député de La Prairie. (21 h 20)

M. Denis Lazure

M. Lazure: Merci, M. le Président Le ministre qui pilote ce projet de loi venait tout juste de commencer à comprendre les demandes qui étaient exprimées par l'Opposition. Mais l'Opposition se faisait, au fond, le porte-parole de milliers de personnes à travers le Québec qui suppliaient le ministre de changer son projet de loi. Elles le suppliaient M. le Président moi, j'ai rarement vu autant de personnes suivre fidèle-

ment les séances d'une commission parlementaire, de représentants des différents commerces d'alimentation et de pharmacie, depuis quelques semaines. Et il commençait à comprendre, la preuve c'est qu'il a apporté, sur 34 articles, 25 amendements. C'est beaucoup ça, 25 articles sur 34 qui sont amendés. Donc, des heures, pas tellement nombreuses - une vingtaine d'heures au maximum, vingt ou vingt-cinq heures - ces heures-là, contrairement à ce que le parti ministériel, le parti gouvernemental disait, n'étaient pas des heures perdues. Ce sont des heures au cours desquelles le ministre a fini par comprendre, un peu, les doléances de tout ce monde-là.

Et, il a baissé le nombre d'heures d'ouverture, il a apporté plusieurs amendements, mais ce n'est toujours pas satisfaisant. Et on se sert, pour mettre fin aux discussions qui semblaient éclairer le ministre et donner partiellement raison à la population, on se sert encore du bâillon, on abuse du pouvoir gouvernemental pour dire à l'Opposition: Vous arrêtez de parler, fini, silence. Nous, on sait ce qui est bon pour la population et on va procéder. Trois fois dans l'espace d'une semaine, on nous a dit ça, M. le Président. C'est un record dans l'enceinte de cette Assemblée nationale. Jamais on n'a eu trois bâillons dans l'espace d'une semaine.

Les heures d'ouverture sur semaine sont encore trop longues. Tout le monde nous dit qu'ouvrir jusqu'à 19 heures, les lundi et mardi, ça vient perturber la vie familiale, et on le dit avec raison. Il faut comprendre que la plupart, la majorité en tout cas, des employés dans les marchés d'alimentation, sont des femmes et, souvent, des femmes qui ont de jeunes enfants, et des femmes qui ont des enfants, souvent, en garderie, garderies scolaires ou autres garderies. Et, dans l'état actuel des choses, le lundi soir, le mardi soir, le mercredi soir, actuellement, ces femmes-là peuvent aller prendre leur enfant à une heure normale où la garderie ferme, où la plupart des garderies ferment. En prolongeant jusqu'à 19 heures, les lundi et mardi, on impose un fardeau additionnel aux parents, aux mères en particulier qui, dans bien des cas, devront changer leur mode de vie, devront, peut-être changer la garde de leur enfant.

Et, M. le Président, nous, de l'Opposition, nous disions: Prolongeons les heures le mercredi soir, comme le jeudi et le vendredi c'est la règle actuellement, et nous pensons, d'après ce que la population nous dit, que ça sera amplement satisfaisant. Le ministre s'entête et veut donner satisfaction aux propriétaires de grandes chaînes, essentiellement. Ça n'est plus du dépannage alimentaire que le ministre autorise, ce n'est pas vrai. Parce que, quand il dit cinq et plus, cinq plus le pâtissier, cinq plus le boulanger, ça commence à faire du monde. Et là, on va voir des chaînes Importantes, pas très très grandes, mais grandes et moyennement grandes, et non plus des petites chaînes ou des dépanneurs, on va donc voir arriver dans la compétition, dans la concurrence du marché, une concurrence tellement forte que plusieurs dépanneurs devront fermer leurs portes.

Alors, injustice pour le véritable petit dépanneur, d'une part, injustice pour la mère, les parents, les enfants qui vont être perturbés par ces nouveaux horaires et, finalement, encore une fois, pour des intérêts qui sont à très court terme. Ces chaînes s'imaginent augmenter leur chiffre d'affaires. Peut-être le feront-elles pour quelque temps, à très court terme. Mais il y a quand même un équilibre qui va s'établir, il y a une masse totale d'argent dans les budgets familiaux qui va aux achats pharmaceutiques, aux achats alimentaires.

M. le Président, il y a aussi la question du dimanche. En ouvrant très grandes les portes à l'ouverture de ces chaînes moyennes et moyennement grandes, le ministre va imposer le fardeau du travail dominical qui, il n'y a pas si longtemps, était même interdit dans nos moeurs - interdit dans nos moeurs il n'y a pas si longtemps, M. le Président. Il va maintenant imposer à des milliers d'adultes le travail le dimanche, il va, dans une large mesure, perturber la vie dominicale des familles le seul jour, à toutes fins pratiques, de plus en plus, M. le Président, où les deux parents se retrouvent ensemble, se retrouvent avec les enfants, surtout les jeunes couples. On sait maintenant qu'au moins les trois quarts des jeunes femmes dans les couples travaillent hors du foyer en plus de travailler au foyer, ont double emploi. Mais là, plusieurs de ces femmes devront travailler le dimanche. Encore une fois, les pressions mercantiles - n'ayons pas peur des mots - les pressions mercantiles des grandes chaînes pharmaceutiques ou alimentaires ont fait plier le ministre. Il sait fort bien, le ministre, que c'est une injustice qu'il commet vis-à-vis du foyer moyen, en forçant des milliers de femmes et d'hommes à travailler le dimanche et en les privant d'une vie familiale normale.

C'est important qu'il y ait au moins une journée par semaine où la grande majorité des familles se retrouvent ensemble pour pouvoir communiquer, pour pouvoir passer des heures de loisirs en famille. De plus en plus on se plaint des brisures de communication qui existent non seulement dans le couple, mais entre les parents et les enfants. Et là, M. le Président, par un geste inspiré de préoccupations strictement commerciales, on vient faire un accroc, une brisure dans le tissu social, dans le tissu familial.

Il y a quand même des valeurs dans notre société qui sont plus importantes, qui devraient primer les valeurs strictement commerciales. Il est bien évident, en plus, qu'en faisant ce que le ministre fait actuellement on ne fait que mettre le pied dans la porte, et c'est ça qui est

dangereux. Il établit un précédent dangereux où on peut prédire avec certitude que, d'ici à quelques années, il y aura beaucoup plus de commerces qui seront ouverts le dimanche. Je ne pense pas que ce soit ça que la société québécoise désire. Peut-être que ça existe et que c'est désiré dans d'autres sociétés mais, au Québec, je pense que - et ça été prouvé amplement par les représentants de différents groupes - la majeure partie de la population au Québec désire maintenir une journée de repos, une journée familiale qui a toujours été traditionnellement la journée du dimanche.

M. le Président, je regrette beaucoup, comme mes collègues de ce côté-ci de la Chambre, que le ministre se soit impatienté si rapidement, parce qu'il aurait pu encore diminuer les heures d'ouverture sur semaine et il aurait pu rétrécir cette porte qu'il ouvre le dimanche à un abus qu'on peut prévoir. Je termine, M. le Président, en déplorant cette absence de compréhension du ministre qui, cependant, montrait un tout début de bonne volonté. C'est dommage que, par son impatience, il ne nous démontre pas jusqu'où sa bonne volonté pouvait le mener. Merci, M. le Président.

Une voix: Bravo!

Le Président: Je reconnais maintenant M. le député de Lac-Saint-Jean et whip de l'Opposition.

M. Jacques Brassard

M. Brassard: M. le Président, c'est malheureux, mais je pense qu'on est en face d'un cas exemplaire de ce qu'on pourrait appeler "comment ne pas légiférer". C'est tout à fait exemplaire. C'est la façon et la méthode qu'il faut rejeter en matière de législation. (21 h 30)

Reprenons rapidement le scénario. Il y a d'abord eu une consultation - c'est bien, c'est excellent - consultation qui permettait à tous les intervenants de se faire entendre, sauf qu'ils se faisaient entendre sur rien. Il n'y avait pas de projet gouvernemental. Alors, ils donnaient leur point de vue sur toute la question des heures d'affaires, mais ils ne pouvaient pas porter un jugement ou une évaluation sur le projet du gouvernement, il n'y en avait pas. Il y avait un document synthèse tout au plus. Alors, déjà une consultation qui comporte une lacune essentielle. Mais le ministre nous avait dit à ce moment-là qu'il se mettait à l'écoute de la population et à l'écoute des intervenants et des intéressés, et ça a donné lieu à un projet de loi. Quand on a pris connaissance de ce projet de loi là qui devait être une synthèse disait le ministre - drôle de synthèse - on s'est rendu compte qu'au lieu d'écouter le ministre avait fait la sourde oreille pendant toute la consultation, puisqu'on ne retrouvait rien dans le projet de loi qui cor- responde aux attentes, aux aspirations et aux demandes formulées par les divers intervenants intéressés.

Alors, le projet de loi franchit l'étape de l'adoption de principe et puis se retrouve en commission. Normalement, un projet de loi de cette importance aurait dû connaître de longues heures d'étude en commission. Ça s'est limité à treize heures, et puis la clôture est tombée, le bâillon est tombé. Retour en Chambre, remise du rapport, dépôt du rapport, fini, plus d'étude, plus d'analyse, plus de travaux en commission où c'est pourtant le lieu privilégié où un projet de loi doit être étudié, examiné article par article. Évidemment, l'Opposition a joué son rôle, le rôle qui lui revient, celui de s'opposer farouchement à une méthode aussi brutale de mettre fin à des débats démocratiques sur un sujet aussi important. On s'est opposés farouchement au bâillon et à la clôture. Et puis, tout d'un coup, peu de temps après, on se retrouve avec, sur la table du secrétaire général, une trentaine d'amendements substantiels, alors que le projet de loi ne comporte que 34 articles. Bref, on se retrouve avec, sur la table du secrétaire général, un nouveau projet de loi, un projet de loi complètement nouveau, complètement différent de celui qui avait été l'objet du débat en deuxième lecture, complètement différent.

Ce projet de loi entièrement nouveau ne fera l'objet d'aucun examen, en commission parlementaire, c'est vraiment inouï, c'est vraiment inouï. Normalement, quand on apporte une avalanche d'amendements comme ça, ça se fait en commission parlementaire et ça implique évidemment le prolongement de l'analyse et de l'examen, parce qu'on se retrouve devant un projet de loi radicalement nouveau. Pas du tout. Aucun des amendements n'a été étudié, n'a été analysé, aucun, puisqu'il y avait le bâillon. Alors, pas question de retourner en commission parlementaire. Les amendements n'ont même pas été lus par le président. Au moins, dans le cas du projet de loi du ministre de l'Éducation sur la fiscalité scolaire, le président a eu la décence de nous lire les amendements et M. le Président, il a même permis au ministre de nous expliquer les amendements, parce qu'on ne pouvait pas le faire, on n'a pas pu aller en commission pour regarder les amendements. Mais là, même pas. Ce sont des numéros, une liste de numéros et puis, c'est tout. Aucun examen des amendements pourtant substantiels qui transforment radicalement le projet de loi.

Vraiment, c'est la façon dont il ne faut pas légiférer. C'est tout à fait exemplaire à cet effet, et on se retrouve avec un projet de loi qui ne fait l'affaire de personne, sauf des grands de l'alimentation qui ont trouvé une oreille attentive du côté du ministre et qui ont obtenu, en gros, satisfaction quant à leurs exigences. Mais, pour le reste, ce projet de loi, même amendé, ne satisfait personne, mécontente tout le

monde. On regarde les horaires qui y sont imposés. Mes collègues l'ont signalé à maintes reprises. On réduit le nombre d'heures, j'en conviens, c'est un petit pas dans la bonne direction, mais c'est loin de satisfaire les intervenants et les intéressés, particulièrement les travailleurs de l'alimentation qui verront leurs soirées du lundi et du mardi bousillées complètement. À partir du moment où ça se termine à 19 heures le lundi et le mardi, c'est évident que voilà des soirées bousillées pour les travailleurs de l'alimentation. Le mercredi aussi, puisque ça se terminera à 21 heures. Et puis on arrive au dimanche.

Le dimanche, alors là, vraiment, c'est presque la libéralisation de l'ouverture des commerces d'alimentation. On était à trois personnes. Le ministre avait évoqué qu'il pouvait passer à quatre. Amendements. On se retrouve avec cinq, plus les pâtissiers, les boulangers dans les commerces d'alimentation, plus les pharmaciens et leurs aides dans les pharmacies. Ce qui fait que, pratiquement, les grandes surfaces, la plupart des grandes surfaces d'alimentation pourront ouvrir le dimanche; c'est évident, avec non pas juste cinq personnes, mais cinq, six, sept personnes puisqu'il faut compter la sécurité, le pâtissier, le boulanger, le pharmacien et ses aides dans une pharmacie à grande surface. Alors, c'est la libéralisation. C'est la libéralisation!

Alors que le ministre prétendait qu'il voulait défendre le vrai dépannage, c'est tout le contraire qui se produit, c'est tout le contraire qui se produit. Absence d'équité totale à l'égard de ces dépanneurs et une telle loi - on peut le prédire - ça va avoir des effets dévastateurs chez les petits dépanneurs et les petits commerçants en alimentation. C'est évident, mon collègue de La Prairie le notait tout à l'heure. Le volume d'affaires n'augmentera pas à partir de la sanction du lieutenant-gouverneur. Quand le lieutenant-gouverneur va signer, va parapher la loi, le volume des ventes n'augmentera pas automatiquement; il va rester le même. La tarte est la même. C'est le partage qui va changer au détriment des petits, au détriment des dépanneurs, des vrais dépanneurs et des commerçants, au profit des grandes surfaces qui pourront ouvrir le dimanche.

Écoutez, ça saute aux yeux. Le volume des affaires, le volume des ventes ne connaîtra pas une augmentation substantielle parce que la loi est adoptée et qu'il y a une nouvelle loi. Il va rester le même, mais il va se déplacer, il va y avoir des transferts - ça c'est évident - vers les grands, les grandes surfaces et ce sont les petits qui vont en souffrir et qui vont devoir, dans bien des cas, fermer leur porte. Et on verra se multiplier les fermetures et les faillites des petits commerçants et des petits dépanneurs, vous pouvez en être assurés. Il n'y a pas besoin d'être prophète pour dire ça. C'est ça qui va se produire, c'est évident, avec une loi semblable.

Par conséquent, visiblement, on légifère trop vite sur des projets de loi majeurs, sur des sujets fondamentaux qui impliquent toute la société québécoise, sans prendre le temps qu'il faut. Moi, je trouve scandaleux qu'un projet de loi de cette nature et de cette importance n'ait pas pu être examiné article par article par une commission parlementaire. Il a été radicalement transformé par des amendements. Aucun des amendements n'a été examiné. C'est digne d'une république d'opérette, d'une république de bananes, une façon de légiférer comme ça. Ça n'a pas de bon sens. C'est carrément inacceptable, cette façon de voter des lois au Québec. Et ce n'est pas juste dans ce cas-là, c'est dans bien d'autres cas également et il faudra que ça cesse. Il faudra revoir ça, ça n'a pas de bon sens!

Alors en conclusion, M. le Président, c'est vraiment la confusion la plus totale. Le ministre voulait clarifier les choses, c'est le contraire qui se produit. La confusion augmente à la suite d'une improvisation évidente et il est clair que le mécontentement non seulement va être maintenu, mais va grandir au Québec au sujet de cette loi-là. Et vous aurez à en payer le prix.

Le Président: Je cède la parole à M. le député de Jonquière. (21 h 40)

M. Francis Dufour

M. Dufour: Merci, M. le Président. Depuis ce matin on est terrés dans un lieu, dans une commission parlementaire qui traite de problèmes touchant les municipalités comme les citoyens de ces municipalités et le ministre aurait peut-être intérêt à regarder ce qui s'y passe puisque, dans ces commissions parlementaires, l'Opposition a son mot à dire; elle est souventefois écoutée et permet de bonifier les lois, et tout le monde s'en porte mieux. Souvent, on prend des intervenants qui ont différents points de vue et on finit par les asseoir ensemble et par leur faire accepter ce que, nous, nous décidons comme parlementaires pour essayer d'améliorer leur milieu de vie et la vie des élus municipaux. C'est de même que ça se passe dans une commission parlementaire.

Donc, ce soir, si j'interviens, c'est parce que je crois sincèrement et fondamentalement que c'est une loi importante. C'est une loi qui a pour effet de chambarder les habitudes de vie, une loi qui a été, j'en conviens, largement publicisée - largement "consensusisée", comme je pourrais dire - pour laquelle il y a eu beaucoup de consultations. Mais il faut regarder le résultat. Ce soir, 20 juin, est-ce que les résultats sont à la hauteur des attentes qui ont été suscitées et est-ce que le ministre peut avouer ou admettre qu'il est content de son bébé, de

son dernier-né? C'est ça. Moi, je voudrais être convaincant. Je voudrais que le ministre puisse entendre vraiment ce que, moi, je ressens très fortement envers ce projet de loi. Ça touche nos milieux de vie à nous, nos familles, nos amis et aussi des milieux de vie importants, non seulement des gens, mais aussi des travailleuses et des travailleurs, des propriétaires et, on pourrait dire aussi, des franchisés assez souvent, d'après les représentations qu'on a eues.

Bien sûr, l'expérience politique que je poursuis depuis un certain nombre d'années, depuis ma 28e année... Je ne dépasse pas le doyen de l'Assemblée nationale, mais, au moins, je pense parler de choses que je connais, et lorsqu'on voit... Et il s'agirait de se demander: Est-ce que cette loi a été demandée par l'ensemble des travailleurs et des travailleuses? Est-ce qu'elle a été demandée par l'ensemble des commerçants? Moi, je pense, hors de tout doute, qu'on peut répondre: Non, ça n'a pas été demandé par tout ce beau monde-là, mais ça répond à des critères. On ne le saura peut-être jamais, mais on peut supposer, penser que ça vient de personnes qui ont intérêt, qui y trouvent leur intérêt. Mais, devant le tollé de protestations, devant les nombreuses requêtes qui nous ont été présentées, je pense bien que tout le monde ne peut pas être de mauvaise foi. Il y a des gens là-dedans qui, vraiment, s'opposent non pas pour s'opposer... Le ministre pourrait nous prêter des intentions comme Opposition en disant: Bien oui, tout ce qui se passe sur le territoire, c'est la faute de l'Opposition. Si c'était vrai, vous ne pourriez plus tenir. Je pense que toute la vie du gouvernement serait en danger. Ce n'est pas 40 % ou 45 % qu'on aurait dans les sondages; ce serait probablement 65 % ou 70 %. Ce n'est pas juste des Québécois d'origine francophone. J'ai bien l'impression que l'opposition vient de tous les groupes et il s'en rencontre un large éventail dans l'ensemble de la population du Québec, quelle que soit son origine.

Effectivement, je vois des amendements qu'on n'a pas pu voir, malheureusement, en commission parlementaire. Encore là, je suis toujours pris avec mon travail, à un endroit plutôt qu'à un autre, mais je suis pareil avec intérêt ce qui se passe. Les amendements que le ministre a apportés jettent un peu de lest, mais ça ne contente pas tout de même les intervenants. Moi, je ne vois pas que nos habitudes de vie vont être améliorées si tous les commerces ouvrent à 8 heures. Le ministre pourra rétorquer: Bien oui, mais ils ne sont pas obligés. Mais, connaissant le jeu de l'offre et de la demande et connaissant la compétition féroce qui existe entre tous les partenaires, c'est évident, c'est clair hors de tout doute dans mon esprit, et je peux le démontrer dans les faits, que, lorsque quelqu'un va ouvrir, les autres vont suivre forcément. Le ministre pourra toujours nous dire: Bien oui, ils peuvent s'entendre entre eux autres. Moi, je pense que, de ce côté-là, on n'a pas à faire la preuve. C'est l'évidence même. Ça tiendra ce que ça tiendra, mais ça va finir par arrêter et, à ce moment-là, tout va être ouvert.

Bien sûr, l'ouverture à 8 heures, je ne pense pas que ça contente qui que ce soit et que ça améliore le train de vie, ou la qualité de vie des individus ou des citoyens et des citoyennes du Québec. Quant à l'abaissement des heures au début de la semaine, déjà, en commençant à 8 heures... Si on regarde, par exemple, le langage que vous nous tenez souvent, que vous voulez favoriser la famille, améliorer le milieu de vie des enfants, des parents, et lorsqu'on sait - et Dieu sait combien il y a de femmes, parce que ce ne sont pas des salaires qui sont payés très fort et il y a beaucoup de femmes qu'on rencontre là-dedans. C'est malheureux encore, mais c'est ce qui se passe. Les femmes travaillent là-dedans, donc, dans les commerces, vont laisser leur maison de plus bonne heure. Donc, les enfants ne seront même pas partis pour l'école. Ça veut dire que déjà on arrache encore la mère au foyer le plus possible et, même si te commerce ferme à 19 heures, le jeune va avoir déjà une bonne partie de la soirée d'écoulée dans son milieu de vie à lui, parce que ses études, il les fait comment? Il les fait souventefois avant de souper ou après le souper, immédiatement. La mère peut s'en occuper, peut donner un peu de son temps, peut ramasser ou améliorer les liens qui existent dans la famille.

Donc, si le commerce ferme à 19 heures, ça ne veut pas nécessairement dire que les employés sont rendus chez eux à 19 h 5, 19 h 10 ou 19 h 15. ça veut dire, assez souvent, avant que la caisse soit calculée, etc., ça veut dire des fois 20 heures, 20 h 30, autant pour le travailleur que pour le propriétaire. c'est ça que j'appelle briser un consensus qui existe.

En ce qui concerne le dimanche, parce que je vais toucher les points qui, à mes yeux, sont très sensibles, si le peuple ou si les Québécois et les Québécoises ont décidé que, pour eux, le dimanche, c'était un jour consacré à leur famille, qui était consacré à renouer des liens avec leur milieu, pourquoi ne respecterait-on pas ça? C'est quoi, cette volonté de vouloir faire consommer les gens, même malgré eux? Est-ce que c'est absolument nécessaire que les gens aient le pouvoir et le désir de consommer sept jours de temps?

Je comprends que le ministre est intransigeant jusqu'à maintenant. Je ne vois pas de signe évident qu'il va casser. Je ne suis pas sûr qu'on va le convaincre, mais il faudrait peut-être qu'il fasse acte d'humilité. Il pourrait regarder ce qui se passe. Vous savez, il n'y a rien comme un gouvernement qui décide de se fermer les oreilles et de ne plus écouter ce qui se passe dans la population. C'est le meilleur signe qui pointe à l'horizon à l'effet qu'on est mûr pour devenir

l'Opposition.

Vous savez, il n'y a rien qui ressemble plus à un gouvernement qu'un autre gouvernement. Mais qu'il tombe dans les mêmes travers... C'est bien sûr que les gouvernements peuvent avoir d'autres préoccupations, mais les travers d'un gouvernement, c'est souventefois penser qu'il devient propriétaire de ce qu'on lui a confié comme bon gérant. C'est ça. On n'est pas des gérants de magasin, on est des gérants du bonheur national brut. Pour le faire, je pense qu'il faut qu'on ait le goût de le faire. Quand on n'écoute plus, c'est parce qu'on perd le goût de le faire, et les gens comprennent ça assez rapidement.

Je pense que, sur une raison ou un domaine aussi fondamental, on a tous intérêt à réfléchir et à s'assurer que les commerçants vont être protégés. Je ne veux pas, au grand jamais, que cette loi qu'on s'apprête à passer cause la disparition de beaucoup de petits commerçants et la perte d'emploi de beaucoup de petits employés. Ça ne se remplace pas nécessairement par d'autres, parce que la consommation est toujours en relation avec les revenus de l'ensemble des gens, avec ce que les gens ont comme revenus. On ne donne pas, en règle générale, ce qu'on n'a pas, mais on ne dépense pas ce qu'on n'a pas.

Donc, il y a beaucoup d'interrogations et, en même temps, ce n'est peut-être pas la meilleure année. Avec les taux d'intérêt élevés qu'on subit, ces gens-là vont avoir à se battre fort, ce qui veut dire qu'on condamne, probablement et sûrement, les gens à des pertes d'emploi, on condamne définitivement des commerces à disparaître et je pense que, de ce côté-là, on n'y gagne rien; tout le monde y perd, y compris le ministre et son gouvernement. On peut peut-être, pendant de nombreuses fois, s'opposer à ce que la population pense, mais trois fois dans la fin de semaine, c'est beaucoup trop, à mon point de vue, et, dans ce cas-ci, on touche encore plus largement à ce consensus et déjà vous avez tout en main pour réparer ce qu'on s'apprête à faire, ce que je considère comme une erreur monumentale. Merci, M. le Président. (21 h 50)

Le Président: Je cède à ce moment-ci la parole à M. le député de Laviolette.

M. Jean-Pierre Jolivet

M. Jolivet: Merci, M. le Président. Mon Dieu! Mon Dieu! Jusqu'à quand devrai-je subir les difficultés que vous m'amenez? semble dire le ministre dans les rencontres que nous avons eues depuis plusieurs jours. Êoignez de moi ce calice que je ne saurais boire. Ce sont peut-être des choses qui nous permettraient de dire à M. le ministre que ce qu'il a subi ici, à l'intérieur, c'est peut-être le présage, malheureusement, de ce qui pourrait se passer maintenant à l'extérieur.

Le ministre, à mon avis, commet une erreur monumentale, mais cette erreur qu'il commet, M. le Président, aurait pu être d'un tout autre ordre, s'il avait décidé de suivre la première idée qu'il avait eue et que son parti a toujours eue. Finalement, ça l'aurait peut-être amené à ne subir qu'une seule fois les difficultés qu'il aura peut-être à subir dans quelques mois ou dans quelques années. Il aurait dû dire, comme plusieurs de ses collègues le pensaient, comme le ministre qui l'avait précédé le pensait: Enfin, tant qu'à manger les difficultés que j'ai à manger dans cette salle, aussi bien, à ce moment-là, les avoir une seule fois: libéralisons à plein. Ouvrons les magasins, tous les commerces d'alimentation, les pharmacies, les magasins de meubles, tous les commerces une seule fois et faisons ce geste; on aura à manger le coup une fois et l'Opposition prendra tous les moyens pour nous empêcher, mais on a la majorité et on va le faire.

Le ministre va me dire, M. le Président: Ce n'est pas la voie que j'ai choisie. Soit! Mais la voie qu'il a choisie, c'est la voie, justement, qui va nous amener à plus ou moins long terme à une pression exercée par l'ensemble de la population. Même s'il nous dit qu'il n'a pas eu de pression de leur part, au moins nous nous imaginons qu'il en a connu de ses collègues, des gens qui sont au gouvernement, qu'il a eu des pressions justement des grands par rapport aux petites et aux moyennes surfaces.

J'ai regardé avec beaucoup d'attention, M. le Président, les pas que le député de Nicolet-Yamaska a faits, le "virevoltage" qu'il a fait ici à cette Assemblée. Je le plains et en même temps je devrais même le féliciter d'être un homme de parti en pilant sur son orgueil, en pilant même sur ses convictions, lui qui, comme vous le savez, a fait un travail convenable, même s'il y avait des imperfections qui pouvaient être corrigées. Mais être capable de revenir en cette salle et appuyer un tel projet, M. le Président, ça, ça nous déconcerte.

Nous sommes, je l'ai dit à M. le ministre, le relais de ceux qui n'ont pas de voix ici à l'intérieur. Le clivage qu'on a connu pendant la commission parlementaire sur un projet vague, des idées qui étaient énoncées sur un document qui était très bien fait, mais sur aucun projet précis qui est devenu ensuite un projet de loi... Je peux dire qu'il y a eu du clivage. M. le ministre en est conscient. Clivage entre ceux qui sont des petits propriétaires proches de leurs employés et qui sont en face de nous et qui nous disaient, en face de nous, et qui l'ont répété à plusieurs occasions... Consommateurs, propriétaires, commerçants, travailleurs, toutes ces personnes nous ont dit: C'est à long terme que vous allez nous avoir.

C'est un peu ce qu'on semble vouloir dire encore une fois par notre bouche, que ces gens n'ont pas de voix à l'intérieur. Ils feront à

l'extérieur, maintenant, ce qu'ils ont à faire, puisque le ministre ne veut pas changer d'idée. D'un autre côté, clivage des personnes qui se trouvent en arrière de moi, en haut. Grands propriétaires, Métro, Steinberg, les gens de Provigo, les gens des chambres de commerce, des gens d'une association, semblerait-il, de consommateurs, mais demandez au député de Saint-Maurice, concernant le Service d'aide aux consommateurs de Shawinigan, si c'est en arrière de moi ou si c'est en avant de moi. Il va vous répondre qu'il est en avant de moi et qu'il représente bien plus les consommateurs que ceux qui sont en arrière de moi.

Je dois vous dire, M. le Président, que je suis, comme je l'ai dit depuis le début, très émotif dans ce dossier parce que je représente des gens qui ont justement une émotivité importante, celle de dire que le ministre est en train de commettre une erreur. Malgré tous les efforts que nous aurons pris, malgré le peu de temps qui nous a été donné pour le faire, nous avons dit tout ce que nous avions à dire. Nous en aurions encore à ajouter. Mais une chose est certaine, c'est que, même si on voulait les ajouter, je ne pense pas être capable de convaincre le ministre. Il a pris sa décision et, comme le disait l'éditorialiste du journal, aujourd'hui, il vivra avec sa décision. Le ministre, cependant, avec ce qu'on appelle la guillotine parlementaire - les trois qui sont devant nous - devra vivre aussi avec une façon de faire les choses qui est anormale dans ce Parlement. C'est un Parlement où on a le droit d'exprimer nos opinions, d'utiliser tous les moyens que le règlement nous donne, comme les gens d'en face, lorsqu'ils étaient à l'Opposition, ont eu le droit de le faire, et ils l'ont exercé sans avoir de bâillon, en aucune façon.

Le ministre est très sûr de ses opinions et de ses collègues, malgré ce que l'on a venant de l'intérieur du caucus et, comme je le disais, même de certains ministres de ce gouvernement qui m'ont dit ici, en cette salle, alors qu'on avait des intermèdes, qu'il n'y avait pas d'urgence à passer cette loi-là, pas plus, comme le disait mon collègue d'Arthabaska, qu'il n'y avait d'urgence à passer la loi qui va venir siphonner, dans la caisse de la Régie de l'assurance automobile du Québec, des millions. Parce que, dans le cas de la RAAQ, c'est une loi fiscale qui s'applique au moment où elle est décrétée par le ministre des Finances. Deuxièmement, quant à celle-ci, il aurait pu y avoir un délai. Et le ministre, même s'il m'a dit qu'il n'avait en aucune façon pris l'engagement de l'adopter à la fin de la session, j'ai lu des journaux, j'ai entendu des gens qui l'ont répété à satiété, le ministre a dit qu'il voulait un projet de loi au printemps. Et quand on dit ça... Pour moi, le printemps se termine demain.

Le ministre est sûr de lui-même malgré les gens, les députés qui assistaient à la commission parlementaire et qui ont fait valoir leur opinion à l'encontre de celle du ministre par les questions qu'ils posaient. Parce que le député d'Or-ford représentait très bien ce que le ministre pensait. Tandis que le député de Drummond représentait pas mal ce qu'on pensait aussi. Mais le député de Drummond n'a pas été à la commission parlementaire qui a étudié le projet de loi article par article et on sait pourquoi. On sait que le député, hier soir, a quitté la salle; on l'a vu à la télévision. Ça ne nous rend pas dupes de ses idées, il nous l'a dit d'ailleurs. Et dans ce sens, si le ministre est sûr, il devrait nous donner, dans le droit de réplique, comme ma collègue de Chicoutimi l'a indiqué, comme mon collègue d'Abitibi-Ouest l'a indiqué... est-ce qu'il est prêt à donner à tous et à chacun de ses collègues le pouvoir de décider en libre conscience, sans aucune difficulté après, s'ils décidaient dans ce sens-là?

Parce qu'il y a eu des cas comme ceux-là où, dans notre propre parti politique, on a laissé des gens s'exprimer. Un exemple: le député de Drummond, Michel Clair, sur la Régie de l'assurance automobile du Québec, s'est levé dans cette salle à rencontre de ce que l'on pensait parce que, dans sa conscience, il ne voulait pas prendre position pour le projet de loi. Il l'a fait. Il n'a jamais été pénalisé pour l'avoir fait. Quelques mois après, il a été nommé ministre du Revenu. Nous avons eu aussi d'autres personnes qui ont décidé autre chose, qui ont même décidé de traverser la salle, comme le député de Sainte-Marie, M. Bisaillon, à l'époque. Ils ont pris leur décision, ils ont été capables de prendre leurs responsabilités, comme la députée d'hier. Je l'ai félicitée de l'avoir fait au su et au vu de tout le monde parce que ça exprimait ce qu'elle ressent, ce qui fait en sorte qu'elle exprimait aussi ce que les gens de son comté ressentent et des gens d'un comté proche du sien, aussi, qui le ressentent, mais qui n'osent pas l'exprimer.

Je vous donne un exemple typique, les commissions scolaires. Le ministre des Affaires municipales n'a jamais été présent à aucun des votes. Le ministre des Affaires municipales, après le vote, est entré dans cette salle, hier; on l'a tous vu. On sait qu'il était en désaccord, et la façon de l'exprimer, c'était d'être à l'extérieur. Je pourrais nommer des ministres qui n'ont pas voté encore une fois sur la loi du ministre. J'ai hâte de les voir voter ce soir. Je ne suis pas sûr de les voir. Et je sais pourquoi ils ne voteront pas. Ils vont être absents parce qu'ils ne veulent pas voter sur ce projet de loi là. Sauf qu'ils sont soumis à un principe qui est la majorité d'un caucus: Ou j'y suis, ou je le quitte. Je ne peux pas avoir le principe d'une porte ouverte ou fermée; il faut que la porte soit ouverte ou qu'elle soit fermée. Et dans ce sens, j'attends la réplique du ministre.

C'est le dernier moment que nous aurons en cette salle pour savoir ce que le ministre pense. Est-ce qu'il a décidé, à partir de toute l'argu-

mentation qui lui a été donnée, de changer d'idée? Avec le visage que je lui vois, je pense que non. Mais, au moins, on aura exprimé par notre voix ce que des milliers et des milliers de citoyens au Québec, des travailleurs et travailleuses, des commerçants et commerçantes, des propriétaires, des gens, hommes ou femmes, qui sont des consommateurs, ce que tout le monde exprime aujourd'hui, par notre voix, qu'ils sont en désaccord avec cette loi et trouvent que cette loi n'a aucun bon sens. Merci, M. le Président. (22 heures)

Le Président: Avant de procéder plus loin, je constate la présence dans l'Assemblée du leader de l'Opposition et, suite à la demande formulée par le président des travaux, cet après-midi, afin de faire retirer certains propos prononcés par le leader de l'Opposition, je réitère la demande de la présidence au leader de l'Opposition de retirer des propos qui ont été prononcés ce matin. Est-ce que vous retirez vos propos, M. le député? M. le leader de l'Opposition.

M. Chevrette: M. le Président, je vais me conformer à votre directive, parce que j'ai l'intention d'intervenir sur le fond de la motion.

Le Président: Donc, vous retirez vos propos. Très bien.

Je suis maintenant prêt à reconnaître un prochain intervenant. Alors, je reconnais maintenant M. le leader de l'Opposition.

M. Guy Chevrette

M. Chevrette: M. le Président, je vais intervenir sur cette question, parce que je considère que la vérité a ses droits en cette Chambre. La vérité a ses droits, M. le Président, et l'honnêteté intellectuelle a aussi ses droits. Je n'aurais jamais pensé, M. le Président, qu'on serait forcés comme parlementaires, à tour de rôle pendant plusieurs minutes, pendant cinq heures, d'exiger la franchise, l'honnêteté intellectuelle. M. le Président, quand on est député, qu'on est élu dans une circonscription électorale et qu'on se permet de ne même pas avoir la rigueur de lire concrètement et correctement un texte, on mérite à peine d'avoir le titre de député. Surtout, M. le Président, quand on se targue d'appartenir à une formation politique qui a une certaine rigueur. Cet avant-midi, M. le Président, j'ai utilisé des mots dans cette Chambre que je ne regrette même pas, j'ai utilisé des mots qui avaient toute leur signification, sauf d'être parlementaires, mais qui n'en demeurent pas moins profondément justes, corrects, et conformes aux définitions que l'on trouve dans les dictionnaires, M. le Président.

M. le Président, quand on n'est pas capable de lire un texte correctement, puis qu'on ose, de son siège, affirmer, par exemple, qu'il y a eu des préférés, des chouchous, qu'on dit qu'il y a 11 détaillants qui ont eu des faveurs, alors qu'il y en a trois pages qui n'ont pas eu de faveurs, qui ont eu une ordonnance de se conformer à une loi et, quand on lit un peu plus loin, dans le même texte, que, le 25 février 1987, c'est eux du Parti libéral qui, comme par hasard, ne mettent pas d'obligation de se conformer, il faut avoir du culot, il faut avoir du toupet, il faut être malhonnête intellectuellement, M. le Président, il faut manquer de rigueur et on mériterait d'être dans une classe de l'équivalent d'une maternelle, M. le Président. C'est à peu près ça qui s'est passé dans cette Chambre. Ça, vous appelez ça de la rigueur? Faites les signes que vous voudrez, vous manquez complètement d'honnêteté intellectuelle envers la population du Québec. C'est ça fondamentalement que vous êtes.

Après avoir écouté du monde - ce n'est pas d'aujourd'hui qu'on parle, M. le Président, des heures d'affaires - l'ex-ministre de l'Industrie et du Commerce, M. MacDonald, dans cette Chambre, a essayé de passer un sapin au Québec, aux Québécois, aux Québécoises. Et, par la suite, est arrivé un grand dieu des routes qui ne magasine pas le dimanche, M. le Président, et qui a décidé d'imposer ses volontés après avoir écouté tout le monde. Ça ne ressemblait même pas à l'ombre de ce que le député de Nicolet avait écouté, lui. Et, s'il avait eu le courage politique de se tenir debout, ce député de Nicolet, M. le Président, s'il avait eu le courage politique, il aurait fait respecter ce que les gens lui avaient dit, ce que les gens lui avaient confié et qu'il avait eu le courage, à l'époque, d'écrire. Mais, là, il se reconnaît dans un texte de loi qui ne ressemble même pas à ce qu'il avait entendu, à ce que les gens lui avaient dit de faire, à ce que les gens lui avaient dit de transposer sous forme de texte législatif, M. le Président.

Fondamentalement, le Parti libéral a eu un parti pris, un parti pris contre la classe ouvrière, M. le Président, dans le domaine de l'alimentation, contre les petits propriétaires de commerce, M. le Président, Et, dans quelques minutes, on se lèvera pour applaudir. Vous remarquerez - je vous mets au défi et vous les verrez, M. le Président - ils vont applaudir à tout rompre un ministre qui aura rendu service à quelques gros "lobbies" au détriment d'une collectivité, au détriment des consommateurs québécois, M. le Président, oui, au détriment des consommateurs québécois, au détriment de petits commerces qui faisaient vivre des salariés, qui faisaient vivre des familles. Et ça, ce n'est pas grave. Les gros "lobbies" prendront de plus en plus de puissance au détriment de la collectivité québécoise. Et là, le ministre se gonflera d'orgueil. Mais dans cinq ans, dans dix ans, on dira: Qui a pensé à ça? Et probablement avant ça, M. le Président. Parce que, si je me fie sur ce que j'ai entendu auprès des membres de la Coalition contre, ils vont vous rappeler sans cesse et rappeler à la cliente-

le - et je les incite à faire ça, M. le Président - quotidiennement que c'est grâce à ce ministre débonnaire qui a pensé aux gros. On va lui rappeler que nous, les petits, on avait une pensée différente. vous savez, je me souviens. ça été la devise de beaucoup de monde, ça, je me souviens. je me souviens qu'il y a eu un ministre qui a écouté, mais qui n'avait rien compris de ce que les gens voulaient. je me souviens qu'au québec il y avait des salariés qui ne voulaient pas voir changer ça. je me souviens qu'il y avait du monde qui croyait à une certaine valeur de ce que ça représente, le septième jour de la semaine. je me souviens qu'il y avait des petits commerçants et des familles sur un coin de rue qui vivaient à trois ou quatre avec l'aide de ce petit dépanneur. je me souviens que j'avais des heures normales de travail. je me souviens que j'avais des journées normales de travail. je me souviens que j'avais une semaine normale de travail. je me souviens, m. le président, que je pouvais espérer vivre une vie normale. oui, je me souviens. et j'espère qu'on va le lui rappeler quotidiennement, quotidiennement, et qu'on va le lui rappeler dans certains comtés en particulier, surtout des comtés fragiles à 114. je suppose qu'on va rappeler, m. le président, que ces gens-là ont, d'une façon arrogante, fait fi à peu près de toutes les consultations populaires, fait fi à peu près de tous les consensus qui se dégageaient. quand, dans un comté aussi petit que matane, les commerçants prennent la peine de débrayer en plein après-midi pour aller faire ressentir tout le poids de leur indignation et leur dire: ce n'est pas ça qu'on veut comme collectivité. ce n'est pas ça qu'on veut vivre-mais, m. le président, la coalition qui est contre, oui, je l'invite, m. le président, par votre intermédiaire - je dois passer par vous - à rappeler constamment que ces gens qui ont la vérité à tout prix... ils ont toute la vérité, ces gens-là. il y a seulement eux autres qui ont raison. il y a seulement eux autres qui ont compris le bon sens. et je vois le ministre, m. le président, là, qui va répondre: écoutez, moi, j'ai écouté. il y a une différence, il y a un monde entre écouter et comprendre. il y a un monde. je ne sais pas combien...

Je n'ai pas rencontré, à part certains gros "lobbies", du monde qui m'a dit: Chevrette défend donc cette loi-là. Au contraire, partout où je suis passé, on m'a dit: Qu'est-ce qui lui prend de faire ça? Qu'est-ce qui prend au gouvernement de faire ça? Qu'est-ce qui prend au gouvernement de ne pas écouter la population? Qu'est-ce qui prend au gouvernement de ne pas écouter ces petits commerçants? Qu'est-ce qui prend au gouvernement de ne pas écouter ces travailleurs? Pourquoi le gouvernement ne légtfère-t-il pas dans le sens du consensus de la majorité? C'est ça fondamentalement que j'ai entendu. Je l'ai entendu à Montréal. Je l'ai entendu à Joliette.

Je l'ai entendu à peu près partout au Québec. Mais pourquoi, M. le Président, un gouvernement peut-il s'entêter à légiférer contre un consensus vraiment majoritaire?

M. le Président, à écouter certains gros "lobbies", on vendrait n'importe quoi dans les pharmacies. On vendrait n'importe quoi le dimanche dans n'importe quoi. On ne se soucie même pas de la valeur des gens. M. le Président - et je vais vous le dire, ce que je pense-un gouvernement qui commence à se fouter des valeurs des individus, un gouvernement qui se fout éperdument des valeurs de ses concitoyens, c'est un gouvernement en décadence. Un gouvernement qui ne croit plus aux valeurs auxquelles les citoyens attachent une importance... (22 h 10)

Ils peuvent rire de l'autre côté. Vous pouvez rire. Riez. Mais, pour certains et pour plusieurs citoyens du Québec, le dimanche, ça a une valeur certaine. Riez. Mais vous viendrez vous expliquer auprès de mes dépanneurs. Vous viendrez vous expliquer auprès des travailleurs. Vous viendrez expliquer votre arrogance auprès d'une majorité de la population et, dans quelques années, si jamais votre loi fait les ravages qu'on peut escompter et que les monopoles prennent de plus en plus de force au niveau de l'alimentation, vous viendrez expliquer ce que vous avez fait aux yeux des consommateurs. Vous viendrez expliquer aux petits Québécois qui auront dû fermer, parce que la concurrence était devenue déloyale, que vous avez été un gouvernement qui a pensé à la collectivité au Québec.

Je termine en vous disant, M. le Président, que la vérité a ses droits, en cette Chambre. Quand un député n'est pas capable seulement de lire les paragraphes noir sur blanc, c'est un député très petit, M. le Président. Et un gouvernement qui se fout des consensus de la population, c'est un gouvernement qui est appelé à être remplacé à très court terme.

Le Président: Je vais maintenant reconnaître M. le ministre de l'Industrie, du Commerce et de la Technologie, dans l'exercice de son droit de réplique.

M. Gerald Tremblay (réplique)

M. Tremblay (Outremont): M. le Président, je voterai bientôt en faveur du projet de loi 75, Loi sur les heures et les jours d'admission dans les établissements commerciaux. Le dossier des heures d'affaires fait partie de mon quotidien depuis huit mois. En tant que ministre de l'Industrie, du Commerce et de la Technologie, je me suis engagé à trouver une solution à une situation qui s'aggravait de semaine en semaine, et ceci, principalement à cause de l'iniquité de la loi.

La député de Taillon a beaucoup parié de

valeurs. J'aimerais vous en parler un peu, des valeurs; pas de celles des autres, mais des miennes. De mon père, j'ai hérité certaines valeurs dont la justice et le besoin de contribuer au bien-être d'une société. Je me suis impliqué pour enseigner aux jeunes, pendant un certain nombre d'années, l'importance de l'initiative, du jugement, du sens des responsabilités et du sens des affaires. Lorsque la majeure partie des intervenants assistaient, à la fin des années soixante-dix, passivement à la liquidation des petites entreprises québécoises, je me suis impliqué pour concevoir un concept qui est appelé, aujourd'hui, le redressement des entreprises. Lorsqu'en 1981 300 000 petits épargnants risquaient de perdre leurs épargnes, je me suis impliqué pour redresser les Caisses d'entraide économique. J'ai accepté, en 1986, la présidence de la Société de développement industriel du Québec pour aider les petites entreprises à devenir plus prospères. Oui, je suis un petit Québécois et, lorsque j'ai décidé de m'impliquer en politique, c'est pour exercer une influence directe sur les décisions qui sont appelées à marquer notre avenir collectif.

Un projet de loi, pour moi, c'est très sérieux, parce que ça affecte des êtres humains. Les heures d'affaires affectent toute la population. Lorsqu'on m'accuse d'avoir déposé 25 amendements, qu'on soit donc, au moins, honnête. Il y a eu trois amendements majeurs, dont deux que j'avais déjà annoncés. J'ai passé la fin de semaine à relire, relire et relire le projet de loi pour qu'il y ait le moins de failles possible et pour qu'il soit le plus parfait possible.

J'ai été également très prudent dans ma démarche. J'ai mis de l'avant les trois principes: l'équité, les besoins réels et la qualité de la vie. J'ai consulté, M. le Président, jusqu'à la dernière minute, tous les intervenants, sans exception. Encore aujourd'hui, j'ai écouté attentivement pendant plus de huit heures, pour un total de 200 heures de consultations, incluant la préparation de la loi. Plus j'écoute, plus je suis sûr de mon choix. L'Opposition continue à interpréter mon silence, mon regard et ma présence comme de l'orgueil, de l'entêtement et on a ajouté tout à l'heure comme de l'intransigeance, de l'arrogance et du mépris. On m'accuse d'avoir subi des pressions. Je dois vous dire qu'en mon âme et conscience je n'ai subi de pressions d'aucun intervenant, qu'il soit gros ou petit.

Malgré l'excellente présentation de ce matin de la députée de Taillon, elle n'a pu me convaincre que la position qu'elle a toujours défendue dans ce dossier aurait été préférable à celle qui sera adoptée bientôt. La décision que j'ai prise, je l'ai prise dans le meilleur intérêt de la collectivité québécoise. L'avenir nous dira qui a raison et je vivrai avec ma décision. Mais l'avenir, M. le Président, nous oblige à travailler davantage ensemble pour bâtir une société d'avenir qui favorisera le développement social, culturel et économique du Québec. J'ai confiance en l'avenir. Je suis prêt à relever un autre défi et j'ai bien hâte de passer à autre chose.

Des voix: Bravo!

Le Président: Le débat étant terminé, nous allons maintenant procéder à la mise aux voix de la motion d'adoption du projet de loi 75.

Une voix: Vote enregistré.

Le Président: Vote enregistré, donc qu'on appelle les députés! (22 h 18 - 22 h 27)

Le Président: MM. et Mmes les députés, je vous invite à prendre vos places, s'il vous plaît.

S'il vous plaît, MM. et Mmes les députés! À l'ordre, s'il vous plaît! Je requiers la collaboration des députés, s'il vous plaît. Mmes les députées, MM. les députés! S'il vous plaît!

Nous allons maintenant mettre aux voix la motion d'adoption du projet de loi 75, Loi sur les heures et les jours d'admission dans les établissements commerciaux.

Que ceux et celles qui sont en faveur de cette motion veuillent bien se lever, s'il vous plaît.

Le Secrétaire adjoint: M. Bourassa (Saint-Laurent), M. Pagé (Portneuf), Mme Bacon (Cho-medey), M. Bourbeau (Laporte), M. Côté (Rivière-du-Loup), M. Tremblay (Outremont), M. Elkas (Robert-Baldwin), M. Lefebvre (Frontenac)...

Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît!

Le Secrétaire adjoint: ... M. Cusano (Viau), M. Picotte (Maskinongé), Mme Robillard (Chambly), M. Blackburn (Roberval), M. Maciocia (Viper), M. Middlemiss (Pontiac), M. Bélisle (Mille-Îles), Mme Dionne (Kamouraska-Témiscouata), Mme Pelchat (Vachon), M. Lemire (Saint-Maurice), M. Poulin (Chauveau), M. Thérien (Rousseau), M. Benoit (Orford), M. Williams (Nelligan), M. Kehoe (Chapleau), M. Doyon (Louis-Hébert), M. Fradet (Vimont), M. Richard (Nicolet-Yamas-ka), Mme Bégin (Bellechasse), M. Bélanger (Laval-des-Rapides), M. Gauvin (Montmagny-L'Islet), M. Chenail (Beauharnois-Huntingdon), M. Gautrin (Verdun), M. Larouche (Anjou), M. Khelfa (Richelieu), M. Gobé (LaFontaine), Mme Ho-vington (Matane), M. Joly (Fabre), M. LeSage (Hull), M. Bergeron (Deux-Montagnes), M. Borde-leau (Acadie), M. Audet (Beauce-Nord), M. Parent (Sauvé), M. Camden (Lotbinière), M. Bradet (Charlevoix), Mme Cardinal (Châteauguay), M. Farrah (Îles-de-la-Madeleine), M. Forget (Prévost), Mme Loiselle (Saint-Henri), M. Lafrenière (Gatineau), M. Lafrance (Iberville), M. MacMillan (Papineau).

Le Président: Que ceux et celles qui sont

contre ce projet de loi veuillent bien se lever, s'il vous plaît.

Le Secrétaire adjoint: M. Chevrette (Joliette), M. Perron (Duplessis), Mme Blackburn (Chicoutimi), Mme Marois (Taillon), M. Garon (Lévis), Mme Harel (Hochelaga-Maisonneuve), M. Jolivet (Laviolette), M. Baril (Arthabaska), M. Dufour (Jonquière), M. Lazure (La Prairie), M. Gendron (Abitibi-Ouest), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Léonard (Labelle), Mme Vermette (Ma-rie-Victorin), M. Claveau (Ungava), M. Boulerice (Sainte-Marie-Saint-Jacques), M. Morin (Dubuc), Mme Caron (Terrebonne), M. Boisclair (Gouin), M. Bourdon (Pointe-aux-Trembles), M. Trudel (Rouyn-Noranda-Témiscamingue), Mme Dupuis (Verchères), M. Beaulne (Bertrand), Mme Carrier-Perreault (Les Chutes-de-la-Chaudière).

M. Libman (D'Arcy-McGee).

Le Président: Est-ce qu'il y a des abstentions? S'il vous plaît! S'il vous plaît!

Le Secrétaire: pour: 50 contre: 25

Le Président: La motion est adoptée. M. le leader du gouvernement.

Projet de loi 50

Prise en considération du rapport de la commission

M. Pagé: M. le Président, j'appelle la prise en considération du rapport sur le projet de loi 50, Loi modifiant la Loi sur la Régie de l'assurance automobile du Québec et d'autres dispositions législatives, qui est prévue à l'article 44 du feuilleton.

Le Président: Alors, à l'article 44 du feuilleton, nous allons maintenant prendre en considération le rapport de la commission de l'aménagement et des équipements sur le projet de loi 50, Loi modifiant la Loi sur la Régie de l'assurance automobile du Québec et d'autres dispositions législatives. Je prierais les députés, s'il vous plaît, qui doivent quitter l'Assemblée, de le faire le plus rapidement possible et en silence.

Mmes et MM. les députés, s'il vous plaît. Je requiers la collaboration des députés, s'il vous plaît. S'il vous plaît! Mmes et MM. les députés, s'il vous plaît, je vous invite à l'extérieur de l'Assemblée. Nous devons procéder aux travaux.

Je suis donc prêt à reconnaître un premier intervenant, M. le ministre des Transports.

M. Sam L Elkas M. Elkas: M. le Président, le député de

Lévis, président de la commission de l'aménagement et des équipements qui a reçu le mandat d'étudier le projet de loi 50, a soumis son rapport mardi matin à cette Chambre. Sans honneur, a-t-il tenu à souligner. En effet, M. le Président, il n'a pas de quoi être fier puisque lui et les autres membres de sa formation politique n'ont jamais permis que l'étude détaillée du projet de loi puisse commencer. On n'a eu droit qu'à une litanie de mesures dilatoires qui n'ont fait que tuer le temps puisque nous ne pouvions jamais procéder à l'étude réelle du projet de loi 50. Les membres de l'Opposition s'insurgeaient contre le fait qu'il n'y avait que treize heures de débat, treize longues heures de débat, M. le Président, et je vous dis qu'il aurait pu y en avoir cent treize, ça n'aurait changé absolument rien.

Reprenons, si vous voulez bien, M. le Président, les motions qui ont été proposées par les membres de l'Opposition. Il y a eu huit motions, treize heures, M. le Président. Cela, déjà, en dit beaucoup. La première motion me demandait d'entendre le Vérificateur général. La lettre de réponse du Vérificateur général à la requête du député de Lévis a été déposée à la commission. Elle était très très claire.

Le Vérificateur a tenu à rappeler qu'il s'agissait de la souveraineté du Parlement. "Le Vérificateur général n'a pas à porter de jugement sur les décisions prises par le Parlement", écrit-il. La lettre dit également que le Vérificateur général n'est pas au-dessus du Parlement, mais qu'il en est le préposé et que toute vérification ne doit pas mettre en cause le bien-fondé des politiques et des objectifs de programmes d'un organisme public ou d'un organisme du gouvernement.

La deuxième motion a demandé d'entendre le conseil d'administration de la Régie de l'assurance automobile du Québec. Si on avait procédé en toute bonne foi à l'étude détaillée du projet de loi, le président de la Régie, M. Jean-Paul Vézina, qui était dans la salle avec moi-même, aurait pu répondre à toutes les questions des membres de l'Opposition qui traitaient d'ailleurs de la loi 50. Mais ce n'était pas leur intention, de toute évidence.

La troisième motion a fait appel à la Fédération de l'âge d'or du Québec. Avec cette troisième motion, nous entamions un retour au passé, avec des discours centrés sur le projet de loi 92 sur la réforme de l'assurance automobile du Québec adopté au printemps de 1989, après son étude en commission parlementaire par les mêmes membres de l'Opposition. On a tenté par tous les moyens d'établir un lien entre le projet de loi 92 et le projet de loi 50, en insinuant que le gouvernement tentait de s'enrichir sur le dos des personnes âgées en ce qui concerne les indemnisations d'accidents d'automobile.

Après une quatrième motion demandant l'ajournement et tous les discours qui s'ensuivi-

rent, nous sommes passés à la motion cinq qui a été, évidemment, une suite logique à la motion trois. Ils ont demandé d'entendre la Fédération des femmes du Québec. Là encore, il s'agissait de poursuivre le même argument incidieux: établir un lien entre la loi 92 et le projet de loi 50. On accusait donc maintenant le gouvernement de pénaliser les femmes au foyer et les personnes âgées.

Les modifications qui ont été apportées à la Loi sur l'assurance automobile du Québec, entrées en vigueur le 1er janvier 1990, ont injecté plus de 70 000 000 $ en indemnités supplémentaires annuelles à l'ensemble des victimes de la route. En plus, d'autres augmentations sont prévues pour les années 1991, 1992 et 1993. Tant au niveau des groupes de l'âge d'or comme des représentants des groupes féminins, des contacts avaient déjà été faits par les gens de la Régie et d'autres rencontres étaient prévues, ainsi que des campagnes de publicité pour mieux diffuser l'information en ce qui concerne les modalités d'indemnisation pour ces groupes en particulier. La futilité de cette motion était donc évidente.

M. le Président, une tactique d'intimidation par excellence: une sixième motion, cette fois pour convoquer les représentants de l'Association nationale des camionneurs artisans inc. J'étais heureux de la présence à la commission d'un groupe de camionneurs, très nombreux et j'ai parlé longuement avec quelques-uns d'entre eux, après l'ajournement. Ils ont pu entendre de leurs propres oreilles, les propos de membres de l'Opposition et comprendre à quel point les gestes posés par ceux-ci étaient pour des fins partisanes. (22 h 40)

La 7e motion convoquait l'Association des victimes d'accidents d'automobiles du Québec. Avec toute la sympathie que j'ai pour ces malheureuses victimes d'accident de la route, M. le Président, leurs cas ne concernent pas le projet de loi 50, sinon pour mettre en évidence le besoin de réfection des routes du Québec pour améliorer le bilan routier. Mais je ne crois pas que c'était l'intention de auteurs de cette motion.

Finalement, M. le Président, une 8e motion convoquant le Protecteur du citoyen. La Régie a en permanence dans ses locaux deux représentants du bureau du Protecteur du citoyen. Ces personnes discutent sur une base continuelle des dossiers litigieux avec les fonctionnaires responsables. La Régie est au service de plus de 4 000 000 de Québécois. M. le Président, il est normal qu'il y ait des cas difficiles à solutionner. Le député de Lévis a cité en long et en large le rapport annuel du Protecteur du citoyen, en mentionnant lui-même qu'il existait une excellente collaboration avec la Régie. En 1988, sur 35 895 demandes d'indemnisation, il y a eu au moins 1000 plaintes, dont la majorité s'est avérée non fondée. À mon avis, compte tenu du volume, le bilan est assez favorable. Pourquoi faire venir le Protecteur du citoyen pour entendre dire que les choses vont bien, sinon pour retarder encore, M. le Président, l'étude du projet qui nous concernait?

Huit motions dilatoires en treize heures, M. le Président, voilà le bilan de la commission. Ce n'est, en effet, pas un bilan honorable pour les membres de l'Opposition. J'ai quand même espoir, M. le Président, que nous pourrons, malgré tout, voter l'adoption de ce projet de loi afin de libérer les sommes nécessaires au financement du plan quinquennal du ministère des Transports dont l'objectif est d'améliorer la sécurité du réseau routier du Québec, auquel les Québécois ont droit et qu'ils attendent avec impatience. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Cannon): Merci, M. le ministre des Transports. Je suis maintenant prêt à reconnaître le prochain intervenant, M. le député de Lévis.

M. Jean Garon

M. Garon: M. le Président, je vous dirai que le ministre, ce soir, en pariant une dizaine de minutes, un peu plus de dix minutes, a parlé, je dirais, à peu près plus longtemps qu'il a parlé pendant les treize heures de la commission parlementaire où il n'a à peu près pas ouvert la bouche et il n'a pas pris la peine de répondre aux questions qui lui étaient présentées par les membres de la commission. Normalement, l'étude en commission parlementaire d'un projet de loi, c'est une étude détaillée, article par article, et qui est précédée d'une période de remarques préliminaires et suivie d'une période de motions préliminaires avant de faire l'étude article par article.

Normalement, à ce stade de l'étude d'un projet de loi, les membres de la commission peuvent poser des questions en général sur le projet de loi. M. le Président, on a eu la surprise de notre vie de voir un ministre qui n'a répondu à aucune question, qui a dit: Je répondrai à ça plus tard. Mais il ne nous avait pas dit que plus tard, c'était un bâillon, de telle sorte que, à aucun moment, le ministre n'a expliqué son projet de loi, n'a répondu aux questions qui lui ont été posées. Ça, c'est absolument anormal, pourtant on ne peut pas dire que le ministre, c'est un ministre fatigué. Contrairement à ce qu'a pu dire le député de Louis-Hébert, qui disait que les commissions parlementaires, ça use les ministres, c'était son deuxième projet de loi. Il y avait eu un petit projet de loi antérieurement, la loi 26, dans le domaine des transports. La loi 26 était, avec la loi 50 sur la Régie de l'assurance automobile, la deuxième loi dans le domaine des transports. Il me fait signe qu'il y en avait deux autres dans le domaine de la sécurité publique, mais quand même, je ne peux pas dire que le

ministre était usé, qu'il était épuisé, et puis, j'avais l'impression un peu qu'il venait se reposer en commission parlementaire parce qu'il se disait: Pendant que je suis là, les camionneurs ne peuvent pas me demander d'aller les rencontrer.

Ça faisait un peu son affaire d'être en commission parlementaire, sauf qu'il n'a répondu à rien. Il n'a pas répondu aux remarques préliminaires et il n'a pas voulu qu'on entende aucun des groupes qu'on a proposé d'entendre. Pourquoi? Parce que le ministre était au-dessus de ça. Malgré qu'il aille chercher, avec le projet de loi, 877 000 000 $ - ce n'est pas une loi de pinotte, là - 877 000 000 $ à la Régie de l'assurance automobile, 625 000 000 $ pour, dit-il, le réseau routier alors qu'il n'y a aucune augmentation de crédits pour le réseau routier en 1990, 1991 et 1992, selon les prévisions même du ministre des Finances.

Cette année, on ira chercher 363 000 000 $ sans qu'il n'y ait aucun travail additionnel dans le domaine routier. Mais le ministre... Pas d'explication, 625 000 000 $ plus des montants d'argent considérables pour des fins d'ambulances. Et même des sommes rétroactives, M. le Président, parce que le décret gouvernemental qui avait été fait antérieurement en 1988 n'était pas régulier. Le Conseil des ministres, avec tous les avis juridiques qu'il pouvait avoir, avec toute la batterie d'experts qu'il peut avoir, n'est même pas foutu de faire des règlements légaux, de sorte que dans le projet de loi on parle d'aller chercher 9 100 000 $ pour l'exercice financier 1988-1989 pour les ambulances, 37 200 000 $ pour l'exercice financier 1989-1990 et 37 500 000 $ pour l'exercice 1990-1991, en même temps que l'indexation pour les années à venir, ad vitam aetemam.

M. le Président, c'est quelque chose. Un gouvernement qui fait des règlements illégaux malgré la batterie d'experts, à son rythme, pas pressé, pas de "filibuster", pas d'étude de l'Opposition. Il les fait tout seul ses règlements, il n'a même pas à avoir l'approbation de l'Opposition. Bien il a réussi, malgré ça, à faire un règlement illégal. Et aujourd'hui il est obligé, par un projet de loi, de demander de ratifier des sommes qui ont déjà été versées ou encore d'autoriser rétroactivement à verser des sommes que la Régie n'aurait pas versées parce qu'elle n'avait pas le droit de les verser, malgré le règlement du gouvernement. On ne le sait pas, on ne l'a jamais su. Le ministre ne nous l'a jamais dit. Sauf qu'il va demander ces sommes-là. Ce qui veut dire, si on tient compte des années 1990, 1991, 1992, 1993, 1994, cinq ans, avec une indexation de 5 %, 877 000 000 $ que le ministre va aller chercher dans les fonds de la Régie pour verser au ministre des Finances, alors que l'argent n'appartient pas à la Régie. C'est l'argent des assurés; il n'appartient pas au ministre des Finances, il n'appartient pas au gouvernement. Et on ira siphonner la Régie de 877 000 000 $. Ce qui arrivera, M. le Président...

Ça n'arrive pas comme première mesure, c'est la deuxième fois, la troisième fois, depuis que les libéraux sont au pouvoir, qu'on siphonne la Régie. On a également, en 1986, voté une loi pour aller chercher 60 000 000 $ par année, indexés, pour verser à l'assurance-maladie. Ça veut dire qu'en 1986, 1987, 1988, 1989, 1990, sur cinq ans, comme il s'agit d'un montant indexé, 326 000 000 $, sans compter les sommes qui seront versées en 1991, 1992, 1993, 1994, où il y aura encore au moins 250 000 000 $. Plus 200 000 000 $, en 1988 et 1989, à raison de 100 000 000 $ par année, en disant que c'était pour des fins de sécurité routière dans la construction de routes, etc., et on constate que les fonds n'ont pas augmenté, ce que je démontrerai dans quelques minutes.

M. le Président, il s'agit de sommes d'argent considérables: 326 000 000 $ entre 1986 et 1990 pour verser à la Régie de l'assurance-maladie; 200 000 000 $, apparemment pour le ministre des Finances, on disait pour des fins de construction routière alors que ça n'ira pas là, ça n'est pas allé là. Et dans les années à venir, 625 000 000 $, prétendument pour les transports, alors que ça n'apparaît pas dans les crédits anticipés du ministre des Finances, et un autre montant d'argent considérable pour des fins d'ambulances. (22 h 50)

Pour les fins d'ambulances, M. le Président, décision gouvernementale absurde où, croyez-le ou non, quand ce ne sera pas la Régie de l'assurance automobile, ce sera, pour les ambulances, 70 $ du voyage plus le kilométrage; quand ça sera pour la Régie de l'assurance automobile, à chaque voyage, ce sera 1500 $ plus le kilométrage. En quoi ça va coûter 1430 $ de plus que pour tous les autres de transporter une victime d'accident d'automobile? 1500 $ du voyage plus le kilométrage, dans la région de Montréal. Pourquoi? En quoi ça coûte plus cher? Personne ne le sait, on n'a jamais eu d'explication et quand on l'a demandé à la commission parlementaire sur les transports, le ministre, député de Charlesbourg à ce moment-là, je vais vous dire qu'il avait l'air aussi surpris que nous autres. Le président-directeur général de la Régie également. Je vais vous dire que c'était motus et bouche cousue. Pas grand-chose à dire non plus et il semblait aussi estomaqué que nous autres.

Et le ministre, quand je lui ai posé la question la première fois, n'avait pas l'air d'être au courant. Mais je vais vous dire, quand il essayait de m'expliquer qu'il voulait administrer la Régie comme un homme d'affaires... Trouvez-moi l'homme d'affaires qui administrerait la Régie au point de vue des ambulances, comme l'a fait le député de Beauce-Sud, lorsqu'il est passé à la famille et je vais vous dire qu'il n'y a pas un commerce qui serait encore en vie au Québec.

Ils seraient tous en faillite, tous en faillite parce que c'est absurde. Quand vous contez ça aux gens, ils vous regardent, ils ont de la peine à vous croire. À tel point que, quand le leader de l'Opposition m'avait conté ça, j'avais demandé qu'il vienne faire les représentations lui-même en commission parlementaire. Je n'étais pas capable de croire ça, tellement je trouvais que c'était absurde.

Le député de Joliette était venu avec moi. On a commencé les questions. Je regardais, j'étais spectateur de cette interrogation, parce que ça s'était passé dans une autre commission parlementaire avec le député de Beauce-Sud qui était ministre et qui venait chercher, il demandait 1500 $ du voyage d'ambulance plus le kilométrage, alors que pour tous les autres dans notre société, ça va être 70 $ du voyage.

Je vois un député encore là qui me regarde, l'air ahuri; lui aussi ne comprend pas. Il n'y a personne qui comprend. Je vais vous dire que si, à chaque fois qu'on a un homme d'affaires en politique il fait ça, le gouvernement au complet va tomber en faillite. Si c'est ça administrer comme un homme d'affaires, je vais vous dire que j'espère qu'il n'y en aura pas beaucoup en politique, parce que, à 1500 $ du voyage d'ambulance, alors que pour les autres, c'est 70 $, essayons de trouver une explication; moi, je ne suis pas capable de comprendre.

Je mets même au défi la vice-première ministre qui me regarde, l'air surprise, de m'expliquer ça. Pourquoi la Régie de l'assurance automobile, par décision du gouvernement, doit payer 1500 $ du voyage plus le kilométrage alors que, pour les autres, ce sera 70 $? Pourquoi ça coûte 1430 $ de plus? Pourquoi? Je ne suis pas capable de comprendre.

Je vais vous dire que le député qui est ministre des Transports n'a pas l'air à comprendre lui non plus parce qu'il n'a pas donné une seconde d'explication. Et tous ceux à qui on demande la question au gouvernement nous regardent tous comme s'ils n'avaient pas été là lorsque la décision s'est prise. Ils ont l'air estomaqués eux aussi, parce que ça n'a pas de bon sens. Ça n'a pas de bon sens. On a l'impression que le Conseil des ministres au complet est tombé sur la tête. Ça n'a pas de bon sens. 1500 $ du voyage d'ambulance, quelle que soit la distance, puisque le kilométrage est en plus. Apparemment, pour sortir l'ambulance de l'hôpital et aller chercher un blessé, même si c'est à trois coins de rue et aller le mener à l'hôpital, trois coins de rue plus loin, 1500 $ plus le kilométrage. Ce n'est pas le kilométrage qui va coûter cher, mais 1500 $ du voyage. Si c'est un autre que la Régie de l'assurance automobile, 70 $. Je vois la ministre des Affaires culturelles, imaginez-vous si elle avait eu cet argent-là pour les bibliothèques ou pour d'autres fins! Je lui demande à elle aussi, si elle veut me répondre à ça. Comment ça se fait que ça coûte 1500 $ du voyage par décret gouvernemental, un voyage d'ambulance, alors que pour tous les autres dans la société, ce sera 70 $? Je demande des explications.

Les éditorialistes qui aiment ça commenter les choses, j'aimerais ça qu'ils me trouvent une explication. Il y a des gens qui écrivent dans les journaux et qui ont des explications, des fois, sur toutes sortes de sujets, j'aimerais ça qu'ils m'en trouvent une seule concernant le service ambulancier, pour essayer de nous expliquer pourquoi ça coûte 1500 $ du voyage pour la Régie de l'assurance automobile, alors que c'est 70 $ pour les autres. Pas d'explication.

Quand on a demandé, M. le Président, d'entendre des organismes, le Vérificateur général. C'est son travail; il est payé à peu près 100 000 $ par année, il pourrait peut-être bien donner un avis. D'autant plus que la loi dit, à l'article 45 du Vérificateur général: quand c'est important... De lui-même, on n'aurait même pas besoin de lui demander. Des fois, j'ai dit et je le répète: J'aimerais ça avoir Kenneth Dye comme Vérificateur général à Québec. Lui, il en donne des avis à Ottawa. Il ne s'agit pas de quelques piastres là. Il a répondu à ma lettre. Il a dit: Quand je ferai mon rapport annuel, je pourrai en parler. Il ne dit pas qu'il n'en parlera pas, il dit: Quand je ferai mon rapport annuel. Sauf que si la caisse est partie... C'est un peu comme si un policier disait, si je l'appelais alors qu'il se faisait un vol de banque: J'irai quand le vol sera fait. Vous allez me dire qu'il aurait peut-être été mieux d'agir par prévention, d'agir avant. Le Vérificateur général, c'est un peu comme le gouvernement, il dit: Je répondrai dans mon rapport annuel, plus tard. J'aurais aimé qu'il me donne une opinion immédiatement et c'est pour ça que j'ai demandé à la commission de le convoquer à la commission. Les libéraux n'ont pas voulu. Les députés du Parti québécois ont voulu et, si les libéraux avaient voulu, il aurait été obligé de venir donner son opinion.

La Régie de l'assurance automobile, je voulais l'entendre en commission. Nous, on prétend que la loi ne permet pas de faire ce que veut faire le ministre avec la loi 50. J'ai même avisé, en commission parlementaire, que la Régie de l'assurance automobile avait un article 16 et, un article 16.1, qui dit que le conseil d'administration ne peut pas être poursuivi pour les actes qu'il accomplit de bonne foi ou les actes légaux qu'il accomplit, et j'ai dit que, si on versait l'argent et si j'étais responsable de la Régie un jour, je n'aurais aucune crainte de prendre des poursuites contre un conseil d'administration qui aurait fait des actes illégaux. Parce qu'il n'est pas possible qu'on ait demandé des sommes d'argent aussi considérables sans avis juridique, on n'en a produit aucun et, chaque fois qu'on veut faire comparaître quelqu'un devant la commission pour dire: Est-ce qu'il y a un avis juridique, le ministre n'a pas parlé de

ces avis juridiques, ne veut pas en parler, au contraire, il sait à peine qu'il est dans le parlement.

Je dois vous dire que le ministre, concernant cette loi-là, les explications... Je défie n'importe quel journaliste ou n'importe quel commentateur de lire les propos du ministre en commission parlementaire; le temps de la commission a duré 13 heures et le ministre n'a pas pris 15 minutes. Pour 877 000 000 $, ça fait cher la minute! Pourquoi? Parce qu'il ne s'est pas donné la peine. On a voulu faire entendre la Régie de l'assurance automobile pour lui demander: Avez-vous le droit de dépenser des sommes d'argent pour la sécurité routière, alors que votre loi dit quand la sécurité routière peut être touchée, quand vous pouvez toucher à la sécurité routière? C'est défini à l'article 2, paragraphe d, de la loi où on dit que, la sécurité routière - et on spécifie les deux cas dans la loi - c'est, premièrement, quand il s'agit du comportement des automobilistes, comportement, ça peut vouloir dire mettre la ceinture ou, encore, quand il s'agit de la sécurité routière pour des fins d'inspection des véhicules moteurs, par exemple, si les véhicules n'ont pas de freins, des freins défectueux ou si l'automobile n'est pas en bon état, là, la Régie a le droit d'intervenir, pour ne pas qu'il y ait des automobiles qui circulent sur la route qui sont en mauvais état ou, encore, lorsque les comportements des automobilistes ne sont pas corrects, la Régie peut intervenir.

Mais elle n'est pas là, la Régie, pour prendre des sommes d'argent de l'assurance pour mettre des couches d'asphalte, des couches de gravelle, pour payer pour les barres blanches. On est dans une époque nouvelle, M. le Président, où le ministre des Transports... Quand les gens avaient demandé la route à quatre voies vers le lac Saint-Jean, l'ancien ministre avait promis un grand bout à Stoneham, vers le parc des Laurentides, où, récemment, il est allé faire une conférence de presse devant les critiques générales. Il y est allé et il a promis des barres blanches. Je dois vous dire que c'est un événement historique. Je n'avais jamais vu, moi, un ministre promettre des barres blanches. J'ai déjà vu des gens qui ont promis des routes de gravelle, des couches d'asphalte, des nouvelles routes, des autoroutes, mais promettre des barres blanches, là, je me dis: Là, on est vraiment rendu dans le fond de la chaudière pour promettre des barres blanches, pour présenter des bilans ou des projets ou en disant qu'au cours des prochaines années on va dépenser tant de millions pour les barres blanches. Je dois vous dire que je n'avais vu ça. (23 heures)

Je vois la vice-première ministre qui me regarde. Pour moi, elle n'a pas lu les articles de journaux qui ont rapporté les paroles du ministre qui avait promis des barres blanches, qui avait dit qu'au cours des prochaines années il dépense- rait 30 000 000 $ pour faire des barres blanches. Je vais vous dire que les gens auraient aimé mieux entendre parler des fonds de routes en dessous des barres blanches. Ils auraient été plus intéressés. Mais le gouvernement en est rendu là, alors ce n'est pas surprenant qu'on se retrouve avec un réseau routier complètement bousillé, détérioré sous le gouvernement actuel. Ce n'est pas surprenant qu'on se retrouve devant des manifestations de camionneurs comme jamais auparavant. Le gouvernement a été chanceux, hein, que les associations de camionneurs ne viennent pas en même temps. Ils sont venus à 15 jours d'intervalle l'un de l'autre. Mais quand c'est rendu à 3000 camionneurs pendant plusieurs jours et, ensuite, 15 jours après, 2000 à 3000 autres camionneurs qui sont ici autour du parlement ou dispersés dans des centres de la ville de Québec depuis... C'est la 16e journée aujourd'hui, ce sera la 17e journée demain s'ils sont encore là. Ça fait quelque chose, M. le Président.

Ce n'est sans doute pas parce que les gens sont heureux s'ils viennent par milliers demander au gouvernement tout simplement de respecter ses engagements. On a cru au ministre, nous autres. Pendant trois ans, il nous a dit des choses, l'ancien ministre, député de Charlesbourg. Et le ministre actuel ne répond plus et le sous-ministre dit: Le ministre est changé, vous devez oublier tous les engagements du ministre antérieur. Les camionneurs sont ahuris. Ils disent: On a cru que les promesses du gouvernement faites par l'ancien ministre, député de Charlesbourg, seraient respectées, parce que c'étaient des promesses du gouvernement par un ministre qui parlait au nom du gouvernement, qui avait l'autorité de parler au nom du gouvernement et, en même temps, on se rend compte que le sous-ministre, que tout le monde sait proche du premier ministre... Vous savez, les camionneurs ont vraiment compris rapidement que M. Bard était proche du premier ministre. Alors, ils l'ont marqué sur leurs pancartes pour montrer qu'ils le savaient. Pourquoi? Parce qu'ils se rendent bien compte, les camionneurs, et c'est pour ça qu'on a demandé de les entendre eux aussi... Pourquoi? Parce que, dans le rapport de la Régie de l'assurance automobile, il est indiqué qu'une des principales mesures de sécurité routière qu'il pourrait y avoir c'est le contrôle routier que revendiquent justement les camionneurs.

Et, comme on parle d'argent de la Régie de l'assurance automobile, il n'était pas inconvenant ni impensable qu'on demande à l'Association nationale des camionneurs artisans de venir nous rencontrer. Puis, si la commission avait eu à siéger, on aurait demandé aussi d'entendre l'autre association, dont M. Miller est le président, l'Association des propriétaires de camions-remorques indépendants. Parce que la Régie elle-même dit, dans son rapport: Une des façons d'améliorer la sécurité routière, c'est qu'il y ait

un véritable contrôle routier au Québec. Exactement. Les revendications des deux associations de camionnage qui ont dit: On était d'accord avec le député de Charlesbourg lorsqu'il nous promettait ça, mais il l'a promis pendant trois ans puis il ne l'a pas fait.

M. le Président, on a demandé aussi d'entendre l'Association des victimes d'accidents d'automobile du Québec. J'imagine que ça les intéresse si on vide la caisse de 877 000 000 $. C'est leur argent à eux puisqu'ils sont des assurés victimes d'accidents d'automobile. Ce n'était pas anormal. On a demandé également d'entendre la Fédération des femmes du Québec. Pourquoi? Parce que, avec la réforme, le changement de la loi en juin 1989, on a économisé sur le dos des femmes, essentiellement les mères de famille qui sont à la maison, plus particulièrement, ou les autres conjoints qui sont à la maison et qui n'ont pas d'emploi. Mais le plus grand nombre touché, ce sont les mères de famille qui sont à la maison et, avec la réforme, on ne veut plus, on ne peut plus leur supposer un emploi comme avant et elles sont coupées par le fait même. La Fédération des femmes du Québec s'était plainte de ça justement par un communiqué en janvier 1990. On voulait les entendre. On parle de politique familiale. Est-ce qu'on va faire une politique familiale en commençant d'abord par pénaliser les femmes ou les conjoints qui sont à la maison?

M. le Président, on voulait entendre aussi la Fédération des clubs de l'âge d'or du Québec. Pourquoi? C'est un autre groupe qui a été pénalisé par la réforme de la loi de juin 1990 puisqu'on dit qu'à partir de 64 ans leurs prestations sont coupées de 25 % et, à 68 ans, terminées. On coupera 25 % par année; 25 % à 64 ans, 25 % à 65 ans, 25 % à 66 ans, 25 % à 67 ans par rapport à la rémunération d'emploi qui est supposée à une victime d'accident d'automobile puis, après ça, terminée. À 68 ans, plus une cenne pour la rémunération d'emploi. Est-ce qu'on ne pense pas que la Fédération de l'âge d'or est intéressée ou n'est pas intéressée? Pourquoi essayer d'économiser des sommes d'argent sur le dos des gens les moins fortunés, les personnes âgées qui n'ont pas le temps de se refaire et, en plus, victimes d'accidents d'automobile ou, encore, les conjoints à la maison qui restent, la plupart du temps, à la maison pour s'occuper de leurs enfants à temps plein. Alors que tout le monde dit que ça prendrait une politique familiale, on aura eu un clou de cercueil dans la politique familiale avec les conjoints à la maison qui n'ont pas d'emploi à l'extérieur du foyer, comme on vient avec les heures d'affaires, pénaliser ceux qui sont au travail.

M. le Président, ce n'était pas inconvenant de demander à ces gens de venir nous renseigner, nous rencontrer et puis nous dire quelles difficultés rencontrait le Protecteur du citoyen.

Le Protecteur du citoyen a des pages dans son rapport annuel qui concernent les délais de la Régie de l'assurance automobile. Il fait plusieurs représentations sur ce qui devrait être fait pour améliorer l'administration de la Loi sur la Régie de l'assurance automobile au Québec. On voulait l'entendre. Pourquoi? Parce que le ministre va chercher 877 000 000 $ par cette loi-là, seulement au cours des cinq prochaines années, sans compter les années... Je n'ai pas voulu additionner les chiffres après cinq ans, mais, seulement en cinq ans, il va chercher 877 000 000 $. Il me semble qu'il n'était pas inconvenant de rencontrer ou de demander de rencontrer ceux qui sont touchés par ces mesures.

On voulait demander également au Club automobile du Québec, une association de protection de consommateurs dans le domaine de l'automobile. Et, également, l'Association de protection des automobilistes. On aurait voulu leur demander, également. Ce n'est pas inconvenant, ça. Ce sont les gens qui s'occupent de protection des automobilistes. Le ministre dit: Je ne veux rien savoir. Pourtant, il aurait été le premier à approuver et favoriser ces rencontres parce qu'il arrive. Il n'a pas de doctorat global. Il était dans le téléphone avant. Pas directement dans le téléphone, mais pour la compagnie de téléphone. Il était pour Bell Canada. Il n'est pas dit que quelqu'un qui travaille pour une compagnie de téléphone est spécialiste de l'assurance automobile, ce n'est pas évident. Ça aurait été une bonne chose pour lui d'entendre ces gens-là pour comprendre davantage leur situation plutôt que refuser de les entendre. J'ai été surpris. Je comprends qu'il vient de l'ouest de Montréal, mais ça n'aurait pas été mauvais. Le ministre de l'Éducation a déjà dit que le député de D'Arcy-McGee devrait sortir un peu, ça déniaise. Je pense aussi que ça aurait valu pour le ministre des Transports de sortir un peu de l'ouest de Montréal et d'aller voir un peu ce qui se passe dans les différentes régions du Québec ou, au moins, on était prêt à demander aux gens de venir en commission parlementaire sans déplacer le ministre pour qu'il vienne prendre connaissance de leurs problèmes. Ça déniaise aussi les ministres de connaître ces problèmes-là.

Mais non, le ministre a refusé. M. le Président, quand on parle de treize heures de commission parlementaire et bâillon après treize heures, ça là, M. le Président, c'est un précédent historique. Je suis persuadé que dans tout Parlement démocratique du monde occidental il n'y a pas un Parlement démocratique du monde occidental où on a bâillonné le Parlement et l'Opposition sur un projet de loi de nature fiscale, où on va chercher 877 000 000 $ après treize heures de débats en commission parlementaire et sans vouloir entendre davantage l'étude du projet de loi. Je suis persuadé que c'est un précédent.

Si on fait une recherche, si des étudiants

veulent faire un projet de recherche et qu'ils regardent ce qui se passe ailleurs dans les pays démocratiques du monde, je suis persuadé qu'ils n'auront pas de précédent où on bâillonne le Parlement, bâillonne l'Opposition après treize heures de débats. Alors qu'on est en train de dénaturer la Régie de l'assurance automobile, une compagnie d'assurances qui appartient à tous les contribuables du Québec obligatoirement assurés en vertu de la loi - il y a 4 000 000 d'assurés - et qu'on vide la caisse, que le ministre des Finances part avec la caisse, avec la complicité du ministre des Transports qui est supposé être le gardien de la caisse... C'est lui qui serait supposé de dire non au nom des automobilistes. Au contraire, il tient le sac, il tient la poche pendant que le ministre des Finances met l'argent.

Moi j'ai appris à la petite école que celui qui aide à faire un crime est aussi coupable que celui qui le commet. Pourquoi c'est un crime? Ce n'est pas l'argent du ministre des Finances, ce n'est pas l'argent du gouvernement, c'est l'argent des assurés, c'est l'argent des victimes d'accidents d'automobile et on n'a pas le droit de s'accaparer leur fonds, leur argent. S'il y en a de trop, et que la Régie de l'assurance automobile... J'ai bien dit que ce n'est pas fini ce débat-là. Même si vous avez mis le bâillon, ce n'est pas fini. Ce n'est pas fini! La Régie de l'assurance automobile n'avait pas le droit de collecter de l'argent plus qu'elle en avait besoin pour fins d'assurance automobile. (23 h 10)

Ou elle en a trop, ou elle n'en a pas trop. Si elle en a trop, c'est parce qu'elle en a perçu trop et elle devrait le remettre aux assurés. Si elle n'en a pas trop et verse de l'argent dont elle a besoin, à ce moment-là, elle devrait augmenter les primes pour payer les prestations des assurés. Ça veut dire qu'il y aura des augmentations de prime pour les assurés dans les mois qui viennent; c'est ça que ça veut dire. Vous savez qu'on parie, avec ce montant d'argent là, avec la loi de 1986 et la loi de 1988, de près de 1 500 000 000 $; on parie de beaucoup d'argent. On ne parie pas de pinottes, là, on parie de 1 500 000 000 $ qu'on aurait été siphonner de la caisse de la Régie de l'assurance automobile.

J'étais content, j'ai vu un editorial dans Le Soleil récemment, ce matin. J'ai dit: Bon! Un éditorialiste qui écrit. Ce n'est pas simple, il faut regarder le projet de loi, il faut l'analyser. J'ai dit: Je comprends que ce n'est pas simple, ça prend un petit peu de travail. Mais je trouve ça de valeur qu'on prêche actuellement, qu'on explique ce qui se passe et qu'il n'y ait pas plus de commentaires de la part de nos éditorialistes, de nos gens qui commentent l'actualité, de nos gens qui sont là pour jouer un rôle un peu moralisateur par rapport à ce qui se fait dans le parlement. Mais ça viendra parce qu'on ne peut pas faire un hold-up de cette ampleur sans que ça paraisse à un moment donné. Ça reviendra, vous savez, parce qu'on ne peut pas faire des choses comme ça sans...

Vous savez, le gouvernement, on lui avait dit, en commission parlementaire: Vous n'avez pas le droit d'aller chercher de l'argent pour des fins d'ambulances. Ah! Il y a des gens qui se pensaient au-dessus de ça. Aujourd'hui, on est obligé de faire un projet de loi rétroactif parce qu'on n'avait pas le droit On avait raison, l'Opposition avait raison, malgré toute l'expertise qui est avec le gouvernement pour faire les projets de règlement. On avait raison. Là, on est obligé d'aller chercher des sommes rétroactivement, parce qu'on n'avait pas le droit.

Aujourd'hui, quand le ministre essaie de faire croire, après ça, que c'est pour mettre plus d'argent dans les routes, alors qu'on voit que, dans le budget du ministre des Finances, il n'y a pas d'argent additionnel pour les routes... Il n'y a pas d'argent additionnel pour les routes, j'en ai fait la démonstration. Par rapport à 1989, il y a moins d'argent, en termes de travaux, pour les routes, en 1990, puisqu'il y a le même montant d'argent au total, 1 020 000 000 $; avec le taux d'inflation à 4,8 %, ça veut dire, avec le taux que prend le ministre des Finances, 49 000 000 $ de moins de travaux en 1990. Ça va vouloir dire aussi moins de travaux en 1991 qu'en 1989. Et si on additionne 1990, 1991 et 1992 ensemble, en dollars constants de 1989, et on fait la moyenne, il y aura une moyenne, pour ces trois années-là, de moins d'argent qu'en 1989. Et on dit qu'en 1993-1994 il pourra y avoir un peu plus d'argent, c'est-à-dire 104 000 000 $ sur deux ans, à la condition que le taux d'inflation ne dépasse pas 5 %. Je vais vous dire que celui qui peut gager qu'il y aura un taux d'inflation qui ne sera pas supérieur à 5 % en 1991, ii est bon. Parce qu'avec la TPS qui s'en vient il y en a qui parient, seulement en termes d'augmentation... Le gouvernement fédéral reconnaît une augmentation de 1,2 % de l'inflation. Et il y en a d'autres qui disent que l'inflation pourrait augmenter, l'an prochain, seulement à cause de la taxe sur les produits et services du gouvernement fédéral, de 2 %à3 %.

En attendant, on pénalise les gens, on les siphonne et on fait des bâillons après trois heures de débat, dans un cas, et dans le cas des heures d'affaires, vingt heures de débat. Je vais vous dire que ce n'est pas un jour glorieux, ce n'est pas une session glorieuse pour le gouvernement. Et, si les gens ne sont pas capables de faire leur travail mieux que ça, c'est au premier ministre d'assumer ses responsabilités. Il faut être capable de faire des projets de loi. J'en ai fait 60, comme ministre; je n'ai pas fait un bâillon une seule fois. J'ai fait une Loi sur la protection des terres agricoles, qui était une loi considérable; on n'a pas fait de bâillon. On a entendu tout le monde, on est allé même dans les régions pour les entendre. Et, une fois que la

loi a été déposée, on a entendu tous ceux qui voulaient être entendus également. Et on a fait tout le débat que l'Opposition a bien voulu faire dans le temps, sans faire de bâillon.

Dans d'autres cas, j'ai vu même - je vois le député de Portneuf qui est ici - la loi sur le parc agro-alimentaire de Montréal, où il y avait même une entente entre le gouvernement du Québec et Montréal. L'Opposition n'a pas voulu passer le projet de loi au mois de décembre de l'année 1984 - si ma mémoire est bonne, décembre 1984. Chacun est venu parler, même ceux qui ne connaissaient rien dans le domaine agricole, pour empêcher que ça passe. Il y a même le député de Nelligan qui était venu faire un discours à ce moment-là; il n'avait aucune idée de quoi il s'agissait, mais il parlait pour parier, pour prendre le temps. On n'a pas adopté le projet de loi à Noël parce qu'on n'a pas voulu faire de bâillon, même s'il y avait une entente entre le gouvernement du Québec, le ministère de l'Agriculture et la ville de Montréal. Et on n'a pas essayé de faire de simagrées, on a pris notre biscuit parce qu'on a dit: Ce n'est pas comme ça qu'on va faire des lois. Et on a attendu plus tard pour passer la loi. Parce que c'est comme ça que ça fonctionne, un Parlement. Un Parlement qui fait des bâillons comme il le fait, après quelques heures de débat comme ça, ce n'est pas un gouvernement qui a beaucoup de fierté et ce n'est pas, surtout, un gouvernement qui a le sens démocratique.

C'est le premier ministre qui est responsable. Le premier ministre est responsable. C'est le premier ministre, quand même, qui a fait "l'appointement" de ses ministres. C'est le premier ministre également qui, dans des questions comme ça, donne son autorisation. C'est clair que le premier ministre, il a fallu qu'il donne son autorisation pour procéder de cette façon-là. Mais ce n'est pas à l'honneur du gouvernement. Ce n'est pas à l'honneur du gouvernement qu'on ait procédé de cette façon-là dans un projet de loi comme celui-là. Ah! je comprends, ça va permettre de faire quoi? Ça va permettre de passer une loi, de force, sans débat, sans débat, mais ce n'est pas de cette façon-là qu'on fonctionne dans une société démocratique.

M. le Président, vous savez, l'Opposition, quand on regarde... On a l'impression, quand le gouvernement considère l'Opposition, qu'il considère qu'on est en charge de bâtons de Popsicle. On vient nous téter des consentements. On vient nous téter des consentements, mais je vais vous dire qu'on a l'impression de rester avec des bâtons de Popsicle.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Garon: Ce n'est pas comme ça qu'on fonctionne dans une société. Dans une société normale, il y a des débats ouverts...

Le Vice-Président (M. Cannon): M. le député, en conclusion, s'il vous plaît.

M. Garon: Oui, M. le Président. Dans une société normale avec des débats ouverts, les gens ont droit de participer dans une société démocratique et l'Opposition a un rôle à jouer pour faire valoir le point de vue de ceux qui ne sont pas d'accord avec le projet de loi. Et je peux vous dire, quand je regarde le nombre de ministres qui ne sont pas capables de répondre aux questions qu'on pose concernant le projet de loi, qui n'ont même pas d'explication, qui se réfugient dans le silence et après ça font des bâillons, sans avoir même expliqué leur projet de loi, c'est parce qu'on est bien gêné d'expliquer le projet de loi. Et je peux vous dire que ce projet de loi passera, au nom du gouvernement, comme un projet de loi honteux, honteux, dont il se souviendra longtemps et qu'on donnera comme exemple comme mauvais projet de loi dans les cours de droit de nos facultés de droit. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (m. cannon): merci, m. le député de lévis. je suis prêt à reconnaître le prochain intervenant. mme la députée de terre-bonne.

Mme Jocelyne Caron

Mme Caron: Merci, M. le Président. M. le Président, cette troisième motion de clôture, ce troisième bâillon est né, bien sûr, de l'impatience du ministre des Transports. Il faut dire, à sa décharge, qu'il était peut-être préoccupé, un petit peu distrait par les camionneurs qui envahissent le tour du parlement. Il faut dire que ce dossier-là il était un petit peu moins impatient de le régler. Il était moins pressé. Aller chercher de l'argent dans les poches des contribuables ou dans la caisse des assurés de la Régie de l'assurance automobile, ça c'est pressant. Mais régler des problèmes, ça c'est un petit peu moins pressant pour le ministre des Transports. Donc, pour aller chercher de l'argent, treize heures de commission ça semblait suffisant. Régler le problème des camionneurs, bien, ils sont encore ici depuis seize jours et ils attendent toujours la bonne volonté du ministre des Transports.

Donc, la motion de clôture est née de l'impatience du ministre. Mais le projet de loi 50, lui, il est né de l'appétit vorace, je dirais même féroce, M. le Président, de ce gouvernement devant les surplus de la caisse de la Régie de l'assurance automobile. Depuis des mois, le Conseil des ministres, le président du Conseil du trésor en tête, scrute attentivement tous les moyens possibles et impossibles - et quand c'est impossible on passe une nouvelle loi - pour aller chercher de l'argent, mais surtout sans que les contribuables ne s'en aperçoivent. Ça c'est la préoccupation première. Il ne faut pas que les

contribuables s'en aperçoivent trop. C'est évident qu'à cet égard la caisse de la Régie de l'assurance automobile constituait une cible extraordinaire. Ça ne paraît pas tellement. Les contribuables, on ne vient pas leur en demander à nouveau. On prend la caisse tout simplement. C'étaient donc 877 000 000 $ à portée de la main, une vraie mine d'or pour le gouvernement.

Qui a permis ce surplus de la caisse de la Régie de l'assurance automobile? Bien, ce sont les automobilistes. Donc, qui devrait bénéficier de ces surplus? Bien, les assurés eux-mêmes. On devrait diminuer les coûts pour les assurés si - et c'est là la question importante - la Régie fonctionne à merveille. Mais est-ce qu'elle fonctionne à merveille, M. le Président? Est-ce que la Régie de l'assurance automobile est efficace et satisfaisante? Est-ce que cette grande compagnie d'assurances collectives accomplit sa mission première? On va la relire sa mission première... (23 h 20)

Le Vice-Président (M. Cannon): M. le député de Duplessis.

M. Perron: Je m'excuse auprès de ma collègue. Est-ce que vous pourriez demander le quorum, s'il vous plaît.

Le Vice-Président (M. Cannon): Oui. Douze. Qu'on appelle les députés, s'il vous plaît! Ça va. Je constate effectivement qu'il y a quorum. Mme la députée de Terrebonne, si vous voulez poursuivre votre intervention s'il vous plaît.

Mme Caron: Merci, M. le Président. Ça confirme ce que je disais tantôt: la préoccupation première, c'est vraiment d'aller chercher de l'argent et non pas d'entendre les arguments de l'Opposition.

Donc, en avril 1977, la réforme de l'assurance automobile du gouvernement du Québec, qui était faite, il faut se le rappeler, par le ministère des Consommateurs, des Coopératives et des Institutions financières, c'était très clair. On disait: Nous nous sommes fixé comme objectif d'assurer une indemnisation meilleure et rapide - retenez bien - de toutes les victimes. Les dommages corporels représentent les pertes les plus importantes socialement. Donc, on voulait être rapide.

Pour voir si cette Régie fonctionne vraiment bien, on va prendre un exemple bien concret, M. le Président. Que faire en cas d'accident de la route? Je me demande si le ministre le sait. D'abord, je vous conseille beaucoup de patience parce que ça ne prend pas seulement treize heures d'étude en commission ou d'un dossier pour régler un problème avec la Régie de l'assurance automobile. Il faut d'abord compléter, bien sûr, un rapport, qui va être évalué; c'est plus que treize heures, c'est plus que seize jours. Et là, si on évalue positivement le dossier, il y a une indemnité de remplacement. Ah mais là, je ne vous souhaite pas, M. le Président, d'être une personne au foyer, d'être une mère de famille ou d'être une personne âgée ou un étudiant ou une étudiante, parce que, en partant, vous êtes pénalisé, parce que le travail que vous accomplissez n'a aucune valeur.

Et là, si vous avez le malheur d'avoir une rechute, eh bien, c'est la grande aventure qui commence: Bureau de la révision de la Régie de l'assurance automobile du Québec: entre un an, un an et demi. Si la décision est négative, ce qui arrive dans 80 % des cas, eh bien là vous faites un appel à la Commission des affaires sociales et, là, préparez-vous parce que de la patience... C'est de la patience infinie qu'il faut. Parce que c'est de deux à trois ans minimum pour être entendu.

Ce que je vous donne là, M. le Président, ce ne sont pas des cas d'exception. En juin 1990, il y avait 4300 personnes au Québec qui attendaient au Bureau de révision et le nombre était encore plus élevé à la Commission des affaires sociales. Si, par malheur, vous êtes victime d'un acccident de la route en travaillant ou que vous êtes déjà une victime d'accident du travail, eh bien là c'est la grande partie de ping-pong en règle, M. le Président, parce que là on va vous transférer entre la CSST et la Régie de l'assurance automobile et là vous en avez pour des années à essayer de trouver une solution.

Est-ce qu'on se demande de l'autre côté que fait la personne en attendant, pour vivre? Qu'est-ce qu'elle fait? Est-ce que ces gens font du bureau de comté? Sûrement, ils ont dû en rencontrer des personnes victimes d'accident d'automobile, mais qu'est-ce qu'elles font? Elles vivent sur leurs économies, M. le Président. Certaines doivent vendre leur maison, dépenser l'argent de la vente de la maison et, en dernier recours, l'aide sociale, en attendant, qu'elles devront remettre si jamais elles gagnent leur cause.

Est-ce que ça répond vraiment au but visé? Non. Vous vous souvenez le slogan, M. le Président? C'était: "La personne avant toute chose". Avec des procédures bureaucratiques aussi longues, ce n'est plus la personne avant toute chose, M. le Président, pas du tout.

En résumé, avant d'aller chercher les surplus de la caisse de la Régie de l'assurance automobile, on doit se poser les questions suivantes: Est-ce que, dans les faits, la Régie a réussi à établir une efficacité dans le traitement des dossiers en révision? Non, M. le Président. Est-ce qu'elle a réussi à établir une efficacité dans le traitement des dossiers en appel à la Commission des affaires sociales? Non, M. le Président. Est-ce qu'on a réussi à établir des mesures plus équitables pour l'évaluation des indemnités de remplacement pour les personnes au foyer, pour les mères de famille, pour les personnes âgées, pour les étudiants et les

étudiantes? Non, M. le Président. Est-ce que les accidentés restés invalides reçoivent présentement des indemnités équitables, par rapport au coût de la vie? Non, M. le Président. Si la Régie de l'assurance automobile réussit à remplir toutes ces conditions à la base même de sa mission et non celles qu'on veut lui donner maintenant, si, après tout ça, il reste de l'argent - ce dont je doute fort - et qu'elle ne sait vraiment plus quoi faire, M. le Président, bien, elle pourra toujours réduire les primes de l'assurance automobile, M. le Président. Quant à moi, ce serait la première bonne nouvelle pour les consommateurs depuis le 25 septembre dernier. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Cannon): Merci, Mme la députée de Terrebonne. M. le député de Bertrand.

M. François Beaulne

M. Beaulne: Merci, M. le Président. Lorsqu'elle a été créée, en 1977, la Régie de l'assurance automobile du Québec visait essentiellement cinq objectifs que je vous rappellerai. D'abord, elle visait une indemnisation meilleure et rapide, au plus bas coût possible; deuxièmement, elle visait à réduire les coûts d'administration de l'assurance automobile et à assurer que le coût global de l'assurance reflète le service que les Québécois en retirent; troisièmement, elle visait une accessibilité de l'assurance à tous; quatrièmement, elle visait à améliorer le bilan routier du Québec par l'établissement de mesures de sécurité routière afin de diminuer les coûts du régime; cinquièmement, elle visait à favoriser le développement des entreprises québécoises en canalisant vers le secteur public une partie des fonds générés par l'assurance automobile.

En fait, la question qui avait motivé à l'époque la ministre Lise Payette pour introduire ce projet de loi était essentiellement le problème central qui était celui du retour aux assurés, sous forme de compensations, des primes perçues. La Régie de l'assurance automobile est avant tout une compagnie d'assurances. Or, toute bonne compagnie d'assurances se conforme aux politiques suivantes: ou bien elle augmente les primes lorsque la conjoncture l'exige, ou bien, elle baisse les primes pour faire bénéficier les assurés qui se conforment à ses objectifs.

Le gouvernement du Québec a eu comme objectif parallèle, depuis déjà plusieurs années, d'améliorer la sécurité routière. Cet objectif s'est manifesté de plusieurs façons par une campagne de publicité bien orchestrée contre l'alcool au volant, par l'imposition de cours obligatoires pour les plus jeunes, en prévision d'obtenir leur permis de conduire, par le resserrement du système de points de démérite, par le resserrement également des pénalités pour conduite avec facultés affaiblies.

Les surplus accumulés par la Régie auraient été une bonne occasion de réduire les primes pour ceux qui se conforment à ces objectifs et qui se conforment au Code de la route. Grâce aux surplus accumulés, la Régie aurait pu également introduire des mesures incitatives financières de façon que, outre les mesures pénalisantes comme le resserrement des pénalités concernant la conduite avec facultés affaiblies, outre le resserrement des pénalités pour conduite avec alcool, outre l'imposition de cours obligatoires avant l'obtention de permis de conduire pour les plus jeunes, elle aurait pu utiliser les surplus pour introduire des mesures financières, parce qu'on sait tous que les mesures financières sont souvent les mesures les plus efficaces au niveau de l'incitation des citoyens à se conformer aux objectifs que l'on veut bien promouvoir. Au contraire, le dernier budget laissait présager des augmentations dans les frais d'immatriculation et dans les frais d'enregistrement des véhicules automobiles. D'ailleurs, il n'y a pas si longtemps, la ville de Québec était ici témoin des protestations des propriétaires de motos qui, justement, venaient protester contre l'augmentation substantielle de leurs frais d'enregistrement. (23 h 30)

M. le Président, si la caisse était vide ou si elle accusait un déficit important, on comprendrait que de telles mesures incitatives ne puissent être appliquées et on comprendrait également que le gouvernement, de façon à renflouer la caisse, envisage d'augmenter les primes et d'augmenter la perception de certains frais. Mais ce n'est pas le cas. Ce n'est pas le cas du tout. En fait, c'est même l'inverse. Depuis sa création, la caisse a enregistré un surplus permanent, sauf, si je me rappelle bien, aux années 1982 et 1983. Et, en 1989, lors du dernier exercice financier, la caisse indiquait un surplus de 283 000 000 $.

Voilà, M. le Président, de quoi mettre en pratique ce que font toutes les bonnes compagnies d'assurances, c'est-à-dire prévoir des remboursements de primes ou des abaissements de frais d'enregistrement pour ceux qui se conforment aux objectifs, entre autres, de la sécurité routière et des normes établies pour la protection et la sécurité sur les routes.

Le gouvernement nous dit qu'il veut utiliser une partie des fonds, une partie du surplus de la Régie pour assurer la sécurité routière. Ce qu'il entend par assurer la sécurité routière, ce n'est pas développer des mesures incitatives pour que les gens soient amenés à être plus prudents, à être plus conscients lorsqu'ils conduisent, mais ces mesures se veulent plutôt strictement matérielles dans le sens d'améliorer la voirie et d'améliorer les routes. Je ne pense pas que ce soient là des mesures fortement incitatives. Bien sûr, lorsque les routes sont en bonne condition, principalement en hiver, II y a moins de risques d'accidents. D'ailleurs, vous avez pu le constater. Des études ont démontré qu'un grand nombre

d'accidents qui se sont déroulés dans la région du pont-tunnel Louis-Hippolyte-Lafontaine à Montréal ont été causés, en partie, par le mauvais état de la chaussée, particulièrement en hiver.

C'est vrai que des routes en bonne condition facilitent et améliorent la sécurité routière, mais je ne pense pas qu'utiliser les fonds de la Régie de l'assurance automobile du Québec pour réparer les routes sort la façon la plus directe et la plus incitative pour que les citoyens se conforment davantage aux objectifs du Code de la route et aux mesures de sécurité auxquels le gouvernement du Québec a essayé de sensibiliser les citoyens depuis déjà bon nombre d'années.

Cela étant dit, M. le Président, j'aimerais également faire remarquer que le projet de loi qui nous est présenté nous cause certains problèmes. Il nous cause certains problèmes, d'abord, en fonction de son contenu, mais également en fonction de la forme. Je ne reviendrai pas sur la forme et sur la façon dont le projet de loi est piloté à l'Assemblée nationale en imposant un bâillon à l'Opposition, en limitant les discussions sur ce projet de loi. Mais j'aimerais surtout insister sur la nature de précédents.

J'ai eu l'occasion, à deux reprises, de revenir sur ce sujet. Mais je pense qu'il est important de prendre en considération le fait que, lorsqu'on veut inculquer aux citoyens le sens de la participation, le sens du civisme pour amener le plus grand nombre possible à se conformer à des objectifs de meilleure qualité de vie dans la société, il est important que les fonds qui ont été désignés pour certains objectifs, on les conserve pour les objectifs assignés et non pas qu'on les détourne vers d'autres.

Nous allons vers l'an 2000, nous allons vers une époque où de nombreuses initiatives vont être prises dans des secteurs où, jusqu'ici, nous avons à peine amorcé des développements. Je parle principalement du domaine de l'environnement, je parle du domaine de la recherche technologique et, possiblement, également, de la formation professionnelle de la main-d'oeuvre. Ce sont des secteurs en mouvance, ce sont des secteurs qui vont exiger des sommes importantes, des investissements importants et ce sont des secteurs qui vont exiger un partenariat avec l'entreprise privée, avec les milieux universitaires, avec les différents partenaires concernés et, en grande partie également, avec les usagers, avec les bénéficiaires ou avec la population en général.

Dans ce contexte, je pense qu'il est de mauvais présage de faire de la loi 50 un précédent parce que je suis convaincu que la population va le garder à l'esprit et dorénavant, lorsque le gouvernement - lorsque je dis "le gouvernement", je parle du gouvernement du Québec, indépendamment du parti qui est au pouvoir - du Québec va vouloir constituer des fonds pour des objectifs bien précis, des fonds comme, par exemple, dans le domaine de l'environnement, la Société de recyclage et de récupération qui va être appelée à administrer des fonds perçus via des consignes, bien, à ce moment-là, je pense que le détournement des fonds que l'on veut faire via la loi 50 est de nature à instaurer une incrédibilité...

Le Vice-Président (M. Cannon): En conclusion, s'il vous plaît.

M. Beaulne: ...un manque de confiance dans...

Le Vice-Président (M. Cannon): M. le député de Bertrand, en conclusion, s'il vous plaît, rapidement.

M. Beaulne: Alors, M. le Président, je limiterai mes remarques à ces quelques points et j'aimerais encore rappeler à mes collègues du gouvernement le danger que constitue ce précédent. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Cannon): Merci, M. le député de Bertrand. M. le député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue.

M. Rémy Trudel

M. Trudel: Merci, M. le Président. Oui, c'est important d'intervenir fermement sur la prise en considération du rapport de la commission qui a étudié ce projet de loi 50 parce que, d'abord, nous pourrions dire depuis quelques jours, depuis quelques semaines, en fait: Les projets de loi se suivent et les procédures et la méthode pour les adopter se ressemblent; c'est comme les jours. On a décidé de suivre une seule et unique méthode: lorsque ça ne fait pas notre affaire du côté gouvernemental, lorsqu'on pense que l'Opposition va expliquer peut-être trop bien à la population son désir qu'on ne dénature pas les choses, qu'on ne dénature pas l'objet pour lequel a été créée la Régie de l'assurance automobile du Québec, bien, on impose un bâillon. On l'a fait et ça semble être devenu un élément fondamental de ce gouvernement au niveau du processus législatif. On dénature les choses, on dénature le processus, on dénature la façon dont, démocratiquement, même si parfois ça peut être difficile, ça peut être long, on veut faire passer absolument ces projets de loi. (23 h 40)

C'est comme ça que ça s'est passé dans le cas de la loi 75 sur les heures d'ouverture des commerces, des magasins. C'est comme ça que ça s'est passé on ne peut plus du côté de la loi 69 pour permettre aux commissions scolaires d'être les dépanneurs du gouvernement sur le plan financier, d'aller chercher au-delà de 300 000 000 $ au niveau des commissions scolaires parce que le gouvernement avait décidé qu'il

y avait objet, au niveau des commissions scolaires, pour répondre à des besoins, mais, correspondant à cet objet, c'est-à-dire le devoir de légiférer pour aller chercher plus de fonds ou pour réaménager ses budgets, point de courage, point de décision. On dit tout simplement: On va présenter des lois qui vont dénaturer des choses. Et c'est ça qui va finir par jouer un mauvais tour, c'est certain, à ce gouvernement.

Dès le moment où on a commencé à lancer les ballons, au début de la saison d'hiver, autour du prochain budget du gouvernement du Québec, on a dit: Oui, on a des besoins majeurs au niveau de la rénovation du réseau routier et quiconque dans cette Assemblée vit dans une région périphérique en particulier se rend bien compte des besoins immenses qu'il y a, du retard qu'on a accumulé et de la situation quasi scandaleuse qui se présente dans une région comme l'Abitibi-Témiscamingue. Il faut le répéter encore une fois, c'est le député de Pontiac, sauf erreur, qui avait préparé un rapport sur l'état du réseau tertiaire au Québec. Et le propre rapport Middlemiss disait, il y a trois ou quatre ans: Dans la région de l'Abitibi-Témiscamingue, je suis obligé de lire la réalité, dans cette grande région qui fournit des matières premières à l'ensemble du Québec en matière de forêts... Il le sait parce que, dans son comté, près de son comté, dans les municipalités limitrophes, il y a des industries qui viennent s'approvisionner en ressources forestières. C'est la même chose au niveau des métaux, au niveau des mines: nous approvisionnons le reste du Québec. Le député Middlemiss nous a préparé, je dois le dire, un bon diagnostic, un très bon diagnostic qui montrait un bon portrait, un portrait désolant pour la région de l'Abitibi-Témiscamingue parce que ces gens-là sont toujours considérés comme des citoyens de deuxième zone. Seulement 11 % du réseau routier tertiaire dans la région de l'Abitibi-Témiscamingue est pavé, par comparaison à un taux d'au-delà de 45 % pour les autres régions du Québec.

Comment accepter cette différence, comment accepter de tels écarts surtout pour une région et surtout pour les citoyens et les citoyennes d'une région qui fournit de larges quantités de ressources naturelles pour permettre de faire vivre le secteur manufacturier dans les plus grands centres, les centres urbains? Pour ces gens-là, on reprend la très vieille expression: Dans le fond, vous habitez un camp. Vous habitez un camp minier, vous habitez un camp forestier, vous habitez un camp agricole. Et on sait ce que ça veut dire comme définition historique. On vient chercher ce qu'il y a de bon ici, on sort ça à l'extérieur, les gens circulent. Et on ne vous laissera pas prendre la catégorie des citoyens de première zone au Québec ou être égaux aux autres citoyens du Québec; on va vous confiner dans une situation extrêmement difficile parce qu'on sait, de toute façon, que vous êtes pris pour gagner votre vie, on sait que vous avez besoin de travail, on sait que vous avez des familles et on sait aussi qu'en termes de distances géographiques vous êtes éloignés des centres urbains et on sait, finalement, que vous n'êtes que 2,8 % de la population du Québec.

Même si vous fournissez 14 % des ressources agricoles, de la production agricole - le ministre de l'Agriculture le sait très bien - même si on sait que vous fournissez une très large part des ressources forestières au Québec pour permettre à l'industrie des pâtes et papiers de vivre dans beaucoup d'autres régions au Québec, et c'est la même chose au niveau des mines, bien sûr: au-delà de 55 % des ressources minérales du Québec sont fournies par cette région; on va aller chercher non seulement ce qui est en dessous, mais également ce qui est au-dessus, ce qui est sur le sol, les ressources de la terre et, en retour, tout ce qu'on vous dit, c'est: Continuez à vivre dans des conditions extrêmement difficiles.

Ce que ce gouvernement dit: Nous allons aller, avec cette loi 50, piger dans la caisse qui servirait peut-être à aider à donner un réseau routier qui a un peu d'allure pour la région de l'Abitibi-Témiscamingue, pour les régions du Québec, pour le Québec. Pourquoi dénaturer les choses comme cela? Quand on a pris la décision d'agir dans telle ou telle direction, il faut, dans un deuxième mouvement, se donner la possibilité de réaliser ces actions. Non, ce gouvernement a choisi d'aller piger dans la caisse qui a été prévue, qui a été constituée pour un autre objet, et ça, ce n'est pas correct. Après coup, on se surprendra que plusieurs députés, de quelque côté que ce soit dans cette Assemblée, au cours de discussions et au cours d'échanges, diront: Mais, finalement, vous savez, le métier ou la responsabilité d'être député, ce n'est pas tellement considéré par la population. On a encore vu, très récemment, des sondages ou des indications sur le niveau où était situé, dans la perception de la population, le rôle du député.

Et pourquoi? Pourquoi? Il faut se le demander. Pourquoi cette perception si difficile, parmi la population, quant aux responsabilités que nous occupons? C'est parce qu'il se passe des choses comme celles que nous étudions ce soir. C'est parce que l'on détourne l'attention, que l'on dénature les choses. On vous a dit, en 1977: On se fera une caisse pour se donner une mutuelle d'assurance. Douze ans plus tard, on dit: Vous savez, là, l'histoire de se constituer une caisse et de dire: Si vous êtes prudents et si vous circulez sur les routes du Québec avec une plus grande marge de sécurité, on va baisser vos primes, erreur, mensonge. Ce que l'on vous dit aujourd'hui, c'est qu'on vous a joué un sacré tour et nous allons aller piger dans votre caisse. C'est ça qui est inacceptable, de dénaturer les choses, et voilà pourquoi il nous faut être contre ce projet de loi.

J'ai eu l'occasion - en terminant, M. le

Président - de discuter librement même avec des députés de la majorité ministérielle, à l'époque du budget, avant ou après le budget, qui disaient très ouvertement: Finalement, les citoyens et les citoyennes, lorsqu'on leur dit: Nous levons une taxe pour tel objet, pour réaliser tel geste, pour réaliser telle politique, ils acceptent plus facilement parce qu'on dit: Voyez pourquoi nous avons besoin de cet argent. Ce qui se passe ici, c'est tout à fait le contraire. Dommage pour les régions, dommage pour le parlementarisme, dommage pour ceux et celles qui prônent de telles méthodes et dommage pour ce gouvernement qui, un jour, se le fera bien dire par la population. Merci, M. le Président. (23 h 50)

Le Vice-Président (M. Cannon): Merci, M. le député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue. Mme la députée de Marie-Victorin.

Mme Cécile Vermette

Mme Vermette: Oui, merci, M. le député. C'est regrettable, M. le député, qu'il faille, dans cette enceinte, toujours parler sur des lois. C'est la troisième loi sur laquelle je dois parler, d'ici la fin de cette session, et c'est toujours des bâillons. Nous avons dû être victimes de bâillons, ici, de ce côté de la Chambre, parce que ce gouvernement, en fait, a préféré, plutôt que de prendre le temps de légiférer et de voir d'une façon plus prudente à la gestion de la présentation de ses lois, au niveau de la fin de session, y aller avec une certaine forme de laxisme et faire en sorte qu'actuellement nous voilà pris, en fait, avec un autre bâillon. Et nous devons soulever ce fart à la population. C'est inacceptable qu'en si peu de temps, à la fin d'une session, nous devions, justement, arriver à la conclusion que ce gouvernement empêche les parlementaires de s'exprimer et ça, ça représente un des droits les plus fondamentaux de tout membre, ici, à cette Assemblée nationale.

Bien sûr, la réforme de la Régie de l'assurance automobile du Québec est un sujet très important, un sujet d'actualité parce que beaucoup de Québécois et de Québécoises sont concernés par une telle réforme de l'assurance automobile au Québec et parce que ce sont des fonds qui viennent des poches des contribuables. C'est avec ces sommes d'argent là, M. le Président, qu'aujourd'hui nous devons nous apercevoir que ce gouvernement prend peu en considération la capacité de payer de ses contribuables, puisque, M. le Président, compte tenu de la caisse, compte tenu des profits qu'autogère cette assurance automobile au Québec, nous nous serions attendus davantage qu'un gouvernement qui comprend les besoins de sa population allège, d'une part, soit par une meilleure indemnité ou par de meilleures primes, les taux que doivent payer les contribuables au niveau de leurs primes d'assurance ou, s'ils sont victimes d'un accident, favorise de meilleures indemnités. Eh bien, non, le gouvernement a préféré, M. le Président, piger dans cette caisse, qui était très, très fructueuse, un montant considérable pour payer, en fait, les factures courantes de la gestion courante de ce gouvernement.

C'est une bonne façon de déguiser, en fait, l'imposition, les taxes. C'est une sorte de camouflage qui fait en sorte que nos contribuables ont l'impression que ce gouvernement est un bon gouvernement, qu'il n'impose pas vraiment beaucoup de taxes, comme au dernier budget, et qu'ils l'ont échappé belle, n'ont pas eu d'augmentation d'impôts. Mais, M. le Président, il faut dénoncer l'imposture, car il y a imposture. Et l'imposture, c'est: on fait ce qu'on ne pourrait pas faire parce que c'est trop impopulaire de prélever des impôts, de les augmenter. Donc, on trouve une façon plus sournoise, en fait, d'aller chercher de l'argent chez les contribuables et de faire en sorte qu'au lieu de les favoriser on leur donne une surcharge, un fardeau au niveau des différentes primes qu'ils auront à subir.

Si, au moins, cet état de choses avait favorisé un meilleur réseau routier. Mais ce n'est pas le cas. Regardons les routes du Québec, à l'heure actuelle, dans quel état elles sont, ces routes du Québec. Jamais le réseau routier n'a été aussi cahoteux, M. le Président. Ce n'est pas possible. On a de la difficulté à circuler à certains endroits, c'est même dangereux. Je pense que nous nous serions attendus, du moins, à une meilleure application des sommes d'argent qui sont versées. Mais, au contraire, nous voyons bien que tout ce que le gouvernement essaie de faire, c'est maintenir, en tout cas, peu importe que ce soit dans le réseau de la santé, dans le réseau routier ou dans le réseau de l'écologie... C'est des coupures drastiques un peu partout. C'est à se demander ce qu'on fait avec les sommes d'argent qu'on prélève un peu partout, avec les excédents qu'on a été capables, justement... Parce que antérieurement le gouvernement du Parti québécois a été capable d'apporter des réformes qui s'imposaient pour favoriser davantage les contribuables.

Qu'est-ce qui se passe avec ce gouvernement? Où vont toutes ces sommes d'argent là? Parce que, à l'oeil, comme ça, de même, on ne peut pas voir de résultats tellement concluants. Et je trouve assez difficile pour un parlementaire de ne pas soulever toutes ces occasions où le gouvernement opère une action de camouflage. C'est inacceptable. Je pense que ce n'est pas une façon très responsable de gouverner, bien au contraire. Et aussi, on essaie de faire semblant ou de faire accroire aux contribuables que tout va bien et que c'est pour leur mieux-être, que c'est pour les favoriser davantage qu'on est obligé d'opérer certaines transactions financières, que, tout compte fait, il n'y a rien là, qu'il ne faut surtout pas en discuter, parce que les gens de l'Opposition, bien sûr, eux, tout ce qu'ils

cherchent à faire, c'est de l'obstruction. M. le Président, ce n'est sûrement pas faire de l'obstruction que de vouloir favoriser le mieux-être de nos contribuables et, qui plus est, les favoriser au niveau des primes, dans leurs cotisations au niveau de l'assurance automobile, ou leur permettre d'avoir de meilleures indemnités, s'ils sont victimes d'accident.

Ce qui est regrettable, c'est que, lorsque nous avions fait cette réforme en 1967, il faut se rappeler que cette réforme a demandé du courage de la part du gouvernement péquiste, à ce moment-là, parce que l'ensemble des gens du gouvernement libérai n'était pas tellement favorable à un telle réforme. On se souviendra. Nous avons dû convaincre la population, d'une part, qu'elle était bénéfique pour elle et, d'autre part, tous les gens qui étaient impliqués dans l'assurance automobile et tous les gens qui voyaient ça d'un très mauvais oeil.

On avait peur aussi que ça encourage davantage l'irresponsabilité de certains conducteurs. Mais, au contraire, on s'est aperçu que des mesures additionnelles avaient été apportées, qui favorisaient la sécurité routière et que le nombre d'accidents avait diminué. C'est pourquoi, M. le Président, nous avons pu avoir de beaux bénéfices, des bénéfices très importants au niveau de l'assurance automobile, ce qui était très appréciable, à mon avis, et qui démontrait une très bonne gestion de la part du gouvernement péquiste.

Qu'en ont fait les libéraux, eux qui s'opposaient à cette réforme de l'assurance automobile? Là, comme dans bien d'autres domaines, M. le Président, ils se sont réjouis des mesures qu'avait prises l'ancien gouvernement pour les favoriser dans leur politique et dans leur gestion. Mais ça se limite uniquement à ce niveau-là. Il faut dire qu'en 1989 l'excédent des revenus sur les dépenses était de 283 000 000 $. Belle somme! Une somme qui aurait pu permettre, en tout cas, une stabilité au niveau de l'assurance automobile, d'importantes baisses des primes et des augmentations substantielles des indemnités qu'elle aurait pu verser aux victimes de la route ou peut-être faire les deux en même temps, M. le Président. Mais, encore une fois, il faut se rappeler que l'ensemble des gens, des économistes considérait que la réforme qui a été apportée en 1977 était bénéfique pour l'ensemble de nos contribuables, qu'elle les favorisait grandement et qu'elle permettait à ceux qui ne pouvaient escompter avoir une forme de protection au niveau des blessures corporelles peu importe la nature de la faute, de prétendre à une indemnité. Je pense que nous avons favorisé la qualité de vie de nos concitoyens et que nous avons appris à les responsabiliser.

Ce même gouvernement, actuellement, par sa façon d'agir et par sa façon d'aller chercher, de piger des fonds dans un endroit qui était leur mutuelle d'assurance au niveau de l'automobile, eh bien, encore une fois, est en train de les décevoir, est en train de dégonfler, en fait, les profits que pouvait percevoir l'assurance automobile du Québec et, encore une fois, nous devons dénoncer l'imposture que fait ce gouvernement à l'endroit de l'ensemble de ces contribuables, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Cannon): Merci, Mme la députée. Je vais maintenant reconnaître M. le député de Dubuc.

M. Gérard R. Morin

M. Morin: Merci, M. le Président. Je ne sais pas si vous avez déjà entendu une annonce à la télévision, M. le Président, une annonce de bière. Elle dit qu'il y a des dizaines de raisons de choisir la bière 50, mais que la meilleure est sous le bouchon. Si on voulait faire un corollaire et faire la promotion de l'Assemblée nationale, on pourrait dire que le ministre aussi a plusieurs raisons d'adopter le projet de loi 50, mais que, là, la meilleure raison est sous le bâillon. Effectivement, sauf que là, avec un bâillon, la fermentation est moins longue.

Mais ça permet quand même de réfléchir un petit peu et particulièrement depuis que le ministre nous a adressé des menaces en commission à l'effet que, si nous continuions à nous opposer, nous ne verrions aucuns travaux dans notre comté. Il a pris la peine de nommer chacun des six députés en commission et je vous prie de me croire que ça nous a ébranlés, M. le Président, car, finalement, ce que nous faisions en commission, nous tentions de sensibiliser le ministre à consulter les gens, à entendre les organismes, entre autres le Protecteur du citoyen pour qu'il vienne nous entretenir de ses propres recommandations qui touchent le paiement d'expertises médicales, les remboursements exigés de façon abusive, les délais administratifs trop longs, les remises d'auditions, (minuit)

Aussi, M. le Président, c'est dommage que le ministre ne soit pas là parce que, concernant l'autre ministre, parrain du projet de loi 75 qui a toujours été là, ça fait curieux, mais je suis convaincu que vous allez lui transmettre les messages. C'était la même préoccupation pour ce qui est du Vérificateur général, qui aurait sans doute été d'un grand intérêt en venant nous entretenir des aspects de gestion et tout ce qui entoure les ajustements de nature financière du projet de loi.

M. le Président, je voudrais aussi vous demander de dire au ministre que, lorsque nous lui avons demandé d'entendre la Régie, c'était bien sûr de nous sécuriser parce que nous avons accusé le ministre de dénaturer la mission de l'assurance automobile.

Nous lui avons aussi demandé, M. le Président, d'entendre l'Association des victimes, parce

qu'on sait que ceux qui sont le plus en mesure de venir témoigner de situations, c'est, bien sûr, ceux et celles qui ont été victimes d'accidents de la route.

Si je tiens mes propos, M. le Président, c'est pour faire amende honorable auprès du ministre, pour qu'il sache bien que nous n'avions aucunement l'intention de le rabrouer, de boycotter son projet de loi. Surtout que je ne voudrais pas - je retarde un peu parce qu'il y a un changement à la présidence et ça dérange toujours un petit peu les orateurs - que le ministre pénalise la population de mon comté parce que j'ai utilisé les droits parlementaires. Excusez, je vais en profiter... Je suis demandé au téléphone - oui, ça va. Ah! Très bien merci.

M. le Président, c'était le bureau régional du ministère des Transports. Ah oui, on vient de m'aviser de ne pas m'inquiéter concernant les coupures concernant la menace du ministre parce qu'il n'y avait rien de prévu de toute façon dans mon comté. Donc, c'était du "bluff", M. le Président. Donc, je cesse d'être inquiet, parce que je me sens moins victime de menaces; c'était du "bluff". Et c'est là qu'on voit qu'avec le projet de loi 50, le gouvernement se donne toute la latitude de gratter, avec ses gros doigts, jusqu'au fond des tiroirs, de la caisse d'assurance automobile, et le scandale qu'il faut dénoncer, c'est qu'il n'y a rien pour le réseau routier dans les régions périphériques.

M. le Président, vous lui ferez le message. J'accuse le ministre d'ignorer les régions depuis fort longtemps, depuis trop longtemps. D'ailleurs, la révolte commence à gronder au Saguenay-Lac-Saint-Jean où les crédits pour la construction ont été coupés de moitié, alors que l'entretien a été réduit presque à néant. Quand la population de ma région se verra imposer des hausses substantielles au niveau de l'immatriculation automobile et que la qualité du réseau routier continuera à se détériorer, je vous garantis que le ministre entendra parler de la région et, là, ce ne sera pas du "bluff1. Au chapitre des routes régionales et malgré une situation catastrophique, c'est l'inertie totale.

Que dire des projets locaux où des travaux prévus en 1989 ne figurent même pas au programme des réalisations de 1990? Je m'étais emballé, M. le Président, j'avais perdu toute inquiétude, mais j'y pense; est-ce que le ministre ferait une telle chose? Je me demande si je ne me suis pas trop sécurisé trop vite. Comme la seule façon d'assouvir sa vengeance sur nos travaux parlementaires, comme il ne peut pas couper de travaux parce qu'il n'y en a pas de prévus, est-ce que le ministre pourrait prendre l'asphalte qui a été posée l'an dernier pour la transporter sur le boulevard Métropolitain? Je ne crois pas que le ministre fasse ça, c'est un bon garçon. De toute façon, je regrette qu'il ne soit pas là pour nous entendre. C'est pour ça que je compose d'une façon sérieuse, de façon laconi- que, de façon ironique parce que, finalement, vaut mieux en rire qu'en pleurer. et je termine cette intervention ici. je vous remercie, m. le président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député. Je reconnais maintenant la prochaine intervenante, Mme la députée de... M. le député...

M. Claveau: Question de règlement.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Question de règlement, M. le député d'Ungava.

M. Claveau: M. le Président, auriez-vous l'obligeance d'appeler le quorum?

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Je vais vérifier, M. le député. Non, je m'excuse, je n'ai pas demandé d'appeler, s'il vous plaît là. C'était 21 avec moi. Je compte dans ces 21 là. Alors, je reconnais maintenant Mme la députée de Ver-chères.

Mme Luce Dupuis

Mme Dupuis: Merci, M. le Président. Au sujet du transfert d'argent de l'assurance automobile, j'ai envie, moi, de vous donner la vision d'un citoyen ordinaire que j'ai vu dans mon comté, la semaine dernière, qui me dit: Qu'est-ce qui se passe, qu'est-ce qu'ils vont faire avec notre argent qu'on a versé? Et il dit: Moi je pensais que c'était pour, si on avait un accident, qu'on soit sûr d'être bien indemnisé des deux côtés. Tu peux être victime d'un accident parce que tu le subis, mais tu peux aussi être victime parce que tu l'as provoqué accidentellement. Il dit: Mais qu'est-ce qu'ils vont faire avec ça? Il dit: On n'en aura plus. Il se questionnait.

Tout ça pour dire qu'il y avait un questionnement. Le questionnement du citoyen ordinaire face à cette inquiétude de perdre ses fonds, de ne plus avoir cette assurance-là m'amène moi aussi à me questionner si on peut se permettre de dévier les fonds des fins auxquelles ils avaient été destinés sans que le gouvernement puisse perdre ou conserver la confiance du public. Le public manque d'information. Le public est inquiet. Et pas seulement sur ce geste-là, sur des gestes constants. Il est inquiet et là comme je disais, M. le Président, je vous donne la version, les impressions du citoyen ordinaire de comté qui est peut-être mal informé, mais qui, je pense, reflète l'ensemble de la population.

Nous on est plus au courant parce qu'on est dans le milieu. Mais ce n'est pas dit que le citoyen ordinaire est aussi informé de tout ça. Donc, inquiet aussi de dire: Oui, mais nos taxes, sur ses comptes de taxes, il dit: Ils viennent piger, la commission scolaire vient piger dans le champ foncier. C'est un peu mêlé. Il me parlait d'assurance automobile, il me parlait de commis-

sion scolaire, d'un ensemble, mais tout ça dénotait quoi? Une certaine inquiétude. Et c'est de ça que je voudrais vous faire part, de ces inquiétudes que vivent présentement les citoyens de nos comtés.

Et moi, ça m'amène à me questionner sur les motifs, les objectifs visés, s'ils ont été respectés et si on peut se permettre de dévier, de changer des choses comme ça, sans que le citoyen soit vraiment informé. Les objectifs étaient quoi? D'indemniser le plus rapidement possible, le mieux possible, les victimes d'accidents. J'ai vécu, dans mon comté un cas où il y a eu - c'était assez pathétique - une bataille entre la responsabilité de la CSST et celle de l'assurance automobile. Vous allez me dire que c'est peut-être un cas unique. C'est peut-être le hasard, mais il reste que j'ai une victime d'un accident de travail. Forcément, il se promène un petit peu plus en auto, il ne travaille pas. Ça ne veut pas dire qu'il n'est pas capable de sortir de chez lui. Et le pauvre, il a un accident d'auto par-dessus.

Et là, c'est là que la saga a commencé, M. le Président. C'était la CSST qui relançait la balle à l'assurance automobile, l'assurance automobile relançait la balle à la CSST et, finalement, ce pauvre type était en train de perdre sa maison. Il n'y avait rien de réglé et c'a fini en me disant: Si la députée n'est pas capable de régler ça, il dit: Moi je vais aller me suicider. C'est bien sûr que je n'ai pas marché dans le coup, ça ne m'a pas... Ça, vous pouvez le croire ou ne pas le croire, je ne vous dis pas qu'il va le faire, c'est certain que c'était pour mettre de la pression. Mais tout ça, ça dénote quand même un état d'esprit, une inquiétude et c'est là que je me dis... (0 h 10)

Moi, quand je voyais ça, je disais: Mais ça va donc bien mal dans l'assurance automobile. Qu'est-ce qui se passe? Ils n'ont plus d'argent ou quoi puisqu'on a tant de difficultés à indemniser nos victimes d'accidents d'automobile? J'ai dit: Ça doit être mal administré. Et là, j'apprends que, non, ils ont des surplus. Donc, c'était prémédité. Donc, le fait de vouloir, sur le dos des accidentés, économiser de l'argent, c'était prévu, prémédité pour, après ça, faire dévier les fonds de cette assurance-là, qui étaient prévus pour ces victimes-là, pour les routes et les affecter à autre chose que pour leur but premier qui était, M. le Président, fondé sur des bases humanitaires.

L'autre objectif, c'était de réduire les coûts d'administration de l'assurance automobile et assurer les coûts globaux de l'assurance et des services que les Québécois en retirent. Bon. Bien indemniser les victimes, moi, j'ai eu des cas, en tout cas, qui démontrent que ça n'a pas été le cas. Ils auraient pu, avec une économie pareille, je pense, baisser les primes d'assurance automobile. Non, au contraire, on affecte les sommes à d'autres fins. C'est là que je me demande si, moralement, un gouvernement peut se permettre de changer les fins comme ça, les motifs, les objectifs. Légalement, il peut peut-être le faire, mais moralement, est-ce qu'il a le droit de faire une chose pareille et d'insécuriser la population? Moi, ça m'amène à me poser ces questions-là.

Et là, on voit que c'est une constante de la part du gouvernement de piger un petit peu partout. Je ne dirai pas: de mentir à la population, mais disons de cacher ou de dire des demi-vérités. On dit dans le budget: On n'augmente pas les impôts. On ne taxe pas plus. Mais, nom de Dieu! on regarde tous les gestes qui s'accumulent, un petit ici et un petit peu là, et encore un petit peu là, et on taxe encore un petit peu là, mais globalement, ça fait quoi? C'est toujours pris dans les poches des contribuables. C'est de l'impôt déguisé, M. le Président. Mais on n'a pas l'honnêteté de le dire, de le dire franchement. Il me semble qu'une faute avouée est mieux pardonnée. Il me semble. Au moins, s'il disait: On n'augmente pas les impôts, mais, par contre, par différents moyens qui n'affecteront pas toujours les mêmes, des fois, ça va être les automobilistes, d'autres fois, ça va être des propriétaires de maisons... Et le dire franchement à la population, il me semble que ça amènerait à revaloriser et amener plus de crédibilité aux députés, aux élus. Parce qu'il ne faut pas se le cacher, il ne faut pas penser que la population a une confiance inébranlable en ses élus. Je pense que ce n'est pas par des gestes comme ceux-là qu'on va amener la population à regagner la confiance qu'elle doit avoir dans ses élus. Et je pense qu'on a encore là une énorme côte à remonter pour regagner notre crédibilité. Et ça, ça m'inquiète un peu de voir cette réaction-là des gens parce qu'ils ont l'impression qu'on leur ment tout le temps, qu'on ne leur demande pas la permission, qu'on ne les consulte pas, que, parce qu'on est élus, on a tous les droits, on se croit infaillibles. Et là, je m'aperçois en plus que c'est encore pire, qu'on passe des choses de force et qu'on ne respecte pas l'Opposition, qu'on ne respecte pas nos institutions démocratiques. Ça, ça m'inquiète un peu.

Ça m'amène à parler du troisième bâillon. Je ne sais pas si c'est le deuxième ou le troisième, mais, de toute façon, il y en a eu trois et on ne sait pas dans quel ordre. Et ça aussi, c'est inquiétant, je pense. C'est inquiétant, pas le fait qu'on nous bâillonne, pas le fait qu'on passe des nuits blanches pour contester et utiliser tous les moyens qui nous sont permis, mais je pense que c'est inquiétant au niveau de la démocratie. Et c'est inquiétant... J'ai peur, moi, de la réaction du public qui peut exercer son droit de parole dans la rue par des manifestations. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la députée. Je reconnais maintenant le

prochain intervenant, M. le député de Gouin. M. le député.

M. André Boisclair

M. Boisclair: Merci, M. le Président. C'est gentil. M. le Président, si nous sommes ici à cette heure tardive - minuit et quart - à discuter du projet de loi 50, c'est parce que l'Opposition a cru bon utiliser - et je le dis sans cachette - l'ensemble des moyens parlementaires qui sont à sa disposition pour faire valoir son point de vue et prendre tous les moyens nécessaires pour s'assurer que ce projet de loi puisse être au moins discuté de façon convenable. Faut-il rappeler que ce projet de loi là, comme le projet de loi 75 concernant la Loi sur les heures d'affaires, a fait l'objet, lui aussi, d'un bâillon? M. le Président, c'était la troisième fois que l'Opposition subissait un bâillon. Pour les gens qui ne sont pas familiers et qui nous écoutent à cette heure tardive, par un bâillon, le gouvernement abuse de sa majorité et vient tout simplement empêcher l'Opposition de s'exprimer.

Nous nous retrouvons, malgré cette heure tardive, tous ici pour manifester notre opposition et utiliser le peu de moyens parlementaires qui nous restent pour faire valoir notre point de vue concernant le projet de loi 50. Il faut comprendre, M. le Président, que ce n'est pas de gaieté de coeur que nous nous retrouvons ici à minuit et quart et que nous serons ici sans doute une partie de la nuit. Mais nous sommes ici parce que l'Opposition croit de son devoir d'utiliser l'ensemble des moyens qui sont à sa disposition pour faire valoir son opposition, comme je le disais tout à l'heure.

M. le Président, 4 000 000 d'automobilistes se font dépouiller. C'est ça, monsieur, la dure réalité lorsqu'on étudie le projet de loi 50. La réforme de l'assurance automobile, proposée par le gouvernement libéral à travers le projet de loi 50, équivaut à un véritable détournement de fonds aux dépens des automobilistes du Québec. Les 877 000 000 $ que le gouvernement libéral veut siphonner de la caisse des assurés appartiennent aux automobilistes et non pas au ministre des Finances. Et une chose est claire, M. le Président; ceux qui contribuent à cette caisse sont ceux qui, chaque année, renouvellent leur permis de conduire et contribuent à cette caisse. Au lieu, M. le Président, d'augmenter les indemnités, au lieu d'augmenter la protection des automobilistes, on va tout simplement... et au lieu aussi de diminuer les primes qu'on demande aux automobilistes qui renouvellent leur permis, on va prendre cet argent-là et on va s'en servir à financer des projets qui n'ont rien à voir avec la caisse des assurés.

De 1991-1992 à 1994-1995, M. le Président, le gouvernement libéral siphonnera 109 000 000 $ Indexés par année pour l'assurance-maladle et pour le transport ambulancier. On prendra de l'argent qui appartient aux assurés et qui devrait normalement leur revenir pour financer le transport ambulancier et une partie de l'as-surance-maladie. Et de plus, M. le Président, ce n'est pas tout, 475 000 000 $ iront pour des travaux de voirie. Tout le monde connaît la situation piteuse - disons-le, piteuse - de nos routes. Un trou n'attend pas l'autre à Montréal. Au lieu d'en faire une véritable priorité, au lieu d'injecter les crédits nécessaires au ministère des Transports, on va voler et siphonner la caisse qui appartient aux assurés pour financer les travaux de voirie, M. le Président. Cet argent-là, ces cotisations de la Régie de l'assurance automobile, M. le Président, seront utilisées à d'autres fins que celles prévues par la loi et serviront d'une espèce de taxe que l'État peut maintenant détourner pour payer des dépenses courantes.

M. le Président, il est très clair que si on juge que les réserves de la Régie de l'assurance automobile sont trop élevées, il faut les ramener à des proportions plus justes en réduisant les primes que les automobilistes ont à payer, en augmentant aussi les compensations versées aux accidentés de la route ou les deux à la fois. La pratique érigée en système par le gouvernement libéral de puiser dans la caisse de la Régie de l'assurance automobile pour des fins autres que celles prévues à la loi est d'autant plus odieuse que le gouvernement ne réalise même pas, avec ces sommes, les investissements dans le réseau routier qu'il s'engage à faire chaque fois qu'il y a un discours sur le budget, chaque fois qu'il y a une campagne électorale afin de dorer... Il agit ainsi, M. le Président, afin de dorer la pilule aux automobilistes. (0 h 20)

M. le Président, la stratégie est très simple et les gens ne sont pas dupes. Ils comprendront rapidement. On affirme à une opinion publique exaspérée par l'état du réseau routier que les sommes qu'on puise dans la caisse des assurés serviront à régler ce problème. Mais, M. le Président, encore une fois, la Régie de l'assurance automobile a versé les centaines de millions demandés au fonds consolidé du revenu. Bien malin, M. le Président, bien malin celui qui pourra dire quelle direction prendront ces millions. L'analyse du budget du ministre des Transports de 1988-1989 et de 1989-1990 confirme qu'au cours des années, le gouvernement libéral a siphonné 200 000 000 $ de la caisse de la Régie, révèle très bien, M. le Président, qu'au contraire, on a consacré, pendant cette période, 202 000 000 $ de moins au réseau routier que si on avait tout simplement maintenu le rythme des investissements de 1985-1986, dernière année du gouvernement du Parti québécois. Ici, II n'y a personne, II n'y a personne qui est venu contredire ces chiffres-là, M. le Président.

Cette fois-ci encore, les centaines de millions que le projet de loi 50 Ira chercher dans

la caisse des assurés au cours des cinq prochaines années ne serviront pas à l'amélioration de nos routes, m. le président. les propres chiffres du ministre des finances démontrent en effet que le budget de construction, de conservation du réseau routier québécois diminuera en termes réels au cours des trois prochaines années. ce n'est qu'en 1993-1994 et en 1994-1995 que ce budget augmentera de 104 000 000 $ par rapport aux dépenses de 1989-1990, et ça, m. le président, si le taux d'inflation demeure en deçà de 5 %, ce qui est très loin d'être certain. m. le président, il peut se passer bien des choses d'ici 1994-1995. le taux d'inflation a le temps d'augmenter, les taux d'intérêt ont le temps d'augmenter, les prévisions budgétaires ont le temps de changer, les prévisions à l'égard du déficit ont, elles aussi, le temps de changer, m. le président. donc, nous n'avons aucune garantie que les sommes qu'on prévoit pourtant consacrer à l'amélioration du réseau routier serviront vraiment à l'amélioration du réseau routier. et au lieu d'en faire une priorité, m. le président, comme je le disais, on prendra les fonds de la régie et on les emploiera à d'autres fins que celles prévues par la loi sur la régie de l'assurance automobile du québec.

Seulement pour l'année en cours, M. le Président, le budget des routes demeure exactement au même niveau que l'an dernier, 1 020 000 000 $, ce qui équivaut à une baisse de 49 000 000 $ lorsqu'on tient compte de l'inflation. Pourtant, M. le Président, et si le projet de loi 50 est adopté, ce qui semble bien le cas, M. le Président, la Régie de l'assurance automobile du Québec devra verser 150 000 000 $ de plus au gouvernement cette année, supposément pour des investissements supplémentaires dans le réseau routier.

M. le Président, en agissant ainsi, le ministre des Transports et son gouvernement sont venus dénaturer les objectifs mêmes du régime. Le projet de loi 50 constitue une nouvelle étape dans un processus amorcé en 1986 par l'actuel gouvernement libéral et qui vise à dénaturer une des plus belles réalisations de l'État québécois, soit le régime public d'assurance automobile mis en place par le gouvernement du Parti québécois et, rappelons-le, à l'égard des gens, et c'est bon de le rappeler à ceux et celles qui ont voté ce projet de loi-là... Quelle était la position de nos amis d'en face? Quelle était la position des membres du gouvernement actuel à l'égard de la réforme proposée par le Parti québécois? Ils s'y sont opposés, M. le Président, ont utilisé l'ensemble des moyens qui leur étaient permis par le règlement pour voter contre ce projet de loi et pour s'assurer que ce projet de loi ne devienne pas loi. Contre vents et marées, M. le Président, le Parti québécois a tenu à son engagement et a fait que la Régie de l'assurance automobile du Québec est devenue force de loi. Et aujourd'hui, j'entendais le ministre des

Transports citer en exemple la Régie de l'assurance automobile du Québec. Il disait même que c'est un régime qui est envié par l'ensemble des autres provinces canadiennes. On dit même que c'est un régime qui est étudié par d'autres pays dans le monde, particulièrement en Europe. Bien malin, M. le Président... Ces gens-là ont la mémoire courte. Ils ont voté contre ce projet de loi et aujourd'hui, à qui mieux mieux, à qui veut l'entendre, ils se permettent de se péter les bretelles et de vanter ce régime-là, partout, M. le Président, à ceux et celles qui veulent l'entendre.

La réforme de 1977, M. le Président, avait un objectif très clair, fondamental, assurer aux automobilistes québécois une indemnisation meilleure, rapide et au plus bas coût possible, au plus bas coût possible. Nulle part, ni dans les documents qui ont servi de base à la réforme, ni dans la loi telle qu'adoptée et amendée par la suite, à plusieurs reprises, on ne confère à la Régie le pouvoir de charger des primes plus élevées que nécessaire et de constituer ainsi une réserve allant largement au-delà des besoins du régime d'assurance. Au lieu de diminuer les primes exigées, au lieu d'améliorer la protection, au lieu d'améliorer les indemnités, on va prendre cet argent-là, on va utiliser les surplus à d'autres fins que celles prévues par la loi.

De quel droit, M. le Président, la Régie de l'assurance automobile se transforme-t-elle ainsi en percepteur de taxes pour le compte du gouvernement, plutôt que de défendre les intérêts de ses assurés et de ses bénéficiaires? De quel droit, M. le Président, accepte-t-elle de financer, sur une base régulière, les dépenses courantes du gouvernement qui n'ont rien à voir avec sa mission et, en même temps, de serrer la vis aux victimes d'accidents de la route, plus particulièrement aux personnes âgées, aux personnes demeurant au foyer, ce qui pénalise plus particulièrement les mères de famille? m. le président, je conclurai en disant qu'il n'y a personne dans cette chambre qui n'a pas eu de problème avec les gens de l'assurance automobile du québec. la situation est loin d'être parfaite, on le voit de façon quotidienne dans l'ensemble de nos journaux: problèmes avec la régie de l'assurance automobile, accidentés qui ont des problèmes avec l'administration de la régie. m. le président, par le projet de loi 50, le gouvernement libéral refuse aux assurés de bénéficier des fruits d'un régime qui a réduit les coûts de l'assurance et de profiter de l'amélioration du bilan et de la sécurité routière dont ils sont les principaux responsables. m. le président, je conclurai en disant que ce projet de loi est un mauvais projet de loi et que j'espère que l'ensemble des membres de cette chambre-Le Vice-Président (m. bissonnet): merci, m. le député. je reconnais maintenant le prochain intervenant, m. le député de pointe-aux-trem-

bles.

M. Pagé: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Oui, je m'excuse, M. le leader du gouvernement.

M. Pagé: M. le Président, si vous le permettez, de consentement avec le leader de l'Opposition, je voudrais qu'on suspende peut-être deux minutes nos travaux pour que le leader de l'Opposition et moi puissions revenir.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, suite à votre demande, M. le député, je suspends les travaux de cette Assemblée pour quelques instants.

(Suspension de la séance à 0 h 27)

(Reprise à 0 h 32)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Mes chers collègues, si vous voulez prendre place, s'il vous plaît!

M. le leader du gouvernement.

Avis touchant les travaux des commissions

M. Pagé: Merci, M. le Président. Comme suite des avis que j'ai eu l'occasion de donner ce matin pour les travaux des commissions parlementaires aujourd'hui et de consentement avec l'Opposition officielle, je désire aviser cette Assemblée, qu'aujourd'hui, soit le 21 juin, après les affaires courantes, à la salle du Conseil législatif, la commission de l'aménagement et des équipements entendra les intéressés et procédera à l'étude détaillée des projets de loi d'intérêt privé suivants, et ce, dans l'ordre ci-après indiqué: le projet de loi d'intérêt privé 259, Loi concernant la municipalité de Deschambault et la municipalité de la paroisse Notre-Dame-de-Portneuf; le projet de loi d'intérêt privé 257, Loi concernant la Régie intermunicipale de la gestion des déchets sur l'Ile de Montréal.

M. Chevrette: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le leader de l'Opposition officielle.

M. Chevrette: Je pense qu'on s'était entendus pour ne pas fixer d'heure précise, mais que les gens ou les groupes soient disponibles après les affaires courantes. Alors, ça veut dire vers 11 h 15 demain.

M. Pagé: Effectivement, M. le Président,...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le leader du gouvernement.

M. Pagé: ...dans le cas du projet de loi 259, la commission a amorcé l'audition de groupes intéressés ou concernés par le projet de loi. Ils poursuivront leurs travaux demain dans la perspective évidemment de les compléter, ça va de soi. Le projet de loi 257, quant à lui, des groupes de l'extérieur doivent être convoqués. Ils ont été effectivement convoqués et l'objectif, c'est que l'ensemble des gens intéressés à se faire entendre puissent se faire entendre demain dans le courant de la séance. C'est ce qui peut amener des changements dans les heures de la convocation demain matin.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le député de Salaberry-Soulanges.

M. Marcil: M. le Président, j'ai participé à une commission parlementaire pendant toute la soirée et l'après-midi. Le président et la présidente de la commission ont eu également de la difficulté à identifier ma circonscription.

Question, M. le ministre: Tous les groupes qui s'étaient annoncés pour le projet de loi 257, pouvez-vous nous affirmer qu'ils vont tous être convoqués pour demain? On prend une décision à minuit et trente-cinq minutes.

M. Pagé: Je peux vous donner l'assurance. Le premier élément, c'est que le motif pour lequel l'étude du projet de loi 257, initialement prévue pour aujourd'hui, a été retardée, c'est que, premièrement, on nous a indiqué qu'il y avait des choses à régler dans le projet de loi concernant à la fois, soit le ministère des Affaires municipales ou le ministère de l'Environnement, premier élément. Deuxième élément, des gens qui prévoyaient venir témoigner et qui s'opposaient ou qui questionnaient l'opportunité d'adopter ce projet de loi, voyant la modification à l'avis, ne se sont pas rendus à Québec. Ces gens-là ont été contactés en soirée. Tous les efforts seront faits pour que ces intervenants-là puissent venir témoigner demain, ainsi que ceux qui appuyaient le projet de loi et qui venaient demander à l'Assemblée nationale de l'adopter et qui sont demeurés à Québec.

M. Marcil: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Très rapidement, M. le député de Salaberry-Soulanges.

M. Marcil: Ce matin, après la période de questions, il y avait des groupes qui s'étaient présentés pour ce projet de loi et on leur a dit en commission parlementaire qu'il est presque certain qu'il ne sera pas déposé dans cette session-ci. Il faudrait s'assurer qu'ils soient présents.

M. Pagé: Je peux vous donner l'assurance

comme leader du gouvernement, et, d'ailleurs, ça a fait l'objet de discussions avec l'Opposition et moi, que l'ensemble des groupes directement ou indirectement concernés, favorables ou défavorables, ont été contactés, seront contactés et, de toute façon, auront suffisamment de temps pour se rendre à Québec demain et venir témoigner devant la commission.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce qu'il y a consentement de la part des membres pour déroger à l'article 53 afin que cette commission ait lieu demain à 13 heures? Consentement? Alors, votre avis est donné, M. le ministre.

M. Chevrette: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Oui, M. le leader de l'Opposition officielle.

M. Chevrette: II se peut qu'à cause du menu législatif ce soit à 15 heures, mais qu'ils soient disponibles à compter de ou après la période des affaires courantes.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, l'avis est donné à ce que ce soit à 13 heures demain et que ça pourrait débuter à 15 heures. L'article 53. Nous poursuivons le débat avec M. le député de Pointe-aux-Trembles.

M. Bourdon: M. le Président...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le député de Pointe-aux-Trembles, je m'excuse. Est-ce qu'il y a consentement pour déroger à l'avis de convocation de sept jour pour les témoins?

Une voix: Oui, ça va de soi.

Projet de loi 50

Reprise du débat sur la prise en considération du rapport de la commission

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Consentement? Très bien. M. le député de Pointe-aux-Trembles, sur le projet de loi 50.

M. Michel Bourdon

M. Bourdon: M. le Président, l'Opposition officielle a raison, je pense, de combattre énergiquement le projet de loi 50. En effet, une des mesures importantes que le gouvernement du Parti québécois avait adoptées lors de son premier mandat, de 1976 à 1981, est battue en brèche par le gouvernement actuel qui, d'ailleurs, avait voté contre l'institution de la Régie de l'assurance automobile. En effet, M. le Président, on assiste, depuis plusieurs années, à des détournements successifs des sommes d'argent que la

Régie de l'assurance automobile perçoit des 3 400 000 automobilistes du Québec aux fins d'administrer un régime d'assurances.

Et, à cet égard, en matière d'assurances, les assurés, ce qui fait partie de leur contrat avec l'assureur qui, en l'occurrence est une Régie d'État, c'est d'avoir une couverture des risques, une indemnisation rapide et une amélioration de la sécurité routière qui va de soi, puisque, dans la mesure où la Régie contribue à responsabiliser les conducteurs d'automobiles, dans la mesure il y a moins d'accidents, ça économise des sommes que les automobilistes placent dans la caisse, dans le fonds de la Régie de l'assurance automobile.

Et on a parlé d'un véritable détournement de fonds, M. le Président, et je pense que le mot n'est pas trop fort, puisque les gens, en renouvelant leur plaque, contribuent à une assurance. Ils ont donc le droit de voir ces sommes utilisées pour indemniser et non pas détournées à d'autres fins par un gouvernement qui manque d'argent.

À propos, M. le Président, je vous demanderais de vérifier le quorum, parce que je pense qu'il y a plus de monde dans le fumoir qu'en Chambre. (Oh 40)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le député, vous n'avez qu'à me demander de vérifier le quorum et je vais le faire. Alors, qu'on appelle les députés, s'il vous plaît!

Une voix:...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): 21. 1, 2, 3,4,5,6,7,8,9,10...

On va poursuivre. On m'informe qu'il y a des commissions qui siègent actuellement. M. le député de Pointe-aux-Trembles.

M. Bourdon: M. le Président, la loi 50, qui prévoit de soutirer 125 000 000 $ par année pendant cinq années à la Régie de l'assurance automobile, c'est-à-dire un détournement de l'ordre de 625 000 000 $, a pour raison officielle, dit-on, que ces sommes-là vont être consacrées à améliorer le réseau routier qui, admettons-le, en a grandement besoin. Cependant, les chiffres mêmes fournis par le gouvernement aux crédits nous montrent que tel n'est pas le cas. On dépense à peine quelques millions de plus cette année que l'année dernière à l'amélioration du réseau routier et, à cause de l'inflation, quelques millions de plus, ça veut dire, en termes réels, moins d'argent que l'année dernière. Pourtant, les besoins sont très importants.

Je ne mentionnerai que le fait, dans l'est de Montréal, que le boulevard Henri-Bourassa, qui est une artère importante pour le développement économique de l'est de Montréal et du bout de IHe, est dans un état lamentable. Il suffit de l'emprunter une fois pour le regretter. C'est plein de trous, mal éclairé, et ça n'a d'aucune

manière l'air d'un boulevard. D'ailleurs, mon collègue de LaFontaine s'est engagé formellement, lors de la dernière campagne électorale, à faire refaire ce boulevard pour le rendre digne d'une métropole, parce que c'est compliqué d'attirer de l'industrie quand on se prétend dans une ville et qu'on se retrouve avec un chemin qui est presque un chemin de brousse.

Pourtant, si on en juge par les derniers crédits, il est probable que ce projet soit en danger pour cette année, malgré les emprunts, les détournements successifs qu'on fait à la Régie de l'assurance automobile, parce que la loi 50 qu'on veut nous passer par le bâillon, parce qu'on ne veut pas que les assurés soient mis au courant ou soient convoqués en commission parlementaire par les diverses organisations auxquelles ils appartiennent pour discuter de la "passe", ce n'est pas le seul moyen que le gouvernement a trouvé - ces 125 000 000 $ - de piger dans la caisse de la Régie de l'assurance automobile.

La loi 19, en 1986, a prévu que la Régie verse un montant de 60 000 000 $ par année, indexé à l'assurance-maladie. En quatre ans, il s'agit d'un montant de 257 000 000 $. La loi 62 a forcé la Régie à verser 200 000 000 $ au fonds consolidé pour, disait-on, des fins de sécurité routière. Par décret, le gouvernement a, d'autre part, décidé que la Régie financerait une partie de la réforme du transport ambulancier à raison de 35 000 000 $ par année. C'est donc dire, M. le Président, que l'assuré se fait conter des histoires. On lui dit qu'il verse des sommes à un fonds d'assurances, à une caisse d'assurances, pour se protéger contre certains risques. En 1977, quand Mme Lise Payette a instauré la mesure, il avait été bien expliqué que le régime qui durait depuis longtemps n'avait plus de bon sens. En effet, les personnes victimes d'accidents d'automobile attendaient jusqu'à dix ans avant d'être indemnisées et ce sont les tribunaux et les avocats qui prenaient une part importante des dépenses. On a donc fait la réforme, mais ça a été une réforme réussie. Maintenant, elle est mise en danger parce qu'on pige dedans systématiquement pour faire autre chose. Or, dans nos bureaux de comté, M. le Président, de plus en plus de personnes se plaignent de la lenteur, notamment, des mécanismes d'appel quand on n'est pas satisfait d'une décision de la Régie. À la Commission des affaires sociales, cela prend maintenant en moyenne douze mois avant de voir son cas décidé.

Il faudrait donc donner des indemnités plus généreuses, avoir un mécanisme d'appel plus rapide et, pourquoi pas, baisser les primes si les comportements des automobilistes ont fait que les risques ont diminué et que la Régie a plus d'argent qu'il ne lui est nécessaire pour fonctionner. Dans ce sens-là, pour récupérer 125 000 000 $ ici, 35 000 000 $ là, le gouvernement diminue la confiance que les gens peuvent avoir dans un régime d'assurance et la confiance qu'ils peuvent avoir dans l'intervention du gouvernement dans un secteur. Il s'agirait donc de battre cette loi et de faire en sorte que la Régie de l'assurance automobile serve à ce pourquoi elle a été créée, obtenir des primes des automobilistes pour verser des indemnités et s'occuper de sécurité routière. Merci.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député. Je reconnais maintenant la prochaine intervenante, Mme la députée des Chutes-de-la-Chaudière. Mme la députée.

Mme Denise Carrier-Perreault

Mme Carrier-Perreault: Merci, M. le Président. Nous sommes ici dans cette Chambre pour la prise en considération du rapport de la commission de l'aménagement et des équipements qui devait porter sur l'étude article par article du projet de loi 50. Oui, M. le Président, je dis bien qui devait porter sur l'étude article par article du projet de loi 50 car aucun article, je dis bien aucun article, n'a pu être étudié lors de cette commission. Je tiens à le préciser puisque moi-même j'étais membre de la commission et j'étais membre avec cinq autres de mes collègues de l'Opposition officielle, nous étions là tous les cinq pour cette commission.

Dans les faits, on n'a pas réussi à aller plus loin que les remarques préliminaires où, à tour de rôle, nous avons exposé notre point de vue et soulevé différentes questions. Aucune réponse de la part du ministre, complètement muet. Donc, à nos interrogations, aucune réponse. Nous sommes ensuite passés aux motions préliminaires. On a dit: S'il ne nous répond pas à nous, le ministre, peut-être que si on fait venir des gens, eux autres pourront nous apporter un éclairage différent, peut-être aussi que le ministre va finalement répondre à ces questions qu'on se pose et auxquelles on veut avoir des réponses. Par ces motions préliminaires, on a demandé de rencontrer des personnes-ressources, différents groupes qui ont été touchés par le dernier projet de loi, la loi 92.

Au bout de treize heures, le ministre des Transports n'en pouvait plus, pas de nous répondre, pas de nous donner des réponses, il n'en pouvait plus de nous entendre. J'entendais tout à l'heure, d'ailleurs, le député d'Iberville qui, en début de soirée, lorsqu'on pariait dans le cadre de l'adoption du projet de loi 75, disait que les députés de l'Opposition faisaient jouer une cassette. Il nous suggérait même un titre pour notre cassette, pas très original, je dois l'avouer, il nous suggérait le titre: 3-20. Trois pour trois bâillons, 20 pour vingt heures de commission. J'imagine que peut-être que tout à l'heure, étant donné que le député d'Iberville est ici dans cette Chambre, il pourra nous suggérer un autre titre du même genre, 3 pour troisième

bâillon, 13 pour treize heures de commission. (0 h 50)

J'entendais aussi le député de Lac-Saint-Jean, pour le citer parce que je trouve que l'expression convient fort bien, qui nous disait que le gouvernement avait l'épiderme sensible. Ça fait quelques fois qu'on le dit et on continue toujours de le vérifier. Le gouvernement a vraiment l'épiderme sensible et particulièrement le ministre des Transports parce que c'est un record, M. le Président: troisième bâillon, treize heures de commission.

Quand il nous disait tout à l'heure, M. le ministre des Transports, que... Bon, il nous a fait un rapport d'une dizaine de minutes. En fait, c'est vrai qu'il a parlé peut-être plus ce soir sur le projet de loi 50 et sur ce qui s'est passé en commission qu'il nous a parlé à nous, qu'il nous a donné de réponses en commission. C'est tout à fait exact de dire ça. Il nous disait, ce soir, qu'on a demandé des groupes et que ça n'avait pas de bon sens de demander des groupes. Il nous disait presque qu'on était de mauvaise foi. En tout cas, ça ressemblait drôlement à ça. Quel mal y a-t-il, M. le Président, à demander à rencontrer le Vérificateur général? Si le ministre avait donné des réponses à nos questions lorsqu'on lui exposait nos interrogations durant les motions préliminaires, on n'aurait pas eu besoin de demander à rencontrer ces groupes-là, mais en aucun moment on a eu de réponse. D'ailleurs, le ministre aurait dû être préparé à répondre à ces questions-là. On voulait savoir s'il y avait des opinions juridiques d'émises. Est-ce que la Régie de l'assurance automobile a le droit de transférer ou est-ce qu'on a le droit de siphonner comme ça? Est-ce que le gouvernement a le droit de siphonner des fonds, comme ça, à la Régie de l'assurance automobile? Ça lui avait été posé comme question lors de l'étude des crédits. Il y avait même l'avocat de la Régie qui était là, Me Gélinas, et c'est très clair. C'est tout écrit, d'ailleurs, dans l'étude des crédits. Sur cette question-là, Me Gélinas avait dit: On pourra en reparler lors de l'étude du projet de loi. C'est en plein ça qui est écrit là. Alors, normalement, le ministre aurait dû être préparé. Il devait bien s'attendre à ce qu'on lui pose cette question lors de l'étude article par article du projet de loi. Absolument pas. Alors on a demandé à parler au Vérificateur général. On a demandé aussi à rencontrer d'autres groupes, c'est vrai. Évidemment, le ministre n'a pas accepté qu'on rencontre le Vérificateur général, alors on a continué. On a demandé à rencontrer la Fédération de l'âge d'or et la Fédération des femmes du Québec. Le ministre nous disait tout à l'heure que ça n'avait rien à voir, que c'était un projet de loi qui avait été voté l'an dernier sauf que, M. le Président, je regrette, mais il y a peut-être quelque chose. Il y a sûrement un rapport entre les deux. En tout cas, il y a des gens qui s'interrogent et ce n'est pas seulement l'Opposition.

La Fédération des femmes du Québec, entre autres, M. le Président, dans un article récent... On sait que la loi 92 a été mise en application seulement depuis janvier 1990. Alors, là, on se rend compte de certains effets de cette loi et la Fédération des femmes du Québec estimait justement, dans un article daté du mois de janvier, qu'il y a tellement de recul dans la nouvelle loi 92 qu'on peut se demander à qui profiteront les sommes supplémentaires annoncées à grand frais de publicité. Bien là, nous autres, on avait comme une réponse, voyez-vous, M. le Président. Le ministre nous annonce, avec le projet de loi 50 qui est devant nous, qu'il va transférer les fonds. Il nous le dit clairement, c'est très clair: Ce projet de loi donne suite au discours sur le budget en prévoyant que la société verse au fonds consolidé - au fonds consolidé, c'est écrit ici. On nous dit que c'est pour faire des routes, mais ce n'est pas ça qui est écrit là. C'est écrit au fonds consolidé du revenu - pour l'exercice financier 1990-1991 du gouvernement et pour les quatre exercices financiers subséquents, une redevance aux fins d'immobilisation en matière de sécurité routière dont le montant et la périodicité des paiements sont fixés par la loi. C'est écrit en toutes lettres dans les notes explicatives du projet de loi. Il nous explique qu'il y a aussi des sommes qui vont être versées au Conseil de la santé et des services sociaux, à la Corporation Urgences-santé de la région du Montréal métropolitain, selon la répartition déterminée par le ministre de la Santé et des Services sociaux, une contribution au coût du transport ambulancier dont le montant et la périodicité des versements sont versés par la loi. C'est tout écrit. Les montants sont même écrits là-dedans, M. le Président. On va chercher carrément 877 000 000 $ en cinq ans dans les fonds de la Régie d'assurance automobile. Je pense que c'est un peu normal que l'Opposition se pose des questions.

C'est évident que ce projet de loi est peut-être moins connu dans la population, M. le Président, et a été moins discuté par la population que celui sur les heures d'affaires, par exemple. On le sait, les heures d'affaires, il y a eu des gens qui sont venus, on a eu des représentations mais, pour ce projet-ci, c'est un petit peu plus subtil au fond et ça prend du temps avant de toucher les assurés et c'est un peu moins connu dans la population, mais ça ne veut pas dire que l'Opposition, parce que la population connaît un peu moins le projet de loi, qu'il ne faut pas qu'elle fasse son travail. C'est à ce moment-là, je pense, que l'Opposition doit absolument faire son travail. Le raisonnement du gouvernement est simple dans ce dossier-là. C'est que le gouvernement nous dit... Il nous dit comme ça: Écoutez, on a une période financière difficile, on manque de sous quelque part et on a besoin d'aller chercher des sous. Donc, on ne va pas donner des impôts supplémentaires, ça, ça ne

paraît pas bien. Ça ne paraît pas bien, le gouvernement ne passe pas... En tout cas, ça ne vole pas haut dans la population quand le gouvernement augmente beaucoup les impôts. Alors, c'est bien simple, à ce moment-là, on dit: On a des fonds - ça, il nous le dit, il nous l'a dit, le ministre - c'est une bonne gestion, on a des fonds dans la caisse des assurés, dans la caisse de la Régie de l'assurance automobile. On va aller les chercher plutôt que d'emprunter ou plutôt que de lever des impôts supplémentaires. C'est une partie de son raisonnement. Pour faire avaler un peu mieux la pilule, pour nous faire avaler un peu mieux le tout, il nous enrobe ça en nous disant: Tout le monde nous dit que les routes sont en mauvais état. Les routes, c'est la sécurité routière, c'est dangereux pour les usagers, alors on va prendre cet argent-là, puis on va mettre ça sur les routes. On va faire de l'asphalte, des barres blanches; on va réparer les routes. Sauf que ce qui est écrit là et ce qu'on a pu voir aux crédits - c'a été démontré, je pense, par le critique de l'Opposition, de façon assez claire - c'est que les fonds qui sont siphonnés dans la caisse des assurés de la Régie de l'assurance automobile ne s'en vont pas nécessairement aux Transports où on va faire des routes. Ce n'est pas ça qui est dit. On dit: Au fonds consolidé et, après, on va faire ce qu'on veut avec. Puis le porte-parole des Transports du côté de l'Opposition officielle, dans le budget, lorsqu'il a fait l'étude du budget, a démontré qu'il n'y en avait pas plus d'argent pour les routes. Alors, qu'on arrête de nous dire qu'on met ça sur les routes quand il n'y a pas une cenne de plus pour les routes. Même si c'était le cas, M. le Président, ce n'est pas le cas, mais même si c'était le cas, sur le fonds, le principe, sur le principe de la chose, nous autres, on soutient que c'est un hold-up, que ça ne se fait pas de prendre l'argent de l'assurance automobile, l'argent de la caisse des assurés, pour le mettre dans le fonds consolidé du gouvernement.

On peut bien vouloir faire des routes, mais pas sur le dos des usagers. Cette caisse-là a été formée vraiment pour les indemnités. S'il y a trop d'argent, qu'on baisse les primes, mais qu'on n'aille pas enlever l'argent de la caisse. C'est pour ça que moi, je suis contre le projet de loi. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la députée des Chutes-de-la-Chaudière. Je reconnais maintenant le prochain intervenant, M. le député de Shefford. M. le député.

M. Roger Paré

M. Paré: Oui. Merci, M. le Président. Eh bien! le projet de loi 50, lorsqu'on regarde le titre, Loi modifiant la Loi sur la Régie de l'assurance automobile du Québec et d'autres dispositions législatives, on peut s'imaginer qu'effectivement ça va toucher les polices d'assurance ou le régime d'assurance automobile des Québécois. Est-ce que c'est pour l'améliorer? Est-ce que c'est pour en diminuer les avantages? Il faut le lire, effectivement, pour s'apercevoir qu'il ne s'agit pas d'améliorations, mais absolument pas, pour les conducteurs québécois. Il s'agit plutôt d'une loi qui remplit un mandat confié au ministre des Transports par le ministre des Finances. Il s'agit de lire une seule phrase dans les notes explicatives pour s'apercevoir ce qu'est ce projet de loi: "...ce projet donne suite au discours sur le budget en prévoyant que la Société verse au fonds consolidé du revenu... "Ce qu'on est en train de dire, c'est simple, c'est que le gouvernement a décidé de vider la caisse de la Régie de l'assurance automobile du Québec.

Je me rappelle que, lorsque le ministre des Finances a lu son discours sur le budget, de l'autre côté, on s'est levés debout, parce que le ministre a dit: Cette année, oui, il y a une augmentation du déficit, mais il n'y aura pas d'augmentation d'impôts et presque pas d'augmentation de taxes. C'était de toute beauté. De l'autre côté, on disait que, malgré le ralentissement économique, on était capable de ne pas aller chercher davantage d'argent ou ça laissait entendre qu'on était capable de ne pas aller chercher davantage d'argent dans les poches des contribuables. Pourtant, qu'est-ce qu'on fait depuis quelques jours, ici, à l'Assemblée nationale? On se rend compte que chacun des ministres, en tout cas de ministères importants, est en train de venir chercher l'argent des contribuables d'une façon indirecte, d'une façon cachée, par un projet de loi touchant des institutions autres que directement les ministères.

Hier, c'était le projet de loi du ministre de l'Éducation concernant les commissions scolaires. Il y avait une phrase semblable; ça donnait le pouvoir au ministre de l'Éducation d'obliger les commissions scolaires à aller chercher de l'argent dans les poches des contribuables via les taxes foncières. Donc, le gouvernement ne le fait pas directement; il fait faire par les commissions scolaires ce que lui ne voulait pas faire ici, publiquement, c'est-à-dire aller chercher davantage d'argent dans les poches des contribuables. Donc, le gouvernement économise en se retirant, finalement, d'une partie des coûts de l'éducation et en obligeant les commissions scolaires à aller chercher l'argent dans les poches des contribuables pour financer l'éducation. (1 heure)

Ce soir, c'est un autre ministre qui fait la même chose. Pour répondre à un ordre, un commandement du ministre des Finances, eh bien, il va aller chercher dans les poches des contribuables, via la Régie de l'assurance automobile, l'argent dont il a besoin pour le fonds consolidé du revenu. Pourtant, ce n'était pas ça l'objectif,

les fondements mêmes de la Régie de l'assurance automobile du Québec. Et c'est bon, peut-être, de se rappeler ce qui s'est passé là-dedans. Ça faisait des années et des années que des organismes de protection du consommateur, des syndiqués, des gens d'à peu près toutes les associations demandaient au gouvernement de mettre sur pied une régie d'État au niveau de l'assurance automobile du Québec, parce que c'était devenu inacceptable. Pour les vicimes, c'étaient toujours des procédures au civil qui prenaient beaucoup de temps et qui coûtaient très cher. Et pourtant, le projet a été sur les tablettes pendant des années, jusqu'à ce que le gouvernement du Parti québécois décide, lui, de rendre à terme les projets et de mettre sur pied la Régie de l'assurance automobile du Québec. Je pense que c'est bon de se le rappeler et de rendre hommage à des gens qui le méritent. Je pense ici à Mme Lise Payette qui a présenté le projet de loi, qui l'a défendu et qui a dû en faire la promotion un peu partout au Québec. C'était très contesté. Ce n'était pas pensable que ce soit une société d'État qui puisse assurer les Québécois, et spécialement les jeunes parce que ça n'avait plus de bon sens. Pour les jeunes, en 1974, 1975, 1976, des fois ça coûtait plus cher pour se protéger, s'assurer que de s'acheter l'automobile. Les paiements étaient plus élevés pour l'assurance que pour l'automobile. L'État a décidé d'intervenir pour aider tous les citoyens, mais peut-être d'une façon particulière les plus jeunes. Donc, Mme Payette s'est promenée dans le décor en disant que, oui, une société d'État pouvait donner un très bon service, un bon rendement, une bonne protection et être rentable. Maintenant, on en a la preuve. La preuve est très concluante puisque, maintenant, le gouvernement libéral décide d'aller chercher l'argent dont il a besoin pour ses revenus consolidés dans la caisse de la Régie de l'assurance automobile du Québec. Ça paraît bien, le gouvernement dit: Je n'augmente pas les impôts ni les taxes. Mais il va chercher l'argent dans les coffres de la Régie de l'assurance automobile du Québec.

Pourtant, c'est une société d'État, une régie, une assurance à laquelle tous les conducteurs et les conductrices du Québec participent. Une assurance, habituellement, ça veut dire qu'on a la protection et qu'on paie les primes en fonction du nombre d'accidents, finalement des indemnités. Et lorsque c'est une assurance qui nous appartient, comme ça, une assurance d'État, ça veut dire que quand c'est rentable, lorsqu'on a payé les Indemnités et tous les frais, finalement les dettes de la Régie, s'il y a des profits Importants, habituellement les bénéficiaires de la police, c'est-à-dire les contribuables, ceux qui sont assurés peuvent s'attendre à une diminution: diminution de prime, diminution de permis ou diminution de plaque d'Immatriculation. Donc, si on ne vidait pas la caisse, les Québécois auraient pu s'attendre à une diminution importante de leurs primes, puisque la caisse est pleine. Au lieu de faire ça, le gouvernement a décidé d'aller chercher les fonds qui sont dans la caisse. C'est exactement ça qu'on retrouve dans le projet de loi 50, c'est-à-dire cette compagnie, cette société d'État, cette Régie de l'assurance automobile du Québec qui faisait des profits, qui aurait pu les retourner de différentes façons, soit donner de meilleurs indemnités aux victimes d'accidents d'automobile ou diminuer les primes. Là, ils ne pourront plus penser à ça parce que, maintenant, la Régie devient une Société et le gouvernement va aller puiser les fonds de la Société pour mettre dans son fonds de roulement. Donc, c'est une taxe cachée, une taxe déguisée que le gouvernement va chercher dans les poches, finalement, des conducteurs et conductrices du Québec.

Et tout ça, on dit que c'est pour le beau principe. C'est pour se donner de meilleures routes. Ça, c'est seulement un argument sur lequel on peut même se questionner par rapport à sa véracité. Si c'est vrai qu'on va chercher des dizaines de millions dans les coffres de la Régie de l'assurance automobile, en prétextant que c'est pour améliorer l'état des routes au Québec puisque, à travers tous les comtés, tout le territoire québécois, nos routes sont dans un état lamentable... Il y a même des centaines de ponts au Québec qui, présentement, sont dans un état dangereux, c'est reconnu. On aurait pu, à tout le moins, penser qu'ils nous ont dit la vérité et que l'argent qu'ils vont chercher dans les coffres de la Régie, ça va être pour améliorer l'état de nos routes. C'est ce qu'on nous a dit. Puis on s'aperçoit, notre critique, le député de Lévis, l'a prouvé à maintes reprises, que l'argent qu'on va chercher...

M. Brassard: Question de règlement, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Question de règlement.

M. Brassard: Je m'excuse. Mon collègue est tellement intéressant qu'on a sûrement besoin du quorum.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Le quorum est complet. Si vous voulez poursuivre, M. le député.

M. Brassard: Complet, 22?

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Vingt et un.

M. Brassard: Oui?

M. Paré: Merci, M. le Président. Ce que J'étais en train de dire, c'est qu'on a fait

accroire aux Québécois que, parce qu'on va chercher leur argent comme assurés dans la caisse de la Régie de l'assurance automobile du Québec, on investirait davantage dans les routes; mais c'est complètement faux, et tous les députés ici en sont conscients. Qu'on regarde seulement les budgets qu'on nous a donnés pour les comtés, pour la voirie municipale, c'est une diminution presque partout: moins d'argent.

En ce qui concerne, maintenant, la construction, l'immobilisation et l'entretien, dans bien des comtés, l'argent investi cette année pour les nouvelles routes, c'est zéro. Diminution de plusieurs dizaines de millions de dollars au ministère des Transports pour les routes, cette année, et on nous a fait accroire que l'argent qu'on allait chercher dans la caisse de la Régie de l'assurance automobile du Québec, c'était pour des routes, alors que la réalité - et là, on le voit maintenant - c'est une diminution considérable en termes de plusieurs dizaines de millions de dollars pour la construction des routes. On nous a leurrés, on nous a trompés. C'est tout simplement que le gouvernement a décidé d'aller chercher ça pour le fonds consolidé.

Donc, la loi est tellement claire: ce n'est pas une loi pour améliorer les conditions des automobilistes québécois; ce n'est pas une loi pour améliorer le régime comme tel, qui était très bon, grâce à Mme Payette et au gouvernement du Parti québécois. Ce n'est même pas une loi pour améliorer les routes au Québec, c'est tout simplement pour mettre dans les coffres du gouvernement. Donc, ça veut dire qu'on ne doit pas s'attendre à des diminutions de primes, à des diminutions du coût du permis, à des diminutions des primes d'assurances, puisque le gouvernement va prendre l'argent; c'est une taxe qu'il va chercher d'une façon indirecte. Et je le répète, la loi est tellement claire, ce projet donne suite au discours sur le budget en prévoyant que la société verse au fonds consolidé du revenu... C'est non pas un projet de loi pour aider les automobilistes, mais c'est un projet de loi pour venir - finalement, je ne peux pas utiliser le mot - mais venir chercher, dans la caisse de la Régie de l'assurance automobile, qui appartient aux assurés du Québec, les fonds qu'on avait accumulés et qui auraient pu nous permettre finalement une diminution de primes.

C'est très malheureux. Merci. M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député. Je reconnais le prochain intervenant, M. le député d'Ungava. M. le député d'Ungava.

Motion d'ajournement du débat

M. Claveau: M. le Président, si vous me permettez, avant de commencer ma brève intervention, je voudrais faire motion à l'effet qu'en vertu des dispositions de l'article 100 du Règlement de l'Assemblée nationale nous ajournions le débat en cours.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Votre motion est recevable, M. le député. En vertu de l'article 100, je vais rappeler aux parlementaires comment est réparti le temps.

M. Pagé: Dix, dix.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Oui, oui, je sais. Alors, l'auteur de la motion, vous avez une période de dix minutes. Un représentant de chaque groupe parlementaire et l'auteur de la motion ont un droit de réplique.

Alors, je vous reconnais, M. le député d'Ungava, pour une période de dix minutes, au maximum.

M. Brassard: Allons nous reposer. M. Christian Claveau

M. Claveau: Oui, M. le Président. D'abord, M. le Président, deux grands événements sont a souligner en ce moment. Je voudrais profiter de l'occasion, si vous me permettez, pour souhaiter un joyeux et magnifique anniversaire à notre collègue, la députée des Chutes-de-la-Chaudière.

Des voix: Bravo!

M. Claveau: Vous en conviendrez, M. le Président, c'est une curieuse façon de commencer son anniversaire, surtout que ça arrive juste une fols par année. L'autre chose, M. le Président, qui, je pense, mérite d'être soulignée au moment où l'on se parle, c'est l'arrivée de l'été. Vous savez que...

M. Brassard: Ah! bien, bravo!

M. Claveau: Vous savez que c'est au solstice de juin...

Une voix: Au moins, on est d'accord sur ça. (1 h 10)

M. Claveau: ...que l'été cogne à nos portes et, M. le Président, il convient, par la même occasion, de souhaiter que tous les automobilistes de la grande région montréalaise s'arment de patience, de leur suggérer d'être bien patients, parce que, avec ce qu'on voit se préparer, ils vont avoir un été très chaud, d'autant plus que le même ministre ne nous garantit pas non plus que la Sûreté du Québec nous accompagnera avec tous ses services durant la période estivale. D'autre part, M. le Président, quant à nous, des régions, nous aurions souhaité pouvoir bénéficier ou attendre un peu, à l'occasion, sur nos routes et c'est de bonne grâce que nous aurions collaboré avec le ministère des Transports pour faire

en sorte de lui permettre de réparer les nombreux trous et crevasses que l'on retrouve sur les routes des régions du Québec. Enfin, nous n'en aurons pas beaucoup l'occasion cet été.

M. le Président, il est 1 h 10 du matin. Nous sommes en train de discuter un projet de loi de très grande importance et pour lequel, en plus, on nous a imposé un bâillon en commission parlementaire, un projet de loi qui va permettre au gouvernement de liquider tous les surplus, tous les fonds qui ont été accumulés péniblement au cours des années par les automobilistes, propriétaires de véhicules automobile et qui se retrouvent à la Régie de l'assurance automobile du Québec et des fonds qui devraient servir d'abord et avant tout pour les raisons pour lesquels ils ont été payés. C'est en pleine nuit, M. le Président, alors que les actionnaires, si vous me permettez d'utiliser l'expression, les bailleurs de fonds de la Régie de l'assurance automobile du Québec, ne sont pas là pour nous écouter, que l'on va en parler. Comment peut-on imaginer, M. le Président, une société, une compagnie qui profiterait du fait que tous ses actionnaires sont en vacances pour faire son assemblée générale? Et bien, c'est, en gros, ce que nous faisons. Nous discutons d'un projet de loi de très haute importance qui va avoir des impacts non négligeables sur la facturation de la Régie de l'assurance automobile du Québec, sur le niveau des primes qu'elle va devoir exiger à plus ou moins long terme à l'ensemble des automobilistes du Québec et nous le faisons alors que les automobilistes sont au repos, en train de reprendre des forces pour s'attaquer à une nouvelle journée de labeur dès le lever du jour.

M. le Président, il me semble que c'est là une mécanique tout à fait inacceptable dans une société qui se veut démocratique. On a beau, M. le Président, imposer des bâillons aux députés en cette Chambre, les empêcher de parler, les empêcher de s'exprimer, mais j'espère et je souhaite de tout coeur, M. le Président, que l'ignominie n'ira pas jusqu'à faire en sorte que les principaux intéressés dans la population ne pourront pas participer ou, du moins, assister comme spectateurs au "hold-up" qu'on est en train de leur faire subir.

M. le Président, je suis d'avis, étant donné les circonstances, étant donné l'heure tardive, étant donné que, d'après le visage dégarni que nous offre la Chambre en face de nous, plusieurs ministres semblent être usés à la corde, pour reprendre une expression qui a déjà été utilisée en cette Chambre par un député de l'aile ministérielle, alors que plusieurs ministres semblent plutôt maganés, eh bien, qu'il serait peut-être de bon aloi de permettre à ceux qui vivotent encore un tant soit peu d'aller se reposer avant de ne pouvoir remplir convenablement leurs fonctions et nous reviendrions, M. le Président, tout le monde, frais et dispos, en cette Chambre demain pour reprendre au grand jour ce débat sur un "hold-up" qui demeurera historique.

M. le Président, vous êtes à même de constater vous-même, de votre siège, que nous, de l'Opposition, devons être vigilants pour nous assurer de ne pas parler dans le vide, pour nous assurer qu'il y ait au moins quorum en cette Chambre. C'est le minimum que l'on puisse exiger de la démocratie, M. le Président. C'est le minimum que l'on est en droit de s'attendre, nous, de l'Opposition, que le gouvernement assure le quorum en cette Chambre. Et on est juste à la ligne de flottaison quand on n'est pas un peu sous l'eau, M. le Président. Et, à tout bout de champ, il faut revenir et rappeler à nos collègues de l'aile ministérielle qu'à cause de la mauvaise planification de son gouvernement, à cause d'un laxisme qui, pour nous, est très difficile à expliquer, eh bien, ils sont obligés de passer des nuits blanches en cette Chambre à former quorum et à nous écouter pour pouvoir refaire les messages aux populations qui les ont élus. Parce que ces populations-là devront compter sur eux pour avoir le message, étant donné qu'à l'heure où nous siégeons, elles risquent fort d'être occupées à d'autres tâches.

M. le Président, il me semble donc que ce n'est là qu'une question de bon aloi, de savoir-vivre que de permettre à nos collègues de l'aile ministérielle d'aller se reposer eux aussi, peut-être pour avoir l'oreille plus alerte dès la reprise des travaux, à 10 heures demain matin, et aussi, de toute évidence, pour s'assurer que les intéressés, que ceux sur qui on va braquer le revolver dans quelques heures, soient au moins au courant des dangers que l'on risque de leur faire subir et que l'on va nécessairement leur faire subir.

Il y a une espèce d'inconvenance, M. le Président, à siéger jour et nuit sur des lois aussi fondamentales. N'ayez crainte, en ce qui nous concerne, nous, de l'Opposition, restons alertes et vigilants quelle que soit l'heure; c'est bien connu. Nous sommes à la disposition de la population vingt-quatre heures par jour et nous allons tenir le coup tant et aussi longtemps qu'il le faudra pour nous assurer que les intérêts de nos commettants, que les intérêts de ceux que nous représentons en cette Chambre soient respectés par ce gouvernement, M. le Président. Et je peux vous assurer qu'en ce qui nous concerne, nous sommes tout à fait disposés à siéger jour et nuit, jusqu'à la fin de juillet s'il le faut, pour s'assurer que les lois qui vont être votées en cette Chambre le seront en toute honnêteté, en toute connaissance de cause et en toute conformité avec les intérêts de l'ensemble de la population du Québec et non pas pour faire en sorte que l'on prenne les caprices de quelques-uns pour les besoins de tout le monde, comme c'est le cas, par exemple, comme on a pu le voir pas plus tard que tout à l'heure avec la Loi sur les heures d'affaires.

Là, M. le Président, si je fais cette motion, ce n'est pas pour nous faciliter la tâche à nous,

parce que de toute façon, nous sommes là pour ça. Nous avons été élus pour travailler pour la population et nous serons là tant et aussi longtemps qu'il le faudra pour s'assurer que les intérêts de la population sont bien représentés et que les lois reflètent vraiment les aspirations fondamentales du peuple du Québec. Mais, par contre, comme nous voyons qu'il y a quelques bancs libres en face de nous et qu'il semble y avoir un problème de concentration de la part de nos collègues du côté ministériel, eh bien, M. le Président, c'est en pensant à eux que je me suis permis de faire cette motion d'ajournement. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député. M. le leader du gouvernement.

M. Michel Pagé

M. Pagé: M. le Président, pour le bénéfice de celles et ceux qui nous écoutent, c'est une motion qui est présentée par l'Opposition en vertu des dispositions du règlement et qui vise purement et simplement à retarder de quelques minutes l'étude du projet de loi en cours, au moment de la prise en considération du rapport. C'est pour gagner du temps. Je retiens que le député nous indiquait dans un premier temps que l'objectif de sa démarche, c'était que les députés puissent aller se reposer et, se référant évidemment à ceux qu'il connaît plus intimement, c'est-à-dire ses collègues de l'Opposition officielle, il sentait que ses collègues avaient besoin d'aller se reposer, de se rafraîchir, etc. Je conviens que l'heure est tardive. Mais il reste seulement deux jours de travaux à l'Assemblée nationale du Québec, deux jours de travaux, M. le Président. Il ne reste même pas quarante-huit heures de travaux à l'Assemblée nationale du Québec. Donc, on doit tout faire ce qui humainement possible pour adopter le plus grand nombre de lois qui sont au feuilleton. Et ça, c'est le mandat du leader du gouvernement. Je retiens donc que l'Opposition ne veut pas siéger malgré qu'il ne reste que quarante-huit heures, que, par la suite, les députés seront dans leur comté, seront en vacances parlementaires. Partant de là, M. le Président, compte tenu de la faiblesse des arguments de l'Opposition, je vous dis tout de suite que je n'ai pas l'intention d'utiliser tout le temps de la réplique et qu'on est prêts à disposer de la motion.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, pour la formation du groupe parlementaire de l'Opposition officielle, M. le député de Lac-Saint-Jean et whip de l'Opposition officielle.

(1 h 20)

M. Jacques Brassard M. Brassard: Je vais me risquer, M. le Président, à essayer de convaincre le leader du gouvernement de la pertinence de la motion d'ajournement de mon collègue d'Ungava, qui m'a pris un peu par surprise, je dois le dire. J'ai été un peu surpris de sa motion, ce n'était pas prévu. C'est, comme on dit, une action purement spontanée de sa part, mais je l'écoutais, puis j'ai vite compris que, ma foi, c'était une motion tout à fait pertinente, appropriée dans les circonstances, non pas pour gagner du temps, comme vient de l'insinuer, de façon quasiment malveillante, le leader du gouvernement, non, non. Ce n'est pas pour gagner du temps, ni en perdre, c'est pour des motifs très sérieux.

D'abord, je dirais que cette motion-là a été présentée dans l'intérêt du leader du gouvernement lui-même. Visiblement, depuis le début de la session, il faut bien le reconnaître, même si j'ai beaucoup d'amitié pour lui, il faut reconnaître qu'il est complètement désemparé. Il est complètement désemparé. Il est absolument incapable de programmer ou de planifier sa législation de façon intelligente, convenable. Il est incapable de faire en sorte que les députés de l'Assemblée nationale puissent légiférer et étudier des lois dans des conditions intelligentes, convenables et acceptables. C'est l'improvisation la plus absolue, une présentation anarchique de son menu législatif. On ne sait pas trop où il s'en va, quelles sont les lois auxquelles il tient. Vraiment, c'est désolant.

Je trouve ça désolant parce que la réputation du député de Portneuf va sortir de cette session-là amochée, amochée, il faut le dire. C'est quand même un parlementaire de longue date, qui est ici depuis fort longtemps, plus longtemps que moi d'ailleurs. Il a un mandat de plus que moi. Donc, c'est un vieux parlementaire, malgré son âge pas très avancé, c'est un vieux parlementaire. Et là, il va sortir de cette session-là avec une réputation de leader amochée, défaite, parce qu'il va avoir raté sa législation. Il va l'avoir présentée de façon tellement désordonnée, tellement improvisée, sans objectif, cahotique, que sa réputation de leader va, je pense, être complètement bousillée.

J'ai l'impression que le premier ministre va en tenir compte dans les mois qui viennent. Parce que le leader aurait besoin de la nuit qui reste, du temps qui reste, pour réfléchir à ce qu'il convient de faire, en termes de menu législatif, identifier les projets de loi qu'il veut faire adopter et, entre autres, le projet de loi 50, je pense qu'il devrait le laisser sur le carreau, ça m'apparaît évident.

Donc, cette motion se fait par le député d'Ungava, dans l'intérêt même du leader du gouvernement, mais c'est aussi dans l'intérêt des ministériels. Regardez ça, M. le Président, regardez ça. C'est la première fois, moi, que je vois que c'est l'Opposition qui assure le quorum. Habituellement, et j'ai déjà été whip du gouvernement deux ans et demi, M. le Président, je

connais ça, le métier de whip, et je sais que, comme whip du gouvernement, une des tâches qu'on a, c'est d'assurer le quorum. Ce sont les ministériels qui assurent le quorum. Et là, ce soir, cette nuit, c'est le contraire. Si les députés de l'Opposition entraient dans leur bureau, là, vous auriez de la misère, vous suspendriez pas mal longtemps cette nuit. Vous auriez de la misère à assurer le quorum. Regardez les banquettes vides.

Donc, les ministériels, je pense, sont fatigués, désemparés...

M. MacMillan: Question de règlement, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Quelle est votre question de règlement, M. le député de Papineau?

M. MacMillan:...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): C'est en vertu de quel article?

M. MacMillan: J'ai oublié l'article, le numéro de l'article. C'est juste pour mentionner qu'on est 25 en train de manger du poulet dans la salle du bureau du whip...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît, M. le député...

M. MacMillan: ...si on peut les appeler, ce serait correct.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): ...ce n'est pas pertinent.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le député, si vous voulez poursuivre.

M. Brassard: Au lieu de manger du poulet, M. le Président, ils devraient aller rencontrer leur leader et s'expliquer avec lui. Ce serait pas mal plus utile pour le Parlement et pour l'intérêt supérieur des Québécois, pour reprendre une expression couramment utilisée par le premier ministre. Donc, c'est dans l'intérêt des ministériels, cette motion d'ajournement. Vous êtes visiblement fatigués, épuisés et, surtout, vous ne savez pas où le gouvernement s'en va. Vraiment, on voit, à vos visages dépités, vous êtes des députés dépités...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Brassard: ...on s'en rend compte visiblement que vous êtes un peu perdus et même pas mal perdus dans tout ça et vous auriez besoin d'un repos mérité. Ça vous permettrait de réfléchir et ça vous permettrait d'avoir des échanges fructueux avec votre leader du gouvernement pour que vous puissiez vous expliquer ensemble pour savoir où vous vous en allez parce que, nous, on ne le sait pas trop où vous vous en allez. Et c'est dans l'intérêt du peuple lui-même, cette motion d'ajournement.

Le projet de loi 50, le meilleur usage qu'on peut en faire, c'est de le laisser au feuilleton pour plusieurs mois, le laisser faisander. Il mérite ça, le projet de loi 50, parce que je suis convaincu qu'au bout de quelques mois, à la reprise de la session d'automne, le gouvernement aura eu le temps de changer son opinion et son point de vue sur un projet de loi qui constitue - je l'ai dit à maintes reprises dans cette Chambre - un véritable hold-up, un braquage par deux ou trois "pistoleros" du gouvernement, pour accaparer 650 000 000 $ et plus, presque 800 000 000 $, dans la caisse des automobilistes - presque 900 000 000 $ - un siphonnage éhonté, scandaleux au détriment des automobilistes du Québec, un détournement de la vocation et de la mission de la Régie elle-même. Alors, je pense qu'un ajournement s'impose. Ça permettrait ainsi aux automobilistes du Québec de reprendre le volant, demain matin, avec, au moins, la satisfaction de voir que le projet de loi 50 n'a pas franchi l'étape qu'on voulait lui faire franchir cette nuit et de susciter peut-être un peu d'espoir chez les millions d'automobilistes du Québec, un peu d'espoir que le gouvernement retrouve la raison et convienne qu'un hold-up pareil, c'est non seulement un scandale, mais ça ne se fait pas, c'est inadmissible, c'est inacceptable et, à ce moment-là, peut-être en retrouvant la raison, qu'il accepte de remettre à plus tard le hold-up et même de l'annuler purement et simplement.

Alors, M. le Président, au début, j'étais surpris de la motion de mon collègue d'Ungava parce que, je vous l'avoue bien franchement, il y a des gestes spontanés qui se passent parfois dans un Parlement, ça en est un, mais la spontanéité, parfois, est de mise dans l'Assemblée nationale, parce que je connais mon collègue d'Ungava et je suis sûr que ça vient du coeur. Ça vient du coeur et ça vient d'une compréhension profonde des intérêts du Parlement du Québec, de l'Assemblée nationale, bafouée dans ses droits les plus fondamentaux par le gouvernement, depuis une semaine, bafouée dans ses droits. Trois bâillons, c'est quelque chose de tout à fait inusité. Ça ne s'est jamais vu, c'est du jamais vu. Alors donc, le député d'Ungava, voyant ses droits bafoués, a eu comme un cri du coeur, il a présenté cette motion d'ajournement et je demande au gouvernement de l'accepter.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député. Je reconnais maintenant M. le député d'Ungava, en vertu de votre droit de réplique et avec un maximum de cinq minutes. M. le député

d'Ungava.

M. Christian Claveau (réplique)

M. Claveau: M. le Président, de toute évidence... Je regarde encore une fois, en terminant, les banquettes vides en cette Chambre et je me dis que, quoiqu'on en dise, il doit y en avoir plusieurs qui sont déjà partis sous d'autres deux...

Une voix: On va manquer de poulet.

M. Claveau: ...et, quant à ceux qui sont intéressés par le poulet, peut-être qu'ils s'intéressent plus à l'agriculture et étant donné les nouvelles dispositions du libre-échange qui mettent en péril nos éleveurs de poulet au Québec, quant à l'accessibilité au marché américain, eh bien, ils ont décidé de soutenir le marché en consommant du poulet de nuit au Parlement. C'est peut-être là une oeuvre très louable, c'est de la philanthropie au sens pur, mais ça ne justifie peut-être pas qu'on en profite pour aller ponctionner 877 000 000 $. Alors que tout le monde a le dos tourné en mangeant du poulet, on va vider la caisse. M. le Président, je constate que, effectivement, il y a plusieurs de nos collègues qui sont quelque peu fatigués. Et, de toute façon, il y a quelque chose de fondamentalement immoral, de clairement immoral et inadmissible dans le fait qu'on nous oblige à opérer, à fonctionner de nuit, pour passer des projets de loi aussi importants que celui-là. On l'a fait depuis le début de la semaine.

M. le Président, on peut accuser l'Opposition de tout ce qu'on voudra, de l'autre côté de la Chambre, mais il n'est reste pas moins un fait, c'est que, s'il fallait qu'à l'image du Nou-veau-Brunswick ce gouvernement soit seul en Chambre, il y a longtemps qu'il ne resterait même plus d'automobilistes au Québec. Une chance que l'Opposition est là pour défendre les intérêts des Québécois et Québécoises. Une chance que nous sommmes vigilants et que nous restons dispos, même à une heure aussi avancée de la nuit.

Des voix:...

M. Claveau: M. le Président, j'entends toutes sortes de rumeurs en cette Chambre. On se croirait dans un poulailler. Ce qui fait preuve du peu d'intérêt que ces gens-là peuvent avoir pour nos propos. Etant donné, même, la difficulté que certains ont à comprendre l'intérêt de nos interventions, j'en suis même à me demander s'il n'y en a pas quelques-uns qui se promènent avec des bouchons dans les oreilles, pour être bien certains de ne rien entendre et, surtout, de ne pas changer d'idée. Si on faisait un petit sondage à main levée, on aurait peut-être des surprises, et il y en a peut-être quelques-uns qui seraient obligés de lever la main en disant: Oui, M. le Président, je m'en excuse, j'avais un bouchon dans les oreilles. Et, en disant ça, je ne regarde personne.

Toujours est-il que ça n'a plus de bon sens. On est toujours à rechercher le quorum. On a vu qu'au moment du dernier vote, tout à l'heure, on n'était même pas encore rendus à minuit, et il y avait à peine 50 % des députés ministériels qui étaient présents en cette Chambre. Imaginez-vous qu'est-ce que ça va être lorsque l'on aura à voter, aux petites heures du matin, sur le projet de loi en question, le projet de loi 50, qui est pourtant un projet de loi très important, et qui risque de modifier passablement le comportement des automobilistes québécois, de ceux qui payent, qui ont alimenté la cagnotte depuis une bonne douzaine d'années, et qui, aujourd'hui, se voient dépouillés de ce bien qu'ils ont accumulé avec les années, pour satisfaire le président du Conseil du trésor qui veut à tout prix, envers et contre tous, sans considération aucune que ses colonnes comptables balancent en fin d'exercice. Là-dessus, M. le Président, je crois que c'est le temps de passer au vote, et j'en suis même à me demander...

Une voix:...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Si vous voulez terminer, M. le député.

M. Claveau: Ah, on me dit, M. le Président, que, effectivement, je dois donner une chance à mes collègues de l'aile ministérielle, sinon on risque de renverser le gouvernement sur ce vote-là, dans la mesure-Le Vice-Président (M. Bissonnet): Si vous voulez conclure, s'il vous plaît.

M. Claveau: ...où leurs banquettes sont terriblement dégarnies. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce que la motion du député d'Ungava d'ajourner le débat est adoptée?

Une voix: Vote nominal.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Vote enregistré. Qu'on appelle les députés! (1 h 35 - 1 h 41)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Si vous voulez prendre place, s'il vous plaît! Si vous voulez vous asseoir, s'il vous plaît. S'il vous plaît! Mmes, MM. les députés, en vertu de l'article 32, nous allons procéder à un vote. Je vous demande votre collaboration entière.

M. Boulerice: Ah! le 32, je respecte ça.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le

député de Sainte-Marie-Saint-Jacques, à l'ordre, s'il vous plaît. S'il vous plaît! Je vais mettre aux voix la motion du député d'Ungava, motion d'ajournement du débat. Que ceux et celles qui sont pour cette motion, veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint: Mme Blackburn (Chi-coutimi), Mme Marois (Taillon), M. Garon (Lévis), M. Jolivet (Laviolette), M. Baril (Arthabaska), Mme Juneau (Johnson), M. Dufour (Jonquière), M. Lazure (La Prairie), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Léonard (Labelle), Mme Vermette (Marie-Victorin), M. Paré (Shefford)...

Des voix: Bravo, bravo!

Le Secrétaire adjoint: ... M. Claveau (Unga-va), M. Boulerice (Sainte-Marie-Saint-Jacques), M. Morin (Dubuc), Mme Caron (Terrebonne), M. Boisclair (Gouin), M. Trudel (Rouyn-Noran-da-Témiscamingue), Mme Dupuis (Verchères), Mme Carrier-Perreault (Les Chutes-de-la-Chaudière).

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Que ceux et celles qui sont contre cette motion veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint: M. Pagé (Portneuf), Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François), Mme Bacon (Chomedey), M. Côté (Rivière-du-Loup), M. Cusano (Viau), M. Picotte (Maskinongé)...

Des voix: II vote! Il vote! Oh!

Le Secrétaire adjoint: ...Mme Robillard (Chambly), M. Blackburn (Roberval), Mme Bleau (Groulx), M. Maciocia (Viger), Mme Trépanier (Dorion), M. Middlemiss (Pontiac), M. Beaudin (Gaspé), Mme Dionne (Kamouraska-Témiscouata), M. St-Roch (Drummond), Mme Pelchat (Vachon), M. Paradis (Matapédia), M. Marcil (Salaberry-Soulanges), M. Lemire (Saint-Maurice), M. Pou-lin (Chauveau), M. Benoit (Orford), M. Williams (Nelligan), M. Kehoe (Chapleau), M. Doyon (Louis-Hébert), M. Messier (Saint-Hyacinthe), M. Charbonneau (Saint-Jean), Mme Bégin (Belle-chasse), M. Bélanger (Laval-des-Rapides), M. Gauvin (Montmagny-L'Islet), M. Gautrin (Verdun), M. Larouche (Anjou), M. Khelfa (Richelieu), M. Gobé (LaFontaine), Mme Hovington (Matane), M. Joly (Fabre), M. LeSage (Hull), M. Bordeleau (Acadie), M. Audet (Beauce-Nord), M. Parent (Sauvé), M. Camden (Lotbinière), M. Bradet (Charlevoix), M. Farrah (Îles-de-la-Madeleine), M. Forget (Prévost), Mme Loiselle (Saint-Henri), M. Lafrenière (Gatineau), M. Lafrance (Iberville), M. MacMillan (Papineau).

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce qu'il y a des députés qui s'abstiennent? M. le secrétaire. le secrétaire: pour: 20 contre: 47

Le Vice-Président (M. Bissonnet): La motion est donc rejetée et nous poursuivons le débat sur le projet de loi 50. Je reconnais M. le député d'Ungava.

Une voix: Bravo!

Reprise du débat sur la prise en considération du rapport de la commission

M. Christian Claveau

M. Claveau: Vous voyez, M. le Président, juste avec le résultat du vote, j'avais presque raison, dans la mesure où 47 étant la moitié de 94 et qu'il y a 92 députés libéraux, eh bien, on est tout juste à la moitié des troupes en place. Ce qui veut dire, M. le Président, que, comme on suppose que la majorité va voter sur l'adoption finale de ce projet de loi, il eût été intéressant pour la population du Québec de savoir que, pour le moins, les députés qui auront à voter sur ce projet de loi étaient présents lors des débats. Dans ce sens-là, M. le Président, je pense que, voyant l'état des troupes et le niveau du moral des troupes du gouvernement, le leader du gouvernement aurait eu avantage à accepter notre motion d'ajournement.

Ceci dit, M. le Président, par rapport au projet de loi 50, d'abord vous me permettrez d'exprimer ma désolation, mon désaveu quant à la façon cavalière dont le gouvernement a traité l'Opposition. Remarquez que ce n'est pas la première fois durant cette session que l'on nous impose un bâillon. On l'a dit, mais on ne l'a pas encore assez dit et on ne le dira jamais assez, M. le Président. Trois bâillons en autant de jours, c'est quelque chose d'inusité. C'est sûrement une première dans l'histoire parlementaire québécoise. J'en suis même à me demander si ce gouvernement, cherchant une façon d'entrer dans le livre des records Guinness, n'a pas considéré que c'était là la meilleure façon que l'on se rappelle de lui sans avoir à trop bouger. C'est la meilleure façon de faire un record qui ne demande pas beaucoup d'efforts. Comme ce gouvernement a une tendance à l'inertie, eh bien, c'est sans hésiter qu'il s'est lancé dans cette façon de faire qui, de toute évidence, est la façon la plus paresseuse qui soit d'adopter un projet de loi et d'éviter d'amener au grand jour la problématique ou de débattre de la problématique que soulève un projet de loi en particulier et, dans le cas présent, le projet de loi 50 qui modifie substantiellement la façon de faire de la Régie de l'assurance automobile du Québec, en allant lui chercher, M. le Président, 877 000 000 $. Et ça, j'ai comme l'impression que ce n'est qu'un début, parce que, le jour où on aura commencé à piger allègrement, année après année, dans la caisse

de la Régie de l'assurance automobile du Québec, il va devenir plutôt difficile de s'en passer.

Ce n'est qu'un début, M. le Président, et ces 877 000 000 $ que l'on enlève délibérément et sans consentement aux assurés de l'assurance automobile, eh bien, ça va se traduire uniquement et très rapidement par une brèche dans le barrage qui va aller en s'élargissant continuellement et qui va faire qu'un jour ou l'autre on va considérer...

M. Boulerice: Question de règlement, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Question de règlement, s'il vous plaît, M. le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques.

M. Boulerice: En vertu de l'article 32, il m'est extrêmement difficile, même étant de ce côté, à côté de mon collègue, le député d'Un-gava, d'entendre ses propos tellement la rumeur est forte venant de l'autre côté, M. le Président. (1 h 50)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Mes chers collègues, je vous demande votre collaboration en vertu de l'article 32. Les députés doivent observer le règlement et contribuer au maintien du décorum de l'Assemblée. Je vous demande votre collaboration. M. le député d'Ungava, si vous voulez poursuivre.

M. Claveau: Oui, M. le Président. Je disais qu'on est en train d'introduire une nouvelle coutume qui va se généraliser très rapidement, qu'on le veuille ou non. À partir du moment où on établit le principe que l'on peut aller chercher de l'argent à volonté dans les surplus de la Régie de l'assurance automobile, eh bien, il sera très difficile, par la suite, de s'en passer. Et, lorsque l'on aura finalisé la ponction des premiers 877 000 000 $ dont il est question actuellement, on continuera, M. le Président. Et la coutume sera établie, et les assurés, dans le domaine de l'automobile au Québec, continueront, sans le vouloir, malgré eux, année après année, à payer pour le gouvernement, à payer des choses qui ne relèvent absolument pas de leur responsabilité en tant qu'assurés.

Quand je me paie une assurance, c'est une assurance que je me paie. Ce ne sont pas des routes, ce ne sont pas des services, ce n'est pas l'inertie d'un gouvernement, c'est des assurances. Et dans ce sens-là, M. le Président, en toute logique et en toute honnêteté, lorsque la compagnie ou, dans le cas présent, lorsque la Régie de l'assurance automobile va bien, c'est à ses assurés, c'est à ceux qui ont mis l'argent dans la cagnotte qu'elle doit en faire profiter, soit par des réductions de primes, soit par des augmentations de compensations, soit par un plus vaste éventail de produits de couverture de risques. Enfin, il y a différentes modalités que la Régie peut prendre pour faire bénéficier de cet argent-là ceux qui ont payé.

M. le Président, le gouvernement dit: Ah, il y a de l'argent qui traîne! Il faut le ramasser, ça n'a pas d'allure. On ne peut pas laisser traîner de l'argent. J'imagine le président du Conseil du trésor, en chasseur invétéré, avide de fonds ou de liquidités, qui muni, habillé de sa "suit" de déguisement, de sa "suif...

Une voix: Superman!

M. Claveau: ...de camouflage, avec ses grandes bottes de robeur et sa casquette sur la tête, armé d'un 12 à deux coups, part à la chasse de fonds disponibles, un peu comme on voit le petit bonhomme qui chasse continuellement dans Bugs Bunny et qui revient souvent bredouille.

Une voix: Roadrunner!

M. Claveau: Le premier que le ministre rencontre sur son chemin, avec son 12 en main, c'est le ministre des Affaires municipales. Il le voit derrière un buisson, avec 320 000 000 $ de liquidité. Sans hésiter, il braque et le ministre crache!

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Claveau: 320 000 000 $. Peu importe ce qu'en pensent les municipalités, peu importe ce qu'en pense les contribuables dans les municipalités, peu importe ce qu'en pensent les MRC, ce n'est pas important et il faut sauver sa peau; on a le "gun" sur la tempe. Eh bien, on crache! Et le ministre des Affaires municipales, pour sauver sa peau, laisse tomber les 320 000 000 $. Le président du Conseil du trésor s'en empare et continue sa chasse. Ce n'est pas assez, parce que ses colonnes comptables ne balancent toujours pas et le ministre des Finances lui dit: Non, il ne faut plus taxer, là! Il ne faut pas taxer. Il faut passer pour un bon gouvernement. On ne peut pas se permettre de taxer plus directement. Il faut faire peser la responsabilité sur le dos de quelqu'un d'autre. Comment voulez-vous que l'on passe pour un gouvernement qui sait administrer si on taxe plus? Déjà qu'on en a pris pas mal dans les taxes et déjà qu'on a de la difficulté à remplir nos promesses électorales. Alors, il faut trouver quelqu'un qui va payer à notre place. Et le ministre continue sa chasse. Qui rencontre-t-il? Le ministre des Transports caché derrière la boîte d'un dix roues, devant le parlement!

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Claveau: Et il part aux trousses du ministre des Transports qui ne peut bénéficier de

l'appui des camionneurs pour l'aider à se cacher. Alors, il finit par le coincer, lui braque son 12, parce qu'il avait deux coups; il lui en reste encore un. Là, il se rend compte que le ministre des Transports avait 877 000 000 $ dans son portefeuille. 877 000 000 $, vous imaginez le plaisir, vous imaginez la joie, vous imaginez jusqu'à quel point le ministre responsable du Conseil du trésor était heureux de trouver comme ça, par hasard, 877 000 000 $ en beaux "bills" du Dominion! Surtout qu'à la même époque son chef était de l'autre côté de la rivière Outaouais en train de discuter de sa façon de rester dans le Dominion. Il pense que c'est peut-être même sa dernière chance de mettre la patte sur de l'argent avec la face de la reine et il s'en empare immédiatement, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Si vous voulez conclure.

M. Claveau: Sans considération pour ceux qui l'ont payé cet argent, il s'en empare.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Si vous voulez conclure, M. le député.

Des voix: Consentement.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Si vous voulez conclure, votre temps est écoulé.

M. Claveau: En trois mots, M. le Président...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît!

M. Claveau: ...en disant qu'en constatant la réaction de cette Chambre à mes propos je suis convaincu que la deputation a enfin compris qu'on ne peut pas se permettre de cambrioler un peuple éternellement. Merci, M. le Président.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Je reconnais maintenant M. le député de La Prairie. M. le député.

M. Denis Lazure

M. Lazure: Merci, M. le Président. Si à 2 heures du matin, en ce jeudi 21 juin, le début de l'été, si à cette heure tardive on doit parier du projet de loi 50, projet de loi qui amende la Loi sur la Régie de l'assurance automobile, c'est essentiellement parce que le ministre des Transports a fait preuve d'impatience, d'inexpérience. Imaginez-vous qu'après à peine treize heures de débats en commission parlementaire, treize heures, ce ministre dit: C'est fini, je vous ai assez entendus, je n'ai pas besoin d'en savoir plus. Moi, j'ai un boulot à faire, j'ai une job à faire, il faut que j'aille chercher les 877 000 000 $; alors, j'ai besoin de cette loi-là.

Quand on pense, M. le Président, que la loi qu'il veut changer, c'est une loi qui, en 1977, a été débattue pendant 225 heures en commission parlementaire. Le gouvernement du Parti québécois de l'époque n'a pas mis le bâillon à l'Opposition, l'Opposition qui était contre ce projet de loi. Cette Opposition a dû regretter, depuis toutes ces années, d'avoir voté contre ce projet de loi. La loi qui a créé la Régie de l'assurance automobile, c'est une des meilleures lois que le gouvernement du Québec s'est jamais données. Avant 1976, la population réclamait une régie d'État parce que les victimes d'accidents devaient passer des mois, des mois et des mois en cour pour obtenir des règlements plus ou moins satisfaisants et devaient payer des primes très élevées.

Le gouvernement du Parti québécois, lorsqu'il arrive en 1976, tient ses engagements et tout de suite se met à l'oeuvre pour écrire ce projet de loi. Mme Lise Payette a été un modèle de patience, contrairement au ministre des Transports. Si, au moins, le ministre des Transports avait pris ce temps qu'il a refusé de donner à la commission pour aller régler le problème des camionneurs artisans, on l'aurait peut-être un peu mieux compris, on l'aurait peut-être à moitié excusé. Non seulement il n'a pas pris ce temps-là pour aller régler le problème des camionneurs artisans, mais il s'est entêté à fermer ses livres au bout de treize heures; plus de commission parlementaire. (2 heures)

M. le Président, c'est un troisième bâillon, c'est la troisième fois que ce gouvernement nous dit: L'Opposition, fermez-vous, vous n'avez rien à dire, même s'il s'agit, dans ce projet de loi qu'on discute, d'un geste qui va transformer la Régie de l'assurance automobile. Du jour au lendemain, la Régie de l'assurance automobile devient un percepteur d'impôt. Ce n'est plus une caisse de mutuelle d'assurances, c'est un percepteur d'impôt.

C'est une loi qui va dénaturer complètement le rôle de la Régie. C'est une loi, en même temps, qui vient pénaliser les citoyennes et les citoyens qui ont été de bons conducteurs, qui ont eu moins d'accidents. Normalement, dans une compagnie d'assurances, lorsque vous avez une police et que vos accidents sont peu nombreux, avec l'augmentation des fonds dans la caisse, ou bien on augmente les indemnités ou on baisse les primes. Ce n'est pas ce que le gouvernement du Parti libéral fait. Il y a beaucoup d'argent dans la caisse parce qu'elle a été bien administrée, parce que la population a été prudente. On prend cette réserve-là et on s'en sert pour renflouer des dépenses qui ont été faites par le gouvernement, un gouvernement qui n'a pas le courage de dire à la population: Nous avons besoin de vous taxer, nous avons besoin d'augmenter les impôts.

Un gouvernement qui prend des moyens détournés pour aller chercher ces sommes d'argent.

Ce matin, dans le journal Le Devoir, Gilles Lesage, qui est un éditorialiste et un chroniqueur parlementaire très expérimenté, très sage, qui observe la vie parlementaire depuis longtemps, commentait cet abus du gouvernement actuel de mettre fin à des débats après à peine quinze, vingt, vingt-cinq heures de débat en commission parlementaire. Il avait des mots très durs pour le gouvernement, et ce n'est pas l'habitude de Gilles Lesage d'avoir des mots durs pour le gouvernement du Parti libéral, mais il en a eu ce matin. Il a dit, en particulier: II y a au moins un de ces trois projets de loi qui devrait être remis à l'automne, et c'est le projet de loi 50. M. Lesage, comme nous le disons dans l'Opposition, démontre clairement que ce projet de loi va changer la nature de la Régie de l'assurance automobile. Il démontre clairement que c'est un geste qui vient tromper la bonne foi de la population, c'est un geste désespéré de ce gouvernement qui a besoin d'argent et qui n'a pas le courage d'augmenter les impôts ou d'augmenter les taxes.

M. le Président, je pense que l'Opposition est en bonne compagnie avec ce journaliste chevronné, expérimenté, qui n'est pas un extrémiste mais qui dit au gouvernement: Écoutez, pensez-y bien, il n'y a pas d'urgence, ce n'est pas vrai qu'il y a une urgence à bouleverser complètement le fonctionnement de la Régie de l'assurance automobile. c'est vrai qu'il n'y a pas d'urgence. le gouvernement n'a pas pu démontrer l'urgence, il a même refusé qu'on entende en commission parlementaire les dirigeants de la régie de l'assurance automobile. c'eut été normal de les entendre. ce gouvernement a refusé que nous entendions le vérificateur général du québec. nous voulions demander au vérificateur général si c'était bien légal ce que le gouvernement était en train de faire. c'était légitime de vouloir demander ça au vérificateur, qui est un peu le surveillant de l'administration publique au québec. là aussi, le ministre a dit: non. c'est un ministre qui dit non. il a dit non aux camionneurs artisans qui sont ici depuis deux semaines; il dit non à la population qui veut entendre les dirigeants de la régie de l'assurance automobile, qui veut entendre le vérificateur général.

M. le Président, c'est une triste semaine pour la vie parlementaire, pour la démocratie parce que les 29 députés de l'Opposition représentent quand même 40 % de la population qui ont voté en septembre dernier. 50 % ont voté pour les libéraux, 40 % pour le Parti québécois. Cette population, ces 40 %, nous parlons en leur nom et nous pensons que dans un projet de loi aussi important que celui que le ministre des Transports nous a présenté, il faut prolonger les discussions. Et maintenant que le ministre a refusé, maintenant que le leader et son gouver- nement ont fermé les livres, le seul recours qui reste à ce gouvernement s'il veut se ressaisir un peu, revenir au sens commun, c'est d'écouter notre voeu, de répondre: Oui, remettons ce projet de loi à l'automne. Il est prématuré. Il n'y a pas d'urgence. Il n'y a pas péril en la demeure, et nous allons prendre le temps de l'expliquer à la population. Moi, je mets au défi nos collègues du parti ministériel d'aller rencontrer leurs électeurs dans les semaines qui viennent. Si le projet était remis à l'automne, ils ou elles auraient le temps d'aller rencontrer les électeurs, les électrices et de leur expliquer pourquoi il est si urgent de changer la vocation de la Régie de l'assurance automobile du Québec. Je les mets au défi d'y aller en compagnie d'un député de l'Opposition et je me rends volontaire tout de suite, surtout pour les députés du parti ministériel qui sont dans la Montérégie. Ça me ferait plaisir de les accompagner dans une espèce de débat public. Je pense que le moins qu'on puisse lui demander, au parti ministériel, c'est de faire, au cours des semaines qui viennent, avec la population, le genre de discussion que le ministre des Transports a refusé en commission. Alors, M. le Président, je souhaite, en terminant, que le gouvernement se ressaisisse et qu'il laisse de côté ce projet pour y revenir cet automne. Merci.

Le Vice-Président (M. Cannon): Merci, M. le député de La Prairie. Le prochain intervenant, M. le député d'Arthabaska.

M. Jacques Baril

M. Baril: Oui, M. le Président, pour une autre fois, j'interviens sur le projet de loi 50. Je pensais qu'avec mes collègues on réussirait à convaincre le ministre des Transports de prendre tout le temps qu'il fallait pour évaluer tous les impacts des conséquences de ce projet de loi. J'ai participé activement à la commission parlementaire durant les quatorze heures environ que nous avons discuté, et nous n'avons pas été capables d'obtenir une réponse du ministre sur toutes les questions qu'on lui posait. Le ministre s'est borné à dire: Commençons à étudier article par article, et on répondra à vos questions. On a demandé au ministre d'entendre différents organismes pour connaître leur opinion sur la façon dont le gouvernement s'y prenait ou s'y prend pour augmenter ses fonds, augmenter ses revenus, pour soi-disant faire des travaux de construction de routes dans les régions. Le gouvernement, M. le Président, depuis deux, trois jours, juste à le voir, de la façon dont il mène nos travaux, qu'il dirige nos travaux ici à l'Assemblée nationale, on s'aperçoit que c'est un gouvernement complètement perdu, un gouvernement complètement déboussolé et, comme diraient les jeunes, un gouvernement complètement sauté, parce qu'on abolit toutes les règles de procédure

en Chambre pour trois projets de loi, dont un sur les heures d'affaires. Je ne comprends pas, encore une fois - je l'ai dit cet après-midi - l'urgence qu'il pouvait y avoir à faire une loi où il n'y a à peu près personne qui est d'accord avec ça, qui ne va rapporter rien au gouvernement de toute façon.

Hier, le feu était pogné pour se dépêcher d'autoriser les commissions scolaires à aller percevoir 320 000 000 $ de taxes de plus au niveau des contribuables québécois. Et durant ce temps-là, lui, le gouvernement se retire du financement des commissions scolaires pour environ 307 000 000 $. Donc, il met encore de l'argent dans ses poches. Il le fait payer par les contribuables. Aujourd'hui, on se retrouve encore avec ce même gouvernement perdu, déboussolé, désorienté, qui va s'emparer d'argent dans la réserve des fonds de l'assurance automobile du Québec pour construire des routes, qu'on nous dit; 875 000 000 $ avec la ponction qu'ils vont venir faire pour payer un système, un service d'ambulanciers complètement sauté également pour la région de Montréal. Ces gens-là ont voté cette loi ici pour donner des services, avantager leurs amis pour qu'ils donnent un service à 1500 $ du coup par ambulance pour un accidenté. Je ne comprends pas, absolument pas, M. le Président, que ça puisse coûter 1500 $ pour transporter un accidenté de la route quand, pour un blessé ou un malade, ça coûte 70 $. Imaginez-vous la marge qu'il y a entre les deux. C'est inexplicable. (2 h 10)

Ce gouvernement, depuis ce printemps, a agi un peu comme dans la fable de La Fontaine. On se souvient du lièvre et de la tortue, c'était à celui qui arriverait le premier au fil d'arrivée. Le lièvre, se voyant comparer à une tortue, se moquait, riait, gambadait, courait dans le bois, se ridiculisait. C'est un peu ce que le gouvernement fait. Il saute sur tout ce qu'il voit. Il est perdu, complètement perdu. Et, pendant ce temps, la tortue, elle, cheminait vers le fil d'arrivée.

Dans le contexte qu'on vit présentement, la tortue, M. le Président, c'est l'arrivée de l'assurance automobile. Depuis 13 ans qu'elle fonctionne, lentement, tranquillement, elle a rendu des services aux gens. Elle a amélioré le système, pendant que ces gens-là, en 1977, avaient voté contre la loi. Ils étaient complètement contre ça, c'était épouvantable, parce qu'on s'attaquait aux avocats, qui auraient beaucoup moins d'ouvrage. Les vendeurs d'assurance, c'était épouvantable, on les menait à la ruine. Donc, ce gouvernement, qui formait l'Opposition à l'époque, était complètement contre le projet de loi créant la Régie de l'assurance automobile.

Aujourd'hui, ils font comme le lièvre; ils courent après tous les fonds qu'ils peuvent aller chercher, tous les surplus qu'ils peuvent aller chercher, entre autres. Et comment pensez-vous,

M. le Président, que les administrateurs de la Régie de l'assurance automobile, qui deviendra la Société de l'assurance automobile, la SAAQ, maintenant, qu'il faudra s'habituer à dire... Quelle motivation ces gens-là auront de continuer à administrer, à donner des services ou à améliorer les services aux accidentés, quand ils savent maintenant qu'à partir d'aujourd'hui, plus ils vont avoir de surplus, plus le gouvernement va venir fouiller dedans? C'est complètement, M. le Président, réorienter dangereusement la Régie de l'assurance automobile quant à la raison pour laquelle elle avait été créée. Et, dans leur course folle vers un objectif qu'on ne connaît pas, on ne sait plus trop où ils veulent arriver, où ils veulent atterrir, le gouvernement actuel - comme je l'ai dit - dans le dernier budget, a annoncé pour plusieurs centaines de millions de dollars d'augmentation de taxes au niveau des contribuables. Mais ce n'est pas eux qui vont avoir l'odieux d'aller les chercher. Ils ont utilisé toutes sortes de moyens, toutes sortes de façons, celui dont on parie présentement en est un.

Il y a également au niveau des commissions scolaires où on a élargi l'assiette fiscale. Vous avez ce gouvernement qui a autorisé une augmentation des coûts d'électricité; avec la TPS, en dedans de 18 mois, ça va faire à peu près 24 % d'augmentation. C'est toujours les contribuables qui vont payer, M. le Président. Il ne faut pas oublier ça. Et plus Hydro augmente ses profits, plus elle remet des redevances au gouvernement. Il y a aussi l'augmentation des frais de scolarité au niveau de l'université. Qui va payer? C'est encore les contribuables. Il y a les taxes sur les cigarettes. Remarquez bien que ça, ça ne me fait pas mal parce que je ne fume pas, mais, de toute façon, pour ceux qui fument, c'est encore une taxe indirecte pareil. M. le Président, je suis certain parce qu'il y a plusieurs personnes qui m'en ont parié: Encore les cigarettes! Mais, comme je vous dis, là-dessus, je ne peux pas faire une grosse bataille, parce que, étant un non-fumeur depuis de nombreuses années, pour ne pas dire n'ayant à peu près jamais fumé... De toute façon, c'est quand même une taxe indirecte que le gouvernement va chercher.

Donc, on a un gouvernement en face de nous qui, après un manque de prévoyance, depuis les cinq dernières années que ce gouvernement administre, après avoir profité d'une croissance économique remarquable grâce au programme que le Parti québécois avait mis en place pour traverser la crise de 1981-1982, ce gouvernement, à cause d'un manque de prévoyance, actuellement, est un peu comme un oiseau qui arrive dans la maison: il se garroche dans toutes les vitres. Il se sent poigne. Il se garroche partout. Il ne sait plus où aller. Et, actuellement, tout ce qui bouge, ce gouvernement trouve le moyen d'essayer de le saisir au passage pour le mettre dans la cagnotte, toujours pour démontrer que ce

sont de bons administrateurs, lis n'augmentent pas les taxes. Ils administrent bien. Ils n'augmentent pas le déficit. Et, quand on compare, on analyse tout ça, on s'aperçoit, M. le Président, que, même si ce gouvernement dit qu'il a coupé le déficit budgétaire du Québec en deux, on s'aperçoit, M. le Président - et le Vérificateur général le dit lui-même - qu'il n'y a rien là. Ce n'est pas vrai. On reste avec le même déficit, excepté qu'ils ont changé les méthodes comptables. Donc, j'avais espéré un bout de temps, M. le Président, en commission parlementaire, pouvoir ébranler un peu le ministre des Transports pour qu'il accepte de rencontrer des organismes.

Je termine en disant simplement, M. le Président, qu'avec toutes les heures que nous avons passées, 13 ou 14 heures en commission parlementaire, avec je ne sais combien d'heures qu'on discute ici, en Chambre, si on avait préservé ça et légiféré comme du monde, je vais dire comme du monde, on aurait facilement pu entendre quatre ou cinq organismes, avec une heure chacun. On aurait pu prendre une heure pour savoir quels organismes seraient venus. En six heures, on aurait entendu tout le monde qu'on voulait entendre et on aurait pu bonifier ce projet de loi pour qu'il puisse répondre exactement aux besoins du gouvernement et aux besoins de la population.

Ça me fait penser, et je vais finir là-dessus, que ce soit n'importe quel congrès, des fois, au Conseil national du Parti québécois, on est des procéduriers, des fois on va s'obstiner une heure de temps au micro pour savoir comment s'y prendre pour arriver à quelque chose. Ça prendrait cinq minutes, le discuter et le décider, mais comment faire pour arriver là, on va prendre une heure pour, après ça, prendre cinq minutes pour la décision. C'est un peu ce que c'est, prendre la décision. C'est ce qu'on fait ici, actuellement. Ça va faire 20, 25 heures qu'on discute, à peu près complètement pour rien, pour essayer de faire comprendre au gouvernement de changer son mode de fonctionnement. Si on avait pris tout ce temps-là pour essayer de discuter, gratter et approfondir article par article le projet de loi, je vous garantis, M. le Président, qu'on aurait réussi à s'entendre et on aurait fait comprendre au gouvernement que, dans l'intérêt des Québécois, il fait fausse route.

Le Vice-Président (M. Cannon): Merci, M. le député d'Arthabaska. Mme la députée de Johnson.

Mme Carmen Juneau

Mme Juneau: Merci beaucoup, M. le Président. M. le Président, je ne sais pas si je dois vous dire bonjour ou bonsoir, puisqu'on est rendu à 2 h 15 du matin, dans la nuit du 20 au 21 juin 1990. De toute façon, M. le Président, je dois faire mon intervention et je dois vous dire qu'aujourd'hui, j'ai eu une surprise de taille. J'ai eu une surprise de taille parce qu'à la période de questions - je dois dire hier, mais ce matin, parce qu'on ne s'est pas couché encore - on a vu arriver le ministre des Finances. Ça faisait une secousse qu'il n'était pas venu. Il est arrivé, le teint hâlé, il avait l'air en forme, il était remis complètement de ses problèmes de santé, en un jour bien extraordinaire pour lui puisque c'était son 34e anniversaire de vie parlementaire. On peut dire, M. le Président, que tous les parlementaires, de chaque côté de la Chambre, l'ont applaudi. Je pense que c'est une chose extraordinaire, un homme ou une femme qui fait 34 ans de vie parlementaire. Il faut le souligner. Je pense que c'est important, surtout qu'il relève de problèmes de santé. On était heureux de le voir revenir. On n'est pas mesquins, absolument pas, M. le Président.

Par contre, j'ai eu aussi une déception. Je dois vous expliquer que j'ai eu une déception. Parce que, quand je l'ai vu arriver, je pensais qu'il s'en venait nous annoncer des choses extraordinaires. J'ai dit: Mon Dieu! Le ministre des Finances qui arrive aujourd'hui, ça doit avoir une signification. Il doit venir nous dire que le projet de loi 50 va être mis de côté jusqu'à l'automne, puisque ça ne presse pas pour le faire adopter. Et, compte tenu que c'est lui qui était au début de cette initiative, puisque c'est lui, dans son discours sur le budget, qui nous a annoncé qu'il irait faire des ponctions dans la Régie - ce n'est pas lui qui exécute, mais c'est lui qui l'a annoncé dans son budget - là, je me suis dit: Ah bien, bravo! Bravo, on va l'applaudir, pas seulement parce qu'il est revenu et qu'on est contents qu'il soit en santé, mais parce qu'il vient nous dire qu'il retire le projet de loi 50, en disant: Ça ne presse pas, ne nous énervons pas, à l'automne ça va faire pareil. (2 h 20)

Quelle déception, M. le Président. Il ne nous a pas dit un mot, sauf sourire et nous remercier de l'avoir applaudi. Quelle déception! Franchement, M. le Président, je ne suis pas la seule à avoir remarqué ça. Je suis persuadée que les autres parlementaires pensaient qu'il avait un message à venir nous livrer. Je suis persuadée de ça. Je suis désappointée et je ne suis pas la seule. En plus de ça, c'est que tout le monde le dit: II n'y a pas de feu en la demeure. La Régie est là pour rester, elle va être là encore cet automne puis le gouvernement n'aurait pas l'odieux de nous avoir mis un troisième bâillon, il n'y avait rien qui pressait, et on aurait eu le temps, en commission parlementaire, d'étudier, article par article... On ne s'est même pas rendus au premier article. Treize heures, floue! Pouf! Fini! Taisez-vous! Vous n'avez plus rien à dire, vous autres. Assoyez-vous dans votre coin et ne menez pas de train. Je m'excuse, on n'a pas été élus pour ne pas mener de train. On a été élus pour faire notre travail; on a été élus pour

passer au peigne fin les lois que le gouvernement libéral nous présente. M. le Président, il ne faut pas croire que le projet de loi 50 est un projet de loi dithyrambique, loin de là. C'est loin d'être un élogieux projet de loi. Le projet de loi 50, ça veut dire que pour les cinq ans à venir il y aura 877 000 000 $ de moins dans la caisse des assurés. Cette année, on en parie là. On essaie de faire en sorte que les principaux intéressés, c'est-à-dire les assurés du Québec, soient au courant que le gouvernement libéral va aller faire des ponctions dans la caisse de la Régie de l'assurance automobile.

Moi, j'ai une proposition à vous faire, M. le Président. Vu que le ministre des Finances a été trop gêné pour le faire aujourd'hui, on pourrait peut-être vous faire la proposition que tous les députés en cette Chambre... On va s'en aller chez nous pour les vacances d'été, la session se termine au moins vendredi ou samedi; en tout cas, on va travailler fort. On pourrait prendre l'été pour envoyer des communiqués a nos assurés de la Régie de l'assurance automobile, leur dire qu'il va y avoir des rencontres dans chacune des municipalités de chacun de nos comtés et aller leur dire que, là, le gouvernement libéral s'apprête à faire une ponction dans leur caisse. Là, on verrait une réaction. Là, on pourrait dire que le monde est informé, que les principaux intéressés sont informés, les gens qui paient l'immatriculation, qui paient des plaques et qui sont assurés avec la Régie de l'assurance automobile. On pourrait leur dire que, d'ici cinq ans, on n'en repariera plus... Quand on aura fini l'adoption du projet de loi 50, c'est-à-dire une autre fois qu'on va intervenir parce qu'on a le bâillon, disons que... on est encadrés... Quand on va avoir terminé et que le projet de loi va être adopté, pour les quatre autres années qui vont suivre, on n'en entendra pas parier, mais doucement, le gouvernement va aller chercher des sous dans la caisse pour supposément les mettre dans les chemins. Mais si je vous disais que, cette année, la ponction qui se fait dans la Régie de l'assurance automobile, M. le Président, ça ne donnera pas une cenne noire. Bien au contraire, dans toutes les régions du Québec, on va avoir une diminution.

Je pourrais vous faire l'état de la situation, M. le Président. Dans la région du Bas-Saint-Laurent, on va avoir 9 600 000 $ de moins cette année pour la construction des routes. Ça, c'est en dollars constants. Ça équivaut à 41 % de moins que le budget de l'année dernière. Dans l'Abitibi-Témiscamingue, le comté de mon collègue, il a raison de chialer, il n'aura rien lui non plus. Il y a 12 600 000 $ de moins. Ça fait 40 % de moins dans son comté. Ils en ont besoin. Dans Drummond-Yamaska - le député de Drummond est là, il devrait chialer - il va y avoir 11 100 000 $ de moins, c'est-à-dire 45 % de moins dans sa région. Il devrait faire venir ses assurés de la Régie de l'assurance automobile et leur expliquer exactement ce qui va se passer. Dans Chaudiè-re-Appalaches, 15 600 000 $ de moins, 39 % de moins du budget. Dans Saguenay-Lac-Saint-Jean, mon collègue est intervenu tout à l'heure, il va y avoir 10 600 000 $ de moins, 42 %. Dans l'Est rie, c'est chez nous, M. le Président. L'Es-trie, 14 700 000 $ de moins, 54 %. Ce n'est pas une mince affaire. Moi, je vais le dire au monde dans mon coin. Je vais leur dire. Dans la Mauri-cie-Bois-Francs, 9 900 000 $ de moins, 39 % de moins. Dans l'Outaouais, 18 000 000 $ de moins, ça égale 60 %. Il faut comprendre pourquoi on a des camionneurs dehors. C'est eux autres qui charroyent la "gamotte" pour mettre dans les chemins.

Une voix: De la gravelle.

Mme Juneau: Si on n'a plus d'argent pour faire les chemins dans nos régions... Aie! moi, au printemps, M. le Président, là, mes autobus scolaires restent pris, puis les camions à lait, qui voyagent le lait de mes producteurs agricoles, ils calent jusqu'aux essieux.

Une voix: Hein!

Mme Juneau: Bien, cette année, je vais avoir moins d'argent, puis, pourtant, on fait une ponction dans la Régie de l'assurance automobile.

Moi, quand je compte, deux et deux, ça fait quatre. Mais quand j'essaie de compter puis que l'autre 2 n'est pas là, bien, ça ne fait pas 4. Puis là, le gouvernement va chercher de l'argent dans la Régie, dans la caisse des assurés, puis il ne le remet pas où il est supposé de le mettre. C'est pour ça que les camions sont dehors. Les gens n'ont pas d'argent, puis on va continuer de voyager dans des nids de poules. Vous savez ce que c'est, des nids de poules, hein? Ce sont des trous dans les chemins de gravier. C'est ça qu'on a chez nous puis, au printemps, ce n'est pas drôle, parce qu'il y a des ventres-de-boeuf aussi.

M. le Président, ce gouvernement-là gouverne à la petite semaine, puis, ce qu'il vient de faire là, c'est une honte. Puis, la proposition que je vous fait, j'espère que vous allez en tenir compte. Donnez-nous l'été, donnez-nous notre saison estivale, nos vacances! Ça ne nous fait rien de laisser tomber nos vacances. On va aller dire à nos assurés de l'assurance automobile du Québec que le gouvernement libéral est en train de fouiller dans leur caisse, puis qu'il ne le remettra pas où il dit qu'il va le mettre. Ça fait que là, à mon point de vue, le gouvernement libéral a tout intérêt à mettre son projet de loi au frais, puis peut-être que le ministre des Finances va arriver avec son prochain budget puis dire: Non, non, on n'a plus besoin de ça, là, ça va bien notre affaire, on laisse tomber ça, puis ça va être, pour tout le monde, un bienfait.

Merci.

Le Vice-Président (M. Cannon): Merci, Mme la députée de Johnson. Mme la députée de Taillon.

Mme Pauline Marois

Mme Marois: Merci, M. le Président. Alors, évidemment, comme un certain nombre de mes collègues, j'interviens ce soir, au moment de la prise en considération du rapport sur le projet de loi 50.

En fait, il faut bien se rappeler que, comme l'a dit ma collègue qui m'a précédée, c'est l'une des trois lois pour lesquelles le gouvernement a imposé un bâillon. Évidemment, je n'ai pas à vous rappeler, M. le Président - puisque vous en êtes un membre eminent - que l'Assemblée nationale est le lieu d'expression institutionnelle de notre démocratie. C'est l'endroit où s'adoptent les lois qui régissent les liens qu'il y a entre les institutions, qui régissent les contrats qu'il y a entre les individus et les institutions. C'est ici, finalement, que nous adoptons les grands projets qui vont permettre, par des programmes, par des lois, par des mesures, par de nouveaux régimes d'assurance qui vont nous permettre de répondre aux besoins de nos concitoyens et de nos concitoyennes.

Quand le gouvernement propose un certain nombre d'orientations, pour lesquelles il demande un débat à l'Assemblée nationale, c'est qu'il juge que c'est suffisamment important pour que, effectivement, ce soit un débat public, un débat où l'ensemble des points de vue vont pouvoir être apportés. Ce sont des éléments, des projets suffisamment importants pour qu'on prenne le temps de voir les pour et les contre de chacun des projets qui sont devant nous.

Or, le rôle fondamental...

M. Boulerice: Excusez, M. le Président, est-ce que vous pourriez vérifier le quorum, s'il vous plaît?

Le Vice-Président (M. Cannon): Oui, M. le député. Effectivement, qu'on appelle les députés, s'il vous plaît. Effectivement, nous avons quorum. Vous pouvez poursuivre, Mme la députée de Taillon. (2 h 30)

Mme Marois: Merci, M. le Président.

Alors, comme je le mentionnais, effectivement, le rôle fondamental d'un parti d'opposition au sein du parlementarisme, au sein de l'Assemblée nationale, c'est de faire valoir des points de vue que le gouvernement aurait omis de considérer, c'est de faire valoir les droits de personnes qui se verraient brimées à l'égard de ceux-ci. Et c'est fondamental, pour que nous puissions exercer ce rôle-là, que nous puissions avoir le temps nécessaire pour discuter, échan- ger, proposer. Or, on assiste depuis quelques jours à un simulacre de démocratie, M. le Président, puisque, dans le cas de trois lois majeures qui concernent des contrats socio-économiques ou des contrats plus formels, des pactes entre le gouvernement et certaines institutions, trois lois fondamentales en ce qui concerne des principes qui régissent notre société, pour ces trois lois-là, on nous aura imposé le silence. Lorsqu'on dit le bâillon, c'est un mot bien amusant qui peut avoir l'air d'un jeu, mais ce n'est pas un jeu que de siéger à l'Assemblée nationale. Et le bâillon, ça veut dire, pour l'Opposition, l'impossibilité d'influencer d'une façon significative les projets de loi que le gouvernement va adopter, Opposition ou non. Vous savez, dans d'autres régimes que l'on voit se détruire à l'heure actuelle, pour lesquels on applaudit lorsqu'ils s'effondrent, ça s'appelle de la dictature.

De quoi s'agissait-il dans les trois lois dont nous parlons, et particulièrement celle que nous étudions actuellement? Dans un premier temps, je parlerai de celle pour laquelle je suis intervenue assez longuement en cette Chambre et qui concerne les heures d'ouverture des établissements commerciaux, où, effectivement, il y a eu mais un tollé, M. le Président, de protestations. Peu importe ce tollé, peu importe que l'Opposition essaie de faire valoir ce point de vue, c'est comme si nous n'existions pas et c'est comme si, effectivement, la majorité n'avait plus voix au chapitre, ne pouvait plus, par l'intermédiaire de membres de l'Opposition dont c'est le rôle, je le rappelle, M. le Président, n'avait plus la possibilité de s'exprimer, de dire ce qu'elle avait à dire. Un deuxième pacte, celui du gouvernement du Québec avec les municipalités. Nous avons entendu des règles, nous avons entendu ensemble des modes fiscaux, si on veut, des façons d'aller chercher des taxes pour les municipalités et les rôles respectifs des uns et des autres à l'égard, par exemple dans le cas du pacte Québec-municipalités, de l'impôt foncier.

Le Vice-Président (M. Cannon): M. le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques, sur une question de règlement.

M. Boulerice: M. le Président, est-ce que vous pourriez faire respecter le deuxième paragraphe de l'article 32 qui prive ma collègue de bénéficier du troisième paragraphe?

Le Vice-Président (M. Cannon): Effectivement, l'article 32 de notre règlement concerne le décorum de l'Assemblée. Je rappelle aux collègues que les députés doivent observer le règlement et contribuer au maintien du décorum à l'Assemblée. Ils occupent la place qui leur a été assignée par le président, y demeurent assis et gardent le silence à moins d'avoir obtenu la parole. Ils doivent s'abstenir de tout ce qui peut nuire à

l'expression d'autrui et au bon fonctionnement. Alors, je demanderais aux députés de prendre les fauteuils qui leur ont été assignés. Vous pouvez poursuivre, Mme la députée de Taillon.

Mme Marois: Alors merci, M. le Président. Je rappelais donc des pactes majeurs qui concernent un contrat social avec une population: les heures d'affaires, un pacte qui concerne un contrat entre le gouvernement et les municipalités et un troisième pacte qui est, lui, beaucoup plus formel puisque l'on parle d'un régime d'assurance, de l'assurance automobile, entre, effectivement, un gouvernement et des assurés, par l'intermédiaire d'une régie. La loi qui est devant nous remet en question les fondements mêmes de ce pacte, qui est un régime d'assurance. Et là, je vais prendre un article qui était publié au début de juin, il y a à peine quelques jours, en fait, le 7 juin dernier, sous la plume de M. Marc Bellemare, qui était publié dans La Presse et qui s'intitule "La saignée de la RAAQ". Je vais lire quelques paragraphes et je vais me permettre de les commenter pour expliquer en quoi on dénature le principe même du régime d'assurance automobile du Québec. Alors, on nous dit: "La Régie de l'assurance automobile est un monopole d'État. Elle occupe seule, sans concurrence, tout le marché de l'assurance... Sa clientèle est captive. Les automobilistes - qui sont des cotisants - comme les victimes - qui sont des bénéficiaires - doivent transiger avec elle. Ils n'ont pas le choix".

Dans ce contexte, M. le Président, évidemment, pour que cela puisse se produire, on établit des cotisations que vont payer les personnes qui sont effectivement les automobilistes, qui vont fournir donc à une caisse, laquelle on utilisera pour indemniser les victimes, pour s'assurer que les personnes qui vivent un accident de la route, peu importe leur situation, qu'elles soient au travail, ou étudiantes, ou chefs de famille, puissent être indemnisées, puissent voir leur revenu remplacé au moment d'un accident.

Quand la caisse prend plus d'importance, parce qu'il y a une certaine amélioration, par exemple, de la part des conducteurs qui font moins d'accidents, normalement on devrait baisser les primes, M. le Président, ou indemniser davantage les victimes, mais pas se servir d'une caisse pour aller taxer finalement et faire en sorte qu'on dénature fondamentalement le régime devant lequel on se trouve, M. le Président. Toute en dénaturant ce régime, tout en remettant en question le principe fondamental de l'assurance, où un cotisant retire ce qu'il a mis s'il rencontre un risque - dans le cas présent, un accident d'auto - il m'apparaît absolument inacceptable que l'on ait bâillonné l'Opposition et que l'on n'ait pas permis d'aller plus en profondeur dans ce projet. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Cannon): Merci, Mme la députée de Taillon. M. le député de Richelieu.

M. Khelfa: M. le Président, en vertu de l'article 213, est-ce que je peux poser une question à la députée de Taillon?

Le Vice-Président (M. Cannon): Mme la députée de Taillon, acceptez-vous que le député de Richelieu vous pose une question, en vertu de l'article 213?

M. Boulerice: M. le Président, question de règlement.

Le Vice-Président (M. Cannon): Un instant, s'il vous plaît, M. le député. Est-ce que...

Mme Marois: Oui, certainement.

Le Vice-Président (M. Cannon): Oui. M. le député de Richelieu, s'il vous plaît! Alors, je vais écouter votre intervention aussitôt... Est-ce que ça porte sur cette question-là? Alors, allez-y, M. le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques?

M. Boulerice: je suis vraiment offusqué, m. le président, que l'on méprise vos rappels à l'ordre lorsque vous invoquez l'article 32. je vous prierais de regarder à votre droite.

Le Vice-Président (M. Cannon): Vous me demandez de faire quoi, M. le député?

M. Boulerice: De faire appliquer le règlement et... le mépris que l'on témoigne à votre égard.

Le Vice-Président (M. Cannon): Je ne vois pas de problème ici à l'article 32, mon cher collègue.

M. Boulerice: Est-ce que vous pouvez m'indiquer à quel fauteuil est assigné M. le député de Rivière-du-Loup?

Le Vice-Président (M. Cannon): M. le député de Rivière-du-Loup est assis dans son fauteuil.

M. Boulerice: De Rimouski, je m'excuse. Des voix: Ha, ha, ha!

Le Vice-Président (M. Cannon): M. le leader du gouvernement.

M. Pagé: M. le Président, une autre belle tentative de la part du député de Sainte-Marie-Saint-Jacques. Je vous inviterais à reconnaître le député de Richelieu qui a une très très brève question à vous poser. Très brève, qui

commandera, j'en suis persuadé, une très brève réponse.

Le Vice-Président (M. Cannon): Mme la députée de Taillon a consenti. M. le député de Richelieu, votre question, s'il vous plaît!

M. Khelfa: Merci, M. le Président. La députée de Taillon et ses collègues de l'Opposition n'ont pas arrêté d'utiliser la cassette à savoir qu'ils sont bâillonnés et qu'ils n'ont pas le droit de parole. Ce que je ne comprends pas, c'est que depuis lundi, précisément, ils n'ont pas arrêté de parler pour dire continuellement la même chose. Avez-vous d'autres cassettes, d'autres informations plus pertinentes, plus professionnelles? Merci.

Le Vice-Président (M. Cannon): Mme la députée de Taillon.

Mme Marois: M. le Président, je pense que notre collègue n'a pas compris le règlement de l'Assemblée nationale. Un bâillon signifie que, peu importé ce que nous dirons ici, le projet de loi sera adopté, M. le Président. Nous tentons donc de faire valoir notre point de vue, de telle sorte que, quelque part, la raison puisse revenir chez ce gouvernement et qu'il amende donc le projet de loi que nous étudions, mais que nous étudions à faux, puisque nous ne pourrons, dans les faits, faire en sorte que ce gouvernement nous permette d'intervenir et de changer ce projet de loi qui est devant nous.

Le Vice-Président (M. Cannon): Merci, Mme la députée et M. le député de Richelieu. M. le leader adjoint de l'Opposition et député d'Abiti-bi-Ouest.

M. Perron: M. le Président, question de règlement. Est-ce que je pourrais demander le quorum, s'il vous plaît? Je m'excuse auprès de mon collègue, juste avant qu'il parle. Je voudrais au moins...

Le Vice-Président (M. Cannon): M. le député de Duplessis invoque le quorum. Alors, qu'on appelle les députés! (2 h 40)

Une voix: C'est ça.

Le Vice-Président (M. Cannon): Alors, le quorum est maintenant complet. M. te député d'Abitibi-Ouest.

M. François Gendron

M. Gendron: M. le Président, j'entendais la , brillante question du député "Kaffala"...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Gendron: Excusez, du député de Richelieu! Et il ne faut pas vraiment se surprendre qu'il y ait un peu...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Gendron: ...de jovialité à cette heure-ci, mais qu'il y ait surtout des propos qui sont repris par plusieurs intervenants. Parce que, sincèrement - et, là, je vais être très sérieux - c'est le leader du gouvernement qui appelle les projets de loi et c'est le leader du gouvernement qui appelle l'adoption du rapport du projet de loi 50 où, d'une façon très sérieuse - et, là, peut-être que le député de Richelieu était moins attentif; il a le droit d'en manquer des bouts - entre autres, le whip de l'Opposition officielle avait fait la preuve, on ne peut plus claire, qu'il s'agissait littéralement d'un vol, qu'il s'agissait d'un hold-up, parce qu'on ne peut pas, comme parlementaires, accepter d'adopter un projet de loi pour établir des règles aux fins que des cotisants, qui se sont cotisés largement à des coûts fort élevés - regardons le coût des plaques d'immatriculation, regardons le coût des permis - qui ont réussi à dégager une marge de manoeuvre pour les fins pour lesquelles on a créé un projet de loi...

J'ai toujours pensé qu'une loi, après qu'elle a été créée, il faut qu'elle serve aux fins pour lesquelles les législateurs ont eu l'occasion de la voter. Et si, au moins, les motifs pour lesquels on nous fait croire, premièrement, qu'il y a urgence - je vais faire un peu une intervention, comme leader adjoint de l'Opposition... Est-ce qu'il y a urgence? Bien non, on ne peut pas plaider l'urgence, parce que les mêmes qui prétendent que c'est utile, requis, nécessaire et urgent d'aller faire un "hold-up" à la caisse, de quelque 800 000 000 $, sous prétexte qu'on va appliquer ça dans un programme de réfection du réseau routier, bien, ils sont dans les patates! Ils ne sont même pas dans le réseau routier, ils sont dans les patates!

Prenons le discours sur le budget, leur discours sur le budget, pas le nôtre, leur discours sur le budget, M. le Président. Je vous défie de me trouver, à l'"item" Transports, à quelle place il est indiqué qu'en 1990 il y aura un rond de plus qui va être dépensé. Il n'y a pas une cent de plus qui va être dépensée. Ça prend quand même un certain culot pour retenir des parlementaires jusqu'à 3 heures, 5 heures ou 6 heures du matin, jour après jour, et s'étonner qu'on répète les mêmes choses. Mais, effectivement, on est sur trois projets de loi qui ont la même signification. Le gouvernement se déguise, comme je vous l'ai dit, en exécutif. Il dit: II n'y a plus d'Opposition, vous n'avez pas d'affaire là, même si on a été aussi élus que vous autres, M. le député de Richelieu.

Ce n'est pas moi qui ai décidé tout seul de venir siéger ici. C'est parce que ma population

m'a envoyé siéger ici. Donc, j'ai un droit de parole, en vertu de nos règles, et je l'utilise d'autant plus que vous avez empêché que les débats se fassent là où c'était prévu qu'ils se passent.

Une voix: Ce n'est pas vrai!

M. Gendron: Quand je vois... Ce n'est pas vrai! C'est encore des gens qui en ont manqué des bouts et c'est un peu normal, parce qu'il y a quelques jeunots qui arrivent, quelques jeunots qui ne connaissent pas le projet de loi, qui ne connaissent pas le règlement. Et, avant d'apprendre comment ça fonctionne... Une chose qui est certaine, des bâillons après 15 heures, moi, ça fait 14 ans que je suis dans la "shop", comme on dit, et je n'ai pas vu ça souvent.

Une voix:...

M. Gendron: Je n'ai jamais vu ça. Et, pourtant, on s'en est fait imposer trois, M. le Président, trois d'affilée pour de faux motifs. C'est ça qui est le plus grave, trois pour de faux motifs. J'entendais ma collègue de Johnson. Elle faisait un peu un rappel...

Une voix:...

M. Gendron: ... Non, ce n'est pas tout pareil. Elle faisait un rappel des pertes, cette année, au niveau du réseau routier et je regarde, moi, ce que je vais subir en Abitibi-Témiscamin-gue: une légère coupure de 40 % du budget.

Je me rappelle, le ministre des Mines nous disait: Où avez-vous pris ça? Sérieusement, II ne comprenait pas ça. Alors, j'ai fait sortir les fiches que l'Opposition a le droit d'avoir lorsqu'on étudie les crédits et je lui ai expliqué une soustraction parce que, lui, il ne comprend pas ça, c'est un notaire. Il faisait juste additionner les tarifs qu'il chargeait. Les soustractions, II ne comprenait pas ça. Alors, j'ai regardé, je lui ai montré sur les fiches que l'on reçoit et, entre la colonne 1989-1990, pour le programme 3, j'ai fait l'un moins l'autre et j'ai fait la même chose pour le programme 2. Tu additionnes l'un et l'autre et ça donne le montant. Ce n'était pas bien compliqué comme exercice, mais il ne comprenait pas ça. Il est convaincu que nos chiffres étaient erronés. Alors, j'ai demandé: Faites-moi la preuve que nos chiffres sont erronés. Et quand je lui ai prouvé que le communiqué de presse émis par mon collègue de Lévis était basé sur des renseignements fournis en commission parlementaire par le Parti libéral, par le gouvernement en place lors de l'étude des crédits, bien, on ne l'a pas réentendu. Ça, on est plus habitués à ça, à ne pas trop l'entendre.

Alors, je reviens sur le fond, M. le Président. Il est évident que nous, on ne se laissera pas "hold-uper" des sommes aussi invraisem- blables sur de faux motifs sur le fond et de faux motifs sur l'urgence. Je le répète, au discours des crédits, pas question, pas une cent d'argent neuf pour les travaux routiers. Alors, quels étaient les motifs que le Parti libéral avait? S'il n'en a pas d'autres que de faire ce qu'il a toujours fait, un gouvernement qui veut, hypocritement, cacher des hausses de taxes directes imposées aux contribuables, qui n'a pas le courage de mettre ses pantalons, même s'il y en a qui portent et la ceinture et les bretelles, il faudrait avoir le courage d'afficher vos responsabilités et dire: Bien, écoutez, on avait une loi qui a créé une réserve pour les assurés au niveau de la Régie de l'assurance automobile, bien, ça, ça va rester à sa place parce que ces gens-là ont cotisé pour ça. Tant mieux si la caisse a réussi à créer un peu de surplus. Ça permettra peut-être de corriger les lenteurs qui n'ont pas de bon sens au niveau de certains remboursements qui sont dus à des accidentés au niveau de l'assurance automobile, juste apporter des correctifs administratifs, non pas corriger la loi. C'est une des meilleures lois qui n'a jamais été passée au Québec et je suis assez bien placé pour en parler.

Ce n'est pas l'heure pour faire des propos émotifs, mais, moi, j'ai perdu mon père dans un accident d'automobile et je me rappelle ce qu'on a eu: zéro, rien et il n'avait aucune responsabilité. Sauf que, dans le temps, il y avait une loi qui s'appelait l'IVAC; il fallait faire la preuve qu'il n'avait aucune responsabilité. Ce n'est que quatre ans et demi plus tard que, par procès, on a établi la preuve qu'effectivement il n'avait aucune responsabilité. Ça nous a donné un beau montant de 10 000 $, 4600 $ de factures d'avocat, en 1960. Il restait 5200 $ pour ma mère et sept enfants dont le plus jeune avait deux ans. C'était ça, le régime qu'on a connu.

Au moins, avec la Loi sur l'assurance automobile, on ne peut plus mettre des familles sur le pavé pour ce seul motif parce que au moins la loi permet, lorsque des citoyens du Québec subissent des inconvénients de cette nature, qu'ils puissent recevoir un minimum de garantie de revenu. Dorénavant, ces citoyens-là auront le droit d'être inquiets parce que, là, la caisse, on l'assèche graduellement, on l'assèche pour de faux motifs. À un moment donné, il va falloir la remplir parce qu'un fonds qui a été accumulé suite à ce que je viens de vous indiquer devrait pouvoir servir aux fins pour lesquelles on l'a créé, surtout quand chacune des régions au niveau de la voirie se fait couper son enveloppe, que ses travaux sont coupés et qu'on a prétendu qu'il y avait urgence et qu'on nous a imposé le bâillon.

C'est surtout ça qui est grave et un peu démentiel avec ce gouvernement-là: peu importent les règles, peu importe où on est rendu, on se déguise en exécutif, il n'y a plus de parlementaires, il n'y a plus d'Opposition. Si vous

voulez siéger en exécutif, traversez la rue, allez au "bunker", on le connaît, on sait où c'est, mais ici, c'est l'Assemblée nationale. À l'Assemblée nationale, il y aura toujours une Opposition et l'Opposition va s'acquitter de ses responsabilités, surtout quand on est convaincus qu'on défend les citoyens sur de réels principes qui sont en cause. (2 h 50)

En conclusion, je pense qu'ici il s'agissait d'un réel principe en cause. On ne vide pas une cagnotte quand elle a été prévue pour rendre des services à des contribuables, surtout lorsqu'il n'y a pas urgence.

Le Vice-Président (M. Cannon): Merci, M. le leader adjoint de l'Opposition. M. le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques.

M. André Boulerice

M. Boulerice: M. le Président, certains de mes collègues sont étonnés d'un tel projet de loi. Moi, je vais vous dire que je ne suis absolument pas étonné d'un tel projet de loi. D'ailleurs, ce projet de loi, M. le Président, il a été prévu au XVIIe siècle - je ne fais pas allusion au ministre des Finances - par Jean de La Fontaine, dans une fable qui s'appelle Le serpent et la lime. Vous devez bien vous douter que le serpent est le ministre, M. le Président, et je vais vous la conter.

On conte qu'un serpent, voisin d'un horloger, c'était pour l'horloger - vous le comprenez bien, M. le Président - un mauvais voisinage, entra dans sa boutique et, cherchant à manger, n'y trouva pour tout potage qu'une lime d'acier qu'il se mit à ronger. Cette lime lui dit, sans se mettre en colère: Pauvre ignorant, que prétends-tu faire? Tu te prends à plus dur que toi, petit serpent à tête folle. Plutôt que d'emporter de moi seulement le quart d'une obole, tu te romprais toutes les dents. Je ne crains que celles du temps. Ceci s'adresse à vous, esprit du dernier ordre qui, n'étant bon à rien, cherchez surtout à mordre. Vous vous tourmentez vainement. Croyez-vous que vos dents impriment leurs outrages sur tant de beaux ouvrages? Ils sont pour vous d'airain, d'acier et de diamants.

Vous voyez, M. le Président, que l'histoire se répète. Ça, ce n'est pas du "Kafka", de Richelieu, c'est du Jean de La Fontaine, de France. Vous voyez, M. le Président, que l'histoire se répète. Je vols, d'ailleurs, la ministre des Affaires culturelles acquiescer à mon propos, M. le Président...

Le Vice-Président (M. Cannon): M. le député de LaFontalne.

M. Gobé: Est-ce que le député pourrait déposer le document qu'il a cité, s'il vous plaît, selon le règlement?

Le Vice-Président (M. Cannon): En vertu de nos articles, M. le député, seuls des ministres peuvent déposer des documents. Voulez-vous poursuivre, s'il vous plaît?

M. Boulerice: La Fontaine ayant fait beaucoup d'enseignement, je suis heureux de voir que vous en faites également auprès du député de LaFontaine. Il n'est pas propriétaire de LaFontaine, ni au propre, ni au figuré, il le verra à la prochaine élection.

Cette arnaque, M. le Président, eh bien, comme je viens de vous l'expliquer, elle a été prévue il y a des années par, justement, un visionnaire. On a eu, M. le Président, Bonnie and Clyde de la loi 75. Remarquez que c'était Clyde and Clyde, il n'y avait pas de Bonnie dans leur groupe, mais il y a eu quand même Bonnie and Clyde de la loi 75, qui a été le premier "hold-up" qui s'est fait dans cette Chambre et, maintenant, il y a la bande à Bonnot qui est en train de faire l'arnaque à la RAAQ, c'est-à-dira la Régie de l'assurance automobile du Québec.

J'ai l'impression que le Québec, actuellement, M. le Président, a une immigration d'AI Capone incroyable. Il cherche par tous les moyens à faire main basse sur les quelques deniers qui sont les fruits des impôts et des taxes que paient les Québécois à des fins très précises, M. le Président, mais dont le gouvernement... Je vais prendre une autre fable de La Fontaine, La cigale et la fourmi. La cigale ayant chanté tout l'été se retrouva à l'automne fort dépourvue, ou à l'hiver fort dépourvue puisque ce gouvernement, si bon gestionnaire, avec une économie si florissante, avec tellement de sous, ça allait tellement bien... Eh bien, voilà, M. le Président, que les Al Capone sont en train - Capone, corne si dice in italian - sont en train, M. le Président, d'aller ramasser de l'argent à des fins qui sont totalement l'inverse de ce pourquoi il a été donné par les Québécois.

Le leader adjoint de l'Opposition a fait état d'un drame personnel qu'il a vécu. Fort heureusement, ça n'a pas tourné comme ça, mais ce matin, en me dirigeant vers le parlement, avec un de mes collègues, nous avons eu malheureusement un accident de voiture, M. le Président. Ah! La tôle, c'est bien assuré. Mais si, par malheur, M. le Président, moi qui ai un permis de conduire depuis l'âge de 16 ans, si par malheur, tout cet argent, lors du renouvellement du permis de conduire qui a été fait, se retrouve soudainement disparu et que mon collègue et moi avions été blessés au point mâme d'être dans l'Incapacité d'exercer nos fonctions, donc, sans aucun revenu, M. le Président, où l'argent aurait-il été pris? Mais nulle part. On est en train de vider les caisses, M. le Président. C'est l'arnaque, M. le Président. C'est l'arnaque, M. le Président.

SI c'était pour des motifs nobles, comme on dit, on va poncer temporairement pour accorder

le fameux 1 % à la culture, cette promesse reniée depuis cinq ans, à ce moment-là, bon, j'aurais dit: Voilà! Enfin, il y a une Bonnie dans Bonnie and Clyde et je ne me serais pas plaint. Mais ce n'est malheureusement pas le cas, M. le Président. C'est supposément pour du pavage et de l'asphalte quand tous mes collègues ont fait, M. le Président, la démonstration la plus évidente, la plus évidente, qu'il n'y a pas un sou qui va véritablement aller à la voirie et que les routes vont rester dans l'état piteux dans lequel elles sont actuellement. On n'a pas besoin d'aller bien loin pour s'en rendre compte. Juste à circuler un petit peu aux alentours de la région de Montréal et même ici à Québec, on s'en rend compte. Et, naturellement, M. le Président, comme tous les crimes se commettent, selon les statistiques, la nuit, eh bien, c'est vers 3 heures du matin, c'est vers 3 heures du matin, M. le Président, que ce crime est commis parce qu'on a imposé un bâillon, M. le Président.

Trois bâillons, M. le Président, trois bâillons. On a bâillonné l'Opposition qui est en définitive les veilleurs de nuit du trésor national, si je peux employer cette image. Trois bâillons, M. le Président, et non pas deux comme vous me l'indiquez. Trois bâillons, M. le Président, trois bâillons pour nous empêcher de faire ce pourquoi nous avons été mandatés. Y avait-il, d'ailleurs, dans leur programme électoral... Remarquez que ce qui est écrit, ils ne le font pas. Ça, c'est normal. C'est typiquement libéral. Y avait-il, M. le Président, dans leur programme électoral, un article dans lequel le Parti libéral s'engageait à piller la Régie de l'assurance automobile du Québec? Bien, voyons donc, M. le Président! Et ça va aller où après, à la Caisse de dépôt et de placement, un coup parti? Mais je veux dire, M. le Président, s'ils sont à court, je vais apporter mon modeste tribut. Je vais leur donner 20 Tommy dollars" de la banque du Parti libéral du Québec et échangeables pour faveurs politiques. C'est un cadeau que ces braves camionneurs qui attendent désespérément dehors au froid depuis près de trois semaines... M. le Président, je vais le donner à la caisse. Comme ça, ça pourra couvrir ce qu'ils essaient d'arnaquer ailleurs. Ces braves camionneurs qui attendent encore, M. le Président. Donc, M. le Président, de nuit comme toujours, de nuit, rapace... On se sert de la nuit, de la pénombre, pensant qu'on ne sera pas vu. Heureusement qu'il y a la télédiffusion des débats, grâce d'ailleurs au gouvernement du Parti québécois. Mais, M. le Président, si j'ai cité La Fontaine... Je ne sais pas qui il veut citer, lui, mais, en tout cas, on verra. (3 heures)

Le Vice-Président (M. Cannon): M. le leader du gouvernement.

M. Pagé: M. le Président, je ne citerai certainement pas le député qui a la parole actuellement. Cependant, je me dois de relever une inexactitude. c'est avec le gouvernement libéral, en 1976, avec m. jean-noël lavoie comme président, que la télédiffusion des débats a été "initiée" sous forme d'expérience ici, à l'assemblée nationale. n'est-ce pas exact?

Le Vice-Président (M. Cannon): Bon. La question d'information de part et d'autre est faite. Je ne crois pas que nous allons ouvrir un débat là-dessus. Simplement pour vous dire qu'il vous reste dix secondes pour conclure, M. le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques.

M. Boulerice: "a beau mentir qui vient de loin" et "le crime ne paie pas", m. le président. ce sont deux maximes que le leader du gouvernement devrait se rappeler. mais j'ai bien peur que, comme dans une autre fable que je ne citerai pas, le ministre n'ait point appris, m. le président. je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Cannon): Merci, M. le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques. M. le député de Duplessis.

M. Denis Perron

M. Perron: Merci, M. le Président. Encore une fois, et c'est la troisième au cours de cette fin de session, notre législation québécoise est sous l'effet du rouleau compresseur du Parti libéral du Québec. On se rappellera que, la première fois, ce fut lors de l'étude du projet de loi 69 se rapportant à l'instruction publique et à l'enseignement privé. La deuxième fois, c'était pour la loi 75, c'est-à-dire hier et aujourd'hui, sur les heures d'affaires. Et, ce soir, nous sommes maintenant devant la loi 50, Loi modifiant la Loi sur la Régie de l'assurance automobile du Québec. M. le Président, il est maintenant 3 h 2 et nous sommes toujours en train de discuter de cette loi qui nous est imposée par le gouvernement libéral, avec, en tête, le leader du gouvernement qui, à ce que je sache, ne sait pas trop où il se dirige face à cette fin de session.

M. le Président, concernant le projet de loi qui modifie la Loi sur la Régie de l'assurance automobile du Québec, il est dommage que tout ça se passe en pleine nuit, devant une majorité de nos concitoyens et de nos concitoyennes qui sont actuellement au lit, qui donnent, qui n'ont même pas connaissance de ce qui se passe ici en cette Chambre. Et je vous assure que l'Opposition fait ce qu'elle peut pour justement permettre...

M. le Président, si la députée de Kamouraska-Témiscouata veut intervenir, elle peut le faire au moment où je parle. Disons que je peux m'asseoir et qu'elle peut parler. Et, encore, elle peut parler après que j'aurai termine. Alors, vous pouvez l'inviter à faire de même. Elle a le droit de parole en cette Chambre. Si elle ne peut le faire ou si elle ne veut pas le faire, qu'elle

laisse les autres parler en toute conscience et en toute connaissance de cause. Parce que vous ne savez même pas ce qui est en train de vous arriver actuellement, ce que vous êtes en train de faire avec une des meilleures lois québécoises. Alors, si vous voulez parler, vous vous levez, vous faites comme nous, on fait de ce côté-ci, vous dites ce que vous avez à dire et, après ça, vous vous assoyez et vous vous fermez la trappe.

Des voix: Wo!

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît!

M. Perron: Alors, M. le Président, l'Opposition fait ce qu'elle peut. C'est bien sûr que nous faisons l'essentiel, face à ce rouleau compresseur, pour faire en sorte que la loi soit la meilleure possible. Mais, compte tenu de la position gouvernementale, il est extrêmement difficile d'avoir un projet de loi qui éventuellement sera bonifié.

Face à ce gouvernement irresponsable qui se fout éperdument de la démocratie... Et je peux vous dire que cette démocratie ne l'étouffé pas par les temps qui courent et ne l'a pas étouffé, non plus, au cours des cinq dernières années. Cette session, dans laquelle nous sommes, en plein mois de juin, encore une fois - maintenant il est 3 h 5 du matin - a été mal préparée, mal planifiée. En somme, rien ne va plus dans ce gouvernement qui ne comprend rien aux événements qui se passent actuellement au Québec. Il a des agissements qui sont dénaturés concernant les heures d'affaires...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît, M. le député de LaFontaine! S'il vous plaît!

M. Perron: M. le Président, est-ce que je peux demander le quorum, s'il vous plaît?

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît. Appelez les députés, s'il vous plaît.

Si vous voulez poursuivre votre intervention, M. le député de Duplessis, s'il vous plaît.

M. Perron: Merci, M. le Président. Il est vraiment déplorable de voir qu'on n'est même pas capables d'avoir le quorum en cette Chambre avec la majorité ministérielle. Comme je le disais tout à l'heure, M. le Président, les agissements de ce gouvernement libéral sont dénaturés concernant les heures d'affaires. Ce gouvernement n'a rien compris des effets négatifs causés par la loi 69 qui permet aux commissions scolaires de taxer localement pour remplacer le gouvernement libéral qui se cache derrière des paravents pour ne pas taxer lui-même. Ce qui donne des résultats que, dans les milieux, dans nos régions, le gouvernement ira chercher un montant de quelque 325 000 000 $.

Et maintenant, nous avons une ponction qui est prévue par le projet de loi 50; dans les poches des citoyens et des citoyennes du Québec, qui paient à même leur permis de conduire et à même leur permis d'immatriculation de l'argent depuis de nombreuses années et qui devraient voir une réduction de leur prime, on se rend compte que ce gouvernement va chercher un montant de plus de 300 000 000 $ pour permettre de financer les épiceries de fin de semaine. Parce que je doute fortement que ces quelque 300 000 000 $ et plus vont être appliqués dans le domaine de la voirie et, en particulier, de la voirie régionale.

M. le Président, ce gouvernement, plein de promesses avant les élections et pendant les élections générales... Je vais vous en donner quelques cas très précis.

Sur la Côte-Nord, de Tadoussac à Blanc-Sablon, en avril 1988, promesse de l'ancien ministre des Transports et actuel ministre de la Santé et des Services sociaux, promesse de 58 000 000 $, sur une période de trois ans, pour réparer et corriger la route 138, entre Tadoussac et Havre-Saint-Pierre; 134 000 000 $ promis et signés par l'actuel gouvernement, en date du 5 mai 1989, dans le cadre d'une entente régionale, dans le domaine du développement économique, 20 000 000 $ de déboursés après 14 mois. M. le Président, la route 138, entre Havre-Saint-Pierre et Mingan, dans le comté de Duplessis, 3 000 000 $ de promesses électorales, en août et septembre derniers; remplies: 500 000 $ au cours de l'année 1990-1991. Entre Vieux-Fort et Blanc-Sablon, promesse libérale: 7 000 000 $ dans le domaine routier; zéro au moment où on se parle, aucun engagement et refus total du ministre délégué aux Transports ainsi que du ministre des Transports d'investir de l'argent dans cette région isolée du Québec. Tout ça pour aller chercher des votes au cours d'une campagne électorale.

M. le Président, je peux vous dire ceci, c'est que les gens, actuellement, en Basse-Côte-Nord-du-Golfe-Saint-Laurent, dans le comté de Duplessis et sur la Côte-Nord, sont en train de s'organiser pour, justement, réfuter l'ensemble des positions qu'a tenues ce Parti libéral au cours de la dernière année. (3 h 10)

Et ça ira aussi pour la 50 que nous avons devant nous actuellement. Et vous allez le payer. Je veux vous dire que vous allez le payer et vous allez même le payer très cher au cours des prochains mois et des prochaines années. Vous allez vous rendre compte, au cours de la prochaine campagne électorale - et celle-là, on l'attend - que la crédibilité que vous aviez antérieurement grâce aux promesses que vous faisiez et que vous n'avez, d'ailleurs, jamais tenues est en train d'en prendre pour son rhume. Tout ce que je souhaite, c'est que, pour l'en-

semble des libéraux et, en particulier, dans les grandes régions du Québec, Bas-Saint-Laurent-Gaspésie, le comté de Saguenay, dans d'autres régions comme l'Outaouais - oui, l'Outaouais -comme la Beauce et ailleurs, la majorité libérale que vous avez actuellement va tomber comme des mouches au cours des prochaines élections. Vous êtes en train de créer vous autres mêmes votre propre tombe. Vous avez ouvert la porte, au cours de cette session parlementaire, par vos agissements négatifs envers la population du Québec, et Dieu sait combien vous allez devoir le payer au cours des prochains mois et des prochaines années. Soyez assurés de ça.

Je voudrais terminer en vous disant qu'en aucun temps je n'accepterai que les régions du Québec soient touchées comme elles le sont actuellement par des décisions libérales et qu'en aucun temps je n'accepterai de favoriser les attitudes qui furent prises par ce gouvernement au cours de cette session parlementaire. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député. Je reconnais maintenant M. le député de Labelle. M. le député de Labelle.

M. Jacques Léonard

M. Léonard: M. le Président, nous nous retrouvons encore avec une loi sur laquelle on a mis le troisième bâillon. Mes collègues en ont fait état. J'y reviens aussi parce que c'est un fait inhabituel en cette Chambre qu'on impose des bâillons sur des lois parce qu'on a mal prévu ou, si on a bien prévu, justement, c'est qu'on voulait se camoufler. Lorsque nous avons pris connaissance du budget le printemps dernier, nous nous sommes rendu compte immédiatement que, malgré la déclaration qu'il y avait de faite dans ce budget, il était évident qu'on essayait de camoufler une hausse substantielle des taxes dans toutes sortes de directions. Cette hausse de 1 219 000 000 $ qu'il ne faut pas oublier se retrouvait chez toutes sortes d'organismes du gouvernement ou chez d'autres organismes parapublics. C'a été des déclarations faites au cours de l'hiver, avant le budget, il y en a eu d'autres pendant le budget et d'autres après le budget.

L'une de celles après le budget touchait justement la Régie de l'assurance automobile du Québec. Après les étudiants, après Hydro-Québec, après les commissions scolaires, voilà qu'on arrivait à la Régie de l'assurance automobile du Québec chez laquelle on voulait aller chercher 150 000 000 $ cette année, plus un montant de 32 000 000 $ pour le transport des handicapés, qui est exactement une ponction, encore une fois, du budget. Donc, si l'on calcule sur cinq ans: 877 000 000 $. Une somme considérable que le gouvernement a essayé de camoufler chez des organismes de façon indirecte.

M. le Président, pour que les Québécois n'en parlent pas comme dans les autres cas de bâillon, on a imposé ce bâillon dans la fin de la session. On a amené la loi très tard, le plus tard possible, dans l'espoir que les Québécois oublieraient rapidement durant les vacances et après les vacances, qu'ils n'auraient pas le goût de reprendre toute cette question et qu'ils paieraient sans crier davantage.

M. le Président, c'est que le gouvernement n'a pas eu le courage d'augmenter l'impôt sur le revenu parce que, justement, il voulait préserver l'image qu'il n'augmente pas les taxes ou les impôts. En réalité, c'est toujours le Québécois qui paie, dans tout cela.

Il le fait, cette fois, de façon pernicieuse, vicieuse, parce que, au fond, pour sauver son image, il affecte une Régie d'État qui avait fait ses preuves et qui était destinée à bien d'autres choses qu'à collecter des fonds pour le gouvernement. La Régie de l'assurance automobile du Québec est une entreprise d'assurance, qui a été fondée en 1977-1978 et dont l'objectif, fondamentalement, est de faire de l'assurance contre les accidents, contre les risques d'accidents corporels dus aux automobiles. Son bilan a été excellent, on l'a vu au cours des années. D'ailleurs, une étude de spécialistes de la question, faite en 1986, a démontré que le bilan de la RAAQ était excellent. Non seulement ce fut un succès dès les premières années de son implantation, parce que les Québécois en ont profité largement, qu'ils étaient beaucoup moins inquiets sur le plan de la sécurité des personnes quant aux accidents de voiture, mais l'institution comme telle avait aussi d'autres fonctions qui étaient de faire de la prévention routière qui irait dans le même sens. Et cette prévention routière, qu'on retrouve à l'article 2 d de la loi, de la mission de la Régie de l'assurance automobile du Québec, a eu des résultats intéressants qui ont amené la baisse des coûts de l'assurance elle-même et qui ont résulté dans des surplus à la Régie de l'assurance automobile du Québec. Ces surplus sont dus à une bonne performance de toutes les mesures de prévention routière.

J'ai eu l'occasion de diriger, d'être le ministre responsable de la Régie de l'assurance automobile, et déjà nous avions mis en route des programmes de publicité sur la sécurité routière. Qu'on se rappelle le verre qui se brisait, et ça, ça en a été un des grands programmes de publicité de la Régie qui a eu son succès, qui a amené une accumulation de surplus. Mais il faut voir aussi que l'accumulation de ces surplus n'est pas due uniquement à cette prévention routière, parce que la Régie de l'assurance automobile a accumulé et accumule des réserves actuarielles considérables, c'est-à-dire des fonds pour faire face à ses obligations futures, par rapport aux accidentés qui ont droit à des rentes pour le reste de leur vie, notamment, que ce soit des

accidentés complètement ou partiellement handicapés.

Or, ce qui se passe au cours des dernières années et surtout ce qui s'accélère dans les toutes dernières années, c'est que le taux réel de rendement est exceptionnel. Le taux d'intérêt réel sur les placements de la Régie de l'assurance automobile du Québec à la Caisse de dépôt et placement du Québec est exceptionnel, de sorte qu'il s'est accumulé des surplus combinés aux effets positifs des campagnes de sécurité routière, combinés à des changements d'attitude chez les conducteurs d'automobile du Québec, qui sont plus prudents, qui conduisent moins vite, qui font plus attention et qui sont plus conscients, justement à cause des campagnes de publicité, des risques extrêmement graves ou des accidents extrêmement graves, et des conséquence graves, donc, qui viennent à la suite de ces accidents. alors, il s'est accumulé des surplus conjoncturels, en bonne partie, ce qui n'empêche pas que, éventuellement, on pourrait devoir faire face à une réalité complètement différente. on escompte, sur le plan actuariel, des taux de rendement réel de 5 %, de 6 %. en réalité, ils sont actuellement de 8 %, 9 %, mais ils pourraient très bien revenir à 2 %, 3 %, comme ils se retrouvent dans les pays industrialisés occidentaux. et ça, ça minerait ou ça toucherait les surplus actuariels de réserve à la régie de l'assurance automobile du québec. (3 h 20)

Donc, il faut être prudent et, lorsque le gouvernement ouvre une porte comme il le fait actuellement dans l'utilisation de ces surplus, lorsque le ministre des Finances vient chercher des surplus dus à une situation conjoncturelle, il ouvre une porte extrêmement dangereuse. Il l'a fait dans le cas d'Hydro-Québec, en incorporant les profits d'Hydro-Québec à son déficit pour réduire son déficit. Maintenant, il touche à la Régie de l'assurance automobile du Québec. Il touchera à d'autres régies ou sociétés d'État. Et je pense qu'il est dangereux d'aller dans cette vole parce que, au fond, on vient d'inverser complètement tous les principes d'administration publique en ce qui concerne ces sociétés d'État. Le risque que nous courons, c'est que le gouvernement opère sur une base de "pay as you go", c'est-à-dire que, finalement, il siphonne tous les surplus, y compris les réserves actuarielles, et qu'il prenne en charge, année après année, les coûts de l'assurance automobile du Québec, de telle sorte que, finalement, les accidentés n'auront plus aucune garantie d'assurance, comme il arrive dans une société d'assurances. M. le Président, ce faisant, on abuse actuellement de la mission de prévention routière de la Régie de l'assurance automobile du Québec. Et il est absolument faux de dire que c'est dans la mission de la Régie d'aller réparer des ponts, des routes, sous prétexte de sécurité routière. Ce n'est absolument pas la mission de la Régie. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député. Je reconnais maintenant M. le député de Jonquière. M. le député.

M. Francis Dufour

M. Dufour: Merci, M. le Président. Vous savez qu'intervenir, à cette heure-ci, concernant une attitude ou une décision gouvernementale qui a pour effet, d'abord, de bâillonner les parlementaires, pas bâillonner dans le sens de ne pas avoir le droit de parler, mais bâillonner dans le sens de vouloir passer des lois coûte que coûte, puisqu'ils ont la force du nombre... Donc, ils pensent et croient qu'eux seuls ont la vérité. Et, en agissant de cette façon, bien sûr, ils nous obligent à les dénoncer. Même s'il y a moins de personnes qui nous écoutent, ça ne veut pas dire que la vérité n'a pas ses droits. Et, lorsqu'on examine ce qui se passe actuellement, on n'a rien pour se réjouir, rien pour réjouir la démocratie. Rappelons-nous que la démocratie, ça part. de loin, ce n'est pas d'hier. Il y a beaucoup de gens qui se sont battus et qui sont morts pour faire appliquer la démocratie. Et, encore aujourd'hui, on sent, dans d'autres pays, des gens qui ont la volonté de s'exprimer, de faire valoir leurs droits, et, pour nous de l'Opposition, nous avons l'obligation de dénoncer des situations qui sont inacceptables. Il s'agit de regarder ce projet de loi qui détourne, à toutes fins pratiques, une régie d'État des fins pour lesquelles elle a été créée. Et si on veut regarder...

Je voudrais en profiter, dans le temps de mon discours, pour saluer l'arrivée inopinée du ministre de la Sécurité publique et des Transports, mon ex-collègue. C'est dommage que la télévision ne puisse pas faire le tour de la salle. On aurait peut-être des beaux points de vue, des belles photos qu'on pourrait transmettre dans les foyers.

Cela étant dit, on a détourné, M. le Président, les fins pour lesquelles la Régie de l'assurance automobile a été créée. Il s'agit de regarder cette loi, au chapitre R-4, où on dit que "la Régie a pour fonctions: d'appliquer le régime d'indemnisation des victimes de dommages corporels - donc ça n'a aucune relation avec le réseau routier - d'appliquer le régime de compensation des dommages matériels - encore là, ça, c'est les dommages causés aux automobiles - d'appliquer le Code de la sécurité routière, "l'immatriculation, les permis et licences, les normes de sécurité; de promouvoir la sécurité en ce qui a trait au comportement des usagers et des véhicules. Donc, on pourrait continuer là-dessus pour savoir les fonctions, les pouvoirs et à aucun endroit on ne peut trouver quelque mesure qui nous permette de confirmer ou d'autoriser le comportement du gouvernement.

D'ailleurs, on l'avait dénoncé, ce n'est pas la première fois que le gouvernement va piger dans la caisse des usagers de l'automobile, qui, eux, ont accepté de mettre des fonds, peut-être pas volontairement, dans une cagnotte qui leur permet de se garantir une sécurité et en même temps d'avoir des revenus leur permettant de faire face à des situations qui sont non souhaitables et qui, en même temps, permettent que le gouvernement n'ait pas à subvenir à des besoins causés par l'usage de l'automobile ou par des automobilistes.

Donc, on est aujourd'hui le 21 juin et on est obligés de regarder ça d'une façon discutable et dénonçable. Si on regarde ce qui se passe depuis les cinq dernières années, il faut constater que le gouvernement du Québec n'a pas investi d'une façon très forte dans le réseau routier, mais on a réussi à pressurer les automobilistes de 1 300 000 000 $ de plus au cours de l'année qu'on vit actuellement, et qu'en retour on leur remet 1 300 000 000 $ de plus qu'en 1985. Donc, il n'y a pas de valorisation; c'est de l'argent brut, c'est de l'argent qui se compare, sans aucune valorisation des montants investis en 1985. Le gouvernement, en retour, réussit à investir 200 000 000 $ de plus qu'en 1985, ce qui veut donc dire qu'il y a un net pour le gouvernement du Québec de 1 100 000 000 $. Contrairement à ce qui se passait en 1985, un investissement de 1 $ sur 2 $, pressuré sur l'automobiliste, actuellement on est rendus à 1 $ sur 3 $, un tiers. Donc, il n'y a pas de quoi se vanter. Ça veut dire qu'il y a des gens qui, allègrement, non pas se remplissent les poches... Mais un gouvernement qui réussit à distraire de l'argent des fins pour lesquelles il a été perçu, ça, c'est à dénoncer.

Il s'agit de faire le tour un peu des régions du Québec pour se rendre compte que personne ne trouve satisfaction de l'attitude ou des décisions gouvernementales concernant la réparation, l'entretien et l'investissement sur la construction du réseau routier. Si on veut faire examiner ce qui se passe chez nous, au Saguenay-Lac-Saint-Jean, il n'y a rien à se gargariser, ni à chanter le cocorico, puisque chez nous il y a une autoroute qui s'appelle l'autoroute 70, Alma-La Baie, qui, depuis les cinq dernières années, n'a pas tellement avancé.

Malgré de nombreuses discussions avec le ministre des Transports, on n'a pas réussi à le convaincre d'investir et on a cherché tous les prétextes pour refuser les investissements dans cette route. Ce qui fait qu'au rythme où on va, ça prendra sûrement plusieurs années avant que cette route soit complétée. Pourtant, il y a de l'argent. Le gouvernement fédéral, dans une entente signée il y a déjà cinq ans, n'a pas réussi à dépenser cet argent-là. Ce n'est pas un manque d'argent, c'est un manque de volonté politique.

Si on veut regarder dans les réseaux routiers locaux, il y a déjà quatre ans, dans une tournée qu'on avait l'occasion de faire dans l'ensemble des régions du Québec, un des plus gros griefs que les municipalités adressaient au gouvernement du Québec, c'était qu'il délaissait la voirie locale. Donc, encore là, manque d'investissements et constatation générale que le réseau se détériorait de plus en plus. C'est à ça qu'on assiste un peu partout. La semaine dernière, on avait l'occasion de rencontrer une délégation de la région de l'Outaouais et, pourtant, cette région n'est pas reconnue comme une région péquiste. Cinq députés sur cinq, plus un ministre ou un ministre délégué viennent rencontrer l'Opposition pour lui faire part de ce qui se passait chez eux. (3 h 30)

En 1990, cette région n'a pas encore de lien direct avec le reste du Québec, ce qui fait que les gens de l'Outaouais, s'ils veulent communiquer avec Montréal ou Québec, ils sont obligés de passer par l'Ontario. Je ne sais pas si c'était de nature à raffermir les liens ou à développer les régions, mais il me semble qu'un des premiers éléments nécessaires au développement économique, ça réside dans le réseau routier et dans les moyens de transport. Mais ce gouvernement, qui se prétend des grands gestionnaires, des grands administrateurs, des connaisseurs, des gens qui veulent favoriser le développement économique... On ne sent pas cette volonté, ce désir de développer nos régions, puisque les réseaux routiers dans tout l'ensemble du Québec, peut-être à part le comté de Bona-venture... Ils ont réussi à laisser aller tout le réseau. C'est des belles promesses. C'est des promesses fallacieuses en disant: Faire plus avec moins.

Je regarde, justement, un de nos collègues du Lac-Saint-Jean, qui est ici ce soir...

M. Jolivet: Qui nous écoute.

M. Dufour: Je n'ai pas déjà fini, M. le Président? Ça n'a pas de bon sens. J'en ai encore pour au moins une dizaine de minutes.

M. Pagé: C'est regrettable, mais...

M. Dufour: Je regrette. C'est sûr que je vais conclure, mais, quand je regarde le député de Lac-Saint-Jean qui a fait un certain nombre de promesses approuvées par le reste de son gouvernement et que je vois le peu de résultats qu'on a chez nous, il n'y a pas de quoi se féliciter et on dort regretter... Il a fait des promesses, le ministre-Une voix: Le député de Roberval!

M. Dufour: Non, de Roberval, du Lac-Saint-Jean, mais pas nous autres...

M. Pagé: M. le Président, je confirme... M. le Président, m'est-il permis de confirmer tout ce que...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît!

M. Pagé: Effectivement, le député du comté de Lac-Saint-Jean a fait beaucoup de promesses...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Si vous voulez conclure, M. le député.

M. Dufour: Vous savez que je parlais du Lac-Saint-Jean dans son tout.

Des voix: Ah bon!

M. Dufour: Non pas dans une partie! Je pense que le député de Roberval a compris ce que je voulais dire. D'ailleurs, son sourire voulait en dire gros, parce que son sourire ne fait que cacher son incapacité à livrer la marchandise, comme tout le reste, comme son gouvernement! Je vous remercie.

Des voix: Ah!

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député. M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Jacques Brassard

M. Brassard: Merci. Un petit moment d'inattention. J'excuse mon collègue de Laviolet-te. Il parlera après moi et il aura des choses intéressantes...

M. Jolivet: Question de règlement, M. le Président. Je m'excuse.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Sur la question de règlement, M. le député.

M. Jolivet: M. le Président, vous avez remarqué le député de Lac-Saint-Jean parce qu'il s'est levé, mais je vais vous dire que j'attendais que le député de Taschereau se lève pour pouvoir intervenir. Comme il ne se...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Ce n'est pas une question de règlement, M. le député.

M. Jolivet: M. le Président...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît!

M. Jolivet: Qu'on ne m'accuse pas de quelque chose que je n'ai pas fait.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le député, le député de Lac-Saint-Jean s'est levé avant vous et je l'ai reconnu avant vous.

Je vous permets de poursuivre votre intervention.

M. Brassard: M. le Président, il est plus de 3 h 30 du matin. C'est la nuit et vous savez que la nuit, c'est le temps par excellence du cambriolage. C'est la nuit que les voleurs et les cambrioleurs se glissent parfois chez nous pour nous dépouiller de nos biens. Parfois, c'est avec effraction, même, en défonçant les serrures ou en brisant les fenêtres. La nuit, c'est le temps du cambriolage. C'est pour ça que nous étudions le projet de loi 50 en pleine nuit, parce que c'est une loi de cambriolage.

C'est une loi qui permet au gouvernement de cambrioler 4 000 000 d'automobilistes. Et...

M. Pagé: Son passe-partout réglementaire.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le leader du gouvernement, s'il vous plaît, l'article 32, vous le connaissez très bien et je vous demanderais votre collaboration. M. le député, si vous voulez poursuivre.

M. Brassard: M. le Président, il y a peut-être quelques automobilistes insomniaques qui nous écoutent encore ce matin et je voudrais les alerter que, très bientôt, dans peu de temps, la main du gouvernement va se glisser dans la poche de leur pantalon pour la vider. C'est ça qui va se produire. Ils vont se faire vider, cambrioler par le gouvernement. 877 000 000 $, ce n'est pas rien. C'est ce qu'avait accumulé la Régie de l'assurance automobile au fil des années grâce à une gestion sage, prudente, efficace; 877 000 000 $, des centaines de millions de dollars par année de surplus d'opération parce que la Régie gérait bien. Voilà que le gouvernement s'apprête à effectuer un véritable cambriolage, un véritable vol qualifié, à se saisir de ces centaines de millions de dollars pour s'en servir à d'autres fins, pour financer des dépenses courantes.

Normalement, le gouvernement aurait dû faire ce que tout gouvernement doit faire quand il manque d'argent, un gouvernement qui a du courage et qui est capable d'assumer ses responsabilités, c'est-à-dire imposer des impôts, augmenter les impôts ou augmenter le déficit, ou augmenter les taxes, assumer pleinement ses responsabilités. Mais, évidemment, manquant de courage, faisant preuve d'hypocrisie, le gouvernement a décidé d'opérer plutôt un cambriolage, un "hold-up", de vider la caisse de la Régie pour s'en servir et se dispenser ainsi d'augmenter les impôts ou les taxes. C'est ainsi qu'il va aller chercher, par un véritable vol qualifié, presque 900 000 000 $. Ce n'est pas loin d'un milliard de dollars, ça, ce n'est pas rien. Ce n'est pas insignifiant, ce n'est pas négligeable.

Ça, c'est ce que les assurés avalent

accumulé au fil des années. Ça leur revenait de droit. C'est ça, un régime d'assurance. Un régime d'assurance, ce n'est pas compliqué, vous payez des primes et, en retour, vous avez des services. Vous avez des services sous forme d'indemnités quand vous avez un accident. C'est simple comme régime. Un régime d'assurance, c'est d'une très grande simplicité. Les assurés paient des primes et, quand il leur arrive un accident, ils ont des indemnités. Et, quand il y a des surplus dans le régime d'assurance, bien, ça doit profiter aux assurés, les assurés doivent en profiter. Comment et de quelle façon? Ça peut prendre diverses formes, soit de diminuer les primes - c'est déjà arrivé de diminuer les primes - ou encore on augmente les indemnités. Ça aussi c'est des choses qui ont déjà été faites dans le passé.

Mais normalement, puisque la Régie dégage des surplus importants depuis quelques années, ça aurait dû se traduire par une amélioration, une bonification du régime d'assurance, mais ce n'est pas à ça qu'on assiste. On assiste à un vol, un cambriolage, un "hold-up" du gouvernement sur la caisse des assurés, des automobilistes assurés. Pour s'en servir à quelles fins, nous dit-on, prétend-on? Pour s'en servir à des fins de projets de voirie. Ça, c'est la meilleure, en plus. Non seulement on procède à un cambriolage, mais, en plus, on le fait suivre d'un acte hypocrite. On prétend qu'on finance des travaux de voirie alors que ce n'est pas du tout le cas. Il suffit de comparer les budgets, il n'y a aucune augmentation des budgets, cette année, par rapport à l'an passé, aucune. Il y a même une légère diminution des budgets de voirie. Alors, ça signifie quoi? Où ira cet argent, fruit du cambriolage de la caisse de la Régie? Où ira-t-il? Ah! Ça, on l'ignore, mais il y a une chose qui est sûre, c'est qu'il n'ira pas dans les projets de construction et d'entretien du réseau routier. Ça, c'est évident, c'est clair et net. À examiner, à jeter un simple coup d'oeil sur le livre des crédits, vous vous rendez compte que le budget n'a pas augmenté cette année par rapport à l'an passé, et probablement pas tellement plus l'an prochain non plus. Donc, 877 000 000 $ qu'on va chercher. (3 h 40)

Si, au moins, ça se traduisait par des travaux de voirie dans nos régions, si au moins ça se traduisait par une augmentation des projets d'entretien du réseau dans nos régions, le réseau routier qui est dans un état lamentable partout, bien, ça ne changerait pas la nature de l'acte commis, ça demeurerait toujours un cambriolage, un vol qualifié et un "hold-up", ça ne changerait pas la nature de l'acte commis, mais ça jetterait un baume sur cet acte-là parce que ça se traduirait par des travaux précis, concrets dans nos réglons. Mais ce ne sera pas le cas. La meilleure preuve que ce ne sera pas le cas, c'est les camionneurs qu'on trouve devant le parlement depuis plus d'une semaine. Qu'est-ce qu'ils réclament, ces camionneurs-là? Ils réclament des travaux de voirie. Leur gagne-pain principal, à ces camionneurs en vrac, ça vient des travaux de voirie, surtout à partir de la fameuse formule 75-25. C'est de là que vient leur principal gagne-pain.

Pourquoi sont-ils devant le parlement? C'est parce qu'ils ont vu chuter la part de leurs revenus parce que les travaux de voirie ont diminué substantiellement et vont diminuer encore davantage cette année. Ils sont devant le parlement avec leurs camions et ils attendent que le gouvernement réponde à leurs exigences, mais ce ne sera certainement pas le cas, à l'examen des budgets. C'est pour ça que ça traîne; le problème perdure et il pourrit parce que le gouvernement est incapable de répondre à leurs attentes, n'ayant pas les budgets requis. C'est un problème budgétaire qu'on a en face du parlement, c'est un problème de budget. Accordez les budgets de voirie requis, suffisants, et je suis convaincu que les camionneurs vont rentrer vite chez eux pour travailler. Ils restent là parce qu'ils n'ont pas de travail. Ils n'ont pas de travail parce qu'il n'y a pas de budget, parce qu'il n'y a pas de crédits.

M. le Président, en cette nuit du plus grand cambriolage du siècle au Québec, 877 000 000 $, je pense que les députés de l'Opposition ont raison d'alerter la population à ce sujet-là.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Lac-Saint-Jean. Je reconnais maintenant M. le député de Laviolette. M. le député.

M. Jean-Pierre Jolivet

M. Jolivet: Merci, M. le Président. Je vous remercie de me reconnaître cette fois-ci. Je comprends que vous avez été obligé d'en reconnaître un autre tout à l'heure parce que j'avais hésité à me lever, espérant que le député de Taschereau puisse intervenir. Comme il ne semble pas vouloir le faire, je me réserve donc le droit d'intervenir.

M. Boulerice: M. le Président, je m'excuse, est-ce que vous pourriez vérifier le quorum, s'il vous plaît?

M. Jolivet: Ah bien nonl

Le Vice-Président (M. Bissonnet): II y a quorum, monsieur. SI vous voulez poursuivre, s'il vous plaît.

M. Boulerice: M. le Président, est-ce que vous pourriez faire respecter l'article 32 dans son Intégralité, s'il vous plaît?

Le Vice-Président (M. Bissonnet): En vertu de l'article 32, le quorum a été vérifié, l'ordre était maintenu. Est-ce que les députés dont la place a été assignée par la présidence peuvent prendre leur place respective, s'il vous plaît, en vertu de la demande du député de Sainte-Marie-Saint-Jacques? Je vous remercie. M. le député de Laviolette, si vous voulez poursuivre.

M. Jolivet: Merci, M. le Président. Je profite de la circonstance, à 3 h 45, pour saluer la présence du député de Drummond qui n'a pu assister, pour les raisons que l'on connaît, au vote sur une motion d'adoption du projet de loi 75 qui concerne l'ouverture et la fermeture des commerces. Vous savez, M. le Président, j'aurais aimé l'entendre sur le sujet qui est en discussion parce que je sais qu'il a énormément de raisons d'espérer que la décision que nous prenons cette nuit ait des avantages pour sa région, pour son comté.

Vous avez remarqué, M. le Président, lors des deux autres motions, que le ministre responsable du dossier - en particulier, je regarde le ministre de l'Industrie, du Commerce et de la Technologie - intervenait, en vertu du règlement; toutes les fois qu'il y avait un député de l'Opposition qui le faisait, il prenait son droit de parole de cinq minutes. Je salue donc la présence - comme l'indiquait mon collègue de Jonquière tout à l'heure - du ministre des Transports, dont ce serait la responsabilité de défendre ce projet de loi de la Régie de l'assurance automobile du Québec. Il aurait dû prendre, à mon avis, M. le Président, des cinq minutes, tel que le règlement le lui permet, puisque nous sommes à la prise en considération du rapport. Mais le ministre ne l'a pas jugé bon. Alors, je me suis dit: Fort probablement, c'est parce qu'il est en négociation. Il est en négociation avec les gens qui sont à l'extérieur et qui espèrent beaucoup de ce ministre pour régler leur problème de camionnage. Mais je ne sais pas s'il était là, présent à ces rencontres, ou si c'était une autre personne du cabinet du premier ministre qui essayait de régler ce problème avant qu'arrive la fête nationale des Québécois et Québécoises. Mais il y a une chose qui est certaine, c'est que je doute que l'utilisation qui ' doit être faite de l'argent qu'on va venir chercher dans la caisse de la Régie de l'assurance automobile du Québec serve nécessairement à ce yque le ministre, dans son discours d'introduction, nous a dit.

Vous savez, M. le Président, nous sommes en droit de nous poser de sérieuses questions. Le ministre de la Main-d'oeuvre et de la Sécurité du revenu, comme on l'appelle, a été longuement questionné par ma collègue, la députée de Hochelaga-Maisonneuve, sur l'utilisation de l'argent de la caisse de Simmons. Et le ministre, à l'époque, avait fait un moratoire pour éviter que l'argent qui appartenait aux individus, hommes ou femmes, qui avaient travaillé chez

Simmons, les matelas Simmons - il faut bien se le rappeler - que ces gens-là aient droit à l'argent qu'ils avaient investi par l'intermédiaire de leur fonds de pension. On a même dit que c'était épouvantable, que c'était abominable, que ça n'avait pas de bon sens, M. le Président, qu'une compagnie s'en aille avec la caisse, que des individus, hommes et femmes, qui avaient travaillé toute leur vie, qui avaient mis de l'argent dans une caisse voient le patron sacrer le camp - comme on dit au Québec - avec la caisse. Mais voilà que le gouvernement donne un mauvais exemple. Lui-même, dans un caisse qui, normalement, doit être utilisée par ceux qui la paient, soit pour la diminution de leurs primes d'assurance, soit pour une diminution du montant d'argent qu'ils doivent payer pour avoir une plaque d'immatriculation, soit pour une diminution de leur permis de conduire ou, encore, si on ne fait pas ces diminutions, pour une augmentation de l'argent qui est disponible au cas où ils auraient, malheureusement, un accident, voilà que le gouvernement se dit: Au lieu de faire un retour sur l'investissement, pour les individus - soit par l'un ou l'autre des moyens dont j'ai fait mention - moi, je prends cet argent-là et je l'investis en l'envoyant d'abord au fonds consolidé, sans garantir que cet argent-là sera utilisé aux fins pour lesquelles ils nous disent que le projet de loi est fait.

C'est, M. le Président, épouvantable. Comme gouvernement, comment se fait-il qu'il passe un moratoire? Comment se fait-il qu'il discute pendant longtemps à savoir de quelle façon il obligera la compagnie de matelas Simmons à remettre aux individus l'argent qu'ils ont placé dans leur fonds de pension et que lui-même agisse autrement? C'est un exemple qui est mauvais, M. le Président. L'exemple venant de haut, on dit, selon les termes latins qu'on apprenait quand on était dans les collèges classiques d'autrefois: Exemplum tradit, l'exemple trahit le geste posé par le ministre. Le ministre représente ie gouvernement et, comme il représente le gouvernement, comment peut-il demander à une société privée d'agir et de remettre entre les mains des individus ce qu'ils ont placé eux-mêmes et, en même temps, se donner le pouvoir, par législation, d'aller lui-même chercher dans les poches des individus ce qu'ils ont placé pour les besoins de leur protection lorsqu'ils sont accidentés? (3 h 50)

C'est épouvantable, M. le Président. C'est tellement vrai que les craintes que nous avons... Et j'aurai l'occasion au cours de cette nuit, je l'espère, de questionner à nouveau le ministre délégué aux Forêts sur un dossier à peu près semblable. Nous faisons par la loi de REXFOR - et je le donne, m. le président, comme exemple - un investissement du double de celui qui est là. on augmente le fonds de rexfor de 175 000 000 $ et personne ne nous garantit... les

questions ont été posées au ministre en commission parlementaire et jamais il n'a été capable de me répondre. Même je dois vous dire, M. le Président, qu'on a été obligés de suspendre à ce moment-là. Et le ministre s'est posé des questions avec ses employés et ses avocats en disant: Est-ce que le député de Laviolette a raison? Est-ce que l'argent qu'on investit comme gouvernement dans REXFOR n'aura pas pour but d'augmenter, à ce moment-là, les dividendes et qu'un jour, le gouvernement, s'apercevant que REXFOR fait des dividendes, fait des bénéfices, en arrive à dire: Je reprends ça et je décide de faire ce que je veux avec ça? Je vous dis, M. le Président, que c'est un exemple qui est mauvais, un exemple qui trahit l'intention ministérielle. Or, comment voulez-vous, si le gouvernement agit de cette façon-là, que les employeurs privés ne veuillent pas faire la même chose? Et comment voulez-vous empêcher les employeurs privés de le faire, si le gouvernement donne l'exemple, M. le Président?

Vous comprendrez très bien, M. le Président, mon désarroi devant les décisions gouvernementales, devant le ministre qui nous écoute - maintenant qu'il est arrivé en cette Chambre - et qui, je l'espère, pourra répondre à mes interrogations avant que mon collègue, qui doit suivre après moi, ne parle. Vous savez, M. le Président, le ministre, en vertu du règlement, a le droit d'utiliser cinq minutes pour me donner des réponses à mes questions. C'est le seul moyen qu'il a, lors de la prise en considération du rapport, de pouvoir intervenir et utiliser son droit de réplique. Mais, comme il ne semble pas m'écouter et qu'il parle au ministre délégué aux Forêts, j'ai l'impression qu'il est en train de discuter justement de ce dont je parlais tout à l'heure et qu'il est en train de donner des mauvais conseils au ministre délégué aux Forêts qui va vouloir un jour utiliser les dividendes et les bénéfices de REXFOR pour justement donner des services que je ne connais pas et je ne suis pas sûr que la société les aura. Alors, M. le Président, je vous dis, avec toute la franchise que j'ai: Je voterai contre cette décision gouvernementale.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Laviolette. Je reconnais maintenant le leader de l'Opposition officielle et député de Joliette. M. le leader.

M. Guy Chevrette

M. Chevrette: M. le Président, ce sera sans doute un de mes derniers discours pour la journée, pour la présente séance, à moins que je ne sois forcé de revenir à la charge sur la loi concernant l'organisme de transport de Montréal, ou encore sur la Loi sur la qualité de l'environnement, ou encore sur la SQAE, ou encore sur quelques rapports concernant les courses de chevaux et concernant la mise en marché de produits agricoles. Donc, M. le Président, à 3 h 54, je serai le dernier en ce qui regarde-Une voix: Je ne suis pas si c'est le dernier. Une voix: Du matin.

M. Chevrette: Du matin, je dis bien, oui, 3 h 54 du matin, je serai le dernier, M. le Président, au niveau de l'étude du rapport de la Loi sur la RAAQ, à m'exprimer. Et, M. le Président, j'ai perdu tout espoir. J'ai perdu tout espoir de convaincre le ministre que, d'abord, il a fait trois gaffes majeures. La première gaffe, M. le Président, la première erreur fondamentale, c'est de n'avoir absolument pas compris le sens du parlementarisme et d'avoir carrément, M. le Président, voulu bâillonner le Parlement à peine après quelques heures - treize heures, m'a-t-on dit - treize heures, bâillonner un Parlement pour effectuer - et c'est là sa deuxième erreur fondamentale - un des rapts, un des vols qualifiés, M. le Président, de la caisse de la Régie de l'assurance automobile du Québec, 877 000 000 $ disait mon collègue de Lac-Saint-Jean sur une période relativement courte. M. le Président, c'est vraiment... Et je suis sûr que ce gouvernement-là, en plus de ça, augmentera les tarifs d'ici peu. Ce soir, au moment où on a appelé le projet de loi en cette Chambre, M. le Président, il y a un monsieur de Québec qui m'appelait et qui me disait: Écoutez, le gouvernement, il va l'avoir son argent, là; je suis un paraplégique et j'aimerais qu'on pense aux accidentés du travail. J'ai dû lui expliquer pendant au moins cinq longues minutes, lui dire: Écoutez, ce n'est pas pour corriger les primes versées aux accidentés du travail. C'est là la troisième erreur, M. le Président.

L'argent qui est versé par les assurés, l'argent qui est versé pour ceux qui ont des véhicules automobiles, qui sont propriétaires de permis de conduire ou encore qui sont détenteurs de permis de conduire ou propriétaires de véhicules immatriculés, cet argent-là ne sert pas - dans ce que je qualifie de vol qualifié -ne servira pas aux propriétaires, ne servira pas à l'assuré qui a le droit et qui est en droit de s'attendre, parce que c'est un peu une mutuelle que l'on a faite avec cet argent-là, ne servira malheureusement pas, et c'est ce que je disais à M. Lebrasseur: Ne vous fiez pas sur le gouvernement actuel pour améliorer les indemnités qui seront versées aux accidentés, non... Ils viennent chercher ça et, la première année, croyez-le ou non, on ne sait même pas où va l'argent. Parce que le ministre a dit: Écoutez, ça va sur les routes. Écoutez, à moins qu'on soit tous des malades, puis j'en douterais, sur 125 il doit y avoir quelques lumières, sur 125... M. le Président, croyez-le ou non, dans nos comtés, il n'y a pas une cenne de travaux neufs. Pas une cenne.

Moi, j'ai deux protocoles qui sont à être terminés, parce que, sinon, je n'aurais pas un sou de dépensé. Et, avant 1993, il n'y a pas un projet d'envisagé. Puis le ministre se lève de son siège et dit: C'est pour investir dans les routes. Bonne mère du ciel! Le député de Rousseau se lève et dit: Écoutez, on n'en met pas cette année, parce qu'on en a mis pas mal et les routes sont en bon état. Il dit, à peu près cinq minutes après, dans le même discours - et vous le lirez, le discours du député de Rousseau, vous allez vous amuser - cinq minutes après, il dit: Le gouvernement, il était temps qu'il investisse et c'est nous autres qui le faisons, les libéraux; on va investir massivement parce que nos routes en ont besoin. Elles étaient trop belles pour en mettre en 1990, puis elles sont tellement laides qu'il faut qu'ils mettent un milliard et quelques centaines de millions sur quelques années.

Une voix: Ce n'est pas vrai!

M. Chevrette: Écoutez, ça frise le ridicule, M. le Président, ça frise le ridicule. Donc, trois erreurs, trois gaffes monumentales, M. le Président, qui sont commises par ce ministre qui, malheureusement, est arrivé ici avec un gros nom. Lui et Cosgrove devaient défoncer, à peu près, les murs du temple et faire résonner cette Assemblée nationale. Il y en a un qui n'a même pas franchi la porte, puis l'autre qui est à la veille de la prendre, M. le Président.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Chevrette: Ce n'est pas des farces. M. le Président, je suis obligé de me rendre à l'évidence. Qu'est-ce que vous avez fait concrètement dans le domaine du transport? À moins que vous ne mettiez en pratique l'argument du ministre actuel de la Santé, prédécesseur de l'actuel ministre des Transports, qui disait: Ce n'est peut-être pas dans le bon comté. Je me suis mis à vérifier ça. Je lui ai dit que c'était peut-être parce qu'on a été élu dans le mauvais comté.

Mais je me suis mis à regarder dans le comté voisin, c'est un petit copain libéral qui est là. Il y a un petit pont, ça fait trois élections qu'il fait pour un petit pont de 400 000 $, puis ils ont annoncé qu'il n'aurait pas son petit pont. Donc, j'ai dit: Donc, ils n'ont pas d'argent. Ils n'ont pas d'argent, même pour faire un petit pont dans un comté, après trois élections pour le petit pont. Duplessis bâtissait un pont et, après ça, il creusait les rivières, mais, eux autres, ils promettent les ponts puis l'eau coule, mais là il n'y a plus de pont pour traverser.

Ça fait dur, votre affaire. Réveillez-vous. Réveillez-vous, ça n'a pas de bon sens. Essayez de... Cessez de faire croire au monde que vous allez chercher de l'argent pour améliorer les routes. Vous ne mettez rien sur les routes cette année, dans tous les comtés. Et regardez les programmations 1992-1993, dans vos comtés, regardez-les et venez nous dire où est-ce que vous allez mettre l'argent que vous allez chercher à la Régie. C'est pour équilibrer un budget, M. le Président. Ils mettent ça dans le fonds consolidé du Québec et ça ne va pas dans les routes, malheureusement. Et ça, ce n'est pas correct. (4 heures)

Ça, M. le Président, on n'acceptera pas ça et même s'il me disait aujourd'hui qu'il prendra l'argent pour le mettre sur les routes, s'il nous disait la vérité, là, toute la vérité et seulement que la vérité et s'il disait: Je vais le mettre sur les routes, bien il faudrait qu'il nous le prouve d'abord. Mais encore là, M. le Président, ça ne serait pas correct parce que la mutuelle que s'est donnée l'Assemblée nationale pour les assurés de l'automobile, ce n'était pas une mutuelle pour "patcher" les routes, ce n'était pas une mutuelle pour réparer les ponts, ce n'était pas une mutuelle pour corriger des courbes, ce n'était pas une mutuelle pour bâtir des routes. C'était une mutuelle, M. le Président, pour garantir la personne avant toute chose. Et les accidentés de la route nous appellent et nous disent: Vont-ils corriger les indemnités? Je suis devenu paraplégique et je n'ai pas d'indemnité correcte, décente, M. le Président. Non. À l'un d'entre eux, j'ai été obligé de dire carrément: Non, ce n'est pas ça. Ils sont supposés en investir sur la réparation, la réfection du réseau routier, M. le Président. Mais c'est faux, c'est ce qu'il y a de plus faux, M. le Président. On n'a qu'à regarder nos programmations.

Donc, M. le Président, il me semble qu'un ministre a avantage à dire toute la vérité en cette Chambre. Qu'est-ce qu'ils font cette année avec l'argent qu'ils vont chercher?

Une voix: Ils font dur!

M. Chevrette: Qu'est-ce qu'ils font, M. le Président? Et ça, je vous avoue bien honnêtement, M. le Président, qu'on est plusieurs députés en cette Chambre et j'ai vérifié auprès des deux côtés de la Chambre - des deux côtés de la Chambre - et j'ai toujours la même réponse. Je n'ai rien de neuf, je n'ai rien de neuf. Je n'ai pas de travaux, je n'ai pas de travaux, je n'ai pas de travaux. Autant du côté ministériel que de l'Opposition. Que faites-vous avez l'argent?

Une voix: Ouais?

M. Chevrette: Que faites-vous, M. le Président, avec l'argent? C'est ça, fondamentalement. Il va falloir que vous disiez la vérité, M. le Président. J'espère que vous allez la dire, M. le Président, parce que, actuellement, et je conclus là-dessus, on n'est pas en mesure, d'abord de répondre adéquatement à nos con-

citoyens. On n'est pas pour leur dire, nous, que les sommes d'argent qu'ils iront chercher serviront au réseau routier parce que ce serait contraire à la vérité, M. le Président, et on n'est pas pour leur dire non plus que, dorénavant, leur argent aurait pu servir à diminuer les primes. C'est chose faite maintenant. Ils s'en servent pour un équilibre budgétaire, M. le Président.

Donc, M. le Président, j'invite le ministre, même si je suis bien conscient que le poids du nombre, bientôt, lui donnera raison à court terme... Je suis persuadé que si le ministre a un tantinet d'esprit d'équité par rapport aux assurés, je pense qu'il devrait, au moins, M. le Président, avoir la délicatesse de nous informer correctement où va l'argent.

Des voix: Bravo! Bravo!

Le Vice-Président (M. Cannon): Merci, M. le leader parlementaire de l'Opposition. Puisqu'il n'y a pas de réplique, est-ce que la motion...

Des voix: On veut le ministre. On veut le ministre. On veut le ministre.

Le Vice-Président (M. Cannon): Alors, est-ce que la motion de prise en considération du rapport de la commission de l'aménagement et des équipements sur le projet de loi 50, Loi modifiant la Loi sur la Régie de l'assurance automobile du Québec et d'autres dispositions législatives, est adoptée?

Une voix: Vote nominal.

Le Vice-Président (M. Cannon): Alors, qu'on appelle les députés! (4 h 5 - 4 h 12)

Mise aux voix du rapport

Le Vice-Président (M. Cannon): Je mets maintenant aux voix le rapport de la commission de l'aménagement et des équipements relatif à l'étude du projet de loi ainsi que le projet de loi 50, Loi modifiant la Loi sur la Régie de l'assurance automobile du Québec et d'autres dispositions législatives.

Que ceux et celles qui sont en faveur de cette motion veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint: M. Pagé (Portneuf), Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François), M. Paradis (Brome-Missisquoi), M. Côté (Rivière-du-Loup)...

Des voix: Bravo! Bravo!

Le Secrétaire adjoint: ...M. Elkas (Robert-Baldwin), M. Cusano (Viau), Mme Robillard (Chambly), M. Blackburn (Roberval), Mme Bleau (Groulx), Mme Trépanier (Dorion), M. Middlemiss

(Pontiac), M. Beaudin (Gaspé), Mme Dionne (Kamouraska-Témiscouata), M. St-Roch (Drummond), Mme Pelchat (Vachon), M. Marcil (Salaberry-Soulanges), M. Lemire (Saint-Maurice), M. Leclerc (Taschereau), M. Poulin (Chauveau), M. Thérien (Rousseau), M. Benoit (Orford), M. Williams (Nel-ligan), M. Kehoe (Chapleau), M. Fradet (Vimont), M. Messier (Saint-Hyacinthe), M. Charbonneau (Saint-Jean), Mme Bégin (Bellechasse), M. Bélanger (Laval-des-Rapides), M. Gauvin (Montmagny-L'Islet), M. Gautrin (Verdun), M. Larouche (Anjou), M. Khelfa (Richelieu), M. Gobé (LaFon-taine), Mme Hovington (Matane), M. Joly (Fabre), M. LeSage (Hull), M. Bordeleau (Acadie), Mme Boucher Bacon (Bourget), M. Audet (Beauce-Nord), M. Parent (Sauvé), M. Camden (Lotbi-nière), M. Farrah (Îles-de-la-Madeleine), M. Forget (Prévost), Mme Loiselle (Saint-Henri), M. La-france (Iberville), M. MacMillan (Papineau).

Le Vice-Président M. Cannon): Que ceux et celles qui sont contre cette motion veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint: M. Chevrette (Joliette), M. Perron (Duplessis), Mme Blackburn (Chicoutimi)...

Des voix: Bravo! Bravo!

Le Secrétaire adjoint: ...M. Garon (Lévis), M. Jolivet (Laviolette), Mme Juneau (Johnson), M. Dufour (Jonquière), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Léonard (Labelle), Mme Vermette (Ma-rie-Victorin), M. Paré (Shefford), M. Claveau (Ungava), M. Boulerice (Sainte-Marie-Saint-Jacques), M. Morin (Dubuc), Mme Caron (Terre-bonne), M. Boisclair (Gouin), M. Bourdon (Pointe-aux-Trembles), M. Trudel (Rouyn-Noranda-Témis-camingue), Mme Dupuis (Verchères), M. Beaulne (Bertrand), Mme Carrier-Perreault (Les Chutes-de-la-Chaudière). le secrétaire adjoint: pour: 46

Contre: 21

M. Boulerice: Ha! ça baisse tout le temps...

Le Vice-Président (M. Cannon): Le rapport est donc adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Pagé: M. le Président, j'appelle, à ce moment-ci, l'article 13 du feuilleton, soit le projet de loi 67, Loi sur le Conseil métropolitain de transport en commun de la région de Montréal.

Projet de loi 67 Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Cannon): Alors, à l'article 13 du feuilleton, M. le ministre des

Transports propose l'adoption du principe du projet de loi 67, Loi sur le Conseil métropolitain de transport en commun et modifiant diverses dispositions législatives. Je suis donc prêt à reconnaître M. le ministre des Transports.

M. Sam L. Elkas

M. Elkas: M. le Président, l'honorable lieutenant-gouverneur a pris connaissance de ce projet de loi. Il en recommande l'étude à l'Assemblée.

M. le Président, le 15 mai dernier, l'Assemblée nationale a accepté de débattre le projet de loi, la Loi sur le Conseil métropolitain de transport en commun et modifiant diverses dispositions législatives. Il me fait plaisir d'exposer aujourd'hui quels sont les objectifs visés par ce projet de loi et de décrire les principaux éléments de son contenu.

Le grand objectif de ce projet de loi consiste à rendre le transport en commun plus attrayant pour l'utilisateur. Pour cela, il faut absolument donner une plus grande cohérence à l'organisation des services. Concrètement, les objectifs découlant de cet idéal consistent à accroître la clientèle des réseaux de transport en commun, à améliorer l'offre en coordonnant les services, en intégrant la tarification et en planifiant les grandes infrastructures dans une perspective d'ensemble et, finalement, à partager entre les sociétés les coûts de transport en commun à la charge des municipalités.

Au début des années soixante dix, plusieurs projets d'infrastructures, élaborés par la CUM et par le ministère des Transports, ont amené le gouvernement à mettre sur pied, en 1976, un groupe de travail spécial chargé de préparer et d'énoncer la politique sur le transport des personnes dans la région de Montréal. Publié en 1977, le rapport du CTRM préconisait un ensemble de mesures touchant l'organisation et le financement du transport dans la région et, notamment, la création d'un organisme consultatif à caractère régional, ce qu'on appelait le COTREM. En juin 1982, le ministère des Transports déposait une proposition gouvernementale concernant l'organisation et le financement du transport en commun dans la région de Montréal.

Avant d'aller plus loin, il m'apparaît important, M. le Président, de rappeler brièvement les principales étapes qui ont mené à la création d'une telle structure. Ce besoin s'est affirmé à mesure qu'on s'est donné une vue d'ensemble du transport des personnes dans la région de Montréal. En effet, au cours des dernières années, les infrastructures de transport se sont rapidement développées dans la région de Montréal. Progressivement, les intéressés se sont rendu compte que la planification, la mise en place et l'exploitation des infrastructures des services de transport devraient être l'objet d'une coordination entre les autorités responsables. Malheureusement, la commission parlementaire qui fut tenue en 1982 fit ressortir l'absence de consensus entre les intéressés, entraînant ainsi l'abandon de ce projet de restructuration. (4 h 20)

Quelque cinq ans plus tard, soit lors des audiences de la commission parlementaire de l'aménagement et des équipements tenues en 1987, la plupart des intervenants ont demandé une meilleure concertation dans l'organisation des services à l'échelle de la région de Montréal.

Compte tenu des opinions exprimées lors de ces audiences, le ministère des Transports décidait alors d'instaurer une table de concertation régionale. Les travaux de la table de concertation ont débouché sur le constat que l'absence d'harmonisation des services de transport en commun est à l'origine de la plupart des problèmes que connaît la région de Montréal en ce domaine: le manque d'intégration des structures tarifaires et l'incompatilité des systèmes de perception; une absence de correspondance entre les différents services de transport adapté; une absence de mécanismes de négociation et de partage des coûts applicables à l'ensemble des autorités organisatrices pour l'utilisation conjointe d'infrastructures (par exemple, les terminus d'autobus et les voies réservées); finalement, l'absence d'une source commune où la clientèle puisse trouver l'information sur les services offerts par l'ensemble des 22 autorités organisatrices actives dans la région de Montréal.

En novembre 1988, le Conseil des ministres confiait au ministère des Transports le mandat de mettre au point, dans le cadre des travaux de la table de concertation régionale, une structure de coordination qui pourrait recevoir l'appui des principaux intéressés. Mon prédécesseur soumettait un document de réflexion à ce sujet en février 1989. Ce document résumait les principaux problèmes et annonçait les principales interventions.

M. le Président, cet outil de travail a atteint son but en alimentant les réflexions et discussions entre les différents partenaires, si bien que le 11 septembre dernier les principaux dirigeants municipaux du Grand Montréal concluaient une entente en vue de la création d'un organisme régional de transport. Dix jours plus tard, soit le 21 septembre 1989, le premier ministre du Québec et le ministre des Transports, en présence des principaux élus du Grand Montréal, annonçaient un accord de principe entre le gouvernement du Québec et les élus municipaux concernant la création d'un organisme régional de transport.

Le transport des personnes dans la région de Montréal constitue une préoccupation majeure pour le gouvernement du Québec. On constate que le volume des déplacements s'accroît constamment. Divers facteurs expliquent le déclin relatif du transport en commun: Une augmenta-

tion du niveau de vie permet à un nombre croissant de familles d'avoir deux ou même trois véhicules; la proportion des femmes travaillant hors du foyer est en croissance; la nature de leurs déplacements (lieu de travail, achats, garderie, domicile) les amène à préférer l'automobile à cause de sa commodité; la performance et le confort des automobiles se sont beaucoup améliorés depuis une vingtaine d'années; la population s'accroît dans les banlieues; les lieux de travail se dispersent.

Il en résulte que le réseau autoroutier est utilisé à pleine capacité et, en plus, il nécessite des réparations majeures. Cela signifie qu'il est difficile d'accommoder plus de voitures dans l'état actuel du réseau et qu'il faudra trouver d'autres solutions. Nous devons donc, M. le Président, nous tourner vers le transport en commun.

Il nous faut toutefois tenir compte du nombre croissant de voyageurs qui utilisent plus d'un réseau de transport en commun. Cette réalité doit amener les sociétés de transport à reconnaître que cette clientèle est leur clientèle commune et à travailler ensemble: pour mieux répondre aux besoins de cette clientèle; pour rendre leurs services plus concurrentiels en vue de répondre aux attentes des clientèles potentielles.

Ceci implique tout d'abord la nécessité d'harmoniser les services offerts par les différentes autorités en ce qui concerne, notamment, les points de raccordement, la tarification et les horaires. De plus, au niveau financier, il devient impérieux de régulariser les effets financiers découlant de l'utilisation d'un réseau par les non-résidents puisque l'importance de ce phénomène est appelée à croître.

M. le Président, tel que je l'ai mentionné au début, le projet de loi sur le Conseil métropolitain de transport en commun a pour objectif fondamental de rendre le transport en commun plus attrayant pour l'utilisateur en minimisant les obstacles découlant du fait que l'organisation des services relève de plusieurs autorités. Le gouvernement privilégie ainsi, de façon non équivoque, une approche orientée vers la clientèle.

C'est pourquoi le projet de loi met à la disposition du Conseil métropolitain de transport en commun les outils permettant d'accroître la clientèle des réseaux. Ainsi, nous comptons en arriver à un meilleur équilibre entre ce mode de transport et l'utilisation de l'automobile en milieu urbain, dans une perspective d'amélioration de la qualité de l'environnement et du développement économique.

En conséquence, le projet de loi confie au Conseil métropolitain de transport en commun les pouvoirs requis pour améliorer la qualité de ses services: en intégrant la tarification; en planifiant les grandes infrastructures dans une perspective d'ensemble; en veillant à la coordination des services offerts à la clientèle inter- réseaux.

Finalement, le projet de loi inclut les dispositions habilitantes pour que le Conseil métropolitain fixe lui-même le partage, entre les sociétés de transport, des coûts du transport en commun à la charge des municipalités.

Le gouvernement a aussi retenu des principes qui déterminent le partage des responsabilités entre les sociétés de transport et le Conseil métropolitain ainsi que le mode d'organisation et de fonctionnement de ce dernier.

La première famille de principes comprend la primauté du pouvoir local dans l'organisation des services ainsi que la simplicité et la légèreté de la structure régionale. Ceci a pour conséquence que les sociétés de transport conservent à peu près intégralement leurs pouvoirs en matière d'exploitation et que l'on confie au Conseil métropolitain les pouvoirs essentiels à l'exécution de sa mission de concertation. Il s'agit d'un conseil politique, d'un lieu de discussion et de concertation, et non d'une administration.

La deuxième famille de principes est reliée à l'équité de la représentation de chaque entité et à l'implantation d'un processus décisionnel qui soit fonctionnel. Dans cette optique, la représentation au sein du CMTC reflète approximativement le pourcentage de la population de chaque entité. De plus, aucune entité n'a la majorité des votes, favorisant ainsi la réalisation de compromis. Finalement, la taille du Conseil a été limitée à un maximum de 13 personnes.

Les autres principes retenus sont du domaine financier. Ils favorisent un partage fondé sur la capacité de payer et visent la responsabilité entière de chaque société de transport.

En conséquence, le potentiel fiscal a été retenu comme facteur de partage financier. De plus, le projet de loi autorise le Conseil métropolitain à adopter des règles de partage des déficits des sociétés pour faire en sorte qu'une société absorbe seule les répercussions négatives de ses décisions en matière de tarification et d'évolution de son déficit.

Le territoire du Conseil correspond à celui des trois sociétés de transport tel que proposé par les élus municipaux. Ce territoire couvre le déplacement interréseaux effectué en transport en commun, c'est-à-dire 75 % des déplacements observés.

D'autre pari:, M. le Président, l'inclusion des cités nécessitera des amendements à la loi. Cette inclusion pourrait se produire une fois que le Conseil aura fait ses premiers pas et que ces questions fondamentales auront été réglées.

Je voudrais maintenant, M. le Président, décrire les principaux rôles qui seront rattachés à la mission du Conseil métropolitain. Essentiellement, le Conseil métropolitain de transport en commun est un conseil politique, un lieu de concertation et de décision. Il n'organise pas les

services. Cette responsabilité continue à être assumée par les sociétés de transport. Aussi, ses tâches administratives sont minimes. (4 h 30)

Le Conseil aura la responsabilité de fixer les tarifs pour des déplacements interrives, c'est-à-dire les déplacements des usagers qui, en traversant un cours d'eau, passent du territoire d'une société de transport à celui d'une autre société, ainsi que pour les déplacements interréseaux, soit lorsque l'utilisateur se sert du service plus que d'une société.

Le Conseil décidera des grandes infrastructures interrives, par exemple, un prolongement du réseau du métro à l'extérieur du territoire de la Communauté urbaine de Montréal et des infrastructures utilisées conjointement par deux sociétés ou plus, notamment, des terminus. Le Conseil métropolitain verra aussi à partager entre les sociétés de transport les coûts du transport à la charge des municipalités. L'entente intervenue en septembre dernier entre les représentants municipaux prévoit déjà une formule de partage financier. Il suffira donc de la concrétiser par une décision du Conseil métropolitain, une fois celui-ci formé, puisque le projet de loi accorde tous les pouvoirs requis pour l'adoption d'une telle formule.

Le projet de loi prévoit aussi que la formule de partage financier doit être adoptée ou modifiée à l'unanimité des voix. La formule de partage financier convenue entre les intéressés en septembre 1989 comporte principalement les éléments suivants. Premièrement, les recettes provenant de la vente du laissez-passer régional sont partagées entre les sociétés en fonction du lieu de résidence de l'acheteur. Deuxièmement, les déficits des trois sociétés de transport ainsi que la part supportée par la Communauté urbaine de Montréal du Service de la dette encourue pour construire le réseau de métro qui existe sont consolidés et mis en commun. Sur la base des budgets de 1990, la somme ainsi consolidée atteint 248 800 000 $. Troisièmement, la somme ainsi consolidée est réduite du montant de la subvention accordée au CMTC par le gouvernement. Pour 1990, il s'agit d'une subvention de 26 500 000 $. Certaines sommes sont exclues du partage. Il s'agit de l'écart entre le prix du laissez-passer local et le prix moyen du laissez-passer des trois sociétés ainsi que de l'écart entre le taux de croissance du déficit d'une société et le taux moyen de croissance du déficit des trois sociétés. Finalement, la somme consolidée moins la subvention est repartagée entre trois sociétés de transport selon le potentiel fiscal uniformisé de chacune des entités.

Le Conseil métropolitain verra à la coordination des services de transport en commun et de transport adapté. Ce rôle n'est cependant pas décisionnel. Il s'agit de concertation. Il existera par la formation de comités dont le mandat et la composition seront décidés par le Conseil. Les travaux des comités techniques qui relèvent de la table de concertation pourront donc être poursuivis sous la direction du Conseil métropolitain. D'autre part, le projet de loi prévoit qu'un représentant du ministère des Transports et un autre du ministère des Affaires municipales pourront participer aux travaux de chacun de ces comités.

Je voudrais, maintenant, M. le Président, décrire la composition du Conseil ainsi que son processus de prise de décision. Tout d'abord, le Conseil sera composé de 13 membres. Il comprendra le président du comité exécutif de la CUM, 6 élus de la ville de Montréal, 2 élus des autres villes de la CUM, 2 élus de la ville de Laval, et 2 élus provenant du conseil d'administration de la Société de transport de la Rive-Sud de Montréal.

Les décisions seront prises à la double majorité, c'est-à-dire qu'il faudra un vote favorable à la fois de la majorité des représentants de la ville de Montréal et de la majorité des représentants des autres entités. Prenez note, M. le Président, que le président du comité exécutif de la CUM n'a pas droit de vote. La création du Conseil métropolitain de transport en commun et le rôle qu'on a choisi de lui confier commandent un réaménagement des responsabilités en matière d'infrastructures de transport en commun. Ce réaménagement constitue en effet le second objet du projet de loi. Et le partage des responsabilités prévu au projet de loi tient compte des prolongements existants et à venir du métro et des trains de banlieue à l'extérieur du territoire de la Communauté urbaine de Montréal. Les principes qui ont inspiré le partage proposé sont: l'unité du réseau, un réseau doit avoir un seul propriétaire et un seul exploitant; l'efficacité, c'est-à-dire la capacité de prendre des décisions et de réaliser des travaux une fois que les objectifs sont fixés; l'efficience, c'est-à-dire un meilleur usage possible des ressources disponibles.

En ce qui a trait au métro et aux trains de banlieue, le partage des responsabilités sera le suivant. La responsabilité de planifier les infrastructures et de décider de leur réalisation appartiendra au Conseil métropolitain. Le Conseil exercera ses responsabilités pour les infrastructures reliant les territoires des deux sociétés. Pour les infrastructures qui ne débordent pas le territoire d'une société de transport, c'est la société concernée qui sera responsable. La propriété des infrastructures reviendra à la STCUM. La STCUM est l'exploitant et doit, à ce titre, détenir tous les droits nécessaires; la propriété ne doit pas être morcelée. Dans ce sens, la CUM devra remettre à la STCUM les titres qu'elle détient, de la même façon que la ville de Montréal l'a fait pour le réseau initial du métro. Les pouvoirs d'acquisition, d'expropriation et de construction seront confiés à la STCUM. Dans le cas du métro, ces pouvoirs

seront transférés de la CUM à la STCUM. Il s'agit de l'arrangement le plus logique, puisque la STCUM est l'exploitant et possède la meilleure connaissance des besoins possibles et contraintes.

L'exploitation du métro et des trains de banlieue relève de la STCUM, qui assumera cette fonction sur le territoire des trois sociétés. Celle-ci est déjà l'exploitant de ces modes de transport. Le projet de loi prévoit par ailleurs que la CUM sera responsable de la programmation des investissements et de la réalisation des emprunts pour la construction du métro, et ce, même dans le territoire de la STL et de la STLSM. En effet, la CUM ressort comme l'entité la plus apte à jouer le rôle d'emprunteur parce qu'elle gère déjà les emprunts réalisés pour le réseau existant. Elle jouit de la meilleure reconnaissance sur les marchés financiers, ce qui lui permet d'emprunter à un meilleur coût. Il s'agit d'un rôle d'exécutant dans le cas des projets dont la réalisation a été décidée par la CMTC. La CUM et les municipalités qui la composent seront conjointement et solidairement responsables des obligations contractées par la Communauté.

Je voudrais signaler que les consultations effectuées auprès des intéressés depuis le dépôt du projet de loi amènent des ajustements qui seront soumis lors de l'étude détaillée du projet de loi par la commission permanente de l'aménagement et des équipements. L'extension du métro sur le territoire de la STL ou de la STRSM comprend des installations qui pourront être réalisées par la municipalité ou la société concernée. Ces installations comprennent les aménagements en surface, tels que les débarcadères, les salles d'attente, les boutiques et les voies d'accès entre la surface et les quais du métro. La municipalité aura la priorité pour accepter de réaliser ces installations et en être propriétaire. Si elle refuse, la STL ou la STRSM aura alors la possibilité d'agir. Enfin, la STCUM pourrait exécuter les travaux, le cas échéant, mais ne pourrait être propriétaire. (4 h 40)

Cet arrangement se veut conforme aux principes d'autonomie décisionnelle de chaque société sur le territoire. Il s'inspire aussi de préoccupations pratiques, puisque la STL et la STRSM pourront ainsi concevoir, posséder et exploiter des raccordements au métro situé sur leur territoire. Quant au financement des infrastructures de métro et de trains de banlieue, les consultations amènent à proposer les changements suivants. La CUM conserve la responsabilité qu'elle exerce présentement d'emprunter pour assurer le financement de la construction du métro et de l'achat du matériel roulant du métro. La STCUM conserve, pour sa part, la responsabilité de financer tous les investissements en matière des trains de banlieue, ainsi que l'entretien et les réparations des infrastructures et des équipements du métro. Enfin, dans le territoire de la STL et de la STRSM, les aménagements de surface et les voies d'accès aux quais des stations de métro seront financés par la municipalité ou la société dans le territoire dans lequel la station est située.

Je me propose également, M. le Président, de soumettre d'autres amendements lors de l'étude en commission parlementaire. Ces amendements ont principalement pour but de préciser la portée de certains articles afin qu'ils reflètent fidèlement la volonté des intéressés en ce qui a trait aux responsabilités du Conseil métropolitain.

En conclusion, M. le Président, il m'ap-paraît que la création du Conseil métropolitain de transport en commun est aujourd'hui une nécessité. Le CMTC constituera un outil privilégié pour aborder la planification et l'exploitation des services de transport en commun dans une perspective régionale. Le gouvernement veut profiter du consensus intervenu entre les principaux dirigeants de la CUM et les trois sociétés de transport et se joindre à eux afin de donner suite à un projet qui bénéficiera, en tout premier lieu, aux principaux intéressés, c'est-à-dire les utilisateurs des services de transport en commun. Il convient que le gouvernement intervienne afin de permettre aux sociétés de transport d'arriver à une véritable coordination des services ainsi qu'à un partage équitable du coût des équipements et des services. C'est aussi pour atteindre la plus haute qualité des services de transport en commun possible, et ceci à un meilleur coût pour la collectivité, que je présente le projet de loi pour créer le Conseil métropolitain, définir son rôle et ses responsabilités. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Cannon): Merci, M. le ministre des Transports. Je suis maintenant prêt à reconnaître le prochain intervenant, M. le député de Lévis.

M. Jean Garon

M. Garon: M. le Président, si les téléspectateurs nous regardent et se demandent si nous avons la barbe longue, ils ont raison, puisque nous siégeons depuis hier matin et presque sans interruption depuis quatre jours, puisque c'est ce gouvernement d'improvisateurs qui nous présente des projets de loi à la dernière minute. Le meilleur exemple, c'est le projet de loi que nous avons devant nous, le projet de loi 67, Loi sur le Conseil métropolitain de transport en commun et modifiant diverses dispositions législatives, qui a été déposé devant le Parlement par le ministre des Transports le 15 mai 1990.

Le ministre dit: Je mène ça comme l'entreprise privée. Sauf qu'on va ajourner le 22 à minuit au maximun, d'après nos règlements et qu'il présente son projet de loi à 4 h 15, le 21 juin. Demandons-nous pas pourquoi le nombre des faillites a augmenté de 30 % depuis le début de

1990 au Québec, qu'on a un record de tous les temps dans le nombre des faillites au Québec en 1990 sous ce gouvernement d'improvisateurs, qui est bien plus fort pour mettre la main sur la caisse de la Régie de l'assurance automobile du Québec, sans débat, que pour faire des lois pensées, réfléchies. Un gouvernement d'improvisateurs. Quand on se demande ce qu'est un parlementaire, je vous dirais, si je comparais à un ingénieur ou à un architecte: Si un ingénieur faisait son plan à moitié et que le pont était à moitié fait, s'il faisait courir des risques au public, vous diriez: Cet ingénieur ne doit pas pratiquer; si l'architecte fait les plans d'une bâtisse, des plans à moitié faits, des structures à moitié calculées, des travaux à moitié réalisés, des murs fissurés qui mettent en danger la sécurité du public, vous diriez: Mauvais architecte. Mais d'un parlementaire qui n'est pas capable de présenter son projet de loi en temps, de faire les débats eh temps, de jour, comme tout le monde, et qui est obligé de présenter, parce qu'il n'a pas su faire ses devoirs quand c'était le temps, un projet de loi à 4 h 15 du matin, le 21 juin, avec près de 2000 à 3000 camionneurs qui dorment dans leur boîte de camion, alors qu'il y a trois semaines, c'étaient 3000 autres qui étaient un peu partout sur des terrains de stationnement du Québec pour demander des rencontres avec le ministre, vous diriez: Si l'entreprise privée était menée comme ça, ce n'est peut-être pas le genre de ministre dont on a besoin dans un gouvernement. Bien, c'est ça que nous avons devant nous, M. le Président, et c'est pourquoi, vous et moi, nous sommes ici, à 4 h 45, en train de débattre un projet de loi sur le transport en commun.

Je dis aux téléspectateurs qui nous regardent: N'ajustez pas votre appareil, on a la barbe longue, parce qu'on ne s'est pas encore fait la barbe. On ira tout à l'heure - il y aura peut-être une demi-heure d'ajournement entre la fin de la session d'hier, à 9 heures ou 9 h 30, et la reprise de la session de ce matin, à 10 heures -prendre une douche rapide. On aura des députés à moitié morts, des ministres à moitié endormis qui ne répondent pas aux questions et qui essaieront d'élaborer des projets de loi qui vont toucher des centaines de milliers de personnes, avec les conséquences qu'on a. Heureusement, il y a une justice immanente. Le Seigneur disait dans l'Évangile: Qui triomphera par l'épée périra par l'épée. Aujourd'hui, ce Parlement, qui veut nous faire siéger de force jour et nuit, est en train de se faire dire: Wo, là, par un député indien, à Winnipeg, qui est en train de remettre la monnaie de sa pièce au gouvernement, en disant: Wo, là! Moi seul vous arrêterai dans vos oeuvres machiavéliques où vous êtes en train de faire des débats... D'abord, c'était les premiers ministres, pendant une semaine, à huis clos, camouflés, comme si c'était une "gang" de maffiosi qui était en train de se répartir le pot.

Ça, c'était la constitution du Canada.

J'ai eu l'occasion, pendant cette semaine, de rencontrer des journalistes américains, des journalistes de la BBC de Londres, qui me disaient: On n'a jamais vu un pareil cirque. Alors qu'on faisait la constitution de l'indépendance américaine, au XVIIIe siècle, les gens étaient mieux informés de ce qui se passait à ce moment-là, alors qu'on n'avait pas de télévision, pas de radio, pas de téléphone. Malgré cela, les gens savaient mieux ce qui se passait dans la constitution américaine. Les gens participaient davantage à son élaboration. Il y avait des débats fantastiques, à ce moment-là, dans ce qui a été les débats peut-être les plus commentés dans l'histoire du monde, lors de la constitution américaine. Les gens étaient fiers de faire une constitution, puis, aujourd'hui, ils parlent de leur constitution comme d'un évangile.

Nous, on a une constitution qui ressemble un peu à une maladie honteuse. Une constitution qui est discutée en cachette. Une constitution qui est faite en cachette par des gens, apparemment, qui se font plaquer au plancher ou bien barrer les portes pour pouvoir les faire rester de force dans la bâtisse. Aujourd'hui, même les premiers ministres qui ont été là disent: C'est d'une façon indigne que le débat s'est fait, où les gens ont l'impression d'avoir appartenu à une "gang" de maffiosi.

M. le Président, ça, c'est le Canada, voyez-vous? Ça, c'est le Canada. C'est pour ça qu'aujourd'hui vous ne voyez pas beaucoup de gens. Au congrès libéral qui commence à Calgary aujourd'hui, on a vu que ça a commencé par un brouhaha indescriptible où les gens, encore là, parlent de la constitution canadienne, et ils sont dans un genre de cirque. Ce n'est pas étonnant que les gens d'ailleurs qui viennent ici, qu'il s'agisse de grands journalistes américains ou britanniques, regardent ce qui se passe et sont estomaqués de voir un tel fouillis. C'est la même façon de délibérer et de faire des lois de ce gouvernement. (4 h 50)

J'ai eu l'occasion d'assister au mois d'août... J'allais dire si on regarde même en Russie; pourtant, en Russie et dans les pays d'Europe de l'Est, qui ne sont pas considérés comme des modèles de démocratie, on peut voir aux nouvelles, à tous les jours, tous les débats qui se font sur l'élaboration de la constitution. Des dizaines et même des centaines de milliers de personnes qui manifestent leur approbation ou leur désapprobation. Aujourd'hui, on regarde le Canada, on dit... Je comprends qu'on a dit que la Sainte Vierge ou le pape, quand il y a eu les déclarations à Fatima, aurait dit - vrai ou faux - Pauvre Canada! Je comprends. Ça devait être vrai. Ceux qui en doutaient... En tout cas, nous-mêmes, on est en train de dire: Pauvre Canada! Avec des gens qui font des textes de loi qui sont des improvisations.

J'ai eu l'occasion d'assister, M. le Président, au début de cette commission parlementaire à Montréal, à une consultation au mois d'août 1987. À ce moment-là, le député de Charlesbourg, qui s'en est bien repenti par la suite, avait bien voulu déplacer la commission parlementaire dans son ensemble à Montréal, avec tout le "kit": les enregistrements, les appareils sophistiqués. Tout avait été déplacé à des coûts considérables, pensant sans doute que les salles seraient bondées, que les gens participeraient aux débats. Je dois vous dire qu'on s'est retrouvés au mois d'août 1987, tous ensemble, un grand nombre de Québécois, dans une salle qui avait l'air plutôt d'une cave et avec un journaliste qui est venu faire un tour, qui a daigné nous faire l'honneur de sa présence, un dénommé Francoeur du journal Le Devoir. Et on avait vraiment l'impression d'être entre nous, alors qu'on avait l'air vraiment de petits poissons rouges dans un aquarium, on ne dérangeait pas la conversation dans le salon.

Mais les gens de Montréal ne sont pas venus. Personne n'est venu. Ah! Il y a bien eu des gens qui sont venus présenter leur mémoire et, l'espace d'une heure, ils venaient nous rencontrer et ils repartaient. Nous, nous étions entre nous. Je me rappelle, de notre côté: le député de Jonquière, du Saguenay-Lac-Saint-Jean, le député de Dubuc, qui a pris sa retraite depuis le temps; j'étais là également comme député de Lévis. On avait l'air de parlementaires - et même d'autres du Parti libéral - au mois d'août qui n'avaient rien d'autre à faire qu'aller s'asseoir dans un hôtel, dans le soubassement, comme si on n'avait pas assez d'imagination au mois d'août, pour aller s'asseoir dans une telle bâtisse. Et même les gens de l'endroit qui devaient, apparemment, être là dans des consultations n'étaient pas présents; et même les médias suivaient à peine les débats.

C'est sans doute pourquoi, lorsqu'est arrivé le plan d'action pour les années 1988 à 1998, cette fois-là, le député de Charlesbourg, ministre des Transports, avait décidé que le débat se ferait au parlement de Québec, qu'il n'y aurait pas de déplacement et que tout se passerait ici au salon rouge. Il s'est dit à ce moment-là que tout se passerait ici au salon rouge: Si ça n'intéresse pas plus les gens que nous allons consulter, alors, à ce moment-là, ça ne donne rien de déplacer tous ces appareils-là; aussi bien que ceux que ça intéresse viennent rencontrer les gens au parlement, ça coûtera moins cher. C'est ça, la réalité, M. le Président.

Aujourd'hui, on se retrouve devant un projet de loi improvisé, comme d'habitude, avec apparemment une série d'amendements qu'on n'a pas encore vus à 4 h 55 maintenant, ce matin du 21 juin, alors que la session doit ajourner le 22 juin, à minuit au plus tard, demain. Le 23, il y aura un feu sur les plaines d'Abraham, pour ceux qui voudront y aller. Là, on sera le 23; le 24, ce sera à Montréal, le dimanche, et le 25, il y aura congé pour que les gens qui auront trop fêté le samedi et le dimanche puissent se reposer.

Mais essentiellement, M. le Président, c'est que le ministre vient de nous dire qu'il y a eu - un bel euphémisme - des ajustements; dans le langage parlementaire, ça veut dire qu'il y aura sans doute une série d'amendements dont on n'a pas vu encore l'ombre et qui nous seront distribués à la dernière minute. Après ça, ce n'est pas surprenant qu'on ait des lois qui soient mal foutues. Je vois Mme la députée de Groulx qui suit le débat dans un enthousiasme délirant et qui est convaincue. Là, encore l'appareil ne montre pas la députée parce qu'il faudrait dire: N'ajustez pas vos appareils. On est en session parlementaire. Il y en a qui regardent, il y en a d'autres qui dorment, il y en a d'autres qui, même s'ils ont la tête penchée sur le poing comme le penseur de Rodin, ce que vous pourriez entendre, c'est plutôt des ronflements que les rouages du cerveau qui sont en ebullition. Pourquoi? C'est parce que c'est le Parlement de Québec dans toute sa splendeur sous un gouvernement d'improvisateurs.

M. le Président, vous comprenez pourquoi des fois, moi, je me demande, comme parlementaire qui suis ici depuis un certain nombre d'années, que, si le Parlement n'est pas respecté comme il le devrait, c'est peut-être qu'il ne fait pas tout ce qu'il faut pour être respectable. On ne peut pas respecter un Parlement qui travaille de cette façon-là. On ne peut pas respecter un Parlement - je le comprends - qui travaille de cette façon-là parce qu'il y a un manque de respect des électeurs, il y a un manque de respect des citoyens dans cette façon de travailler qui n'a pas de bon sens. Ce n'est pas comme ça.

Vous savez les camionneurs qui sont là dehors, ils n'ont pas le droit de conduire leur camion plus que tant d'heures de suite, pas plus que huit heures, depuis le nouveau Code sur la sécurité routière, parce qu'on dit qu'ils constituent après ça des dangers pour le public. Nous, on a le droit de légiférer à peu près 24 heures par jour des lois qui vont affecter des millions de personnes, des centaines de milliers de personnes, même des millions dans certains cas. Tantôt la loi de la RAAQ du Québec, la RAAQ, 4 000 000 d'automobilistes. Mais là, on fait main basse sur la caisse, 877 000 000 $. C'est ça justement. Et là actuellement on va faire une loi qui va toucher tout le transport en commun, de nuit, avec des députés à moitié endormis, avec d'autres qui sont dans leurs bureaux attendant le son des cloches pour venir faire un tour au Parlement pour prendre un vote sur un débat qu'ils n'ont pas suivi et qui se lèveront quand le whip leur dira de se lever et qui s'asseoiront quand il leur dira de s'asseoir, qui ouvriront la bouche s'il leur dit de l'ouvrir et qui la refermeront s'il leur dit de la fermer. Ce n'est pas ça un Parlement. Ce n'est pas ça.

Moi, je pense que c'est une parodie de Parlement. On se demande après ça pourquoi les citoyens n'ont pas un grand respect du Parlement. Je pense que le gouvernement actuel fait tout ce qu'il peut imaginer pour dégrader le Parlement. Le premier ministre, mou, assez que je pense qu'il faudrait faire une enquête. Là, je voyais l'autre jour, en fin de semaine dans les journaux qu'on se demande pourquoi les grenouilles sont en train de disparaître de la terre. Il y a un phénomène incroyable qui se passe, les grenouilles sont en train de disparaître. Les animaux amphibies sont en train de disparaître, personne ne sait exactement pourquoi. Il y en a qui disent que c'est la pollution. Mais en tout cas les grenouilles disparaissent. Le symbole des Québécois, la grenouille, les "frogs", est en train de disparaître. C'est peut-être un signe avant-coureur.

Mais, par ailleurs, je suis en train de me demander si on ne devrait pas faire une enquête sur le premier ministre qui serait peut-être un verterbré qui est en train de se transformer en inverterbré. On l'a vu au lac Meech. Il a un manque de colonne vertébrale. Mais pour faire siéger le Parlement de nuit, par exemple, là il n'a pas son pareil. Il a des résultats, par exemple: des lois mal faites, des lois à moitié étudiée, des lois escamotées. J'entends un député qui dit: II gagne des élections. Il gagne des élections, mais il part quasiment comme la fuite en Egypte. Rappelons-nous 1976, il est parti. J'ai prédit que la prochaine fois il partirait avant les prochaines élections, il partirait d'une façon plus humiliante qu'en 1976, parce que ceux qui avaient dit qu'il avait pris sa leçon se rendront compte qu'il n'a pas pris de leçon, que c'est le même homme avec les mêmes problèmes qui se génèrent actuellement. (5 heures)

Rappelons nous qu'en 1976, de 1974 à 1975 et 1976, le Parlement était quasiment en état de siège permanent. C'est en train de redevenir la même situation parce que tous ont le sentiment très net qu'il n'y a plus de gouvernement aux commandes, qu'il n'y a plus personne qui dirige ce gouvernement-là. C'est pour ça qu'on a des projets de loi qui sont à moitié présentés.

M. le Président, sur le principe du projet de loi, il n'y a pas grand monde qui peut dire grand-chose contre un principe normal qui est d'essayer de regrouper, sur un territoire, comme la région de Montréal, un Conseil métropolitain de transport en commun, selon le projet qui nous est présenté. Sauf que ce n'est pas sur le principe, tout le monde va être pour le principe. Le problème va être dans les modalités et c'est pourquoi le ministre, qui a dû déposer son projet de loi le 15 mai en Chambre, ne l'a pas apporté devant le Parlement avant le 21 juin, plus de cinq semaines plus tard. Mais, ensuite, il va demander de faire l'étude d'un projet de loi qui a presque 30 pages, 25 pages, 101 articles. Il veut essayer de faire ça en dépassant le mur du son, en ayant à peine le temps de lire les articles et en essayant de faire des pressions sur les députés de l'Opposition pour qu'ils donnent toutes sortes de consentements pour essayer d'aller le plus rapidement possible, et là en utilisant tous ceux qui ont des mécanismes de pression à utiliser, pour essayer de faire en sorte que la loi soit adoptée avant l'ajournement de la session.

C'est ça, le genre de gouvernement qu'on a devant nous aujourd'hui. Ne nous trompons pas: si le transport en commun ne marche pas mieux, si le transport en commun est rendu de moins en moins sécuritaire... Parce que je vais vous dire une chose: Si seulement il y avait plus de sécurité dans le métro de Montréal, il y aurait sans doute beaucoup plus d'utilisation du transport en commun, plutôt que de voir des titres comme ceux qu'on voyait dans la La Presse du 15 mars 1990: "Forte hausse de la criminalité dans le métro". Si on avait juste réglé ce problème-là, on aurait réglé un gros problème et les personnes âgées qui sont de grands utilisateurs potentiels du transport en commun pourraient utiliser davantage le métro, mais à condition de s'y sentir en sécurité. Quand on dit, par exemple, que c'est l'endroit de prédilection pour des luttes de "gangs", ça ne fait pas un métro qui est très sécuritaire. On aura beau faire tous les palabres qu'on voudra, toutes les ententes qu'on voudra, j'ai l'impression qu'il agit exactement comme des poissons rouges dans un bocal, un aquarium, qui ne dérangent pas la conversation du salon. Il serait bien mieux d'assurer une certaine sécurité dans le métro pour faire en sorte que les gens n'aient pas peur de prendre le métro. Il s'agirait aussi de mieux planifier ce qui se fait.

Ici, le projet de loi crée donc le Conseil métropolitain de transport en commun, un organisme qui sera chargé de faciliter les déplacements interréseaux dans la région de Montréal. C'est une structure qu'on dit légère où les sociétés de transport locales gardent leur autonomie entière. Il contient également des dispositions concernant les projets de développement du métro à l'extérieur du territoire de la Communauté urbaine de Montréal. Il y a un certain nombre de questions qu'il faut se poser concernant ce projet de loi. Ce projet de loi pourra-t-il améliorer le transport en commun à Montréal et solutionner les vrais problèmes du transport en commun? En voulant respecter l'autonomie des sociétés de transport locales, qui est un objectif louable, le Conseil, par ailleurs, aura-t-il la capacité et les pouvoirs nécessaires pour prendre les décisions essentielles au bon fonctionnement du transport en commun à Montréal?

Le ministre disait tout à l'heure: Le Conseil métropolitain va être un organisme de concertation et de décision. On verra à l'usage. C'est

facile actuellement de créer un organisme régional. Il faudra voir si la pondération des choses a été réalisée et si tout ce qui doit entourer le fonctionnement de cet organisme-là a été bien pensé. Cent un articles, il s'agit de beaucoup de dispositions qui concernent l'aménagement, la mise sur pied et le fonctionnement d'un tel organisme.

Je vois le député de Gaspé qui est venu ici par sympathie, sans doute, pour son collègue, mais j'ai l'impression qu'il n'est pas le principal préoccupé. Je me serais attendu à voir les députés de Montréal présents ici. Je vois le député de Gaspé. Je ne suis pas sûr que ce soit le principal intéressé, même si les gens de Gaspé, quand ils partent de Gaspé, ont la réputation d'aller rester à Montréal. Mais lui, en attendant, il est plutôt à Sainte-Thérèse-de-Gaspé, proche du quai.

Je vois aussi le député de Drummond. Le député de Drummond est présent. Il n'a pas la réputation de parler souvent, mais il est présent. Je ne suis pas sûr que c'est le principal concerné aussi par le projet.

Je vois le député de Rivière-du-Loup. Il y en a qui disent qu'il n'est pas sorti du bois, mais ce soir il est ici. Le député de Rivière-du-Loup, je ne suis pas certain que c'est le principal intéressé par le projet. Je ne suis pas certain.

Je vois le député de Portneuf qui est ici un peu par devoir à cause de sa mauvaise planification des travaux; on est tous ici un peu à cause de lui pour payer pour sa mauvaise planification des travaux. Je ne suis pas certain, par ailleurs, que c'est parce qu'il est le plus touché par le projet.

Je vois le député de Gatineau, de Papineau, Papineau. Il ne parle pas souvent, ça fait que je ne me rappelle pas toujours le nom de son comté, mais je sais qu'il est de l'Outaouais. Ce n'est pas encore le député le plus concerné par le projet.

M. le Président, par ailleurs, ici, on voit nos députés de la région de Montréal. On n'en a pas beaucoup, on ne peut pas en amener beaucoup, en avoir autant ici présents. Mais nos députés sont ici et ils vont prendre la parole en plus. Il y a des députés de l'Opposition qui vont prendre la parole, qui sont de la région de Montréal: le député de Bertrand, de la rive sud, le député de Pointe-aux-Trembles, de Montréal, qui est ici présent, d'autres qui écoutent ensemble au bureau du whip les débats qui sont aussi présents. Dans Laval, les gens, on ne peut pas avoir de député pour les représenter, on n'en a pas élu. Mais c'est frappant de voir à quel point les députés de Montréal ne sont pas présents. Les députés de Itle de Montréal, je peux vous dire qu'il y en a 2 sur 33. Il y a la députée de Bourget, qu'on me dit, et le député de Verdun, 2 sur 33. Ça ne fait pas extraordinaire. Je vais vous dire que ce n'est pas parce qu'il manque de transport en commun dans la région de Québec qu'ils n'ont pas pu se rendre au Parlement parce qu'on est là depuis hier matin. Alors, ce n'est pas une grosse préoccupation pour le transport en commun. Quand même qu'on nous dirait que c'est l'urgence nationale, je vois bien qu'il faut faire un acte de foi considérable parce que ce n'est pas la présence des députés libéraux de Montréal qui nous incite à le croire.

Ah! Je dois dire que vous, M. le Président, vous êtes présent, un peu par devoir, je pense bien, parce que vous êtes obligé de tenir le fort; si vous ne teniez pas le fort, ça fait longtemps qu'on aurait fermé la Chambre. C'est tout à votre honneur et je sais qu'en dedans de vous-même vous ne pouvez pas le dire, comme président, mais vous n'êtes pas d'accord avec cette façon d'opérer, de voter la nuit comme si on était des taupes. On est comme des taupes. Des taupes, on sait que ça travaille la nuit, ça a la réputation de ne pas voir clair. On sait qu'une taupe s'enfonce dans son trou et ça travaille la nuit, apparemment. De toute façon, ça ne voit pas clair. Ça fait que, que ça travaille la nuit ou le jour, c'est pareil. On aurait l'impression qu'un député travaillerait davantage le jour plutôt que de travailler comme une taupe, mais qu'est-ce que vous voulez? (5 h 10)

Autre point qu'il faut souligner: A-t-on assuré la viabilité financière de l'organisme? L'article 71 stipule que l'engagement financier du gouvernement prend fin le 31 décembre 1994. Qu'arrivera-t-il après? Il n'y a pas un mot dans le projet de loi. Et je vais lire l'article pour que les gens, que leurs commettants se rappellent qu'apparemment ils ne se sont pas préoccupés davantage de ce qui dépasse 1994. On dit: "Le gouvernement accorde au Conseil, pour la période du 1er janvier 1990 au 31 décembre 1994, une subvention d'au plus 144 400 000 $ qu'il verse par tranche annuelle à la date et aux conditions qu'il fixe." Donc, un financement qui est assuré jusqu'en 1994, mais sans dépasser le 31 décembre 1994, avec un montant maximum. Qu'arrivera-t-il s'il y a des dépassements de coûts? On ne le sait pas. Qu'arrivera-t-il après 1994? On ne le sait pas davantage.

Les définitions concernant les équipements de transport dits interrégionaux sont-elles adéquates, satisfaisantes et claires pour tous les intéressés? Par exemple, les articles 2 et 88, paragraphe k), concernant la définition d'un déplacement interrégional et la propriété des équipements régionaux sont-ils acceptables par tous? Je vais lire les articles, vous allez voir à quel point, quand on parle d'équipements interrégionaux, on est dans le vague. On est drôlement dans le vague. On s'entendra sur ce que ça dit par la suite. Il faut faire un acte de foi, là encore, à moins qu'il n'y ait d'autres amendements du ministre.

Qu'est-ce qu'il dit l'article 2? On dit: "Le

transport en commun régional est celui qui permet à une personne de se déplacer du réseau de transport en commun d'une société à celui d'une autre société ou, à l'intérieur d'un même réseau, du territoire d'une société à celui d'une autre." Je dois vous dire que, comme définition, c'est un peu extensible, mais on ne peut pas dire que c'est très précis. Et, à l'article 88, que je vais lire, paragraphe k), on se rend compte, encore là, qu'il s'agit d'un article qui ne pèche pas par un excès de clarté. Je vais vous le lire: "La Société est seule propriétaire de ses ouvrages et immeubles nécessaires à l'exploitation du réseau de métro. La Communauté doit transférer gratuitement à la Société tous les droits immobiliers, ainsi que leurs titres, biens meubles et autres droits qu'elle peut détenir en relation avec le réseau de métro. Le service de la dette afférente aux biens de la Société de transport est réparti comme un déficit de ladite Société et le service de la dette afférente aux autres biens et droits acquis à l'origine par la Communauté est réparti comme une dépense de la Communauté. Cependant, lorsqu'une extension du réseau de métro est faite sur le territoire de la Société de transport de la ville de Laval ou des municipalités dont le territoire fait partie du territoire de la Société de transport de la rive sud de Montréal, la Société ne conserve que la partie souterraine du réseau et elle doit transférer à la municipalité sur le territoire de laquelle l'extension a été réalisée les biens, droits et titres immobiliers qu'elle a pu acquérir à cette fin en surface ou au-dessus du sol."

On sait qu'il y a eu des débats, qu'il n'y avait pas entente là-dessus entre, principalement, les gens de Laval et les gens de la communauté urbaine ou de la STCUM. Mais on verra s'il y a eu entente et s'il y a eu des changements concernant ces articles de loi. Concernant la STRSM, on n'en a pas entendu parler, on ne sait pas ce qu'elle en pense.

Mais, j'ai remarqué que le ministre, dans son allocution, a laissé entendre qu'il y aurait des amendements concernant les dispositions qu'on trouve au paragraphe k) de l'article 88, sans le nommer, quand il parlait des infrastructures à la surface de la terre par rapport aux infrastructures souterraines, à savoir qu'il pourrait y avoir des changements. M. le Président, ce qui veut dire qu'encore une fois c'est un projet de loi qui a été déposé le 15 mai 1990, mais qui était loin de faire l'unanimité.

Deuxièmement, l'incohérence du gouvernement en matière de transport en commun à Montréal. Les orientations du gouvernement concernant le transport en commun à Montréal sont de plus en plus confuses. Le plan de l'ancien ministre des Transports prévoyait, au niveau du développement, le prolongement de la ligne 5 du métro jusqu'à Montréal-Nord, 200 000 000 $, et de la ligne 2 vers les Bois-Francs, 100 000 000 $, l'aménagement de l'es- tacade sur la rive sud de Montréal pour les autobus, 85 000 000 $, et la mise en service d'un train de banlieue vers Châteauguay, 35 000 000 $. Le plan Côté prévoyait également la modernisation du train de banlieue vers Deux-Montagnes au coût de 175 000 000 $. Vous aurez l'occasion de voir quelles sont les parties de ces sommes d'argent là qui sont dépensées; on verra que c'est peu avancé.

Lors de la commission parlementaire, en janvier 1989, le ministre Côté, député de Charlesbourg, avait donné son accord au prolongement de la ligne 5 vers Anjou et à la construction de la ligne 1, à Montréal-Nord, pour 500 000 000 $. Le développement de ces infrastructures devait se réaliser sur un échéancier de 13 ans, simultanément à la modernisation du train vers Deux-Montagnes. Ce compromis permettait de concilier les volontés du gouvernement exprimées dans le plan et les demandes de la Communauté urbaine de Montréal. La campagne électorale est venue chambarder tout cela. Alors, qu'il y avait eu un tas de consultations, de tentatives de faire des consensus, les engagements électoraux en 1989 ont porté sur des sujets où il n'y avait eu aucune consultation. C'est quelque chose, M. le Président. Mais je suppose que ça doit faire partie de ce qu'on appelle la vérité révélée. La vérité révélée, c'est un genre de postulat ou d'axiome qui n'a pas besoin de démonstration. Alors, possiblement que ça fait partie des postulats ou des axiomes, et qu'il n'y a pas besoin de démonstration. Mais la campagne électorale est venue chambarder tout cela.

Il faudrait demander aux élus ce qu'ils en pensent ou aux gens représentant les sociétés qui sont ensemble, puisque, à l'article 2, on dit bien qui va se regrouper. On dit ici: "Les sociétés de transport en commun sont la Société de transport de la Communauté urbaine de Montréal, la Société de transport de la ville de Laval et la Société de transport de la rive sud de Montréal." Il faudrait qu'ils nous disent, au fond, ce sur quoi ils sont d'accord, s'ils sont d'accord avec le plan qui est allé en consultation ou sur les engagements de la campagne électorale, ou s'ils pensent que ça devrait être les deux.

En août 1989, quatre ententes ont été conclues entre le gouvernement du Québec et les autorités municipales et de transport en commun de la région de Montréal. Ces ententes portent sur le prolongement du métro à Laval, sur la rive sud de Montréal et dans l'est de Montréal, sur la modernisation du train de banlieue vers Deux-Montagnes, sur la création de l'organisme régional de transport communément appelé ORT et sur les études pour élaborer les solutions à long terme de l'autoroute Métropolitaine. Le prolongement du métro à Laval d'ici 1995, 150 000 000 $, et le début des études pour le prolongement vers Brassard n'ont jamais été débattus dans le cadre du plan Côté. Qu'il

s'agisse du dépôt du plan ou de l'étude en commission parlementaire, ça n'a jamais fait l'objet de consultations; pourtant, c'est ça qui a fait l'objet d'engagements électoraux. De plus, ces ententes atténuent le compromis intervenu lors de la commission parlementaire de janvier 1989 sur la réalisation de la ligne 5 vers Anjou et de la ligne 7, puisqu'elles font davantage référence à des études qu'à des travaux. Ça, c'est très important de se le rappeler.

Est-ce que les gens vont se satisfaire de cette façon-là? Il faudra qu'ils nous le disent. Nous autres, comme parlementaires, c'est bien difficile de défendre les gens puisqu'ils se défendent eux-mêmes. Comme avocat, une chose qu'on a apprise... C'est pour ça que ça aide d'être avocat, des fois, comme parlementaire, parce que l'avocat sait qu'il ne peut pas défendre son client plus qu'il ne veut lui-même se défendre; autrement, ça fait un drôle de mandat. (5 h 20)

Alors, c'est pour ça qu'il va falloir se demander: Qu'est-ce que les intervenants en pensent, clairement? Comment expliquer un tel revirement entre la commission parlementaire sur le plan Côté, qu[ ne contenait aucun projet de développement de métro à l'extérieur de la Communauté urbaine de Montréal, et la campagne électorale? Qu'est-ce qui est arrivé? Quel chemin de Damas le premier ministre a-t-il rencontré? Est-ce qu'il a été, comme saint Paul sur son cheval, démonté sur le chemin de Damas? On ne le sait pas, mais espérons que la commission parlementaire qui suivra éventuellement le projet de loi nous permettra de faire la lumière sur ces engagements nouveaux. Les gens de Laval et de la rive sud devraient se méfier des promesses du gouvernement, puisqu'il n'a même pas d'argent pour respecter les échéanciers du plan Côté. Les engagements du plan de 10 ans - on aura l'occasion d'y revenir - sont loin d'être réalisés, bien que, actuellement, on affame les différentes régions au Québec, puisque les travaux de voirie régionale, dans les différentes régions du Québec, ont baissé cette année de 42 %. Malgré tout, dans la région de Montréal, on est loin de la réalisation du plan qui est allé en consultation et pour lequel il y avait eu consensus lors de l'étude en commission parlementaire.

Le gouvernement se désengage du transport en commun. Il refile la facture aux municipalités. En 1989, le gouvernement du Québec a versé une contribution de 207 000 000 $ pour les dépenses d'opération de la STCUM. Cette contribution représente près de 29 % des dépenses totales de la Société, qui se sont élevées la même année à 726 000 000 $. Le projet du gouvernement de transférer aux municipalités l'entière responsabilité financière du fonctionnement d'un système de transport en commun, tel qu'annoncé lors du discours sur le budget, aura des conséquences graves sur l'avenir du transport en commun, à Montréal et au Québec. En effet, selon les projections de coûts de la STCUM, de 1990 à 1993, cette dernière prévoit un manque à gagner de 49 000 000 $ en 1990, de 64 000 000 $ en 1991, de 76 000 000 $ en 1992, et de 93 000 000 $ en 1993. Le transfert aux municipalités de leurs responsabilités financières pour le fonctionnement du transport en commun pourrait se traduire par une augmentation des tarifs aux usagers de l'ordre de 40 %, selon Le Président de la Conférence des maires de la banlieue de Montréal, M. Michel Leduc.

Ici on voit, par exemple, les coupures de journaux, suite au discours du budget. On se rend compte qu'à ce moment-là la directrice générale indiquait, dans une déclaration, que le coût de la carte de transport en commun pourrait augmenter à 94,67 $, si les menaces indiquées au budget du ministre des Finances en 1990 se matérialisaient. Je sais qu'il y en a qui ont dit que c'était une chasse aux sorcières. Mais, habituellement, ces dépenses-là, concrètement, le gouvernement ne les annonce pas pendant que la session est en cours. C'est sans doute pourquoi le ministre-Non, c'est le truc. J'ai vu ça du gouvernement Trudeau, à Ottawa. J'ai souvent vu que les menaces, par exemple, aux pêcheurs arrivaient toujours au mois de juillet alors que le monde était en vacances. Comme le disait Notre-Sei-gneur - je pense bien que le ministre a pris ça pour lui - je viendrai comme un voleur. Mais il parlait de la mort, à ce moment-là. Entendons-nous. Je vois que le ministre essaye de forcer pour faire l'adoption de la structure avant l'ajournement. J'ai l'impression que ça cache des lendemains amers. J'ai l'impression que les lendemains amers vont venir après minuit, le 22 juin.

Le désengagement qui est contenu dans le budget... Les municipalités sont peut-être bien naïves; quand elles ont entrepris les discussions avec le gouvernement sur le financement scolaire, elles pensaient se faire mettre le pied dans la porte pour 75 000 000 $. On a réalisé qu'ils l'ont mis pour 320 000 000 $ et qu'elles ont été surprises. Mais, comme beaucoup de ces maires-là sont beaucoup plus libéraux que maires, la réaction a été mitigée, et on aurait voulu qu'on les défende plus dans certains cas qu'ils se défendaient eux-mêmes.

Et c'est pourquoi, dans le cas du transport en commun... Et vous remarquerez, je le dis, c'est enregistré. Je comprends qu'à 5 h 25, M. le Président, ça ne se bouscule pas encore dans les autobus pour aller au poste de télévision pour écouter mon discours, mais les quelques-uns qui sont devant la télévision, qui sont insomniaques et qui écoutent encore la télévision à presque 5 heures et demie le matin du 21 juin, début de l'été, au moment où le soleil a dû commencer à se lever - même les taupes rentrent dans leur trou - éventuellement, M. le Président, se rappelleront et ils vont dire: Le député de Lévis

nous avait dit de nous méfier du gouvernement, après le 22 juin, qu'il y a une "opérationalisa-tion" du budget du ministre des Finances entrant en opération après le 22 juin et que ça ne serait pas au cours de la session, mais possiblement entre la Saint-Jean-Baptiste et la Confédération ou au cours du mois de juillet, pour que ça passe le plus inaperçu possible. Ils pourront dire que le député de Lévis, même s'il n'est pas de Montréal, les avait avertis de se méfier d'un gouvernement qui adopte les lois de nuit et qui adopte aussi des mesures impopulaires le plus subrepticement possible, comme il le fait pour la caisse de la Régie de l'assurance automobile et en changeant le nom de la RAAQ pour la SAAQ, parce qu'il va partir avec le sac.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Garon: En se désengageant de l'aide à l'exploitation du transport en commun, le maintien de la participation du gouvernement dans le développement des infrastructures ne veut plus rien dire. Remarquez bien, en se désengageant, le gouvernement va peut-être bien financer le métro, mais est-ce qu'il va le financer avec son désengagement du financement, de sa participation au développement des infrastructures? Là, on verra. Mais je dis à ceux qui n'ont pas lu le budget du ministre des Finances de le relire. Parce que là, les chiffres sont escomptés. Il faut, quand on regarde le budget, avoir les yeux vis-à-vis des trous pour bien voir ce qui est marqué dans le budget. Et on se rendra compte que le gouvernement veut se désengager du transport en commun. Dans ce désengagement de l'aide à l'exploitation du transport en commun, le maintien de la participation du gouvernement dans le développement des infrastructures ne veut pas dire grand-chose.

Comme les municipalités et les usagers seront incapables d'assumer seuls les opérations du transport en commun, il ne se fera plus de développement d'infrastrutures de transport en commun. Il faut bien se dire la vérité. C'est ça qui pend au bout du nez de ceux qui sont dans le transport en commun. Et j'émettrais ma première mise en garde concrète, pas première, mais une autre mise en garde concrète: le vrai plan d'action du transport en commun de l'ex-ministre des Transports, le député de Charlesbourg, tarde à se mettre en marche. Alors que 60 % du temps est écoulé concernant la première partie du plan d'action quinquennal contenu dans le plan Côté, c'est-à-dire qu'il y a trois années de passées sur cinq, le gouvernement n'a dépensé ou engagé que 24 % des montants prévus pour les cinq premières années.

J'ai remarqué, M. le Président, que le ministre n'est pas présent; c'est à peu près le seul ministre qui n'est jamais présent quand on discute ses projets de loi. J'ai remarqué que même le ministre de l'Éducation, qui est bien plus vieux que lui, est présent. Il n'a pas manqué une minute. Il a assisté à tous les débats. J'ai remarqué que le ministre des Finances, même parfois malade, assistait aux débats en ce qui concerne son ministère; mais le ministre des Transports, lui, il est au-dessus de ça. Il n'est là pour aucun de ses projets de loi. Il demande à ses députés d'être là; lui, il n'y est pas. Il ne donne pas l'exemple. Il n'est pas là pour les camionneurs. Il n'est pas là pour ses projets de loi. Il est absent. On aimerait ça qu'il soit là et qu'il s'intéresse un peu à son projet de loi. Mais il semble que la merveille que devait représenter ce nouveau ministre des Transports issu de l'ouest de Montréal n'a pas besoin d'être présente lors des débats qui concernent ses projets de loi. Même le député de Papineau est là, un peu découragé, la tête appuyée sur la main, et qui se dit: Comment ça se fait que moi, de l'Outaouais, qui n'aurai pas un seul de ces véhicules qui va passer sur mon territoire, je suis présent pour écouter le débat et participer au débat? Mais le ministre, qui est supposé être le maître d'oeuvre, est complètement désintéressé. (5 h 30) tantôt, les gens de la communauté urbaine, les gens de la société de transport de laval ou encore de la strsm, ils ne nous l'ont pas encore dit, vont nous demander d'étudier jour et nuit, d'être là le ventre à terre pour étudier leur projet de loi. mais, alors qu'on en parle en chambre, le ministre est au-dessus de ça, il n'est pas présent. je ne sais pas s'il est allé voir si les camions sont encore là. peut-être qu'il est allé faire le tour du parlement pour compter les camions, voir s'il y en a autant ou s'il y en a d'autres, avertir le ministre de l'environnement qu'apparemment on prendrait des poursuites concernant l'environnement parce qu'il y a des camions autour du parlement. on a entendu ça aux nouvelles tantôt. en tout cas, le ministre n'est pas là. pourtant, alors que 60 % du temps s'est écoulé concernant la première partie du plan d'action quinquennal contenu dans te plan côté, trois années sur cinq, le gouvernement n'a dépensé, au cours des trois premières années sur cinq ans, que 24 % des montants prévus pour les cinq premières années. de 1988 à 1990, 134 000 000 $ ont été dépensés ou engagés, alors que le plan côté prévoyait investir 554 000 000 $, m. le président. c'est quelque chose: 134 000 000 $ sur 554 000 000 $.

Au cours des trois premières années, le gouvernement a dépensé en moyenne 66 000 000 $ de moins par année que ses prévisions. Pour atteindre ses objectifs et respecter ses échéanciers d'ici 1993, il devra dépenser, en 1991-1992, 420 000 000 $, soit 210 000 000 $ par année. Imaginez-vous! Sera-t-il capable de faire ça, alors qu'on a vu qu'actuellement dans les travaux qu'il fait à Montréal il y a du craquèle-ment, qu'on est obligés de changer des plans et

devis sur lesquels on taponne depuis des années, parce qu'on s'est trompé, on a fait des erreurs, et je reviendrai là-dessus. On n'a même pas posé le béton qu'on avait spécifié dans le devis. Sera-t-il capable de faire ces investissements qui étaient prévus dans le plan? Aura-t-il les budgets pour le faire, compte tenu des dépassements de coûts du volet routier et du plan de transport dans la région de Montréal? Si on regarde le bilan du transport dans la région de Montréal, le volet du transport en commun pour la période de 1988 à 1992, en millions de dollars, on se rend compte que pour la conservation des acquis, alors qu'on pensait dépenser, de 1988 à 1992, 288 000 000 $, il y a seulement, au bout de trois ans, 125 000 000 $ de dépensés, sur 288 000 000 $ sur cinq ans.

Pour l'amélioration, il devait dépenser 70 000 000 $ sur cinq ans: au bout de trois ans, on a dépensé la fabuleuse somme de 6 600 000 $ sur 70 000 000 $. Pour les questions du développement, imaginez-vous, on devait dépenser 196 000 000 $ entre 1988 et 1992: après trois ans, on n'aurait pas dépensé 196 000 000 $, mais un gros 2 000 000 $: un gros plan! Donc, sur 554 000 000 $, 133 600 000 $ de dépensés. Pour le développement: 2 000 000 $ sur 196 000 000 $, imaginez-vous! Ça va bien. Les gens doivent être rassurés à Montréal. Alors, vous voyez que dans la théorie c'est beau, mais dans la pratique ça ne marche pas autant. Il y a des crevaisons à bien des places pour ne pas que ça avance plus que ça.

Ce qui distingue les actions du gouvernement en matière de transport à Montréal, ce sont les dépassements de coûts des travaux. Même si on ne dépense pas l'argent qu'on devait dépenser, beaucoup moins, on réussit quand même à dépasser les coûts qu'on avait prévus, pas parce qu'on est débordés, parce qu'on en fait beaucoup moins que ce qu'on avait prévu, mais, quand même, ceux qu'on fait, on n'est pas capables de contrôler les coûts. Il y a des dépassements considérables. À la lumière des trois premières années de réalisation du plan Côté dans la région de Montréal, il nous apparaît que ce plan a été improvisé, qu'il a été déposé en catastrophe et que le ministère des Transports fait les plans et devis au fur et à mesure de l'avancement des travaux. On a vu ce que ça donne dans le domaine des frégates. On va voir ce que ça donne dans le domaine des transports, des dépassements de coûts. Les travaux pour le plan de transport dans la région de Montréal ont dépassé les coûts prévus, lors des soumissions, de plus de 30 % l'an dernier. Même si on dépense plus que jamais pour les plans et devis et la surveillance... C'est à tel point que le Vérificateur général s'en plaignait dans son rapport du 31 mars 1987, où il disait qu'alors que sous l'ancien gouvernement on faisait pour 3,60 $ de travaux avec 1 $ de plans et devis et de surveillance le gouvernement actuel, en 1986, était rendu à 2,81 $.

Alors, vous voyez, M. le Président, que ce n'est pas fantastique, l'administration actuelle. On dit: On va administrer cela comme une entreprise privée, oui. Lors de l'étude des crédits de 1990-1991 du ministre des Transports, le ministre Vallières a indiqué qu'il y aurait encore des dépassements importants cette année pour les travaux dans la région de Montréal.

Il l'a dit d'avance. Il a dit: L'année vient de commencer et je peux vous dire d'avance qu'il va y avoir des gros dépassements. En plus de faire l'objet de dépassements importants, il y a eu des changements de matériaux dans les travaux de construction dans la région de Montréal l'an dernier. Le ministre délégué aux Transports a confirmé, lors de l'étude des crédits de son ministère, le 30 mai 1990, qu'on utilisait un type de béton différent de celui qui avait été spécifié aux plans et devis. On fait faire des soumissions sur du béton plus cher et, quand on fait les travaux, on utilise du béton moins cher.

Une belle planification! Ça fait curieux. Comment se fait-il que les plans et devis n'ont pas été respectés? On dit qu'ils ont été bien faits. Les travaux préparatoires aux plans étaient-ils suffisants et étaient-ils bien réalisés? De plus, il arrive que ces ouvrages, dont les coûts ont dépassé largement les montants établis lors des soumissions et dont les plans et devis n'ont pas été respectés, montrent déjà des signes visibles et une inquiétante détérioration après moins d'un an de leur réalisation. Ça craque!

On voyait même que du béton qui avait été fait, il y a quelque 20 ou 30 années, n'avait pas encore craqué et du béton fait l'an dernier, sous ce gouvernement-là, avait déjà commencé à craquer. C'est quelque chose, M. le Président. Bref, ça sent l'improvisation et on a l'impression que le plan Côté a été déposé en catastrophe pour montrer que le gouvernement avait des orientations en matière de transport dans la région de Montréal. Mais, aujourd'hui, il est clair qu'il ne sait pas où il va. C'est pareil dans le transport comme dans le développement régional. Ça fait dur.

C'est le ministre délégué aux Transports qui l'a dit lui-même. Le ministre des Transports fonctionne à la mitaine. Je cite le ministre des Transports lui-même en commission parlementaire, lors des travaux de la commission de l'aménagement et des équipements le 30 mai 1990. N'est-il pas étonnant que des travaux dans la région de Montréal se réalisent de façon aussi régulière quand le ministre lui-même a déclaré en commission parlementaire ce qui suit, et je vous le cite, M. le Président: Oui, là, il y a un problème. Je me rends compte qu'aux Transports - là, je ne sais pas si dans les autres ministères, c'est pareil - il y a très peu de choses qui sont informatisées. Apparemment, il y a le cabinet du ministre; c'est lui qui a les applications des occasionnels et, là, c'est informatisé! Il a dit: II

y a très peu de choses d'informatisées. On va essayer de voir à ça. Il a commencé par informatiser les emplois pour mieux pouvoir les contrôler. J'aîmerais - ajoute-t-il - pouvoir répondre de façon beaucoup plus instantanée à certaines questions de cette nature. Mais on est littéralement obligé de faire toutes nos recherches actuellement à la mitaine dans les différents dossiers. Je promets au député de Lévis ce type d'information là. Normalement, on devrait être capable rapidement de lui donner une réponse. Mais, là encore, ce n'est même pas fait par ordinateur. On va chercher l'information et la cueillir à l'intérieur de documents dont on dispose à la mitaine. Mais je vais vous les remettre.

Vous voyez, M. le Président, le ministre lui-même se plaint de son ministère et accuse son ministère, après avoir été un nouvel arrivé au ministère depuis l'automne dernier, d'être un ministère qui marche à la mitaine. Ce n'est pas rassurant, M. le Président. Et c'est pour ça que, dans le transport en commun, j'espère que les gens qui représentent Laval, la Communauté urbaine ou la rive sud de Montréal ont pris des assurances, parce qu'encore là l'Opposition ne peut pas les défendre plus qu'ils ne se défendent eux-même. L'Opposition ne peut pas être plus aguerrie qu'ils ne sont aguerris. L'Opposition ne peut pas être plus soupçonneuse qu'ils ne sont soupçonneux. L'Opposition ne peut pas vérifier plus qu'ils ne lui demandent de vérifier. L'Opposition ne peut pas faire un travail plus grand que ce qu'ils ne font eux-mêmes. (5 h 40)

C'est important, M. le Président, ce que je dis là. Je le dis et je sais que mes paroles sont enregistrées. Je le sais, mais ceux qui marchent seulement sur des actes de foi doivent se rappeler il est aussi dit dans l'Évangile que la foi sans les oeuvres, ça n'impressionne pas le Seigneur. Souvent, j'ai vu le ministre des Transports qui a fait le plan d'action 1988-1998 avoir beaucoup de choix, mais je vais vous dire que les oeuvres n'apparaissent pas souvent.

C'est pourquoi, M. le Président, je suis méfiant. Je suis méfiant vis-à-vis de ce plan-là et je vois que j'ai réussi à vous convaincre. Je vois que le député de Papineau s'est levé. Il regarde le plafond et se demande, sans doute, ce qui va lui tomber sur la tête. Il est inquiet lui aussi. Je sens que la députée de Groulx est inquiète elle aussi. Elle est assise la tête dans la main et elle se dit: A 5 h 40, qu'est-ce que je fais là? Je vois que le député de Rivière-du-Loup nous a abandonnés, il est retourné dans le bois. Je vois que le député de Saint-Hyacinthe est venu faire un tour. Il y a un député qui est loin, là, je ne suis pas capable de le reconnaître parce que je ne vois pas si loin que ça, mais il s'est assis proche de la porte, prêt à sortir à tout événement: S'il arrive quelque chose, je suis prêt à partir. Je vois que le député de Drummond a changé de banc. Il dit: Si on peut partir pour se faire la barbe. Il a essayé de se mettre le plus loin possible de la télévision pour que les gens ne se demandent pas pourquoi il est tellement découragé de la vie qu'il ne se rase plus.

Alors, c'est ça. On est dans cette situation-là, M. le Président, et je m'excuse auprès des téléspectateurs qui nous regardent. Je ne suis pas découragé, mais le gouvernement nous oblige à siéger. Il est 5 h 40. Tantôt, on va aller changer de chemise, changer de cravate si on a le temps, se raser, se passer une serviette dans la face et recommencer, parce qu'on marche jour et nuit au Parlement. Ne vous demandez pas pourquoi, après ça, les lois s'en vont cahin-caha. Les gens qui gardent l'heure avec leurs chronomètres n'en croient pas leurs yeux. Ils voient les secondes, les minutes, les heures passer et ils se disent: Qu'est-ce qu'on fait encore là assis sur notre chaise? Ça n'a pas de bon sens, M. le Président, d'avoir un Parlement qui siège de cette façon-là, mais sous le gouvernement Bourassa on a un gouvernement qui légifère de cette façon-là. C'est anormal. On disait qu'on voulait faire plus avec moins; bien, on réussit à faire moins avec plus. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Je vous remercie M. le député de Lévis. Je suis prêt à reconnaître le prochain intervenant, M. le député de Bertrand. M. le député, vous avez la parole.

M. François Beaulne

M. Beaulne: Merci, M. le Président. Le projet de loi 67 est un projet de loi qui est important, du moins pour nous de la grande région métropolitaine de Montréal.

M. Garon: M. le Président, je n'ai pas fait de chichi en faisant mon discours, mais j'aimerais ça qu'il y ait quorum pendant que mon collègue, le député de Bertrand, parle.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Qu'on appelle les députés. Faites sonner la cloche, s'il vous plaît.

Si vous voulez prendre place, s'il vous plaît. Je reconnais maintenant le prochain intervenant, M. le député de Bertrand.

M. Beaulne: Merci, M. le Président. Comme j'ai eu l'occasion de le dire avant notre interruption, le projet de loi 67, qui porte sur le Conseil métropolitain de transport en commun, revêt pour nous, de la région du grand Montréal métropolitain, une importance particulière. Ce projet de loi crée le Conseil métropolitain de transport en commun, un organisme qui sera chargé de faciliter les déplacements interréseaux dans la région de Montréal.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): ...mes chers collègues, à entendre M. le député. Je demanderais votre collaboration, en vertu de l'article 32; vous savez ce que je veux dire. M. le député, vous pouvez poursuivre.

M. Beaulne: C'est une structure assez légère puisqu'elle conserve l'autonomie entière des autorités locales. Ce projet de loi contient également des dispositions concernant les projets de développement du métro à l'extérieur du territoire de la Communauté urbaine de Montréal.

M. le Président, je ne peux souligner suffisamment l'importance pour la grande région de Montréal de ce projet de loi puisqu'il insuffle un nouvel élan à l'intégration des services de transport en commun. J'aimerais également moi aussi, en guise de remarques préliminaires, souligner l'irresponsabilité du gouvernement d'appeler un projet d'une telle importance à moins de vingt-quatre heures avant l'ajournement de la session, à 5 h 50 le 21 juin.

J'aimerais également, comme l'a fait mon collègue de Lévis...

Une voix: M. le Président, j'invoque le règlement. Il me semble qu'il y a une atmosphère de gare de trains.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît. Chers collègues, je vous demande de respecter le règlement, en vertu de l'article 32. La parole est au député de Bertrand, et je demande votre collaboration, s'il vous plaît. M. le député. (5 h 50)

M. Beaulne: Merci, M. le Président. Effectivement, ce n'est pas parce qu'on discute de transport en commun qu'il faudrait qu'il y ait, dans cette Assemblée, une atmosphère de gare de trains. J'aimerais également, moi aussi, déplorer l'absence du ministre des Transports pendant ce débat contrairement à plusieurs de ses autres collègues, je dirais même à la majorité de ses autres collègues qui ont suivi assidûment les débats sur les projets de loi qui tombent sous leur juridiction. J'ai eu l'occasion de participer au débat sur la Régie de l'assurance automobile du Québec et, là non plus, il n'était pas présent. Je trouve que c'est un manque de responsabilité pour quelqu'un qui cherche à améliorer ses projets de loi ou du moins à écouter les points de vue de ceux qui sont principalement concernés par ses projets.

D'autre part, j'aimerais également, M. le Président, souligner qu'il y a bon nombre de projets de loi, dont celui-ci, qui intéressent une grande partie de la population et qui ont pour objectif de contribuer à la meilleure gouverne du Québec et je voudrais surtout dissiper l'impression que le public pourrait avoir que c'est parce que l'Opposition empêche le processus normal de se dérouler que bon nombre de projets de loi ne seront pas ou ne risquent pas d'aboutir avant la fin de la prochaine session. J'espère que celui-ci aura l'occasion de déboucher. Je ne puis en garantir l'issue puisque c'est un projet de loi de 101 articles. Je rappellerai tout simplement que ces retards dans le processus législatif sont dus à une mauvaise planification de l'échéancier de la part du gouvernement. Le budget a été présenté en retard. On a tergiversé pendant plusieurs jours sur la saga du lac Meech pour en arriver à la situation actuelle où, à moins de vingt-quatre heures de l'ajournement, il y a encore des projets de loi importants comme celui-ci qui n'ont pas été étudiés comme ils devraient l'être, avec le sérieux avec lequel ils devraient l'être.

Ceci étant dit, M. le Président, j'aimerais également profiter de l'occasion pour souligner votre excellent travail puisque j'ai remarqué que, parmi ces longues heures tardives que nous avons vécues ces derniers jours, vous avez toujours été celui qui nous a accompagnés.

Des voix: Bravo! Bravo! Bravo!

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît! Je vous remercie de votre appréciation, M. le député, et je vous permets de continuer votre exposé.

Une voix: Question de règlement, M. le Président. Est-ce que l'article 32 va à l'égard du président aussi? Non?

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le député, s'il vous plaît! M. le député, si vous voulez poursuivre.

M. Beaulne: Le projet de loi 67 est particulièrement important pour nous, de la région métropolitaine de Montréal, parce qu'il inaugure en quelque sorte ce concept de partenariat qui devrait exister dans le développement économique de la région. Jusqu'ici, malheureusement trop souvent, nous avons assisté à des prises de position, à des méfiances et également à des politiques qui étaient plus ou moins incohérentes selon qu'elles étaient adoptées par un conseil municipal ou une communauté urbaine située sur IHe de Montréal, sur la rive nord de Montréal ou sur la rive sud de Montréal. Je pense qu'il est important de concevoir le développement économique de la grande région sous forme de partenariat parce que la ville de Montréal et les municipalités situées sur I Ile de Montréal ont quelque chose à apporter à l'ensemble de la région de la même façon que la population qui s'est établie sur la rive nord de Montréal, dans la région de Laval et dans les municipalités de la rive sud a également quelque chose à contribuer au développement. Et il ne s'agit pas de con-

cevoir le développement de la grande région métropolitaine comme une espèce de partie de souque à la corde où la rive nord, la rive sud ou 111e de Montréal tire chacun sur la "couverte" pour obtenir les retombées les plus grandes possible. Il faut que cette région se développe sur la base du partenariat et, pour ce faire, il faut des outils. Il faut des outils, et un système de transport en commun coordonné est un des outils principaux. Dans ce contexte, le projet de loi 67 revêt toute l'importance qu'on devrait lui accorder.

Ce projet est important, d'autre part, parce qu'il va contribuer à améliorer la qualité de vie dans la grande région métropolitaine. On connaît déjà les problèmes que soulève l'engorgement du trafic à Montréal, les heures que perdent les résidents de la rive sud pour se rendre à Montréal via les ponts, les heures que perdent les résidents de Laval pour se rendre également, eux, sur IHe de Montréal. Ce projet de loi, en améliorant la qualité et en intégrant le système de transport en commun à Montréal, aura comme objectif de réduire le trafic sur les ponts qui mènent à Montréal, aura comme objectif de réduire l'utilisation des véhicules automobiles de façon à réduire également le niveau de pollution, le niveau de détérioration des routes et le niveau de qualité de vie qui se dégrade dans l'île de Montréal. Par contre, ce projet de loi pourra également permettre aux étudiants qui habitent la rive sud ou qui habitent Laval, et qui doivent se rendre dans les institutions d'éducation de Montréal, de le faire de façon beaucoup plus efficace à des coûts moindres. Il permettra également aux travailleurs qui habitent les régions où sévit un chômage élevé sur l'île de Montréal de trouver de l'emploi, soit sur la rive nord ou sur la rive sud ou, en particulier, dans mon comté de Bertrand, où nous avons moins de 3 % de chômage. C'est donc dire que les occasions d'emploi existent.

Nous venons, par exemple, d'inaugurer à Boucherville le centre de distribution régionale de Honda au coût de 20 000 000 $. Bientôt, la compagnie Molson va implanter un projet d'une envergure semblable. La possibilité d'emplois, elle existe pour les travailleurs et les travailleuses qui résident dans l'est de Montréal ou dans les parties du sud-ouest de Montréal, où des problèmes de chômage sévissent. Encore faut-il que ces gens, pour bénéficier du potentiel d'emplois qui existe dans les régions comme la rive sud de Montréal ou la ville de Laval, qui, elle aussi, se développe, encore faut-il que ces gens-là puissent se déplacer pour avoir accès à leur travail ou à ces occasions de travail. Ainsi, la mise sur pied d'un système de transport en commun coordonné permettra cette espèce de mouvement, cet échange entre les différentes communautés constituantes de la grande région métropolitaine et facilitera le développement économique de cette grande région dans le concept du par- tenariat plutôt que dans le concept de l'opposition.

D'autre part, la création du Conseil métropolitain s'inscrit dans la mouvance générale du maintien des coûts de transport en commun à un niveau raisonnable. De plus en plus, les coûts augmentent et les frais qui sont imputés aux usagers du service en commun dans la grande région métropolitaine de Montréal augmentent. Ce n'est sûrement pas de nature à inciter les usagers à utiliser davantage le système de transport en commun et à réduire l'utilisation des automobiles comme plusieurs planificateurs l'ont indiqué et comme le désire la majorité de la population. Le système actuel, tel qu'il est conçu, de façon morcelée, basé surtout, dans les communautés à l'extérieur de IHe de Montréal, sur l'utilisation des autobus, est un système à moyen et à long terme qui est insoutenable. Il est insoutenable parce que les coûts d'opération d'un système comme celui-là sont beaucoup plus élevés que ne le sont les coûts afférents à l'opération de trains de banlieue, à l'opération du métro ou au prolongement du métro. D'ailleurs, les problèmes qu'a vécus la STRSM au cours de la dernière année en témoignent. Ce n'est pas parce que la société est mal gérée, c'est parce que la société fait face, finalement, à un problème qu'elle ne pourra jamais régler à moins que l'on ne trouve une façon de faire en sorte que les autobus deviennent un service accessoire à la mise au point d'un système de transport en commun coordonné, plutôt que l'instrument principal et coûteux de l'application de ce transport. Finalement, la mise sur pied de ce Conseil s'inscrit dans la tendance moderne de l'aménagement des grandes villes. (6 heures)

J'ai eu l'occasion, il y a quelques années, comme consul du Canada à San Francisco, de connaître particulièrement le système de transport en commun qui regroupe les villes de la baie de San Francisco, le système BART. Ce système est un système dont on pourrait facilement s'inspirer dans la grande région métropolitaine de Montréal, puisqu'il combine à la fois l'utilisation d'autobus dans les grands centres principaux, l'utilisation de trains de banlieue et l'utilisation de métros dans les centres les plus peuplés et à travers la baie de San Francisco. Et finalement, ce projet est important, parce qu'il est le fruit de la concertation entre les municipalités, les élus et les sociétés de transport concernées. Jusqu'ici, nous avions eu une certaine difficulté, dans la grande région métropolitaine de Montréal, de trouver une sorte d'unanimité ou de trouver un terrain d'entente commun. Eh bien, nous avons réussi à dépasser cette étape lorsque les partenaires concernés ont accepté de s'engager dans la voie de l'ORT et d'accepter la mise sur pied de ce Conseil métropolitain de transport, d'ailleurs, projet sur lequel ils insistent pour une adoption rapide et

expéditive.

Ceci étant dit, M. le Président, il demeure que certains points doivent être éclaircis. En voulant respecter l'autonomie des sociétés de transport locales, on peut se poser la question, à savoir si le Conseil aura la capacité et les pouvoirs nécessaires pour prendre les décisions essentielles au bon fonctionnement du transport en commun dans la région de Montréal. Autre point à éclaircir, c'est toute la question de la viabilité financière de l'organisme. L'article 71 stipule que l'engagement financier du gouvernement prendra fin le 31 décembre 1994. On peut se demander en toute bonne foi ce qui arrivera après et ce qui est prévu suite à cette échéance du 31 décembre 1994. Voilà un point qu'il serait intéressant et utile d'élucider.

D'autre part, il faudrait également préciser - et peut-être aurons-nous l'occasion de le faire dans le contexte de l'étude plus détaillée en commission - il y aurait peut-être lieu d'élucider les définitions concernant les équipements de transport dits - et je cite - interrégionaux. Ces équipements sont-ils adéquats? Ces définitions conviennent-elles aux principaux partenaires concernés? Sont-elles satisfaisantes? Sont-elles claires pour tous les principaux partenaires? Comme a eu l'occasion de le souligner mon collègue de Lévis, par exemple, les articles 2 et 88, paragraphe k, concernant la définition d'un déplacement interrégional et la propriété des équipements régionaux, demeurent une question qu'il faudrait préciser, à savoir si elle est acceptable par les principaux partenaires intéressés?

M. le Président, je pense qu'il est important d'assurer la viabilité financière de cet organisme. C'est bien beau d'introduire des projets de loi qui mettent sur pied des structures, mais les structures, finalement, n'ont de valeur que pour autant qu'elles sont dotées des outils et des ressources suffisantes pour fonctionner. Si j'en juge par l'expérience récente que nous avons vécue, on peut sérieusement se poser des questions quant à l'engagement du gouvernement sur la viabilité financière de l'organisme. En 1989, le gouvernement du Québec avait versé, comme l'a fait remarquer mon collègue de Lévis, une contribution de 207 000 000 $ pour les dépenses d'opération de la STCUM. Cette contribution représente à peine 29 % des dépenses totales de la société qui, pour la même année, s'élevaient, si je me rappelle bien, à 762 000 000 $.

Le projet du gouvernement de transférer aux municipalités l'entière responsabilité financière du fonctionnement des systèmes de transport en commun, tel qu'annoncé dans le dernier discours sur le budget, aura des conséquences graves sur l'avenir du transport en commun à Montréal et au Québec. Je ne reviendrai pas sur les commentaires des présidents des différents organismes à ce sujet, mais simplement pour indiquer au ministre qu'il y a ici une question qui devrait être élucidée au cours des prochaines discussions sur le projet de loi et certainement dans les premiers mois de l'application de la loi. En effet, selon les projections de coûts de la STCUM, de 1990 à 1993, on prévoit un manque à gagner de 49 000 000 $ en 1990, de 64 000 000 $ en 1991, de 76 000 000 $ en 1992 et de 93 000 000 $ en 1993. Le transfert aux municipalités de la responsabilité financière du fonctionnement du transport en commun pourrait se traduire par une augmentation des tarifs aux usagers de l'ordre de 40 %, selon le président de la Conférence des maires de banlieue de Montréal, M. Michel Leduc.

Ce ne sont, vous me direz, que des projections. Il est à souhaiter que ces hausses des frais pour les usagers ne se concrétisent pas. C'est d'autant plus l'urgence que revêt l'intégration du système de transport en commun à Montréal. Finalement, M. le Président, puisque vous m'indiquez que mon temps de parole achève, j'aimerais conclure en disant que, d'abord, la création de l'organisme régional de transport, l'ORT, comme on l'a appelé à Montréal, l'introduction de la loi 67 créant le Conseil métropolitain de transport en commun, sont un pas dans la bonne direction vers la modernisation de tout le réseau du transport en commun de la grande région métropolitaine de Montréal, sont un pas dans la bonne direction du développement économique de la région, dans un esprit de partenariat plutôt que dans un esprit d'affrontement et sont, également, un pas dans la bonne direction des échanges, à la fois de main-d'oeuvre et de capital dans le développement économique de notre région. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Cannon): Merci, M. le député de Bertrand. Sur une question de règlement, M. le député de Chauveau.

M. Pouiin: Une question de privilège, M. le Président. Je voudrais, avec tout le respect que j'ai pour le député de Terrebonne, rappeler, au nom du ministre des Transports, quand il précisait que le ministre n'était pas ici pour écouter les débats, je voudrais rappeler au député de Terrebonne que, dans les deux salons, il y a des télévisions où on peut écouter les débats et aussi, il y a des perroquets. Donc, je voudrais rappeler au député de Terrebonne...

Une voix: ...au député de Terrebonne...

M. Pouiin: Le député de Bertrand, excusez. Pardon? Le député de Bertrand, justement. Je voudrais rappeler que, dans les deux salons, on peut suivre facilement les débats et on n'est pas obligé d'être ici, au salon.

Le Vice-Président (M. Cannon): O.K. Je pense que c'est effectivement... Un instant, s'il vous plaît, M. le député de Richelieu. Effective-

ment, il ne s'agissait pas là d'une question de privilège, M. le député de Chauveau. Il est bien sûr qu'un député ne peut pas intimer des propos ou enfin, indiquer qu'un autre parlementaire n'est pas présent ici, dans cette Chambre. Effectivement, c'est le point. Je pense qu'il y avait une autre question de règlement quelque part. M. le député de Richelieu?

M. Khelfa: Je vais laisser faire, je crois que...

Le Vice-Président (M. Cannon): Alors, merci beaucoup, M. le député. M. le député de Pointe-aux-Trembles.

M. Michel Bourdon

M. Bourdon: M. le Président, la présentation du projet de loi sur le Conseil métropolitain de transport en commun illustre parfaitement la situation de la métropole dans le Québec libéral d'aujourd'hui. Ce Conseil métropolitain de transport en commun est le résultat d'une concertation souhaitée depuis longtemps entre toutes les composantes du transport en commun de la métropole et de sa ceinture. En effet, M. le Président, on met enfin ensemble les ressources de la Société de transport de la Communauté urbaine de Montréal avec les sociétés de transport équivalentes sur la rive sud de Montréal et à. Laval.

Je dis que c'est révélateur de l'état de la métropole dans le Québec libéral d'aujourd'hui, c'est que la session finit le 22 à minuit et on nous appelle le projet de loi au Parlement, à 4 h 15 du matin, le 21. C'est dire tout le cas qu'on porte aux 3 000 000 de population qui sont touchés, M. le Président, par le Conseil métropolitain de transport en commun. Alors que le même gouvernement, pour ce qui concernait son administration, était autrement plus vigilant. La loi 50, qui va lui permettre de piger au-delà de 800 000 000 $ dans la Régie de l'assurance automobile du Québec, ça fait un bout de temps qu'elle a été déposée, que l'Opposition a été bâillonnée et qu'elle a été adoptée. La loi 69, qui lui permet de garrocher vers les commissions scolaires, au détriment des municipalités, 320 000 000 $ de son budget, ça, c'est depuis longtemps discuté point par point. L'Opposition a été bâillonnée et le projet de loi a été adopté. (6 h 10)

Et on arrive à un problème qui est crucial, c'est le sort des transports en commun pour 3 000 000 de Québécois sur 7 000 000; on le fait à la sauvette, à la dernière minute, et dans l'indifférence quasi générale. Je pense, M. le Président, qu'il faut le déplorer. Cependant, je trouve et notre groupe parlementaire trouve, que le Conseil métropolitain de transport en commun est une excellente initiative, quand on regarde les notes explicatives du projet de loi et qu'on voit le mandat du Conseil: établir les tarifs des services de transport en commun régionaux pour que les gens de la rive sud ou de Laval, lorsqu'ils circulent vers Montréal, aient droit à une carte à un prix raisonnable et qui soit valide dans tous les réseaux. De plus, on dit que le Conseil décidera et planifiera la réalisation d'infrastructures communes aux sociétés et répartira entre elles les revenus provenant de la vente des titres de transport donnant accès aux trois réseaux.

Alors, M. le Président, il était important que ce Conseil métropolitain de transport en commun voie le jour, et sa composition reflète un équilibre souhaitable entre les intérêts de la métropole et ceux de sa ceinture. En effet, M. le Président, le projet de loi prévoit qu'il y aura six membres nommés par la ville de Montréal, au Conseil; deux nommés par les villes de banlieue de l'île de Montréal; deux par la rive sud de Montréal; et deux par Laval. Et on prévoit, dans le fonctionnement, que ça prend une double majorité de ces deux fois six représentants pour que les décisions se prennent au Conseil métropolitain de transport. C'est donc heureux, M. le Président, qu'il y ait un tel équilibre.

Maintenant, il y une question que la création de la Société pose, M. le Président; c'est: quel est l'avenir du transport en commun dans la métropole et sa ceinture, à l'égard de l'implication du gouvernement du Québec? Là-dessus, on peut entretenir des craintes, quand on lit dans le discours sur le budget l'intention du ministre des Finances de cesser toutes les contributions du gouvernement du Québec au budget de fonctionnement des sociétés de transport, ce qui ne touche pas que Montréal, Laval et la rive sud, mais l'ensemble du Québec; on ne peut qu'être effrayés. Pour la seule Société de transport de la Communauté urbaine de Montréal, le manque à gagner, M. le Président, serait de 207 000 000 $ par année. Et la carte d'autobus-métro, on l'a dit, devrait, pour financer ça, passer a au-delà de 90 $ par mois, ce qui est carrément incroyable et impensable.

Il y a une chose évidente, c'est que le Conseil métropolitain de transport, une de ses raisons d'être, c'est de développer le transport en commun et de le rendre plus efficace. Or, si le gouvernement du Québec se retire du financement du transport en commun, on ne parlera plus de développement et on aura de la peine, M. le Président, à simplement maintenir ce qui existe déjà comme transport en commun. Or, ce ne sont pas les projets qui manquent, et le gouvernement s'était engagé, avant la dernière élection, à un certain nombre de projets. Par exemple, sur l'île de Montréal, il y a une disproportion incroyable entre les moyens de transport en commun de l'ouest de 111e et les moyens de transport en commun de l'est de l'île. À cet égard, on peut parler d'une véritable discrimination. Il y a, à l'ouest de la rue Saint-Laurent, sur 111e de

Montréal, près de 40 stations de métro dans les directions ouest et nord-ouest, alors qu'à l'est de la rue Saint-Laurent, il n'y a même pas 15 stations de métro vers l'est. Plus précisément, la ligne centrale Henri-Bourassa jusqu'à Berri-UQAM joue sa fonction et déborde, alors que vers l'ouest, il y a une ligne qui va jusqu'à Angrignon, et que, de Lionel-Groulx à Côte-Vertu, il y a une autre ligne dans l'axe nord-sud, mais à l'ouest de Montréal, alors que pour l'est il n'y a aucun équivalent. m. le président, on a les dernières stations de métro vers l'est de montréal dans le prolongement de la ligne numéro 5, qui dessert elle aussi l'ouest de snowdown, à travers outremont, et, jusqu'à la sation de saint-michel, il y a quelque 5 stations de métro qui vont vers l'est dans la ligne 5. il y en a une douzaine qui vont vers honoré-beaugrand mais, rendu là, ça s'arrête là.

L'autre disproportion flagrante - et je m'étonne qu'aucun député ministériel de l'île de Montréal ne s'en offusque - c'est qu'il y a deux lignes de trains de banlieue dans l'ouest de Montréal, une qui fait Rigaud-centre-ville et l'autre qui fait Deux-Montagnes-centre-ville, alors que, dans l'est, il n'y en a pas, sauf un projet improvisé à la dernière minute d'un train qui relie Repentigny à ville Saint-Laurent, pour soulager un peu la circulation à cause des travaux sur l'autoroute métropolitaine et qui est sûrement un grand soulagement aux problèmes de circulation sur l'autoroute métropolitaine puisque, dans les "parkings" de dissuasion de cette ligne de train, il y a 125 voitures en moyenne, chaque jour, qui se garent. Alors, on peut dire que le centre-ville et l'autoroute métropolitaine, à cause de ce train, qui est comme passé devant la face des gens de l'est pour une période temporaire de six mois, on s'évite 125 voitures, ce qui, à la grosseur de la métropole, est vraiment très peu.

Donc, M. le Président, à l'est de la rue Saint-Laurent, les gens, qui sont des contribuables, n'ont pas les transports en commun rapides qu'il y a vers l'ouest. Et je ne reproche pas à l'ouest de les avoir, je suis heureux qu'il les ait, mais il faudrait que les francophones de l'est aient une mesure d'égalité et il faudrait que les députés ministériels de l'est se manifestent à un moment donné et disent que les transports en commun, ça ne devrait pas exister que pour une partie de l'île de Montréal.

M. le Président, j'entends le ministre protester. Il y a deux lignes de trains de banlieue dans l'ouest, il n'y en a pas dans l'est! Il y a une quarantaine de stations de métro dans l'ouest de l'île de Montréal, il y en a à peine une quinzaine dans l'est. Je n'invente rien! Il y a une nomme politique qui a dit un jour que les faits sont têtus. Alors, ces faits-là sont têtus, et le ministre a un travail sérieux à faire. S'il veut donner des moyens de transport à l'est de Montréal, qu'il se compare un tant soit peu à ce qu'il y a dans l'ouest. Pourquoi y a-t-il un train entre Rigaud et le centre-ville, entre Deux-Montagnes et le centre-ville et qu'il n'y en a pas dans l'est? Qu'est-ce qu'on attend, sur la ligne de train qui est peu utilisée, qui est au sud de l'île de Montréal, en parallèle à la rue Notre-Dame, pour en faire une voie rapide pour les autobus, ce qui serait autrement moins coûteux qu'une ligne de train, alors que, pour Deux Montagnes, pour une population pas plus grande que celle de l'est, on est en train de dépenser 175 000 000 $, M. le Président?

Alors, moi, je ne suis pas de ces Québécois qui remercient ceux qui font qu'on est maltraités au plan du transport en commun, entre autres, et je pense, M. le Président, que ce qui est révélateur d'une mentalité - c'est un editorial récent du quotidien The Gazette qui le disait - c'est que, étant donné le train qui relie Repentigny à Ahuntsic et ville Saint-Laurent, la ligne numéro 7 de métro qui doit relier la station Pie IX, dans l'est, à Montréal-Nord, n'était plus nécessaire. Quand on connaît un peu la géographie de Montréal, M. le Président, dire que, vu qu'un train part de Repentigny, arrête dans Rivière-des-Prairies et joint le métro à Ahuntsic et ville Saint-Laurent au nord-est, ça rend inutile un métro entre l'intersection Pie-IX et Sherbrooke jusqu'à Montréal-Nord à travers les quartiers de Rosemont et ça desservirait aussi Anjou, Saint-Léornard et Montréal-Nord, il y a, là-dedans, l'esprit de dire que l'ouest de Montréal étant doté d'un métro souterrain ramifié - et c'est tant mieux, je n'ai rien contre le fait qu'il l'ait - l'est, qu'il s'arrange! (6 h 20)

M. le Président, ce gouvernement, à cet égard, doit porter le poids de ses promesses électorales. En 1985, on promettait d'allonger le métro vers l'est de Montréal. En 1989, on promettait de l'allonger plutôt à Laval, et il y a une électrice de mon comté de Pointe-aux-Trembles qui me résumait très bien la question, M. le Président, pendant la campagne électorale. Elle m'a dit: Nous, le métro, ils nous l'ont promis en 1985. On ne l'a pas eu et ils ne le promettent même plus en 1989. Laval va avoir le même processus: on leur promet en 1989, ils ne l'auront pas, puis on ne leur promettra même plus à l'élection d'après.

M. le Président, il faudrait que le gouvernement nous donne bientôt des indications. Est-ce que la modernisation, au coût de 175 000 000 $, du train Deux-Montagnes-centre-ville va être la seule chose faite en transport en commun et est-ce que l'est va être laissé pour compte encore une fois? Je pense que c'est des questions auxquelles on doit répondre, car le Conseil métropolitain de transport en commun doit relier ensemble tous les morceaux du "puzzle" du transport en commun dans la métropole du Québec.

M. le Président, je pense que ça a une

grande importance, parce que le transport en commun est important à la fois sur le plan économique et sur le plan social. Sur le plan social, parce que c'est fort étrange de voir que les parties de l'agglomération de Montréal où les revenus sont plus bas et les gens ont moins de mobilité et moins d'automobiles, sont moins bien desservis en transport en commun. Il y a là un illogisme auquel le gouvernement devrait mettre fin.

M. le Président, l'autre sujet d'inquiétude, évidemment, qu'on doit entretenir, c'est que des transports en commun efficaces, ça suppose des coûts très considérables. Or, le ministre devra nous dire, à un moment donné, où se situe le gouvernement. Est-ce qu'il a l'intention de se désengager comme il l'annonce dans son budget, ou est-ce que cet alignement-là a été changé? Autrement, on ne développera pas les transports en commun dans la métropole et sa ceinture. À cet égard, M. le Président, le gouvernement de l'Ontario, dans son dernier budget, a annoncé pour Toronto 5 000 000 000 $ d'investissements en transport en commun sur dix ans, soit 500 000 000 $ par année, alors qu'à Montréal le métro souterrain, on n'en parle pas, il n'y en a pas de ligne en construction actuellement. Les lignes retenues, la ligne 5 vers Montréal-Nord ou ville d'Anjou et la ligne 7 dans l'axe nord-sud à l'est, on ne sait pas trop quel sort on va subir.

En commission parlementaire, on avait dit que la modernisation du train de Deux-Monta-gnes-centre-ville se ferait en même temps que le métro dans l'est: pour la partie ouest, ça va bien; pour la partie est, il n'y a rien qui vient. Or, je pense, M. le Président, que ce serait important que le gouvernement nous fasse savoir bientôt ce qu'il a l'intention de consacrer comme ressource au transport en commun dans la métropole; autrement, on aura un Conseil métropolitain de transport en commun qui fera un travail indispensable à l'égard des titres de transport, des tarifs d'une région à l'autre, qui fera le travail de coordination qui s'impose aussi, et là-dessus, je pense que les autorités de Montréal, de Laval et de la rive sud ont manifesté une grande maturité en s'entendant sur un cadre pour organiser le transport en commun au plan régional de la grande région de Montréal. Mais, il reste du côté de Québec à savoir si cette concertation-là, qui est un des atouts de la métropole, qui rejoint les autres formes de concertation qu'on connaît entre les chambres de commerce, la ville de Montréal, les syndicats, pour trouver des moyens de relancer l'économie de la métropole, pour trouver les moyens de réduire les inégalités, si cette concertation en matière de transport en commun ne se buttera pas au même obstacle que la concertation chez les agents de développement économique, qui est l'indifférence inouïe du gouvernement du Québec au sort de la métropole.

M. le Président, je pense que c'est essen- tiel, parce que la métropole et sa ceinture forment vraiment l'ossature du Québec au plan économique et que si la métropole va, ça a des retombées pour l'ensemble du Québec. Si on laisse dépérir la métropole, je pense qu'on affaiblit l'ensemble du Québec.

Et, dans ce sens-là, M. le Président, on ne peut qu'espérer qu'au plan économique les projets avancent et qu'au plan du transport en commun, qui a un lien non seulement avec le social mais aussi avec l'économie, il y ait des investissements qui soient annoncés bientôt par le gouvernement et que les promesses qui ont été fartes soient tenues. Je reviens, M. le Président, à la relation est-ouest sur IHe de Montréal. Le métro n'est absolument pas développé et ramifié dans l'est. On prend une carte et on regarde le boulevard Saint-Michel et Honoré-Beaugrand, près du pont-tunnel, et ça entame à peine le territoire du bout de IHe de Montréal. Et ça, c'est une situation à corriger, M. le Président.

Dans l'est, on a eu plusieurs cadeaux des gouvernements qui se sont succédé à Québec. L'autoroute Métropolitaine, c'est la même réalité: la partie la plus monstrueuse de l'autoroute est dans l'est, en hauteur, ce qui divise les quartiers, ce qui pollue et qui est une source de sous-développement urbain alors qu'à l'ouest, on l'a faite en surface ou en tranchées. Et mon idée, M. le Président, n'est pas d'aucune manière de reprocher à l'ouest d'être bien et d'avoir des transports en commun acceptables. Le problème, M. le Président, c'est qu'on fait à peu près rien dans l'est. Et ça, je pense que ça doit changer et que la première chose à faire pour que ça change, c'est que la ligne de métro 7 promise soit faite. Elle a été promise à l'élection de 1985. Bien, faites-là à quelque part avant l'élection des années quatre-vingt-dix, la prochaine élection, et qu'on cesse de dire que parce que, temporairement, on a donné le train à l'est, parce qu'il y a des travaux de réfection de l'autoroute Métropolitaine, que le train de Repentigny rend inutile le lien nord-sud par un métro souterrain sous le boulevard Pie-IX.

Alors, M. le Président, je pense que le Conseil métropolitain de transport en commun est une chose très heureuse, qui va coordonner et peut donner de l'essor au transport en commun tant à Montréal qu'à Laval et sur la rive sud. Et ça méritait mieux qu'un appel, qu'une présentation en Chambre le 21, dans un Parlement qui doit terminer ses travaux à minuit le 22.

Mais on ne peut pas refaire le passé. Souhaitons, M. le Président, qu'on ait non seulement un instrument de planification, de coordination et de réalisation d'un meilleur transport pour la métropole et sa ceinture, mais que Québec se décide à mettre des ressources. Maintenant que l'ouest de l'île est bien desservi en transport en commun, passons à l'est.

Et je pense, M. le Président, que, de cette manière, on aura fait un pas en avant avec la

création du Conseil métropolitain de transport en commun. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Cannon): Merci, M. le député de Pointe-aux-Trembles. Mme la députée de Marie-Victorin.

Mme Cécile Vermette

Mme Vermette: M. le Président, bien sûr, nous avons un projet de loi et nous ne pouvons pas être contre la vertu, puisque ce projet de loi institue un Conseil métropolitain de transport, qu'il favorisera et facilitera les déplacements régionaux, et qu'il permettra d'établir de meilleurs tarifs au niveau des services de transport en commun.

Alors, M. le Président, bien sûr qu'au niveau du transport en commun nous avons eu une grande commission parlementaire en janvier 1989 où, déjà, on faisait état de la situation. Ils relevaient, en fait, plusieurs failles dans notre système de transport en commun, l'urgence et l'importance de se pencher sur cette problémati-que-ià et d'apporter des solutions adéquates pour permettre un meilleur service au niveau du transport en commun. (6 h 30)

Bien sûr, nous savons tous qu'un transport en commun peut avoir de la difficulté au niveau de sa rentabilité, puisque, par principe, c'est favoriser l'ensemble de la population qui utilise le service en commun. Et la notion de service en commun n'est pas nécessairement une question de rentabilité, mais davantage de favoriser le plus grand nombre possible de citoyens et de citoyennes qui doivent se déplacer par des moyens de transport à leur disposition qui facilitent leurs déplacements d'une région à une autre. On sait fort bien que la région métropolitaine de Montréal s'est de plus en plus étendue à ces différentes régions qui sont dans la ceinture de Montréal et, notamment, nous pouvons inclure maintenant, lorsque nous parlons du problème de transport en commun, les régions de la ville de Laval et les régions aussi de la rive sud de Montréal.

Moi, M. le Président, j'aimerais davantage parler du problème de transport de la rive sud de Montréal puisque j'appartiens à cette partie de la ville qu'on appelle la grande banlieue. Je peux vous dire à quel point le problème sur la rive sud de Montréal est vraiment important. Il faut trouver, actuellement, des solutions rapides pour faire en sorte que cette population soit bien servie par un transport en commun. Non pas que la compagnie de transport, la STRSM, ne fasse pas des efforts substantiels, ainsi que les différentes banlieues de la rive sud, pour permettre à leurs concitoyens de recevoir un service adéquat, mais nous devons toujours articuler ce service dans une interdépendance entre les différentes régions, ne seraient-ce que celle de Montréal et aussi la région de Laval.

Vous savez fort bien que maintenant, de plus en plus, les gens se déplacent rapidement, ont besoin, ne serait-ce que pour différents déplacements, pour leur travail, pour leurs études, utilisent le transport en commun. Et nous devrions de plus en plus faciliter ce mode de transport alors que nous avons énormément de problèmes à traverser les ponts de la rive sud de Montréal pour nous rendre dans la grande région métropolitaine. Il faut vivre ce cauchemar de la rive sud pour savoir à quel point, maintenant, de plus en plus, est difficile pour la population de la rive sud, le transport au niveau routier, lorsqu'on regarde à tous les matins les longues files qui sont aux abords de nos ponts et à quel point il serait essentiel de développer un transport en commun plus adéquat et qui favorise un plus grand étalement de la circulation.

Nous avons longtemps parlé de la gestion de la circulation sur la rive sud. Nous avons dit à quel point il était important de trouver des solutions pour faire en sorte que cette circulation soit mieux répartie que ces bouchons que l'on retrouve à l'entrée des ponts, que l'on retrouve sur tous les différents ponts, autant le pont Jacques-Cartier, le pont Champlain et le pont dans la région de Châteauguay... Toute cette circulation est dense, lente et fait en sorte que bon nombre de nos concitoyens ont de la difficulté à se rendre à leur travail et, dans plusieurs cas aussi, décourage certains à venir s'installer dans les différentes régions. Plus souvent qu'autrement, maintenant, certaines grandes compagnies songent à délaisser le centre urbain de Montréal pour installer leur siège social plus spécifiquement dans les différentes banlieues justement à cause de ce problème de circulation sur nos ponts.

Donc, M. le Président, il serait souhaitable, en fait, de reprendre les travaux de la commission parlementaire en ce qui concerne le transport en commun sur l'ensemble du Grand Montréal, y incluant la rive sud. Nous savons fort bien qu'à ce moment-là le gouvernement avait projeté, en fait, le prolongement du réseau dans sa grande ceinture en incluant aussi le prolongement de la ligne de métro 5 à Anjou et la construction d'une ligne de métro 7, de la ligne 1 à Montréal-Nord. Tout ça, M. le Président, devait se faire dans un développement sur une période de treize ans. Aussi, on devait, en même temps, entreprendre la modernisation des trains vers la région de Deux-Montagnes. Alors, tout ça devait être favorisé dans une harmonisation entre les engagements financiers du gouvernement et les municipalités. Mais voilà qu'on se rend compte que ce n'étaient que de bons voeux pieux de la part de ce gouvernement puisqu'on refile maintenant cette responsabilité aux municipalités. On leur a fait miroiter une possibilité de développement et, une fois que tout le monde est sur son appétit et qu'on a fait miroiter la possibilité d'améliorer substantiellement ce réseau de

transport en commun, on leur refile une responsabilité sans trop savoir, maintenant, comment elles arriveront à atteindre leurs objectifs.

Le Conseil qu'on vient de créer, le Conseil qu'on veut instituer, le Conseil métropolitain de transport en commun veut respecter l'autonomie des sociétés de transport locales. Alors, est-ce que ce Conseil, qui est naissant, aura la capacité et les pouvoirs nécessaires pour prendre les décisions essentielles au bon fonctionnement du transport en commun à Montréal? Et pour ce, M. le Président, il faut voir à ce que, justement, cette autonomie soit préservée et que le gouvernement puisse faire en sorte que ce Conseil puisse non pas avoir des préoccupations d'ordre financier à long terme sur le plan de sa survie, puisque l'article 71 stipule que l'engagement financier du gouvernement prend fin le 31 décembre 1994.

Qu'arrivera-t-il après cette échéance? Est-ce qu'encore une fois on sera devant absolument plus rien? Est-ce que ce n'est déjà pas un bébé mort-né si on ne lui donne pas la possibilité et la chance de compter sur un financement adéquat, un financement qui permettra de penser à des réalisations à long terme? Lorsqu'on parle de transport en commun de cet ordre de grandeur, bien sûr, tout ça doit s'étaler sur une longue période, une période tout de même qui permettrait d'envisager hors de tout doute et sans problème financier l'avenir du système du réseau routier à Montréal et dans les différentes régions de Montréal, incluant la rive sud et incluant la ville de Laval.

Au niveau des différents équipements de transport dits interrégionaux, en fait, il pourrait regarder tout ça dans son ensemble. Est-ce que ces équipements, la définition qu'on en fait, est-ce que c'est adéquat et satisfaisant, assez clair pour tous les intéressés? Il reste encore beaucoup de questions en suspens, et je pense que nous devrions nous pencher davantage et permettre au ministre d'apporter certains éclaircissements pour faire en sorte qu'il n'y ait pas de confusion et que tout le monde ait le même langage puisqu'il s'agira d'une concertation à établir, d'une coordination au niveau aussi de l'ensemble des décisions qui devront être prises, qui concernent autant les différentes régions que nous avons mentionnées plus haut.

Donc, M. le Président, bien sûr, c'est un pas dans la bonne direction. Le Conseil métropolitain de transport en commun, bien sûr, répond à des aspirations maintes fois formulées par les intéressés, mais faut-il encore donner des moyens de viabilité à ce Conseil et faire en sorte qu'il ait les meilleures chances de succès escompté, qu'il favorise aussi les transports interrégionaux et qu'il favorise l'ensemble de la population par des cotisations au niveau de la CAM, les cartes qu'on appelle les cartes de transport mensuelles, et qu'on n'en vienne pas à être obligés de payer des prix exorbitants.

Je pense, M. le Président, que la nouvelle tendance, lorsque le gouvernement se désengage au niveau du transport en commun, notamment au niveau du transport de la CUM, on peut s'apercevoir qu'en fait il y a beaucoup d'interrogations pour savoir si vraiment le gouvernement est prêt à s'engager à donner un service de qualité pour tous ces citoyens qui doivent utiliser ce transport en commun? Où met-il ses priorités puisque le gouvernement, en fait, a versé une contribution de 207 000 000 $ pour les dépenses d'opération de la STCUM? Cette contribution représente près de 29 % des dépenses totales de la Société qui se sont élevées, la même année, à 726 000 000 $. (6 h 40)

Le projet du gouvernement de transférer aux municipalités l'entière responsabilité financière du fonctionnement des systèmes de transport en commun, tel qu'annoncé lors du discours sur le budget, aura des conséquences excessivement grandes sur l'avenir du transport en commun à Montréal et au Québec. En fait, on doit s'attendre qu'une contribution substantielle soit demandée aux usagers pour permettre, encore une fois, un service de qualité au niveau du transport en commun. Et, M. le Président, je trouve ça inacceptable pour l'ensemble de ces usagers qui doivent espérer un service de qualité parce que ces mêmes usagers sont des payeurs de taxes, ce sont des gens qui n'ont pas le choix de prendre d'autres moyens que les services en commun et qui peuvent se permettre, par l'utilisation de ces services en commun, d'espérer un service de meilleure qualité. Vous savez, dans le transport en commun, plus les gens utilisent ce transport en commun, plus ils favorisent la survie du transport en commun et un service de qualité.

Donc, il faut encourager les usagers à prendre le service du transport en commun, à utiliser le métro, les autobus et les trains de banlieue davantage qu'ils ne le font à l'heure actuelle. Parce qu'on s'aperçoit, bien que beaucoup d'usagers utilisent leur automobile, qu'il n'y a qu'un usager à l'intérieur de l'automobile et qu'il serait favorable, en tout cas davantage, de permettre, par des campagnes de sensibilisation, l'utilisation du transport en commun beaucoup plus que nous ne le faisons à l'heure actuelle. Mais pour ça, il ne faut pas les décourager en leur demandant un prix exorbitant pour le billet du transport en commun et, aussi, il faut peut-être que le gouvernement favorise les sociétés de transport, par des contributions financières beaucoup plus qu'il ne le fait à l'heure actuelle. Et plutôt que de se désengager dans le transport en commun, il devrait favoriser davantage l'implication du gouvernement pour faire en sorte que l'ensemble des usagers puisse espérer, puisse escompter, en fait, un prix raisonnable en ce qui concerne la dépense au moment de l'achat de la carte ou d'un billet

pour prendre ou utiliser ces différents modes de transport offerts par le service...

M. Garon: M. le Président, je m'excuse, mais je trouve ça...

Le Vice-Président (M. Cannon): M. le député de Lévis, sur une question de règlement, je présume?

M. Garon: II est 6 h 40. Si on veut nous faire siéger jusqu'à cette heure-là, il faudrait au moins qu'il y ait le quorum dans l'Assemblée, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Cannon): Effectivement, je constate qu'il n'y a pas quorum. Donc, qu'on appelle les députés, je vous prie.

Effectivement, Mme la députée, vous pouvez poursuivre.

Mme Vermette: Oui, M. le Président. On s'aperçoit, M. le Président, et je comprends l'heure tardive à laquelle nous devons, ici, en cette Chambre, se pencher sur les différents projets de loi et si je souligne cette heure tardive... Je comprends fort bien que le gouvernement, à l'heure actuelle, a choisi de légiférer durant la nuit plutôt que durant le jour pour des raisons qui lui appartiennent parce que, vous save2, lorsqu'on est au gouvernement, il appartient au gouvernement d'appeler ses propres lois et de voir à la gestion, à l'adoption de ses différentes lois.

Quant à nous, du côté de l'Opposition, nous devons, en fait, favoriser les intérêts de l'ensemble de la population et c'est notre... Quant à nous, c'est notre rôle, un de nos principaux rôles, de soulever, en fait, toutes les actions prises par le gouvernement qui pourraient causer un préjudice à l'ensemble de nos concitoyens et concitoyennes au niveau du Québec. Et notamment, M. le Président, au niveau... Je parlais, du transport en commun. Je parlais aussi, M. le Président, de la facturation, en fait, au niveau du transport en commun, surtout pour le contribuable. Bien sûr, qui devra payer la note si le gouvernement se désengage de plus en plus de ses responsabilités versus le transport en commun? Bien sûr, on devra se retourner une fois de plus vers les usagers que je considère déjà comme étant lourdement taxés à l'heure actuelle par toutes formes de taxes indirectes.

Nous avons vu, encore une fois, au niveau de la loi que nous avons passée, la loi 50, il n'y a pas si longtemps, sur laquelle on s'est penchés, que c'est une loi qui touchait encore le transport, où on allait siphonner, en fait, la caisse de l'assurance automobile qui est, en fin de compte, une contribution volontaire, vous me direz, de tous les automobilistes qui participent à ce régime. Mais, encore une fois, le gouvernement va siphonner dans cette caisse-là pour la gestion courante, en fart, des dépenses du gouvernement. Mais, encore faut-il se le rappeler, M. le Président, c'est toujours l'usager qui fait les frais de toute cette pratique gouvernementale, à l'heure actuelle. Je trouve inadmissible qu'un gouvernement n'ait pas plus le respect de ses concitoyens et concitoyennes et qu'il aille continuellement gruger dans leur portefeuille. L'incapacité de ce gouvernement à administrer les impôts et les taxes de nos contribuables, et ce, de plus en plus...

M. le Président, c'est vrai que ce projet de loi permettra à l'ensemble des municipalités de travailler dans un esprit de concertation à améliorer le système de transport en commun au niveau de la qualité du service pour favoriser les déplacements des usagers interrégionaux et aussi pour établir un tarif qui nous semble, en tout cas, et qui permettra aux gens d'avoir une uniformité au niveau des différents modes, une uniformité au niveau du coût, du prix, en fait, du transport en commun. Mais, faut-il encore le rappeler, M. le Président, il faut assurer à ce Conseil un avenir viable et, pour lui assurer cet avenir viable, ce n'est sûrement pas tel que stipulé par l'article 71, alors que le gouvernement, après le 31 décembre 1994, ne donnera plus de financement à l'organisme. En fait, ce n'est pas clair. Il faudra que le ministre nous apporte des éclaircissements pour le mieux-être et pour, en fait, l'intérêt de l'ensemble des usagers au niveau du transport en commun. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Cannon): Merci, Mme la députée de Marie-Victorin. Est-ce qu'il y a d'autres intervenants sur le projet de loi? M. le ministre, pour l'exercice de votre droit de réplique.

M. Sam L Elkas (réplique)

M. Elkas: M. le Président, brièvement, j'aimerais remercier les membres de l'Opposition de leur appui dans ce projet de loi. Comme vous le savez, l'intérêt est le même, soit chez nous ou chez vous. On a toujours démontré du sérieux dans la promotion du transport en commun dans la région de Montréal et on sait tous que c'est une chose qui nous préoccupe, le fait que... Ce n'est pas un mystère qu'on est pris à regarder de jour en jour les ponts remplis de trafic avec les automobilistes qui refusent de prendre le transport en commun. On s'interroge, à savoir pourquoi ifs ne le prennent pas.

Il est évident que ce sont des choses qui vont nous coûter assez cher à gérer, vu que le transport en commun ne semble pas être l'alternative que ces gens désirent. Par contre, c'est le défi qu'on regarde et on espère le rencontrer. Il est faux de penser que le gouvernement, de ce côté, n'est pas intéressé à avoir les services offerts dans l'est de 111e. Des montants d'argent

assez importants ont été déposés dernièrement par le Conseil des ministres, à savoir qu'on est pour faire des études pour le prolongement des lignes de métro dans l'est de Montréal. (6 h 50)

Quant aux trains de banlieue, il est important de prendre avantage des services ou infrastructures qui sont déjà en place. Le train de Rigaud est un service qui a été protégé d'ailleurs par le gouvernement opposant en 1981, après de grandes batailles. La ligne de Deux-Montagnes, on comprend aussi que c'est un service qui va être abandonné si le gouvernement n'agit pas. On parie de 22 000 passagers par jour, qui est un nombre assez important à transporter, ces 22 000 personnes, les mettre dans les automobiles, ce n'est pas nécessairement la réponse.

Pour la rive sud, nous avons des plans assez importants, assez intéressants aussi, parce que nous sommes en train de faire des études sur le projet Estacade. Quant au train de Châ-teauguay, le gouvernement est en train aussi de négocier avec Conrail pour nous permettre de transporter les gens de Châteauguay à Montréal. La ligne de Pointe-aux-Trembles qu'on a dernièrement instaurée est un exemple de bonne volonté de notre part. Alors, oui, on croit fermement que les municipalités de la rive sud, Laval et Montréal, devraient agir et planifier leur avenir dans le transport en commun. Voici, on leur donne un outil et un outil qui sera précieux pour ces gens-là. Ça va permettre d'agir ensemble au lieu d'être divisé sur bien des sujets.

Alors, M. le Président, je remercie encore les membres de la Chambre pour l'appui qu'on a et je propose l'adoption du principe du projet de loi 67 sur le Conseil métropolitain de transport en commun.

Le Vice-Président (M. Cannon): Merci, M. le ministre. Est-ce que la motion proposant l'adoption du principe du projet de loi 67, Loi sur le Conseil métropolitain de transport en commun et modifiant diverses dispositions législatives, est adoptée? M. le whip.

M. Brassard: Pour démontrer notre bon esprit de collaboration, nous allons adopter le projet de loi.

Le Vice-Président (M. Cannon): Donc, ce projet est adopté. M. le leader substitut et ministre de l'Environnement.

Renvoi à la commission de l'aménagement et des équipements

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, M. le Président. Je fais motion dans les circonstances pour que ledit projet de loi soit déféré à la commission de l'aménagement et des équipements pour étude détaillée.

Le Vice-Président (M. Cannon): Est-ce que cette motion est adoptée?

M. Brassard: Adopté.

Le Vice-Président (M. Cannon): Adopté. M. le leader par interim du gouvernement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, M. le Président. Je vous demanderais d'appeler l'article 12 du feuilleton.

Projet de loi 65 Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Cannon): À l'article 12 du feuilleton, M. le ministre de l'Environnement propose l'adoption du principe du projet de loi 65, Loi modifiant la Loi sur la qualité de l'environnement. Alors, M. le ministre, vous avez la parole.

M. Pierre Paradis

M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, aujourd'hui, l'Assemblée nationale du Québec est appelée à discuter des principes du projet de loi 65, Loi modifiant la Loi sur la qualité de l'environnement. Vous n'êtes pas sans savoir, M. le Président, les nombreux problèmes existant en matière de sol contaminé, problèmes qui sont davantage connus de la population depuis quelques années. Pour solutionner ces problèmes de terrains contaminés, l'application du principe du pollueur-payeur nous apparaît incontestablement la solution la plus appropriée. D'ailleurs, je vous rappellerai, M. le Président, que le Parti libéral du Québec s'était engagé, lors de la dernière campagne électorale, à mettre en application le principe du pollueur-payeur. permettez-moi, tout d'abord, d'expliquer brièvement l'origine du principe et de situer le contexte historique de ce projet de loi avant d'en aborder le contenu proprement dit. depuis le début du siècle, surtout durant sa première moitié, le québec a connu un essor industriel marqué qui s'est traduit par des effets positifs sur l'économie, mais qui a eu en même temps des conséquences sur notre environnement. au fil des ans, le québec a connu des fermetures d'entreprises et l'arrêt d'activités industrielles, soit en raison de conditions économiques moins propices 4>u encore, en raison du vieillissement des industries. le québec s'est ainsi retrouvé, principalement dans la région de montréal, avec des terrains industriels vacants qui constituaient bien souvent un attrait pour les promoteurs immobiliers désireux d'y construire des complexes résidentiels, commerciaux et même industriels. cependant, on découvrait en même temps que

dans bien des cas, il devenait impossible de réutiliser ces mêmes terrains à d'autres fins, en raison de la contamination de ceux-ci, à la suite de rejets liés aux opérations journalières, de déversements accidentels ou encore d'enfouissement de substances dangereuses. On devenait également confrontés à la quasi-impossibilité d'obliger les propriétaires antérieurs à décontaminer les terrains pour les remettre dans leur état initial pour divers motifs, telles la faillite, la dissolution de compagnie et l'absence de moyens légaux. Ainsi, des dizaines de terrains contaminés demeurent, encore aujourd'hui, inutilisables et la liste de ceux-ci s'allonge continuellement.

Par ailleurs, nous avons su apporter certaines améliorations quant à la gestion des substances dangereuses. Notamment l'adoption de la Loi sur la qualité de l'environnement en 1972 a permis de délimiter le cadre légal des interventions du ministère de l'Environnement du Québec en matière de terrains contaminés. Cette pièce législative accorde des pouvoirs au ministère, lui permettant d'intervenir sur des terrains contaminés, lors de situations particulières. L'article 25 de cette loi, M. le Président, que vous connaissez bien, permet ainsi au ministre d'ordonner aux responsables de la source de contamination de cesser définitivement ou temporairement ou de limiter, selon les conditions qu'il impose, l'émission, le dépôt, le dégagement ou le rejet de ce contaminant.

D'autre part, en vertu des pouvoirs accordés dans cette loi, le ministre ne peut ordonner aux propriétaires de terrains contaminés de décontaminer ceux-ci que lorsque la situation est considérée comme étant urgente et que le ministre démontre que cela a été fait accidentellement ou contrairement aux dispositions de la présente loi ou des règlements du gouvernement. Par la suite, le ministère de l'Environnement du Québec a élaboré une politique de réhabilitation des terrains contaminés afin de déterminer les orientations quant à la réutilisation sécuritaire de ces terrains. Publiée en avril 1988, cette politique mise essentiellement sur la bonne volonté des propriétaires de ces terrains de se conformer aux orientations du ministère dans ce domaine.

Les objectifs de cette politique de réhabilitation, et je vous les rappelle, M. le Président, se résument comme suit: Premièrement, empêcher que l'utilisation de terrains contaminés ne s'effectue au détriment de la santé, de l'environnement et des biens; deuxièmement, favoriser la récupération des ressources en permettant et en rendant possible le réemploi des terrains contaminés, dans la mesure où le niveau de décontamination atteint est sécuritaire, et pour les usagers et pour l'environnement; troisièmement, s'assurer que les sols contaminés seront gérés de façon adéquate.

Bref, nous devons admettre que la politique de réhabilitation des terrains contaminés ne donne que des orientations en matière de réemploi de sols contaminés, sans obligation pour les propriétaires de ces terrains de s'y conformer. D'autre part, signalons qu'une entente fédérale-provinciale sur les sites orphelins a été conclue en octobre 1989. Cette entente porte notamment sur l'assainissement des lieux contaminés orphelins à risque élevé.

Le fait que les médias ait fortement fait état de contamination de terrains existants, par exemple à Murdochville et à Val-d'Or, à Saint-Jean-sur-Richelieu, à Duparquet et, plus récemment, dans une partie de l'est de Montréal, ces faits donc rendus publics ont entraîné une prise de conscience collective de notre héritage en matière de contamination de terrains. Ceci a permis, notamment, une sensibilisation accrue aux limites de notre pouvoir législatif quant à la capacité d'ordonner aux responsables de la contamination de ramasser, enlever, recueillir ou de neutraliser le contaminant et de décontaminer ou restaurer l'environnement.

D'autre part, lorsque le projet de loi 65 a été déposé à l'Assemblée nationale en mai dernier, j'avais indiqué que peu de pays occidentaux disposaient d'une telle structure législative, quelques rares pays ayant adopté une législation visant à se protéger contre la contamination des sols. Ainsi, nous rappellerons brièvement que des mesures législatives ont été adoptées aux États-Unis, dans l'État du New Jersey en 1984, permettant au gouvernement de cet État d'intervenir auprès des industries susceptibles de contaminer les sols. En vertu de cette loi, 'The Environmental Cleaning Responsibility Act", les industries doivent caractériser leurs terrains. (7 heures)

Par le fait même, les résultats obtenus sont comparés à des critère préétablis et, lorsqu'il y a présence de contaminants à des concentrations excédant le niveau naturel, il peut devenir nécessaire de procéder à des travaux de restauration. De même, les Pays-Bas ont adopté, en 1983, une loi sur la décontamination des sols, qui oblige tout promoteur à caractériser le sol et l'eau souterraine avant toute correction et/ou réutilisation du sol. Depuis janvier 1988, les entreprises doivent également caractériser les terrains avant de s'y installer et effectuer une nouvelle caractérisation au moment où elles désirent modifier ou vendre leurs installations, afin de vérifier si les terrains sont dans le même état qu'au moment de l'acquisition. Dans la négative, les entreprises doivent réaliser les travaux de decontamination.

Dans ce même ordre d'idées, M. le Président, mentionnons que d'autres pays européens réfléchissent actuellement sur la possibilité d'adopter des législations similaires. Il est important de noter que la France, la Belgique et la République fédérale d'Allemagne sont déjà à l'avant-garde au niveau de la politique de gestion

des déchets. D'ici peu, il est à prévoir que ces trois États européens disposeront d'outils législatifs et réglementaires dans le domaine de la gestion des sols comtaminés. Nous pouvons d'ores et déjà remarquer que le Québec sera la première province canadienne à se munir d'outils législatifs et réglementaires dans le domaine de la décontamination des sols pollués, si l'Assemblée nationale consent à l'adoption du présent projet de loi. D'ailleurs, ce projet de loi nous permettra de corriger, entre autres, la situation qui prévaut actuellement, et qui consiste à transférer des coûts de décontamination des terrains à l'ensemble de la société. Il s'agit non seulement d'éviter que la décontamination et la restauration fassent les frais de l'ensemble de la population, mais que les pollueurs assument systématiquement leurs responsabilités en matière de décontamination des sols. Inutile de rappeler les malheureux exemples que l'on connaît actuellement au Québec.

Il nous apparaît légitime que le ministère de l'Environnement assume, du même coup, un leadership dans la mise en place de jalons administratifs requis pour appliquer le principe pollueur-payeur. C'est dans cet esprit, M. le Président, que nous avons déposé, le 10 mai dernier, à l'Assemblée nationale du Québec, le projet de loi 65. Dans ce même ordre d'idées, plusieurs intervenants que nous avons entendus lors de notre commission parlementaire, les 5, 6 et 7 juin dernier, ont exprimé clairement leur accord au principe même pollueur-payeur; 15 organismes ont eu alors l'occasion de se faire entendre et contribuer ainsi à la bonification du texte législatif. Ainsi, nous voulons corriger, par ce projet de loi, deux lacunes dans la législation actuelle: soit de nous permettre d'agir plus efficacement et de renforcer l'application du principe pollueur-payeur. En effet, l'objet du projet de loi est donc de s'assurer que toute contamination de l'environnement puisse conduire, lorsqu'elle dépasse certains niveaux, à une intervention du ministre en vue d'exiger du pollueur une étude de caractérisation, et une décontamination des sols et des eaux souterraines polluées. Il nous apparaît tout à fait justifié que celui qui est à l'origine de la contamination soit tenu responsable de la décontamination.

Actuellement, comme je l'indiquais précédemment, la Loi sur la qualité de l'environnement ne permet pas au ministre d'ordonner la décontamination, sauf en cas d'urgence, ou à moins de faire la preuve d'une contamination de terrains adjacents. Ainsi, cette absence de pouvoir d'ordonnance restreint le champ d'intervention du ministre dans ce domaine, ce qui limite considérablement l'application du principe pollueur-payeur que nous retrouvons à l'intérieur du projet de loi 65. Il s'agit, dans les faits, de corriger la situation qui prévaut actuellement et qui consiste à transférer les coûts de la décontamination des terrains à l'ensemble de la population du Québec. En adoptant le projet de loi 65, l'Assemblée nationale du Québec donnerait au ministre de l'Environnement les moyens légaux nécessaires pour lui permettre de s'assurer que le responsable d'une contamination soit tenu de décontaminer l'environnement qu'il a pollué. Sans nécessairement entrer dans les dédales juridiques, notons que ces moyens légaux auront des impacts importants, tant au chapitre de la prévention de la contamination des sols qu'aux fins d'assurer au ministre de l'Environnement la possibilité d'aller chercher les fonds nécessaires à la décontamination et à la restauration des terrains pollués. Par le fait même, la société québécoise n'aurait plus à assumer systématiquement la décontamination des sols pollués par une entreprise comme c'est le cas, actuellement, à Saint-Jean-sur-Richelieu, où le gouvernement vient d'autoriser une dépense de 3 100 000 $ pour procéder aux activités de restauration des propriétés privées et publiques situées à proximité des terrains de la compagnie Balmet Canada inc.

Aussi le ministre de l'Environnement pourra, en vertu de nouveaux pouvoirs d'ordonnance contenus dans le projet de loi, obtenir le rang de créancier privilégié sur les biens meubles et immeubles de tout contrevenant à une ordonnance de décontamination des sols. Les mesures législatives et réglementaires que nous préconisons auraient par ailleurs des effets bénéfiques quant à la bonne gestion des substances dangereuses par les entreprises, en leur rappelant que le gouvernement pourrait exiger une décontamination advenant la découverte de la présence de contaminants sur leur terrain et sur les terrains avoisinants. En fait, ces effets, loin d'être négligeables, permettraient de conscien-tiser les entreprises à cet état de fait et ainsi d'éviter que se répètent les erreurs commises dans le passé.

Cette pièce législative, M. le Président, vise ainsi à fournir au ministre de l'Environnement les pouvoirs nécessaires pour éviter que certaines situations que nous avons connues récemment ne se reproduisent. En lui permettant d'agir au moment où il constate la présence de contaminants dans l'environnement, le projet de loi permettra de renforcer l'application du principe "pollueur-payeur". Si nous voulons nous assurer que le responsable de la contamination défraie seul les coûts de la décontamination et si nous voulons encourager les entreprises à gérer adéquatement leurs rejets dans l'environnement, ce projet de loi devient une nécessité. L'époque où l'on assistait, impuissants, au démantèlement de complexes industriels, abandonnant du même coup de vastes terrains contaminés, deviendrait alors révolue. En somme, le projet de loi 65 a été élaboré dans le but de doter le ministère des outils légaux et réglementaires lui permettant de remplir son mandat de façon plus adéquate et plus efficace qu'il ne le fait actuellement.

Les nombreuses situations auxquelles il a dû

faire face depuis le milieu des années quatre-vingt ont contribué à préciser les besoins du ministère en matière de pouvoir législatif et réglementaire. Devant les différentes expériences trop souvent décevantes que nous avons vécues dans le passé, nous avons à faire face à deux situations dans des cas de contamination des sols. Dans un premier cas, l'entreprise responsable de la contamination est toujours en opération et facilement identifiable. Dans un deuxième cas, la source de contamination est difficile à identifier, l'entreprise ayant cessé ses activités. Ces expériences passées nous ont amenés à proposer des orientations et des mesures législatives permettant d'apporter les correctifs nécessaires en matière de contamination des sols. Ainsi, lorsque le responsable de la contamination est identifiable, nous désirons donner au ministre de l'Environnement des pouvoirs lui permettant d'ordonner la décontamination de l'environnement, lorsque la situation le commande. Des dispositions très claires sont présentes dans le projet de loi afin de pouvoir exiger la decontamination de l'environnement par celui ou celle qui l'a contaminé. En vertu des principes énoncés dans le projet de loi, le ministre aura le pouvoir d'ordonner au responsable de la contamination la caractérisation puis la décontamination de l'environnement, lorsque le niveau de contamination le commandera.

L'approbation du projet de loi aurait ainsi pour effet d'éviter qu'une entreprise qui a contaminé son terrain puisse, sous prétexte qu'il n'y a pas d'urgence, ne procéder à aucun des travaux correctifs. Dans le passé, plusieurs exemples abondent en ce sens. (7 h 10)

D'autre part, le projet de loi 65 prévoit une certaine souplesse quant aux mesures que nous pourrions ordonner aux propriétaires de terrains contaminés alors qu'ils n'ont pas été responsables de ladite contamination. À titre d'exemple, nous n'avons qu'à penser aux très grands nombres de terrains qui ont été contaminés dans le passé par des entreprises ayant cessé leurs activités. Ces terrains, localisés principalement dans les régions urbaines, sont habituellement la propriété de personnes ou de municipalités et assurent un bon potentiel de réutilisation à des fins résidentielles, commerciales ou autres. Par ailleurs, on peut penser aux propriétaires de terrains qui ne sont pas nécessairement informés des activités qui se sont déroulées dans le passé sur ces terrains et qui ignorent probablement le degré de contamination de ceux-ci. Dans ces cas, nous devions nous assurer qu'aucune réutilisation de ces terrains ne se fasse sans une décontamination préalable, de manière à éviter que la présence de contamination ne puisse porter atteinte à la santé publique. À cet effet, nous proposons deux mesures dans le projet de loi 65, mesures qui s'adressent aux propriétaires de sols contaminés sans qu'ils aient été responsables de la con- tamination.

La première de ces mesures, le ministre peut signifier au propriétaire un avis l'informant que son terrain est contaminé au-delà d'un certain niveau et cet avis est inscrit au bureau d'enregistrement. Seconde mesure, le ministre exige, de la part du propriétaire d'un terrain contaminé, une demande d'autorisation avant que celui-ci ne procède à une modification d'usage de son terrain. Pour ce qui est de l'entreprise qui démantèle ses installations, des dispositions sont également prévues dans le projet de loi 65 afin de soumettre le démantèlement à diverses exigences lorsqu'il concerne certaines activités reconnues comme polluantes pour les sols. Ainsi, le propriétaire du terrain devra obtenir l'autorisation du ministre avant de procéder au démantèlement. Nous pourrons alors nous assurer que le démantèlement d'équipements et de bâtiments sera accompagné d'une caractérisation et, éventuellement, d'une décontamination du terrain. Le principe pollueur-payeur sera donc appliqué en intervenant dès le démantèlement, évitant que le terrain demeure contaminé par la suite.

Une entreprise qui aura contaminé son terrain, suite à ses activités, sera donc obligée de le décontaminer, alors qu'actuellement de grandes entreprises ont fermé leurs portes sans avoir complété, malheureusement, la décontamination de leur terrain. D'autre part, le ministère de l'Environnement pourra obtenir le rang de créancier privilégié sur les biens meubles et immeubles de tout contrevenant à une ordonnance de décontamination des sols grâce à des nouveaux pouvoirs d'ordonnance contenus dans le projet de loi 65. Il est prévu que les sanctions seront plus élevées dans le cas de non-respect par une entreprise d'une ordonnance ministérielle pour les infractions subséquentes à la première.

En terminant, M. le Président, je rappellerai que l'ensemble des dispositions législatives réglementaires aura pour effet, du moins, c'est l'objectif que nous nous fixons, de renforcer l'application du principe pollueur-payeur dans la décontamination des sols pollués. Alors qu'il y a des intervenants, dont le président de l'Association des manufacturiers canadiens, qui osent encore prétendre et déclarer publiquement, en pariant du projet de loi 65, que la protection de l'environnement constitue un objectif social pour lequel il est impossible de ne pas accorder son support, mais qui ajoute, du même souffle, que personne n'est mort sur un coin de rue au Québec, je répliquerai au porte-parole, M. Richard Le Hir, en rappelant que nous sommes d'avis que le projet de loi 65 s'avère nécessaire et utile, car des gestes sont attendus depuis déjà trop longtemps. Par exemple, à Saint-Jean-sur-Richelieu, il y a des enfants avec un taux de plombémie élevé dans le sang.

Enfin, je peux vous assurer que cette pièce législative constitue une étape importante afin de doter le Québec d'outils préventifs et sécuritaires

en matière de protection de l'environnement. De plus, le principe pollueur-payeur contenu et renforcé par le projet de loi a été appuyé par les divers intervenants tout dernièrement en commission parlementaire. Je sollicite maintenant l'appui de tous les membres de cette Assemblée nationale. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Cannon): Merci, M. le ministre de l'Environnement. M. le député de La Prairie.

M. Denis Lazure

M. Lazure: Merci, M. le Président. Enfin, le ministre de l'Environnement appelle la discussion sur son projet de loi. Enfin! Il laissait planer le doute dans l'esprit des journalistes depuis quelques jours que peut-être son fameux projet de loi pollueur-payeur ne serait pas adopté parce que, peut-être, le Parti québécois s'opposerait. Je pense que le ministre a généralement des performances qui se situent à un niveau plus élevé que ça. J'ai été très déçu hier d'entendre les journalistes me raconter ce que le ministre leur a raconté depuis quelques jours. Alors, qu'il soit bien clair tout de suite que le Parti québécois appuie ce projet de loi, que le Parti québécois a toujours été d'avis que le pollueur devait payer pour les pots cassés.

Alors, je ne peux que blâmer sévèrement le ministre pour le retard qu'il apporte à commencer sa discussion du projet de loi, à peine 48 heures, moins de 48 heures avant la fin des travaux de la session. Ce n'est pas sérieux, moins de 48 heures, le jeudi matin 21 juin, à 7 h 15, alors que le projet est déposé depuis plus d'un mois. Non seulement on peut s'interroger sur la volonté politique du ministre de voir son projet adopté avant la fin de la session, mais on peut s'interroger aussi sur les dissensions qui existent au sein du Conseil des ministres, dissensions qui ne sont pas nouvelles. On l'a vu il y a quelque temps, lorsque le ministre de l'Industrie et du Commerce a avoué finalement que, oui, les gens qu'il défend, notamment le Conseil du patronat, s'opposaient à plusieurs choses émanant du ministère de l'Environnement. Par exemple, ils s'opposaient à ce que le Bureau d'audiences publiques, à la demande du ministre - ce que la loi lui permet de faire, ce que la loi lui permet de faire, je le répète, même si, à tout bout de champ, le ministre dit: Oh! la loi est incomplète, la loi a des trous, (a loi n'est pas assez forte... La loi actuelle lui permet de demander des audiences publiques sur n'importe quel projet. Mais on sait fort bien que, s'il n'y a pas d'audiences publiques sur les grands projets industriels de 1 000 000 000 $ et plus, c'est parce que le Conseil du patronat ne veut pas qu'il y en ait. Et le ministre, depuis quelque temps, nous dit: Bon, là, écoutez, je pense que nos chicanes internes sont finies au Conseil des ministres, mais il faut que je discute avec mon collègue de l'Ontario. M. le Président, on est alors un peu à la merci du bon vouloir du ministre de l'Environnement de l'Ontario.

Mais je reviens au projet de loi. Le ministre nous avait dit, en novembre dernier, au moment de la mini-session qui a suivi l'élection: Je vais présenter, durant la session - m'avait-il dit et avait-il dit aux journalistes, c'est-à-dire la session de novembre et décembre - un projet de loi qui va permettre au gouvernement, à mon ministère, d'intervenir à la Balmet, par exemple, ou dans d'autres situations semblables; c'est ça qu'il nous avait dit. M. le Président, la session s'est terminée, pas de projet de loi. Et on arrive à la session du printemps, ça traîne, ça traîne. Et, en bout de piste, à la mi-mai, le ministre dépose enfin son projet de loi. À la demande de l'Opposition, il a accepté - je dois le reconnaître, il a bien collaboré - que la commission parlementaire de l'aménagement et des équipements rencontre un certain nombre de groupes, d'individus, pour consultation. Et là, on s'est rendu compte que le ministre n'avait pas fait ses devoirs, que le ministre avait été négligent. Même s'il savait et s'il avait dit publiquement, depuis novembre 1989, qu'il allait présenter un projet de loi, il n'avait fait aucune consultation. Groupe après groupe, on s'est fait dire, en commission parlementaire: Nous n'avons pas été consultés, alors qu'il a eu amplement le temps, entre novembre et mai, de consulter les groupes. Pas de consultations! (7 h 20)

M. le Président, nous pensons que la performance du ministre est décevante depuis sa nomination à l'Environnement. Avant lui, sa prédécesseure immédiate, rappelons-le, en arrivant à son poste, avait fait une déclaration-choc, disant aux journalistes: Mon prédécesseur - disait-elle, celle qui est maintenant ministre de l'Énergie - Cliff - disait-elle, entre guillemets - est un beau parleur, Cliff fait de beaux discours, mais Cliff ne livre pas la marchandise. Mme la prédécesseure du ministre actuel a dit ça textuellement, je lui montrerai les coupures de journaux. Moi, j'ai rendu hommage à la franchise de la ministre quand elle a dit ça; je lui ai rendu hommage, parce que j'étais parfaitement d'accord avec elle, parfaitement d'accord. Le Cliff en question avait endormi la population; le Cliff en question, par ses beaux discours, avait endormi les journalistes, les groupes écologiques. Le ministre le sait, le ministre sourit actuellement, parce qu'au fond de lui-même il est d'accord aussi avec le verdict de sa prédécesseure vis-à-vis du dénommé Cliff.

Arrive la ministre actuelle de l'Énergie à l'Environnement. Elle a brassé un peu. Elle a brassé; à un moment donné, elle a montré la porte au président du Bureau d'audiences publiques, le bon Dr Goldbloom. Pourquoi? Là aussi, elle a fait preuve de courage. Pourquoi l'a-t-elle

mis à la porte? elle l'a mis à la porte parce que le bon dr goldbloom, président du bureau d'audiences publiques du ministère de l'environnement, imaginez-vous, a dit - ii a été cité dans les journaux - à un moment donné, avant que ne débutent les travaux de la commission sur les déchets dangereux, la commission charbonneau... le dr goldbloom, président du bureau d'audiences publiques de l'environnement, a dit: mme la ministre - il l'a dit par écrit, à part ça - je vous conseille de ne pas trop en dire au public parce que, si le public en sait trop, le public va s'inquiéter. alors, là encore, une deuxième fois en quelques mois, la ministre qui a précédé le ministre actuel a fait preuve de courage. elle lui a dit, au dr goldbloom: fini! vous êtes dépassé, vous êtes déphasé. elle a eu le courage de lui nommer un remplaçant. bravo!

Malheureusement, après l'élection, la ministre n'a pas été renommée à ce poste. Le député de Brome-Missisquoi, jeune politicien compétent, vigoureux, ambitieux, ex-candidat à la chefferie et prometteur, oui, comme le député de Saguenay le dit, très prometteur... Je ne sais pas s'il sera aussi prometteur après un an ou deux à l'Environnement, par exemple; ça, on verra. Mais arrive le député de Brome-Missisquoi. Lui, qu'est-ce qu'il nous dit? Le député de Brome-Missisquoi nous dit, en arrivant: Enfin, l'action. Ça, ça reprend un peu le slogan qu'il avait en 1983, lors de la campagne à la chefferie; son "motto", son slogan, c'était: Enfin, Paradis. Il s'en souvient, il sourit: Enfin, Paradis. C'était beau comme "motto", mais c'était surtout très modeste. C'était très humble, très humble: Enfin, Paradis vint, enfin le Christ vint. Alors, ce jeune homme, ambitieux, compétent, dynamique, sans complexe d'infériorité: Enfin, Paradis vint.

Alors, il est nommé ministre de l'Environnement. Il est normal qu'il revienne avec le même "motto", le même slogan; normal. Alors là, il dit: Enfin, l'action. On s'attend, M. le Président, à ce qu'il y ait de l'action. Quelle action? Quelle action? Au bout de cinq ou six semaines, il nous annonce, en grande conférence de presse, avec tableau à l'appui, etc., l'action. C'est quoi, l'action qu'il nous propose? Un grand changement de son organigramme, un grand changement de sa structure, tout à fait typique d'une attitude bureaucratique, "juridico-bureaucratique" parce que le ministre de l'Environnement est un avocat de formation. Il a plaidé déjà pour plusieurs producteurs agricoles, par exemple. Donc, l'action c'est le changement d'organigramme. La structure du ministère va changer. Et ça, on le sait, M. le Président. Quiconque a été proche d'un gouvernement sait que chaque sous-ministre, dans chaque ministère, a toujours dans son tiroir supérieur un nouveau plan pour le nouveau ministre qui va arriver. Je vois le ministre délégué aux Forêts qui a été fonctionnaire longtemps et il m'approuve. Il a l'air de m'ap-prouver. C'est vrai ça. Il a été fonctionnaire longtemps et il le sait. Alors, les fonctionnaires étaient contents quand ils ont vu que le ministre était disposé à faire un nouvel organigramme. Bravo!

Mais, M. le Président, ce que le ministre ne nous a pas dit, c'est qu'il avait cru, lui, son premier ministre, son chef du parti, le premier ministre actuel. Il l'avait cru. Il avait fait confiance à la parole de son chef lorsque, durant la campagne électorale, son chef avait promis solennellement: L'environnement va devenir la priorité numéro un dans un gouvernement du Parti libéral. Numéro un. Rien de moins. Et, à cet égard, nous allons, dès la première année fiscale, consacrer 50 000 000 $ de plus... 50 000 000 $, c'est de l'argent ça. Parce que le budget de fonctionnement du ministère de l'Environnement, au moment où le premier ministre faisait cette promesse, en août 1989, le budget de fonctionnement était autour de 100 000 000 $ par année. Alors, ajouter d'un coup 50 000 000 $, c'est un bel effort.

Alors, le député de Brome-Missisquoi s'est dit: L'affaire est belle. Avec mon plan de carrière qui m'amène à la chefferie éventuelle, je fais un stage à l'Environnement. Il y a un gros pot qui m'attend, 50 000 000 $, je vais pouvoir faire des merveilles avec cet argent. Le ministre de l'Environnement a été naïf, M. le Président. Il a été candide, bien intentionné et je comprends que c'était tentant de vouloir ce portefeuille de l'Environnement, si on y attachait cette promesse de 50 000 000 $, d'augmenter de 50 % le budget de fonctionnement. On peut faire beaucoup de choses avec une augmentation de 50 000 000 $. Le ministre de l'Environnement a cru à ça. Nous, de ce côté-ci, on était bien sceptiques. On souhaitait que l'environnement puisse bénéficier d'une telle augmentation. Mais, par contre, on était habitués aux promesses brisées du chef du Parti libéral. On était habitués à ça. Alors le ministre de l'Environnement, peu de temps après sa nomination, nous disait, de semaine en semaine: Oui, ça s'en vient. Inquiétez-vous pas. J'ai confiance. On va les avoir, les 50 000 000 $. Et, finalement, on a eu le chiffre précis, M. le Président: 15 000 000 $, même pas le tiers de la promesse de l'engagement, même pas.

Mais le ministre de l'Environnement aurait dû faire un peu l'historique du mandat de 1985 à 1989 du ministère de l'Environnement. Il se serait aperçu que le Conseil des ministres dont il a fait partie durant tout ce temps-là avait posé un geste très symptomatique en arrivant au pouvoir, très symptomatique. En arrivant au pouvoir, ce gouvernement du Parti libéral, dès la première année fiscale 1986-1987, coupe le budget de l'Environnement de 24 %. Le budget de l'Environnement, qui était de 87 000 000 $ pour le budget de fonctionnement, est tombé d'un coup à 71 000 000 $. Si le ministre de l'Environnement avait eu une perspective le moindrement historique...

Et je comprends qu'il ne l'ait pas, la perspective historique. C'est un jeune, comme je disais tantôt, plutôt ambitieux qui a un bon plan de carrière, il regarde en avant. C'est bon de regarder de temps à autre en arrière pour mieux savoir d'où on vient, d'où notre équipe vient. Il a fait partie de cette équipe-là, lui, de 1985 à 1989; il en a fait partie. Et il n'aurait pas dû croire son chef, quand son chef a dit: Je veux augmenter de 50 000 000 $, parce que son chef avait baissé de 24 % le budget de l'environnement. M. le Président, ces remarques préliminaires, c'était pour quand même situer dans son contexte le fonctionnement du gouvernement actuel eu égard à l'environnement.

Donc, on est heureux que le ministre ait enfin déposé, pour discussion, son projet. Et on est heureux aussi d'avoir l'occasion justement de comparer la performance de ce gouvernement actuel en matière environnementale avec la performance du gouvernement du Parti québécois. Rappelons que c'est le gouvernement du Parti québécois qui a créé le ministère de l'Environnement, que c'est le gouvernement du Parti québécois aussi, par exemple, qui a créé, qui a mis sur pied le groupe qui fait les études de recherche en matière de déchets dangereux, qui a remis, sous la pression du ministre, il y a quelques jours, un rapport daté d'avril-mai 1990. Le ministre avait hâte d'avoir ce rapport-là. Ça lui prenait pour exercer un peu de pression auprès de ses collègues du Conseil des ministres pour avoir le feu vert sur son projet de loi. Ça lui prenait, il fallait dramatiser la situation. Le rapport n'était pas dû, à ce moment-là, le ministre le sait très bien; moi, je le sais en tout cas; moi je le sais, parce que les fonctionnaires nous l'ont dit.

Le ministre a un problème avec les fonctionnaires. En arrivant, il a fait sa grande réforme sur papier, l'organigramme. Après ça, il s'est dit: Maintenant, j'ai plu à mes fonctionnaires, surtout aux hauts fonctionnaires, il faut maintenant que je plaise aux groupes écologiques. Il faut maintenant que je fasse plaisir aux groupes environnementaux. Comment faire ça? Comment en faire des alliés? Je vais leur démontrer que je suis prêt à brasser la cage. Là, il s'est mis, M. le Président, à enguirlander publiquement ses fonctionnaires; publiquement, ce ministre de l'Environnement a eu des paroles très dures pour ses fonctionnaires, comme je n'en ai jamais entendu, moi, dans ma carrière en politique. Jamais, je n'ai vu ça.

Et il se plaint après ça que ses fonctionnaires ne lui sont pas toujours loyaux. Par exemple, tout récemment, un journaliste a rendu public le fait que, dans l'est de Montréal, sur la base militaire de Longue-Pointe, il y avait un degré de contamination au plomb très élevé, jusqu'à 30 fois plus élevé qu'à la Balmet, de Saint-Jean. Et, faisant bien leurs devoirs, pas à la demande de l'Environnement, pas du tout, la

Défense nationale, les Forces armées canadiennes prennent sur elles de faire une étude des sols. Elles font cette étude, envoient le rapport au ministère de l'Environnement en janvier 1990. Lorsque, en mai 1990, cinq mois plus tard, le journaliste de La Presse fait cette révélation, le ministre, suite aux questions que je lui pose à l'Assemblée nationale... (7 h 30)

Mme Vermette: Sur une question de règlement, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Cannon): Oui, Mme la députée de Marie-Victorin, sur une question de règlement.

Mme Vermette: Oui, M. le Président, je demanderais le quorum, s'il vous plaît. Comme on discute d'un problème...

Le Vice-Président (M. Cannon): Oui, madame. Effectivement, je vais compter. Alors, qu'on appelle les députés s'il vous plaît.

Alors, ça va. Nous avons maintenant quorum. M. le député de La Prairie, simplement pour vous dire que vous avez déjà utilisé 20 minutes sur votre temps d'intervention.

M. Lazure: Merci, M. le Président. Alors, maintenant que les députés du parti ministériel commencent à apparaître en Chambre, je vais continuer, avec votre permission, mon exposé. J'étais en train de relater le drôle de climat qui existe au ministère de l'Environnement, entre le ministre et ses fonctionnaires. J'étais en train de dire que le ministre, après avoir enguirlandé ses fonctionnaires de verte façon dès son arrivée au ministère, ne devait pas se surprendre si ses fonctionnaires ne lui étaient pas aussi loyaux qu'il le souhaiterait. Je donnais comme exemple le rapport de la Défense nationale qui était parvenu à son ministère, en janvier 1990, sur une situation très grave, et dont le ministre a ignoré l'existence jusqu'en mai 1990, et il appris l'existence de ce rapport parce que le journaliste a fait cette révélation dans les médias. M. le Président, je pense que c'est grave lorsqu'on crée un climat de travail dans un ministère tel qu'un rapport extrêmement sérieux n'est pas soumis à l'attention du ministre. C'est grave et c'est le symptôme d'un malaise profond.

Le projet de loi, donc, est en retard; il était promis pour novembre, décembre 1989, pas de nouvelles. Ensuite, arrive le printemps; il est déposé à la mi-mai et, à notre demande, le ministre accepte de rencontrer des groupes et les groupes nous révèlent à ce moment-là qu'ils n'ont pas été consultés sur un projet de loi aussi important. C'est un projet qui a été improvisé et je vais passer tout de suite au coeur du problème. Le coeur du problème, c'est que le ministre, il l'a répété encore tantôt, se vante qu'avec ce projet de loi le Québec aura l'une des lois les

plus fortes, les plus sévères non seulement en Amérique, mais au monde. Je pense qu'il a dit qu'il y a seulement la Hollande et le New Jersey qui vont dépasser, en force, cette loi, si ça devient une loi. on a parlé de dents longues, de dents fortes, de dents solides. mais, à un moment donné, le 12 mai, donc quelques jours après le dépôt du projet de loi, alain dubuc, éditorialiste à la presse, intitule son article: "où est la mâchoire?" où est la mâchoire? je me permets de citer quelques extraits de cet editorial. "mais une loi avec des dents n'a de sens que si le gouvernement a déjà une mâchoire. c'est-à-dire des outils et des réflexes qui lui permettront de mordre." parce que c'est ça que le ministre veut. il veut mordre le pollueur. je suis d'accord avec lui jusque-là, mais à condition qu'il ait une mâchoire, comme le dit m. dubuc. "sinon, cette loi ne sera qu'un bout de papier de plus. il est beaucoup plus facile de faire adopter la loi la plus sévère au canada, bien protégé par les murs de l'assemblée nationale, que de diriger, sur le terrain, le meilleur ministère de l'environnement." quelle sagesse dans ces paroles! quelle sagesse! "par exemple, avec une telle loi, la balmet aurait-elle pu contaminer un quartier de saint-jean?" on va y revenir tantôt. "dans le cas de la balmet, on a laissé des pollueurs notoires ouvrir une usine. on a ensuite attendu cinq ans avant de mesurer le degré de contamination. et un an plus tard, les travaux de décontamination ne sont toujours pas entrepris." c'est vrai, m. le président. ils ne sont toujours pas entrepris. "ces délais insensés, où se côtoient - tenez-vous bien - incompétence et impuissance - les deux "i" du ministre, incompétence et impuissance - ne seront pas changés par la loi. le seul progrès, c'est que québec pourra récupérer plus d'argent si une entreprise recourt à la faillite pour éviter de faire face à ses obligations." et même ça, ce n'est pas sûr. "autrement dit - je termine l'extrait de l'article de m. dubuc dans la presse - les gangsters de l'environnement, comme marc levy ou la famille singerman - de la balmet - pourront continuer à faire des coups d'argent tout en préparant leur retraite sous le ciel bleu de la floride, bien loin du québec et de sa loi bien dentée." (7 h 40)

M. le Président, c'est exactement ce que la plupart des groupements nous ont dit en commission parlementaire. La plupart des groupements nous ont dit: Cette loi-là - et je mets le ministre au défi de me contredire, s'il veut m'écouter - si elle avait été en vigueur depuis X mois, n'aurait pas permis au gouvernement actuel de faire payer le pollueur. Elle ne l'aurait pas permis. Il n'y a rien dans ce projet de loi qui permet de faire payer le vrai pollueur, si le vrai pollueur est non solvable et si le vrai pollueur a pris la fuite. Rien dans ce projet de loi, absolument rien. À cet égard, le projet de loi, c'est un grand coup d'épée dans l'eau par le chevalier de Brome-Missisquoi, un grand coup d'épée dans l'eau.

Ce que les groupes nous ont dit, c'est: M. le ministre, de grâce, créez un fonds spécial de décontamination pour le passé et pour l'avenir. Quelques mots sur cette suggestion d'un fonds de décontamination, M. le Président, puisque c'est revenu dans presque toutes les interventions, y compris, évidemment, celles de l'Opposition qui réclame la création d'un tel fonds depuis des mois. Pour l'avenir, la formule d'un tel fonds est facile à mettre sur pied. Tout le monde convient qu'un tel fonds serait constitué par la cotisation des entreprises, qui pourrait varier selon que l'entreprise pollue plus ou moins, un peu comme le système à la Commission de la santé et de la sécurité du travail où l'entreprise est cotisée selon le degré de sécurité et selon le nombre d'accidents dans l'entreprise. Donc, pour l'avenir, la constitution d'un tel fonds, c'est simple, mais encore faut-il qu'il y ait une volonté politique de la part de ce gouvernement, ce qui n'est pas le cas, malheureusement. Et, pour le passé, il va falloir, évidemment, que ce fonds spécial de décontamination soit constitué de façon mixte par le gouvernement, par les fonds publics et, en partie, par les entreprises qui ont été reconnues comme polluant l'environnement.

M. le Président, ce projet de loi auquel nous concourons quant à son principe, quant à son objectif... Je vous le dis tout de suite: Nous allons voter en faveur de l'adoption du principe pour dissiper le malentendu, les doutes que le ministre a laissé planer depuis quarante-huit heures. Nous allons voter, M. le leader - dont je salue l'arrivée en Chambre - pour l'adoption de ce principe du pollueur-payeur.

Une voix: Merci. Une voix: Bravo!

M. Lazure: Merci. Mais je disais, M. le leader, brièvement, sans tout répéter, que cette loi qui a beaucoup de dents doit avoir une mâchoire aussi. Elle doit avoir une mâchoire. Je le répète, presque tous les groupes ont même envoyé des messages hier, M. le Président - j'ai des messages que je pourrai lire au besoin - que le ministre a reçus...

Une voix: Au besoin.

M. Lazure: ...de l'Union des municipalités du Québec, de la ville de Montréal, de la ville de Québec, de l'Union des municipalités régionales de comté, de plusieurs groupements importants dans notre société, et qui disent au ministre: Votre projet de loi, nous en sommes, mais, de grâce, mettez-y une mâchoire, mettez-y le mécanisme d'un fonds spécial de décontamination. M. le Président, on ne demande pas au ministre

les 35 000 000 $ que son patron lui avait promis et qu'il n'a pas mis dans la caisse. On ne lui demande pas ça, mais, en partant du bilan des lieux, des sites où il y a des déchets dangereux au Québec, 71 actuellement, selon le dernier rapport, on lui dit: Faites donc une clarification une fois pour toutes. Le ministre de l'Éducation, qui est arrivé aussi tantôt, va comprendre parce que c'est un bon planificateur, le ministre de l'Éducation; dans son réseau de l'éducation, il est habitué à ça.

Nous disons au ministre de l'Environnement: Vous devez faire une planification pour décontaminer les 71 sites dangereux parce qu'il n'y en a pas de planification actuellement. Comme ses prédécesseurs, Cliff dont je parlais tantôt, et sa prédécesseure, le ministre fonctionne de crise en crise, comme un pompier. Sauf que lui, il n'est pas allé comme pompier, comme Cliff était allé à Saint-Basile. Lui, le ministre de l'Environnement, n'est pas allé à Saint-Amable. Il est resté ici à Québec. Et, à la fin, il est allé faire un tour, à la fin, à la fin. Il est allé donner la main devant les caméras aux pompiers volontaires de Saint-Amable.

Ça, c'est un autre style. C'est un style peut-être plus moderne que le style de Cliff. Mais le ministre ne planifie pas. Le ministre se promène de crise en crise, de Saint-Basile à Saint-Jean, à Balmet, de Saint-Jean à Saint-Amable, de Saint-Amable à Duparquet en Abitibi, de Duparquet en Abitibi à l'est de Montréal. Il se promène de crise en crise au gré des révélations des journalistes, alors que les groupes lui disent, que nous lui disons: Prenez donc l'exemple sur certains de vos collègues qui font une planification.

Les 71 sites, personne ne s'attend à ce qu'ils soient décontaminés dans l'espace d'un an, deux ans, trois ans. Bon. Faites un plan quinquennal. Faites un plan et dites-nous par où vous allez commencer. Dites-nous: Nous allons décontaminer d'ici un an tel site, telle région et, à cet égard, nous allons obtenir tel argent, nous allons constituer un fonds de décontamination. Loi ou pas loi, M. le Président, il faut qu'il y ait un fonds de décontamination parce que le problème principal, ce n'est pas la pollution par les industries qui se produit actuellement. Celle-là, elle est assez bien contrôlée. Les industries polluantes qui fonctionnent toujours dans leurs entreprises contrôlent de mieux en mieux le degré de pollution de l'environnement, mais le problème principal, ce sont les sites du passé où, ou bien le propriétaire est disparu depuis 10 ans, 15 ans, 20 ans ou bien le propriétaire n'est pas solvable. C'est ça qui est le problème. Tout le monde le sait. Le ministre fait semblant de ne pas le savoir. Il devrait le savoir. C'est ça, le problème. Il est bien circonscrit, le problème. Et, à cet égard, son projet de loi ne réglera strictement rien. Son projet de loi ne règle rien quant aux sites orphelins.

Et, là, il va me dire: Ah! Attention - il l'a dit d'ailleurs tantôt - il y a un fonds fédéral-provincial. Il en parle à satiété de ce fonds fédéral-provincial. Qu'en est-il? À peine 200 000 000 $ pour cinq ans. Pour cinq ans, 200 000 000 $, donc 40 000 000 $ par année, mais ça, ce n'est pas pour le Québec. C'est pour l'ensemble du Canada.

Le ministre, encore une fois, dans sa naïveté, se dit: Bien, je vais pousser bien fort, puis je vais peut-être avoir proche des 40 000 000 $, proche du total, juste pour le Québec. Il m'a dit, à un moment donné: Premier arrivé, premier servi dans ce fonds-là. Bon. Je lui ai posé la question récemment, M. le Président: combien d'argent il a reçu à date? Zéro. Zéro sou. Puis, ça fait longtemps, ça fait au moins six mois que le fonds est annoncé. Au moins six mois. Le ministre, une de ses premières déclarations publiques après sa nomination, c'était sur ce fonds fédéral-provincial justement.

Donc, aucun argent à date. Mais, même s'il avait le total de l'argent de ce fonds fédéral-provincial de décontamination, ça ne fait que 40 000 000 $ par année. C'est évident qu'il ne l'aura pas. Et, quand on connaît le pourcentage de ces fonds fédéraux-provinciaux qui viennent au Québec par rapport à l'Ontario, on peut se poser des questions, M. le Président. Alors, si, pour décontaminer Balmet, le ministre a dû prendre la totalité de l'argent à son budget pour 1990-1991, soit 3 300 000 $, la totalité, imaginez-vous...

Des voix:...

M. Lazure: M. le Président, est-ce que je pourrais avoir un peu d'ordre dans la Chambre? (7 h 50)

Le Vice-Président (M. Cannon): Oui, merci. J'invite mes collègues à respecter l'article 32, et même ceux qui me font signe et qui viennent d'arriver en cette Chambre. S'il vous plaît, continuez, M. le député.

M. Lazure: M. le Président, je disais que le ministre se fait des illusions. S'il pense que la réponse à la décontamination des sites orphelins, c'est le fameux fonds fédéral-provincial, c'est de la foutaise. L'urgence, c'est de créer ce fonds strictement québécois, en deux volets, un, pour l'avenir, à partir de maintenant, selon le modèle de la CSST, et l'autre, pour le passé, un fonds mixte où le gouvernement devra nécessairement mettre des sommes d'argent importantes. Et qu'il étale la décontamination sur 5 ans, sur 10 ans, peu importe, mais qu'il nous présente un plan, de grâce. Mais il refuse jusqu'ici de présenter un plan.

Et, là, j'arrive à un autre aspect du fonctionnement de son ministère: le côté secret, le manque de transparence. J'ai donné l'exemple tantôt: il y a un secret même entre les hauts

fonctionnaires de son ministère et le ministre. Ils lui cachent un rapport important pendant six mois. En plus, son ministère refuse, il y a quelques mois, de donner des renseignements à la commission Charbonneau. Le ministre a dû intervenir, faire une colère pour que ses fonctionnaires donnent des renseignements à la commission Charbonneau. M. le Président, la condition élémentaire pour que la population collabore à la préservation de la qualité de l'environnement au Québec, c'est la transparence, c'est l'information. Et ce gouvernement nous démontre, de semaine en semaine, qu'il n'a pas le goût d'être transparent, qu'il ne veut pas mettre la population de son côté.

Un autre aspect inquiétant dans le fonctionnement du ministère de l'Environnement, c'est - et c'est en rapport avec le manque de transparence - l'absence d'audiences publiques. Un des meilleurs outils pour prévenir la pollution de l'environnement, c'est la tenue des audiences publiques. Lorsqu'un nouveau projet industriel - par exemple: alumineries, raffineries, aciéries, peu importe - est planifié, on devrait tenir des audiences. Nous avons réclamé à plusieurs reprises la mise en application des articles n, p, etc., qui permettraient et qui obligeraient le gouvernement à tenir des audiences publiques. Dans le moment, il est exempté de tenir des audiences sur les grands projets, mais il peut le faire. Le ministre peut le faire, je le répète, et il pourrait encore le faire dans le projet de Lauralco, qui est situé dans le comté du leader gouvernemental. Il y a beaucoup de gens qui sont inquiets des retombées environnementales du projet Lauralco, aluminerie de près de 1 000 000 000 $. Et le ridicule de la situation, M. le Président, c'est que le Bureau d'audiences publiques, à grands frais, fait des audiences publiques pour un projet d'agrandissement de marinas de 400 000 $. Et là, pour un projet de 900 000 000 $, pas d'audiences, pas nécessaire.

Et, dans la machine gouvernementale, on pousse l'audace jusqu'à vouloir faire adopter un projet de loi privé pour faire en sorte qu'une expropriation de terre à Deschambault soit soustraite aux mécanismes habituels de la Commission de protection du territoire agricole. Moi, ça m'étonne quand on sait que le député de Portneuf est en même temps ministre de l'Agriculture et qu'il est supposé être le protecteur des agriculteurs, "supposé être" le protecteur. Il semble trouver normal que les autorités municipales de Deschambault veuillent passer à côté de la Commission de protection du territoire agricole.

Nous sommes en train d'étudier ce projet de loi. Je reviens au projet de loi du ministre de l'Environnement pour dire que nous déplorons, donc, l'absence d'un fonds de décontamination; nous déplorons aussi l'absence d'un fonds de compensation aux victimes. Vous savez, de plus en plus ailleurs on s'est rendu compte que la contamination, en particulier par le plomb, chez les enfants pouvait causer des dommages à moyen terme, à long terme, qui sont maintenant mesurables. Il y a actuellement, aux États-Unis, des causes devant les tribunaux de poursuites par des parents d'enfants qui ont été victimes d'empoisonnement au plomb. Si, par malheur, au Québec, dans quelques années, il s'avérait que ces enfants devenus adolescents ou adultes ont des handicaps intellectuels, notamment - parce que le plomb chez les enfants, on le sait, affecte le fonctionnement des cellules cérébrales - ou des invalidités importantes et qu'ils voulaient poursuivre, ils vont se retrouver un peu comme le ministre de l'Environnement devant des propriétaires fantômes qui, comme la famille Singerman, par des tours de passe-passe a réussi à se libérer de toute obligation ou bien qui sont rendus en Floride ou en Jamaïque. Ces parents, ces individus n'auront pas de recours, pas de compensation financière.

Alors, nous avons dit au ministre en commission parlementaire: Pourquoi ne pas créer un fonds de compensation aux victimes environnementales, comme il y a des fonds de compensation pour les victimes d'actes criminels, par exemple? D'ailleurs, c'est à se demander si, dans certains cas, ça ne devrait pas être ce fonds de compensation aux victimes d'actes criminels. Polluer l'environnement comme on le fait dans certaines entreprises, notamment au plomb, c'est criminel. Là-dessus, le député de Brome-Missisquoi et moi, on s'entend très bien. On a le même diagnostic. Mais que ce soit par le fonds de compensation aux victimes d'actes criminels ou par un autre fonds spécial aux victimes environnementales, nous disons au ministre: De grâce, il faut constituer un fonds pour les victimes. Mais, à cet égard, il n'a pas répondu non plus à nos voeux.

Il y a une autre modification que le ministre devrait apporter au projet de loi. On sait - dans le passé, on l'a vu à quelques reprises - que bien souvent il faut qu'il y ait un lien très étroit entre le ministère de l'Environnement et le ministère de la Santé lorsqu'il arrive une catastrophe quelconque ou lorsqu'on découvre un lieu très contaminé, un lien très étroit Santé-Environnement. Parce que, si la population s'inquiète au sujet de l'environnement, c'est d'abord et avant tout parce que la population, à bon droit, se dit: Ma santé, celle de ma famille, de mes enfants est en cause. C'est ça. Ce n'est pas toujours parce qu'il y a des blessures graves au tissu environnemental, physique, géographique, mais c'est surtout à cause de menaces à la santé. On sait que les deux ministères, Environnement d'une part et Santé d'autre part, ne fonctionnent pas de façon harmonieuse. Alors, nous disons au ministre: Mettez donc dans votre projet de loi, lorsque vous vous donnez le pouvoir d'émettre une ordonnance pour décontaminer un terrain ou pour faire une étude de

caractérisation, l'obligation - ça vous protégera parce que ça forcera vos fonctionnaires à mieux faire leur travail - d'informer votre collègue de la Santé pour qu'il informe les départements de santé communautaire. Il n'en a pas parlé tantôt dans ses remarques. J'espère qu'il en tiendra compte.

Troisièmement, les normes par lesquelles le ministre va pouvoir décider d'émettre une ordonnance: le degré de contamination à tel ou tel métal, par exemple, et le seuil, le niveau au-delà duquel automatiquement le ministre émettrait une ordonnance pour étudier le sol et décontaminer. Ça, c'est le projet de règlement que le ministre nous a soumis. Nous, et plusieurs groupements, avons demandé que ce projet de règlement, d'abord, soit amélioré. (8 heures)

Le ministre était d'accord. Il y avait des lacunes dans ce projet de règlement, dans les barèmes, dans les normes, le pourcentage de telle ou telle substance qui devient un dangereux contaminant à partir de tel degré. Mais les gens lui ont dit aussi: Ce n'est pas suffisant d'avoir cette échelle; il faut que vous gardiez la notion de risque et de danger. Il n'en a pas parlé ce matin. L'autre jour, il avait dit: Oui, ça a du bon sens; je pense qu'on va la garder. Il fait signe que oui, tant mieux. J'espère que le ministre va tenir compte, lorsque nous étudierons ce projet de loi article par article, des nombreuses suggestions qui lui ont été faites.

M. le Président, je vois qu'il me reste à peine quelques minutes. En résumé, nous concourons au principe du pollueur-payeur. Nous allons voter favorablement pour l'adoption de principe de ce projet de loi. Nous avions hâte d'aborder la discussion de ce projet de loi. Nous ne comprenons pas - peut-être que c'est le leader qui pourrait nous donner les vraies raisons - pourquoi ça a pris tant de temps avant que ce projet soit déposé pour discussion. Le projet, il est connu depuis la mi-mai. Ça a pris au moins un mois. Tout à coup, on le dépose moins de 48 heures avant la fin des travaux. C'est un projet important, très important.

Il ne faudrait surtout pas que le ministre, comme il a commencé à le faire depuis quarante-huit heures - vous n'étiez pas ici, M. le leader -laisse entendre aux journalistes: Bien, peut-être qu'il ne passera pas et ce sera à cause du Parti québécois.

Une voix: J'étais ici.

M. Lazure: Vous étiez ici? Bon. Comme leader, vous devriez être sensible à ce genre d'insinuation qui n'est pas très bienveillante. Nous avons toujours collaboré. Mais nous blâmons le ministre d'avoir attendu si longtemps avant d'aborder la discussion, d'avoir attendu à 7 heures le matin, l'avant-dernier jour de la session. Il sait très bien qu'il y a le débat que l'on fait actuellement, mais qu'il y aura ensuite, obligatoirement, une étude article par article. Il le sait très bien. Il a reçu plusieurs recommandations de groupements importants, j'en ai parlé tantôt.

En résumé, nous allons dire oui au projet de loi, mais nous disons aussi, M. le Président, qu'il faut que le ministre, une fois pour toutes, cesse d'être naïf vis-à-vis de son premier ministre, qu'il cesse d'attendre les fameux 50 000 000 $. Il peut continuer ses luttes et nous le supportons. Je le supporte dans sa lutte, il le sait. D'ailleurs, il demande mon aide, mon support à tout bout de champ. Je pense que, parfois, je l'aide plus que plusieurs de ses collègues du Conseil des ministres. Ça, je comprends ça. Je suis prêt à lui continuer mon aide. Le ministre de l'Éducation, je pense, est un allié aussi du ministre de l'Environnement.

Mais son Conseil des ministres, particulièrement le président du Conseil du trésor qui, par hasard - parce qu'il faut avoir la perspective historique, il faut garder la perspective historique - était le compétiteur du ministre de l'Environnement il n'y a pas si longtemps, en 1983... En 1983, on se retrouvait avec trois candidats à la chefferie du Parti libéral: le député actuel de Saint-Laurent, qui est premier ministre, le député de Vaudreuil, qui est président du Conseil du trésor, et le député de Brome-Missisquoi, qui est ministre de l'Environnement. C'est le trio de 1983 qu'on retrouve. Et le pauvre ministre de l'Environnement, bien là, il est coincé entre ses deux ex-adversaires. J'admire son courage. Ça prend du courage. Mais il a besoin de plus de support de ses collègues du Conseil des ministres. Mais qu'il arrête de penser que son chef va tenir ses engagements. Son chef ne tient pas ses engagements. Son chef né prend pas au sérieux l'environnement. Ce gouvernement du Parti libéral ne prend pas au sérieux les causes de l'environnement. Il intervient en pompier lorsqu'il est obligé d'intervenir. Il avait coupé - M. le leader, vous faisiez partie de ce gouvernement en 1986-1987 - vous aviez coupé le budget de fonctionnement de l'environnement de 24 %, du jamais vu, alors que la situation économique était prospère. Vous n'étiez pas en crise économique à ce moment-là. Donc, c'est la volonté politique, M. le Président, qui est en cause dans ce gouvernement. Comme Alain Dubuc le disait si bien: On a beau avoir la loi avec les dents les plus longues, si on n'a pas la volonté politique, c'est une grande illusion.

Le ministre a souvent invoqué sa loi déficiente. Quand ce n'était pas la loi déficiente, il invoquait la lenteur ou l'incompétence de ses fonctionnaires ou, encore, il invoquait l'absence de budget, parce que le ministre est souvent porté à avouer son impuissance devant telle ou telle situation. Il avoue son impuissance: Qu'est-ce que je peux faire? Je n'y peux rien, j'ai seulement 26 inspecteurs. Une police verte pour

tout le Québec, M. le Président, de 26 personnes. Comment voulez-vous qu'il y ait une observance sérieuse de la loi? Non seulement de la prochaine loi, la future loi, mais même la loi actuelle n'est pas observée. Imaginez-vous une région aussi grande que l'Abitibi-Témiscamingue, région importante parce que 31 des sites contaminés dangereux sur les 74, 31 sont en Abitibi-Témis-camingue. Imaginez-vous que dans cette région il n'y a que cinq polices vertes, cinq inspecteurs. Côte-Nord, région encore plus vaste, quatre inspecteurs.

M. le Président, il est temps que ce gouvernement s'affirme de façon concrète, par des budgets appropriés, et qu'il fasse preuve de plus de sérieux. Il est temps, en plus d'avoir des lois avec des dents, qu'on ait aussi une volonté politique d'agir, de cesser de parler. À cet égard, une dernière remarque sur les aspects punitifs de la loi, les amendes. Nous sommes d'accord pour augmenter les amendes. Qu'on ait le record du maximum d'amendes, bravo! Mais il y a quand même un aspect négatif à ça, M. le Président. Lorsque les amendes minimales sont tellement élevées, des centaines de milliers de dollars, les juges - et ça, la jurisprudence en témoigne - exigent une preuve beaucoup plus étanche, beaucoup plus forte et, dans un sens, bien souvent ça a un effet contraire à l'effet recherché. Alors, je mets en garde le ministre, qui veut établir un record en Amérique, même au monde, pour pouvoir se vanter d'avoir les pénalités les plus élevées, que ceci peut avoir un effet boomerang.

Finalement, sur cette question de pénalités et de juges, l'Opposition officielle, le Parti québécois propose dans son programme la mise sur pied d'un tribunal de l'environnement. Nous pensons qu'un tribunal de l'environnement serait de nature à accélérer les causes qui vont devant les tribunaux, d'une part. D'autre part, en créant graduellement tout un groupe de juges spécialisés en litiges environnementaux, nous aurions un meilleur service, un peu comme au Tribunal du travail nous avons un meilleur service que dans une cour générale. Je souhaiterais, M. le Président, que le ministre tienne compte de cette excellente suggestion que le Parti québécois lui fart depuis longtemps.

Alors, je termine, M. le Président, mon intervention en répétant que nous concourons à l'adoption du principe de ce projet de loi. Nous déplorons le manque de consultation, le retard apporté par le ministre à nous déposer ce projet de loi, des mois et des mois, six mois - il en a parlé pendant six mois avant de le déposer - mais nous lui disons: Mieux vaut tard que jamais. Nous allons collaborer à l'examen de ce projet de loi et j'espère qu'il sera plus réceptif qu'il ne l'a été sur le projet de loi 60. Nous lui avons fait des recommandations d'amendements sur le projet de loi 60 et il les a rejetées du revers de la main. Ça m'a surpris, je dois dire.

Je ne sais pas pourquoi il a fait ça, mais j'ai hâte de voir à l'étude article par article du projet de loi 65 s'il sera plus réceptif, et je le souhaite. (8 h 10)

Alors, je veux, au nom de l'Opposition, souhaiter, une fois encore, que ce projet de loi soit bonifié comme l'Union des municipalités le demande, comme l'Union des municipalités régionales de comté du Québec le demande, les départements de santé communautaire, la ville de Montréal et la ville de Québec. Alors, de grâce, que le ministre écoute les groupements, écoute l'Opposition et, de grâce, qu'il ne nous impose pas le bâillon non plus! Merci.

Le Président: Je suis prêt à reconnaître le prochain intervenant, M. le député de Bertrand.

M. François Beaulne

M. Beaulne: Merci, M. le Président. En dépit de l'heure tardive ou, devrais-je dire, de l'heure matinale, j'ai demandé d'intervenir sur ce projet de loi, parce qu'il peut avoir des incidences importantes dans la région à laquelle j'appartiens, en Montérégie, et particulièrement dans le comté que j'ai l'honneur de représenter à l'Assemblée nationale, le comté de Bertrand, qui sont des régions d'industrialisation croissante et qui sont également, malheureusement, des régions où on assiste à une prolifération de sites d'enfouissement et de sites orphelins.

Vous me permettrez, M. le Président, pour le bénéfice de mes concitoyens, de rappeler l'objet de ce projet de loi. Ce projet de loi permet au ministre de l'Environnement, lorsqu'il a des motifs de croire qu'un contaminant est présent dans l'environnement, d'ordonner aux responsables de la contamination de lui fournir une étude de caractérisation et un programme de décontamination ou de restauration de l'environnement contaminé.

Par ailleurs, lorsqu'il constate la présence d'un contaminant dans l'environnement, le ministre peut également rendre une ordonnance enjoignant aux responsables de ramasser, d'enlever, de recueillir ou de neutraliser le contaminant et de décontaminer ou de restaurer l'environnement. Ce projet de loi prévoit aussi que le ministre, lorsqu'il constate la présence d'un tel contaminant dans le sol, peut signifier au propriétaire un avis indiquant que ce sol est contaminé. Suite à l'enregistrement de l'avis, le propriétaire devra procéder à certains travaux, demander l'autorisation du ministre et lui fournir une étude de caractérisation et un programme de décontamination ou de restauration du sol contaminé. Ce qui est également intéressant dans ce projet de loi, c'est que quiconque exerce une activité susceptible de contaminer le sol devra, avant de procéder à certains travaux, demander l'autorisation du ministre et lui fournir les

documents requis.

M. le Président, comme j'ai eu l'occasion de le mentionner tout à l'heure, lors de l'étude du projet de loi 67, il est à déplorer que, pour des raisons qui tiennent de la planification de l'échéancier et du menu législatif que nous présente le gouvernement, nous soyons appelés à étudier ce projet de loi à peine 24 heures avant l'ajournement de la session.

J'aimerais prendre les minutes qui me sont allouées pour souligner les aspects positifs de ce projet de loi, en indiquer les faiblesses et suggérer certaines améliorations qu'on pourrait y apporter. Permettez-moi d'abord de parler des aspects positifs. Le projet de loi consacre, en fait, le principe du pollueur-payeur. C'est un aspect positif, puisqu'une certaine iniquité s'est introduite dans le développement industriel de notre société, du fait que pour procurer des bénéfices, pour enrichir quelques-uns, des corporations et des individus ont, à toutes fins pratiques, saccagé le patrimoine commun et ont, parfois, affecté l'environnement de façon importante et à des coûts énormes.

Je pense que, pour une fois, nous voyons consacrer le principe du pollueur-payeur dans un projet de loi. Il est trop facile pour une compagnie d'échapper à ses responsabilités en raison des structures inadéquates d'amendes. Mon collègue, le porte-parole, le député de La Prairie, a émis certaines réticences quant à la politique des amendes. Je dois avouer que, malgré tout, il est intéressant de constater que le projet de loi, ici, relève le seuil des amendes minimales ainsi que des amendes maximales. On passe d'une amende minimale de 12 000 $ à une amende minimale de 50 000 $ et d'une amende maximale de 500 000 $ à une amende maximale de 1 000 000 $.

Je vous rappellerai, M. le Président, malgré la disposition de ces amendes, que celles-ci sont bien loin de compenser les coûts que le gouvernement doit assumer, principalement suite aux incidents écologiques majeurs. Je vous rappellerai que la facture se monte déjà au-delà de 35 000 000 $ en ce qui concerne les BPC de Saint-Basile. Nous n'avons pas d'estimation globale encore de ce qu'il en coûtera à Saint-Amable, mais je puis d'ores et déjà prévoir que les montants seront également assez importants, principalement pour la décontamination du site de l'incendie. Il est également trop facile pour des compagnies de se dérober à leurs responsabilités, soit en déclarant faillite ou en déposant leur bilan.

Une autre amélioration, un autre aspect positif que j'aimerais souligner de ce projet de loi, c'est qu'il permet de s'attaquer au problème de la contamination des sols. Pour représenter la municipalité de Saint-Amable dans le comté de Bertrand, où nous aurons à faire face à un sérieux problème de contamination du site où s'est déroulé l'incendie de pneus, j'ose croire que ce projet de loi nous permettra de procéder avec plus de célérité à la caractérisation des sols et à la décontamination du site contaminé, mais surtout qu'il permettra au ministre de l'Environnement d'intervenir rapidement dans la problématique de la prolifération des sites d'enfouissement. Un grand nombre de sites d'enfouissement sont potentiellement des endroits où des déchets contaminés pourront être entreposés. Il y a des mesures législatives qui prévoient une certaine surveillance de ces sites, mais, malheureusement, on ne peut pas tout surveiller et les risques sont énormes que des sites d'enfouissement, de prime abord inoffensifs, se transforment en sites d'enfouissement de déchets dangereux.

Cela étant dit, M. le Président, j'aimerais quand même souligner certaines faiblesses du projet de loi. D'abord, laissez-moi vous dire que nous attachons l'importance qu'il faut à l'environnement pour souhaiter que ce projet de loi ne soit pas uniquement une coquille vide. Il est facile d'émettre, de pondre des projets de loi qui, de prime abord, répondent aux souhaits de la population, particulièrement en matière d'environnement, mais gardons-nous d'adopter un projet de loi uniquement sur la base de ces beaux principes sans vérifier si derrière les principes qui y sont énoncés se trouvent effectivement les ressources pour l'appliquer de façon efficace.

Vous me permettrez ici, M. le Président, tout comme mon collègue de La Prairie, d'émettre certaines réserves et d'exprimer certains doutes à ce sujet, puisque le budget du ministère de l'Environnement, comme on le répète à satiété de ce côté-ci de la Chambre, est insuffisant. Il n'atteint même pas 1 % de l'ensemble des dépenses budgétaires du gouvernement du Québec. Le ministère de l'Environnement ne dispose que de 26 inspecteurs pour l'ensemble du Québec. Alors, encore une fois, il faudrait, pour que ce projet de loi ait les dents qu'il doit avoir, qu'il ne demeure pas uniquement au feuilleton des coquilles vides.

D'autre part, certaines précisions devraient être apportées au projet pour corriger certaines lacunes. La majorité des groupes qui se sont fait entendre par la commission de l'aménagement et des équipements se sont dits en faveur du projet de loi 65. Cependant, plusieurs d'entre eux ont mentionné des lacunes importantes dans cette loi. Parmi celles-ci, j'aimerais souligner, d'abord, l'imprécision quant à la distinction entre "pollueur-payeur" et "propriétaire-payeur". (8 h 20)

Le projet que nous soumet le ministre de l'Environnement contient des dispositions qui lui permettront d'exiger à la fois d'un pollueur ou d'un propriétaire d'un terrain contaminé qu'il procède à une étude de caractérisation et qu'il soumette un plan de décontamination. L'ensemble des intervenants s'entend pour dire que, dans le cas où les pollueurs sont connus, les dispositions

contenues dans le projet de loi sont équitables. Là, cependant, où le bât blesse, c'est lorsque le ministre exigera du propriétaire d'un terrain des mesures correctrices alors que, souvent, celui-ci ne sera pas responsable de la contamination. Dans la plupart des cas, il aura acquis ce terrain sans même connaître son état de contamination. Ces dispositions qui sont contenues particulièrement aux articles 31.42 à 31.50 sont généralement mal accueillies par les intervenants que nous avons eu l'occasion d'écouter en commission et, entre autres, par les municipalités dont des extraits de leurs mémoires ont été présentés au ministre.

Mon collègue de La Prairie a également insisté sur la nécessité de créer un fonds pour la décontamination. Je ne reviendrai pas là-dessus. Simplement, je voudrais souligner que les groupes qui ont participé aux audiences sur le projet de loi 65 ont insisté sur la nécessité de créer un fonds dans lequel on pourrait puiser les sommes nécessaires à la décontamination des terrains, dans les cas où les responsables des méfaits seraient introuvables.

J'aimerais simplement, ici, ouvrir une petite parenthèse dans le contexte de ce que nous avons vécu dernièrement et, particulièrement, dans le contexte du débat sur la Loi modifiant la Loi sur la Régie de l'assurance automobile du Québec. J'ai eu l'occasion, dans le contexte de ce débat, de souligner l'effet dangereux de précédent que créait la loi 50. Ici, nous recommandons la création d'un fonds pour la décontamination. Nous avons examiné en commission la mise sur pied de la Société de récupération et de recyclage du Québec. Je suis sûr que, d'ici à la fin de cette Législature, nous aurons l'occasion de nous pencher sur la création d'autres fonds, que ce soit en matière de formation professionnelle, de recherche et de développement ou d'environnement.

Permettez-moi ici, M. le ministre, encore une fois, de vous demander que, si vous acceptez de procéder à la création d'un fonds, comme nous vous le suggérons, les sommes recueillies par ce fonds soient destinées aux objectifs pour lesquels ils auront été recueillis.

Enfin, au niveau des faiblesses que j'aimerais souligner, j'aimerais insister sur l'intervention qu'ont faite les départements de santé communautaire lors des audiences. Lors de la participation du comité de santé environnementale, les départements de santé communautaire ont soulevé une question, d'ailleurs, à laquelle a fait allusion mon collègue. En effet, les DSC déplorent le fait que le projet de loi 65 ne contienne aucune disposition qui oblige le ministre à informer les autorités de santé publique lorsqu'il constate des cas de contamination. Le ministère de l'Environnement a son rôle au niveau de l'identification des sources de contamination et des sites de contamination. Mais l'analyse et l'évaluation des risques que cette contamination comporte pour la santé du public, ce sont les professionnels de la santé qui les font et qui ont la responsabilité de les faire. Dans ce sens, j'insiste sur les recommandations qu'a apportées également mon collègue de La Prairie sur le besoin de communiquer le plus rapidement possible et de la façon la plus efficace possible les renseignements dont dispose le ministère de l'Environnement aux départements de santé communautaire.

Après avoir indiqué certaines des faiblesses que comporte le projet de loi, j'aimerais souligner certaines améliorations et apporter certaines suggestions quant à la bonification du projet. D'abord, comme je l'ai indiqué, il est nécessaire qu'on distingue de façon très précise les responsabilités du pollueur d'un terrain de celles du propriétaire. Il est à la fois injuste et illogique de forcer un propriétaire à décontaminer un terrain, alors que celui-ci n'en est pas responsable. De plus, il faut se demander s'il est logique de criminaliser des activités antérieures qui se sont déroulées dans le respect des lois et des règlements existants à ce moment-là.

A l'instar des groupes qui se sont présentés fors des consultations particulières, nous réclamons, nous, de ce côté-ci de la Chambre, du gouvernement qu'il crée un fonds dans lequel on puiserait les sommes nécessaires à la décontamination des sols de terrains où il n'est plus possible de retrouver les pollueurs. Ces fonds pourraient être constitués à partir de cotisations versées par les industries, un peu à la manière du fonctionnement de la Commission de la santé et de la sécurité du travail.

Lors des consultations particulières, M. le ministre, vous avez consenti à ce que les règlements votés en vertu de cette loi soient discutés publiquement. J'aimerais vous rappeler cet engagement et vous rappeler que tous les intervenants ont également manifesté des réserves importantes quant au projet de règlement déposé en même temps que le projet de loi.

J'aimerais également vous rappeler que les experts qui décident des normes réglementaires devront expliquer leur choix à la population. Nous recommandons également d'apporter des modifications pour réintroduire dans le projet de loi 65 la notion de risque ou de danger pour la santé et l'environnement. Cet ajout vous donnera, M. le ministre, les pouvoirs nécessaires et assez larges en matière de sols contaminés. De plus, ces modifications, à mon avis, contribueront à conserver la logique de l'actuelle Loi sur la qualité de l'environnement.

Finalement, permettez-moi de dénoncer le fait que le ministre, dans ce projet de loi, se donne des pouvoirs pour le moins discrétionnaires. En effet, aucune disposition ne comporte des obligations pour le ministre. Tous les articles relatifs à la décontamination des sols et de l'environnement indiquent, sur la base de la lecture que j'ai faite du projet, "que le ministre

peut demander que l'on répare les dégâts". Nous pensons que, si le gouvernement croit vraiment en la nécessité de restaurer l'environnement, le ministre devrait être obligé d'exiger les études de caractérisation et la décontamination dans tous les cas où la santé et la sécurité de la population sont menacées.

En conclusion, M. le Président, j'aimerais encore rappeler que nous endossons le principe de ce projet de loi, mais que nous souhaitons qu'il ne demeure pas une coquille vide. Merci.

Le Président: Je cède maintenant la parole à M. le député de Saguenay.

M. Ghislain Maltais

M. Maltais: Merci, M. le Président. Si le proverbe est toujours juste que l'avenir est à ceux qui se lèvent tôt, alors, le projet de loi 65 connaîtra un avenir fort imposant. Brièvement, M. le Président, j'aimerais bien sûr intervenir sur le principe de la loi 65. Cette loi qui arrive après plusieurs années va permettre de corriger pour l'avenir ce qui va se passer au Québec. Enfin, le principe du pollueur-payeur sera reconnu, bien encadré et dicté aussi par une réglementation qui aura des dents. M. le Président, la loi 65 ne viendra pas corriger ce qui a été laissé aller au cours des 50 dernières années. Mais la loi 65 préviendra dans l'avenir les catastrophes qu'on a peut-être connues trop souvent, hélas! au Québec.

J'aimerais, dans un premier temps, remercier le critique de l'Opposition pour sa contribution en commission parlementaire, même ici à l'Assemblée nationale. Effectivement, malgré qu'on ait des divergences d'opinions sur certains points, le critique en matière d'environnement et député de La Prairie a fait un travail remarquable, positif. Et je pense qu'on doit le féliciter pour son apport. Tout en n'étant pas totalement d'accord sur les principes qu'il a énoncés, il a apporté quand même des choses très positives. Je l'écoutais attentivement sur le fonds pour la dépollution. (8 h 30)

Moi, j'ai apporté, M. le Président, au ministre une suggestion qui, je pense, dans l'avenir, pourra être mise de l'avant, c'est-à-dire le principe que chaque compagnie qui transite des matières dangereuses, soit pour sa fabrication, son transport ou sa vente, soit munie d'une assurance ou d'une caution responsabilité parce que je ne vois pas que ce soit l'ensemble des Québécois et des Québécoises au Québec qui aient à payer pour les activités d'une compagnie qui a pour but de faire des bénéfices. Or, il est évident que la responsabilité du pollueur-payeur appartient à ceux et à celles qui transigent dans ces matières. Et la suggestion que j'ai faite au ministre, c'est que, lors des émissions des permis d'usine, que ce soit au niveau des municipalités ou au niveau du gouvernement, ces certificats d'assurance ou de caution soient bien affichés dans les usines. En cas de désastre, on pourra se retourner, non pas vers une compagnie qui vient de déclarer faillite, mais vers une compagnie d'assurances responsable, une assurance contamination. Et je pense que c'est de cette façon que, dans les autres pays, on est venu à bout de s'assurer que le principe du pollueur-payeur soit totalement respecté.

J'ai eu l'opportunité, M. le Président, au cours du mois de mai de faire la tournée de toutes les régions du Québec. On s'aperçoit que tout le monde a ses produits dangereux, tout le monde a ses produits dans chacune des régions, particulièrement dans la mienne où on a ceux des autres. On doit vivre avec, M. le Président. On ne viendra pas corriger par la loi 65 les BPC entreposés à Saint-Basile et transférés à Manie 2. Ce n'est pas vrai. On ne viendra pas corriger ça. Mais si la loi avait été appliquée en 1980, en 1979, on aurait pu corriger, M. le député de La Prairie. On aurait pu le faire. Malheureusement, ce n'était pas fait et on ne peut rendre collectivement responsable la société qui a laissé aller au cours des cinquante dernières années des actes avec lesquels on est pris aujourd'hui. Or, le principe du pollueur-payeur va faire une chose, cependant. C'est qu'à l'avenir, on va protéger notre collectivité québécoise de ces désastres qu'on a connus dans le passé. Je pense que le ministre, d'abord, pour régler les sites orphelins, avec le principe de la loi 65 du pollueur-payeur, c'est un pas en avant comme on n'avait jamais connu au Québec.

Il est évident qu'on voudrait immédiatement, à la grandeur du Québec, corriger tous les sites dangereux. On ne voudrait pas qu'il y ait d'autres Saint-Amable, d'autres Balmet, d'autres BPC de Saint-Basile. C'est évident qu'on ne veut pas ça. Il n'y a personne au Québec qui veut ça. Malheureusement, la loi 65 ne pourra corriger toutes ces choses-là sauf que ce qui est important, c'est de s'assurer qu'il n'y en ait plus dans l'avenir. C'est pour ça que la loi 65 a des dents. Elle arrive au bon point. La nouvelle attitude qui se développe parmi la population - et on est en mesure de s'en rendre compte dans chacune de nos régions - c'est que les gens sont beaucoup plus sensibles et sont prêts à passer à l'action même dans leurs habitudes de vie et ça, il faut le reconnaître que c'est une nouvelle philosophie qui va permettre l'application d'une loi comme la loi 65 qui, elle, a des dents. Il est évident que la loi 65, par exemple, ne fera pas le bonheur de toutes les entreprises.

Déjà, au Conseil du patronat, lorsqu'on est venu en commission parlementaire, M. Dufour s'est inscrit contre le principe de la loi 65, mais le gouvernement va au-delà des responsabilités des entreprises. Il y va de la vie humaine et la vie humaine - j'en profiterai pour

répondre à M. Dufour - n'a pas de prix. La vie d'un enfant n'a pas de prix. Ça vaut tout l'ensemble du Conseil du patronat. Et là-dessus, je félicite la rigueur du ministre qui n'a pas eu peur de l'imposer à certaines personnes qui, pour des intérêts financiers, en particulier, étaient contre le projet de loi 65. Or, aujourd'hui, la grande responsabilité que le ministre a, c'est bien sûr de protéger l'ensemble des Québécois et des Québécoises et c'est ce qu'il consacre dans la loi 65. Je suis heureux d'entendre dire que l'Opposition va concourir, tout à l'heure, en commission parlementaire et probablement cet après-midi à l'adoption. Je suis heureux qu'enfin, elle ait compris ensemble qu'il faut s'élever au-delà de la politique pour protéger la qualité de vie qui, finalement, M. le Président, est l'héritage qu'on donnera à nos enfants dans le futur. Merci beaucoup.

Le Président: Or, nous allons poursuivre ce débat avec l'intervention de M. le chef de l'Opposition.

M. Jacques Parizeau

M. Parizeau: M. le Président, même si l'heure à laquelle nous examinons ce projet de loi en deuxième lecture est - comment dire? - assez inédite, j'ai tenu à participer au débat au point où nous en sommes, parce que la question me semble avoir tellement d'importance. À bien des égards, notre société a été lente à comprendre la nécessité du contrôle, de l'examen, de l'observance de normes d'environnement un peu serrées. Il y a peut-être un phénomène de société ici à cet égard-là.

Je me souviens encore lorsque nous avons mis en place le programme d'épuration des eaux municipales, à la fin des années mil neuf cent soixante-dix, à quel point le contraste était choquant entre un Québec où 90 % des eaux municipales ne subissaient aucun traitement, alors qu'ailleurs en Amérique du Nord, les proportions étaient souvent inversées. Et à l'égard de la contamination industrielle, nous sommes... Au fond, là encore, notre société a pris des retards importants. Et je comprends que le ministre de l'Environnement aujourd'hui, partagé en un certain sens, est tiraillé par deux préoccupations qui sont vraiment concurrentes pour lui. D'une part, une bonne partie de son temps et de son énergie est consacrée à éteindre des feux. Qu'il le veuille ou non, ce sont les circonstances qui s'imposent à lui. Et d'autre part, il arrive à point nommé pour essayer de présenter - comment dire? - une sorte de perspective un peu plus générale, basée sur des pouvoirs plus importants que ceux dont il disposait jusqu'à maintenant. Et ce n'est jamais facile d'établir une sorte de perspective générale quand, de semaine en semaine, on éteint des feux.

Une perspective générale, une politique générale à l'égard de la pollution industrielle doit comporter toute une série d'éléments qui s'appuient les uns et les autres. Il y en a même qui disent: Au fond, il faudrait avoir une sorte de charte de l'environnement, avec des droits et des obligations clairement définis. Je comprends que le ministre n'en est pas là, pour les raisons que je viens d'expliquer, et donc que, dans le domaine de la législation, il est un peu forcé de faire ce qu'il fait dans la vie de tous les jours, c'est-à-dire d'aller au plus pressé. Et à cet égard, bien que ce projet de loi, à mon sens, n'aille pas assez loin, ne comporte pas tous les éléments qu'il devrait comporter, ne présente pas les perspectives dont j'ai parlé tout à l'heure, néanmoins, je pense que le ministre a besoin, de la part de tous ceux qui siègent en cette Assemblée nationale, d'un coup de main pour au moins être capable de franchir cette étape-là.

Il reste néanmoins que je ne peux pas m'empêcher, au moins en quelques minutes, d'essayer un peu de tracer une perspective, parce que j'ai l'impression que tôt ou tard, on va être amenés à regarder systématiquement ensemble les trois volets de la perspective. (8 h 40)

Le premier des volets a trait aux pouvoirs juridiques, simplement juridiques, dont le ministre et le ministère de l'Environnement doivent être dotés. Là, cependant, comme toujours dans ces domaines juridiques compliqués, il faut avoir un certain nombre d'idées claires, il faut faire très attention de ne pas se laisser embarquer par des slogans.

Pollueur-payeur, ça peut vouloir dire bien des choses. Qu'est-ce que ça veut dire exactement? Et puis surtout, pollueur-payeur, il faut examiner ça, toujours en essayant d'avoir quelques idées un peu claires là-dessus, il faut examiner ça pour tout ce qui est le passé et tout ce qui est l'avenir. Ce n'est pas pareil. Il faut qu'on fasse attention, par exemple, de ne pas projeter les dispositions qu'on peut avoir à l'égard de l'avenir et qui peuvent aller jusqu'à la criminalisation de certains actes et, rétroactivement, renvoyer ça sur des entreprises qui ont posé des gestes dans le passé, mais dans le cadre des lois et des règlements existants.

On doit à cet égard et, inévitablement, établir une distinction entre ce qui va se faire à partir d'aujourd'hui et ce qui a été lait avant. Ça ne veut pas nécessairement dire qu'on tolère ce qui a été passé avant. Ça ne veut pas nécessairement dire qu'on l'accepte. Ça ne veut pas nécessairement dire qu'on ne le fait pas corriger. Ça veut simplement dire que, sur le plan juridique, ça ne se présente pas de la même façon et il faut que ces deux situations se traduisent dans les textes. il est clair aussi, toujours dans l'ordre juridique, qu'il faut établir une. distinction entre l'obligation ou bien l'intervention discrétionnaire. à cet égard, je ne peux pas m'empêcher de

penser, je pense que le député de Bertrand y faisait allusion tout à l'heure, que, dans le projet de loi que nous avons devant nous, le ministre 'peut" souvent et "doit pas" très souvent. Et Dieu sait, on le sait tous, pour tous ceux qui ont eu à administrer des lois, à quel point il y a une différence fondamentale entre "le ministre doit" et "le ministre peut". Dans un domaine comme celui de l'environnement surtout, "le ministre peut", ça le rend inévitablement - comment dire? - la cible de quantité de pressions: Surtout, n'intervenez pas, vous savez, l'entreprise pourrait fermer; ou bien, n'exagérez pas, l'entreprise a des difficultés financières à l'heure actuelle, il ne faut pas pousser ça trop loin; ou bien, n'intervenez pas parce que, de toute façon, telle ou telle entreprise a fait des pressions directes pour nous demander que vous n'interveniez pas.

Je ne veux pas dire par là que le ministre va invariablement céder, mais il est évident qu'il ne peut pas ne pas tenir compte de pressions qui peuvent lui venir de ses collègues. Encore une fois, je ne mets pas en cause le ministre lui-même, la personne du ministre, en disant ça. C'est le système qui veut ça. Alors que "le ministre doit" a un tout autre sens. Permettez-moi, à cet égard, d'établir un parallèle avec le ministre du Revenu. Le ministre du Revenu, la plupart du temps, on ne lui dit pas "le ministre peut"; on lui dit "le ministre doit", parce que, là, il s'agit de collecter des impôts et on se rend compte à quel point on ne va pas être discrétionnaire. Mais, enfin, c'est un pas.

Les dispositions, je pense, du cadre législatif que nous avons devant nous, ne sont certainement pas aussi claires que je le souhaiterais, ne vont pas suffisamment loin, autant, en tout cas, que je le souhaiterais. Mais reconnaissons que c'est tout de même un pas.

Deuxième volet de la perspective: les moyens et interventions. À cet égard, je dois dire au ministre de l'Environnement ce que mes deux collègues qui m'ont précédé ont dit aussi, ce que tant d'organismes, de municipalités lui ont suggéré: il va lui falloir, au ministre, un fonds de décontamination. Je pense que c'est inévitable, en particulier, à l'égard du passé, pour reprendre la distinction que j'établissais tout à l'heure. Je pense qu'on ne s'en tirera pas. S'il n'y a pas un fonds de décontamination, le ministère de l'Environnement va se retrouver constamment avec des feux à éteindre, des circonstances où, de toute façon, les pouvoirs qu'il se donne dans la loi ne lui fourniront aucun des moyens financiers nécessaires, et il ne pourra tout de même pas aller, chaque fois, à l'occasion de chaque feu à éteindre, voir le Conseil du trésor pour obtenir un montant ad hoc, satisfaisant pour une opération, et recommencer deux ou trois mois plus tard. Je pense que, s'il y a une leçon qu'on peut tirer des quelques dernières années, c'est justement la nécessité d'un fonds de décontamination permettant de régler les problèmes, insolubles sans cela, et qui se présentent au fur et à mesure où le temps avance.

Je suis certain, M. le Président, qu'il faut discuter davantage de cette question d'un fonds de décontamination, voir comment et par qui il pourrait être financé. J'ai entendu, tout à l'heure, ce que disait le député de Saguenay, et il y a quelque chose d'intéressant. Ça pourrait être une alternative, ce que disait le député de Saguenay, mais il faudrait examiner le type d'assurance dont il parlait. Le concept est intéressant. Je me pose simplement la question, mais encore il faudrait l'examiner: est-ce que c'est bon pour l'avenir seulement? Et je pense qu'il faut répondre oui. La formule de l'assurance est peut-être intéressante pour l'avenir. Mais je ne suis pas certain que ça enlève la nécessité d'un fonds de décontamination pour le passé. On ne va pas trouver des compagnies d'assurances qui vont accepter d'assurer des risques rétroactifs. Ça ne se fait pas dans le domaine de l'assurance. Alors comprenons-nous bien, il peut y avoir, là, des combinaisons de formules, toujours à partir de la distinction que j'établissais tout à l'heure entre le passé et l'avenir. Regardons ces choses-là, M. le Président. C'est important. En un certains sens, sans ces moyens d'intervention là, je pense que le ministre ne pourra pas faire tout ce que, sur le plan juridique, le projet de loi 65 l'autoriserait de faire.

Et troisièmement, troisième aspect de ce volet, M. le Président, la volonté politique, bien sûr, et l'efficience du ministère. Et ça, je reconnais les intentions du ministre. Je reconnais volontiers qu'il veut changer les choses, qu'il a pris certains risques, par certaines de ses déclarations jusqu'à maintenant à l'égard de son ministère, en particulier, pour essayer de traduire sa volonté d'avancer dans ce domaine. Mais reconnaissons que nous sommes bien loin du compte. L'épisode de la Balmet, M. le Président, est un épisode navrant, sur le plan de l'efficience de l'action gouvernementale. Pensons que, en gros, le phénomène de la contamination d'un certain nombre de terrains au plomb, à la Balmet, est connu depuis l'été 1988, par des journaux, par des reportages de cet hebdomadaire qui s'appelle le Canada français et qui, à la suite d'une enquête, a révélé un certain nombre de choses, dont on pouvait peut-être trouver à l'époque que ce n'était pas scientifique, mais dont il se révélera, d'ailleurs, par la suite qu'il avait parfaitement raison. Ça aura pris un an, à la suite de ces divulgations, pour qu'on commence à faire certains prélèvements de sol, et qu'on constate que, effectivement, la situation était assez dangereuse. Et un an plus tard, ça prendra un an de plus pour qu'on commence les travaux de décontamination. Deux ans. (8 h 50)

II est évident qu'on ne peut plus continuer à fonctionner comme ça. Et, quand on voit, à

l'heure actuelle, avec quelle lenteur les choses avancent dans les sites contaminés au plomb dans l'est de Montréal, il faut bien se dire que, sur le plan de l'efficience, sur le plan de l'efficacité du ministère de l'Environnement, nous sommes, à l'heure actuelle, très très loin du compte. Et on pourra passer toutes les lois qu'on voudra, si on n'arrive pas à améliorer l'efficacité de ce ministère, on va se retrouver exactement dans la situation d'un gouvernement qui aurait des lois fiscales admirables et qui ne serait pas capable de ramasser le produit des impôts. C'est exactement ça. Ça ne nous viendrait pas à l'idée qu'on puisse dire: Ça prendra quatre ans pour vérifier une déclaration d'impôt, ou ça prendra deux ans, ou bien ça sera pas du tout. Eh bien, c'est la même chose quand on parle de la contamination au plomb, là, comprenons bien qu'il s'agit de quelque chose d'au moins aussi impératif pour notre société que de collecter les taxes. Et ça, il va bien falloir, M. le Président, si le gouvernement veut montrer le sérieux de ses intentions, qu'il mette dans le ministère de l'Environnement l'argent, oui, le personnel, oui, du personnel de qualité, oui, des cadres qui font fonctionner correctement - il y en a de tous les genres, des cadres - c'est à cette aune-là, à partir de ce test, qu'on s'assurera que les intentions qu'on voit commencer à s'exprimer par le projet de loi que nous avons devant nous, que le gouvernement et le ministre ont vraiment l'intention d'aboutir.

Cela étant dit, cependant, et avec toutes les réserves que je viens d'exprimer, M. le Président, ainsi que le critique en matière d'environnement de l'Opposition officielle l'a dit tout à l'heure, nous voterons en faveur de ce projet de loi en deuxième lecture.

Le Président: II n'y a pas d'autre intervention? Alors, le débat étant terminé, est-ce que la motion d'adoption du principe du projet de loi 65, Loi modifiant la Loi sur fa qualité de l'environnement, est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Président: Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Pagé: Alors, M. le Président, j'appelle maintenant l'article 9... Ah! je m'excuse.

Renvoi à la commission de l'aménagement et des équipements

Alors, je fais motion, M. le Président, pour que le projet de loi que nous venons d'adopter en deuxième lecture, le projet de loi 65 sur la qualité de l'environnement, soit déféré à la commission de l'aménagement et des équipements, pour son étude détaillée. Et ensuite, j'appelle l'article 9 du feuilleton, se référant au projet de loi 59, Loi modifiant la Loi sur la Société québécoise d'assainissement des eaux.

Le Président: Alors, est-ce que cette motion de déférence est adoptée?

Une voix: Adopté.

Le Président: Adopté. Est-ce que vous appelez l'article 9, M. le leader du gouvernement?

Projet de loi 59 Adoption du principe

Alors, à l'article 9, M. le ministre de l'Environnement propose maintenant la motion d'adoption du principe du projet de loi 59, Loi modifiant la Loi sur la Société québécoise d'assainissement des eaux. Je vais donc donner la parole à M. le ministre de l'Environnement.

M. Pierre Paradis

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, M. le Président. L'Assemblée nationale est aujourd'hui appelée à discuter du principe du projet de loi 59, Loi modifiant la Loi sur la Société québécoise d'assainissement des eaux.

Ce projet de loi a pour objet de modifier, compte tenu de la constitution de la municipalité en vertu de la Loi sur la réorganisation municipale du territoire de la municipalité de la Côte-Nord-du-Golfe-Saint-Laurent, la désignation des municipalités sur le territoire desquelles la Société québécoise d'assainissement des eaux peut, à certaines conditions, concevoir, construire, améliorer, agrandir, mettre en marche ou financer des réseaux d'égout ou d'aqueduc ou des installations de traitement de l'eau potable. Je souhaite, M. le Président, obtenir l'appui unanime de cette Assemblée afin de permettre la réalisation du programme d'intervention spéciale sur le territoire de la Côte-Nord. Merci, M. le Président.

Le Président: Merci, M. le ministre. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de La Prairie.

M. Denis Lazure

M. Lazure: M. le Président, je dois dire tout de suite, d'entrée de jeu, que l'Opposition est favorable à l'adoption du principe de ce projet de loi... Merci beaucoup. Comme vous voyez, nous collaborons, habituellement, surtout lorsqu'on ne nous met pas de bâillon dans la gorge, lorsqu'on ne fait pas fonctionner le claquoir du préfet de discipline en disant: Silence! plus de commission parlementaire! comme ça s'est fait dans trois cas, après à peine

quelques heures de débat. Quand on n'utilise pas ces techniques-là, l'Opposition collabore, M. le Président, de façon exemplaire, surtout en matière environnementale, lorsqu'il s'agit du bien-être de nos concitoyens de la Côte-Nord.

Je rappelle, durant ces brèves remarques, que la Société québécoise d'assainissement des eaux est un fleuron du gouvernement du Parti québécois. C'est une des nombreuses initiatives du gouvernement du Parti québécois en matière d'amélioration de l'environnement. Le chef de l'Opposition y a fait allusion, tout à l'heure, dans ses remarques au sujet du projet de loi 65. Le gouvernement du Parti québécois, à partir de 1978, a mis sur pied un programme d'assainissement des eaux, où il a fallu mettre les bouchées doubles, où il a fallu investir des milliards de dollars en assumant, avec les municipalités, jusqu'à 90 % des coûts des infrastructures. Nous avions à réparer le retard accusé suite aux années d'administration du Parti libéral, de 1970 à 1976, par le premier ministre actuel, qui était premier ministre à l'époque, de 1970 à 1976, les années durant lesquelles le gouvernement fédéral, avec l'argent de nos impôts, distribuait des centaines et des centaines de millions de dollars à l'Ontario pour que l'Ontario, avec ses municipalités, assainisse ses eaux municipales.

Pendant ce temps-là, le gouvernement du Parti libéral, de 1970 à 1976, avait les yeux fermés sur ce problème, complètement fermés. Il n'avait d'yeux que pour la Baie James. Rappelons-nous ça. Pendant qu'on n'avait d'yeux que pour la Baie James, le gouvernement fédéral avec l'Ontario dépensait des centaines et des centaines de millions de dollars de notre argent, si bien que, lorsque nous sommes arrivés au pouvoir, en 1976, nous avons dû assumer presque en entier les coûts de ce programme considérable d'assainissement des eaux, puisque le fédéral n'avait plus d'argent. Nous avons pris nos responsabilités. Nous avons créé cette Société québécoise d'assainissement des eaux qui a fait un excellent travail, qui continue de faire un excellent travail avec les municipalités.

Et ce projet de loi, comme le ministre de l'Environnement vient de le dire, est un projet de loi qui vient compléter à toutes fins pratiques l'application des divers programmes d'assainissement des eaux pour quelques municipalités de la Côte-Nord, notamment dans le comté de Duples-sis. Je sais que mon collègue de Duplessis est d'accord avec ce projet de loi. C'est pourquoi, au nom de l'Opposition, M. le Président, nous concourons et nous allons voter en faveur de l'adoption de ce projet de loi. Merci.

Le Président: II n'y a pas d'autre intervention? En conséquence, est-ce que la motion d'adoption du principe du projet de loi 59, Loi modifiant la Loi sur la Société québécoise d'assainissement des eaux, est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Président: Adopté. M. le leader du gouvernement.

Renvoi à la commission de l'aménagement et des équipements

M. Pagé: M. le Président, je fais motion pour que ledit projet de loi soit déféré à la commission de l'aménagement et des équipements pour étude détaillée, lui aussi.

Le Président: Est-ce que cette motion est adoptée?

M. Chevrette: Adopté.

Le Président: Adopté. (9 heures)

M. Pagé: M. le Président, j'appellerais la prise en considération du rapport, à l'article 46, sur le projet de loi sur la Société québécoise de récupération et de recyclage. Il n'y avait pas d'intervention prévue.

Le Président: C'est l'article 46 du feuilleton. Ça s'appelait le projet de loi 60.

M. Pagé: Alors, M. le Président, j'appelle l'article 43 du feuilleton, soit la prise en considération du rapport sur le projet de loi 47, Loi modifiant le Code civil du Québec concernant le partage du patrimoine familial.

Projet de loi 47

Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée

Le Président: Très bien. En conséquence, nous allons maintenant procéder à la prise en considération du rapport de la commission des institutions qui a procédé à l'étude détaillée du projet de loi 47, Loi modifiant le Code civil du Québec concernant le partage du patrimoine familial.

Nous avons reçu certains amendements concernant ce rapport, amendements présentés par Mme la ministre déléguée à la Condition féminine et ministre responsable de la Famille et qui concernent l'article 462.3 du Code civil, ainsi que l'article 817 du Code de procédure civile; un troisième amendement concerne une modification au titre du projet de loi 47. Est-ce qu'il y a des interventions sur ce rapport? Mme la ministre...

M. Chevrette: M. le Président, juste une seconde.

Le Président: Oui, M. le leader de l'Opposition.

M. Chevrette: M. le Président, pour fins d'accommodation, nous avons convenu que seule la ministre ferait son discours ce matin parce qu'elle a des engagements. Et compte tenu que la critique n'y est pas, on reportera dans le temps l'adoption du rapport comme tel. Il y aura seulement une partie de faite.

Le Président: Alors, très bien. En conséquence, je vais céder la parole à M. le leader du... D'accord?

M. Pagé: M. le Président, je veux confirmer ce qu'indique le leader de l'Opposition, effectivement, pour les deux projets de loi proposés par Mme la ministre. J'appelle la prise en considération de ces deux projets de loi, soit le projet de loi 47 et le projet de loi 61. Dans les deux cas, Mme la ministre va nous livrer son intervention et Mme la critique de l'Opposition officielle pourra intervenir plus tard, au cours de la séance.

Le Président: Très bien. En conséquence, nous aurons, disons, la discussion sur le rapport. Après le débat sur le rapport de la commission, nous procéderons, à ce moment-là, au vote sur les amendements proposés par Mme la ministre, vote en bloc sur les amendements et, ultérieurement, au vote sur le rapport tel qu'amendé, s'il y a lieu. Donc, Mme la ministre déléguée à la Condition féminine et ministre responsable de la Famille, je vous cède la parole.

Mme Violette Trépanier

Mme Trépanier: Merci, M. le Président. Le 2 mai dernier, je déposais en cette Chambre le projet de loi 47 ayant pour objet de clarifier certaines dispositions du Code civil du Québec en ce qui a trait aux droits économiques des époux. Les modifications proposées dans ce projet de loi visaient à contrer des iniquités qui, selon certains, auraient pu résulter d'une interprétation littérale de l'article 462.5 concernant l'établissement de la valeur du patrimoine familial. Il était important de clarifier la question de la plus-value acquise par un bien possédé avant le mariage et qui fait partie du patrimoine familial entre le moment de l'acquisition de ce bien et la date du mariage. Il nous fallait également modifier le texte de loi pour établir clairement que les sommes provenant de la vente de biens reçus par succession, legs ou donation et qui servent à l'achat d'un bien du patrimoine familial font en sorte que la valeur de ce bien remployé doit être déduite de la valeur nette du patrimoine familial ainsi que la plus-value afférente.

Depuis le dépôt de ce projet de loi, plusieurs intervenants nous ont fait connaître leurs commentaires, leurs suggestions et leurs recommandations en regard de la loi. Parmi les points soulevés, les plus importants étaient la question du remploi des biens autres que ceux acquis au moyen de sommes échues par succession, legs ou donation. J'ai jugé opportun de présenter en commission parlementaire un amendement ayant comme objectif d'étendre la déduction de la valeur nette du patrimoine familial permise en vertu de l'article 462.5 aux biens du patrimoine familial acquis en remploi d'un bien de même nature possédé au moment du mariage. En plus d'accorder à un bien du patrimoine payé avant le mariage un traitement équivalent au remploi des biens payés au moyen de sommes provenant d'une succession, d'un legs ou d'une donation, cette solution comporte aussi d'autres mérites. Elle enlève un irritant pour les gens qui songent à se remarier et qui désirent protéger le patrimoine déjà accumulé malgré son remplacement pour le destiner aux enfants nés de mariages antérieurs. Tout au long du processus qui a mené aux décisions dont je viens de faire état, mon objectif a toujours été de rechercher le plus large consensus possible et de prendre en compte les avis exprimés par divers organismes, notamment le Barreau du Québec, la Chambre des notaires, le Conseil du statut de la femme et certains groupes de femmes. C'est dans cet esprit que s'inscrivent les amendements que j'ai déposés à la suite de l'étude article par article en commission parlementaire.

En ce qui a trait au jugement sur le partage en cas de divorce, certains intervenants ont fait valoir qu'étant donné le libellé du premier alinéa de l'article 462.3, à l'effet qu'en cas de séparation de corps, de dissolution ou d'annulation du mariage, la valeur du patrimoine familial des époux est divisée entre eux, il y avait risque que le tribunal ne soit pas habilité a statuer sur le partage du patrimoine familial au moment où il prononce le jugement de divorce. À leur avis, il ne pourrait le faire que 31 jours après son prononcé, étant donné que la Loi sur le divorce prévoit que le jugement de divorce ne prend effet que 31 jours après son prononcé. Par souci de clarté, nous proposons donc de modifier l'article 817 du Code de procédure civile pour prévoir spécifiquement que le tribunal pourra statuer au même moment que la séparation de corps, la nullité du mariage ou le divorce, ou ultérieurement, si les circonstances le justifient, sur les questions relatives au patrimoine familial et aux autres droits patrimoniaux résultant du mariage.

À la lecture de l'article 462.3 du Code civil du Québec, nous constatons que le législateur a prévu, avec raison, que lorsqu'un partage a eu lieu à l'occasion d'une séparation de corps, il n'y a pas de nouveau partage si, sans qu'il y ait eu reprise volontaire de la vie commune, il y a ultérieurement dissolution ou nullité de mariage. Plusieurs intervenants nous ont fait valoir que cette disposition aurait avantage à être plus spécifique dans le cas de second partage. Pour éviter toute confusion et clarifier le texte, une

modification est donc proposée à l'article 462.3 pour prévoir qu'en cas de nouveau partage, la date de reprise de la vie commune remplace celle du mariage pour l'application des règles du patrimoine familial.

En conclusion, les nouveaux amendements qui sont soumis à cette Assemblée visent à clarifier les intentions du législateur et, comme je l'ai souligné précédemment, font l'objet d'un large consensus. Lorsqu'elle a été informée plus tôt cette semaine de notre intention de déposer ces nouveaux amendements, la bétonnière du Québec nous a fait part de sa satisfaction et de sa conviction qu'ils viendraient clarifier efficacement certains aspects de la Loi sur le patrimoine familial.

Pour ma part, je suis persuadée que grâce aux amendements auxquels l'Opposition officielle a collaboré dans un esprit d'ouverture, cette loi pourra rejoindre encore plus efficacement ses objectifs d'équité. Je vous remercie.

Le Président: Alors, M. le leader du gouvernement.

M. Pagé: M. le Président, tel que convenu, je demande l'ajournement du débat sur la prise en considération du rapport concernant le projet de loi 47 et je...

Le Président: Alors, est-ce que cette motion d'ajournement du débat est adoptée? Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Pagé: M. le Président, je vous invite à appeler l'article 47 du feuilleton se référant au projet de loi 61, Loi modifiant la Loi sur les services de garde à l'enfance.

Projet de loi 61

Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée

Le Président: Alors, l'article 47 du feuilleton. Nous allons maintenant prendre en considération le rapport de la commission des affaires sociales qui a procédé à l'étude détaillée du projet de loi 61, Loi modifiant la Loi sur les services de garde à l'enfance.

Est-ce qu'il y a des interventions? Mme la ministre déléguée à la Condition féminine et ministre responsable de la Famille.

Mme Violette Trépanier

Mme Trépanier: M. le Président, le projet de loi 61 modifiant la Loi sur les services de garde à l'enfance a pour but d'inclure dans le mandat de l'Office des services de garde à l'enfance une disposition lui permettant de remplir toute autre fonction que peut lui confier le gouvernement.

En juin 1989, le gouvernement a annoncé que des sommes seraient dégagées afin de défrayer les coûts associés à l'implantation d'un régime d'assurance collective et de congé de maternité pour le personnel des garderies. Le gouvernement concrétisait son engagement, en janvier 1990, en confirmant qu'une subvention équivalant à 50 % du coût d'un tel régime, jusqu'à un maximum de 3 % de la masse salariale, sera versée par le gouvernement aux garderies employeurs qui choisiront d'adhérer à un tel régime. Cette subvention servira à couvrir 100 % des coûts du programme de congé de maternité.

Afin de respecter cet engagement, le gouvernement a confié à l'Office des services de garde à l'enfance un mandat de preneur et d'administrateur du régime d'assurance collective et de congé de maternité proposé aux employés des garderies. Il a voulu que ce soit l'Office qui effectue les travaux requis puisqu'il était le mieux habilité à le faire. (9 h 10)

Afin de respecter l'échéance du 1er juillet 1990, date de la mise en vigueur du régime, l'Office a procédé à la préparation de la concrétisation juridique de ce régime. Aussi, l'Office a préparé la modification que nous avons adoptée en commission parlementaire lundi dernier. Il a accepté la proposition d'assurance et il doit voir maintenant a la mise en vigueur du régime. L'Office a rempli adéquatement la tâche qui lui avait été confiée.

Diverses étapes ont été franchies par l'Office des services de garde à l'enfance afin de déterminer quelle compagnie d'assurances sera choisie. L'Office des services de garde avait préalablement commandé une étude de faisabilité à une firme spécialisée d'actuaires sous la supervision du Conseil du trésor. Dans le cadre de cette étude, il a fallu recueillir et analyser des renseignements sur les régimes d'avantages sociaux ayant cours dans des entreprises du secteur privé de taille et de mission similaires aux garderies. Le choix des protections s'est effectué avec la collaboration, je tiens à le souligner, de représentants de Concertaction inter-régionale des garderies du Québec, de l'Association des propriétaires de garderies du Québec et de la CSN.

En janvier 1990, un appel d'offres public a paru dans divers quotidiens. Deux compagnies d'assurances déposèrent une proposition en bonne et due forme. Elles furent entendues devant un comité de sélection regroupant tant des membres de l'Office des services de garde, du Conseil du trésor que d'un actuaire-conseil venant d'une firme indépendante. Ce comité arrêta son choix sur la SSQ Mutuelle d'assurance puisqu'elle avait, entre autres, déposé la soumission la plus basse.

Comme je l'ai mentionné au début de mon intervention, le gouvernement a confié à l'Office des services de garde à l'enfance le mandat

d'être preneur et administrateur de ce régime. Cependant, les fonctions et pouvoirs confiés à l'Office de par sa loi n'incluaient pas nécessairement ces responsabilités spécifiques. Il n'est pas démontré clairement que les fonctions de veiller à ce que soient assurés des services de garde de qualité, d'offrir un soutien technique et professionnel aux personnes oeuvrant dans les services de garde ou d'accorder des subventions comprennent le fait d'être preneur et administrateur d'un régime tel que proposé. Il a été donc jugé essentiel de proposer une modification à la Loi sur les services de garde à l'enfance au plan de la sécurité juridique et ainsi éviter toute ambiguïté d'interprétation que nécessiterait le fait d'être preneur et administrateur d'un régime d'assurance.

Lors de la commission parlementaire, la députée des Chutes-de-la-Chaudière a mentionné, dans ses remarques préliminaires, son inquiétude face à l'ajout d'un article aussi large. Je tiens à indiquer, pour le bénéfice des membres de cette Assemblée, que la rédaction d'une formulation aussi large permettra, dans l'avenir, d'accorder d'autres mandats jugés nécessaires par le gouvernement afin que l'Office, qui est responsable du développement et du contrôle d'un secteur en pleine évolution, se dote de moyens plus efficaces pour l'avenir.

En terminant, je m'en voudrais d'oublier de vous rappeler les effets bénéfiques que ce régime d'assurance collective et de congé de maternité procurera à tous les employés des garderies au Québec. Ceci est un pas en avant dans l'amélioration de leurs conditions de travail. Je vous remercie.

Le Président: Est-ce qu'il y a d'autres interventions? Il n'y a pas d'autres interventions. M. le leader du gouvernement.

M. Pagé: Tel que convenu, je demande l'ajournement du débat sur la prise en considération de ce rapport.

Le Président: Est-ce que cette motion d'ajournement est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Président: Adopté.

M. Pagé: Et je vous invite à appeler l'article 48 du feuilleton, M. le Président, pour entendre la prise en considération du rapport du projet de loi 70.

Projet de loi 70

Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée

Le Président: À l'article 48 du feuilleton, nous allons maintenant prendre en considération le rapport de la commission des affaires sociales qui a procédé à l'étude détaillée du projet de loi 70, Loi concernant l'adoption et modifiant le Code civil du Québec, le Code de procédure civile et la Loi sur la protection de la jeunesse. Nous avons également reçu des amendements transmis en temps utile par Mme la députée de Marie-vïctorin. Alors, je suis prêt à reconnaître un premier intervenant. M. le ministre délégué à la Santé.

M. Christos Sirros

M. Sirros: Merci, M. le Président. Le projet de loi 70, M. le Président, vise effectivement à assouplir les procédures en matière d'adoption internationale, à réduire un certain nombre d'étapes qui sont là actuellement et donc, à raccourcir, finalement, les délais, M. le Président. Ça a été discuté, comme vous le savez, en deuxième lecture et ça a aussi reçu l'aval, en quelque sorte, de l'Opposition. Nous l'avons étudié article par article également en commission parlementaire et, dans sa grande majorité, le projet de loi a été adopté sans amendement. Je constate que la députée de Marie-Victorin voudrait apporter quelques amendements. On en discutera, mais je suis convaincu que les arguments qui ont été faits lors de l'étude article par article du projet de loi, M. le Président, seront remis sur le parquet de l'Assemblée. Le gros bon sens de ces arguments pour, finalement, repousser, j'imagine... Les mêmes amendements qui auraient été discutés en commission parlementaire seraient ramenés ici.

Mais, M. le Président, ce qu'il est important de retenir de ce projet de loi, c'est que, finalement, non seulement le projet de loi vise à rendre les procédures plus flexibles et, ce faisant, à raccourcir les délais, mais il devient très important, M. le Président, de savoir que l'un des effets majeurs de ce projet de loi sera effectivement le recentrage, en quelque sorte, du rôle que le service gouvernemental aura à jouer dans la question des adoptions internationales, de l'adoption des enfants hors du Québec.

M. le Président, le projet de loi permet trois voies différentes par lesquelles on pourrait procéder pour faire l'adoption d'un enfant né hors Québec, c'est-à-dire soit de maintenir la situation actuelle, qui est que la personne passe par le service gouvernemental - et je vous fais remarquer qu'actuellement c'est la seule façon légale de procéder. Ceci change de façon assez radicale, en ouvrant donc deux autres portes. Premièrement, la porte d'un organisme agréé et non pas d'un organisme reconnu, telle qu'est la situation actuelle; donc, on souhaite aussi voir la naissance d'autres organismes qui voudraient s'impliquer dans le domaine de l'adoption internationale, afin de permettre l'accroissement des sources, en quelque sorte, et des contacts qu'on

peut avoir dans d'autres pays. La troisième voie, M. le Président, qui est une voie qui a souvent été réclamée par des parents en faisant des adoptions, c'est la voie des contacts directs. En termes de contacts directs, ça veut dire que les parents peuvent entreprendre eux-mêmes leurs démarches, en demandant la vérification du ministre, afin de s'assurer, telles que sont nos connaissances, que les procédures suivies sont les procédures régulières dans le pays où se fait l'adoption. Les parents pourraient, par la suite, compléter leur adoption ici, au Québec, M. le Président, sans difficulté.

Il y a un point sur lequel on a discuté assez chaudement, je dirais, en commission parlementaire. J'imagine que ça va faire l'objet des amendements de la députée, et c'est toute la question de la possibilité, pour des tierces personnes, d'agir comme intermédiaires dans des procédures d'adoption, M. le Président.

Nous avons choisi, et très délibérément - et je le disais en commission parlementaire - de ne pas retenir cette possibilité, M. le Président, parce que, d'une part, c'est le sens et ce sont les tendances qui existent sur le plan international où plusieurs pays, à travers surtout, je dirais, les discussions qui se font au niveau de La Haye, M. le Président, autour de la question de l'adoption des enfants sur le plan international ainsi que de la protection des droits des enfants, où le mouvement se développe de plus en plus de ne pas permettre des intermédiaires privés, tierces personnes agissant, afin de compléter des adoptions internationales, pour un autre, parce que, M. le Président, la dynamique qui peut se développer avec l'utilisation des associations à but non lucratif est une garantie meilleure, tant pour l'intérêt des enfants que pour l'avenir de ces enfants dans leur famille adoptive. Le choix que nous avons fait ici, c'est que nous ne voulons pas voir l'émergence au Québec d'un genre de carrière ou de profession, si on peut parler ainsi, de courtier d'enfants, si je peux le libeller ainsi.

Vous comprendez, M. le Président, qu'on oeuvre dans un domaine très émotif, dans un domaine où on touche les sentiments les plus profonds et qu'il s'agit de s'assurer qu'on met, d'une part, toutes les chances du côté de la défense des intérêts de l'enfant, mais, également, de la défense des intérêts, je dirais, des parents qui veulent adopter, M. le Président, en s'as-surant que les choses se fassent sans l'intervention pécuniaire qui peut en résulter en reconnaissant des individus privés qui feraient ça non pas pour du bénévolat, M. le Président, mais contre une certaine rémunération.

Alors, nous sommes convaincus qu'avec de la bonne volonté et l'appui des associations de parents, des organismes gouvernementaux ainsi que des parents eux-mêmes, nous pourrons envisager une augmentation du nombre des adoptions, M. le Président. Ce serait l'autre étape à laquelle il faudrait qu'on s'attaque dans les quelques mois à venir, c'est-à-dire d'investir nos énergies afin de s'assurer qu'on puisse développer d'autres contacts dans les pays et les sources d'où peuvent provenir des enfants pour les parents qui veulent adopter des enfants nés hors Québec et de pouvoir ainsi trouver des foyers pour les enfants qui sont abandonnés dans d'autres pays, M. le Président, et qui pourraient ainsi envisager un meilleur avenir ici.

Je sais que la nuit a été longue pour plusieurs de mes collègues et je ne m'attarderai pas plus sur ce point-ci. Je crois que nous avons amplement fait la démonstration que le projet de loi assouplit effectivement les procédures, raccourcira les délais et augure bien pour l'émergence d'une nouvelle coopération entre les organismes qui font de l'adoption, les associations de parents, les services gouvernementaux et les parents eux-mêmes. Je suis convaincu que nous oeuvrons tous, dans ce cas-ci, pour nous assurer qu'un certain nombre d'enfants abandonnés dans d'autres pays puissent trouver un avenir meilleur ici tout en permettant à une famille d'ici qui veut effectivement fonder une famille avec des enfants, de combler son désir.

Sur ce, je termine et, si besoin il y a, on pourra revenir avec une intervention à la suite des amendements de Mme la députée de Marie-Victorin. Merci, M. le Président.

Le Président: Alors, merci, M. le ministre délégué à la Santé et aux Services sociaux. M. le leader du gouvernement.

M. Pagé: Alors, merci, M. le Président. Je demande l'ajournement du débat sur la prise en considération de ce rapport.

Le Président: Très bien. Uniquement avant ça, je veux informer l'Assemblée que les amendements que nous avons reçus de Mme la députée de Marie-Victorin, dont deux amendements à l'article 12 du projet de loi qui concerne la Loi sur la protection de la jeunesse et plus particulièrement les articles 135.1.1 et 135.1.3 de la Loi sur la protection de la jeunesse, ces amendements seront mis aux voix à la fin du débat sur le rapport. Ils seront mis au vote en bloc. Est-ce que la motion d'ajournement du débat est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Président: Adopté. M. leader du gouvernement.

M. Pagé: Alors, M. le Président, il est 9 h 23 en ce matin du jeudi 21 juin. Je veux remercier l'ensemble des collègues des deux côtés de la Chambre qui, je pense, ont travaillé de façon très utile, très sereine, très calme, malgré le fait que la fin de session et les circonstances

nous aient obligés à siéger une séance de 23 heures et même un peu plus. Je voudrais remercier le personnel, vos adjoints qui sont à la table, et tout le personnel qui ont dû s'astreindre à passer une nuit. Pour moi, c'est la deuxième fois que j'ajourne ou que je termine une séance à 9 h 15 le matin. Je dois faire part au leader de l'Opposition que, la première fois où j'ai terminé les travaux d'une séance à 9 h 30 le lendemain matin, c'était de ma faute, si le leader du gouvernement avait dû faire en sorte de siéger toute la nuit. Cette année, j'ai dû me soumettre et faire en sorte, compte tenu des nombreuses interventions importantes, fondées de l'Opposition, de convier l'ensemble de mes collègues à siéger jusqu'à 9 heures. Alors, M. le Président, je vous demande, en vous remerciant encore une fois, d'ajourner nos travaux à ce matin 10 heures.

Le Président: Alors, est-ce que cette motion d'ajournement de nos travaux est adoptée?

Une voix: Adopté.

Le Président: Adopté. En conséquence, l'Assemblée nationale ajourne ses travaux qui reprendront ce matin, le jeudi 21 juin, à 10 heures.

(Fin de la séance à 9 h 24)

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