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Version finale

34th Legislature, 2nd Session
(March 19, 1992 au March 10, 1994)

Wednesday, June 16, 1993 - Vol. 32 N° 114

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Journal des débats

(Dix heures seize minutes)

Le Président: Alors, Mmes et MM. les députés, nous allons nous recueillir quelques instants.

Je vous remercie. Veuillez vous asseoir.

Avant de procéder aux affaires courantes... Mmes et MM. les députés, veuillez prendre place, s'il vous plaît! Mmes et MM. les députés!

Démission du député de Laval-des-Rapides, M. Guy Bélanger

Avant de procéder aux affaires courantes, je vais reconnaître M. le député de Laval-des-Rapides.

M. Bélanger (Laval-des-Rapides): Alors, M. le Président, chers collègues, j'ai demandé la parole aujourd'hui pour vous faire part de mon intention de me retirer de la vie politique.

Il y a 8 ans, je faisais mon entrée en cette Chambre de l'Assemblée nationale. Je laissais alors un poste d'avenir pour un engagement politique qui me permettait, semblait-il, de grands espoirs. Je pouvais donner beaucoup, j'étais bien préparé et je pensais que mon expérience professionnelle me permettait d'aspirer à un rendement intéressant. Mais, après 8 ans, compte tenu des circonstances, je constate qu'il n'y a plus d'avenir en politique pour moi. Je ne peux pas aider comme il se doit les citoyens de mon comté et, également, ceux du Québec. Considérant cette situation, j'ai donc décidé de démissionner.

Or, aujourd'hui, c'est ma dernière présence en cette Chambre. Je veux d'abord remercier les électeurs de Laval-des-Rapides de m'avoir fait confiance à 2 reprises et j'en profite pour leur témoigner toute ma gratitude et pour leur dire que j'ai essayé d'être à la hauteur de leur confiance et que j'ai vraiment fait de mon mieux.

Je voudrais aussi remercier le personnel de mon bureau dont, entre autres, Mme Hamel, qui est avec moi depuis 18 ans, et, évidemment, dans le contexte, ça va séparer nos chemins. Ça a été une collaboratrice hors pair et je tenais à le souligner.

Durant les 3 dernières années en particulier, j'ai oeuvré dans le dossier constitutionnel. D'abord, à la commission Bélanger-Campeau et à cette commission que j'ai eu l'honneur de présider, soit celle chargée d'étudier les impacts et les questions afférentes à l'accession du Québec à la souveraineté.

De ces 2 commissions, de la rencontre avec autant d'experts et de représentants de la population, j'en retire une conviction: les choses ont changé au Québec, comme dans le reste du monde, d'ailleurs. Qui aurait pu prédire, il y a seulement 3 ans, que le communisme tomberait comme il l'a fait? Que la social-démocratie serait défaite en Suède? Que les 2 Allemagne seraient réunifiées? Que l'ordre politique connu depuis longtemps serait bouleversé comme il l'est? Que les Américains et les Russes seraient alliés dans les forces de paix de FONU? Et même ici, au Québec, qui aurait cru que les contestations en cette Chambre seraient davantage le fruit des personnes âgées ou des marchands plus que des assistés sociaux? Il y a des choses qui ont changé. Elles ont changé beaucoup.

Je pense que l'expression des attentes de la société n'est plus la même. Mais quelles sont ces attentes? Il y a 25 ans, les sociologues nous ont dit quelle société on devrait bâtir, et on avait organisé alors le réseau de la santé, la Caisse de dépôt, la nationalisation de l'électricité, le ministère de l'Éducation. Bref, ce fut la Révolution tranquille de Jean Lesage et ça a été une époque de prospérité, je pense, sans précédent pour le Québec. Et ce fut, par la suite, l'ère des économistes et de leurs théories économiques, les grands ensembles, la concentration des pouvoirs à la Trudeau. On parlait de la «trudeaumanie». On a parlé du «Québec inc.» et toute cette effervescence qui nous amenait à une certaine fierté. Mais ces époques sont révolues. (10 h 20)

Enfin, cela ne veut pas dire que nos systèmes économiques soient stabilisés pour autant. Non. Récession, inflation, dépression; c'est le lot, actuellement, de notre système économique, et je pense que ces mouvements-là sont annonciateurs de grands changements. Autant pour le capitaliste que pour le socialiste, il y a des changements importants qui s'en viennent dans nos systèmes. Je pense que nous sommes rendus à une société de philosophes, à une société où les plus grands problèmes sont des problèmes d'éthique, beaucoup plus que des problèmes politiques.

Pouvons-nous tolérer encore davantage la pauvreté? L'euthanasie doit-elle être acceptée comme une solution? La protection de l'environnement, qui devient une grande préoccupation, le suicide chez les jeunes, la situation des autochtones, et là je ne fais pas allusion à la contrebande des cigarettes qui n'est absolument que le symptôme d'un problème beaucoup plus grand que ça, la problématique de l'égalité des femmes, problématique aussi de la violence, la violence qui explose gratuitement comme ça. On fête un objet de rejouissance extraordinaire et, tout à coup, la violence éclate partout. On ne sait pas trop comment. On est dépassé par ça. On est renversé. Mais ça existe, dans notre société.

Ce ne sont pas là des problèmes politiques ni, non plus, d'ordre économique. Ce sont des problèmes de philosophie, d'éthique, de valeurs et ça appelle, je pense, à un nouveau leadership de la part de nos politiciens. Nos modèles économiques n'ont pas survécu à tous ces changements-là. Steinberg n'est plus, Provigo en arrache, Laval in n'existe plus, et pourtant c'étaient là les

objets de fierté les plus grands qu'on avait en cette Chambre. Qui n'a pas cité Lavalin ou ces autres organismes comme modèles dans ses discours en cette Chambre? On en était fier, les Québécois. Les grands ensembles, je pense, ne peuvent plus exister. Décentralisons. Allons vers les communautés locales. Soyons plus près des gens et de leurs problèmes.

Il y a 10 ans, le peuple québécois a voté non à la négociation de sa souveraineté. Il y a quelques mois, ce même peuple a voté non à un renouvellement du fédéralisme. À quoi votera-t-il oui?

La seule continuité dans tous ces changements, c'est le discours politique qui m'apparaît, lui, ne pas avoir changé et la fonction publique qui, elle aussi, est restée là, d'une stabilité et d'une constance dans sa pensée et dans son action. Ce discours politique, quant à moi, s'est usé à brasser de l'eau chaude pour qu'elle ne colle pas au fond. Pourtant, on a dit: Le Québec est et sera toujours libre de ses choix. Et plus que jamais je continue de croire que M. Bourassa avait raison, mais on aborde tous ces changements, tous ces bouleversements sociaux, aussi profonds soient-ils, de la même façon, et cela, que l'on soit libéral ou péquiste. on est à l'ère des coupures, on suit les sentiers battus parce que c'est plus facile de marcher, bien qu'on ne sait pas toujours où ça mène. même remède, même résultat. mais le problème m'apparaît beaucoup plus profond. dix ans avec les péquistes, 8 ans avec les libéraux, et le même résultat. on se demande encore combien de temps nous serons capables de nous offrir tous les services que nous avons comme société. il y a 10 ans, le parti québécois avait posé cette même question et avait, d'une façon courageuse à l'époque, posé un geste qui était une coupure des salaires de 20 %. et on a vu ce qui est arrivé à l'élection suivante. on est à l'ère des coupures, et je pense que c'est un manque de vision en avant, un manque de moyens, où on cherche et, de toute façon, 10 ans après, on est encore devant le même problème, avec juste plus d'acuité. j'ai l'impression qu'on a pelleté la neige en avant, qu'on n'a pas réglé le problème. c'était plus facile, mais, voilà, le peuple s'inquiète et ne veut plus de ces dettes. il met dehors ceux qui les font ou il tend à le faire en tout cas.

Le Québec, comme tous les États du monde, est devenu un État complexe à administrer. Quel défi que ces arbitrages de conflits interpersonnels, sectoriels, régionaux, locaux, internationaux! Mais qui aura le courage de poser la vraie question? Qui saura nous présenter avec imagination et créativité les solutions nouvelles? Qui aura cette vision de ce que doit être le Québec dans 5 ans, dans 10 ans, dans 20 ans? Et quels moyens prendre pour y arriver? Avec quel courage défendra-t-il ces solutions neuves et réalistes et qui seront peut-être fort éloignées de celles que l'on connaît actuellement? Et force est d'avouer que ça demandera, je pense, beaucoup de courage. Où sont ces leaders, ces Jean Lesage, ces René Lévesque et ces Robert Bourassa du défi des 100 000 emplois, du défi du Nord, de l'énergie du Nord?

J'en arrive à la conclusion que notre façon de faire de la politique n'est plus capable d'être proactive. Elle sait tout juste être réactive, réagir comme si les événements la menaient plutôt que, elle, influencer les événements. On est à la remorque des systèmes plus qu'on les anticipe et qu'on agit. Notre système est sclérosé. Et je ne parlerai pas de ces lignes de parti qui, de part et d'autre, existent et qui ont pour effet, je pense, de stériliser la réflexion et l'action chez les politiciens. Comment remplacer la ligne de parti? Je vais vous avouer que je n'ai pas fait, pas poussé d'étude là-dessus, mais il me semble qu'il y a matière à se questionner là-dessus.

Il ne faut pas sortir des sentiers battus, avec la ligne de parti, et penser autrement que les autres. Vous savez, le parti, sa cohésion... Mais c'est aussi, je pense, sa grande faiblesse. Et je ne parle pas comme spécialiste en dynamique de groupe, là. Mais pourquoi être 100, si on doit obligatoirement tous penser pareil? Un seul suffirait, non? Et la ligne de parti oblige!

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bélanger (Laval-des-Rapides): C'est vrai! Sans parler des disputes entre leaders qui nous obligeaient à passer des nuits ici.

Bof! Vous n'êtes pas pire que les autres avant! J'en ai connu plusieurs, puis ce n'est pas leur caractère, c'est la situation qui le veut.

Ce soir, je vais redevenir membre ordinaire du peuple et, en tant que tel, j'ai le goût de demander une année sabbatique, une année sans politique, sans gouvernement, sans rien. Tout à coup que ça marche. Pourquoi pas? Des fois, je me demande si la politique n'est pas devenue trop sérieuse pour la laisser aux politiciens. Mais, en quelques heures, comme peuple, je saurai ce qu'il pense des politiciens. Déjà les sondages nous le disent: on est en bas de l'échelle de crédibilité. Et je sors un peu de mon texte.

Je lisais dernièrement dans une revue européenne, un des pays d'Europe: Les députés sont au même niveau que les prostituées dans les sondages d'opinion. Ça prouve que la politique, ce n'est pas fort, tout au moins. Et ce n'est pas le même salaire, oui. Ha, ha, ha!

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bélanger (Laval-des-Rapides): Dans les deux cas, je suppose que c'est imposable. Enfin!

Alors, dans cette crédibilité-là ? s'il vous plaît! ? dans cette échelle de crédibilité, je pense, on est en bas. Qui d'entre nous ne s'est pas fait dire un jour ou l'autre: Pas toi, toi, tu n'es pas pareil, mais les autres, ce sont tous des voleurs, des patineurs. Vous vous en mettez plein les poches. Vous êtes tous pareils! Toi, tu es un petit peu différent. Ça, c'est parce qu'on est là, parce que, quand on n'est pas là, ils disent la même chose. Qui ne l'a pas entendu? Autant d'un bord que de l'autre. C'est ça l'image que la population a de nous.

Comment allons-nous changer cette image-là? Comment on va faire face à ça? Je pense que c'est le défi qui attend les politiciens aujourd'hui. Et ce n'est pas si facile. On peut en rire aujourd'hui, on est capable de rire de nous un peu, mais je pense que ça ne sera pas si facile. Ce défi-là n'est pas aussi évident. Et le peuple continue à voter. Évidemment, comme je vous le disais tout à l'heure, est-ce que la politique n'est pas devenue trop sérieuse pour être confiée à des politiciens? Je pense que les politiciens devront reprendre la politique en main. Enfin...

M. le Président, c'est après mûre réflexion, après avoir bien observé autour de moi, après avoir consulté que j'ai mobilisé mon courage et que j'ai pris ma décision. Il n'y a pas de courage facile. La facilité eût été d'endurer, de laisser aller plutôt que d'agir ou de laisser les événements décider pour moi, par exemple ne pas me représenter à la prochaine élection. Peut-être aussi le courage commandait-il de continuer, de me dépasser, de donner davantage, d'essayer. Mais je sais aujourd'hui que décider comporte des risques. Décider, c'est endosser la responsabilité de son geste, et un geste qui exige de s'informer, de réfléchir, de discuter.

Jusqu'à aujourd'hui, j'ai le sentiment d'avoir eu une vie remplie et intéressante et, comme beaucoup, une vie remplie d'action, d'efforts et de courage ? il y a des petits courages à tous les jours dont il faut faire preuve. Et je peux dire que, dans ces 8 années de politique, je me suis donné coeur et âme, pas corps et âme, mais coeur et âme, sans jamais compter mes efforts et sans jamais ménager ma peine non plus, et surtout sans crainte d'exprimer mes opinions. Eh oui! Je suis ainsi fait et je vais continuer à le faire où je serai, quelles que soient les situations. C'est, comme on dit, «built in», c'est inscrit dans la masse. Alors, je ne suis ni désabusé, ni déçu, ni amer, car, je viens de le dire, j'ai depuis toujours mené une vie intéressante, et mon seul regret, c'est d'avoir peut-être mis autant de temps à m'en rendre compte, parce que ça prend des événements des fois pour s'arrêter, puis réfléchir, puis dire: Bien, coudon, ce n'est pas si pire mon affaire! Mais ça prend du temps, ce n'est pas toujours facile, ce n'est pas toujours évident.

Mais je dois avouer aussi que la vie parlementaire n'est pas facile. Vous avez choisi le plus dur des métiers et le plus ingrat aussi. Il y a peu de gens qui savent ce que c'est que de passer ses fins de semaines à l'âge d'or, puis partout, à s'occuper des gens, à recevoir les plaintes de tout le monde, les doléances des fois de quelqu'un qui commence son explication puis qui finit sur une autre explication, et tu ne sais plus où il est rendu, et tu essaies de suivre parce que tu veux l'aider, et tu y crois. Ce n'est vraiment pas facile. Il faut faire du bureau de comté pour savoir comment ce n'est pas facile. Il faut le savoir aussi quand vous allez au restaurant et que tout le monde est après vous pour vous demander quelque chose: Aïe! il faut que je te demande ceci. Aïe! es-tu capable de m'arranger ça? On n'a plus d'intimité, on n'a plus de vie privée. Ce n'est vraiment pas facile. Là-dessus, je garderai toujours pour vous tous une grande admiration. (10 h 30)

Je peux quand même dire que j'ai vécu des bons moments comme président de commission parlementaire. Il est bien évident que, bien que ma santé soit plus fragile aujourd'hui qu'à mon arrivée il y a 8 ans, je ne quitte pas, non plus, pour des raisons de santé. Est-ce que j'ai l'air d'un gars malade? Ha, ha, ha! Je suis, je pense, dans une forme physique exceptionnelle, et l'excuse serait trop facile dans mon cas, voire même, en tout cas, ce serait me mentir au moins à moi, sinon aux autres, des choses que je ne peux pas faire. Je ne quitte pas non plus, et je tiens à le préciser, contrairement à ce qu'un journaliste a écrit, parce qu'on a acheté la paix, on m'a trouvé un job. Je n'ai pas de job de personne et je n'en ai pas besoin. Je m'arrange fort bien seul. Et, croyez-moi, lorsque j'aurai besoin des autres, je demanderai. Mais, pour le moment, je n'ai rien demandé à personne. Or, l'État ne me doit rien, et je quitte en excellents termes avec tout le monde, un petit peu malheureux, parce que je pense qu'on ne quitte pas ces lieux-là facilement. Mais, en tout cas...

Mon processus de réflexion date de mai et juin 1992, soit avant mes problèmes de santé. J'avais alors averti le premier ministre, M. Bourassa, de mon intention de partir. L'un et l'autre étions en apparence pleins de santé à ce moment-là. Et j'en profite d'ailleurs pour me réjouir avec M. Bourassa de son retour à la santé et lui souhaiter ardemment le maintien de sa santé qui, j'en suis très conscient, est un bien très précieux. Je vois Mme la vice-première ministre à qui je pourrais aussi transmettre les mêmes voeux. Donc, plus que ma santé, plus que ma désillusion, si tant est qu'il y en a ? parce qu'il y a des gens qui forcent pour que j'en aie, ça fait qu'il y en aura ? c'est le sentiment d'inefficacité, de paralysie, le sentiment de trahir la confiance de mes électeurs, face aux changements qui s'en viennent, qui font que je préfère partir. Je ne voudrais pas les tromper. Je ne voudrais pas les induire en erreur. J'ai toujours fait de mon mieux. J'ai toujours essayé... Actuellement, je pense que je ne peux pas aller plus loin. Je dois donc partir.

Il faudrait, je pense, M. le Président, que les élus reprennent en main la gestion de l'État et non la laisser aux fonctionnaires qui ne sont pas imputables, eux. Pourtant, il y avait eu une commission bipartite, non partisane, qui avait fait un travail fort valable à ce sujet. J'espère qu'on donnera des suites à ça et qu'on en arrivera à une politique non partisane où tous les efforts convergeront vers les citoyens, plus que vers les partis.

Il faudra aussi décentraliser les pouvoirs vers les régions, ce qui aura un effet mobilisateur très stimulant pour ces régions qui sont capables, pour l'essentiel, de décider de leur sort. Donc, plus de pouvoirs aux communautés locales.

Vous savez, on a réussi à baisser le taux de pauvreté de 8 sur 10 qu'il était à 1 sur 10 chez les personnes âgées. C'est des recherches d'un sociologue que j'ai

lues dernièrement. Mais, chez les moins de 35 ans ? malheureusement, mes chiffres ne sont pas validés, mais je vous les donne quand même, c'est un ordre de grandeur ? il est de 5,2 sur 10. Ça veut dire que 5,2 jeunes de moins de 35 ans sur 10 vivent sous le seuil de la pauvreté. Et ça va en augmentant sans cesse. Pour moi, c'est une catastrophe qu'on ne voit bien qu'à travers les statistiques. Combien de jeunes avocats sont sur le bien-être social, après autant d'années d'études? Combien de comptables agréés sont sur le bien-être social? Combien d'ingénieurs sur le bien-être social? Ils ne sont plus sur le chômage, ils ont fini. Alors, il me semble que c'est là quelque chose d'assez catastrophique et une chose qui devra nous préoccuper grandement.

Il faudra aussi arrêter de faire croire en l'État-providence. L'État n'est pas responsable du bonheur des individus. C'est là une responsabilité personnelle et non collective. L'État ne peut pas créer... Il ne peut, tout au plus, que créer des conditions qui permettent généralement le bonheur, mais il ne peut pas garantir le bonheur à lui seul. Il faudra, un jour, nous remettre à l'écoute de nos citoyens car, en substance, ils nous disent partout où on leur en donne l'occasion leur immense besoin de retrouver la responsabilité de leur destin.

Notre action a été trop centralisatrice et a sérieusement hypothéqué l'espace de liberté des individus en les rendant dépendants du gouvernement pour un nombre considérable de permis, d'autorisations ou de droits qui, finalement, restreignent plus qu'ils ne responsabilisent. Rendons aux individus et aux communautés leur capacité d'agir, comme dans le premier mandat. Revenons aux positions de M. Gobeil où l'on disait qu'il y a trop de gouvernements. La commission Bélanger-Cam-peau a bien démontré que cette centralisation aux mains d'une bureaucratie compétente, il est vrai, mais boulimique comme ce n'est pas possible, n'est pas le fruit des politiciens. À preuve, après 9 ans et 17 jours avec le Parti québécois et 8 ans avec le Parti libéral, c'est le même constat.

En fait, les politiciens devront défendre la population et non la bureaucratie. Faire en sorte de ne pas se cacher derrière des chartes des droits et libertés, mais derrière, plutôt, un nouveau contrat social basé sur des devoirs et responsabilités. Les droits et privilèges, tout le monde les a, tout le monde les connaît, au Québec. On les utilise avec abondance, même. N'importe qui qui entre dans nos bureaux nous fait état de ses droits et de ses privilèges. Mais qui nous parle de ses devoirs et de ses responsabilités? Et où on fait, nous, appel à ce sens des devoirs et des responsabilités? Il m'apparaît que le prochain contrat social à passer avec la population devra être à cet effet-là. Et, évidemment, éliminer les dédoublements coûteux avec le fédéral. Éliminons, dans la même foulée, les dédoublements coûteux avec les communautés locales. Refaisons le plein de pouvoirs de haut en bas, comme le suggérait si bien le rapport Allaire. En fait, M. le Président, j'arrête ma réflexion parce que... J'en aurais encore pour longtemps, évidemment, beaucoup à dire.

J'ai peut-être un grand défaut, M. le Président, c'est que j'aime le Québec. C'est ma province, j'en suis fier et je veux le meilleur pour cette province-là. Or, au-delà de cette fierté-là, je voudrais qu'un jour on donne à cette province tout le sens, toute la force, tous les pouvoirs dont elle a besoin pour s'épanouir, pour se développer comme on le veut.

Or, à mes collègues, je voudrais vous remercier tous car, au-delà de la partisanerie et de la politique avec un petit p, j'ai toujours agi avec sincérité. Si, à l'occasion, je vous ai secoués ou remués avec mes déclarations, vous m'avez trouvé un petit peu baveux, mais c'est peut-être parce que je vous aimais beaucoup. Dans le fond, je voulais brasser les affaires un peu.

À mes collègues de l'Opposition, merci à vous aussi, car, au-delà de la partisanerie, je me suis toujours senti respecté par vous. Et je dois vous avouer que je n'ai jamais cru qu'on avait toute la vérité de notre bord. Remarquez qu'elle n'était pas plus non plus de votre bord. C'est Jean Piaget qui disait que toute conduite intelligente est réversible. Alors, vous comprenez que... Mais c'est la politique qui le veut, puis...

Or, j'ai, quant à moi, décidé de passer la main et de faire confiance aux jeunes qui nous pressent de changer le régime ou de quitter le devant de la scène et d'écouter les voeux et les réflexions de cette jeunesse en qui j'ai confiance, en qui je crois. C'est peut-être pour moi un retour aux origines. Au début de ma carrière professionnelle, j'ai travaillé beaucoup avec les jeunes, à aider les jeunes en difficulté. Et c'est peut-être... On revient toujours quelque part à nos racines, à nos origines. Alors, c'est peut-être ce retour-là qui me motive.

Et, comme je l'ai dit tout à l'heure, contrairement à ce qui a été affirmé dans un journal, je n'ai aucun poste qui relève de l'État. Soyez rassurés là-dessus, vous n'aurez pas un fonctionnaire de plus sur les bras, je ne serai pas là. J'ai été en congé sans solde. C'est fini, je m'en vais avec des associés. Nous avons mis sur pied des entreprises qui me permettent de nourrir les espoirs les plus optimistes et de m'assurer un avenir qui devra être, en tout cas, la misère confortable quoi! C'est ce que j'espère. C'est peut-être là mon geste le plus concret de confiance en l'avenir du Québec. Et ça, j'en suis fier.

M. le Président, je vous prie d'agréer l'expression de mes sentiments les meilleurs. Merci.

Le Président: Merci, M. le député de Laval-dès-Rapides.

Affaires courantes

Nous allons maintenant procéder aux affaires courantes.

Il n'y a pas de déclarations ministérielles. Présentation de projets de loi.

Dépôt de documents

Dépôt de documents.

M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.

Rapports annuels de la Commission de protection

du territoire agricole, de l'Office du

crédit agricole du Québec, du Fonds

d'assurance-prêts agricoles et forestiers

et du Tribunal d'appel en matière de

protection du territoire agricole

M. Picotte: Merci, M. le Président. J'ai l'honneur de déposer les rapports annuels 1992-1993 suivants: premièrement, celui de la Commission de protection du territoire agricole; deuxièmement, de l'Office du crédit agricole du Québec; en troisième lieu, du Fonds d'assurance-prêts agricoles et forestiers et, finalement, M. le Président, celui du Tribunal d'appel en matière de protection du territoire agricole. Merci.

Le Président: Ces documents sont donc déposés. Maintenant, M. le ministre de la Justice.

Commentaires du ministre de la Justice sur la réforme sur le nouveau Code civil du Québec

M. Rémillard: M. le Président, j'ai l'honneur et le privilège de déposer en cette Chambre les tomes I et II des commentaires du ministre de la Justice sur la réforme sur le nouveau Code civil du Québec.

Le Président: Ces documents sont déposés. M. le ministre des Approvisionnements et Services.

Rapport annuel de la Société immobilière du Québec

M. Dutil: M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport annuel 1992-1993 de la Société immobilière du Québec. (10 h 40)

Le Président: Ce rapport est déposé.

Maintenant, M. le ministre des Transports.

Rapport annuel de la Commission des transports du Québec

M. Elkas: M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport annuel 1992-1993 de la Commission des transports du Québec.

Le Président: Ce rapport est également déposé. Dépôt de rapports de commissions

Maintenant, dépôt de rapports de commissions. M. le président de la commission de l'aménagement et des équipements et député de Lévis.

Étude détaillée du projet de loi 91

M. Garon: M. le Président, je dépose le rapport de la commission de l'aménagement et des équipements qui a siégé les 27 mai, 10 et 15 juin 1993 afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi 91, Loi modifiant le Code de la sécurité routière. Le projet de loi a été adopté avec des amendements.

Le Président: Ce rapport est déposé. Maintenant, M. le vice-président de la commission de l'économie et du travail et député de Laviolette.

Audition des parties impliquées dans la négociation du décret de la construction

M. Jolivet: Permettez-moi, M. le Président, de déposer le rapport de la commission de l'économie et du travail qui a siégé le 14 juin 1993 afin d'entendre, conformément à l'article 51 de la Loi concernant les relations du travail, la formation professionnelle et la gestion de la main-d'oeuvre dans l'industrie de la construction, les parties impliquées dans la négociation du décret de la construction quant aux raisons motivant l'impossibilité de parvenir à une entente relativement aux modifications à apporter au décret de la construction.

Le Président: Alors, ce rapport est également déposé.

Maintenant, dépôt de pétitions.

Il n'y a pas d'interventions portant sur une violation de droit ou de privilège ou sur un fait personnel.

Questions et réponses orales

Alors, nous allons dès maintenant procéder à la période des questions et réponses orales des députés.

Je reconnais, en première question principale, M. le chef de l'Opposition.

Intention du gouvernement fédéral de couper les transferts aux provinces

M. Parizeau: M. le Président, le 9 juin dernier, M. Charest, candidat à la direction du Parti conservateur, assurait, dans une entrevue qui s'appelle «Prime Time News», à Radio-Canada, que, s'il devenait chef du Parti conservateur, il couperait 8 000 000 000 $ dans les transferts aux provinces, ce qui veut dire, au minimum, 2 000 000 000 $ pour le québec, peut-être 3000 000 000 $, dépendant dans quels programmes il couperait. cela entraînerait, bien sûr, une nouvelle augmentation d'impôt de la part du ministre des finances au québec, ou une décote, ou les deux. m. charest n'a pas gagné, comme on le sait, la campagne au leadership.

J'ai cependant été un peu étonné, depuis 48 heures, d'entendre les pleurs, les soupirs de nos amis d'en

face à l'occasion de la défaite de M. Charest. Je ne les connaissais pas masochistes à ce point-là. Mais ce qu'on sait moins, à l'heure actuelle, c'est les chiffres impliqués par l'attitude de Mme Campbell à l'égard des transferts fédéraux. Dans certaines déclarations, elle indique qu'elle les gèlerait, opération que le gouvernement d'en face connaît bien, ou bien encore qu'elle les couperait, mais on ne sait pas de combien.

Plutôt que de dresser une sorte de liste d'épicerie et de voeux pieux dont le premier ministre sait très bien qu'il n'en obtiendra rien, pas plus maintenant qu'il y a 3 ans ou qu'il y a 5 ans, est-ce que le premier ministre ne devrait pas ou ne pourrait pas demander au nouveau premier ministre du Canada quel genre de coupures dans les transferts elle envisage, de façon à ce que son ministre des Finances puisse se préparer à un budget supplémentaire pour augmenter, par exemple, les impôts à nouveau? Ça, ce serait important de le savoir. Est-ce que le premier ministre va se renseigner auprès de la première ministre du Canada pour savoir de combien elle a l'intention de couper les transferts aux provinces?

Le Président: Alors, M. le premier ministre.

M. Bourassa: M. le Président, je constate que le chef de l'Opposition est déjà en campagne électorale avec son ami, M. Lucien Bouchard, aux questions qu'il pose. Non, mais là, il n'y a rien de nouveau. Il n'y a rien de nouveau, il l'a annoncé, que lui et tous les membres de son parti feraient campagne sur la scène fédérale.

M. le Président, avant de compléter ma réponse, je voudrais simplement, à l'occasion du départ du député de Laval-des-Rapides, souligner son travail comme député durant 8 ans, travail qu'il a fait avec beaucoup de sincérité et d'ouverture.

Je veux dire au chef de l'Opposition que j'aurai l'occasion de rencontrer Mme Campbell avec qui j'ai communiqué hier ? et j'ai communiqué également avec M. Charest ? et j'ai mentionné, hier, que le dossier prioritaire pour le gouvernement du Québec... Parce qu'on parle, bon, de transfert, on n'en est pas là. Le budget fédéral va s'appliquer jusqu'en avril 1994 et, dans le budget fédéral, il n'y avait aucune diminution des transferts pour le gouvernement du Québec.

Mais ce qui est plus important pour nous, et je l'ai dit clairement, publiquement et privément, c'est la solution du problème de la main-d'oeuvre que nous avions réussi à résoudre avec l'accord de Charlottetown, mais l'accord ayant été refusé à cause de cette complicité entre le Parti québécois, l'aile radicale du Parti Égalité et Pierre Elliott Trudeau, cette triple complicité, M. le Président, nous a empêchés de pouvoir obtenir les pouvoirs dont nous avons besoin dans le secteur de la main-d'oeuvre. Voilà le problème prioritaire pour le gouvernement du Québec.

Le Président: Pour une question complémentaire, M. le chef de l'Opposition.

M. Parizeau: II me semblait que, dans ce référendum, le peuple québécois avait eu quelque chose à dire. Il me semble! Il me semble!

Est-ce que le premier ministre, au-delà de traîner son dossier de main-d'oeuvre dont il n'a aucune indication qu'il est susceptible de se régler plus aujourd'hui qu'hier ? est-ce qu'on doit lui rappeler les déclarations de M. Valcourt à ce sujet-là? Il est toujours dans le portrait, celui-là ? est-ce que le premier ministre peut, à la première occasion, essayer de s'enquérir pour savoir jusqu'où les coupures dans les transferts fédéraux, quand elles vont commencer, de quelle ampleur elles vont être? Est-ce que je peux rappeler au premier ministre, est-ce qu'il se souvient que, de l'aveu même de son ministre des Finances, 3 200 000 000 $ représentent, en quelques années, l'ampleur des coupures déjà réalisées par le gouvernement fédéral? Est-ce que le premier ministre peut s'enquérir le plus rapidement possible pour savoir s'il y en a encore 1 000 000 000 $ à venir, 2 000 000 000 $, 3 000 000 000 $? De quelle ampleur ça va être? Il me semble que ce serait responsable à l'égard de la population du Québec.

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bourassa: J'ai répondu tantôt au chef de l'Opposition. Les priorités du gouvernement... À ma connaissance, il n'y a eu aucune indication que le nouveau gouvernement fédéral va faire un nouveau budget au cours des prochains mois. Je pense bien que le gouvernement fédéral, qui devra faire face à une élection dans les prochains mois, tiendra compte de la conjoncture générale. Qu'on ait juste à examiner la situation chez nos voisins, le Québec ne sera pas seul pour faire valoir son point de vue. quand on voit, par exemple, un gouvernement néo-démocrate imposer un gel des salaires de 3 ans, 3 ans de gel des salaires, et, au cours de la présente année 1993-1994, 12 journées non payées, 12... nous, on en propose 3; 12 dans le cas de l'ontario qui a une capacité de payer de 25 % supérieure à la nôtre et qui a un endettement qui équivaut à environ 20 %, 25 % du pib par rapport à près de 40 % pour le québec. alors, m. le président, c'est une raison parmi d'autres qui justifie notre politique salariale. je l'invoque parce que c'est un sujet d'actualité. il y a des dizaines de milliers de montréalais et de québécois qui ont été importunés, il y a des atteintes à la liberté des citoyens, et on ne pose pas de questions ce matin là-dessus, m. le président.

Le Président: En question principale maintenant, M. le député de Bertrand.

Situation financière de Pétromont

M. Beaulne: Merci, M. le Président.

Lors de l'étude des crédits du ministère de l'Énergie le 5 mai'dernier, le ministre de l'Industrie, du Commerce et de la Technologie, qui remplaçait la ministre

de l'Énergie hospitalisée d'urgence, a indiqué que l'avenir du projet Soligaz était lié à la santé financière de Pétromont, coeur de la pétrochimie québécoise. Hier, en cette Chambre, la ministre de l'Énergie a reconfirmé cette affirmation et a indiqué que le dossier était désormais entre les mains du ministre de l'Industrie, du Commerce et de la Technologie. depuis 3 semaines, m. le président, j'essaie en vain d'obtenir les états financiers de pétromont, à la fois de la part de pétromont elle-même et de la sgf qui en est partenaire à 50 %. le ministre de l'industrie, du commerce et de la technologie trouve-t-il normal que les contribuables du québec ne puissent avoir accès aux états financiers d'une société détenue à 50 % par des fonds publics et peut-il confirmer à cette chambre que le déficit accumulé de pétromont, depuis 1990, s'élèverait à plus de 100 000 000 $? (10 h 50)

Le Président: M. le ministre de l'Industrie, du Commerce et de la Technologie.

M. Tremblay (Outremont): M. le Président, il me semble réentendre ce que le député de Lévis nous disait il y a quelques années lorsqu'on a refusé de déposer les états financiers de la Société générale de financement pour discuter des chantiers maritimes. On faisait des scénarios d'horreur. On a affecté la crédibilité de l'entreprise jusqu'à temps que le gouvernement trouve des solutions concrètes, ce que nous avons fait.

Dans le cas de Pétromont, j'ai écouté attentivement les propos de la ministre responsable de l'Énergie et des Ressources hier. Il est vrai que le ministère de l'Énergie et des Ressources a fait tout ce qu'il pouvait faire pour donner suite à ce projet, en collaboration avec le ministère de l'Environnement. En ce qui concerne le ministère de l'Industrie, du Commerce et de la Technologie, à cause de conditions de marché, nous sommes en train de regarder sérieusement la situation financière de Pétromont et, lorsque nous aurons les renseignements que la Société générale de financement a promis de nous donner, nous serons en mesure de répondre de façon précise à la question.

D'ailleurs, après de nombreuses questions du leader de l'Opposition, en commission parlementaire, j'ai donné exactement cette réponse et j'espère que vous allez arrêter de poser des questions et de miner la crédibilité de cette entreprise qui contribue de façon importante au développement économique de l'est de Montréal.

Des voix: Oh! Oh! Oh!

Le Président: Alors, pour une question complémentaire. S'il vous plaît!

M. Beaulne: M. le Président, comment le ministre peut-il refuser d'accéder à une demande de déposer les états financiers ou de donner du moins un ordre de grandeur du déficit accumulé de Pétromont qu'on décla- rait techniquement en faillite au début de 1992? Est-ce que le ministre peut confirmer à cette Chambre que Pétromont constitue encore la pierre angulaire de sa grappe pétrochimique? Et peut-il nous indiquer quelles mesures il entend prendre pour en assurer la survie et la rentabilité, si tel est le cas?

Le Président: Alors, M. le ministre.

M. Tremblay (Outremont): Nous attendons un plan d'affaires de l'entreprise. L'entreprise, c'est un partenariat entre la Société générale de financement et une multinationale qui s'appelle Union Carbide. Je me rappelle très bien les mêmes questions du député lorsque l'entreprise, il y a quelques années, avait des problèmes. Allez-vous injecter des ressources financières additionnelles? Allez-vous laisser tomber cette entreprise qui contribue au développement économique de l'est de Montréal?

Vous posiez les questions. Nous avons trouvé la solution lorsque les partenaires ont injecté 12 500 000 $ chacun et le gouvernement du Québec a octroyé une garantie de prêt de 25 000 000 $. Nous sommes en train d'analyser la situation financière. Nous sommes un gouvernement responsable. La ministre de l'Énergie et des Ressources l'a mentionné de façon très claire hier: le projet Soligaz, Pétromont et les autres entreprises de la grappe de la pétrochimie sont importants pour le Québec et c'est dans ce sens-là que nous allons le regarder dans son ensemble et nous allons prendre les décisions pour assurer la réussite de cette grappe industrielle dans l'est de Montréal. D'ailleurs, le président du Conseil du patronat y tient.

Le Président: Alors, toujours en question complémentaire.

M. Beaulne: Est-ce que le ministre est conscient que le déficit de Pétromont s'explique en grande partie parce que, depuis 1990, la direction de Pétromont a pris des décisions de production en fonction justement des intérêts multinationaux de son partenaire Union Carbide plutôt qu'en fonction de la rentabilité elle-même de Pétromont?

Le Président: Alors, M. le ministre.

M. Tremblay (Outremont): M. le Président, Dieu que l'Opposition a de la difficulté à comprendre!

Des voix: ...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! S'il vous plaît! Alors, M. le ministre.

M. Tremblay (Outremont): Je ne comprends pas le sourire de l'Opposition, d'autant plus que je viens de citer le chef de l'Opposition. Les Japonais cherchent à

nous convaincre de ça depuis des années. Les Américains nous démontrent ça tous les jours. Union Carbide... Dieu que l'on a de la difficulté à comprendre le chef de l'Opposition, M. le Président!

Des voix: Bravo!

Le Président: En question principale? S'il vous plaît, Mmes et MM. les députés.

Alors, pour une complémentaire, Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve.

Mme Harel: M. le Président, est-ce que le ministre se rappelle que le 8 avril dernier, en commission parlementaire, il disait ceci, et je le cite: «Dans les semaines qui viennent, nous devrions avoir l'information nécessaire pour prendre une décision sur l'implantation du projet Soligaz»? Est-ce qu'il peut comprendre qu'il y a 10 semaines de cela et que c'est avec raison que nous demandons maintenant qu'il fasse le point sur cet important dossier, M. le Président?

Le Président: M. le ministre.

M. Tremblay (Outremont): Alors, j'ai bien dit que, dans les semaines qui viennent, nous serons en mesure, lors de la réception du plan, de faire le point sur cet important dossier, parce que nous reconnaissons, M. le Président, que c'est un important dossier.

Le Président: Pour une question complémentaire, M. le député de Bertrand.

M. Beaulne: Est-ce que le ministre est en train d'admettre que, dans ce dossier, la SGF s'est contentée d'un rôle de bailleur de fonds plutôt que d'un partenaire des opérations comme elle aurait dû le faire?

Le Président: M. le ministre.

M. Tremblay (Outremont): M. le Président, la Société générale de financement a réussi à convaincre Union Carbide de consolider l'administration de l'entreprise au Québec. La Société générale de financement, dans son plan de développement stratégique, en commission parlementaire... Parlez à la députée de Hochelaga-Maisonneuve, elle a félicité le président de la Société générale de financement parce qu'il a eu l'opportunité, pendant plus de 2 heures, d'expliquer la stratégie, à la grande surprise de la députée de Hochelaga-Maisonneuve qui l'a félicité. «J'ai l'impression qu'on s'en va vers une prise de conscience nouvelle. Il y a des choses qu'on n'accepte plus. J'ai de la difficulté à cerner ça.» Encore une fois, M. le Président, je viens de citer le chef de l'Opposition.

Le Président: Alors, pour une question complémentaire, M. le député de Pointe-aux-Trembles.

M. Bourdon: M. le Président, le ministre peut-il nous donner l'assurance que les 400 employés d'Union Carbide, à Montréal-Est, n'iront pas rejoindre au chômage les 300 employés de Kemtec?

Le Président: M. le ministre.

M. Tremblay (Outremont): Lorsque le député de Pointe-aux-Trembles m'a approché pour le dossier Kemtec, il m'a demandé de maintenir les actifs, d'essayer de trouver un partenaire industriel qui avait des ressources financières, qui avait la crédibilité et un réseau. Ça fait 18 mois, dans le dossier Kemtec, qu'on cherche et il va me poser la question pour savoir si, dans le cas de Pétromont, le gouvernement du Québec va faire tous les efforts nécessaires pour maintenir cette importante entreprise dans l'est de Montréal, qui contribue au développement économique? Je pense que nous avons répondu à cette question il y a longtemps, et c'est le gouvernement du Québec qui va trouver les solutions. On va répondre dans un avenir rapproché parce que c'est important pour le développement de la pétrochimie au Québec.

Le Président: Pour une dernière complémentaire, M. le leader de l'Opposition.

M. Chevrette: Est-ce que le ministre pourrait s'engager, M. le Président, à faire le point d'ici à la fin de la présente session, parce que nos informations sont à l'effet qu'il voudrait que le tout se règle en douce avec des fermetures potentielles au cours de juillet?

Le Président: M. le ministre.

M. Tremblay (Outremont): Je n'ai pas cette information, M. le Président. Je n'ai pas cette information, je vais vérifier. Je vais vérifier les affirmations du leader de l'Opposition et je vais revenir en Chambre pour rassurer l'Opposition que nous n'attendons pas la fin d'une session pour mettre des personnes à pied. Nous avons trop de respect pour les travailleurs et les travailleuses de cette entreprise.

Le Président: Alors, en question principale, maintenant, Mme la députée de Chicoutimi.

Contenu du projet de règlement en matière d'affichage

Mme Blackburn: Merci, M. le Président.

Lundi soir, en commission parlementaire, le ministre responsable de l'application de la Charte de la langue française continuait de distiller au compte-gouttes ses projets de règlement en déposant celui relatif à la langue du commerce et des affaires. Ce projet de règlement confirme les intentions du ministre et de son gouvernement d'instaurer le bilinguisme dans l'affichage. Ma question au ministre responsable de l'application de

la Charte: Est-ce que le ministre confirme, par son projet de règlement touchant la langue du commerce et des affaires, qu'il limite désormais Punilinguisme français au transport en commun et aux panneaux-réclame?

Le Président: M. le ministre responsable de l'application de la Charte de la langue française. (11 heures)

M. Ryan: M. le Président, ainsi que la députée de Chicoutimi aura pu s'en rendre compte, Favant-projet de règlement déposé lundi soir reproduit, dans une proportion d'à peu près 90 %, les propositions déjà contenues dans un projet de règlement qui avait été prépublié sous le règne du Parti québécois en 1985. Je pense que la vice-première ministre et ministre de l'Énergie et des Ressources sait très bien de quoi je parle. Il reproduit également, de manière presque intégrale... Nous parlerons des choses sur l'affichage, mais tout le reste du projet de règlement reproduit des propositions qui m'ont été soumises dès 1991 par l'Office de la langue française. Et je défie la députée de Chicoutimi de contredire ce que je viens d'affirmer.

En ce qui touche l'affichage, ce n'est pas vrai que nous instituons le bilinguisme généralisé partout. J'ai passé mon temps à nier cette affirmation-là depuis un mois et demi, et je vais le faire de nouveau ce matin. Ce que nous faisons, d'abord, nous proclamons le français obligatoire partout dans l'affichage. Deuxièmement, nous instituons la possibilité, la faculté, pour une entreprise ou un particulier, d'avoir un message également dans une autre langue pourvu que le français soit toujours prédominant. Mais, d'instituer la possibilité pour un individu ou une entreprise d'utiliser une autre langue, d'abord, ça ne veut sûrement pas dire que nous lui en faisons une quelconque obligation. Ça ne veut pas non plus dire que cette autre langue sera utilisée en toute occasion. Et le fond du projet gouvernemental, c'est que nous avons conclu qu'il est fort possible de promouvoir le français sans interdire l'usage d'une autre langue dans l'affichage.

Le Président: Alors, en question complémentaire.

Mme Blackburn: Le ministre peut-il nier que Punilinguisme français soit devenu l'exception, exception réservée aux transports en commun et aux panneaux-réclame, alors que la règle générale autorise l'anglais et le français partout et en tout temps, et y compris sur les camions de livraison, et qu'il ne sera plus désormais possible de dire qu'au Québec ça se passe en français, mais que ça se passe bien en français et en anglais?

Le Président: Alors, M. le ministre.

M. Ryan: En matière d'affichage nous disons, depuis le début du débat, que nous pouvons promouvoir le français sans nécessairement interdire l'usage d'une autre langue, pourvu que l'usage d'une autre langue se fasse dans des conditions qui maintiennent la prédominance du français et que cet usage soit facultatif. Ça résume tout le projet de loi en ce qui touche l'affichage. Et toutes les contorsions intellectuelles que voudra nous proposer la députée de Chicoutimi ne changeront rien à l'orientation véritable du projet de loi.

Le Président: Alors, pour une autre question complémentaire.

Mme Blackburn: On s'en doutait. M. le Président, le ministre, qui semble se comporter de plus en plus comme s'il était premier ministre, peut-il nous dire s'il a vraiment décidé de mettre fin à l'étude article par article du projet de loi 86 avant que l'on aborde l'important volet de la langue d'enseignement? Sinon, comment explique-t-il qu'à 5 jours de la fin de la session nous ne soyons toujours pas convoqués aujourd'hui en commission parlementaire?

Le Président: Alors, M. le ministre.

M. Ryan: La députée devrait très bien savoir que ces décisions dont elle parle relèvent de la compétence du leader du gouvernement en Chambre, et c'est à lui qu'il incombe de répondre à la question, non pas à moi.

Le Président: Alors, Mme la députée de Chicoutimi, pour une autre question complémentaire.

Mme Blackburn: M. le Président, la question est claire. Le ministre a-t-il l'intention de ramener le projet de loi 86 en commission parlementaire de manière à ce qu'on examine ensemble, tel que le veut la règle, l'important volet touchant la langue d'enseignement? Est-ce qu'il reviendra en commission parlementaire avant la fin de la session?

Le Président: Alors, M. le ministre.

M. Ryan: M. le Président, j'ai l'intention, comme je le fais toujours, de me soumettre activement aux décisions que le leader de la Chambre voudra bien communiquer à cette Chambre concernant la suite de ces travaux.

Le Président: Alors, pour une question complémentaire, M. le leader de l'Opposition.

M. Chevrette: Oui, M. le Président, au leader du gouvernement. Étant donné que nous avons appris par les médias d'information, hier, que le premier ministre avait dit que le projet de loi 86 et le projet de loi 102 feraient l'objet d'une motion de clôture, est-ce que le leader du gouvernement pourrait me confirmer que, même avec l'intention de mettre le bâillon, il n'appellera plus la loi 86 au moment où on en est rendu à un des chapitres très importants, à savoir l'immersion scolaire.

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, M. le Président. À l'agenda de la journée, il y a une étape qui s'intitule «Renseignements sur les travaux de l'Assemblée», qui n'est pas la même étape que la période des questions comme telle.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Maintenant, si vous voulez profiter de la période des questions, je n'ai pas d'objection fondamentale à vous répondre. Je n'ai pas pris connaissance de la déclaration que vous attribuez au premier ministre. Je vous demande de me donner le temps d'en prendre connaissance, si effectivement il y a eu une déclaration dans ce sens-là ou non, et je vous reviendrai.

Le Président: Pour une question principale, maintenant, M. le député de Shefford.

Engagement du ministre de la Santé et des Services sociaux d'augmenter les budgets des centres de femmes

M. Paré: Oui, merci, M. le Président.

Le 20 mai dernier, le ministre de la Santé et des Services sociaux prenait un engagement formel devant des centaines de femmes réunies ici, devant le Parlement. À une question que je lui posais la même journée, le ministre déclarait, et je cite: «Que d'ici le 15 juin nous donnerions la réponse finale quant au triennal et qu'il y aurait des augmentations substantielles par rapport à ce qu'elles ont aujourd'hui et par rapport à leurs demandes. Je le maintiens et je le dis devant cette Assemblée, et le député de Shefford pourra se lever éventuellement pour me le remettre sur le nez si jamais je ne le remplis pas, mais il n'aura pas ce plaisir là.»

Ma question au ministre de la Santé et des Services sociaux: Puisque, le 15 juin, c'était hier, est-ce que le ministre peut nous annoncer dès aujourd'hui qu'il respectera l'engagement qu'il a pris devant les femmes, devant le Parlement, le 20 mai dernier?

Le Président: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Côté (Charlesbourg): Oui, M. le Président, je respecterai ce que j'ai fait comme engagement, et dès aujourd'hui.

Le Président: Pour une question complémentaire.

M. Paré: Comment le ministre peut-il justifier la réponse qu'il vient de faire à la question que je lui posais alors que l'engagement qu'il a pris le 20 mai dernier devant des centaines de femmes devant le Parlement, c'est qu'on annoncerait les montants investis pour les centres de femmes dans le plan triennal avant le 15 juin? Nous sommes le 16.

Le Président: M. le ministre.

M. Côté (Charlesbourg): M. le Président, les instances centrales du gouvernement ont été saisies des différents dossiers, le Conseil du trésor a pris les décisions qu'il devait hier, c'est donc avec grand plaisir que, oui, j'annoncerai, 24 heures plus tard, la décision gouvernementale. Mais je pense que ça va quand même être bien accueilli par les gens pareil.

Le Président: Pour une autre question complémentaire.

M. Paré: En attendant l'annonce, pour être sûr et certain que les groupes de femmes ne seront pas déçus de l'engagement d'augmenter considérablement et d'une façon substantielle les montants, que le ministre réaffirme son engagement qu'il va y avoir une augmentation substantielle et que, s'il ne réussit pas à la décrocher dans le budget du ministre des Finances ? on connaît déjà la réponse, c'est non ? si ce n'est pas au niveau du Conseil du trésor, le ministre s'engage à donner une augmentation substantielle prise à même ses crédits, si nécessaire.

Le Président: M. le ministre.

M. Côté (Charlesbourg): M. le Président, je comprends le député de Shefford qui a grand peur que les femmes soient déçues. Je peux lui assurer une seule chose, c'est que le seul déçu, ce sera lui.

Des voix: Ha,ha, ha!

Le Président: Pour une question principale maintenant, M. le leader adjoint de l'Opposition et député d'Abitibi-Ouest.

Transfert d'employés d'Hydro-Québec de Rivière-du-Loup à Rimouski

M. Gendron: Oui, M. le Président. Les régions du Québec vivent une série plutôt noire avec ce gouvernement, dans toutes sortes de décisions de réorganisation administrative plutôt douteuse. À titre d'exemple, c'est le cas à Rivière-du-Loup où une trentaine d'employés de la société d'État seront transférés à Rimouski parce que Hydro-Québec, dans sa grande sagesse, a entrepris de centraliser ses activités dans les grands centres au détriment des petites communautés. À l'instar d'autres régions du Québec, les citoyens de Rivière-du-Loup se sont mobilisés et ont vivement protesté contre ce transfert illogique; illogique parce que Hydro-Québec convient et admet qu'elle ne fait aucune économie en transférant ces employés à Rimouski. D'ailleurs, le chef de cabinet, du bureau du premier ministre a confirmé la

même chose.

Ma question, M. le Président, à la vice-première ministre: Est-ce que la vice-première ministre peut nous indiquer pourquoi Hydro-Québec s'entête à effectuer ce transfert d'employés qui affectera grandement l'économie locale de Rivière-du-Loup, alors qu'il n'y a pas d'économies à faire, et où tout le monde questionne: C'est quoi la logique qui guide Hydro-Québec dans ce dossier? (11 h 10)

Le Président: Mme la vice-première ministre et ministre de l'Énergie et des Ressources.

Mme Bacon: M. le Président, le député d'Abitibi-Ouest sait très bien que la ministre de l'Énergie et des Ressources n'a aucun contrôle sur les décisions administratives d'Hydro-Québec. Je pense qu'il y a eu des décisions administratives qui ont été prises, il y a eu des réaménagements qui ont été faits dans les régions, comme au central, comme dans le bureau sur le boulevard René-Lévesque, M. le Président, et la ministre n'a pas à donner d'avis sur ces décisions administratives. La responsabilité que j'ai, c'est de surveiller qu'il n'y ait pas des dépenses folles de faites, à Hydro-Québec, comme on a fait cette année: on a demandé à HydroQuébec de geler ses frais d'exploitation et d'achat de biens et de services. Je pense qu'à ce moment-là on a fait notre devoir, M. le Président. Mais ces décisions administratives sont prises par Hydro-Québec.

M. Gendron: Ça va venir, ça va venir. En tout cas, je n'ai pas...

Le Président: Alors, en question complémentaire.

M. Gendron: M. le Président, comment la vice-première ministre peut-elle faire accroire à cette Chambre que, dans une société d'État où les budgets sont approuvés par l'Assemblée nationale, par la ministre responsable, comment peut-elle oser prétendre que ça ne regarderait pas la ministre responsable? Voyons donc! Et pourquoi la ministre ne se rend-elle pas compte que, dans ce dossier-là, Hydro-Québec elle-même a convenu qu'il n'y avait pas d'économies? Et, dans ce sens-là, il me semble qu'elle devrait leur donner une indication. Pourquoi ne le fait-elle pas?

Le Président: Alors, Mme la ministre.

Mme Bacon: M. le Président, on a demandé à Hydro-Québec de faire des gains de productivité; on a demandé à Hydro-Québec d'opérer efficacement. Je pense que c'est ce qu'elle tente de faire. Et, à chaque fois qu'une région a été insatisfaite des décisions d'Hydro-Québec, j'ai demandé à M. Couture, qui est responsable de ces gains de productivité et de ce souci d'efficacité, de rencontrer les groupes. Ce n'est pas à la ministre à le faire, M. le Président, c'est à Hydro-Québec.

Le Président: Alors, toujours en question complémentaire.

M. Gendron: Oui. Question additionnelle, M. le Président, au ministre des Forêts: Comment se fait-il que, lui, il prétend que ça appartient, effectivement, au gouvernement et à la ministre responsable de prendre une décision qui éviterait de pénaliser une ville comme Rivière-du-Loup? Et est-ce que le ministre des Forêts ne convient pas qu'il est pas mal plus attentif, dans ce dossier-là, et pas mal plus analytique que dans la même décision où il a prétendu que ça le regardait de prendre une décision de transfert concernant la société de conservation de la ressource, de Rouyn-Noranda à Val-d'Or, pour rien, et de Saint-Honoré à Roberval? Alors, comment se fait-il...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, question de règlement.

M. Gendron: ...que, dans le dossier de Rivière-du-Loup, vous êtes pas mal plus attentif?

Le Président: Alors, sur une question de règlement, M. le leader du gouvernement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je pense que le leader adjoint de l'Opposition conviendra avec le leader du gouvernement que les questions s'adressent au ministre en tant que ministre et non pas à des députés. On n'adresse pas des questions à des députés au moment de la période des questions.

M. Gendron: ...le ministre, c'est de mes affaires.

M. Chevrette: M. le Président...

Le Président: M. le leader de l'Opposition.

M. Chevrette: ...on espère qu'il va être aussi loquace dans cette Chambre qu'il l'est en dehors.

Le Président: Alors, la question est posée au ministre des Forêts.

M. le ministre des Forêts.

M. Côté (Rivière-du-Loup): M. le Président, dans le cas des sociétés de conservation, auquel fait allusion le député d'Abitibi-Ouest, nous avons fait des démonstrations d'économies et d'efficacité. Dans le cas du transfert des employés d'Hydro-Québec à Rivière-du-Loup, moi, je ne suis pas satisfait des réponses que j'ai obtenues, tout simplement.

Le Président: Alors, pour une dernière question additionnelle, M. le leader adjoint de l'Opposition.

M. Gendron: Comment un membre de ce gouvernement, M. le Président, comment un membre de ce

gouvernement peut-il faire une déclaration de cet ordre en Chambre, alors qu'il est membre du Conseil des ministres? Et, effectivement, ma prétention est à l'effet que la ministre de l'Énergie et des Ressources devrait s'impliquer. Il n'y a pas d'économies, et le gouvernement nous dit: Bien, c'est une décision d'Hydro-Québec. Ah oui! Comment le ministre délégué aux Forêts n'exige-t-il pas une discussion au Conseil des ministres afin que ce débat puisse prendre en compte qu'il n'y a pas d'économies dans une décision aussi folle?

Le Président: Alors, M. le ministre des Forêts.

M. Côté (Rivière-du-Loup): M. le Président, comme l'a expliqué la ministre de l'Énergie et des Ressources, c'est une décision administrative d'Hydro-Québec, qui a été prise administrativement. C'est tout simplement ça.

Le Président: Alors, pour une question additionnelle, M. le leader de l'Opposition.

M. Chevrette: M. le Président, est-ce que je pourrais demander au ministre des Forêts ? ou à Mme la ministre de l'Énergie ? en quoi les réponses qu'il a reçues ne le satisfont pas?

Le Président: Alors, M. le ministre des Forêts.

M. Côté (Rivière-du-Loup): M. le Président, c'est tout simplement sur une question d'économies et d'efficacité, et les représentants d'Hydro-Québec n'ont pas réussi à me convaincre que c'était efficace de transférer à Rimouski un chauffeur de véhicule plutôt que de le laisser à Rivière-du-Loup.

Le Président: Alors, une question principale maintenant, M. le député de Dubuc.

Interdiction de la chasse au chevreuil dans la région du Bas-Saint-Laurent

M. Morin: Merci, M. le Président.

En octobre dernier, devant le constat du déclin catastrophique des populations de chevreuil, le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche ordonnait l'interdiction de la chasse au chevreuil pour 5 ans dans la région de la Gaspésie, décision accompagnée de mesures timides visant à favoriser le piégeage du coyote. Plus récemment, soit en mai dernier, c'était au tour de la région du Bas-Saint-Laurent de se voir interdire la chasse au chevreuil pour les 5 prochaines années.

En considérant que le MLCP effectue régulièrement des inventaires et que, depuis plusieurs années, les chasseurs et plus particulièrement l'Association nationale des trappeurs indépendants pressaient le ministre d'agir pour contrôler l'augmentation de la population des coyotes, l'accusant même d'être responsable de la quasi-extermination du chevreuil, le ministre, comme premier responsable de la conservation de la faune, reconnaît-il avoir sous-estimé la gravité de la situation de la prolifération du coyote et de son impact sur le chevreuil?

Le Président: Alors, en demandant, s'il vous plaît, l'attention des collègues, M. le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche.

M. Blackburn: Je dois vous avouer, M. le Président, que j'apprécie la question du député de Dubuc, ce matin, concernant la faune, parce qu'à voir le nombre de questions que j'ai eues depuis le début de cette session je pensais qu'on avait largué cette responsabilité importante de la faune sur le territoire du Québec.

Alors, effectivement, il y a un problème qui est majeur. Le gouvernement, le ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche et le ministre ont assumé leurs responsabilités. Une population de coyotes...

Le Président: Un instant, M. le ministre. Je vais demander aux collègues leur attention, s'il vous plaît! MM. les députés, je suis tout près du ministre et j'ai de la difficulté à l'entendre à ce moment-ci. Alors, je vous demanderais de baisser le ton, s'il vous plaît!

M. le ministre.

M. Blackburn: Merci, M. le Président.

Alors, compte tenu que la responsabilité fondamentale du ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, c'est de protéger, bien sûr, les populations fauni-ques, dans le cas de la population des cerfs de Virginie dans la région du Bas-Saint-Laurent, un inventaire nous démontrait très clairement que la population était partie de 11 000 il y a 3 ans à 3000 maintenant. Il nous fallait donc agir, et c'est ce que j'ai fait, M. le Président.

J'ai voulu restaurer cette population faunique importante, parce qu'à quelque part on a des responsabilités au niveau de la restauration la plus rapide pour permettre, justement, que cette pratique de l'activité de la chasse puisse se faire le plus rapidement possible, dans les meilleurs délais, compte tenu de l'importance de l'activité économique que ça génère.

Le Président: Pour une question complémentaire, M. le député de Dubuc.

M. Morin: Merci. Alors, en parlant de l'aspect économique, M. le Président, comment le ministre peut-il expliquer que son ministère ait accepté la tarification de la chasse au chevreuil pour les ZEC de la région du Bas-Saint-Laurent, alors qu'il était déjà question, en avril dernier, d'interdire la chasse pour la saison 1993? Dois-je comprendre, comme l'a soutenu le député de Rimouski, que le ministre gère son ministère à la petite semaine?

Le Président: M. le ministre.

M. Blackburn: Je n'accepte pas du tout, M. le

Président, cette affirmation du député de Dubuc. Effectivement, il y a eu des consultations qui se sont tenues par les fonctionnaires du ministère en région, avec les représentants de la réserve faunique de Duchénier et avec les représentants des territoires de ZEC, pour les informer de la situation et, bien sûr, pour leur dire qu'à quelque part il y aurait probablement des décisions de prises. Des décisions ont été prises, et c'est en fonction des responsabilités qui m'incombent.

Le Président: Toujours en question complémentaire.

M. Morin: M. le Président, est-ce que le ministre considère, pour des partenaires privilégiés, que quelques coups de téléphone de biologistes, ça constitue une consultation? Et est-ce que le ministre ne devrait pas admettre que la consultation auprès des gestionnaires des territoires fauniques touchés par cette décision a été des plus ordinaires par rapport aux impacts que celle-ci provoque sur le plan économique?

Le Président: M. le ministre.

M. Blackburn: II faut bien rappeler, M. le Président, que, dans la région de la Gaspésie, la même décision a été prise l'an passé, les mêmes gestes ont été posés, la même responsabilité a été assumée. Dans le cas du Bas-Saint-Laurent, c'est une autre réalité, une autre problématique qui nous fait ressortir qu'à quelque part il y a des décisions qui se devaient d'être prises, et c'est ce que nous avons fait. Le coyote est un élément important, bien sûr, pour les raisons de ce qu'on voit maintenant en termes de réalité, mais il y a aussi les hivers rigoureux de ces régions qui sont effectivement très néfastes pour les populations de cerfs de Virginie.

Le Président: Pour une autre question complémentaire.

M. Morin: Alors, M. le Président, qu'entend faire le ministre pour compenser les ZEC, les pourvoi-ries et la réserve Duchénier des impacts économiques négatifs de plusieurs millions de dollars causés par sa décision tardive?

Le Président: M. le ministre. (11 h 20)

M. Blackburn: M. le Président, quand le député de Dubuc parle de plusieurs millions de dollars, effectivement, il y a des problèmes qui sont d'un ordre beaucoup moins important. On va continuer d'assumer nos responsabilités et faire que cette population de cerfs de Virginie soit restaurée le plus rapidement possible pour permettre que cette activité économique extrêmement importante pour cette région puisse se faire le plus rapidement possible. Bien sûr, ce que ça permet de faire, ces décisions, c'est de restaurer cette population dans les meilleurs délais, et c'est ce qu'on souhaite tous ensemble.

Une voix: Les compensations?

M. Blackburn: Les compensations, c'est les mêmes qu'on a eues dans la région de la Gaspésie. Il n'y aura pas de compensation de plus dans la région du Bas-Saint-Laurent.

Le Président: En question principale, Mme la députée de Marie-Victorin.

Rapport du Comité permanent de lutte aux drogues concernant Le Patriarche

Mme Vermette: Oui. Merci, M. le Président.

Le 21 janvier 1992, je demandais au ministre de la Santé et des Services sociaux d'enquêter sur l'association Le Patriarche, un centre de traitement pour toxicomanie et sidatiques, comptant 5 points de services au Québec, dont les activités et le mode de fonctionnement faisaient l'objet de vives critiques de la part d'intervenants du milieu.

Le ministre m'informait qu'il transmettrait pour analyse ce dossier à la Direction générale de réadaptation et services de longue durée de son ministère, dossier qui fut par la suite soumis au Comité permanent de lutte aux drogues. Le ministre s'est aussi engagé à nous faire part de ses commentaires dès réception de cette analyse. Le rapport de ce comité, qui confirme la nécessité d'enquêter sur Le Patriarche, fut remis au ministre en juin 1992 et ce n'est qu'il y a quelques jours seulement qu'il m'en transmettait copie sans émettre, M. le Président, le moindre commentaire.

Alors, ma question est de demander au ministre de la Santé et des Services sociaux ce qu'il a fait depuis 1 an dans ce dossier. A-t-il, oui ou non, donné suite à la recommandation du Comité permanent de lutte aux drogues qui lui demandait d'ordonner une enquête formelle sur les allégations qui ont été soulevées à l'égard de certaines activités de l'association Le Patriarche touchant son financement, les soins aux étrangers, le respect des droits des usagers et divers aspects de son organisation, et peut-il nous livrer, en fait, les résultats de cette enquête?

Le Président: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Côté (Charlesbourg): M. le Président, c'est un dossier qui préoccupe la députée depuis, je dirais, quelques années puisque, depuis quelques années, aux crédits, elle me pose des questions concernant Le Patriarche.

L'an dernier, donc, aux crédits de 1992-1993, nous avons abordé cette question de long en large et, au lendemain de cette commission, M. le Président, j'ai passé dans tout le réseau des CSS de l'époque le message qu'il ne devait plus y avoir de placement d'enfants

au Patriarche, chose qui a été faite partout à travers le Québec, puisqu'elle-même nous avait informés que certains CSS faisaient ces pratiques.

Entre-temps, nous avons mené des enquêtes et demandé un avis au comité dont elle faisait mention tout à l'heure et, à nouveau, aux crédits cette année, Mme la députée a posé des questions s'informant si on pouvait rendre public l'avis du comité. Et, aux crédits, j'ai dit: Je vais m'enquérir auprès des gens du comité, en particulier de Me Gérald Tremblay, s'il a objection ou pas à ce que ce document-là soit rendu public. La réponse nous est parvenue il y a une dizaine de jours tout au plus ou une quinzaine de jours. J'ai donc décidé ? à ce moment-là, il me laissait le choix ? de prendre l'avis et de l'expédier à madame, tel que convenu; il est maintenant du domaine public. Ça, c'est la première partie de la réponse.

La deuxième, M. le Président. Je ne peux pas et je ne condamnerai pas un organisme comme Le Patriarche sans qu'il y ait des preuves suffisantes.

Le Président: Je vais vous interrompre à ce moment-ci en requérant de nouveau la collaboration des collègues. Vous avez des salons à votre disposition, alors je vous prie de les utiliser, s'il vous plaît.

Alors, en conclusion, M. le ministre.

M. Côté (Charlesbourg): M. le Président, personne jusqu'à maintenant ne m'a fourni des preuves que Le Patriarche devait faire l'objet d'une enquête plus systématique. Ce que nous avons décidé, c'est de faire des règlements, tel que nous le recommandait le comité Bertrand. Ces normes, donc, d'accréditation, des maisons qui veulent offrir de ces services seront donc, au cours de l'automne, soumises aux nouvelles normes qui sont en consultation actuellement et qui feront l'objet d'une décision finale à l'automne. Le Patriarche, comme les autres, devra être soumis à ces normes et c'est ça qui va régler le problème, je pense, une fois pour toutes.

Une voix: Très bien.

Le Président: Alors, en question complémentaire, Mme la députée de Marie-Victorin.

Mme Vermette: Oui, M. le Président. Est-ce que le ministre peut nous confirmer qu'à la lecture de ces normes justement les centres de thérapie du genre du Patriarche ne sont pas considérés? Est-ce qu'il va apporter une attention particulière pour empêcher que de tels organismes soient, en tout cas, mis à l'intérieur de ces normes sans vraiment être impliqués aussi par ces normes?

Le Président: M. le ministre.

M. Côté (Charlesbourg): M. le Président, ce que le rapport Bertrand nous recommandait, c'était de mettre de l'ordre dans ceux qui dispensent des services en toxicomanie, que ce soit au niveau de la prévention, que ce soit au niveau de la réadaptation. Ce que nous avons choisi comme voie, c'est de nous assurer qu'en réadaptation ce ne soit pas n'importe qui, formé n'importe comment, dans n'importe quelle circonstance, puisse faire ça, et c'est à ça que vont répondre les normes.

Quant à la prévention, si, demain, on se doit de réglementer tout ce qu'il y a de prévention ou de promotion à travers le Québec, je pense qu'on n'a pas fini de siéger. On va être obligé de siéger 12 mois par année, 24 heures par jour, pour être capable de les régler. Et ça, ça fait appel à un contrat qui interviendra entre un individu et un organisme qui veut dispenser des services en prévention ou en promotion, et ça relève davantage du domaine d'un contrat d'un organisme à un individu. Ça ne relève pas de mon domaine à moi.

Le Président: Alors, pour une autre question complémentaire, Mme la députée.

Mme Vermette: Oui, M. le Président. Est-ce que le ministre a l'intention d'examiner chacun des éléments qui ont été soulevés par le rapport du comité sur les drogues en ce qui concerne Le Patriarche et qui recommande au ministre de ne pas accréditer cette maison de thérapie parce que c'est considéré plus, en fin de compte, selon certains, comme une secte, comme vraiment une raison sociale? On pourrait leur donner des normes sans problème. Est-ce que le ministre s'engage à examiner chacun des éléments soulevés dans le rapport du comité pour déterminer si vraiment il y a lieu d'accréditer cette ressource?

Le Président: Alors, M. le ministre.

M. Côté (Charlesbourg): M. le Président, on a vécu pendant de nombreuses années avec des gens de bonne volonté qui ont offert des services en réadaptation un peu partout à travers le Québec, et c'est ce qu'a soulevé le comité Bertrand, en nous demandant de faire en sorte qu'il y ait dorénavant des normes. Ces normes ont été élaborées au cours des dernières années. Elles sont soumises à une consultation. Elles auront force de loi au cours de l'automne et, à partir du moment où ces normes seront là, c'est sûr qu'elles vont s'appliquer, y compris au Patriarche, et il n'est pas question de reconnaître Le Patriarche tant et aussi longtemps qu'ils ne répondront pas aux normes que nous allons éventuellement édicter.

Le Président: Alors, c'est la fin de la période de questions.

Il n'y a pas de votes reportés. Motions sans préavis.

Avis touchant les travaux des commissions

Avis touchant les travaux des commissions.

M. le leader du gouvernement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, M. le Président. J'avise cette Assemblée qu'aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures, de 15 heures à 18 heures et de 20 heures à 24 heures, à la salle Louis-Hippolyte-LaFontaine, la commission du budget et de l'administration poursuivra l'étude détaillée du projet de loi 90, Loi modifiant la Loi concernant l'impôt sur le tabac, la Loi sur le ministère du Revenu et d'autres dispositions législatives d'ordre fiscal; de 15 heures à 18 heures et de 20 heures à 24 heures, à la salle du Conseil législatif, la commission des institutions poursuivra l'étude détaillée du projet de loi 84, Loi sur la Régie des alcools, des courses et des jeux et modifiant diverses dispositions législatives.

Le Président: Alors, merci, M. le leader du gouvernement.

Maintenant, aux renseignements sur les travaux de l'Assemblée.

M. le leader de l'Opposition.

M. Chevrette: Oui. Je demanderais, si le leader du gouvernement est d'accord, qu'on suspende pour quelques minutes parce que, avant de poser mes questions sur les travaux, j'aimerais pouvoir consulter quelques-uns de mes collègues.

Le Président: Très bien.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Consentement.

Le Président: Alors, à la demande, nous allons donc suspendre les travaux de l'Assemblée pendant quelques minutes.

(Suspension de la séance à 11 h 29)

(Reprise à 11 h 38)

Renseignements sur les travaux de l'Assemblée

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Nous en sommes aux renseignements sur les travaux de l'Assemblée.

M. le leader de l'Opposition officielle.

M. Chevrette: Oui, M. le Président. J'ai eu une demande du leader du gouvernement, une demande de consentement concernant la loi 101, qui est la loi sur...

Une voix: La qualité de l'environnement.

M. Chevrette: La qualité de l'environnement... qui, normalement, aurait dû être appelée dans 7 jours. Compte tenu que, de notre côté, on a consenti... Depuis le dépôt, on a toujours dit au ministre de l'Environne- ment que nous concourrions à l'étude de ce projet de loi. Donc, dans un premier temps, je voudrais dire au président de la Chambre et au ministre de l'Environnement que nous acceptons, cet avant-midi, l'étude du principe, et que nous accepterions également un consentement pour aller en commission parlementaire, d'autre part, parce qu'on est à préparer des amendements au projet de loi, toute cette partie-là.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le leader du gouvernement, sur cette question.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui. Effectivement, M. le Président, le leader de l'Opposition a résumé les pourparlers entre l'Opposition officielle et le parti ministériel sur ce projet de loi qui a été déposé en dehors des délais prescrits par notre règlement. Effectivement, le leader de l'Opposition nous avait fait part de son accord au cours de la journée d'hier. Il y a un retrait d'accord pour des vérifications ? je pense qu'elles ont dû s'effectuer hier soir ? de la part de l'Opposition officielle. S'il y a consentement, aux affaires courantes, j'appellerais l'article ou je vous demanderais, M. le Président, d'appeler l'article 3 du feuilleton.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le leader de l'Opposition officielle. (11 h 40)

M. Chevrette: Avant que le ministre n'accepte... appelle l'article 3 du feuilleton, est-ce que le ministre peut nous donner un aperçu du déroulement des travaux pour la journée? On sait qu'il y a des commissions parlementaires qui fonctionnent, puis il y a des lois qui ne sont pas appelées puis qui sont très contentieuses, à savoir la 86 et la 102. Et, contrairement à ce que j'ai connu depuis 4, 5 jours, je n'ai pas un menu très consistant pour la journée en ce qui regarde l'Assemblée nationale. Donc, à part de la loi 101 sur laquelle nous consentons à faire des discussions au niveau du principe, je suppose que c'est une entrée, quel est le plat de résistance de la journée, M. le Président, et quel est le dessert?

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le leader du gouvernement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, M. le Président. Si nous obtenons le consentement unanime des membres de cette Assemblée pour procéder dans le cas de la loi 101, qui touche toute la question des sites d'enfouissement sanitaire et de dépôt de matériaux secs dans la province de Québec, il y a, à ma connaissance, plusieurs députés de plusieurs régions qui souhaitent intervenir, qui sont aux prises avec des problèmes chez eux, ce qui devrait normalement nous amener à au moins 13 heures. À ce moment-là, il y aurait suspension, comme c'est l'habitude, des débats jusqu'à 15 heures en cette Chambre.

Je dois assister au Conseil des ministres où le

menu législatif comme tel va être précisé par l'ensemble de mes collègues et, à ce moment-là, je serai en mesure de communiquer l'information au député de Joliette et leader de l'Opposition. Maintenant, il est possible également que, sur la loi 101, on n'ait pas terminé, malgré tous les efforts, pour 13 heures. Aussitôt que j'aurai l'information du Conseil des ministres, je m'engage à la communiquer au leader de l'Opposition officielle.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le député de Drummond.

M. St-Roch: Oui, M. le Président. Sur la réquisition de M. le leader du gouvernement concernant la loi 101, j'avais indiqué, lorsqu'on a eu la Journée de la terre, le 2 avril, que j'étais pour concourir à tout projet de loi, même s'il était hors délai, qui ferait en sorte qu'on pourrait mettre un frein à la bombe à retardement sur laquelle on est assis.

Alors, c'est avec plaisir que je participerai et que je donne mon consentement à l'adoption du principe de la loi 101.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce qu'il y a d'autres renseignements sur les travaux? Alors, ceci met fin à la période des affaires courantes.

Affaires du jour

Nous allons maintenant passer aux affaires du jour. M. le leader du gouvernement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, je vous prie donc, dans les circonstances, d'appeler l'article 3 de notre feuilleton.

Projet de loi 101 Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Bissonnet): À l'article 3, M. le ministre de l'Environnement propose l'adoption du principe du projet de loi 101, Loi sur l'établissement et l'agrandissement de certains lieux d'élimination de déchets.

Alors, y a-t-il consentement pour déroger à l'article 227 du règlement parce qu'il y a délai d'une semaine? Est-ce qu'il y a consentement?

Mme Juneau: Consentement.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Consentement.

M. le leader du gouvernement, sur ce projet de loi, à l'adoption du principe.

M. Pierre Paradis M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, pour le bénéfice de tous les membres de cette Assemblée et pour une meilleure compréhension du débat qui nous préoccupe aujourd'hui, vous me permettrez de reprendre l'essentiel des propos que je tenais, il y a quelque temps, à l'occasion d'une interpellation en Chambre sur la gestion des déchets solides, soit le vendredi 14 mai dernier.

Il faut d'abord remonter dans le temps et dresser un portrait des actions entreprises par notre gouvernement au cours des dernières années, avant de situer le débat sur la question plus précise qui fait l'objet de la législation discutée en cette Chambre aujourd'hui.

À l'instar de tous les Québécois et Québécoises, notre gouvernement accorde le plus grand intérêt à la question des déchets solides. C'est une préoccupation de première importance sur laquelle nous travaillons, avons travaillé et continuerons de travailler avec constance, comme en font foi la mesure législative que nous débattons aujourd'hui et les autres mesures dont il sera question plus loin au cours de cette intervention.

On se rappelera d'abord, M. le Président, qu'en 1987 notre gouvernement recevait les commentaires et recommandations de 37 organismes prônant la mise en place d'une politique de gestion intégrée des déchets solides au Québec. La même année, le ministère de l'Environnement menait une large consultation à laquelle ont participé plus de 120 organismes, en décembre 1987, à Montréal. Cette consultation, conjuguée aux efforts d'analyse et de réflexion du ministère, a débouché sur l'adoption, en août 1989, de la politique de gestion intégrée des déchets solides.

Cette politique fait état de la situation concernant la problématique des déchets solides au Québec, propose des principes d'intervention de même que toute une série de moyens d'action. Ce document demeure toujours une référence quand on s'intéresse consciencieusement à la question des déchets au Québec, particulièrement quand on réclame une politique cohérente et, surtout, garante du développement durable.

C'est donc dès ce moment que le gouvernement libéral disposait d'un guide pour ses interventions et établissait 2 objectifs fondamentaux, à savoir de réduire au minimum les quantités de déchets à éliminer et, deuxièmement, de s'assurer que les moyens d'élimination des déchets qui restent soient adéquats et sans danger pour l'environnement.

En fait, le but premier visé par la politique consiste à réduire de 50 %, d'ici à l'an 2000, la quantité de déchets solides destinés à l'enfouissement. De plus, la politique privilégie, dans l'ordre: la réduction à la source, le réemploi, le recyclage, la valorisation et, finalement, l'élimination, une stratégie mieux connue sous l'appellation des RRRV.

D'autre part, la politique clarifie le rôle de chaque intervenant et confirme la responsabilité première des municipalités dans la gestion de leurs déchets, spécialement en matière de collecte, de transport et d'élimination.

Il faut, en effet, garder à l'esprit que la gestion

des déchets proprement dite de même que la collecte sélective relèvent du champ de compétence des municipalités. Le ministère de l'Environnement du Québec, pour sa part, est concerné dans la mesure où l'élimination des déchets solides, surtout les déchets domestiques, est susceptible de porter atteinte à la qualité de l'environnement.

Il va de soi, par ailleurs, que la responsabilité des autres intervenants doit nécessairement être mise à contribution dans une démarche intégrée de réduction des déchets. Suivant ce partage des responsabilités, le ministère de l'Environnement intervient donc à titre de responsable de la préservation et de l'amélioration de l'environnement. C'est son rôle de régir les pratiques liées à l'élimination des déchets, le tout dans une perspective de développement durable. Toutefois, dans une approche globale, il n'est qu'un des acteurs concernés et il a toujours envisagé ses interventions dans une perspective d'interaction avec les différents intervenants et dans le respect du rôle de chacun.

Je mentionnerai maintenant, à titre d'exemple, quelques-unes des interventions que notre gouvernement a entreprises dans l'esprit et dans la foulée de cette politique de gestion intégrée des déchets.

En 1989, Collecte sélective Québec a été créée, avec l'appui du gouvernement, afin d'assurer l'implantation de programmes municipaux de collecte sélective; 2 000 000 de citoyens sont desservis aujourd'hui par la collecte porte à porte, soit 6 fois plus qu'en 1989. En mars 1990, nous avons donné notre approbation au protocole national sur l'emballage, adopté par le Conseil canadien des ministres de l'Environnement, protocole qui vise une réduction de 50 % de la quantité d'emballage envoyé à l'élimination d'ici l'an 2000. Le 22 juin 1990, l'Assemblée nationale a adopté à l'unanimité la Loi créant la Société québécoise de récupération et de recyclage, mieux connue sous le nom de RECYC-QUÉBEC. Cette nouvelle société vise à promouvoir la réduction à la source et la récupération en vue du réemploi, du recyclage et de la valorisation. RECYC-QUÉBEC créait plus récemment un programme d'aide gouvernemental pour solutionner les problèmes environnementaux causés par les pneus hors d'usage générés au Québec annuellement. Elle a également mis sur pied, il y a quelque temps, une bourse québécoise de matières secondaires destinée à ouvrir des marchés pour la valorisation de ces produits.

Le 25 juin 1991,des modifications ont été apportées au règlement sur les déchets solides afin que les exploitants du lieu d'enfouissement sanitaire puissent refuser les déchets provenant de l'extérieur de leur région. En octobre 1991, le ministère de l'Environnement démarrait son évaluation systématique des lieux d'enfouissement sanitaire par son plan d'action pour l'évaluation et la réhabilitation des lieux d'enfouissement sanitaire. En mai 1992, le gouvernement du Québec a modifié sa politique d'achat, favorisant ainsi l'acquisition de produits et services plus respectueux de l'envi- ronnement.

Malgré toutes ces démarches, il reste néanmoins que la gestion des déchets constitue actuellement un problème et que nous ne pouvons pas attendre que la situation devienne plus critique avant de réagir à la pollution générée par l'élimination des déchets. Nous sommes parfaitement conscients de la situation en tant que gouvernement.

Qu'en est-il de cette situation? Il faut tout de suite remarquer qu'en matière d'élimination des déchets le problème se pose surtout avec les lieux d'enfouissement sanitaire. Si l'on brosse rapidement un portrait de la situation, force nous est de constater que la grande région de Montréal s'avère particulièrement préoccupante. Le dépotoir de l'ancienne carrière Miron et le projet d'incinérateur de la Régie intermunicipale de gestion des déchets sur l'île de Montréal donnent à la question de l'élimination des déchets son caractère d'actualité. Mais le gouvernement n'est pas sans rien faire ?je l'ai dit ? sur la question de l'élimination des déchets, bien au contraire, et particulièrement quant au problème des lieux d'enfouissement sanitaire. (11 h 50)

Ainsi, depuis le 12 novembre 1992, tout nouveau site d'enfouissement sanitaire, de dépôt de matériaux secs, de dépôt en tranchées, de site de déchets spéciaux ainsi que tout agrandissement de l'un de ces sites font l'objet d'une évaluation de ma part en vue de décider si ces projets doivent être référés au Bureau d'audiences publiques sur l'environnement pour fin d'une consultation.

Cette décision fait en sorte que tout projet actuel et futur visant à établir ou à modifier un système de gestion des déchets ou une partie de ce système est potentiellement soumis à la procédure d'enquête et d'audiences publiques, et ce, en vertu des pouvoirs exceptionnels que confère au ministre de l'Environnement l'article 6.3 de la Loi sur la qualité de l'environnement. Cette décision a été prise en attente de l'adoption du nouveau règlement sur les évaluations environnementales et du nouveau règlement sur les résidus solides, qui constitue une refonte de l'actuel règlement sur les déchets solides. De cette façon, nous avons manifesté notre ferme volonté d'impliquer la population dans la gestion des sites de déchets. Les citoyens et les citoyennes doivent en effet être directement et démocratiquement impliqués dans le processus d'analyse actuellement effectué par les fonctionnaires du ministère de l'Environnement.

Vous n'êtes pas sans savoir, M. le Président, toutefois, que cette décision a essuyé quelques revers devant les tribunaux dans certains dossiers. En fait, actuellement, 7 projets majeurs d'agrandissement font toujours l'objet de procédures judiciaires devant les tribunaux, soit 4 projets de lieux d'enfouissement sanitaire et 3 projets de dépôts de matériaux secs. Au-delà des caractéristiques de chacun de ces cas particuliers, ce que cette situation vient mettre en évidence, c'est l'in-

suffisance, à certains égards, des mesures actuelles législatives et réglementaires, ce dont nous sommes tout à fait conscients, en tant que gouvernement, comme le montrent les importantes mesures législatives que nous entendons présenter dans le cadre de la refonte du règlement sur les déchets solides ou que nous avons déjà fait savoir, notamment avec le projet de loi 61 portant sur la réforme de l'évaluation environnementale.

Enfin, en ce qui concerne la première de ces mesures, nous avons amorcé, en octobre 1992, la diffusion auprès de plus de 200 intervenants d'un document de préconsultation visant à donner les orientations de la refonte du règlement sur les déchets solides. Quant à la deuxième mesure, l'Assemblée nationale a adopté en décembre 1992 le projet de loi 61 portant sur la réforme des évaluations environnementales visant, entre autres, l'assujettissement des lieux d'élimination des déchets à la procédure d'évaluation et d'examen des impacts sur l'environnement. La réforme obligera en effet tout projet d'implantation d'un lieu d'enfouissement sanitaire et de dépôt de matériaux secs à faire l'objet d'une consultation publique préalable.

D'après tous les avis que nous avons reçus, cette loi et le règlement afférent, une fois en vigueur, donneront au ministre de l'Environnement une assise juridique solide sur laquelle il pourra s'appuyer pour obliger tous les sites d'enfouissement sanitaire, par exemple, à passer devant le Bureau d'audiences publiques sur l'environnement. Le gouvernement reste par ailleurs sensible aux préoccupations de la population quand elle s'exprime par la voix des groupes environnementaux sur la question de l'élimination des déchets, et nous sommes bien loin de faire la sourde oreille lorsque ces mêmes représentants nous demandent de tenir une enquête publique sur cette problématique particulière des déchets et de décréter, pour ce faire, un moratoire sur l'établissement et l'agrandissement des lieux d'élimination des déchets. À preuve, nous avons rencontré ces représentants à plusieurs reprises ces derniers temps et nous leur avons confirmé, par le fait même, toute l'importance que nous accordons à leur point de vue sur le problème. Nous avons même pu compter, au cours de ces échanges, sur l'expertise d'éminents juristes québécois en environnement. L'avis de ces juristes devait confirmer la position que nous continuons de défendre sur ce sujet, à savoir qu'un moratoire entraînerait des difficultés légales, des contestations légales et pratiques, qu'on ne peut arrêter de produire des déchets et qu'il est, à toutes fins utiles, impossible d'appliquer une telle solution.

Un moratoire sur l'élimination des déchets s'avérerait sans doute encore moins viable, sur le plan juridique, que l'application de l'actuel article 6.3 qui a déjà fait l'objet de contestations devant les tribunaux. Qui plus est, les juristes ont confirmé qu'il ne serait pas pertinent de modifier les règles de jeu actuelles en allant dans cette direction, compte tenu de l'état d'avancement des actions déjà entreprises au sujet de la refonte du règlement sur les déchets solides et de la réforme sur l'évaluation environnementale. Ainsi, dans un contexte où un moratoire se révèle une solution pour le moins précaire pour soutenir un débat public, dans un contexte où les moyens actuellement mis en branle aux plans légal et réglementaire se présentent comme des solutions tout à fait appropriées, nous sommes d'avis que la solution qui apparaît la plus réaliste et la plus indiquée dans les circonstances réside dans la poursuite des actions qui sont déjà entamées et qui vont bon train, et dont on peut espérer un certain succès.

Toutefois, tout au cours de nos discussions avec les différents intervenants intéressés à la gestion des déchets, nous avons toujours indiqué que nous demeurions ouverts, à titre de gouvernement, à tout autre élément de solution qui pourrait être utile dans l'atteinte de nos objectifs. Aussi est-ce pour cette raison que nous avons continué d'accueillir avec considération l'avis de tous les partenaires environnementaux, car il faut bien, sur une question aussi grave et aussi déterminante, chercher à mettre tous les efforts en commun et faire fi des divergences d'opinion stériles.

C'est cette attitude d'ouverture qui nous a conduits à présenter le projet de loi sur l'établissement ou l'agrandissement de certains lieux d'élimination des déchets, particulièrement devant la prolifération des demandes d'autorisation pour la création ou l'agrandissement de lieux d'élimination avant que n'entrent en vigueur les nouvelles dispositions portant sur les déchets solides et sur les évaluations environnementales. Il faut signaler, encore une fois, en effet, que ces nouvelles dispositions seront plus contraignantes et plus rigoureuses à l'endroit des promoteurs.

Je signalerai à cet égard que le ministère de l'Environnement est actuellement saisi ou informé de près de 80 demandes d'établissement ou d'agrandissement de lieux d'enfouissement sanitaire et de dépôt de matériaux secs. Bien qu'on remarque que ces demandes sont réparties dans toutes les régions du Québec, on note que les environs de la grande région métropolitaine, notamment la Montérégie et l'Estrie, font l'objet d'un nombre important de demandes.

Enfin, le projet de loi que nous présentons aujourd'hui se veut, d'une part, une réponse rapide et appropriée à une problématique actuelle et, d'autre part, une solution dotée d'une base légale qui correspond aux préoccupations légitimes et toujours plus pressantes de la population du monde municipal et des groupes écologiques à l'égard de la problématique de la gestion des déchets au Québec.

L'essentiel de ce projet de loi consiste à rendre l'évaluation environnementale obligatoire, avec étude d'impact et audiences publiques à l'égard des projets d'implantation ou d'agrandissement de certains lieux d'élimination de déchets, des projets qui, jusque-là, ont échappé à ce processus d'évaluation puisque la Loi sur la qualité de l'environnement et l'actuel Règlement portant sur l'évaluation environnementale ne les soumettait pas à ce processus.

D'autre part, ce projet de loi, lorsqu'adopté, permettra au gouvernement, si les circonstances le justi-

fient, d'imposer des normes différentes, c'est-à-dire plus sévères que celles qui sont prescrites par le Règlement sur les déchets solides actuellement en vigueur. Cette particularité permettra d'imposer des conditions plus exigeantes à un promoteur lors de la création ou de l'agrandissement, par exemple, d'un lieu d'enfouissement sanitaire.

Je me dois d'ailleurs d'insister sur le fait que ce projet de loi est une mesure transitoire présentée en attente du nouveau Règlement sur les évaluations environnementales qui soumettra notamment les sites d'enfouissement et les dépôts de matériaux secs à la procédure d'examen des impacts sur l'environnement et du . nouveau Règlement sur les déchets solides, qui prévoit la mise en place de normes plus sévères concernant l'établissement et l'exploitation des lieux d'élimination des déchets.

Je me dois également d'insister sur le fait que cette solution légale permet d'intervenir rapidement et de soumettre à une procédure d'évaluation environnementale et d'audience publique tous les projets de création et d'agrandissement de sites tout en prenant le temps qu'il faut pour compléter le processus visant l'adoption de mesures précédemment mentionnées, et ce, dans le meilleur intérêt de l'ensemble de la population et des décideurs locaux.

J'ajouterai en outre que, lors de sa sanction par le lieutenant-gouverneur, ce projet de loi spécial sera effectif à la date de son dépôt, soit le 14 juin 1993, et qu'il s'applique à toute nouvelle demande de certificat et également à toutes les demandes qui sont pendantes au ministère de l'Environnement du Québec.

D'autre part, comme je le signalais précédemment, nous avons travaillé dans un esprit d'ouverture avec nos partenaires environnementaux, si bien qu'il me fait plaisir d'annoncer aujourd'hui la mise sur pied d'un processus de consultations particulières additionnelles réunissant des représentants du monde municipal, gouvernemental, écologique et de l'industrie environnementale.

Animés d'un souci de bonification, nous croyons de cette façon que le texte législatif instituant la refonte du Règlement sur les déchets solides fera l'objet de commentaires et de propositions du milieu qui viendront améliorer le projet de loi en voie de rédaction au ministère, lequel a déjà été précédé d'une consultation préliminaire sur un document technique l'automne dernier. Ce groupe de travail, dont la première réunion est prévue pour le 21 juin prochain, réunira les représentants de chaque organisation que nous sollicitons, soit le ministère des Affaires municipales, le ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, le ministère de l'Environnement, l'Union des municipalités du Québec, l'Union des municipalités régionales de comté du Québec, l'Union des producteurs agricoles, la Société québécoise de récupération et de recyclage, Collecte sélective Québec, l'Association des entrepreneurs de services en environnement du Québec, et le Front commun québécois pour une gestion écologique des déchets. (12 heures)

En mettant nos efforts en commun ainsi que nos compétences respectives, je suis confiant que nous élaborerons ensemble une réglementation environnementale sur la problématique de la gestion des déchets au Québec qui répondra aux besoins et aux attentes de la population, du monde municipal et des groupes écologiques. Cette consultation, qui a pour but de doter le Québec des outils nécessaires à une gestion écologique de nos déchets, n'entraînera pas, par ailleurs, de délais significatifs dans l'atteinte de cet objectif puisqu'il est prévu qu'un rapport devra être élaboré pour le 1er septembre prochain.

Pour l'heure, et dans l'attente de l'entrée en vigueur des mesures annoncées précédemment et du rapport de la nouvelle table de discussion, nous demeurons toutefois fermement convaincus que le projet de loi 101, dont nous débattons aujourd'hui, s'avère la réponse la plus indiquée et la plus apte, compte tenu des circonstances, pour répondre aux préoccupations légitimes de la population, circonstances sur lesquelles vous me permettrez, M. le Président, d'insister, à savoir: le caractère désuet des normes de l'actuel règlement sur les déchets solides qui fixe des paramètres datant de 1978 pour l'établissement et l'agrandissement des lieux d'élimination des déchets, alors que ces sites exigent, de toute évidence, l'application d'une réglementation environnementale beaucoup plus rigoureuse; que la population désire de plus en plus ? et à bon droit, d'ailleurs ? être consultée et être impliquée dans la mise en place ou la gestion de projets dont les impacts sur la qualité de l'environnement sont des plus préoccupants, compte tenu, d'une part, de la nature des opérations qu'on y pratique et, d'autre part, de l'envergure toujours plus grande que prennent ces mêmes projets quant à leur dimension; que les promoteurs ont, dans certains dossiers, contesté devant les tribunaux la décision que nous avions prise en novembre dernier, suivant l'article 6.3 de l'actuelle Loi sur la qualité de l'environnement, de soumettre à l'analyse, en vue d'une éventuelle procédure d'enquête et d'audiences publiques, tout projet actuel et futur visant à établir ou à modifier un système de gestion des déchets ou une partie d'un tel système; qu'il y a prolifération des demandes d'autorisation pour la création ou l'agrandissement de lieux d'élimination de déchets ou de dépôts de matériaux secs dont le ministère a été saisi ou informé ? on en dénombre, et je le répète, à peu près 80 ? alors que nous sommes en train d'élaborer et de mettre en place, pour un avenir rapproché, les dispositions légales et réglementaires qui, d'une part, obligeront à une procédure de consultation publique concernant les sites d'élimination de déchets et qui, d'autre part, introduiront une batterie de normes plus rigoureuses et plus sévères concernant l'établissement et l'exploitation des lieux d'élimination des déchets; que l'émission d'un aussi grand nombre de permis aurait des répercussions importantes et fort négatives sur la collecte sélective, la récupération et le recyclage de nos

déchets parce que, l'enfouissement étant facilement accessible, les coûts de la tonne de déchets enfouis se maintiendraient à des niveaux très bas, ce qui découragerait tous les efforts qu'on doit consentir à la récupération et au recyclage; que, dans les dossiers des lieux d'enfouissement sanitaire ou dans tout autre dossier à caractère environnemental, nous devons poser des gestes pour le seul et unique bien-être de la population que nous représentons, ce qui est le cas avec ce projet de loi; que, dans le cadre de nos interventions, nous devons surtout nous assurer que personne n'a ou ne conserve de droits acquis à la pollution, une telle prétention étant indéfendable et insoutenable dans une société comme la nôtre, comme le reconnaît une jurisprudence maintenant bien établie en droit de l'environnement; que, lorsque nous devons intervenir en tant que parlementaires, nous devons le faire au moment jugé approprié et que, dans le dossier de la gestion des déchets solides, un concensus a été établi afin que nous intervenions dans ce secteur qualifié d'intérêt public.

Voilà, M. le Président, autant de raisons qui expliquent notre choix d'invoquer l'urgence de la situation pour discuter aujourd'hui de ce projet de loi spécial. C'est pourquoi je demanderai à tous les membres de cette Chambre de contribuer activement au processus parlementaire permettant d'aller de l'avant avec cette mesure législative dont l'urgence et la nécessité, j'insiste, ne font aucun doute.

Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le ministre de l'Environnement de votre intervention.

Alors, je rappelle aux membres de cette Assemblée que nous en sommes à l'étape de l'adoption du principe du projet de loi 101, Loi sur l'établissement et l'agrandissement de certains lieux d'élimination de déchets, et je cède la parole à Mme la présidente de la commission des affaires sociales et députée de Taillon.

Mme la députée, la parole est à vous.

Mme Pauline Marois

Mme Marois: Merci. Alors, je vous remercie M. le Président.

Je voudrais, dès le début de mon intervention, et sans réserve, dire au ministre que je suis d'accord avec le fond du projet de loi qui nous est présenté de même que généralement avec les articles, tels que je les interprète à ce moment-ci. Évidemment, nous aurons l'occasion, en commission parlementaire, d'étudier l'un après l'autre ces articles et nous aurons l'occasion, s'il y a lieu, de les bonifier. J'aurai, d'ailleurs, une proposition précise à faire, M. le Président, un amendement, un projet d'amendement dont je parlerai plus loin dans mon intervention.

Je pense qu'il était important que, dès ce moment-ci, les membres de cette Assemblée, unanimement, reconnaissent l'importance d'agir d'une façon urgente dans ce dossier, et c'est ce que permettra de faire la loi, urgente parce qu'on a constaté ? et le ministre l'a dit lui-même ? que, suite aux directives émises par le ministre, celles-ci avaient été déboutées en cour et, donc, avaient permis à certains promoteurs de sites, qu'il s'agisse de promoteurs publics ou privés, d'ailleurs, de ne pas avoir à passer devant le BAPE pour que le projet de site d'enfouissement soit évalué, donc, par le Bureau d'audiences publiques, et surtout que le projet soit soumis à la discussion publique.

Cela étant dit, M. le Président, vous allez me permettre, cependant, de déplorer le fait que le ministre, comme ça en est malheureusement son habitude, arrive en catastrophe, à la fin d'une session, pour nous présenter ce projet de loi qui devient un projet de loi spécial, nous contraignant, évidemment, à procéder d'une façon accélérée, sans avoir le temps de faire toutes les consultations utiles et nécessaires nous permettant de nous alimenter, pour intervenir d'une façon pertinente dans le débat, en tenant compte de tous les enjeux concernés par un tel projet de loi.

M. le Président, ce qu'il faut savoir, c'est que le ministre avait été prévenu, tant par ses conseillers juridiques que par des avocats qui oeuvrent dans le secteur privé ? et ça, je l'affirme parce qu'on me l'a très clairement dit ? le ministre avait été prévenu que sa directive risquait d'être contestée, ce qui est arrivé concrètement et pratiquement. Ce qui fait que nous nous retrouvons donc maintenant devant un projet spécial, alors qu'il aurait pu, il y a quelques mois, il y a 1 an, il aurait pu, dès ce moment-là, venir avec le projet qui est là, qui corrige évidemment... c'est-à-dire qui lui permet d'intervenir sans aucune espèce de crainte de se voir contesté. Et c'est ce que je reproche au ministre, comme je reproche au ministre, M. le Président, d'annoncer depuis un long moment ? et j'ai devant moi le document qu'il a déposé en commission parlementaire où on a étudié le budget du ministère, j'ai devant moi la liste des règlements qui sont en étude... Ce que je reproche au ministre, c'est qu'il annonce des projets, il fait miroiter aux gens qu'il va procéder et, 1 an, 1 an et demi plus tard, on en est toujours en préconsultation, en projets qui dorment sur les tablettes du ministère et qui ne sont pas mis en opération.

Quand je lis la liste des projets de règlement qui sont soit en prépublication ou qui sont attendus, c'est absolument effarant, M. le Président: projet de règlement sur les matières dangereuses, refonte de règlement sur l'évaluation de l'examen d'impact, projet de règlement sur les rejets liquides, projet de règlement sur la pollution par les élevages d'animaux, etc. Certains sont en prépublication ou en publication, c'est-à-dire en prépublication ou en consultation depuis février 1990, janvier 1992, M. le Président; 1 an, 2 ans, 3 ans. C'est inadmissible. Et le ministre le sait très bien, M. le Président.

De la même façon, le projet de loi qui est devant nous aurait pu être présenté préalablement, aurait évité que des conflits ne s'enveniment sur le terrain, et le ministre le sait très bien, des conflits entre les citoyens

et les promoteurs. Cela met les promoteurs dans des situations difficiles, bien sûr, mais cela enlève, à mon point de vue, des droits aux citoyens de s'exprimer. Et c'est ce qui s'est passé dans un certain nombre de cas au Québec. C'est ce qui se passe actuellement en Mauricie. C'est ce qui se passe actuellement dans Laurentides-Lanaudière. Qu'on pense, entre autres, à Saint-Jean-de-Matha, M. le Président.

Alors, si on avait très clairement modifié la loi, obligeant tous les projets, c'est-à-dire toutes les demandes, soit visant à agrandir des sites d'enfouissement ou à en implanter, à passer devant le BAPE, à ce que s'applique pour eux la procédure prévue par le Bureau d'audiences publiques, on aurait évité, à mon point de vue, que des conflits s'enveniment. Et ça m'apparaît une responsabilité que le ministre doit porter à ce moment-ci. (12 h 10)

Bien sûr, il se rattrape un peu par le projet qui est là, et maintenant va obliger toutes les demandes qui vont lui être présentées... va obliger les promoteurs de toutes les demandes à suivre la procédure du BAPE. Je suis d'accord, ça a de l'allure, ça a du bon sens, puis c'est important de le faire. Pourquoi ne l'a-t-il pas fait avant, M. le Président? C'est ça que je reproche au ministre, et il le savait, mais il a attendu de contester son règlement... C'est-à-dire que sa directive a été contestée. Il s'est défendu, bien sûr. Il a annoncé par la suite qu'il poursuivrait devant les tribunaux supérieurs. Tant mieux! Bravo! Il n'avait pas le choix, de toute façon, à mon point de vue, s'il voulait être un tant soit peu cohérent. Cela étant dit, je lui reproche de se traîner les pieds, M. le Président, en matière d'environnement.

Il nous a resservi ? je n'ai pas d'autre mot, M. le Président ? les propos qu'il tenait il y a quelques semaines devant cette Assemblée, au moment où nous avons eu un débat sur la question de la gestion des déchets solides au Québec, M. le Président. Ceci s'appelait une interpellation, c'est-à-dire un moment où les parlementaires ont la possibilité de questionner un ministre sur un thème précis, de telle sorte que l'on puisse comprendre ce que sont les intentions du ministre, que l'on puisse faire un peu l'évaluation d'une situation qui concerne, évidemment, l'ensemble de la population, et, dans ce cas présent, c'était la question de la gestion des déchets solides, M. le Président.

J'ai relu avec attention les propos qu'avait tenus le ministre et je l'ai écouté à nouveau ce matin. Et c'était tellement amusant, M. le Président, qu'à un certain moment j'ai retrouvé in extenso ? c'est-à-dire dans le texte, absolument tel que le ministre l'avait dit déjà au moment de l'interpellation ? les propos qu'il a repris ce matin. Bon. Cela étant dit, ça va de soi. Il n'avait pas de choses différentes à dire, vous allez me dire, sûrement. Mais, cela étant dit, comme il n'avait pas répondu à mes questions au moment de l'interpellation, dans ses propos de ce matin, évidemment, en défendant sa loi, il n'a pas davantage fait la lumière sur la question de la gestion des déchets solides, M. le Président.

Et je vais vous dire en quoi, à mon point de vue, il ne l'a pas fait, et je vais reprendre un certain nombre d'interrogations que j'avais à cet égard et que le projet de loi ne vient pas résoudre, M. le Président, mais qu'une commission d'enquête, qu'une enquête générique, qu'une commission publique pourrait, cependant, venir, sinon résoudre, du moins mettre en lumière et par laquelle nous pourrions avoir un certain nombre d'avenues de solution auxquelles le ministre pourrait souscrire et surtout qu'il pourrait appliquer, M. le Président. Alors, comme il n'a pas répondu à mes questions, je vais en reprendre un certain nombre concernant la gestion des déchets.

En fait, on va se rappeler, M. le Président, que l'intervention du gouvernement en matière de gestion des déchets date de 1978. Sous le gouvernement du Parti québécois, on avait publié, pour la première fois, un règlement sur la gestion des déchets solides. D'ailleurs, faut-il se rappeler, M. le Président, que c'est toujours ce règlement qui est opérationnel, et nous sommes tout à fait et essentiellement d'accord avec le ministre qu'il faut revoir ce règlement-là. S'il était pertinent et juste au moment où on l'a adopté, compte tenu d'une évolution absolument extraordinairement rapide que connaît toute la question environnementale, et particulièrement celle qui concerne la gestion des déchets, il va de soi qu'on doit réviser ce règlement, qui est toujours, M. le Président, je le rappelle, en prépublication.

C'est important de se souvenir aussi, parce que ça concerne notre vie quotidienne, mais ça concerne aussi l'aménagement de nos ressources, M. le Président, et ça concerne ce qui nous concerne très largement en matière de développement durable... Il faut rappeler qu'en 1982 on avait amorcé un programme en vue de fermer ce qu'on appelle maintenant des lieux d'enfouissement, mais qui étaient essentiellement des dépotoirs, faut-il bien le dire. Il y avait un terme anglais qu'on utilisait à l'époque, des «dumps». Je le mets entre guillemets, évidemment. On avait donc, en 1982, fait un bilan et engagé un programme de fermeture des dépotoirs à ciel ouvert. En 1991, le ministère de l'Environnement croit, dit qu'il reste environ 50 dépotoirs à ciel ouvert, et ce que je vous dis c'est qu'actuellement 43 seraient encore en opération. Alors, si, actuellement, on a un débat important sur le fait que chacun des sites d'enfouissement soit analysé en termes d'impacts sur l'environnement, du fait qu'ils peuvent générer des gaz absolument dangereux pour la qualité de vie, pour la santé, même ? c'est plus que pour la qualité de vie, pour la santé des citoyens et des citoyennes ? si ces lieux d'enfouissement peuvent générer des eaux qu'on appelle des eaux de lixiviation, c'est-à-dire qui sont le résultat, évidemment, de la putréfaction de l'ensemble des déchets qu'on enfouit dans un site et qui, ces eaux, lorsqu'elles s'écoulent, viennent soit contaminer en sous-sol des nappes phréatiques, soit contaminer des ruisseaux ou des cours d'eau qui sont près des sites, on comprendra l'importance, M. le Président, qu'il y a à se préoccuper, évidem-

ment, de la sécurité sanitaire de ces sites-là et de la sécurité en termes de santé publique et en termes d'affectation de l'environnement.

Imaginez si, maintenant, on est très exigeant à l'égard de l'implantation de nouveaux sites, de l'agrandissement de sites existants, de la consolidation, en termes sécuritaires, de sites qui auraient été mal foutus au départ, imaginez comment il est important qu'on se préoccupe de dépotoirs, à toutes fins pratiques, qui existent toujours, à ciel ouvert, et pour lesquels on n'exerce aucune espèce de contrôle, M. le Président.

Et, dans ce sens-là, je rappellerai au ministre que je lui avais demandé de nous faire état du travail qu'il accomplissait, que son ministère accomplissait à l'égard des lieux d'enfouissement sanitaire. Et l'état de la situation, à l'heure actuelle, serait le suivant ? je dis bien serait le suivant, puisque ce sont les informations officielles dont je peux disposer, à l'heure actuelle. Ce qu'on me dit, c'est qu'il existerait 75 lieux d'enfouissement sanitaire, 342 dépôts en tranchées, 78 dépôts de matériaux secs.

Ce qu'on nous dit aussi, c'est que tous les exploitants des lieux d'élimination qui étaient considérés comme non conformes devaient procéder à des travaux pour corriger les déficiences des sites, donc de ces dépotoirs, dans certains cas, mais, dans d'autres cas, de sites dans le sens où ils ont été, quand même, aménagés de manière sécuritaire à l'époque où on les a aménagés; il faut quand même être conscient de ça aussi. Ils devaient le faire, donc, d'ici 1991.

Ce que l'on sait, M. le Président, c'est que le travail n'était pas terminé. Nous sommes, cependant, en 1993. Le ministre serait encore à faire un bilan de la situation. C'est un peu inquiétant, M. le Président, quand on sait que plusieurs lieux d'élimination ne sont pas conformes, quand on sait les problèmes auxquels sont confrontés certains citoyens dans un bon nombre de régions du Québec, où des eaux de lixiviation, des eaux contaminées de sites d'enfouissement s'écoulent dans les rivières, s'écoulent dans les ruisseaux, viennent contaminer les sources d'eau potable de certains milieux ou présentent des risques de contamination à cet égard-là.

Moi, je pense que c'est absolument inadmissible que le ministre ne nous dise pas publiquement, à ce moment-ci, où il est en est, d'une part, dans l'identification et, d'autre part, dans la caractérisation. Ça veut dire quoi? Ça veut dire essentiellement que l'on identifie exactement... Parce qu'on peut savoir où ils sont, mais savoir où ils sont et savoir qu'ils sont polluants, dangereux pour l'environnement, c'est une autre chose, et savoir ce qu'il faut faire pour corriger la situation s'ils sont dangereux, c'est aussi une autre étape.

Ce que je veux savoir du ministre, c'est sur l'ensemble des sites... Parce que, là, on se préoccupe des futurs sites qui vont s'ouvrir ou de sites qui vont s'agrandir, et tant mieux, je suis d'accord. Remarquez qu'on a des techniques beaucoup plus fines, maintenant, qui nous permettent de travailler plus adéquatement à la protection de l'environnement, de s'assurer que les sites sont bien «sécurisés», M. le Président, en termes de santé publique et de protection de l'environnement au sens large.

Mais, M. le Président, je veux savoir du ministre ce qui se passe avec le passé. Où en est-il actuellement? Quand va-t-il déposer l'état de la situation précis, complet, avec la caractérisation des sites dans le sens des actions à mener pour corriger les lacunes identifiées dans ces sites-là, M. le Président? Parce que, si on se préoccupe de l'avenir, il faut aussi se préoccuper du passé parce que le passé a souvent été bien pire que ce qui se fait maintenant, compte tenu que l'état de connaissances était à ce point limité, si on veut, dans ce secteur-là, qu'on a agi dans un certain nombre de cas, pas dans tous les cas, je veux bien le préciser, mais on a agi dans un bon nombre de cas en toute bonne foi, n'ayant pas les connaissances pour agir autrement. (12 h 20)

Mais cela étant dit, nous sommes en 1993, et je pense que le ministre a une responsabilité à cet égard-là. Alors, j'aimerais bien qu'il puisse me dire quel est l'état de la situation à cet égard et qu'il fasse le point le plus complet possible. Ce matin, en l'écoutant, je me disais: II fait toujours la même chose; il nous explique ses objectifs, il nous explique les processus qu'il choisit pour atteindre ces objectifs-là. Jusque-là, ça va. Je ne suis pas en désaccord avec ça. C'est important, lorsqu'on veut résoudre un problème, lorsqu'on veut atteindre, réaliser un projet, il faut fixer l'objectif qu'on veut atteindre, le plan de travail à suivre et poser les gestes en conséquence. Bon. Alors, ça va de soi. Là, il m'explique ça. Il me dit: Voilà, je me fixe un objectif de réduction, par exemple, de l'emballage, parce que j'adhère au protocole avec les autres provinces et on s'est entendu sur un objectif; je fixe un objectif de réduction de production de déchets, de résidus; je fixe un objectif, voici lequel il est, et je compte procéder de cette façon-là pour y arriver.

Mais où en est-il maintenant? Quels sont les résultats qu'il a atteints dans tous les cas, M. le Président? Et si le rythme d'atteinte de l'objectif est en deçà de ce qu'il s'était fixé, qu'est-ce qu'il va faire pour remédier à la situation? C'est ça, dans le fond, la question que je lui pose. Pas qu'il vienne me dire qu'il s'est fixé des objectifs. C'est-à-dire, oui, j'accepte qu'il vienne me le dire, mais je veux savoir où il en est dans l'état de réalisation de ce qu'il s'est fixé comme objectif et comme plan d'action.

Et c'est toujours la même chose, M. le Président, on devient un petit peu vague et on revient sur le fait que la volonté du ministre est là, qu'il doit respecter ses partenaires. J'en suis, M. le Président, je n'ai jamais pensé que le ministre ne devait pas respecter ses partenaires, que ceux-ci soient des partenaires publics, soit les municipalités, les MRC, que ses partenaires soient des partenaires privés. Je suis tout à fait d'accord avec cela. Ce n'est pas ça que je lui demande. Je lui demande: II se fixe des objectifs, a-t-il les moyens de les réaliser? S'il n'a pas les moyens actuels de le faire,

qu'est-ce qu'il va corriger pour y arriver? C'est juste ça que je lui demande, M. le Président, mais encore faut-il qu'il me fasse un état de la situation complet, et je n'ai pas l'impression d'en être à cette réalité-là.

D'ailleurs, M. le Président, je vais prendre un thème précis, celui de la réduction des déchets. En fait, la politique de 1989 prévoyait de réduire la production des déchets, vous savez, ce qu'on met dans nos sacs verts, les sacs verts qu'on dépose sur le coin de la rue ou sur le bord de notre cour. La politique de 1989 nous disait: II faut réduire de 36 % la quantité de nos déchets. Ce qu'on sait, c'est qu'en 1989 on produisait annuellement 6 500 000 tonnes métriques de déchets. 6 500 000, ce n'est pas inutile de bien se rappeler ce chiffre-là. En 1992, une augmentation de l'ordre de 700 000 tonnes par rapport au chiffre de 1989: nous produisons 7 219 000 tonnes métriques. Quand je lis ça, M. le Président, je n'ai pas l'impression qu'on a baissé ni de 1, ni de 2, ni de 3, ni de 36 %, M. le Président, la production des déchets.

Là, le ministre va me dire: Oui, mais écoutez, entre 1989 et 1992, la population a sans doute augmenté. A-t-elle augmenté suffisamment, M. le Président, pour expliquer que les déchets aient augmenté de l'ordre de 700 000 tonnes, alors que le ministre voulait réduire la production de déchets? Sûrement pas en 3 ans, M. le Président. En 20 ans, en 10 ans, là, on pourra comparer des chiffres, puis mettre tout ça en relation les uns avec les autres. Mais je ne pense pas que ce soit la situation actuelle, M. le Président.

En fait, ce qu'on constate, c'est que, si on veut atteindre l'objectif qu'on s'est fixé, on devrait effectivement diminuer la production annuelle de l'ordre de 430 000, 435 000 tonnes. Or, si je comprends, on l'a augmentée sur 2 ans, 3 ans, de 700 000 tonnes. Alors, on est complètement, mais complètement, M. le Président, à côté de la cible.

Qu'est-ce que le ministre a à me répondre à ça? Qu'est-ce qu'il a fait comme travail, à cet égard, pour arriver à atteindre l'objectif qu'il s'était fixé et dont il nous parle, M. le Président? Comment vous pensez qu'on arrive à réduire la production de déchets? De différentes façons, bien sûr, mais la première consiste à faire en sorte que ce qu'on met dans le sac à déchets, c'est-à-dire les produits que l'on achète pour fins de consommation, soit consommation en termes de nourriture, soit consommation en termes de produits de nettoyage ou quoi que ce soit, que les produits, donc, que l'on achète au début de la chaîne de production de déchets, M. le Président, soient les moins polluants possible, d'une part, que les emballages prévoient que l'on puisse réutiliser les contenants, par exemple, dans lesquels se trouvent soit des produits de nettoyage ou des produits utiles à la consommation humaine, donc que l'on intervienne chez le producteur, M. le Président, d'une part; d'autre part, pour faire en sorte que les contenants qui sont utilisés soient réutilisables, soient dans des formats qui font en sorte qu'on ne morcelle pas le contenant et qu'on se retrouve avec 3 petites boîtes plutôt qu'une, qui déjà utilise moins de ressources, mais qui aussi vient moins encombrer notre sac à vidanges qui, lui, va justement s'en aller au site d'enfouissement avec tous les problèmes que cela comporte.

Alors, il faut donc qu'il y a ait des politiques en ces matières, mais il faut qu'il y ait aussi des politiques en matière de récupération et de recyclage, c'est-à-dire des produits que l'on peut transformer, après qu'ils ont été utilisés une première fois, pour les remettre sur le marché sous la même forme, soit de contenant, ou autrement réintroduits. Tout le secteur des papiers, évidemment, est un très bel exemple des papiers qui sont réintroduits dans des produits de consommation courante, qu'il s'agisse de papier hygiénique ou qu'il s'agisse de papier nous permettant d'écrire, de produire des documents, etc., peu importe, que l'on recycle, donc, un certain nombre des produits pour les réintroduire dans le circuit. Tous ces gestes qu'on pose ont un impact sur le fait que l'on réduise le volume des déchets qui s'en vont vers les sites d'enfouissement. évidemment, pour ce faire, le ministre a rappelé qu'on avait mis en place des programmes de collecte sélective. combien, vous pensez, de personnes au québec sont desservies par la collecte sélective, c'est-à-dire le fait que l'on aille chercher, soit dans des bacs, soit en vrac dans des sacs, tous ces produits qui peuvent être réutilisés, papier, carton, plastique, boîtes de conserve vides, etc.? savez-vous combien, quelle partie de la population est couverte par ces processus de collecte sélective? 37,2 % de la population est couverte. ça peut être aussi les fameuses cloches que l'on retrouve dans plusieurs de nos municipalités. mais savez-vous quel est l'objectif du ministre? c'est un autre bel exemple, ça. il fixe des objectifs et il ne prend pas les moyens pour y arriver. il ne nous dit pas non plus ce qu'il va faire pour corriger la cible, pour corriger le tir ou pour mener des actions différentes. (12 h 30) en 1989, on prévoyait que de 70 % à 80 % de la population seraient desservis en 1996, m. le président. il va falloir accélérer le rythme, et drôlement, si on veut atteindre cet objectif-là. on apprenait dernièrement qu'à l'échelle canadienne les régions de montréal et de québec se classent respectivement avant-dernière et dernière parmi les 15 principales agglomérations urbaines du pays. dans la région de montréal, le pourcentage est de 37 % et dans celle de québec, on parle de 25 %. rappelez-vous l'objectif: réduire, d'ici 1996, de 70 % à 80 % la production de déchets, m. le président, par l'intermédiaire... pardon, pas réduire la production de déchets, mais atteindre de 70 % à 80 % des foyers par la collecte sélective. en fait, ce qu'il faut savoir, c'est que si le triste chiffre de 37 % pour montréal et de 25 % pour québec est inadmissible, on va constater que dans des villes de même taille, ailleurs, on réussit, par contre, à atteindre 50 % et même à le dépasser. ottawa est à 70 %; toronto, 75 %; 94 % dans la région de kitchener, waterloo. alors, à ce que je sache, notre niveau de consommation

est à peu près comparable, nos économies se comparent. La différence, elle est dans la volonté et du gouvernement et du ministre d'appliquer les politiques qu'ils adoptent, les objectifs qu'ils se fixent, M. le Président. Alors, c'est ça les résultats auxquels on est confrontés.

Qu'est-ce que c'est, maintenant, la suite des choses? La suite des choses, c'est que si on ne réduit pas à la source la question et qu'on ne touche pas la question des emballages, si on n'implante pas d'une façon systématique la collecte sélective... Et pour ceux qui croyaient, d'ailleurs, qu'en recueillant des produits qui devraient être réintroduits dans le circuit pour être recyclés, si certains croyaient qu'on le fait inutilement parce que tout ça s'empile dans l'arrière-cour des entreprises et qu'il n'y a pas de marché pour ça, je peux vous dire, pour avoir visité un certain nombre de centres de tri à travers le Québec, que les entreprises impliquées, soit dans la revente de ces produits-là ou dans la collecte de ces produits-là pour éventuellement fournir des marchés, nous disent: Le problème auquel on est confrontées, c'est qu'on ne peut pas assurer aux entreprises à qui on vend, soit des plastiques, soit de l'aluminium, soit des cartons, on ne peut pas leur assurer qu'on va être fidèles dans la livraison de la marchandise en termes de volume.

Vous savez comment ça marche, n'est-ce pas? On dit à une entreprise: Tous les mois ou toutes les semaines, je te livre une tonne de papier qui est utile pour du recyclage, qui peut être réintroduit dans le processus. Je te livre une tonne toutes les semaines. Sauf que la semaine prochaine, sais-tu, je ne suis pas capable, ça va être juste 700 000 livres. Ça ne sera pas... Ou ça va être juste... Ça va être un volume différent. L'entreprise dit: Bon. Moi, je veux bien... Je n'ai pas signé, par exemple, un contrat avec toi pour tes beaux yeux et parce que tu étais poli et gentil et aimable, j'ai signé un contrat parce que tu voulais me livrer ça. Moi, je compte sur la marchandise. Merci beaucoup. Vas signer un contrat avec quelqu'un d'autre, moi, je ne suis pas preneur.

Ceci pour vous dire, M. le Président, qu'il y a des marchés. Il y a des marchés pour les fibres recyclées, il y a des marchés pour les matières plastiques recyclées, il y a des marchés pour les produits, les métaux recyclés, il y a des marchés pour l'ensemble de ces produits que nous pouvons récupérer, sortir de nos boîtes à vidange et remettre dans le circuit pour le mieux-être collectif de tous, pour une meilleure protection de l'environnement, pour une meilleure utilisation de nos ressources, M. le Président, et pour une vision à long terme de ce que sera notre avenir et celui de nos enfants.

Si on ne fait pas ça, évidemment, ou même en le faisant, il restera toujours un certain nombre de déchets dont on ne saura que faire et qu'il faudra envoyer vers les lieux d'enfouissement. D'ailleurs, soit dit en passant, je n'ai pas parlé de toutes les techniques de compostage qui sont fort prisées à l'heure actuelle et qui permettent d'aller rechercher un certain nombre de déchets qu'au- trement on jette littéralement, encore une fois, dans le sac à poubelle, alors que certains vous diraient: Ce n'est pas un déchet, c'est une ressource. Je pense à tous les déchets reliés aux légumes et aux fruits, par exemple, que l'on peut immédiatement, dans sa propre cour, faire transformer en compost utilisable dans son jardin, sa pelouse, et qui sont tout aussi efficaces et utiles, bien sûr, que beaucoup d'autres engrais de type chimique. Bon. Alors, M. le Président, une fois qu'on a fait tout ce travail-là, il restera toujours, évidemment, des déchets que l'on ne peut réutiliser ? souillés, etc. ? et qu'on doit envoyer aux sites d'enfouissement. Et si j'ai fait cette longue démonstration, c'est pour vous dire que le projet de loi qu'on regarde ce matin, il ne s'attaque qu'à un élément de toute la chaîne et de tout le processus de production, de consommation, de rejet des déchets. Et, donc, en ne s'attardant qu'à un seul élément du processus, on perd la vue de l'ensemble.

Et dans ce sens-là, ça me fait toujours penser au fait que, quand on est dans une forêt et qu'on a le nez collé sur l'arbre, la forêt disparaît. Évidemment, on ne la voit plus. Et on a une vision très limitée de ce qui se passe dans notre univers. Ce qui est un peu inquiétant, M. le Président, à l'heure actuelle, c'est que le ministre morcelle son intervention par la loi que nous adoptons ce matin. Il dit: Là, moi, j'ai tellement de troubles avec les sites d'enfouissement sanitaire ? et il a raison ? on va s'assurer qu'au moins on puisse intervenir sur ces demandes-là par un processus qui va impliquer la population. Alors, on va donc se préoccuper de ces sites-là. Tant mieux, bravo! Mais ce n'est, comme je vous le disais, qu'un petit bout de toute la chaîne, de toute la réalité. Alors le ministre dit: Oui, mais ce n'est pas grave, j'ai un projet de règlement sur les déchets solides et il viendra corriger un bon nombre des situations auxquelles on est confronté en matière de déchets.

Savez-vous, M. le Président, que le règlement dont il nous a parlé ce matin est en préconsultation depuis septembre 1992, et qu'on prend la peine, dans le libellé de présentation, dans les paragraphes de présentation, de nous dire ceci: «Comme son titre l'indique, il s'agit d'une préconsultation sur des propositions préliminaires.» Alors, il faut le faire, M. le Président! C'est exactement, là, ce qu'il nous dit sur le règlement de septembre 1992.

Vous pensez qu'il l'a changé là? Pas du tout. Il ne l'a pas changé. C'est ça qu'il envoie devant le comité dont il nous parlait ce matin ? et je vais lui en parler de son comité, M. le Président ? pour lui dire: Vous allez étudier ce projet-là. Vous allez même regarder du côté de la loi pour que l'on modifie plus en profondeur la loi, M. le Président.

Mme Bleau: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Oui, Mme la députée de Groulx.

Mme Bleau: Je m'excuse, Mme la députée, j'ap-

pellerais l'article 32, s'il vous plaît.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, vous invitez, si je comprends bien, les députés à retourner à leur banquette. Alors, tout le monde est à sa banquette. Continuez votre intervention, Mme la députée de Taillon.

Mme Marois: Bon. Je vous remercie, M. le Président. Alors, donc, le ministre nous dit qu'il va nommer un comité pour revoir le règlement sur les déchets solides. Là, M. le Président, j'aimerais ça que le ministre m'entende bien et je suis persuadée qu'il m'entend bien. Je ne veux pas, je ne veux plus que l'on cautionne, de ce côté-ci de la Chambre... Et d'ailleurs, je vais vous dire, on ne l'a jamais fait. Mais je veux que ce soit clair. Je ne veux pas que l'on cautionne une intervention à la pièce. C'est inadmissible. Quand on parle justement de développement durable, M. le Président, c'est parce qu'on croit utile et nécessaire de développer une vision globale de l'ensemble des activités que l'on mène, de l'ensemble des processus de production que l'on utilise, des façons d'occuper le territoire qu'on a retenues, pour dire: II faut modifier nos comportements, nos attitudes, nos façons de faire. (12 h 40)

Cela ne demande pas un changement sur une chose. Cela demande un changement plus global. Et c'est aussi vrai, M. le Président, dans le cas de la gestion des déchets au Québec. Des groupes de tous les univers, M. le Président, ont dit au ministre: II faut que vous engagiez un débat de fond sur cette question-là, une enquête générique ? appelons-la comme on veut; moi, je ne m'enfarge pas vraiment dans les étiquettes, M. le Président, mais ce que je sais que je veux, cependant, et ce que d'autres veulent aussi et demandent depuis un long moment au ministre ? puis je vais lui rappeler d'ailleurs, M. le Président, quels groupes ont demandé cela au ministre, et je vais lui rappeler depuis combien de temps on lui demande ce qu'on lui demande ? c'est qu'il procède à une analyse globale, à une consultation sur tout le processus de production du produit, au départ de ce qui va devenir éventuellement déchet, toute la chaîne dans laquelle chaîne s'engage ce produit, ce que nous lui faisons subir et ce que nous pourrions faire avec, M. le Président, pour qu'on évite des débats comme ceux qui ont cours actuellement à Montréal entre la Régie intermunicipale de gestion des déchets sur l'île de Montréal, qui veut implanter un incinérateur, alors qu'on ne réussit pas à occuper pleinement, par exemple, le site Miron, et qu'on se débat sur la même île entre une avenue versus une autre, M. le Président. Est-ce que l'incinération doit être retenue ou pas, comme procédé d'élimination des déchets, M. le Président? Moi, je pense que non.

Si une commission d'enquête fait des analyses systématiques et sérieuses de ce qui se passe ailleurs, des procédés que nous avons retenus chez nous, et que nous concluons que cela pourrait être une avenue, on verra. Mais, pour l'instant, on fait à la pièce, dossier par dossier, des analyses qui coûtent cher, qui impliquent des énergies, qui, souvent, mettent en conflit des citoyens avec les autorités municipales, avec des entreprises. On met au ban des accusés un certain nombre d'entreprises qui, probablement, ne le méritent pas. Certaines le méritent peut-être, mais sans doute qu'un bon nombre ne le méritent pas, mais on les identifie comme étant les gros méchants. En fait, c'est l'irresponsabilité du ministre qu'on devrait remettre en cause, celui qui ne donne pas, ne permet pas que les outils soient identifiés pour prendre les bonnes décisions dans toutes circonstances en ce qui concerne la gestion des déchets, M. le Président. Ça, ça s'appelle une enquête publique, une commission, peu importe.

Il nous dit ? mais c'est inadmissible ? il nous dit: Vous savez, j'ai demandé au comité, au front commun, aux groupes préoccupés des matières environnementales de me dire comment je pouvais instaurer un moratoire pour ne pas qu'on ouvre nulle part de nouveaux sites d'enfouissement, pour ne pas qu'on ouvre d'incinérateurs pendant 1 an. Qu'on établisse donc un moratoire, c'est ça le sens du moratoire, pour pouvoir faire cette enquête-là. Parce que, si on fait une enquête et qu'en même temps s'ouvrent un peu partout des sites et qu'on autorise des incinérateurs, le ministre a, jusqu'à un certain point, raison dans ce sens-là, on se posera la question pour rien puisque les infrastructures seront en place et qu'on aura investi des sous. Mais le ministre l'a, son moratoire, M. le Président. Il a sa loi qu'il dépose aujourd'hui, qui va amener tous les projets à passer en audience devant le BAPE. Pour certains, ça ne prendra pas un long moment puisque les procédures étaient déjà engagées. Pour d'autres, évidemment, cela prendra un certain temps. Est-ce que c'est 6 mois? Est-ce que c'est 1 an? Est-ce que c'est 18 mois? Pourquoi, immédiatement, ne demande-t-il pas la tenue d'une enquête publique, qui durera 1 an, un an et demi, de telle sorte qu'on puisse se pencher sur l'ensemble du processus? Si on donne à la pièce des permis pour enfouir au Québec, que ce soit à Saint-Étienne-des-Grès... D'ailleurs, j'aimerais bien que le ministre me dise comment il se fait qu'il a autorisé un permis à Saint-Étienne-des-Grès pour la compagnie Waste Management, il y a à peine quelques jours. Ça m'inquiète un peu. Je suis persuadée qu'il pourra répondre à ça au moment de la commission parlementaire, parce que c'est un petit peu inquiétant.

Mais, cela étant dit, revenons sur le propos global. Si le ministre autorise, même après étude, parce que, évidemment, le BAPE fait une étude, et il dit: Oui, l'entreprise ou la municipalité respecte les règles, s'assure que le site ne contaminera pas l'environnement. Si, donc, le BAPE conclut cela, qu'on procède correctement et que le ministre autorise que le site s'implante ou que le site s'agrandisse, on va voir apparaître comme ça des dizaines de lieux d'enfouissement à travers le Québec. Vous savez qu'il y en a actuellement au moins 16, si ce n'est 17, au bureau du ministre, des projets

d'agrandissement. Qu'est-ce que ça va faire, si on les autorise, ces projets-là? On augmente la capacité d'enfouissement. Augmentant la capacité d'enfouissement, on ne crée aucune espèce de pression pour réduire à la source, pour recycler, pour récupérer. Et c'est ça le débat, actuellement. Ce n'est pas de dire qu'on est contre le fait qu'il s'ouvre des sites. On est contre le fait que l'on prenne des décisions à la pièce, que la décision se prenne, mais par la bande et sans qu'on ait eu d'impact dessus.

De la même façon pour l'incinération. Qu'on soit pour ou contre l'incinération... D'abord, il faut savoir que, pour incinérer, ça prend un certain nombre de matières qui stimulent la combustion. Les matières qui stimulent le plus la combustion, ce sont les matières les plus récupérables ? c'est le papier, entre autres. Alors, si on enlève le papier, parce qu'on le récupère et qu'on ne l'envoie plus à l'incinération, est-ce que ça ne provoquera pas d'autres problèmes liés au fait qu'on se retrouve avec des déchets sur lesquels il faudra jeter certains produits pour que l'incinération se fasse mieux ou davantage? C'est le genre de problèmes auxquels on est confronté.

Alors, ce que je dis au ministre, et que des dizaines et des centaines de groupes, à travers le Québec, lui disent, M. le Président, ce n'est pas un comité comme celui qu'il va former cet été... Il peut le former s'il veut, pour regarder la loi, pour essayer de l'améliorer et regarder la question des règlements et tout. Il peut le faire, mais ce qu'on lui dit, c'est: Mettez en place une enquête générique. Et ça va être ça la proposition qu'on va lui faire aujourd'hui. S'il se dit si ouvert, M. le Président, il acceptera notre proposition d'amendement, qu'il s'engage dans une enquête générique.

Savez-vous la liste des groupes qui lui ont demandé une enquête générique? Je ne vous la lirai pas, M. le Président, parce que j'en aurais pour 15 minutes. Je vais juste vous nommer les premiers que j'ai sur la liste: le Front commun québécois pour une gestion écologique des déchets, le Bureau de consultation de Montréal, la ville de Montréal, l'Union des municipalités régionales de comté du Québec ? toutes les municipalités du Québec, mais ça, ce n'est pas trop grave ? l'UPA, la commission de l'aménagement et des équipements ? une commission de l'Assemblée nationale, M. le Président, pas une commission extérieure à nous ? le Conseil des travailleurs et travailleuses du Montréal métropolitain, Environnement Jeunesse, Greenpeace, le Centre québécois du droit de l'environnement, la Fédération québécoise de la faune, l'Association québécoise de lutte contre la pollution, Action RE-buts, etc. Je n'en ai que 4 lignes de lues, il y en 20 lignes...

Alors, ce qu'on lui dit, c'est: Cessez de nous faire intervenir à la pièce. C'est inadmissible, M. le Président. Et ce matin, je voudrais réitérer, d'une façon encore plus spécifique cet appui que j'ai mentionné et qui concerne l'Union des municipalités régionales de comté qui écrit au ministre en lui disant ceci: «Parallèlement à la démarche visant l'adoption de la loi 101, vous proposez la mise sur pied d'une table de discussion élargie pour procéder à une consultation particulière sur les modifications législatives à venir, découlant de la politique de gestion intégrée des déchets et du protocole national sur l'emballage. Bien que l'objectif de cette table soit louable, et nous en sommes, nous considérons que cette consultation, qui se veut davantage technique, ne pourrait suppléer à une réflexion plus approfondie et plus globale qu'impliquerait une enquête générique, telle que nous l'avons préconisé précédemment.» Et c'est signé du président de FUMRCQ, M. Roger Nicolet. Alors, ce n'est pas, là, quelques groupes isolés quelque part qui réclament une enquête publique de la part du ministre. C'est à peu près tout ce qui bouge au Québec et qui est préoccupé de la question de la gestion des déchets. Alors, plutôt que de s'entêter et de nous faire travailler à la pièce, pourquoi ne reçoit-il pas favorablement les demandes qui viennent de toutes parts à travers le Québec, pour que nous statuions ensemble d'une façon cohérente sur les techniques que nous allons privilégier, sur les objectifs que nous allons nous fixer? (12 h 50)

Et je vous dirais que toute la société en sortirait gagnante. Les entreprises qui sont aux prises soit avec des projets de sites ou qui ont des centres de tri et qui, actuellement, fonctionnent toujours en se disant: Est-ce que c'est toujours cette orientation-là qu'on va conserver? Est-ce qu'on ne va pas en changer? L'ensemble des groupes concernés par ces questions-là, particulièrement les groupes écologiques, les groupes de protection de l'environnement, pourraient mettre toute leur énergie à supporter des objectifs de collecte sélective, de recyclage, de modification de nos comportements. Je suis persuadée de cela. Mais encore faut-il savoir ce que nous voulons faire, comment nous voulons le faire, avec qui nous voulons le faire et dans une perspective globale. Il en va aussi, bien sûr, de la qualité de notre environnement, mais encore plus largement de développement durable et de notre avenir, de l'avenir de ceux et celles qui vivent sur cette planète, M. le Président.

Si j'étais la seule, ici, à vous demander ça et que je me retournais derrière et je disais: II n'y a absolument personne qui m'appuie, bien, je dirais peut-être que le ministre a raison de rejeter du revers de la main ma proposition. Mais ce n'est pas le cas, M. le Président, d'aucune espèce de façon. La liste est longue, les appuis sont nombreux, M. le Président, et l'intérêt collectif serait beaucoup mieux servi si le ministre acceptait la proposition que nous lui faisons.

Je crois que la question du moratoire n'est qu'un prétexte, M. le Président. Vous savez, quand on ne veut pas faire quelque chose, on s'arrête souvent sur des processus, sur des raisons à côté qui font qu'on peut toujours dire ? comme le fait le ministre, je relisais encore ses propos... Comme le fait le ministre: «Je ne suis pas insensible à la demande que font les groupes, mais c'est tellement compliqué; c'est tellement compli-

que que je leur ai même demandé de me proposer une solution et il ne semble pas qu'ils en aient vraiment.» Alors, on va continuer à chercher. On ne le fera pas, M. le Président, et, entre-temps, on va prendre pareil les décisions. Alors, une façon même pas élégante, à mon point de vue, de rejeter une demande tout à fait légitime et qui nous permettrait de faire avancer le dossier.

Alors, je dis au ministre que je vais présenter ce projet en amendement, lorsque nous arriverons à l'étude article par article. J'espère que, cette fois-ci, il ne sera pas insensible à une demande qui vient, de toutes parts, de l'ensemble des groupes concernés par une telle question à travers le Québec, M. le Président. En ce sens-là, je l'invite à relire les propos tenus tant par l'UMRCQ que par ses partenaires des municipalités.

Il est le premier à venir nous dire, et je n'en disconviens pas: Écoutez, c'est la responsabilité dès municipalités que telle action à mener. Alors, si c'est la responsabilité des municipalités et qu'il est si respectueux de cela, bien, qu'il respecte leur demande, M. le Président, et qu'il y réponde positivement. Je crois que c'est ainsi qu'il assumera le rôle qu'il a comme ministre de l'Environnement au sein de ce gouvernement et qu'il respectera l'objectif qui est le seul qu'il doive poursuivre, M. le Président: s'assurer que notre avenir soit un avenir meilleur en matière de santé, d'équité, de justice, mais aussi et surtout, je dirais, en matière de qualité de vie au sens large du terme. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, Mme la députée de Taillon. Mme la députée de Johnson.

Mme Carmen Juneau

Mme Juneau: Merci, M. le Président. Je croyais qu'il y aurait l'alternance et qu'il y avait quelqu'un de l'autre côté qui prendrait la parole. Je m'aperçois que ce n'est pas le cas. Donc... Compte tenu qu'il nous reste 5 minutes, je vais commencer mon intervention, M. le Président, et je continuerai après la reprise.

M. le Président, on se pose toujours des questions ici, à l'Assemblée nationale. Ça fait longtemps que des gens exigent qu'il y ait ce qui se passe aujourd'hui, cette loi-là qui a été déposée après le temps limite que la Chambre prescrit pour le dépôt de lois, quand, dès le mois de novembre dernier... Et j'ai une copie de presse de novembre dernier, du 23 novembre dernier, qui exigeait un moratoire déjà, M. le Président. Comment se fait-il que ça ait pris tant de temps? Ça fait 6, 7, 8 mois qu'on exige ça et bien avant aussi. Mais qu'on arrive après la date prévue et, là, ça presse. Il faut des consentements, il faut que l'Opposition officielle soit très ouverte. Mais on est d'accord avec ça. Ça fait longtemps qu'on est d'accord, M. le Président. Ça fait longtemps. Ça fait des mois que, de notre côté, les critiques en matière environnementale demandent, talonnent, exigent du ministre qu'il dépose quelque chose qui fasse en sorte qu'il y ait un moratoire sur tout projet de nouveaux sites, d'agrandissement, de toute la problématique qui concerne l'environnement.

M. le Président, on disait, le 23 novembre, qu'il y avait une coalition de cols bleus, de représentants de CLSC, de sociétaires de caisses populaires, d'associations de consommateurs, d'environnementalistes, beaucoup de gens, en surcroît de ceux que ma collègue, la députée de Taillon, vient de nommer dans son intervention qui exigeaient, dès le mois de novembre... Mais on sait que ça fait bien plus longtemps que ça que les gens souhaitent que le ministre en arrive avec une loi où on oblige les gens à passer devant le Bureau d'audiences publiques afin de clairement indiquer ce qu'ils veulent faire.

Vous savez, M. le Président, l'environnement, c'est la vie, en quelque sorte, parce que si tu ne peux plus respirer, si tu n'as plus d'eau à boire, puis si tout est sans dessus dessous dans la société, comment allons-nous faire, nous, les humains, pour continuer à vivre? C'est la question. C'est une question de vie ou de mort, l'environnement. Malheureusement, les gens n'ont pas accepté d'être prévoyants. Les gens ont laissé aller pendant un certain temps et, là, on est rendus, à un moment donné, où il y a de grandes décisions qui doivent être prises, et le ministre responsable de l'Environnement en a une encore plus importante à prendre, c'est-à-dire arrêter tout ce cirque, arrêter l'autobus qui file à fond de train vers quoi? Avec une décadence de tout ce qui peut se passer en matière environnementale.

M. le Président, il faut que l'autobus arrête net. Il faut qu'on regarde ensemble ce qu'on peut faire pour protéger notre environnement, c'est-à-dire protéger notre vie ? la nôtre, et celle de ceux qui viendront après. Quand on sait que, dans le domaine de l'environnement et des sites d'enfouissement, on a parlé de membranes qui pourraient protéger ad vitam aeternam le fait que le lixivia pourrait s'écouler, tout ça. Ça a été prouvé, M. le Président, que ces membranes ne peuvent durer que peut-être une vingtaine d'années et qu'après ça elles ne sont pas garanties, et que le lixivia, justement, pourrait passer à travers et pourrait contaminer la nappe phréatique.

M. le Président, qu'allons-nous faire si, à un moment donné, cette catastrophe-là arrive? Et si tous nos cours d'eau sont contaminés, qu'est-ce que nous allons faire? La loi 101, M. le Président, va nous permettre au moins de pouvoir arrêter le train, le cirque, l'autobus, pour faire en sorte qu'on puisse voir c'est quoi, les vrais projets, et ce que ça va faire au niveau de l'environnement.

Donc, vous comprendrez, depuis le temps qu'on le demande de ce côté-ci...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Oui, M. le leader de l'Opposition officielle.

M. Chevrette: M. le Président, compte tenu de l'heure et, d'autre part, désireux que ce projet de loi

soit en étude en commission parlementaire ce soir, après avoir discuté avec le député de Drummond et mon collègue de Dubuc ? je n'ai malheureusement pas eu le temps de parler avec ma collègue de Johnson ? nous serions prêts à donner un consentement pour prolonger le temps à compter de 13 heures, pour terminer le discours de Mme la députée de Johnson et avoir l'exposé de MM. les députés de Dubuc et de Drummond, pour qu'on puisse s'assurer que, ce soir, il soit étudié article par article en commission parlementaire.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le leader du gouvernement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui. Est-ce qu'il y a possibilité d'aménager une brève réplique au cas où il y aurait...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Combien de temps, à peu près?

M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...des éléments qui commanderaient des réponses immédiates?

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Je prends note de votre consentement. Maintenant, j'ai besoin de savoir jusqu'à quelle heure à peu près, parce qu'on ne peut pas prolonger jusqu'à 13 h 30. Plus ou moins... (13 heures)

M. Chevrette: Bien, je vais vous dire: dans les meilleurs délais à compter de ce temps, M. le Président. Je pense qu'en autant qu'on limite le nombre, sachant auparavant que ce sera aux alentours de 10 minutes, les exposés de chacun, mais sans être très rigoureux.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): D'accord. Allez-y. Allez-y, Mme la députée de Johnson.

Mme Juneau: M. le Président, je pense que l'environnement est tellement un sujet important pour la vie de tous les humains et pour les générations futures qu'on ne peut pas se permettre, M. le Président, de boucler ça trop rapidement. C'est trop important. C'est trop important.

Vous savez, le projet de loi 101 vient, en quelque sorte, changer l'état du droit sur cette question. Il permet explicitement au ministre de l'Environnement de soumettre à la procédure d'évaluation tous les projets d'implantation de sites d'enfouissement ou encore de dépôts de matériaux secs. Il prévoit, en outre, que les projets pour lesquels les demandes sont faites, mais dont les certificats d'autorisation ne sont pas émis, devront également être soumis à la procédure d'évaluation. Ces dispositions prévalent également pour les projets d'agrandissement. Le projet de loi prévoit également que le ministre pourrait exiger des promoteurs qu'ils se conforment à des normes réglementaires plus sévères que celles prévues au Règlement sur les déchets solides. Ces dispositions s'expliquent par le fait que le ministère de l'Environnement est actuellement à réformer le règlement qui date de 1978, et ma collègue, la députée de Taillon, en a parlé tout à l'heure. Ça fait longtemps, M. le Président, que ça aurait dû être amélioré, compte tenu des nouvelles connaissances que nous avons sur les sites d'enfouissement.

M. le Président, il y a de simples citoyens qui sont simplement des gens qui croient à l'environnement, qui ne font pas partie de grandes sociétés, qui n'ont pas les enveloppes budgétaires pour faire en sorte qu'ils puissent utiliser ça pour aller se chercher de l'information à l'extérieur et qui dépensent leurs propres deniers pour dire qu'ils croient à l'environnement, qu'ils croient que c'est important qu'on le protège pour notre vie et pour la vie de nos enfants et les générations futures. Je pense, M. le Président, qu'on ne peut pas avoir de meilleur témoignage de gens qui croient très fortement qu'on devrait faire en sorte d'évaluer, mais de façon très approfondie, tous les sites d'enfouissement qui verront le jour, tous les agrandissements pour lesquels il y a des propositions sur la table, et qu'il y ait des critères généraux et des critères bien établis où chacun des projets... que chacune des entreprises qui voudrait implanter des sites d'enfouissement ou agrandir des sites d'enfouissement puisse se baser sur des critères bien établis, que ce ne soit pas décidé à la pièce et que chaque personne soit soumise aux mêmes règles. C'est ça qu'on demande, M. le Président, pas d'autre chose.

Je voudrais, entre autres, vous parler de ma région, que le ministre connaît très bien, et je vais vous donner un exemple très, très, très, très flagrant de ce qu'on veut éviter. Vous savez, vous connaissez le comté d'Orford dans ma région ? mon collègue est ici ? puis le comté d'Orford vit présentement, la municipalité de Magog en particulier, une problématique très inquiétante, M. le Président, très inquiétante. Et je vais vous raconter ce qui se passe.

Vous savez, le projet de gestion de rebuts Laid-law, dans notre région. En février 1991, Laidlaw achète des actions de Services sanitaires Bestan inc., qui sont propriétaires du site qui est situé sur la route 147 entre Magog et Ayer's Cliff. Bestan exploite à ce moment 66 acres et enfouit à peu près 50 000 tonnes de déchets solides annuellement de provenance régionale. Je pense que le ministre comprend très bien ce que je suis en train de lui dire. Dès février 1991, Laidlaw, ayant enfoui 120 000 tonnes de déchets par année, le 4 juin 1991, Laidlaw fait une demande d'agrandissement au ministère de l'Environnement du Québec afin d'ajouter 240 acres pour y enfouir 320 000 tonnes de déchets solides par année. Le dossier d'agrandissement du site de Laidlaw est présentement chez le ministre Paradis, selon mes informations ? je m'excuse de le nommer de même ? le ministre de l'Environnement, pour approbation finale.

Vous comprendrez que les gens de Magog et du comté d'Orford, qui est l'un des plus beaux comtés, M. le Président, en termes d'attraits touristiques et un des comtés où il y a beaucoup d'attraits touristiques... Je

pense au mont Orford. Je pense au parc national qu'il y a à Orford. C'est incroyable, si on laisse faire une chose comme celle-là. Durant les 35 années prochaines, Laid-law veut imposer et importer dans le canton de Magog de 10 000 000 à 12 000 000 tonnes de déchets solides, et le site est situé dans le bassin versant du lac Memp-hrémagog. Le lac Memphrémagog est le réservoir d'eau potale de la ville de Sherbrooke, desservant 125 000 citoyens. La région de Magog-Orford fut désignée site touristique et non site d'enfouissement, et notre région n'est pas la poubelle de la rive sud de Montréal.

En septembre 1992, le ministère de l'Environnement a publié le document de préconsultation sur la refonte du Règlement sur les déchets solides. Après l'avoir consulté, il est certain que le ministère de l'Environnement va regarder passer le bateau. Ça, c'est ce qu'on me dit. Si les gens s'inquiètent à ce point-là, M. le Président... Concernant la refonte du Règlement sur les déchets solides, il faut un moratoire sur tout projet de nouveau site d'agrandissement et de site d'enfouissement au Québec pour que certains devoirs soient refaits.

Donc, M. le Président, c'est des lettres comme ça, d'hommes et de femmes concernés et qui sont prêts à mettre de l'argent de leurs poches pour défendre l'environnement. Est-ce que ça ne vaut pas, M. le Président, qu'il y ait un moratoire qui ferait en sorte qu'on puisse voir venir les gens, qui, à bien des égards, s'en foutent? D'abord qu'ils fassent de l'argent, M. le Président, c'est tout ce qui compte! Je pense que nous sommes des gens qui ont été élus par une population qui compte sur nous pour qu'il se passe ici des choses pour interdire que la population en général souffre de gens sans conscience qui puissent faire en sorte que dans quelques années la nappe phréatique soit gaspillée à tout jamais.

M. le Président, c'est grave, l'environnement, et je pense que chacun de nous le sait. À ce moment-là, on ne peut pas accepter, M. le Président, que ça aille à la va-comme-je-te-pousse. On ne peut pas! Je pense qu'on a des responsabilités à prendre en matière d'environnement et ce n'est pas seulement au niveau du ministre lui-même, titulaire de l'Environnement, pas plus que seulement la responsabilité de notre critique, la députée de Taillon. L'environnement, ça regarde tout le monde ici, tout le monde à l'extérieur, toute la population en général.

M. le Président, on ne peut pas accepter qu'on aille comme ça et que le ministre décide, cas par cas, comment il va réagir dans une situation comme dans une autre. Je ne voudrais pas que ma région, que les gens de ma région, pas plus que les gens de tout le Québec ou d'ailleurs ne puissent plus respirer l'air pur, n'aient plus d'eau pour faire en sorte qu'on puisse continuer à vivre. Je ne veux pas ça et je pense qu'il n'y a aucun parlementaire en cette Chambre qui ait l'âme assez basse pour souhaiter une chose comme ça, parce que ça serait la fin du monde. (13 h 10)

M. le Président, je ne veux pas avoir l'air de quelqu'un qui crie au loup, mais je pense qu'il faut réveiller la conscience des uns et des autres afin qu'on puisse intervenir et pouvoir discuter de ce dossier extrêmement important qu'est l'environnement. Ma collègue, la députée de Taillon, a annoncé en plus qu'elle aurait des amendements à apporter en commission parlementaire. Je pense qu'en commission parlementaire on pourra discuter de toutes ces choses qu'il nous apparaît important d'apporter. C'est le temps, M. le Président, que le ministre se lève et qu'il pose des gestes concrets ? pas des gestes à la pièce ? des gestes concrets qui vont englober l'ensemble de la situation au niveau de l'environnement. C'est très important. C'est important pour les gens de Magog qui vivent une urgence, présentement. C'est important pour toutes les autres personnes qui vivent aussi des problèmes au niveau de l'environnement.

M. le Président, je sais que nous allons faire un travail intensif au niveau du projet de loi 101 et j'espère qu'après que nous aurons... Je ne présume pas, mais je pense bien que, compte tenu que tout le monde le désire, le projet de loi pourra être adopté, avec ce que Mme la députée de Taillon apportera comme amendements, et j'espère que ça sera en application pour faire en sorte, M. le Président, que l'ensemble de la population soit sûre de savoir où elle s'en va et faire en sorte qu'il n'y ait pas de gens sans coeur et sans vergogne qui puissent faire n'importe quoi pour nuire à l'ensemble de la population. Merci.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, Mme la députée de Johnson. Sur la même motion, je cède la parole à M. le député de Dubuc.

M. Gérard R. Morin

M. Morin: Alors merci, M. le Président. On a souvent entendu dire «Ne touchez pas à la loi 101.» Sauf que, celle-là, il faudra y toucher quelque peu. Alors, considérant qu'on est en prolongation des heures normales de séance, je vais synthétiser mon intervention de façon très, très rapide pour vous dire, M. le Président ? comme l'a dit d'ailleurs ma collègue, dans son intervention ? que nous serons favorables au principe de cette loi, et pour les raisons suivantes, en ce qui me concerne.

D'abord, cette loi fait franchir une étape importante à une des recommandations fondamentales du mandat d'initiative de la commission de l'aménagement et des équipements, dont le rapport était déposé, par pure coïncidence, il y a 1 an presque jour pour jour à l'Assemblée nationale ? en juin 1992. Deuxièmement, bien sûr, elle donne un poids juridique aux directives du ministre de l'Environnement de l'automne dernier en ce qui concerne les sites d'enfouissement sanitaire. Et, enfin, un troisième élément pour lequel nous devons être favorables au principe de loi, c'est que ça peut éviter la paralysie des projets d'enfouissement sanitaire, surtout,

particulièrement, à la non mise en vigueur de l'article 12 de la loi 61 qui a été adoptée l'an passé.

Maintenant, tout en étant favorables, M. le Président, nous devons quand même vous faire part de nos réserves par rapport à des vices cachés potentiels. Alors, ces vices cachés sont reliés aux éléments suivants. D'abord, devant l'absence d'audiences génériques concernant la gestion des déchets, vous conviendrez avec moi qu'il devient assez difficile de bien positionner toute la réglementation entourant l'enfouissement sanitaire comme tel, sans que ce volet puisse s'inscrire dans une politique globale de la gestion des déchets.

Un autre élément, bien sûr, c'est que ce projet de loi 101 nous est soumis à la dernière minute. Et, à ce moment-là, comme il s'agit d'un projet de loi transitoire, qui, d'une part, a pour but de donner des dents ou un poids juridique aux directives du ministre de l'automne dernier concernant l'enfouissement sanitaire, c'est une loi qui n'aura qu'une durée temporaire, c'est-à-dire jusqu'au moment où sera en vigueur l'article 12 en particulier du projet de loi 61, relié à toute la réglementation.

Il y a aussi les 80 projets d'enfouissement sanitaire qui sont là, au Québec, dont certains viennent tout juste d'être mis sur la table à dessin. D'autres ont fait l'objet de consultations de différentes formes depuis 3, 4, 5, 6 ? 10 ans, peut-être. Alors, est-ce que le projet de loi aura pour effet de tout mettre ces projets d'enfouissement sanitaire sur le même pied ou s'il permettra une analyse particulière, sans tomber dans des cas d'exception qui ne seraient pas faciles à gérer?

Et, enfin, M. le Président, il ne faudrait pas que le présent projet de loi soit ? puisque le ministre en a fait mention abondamment ? un moratoire déguisé par cette obligation de faire reprendre toute la procédure à travers tous les projets. Il ne faudrait pas que ce soit une façon déguisée de paralyser tous les projets qui sont en plan. Alors, ceci dit, c'est le genre de questionnement que nous nous posons, tout en étant favorables au principe, et nous souhaitons que, lors de la commission parlementaire, le ministre pourra répondre à nos inquiétudes. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le député de Dubuc. M. le député de Drummond, je vous cède la parole.

M. Jean-Guy St-Roch

M. St-Roch: Merci, M. le Président. C'est avec plaisir que j'ai donné mon consentement à l'étude du projet de loi 101, présenté, il va sans dire, hors délais. Hier, lors de l'étude du projet de loi 73, le leader du gouvernement nous rappelait que, lorsque des projets de loi sont appelés et apportés à la dernière minute, il fallait faire preuve d'une grande prudence. M. le leader du gouvernement, si j'avais utilisé les critères d'analyse que vous avez étudiés dans l'élaboration de votre stratégie concernant le projet de loi 73, je dois vous dire, lorsque je regarde le projet de loi 101, adopté dans cette grande problématique de gestion intégrée des déchets, que nous ne serions pas, ici, M. le Président, aujourd'hui, à étudier et à considérer le projet de loi 101.

Mais je pense que le député de Drummond a toujours fait preuve, M. le Président, d'un sens d'urgence et d'un sens des responsabilités collectives. Dès le 2 avril, lorsque nous avons eu la motion célébrant la Journée de la terre, j'avais insisté et plaidé auprès du ministre de l'Environnement d'être capable d'en arriver avec ce que j'aurais espéré aujourd'hui avec la loi 101: non pas un moratoire, mais un vrai projet de loi qui aurait réglementé cette grande problématique. Il va sans dire que, pour cette raison... J'avais offert aussi, M. le Président, mon concours au ministre de l'Environnement, et c'est avec plaisir que je le fais. Mais cette grande problématique, je n'y reviendrai pas, parce que, comme mon collègue de Dubuc l'a souligné, nous sommes maintenant en période supplémentaire, on a dépassé les délais. Alors, je prendrai le moins de temps possible. Mais il ne faudrait quand même pas oublier, M. le Président, lorsqu'on regarde l'ensemble de cette problématique qu'est la protection de l'environnement aujourd'hui, qu'il faudrait être minutieux. Ma collègue de Taillon l'a souligné. M. le ministre, à l'intérieur de ses objectifs l'a souligné aussi, devant toute la réglementation et les lois maintenant qui sont sur la table.

J'aimerais rappeler, M. le Président, à cette Assemblée, que, lors du dernier colloque de l'Association québécoise du droit comparé, qui a été tenu par la Faculté de droit de l'Université McGill, dans un article de M. Emmanuel Bilodeau, dans La Presse juridique du 30 avril, il y avait deux commentaires qui méritent qu'on s'y attarde, M. le Président, lorsqu'on regarde cette législation que nous sommes en train de passer aujourd'hui. Ce colloque nous rappelait avec justesse que la stabilité du droit est importante. Il nous rappelait que «le citoyen ordinaire devrait pouvoir se coucher le soir avec la certitude que, lorsqu'il se réveillera le lendemain matin, le droit ? n'aura pas complètement changé». Or, c'est une des raisons pourquoi j'ai donné mon consentement. Contrairement à la 61 où on a fait ça en pleine nuit, aujourd'hui, au moins, on le fait visière levée, en plein jour. Je pense que les paroles du 30 avril de Me Gaudet, ça se voulait de l'inflation législative, menace à la stabilité du droit. M. le ministre semble en avoir tenu compte dans ses propos.

Et un deuxième point, M. le Président, qui m'ap-paraît drôlement important aussi, lorsque je regarde un sujet aussi fondamental que la protection de notre environnement, qui veut dire qualité de vie, qualité sociale, et qui veut dire aussi héritage que l'on laissera aux générations qui vont nous suivre, c'est cet autre commentaire qu'il faisait: «Le droit a un rôle important à jouer dans l'angoisse collective d'une société. Jusqu'au XIXe siècle, le citoyen avait une connaissance intuitive de ses droits et obligations. Mais l'univers juridique est aujourd'hui tellement complexe que même les experts s'y perdent.»

Lorsque j'ai écouté, M. le Président, autant la critique et députée de Taillon que le député de Brome-Missisquoi et ministre de l'Environnement nous faire part de tous les objectifs, de toutes ces grandes problématiques, c'est la première inquiétude que ça me soulève, M. le Président, et c'est pour cette raison que je crois qu'il est important maintenant d'en arriver au Québec à une commission. Est-ce qu'elle sera générique? Est-ce qu'elle sera une commission parlementaire élargie? Est-ce que ce sera autre chose? M. le Président, la seule chose, je pense, qui est importante à ce moment-ci, c'est qu'une fois pour toutes on essaie de dégager un grand consensus social, au Québec, autour de cette politique de gestion intégrée de nos déchets domestiques.

M. le Président, j'aimerais vous rappeler que je viens d'une région qui a été à l'origine de la cueillette sélective, chez nous, dans la Mauricie?Bois-Francs? Drummond. On est sorti hors des sentiers battus, et un des dangers, M. le Président, qui nous guette, c'est lorsque je regarde, moi, dans un même espace de temps, trois semaines, où, à Drummond, nous avons la cueillette sélective, on a demandé à chacun des propriétaires occupants, par porte, de payer un conteneur spécial pour la récupération de nos déchets, pour être capable de les recycler; on a demandé un coût de 150 $ à être défrayé par les propriétaires de chacune des portes, de chacun des logements, M. le Président. (13 h 20)

On a demandé aussi, à l'intérieur de cette politique chez nous, de gestion des déchets... Ça nous coûte 102 $ la tonne pour être capable de faire de la récupération. Et, dans le même délai qu'on prenait ces décisions-là ? et Dieu sait que je suis fier de cette décision-là de nos autorités municipales ? on voyait que l'enfouissement d'une tonne de déchets non récupérés, non recyclés, non réutilisés coûtait 42 $. Alors, je dois vous dire, M. le Président, que les citoyens et les citoyennes de la ville de Drummond ont toute mon admiration d'avoir consenti à débourser 60 $ de plus la tonne pour être capable de récupérer et de recycler. Et c'est ça qu'il va falloir faire dans un avenir pas tellement lointain.

On a touché aussi à toute la réutilisation des matériaux recyclés. Or, M. le Président, je pense qu'il était urgent d'avoir la loi 101 qui nous met un blocage dans tout agrandissement de site d'enfouissement, parce que je pense que c'est un secret de Polichinelle pour ceux et celles qui se sont intéressés à cette gestion des déchets de savoir que, lorsqu'on demande un permis pour un nouveau site, ceux qui sont déjà existants vont utiliser toutes sortes de moyens détournés pour prévenir l'ouverture de nouveaux sites, pour faire en sorte que, pour ceux qui sont existants, on soit capable d'avoir des permis d'agrandissement, on soit capable d'avoir des permis pour surélever les sites.

Finalement, M. le Président, on ne s'en cachera pas, c'est à une guerre de gros sous qu'on doit faire face, à l'heure actuelle. C'est là qu'on a la responsabilité, en tant que parlementaires, de dire quel est l'héritage qu'on veut laisser. Et le problème s'en vient urgent, M. le Président. Je pense que M. le ministre va reconnaître, lui qui a à travailler tous les jours avec les différents intervenants du dossier. Que ce soit au niveau écologique ou au niveau monétaire, on s'aperçoit que c'est une guerre de gros sous. Et lorsqu'on dit guerre de gros sous, malheureusement encore aujourd'hui, lorsqu'on parle d'économie, souvent tous les coups sont permis, M. le Président.

Mais on devra s'élever ici au-dessus de ces batailles de quartiers, de ces batailles de régions. Lorsque je regarde, M. le Président, ce qui est en train de se développer... Je vais vous poser une question. Le développement des sites et la récupération, les centres de tri, est-ce que ça devrait être la responsabilité du monde municipal ou du monde privé? Je regarde dans ma région, M. le Président, où on est en train d'avoir un super site, chez moi, près de la rivière Saint-François, qui est une source d'approvisionnement d'eau potable pour à peu près 65 000 de nos citoyens et citoyennes de la grande région de Drummond. Alors, on veut proposer un centre de tri... Parce que j'ai toujours été un de ceux qui croient qu'il va falloir récupérer le maximum de nos déchets, M. le Président. Il va falloir être capable de développer les technologies. Je regarde la législation qu'on a devant nous, M. le Président, elle ne favorise pas ça.

Il y a un autre domaine dont je suis convaincu... C'est un domaine où le Québec pourrait prendre un rôle de chef de file, c'est au niveau de la recherche et du développement. Moi, je suis un de ceux qui croient, M. le Président, qu'on est capable aujourd'hui, avec les biotechnologies, de développer de nouveaux produits, de nouvelles enzymes, de nouvelles bactéries qui feront que, dans 3, 4 ou 5 ans, on aura un site qui serait devenu complètement amorphe et neutre. Autrefois, on disait 20 ans, aujourd'hui on parle de 30 ans, et peut-être même plus avant qu'un site ne devienne complètement amorphe.

Ça, M. le Président, il va falloir s'attacher. Est-ce que c'est un projet de loi? Est-ce c'est la commission parlementaire qui va être capable de dégager ces grands consensus là? Je n'y crois pas à ce moment-ci. De là l'importance d'avoir cette commission ? je vais dire commission d'enquête. On y mettra le générique «élargie» ? pas élargie, mais une commission d'enquête qui aurait pour mandat et but de regarder, M. le Président, les politiques. Est-ce que ce sont des politiques au niveau du privé? Est-ce que ce sont des politiques au niveau municipal de la gestion des déchets? On a parlé de toute la problématique de l'emballage. On a toute la récupération des déchets. On a toute la réutilisation. On a toute la recherche et le développement. Or, quand on regarde toute cette problématique-là sur ces différentes facettes, il est sûr et certain qu'on a besoin, et dans les plus brefs délais, M. le Président, de cette enquête-là pour faire en sorte aussi qu'on ne laisse pas se développer à l'intérieur de nos régions, puis accentuer le phénomène de «pas dans ma cour», parce que je vous dis qu'à

l'heure actuelle, chez moi, on veut garder nos déchets, mais on ne veut pas avoir ceux des autres.

Pourtant, je me dois, en tant que parlementaire, d'être responsable, de dire à mes gens: Oui, mais on est un milieu industriel aussi. On ne peut pas garder nos déchets industriels, il faut les envoyer traiter et recycler ailleurs. Alors, quelque part ailleurs, il va falloir qu'il y ait des unités aussi de récupération et de recyclage des déchets industriels. La même chose, M. le Président, qu'à l'intérieur de nos propres déchets domestiques. Nous, les consommateurs que nous sommes, on a des déchets qui sont dangereux aussi. Il va falloir quelque part qu'il y ait un site de récupération, de réutilisation.

Or, comme vous voyez, ça fait appel à beaucoup plus qu'à une législation. Moi, je crois, M. le Président, quand je regarde la multitude de réglementations et que je reviens ? et je vais conclure ? en regardant au niveau du droit, au niveau de l'obligation du citoyen et de la citoyenne d'avoir la connaissance, il ne peut pas plaider l'ignorance des lois, il va falloir arriver avec une simplification. La simplification, quant à moi, va arriver lorsqu'on aura eu cette commission élargie au Québec, lorsqu'on sera capable d'avoir ce consensus et de dire: Oui, on va récupérer, oui, on va recycler nos déchets, même si ça coûte 50 $ à 60 $ la tonne de plus. Je vais citer Normand Maurice, que tout le monde connaît au Québec et qui est une personne de ma région, qui est originaire de chez nous, qui dit toujours que des déchets, ce n'est pas des déchets, c'est une mine d'or, c'est une mine de matières premières. Je pense que la journée où on sera capable d'avoir cette philosophie-là au Québec, il sera possible aussi d'avoir de grands consensus où on pourra faire réellement cette gestion intégrée des déchets.

M. le ministre, j'espère que, dans l'analyse article par article de cette loi-là, vous nous annoncerez, avant la troisième lecture, la tenue, dès cet automne, de cette commission d'enquête que vous voudrez élargie ou pas élargie, générique ou non générique, mais une commission d'enquête où les parlementaires auront leur rôle, auront leur mission d'arriver, lorsqu'on arrivera, avant le 17 décembre 1993... Ça me fera plaisir de vous donner mon consentement cette fois-ci, non pas pour un moratoire, mais pour une vraie loi, qui va contribuer à mettre en place les résultats de cette commission d'enquête. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le député de Drummond. Est-ce qu'il y a d'autres interventions?

Une voix: Oui, le député d'Orford.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le député d'Orford.

M. Benoit: M. le Président... Une voix: En conclusion.

M. Robert Benoit

M. Benoit: ...en conclusion, je vais prendre seulement quelques instants. J'ai accepté de laisser mon temps d'antenne pour bien entendre ce que l'Opposition avait à dire, ce que les gens, les députés indépendants avaient à dire, et, finalement, pour m'apercevoir qu'il y a unanimité à l'Assemblée nationale sur la loi 101, et je m'en réjouis.

Je veux aussi reconnaître le dynamisme du ministre qui a déposé cette loi-là. Je dois aussi reconnaître que la députée de Taillon et son équipe, qui avaient retiré leur consentement hier après-midi, sont revenus sur cette décision; ils ont accepté de nouveau, aujourd'hui, que nous puissions parler de ce projet de loi tout à fait important. Alors, je suis heureux de voir qu'il y a unanimité et on va se retrouver en commission parlementaire, un peu plus tard, pour l'étude article par article.

M. le Président, la problématique, elle est à ce point importante que nous ne parlons plus maintenant de petits sites que vous avez connus à l'arrière de la maison chez vous, à l'arrière du village, mais nous parlons, maintenant, de mégasites. Nous parlons de sites où des centaines et des centaines de camions entrent à tous les jours, des sites où les déchets viennent de très loin, sont transportés par de très gros camions et même par des trains. La problématique, elle est grandissante et on sait tous qu'il y a en ce moment au ministère plus de 79 demandes d'agrandissement de sites, de gens qui, éventuellement, nous diront qu'ils ont des droits acquis.

La députée de Johnson a, effectivement, parlé de la problématique d'un site en particulier, celui du comté d'Orford, et c'est une très grande problématique. Nous en reparlerons en commission parlementaire. Problème qui est très grand, entre autres à cause du promoteur, mais ce promoteur-là, il est semblable aux autres promoteurs et aux compagnies qui sont tout à fait puissantes, aux compagnies qui ont une expertise, mais qui sont très loin, en termes de territoire... Ils vont aller chercher des déchets aussi loin que la périphérie de Montréal, des compagnies qui ont les meilleurs avocats, qui ont une expertise aux Etats-Unis et qui vont nous battre sur tous les fronts. Et le ministre avait besoin de la loi 101 pour dire à ces gens: Assez, c'est assez! Ce ne sont pas des compagnies qui vont mener le Québec, mais c'est le Québec, c'est le gouvernement, c'est les gens qui ont été élus démocratiquement qui vont prendre ces décisions-là, qui vont décider des balises. C'est ce que fait, M. le Président, cette loi 101.

Finalement, je voudrais finir en disant que cette loi va permettre à tous les citoyens qui vont en faire la demande... Chez nous, c'est déjà fait; j'ai parti le bal, j'ai écrit au ministre, il y a déjà plusieurs mois en disant: Attention, il y a un problème, il faut le regarder, il faut envoyer ça devant le BAPE. Je suis heureux, maintenant, de voir que la loi 101 va obliger ces compagnies à aller devant le BAPE. Je voudrais finir en vous disant qu'on a vécu une expérience, chez nous, devant le

BAPE, et, peu importe ce que j'ai entendu, peu importe ce que vont dire les gens ici, peu importe ce que diront les médias, en mon âme et conscience, je suis allé à l'expérience du BAPE chez nous, je suis allé voir ce qui se passait. Je voulais voir si les simples citoyens étaient écoutés; s'ils étaient écoutés et si on les aiderait. (13 h 30)

M. le Président, je dois dire que, dans un autre débat qui fut mené chez nous, j'ai dit au ministre, je l'ai dit aux médias et je le dis ici, à l'Assemblée nationale, l'expérience du BAPE a été l'une des plus belles expériences en démocratie que j'ai pu voir. De simples citoyens, français et anglais, de tous les âges, qui se sont ramassés pendant un mois dans un sous-sol d'église pour aller expliquer, souvent difficilement, souvent sans mémoires, et la présidente du BAPE les faisait expliquer... On avait une série d'experts qui essayaient de ridiculiser ces gens-là, mais, constamment, le BAPE leur a permis d'être tout à fait dynamiques dans leurs interventions. Un jugement tout à fait neutre a été rendu, non pas des gens du village et de la ville qui étaient pour ou qui étaient contre, des intervenants qui, de l'autre bord, étaient pour et étaient contre, mais des experts assis au BAPE, qui, finalement, ont rendu un jugement tout à fait démocratique. C'est une magnifique expérience, chez nous, cette expérience qui a eu lieu devant le BAPE, il y a environ 1 an. Je me réjouis de voir que les citoyens vont pouvoir retourner maintenant, dans le cas des sites.

Alors, j'arrête ici en vous disant, bien entendu, que je voterai pour la loi 101. C'est une loi qui était importante et qui est tout à fait responsable. Je serai présent en commission, cet après-midi, avec le ministre pour écouter ce que l'Opposition veut apporter comme amendements à la loi. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le député d'Orford. Mme la députée de Taillon.

Mme Marois: M. le Président, en vertu de 213, je peux, je pense, poser une question.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Oui, s'il y a consentement du député d'Orford.

Mme Marois: S'il y a consentement.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Vous consentez, M. le député?

M. Benoit: Oui.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Courte question, courte réponse.

Mme Marois: D'accord. Je voudrais savoir de la part du député s'il a affirmé que nous avions retiré notre consentement sur le fond de la loi 101, parce que ce ne serait pas le cas.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le député d'Orford.

M. Benoit: Je continue à dire que le consentement a été retiré hier, à 15 heures, et nous n'avons pas pu... On m'a posé une question, M. le Président, puis-je y répondre?

Le Vice-Président (M. Lefebvre): S'il vous plaît! Allez-y, allez-y.

M. Benoit: Ce que je dis et ce que je redis, c'est que le consentement a été retiré hier et que nous n'avons pas pu débattre de la loi 101, tel que prévu, en après-midi hier, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci. Alors, est-ce qu'il y a d'autres interventions? Pas d'autres interventions?

M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Oui, M. le ministre.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Très brièvement, simplement...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Oui, je m'excuse. Pour votre réplique.

M. Pierre Paradis (réplique)

M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...pour remercier tous les parlementaires qui ont pris la peine d'intervenir sur ce débat, pour l'appui qu'ils donnent au principe de ce projet de loi. Tout à l'heure, nous donnerons des avis quant au moment où siégera la commission parlementaire. Je vous invite à suivre très attentivement le libellé de chacun des articles de façon à ce que ce libellé nous permette d'atteindre les objectifs que nous partageons.

Je vous préviens également que c'est un projet de loi qui dérange beaucoup de gens sur le terrain. Nous allons être victimes, tous et chacun, de beaucoup de pressions. Je pense qu'il s'agit de maintenir, au cours des prochaines heures et des prochains jours, l'unanimité qui nous a animés au cours de cette adoption de principe, de façon à ce que, au bout, ce soit l'intérêt public qui soit le mieux servi. Merci, M. le Président.

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le ministre. Le principe du projet de loi 101, Loi sur l'établissement et l'agrandissement de certains lieux d'élimination de déchets, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je fais une autre motion, M. le Président, pour que ce projet de loi soit déféré à la commission de l'aménagement et des équipements pour étude détaillée.

Renvoi à la commission de l'aménagement et des équipements

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Cette motion de déférence est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Adopté. Il est 13 h 30.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Oui, M. le leader du gouvernement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...conformément à une entente intervenue avec le leader de l'Opposition ? et je sollicite également le consentement du député de Drummond pour modifier les avis touchant les travaux de cette Chambre et permettre à une quatrième commission parlementaire de siéger ce soir, de 20 heures à 24 heures.

M. St-Roch: II y a consentement, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, je...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je donne donc avis formel...

Mme Juneau: Est-ce que j'ai bien compris qu'il y avait eu une entente avec le leader de l'Opposition?

M. Paradis (Brome-Missisquoi): De l'Opposition officielle. Oui, c'est exact.

Mme Juneau: C'est très bien, M. le Président.

Avis touchant les travaux des commissions

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je fais donc l'avis suivant, M. le Président. J'avise cette Assemblée qu'aujourd'hui, de 20 heures à 24 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau, la commission de l'aménagement et des équipements procédera à l'étude détaillée du projet de loi 101, Loi sur l'établissement et l'agrandissement de certains lieux d'élimination des déchets. Et je dépose l'avis.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Et vous m'informez que le député de Joliette, leader de l'Opposition officielle, est d'accord?

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je vous informe que le député de Joliette, leader de l'Opposition officielle, a donné son consentement.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, ça rassure le président. Ça rassure le président. Je suspends les travaux jusqu'à 15 heures cet après-midi.

(Suspension de la séance à 13 h 34)

(Reprise à 15 h 11)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Si vous voulez prendre place, s'il vous plaît. M. le leader adjoint du gouvernement.

Motions du gouvernement

Motion d'urgence proposant la suspension

de certaines règles de l'Assemblée afin de permettre l'adoption du projet de loi 102

M. Pierre Paradis

M. Johnson: Oui, M. le Président, je fais motion: «Que, en raison de l'urgence de la situation et en vue de permettre l'adoption du projet de loi 102, Loi concernant les conditions de travail dans le secteur public et le secteur municipal; «Le 1er paragraphe de l'article 19, les articles 20 et 21, l'article 54, les 2e, 3e et 8e paragraphes de l'article 87, les articles 88 à 93, 100 et 101, 105 à 108, 111 à 114, 164 et 175, les articles 194 et 195, 205 à 209, 212 et 213, 215 et 216, 230, le 2e alinéa de l'article 244, les mots "et l'adoption du projet de loi est fixée à une séance subséquente" au 2e alinéa de l'article 248, les articles 249 à 251, les 2e et 3e alinéas de l'article 256 et les articles 304 à 307 soient suspendus jusqu'à l'adoption dudit projet de loi; «Dès l'adoption de la présente motion, un ministre ou un leader adjoint du gouvernement puisse proposer que l'Assemblée se constitue en commission plénière pour poursuivre l'étude détaillée du projet de loi 102, Loi concernant les conditions de travail dans le secteur public et le secteur municipal; une telle motion ne requière pas de préavis, ne puisse être amendée ni débattue et soit immédiatement mise aux voix, sans appel nominal; «La durée de l'étude détaillée dudit projet de loi en commission plénière soit fixée à un maximum d'une heure après le début de ses travaux, et ce, malgré les dispositions de l'article 245; «Un ministre ou un leader adjoint du gouvernement puisse, plus d'une fois au cours d'une même séan-

ce, proposer de faire rapport à l'Assemblée que la commission plénière n'a pas fini de délibérer et qu'elle demande la permission de siéger à nouveau; une telle motion ne requière pas de préavis, ne puisse être amendée ni débattue et soit immédiatement mise aux voix, sans appel nominal; «Le président de la commission plénière, à l'expiration de ce délai, mette aux voix immédiatement, sans débat et sans appel nominal, les articles et les amendements dont la commission n'aurait pas disposé, y compris les amendements que le ministre qui présente le projet de loi n'aurait pas pu proposer en cours d'étude, mais dont il saisira le président de la commission à ce moment, et fasse rapport à l'Assemblée; ce rapport soit mis aux voix sans appel nominal; «La durée du débat sur l'adoption dudit projet de loi soit fixée à un maximum de 60 minutes, dont 25 minutes au groupe parlementaire formant le gouvernement, 25 minutes au groupe parlementaire formant l'Opposition officielle, 5 minutes au groupe des députés indépendants et une réplique d'une durée maximale de 5 minutes au ministre qui présente le projet de loi, auquel maximum pourrait s'ajouter, le cas échéant, pour les fins de l'application de l'article 257, une période maximale de 15 minutes réparties de la façon suivante: 5 minutes au groupe parlementaire formant le gouvernement; 5 minutes au groupe parlementaire formant l'Opposition officielle; 3 minutes au groupe des députés indépendants et une réplique d'une durée maximale de 2 minutes au ministre qui présente le projet de loi, au terme de laquelle les amendements seraient mis au voix immédiatement, sans débat et sans appel nominal; «Une motion de suspension de la séance puisse être proposée à tout moment par un ministre ou un leader adjoint du gouvernement; une telle motion ne requière pas de préavis, ne puisse être amendée ni débattue, et soit immédiatement mise aux voix sans appel nominal; «L'ajournement du débat, l'ajournement de l'Assemblée ou le retrait d'une motion puissent être proposés à tout moment de la séance par un ministre ou un leader adjoint du gouvernement; une telle motion ne requière pas de préavis, ne puisse être amendée ni débattue et soit immédiatement mise aux voix, sans appel nominal; «L'Assemblée puisse siéger tous les jours, à compter de 10 heures, jusqu'à ce qu'elle décide d'ajourner ses travaux; «Sous réserve de ce qui précède, les dispositions du règlement particulières aux mois de juin et décembre soient appliquées et les règles ci-haut mentionnées puissent s'appliquer jusqu'à l'adoption dudit projet de loi.»

M. Chevrette: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Oui, votre motion est déposée. M. le député de Joliette.

M. Chevrette: J'ai l'intention de traiter de la recevabilité et je demanderais quelques minutes pour lire la suspension d'à peu près tous les droits qui nous restent dans cette Assemblée, afin de pouvoir argumenter sur la recevabilité.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): À votre demande, je vais suspendre les débats de cette Assemblée. Et je demanderais qu'on remette les copies de la motion aux parlementaires qui sont ici présents.

(Suspension de la séance à 15 h 16)

(Reprise à 15 h 25)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, si vous voulez prendre place. Si vous voulez prendre place, s'il vous plaît. Alors, sur la recevabilité, M. le leader de l'Opposition officielle.

Débat sur la recevabilité M. Guy Chevrette

M. Chevrette: Oui, M. le Président. Je voudrais dire quelques mots sur la recevabilité. Tout d'abord, c'est en vertu de l'article 183 de nos règlements que le ministre a invoqué l'urgence, en sachant très bien que, lorsqu'il invoque le motif d'urgence, il n'a pas à déposer de motion au feuilleton. Il n'a qu'à invoquer le mot «urgence» en cette Chambre pour qu'il n'y ait pas besoin de préavis ou de quoi que ce soit et qu'il se lève pour suspendre les règles.

M. le Président, je ne crois pas que l'esprit de nos règlements soit ainsi fait pour permettre d'induire la Chambre en erreur, pour tromper la Chambre, tel que c'est le cas présentement. Parce que, dans la procédure régulière de nos règlements, en vertu des articles 200, 250 et suivants, il y a une manière pour un gouvernement de mettre fin à des travaux qui traînent en longueur, selon lui. Il aurait donc pu, depuis jeudi dernier... Depuis jeudi dernier, jamais le leader adjoint et président du Conseil du trésor n'a rappelé la loi en cette Chambre. Jamais il n'a ramené cette loi pour qu'elle soit étudiée article par article, depuis jeudi passé. Il y a eu toute la journée de vendredi où on aurait pu travailler sur la loi. Il y a eu la journée de lundi. On aurait pu travailler de 10 heures à 10 heures le lendemain matin puisque, en plénière, il n'y a même pas de limite à minuit. Il aurait pu l'appeler toute la journée hier. Il aurait pu l'appeler ce matin. M. le Président, je ne crois pas que l'économie de nos règlements soit ainsi faite pour induire le public et la Chambre en erreur et tromper ainsi, délibérément, cette Assemblée nationale. L'urgence, en aucun temps, ne peut être invoquée à ce stade-ci. Il reste encore 5 jours de délibérations, en vertu de nos règlements. Ça, c'est de un.

Deuxièmement, quant à en mettre, en tant que sépulcre blanchi, le premier ministre lui-même, hier, a

dit que, dans les 3 mois qui suivent, il n'était pas question d'appliquer cette loi. Quelle est l'urgence? Quelle est l'urgence, d'abord? Quel motif? Pour quelle raison il peut invoquer l'urgence, à ce stade-ci, quand le premier ministre lui-même, au sortir de la rencontre avec les principaux leaders syndicaux, a dit: Écoutez, ça va aller à l'automne prochain ? négociez! Bien, quand on veut prouver sa bonne foi, quand on l'est, de bonne foi, d'abord, on s'écrase puis on négocie. Ça, c'est fondamental.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît! Je voudrais informer les membres dans la galerie qu'en vertu de nos règlements vous ne pouvez faire aucun signe d'approbation ou de désapprobation. S'il y a d'autres signes qui se manifestent, je serai obligé de vous faire quitter cette salle. Merci d'avance de votre collaboration.

M. Chevrette: Merci, M. le Président. La spontanéité a sa place.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît! M. le leader.

M. Chevrette: M. le Président, j'espère... On peut empêcher de... On peut empêcher de parler, on peut empêcher de manifester, mais rire, c'est difficile, des fois, de s'en empêcher. M. le Président, le premier ministre nous donnait lui-même, hier, l'argument fondamental qui démontre que le motif invoqué par le leader adjoint, par le président du Conseil du trésor qui est à la fois leader et celui qui a le portefeuille de la négociation.... Et il vient invoquer candidement: En raison de l'urgence. Qu'est-ce qu'il y a d'urgent, M. le Président, si on donne 3 mois de négociation? Quand on est de bonne foi, on dit: Bon bien, O.K., je vais essayer, durant les prochains mois, de laisser libre cours à la négociation. C'est ça, le principe du rapport de force. Mais non. On passe la loi. On passe la loi cet après-midi, en pleine urgence supposément. (15 h 30)

M. le Président, je ne crois pas que, comme président de l'Assemblée nationale... Et je fais maintenant appel à vous. Vous êtes le gardien des droits. Et le gardien des droits, c'est contre les abus de pouvoir que vous avez le droit d'intervenir. Et, à mon point de vue, le geste qui est posé cet après-midi est un abus de pouvoir contraire à l'esprit du règlement.

S'il y avait eu une urgence, M. le Président, si les écoles étaient fermées, si les hôpitaux étaient en grève, si tout était perturbé, au Québec... Jamais je n'ai vu au Québec autant de bonne foi de la part des chefs syndicaux. Jamais je n'ai vu ça: prêts à sacrifier un an, dans certains cas, de gel de salaires. Dans des cas, il y a des chefs syndicaux, sans consulter leur base, à part de ça, dans certains cas, qui ont annoncé 2 ans de gel de salaires. Puis il vient invoquer l'urgence, alors que le premier ministre dit que ça s'appliquerait dans 3 mois? C'est quoi? Vous voulez négocier avec une petite arme au-dessus des oreilles pour leur dire: Accepte ça, sinon, voici, c'est voté déjà? Ce n'est pas ça qui est le principe de relations de travail. En relations de travail, il y a un climat. Il y a bien assez, de temps en temps, que l'Assemblée nationale est obligée d'intervenir sans invoquer de faux prétextes dans le processus normal des négociations. Si vous voulez négocier 3 mois, si vous voulez de la bonne foi de part et d'autre, respectez l'esprit du règlement et la lettre du règlement qui dit: en cas d'urgence.

Moi, je n'ai pas vu d'urgence, M. le Président. Au contraire, si j'avais le droit de le dire en cette Chambre?j'ai besoin de mon droit de parole aujourd'hui, parce que je dirais ce que je pense quitte à me faire enlever la parole ? je dirais, M. le Président, que c'est de la mauvaise foi, puis je la qualifierais. Quand le premier ministre, lui-même, de ce gouvernement a annoncé qu'il y avait 3 mois pour négocier et qu'on vient suspendre tous les droits dans le Parlement, toutes les règles en invoquant la notion d'urgence... Vous avez peut-être hâte d'aller en vacances, ça, c'est une chose, mais induire la Chambre en erreur, tromper la Chambre sur la notion d'urgence et accepter ça comme procédure parlementaire pour bâillonner une équipe qui a l'idée de faire son travail, qui a le goût de faire son travail, M. le Président, c'est de la mauvaise foi.

Et j'en appelle à vous comme gardien des droits de chacun des députés en cette Chambre. Est-ce que nos règlements sont faits pour inciter aux mensonges? Est-ce qu'ils sont faits pour inciter à la tromperie? Est-ce qu'ils sont faits, monsieur, pour induire les gens en erreur, une population entière en erreur? Non, M. le Président, nos règlements sont faits pour être respectés non seulement dans la lettre, mais dans son esprit.

Et, M. le Président, je défie le président du Conseil du trésor de me prouver qu'il y a urgence si ce n'est que pour satisfaire ses petits besoins de maîtrise totale des négos. S'il y a de la bonne foi, qu'il n'invoque pas au moins l'urgence et qu'il se serve de l'article 250. Qu'il dise qu'il est tanné d'entendre l'Opposition parler sur le projet de loi, je lui dirais encore là qu'il induit la Chambre en erreur. Pourquoi ne l'a-t-il pas appelé? Pourquoi, en plein mercredi, M. le Président, il arrive puis il dit: En raison de l'urgence, je dois suspendre toutes les règles du Parlement pour adopter une loi qui sera sanctionnée peut-être dans 3 mois, qui ne s'appliquera peut-être pas pantoute si la négociation aboutit. Bien, donnez une chance à la négociation!

M. le Président, je sais que la tradition au niveau de la présidence vis-à-vis ce genre de plaidoirie que je viens de faire, la présidence a toujours refusé jusqu'à présent de juger de l'urgence, de la notion d'urgence. Mais quand à sa face même ? et vous êtes avocat, M.

le Président ? une plaidoirie n'a ni queue ni tête, quand à sa face même la notion d'urgence est ridicule, dérisoire, quand à sa face même la notion d'urgence est ridicule et dérisoire, quand à sa face même le gouvernement lui-même dit que cette loi s'appliquera dans 3 mois, prouvez-moi donc qu'il y a une urgence! Et il y a toujours une soupape dans nos règlements. Un premier ministre peut en tout temps convoquer la Chambre. Ça, c'est dit en toutes lettres. Bien, qu'il négocie de bonne foi pendant 3 mois avec l'ensemble des secteurs, du secteur de la fonction publique québécoise, de tous les secteurs, qu'il négocie de bonne foi, puis, au mois de septembre, il nous convoquera s'il y a une urgence. Nos règlements prévoient ça, mais pour le moment, M. le Président, qu'on ne vienne pas me dire qu'il y a urgence. Je prétends que c'est un faux prétexte. C'est tromper la Chambre. C'est contraire à l'esprit du règlement, et je fais appel à vous comme gardien, dans cette Chambre, de nos droits.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Sur la recevabilité, M. le président du Conseil du trésor.

M. Daniel Johnson M. Johnson: M. le Président...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît, M. le député.

M. Johnson: M. le Président...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le député, vous pouvez poursuivre.

M. Johnson: ...le leader de l'Opposition vient d'évoquer le fait qu'un argument peut être sans queue ni tête. Il peut également, comme le sien, être tellement court que la queue rejoint la tête. Et ça m'apparaît que c'est le raccourci que vient d'utiliser le député de Joliette et leader de l'Opposition.

Je lui rappelle tout simplement que, en vertu de la jurisprudence sous 183, l'urgence n'a pas à être prouvée, M. le Président. Les décisions sont extrêmement claires. La dernière, enfin, celle que j'ai devant moi remonte à juin 1987: «II suffit d'invoquer l'urgence et cette dernière n'a pas à être prouvée.»

Ça pourrait mettre fin, de cette simple façon, au débat, mais il m'apparaît important, dans les circonstances, d'en remettre, d'en ajouter et de préciser, de toute façon, que cette preuve n'a pas à être faite, M. le Président, parce que c'est l'évidence même qu'il y a urgence au titre des équilibres financiers du gouvernement. Et nous l'avons dit depuis le 23 mars. Nous l'avons dit depuis le 23 mars que nous avions, comme gouvernement, la responsabilité de faire en sorte que les signaux que nous donnons, à quelque titre que ce soit dans les dépenses publiques, sont des signaux qui sont clairs, qui permettent de réaliser les dépenses qui sont prévues dans les crédits et de ne pas dépenser plus que les moyens de nos concitoyens. Nous en sommes à un moment, en juin, où nous devons nous donner l'assurance, comme gouvernement... Et c'est ce que nous avons fait lorsque nous avons rencontré, depuis le 23 mars dernier ? dans mon cas, à 9 reprises différentes ? les dirigeants syndicaux. Nous avons indiqué l'urgente nécessité qu'il y avait de souscrire à l'objectif financier gouvernemental en raison de la situation de l'économie et des finances publiques et en raison du jugement que s'apprêtaient alors à porter les prêteurs sur le risque financier que représentent les obligations du gouvernement du Québec sur les marchés internationaux.

Nous avons eu une réponse d'une des agences tout récemment, qui n'allait évidemment pas dans le sens souhaité par tous les Québécois et tous les parlementaires, qui reconnaissait que, malgré des efforts récents, il y avait une dette considérable; que malgré le dépôt à l'Assemblée nationale de différents documents, il y avait encore cette inquiétude qu'on doit reconnaître par la cote qui nous a été octroyée, mais qu'il y avait au moins cette perspective que le gouvernement avait pris des décisions qui allaient dans le bons sens, le sens de la responsabilité, en invoquant spécifiquement le projet de loi 102.

Il m'apparaît que, dans les circonstances, il est urgent de confirmer notre intention d'aller de l'avant. Nous l'avons fait en cette Chambre en termes très nombreux. Nous l'avons fait, le premier ministre et moi, hier, pendant 2 heures 30, à de nombreuses reprises. Nous avons dit à nos interlocuteurs qu'aujourd'hui, cette semaine, nous serions à l'Assemblée nationale pour adopter cette loi. Nous l'avons dit à nos interlocuteurs, et nous avons également indiqué qu'afin de maintenir une atmosphère que je qualifierais de sérénité relative nous étions disposés à retarder la mise en vigueur de la loi jusqu'au 15 septembre. C'est, mot à mot, ce que le premier ministre et moi-même, donc le gouvernement, avons manifesté à nos interlocuteurs syndicaux. (15 h 40)

L'adoption de la loi, en raison des faits que j'ai mentionnés, est en même temps un geste d'ouverture qui fait en sorte que l'épée n'est pas suspendue au-dessus des têtes. On pourra y voir des distinctions, des nuances. J'indique que, dans les circonstances... Je dirais même que, si la loi était en vigueur demain... Elle prévoit, dans ses dispositions, de toute façon, des négociations qui peuvent mener, avant le 1er octobre, à une convention qui équivaut aux objectifs financiers que nous recherchons.

On pourrait donc dire, M. le Président, que, dans certains cas, dans le cas de la sanction et de la mise en vigueur immédiate de la loi, les délais ne sont même pas les mêmes que ceux que nous avons évoqués, hier. Mais on pourrait faire de l'analyse de texte, invoquer le calendrier. Je réitère l'intention gouvernementale, M. le Président, d'adopter cette loi pour des motifs de certitude, d'invoquer cette loi pour des motifs d'assurance que nous pouvons réaliser les équilibres financiers dont

dépendent la qualité, la crédibilité du crédit du Québec.

Je suis surpris que le chef de l'Opposition ne soit pas, quant à lui, sensible à ces préoccupations. Sans doute nous entretiendra-t-il de ce qu'il en est. Il est évident que le débat pourrait éventuellement le permettre, mais il m'apparaît, M. le Président, que d'aucune façon, à ce moment-ci, en invoquant l'urgence, nous manquions de bonne foi, que nous manquions de quelque façon que ce soit aux règles que nous nous sommes données comme Assemblée, d'autant plus que nous avons annoncé, hier, à nos partenaires syndicaux que c'est précisément ce que nous sommes en train de faire aujourd'hui que nous ferions aujourd'hui.

Je pourrais penser qu'il y a mauvaise foi si, hier, nous avions laissé penser le contraire ou avions dit le contraire. Ce n'est justement pas le cas. Nous avons, comme gouvernement, indiqué clairement à nos interlocuteurs que nous serions aujourd'hui à l'Assemblée nationale en train de faire ce que nous faisons. C'est un peu fort de prétendre qu'à partir de ce moment-là il y a mauvaise foi d'une des parties, lorsque toutes nos intentions ont été communiquées en temps utile à nos partenaires.

Quant à savoir que, de toute façon, selon le leader de l'Opposition il y a beaucoup de temps encore de disponible, ça dépend de combien de temps on parle. Il faut nécessairement s'en référer au temps que nous avons déjà passé sur ce projet de loi. Je ne parle pas de l'adoption en deuxième lecture, l'étude du principe. Nous avons passé presque 6 heures. C'est parfaitement normal. Une quinzaine d'intervenants, 8 de part et d'autre, se sont exprimés sur le projet de loi.

En commission plénière, M. le Président, nous avons passé près de 15 heures à l'occasion desquelles ou à la fin desquelles ? et je vais le dire exactement ? une des raisons pour lesquelles je refuse, M. le Président, de croire qu'il y a quelque perspective que ce soit que cette loi soit adoptée en temps utile, avant le 23 juin, chose certaine, en raison des interventions de l'Opposition.

Je suis heureux que nos fonctionnaires ou leurs représentants soient dans les galeries pendant que je le dis. Parce que, je veux leur rappeler, je vais leur apprendre, à titre d'exemple, que nous n'en sommes, après une vingtaine d'heures de débats, qu'à 4 articles, qu'il y a 51 articles à la loi. Et qu'à raison de 10 heures par jour, 5 jours par semaine, il faudrait mettre 5 semaines pour adopter article par article, avec le comportement de l'Opposition, ce projet de loi.

On aurait droit, M. le Président, et je refuse de m'associer une minute de plus qu'il ne faut à un processus qui permet, par exemple, au député d'Ungava d'accuser littéralement l'ensemble des fonctionnaires du gouvernement du Québec d'être des voleurs. Parce que c'est ça qu'il a dit.

Des voix: ...

M. Johnson: II a évoqué, M. le Président...

M. Gendron: Question de règlement, monsieur...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît, un instant! S'il vous plaît!

Question de règlement, M. le leader adjoint de l'Opposition.

M. Gendron: M. le Président, d'aucune façon, vous ne devez, à ce moment-ci, accepter des arguments sur le fond des propos qui ont été tenus, lors de l'étude qu'on ne veut même plus nous permettre de faire correctement comme parlementaires, en commission. Nous avons et vous avez...

Une voix: ...

M. Gendron: Bien sûr, s'ils ont été tenus hors contexte. Vous avez, comme président, M. le Président, à recevoir un éclairage addtionnel sur le pourquoi de l'usage en vertu de 182 et 183 qui, spécifiquement, indiquent qu'on doit prouver l'urgence. Le leader dit: On n'a pas à en faire la preuve. C'est l'inverse, à condition que... Ce serait évident, à sa face même, et c'est ce que je vais faire tantôt, sur le fond. Mais, à ce moment-ci, M. le Président, dites-moi en quoi vous allez permettre, dans la discussion, qu'on se lève pour reprendre des éléments qui ont été pris ou discutés à d'autres étapes du projet de loi. Ça n'a rien à voir avec l'éclairage additionnel que vous devez recevoir concernant l'urgence.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, nous en sommes... Alors, j'entends la recevabilité de la motion du leader adjoint du gouvernement en ce qui a trait à la recevabilité qui a été soulevée par M. le député de Joliette, leader de l'Opposition officielle, et je demanderais au leader de s'en tenir aux motifs sur l'urgence qui a été invoquée.

M. Johnson: Oui, M. le Président. Je prétendrais qu'il est urgent que nous n'ayons plus à entendre le député d'Ungava s'exprimer en commission plénière. Il est urgent que nous n'entendions plus le député d'Ungava nous dire que, lorsqu'il était maire de sa municipalité, l'acheteur, à l'aréna, passait une commande pour acheter des globes, et on lui envoyait une petite télévision ou un «charcoal» pour le récompenser. Et je le cite: «Je m'imagine que ça doit se passer comme ça au gouvernement aussi», dit-il. Littéralement, M. le Président, je crois qu'il est urgent de ne pas être l'objet de commentaires comme ceux-ci.

J'aurai l'occasion, si vous reconnaissez la recevabilité de cette motion et que nous en débattons, d'illustrer comment, pendant une vingtaine d'heures, nous avons eu droit à des interventions de cette nature. J'aurai l'occasion d'exprimer comment il m'apparaît que nous pourrions faire du progrès si nous discutions tous, comme l'ont fait certain menbres de l'Assemblée nationale des 2 côtés de cette Chambre. Et j'ai des exemples d'une contribution positive qui peut être faite pour

l'examen d'un projet de loi. Malheureusement, au rythme où on traitait de ces travaux, et compte tenu notamment des interventions comme celle du député d'Ungava, il m'apparaît urgent, M. le Président, de ne pas lui donner une chance de récidiver.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, sur la recevabilité, M. le député de Drummond.

M. Jean-Guy St-Roch

M. St-Roch: Oui, merci, M. le Président.

Sur la recevabilité. M. le Président, en décembre, j'ai eu l'occasion de me lever dans des circonstances similaires et de rappeler qu'en 1992, à 4 occasions, le leader du gouvernement avait jugé bon d'utiliser la loi du bâillon. Nous nous trouvons cet après-midi à évoquer, encore une autre fois, M. le Président, l'état d'urgence. Pour moi, me faire bâillonner, c'est devenu une coutume, M. le Président, dans cette Assemblée ou dans des commissions, parce qu'il y a un précédent. Il faut se rappeler que le résultat de la loi 102 a débuté lorsqu'il y a eu des commissions parlementaires. Et lorsque j'ai demandé, en tant que député, de participer, on m'a refusé le consentement parce que, encore là, le règlement fait, à cause d'une lacune qui est aberrante à mon idée, M. le Président, qu'on m'a refusé la permission d'intervenir.

Mais, ceci étant dit, M. le Président, vous aurez cet après-midi, encore une fois, à statuer sur l'état d'urgence. Je l'ai mentionné tantôt, à 4 reprises maintenant, en 1992, on a utilisé l'état d'urgence. Et ce que vous aurez à considérer, M. le Président, lorsque je regarde... En décembre 1992, les raisons qui ont été invoquées sur 4 projets de loi pour nous invoquer l'état d'urgence... Il y en a un, entre autres, qui était le projet de loi 55 où, pour une des rares fois, on a appelé à une rétroactivité de la fiscalité. Et, aujourd'hui, on retrouve ça aussi, M. le Président, banalisé dans nos procédures lorsque je regarde ce qui est arrivé à l'état du budget.

J'aimerais que vous preniez en considération aussi, M. le Président, les commentaires, ce qui est arrivé aussi dans la population, parce qu'on n'est pas ici simplement en tant que législateurs, pour faire des lois, on a l'obligation, M. le Président, en tant que parlementaires, de revaloriser l'image de l'institution. On a l'obligation, en tant que parlementaires, de faire en sorte que nos citoyens et citoyennes sachent une chose, puis c'est dans cette honorable Assemblée, ici, qui, depuis 200 ans, est le summum de la démocratie, c'est ici que les problèmes vont se régler, en ayant des échanges directs, musclés, dans la bonne foi.

Qu'est-ce qu'on a retrouvé, M. le Président, suite à décembre? C'est probablement ce qu'on retrouvera aussi dans la presse et ce que nos citoyens en diront. Je vais vous citer seulement le bâtonnier. Le titre de l'article, M. le Président, était: Le Barreau révolté par le recours abusif au bâillon de l'Assemblée nationale. On a demandé, à ce moment-là, au président de l'Assemblée nationale et on a demandé, aussi, au leader du gouvernement et au premier ministre de faire en sorte que ça ne se produise plus. On a conclu, M. le Président, que la banalisation du bâillon n'est certes pas un signe de santé pour la démocratie parlementaire au Québec et discrédite notre processus législatif, a précisé le bâtonnier.

Je vais faire miennes, M. le Président, ces paroles. Je ne veux pas prendre plus de temps qu'il faut. J'aurai l'occasion de revenir, tout à l'heure, sur le fond. Mais je plaide devant vous qu'on n'a pas utilisé tout le recours au règlement. J'ai écouté le leader adjoint du gouvernement et président du Conseil du trésor nous dire que, peut-être, en commission parlementaire, ça ne s'est pas développé de la façon qu'il aimerait. Mais l'article 249 de notre règlement est clair. Il aurait pu appeler cette loi-là dès hier soir. Parce qu'il faut se rappeler qu'à 17 h 15, hier, on ajournait nos travaux, puis on était en congé, en pleine session intensive.

Des voix: Bravo! Bravo!

M. St-Roch: Alors, si le président... Si le président du Conseil du trésor et leader ajoint du gouvernement pense qu'il y avait abus de qui que ce soit, M. le Président, il a manqué une opportunité en or parce que, si on avait fait siéger hier, ici, cette Assemblée, en commission parlementaire, de 17 h 15... et on pourrait encore siéger sur ce même projet de loi, ça aurait été au vu et au su de tout le monde. Parce que, lorsqu'on siège dans le salon bleu, ici, tous nos débats sont télévisés à l'ensemble de nos citoyens et citoyennes. Eux auraient été à même de juger et non pas ce qui passe, malheureusement, dans une commission parlementaire où très peu de gens suivent nos recours. (15 h 50)

Je vais conclure en vous citant, M. le Président, les interrogations que le bâillon de décembre avaient suscitées. Parce qu'en décembre on a eu le bâillon, on a eu à plaider la même recevabilité. Et la présidence avait statué. Puis c'est la première fois en 8 ans, ici, dans cette Assemblée, que la présidence émettait de sérieux doutes.

Je vais citer la présidence. La présidence disait: La disposition à laquelle a recours le leader du gouvernement peut paraître, pour le moins, extraordinaire. Aurait-elle été voulue ainsi, ayant été introduite au règlement en 1984, à l'usage que l'on décèle les avantages et les inconvénients d'une disposition? Avait-on prévu, à l'époque, toutes les possibilités qu'offre cette disposition? Le moment serait-il venu de remettre en question cette procédure? Pour le savoir, une discussion s'impose dans un cadre tout désigné, celui de la sous-commission permanente de la réforme parlementaire qui devrait s'en saisir.

J'ai eu l'occasion, M. le Président, de demander ici, dès la reprise de nos travaux, au mois de mars, la tenue de cette sous-commission pour qu'on puisse regarder notre règlement et faire en sorte que l'article 84 de

l'ancien règlement, tel qu'il avait été écrit, où le leader du gouvernement était obligé de plaider l'urgence... qu'on réforme le règlement pour faire en sorte... Ce que j'avais plaidé, à ce moment-là, M. le Président, qu'on ne soit pas en fin de session aujourd'hui et être devant le fait qu'on banalise, maintenant ? et c'est devenu une pratique courante ? que, dès qu'on arrive ici, au début de mars ou au début d'octobre, deuxième mardi, on a juste à regarder les projets de loi pour être pratiquement capable de prédire, maintenant, ce qui sera appelé comme loi, comme bâillon.

Bien, M. le Président, pour moi, si j'avais, à ce moment-ci... et, si notre règlement me le permettait, j'oserais vous demander de mettre les drapeaux en berne en signe d'une autre entorse très grave à la démocratie et à la représentative de nos citoyens. Et je vous remercie.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, je rappelle aux membres de cette Assemblée que le motif allégué par le leader de l'Opposition officielle, c'est sur l'urgence, et je voudrais écouter le leader adjoint de l'Opposition officielle sur l'urgence.

M. François Gendron

M. Gendron: Oui, M. le Président. Je voudrais vous rappeler 3 faits qui m'apparaissent importants... qu'ils soient pris en compte, M. le Président.

Le premier, c'est que, lorsqu'un gouvernement décide d'utiliser une motion de suspension des règles et qu'il le fait en vertu, comme mon collègue l'a rappelé correctement, de 182 et 183, la marge d'interprétation n'existe que sur une seule notion. Elle n'existe, M. le Président, que sur la seule notion d'urgence.

Le leader adjoint du gouvernement a prétendu tantôt que nous n'avions plus, dans nos règlements, à faire la preuve de l'urgence. Il a raison, sauf qu'il oublie ceci: L'esprit du règlement, M. le Président ? et c'est là qu'on fait appel à votre qualité de présidence et de sauvegarde de nos droits démocratiques ? a toujours été parce que, à sa face même, d'autres que nous, d'autres que le leader du gouvernement pouvaient constater cette urgence. En quoi, M. le Président, il y aurait une logique d'avoir une disposition où, à sa face même, il y a une notion d'urgence et il n'y a personne qui peut la constater? Il n'y a personne d'autre qui pourrait la voir. Moi, il me semble que, à sa face même, l'esprit du règlement, c'est parce que ça se devait d'être une évidence. Et lorsque ça se doit d'être une évidence, il faut que la notion d'urgence soit visible, observable et manifestement conclue par d'autres.

Parce que ce n'est pas uniquement, ça, un collège privé, l'Assemblée nationale. L'Assemblée nationale est l'institution qui représente la démocratie au Québec, et, dans ce sens-là, si n'importe qui à l'extérieur ne peut pas observer la raison pour laquelle le gouvernement invoque le règlement, en vertu de 182 et 183... Parce que dans votre siège de président, vous avez interprété aussi, M. le Président. Pourquoi le fait-il en vertu de 182 et 183? C'est un choix qu'il a fait. À partir du moment où il fait ce choix-là, il me semble qu'il vous appartient de statuer: Est-ce que pour d'autres, manifestement, nous pouvons observer et conclure que, oui, il y a une urgence parce que ça fait des semaines que nous faisons un certain nombre de discussions en commission parlementaire ou ailleurs et nous sommes à une journée de la fin de session? Est-ce que vous pouvez observer ça? Réponse: Non. Est-ce que vous ne pouvez pas observer une certaine insouciance, une certaine délinquance de ce gouvernement-là de ne pas avoir convoqué, depuis jeudi soir dernier, la commission parlementaire pour faire les travaux?

Ce n'est pas très, très honnête intellectuellement de faire le discours qu'on a entendu tantôt, en disant: On a étudié ça pendant 14 heures en commission et on a avancé sur 4 articles, sachant très bien que l'essentiel du temps a été pris par les remarques préliminaires. Vous le savez. L'essentiel du temps a été pris par des remarques préliminaires, comme c'est normal. Ça fait 17 ans que je suis membre de ce gouvernement-là, pas de ce gouvernement-là, excusez, je ne voudrais pas pour 5 minutes...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Gendron: ...mais de l'Assemblée nationale, et de tout temps, M. le Président, lorsqu'on commence, en commission parlementaire, un projet de loi article par article, de tout temps, il y a eu des remarques préliminaires, et, règle générale, c'est ce qui prend le plus de temps. Et quand on se met au travail article par article, ça procède. Il avait uniquement à la convoquer, la commission parlementaire. Jeudi, vendredi, jusqu'à minuit, il avait le droit. Lundi, jusqu'à minuit, il avait le droit. Mardi...

M. Chevrette: Lundi...

M. Gendron: ...toute la nuit, je le sais bien. Cinq jours. Et là, aujourd'hui, vous, dans votre responsabilité de président de cette Assemblée, vous ne seriez pas tenté de dire: Écoutez, j'ai des sérieux doutes, moi, quant au motif d'urgence, à sa face même, qu'on appelle, prima facie, observable par tout le monde, visible. Manifestement, ça n'y est pas. Manifestement, nous ne pouvons observer cette réalité d'urgence. Et aussi pour les motifs que lui-même invoquait, pas parce qu'il a eu une rencontre hier avec le premier ministre qui a dit: Oui, on va l'adopter, le projet de loi, mais il sera en vigueur uniquement dans 3 mois.

Mon collègue, avec raison, a dit: À n'importe quel moment, il y a une disposition du règlement qui permettra au premier ministre de dire à l'ensemble du Québec: Je dois convoquer l'Assemblée nationale parce que, là, il y a urgence. On n'a pas conclu, on a négocié

raisonnablement, selon leur vision des choses ? ça pourrait arriver, ça, qu'ils négocient raisonnablement, selon leur vision des choses ? puis on n'arrive pas à une conclusion. En conséquence, là, par rapport à ses objectifs de comptable puis de «balançage» de colonnes, qu'on peut respecter, dépendamment de... S'il n'y avait pas tant de gaspillage, on comprendrait. Là, on pourrait respecter ça. Là, il y aurait une notion d'urgence.

M. le Président, je veux juste conclure. Il me semble que les 3 motifs nouveaux que je vous apporte, c'est que, oui, dans l'esprit du règlement, quand on a mis la notion d'urgence, c'est parce que ça se devait d'être une évidence, à sa face même. Nous n'avons rien de ça qui nous permettrait aujourd'hui de conclure, et vous n'avez pas le droit de sanctionner un tant soit peu l'insouciance chronique du gouvernement, de dire: Bien, écoutez, je peux jouer ? excusez l'expression ? fessier, puis on verra, parce que, moi, je veux juste arriver en Chambre puis dire: J'utilise la notion d'urgence, puis c'est réglé, puis dans 2 heures, j'ai ma loi. Au diable les règles démocratiques! Et c'est évident qu'on reviendra sur le fond, dépendamment de votre décision. Merci.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Une dernière remarque sur la recevabilité de la motion, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Daniel Johnson

M. Johnson: Oui, M. le Président, sur la recevabilité.

Je notais que le chef de l'Opposition désirait prendre la parole, et je vous demanderai ici, si vous préférez ? je m'en remets à vous ? que j'intervienne tout à la fin ou si vous entendez écouter absolument tout le monde là-dessus. Ou, si je dois intervenir après chaque intervention, alors, là...

Une voix: Vous n'êtes pas obligé.

M. Johnson: C'est simplement pour savoir.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît! Je fonctionne en vertu de l'alternance. Je vous reconnais, et je pourrai vous reconnaître si vous avez quelque chose, additionnellement, à dire après. Si vous voulez intervenir, je suis prêt à vous écouter.

M. Johnson: M. le Président, en présumant que vous nous expliquerez, que vous nous direz à quel moment vous serez suffisamment éclairé, je présume, pour rendre la décision. D'abord, peut-être un sophisme du leader adjoint de l'Opposition, ou une inexactitude, à tout le moins, qui lui a permis un sophisme, c'est-à-dire qu'il aurait laissé croire que nous avons passé le plus clair de notre temps en commission plénière avec les remarques préliminaires. C'est absolument inexact. Plus de 12 heures se sont écoulées dans l'article par article.

C est à peine 2 heures qui ont été consacrées aux remarques préliminaires, sur 14 h 30 de débats.

Mais, M. le Président, quant à l'urgence, encore une fois, je vous rappelle que notre jurisprudence est très claire à cet égard-là. Il ne s'agit, dans ce cas, qui n'est pas celui d'invoquer qu'il y a raison d'un débat d'urgence mais que nous invoquons l'urgence afin de suspendre les règles... Il s'agit pour le gouvernement de l'invoquer. (16 heures)

On a, de l'autre côté, indiqué que ce n'était même pas dans l'esprit de nos règles. J'indique, M. le Président, que c'est certainement dans l'esprit de l'exercice de la responsabilité gouvernementale à l'Assemblée nationale d'invoquer l'urgence là où, comme gouvernement, nous croyons que cette urgence peut être invoquée. Et je réitère que nous n'avons pas à la prouver comme telle au sens du règlement afin que vous jugiez de la recevabilité, mais que c'est une intervention à caractère qu'on pourrait qualifier de politique, qui fait en sorte que nous invoquons l'urgence pour les raisons que j'ai expliquées un peu plus tôt. J'ai expliqué les raisons de fond qui, quant à nous, nous amènent, à ce moment-ci, compte tenu du retard apporté à l'examen article par article, à assurer de façon très claire, législative que nous pouvons réaliser les équilibres financiers cette année, notamment au titre des conditions de travail dont nous pourrions, je le souhaite, convenir avec nos partenaires syndicaux, mais à l'intérieur d'un cadre extrêmement clair qui est celui qui est prévu dans la loi.

J'aimerais, par ailleurs, préciser, M. le Président, que je suis un peu perplexe devant les propos du député de Drummond, qui, à de très nombreuses reprises, lorsqu'il siégeait à un autre banc que celui qu'il occupe, maintenant, s'est, de façon enthousiaste, prêté à un vote en faveur de la suspension des règles de l'Assemblée nationale. Alors, moi, je veux bien qu'il fasse aujourd'hui amende honorable, mea culpa, mais il n'en reste pas moins que, du côté gouvernemental, nous croyons de bonne foi que c'est maintenant le moment, après les heures que nous avons passées en commission plénière, d'en arriver à un examen le plus rapide possible des dispositions et de l'adoption de cette loi.

Et je ferai simplement remarquer que si nous n'avons pas convoqué la Chambre ou la commission plénière sur ce projet de loi depuis minuit jeudi dernier... Encore une fois, je m'en réfère à la transcription des débats, on verra, et je vous le dis, M. le Président, avec toute la conviction dont je suis capable, c'est à la suite des interventions du député d'Ungava que, quant à moi, j'ai recommandé au leader...

Des voix: Ah! Ah!

M. Johnson: Je regrette infiniment, mais c'est exactement à ce moment-là, M. le Président, si on se le demande et si les gens qui veulent bien en témoigner veulent le faire, c'est lorsque le député d'Ungava a commencé à accuser les fonctionnaires d'être des vo-

leurs que j'ai trouvé que ce n'était plus le temps d'en faire.

M. Gendron: M. le Président, question de règlement.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît! Alors, je vais entendre M. le leader adjoint de l'Opposition officielle.

M. Gendron: M. le Président, vous ne pouvez pas, sur l'urgence, accepter ça, parce que moi, je veux sortir les galées. Il y a des propos qui ont été tenus, à cette commission, par des représentants ministériels, puis c'était loin d'être drôle d'entendre ce qui s'est dit. Ça n'a rien à voir par rapport à ce qu'on discute. Vous avez une responsabilité. Quand vous prétendrez que vous avez suffisamment d'éclairage, vous prendrez une décision. Mais l'éclairage doit toujours porter sur: En quoi est-il urgent? Or, je regrette, les propos pris hors contexte du député d'Ungava n'ont rien, mais rien à voir avec ce qui est sur la table.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. leader adjoint. Alors, voici, je vais entendre 2 intervenants de part et d'autre. M. le chef de l'Opposition.

M. Jacques Parizeau

M. Parizeau: M. le Président, nous observons dans ce Parlement, depuis déjà un certain temps, une sorte de glissement qui, basé sur nos règlements, nous amène maintenant des situations qui violent le sens commun, si je peux m'exprimer ainsi. Par exemple, cette notion d'urgence. Ça fait assez longtemps que je siège à l'Assemblée nationale pour avoir vu les transformations de cette notion d'urgence. Autrefois, on plaidait. On pouvait discuter du sens de l'urgence lorsqu'une loi spéciale était présentée, par exemple, à l'occasion d'une grève qui avait eu lieu dans les écoles. Bon, ça durait depuis 1 semaine. Est-ce que c'était urgent ou pas? 15 jours. Est-ce que c'était urgent ou pas? Ce sont des choses qui se comprenaient, qui relevaient du sens commun. Il y a eu un certain nombre de décisions gouvernementales sur l'urgence qui ont donné lieu à une série de décisions de la présidence ? 3 ou 4. Et la jurisprudence, graduellement, s'est établie qu'on n'avait pas, côté gouvernemental, à plaider l'urgence, à démontrer l'urgence. Déjà, c'était embêtant. C'est une décision, moi, qui continue de m'embêter autant que celle que plusieurs présidents ont rendue, à l'effet que, mentir en cette Chambre, ce n'est pas grave. Il y a des décisions, comme ça, moi, qui m'embêtent.

Mais, comment dire, l'urgence... On a décidé, de par la jurisprudence, qu'on n'avait pas à plaider ou à démontrer, que le gouvernement n'avait pas à démontrer l'urgence. Bon, soit! Je veux bien, puisque c'est comme ça que la jurisprudence a évolué. Mais il faut quand même, là encore, revenir au sens commun. Ce n'est pas parce qu'il y aurait une jurisprudence en cette Chambre qui dirait qu'on ne discute pas de la couleur des choses que, devant quelque chose de manifestement noir, le gouvernement pourrait nous dire: C'est blanc, puis la présidence dirait: Bien, oui, c'est blanc, effectivement, puisque le gouvernement l'a dit.

On est un peu dans ce genre de situation, actuellement, M. le Président. Là, on viole le sens commun le plus élémentaire. Il y a une sanction à ça. Depuis jeudi dernier, le gouvernement n'a pas cru bon de convoquer la commission pour discuter de ce projet de loi. Donc, vendredi, ce n'était pas urgent, puis, lundi, ce n'était pas urgent, puis, hier, ce n'était pas urgent. Bah! Tout à coup, aujourd'hui, ça le devient. On nous dit: À cause des réactions d'un député du côté ministériel. Est-ce que c'est la même raison pour laquelle, à l'heure actuelle, on ne siège pas aujourd'hui pour examiner la loi 86? Et, hier, est-ce qu'on a siégé sur la loi 86? Non. Tout à coup, depuis quelques jours, la loi 86, ce n'est plus important, ce n'est plus urgent. Le gouvernement se conduit comme s'il n'en avait pas besoin de la loi 86.

M. Chevrette: Demain, il va y avoir une motion.

M. Parizeau: Et là, tout à coup, demain, qu'est-ce qui va arriver? Il va nous dire: Ah! l'urgence! puis je n'ai pas besoin de la plaider. Ça devient une parodie du Parlement.

En somme, le gouvernement, si je comprends bien, quand il est tanné, seulement tanné de discuter de certaines choses, arrête les discussions en Chambre, puis, au bout de quelques jours, quand, d'autre part, ses propres députés lui font comprendre qu'ils aimeraient bien que ça se termine vendredi, dit: Urgence! D'après ce que je peux voir, M. le Président, il n'y a d'urgence, à l'heure actuelle, que celle d'un bon nombre de députés libéraux décidés de partir en vacances, vendredi. C'est la seule urgence que je vois. C'est respectable, je n'en disconviens pas, comme motif, mais quand on discute de quelque chose d'aussi important que les relations de travail, il me semble que d'autres considérations pourraient primer.

D'autre part, le leader adjoint du gouvernement et président du Conseil du trésor faisait état, tout à l'heure, des exigences des agences de «rating». Ce seraient les exigences de Moody's qui rendraient imperative et urgente l'adoption du projet de loi que nous avons devant nous. M. le Président, c'est une autorité bien discutable qu'évoque le leader adjoint du gouvernement. Le ministre des Finances, le jour de son budget, annonçant des augmentations phénoménales d'impôts, disait: C'est pour maintenir notre «rating». Bon! Eh bien, si le président du Conseil du trésor a autant de succès avec ce projet de loi que le ministre des Finances en a eu avec ses augmentations d'impôts, on n'est pas sorti de l'auberge! Bon!

D'autre part, est-ce qu'on pourrait me dire en quoi les agences de «rating» ont quoi que ce soit à voir avec toutes ces dispositions dans la loi 102 qui portent

sur les municipalités?

Une voix: Ha,ha, ha!

M. Parizeau: Allons donc! Alors, M. le Président, j'en conclus simplement ceci. Je vous demande de prendre juste le temps, là, de regarder ça à nouveau, attentivement, cette question de l'urgence. J'ai l'impression que le glissement en est rendu à un point tel que là, ce n'est pas seulement qu'à mon sens nous violons l'esprit de notre règlement, mais nous violons le plus élémentaire sens commun.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Dernière intervention sur la recevabilité et, après, je vais suspendre pour délibérer sur cette question. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Daniel Johnson

M. Johnson: M. le Président, je préciserais, tout en rejoignant la même préoccupation que le chef de l'Opposition et tous les députés ici, à l'Assemblée nationale, que nous devons faire preuve d'une extrême prudence, c'est le moins qu'on puisse dire, lorsque nous invoquons les règles exceptionnelles. C'est évident.

Mais encore faut-il se souvenir que ces règles exceptionnelles n'ont pas été imposées par le gouvernement. C'est l'ensemble des députés, l'ensemble des membres de l'Assemblée nationale... À un moment donné, afin de prévoir qu'il y a des circonstances où le gouvernement doit exercer ses responsabilités, dans un contexte où l'Opposition décide, pour des raisons qui lui sont propres, M. le Président, de prendre beaucoup de temps, alors qu'un projet de loi chemine, notamment en commission parlementaire, notre règlement doit pouvoir permettre au gouvernement d'exercer ses responsabilités. (16 h 10)

II a été décidé, en 1987 ? il y a quand même un bon moment ? que, si le gouvernement, en vertu de 183, invoque l'urgence, qu'il n'a pas à le prouver. Nous n'en sommes pas à discuter d'un débat d'urgence, où vous avez à vous prononcer, M. le Président, si, oui ou non, il y a urgence. Nous en sommes à cette étape finale, c'est évident, dans la tenue de nos débats, où le gouvernement décide ? c'est une décision de la formation ministérielle ? d'invoquer l'urgence pour suspendre les règles. Nous en sommes là. Et il me semble, M. le Président, qu'on doit avoir à l'esprit certains précédents, et les précédents sont nombreux, ils sont variés.

Je m'en voudrais de ne pas soulever celui de décembre 1990, alors que, lorsque nous étudiions, en commission parlementaire, la loi qui amendait la Loi sur la Caisse de dépôt et placement, après 4 ou S heures, cette fois, de débats, alors que le gouvernement invoquait la suspension des règles et le bâillon, le leader de l'Opposition, dans son enthousiasme, avait reconnu que «8 à 10 heures de débats pouvaient lui permettre de reconnaître que nous pourrions recourir au processus du bâillon» ? et je cite. Nous avons fait plus de 20 heures, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, dernière intervention et je vais suspendre.

M. Guy Chevrette

M. Chevrette: Oui, M. le Président, mais je voudrais dire au leader du gouvernement et président du Conseil du trésor: Si un député en cette Chambre peut l'influencer au point de décider de mettre un bâillon, il me semble qu'un simple petit calcul politique devrait lui faire comprendre que 400 000 travailleurs des secteurs public et parapublic devraient l'influencer d'abord.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, là-dessus, je vais suspendre les travaux pour quelques instants, pour...

M. Claveau: Question de règlement.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Question de règlement? Je m'excuse. Question de règlement, M. le député d'Ungava.

M. Claveau: Est-ce que je peux soulever une question de fait personnel sur les accusations que le président du Conseil du trésor a faites, sur la base d'une intervention qu'il cite hors contexte et qui se voulait des exemples de pratiques...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, M. le député... M. le député, vous connaissez le règlement plus que moi. Vous savez le règlement et vous devez l'utiliser.

M. Chevrette: Non, non. Question de règlement.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Question de règlement, M. le leader de l'Opposition officielle.

M. Chevrette: M. le Président, vous n'avez même pas laissé continuer mon collègue pour qu'il explique la nature de sa question de règlement. C'est un minimum, en cette Chambre...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Non... Un instant. Il m'a parlé d'une question de fait personnel. Alors, en vertu du règlement...

M. Chevrette: Question de privilège, si vous voulez.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Question... Écoutez, je peux...

M. Chevrette: Quand un député est taxé fausse-

ment de choses, qu'est-ce qu'il lui reste à faire, en vertu du règlement? D'abord, d'être entendu par la présidence pour rectifier les faits. C'est un minimum, ça, des droits, là. Vous en avez assez suspendu. S'il vous plaît, laissez-nous celui qu'il nous reste pour le moment.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît! S'il vous plaît!

M. Johnson: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le leader adjoint du gouvernement, sur la question de règlement.

M. Johnson: Une question de fait personnel, M. le Président, si elle doit être soulevée, selon nos règles, doit...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît!

M. Johnson: ...l'être par avis qui vous est signifié une heure avant la période des affaires courantes, M. le Président ? et à défaut de quoi, je pourrais déposer le texte de l'intervention du député...

Question de règlement

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît! Je vais permettre que vous continuiez votre intervention sur une question de règlement, mais... Quelle est votre question de règlement, M. le député?

M. Chevrette: II a laissé...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît, M. le député, vous n'avez pas la parole. S'il vous plaît! M. le député d'Ungava.

M. Christian Claveau

M. Claveau: Oui, M. le Président, en vertu de 35.6°, «imputer des motifs indignes à un député ou refuser d'accepter sa parole». M. le Président, vous me permettez de plaider pendant quelques secondes sur ce dont on m'accuse. Et là, je pense que c'est la moindre des choses, que l'on puisse, en cette Chambre, rectifier ce qui peut être dit sur notre compte hors contexte, M. le Président.

Je vais me situer dans le contexte de mon intervention. Je n'ai jamais accusé qui que ce soit de pratiques frauduleuses, de vol, de fraude, ou quoi que ce soit. J'ai parlé de pratiques administratives qui pouvaient s'appliquer dans un cadre qui doit être légal puisqu'il est publicise. Des entreprises, M. le Président... J'ai eu des papiers en main... Malheureusement, je n'en ai pas avec moi pour les déposer en cette Chambre, mais je peux en trouver, s'il le faut. Il y a des entreprises qui font leur publicité aux différents ache- teurs d'entreprises, de municipalités ou autres, et les acheteurs, ce ne sont pas tous des fonctionnaires, M. le Président. Ce n'est pas tous les fonctionnaires qui décident des achats, dans un gouvernement. Ça, déjà là, il y a une exagération de la part du ministre. Mais il y a de la publicité qui se fait en bonne et due forme, qui est publiée, distribuée à la population, où on dit: Si vous achetez tant d'unités, vous en recevrez tant; si vous achetez 2 fois plus d'unités, vous aurez autre chose, etc. Je n'ai pas à juger de la légalité ou non de la pratique, et ce n'est pas ça dont j'ai parlé. Mais j'ai tout simplement dit que de telles pratiques administratives, si elles étaient tolérées par un gouvernement, pouvaient amener à des dépenses indues, inconsidérées, et que, là, il y a une responsabilité gouvernementale de faire en sorte que l'on empêche des dépenses qui ne sont pas nécessaires. C'est des questions de pratiques administratives, dont lui est responsable, et qui n'ont rien à voir, mais absolument rien à voir...

Des voix: Bravo! Bravo!

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît! S'il vous plaît! Alors, je suspends les travaux pour... Sur la recevabilité de... Je suspends les travaux, actuellement. J'ai suspendu les travaux, M. le député. S'il vous plaît, les travaux sont suspendus pour étudier les argumentaires sur la recevabilité de la motion.

(Suspension de la séance à 16 h 15)

(Reprise à 17 h 1)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le député de Joliette.

M. Chevrette: M. le Président, en vertu des article 69, 70, je crois, du règlement ? j'espère que je ne me trompe pas de numéro ? je pense que, dans cette Chambre, il est admis qu'on puisse discuter, diverger d'opinion. Je pense qu'en vertu de nos règlements on ne peut pas, en aucun temps, bousculer un député ou menacer physiquement un député, ce dont je fus victime au moment où vous vous êtes levé de votre siège pour aller délibérer.

Je demanderais au président de l'Assemblée nationale de voir à ce que chaque député en cette Chambre, quel qu'il soit, qu'il diverge d'opinion ou pas, puisse avoir sa pleine intégrité physique et avoir pleine liberté d'exercer son travail comme bon lui semble.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, en vertu de 68, vous vous êtes expliqué sur ce fait.

Décision du président

Alors, voici ma décision. J'ai été saisi d'une question de règlement soulevant l'irrecevabilité de la

motion présentée par M. le leader adjoint du gouvernement. L'argument invoqué à rencontre de la recevabilité de cette motion consistait en l'appréciation de la notion d'urgence invoquée à son soutien.

Le président est lié par le règlement actuel voté unanimement par l'Assemblée nationale. Ce règlement l'enjoint de décider de la recevabilité d'une motion, si les conditions de forme sont remplies. Or, en ce qui concerne l'urgence, elle n'a qu'à être invoquée, si on se reporte au texte même de l'article 183 de notre règlement. Le président n'a pas à aller au-delà de ce que lui dicte le règlement que l'Assemblée lui demande d'observer.

Il existe une abondante jurisprudence à l'effet que la présidence n'a pas à s'immiscer dans l'examen de cette notion d'urgence. Si on voulait laisser à la présidence le devoir d'apprécier l'urgence d'une situation, il faudrait amender le règlement actuel pour le prévoir. Y a-t-il urgence ou non? Voilà une question qui est laissée à l'appréciation de l'Assemblée et non de la présidence, appréciation qui sera exprimée par le vote qui se tiendra après le débat sur cette motion. Tel est l'état de notre règlement actuel.

Je voudrais, à ce moment-ci, dissiper la confusion qui semble régner lorsqu'on parle de l'ancien règlement. Avant 1984, sous l'ancien règlement, il n'était pas requis, comme aujourd'hui, d'ailleurs, de prouver l'urgence. Sous l'ancien règlement, on devait indiquer les motifs à l'appui de l'urgence dans l'accord même de la motion de suspension. C'est la seule différence qui existe avec le règlement actuel. C'est l'Assemblée qui devait aussi, à ce moment, apprécier l'urgence par son vote sur la question qui lui était soumise.

La motion du leader adjoint du gouvernement est donc recevable parce qu'elle est conforme à notre règlement. Je suspends la séance pour réunir les leaders parlementaires afin de partager le temps du débat qui s'ensuit. Alors, je suspends pour quelques instants pour une rencontre avec les leaders.

M. Chevrette: M. le Président, si ça peut vous aider, là...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Oui.

M. Chevrette: ...il y a une procédure, pour ne pas étirer le temps indûment, qui est à peu près normale. On laisse quelques minutes aux députés indépendants et on partage 50-50 pour le reste. Je ne vois pas pourquoi on se réunirait à nouveau.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Si je comprends bien, quant au partage du temps et, s'il y a consentement, 50 % du temps pour la formation ministérielle, 50 % du temps pour la formation de l'Opposition officielle et 10 minutes pour les députés indépendants. Alors, il y a consentement. Alors, c'est le partage du temps.

Et je reconnais M. le député, sur votre motion.

Débat sur la motion M. Daniel Johnson

M. Johnson: Oui, je vous remercie, M. le Président. La raison qui nous amène ici aujourd'hui est fort connue. Nous avons, comme gouvernement, des décisions à prendre en matière financière, et la réalité des chiffres est inéluctable. Nous avons à composer avec une situation économique qui a des effets que je qualifierais, sans exagération, de dévastateurs sur certains des éléments des finances publiques.

Nous avons vu, depuis les 2 dernières années, que, quel que soit le soin que nous mettions, quel que soit le conservatisme, ajouterais-je, M. le Président, que les ministres des Finances, partout dans les pays industrialisés, peuvent mettre dans leurs prévisions de revenus, dans tous les cas, l'économie nous a réservé de désagréables surprises et, malgré des hausses de taxes et d'impôts passablement généralisées dans le monde qui nous entoure ? et nous n'y avons pas échappé ? nous avons dû constater que la conjoncture économique a créé un déséquilibre des finances publiques que nous devons corriger.

C'est ironique, évidemment, les revenus n'étant pas là, créant par eux-mêmes une difficulté d'équilibrer les finances publiques, que les dépenses, quant à elles, soient trop là. Nous avons décidé, à l'instar de nos voisins canadiens et de nombreux pays de l'Europe de l'Ouest, de nous donner un ensemble de services publics qui font en sorte que nous prévoyions un filet de sécurité pour nos concitoyens. Qu'il s'agisse des services sociaux ? au-delà des services de santé ? qu'il s'agisse de l'accès généralisé, gratuit, universel à l'enseignement supérieur, qu'il s'agisse des programmes de sécurité du revenu ou du soutien particulier aux familles, nous n'échappons pas à la dure conséquence que le ralentissement économique emporte: c'est-à-dire que nos dépenses augmentent par la structure même de nos programmes, alors que les revenus diminuent en raison de la conjoncture économique.

Nous n'y pouvons rien, M. le Président. Il s'agit de savoir comment nous pouvons composer avec de telles difficultés. Je prétendrais que nous avons réussi, comme gouvernement, depuis quelques années, à maîtriser davantage qu'autrement l'évolution des dépenses publiques. Que nous avons choisi ? on peut le déplorer, le regretter, vouloir le contredire aujourd'hui après le fait, que nous...

Des voix: Non à la loi 102! Non à la loi 102!

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Je suspends les travaux. Je suspends les travaux.

(Suspension de la séance à 17 h 7)

(Reprise à 17 h 18)

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, nous reprenons les travaux de l'Assemblée, et je rappelle à ceux et celles qui suivent les travaux de la galerie que vous êtes les bienvenus pour assister aux travaux de l'Assemblée nationale, mais, comme vous avez pu le constater, la présidence a le pouvoir et de devoir de maintenir l'ordre. Également, tout signe d'approbation ou de désapprobation quant au discours d'un intervenant ne peut se manifester dans les galeries de l'Assemblée. M. le président du Conseil du trésor, je vous cède la parole.

M. Johnson: Merci, M. le Président. Et pour renchérir sur vos derniers propos, je pense qu'on pourrait convenir que, sur le parquet de l'Assemblée, il y a suffisamment d'exemples d'approbation et de désapprobation, que ce soit avec ou sans nuances, qu'il n'y a presque plus de place, dans cette enceinte, pour des signes qui viendraient d'ailleurs que du parquet.

Ceci étant dit, je remercie ceux de nos spectateurs qui sont toujours avec nous, qui font preuve d'une attention exemplaire à nos débats et qui, évidemment, sont préoccupés par les effets que cette loi pourrait entraîner sur leurs conditions de travail. J'indique, et je reviens, M. le Président, à mon propos initial qui était le constat que la gamme des services que nous nous sommes donnés et la structure des revenus que le gouvernement a mis sur pied font en sorte qu'une conjoncture économique extrêmement difficile crée un écart bien au-delà des prévisions, aussi serrées et conservatrices soient-elles, que nous pourrions faire et que nous avons faites depuis 2 ans. (17 h 20)

II faut savoir que la structure des dépenses publiques a une mécanique propre, je le reprends, qui fait en sorte que, sur les 40 000 000 000 $ ou à peu près que nous dépensons, un peu plus du quart ? 10 000 000 000 $ ou à peu près ? est attribuable au service de la dette, donc à l'intérêt sur les emprunts que nous avons contractés dans le passé ? plus de 60 000 000 000 $ au moment, où nous nous parlons de dette directe totale ? et, deuxièmement, est consacré à la sécurité du revenu d'un nombre malheureusement trop élevé de nos concitoyens qui ne peuvent compter sur un emploi pour subvenir à leurs besoins et qui donc se retournent ? c'est exactement pour ça que ces programmes existent ? vers le ministère de la Main-d'oeuvre et de la Sécurité du revenu, afin de leur assurer un tant soit peu quelque aide financière dans la conjoncture que nous traversons.

Je dois signaler que, pour ce qui reste des 30 000 000 000 $, les deux tiers sont attribuables à la rémunération. Je peux comprendre nos fonctionnaires et les gens qui, dans les services publics, assurent la prestation de ces services, alors que dans l'entreprise privée, s'il y a un problème de marché, tout le monde dans l'entreprise en est saisi. On s'aperçoit ? je reprends l'exemple ? qu'à l'expédition les clients ne viennent plus chercher de marchandises, qu'aux comptes receva-bles on doit se faire insistant pour que les clients commencent à payer, qu'aux comptes payables on doit recevoir des appels pressants des prêteurs, de la banque ou de qui que ce soit, des fournisseurs. Lorsque la conjoncture économique est plus difficile, les gens, en général, dans les entreprises s'en aperçoivent personnellement.

Lorsqu'on commence à requérir une contribution, ou un effort, ou une participation pour rééquilibrer, je dirais, le bilan d'une entreprise, il est peut-être plus facile de faire passer le message qu'il ne l'est dans le secteur public où, ironiquement, au fur et à mesure que nous persistons dans ce ralentissement économique, des jeunes s'attardent à l'école; des gens plus nombreux et plus insistants transigent avec nos agents de l'aide sociale dans les bureaux de Travail-Québec; des familles connaissant des déchirements, sinon carrément des tragédies beaucoup plus sérieuses, ont à vivre des problèmes humains qui créent des tensions, qui demandent souvent des signalements à la Direction de la protection de la jeunesse, qui demandent des interventions des travailleurs sociaux qui, autrement, bon, auraient à vaquer à leurs occupations de façon peut-être moins intensive.

La même chose est vraie dans le milieu scolaire. La crise économique, avec les répercussions que ça peut avoir sur les familles, et donc sur les enfants, demande des efforts de compensation considérables des hommes et des femmes ? et des femmes surtout, on le sait, dans le monde de l'enseignement primaire, notamment ? des efforts de compensation sur les lieux, à l'école, dans les classes, afin de donner aux enfants une perspective d'espoir qui peut leur manquer dans leur milieu familial, lorsque le père, la mère ou les deux ont perdu leur travail et se demandent vraiment comment subvenir aux besoins des enfants.

On voit, étrangement, donc, que lorsque les revenus du gouvernement chutent, les services connaissent une pression additionnelle, et les femmes et les hommes qui ont à rendre ces services dans le secteur public sont soumis à des pressions croissantes de la clientèle. Alors, évidemment, le signal est inverse de celui qu'il est dans le secteur privé: nous sommes privés de revenus; la moitié de notre budget est consacrée à la rémunération; ceux que nous rémunérons, nos employés, travaillent ou sont appelés à travailler plus fort, ou dans des circonstances plus difficiles; et nous sommes condamnés ? et c'est vrai depuis de nombreuses années ? à leur demander une contribution qui doit être ? c'est le seul test ? raisonnable dans les circonstances.

On pourra toujours prétendre qu'il y a des gains autres que ceux que nous pourrions faire sur la rémunération à réaliser. Et je suis parfaitement d'accord, M. le Président. Nous poursuivons, depuis de nombreuses années, depuis plus de 10 ans, au Québec, un effort de rationalisation des dépenses, de coupures dans les rythmes de croissance des dépenses, qui nous permet un tant

soit peu de vivre à la mesure de nos moyens. Or, nos moyens, indépendamment des efforts que nous avons faits pour, je dirais, contrôler le rythme de croissance des dépenses, nos moyens ont chuté. Le ralentissement économique a un effet immédiat sur notre capacité de rencontrer les factures que l'activité gouvernementale nous oblige à rencontrer.

Évidemment, une de ces grosses factures, ça demeure la rémunération de nos employés. On ne peut pas faire autrement. Et je le sais pertinemment: depuis février, mars 1991 que, de façon presque permanente, je suis en discussion avec nos partenaires syndicaux. Depuis le printemps 1991, alors que j'avais pris contact avec les instances syndicales, j'avais indiqué que les perspectives financières étaient telles que nous devions envisager un gel d'un an, à l'époque, pour l'année suivante, et une augmentation de 3 % pour l'année qui suivait. nous avons éventuellement réglé ? parce que nous avions quand même plusieurs options ? pour un gel de 6 mois, donc aucune augmentation de salaire par rapport au 31 décembre 1991. nous avons maintenu les échelles salariales pour 6 mois de plus. nous avons versé 3 %, au titre de l'augmentation sur échelle, le 1er juillet 1992. et lorsqu'il fut question, l'année suivante, du versement de ces 3 %, et du 1 % qui devait, sur échelle, je dirais, faire perdurer un forfait de 1 % qui avait été introduit lors de la négociation de 1989 pour l'année 1991, à compter du 1er juillet 1991, je me suis retrouvé, en 1992, devant, encore une fois, nos vis-à-vis syndicaux pour leur dire que l'augmentation qui devait être payée dans les mois qui venaient apparaissait passablement problématique, que les finances publiques s'étaient détériorées davantage et qu'il y aurait peut-être lieu de considérer que les 3 % et le 1 % ? les 4 %, donc ? pourraient être avantageusement divisés sur une période de 12 à 18 mois, en versements de 1 %, puis de 1 %, puis de 2 %; ou, alors, de 2 % et de 2 %, ou, alors, de 2 % et de 1 %, et de 1 %. enfin, on a essayé toutes les combinaisons pour, finalement, maintenir, parce qu'il fallait en convenir, l'engagement gouvernemental quant aux 3 %. et ça représentait, dans les circonstances, un coût, évidemment, financier. mais, ayant convenu, l'année d'avant, que c'est ce que nous ferions, on n'a pas légiféré à rencontre de notre signature. nous avons donc décidé, oui, de verser ces 3 %, mais avons également convenu que le 1 %, qui devait être intégré dans les échelles à partir de juillet, ne le serait que 9 mois plus tard, c'est-à-dire en avril dernier. nous sommes donc rendus, dans mon récit, au printemps 1993, où le 1 %, comme on le sait, a été versé selon les ententes qui avaient été conclues en 1992.

Mais un autre des éléments de cette entente de 1992 visait la tenue d'une commission sur les finances publiques, sur le financement des services publics. On pourra, aujourd'hui, dire et dénoncer ? enfin, je m'y attends, M. le Président ? que le ministre des Finances et moi-même avons tardivement déposé un document.

On reconnaîtra, par ailleurs, qu'il était passablement complet et que nous avons ?j'entends déjà les propos de l'Opposition, «pour la frime», comme on dit chez nous ? tenu des audiences publiques. Encore une fois, 75 groupes ont eu quand même l'occasion, par écrit et presque tous en personne, de faire valoir leur point de vue sur les dépenses publiques, sur le niveau de revenus, sur la politique fiscale. Ce n'était pas aussi ciblé qu'auraient pu le souhaiter certains intervenants ? notamment, je pense à la CSN ? sur la fiscalité et la progressivité de notre régime fiscal, sur les dépenses fiscales que les individus et les entreprises ont à leur disposition dans notre régime, mais, enfin, ça a été un forum qui a duré 3 semaines, qui a permis à peu près à tout le monde de s'exprimer.

Nous avons donc, à ce moment, déposé ce qui constituait un plan de redressement graduel des finances publiques sur 5 ans, et il m'apparaît, encore une fois, que, lorsqu'on regarde la composition des éléments de dépenses publiques, on ne peut pas échapper à un examen attentif de ce que la rémunération peut représenter ultimement comme facteur de stabilisation ou facteur de contribution à la réalisation de ces équilibres financiers. (17 h 30) mais, cette contribution, je le répète, doit être raisonnable. elle doit s'inscrire sur une longue période, dans un effort soutenu du gouvernement et de ses employés à contribuer tous ensemble à réaliser nos engagements financiers à l'endroit de nos prêteurs, à l'endroit de l'économie du québec, à l'endroit du secteur privé et à l'endroit de nos employés. et ce que nous avons à décider comme gouvernement, c'est comment nous pouvons requérir de tous et chacun de nos concitoyens, qu'ils soient contribuables ou bénéficiaires de services ou, alors, évidemment, nos propres employés et nous-mêmes, les députés de l'assemblée nationale... comment pouvons-nous distribuer ce fardeau? nous avons réussi, pour 1993, à diminuer les dépenses de plus de 1 400 000 000 $ à l'égard de la rémunération dans le secteur public, en partie par des diminutions de 6 % sur l'ensemble, une moyenne de 6 % ? c'est beaucoup plus, c'est beaucoup moins, selon les programmes ? 6 % de diminution dans les différents programmes de subvention et de transfert; par une diminution de 3 %, ou à peu près, en moyenne, au titre du fonctionnement et des dépenses de capital des différents ministères. également par des diminutions d'effectif, notamment dans la fonction publique, où le régime de sécurité d'emploi, évidemment, ne menace pas l'ensemble de nos employés, mais requiert des attitudes de gestion qui nous permettent d'identifier ? et c'est déjà commencé ? là où il peut y avoir un surplus d'effectif, de nous astreindre à reformer, recycler, rediriger ces employés, en vertu de la loi de la fonction publique, pour leur demander, évidemment, d'occuper un poste qui peut devenir vacant, sans que nous ayons recours au recrutement externe pour combler ce poste. c'est une responsabilité de gestionnaire que je viens de décrire, qui doit également faire partie des efforts qui sont demandés.

C'est un effort demandé au gestionnaire lui-même. C'est un effort demandé au corps que représentent les gestionnaires et cadres, que nous réduisons de 20 % sur 3 ans, dont les salaires non seulement sont diminués de 1 % mais également de 2 % additionnels cette année au titre des bonis, qui, depuis 1982, sont intégrés dans les modes de rémunération de nos cadres. il faut se souvenir, d'ailleurs, que ce n'est pas 2 % par-dessus les 100 % de rémunération, mais que, à l'occasion des décrets de 1982 et 1983, la base de rémunération des cadres a été abaissée à 98 % de ce qu'elle était avant les décrets de réduction de salaires, et que les 2 % qui sont restés lorsque leur rémunération a été restaurée sont maintenant distribuables au mérite. donc, certains ont 0 %, d'autres, 2 %; d'autres, 4 %; d'autres, 6 %; et, essentiellement, ce n'est pas à 102 % que se situe maintenant la rémunération globale des cadres, mais à 100 %, dont une partie est distribuée au mérite.

Donc, nous avons requis des efforts de tout le monde. Je répète, enfin, pour ceux qui nous écoutent, je veux les rassurer: les députés aussi, en vertu du projet de loi, sont touchés. Notre salaire est fixé comme étant à 100 % ou à la médiane d'une classe de fonctionnaires, de telle sorte que, au fur et à mesure que cette classe de fonctionnaires peut connaître des augmentations de salaire, les députés voient leurs salaires évoluer de la même façon. Nous serons désormais à 99 % de cette rémunération. Donc, il y a essentiellement une diminution de 1 % des salaires des députés, et ce, pour toujours, non pas seulement pour une année et on se reprendrait plus tard. C'est pour toujours que la base de rémunération du secteur public, y compris celle des députés, est abaissée. C'est la contribution qu'on requiert. je viens tout de suite dire qu'on a souvent souhaité ? et on a vu le gouvernement de l'ontario le faire hier ? du côté de l'opposition et du côté de certaines instances syndicales, que nous exemptions davantage certaines classes d'emploi situées dans les emplois les moins rémunérés. l'ontario le fait à la hauteur de 30 000 $; les mesures de diminution de salaires que l'ontario pourrait décréter d'ici le 1er août sont de 4,4 %. c'est une diminution de 4,4 % dans un gel de 3 ans. c'est ça qu'ils sont en train de faire en ontario pendant que, nous, on parle d'un gel de 2 ans et moins 1 %. l'ontario parle d'un gel de 3 ans et moins 4,4 %, c'est-à-dire 12 jours par année de congé sans solde. c'est ça, la base de comparaison qui m'apparaît importante, dont il m'apparaît important de se souvenir.

C'est que, dans cette opération, nous avons à requérir de tout le monde une contribution qui est raisonnable. Et on ne peut pas confondre le rôle de l'État comme employeur et le rôle de l'État comme, je dirais, agent fiscal, comme agent de soutien financier aux familles québécoises. Qu'un gouvernement du Nouveau Parti démocratique en Ontario utilise le gouvernement comme un redistributeur de richesses, à titre d'employeur, pour exempter certains emplois d'une diminution de la rémunération et n'en pas exempter les autres m'apparaît confondre ces deux rôles. Nous n'exemptons personne, M. le Président. Mais je veux faire remarquer que, si un couple avec enfants reçoit un revenu de 25 000 $, ou presque, il est exempté de l'impôt sur le revenu des particuliers. C'est de cette façon que nous décidons, pour tous les Québécois de ce niveau de revenu d'assurer qu'ils conservent la totalité de ces revenus au titre de l'impôt sur le revenu des particuliers. d'autres écoles: le député de duplessis, de mémoire, qui nous faisait état de ses activités de représentant syndical d'hydro-québec sur la basse-côte-nord, nous disait plus tôt que, quant à lui, il favorisait un modèle où toutes les classes d'emploi verraient leur salaire diminuer ? à la hausse ou la baisse, selon la conjoncture ? d'un montant égal. alors, évidemment, on se rend compte que 0,50 $ l'heure, pour quelqu'un qui fait 10$ l'heure, ça représente 5 %, mais 0,50$ l'heure, pour quelqu'un qui fait 20 $, ça ne représente que 2,5 %. c'est un modèle pour lequel plaidait le député de duplessis.

Il m'apparaît que c'est là une illustration de l'État-employeur redistributeur de richesses. C'est un modèle, sans caricaturer, qui a été épousé dans d'autres pays, qui, depuis 5 ans, s'écroule sous le poids de l'injustice et de la désincitation au travail qu'un tel régime égalitaire, évidemment, apporte à la longue. Je dirais qu'avec des critères de rémunération comme ceux-là, dans des situations d'inversion salariale, à la limite, lorsqu'on veut tellement corriger ce qu'on prétendait des injustices sociales à coup de rémunération plutôt qu'à coup de soutien financier, de programmes sociaux ou de fiscalité, on se retrouve dans des situations où certains de nos employés de la fonction publique, qui occupent les postes de superviseurs ou de cadres, sont moins bien payés que ceux qui relèvent d'eux. Alors, évidemment, ça crée des situations absolument loufoques, qui, dans n'importe quelle pyramide des emplois, mènent à des tensions, à des difficultés de gestion qu'il faut absolument corriger. alors, nous empruntons plutôt le modèle... je m'excuse d'avoir été un peu technique, m. le président. ce n'est pas là mon objet, mais il fallait quand même illustrer comment notre politique requiert de tous, dans un souci d'équité, une contribution à la mesure de leurs moyens. et, en réalité, certains des moyens de soutien financier que nous mettons à la disposition des contribuables, des familles québécoises viennent contrer, dans les classes de revenus plus modestes, les décisions que nous prenons, viennent compenser, viennent annuler littéralement certaines de décisions que nous prenons en assurant du soutien financier additionnel pour ceux qui auraient vu leur feuille de paie diminuer de 1 %.

Il m'apparaît, M. le Président, en terminant, que je dois encore passer un moment à justifier le recours à cette mesure exceptionnelle qu'est la suspension des règles. Les heures que nous avons passées à discuter de ce projet, article par article, n'ont pas été aussi productives qu'elles auraient pu l'être. Je pense que c'est la moindre des choses. Je pense qu'une lecture honnête de

la transcription de nos débats nous amènerait à cette conclusion en toute bonne foi.

Je ne prétends pas que ça a été universel et permanent, cette absence d'esprit constructif, et je me souviens, par exemple, que le député de Masson a fait une intervention que j'ai trouvée extrêmement intéressante et même constituant un défi intellectuel, dans l'application de la loi aux municipalités, dans certaines circonstances où nous pourrions nous être entendus, d'ici la mise en vigueur de la loi, avec l'ensemble de nos employés de notre univers à nous, du secteur public.

Quels étaient les effets? Quels sont les effets qu'on pourrait prévoir, si nous nous entendons avec tous nos employés ? mais évidemment pas avec les employés municipaux, ce ne sont pas nos employés ? et que, donc, ne subsisteraient, dans cette loi 102, que les dispositions s'appliquant aux municipalités? Question légitime, s'il en est. Et nous avons à nous pencher, évidemment, et nous aurons à le faire, si la motion est adoptée très prochainement, sur la façon d'approcher ce problème très, très précis.

On m'a également demandé, je dirais, des détails sur l'ensemble des conventions collectives qui étaient ainsi affectées. Je ne prétends pas que la question n'était pas légitime. Je crois qu'elle était tellement vaste, par ailleurs, qu'il était impossible d'y répondre aussi rapidement que la question pouvait laisser espérer, tout en ajoutant qu'il n'en demeure pas moins qu'on peut mettre en doute ? le terme est fort ? qu'on peut peut-être diverger'd'opinion sur l'opportunité, la pertinence qu'il y a de savoir combien de conventions collectives, quelles sont les dates d'échéance et le nombre d'employés de chaque unité syndicale de chaque municipalité ainsi visés. J'ai affirmé ? c'était la seule réponse que je pouvais donner en toute vérité, en toute clarté, séance tenante ? que toutes les conventions collectives étaient touchées dans toutes les municipalités, à charge pour elles, je dirais, sauf évidemment les cas où la municipalité ? et c'est sa décision ? décidait, par résolution, de se soustraire à l'application de la loi. (17 h 40)

J'ai demandé à mes gens de me fournir quelques-unes des réponses qui étaient accessibles plus facilement que d'autres en réponse à des questions de l'Opposition, que ce soit celles du député de Labelle... Le député de Joliette a également évoqué des questions extrêmement précises sur les mandats que le Conseil du trésor aurait donnés depuis 6 mois à différentes instances. J'ai des débuts de réponse à ce sujet-là. J'ai fait faire l'inventaire de ces activités. On pourra voir si c'est encore pertinent tout à l'heure, mais nous ne tentons pas de cacher quoi que ce soit, M. le Président. Je crois qu'il a été extrêmement clair, comme il l'a été dans le dossier de la fiscalité municipale, comme il l'a été... Enfin, dans tous les dossiers que le gouvernement a à mettre de l'avant, les exigences de transparence, d'évidence que le Vérificateur général, le contrôleur des finances, l'Assemblée nationale, ses commissions et notre tradition parlementaire exigent, font en sorte qu'on ne peut pas prétendre que le gouvernement cache ce qu'il est en train de faire. il n'y a rien de plus clair depuis le 23 mars que ce qu'on est en train de faire: on est en train de requérir de nos employés une contribution qui passe par un gel des conditions de salaire au titre des taux et échelles et qui passe par l'identification et évidemment la réalisation d'un gain de 1 % de la masse salariale. c'est de ça qu'on veut discuter, et je dirais que ce que nous avons proposé est un signe de toute l'importance que nous accordons comme gouvernement à la réalisation de cet objectif. ça m'apparaît important. si c'était en doute, là... j'espère que ce n'est plus en doute, l'importance qu'on accorde à la réalisation de cet objectif. là où il y a beaucoup de place, et je le redis à nos employés, c'est que nous devons, à un moment donné... et là, il y a tellement de place ? dans le fond, c'est là que la négociation devrait se dérouler ? à l'intérieur de cet objectif-là, il y a tellement de place dans les conventions collectives qu'on a négociées depuis 25 ans pour aménager le travail, la prestation des services d'une façon plus souple, plus légère, plus efficace, qu'on peut facilement réaliser 1 %. moi, je ne doute pas une minute et on nous l'a dit, notamment la ftq, qui prétend avoir, avec raison, une grosse expérience d'études de productivité du travail, notamment dans le secteur privé, qu'il y a probablement plus que 1 % à réaliser. il y a très probablement plus que 1 % d'économie à réaliser dans l'organisation du travail en modifiant des habitudes, en modifiant des rigidités, en se débarrassant de certaines rigidités qu'il y a dans les conventions collectives et dans les règles d'organisation du travail. s'il y a plus que 1 %, ça devrait être un détail, là, de dire: garantissez-nous donc le 1 %, parce que c'est important. convenons donc qu'on va le faire, le 1 %. garantissons-le. entendons-nous sur une façon de le garantir et l'excédent sera distribuable et partageable. c'est presque jusque là que les instances syndicales sont allées. je dis presque, mais c'est un gros presque. c'est un gros presque, la différence entre garantir et ne pas garantir. c'est presque la différence entre? j'allais dire entre rouge et bleu ? noir et blanc.

C'est vraiment là qu'il y avait une difficulté, je dirais, là, d'asseoir solidement notre connaissance mutuelle, notre reconnaissance mutuelle de la situation financière. C'est ça qu'on cherche et pas plus. On n'essaie pas d'attacher les instances syndicales à des défis qu'on ne pourra jamais relever. On n'essaie pas de prétendre non plus de notre côté que, dans le fond, il n'y a rien là, puis si on ne réalise pas 171 000 000 $ d'économie, ce n'est pas grave. C'est très grave. C'est très grave, parce que c'est un manquement à la parole que l'on tente de donner aux contribuables, à savoir qu'on va trouver le moyen de ne pas dépenser plus que ce qu'ils ont les moyens de dépenser, sachant que déjà on emprunte 4 000 000 000 $. Écoutez, par dessus les 60 000 000 000 $ qui existent, ça commence à faire! Et on est dans une situation où on se trouve à augmenter encore davantage la pression sur le service de la dette de

l'année suivante.

Alors, il faut bien comprendre que moi, j'ai toujours été disposé à faciliter aux instances syndicales, je dirais, la construction, la formulation d'un discours qui permet de s'engager dans une oeuvre qui est celle de tous les Québécois, de faire en sorte qu'on redonne la santé aux finances publiques, parce que c'est le seul outil de développement qu'on a, c'est la seule façon dont le gouvernement peut intervenir, si ses finances publiques sont saines, auprès des clientèles que je mentionnais tout à l'heure et que la crise économique non seulement n'épargne pas, mais dont elle complique l'existence encore davantage. Alors, moi, je suis prêt à demander aux instances syndicales à se pencher sur une formulation qui leur permette, d'une façon convaincante, de présenter une position qui rejoint ces objectifs-là, qui ne sont pas les objectifs du gouvernement du Québec, du ministre des Finances, du premier ministre, du président du Conseil du trésor ou de qui que ce soit. Ce n'est pas personnel, cette affaire-là. On n'est pas ici pour notre affaire; on est ici pour l'affaire de tout le monde.

Il y a pour le gouvernement une responsabilité qu'on a à assumer et qu'on formule de la façon suivante: Nous devons vivre selon nos moyens. Nous devons, afin d'y arriver, requérir de tout le monde une contribution raisonnable, et la contribution raisonnable de nos employés, c'est telle chose. Maintenant, venons voir ensemble comment nous pouvons identifier, pour respecter nos préoccupations respectives, les voies qui nous permettent d'atteindre au moins 1 % ? apparemment c'est un détail, je suis profondément convaincu de ça, moi aussi ? et comment, donc, nous pourrions négocier le partage de cet excédent de 1 %. Il m'apparaît, M. le Président, que c'est quelque chose, c'est un effort que, quant à moi, j'ai consenti depuis 3 mois. Ce à quoi je me serais attendu de nos partenaires, c'est qu'ils nous permettent également de soutenir, de façon convaincante, qu'on peut s'engager ensemble dans cette voie-là.

Il me semble que ça manque encore, cette reconnaissance que le gouvernement agit non pas pour son propre compte, mais pour le compte de l'ensemble des citoyens, y compris nos employés. C'est ce bout-là qui manque, il me semble, M. le Président. Ce n'est pas comme dans une entreprise privée où il y a, d'un côté, l'employeur ? souvent l'actionnaire, si c'est une petite entreprise ou une moyenne entreprise ? et, de l'autre côté, les travailleurs et leurs intérêts. On pourrait penser que leurs intérêts divergent. Il n'en reste pas moins qu'il faut, et pour l'actionnaire, et pour les travailleurs, que l'entreprise subsiste afin qu'elle produise son rendement pour tout le monde, soit pour l'employeur, le cadre, le propriétaire, le directeur, les employés, ou qui que ce soit. Et, là aussi, il y a un partenariat.

Mais c'est la même chose dans le cas du gouvernement. Nous, on n'agit pas comme si on était une entreprise privée qui essaie de balancer ses livres au détriment de ses clients, de ses fournisseurs ou de ses employés. On essaie de réaliser, à l'intérieur d'un cadre budgétaire extrêmement difficile, l'équilibre des revenus et des dépenses. Et, à l'intérieur des dépenses, il y a les choix des services qu'on octroie à nos concitoyens qui nous le demandent et qui s'attendent à ça, mais il faut le faire, là, à la hauteur de nos capacités de payer.

Alors, je me serais attendu, moi, à cette compréhension-là de la part de nos employés. Je comprends qu'ils disent que c'est presque de la négation de la négociation. C'est là qu'on arrive au coeur du problème. On a vu les macarons, on a vu les affiches, enfin, on a entendu les discours, les chansons, les poèmes qui font rimer «trésor» avec «dehors» ? c'est une des rares fois où on m'appelle «trésor». Incidemment, ça, je le souligne, M. le Président, c'est lorsque les membres des syndicats m'illustrent, à leur façon, ce qu'ils pensent de moi par les temps qui courent. Bon. Moi, je veux bien. Ça fait partie des échanges qu'on a de toutes sortes de façons. Mais, on a, ensemble, à régler ces problèmes-là, et il me semble qu'on a beaucoup de matière à négociation à l'intérieur, je dirais, d'une patinoire qui est pas mal plus petite qu'elle était, pas mal plus restreinte. Ça, c'est comme ça. Ça, c'est comme ça, mais c'est la réalité. Qu'est-ce que vous voulez qu'on y fasse? Et moi, je prétends que la patinoire est dessinée à partir de la situation économique, avec ses répercussions sur les finances publiques, et qu'en conséquence on doit tenir compte du fait qu'on ne peut pas agrandir la patinoire parce qu'on doit geler ? vous me permettrez le jeu de mots, en parlant de gel et de patinoire ? on doit geler pour 2 ans le niveau de rémunération dans les taux et échelles et on doit trouver une économie de 1 %. Et c'est là-dessus, là, c'est sur ce plancher-là qu'on doit évoluer ensemble. (17 h 50)

II me semble qu'il y a de la place pour la négociation. On doit assurer, nous, aux contribuables qu'on va être capable de réaliser ces équilibres financiers. C'est pour ça qu'il y a un projet de loi, c'est pour ça que ça presse. C'est aussi simple que ça. On est disposé, on l'a dit hier, à retarder la mise en vigueur de la loi de 90 jours, pour qu'on continue à discuter de ces choses-là. Je peux comprendre que, dans le discours syndical traditionnel, ça veut dire qu'on nie la négociation, qu'il y a une épée de Damoclès et que, s'ils ne s'entendent pas... Bien oui, bien oui, les circonstances sont comme ça. On en est là, et le geste qu'on peut poser, c'est de dire que d'ici 3 mois il me semble qu'on a assez le temps de s'entendre sur ce que veut dire l'équilibre des finances publiques, la contribution qu'on requiert de tout le monde et la façon de réaliser cette contribution raisonnable.

M. le Président, c'est la raison pour laquelle nous avons amené le projet de loi. C'est la raison pour laquelle nous en avons parlé tout à l'heure. Il y a, selon nous, urgence. C'est la raison pour laquelle nous avons cette mention de suspension des règles. J'ai traité un peu plus tôt de certains discours qui avaient eu cours et qui m'avaient amené, je vous le dis bien franchement, à trouver totalement inutile et futile l'exercice de la com-

mission plénière. Il s'agit ?je ne les citerai pas, j'en ai distribué des exemplaires ? de se remémorer les propos de députés ? au singulier! ? à la toute fin, jeudi soir, de la commission plénière. C'est pour cette raison, c'est en raison de ce discours... Ce n'est pas la seule raison, mais c'est une des raisons qui m'ont amené, moi, à suggérer au leader que vraiment ça ne donnait rien de passer des heures en commission plénière et d'en arriver...

M. Chevrette: Ce n'est pas sérieux.

M. Johnson: Bien, écoutez, on aura beau dire que ce n'est pas sérieux, moi, je viens témoigner des raisons qui m'ont amené à suggérer...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): S'il vous plaît! S'il vous plaît!

M. Johnson: ...cette mesure. Et je dis ici, devant tout le monde, que certains discours ? au singulier! ? que j'ai entendus m'ont profondément convaincu. D'abord, ils m'ont profondément outré et scandalisé sur ce que certains députés pensent des fonctionnaires. Moi, je trouve que ça n'avait pas sa place...

Des voix: Ah!

M. Johnson: ...et, deuxièmement, ça ne contribuait absolument en rien à faire avancer le dossier que de s'échanger des propos comme ceux-là. Alors, c'est une question personnelle. Peut-être que, de l'autre côté, on trouve que ça faisait avancer le dossier. C'est possible. On diverge là-dessus.

Des voix: ...

M. Johnson: Le député de Pointe-aux-Trembles, qui n'était pas ici, d'ailleurs, aurait intérêt à regarder la cassette du discours dont je parle, à 23 h 40, jeudi dernier...

Une voix: ...

M. Johnson: En parlant de bouffon, il va en voir un vrai là, s'il regarde cette cassette-là, et il va comprendre... Je le mets au défi d'être convaincu que c'était une intervention constructive. Bon. À partir de ce moment-là, je me dis: Si c'est sur cette patinoire-là qu'on joue, avec des joueurs habillés de même, la partie ne finira jamais, M. le Président!

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le leader adjoint et président du Conseil du trésor. M. le député de Joliette, je vous cède la parole.

M. Guy Chevrette M. Chevrette: Merci. M. le Président, vous venez d'entendre un discours d'à peu près 40 minutes, dont la principale justification, c'est les propos d'un député, à 23 h 40, un soir, qui déclenchent une urgence nationale d'adopter un projet de loi pour mettre fin à des conventions collectives qui finissent le 30 juin prochain, avec une clause de reconduction automatique. C'est le président du Conseil du trésor qui ne semble pas savoir ça. Toutes les conventions sont en vigueur jusqu'au 30 juin ? dans le domaine de l'enseignement, en tout cas; ça, j'en suis sûr ? avec une clause de reconduction, c'est-à-dire que ça demeure ce que c'est, avec 3 mois de promesse du premier ministre pour négocier. Il dit: Voilà, il y a de la place pour de la négociation. C'est ce qu'il dit. M. le Président. S'il y a place pour la négociation et si on donne 3 mois pour ce faire, pourquoi on se précipite à lever toutes les règles dans cette Chambre et qu'on veut voter un projet de loi?

Parce que l'État, ce n'est pas un employeur normal. Vous savez que tout employeur, M. le Président, il se bâtit un rapport de force entre un employeur du secteur privé et son syndicat. Mais l'État-employeur a 2 chapeaux. Quand ça ne marche pas avec son chapeau d'État-employeur, il utilise son chapeau de législateur. Lui, avant même d'utiliser son chapeau d'État-employeur pour négocier, il se coiffe d'avance de son chapeau d'État-législateur et il dit: II y a de la place pour de la négociation.

Franchement, là, je ne sais pas où il a fait son cours de relations de travail, mais c'est dérisoire, c'est ridicule, M. le Président, d'avoir un tel discours. C'est clair. Voyons! Déjà le rapport de force est disproportionné entre un État et ses employés. Déjà, tout le monde sait ça. Il me semble que, si c'est vrai, s'ils ont de la bonne foi, s'ils sont sérieux, s'ils croient véritablement qu'ils peuvent en arriver à une entente d'une convention collective d'ici 3 mois, pourquoi voter la loi d'abord? Pourquoi suspendre les règles du jeu ici, à l'Assemblée nationale? Pourquoi ne pas attendre, de bonne foi, ce que donneront les négociations, avant de se servir de son chapeau de législateur? C'est ça, fondamentalement, les règles du jeu présentement en cause, M. le Président.

Bien sûr qu'on va profiter du fait qu'il y a eu un budget épouvantable, puis, là, on veut faire miroiter aux citoyens du Québec que ça pourrait être dangereux de signer des contrats. Mais, s'il a aussi confiance que ça dans les négociations, au point de retarder de 3 mois, pourquoi ne pas donner libre cours aux règles du jeu normales des relations de travail? Je suis convaincu que l'ex-président du NPD-Québec devrait comprendre ça, M. le Président, parce que, à mon point de vue, ce qu'on fait là, aujourd'hui, ce n'est vraiment pas sérieux.

Le président du Conseil du trésor, qui reçoit, avec son premier ministre, tous les leaders syndicaux, puis qui dit: Oui, c'est correct, là, on va se donner 3 mois de négociation. Le lendemain, tu arrives en Chambre, tu suspends toutes les règles du jeu, et tu dis: loi! M. le Président, c'est rire du monde. C'est rire du monde, d'autant plus que le premier ministre, il faut le dire, là,

au cas où il y aurait des citoyens qui ne le sauraient pas, le premier ministre a un pouvoir de convoquer cette Chambre n'importe quand, en plein mois de juillet, août, septembre. Mais qu'il laisse la chance aux négociations d'avoir lieu. C'est ça qu'on vous demande. C'est ça que vous demande le front commun.

M. le Président, je n'ai jamais vu, je l'ai dit tantôt, dans ma plaidoirie sur la recevabilité, avec la notion d'urgence qui, à sa face même, est folle comme balai... Là, je disais, M. le Président, que je n'ai jamais vu autant de bonne foi, moi, personnellement. Quand j'ai entendu la présidente de la FIIQ dire: Je suis prête à négocier 2 ans de gel, puis on va parler de réaménagement, avez-vous déjà vu plus que ça, vous autres? J'ai même reçu une lettre que je lisais, là, qui va probablement la placer dans l'embarras, à part de ça, d'avoir fait ça sans consulter sa base ? 2 ans de gel, disait-ellle.

Pourquoi vous imposez une loi? Vous avez déjà dans le sac, avec ce groupe-là, ce que vous vouliez. Pourquoi ne pas essayer de faire la même chose avec les enseignants du Québec, négocier? J'écoutais Mme Pagé, ce midi, à l'émission «Mongrain de sel», qui expliquait ce qu'elle voulait. Elle parlait de réaménagement de travail. Mais donnez la chance de bonne foi.

Pourquoi, à ce moment-là, vous servir de votre chapeau de légistaleur avant même de passer le test de la bonne foi des négociations? C'est parce que vous n'y croyez pas, M. le Président. Il y a des mots, qui ne sont pas parlementaires, qui pourraient être utilisés. Je ne les utiliserai pas.

Une voix: Ah oui! Ah oui!

M. Chevrette: Quand on ne croit pas à quelque chose, on fait exactement ce que le président du Conseil du trésor fait, présentement: place à la négociation, mais je passe ma loi avant.

M. le Président, franchement, vous n'avez pas là un modèle de grande transparence parce que, quand on est transparent et qu'on fait un discours, et qu'on croit à la valeur de la négociation, on subit l'épreuve avant de se servir de la matraque. C'est ça, fondamentalement, que vous faites et, à mon point de vue, M. le Président, c'est incorrect, c'est injustifiable, puis je continuerai à 20 heures, M. le Président, de dire ce que je pense de ça.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, comme vous venez de l'indiquer, M. le leader de l'Opposition officielle, il est 18 heures. Je vous rappelle, M. le leader adjoint du gouvernement, que votre formation dispose encore d'un temps d'intervention de 17 minutes. Je suspends donc les travaux jusqu'à 20 heures ce soir.

(Suspension de la séance à 17 h 59)

(Reprise à 20 h 7)

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Mmes et MM. les députés, si vous voulez vous asseoir, s'il vous plaît.

Nous continuons le débat sur la motion de suspension de certaines règles de procédure, prévue aux articles 182 et 183 de notre règlement. Je cède la parole à M. le député de Joliette, leader de l'Opposition officielle. Je vous rappelle, M. le député, que votre formation dispose d'un temps de parole de 50 minutes. Allez-y, M. le député de Joliette.

M. Chevrette: Merci. M. le Président, avant le souper, je disais combien c'était important, la bonne foi dans les relations de travail, et je considère qu'avec ce qui se passe présentement, autant pour les parlementaires que face au monde syndiqué de la fonction publique et parapublique, la bonne foi n'y est pas.

Comment peut-on faire croire, M. le Président, avec de grands discours, que nous avons confiance en la négociation, que nous avons confiance que, dans les 3 mois qui vont suivre, on va en arriver à des ententes négociées avec les différents secteurs de la fonction publique, les différents corps syndiqués de la fonction publique, M. le Président, et en même temps, avoir tellement confiance, au point qu'on enlève, qu'on suspend à peu près tous les droits, à cette Assemblée nationale, M. le Président, qu'on s'empresse, qu'on invoque l'urgence pour voter une législation qui démontre carrément le contraire d'une bonne foi, M. le Président?

En relations de travail, M. le Président, une des clés, c'est justement la confiance. C'est justement la compréhension de part et d'autre. C'est justement la transparence. Le ministre dit: Oui, mais nous avons des objectifs, nous avons des paramètres. Bien oui. Je pense qu'ils sont connus. Déjà, les groupes syndiqués, M. le Président, ont fait connaître des propositions, ont avancé des propositions. Il y en a même qui sont allés au-delà de toute attente, je pense, et ils sont assujettis à une loi. (20 h 10)

Quelle est la marge de manoeuvre pour négocier, M. le Président? Expliquez-moi comment on pourra négocier correctement, comment on pourra vraiment faire des échanges corrects. Chaque fois qu'il va y avoir un raidissement, un peu, à la table de négociation ? et Dieu sait si ça arrive souvent ? là, ils vont sortir la loi 102. On va la montrer aux syndiqués. C'est de la provocation. Ce n'est pas un élément qui va faciliter, qui va aider la négociation. C'est précisément cette arme, que se donne le ministre, qui va raidir les positions, qui va provoquer des réactions, parce que c'est un geste purement provocateur, M. le Président.

Pourquoi cet empressement? Pourquoi cette hâte? Je disais, avant le souper, que toutes les conventions collectives ? plusieurs, en tout cas, si ce n'est pas toutes ? viennent à échéance le 30 juin prochain. D'abord, au moment où on se parle, on n'est pas devant une situation où il y a des problèmes, M. le Président, qui exigent l'intervention de l'État. On a des conventions collectives de travail qui sont en renouvellement. Est-ce qu'il y a de quoi qui justifie, à ce stade-ci, l'intervention de l'État? L'État lui-même, par la voix de son premier

ministre, dit: Qu'on se donne 3 mois pour négocier. Quelle est l'urgence et quels sont les motifs qui, pour le moment, sont cachés, en tout cas, qui font en sorte qu'on demande à l'État d'intervenir?

Il me semble, M. le Président, que l'intervention de l'État est beaucoup plus au moment où la santé publique est en cause, où les services sont en cause, où l'année scolaire, par exemple, de nos jeunes serait en cause, où, dans les hôpitaux, les patients pourraient être affectés dans la qualité des services qu'ils reçoivent. Ce n'est pas ça. Au moment où on se parle, il y a du monde qui veut négocier, puis il y a un gouvernement qui dit qu'il veut négocier, et il passe une loi pour mettre fin aux négociations, tout en disant qu'il donne 3 mois pour négocier. Voyons! Pensez-y 30 secondes, là. Où est la bonne foi dans cela? Où est véritablement la transparence? Qu'est-ce qu'on cherche? Qu'est-ce qu'on vise, M. le Président?

Il y a une évolution sans précédent dans le monde du travail, présentement, au Québec. On a eu des centrales syndicales qui ont signé des conventions de 5 ans, dernièrement, dans l'entreprise privée. On n'a jamais vu dans le passé autant de leaders syndicaux des secteurs public et parapublic tendre la main au gouvernement et dire: Voici l'effort que nous sommes prêts à consentir immédiatement, là, avant même de commencer à parler de réaménagement de travail, avant même de discuter là où on pourrait faire certaines récupérations ou des gains de productivité, pour avoir le langage du président du Conseil du trésor. Parce que «gain de productivité», c'est comme s'il n'y avait pas d'humain, là. Tout est signe de piastre.

Mais où est-ce qu'elle est, la bonne foi, à ce moment-là? Si le gouvernement n'a pas l'intention réelle, arrêtée, de sanctionner, de promulguer une loi ou de la mettre en application avant le mois de septembre prochain, c'est quoi? C'est quoi qui est recherché, M. le Président, si ce n'est pas la provocation, si ce n'est pas carrément, M. le Président, de leur dire: Écoutez, vous pourrez bien vous amuser, moi, j'ai mon petit papier, puis, quand je serai tanné de vous parler, je ne vous parlerai plus parce que j'ai ma loi. C'est ça, fondamentalement. Un peu comme l'attitude du président du Conseil du trésor. On le disait cet après-midi, ça dénote bien l'attitude arrogante. Après 14 heures de débat, il a décidé que c'en était fait, qu'on ne discutait plus d'une loi.

M. le Président, ce gouvernement en est rendu à 7 motions de suspension des règles en trois ans et demi. Il en est rendu à 10 motions de clôture sur les débats depuis trois ans et demi. Et, un record, du jamais vu dans cette Chambre: il y a eu une motion de clôture pour 27 projets de loi d'une seule claque ? avec le député de Portneuf de l'époque. M. le Président, on n'est pas dans une dictature pour clore le bec à tout le monde sur l'ensemble des projets de loi, voyons! Moi, j'ai vu cette formation, cette artillerie lourde rouge, au moment où ils occupaient les banquettes de l'Opposition, durant la loi 101; on les a entendus pendant 200 heures et plus, en plein mois de juillet, par une chaleur épouvantable, au salon rouge, déconner sans arrêt sur une loi qui avait apporté la paix linguistique au Québec; 200 et quelques heures à écouter des âneries, mais c'était le fruit de la démocratie pour se donner un projet de loi qui amenait au Québec cette paix sociale sur le plan linguistique.

Après 14 heures, «sa majesté, le président du Conseil du trésor», directement arrivé de la haute finance québécoise, en a assez et il veut négocier de bonne foi. Il veut une entente pour le mois de septembre. Il flanque une loi ici, suspend toutes les règles... M. le Président, je l'écoutais essayer de justifier son projet de loi, cet après-midi. Il n'en a pas parlé du tout, il parlait de la décote. Il parlait de la décote québécoise, comme si c'est rien que ça qui compte pour lui, alors qu'il pourrait peut-être trouver, précisément dans une négociation de bonne foi, des aménagements de travail et des gains de productivité ? pour utiliser son langage ? qui permettent au Québec de vivre à l'intérieur de ses édifices de santé, à l'intérieur de ses écoles, un climat de relations du travail normal.

M. le Président, les relations de travail, pour en avoir fait pendant une bonne quinzaine d'années, c'est aussi des relations humaines. Je vous dis que, dans la fonction publique québécoise, c'est encore plus dur de faire des relations de travail que dans n'importe quel secteur du monde du travail, parce que, quand on a affaire à un patron dans l'entreprise privée, on discute avec, on a un rapport de force avec. On peut carrément s'opposer, avoir des stratégies qui font en sorte qu'il y a un équilibre dans le rapport de force. Mais, dans la fonction publique, à faire ce qu'on fait depuis des années ? puis je n'essaierai pas d'être partisan, je dirai depuis 1982 ? on a complètement débalancé les rapports de force. On a perdu toute imagination, à part ça, au pouvoir. Quand on manque d'argent sur le plan budgétaire, la seule source ou le seul endroit où on va chercher de l'argent, c'est dans des ponctions salariales. Comme s'il n'y avait pas des choses à corriger pour aller chercher de l'argent! Comme s'il n'y avait pas des débats de fond, des débats de société à faire pour voir si on ne doit pas conserver l'essentiel! Puis, peut-être, au lieu de couper systématiquement dans tous les programmes, comme on le fait pour indisposer tout le monde et faire en sorte que l'ensemble de nos programmes deviennent des programmes qui clochent à tous les points de vue... Bien non, on coupe partout, on indispose tout le monde plutôt que de faire un débat de société, puis dire: Écoutez, on serait peut-être mieux de faire un débat sur ce qui est essentiel par rapport à ce qui est accessoire. Qu'est-ce qu'on veut se payer parce que c'est essentiel? Mais non, M. le Président. On dirait qu'un coup au gouvernement on n'a plus le droit d'être imaginatif, on n'a plus le droit d'être inventif, on n'a plus le droit d'être créatif. Ah non! On coupe ou on gèle, sous l'étiquette des gains de productivité.

On en a vu une belle expérience avec les médecins, des gains de productivité, en cette Chambre. Le

ministre, président du Conseil du trésor, et le ministre de la Santé, qu'est-ce qu'ils ont fait avec les médecins spécialistes puis les médecins? Imaginez-vous qu'on a mis la main sur un papier. Ils avaient décidé qu'ils pourraient donner une trentaine de millions aux médecins. Mais ils avaient dit aux médecins: Trouvez-nous des endroits où il faut couper. Comme par hasard, ils ont eu une liste; puis, les mammographies pour détecter le cancer du sein, ça, c'était coupé. Ah! Le ministre a dit: Non, non, je ne le ferai pas, quand il a vu qu'on se levait, de ce côté-ci de la Chambre, pour dire: Ça n'a pas de bon sens. Ce n'est pas un choix de société, ça. Depuis quand dit-on à un groupe: Trouvez-moi de l'argent, je vais vous en donner? Ce n'est pas ça, une discussion.

Ce n'est pas ça que Lorraine Pagé, de la CEQ, propose à la ministre de l'Éducation. Elle lui dit qu'elle est prête à discuter de bonne foi sur des aménagements de travail. Dans le domaine de la santé, qu'est-ce que Mme Lavallée a dit? Oui, on est prêt à des choses majeures. On comprend la situation économique du Québec. On comprend la situation budgétaire, mais on veut négocier. On ne veut pas avoir une loi au-dessus de notre tête. Qu'est-ce que Fernand Daoust a dit, ce midi? Ils n'ont pas l'air de gens enragés qui veulent faire la grève. Au contraire, je sais jusqu'à quel point, à cause des déboires depuis 1982, il ne doit pas être facile, dans le monde du travail, dans le monde du secteur public, de mobiliser des gens, parce qu'ils se disent: Ça ne nous donne rien. Si on enclenche un moyen de pression, il va mettre son chapeau de législateur, il va nous flanquer une loi avec des amendes épouvantables allant jusqu'à la prison. Je me rappelle de ça. M. le Président, le gouvernement libéral, là-dessus, aura beau reprocher n'importe quoi. Chaque gouvernement fait ses erreurs, puis je reconnais ça, moi. Mais un gouvernement, par exemple, qui dit qu'il veut négocier, un gouvernement qui dit qu'il est de bonne foi, il a donc l'obligation d'avoir une cohérence entre son discours et ses actions.

Je répète que je ne comprends pas que ce gouvernement-là ne veuille pas donner la chance... Parce que c'est une chance unique qu'ils ont de voir autant d'offres de négociation sincères. Moi, je ne l'ai jamais vu, je n'en ai jamais vu... Je trouve qu'il n'y a jamais eu autant de bonne volonté, qu'il n'y a jamais eu autant le désir d'en arriver à quelque chose de négocié, mais pas négocié exclusivement en chiffres. (20 h 20)

II y a des problèmes majeurs en éducation, M. le Président. Je recontre des dizaines et des dizaines d'enseignants, puis, avec le type de société dans lequel on vit présentement, ce n'est pas facile, enseigner. Pourquoi ne pas se prêter à une négociation, à ce moment-là, sur l'aménagement du travail dans l'enseignement? Qu'est-ce que ça vous ôte, ça? Mais, donnez donc de la bonne foi. Faites-le dans un cadre où il n'y a pas d'épée de Damoclès sur la tête. Vous aurez toujours le recours, comme État-législateur, de convoquer la Chambre n'importe quel temps, n'importe quel temps...

Qu'est-ce que ça vous donne de passer une loi qui va faire faire du chantage tout l'été, alors que vous pourriez profiter précisément de cette période estivale, dans un cadre beaucoup plus calme, pour négocier correctement les contrats collectifs de travail? Moi, je ne comprends pas. C'est de la mauvaise foi, M. le Président, j'en suis sûr. J'allais dire un autre mot, puis je me suis tourné la langue sept fois. Mais je vous dis que ça sonne faux, ça sonne faux. C'est de parler des deux côtés de la bouche en même temps, puis il n'y en a pas gros, au Québec, qui peuvent faire ça: avoir le discours à gauche, puis le geste à droite; le verbe à gauche et le geste à droite. C'est un peu ça qui se passe présentement, M. le Président. Il n'y aucune sincérité dans la volonté de négocier.

Et ce qui me dépasse encore davantage, c'est que le premier ministre lui-même, qui en a vécu, pourtant, des conflits, il devrait avoir appris qu'on ne provoque pas inutilement... M. le Président, voulez-vous demander au député de Richelieu et au député de Verdun, s'ils veulent parler, de demander la parole?

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, je m'adresse à tous les parlementaires de cette Chambre, à ma gauche comme à ma droite... Non, non, M. le député de Richelieu. C'est les prescriptions qu'on retrouve à l'article 32 qui s'appliquent. Celui qui intervient doit pouvoir le faire en toute quiétude. Question de règlement, M. le député de Richelieu?

M. Khelfa: Oui.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, allez-y. Sur quoi...

M. Khelfa: M. le Président, s'il n'a pas autre chose à dire, qu'il...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Non, non. Ce n'est pas une question de règlement. Allez-y, M. le député de Joliette.

M. Chevrette: L'article 32 s'applique très bien dans son cas. Donc, M. le Président, je voudrais... Parce que je voudrais donner la chance à mon collègue de Labelle et à mon collègue d'Abitibi-Ouest également de dire quelques mots sur le projet de loi. C'est de la fumisterie, M. le Président, ce qu'on nous présente. Une motion qui suspend à peu près tous les pouvoirs des parlementaires, qui suspend l'effet de tout notre règlement ? 2, 3, 4, 5 pages de suspension de droits ? pour pouvoir passer une loi dite urgente! Dite urgente!

Et ça a été intéressant de voir le président du Conseil du trésor, toujours très froid, très glacial, se lever et invoquer l'urgence. Urgence, quand les conventions collectives ne sont pas échues! Urgence, quand le premier ministre dit qu'il donne 3 mois pour négocier! Urgence, M. le Président, parce qu'ils se battent la trappe depuis je ne sais pas combien de mois pour dire

qu'ils veulent négocier de bonne foi! Urgence, quand les syndiqués, les leaders syndicaux leur disent à tour de bras qu'ils sont prêts à faire des compromis majeurs! Urgence, parce qu'ils veulent négocier autre chose que des conditions salariales, parce qu'il y a des problèmes importants à régler dans nos écoles, dans nos centres hospitaliers! Urgence d'une négociation de bonne foi! Et, après ça, on dira: II y a une crise de confiance entre les élus politiques et la population.

Seulement, continuez à faire un paquet de conne-ries comme celles qu'on fait présentement, et la crise, non seulement elle va continuer mais elle va augmenter, M. le Président. Ce n'est pas surprenant qu'il y en ait qui soient tannés, qui soient dégoûtés devant ce genre de gestes de mauvaise foi. On se tait si on ne peut pas être cohérent avec nos discours. Quand on dit qu'on veut négocier, puis dans un contexte où il n'y a même pas de pression, en plein coeur d'été, pourquoi passe-t-on une loi pour provoquer? Pourquoi passe-t-on une loi pour narguer ceux et celles qui, difficilement, essaient de montrer qu'ils ont des pouvoirs présentement, et qu'ils veulent les faire valoir?

Moi, je ne comprends pas ça. Je vous avoue que ça me dépasse! Ça me dépasse! Il y a sûrement quelque chose de caché en-dessous de ça. Et l'histoire nous le dira, ce qu'il y a de caché en-dessous de ça. Ça peut être aussi bien les préparatifs d'une élection hâtive, et on ne le dit pas. Ça peut être aussi bien, M. le Président, une entourloupette qu'on nous fera au cours de l'été ou au début de l'automne. Ça peut être n'importe quoi, mais ça ne s'explique pas par la logique. Ça ne s'explique pas avec des arguments de raison. Ça ne s'explique pas du tout quand on se dit homme ou femme de bonne foi. Dans un contexte de relations de travail, tu laisses jouer tous les mécanismes prévus au Code du travail, et, en cas d'impasse, le seul employeur qui a des pouvoirs disproportionnés par rapport aux autres employeurs, c'est l'employeur qui est l'État. Puis, là, il se sert de son statut de législateur. Mais, tant et aussi longtemps, M. le Président, qu'on ne connaîtra pas les vrais motifs, je ne serais même pas surpris que tout ça sous-tende également une course à la chefferie. Merci, M. le Président.

Une voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le député de Joliette, leader de l'Opposition officielle. M. le député de Verdun, il reste à votre formation une période de 17 minutes.

M. Henri-François Gautrin

M. Gautrin: Je ne les prendrai pas, pour laisser la chance à d'autres d'intervenir, mais il me faut répondre au député de Joliette.

M. le Président, la base de tout l'esprit des relations de travail, c'est la bonne foi. La base de l'esprit des relations de travail, c'est la bonne foi. Y a-t-il meil- leure bonne foi, à l'heure actuelle, de la part du gouvernement, que de dire exactement dans quelle situation financière nous sommes? y a-t-il meilleure bonne foi, de la part du gouvernement, que de ne pas laisser croire que les finances publiques peuvent permettre de faire n'importe quoi, que de dire la vérité, et dire la vérité au point de l'inscrire même dans la loi? c'est ça, la loi 102. la loi 102 le dit: voici, nous sommes de bonne foi, mais nous ne pouvons pas aller plus loin que telle situation. nous ne pouvons pas aller plus loin que demander que l'ensemble de la gestion des conventions collectives soit diminué de 1 %.

Permettez-moi, M. le Président, de rappeler pourquoi, brièvement. Le taux de croissance des dépenses, depuis ces dernières années, a toujours été supérieur au taux de croissance des revenus. Nous devons ? c'est dans le budget, actuellement ? être en mesure de réduire à la fois les dépenses et soutenir aussi les augmentations de revenus, la ponction fiscale, ce qu'on a pris dans la poche des Québécois. De bonne foi et de la meilleure foi qu'on ne peut pas dire, on délimite clairement la patinoire ? je reprends les expressions, actuellement, du président du Conseil du trésor ? on dit: C'est dans ces limites-là que nous pouvons négocier. Nous ne pouvons pas aller plus loin. Nous ne pouvons pas faire autre chose, non pas parce qu'on ne le veut pas, mais parce qu'on ne peut pas. Parce qu'on voudrait peut-être faire autre chose, mais les conditions financières, actuellement, de l'État du Québec nous placent dans cette situation.

M. le Président, n'y a-t-il pas geste de meilleure bonne foi, à l'heure actuelle, que de dire: Voici les paramètres, voici les frontières, voici la partie intangible, non franchissable que la responsabilité que nous avons des finances publiques et du bien-être de l'ensemble du Québec ne nous permet pas de franchir? Nous allons même jusqu'à l'inscrire dans la loi pour bien faire en sorte de bien exprimer que ces barrières ne sont pas franchissables. C'est ça actuellement la loi 102, M. le Président.

Il ne s'agit pas de remettre en question le principe des négociations. Pas vrai. Ce n'est pas vrai. Il s'agit réellement de bien préciser, compte tenu de l'état des finances publiques, compte tenu de la situation dans laquelle se trouvent actuellement les finances publiques de l'État, compte tenu de la limite que nous pouvons prendre dans la poche de nos citoyens en augmentant la ponction fiscale, compte tenu de ces limites-là... Et nous avons déjà demandé ? et le député de Labelle l'a rappelé avec brio ? un effort important à nos concitoyens dans le dernier budget. (20 h 30)

M. le Président, la loi 102 est un autre élément qui s'ajoute, à l'heure actuelle, à l'effort que fait ce gouvernement pour équilibrer les finances publiques. D'un côté, nous avons, dans le budget, demandé un effort extrêmement dur à l'ensemble des Québécois, mais, de l'autre côté, nous voulons actuellement être en mesure de réduire les dépenses publiques. On ne peut

pas arriver à une réduction des dépenses publiques, lorsque l'on sait que la majeure partie des dépenses se trouve être des dépenses d'ordre salarial, si nous ne fixons pas, au début, dans la loi, les limites de la négociation.

Qu'est-ce que dit, à l'heure actuelle, la loi 102? La loi 102 va clairement fixer non pas la totalité des conventions collectives, mais les balises, ce «plus loin» dans lequel nous ne pouvons pas aller. Nous précisons clairement les limites, actuellement, du champ de la négociation. Nous balisons le champ de la négociation. M. le Président, y a-t-il meilleure bonne foi que ne pas laisser croire des choses qui n'existent pas, et dire: Réellement, nous ne pouvons pas aller plus loin, nous ne pouvons pas faire plus? C'est là, les limites, à l'heure actuelle, que l'État, compte tenu de la situation financière de l'État... C'est les limites où nous pouvons aller.

M. le Président, je voudrais vous le rappeler. C'est un geste réellement de bonne foi, à l'intérieur des négociations, d'avoir le courage de baliser clairement les limites dans lesquelles les finances publiques nous permettent d'aller. Ne laissons pas croire aux gens, ne laissons pas imaginer à la population que nous pouvons donner des choses que nous n'avons pas. Et c'est avec de la toute honnêteté, à l'heure actuelle, que la loi 102 est présentée pour baliser réellement l'espace dans lequel les négociations peuvent avoir lieu.

Deuxième question, M. le Président, parce que nous sommes dans une motion, à l'heure actuelle, pour suspendre les règles. Y a-t-il urgence? Y a-t-il urgence? C'est la question qu'on a devant nous. M. le Président, cette Chambre, statutairement, doit ajourner au plus tard le 23 juin. Pensons-nous réellement, compte tenu de l'Opposition, et je la comprends... Et c'est le rôle de l'Opposition de jouer ce jeu. Pensons-nous réellement que, sans suspension des règles, la loi 102 pourrait traverser l'étude article par article?

C'est la question que nous avons à nous poser. C'est la question que nous avons à nous poser. Le leader adjoint et président du Conseil du trésor, compte tenu de la manière dont la loi avait évolué, en commission plénière, parce qu'elle avait été débattue article par article, en commission plénière, compte tenu de la vitesse et de la progression, compte tenu aussi des travaux qui sont devant nous... Et nous ne nous cachons pas non plus, nous avons aussi un énorme projet de loi, la loi 86, qui touche l'affichage, qui devra aussi être adopté avant la fin de cette session. Donc, compte tenu des travaux parlementaires que nous avons devant nous, est-ce que, logiquement, nous pensons pouvoir atteindre la fin, l'étude article par article de la loi 102? La réponse est non.

Une voix: Non.

M. Gautrin: La réponse est non. Et, parce que la réponse est non, M. le Président, à ce moment-là, ça justifie la motion du président du Conseil du trésor et leader adjoint du gouvernement de suspendre les règles pour être en mesure de passer cette loi, qui est importante dans le sens où elle va démontrer la bonne foi du gouvernement dans les négociations, c'est-à-dire limiter et positionner clairement les balises entre lesquelles le gouvernement peut négocier.

Il est clair qu'il nous faut faire en sorte que le taux de dépenses des conventions collectives puisse être réduit de 1 %, si on veut satisfaire les engagements que nous avons pris, à l'intérieur du budget, et c'est strictement de bonne foi qu'on propose actuellement cette loi 102, pour bien baliser dans quel cadre, actuellement, le gouvernement peut agir dans les négociations. Ne pas le faire serait induire en erreur les gens aux tables de négociation, leur laisser croire qu'on peut obtenir beaucoup plus qu'ils pourraient obtenir, leur laisser négocier, à ce moment-là, des choses que nous ne pouvons pas donner. Actuellement, la loi va préciser, M. le Président, réellement le champ de négociation, et c'est, de la part du gouvernement, un geste de bonne foi et un geste d'approche honnête aux négociations, M. le Président.

C'est dans ce cadre-là, M. le Président, que je pense, premièrement, qu'il est nécessaire de passer cette motion de suspension des règles pour pouvoir passer, le plus rapidement possible et, certainement avant l'ajournement d'été, la loi 102.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le député de Verdun.

Alors, M. le député de Joliette.

M. Chevrette: Est-ce qu'en vertu de 213... Une voix: Bien sûr.

M. Chevrette: ...le député me permettrait de lui poser une question?

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Vous acceptez de répondre à une question, M. le député...

M. Gautrin: Bien sûr, et avec plaisir.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Courte question, courte réponse.

M. Chevrette: Oui, M. le Président. Est-ce que le député de...

M. Gautrin: Verdun. Oui. M. Chevrette: Pardon? M. Gautrin: Verdun.

M. Chevrette: M. le Président, est-ce que le député de Verdun...

M. Garon: La bataille de Verdun.

M. Chevrette: Je m'excuse. Il peut s'asseoir. Je vais prendre le temps de poser ma question.

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): S'il vous plaît! S'il vous plaît! S'il vous plaît! Allez-y, allez-y.

M. Chevrette: Je voudrais lui demander, M. le Président, si, selon lui, la bonne foi serait plus évidente s'il n'y avait pas d'épée de Damoclès au-dessus de la tête?

Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le député de Verdun.

M. Gautrin: M. le Président, je répète, à l'heure actuelle, que la bonne foi, de la part du gouvernement, dans la négociation, c'est de dire exactement ce que nous pouvons donner, les limites hors desquelles nous ne pouvons pas aller sur le plan budgétaire. Et c'est exactement un geste de bonne foi de la part de ce gouvernement de proposer la loi 102.

M. Garon: Selon 213, M. le Président, j'aimerais poser une question également au député de Verdun.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Est-ce que vous acceptez de répondre à une autre question?

M. Gautrin: M. le Président, c'est avec le plus grand des plaisirs et le plus vif des agréments.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci. Allez-y, M. le député de Lévis.

M. Garon: M. le Président, est-ce que le député de Verdun ne pense pas qu'il serait préférable de siéger pendant le mois de juillet et le mois d'août plutôt que de faire un bâillon?

M. Gautrin: M. le Président, je pense que les bâillons ne sont jamais souhaitables. Par contre, la manière dont s'est faite l'étude, pendant la période en commission plénière, nous amène à penser que, sans bâillon, il y aurait difficulté de passer cette loi 102. Et je regrette que nous soyons obligés de passer un tel bâillon.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le député de Verdun.

Alors, je vais maintenant céder la parole à M. le député de Labelle. Il reste à votre formation, M. le député de Labelle, 31 minutes. Allez-y.

M. Jacques Léonard M. Léonard: Merci, M. le Président. Je viens d'entendre le député de Verdun nous faire part de ses élucubrations quant à la loi 102. Je pense qu'il a plaidé la bonne foi, mais, s'il est de bonne foi, il a l'esprit confus.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Léonard: Parce que, au fond, il plaide l'urgence quant à la situation financière, mais nous avons bien l'impression qu'il n'a pas compris ce dont il s'agissait ici, de quelle motion l'on débattait. Parce que l'on débat d'une motion de suspension des règles, et c'est là-dessus qu'on invoque l'urgence et pas du tout sur la question de l'urgence des finances de l'État.

M. le Président, parlons-en de cette question d'urgence. Le gouvernement, en la personne du ministre responsable de l'Administration publique, président du Conseil du trésor, a déposé ses crédits le 24 mars dernier en annonçant qu'il déposerait un projet de loi ? je pense qu'il en a parlé aussi la veille, le 23 mars ? et puis il s'est affairé à l'écrire, si je comprends bien, mais il a déposé son projet de loi le 13 mai. Nous n'en avons pas entendu parler en Chambre jusqu'au 9 juin, où nous avons, à ce moment-là, commencé l'étude en deuxième lecture, l'étude du principe. Cette étude de principe, ce discours de deuxième lecture a duré 2 jours: le 9 et le 10 juin. De nouveau, M. le Président, après, le jeudi, nous avons commencé l'étude article par article, une journée de temps, jeudi dernier, le 10 juin, et, depuis jeudi dernier, il ne s'est rien passé. Vendredi, on n'a convoqué ni la commission plénière de l'Assemblée nationale ni aucune commission parlementaire. Ni vendredi, ni lundi, ni mardi, ni aujourd'hui, jusqu'à cet après-midi où, là, on a décidé non pas d'imposer un bâillon mais de suspendre les règles de l'Assemblée nationale. (20 h 40)

M. le Président, plus que cela, je voudrais simplement rappeler à l'attention de ceux qui m'écoutent que les conventions collectives dont il s'agit ne sont pas encore expirées. Elles viennent à échéance, pour la plupart, le 30 juin, et pour beaucoup d'autres, plus tard, en particulier dans le monde municipal où il y a toutes espèces d'échéances d'ici à 3 ans. Et l'on plaide urgence! M. le Président, on plaide urgence!

Plus que ça, le premier ministre, hier, dans une rencontre avec les représentants du front commun a dit qu'il donnait jusqu'au 15 septembre pour s'entendre dans les négociations, et qu'il n'appliquerait pas la loi avant le 15 septembre. La notion d'urgence qui a été évoquée pour amener cette motion de suspension des règles ne tient pas. En réalité, le mot «urgence» est interprété, ou il faut l'interpréter, comme étant le désir du gouvernement de procéder maintenant. Le mot «urgence» n'a plus aucun sens dans le règlement. Au fond, on devrait le remplacer par: «à la demande du gouvernement, les règles sont suspendues». Or, ce n'est pas ça que l'on fait. Ce serait gênant parce que, au fond, on revient à l'esprit de nos institutions. Il y a le

pouvoir exécutif, représenté par le gouvernement, et il y a l'Assemblée nationale composée des députés. L'Assemblée nationale est un pouvoir et le pouvoir suprême dans une société démocratique, au-dessus de l'exécutif qui, lui, applique les lois, exécute les mandats de l'Assemblée nationale...

Une voix: C'est vrai.

M. Léonard: ...alors que l'Assemblée nationale légifère par les députés élus démocratiquement dans les 125 circonscriptions du Québec.

Or, qu'est-ce que fait le gouvernement par la motion qu'il propose? Il suspend les règles et, en quelque sorte, dans une négociation qui fait à peine commencer ? j'y reviendrai ? il utilise l'Assemblée nationale. Il la soumet, en quelque sorte, il la domestique, il l'asservit pour remplir des mandats d'exécutif, pour faire son travail.

Je pense que, finalement, ce qu'il faut retenir, c'est que l'Assemblée nationale se met aux caprices de l'exécutif. Il faut dire que c'est aux caprices de l'exécutif. C'est inouï de voir que, dans une situation où il n'y a pas urgence ? il n'y a pas urgence ? alors que, sur le plan des finances publiques, s'il y a urgence, ça a déjà été démontré durant la commission sur les finances publiques, au mois de février, il n'y a rien de nouveau là-dedans. Mais cela peut simplement vouloir dire qu'il n'a pas réussi à convaincre la population de l'urgence, et qu'il procède de façon dictatoriale, à ce moment-ci. S'il n'a pas réussi, donc, à convaincre la population, finalement, il se retourne et demande à l'Assemblée nationale d'utiliser son pouvoir de législation pour exécuter des mandats qu'il a par l'Assemblée nationale.

En d'autres termes, c'est un déséquilibre fondamental dans nos institutions politiques, et je pense qu'il ne faut pas continuer dans ce sens. Je rappellerai que c'est une tendance fâcheuse que le gouvernement a prise. L'an dernier, alors que par une motion de suspension des règles de 2 heures, il a adopté 28 projets de loi d'un coup sec, il a fait la même chose à Noël, et il le refait maintenant.

M. le Président, plus que cela. Il y a au règlement la possibilité d'imposer un bâillon sur un projet de loi, où là, il doit invoquer des motifs d'urgence et de sécurité publique. Il doit prouver urgence et sécurité publique. Pourquoi ne l'a-t-il pas fait? Il est incapable, comme gouvernement, à ce moment-ci, de plaider l'urgence. Elle n'existe pas et il l'utilise dans la motion de suspension des règles parce qu'il n'a pas à la prouver. Mais dans une motion de bâillon, il devrait la prouver. Dans une motion de bâillon, il pourrait aussi invoquer la sécurité publique. La sécurité publique n'est pas menacée à ce stade-ci. À ma connaissance, il n'y a pas de grève. S'il y a eu quelques manifestations aujourd'hui, c'est justement à cause de l'abus de pouvoir qu'il commet à ce moment-ci, et qui est dénoncé par ceux qui sont visés par le projet de loi. Je pense, M. le Président, que, dans ce contexte, le gouvernement ne pouvant plaider ni la sécurité publique ni l'urgence, a décidé de procéder par la suspension des règles, chose qui se passe dans les républiques de bananes, faut-il le dire! Nous en sommes rendus là, M. le Président. Nous en sommes rendus là.

J'entendais, tout à l'heure le député de Verdun dire qu'en commission plénière le débat avait duré beaucoup. D'abord, c'était 1 journée, et il y a des remarques préliminaires, il y a des motions dont on n'a pas abusé. Nous en étions rendus à l'article 4 au bout d'une seule journée de commission plénière. Et le gouvernement, s'il voulait limiter les droits de parole, avait aussi le choix d'aller en commission parlementaire, ce qu'il n'a pas fait; en commission parlementaire ordinaire, ce qu'il n'a pas fait. En venant ici, en commission plénière, il donnait le droit à tous ses députés de parler et à tous nos députés de parler. C'est lui qui a choisi cette voie. Mais il pouvait encore revenir en arrière le lendemain et nous amener en commission parlementaire, ce qu'il n'a pas fait.

Je dois dire aussi que, ce que j'en pense, c'est que, finalement, le président du Conseil du trésor, en mal de course à la chefferie, pensait utiliser l'Assemblée nationale, en pleine télévision, pour essayer d'éteindre les ardeurs. Oui. Mais lorsque nous avons commencé l'étude article par article, on s'est très bien aperçu ? puis on pourrait revoir les cassettes de l'enregistrement de nos débats ? que le président du Conseil du trésor n'avait pas réponse à toutes les questions de l'Opposition, en particulier sur l'article 4 que nous avons étudié, où, finalement, il est devenu clair qu'il n'avait pas pensé à la réponse aux questions que nous lui posions. Lorsque nous lui avons prouvé que la loi ne s'appliquait pas en même temps pour tous mais qu'elle s'appliquait de façon différente dans le temps et dans l'espace, ce qui amenait des implications très différentes pour chacun des assujettis à la loi, M. le Président, le président du Conseil du trésor, à partir de là, n'est pas revenu ici. Il aurait eu l'occasion, tout le long de la semaine, vendredi, lundi, mardi, de revenir ici ou en commission parlementaire. Et il invoque une déclaration du député d'Ungava ? qui, d'ailleurs, l'a faite dans un contexte très précis ? il l'invoque et, là-dessus, nous avons raison de douter de sa bonne foi, surtout de la façon dont il l'a ramenée ici.

M. le Président, je voudrais dire une chose, en terminant. Le président du Conseil du trésor agit en paresseux. Il n'a pas livré sa marchandise lors du dépôt des crédits. Il ne s'en est pris qu'aux employés de l'État, qu'à la fonction publique, point, à la ligne, et il n'a pas recentré l'action de l'État, rééquilibré, réorganisé l'État. Loin de là. Et là il a raté son mandat. Alors, en paresseux, il se dit que dans une journée, dans une motion de suspension des règles, il va régler son problème. C'est ça, être paresseux. C'est de procéder par abus de pouvoir, en utilisant, en asservissant le pouvoir législatif de l'Assemblée nationale pour se donner une force de négociation par rapport à des syndiqués qui, justement, voulaient négocier.

Parce que, faut-il le rappeler, à ce stade-ci, M. le Président, la Fédération des infirmières et infirmiers du Québec a accepté le principe d'un gel salarial de 2 ans. On n'est pas loin, et les négociations commencent. Le front commun a accepté le principe d'un gel de 1 an et a accepté d'examiner des façons de faire pour sauver des coûts. La FAS, la Fédération dont la position est la plus dure, entre guillements, à ce stade-ci, demande simplement l'indexation; elle ne demande pas un partage de l'augmentation de la productivité au Québec; à l'heure actuelle, elle ne demande que l'indexation. Et nous savons que ceux de la FAS sont les syndiqués les moins bien payés, ceux qui ont 25 000 $ et moins à l'heure actuelle. Ce sont eux, à l'heure actuelle, que l'on touche le plus durement. M. le Président, les syndiqués, à l'heure actuelle, étaient prêts à négocier, avaient commencé la négociation et ils ont déclaré qu'ils voulaient négocier. À tel point que le premier ministre leur a dit qu'il était d'accord pour négocier avec eux encore jusqu'au 15 septembre. Et qu'est-ce que nous faisons? Nous passons une motion de suspension des règles pour donner tout pouvoir au président du Conseil du trésor. (20 h 50)

Je pense que ce que l'on remet en cause, ici, sur le fond de la question, finalement, c'est le droit à la négociation, c'est le Code du travail, en particulier, en ce qui concerne tous les employés municipaux, c'est l'autonomie de gestion d'un bon nombre d'unités de notre réseau des affaires sociales, de notre réseau de la santé, de l'éducation et surtout, surtout, l'autonomie de gestion des municipalités. M. le Président, il n'y a pas d'urgence, c'est un faux-fuyant invoqué par le gouvernement. C'est un asservissement de l'Assemblée nationale que l'on fait à l'heure actuelle pour les caprices du gouvernement et la paresse du président du Conseil du trésor.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le député de Drummond, je vous cède la parole. En votre qualité de député indépendant, vous avez droit à une intervention de 10 minutes.

M. Jean-Guy St-Roch

M. St-Roch: Oui. Merci, M. le Président. M. le Président, nous en sommes maintenant à la deuxième étape de cette motion de suspension des règles. J'ai eu l'occasion, sur la recevabilité, de vous exprimer mon point de vue sur l'usurpation que l'exécutif fait aujourd'hui du législatif. Mais un député doit prendre la première occasion pour corriger ses propos ou ce qu'on a dit de lui.

M. le Président, le président du Conseil du trésor, dans la seule réplique qu'il a osé faire à l'argumentation que j'avais déposée, a dit, cet après-midi, que le député de Drummond avait toujours fait avec empressement et avec jouissance l'application et le vote sur le bâillon. Je lui demanderais de regarder 1992, il va s'apercevoir que, lorsque le député de Drummond a voté sur des mesures de suspension ou de bâillon, c'était, à son sens, lorsqu'il y avait réellement urgence, dont, entre autres, lorsqu'il y a eu, à un moment donné, une grève dans le transport public.

Mais, M. le Président, nous en sommes, aujourd'hui, comme j'ai mentionné aussi brièvement cet après-midi, à une procédure, une terminaison qui nous amène à la loi 102. Mais ça a débuté par une consultation publique, M. le Président, et je vous rappelle qu'à ce moment-là, en toute transparence, encore, on m'a refusé le droit de parole à la commission, ce qui est un précédent, parce que dans nos traditions parlementaires, règle générale, lorsqu'un député demande à participer à une commission parlementaire, qui était l'urgence d'assainir les finances publiques... Je pense qu'il était normal que je représente mes citoyens. Mais j'ai compris, un peu plus tard, M. le Président, le 21 avril 1993, lorsqu'on m'a fait parvenir un document sous la signature du président du Conseil du trésor, qui était une synthèse ? du jamais vu ? une synthèse des travaux qui s'étaient passés à la commission parlementaire.

En conclusion, M. le Président, on comprendra pourquoi on est ici à suspendre les règles, ce soir. Parce que dans la conclusion, voyez-vous, on donne, règle générale, les objectifs qu'on voulait obtenir, puis on les met par ordre d'importance. Ça se veut dans la logique des choses. Alors, le président du Conseil du trésor, usurpant encore les pouvoirs de la commission parlementaire, nous disait ceci: En lançant une consultation générale sur les finances publiques, le gouvernement avait essentiellement pour objectif de sensibiliser la population à la situation des finances publiques, de faire connaître les orientations budgétaires qu'il privilégie et de recueillir des commentaires à l'égard de ces orientations.

M. le Président, ça a découlé à un projet de loi 102 qu'on a là. Mais lorsque je regarde la synthèse qui a été produite dans ce document-là, des recommandations, on nous dit, en exemple: La typologie et nombre de recommandations, la catégorie de recommandations relatives au revenu et à la fiscalité, 19 recommandations sur 151, diminuer le déficit; 22, réduire ou ne pas augmenter le fardeau fiscal; 21, réviser la fiscalité et la réglementation pour permettre une plus forte croissance économique; 21, améliorer la perception des revenus et éliminer l'évasion fiscale, travail au noir, taxe sur le tabac, par exemple, etc. Alors, on est rendus, aujourd'hui, M. le Président... Moi, lorsque je regarde la situation économique du Québec, oui, c'est vrai qu'on est dans une situation qui est alarmante. Oui, c'est vrai qu'on a un déficit. Oui, c'est vrai qu'il faut donner des coups de barre.

Mais, M. le Président, j'aimerais vous soumettre avec humilité, que... Ayant fait aussi dans ma vie privée, et ayant eu la chance de participer à beaucoup de négociations de conventions collectives, à voir utiliser le procédé que je vois ce soir, ça aurait été le plus beau moyen de me conduire, en Ferrari, à 300 km à l'heure, dans des sérieuses de difficultés, pour ne pas dire une

grève, M. le Président. Les méthodes employées me rappellent le jeune administrateur des années 1960, M. le Président, ce que je remarquais, moi, de l'attitude. Le patron arrivait, il déposait sur la table, et il disait: Voici le cadre des négociations. Voici où je veux aller. Si vous acceptez, c'est très bien. On va négocier les modalités, les cosmétiques de la négociation, mais pas plus.

M. le Président, une vraie consultation se serait dû, dès le départ, au mois de janvier, de dire: On va faire des états généraux au Québec. On va s'asseoir avec nos partenaires, qui sont le monde municipal, qui sont le monde de tous nos employés de la fonction publique et parapublique, M. le Président, et on va dresser un bilan économique du Québec. On va dresser un bilan de nos difficultés. On va dresser un bilan des situations et des problématiques, telles que nous aurons à les vivre devant la mondialisation et devant les différents traités de libre-échange et de l'ALENA.

Ça, c'est la première chose qu'on aurait dû faire, M. le Président, une conscientisation mutuelle, chacun de nous, en tant que citoyens et citoyennes, quelles que soient nos tâches dans la société québécoise, et aller chercher ce consensus social. Après ça, M. le Président, on aurait pu dégager, ensemble, nous, les Québécois, dans un forum, dans un sommet, dans une commission parlementaire élargie ? je ne m'enfargerai pas dans les mots... aller chercher un grand consensus, et dire: Voici, pour les 5 prochaines années, ce à quoi, nous, on se doit de se limiter. Mais, M. le Président, pas simplement dans la fonction publique! Ne pas demander seulement à nos 400 000 travailleuses et travailleurs de tous les secteurs, de se serrer la ceinture et de dire: Bien, on va laisser libre cours à la négociation dans le secteur privé. Il aurait fallu que ce soit un consensus social important, majeur au Québec, qui aurait regroupé autant le côté privé que le côté public. On n'aurait pas retrouvé ça, M. le Président.

Dans cette réflexion, M. le Président, je me serais attendu qu'on voit notre rôle, ici, en tant que législateurs, de voir le poids de nos législations. Comment est-ce que ceci accroît la lourdeur de la bureaucratie! Comment est-ce que ceci accroît la lourdeur du fardeau fiscal, et les financements qui se transféreront à nos citoyens et nos citoyennes!

J'ai eu la chance, M. le Président, à moult reprises, de vous donner le nombre de législations auquel on est rendus. Je n'ai vu personne regarder, à l'heure actuelle, M. le Président, dans tout ce dédale-là, les effets des formulaires. J'ai eu l'occasion de dire qu'au ministère du Revenu, seulement, on est rendus à 4504 formulaires auxquels on a à faire face, nous les citoyens et les citoyennes. On peut en présumer, de la lourdeur, M. le Président. On n'a pas mis en pratique ce que prône, avec justesse, le ministre de l'Industrie et du Commerce, la qualité totale. De regarder, dans une gestion intégrée, toutes les problématiques, toutes les facettes, pour être capables, en tant que citoyens, en tant que groupes, en tant que composantes de la collectivité québécoise de faire notre effort, M. le Président.

Alors, on se retrouve, ce soir, encore là. On peut dire, dans notre jargon, si on veut être pointus, M. le Président, suspension des règles! Mais, suspension des règles égale bâillon. On est, encore ce soir, avec une usurpation du pouvoir législatif par l'exécutif. C'est à ça qu'on est rendus, M. le Président.

M. le Président, voulez-vous rappeler au ministre des Transports... s'il a quelque chose à dire, qu'il demande la parole. Je vais même lui laisser de mon temps de parole, M. le Président.

Article 32 pour Mme la députée de Mégantic-Compton, M. le Président. M. le Président...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Un instant! Un instant! M. le député de Drummond, il vous reste 4 minutes. Continuez votre intervention.

M. St-Roch: M. le Président, dans un contexte moderne de négociation, je me serais attendu, suite aux rencontres d'hier, à un geste qui se serait voulu, M. le Président, d'ouverture. De dire qu'on va traiter nos travailleuses et nos travailleurs de l'État en tant que partenaires de la collectivité québécoise, je me serais attendu, ce matin, moi, à une déclaration ministérielle de la personne qui aurait été apte à le faire, le président du Conseil du trésor ou le premier ministre, M. le Président, qui aurait dit à cette Chambre, ici: Voici, j'ai eu une rencontre avec nos partenaires du milieu syndical. Je me suis engagé à donner un second regard à la négociation, et j'annonce à cette assemblée que nous allons suspendre l'étude du projet de loi 102 pour une période de 3 mois, tel que je me suis entendu avec nos partenaires. (21 heures)

Je me serais attendu, aussi, M. le Président, de cette personne-là, qu'elle nous dise: Mais, n'oubliez pas une chose. En tant que porte-parole du gouvernement, j'ai toujours un recours d'utiliser le règlement de l'Assemblée nationale et de rappeler, de reconvoquer l'Assemblée nationale. Si nous ne pouvons pas en arriver à un consensus, à une négociation réglée en regard des grands objectifs qu'on s'est donnés en tant que gouvernement, on rappellera l'Assemblée nationale et, à ce moment-là, on ira avec un projet de loi qui sera bien balisé.

Est-ce que ça aurait été un précédent, M. le Président? On n'aurait pas créé de précédent, M. le Président. Le 30 août, on m'a rappelé, moi, ici, dans cette Chambre pour regarder encore, suite à une certaine négociation, un projet de loi où on a suspendu des règles, où on a balisé une intervention à ce moment-là. On est arrivés à la fin et on a agi en tant que parlementaires libres, M. le Président, voté pour ou voté contre, mais on a donné le point de vue en tant que représentants de nos citoyens et nos citoyennes.

C'est à ça que je me serais attendu d'un gouvernement qui est responsable. C'est à ça que je me serais attendu d'un gouvernement, M. le Président, qui veut développer un consensus social, au Québec, qui veut

développer l'harmonie et ne pas semer la zizanie comme on voit partout. On est rendus, M. le Président, que ce soit dans les régions éloignées et même dans les régions du coeur du Québec, que, nous, les députés, on est obligés de retenir nos gens, de dire: Non, il y a encore place à la négociation. Et vous le verrez bientôt, M. le ministre délégué aux Transports.

Des voix: Bien, voyons donc!

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, je demanderais à ceux et celles qui sont au salon bleu de permettre à celui qui parle, au moment où on se parle, le député de Drummond, de terminer son intervention. M. le député de Drummond, je vous invite à vous adresser à la présidence. Ça va peut-être éviter le brouhaha auquel on fait face, là, depuis 2, 3 minutes.

M. St-Roch: M. le Président...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Je vous demande de conclure. Il vous reste 1 minute.

M. St-Roch: M. le Président, dans la bonne conduite de nos travaux, j'aimerais rappeler l'article 32 du règlement, s'il vous plaît.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, j'imagine que vous faites référence au fait qu'il y a certains parlementaires qui ne sont pas à leur banquette. C'est une règle, c'est une règle. Alors, M. le député de Drummond, il vous reste 1 minute.

M. St-Roch: Merci, M. le Président. Donc, en conclusion, M. le Président, avec le peu de temps qu'il me reste, je voterai contre cette motion de suspension des règles, et j'espère, malgré les quolibets que j'ai entendus dans cette Assemblée ce soir... J'ai toujours représenté mes électeurs et mes électrices avec dignité, avec respect et donné ici, M. le Président, ce que mes gens attendent réellement d'un député.

J'oserais ce soir lancer un défi au président du Conseil du trésor, en conclusion, de nous déposer la consultation qui a été faite dans chacun des ministères pour arriver au consensus de 1 400 000 000 $, de nous dire qu'à partir du sous-ministre on est allé jusqu'à la personne de ligne qui donne les services lui demander son point de vue, lui demander de dire: Qu'est-ce que je peux faire, moi, en tant que travailleuse et travailleur de l'État, pour contribuer à assainir les finances publiques? Alors, si ça a été fait, qu'on nous le dépose. Qu'on nous dépose cette approche-là, parce que, avec les investigations que j'ai faites, M. le Président, dans quelque secteur que ce soit, on s'est aperçu que ça n'avait pas été consulté, que les 1 400 000 000 $ sont les mêmes qu'on m'a présentés en 1991 venant du secrétariat du Conseil exécutif.

Et, sur ceci, M. le Président, c'est encore un deuil pour la démocratie; j'oserais vous recommander de mettre les drapeaux en berne pour qu'on puisse célébrer ça dignement.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le député d'Abitibi-Ouest et leader adjoint de l'Opposition officielle, je vous cède la parole. Je vous rappelle que votre groupe parlementaire dispose encore de 17 minutes.

M. François Gendron

M. Gendron: Oui, M. le Président. Il serait peut-être bon de rappeler aux membres de cette Assemblée que la motion qui est devant nous, c'est une motion de suspension des règles, en vertu de 182 et 183, où manifestement ? on a eu à l'indiquer et à le prouver ? il y a urgence uniquement dans l'esprit du président du Conseil du trésor. Parce que, quand on a la prétention qu'il y a urgence, encore faudrait-il que ça soit constaté par d'autres intervenants pas mal moins partisans, pas mal moins aveuglés par toutes sortes de considérations, et on en fera la démonstration. On n'a pas besoin de moult exemples.

Le premier exemple, M. le Président, qu'on peut prendre: leur premier ministre lui-même a dit publiquement que cette loi-là entrerait en vigueur à la fin de septembre. Toute une urgence! Je n'ai pas vu ça souvent, moi, une urgence... Le feu est dans la cabane, la sécurité des gens est menacée, la situation est absolument invraisemblable au niveau de la santé et des services sociaux, des écoles, là, on pourrait, à certains égards, prétendre l'urgence. Mais il n'y a absolument rien là. Les ouvertures se multiplient de jour en jour, du côté des organisations syndicales, pour s'asseoir à la table de négociation, justement parce qu'ils comprennent la dure et froide réalité à laquelle ce gouvernement de comptables nous a amenés.

Il serait peut-être bon de regarder ce que d'autres ont exprimé comme point de vue pour en être arrivé là. Je donne juste un exemple, ici, dans un editorial de M. Bilodeau. Il disait: «Bien sûr que le gouvernement du Québec a la prétention d'assainir les finances publiques du Québec, lesquelles sont affectées à la fois par un endettement trop élevé ? personne ne met ça en cause ? une dure récession...» Personne ne met ça en cause. La récession dure et elle perdure parce qu'il n'y a pas de volonté politique de corriger quoi que ce soit. Mais il ajoutait également: «pour des motifs de gaspillage de fonds publics et, également, une mauvaise administration et gestion des ressources humaines».

Ça ne vous tente pas, là, les répondeurs automatiques, de regarder ce que le Vérificateur général a dit, dans une section assez étoffée, sur votre extraordinaire-ment belle gestion? Il y en a à pleines pages, des considérations pour arriver à conclure qu'il y a de la mauvaise gestion administrative. Si le ménage était fait convenablement et complètement, là, on pourrait peut-être tenter de comprendre un peu plus la réalité à laquelle le président du Conseil du trésor essaie de nous amener en pensant que le gouvernement a fait tous les

efforts. Ce n'est, au moins, pas le point de vue partagé par d'autres.

Est-ce qu'il s'arrêtait là, M. Bilodeau? Non. Il continuait: «Cela ne donne pas pour autant pleine crédibilité à la démarche du président du Conseil du trésor.» Ce serait peut-être important qu'on comprenne ce qu'il disait. «Elle en aurait davantage, disait-il, de crédibilité, s'il nous donnait la preuve que les budgets de services à la population ont priorité sur ceux de la bureaucratie, si, pour réaliser des gains de productivité, il avait quelque chose d'autre de plus sérieux à proposer que d'imposer 3 journées de congé sans solde à ses employés, s'il prenait la peine de faire une distinction entre les diverses catégories de salariés.» Ah bon! Il y en a d'autres qui pensent que ce n'est pas très courageux, que ce n'est pas très brillant, puis que ce n'est pas très imaginatif d'arriver: Nous autres, on est des supergestionnaires parce qu'on tire la ligne à la même place pour tout le monde sans aucune évaluation des particularités ou des spécificités de chacun. «Bref, si le président du Conseil du trésor démontrait à tous que sa volonté politique est empreinte autant de cohérence que de justice et que le gel salarial n'est pas simplement le moyen le plus facile ou le moins courageux de parvenir à ses fins.» D'autres collègues ont employé d'autres expressions avec raison. Ce n'est pas courageux, ce n'est pas bien, bien vaillant, ce n'est pas très imaginatif, et ça a été dit par d'autres.

Un de vos superadmirateurs, qui, constamment, écrit des éditoriaux presque toujours en votre faveur, l'éditorialiste de La Presse, Alain Dubuc, disait ceci, lorsque le président du Conseil du trésor a déposé son budget de dépenses: «Des choix comptables plutôt que des choix politiques.» Et il ajoutait ceci: «On découvre que l'offensive du président du Conseil du trésor est sans aucune imagination, sans aucune vision et, surtout, sans aucun courage.» Votre admirateur no 1, ça commence à faire! Ce n'est pas mince comme jugement.

Puis, ces gens-là, aujourd'hui, vont arriver en Chambre, parce qu'ils se sont traîné les savates, parce qu'ils n'ont pas assumé leurs responsabilités, parce qu'ils n'ont pas eu le courage d'amener les travaux là où ils devraient être amenés, puis, après une dizaine d'heures, le président du Conseil du trésor, du haut de sa grande sagesse, dit: C'est assez, c'est fini, les débats. Je n'ai plus de temps à perdre. C'est urgent. Ça devient prioritaire. Et, moi, tantôt, je l'écoutais très religieusement. Je suis un négociateur de bonne foi, disait-il. Tellement de bonne foi qu'il fixe complètement le cadre de négociation. Il dit d'avance: Je n'ai rien à négocier, puis venez vous asseoir, on va se parler. Venez vous asseoir, puis on va essayer de faire des arrangements, on va essayer de discuter de gains de productivité. (21 h 10)

J'ai eu l'occasion de le dire sur le fond: Un président du Conseil du trésor, aujourd'hui, ou quelque personne que ce soit qui prétend qu'on peut objectivement faire des gains de productivité en éducation, en 1993, elle vit sur une autre planète. Elle ne sait pas ce que c'est et elle ne connaît pas ce que c'est qu'enseigner en 1993, avec les familles éclatées, la crise des valeurs, 40 % de monoparentales, 40 % de chômage dans la plupart des régions du québec. allez-y, dans une classe. allez voir ce que c'est qu'enseigner en 1993. ce n'est pas parce que sa sainteté le président du conseil du trésor dirait en chambre: moi, je suis d'une justice extraordinaire parce que j'applique le même critère pour tout le monde; vous allez me livrer 1 % de gain de productivité; que ça s'applique ou pas, ça ne me regarde pas et je ne suis pas intéressé à voir ça; tout ce que je veux: vous allez me livrer 1 % de gain de productivité, qu'il va améliorer ce que j'appelle le climat des relations de travail dans certains secteurs de travail sans prendre la peine de regarder ce qui se passe. ce n'est pas bien, bien courageux, et ça a été mentionné par d'autres.

Le président du Conseil du trésor nous provoque aujourd'hui, M. le Président, en suspendant toutes les règles du parlementarisme, en disant: Dorénavant, il faut fermer toute discussion là-dessus. Laissez-moi ça entre les mains, et je donne 3 mois aux centrales syndicales pour en arriver à une conclusion. Si vraiment il était sérieux et que ça l'intéressait, les gains de productivité, il n'aurait pas été un présentateur ou un défenseur de cette motion de suspension des règles, alors que, comme je l'ai dit, il n'y a pas péril en la demeure. Il n'y a pas de manifestation à ce point dangereuse qui mette la vie, la santé et la sécurité des intervenants en cause. Et, au contraire, ces gens-là, comme je l'ai dit tantôt, ont multiplié les appels à une saine négociation, parce qu'ils sont conscients de la réalité. Mais ils sont tannés, en même temps, en étoile, d'être constamment les gens qui doivent faire à peu près à eux seuls les frais de votre mauvaise gestion et de votre mauvaise administration.

Mon collègue, le leader de l'Opposition, avait l'occasion de l'exprimer tantôt: ça fait une dizaine d'années qu'on demande des efforts à ces gens-là. Ça fait 10 ans que ces gens-là font des efforts, des sacrifices. On ne peut pas, M. le Président, d'une façon automatique, facile, sans courage, sans aucune imagination, dire: II y a une règle qui s'applique quand nos finances sont mal en point, c'est la règle universelle du gel des salaires systématique, sans nuances. Surtout quand on a l'insouciance et l'inconvenance d'y aller avec l'inclusion des employés municipaux, pour la première fois, sans aucune discussion, en instaurant un régime de droit nouveau, alors que ces gens-là ont fait combien de beaux discours sur la responsabilisation des intervenants municipaux. Ça vient vicier tout le mécanisme de confiance et de relations de travail.

Et il me semble que c'est faire accroire que, dorénavant, l'État devient FÉtat-employeur pour tout le Québec. Qui que ce soit au Québec, qui gagne sa croûte quelque part, devient sous la responsabilité de l'État, dans la logique de ce gouvernement-là. Les distinctions d'être un employé qui relève de la municipalité de Rouyn-Noranda, de Val-d'Or ou de Westmount, ça, on ne s'occupe pas de ça. On dit: Vous allez passer par la

même filière, même s'il y a des municipalités qui, étant justement responsables et conscientes des situations budgétaires difficiles, ont demandé des efforts à certains. D'autres n'en ont pas demandé. Ça appartient aux contribuables de l'endroit de sanctionner ces gens-là qui n'ont pas eu la responsabilité de s'acquitter de leurs responsabilités. Je ne trouve pas ça très courageux, non plus, de la part des municipalités de dire: Réglez notre problème; nous autres, on a échappé le bébé. Ce n'est pas très courageux. Ce n'est pas parce qu'ils le demandent qu'il faut leur dire oui. Parce que les lendemains qu'on se prépare vont être beaucoup plus difficiles, et les problèmes de relations de travail qu'on va créer auront des lendemains coûteux, M. le Président. Et c'est notre responsabilité de le faire valoir à ce moment-ci.

Y avait-il urgence? La réponse, c'est non. Y avait-il nécessité d'une motion de suspension de l'ensemble des règles qui nous régissent? Bien non, puisque, comme je l'ai mentionné tantôt, les ouvertures sont là. Et laissons donc la chance à une véritable négociation. Et la chance à une véritable négociation, je ne crois pas, surtout pas... J'entendais ce soir... J'espère que ce n'est pas vrai. On m'a affirmé ? ils étaient plusieurs pour le faire ? que le président du Conseil du trésor aurait même dit: Ce qu'on vous a dit, moi et le premier ministre, quant à l'application en septembre du projet de loi, c'est loin d'être sûr si vous n'êtes pas gentils. Si vous n'êtes pas gentils et que vous continuez à vous exprimer... Oui, aux nouvelles de 18 heures, à Radio-Canada, on a dit: Si vous n'êtes pas fins, si vous n'êtes pas gentils, ne vous surprenez pas, la loi va être en vigueur dès son adoption. Donc, ça veut dire probablement demain matin, contrairement à une parole donnée au niveau de l'ensemble de la nation québécoise par le premier ministre du Québec et le président du Conseil du trésor. Parce qu'il y aurait des gens, supposément, qui ne seraient pas fins, qui ne seraient pas contents de passer dans la moulinette sans aucun jugement. Puis ils nous l'ont fait savoir. Alors, je pense que ces gens-là ont raison. écoutez, quand ils ont fait savoir, entre autres, ce qu'on a dans les mains, là... on ne demande pas la lune. dans la santé et services sociaux, si on en vient aux faits, à un moment donné, 76 % des salariés de la santé et services sociaux sont des femmes, 50 % des employés travaillent à temps partiel, 81 % reçoivent une rémunération annuelle moyenne de 25 000 $. puis je vais entendre probablement la réplique du député de saguenay. je la connais d'avance, je connais sa disquette, je connais son disque: vous autres, en 1982... bien, c'est justement ce que je dis. depuis 1982 qu'on demande des sacrifices à ces gens-là. ils les ont faits. en 1993, quelqu'un qui a 25 000 $, pensez-vous que, avec le niveau de vie, avec vos multitudes de taxes, de droits, puis d'accises, puis 2 500 000 000$ par année.d'augmentation d'impôts de toutes sortes... 2 500 000 000$ par année d'augmentation d'impôts de toute nature! vous pensez qu'avec 25 000 $ par année, ces gens-là nagent dans l'allégresse? voyons donc! il me semble qu'un gouvernement qui aurait un minimum de considération aurait regardé cette réalité et aurait convenu qu'appliquer un gel des salaires uniforme, sans nuances, comme si tout le monde était au même niveau, c'était irresponsable, pas courageux et pas très imaginatif. Il me semble que...

Puis, je reviens à leur demande. Leur demande, ce n'était pas 8 % par année pour les 3 prochaines années, là; c'était l'IPC. Maintenez notre pouvoir d'achat. On comprend que vous êtes en difficulté, que vous êtes dans le trouble, que vous vous êtes mis dans le trouble, que vous ne savez pas gérer, balanceurs de colonnes! Puis, vous avez vécu 5, 6 ans de prospérité en plus. Puis, là, on est pires qu'on était au niveau du déficit. Toutes sortes d'acrobaties pour faire accroire que le déficit est alentour de 4 500 000 000 $ ou 5000 000 000 $, alors que ça va être plus 6000 000 000 $ ou 7 000 000 000 $. on le sait. le ministre des finances, pas une année depuis qu'il est ministre des finances, ne s'est pas trompé de milliards de dollars entre ses prévisions budgétaires versus la réalité observée quelques mois plus tard. toujours un écart énorme entre le beau discours, puis la réalité observable! pensez-vous que ça va aller mieux, là, avec tous les cris d'alarme dans les régions, avec à peu près personne qui travaille, avec ce gouvernement-là qui ne s'occupe à peu près de rien, qui laisse passer la parade, puis un premier ministre qui, depuis 3 ans, est absent parce qu'il a confié ça à dieu le père qui est de tous les dossiers, qui s'occupe à peu près de tout, puis qu'il n'y a pas de décisions qui se prennent? un gouvernement sans imagination, sans vision, sans aucun courage de regarder la réalité pour dire: non, le ménage n'est pas fait dans notre affaire, puis il y a du ménage à faire avant d'imposer un gel de salaires sans nuances.

Parce que, comme je l'ai mentionné tantôt, les centrales syndicales, puis même ceux qui ne sont pas dans les centrales syndicales sont conscients de la difficulté, puis de la récession, puis ils étaient prêts à discuter d'efforts importants pour convenir de vos difficultés. Mais ils auraient aimé ça avoir l'impression, à tout le moins, que le gouvernement avait la même sensibilité à la réalité. Puis, la meilleure façon de le démontrer, ce n'est sûrement pas avec une loi qui nous bâillonne, avec une loi qui plaide l'urgence alors qu'à sa face même il n'y a à peu près personne qui croit à votre urgence, même votre premier ministre. Le premier ministre n'y croit pas tellement quand il dit: Écoutez, oui, on va passer la loi, mais il n'est pas question de mettre ça en vigueur pour donner une chance à la négociation. Ça fait sérieux!

Alors que, vous le savez, vous, M. le Président, il y a un article du règlement qui dit qu'à n'importe quel temps le premier ministre aurait pu convoquer la Chambre si, après une réelle chance aux négociations, il y avait une impasse. Et ça, dans vos délais ? pas dans mon calendrier à moi, dans vos délais ? ça vous mène fin août, début septembre. Il ne doit pas y avoir de drame à ce que vous recommenciez à travailler après 2

mois de vacances, jamais je ne croirai! On sent que vous ne voulez pas travailler en juillet, c'est évident. Mais, au milieu d'août, ça ne devrait pas vous déranger de recommencer. Puis, au début de septembre, il ne devrait pas y avoir de drame à travailler. Alors, qu'est-ce qui empêchait que le premier ministre convoque la Chambre, puis dise: Bien, écoutez, là, on l'a essayée, la négociation sans épée de Damoclès, sans cadre de négociation restrictif, puis on n'arrive pas à conclure, et on a une politique budgétaire de comptables qui ne nous permet pas de changer quoi que ce soit, aucun iota de ce que nous prétendons être la chose à faire? (21 h 20)

Bon! Vous êtes gouvernement. À la limite, on peut comprendre ça que la chose à faire, selon vous, c'est un gel sans nuances où on met tout le monde dans le même panier, sans aucune distinction, que ça soit du temps partiel... Écoutez, quand c'est rendu qu'à des employés, des jeunes étudiants, cet été, là, une municipalité pourrait dire: Je ne peux pas te donner une cent d'augmentation. Raison: la «brillantitude» du président du Conseil du trésor. Gui, c'est vrai. Il a inclus les commissions de loisirs sous la responsabilité des villes, dans certaines municipalités, parce qu'il a dit: Ça s'applique aux employés municipaux. Je connais un certain nombre de villes dont la charte de leur commission de loisirs relève de la ville, puis les employés sont payés par la commission des loisirs, mais supervisée par la ville. Je lui ai posé la question: Est-ce que ces employés-là vont être assujettis? La réponse, c'est oui. Et là, il me semble que c'est faire preuve d'une espèce d'irresponsabilité chronique. Et c'est là qu'on est rendus, M. le Président...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Veuillez conclure, monsieur...

M. Gendron: ... ? on n'a plus le droit de s'exprimer, oui, vous voyez, alors, on va conclure ? dans une motion de bâillon, sous prétexte qu'il y a urgence, parce que ces messieurs auraient trouvé la solution immensément courageuse d'appliquer sans nuances une politique de même nature, alors que ces gens-là, depuis 10 ans, font des efforts et supportent, presque à eux seuls, l'incurie de la gestion de ce gouvernement-là.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, cette dernière intervention met fin à la période de temps allouée à la formation de l'Opposition officielle.

M. le député de Saguenay, vous terminez la période de temps mise à la disposition de votre propre formation. Vous avez droit à 8 minutes.

M. Ghislain Maltais

M. Maltais: Merci beaucoup, M. le Président. M. le Président, d'entrée de jeu, peut-être que le député d'Abitibi-Ouest trouvera que c'est un disque usé, mais il y a certaines choses qu'il faut ramener à l'ordre dans la vie. Nous avons écouté religieusement tous les discours qui se sont faits, soit en plénière, soit ce soir, et je vous avoue que j'ai été un peu surpris, M. le Président, parce que, pour la mémoire, il faut revenir en arrière un peu. je suis surpris de voir ces nouveaux anges défenseurs des syndicats, le visage angélique, qui parlent de courage, d'audace, de compréhension, eux-mêmes, m. le président, qui, à une certaine époque, non pas ont suspendu les règles de la chambre, non pas ont voté des lois iniques qui coupaient de 20 % non seulement les salariés, mais ceux qui étaient en fonds de pension... et, pour s'assurer que ces lois-là seraient appliquées, on avait suspendu les 2 chartes: la charte québécoise des libertés et la charte canadienne des libertés. ils ont fait ce que pierre elliott trudeau n'a jamais voulu faire au québec.

Et, aujourd'hui, avec de beaux sourires, de gré au Québec, ils viennent défendre leurs syndicats. Puis je vais en rappeler quelques-uns à l'ordre, M. le Président. Le député de Labelle qui, d'un visage angélique, avait voté à 2 mains, le député d'Abitibi-Ouest, la députée de Maisonneuve, qui était en voyage, qui avait démissionné en revenant, le député de Lévis, le député d'Arthabaska qui, aujourd'hui...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Un instant, M. le député de Saguenay!

M. Maltais: Oui, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Oui, Mme la députée.

Mme Harel: M. le Président, je voudrais faire une question de fait personnel. M. le Président, là, j'aimerais...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Non, non, non! Non, non! Mme la députée de Hochelaga-Maison-neuve, vous pouvez être en désaccord avec ce que le député de Saguenay peut dire, mais il ne s'agit pas là, ni d'une question de règlement, ni d'une question de fait personnel ou de privilège. Allez-y, M. le député de Saguenay.

M. Gendron: M. le Président...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le leader adjoint.

M. Gendron: Oui, ma collègue, j'ai entendu ce qu'elle a invoqué. Elle voulait soulever une question de règlement pour rectifier un propos erroné qui venait d'être exprimé. Un fait erroné, le député peut le corriger dès qu'il entend le fait qui ne correspond pas à la vérité des faits.

Une voix: Après. Après.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Après Tinter-

vention.

M. Gendron: Une question de fait personnel, ça, c'est prévu au règlement, et, ma collègue, c'est ce fait-là qu'elle voulait corriger, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, j'ai indiqué, et je me répète, que Mme la députée de Hoche-laga-Maisonneuve peut être en désaccord et peut même être en mesure de démontrer subséquemment que ce qu'a dit le député de Saguenay n'est pas exact, mais il ne s'agit pas là d'un fait qui lui permet d'intervenir comme elle veut le faire au moment où on se parle. M. le député de Saguenay, continuez votre intervention.

M. Maltais: Merci, M. le Président. Je ne savais pas que la vérité choquait à ce point-là. Le député de Masson a voté contre, M. le Président. Il était pour la loi 105, la loi 111, la suspension des chartes des libertés, puis il ne s'offusque pas de ça. Je ne vois pas pourquoi, aujourd'hui, tout à coup, vous êtes devenus des défenseurs... Le député de Lac-Saint-Jean, il a eu honte, il a voté pour. Il a payé son prix. Je ne vois pas pourquoi, aujourd'hui, vous vous offusquez de vous faire rappeler la vérité. La vérité, est-ce que ça choque à ce point-là? Est-ce que la vérité, c'est ça? Le député de Labelle fait accroire de dormir, puis il a raison, M. le Président. Moi, j'aurais honte à sa place, si j'avais posé un pareil geste. J'aurais honte. Je ne me serais jamais levé en Chambre pour parler comme il a parlé sur la mesure de suspension. Le député d'Abitibi-Ouest, il n'a pas de honte. M. le Président, dans l'Évangile, on appelait ça des pharisiens, ceux qui se «targuaient» dans les grands manteaux de la justice et qui poignardaient l'autre. M. le Président, on ne peut pas tolérer ça. Les mêmes personnes, les mêmes syndicats qui sont défendus, aujourd'hui, par ces gens-là, ça a été les premiers à les poignarder. Je les vois sourire, parce que ça leur rappelle leur tendre enfance.

M. le Président, on a accusé le président du Conseil du trésor, le gouvernement, de manquer de courage, d'être usé. Ça peut arriver qu'un gouvernement soit usé, temporairement.

Une voix: On le sait.

M. Maltais: M. le Président, ce qui est le pire, au Québec, c'est que l'Opposition est usée à la corde, usée à la corde. Ça, ce n'est pas acceptable, dans l'Assemblée nationale. Regardez-moi ces jeunes hommes et ces jeunes femmes, M. le Président, qui ont 10, 15 ans d'usure et qui, aujourd'hui, viennent faire les vierges offensées, à l'Assemblée nationale. M. le Président, moi, ce que je trouve aberrant, là-dedans, c'est qu'il y a encore des gens qui les croient.

Ce midi, je passais devant le parlement, je voyais des gens qui se baignaient dans une piscine, des gens qui affichaient CSN autour de la piscine. Bien, moi, dans mon comté, M. le Président, ma serveuse de res- taurant, celle qui travaille au restaurant du coin, celle qui livre l'essence, elles n'avaient pas les moyens d'aller se baigner, aujourd'hui. Celle qui travaille dans une ZEC, celle qui travaille dans un hôtel, elles n'avaient pas le moyen d'aller se baigner, aujourd'hui. Elles devaient travailler pour gagner leur croûte.

Et ces permanents syndicaux viennent faire une démonstration endossée par l'Opposition, aussi, M. le Président, indigne que celle qui a été faite cet après-midi, par les mêmes gens qui les ont coupés de salaire, qui ont suspendu les chartes des droits et libertés. M. le Président, en voilà 2 autres qui ont voté pour la suspension des chartes des droits et libertés. Et ces gens, aujourd'hui, viennent nous faire accroire qu'il y a 2 sortes de Québécois: ceux qui ont une sécurité d'emploi, qui ont un salaire raisonnable, et ceux qui doivent gagner leur croûte, qui n'ont pas le moyen d'aller se baigner devant le parlement, aujourd'hui. M. le Président, moi, c'est à eux que je pense, aujourd'hui, en particulier. Tant et aussi longtemps que l'Assemblée nationale aura la responsabilité des gens qui gagnent 10 000 $, 15 000 $ par année et 18 000 $, on ne viendra pas nous faire pleurer ici.

M. le Président, j'ai écouté attentivement le discours du député de Drummond, et tout ce que je pourrais dire, c'est que, M. le Président, on ne peut pas répondre à une chose qui n'est même pas une question.

M. le Président, en terminant, la loi 102 est une police d'assurance. Le président du Conseil du trésor, le premier ministre l'a dit. Une police d'assurance, on la prend avant que l'incendie ait passé dans la maison, avant que l'automobile ait eu un accident, et c'est ce qu'on fait avec la loi 102. Merci.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le député de Saguenay.

Cette dernière intervention met fin au débat sur la motion de suspension proposée par le leader adjoint du gouvernement. Alors, je vais mettre maintenant aux voix cette motion.

M. Gendron: Vote nominal, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Vote nominal. Qu'on appelle les députés! (21 h 30 - 21 h 39)

Le Vice-Président (M. Lefebvre): MM. les députés, s'il vous plaît! Alors, Mmes et MM. les députés, s'il vous plaît! S'il vous plaît!

Mise aux voix

Alors, je mets aux voix la motion du leader adjoint du gouvernement proposant la suspension de certaines règles de procédure, le tout en vertu des articles 182 et 183 de notre règlement.

Que ceux et celles qui sont en faveur de la motion du leader adjoint du gouvernement veuillent bien se lever, s'il vous plaît.

Le Secrétaire adjoint: M. Paradis (Brome-Missis-quoi), Mme Bacon (Chomedey), M. Ryan (Argenteuil), M. Dutil (Beauce-Sud), M. Côté (Rivière-du-Loup), M. Tremblay (Outremont), M. Savoie (Abitibi-Est), Mme Robic (Bourassa), M. Middlemiss (Pontiac), M. Johnson (Vaudreuil), M. Cusano (Viau), M. Picotte (Maskinon-gé), M. Ciaccia (Mont-Royal), M. Houde (Berthier), M. Maciocia (Viger), M. Maltais (Saguenay), M. Kehoe (Chapleau), Mme Trépanier (Dorion), M. Cannon (La Peltrie), M. Philibert (Trois-Rivières), M. Beaudin (Gaspé), Mme Dionne (Kamouraska-Témiscouata), M. Doyon (Louis-Hébert), Mme Bégin (Bellechasse), Mme Pelchat (Vachon), M. Marcil (Salaberry-Soulanges), M. Lemire (Saint-Maurice), M. Leclerc (Taschereau), M. Tremblay (Rimouski), M. Benoit (Orford), M. Williams (Nelligan), M. Richard (Nicolet-Yamaska), M. Char-bonneau (Saint-Jean), M. Gauvin (Montmagny-L'Islet), M. Gautrin (Verdun), M. Forget (Prévost), M. LeSage (Hull), M. Gobé (LaFontaine), Mme Hovington (Ma-tane), M. Lafrenière (Gatineau), M. Bergeron (Deux-Montagnes), M. Bordeleau (Acadie), Mme Boucher Bacon (Bourget), M. Parent (Sauvé), Mme Bélanger (Mé-gantic-Compton), M. Camden (Lotbinière), Mme Cardinal (Châteauguay), M. Després (Limoilou), Mme Loi-selle (Saint-Henri), M. Khelfa (Richelieu), M. Lafrance (Iberville), M. MacMillan (Papineau).

M. Cameron (Jacques-Cartier). (21 h 40)

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, que ceux et celles qui sont contre cette motion veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint: M. Parizeau (L'Assomption), M. Chevrette (Joliette), Mme Blackburn (Chicou-timi), M. Biais (Masson), Mme Marois (Taillon), M. Garon (Lévis), Mme Harel (Hochelaga-Maisonneuve), M. Jolivet (Laviolette), M. Baril (Arthabaska), Mme Ju-neau (Johnson), Mme Caron (Terrebonne), M. Dufour (Jonquière), M. Lazure (La Prairie), M. Gendron (Abi-tibi-Ouest), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Léonard (Labelle), Mme Vermette (Marie-Victorin), M. Paré (Shefford), M. Boulerice (Sainte-Marie?Saint-Jacques), M. Morin (Dubuc), M. Filion (Montmorency), M. Bois-clair (Gouin), M. Bourdon (Pointe-aux-Trembles), M. Trudel (Rouyn-Noranda?Témiscamingue), M. Beaulne (Bertrand), Mme Carrier-Perreault (Les Chutes-de-la-Chaudière), M. Bélanger (Anjou).

M. St-Roch (Drummond).

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Est-ce qu'il y a des abstentions? Aucune.

Le Secrétaire: pour: 53 contre: 28 abstentions: 0

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, la motion est adoptée. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Johnson: Oui, M. le Président, je propose que l'Assemblée se constitue en commission plénière pour poursuivre l'étude détaillée du projet de loi 102, Loi concernant les conditions de travail dans le secteur public et le secteur municipal.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, cette motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Adopté.

Alors, à partir de maintenant, l'Assemblée nationale se transforme en commission plénière. (21 h 49 ? 22 heures)

Commission plénière

M. Lefebvre (président de la commission plénière): Alors, mesdames et messieurs les députés, je vous rappelle que nous sommes en commission plénière pour procéder à l'étude détaillée du projet de loi 102, et je veux vous rappeler que, en vertu de la motion de suspension des règles qu'on vient tout juste d'adopter, la durée de l'étude détaillée du projet de loi 102 en commission plénière est fixée à un maximum de 1 heure après le début des travaux, c'est-à-dire à partir de 22 heures, puisqu'il est 22 heures au moment où on se parle. Et ces dispositions sont en vigueur malgré l'article 245.

Alors, M. le président du Conseil du trésor, je vais vous permettre d'intervenir pour ouvrir le débat de cette commission plénière. Je vous cède la parole.

Étude détaillée Champ d'application (suite) M. Johnson: L'article 4, M. le Président.

Le Président (M. Lefebvre): Alors, avant que je ne mette aux voix l'article 4, est-ce que, M. le député de Labelle, vous voulez faire des commentaires, ou si j'appelle le vote immédiatement?

M. Léonard: L'autre jour, lorsque nous avons... Il y a presque une semaine maintenant, puisque nous n'avons pas siégé encore, depuis une semaine, sur le projet de loi 102; même si on arrive aujourd'hui avec l'urgence, le gouvernement ne s'était pas préoccupé de siéger sur le projet de loi.

Donc, nous revenons à l'article 4, et j'ai posé une question au ministre quant aux impacts d'une évolution du taux d'inflation et du rapport qu'il y a avec la loi, l'article 4, où je lui ai démontré que sa loi ne s'appliquait pas également pour tous parce qu'elle ne s'appliquait pas en même temps. Et, compte tenu que le taux de l'inflation variait, cela avait des impacts différents. Le taux d'inflation varie dans le temps mais varie aussi

selon les régions du Québec, selon les villes, à tel point que Statistique Canada calcule des taux d'inflation différents selon les villes.

Alors, le président du Conseil du trésor, qui a paru surpris par ma question, aurait-il aujourd'hui une réponse?

M. Johnson: Oui...

Le Président (M. Lefebvre): M. le président du Conseil du trésor.

M. Johnson: Oui, d'abord, M. le Président, j'étais surpris, parce qu'on décrivait une situation qui est peut-être plus théorique que pratique. Je comprends que Statistique Canada peut publier, pour fins de renseignements, l'indice des prix à la consommation pour chaque grande ville, ou une moyenne du Canada, mais je ne crois pas que les conventions collectives fassent référence à l'IPC de leur propre ville. Je serais extrêmement surpris que ça soit l'IPC de Sherbrooke qui s'applique à Sherbrooke, l'IPC de Drummondville à Drummondville, l'IPC de Saint-Hyacinthe à Saint-Hyacinthe, etc. C'est l'IPC du Canada qu'on retrouve, d'une part, dans les conventions collectives.

D'autre part, c'est une situation, là aussi, qui présumerait de l'immobilisme et de l'immobilité de la main-d'oeuvre. Les exemples qu'a donnés le député, sur une période de gel à très bas taux d'inflation et une période d'indexation pleine et entière, lorsque l'inflation monte en flèche par opposition à la situation qu'on pourrait qualifier d'inverse, où des gens seraient en convention collective, qu'ils viendraient de négocier à 0 par les temps qui courent et seraient gelés pour une autre période de 2 ans alors que l'inflation est de 11 m'apparaît, je le dirais, là, plus théorique que pratique parce que, surtout, ça ignore la mobilité de la main-d'oeuvre.

Alors, on peut évoquer toutes sortes de scénarios, évidemment, mais on ne peut pas prévoir l'imprévisible. Vous me permettrez de le dire, là. Et c'est à ce titre-là que le signal, enfin, uniforme que la loi donne, c'est celui d'un maintien des conditions salariales pour 24 mois à l'expiration des conventions collectives qui sont soit déjà expirées, soit qui viendront à expiration parce qu'elles sont en cours lors de l'adoption de la loi.

M. Léonard: M. le Président, le ministre a-t-il demandé à son sous-ministre de travailler sur cette question et de lui faire un portrait un peu plus précis? Parce que, quand il évoque la mobilité de la main-d'oeuvre, je lui rappellerai qu'au Québec le taux de chômage est de 13 % et que, ensuite, les taux d'inflation varient de façon considérable dans le temps et peuvent varier beaucoup dans les perspectives d'avenir qui nous confrontent. Est-ce que son sous-ministre, qui juge du rendement des parlementaires, lui-même s'est préoccupé de s'en occuper, de cette question? Il sait à quoi je fais référence.

Le Président (M. Lefebvre): M. le président du

Conseil du trésor.

M. Johnson: II n'en reste pas moins qu'on est à la case départ avec le député de Labelle, avec sa question. J'essaie encore de voir pourquoi il y a une implication pratique à ce que le député nous dit. Je ne prétends pas que c'est inimaginable, ce qu'il nous soumet. Je dis que, dans la réalité, on ne risque pas de voir de tels comportements. Ou bien un groupe sera en rattrapage s'il était désavantagé par la mécanique de la loi, ou alors une municipalité, inversement, trouvera qu'elle aurait intérêt à resserrer ses critères de négociation, si quelqu'un, pour des raisons que je ne peux pas comprendre, a pris une avance considérable pendant qu'ailleurs les gens seraient gelés. alors, ça fige dans le temps. autrement dit, de toute évidence, ce que le député fait, il fige sur une période de 4 ans, un 2 ans gelé et un 2 ans pas gelé, toutes sortes de scénarios qu'on peut bien imaginer à l'infini. il y en a autant qu'il y a de monde ici, des scénarios de cette nature-là. mais il faut reconnaître que la réalité va se dérouler pour plus que 4 ans et que des gens, s'il y avait une iniquité qui s'était glissée, pourraient être, à un moment donné, en régime de rattrapage, parce qu'il n'en reste pas moins qu'il y a une comparabilité qui s'établit dans ce marché municipal. la preuve ?je le dis sans facéties ? c'est qu'à peu près tout le monde en moyenne est en haut du marché de 25 %. bon.

Donc, ils surveillent tout le monde. Les gens se surveillent les uns les autres pour retenir qui a un secrétaire trésorier, qui a un autre type d'employé municipal dans sa région. Il faut que la rémunération s'ajuste dans ce marché-là aussi, au fil des ans. On ne pourra pas avoir des situations de 11 % et de 15 % de différenciation en dedans de 24 mois pour les mêmes emplois dans les mêmes régions. Toutes les régions sont dans la même région. Tout le monde a un voisin. Alors, le risque de voir se glisser de telles iniquités, je le répète, m'apparaît théorique. Je ne dis pas qu'il est inimaginable, là, je reconnais ça, mais ça m'apparaît théorique.

M. Léonard: M. le Président, je vois...

Le Président (M. Lefebvre): M. le député de Labelle.

M. Léonard: ...que le président du Conseil du trésor n'a pas de réponse à ma question. L'autre jour, nous avions très bien exposé l'impact de sa mesure, de sa loi, qui fait qu'elle ne s'applique qu'en des périodes différentes. Elle peut même s'appliquer jusqu'à presque 3 ans, parce que souvent on a des conventions collectives de 3 ans. Et en particulier dans le monde municipal, une convention collective qui vient d'être signée, par exemple, maintenant, alors que la loi n'est pas adoptée, s'appliquera seulement dans 3 ans, plus 2, donc, dans 5 ans, et je pense que le président du Conseil du trésor ne peut absolument pas nous dire quel sera le taux de l'inflation dans 5 ans et, donc, mon point est réel, alors

qu'il pouvait procéder à rencontre de cela et faire appliquer sa loi maintenant.

M. le Président, comme nous n'avons qu'une minute par article, qu'une minute par article, que le président du Conseil du trésor n'a pas de réponse, je pense que je vais juste simplement dire que ça va être adopté sur division. On va voter contre.

M. Johnson: M. le Président.

Le Président (M. Bissonnet): Oui.

M. Johnson: M. le Président, la théorie du député de Labelle nous amènerait, pour contrer les iniquités appréhendées, à rouvrir les conventions collectives actuelles...

M. Léonard: ...pareil.

M. Johnson: ...ou bien... Absolument. Pas du tout.

M. Léonard: Vous pouvez les rouvrir pareil parce qu'à la fin vous intervenez.

M. Johnson: mais non, on ne les ouvre pas du tout. c'est à la fin qu'il se glisse une période de prolongation de 2 ans, aux mêmes taux et échelles de salaire. bon. mais qu'est-ce qu'on fait d'une convention qui est en vigueur pour un autre 18 mois à partir d'aujourd'hui, là, qui est en vigueur, donc, à des taux, par exemple, de 4 %, cette année, et de 6 %, l'an prochain? on fait quoi, là, pendant que, dans d'autres municipalités, c'est 0 %, d'autres étaient à moins 2 %, et que la loi suggère moins 1 %? alors, on va faire quoi, d'ici 24 mois? on va ouvrir celles qui sont à 5 %, puis on va... ou, alors, on va prévoir que ça devrait être 4 % pour celles dont on dit qu'elles devraient être 0 % pendant 18 mois, et, ensuite, ce sera 0 %? là, vraiment, je ne suis pas. c'est difficile à suivre parce que ça exige, si on veut vraiment compenser toutes les iniquités appréhendées, présumées, telles que les décrit le député, en vertu de son propre raisonnement, ça entraîne la réouverture de toutes les conventions collectives pour bien uniformiser tout le monde, pour ne pas qu'il y ait d'iniquités. alors, on se rend compte que ce n'est précisément pas ça qu'on a intérêt à faire pour respecter... (22 h 10)

M. Léonard: Ce n'est pas du tout ça, M. le Président, que je dis. Ce n'est pas du tout ça. C'est que, par l'effet de sa loi, il crée des iniquités. Je ne parle pas de celles qui existent, à l'heure actuelle. On le sait qu'en termes d'équité salariale vous n'êtes pas allé très loin. Mais ce n'est pas de ça dont il s'agit.

Ce dont il s'agit, c'est que, si la loi s'applique, maintenant, et qu'elle s'appliquait à tout le monde en même temps, tout le monde serait touché de façon égale quant aux effets de la loi, alors que, lorsqu'elle s'appli- que à des dates différentes, compte tenu que les taux d'inflation sont différents d'une année à l'autre et même d'une région à l'autre, mais, disons, d'une année à l'autre, c'est peut-être le point le plus important, l'effet sera différent.

Alors, M. le Président, je vois que le président, s'il comprend ce que je dis, essaie de mettre de la confusion, ou bien il ne comprend pas, tout simplement, la question, et je ne pense pas qu'on puisse perdre beaucoup de temps, parce qu'on a une minute par article.

M. Johnson: M. le Président.

Le Président (M. Bissonnet): M. le président du Conseil du trésor.

M. Johnson: Évidemment, si on avait écouté l'Opposition, ça aurait pris une journée par article. Alors, là, c'est un excès contraire, me dira-t-on, mais, à partir du moment...

M. Léonard: Depuis 5 jours, vous vous êtes traîné les pieds. Vous vous traînez les pieds depuis jeudi dernier.

M. Johnson: Mais, M. le Président, j'ai expliqué les raisons pour lesquelles nous sommes ici...

M. Léonard: Oui.

M. Johnson: ...dans le cadre de cette motion de suspension des règles et de commission plénière qui durera 1 heure, tel qu'on l'a voté, il y a quelques instants. J'ai dit, un peu plus tôt, qu'il était urgent d'épargner au public de la télévision et aux parlementaires les discours comme ceux auxquels on a eu droit, la semaine dernière.

M. Léonard: Wo!

M. Johnson: Alors, il n'y avait pas d'urgence comme telle.

Sur l'article 4, oui, sur l'article 4, le député dit, et c'est sa logique à lui, là, dans laquelle il veut nous entraîner, qui est inacceptable...

Le député dit: La loi devrait, en même temps, tout de suite s'appliquer à tout le monde également pour ne pas créer les iniquités que son adoption, dans les circonstances actuelles et de la façon que c'est libellé, créerait.

C'est justement ça qui est faux. C'est cet énoncé-là qui est faux, de vouloir nécessairement ? c'est la contrepartie, on n'a pas le choix, on n'en sort pas ? rouvrir et égaliser l'ensemble des conventions collectives alors qu'elles n'ont pas les mêmes paramètres, alors qu'il y a encore des municipalités qui paient selon leurs besoins, alors qu'il y en a qui sont peut-être en rattrapage et vont le demeurer, alors que ce n'est pas

la même périodicité; premièrement, les dates d'expiration ne sont pas les mêmes. Le député voudrait prendre cet univers éminemment diversifié et l'homogénéiser. Il dit: À défaut de faire ça, c'est de l'iniquité. Bien, ce n'est pas le cas, M. le Président.

M. Léonard: Ce n'est pas ce que je dis, M. le Président.

Le Président (M. Bissonnet): Je vais vous donner la parole, M. le député. Avez-vous terminé?

M. Johnson: Bien, j'ai terminé...

Le Président (M. Bissonnet): Non, mais écoutez, si vous n'avez pas terminé, je vous écoute, là, moi.

M. Johnson: Ce n'est pas le cas, M. le Président. Enfin, évidemment, on ne terminera jamais si le député revient avec le même argument.

Le Président (M. Bissonnet): Non, mais vous avez la parole. Est-ce que vous avez terminé?

M. Johnson: Non, je comprends. Alors, on va lui laisser...

Le Président (M. Bissonnet): M. le député, nous sommes sur l'article 4, tel qu'amendé. La parole est à vous.

M. Léonard: Je pensais revenir pour la dernière fois tout à l'heure, mais c'est parce que, quand il l'explique, quand il s'exprime comme il vient de le faire, il démontre ou bien qu'il n'a pas compris ou il fait exprès pour «contusionner» la question que je lui pose.

Je lui dis que la loi, si elle s'appliquait, par exemple, pour tout le monde le 1er juillet 1993 jusqu'au 30 juin 1995, aurait exactement le même effet pour tout le monde. Je ne demande pas de rouvrir les conventions collectives. Ce n'est pas ça que je lui dis. J'ai dit: On reporte simplement de 2 ans. Les 2 ans, on les prend maintenant en même temps pour tout le monde plutôt que de les prendre à la fin de la convention de chacun. Ou là, si on procède comme il le propose, les effets sont différents. Je suis sûr... Peut-être que le président du Conseil du trésor ne comprend pas la question ou ne visualise pas, mais, mon argumentation, elle est mur à mur complètement.

Alors, M. le Président, 1 minute... Ça fait déjà quelques minutes... On n'aura pas le temps de lire tous les articles, on a à peu près 1 minute par article pour aller à la fin.

Le Président (M. Bissonnet): Sur le même article, M. le ministre.

M. Johnson: M. le Président, c'est devenu un défi intellectuel pour moi que de comprendre...

M. Léonard: Pour vous.

M. Johnson: ...ce que le député dit. Je n'ai aucun... Alors, je ne prétends pas que lui ne comprend pas ce que je dis, moi, j'essaie de comprendre ce qu'il dit. Je le cite et, ensuite, on circulera un peu partout la transcription de nos débats pour voir que le député dit: II faudrait, pour que ce soit juste, que la loi s'applique également à tout le monde du 1er juillet 1993 au 30 juin 1995.

M. Léonard: En même temps.

M. Johnson: J'ai compris. En même temps. Or, les conventions collectives de l'univers que veut recouvrir la loi et présumément auxquelles réfère le député n'ont pas comme date d'expiration de toutes les conventions collectives de tout l'univers couvert le 30 juin, c'est-à-dire dans 15 jours. La seule façon dont l'énoncé du député peut être vrai, c'est si toutes les conventions collectives de toutes les municipalités du Québec se terminaient le 30 juin, dans 15 jours. Et c'est la seule condition à laquelle il y aurait maintien des conditions salariales de tout le monde pendant 2 ans.

Alors, évidemment, à partir du moment où certaines conventions collectives peuvent venir à expiration en juillet, en septembre, en décembre cette année, en mars 1994, il n'y a pas d'autre façon, je dirais, d'édicter les conditions qui s'appliquent légitimement et équitable-ment à tout le monde de façon raisonnable que de dire: C'est à compter de l'expiration de ces conventions-là que prendra effet un gel de 2 ans. Le député nous dit: Non, non, il faut que ça s'applique à partir du 1er juillet pour être juste. Donc, il veut, de toute évidence, rouvrir les conventions collectives et en changer les dates d'expiration ou en reporter la date d'expiration de 2 ans, indépendamment du début de la convention collective qu'il vise ainsi. Alors, là, il faudrait presque rétroactivement, je dirais, déterminer, artificiellement, que la date de départ des conventions collectives ainsi touchées devient la même pour tout le monde et que les ajustements salariaux, à ce moment-là, auraient dû être les mêmes pour tout le monde. On ne fait que maintenir les situations relatives de cette façon-là. Le député essaie, à mon sens, par un artifice d'argumentation, de vouloir atteindre une équité impossible à atteindre, sauf en rouvrant les conventions collectives, ce qui n'est pas possible, ce qui est exclu.

Le Président (M. Bissonnet): Est-ce qu'il y a d'autres remarques sur l'article 4 tel qu'amendé?

Est-ce que l'article 4, tel qu'amendé, est adopté?

M. Léonard: Ah! non. Moi, je vote contre. Mais on peut voter nominalement?

Le Président (M. Bissonnet): II faudrait que vous soyez 5 députés. Vous êtes 4.

Une voix: Non, ce n'est pas les règles. M. Léonard: On n'a pas le droit. Ah bon!

Le Président (M. Bissonnet): Non, non, je n'ai pas dit que vous n'aviez pas le droit. Vous n'êtes pas 5 députés, donc il ne peut pas y avoir de vote nominal.

Alors, l'article 4 tel qu'amendé est adopté sur division, si je comprends bien.

M. Léonard: Oui, sur division.

Une voix: La suspension des règles inclut qu'il n'y a pas de vote nominal.

Organismes publics Prolongation des conventions collectives

Le Président (M. Bissonnet): Alors, nous en sommes à l'article 5.

M. Johnson: ...amendement à l'article 5, M. le Président.

Le Président (M. Bissonnet): À l'article 5, voulez-vous déposer votre amendement, monsieur...

M. Johnson: Que je lis ainsi... (Consultation)

Le Président (M. Bissonnet): Nous avons une liasse d'amendements. M. le ministre l'a déposée ici.

M. Léonard: M. le Président.

Le Président (M. Bissonnet): Oui.

M. Léonard: Étant donné...

M. Johnson: L'article 5, M. le Président...

Le Président (M. Bissonnet): Un instant.

M. Johnson: Ah! Pardon.

Le Président (M. Bissonnet): M. le député de...

M. Léonard: Est-ce que je peux prendre une demi-minute pour obtenir une copie des amendements pour tous les députés présents en cette Chambre?

Le Président (M. Bissonnet): Oui.

M. Johnson: Ceux qui en font la demande, oui.

Le Président (M. Bissonnet): Non, la présidence... Si vous voulez remettre une copie des amende- ments aux députés qui sont présents... Si une demande est faite, je crois que...

M. Léonard: Merci, M. le Président. M. Johnson: Mais qui en font la demande. Le Président (M. Bissonnet): Non, non. C'est... Une voix: Quelle générosité!

M. Johnson: Un député ne peut pas dire: Non, merci, moi, je n'en veux pas?

Le Président (M. Bissonnet): Non, écoutez. Une voix: On est ici. On les veut.

Le Président (M. Bissonnet): II y a des amendements qui sont déposés et, en tant que président, je pense que les députés devraient avoir copie de ces amendements, ceux qui sont ici.

M. Johnson: O.K.

Le Président (M. Bissonnet): On va faire faire des copies, puis on va... Non, non, je ne suspendrai pas. On va faire des copies. Nous sommes sur l'article 5. Il est évident que si vous me demandez que des copies soient remises aux députés, je me dois d'exercer... Non, je ne suspendrai pas. Je pense qu'il est normal que les députés dans cette Chambre aient des copies des amendements. Ça, c'est très bien.

M. Léonard: Bien, autrement, comment peut-on en discuter?

Le Président (M. Bissonnet): Non, ça va. Ça va.

M. Johnson: ...M. le Président.

M. Léonard: Mais, M. le Président, je vois... Moi, je viens de recevoir la liasse, je suis le seul à l'avoir de mon côté, mais je vois qu'il y a un amendement à l'article 4 que nous venons d'adopter.

M. Johnson: Oui, oui. C'est celui qu'on a adopté, oui.

Le Président (M. Bissonnet): II avait été adopté, M. le député.

M. Léonard: II avait été adopté, celui-là? M. Johnson: Oui.

Le Président (M. Bissonnet): Là, nous sommes sur l'article 5...

M. Léonard: O.K.

Le Président (M. Bissonnet): Un instant. On va lire l'amendement à l'article 5, mais on n'est pas encore aux autres amendements et, durant ce temps, on va faire des copies pour remettre à tout le monde, donc il n'y aura pas de problème. Un instant.

Alors, à l'article 5, il y a un amendement qui est proposé par M. le président du Conseil du trésor: 1° remplacer, dans la troisième ligne du premier alinéa, les mots «de la présente loi» par les mots «du présent article»; 2° supprimer le deuxième alinéa.

Nous sommes sur cet article présentement.

M. Trudel: Question de privilège.

Le Président (M. Bissonnet): Alors, sur l'amendement à l'article 5.

M. Trudel: Une question de privilège, M. le Président.

Le Président (M. Bissonnet): M. le député de Rouyn-Noranda?Témiscamingue.

M. Trudel: Est-ce que je peux avoir le texte de l'amendement à l'article 5...

Le Président (M. Bissonnet): Oui, on va vous le donner tout de suite.

M. Trudel: ...pour pouvoir en discuter? (22 h 20)

Le Président (M. Bissonnet): Je vous le transmets, M. le député.

M. Trudel: Merci, M. le Président. Merci.

M. Léonard: M. le Président, on n'a plus le texte de l'amendement. Est-ce qu'on peut procéder?

Le Président (M. Bissonnet): M. le député, on est en train de mettre tout le personnel au service des membres de cette assemblée.

Alors, nous en sommes sur l'amendement à l'article 5.

M. Johnson: Oui, M. le Président.

Le Président (M. Bissonnet): M. le président du Conseil du trésor, s'il vous plaît.

M. Johnson: Qui, comme peut le voir le député de Labelle, qui consulte activement les amendements qu'on lui a remis, c'en est un de concordance avec l'article 51 qui prévoit qu'il y aura mise en vigueur, à la date ou aux dates que le gouvernement pourrait décider selon théoriquement ou possiblement les articles. Donc, c'est l'entrée en vigueur de l'article auquel on doit référer dans Particle 5 plutôt que l'entrée en vigueur de la loi, étant donné que certains articles de la loi pourraient être mis en vigueur à une date autre que l'entrée en vigueur de la présente loi.

Le Président (M. Bissonnet): Alors, sur l'amendement à l'article 5, M. le député de Labelle.

M. Léonard: Bien, M. le Président, on reporte la date d'expiration d'une convention collective. En réalité, on intervient à l'intérieur de la convention collective parce que ça, ça fait partie d'une convention collective, la date d'expiration. Et donc, il joue à l'intérieur du contrat liant les parties.

M. Johnson: C'est à l'extérieur, c'est à la suite.

M. Léonard: Donc, toute l'argumentation qu'il m'a servie tout à l'heure en ce qui concerne l'article 4 est fausse parce qu'ici lui-même intervient dedans. Ça, c'est ma première remarque, M. le Président.

M. Johnson: Pas du tout, pas du tout.

M. Léonard: La deuxième aussi. Il y a des explications qui accompagnent l'article 5 où l'on dit ceci: Les conventions collectives sont reportées de 2 ans, sauf celles qui avaient été prolongées lors de l'entente intervenue en 1992 pour une période de 2 ans, comme celle liant le gouvernement et la Centrale de l'enseignement du Québec.

Alors, on voit qu'on est reporté au moins de 2 ans, et même de plus. Mais surtout, le point que je voulais faire ressortir, c'est que le président du Conseil du trésor, qui a participé à la commission sur les finances publiques et qui s'est pété les bretelles, tapé la bedaine en disant qu'il recentrait l'action de l'État et qu'il réorganisait l'État, vient de dire qu'il prolonge les conventions collectives.

Comment peut-il prétendre renégocier l'organisation de l'État, l'organisation du travail alors qu'il prolonge les conventions collectives en l'état, à l'heure actuelle, où elles sont? Je pense que son raisonnement est faussé à la base. En réalité, s'il impose, s'il doit imposer par la loi 102 le prolongement des conventions collectives, il s'enlève tout moyen de réorganiser le travail et de renégocier les conditions de travail et les modalités du travail, l'organisation du travail avec les syndiqués. Donc, pour un gel salarial, il vient de laisser tomber tout le volet réorganisation du travail du gouvernement. C'est fondamental. C'est un discours qui se fait des 2 côtés de la bouche en même temps.

M. Johnson: Pas du tout. M. le Président.

Le Président (M. Bissonnet): M. le président du Conseil du trésor. Est-ce que...

M. Johnson: Est-ce que... Oui, M. le Président, je vais continuer dans ma réplique, oui.

Le Président (M. Bissonnet): M. le président du Conseil du trésor, je vous cède la parole.

M. Johnson: On nage en plein surréalisme dans l'argumentation du député de Labelle. On n'intervient pas dans une convention collective en cours en en prolongeant la durée. C'est vraiment facétieux d'aller dire qu'étant donné que la durée est fixée quelque part dans un article de la convention collective on se trouve à intervenir dans la convention collective en prolongeant la durée. Voyons! On prolonge la durée, on ne modifie pas la convention collective. Je pense qu'il y a une distinction absolument essentielle qu'il faut avoir à l'esprit, puis c'est celle-là. Et, évidemment, le député a oublié complètement cette distinction. Alors, là, c'est son argument à rencontre du mien qui n'est plus bon. Mais c'est des choses qui arrivent. C'est des choses qui arrivent, il ne faut pas s'en faire, M. le député de Labelle, c'est des choses qui arrivent. Ha, ha, ha!

Deuxièmement, quant à la négociation, là aussi, il n'y a aucune espèce de contradiction. On prolonge les conventions collectives; ça, c'est la loi 102. Mais, en parallèle et constamment, nous disons à nos partenaires syndicaux qu'on devrait se pencher sur les règles d'organisation du travail. Donc, en aucun temps, la loi 102, son adoption ou sa mise en vigueur, n'exclut, entre des parties qui consentent librement de le faire, de revoir les dispositions de la convention collective. Il est évident qu'on ne pourra pas parler de règles d'organisation du travail, on ne pourra pas parler de modifications aux conditions de travail sans toucher au petit livre, sans toucher au petit livre, la convention collective, c'est évident. Mais, pour des fins, que j'ai déjà décrites, de sécurité financière obligatoire dont le premier ministre et moi avons entretenu nos vis-à-vis syndicaux hier, nous devons avoir cette loi, nous devons l'adopter.

Il faudrait, là, techniquement, la sanctionner ces jours-ci, mais les dispositions de mise en vigueur font en sorte que le gouvernement peut, évidemment, mettre en vigueur la loi ou certains de ses articles à une date ultérieure. Nous avons ? et j'en profite, c'est probablement la première occasion que j'ai, vraiment, de le faire ? indiqué hier que le gouvernement était disposé à retarder au 15 septembre la mise en vigueur de cette loi, afin de nous garantir une période de 90 jours pendant laquelle nous pourrions continuer à négocier. Alors, l'un n'exclut pas l'autre, M. le Président, ça ne l'a jamais exclu, depuis le début. Alors...

Alors que je m'émerveille devant les talents de dialecticien du député de Labelle, je déplore que ses talents servent au sophisme et à la facétie.

M. Léonard: M. le Président.

Le Président (M. Bissonnette): Oui, M. le député de Labelle, je vous écoute attentivement.

M. Léonard: Quand j'écoute... J'ai écouté attentivement le président du Conseil du trésor, tout à l'heure, venir nous dire sérieusement ? pour un avocat, c'est fort, il faut le faire ? que la date d'expiration n'était pas partie d'un contrat. Voyons donc!

M. Johnson: ...vrai...

M. Léonard: La date...

Le Président (M. Bissonnet): Monsieur...

M. Léonard: ...d'expiration...

Le Président (M. Bissonnet):...vous n'avez pas la parole.

M. Léonard: ...fait partie d'un contrat, n'importe lequel. Prenez-le, c'est l'a b c du Code civil que la date de fin d'un contrat fait partie du contrat lui-même.

Alors, M. le Président, c'est lui, c'est lui qui fait des sophismes; c'est lui qui commet des sophismes, à l'heure actuelle, des facéties, comme il le dit. Facéties. Alors, ça, là... Il intervient à l'intérieur du contrat; les parties n'ont pas choisi, n'ont pas négocié de prolonger le contrat, mais il l'oblige, par le pouvoir législatif de l'Assemblée nationale. Et là, on revient, finalement, au débat de fond qu'il y a ici, qu'on lui a dit: II devrait négocier, commencer par négocier, avant de s'amener devant l'Assemblée nationale, puis imposer les conditions.

Alors, M. le Président, je reviens aussi sur le deuxième point que j'ai soulevé: il prolonge les conventions collectives par l'Assemblée nationale; il force l'application de la même convention 2 ans de plus. Alors, comment peut-il, après, venir dire qu'il veut réorganiser le travail, renégocier le travail, alors qu'il impose le prolongement, la prolongation de la convention collective de 2 ans? D'abord, il vient de bloquer toute négociation possible: si l'autre partie n'est pas d'accord, comment va-t-elle accepter de négocier à l'intérieur, par la suite? Donc, on revient à la nécessité de négocier. Et, lorsqu'il l'impose par la loi 102, il se prive de toute possibilité de réorganiser le travail; c'est ça qu'on dit. Je veux dire, M. le Président, c'est clair.

M. Johnson: M. le Président.

Le Président (M. Bissonnet): M. le président du Conseil du trésor, sur l'amendement à l'article 5, je vous écoute.

M. Johnson: Oui. Je dirais au député de Labelle qu'il se méfie de l'avocat qui lui a soufflé quelque conseil que ce soit, comme ceux qu'il...

M. Léonard: Oui, il y en a un.

M. Johnson: Ah, il n'y en a pas, d'avocat, ici?

Bon. Alors...

M. Léonard: Oui, il y en a un, derrière nous.

M. Johnson: ...le député d'Anjou doit être enchanté d'apprendre ça...

M. Léonard: Oui, oui.

M. Johnson: ...de votre bouche.

M. Léonard: Non, non, ça va.

M. Bélanger (Anjou): Je suis encore inscrit à l'Ordre.

M. Johnson: Bon.

M. Léonard: Derrière... Mais il ne m'a rien soufflé, je peux vous dire.

M. Johnson: II ne vous a rien soufflé? Bon. Heureusement, c'est donc un gage de compétence du député d'Anjou...

M. Bélanger (Anjou): Je n'ai rien soufflé. (22 h 30)

M. Johnson: ...parce que celui qui vous l'a soufflé s'est trompé: D'aucune façon la prolongation de la durée d'une convention collective n'est-elle, que ça soit par les dispositions du Code du travail qui prévoient que, tant qu'il n'y a pas de nouvelle convention collective, celle qui est en vigueur et prend fin perdure, d'aucune façon est-ce que la loi 102 n'intervient dans la convention collective qu'elle prétend toucher, la ou les conventions collectives qu'elle prétend toucher. C'est à la fin de la convention collective que la durée est prolongée pour une durée de 2 ans. Alors, c'est assez simple. C'est une règle fondamentale, là, qui m'apparaît importante à rappeler, parce que le député a voulu faire ses choux gras avec tout ça. Erreur! Erreur! Mais, encore là, c'est un point de détail, parce que, dans le fond, ce que le député a dit, c'est: Comment pouvez-vous amener quelque chose comme ça et dire que vous négociez? Bien, c'est ça que je fais depuis le 23 mars. C'est ça que je fais depuis le 23 mars.

Je veux simplement rappeler que, depuis le 23 mars, nous sommes partis d'une situation où nous avions mis de l'avant notre proposition, qu'on a eu droit à des fins de non-recevoir successives et, tout d'un coup, à des rencontres successives, et, finalement, on reconnaît que le dernier geste est une reconnaissance qu'il n'y aurait pas d'augmentation de salaires, de la part syndicale là, pas d'augmentation des taux et échelles de salaires jusqu'au 30 juin 1994; c'est donc un gel d'un an, les dernières propositions syndicales.

Deuxièmement, qu'il y aurait intérêt à chercher à identifier 1 % d'économie. Alors, c'est un geste dont on a reconnu l'importance, M. le Président, mais qui man- que un peu de garantie et d'assurance, évidemment, au point de vue financier pour le gouvernement. Et, enfin, on cherche, évidemment, l'engagement, ou l'ouverture à tout le moins, là, que, pour la deuxième année également, on doit parler de taux et échelles de salaires qui sont maintenus, sauf, si on trouvait plus que 1 % d'économie la première année, bien là, on pourrait parler de distribution, évidemment, de ce surplus.

Ce qui est important dans tout ça, à savoir, ce qui est incontournable, c'est que la position gouvernementale n'aurait aucune espèce de crédibilité dans les circonstances financières qu'on connaît, même sans loi, là, parce que, le 23 mars, il n'y avait pas de loi, ça a été un exposé qu'on a fait. De laisser croire aux syndicats qu'ils peuvent nous présenter des demandes ? il y a seulement la Fédération des affaires sociales qui a monté une immense structure pour nous présenter des demandes, des demandes salariales, des demandes normatives, enfin, un tas de choses ? c'est non. C'est non en partant.

Alors, moi, je veux bien qu'on dise: Négociez. Je veux juste qu'on sache que, si la proposition syndicale, si la demande syndicale, c'est autre chose que le gel des taux et échelles de salaires pour 2 ans et une diminution de 1 % cette année, et récurrent pour les années suivantes, on va dire non. Alors, on pourrait donner l'illusion aux gens qu'on libère, etc., et dont on paie les salaires, qu'ils peuvent nous demander toutes sortes de choses, puis qu'on va s'asseoir et qu'on va dire non, non, non, constamment, ou alors on va reconnaître la réalité. On va reconnaître la réalité, on va l'inscrire dans nos statuts, on va l'inscrire dans les équilibres budgétaires, et là, on va dire: Bon, bien, la réalité étant celle-là pour tout le monde, négocions des véritables économies qu'on peut recycler au bénéfice de l'amélioration et des conditions de travail, et du service à nos concitoyens, et pouvant dégager des économies additionnelles à des programmes pour lesquels un gouvernement est élu; qu'il s'agisse du soutien aux familles, qu'il s'agisse du développement régional, qu'il s'agisse de quoi que ce soit. Le prochain montant de 100 000 000 $ qu'on trouve, une fois qu'on a trouvé 1 %, qu'est-ce qu'on fait avec? Bien, on le partage, on le partage selon une négociation à intervenir. On le partage, M. le Président, et c'est ça le noeud et la matière de la négociation depuis le début. Je ne ferai pas croire à qui que ce soit que nous pouvons augmenter les taux et échelles de salaires cette année.

Le Président (M. Bissonnet): Merci, M. le président du Conseil du trésor.

Je rappelle aux membres de cette Assemblée que nous sommes toujours à l'amendement à l'article S, et je vous cède la parole, M. le député de Labelle.

M. Léonard: Oui. M. le Président, je remarque que, depuis que le temps est limité, le président du Conseil du trésor, tout à coup, s'est mis à parler. Il souffre de diarrhée verbale assez, évidemment... C'est évident.

Le Président (M. Bissonnet): M. le député de Labelle, le président du Conseil du trésor, comme proposeur de ce projet de loi, a droit à une période de 5 minutes après chaque intervention.

M. Léonard: Oui. O.K. Bon. On ne passera pas très vite, là...

Le Président (M. Bissonnet): À ce que je sache, cette règle est encore en vigueur. Monsieur, vous avez la parole.

M. Léonard: ...parce que, nous venons de nous en rendre compte, on vient de finir de les compter, il y a 34 amendements, M. le Président, qui viennent de nous parvenir. Alors, les parlementaires viennent d'avoir ça, il y a à peine même pas 5 minutes, puis on doit finir l'étude de la loi à 23 heures, dans 25 minutes.

Alors, c'est ça, là, la suspension des règles, dans une démocratie. Moi, j'appelle ça une république de bananes.

M. Johnson: Ha,ha, ha!

M. Léonard: Un Parlement fantoche.

M. Johnson: Ah! franchement.

M. Léonard: Un Parlement fantoche. C'est ça qu'on est en train de faire.

Qu'est-ce que cela veut dire que, dans l'amendement, vous utilisiez «le présent article» plutôt que «la présente loi»? Est-ce que chacun des articles va entrer en vigueur à des dates différentes?

M. Johnson: Oui. Comme je l'indiquais tout à l'heure, M. le Président, c'est un amendement de concordance avec celui qu'on a distribué tout à l'heure, où l'article 51 prévoira que: «Les dispositions de la présente loi entreront en vigueur à la date ou aux dates fixées par le gouvernement, à l'exception de l'article 42 qui entre en vigueur le (indiquer ici la date de la sanction de la présente loi). Les dates d'entrée en vigueur des dispositions des articles 17 à 22, 25 et 50 ne peuvent être antérieures au 1er octobre 1993.»

M. Léonard: L'amendement, là, de l'article 5?

Le Président (M. Bissonnet): Nous en sommes à l'amendement de l'article 5.

M. Léonard: II y a trop d'amendements, vous êtes mêlé dans vos amendements?

M. Johnson: Non, pas du tout, absolument pas. M. le Président, personne n'est mêlé, sauf le député de Labelle. Je viens de dire que c'est un amendement en concordance avec l'article 51 tel qu'amendé, ou éventuellement amendé. C'est tout. Il n'y a rien de mêlé là- dedans.

Le Président (M. Bissonnet): Est-ce qu'il y a d'autres remarques sur l'amendement à l'article 5?

M. Léonard: Un instant, on va aller voir l'article 51. Amendé, amendé, il y a un amendement là aussi.

(Consultation)

M. Léonard: Remplacer l'article au complet. Ah bien! Ça va bien.

M. Johnson: ...des explications, M. le Président?

Le Président (M. Bissonnet): Oui, M. le président du Conseil du trésor, oui.

M. Johnson: L'article 51, tel qu'amendé, dont le député prend connaissance, prévoit non pas une date d'entrée en vigueur de la loi, mais de différents articles de la loi. On ne peut donc pas référer, à l'article 5, à la date d'entrée en vigueur de la présente loi, il n'y a pas de telle chose comme telle, parce que ce sont des dates d'entrée en vigueur des articles qui sont prévus dans 51.

Le Président (M. Bissonnet): Alors, nous sommes à l'article 5, mais il y a un amendement qui a été déposé à l'article 51. Donc... M. le député de Rouyn-Noranda?Témiscamingue.

M. Trudel: Quelle est la raison fondamentale pour laquelle on a changé l'économie générale, de faire en sorte que l'on va faire entrer en vigueur les articles...

M. Léonard: Différents articles à différentes dates.

M. Trudel: ...différents articles à différentes dates, par rapport au fait de faire entrer tout le projet de loi en vigueur au même moment, puisque les mesures d'équité, qui nous ont longuement expliquées, de faire en sorte qu'on applique à tout ce monde-là les mêmes effets en même temps?

Le Président (M. Bissonnet): Alors, M. le président du Conseil du trésor.

M. Johnson: C'est depuis hier, alors que le premier ministre et moi-même avons rencontré les instances syndicales, où nous avons convenu qu'il y aurait une date de mise en vigueur éventuelle. On a parlé du 15 septembre. Absolument, et on sait, par ailleurs, que certains articles réfèrent à d'autres dates que le 15 septembre. Par exemple, l'entrée en vigueur de la capacité du gouvernement de décréter des jours de congé sans solde est fixée au 1er octobre, dans la loi. Ça, c'est un engagement, ça aussi. Alors, déjà, on a 2 dates qui se

promènent, alors il n'y a pas de telle chose qu'une date d'entrée en vigueur de la présente loi. Parce qu'il y a des articles qui seront en vigueur le 15 septembre, là, disons, compte tenu de l'engagement qu'on a formulé, et d'autres, c'est le 1er octobre.

M. Léonard: Alors, là, c'est...

M. Johnson: II y a d'ailleurs un amendement... Il y a l'article 42 aussi qui pourrait être en vigueur immédiatement.

M. Léonard: Oui, oui, ça va bien.

M. Johnson: À force de parler, à force de négocier, il faut ajuster le projet de loi. On a négocié.

M. Léonard: La loi s'applique à des dates différentes, selon les différentes conventions collectives; en plus, à l'intérieur de la loi, il y aura des dates différentes, selon les articles.

M. Johnson: Oui, c'est ça.

Le Président (M. Bissonnet): Estce qu'il y a d'autres interventions sur l'amendement à l'article 5? M. le député de Rouyn-Noranda_Témiscamingue.

M. Trudel: Le président du Conseil du trésor dit: On ajuste les différents articles du projet de loi, suivant...

M. Léonard: Un gel ajusté.

M. Trudel: Un gel ajusté suivant l'évolution des négociations. Elles ne sont pas terminées, les négociations.

M. Johnson: ...

M. Trudel: Alors, pourquoi l'urgence de voter ce projet de loi aujourd'hui ici, si vous n'en avez pas besoin?

M. Johnson: Oui, mais écoutez, si le député a manqué nos débats de cet après-midi, on peut les recommencer, mais j'ai expliqué, selon le point de vue gouvernemental, pourquoi il était important d'adopter ce projet de loi, compte tenu des équilibres financiers. Il y a quelque chose qui s'appelle la réalité financière et, selon nous, on doit obtenir l'assurance et la garantie que nous pouvons réaliser les objectifs financiers que nous nous sommes fixés qui correspondent à la capacité de payer de nos concitoyens. Et ça, ça ne change pas de jour en jour ou d'heure en heure là. (22 h 40)

M. Léonard: Mais on ne demande pas au député de Vaudreuil, président du Conseil du trésor, de recommencer son argumentation. Il serait obligé de se confes- ser une fois de plus.

Le Président (M. Bissonnet): Est-ce qu'il y a d'autres interventions sur l'amendement à l'article 5? Est-ce que l'amendement à l'article...

M. Léonard: À une minute par article, on ne va pas vite là.

Le Président (M. Bissonnet): M. le député, est-ce que l'amendement à l'article 5 est adopté?

M. Léonard: Avec 34 amendements en plus... Sur division, sur division.

Le Président (M. Bissonnet): Sur division. Est-ce que...

M. Léonard: Sur l'amendement, oui, sur division.

Le Président (M. Bissonnet): Est-ce qu'il y a des remarques sur l'article 5 tel qu'amendé?

M. Léonard: On a combien de temps, là? Il reste combien de temps par article? 20 minutes? Il en reste encore...

Le Président (M. Bissonnet): M. le député, il reste exactement...

M. Léonard: ...45 articles?

Le Président (m. bissonnet): ...19 minutes et 15 secondes. c'est très précis. est-ce qu'il y a d'autres remarques? est-ce que l'article 5 tel qu'amendé est adopté?

M. Léonard: Sur division.

Le Président (M. Bissonnet): Adopté sur division.

M. Léonard: Sur division sur le cinquième...

Le Président (M. Bissonnet): À l'article 6, il est proposé un amendement.

M. le président du Conseil du trésor, si vous voulez faire votre amendement.

M. Johnson: M. le Président, c'est le même genre d'amendement que nous venons de considérer à l'article 5. Il s'agit ici, je cite: De remplacer, dans la quatrième ligne du premier alinéa, les mots «de la présente loi» par les mots «du présent article».

Le Président (M. Bissonnet): Alors, je suis prêt à entendre les députés sur l'amendement à l'article 6 et l'article 6 comme tel.

M. Léonard: M. le Président, je pense que je vais vous demander de le lire, juste cet article-là.

Le Président (M. Bissonnet): Vous voulez que je lise l'article 6?

M. Léonard: S'il vous plaît.

Le Président (M. Bissonnet): Je vais vous lire ça.

À l'article 6: «Est également reportée de deux ans la date d'expiration d'une convention collective ayant lié un organisme public et une association de salariés, expirée avant le (indiquer ici la date de l'entrée en vigueur de la présente loi) et dont le renouvellement ou le remplacement n'a pas encore été conclu à cette date. «S'il s'agit d'une convention collective visée par la Loi sur le plafonnement provisoire de la rémunération dans le secteur public ou la Loi concernant la prolongation des conventions collectives et la rémunération dans le secteur public dont la date d'expiration n'a pas été reportée par entente conformément à l'une ou l'autre de ces lois, le report de la date d'expiration ainsi que le plafonnement de la rémunération prévus par l'une ou l'autre de ces lois ou les deux, selon le cas, s'appliquent à cette convention à compter de sa date d'expiration originaire et les dispositions de la présente section s'appliquent à compter de la date d'expiration ainsi reportée.»

Il est proposé un amendement par M. le président du Conseil du trésor: De remplacer, dans la quatrième ligne du premier alinéa, les mots «de la présente loi» par les mots «du présent article».

Je vous écoute, M. le député.

M. Léonard: M. le Président, je vous remercie d'avoir fait cette lecture. Mais vous comprenez que, lorsqu'on étudie un projet de loi qui compte 51 articles, auxquels on vient d'ajouter 34 amendements, bien faire le travail, ce n'est pas aussi facile qu'on le dit. Et quand le président du Conseil du trésor se plaint que parfois l'Opposition prend un peu de temps, alors que lui-même il en ajoute, du temps, de par ses expressions, vous comprendrez que ce n'est pas... Il faut y mettre du temps.

Juste à la lecture, on voit très bien que c'est complexe. Simplement cet article, il y a 2 paragraphes, 2 petits paragraphes dans cet article. Et pourtant, on nous demande d'adopter les 51 articles moins les 4 que nous avions étudiés auparavant, dans une heure, plus les 34 amendements. C'est ça qu'on nous demande de faire. Ce n'est pas du travail sérieux. Non.

Et ça veut dire que l'Assemblée nationale n'a plus aucun contrôle parlementaire sur les lois qu'elle vote. Donc, on nous demande de voter les yeux fermés. Et tous les encensoirs mécaniques qu'il peut y avoir en cette salle ici, dans cette Assemblée nationale, vont applaudir des choses qu'ils n'ont même pas lues, qu'ils ne comprennent pas. C'est impossible de lire. Et puis, on verra des députés faire des grands discours sur l'im-putabilité, d'abord des députés, puis ensuite des ministres, puis ensuite des hauts fonctionnaires, alors qu'ils vont applaudir mécaniquement ce projet de loi.

J'imagine que tout à l'heure, lorsque le président du Conseil du trésor va se lever pour voter son projet de loi, il va être applaudi par ces encensoirs mécaniques.

M. le Président, c'est une folie furieuse. C'est pour ça que je vous ai fait lire cet article-là. Vous l'avez lu d'ailleurs très dignement. Je vous félicite. Très dignement. Mais je pense que, juste à la lecture, c'est difficile de se faire une idée de ce que cela signifie. C'est là où on en est. C'est pour ça qu'on vote contre, sur division. On ne sait pas sur quoi on vote, finalement.

Alors, le président du Conseil du trésor peut-il donner une explication sur son article 6?

Le Président (M. Bissonnet): M. le président du Conseil du trésor.

M. Johnson: M. le Président, vous noterez, d'abord, que le député de Labelle a annoncé qu'il voterait contre avant qu'on ne lui explique ce sur quoi il votait. On trouvait ça assez extraordinaire.

M. Léonard: Peut-être que vous nous amènerez à voter pour. On verra.

Le Président (M. Bissonnet): La parole est au président du Conseil du trésor que je reconnais. M. le député, si vous voulez intervenir, je vous écoute.

M. Johnson: Merci, M. le Président.

M. Léonard: Faites ça vite, là!

Le Président (M. Bissonnet): II a 5 minutes.

M. Johnson: Ce qui est en cause ici, c'est l'arrimage ? si je peux utiliser l'expression ? c'est-à-dire l'entrée en vigueur et l'application de la prolongation de 2 ans aux mêmes taux et échelles de salaires de cette loi à des conventions collectives qui ont déjà été touchées par les lois de 1991 et 1992 qui prévoyaient? on s'en souvient dans un cas ? le gel de 6 mois et, donc, la prolongation de la convention collective de la même période et, éventuellement, le report également de 9 mois du versement de certaines des augmentations de salaire.

Donc, on a eu 2 lois, autrement dit, depuis 2 ans, qui touchaient les conventions collectives. J'ai décrit, cet après-midi, la succession des événements depuis 1991. Ça, ça nous assure que tous les effets prévus dans ces lois-là, le gel de 6 mois, la prolongation, etc., sont en vigueur et effectués avant que ne s'applique la prolongation de 2 ans, parce que ce n'est pas dans l'ensemble, dans notre univers du secteur public que toutes les conventions collectives ne sont pas précisément, je

dirais, de même date d'expiration.

De mémoire, à la Société des alcools, dans les universités ? les deux ex-universitaires qu'on a devant nous pourraient en convenir ? les dates d'expiration ne sont pas nécessairement le 31 décembre ou le 30 juin comme c'est maintenant. Ça varie. Ça varie d'un établissement à l'autre souvent, et il faut donc laisser ces lois auxquelles on réfère dans l'article 6 le temps ? si je peux me permettre l'expression ? de s'appliquer avant de prolonger de 2 ans les taux et échelles et les conventions collectives, donc, qui étaient visés par les lois précédentes et par celle-ci.

M. Léonard: M. le Président, si je comprends bien, là, il s'agit d'une convention collective qu'on prolonge de 2 ans, mais il s'agit de convention collective visée par la Loi sur le plafonnement provisoire, donc, déjà d'un gel où la loi concernant la prolongation des conventions collectives qui avaient été gelées. Donc, on parle de surgeler. Nous sommes dans le monde du surgelé. C'est ça qu'on fait depuis 4 ans. Je pense qu'on se rend compte de ce que l'on fait, à l'heure actuelle.

M. Johnson: Oui, on a... Oh non...

M. Léonard: La loi de 1991 et la loi de 1992 qui a impliqué des prolongations sont reportées, sont encore reportées de 2 ans, 2 ans de plus. Alors, on gèle, on surgèle. C'est ça qu'on fait.

M. Johnson: M. le Président, je vais tout de suite corriger. Malheureusement, le député de Labelle s'exprime...

M. Léonard: M. le Président, avant, si vous...

M. Johnson: ...comme certains de nos interlocuteurs. Il oublie les augmentations de salaires de 10 % qui ont été versées depuis le 1er janvier 1991. Ce n'est pas un gel. C'est des prolongations qui sont en cause et...

M. Léonard: ...

M. Johnson: absolument, 5 % plus 3 %, plus 1 %, plus 1 %. 5 % sur échelles, 3 %...

M. Léonard: ...

M. Johnson: absolument. 30 % en juin 1992, 1 % en avril 1993 et 1 % de forfaits de juin 1991 à juin 1992. ça fait 10 %. mais ce sont les dates d'expiration qui ont été reportées. elles le sont à nouveau, et c'est la première fois maintenant que nous prévoyons un gel des taux et échelles de salaires, à part le gel de 6 mois et le report qui s'ensuivait en 1991.

Alors, il ne faut pas dire que tout le monde est gelé depuis 4 ans. C'est carrément faux. C'est carrément faux.

Le Président (M. Bissonnet): M. le député de Labelle, vous avez la parole.

M. Léonard: M. le Président, je viens d'entendre le président du Conseil du trésor nous affirmer qu'il y avait eu 10 % d'augmentation. Je voudrais bien entendre le point de vue des syndiqués là-dessus. Je comprends qu'il ait refusé de les entendre lorsque nous avons fait des motions à cet effet pour dire qu'il faudrait entendre l'autre partie syndicale. Alors, M. le Président, je pense que, là-dessus, ça ne colle pas. Je comprends qu'il fasse des discours pour la galerie, mais, à mon sens, les galeries sont vides, étant donné qu'on a expédié des syndiqués qui étaient dans les galeries cet après-midi. Alors... (22 h 50)

M. Johnson: Pourquoi? Il faudrait dire pourquoi?

M. Léonard: ...je comprends qu'elles sont vides maintenant.

M. Johnson: II faudrait peut-être dire pourquoi, M. le député. Il faudrait peut-être dire pourquoi.

M. Léonard: Oui.

Une voix: Parce qu'ils avaient des sentiments.

M. Johnson: Ces gens-là se sont comportés comme des malotrus.

M. Léonard: Parce qu'ils ont ri... Des malotrus! Non, là, vraiment...

Le Président (M. Bissonnet): Vous avez toujours la parole...

M. Johnson: Voyons donc!

Le Président (M. Bissonnet): M. le député de Labelle, si vous voulez vous en tenir à l'article 6.

M. Léonard: Ils ont ri aux sophismes que vous débitiez en cette Assemblée. C'est ça. Ils n'ont pas pu s'empêcher de rire.

Le Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît!

M. Léonard: Mais ceci étant dit, je ne veux pas mettre en cause la décision de la présidence là-dessus, absolument pas.

Le Président (M. Bissonnet): Alors, si vous voulez poursuivre votre intervention.

M. Léonard: M. le Président, on est en train de surgeler des conventions collectives, de les prolonger. On prolonge un plafonnement. C'est bien ça. C'est le titre même de la loi: Loi sur le plafonnement provisoire.

Là, on rajoute 2 ans au plafonnement provisoire. Je vous dis que ça fait des grosses augmentations, ça! Il n'y en a pas, d'augmentation, c'est un gel. M. le Président, je pense qu'il y a des sophismes dans les raisonnements du président du Conseil du trésor qui sont évidents. Je comprends qu'il essaie de vendre sa salade, mais il n'y a personne qui va le croire ici. Puis, quand il donne des explications comme celles-là et que je l'ai entendu cet après-midi raisonner, de façon résonante, sur l'urgence qu'il y avait à adopter une motion de cessation, de suspension des règles de cette Assemblée, là, vraiment, ce n'est pas rassurant sur sa capacité de logique, et c'est ça le problème qu'on a. C'est que maintenant, après avoir déposé son projet de loi, l'avoir amendé par 34 amendements qu'il vient de nous déposer, en réalité, on voit très bien que son projet de loi, il n'est pas si définitif qu'il peut le dire. Qu'il peut le dire! Puis il ne se donnera même pas la peine de l'étudier article par article. On n'aura pas le temps de le faire. C'est un projet de loi complexe qui touche toutes les conventions collectives des 400 000 ou 350 000 syndiqués de la fonction publique et parapublique. Alors, on touche ça dans 1 phrase ou 2, ou 2 paragraphes, puis le tour est joué. Je pense qu'il y aura des conséquences à cela. Et ce n'est pas par une explication générale qu'il va régler les problèmes que cela va poser. Loin de là.

Alors, M. le Président, on est à l'article 6. Il est 22 h 54. Il reste 6 minutes à peu près, 6, 7 minutes, pour 6 articles... 45 articles et 32 amendements encore à étudier.

(Consultation)

Le Président (M. Bissonnet): Dix minutes... M. le président du Conseil du trésor.

M. Johnson: Quelques minutes.

Le Président (M. Bissonnet): II reste 7 minutes, monsieur...

M. Léonard: Bien, il a 5 minutes. Il peut parler 5 minutes. Il parle beaucoup ce soir, je trouve.

Le Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît, M. le député! La parole est au président du Conseil du trésor. On vous écoute.

M. Johnson: M. le Président, je suis condamné à parler beaucoup pour contrer les énormités qu'on a entendues de l'autre côté.

Le député de Labelle a commencé en disant que j'avais prétendu qu'il y avait eu 10 % d'augmentation depuis le 1er janvier 1991 et il réclamait la présence de témoignages, je présume, de l'autre partie, qui viendrait nous expliquer ce qui est arrivé depuis le 1er janvier 1991. Je n'ai fait que lire les conventions collectives. L'autre partie viendra la lire et conclura la même chose. C'est de notoriété publique, sinon universelle, qu'il y a eu 5 % d'augmentation le 1er janvier 1991. Tout le monde qui travaillait dans le secteur public le 31 décembre et le 1er janvier a vu son salaire rajusté à la hausse de 5 % le 1er janvier. Ça, là, c'est un fait absolument indéniable. C'est indéniable.

M. Léonard: L'inflation était de 6,7 %.

M. Johnson: le 1er juillet, il y a eu un forfait de 1 % qui a commencé à être versé jusqu'au 30 juin 1992. c'est un fait indéniable. absolument indéniable! le 1er juillet 1992, il y a eu une augmentation de 3 %. c'est un fait indéniable. personne ne peut venir ici et dire: le 1er juillet, je n'ai pas eu mes 3 %. sauf s'il ne travaillait pas dans le secteur public, c'est évident. finalement, le 1er avril dernier... je ne sais pas si ça taxe la mémoire du député de labelle à ce point-là. il y a eu une augmentation de 1 % le 1er avril, c'est indéniable; 5 plus 3, plus 1, plus 1, ça fait 10. alors, que l'autre partie vienne dire le contraire, moi, je veux bien. mais je veux qu'on me montre les dispositions des conventions collectives dûment signées, incidemment, qui prévoient le 5, le 3, le 1 et le 1, et qu'on me dise qu'ils n'ont pas eu ça. si quelqu'un ne l'a pas eu, je l'incite immédiatement à communiquer avec moi, on fera l'enquête appropriée et on lui enverra le chèque rétroactif, s'il ne l'a pas eu, s'il y a droit. mais, en attendant, les paramètres ont été ajustés à la hausse de 9 % sur échelle plus 1 % forfaitaire depuis 2 ans et 4 mois. alors, m. le président, moi, je veux bien que le discours du député de labelle vienne dire que ce n'est pas vrai, malheureusement, il y a 350 000 personnes, y compris lui, sur son chèque de paie à lui, comme député, qui a bénéficié d'une même augmentation, exactement. exactement la même augmentation depuis tout ce temps-là.

Alors, ce n'est pas une question de fiction, ce n'est pas des romans qu'on est en train de lire, ce n'est pas de la science-fiction dont on est en train de s'entretenir, ce sont des conventions collectives qui sont en vigueur, qui ont été signées, donc, adoptées par les parties syndicales et leurs instances, qui prévoient, depuis quelques années, des augmentations de salaire quelque peu au-delà de l'indice des prix à la consommation, incidemment.

M. Léonard: Pas l'indice des prix à la consommation, voyons!

M. Johnson: pas énormément, on parle de 0,1 %. mais c'est essentiellement le maintien des conditions salariales par rapport à l'inflation qui a été la politique gouvernementale depuis 1985. à partir de ce moment-là, m. le président ? bonsoir, m. le président de l'assemblée ? il est évident que si on peut parler de gel des conditions des taux et échelles, c'est à compter du 1er juillet prochain, en général, pour les conventions collectives du secteur public qu'on peut parler d'un gel salarial. on ne pouvait pas en parler depuis 1982; ça fait 11 ans.

M. Léonard: Alors, M. le Président...

Le Président (M. Bissonnet): Est-ce qu'il y a des interventions sur l'amendement à l'article 6?

M. Léonard: ...ça va être sur division.

Le Président (M. Bissonnet): Est-ce que l'amendement à l'article 6 est adopté?

M. Léonard: Sur division.

Le Président (M. Bissonnet): Adopté sur division.

Est-ce que l'article 6, tel qu'amendé, est adopté?

M. Léonard: Sur division, évidemment.

Le Président (M. Bissonnet): Adopté sur division.

Alors, il est proposé...

M. Léonard: M. le Président? Le Président (M. Bissonnet): Oui? M. Léonard: II y a l'article 6.1.

Le Président (M. Bissonnet): Oui, mais, là, je vais laisser la parole à M. le président du Conseil du trésor. Vous avez un amendement que vous avez déposé pour ajouter à l'article 6?

M. Léonard: Oui, M. le Président. Est-ce que vous pourriez le lire, s'il vous plaît?

M. Johnson: Après l'article 6, M. le Président? M. Léonard: Oui.

M. Johnson: Insérer, après l'article 6, les articles suivants: «6.1... Si vous insistez, M. le Président...

M. Léonard: Je demanderais au président... M. Johnson: «Malgré les articles 5 et 6...

M. Léonard: M. le Président, je vous demanderais, vous, de le lire. La lecture serait plus agréable à entendre.

M. Filion: Vous avez une voix agréable, vous!

Le Président (M. Bissonnet): Si vous voulez. Alors, M. le président du Conseil du trésor, vous proposez un amendement après l'article 6. L'amendement a été déposé, et les membres de l'Assemblée en ont reçu copie.

Il est proposé, par le président du Conseil du trésor, d'insérer, après l'article 6, les articles suivants: «6.1 Malgré les articles 5 et 6, une convention collective, qui prévoit un plafonnement des taux et échelles de salaires ainsi que des primes des salariés à compter de 1992 ou de 1993, est reportée à une date distante de deux ans de celle du début de la période de plafonnement qu'elle prévoit; «6.2 Dans le cas d'une première convention collective agréée après l'entrée en vigueur du présent article entre un organisme public et une association de salariés, les taux et échelles de salaires, ainsi que les primes applicables aux salariés visés le jour précédant la date de la prise d'effet de la première convention collective, sont maintenus pour une période de deux ans à compter de la date de cette prise d'effet.>

S'il vous plaît, je vous demanderais l'ordre. J'ai de la difficulté. «Le premier alinéa ne s'applique pas à un groupe de salariés dont les taux, échelles et primes ont fait l'objet, pour une période d'au moins deux ans avant la prise d'effet de la première convention collective, du plafonnement prévu par l'article 23 ou l'article 24. Si ce plafonnement s'est appliqué aux groupes de salariés pour une période de moins de deux ans, les taux, échelles et primes applicables le jour précédant la prise d'effet de la première convention collective sont maintenus à compter de la date de cette prise d'effet, jusqu'à une date distante de deux ans de celle du début de la période de plafonnement; «6.3 La période de plafonnement visée par l'article 6.1 ou le deuxième alinéa de l'article 6.2 est calculée à l'exclusion de la période de prorogation de six mois prévue par l'article 5 de la Loi sur le plafonnement provisoire de la rémunération dans le secteur public.»

M. le député? (23 heures)

M. Léonard: Oui, M. le Président. Je sais que nous pourrions débattre de l'article 6.1, 6.2, 6.3, mais on me signale qu'il y a eu aussi un amendement déposé, qui porte le numéro 47.2, et qui dit ceci: «Les articles 5 à 6.1 et 7 ne s'appliquent pas à la Commission scolaire crie ni à la Commission scolaire Kativik constituées respectivement en application des articles 570 et 602 de la Loi sur l'instruction publique pour les autochtones cris, inuit et naskapis. Pour la négociation du salaire et des avantages sociaux suivant l'article 668 de cette loi, les article 6.2 et 6.3 s'appliquent à ces commissions scolaires et aux associations de salariés concernées comme s'il s'agissait d'une première convention collective.

Est-ce que je dois comprendre, à la lecture de cet amendement, que, finalement, ces commissions scolaires ne seront pas sujettes ou assujetties à la loi?

Le Président (M. Bissonnet): Très rapidement, parce que les délais...

M. Johnson: Oui, M. le Président. Précisément,

c'est conformément aux engagements pris dans le cadre des négociations et de l'entente de la Baie James que cette disposition doit être amenée.

Le Président (M. Bissonnet): Alors, sur ce...

M. Léonard: Mais, la réponse c'est qu'ils ne sont pas appliqués? Ça ne s'applique pas, donc?

Mise aux voix des articles et des amendements en bloc

Le Président (M. Bissonnet): Et sur ce, M. le député de Labelle, conformément à la motion qui a été adoptée pour suspendre certaines règles de procédure, je me dois, à ce moment-ci, compte tenu que la commission plénière a déjà terminé son heure, de mettre aux voix immédiatement, sans débat et sans appel nominal, les articles et les amendements dont la commission n'aurait pas disposé, y compris les amendements que le ministre qui présente le projet de loi n'aurait pas pu proposer en cours d'étude.

S'il vous plaît! Je m'excuse. Est-ce que l'amendement à l'article 6, ajoutant les articles 6.1, 6.2, 6.3, est adopté?

Des voix: Adopté.

M. Léonard: Je vote contre.

Le Président (M. Bissonnet): Adopté sur division.

Il est proposé, à l'article 7, la modification suivante: Remplacer cet article par le suivant: «7. Est reportée d'une année la date d'expiration d'une convention collective visée par l'une ou l'autre des ententes suivantes: «1° l'entente sur la prolongation jusqu'au 30 juin 1994 des conventions collectives se terminant le 30 juin 1992, intervenue le 29 juin 1992 entre le gouvernement du Québec et la Centrale de l'enseignement du Québec; «2° l'accord conclu le 3 juillet 1992 entre le Comité patronal de négociation pour les commissions scolaires pour protestants, les commissions scolaires confessionnelles protestantes et les commissions scolaires dissidentes pour protestants (CPNCP) et l'Association provinciale des enseignants protestants du Québec (APEPQ), ayant pour objet la prolongation jusqu'au 30 juin 1994 d'une entente entre les parties se terminant le 30 juin 1992; «3e l'accord conclu le 7 août 1992 entre le Comité patronal de négociation pour les commissions scolaires pour catholiques, les commissions scolaires confessionnelles catholiques et les commissions scolaires dissidentes pour catholiques (CPNCC) et la Provincial Association of Catholic Teachers (PACT), ayant pour objet la prolongation jusqu'au 30 juin 1994 d'une entente entre les parties se terminant le 30 juin 1992.»

Est-ce que cet amendement à l'article 7 est adopté?

M. Léonard: Contre.

Le Président (M. Bissonnet): Adopté sur division. Est-ce que l'article 7 est adopté? Adopté sur division.

M. Léonard: Sur division.

Le Président (M. Bissonnet): Parce que l'article 7 remplaçait le paragraphe. Est-ce que l'article 8 est adopté? Adopté sur division?

M. Léonard: Sur division.

Le Président (M. Bissonnet): Est-ce que l'article 9 est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Bissonnet): Adopté sur division?

M. Léonard: Sur division.

Le Président (M. Bissonnet): L'article 10. Il est proposé à l'article 10 de remplacer les deux premiers alinéas par les suivants: «S'il estime qu'une convention collective liant un organisme public visé par le paragraphe 1°, 2° ou 3° de l'article 1 comporte une stipulation ayant pour effet de rendre applicable à des salariés, pour une période d'au moins 2 ans à compter de l'année 1992, 1993, 1994 ou 1995, un plafonnement comparable à celui résultant de l'application de l'article 8 ou de l'article 9, selon le cas, le gouvernement peut, par décret, en donner acte aux parties. Alors, les articles 5 à 9 ne s'appliquent pas ou cessent de s'appliquer aux salariés visés par cette convention collective. «Si une convention collective liant un autre organisme public comporte une stipulation ayant l'effet prévu par le premier alinéa, les articles 5 à 9 ne s'appliquent pas ou cessent de s'appliquer aux salariés visés par cette convention lorsque les parties le prévoient.»

Est-ce que l'amendement à l'article 10 est adopté?

M. Léonard: Sur division.

Le Président (M. Bissonnet): Adopté sur division. Est-ce que l'article 10, tel qu'amendé, est adopté?

M. Léonard: On vote contre systématiquement.

Le Président (M. Bissonnet): Adopté sur division. Est-ce que l'article 11 est adopté?

M. Léonard: Sur division.

Le Président (M. Bissonnet): Adopté sur division. Est-ce que l'article 12 est adopté?

M. Léonard: Sur division.

Le Président (M. Bissonnet): Adopté sur division. À l'article 13, il est proposé, premièrement, de retrancher à la deuxième ligne, après le mot «reportée», les mots «par entente»; deuxièmement, remplacer dans la septième ligne les mots «de l'entente» par les mots «d'entrée en vigueur de la présente loi». Est-ce que cet amendement est adopté?

M. Léonard: Sur division.

Le Président (M. Bissonnet): Adopté sur division. Est-ce que l'article 13, tel qu'amendé, est adopté?

M. Léonard: Sur division.

Le Président (M. Bissonnet): Adopté sur division. Article 14. Il est proposé en amendement d'ajouter, à la fin, l'alinéa suivant: «Dans le cas où l'article 53 du Code du travail s'applique à la négociation d'une convention collective qui renouvelle ou remplace une convention collective dont la date d'expiration est reportée, le commencement de la phase de négociation est déterminé selon la nouvelle date d'expiration de cette convention collective.»

Est-ce que l'amendement à l'article 14 est adopté?

M. Léonard: Sur division.

Le Président (M. Bissonnet): Adopté sur division. Est-ce que l'article...

M. Gendron: M. le Président.

Le Président (M. Bissonnet): Oui.

M. Gendron: Bien, vous l'avez fini, 14?

Le Président (M. Bissonnet): II n'y a pas de débat, là.

M. Léonard: Non, il n'y a pas de débat, là. L'article 14...

M. Gendron: Question de privilège...

Le Président (M. Bissonnet): Est-ce que l'amendement à l'article 14 est adopté?

M. Léonard: Sur division.

M. Gendron: 14, sur division.

M. Léonard: L'article 14 sur division, oui.

Le Président (M. Bissonnet): Est-ce que l'article 14, tel qu'amendé, est adopté sur division? Ça va?

M. Gendron: Là, je voudrais vous poser une question de privilège.

Le Président (M. Bissonnet): Question de privilège.

M. Gendron: Oui. Est-ce que vous ne trouvez pas, à moins de vouloir absolument tourner au plus profond ridicule la Chambre... Comment vous voulez que... Ces amendements-là, ils n'ont pas été évalués, ils n'ont pas été analysés. Alors, pourquoi vous nous lisez ça, puis vous nous demandez si on est d'accord pour adopter ces amendements-là? On ne les a pas vus, puis on ne les a pas discutés d'aucune façon, à aucun endroit, puis on n'a pas le droit d'en parler.

Le Président (M. Bissonnet): M. le député, je m'excuse...

M. Gendron: Oui. Oui, oui, je veux juste...

Le Président (M. Bissonnet): Je suis l'ordre de la Chambre. Les amendements ont été distribués aux députés, ici...

M. Gendron: Oui.

Le Président (M. Bissonnet): ...et je suis les articles...

M. Gendron: Je sais tout ça.

Le Président (M. Bissonnet): ...219 et plus, qui n'ont pas été suspendus.

M. Gendron: Oui.

Le Président (M. Bissonnet): Alors, si vous me dispensez de lire les amendements, je ne les lirai pas.

M. Gendron: Mais, M. le Président, moi, c'est ça que je veux vous dire. Parce que, moi, je ne veux pas participer à une mascarade jusqu'à ce point-là. Qu'est-ce que vous voulez? Ça donne... Quand bien même vous les liriez, les amendements, on ne peut même pas les discuter, en parler; c'est sans débat, sans aucune discussion.

Le Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît, M. le député, vous savez très bien. Je m'excuse... Je vous demanderais...

M. Gendron: Question générale, c'est la farce. C'est ça, la question de privilège.

Le Président (M. Bissonnet): M. le député, j'ai

un ordre de la Chambre, ici, qui a été adopté, et je mets aux voix... Après la commission plénière, je mets aux voix, sans débat, tous les articles qui n'ont pas été adoptés et tous les amendements. Donc, j'ai une liasse d'amendements qui ont été distribués aux membres de cette Assemblée, et je poursuis la procédure. J'en suis rendu à l'article 15...

M. Gendron: Oui, mais, M. le Président, je vous demande si vous pouvez les mettre aux voix globalement, puisqu'on ne peut pas parler, puis on ne peut dire aucun mot.

Le Président (M. Bissonnet): Ça va.

M. Gendron: Moi, je vous demande de... Mettez tout ça ensemble, c'est ça que vous voulez faire, là, puis mettez fin à cette farce-là. Puis, si vous êtes d'accord, nous autres, on est d'accord pour dire: Sur division, puis, finies, les folies! C'est ça que je vous demande.

Le Président (M. Bissonnet): II y a consentement, si je comprends bien?

M. Gendron: Bien, moi... Il y a consentement, certain. Nous, on vous demande... Tout le reste, là...

Le Président (M. Bissonnet): Ça va. Il y a consentement, alors...

M. Gendron: Adopté sur division.

Le Président (M. Bissonnet): Alors... Je vais quand même... Je ne lirai pas les amendements. Si on me demande de les lire, je les lirai. Mais, je vais adopter les articles, article par article.

M. Gendron: Oui, oui. Puis, on ne dira plus un mot, là.

Le Président (M. Bissonnet): Est-ce que l'article... Il y a un amendement qui a été déposé à l'article 15. Est-ce que cet amendement est adopté?

M. Léonard: Sur division.

Le Président (M. Bissonnet): Adopté sur division. Est-ce que l'article 15, tel qu'amendé, est adopté?

M. Léonard: Sur division.

Le Président (M. Bissonnet): Adopté sur division. Est-ce que l'article 16 est adopté.

M. Léonard: Sur division.

Le Président (M. Bissonnet): Adopté sur division. Il y a un amendement qui a été déposé à l'article 17. Est-ce que cet amendement est adopté?

M. Léonard: Sur division.

Le Président (M. Bissonnet): Adopté sur division. Est-ce que l'article 17 tel qu'amendé est adopté sur division?

M. Gendron: Sur division jusqu'à la fin. Pas besoin de le demander, quant à nous.

Le Président (M. Bissonnet): Alors, un instant. Alors, je vais... Les amendements proposés aux articles 20, 21, 23, 24, 26, 28, 33, 34, 35, 36, 37, 38, 40, 41, 42, 44, 44.1, 45, 46, 47, 47.1, 47.2, 48, 49, 51. Est-ce que ces amendements sont adoptés? (23 h 10)

M. Gendron: Vous avez oublié 0-72.

Le Président (M. Bissonnet): Adopté sur division.

M. Léonard: Sauf une chose, M. le Président.

Le Président (M. Bissonnet): Un instant. Est-ce que les articles 18 et suivants, et selon les amendements proposés, sont adoptés?

Des voix: Sur division.

Le Président (M. Bissonnet): Adopté sur division.

M. Léonard: C'est que l'amendement 42 avait été lui-même sous-amendé. Vous ne l'avez pas mentionné.

Le Président (M. Bissonnet): M. le député de Labelle, je lisais les amendements. Vous m'avez demandé de ne pas lire les amendements. Donc, je les ai faits en bloc et ils sont adoptés sur division. Ceci met fin au terme de la commission plénière et je vais suspendre... Est-ce que le projet de loi 102, tel qu'amendé, est adopté?

M. Léonard: Sur division.

Le Président (M. Bissonnet): Adopté sur division. Est-ce que le titre du projet de loi est adopté?

M. Léonard: Sur division.

Le Président (M. Bissonnet): Adopté sur division.

M. Johnson: On est en train...

Le Président (M. Bissonnet): Nous sommes comme en commission plénière, M. le président du Conseil du trésor.

M. Johnson: D'accord. Parfait.

Le Président (M. Bissonnet): Alors, ceci met fin au terme de cette commission plénière et nous allons suspendre pour...

M. Johnson: II faut une motion de renumérotation.

Le Président (M. Bissonnet): Est-ce que la motion de... Un instant, là. Est-ce que la motion de «rémunotation» des articles est adoptée?

Des voix: Ha, ha, ha! M. Léonard: Sur division.

Le Président (M. Bissonnet): Vous savez, moi, je suis habitué. À Saint-Léonard, des fois, on parle italien, français. On a de la difficulté. Est-ce que la motion de...

Des voix: Ha ha, ha!

M. Léonard: En parlant...

Une voix: Renumérotation.

Le Président (M. Bissonnet): «Rémunérotation».

M. Léonard: Renumérotation.

M. Gendron: Avant, M. le Président, on voudrait savoir si le leader du gouvernement va nous garantir la version anglaise avant la renumérotation.

Une voix: En même temps.

M. Gendron: Est-ce qu'elle va suivre?

Une voix: Anglais.

Une voix: Elle est où, là?

Une voix: Elle est où?

M. Gendron: On ne l'a pas. On n'a pas de copie de la version anglaise. On ne peut pas adopter ça.

Le Président (M. Bissonnet): Alors, est-ce que la motion de...

M. Gendron: Un Parlement bilingue, ça prend la version anglaise.

Le Président (M. Bissonnet): Pour renuméroter, le projet de loi est adopté?

Une voix: Adopté.

Le Président (M. Bissonnet): Adopté. Donc, ceci met fin au terme...

M. Léonard: Sur division.

Le Président (M. Bissonnet): ...sur division, à part ça. Sur division.

M. Léonard: Sur division tout partout.

Le Président (M. Bissonnet): Alors, ceci met fin à la commission plénière et je vais suspendre les travaux de cette commission pour permettre aux membres, au personnel qui accompagne la deputation de pouvoir bien se retirer et pour que l'Assemblée poursuive les débats sur ce projet de loi.

(Suspension de la séance à 23 h 13)

(Reprise à 23 h 19)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le président de la commission plénière.

Adoption du rapport

M. Richard (président de la commission plénière): M. le Président, j'ai l'honneur de faire rapport que la commission plénière a étudié en détail le projet de loi 102, Loi concernant les conditions de travail dans le secteur public et le secteur municipal. Le projet de loi a été adopté avec amendements, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce que ce rapport est adopté?

Des voix: Adopté. Des voix: Sur division.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté sur division.

Adoption

Alors, nous poursuivons le débat. Nous sommes à l'étape de l'adoption, maintenant que le projet de loi a eu sa renumérotation. Alors, nous en sommes à l'adoption, et j'informe les membres de cette Assemblée que ce débat est d'un maximum de 60 minutes: 25 minutes au groupe parlementaire formant le gouvernement; 25 minutes au groupe parlementaire formant l'Opposition officielle; 5 minutes au groupe des députés indépendants et une réplique d'une durée maximale de 5 minutes au ministre qui présente le projet de loi. Alors, M. le président du Conseil du trésor. (23 h 20)

M. Johnson: Oui, M. le Président. Nous arrivons

à la fin d'un processus qui a été à la fois laborieux et expéditif...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Je demanderais à vos collègues de porter attention. M. le député, si vous voulez poursuivre.

M. Daniel Johnson

M. Johnson: Oui, M. le Président. Ce processus, comme je le disais, a connu des moments laborieux et d'autres qu'on pourrait qualifier d'expéditifs. Les derniers moments, expéditifs ceux-là, suite à la suspension de nos règles habituelles de discussion en commission pour l'étude détaillée, viennent du fait que la première partie des débats a été passablement laborieuse. On pouvait se plaindre tout à l'heure qu'il n'y avait qu'une minute par article ou par amendement à consacrer en commission plénière. Il faut se souvenir que l'article 4 a nécessité 9 heures de débat, M. le Président, ce qui est sans doute un record de tous les temps, soit de la faconde des députés, soit du caractère passablement entêté des lecteurs de ces articles, car, si on doit, pendant 9 heures, expliquer une disposition passablement simple, vous me permettrez d'avoir conclu, la semaine dernière, que 51 articles, y compris certains amendements dont la plupart sont de concordance et qui n'appellent pas vraiment des débats de fond, donc, que l'étude de ces articles et amendements aurait pu nous occuper pour la meilleure partie de l'été qui s'amorce. Et comme gouvernement, nous avons choisi, de façon délibérée, de manifester par un signal très clair que l'état des finances publiques est tel qu'il serait injuste, il serait, à la limite, inapproprié et très certainement ridicule, dans le pire des cas, de prétendre que nos employés peuvent préparer des demandes salariales par les temps qui courent. Ça, je l'ai déjà dit. Et, de fait, à part la Fédération des affaires sociales, CSN, nous en sommes rendus à un point où aucun de nos partenaires syndicaux n'a préparé de demande salariale comme telle, à tout le moins pour la première année d'une nouvelle convention qui débuterait le 1er juillet prochain.

Il y a donc eu un progrès réel dans la connaissance et la reconnaissance des états financiers du gouvernement de la part syndicale. Malheureusement, nous n'en sommes pas encore rendus au degré d'assurance que doit requérir un gouvernement, alors qu'il s'astreint à respecter la capacité de payer de ses concitoyens. Nous avons, cependant, il y a quelques heures, le premier ministre et moi, indiqué à nos partenaires syndicaux que cette loi, que nous comptons adopter ce soir, qui pourrait être sanctionnée, enfin signée par le lieutenant-gouverneur dans les heures qui viennent, ne serait néanmoins, comme les amendements que nous y avons apportés le prévoient, mise en vigueur que le 15 septembre prochain, c'est-à-dire dans 3 mois.

J'ai amené sur la place publique certains ajustements à la proposition gouvernementale, dont un ajustement important à mon sens, celui de réaffirmer ? et, cette fois-là, de façon très solennelle comme gouvernement, comme membre du gouvernement ? que nous devrions nous consacrer davantage, pour les 90 prochains jours, à une négociation autour des enjeux, enjeux difficiles à accepter, j'en conviens avec nos partenaires syndicaux, compte tenu du contexte financier. Mais, encore une fois, je ne veux pas m'étendre sur le sujet plus qu'il ne faut, M. le Président, sinon pour réitérer qu'il m'apparaîtrait incongru ? c'est le mot que je cherchais tout à l'heure ? de laisser croire, après publication des états financiers du gouvernement, des crédits de dépenses, du discours sur le budget, du document «Vivre selon nos moyens», de l'opinion de l'agence Moody's, qui détermine la cote du Québec sur les marchés financiers, après tous ces documents, on ne peut plus officiels les uns que les autres, de laisser penser à nos employés que nous pourrions accepter de discuter sérieusement de demandes salariales pour les 2 prochaines années, à part le fait que nous pourrions dégager des économies dans les conventions collectives, les règles d'organisation du travail et les conditions de travail. Justement, je le répète, ce serait incongru. Et l'incongruité devient de l'irresponsabilité si on laisse croire aux gens qu'on va négocier; la bonne foi consiste à dire exactement ce qu'il en est dès le départ.

À partir de ce moment-là, on peut se comprendre et donc négocier les vraies choses qui sont négociables dans les faits et la réalité. Les salaires, l'économie que nous cherchons ne peuvent pas être négociables, c'est la réalité. La réalité ne peut pas être négociable, pas plus que l'agencement du système solaire. On en est à ces évidences-là, il m'apparaît. Il aurait été irresponsable, à la limite, je le répète, que le gouvernement laisse croire que nous pouvions traiter d'augmentations de salaires.

Donc, la position gouvernementale est claire, elle apparaît dans le projet de loi 102. Il sera adopté, sa mise en vigueur est reportée au 15 septembre prochain. J'ose croire que ça donnera lieu à un climat de négociation serein, calme, à défaut de quoi ? je le disais aujourd'hui, on me le demandait ? je pourrais reconsidérer de suggérer au gouvernement que la mise en vigueur pourrait être une date plus hâtive que le 15 septembre prochain. On ne peut pas exclure que les circonstances nous feront reconsidérer, mais je ne le souhaite pas. Je l'indique encore une fois. Je souhaite des négociations. Je souhaite que nous puissions nous entendre.

M. le Président, en terminant, et conformément à l'ordre de la Chambre qui est devant vous et que vous appliquez, j'amène maintenant un amendement, encore une fois, de concordance. C'est une coquille: les mots «de la présente loi» qui apparaissaient à de nombreux endroits étaient remplacés ? vous l'avez vu tout à l'heure ? par les mots «du présent article», sauf à un endroit. L'article 13, tel qu'amendé, devrait être amendé comme suit: en remplaçant, dans la septième ligne, les mots «de la présente loi» par les mots «du présent article». Alors, si je peux remettre au page les copies nécessaires pour les membres de l'Opposition et

vous-même, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): En vertu de la motion de suspension des règles, en ce qui a trait à l'article 257, une période maximale de 15 minutes est répartie de la façon suivante sur l'amendement qui est proposé en vertu de l'article 257: 5 minutes au groupe parlementaire formant le gouvernement; 5 minutes au groupe parlementaire formant l'Opposition officielle; 3 minutes au groupe des députés indépendants, et une réplique d'une durée maximale de 2 minutes au ministre qui présente le projet de loi, au terme de laquelle les amendements seront mis aux voix immédiatement, sans débat et sans appel nominal.

Donc, nous en sommes à un amendement, en vertu de l'article 257, pour modifier l'article 13: Remplacer, dans la septième ligne, les mots «de la présente loi» par les mots «du présent article». M. le président du Conseil du trésor.

M. Johnson: Oui, M. le Président. Je n'ai pas d'intervention à faire valoir.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Je vais suspendre les travaux pour quelques instants.

(Suspension de la séance à 23 h 29)

(Reprise à 23 h 41)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Si vous voulez prendre place. M. le leader adjoint de l'Opposition officielle, vous avez une question.

M. Gendron: M. le Président, je voudrais, à ce moment-ci, vous demander qu'est-ce qui est arrivé? Qu'est-ce qui fait qu'à un moment donné, dans une motion, un ordre de la Chambre avec des temps impartis, avec une motion de suspension des règles où tout est prévu, qu'à un moment donné le président décide de suspendre la séance?

Alors, j'aimerais que vous me donniez l'explication, d'abord, pourquoi avez-vous suspendu l'Assemblée nationale conformément à l'ordre de la Chambre? C'est quoi, les motifs qui ont fait que vous avez décidé de suspendre? Première question.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Bon, alors, voici, M. le leader adjoint de l'Opposition officielle. M. le président du Conseil du trésor a proposé un amendement en vertu de l'article 257. J'ai relu avec une très grande attention la motion de suspension de certaines règles de procédure et, en vertu de l'article 257, le temps qui est révolu de 15 minutes, c'est une période de temps qui doit se faire en commission plénière.

Alors, il est évident que l'article 257 s'applique toujours comme dans un projet de loi ordinaire où le ministre qui présente un projet de loi peut faire un amendement et l'Assemblée, à ce moment-là, doit se transformer en commission plénière, sur motion du ministre qui propose l'amendement, et il y a de brèves interventions qui peuvent s'appliquer en vertu de l'article 257, conformément au règlement, et lorsque on nous serons en commission plénière, à ce moment-là, il y aura 15 minutes de temps qui seront réparties de la façon suivante par l'ordre de l'Assemblée, soit 5 minutes au groupe parlementaire formant le gouvernement; 5 minutes au groupe parlementaire formant l'Opposition officielle; 3 minutes aux députés formant les indépendants et 2 minutes de réplique.

Alors, c'est pour ça que j'ai suspendu, M. le leader, pour m'assurer que je suivais bien, très bien ? et qu'il n'y ait pas de confusion ? la motion de suspension des règles que vous avez adoptée à une période antérieure au moment où je vous parle.

Alors, oui, M. le leader adjoint de l'Opposition officielle.

M. Gendron: Bien, également, vous conviendrez qu'avec la motion de suspension des règles qui a été présentée par le leader du gouvernement, l'article 257 n'est pas suspendu et, en conséquence, la motion qui, à un moment donné, va être présentée par le leader du gouvernement n'est pas encore faite. Le leader adjoint du gouvernement n'a pas encore présenté cette motion. Est-ce que je comprends bien?

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Vous comprenez bien. Le leader adjoint du gouvernement n'a pas encore présenté la motion d'aller en commission plénière, et je vais lui céder la parole à ce moment-ci.

M. Gendron: O.K., je regarde bien.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Johnson: M. le Président, lorsque j'ai amené l'amendement à l'article 13, j'ai indiqué que c'était en vertu des dispositions qu'on retrouvait dans la motion de suspension des règles, laquelle réfère, évidemment, à 257.

Alors, ce qui était implicite devient explicite en faisant motion, M. le Président, que nous nous constituions en commission plénière afin de considérer cet amendement.

M. Gendron: M. le Président, on aura l'occasion... Il ne l'a pas fait encore.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Oui, monsieur... Je m'excuse, là. Je n'ai pas compris ce que vous avez dit. Je m'en excuse. Si vous voulez reprendre. Je m'en excuse. J'étais en discussion, là.

M. Johnson: Oui, M. le Président, en discussion avec quelqu'un d'important, d'ailleurs, à ce que j'ai

remarqué.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Non, non.

Motion proposant que l'Assemblée se transforme en commission plénière

M. Johnson: Alors, je fais donc motion, M. le Président, que cette Assemblée se constitue en commission plénière afin de considérer l'article 13 et son amendement, donc, que j'apporte.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, sur cette motion pour que l'Assemblée se constitue en commission plénière, M. le leader adjoint de l'Opposition officielle.

M. Gendron: Je ne veux pas en débattre. Les brèves explications vont être très brèves, parce qu'on aura l'occasion de dire tantôt que, quand on légifère d'une façon aussi ridicule, ça donne lieu à ce qu'on est en train de vivre. On le dira tantôt. Mais, puisque, à l'article 257, les prescriptions du règlement n'ont pas été suspendues au moins pour les 2 paragraphes, à ce moment-ci, on peut demander que cette motion soit mise aux voix. Et c'est ce que nous allons faire en demandant un vote enregistré.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Si je comprends bien, le vote nominal est demandé sur la motion...

M. Gendron: Oui, sur la mise aux voix de la folie.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): ...de se transformer en commission plénière et, conformément à l'ordre de la Chambre, qu'on appelle les députés! (23 h 46 - 23 h 53)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Mes chers collègues, si vous voulez prendre place. S'il vous plaît! S'il vous plaît! Si vous voulez prendre place, messieurs!

Mise aux voix

Je mets aux voix la motion de M. le leader adjoint du gouvernement et président du Conseil du trésor proposant que cette Assemblée se constitue en commission plénière...

M. le député de Lévis, si vous voulez m'écouter, M. le député de Lévis. M. le député de Lévis, s'il vous plaît! Je voudrais que vous m'écoutiez.

Que cette Assemblée se constitue en commission plénière afin de procéder à l'étude d'un amendement du président du Conseil du trésor à l'article 13 amendé du projet de loi 102.

Que ceux et celles qui sont pour cet amendement veuillent bien se lever!

Le Secrétaire adjoint: M. Paradis (Brome-Missis-quoi), M. Ryan (Argenteuil), M. Côté (Rivière-du-Loup), M. Sirros (Laurier), M. Tremblay (Outremont), M. Savoie (Abitibi-Est), M. Middlemiss (Pontiac), M. Johnson (Vaudreuil), M. Cusano (Viau), M. Picotte (Maskinongé), M. Ciaccia (Mont-Royal), M. Houde (Berthier), M. Maciocia (Viger), M. Maltais (Sague-nay), Mme Trépanier (Dorion), M. Cannon (La Peltrie), M. Philibert (Trois-Rivières), M. Beaudin (Gaspé), Mme Dionne (Kamouraska-Témiscouata), M. Doyon (Louis-Hébert)...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le secrétaire, un instant!

Je demanderais un peu d'ordre, s'il vous plaît! M. le député, si vous voulez prendre votre place, M. le député de... Vous savez que vous ne pouvez pas... Il faut que vous restiez à votre place. Je vous remercie de votre collaboration. Vous pouvez poursuivre le vote. Je vous demanderais votre collaboration, s'il vous plaît!

M. le secrétaire, vous pouvez poursuivre.

Le Secrétaire adjoint: Mme Bégin (Bellechasse), Mme Pelchat (Vachon), M. Marcil (Salaberry-Soulan-ges), M. Lemire (Saint-Maurice), M. Leclerc (Tasche-reau), M. Tremblay (Rimouski), M. Benoit (Orford), M. Williams (Nelligan), M. Richard (Nicolet-Yamaska), M. Charbonneau (Saint-Jean), M. Gauvin (Montmagny-L'Islet), M. Gautrin (Verdun), M. Forget (Prévost), M. Gobé (LaFontaine), Mme Hovington (Matane), M. Joly (Fabre), M. Lafrenière (Gatineau), M. Bergeron (Deux-Montagnes), M. Bordeleau (Acadie), M. Parent (Sauvé), M. Camden (Lotbinière), Mme Cardinal (Châteauguay), M. Després (Limoilou), Mme Loiselle (Saint-Henri), M. Khelfa (Richelieu), M. Lafrance (Iberville), M. Mac-Millan (Papineau).

M. Cameron (Jacques-Cartier).

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Que ceux et celles qui sont contre cette motion veuillent bien se lever!

Le Secrétaire adjoint: M. Chevrette (Joliette), Mme Blackburn (Chicoutimi), M. Biais (Masson), Mme Marois (Taillon), M. Garon (Lévis), Mme Harel (Ho-chelaga-Maisonneuve), M. Jolivet (Laviolette), Mme Ju-neau (Johnson), Mme Caron (Terrebonne), M. Dufour (Jonquière), M. Gendron (Abitibi-Ouest), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Léonard (Labelle)...

Des voix: Bravo! Bravo!

Le Secrétaire adjoint: ...Mme Vermette (Marie-Victorin), M. Paré (Shefford), M. Boulerice (Sainte-Marie?Saint-Jacques), M. Morin (Dubuc), M. Filion (Montmorency), M. Boisclair (Gouin), M. Bourdon (Pointe-aux-Trembles), M. Trudel (Rouyn-Noran-da?Témiscamingue), M. Beaulne (Bertrand), Mme Car-rier-Perreault (Les Chutes-de-la-Chaudière), M. Bélan-

ger (Anjou).

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce qu'il y a des abstentions? Aucune abstention. le secrétaire: pour: 48 contre: 24 abstentions: 0

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Cette motion est adoptée, et nous allons suspendre les travaux de cette Assemblée pour que la commission plénière entreprenne ses travaux.

(Suspension de la séance à 23 h 58)

(Reprise à 0 h 1)

Commission plénière

M. Bissonnet (président de la commission plénière): Si vous voulez prendre place.

Étude de l'amendement proposé par le ministre

La commission plénière entreprend ses travaux, suite au mandat de l'Assemblée, pour étudier la motion d'amendement de M. le président du Conseil du trésor et leader adjoint du gouvernement, à l'article 13: 13. Remplacer, dans la septième ligne, les mots «de la présente loi» par les mots «du présent article».

J'informe immédiatement les membres de cette assemblée que la période de temps pour cette commission plénière a été adoptée conformément à la motion de suspension des règles de procédure. Il y a une période maximale de 15 minutes qui est répartie de la façon suivante: 5 minutes au groupe parlementaire formant le gouvernement, 5 minutes au groupe parlementaire formant l'Opposition officielle, 3 minutes au groupe des députés indépendants, et une réplique d'une durée maximale de 2 minutes au ministre qui présente le projet de loi.

Alors, je suis prêt à écouter le premier intervenant.

M. le président du Conseil du trésor.

M. Johnson: Oui, M. le Président. C'est un amendement de concordance, M. le Président.

Le Président (M. Bissonnet): Alors, pour l'Opposition officielle, M. le député de Labelle.

M. Léonard: Je voudrais intervenir d'abord, M. le Président, pour souligner un point. On nous a déposé 34 amendements au projet de loi, tout à l'heure, mais il y en avait 35. Alors, une demi-heure après, on revient. Nous étions en troisième lecture, le ministre avait commencé son discours de clôture de troisième lecture et puis, tout à coup, il s'est aperçu qu'il avait oublié un amendement. Donc, nous devons retourner. Nous avons dû revenir en commission plénière.

M. le Président, vous voyez très bien ce qui arrive quand nous légiférons sur le bras, comme nous le faisons ce soir, à l'intérieur d'une période d'une heure. Qu'est-ce qui nous garantit, maintenant, que la loi est correcte, est parfaite? Est-ce qu'il va falloir que le président du Conseil du trésor aille chercher, pour l'aider, son collègue, ministre de l'Industrie, du Commerce et de la Technologie qui prêche la qualité totale, l'apôtre de la qualité totale, pour l'aider à rédiger un projet de loi complet, parfait? Mais encore là, peut-on être sûr que ce sera parfait, M. le Président?

Voyez-vous, 15 minutes après avoir fini le projet de loi, alors qu'on était en discours de troisième lecture, on doit revenir en commission parlementaire. C'est ça qui arrive, quand on légifère à la toute dernière minute, quand on presse le pas, quand on refuse d'aller en commission parlementaire étudier normalement un projet de loi.

Là, M. le Président, les conventions collectives que nous affectons dans ce projet de loi touchent toutes les conventions collectives. Le ministre, l'autre soir, nous a dit que ça touchait toutes les conventions collectives de 350 000 personnes, plus toutes les conventions collectives, potentiellement, de toutes les municipalités du Québec. Voilà où nous en sommes. Et de tous les corps qui relèvent des municipalités du Québec: en dessus, en dessous, à côté, intermunicipalités, tout ce qu'on veut, toute entente intermunicipale.

C'est ça qu'on affecte, à l'heure actuelle, et puis là on vient de découvrir qu'il y avait un amendement à apporter dans le projet de loi, qu'on avait oublié. Je ne sais pas qui l'a oublié. Peut-être le sous-ministre qui l'accompagnait, tout à l'heure, qui trouvait que les parlementaires n'étaient pas efficaces; peut-être que c'est lui qui a oublié de l'inclure dans la liasse des 34, puis d'ajouter ce trente-cinquième. Alors, avant de donner des conseils, peut-être que lui aussi serait mieux de s'adonner à la qualité totale: bien faire partout, à tout coup, n'importe où...

Une voix: Du premier coup.

M. Léonard: ...du premier coup. C'est ça!

Je propose au ministre, président du Conseil du trésor, de faire une session intensive de qualité totale avec son collègue, ministre de l'Industrie, du Commerce et de la Technologie. Peut-être que là, ils pourraient s'entendre aussi sur les méandres à suivre en ce qui concerne la course à la chefferie du Parti libéral bientôt. Et puis là ils s'entendront, puis ils pourront aussi se faire accompagner tous les 2 du président du Conseil du patronat du Québec. Ça pourrait peut-être aider à rétablir les ponts.

Une voix: Ha,ha, ha!

M. Léonard: Et je pense que... Ha, ha, ha!

M. le Président, je pense qu'on doit conclure là, parce que nous en sommes rendus au ridicule de tout ce que nous faisons, alors que nous sommes en train de parodier le processus parlementaire.

Voilà ce que j'avais à dire sur cet amendement oublié qui va toucher 350 000 syndiqués de la fonction publique et parapublique, plus tous les employés des municipalités du Québec.

Merci, M. le Président.

Le Président (M. Lefebvre): Merci, M. le député de Labelle.

Pas d'intervention, M. le député de Jacques-Cartier.

M. le ministre, vous avez droit à une réplique de 2 minutes.

M. Johnson: Oui, M. le Président. Je réitère qu'il s'agissait là d'un amendement de concordance. Je veux bien qu'on fasse un plat terrible avec ça et qu'on sombre dans la parodie du côté de l'Opposition, c'était un amendement de concordance, tout simplement, M. le Président.

Le Président (M. Lefebvre): Merci, M. le ministre, président du Conseil du trésor.

Est-ce que l'amendement à l'article 13 qui se lit comme suit: Remplacer, dans la septième ligne, les mots «de la présente loi» par les mots «du présent article», est adopté?

Des voix: Vote nominal.

Le Président (M. Lefebvre): Alors, il n'y a pas de vote nominal. C'est prévu dans la motion.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Lefebvre): Alors, adopté sur division.

Et ceci, évidemment, met fin à la commission plénière. Je suspends ladite commission plénière pour quelques instants, de sorte qu'on puisse faire rapport à l'Assemblée.

(Suspension de la séance à 0 h 7)

(Reprise à 0 h 10)

Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le président de la commission plénière.

Adoption du rapport

M. Lemire (président de la commission plénière): M. le Président, je fais rapport que la commission plénière a procédé à l'étude de l'amendement à l'article 13 et l'a adopté sur division.

Le Vice-Président (M- Lefebvre): Est-ce que ce rapport est adopté?

Une voix: Sur division.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Adopté sur division.

Reprise du débat sur l'adoption

Nous revenons au débat sur la motion proposant l'adoption du projet de loi 102.

Je vous rappelle qu'en vertu des règles contenues dans la motion de suspension des règles chaque groupe parlementaire a droit à une intervention globale de 25 minutes. M. le président du Conseil du trésor est intervenu, à date, pour 7 minutes. Je reconnais donc maintenant M. le député de Labelle.

M. Jacques Léonard

M. Léonard: M. le Président, le président du Conseil du trésor a commencé son intervention de clôture tout à l'heure en disant qu'au terme de ce processus il présentait ce projet de loi dont il était fier. Mais je pense, M. le Président, qu'avec un tel processus on en oublie les objectifs qu'il poursuivait, tant ce processus heurte le sens commun, le sens démocratique, après ce que nous avons connu aujourd'hui.

M. le Président, ce soir, en commençant une étude article par article... en terminant, plutôt, au cours d'une heure, une étude article par article des 47 articles qui restaient, nous avons eu droit au dépôt d'une liasse d'amendements, de 34 amendements, les uns considérables, qui étaient, finalement, une réécriture du projet de loi, puis nous avons dû les adopter, pour la plupart, presque la totalité, sans les avoir lus, sans les avoir étudiés, sans avoir pu poser des questions, parce que, paraît-il, il y avait urgence. Or, tout l'après-midi et une partie de cette soirée, nous avons bien démontré que l'urgence n'existait que dans l'esprit fumeux du président du Conseil du trésor et rien d'autre. Il n'y avait rien d'autre. Mais, surtout, nous avons eu droit à ce que cela signifie que de légiférer à la dernière minute comme il l'a fait.

Alors qu'il terminait son intervention de clôture, le président du Conseil du trésor a annoncé un trente-cinquième amendement qui avait été oublié; un trente-cinquième! Il a fallu que le président suspende la troisième lecture ici, à la Chambre, et qu'on retourne en commission plénière étudier ce nouvel amendement à l'article 13. Et là, maintenant, nous revenons en troisième lecture.

Tout ce que cela souligne, c'est l'improvisation du processus législatif du gouvernement en ce qui concerne la loi 102: l'arrivée à la dernière minute avec 34 amendements, 35 amendements, alors que jeudi dernier,

quand nous avions commencé l'étude article par article, il n'en était pas question, on n'en avait qu'un seul qui nous avait été déposé, alors on arrive à l'intérieur d'une heure pour étudier tout cela. On pourrait rigoler, M. le Président, mais c'est triste d'en arriver à une telle parodie de la démocratie, à une telle improvisation du processus parlementaire, et ça, à cause du président du Conseil du trésor qui vient ici plaider l'urgence. Il n'y en avait pas, d'urgence, en plus.

M. le Président, pour revenir au projet de loi, puisque nous sommes en troisième lecture, je souligne à nouveau qu'il intervient après 2 projets de loi de même nature, l'un en 1991, qui a été déposé le 15 mai 1991, et un autre qui a été déposé le 14 mai 1992, l'un qui portait sur le plafonnement provisoire de la rémunération, qu'on a prolongé, qu'on est en train de prolonger par la loi 102, de 2 ans. C'est un plafonnement provisoire prolongé de 2 ans, gelé pour 2 ans. Nous avons dit, finalement, qu'il s'agissait d'un surgelage ou d'un surgel de la rémunération dans le secteur public. Effectivement, le président du Conseil du trésor fait intervenir des objectifs financiers, d'équilibre financier du gouvernement, mais le processus lui-même discrédite en quelque sorte les affirmations du gouvernement. Et c'est là où c'est dommageable pour le public, pour les citoyens qui ne peuvent trouver, finalement, que du cynisme à la suite d'une telle démarche et se poser des questions sur la valeur des déclarations du gouvernement quand il plaide l'urgence et la gravité de la situation financière.

Nous en sommes convaincus, que la situation financière est grave, qu'elle exige des correctifs urgents. Oui, nous en sommes convaincus. Mais quand on procède de cette façon, on ne met pas les chances de son côté. C'est ça qui se passe. Et le président du Conseil du trésor est en train, finalement, de polluer le climat des relations syndicales, des relations du travail à l'intérieur du gouvernement et il se met dans une position où il ne pourra pas refaire l'organisation gouvernementale, refaire, reprendre l'organisation du travail. C'est ça qui est triste et très dangereux pour l'avenir.

Alors, aujourd'hui, dans son projet de loi, il propose de geler la rémunération des travailleurs, de réaliser une économie de 1 % qu'il a qualifiée pompeusement de gain de productivité. Et il faut dire «pompeusement» parce qu'au fond on sait très bien que ce n'est pas cela qui va arriver, c'est simplement qu'on va retirer 3 jours de paie ou qu'on va donner un congé de 3 jours sans salaire. Et puis, on prolonge les conventions collectives de 2 ans, mais surtout, surtout, M. le Président, on intervient dans un domaine où le gouvernement n'avait jamais mis les pieds, la gestion des ressources humaines à l'intérieur des municipalités. Et là, maintenant, par le fait qu'on applique le projet de loi au secteur des relations du travail à l'intérieur des municipalités, on vient, comme gouvernement, de s'ingérer dans la gestion des municipalités. On vient de créer un très dangereux précédent pour l'avenir parce que l'économie des municipalités, l'économie administrative, financière, et puis la gestion des ressources humaines des municipalités s'en trouveront affectées pour l'avenir. Et Dieu sait si, à partir de ce précédent, on n'ira pas beaucoup plus loin plus tard. C'est ça. Parce qu'un coup qu'on aura mis le pied dans l'engrenage, on va aller plus loin. On sera tenté, dès qu'on aura un problème.

M. le Président, on vient de battre en brèche un principe fondamental de l'administration municipale, de l'autonomie municipale. On vient de déresponsabiliser des élus municipaux, mais, en même temps, on a aussi touché tous les autres corps constitués dans la société comme le réseau de la santé, le réseau de l'éducation, les universités, etc. On bouleverse les relations du travail; tout ça à partir d'un Conseil du trésor, d'un président du Conseil du trésor qui a été pris à partie, lui-même, par le Vérificateur général, le Vérificateur général du Québec, qui a démontré, dans son rapport, que l'une des failles majeures de l'administration gouvernementale consistait, justement, dans la mauvaise gestion des ressources humaines au gouvernement. Alors, ce président du Conseil du trésor, qui est en mal de course à la chefferie libérale... en mal de course à la chefferie libérale ? Ah, il est là; ah bon, il est là. Il faudrait vous asseoir à votre place, là, avant d'intervenir. M. le Président, il faudrait le faire asseoir à sa place, article 32, pour le président du Conseil du trésor ? alors, en mal de course à la chefferie, M. le Président...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Un instant, un instant, monsieur.

M. Léonard: ... a été...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Un instant, un instant. M. le député de Berthier.

M. Houde: II faudrait demander la pertinence, s'il vous plaît, au député de Labelle.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Continuez, continuez votre intervention. (0 h 20)

M. Léonard: M. le Président, M. le Président, oui, je pense qu'il a un esprit brumeux. Il vient de démontrer qu'il n'a pas suivi mon raisonnement. Le président du Conseil du trésor, pour le bénéfice du député de Berthier, a été pris à partie par le Vérificateur général du Québec dans son dernier rapport, déposé au mois de décembre ? au cas où vous ne l'auriez jamais lu, là ? a été pris à partie par le Vérificateur, qui a fait rapport sur la moitié, une bonne partie, la moitié de la gestion des ressources humaines, et il fera rapport l'an prochain sur l'autre moitié de la gestion des ressources humaines. Et puis, il y avait une planification, une reddition de comptes inexistante sur les ressources humaines, M. le député de Berthier, M. le Président. Il faudrait qu'il enregistre ça, qu'il suive le raisonnement.

Alors, le président du Conseil du trésor est particulièrement mal placé pour s'ingérer dans la gestion des

ressources humaines, à l'intérieur des réseaux de l'éducation, de la santé, des municipalités, particulièrement mal placé; particulièrement mal placé, aussi, pour intervenir, par des lois comme celle-là, dans la gestion des ressources humaines, des employés de l'État, de la fonction publique en particulier.

Et puis, M. le Président, je pense que le pire, dans tout cela, c'est qu'on en est rendu, finalement, à un climat de relations de travail qui sera pourri, à partir de maintenant, parce qu'on aura imposé, imposé, une loi matraque comme celle-là, même pas par un bâillon ? parce que, encore là, il y a des règles qui s'appliquent à un bâillon ? mais par la suspension des règles de l'Assemblée nationale. Nous en sommes venus à une république de bananes, à un Parlement fantoche. C'est épouvantable, et l'habitude qu'on a prise de suspendre les règles, l'an passé, au mois de juin, en votant d'un seul coup 28 lois; la même chose, à Noël, un autre 4 lois importantes, d'un seul coup, avec un débat de 2 heures; et maintenant, voilà qu'on intervient encore, en gelant les salariés de la fonction publique, parapublique et toutes les municipalités, encore par un débat de 2 heures: M. le Président, nous en sommes rendus à un État fantoche.

Je pense que, lorsqu'on analyse l'histoire des démocraties dans le monde occidental, on voit très bien que c'est comme ça, c'est comme ça que les démocraties s'écroulent.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le député de Labelle.

M. le député d'Abitibi-Ouest, leader adjoint de l'Opposition officielle, je vous cède la parole.

M. François Gendron

M. Gendron: Oui, M. le Président, assez rapidement, puisque nous en sommes à la dernière étape d'une parodie en 3 actes.

Le premier acte, lors du dépôt du cadre, à la fin de mai, où on a prétendu que c'était important de ? j'écoutais le président du Conseil du trésor ? donner les balises, en disant que la logique commandait de dire à ce monde-là qu'il n'y avait rien sur la table, qu'il n'y avait rien à négocier, tous les efforts avaient été faits, même s'il y en a plusieurs qui ont un autre point de vue, je l'ai déjà cité: un gel salarial qui ne règle rien. Ce n'est pas l'opinion de celui qui vous parle... même, mais c'est pour donner le point de vue de quelqu'un de l'extérieur, un peu plus objectif.

J'avais l'occasion, lors du premier acte de cette parodie, d'indiquer qu'il y en a d'autres qui ont le même point de vue. Même si le président du Conseil du trésor prétend que c'est la solution, M. Bilodeau, dans un editorial, disait: Ça ne donne pas pour autant pleine crédibilité à la démarche globale du président du Conseil du trésor. Elle en aurait davantage si elle nous donnait la preuve que les budgets de services à la population ont priorité sur ceux de la bureaucratie. Si, pour réaliser des gains de productivité, il y avait quelque chose d'autre que sa trouvaille de 3 jours; s'il prenait la peine de faire une distinction entre les diverses catégories de salariés. Évidemment, dans la parodie à laquelle on assiste, il n'est pas question de rien de ça.

Deuxième acte: commission parlementaire. Le président du Conseil du trésor décide, comme étant le roi de la sagesse, qu'une commission parlementaire, passé 14 h, ça n'a plus aucun résultat possible. Ça ne donne rien de permettre aux parlementaires de s'exprimer. 14 h, selon lui, serait un record sans précédent pour adopter 4 articles, alors qu'on sait que ces gens-là nous ont fait passer deux mois et demi, lors de la première année où on a légiféré, en pleine session d'été, au mois de juillet et août, pour l'adoption de la loi 101. Il n'y a pas de record là, après 14 h. C'est juste le temps normal pour faire les remarques préliminaires, dans une loi aussi majeure comme ça.

Troisième acte: c'est cet après-midi, où, encore là, on a presque atteint la limite de la loufoquerie en prétendant l'état d'urgence, alors qu'ils n'ont même pas eu le courage d'appeler les parlementaires pendant 4 jours de session intensive, puisque la dernière fois qu'on a eu l'occasion de parler de ce projet de loi là, c'est jeudi dernier. Nous sommes en session intensive. Vendredi, pas d'appel du projet de loi; lundi, pas d'appel du projet de loi; mardi, pas d'appel du projet de loi, mais, c'est urgent, comme ce n'est pas possible! C'était tellement urgent que, tantôt, en commission plénière, il y avait autant d'amendements proposés qu'il y avait d'articles.

Et, comme si ce n'était pas assez, comme si ce n'était pas suffisant, M. le Président, on est obligés de revenir en commission plénière parce qu'il y avait une coquille, puis probablement qu'on apprendra qu'il y avait bien des coquilles. Nous, on pense que la coquille, c'est l'ensemble de ce gouvernement-là. Ça, c'est la coquille. Ce n'est pas le projet de loi. Et, dans ce sens-là, le troisième acte n'est pas plus drôle que les autres. Et ça prouve jusqu'à quel point, quand un gouvernement en est rendu que, dès qu'il y a quelque chose qui ne fait pas son affaire, ce n'est pas compliqué, il rentre en Chambre, puis il invoque l'urgence, puis il suspend les règles, puis on procède...

La nouvelle démocratie, pensant que ça, ça va privilégier une entente, ça va faciliter un climat de négociation convenable. Imaginez! Le climat de négociation va être bon, va être très avantageux. Une épée de Damoclès sur la tête, en disant: II n'y a rien à négocier, mais venez vous asseoir à la table, on est ouvert. Parce que là, il aura sa loi dans 8, 10 minutes. Le projet de loi sera adopté, puis là, ça va être un climat propice aux négociations.

Et surtout, moi, comme porte-parole en matière d'affaires municipales, je ne peux pas, non plus, laisser passer sous silence le droit nouveau qu'on instaure. Pour la première fois, un gouvernement s'immisce dans le monde municipal et prétend qu'il est devenu l'employeur des employés municipaux, indépendamment des

responsabilités, indépendamment du discours, même si ces gens-là se promènent partout pour dire: Nous, on a confiance au monde municipal et on veut que les gens des municipalités se responsabilisent; dorénavant, on introduit une nouvelle dimension dans les relations de travail au Québec, on ne regarde pas les conséquences que ça peut créer pour l'avenir. Parce que, comme mon collègue le disait tantôt, j'ai l'impression que c'est un précédent dangereux qui peut coûter cher dans l'avenir des relations de travail. Ça, ils s'en foutent parce que nos balanceurs de colonnes veulent absolument s'assurer de récupérer 170 000 000 $ alors qu'il y a 500 000 000 $ au noir ? ça, ça ne les intéresse pas ? il y a 500 000 000 $ en contrebande de cigarettes ? mais ça, il n'est pas question de toucher à ça ? et il y a des milliards d'échappatoires fiscales. Ça, ils ne regardent pas ça, ça ne les intéresse pas, il n'y a pas de mesures pour essayer de contrer ça.

C'est pour ça, M. le Président, qu'en ce qui me concerne, moi, je mets fin à cette parodie en dénonçant toute cette situation absolument insultante.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le député de Masson, je vous cède la parole.

M. Yves Blais

M. Blais: M. le Président, je suis content que le ministre des Affaires municipales soit ici ce soir, parce qu'on a parlé de coquilles à la commission plénière. Mais je voudrais souligner au ministre des Affaires municipales que cette loi, vu qu'il est là pour protéger les municipalités, a dans son sein, par son verbatim même, un vide juridique possible qui a des conséquences excessivement graves sur l'administration municipale. Et le voici. J'en ai parlé, à l'entracte, au président du Conseil du trésor et il m'a dit que c'était vrai, à part ça.

Il arrive ceci. Le voeu du président du Conseil du trésor est de signer les conventions avec tout le public et le parapublic avant le 15 septembre. S'il signait avec tout le public et le parapublic avant le 15 septembre, la loi devient caduque. Si la loi devient caduque et si, entre aujourd'hui et le 15 septembre, des municipalités prennent l'autorité que vous leur donnez de signer des conventions en gelant pendant 2 ans les employés municipaux, eh bien, à ce moment-là, leur acte qu'ils ont fait devient illégal, illégitime, si la loi devient caduque. Alors, les municipalités seraient... Si c'est signé, si c'est votre voeu, à moins que le voeu du gouvernement, ce soit qu'il ne veut pas signer ces conventions collectives avec les employés de l'État et l'employé paragouverne-mental. À ce moment-là, qu'est-ce que les villes qui auraient signé un gel de 2 ans avec leurs employés... Il y en a 200 000, au Québec; il y a 1568 municipalités, il y a les policiers, il y a les pompiers, les employés municipaux, les CIT, etc. Alors, si des villes se prévalent de cette loi et signent des conventions avant le 15 septembre et que le ministre signait avec tous les employés du gouvernement et du parapublic, la loi devenant caduque, qu'est-ce que vous allez faire avec les municipalités qui ont déjà signé?

J'ai demandé cette question, à la pause, au président du Conseil du trésor. Il m'a dit: II faudrait revenir en Chambre, en octobre, et regarder de quelle façon on pourrait amender le Code du travail, etc. Ça veut donc dire que, loin des coquilles, on a un vide juridique ici dont les conséquences sont énormes. Et on s'en fout. On passe ça dans 1 heure sans lire la loi, et je ne voudrais pas être de l'autre côté, qu'on nous dise qu'on a abusé. Si on avait étudié de façon très honnête ce projet de loi, eh bien, le ministre des Affaires municipales aurait eu le temps, d'abord, de regarder les vides juridiques dont je viens de parler, surtout celui-là. On aurait pu faire une correction. À cause de cela, M. le Président, je trouve ça énorme qu'on impose un temps aussi court pour une chose aussi conséquente, et je suis persuadé que le ministre des Affaires municipales en tiendra compte.

Je vous remercie beaucoup, M. le Président. (0 h 30)

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le député de Masson. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? M. le ministre des Affaires municipales, je vous cède la parole.

M. Claude Ryan

M. Ryan: Oui, juste quelques mots, M. le Président, vu que le député de Masson m'a interpellé cordialement. À propos des municipalités, elles sont incluses dans le projet de loi 102 parce qu'elles l'ont demandé avec insistance. Je pense que nous le savons tous, dès l'année dernière, lorsque des premières mesures de restrictions en matière de rémunération furent instituées par le gouvernement, l'Union des municipalités du Québec avait demandé avec beaucoup d'insistance d'être incluse dans le train de mesures gouvernementales et, malheureusement, ce ne fut pas possible de le faire parce que, déjà, des engagements avaient été pris en relation avec ces négociations et il fallut que le monde municipal fut laissé à sa seule responsabilité. dans un contexte où certaines dispositions législatives concernant les négociations dans le secteur municipal créaient des difficultés sérieuses pour celui-ci ? en particulier, le régime de négociation que nous avions pour les policiers et les pompiers se traduisait, très souvent, par des arbitrages dont les résultats étaient parfois fort coûteux ? il s'est créé entre les municipalités et les secteurs public et parapublic québécois un écart considérable qui est d'au moins 25 % en matière de rémunération. les municipalités nous disaient: aussi longtemps que les choses demeurent ce qu'elles sont, nous ne pouvons pas résister, parce que, lorsqu'un arbitrage vient donner une augmentation de salaire, disons, de 6 % ou 7 % aux policiers, que pensez-vous que les cols bleus et les cols blancs de la municipalité feront? que pensez-vous que les cadres feront? ils pourront bien consentir un sacrifice une année ou l'autre,

mais il y a un effet d'entraînement considérable. Et lorsqu'une...

Une voix: Le vide juridique.

M. Ryan: J'y viens au vide juridique, j'y viens. Et lorsqu'une municipalité se voit imposer une augmentation considérable, le phénomène d'entraînement se produit immédiatement dans les autres. On a assisté au Québec, depuis une quinzaine d'années, à une véritable spirale d'augmentations de ce côté-là, et les municipalités suppliaient littéralement le gouvernement de les inclure cette année dans le projet de loi.

Le député s'inquiète, il dit: Si le projet de loi conduit à des négociations qui rendent plus ou moins caduques, en septembre prochain, les dispositions législatives, qu'arrivera-t-il des municipalités? C'est un point pertinent que soulève le député de Masson. Je veux l'informer que nous en avons discuté, le président du Conseil du trésor et moi-même, et que nous apporterons une solution à ce problème, une solution convenable. Nous n'avons pas terminé l'étude du projet de loi. Je pense qu'il est important d'examiner ce sujet, parce qu'à supposer que tout se réglerait par voie de négociation avec les centrales syndicales ? ce que nous souhaitons vivement ? d'ici le 15 septembre, c'est évident que la question se pose: Qu'est-ce qui arrive pour les municipalités? Le député de Masson a raison. Mais je veux l'assurer, encore une fois, que nous avons examiné le dossier, que nous sommes parfaitement conscients de cette situation et qu'une solution raisonnable, une solution acceptable autant au gouvernement qu'au monde municipal et à l'Assemblée nationale sera instituée.

Voilà pour ce qui en est de l'intervention du député de Masson. Le président du Conseil du trésor s'en chargera, et ce sujet a fait l'objet d'échanges entre nous au cours de la soirée, et il a fait également l'objet d'échanges avec des représentants autorisés du monde municipal. J'ajoute, finalement, que l'autonomie municipale est conservée dans le projet de loi, parce que chaque municipalité qui le veut peut décider de se retirer librement des mesures que prévoit le projet de loi. On ne peut pas demander une mesure plus respectueuse de l'autorité municipale que celle-là. N'importe quelle municipalité du Québec peut décider, à la majorité de son conseil municipal, qu'elle se retire de ce programme et qu'il ne l'affectera, par conséquent, en aucune manière.

Alors, voilà une formule originale, formule complètement inédite, complètement nouvelle, que nous avons mise au point grâce aux rapports de respect mutuel et de collaboration qui existent entre le gouvernement et le monde municipal. Et vouloir utiliser le monde municipal pour tenter de discréditer le projet de loi 102, je pense que c'est viser une fort mauvaise cible en l'occurrence.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le ministre des Affaires municipales. S'il n'y a pas d'autres interventions, je vais permettre à M. le ministre, président du Conseil du trésor, de procéder à sa réplique. Vous pouvez répliquer pour 5 minutes.

M. Daniel Johnson (réplique)

M. Johnson: Oui, je vous remercie, M. le Président. À la fin de ce processus, je rappelle la volonté du gouvernement d'en arriver à des conventions collectives négociées. Je redis que la réalité s'impose par ailleurs à notre esprit, qu'il y a, dans l'économie du Québec et l'économie nord-américaine, des éléments qui ont emporté une crise véritable des finances publiques en raison des systèmes de programmes que nous avons retenus depuis une génération et des modes de perception de revenus que nous avons également arrêtés depuis au moins tout aussi longtemps, et que la conjugaison de ces programmes et des modes de fonctionnement de la fiscalité, dans une conjoncture économique comme celle que nous connaissons, nous amène à assurer la santé financière du gouvernement du Québec par un projet de loi comme celui-là.

Je réitère que nous n'avons pas l'intention, dans les circonstances et dans le contexte actuel, de mettre ces dispositions en vigueur avant le 15 septembre afin que, d'ici là ? 90 jours ? nous puissions en arriver à négocier, donc à pouvoir nous entendre avec nos employés à l'intérieur d'un cadre financier extrêmement contraignant, je le redis et je le reconnais.

Quant aux municipalités, elle bénéficieront, dès l'adoption et la sanction de la loi ces heures prochaines, si l'Assemblée le souhaite ainsi, elle bénéficieront, dis-je, de la disposition qui leur permet de se soustraire à l'application de la loi. Certaines d'entre elles nous ont souligné qu'elles ne voulaient pas attendre un tel délai avant que de se soustraire à la loi. C'est ce que l'amendement à l'article 42, que nous avons amené tout à l'heure, prévoit.

Par ailleurs, et le ministre des Affaires municipales a parfaitement répondu au député de Masson, nous avons également à l'esprit la situation où nous pourrions nous entendre avec l'ensemble de nos employés, laissant ainsi les seules municipalités qui ne se seraient pas soustraites à la loi, je dirais, peut-être en ayant à la main ce pouvoir que nous leur octroyons.

Évidemment, dans le contexte où nous nous entendons avec nos employés, on pourrait considérer ne pas mettre en vigueur la loi, auquel cas, qu'est-ce qui arrive? Il arrive, M. le Président, la même chose qui arrive à partir de tout de suite: tout le monde a le droit d'essayer de négocier et nous verrons en temps utile, si la situation se présentait, comme l'a indiqué mon collègue, comment nous pourrions reconnaître la situation particulière dans laquelle nous serons ou serions avec une convention négociée avec quelconque de nos employés, certains d'entre eux, la majorité, tous parmi eux. Je l'ignore, on verra. Je souhaite évidemment que ce soit avec tous nos employés. Alors qu'il y aurait des situations inégales dans les différentes municipalités, nous

aurons à les traiter d'une façon qui respectera les désirs des municipalités et le gros bon sens, dans la mesure où, si nous nous entendons avec 350 000 ou 400 000 personnes, je ne peux pas croire que l'ensemble du milieu du travail, des organismes municipaux, des organismes et sociétés d'État du gouvernement du Québec ne prendraient pas acte de cette reconnaissance que représente, dans les circonstances actuelles, une convention collective négociée selon les paramètres gouvernementaux.

En conséquence, M. le Président, je soumets une dernière fois à cette Assemblée la proposition que nous adoptions ce projet de loi.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le président du Conseil du trésor. Cette dernière intervention met fin au débat sur la motion proposant l'adoption du projet de loi 102 que je vais maintenant mettre aux voix.

Une voix: Vote nominal! Une voix: Adopté. Une voix: Vote nominal.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Vote nominal. Qu'on appelle les députés! (0 h 40 ? 0 h 46)

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Mmes et MM. les députés, s'il vous plaît!

Mise aux voix

Alors, je mets aux voix la motion proposant l'adoption du projet de loi 102, Loi concernant les conditions de travail dans le secteur public et le secteur municipal. Que ceux et celles qui sont en faveur de cette motion veuillent bien se lever, s'il vous plaît.

Le Secrétaire: M. Paradis (Brome-Missisquoi), M. Ryan (Argenteuil), M. Côté (Rivière-du-Loup), M. Sirros (Laurier), M. Tremblay (Outremont), M. Savoie (Abitibi-Est), M. Middlemiss (Pontiac), M. Johnson (Vaudreuil), M. Cusano (Viau), M. Picotte (Maskinon-gé), M. Ciaccia (Mont-Royal), M. Houde (Berthier), M. Maciocia (Viger), M. Maltais (Saguenay), Mme Trépa-nier (Dorion), M. Cannon (La Peltrie), M. Philibert (Trois-Rivières), M. Beaudin (Gaspé), Mme Dionne (Kamouraska-Témiscouata), M. Doyon (Louis-Hébert), Mme Bégin (Bellechasse), Mme Pelchat (Vachon), M. Marcil (Salaberry-Soulanges), M. Lemire (Saint-Maurice), M. Leclerc (Taschereau), M. Thérien (Rousseau), M. Tremblay (Rimouski), M. Benoit (Orford), M. Williams (Nelligan), M. Messier (Saint-Hyacinthe), M. Richard (Nicolet-Yamaska), M. Charbonneau (Saint-Jean), M. Gauvin (Montmagny-L'Islet), M. Gautrin (Verdun), M. Forget (Prévost), M. Gobé (LaFontaine), Mme Hovington (Matane), M. Joly (Fabre), M. Lafre-nière (Gatineau), M. Bergeron (Deux-Montagnes), M.

Bordeleau (Acadie), Mme Boucher Bacon (Bourget), M. Parent (Sauvé), M. Camden (Lotbinière), Mme Cardinal (Châteauguay), M. Després (Limoilou), Mme Loiselle (Saint-Henri), M. Khelfa (Richelieu), M. Lafrance (Iberville), M. MacMillan (Papineau), M. Cameron (Jacques-Cartier).

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Que ceux et celles qui sont contre cette motion veuillent bien se lever, s'il vous plaît. (0 h 50)

Le Secrétaire: M. Chevrette (Joliette), Mme Blackburn (Chicoutimi), M. Biais (Masson), Mme Ma-rois (Taillon), M. Garon (Lévis), Mme Harel (Hochela-ga-Maisonneuve), M. Jolivet (Laviolette), Mme Juneau (Johnson), Mme Caron (Terrebonne), M. Gendron (Abi-tibi-Ouest), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Léonard (Labelle), Mme Vermette (Marie-Victorin), M. Paré (Shefford), M. Boulerice (Sainte-Marie?Saint-Jacques), M. Morin (Dubuc), M. Filion (Montmorency), M. Bois-clair (Gouin), M. Bourdon (Pointe-aux-Trembles), M. Trudel (Rouyn-Noranda?Témiscamingue), M. Beaulne (Bertrand), Mme Carrier-Perreault (Les Chutes-de-la-Chaudière), M. Bélanger (Anjou).

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Il y a des abstentions? Pas d'abstention. le secrétaire: pour: 51 contre: 23 abstentions: 0

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, le projet de loi 102 est adopté.

Nous sommes toujours à l'étape des affaires du jour. M. le leader du gouvernement, je vous écoute.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je vous prierais d'appeler l'article 14 du feuilleton.

Projet de loi 72

Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Nous continuons les travaux de l'Assemblée. À l'article 14 du feuilleton, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission de l'éducation sur le projet de loi 72, Loi modifiant le Code des professions et la Loi sur les infirmières et les infirmiers. M. le ministre responsable du Code des professions, je vous cède la parole.

M. Raymond Savoie

M. Savoie: Très rapidement, M. le Président. Je veux tout simplement souligner que le projet de loi en question a été, comme vous le savez, déposé le 18 décembre 1992. Le principe a été adopté le 11 juin. La

commission de l'éducation en a fait l'étude détaillée le 14 juin 1993 et en a adopté les 9 articles sans amendement, M. le Président. Enfin, le rapport de la commission a été déposé ici, à cette assemblée...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Un instant, un instant, M. le ministre, je ne vous entends pas. Les députés à ma droite, en arrière, là... M. le député de Rimouski, vous distrayez vos confrères. M. le ministre, continuez votre intervention, s'il vous plaît.

M. Savoie: Le rapport de la commission, M. le Président, a été déposé le 15 juin. Alors, je ne crois pas qu'il soit nécessaire de rappeler le but du projet de loi 72, le fait qu'il s'agisse, évidemment, de tout simplement ramasser 9 ou 10 modifications concernant le Code des professions du Québec et de faire une introduction sous un projet de loi afin de sauver le temps et le travail de l'Assemblée nationale, de même que les instances gouvernementales chargées de surveiller la rédaction et l'interprétation de nos lois.

M. le Président, je demande donc, en conséquence, de bien vouloir adopter le rapport de la commission de l'éducation sur l'étude du projet de loi 72.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le ministre. Mme la députée de Terrebonne, je vous cède la parole.

Mme Jocelyne Caron

Mme Caron: Merci, M. le Président. Alors, évidemment, nous avons étudié ce projet de loi de 9 articles, que le ministre considérait comme un projet mineur, relativement léger, pour citer ses paroles. Mais il y avait certains principes majeurs, et, contrairement aux souhaits du ministre, nous n'avons pu étudier ce projet de loi en 1 heure seulement. Le ministre croyait que nous pourrions étudier ce projet de loi en 1 heure. Nous avons donc pris le temps d'étudier le projet article par article et nous avons enregistré une dissidence sur un principe fondamental, qui était celui qui donnait un pouvoir d'enquête, à l'article 6.

Alors, M. le Président, comme nous avions décidé que la prise en considération du rapport devait se faire sans débat, nous ferons le débat au moment de l'adoption. Je vous remercie.

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, Mme la députée. Est-ce que le rapport de la commission de l'éducation sur le projet de loi 72, Loi modifiant le Code des professions et la Loi sur les infirmières et les infirmiers, est adopté? Adopté. M. le ministre des Communications.

M. Cannon: M. le Président, je vous prierais d'appeler l'article 15, s'il vous plaît.

Projet de loi 75 Adoption

Le Vice-Président (M. Lefebvre): À l'article 15 de notre feuilleton, M. le ministre des Affaires municipales propose l'adoption du projet de loi 75, Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant l'abolition de la Société d'aménagement de l'Outaouais. M. le ministre des Affaires municipales, pas d'intervention? M. le député d'Abitibi-Ouest, pas d'intervention?

M. Gendron: Pas d'intervention.

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Est-ce que le projet de loi 75, Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant l'abolition de la Société d'aménagement de l'Outaouais est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Adopté. M. le ministre des Communications.

M. Cannon: M. le Président, je vous prierais d'appeler l'article 1.

Projet de loi 92 Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Lefebvre): À l'article 1 de notre feuilleton, M. le ministre des Affaires municipales propose l'adoption du principe du projet de loi 92, Loi modifiant la Loi sur la fiscalité municipale et d'autres dispositions législatives. M. le ministre.

M. Claude Ryan

M. Ryan: M. le Président, ce projet de loi vise à apporter une solution à un problème très aigu qui a surgi en matière de taxation des entreprises ferroviaires pour fins municipales. Notre régime fiscal municipal contient de nombreuses dispositions concernant les voies ferrées. D'abord, l'assiette d'une voie ferrée n'est pas assujettie, actuellement, à la surtaxe qu'une municipalité locale peut imposer sur les terrains vagues. Ensuite, la voie ferrée elle-même n'est pas inscrite au rôle d'évaluation foncière. Seule son assiette est inscrite au rôle. Enfin, la valeur de l'assiette de la voie ferrée est établie, pour les fins de son inscription au rôle d'évaluation foncière selon une règle particulière qui fait appel à la valeur moyenne au mètre carré des autres terrains du territoire municipal local. On comprend ça, parce que l'assiette d'une voie ferrée, c'est une bande de terrain qui s'étend en longueur; elle n'a pas de valeur marchande comme telle. Alors, pour l'évaluer aux fins de

taxation municipale, on prend la moyenne de l'évaluation par mètre carré pour l'ensemble du territoire de la municipalité et on l'applique à la superficie que représente l'assiette de la voie ferrée.

Alors, il y a différents problèmes qui se sont posés, depuis des années, auxquels des solutions n'avaient malheureusement pas été apportées. Le premier problème consiste dans la détermination des voies ferrées visées par les divers éléments du régime fiscal. Le sens normal des mots «voie ferrée» désigne tout ensemble formé de rails et de traverses installé sur du balastre et doté d'un accotement. S'il est assez clair que ce concept convient aux structures ferroviaires que l'on retrouve le long des routes ou dans les champs, on peut se demander s'il s'applique aussi lorsque les rails et les traverses se trouvent dans une cour de triage ou dans une gare. De grosses différences ont surgi quant à l'interprétation qu'il convient de donner aux rails qui sont situés dans des cours de triage ou dans des gares.

Au-delà du sens normal des mots, la disposition législative créant la règle spéciale quant à la valeur à inscrire au rôle de l'assiette d'une voie ferrée précise que celle-ci comprend les fossés et les remblais aménagés de chaque côté de la voie. Certains en ont déduit que les mots «voie ferrée» ne pouvaient jamais, en droit municipal, viser les rails et les traverses situés dans une cour de triage ou une gare. D'autres, au contraire, ont vu dans cette précision, l'indice d'une volonté différente du législateur. Là où cette précision n'existe pas, c'est-à-dire dans les dispositions relatives à la non-inscription au rôle de la voie ferrée elle-même et au non-assujettissement de son assiette à la surtaxe sur les terrains vagues, les mots «voie ferrée» doivent aussi viser les rails et les traverses situés dans une cour ou une gare.

Un problème se pose à propos des passages à niveau aussi. On se demande s'ils doivent être taxés à titre de voies ferrées ou à titre d'assiettes situées le long d'une voie publique. Évidemment, la valeur du terrain est bien différente, à ce moment-là. (1 heure)

Un problème a sugi récemment, en conséquence de la Loi 145. La loi 145 autorise une surtaxe sur les immeubles non résidentiels; la surtaxe peut se substituer à l'ancienne taxe sur la valeur locative. Or, les voies ferrées, jusqu'à l'adoption de la loi 145, n'avaient pas été assujetties à la taxe d'affaires. Là, plusieurs municipalités où se trouvent des voies ferrées, et en particulier les cours de triage, ont voulu profiter de la loi 145 pour imposer, aux voies ferrées qui sont situées dans les cours de triage, une surtaxe sur les immeubles non résidentiels. Évidemment, ça a entraîné une augmentation considérable du compte de taxes des entreprises ferroviaires. Celles-ci ont protesté avec vigueur et ont fait savoir par toutes sortes de moyens qu'elles ne pouvaient pas accepter la situation qui leur était ainsi causée.

Je voudrais donner lecture, à ce sujet, d'une lettre qui était adressée, en avril dernier, par le vice-président exécutif et chef de la direction financière de Canadien

National, M. Yvon Masse. Cette lettre était adressée au ministre des Finances, le député de Bonaventure. Je pense que c'est intéressant pour comprendre le problème auquel nous cherchons une solution ce soir. Elle se lit comme suit: «Je voudrais attirer votre attention sur l'importance du fardeau fiscal qui incombe au Canadien National, alors que cette entreprise traverse l'une des pires crises de son histoire. Dans une telle perspective, il est certainement approprié d'évoquer les conséquences adverses que toute augmentation de ce même fardeau fiscal ne manquerait pas d'entraîner. 11 m'apparaît même essentiel que tous ceux qui sont en mesure d'intervenir en soient informés. «Le CN exerce aujourd'hui son activité dans un environnement hautement concurrentiel. Depuis 1987, la Loi sur les transports nationaux a modifié les règles du jeu, en créant un environnement déréglementé, avec la volonté expresse de favoriser les expéditeurs de marchandises. Cette loi ne donne pas au Canadien National le moyen de disposer de toute la latitude nécessaire pour rationaliser son exploitation à un moment où la situation financière de l'entreprise est très alarmante. Ainsi, dans les trois dernières années ? cette lettre date d'avril 1993, là, ce n'est pas du passé préhistorique ? le Canadien National a accusé des pertes qui représentent quelque 250 000 000 $. «Pour redresser sa situation, le CN a décidé de réduire le poste le plus important de ses dépenses en procédant à des compressions de personnel, mais ces compressions ne suffiront pas, à elles seules, à régler tout le problème financier du CN. Avec le libre-échange, et dans la perspective de l'alliance de libre-échange nord-américain avec le Mexique, l'environnement concurrentiel dans lequel évolue le CN revêtira un caractère de plus en plus international. «Or ? et j'attire votre attention sur ce point ? le CN paie chaque année aux gouvernements fédéral et provinciaux et aux municipalités environ 260 000 000 $ en taxes et impôts. On estime que le CN et CP Rail versent ensemble 225 000 000 $ de plus en taxes et impôts que s'ils exerçaient la même activité aux États-Unis, et ceci repose sur une étude du Vancouver Round Table de décembre 1991. «Au Québec, note M. Masse, la taxe sur le carburant à locomotive est plus élevée qu'aux États-Unis. Mais, c'est cependant au niveau de la taxe foncière que l'écart est le plus grand.» Et avec l'application de la surtaxe sur les immeubles non résidentiels, il est évident que l'écart allait s'accroître considérablement. «S'il est vrai que dans le jeu économique québécois le CN est un partenaire important, il est indispensable de tout mettre en oeuvre pour qu'il le demeure. À l'heure actuelle, le CN emploie quelque 8600 personnes au Québec, dont 7200 à Montréal. Il y aura un fléchissement de ces chiffres à la suite des compressions annoncées par les autorités du CN, mais il n'empêche que le CN demeure au Québec, comme d'ailleurs dans l'ensemble du Canada, un employeur de premier plan. «À ce sujet, les taxes foncières et les surtaxes

applicables aux propriétés à caractère non résidentiel donnent lieu à des problèmes qui font l'objet de négociations avec le ministère des Affaires municipales ? c'est toujours M. Masse qui parle ? mais, finalement, c'est l'ensemble des charges fiscales pesant sur le CN qui doit être pris en considération.»

Alors, la lettre se termine ainsi: «Pour les motifs ci-dessus énoncés, nous espérons, M. le ministre des Finances, que votre prochain budget ne comportera aucune hausse de taxes pour le secteur ferroviaire. En outre, nous vous demandons d'apporter votre appui, si besoin en est, au ministre des Affaires municipales, lors des négociations touchant les taxes foncières. La réussite de ces négociations sera une première étape en vue d'obtenir une fiscalité concurrentielle pour le réseau ferroviaire au Québec.»

Saisi de ces faits, M. le Président, je me suis empressé de communiquer avec les municipalités concernées. Il y en a une dizaine sur l'île de Montréal, il y en a ailleurs au Québec, mais le problème se pose de manière particulièrement aiguë sur l'île de Montréal. Et grâce aux services de la Communauté urbaine de Montréal et des municipalités concernées, des négociations se sont engagées avec le CN et le CP. Au terme de ces négociations, une entente a été conclue, en vertu de laquelle le fardeau incombant aux entreprises ferroviaires connaîtra un allégement substantiel par rapport à ce qui eut découlé de l'application littérale de la mesure de surtaxe sur les immeubles non résidentiels. Mais ces ententes, pour être durables, pour n'être pas sujettes aux fluctuations de la volonté des conseils municipaux concernés, doivent être confirmées dans une législation émanant de l'Assemblée nationale. C'est le but du projet de loi 92 que nous abordons maintenant: apporter des solutions fondées sur des négociations qui ont eu lieu entre des entreprises ferroviaires et les municipalités. Pour nous, du gouvernement du Québec, cet arrangement n'entraîne aucune diminution de revenus, aucune conséquence financière. Il s'agit d'un arrangement auquel ont consenti les municipalités concernées, les municipalités de l'île de Montréal surtout, et cet arrangement aurait les effets suivants. Tout d'abord, préciser que le non-assujettissement de l'assiette d'une voie ferrée à la surtaxe sur les terrains vagues s'applique aussi dans le cas où la voie ferrée est située dans une cour ou un bâtiment; deuxièmement, préciser que la non-inscription d'une voie ferrée au rôle d'évaluation foncière s'applique aussi dans le cas où la voie ferrée est située dans une cour ou un bâtiment.

Ce qui est arrivé à Montréal en particulier, c'est que, depuis quelques années, on avait commencé à inscrire des voies ferrées au rôle d'évaluation. Évidemment, il en découlait des charges fiscales importantes. Puis des litiges ont surgi. Cette situation dure depuis une dizaine d'années. Des litiges ont surgi. Le nombre de plaintes dont est saisi le Bureau de révision de l'évaluation foncière s'élève actuellement, de 1974 à 1992, à 6500 plaintes, pour une valeur totale de 3 500 000000$ à 4000000000$. C'est seulement pour les municipalités de la CUM, ça. Alors, toutes ces plaintes n'ont pas été l'objet de décisions, encore. La situation traînait. Et des implications proprement fiscales étaient, évidemment, de plusieurs millions de dollars. On estime que pour la seule année 1993, en l'absence d'un règlement comme celui que définit le projet de loi 92, les charges fiscales additionnelles que devront porter les entreprises ferroviaires seraient de l'ordre de 13 000 000$ à 14 000 000 $ ?seulement pour cette année-là.

Alors là, il y a un intérêt mutuel qui se pose pour les deux. On peut bien dire: Qui paie? C'est le CN, puis c'est le CP. Ils ont de l'argent en masse. Mais, si, à force de porter des charges trop lourdes, ces entreprises décident de réduire leurs activités dans la région de Montréal et au Québec, si elles décident de réduire leurs centres de décision, de couper les activités au minimum, nous ne serons pas plus avancés. Nous aurons encore moins de revenus de taxes que si nous allions convenir avec elles, avec l'accord des municipalités, d'ailleurs, d'un régime plus convenable. Alors, voilà, M. le Président, les 2 premiers points.

Le troisième objet du projet de loi est de préciser que la règle particulière relative à l'établissement de la valeur devant être inscrite au rôle d'évaluation foncière de l'assiette d'une voie ferrée, qui fait appel à la valeur moyenne, au mètre carré, des autres terrains du territoire municipal dont j'ai parlé tantôt, ne s'appliquera pas dans le cas où la voie ferrée est située dans une cour ou un bâtiment. Le projet de loi précise également que lorsqu'un terrain est susceptible d'être assujetti quant à son inscription au rôle d'évaluation foncière, à la fois au régime ? ça, c'est le cas des passages à niveau, là ? à la fois à son titre de voie ferrée et de voie publique, à ce moment-là, il sera assujetti à l'assiette de la voie publique seulement et non pas aux deux. (1 h 10) une autre chose. quand il s'agit d'une cour de triage, là, l'évaluation va se faire pour l'ensemble. les propriétés qui peuvent être là-dessus, le bien-fonds de terrain et, également, la voie ferrée, c'est tout compté dans un seul ensemble. mais ça sera évalué, par conséquent, de manière régulière. mais, cependant, pour la taxation, ça sera seulement 40 % du taux normal de taxation, et c'est là qu'est la clé de la mesure. dans le cas de ces installations ? ce sont des cours de triage et des gares ? le taux de taxation sera ramené à 40 % au lieu de 100 % du taux qui a été décrété par la municipalité locale. avec ces modifications, je pense que nous contribuerons à procurer un régime fiscal beaucoup plus intéressant pour les municipalités.

Et j'ai ici une lettre d'une personne qui a agi comme porte-parole des entreprises ferroviaires dans les discussions qu'elles ont eues avec les municipalités concernées et le ministère des Affaires municipales. Nous avons été associés étroitement à ces échanges; nous en avons facilité l'aboutissement. Nous sommes très heureux d'apporter une contribution encore plus concrète par le dépôt de ce projet de loi. Alors, je

donne des extraits, ici, d'une lettre qu'adressait, le 31 mai dernier, au directeur du service de l'évaluation de la Communauté urbaine de Montréal, M. Jean Bélanger, le directeur du groupe-conseil Fallu, Gingras et associés, M. Pierre-H. Fallu: «À la suite de notre rencontre, mes clients ? c'est-à-dire les entreprises ferroviaires ? ont exprimé leur grande satisfaction à l'effet que, pour la CUM également, le projet de loi 92, dans son ensemble, est conforme aux discussions que nous avons entreprises il y a plus d'un an. Nous avons également convenu que, dans les prochains jours, nos actions communes devront porter sur l'obtention d'une garantie de la part du législateur que le projet de loi 92 sera adopté avant le 23 juin 1993. Devant le peu d'informations que nous avons quant aux problèmes relatifs aux compagnies ferroviaires à vocation unique qui desservent principalement l'industrie métallurgique, nous nous en tiendrons, pour le moment, à la piste de solution énoncée par votre aviseur légal.»

Je souligne ici qu'on a soulevé le problème des chemins de fer privés, comme celui d'Iron Ore, à Port-Cartier. Alors, je déposerai, plus tard dans l'étude du projet de loi, un amendement qui fera en sorte que la loi ne s'appliquera qu'au CN et au CP et ne s'occupera pas des problèmes relatifs aux chemins de fer privés parce qu'ils sont trop complexes. Ils nécessiteront des négociations particulières et des solutions différentes.

Je continue à lire des extraits de la lettre de M. Fallu: «En ce qui a trait au libellé du projet de loi 92, mes clients considèrent que le législateur a fidèlement reflété l'esprit et la lettre des ententes intervenues avec le monde municipal. Par ailleurs, compte tenu de nos dernières discussions et dans le but de favoriser un débat harmonieux en commission parlementaire, mes clients continuent de manifester l'esprit d'ouverture qui a présidé à nos discussions sur ce dossier et m'autorisent à vous faire part de l'offre finale suivante: Canadien National et CP Rail s'engageront à ne pas réclamer des municipalités non directement concernées par les causes du rail et des cours de chemin de fer le remboursement de la surtaxe déjà facturée sur les entreprises de la voie ferrée pour les années 1992 et 1993.» Alors, ça, c'est une disposition extrêmement intéressante. Ça veut dire que ça met fin à tout le contentieux des causes qui avaient été portées devant le BREF. C'est un règlement qui intervient sans que n'en découle aucune charge financière pour les municipalités concernées. «Deuxièmement, Canadien National et CP Rail s'engageront à payer, pour l'année 1993, les taxes foncières imposées sur les voies ferrées dans les cours de chemin de fer ainsi que 40 % de la surtaxe sur les immeubles non résidentiels sur ces mêmes voies ferrées, et cela pour l'année 1993.» Ici, j'apporte une précision. Le projet de loi sera adopté ? je le souhaite bien ? d'ici la fin de la présente session. S'il est adopté, il ne pourra guère entrer en vigueur avant le début de juillet, et, à ce moment-là, nous présenterons un amendement en vertu duquel les taxes foncières devant découler du projet de loi ne seront payables qu'à comp- ter du 1er juillet. Il y a une proposition de compromis qui est intervenue entre les municipalités concernées et les entreprises ferroviaires: ça sera payable seulement à compter du 1er juillet et, par conséquent, pour la première partie de l'année, la taxe sera payable à 100 %, non pas à 40 %. Un compromis très avantageux pour les municipalités. En même temps, les compagnies ferroviaires sont tellement intéressées à obtenir cette solution confirmée par voie législative qu'elles seront très heureuses également du compromis.

Oui, j'ai bien dit tantôt, je ne voudrais pas qu'il y ait de mélange. Je pense que c'est clair. C'est 40 % du taux de la surtaxe sur les immeubles non résidentiels. Si j'ai dit des choses différentes, je vous aurais induits en erreur. C'est évident que la taxe foncière de base est payée à sa pleine valeur. Mais il s'agit de la surtaxe qui découle de la loi 145, et qui est venue remplacer, dans le cas d'un grand nombre de municipalités, l'ancienne taxe d'affaires, laquelle, comme je l'ai dit, n'était pas imposée sur des voies ferrées. On a commencé à imposer la surtaxe. C'est là que le problème s'est amplifié considérablement. Et si le problème remontait à plusieurs années en arrière, à Montréal, c'est parce qu'on avait commencé à modifier la valeur qu'on inscrivait au rôle pour ces propriétés, et les compagnies de chemins de fer ne l'avaient jamais accepté. Ça a donné lieu à ces causes inscrites devant le BREF.

M. le Président, voilà l'essentiel de ce projet de loi 92, qui est un projet hautement technique. Je pense qu'il permet à l'Assemblée nationale d'apporter au problème de la taxation des entreprises ferroviaires, surtout en milieu urbain, une solution raisonnable, une solution réaliste, une solution qui devrait aider ces entreprises à poursuivre, dans un climat de confiance et de collaboration, leur activité économique très importante au Québec, et plus particulièrement dans la région de Montréal. Merci.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le ministre des Affaires municipales de votre intervention. Un simple rappel aux membres de cette Assemblée que nous en sommes à l'adoption du principe du projet de loi 92, Loi modifiant la Loi sur la fiscalité municipale et d'autres dispositions législatives.

Je cède la parole à M. le leader adjoint de l'Opposition officielle et député d'Abitibi-Ouest.

M. François Gendron

M. Gendron: Oui, M. le Président. Même si je trouve qu'il est un peu tard pour prendre le train, l'Opposition officielle va concourir à l'adoption du principe de ce projet de loi, parce que nous avons à peu près la même perception des choses: il s'agit là d'un projet de loi qui est devenu nécessaire pour régulariser une situation qui avait assez duré.

On sait que, depuis plusieurs années, la fiscalité municipale applicable aux voies ferrées fut l'objet de plusieurs contestations de la part des entreprises de

chemin de fer, que ce soit Canadien National ou CP Rail. Sans porter de jugement sur le fond des choses, il y a quand même une explication qui a été donnée par le ministre responsable des Affaires municipales, c'est qu'il est exact que la fiscalité municipale a subi de multiples changements au fil des ans, et la législation a donné lieu également à toutes sortes de jugements contradictoires depuis 20 ans, ce qui rendait passablement difficile l'application de la Loi sur la fiscalité municipale, plus spécifiquement en ce qui a trait aux voies ferrées, parce que ? ça a été également mentionné par le ministre également, mais je pense qu'il y a lieu de le rappeler ? ce n'est pas des choses mineures qui sont en cause, là. Quand on est rendu à contester des sommes aussi significatives que 3 500 000 000 $ et un nombre de plaintes aussi important que 6500, c'est parce que ça se multipliait pour l'ensemble des villes à l'intérieur du territoire de la Communauté urbaine, et c'est évident que ça devenait peut-être assez avantageux pour les avocats et les avocates du Québec. Mais ce n'est quand même pas une mesure des plus productrices, si on convient que, normalement, lorsqu'un gouvernement décide de légiférer dans le domaine de la fiscalité, c'est pour que, essentiellement, les lois fiscales soient compréhensibles, et que les concernés en aient une application commune, qui, règle générale, ne multiplie pas à satiété les contestations. (1 h 20)

Ce n'était pas le cas, et je pense que c'est heureux aujourd'hui que le projet de loi 92 vienne régulariser une situation qui avait assez duré dans le temps. Afin d'en venir à un règlement final et total des litiges concernant la fiscalité applicable aux voies ferrées, la Communauté urbaine, les entreprises ferroviaires concernées ont mis un comité sur pied afin d'élaborer un compromis. Parce que je pense que, dans des débats ou dans des questions comme ça, il y a lieu, pour l'une ou l'autre des parties, de faire un certain nombre de compromis. Ça a été fait, et on arrive à cette conclusion-là.

Je ne crois pas qu'il m'appartienne de reprendre les éléments du projet de loi. Je pense que le ministre a bien précisé les éléments sur lesquels porte le projet de loi. Je voulais juste, peut-être, en rappeler 2 qui, à ma connaissance, n'ont peut-être pas été assez évoqués. On se rappelle que la valeur foncière des voies ferrées sera établie en fonction de la valeur moyenne, au mètre carré, des autres terrains de la municipalité, sauf pour les voies ferrées situées dans une cour ou une gare, ce qui devrait, encore là, éliminer les applications divergentes.

Il y a également, dans le projet de loi, des dispositions qui ont tenu compte de la jurisprudence afin que les voies ferrées situées ailleurs que dans une cour ou une gare ne constituent pas un lieu d'affaires ? donc, elles ne seront pas soumises à une taxe d'affaires. Le ministre, d'entrée de jeu, disait que c'était un projet de loi qui était intéressant parce qu'il ne nous coûte rien. Je comprends! S'il avait fallu qu'il coûte quelques cents au gouvernement, je ne suis pas sûr que, même s'il est 1 h 20 du matin, on aurait à l'apprécier, sachant combien la situation budgétaire de ce gouvernement-là est rendue difficile, dans certains cas, par de la mauvaise gestion; dans d'autres cas, par du gaspillage; dans d'autres cas, en se mettant un bandeau sur les yeux concernant les échappatoires fiscaux, que ce soit au niveau de la fraude, de la contrebande ou autre chose. Alors, je comprends, le ministre a dit: C'est un bon projet de loi, ça ne nous coûte pas un cent. Bien heureux, bien content!

J'aimais aussi sa compréhension très large eu égard aux charges financières des compagnies ferroviaires. Alors, je le cite au texte, il disait: «Ça serait dangereux de laisser des charges financières trop lourdes aux compagnies ferroviaires. Il y aurait un danger pour nous parce que quand les compagnies ferroviaires ou d'autres se voient appliquer des charges financières tellement élevées, la conséquence, ce n'est pas compliqué, c'est sûr que ça va se traduire par une réduction d'effectifs, dans certains cas, et par une coupure de services, dans d'autres.» J'aimerais ça qu'il ait la même compréhension pour bien des contribuables québécois. J'aimerais ça qu'il parle à son ministre des Finances, à certaines sociétés ou compagnies qui, actuellement, sont en presque faillite technique, dû, justement, au même raisonnement du ministre, c'est-à-dire des charges financières trop lourdes. Il y a un certain nombre d'entreprises au Québec qui, ayant des charges financières trop lourdes, baissent les bras. On ne peut pas les blâmer, quand ce gouvernement-là a surtaxé et imposé toutes sortes d'impositions, ce qui fait que le niveau de taxation au Québec a augmenté d'à peu près 8 000 000 000 $ depuis que ce gouvernement-là est au pouvoir. Alors, j'aimerais ça que le ministre ait la même logique, la même continuité de pensée concernant sa bonne logique de charges financières trop lourdes. Ça peut avoir des conséquences graves sur l'économie; c'est ce que nous vivons, malheureusement.

Si on revient au fond du projet de loi, le ministre dit: Ça ne nous coûte pas un cent, donc, on est d'accord. Ce n'est quand même pas tout à fait le point de vue de l'UMQ. C'est important de rappeler, il n'a pas dit un mot de l'Union des municipalités du Québec, qui a indiqué au gouvernement que, en ce qui les concerne, le nouveau régime fiscal applicable aux chemins de fer, selon l'UMQ, aura comme conséquence d'entraîner des pertes de revenus pour les municipalités. L'Union des municipalités du Québec, un certain temps, a exigé que le gouvernement compense les municipalités pour ces pertes de revenus puisque ? je ne veux pas parler des deux côtés de la bouche, là ? ou bien c'est vrai que les compagnies de chemins de fer auront des charges financières moins lourdes ? et je suis d'accord avec ça ? et si c'est vrai, il y a quelqu'un qui va devoir le payer en quelque part... Et il y a un certain nombre de municipalités qui n'auront pas la capacité qu'elles avaient d'aller chercher un certain nombre de fiscalités qui se trouvent à être réduites par l'accord auquel les parties en sont

arrivées. Et on aura l'occasion d'apprécier ça, j'espère, en commission parlementaire, article par article.

L'UMQ avait également souligné qu'elle s'opposait à l'exemption, pour les voies ferrées situées ailleurs que dans une cour ou une gare, de la surtaxe sur les immeubles non résidentiels. Aux yeux de l'Union des municipalités du Québec, cette exemption constitue un grave accroc au principe de la loi 145 qui a introduit la surtaxe afin de permettre aux municipalités de se procurer de nouveaux revenus, afin de compenser pour les pertes importantes découlant de «la réforme Ryan» ? et, là, je cite comment on l'appelait, entre guillemets, bien sûr, M. le Président.

C'est exact que la réforme du ministre des Affaires municipales a eu comme conséquence de se traduire par des pertes importantes au niveau de la fiscalité directe pour les municipalités. Et, selon l'Union des municipalités du Québec, cette exemption que je viens d'évoquer n'a pour seul objectif que d'alléger ? et c'a été repris par le ministre des Affaires municipales ? le fardeau fiscal des entreprises de chemins de fer. Et ça, je l'ai dit tantôt, moi, je n'ai pas de trouble avec ça, puis c'est un objectif louable du gouvernement de vouloir alléger les charges financières des compagnies de chemins de fer parce que ça devient, à un moment donné, odieux. Sauf que l'Union des municipalités du Québec convienne que ce n'est pas sa responsabilité d'assumer cette logique que le gouvernement peut épouser et que j'épouse moi-même, comme porte-parole de l'Opposition officielle, il y aura lieu d'apprécier si c'est exact qu'il y a une perte fiscale pour les municipalités. 11 y aura lieu de l'apprécier au mérite puis de convenir de dispositions.

L'UMQ considère également que les articles 10 et 12du projet de loi qui ont pour effet de situer le taux de la taxe d'affaires, ou de la surtaxe foncière sur les voies ferrées localisées dans une cour, à 40 % du taux réel, engendreront des impacts financiers négatifs pour certaines municipalités. ça aussi, ça sera à apprécier. en effet, ces dispositions pénalisent les municipalités qui comptent sur leur territoire des entreprises régionales de chemins de fer qui, la plupart du temps, opèrent pour les fins propres des compagnies qui les possèdent, que ce soit alcan, que ce soit ioc, québec cartier, que ce soit north land je ne sais pas quoi, à rouyn-noranda, et ainsi de suite.

Les municipalités telles que Sept-îles, Fermont, Port-Cartier, Rouyn-Noranda, Jonquière, Aima, Matane et bien d'autres se trouvent donc à être perdantes parce qu'on applique à l'ensemble du territoire québécois une entente entre la Communauté urbaine et les deux grandes compagnies ferroviaires du Québec. Et ça, il me semble que c'était une réalité du projet de loi. Puis, d'ailleurs, lorsque j'ai eu l'occasion, moi, comme porte-parole, comme c'est normal de le faire, de rencontrer les parties concernées, c'est-à-dire les représentants de la Communauté urbaine ? M. Hamelin, le président ? et les gens représentants les compagnies ferroviaires, nous avions, dans cette rencontre avec M. Pari- zeau et moi-même, évoqué cette difficulté d'appliquer à l'ensemble du Québec une problématique plus spécifique et particulière au territoire de la Communauté urbaine. Parce que, essentiellement, c'est tellement vrai ce que je souligne que la prétention de l'UMQ, c'était que le gouvernement aurait dû faire le choix de modifier la Loi sur la Communauté urbaine plutôt que modifier la Loi sur la fiscalité municipale.

Et, là-dessus, j'en profite pour faire une mise au point au niveau de l'UMQ. En ce qui nous concerne, même si dans une lettre que j'ai reçue du président de l'UMQ ? et j'y reviendrai tantôt ? lorsqu'il prétend que nous aussi, selon les renseignements qui lui sont accessibles ? je ne sais pas où il a pris ses renseignements ? l'Opposition était d'accord avec cette préférence, je rappelle qu'il n'appartient pas aux membres de l'Opposition de choisir les cadres législatifs. Et le cadre législatif qui a été choisi par le gouvernement, ça n'a pas été de modifier la Loi sur la Communauté urbaine, c'a été de modifier la Loi sur la fiscalité. Puis, c'est son droit le plus strict, puis ça appartient au gouvernement, ça n'appartient pas à l'Opposition officielle de déterminer quel sera le cadre législatif. (1 h 30)

Mais ça, c'est pour illustrer, M. le Président, que c'est évident que, essentiellement, le litige, les plaintes et le conflit originaient entre les compagnies ferroviaires et les principales municipalités qui sont sur le territoire de la Communauté urbaine. Et en faisant des dispositions à l'ensemble de la Loi sur la fiscalité, on touche des municipalités qui ont un réseau ferroviaire qui n'est pas du CN et qui n'est pas du CP, qui est un réseau ferroviaire un peu à caractère privé. Mais, pour une municipalité, il y avait là une source de fonds. Il y avait là une capacité d'aller chercher ce qu'on appelle une certaine assiette fiscale et il me semble que c'était pertinent, que l'UMQ fasse valoir ce point de vue là.

Cependant, je reconnais qu'après en avoir été saisis, nous, on a fait des représentations auprès du cabinet du ministre des Affaires municipales et les 2 amendements que nous avons reçus aujourd'hui, je pense, vont dans le sens de permettre, même si le problème était davantage au niveau de la Communauté urbaine, de tenir compte de cette représentation qui a été faite par l'UMQ concernant les municipalités qui n'étaient pas dans le territoire de la Communauté urbaine. On aura, encore là, à apprécier ça article par article, mais il nous apparaît que les amendements proposés devraient convenir.

Je ne peux pas faire un long plaidoyer sur le fond même. J'ai indiqué tantôt que le projet de loi 92 était un projet de loi à caractère technique qui s'adresse, d'abord et avant tout, aux évaluateurs puis aux tribunaux qui auront à interpréter ces dispositions. Tantôt, il confirme certaines règles d'évaluation foncière des voies ferrées déjà utilisées, tantôt il clarifie des zones plutôt obscures ou grises qui existaient présentement dans la Loi sur la fiscalité municipale. Après 15 ans de chicane puis de tiraillements entre la Communauté urbaine puis les

entreprises ferroviaires, il est intéressant de constater que les 2 parties ont délaissé les tribunaux pour négocier une entente. Et, dans le projet de loi 92, l'on retrouve le résultat de cette entente. On ne peut faire autrement que de se réjouir et de concourir.

Comme je l'ai indiqué aux parties et que je l'indique présentement en cette Chambre, nous sommes d'accord avec le principe du projet de loi. On avait une préoccupation pour les municipalités à l'extérieur de la zone de la Communauté urbaine, les 2 amendements vont dans le sens des revendications qui nous avaient été faites, et puisque le gouvernement, par ces amendements-là, s'est montré attentif à leurs représentations, il nous apparaît, à ce moment-ci, qu'il n'y a plus d'obstacle majeur pour convenir de l'approbation de ce projet de loi là. Je tenais cependant, M. le Président, à ce que ces choses-là soient confirmées par écrit par le président de FUMQ. Donc, dès aujourd'hui, j'ai ? bien, plus aujourd'hui parce que, là, on est rendu à jeudi, mais mercredi, donc hier ? communiqué avec le président de FUMQ pour qu'il m'indique par écrit si, dans l'état actuel du projet de loi, il donnait son accord à la passation du projet de loi puisqu'il nous avait fait parvenir, comme au gouvernement, sans doute, un mémoire que le ministre des Affaires municipales n'a pas évoqué, mais dans le mémoire qu'il nous a présenté, je pense qu'il avait raison de prétendre que l'Union constate également que ce projet de loi ne fait aucune distinction entre la situation vécue sur le territoire de la Communauté urbaine qui concerne les transporteurs ferroviaires nationaux que sont les compagnies CN, CP, et la situation vécue ailleurs. Il y avait d'autres remarques que, rendu à 1 heure 30 du matin, je ne reprendrai pas, mais il m'apparaissait important d'avoir une confirmation de l'Union des municipalités du Québec pour distinguer entre la position qui semblait ne pas tellement être favorable, compte tenu qu'il y avait trop de pertes fiscales les concernant, et l'évolution du projet de loi par rapport aux amendements qui ont été apportés.

Très rapidement, M. le Président, je vous cite uniquement 2 paragraphes: «Enfin, compte tenu de l'ampleur des enjeux budgétaires qui sous-tendent les règlements intervenus sur le territoire de la Communauté urbaine, l'Union des municipalités du Québec ne souhaite pas que ces objections à ce projet de loi mettent en péril son adoption avant l'ajournement de la présente session parlementaire.»

Et c'est signé: M. Ulric Blackburn, maire de Chicoutimi et président de l'Union des municipalités du Québec.

Donc, ça ne fait aucun doute qu'en ce qui nous concerne nous allons collaborer pour que, rapidement, ce projet de loi puisse être adopté dans toutes ses phases afin que les nombreux échanges mettent fin à cette situation difficile pour les compagnies de chemins de fer, difficile pour les municipalités, ayant des conséquences assez importantes au niveau de la fiscalité du Québec. Je pense que si les parties en sont arrivées à un règlement et qu'il est légitime de l'encadrer dans une législation pour éviter une interprétation arbitraire des conseils municipaux qui se succèdent, compte tenu de la démocratie qu'on connaît au Québec, je pense que c'était normal que le gouvernement donne suite à cette entente par un projet de loi, afin de mettre fin à ces difficultés d'interprétation qui ont fait que ça a été, pendant un certain temps, assez coûteux pour les différentes parties concernées.

Alors, M. le Président, nous sommes favorables à l'adoption du principe du projet de loi.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, merci, M. le député d'Abitibi-Ouest.

Je cède la parole à M. le ministre des Affaires municipales pour son droit de réplique. M. le ministre.

M. Claude Ryan (réplique)

M. Ryan: M. le Président, je serai très bref. Je voudrais tout d'abord remercier le député d'Abitibi-Ouest de la collaboration qu'il accorde au gouvernement en vue de l'adoption du projet de loi. Le député d'Abitibi-Ouest, je pense que je peux le dire, m'a abordé spontanément, au cours de la journée d'hier, pour m'offrir sa collaboration. J'en étais très heureux, parce que nous avons déposé le projet de loi il y a quand même déjà un certain temps, il y a maintenant plus d'un mois, et le calendrier chargé de nos travaux n'avait pas permis de l'aborder avant ce jour. Je craignais fortement qu'en l'absence de collaboration de l'Opposition, qui aurait pu être justifiée par différentes circonstances que nous connaissons, ce projet de loi ne puisse être adopté à cette session-ci. Mais, étant donné l'excellente collaboration du député d'Abitibi-Ouest, dont j'ai déjà bénéficié, d'ailleurs, lorsqu'il était critique de l'Éducation et que j'étais moi-même ministre de l'Éducation et de l'Enseignement supérieur, je pense que nous pouvons accomplir un geste constructif, empreint d'esprit civique.

Je suis très heureux de le voir posé en la présence de représentants des entreprises ferroviaires, qui sont dans les galeries en haut, qui ont suivi nos travaux au cours de la journée, d'après ce que je comprends, que je veux féliciter de leur présence parmi nous, et à qui je suis très heureux que notre Chambre offre, à l'occasion de ce projet de loi, l'exemple d'une attitude d'harmonie et de collaboration dont on n'a peu souvent d'échos à l'extérieur et qui se produit plus souvent à l'intérieur qu'on ne serait enclin à le penser en lisant seulement les journaux, qui voient surtout les aspects négatifs de nos travaux et qui soulignent, surtout, les aspects plus spectaculaires. Ceci n'a rien de spectaculaire, c'est peut-être une des choses les plus importantes que nous aurons accomplies au cours des 2 ou 3 dernières semaines. Et, que nous ayons pu accomplir ces choses au profit d'une entreprise d'un secteur d'activité absolument fondamental pour la vie économique du Québec et en particulier de la région métropolitaine, je pense qu'il y a lieu de

s'en réjouir.

N'oublions pas, M. le Président, que la vocation économique de Montréal a toujours gravité autour de son rôle de pivot en matière de transport, transport maritime, transport aérien, transport routier, transport ferroviaire. Et l'avenir de la métropole, tous ceux qui se penchent sur les perspectives d'avenir de la métropole conviennent que nous devons viser à développer et à renforcer sa vocation dans le secteur du transport. Je pense que nous posons, avec ce projet de loi, un geste qui va dans ce sens-là. Ce n'est pas le plus décisif de tous, mais c'est un geste, j'en suis convaincu, qui incitera les entreprises ferroviaires à considérer avec plus d'intérêt encore leur implantation dans la métropole et ailleurs au Québec.

Et, à propos des autres municipalités concernées, je pense qu'il ne faut pas exagérer le problème. Nous réglons le problème des municipalités où il y a des chemins de fer privés, comme celui de Port-Cartier et de Sept-îles, ça, ça va, mais les autres cas où ce sont le CN ou le CP, ces municipalités jouiront du même traitement qui est garanti dans l'entente dont nous confirmons les termes par le projet de loi actuel. Je pense que c'est un régime qui est fort convenable, et ces municipalités doivent se réjouir de compter sur leur territoire des installation du CN et du CP.

Je me rappelle, quand nous discutions, il y a 2 ans, du projet de loi 145, 4 municipalités sont venues protester à cause de la diminution qui était intervenue dans le montant des «en lieu» de taxes pour les écoles. À les entendre faire leurs représentations, à l'époque, c'était comme si la présence d'écoles, sur leur territoire, leur coûtait 3 fois plus cher que ça ne leur rapportait. Et je leur disais toujours: Comme ministre de l'Éducation, quand j'étais ministre de l'Éducation et que je recevais des délégations qui venaient plaider pour la construction d'une école, je ne parlais pas des charges fiscales et des «en lieu» de taxes, je parlais de tous les avantages que procurait, à une municipalité, l'implantation d'une école sur son territoire.

Il en va de même du sujet que nous discutons ce soir, M. le Président, et j'offre à l'Opposition toute la collaboration du gouvernement pour que nous puissions poursuivre, en commission, l'examen détaillé du projet de loi dans le même esprit de collaboration, de courtoisie et de compréhension à l'endroit des besoins très réels de l'industrie ferroviaire qui a caractérisé nos échanges jusqu'à ce moment.

Merci. (1 h 40)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le ministre des Affaires municipales.

Mise aux voix

Le principe du projet de loi 92, Loi modifiant la Loi sur la fiscalité municipale et d'autres dispositions législatives, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. M. le leader adjoint... M. le ministre des Communications.

Renvoi à la commission de l'aménagement et des équipements

M. Cannon: M. le Président, je fais motion pour que ledit projet de loi soit déféré à la commission de l'aménagement et des équipements pour étude détaillée.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le ministre des Communications.

M. Cannon: M. le Président, je fais motion pour l'ajournement des travaux au jeudi 17 juin 1993, à 10 heures.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce que cette motion d'ajournement des travaux est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté.

Donc, les travaux de cette Assemblée reprendront ce matin, le jeudi 17 juin, à 10 heures. Bonne nuit à tous.

(Fin de la séance à 1 h 41)

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