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Version finale

36th Legislature, 1st Session
(March 2, 1999 au March 9, 2001)

Wednesday, May 19, 1999 - Vol. 36 N° 32

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Table des matières

Affaires du jour

Présence de l'ambassadeur d'Israël, M. David Sultan, et du consul général d'Israël à Montréal, M. Daniel Gal

Présence de membres de l'Amicale des anciens parlementaires de l'Assemblée nationale du Québec

Affaires courantes

Affaires du jour


Journal des débats


(Dix heures une minute)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Veuillez vous asseoir, s'il vous plaît!


Affaires du jour

Alors, nous débutons nos travaux aux affaires du jour. J'inviterais M. le leader adjoint du gouvernement à nous indiquer l'ordre du jour.

M. Boulerice: Avec plaisir, M. le Président, si je retrouve la feuille dont la couleur est la couleur préférée du leader de l'opposition officielle. Alors, M. le Président, je vous réfère à l'article 77 du feuilleton.


Affaires inscrites par les députés de l'opposition


Motion proposant que l'Assemblée s'assure que le gouvernement donne à la Régie de l'énergie toute l'indépendance nécessaire à l'exercice de son mandat initial

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie. Alors, à l'article 77 du feuilleton, aux affaires inscrites par les députés de l'opposition, en vertu de l'article 97 du règlement, Mme la députée de Bonaventure présente la motion suivante:

«Que l'Assemblée nationale s'assure que le gouvernement du Québec donne dans les faits, à la Régie de l'énergie, toute l'indépendance nécessaire à l'exercice de son mandat initial.»

Alors, à la suite d'une réunion avec les leaders parlementaires afin de répartir le temps de parole pour le déroulement de ce débat, le partage du temps a été établi de la façon suivante: l'auteure de la motion disposera d'un droit de réplique de 10 minutes; cinq minutes sont allouées au député indépendant; 50 % du temps restant est réservé, pour l'un, au groupe parlementaire formant le gouvernement, pour l'autre, au groupe parlementaire formant l'opposition officielle; et, dans ce cadre, le temps non utilisé par l'un des groupes s'ajoutera à celui de l'autre groupe, tandis que le temps non utilisé par le député indépendant pourra être distribué entre les groupes parlementaires. Les interventions ne seront limitées à aucune limite.

Je suis maintenant prêt à entendre le premier intervenant. Mme la députée de Bonaventure, je vous cède la parole.


Mme Nathalie Normandeau

Mme Normandeau: Merci, M. le Président. Alors, le contexte dans lequel nous déposons la motion de ce matin, à savoir «que l'Assemblée nationale s'assure que le gouvernement du Québec donne dans les faits, à la Régie de l'énergie, toute l'indépendance nécessaire à l'exercice de son mandat initial», donc le contexte dans lequel nous déposons cette motion, nous le faisons suite à plusieurs messages qui sont envoyés depuis plusieurs semaines déjà de la part de différents intervenants du domaine de l'énergie. En fait, plusieurs craintes ont été soulevées par l'ensemble de ces intervenants. Ces groupes sont inquiets des messages que leur envoie le gouvernement actuellement sur l'importance que celui-ci accorde à la Régie de l'énergie.

Avant d'exposer ces craintes, M. le Président, je crois qu'il est de mon devoir, comme critique officielle au niveau des ressources naturelles, de vous rappeler et de rappeler aux membres de cette Chambre les conditions et les motifs qui ont conduit à la création de la Régie de l'énergie.

En 1995, à l'initiative de l'ancien ministre des Ressources naturelles, le député de Joliette, le gouvernement tenait une vaste consultation publique sur toute la question de l'énergie. En fait, l'ensemble des intervenants invités étaient invités à se questionner sur les conditions dans lesquelles était réalisé notre développement énergétique. Et je tiens à saluer, quelques années plus tard, mais il n'est jamais trop tard pour bien faire, l'initiative de l'ancien ministre des Ressources naturelles. Aux dires du député de Joliette, à l'époque il s'agissait d'un des plus vastes débats qu'ait connus le secteur énergétique québécois, un débat d'idées, il va de soi, un débat d'idées de fond. Ce vaste débat a conduit à l'adoption de la politique énergétique, une politique qui a été adoptée en 1996, la suivante, donc, et qui s'intitule L'énergie au service du Québec : une perspective de développement durable.

M. le Président, cette politique était attendue grandement par l'ensemble des intervenants et organismes du secteur énergétique. C'est une politique qui s'est appuyée sur un très large consensus, un consensus explicite et effectif, selon l'ancien ministre des Ressources naturelles, et il va de soi – comme l'opposition est habituée de le faire, elle sait prendre ses responsabilités lorsque le temps est venu – donc que l'opposition officielle, à l'époque, faisait partie de ce consensus et reconnaissait du même coup à son tour la nécessité et le bien-fondé d'avoir une telle structure pour le Québec.

Alors, dans cette optique, c'est avec fierté que l'opposition officielle, à l'époque, s'est jointe au gouvernement en adoptant cette politique qui, elle-même, allait déboucher quelques mois plus tard sur l'adoption de la loi n° 50 qui, elle, allait créer la Régie de l'énergie.

Dans cette politique, M. le Président, on nous apprend qu'elle propose au Québec, en matière d'énergie, un cadre d'action à la fois clair et ambitieux, et cette nouvelle politique énergétique, de nous dire l'ancien ministre des Ressources naturelles et député de Joliette, traduit en termes d'actions gouvernementales les consensus qui ont été établis lors du débat public sur l'énergie. Et le ministre d'ajouter: De ce cadre d'action clair et ambitieux, le gouvernement a annoncé plusieurs mesures, et j'y ai fait référence il y a quelques secondes, dont la création de la Régie de l'énergie.

Le député de Joliette à ce moment-là a souligné que cette Régie serait dotée de pouvoirs décisionnels, qu'elle apporterait transparence et équité dans le questionnement du secteur énergétique québécois. On prend soin de souligner également que les interventions de la Régie de l'énergie permettront en même temps de s'assurer que les possibilités de mieux utiliser l'énergie sont systématiquement exploitées, que la réalisation des économies d'énergie est effectivement considérée comme prioritaire. Donc, M. le Président, nous venions de donner le ton à ce qui allait être cette future Régie de l'énergie.

Cette politique nous apprend également que la création de la Régie de l'énergie s'est faite dans un contexte où le Québec avait un urgent besoin de transformer sa façon d'administrer le secteur de l'énergie au Québec. À la lumière de cette affirmation, M. le Président, on comprend donc qu'il y avait des problèmes importants et qu'on devait corriger la situation. Donc, en plus d'être souhaitable, cette fameuse Régie de l'énergie, qui est venue remplacer la Régie du gaz naturel, était donc nécessaire. En fait, ce que le gouvernement a cherché à corriger, c'est un problème qu'on connaissait dans le passé, mais on voulait également créer un mécanisme qui lui permettrait de contre-expertiser de façon satisfaisante les demandes tarifaires d'Hydro-Québec, et ce n'est pas moi qui le dis, je fais toujours référence à la politique énergétique qui a été adoptée en 1996.

Alors, M. le Président, vous savez comme moi que l'ensemble des parlementaires de cette Chambre possèdent de belles aptitudes, possèdent de nombreux talents, cependant ils ne sont pas des experts pour la question de l'énergie. On sait que c'est une question qui est complexe. Alors, avec la meilleure volonté du monde, avec la meilleure préparation, il devenait très difficile, nous dit le gouvernement, de contre-expertiser adéquatement la haute direction d'Hydro-Québec. Donc, en créant la Régie de l'énergie, le gouvernement est venu améliorer à la fois pour le public et pour l'ensemble des parlementaires de cette Chambre tout le processus qui conduit à l'établissement des tarifs d'Hydro-Québec, et la nouvelle politique de souligner que la Régie de l'énergie est l'organisme le mieux adapté à cette fin.

En créant cette instance, le gouvernement a insisté sur le fait qu'il est essentiel que l'organisme soit crédible et indépendant, et c'est un point extrêmement important, une crédibilité, M. le Président, et une indépendance qui reposent en fait sur un statut quasi judiciaire. Donc, la Régie de l'énergie, dans les faits, a donc un statut d'organisme quasi judiciaire. Pour ce faire, la loi n° 50 qui a été créée contient 173 articles qui confèrent à cette Régie des compétences ou des champs d'activité dans plusieurs secteurs, soit notamment dans les domaines de la tarification de l'électricité et du gaz naturel. Elle a également un mandat de surveillance des prix des produits pétroliers. Elle a également un pouvoir de réglementer dans les secteurs où existent des monopoles naturels. Et on pense ici bien sûr à Hydro-Québec ou encore dans tout le domaine de la distribution du réseau gazier. Et sur cette base, M. le Président, Hydro-Québec et ses distributeurs sont dans l'obligation de soumettre à la Régie de l'énergie leurs plans de ressources, qui, on le sait, sont des outils très, très précieux quant à la planification de leurs activités pour la demande d'énergie.

(10 h 10)

La Régie de l'énergie également a comme responsabilité d'obliger Hydro-Québec et les distributeurs gaziers de faire autoriser leurs projets ou leurs investissements.

En cinquième lieu, Hydro-Québec aura également, nous dit cette politique, l'obligation de présenter ses contrats d'exportation à la Régie de l'énergie. Et c'est un élément important, et vous me permettrez de citer, à la page 23 de cette fameuse politique de l'énergie, cette obligation qu'a Hydro-Québec, donc, de présenter ses contrats d'exportation. On peut lire qu'il s'agit de permettre à la Régie de vérifier l'impact éventuel des exportations sur les tarifs des consommateurs québécois et de s'assurer que les exportations ne lèsent pas les intérêts des consommateurs. Et on souligne également, M. le Président, que la Régie aura un pouvoir d'enquête et d'analyse.

Donc, on constate que cette structure a d'énormes pouvoirs et qu'avec une telle structure le gouvernement est venu mettre, d'un trait, définitivement de côté toute la façon de faire et toutes les manières, donc, de contrôler et de réglementer le secteur de l'énergie au Québec. Enfin, M. le Président, avec un peu de recul, on constate que c'est une véritable révolution qui a été opérée dans tout le secteur de contrôle et de réglementation dans le domaine de l'énergie. En fait, je crois que sans exagération on peut affirmer qu'on est entré dans l'ère de la modernité, avec la création de cette Régie de l'énergie.

Cependant, ce que je viens de vous exposer, M. le Président, c'est la théorie. Malheureusement, depuis plusieurs semaines, on se rend compte que la théorie est souvent loin de la réalité. Et vous me permettrez de m'expliquer, M. le Président. Tout à l'heure, d'entrée de jeu, j'ai souligné que plusieurs groupes et organismes ont manifesté depuis plusieurs semaines déjà leurs inquiétudes quant à la latitude que possède en ce moment la Régie de l'énergie pour traiter de questions d'importance. Ce qu'on constate, c'est que, très globalement, deux ans après la création de la Régie de l'énergie, elle n'est pas apte à assumer toutes les responsabilités, toutes les fonctions pour lesquelles elle a été créée.

En fait, le problème se situe ou vient du fait que deux articles d'importance ne sont pas encore complètement en vigueur. Il s'agit des articles 52 et 167. Et j'aurai l'occasion tout à l'heure d'approfondir davantage sur cette question-là. Certains bien sûr seront tentés de nous dire: Écoutez, sur un total de 173 articles, le fait qu'il y ait seulement deux articles qui ne soient pas en vigueur, il n'y a pas lieu, donc, de paniquer et de tirer des conclusions quant au peu de latitude que possède cette structure-là. Cependant, on se rend compte que les deux articles en question, soit les articles 52 et 167, sont des champs de compétence très importants à la Régie de l'énergie. Même le ministre des Ressources naturelles, en commission parlementaire, admettait que ces deux articles sont loin d'être anodins.

M. le Président, après ces deux articles, il y a également deux avis importants qui ont été émis par la Régie de l'énergie, soit un avis sur l'énergie éolienne et un autre avis, extrêmement important également celui-là, sur les tarifs de fourniture d'électricité. Ces deux avis dorment depuis presque un an sur le bureau du ministre et le gouvernement n'a pas encore statué sur les suites qui seront données à ces deux avis importants.

Il y a un autre élément extrêmement important qu'on ne doit pas négliger, c'est l'adoption de la fameuse directive n° 1 qui a été adoptée le 27 janvier dernier, 27 janvier 1998. Deux recours supérieurs ont également été déposés, un relatif à cette fameuse directive n° 1, qui vise à faire reconnaître comme nulle et inopérante la directive n° 1 et le décret qui l'a approuvée, soit le décret 5399, et un autre recours en Cour supérieure qui vise à forcer la Régie de l'énergie à se prononcer sur l'état des réservoirs d'Hydro-Québec. Alors, vous comprendrez bien, dans le contexte, M. le Président, que cette situation, dans son ensemble, suscite ou est à l'origine de l'inquiétude qui est manifestée par plusieurs groupes du domaine de l'énergie.

Alors, ce matin, M. le Président, après ce bref exposé au niveau des problèmes qu'on retrouve en ce moment et qui empêchent la Régie d'assumer tous les pouvoirs pour lesquels elle a été créée, donc je commencerais à vous parler de l'avis de la Régie de l'énergie relatif aux modalités d'établissement des tarifs de fourniture d'électricité d'Hydro-Québec. Enfin, il y a plusieurs groupes qui craignent, M. le Président, que le retard indu – je l'ai souligné tout à l'heure, ça fait presque un an maintenant que le ministre a l'avis sur son bureau – à donner suite à cet avis ne camoufle en fait une volonté politique de réduire la portée de la loi n° 50, qui a créé la Régie de l'énergie. Et c'est important de se le rappeler, cette Régie a été créée dans un contexte où on avait un très, très large consensus de tous les intervenants du secteur de l'énergie.

Il y a un journaliste qui s'est penché sur la question, donc, M. Pierre Asselin du journal Le Soleil , en date du 1er mai 1999, Un vide juridique qui empoisonne le dossier . Et M. Asselin fait effectivement référence à ce fameux avis sur lequel le gouvernement tarde à se prononcer. C'est un article important et qui a été suivi par d'autres articles ou encore précédé par d'autres articles.

Et là vous me permettrez de citer à nouveau, donc, un autre article, celui paru dans La Presse du 26 mai dernier, article écrit par la journaliste Lisa Binsse, qui titrait son article: Québec s'apprêterait à émasculer la Régie de l'énergie, donc un autre article qui fait référence aux craintes qui sont soulevées par plusieurs groupes, par plusieurs intervenants du domaine de l'énergie.

Un autre article également, celui paru dans Le Devoir du 11 mars dernier, article signé par Louis-Gilles Francoeur, nous rapporte la crainte des groupes que la Régie devienne une coquille vide, un paravent commode pour les technocrates, qui vont désormais décider de tout sans même avoir, comme par le passé, à rendre des comptes à une commission parlementaire. Et ce n'est pas nous qui le disons, M. le Président. M. Francoeur s'est fait un devoir de rapporter les craintes qui ont été manifestées par plusieurs intervenants du domaine de l'énergie.

Et une chose qui est plus importante encore, c'est que même les commissaires qui siègent à la Régie de l'énergie, dans une décision qu'ils ont rendue, la décision D-99.20 relativement à la recevabilité de la requête sur la surveillance des opérations d'Hydro-Québec afin d'assurer un approvisionnement d'énergie suffisant aux consommateurs québécois, reconnaît... C'est la Régie elle-même qui le fait, elle reconnaît qu'elle est dans l'impossibilité de remplir pleinement le rôle qui lui a été dévolu.

Et, compte tenu de l'importance de cette question, M. le Président, vous me permettrez de citer un extrait de cette décision qui a été rendue. Donc, les commissaires nous disent la chose suivante: «La Régie de l'énergie statue qu'elle ne peut recevoir la requête des requérants tant que la nature et l'étendue de l'exercice de sa compétence relative à la production et aux exportations d'électricité ne seront pas définies par les autorités compétentes. Puisque ces dernières affectent l'examen recherché de la sécurité des approvisionnements, elle réserve sa décision et suspend l'étude du présent dossier.» C'est donc dire que la Régie elle-même, par un jugement comme celui-là, affirme qu'elle a les mains liées. En fait, cet imbroglio, M. le Président, est causé par le gouvernement qui tarde à décréter l'entrée en vigueur de deux articles particulièrement importants, et j'y ai fait référence tout à l'heure, soit l'article 52 sur la tarification et l'article 167. Qu'est-ce que nous dit l'article 52? L'article nous dit que, dans tout tarif de fourniture d'électricité, les taux et autres conditions applicables à un consommateur doivent refléter le coût réel d'acquisition ou toute autre condition d'approvisionnement en considération de la consommation de ce consommateur ou de cette catégorie de consommateurs. L'alinéa 2 de l'article 167, lui, indique au gouvernement qu'il doit, suite à un avis de la Régie, déterminer, par décret, les modalités d'établissement et d'implantation des tarifs de fourniture d'électricité. Donc, il s'agit ici de deux articles très importants qui permettent à la Régie de jouer pleinement son rôle de régulateur, rôle qui lui a été bien sûr dévolu par la loi.

Le gouvernement – et c'est ce qu'on a appris – tarde également à émettre les règlements associés aux articles 72 et 73 de la loi. Alors, ça fait plusieurs articles, ça, M. le Président. L'article 72 concerne l'obligation pour Hydro-Québec de soumettre un plan de ressources et l'article 73 concerne l'obligation pour Hydro-Québec d'obtenir l'autorisation de la Régie pour mener à terme ses projets. Donc, des propositions de la Régie à cet effet sont pourtant sur le bureau du ministre depuis plus de six mois maintenant dans le cas du règlement qui est associé à l'article 72 et depuis près de trois mois dans le règlement qui est associé à l'article 73. Alors, six mois pour ces deux articles-là et près d'un an pour les deux avis auxquels j'ai fait référence tout à l'heure.

Alors, la question qu'on doit se poser, M. le Président: Pourquoi est-ce qu'on hésite? Pourquoi le ministre des Ressources naturelles hésite à confier à la Régie de l'énergie toutes les compétences pour lesquelles elle a été créée? La perception qu'on envoie à ce moment-là dans le public, c'est que la Régie semble condamnée à jouer un rôle secondaire avant même qu'elle n'ait pu, M. le Président, se prononcer de façon très claire sur les mandats qui lui ont été confiés par l'Assemblée nationale. Et je tiens à souligner que cette loi n° 50 qui a créé la Régie de l'énergie, elle a été faite de façon unanime.

En fait, on peut se demander qu'est-ce qui fait que la Régie de l'énergie en ce moment ne peut pas asseoir son autorité dans toute la question qui concerne l'électricité au Québec. La réponse vient notamment du fait que le gouvernement péquiste, malheureusement, n'a toujours pas donné suite à l'avis de la Régie de l'énergie sur les modalités d'implantation des tarifs de fourniture d'électricité, donc un avis qui a été transmis par la Régie au ministre des Ressources naturelles il y a près d'un an, soit le 27 août 1998. Ça fait un an, et on n'a toujours pas donné suite à cet avis-là. Il s'agit bien sûr d'un dossier extrêmement délicat et je vous dirais qu'il s'agit d'un dossier très, très chaud pour le gouvernement.

Juste avant les dernières élections, soit à l'automne dernier, le ministre titulaire de l'époque, soit le député de Joliette, a refilé au gouvernement actuel cette question en disant souhaiter, comme il est rapporté dans le journal Le Soleil du 29 octobre dernier, obtenir l'opinion d'experts pour l'éclairer sur les impacts de cet avis aux plans budgétaire, tarifaire, économique et financier. Il y a eu des élections, un nouveau ministre a été nommé, moins pressé, semble-t-il, donc, que son précédent de répondre à ce fameux avis de la Régie de l'énergie.

(10 h 20)

Le 17 février, dans le journal La Presse , on apprend que le ministre des Ressources naturelles devait soumettre son rapport au Conseil des ministres en mars. Le 26 mars, le même quotidien nous rapporte que le ministre des Ressources naturelles qui a soumis l'avis de la Régie à un comité de quatre experts présentera son rapport au gouvernement en avril. M. le Président, nous sommes aujourd'hui le 19 mai, et on n'a toujours aucune nouvelle du ministre des Ressources naturelles. Ce laxisme, malheureusement, handicape de façon très importante la Régie de l'énergie.

Donc, pourquoi, M. le Président, est-ce que le gouvernement tarde à se prononcer sur cet avis d'importance? On a une partie de la réponse dans l'avis même qui a été produit par la Régie de l'énergie. En fait, dans cet avis, on apprend que la Régie de l'énergie a rejeté du revers de la main la proposition tarifaire de la société Hydro-Québec, une proposition qui retirait de la compétence de la Régie tellement de sujets, M. le Président, que la loi elle-même sur la Régie de l'énergie aurait été méconnaissable et aurait fait en sorte de supprimer la plupart de ses pouvoirs à l'endroit d'Hydro-Québec, et c'est un élément extrêmement important. En fait, Hydro-Québec proposait que la Régie n'ait aucun droit de regard et donc aucun contrôle sur la production d'électricité au Québec.

Alors, M. le Président, on constate qu'Hydro-Québec a, dans les faits, beaucoup de réticences à se soumettre à l'autorité de la Régie de l'énergie. En fait, ce qu'on comprend, c'est qu'Hydro-Québec ne veut tout simplement pas que la Régie s'immisce dans toute la question des coûts de production d'électricité au Québec. Justement, le mandat de la Régie vise à faire un examen complet – et le litige se situe à ce niveau-là – à la fois des coûts de transport, des coûts de production et de distribution d'électricité. Et, M. le Président, la création de la Régie de l'énergie, justement, repose sur cette capacité qu'elle a à réglementer dans des secteurs dits de «monopole naturel». C'est une approche qu'on retrouve partout en Amérique du Nord et c'est une approche qui a été priorisée justement par les intervenants qui se sont entendus sur l'adoption de cette fameuse politique de l'énergie. M. le Président, on est en droit de se questionner, en ce moment, sur les pressions qu'exerce Hydro-Québec sur le gouvernement et qui empêchent la Régie de l'énergie d'exercer tous les pouvoirs pour lesquels elle a été créée.

Je reviendrai un peu plus loin sur la fameuse directive n° 1 qui a été adoptée le 27 janvier 1998 et qui elle aussi handicape, de façon importante, les pouvoirs de la Régie. Cependant, histoire de mieux comprendre la direction que le gouvernement semble prioriser, je souhaiterais vous entretenir quelques minutes des mandats qui ont été confiés aux quatre experts.

Quatre experts ont été chargés de se pencher sur l'avis qui a été produit par la Régie de l'énergie. Dans le journal La Presse du 11 mai dernier, on apprend, M. le Président, qu'un seul de ces experts est du Québec, soit M. Jean-Thomas Bernard, de l'Université Laval. M. Bernard est un spécialiste de toutes les questions énergétiques. Sur les quatre experts, M. le Président, M. Bernard est le seul qui a été chargé d'évaluer les impacts tarifaires, financiers, budgétaires et économiques de cet avis. D'après La Presse , et selon les copies des mandats qu'on a obtenues, les autres experts – il y en a deux des États-Unis et un de la Colombie-Britannique – ont reçu comme consigne d'évaluer plutôt la proposition d'Hydro-Québec sur la détermination d'un prix plafond pour la production. Donc, dans ce contexte, M. le Président, sur la nature et sur la base des mandats qui ont été confiés à ces quatre experts, est-ce qu'on est en droit de conclure que le gouvernement a déjà fait son nid sur la suite qu'il donnera à l'avis qui a été produit par la Régie de l'énergie, donc, il y a déjà près d'un an?

Les groupes qui suivent de près toute la question du secteur de l'énergie – et ils sont nombreux au Québec – ont donc toutes les raisons de s'inquiéter sur les intentions du gouvernement dans ce dossier. Où veut en venir le gouvernement, M. le Président? Pourquoi est-ce qu'on tient tant à contrôler la Régie de l'énergie? Et c'est assez étonnant, dans la mesure où c'est ce même gouvernement qui a initié tout le débat sur l'énergie et où c'est ce même gouvernement, donc, qui a proposé d'adopter la loi n° 50 qui a créé la Régie de l'énergie.

Pourtant, M. le Président, le ministre des Ressources naturelles avait clairement laissé entendre, lors de l'étude des crédits de son ministère, en avril, qu'il ne pouvait pas intervenir dans les dossiers de la Régie de l'énergie. Et vous me permettrez de le citer textuellement. Le ministre nous a dit: «C'est évident que je ne peux pas m'immiscer dans son fonctionnement.» Alors, ce sont les paroles du ministre, des paroles qu'il a prononcées après que son gouvernement, à peine quelques mois plus tôt, eut adopté la fameuse directive n° 1 qui marquait une première intrusion flagrante dans l'autonomie de cet organisme quasi judiciaire.

M. le ministre, cependant, va nous répondre la chose suivante, qu'en vertu de l'article 110 de la Loi sur la Régie de l'énergie il a le pouvoir d'émettre une directive à l'intention de la Régie. Cependant, le libellé de cet article est très, très clair. On y dit que le ministre peut donner à la Régie des directives sur l'orientation et les objectifs généraux à poursuivre. Dans ce sens, on est donc en droit de conclure que la directive n° 1, qui a été approuvée le 28 janvier dernier, outrepasse outrageusement les simples orientations et objectifs à poursuivre tels qu'énoncés dans la Loi sur la Régie de l'énergie.

(10 h 30)

D'ailleurs, dans la politique énergétique du gouvernement du Québec, et je crois que c'est un élément important auquel fait grandement référence le ministre des Ressources naturelles, on souligne cependant que ce pouvoir sera considéré comme exceptionnel et que jamais dans le passé le gouvernement, dans ses relations avec la Régie du gaz naturel, n'y a fait appel. Dans un article publié le 29 janvier, dans le journal Le Soleil , on jette un peu de lumière sur les conséquences de l'imposition de cette fameuse directive. Le même expert, auquel je faisais référence tout à l'heure, soit M. Jean-Thomas Bernard, de l'Université Laval, qui a reçu un mandat de statuer sur cet avis de la Régie de l'énergie, donc le même expert remet en question l'indépendance de la Régie et nous dit: «C'était ça, le gros débat, et ils l'ont tranché.» M. le Président, c'est donc dire que le gouvernement a déjà fait son nid.

Et, selon un communiqué de presse qui a été émis par le ministre des Ressources naturelles le 28 janvier sur la directive n° 1, on prend soin de souligner que cette directive a pour premier objectif d'assurer aux Québécois et aux Québécoises le maintien de la pratique actuelle d'un tarif de transport uniforme pour l'électricité. Cependant, M. le Président, de l'avis de la plupart des groupes concernés par cette question, la directive n° 1 a plutôt pour effet de soustraire la Régie à une autre sphère de réglementation dont l'impact pour les citoyens et les citoyennes est majeur.

On apprenait tout récemment que des audiences sont en cours présentement à la Régie de l'énergie sur les principes réglementaires dont elle se servira pour établir un jour, peut-être, si le ministre le lui permet, les tarifs d'électricité.

On nous dit que la directive n° 1 a fait en sorte qu'elle force la Régie à reconnaître comme prudemment acquis et utiles tous les actifs construits et en cours de construction chez Hydro-Québec et, par le fait même, à intégrer ces actifs dans la base de tarification de l'ensemble des Québécoises et des Québécois. Cela signifie, M. le Président, en termes très clairs, que la Régie se trouve, en ce moment, dans l'incapacité d'empêcher les clients résidentiels du Québec de payer à même leur facture mensuelle pour des actifs de transport d'Hydro-Québec servant principalement à l'exportation de l'électricité.

M. le Président, renverser l'avis de la Régie de l'énergie concernant les tarifs de fourniture d'électricité et approuver la proposition d'Hydro-Québec revient donc à refuser tout droit de regard à la population du Québec sur la façon dont sont gérés près de la moitié des actifs de la plus importante société d'État québécoise. Ces actifs sont de l'ordre de 23 000 000 000 $, sur un total de 48 000 000 000 $.

La directive n° 1 et le décret 53-99 ont pratiquement le même effet, puisqu'ils empêchent de discuter de la manière dont doivent être alloués les coûts associés aux actifs de transport entre la clientèle québécoise et les marchés d'exportation. Alors, pourquoi, M. le Président, la population du Québec se verrait refuser le droit de regard sur la façon dont est géré un patrimoine collectif d'une si grande importance et d'une si grande valeur?

M. le Président, on a créé la Régie de l'énergie et, en ce moment, on lui enlève le pouvoir d'intervenir dans ses champs de compétences exclusifs. Alors, il ne faudrait pas s'étonner, donc, si, encore une fois, le gouvernement se retrouve face à des poursuites en Cour supérieure. Et d'ailleurs, j'en faisais mention tout à l'heure, il y a une requête qui a été déposée par quatre groupes socio- environnementaux, soit Action Réseau Consommateurs, Greenpeace, le Mouvement Au Courant et le Centre d'analyse des politiques énergétiques. Ces groupes, M. le Président, souhaitent que la Cour supérieure déclare nuls et sans effets les décrets 53-99 et la directive n° 1.

Et vous me permettrez de vous citer un passage d'un article publié le 11 mars dernier dans Le Devoir et qui, vous allez le voir, est particulièrement inquiétant pour ce gouvernement. Ce qu'on nous dit, c'est que «selon la requête en jugement déclaratoire déposée hier en Cour supérieure par Me Gertler, le procureur qui a fait invalider les décrets autorisant la ligne Hertel–des Cantons, le décret 53-99 et la directive n° 1 sont nuls et illégaux parce qu'ils ne respectent pas le principe de la séparation des pouvoirs».

Donc, M. le Président, sur la base de ces faits, nous sommes en mesure de nous questionner sur la véritable indépendance et la crédibilité qu'a la Régie de l'énergie en ce moment. Et le message qu'on peut envoyer ce matin au gouvernement, c'est qu'il assume ses responsabilités, qu'il soit conséquent avec ses engagements qu'il a pris dans le passé et qu'il permette à cette structure d'opérer et de bien gérer toute la question de l'énergie au Québec. Alors, je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la députée de Bonaventure. Je vais maintenant céder la parole à M. le ministre des Ressources naturelles. M. le ministre.


M. Jacques Brassard

M. Brassard: D'abord, M. le Président, je le dis d'entrée de jeu, l'attitude de l'opposition est une attitude de mesquinerie, un comportement marqué par la petitesse. Je pense que ça mérite d'être signalé. Il n'y a pas beaucoup de grandeur dans l'attitude de l'opposition actuellement.

M. Paradis: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Excusez, M. le ministre. M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: Oui. Simplement rappeler au leader du gouvernement, qui est un parlementaire d'expérience et qui connaît bien les dispositions de l'article 35 de notre règlement – on peut lui citer des extraits, ce serait inutile à ce moment-ci – juste l'inviter à prononcer un discours dans le respect des règles parlementaires, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, M. le leader du gouvernement, vous connaissez les différents paragraphes de l'article 35. Je vous inviterais, s'il vous plaît, à vous y conformer.

M. Brassard: Oui. Je m'y conforme, d'ailleurs. Je ne sache pas que le terme «mesquinerie» soit antiparlementaire quand ça correspond à une attitude réelle. Je le dis, il n'y a pas beaucoup de grandeur dans cette façon d'agir. Ça m'étonne de la part de la députée de Bonaventure, d'ailleurs.

Vous le savez, M. le Président, je vais vous l'expliquer, je n'ai pas le don d'ubiquité. Je ne peux pas me multiplier en quatre. Je ne peux pas à la fois entendre des intervenants qui sont de l'autre côté, au salon rouge, des intervenants qui viennent s'exprimer sur toute la question fondamentale de la sécurisation du réseau, de l'approvisionnement d'électricité au Québec, et en même temps être ici, au salon bleu, pour débattre d'une motion qui me concerne comme ministre des Ressources naturelles. Je n'ai pas le don d'ubiquité. Je sais pertinemment que l'opposition, en faisant ainsi, ne viole pas le règlement, mais je trouve ça petit, mesquin, médiocre, petite manoeuvre, pas très digne, d'arrière-cour.

Le 5 juin 1996, mon collègue d'en face disait ce qui suit, je le cite, en cette Chambre: «Les parlementaires vont s'en souvenir, disait-il, le nouveau président de l'Assemblée nationale du Québec a souhaité qu'on ne ridiculise pas l'institution. Moi, je soumets simplement – c'est le leader de l'opposition qui parlait – que des ordres contraires qui émanent de l'Assemblée nationale du Québec, c'est-à-dire qu'on place un ministre dans une situation qui est impossible, d'être à la fois de l'autre côté pour s'acquitter de son devoir et entendre divers intervenants et qu'il soit également – et on le sait, qu'il est préoccupé et intéressé par le projet de loi n° 116, c'était l'ancien ministre de la Santé qui était concerné – privé de son droit d'être ici, à l'Assemblée nationale, ça met l'Assemblée nationale dans une drôle de situation.» Fin de la citation.

Bien, cette drôle de situation, on s'y retrouve aujourd'hui, et c'est le leader de l'opposition qui l'a créée et qui l'a suscitée. Je ne trouve pas cela très honorable. Je le dis clairement. Je comprends que c'est l'autre volet de leur stratégie, ça accompagne, c'est l'autre dimension de leur stratégie.

Hier, on le sait, l'opposition officielle a décidé de ne pas s'acquitter de son devoir – pour reprendre l'expression du leader de l'opposition, le 5 juin 1996 – et de quitter la commission parlementaire qui examine une question fondamentale, la sécurisation de l'approvisionnement électrique au Québec. Ça concerne toute la population du Québec. Donc, l'opposition a décidé de ne pas s'acquitter de son devoir, de quitter la commission, de s'accrocher aux basques d'un groupuscule de Val-Saint-François qui se qualifie pompeusement de coalition et à qui la victoire judiciaire manifestement monte à la tête, négligeant de cette façon son devoir parlementaire et faisant le choix de défendre les intérêts d'un petit groupe, remuant sans doute, activiste, mais au détriment de l'intérêt de millions de personnes, de millions de Québécois et de Québécoises qui ont été privés d'électricité pendant des semaines, en janvier 1998. C'est ça, le choix de l'opposition. C'est ça, sa stratégie.

Et l'autre volet de sa stratégie, on l'applique aujourd'hui en m'obligeant à être présent ici, parce que c'est une motion qui me concerne comme ministre des Ressources naturelles, négligeant ainsi d'être de l'autre côté. N'ayant pas le don d'ubiquité, que voulez-vous, je vais y retourner tout à l'heure, là, sans aucun doute, mais je ne peux pas être présent à ce moment-ci.

(10 h 40)

Si elle avait été avec nous d'ailleurs, la députée de Bonaventure n'aurait pas cautionné cette légende, cette fable qu'on retrouve dans le communiqué de la Coalition de Val-Saint-François et qui prétend, qui affirme que la ligne Hertel–des Cantons n'a rien à voir avec la sécurisation du réseau. C'est ça, ce qu'affirme la Coalition de Val-Saint-François. Si la députée de Bonaventure avait été présente de l'autre côté hier avec les représentants d'Hydro-Québec et avec les représentants de M. Nicolet, de la commission Nicolet, elle aurait compris qu'une telle affirmation constitue une fausseté totale, une fable, une légende, et elle n'aurait pas commis l'imprudence de cautionner une pareille fabulation.

M. le Président, le 5 juin 1996, le leader de l'opposition parle de s'acquitter de son devoir en entendant différents intervenants. Le 17 mai 1999, la critique libérale en matière de ressources naturelles se retire de la commission parlementaire, reniant ainsi les propos précédents de son leader. Ce devoir ne fait désormais plus partie d'un parlementaire, il faut croire.

Lors de l'étude de crédits de mon ministère, M. le Président, en avril dernier – ça ne fait pas longtemps, ça ne fait pas des années, ça fait quelques semaines tout au plus – c'est cette même députée, la députée de Bonaventure, qui réclamait une commission parlementaire pour entendre la commission Nicolet, pour entendre M. Nicolet et ses commissaires. C'est ça qu'elle me réclamait à l'étude des crédits. Où est-ce qu'elle était hier? Parce que la commission Nicolet, elle était en commission parlementaire. M. Nicolet était avec nous de l'autre côté, au salon rouge, et on a échangé pendant des heures sur son rapport substantiel, articulé, sérieux, responsable. On a échangé avec M. Nicolet. C'est ça qu'elle voulait faire, la députée de Bonaventure, quand on a étudié les crédits. Où est-ce qu'elle était? Elle a préféré faire du mauvais théâtre. Elle a préféré se payer 15 secondes de gloire très éphémère dans les téléjournaux, dans les journaux télévisés, mais elle a négligé l'essentiel.

Et je ne comprends d'ailleurs pas son comportement, ni son attitude, ni son mode de pensée. Il n'y a pas si longtemps, quand on parlait de forêt au Québec, de l'avenir de la forêt, de la gestion de la forêt, suite à un film que l'on a pu voir à Télé-Québec, le film de Desjardins, la députée de Bonaventure réclamait à cor et à cri, comme certains autres intervenants, une enquête publique sur la gestion de la forêt. Là, en plus, concernant la ligne Hertel-des Cantons, toute la question de la sécurité d'approvisionnement électrique, là, elle réclame le BAPE. C'est à croire, M. le Président, que la députée de Bonaventure n'a aucune considération pour l'institution qu'est l'Assemblée nationale et ses commissions et pour l'ensemble des membres aussi du Parlement québécois. Il faut croire qu'elle se sent plus à l'aise dans les couloirs et dans les coulisses du Parlement qu'en Chambre et en commission parlementaire, là où son devoir l'appelait hier, comme aujourd'hui et demain.

M. le Président, je cherche à concilier cette attitude qui consiste à réclamer toutes sortes d'enquêtes avec une habitude, en cette Chambre, de la part de l'opposition, qui est, à tout bout de champ, à tout propos, de demander une commission parlementaire. C'est une coutume bien établie que je connais très bien pour avoir été membre de l'opposition pendant des années. Traditionnellement, coutumièrement, sur quelque sujet que ce soit, il est familier de réclamer une commission parlementaire. Là, on en convoque une, et puis ça ne répond pas à leur attente, et elle est jugée inutile. On jette le discrédit. On dénigre ce forum et cet exercice.

M. le Président, j'en arrive malheureusement à la conclusion que, faute d'être capable de mener un débat de fond sur les grands enjeux, les libéraux se cantonnent dans le superficiel, le futile, les petites combines médiatiques et s'attachent au clinquant pour éviter d'aller au fond des choses et d'aller à l'essentiel. Et on sait pourquoi, sur cette question de l'approvisionnement, de sécurité de l'approvisionnement électrique, ils refusent d'aller à l'essentiel, parce que, si on allait à l'essentiel, ils seraient obligés d'admettre qu'ils sont favorables au démantèlement de ce qui est déjà construit et réalisé et à la démolition d'infrastructures qui ont demandé des investissements de plusieurs centaines de millions de dollars. Alors, pour éviter cela, ils tergiversent et ils préfèrent évidemment faire du vaudeville.

Quelle contribution constructive a-t-elle apportée, la députée de Bonaventure, en matière de révision du régime forestier? Comment compte-t-elle tenir une position respectable et responsable dans le dossier de la crise du verglas? Je demanderais à ma vis-à-vis, M. le Président, de lire un peu moins les journaux ou les communiqués de coalitions de toute espèce et venant de tous les horizons, qu'elle cesse de nous faire ce théâtre et qu'elle s'attaque à définir un discours cohérent, ce qui, je l'avoue, ne nuira pas à la crédibilité de son parti, plutôt que de se mettre à la remorque d'un petit groupe d'intérêts.

Aujourd'hui, la critique de l'opposition veut discuter de Régie de l'énergie. Je veux bien. Elle aurait pu choisir un autre moment cependant. Mais je connais déjà sa conclusion, je l'ai entendue tout à l'heure même si je n'étais pas présent; j'étais à mon bureau, la télévision ouverte. Et je savais que son discours allait s'inspirer très largement d'articles parus dans les journaux. Je ne me suis pas trompé, elle a cité abondamment ces articles, particulièrement un qui titrait: Le gouvernement s'apprête à émasculer la Régie . Je lui rappellerais que le dictionnaire Robert nous définit «émasculer»: au sens propre, «priver (un mâle) des organes de la reproduction» et, au figuré, «dépouiller de tout caractère viril». Il y a des synonymes cependant: «abâtardir, affaiblir, mutiler». Quand on prend ce titre de journal au sérieux, il faudrait quasiment en conclure que le gouvernement s'apprête à faire subir la torture à la Régie de l'énergie – je ne savais pas que j'étais un tortionnaire; j'en suis un qui s'ignore sans doute – et que le gouvernement s'apprêtait à pratiquer de la médecine illégale à l'égard de la Régie de l'énergie. Bon.

Alors, ça, je savais qu'elle citerait ces articles de journaux, dont le contenu d'ailleurs vient d'une autre coalition. Par les temps qui courent, c'est la mode, M. le Président, il se crée des coalitions à tout bout de champ, comme une génération spontanée de coalitions. Il y en a une autre, coalition, elle s'appelle Arc-en-ciel, celle-là. Pourquoi Arc-en-ciel? Parce qu'elle est assez, disons, hétéroclite. On retrouve côte à côte les défenseurs des consommateurs et les grands consommateurs d'énergie, c'est-à-dire les alumineries puis les papeteries. Drôle de ménage! Mais enfin, ils sont ensemble. Et ça vient d'eux, ça; ça vient de cette coalition, ces articles de journaux.

Je les ai rencontrés il y a quelques semaines. Le lendemain, leur interprétation de cette rencontre apparaissait dans les journaux. C'était leur point de vue évidemment. J'aurais pu réagir et corriger certains faits. Mais je ne l'ai pas fait, je n'ai pas cru que ça valait la peine. Mais ils se sont empressés d'appeler les journalistes. C'est la première fois d'ailleurs que ça m'arrive. Depuis que je suis aux Ressources naturelles, j'ai rencontré je ne sais pas combien d'intervenants de toutes natures, des associations, des organisations de toutes sortes, et jamais le lendemain matin ça ne se retrouvait dans les journaux, sauf avec eux. Bon. Je ne m'en scandalise pas plus qu'il faut.

(10 h 50)

Mais la motion qu'elle nous propose est insidieuse, M. le Président. J'espère que c'est parlementaire de dire ça. Comme elle est rédigée, la motion laisse entendre que la Régie de l'énergie et ses régisseurs sont inféodés au gouvernement. On appelle ça jeter le discrédit sur une institution et sur son personnel après l'avoir encensée préalablement et avoir repris pour l'essentiel les éléments de la politique énergétique que notre gouvernement a adoptée à la suite d'un débat public que notre gouvernement a lancé, a mis en branle. Et j'écoutais aussi son éloge de la Régie de l'énergie, institution que notre gouvernement a créée, de même d'ailleurs que pour l'Agence de l'efficacité énergétique, qui est également un organisme que notre gouvernement a créé.

Alors, en matière de politique énergétique, je le dis d'emblée, là, on n'a pas de leçons à recevoir de personne, surtout pas de l'autre côté de la Chambre, pas plus de la députée de Bonaventure, parce que la politique énergétique, c'est le gouvernement du Parti québécois qui l'a conçue et mise en oeuvre, et la Régie, c'est le gouvernement qui l'a créée.

Alors, sans beaucoup de finesse, d'une façon un peu sournoise, la motion laisse entendre que le gouvernement, au fond, manipule la Régie au point qu'il l'empêche d'exercer son mandat. C'est un peu ça, l'insinuation qui ressort de cette motion. Si telle était la situation, M. le Président, comment expliquer le travail effectué par la Régie de l'énergie depuis sa création? Juste vous dire, et je suppose que la députée de Bonaventure le sait, que la Régie, en 1998, a rendu 97 décisions et avis, et, depuis le début de 1999 jusqu'au 6 mai, quelques 40 autres décisions et avis. Il y a plus d'une centaine de dossiers qui portent sur des plaintes de consommateurs, qui ont été ouverts. Alors, elle fait son travail, la Régie. C'est ça, la conclusion qui s'impose d'elle-même: la Régie fait son travail, la Régie assume ses responsabilités et assume les compétences qui sont les siennes.

Ai-je besoin aussi de rappeler à la critique de l'opposition et députée de Bonaventure que la Régie a tenu des audiences publiques sur les causes tarifaires, en 1998, de Gaz Métro et de Gazifère, qu'elle travaille actuellement à la cause tarifaire 1999 portant sur le gaz, que des audiences publiques sont actuellement en cours sur la fixation des coûts d'exploitation d'une essencerie, d'un poste d'essence. Ah! Elle doit sûrement savoir tout ça! C'est curieux, ça n'apparaît pas vraiment comme une institution inféodée, encarcanée, paralysée et prisonnière du gouvernement, pour avoir fait tout ce travail, sans ingérence, forcément. C'est clair que le gouvernement ne se permettrait pas de s'ingérer le moindrement dans les processus d'audiences de la Régie, son autonomie devant être scrupuleusement respectée.

C'est vrai qu'il y a des avis qui ont été présentés au gouvernement, celui, entre autres, sur l'énergie éolienne, celui sur le tarif de fourniture, celui aussi – ça viendra bientôt – sur la petite hydraulique, qui est en cours présentement et qui devrait se conclure par un avis déposé au gouvernement d'ici quelques mois. Bon.

C'est vrai que la Loi sur la Régie de l'énergie a été adoptée à l'unanimité, dans cette Chambre, suite à un débat public très vaste, avec des consensus très larges. Mais elle l'a dit elle-même, la députée de Bonaventure, il y a 172 articles dans la loi constitutive de la Régie et il y en a seulement deux et deux alinéas d'un troisième article qui ne sont pas en vigueur. C'est une véritable tragédie, M. le Président. Il y a deux articles qui ne sont pas en vigueur. On est face à une situation extrêmement dramatique. Même si, je l'ai dit avec raison, ce ne sont pas des articles anodins, il reste qu'il y en a quand même 170 sur 172 qui sont en vigueur. Pas si mal. Alors, on est loin, là, de la manipulation de la Régie puis on est loin du manque d'indépendance des régisseurs, comme le laisse entendre la motion présentée par la députée de Bonaventure.

Oui, il y a un avis actuellement portant sur le tarif de fourniture qui est devant le gouvernement depuis le mois d'août 1998. C'est vrai. C'est une question éminemment complexe, et je pense que le gouvernement se doit de prendre le temps qu'il faut, de ne pas faire preuve de précipitation dans un dossier aussi complexe que celui-là pour prendre la décision la plus éclairée possible. C'est ce qu'on fait présentement. Je devrais être en mesure d'ici quelques semaines de me présenter devant le Conseil des ministres avec des propositions sur cette question, majeure, j'en conviens.

Mais il faut vous dire aussi que je garde comme priorité d'assurer la pérennité réglementaire, la pérennité tarifaire, les bas tarifs qu'on connaît au Québec depuis toujours et la compétitivité de notre société d'État aussi. Ce sont là également des préoccupations et des priorités du gouvernement. Et je rappelle encore une fois – on peut bien s'agiter, là, de l'autre côté – qu'il n'y a pas péril en la demeure en ce qui concerne la cause tarifaire, puisque les tarifs d'électricité – on le sait très bien, en tout cas les citoyens le savent et en sont très satisfaits d'ailleurs – sont gelés au Québec jusqu'en 2001. Alors, on a un peu de temps, là, on n'est pas en urgence absolue. On a un peu de temps pour justement bien faire le tour d'une question aussi complexe que celle-là et prendre les décisions les plus sages et les plus raisonnables.

M. le Président, nous travaillons sérieusement pour que la Régie de l'énergie remplisse bien sa mission, et c'est ce qu'elle fait présentement. La Régie de l'énergie assume pleinement les mandats qui sont les siens; elle les assume en toute indépendance, en toute autonomie, comme le prévoit sa loi constitutive. Et nous allons continuer de lui permettre d'assumer pleinement et en toute indépendance les fonctions qui lui sont dévolues, les compétences qui sont les siennes. C'est pourquoi, M. le Président, la motion ne reflète pas la réalité. Je proposerai tout à l'heure, à la fin, des amendements pour la rendre plus conforme à ce qui existe vraiment.

Mais je conclurai, M. le Président, en disant que l'opposition joue un jeu dangereux. Elle a pris comme stratégie de dénigrer et de jeter le discrédit sur des institutions de notre démocratie. La motion, telle que présentée, portant sur la Régie de l'énergie, a pour effet de discréditer la Régie de l'énergie, de laisser entendre que l'indépendance de la Régie est compromise, de laisser entendre et de laisser croire que la Régie de l'énergie ne fonctionne pas en toute autonomie. C'est ça, le sens de la motion: discrédit sur la Régie.

(11 heures)

Je vous rappelle le discrédit aussi qu'on jette depuis bien des semaines sur la Commission d'accès à l'information en allant jusqu'à réclamer la démission de son président qui a été choisi à l'unanimité en cette Chambre, puisque la Commission, on le sait, relève directement de l'Assemblée nationale et que son président doit être désigné, nommé par l'Assemblée nationale elle-même. Ça s'est fait unanimement. Pourtant, depuis des semaines, on jette le discrédit sur une institution majeure de notre système politique, de notre démocratie.

On a fait la même chose hier sur une autre fort ancienne institution parlementaire, celle-ci, c'est-à-dire la commission parlementaire, qui est un forum privilégié pour les élus pour bien connaître et bien comprendre une problématique souvent complexe. C'est en commission parlementaire qu'on peut le faire, c'est un forum tout à fait approprié. Hier, en quittant précipitamment la commission, en refusant de faire son devoir de parlementaire, la députée de Bonaventure a ainsi jeté le discrédit sur une très ancienne institution de notre démocratie et de notre Assemblée nationale. C'est un jeu dangereux, M. le Président. Je le regrette et je le déplore parce que, ce faisant, l'opposition officielle discrédite nos institutions et discrédite notre démocratie. Ça laisse des traces, ça enracine des perceptions dans l'opinion publique qui sont tout à fait regrettables.


Motion d'amendement

Alors, dans ces circonstances, M. le Président, je voudrais faire motion pour que la motion de la députée de Bonaventure soit amendée comme suit:

1° en remplaçant les mots «du Québec donne dans les faits» par les mots «continue d'accorder»; et

2° en remplaçant les mots «l'exercice de son mandat initial» par les mots «la mise en oeuvre de sa loi constitutive».

Et la motion telle qu'amendée se lisant comme suit:

«Que l'Assemblée nationale s'assure que le gouvernement continue d'accorder, à la Régie de l'énergie, toute l'indépendance nécessaire à la mise en oeuvre de sa loi constitutive.» Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, j'aimerais qu'on me remette le texte. On me remettra le texte tantôt? Ça va. Très bien. Alors, nous avons le texte de la motion. Je prendrai quelque temps pour décider de la recevabilité. Le débat pourra se poursuivre comme d'habitude sur le fond de la question, évidemment. Alors, M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: Simplement, M. le Président, vous avez pris en délibéré la recevabilité de ladite motion. Il est possible que nous ayons des représentations à vous faire. Nous vous les ferons un peu plus tard, après avoir pris connaissance également du texte et analysé la jurisprudence.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Oui. Très bien. Alors, on pourra prendre quelques minutes, étant entendu que, dans un débat restreint, on ne prendra pas trop de temps pour vous entendre, mais on accordera quelques minutes pour vous entendre sur la recevabilité, et je prendrai en délibéré.

Alors, nous allons poursuivre actuellement le débat sur la motion elle-même. M. le député de Laurier-Dorion.


M. Christos Sirros

M. Sirros: Merci, M. le Président. Hier, je disais à la blague à des collègues, suite au spectacle de la période de questions que nous a livré le vice-premier ministre, que peut-être on pourrait mettre les cassettes en vente de ce spectacle-là, puis ça serait une façon de financer un peu les opérations de l'Assemblée nationale, parce que c'était vraiment un spectacle, hier.

Tout à l'heure, on vient d'avoir une prestation qu'on pourrait filmer aussi, puis l'intituler: Comment tourner le monde à l'envers, comment mettre le monde dans sa tête, M. le Président. On a eu le ministre des Ressources naturelles qui se faisait le grand défenseur du parlementarisme puis de l'institution démocratique qu'est la commission parlementaire en décriant puis en jetant du discrédit sur ma collègue la députée de la Gaspésie – en tentant de le faire – qui, par exemple, a hérité d'un vrai sens de responsabilité parlementaire de son prédécesseur, feu Gérard D. Levesque, qui, pendant des années, nous a bien dit ici, en cette Chambre, que ça prend bien des cas spéciaux et exceptionnels afin de poser un geste qui effectivement fait un genre de coupure avec le processus parlementaire.

Mais c'est exactement ce genre de situation à laquelle nous avons à faire face, M. le Président, avec tout ce que ce gouvernement a tramé dans le dossier de la ligne Hertel–des Cantons. Et ça prenait justement ce geste qui fait souligner le fait que ce gouvernement a procédé d'une façon incorrecte, pour ne pas utiliser des qui, vous allez me dire, sont inutilisables en cette Chambre, M. le Président, qui ont même été jugés illégaux par les tribunaux, et qui... À l'instar du vice-premier ministre, quand on est confronté avec des lois qui ne font pas notre affaire, on dit: Bien, on va changer les lois. On ne va pas les respecter. On ne va pas démissionner, dans son cas. On ne va pas soumettre l'ensemble du projet au BAPE comme ça devrait se faire dans le cas qui nous préoccupe. Mais on va changer des lois.

Et, pour changer des lois, dans ce cas-ci, bien, on va aussi utiliser la commission parlementaire puis l'institution parlementaire pour se donner un genre de manteau de crédibilité en disant qu'on prétend tenir des audiences publiques, M. le Président. On va inviter quelques personnes, on va tenir des audiences pendant trois jours, puis, après, une fois que tout le monde aura dit ce qu'il avait à dire, une fois que l'opposition aura fait sa crise en commission parlementaire, que le groupuscule, comme il l'appelle, des citoyens du Val-Saint-François... Et d'ailleurs, c'est assez étonnant de voir le ministre des Ressources naturelles, dans tout ses discours, s'attaquer à presque tout le monde, à la députée de Bonaventure, au groupuscule insignifiant, dit-il, finalement, des citoyens du Val-Saint-François, à la Coalition Arc-en-ciel, étrange ménage, dit-il, comme si tout le monde qui le critique, ce sont des insignifiants, M. le Président. C'est une attitude assez suffisante, merci. Et c'est pour ça que je disais qu'on pourrait intituler ça: Comment mettre le monde à l'envers et vendre ça comme un exemple aux acteurs futurs du comment on pourrait prétendre qu'une chose est quelque chose qu'elle n'est pas, parce que ce n'est pas vrai que c'est des vraies consultations publiques de l'autre côté.

Des vraies consultations publiques dans ce dossier auraient amené le gouvernement à soumettre, dès le début d'ailleurs – chose qu'on avait réclamée dès le début afin justement de bien gérer les fonds publics – tout le dossier au BAPE, afin de permettre à tous les éléments de ce dossier de sortir à la lumière du jour, M. le Président. Parce qu'on sait bien que ce n'est pas vrai que ce projet de la ligne Hertel–des Cantons est uniquement et seulement pour sécuriser le réseau, M. le Président. Ça ne peut pas être le cas, c'est un projet qui existe depuis 15 ans dans les tiroirs d'Hydro-Québec. Vous n'allez pas me dire qu'on avait prévu, il y a 15 ans, qu'il allait y avoir une tempête de verglas pour qu'on puisse sortir un projet pour faire face à la tempête, M. le Président. Et d'ailleurs, le rapport Nicolet dit à peu près la même chose. Il dit: Oui, il y avait d'autres alternatives qu'on aurait pu utiliser pour sécuriser cette situation-là, le temps de regarder l'ensemble de la question.

Et il soulève également la question des exportations. Les exportations, M. le Président, c'est important de le dire ici, en cette Chambre, et c'est probablement une des raisons pour lesquelles le gouvernement a tout fait pour résister à envoyer ce dossier devant le BAPE, parce qu'il savait que, lors de ces audiences-là, sortirait l'aspect suivant, M. le Président, qu'en faisant construire cette ligne, de 735 kV, Hertel–des Cantons, qui va servir également pour des exportations, mais en la construisant en fonction de la tempête de verglas puis en fonction, donc, de nos besoins internes, bien, on va prendre les coûts de cette ligne puis on va les mettre dans la facture des Québécois. On va payer de nos poches, dans nos tarifs d'électricité, pour construire une ligne qui va servir à l'exportation. Ça veut dire quoi, ça? Qu'est-ce qu'il y a de mauvais, là-dedans? Peut-être rien. Mais, M. le Président, ça veut dire que l'électricité qui sera vendue aux autres, elle va être vendue à escompte parce qu'on aura payé pour les infrastructures.

Et d'ailleurs, M. le Président, si ce n'était le fait que le gouvernement avait peur que tout le débat soit fait et que toute la lumière, la transparence, qui est le fondement même de la démocratie, dont le ministre disait qu'elle lui était si chère, cette transparence aurait permis d'examiner cet aspect, M. le Président, et tous les autres aspects qui se rattachent à ce dossier. Et d'ailleurs, c'est tellement vrai que, à la limite, les recommandations du BAPE demeurent des recommandations au gouvernement. Alors, à la limite, même si le BAPE avait dit: Démantelez cette horreur de 350 000 000 $ que vous avez construite illégalement, le gouvernement n'aurait pas été obligé de le faire. Il aurait dû, par exemple, venir ici puis expliquer pourquoi il a décidé, si tel était le cas, de ne pas démanteler la ligne, tel que le recommandait le BAPE, si jamais le BAPE avait recommandé une telle chose, chose dont je doute, M. le Président. Mais il aurait eu l'obligation de s'expliquer visière levée, correctement, de façon transparente.

(11 h 10)

Au lieu de ça, ils ont dit: On oublie l'ensemble du projet pour le BAPE puis on va vraiment essayer de faire une diversion en instituant une commission parlementaire sur la sécurisation du réseau, afin de convaincre tout le monde qu'on avait raison et que vraiment il faut absolument procéder, puis ne posez pas trop de questions, puis surtout ne parlez pas d'autres affaires comme l'exportation, etc. À tel point qu'Hydro-Québec est arrivée ici avec un écran géant IMAX afin de projeter, pour qu'on saisisse comme il faut... Parce que, savez-vous, on est juste des vilains parlementaires, M. le Président, qui ne devraient pas avoir trop à penser, hein?

Alors, c'est pour ça, M. le Président, que l'opposition a dit: Non, arrêtez ce jeu, cette mascarade, on ne suivra pas le gouvernement dans un autre pas dans l'accréditation de l'illégalité qu'il a commencée dès le début. Alors, qu'il assume ses responsabilités. Et tant pis si le ministre se trouve tellement choqué qu'il n'est pas capable de proférer son discours sans des attaques personnelles à peu près à tout le monde, en dénigrant tous ceux qui ont exercé leur droit démocratique de s'objecter à quelque chose sur quoi les tribunaux leur ont donné raison.

Alors, si on est rendu là, c'est dans la poursuite de la ligne qui existait avant. Il y a d'autres ministres qui ont traité des gens de... en tout cas, des noms dont je ne me rappelle pas, là, «gosseurs de poil de grenouille», je pense bien. En tout cas, c'était l'élégance extraordinaire de l'art oratoire de nos ministres des Ressources naturelles, M. le Président, il me semble que c'est la même lignée. Et c'est le même exemple que leur donne le vice-premier ministre: quand il s'agit d'une loi qui pose problème, bien, on change la loi, on n'assume pas les conséquences. Belle façon de gouverner, M. le Président!

Sur le sujet de la Régie. Le sujet de la Régie est très intéressant, M. le Président, parce que le ministre disait: Bah! il n'y a rien là, il y a 172 articles, on en a mis en vigueur 170. Mais j'aimerais qu'on le ramène d'une autre façon de voir les choses pour que les gens comprennent. Le corps humain est très complexe, un peu comme la Loi sur la Régie. Le corps humain a toutes sortes de systèmes qui le font fonctionner. Il y a les poumons, il y a le système sanguin, il y a le foie, il y a le pancréas. Il y a toutes sortes d'organes et de systèmes. Il y a aussi le cerveau. Et, si le cerveau arrête, M. le Président, dites-moi, qu'est-ce qui arrive? Si on mettait en vigueur un ou deux articles qui, par hasard, sont à peu près comme le cerveau puis le coeur dans le corps humain, dites-moi ce qui arriverait, à la limite? Ça meurt. Alors, si on ne permet pas à la Régie...

Ça fait un an que la Régie a recommandé au gouvernement de lui donner le droit puis le pouvoir d'examiner les coûts de production d'Hydro-Québec sur la base des coûts. Ô surprise! Hydro-Québec est allée vite devant la Régie pour dire et même devant les tribunaux... En tout cas, c'est d'autres qui sont allés devant les tribunaux, M. le Président. Hydro-Québec est allée vite devant la Régie pour dire: Non, non, non, vous ne pouvez pas faire ça. Et je suis sûr que la même communication a été faite au gouvernement, parallèlement, par Hydro-Québec: Vous ne pouvez pas faire ça parce que, si vous faites ça, mon Dieu, vous me placez dans une situation de concurrence intolérable. Sans dire, par exemple, qu'à peu près toutes les utilités publiques à travers l'Amérique du Nord ont à faire face aux mêmes exigences, veulent procéder avec les mains complètement libres, M. le Président, parce qu'ils comprennent que, si la Régie a ce pouvoir d'examiner les véritables coûts de production puis d'établir les tarifs en fonction des coûts de production, ça peut aussi avoir un effet sur les tarifs d'exportation par rapport aux tarifs de consommation interne.

Et ça fait un an, étrangement, que le gouvernement a l'avis de la Régie, qui a été effectivement constituée par une loi de l'Assemblée nationale votée à l'unanimité. Parce qu'on se disait: Ce n'est pas en commission parlementaire qu'on peut véritablement analyser l'ensemble des opérations d'Hydro-Québec, ça nous prend un groupe à part, indépendant, avec des pouvoirs quasi judiciaires, avec une expertise qui va pouvoir contre-interroger les gens, qui va pouvoir faire des études, qui va pouvoir examiner à fond les aspects qui lui sont amenés – ça, on appelle ça la Régie – ça nous prend la Régie pour qu'on puisse véritablement établir les tarifs mais aussi tenir compte de tout ce qui rentre dans l'établissement des tarifs.

Et qu'est-ce qui rentre dans l'établissement des tarifs? C'est les coûts des barrages, c'est les coûts des lignes de transport, c'est les marchés sur le besoin au niveau de l'électricité au Québec. Tout ça. Alors, la Régie, elle a dit au gouvernement, il y a un an: Donnez-moi le pouvoir – parce que c'est ce qu'elle devrait faire, elle devrait recommander au gouvernement comment procéder – de véritablement examiner les coûts de production d'Hydro-Québec. Hydro-Québec réplique en disant: Non, non, prenez pour acquis que le tarif, lui, je pense, c'est à peu près ce que ça coûte, et de là je n'ai pas à vous soumettre combien ça peut coûter pour tel barrage, ou etc.

Il y a une différence fondamentale assez importante, parce que l'une amènerait à une contrainte pour Hydro-Québec de se justifier par rapport aux augmentations et de passer à la loupe, pour le bien public – parce qu'il s'agit d'une société d'État, quand même, qui est la propriété collective de nous tous – et à la lumière du jour – parce que les audiences de la Régie sont publiques, M. le Président, pour l'essentiel – et ça obligerait donc de mettre sur la table tous les chiffres de tous les projets d'Hydro-Québec. Et évidemment l'autre voie, celle que propose Hydro-Québec, c'est un genre de «Sois belle mais tais-toi», prenez ma parole, c'est comme ça, approuvez, vous avez une petite marge de manoeuvre pour évaluer les effets de ça, et je peux faire ce que je veux faire.

Et je me demande pourquoi le gouvernement agonise tellement, depuis un an, à mettre en vigueur la recommandation de la Régie que nous avons créée. Pourquoi est-ce qu'ils ont pris cette façon de se gratter la tête, pour dire finalement: Comment est-ce qu'on va retarder la mise en vigueur de cet article-là? Ils ont créé un comité qui a fait rapport ou qui va faire rapport. Puis c'est le gouvernement qui a choisi le comité, c'est le gouvernement qui a donné le mandat au comité puis aux membres du comité. Sans insinuer quoi que ce soit par rapport aux membres du comité, M. le Président, qui sont tous des éminents spécialistes dans leur domaine, on sait comment ça fonctionne souvent quand on reçoit des avis comme ça, parce qu'une fois qu'on va recevoir l'avis il va y avoir un autre avis qui va être envoyé au gouvernement, venant, lui, du ministre des Ressources naturelles, et éventuellement à quelque part on ne sait pas trop quand... et ça serait intéressant d'avoir un échéancier de la part du gouvernement qui est déjà en retard dans ce dossier, M. le Président.

Alors, ce qui nous inquiète, c'est que finalement ce qui se trame par rapport à ces articles vitaux par rapport aux opérations de la Régie, c'est que le gouvernement se cherche une façon de défaire ce qu'on a fait. Et vous allez me dire: Pourquoi il cherche ça?, M. le Président. Parce que, je vais vous dire honnêtement, je pense qu'ils n'ont pas vu venir ce qu'ils ont proposé eux-mêmes, parce qu'ils l'ont proposé puis c'était dans la machine, en quelque sorte, depuis bon nombre d'années. Même avant que ce gouvernement arrive, c'était dans la machine. Quand j'étais ministre aux Ressources naturelles, le projet de la Régie, il était là, et, quand finalement le gouvernement l'a fait, ça avait reçu une impulsion par l'ancien premier ministre, M. Parizeau; M. Bouchard en a hérité, ça a continué son chemin de mise en vigueur et d'application.

Puis oups!, à peu près au même moment où la Régie était adoptée, ici, en cette Chambre, au mois de décembre 1997, je pense, c'était le même moment où le nouveau premier ministre de l'époque changeait de président d'Hydro-Québec. Et c'est là où ils ont réalisé, M. le Président, que: Oh, My God! qu'est-ce qu'on a fait avec la Régie? On a vraiment donné trop de pouvoirs à cet instrument qui pourrait être vraiment une façon de contrôler Hydro-Québec, et là ça veut dire qu'on va être obligé d'aller devant la population, que tout le monde va savoir ce qui se passe, puis on ne pourra pas juste dans l'avenir tramer les choses entre le bureau du premier ministre puis le bureau du directeur général d'Hydro-Québec, arranger entre nous.

(11 h 20)

Le ministre des Finances intervient puis dit: Écoutez, là, moi, j'en ai besoin, de tant d'argent. Puis le président d'Hydro-Québec dit: Combien vous voulez? Puis le premier ministre dit: Exécutez. C'est à peu près le triangle, M. le Président, qui était dessiné. Et là ils ont réalisé... et le projet de loi était déjà en Chambre, déjà en train d'être voté, et il y a eu, on se rappellera, des tractations, à l'époque, entre le président, qui était en devenir, d'Hydro-Québec et le bureau du premier ministre, sur la Régie. Parce qu'il y avait aussi tout le dossier de la déréglementation puis l'ouverture des marchés, puis il avait l'argument qui disait: Donnez-moi les mains libres puis, moi, je vais aller vous chercher de l'argent. Et il y a, de l'autre côté, des gens qui disent: C'est bien beau, ça, on n'a rien contre, avoir plus d'argent, mais au moins il faut examiner quelles sont les conséquences pour les contribuables, puis les payeurs de taxes, puis les citoyens, puis les propriétaires d'Hydro-Québec avant de changer l'orientation fondamentale d'Hydro-Québec qui a toujours été de fournir de l'électricité au plus bas coût possible aux consommateurs québécois.

Si on était dorénavant pour tranquillement payer plus pour notre électricité pour qu'on puisse la vendre moins cher aux Américains, ça revient à dire qu'on va subventionner les consommateurs puis les industries américaines, avec des impacts peut-être ici. Et c'est pour ça, M. le Président, que la Coalition Arc-en-ciel que dénigre – que dénigre – le ministre des Ressources naturelles a vu le jour. Et, évidemment, ça fait un peu étrange de voir les environnementalistes d'un côté et avoir des grandes industries de l'autre côté, ensemble, bras dessus, bras dessous, dire: Minute! on veut que vous appliquiez la Loi sur la Régie telle quelle, on veut connaître les vrais coûts de production d'Hydro-Québec. Les deux ont intérêt à le faire, M. le Président: les industriels, ici, parce qu'on veut savoir qu'Hydro-Québec et le gouvernement ne sont pas en train de subventionner les concurrents aux États-Unis, puis les consommateurs parce qu'ils veulent savoir qu'on n'est pas en train de payer plus qu'on devrait payer, M. le Président.

Alors, quand le ministre fait son spectacle pour décrier le manque de respect de l'opposition pour le Parlement, moi, je lui dirais, M. le Président, que le vrai respect pour le Parlement, ça aurait été de véritablement suivre le processus que le Parlement avait voté au niveau des audiences nécessaires pour des projets d'une telle envergure et de ne pas adopter des décrets en cachette, qui ont été mis en lumière seulement après leur mise en vigueur, et que le gouvernement, depuis ce temps-là, essaie de se couvrir et fait bourde après bourde dans ce dossier, de dénigrement en dénigrement de citoyens qui ne font qu'exercer leurs droits. Ils sont rendus, M. le Président, à perdre les pédales en cette Chambre avec un ministre qui n'est pas capable de répondre sur le fond d'un argument par rapport à l'application de la Régie, qui essaie de banaliser en disant que, quantitativement, il y a 170 sur 172 articles qui sont en vigueur, en oubliant de dire que les articles qui ne sont pas en vigueur sont les articles qui permettent à l'oxygène de faire fonctionner le système et que, si on maintient ça comme ça, le système va arrêter, M. le Président, la Régie n'aura plus de sens, un peu comme ce qui se passe de l'autre côté avec ce ministre n'a pas de sens, M. le Président. Merci beaucoup.


Débat sur la recevabilité de l'amendement

Le Vice-Président (M. Brouillet): Ceci met fin au temps qui était dévolu au groupe parlementaire formant l'opposition. Il restera le 10 minutes de réplique. Il reste encore au groupe parlementaire formant le gouvernement 25 minutes. Alors, je serais prêt à prendre quelques minutes pour entendre le leader de l'opposition sur le délibéré, là, l'amendement.


M. Pierre Paradis

M. Paradis: Brièvement, oui, sur la recevabilité de l'amendement proposé par le ministre. Comme vous l'avez constaté, M. le Président, il y a deux amendements: 1° et 2°. Quant à 2°, nous n'avons pas de conseils à donner à la présidence, mais nous n'avons pas de représentations à faire quant à sa non-recevabilité.

Quant au premier amendement, M. le Président, nous vous soumettons très respectueusement qu'il est irrecevable. La motion vise à remplacer les mots «donne dans les faits» par les mots «continue d'accorder». Vous allez retrouver, dans les précédents, une décision d'un des grands présidents de l'Assemblée nationale, Jean-Noël Lavoie, du 3 décembre 1975, une décision qui est très brève, mais qui rejoint dans son essence exactement ce que le ministre de l'Énergie tente de faire ici. Je cite au texte le résumé de la décision du président Lavoie: «Cette motion d'amendement est irrecevable puisqu'elle écarte la motion de fond.» Donc, nous prétendons que ce premier amendement du ministre écarte la motion de fond. La motion de fond propose de combler une absence dans un système de sécurité du travail, alors que l'amendement implique une présence.

Vous aurez compris, M. le Président, que la motion de Mme la députée de Bonaventure stipule «Que l'Assemblée nationale s'assure que le gouvernement du Québec donne dans les faits». Donc, s'il faut que ça donne dans les faits, c'est qu'il y a une absence présentement, et l'amendement du ministre la contredit carrément, la dénature carrément: «continue d'accorder». S'il y avait de quoi d'accordé présentement, on pourrait dire: Oui, qu'on continue d'accorder, mais quand il y a une absence totale – et le président Lavoie l'avait reconnu à l'époque – nous vous demandons de prendre cette décision en considération.

Pour vous aider, une décision qui n'est pas tout à fait aussi proche dans sa nature même – c'est toujours difficile de trouver quelque chose d'identique – nous vous référons à une décision du président Saintonge, du 28 mai 1986. Merci, M. le Président.

M. Boulerice: M. le Président...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le leader de l'opposition. Brièvement, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boulerice: Brièvement, M. le Président, enfin, le temps qu'il me faudra, vous allez le comprendre.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Non, le temps que je...

M. Boulerice: Je ne vais pas...

Le Vice-Président (M. Brouillet): ...jugerai nécessaire pour...

M. Boulerice: Bon, alors, à ce moment-là...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous donne la parole.

M. Boulerice: ...j'aurai autant de temps que M. le leader de l'opposition officielle, connaissant votre justice distributive.


M. André Boulerice

M. le Président, il avait bien le droit d'intervenir. Il avait le droit d'essayer, comme on dit. Et il vous a sorti des jugements. J'en citerai, moi, des plus contemporains. Je vous citerai celui de Lawrence Cannon en 1990, celui de Roger Lefebvre en 1992, celui de Michel Tremblay en 1994. Je reciterai également M. Saintonge: «N'est-il pas là le but d'une motion d'amendement que de modifier une proposition de façon à permettre qu'un plus grand nombre y adhère? En conséquence, cet amendement est recevable.»

M. le Président, c'est un jugement de valeur que porte la députée de Bonaventure dans sa motion présentement; elle ne correspond pas à la réalité. Donc, le gouvernement continue, M. le Président, d'accorder; c'est ce que nous souhaitons. Alors, leur présomption que le gouvernement ne le fait pas est totalement fausse. C'est pour ça que l'amendement que nous présentons est on ne peut plus pertinent et recevable. Vous en jugerez, de toute façon, à votre bon escient, tantôt.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le leader adjoint du gouvernement, et je suis prêt maintenant à céder la parole à M. le député de Dubuc. Bien. Alors, M. le député.


Reprise du débat sur la motion principale et l'amendement


M. Jacques Côté

M. Côté (Dubuc): Merci, M. le Président. Alors, mes commentaires seront brefs, mais il m'apparaît quand même important d'intervenir sur la motion de la députée de Bonaventure, et telle que libellée comme suit: «Que l'Assemblée nationale s'assure que le gouvernement du Québec donne dans les faits, à la Régie de l'énergie, toute l'indépendance nécessaire à l'exercice de son mandat initial.»

J'ai écouté attentivement les propos de l'opposition depuis le début de cette motion et j'en retire, M. le Président, que c'est un vent de pessimisme. On ne broie que du noir, on ne voit que des mauvaises choses, tout est mauvais. La commission parlementaire est bidon, la Régie de l'énergie ne fait pas son travail, Hydro-Québec ne fait pas son travail.

Alors, M. le Président, pourtant, on a une loi, la Loi sur la Régie de l'énergie, qui a été adoptée le 19 décembre 1996, à l'unanimité, par cette Assemblée. Et je me permets de vous lire l'article 5 de cette loi, qui dit: «Dans l'exercice de ses fonctions, la Régie favorise la satisfaction des besoins énergétiques dans une perspective de développement durable. À cette fin, elle tient compte des préoccupations économiques, sociales et environnementales ainsi que de l'équité au plan individuel comme au plan collectif. Elle assure également la conciliation entre l'intérêt public, la protection des consommateurs et un traitement équitable des distributeurs.»

(11 h 30)

Elle a également, M. le Président, cette Régie, pour fonction de surveiller les opérations afin de s'assurer que les consommateurs aient des approvisionnements suffisants et paient selon un juste tarif, d'approuver les plans de ressources, de déterminer les taux de rendement et d'autoriser les projets d'immobilisations.

La loi prévoit également que les exportations d'électricité d'Hydro-Québec sont soumises au contrôle de la Régie selon qu'elle le détermine. L'autorisation du gouvernement est maintenue, dans les cas qu'il détermine, à l'égard des contrats d'exportation d'électricité des producteurs privés et des contrats de puissance et d'énergie dont Hydro-Québec ne peut interrompre unilatéralement la livraison.

M. le Président, la motion, telle que présentée et telle que libellée par la députée de Bonaventure, m'apparaît une insulte pour les régisseurs de la Régie. Elle met en doute leur compétence et laisse planer des doutes quant au travail qu'ils font.

On a également parlé, dans cette loi, que des articles n'avaient pas encore été adoptés. J'aimerais insister un peu plus sur ces articles qui n'ont pas été adoptés. Il y a l'article 52, et la mise en vigueur de cet article, pour l'électricité, est associée aux suites que donnera le gouvernement à l'avis de la Régie sur les tarifs de fourniture d'électricité; l'article 126 sera mis en vigueur lorsque le règlement de la Régie concernant les projets d'immobilisation d'Hydro-Québec... et les deuxième et troisième alinéas de l'article 167 seront également mis en vigueur lorsque le gouvernement donnera son avis sur les propositions de la Régie sur les tarifs de fourniture d'électricité.

Et je pense que c'est important, M. le Président, avant de trancher sur une question aussi complexe que le tarif de fourniture ou le tarif de production, je pense que cela mérite une solide réflexion de la part du gouvernement et des analyses approfondies de toute cette problématique et de toute cette question. C'est ce que le gouvernement est en train de faire, et après, comme gouvernement, ce dernier prendra les décisions qui s'imposent.

Mme la députée de Bonaventure a également soulevé le fait qu'il y a devant les tribunaux des requêtes. J'aurais aimé qu'elle attende le sort de ces requêtes devant les tribunaux avant de présenter cette motion. Il ne faut pas oublier, M. le Président, que l'exercice, par la Régie, de certaines de ses responsabilités, telles qu'immobilisations, plans de ressources, exportations, est assujetti à l'approbation du gouvernement de règlements de la Régie encadrant cet exercice. Et cela n'est pas soumettre la Régie au bon plaisir du gouvernement que de l'assujettir à de tels contrôles. Ces règlements seront soumis au gouvernement qui verra à les prendre en considération.

Il y a également, M. le Président... C'est qu'en novembre 1996 le gouvernement a retenu une orientation claire et ferme – Mme la députée de Bonaventure l'a souligné – dans sa politique énergétique de déréglementer la production d'électricité et a donné, à ce titre, un mandat à la Régie de l'énergie. Ce n'est pas s'immiscer dans son fonctionnement, je pense qu'au contraire la Régie est totalement indépendante.

Je voudrais, M. le Président, vous dire que le libellé initial de la motion est injuste, puisque le gouvernement met tous les efforts possibles pour que la Régie accomplisse sa mission de façon non équivoque et d'une manière indépendante. En terminant, j'aimerais rappeler que le gouvernement a retenu une orientation limpide dans sa politique énergétique de novembre 1996 à l'effet de déréglementer la production d'électricité. Et je pense que cette motion, telle que libellée, ne fait aucunement confiance à la Régie. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Dubuc. Nous cédons maintenant la parole au député de Saguenay et adjoint parlementaire au ministre de l'Environnement. M. le député.


M. Gabriel-Yvan Gagnon

M. Gagnon: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir d'intervenir sur cette motion qui, dans sa nature, tente de remettre en question, de jeter un discrédit sur cette importante institution qu'est la Régie de l'énergie. Pour mieux comprendre dans quelle perspective cette motion s'inscrit, je crois qu'il serait utile de se rappeler dans un premier temps quels étaient les objectifs poursuivis par la loi qui a constitué cette Régie. Je crois qu'il faut, à ce moment-là, pour faire un portrait qui soit le plus succinct possible, référer aux notes explicatives qu'il y avait dans la loi qui a constitué cette Régie: Cette Régie a compétence pour fixer, à la suite d'audiences publiques, les tarifs et les conditions auxquels l'électricité est fournie ou transportée par Hydro-Québec, à l'exclusion des contrats spéciaux de fourniture d'électricité que le gouvernement détermine, ainsi que ceux auxquels le gaz naturel est transporté, livré ou fourni par un distributeur de gaz naturel ou emmagasiné. Elle a également pour fonctions de surveiller leurs opérations afin de s'assurer que les consommateurs aient des approvisionnements suffisants et paient selon un juste tarif, d'approuver leurs plans de ressources, de déterminer leurs taux de rendement et d'autoriser leurs projets d'immobilisation.

La loi prévoyait également les critères qui devaient être pris en compte par la Régie. Le projet de loi avait également prévu que les exportations d'électricité soient soumises au contrôle de la Régie, selon qu'elle le détermine. L'autorisation du gouvernement est maintenue, dans les cas qu'il détermine, à l'égard des contrats d'exportation des producteurs privés et des contrats de puissance et d'énergie dont Hydro ne peut interrompre unilatéralement la livraison. On regarde l'ensemble de la mission de la Régie telle qu'elle a été constituée par la loi constitutive. Je pense qu'il est bon de faire ces rappels pour, par la suite, regarder dans les faits comment la Régie a agi.

On indique également que la Régie est seule compétente pour examiner les plaintes des consommateurs insatisfaits des décisions rendues par les distributeurs d'électricité ou de gaz naturel à l'égard d'un tarif ou d'une condition de services. Ceux-ci doivent instaurer une procédure interne d'examen des plaintes des consommateurs. La Régie est chargée de surveiller le prix de la vapeur et des produits pétroliers de sorte qu'on puisse renseigner le consommateur à cet égard. On voit dans quel contexte la Régie a été instituée, a été constituée et la mission qui lui est dévolue par cette loi-là. On précise également qu'en matière d'essence et de carburant diesel, elle a aussi le pouvoir de fixer un montant au titre des coûts d'exploitation d'un détaillant pour l'application de la présomption en matière de prix de vente en regard des produits pétroliers. Et, finalement, la loi a également attribué à la Régie des fonctions de nature consultative ainsi que des pouvoirs d'inspection et d'enquête. C'est de ça dont on parle, M. le Président.

Quand on regarde maintenant la motion qui a été présentée par la députée de Bonaventure qui réclame «que l'Assemblée nationale s'assure que le gouvernement donne dans les faits, à la Régie de l'énergie, toute l'indépendance nécessaire à l'exercice de son mandat initial»...

Maintenant, les faits. On a vu la mission. On peut, je dirais, succinctement, rappeler que, en 1998, près d'une centaine de décisions et avis ont été rendus par la Régie. Si elle a pu le faire, elle avait des moyens. Depuis le début de l'année, une quarantaine de décisions ont été rendues. Plus d'une centaine de dossiers portant sur des plaintes de consommateurs ont été ouverts.

Quels étaient les objectifs qui étaient fixés pour la Régie? Regardons maintenant qu'est-ce que la Régie fait. On constate qu'il y a eu ce travail qui a été accompli. Pour que la Régie puisse faire ce travail, elle avait donc les moyens de le faire. Faut-il rappeler également que la Régie a tenu des audiences sur des causes tarifaires 1998 de Gaz Métro et de Gazifère. Pour tenir de semblables audiences, il fallait avoir les pouvoirs de le faire, ce qu'elle avait. Rappelons également que la Régie travaille actuellement à la cause tarifaire de cette année, 1999, que des audiences sont actuellement en cours sur la fixation des coûts d'exploitation d'une essencerie. C'est ça, l'objectif. Elle a les moyens de le faire.

(11 h 40)

Il faut également savoir que la Régie – on en a entendu largement parler là aussi par les médias – a fourni différents avis à la demande du gouvernement sur les sujets suivants: l'utilisation de l'énergie éolienne, le tarif de fourniture, l'utilisation de la petite hydraulique qui devrait d'ailleurs nous parvenir prochainement. Il a été rappelé aussi tantôt par le ministre des Ressources naturelles, puis à juste titre... La loi constitutive comprend 172 articles, et deux ne sont pas en vigueur. Le député de Laurier-Dorion a fait référence au coeur et au cerveau, mais il faut observer, il faut constater que la Régie vit, elle remplit sa mission. Il y a des aspects qui sont importants, mais qui n'empêchent pas la Régie d'atteindre sa mission d'assurer la finalité pour laquelle elle a été constituée.

Je voulais rappeler ces éléments en indiquant également que, fondamentalement, la Régie, c'est un organisme de régulation économique. Quand on regarde aussi le contexte nord-américain où l'ensemble des producteurs d'énergie ont à opérer et quand on regarde également ce qu'est l'Hydro – parce qu'ils ont fait une large part de leurs interventions sur les interventions de l'Hydro – il faut rappeler que le Québec fait face à un nouveau contexte énergétique, c'est tout le défi de la déréglementation. Et rappelons ce qui a été indiqué dans le rapport de la table lors du débat public qui avait conduit à la Régie: «La restructuration du marché de l'électricité met donc en jeu les intérêts de la collectivité québécoise, à la fois cliente et propriétaire d'Hydro-Québec.» Ça fait partie des enjeux qui doivent être considérés. Ça fait que, dans ce contexte... Et en précisant aussi, comme l'avait également souligné le ministre des Ressources naturelles, qu'il n'y a pas péril en la demeure, là, sur la cause tarifaire, puisque les tarifs d'électricité sont gelés au Québec jusqu'en 2001. C'est important de le rappeler.

Ça fait que, quand on regarde tous ces éléments, on en vient à se demander: Pourquoi une semblable motion est-elle déposée à ce moment-ci, alors que le ministre est requis, dans le cadre des travaux parlementaires, en commission parlementaire pour traiter de l'ensemble des ouvrages de l'Hydro-Québec? On réclame du ministre qu'il soit à la fois en commission parlementaire et ici, à l'Assemblée, pour qu'il débatte de deux sujets, je dirais, convergents dans tout le domaine énergétique, mais on le prive des moyens qu'il devrait normalement avoir pour répondre adéquatement dans chacun de ces forums.

Quand on regarde tout cela, quand on regarde le contexte dans lequel cette motion a été amenée, on ne peut que conclure que la motion a été présentée dans un objectif de vouloir discréditer nos institutions, discréditer la Régie, susciter des inquiétudes pour une institution qui a été mise en place par l'Assemblée nationale et qui remplit sa mission et qui la remplit adéquatement. Je pense plutôt qu'il faut, comme l'a souligné le ministre des Ressources naturelles, continuer d'appuyer la Régie dans l'accomplissement de sa mission. Et, à cet égard-là, le gouvernement a agi, si on observe l'ensemble des faits, on ne peut plus correctement. C'est la raison pour laquelle, comme plusieurs de mes collègues ici, à l'Assemblée nationale, on va faire en sorte que la motion présentée soit défaite et qu'on en adopte une autre qui soit plus conforme aux faits, à la réalité. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député du Saguenay, adjoint parlementaire au ministre de l'Environnement. Alors, puisqu'il n'y a pas d'autre intervenant, nous allons immédiatement procéder au droit de réplique de Mme la députée de Bonaventure. Mme la députée.


Mme Nathalie Normandeau (réplique)

Mme Normandeau: Merci, M. le Président. Avant de conclure sur le débat qui a entouré le dépôt de cette motion, M. le Président, vous me permettrez de réagir quelque peu aux propos qu'a tenus tout à l'heure le ministre des Ressources naturelles sur la non-participation, sur la décision qu'a prise l'opposition officielle de ne pas participer aux consultations particulières qui se tiennent aujourd'hui, qui se sont tenues hier, aujourd'hui et demain.

Tout d'abord, je dois vous dire que je trouve très décevante l'attitude du ministre des Ressources naturelles. Compte tenu de l'expérience du ministre en Chambre, ses attaques personnelles à mon endroit et à l'endroit de groupes, de groupuscules, comme il les a appelés, donc, est décevante et met en lumière toute sa suffisance.

À ce sujet, M. le Président, je vous dirais que, si le gouvernement et si le ministre avaient eu de la considération, justement, pour les institutions démocratiques, pour l'Assemblée nationale, ils auraient pris leurs responsabilités durant la crise du verglas, et ils auraient convoqué l'Assemblée nationale d'urgence, et ils auraient adopté une loi spéciale qui leur aurait permis de légaliser les décrets qui, justement, ont été reconnus illégaux par le jugement Rousseau le 23 février dernier. Alors, je veux bien croire qu'on n'a pas de morale à faire au gouvernement, mais ce n'est pas moi qui le dis, c'est le jugement Rousseau qui a été rendu public le 23 février dernier. Et, si le gouvernement avait agi dans les règles de l'art dans ce dossier, M. le Président, on n'en serait pas là aujourd'hui. Alors, le gouvernement n'a pas pris ses responsabilités, et les conditions face auxquelles nous sommes confrontés aujourd'hui, c'est lui-même qui les a créées.

Alors, on constate qu'une fois de plus, en convoquant des consultations particulières, en présentant le projet de loi n° 42 qui vise à sécuriser les équipements d'Hydro-Québec qui ont été construits durant la crise du verglas, une fois de plus le gouvernement est en train de créer des mesures, donc tout un processus sur mesure. Comme mon collègue, tout à l'heure, de Laurier-Dorion l'a affirmé, lorsqu'on se situe au-dessus de ses propres lois, la solution est bien simple pour ce gouvernement, M. le Président: on change la loi. Alors, c'est exactement ce qu'on fait dans ce cas-ci. Et, pour l'opposition, il n'est pas question de cautionner une démarche comme celle-ci.

Le ministre tente de blâmer l'opposition dans ce dossier, mais je pense que le premier blâme qui doit être porté dans ce dossier, c'est sur ce gouvernement qu'il repose. Et, là-dessus, ce n'est pas nous qui le disons, une fois de plus, la commission Nicolet a été claire là-dessus, et également le jugement Rousseau.

Alors, nous, de ce côté-ci de cette Chambre, M. le Président, nous prenons nos responsabilités et nous n'assumerons pas, donc, d'irresponsabilité dans ce dossier pour cautionner une démarche qui est, encore une fois, malhonnête et illégale. Et j'ai eu l'occasion de le dire hier en commission parlementaire, durant les remarques préliminaires, nous sommes pour la sécurisation du réseau, nous souhaitons que les travaux reprennent le plus rapidement possible, mais qu'on le fasse dans le cadre des lois qui sont en vigueur.

Alors donc, M. le Président, la motion qui nous concerne ce matin – la Régie de l'énergie, nous demandons, dans les faits, que la Régie de l'énergie ait toute l'indépendance nécessaire à l'exercice de son mandat – nous la présentons dans un contexte, comme je l'ai souligné tout à l'heure, qui est bien particulier. Et on se rend compte que le gouvernement déploie énormément d'énergie à diminuer la portée de cette motion et l'importance également de cette motion. Cependant, je vous ferai remarquer que l'inquiétude et les faits que nous avons apportés ce matin... Et l'inquiétude que nous avons démontrée, elle n'est pas uniquement le fait de l'opposition officielle, elle est également le fait de plusieurs groupes dans le domaine de l'environnement qui s'inquiètent. Et, lorsque je parle de groupes, je parle également de certaines industries importantes.

Donc, M. le Président, à la lumière des faits que nous avons apportés ce matin – et d'ailleurs mon collègue de Laurier-Dorion a fait une excellente présentation, très éloquente – on constate que la Régie malheureusement ne dispose pas de tous les pouvoirs qui lui incombent par la loi pour exercer le rôle pour lequel elle a été créée. Alors, il y a également lieu de s'interroger. Si effectivement la Régie de l'énergie a été créée suite à un large consensus, alors, M. le Président, il y a lieu de s'interroger. Sur la base de ce consensus, pourquoi est-ce qu'effectivement on ne permet pas à la Régie d'exercer tous les pouvoirs pour lesquels elle a été créée?

Alors, normalement un pareil consensus devrait se traduire dans les faits par une mise en application rapide de l'ensemble des articles qui sont contenus dans la loi n° 50. Alors, évidemment, devant l'hésitation manifestée par le gouvernement, et le ministre des Ressources naturelles nous a encore confié qu'il n'était pas pressé à aller de l'avant avec l'avis concernant les tarifs de fourniture, donc, devant ce peu d'empressement, M. le Président, on est en droit de s'inquiéter.

(11 h 50)

Comme je le soulignais tout à l'heure, l'inquiétude que nous manifestons, elle est aussi partagée par plusieurs groupes et industries du domaine de l'énergie. Ces groupes qui, pour la plupart, ont participé au débat public sur l'énergie ont cru en la bonne foi du gouvernement dans le processus qui a mené à la création de la Régie de l'énergie. Et, dans ce sens-là, je l'ai souligné tout à l'heure, nous tenons à saluer l'initiative de ce gouvernement pour avoir créé une telle structure. Cependant, nous espérons que le gouvernement, qui aura à statuer sur des questions d'importance comme celle de la Régie qu'il a lui-même créée, donc, le fera rapidement.

J'ai souligné dans ma présentation, M. le Président, ce matin, que le Québec a fait un pas important avec la création de la Régie de l'énergie. Ce que je disais en fait, c'est qu'on était entré dans l'ère de la modernité. On a opéré une véritable révolution pour tout ce qui a trait au contrôle et à la façon de réglementer ce secteur important de notre économie. Dans le passé, on l'a constaté, il y a des problèmes importants qui ont découlé justement de cette capacité de réglementer et de contrôler ce secteur d'activité.

On a créé la Régie de l'énergie pour la rendre conforme à tout ce qui se fait ailleurs en Amérique du Nord. Et je dois dire qu'à l'aube du IIIe millénaire, dans un contexte de profond changement, la Régie de l'énergie aura un rôle crucial à jouer. Je crois qu'il faut éviter de revenir en arrière. Et, dans ce sens-là, le gouvernement a des responsabilités importantes à prendre. Et, si justement le gouvernement est responsable et conséquent avec les choix qu'il a faits en adoptant la politique énergétique, en tenant un vaste débat public sur l'énergie et en créant également la loi n° 50, qui a créé la Régie de l'énergie, ce gouvernement, nous l'espérons, va permettre à la Régie d'exercer tous les pouvoirs pour lesquels elle a été créée.

Alors, M. le Président, vous comprendrez bien que toute cette question relève d'une grande importance. C'est une question bien sûr qui commande de notre part une grande vigilance en raison des enjeux économiques majeurs qu'elle représente pour l'ensemble de la société québécoise, pour l'ensemble des Québécois et des Québécoises, pour l'ensemble des groupes, pour l'ensemble des industries qui évoluent dans ce domaine important qu'est l'énergie.

Alors, sur ces bases, M. le Président, c'est pourquoi, de ce côté-ci de la Chambre, nous aurions souhaité que le gouvernement accepte ou cautionne, donc, la motion qui est présentée ce matin. Malheureusement, on constate que des amendements majeurs y seront apportés, amendements qui malheureusement vont contribuer à dénaturer cette motion d'importance que nous avons présentée ce matin, la rendre moins pertinente effectivement et moins importante. Alors, M. le Président, mes remarques finales s'arrêtent ici. Je trouve décevante, malheureusement, l'attitude du gouvernement actuel par rapport à l'importance de la motion qui est présentée ce matin. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, ceci met fin à notre débat. Nous allons maintenant suspendre les travaux de l'Assemblée. Nous allons attendre le retour du vice-président Brouillet qui a pris en délibéré la recevabilité des amendements qui ont été déposés par le leader du gouvernement et ministre de l'Énergie. Alors, je suspends nos travaux quelques instants.

(Suspension de la séance à 11 h 54)

(Reprise à 11 h 57)


Décision du président sur la recevabilité de l'amendement

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, mes amis, nous revenons pour terminer ce débat. Et je dois rendre ma décision quant à la recevabilité des amendements à la motion présentée par l'opposition, par la députée de Bonaventure. Il y avait deux amendements. Le deuxième amendement, vous le connaissez très bien, c'est de remplacer les mots «l'exercice de son mandat initial» par les mots «la mise en oeuvre de sa loi constitutive». Cet amendement ne pose pas de problème, il est recevable.

Maintenant, il y a le premier amendement qui consiste à remplacer les mots «du Québec donne dans les faits» par les mots «continue d'accorder». Alors, ce deuxième amendement, je le déclare irrecevable pour les raisons suivantes. C'est que la motion comme telle affirme implicitement et clairement... À partir du texte qui dit «donne dans les faits», on demande à l'Assemblée d'assurer que le gouvernement donne, dans les faits, toute indépendance. Ce texte implique une affirmation qu'il n'y a pas actuellement d'indépendance accordée. C'est la lecture, le sens même de la motion. Et l'amendement vient nier cette chose-là en disant: Oui, nous accordons l'indépendance. Alors, je n'ai pas à me prononcer sur la conformité ou non du texte avec la réalité. Je prends le texte en lui-même pour voir si ça correspond aux règles de recevabilité.

Alors, ce n'est pas à moi à décider si, oui ou non, il y a conformité à la réalité, soit dans l'amendement, soit dans la motion principale. Ce n'est pas mon rôle de décider de la recevabilité. Alors, comme il y a, si vous voulez, le principe de la motion qui se trouve à être nié par l'amendement... Alors, un amendement qui apporte une modalité au principe, c'est acceptable. Mais, quand l'amendement consiste à nier ce qui constitue le principe de la motion, à ce moment-là, sur le plan strictement formel, quant au sens des termes, je juge que c'est irrecevable.

(12 heures)

Maintenant, c'est évident qu'il y a des situations un peu moins claires – parce que je dois référer à différentes jurisprudences. Il y a des jurisprudences qui correspondent exactement avec cette décision-là, d'autres où le texte était un peu plus imprécis, où on a changé des verbes ou des actions à poser par «continue à», mais la formulation ne laissait pas entendre qu'il y avait une affirmation d'absence. C'est la nuance, si vous voulez. Tandis qu'ici le texte «donne dans les faits [...] toute l'indépendance», il y a dans la formulation même du texte une affirmation d'absence d'indépendance. C'est, si vous voulez, ce qui m'a amené finalement à décider de l'irrecevabilité de cet amendement.

Alors, sur ce, nous allons... Ah oui! Maintenant, nous allons venir à la mise aux voix de la motion.

M. Boulerice: Je prends acte qu'il y a un nouveau courant jusprésidentiel, hein. Je...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vais mettre aux voix l'amendement, tout d'abord. Est-ce que le premier amendement, que je vais lire... Alors, M. le leader adjoint.

M. Boulerice: Une chose, M. le Président. Je pense que, normalement et statistiquement, quand il y a cinq députés de l'opposition de présents en Chambre, c'est qu'ils vont demander un vote nominal. Alors, je ne sais pas s'ils vont le faire.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Boulerice: Je m'y suis fait, selon une vieille tradition numérique, en plus.


Vote reporté

Le Vice-Président (M. Brouillet): Très bien. Bon, alors, finalement, il n'y a pas d'amendement à mettre aux voix parce que ça faisait un tout; cette partie-là, ici, constitue un seul amendement. Donc, je mets la motion aux voix, que je vais vous lire rapidement:

«Que l'Assemblée nationale s'assure que le gouvernement du Québec donne dans les faits, à la Régie de l'énergie, toute l'indépendance nécessaire à l'exercice de son mandat initial.»

Est-ce que cette motion est adoptée?

M. Paradis: Vote par appel nominal, M. le Président...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Vote par appel nominal.

M. Paradis: ...et nous sommes prêts à voter.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Et, M. le leader adjoint du gouvernement, êtes-vous prêts à voter?

M. Boulerice: Et, de façon à permettre aux députés de l'opposition d'être encore plus prêts à voter, donc plus nombreux, je vais, conformément à l'article 223 de notre règlement, vous demander de bien vouloir reporter le vote à la période des affaires courantes.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, très bien. Le vote est donc reporté aux affaires courantes de cet après-midi. Oui, c'est ça.

Alors, nous allons suspendre nos travaux jusqu'à cet après-midi, 14 heures.

(Suspension de la séance à 12 h 2)

(Reprise à 14 h 2)

Le Président: À l'ordre! Mmes, MM. les députés et peut-être Mmes, MM. les anciens membres de l'Assemblée qui sont imprégnés de la culture institutionnelle, alors, nous allons nous recueillir quelques instants d'abord.

Très bien. Veuillez vous asseoir.


Présence de l'ambassadeur d'Israël, M. David Sultan, et du consul général d'Israël à Montréal, M. Daniel Gal

Alors, chers collègues, j'ai d'abord le plaisir de souligner la présence dans les tribunes de l'ambassadeur d'Israël, Son Excellence M. David Sultan, ainsi que du consul général d'Israël à Montréal, M. Daniel Gal.


Présence de membres de l'Amicale des anciens parlementaires de l'Assemblée nationale du Québec

Et, comme vous l'avez remarqué sans doute, j'ai également le plaisir de souligner la présence des membres de l'Amicale des anciens parlementaires de l'Assemblée nationale du Québec qui se réunissent aujourd'hui à l'occasion de leur cinquième assemblée générale. Je voudrais en particulier signaler la présence des membres du conseil d'administration: le président, Roger Houde; le vice-président, Pierre de Bellefeuille; le secrétaire-trésorier, Louis-Philippe Lacroix; ainsi que les administrateurs Denis Hardy, François Gagnon et Jérôme Proulx.


Affaires courantes

Alors, convaincu que le sens de la discipline et de l'institution de nos anciens collègues rejaillira sur le parquet du salon bleu, nous allons aborder maintenant les affaires courantes.

Il n'y a pas de déclarations ministérielles aujourd'hui, ni de présentation de projets de loi, ni de dépôt de documents.


Dépôt de documents

Au dépôt de rapports de mission, Mme la députée de La Pinière.


Rapport de la mission d'observation des élections législatives au Bénin

Mme Houda-Pepin: Oui, M. le Président. Je dépose le rapport de la mission d'observation électorale de la francophonie que j'ai effectuée au Bénin lors des élections législatives du 30 mars 1999, mission à laquelle j'ai eu le plaisir de participer en tant que représentante de la région Amérique de l'Assemblée parlementaire de la francophonie.

Le Président: Alors, merci, Mme la députée de La Pinière. Votre rapport est déposé.


Dépôt de rapports de commissions

Au dépôt de rapports de commissions, Mme la présidente de la commission de l'économie et du travail et députée des Chutes-de-la-Chaudière.


Étude détaillée du projet de loi n° 15

Mme Carrier-Perreault: Oui, M. le Président. J'ai l'honneur de déposer le rapport de la commission de l'économie et du travail qui a siégé le 13 mai 1999 afin de procéder de l'étude détaillée du projet de loi n° 15, Loi modifiant la Loi sur le régime des eaux. La commission a adopté le projet de loi avec un amendement.

Le Président: Très bien. Ce rapport est déposé. M. le président de la commission de la culture et député de Matane.


Étude détaillée du projet de loi n° 6

M. Rioux: M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport de la commission de la culture qui a procédé à l'étude détaillée du projet de loi n° 6, Loi modifiant la Loi sur la Société de la Place des Arts de Montréal et la Loi sur la Société du Grand Théâtre de Québec.

Le Président: Alors, le rapport est également déposé. M. le vice-président à la commission des finances publiques et député de Nelligan.


Étude détaillée des projets de loi n°s 2 et 9

M. Williams: M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport de la commission des finances publiques qui a siégé le 18 mai 1999 afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi n° 2, Loi sur la réforme de la comptabilité gouvernementale. La commission a adopté le projet de loi.

Et, M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport de la commission des finances publiques qui a siégé le 18 mai 1999 afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi n° 9, Loi sur Financement-Québec. La commission a adopté le projet de loi avec des amendements.

Le Président: Merci, M. le député de Nelligan. Les rapports sont déposés.

Alors, il n'y a pas de dépôt de pétitions ni d'interventions portant sur une violation de droit ou de privilège.

Je vous avise qu'après la période de questions et de réponses orales sera tenu le vote reporté sur la motion de Mme la députée de Bonaventure présentée aux affaires inscrites par les députés de l'opposition.


Questions et réponses orales

Alors, maintenant, nous abordons cette période de questions et de réponses orales. M. le député de Hull, en question principale.


Avis de la CAI concernant la transmission de renseignements par le ministère du Revenu au Bureau de la statistique du Québec


M. Roch Cholette

M. Cholette: Merci, M. le Président. Alors, le 4 mai dernier, ma collègue de Beauce-Sud posait la question suivante au ministre du Revenu, et je cite: «M. le Président, est-ce que j'ai bien compris que le ministre du Revenu s'engage à déposer l'avis de la Commission d'accès à l'information [...] avec le Bureau de la statistique du Québec?» C'était sa question. Alors, le ministre du Revenu lui répondait à ce moment-là, et je le cite au texte: «Bien, c'était qualifié par le fait que je devais en prendre connaissance, donc que tel avis existait, qu'il était disponible, qu'il était prêt. Et il me semble que ma réponse était claire, et je vous la refais. Ce sera d'une transparence absolue.»

Depuis ce temps, l'obscurité totale! Le ministre n'a toujours rien déposé et il fait preuve d'une transparence opaque en refusant de demander à la Commission d'accès de faire enquête dans le dossier des fuites d'information entre Revenu Québec et le Bureau de la statistique du Québec.

Alors, ma question au ministre du Revenu: Est-ce que la véritable raison pour laquelle il refuse de demander à la Commission de faire enquête est justement parce qu'il sait très bien qu'il est dans une situation identique à sa collègue de Rosemont, que l'avis de la Commission d'accès serait identique et que les conséquences devraient être identiques?

Le Président: M. le vice-premier ministre, ministre d'État à l'Économie et aux Finances et ministre du Revenu.


M. Bernard Landry

M. Landry: La meilleure façon de répliquer à des propos légers et inexacts, c'est l'action. Alors, comme je l'ai fait presque à chaque séance où l'opposition m'a questionné, une fois pendant 45 minutes, je dépose des documents qui illustrent les gestes posés, car l'action est supérieure à l'inaction qui les a caractérisés dans ce dossier pendant neuf ans. Alors, aujourd'hui, je dépose une information relative à la suspension de 16 contrats; j'avais déposé la liste des contrats suspendus. Après – comme je me suis engagé à le faire pour chaque étape de ce dossier – consultation et approbation de la Commission d'accès à l'information, 10 contrats pourront être relancés. Alors, déclaration des particuliers, modélisation et architecture, an 2000, système d'encaissement, imagerie, système de perception.

Par ailleurs, je dois dire que cinq contrats sont toujours suspendus, dont celui qui implique le remboursement à quelques millions de nos concitoyens et concitoyennes du 150 $ de taxe de vente. Et j'ai vu que le chef de l'opposition a annoncé une attitude coopérative, une attitude constructive. Alors, j'espère que, dès que j'aurai déposé ces amendements... Il me reste quelques consultations à faire, dont auprès de la jurisconsulte, et l'autorisation du Conseil des ministres, bien entendu. Il me fera le plus grand plaisir de proposer l'amendement à cette Chambre. Alors, je dépose le document dont je viens de parler et...

(14 h 10)

Des voix: ...

M. Landry: M. le Président, quand ce document existe. À l'impossible nul n'est tenu. Je vous ai dit l'autre fois que, si l'avis existait, je le déposerais. L'avis n'existe pas. Il n'est pas en mon pouvoir de déposer une chose qui n'existe pas.


Document déposé

Le Président: Alors, le leader de l'opposition officielle me fait signe qu'il y avait consentement pour le dépôt. M. le député de Hull, en complémentaire.


M. Roch Cholette

M. Cholette: Est-ce que le ministre réalise que, pour la énième fois, il ne répond pas à nos questions? La question est simple: Peut-il s'engager aujourd'hui à demander à la Commission d'accès de faire enquête dans le dossier du Bureau de la statistique du Québec?

Le Président: M. le ministre.


M. Bernard Landry

M. Landry: S'il voulait une réponse à cette question, il n'avait qu'à poser cette question.

Des voix: Ah!

M. Landry: Ce n'est pas ça qu'il a dit tout à l'heure. Ce qu'il a dit il y a un instant, c'est dans notre Journal des débats : il me demandait de déposer un avis qui n'existe pas.

Il me demande pourquoi l'avis n'existe pas, bien sûr que je vais lui dire. Il est basé sur cinq distinctions, que j'ai faites à plusieurs reprises et que je vais refaire de façon systématique. Entre l'affaire SOM et l'affaire BSQ, il y a les cinq différences suivantes: SOM est une firme privée; il y avait absence de contrats conformes; ce n'est pas prévu à la Loi sur le ministère du Revenu. Les articles 6.2 et suivants de la Loi...

Bon. Il me demande de déposer des documents qui n'existent pas, puis, pendant que je leur parle de documents qui existent, ils ne m'écoutent pas. Alors, M. le Président, font-ils semblant...

Le Président: M. le vice-premier ministre, en conclusion.

M. Landry: Font-ils semblant de prendre cette affaire au sérieux? Car, nous, M. le Président, nous la prenons au sérieux. C'est pourquoi j'essaie de donner, malgré leurs interjections, des réponses articulées et précises. Alors, le cinquième point, c'était: pas de loi concernant l'organisme en question.

Et je cite Mme Mariette Dion, de la Commission d'accès à l'information, qui parlait au journal The Gazette , je présume, en tout cas, c'est en anglais: «The case is different from the SOM allegation because it involves exchanges of information within the Government.»

En un mot, M. le Président, je n'ai aucune indication, personne ne m'a donné aucune indication que les lois et règlements, dans cette affaire, n'avaient pas été suivis. C'est la raison pour laquelle je ne demande pas d'avis fantaisiste à une commission qui a d'autres choses à faire.

Des voix: Ah!

Le Président: M. le député de Hull.


M. Roch Cholette

M. Cholette: Est-ce que le ministre réalise que, le 28 avril dernier, le jour même de la démission de son ex-collègue, il affirmait en cette Chambre, et je le cite comme il aime bien qu'on le fasse: «Mais le chef d'un ministère, quand une chose de cette nature arrive, ne peut pas reporter sa responsabilité sur d'autres. Il l'assume»? Elle l'a assumée. Alors, qu'attend le ministre pour assumer ses responsabilités et mettre fin à deux poids deux mesures dans ce dossier-là, M. le Président?

Le Président: M. le vice-premier ministre.


M. Bernard Landry

M. Landry: Encore faudrait-il que la chose arrive. Et la chose n'est pas arrivée, et je n'ai pas la moindre indication que la chose soit arrivée. Et, si l'opposition est sincère en cette affaire et prétend que la chose est arrivée, qu'elle le démontre, et elle sait ce qu'elle a à faire. La Commission d'accès à l'information, ça répond à toute demande de citoyen quand elle est fondée et qu'elle n'est pas fantaisiste.

Pour continuer la transparence, M. le Président, vous savez que nous avons mis sur pied un comité, et j'ai eu aujourd'hui une lettre du président de la Commission, Paul-André Comeau, qui donne son avis sur ce comité, et qui démontre bien...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Landry: Ils rigolent d'un fonctionnaire nommé à l'unanimité par cette Assemblée.

Le Président: Bien. M. le vice-premier ministre.

M. Landry: Vous avez fait allusion, M. le Président, en début de séance, en évoquant nos collègues qui ont déjà siégé parmi nous, au respect de l'institution et des règles institutionnelles. Quand la mention d'un fonctionnaire nommé à l'unanimité par cette Assemblée, et qui se conduit dignement, provoque des rires dans l'opposition, je pense que l'institution est en danger de ne pas être respectée, sans compter que ça m'empêche de parler. Et, moi...

Le Président: Alors, je voudrais éviter qu'on reprenne une pratique qu'on avait passablement mise de côté depuis quelques années, c'est-à-dire qu'on passe une partie du temps de la période de questions et de réponses orales à faire des questions de règlement. Bon. Les leaders, hier – et je ne veux pas porter de jugement – ont jugé bon de le faire, mais je voudrais inviter tout le monde à faire en sorte que les leaders n'aient pas à le faire et que le président n'ait pas à reconnaître... Ça va? M. le vice-premier ministre.

(14 h 20)

M. Landry: D'ailleurs, puisqu'ils rigolent aujourd'hui, je ne sais pas si leur rire va être rétroactif, parce que je vais produire une lettre du 21 juin 1993, où la Commission d'accès, dans le cas de la formation d'un comité analogue, disait: «Elle est heureuse de l'initiative du ministère de créer un comité aviseur permanent afin de conseiller les gestionnaires en matière d'accès et de sécurité à l'information.» Dans ce temps-là, ce n'était pas drôle, c'était louable.

Alors, voici, si on me permet enfin de le dire, ce que M. Comeau m'a écrit. On lui a soumis le plan de travail du comité tripartite. Il dit: «Ce plan de travail m'apparaît répondre à l'objectif de mettre en place au MRQ des processus administratifs qui assurent une protection adéquate des renseignements personnels et qui sont conformes aux règles légales en vigueur.» Ce n'est pas encore fait, on y travaille très fort et on fait le contraire de ce qu'eux ont fait pendant neuf ans, c'est-à-dire que nous faisons beaucoup et eux n'ont fait rien.

Le Président: En question principale, Mme la députée de Saint-Henri–Sainte-Anne, maintenant.


Transmission de renseignements par le ministère du Revenu au Bureau de la statistique du Québec


Mme Nicole Loiselle

Mme Loiselle: Merci, M. le Président. Hier, on apprenait avec stupéfaction que le ministre du Revenu est prêt à tout, qu'il est prêt à tout pour continuer sa tentative de noyer le poisson dans ce dossier. Afin de renverser la vapeur et pour créer une diversion, le ministre du Revenu a tenté de faire accroire à la population du Québec que le problème, ce n'est pas que lui a enfreint une loi, mais que les travailleurs à faibles revenus risquent de ne pas recevoir le remboursement de la TVQ. Il faut le faire! Mais personne, personne en cette Chambre n'est dupe, dupe de sa manoeuvre de diversion, dupe de sa manoeuvre de se disculper et de sauver sa peau.

M. le Président, est-ce que le ministre du Revenu peut arrêter d'affoler et d'ameuter la population, de prendre en otage la population et d'utiliser les travailleurs et les familles à faibles revenus comme bouclier pour se protéger et pour camoufler le fait que, lui, le député de Verchères et ministre du Revenu, il n'a pas autant le sens de l'honneur et du devoir que la députée de Rosemont et ex-ministre du Revenu?

Une voix: Bravo!

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: Bien, M. le Président, j'ai voulu la laisser compléter son préambule et sa question parce que – oui, j'aurais pu l'arrêter avant – voilà un beau cas, exemplaire, de violation, de la première phrase à la dernière, de notre règlement. Pendant tout son préambule, y compris sa question, la députée de Saint-Henri a imputé des motifs indignes au député de Verchères, refusé d'accepter sa parole – article 35. Manifestement, il n'y a même pas une phrase qui est une violation du règlement, c'est toute sa question, tout son préambule.

Une voix: Bravo!

Le Président: M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: S'il y avait eu un soupçon de vérité dans ce que vient de dire mon bon ami le leader du gouvernement, vous auriez immédiatement arrêté Mme la députée.

Des voix: ...

Le Président: À ce moment-ci, j'inviterais le vice-premier ministre à répondre. M. le vice-premier ministre.


M. Bernard Landry

M. Landry: M. le Président, d'abord, je souligne que cet amendement législatif auquel le gouvernement travaille et qui sera soumis au Conseil des ministres et puis à cette Assemblée, il nous a été suggéré par la Commission d'accès à l'information. Je relis la lettre que j'ai déposée: «C'est pourquoi la Commission souscrirait à l'adoption par l'Assemblée nationale d'une modification législative pour clarifier la situation.» Alors, en clarifiant la situation, le gouvernement fait son devoir et, par le fait même, il empêche que soit mis en péril l'envoi de chèques à quelques millions de personnes au mois d'août, suivant cette politique qui consiste maintenant à rembourser totalement, en deux chèques, la taxe de vente.

C'est dommage que le chef de l'opposition ne soit pas ici, parce que, lui...

Des voix: ...

Le Président: Alors, je voudrais rappeler à tout le monde que les dispositions de notre règlement, qui sont actuellement, selon la réaction que je viens d'entendre...

Des voix: ...

Le Président: Il n'y a qu'une personne qui a la parole à ce moment-ci, c'est le président de l'Assemblée. Alors, les dispositions de notre règlement, contrairement à ce que plusieurs pensent, ne visent pas à constamment ne pas mentionner qu'un député est absent; on ne peut signaler l'absence d'un député, dans le cadre et dans l'esprit de l'article 35 du règlement qui vise à éviter d'imputer des motifs indignes. Je ne pense pas qu'actuellement il y ait eu raison d'avoir ce type de réaction. Je ne crois pas que, dans l'interprétation des propos que je viens d'entendre, on a prêté des intentions indignes au chef de l'opposition officielle... de son absence ici, à l'Assemblée. Tout le monde sait que le chef de l'opposition officielle a effectué une mission à l'étranger et qu'il est normal, comme le premier ministre, qu'il soit absent. Je n'ai aucune indication actuellement des raisons pour lesquelles il est absent, et je sais par ailleurs qu'il n'y a pas de motifs indignes que j'ai entendus qui ont été prononcés et qui ont été prêtés au chef de l'opposition officielle.

Et je voudrais donc rappeler aux gens cette disposition du règlement. L'article 35 est clair, quand on parle et qu'on fait référence au fait qu'on ne doit pas indiquer l'absence d'un collègue, il n'y a rien qui indique ça dans le règlement. Ce qu'on indique dans le règlement, c'est qu'on ne doit pas prêter des motifs indignes. Et c'est en regard de cet article-là que normalement on s'abstient de signaler l'absence d'un collègue, parce que cela pourrait prêter à interprétation.

M. le vice-premier ministre, en conclusion.

M. Landry: M. le Président, c'est le contraire. Je ne voulais pas lui prêter des motifs indignes, ce que notre règlement aurait réprouvé, mais, au contraire, des motifs dignes et beaucoup plus dignes que ce qu'a dit sa députée. Car, en effet, le chef de l'opposition officielle, sentant que des remboursements pouvaient être menacés si la loi n'est pas amendée, a dit ceci, et je le cite: «L'opposition a l'habitude d'être constructive, a-t-il avancé lors d'un point de presse. Que le gouvernement présente ses amendements, nous verrons.» Si c'étaient les choses horribles qu'a dites la députée, son chef n'aurait pas eu ces propos d'ouverture et d'attitude constructive. Son chef a eu la sagesse, avant de lancer des accusations qui frôlaient l'injure à tous les mots prononcés, de dire qu'il verrait les amendements, comme un bon parlementaire fait avant de condamner ce qu'un autre s'apprête à faire et lui prêter, là, des motifs indignes.

Des voix: Bravo!

Le Président: Mme la députée.


Mme Nicole Loiselle

Mme Loiselle: M. le Président, est-ce que je peux rappeler au ministre du Revenu qu'exagérer est aussi insignifiant et...

Le Président: Non, non. Non, non, non. Ce n'est pas une question, Mme la députée. Vous savez, là... Un instant!

J'ai indiqué hier – et est-ce que je devrai le rappeler? – que le travail de la présidence, c'est-à-dire d'un de vos collègues que vous avez choisi, serait plus simple s'il y avait moins de gérants d'estrade. Alors, en l'occurrence, Mme la députée de Saint-Henri–Sainte-Anne, je pense que votre formulation, c'était un commentaire sous forme interrogative. Ce n'est pas admis. Une question complémentaire sans préambule, s'il vous plaît.

M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: M. le Président, question de règlement. Simplement pour vous rappeler que les propos prononcés par ma collègue sont exactement les mêmes propos que vous avez acceptés du ministre du Revenu la semaine dernière.

Des voix: Ah!

Le Président: Alors, je pense que j'ai indiqué à Mme la députée comment elle devait formuler sa question. Mme la députée.

Mme Loiselle: M. le Président, est-ce que le ministre peut nous expliquer pourquoi la situation était tellement claire pour l'ex-ministre du Revenu et qu'elle a été obligée de démissionner, mais que, pour lui, le député de Verchères et ministre du Revenu, on doit légiférer, on doit se camoufler derrière les travailleurs à faibles revenus, on doit se servir des plus démunis pour essayer de créer une diversion pour assurer de camoufler et de sauver sa propre peau?

Une voix: Ce n'est pas des accusations, ça. Ce n'est pas grave.

Le Président: M. le vice-premier ministre.


M. Bernard Landry

M. Landry: La députée commence à apprendre. Effectivement, c'est moi qui ai dit dans cette Chambre, citant un grand auteur français la semaine dernière, que tout ce qui est exagéré est insignifiant, et ça s'appliquait avec une pertinence totale ce coup-là.

Des voix: ...

Le Président: M. le vice-premier ministre, chacun peut avoir son habileté oratoire, mais, à un moment donné, la présidence sera incapable d'imposer le respect et l'application du règlement si chacun essaie de tirer son épingle du jeu indépendamment de l'esprit, aussi, du règlement. Je vous invite à vous conformer à l'esprit du règlement.

M. Landry: Alors, l'esprit du règlement, M. le Président, c'est que je redise, premièrement, que, si jamais ces chèques étaient menacés, ça ne pourrait venir que d'une attitude butée de l'opposition officielle qui refuserait de comprendre que, comme le dit la Commission d'accès à l'information, il faut clarifier nos lois pour que le ministère du Revenu puisse fonctionner convenablement.

Deuxièmement, M. le Président, là je n'ai pas d'auteur à citer, je n'ai qu'à reprendre les faits systématiques qui établissent une différence claire et nette entre le cas SOM, qui a amené ma collègue à démissionner dans l'honneur, comme on l'a dit... Et ce n'est pas par ce seul geste, d'ailleurs, qu'elle s'est acquis notre estime, c'est surtout qu'elle a été une excellente ministre du Revenu qui a combattu le travail au noir et qui a permis à des travailleurs de la restauration d'avoir accès à des mesures sociales – si les démunis vous intéressent – qu'ils n'avaient jamais pu rêver d'avoir depuis des décennies.

Le Président: M. le vice-premier ministre, vous savez très bien, vous, comme tous les autres, qu'il y a un temps imparti pour les questions et les réponses, et je n'ai pas à choisir la façon dont un ou l'autre pose des questions ou répond. Et je vous indique que vous avez largement déjà écoulé le temps pour une réponse complémentaire. Alors, en conclusion, rapidement, s'il vous plaît.

M. Landry: En conclusion. J'ai dit qu'il y avait cinq différences entre le cas SOM et le cas BSQ, et je maintiens que c'est ça, et je maintiens que c'est la loi.

Le Président: Mme la députée.


Mme Nicole Loiselle

Mme Loiselle: M. le Président, est-ce que le ministre du Revenu peut admettre qu'il n'a pas besoin de légiférer pour pouvoir émettre les chèques de remboursement de la TVQ et qu'il n'a qu'à engager les ressources nécessaires dans son propre ministère, comme ça s'est fait auparavant? Puis, s'il tient tellement, M. le Président, à légiférer, ce n'est pas pour aider les faibles revenus, mais c'est pour se disculper, lui.

(14 h 30)

Le Président: Alors, est-ce que je pourrais inviter les uns et les autres, encore une fois... Les deux leaders se sont levés chacun leur tour à des moments différents pour nous inviter tous au respect de l'esprit du règlement. Je pense que toute la question que vous avez posée était correcte jusqu'à ce que vous imputiez des motifs indignes. Je crois qu'une bonne partie des problèmes que nous avons à la période des questions et des réponses orales, c'est qu'on pense de marquer des points en ajoutant des choses qui sont personnelles et qui n'ajoutent rien au fond de la question. M. le vice-premier ministre.


M. Bernard Landry

M. Landry: M. le Président, je réitère que l'idée de cet amendement législatif vient d'une commission qui a comme mandat principal, comme obsession, depuis des années, de s'assurer de l'application de ces lois et de la protection des renseignements. Et la Commission, qui me l'a écrit, dit qu'elle souscrirait à l'adoption par l'Assemblée nationale d'une modification législative pour clarifier la situation. La Commission dit que la situation doit être clarifiée. Le gouvernement répond à la Commission: Oui, nous allons la clarifier par le seul moyen qui est à notre disposition, le moyen démocratique de l'Assemblée nationale et d'un amendement législatif. De un.

De deux, 2 000 000 de chèques, là, d'ici le mois d'août, à la mitaine... Si la députée n'a pas pris acte que l'informatique avait été inventée et existait, si la députée n'a pas pris acte, ce que tous les techniciens de mon ministère savent, qu'une telle chose – que j'aurais peut-être souhaitée si j'avais pu la faire, j'étais prêt à essayer de faire ça – qu'une telle chose, me disent tous les spécialistes de la question, est impossible. Alors, je ne prendrai aucun risque avec les remboursements d'impôts à ceux qui ont et celles qui ont le droit de les avoir, et nous prendrons les mesures démocratiques qui s'imposent. Et, si c'est un amendement aux lois, nous ferons cet amendement aux lois.

Une voix: Bravo!

Le Président: M. le député de Chomedey...

M. Mulcair: En principale.

Le Président: ...en principale.


Demande d'enquête de la CAI sur la transmission de renseignements par le ministère du Revenu au Bureau de la statistique du Québec


M. Thomas J. Mulcair

M. Mulcair: Ce qu'on comprend surtout, c'est qu'il ne veut prendre aucun risque avec sa carrière. M. le Président...

Des voix: ...

Le Président: Je ne sais pas si notre comportement va inspirer une certaine nostalgie à nos anciens collègues, mais je voudrais signaler à tout le monde que normalement la présidence accepte que, dans le feu des interventions puis de la vigueur du débat, un certain nombre de choses se disent. Mais quand systématiquement et de jour en jour, de part et d'autre, finalement, on enfreint les dispositions de l'article 35 qui nous interdit d'imputer des motifs indignes à un collègue et de se servir d'un langage violent, injurieux ou blessant à l'adresse de qui que ce soit, et en particulier des membres de l'Assemblée, on peut finir par créer un climat tellement pourri et tellement destructif qu'il ne sera plus possible de gérer cette période de questions et de réponses et qu'il faudra ajourner pour que le calme revienne.

Alors, je vous demanderais, de part et d'autre, de vous abstenir, dans ce débat qui semble important aux uns et aux autres, de porter des attaques personnelles à vos collègues. M. le député de Chomedey, s'il vous plaît, de façon réglementaire.

M. Mulcair: Oui, merci, M. le Président. La semaine dernière en conférence de presse, un journaliste a posé la question suivante au ministre du Revenu du Québec: «In the case of the similar surveys conducted by the BSQ, do they contravene the Access to Information Act?» La réponse du ministre du Revenu: «Technically, I think.» Quelques jours plus tôt, dans cette Chambre – j'espère que ce n'est pas anti-parlementaire de lire les débats en Chambre, M. le Président: «Les sondages additionnels réalisés par le BSQ ont tous fait l'objet d'un contrat[...]. Alors, encore une fois, qu'on parle du viol de la loi, qu'on parle du viol des procédures, bien sûr...»

M. le Président, la vraie question à laquelle le ministre du Revenu doit répondre, ce n'est pas pourquoi il faut qu'il travaille sur les chèques de la taxe de vente du Québec, ce n'est pas qu'il a eu des conversations ou des lettres sur l'avenir d'un comité avec le président de la Commission d'accès à l'information, la seule vraie question à laquelle il doit répondre, c'est: Pourquoi faire c'était si honorable que sa collègue la députée de Rosemont demande un avis à la Commission d'accès à l'information et que lui a le droit de se lever et de lire son propre jugement, écrit par lui-même, dans lequel il fait cinq distinctions? S'il est si sûr que ça qu'il n'y a rien d'illégal qui a été fait dans le cas des contrats du Bureau de la statistique du Québec, pourquoi il ne nettoie pas la situation qui met fin à tout ça et qu'il ne réfère pas le dossier, comme sa collègue a eu l'honneur de le faire, à la Commission d'accès à l'information? C'est aussi simple que ça, M. le Président.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le vice-premier ministre.


M. Bernard Landry

M. Landry: Je vois une espèce de petite contradiction dans l'attitude de l'opposition. À chaque fois qu'on mentionne le nom du président de cette Commission, ça leur attire des rires gras et des hurlements. Et là, maintenant, il me supplie de m'adresser à lui. Je vous redis que la Loi du BSQ en particulier, qui fait de lui, fait de cet institut, maintenant – c'est comme ça qu'il s'appelle – un organisme public, établit cinq différences fondamentales, et la Commission elle-même – j'ai cité Mme Dion – dit que «the case is different from the SOM allegations». «The SOM allegations», c'est ça qui a provoqué la démission de ma collègue.

La Commission dit d'avance que le cas est différent. Je donne cinq différences essentielles. Si l'opposition a un fait à me donner à l'effet que la loi aurait été violée, qu'elle me le donne, ce fait, ou sinon tout simplement qu'elle le demande elle-même, elle a le droit de le faire.

Le Président: M. le député.


M. Thomas J. Mulcair

M. Mulcair: Est-ce que le ministre du Revenu, qui vient de nous faire un long discours sur l'importance de respecter l'institution de la Commission d'accès à l'information, est capable de comprendre que la personne qu'il a citée dans l'article de la Gazette , c'est une fonctionnaire qui travaille à la Commission d'accès et que ce que cette Chambre a nommé, c'est cinq commissaires, dont un président? C'est ça, la Commission d'accès à l'information. Alors, ni son «self-serving» jugement rédigé par lui-même ni l'avis soi-disant d'une fonctionnaire qui n'a pas le pouvoir de rendre un avis ne compte pour quoi que ce soit. Pourquoi il refuse de faire la chose simple de demander à la Commission d'accès à l'information de tirer tout au clair, de faire exactement comme la Commission a fait dans le cas de sa collègue de Rosemont? Il sait la réponse comme nous: Parce qu'il va être obligé de démissionner, comme elle.

Le Président: M. le ministre.


M. Bernard Landry

M. Landry: Si le député veut mettre en cause l'intégrité de cette fonctionnaire de la Commission ou sa capacité de se prononcer comme porte-parole de la Commission sur ce que pense la Commission, qu'il le fasse. Il pourrait le faire en dehors de la Chambre aussi, ce serait plus courageux.

Quant au fond de la question, je réitère, M. le Président, que, moi, je respecte cette institution de la Commission d'accès à l'information. C'est notre gouvernement, d'ailleurs, qui a eu l'honneur de la créer et de faire voter cette loi, en 1985. Malheureusement, pendant neuf ans, c'est comme si on n'avait pas vraiment voté cette loi. Une série de négligences, un long sommeil de vigilance en matière d'application de cette loi nous mettent dans la situation où nous sommes aujourd'hui. Et, quand il y a eu lieu de faire appel à la Commission et de demander une enquête, le gouvernement l'a fait et a demandé tous les avis qu'il fallait. Mais, comme nous respectons l'institution que nous avons nous-mêmes créée, quand on n'a aucune raison de mobiliser une instance, on ne le fait pas par fantaisie ou pour se faire du capital politique ou s'en défaire, on respecte l'institution et les lois.

Le Président: En principale?

(14 h 40)

M. Dumont: Oui.

Le Président: En principale, M. le député de Rivière-du-Loup d'abord, M. le député de l'Acadie.


Processus d'élimination des clauses orphelin


M. Mario Dumont

M. Dumont: Oui. Merci, M. le Président. Il y a un an jour pour jour aujourd'hui, l'Assemblée nationale était saisie d'un projet de loi sur les clauses orphelin, projet de loi dont l'essence était fort simple: d'éliminer les clauses orphelin. L'expression «éliminer les clauses orphelin» est exactement la même expression que le ministre de l'Éducation, responsable de la Jeunesse, utilisait il y a quelques semaines en commission parlementaire pour décrire l'action qui allait être à venir du gouvernement.

Alors, la ministre a commencé dans les derniers jours à nous annoncer une version diluée du projet de loi, entre autres basée sur des motifs supposément d'emploi pour les jeunes. Pourtant, il y a une étude qui est sortie, d'un groupe de recherche sur le travail et les jeunes, qui dit: «Une chose est sûre, les clauses orphelin n'ont pas eu pour effet d'améliorer la situation de l'emploi dans les entreprises qui les ont utilisées.»

Alors, ma question à la ministre est fort simple: Une motion va être soumise à l'Assemblée tout à l'heure pour procéder à l'étude d'un projet de loi fort simple qui veut éliminer les clauses orphelin. Maintenant qu'une étude lui démontre que les motifs qu'elle a utilisés sont tout à fait faux et non fondés, est-ce que la ministre est prête, oui ou non, à se lancer, à s'engager résolument dans un processus d'élimination des clauses orphelin?

Le Président: Mme la ministre d'État au Travail et à l'Emploi.


Mme Diane Lemieux

Mme Lemieux: M. le Président, je suis déjà lancée, je l'ai dit, je le dis depuis plusieurs jours. Nous allons agir de manière responsable. Oui, nous avons saisi très clairement l'appel des jeunes dans ce dossier-là, mais, en même temps, nous devons voir les impacts, nous ne pouvons pas nous priver d'emplois. Et, pour ça, il nous faut progresser tranquillement mais sûrement. Nous avançons, et nous ferons le débat à partir d'une pièce législative consistante qui va bien camper les choses. C'est ça, agir de manière responsable. Et nous déposerons dès que nous serons prêts. Il y aura un processus parlementaire. Parce que, après tout, ce débat-là ne se fera pas entre Mario Dumont et Mario Dumont; il va se faire avec toutes les composantes de la société québécoise: les jeunes, les travailleurs, les employeurs qui sont interpellés par ces questions.

Le Président: M. le député.


M. Mario Dumont

M. Dumont: Est-ce que la ministre, d'abord, qui nous parle des effets sur l'emploi, a en main une étude contraire à celle qui est sortie puis qui démontre qu'il n'y a pas de lien entre les clauses orphelin et l'emploi? Ou est-ce que c'est simplement des discours en l'air, pour jouer sur deux tableaux, qu'elle nous lance? Si elle a une étude qui démontre le contraire, est-ce qu'elle peut la déposer à l'Assemblée, qu'on puisse voir concrètement sur quoi elle se fonde là-dessus? Est-ce qu'elle n'est pas simplement en train de noyer le poisson?

Puis, en passant, est-ce que la ministre ne pourrait pas aussi se souvenir qu'il n'y a plus de débat, techniquement, sur les clauses orphelin? Parce que, le débat, ils auraient dû le faire dans leur parti avant de faire des promesses en l'air pour gagner le vote des jeunes dans les élections.

Le Président: Mme la ministre.


Mme Diane Lemieux

Mme Lemieux: M. le Président, le ministère du Travail a déjà procédé à des analyses importantes qui nous ont permis de repérer dans quels secteurs d'activité il y avait des clauses orphelin, comment elles se manifestaient concrètement. Des études, il y en a, il y en a un certain nombre qui disent une chose et son contraire. Et c'est à partir du moment où on est au clair sur la définition qu'on pourra véritablement mesurer l'impact de cette législation-là; et c'est ce que nous sommes en train de faire.

Le Président: M. le député.


M. Mario Dumont

M. Dumont: Est-ce que la ministre peut informer la Chambre, dans le cadre de rencontres privées qu'elle a avec les représentants du patronat, s'il est vrai ou faux qu'elle s'est engagée à ne pas éliminer complètement les clauses orphelin? Est-ce qu'elle peut dire devant l'Assemblée nationale, devant tous les jeunes du Québec, ce qu'elle a dit, semble-t-il, devant des représentants du patronat, c'est-à-dire que les clauses orphelin ne seront pas complètement éliminées, pour qu'on sache au moins exactement dans quelle direction elle s'en va?

Le Président: Mme la ministre.


Mme Diane Lemieux

Mme Lemieux: M. le Président, j'ai le devoir de parler à tout le monde et d'entendre tous les arguments. Parce que nous avons un rôle ici, dans ce Parlement: arbitrer des questions qui sont abordées de manière contradictoire par des personnes. Et j'assume mes responsabilités. Et je suis très contente d'avoir accès au monde des affaires pour leur en parler, comme je suis très contente de pouvoir en parler aux jeunes et aux syndicats. Alors, ça, je vais continuer à le faire. La question n'est pas de savoir qu'est-ce qu'on élimine ou pas; la question est de savoir qu'est-ce qu'on met sur la table pour nous permettre de progresser sur ces questions-là. Parce que les jeunes nous interpellent très sérieusement; il y a des messages à enregistrer de leur part. Le milieu des affaires aussi nous interpelle, et il y a aussi des messages à enregistrer de sa part.

Le Président: M. le député.


M. Mario Dumont

M. Dumont: Est-ce que la ministre saisit que, ce dont il est question, ce n'est pas de son devoir ou de sa capacité de parler à tout le monde, mais c'est son devoir de dire la même chose à tout le monde?

Le Président: Mme la ministre.

Mme Diane Lemieux

Mme Lemieux: Alors, M. le Président, je mets au défi le député de démontrer que je ne dis pas la même chose à tout le monde.

Le Président: En complémentaire, M. le député de LaFontaine.


M. Jean-Claude Gobé

M. Gobé: Oui, M. le Président. Est-ce que Mme la ministre pourrait nous assurer en cette Chambre que, contrairement à ce qu'elle a fait dans le dossier de Bell Canada, où elle avait promis un projet de loi aux téléphonistes, elle va en déposer un pour les clauses orphelin?

Le Président: Mme la ministre.


Mme Diane Lemieux

Mme Lemieux: M. le Président, cette question-là est... En fait, je ne la qualifierai pas, parce que j'ai été extrêmement courageuse et honnête.

Des voix: ...

Mme Lemieux: Oui, je l'avais envisagé, cet amendement, dans le cas des travailleuses de Bell, mais j'ai le courage d'aller jusqu'au bout et de voir, après analyse, que ça ne leur servirait pas. Et c'est ce que j'ai fait. Et je vais toujours travailler de cette manière.

Le Président: M. le député de l'Acadie, en principale.


Tenue d'audiences publiques sur le projet de loi n° 24 modifiant la Loi sur l'assurance automobile et d'autres dispositions législatives


M. Yvan Bordeleau

M. Bordeleau: Oui. Merci, M. le Président. Aujourd'hui, une conférence de presse a eu lieu à Québec, par plus d'une dizaine de groupes, pour dénoncer le fait que le gouvernement ne tiendra pas d'audiences publiques en commission parlementaire sur le projet de loi n° 24, Loi modifiant la Loi sur l'assurance automobile au Québec. De plus, il importe de rappeler à ce gouvernement que, le 8 avril 1997, lors du lancement de la campagne d'information sur le régime d'assurance automobile du Québec, le ministre des Transports de l'époque promettait, et je cite: «Ce projet, comme ce fut le cas pour les récentes modifications au Code de la sécurité routière, fera l'objet d'audiences publiques.» Je sollicite le consentement pour déposer la liste des groupes et organismes ayant demandé ce matin à être entendus en consultations publiques.


Document déposé

Le Président: Est-ce qu'il y aura consentement pour le dépôt du document?

Une voix: Oui, oui.

Le Président: M. le député.

M. Bordeleau: Ça va? Alors, ma question, M. le Président, au ministre des Transports: Est-ce que le ministre entend respecter l'engagement que son prédécesseur a pris de tenir des audiences publiques sur ce projet de loi?

Le Président: M. le ministre des Transports.


M. Guy Chevrette

M. Chevrette: M. le Président, je n'entends pas faire de consultations publiques, pour les motifs suivants: je ne donnerai pas une tribune à quelqu'un qui veut remettre le système qu'on a présentement, du «no fault», pas de faute. Il n'est pas question de donner à l'avocat Bellemare une tribune pour venir faire un spectacle ici, au salon bleu ou au salon rouge. J'ai l'intention d'appliquer le projet de loi, d'apporter les amendements, la bonification aux indemnités, et c'est ce que nous demande 90 % et plus de la population, et c'est à ça que je vais répondre. Et je laisse à l'opposition le soin de s'accoler toujours aux groupuscules, comme à Hertel–des Cantons, comme dans le cas des assurances automobile, comme dans tous les cas présentement. Ils se greffent à des minorités et soutiennent des causes désespérées.

Le Président: M. le député.


M. Yvan Bordeleau

M. Bordeleau: M. le Président, comment le ministre des Transports peut-il refuser des audiences publiques, en commission parlementaire, alors que nous savons que des groupes de victimes directement concernés par l'application de ce projet de loi... et je cite: Le comité Clifford-Lincoln, Plaidoyer-victimes, la Fondation des accidentés de la route, le Comité Claudine-Anne Zamprelli, etc. Comment le ministre peut-il refuser ces audiences publiques à ces groupes qui n'ont pas été consultés, qui ont quelque chose à dire sur plusieurs éléments et qui demandent enfin à être entendus par ce gouvernement?

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le ministre.


M. Guy Chevrette

M. Chevrette: M. le Président, c'est le droit de l'opposition de s'être prononcée contre l'adoption de principe du projet de loi n° 24, mais, nous, nous voulons augmenter les indemnités, comme nous le demandent les citoyens québécois, les assurés de la route. Ils nous le demandent, et c'est ce à quoi on répond. On répond pour les personnes à charge. On répond pour les indemnités en cas de décès. On améliore le projet de loi. Et il n'est pas question – notre lit est fait de ce côté-ci – de remettre en question le fondement même de cette loi qui est un système de «no fault». C'est clair? Et on ne le remettra pas en question. On ne permettra pas de revenir aux anciens procès interminables où les victimes payaient de gros frais juridiques et étaient des mois et des années sur le bien-être social avant de toucher un sou. Ce système-là, il est partagé par plus de 90 % de la population. Nous en sommes fiers et nous allons l'améliorer. Et nous ne puiserons pas, comme les libéraux ont fait, 2 000 000 000 $ dans la caisse pour des fins gouvernementales; on les met au profit des assurés.

Une voix: Bravo!

Le Président: En question principale, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce. M. le député de Gaspé, demain, si vous revenez, je pourrai vous reconnaître.


Menace de grève dans les garderies syndiquées


M. Russell Copeman

M. Copeman: Merci, M. le Président. Encore une fois, il y a menace de grève générale illimitée dans les 200 garderies syndiquées au Québec. La date butoir fixée par le gouvernement lui-même pour un règlement de la question des salaires des travailleuses est de vendredi de cette semaine.

(14 h 50)

Étant donné que ça fait quatre semaines que le comité qu'elle a mis en place elle-même travaille sur la question, est-ce que la ministre déléguée à la Famille et à l'Enfance peut assurer cette Chambre et des milliers de parents qu'il n'y aura pas de grève générale illimitée dans les garderies syndiquées au Québec à partir de mardi?

Le Président: Mme la ministre déléguée à la Famille et à l'Enfance.


Mme Nicole Léger

Mme Léger: Oui, M. le Président. Il me fait plaisir de répondre à la question du député de Notre-Dame-de-Grâce; cela me permettra de lui rappeler d'ailleurs le processus de notre groupe de travail. Alors, j'ai annoncé un groupe de travail tripartite formé d'employeurs, d'employés et du ministère, et ce groupe de travail est un lieu d'échanges, un lieu pour avoir des discussions, un lieu pour donner sa position. Ce groupe de travail a beaucoup progressé à date et il a jusqu'au 21 mai pour me remettre ses recommandations.

Le Président: M. le député.


M. Russell Copeman

M. Copeman: M. le Président, est-ce que la ministre réalise que la question des salaires des travailleuses en garderie a été soulevée par son premier ministre en campagne électorale, il y a six mois, et que depuis elle nage dans l'improvisation la plus totale dans le dossier, au grand malheur des familles québécoises?

Le Président: Mme la ministre.


Mme Nicole Léger

Mme Léger: M. le Président, je veux rassurer le député, je prends très sérieusement la situation du redressement salarial. J'ai dit que je le réglerais d'ici le 21 juin et je le réglerai d'ici le 21 juin. C'est un engagement électoral, et il sera respecté.

Des voix: Bravo!

Le Président: Complémentaire?

M. Lelièvre: Principale.

Le Président: En principale, M. le député de Gaspé.

M. Lelièvre: Merci, M. le Président.

Des voix: ...

Le Président: M. le député de Gaspé.


Appui à une demande de réouverture de la pêche commerciale à la morue


M. Guy Lelièvre

M. Lelièvre: Merci, M. le Président. Au cours du printemps 1999, sur l'initiative du consortium Gaspé Cured, un mouvement régional sur l'unité et l'emploi a été créé en Gaspésie afin de réclamer du ministère fédéral des Pêches l'ouverture d'une pêche commerciale contrôlée et l'établissement d'un quota de capture de 10 % de la biomasse des géniteurs, dans le respect des parts historiques des pêcheurs québécois.

Est-ce que le ministre responsable des Pêches est prêt à soutenir cette demande, M. le Président?

Le Président: Alors, M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.


M. Rémy Trudel

M. Trudel: M. le Président, non, je ne prendrai pas avis de la question.

Oui, j'ai été saisi de cette demande d'appui du consortium Gaspé Cured, cinq usines dans la région de la Gaspésie, 250 employés qui font un produit unique au monde, le Gaspé Cured. J'ai été saisi également de la demande d'appui de cette coalition des pêcheurs, des aide-pêcheurs et de tous les agents de transformation des produits de la Gaspésie pour appuyer la reprise de la pêche commerciale dans le golfe Saint-Laurent, et en particulier au niveau de la morue, qui est sous moratoire depuis 1993. Oui, je les appuie. J'ai fait parvenir, lundi de cette semaine, une lettre au ministre fédéral des Pêches, M. Anderson, pour lui dire de suivre la recommandation du Conseil canadien des ressources halieutiques, et de permettre la réouverture de la pêche commerciale à la morue dans le golfe Saint-Laurent tout de suite cette année, et de nous accorder notre part historique de pêche, c'est-à-dire 10 %, pour que, cette année, nous puissions disposer de 6 000 tonnes de morue afin de permettre la réouverture profitable des cinq usines, que nous aidons déjà, du groupe Gaspé Cured.

M. le Président j'espère que, au fédéral, cette fois-ci, on va dire oui aux pêcheurs de la Gaspésie, aux industriels, aux gens qui sont dans le circuit de la pêche et des pêcheries aux Îles-de-la-Madeleine et en Gaspésie, parce que, si c'était non cette fois-ci, il faudrait convenir avec d'autres au Canada que le véritable ministre des Pêches, il est peut-être à Terre-Neuve.

Le Président: Bien. La période de questions et de réponses orales est terminée.


Votes reportés


Motion proposant que l'Assemblée s'assure que le gouvernement donne à la Régie de l'énergie toute l'indépendance nécessaire à l'exercice de son mandat initial

Nous avons un vote reporté. Alors, nous allons procéder immédiatement au vote reporté sur la motion de Mme la députée de Bonaventure, qui se lit comme suit:

«Que l'Assemblée nationale s'assure que le gouvernement du Québec donne dans les faits, à la Régie de l'énergie, toute l'indépendance nécessaire à l'exercice de son mandat initial.»

Que les députés en faveur de cette motion veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint: M. Paradis (Brome-Missisquoi), M. Bourbeau (Laporte), Mme Bélanger (Mégantic-Compton), M. Middlemiss (Pontiac), M. Cusano (Viau), M. Maciocia (Viger), M. Gobé (LaFontaine), M. Després (Limoilou), M. Williams (Nelligan), Mme Delisle (Jean-Talon), M. Brodeur (Shefford), Mme Houda-Pepin (La Pinière), M. Gautrin (Verdun), Mme Lamquin-Éthier (Bourassa), M. Chagnon (Westmount–Saint-Louis), M. Mulcair (Chomedey), M. Fournier (Châteauguay), Mme Loiselle (Saint-Henri– Sainte-Anne), M. Sirros (Laurier-Dorion), M. Bordeleau (Acadie), M. Marsan (Robert-Baldwin), M. Poulin (Beauce-Nord), M. Pelletier (Chapleau), M. Ouimet (Marquette), Mme Beauchamp (Sauvé), Mme Jérôme-Forget (Marguerite-Bourgeoys), M. Dupuis (Saint-Laurent), Mme Leblanc (Beauce-Sud), M. Kelley (Jacques-Cartier), Mme Normandeau (Bonaventure), M. MacMillan (Papineau), M. Copeman (Notre-Dame-de-Grâce), M. Cholette (Hull), M. Tranchemontagne (Mont-Royal), M. Marcoux (Vaudreuil), M. Lamoureux (Anjou).

M. Dumont (Rivière-du-Loup).

Le Président: Que les députés contre cette motion veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint: M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Landry (Verchères), Mme Harel (Hochelaga-Maisonneuve), Mme Lemieux (Bourget), M. Léonard (Labelle), Mme Marois (Taillon), M. Rochon (Charlesbourg), M. Trudel (Rouyn-Noranda– Témiscamingue), Mme Maltais (Taschereau), M. Arseneau (Îles-de-la-Madeleine), M. Cliche (Vimont), M. Jolivet (Laviolette), M. Ménard (Laval-des-Rapides), M. Bégin (Louis-Hébert), M. Bertrand (Portneuf), Mme Dionne-Marsolais (Rosemont), Mme Léger (Pointe-aux-Trembles), M. Baril (Berthier), Mme Beaudoin (Chambly), M. Boisclair (Gouin), Mme Caron (Terrebonne), M. Facal (Fabre), Mme Goupil (Lévis), M. Chevrette (Joliette), M. Baril (Arthabaska), Mme Carrier-Perreault (Chutes-de-la-Chaudière), M. Rioux (Matane), M. Bertrand (Charlevoix), M. Gendron (Abitibi-Ouest), M. Boulerice (Sainte-Marie–Saint-Jacques), M. Payne (Vachon), Mme Vermette (Marie-Victorin), M. Beaumier (Champlain), Mme Charest (Rimouski), Mme Robert (Deux-Montagnes), M. Laprise (Roberval), M. Paré (Lotbinière), Mme Leduc (Mille-Îles), M. Pelletier (Abitibi-Est), M. Kieffer (Groulx), M. Deslières (Salaberry-Soulanges), M. Lelièvre (Gaspé), M. Gagnon (Saguenay), M. Côté (La Peltrie), M. Dion (Saint-Hyacinthe), M. Cousineau (Bertrand), Mme Blanchet (Crémazie), Mme Papineau (Prévost), M. Paquin (Saint-Jean), M. St-André (L'Assomption), M. Duguay (Duplessis), M. Geoffrion (La Prairie), M. Bédard (Chicoutimi), M. Désilets (Maskinongé), M. Bergeron (Iberville), M. Boulianne (Frontenac), M. Labbé (Masson), M. Côté (Dubuc).

Le Président: Y a-t-il des abstentions?

(15 heures)

Le Secrétaire: Pour:37

Contre:58

Abstentions:0

Le Président: Alors, la motion de Mme la députée de Bonaventure est rejetée.


Motions sans préavis

Maintenant, nous allons passer aux motions sans préavis. M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.


Souligner la Semaine des centres de la petite enfance et des services de garde en milieu scolaire

M. Copeman: Merci, M. le Président. Je sollicite le consentement des membres de cette Chambre afin de proposer la motion suivante:

«Que l'Assemblée nationale du Québec souligne la Semaine des centres de la petite enfance et des services de garde en milieu scolaire, qui se tient du 16 au 22 mai.»

Le Président: Alors, est-ce qu'il y a consentement pour débattre de la motion? Une intervention de chaque côté, MM. les leaders, ça va? Alors, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.


M. Russell Copeman

M. Copeman: Merci, M. le Président. Comme y fait référence la motion, nous sommes en plein milieu, aujourd'hui, de la Semaine des centres de la petite enfance et des services de garde en milieu scolaire. Il y a 75 000 enfants dans les centres de la petite enfance à travers le Québec, c'est-à-dire les deux types de services qui sont offerts par les centres de la petite enfance: les services de garde en milieu installation et les services de garde en milieu familial, et tout près de 80 000 enfants, si ma mémoire est bonne, qui bénéficient des services de garde en milieu scolaire.

Rajoutez à ça, M. le Président, évidemment, presque 10 000 personnes qui travaillent dans les CPE à travers le Québec. On peut penser à des directeurs de CPE, des éducateurs et éducatrices, évidemment des directeurs et directrices, et le personnel de soutien. Et je pense également aux milliers de parents qui siègent sur des conseils d'administration, parce que, comme vous le savez, M. le Président, nos CPE sont des organismes à but non lucratif, avec un conseil d'administration composé majoritairement de parents. Ça fait beaucoup de monde impliqué dans le processus, M. le Président. Et la Semaine des centres de la petite enfance nous donne, comme législateurs et comme société, l'occasion de manifester, comme le souhaitent les CPE, notre position quant à la place essentielle que doit laisser notre société à cette enfance si précieuse.

M. le Président, le thème de cette Semaine des centres de la petite enfance est: Grandir, la belle aventure . Vous savez comme moi, M. le Président, comme père de famille, effectivement, que, quand les enfants grandissent, on s'embarque dans une belle aventure, une belle aventure pour tout le monde, hein, une belle aventure pour les parents, pour les enfants et pour d'autres acteurs de notre société.

Confier des enfants à des services de garde n'est pas facile nécessairement. Il est à la fois stimulant de vouloir confier nos enfants à des services de garde, mais aussi un peu inquiétant. Je suis passé par là, M. le Président, comme beaucoup de nos collègues qui ont, le jour où ils ont décidé d'inscrire leur enfant dans des services de garde... La première journée qu'on arrive à la garderie, on ne le fait pas sans pincement de coeur. On prend des petits enfants, des jeunes enfants, puis on les confie à d'autres personnes, on confie la responsabilité de les aider à grandir et à se développer, et ce n'est pas sans pincement de coeur qu'on le fait. Je l'ai fait trois fois, M. le Président, avec mon fils aîné et mon fils cadet, et présentement je ne le fais pas quotidiennement parce que mes responsabilités ne le permettent pas, mais je le fais deux fois par semaine, et ma femme le fait trois fois par semaine. Quand on siège ici, à l'Assemblée nationale, on amène notre fille, Emma, à notre centre de la petite enfance local, et on la confie à d'autres personnes, des éducateurs, des éducatrices, à du personnel de soutien qui prend soin d'elle, qui assure son développement social et intellectuel pendant les heures de travail.

Alors, M. le Président, il faut, je pense, comme parents et comme société, prendre en considération toute la question de la qualité. Il faut avoir le souci de qualité dans nos services de garde. C'est excessivement important, on le sait fort bien. En confiant des jeunes, des petits enfants, des jeunes enfants à d'autres personnes, dans le cas des services de garde en milieu familial, à d'autres établissements ou des installations, dans le cadre des garderies, c'est essentiel de veiller à la question de qualité parce que l'enfant va passer des heures importantes sous la responsabilité de ces personnes. La qualité est reliée à beaucoup de choses, mais deux choses sont claires: la qualité est reliée au ratio d'éducatrice-enfants, et les conditions de travail également ont un impact sur la question de qualité. Des éducatrices satisfaites avec leurs conditions de travail y mettent, je crois, le maximum d'efforts et arrivent au CPE avec beaucoup d'espoir, beaucoup de dévouement, comme elles font présentement. Alors, les conditions salariales sont importantes.

Alors, M. le Président, cette question est d'autant plus importante à cause du conflit de travail, ou la menace de conflit de travail qui plane sur les services de garde au Québec présentement. La ministre se fait très rassurante ici en période de questions. J'espère – et c'est tout ce que je souhaite, M. le Président – qu'elle a raison d'être confiante. On a tous à coeur l'intérêt de ces enfants et nous espérons vivement que, rendu à mardi matin, il y aura des services de garde de qualité dans tous les centres de la petite enfance au Québec, sinon le gouvernement aurait à accepter ses responsabilités, aurait à agir pour éviter un conflit de travail qui va pénaliser des milliers de familles québécoises.

Alors, il me fait grand plaisir de présenter cette motion au nom de mes collègues de l'opposition officielle et de souligner simplement de notre part à quel point toute la question des services de garde au Québec est essentielle pour l'avenir des familles québécoises ici. Merci, M. le Président.

Le Président: Alors, merci, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce. Maintenant, Mme la ministre déléguée de la Famille et de l'Enfance.


Mme Nicole Léger

Mme Léger: Alors, M. le Président, tout d'abord, il m'apparaît très clair que mon collègue le député de Notre-Dame-de-Grâce ne connaît tout simplement pas la tradition et le modus vivendi qui existent parmi les organismes représentant les divers services de garde du Québec à l'effet que la Semaine des centres de la petite enfance n'a qu'un seul objectif, soit celui de faire la promotion des centres de la petite enfance et des services de garde en milieu scolaire. Alors, il est donc exclu d'utiliser cette semaine de célébration comme tribune politique.

Alors, c'est avec beaucoup de joie et de fierté qu'à titre de ministre déléguée à la Famille et à l'Enfance je souligne la tenue de la Semaine des centres de la petite enfance 1999, qui se déroule du 16 au 22 mai à travers tout le Québec. Durant cette période, ce sera une grande fête, d'abord la fête des enfants, où ils manifesteront leur attachement à leurs services de garde, mais aussi celle du personnel des centres de la petite enfance et des services de garde en milieu scolaire, où s'exprimera toute leur fierté à l'égard de ce milieu de travail à la fois chaleureux et stimulant. La Semaine des centres de la petite enfance se veut aussi une occasion de sensibiliser la population à la très grande qualité du travail éducatif, du cadre d'apprentissage et du milieu de vie qu'on retrouve dans les centres de la petite enfance et les services de garde en milieu scolaire au Québec. Ce sont d'ailleurs ces éléments qui favorisent le développement global et harmonieux des jeunes enfants et qui donnent tout son sens au thème de la Semaine des centres de la petite enfance 1999: Grandir, la belle aventure .

Alors, M. le Président, j'invite donc tous les membres de l'Assemblée nationale à appuyer cette motion et à se joindre ainsi au personnel des centres de la petite enfance et des services de garde en milieu scolaire, aux parents et aux enfants du Québec afin de célébrer ensemble cette Semaine des centres de la petite enfance 1999. Merci, M. le Président.


Mise aux voix

Le Président: Très bien. Vous voulez intervenir, M. le député de Rivière-du-Loup, sur cette motion? Ah bon! Alors, cette motion est adoptée? Adopté.

J'ai une autre motion, du ministre des Ressources naturelles, d'abord, M. le député de Rivière-du-Loup. M. le ministre.


Souligner la Semaine de l'arbre et des forêts

M. Brassard: Oui, M. le Président, je voudrais solliciter le consentement de cette Assemblée afin de présenter la motion suivante:

«Que l'Assemblée nationale souligne la Semaine de l'arbre et des forêts qui se déroule du 16 au 22 mai 1999 sous le thème de la forêt Au coeur de nos vies

Le Président: Il y a consentement pour débattre, d'abord, de la motion? Est-ce que je comprends qu'il y a une intervention de ce côté?

(15 h 10)

M. Brassard: C'est ça.

Le Président: Très bien.


M. Jacques Brassard

M. Brassard: Alors, M. le Président, je présente aujourd'hui, donc, cette motion pour souligner la Semaine de l'arbre et des forêts. Cet événement permet de sensibiliser la population à l'importance sociale, environnementale, mais aussi économique de la forêt dans notre vie quotidienne. Et, cette année, les activités se déroulent sous le thème Au coeur de nos vies . Je pense que c'est un thème tout à fait approprié, quand on sait que près de 92 % des forêts québécoises sont du domaine public, sont publiques, et donc appartiennent à tous les Québécois et toutes les Québécoises.

Les forêts comptent également parce qu'elles sont l'un des grands maillons de notre économie. Rappelons simplement que la valeur annuelle des livraisons de l'industrie forestière est de 19 000 000 000 $. Et rappelons aussi que ça génère des emplois directs, plus de 80 000. Si on ajoute les emplois indirects et les emplois induits, on grimpe jusqu'à 200 000. L'industrie forestière est également le principal moteur économique et souvent, très souvent le seul employeur manufacturier dans quelque 250 municipalités sur l'ensemble du territoire québécois. Et on s'étonnera d'apprendre qu'il y a plus de 10 000 produits et sous-produits du bois dont nous pouvons tous bénéficier.

De nos jours, d'ailleurs, l'industrie forestière s'oriente de plus en plus vers ce qu'on appelle la seconde transformation et la fabrication de produits à plus grande valeur ajoutée. Même les centres urbains sont concernés par l'industrie forestière. Montréal, entre autres, est le lieu de plusieurs grands sièges sociaux de l'industrie papetière. À Québec, la recherche forestière occupe une place importante. Donc, oui, la forêt est au coeur de nos vies, pour notre économie.

Pas seulement pour l'économie. Elle compte aussi, évidemment, parce que la forêt est le lieu de nombreuses activités de plein air. Donc, il y a de multiples usages ou utilisations de la forêt. C'est le rendez-vous, on le sait, de centaines de milliers de Québécois et de touristes qui s'adonnent à toutes sortes d'activités, de la randonnée pédestre à la villégiature en passant par la chasse, la pêche et le canotage, et j'en passe.

Nous sommes en processus de révision du régime forestier. C'est enclenché depuis deux ans. Je pense que tout le monde reconnaît qu'il faut le bonifier, l'améliorer. Et cela se fait sur la base de consultations qui ont eu lieu à l'automne, participation de plus de 500 personnes et organismes à l'occasion de ces consultations en région. Je rendais publique d'ailleurs tout récemment, lundi de cette semaine, la synthèse de ces consultations. Il y a là toutes sortes de propositions, il y a des consensus, mais il y a aussi des points de vue divergents. Il faudra donc trancher comme ministre et comme gouvernement, et ça devrait ensuite donner lieu à un projet de loi qui sera déposé à l'Assemblée nationale et qui, lui aussi, va faire l'objet d'une large consultation en commission parlementaire.

Un mot en terminant, M. le Président, sur la candidature de la ville de Québec comme éventuelle ville hôte du 12e Congrès forestier mondial que va tenir l'Organisation mondiale des Nations unies pour l'agriculture et l'alimentation en 2003: il s'agit là pour le gouvernement et tous ses partenaires d'une occasion unique de promouvoir l'image de la foresterie québécoise sur la scène internationale, et on sait que les candidatures pour ce Congrès ont été déposées le 4 mars dernier à Rome. La décision devra être rendue publique, le choix devrait se faire en juin 1999, et j'ai bon espoir, je suis très confiant, moi, que la ville de Québec sera le choix de l'Organisation mondiale pour l'agriculture et l'alimentation.

Donc, M. le Président, chers collègues, je vous invite tous, j'invite tout le monde un peu partout dans les régions du Québec, chacun dans son milieu, à célébrer cette Semaine de l'arbre et des forêts 1999 pour que tous les Québécois et toutes les Québécoises sachent que, plus que jamais, cette année, la forêt est au coeur de nos vies et qu'il continuera d'en être ainsi encore longtemps. Merci.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le ministre des Ressources naturelles. Je vais céder la parole à Mme la députée de Bonaventure. Mme la députée.


Mme Nathalie Normandeau

Mme Normandeau: Merci, M. le Président. Alors, l'arbre et les forêts Au coeur de nos vies , c'est le thème qu'a retenu cette année le ministère des Ressources naturelles pour souligner la Semaine de l'arbre et des forêts. La forêt au Québec a toujours été au coeur de notre vie collective, car, avant d'être ce qu'on connaît aujourd'hui du Québec, il fut d'abord et avant tout une immense forêt. La forêt fut, au fil des siècles, au centre de notre économie. Sans l'exploitation, la mise en valeur de ce qu'on appelle aujourd'hui la matière ligneuse et papetière, nos régions ne seraient sûrement pas ce qu'elles sont aujourd'hui.

Dans mon comté, celui de Bonaventure, et comme dans plusieurs régions au Québec, la forêt représente un potentiel économique et récréotouristique de première importance. La vitalité économique de centaines de municipalités au Québec est intimement liée à son exploitation. Les défis qui nous interpellent mettent donc en lumière la nécessité de préserver la ressource, d'augmenter ses retombées économiques, et ce, dans le respect des valeurs des différents utilisateurs de la forêt.

Le secteur de la forêt est au premier rang des industries manufacturières au Québec, avec des retombées économiques de 18 500 000 000 $. Le secteur de la forêt procure aussi à plus de 200 000 personnes des emplois, et ce, dans 250 municipalités au Québec. Alors, nous profitons, M. le Président, de la tribune qui nous est offerte aujourd'hui pour saluer tous les travailleurs et toutes les travailleuses de la forêt, des gens qui gagnent leur vie, et c'est souvent le cas, en le faisant très, très fort. Donc, pour tout ce qu'ils apportent à l'ensemble de l'économie du Québec, nous devons leur témoigner toute notre reconnaissance.

Nous avons, M. le Président, également, comme parlementaires et législateurs, à l'endroit de ces travailleurs et de ces travailleuses, à l'égard, donc, de tous les Québécois et Québécoises, la responsabilité de nous assurer que toutes les mesures sont prises pour assurer la pérennité de cette ressource. Alors, ce mandat doit bien sûr se faire en toute transparence, compte tenu que 92 % des forêts au Québec sont des forêts publiques, qui appartiennent donc de fait à l'ensemble des citoyennes et des citoyens.

M. le Président, la Semaine de l'arbre et des forêts est l'occasion d'exercer un effort de sensibilisation collectif qui permet à chacun des Québécoises et des Québécois de découvrir et de redécouvrir nos arbres et l'importance de nos forêts. C'est donc avec enthousiasme que nous appuyons les efforts de sensibilisation des gouvernements successifs, axés toujours sur la Semaine de l'arbre et des forêts.

Et, avant de terminer, M. le Président, en cette période où la Société de protection des forêts contre le feu a interdit les feux à ciel ouvert sur tout le territoire du Québec, j'invite les utilisateurs de nos forêts à faire preuve de la plus grande prudence et à se montrer très vigilants. Il est du devoir de tous et de toutes de protéger les ressources qui appartiennent à tous les Québécois et les Québécoises afin que tous puissent en profiter en toute quiétude.

Alors, M. le Président, au nom de tous mes collègues, permettez-moi de souhaiter à tous les intervenants du domaine forestier une bonne Semaine de l'arbre et des forêts. Et je souhaite longue vie à cette industrie qui est appelée à relever des défis de taille au cours des prochaines années. Alors, merci.

Des voix: Bravo!


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la députée de Bonaventure. Cette motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Alors, M. le député de Rivière-du-Loup, pour une motion?

M. Dumont: Oui, M. le Président. À la suite des réponses de la ministre du Travail, je suis convaincu qu'on aura consentement des membres de l'Assemblée pour adopter la motion sans préavis suivante:

«Que l'Assemblée nationale procède à l'étape de l'adoption du principe du projet de loi n° 190, Loi modifiant le Code du travail et la Loi sur les normes du travail.»

Le Vice-Président (M. Brouillet): Y a-t-il consentement pour débattre cette motion?

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, il n'y a pas consentement. Nous allons passer, si cela met fin...

M. Paradis: ...moi, j'ai vu tout le monde de ce côté-ci, le député de Rivière-du-Loup, manifester leur accord. D'où venait ce refus?

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, il y a des refus qui sont moins perceptibles. Enfin, ils doivent être quand même... Pourvu que le président s'en aperçoive. Ha, ha, ha! Alors, il y a eu refus effectivement de la part du parti ministériel.


Avis touchant les travaux des commissions

Maintenant, nous sommes aux avis touchant les travaux des commissions, et je vais céder la parole à M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: M. le Président, j'avise cette Assemblée que la commission des affaires sociales procédera à l'étude détaillée du projet de loi n° 27, Loi modifiant la Loi sur les services de santé et les services sociaux en matière d'accès au dossier de l'usager, aujourd'hui, après les affaires courantes, jusqu'à 18 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau;

Que la commission de l'économie et du travail poursuivra les consultations particulières relativement à la sécurisation du réseau de transport et de distribution d'Hydro-Québec dans les régions touchées par la tempête de verglas de janvier 1998, aujourd'hui, de 15 h 30 à 17 h 30, ainsi que demain, le jeudi 20 mai 1999, de 9 h 30 à midi trente, à la salle du Conseil législatif;

Que la commission des institutions procédera à l'étude détaillée du projet de loi n° 34, Loi modifiant le Code civil en matière de nom et de registre de l'état civil, demain, le jeudi 20 mai 1999, de 9 h 30 à 12 h 30, à la salle Louis-Joseph-Papineau.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le leader du gouvernement. Pour ma part, je vous avise que la commission de l'administration publique se réunira aujourd'hui, mercredi 19 mai 1999, après les affaires courantes jusqu'à 18 heures, à la salle 1.38 de l'édifice Pamphile-Le May.

L'objet de cette séance est d'entendre le sous-ministre de la Santé et des Services sociaux sur les services préhospitaliers d'urgence au Québec, conformément à la Loi sur l'imputabilité des sous-ministres et des dirigeants d'organismes publics.

(15 h 20)

Je vous avise également que la commission de l'administration publique se réunira demain, le jeudi 20 mai 1999, de 9 h 30 à 12 h 30, à la salle 1.38 de l'édifice Pamphile-Le May. L'objet de cette séance est de procéder à la vérification des engagements financiers du ministère des Transports pour les listes d'avril 1997 à mars 1998 et celles d'avril 1998 à mars 1999.

Alors, nous sommes à l'étape des renseignements sur les travaux de l'Assemblée.


Affaires du jour

S'il n'y a pas de questions, nous allons mettre fin aux affaires courantes et passer aux affaires du jour. Je cède la parole à M. le leader du gouvernement.

M. Boulerice: Oui. Alors, M. le Président, nous souhaitons procéder par l'article 1 du feuilleton. Voilà.


Projet de loi n° 4


Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 1, Mme la ministre des Affaires municipales et de la Métropole propose l'adoption du principe du projet de loi n° 4, Loi sur Immobilière SHQ. Alors, je vais céder la parole maintenant à Mme la ministre.


Mme Louise Harel

Mme Harel: Merci, M. le Président. Ce projet de loi n° 4, Loi sur Immobilière SHQ, consiste en une réforme de la comptabilité gouvernementale annoncée par le ministre des Finances dans le discours sur le budget du 31 mars 1998, et cette réforme de la comptabilité gouvernementale applique les nouvelles normes comptables pour le secteur public qui ont été publiées par l'Institut canadien des comptables agréés et déjà adoptées par les provinces canadiennes. Cette réforme a comme conséquence d'élargir le périmètre comptable du gouvernement en y intégrant les fonds spéciaux, les organismes, les entreprises publiques en vue de présenter des états financiers consolidés. Deux méthodes de comptabilisation des résultats financiers ont été retenues: la consolidation ligne par ligne, l'autre méthode étant la consolidation à la valeur nette, réservée aux entreprises publiques.

Sans entrer dans le détail de ces nouvelles règles, M. le Président, qu'il me suffise de dire que la mise en place de cette réforme a amené la Société d'habitation du Québec à revoir sa structure financière. En collaboration avec des représentants du ministère des Finances et du Vérificateur général, il a été jugé nécessaire de procéder à la constitution d'une nouvelle entité juridique, ce qui est le cas avec le dépôt de l'actuel projet de loi n° 4, entité juridique dont la mission principale sera d'être titulaire du patrimoine immobilier de la SHQ, laissant par ailleurs à celle-ci la mise en oeuvre des programmes de subvention applicables à ses immeubles en vertu des contrats d'exploitation avec les offices municipaux d'habitation et les organismes à but non lucratif.

Je disais donc que, dans le discours sur le budget de mars 1998, le gouvernement identifiait nommément la SHQ, parmi les entités concernées qui devaient procéder à une restructuration administrative et financière, pour être reconnue à titre d'entreprise publique dans le périmètre comptable du gouvernement, pour permettre d'utiliser, pour les activités immobilières de la SHQ, la méthode modifiée de consolidation à la valeur nette, réservée aux entreprises publiques. Si la comptabilisation selon la méthode de consolidation ligne par ligne avait été maintenue, le gouvernement devait ajouter à sa dette directe celle de la Société d'habitation du Québec, qui est d'environ 2 500 000 000 $, sans tenir compte, en contrepartie, de la valeur de l'actif de la SHQ, à la fois de la valeur des immeubles et des créances hypothécaires. Afin de bénéficier d'une comptabilisation à la valeur de consolidation, la SHQ doit se qualifier d'entreprise publique. Pour ce faire, un organisme doit avoir comme principale activité la vente de biens et de services à des entités non comprises dans le périmètre comptable du gouvernement. De plus, un organisme doit être en mesure de faire face à ses dettes au moyen de revenus tirés des activités également exclues du périmètre comptable du gouvernement.

Le projet de loi n° 4 propose donc de modifier la structure de la SHQ en vue de constituer, pour les activités immobilières de la SHQ, une personne morale de droit public dotée d'un fonds social en mesure d'être reconnue comme entreprise publique bénéficiant d'une comptabilisation à la valeur de consolidation. Cette personne morale aura pour mission d'acquérir, avec les droits et obligations qui s'y rapportent, des immeubles d'habitation, notamment les immeubles appartenant à la Société d'habitation du Québec, et de maintenir ces immeubles à la disposition des offices municipaux d'habitation et autres organismes à but non lucratif. Elle aura également pour mission d'acquérir les droits et obligations découlant de prêts consentis par la Société d'habitation du Québec à des offices municipaux d'habitation ou à d'autres organismes sans but lucratif.

Si l'on considère uniquement les activités immobilières de la SHQ, celle-ci possède l'essentiel des caractéristiques requises pour être reconnue à titre d'entreprise publique dans le périmètre comptable du gouvernement. La constitution de cette nouvelle entité pour des activités comme propriétaire d'immeubles et prêteur permettra d'isoler cette nouvelle entité des autres activités de la SHQ, notamment ses programmes de subvention.

Il est utile de rappeler ici que la Société d'habitation du Québec a été constituée en 1967 notamment afin de permettre aux offices municipaux d'habitation et à d'autres organismes sans but lucratif de se prévaloir des programmes fédéraux de financement de logements pour personnes ou familles à faibles revenus. Sa constitution devait en outre, en 1967, permettre au gouvernement du Québec de participer financièrement à l'application de ces mêmes programmes. La loi constitutive de la SHQ lui a donc accordé le pouvoir de consentir des prêts hypothécaires pour la construction de logements par des offices municipaux d'habitation, des organismes sans but lucratif et des coopératives d'habitation.

En 1974, à la suite de la signature de nouvelles ententes avec la Société canadienne d'hypothèques et de logement, la Loi sur la Société d'habitation du Québec a été modifiée. La SHQ a cessé d'être un organisme prêteur et est devenue le maître d'oeuvre de la construction des habitations à loyer modique. C'est par défaut qu'elle est ainsi devenue propriétaire de logements, pour empêcher des prêts directs par le gouvernement fédéral aux municipalités et à leurs agents, les offices municipaux d'habitation. En effet, la SCHL, donc Société canadienne d'habitation et de logement, a refusé, à cette époque, à la SHQ le droit de prêter aux OMH, offices municipaux d'habitation, les fonds empruntés par la SHQ à la SCHL, comme elle le faisait depuis 1967.

Le rôle de la SHQ, au niveau de la réalisation des immeubles d'habitation exploités par des offices municipaux et d'autres organismes sans but lucratif, est donc hybride. De 1967 à 1974, la SHQ a joué le rôle de prêteur, avançant les sommes requises pour la construction de ces immeubles, alors que, à compter de 1974, elle a non seulement financé la construction de ces immeubles, mais elle en est également devenue propriétaire. Toutefois, l'administration de ces immeubles a toujours été confiée à l'office municipal d'habitation de la municipalité où ils sont situés ou à un organisme à but non lucratif ou, dans le cas du Nunavik, à la municipalité elle-même dans le cadre d'un contrat d'exploitation qui prévoit le versement de subventions par la Société d'habitation du Québec pour combler le déficit d'exploitation de ces immeubles, qu'ils appartiennent à un office municipal ou à la SHQ.

Le transfert de propriété de la SHQ à Immobilière SHQ qui est proposé dans le présent projet de loi sera donc sans conséquence pour les OMH, les contrats actuels demeurant en vigueur. En effet, la SHQ ne verse pas de subvention aux OMH, parce qu'elle est propriétaire des immeubles qu'ils administrent. D'ailleurs, la SHQ subventionne de la même façon des OMH et certains organismes sans but lucratif pour l'administration d'immeubles qui leur appartiennent. Mais, pour qu'ils exploitent ces immeubles comme des habitations à loyer modique pour personnes ou familles à faibles revenus conformément aux règlements de la SHQ en matière d'attribution et de conditions de location des logements à loyer modique, il est important, M. le Président, que cette nouvelle entité juridique, Immobilière SHQ, soit une entreprise publique, c'est-à-dire une entreprise appartenant à l'État. Le transfert de droits prévu par ce projet n'implique donc aucune privatisation du secteur du logement social du Québec.

(15 h 30)

Les immeubles d'habitation appartenant à la SHQ ainsi que les prêts consentis par cette dernière pour la réalisation des immeubles d'habitation appartenant à des OMH et à d'autres organismes sans but lucratif seront transférés, de par l'effet de la loi n° 4 et à compter du 1er janvier 2000, à Immobilière SHQ, de même que les obligations contractées par la SHQ pour le financement des immeubles et des prêts transférés. De plus, l'excédent de la SHQ découlant de ces opérations immobilières sera aussi transféré à Immobilière SHQ.

Sur le plan quantitatif, le patrimoine immobilier visé par ce transfert ainsi que les engagements et l'excédent de la SHQ à son égard s'élèvent, selon les états financiers de la SHQ établis en date du 31 décembre 1998, aux montants suivants: immeubles d'habitation, 1 924 600 000 $; prêts hypothécaires et intérêts courus, 515 400 000 $; emprunts, 2 426 800 000 $; excédent 13 200 000 $. Il est également important de mentionner à nouveau que ce transfert de droits n'apporte aucun changement pour les OMH et les autres organismes sans but lucratif gestionnaires de ces immeubles et bénéficiaires de subventions versées par la SHQ dans le cadre de ses programmes d'habitation.

Les contrats d'exploitation demeurent en vigueur sans changement, puisqu'ils ont été conclus dans le cadre de l'application d'un programme de subvention qui demeure sous la responsabilité de la SHQ et non pas en considération du fait que la SHQ est créancière ou propriétaire d'un immeuble. Les droits, bénéfices, obligations prévus par ces contrats continuent de recevoir application indépendamment du droit de propriété d'un immeuble ou du prêt consenti pour sa réalisation. Ainsi, les organismes gestionnaires de ces immeubles poursuivront leur mandat d'administration. La SHQ continuera à subventionner l'exploitation de ces immeubles.

Sur le plan opérationnel, comme la nouvelle entreprise ne comptera, à proprement parler, aucun employé sauf un secrétaire, la gestion de ses affaires courantes sera assurée par la SHQ en vertu d'un contrat de gestion à intervenir entre cette dernière et Immobilière SHQ. Ce contrat prévoira que l'Immobilière SHQ retient les services de la SHQ à titre de mandataire aux fins d'exercer les actes administratifs découlant soit de sa qualité de propriétaire d'immeubles d'habitation soit de sa qualité de créancier, comme, par exemple, la perception des droits d'utilisation de ces immeubles correspondant à ce qui est actuellement prévu pour le service de la dette dans les contrats d'exploitation ou la perception des créances résultant des prêts. À cette fin, la SHQ fournira le personnel nécessaire à l'exécution de ce contrat de gestion. Certains services de soutien, tels les services juridiques, de financement, de comptabilité, de technologies de l'information, d'expertise technique, seront d'une façon plus particulière mis à contribution.

Enfin, soulignons que le transfert de droits et d'obligations de la Société d'habitation du Québec à Immobilière SHQ n'engendrera aucuns coûts additionnels pour le gouvernement, aussi bien au titre du versement des subventions prévues par les programmes d'habitation qu'au titre du fonctionnement de la nouvelle entreprise publique et de la SHQ. À la suite de l'institution de Immobilière SHQ, les relations entre la Société d'habitation du Québec, la Société canadienne d'hypothèques et de logement, le ministère des Affaires municipales et de la Métropole et Immobilière SHQ seront essentiellement les suivantes: a. la SCHL et le ministère continueront de subventionner la SHQ comme actuellement; b. la SHQ continuera à subventionner les OMH et les autres organismes; c. les OMH et autres organismes à but non lucratif paieront à Immobilière SHQ des droits d'utilisation correspondant à ce qui est actuellement prévu aux termes des contrats d'exploitation pour le service de la dette qui affecte les immeubles qu'ils administrent appartenant à la SHQ, ou effectueront auprès de celle-ci, conformément au contrat de gestion à intervenir entre Immobilière SHQ et la SHQ, le remboursement des prêts contractés pour la réalisation des immeubles qu'ils possèdent eux-mêmes.

En terminant, précisons que le transfert de droits prévu par le projet de loi n° 4 n'affecte en rien les ententes fédérales-provinciales relatives au financement des programmes d'habitation à frais partagés. La SHQ demeure l'interlocutrice de la SCHL pour l'application de ces ententes. Je suis donc heureuse de présenter le projet de loi n° 4, Loi sur Immobilière SHQ, qui permet de respecter la décision prise par le gouvernement dans le discours sur le budget du 31 mars 1998 concernant l'application des nouvelles normes comptables pour le secteur public publiées par l'Institut canadien des comptables agréés, facilitant ainsi la présentation des états financiers consolidés du gouvernement.

Et je comprends, M. le Président, que nous pourrons, je suis certaine, compter sur la collaboration de l'opposition pour faire en sorte que ce projet de loi soit adopté rapidement. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la ministre des Affaires municipales et de la Métropole. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Laurier-Dorion. M. le député.


M. Christos Sirros

M. Sirros: Merci, M. le Président. La ministre était tellement contente de présenter ce projet de loi que la joie débordait, je la voyais. Elle avait tellement hâte de venir ici parler de cet arrangement administratif, comptable!

Réduit à l'essentiel, M. le Président, ce que je comprends, c'est qu'on crée une coquille dans laquelle on va transférer les immeubles de la SHQ afin d'être conforme à des règles comptables qui sont acceptées un peu par tout le monde. La ministre nous dit que ça ne change rien. J'ai presque le goût de dire: D'accord, on comprend. Il y a juste une petite affaire qui est soulevée et qui a attiré mon attention: l'article 23, et la ministre en a parlé dans ses trois éléments de description de la relation entre SHQ, Société Immobilière SHQ, les Offices municipaux et la Société canadienne d'hypothèques et de logement.

L'article 23 du projet de loi prévoit qu'il y aurait maintenant la possibilité de charger des frais, que la Société Immobilière SHQ pourrait charger des frais aux offices municipaux d'habitation, ce que la Société d'habitation du Québec n'avait pas le droit de faire ou ne pouvait pas faire. Comme c'est la SHQ qui va financer les OMH, mais que la Société Immobilière SHQ va, elle, charger des frais aux OMH, qui, eux, reçoivent leurs subventions de la SHQ, est-ce que la SHQ va augmenter la subvention qu'elle versera aux OMH pour tenir compte des frais que la SISHQ va charger aux OMH? Et, si quelqu'un qui nous écoute peut nous suivre dans toutes ces abréviations, M. le Président, bravo! Je me surprends moi-même d'être capable de faire cette analogie.

Mais c'est une des questions qui restent peut-être à clarifier au niveau de l'échange que nous aurons article par article. Parce que, si je comprends bien, les OMH dépendent entièrement des subventions, finalement, qu'ils reçoivent de la SHQ. Si, maintenant, on crée une coquille qui va administrer les mêmes édifices que les OMH, il va être propriétaire des édifices que les OMH administrent, mais que maintenant ce nouveau propriétaire va charger des frais pour l'utilisation de ses édifices, est-ce que celui qui recevait des bénéfices de la SHQ va être capable d'espérer avoir une augmentation de subvention de la part de la SHQ, si tel est le cas, le cas échéant?

Pour l'essentiel, je ne pense pas qu'on fera des grands discours oratoires sur ce projet de loi, M. le Président. Ça ne change pas grand-chose pour les personnes qui bénéficient des logements sociaux. Ça change quelque chose au niveau des écritures comptables. D'après ce que j'ai su aussi avec les consultations qu'on a faites, dans les règles de l'art, ça semble être quelque chose qui est accepté un peu par tout le monde. Alors, sans plus tarder, il me fera plaisir de revoir la ministre lors de l'étude article par article de ce projet de loi. Merci.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le député de Laurier-Dorion. Il ne semble plus y avoir d'autres intervenants.

Une voix: Non.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je mets aux voix le principe. Le principe du projet de loi n° 4, Loi sur Immobilière SHQ, est-il adopté?

Une voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.


Renvoi à la commission de l'aménagement du territoire

M. Boulerice: Oui, M. le Président, je fais motion que le projet de loi soit déféré à la commission de l'aménagement du territoire pour étude détaillée.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Cette motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Alors, M. le leader adjoint du gouvernement, une autre fois.

(15 h 40)

M. Boulerice: Oui. Alors, M. le Président, j'ai l'honneur et le plaisir de vous demander de bien vouloir considérer l'article 9 de notre feuilleton.


Projet de loi n° 32


Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, à l'article 9, Mme la ministre de la Justice propose l'adoption du principe du projet de loi n° 32, Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant les conjoints de fait. Mme la ministre, je vous cède la parole.


Mme Linda Goupil

Mme Goupil: M. le Président, au mois de juin de l'année 1998, le ministre de la Justice d'alors, mon collègue de la Sécurité publique et député de Laval-des-Rapides, déclarait devant cette Assemblée l'intention du gouvernement de réviser l'ensemble de notre législation afin de revoir son application aux conjoints de fait de même sexe. Le 21 octobre suivant, le premier ministre présentait un avant-projet de loi intitulé Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant les conjoints de fait. Celui-ci n'a toutefois pas eu de suite immédiate, puisque dans les jours qui ont suivi prenait fin la Trente-cinquième Législature. Mais, dès l'ouverture de la présente session, lors du discours inaugural, le premier ministre réitérait l'engagement de son gouvernement à reconnaître dans nos lois les couples de même sexe.

Cet engagement, M. le Président, franchit aujourd'hui une autre étape avec la participation de l'Assemblée à l'adoption du principe du projet de loi n° 32 intitulé Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant les conjoints de fait. Comme l'avant-projet, ce projet de loi concerne les personnes de même sexe qui ont choisi de faire vie commune dans une union qui ne peut être qu'une union de fait. Essentiellement, ce projet de loi a pour objet de modifier les textes législatifs et réglementaires qui reconnaissent déjà les unions de fait. Il les modifie en ce qu'il vient leur apporter un sens élargi pour faire en sorte que les couples de même sexe soient dorénavant considérés au même titre que les conjoints de fait de sexe opposé.

Vous me permettrez, M. le Président, pour bien situer notre proposition législative, de faire un bref rappel de l'historique de la reconnaissance législative des conjoints de fait. Cette reconnaissance a débuté dans les années soixante, bien qu'en cette période-là les unions de fait représentaient un faible pourcentage des unions au Québec. D'ailleurs, à titre informatif, rappelons que plus de 10 ans plus tard, soit à la fin des années soixante-dix, ce pourcentage n'était que de 8 %.

L'une des premières reconnaissances, sinon la première, se retrouve dans la Loi sur le régime de rentes, adoptée en 1965. Au fil des années qui ont suivi, le législateur a reconnu ces unions en abrogeant au Code civil du Bas-Canada les mesures dissuasives que constituaient pour les concubins, entre autres, l'interdiction de donation entre vifs et la distinction entre la filiation légitime des enfants nés du mariage et celle illégitime des enfants nés hors mariage.

Il est aussi considéré de façon ponctuelle dans près de 30 autres lois, généralement des lois de nature sociale et fiscale. Je me permets ici, M. le Président, de donner quelques exemples. Dans la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles, la Loi sur l'assurance automobile et la Loi sur le régime de rentes du Québec, la reconnaissance des conjoints de fait s'est faite par l'introduction de dispositions permettant de considérer les conjoints de fait comme des époux.

En ajoutant à ces lois comme à d'autres une définition du conjoint qui visait tant les personnes vivant maritalement que les époux, le législateur permettait à celles-ci de bénéficier d'avantages, comme des indemnités de décès ou la rente de conjoint survivant, qui n'étaient jusqu'alors réservés qu'aux époux. Ce faisant, ce n'était plus le statut juridique de l'union des personnes qui prévalait, mais plutôt la nature même de la relation qui existe entre les deux personnes, qu'elles soient mariées ou non. Notre conception collective de cette relation justifiait alors et même commandait d'assimiler les deux types d'union. L'assimilation s'est donc faite naturellement, suivant le modèle d'une union entre un homme et une femme, puisque le mariage est une union hétérosexuelle.

Les textes adoptés prirent ainsi souvent la forme suivante: Pour l'application de la loi, on entend par «conjoints» les époux, les deux personnes ou l'homme et la femme qui vivent maritalement depuis au moins trois ans ou, lorsqu'ils ont un enfant, depuis au moins un an.

Les interventions ponctuelles du législateur dans les différentes lois n'ont visé jusqu'à ce jour que les unions de fait entre personnes de sexe opposé. Aujourd'hui, M. le Président, on estime qu'environ 2 % à 3 % de la population québécoise vit dans un couple formé de deux conjoints de même sexe. Ces derniers se représentent d'ailleurs comme des conjoints de fait et revendiquent une reconnaissance de leur union au même titre que les conjoints de fait de sexe opposé. Les autres membres de la société semblent aussi partager de plus en plus leur préoccupation. En majorité, ils sont en accord avec le fait que ceux-ci puissent bénéficier des mêmes droits et soient tenus aux mêmes obligations que les conjoints de fait de sexe opposé.

Aussi, M. le Président, le gouvernement a décidé d'agir et de revoir le cadre législatif des unions de fait afin de marquer l'évolution de la société québécoise dans ce domaine. En effet, la reconnaissance des couples de même sexe fait l'objet d'un vaste consensus et reflète les valeurs sociales actuellement acceptées par une grande partie de la population. Les Québécoises et les Québécois seront d'ailleurs sans doute très fiers d'être partie prenante d'une société qui témoigne une fois de plus de son ouverture, de sa solidarité et du respect de ses minorités, d'une société qui mise sur la cohésion sociale et non sur les différences existant entre ses citoyens.

C'est donc au nom de ces valeurs que le gouvernement propose le présent projet de loi. Vingt-huit lois et 11 règlements sont expressément touchés par ce projet de loi. Quatre autres lois qui renvoient à la disposition de l'une de ces lois et d'autres textes d'application de ces lois sont aussi visés indirectement.

L'objectif recherché, M. le Président, est de modifier toutes les dispositions applicables aux conjoints de fait qui ne permettraient pas, dans leur version actuelle, d'être comprises comme visant autant les conjoints de même sexe que les conjoints de sexe opposé. Ces modifications sont presque exclusivement apportées à des dispositions qui comportent une définition du concept de conjoint de fait. Elles auront ainsi pour effet d'élargir le sens du concept dans l'ensemble des lois concernées ainsi que dans les textes d'application. Elles feront en sorte que les conjoints de fait seront désormais considérés sans égard au sexe des personnes, ce qui signifie que les couples de même sexe auront le même statut que les conjoints de fait de sexe opposé. La reconnaissance des couples de même sexe dans chacune des lois qui reconnaissent déjà les conjoints de fait de sexe opposé, tel que nous le proposons, aurait pour effet de conférer aux conjoints de même sexe les mêmes droits et obligations que ceux actuellement applicables aux conjoints de fait de sexe opposé.

En vertu de cette proposition législative, les conjoints de même sexe auraient maintenant droit à plusieurs bénéfices; pensons, entre autres, à la rente de conjoint survivant, à l'indemnité de décès d'un travailleur en raison d'une lésion professionnelle, à l'exonération du droit de mutation immobilière ou au congé pour raison familiale prévu à la Loi sur les normes du travail. D'un autre côté, M. le Président, ils devront à l'avenir satisfaire à de nouvelles conditions d'admissibilité à des programmes d'aide financière selon les critères actuellement en vigueur ou perdront un statut de célibataire parfois avantageux sur le plan fiscal. Par exemple, les revenus liquidés et autres actifs d'un partenaire qui sera dorénavant considéré comme un conjoint de fait au sens de la loi seront pris en compte pour déterminer l'admissibilité à l'aide juridique ou aux programmes de soutien du revenu d'une personne ou encore pour déterminer le montant de cette aide. Cet équilibre entre les avantages et les inconvénients, qui est aussi celui des autres conjoints de fait, est compris, accepté et désiré par les intéressés, qui veulent par-dessus tout recevoir le même traitement que des conjoints de sexe opposé.

Enfin, nous proposons, M. le Président, que cette nouvelle reconnaissance des conjoints de même sexe soit d'application immédiate, sous réserve de peu d'exceptions qui sont à l'avantage des personnes concernées, tels une période transitoire pour leur permettre de se conformer aux obligations qui leur seront désormais applicables ou le report de conditions d'admissibilité à des programmes de soutien du revenu qui remettraient en cause des prestations qui ont déjà été consenties.

La démarche législative que nous proposons devrait garantir une égalité de traitement pour toutes les personnes. Elle signifierait désormais, pour les personnes homosexuelles formant un couple, une reconnaissance de leur union qui est le juste reflet d'une reconnaissance qu'ils ont déjà acquise dans notre société. J'invite donc, M. le Président, cette Assemblée à poursuivre avec moi cette démarche législative importante non seulement pour la minorité directement visée, mais pour toute notre société, et à adopter le principe du projet de loi n° 32 intitulé Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant les conjoints de fait.

En terminant, je souhaite souligner le travail de mon prédécesseur ainsi que des députés et des ministres, tant de la Sécurité publique que des autres ministères, qui ont amorcé la démarche pour qu'aujourd'hui nous puissions déposer devant l'Assemblée nationale ce projet de loi. Je connais toute l'importance qu'il revêtait pour mes collègues qui m'ont précédée lorsqu'ils étaient ministres de la Justice ou pour mes collègues qui sont encore ici aujourd'hui députés, et je tenais à souligner tout leur apport pour l'avancement de ce dossier. Aussi, je ne pourrais passer sous silence la contribution du député de Sainte-Marie–Saint-Jacques qui a travaillé sans relâche pour que le dossier de la reconnaissance des conjoints de même sexe reçoive le traitement et la priorité qui lui revenaient. Je vous remercie, M. le Président.

(15 h 50)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la ministre de la Justice. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Marquette. M. le député.


M. François Ouimet

M. Ouimet: Merci, M. le Président. À mon tour de prendre la parole sur cet important projet de loi pour la société québécoise et d'indiquer d'emblée à la ministre ainsi qu'à tous les parlementaires de cette Assemblée que l'opposition appuie ce projet de loi et que ça nous fait extrêmement plaisir de voir que le gouvernement a finalement déposé un projet de loi qui vraisemblablement sera adopté avant la fin de la présente session.

Je salue également tout le travail accompli par le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques. Je me souviens, en 1994, j'étais nouveau parlementaire, et il avait indiqué qu'il n'était pas député de Sainte-Marie–Saint-Jacques, mais ministre de Sainte-Marie–Saint-Jacques. Alors, un député-ministre arrive à faire adopter des projets de loi qui lui tiennent à coeur, je salue son travail.

M. le Président, j'aurais cependant souhaité de pouvoir entendre des groupes sur cet important projet de loi là, ne serait-ce que pour faire une certaine pédagogie. Je me souviens que la ministre de la Justice avait indiqué, dans le cadre d'un autre dossier, au niveau de la rémunération des juges, son souhait de faire de la pédagogie au niveau de la population. Je pense qu'un tel dossier l'aurait bien mérité afin que nous puissions bien clarifier le geste que va poser l'Assemblée nationale à l'égard des conjoints de même sexe. Mais, cependant, j'ai cru comprendre que ce n'était pas possible; pour toutes sortes de raisons, le gouvernement n'avait pas la volonté d'avoir une commission parlementaire et d'entendre quelques groupes. Il ne s'agissait pas de consultations générales, mais de consultations particulières, on aurait pu s'entendre sur tout au plus une dizaine de groupes, et puis pour voir tous les tenants et les aboutissants de ce projet de loi là. Mais ça a été la volonté du gouvernement, et, bon, l'opposition ne talonnera pas le gouvernement là-dessus.

Il faut préciser également... Je pense que la ministre ne l'a pas fait dans sa présentation du projet de loi, mais il faut bien distinguer que le législateur québécois ne modifie pas le Code civil du Québec, de sorte que nous ne légalisons pas les mariages ou l'adoption pour les couples de même sexe. Je pense qu'on n'est pas rendu là encore au niveau de la société québécoise, mais nous sommes prêts à faire un très grand pas en avant, et le gouvernement et la ministre de la Justice peuvent compter sur la collaboration de l'opposition. C'est sûr que nous allons poser des questions en commission parlementaire pour tenter de bien cerner tous les enjeux, tous les impacts, toutes les conséquences du projet de loi, mais en perspective, finalement, de pouvoir l'adopter avant la fin de nos travaux et que ça soit un vote unanime sur une question aussi importante.

En terminant, je le signale à la ministre de la Justice: hier, j'ai eu des propos peut-être un peu durs à son égard concernant des engagements qu'elle avait pris de me transmettre un certain nombre de documents. Je dois dire que la ministre s'est exécutée, et dès ce matin j'ai reçu les documents que j'avais demandés. Alors, je la remercie. Il manquait cependant un document, c'est la partie accessible au niveau du mémoire déposé au Conseil des ministres concernant le projet de loi n° 54. Mais peut-être aurais-je le plaisir de trouver une nouvelle enveloppe venant du cabinet de la ministre pour répondre aux préoccupations de l'opposition. Je lui signale que ça va vraisemblablement favoriser l'adoption de ce projet de loi n° 54 également.

Alors, M. le Président, l'opposition, dans l'enthousiasme et dans l'ouverture d'esprit qui ont toujours caractérisé notre formation politique, va adopter un tel projet de loi. C'est d'ailleurs dans les résolutions du Conseil général du Parti libéral du Québec d'aller de l'avant avec une telle chose. Ça correspond à notre programme politique, ça correspond également au programme politique du Parti québécois, et donc il ne faut pas s'étonner que le vote sera vraisemblablement unanime sur une telle question. Merci.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Marquette. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques.


M. André Boulerice

M. Boulerice: M. le Président, Mme la ministre, M. le porte-parole de l'opposition, chers collègues, ce n'est pas sans émotion que j'interviens aujourd'hui sur l'adoption de principe du projet de loi n° 32 dit Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant les conjoints de fait.

Le jour où j'ai décidé d'entrer en politique active et élective, je me suis juré que jamais la politique ne me changerait, que j'étais moi et que je demeurerais moi. Pour ce faire, j'ai clairement indiqué aux femmes et aux hommes dont je sollicitais l'appui qui j'étais. Certains disent que c'était courageux, moi, je dis simplement que c'était honnête. Et cette honnêteté a été d'ailleurs récompensée quatre fois de suite, et chaque fois avec plus d'ampleur. Je les en remercie d'ailleurs de nouveau.

Je me suis également juré il y a 14 ans que, si la politique ne devait pas me changer, je me devais, par contre, de changer la politique. Ma nature, sous tous ses aspects, m'a fait connaître tôt, trop tôt, M. le Président, ce que l'ignorance, l'intolérance pouvaient créer comme injustices envers des femmes et des hommes de mon peuple et de mon pays, d'où ma volonté constante de corriger ces injustices. Une de ces injustices que j'ai toujours combattues est celle de l'exclusion envers ceux dont l'orientation sexuelle est différente de la majorité.

Le parti politique auquel j'appartiens a toujours été sensible à cette dimension de la vie humaine. En 1976, le gouvernement dirigé par le très regretté René Lévesque a modifié la Charte des droits et libertés du Québec; après les Pays-Bas, nous étions à ce moment-là le seul État à avoir cette disposition. De 1985 à 1994, nous n'étions plus au gouvernement, nous étions à l'opposition – et pour donner un certain encouragement à mes collègues d'en face, c'est toujours des états temporaires que d'être dans l'opposition et d'être au gouvernement – et nous avons été le premier parti politique à poser cette question clairement et à l'inclure dans le programme de notre formation politique. Le Parti québécois devenait le premier parti à faire connaître clairement sa position. Aucun parti dans cette Assemblée n'a vu une telle inscription à son programme. En 1996, peu de temps après notre retour au gouvernement, avec M. Parizeau à titre de premier ministre, nous avons modifié la Charte des droits de la personne de façon à supprimer toute discrimination envers les gais et les lesbiennes. Cela devait être l'avant-dernière étape.

Maintenant, nous commençons aujourd'hui la dernière étape, celle qui nous mènera à cette reconnaissance. J'ai écouté et accueilli avec beaucoup de joie, et je l'en remercie, le porte-parole de l'opposition sur cette question, le député de Marquette, comme j'ai d'ailleurs accueilli avec beaucoup de bonheur le geste si éminemment sympathique qu'il a posé le lendemain du dépôt, et qui est celui de m'avoir téléphoné pour me témoigner, à moi et forcément envers notre collègue Mme la ministre de la Justice, son appui et l'appui de l'opposition officielle.

Donc, nous commençons aujourd'hui la dernière étape, celle qui nous mènera à cette reconnaissance. Comme le disait si bien l'actuel ministre de la Sécurité publique et ancien ministre de la Justice, nul ne choisit son sexe, nul ne choisit son orientation sexuelle. À partir de cette loi de la nature, de quel droit pouvions-nous continuer d'exclure? Notre gouvernement dit non, notre Assemblée nationale dira non.

Il y a aussi au Québec un État de droit, une société marquée par son esprit de tolérance. Forcé, d'ailleurs, par son statut de minorité sur ce continent, ce qui le rend inéluctablement du côté du plus faible, le Québec est une terre de compréhension. Après le dépôt du projet de loi et accompagnant ma collègue et amie la ministre de la Justice, les journalistes m'ont demandé qu'est-ce que cela changeait. Eh bien, le premier changement, M. le Président, et à mon avis le plus important, il est psychologique. Celles et ceux qui ont décidé librement d'avoir une vie affective comme couple, comme tous les autres couples, sauront que leur condition humaine est normale, que le silence et la marginalité qui ont été trop longtemps leur lot sont terminés.

(16 heures)

Mme Agnès Gruda, dans le journal La Presse , et dont j'apprécie aujourd'hui les propos, écrivait avec justesse, et je la cite: «En traitant le couple homosexuel, hommes ou femmes, la société allège autant le fardeau de la différence.» Si l'éditorial de Mme Gruda est cité, ceux de M. Sansfaçon, du Devoir , et de M. Samson, du Soleil , méritent également d'être cités. Le traitement de la presse en général a été exceptionnel, et je m'en réjouis pour le Québec et la société québécoise.

La seule voie discordante vient de M. Henripin, professeur émérite au Département de démographie de l'Université de Montréal. Un professeur émérite, faut-il le préciser, n'est pas un professeur qui a mérité, mais plutôt un professeur qui est retraité. Dans un article, à mon point de vue, court intellectuellement, M. Henripin explique sa vision génitrice du couple. Soit, il en faut, mais, de là à dire que ce projet de loi est un cadeau, il y a un chemin qu'il n'aurait pas dû parcourir. La pension n'est pas un cadeau mais une assurance que se paient des individus. Ce projet de loi ne modifie en rien la volonté du gouvernement du Parti québécois de continuer à légiférer sur des politiques familiales et natalistes progressistes. Il l'a fait et il continuera de le faire. Faut-il rappeler à l'apôtre de la reproduction que, statistiquement, il est prouvé que 99,99 % des gais et lesbiennes ont été conçus par des hétérosexuels? Nous passerons.

Albert Jacquard disait – et la phrase est belle, je m'en voudrais de ne pas la citer: «Une vie humaine est une vie où on a pensé à demain, à regarder les autres, à transformer les choses.» Alors, je crois que le message d'espoir est un message de lucidité. Chacun est quelqu'un dont les autres ont besoin pour faire avancer les choses. Il n'y a personne de trop sur cette terre. Le gouvernement du Parti québécois, notre Assemblée nationale dit aujourd'hui qu'il n'y a personne de trop dans notre pays, que tous, y compris les membres de la communauté gaie et de la communauté lesbienne, font avancer les choses et qu'on a des droits et des devoirs égaux. Avec ce projet de loi que je souhaite voir adopté à l'unanimité, le Québec passe au premier rang, à l'avant-garde quant aux droits de la personne.

En terminant sur une note plus personnelle, je vous dirai que, deux jours après la présentation de ce projet de loi, c'était mon anniversaire de naissance. Ma secrétaire m'a offert une jolie carte de voeux qui portait une phrase de Martin Gray. Je vous la lirai. Il n'y a jamais de hasard, c'est toujours le destin. Cette phrase de Martin est: «Vivre pleinement, c'est participer à la totalité du monde.» Je participe, nous participerons. Merci, chers collègues. Merci, Mme la ministre. Merci, M. le Président.

(Applaudissements)

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci. Merci. Merci, M. le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques et également leader adjoint du gouvernement. Nous cédons maintenant la parole à M. le député de Verdun. M. le député.


M. Henri-François Gautrin

M. Gautrin: Merci, M. le Président. Je vais revenir, d'une part, pour repositionner notre parti à l'intérieur de ce débat et rappeler que, dès 1993, notre Conseil général avait voté une résolution qui se lisait comme ceci:

«Que le gouvernement élimine toutes les formes de discrimination en raison de l'orientation sexuelle tant au niveau de la Charte des droits que des lois, des conditions et statuts légaux, des pratiques et règlements officiels et officieux de tous les ministères.»

M. le Président, les phénomènes qui sont les aléas de la politique ont fait en sorte que notre formation politique n'a pas été reportée au pouvoir et n'a pas été en mesure de mettre en pratique ces recommandations. Nous sommes donc heureux aujourd'hui de saluer le dépôt du projet de loi n° 32 qui va dans cette direction. Je me permettrai de faire un léger historique pour bien que l'on comprenne ici toute l'injustice qu'il y avait par rapport à ce que j'appellerais des couples ou des cellules économiques de même sexe. Il est important de comprendre particulièrement... Et c'est l'objet de cette loi qui touche essentiellement les régimes d'assurance, les régimes d'indemnisation en cas d'accident automobile et dans le cadre de la Régie des rentes. Ce que ça changera, en particulier dans le cadre de la Régie des rentes, c'est la possibilité de verser une rente à un conjoint survivant.

M. le Président, vous n'êtes pas sans ignorer, parce que vous connaissez très bien les lois, l'évolution qu'il y a eu dans notre société où initialement, il y a une quinzaine d'années, seuls n'étaient reconnus que les couples mariés légalement. Ensuite, on a lentement été en mesure d'intégrer ce concept, parce qu'on se disait: La cellule économique formée de deux personnes n'est pas uniquement des personnes qui sont mariées légalement, mais il existe aussi des gens qui ont choisi de former une unité et qui ne désirent pas avoir l'officialisation du mariage. Et on a été amené, à l'intérieur de nos lois, à reconnaître les conjoints de fait. Et je suggérerais à la ministre actuellement de procéder à la révision de ce concept. Je me permets de lui dire qu'à ma connaissance actuellement il y a à peu près 12 ou 13 définitions différentes du concept de conjoint de fait dans nos lois. La modification que vous faites aujourd'hui serait peut-être l'occasion pour vous de réviser, tant dans les lois de la sécurité du revenu que dans les lois de la Société de l'assurance automobile, que dans les lois de l'aide financière aux étudiants, que dans les lois de la Régie des rentes, la définition de conjoint de fait, qui n'est pas toujours la même. Vous devez sûrement avoir eu des cas dans vos bureaux de comté où des gens sont conjoints de fait suivant une loi mais ne le sont plus suivant une autre loi.

Mais, lentement, on a évolué, M. le Président, pour dire qu'il y avait cette cellule économique de gens qui, liés par des liens affectifs, avaient réussi à mettre en commun leurs revenus et leurs avoirs. Et, parce qu'ils avaient mis en commun leurs revenus et leurs avoirs, lorsque la disparition de l'un d'eux arrivait, la Régie des rentes, où chacun avait contribué, pouvait verser un élément compensatoire pour compenser la perte de revenus. Il est une réalité que l'on ne peut pas se cacher, c'est que des gens de même sexe, que ça soient des hommes ou des femmes, ont choisi aussi de former une unité économique, une cellule familiale. Et, dans ce cadre-là, ils contribuent tous les deux au Régime de rentes ou aux autres programmes d'assurance. Je ne voudrais pas faire la liste, je crois que la ministre en a fait la liste actuellement, des projet de loi qui seraient modifiés. Mais l'idée de base est la suivante. C'est que, lorsque ces personnes constituent une unité économique et lorsqu'elles contribuent toutes deux au fonctionnement et à l'établissement d'un régime de rentes, la disparition de l'une ou de l'autre crée la même pénalité économique, que ça soit des gens de même sexe ou que ça soit des gens de sexe différent.

J'avais personnellement regretté que, lorsqu'on a fait la réforme de la Loi sur le Régime de rentes, on n'ait point pris la chance de cette réforme pour introduire cet élément de reconnaissance de rente au conjoint survivant de même sexe. Il faut, M. le Président, et vous le savez parce que vous faites du bureau de comté, savoir qu'il y a des drames absolument, bien sûr, difficiles, parce que la perte d'un être cher est toujours difficile, mais des drames économiques qui sont causés dans des couples homosexuels par la disparition de l'un ou de l'autre sans qu'il n'y ait la compensation du Régime de rentes.

(16 h 10)

M. le Président, mon collègue de Sainte-Marie–Saint-Jacques a fait allusion à un article d'un de mes collègues de l'Université de Montréal, le professeur Henripin. C'est important de... Et l'argument du professeur Henripin tourne autour du concept suivant, de dire: Oui, je serai prêt à accepter qu'il puisse y avoir une forme de rente donnée à un conjoint survivant si tant est qu'il y ait des enfants qui soient issus de cette union. Et comme, a priori, il est à penser que dans la majeure partie des cas les unions de conjoints de même sexe n'ont pas d'enfants, il en concluait qu'il y avait la difficulté d'accepter cette rente de conjoint survivant.

Je me permettrai de rappeler, M. le Président, et vous le savez parfaitement, que l'on a... Si, au début de la constitution du Régime de rentes, la nécessité, lorsqu'on était jeune, de pouvoir recevoir une rente de conjoint survivant était liée au fait, pour l'homme ou la femme, que le couple ait eu des enfants, on l'a abandonné dès 1994, ce principe-là. Dès 1994, on a reconnu qu'il y avait une cellule, une unité économique homme-femme et, dans ce cas-là, de deux personnes, et, lorsqu'une des deux personnes disparaissait, que ce couple ait eu ou n'ait pas eu d'enfants, cela pouvait justifier de la part de la Régie des rentes le versement d'une rente de conjoint survivant.

Là, le législateur, à l'époque – et encore aujourd'hui, puisque la loi est toujours valable – avait d'ailleurs distingué, avait dit que, si la personne, le couple, au moment du décès, a des enfants à charge, la rente de conjoint survivant était beaucoup plus importante que si le couple n'avait pas d'enfants à charge, c'est-à-dire que le législateur reconnaissait qu'il y avait une rente de base liée au concept de voir une unité économique qui était brisée, formée de deux personnes, et si jamais il y avait eu dans cette unité un enfant ou deux enfants à charge, la rente de conjoint survivant, M. le Président, était plus importante.

Donc, déjà, au départ, on considérait qu'il y avait une différence entre les couples avec enfants et les couples sans enfants, c'est-à-dire que la pénalité qui était portée par une personne lorsque son conjoint disparaissait existait, qu'il y ait ou qu'il n'y ait pas eu d'enfants issus du couple. C'était dès 1994, M. le Président, qu'on avait fait ces modifications au Régime de rentes. Donc, on reconnaissait dès ce moment-là qu'une cellule ou un couple qui perdait – et là, à l'époque, on reconnaissait seulement les couples de même sexe – ou dont un des deux partenaires de ce couple décédait, à ce moment-là, il y avait lieu pour la Régie des rentes de verser une rente de conjoint survivant.

M. le Président, la réalité, c'est qu'il n'existe pas uniquement des cellules économiques formées de personnes de sexe différent, c'est-à-dire un homme et une femme, il existe aussi des cellules liées par des sentiments, bien sûr, profonds sur le plan émotif, mais aussi des cellules économiques, en disant: Ensemble, ils possèdent un bien immobilier ou des biens mobiliers. Ensemble, ils ont pris la peine, pendant de nombreuses années, de mettre ensemble leurs revenus et de gérer ensemble leurs biens. Et, lorsque un des deux décède, la difficulté est absolument identique à lorsqu'un couple formé d'un homme et d'une femme, où chacun travaille, et les personnes décèdent.

Alors, c'est strictement, M. le Président, de la simple justice aujourd'hui de dire, puisque ce sont des... Tous les gens cotisent de la même manière. Lorsqu'on vous demande de cotiser au Régime de rentes du Québec, lorsqu'on vous demande de cotiser à un régime de pension – parce que la loi va couvrir aussi les régimes privés de pension – lorsqu'on vous demande ou qu'on vous amène, par la loi, à devoir participer à la Société de l'assurance automobile du Québec, on ne vous demande pas votre orientation sexuelle, et vous avez droit aux mêmes bénéfices. Vous devriez avoir droit aux mêmes bénéfices, et vous ne l'aviez point si vous étiez une cellule économique formée de deux personnes de même sexe.

Et là, aujourd'hui, ce que vient faire la loi, elle vient rétablir strictement un principe de simple justice. Et, il faut bien le voir de ce côté, elle va rétablir un principe de simple justice, de dire: Deux personnes, des gens qui vont avoir cotisé de la même manière à des régimes de rentes ou des régimes d'assurance, quelle que soit leur orientation, si tant est que ces régimes puissent accorder des bénéfices à votre partenaire de la cellule économique que vous formez... À ce moment-là, on ne vous pose pas de question, lorsqu'on vous demande de contribuer, si votre cellule économique est formée de personnes de même sexe ou de personnes de sexe différent. Vous n'avez pas une diminution, en quelque sorte, de cotisations parce que vous seriez dans une cellule économique de personnes de même sexe. Ça n'a jamais été abordé.

Alors, puisque les personnes contribuent les mêmes montants, puisqu'elles sont amenées à amener les mêmes contributions soit au Régime de rentes, soit au Régime de pensions, soit à la Société de l'assurance automobile, il n'est que juste, M. le Président... Et j'insiste ici sur le concept de justice, parce qu'on n'est pas en train de donner quelque chose, comme j'ai pu le lire dans un certain nombre d'articles. C'est une reconnaissance d'un principe de justice. Il n'est que juste de dire: Puisque vous contribuez de la même manière, vous devez avoir droit aux mêmes bénéfices.

Remarquez, M. le Président, la loi va même un peu plus loin, parce qu'elle ne fait pas seulement que reconnaître les bénéfices, elle va une étape plus loin, elle va reconnaître qu'il y a aussi des obligations, et elle va dire aussi aux conjoints de même sexe: Bien sûr, on vous reconnaît les droits qui sont les droits propres aux conjoints, mais vous allez avoir les mêmes obligations. Ça veut dire quoi? Ça veut dire, en particulier dans la Loi sur la sécurité du revenu – et vous le savez parfaitement, M. le Président – lorsqu'on est amené à donner ce qu'on appelle couramment dans notre langage les montants d'aide sociale, on prend en considération le revenu familial. Et, jusqu'à maintenant, dans le concept du revenu familial, on ne faisait rentrer que les revenus des deux composantes de cette cellule économique, qui ne pouvait exister, dans la Loi de la sécurité du revenu, que s'il y avait, évidemment, des partenaires qui étaient de sexe différent. Maintenant, changement. Il est évident que, dans la loi – et je crois que la ministre va concourir avec moi sur ce fait-là – lorsqu'on sera amené à devoir considérer une demande d'aide à la sécurité du revenu d'une cellule économique formée de partenaires du même sexe, on prendra, à ce moment-là, aussi le revenu familial en considération.

Même chose au niveau des questions qui touchent la loi de soutien à l'aide financière pour les étudiants. Vous savez parfaitement que, lorsqu'on parle de l'aide financière aux études donnée aux étudiants qui sont universitaires – je ne voudrais pas rentrer avec vous dans les détails, ici, d'une loi que vous connaissez parfaitement et que je connais très bien aussi, sur l'aide financière aux études – on est amené à considérer le revenu familial. Et, à ce moment-là, ici, de cette même manière – et ça va être une obligation à partir du moment où on reconnaîtra la cellule économique qui va être faite par des conjoints de même sexe – ils auront aussi la même obligation de devoir être considérés dans le revenu familial.

Donc, M. le Président, ce qu'on fait aujourd'hui, et je dois saluer la ministre de la Justice pour cela, on ne fait que rétablir strictement un principe de simple justice. Et je voudrais, à ce moment-là, vous assurer que, de notre côté, nous votons pour la justice. Merci, M. le Président.

(16 h 20)

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Verdun. Alors, nous cédons maintenant la parole au député de Rivière-du-Loup. M. le député.


M. Mario Dumont

M. Dumont: Oui, merci, M. le Président. Alors, je suis heureux d'intervenir sur le projet de loi n° 32 modifiant diverses dispositions législatives concernant les conjoints de fait. Je vais abonder, évidemment, dans le même sens que la ministre de la Justice et que l'opposition officielle pour appuyer le projet de loi n° 32. D'ailleurs, je constate, après avoir entendu les représentants de l'opposition officielle, je crois que, dans tous les partis politiques au Québec, ces discussions, ces débats ont pu avoir lieu au fil des années. Chez nous, c'était il y a environ un an qu'on adoptait une résolution sur la reconnaissance des droits des conjoints de même sexe, une résolution en conseil général, où on disait: «Que l'ADQ s'engage à tout mettre en oeuvre pour initier, appuyer, faciliter les mesures visant à reconnaître des droits égaux pour les conjoints de même sexe, au même titre que les conjoints hétérosexuels vivant en union de fait.»

Bien, c'est ce que le projet de loi n° 32 vient faire dans plusieurs champs qui touchent, comme l'a dit le député de Verdun, dans la vie économique, des gens dans ces cellules économiques, pour reprendre son expression, qui touchent les gens très concrètement. Que ce soient les accidents de travail, que ce soit évidemment tout ce qui touche les diverses formes de rentes, quand un décès survient, les personnes se retrouvent bien en attente de ces rentes-là et présentement font face finalement à une fin de non-recevoir, alors qu'ils ont, tout au long de leur vie, choisi communément d'unir leur vie et de payer conjointement, de mettre en commun leurs biens, leurs actifs, et que les rentes ne peuvent pas être transférables.

Donc, c'est ce que je voulais apporter comme appui. Donc, pour certainement beaucoup de personnes qui attendent depuis des mois, des années ce projet de loi et qui, je pense, attendent, pour la plupart, en comprenant que la société doit évoluer, que la ministre de la Justice, que l'ensemble des... Le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques, il est un de ceux sûrement qui attendent depuis longtemps, qui poussent – il ne fait pas seulement attendre – qui attendent d'une façon proactive, qui poussent le travail avec beaucoup de conviction pour un projet de loi comme celui-là. Ils doivent comprendre que la société évolue, que les règles, la justice, s'adaptent aux réalités nouvelles, et c'est comme ça qu'on construit année après année une société où les principes de justice peuvent devenir de plus en plus généreux, de plus en plus conformes à ce que devient la réalité sociale. Le projet de loi obtiendra donc un appui unanime. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Rivière-du-Loup.

M. Boulerice: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boulerice: Je sais qu'il n'y a eu aucune entente entre les leaders comme tel, donc je vais m'adresser à M. le député de Marquette. Est-ce que M. le député de Marquette accepterait que M. le député de Gouin et ministre de la Solidarité sociale s'adresse à cette Assemblée pour cinq minutes?

M. Ouimet: Bien sûr. Consentement.

M. Boulerice: Merci.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, je reconnais maintenant, parce qu'il est coutume ici, en cette Chambre, que dès qu'un député se lève le président cède la parole à celui qui la demande... M. le député de Gouin et ministre de la Solidarité sociale, vous avez un temps de parole de 20 minutes.


M. André Boisclair

M. Boisclair: M. le Président, je serai très rapide. Je voudrais remercier les gens de l'opposition de me permettre de m'exprimer, au-delà de l'entente qui ait pu être convenue entre les leaders. Je tenais à m'exprimer sur cette question pour souligner jusqu'à quel point le Québec aujourd'hui, avec le consensus qui s'exprime par les partis politiques, marque un progrès important, un progrès dans la recherche d'un idéal, celui que dans notre société, au-delà des différences qui peuvent nous distinguer les uns des autres par nos convictions religieuses, nos orientations sexuelles, par rapport aux origines des gens, par rapport aux convictions qui peuvent animer des choix politiques, au-delà de ces différences, il y ait un idéal vers lequel nous tendons tous qui est celui d'un idéal de citoyenneté qui reconnaît aux gens un même patrimoine de droits et de responsabilités.

C'est sur cet idéal que bien des sociétés se sont bâties et c'est avec cet idéal qu'aujourd'hui nous franchissons une étape importante. Je pense que, au-delà des avantages et des nouvelles obligations, aussi, qui sont impliqués dans le projet de loi, il faudra bien comprendre qu'il y a, à travers une nouvelle institution qui est le projet de loi présenté par ma collègue de la Justice, un message très fort d'inclusion qui est envoyé à tous ceux et celles qui dans notre société se sentent ou qui se sont un jour sentis marginalisés, victimes de discrimination, à ces personnes aujourd'hui à qui nous disons: Vous êtes, bien avant vos différences, semblables aux autres, et, cette ressemblance, nous la reconnaissons dans un texte de loi.

M. le Président, je pense que cet idéal qui a animé les parlementaires au moment de l'adoption de la Charte québécoise des droits et libertés, qui a animé aussi l'ensemble des parlementaires lorsqu'est venu le temps de discuter des questions d'équité salariale, est le même qui préside aujourd'hui à ces travaux, et je suis heureux de voir que c'est d'une même voix que l'Assemblée nationale parlera: Celui que, avant toute chose, dans cette société, nous sommes des Québécoises et des Québécois à part entière, que cette réalité inclut bien des différences – celle de l'orientation sexuelle est particulièrement en cause dans le projet de loi, mais nous pourrions aussi décliner bien d'autres différences – et que cette définition que nous avons du Québécois ou de la Québécoise est une définition qui est inclusive.

Il faudra remarquer, M. le Président, que, sur la question de la reconnaissance des conjoints de même sexe, le débat s'est fait dans notre société d'une façon toute particulière. Et il faudra noter jusqu'à quel point ce sont les tribunaux qui, à bien des égards aussi, ont motivé le législateur à agir, sans doute sous l'influence de la Charte québécoise des droits et libertés, sous l'influence aussi de la Charte canadienne des droits et libertés, contrairement à d'autres époques où de grands combats pour l'égalité qui ont été menés ont d'abord été le fait d'hommes et de femmes, particulièrement de femmes, sur la question de l'égalité, qui se sont exprimés et qui ont fait avancer un certain nombre d'enjeux. On se souviendra, comme parlementaires, de la récente marche d'un groupe de femmes, Du pain et des roses , qui est venu, ce groupe de femmes, se présenter à l'Assemblée nationale avec des revendications bien affirmées.

Dans le cas de la reconnaissance des conjoints de même sexe, les choses se sont passées un peu différemment. Bien sûr, un engagement politique... Et je tiens à rendre hommage ici à mon collège député de Sainte-Marie–Saint-Jacques. Je souhaite de le faire sans flagornerie, sans flatterie, mais lui dire jusqu'à quel point son engagement personnel y a été pour beaucoup. Je tiens aussi à remercier le député de Louis-Hébert, qui aussi s'est à de nombreuses reprises prononcé sur ces questions, qui a fait avancer les choses, mon collègue, ancien ministre de la Justice aussi, Serge Ménard, député de Laval-des-Rapides, et, jusqu'à tout récemment aussi, bien sûr, ma collègue députée de Lévis. L'ensemble des gens ont, chacun à leur façon, apporté une contribution, et nous l'avons fait parce que nous savions qu'il y avait un consensus clair dans l'opinion politique et que nous savions aussi qu'il y avait un consensus clair dans la population. Nous l'avons fait aussi, bien sûr, influencés par les conséquences des choix que les parlements avaient déjà faits, particulièrement en adoptant la Charte québécoise des droits et libertés, et différentes causes se présentaient devant nous et nous ont sans doute conduits à agir avec davantage de célérité. Et il est intéressant de voir jusqu'à point souvent les droits, que ce soient des droits sociaux ou des droits économiques, de plus en plus feront l'objet de décisions de tribunaux. Il faut voir comment notre société évolue et prendre acte de cette réalité.

Donc, M. le Président, je suis fier de m'associer à l'initiative de ma collègue de la Justice. Je le suis d'autant plus parce que nous pourrons bientôt mesurer sur davantage du court terme, mais aussi sur du moyen terme, l'impact que ce projet de loi pourra avoir sur l'estime de bien des jeunes homosexuels qui, souvent confrontés à des problèmes d'identité, choisissent des voies qui vont parfois les conduire à l'exclusion, à la marginalité. Très bientôt, un médecin bien connu de Montréal, le Dr Réjean Thomas, publiera un article dans les quotidiens où il fera état des conséquences positives qui sont déjà évaluées sur la santé des jeunes homosexuels qui, faut-il le rappeler, sont encore très nombreux, confrontés à des problèmes d'identité bien réels, à choisir une voie qui parfois va même les amener à choisir... «choisir» n'est pas le mot juste, mais qui va les conduire, devrais-je dire, au suicide plutôt que de les amener à vivre leur réalité.

Ce message très fort que le gouvernement envoie, je pense, en est un qui se reflétera sur la santé des homosexuels, qui se reflétera aussi sur, de façon plus large, l'estime et la perception qu'ils peuvent avoir d'eux-mêmes et du message aussi que la société peut leur envoyer. Donc, la société québécoise, je pense, franchit un pas important, et je veux dire que, moi aussi, M. le Président, à mon tour, je me sens davantage Québécois et davantage participant à cette société, sachant le geste que le gouvernement vient de poser. Je vous remercie.

(16 h 30)


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, merci, M. le député de Gouin et ministre de la Solidarité sociale. Comme il n'y a pas d'autres intervenants, le principe du projet de loi n° 32, Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant les conjoints de fait, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Pinard): Adopté. Alors, M. le leader adjoint du gouvernement.


Renvoi à la commission des institutions

M. Boulerice: Oui. M. le Président, cette adoption étant unanime, je m'en réjouis. Je vous fais motion que le projet de loi soit déféré à la commission des institutions pour étude détaillée, où nous retrouverons notre collègue. Ha, ha, ha!

Le Vice-Président (M. Pinard): Est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boisclair: Alors, M. le Président, l'article 13 du feuilleton de ce jour.


Projet de loi n° 38


Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, à l'article 13 de votre feuilleton, Mme la ministre de la Justice propose l'adoption du principe du projet de loi n° 38, Loi modifiant le Code civil relativement à la publication de certains droits au moyen d'avis. Y a-t-il des interventions sur l'adoption du principe du projet de loi n° 38? Mme la ministre.


Mme Linda Goupil

Mme Goupil: Merci, M. le Président. Alors, le projet de loi n° 38, que j'ai présenté devant l'Assemblée nationale le 11 mai dernier et dont le principe est aujourd'hui soumis pour adoption, propose, comme son titre l'indique, de modifier le Code civil relativement à la publication de certains droits au moyen d'avis. Plus précisément, il prévoit que la publication, au Bureau de la publicité des droits, des désignations ou remplacements de liquidateurs de successions se fera au moyen d'un avis présenté à l'officier de la publicité des droits.

Vous vous rappellerez que la Loi modifiant le Code de procédure civile en matière notariale et d'autres dispositions législatives, sanctionnée le 21 octobre 1998, a ajouté à l'article 777 du Code civil une disposition qui prévoit désormais que les désignations et remplacements de liquidateurs successoraux sont publiés sur les registres de la publicité des droits. Il s'agissait là, M. le Président, d'une mesure destinée à assurer une plus large publicité des droits ou de l'autorité des personnes réellement chargées de liquider les successions qui s'ouvrent au Québec et, par le fait même, à favoriser une meilleure protection de ceux qui, héritiers, créanciers ou même débiteurs, ont des droits à faire valoir en faveur ou contre une succession ou sont tenus de remettre les biens à une succession. Il importe en effet, pour bien protéger les droits de chacun, de veiller à ce que les biens de la succession soient effectivement remis au liquidateur de la succession, puisque c'est le liquidateur qui en a la saisine légale de l'actif successoral et qui est seul autorisé par la loi à procéder au règlement complet de la succession, c'est-à-dire au paiement des dettes successorales et à la transmission des biens aux héritiers.

Mais, lors de l'adoption de cette mesure qui, rappelons-le, n'est pas encore en vigueur, les modalités de la publication envisagée ne furent pas précisées, de sorte que certaines difficultés sont susceptibles de surgir dans son application, particulièrement lorsque la publication devra se faire sur les registres fonciers en raison de la présence d'immeubles dans la succession. Dans les faits, l'acte de désignation du liquidateur est souvent un testament qui ne mentionne pas les immeubles laissés par le testateur. En l'absence de modifications législatives, il faudrait alors publier le testament et un second document identifiant les immeubles visés. En plus d'être coûteuse pour les justiciables, cette solution va à l'encontre de l'objectif que le législateur s'est donné en 1991, lors de l'adoption du Code civil du Québec, soit de ne plus publier les testaments, puisque les informations qu'on y retrouve sont généralement de nature personnelle et privée.

M. le Président, l'article 1 du projet de loi n° 38 vise précisément à régler cette difficulté de manière à éviter des coûts inutiles pour les citoyens et à préserver le caractère confidentiel de leurs dernières volontés. Il propose en effet que la publication des désignations et remplacements des liquidateurs de successions puisse se faire au moyen d'un simple avis présenté à l'inscription, avis dont le contenu permettrait uniquement d'identifier la succession et le liquidateur, l'acte de désignation ou de remplacement et les immeubles visés, le cas échéant.

Dans un autre ordre d'idées, le projet de loi n° 38 propose de combler une lacune du droit actuel en permettant la publication sur les registres fonciers des droits résultant d'un bail commercial au moyen d'un avis dont le contenu assurerait, cette fois, la confidentialité des clauses relatives au loyer convenues entre les parties. La possibilité de publier des baux sans avoir à divulguer les clauses relatives au loyer existait sous l'empire du Code civil du Bas-Canada, puisqu'il suffisait aux parties de présenter à l'officier de la publicité un bordereau notarié qui résumait le bail. Ce bordereau était accompagné d'une copie du bail, laquelle, après vérification faite par l'officier, était retournée aux parties. Mais cette possibilité n'existe plus depuis l'entrée en vigueur du nouveau Code civil, le 1er janvier 1994. En effet, même si le Code civil autorise toujours la publication d'un sommaire ou résumé du bail, il exige dorénavant que le bail même, à moins qu'il ne soit notarié, soit déposé au registre pour y être conservé à des fins de consultation.

Or, pour les entreprises qui sont appelées à conclure des baux dans le cours de leurs activités, les nécessités du commerce font qu'il est primordial qu'elles puissent préserver la confidentialité des clauses relatives au loyer qu'elles ont convenu. C'est pourquoi une pratique s'est rapidement développée, soit celle de déposer au registre non pas le bail proprement dit, mais une convention dite «convention de bail à des fins de publication», laquelle reprenait les principaux éléments du bail sans cependant faire mention du loyer convenu. Toutefois, M. le Président, une jurisprudence récente indique dans un obiter dictum que cette pratique n'est pas valide au motif que la convention déposée ne pouvait être qualifiée de bail en l'absence du loyer, élément essentiel du contrat.

M. le Président, le projet de loi n° 38 vise à corriger cette situation difficile pour les entreprises concernées en proposant que les baux non résidentiels puissent à l'avenir être publiés au moyen d'un avis dont le contenu minimal serait limité à ce qu'il est vraiment utile de divulguer aux tiers, notamment l'existence du bail et sa durée. De cette façon, les entreprises pourront, comme c'était le cas sous le Code civil du Bas-Canada, protéger adéquatement leurs droits sans avoir pour cela à divulguer aux tiers les clauses relatives au loyer que comportent leurs baux, clauses qui ne concernent réellement que les parties signataires de ces baux.

Afin, par ailleurs, d'éviter que les publications faites à ce jour au moyen de conventions qui ne portent pas mention du loyer soient remises en cause, le projet de loi n° 38 propose exceptionnellement de rétablir pour le passé la validité de ces publications, pourvu seulement qu'elles contiennent l'essentiel des informations qui seront dorénavant requises pour la publication des baux au moyen d'un avis. Cette mesure s'avérerait nécessaire afin d'éliminer pour les entreprises concernées le risque d'une perte de droits tout en leur évitant le coût de nouvelles publications sur les registres. Elle est d'autant plus justifiée que l'exigence de la publication des baux n'a jamais eu d'autre objectif que de rendre opposable aux tiers, entre autres aux acquéreurs des immeubles loués, l'existence même de ces baux et de leur durée.

Telles sont donc, M. le Président, les modifications au Code civil que propose le projet de loi n° 38 dont le principe est aujourd'hui soumis pour adoption. D'ordre technique en apparence, ces modifications ont la vertu de faciliter l'application du régime de la publicité des droits et, par voie de conséquence, de favoriser une meilleure protection des droits des citoyens et citoyennes et entreprises du Québec, tout en tenant compte de leurs intérêts légitimes. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, Mme la députée de Lévis et ministre de la Justice. Nous cédons maintenant la parole au député de Marquette et critique officiel de l'opposition en matière de justice. M. le député.


M. François Ouimet

M. Ouimet: Merci, M. le Président. Très brièvement. Effectivement, un projet de loi très technique; nous en avons pris connaissance. C'est avec plaisir que nous allons procéder à l'étude détaillée de ce projet de loi là en commission, et j'indique à la ministre à nouveau qu'elle peut compter sur ma collaboration.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Pinard): Est-ce qu'il y a d'autres intervenants sur l'adoption du principe du projet de loi n° 38? Le principe du projet de loi n° 38, Loi modifiant le Code civil relativement à la publication de certains droits au moyen d'avis, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader adjoint du gouvernement.


Renvoi à la commission des institutions

M. Boisclair: M. le Président, à ce moment-ci, je fais motion pour que le projet de loi soit déféré à la commission des institutions pour son étude détaillée.

Le Vice-Président (M. Pinard): Est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Pinard): Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boisclair: Oui, M. le Président. L'article 12 du feuilleton de ce jour.


Projet de loi n° 37


Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, à l'article 12 de votre feuilleton, Mme la ministre de la Justice propose l'adoption du principe du projet de loi n° 37, Loi modifiant le Code de procédure pénale. Y a-t-il des interventions?

Une voix: ...

(16 h 40)

Le Vice-Président (M. Pinard): Excusez-moi, madame. On m'avise qu'en vertu de notre règlement je dois faire mention, à ce stade-ci, qu'il y aura un débat de fin de séance, le jeudi 20 mai, entre le député de l'Acadie et le ministre des Transports concernant la tenue d'audiences publiques en commission parlementaire sur le projet de loi n° 24, Loi modifiant la Loi sur l'assurance automobile et d'autres dispositions législatives.

Vous ayant avisés de ce débat de fin de séance prévu pour demain, alors nous revenons à notre projet de loi n° 37, et, Mme la ministre de la Justice et députée de Lévis, à vous la parole.


Mme Linda Goupil

Mme Goupil: Merci, M. le Président. Alors, le projet de loi n° 37 intitulé Loi modifiant le Code de procédure pénale et dont nous étudions aujourd'hui le principe poursuit des objectifs divers et propose essentiellement des mesures ponctuelles qui visent soit la protection des droits des justiciables soit l'efficacité accrue de la justice pénale.

Parmi les mesures proposées, M. le Président, je soulignerais tout d'abord l'introduction du mandat d'entrer dans une demeure. En effet, à la suite de la décision rendue en 1997 par la Cour suprême dans l'arrêt Feeney, dans laquelle la Cour reconnaissait l'importance de protéger la vie privée des justiciables qui doivent être appréhendés dans leur demeure ou dans la demeure d'un tiers, toute la procédure afférente à une arrestation dans une maison d'habitation se devait d'être revue. Dorénavant, afin de respecter les prescriptions dégagées par la Cour suprême, une arrestation dans une demeure en application d'un mandat d'emprisonnement devra être autorisée au moyen d'un mandat d'entrer dans une demeure délivré par un juge. Cette nouvelle règle devrait assurer aux citoyens, lors d'une arrestation, le respect de tous les droits garantis par les chartes.

Cependant, il existe des situations pour lesquelles le mandat d'entrer dans une demeure ne sera pas nécessaire. Ces cas sont des exceptions, et celles-ci sont au nombre de trois: le cas où une personne s'enfuit pour échapper à son arrestation; le cas où le responsable des lieux consent à ce que celui qui est chargé d'exécuter le mandat entre dans la demeure; et le cas où il n'y a pas d'attente raisonnable en matière de vie privée.

Une autre mesure proposée dans ce projet devrait permettre à l'État de recouvrer les sommes qui lui sont dues pour des infractions commises à l'encontre des lois applicables au Québec. Chaque année et de façon récurrente, plusieurs milliers de personnes condamnées par les tribunaux éludent le paiement des amendes auxquelles elles ont été condamnées, soit par négligence...

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Pinard): Excusez-moi, Mme la ministre.

M. Ouimet: Avec mes excuses à la ministre de la Justice.

Le Vice-Président (M. Pinard): Excusez-moi, Mme la ministre. Voulez-vous, M. le sergent d'armes, signifier à cette dame qu'en cet endroit on ne parle point et on ne dérange point la députation?

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Pinard): Je suspends les travaux.

(Suspension de la séance à 16 h 43)

(Reprise à 16 h 45)

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, nous reprenons nos travaux. Excusez-moi, Mme la ministre, comme nous sommes sous enregistrement, on se doit de maintenir l'ordre. Alors, je vous cède la parole. Je vous prie de continuer.

Mme Goupil: M. le Président, c'est rassurant de savoir qu'on respecte notre institution. Alors, M. le Président, je reprendrai en reparlant des exceptions, pour s'assurer que nous prenons toute la lecture nécessaire pour cette adoption.

Alors, je parlais des cas d'exception concernant les mandats d'entrée dans des demeures délivrés par les tribunaux. Il y aurait trois exceptions. Elles étaient au nombre de trois, elles le sont toujours. Alors, la première, qui est le cas où une personne s'enfuit pour échapper à son arrestation; le cas où le responsable des lieux consent à ce que celui qui est chargé d'exécuter le mandat entre dans la demeure; et le cas où il n'y a pas d'attente raisonnable en matière de vie privée.

Une autre mesure proposée dans ce projet devrait permettre à l'État de recouvrer les sommes qui lui sont dues pour des infractions commises à l'encontre des lois applicables au Québec. Chaque année et de façon récurrente, plusieurs milliers de personnes condamnées par les tribunaux éludent le paiement des amendes auxquelles elles ont été condamnées, soit par négligence soit en s'y soustrayant volontairement. Ainsi, M. le Président, au 31 décembre 1998, le montant des amendes impayées totalisait près de 220 000 000 $ répartis dans 320 848 dossiers.

Actuellement, le Code de procédure pénale met à la disposition des percepteurs des amendes plusieurs moyens pour tenter de recouvrer le montant de ces amendes impayées. Cependant, force est de constater que le ministère de la Justice éprouve certaines difficultés à effectuer le recouvrement des amendes dues au gouvernement. Aussi, dans une recherche constante de solutions pour contrer ce problème persistant, ce projet propose une nouvelle façon de faire pour recevoir les paiements des sommes dues par un défendeur. En effet, M. le Président, il sera désormais possible d'affecter le remboursement dû à une personne par suite de l'application d'une loi fiscale au paiement des amendes dont cette personne est débitrice envers le gouvernement. Ce nouveau moyen, ajouté aux autres moyens existants, devrait faciliter la récupération de certaines des amendes dues par ces justiciables qui, par ailleurs, s'attendent à recevoir un remboursement de l'État, et évitera ainsi qu'une partie de la population n'en vienne à la conclusion qu'on peut impunément ne pas respecter les lois et les jugements des tribunaux.

Ce projet propose également une mesure visant à faciliter la signature des constats d'infraction. Au Québec, à la suite de rapports d'infraction produits par des enquêteurs ou des inspecteurs, un nombre considérable de constats sont délivrés annuellement. Aussi, afin de continuer à assurer un contrôle sérieux sur la délivrance de ces constats et de permettre à l'État d'agir avec une plus grande célérité, non seulement la signature des substituts pourra être apposée par la voie électronique ou au moyen d'un appareil automatique, mais également celle des personnes qui auront été autorisées à le faire par le Procureur général. Cette nouvelle autorisation témoigne de la prise en compte de l'évolution technologique et devrait aider à bonifier le travail de l'administration.

Une autre des mesures contenues dans ce projet fera en sorte qu'un bref de saisie délivré dans le cadre de l'exécution d'un jugement deviendra nul s'il n'a pas été exécuté dans les cinq ans de sa délivrance. Ce délai est le même que celui prévu pour la non-exécution d'un mandat d'emprisonnement et se veut suffisamment long pour que l'administration épuise tous les moyens à sa disposition pour exécuter ce bref. Une telle mesure a été envisagée après que les expériences passées relatives à l'exécution des brefs eurent révélé que, au-delà d'un tel délai, poursuivre l'exécution d'un bref s'avère, pour la grande majorité des cas, inutile et alourdit grandement le processus administratif.

Finalement, M. le Président, ce projet devrait permettre de clarifier, dans certaines dispositions du Code de procédure pénale, la notion d'acte de procédure. En effet, la rédaction actuelle de certains articles du Code, notamment ceux qui traitent de la forme électronique des actes de procédure et autres documents pouvant être présentés dans une instance pénale, pourrait laisser croire que le rapport d'infraction est un acte de procédure, alors qu'il est de fait un moyen de preuve du poursuivant. Cette clarification est d'autant plus nécessaire qu'elle a une influence sur le type de preuve qui doit être présentée devant les tribunaux. En effet, en l'absence de cette clarification dans ces articles, le poursuivant pourrait être appelé à faire une preuve longue et coûteuse à chaque fois que la forme électronique du rapport d'infraction sera contestée.

Ceci complète, M. le Président, les grandes lignes que comporte ce projet de loi. Je soumets donc à cette Assemblée le projet de loi n° 37 pour adoption du principe et vous remercie de l'attention que vous y avez accordée.

(16 h 50)

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, merci, Mme la députée de Lévis et ministre de la Justice. Nous cédons maintenant la parole au critique officiel de l'opposition en matière de justice et député de Marquette. M. le député.


M. François Ouimet

M. Ouimet: M. le Président, là cesse la collaboration de l'opposition. Il y a des dispositions dans ce projet de loi là avec lesquelles l'opposition a énormément de difficultés, particulièrement les dispositions qui visent le recouvrement d'amendes non payées, parce que le gouvernement a décidé de s'attaquer principalement aux plus démunis de notre société.

Les gens que le gouvernement vise pour recouvrer des amendes non payées en vertu du projet de loi sont les gens qui sont bénéficiaires de la sécurité du revenu, d'une part, d'autre part, les étudiants qui sont bénéficiaires d'aide financière et, troisièmement, les personnes qui bénéficient d'un logement à prix modique. Des gens, M. le Président, qui normalement n'ont pas les moyens suffisants pour avoir une qualité de vie raisonnable, décente. Le gouvernement a décidé de s'acharner et de s'attaquer à ces personnes-là, alors qu'il y a d'autres personnes dans la société qui ne paient pas d'amendes non plus, et que le gouvernement a décidé de ne pas s'attaquer à ce problème-là.

La ministre parlait d'un montant de 220 000 000 $, sur une base annuelle, d'amendes non payées. D'après les informations que nous possédons, les modifications que souhaite apporter la ministre par le biais du projet de loi n° 37 à cet égard-là permettraient à l'État de recouvrer à peu près 1 400 000 $ seulement, si les informations qui nous ont été transmises sont exactes, 1 400 000 $ sur 220 000 000 $, et le 1 400 000 $, M. le Président, pris dans les poches des étudiants, des prestataires de la sécurité du revenu et également des gens qui bénéficient des logements à prix modique.

Qu'en-est-il des autres personnes qui doivent des sommes d'argent importantes au gouvernement sur une base annuelle? Selon les chiffres du gouvernement – et je les donne sous toutes réserves, parce que, je pense, c'est les chiffres qui apparaissaient à la partie accessible au public, dans le cadre du mémoire déposé au Conseil des ministres – le gouvernement vise à aller chercher 1 400 000 $. Donc, pour 218 000 000 $, il n'y a aucune mesure de prévue dans la législation déposée par la ministre de la Justice, alors que, dans d'autres circonstances, l'ancien ministre responsable des Transports et député de Joliette avait déjà envisagé des mesures semblables en ce qui concerne la Société de l'assurance automobile du Québec pour faire en sorte que, pour des gens qui doivent des amendes importantes à l'État, lorsque viendrait le moment de renouveler leur permis de conduire, alors le permis de conduire ne serait pas émis, à moins que ces gens-là paient leurs amendes.

Pourquoi est-ce qu'on ne retrouve aucune mesure à cet égard-là dans le projet de loi? M. le Président, c'est fort problématique, parce qu'on sent que le gouvernement a une volonté de s'attaquer à des gens qui ne pourront pas se défendre et qu'il va aller chercher dans les poches de ces personnes-là des sommes d'argent dont elles ont besoin pour subvenir à leurs besoins les plus élémentaires, besoins les plus fondamentaux. Par contre, par rapport à d'autres personnes, on ne sent aucune volonté de la part du législateur de trouver des mécanismes et de mettre de l'avant des mesures qui feraient en sorte que, lorsqu'il y a imposition d'amendes, ces amendes-là soient payées, et c'est au montant de 218 000 000 $. Donc, l'opposition a énormément de difficultés à cet égard-là, non pas à permettre à l'État d'aller chercher les amendes qui lui sont dues, mais d'appliquer une mesure qui, somme toute, semble discriminatoire parce qu'on s'attaque à certaines personnes mais qu'on laisse de côté beaucoup d'autres personnes. Alors, j'indique d'ores et déjà à la ministre de la Justice qu'elle va faire face à des barrages de questions de la part de l'opposition lorsque viendra le moment d'étudier ce projet de loi là en commission parlementaire.

Sur un autre volet, M. le Président – et peut-être que la ministre pourra le clarifier en commission parlementaire – il s'agit de permettre à des personnes qui seront autorisées par la Procureur général à signer des constats d'infraction. On sait que présentement il y a un litige important entre les substituts du procureur de la couronne et la ministre de la Justice. Des plaintes ont été déposées au Barreau du Québec par rapport à la pratique illégale de la profession d'avocat. Si j'ai bien compris – et peut-être que je me trompe et que la ministre pourra me fournir d'autres renseignements dont nous ne disposons pas à ce moment-ci – j'ai l'impression que la ministre tente de régler le problème soulevé par les substituts du procureur de la couronne en permettant à des techniciens d'aide judiciaire de poser des gestes qui normalement, en vertu de nos lois, relèvent de la pratique d'avocat. Alors, je comprends que, par la porte d'en arrière, on essaie de régler un problème. Si j'ai tort, la ministre pourra me fournir des renseignements et des informations, et, à ce moment-là, on constatera que ce n'est pas du tout ce que vise le projet de loi. Mais, à première vue, ça semble être ça, d'après les informations que nous avons obtenues jusqu'à présent, et je dis à la ministre que, là également, il y a un problème important.

Alors, pour toutes ces raisons, M. le Président, à la présente étape, nous ne sommes pas en mesure de voter pour un tel projet de loi.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Marquette et critique officiel de l'opposition en matière de justice. Y a-t-il d'autres intervenants sur l'adoption du principe du projet de loi n° 37? Mme la ministre, est-ce que vous désirez vous prévaloir de votre droit de réplique, tel que vous le donne l'article 216 de notre règlement?


Mme Linda Goupil (réplique)

Mme Goupil: M. le Président, je suis un peu surprise de voir que le député de Marquette, qui est lui-même avocat de profession, ne comprenne pas que le projet de loi qui modifie la procédure pénale, c'est un projet de loi qui veut aller récupérer des sommes d'argent suite à des infractions qui ont été commises et sur lesquelles il y a eu des jugements. Alors, dans ces dossiers, bien que les gens aient des amendes à payer, ils n'acceptent pas, soit volontairement ou soit de mauvaise foi, de les payer.

Alors, M. le Président, nous ne nous attaquons pas à une classe de la société, c'est une règle de droit qui s'applique pour tout le monde. Quand nous avons des amendes à payer, il est tout à fait normal que l'on paie les amendes. Quand on parle d'un montant de 220 000 000 $, c'est le cumul qui est dû jusqu'à aujourd'hui, et, je l'ai mentionné aussi, c'est pour un nombre de 320 000 dossiers. Donc, ce projet de loi là est un projet qui fait tout simplement nous donner des outils pour être capables de récupérer les sommes qui nous sont dues. Je vous dirais que c'est une question de justice sociale. Il ne s'agit nullement de discrimination, mais c'est de faire appliquer la loi par tout le monde.

Alors, M. le Président, je suis surprise de voir que le député de Marquette n'a pas compris, et ça me fera plaisir de lui réexpliquer à l'extérieur pour avoir sa collaboration, pour que l'on puisse faire passer ce projet de loi là qui fera en sorte que l'on pourra récupérer des sommes d'argent. Et c'est une équité sociale de s'assurer qu'au Québec tout le monde paie ses amendes, et qu'on ne fait aucune discrimination sociale, et qu'on ne s'acharne sur aucune classe de la société. Ce que l'on fait, c'est, lorsqu'il y a eu des jugements qui ont condamné des personnes à des amendes, qu'il faut que nous nous donnions des outils pour que l'on puisse récupérer ces amendes. C'est l'objet du projet de loi. Merci.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, Mme la ministre de la Justice. Le principe du projet de loi n° 37, Loi modifiant le Code de procédure pénale, est-il adopté?

Une voix: Adopté sur division.

Le Vice-Président (M. Pinard): Adopté sur division. M. le leader adjoint du gouvernement.


Renvoi à la commission des institutions

M. Boisclair: M. le Président, je fais motion pour que le projet de loi soit déféré à la commission des institutions pour son étude détaillée.

Le Vice-Président (M. Pinard): Est-ce que cette motion est adoptée? Adopté. Alors, M. le leader adjoint du gouvernement.

(17 heures)

M. Boisclair: Oui, l'article 53 du feuilleton de ce jour, s'il vous plaît.


Projet de loi n° 25


Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée

Le Vice-Président (M. Pinard): À l'article 53 de votre feuilleton, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission de l'économie et du travail sur le projet de loi n° 25, Loi modifiant diverses dispositions législatives relatives au bâtiment et à l'industrie de la construction. Y a-t-il des interventions sur l'adoption du rapport de la commission?

Mme la ministre du Travail, vous avez un temps de parole de 30 minutes, maximum.


Mme Diane Lemieux

Mme Lemieux: M. le Président, ça sera un peu plus court. Alors, nous nous retrouvons aujourd'hui pour la prise en considération du rapport de la commission de l'économie et du travail sur le projet de loi n° 25, Loi modifiant diverses dispositions législatives relatives au bâtiment et à l'industrie de la construction.

Je voudrais d'abord porter à l'attention de nos collègues de l'Assemblée que le projet de loi qui est devant nous modifie deux législations régissant l'industrie de la construction: la Loi sur le bâtiment et la Loi sur les relations de travail, la formation professionnelle et la gestion de la main-d'oeuvre dans l'industrie de la construction.

M. le Président, le projet de loi qui est devant nous a pour objectif d'apporter certains ajustements aux modifications introduites à ces lois par le législateur en 1998. Ces modifications prévoyaient, entre autres, la possibilité pour le gouvernement de confier des responsabilités en matière de qualification professionnelle aux corporations d'entrepreneurs. Afin de leur permettre de s'acquitter correctement du mandat qui leur a été confié et ainsi traduire pleinement la volonté gouvernementale énoncée lors de l'adoption du projet de loi n° 445, les corporations nous ont demandé de les habiliter à mettre en place des garanties financières exigibles de leurs membres. L'instauration de ces garanties serait sujette à l'approbation du gouvernement, et celles-ci seraient complémentaires à celles prévues au plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs de la Régie du bâtiment du Québec.

Le projet de loi prévoit également un partage plus équitable des coûts et des revenus entre les corporations et la Régie du bâtiment pour la réalisation du mandat de qualification. Le troisième élément du projet vise à reconnaître un nouveau partenaire au sein de l'industrie de la construction. Il s'agit du Conseil conjoint de la Fédération des travailleurs du Québec, FTQ-construction, et du Conseil provincial du Québec des métiers de la construction, issu du regroupement de la FTQ-construction et du Conseil provincial du Québec des métiers de la construction, deux associations représentatives majeures de l'industrie.

Enfin, le quatrième élément du projet de loi consiste à habiliter le Commissaire de l'industrie de la construction, instance spécialisée dans l'industrie de la construction, à régler les difficultés d'interprétation ou d'application des définitions existantes des quatres secteurs de cette industrie.

En résumé, M. le Président, ce projet de loi a pour but de faciliter l'application des lois dans le domaine du bâtiment et de l'industrie de la construction afin de traduire la volonté gouvernementale énoncée lors de l'adoption du projet de loi n° 445 et de prendre en compte la nouvelle réalité qu'est le Conseil conjoint de la Fédération des travailleurs du Québec et du Conseil provincial du Québec des métiers de la construction. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci beaucoup. Merci, Mme la ministre du Travail. Nous cédons maintenant la parole au député de LaFontaine et critique officiel de l'opposition en cette matière. Alors, M. le député.


M. Jean-Claude Gobé

M. Gobé: Alors, merci, M. le Président. En effet, nous avons procédé à l'étude article par article du projet de loi n° 25. Ce fut une étude fort intéressante et fort civilisée, d'ailleurs, qui nous a permis de mieux comprendre la dynamique de ce projet. Et force a été de constater que, dans certains domaines, il va améliorer un certain nombre de choses ou faciliter un certain nombre de choses, particulièrement en ce qui concerne, bien sûr, cette fusion entre les associations de travailleurs, qui le demandaient elles-mêmes. On est dans un système démocratique, un système où l'État n'a pas à empêcher les forces de jouer, les gens de se réunir et de s'associer. Nous sommes pour le droit à l'association. Alors, les gens le voulaient, les gens l'avaient adopté par un vote, démocratiquement. Et il appartenait au législateur de donner suite à cela. C'est ce que le gouvernement fait avec le projet de loi n° 25, dans ce domaine-là en particulier.

Il reste à souhaiter que, dans l'avenir, ça aura été une bonne décision pour les gens qui ont voté cette réunion. On sait qu'entre, des fois, des grands principes ou des grandes idées qui peuvent sembler de prime abord assez intéressantes, généreuses ou pratiques à des individus ou à des organisations, par la suite, eh bien, lorsque cela passe le stade de l'application et des épreuves, il se révèle que ce n'était pas toujours peut-être la meilleure solution ou que cette solution devrait être perfectible.

En tout cas, ça a été fait, et nous n'avons reçu de personne de recommandation, comme opposition, de nous opposer à cela ou de questionner cette dimension. Peut-être, oui, que certaines personnes se sont élevées devant le fait que nous nous retrouvons maintenant avec une concentration, dans l'industrie de la construction, en ce qui concerne la représentativité des travailleurs par une même organisation, au-delà de 75 % et peut-être 80 %. On se rappellera, dans le temps, que, dans le rapport Cliche, il y avait justement des attentions à cet effet, et on semblait vouloir dire qu'il était préférable d'avoir une diversité d'organismes ou d'associations pour représenter les travailleurs. On se rend compte, par contre, de l'autre côté, du côté des entrepreneurs qui maintenant sont scindés en quatre parties, en quatre secteurs, qu'il y a là un peu une dilution de leur pouvoir de négocier. Maintenant, il semble que ça doit les satisfaire ou, dans le moins, ne pas les déranger, car nous n'avons pas reçu de demande de ce côté-là non plus de faire des changements ou de faire des recommandations au gouvernement, comme opposition, afin que cela ne soit pas fait. Donc, semble-t-il que tout le monde est d'accord avec cette partie-là au moins du projet de loi.

En ce qui concerne les autres parties, M. le Président, bien sûr, ça touche les maîtres mécaniciens, ça touche les maîtres électriciens et les mécaniciens en tuyauterie. Bon. Qu'est-ce qui va se passer maintenant en particulier? Ils vont pouvoir gérer eux-mêmes la formation, ce qui est une bonne chose. Ils sont certainement les plus aptes, dans leur domaine, connaissant très bien comment ça se passe, connaissant les besoins aussi, à faire cette opération. C'est une bonne chose, donc, pour ces gens-là, et aussi ils vont gérer les cautions. Vous savez que, lorsqu'il y a des travaux, il faut prendre un cautionnement pour garantir l'exécution du travail, et là, avant, c'était géré par le gouvernement. Maintenant, ça va être géré, par délégation, par les corporations. Alors, il est à souhaiter bien sûr que ça soit plus efficace et que ça fonctionne de bonne façon.

Le dernier point sur lequel nous avons eu l'occasion de discuter, c'était la dévolution au Commissaire de la construction de pouvoir décider dans le cas de litiges. Vous savez que, dans la construction maintenant, il y a quatre secteurs, le résidentiel, le commercial, l'industriel et les grands travaux, et, à l'occasion, il peut arriver qu'il y ait des débordements d'un secteur sur l'autre dans un champ de juridiction. Avant, c'était la Régie du bâtiment qui décidait, qui tranchait quel était le fautif dans le litige ou qui tranchait le litige; maintenant, ça va être le Commissaire à la construction. C'est une nouveauté. C'est un rôle supplémentaire qu'on donne au Commissaire de la construction. Il reste à voir qu'il puisse s'en acquitter dans le futur. Là aussi, nous n'avions pas reçu, comme opposition, comme ça se passe en général...

Lorsqu'il y a un projet de loi, l'opposition reçoit, après consultation des différents groupes qui sont touchés, des recommandations ou des protestations. Enfin, nous n'en avons pas reçu non plus, du moins pas formellement, lorsque l'étude s'en est faite. Alors, bien sûr, nous avons donné notre appui au projet de loi, et c'est dans ce sens-là que nous avons travaillé et fait l'étude de ce projet. Alors, je tiens à remercier les gens qui y ont participé, du côté de l'opposition comme du gouvernement, ainsi que tous les fonctionnaires qui nous ont appuyés dans cette opération.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de LaFontaine et critique officiel de l'opposition en matière de travail. Est-ce qu'il y a d'autres intervenants sur l'adoption du rapport de la commission?


Mise aux voix du rapport

Le rapport de la commission de l'économie et du travail portant sur le projet de loi n° 25, Loi modifiant diverses dispositions législatives relatives au bâtiment et à l'industrie de la construction, est-il adopté?

Une voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Pinard): Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boisclair: À ce moment-ci, M. le Président, je fais motion pour que nous ajournions nos travaux au jeudi 20 mai 1999, à 10 heures.

Le Vice-Président (M. Pinard): Est-ce que cette motion est adoptée?

Une voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Pinard): Adopté. Alors, nous ajournons donc nos travaux au jeudi 20 mai, 10 heures.

(Fin de la séance à 17 h 10)


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